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BIOGRAPHIE
UNIVERSELLE.
BESANÇON, — IMPRIMERIE D'OUTHENIN CHALANDRE FILS.
BIOGRAPHIE
UNIVERSELLE,
OU
DICTIONNAIRE HISTORIQUE,
Par F.-X. DE FELLER.
îv®^¥'s&&@ Essaies,
AUGMENTÉE DE PLUS DE 3000 ARTICLES, RÉDIGES
PAR M. PËRENNÈS,
FSOFESSEliR DE I.ITTÉJIATCBE FEANÇAISE A I.'aCADÉMIE DE BESANÇON.
TOME SEPTIÈME.
BESANÇON. — OUTH. CHALANDRE FILS.
PARIS,
J. LEROUX, JOUB Y ET Cs LIBRAIRES, IGAUME FRÈRES, LIBRAIRES,
nie des Grands-Auguslins , 9. i rue Casselle , 4,
M DCCC XLVIII.
cT
T. 7
U1TIT3IISELL:
JOA
JOA
JOAB.fils de Sarvia sœur de David,
et frère d'Abisaï el d'Azaël , fut altaché
au service de David , et commanda ses
armées avec succès. La première occasion
où il se sijjnala fut le combat de Gabaon,
où il vainquit Abner, chef du parti d'Is-
boselh. Il raonta le premier sur les murs
de Jérusalem, et mérita par sa valeur
d'être conservé dans l'emploi de général,
qu'il possédait déjà. Il marcha coiilre les
Syriens qui s'étaient révoltés contre Da-
vid, les mit en fuite, el s'étant rendu
maître d'un quartier de la ville de Rab-
balii sur les Ammonites , il fit venir Da-
vid, pour qu'il eut la gloire de celte con-
tiucto. Joab se signala dans toutes les
guerres que ce monarque eut à soutenir,
mais il se déshonora en assassinant Abner
. et Amasa, parce qu'il était jaloux de la
coiiliance que David leur accordait. Il
réconcilia Absalon avec David , et ne
laissa pas de tuer ce prince rebelle dans
ime bataille, vers l'an 1023 avant J.-C.
David, en considération de ses services,
et parla crainte de sa puissance, ne sévit
pas contre lui ; mais en mourant il com-
manda à son fils Salomon de le punir.
Ce jeune prince fut ministre de la ven-
geance de son père. Joab ayant pris parli
pour Adonias contre le nouveau roi, Sa-
lomon lit tuer le général rebelle aux
pieds de l'autel où il s'était réfugié ,
croyant y trouver un asile, l'an lOli
avant Jésus-Christ.
JOACIIAZ, roi d'Israël, succéda à son
père Jéhu l'an 8S6 avant Jésus-Christ,
et régna 17 ans. Le Seigneur, irrité de ce
qu'il avait adoré les dieux étrangers, le
livra à la fureur d'Azaël et de Benadad,
rois de Syrie, qui ravagèrent cruellement
ses états. Ce prince , dans cette extrémité,
eut recours à Dieu, qui l'écouta favora-
blement. Joas, son fils et son successeur,
rétablit les affaires d'Israël , et remporta
durant son règne plusieurs victoires sur
les Syriens. Il mourut en 859 avant J.-C.
JOACIIAZ, nommé aussi Séleucus ,
fils de Josias, roi de Juda,fut élu roi
après la mort de son père , l'an 609 avant
J.-C. Il avait 23 ans quand il monta sur
le trône. Il ne régna qu'environ 3 mois à
Jérusalem, et se signala par ses impiétés.
Néchao , roi d'Egypte , au retour de son
expédition contre les Babyloniens, rendit
la Judée tributaire; et pour faire un acte
de souveraineté , sous prétexte que
Joachaz avait osé se faire déclarer roi
sans sa permission, au préjudice de son
frère aùié, il donna le sceptre à celui-ci.
Le roi détrôné mourut de chagrin l'an
598 avant Jésus-Christ, en Egypte, où il
avait été emmené.
JOACIIOÏ, ou JOAKIM, fils de Josias
et frère aine du précédent, fut mis sur le
trône de Juda par Néchao, roi d'Egypte,
l'an 609 avant Jésus-Christ. Il déchira et
brûla les livres de Jérémie , et traita avec
cruauté le projjhète Urie. Il fut détrône
par Nabuchodonosor, et mis à mort par
les Chaldéeiis, qui jetèrent son corps
hors de Jérusalem , et le laissèrent sans
sépulture, vers l'an 600 avant J.-C.
JOACHIM, fils du précédent. Voyez
JÉCHONIAS; c'est le même.
JOACIIIM ( saint ), fut, selon une
pieuse tradition , épotix de sainte Arme,
et père de la sainte Vierge. On ne sait
rien de sa vie, et l'Ecriture sainte ne fait
aucune mention formelle de saint Joa-
chim. Mais il est très probable qu'Héli .
dont il est parlé dans le chap. 5 de saini
Luc, comme père de saint Joseph ,est ce
même Joachim, père de Marie , et beau-
père de Josepb, car Joachim, Héli, Elia-
cim, etc. sont les mêmes noms dans l'E-
criture ( Voy. AFRICAIN Sexte-Julks).
Le seul livre ancien qui parle expressé-
ment de saint Joachim, est traité d'apo-
cryphe par saint Augustin. L'église grec-
que célèbre la fête de saint Joachim dès
le T^ siècle ; mais elle n'a été introduite
que fort tard dans l'église latine. On pr6-
i
JO.V
tend que ce fui le pape Jules II qui l'ia-
stitna.
JOACniM ( l'atbé ) , surnommé le
Prophète^ né en 1130 au bour{j de Ce-
lico , près de Cosen/.a , fui d'abord un des
pafje.3 de Roger, roi de SicUe, et voyagea
unsu iie dans la Terre-Sainte. De retour
en Calabre , il prit l'iiabit de Cileaux
druis le monastère de Cora/.zo , dont il
fut prieur et abbé. Joachim quitta son
abbaye avec la permission du pape Luce
m , vers 418S, et se retira dans la soli-
tude de Casemar, où il resta deux ans ,
occupé à commenter les saintes Ecritures.
11 revint à Corazzo en 1187. Le pape lui
ayant alors ordomié de continuer son
tommentaire , lui permit de se démettre
de son abbaye, où jiisqu' alors il n'avait
élé que remplacé, comme absent, par
un de ses religieux. En conséquence de
cette permission , Joachim alla se fixer à
Flora, où il fonda un monastère dont la
règle était calquée sur celle de Cileaux.
Il mourut en 1202 à 72 ans , laissant un
grand nombre d'ouvrages , imprimés à
Venise, 1516, in-folio. Ils conlicruient
quelques propositions touchant la na*are
divine, la Trinité et la durée de l'Evan-
gile de Jésus-Christ ; ils furent condam-
nés dans la suite au concile général de
Latran en 1215 , et au concile d'Arles, en
1260. Les plus connus sont les Commen-
taires sur Isaïe , sur Jérémie et sur l'A-
pocalypse. On a encore de lui des Pro-
phéties , qui ont fait autrefois beaucoup
de bruit, et que dom Gervaise , dans
V Histoire de l'abbé Joachim , i7/i.o , 2 vol.
in-12 , prétend avoir été accomplies. On
trouve dans le t. 7 des Jeta Sanclorum
des détails sur la vie de Joachim.
JOACHIM II , électeur de Brande-
bourg, fils de Joachim l*^"", iiaquit en
IJiOo , et succéda à son père en la32. Il
embrassa la doctrine de Luther en 1S59.
Ses courtisans et l'évêque de Brandebourg
suivirentsonexemple. L'électeur Joachim
acquit par ce changement les évêchés de
lirandebourg, de Ilavelberg et de Lebus,
qu'il incorpora à la Marche. Il n'entra
l)oint dans l'union que les protestans fi-
rent à Smalcalde , se montra assez indif-
férent aux progrès de cette secle, et se
tint en repos, tandis que les guerres de
religion désolaient la Saxe et les pays
voisins. L'empereur Ferdinand II lui ven-
dit le duché de Crossen dans la Silésie ;
f.t son beau-frère Sigismond-Auguste roi
de Pologne lui accorda en 1569 le droit
4e succéder à Albert-Frédéric de Brande-
bourg , duc de Prusse , au cas qu'il mou-
rût sans héritiers. Le règne de Joachim II
fut doux et paisible. On l'accusa d'être
libéral à la prodigalité, et d'avoir le fai-
ble de l'astrologie. II mouiut en 1571, du
poison qu'un médecin lui avait donné.
JOACHIM ( Georges ), astronome, sur-
nommé Rheticus parce qu'il était de la
"Valteline , qui faisait partie de l'ancienne
Rhetia, enseigna les mathématiques et
l'astronomie à Witlenberg. Dès qu'il fut
instruit de l'hypothèse de Copernic , il
alla le voir, et embrassa son opinion. Ce
fut lui qui, après la mort de cet astro-
nome , publia ses ouvrages. Il a soin d'a-
vertir que malgré la vraisemblance de la
nouvelle hypothèse , il faut bien se gar-
der de la regarder comme une chose dé-
montrée ; il croit que ceux qui pensent
autrement n'ont pas étudié la chose à
fond : Quihus aliud videtur . rem peniîus
non attigerunt. Il mourut d'apoplexie à
Cascliau en 1576 à 62 an$. On a do lui
des Ephémérides selon les principes de
Copernic; et plusieurs autres ouvrages
sur la physique, la géométrie et l'astro-
nomie ; ils ont eu du cours autrefois (i).
* JOAIXES ( Vincent ) , célèbre peintre
espagnol, né àFuente-de-la-Higuera,près
de Valence , en 1525 , étudia son art en
Italie , s'appliqua à imiter le style de Ra-
phaël et devint ensuite chef de l'école de
Valence. Il était d'une piété exemplaire
La plupart de ses ouvrages, qui sont ad-
mirés des connaisseurs, se trouvent dans
les églises, de Valence. On distingue un
Christ m.ort soutenu par des anges; le
Sauveur au milieu de deux prophètes;
un Saint François de Paule , et surtout
une Sainte-Cène. Le principal mérite de
SCS tableaux consiste dans une exacte cor-
rection de dessin , dans la force, la grâce,
la majesté et l'expression de ses figures,
et dans la vérité de son coloris. Joanès
mourut à Valence en 1581.
* JOANXET ( Claude ) , né à Dôle, le
Il juillet 1716, se fit d'abord jésuite. Sa
mauvaise santé l'ayant forcé d'abandon-
ner la société , il vint à Paris où il com-
mença un journal destiné à faire connaître
les ouvrages religieux, sous !e titre de
Lettres sur les ouvrages de piétés ou Jouj'-
nal chrétien^'Pa.ris, 1754-64, 40 vol. in-12.
Ce journal parut pendant dix ans ; il était
dédié à la reine Marie Leczinska, et avait
pour but de combattre l'incrédulité mo-
(i) C'est à George» Joachim qu'on doit l'iotioduc-
t^o d'et téeaotet dans la trigonométrie.
JOA
derne. L'abbé Joannct , fatigué du peu de
succès de ses travaux et des nombreuses
attaques dont il fut l'objet , abandonna la
rédaction de son journal , et passa le reste
de sa vie dans la retraite. Il était membre
des académies de Nancy et de Besançon.
On a de lui, outre son journal : | Elé-
mens de la poésie française, Paris, 1752,
3 vol. in-12. L'abbé Sabatier qui a con-
sacré un article à l'abbé Joannet dans ses
Siècles littéraires . tome 2 , pajj. 455 ,
tiouve dans cet ouvrage des réflexions
judicieuses . une critique fine , des règles
sûres, et le caractère d'un bon poète tracé
avec discernement et avec goût. Il re-
proche aux encyclopédistes d'avoir extrait
beaucoup d'articles de cet ouvrage sans
nommer l'auteur ; entre autres l'article
Jeux de mots. \ Les bêles mieux connues ,
1770 , 2 vol. in-12. L'auteur est du senti-
ment de Descartes qu'il soutient par des
raisonnemens solides mais peucoiicluans.
Il y réfute l'Essai de BouUier sur VJme
des bêtes. \ De la connaissance de V homme
dans son être et dans ses rapports, ibid. ,
4775 , 2 vol. in-8° ; ouvrage d'une méta-
physique embarrassée , obscure , et mal
écrit. L'abbé Joannet mourut à Paris en
4789.
JOANÎVITZ. royez. CALO-JEAN.
JOAPHAR , ou ABOUGIAFAR , philo-
sophe arabe, contemporain d'Averroës,
est le même , selon quelques-uns , qu'A-
vicennes. Il composa dans le 12*= siècle le
roman philosophique de Haï, fUsdeJock-
dhan, dans lequel il règne une fiction ingé-
nieuse. L'auteur y montre, en la personne
de son héros , par quels degrés on peut
s'élever delà connaissance des choses na-
turelles à celle des surnaturelles. Edouard
Pocoke , le fils , a donné une bonne ver-
sion latine de cet ouvrage , sous le titre de
Philosophus autodidactus , ou Le philo-
sophe instruit par lui-même. Cet auteur
est appelé par quelques-uns Jaaphar ben
Tophail.
JOAS , fils d'Ochosias, roi de Juda,
échappa, par les soins de Josabeth, sa
tante, à la fureur d' Athalie, sa grand-mère,
qui avait fait égorger tous les princes de
la maison royale. Il fut élevé dans le
temple sous les yeux du grand prêtre
Joïada,mari de Josabeth. Quand le jeune
prince eut atteint sa septième année ,
Joïadale fit reconnaître secrètement pour
roi par les principaux officiers de la garde
du temple. Athalie qui avait usurpé la
couronne , fut mise à mort l'an 883 avant
Jésus- Christ. Tant que Jous fui conduit
3 JOA
par le pontife Joiada, il gouverna avec
sagesse ; mais lorsque ce saint hommo
fut mort , le jeune roi , séduit par les flat-
teurs, adora les idoles. Zacharie, fils da
Joiada , et qui avait succédé à son père
dans la grande prêtrise, reprit le roi de
ses impiétés ; mais Joas oubliant ce qu'il
devait à son bienfaiteur, fit lapider son
fils dans le parvis du temple. Dieu , pour
punir ce crime , rendit la suite de la vie
de ce prince aussi triste que le commen-
cement avait été heureux. Les Syriens ,
avec une petite poignée de gens , défirent
son armée, et le traitèrent lui-même
avec la dernière ignominie. Après être
sorti de leurs mains, accablé de cruelles
maladies , il n'eut pas même la consola-
lion de mourir paisiblement ; trois de
ses serviteurs l'assassinèrent dans son
lit : ainsi fut vengé le sang du fils de
Joïada , qu'il avait répandu. Ce prince
régna 40 ans, et mourut l'an 843 avant
Jésus-Christ. Le rétablissement de Joas
sur le trône de Juda a fourni le sujet de
la tragédie à^ Athalie, chef-d'œuvre de Ra-
cine. Le poète Hardy et Métastase avaient
aussi composé, l'un une tragédie, l'autre
un Oratorio sous le titre de Joas.
JOAS , fils de Joachas , roi d'Israël ,
succéda à son père dans le royaume qu'il
avait déjà gouverné deux ans avant lui.
Il imita l'impiété de Jéroboam, et cepen-
dant conserva beaucoup de vénération
pour le saint prophète Elisée. Ce dernier
étant tombé malade de la maladie dont il
mourut , Joas vint le voir, et parut affligé
de le perdre. L'homme de JDieu pour le
récompenser de ce bon office , lui dit de
prendre des flèches et d'en frapper la terre.
Comme il ne frappa que trois fois, le pro-
phète lui dit que s'il avait été jusqu'à la
septième, il aurait entièrement ruiné la
Syrie. Joas gagna contre Bénadad les trois
batailles qu'Elisée avait prédites , et réu-
nit au royaume d'Israël les villes que les
rois d'Assyrie en avaient démembrées.
Amasias, roi de Juda, ayant déclaré la
guerre à celui-ci , Joas le battit, prit Jé-
rusalem, et fit le roi lui-même prisonnier.
Il le laissa libre à condition qu'il lui paie-
rait un tribut, et il revint triomphant à
Samarie , chargé d'un butin considérable.
Il y mourut en paix , peu de temps après
cette victoire , et après un règne de 46
ans , l'an 826 avant Jésus- Christ. Jéro-
boam II, son fils , lui succéda.
JOATIIAM ou JOATHAN, le plus jeune
des fiils de Gédéon , échappa au carnage
qu'Abimclech , fils naturel de Gédéon, fit
JOB
de ses autres frères. Du liaut d'une mon-
tagne , il prédit aux Sichimitcs les maux
qui les attendaient , pour avoir élu Abi-
mélech, l'an 1233 avant Jésus-Christ. Pour
leur rendre leur ingratitude plus sensi-
ble , il se servit de l'ingénieux apologue
du figuier, de la vigne , de l'olivier et du
buisson.
JOATHAM ou JOATHAN , fils et suc-
cesseur d'Oiias , autrement Azarias , 759
ans avant Jésus-Christ , prit le maniement
des affaires , à cause de la lèpre qui sé-
parait son père delà compagnie des autres
hommes. Il ne voulut pas prendre le nom
de roi tant que son père vécut. Il fut fort
aimé de ses sujets , pieux , magnifique et
bon guerrier. Il remporta plusieurs vic-
toires, remit Jérusalem dans son premier
éclat , imposa un tribut aux Ammonites ,
et mourut l'an 7i2 avant Jésus-Christ ,
après un règne de 16 ans , en comptant les
dix pendant lesquels il fut associé à son
père.
JOB, célèbre patriarche, naquit dans le
pays de Hus , entre l'Idumée et l'Arabie ,
vers l'an 1700 avant Jésus-Christ. C'était
un homme juste, qui élevait ses enfans
dans la vertu , et offrait des sacrifices à
l'Etre suprême. Pour éprouver ce saint
homme , Dieu permit que tous ses biens
lui fussent enlevés , et que ses enfans fus-
sent écrasés par les ruines d'une maison
tandis qu'ils étaient à table. Tous ces fléaxix
arrivèrent dans le même moment, et Job
en reçut les nouvelles avec une patience
admirable. « Dieu me l'a donné , Dieu me
» l'a ôté , dit-il ; il n'est arrivé que ce qui
» lui a plu : que son saint nom soit béni ! »
Le démon , à qui Dieu avait permis de
tenter son serviteur, fut au désespoir de
la constance qae Job opposait à sa malice.
Il crut la vaincre en l'affligeant d'une lèpre
épouvantable qui lui couvrait le corps.
Le saint homme se vit réduit à s'asseoir
sur un fumier , et à racler avec un mor-
ceau de pot cassé le pus qui sortait de
ses plaies. Le démon ne lui laissa que sa
femme, pour augmenter sa douleur et
tendre un piège à sa vertu. Elle vint in-
sulter à sa piété, et traiter sa patience
d'imbécillité ; mais son époux se contenta
de lui répondre : « Vous avez parlé comme
» une femme insensée '.puisque nous avons
» reçu les biens de la main de Dieu, ponr-
» quoi n'en recevrions-nous pas aussi les
» maux ? » Trois de ses amis , Eliphaz ,
Baldad etSophar, vinrent aussi le visiter
et furent pour Job des consolateurs im-
portuns. Ne distinguant pas les maux que
& JOB
Dieu envoie à ses amis pour les éprouver
de ceux dont il punit les méchans , ils le
soupçonnèrent de l'avoir mérité. Job ,
convaincu de son innocence, leur prouva
que Dieu affligeait quelquefois les justes
pour les éprouver , les humilier , les per-
fectionner, ou pour quelque autre raison
inconnue aux hommes. Le Seigneur prit
enfin la défense de son fidèle serviteur, et
rendit à Job d'autres enfans, une parfaite
santé, et plus de l)iens et de richesses qu'il
ne lui en avait ôté. Il mourut vers l'an 1500
avant Jésus-Christ , à 211 ans. Quelques
auteius ont douté de l'existence de Job , et
ont prétendu que le livre qui porte son
nom est moins une histoire véritable
qu'une parabole. Mais ce sentiment est
contraire, 1° à celui d'Ezéchiel et à celui de
Tobie, qui parlent de ce saint homme com-
me d'un homme véritable ; 2° à saint Jac-
ques qui le propose aux chrétiens comme
un modèle de la patience avec laquelle ils
doivent souffrir les maux ; 3° à l'autorité
de la tradition des Juifs et de celle des
chrétiens. Quelques-uns attribuent le livre
de Job à Moïse , d'autres à Isaïe ; il est
difficile de décider cette question. Il est
écrit en langue hébraïque , mêlée de plu-
sieurs expressions arabes , ce qui le rend
quelquefois obscur. Il est en vers, et l'an-
tiquité ne nous offre point de poésie plus
riche, plus relevée, plus touchante que
celle-ci. Les vers ne sont pas assujétis à
une cadence réglée , mais ils sont animés
par le feu du génie , par les expressions
' nobles et hardies , qui font l'âme de la
poésie d'Homère et de Virgile. Bacon ad-
mirait les profondes connaissances en phi-
losophie et en physique renfermées dans
ce livre. Si quis eximium illum Jobi li-
brum diligenter evolverit , plénum illum
et tanquam gravidum naturalis philoso-
phiœ mysteriis deprehendet : exempli
grattât circa cosmographiam ^ et rotun~
ditatem terrce, circa astronomiam et aste^
rismos ^ circa generationem ^ rem me-
tallicam, etc., De augm. Scient, pag. 25.
On y trouve de plus des maximes d'une
sagesse profonde et sublime , de grandes
et magnifiques idées de la Divinité, qu'on
chercherait en vain chez les anciens poètes
abandonnés à leur imagination et aux
rêves d'une ridicule mythologie. Toutes
les expressions de Job dans la peinture
qu'il fait de ses malheurs ne doivent pas
être prises dans le sens rigoureux de la
lettre. Il paraît que le saint homme a
donné quelquefois à sa douleur un essor
trop vif , et qu'il se reproche cette faute
JOB
aa chap. 39 et i2. Nous avons de savans
Commentaires sur le livre de Job, mais
Il y en a peu qui se fassent lire avec plus
de plaisir et d'cdificalion que celui de
l'abbé Duguet, quoique Tauteurne s'atta-
che pas toujours assez au sens littéral ; dé-
faut qu'il répare par une érudition bien
amenée, un style plein d'onction, des appli-
cations et des allusions aussi heureuses
que remplies de piété. Lelivre de Job a été
Iraduit en français par Théodore Crinsoz
( protestant ), 1729 , in-i", et par Bridel,
1818, in-8°. M. de Genoude en adonné
une traduction Miilii et élégante, etM.de
Lamartine en a tiré le sujet de plusieurs
belles strophes ; nous en citerons deux :
Ali ! périsse à jamais le jour qui ra'.i vu naître !
Que du nombre des jours Dieu pour jamais l'efface,
Que toujours obscurci des ombres du trépas,
Ce jour parmi les jours ne trouve plus sa place ,
Qu'il soit comme s'il n'était pas
Maintenant dans l'oubli je dormirais encore ,
Et j'achèverais mon sommeil
Dans cette longue nuit qui n'aura point d aurore.
Avec ces conquérans que la terre dévore ,
Avec le fruit conçu qui meurt avant d'e'clore ,
Et qui n'a pas vu le soleil.
M. Levavasseur a donné une excellente
traduction du poème de Job , en vers.
( Voyez LEVAVASSKUR. ) On a une His-
toire de Job par Frédéric Spanheim , Ra-
(isbonne, 1710, in-8°.
JOlîERT ( Louis ), jésuite parisien , lit-
térateur et prédicateur, né le 27 avril 1637,
mort dans sa patrie le 50 octobre 1719 ,
à 82 ans , après avoir professé long-teinps
la rhétorique dans les maisons de son
ordre, s'est fait une grande réputation en
suivant les conférences de l'hôtel d'Au-
mont : il est surtout connu par sa Science
des médailles ^ réiinprimée en 1759, en
2 vol. iu-12, par les soins de Bimard de
la Bastie , mort en 1742 , qui l'a enrichie
d'un grand nombre d'observations. Cet
ouvrage a été Iraduit en latin, et à diver-
ses reprises en italien, en anglais, en
allemand , en hollandais , etc. : on cite en-
core du Père Jobert sa Lettre à M. Vahbé
de Vallemont sur la nouvelle explication
qu'il a\mit donnée d'une médaille d'or de
Galien, Paris , 1699 , in-8°. Le Père Jobert
a fait aussi quelques livres de piété.
JOCONDE. Voyez GIOCONDO.
JODELLE (Etienne), sieur deLimodin,
ne à Paris en 15o2 , fut le premier auteur
qui fit des tragédies avec des chœurs , et
l'un des poètes de la Pléiade^ imaginée par
JOE
Ronsard. Sa Cléopâlre est la première de
toutes les tragédies françaises. Point d'ac-
tion, point de jeu, grands et mauvais
discours partout. Didon suivit Cleopâtre.
et fut aussi applaudie, quoiqu'elle ne valût
pas mieux. Il donna encore des comédies
un peu moins mauvaises que ses tragédies.
Henri II l'honora de ses bienfaits, mais
ce poète, qui faisait consister la philoso-
phie à vivre dans les plaisirs et à dédai-
gner les grandeurs , négligea de faire sa
cour, et mourut dans la misère en 1573 ,
à hi ans. Le Recueil de ses poésies fut im-
primé à Paris, en 1574, in-i"; et à Lyon
en 1597, in-12. Ce recueil fut fait parles
soins de Charles de La Mothe qui avait
promis un 2* volume , lequel n'a jamais
paru. On y trouve : | ses deux tragédies,
Cleopâtre et Didon ; sa Cleopâtre fut
jouée en 1552, à Reims , puis au collège
de Boncour, en présence de Henri II, qui
fil présent à Jodelle de 500 écus. L'auteur
y jouait le rcle de Cleopâtre, et les au-
tres rôles étaient remplis par ses amis ;
I Eugène , ou la rencontre ^ comédie : ] des
Sonnets, des Chansons, des Odes, des
Elégies , etc. Quoique ses poésies fran-
çaises aient été estimées de son temps,
il faut avoir aujourd'hui beaucoup de-
patience pour les lire. Nicolas Bourbon ,
qui eut cette patience, d'après la répu-
tation de Jodelle , mit ces mots à la tête :
Minuit p7'œsentia famam. Il n'en est pas
de même de ses poésies latines. Le style
en est plus pur, plus coulant et de meil-
leur goût. Jodelle s'était rendu habile dans
les langues grecque et latine; il avait du
goût pour les arts , et l'on assure qu'il en-
tendait bien rarchiteclure , la peinture et
la sculpture.
* JOECHER ( Chrétien Théophile ) ,
professeur et biographe allemand, né à
Leipsick en 1694 , étudia successivement
la médecine et la théologie, et professa
la rhétorique de 1715 à 1750 : il prononça
un grand nombre d'oraisons funèbres , et
dirigea do 1721 à 1759 le Sommai litté-
raire dit Jeta enulitorum. Après avoir
rempli d'abord la chaire de plùlosophie ,
puis celle d'histoire à Leipsick, il fut
nominé bibliothécaire de l'université de
cette ville , où il mourut en 1758. Le
nombre de ses écrits est très considéra-
ble. Son prhicipal ouvrage est le Diction-
naire uni^^ersel des savans ( Allgemeines
Gelehrten Lexicon), Leipsick, 1750, in-i".
Cet ouvrage immense qui contient pins
de 60,000 articles dans 4754 pages à deux
colonnes , est encore incomplet. Adelur.g
JOH
eiilreprit d'y suppléer ; mais les deux vo-
lumes qu'il publia en 4784 et 1787 ne vont
que jusqu'à la lettre J; il n'eut pas le temps
d'achever ce travail; Rotermund l'a con-
tinue, mais il no l'a poussé que jusqu'à la
syllabe Jîimm.
JOKL, fils de Phatuel , cl le second des
douze petits prophètes , commença vers
l'an 789 avant Jésus-Christ sa mission pro-
phétique. On a de lui trois chapitres de
Prophéties , écrits d'un style véhément ,
expressif ",t figuré ; elles regardent parti-
culièrement la dévastation de la Judée
par les Chaldéens , et sous ce type , la des-
truction de Jérusaleiïi par les Romains,
la lin du monde , le jugement universel ,
les peines de l'enftu- pour les réprouvés,
et la gloire éternelle pour les justes. Saint
Pierre dans les actes des Apôtres en ap-
plique un passage considérable à la révo-
lution qui établit le christianisme sur la
terre. Sa Prophétie est en hébreu, et est
divisée en trois chapitres. On trouve dans
les commentateurs des petits prophètes ,
d'excellentes dissertations sur la propliélie
de Joël. On dislingue surtout celles de
eainl Jérôme, de dom Calmet , de Jou-
bert , etc.
* JOIINES ( Thomas ), savant anglais,
né en 1748 à Ludlow dans le comté de
Shrop , d'une famille ancienne , possé-
dait une fortune considérable qu'il dis-
sipa par son goùl pour les constructions,
les réparations et les embellissemens. II
avait fait d'excellentes études à Oxford ,
et il dut à ses connaissances les diffé-
rentes places qu'il occupa. Conservateur
des bàlimens de la couronne et auditeur
des revenus fonciers pour le pays de
Galles , il fal fait lord-lieutenant et mem-
bre du parlement , où il représenta le
comté de Cardigan. Johnes était membre
de la société Linnéenne. Johnes est connu
pour avoir fait imprimer des Traduc-
tions anglaises de quelques-unes de nos
Chroniques, enlrcautrcsde celles de Frois-
sard^k vol. in-i° : l'édition de 18ÛG a 10
vol. in-8°; celles de Monslrelet avec des
notes. 1810, 5 vol. in-4° ou 12 vol. in-8";
les Mémoires de Jean, seigneur de Join-
ville, 2 vol. in-4° , 1807. Tous ces livres
sont sortis d'une très belle imprimerie
que Johnes avait établie lui-même à Ha-
tod , agréable maison de campagne située
dans le comté de Cardigan. Joluies est
mort le 5 avril 1816.
JOHNSO.X ( Be\j\mis ), plus connu
sous le nom de BEN-JOHNSON , célèbre
poète anglais, fils d'un ecclésiastique de
6 JOU
Westminster, naquit en 1574, et cultiva
les muses dès son enfance. Il fut d'abord
soldat , puis comédien , et enfin auteur.
Shakespeare, ayant eu occasion de le con-
naître, lui donna son amitié et le proté-
gea. Johnson fut le premier poète co-
mique de sa nation qui mit un peu de ré-
gularité et de bienséance sur le théâtre.
Il réussit principalement dans la comé-
die. Il était forcé dans la tragédie , et
celles qui nous restent de lui sont assez
peu de chose. Elles manquent souvent do
goût , d'élégance , et surtout de correc-
tion. Copiste des anciens , il traduisit en ■
vers anglais les plus beaux morceaux des
auteurs grecs et romains. Ce poète mou-
rut dans la pauvreté en 1637, à 05 ans.
Ayant fait demander quelques secours à
Charles l", ce prince lui envoya une gra-
tification modique. « Je suis logé à l'é-
«Iroit, dii-il à celui qui lui remit la
» somme ; mais je vois , par l'étendue de
» cette faveur , que l'àme de sa majesté
I) n'est pas logée plus au large. » On ne
mit que ces mots sur son tombeau : 0
rare lien Johnson! Le recueil de ses ou-
vrages parut à Londres, 1716, en 6 vol.
in-S" , en 1756 , 7 vol. in-S" et en 1816 , 9
vol. in-8°. Il écrivit plus de 50 pièces ,
parmi lesquelles on cite encore Catiîina ,
Le Renard ou Volpone , Chaque homme
dans son caractère. Chaque femme hors
de son caractère. On admirait son talent,
et on haïssait son caractère vain et sati-
rique, accompagné de mœurs désordon-
nées. — Il faut le distinguer de Thomas
JOHNSON , auteur de quelques ouvrages
de lillératurc, enir'aulres de Notes asse*
estimées sur quelques tragédies de So-
phocle , et qui mourut vers l'an 1750.
JOHNSON (Samuel), né dans le comté
de Warwick en 1649, d'abord curé do
Corrigham , quitta sa cure pour se mêler
de politique ; il fut condamné à une
amende de 500 mar<;s et à la prison jus-
qu'au paiement de cette somme, pour
avoir composé contre le duc d'Yorck ,
depuis .lacques II, un libelle furieux, sous
le titre de Julien l'Jpostat; mais le roi
Guillaume cassa cette sentence , le fit
élargir, et lui accorda de fortes pensions.
Il existe une traduction française de cet
ouvrage, 1688, petit in-12. Ses OEuvrrs
ont été recueillies en 2 vol. in-fol., à Lon-
dres. Ils roulent sur la politique et la ju-
risprudence anglaise. Son Traité sur la
grande Charte, qu'on trouve dans ce re-
cueil, est curieux.
J01INS0.\ ( Samuel ), né à Litclifield,
JOU 7
dans le comté de Warwick, en 1709, se
lit connaître par plusieurs ouvrages , et
principalement par le Gentlemafi'Mar/a-
^me^ journal estimé de ses compatriotes ,
qui contribua beaucoup à lixer alors une
langue qui jusque là n'avait pas paru
avoir de rè{;les sûres et uniformes. Un
ouvrage tout différent, intitulé The Ram-
bler j ou Le Rôdeur, dans le goût du
Spectateur d'Jddison . a eu aussi beau-
coup de succès. L'auteur le termina le 4
avril 1760. Il s'en imprima dix éditions
du vivant de l'auteur. Il a été réimprimé
à Londres en 17% , 5 vol. grand in-8°.
Quelques allégories , insérées dans la
Ra7nbler. prouvent que 1 auteur avait une
imagination riante et quelquefois poéti-
que. M. Boulard a publié une traduction
française de morceaux choisis du Ram-
bler, 1783, in-12. Johnson mourui à Lon-
dres en \lSk. Milord Cliesterlield en a fait
le portrait suivant : « Il y a un homme
» dont je reconnais.yestime et j'admire le
» caractère moral , les profondes connais-
» sances e! le talent supérieur ; mais il
» m'est si impossible de l'aimer, que j'ai
j> presque la lièvre quand je le rencontre
» dans ime société. Sa figure , sans être
» repoussante, semble faite pour jeter de
» la disgrâce et du ridicule sur la forme hu-
» maine. Sans égard à aucune des bien-
» séances de la vie sociale, il prend tout, il
» fait tout à contre-temps. Il dispute avec
» chaleur, sans aucune considération pour
)• le rang, l'état et le caractère de ceux
» avec qui il dispute. Ignorant absolu-
• ment toutes les nuances du respect et
» de la familiarité , il a le même ton et les
» mêmes manières avec ses supérieurs ,
» ses égaux et ses inférieurs ; et il est par
» conséquent absurde avec au moins deux
■ de ces trois classes d'hommes. Serait-il
» possible d'aimer un tel homme? Non;
» tout ce que je puis faire est de le re-
■ garder comme un respectable Hotten-
j> tôt. » Jolmson néanmoins était chrétien
fervent , et très- attaché à la maison des
Stuarts ; et tous les écrits philosophiques
de l'époque où il vivait ne portèrent au-
cune atteinte à sa croyance. On a encore
de lui : | un Voyage en Ecosse et aux
iles flébrides ^ ouvrage curieux et plein
d'humeur contre les Ecossais ; | des Vies
des principaux poètes anglais, remplies
de détails intéressans, et d'une excellente
littérature ; | d'autres ouvrages en prose
moins importuns, et plusieurs pièces de
poésie, où il y a de l'esprit et du talent
poétique; ] un Dictionnaire anglais^ la
JOH
meilleur dictionnaire qui existe peut-être
en aucune langue, imprimé pour la pre-
mière fois en 1755. Les meilleures édi-
liotis sont celles de Londres, 1784 , 2 vol.
in-folio ; 1786 et 1799 , 2 vol. grand in-4° ;
1803, 4 vol. in-8°, 1806 et 1810, 2 vol.
in-4°, et 1817,4 vol. in-4° , avec de nom-
breuses corrections et additions. Il y a
une édition de 1783, en petit caractère,
complète en un seul vol. irji-folio. | Une
bonne édition de Shakespeare, avec des
remarques critiques, Londres, 1765, 8
vol. in-S" ; | une Collection des meilleurs
Poètes anglais, Londres, 1779, 68 vol.
petit in-12 ; 1790, 75 vol. et 1810, 21 vol.
grand in-8°. | Son roman de Rasselas ou
le Prince d'Jbyssinie, traduit dans pres-
que toutes les langues, eut un succès
prodigieux , à la même époque que parut
Candide , roman de Voltaire ( avec qui
Johnson avait eu quelques démêlés ). Le
fonds de ces deux romans est le même ;
mais Voltaire semble se faire une arme
contre la providence des maux qui affli-
gent l'humanité , tandis que l'auteur an-
glais dirige les pensées du lecteur vers
un meilleur avenir. M"" Belot en a donné
une Traduction française sous le titre
à! Histoire de Rasselas , Paris , 1768, in-
12. On a publié à Paris en 1817, le Vallon
fortuné, ou Rasselas et Dinarbas ^ 3 vol.
in-12. Johnson travailla aussi à plusieurs
recueils périodiques, par exemple à la
Revue unive7'selle, au The Idler ou l'Oisif,
etc. L'extrait qu'il fit pour le premier de
ces journaux de l'ouvrage intitulé : Re-
cherches sur Vorigine du bien et du malj
par Soame Jenyns , fut si recherché que
le libraire en donna deux éditions en 1758.
A sa mort, qui eut lieu en 1784 , les per-
sonnes les plus distinguées de la cour et
de la ville accompagnèrent son cercueil.
Il fut enterré à Westminster, auprès de
Garrick. Ses OEuvres ont été lecueillios
et publiées à Londres en 1788, 16 vol. in-
8°; et 1796, 1801, 1806, 1810 et 1816 , 12
vol. grand in-8"*. Il y a aussi une édit. de
1816, en 12 vol. in-12. On a publié, en
1781 , les Beautés de Samuel Johnson.
souvent réimprimées en 1 et 2 vol. Sa Vie
a été écrite par Hawkins, et placée à la
tête de ses Œuvres; mais elle est peu
exacte. Celle publiée par l'écossais Bos-
w-ell en 1791 , 2 vol. in-4° , et 1816 , 4 vol.
in-8° , est plus estimée ; et malgré son ex-
trême prolixité , elle a eu 6 ou 7 éditions.
On reciierche encore les Anecdotes sur le
docteur Johnson, par M"' Pio/z-i, et
ï Essai sur la vie^ le caractère et les
JOI
écrits du docteur Johnson > par Joseph
Tcwers.
JOHNSON. /^'oyezBEHN.
fl JOII.VSTON ( AnTHun ), né en 1587 à
Casbicken, près Abcrdcen , en Ecosse,
passa une partie de sa vie à voyager; il
fut reçu docteur en uicdccinc à Padoue ,
|revinl dans sa patrie en 1(552, et mourut
à Oxford en 16/*1. Sa Paraphrase des
Psaumes en vers latins, souvent réim-
primée, lui a acquis une espèce de célé-
brité , mais qui n'approche pas de celle
que Buchanan a si bien ntiéritée dans le
même genre.
JOIINSTON ( Jeaiv ) , naturaliste , né à
Sambter , dans la grande Pologne , en
1605, parcourut tous les pays de l'Eu-
rope , et mourut dans sa terre de Zieben-
dorf, dans le duché de Lignitz en Silésie,
l'an 1675. On a de lui plusieurs ouvrages,
parmi lesquels on distingue s^s Histoires
des poissons , des oiseaux , des quadru-
pèdes , des arbres , etc. en 5 vol. in-fol.,
1650 , 1655 et 166'i. Celte édition , qui est
la première , est aussi rare que recher-
chée. Ce livre est en latin. Ou a encore
de lui un traité De arboribus et fructi-
bas M Francfort-sur-le-Mein , 166!2, in-fol.
C'est de toutes les productions de cet in-
fatigable naturaliste , la meilleure et la
moins commune. Tous ses ouvrages ont
été réimprimés en 10 tom. in-fol., 1755
à 1768. — Il ne faut pas le confondre avec
Guillaume JOHNvSTON, écossais, mort
eu 1609, dont on a un Abrégé de l'His-
toire de Sleidam.
JOIAD.V , grand -prêtre des Juifs,
éleva avec soin Joas, lils du roi Ochosias,
dans le temple , le plaça sur le trône de
ses pères, lit mettre à mort la reine
Athalie , qui avait usurpé le sceptre de
David , renouvela l'alliance de Juda avec
le Seigneur , l'an 883 , mourut peu après,
et fut inhumé par ordre de Joas, en con-
sidération de ses services , dans le sépul-
cre des rois de Jérusalem. Voyez JOAS,
roi de Juda , et JOSABETH.
JOl.N'V'iLLE ( Jean sire de ) , sénéchal
de Champagne , d'une des plus anciennes
maisons de cette province , naquit en 1223
ou 122/t de Simon , sire de Joinville et de
Vaucoulcurs, et de Béatrix de Bourgogne,
lille d'Etienne IH , comte de Bourgogne.
H fut un des principaux seigneurs de la
cour de saint Louis , qu'il suivit dans
toutes ses expéditions militaires. Comme
il ne savait pas moins se servir do la
plume que de i'épée, il écrivit la Vie do
ce roonartjue. Fous avons un grand aorn-
8 JOL
bre d'éditions de cet ouvrage ,.cnlr'autre3
une excellente par les soins de Charles du
Cange , qui la publia avec de savantes ob-
servations en 1668. Il faut consulter à ce
sujet la Dissertation du baron Bimard de
la Basile , sur la Vie de saint Louis ,
écrite par Joinville, dans le tome 15 des
Mémoire s de l'académie des Inscriptions,
p. 602 ; et l'addition du même à cette Dis~
sertation j dans les mêmes Mémoires, p.
736 et suiv. On a recouvré depuis quel-
ques armées un manuscrit de la Fie de
saint Louis, par le sire de Joinville, plus
aulhenli^que et plus exact que ceux qu'on
a connus jusqu'ici. Ce manuscrit est à la
bibliothèque du roi. M. l'abbé Sallier l'a
fait connaître dans une curieuse Disser-
tation qu'il lut à ce sujet à l'académie des
belles-lettres, le 12 novembre 1748; et on
l'a suivi dans l'édition de 1761. Le roi
saint Louis se servait du sire de Joinville
pour rendre la justice à sa porte. Joinville
en parle lui-même dans la Vie de ce mo-
narque. Œ II avoit coutume, dit-il, de
» nous envoyer , les sieurs de Nesle, de-
» Soissons et moi , ouïr les plaids de la
n porte , et puis il nous envoyait quérir ,
» et demandoil comme tout se portoit, et
» s'il y avoit aucune affaire qu'on pût dé-
» pécher sans lui ; et , plusieurs fois, se-
» Ion notre rapport, il envoyoit quérir
» les plaidoyans , et les contenoit, les met-
» toit en raison et en droiture. » On voit,
par ce passage tire de l'ancienne édition ,
que le français de l'Histoire de Joinville
n'est pas le même que celui que parlait
ce seigneur ; il se trouve sans altération
dans la nouvelle édition de 1761, in-fol.,
de l'imprimerie royale , donrvée par Me-
lot, garde de la bibliothèque du roi, par
SaUier et J. Capperonnier. Ses mémoires
se trouvent dans la Collection des mé~
moi?-es relatifs à l'histoire de France de
M. Guizot. Joinville mourut vers 1517,
âgé de près de 90 ans, avec la réputation
d'un courtisan aimable, d'un militaire cou
rageux, d'un seigneur vertueux. Il avait
l'esprit vif, l'humeur gaie, l'àme noble,
les sentimens élevés. On trouve , au
lorne 7 , page 515 de la Vie des saints
par Godescard , une intéressante notice
sur Joinville et ses Mémoires. Pendant sa
longue carrière, Joiuville avait vu ré-
gner six rois de France.
' JOLLY ( ToussAiXT-FÉLix ), ecclé-
siastique distingué , né le 30 mai 1759 à
Moivre , diocèse de Châlons , appartenait
à une famille d'honnêtea laboureurs qui
lui Jirenl faire ses éludes. Il entra chez
JOL •
!es chanoines réguliers de la congréga-
lion de France dile de Sic. -Geneviève, et
après avoir fait ses vœux le i5 février
1781, et reçu la préirise le 14 juin 1783,
il fut chargé d'enseigner la théologie à
Beauvais, puis au Val-des-écoliers dans
le diocèse de Langres. Nommé en 1788
prieur de Chàtillon-sur-Seine , il refusa
d'abord ce posle ; mais , obligé en quel-
que sorte de l'accepter , il se fit remar-
quer par sa prudence, par son esprit con-
ciliateur et par une sage fermeté. A l'é-
poque de la fédération du 14 juillet 1790,
JoUy fut chargé de dire la messe et de
prononcer le discours ajiialogue à la cir-
constance. Plusieurs s'étonnèrent de le
voir prendre part à cette cérémonie ; mais
on doit remarquer que la constitution ci-
vile du clergé n'était point encore mise en
vigueur : le discours qu'il prononça dans
cette circonstance, est grave et religieux;
l'orateur, en traitant de la sainteté du ser-
ment, semblait avoir eu pour but de cal-
mer les esprits par de sages avis : ce
discours a été imprimé. Mais bientôt la
constitution civile du clergé fut approu-
vée par le roi, et mise à exécution : la
suppression des abbayes et des monas-
tères fut résolue. On eut quelque temps
l'espérance de conserver l'abbaye de Chà-
tillon , espérance fondée sur une délibé-
ration prise par le conseil général de la
commune le 3 février 1795 , et dans la-
quelle il est question des services impor-
tans que les génovéfainsonl toujours ren-
dus à la ville. Ils étaient, ajoule-t-on ,
les pères des pauvres ; ils sac7-i fiaient tme
partie de leurs revenus pour le soulage-
ment des pauvres ; ils ne se contentaient
pas de les nourrir , ils leur fournis-
saient des vêtemens. Celte pétition si-
gnée par les autorités et par les habitans,
fut envoyée à l'Assemblée nationale où
Camus la fit rejeter. JoUy rédigea alors
une déclaration à laquelle s'associèrent
plusieurs religieux de son ordre ainsi
que des étudians de théologie (juin 179 1_).
Dans cet écrit , il gémissait de ne pouvoir
tenir ses engagemens, et adressait des
remercimens et des adieux qui attestent
la bienveillance dont il avait été l'objet, et
la sincère reconnaissance dont il était pé-
nétré. Recueilli à la campagne par la
famille Mesgrigny, il passa plusieurs
années dans sa retraite où il consacrait
tous ses loisirs à l'éducation des enfans
et à la pratique de toutes les vertus du
christianisme. Pendant la terreur , il fut
obligé de se cacher. Après la chute de
JOL
Robespierre , il revint chez ses anciens
amis , dans la famille des Mesgrigny, où
il resta jusqu'après la conclusion du con-
cordai. Alors il enseigna au séminaire de
Troyes la théologie et l'Ecriture sainte ,
sans vouloir accepter aucune rétribution,
se contentant dune petite rente qui suf-
fisait à ses besoins. Le séminaire ayant
été fermé par suite des persécutions di-
rigées contre M. de Boulogne , JoUy re-
vint à Paris où il resta jusqu'à la seconde
restauration; à cette époque il retourna
au séminaire de Ti-oyes où il reprit ses
fonctions. Comme sa santé s'était nota-
blement altérée, il renonça à l'enseigne-
ment , et vint se fixer au séminaire des
missions étrangères à Paris, où il est
mort le 14 octobre 1829. On a de lui deux
ouvrages importans : | le Mémorial sur
la révolution française, 1824, in- 12, et
1828, en deux volumes ; M. d'Exauvillez
en a publié un abrégé. ( Voxjez^MV cet ou-
vrage ainsi que sur le suivant X Ami de
la religion, n*" 1004, 1133 , 1217, et 1498. )
I Mémorial de l'Ecriture sainte en deux
parties, dont la première parut en 1823 ,
en 2 vol. in- 12 pour l'édition latine avec
la traduction française ; la seconde partie
a été publiée en 1826 , et est aussi en 2
vol. pour l'édition latine , et en un seul
vol. pour l'édition française. C'est un ou-
vrage utile, qui l'eût été peut-être da-
vantage encore s'il eût embrassé moins
d'objets. L'auteur se proposait de donner
dans le mèime genre nw Mémorial sur l'é-
ducation, et il avait rassemblé pour ce
travail beaucoup de matériaux qu'il n'eut
pas le temps de mettre en ordre. JoUy
avait été nommé chanoine honoraire de
Troyes, et grand-vicaire de Sl.-Flour;
mais sa modestie l'empêcha d'accepter
ce" dernier titre.
JOLY (Claude), né à Paris en 1607,
chanoine de la cathédrale en 1631 , fit deux
voyages, l'un à Munster cl l'autre à Roir.e.
De retour à Paris, il fut fait officiai et
grand-chantre. Il parvint jusqu'à l'âge de.
93 ans , sans avoir éprouvé les infirmités
de la vieillesse, lorsqu'il tomba dans un
Irou fait dans l'église de Notre-Dame pour
la construction du grand autel. Il mourut
de cette chute en 1700, après avoir légué
sa nombreuse bibliothèque à son chapitre.
Les agrémens de son caractère , la can-
deur de ses mœurs, son exacte probité,
et ses autres vertus, le firent long-temps
regretter. Il dut sa longue vieillesse à un
régime exact, à son enjouement tempéré
par la prudence. Sesprinripaux ouvrages
JOL
iO
JOL
sont : I Traité des restitutions des grands.
4680 , in-12; \Traité historique des écoles
épiscopales . 1678 , in-12 ; | Voyage de
Munster en ff^estphalie . 1672 , in-12 ;
j Recueil des Maximes véritables et im-
portantes pour l'institution du roi. contre
la fausse et pernicieuse politique du cardi-
nal Mazarin. 1655, in-12. Cet ouvrage,
écrit avec vivacité et hardiesse , réimpri-
mé en 1663 , avec deux Lettres apologé-
litiues de l'ouvrage même , fut brûlé par
la main du bourreau en 1665. L'auteur fil
imprimer un autre livre relatif à celui-ci ;
il est intitulé : Codicile d'or. C'est un
recueil de maximes pour l'éducation d'un
prince chrétien, tirées d'Erasme et d'au-
tres auteurs. | De l'état du mariage;
I Traditio antiqua Ecclesiarum Franciie ;
circa Assumptionem B. MARl^, Sens,
1672 , in-12 ;|i)e reformandis horis cano-
nicis^ 1644, et 1673, in-12; | De vcrbis
Usuardi circa assumptionem B. M. F'ir-
ginis^ Sens , 1669 , in-12 , avec une Lettre
apologétique en latin , pour la défense de
cet ouvrage, Rouen, 1670, in-12. Pres-
que tous les ouvrages do ce pieux cha-
noine sont curieux et peu connus.
JOLY (Claude), né en 1610 à Buridans
le diocèse de Verdun , d'abord curé de
Saint-Nicolas-des - Champs à Paris , en-
suite évéque de Sainl-Pol-de-Léon, et
enfin d'Agen, mourut en 1678 , à 68 ans ,
après avoir occupé avec distinction les
principales chaires des provinces et de la
capitale. Les huit vol. in-8"de Prônés et de
Sermons qui nous restent de lui furent ré-
digés après sa mort par Richard , avocat.
Jls sont écrits avec plus de solidité que d'i-
magination. Le pieux évèque ne jetait sur
le papier que son exorde , son dessein et
ses preuves, et s'abandonnait pour tout
le reste aux mouvemens de son cœur.
On a encore de lui les Devoirs du chré-
tien. in-12, 1719. Ce fut lui qui obtint
l'arrêt célèbre du 4 mars 1669, qui règle
la discipline du royaume sur l'approba-
tion (les réguliers, pour l'adjninistralion
du sacrement de pénitence.
JOLY (Gcji), conseiller du roi au Châ-
telet, fut nommé en 1652 syndic des ren-
tiers de î'hotel-dc-ville de Paris. Il suivit
long-temps le cardinal de Relz , et lui fut
attaché dans sa faveur et dans ses dis-
grâces : mais ayant refusé de le suivre à
Rome, il fut obligé de le quitter. Joly a
laissé des Mémoires historiques depuis
i6U8 jusqu'en 1663. Si l'on en excepte la
lin, ils ne sont proprement qu'un abréfjé
de ceux de ym maître, qu'il peint avec
assez de vérité. Joly y parait plus sage
dans ses discours, plus prudeht dans sa
conduite, plus fixe dans ses principes,
plus constant dans ses résolutions. Ses
Mémoires, qui forment 2 vol. in-12, ont
été réunis avec ceux du cardinal de Retz.
On a encore de lui : | quelques Traités
composés par ordre de la cour pour la
défense des droits de la reine, contre
Pierre Stockmans, célèbre jurisconsulte
{voyez ce nomj ; | Les Intrigues delà
paix ^ et les Négociations faites à la cour
par les amis de M. le Prince , depuis sa
retraite en Guyenne, in-fol., 1652; | une
Suite do ces mêmes intrigues, 1652,
in-4°, etc.
JOLY (Guillaume) , lieutenant-géné-
ral de la connétablie et maréchaussée de
France, mort en 1613, est auteur : |d'ua
Traité de la justice militait e de France ,
in-S'' ; ! de la f^ie de Guy Coquille ^ célè-
bre jurisconsulte.
JOLY (Marc-A.-vtoiive), censeur royal,
né à Paris en 1 672, débuta par quelques piè-
ces de théâtre , et se fit connaître ensuite
plus avantageusement par des Editions
de Molière, ,in-4°; de Corneille, in-12;
de Racine , in-12 ; et de Montfleury, in-12.
Il a laissé un ouvrage considérable , inti-
tulé Le nouveau et grand Cérémonial de
France, gros in-iol. , déposé à la biblio-
thèque du roi. Joly est mort à Paris en
1755.
JOLY ( Jeaiv-Pierre de), avocat au
parlement de Paris, et doyen du conseil
du duc d'Orléans, naquit à Milhau eu
Rouergue l'an 1694 , et mourut subitement
à Paris en 1774. Nous avons de lui une
Traduction française , in-8° , des Pensées
de l'empereur Marc- An ton in, et une Edi~
tion très exacte du texte grec de ces Pen-
sées.
* JOLY (N.) , sculpteur, élève du cé-
lèbre Girardon , naquit à Troyes en Ciiam-
pagne vers 1690. Il a exécuté plusieurs
ouvrages estimés, entre autres la statue
équestre de Louis XIV, qu'on admirait à
Montpellier, et qui décorait la plac*; du
Peyrou de cette ville. Les états du Lan-
guedoc lui avaient fait en récompense
une pension de 3, 000 livres. Il est mort
vers l'an 1760.
• JOLY (N. ) , doyen de l'église de Lan-
gres, né à Dijon, était' président delà
chambre des comptes de Bourgogne. On
a de lui : j La Religion chrétiome éclairée
par les dogmes et les prophéties ; | Traité
du mal; j Traité des anges , bons ei
mauvais-
joL a
• JOLY ( PuiMPPE-Louis), savant philo-
logue et chanoine de la Chapelle-aux-
Biches de Dijon, naquit dans celte ville
vers 1680, ou 1710 d'après M. Barbier, et
publia : | Eloge historique de l'abbé Papil-
lon.il^S, in-S"; I Remarques c?itiques sur
le Dictionnaire de Bayle. Paris , (Dijon),
1732 , 2 vol. in-fol. Cet ouvrage , sagement
écrit et très estimé . est un des coJilre-poi-
sons les plus ef :icaces de la dangereuse doc-
trine de ce philosophe . | Traité de la ver-
sification française . qui se trouve dans la
nouvelle édition du Dictionnaire des Ri-
mes de Richelet, Paris, 1751, in-8° ;
I Eloges de quelques auteurs français^
Dijon, 1742, in -8". De ces éloges qui
sont au nombre de douze , il faut excep-
ter trois qui ne sont pas de l'abbé Joly :
savoir, ceux de Dalcchamps ef de M. de
Méré , par J.-B. Michauet , et de Mon-
taigne , par le président Bouhier. | Plu-
sieurs articles intéressans dans le Journal
des 5afa«set dans les nouveaux /Uémoires
de l'abbé d'Jrligny. Il a en outre publié
la Bibliothèque des auteurs de Bourgo-
gne , de l'abbé Papillon , 2 vol. in-fol. ;
une Edition des Nouvelles poésies de La
Monnoie, 1745 ; et une autre des Mémoires
historiques, critiques etliltéraires de Fran-
çois Bruys, 1751 {voyez BRUYS). L'abbé
Joly occupe une place distinguée parmi iios
bons écrivains. Il mourut dans sa patrie
vers 1755 , suivant la Biographie univer-
selle et le 27 août 1782 , suivant Barbier,
Examen des Dictionn. histor. Joly avait
autant de modestie que d'érudition, et
jamais il ne se décida à publier un ou-
vrage sans l'avoir soumis à la critique de
ses amis , et corrigé avec tout le soin dont
il était capable ; néanmoins il ne voulut en
avouer aucun. C'était le blesser que de
lui parler de ses productions.
* JOLY (le père Josepu-Romain ) , ca-
pucin, né le 15 mars 1715 , à Saint-Claude
en Franche-Comté, d'une des maisons
les plus anciennes de cette ville, fit ses
humanités dans sa ville natale , au collège
qu'y avait fondé, plus de deux cents ans
auparavant, un eclésiastique de sa famille.
U alla faire sa philosophie chez les carmes
réformés; s'étant décidé pour l'état mo-
: nastique , il alla prendre l'habit de vSaint-
! François dans le couvent des capucins de
Pontarlier. La nature l'avait doué d'heu-
I reuscs dispositions , et surtout d'une ex-
trême facilité d'esprit qui lui permellail
d'embrasser tous les genres de science et
de littérature. Il cultivait à. la fois l'élo-
qv.ence, la poésie, l'histoire, la criliciue .
JOL
la métaphysique, la théologie, les scien-
ces naturelles, les arts, et produisait
avec une incroyable fécondité dos ouvra-
ges sur presque toutes les bratichos de3
connaissances humaines. Ce n'étaient pasà
beaucoup près des chefs-d'œuvre; mais
tels que sont ces ouvrages, ils supposent
néanmoins du travail, de l'érudition et un
véritable talent. « Il a cultivé, dit Saba-
» tier, presque tous les genres de littéi'ii-
» ture , sans qu'on puisse dire qu'il ait
» réussi dans aucun. lia composé des dis-
» cours, des histoires, des critiques , dc3
«satires, des contes, des épigrammes,
« des cantiques, des tragédies, un poème
» épique en 12 chants, des lettres sur les
«spectacles, sur les duels, sur le sabbat
» des sorciers, sur la reine des abeilles ,
» sur les convulsionnaires, et pas un de
« ces ouvrages n'a fait assez de sensation
« dans le moule , pour attacher la moindre
» célébrité au nom de l'auteur. On ne
« peut cependant lui refuser des connais-,
«sances, de l'érudition, des idées; mais
« ces qualités sont perdues poui- le public,
« quand elles ne sont pas mises en œuvre
» par le talent , ou relevées par le mérite
» du style. » On a du père Joseph Romain
des Compositions historiques ,des Satires,
des Contes , un Poème épique , des Epi-
grammes, des Lettres, des Cantiques, des
Tragédies. De cette liste nombreuse nous
nous contenterons de citer les ouvrages
suivans, dont quelques-uns sont restés
inédits : ( Dissertation où l'on examine
celle qui a remporté le prix de l'acadé"
mie de Besançon en 1734;Epinal, 1734,
10-8°; c'est une critique du mémoire de
l'abbé Bergier sur le nombre et la posi-
tion des villes de l'ancienne Séquanie.
I Histoire de l'image miraculeuse de No-
tre-Dame d'OnnoZj près d'Orgelet en
Franche-Comté, Besançon, 1757,in-12;
I Le Diable cosmopolite , poèiiie , Paris ,
1760, in-S", c'est une satire contre, les
philosophes ; | Lettre sur les spectacles , à
mademoiselle Clai?'on, Avignon (Paris),
1762, m-S"; } Histoire de la prédication ,
Paris, 1767, in-I2; | Conférences pour
servir à l'instruction du peuple, Paris,
1768,6 vol. in- 12; | Conféj-ences sur lei
mystère s, 'ib'và.., 1771, 5 vol. in-12; \ Dic-
tionnaire de morale philosophique^ 2
vol. in-8°, 1772; \La Géographie sacrée,
et les Monumens de l'histoire sainte ,
Paris, 1784, in-4''. C'est le plus important
des ouvrages de Joly. | Notice touchant
l'ordre de Saint-François , à l'occasion
de l'élection de Clément XIV, dans le
JOL 12
Mercure ; | L'ancienne Géographie uni-
verselte comparée à la moderne. Paris ,
4801, 5 vol. in-8", et atlas ia-i°; | La
Franche - Comté ancienne et moderne .
avec une carte des provinces helvétique
et séquanaise, Paris, 1779, in-12 ; | L'F.gyp-
tiade , ou le Voyage de saint François
d'^Usise à la cour du roi d'Egypte.
poème épique en 12 chants , nouvelle édi-
tion, Paris, 1786, in-12; | Placide Aragé-
die en vers et en cinq actes, ibid , 1786,
in-€° ; | Le Phaéton moderne . poème , Pa-
ris , 1772 , in-8° ; | Lettre sur la manière de
prendre la reine des abeilles , dans le Mer-
cure d'août 1770 ; | Lettre sur le sabbat
des sorciers j dans l'Année littéraire en
1765 ; ) Lettre à un docteur en médecine sur
sa Relation des convulsionnaires ; \ Lettre
à l'occasion du Bélisaire de Marmonlel ,
touchant les fausses citations; \ Lettre sur
laprimatie de Lyon ; \ Dissertation où l'on
répond à la question suivante . proposée
par l'académie de Berne : Quel est le peu-
ple le plus heureux? L'auleur se décide
en faveur des Hottentots. Que l'on ajoute
à cela des Opuscules touchant les lampes
à réverbère. 38 Satires . 160 tant Contes
qvCEpigrammes et poésies, et l'on se
formera une idée des travaux du Père
Joseph-Romain. Ceux qui voudront les
connaître plus en détail peuvent con-
sulter la France littéraire ^ à son article ,
lom. 3 et k. Ce religieux survécut à son
institut , et nrrourut à Paris en 1805 , âgé
de 90 ans. Il était de l'académie des
Arcades de Rome. N'ayant pu se faire ad-
mettre à celle de Besançon , il s'en con-
sola par des épigrarames.
• JOLY DE BÉVY ( Louis-Philibert-
JosEPQ ) , naquit le 23 mai 1736 à Dijon
où il devint président à mortier au par-
lement. Lors de la révolution , il eut à
souffrir les persécutions auxquelles furent
exposés presque tous ses confrères; Joly
se déclara néanmoins en faveur des prê-
tres qui refusèrent de prêter le serment
appelé civique. Il soutint quelques an-
nées après des opinions contraires à l'es-
prit du concordat de 1801 , sur lequel , en
1815 , on a reconstitué l'Eglise de France.
Joly de Bévy était aussi savant dans la
jurisprudence que dans les canons; il est
mort dans sa patrie , le 21 février 1822. Il
a laissé ; | De la nouvelle Eglise de Fran-
ce , Paris , Michaud , 1816 , in-8° ; | Nou-
velle Traduction des livres de V Imitation
de J. C. Dijon, Fantin, 1816, in-12.
JOL
sième édition , ibid. , 1822 , in-8° ; | Prières
à l'usage des fidèles, dans les temps cTuf'
fliction et de calamités , tirées des Psau-
mes de David et des Cantiques . etc. ,
traduction de J.-F. La Harpe , avec des
extraits du Commentaire des Psaumes du
Père Berlhier. ibid. , 1817 , in-12 do
cent quatre-vingt-sept pages (l'édition,
par ordre de l'auteur, est restée tout ea-
tière chez l'imprimeur ) ; | De l'ordre de
la noblesse et de son antiquité chez les
Francs . ibid. , 1817, in-8° ; | Extrait du
livre de M. Burke sur la révolution fran-
çaise . ibid. 1819 , in-S" ; | Sur Louis XIK.
ibid. 1820 , in-8° ; | Instructions pour un
pécheur qui . touché de Dieu . veut se
convertir, tirées du Cominentaire des
Psaumes de David, par le Père Bouhier,
suivies d'un récit motivé de la conversion
d'un incrédule (La Harpe) qui fut long-
temps un des plus renommés dans la secte
philosophique , et auteur de ce récit, ibid.,
1820 , in-S". Joly de Bévy a été , en outre,
éditeur | du Traité de la Péremption
d'instance, par M. Melenet . nouvelle
édition, augmentée d'un traité de M. le
président Bouhier sur la même matière ,
1787, in-8°; | OEuvres de jin-isprudena ^
de M. Bouhier. président à mortier au
parlement de Dijon, de l'académie fran-
çaise ; recueillies et mises en ordre avec
des notes et additions. 1787-88, 2 vol.
in-folio. M. Amanton a donné une notice
sur Joly de Bévy dans le Journal de Dijon
23 février 1822.
JOLY DE FLEURY ( Guillaume Fran-
çois) , né à Paris en 1673 , d'une ancienne
famille de robe, originaire de Bourgogne,
fut reçu avocat au parlement en 1095 , de-
vint avocat-général de la cour des aides
en 1700 , et avocat-général au parlement
de Paris en 1705. D'Aguesseau ayant été
fait chancelier de France en 1717, Joly de
Fleury le remplaça dans sa charge de pro-
cureur-générsJ , et mourut en 1756 , dans
sa 81' année , laissant plusieurs manus-
crits : \Mémoire$. qui sont tout autant de
traités sur les matières qu'ils embrassent;
I des Observations, des Remarques , de9
Notes sur différentes parties du droiî
public français; | les tomes 6 et 7 dn
Journal des audiences offrent quelques
extraits de ses plaidoyers.
• JOLY DE FLEURY ( Jean-Omer ), fils
de Guillaume, naquit à Paris le 26 octo-
bre 1715. Joly de Fleury remplit «ucces-
sivement les places de procureur-général
deuxiènte édition ; avec les textes de l'E- 1 et d'avocat-général au grand conseil et au
criture sainte, ibid., 1821, in-8° ; troi-' parlement de Paris. Dans un temps oi;
JOL JS
par des prcKuctions iiiipics , on sapail les
fondemcns de la rcligiuu, il s'en uioulra
le zélé défenseur, el la défendit avec au-
tant de force que d'éloquence. L'abbé
C-hauvelia ayant dénoncé au parlement
quelques ouvrages philosopbiques, Joly
de Fleury prononça, le 9 aviil 1756, son
réquisiloiie contre l'Analyse de Bayle ,
(le l'abbé de Marsy , Vflisloire du peuple
de Dieu ^dn Père Berruyer, et contre Za
CJiri.'itiade , ou le Paradis reconquis , es-
j)èce de ronian sacré , de l'abbé de la
Baume. Joly de Fleury s'attacha moins à
attaquer l'auteur de l'Analyse que le phi-
losophe lui- même. « Bayle , dit-il, trop
f connu par sa liberté de penser , se dé-
» Clara dans le dernier siècle l'apologiste
» du pyrrlionisme et de l'irréligion. Ami
» de toutes les sectes , dont il fait égale-
» ment l'éloge, il apprend à suspendre
» sur tout son jugement, parce qu'il n'ad-
» met aucune certitude. Toujours en
» garde contre les ennemis implacables
» de ses impiétés , il répand comme fur-
» tlvenient ses erreurs dans les articles
» des numichéens j des pauliciens j des
» mai'cioniles , ûes pyrrhoniens , etc. Les
» dcmi-savans, croyant y trouver des
» preuves invincibles contre la religion ,
» méprisent ces hommes dociles et pru-
» dv-ns qui font un usage légitime de leur
B raison, et qui pensent avec justice
» qu'une raison droite conduit à la loi , et
» qu'une foi pure perfectionne la raison,
Bclc.... Voilà l'ébauche du Diclioimaire
» de Bayle. Il mérilait sans doute de ren-
» trcr dans les ténèbres d'où il avait fait
» sortir tant d'autres écrivains. Bayle avait
» renfermé tant d'erreurs dans des volu-
» mes immenses ; il les avait répandues
« de tous côtés dans les différens articles
» qui les composent ; l'acquisition de ses
» œuvres était difficile , la lecture trop
» longue , l'usage peu commun. Les textes
» dont il abuse pour autoriser l'incréduli-
» té étaient placés comme au hasard et
» sans ordre. La difficulté de les suivre ,
» de les lire ensemble pouvait être un
» obstacle aux progrès trop rapides de
» l'impiété. Un rédacteur pervers, enne-
» mi sans doute de tout bien , prête hon-
» teusement sa plume à l'impiété. II pré-
» sente aujourd'liui tout ce venin , comme
» dans une coupe; il approche les textes
» sous des titres analogues; il rassemble
» toutes les obscénités, les histoires scan-
* daleuses, les invectives, et les blasphè-
» mes de l'auteur : ce qui n'était presque
b accessible à personne devient àla portée
7.
JOL
« de tout .e monde. Quel scandale une
» semblable analyse n'offre-t-elle pas aux
» mœurs et à la religion ?» Il jugea en-
suite et avec une juste sévérité V Histoire
du peuple de Dieu. Le père Berthier, en
parlant de ce Hvre et de son auteur,
s'était déjà exprimé en ces termes : « Il
» ne se souvhit pas ( le père Berruyer)
» qu'il travaillait sur le livre le plus sim-
» pie , le plus noble , le plus divin , le plu»
» sanctifiant. Il en altéra la simplicité
» par l'extrême abondance de son style,
» la noblesse par une foule d'images et
» d'expressions peu convenables , la divi-
» nité par l'alliage de ses propres concep-
» tiens , l'édification par la méthode très
» condairinable de réduire quantité de
» leçons évangéliques aux seuls Juifs et
» aux événemens qui les concernent. »
L'avocat-général ne fut pas moins sévère
pour la Christiade ^ où « l'auteur, dit-il ,
» en se livrant à toute la fougue de son
» imagination, travestit l'Evangile, prête
» à la Divinité le langage que les poètes
» mettent dans la bouche de leurs dieux,
» insère dans le récit des actions de Jésus-
» Christ des épisodes indécens , et copiés
B d'après ceux des héros de Virgile , etc. »
Sur le réquisitoire de l'avocat-général ,
intervint l'arrêt qui condamnait à être
lacérés et brûlés par la main du bourreau
les trois livres ci-dessus mentionnés. Le
23 janvier 1759, Joly de Fleury déféra et
prononça un autre réquisitoire sur huit
livres impies , au nombre desquels étaient
le livre de VEsprit^ V Encyclopédie ^ la
Religion naturelle . ou la Loi naturelle
(ce livre parut sous ces deux titres). Vol-
taire, son auteur, en fut très indigné, et
chercha , par des satires mordantes et
des plaisanteries grossières, à jeter, quoi-
que en vain, du ridicule sur l'avocat-
général qui l'avait attaqué vigoureuse-
ment. Joly de Fleury y fit remarquer
l'adresse perfide avec laquelle les auteurs
insinuaient plus ou moins ouvertement
leur doctrine , et il ne dissimula pas que
l'on voyait bien qu'il y avait un projet
conçu , une société formée pour soutenir
le matérialisme , détruire la religion ,
inspirer l'indépendance et énerver la
morale. Ces ouvrages furent condamnés
à être brûlés , à l'exception de Y Encyclo-
pédie qui devait être examinée plus am-
plement. Il remplit avec honneur les de-
voirs de sa charge et fut toujours l'irré-
conciliable ennemi des opinions philoso-
phiques, dont il a pu voir les tristes résul-
tats ; après avoir traversé nos orages ré-
JON 14
voIuîioniKiircs, il est morl le 20 janvier
1810. Son lils a clé le dernier procureur-
général (lu parlement.
• JOMBERÏ (Chvrles-Antoixe), im-
primeur-libraire, né à Paris en 1712,
mort à St.- Germain -en-Laye en 1784,
était tr^ès versé dans les arts de la pein-
l!)re, du dessin, de la gravure, de l'ar-
rlùteclure, et a publié : | Nouvelle mé-
ikoda pour apprendre à dessiner sans
r.iuitre^ 1740, in-i°; | Architecture îno-
dertie^ ou l'Jrt de bien bàlir , pour toutes
sortes de personnes^ Paris, 1764, 2 vol.
iu-i". Cet ouvrage est de Briseux : il n'a
fait que l'augmenter. | Répertoire des
artistes^ Paris, 1763,2 vol. in-fol.; j Ca-
talogue de V œuvre de Charles- Nicolas
Cochin, 1770, in-8°; | Essai d'un catalo-
gue de l'œuvre d'Etienne La Belle ^ 1772 ,
iîi-8"; I Théorie de la figure humaine^
traduite du latin de Rubens, 1773, in-i" ;
I Catalogue raisonné de l'œuvre de Sébas-
tien LeclercA77k, 2 vol. in-8°; | plusieurs
éditions corrigées d'ouvrages do Bélidor,
de Piles, etc.
* JOMliLLI ( NicoLO ) , compositeur
italien, né dans le royaume de Naples en
1714, fut un des plus grands maîtres de
son temps. Il séjourna long-temps à Rome
«t fut nommé maître de chapelle de St.-
Pierre. En 1755, lise rendit à Slutgard,
où il séjourna 13 ans , enfin il revint à
Naples en 1768, et y mourut le 28 août
■1774. Il a composé un grand nombre de
?nesses . de motels et plus de ii.0 opéras.
Le plus renominé est son Armide. 11 ex-
cellait particulièrement dans la musique
sacrée. Son Miserere à deux voix est une
des compositions sublimes de ce genre.
JO.\ (du). Voyez JUNIUS.
JOi\ADAB, fils de Réchab, de la fa-
mille de Jéthro, beau- père de Moïse,
aida Jéhu à exterminer le culte de Baal,
et se rendit recommandable par la sain-
teté et l'austérité de sa vie. Il prescrivit à
ses descendans un genre de vie très dur,
et des privations pénibles, auxquelles la
loi n'obligeait personne, mais qui ten-
daient d'elles-mêmes à une plus exacte et
plus parfaite observation de la loi. Il leur
défendit l'usage du vin, des maisons, de
l'agriculture et la propriété d'aucun
fonds, et il leur ordonna d'habiter sous
des tentes. Les disciples de Jonaxlab s'ap-
pelèrent réchabites. du nom de son père.
Ils pratiquèrent la règle qu'il leur avait
donnée , durant plus de 300 ans. La der-
nière année du règne de Joachim , roi de
Jiida, iNabuchodonosor étant venu assic-
JOIV
ger Jérusalem, les réchabites furpnl
obligés de quitter la campagne et de sa
retirer dans la ville, sans toutefois aban-
donner leur coutume de loger sous des
tentes. Pendant le siège, Jérémie reçut
l'ordre d'aller chercher les disciples de
Réchab, de les faire entrer dans le temple,
et de leur présenter du vin à boire.
L'homme de Dieu exécuta cet ordre.
Lorsqu'il leur eut offert à boire , ils ré-
pondirent qu'ils ne buvaient point de
vin, parce que leur père Jonadab le leur
avait défendu. Le prophète prit de là
occasion de faire aux Juifs de vifs repro-
ches sur leur endurcissement. Il opposa
leur facilité à violer la loi de Dieu à
l'exactitude rigoureuse avec laquelle les
réchabites observaient les ordonnances
des hommes. Les réchabites furent em-
menés captifs après la prise de Jérusa-
lem par les Chaldéens, et on croit qu'a-
près le retour de la captivité, ils furent
employés au service du temple; qu'ils y
exercèrent les fonctions de portiers , et
même de chantres, sous les lévites. L'ex-
périence a fait voir encore plus claire-
ment depuis, que les hommes assujétis
à des règles et à des observances parti-
culières, formés à l'amour et à la pratique
de la religion, par des leçons et des exer-
cices assortis à une plus grande perfec-
tion, sont en général les plus propres
aux fonctions du saint ministère, f^oyez
saint NORBERT et EUSÈBE de Vcrceil.
JOA/E. f^oyesJONAS (Aungiîim).
JO>JAS, fils d'Amathi, cinquième des
petits prophètes , natif de Géthopher ,
dans la tribu de Zabulon , vivait sous
Joas, Jéroboam II, rois d'Israël, et du
temps d'Ozias , roi de Juda. Dieu ordonna
à ce prophète d'aller à Ninive , capitale
de l'empire des Assyriens, pour prédire
à cette grande ville que Dieu l'allait dé-
truire. Jonas, craignant d'exécuter une
mission qui lui semblait dangereuse , s'ej>-
fuit, et s'embarqua à Joppé, pour aller
à Tharse , en Cilicie. Une grande tempête
s'étant élevée tout à coup, les mariniers
tirèrent au sort pour savoir celui qui était
cause de ce malheur, et le sort tomba sur
Jonas. On le jeta dans la mer, afin que
sa mort procurât le salut aux autres; et
aussitôt l'orage s'apaisa. Dieu envoya un
grand poisson pour recevoir Jonas , qui
demeura trois jours et trois nuits dans le
ventre de l'animal. Le poisson le jeta
alors sur le bord de la mer, et le pro-
phète ayant reçu im nouvel ordre d"all r
à Ninive , obéit. Les habitans , effrayé.-, de
jroiv
ses menaces, firent pénitence, ordonnè-
rent un jeûne public, et le Seigneur leur
pardonna. Jonas voyant que Dieu avait
révoqué sa sentence touchant la destruc-
tion de Ninive, appréhenda de passer
pour un faux prophète, et se plaignit au
Seigneur qui lui lit bientôt comprendre
l'injustice de sa plainte, par une de ces
leçons typiques, si propres à instruire et
à convaincre. Pour le défendre contre
l'ardeur du soleil, il lit croître dans l'es-
pace d'une seule nuit un végétal que
riicriture nomme un lierre, et qui est
probablement le Palma Christi^ lequel
lui donna beaucoup d'ombre. Mais, dès
!« lendemain, un ver piqua la racine de
celte plante, la lit sécher, et laissa Jonas
exposé , comme aui)aravant,à la violence
du soleil. Cet événement augmenta l'af-
fliction du prophète , qui , dans l'excès de
sa douleur, souhaila de mourir. Alors
Dieu , pour l'instruire , lui dit que , « puis-
» qu'il était fâché de la pftte d'un lierre ,
» qui ne lui avait rien coûté, il ne devait
» pas être surpris de voir fléchir sa colère
» envers une grande ville, dans laquelle
» il y avait plus de 120 , 000 personnes
■ qui ne savaient pas distinguer entre le
» bien et le mal. » Jonas revint de Ninive
dans la Judée, et saint Epiphane raconte
qu'il se relira avec sa mèie près de la
ville de Sur, où il demeura jusqu'à sa
mort, arrivée vers l'an 761 avant J.-C.
Les Prophéties àe Jonas sont en hébreu,
et contiennent quatre chapitres. Il y a des
mythologistes qui prétendent que la fable
d'Andromède a été inventée sur l'histoire
de Jonas ; sans rien décider sur cette con-
jecture , en particulier, l'on peut dire que
presque toute la mythologie , et même la
partie fabuleuse de l'histoiie ancienne ,
est prise de l'Ecriture sainte ( voij. OPHIO-
NÉE ). Jonas jeté dans la mer pour sauver
ses semblables, englouti parla baleine , et
rendu le troisième jour, est , suivant l'E-
vangile même, la ligure de o.-C. Il l'est
encore en ce que c'est le seul prophète
que Dieu ait envoyé aux gentils. Les sa-
vans ont beaucoup disputé sur le poisson
qui engloutit Jonas. On a dit que ce n'é-
tait point une baleine proprement dite ,
puisqu'on n'en voit point dans la mer
Méditerranée, où ce prophète fut jeté ;
que d'ailleurs le gosier des baleines était
trop étroit pour qu'un homme y pût pas-
ser. Quelques-uns croient que le poisson
dont il s'agit était une espèce de requin
ou de lamine ; mais il y a pins d'appa-
rence que c'était une orca^ qui ne sort
15 JON
pas du genre des célacees. Enfin , on a dît
que le mol venter, qui, en général, si-
gnifie cavité, surtout dans le langage de
l'Ecriture, pouvait marquer la bouche de
la baleine, où il y a de très grands creux.
Et quant à la mer Méditerranée , si elle
n'a pas aujourd'hui des baleines, elle
peut en avoir eu autrefois : la Manche
n'en a pas davantage , et cependant , en
1617, on en a pris une à Sclievelingue.
Quelques interprètes ont cru que ce pois-
son pouvait avoir été formé exprès par
celui qui les a faits tous, et se sont ap-
puyés du mot prœparavit, qui se trouve
dans le texte sacré. Quoi qu'il en soit de
celte opinion , elle est certainement plus
raisonnable que les inepties qu'un moine
nommé Thaddée , professeur à Bonn, et
d'autres ignorans, se parant du nom.(ÏHer-.
m&neutes , ont débitées sur cette matière.
Les principaux commentateurs de ce pro-
phète sont Feuardent, J. Heusden , H.
von der Hardi, F. C. Fabricius et Ro-
senmuller.
JO.NAvS, évcque d'Orléans, mort en
842 , a laissé deux ouvrages eslimés. Le
premier, intitulé Institutions des laï-
ques, fut traduit en français par D. Mége,
1GG!2, in-rj. Le second a pour litre : Ins-
truction d'un roi chrétien, traduit en
français par Desmarets , 1661 , in-8° ; l'un
et l'autre se trouvent en latin dans le
Spicilége de d'Acheri. Il y a encore de
Jonas vui Traité des miracles dans la
Bibliothèque des Pères, et imprimé sépa-
rément , 164j , in-i6 ; et un Traité contre
Claude, évèque de Turin, et les icono-
clastes, dédié à Charles le Chauve. Quoi-
que Jonas combatte le sentiment de ceux
qui condamnent l'usage des images, il
n'en approuve pas le culte. C'est pour-
quoi Bellarmin avertit qu'il faut lire son
ouvrage avec précaution. « On n'y trouve
» de justesse ni dans les raisonnemens ni
» dans les réflexions, a dit un critique,
K mais à la place de cela , de froides plai-
» sauteries et des puérilités , comme lors-
» qu'il raille son adversaire sur l'équivo-
» que de son nom, en lui disant qu'on ne
» doit pas s'étonner de ce qu'il ne marche
r pas droit dans les sentiers de la vérité,
» puisqu'il se nomme Claude, c'est-à-dire
D boiteux, selon l'élymologie latine : mais
» c'était le goût du temps. » Ce prélat fu'
le modèle des évêques et l'ornement du
6* concile de Paris et de celui de Thion-
ville.
JONAS (Juste ) , théologien luthérien,
l'un àcs premiers apôtres de la réforma-
JON 16
lion, né dans la Thurinfre en 1493, mort
en VÔUH , a laissé quclqtn^s ouvrages rem-
plis des erreurs de Lulhcr, dont il était
im des plus ardens disciples : il était ami
de Mélanchthon qui le fit principal du
collège de Wilteniber{j et ensuite doyen
de l'université de cette ville.
JOAAS ou plutôt JON^E (ARNcnni),
astronome irlandais, disciple de Tycho-
Bralié, et coadjuleur de Gulbrand de
Tliorlaksen, évèquede Holum en Islande,
refusa cet évèclié après la mort de Gul-
brand, se contentant d'être ministre de
l'éfïlise de Melstadt, et mourut en 1649,
à 93 ans, après avoir publié un grand
nombre d'ouvrages. Les principaux sont :
j V Histoire et la description de l' Islande ^
Amsterdam, 1643, in-4", avec la Défense
de cet ouvrage , estimable pour l'érudi-
tion et les rechercbes. Celte histoire est
en latin. | Idea ve?i magislratûs . Copen-
hague , 1589 , in-8° ; | la f^ie de Gutbrand
de Thorlaksen^ «".n latin, in-4°, etc. Il
prétend que l'Islande n'a été habitée que
vers l'an 874 de J.-C. , et que par consé-
quent elle n'est point l'ancienne Thulé ;
mais on peut l'avoir connue comme tant
d'autres plages avant qu'il y eût des
liabitans. Il se remaria à l'âge de 90 ans à
une jeune fille, (i).
JO.\VTIIVS, fils de SaiJl.est célèbre
par sa valeur et par l'amilié constante
qu'il eut pour David contre les inlérêls
de sa maison. Il délit deux fois les Philis-
tins , cl eût été mis à mort par Saiil , pour
avoir mangé contre sa défense un rayon
(i) SaivaDt U Biographie univertetie de Michaud ,
ArngrimJonx naquit en i563, rt mourut âgé de 80
ans en 1648. Commr: la liste de ses ouvrages sur l'Is-
lande est presenlée par Feller d'une ^lani^^e extrè-
roeinenl incomplîle , nous en donnerons ici les litre» ;
I Breifis commt'ntfiriits d*' Islandiâ, (Copenhague,
* iSga, petit in-fol. Le but de ce livic est de réfuter les
faux ju^emens portés sur l'Islande par Munster, Fri-
iius, /-icglcr, Olaiii Maguus , etc. | Crymogcea, *iVc
trrum i.iIanJicarum lihri irrs, Hambourg, 1609, 10,
i^.iSetao, in-4' Cet ouvrage , le plus considérable
de Tauteur, est aussi celui qu "od cite le plus souvent.
Ou y trouve beaucoup de dt-lails du plus haut intérêt,
sur les origines islandaises , les lois , les mœurs, etc.,
auxauels a présidé une saine critique. | Anatomio
Blrjkrinlana, etc., iliid . 16.8, in-4^ critique d'un
ouvrage de Bleflien sur l'Islande; i Spécimen Islanditr
kisloricum, fl magnd ex parle ehorographieum, Am-
• terdïm , 1643 , io-4''- On a aussi de lui des disserta-
tions latines iar /es Irllres riinniifues et sur les divinitét
des peuples septentrionaux, imprimées, l'une dans
Xi Liilfratura danica d'Olaiis Worm , et l'autre dan»
le ctmmenlaire de Stephanius sur Saxon le grammai-
rien. Arngrim Jonœ est queliinefuis aussi désigné par
le Dom de Vidalin, qu'il prit da canton de Widesal
s6 il avait re^u le jour.
JON
de miel, si toute l'armée ne s'y fût op-
posée. La guerre s'élanl de nouveau allu-
mée quelque temps après entre les Hé-
breux et les Philistins, Saiil et Jonathas
se campèrent sur le mont Gelboé, avec
l'armée d'Israël. Ils y furent forcés, leurs
troupes taillées en pièces , et Jonathas fut
tué en lOoS avant J.-C. La nouvelle en
ayant été apportée à David, il composa
un Cantique funèbre, où il fait éclater
toute sa tendresse pour son ami. Jonathas
est un modèle admirable de la générosili
et de l'amitié chrétienne. La gloire dj
David efface la sienne , et il n'en est point
jaloux. Quoique héritier présomptif de la
couronne, il prend, aux dépens de ses
propres intérêts, ceux de l'innocent per-
sécuté. M. l'abbé Brûlé a donné un poème
en prose en quatre chants, intitulé Xllé-
roïsme de l'amitié ^ ou David et Jo'
nathasj. Paris, 1776, in-12, plein de sen-
timent, et écrit dans les bons principes.
JO:>JATIIAS,*fils de Samma, neveu do
David, eut la gloire de tuer un géant de
9 pieds de haut, qui avait six doigts à
chaque main et à chaque pied.
JONATHAS, qu'on nomme aussi JO-
NATHAN ou JOHANNAN, fils de Joïada
( autre que celui qui rétablit Joas sur le
trône ), et petit-fils d'EUasib, surcéda à
son père dans la charge de grand sacrifi-
cateur des Juifs , qu'il occupa pendant
environ 40 ans. Ce pontife déshonora sa
dignité par une action barbare et sacri-
lège. Il avait un frère nommé Jésus , qui
prétendait parvenir à la souveraine sa-
crificature par la protection de Bagose .
général d'Arlaxei xès. Jonathas en conçut
de la jalousie ; un jour que les deux frères
se rencontrèrent dans le temple, la dis-
pute s'échauffa si fort, que Jonathas tua
Jésus dans le lieu saint.
JONATHAS. surnommé Jpphus ^ l'un
des plus grands généraux qu'aient eus les
Juifs, était fils de Matalhias et frère de
Judas Machabée ; il fut chargé du gouver-
nement après la mort de Judas, vengea
sur les fils de Jambri la mort de Jean son
frère, pa.ssa ensuite le Jourdain à la nage
avec son armée, et força Bacchide, gé-
néral des Syriens , qui faLsait la guerre
aux Juifs, d'accepter la paix l'an 161 avant
J.-C. Après les victoires qu'il venait de
remporter, et la paix conclue , son prin-
cipal soin fut, ainsi que l'avaient fait son
frère et son père, de bannir les Juifs
apostats , ei de rendre à la religion son an-
cienne splendeur. La réputation de Jo-
nathas fit rechercher son alliance 'p«ir
Alexandre Balas et Démélrius Soter , qui
se disputaient le royaume de Syrie. Il
embrassa les intérêts du premier, et prit
possession de la souveraine sacrificature,
en cousi'-qucnce de la lettre de ce prince
qui lui donnait cette dif[nité. Deux ans
après, Alexandre Balas ayant célébré à
Plolémaïde son mariage avec la fille du
roi d'Egypte, Jonalhas y fut invité , et y
parut avec une magnilicence royale. Dé-
mélrius, qui succéda à Balas, le confirma
dans la grande sacrificature ; mais sa
bonne volonté ne dura pas long-temps.
Jonathas l'ayant aidé à soumettre ceux
d'Anlioche soulevés contre lui, Démétrius
n'eut pas la recoimaissance qu'il devait
pour un si grand service; il le prit en
aversion, et lui fit tout le mal qu'il put.
Diodote Tryphon , ayant résolu d'enlever
la couronne au jeune Antiochus, fils de
Balas, sotigea d'abord à se défaire de Jona-
lhas. Il l'attira à Ptolémaïde , le prit par
trahison, et le fit charger de chaînes ; en-
suite, après avoir tiré de Simon une
somme considérable pour la rançon de
son frère, ce perfide fit mourir Jonathas
avec ses deux enîans, l'an Ikk avant J.-C.
' JO.\ATIÏAS, tisserand du bourg de
Cyrcne. Après la ruine de Jérusalem par
Titus , fils de l'empereur Vespasien , il
gagna un grand nombre de Juifs et les
mena sur une montagne, leur promet-
tant des miracles s'ils le choisissaient
pour chef ; mais il fut arrêté par Catulle ,
gouverneur de Lydie. Ce séducteur dit
qu'on l'avait engagé à cette révolte, et
nomma Fluve Joséphe l'historien entre
ses conipiires. Mais comme celui-ci était
innocent , on ne s'arrêta point aux accu-
sations du caloirniiateur, qui fut condamné
à être brûlé vif. La multitude d'impos-
teurs qui parut vers le temps de la des-
truction de Jérusalem est un accomplis-
sement bien frappant de la prédiction de
J.-C. : 'J'unc multi pseudoprophetcB sur-
yent et seducent imiltos. Mat th. 24.
• JO.XCOURT ( Pierre de ), prédica-
teur prolestant, français d'origine et ré-
fugié en Hollande , quelque temps avant
la révocation de l'édit de Nantes , devint
ministre de l'église wallonne de la Haye ,
et s'acquit une réputation brillante par
ses sermons pleins de force et d'éloquence,
il passa pour un des plus célèbres prédi-
cateurs de la Hollande. Il est mort vers
1725, après avoir public plusieurs ouvra-
ges, parmi lesquelson remarque : | Letlres
critiques sur divers sujets importuns de
l'JJciiturc ia//i/^, Amsterdam, 1705, in-
7 JOIV
12 ; I Entrctims sur les différentes mèt/io
des d'expliquer l'Ecriture et de prêcher
de ceux qu'on appelle coccéiens et voé-
tiens dans les Provinces-Unies , Amster-
dam, 1707, in-i2; | Nouveaux entretiens,
in-12, pour faire suite aux précédens, en
réponse à un écrit publié par les coc-
céiens contre M. de Joncourt; ] des Lettres
sur les jeux de hasard. 17 li, in-12;
I Nouvelle lettre sur les jeux de hasard.
1774, in-12; | Entretiens sur l'état pré-
sent de la religion en France , oii l'on
traite amplement de l'autorité des papes
et de ses fondemens, la Haye, 1725, in-12.
* JONCOURT ( Elie de ), ministre pro-
testant, né à la Haye vers l'an 1700 , fut
long-temps professeur de philosophie à
Bolduc, et a publié un grand nombre de
traductions d'ouvrages anglais et latins
dont on peut voir les titres dans la France
littéraii-e de Formey , et dans VExam.en
critique de M. Barbier. Nous citerons :
I Traité de la Providence . traduit de
Sherlock, la Haye, 1721, in-12; | Préser-
vatif contre le papisme^ traduction du
même, 1721, in-8"; ] Sermons sur divers
textes importans de VEcritui-e sainte^
traduits du même, 1723, 2 vol. in-S";
I Sermons sur la mort et le jugement.
traduits de feu M. Lucas , 1725 , in-8° ;
I Jlciphron ou le Petit philosophe , tra-
duit de Berklei, la Haye, 1734, 2 vol.
in-12; | Elémens de la philosophie netv-
tonienne ^ traduits de Pemberton, Am-
sterdam , 1755, in-S" ; | Elémens de phi-
losophie morale, traduits de Fordyce,
1756, in-8° ; | Elémens d'algèbre de Saun-
derson, augmentés de quelques remar-
ques, Amsterdam, 1756, 2 vol. in-4";
i Nouvelle Bibliothèque anglaise ancienne
1756,3 vol. in-8°, divisés en plusieurs
parties; | le 7' et le 8' vol. du Specta-
teur anglais., Amsterdam, 1750 et 1754,
in-12 ; | Dialogue des morts, traduit de
Lyttleton, 1760 , in-8° ; | Elémens de phy~
sique démontrés mathématiquement, el
confirmés par des expériences, traduits du
latin de s'Gravesande, Leyde, 1746, 2 vol.
in-4°; | OEuvres diverses, la Haye, 1764, 2
vol. in-12, contenant quelques morceaux
de la composition de l'auteur, et autre?
traductions de l'anglais ou du hollandais.
II a aussi publié en latin un T?'aité sur fa
nature et les principaux usages de la plus
simple espèce de nombres trigonaux , la
Haye, 1762, in-4°, qu'il a traduit lui-même
en français. Il a été aussi l'éditeur et en
partie le traducteur des OEuvres diverses
de Pope Amsterdam , 1754 , 7 vol. in-i2.
2
JON
18
JOÎV
n a encore coopère à la reprise du Jour-
nal littéraire ^ par s'Gravesande , et à la
traduction de V Histoire universelle ^ \)n-
Llice en anglais. Il mourut à la Haye
l'an 1770. — Un autre JONCOURT, pro-
fesseur de langues étrangères à Paris en
17u4 , a traduit de l'anglais de Wallace,
un £ssai sur la différence du nombre des
hommes.
JOKCOITX ( Fkançoise-Marguerite
de ), naquit en 1668 d'un gentilhomme au-
vergnat, et mourut en 1715, âgé de kl
ans , après s'être distinguée par son atla-
abement aux religieuses de Port-Royal.
et avoir donné une Traduction des Notes
de Nicole ( caché sous le nom de lyen-
drock ) sur les Provinciales. Cette version
a été imprimée en U vol. in-12. Margue-
rite de Joncoux avait appris le latin pour
entendre loftice de l'Eglise.
JOMùS ( Imgo ), célèbre architecte an-
glais, né à Londres en 1572, mort en 1652,
fui surnommé le Fitruvede l'Angleterre;
le vrai goût et les règles de l'art étaient
presque inconnus avant lui dans la Gran-
de-Bretagne. Il avait visité la France,
l'Allemagne et l'Italie , et étudia long-
temps à Venise les chefs-d'œuvre de Pal-
ladio sur lesquels il a laissé des Notes
curieuses , insérées dans une traduction
anglaise qui en a été publiée en 17i2. Ses
principales compositions sont le Portique
de l'église Saint-PauL la bourse de Lon-
dres, V Hôpital de Greemvich, la grande
salle des banquets du palais de Jf^ite-
hall, le palais de lord Pembroke à Wil-
son ( Wiltshire). Il fut successivement ar-
chitecte des rois Jacques I", Charles 1"
et Charles II. Il avait laissé un grand
nombre de dessins, et il doit être regardé
comme le créateur de larchileclure en
Angleterre.
* JOM'IS ( Jon\ ), nommé aussi Léan-
dre de Saint-Martin . bénédictin anglais.
né à Londres en 1575, fit ses éludes au
! collège de Sainl-Jean, à l'université
d'Oxford. Il quitta, jeune encore, sa pa-
trie pour aller embrasser en Espagne la
religion catholique. Il prii l'habit de Saint-
Benoit, et s'engagea dans la congrégation
des bénédictins anglais. Ce fut alors qu'il
changea son nom en celui de Léandre de
Saint-Martin. Il alla achever ses études au
collège des Anglais, à Douai, et s'y api)li-
qua aux langues orientales. Après avoir
achevé ses cours, il prit le bonnet de doc-
teur, et fut presque aussitôt chargé par
«es supérieurs d'enseigner l'hébreu et la
tUéoiogic : il s'acquitta de cette double
fonction d'une manière honoroble, , et sut
mériter par les rares qualités de son es-
prit et de son cœur la confiance de sa
congrégation. Il fut successivement prieur
du monastère de Saint-Waast , et prési-
dent ou supérieur-général de la congré-
gation anglaise de son ordre. Il mourut à
Londres en 1656. Il a publié différens ou-
vrages qui lui ont fait la réputation d un
savant distingué ; en voici les litres : | Ro-
se tum exercitioT^m spiritualium. Douai,
1623; I Sacra ars niemo7ia> adscripturas
divinas in promptu Iiabendas .memori ter-
que addiscendas, accoinmodata, ib., 1623,
in-8° ; | Conciliatio locorum specie tenus
pugnantium, totius scripturœ sacrœ. ibid.,
1623, in-8°; | une Edition du Miroir his-
torial du domhiicain Vincent de Beauvats,
sous ce titre : Bibliotheca mundi , seu Spé-
culum. Fincentiibellovacensis .{(j'ai, 4 vol.
in-fol. ( Voyez VINCENT DE BEAU-
VAIS. j 1 Une Edition du livre d'Amobe
contre les païens, 1632, in-S"; | une Edi-
tion de la Vulgate avec la glose , des pos-
tilles, des observations, etc., et ses pro-
pres remarques et explications. Elle est
intitulée : Biblia cum glossa 07'dinaria a
Strabone fuldensi collecta , novis patrum
grœcorum et latinoiutn explicationibus
locupletata et postilla IVicolai de Lira,
cum additionibus Pauli burgensis ac Mat-
thiœ Thoringi replicis, theologorum dua-
censium studio emendatis, tomis sex com-
prehensa. Omnia denuo recensuit Lean-
der de Sancto-Martino, adjecitque plures
et antiquos tractatus , analyses, paral-
lella. tabulas chronologicas et prosogi'a-
phicas , cum indicibus copiosisstmis, ut
merito hœc editio dici possil theologorum
et concionatorum thésaurus. 6 vol. in-fol.
Douai, 1617, et Anvers , 1654 ; | un Traité
de la perfection de la grâce , resté ma-
nuscrit.
* JO^ES ( Paul), célèbre marin , né en
Ecosse dans la terre du comte de Selkirk,
alla s'établir en Amérique , et obtint en
1775 le commandement d'un vaisseau de
l'escadre des Etats-Unis , sous les ordres
de l'amiral Hopkins. Il rendit à cette répu-
blique naissante de grands services, et sa
distingua par plusieurs atlions d'une
grande bravoure. Louis XVI lui donna la
croix de l'ordre du mérite militaire et
une épéed'or-, le congrès lui vota une
médaille d'or. A la paix il passa en Russie
avec le grade de contre-amiral. Il revint
ensuite en France , et mourut à Paris en
juillet 1792. Il a laissé en anglais des Mé-
moires sur sa vie, qui ont été traduits en
JON
19
JON
français sous ses yeux , et puMics après
sa mort, Paris, 171)8, i vol. in-18.
• JOAF-S (le chevalier William), un
des plus laborieux écrivains et des i)lus
sa vans orientalistes de ces derniers lenips,
naquit à Londres le 28 septembre i7li6.
Ayant eu le malheur de perdre son père ,
professeur de mathématiques, dans un
ège encore tendre, il dut une éducation
soignée à la sollicitude d'une mère éclai-
rée, qui mit tout en usage pour former
l'esprit aussi bien que le cœur de son
fils. Après des éludes aussi brillantes que
solides, Jones fut reçu agrégé à l'uni-
versilé d'Oxford. Mais il fut bientôt ar-
raché de cette savante école pour diri-
ger l'éducation du jeune lord Althorp ,
depuis comte de Spencer. Après quel-
ques années données à cette occupation, il
se fil recevoir avocat, et suivit le bar-
reau avec succès. Jones avait fait plu-
siurs voyages en France ; il avait méiîie
accompagné son élève en Allemagne et en
Italie, et s'était rendu familier avccles
langues modernes , qu'il parlait et qu'il
écrivait avec autant de facilité que sa lan-
gue naturelle ; mais l'étude de ces diffé-
rens idiomes n'avait presque rien coûté
à son application, fixée tout entière sur
les langues orientales. Il en possédait
presque tous les dialectes, et leur conser-
vait, en les traduisant, leur charme et
leur pureté. Appelé en 1783 à remplir la
place de juge à la cour suprême du fort
William à Calcutta , Jones se rendit avec
joie dans des contrées dont les idiomes
et les auteurs avaient tant d'attrait pour
lui. Les loisirs que lui laissaient ses fonc-
tions étaient consacrés à des recherches
scientifiques ; et ce fut dans ces études
qu'il conçut le projet d'établir à Calcutta
une société savante à l'instar des acadé-
mies de l'Europe. Le projet fut exécuté en
1784 , et William Jones fut le premier
président de la savante société de Cal-
cutta, de cette illustre compagnie dont
les travaux ont été si utiles aux lettres, à
l'histoire e'. même à la religion. Les Mé-
moires de la société du Bengale ^ très
rares en France, forment 12 vol. in-i"
ou in-S". Le i)remicr parut en 1788 , et le
dernier en 1816. Les deux premiers volu-
mes ont été traduits en français , en 1805,
par A. Labaume, et publiés avec des No-
tes fort étendues de MM. Delambre. Cu-
vier, Lamarck et Lanylcs ; Adrien du
Qucsnoy faisait les fonds de cette entre-
prise, qui fut abandonnée après sa moit.
William Jones, qui dans un âge peu avan-
cé , pouvait se promettre une longue suite
de glorieuses années , ne jouit pas long-
temps de SCS succès et de ses travaux. At-
teint d'une inflammation au foie, il suc-
comba, ajiris quelques jours de maladie,
le 27 avril 1794, à l'âge de 47 ans. L'An-
gleterre perdit en lui un des savans les
plus universels dont elle puisse s'honorer.
Rien n'a seuiblé étranger à ce vaste génie;
tour à tour poète , jurisconsulte , histo-
rien , il a encore écrit sur l'Ecriture
sainte, l'astronomie, la chronologie, l'his-
toire naturelle et les antiquités. Il possé-
dait plus de vingt langues et en écrivait
huit avec une rare élégance. Ses OEuvres,
recueillies après sa mort , forment 6 vol.
in-4°, ou 15 volumes in-8°; le treizième
contient sa Vie par lordTeignmouth, gou-
verneur-général du Bengale. Les ouvra-
ges les plus remarquables de Jones, sont:
I Poeseos asiaticœ Commentariorum libri
«^jr^ Londres, 1774, in-8°. Enchori, qui
en a donné une édition avec des notes,
en fait le plus grand éloge. | Grammaire
persane, in-4"; on la trouve en français;
I Histoire de Nadir-Schah, connu sous le
nom, de Thamas Kouli-Kan , publiée en
français , in-4", 1770 et 1790 ; | la Traduc-
tion du Code de Menou. Ce livre offre le
système complet des devoirs civils et re-
ligieux des Indous , et est bien propre à
nous faire bénir la Providence, qui , par
les divines lumières de la révélation,
nous a arrachés aux monstrueuses er-
reurs du paganisme. | Dissertations sur
la littérature orientale, 1771, in-8**, tra-
duites en français. | Lettres philosophi-
ques et historiques sur l'état m07-al et po-
litique de l'Inde, traduites par d'Ecram-
meville, Paris, 1803, in-8° ; c'est d'après
la version anglaise de W. Jones qu'a été
faite la traduction française du drame in-
dien intitulé : Sacountalaou l'anneau i».'
tal. Un grand nombre de Traductions de
morceaux persans, et de Dissertations.,
publiées dans le Recueil de ses Œuvres,
ou dans les Mémoires de la société do
Calcutta. VJiinual biography and obi-
tuary. for, 1817, renferme un précis dr
la vie de sir Will. Jones, et l'on y trouve
quelques détails qui avaient échappé aux
reclierches de lord Teignmoulh.
JO.XGII (du;. Koj/ez JUNIUS.
JOMN ( le père Gilbom' ), jésuite, né
en 159(3, mort en 1638, se distingua par
son talent pour la poésie grecque et la-
tine, et excella surtout dans le lyrique.
On remarque dans ses poésies de la viva-
cité, de l'élégance, de la facilité, et quel-
JOR
20
JOR
ipiefois de la négligence. On a de lui :
I des Odes et des Epodes, Lyon , 1630, in-
16; I des Elégies, Lyon, 1634, in-12 ;
I d'autres Poésies, en grec et en latin, 6 vol.
in-«° et in-16, 1654 à 1637.
JOASIUS ( Jeam ), né à Flensbourg en
1624, mort à la fleur de son âge, à Franc-
foi t sur leMein.en 1659, tst auteur: | d'un
Traité estimé des écrivains de l'Jiisloire
de la philosophie, en latin. Jean Chr.
Dorn , qui en donna une bonne édition ,
en 1716, in-4°, à léna, a continué cet ou-
vrage jusqu'à son temps. | Tractatus de
Spartis, aliisque nonnullis, et de ordine
librorum ^ristotelis, publié par Grœvius,
dans Syntagma disserlattonum. La liste
complète de ses ouvrages est dans \q Dic-
tionnaire de Chauffepié.
JORAM, roi d'Israël , après son frère
Ochosias , l'an 896 avant J.-C, était iils
d'Achab. Il vainquit les Moabites, selon
la prédiction du prophète Elisée , et fut
dans la suite assiégé dans Samarie par
Benadad, roi de Syrie. Ce siège réduisit
cette ville à une si grande famine , que la
tête d'un âne s'y vendait 80 sicles. C'est
alors qu'arriva une histoire tragique dont
il y a peu d'exemples. Une femme , étant
convenue avec une autre de manger
leurs enfans , et ayant d'abord fourni le
sien, vint demander justice à Joram
contre l'autre mère qui refusait de donner
son enfant. Ce prince , désespéré d'un ac-
cident si barbare, tourna sa fureur contre
Elisée, et envoya des gens pour lui cou-
per la tête. Mais se repentant bientôt d'un
ordre aussi injuste , il courut lui-même
pour en empêcher l'exécution ; et le pro-
pliète l'assura que le lendemain , à la
même heure , la farine et l'orge se don-
neraient presque pour rien. Cette pré-
diction s'accomplit en effet. Les Syriens ,
ayant été frappés d'une frayeur subite,
prirent la fuite en tumulte , et laissèrent
un très riche butin dans le camp. Tant
de merveilles ne convertirent point Jo-
ram ; il continua d'adorer les dieux étran-
gers. Enfin, ayant été blessé dans une ba-
taille contre Azaël , successeur de Bena-
dad, il se fit conduire à Jezrahel. Il y fut
percé de flèches dans le champ de Na-
i)oth , par Jéhu , général de son armée,
qui fit jeter son corps aux chiens dans ce
même champ, l'an 884 avant J.-C, selon
1.1 prédiction du prophète Elie.
JORAM , roi de Juda , succéda à son
père Josaphat, l'an 889 a^•o^t J.-C. Loin
d'imiter sa piété , il ne se signala que par
des actioas d'idolâtrie el de fureur. Il
épousa Athalie , fille d'Achab , qui causa
tous les malheurs dont son rè^ne fat af-
fligé. A peine fut-il sur le trône , qu'il
le souilla par le meurtre de ses propre»
frères, et des principaux de son royaume
que Josaphat avait le plus aimés. Il imita
toutes les abominations des rois d'Israël ;
il éleva des autels aux idoles dans toutes
les villes de Judée , et excita ses sujets
à leur sacrifier. Dieu , irrité de ses im-
piétés, permit la révolte des Iduméens,
qui , depuis les victoires de Juda , avaient
toujours été assujétis à sa domination.
La ville de Lobna se retira de son obéis-
sance, et ne voulut plus le reconnaître
pour souverain- Les Philistins et les
Arabes firent une irruption dans la Ju-
dée, où ils mirent tout à feu et à sang.
Joram fut lui-même attaqué d'une hor-
rible maladie , qui lui causa pendant deux
ans des tourmens incroyables , et qui le
fit mourir l'an 885 avant J.-C, comme
le prophète Elie l'avait prédit. On le
priva de la sépulture des rois. •
JORDAEKS f Jacques ) , célèbre pein-
tre de l'école flamande , né à Anvers en
1594, fut élève de Van Oort dont il
épousa la fille , puis de Rubens , auquel
il causa de la jalousie par sa manière
forte , vraie et suave. On dit que Rubens ,
craignant qu'il ne le surpassât, l'occapa
long-temps à faire en détrempe des car-
tons de tapisserie , et qu'il affaiblit ainsi
son pinceau fier et vigoureux. Jordacns
excella dans les grands sujets et dan-j les
sujets plaisans. U embrassait tous les
genres de peinture, et réussissait presque
dans tous. On remarque dans ses ou-
vrages une parfaite intelligence du clair-
obscur, beaucoup d'expression et de
vérité; ils manquent quelquefois d'élé-
vation et de noblesse Ses principaux ta-
bleaux sont à Anvers et dans quelques
autres villes du Brabaut et de la Flandre.
Le musée du Louvre possède de cet ar-
tiste 4 tableaux , qui sont les quatre évan-
gélistes; le roi boit ; les Vendeurs chas-
sés du Temple et le concert de famille.
On a souvent attribué à Rubens un des
plus grands tableaux de Jordaens, Jésua^
Christ au milieu des docteurs. Il a gravé
quelques-uns de ses tableaux , les Ven-
deurs chassés du temple; Jupiter allaité
par la chèvre Amalthée ^ etc. Il mourut
en 1678 , à 84 ans.
JORDAN, général des dominicains,
né à Borrcntrick dans le diocèse de Pa-
derborn, gouverna son ordre avec sa
gesse, et y fit fleurir la science et lu
JOR
piété. Il périt dans la mer,
2i
JOR
auprès de
Satalie, en revenant de la Terre-Sainte,
l'an ^237. C'est lui qui introduisit l'usage
de chanter le Salve Regina après les
compiles , que les dominicains chantent
toute l'année, tandis que, dans lusuge
ordinaire, on chante successivement
Aima Redemptoris Mater; Ave Regina
çœlorum , Regina Cœli; et Salve Regina.
On a de lui une Histoii-e de l'origine de
son ordre ^ que le père Echard a insérée
dans sou histoire des écrivains domi-
nicains.
J01\DAIV( RAYMOND), rotjez IDIOT.
JORDAN ( Chaules-Etienne ) , né à
Berlin en 1700 , d'une famille originaire
du Dauphiné, remplit les fonctions de
ministre de la prétendue réforme; il fui
conseiller privé du grand directoire fran-
çais, curateur des universités, et vice-
président de l'académie des sciences de
Berlin, où il mourut en 1745. Ses ou-
vrages ne donnent pas une grande idée
de son esprit. Les principaux sont :
I Y/Iistoire d'un voyage littéraire en
France , en Angleterre . en Hollande ^
eemée d'anecdotes satiriques, in-12; | un
Recueil de littérature , de philosophie
et d'histoire ^ in-i2, où l'on trouve quel-
ques bonnes remarques et plusieurs mi-
nutieuses. Il était lié avec les pliiloso-
phes les plus hardis de son temps , et
était un des littérateurs favoris de Fré-
déric II ; il publia sa Correspondance
avec ce roi philosophe. C'est le 10^ vol.
des œuvres posthmnes du roi de Prusse.
• JORDAN (Camille), membre de la
chambre des députés, né à Lyon, le 11
janvier 1771, d'une famille recomman-
dable de négocians, lit ses études au col-
lège de l'Oratoire , puis au séminaire de
Saint-Irénée , dépendant de celui de
Saint-Sulpice. En 1788, étant à peine âgé
de dix-huit ans , il assista chez Claude
Perrier , son oncle maternel , à la fameuse
assemblée des états du Dauphiné, tenus à
Vizille dans le château de ce dernier. 11
fit, en 1790, un voyage à Paris, où il
assista avec assiduité aux séances de l'as-
semblée Constituante. Jordan avait reçu
dans la maison paternelle et dans les
deux élaMissemensoù il avait étudié, des
principes très religieux. Aussi le vit-on
se déclarer contre la conslilution civile
du clergé , et il publia même à ce sujst
divers écrits remarquables. Plus tard
lorsque la ville de Lyon tenta de résister
au parti delà Montagne, Camille Jor-
dan, qui se trouvait dans cette ville , fut
un des plus ardens soutiens de l'insur-
rection; il comballil dans la sanglante
journée du 29 mai 1793 , et parcourut en-
suite les provinces voisines pour rallier
de nouvelles forces à la cause de ses con-
citoyens. Après la réduction de Lyon , il
se réfugia en Suisse , où il resta durant
six mois , et passa de là en Angleterre.
Il se lia dans ce pays avec plusieurs
proscrits français, entres autre Mallouet ,
Lally-Tollendal et Ca/.ales , et y fit la
connaissance de plusieurs membres in-
fluens du parlement , tels que Fox , lord
Erskine , et lord Holland. Après le 9 ther-
midor, les proscrits de Lyon purent re-
venir en France ; Camille Jordan y ren-
tra en 1796 , et l'année suivante, lors du
renouvellement du second cinquième du
conseil des Cinq-cents , il fut député à
cette assemblée par les électeurs de sa
ville natale. Il y lit briller ses talens oia-
toires et acquit de nouveaux amis dans
les personnes de MM. Royer-Collard,
Barbé-Marbois, Boissy-d'Anglas , etc. Lo
U juin , il défendit Lyon qu'on accusait
d'être un foyer de coiitre-révolution ^ un
réceptacle d'assassins et de bandits. Le
17 (29 prairial an 5), il présenta son
fameux rapport sur la police des cultes,
et demanda pour eux tous une entière
liberté, la révocation des lois antérieure?,
sans exiger des prêtres ni serment, ni
promesse, et il insista en outre sur le
rétablissement des cloches dans les églises
des villes et des campagnes; mais ses
propositions ne furent adoptées que par-
tiellement , et elles donnèrent même
lieu à quelques mauvaises plaisanteries ,
telles que le surnom de Jordan-Cloche
qui fut donné à l'orateur. Lorsque le
coup d'étal du 18 fructidor an 5 fut
frappé, son nom se trouva porté sur les
listes de proscription ; mais il en conçut
si peu de frayeur, que M. de Gérando,
s'étant rendu chex lui, dans la nnit du
18 au 19 fructidor , eut de la peine à l'ar-
racher de son lit et à l'emmener dans la
retraite qui lui avait été préparée chez
M'"' de Griinaldi. Dès le 19. il lit im-
primer et distribuer une Adresse à ses
co7nmettans. Ses amis, qui l'avaient
soustrait au premier danger, lui fourni-
rent les moyens de sortir de France, et
M. de Gérando l'accompagna même dans
son exil. Les deux amis se rendirent à
Bâle, et ce fut dans cette ville que Ca-
mille Jordan composa et publia sa pro-
testation contre le 18 fructidor. Cet écrit
intitulé : Camille Jordan . député du dé-
JOR
22
JOR
parlement du Rhône . à ses commettans.
sur la révolution du k septembre 1797 ,
fut traduil aussitôt en plusieurs langues.
II quitta Bàle, et se rendit dans la ville de
Neuchâtel, près de laquelle il faillit être
arrête; mais il fut encore sauvé par
M. de Gérando. Il alla en Souabe, à
Tubingen, et enfin à Weimar, où il vit
les écrivains les plus célèbres de l'AUe-
ntiagne , Goethe , Wieland , Schiller , Her-
ôer, etc. , et où il étudia avec ardeur la
littérature et la philosophie allemandes.
En février 1800, il revint en France , et
habita pendant quelque temps la maison
de M""' de Staël à Saint-Ouen, puis il re-
tourna à Lyon. Le premier consul , s'é-
tanl rendu dans cette ville à cette épo-
que , pour y tenir la consulte cisalpine
qui devait décider des destinées de l'Italie,
vit Camille Jordan, et essaya mais inuti-
lement d'en faire un des appuis de sa
cause. Lorsque Bonaparte soumit en ap-
parence au peuple la question de perpé-
tuer le consulat dans sa personne , Ca-
mille Jordan, dans un écrit intitulé :
frai sens du vote national sur le con-
sulat à tne^ 1802 , signala les manœuvres
employées par la police pour déternii-
ner les suffrages populaires , et dévoila
les vues ultérieures et , selon lui , mena-
çantes du premier consul , aux grandes
qualités duquel il rendait cependant jus-
tice. L'auteur de cet écrit anonyme fut
vivement recherché, et on arrêta un
M. Duchesne qui en avait remis le ma-
nuscrit à l'imprimeur. Camille Jordan se
fit alors connaître , mais il ne fut point
inquiété. Use retira à Lyon , où il se maria
en 1805 , et fut reçu dans l'académie de
cette ville, à laquelle il lut plusieurs
morceaux fort remarquables , parmi les-
quels on doit distinguer un Discours sur
l'influence réciproque de l'éloquence sur
la révolution et de la révolution sur l'é-
loquencj ; un Eloge de V avocat-général
Servait, et des Etwles sur Klopslock ,
l'auteur de la Messiade , dans lesquelles
sont passées en revue les principales pro-
ductions philosophiques et littéraires de
l Allemagne, et qui ont précédé le livre
de ftï""^ de Staël. Au mois de mars 1814,
la ville de Lyon le nomma membre d'une
depulation qu'elle envoyait à Dijon , au-
I»rès de l'empereur d'Autriche , pour ob-
tenir un allégement des charges de la
guerre. Cette députalion avait une autre
mission secrète, qui était, dit-on, de
demander le rétablissement des Bour-
bon». De retour à Lyon , Camille Jordan
assista , le 8 avril à la séance où le con-
seil municipal proclama Lcuis XVIII. Un
mois après, il fut compris de la dépu-
tation envoyée à Paris pour adresser ai
monarque les hommages dans la ville de
Lyon, et il recul du roi, à cette occasion ,
des lettres de noblesse ; puis il fut nommé
chevalier de la légion-d'honneur , par la
comte d'Artois , lorsque ce prince vint à
Lyon en mars 1815 , pour organiser des
moyens de résistance contre Bonaparte
qui avait débarqué à Cannes. Jordan fut
le dernier qui se sépara du prince. Apres
la seconde restauration , ses compatriotes
l'envoyèrent en Angleterre pour récla-
mer la délivrance d'un legs fait à leur
ville par le major-général Martin , mort
aux Indes , et il l'obtint. Le ministère lui
offrit ensuite la présidence du collège
électoral du département du Bhône , que
le mauvais état de sa santé ne lui permit
point d'accepter. Nommé bientôt après
député par le département de l'Ain , i]
vola d'abord avec le ministère dans les
sessions de 1816, 1817 et 1818. A par-
tir de cette dernière année , il se raj)-
procha de l'opposition, en se montrant
toutefois constamment motléré. Il avait
été nommé, en 1817, conseiller-d'état,
puis appelé dans le conseil privé du roi.
Son système d'opposition ayant bientôt
pris un caractère plus décidé, Camille
Jordan vil son nom rayé , après la session
de 181i), du tableau du conseil-d'état,
mais il conserva le titre de conseiller ho-
noraire. Il partagea encore les travaux de
la session de 1820, quoique sa santé fût
déjà très délabrée. Il mourut à Paris , au
njilieu de sa famille et de ses amis, le 19
mai 1821 , et ses restes furent déposés au
cimetière du Père Lachaise. Il serait dif-
ficile d'indiquer avec précision quel était
le système politique que Camille Jordan
s'était créé dans les derniers temps , et
qu'il paraissait avoir résumé dans une
sorte d'éclectisme , où se heurtaient plu-
sieurs dogmes contradictoires. Il se mon-
tra toujours attaché à la religion, et lors-
qu'il senlit sa fin approcher , il s'y pré-
para en chrétien. On le voyaitsouvent dans
les églises , même aux jours non comman-
dés par le précepte. Le jour de sa mort,
il avait dicté quatre pages d'un discours
sur la loi relative aux établissemens ec-
clésiastiques ; il ne put le terminer ; un
prêtre de sa paroisse vint lo visiter , et
lui administra l'extrême-onction. On a de
lui les ouvrages suivans : | Lettre à M.
Lamourette se disant évéque de Bhânc-
JOÎl
st-Loire et métropolitain du Sud-est ^
Lyon , 1792 , in-S", ( avec M. de Gérando).
Cette épître sur l'instruction pastorale de
M. Lamourette est du 16 juillet, et C.
Jordan combat cet évêque constitu-
tionnel par des raisons et des autorités
concluantes. A la suite de la lettre, on
trouve deux Postcriptum, l'un sur l'é-
lection de Lamourette, l'autre sur son
mandement du 16 septembre. | Histoire
de la conversion d'une dame paii-
«/enne, Paris, 1792, in-S". Cette fiction,
écrite avec un talent remarquable, re-
présente une femme d'abord éprise de la
révolution , et qui en est bientôt désa-
busée. Cet écrit est également dirigé
contre l'Eglise constilutioimelle. | La loi
et la religion vengées sur les troubles
arrivés dans l'église de France , Paris ,
1792 , in-S". C'est une réclamation éner-
gique contre les persécutions des révo-
lutionnaires envers les catholiques atta-
chés à leurs pasteurs légitimes. Cet écrit
est signé , le citoyen Simon. \ Discours
sur la liberté , la police et l'exercice des
cultes , prononcé dans le conseil des Cinq-
cents , «n 5 ( 1797 ) ; ] Vrai sens du vote
national sur le consulat à vie . 1802^ in-
8", etc. 1 Réponse de M. Camille Jordan^
député du département de l'Ain ^ à un
discours sur les troubles de Lyon, etc.,
et réponse de M. Cotton , député du dé-
paî'tement dti Rhône , à M. Camille Jor-
dan, Paris, 1818; ] La session de 1817^
aux habitons des départemens de l'jlin
et du Rhône, Paris, 1818. Jordan a fait
insérer dans le Journal intitulé VJbeille
( 1820 à 1821 ) quelques fragmens de
Klopstock et de Schiller, traduits en
prose. On trouve des Discours de Jor-
dan dans une collection qui a pour
titre : Choix des rapports , opinions et
discours prononcés à la tribune natio-
nale de Paris, Eymery, 1819, 1822, 2
vol. in-8°. Rien ne fait mieux con-
naître les opinions de C. Jordan sur
la révolution, qu'une brochure impri-
mée à Londres, vers 1798, ayant pour
litre : Robespierre aux frères et amis . et
Camille-Jordan aux fils légitimes de la
monarchie et de l'Eglise. C'est un pam-
phlet non seulement contre Robespierre ,
mais aussi contre Jordan , qu'on s'y plaît
à faire parler d'une manière ridicule. On
trouve àwnhVAmide la religion, dans la
Revue encyclopédique, tom. 10, pag.
494 , et dans VJbeille de 1821 , des Noti-
ces sur Camille Jordan : celte dernière
est (Je M"" Dufresnoy. On a publié en
25 jon
t826 ses discours protioncés à la ttibune ,
précédés de son éloge par M. Ballanche^
d'une lettre de M. de Gcrando sur sa viô
privée , suivis des discours prononcés sur
sa tombe par MM. Royer-Collard et de
St.-Aulaire.
JORDANS. Voyez JORDAENS.
♦ JOUDAÎVS ou GIORDANO (Luc), pein-
tre, surnommé Fa-presto. à cause de la cé-
lérité avec laquelle il travaillait , naquit i
Naplesenl652. PaulVéronèsefutle modMe
auquel il s'attacha le plus. Le roi d'Es-
pagne Charles II l'appela auprès de lui
pour embellir l'Escurial. Le roi et la reine
prenaient plaisir à le voir peindre , et lui
pernictlaieiit/esecouvrirenleur présence.
Jordans avait une humeur gaie, et des
saillies qui amusaient la cour. L'aisance
et la grâce avec laquelle il maniait le
pinceau se faisaient remarquer de tout le
monde. La reine lui parla un jour de sa
femme, et témoigna avoir envie de la
connaître. Le peintre aussitôt la repré-
senta dans le tableau qui était devant lui ,
et fit voir son portrait à Sa majesté qui fut
d'autant plus étonnée, qu'elle ne se dou-
tait point de son intention. Cette prin-
cesse détacha dans l'instant son collier de
perles , et le donna à Jordans pour son
épouse. Le roi lui montra un jour un
tableau du Bassan , dont il était fâché de
n'avoir pas le pendant; Jordans peu de
jours après en présenta un au roi
qu'on crut être de la main du Bassan ; et
l'on ne fut désabusé que quand il fit voir
que le tableau était de lui-même. Tel était
le talent de Jordans ; il imitait à son gré
tous les peintres célèbres. Le roi s'alla-
chant de plus en plus à ce savant artiste ,
le nomma chevalier. Apres la mort de
Charles II, il revint dans sa patrie, oii
il mourut en 1705. Ses principaux ou-
vrages sont à l'Escurial , à Madrid , à Flo-
rence et à Rome. Ses tableaux sont en
trop grand nombre , pour que la plupart
ne soient pas incorrects; mais il en a
laissé quelques-ims de très finis et très
gracieux. On cite parmi ses compositions
V Enlèvement des Sabines , et celui d'^u-
rope , tous deux gravés par Beauvarlet ;
Sainte Cécile mourante , gravé par F. Bar-
toloz7.i , La présentation de Jésus au temr
pie, qu'on voit au Musée de Paris , etc.
JORDAJSUS BRUi\US. Voyez BRU-
NUS.
JORÎVAIVDÈS ou JORDANÈS , évêquo
de Ravenne , goth d'origine , fut notaire
du roi des Alains , en Italie, sous l'empire
de Justinien; ainsi il vivait en 552.11
JOS,
2k
JOS
en>l)rassa le chrisiianisme, et obtint le
sioyc épisropal de Ravennc. Voilà tout
ce qu'on sait de sa vie. On a de lui deux
ouvrages, dont l'un porte pour litre :
De rébus gothicis : c'est l'histoire des
Goths jtisim'au règne de Yiligès; elle se
trouve dans la UihliolJièque des Pères.
KUe a été traduite par l'ahbc de Mauper-
luis. Klle est si conforme à V Histoire des
Goths par Cassiodors, (ju'on croit que ce
n'en est qu'un abrégé. L'autre est inti-
tulé : De origine mundi . de rcrum et
temporum sucressione , 1017 , in-S° : c'est
un abrégé chronologique de l'histoire
jusqu'à son époque ; elle se trouve dans
la Bibliothèque dss Pères. Pour cet ou-
vrage, Jornandès a beaucoup pris de
Florus sans le citer. Cet auteur est d'ail-
leurs trop partial, surtout dans les en-
droits où il parle des Goths. L'ouvrage de
Jornandès intitulé : De origine mundi .
a été aussi iniprimc à Bàle in 1551 , et se
trouve dans plusieurs recueils historiques
et dans la coUccliosi des historiens de
Histoire auguste de Gruter, Hanaut, 1611,
etc.
JORTIN (John ) , théologien anglican,
né à Londres en 1698, mourut en 1770,
dans la même ville où il était archidiacre :
il avait été successivement chapelain,
puis prébendaire de suint Paul et ministre
de Kensinjjlo:!. Il passa toute sa vie à
écrire cl à publier des ouvrages. Les
principaux sont: | fie d'Erasme , Lon-
dres, 1758, in-4°; | Remarques sur les
ouvrages d'Erasme avec un appendice,
1760, in-Zi.", réimprimé en 1807, en 2
\ol. in-8° : c'est une suite de l'ouviagc
précédent. \I)bsers>ations sur les auteurs
afnciensetmmernes. 173 1 , 2 vol. in-S"; | Six
Dissertatiofis sur différens sujets^ 1755,
in-8"; | Remarques sur l'Histoire ecclé-
siastique , 1751 , 5 vol. in-8" dont les deux
derniers ne parurent qu'après la mort de
l'auteur; ouvrage entrepris pour y étaler
les préjugés de la secte ; | Sermons sur la
vérité de la religion chrétienne ^ 1750.
Ils sont tous écrits en anglais. Il a paru
une édition des OEuvres complètes de
Jortin , en 1775.
JOSABET», femme du grand-prêtre
Joïada , sauva Joas du massacre que fai-
sait Alhalie des princes du sang do David.
royez JOAS.
JOSAPHAT, fils et successeur d'Asa ,
roi de Juda , l'an 9H avant J.-C. , fut un
des plus pieux souverains de ce royaume.
11 détruisit le culte des idoles, et envoya
des lévites et des docteurs dans toutes lea
provinces de son obéissance , pour in-
struire le peuple de ce qui concernait la
religion. Il réforma aussi l'es abus qiii
s'«>laient glissés dans la police cl dans la
milice. L'Ecriture reproche cependant à
ce prince d'avoir fait épouser à son lils
Joram , Athalie , fille d'Achab , qui fut la
ruine de sa maison , et d'avoir entrepris
la guerre contre les Syriens avec ce
même Achab. Cette guerre fut malheu-
reuse ; le roi d'Israël y fut tué. Josaphat,
reconnaissant la faute qu'il avait faite en
secourant cet impie, la répara par de
nouvelles actions de piété. Mais il fit une
nouvelle alliance avec Ochosias, roi
d'Israël, et Dieu l'avertit par Elisée qu'il
l'en punirait , et que leur entreprise con-
tre les Iduméens échouerait; ce qui ar-
riva en effet. Les Ammonites, les Moa-
bites et les Arabes l'étant venus attaquer,
il s'adressa au Seigneur , qui lui accorda
la victoire sur ces peuples d'une manière
miraculeuse. Les chantres du temple se
mirent à la tête de ses troupes, et com-
mencèrent à chanter les louanges du Sei-
gneur. Leurs voix ayant répandu la ter-
reur parmi les infidèles , ils s'enlre-
tuèrent , et ne laissèrent à Josajibal que
la peine de recueillir leurs dépouilles. Ce
prince continua le reste de sa vie à mar-
cher dans les voies du Seigneur, sans
s'en dclourner, et il mourut l'an 889
avant J.-C. , après 2S ans de règne.
JOSAPHAT (le Bienheureux), cé-
lèbre archevêque de Polocz , né en 1588
à Wlodimir en Volhinie , de parens no-
bles, se distingua par sa piété et son zèle
pour l'union de l'église russo-grecque
avec la latine, à laquelle la plupart des
Russes , sujets de la Pologne , venaient
d'adhérer. Il entra dans l'ordre de Saint-
Basile , el se consacra entièrement à l'in-
struction des schismatiques. Elevé sur le
siège de Polocz , il combattit l'erreur avec
tant d'activité et d'ardeur, que plus d'une
fois il fut sur le point d'être assassiné
ou précipité dans les flots. C'est data
ces occasions qu'il signalait sa charité,
en embrassant ses ennemis, en les in-
struisant et les gagnant à Jésus-Christ.
Après des travaux et des dangers sans
nombre, il fut attaqué par les schismati-
ques à Vitepsk, et mis à mort de la ma-
nière la plus cruelle , le 12 novembœ
iG52, à l'âge de kU. ans. Son corps, jeté
dans la rivière , fut retrouvé par les soins
de la noblesse polonaise , et rapporté à
Polocz. En 1G58, le saint Siège députa
des commissaires pour en f:iirc ia vii^ile;
JOS 2
ils le trouvèrent sans corruption , et la
plaie de la tête encore saignante. Urbain
VIII le héalifia le 14 mars 1641.
JOSAPIIAT. Voyez BARLAAM.
JOSEPH , fils de Jacob et de Rachel,
frère utérin de Benjamin. Ses autres
frères, envieux de la prédilection que
son père avait pour lui, et de la supério-
rité qxie lui promettaient quelques son-
ges , méditèrent sa perte. Un jour qu'il
«'tait allé de la part de son père visiter
Bes frères , occupés au loin dans la cani-
pagne à faire paître leurs troupeaux, ils
résolurent de le tuer. Mais , sur les re-
montrances de Ruben , ils le jetèrent dans
une vieille citerne sans eau , à dessein
de l'y laisser mourir de faim. A peine
fut-il dans la citerne, que Judas , voyant
passer des marchands madianites et is-
maélites , persuada à ses frères de le
vendre à ces étrangers. Ils le leur livrè-
rent pour vingt pièces d'argent , et ayant
trempé ses habits dans le sang d'un che-
vreau , ils les envoyèrent tout décliirés-el
tout ensanglantés à leur père , en lui fai-
sant dire qu'une bête féroce l'avait dé-
voré. Les marchands qui avaient acheté
Joseph , le menèrent en Egypte , et le
vendirent au général des armées de Pha-
raon , nommé Puliphar. Bientôt il gagna
la confiance de son maître, qui le fit in-
tendant de ses autres domestiques. La
feiiime de Puliphar conçut pour lui une
passion violente. L'ayant un jour voulu
retenir auprès d'elle dans son apparte-
ment, le jeune Israélite prit le parti de se
sauver en lui abandonnant son manteau,
par lequel elle l'arrêtait; action que les
saints Pères regardent comme le fonde-
ment de son élévation et des bénédictions
de tous les genres que le Seigneur répan-
dit sur lui. Outrée du refus de Joseph,
cette femme voluptueuse rapporta à son
mari que l'Hébreu avait voulu lui faire
violence, et que, dans la résistance qu'elle
avait faite , son manteau lui était resté
entre les mains. Putiphar indigne fit met-
tre Joseph en prison : « Mais la sagesse ,
» dit l'Ecriture, y descendit avec lui, et ne
■ l'abandonna pas dans ses fers : » Des-
cenditqus cuui eo in foveam, et in vincu-
lis non dereliquil illum. Le jeune Israélite
y expliqua les songes de deux prisonniers
disthigués qui étaient avec lui. Pharaon ,
instruit de ce fait , dans un temps qu'il
avait eu un songe effrayant, que les de-
vins et les sages d'Egypte ne pouvaient
expliquer, fit sortir Joseph de prison. Cet
illustre opprimé, alors âgé de trente ans,
7.
a JOS
lui prédit une famine de scj)t ans précé-
dée d'une abondance d<j scjjt autres an-
nées. Le roi. plein d'atiniiration pour Jo
se})h,lui donna fadmini-tralion de son
royaume, et le fit traverser la ville sur
uncliaiiot, précédé d'un héraut, criant
que tout le monde ci'it à (lédiir le genou
devant ce ministre, Josepli iil remplir do
blé des magasins immenses pour nourrir
cluranl la famine, non-seulement les Egyp-
tiens, mais encore les autres nalions. Ses
frères étant venus en Egypte pour de-
mander du blé, Joseph les reconnut et
feignit de les prendre pour des espions.
11 les envoya ensuite avec ordre de lui
amener Benjamin, et retint Siméon pour
otage. Jacob refusa d'abord de laisser aller
Benjamin , le plus jeune de ses enfans ;
mais la famine croissant, il fui contraint
d'y consentir. Joseph ayant aperçu son
jeune frère, fils de Ràchel comme lui, ne
put retenir ses larmes. II fit préparer un
grand festin pour tous ses frères, les plaça
selon leur âge, et eut des attentions par-
ticulières pour Benjamhi. Il se fit enfin
connaître à ses frères , leur pardonna et
les renvoya, avec ordre d'amener promp-
tement leur père en Egypte. Jacob eut la
consolation de finir ses jours auprès de
son fils, dans la terre de Gessen , que le
roi lui donna. Joseph, après avoir vécu
110 ans, et avoir vu ses pelits-liis jusqu'à
la 5* génération, tomba malade. Il appela
ses frères, leur prédit que Dieu les ferait
entrer dans la Terre promise , et leur fit
jurer qu'ils y transporteraient ses os. C'est
ce qu'exécuta Moïse, lorsqu'il tira les
Israélites de l'Egypte , et ce corps fut don-
né en garde à la tribu d'fchraïm, qui
l'enterra près de Sichem, dans le champ
que Jacob avait donné en propre à Joseph
peu avant sa nu^rt. Ce patriarche mourut
l'an 1635 avant J.-C, après avoir gouver-
né l'Egypte pendant 80 ans. Il laissa deux
fils, Manasscs et Ephraïm, qu'il avait eus
de sa femme Asenelh , fille de Putiphar,
grand-prétre d'Hcliopolis, et qui lui fu-
rent substitués connne chefs de deux tri-
bus. Tout le monde connaît son Histoire,
en prose poétique, par M. Bilaubé. Le
père Gab.-Jos. le Jay a tiré de l'Histoire
de Joseph le sujet de trois tragédies tou-
chantes, et particulièrement intéressantes
Iiour les jeunes élèves , par lesquels et
pour lesquels elles étaient représentées.
L'abbé Genest en a donné une autre sur
le même sujet , et M. Baour-Lormian a
reproduit rbi^foire de Joseph dans son
Omasis. Les saints Pères ont eu soin de
5
JOS 2fi
/air<* rriiKirriuer les r;iracl{'rc=; q^i fonl ilt-
Joseph la li{jmo cf une image , quoique
imparfaite., de J.-C, vendu et trahi fiar
les siens, sauveur de son peuple et de
tous les pcui)lcs de la terre. C'est effecli-
vcment xme des plus belles figures de
l'Ancien Testament, qui, de l'aveu même
des Juifs, nommément de Fhilon et de
Jdsèplie, était tout fl{ruralif, ronnue saint ^
Paul le montre amplement dans son Epî-
tre aux Hélireux.» Parées figures, «lit un
» théologien exael et profond , Dieu avait
» dessein de rendre sensii>les les mystères
» futurs de son Fils, potir ceux à qui il en
» doîuiait dès lors rinlelligence par une
» lumière inlérieuic, et d'affermir un
• jour dans la foi de ces mêmes luysières
» ceux qui, après l'accomplissement, ver-
» raient le rapport frappant qui se trouve
» crjtre les ligures et ces mystères : car
» quoique ce ra])porl ait été; obscur et
» comme voilé avant l'événement, il est
» certain qu'aujourd'buiron ne peut com-
» parer les faits de l'Evangile avec ceux
» de l'Ancien Testament sans être vive-
» ment frappé de la parfaite conformité
» que l'on y remarque aisément, et sans
■ être intimement persuadé que la sagesse
p divine a eu intention de représenter les
» uns ])ar les autres. i> C'est ce qui a fait
dire à Tertullien : l/f verbis ita et rébus
jrropkctariim ; ci à saint Augustin : JUo-
rum non tantum Ungua . sed et vita pro-
pketicafuit. ( Voyez JON AS, MOÏSE, etc. )
IndépcndanuTient de cette allégorie, l'his-
toire de Joseph fiit naître les réflexions
les plus religieuses conmie les plus sen-
sées. « Que les voies de Dieu sont admi-
» rablcs » (s'ftrie un auteur qui a déve-
loppé admirablement tous les traits de
cette histoire touc^lante)! « Quelle force
» dans les ressorts cachés de sa provi-
• dencc! Il change la faiblesse eu puis-
t sance , et exécute ses desseins par les
» obstacles mêmes qu'on lui oppose. »
JOSCPH, llls de Jacob, petil-fils de
I^îathan, époux de la sainte Vierge, et père
jiutatif de Jésus-Christ, était de la tribu
de Juda et de la famille de David. On ne
sait point quel fut le lieu de sa naissance,
mais on ne peut douter qu'il ne fût établi
à Nazareth, petite ville de Galilée, dans
la tribu de Zabulon. Il est constant par
l'Evangile même qii'il était artisan , puis-
ijuc les .Tuifs, parlant de Jésus-Christ,
disent qu'il était fabri fiUus. Il était fiancé
8 la vierije ?.Tarie. Le mystère de l'incar-
nation du (lis do Dieu ne fut pas d'abord
révélé à Joseph. Ce saint homme , ayant
JOS
rouiarfjué la grossesse de son épo:i<i(^,
voidut la renvoyer secrèfeinenl ; mais
l'ange du Seigneur lui apparut, et lai ré-
véla le mystère. Joseph n'eut jamais de
commerce conjugal avec la sainte Vierge.
Il l'accompagna à Bethléem, lorsqu'elle
mit au monde le fils de Dieu. Il s'enfuit
ensuite en Egypte avec Jésus et Marie,
et ne retourna à Na/areth qu'après la
morld'Hérode. L'Ecriture dit que Joseph
allait tous les ans à Jértisalem avec la
sainte Vierge pour y célébrer la fête de
Pâques, e» qu'il y mena J.-C. à l'âge de
douze ans. Elle ne rapporte rien de plus
de sa vie ni de sa mort. On croit néan-
wnoins qu'il mourut avant Jésus-Christ ;
car s'il eût été vivant du temps de la pas-
sion, on pense que le Fils de Dieu, expi-
raJil s>ir la croix , lui eût recommandé la
sainte Vierge sa mère, et non point à
saint Jean. On a été long-temps dans l'E-
glise sans rendre un culte religieux à saint
Jost'ph, vraisemblablement pour ôter aux
inlîdèles l'idée qu'il était le père de Jé-
sns-Christ. où pour les empêcher d'attri-
buer ce blasphème aux chrétiens. Sa fête
était établie en Orient long-temps avant
que de l'être en Occident. On dit que les
carmes sont les premiers qui l'ont célé-
brée en Europe. Sixte IV l'institua pour
Home , et ]dusieurs églises ont suivi de-
puis cet exemple. On célèbre sa fête le 19
mars.
JOSEPH B\RS\r,\S , surnommé le
Juste. Voyez. BARS A BAS.
JOSEPH, ou JOSUÉ, fils de Marie, sœur
de la sainte Vierge, et de Cléophas , frère
de saint .loseph, était frère de saint Jac-
ques le Mineur, et proche parent de J.-C.
selon la chair. L'Ecriture ne nous apprend
rien de plus à son sujet.
JOSEPH D'ARIMATHIE, prit ce nom
d'une petite ville de Judée, située sur la
mont Ephra'iin, dans laquelle il naquit.
Il vint demeurer à Jérusalem, où il acheta
des maisons. Saint Matthieu l'appelle
riche , et saint Marc un noble dècurion .
c'est-à-dire, conseiller ou sénateur. Cet
office lui donnait entrée dans les plus cé-
lèbres assemblées de la ville : c'est en
cette qualité qu'il se trouva chex le grand-
prêtre Caïphe, lorsque Jésus-Christ y fut
mené; mais il ne voulut point consentir
à sa condamnation. L'Evangile nous ap-
prend (jue c'était un homme juste et ver-
tueux, du nombre de ceux qui attendaient
le royaume de Dieu. Il était même disci-
ple de J.-C. , mais il n'osait se décorer
ouvertement, par la crainte des JuifSr
JOS
27
JOS
Ai>rè9 la mort du Sauveur, il alla hardi-
ment trouver Pilate, et lui demanda le
corps de Jésus-Christ pour l'ensevelir; il
I obtint, et le mit dans un sépulcre neuf
qu'il avait fait creuser dans le roc d'une
ÎTrolle de son jardin. L'Ecriture ne dit plus
rien de Joseph d' Ariiuathie ; mais on croit
qu'il se joiynit aux disciples , et qu'après
avoir passé le reste de sa vie dans la fer-
veur des premiers chrétiens, il mourut à
Jérusalem.
JOSEPÎI, beau-frère d'Hérodc le Grand,
par Salomc, sa sœur, qu'il avait épousée,
l'.e roi, en partant pour aller se justifier
auprès d'Antoine , sur la mort d'Aristo-
bule, grand sacrificateur, le chargea du
gouvernement de ses états pendant son
absence. Il lui ordonna en uicine temps,
sous le sceau du secret, de faire mourir
Marianne sa femme, s'il ne pouvait se
disculper. L'imprudtnt Joseph découvrit
son secret à Marianne. Celle-ci le reprocha
à llérode, qui de dépit iit mourir Josepli,
sans écouler ses justifications.
JOSEPH , surnommé rf/i/mnoctraphe ^
originaire de Sicile, embrassa l'état mo-
nastique, et fut ordonné prêtre à Tliessa-
lonique. Il souffrit beaucoup pour le culte
des images durant la persécution de l'^îm-
pereur Théophile, et fut relégué dans l'ile
de Crèle, où il resta jusqu'à l'an 842. Il
alla ensuite à Constant inople , où saint
Ignace lui confia la garde du trésor de
l'église. Il composa des Hymnes pleines
d'onction en l'honneur de la sainte Vierge
et de plusieurs saints, et mourut vers l'an
883. Sa f^ie a été écrite par Théophane ,
son disciple. Le diacre Jean en a donné
une plus étendue , insérée dans les Jeta
sancto7'um , avril, tome V" . Les Grecs cé-
lèbrent sa fête le 3 avril.
JOSEPH BEN GORION, ou GORI.ONI-
DES, c'est-à-dire lils de Gorion, fameux
historien juif, que les rauojus confondent
mal à propos avec le céîèi>.e historien
Josèphe, vivait vers la fin du 9' siècle, ou
au commencement du 10*^. Il nous reste
de lui une Histoire des Juifs , que Gagnier
a traduite en lalin, Oxford, 1706, in-i". Il
y en a une édition hébraïque et latine, de
Gotha, 1707 , in-4°. On voit , par ce livre
même, que l'auteur était, selon toutes les
apparences, un juif du Languedoc. Le pre-
mier écrivain qui a cité cet ouvrage est
Saadias Gaon, rabbin célèbre, qui vivait
au milieu du 10^ siècle.
JOSEPH 1", quinzième empereur de
la maison d'Autriche , troisième fils de
l'ccopereur Léopold I", cl de sa troisième
femme, Eléonore-Madeleine, de la maison
palatine deNeubourg, naquit à Vienne le
2() juillet 1G76, fut couronné roi héréditaire
de Hongrie en 1687, élu roi des Romains en
1690, el monta sur le trône impérial après
la mort de son père en 1703. L'esprit du
lils était vif et jilus actif, plus propre à
brusquer les événemens qu'à les attendre,
consultant ses ministres et agissant par
lui-même. Ce prince soutint avec autant
de courage que de succès les droits de sa
maison. Il engagea le duc de Savoie, les
Anglais et les Hollandais dans ses intérêts
contre la France , et fit reconnaître l'ar-
chiduc Charles, son frère, roi d'Espagne.
Il obligea Clément XI, qui paraissait trop
attaché à la France , à lui donner ce titre ,
en déclarant dépendant de l'Empire beau-
coup de liefs qui avaient relevé jiisqua-
lors des papes. Les électeurs de Bavière
et de Cologne continuant la guerre contre
l'empereur et le corps de l'Empire, Joseph
les lit mettre, en 1706, au ban de l'Em-
pire. Dès la victoire de Hochstedt , la
Bavière était devenue une province au-
trichienne; mais une cons])iralion mal
conduite aggrava le sort de l'éleclrice et
de ses enfuns, à qui on ôta jusqu'à leur
nom. Le duc de la Mirandoïe , vassal de
l'Empire, lui ayant donné de grands mé-
conlentemens, il le dépouilla de son fief.
Par des victoires multipliées, il devint
maître paisible en Italie. La conquête du
royaume de Naples et de Sicile lui fut as-
surée. Tout ce qu'on avait regardé en
Italie comme feudataire fut traité comme
sujet. Il Jaxa la Toscane à 130,000 pisto-
les ; Mantoue, à i 0,000. Parme, Modène.
Lucques, Gènes, qui s'étaient liguées ou
secrètement ou solennellement avec ses
ennemis, furent comprises dans ces im-
positions. La France avait suscité contre
lui Ragolxki , prince de Transylvanie, ar-
mé pour ses prétentions el pour celles de
son pays. Il fut battu, ses villes prises,
son parti ruiné, et lui obligé de se retirer
en Turquie. Au milieu de ses succès , Jo-
seph fut attaqué de la petite-vérole, et
en mourut le 17 avril 1711, à 55 ans. Il
n'y a guère eu d'empereurs plus heureux ;
son règne n'a presque été qu'un enchaî-
nement de victoires : il parvint à apaiser
presqu'entièrement les troubles de la
Hongrie. L'empire lui fut constamment
dévoué; les plus grands princes recher-
chèrent son amitié ; toute l'Europe consi-
déra sa puissance sans envie ; ses géné-
raux étaient les héros de ce temps : an
milieu d'une guerre très compliquée, il sut
JOS
28
JOS
amt'liorer ses finance», el ne surcliarpea
jaii:aisses peui)les. Il fut oopeiidanl moins
aimé que ses prédéresseurs »•! que le frère
«jui lui succéda ( voy. CHAULES VI) . sa
conduite personnelle étant parfois légère,
et peu assortie aux principes qui sem-
blaient avoir lixé la vertu dans sa famille.
IsliacKwilz a écrit, en allemand, une Vie
de cet empereur.
JOSKPII II , lils de l'empereur Fran-
çois I" de Lorraine et de Marie-Tlicrcse
d'Autriche, lille de Charles VI, naquit à
Vienne le 13 mars Vlk\, et fut porté la
même année par sa mère à la diète de
Presbotirjî, <>ù la vue du jeune prince ne
contrihua pas peu à animer les Hongrois
contre la multitude d'ennemis qui assail-
laient son héritage. Elu roi des Romains
en 1764, il succéda l'année suivante à
son père comme empereur d'Allemagne.
f>oit parle motif de s'instruire, soit par
l)rincipe de santé et le besoin impérieux
dune activité extraordinaire, il parcou-
rut une grande partie de l'Europe, et ap-
prit une multitude de choses, qu'il résolut
de mettre à exécution après la mort de sa
mère. Cette princesse possédanten propre,
comme dernier rejeton de la maison d'Au-
triche, celte province ainsi que les royau-
mes de Hongrie et de Bohème, ce qui for-
mait ce qu'on appelait les élats héréditai-
res , ne voulait laisser à son Jils aucune
part au gouvernement de ses étals. Ce
dernier alla à Rome, accompagne de trois
seigneurs de sa cour, et pendant qu'il en
visitait les monumens , chacun de ses
compagnons de voyage avait son dépar-
tement, et chaque soir ils lui remeltaient
leurs observations. Cependant , ^ ces oc-
cupations utiles en succédèrent d'autres
bien minutieuses : à Milan, par exemple,
il visita les couvens de lilles, et ne trou-
vant pas qu'elles fussent assez occupées,
il leur envoya l'ordre ae faire des che-
mises pour ses soldais, et à cet effet il
leur fil remettre de la toile. Le 3 septem-
bre 1771 , il eut , à Ncustadt en Moravie ,
«ne entrevue avec le roi de Prusse , la-
quelle fît beaucoup de sensation dans le
temps, tant parce que rEurop3 s'étonnait
de voir se rapprocher deux princes qu'on
croyait être divisés par des inimitiés in-
terminables , que parce qu'on répandit le
bruit que, dans cette occasion , il avait
adopté plusieurs idées de Frédéric, et
forme le dessein de les réaliser dans ses
états. Mais cette opinion a été trouvée
fausse par le fait ; car le roi de Prusse
n'a presque donné l'exemple de rien de
ce que l'empereur a cru devoir faire chez
lui. En j)articulier , pour ce qui regarde
les possessions ecclésiastiques et le» mai-
sons religieuses, Frédéric a constamment
manifesté des principes différens.« L'em-
» pereur, dit-il dans une lettre à d'Alem-
» bert , continue ses sécularisations sans
«interruption; chez nous, chacun reste
» comme il est, et je respecte le droit de
» possession, sur lequel la société est fon-
» dée. »( royez la 226' lettre de celle Cor-
respondance. ) Une anecdote a rendu celte
entrevue remarquable. Un corps nom-
breux de troupes autrichiennes campait
à Neusladt en Moravie; l'empereur vou-
lut le faire parader et manœuvrer en
présence de Frédéric. La journée était
belle et le ciel serein ; mais un grand
orage survint si rapidement, qu'on ne
puise retirer sans être bien mouillé, et
l'exercice n'eut pas lieu : Il faut avouer^
dit Frédéric à l'empereur, qu'il y a un
plus grand maître que nous. Marie-Thé-
rèse étant morte le 29 novembre 1780, son
fils prit le gouvernement des provinces hé-
réditaires, mais ne voulut pas se faire cou-
ronner roi de Hongrie et de Bohème ; il fit
même enlever, au grand regret des Hon-
grois, et transporter à Vienne la couronne
de saint Etienne, gardée dans le château
de Presbourg. Ses vues sur les affaires
ecclésiastiques, sur l'autorité épiscopale ,
les matières matrimoniales, les maisons
religieuses , dont plus de 500 furent sup-
primées, engagèrent le pape Pie VI, après
d'injitiles reniontrances , à se rendre en
personne à Vienne en 1782. Joseph le re-
çut avec beaucoup d'égards et de respect,
l'écoula et ratifia les conclusions que le
pape avec les évéques de Hongrie avaient
arrêtées sur les points les plus inquictans
(on peut voir ces conclusions dans le 6*^
volume des Réclamations belgiques , p.
252). Pie VI partit content; mais, soit que
le monarque eût changé de sentiment ,
soit que les ministres, chargés de l'exé-
cution , fussent d'une opinion différente ,
celle espèce d'accord resta sans effet. Ce
fut même peu après le départ du souve-
rain pontife que l'empereur fit lui seul
une nouvelle circonscription des évéchés
de ses états, abolit les séminaires diocé-
sains, dont il ne laissa subsister que 5 ou
6, ordonna d'ôler les images des églises,
permit le divorce , et se porta à d'autres
innovations non moins dangereuses. Ce
fut au sujet de ces innovations qtie le roi
de Prusse , le grand Frédéric , l'appelait
notre frère le sacristain. Toutefois, le
JOS
29
JOS
voyage du pape uc fui cependtin» pas inu- !
tile. « Il est incontestable, dit un écrivain
» protestant , qvic i>ai- .'a prtscnce , par les
» cérémonies touthanlcs de la reîi^non ,
» en nn mot, par tout ce qui peut loudier ;
» le cœur et émouvoir l'ànie, il parvint à |
o raffermir la foi chancelante, à lever les j
» doutes naissans , et donner au moins |
» pour quelque temps une nouvelle vi- j
» gueur et un nouvel aliment à la foi ,
» catholique dans les pays autrichiens. »
L'année 178ifut mémorable par la révolte
des Valaques contre leurs seigneurs. Ils
dévastèrent la Transylvanie et le bantuU
de Témeswar d'une manière horrible.
Les nobles el les ecclésiastiques fuient
massacrés, leurs possessions ravagées, un
grand nombre de cliàteaux el de villages
incendiés. Horiah et Gloska [voyez ces
noms), qui étaient à la tète des rebelles,
furent pris enlia par les hussards sicu-
liens, et finirent par le dernier supplice
en 1785. La manière dont on a parlé de
la cause et du but de cette rébellion est
si peu uniforme , et présente d'ailleurs
des considérations si délicates, qu'il est
plus prudent de laisser la chose sous le
voile du mystère , que d'essayer de l'en
tirer. Les Hollandais qui, sur une simple
sommation, avaient abandonné en 1782
les barrières qui leur étaient assurées par
la paix d'Utrecht , ne furent pas si dociles
en 1784 pour la liberté de l'Escaut, que
demandait l'empereur. Ils refusèrent de
déroger en ce point à la paix de Munster,
et tirèrent sur le vaisseau impérial, qui
avait entrepris de dépasser les batteries
élevées sur les bords du fleuve. Cet in-
cident amena une guerre qui ne pro-
duisit aucun événement remarquable , et
qui fut lerrainée par la paix de Fontaine-
bleau, le 8 novembre 1785. L'empereur
obtint le fort de Lillo ; on fil quelques
échanges, une nouvelle démarcation dans
certains endroits des frontières; mais
l'Escaut resta fermé. L'impératrice de
Russie ayant entrepris en 1787 le voyage
de Kherson , pour visiter ses nouveaux
établissemens et ses conquêtes , engagea
l'empereur à s'y rendre, fliais à peine y
fut-il arrivé, qu'il apprit que l'exécution
des nouveaux systèmes en matière civile
el religieuse avait produit aux Pays-Bas
des mouvemcns violens , que la sagesse
des états avait empêché d'éclater en ré-
volte ouverte. Pour ne rien donner au
préjugé, nous transcrirons ce que dit à ce
sujet l'auteur de la Vie de Joseph II ( Ca-
raccioJi), qui, dans le fait, n'est qu'un pa-
négyrique. >' Toujours ardent à rèaJisiûr
» tout ce qui lui semblait être le mieux,
» l'empereur ne sentait pas le danger
» d'une iïuiovation, et il s'efforçait d'aller
>• au-delà du bien, même à travers Us dif-
» licuités. Les Brabançons réclamèrent
» avec force en faveur de leurs droils, ne
«voulant ni être imposés, ni diffcrem-
» ment traités que par le passé. Us allé-
» guèrent l'exemple de l'impératrice-reitie
» de Hongrie, Marie-Thérèse, d'heureuse
» mémoire , qui avait toujours respecté
«leurs privilèges, et ils rappelaient le
» serment qu'avait fait l'empereur lui-
» même de ne leur donner aucune atteinte.
» llien ne moleste autant les nations que
» le changement de leurs lois et de leurs
» usages, comme rien ne fatigue autant les
» souverains que la différence des privi-
«légesel des coutumes parmi les sujets
» d'un même empire. Il n'y a pas un seul
» monarque qui ne voulût les restreindre
»à la même règle, et les assujétir aux
» mêmes lois. Ce fut la principale faute
» de Joseph, celle qui le fit passer pour
» tyrannique aux yeux du public ; el il
» faut convenir que c'est violer en quel-
» que sorte le droit des gens, que de vou-
B loir changer les coutumes consacrées
» par la prescription el par l'usage , à
» moins qu'on ne le fasse d'accord avec la
«nation. » Le 20 septembre, il y eut à
Bruxelles un choc entre les troupes d-
l'empereur et les volontaires brabançons;
et le Icndeiiiain, le comte de Murray. dé-
claré gouverneur gênerai ad intérim .
apj'ès le départ de l'archiduchesse Clii is
line pour Vienne, publia la restitution d j
tous les droits el privilèges; mais le mo-
narque ne put se résoudre à la ratifier, it
l'on s'attendait à des opérations sévères ,
quand il se vit entraîner dans la guerre
contre les Turcs. Ceux-ci l'avaient déjà
déclarée aux Russes. L'empereur, quoiquo
allié de ces derniers, restait encore neu-
tre, lorsqu'il résolut d'enlever Belgiade
par un coup de main. Cette tentative,
manquée le 5 décembre 1787 , décida la
guerre. Elle se fit d'abord sans aucun suc-
cès marqué do ])art ni d'autre. L'armée
autrichienne, retranchée près de Senilin
entre le Danube et la Save, perdit un
temps précieux , et resta dans linaction
jusqu'à la prise de Sabacs , le 24 avril
1788. Dubitza arrêta les assiégeans pen-
dant six mois ; ils y furent défaits le 25
avril; mais la place se rendit le 26 août
au général Laudon , qui était venu pren-
dre le commandement de l'armée de
5.
JOS
30
JOS
Croatie. Ce pt'néral s'empara ensuite des
aulres peliles places, tandis que le prince
de Saxe-Cobourg prenait Chocxim. Mais
le grand-visir ayant fait une invasion dans
le Bannat, s'empara de l'Antre de Ve«e-
rani et de plusieurs postes imporlans. On
craignait qu'après plusieurs combats , où
il eut l'avantage, il n'allât faire le siège
do Témcswar, lorsqu'il prit le parti de la
retraite. L'année suivante fut remarqua-
hle par la prise de Belgrade, qui se rendit
à Laudon le 7 octobre 1789 ; mais la santé
de l'empereur, qui depuis trois ans don-
nait des présages sinistres , devenait tous
les jours plus chancelante. La commotion
que les nouveaux systèmes avaient pro-
duite en Hongrie, en Autriche, en Tyrol.
dans le Milanais, mais surtout dans les
Pays-Bas , l'affligeait sensiblement. Dar)s
cette dernière contrée , les choses en
étaient enfin vwiues à une insurrection
ouverte: et après l'expulsion des troupes
autrichiennes, les états des différentes
provinces, excepté le Luxembourg, dont
la capitale resta en son pouvoir, le décla-
rèrent déchu de la souveraineté. Dims
cette extrémité , il s'adressa au pape , et
réclama son autorité comme celle du père
commun des peuples et des rois, pour
fairr, rentrer ses sujets dans le devoir,
pro.v.eltant de réparer tous les torts qui
leur avaient été faits. Le pontife écrivit
en effet un bref très touchant aux évê-
ques des Pays-Bas ; mais la révolution y
était tellement consommée , que la voix
des pasteurs d'Israi:! devint inutile (i). Le
monarque en fut consterné. Son âme ,
déjà affaiblie par sa situation personnelle,
ne put résistera tant de disgrâces. Il mou-
rut le 20 févilcr \79?i deux jours après
la princesse Eliz-abeth de Wurtemberg ,
épouse de l'archiduc François , aujour-
d'hui empereur, qu'il chérissait tendre-
ment, et dont la mort hàla la sienne.
Prince plein de courage, d'activité, d'a-
mour pour le travail , vwilant le bien ,
sans toujours en distinguer les moyens;
(i) L'auteur de eelte nele a été te'moin , comme
liicD d'autrei . de la baine que Ici cbaDgenient philo-
iophiquei de Joseph II avaient irr.primée <ians l-e coeur
dci BrabançoDi ; eux qui ne parlaient qu'avec CDthuii-
• iamie de Marie-Thérèie et de leur grand gouverneur
l'archiduc Charles , en étaient venus au point de dé-
tester jusqu'aux soldats autrichimit , qu'ils appelaient
irt rasjur/les. Par esprit de religion , ils aicurillircat
les ccclésiasti<|ues français dcportct ; et par esprit de
■.engeance, ils les virent partir avec une sorte de joie,
parce que
rs rra:<
républicains l'approchaient
pour les délivrer d'un jong qu'ils ont plu
r^rtUé.
d'une fois
cherchant les lunnières , mais s'adrcssan<
parfois à ceux qui ne pouvaient les don-
ner ; zélé contre les abus , mais envcloj>-
panl dans celte dénomination des choses
qui ne l'étaient pas; avide de gloire, mais
ne discernant pas dans tous les cas sa vé-
ritable splendeur; instruit de sa puis-
sance, mais la portant hors de ses bornes;
il etit eu un règne heureux, et probable-
ment plus long, si ses instituteurs, qui
n'ont pas été choisis avec assez de soin ,
avaient mieux dirigé les heureuses qua-
lités de .son cœur et do son esprit ; si, au
lieu de l'inquiéter par les creuses spécu-
lations de la philosophie, ils l'avaient bien
pénétré de celte maxime d'un de ses plus
illustres aïeux (Charles-Quint), que « Us
» gouvernemens établis maichenl d'eux-
» mêmes, et que ceux qui proposent des
» nouveautés sont les perturbateurs du
» repos public; « ou bii-n de celte utile et
raisonnable leçon que Burke donna à son
successeur : « Un prince sage, tel que
» l'empereur, doit étudier le génie de sun
» peuple. Ce prince ne le contrariera pas
■ dans ses mœurs, il ne lui enlèvera pas
» ses privilèges , mais il agira d'après If s
» circonstances où il trouvera le gouver-
» neiuent; et tant qu'il se conduira d'a-
» près ces principes habituels de l'expé-
» rience pratique, il sera Iheureux print e
» d'un peuple heureux. Il ne doit pas e*-
» limer un denier ce que les Condorcet ,
» les Raynal, ces oiseaux blancs et noirs
» de la moderne littérature, ces pies plii-
» losophiques , pourront babiller ou ga-
» zouiller sur sa conduite ou son carac-
» tère. «Il avait épousé en 1760 Klizabelh
de Parme, dont il eut une fille, qui mourul
en bas âge. Après le décès d'Elizabeth ar-
rivé en 17G3, il épousa en 1765 Marie-
Antoinette de Bavière, sœur de l'électeur,
qu'il perdit en i767. Son frère Léopold,
grand-duc de Toscane, lui'succéda, mais
ne lui survécut que deux ans. Le roi de
Prusse décrit dans ses Mémoires le véri-
table caractère de Joseph II. <i Ce jeune
prince , dit-il , affectait une franchise qui
lui semblait naturelle ; son caractère mar-
quait de la gaité jointe à beaucoup de vi-
vacité, mais, avec le désir d'apprendre il
n'avait pas la patience de s'instruire.... »
Dans une autre occasion, il s'exprime en
ces termes : « Le jeune empereur , dévoré
» d'ambition, avide de gloire, n'attendait
» qu'une occasion pour troubler le repos
» de l'Europe. » Lors de la révolution fran-
çaise, et peu avant d'expirer, l'enipereur
l Joseph dit : « Je n'ignore pas que lesenne-
JOS 5
» mis de ma sœur Anloinctle ont osé l'ac-
» cuser de m'avoir fait passer des sommes
> considérables ; près de paraître devant
• Dieu, je déclare que cette inculpation
» est une horrible calomnie. » Il dicta lui-
même son épilaphe , qui consistait en ce
peu de mots : Ci gît Joseph II, qui fut
malheureux dans toutes ses entreprises.
On a de Joseph II des lettres inédites
précédées d'une notice historique sur ce
prince et suivies de détails sur ses der-
niers momens : elles ont été traduites de
l'allemand, Paris, 1822, in-8°. On a publié
aussi comme étant de ce prince un testa-
ment politique qu'on a tout lieu de croire
apocryphe. Plusieurs auteurs ont écrit sa
vie; M. Riousl a publié à Paris en 1817 ,
Joseph If peint par lui-même,^ volumes
in-i2.Différens traits delà vie de ce prince
ontélétransporléssur la scèneavec succès.
JOSEPH l"ou JOSEPH-KMMANUEL,
roi de Portugal, de la famille de Bragance.
fils et successeur de Jean V , né en 1714 ,
monta sur le trône en 17o0 , à l'âge de 5o
ans, et mourut en 1777, à 62 ans et 8 mois.
Le tremblement de terre de 1755, qui en-
gloutit une partie de Lisbonne; une pré-
tendue conspiration en 1758, quifit couler
bien du sang (voyez AVEIRO); l'expul-
sion des jésuites et la conliscation de leurs
biens ; les disputes avec la cour de Rome,
qui suivirent cet événement ; enfin la
guerre avec l'Espagne en 1765 , sont les
événemens les plus remarquables de ce
règne, dont les Portugais se souviendront
long-temps, Marie-Françoise, tille de Jo-
seph r% et qui lui succéda, ramena le
calme par l'exil du marquis de Pombal
(voyez ce nom), qui exerça tant d'in-
fluence sous son ministère.
JOSEPH ALIîO , savant juif espagnol
du 15' siècle, natif de Soria, se trouva en
l/tl2 à la fameuse conférence qui se tint
entre Jérôme de Sainte-Foi et les Juifs.
Il mourut en l/tôO. On a de lui un livre cé-
lèbre intitulé en hébreu : Sepher Ikkarim ;
c'est-à-dire le Livre des fnndemens de la
foi, Venise, 1618, in-fol. Plusieurs savans
ovit entrepris de le traduire en latin, mais
il n'en a encore paru aucune traduction.
Il y prétend que la croyance de la venue
du Messie n'est point nécessaire au salut.
ni un dogme essentiel. Il avança, dit-
on, celte proposition pour raffermir la
croyance des Juifs, que .lérômede Sainte-
Foi avait ébranlée, en prouvant que le
Messie était venu.
JOSEPH MEIR, savant rabbin, naquit
l'an 1496 à Avignon , d'un des Juifs chas-
1 JOS
ses d'Espagne quatre ans auparavant par
le roi Ferdinand le Juste. Il fut emmené
depuis par son père en Italie , et n»ourut
près de Gènes en 1554. On a de lui un ou-
vrage très rare en hébreu : Annales des
rois de France et de la maison ottomane,
Venise, 1554, in-S". Il est divisé en deux
parties ; dans la première, il rapporte les
guerres que les Français ont soutenues,
pour la conquête de la Terre-Sainte, contre
les Ottou)ans. Il ]>rend de là occasion ds
faire l'histoire de ces deux peuples. Il
commence celle des Français par Marco-
ni ir, Sunnon et Génébalde. Avant de par-
ler des Ottomans, il donne une idée de
Mahomet, d'Aboubeker et d'Omar. Cette
première partie finit à l'an 1520. Dans la
deuxième, l'histoire des Ottomans est pré-
cédée de celle de Saladin, de Tamerlan ,
d'Isii'.aèl Sophi, et de plusieurs autres
Orientaux. 11 parle en passant des princes
de l'Europe, et termine cette partie à l'an
1555. Sorx style est simple et convenable à
l'histoire.
JOSEPH de PARIS (François le CLERC
DU TREMBLAI), célèbre capucin , plus
connu sous le nom de Père Joseph, naquit
à Paris le 4 novembre 1577 , de Jean Le
Clerc, seigneur du Tremblai, président
aux requêtes du palais. Le jeune du Trem-
blai voyagea en Allemagne et en Italie;
ayant embrassé d'abordle parti des armes,
il lit une campagne sous le nom de baron
de iUaflée , et se distingua au siège d'A-
miens. Au milieu des espérances que ses
lalens donnaient à sa famille , il quitta le
monde pour se faire capucin en 1591).
Après son cours de théologie, il fit des
missions, entra en lice avec les héréti-
ques, en convertit quelques-uns , et ob-
tint les premiers emplois de son ordre.
Le cardinal de Richelieu, instruit de son
génie , lui donna toute sa confiance, et le
chargea des affaires les plus épineuses.
Ce fut surtout lorsque le cardinal fit ar-
rêter la reine Marie de Médicis, que le
capucin fut utile au ministre. Admis dans
un conseil secret, il ne craignit point de
remontrer au roi qu'il pouvait et qu'il de-
vait sans scrupule mettre sa mère hors
d'état de s'opposer à son ministre, chargé
du gouvernement et des intérêts duroyau-
me. L'auteur de sa Vie lui reproche d'a-
voir extorqué une rétractation du docteur
Richer ; mais les circonstances qu'il rap-
porte de cette rétractation sont invinci-
blement réfutéci dans le Journal de Tré-
voux , janvier 1703. Ce zélé capucin en-
voya des missionnaires en Angleterre, au
\
JOS
32
JOS
Canada et en Turquie. N'ayant pu réussir
t faire adoiiter dans l'ordre de Fonlevrault
lu réforme qu'il voulait y introduire , il
ififida en 161 4 celui des relii^ieuscs béné-
dictiiu'S du Calvaire, auxqiielles il donna
des çonstilulions très sayes , qui ont lou-
jouis été observées depuis. Louis XIII,
voulant le récompenser de ses services,
demanda pour lui le cbapeau de cardinal;
mais il ne put l'obtenir, et le père Joseph
mourut à Ruel le 18 décembre 1638, à 61
ans, avant que de l'avoir reçu. Le parle-
ment en corps assista à ses obsèques, et un
évêque prononça son oraison funèbre.
Labbé Richard a publié deux P''tes de cet
homme singulier; l'une sous le titre de Fie
du père Joseph,^ vol. in-i2 ; et l'autre, qui
n'est qu'une satire , intitulée Le véritable
père Joseph , 1704, in-12. Dans la pre-
mière, il le peint comme un saint, et dans
la seconde , comme un poliliijue artifi-
cieux. « Cet houime , dit un liistorien ,
«travailla toute sa vie pour l'Eglise, et
» assez, long-temps j)our l'état : fervent
V rcli;;ieux taudis (ju'il resta dans le cloî-
» tre, liabile politique lorsque le cardinal
o de Richelieu l'eut en quelque sorte as-
» socié au ministère, en se déchargeant
* sur lui d'une partie des soins qui en
» scHit inséparables, il dorma dans tous les
w temps des preuves d'une capacité con-
» sommée. Je sais que la satire ne l'a pas
» épargné. Ami et confident du cardinal
» de Richelieu , pouvait-il manquer de
» critiques? Sa ferveur et la confiance du
» premier ministre, voilà, ce me semble,
p ce qui fait tout son crime. »
JOSEÎ'Il de CALASANCE (saint), fon-
dateur des écoles pies .naquit à Pétralta,
dnns le royaume d'Aragon, en iJjJiG. d'une
famille noble. Il lit vœu de chasteté dans
sa jeunesse, et la passa dans les exercices
de pieté. Devenu fils uniqtie par la mort
de son frère aine, il eut quelques contra-
dictions à essuyer de la part de son père,
qui voulut lui procurer un brillant éta-
blissement dans le monde. Etant tombé
malade et réduit à l'extrémité, il déclara
à son père le vœu qu'il avait fait , et le
pria de le laisser suivre sa vocation. En-
ga;;é dans les ordres sacrés, Joseph fut le
modèle du clergé , et plusieurs évêques
l'ayant employé dans leurs diocèses, il y
fit des fruits merveilleux. Se croyant ap-
pelé à un étal plus parfait, il passa à
Uome, où la vue d'une troupe denfans
livrés aux vices qu'amène le défaut d'é-
«incation, lui fit prendre la résolution de
£C donner tout entier à leur iiibtrurlion.
Il s'associa quelques ecclésiastiques, entre
lesquels était le célèbre Dragonetti , âgé
de 9;> ans, mais fort et vigoureux; qui
remplit les exercices de la nouvelle C07i-
grégation jusqu'à l'âge de 120 ans, qii'il
mourut en odeur de sainteté. Elle fut éri-
gée en ordre religieux en 1621 par Gré-
goire XV. Un mauvais sujet y ayant été
reçii, porta le désordre de l'orgueil et de
la division dans le nouvel établissement,
se servit de son crédit pour susciter au
saint fondateur des persécutions de toute
espèce. Innocent X supprima l'ordre. Le
saint fondateur continua toujours ses œu-
vres de charité à l'égard des pauvres en-
fans. Il survécut deux ans à ce désastre,
et mourut âgé de 92 ans, après avoir pré-
dit le réiablissement de son ordre ; ce
qui aniva 21 ans après. Clément IX le
remit sur le même pied qu'il avait été
approuvé par Grégoire XV. Les fonctions
des religieux de cet institut ne furent d'a-
bord que d'enseigner à lire , à écrire le
catéchisme, l'arithmétique et les élémens
de la grammaire ; mais, en vertu des
concessions que leur ont faites plusieurs
papes, ils ont dans leurs collèges des cours
d'études réglés, et enseignent aussi les
hautes sciences. Joseph de Calasance fut
béatifié par Benoît XIV et canonisé par
Clément XIll. Sa Fie a été composée en
italien par le père Tosetli , et traduite en
allemand par le jière Kocli ; elle est très
bien écrite dans les deux langues. L'au-
teur est un biographe judicieux, qui parle
des vertus chrétiennes et de la gloire des
saints avec autant de discernement que
d'édification.
JOSEPH (Pierre de SAINT-), feuillant,
né en 1394 dans le diocèse d'Auch, d'une
famille appelée Comagère . mort en 1662,
publia plusieurs ouvrages de théologie,
contre les partisans de Jansénius.
JOSEPH de CL'PERTIN ( saint) , ainsi
nommé du lieu de sa naissance , petite
ville du diocèse de Nardo.dansle royaume
de Naples, né en 1603 de parens pauvres,
entra dans l'ordre des franciscains con-
ventuels, fut élevé aux ordres sacrés , et
se sanctifia par la pratique de toutes les
vertus propres à son état. Le procès de
sa canonisation fait mention d'un grand
nombre de faveurs extraordinaires qu'il
reçut de Dieu. Il mourut enl6G3 àOsimo,
et fut canonisé en 1767. Pastrovicchi, re-
ligieux du même ordre, a écrit sa Vie en
1753 : il y à peu de goût et de critique.
JOSEPH (A^CE de SAINT-), carrac
décliaussé. Voij. ANGE.
JOS 3
JOSEPH. Voi/ez A BOU- JOSEPH.
JOSEPH E, Flavius, ei non pas Flavia-
iruSj comme le supposent ceux qui l'ap-
pellent Flavien et Flavian, célèbre histo-
rien et général juif, né à Jérusalem , l'an
37 de Jésus-Christ , de parens de la race
sacerdotale, montra de bonne heure
beaucoup d'esprit et de pénétration. Dès
l'âge de 14 ans, les pontifes le consul-
taient. Il fut l'ornement de la secte des
pharisiens , dans laquelle il entra. Un
voyage qu'il fit à Rome , à l'âge de 26
ans, sous le règne de Néron, perfectionna
ses talens et augmenta son crédit. Un co-
médien juif , que l'empereur aimait , le
servit beaucoup à la cour de ce prince.
Cet acteur lui lit connaître l'impératrice
Poppée,dont la protection lui fut très
utile. De retour dans la Judée, il eut le
commandement des troupes, et se signala
au siège de Jotapat, qu'il soutint pendant
sept semaines contre Vespasien et Titus.
C'est là qu'il fut réduit à se cacher dans
une caverne profonde, avec quarante des
plus braves de sa nation. Vespasien en
étant averti lui fit proposer de se rendre;
mais Josèphe en fut empêché par ses
compagnons qui menacèrent de le tuer
s'il y consentait. Ces furieux , pour ne
pas tomber entre les mains de leurs en-
nemis, proposèrent de se donner la mort;
et Josèphe ne réussit qu'avec peine à
leur persuader de ne pas tremper leurs
mains dans leur propre sang , mais de
recevoir la mort par la main d'un
autre. Ils tirèrent donc au sort, pour
savoir qui serait tué le premier par celui
qui le suivait. Projet qui n'était guère
plus raisonnable qu'un suicide propre-
ment dit. Josèphe eut le bonheur de res-
ter avec un autre , à qui il persuada de
se rendre aux Eomains. Vespasien lui
accorda la vie , à la prière de Titus . qui
avait conçu beaucoup d'estime et d'affec-
tion pour lui. Ce prince l'emmenaau siège
de Jérusalem. Josèphe y exhorta vaine-
ment ses compatriotes à se soumettre aux
Iloinains. Après la prise de cette ville , il
suivit Titus à Rome , où Vespasien lui
donna le titre de bourgeoisie romaine et
le gratifia d'une pension. Titus et Domi-
tien la lui continuèrent, et ajoutèrent aux
bienfaits les caresses les plus flatteuses.
On croit qu'il mourut à Rome vers l'an
9S. C'est dans cette ville que Josèphe
continua la plupart des ouvrages qui nous
restent de lui : | Y Histoire de la guerre
des Juifs , en 7 livres. L'auteur l'écrivit
ti'abord en syriaque et la traduisit en
3 JOS
grec. Titus faisait tant de cas de ^G^te
histoire qu'il la sijjna de sa main , la fit
traduire et déposer dans la bibliothèque
publique. On ne peut nier que Josèphe
n'ait l'imagination brillante, ie style ani-
mé, l'expression noble ; il sait peindre à
l'esprit et remuer le cœur. C'est celui de
tous les historiens grecs qui approche le
plus deTite-Live; aussi saint Jérôme l'ap-
pelait-il le Tite-Live delà Grèce; mais
s'il a les beautés de l'historien latin, il a
aussi bien des défauts. 11 est long dans ses
harangues, et exagérateurdans ses récits.
\ Les u^ntiquités judaïques . en 20 liv. ;
ouvrage qui renferme l'histoire des Juifs
jusqu'à la prise de Jérusalem, écrit avec
autant de noblesse que le précédent ,
mais dans lequel l'auteur a déguisé, affai-
bli, ou anéanti les miracles attestés par
l'Ecriture. Il corrompt partout ce qui
pouvaitblesserlesgentils.il paraît que
Josèphe était plus lâche politique que
bon Israélite. L'intérêt le dirigea dans ses
écrits comme dans sa conduite. Il eut la
bassesse sacrilège d'appliquer les prophé-
ties sur le Messie à l'empereur Vespa-
sien, tout païen qu'il était. | Deux Livres
contre ^/j;;?»//, grammairien alexandrien,
un des plus grands adversaires des Juifs.
Cet ouvrage est précieux par divers fraç-
mens d'anciens historiens que l'auteur
nous a conservés. | Un Discours sur le
martyre des Machahées, qui est un chef-
d'œuvre d'éloquence ; et un Traité de sa
Vie. Tous ses ouvrages sont en grec. La
meilleure édition est celle d'Amsterdam ,
par Sig. Havercamp, 1726, 2 vol. in-fol.,
en grec, et en latin : il en existe ime
autre de Jean Hudson , Oxford , 1720 ,
2 vol. in-fol., qui n'est pas moins tstimce.
Nous en avons deux traductions en fran-
çais, la première par Arnauld d'Andilly,
Amsterdam, 1681 , 2 vol. in-folio, fig., et
Bruxelles, 1701-1703, o vol. in-8°, fig.;
la deuxième par le père Joachim Gillet ,
Paris, 1750, A vol. iii-4° : celle-ci est faite
avec plus d'exactitude , l'autre est écrite
avec plus de force ( voyez leurs articles).
On a beaucoup disputé sur le fameux
passage de Josèphe touchant Jésus-Christ,
où cet historien juif reconnaît le légis-
lateur des chrétiens pour le Messie et
l'envoyé de Dieu. Quelques-uns l'ont sus-
pecté, « parce que, disent-ils, pour être
» conséquent , Josèphe eut dû embrasser
» le christianisme : » comme si un homme,
qui avait eu la lâcheté et l'avcugleinent
de reconnaître pour Messie l'idolàUe Ves-
pasien, n'avait pu, sans se faire cluélien,
JOS 5
r^connaîlre celle qualité dans J.-C. Saint
Jérôme. Ensèbe, Isidore de Pcluse , Sozo-
niène, Suidas , Grotius, Huct. Casaubon,
Isaac et Gérard Vossius, Usserius , etc. ,
n'ont pasdciilé que ce passage ne fût de Jo-
^èphe. On peut voir là-dessus Huet, Mein.
évang. prop. 3, n° H. Mais s'il n'est pas de
lui , il en résulte un aqjument doiit nos
incrédules ne s'accominoderonl (juire.Ou
Joscphe a p;irlé de Jésus-Christ, ou il n'en
a jias parlé : s'il en a parlé , qu'on nous
hiontre un passage différent de celui que
nous y voyons : s'il n'en a pas jiarlé, un
silence si affecté sur des événewiens qui
avaient fait tant de i)ruit dans le monde,
annonce plus que tout ce qu'il eût pu en
dire. Il parle de saint Jeaii-Baptiste et de
saint Jacques ( roz/cz saint JACQUES le
Mùiatr) (i) , et il aurait oublié le chef,
dont les disciples étaient déjà répandus
partout et cornms de tout lunivers! On
a une Histoire clés Juifs par demandes et
j)ar réiKinses , avec la Vie de Joscphe.
par Ligcr , Lyon ( Paris ) , 1753 3 vol.
in-12.
• JOSÉPHINE ( Rose TASCHER de la
PAGERIE), impératrice des Français,
reine dllalie , naquit à la Martinique le
24 juin 1763 , d'une famille noble. Amenée
de bonne heure à Paris , elle y épousa le
vicomte de Beaubaniais , dont le- père
avait été gouverneur-général des Antilles,
et qui était doué des plus brillantes qua-
lités. Deux enfans, Eugène et Horlense
furent le fruit de ce mariage. M""^ de
Beauharnais qui par son amabilité et ses
grâces faisait les délices de la société ,
ayant reçu la nouvelle inopinée que sa
mèi'e déjà avancée en âge, était malade à
la Martinique, partit en 1787 pour cette
île où elle passa trois ans. Les troubles
qui y éclatèrent la forcèrent de fuir
précipitamment du sol natal , et après
avoir échappe à une foule de dangers elle
arriva en France où l'attendaient de nou-
velles épreuves. Son mari , connu par
son attachement à la liberté constitution-
nelle, après avoir joui de la faveur popu-
laire et commandé en chef l'armée du
Rhin, fut arrêté par suite de dénoncia-
tions mensongères et condamné à mort.
AI'"* de Beauliarnais eut la douleur de le
voir conduire au supplice, et il paraît
JOS
(i) L'authenltcilé de ce dernirr passage n'esl con-
tetlée parperionne; Blonde! suspecte celui qui re-
garde saint Jean-B.-iptiste , ni.iis sans aucun motif
raisonnable (Voyez JEAN-BAPTISTE). Orig^ne
tes reconnaît tous les deux , dans un temps fort anté-
rieur i. la prétendue falsi&catiun du texte de Josèphc.
qu'elle ne dut elle-même son salut qti'à
un évanouissement (pii fit différer sou
exécution. Le 9 thermidor survint bien-
tôt, et Tallien . dont la feitune avait élé
liée avec M""" do Bt-auharnais . la iU
promiitemenl sortir de prison. Ce ser\ice
dont elle conserva toujours un vif senti-
ment de reconnaissance fut la source de
la prodigieuse fortune à laquelle elle s'é-
leva, et qui parait lui avoir été prédite
dès son enfance. Bai ras lit rendre à .José-
phine tous sîis biens qu'elle avait perdus
l)ar suite de la condamnation de son
mari. Après le 13 vendémiaire, elle ren-
contra chez ce direcieur le général Bonn -
parte qui avait témoigné la plus grand-
envie de la connaître. Dès qu'il la vit , iî
coiïçut pour elle un attachement très vif.
et il l'épousa en 171)6. La même année
Bonaparte reçut le commandement de
l'année d'Italie. Joséphine le suivit dans
cette campagne et s'y fit aimer de ceux
niéme qui redoutaient son mari. Pendant
le temps que Bonaparte passa en Egypte,
la maisoh de Joséphine devint à Paris le
rendez-vous de tous les hommes mar-
qwans de l'époque. En gagnant les cœurs
et en se conciliant l'estime et la reconnais-
sance de tous les partis, elle frayait à son
époux le chemin du jjouvoir suprême. Sa
générosilé n'avait j)cird de bornes , et eile
essayait l'aulorité souveraine, en répan-
dant à pleines mains les bienfaits. Ce fut
à ses larmes que MM. de Polignac et de
Rivière durent plus lard leur grâce. Lors-
qu'elle fut élevée au rang d'impératrice,
Joséphine ne démentit pas cette noble
conduite , et elle redoubla de soins , pour
gagner la couliance de son époux , et mé-
riter l'amour des Français. Le mariage
du prince Eugène ave.^ une princesse de
Bavière, et celui de Hortense avec Louis
Bonaparte, qui devint roi de Hollande,
lit éprouver à l'impératrice une joie qui
fut tempérée par le chagrin qu'elle res-
sentit de se séparer de ses enfans. Bientôt
la mort du lils aine d'Horlense que Na-
poléon se proposait de nommer son suc-
cesseur, lit évanouir une de ses plus chères
espérances •, le projet de divorce que Na-
poléon conçut dans l'enivrement de sa
puissance vint lui porter un coup plus
sensible encore. Joséphine était tendre-
ment attachée à Bonaparte, et elle ne put
qu'éprouver la plus vive douleur de se
voir séparée d'un époux dont la personne
et la gloire lui étaient également chères.
Cependant elle eut aisez de force d'àme
pour consentir à ce pénible sacrifice ,' au-
JOS l
que! le prince Eugène avait été charjjc
j)ar reriip«;rcur de préparer sa irière. La
1 e.-olution de Bonaparte fut rendue pu-
blique le 17 décenii)re 180'.). L'iiilérét de
la France , disail-on . coinniandait cette
séparation. Retirée d'aliord au château de
Navarre , rcx-iiupératrice vint ensuite
s'établir à la Maluiaison , qu'elle enrichit
des plus belles productions de la nature
et de l'art. Les revers qui signalèrent le
déclin de l'empire affectèrent profondé-
ment Joséphine. Elle voyait avec une
amère douleur approcher la crise fatale,
(^uand Napoléon fut contraint d'abdiquer,
Joséphine re{îrella d'avoir perdu le droit
de l'accompagner dans son exil. Les sou-
verains alliés, après leur entrée à Paris,
s'empressèrent de lui offrir leurs hom-
tnages respectueux, et s'efforcèrent de la
consoler. Mais les émotions déchirantes
que tant d'événemens lui avaient luit
éprouver, avaient usé ses forces. Bientôt
elle fut atteinte d'une maladie grave, qui
dans trois jours termina sa vie et ses souf-
frances. Elle expira le 29 mai 1814 au mi-
lieu de ses enfans et de quelques amis (jui
lui étaient restés fidèles. Ses dernières
paroles furent : l'ile-d'Elbe... ! Napoléon!
L'empereur Alexandre se lit représenter
à son convoi par le général Sakem. L'ar-
chevêque de Tours prononça son oraison
funèbre; et ses enfans obtinrent en 182i
l'autorisation de lui ériger un monument
dans l'église de Ruel où son corps avait
clé déposé. On a publié en 1819 des .lié-
moires et correspondances de Imipéra-
Irice Joséphine , 2 vol. in-8°. Mais le
prince Eugène a déclaré depuis qu'il n'y
avait pas dans ce livre une sexde lettre
qui fût de la main de sa mère. Joséphine
protégea les arts et les sciences et aima
passionnément la botanique. Elle a enri-
chi la France d'un grand nombre de
plantes exotiques qu'elle a fait venir de
diverses contrées du globe. On lui a re-
l)!Oché une magnificence excessive, qui
la força de contracter des dettes considé-
rables , pour suffire à ses énormes dé-
penstrs.
J06EPIN. Voij. ARPINO.
JOSIA.S , roi de Juda , succéda à son
père Amon , l'an 6/tl avant Jésus-Christ ,
à l'âge de 8 ans. Il renversa les autels
consacrés aux idoles, établit de vertueux
iTiagistrals pour rendre la justice, et fit
réparer le temple. Ce fut alors que l'ori-
ginal du Li'jre de la Loi^ écrit de la main
de Moïse , fui trouvé par le grand-prclre
Relcias. Sut la fin de son règne , Néchao,
a JOS
roi d'Egypte, allant faire la guerre aux
Mèdes et aux Babyloniens, s'avai)^ jus-
qu'auprès de la ville de Mageddo. qui était
du royaume de Juda. Josias s'opposa à
son passage, et lui livra bataille au pied
du Mont-Carmel : il y fut blessé dange-
reusement, et mourut de ses blessures l'an
GlO avant Jésus-Christ. Le peuple donna
à sa mort les marques de la \A\\s vive
douleur. Jérémie composa un Cantique
lugubre à sa louange.
JOSLAir^ ou GOSLEN de VIERZY,
évéque de Soissons , mort en 1152 , était
un des principaux ministres de Louis
VII, et un modèle de vertu. Il laissa une
Exposiiion du Symbole et de l'Oraison
doniinicale, qu'on trouve dans la Collec-
tio inaxima de dom Marlenne. Il fonda
des abbayes, entre autres Long-Pont, as-
sista au concile de ïroyes , en 1127 , et y
mérita l'estime du pape Eugène III et de
toute la France.
JOSSE ( saint ) , Jitdocus ou Jodocus,
illustre solitaire, était fils de Juthaél, qui
reprit le titre de roi de Bretagne. Son
frère Judicael, résolu de quitter le trône
pour se donner à Dieu, pria Josse de se
charger du gouvernement de ses états et
de l'éducation de ses enfans ; mais celui-
ci, également détaché des grandeurs mon-
daines , sortit de la Bretagne déguisé en
pèlerin, et alla se cacher à Runiac, dans
le Ponthieu , oîi il bâtit une chapelle. Cet
ermitage fut changé ensuite en un mona-
stère célèbre, cpiiestà une lieue delà mer,
près de Montreuil, diocèse d'Amiens , et
se nomme Saint -Josse- sur -Mer. Il y
mourut saintement en 653 ou 668. Il y
avait à Paris une paroisse qui portait son
nom , en mémoire du séjour que ce saint
y avait fait. *
* JOSSEyN l"de Courtenay, seigneur
français , partit pour la Terre-Sainte eu
1101, et reçut du comte Baudouin d'Edesse
son cousin , la souveraineté de quekpies
villes situées sur les bords de l'Euijhrate.^
En 1115. Baudoin lui donna la principauté'
de Tibériade. Après avoir été dans cet
intervalle prisonnier des Turcs pendant
cinq ans , il tomba de nouveau au pou-
voir des Musulmans, en 1118; mais i]
vint à bout de briser ses fers et se dis-
tingua par un grand nombre d'actions
éclatantes , jusqu'à sa mort arrivéti en
1151.
*J0SSEL1N II de Courtenay, fils et suc-
cesseur du précédent , n'hérita pas de la
bravoure de son père. Aulieu de se mesu-
rer contre lesenncmisde la croix, il n'eut
JOS
56
JOS
desse, qu'il alla se confiner dans la déli-
cieuse retraite deTurbesscl sur les Lords
de l'Euphrate, qu'il ne quitta que lorsqu'il
eut appris que la ville d'Edesse était prise
par le sullan de Mossoul. Josselin profita
pour reprendre cette ville des troubles
qui suivirent la mort de ce prince musul-
man : mais, «blii;é bientôt de fuir, Uii-
inéme fut i)ris par le sultan Nourcddin ,
et emmené à AÎep, où il mourut d'ennui
el de misère en ilU7.
* JOSSELIK III, fils de Josselin II, se
battit avec une cxlrcme valeur contre
les musulmans. Pris par les Turcs à la
bataille de Harul en H( S , il resta 10 ans
l)risonnier à Alep , cl ne recouvra la li-
berté que lorsque Baudoin IV, son beau-
frère, roi de Jérusalem, eut payé sa ran-
çon. Baudoin le nomma ensuite grand-
sénéchal de son royaume.
JOSSELIN , médecin anglais dans le
17' siècle , sous le règne de Charles II ,
laissa une I/istotre naturelle des posses-
sions anglaises en Américiue. Il y rap-
j>orle ce qu'il y a de plus rare , avec les
remèdes dont se servent les habitans du
pays pour guérir les maladies , les plaies
et les ulcères.
JOSL'É, était fils de Nun , de la tribu
d'Ephraïm : il naquit en Egypte l'arr ibôk
avant J.-C. Dieu le choisit , du vivant
môme de Moïse , pour gouverner les Is-
raélites. Josné succéda à ce divin légis-
lateur, l'an Ubl avant Jésus-Christ. Moïse
avait conduit le peuple de Dieu jusqu'au
, bord du Jourdain. C'était là, selon l'ora-
cle divin, qu'il devait terminer son mi-
nislèrc et sa vie. La gloire de conduire les
Israélites dans la Terre promise était ré-
servée à Josué. n avait fallu jusque là à ce
peuple un législateur. Il leur^/allail alors
un général et un guerrier ; mais un gé-
néral qui eût j)ourses soldats toute la ten-
dresse d'un père , et un guerrier qui ne
manquât ni des attentions ni de la vigi-
lance du législateur. Tel était Josué. Il
envoya d'abord des gens pour examiner
la ville de Jéricho. Dès qu'ils lui eurent
fait leur rapport, il passa le Jourdain avec
toute son année. Dieu suspendit le cours
des eaux , et le fleuve demeura à sec
dans une étendue de deux lieues. Peu de
jours après ce miracle , Josué fit circon-
cire tous les enfans mâles qui étaient nés
pendant les marches du désert. Il fit en-
suite célébrer la pàque, et vint assiéger
Jéricho. Suivant l'ordre de Dieu , il fit
faire six fois le tour de la ville par l'ar-
mée , en six jours dilférens , les prêtres
portant l'arche et sonnant de la trompette.
Les murailles tombèrent d'elles-mêmes
au septième jour. La ville d'Haï fut en-
suite prise et saccagée, et les Gabaonites ,
craignant le même sort pour leur ville,
se servirent d'un stratagème pour faire
alliance avec Josué. Adonisedec , roi do
Jérusalem, irrité de cette alliance, s'élant
ligué avec quatre autres rois , alla atta-
quer Gahaon ; Josué fondit sur les cinq
rois, qu'il mit en déroute. Pour achever
sa victoire, il commanda au soleil de s'ar-
rêter , et la nature , soumise à sa voix ,
prolongea le jour de 12 heures entières ;
soit que le soleil suspendît réellement
son cours, soit que la terre dans le sys~
tème de sa rotation demeurât immobile,
soit que pç.r une merveille plus simple ,
la lumière jetée par le soleil s'arrêtât sur
l'horixon. « C'était , dit un pieux et solide
» écrivain, pour manifester sa puissance
» aux yeux des nations idolâtres, et pour
» leur montrer l'absurdité de leur culte,
» que Dieu fit alors ce grand miracle.
» Rien n'est difficile au Tout-Puissant. Il
» a établi l'ordre constant de l'univers,
» pour élever l'esprit de l'homme à la
» connaissance de ses perfections invisi-
» blés , par les merveilles visibles qu'il
» expose à ses sens. Il suspendit cet ordre
» en cette occasion , pour montrer que
B les plus grands prodiges ne lui coûtent
» rien ; qu'il est l'arbitre souverain de
» toutes les créatures, et qu'il est abso-
n lument indépendant des lois de la na-
» ture ; parce que lui seul est l'auteur de
» ces loi» , que la nature elle-même n'est
» autre chose que sa volonté loute-puis-
» santé. » L'Ecclésiastique avait long-temps
auparavant exprimé la même observa-
tion avec autant dénergie que de laco-
nisme : IiwocavH altissimum. jwtentem
m oppugnando inimicos undique , et au'
divit illum magnus et sanctus Deus , ut
agnoscant gentes potentiam ejus, quia
contra Deum pugnare non est facile
( Eccl. iô ). Josué, poursuivant ses vic-
toires, prit presque toutes les villes des
Chananéens en six ans. Il distribua les
terres aux vainqueurs, conformément à
l'ordre de Dieu, et après avoir placé l'ar-
che d'alliance dans la ville de Silo, il
mourut à 110 ans, l'an \k1k avant Jésus-
Christ. Il gouverna le peuple d'Israël
pendant 27 ans. Nous avons sous son nom
un Livre canonique écrit en hébreu. Plu-
sieurs savans le lui attribuent, mais 5ans
en avoir aucune preuve démonstrative.
JOU
57
JOU
Los Commentaires de dom Calmet el de
Wasius, sur ce livre, sont les plus estimés.
C'est par ignorance ou mauvaise foi que
d«s écrivains de ce siècle ont osé repro-
chî^r à Josué et aux autres chefs des Hé-
lireux la rigueur dont ils ont usé envers
les habilans de la Pakstine, el envers
quelques antres peuples ; rigueur due
aux crimes énormes dont ils étaient cou-
pables, et si habituels chez eux qu'ils fai-
saient comme partie de leurs iois.
Dieu lui-même avait ordonné cette ri-
gueur ; le Deutéronome et le livre de la
Sagesse nous en instruisent (i). Pour-
qacrl les Juifs n'auraienl-ils pu être les
exécuteurs des arréls que sa justice avait
prononcés contre des nations abomina-
Lies ?... Le danger que les Juifs, mêlés
avecles idolâtres, ne quittassent bientôt
le culte du vrai Dieu , était évident ; et le
culte du vrai Dieu était-il un objet assez
peu important pour lui préférer la
conservation d'un peuple infâme , dont
la malice était incorrigible...? Les Juifs
punissaient la cruauté de ces barbares par
la peine du talion. Je n'ai rien souffert
que je n'aie fait souffrir aux autres^
disait Adonibcsech ; Dieu me rend le
mal que j'ai fait. Yoy. DAVID, AGAG,
ADONIBESECH , etc.
JOTAPIEÎV, tyran, quîs'étant soulevé
dans la Syrie, et fait proclamer empereur
sur la fin du règne de l'empereur Phi-
lippe, fut défait sous celui de Dèce, vers
l'an 249. Sa tête fut portée à Rome.
JOUBERT (Laurent), savant médecin,
professeur royal et chancelier de l'uni-
versité de Montpellier, naquit à Valence
en Dauphiné, l'an 1529, etmourut àLom-
bez en 1583, médecin ordinaire du roi de
France el du roi de Navarre. Reçu doc-
teur à Montpellier, en 1558, il succéda en
<o6C au célèbre Rondelet, son maître et
son ami, dans la chaire de médecine,
puis en 1574, dans la dignité de chancelier
de l'université. Il laissa un Traité con-
tre les erreurs populaires^ 1578, in-8".
Il y a des choses curieuses , dont plu-
(i> Le livrf de la Sagesse leur reproche tel sacrifi-
re» huinaÏDS , i'infaolicide, l'aothropopliagic et tou-
te» lei atrocités qui rendent l'existence d'un peuple
odieuse ^ IVcn et avix hommes. Illos antSquos hahila-
t >res terta tantta luct , quos exhomisti , quoniam
odiiîlia epera /acieiani tibi per medicamina el sa-
crificia injusia ; et filiorum suorum neealiTts sine
misericordia , el eomeslortt visa mm hominum , el
devoratoret sanguinis a medio sacramenio luo , et
pucloreâ pan met animarum inauxilialarum , perdtre
voh'.sti per manus parentum nnstrorum. Sap. la. On
peut voir encore Dei't- 8. Lrvii. i8; etc.
sieurs Sont bien constatées, et d'autres
qui ne méritent pas de croyance. | Uii
Traité du ris , 1579, in-S", 5 parties, avec
la cause morale du ris de Démocrite,
expliqué par Ilippociate, rare; | un ZJmj-
loyue sur la en cogr aphte française . à la
suite du précédent ; | De halnèis antiquo-
rum; De gymnasiis et generibus exer-
citationum apud antiquos celebrium , etc.
La plupart de ses écrits latins ont été re-
cueillis en 2 vol. in-fol., Lyon, 1582. Ils
roulent presque tous sur la médecine; on
en trouve la liste dans les notes deTeissier
sur les Elofjes de de Thou. Ils sont rem-
plis d'érudition ; on pexit même dire qu'il
y en a trop , et qu'elle nuit quelquefois
au jugeiTtent de l'auteur. — Laurent Jou-
berl laissa un lils nommé ISA/'.cJOUBERT,
qui a fait une Apologie de l'oi'thograpJie
fj-ançaise. el qui a traduit quelques ou-
vrages de son p> re.
JOIJBERT (le père Joseph), jésuite
de Lyon, coenu par un Dictionnaire finan-
çais el latin, in-4°, très estimé, surtout
pour le latin, qui est pur, et dont les
exemples sont tirés des meilleurs auteurs;
i! ne vaut pourtant pas celui du père le
Brun, qui, en profitant du travail de son
confrère, Ta perfectionné. Les Diction-
naires de Boudol et de Koëlont fait oublier
celui de Joubert. L'auteur mourut vers
1724.
JOUBERT ( Fraxçois), prêtre de Mont-
pellier, né en 1689, mort le 23 décembre
1763, était fils du syndic des états de Lan-
guedoc, et avait lui-même exercé cette
charge avant dètre élevé au sacerdoce.
Son attachement aux disciples de Jansé-
nius le fit renfermer à la Bastille. Il est
auteur d'un Commentaire sur l'Apoca-
lypse, itïiprimé en 17G2, en 2 vol. in-12 ,
sous le titre d'Avignon. On a encore de
lui divers autres ouvrages, dont les prin-
cipaux sont : I De la connaissance des
temps par rapport à la religion, in-12 ;
I trois Lettres sur l'interprétation des
Ecritures, in-12; \ Explication de l'his-
toire de Joseph, in-12; j Eclaircissement
sur le discours de Job, in-12; ] Traité du-
caractère essentiel à tous les prophètes ..
in-12 ; | Explication des prophéties de
Jérémie, Ezéchiel. Daniel, 5 vol. in-12;
I Cominentairessurles i'i petit s prophète s,
6 vol. in-12 ; eî d'autres ouvrages qui ,
comme les précédens , sont en faveur du
parti dans lequel il s'était laissé en^jager.
Tous les écrits de l'abbé Joubert sur l'E-
criture sainte sont en faveur du miUéna-
risme , et remplis d'allusions malignes et
4
JOU 58
de rêveries ; il n'y est question que d'obs-
curcisseini-nt, de vcrilés proscrites, d'er-
reurs qui infectent le sanctuaire, de pas-
teurs infidèles , du retour des juifs, qui
précédera de beaucoup la fin du monde.
* JOIIBKRT (BAnrnÊLEMi-CATiiEr.iivE),
(;énéral français , naquit en 1769 à Pont-
de-Vaux en Krt^se. Son père, jujje dans
relie ville, le destinait au barreau ; mais
la révolution de 1789 vint le détourner
de ses études. Né avec une imaijination
vive et ardente, il s'enrôla volontairement
en 1791 , ei iiarviut bientôt omnie simple
grenadier au {^rade d'adjudant -général.
S'élant signalé en 179.T à la bataille de
Loano, il fut nommé général de brigade
sur le cbamp de bataille. Depuis il ne
marcha plus que de victoire en victoire,
et fut un des généraux qui par son in-
trépidité contribua le plus à la brillante
campagne dltalie en 1796. Il développa
surtout les plus grands lalens dans la
campagne du Tyrol, que Carnot, dans ses
Mémoi7-es , appelle une campagne de
fjèans. Il fut ensuite appelé au comman-
dement de l'armée de Maycnce, et peu
après à celui de l'arniée d'Italie, en rem-
placement du général Brune. Ce fut lui
qui dirigea 1 opération, exécutée avec
beaucoup d'adresse et de promptitude,
mais peu lionorable. qui eut lieu en Pié-
mont en décembre 1798. Le roi de Sar-
tlaigne fut détrôné et chassé de ses étals
par les troujies françaises qu'il avait re-
çues sous la foi d'un traité. On a prétendu,
dans le temps . que Joubert avait entre-
pris celle expédition sans eu avoir reçu
l'ordre de son gouvernement. Ce qu'il y
îi de certain, c'est que le Directoire en-
voya peu de temps après à Livourne, où
il s'était porté , deux commissaires i)our
traverser ses opérations. Il donna alors
sa démission, et revint à Paris. Après la
révolution <)iii eut lieu dans le Directoire
le; 18 juin 1799. on lui conda de nouveau
le commandement en chef de l'armée
dltalie, pour s'opposer aux progrès des
Ilusscs, commandés par Su\varo^v , qui
avait repris en peu de mois toutes les
conquêtes de Bonaparte. Joubert venait
idors d'épouser iVl"' de Monlholon. 11 se
r-dndità Gènes pour pénétrer, parles mon-
tagnes du Monlferrat, dans le Piémont,
et fut tué à la sanglante bataille de iNovi,
Kiï voulant rallier deux bataillons et com-
mandant une charge à la baïonnette.
#^lie perte affligea vivement l'arnice ,
dent il avait gagné la confiance , en par-
tageant dans toutes les occasions ses liau-
JOU
gers et ses privations. Il dut en grande
partie ses succès à la hardiesse et à Ja
promptitude de ses manœuvres, à l'im-
pétuosité de ses attaques, à son infatiga-
ble activité, et se lit remarquer par un
rare désintéressement dans un temps où
presque tous les généraux s'enrichissaient
des dépouilles des vaincus. Les princi-
paux meneurs, persuadés qu'il convenait
de meltj-e à la tète du gouvernement \m
général, avaient, dit-on, jeté les yeux sur
lui , au refus du général Moreau , comms
le plus capable de commander les armées.
Il lenu''ritails;ins(louleparsesta!cns:mais
il lui manquait ce calme, celte prudence
qui ne permet pas à un général en chef
surtout, de s'exposer comme le dernier
des soldats , sa mort pouvant entraîner la
perte de l'armée , et par suite celle de
l'étal.
JOUFFKOY (Jea\ de), en latin Joff re-
clus , cardinal et aumônier de Louis XI,
né à Luxeuil, dans la Franche-Comté, vers
l'an 1412, étudia d'abord le droit à Cologne
et à Paris , prit l'habit de religieux dans
l'abbaye de Saint-Pierre de Luxeuil, et en
devint abbé. PliilippcleBon.ducde Bour-
gogne , lui procura l'évêché d'Arras , et
sollicita pour lui un chapeau de cardinal.
Pie 11 le promit, à condition que le prélat
engagerait le roi Louis XI à supprimer la
pragmatique-sanction. Jouffroy obtint de
ce nionarque une déclaration telle que le
pape la souhaitait. Mais Louis XI se re-
pen'. int de sa facilité, disgracia l'évêque
d'Arras. Pour remédier aux maux que sa
déclaration pouvait occasioner en France,
il fil de nouvelles ordonnances touchant
les réserves et les expectatives, qui élaienî
presque le seul avantage que l'abolition
de !a pragmatique-sanction avait procuré
au souverain pontife; et jusqu'au temps
du concordat, la cour de Borne ne pul
avoir la satisfaction qu'elle désirait. Ce-
pendant Jouffroy recueillit le fruit de sa
négociation. Le pape ajouta même au
chapeau de cardinal l'cvèché d'Alby;
mais il n'en jouit pas long-temps, étant
mort au prieuré de BuUi , diocèse de
Bourges, en l/i73. Il reste de lui quelques
discours recueillis dans le Spicilége de
dom Luc d'Achéry : son Eloge historique
a été publié par dom Grappin, chanoine
de Besançon, 178.'), ia-8°.
•JOL'G (HuMBKP.T de VILLENEUVE,
baron de ). premier président du parle-
ment de Dijon dans les 15* et 16' siècles ,
né à Lyon vers l'an l/i60 , exerça d'abord
ia charge de lieuienant-géiiéral de la se-
JGU 5
nédiaussfc de sa ville natale. Il fui en-
suite nommé conseiller du roi en son
prand conseil, et reçu-t tuûu de Louis XII
en Iî)05 la dignité de premier président
el de chef de conseil du parlement de
Eourfïognc. Après avoir rempli avec suc-
cès diverses missions au sujet des pré-
tonlions injustes du pape Jules II, Ilum-
bert de Villeneuve fut cliargé de nc[;0cier
avec les Suisses la rançon des otages que
louis de laTrémouilie s'était vu contraint
de leur livrer comme garantie du traité
qu'il conclut avec eux en 1515, pour les
déterminer à lever le siège de Dijon et à
évacuer la Bourgogne. Malgré toule son
habileté , il ne parvint qu'avec beaucoup
de peine à se retirer sain et sauf des
mains des Suisses qui ne le relâchèrent
que moyennant une rançon de 2,000 écus-
soleils. De retour à Dijon, il reprit l'exer-
cice de ses fonctions , et mourut dans
cette ville en 1525. Humbert de Ville-
neuve était membre de l'académie de
Fourvièjes, et fut un des restaurateurs
des sciences et des lettres dans la province
qu'il habitait. On trouvera de plus amples
détails sur cet illustre personnage dans
les Lettfes sur trois Lyonnais , premiers
présidens du parlement de Bourgogne
dans le 16' siècle, par M. Amanton, mem-
bre des académies de Lyon et de Dijon,
Lyon, 1826, in-8°, de 26 pages, et qui ont
été insérées dans les archives du IlliCne.
Les deux autres premiers présidens sur
lesquels M. Amanton a réuni des docu-
mens historiques dans ce savant opusnde
sont Hugues Fournier et Claude Pata-
rin.
JOUIN (Nicolas), né à Chartres, fut
banquier à Paris , el y mourut le 22 fé-
vrier 17S7, à 73 ans. On a de lui : | Pro-
cès contre les jésuites (celui d'Ambroise
Guys), etc. 1750, in-12; | les Sarcelades,
.satire en vers, en faveur des disciples de
Jansénius; | le Portefeuille du Diable, et
daulres fruits de la calomnie et de la
luxure, bien propres à faire connaître la
secte hypocrite dont il s'était fait le cham-
l»ion.
' JOURDAIN ( AxSEi.ME- Louis -Ber-
N.vv.o BRECHILLET), chirurgien, né à
Taris le 28 novembre 1754. Il se destina
I)artir,ulièrement à l'art du dentiste, et
ne resta pas étranger aux autres branches
de l'art de guérir. Il a inventé quelques
iîis'rumens. parmi lesquels on en remar-
que un pour l'opération de la pierre et
un autre pour l'extirpation des polypes
duns l'arrière-bouche. Il mourut le 7 fé-
9 JOU
vricr 1816. Cn lui doit : } Nouveaux été-
mens d'odontalgie , 1756, in-d2 ; ] Traité
(les dépôts dans le sinus maxillaire, des
fractures et des caries de l'une et de l'au-
tre mâchoire , 1760, in-12; | Essais sur
la formation des dents, comparée avec
celle des os. 1766, in-12; | le Médecin des
dames ou \'j7t de les conserver en santés
1771 , iri-12 ; | le Médecin des Iwmmes d^
puis la puberté jusqu'à l'extrême vieil-
lesse, ilTi, in-12; j Préceptes de santé.,
ou Introduction au Dictionnaire de santé,
1772, in-S**. Ces trois derniers ouvrag(!3
sont anonymes. | Traité des maladies et
des opératioiis réellement chirurgicales
de la bouche et des paities qui y corres-
pondent, 1778. 2 vol. iM-8"; | plus eu rs
articles dans 1 • Journal de médecine et
dans \ Année littéraire.
* JOl J H D A ! \' ( A M A blk-Lou i s-Map. i i.-
MiciiiL BiiECHILLET), fils du précédent,
né à Paris le 23 janvier 1788, s'adonna
d'abord à l'étude des lois, qu'il abandonna
liienlôt pour se livrer à celle des langu! s
orientales. Les talens qu'il annonçait
firent créer pour lui la place de secré-
taire-adjoint de l'école spéciale des lan-
gues orientales, qu'il occupa jusqu'à sa
mort, arrivée le 19 février 1818. Son prin-
cipal ouvrage a pour litre : La Perse .
ou Tableau de l'histoire du gouvernement,
de la religion . de la littérature . etc.. de
cet empire ; des mccurs et coutumes de
ses habitons , Paris, 181/1, 5 vol. in-i8 ,
ouvrage composé d'api es les auteurs ori-
ginaux, et qui prouve que Jourdain avait
de grandes connaissances dans l'histoiro
littéraire de ce pays. Il a travaillé à la
Biographie universelle, aux Annales des
voyages . des Mines de l'Orient . et fourni
à M. Michaud plusieurs extraits d'au-
teurs arabes pour son Histoire des croi-
sades.
JOIJilDAN (Raihoxd), vicomte de
Saint-Antoine dans le Quercy, parut à la
cour de Raiiaond Bérenger , comte do
Provence , et s'y signala par ses talens.
Il lit plusieurs pièces de vers pour Ma-
bille de Riez, dont il était devenu amou-
reux. Cette illustre et vertueuse danne
paraissant insensible à ses feux, il prit
le parti de s'éloigner, et se croisa contre
Raimond, comte de Toulouse. Le bruit
ayant couru qu'il avait été tué dans cette
expédition, Mabille en fut si touchée,
qu'elle en mourut de douleur. Le vicomte,
de retour, lui fit dresser une statue Ci>-
lossale de marbre dans l'abbaye de Mont-
Majour à Arles. Il prit ensuite l'habit rç-
JOU
40
JOU
liçieux, renonça à la poésie, et mourut
vers 1286. Avant sa retraite, il avait fait
on traité de Lon Fontiunary de las don-
nas. Son entrt'e dans le cloître parut d'au-
tant plus méritoire, qu'il avait dans le
monde la réputation d'un homme qui
savait unir les lauriers de Mars à ceux
d'ApolUm.
* JOURDAN (Claude), dit de Colom-
bier, voyageur et journaliste français ,
qui vivait à la fia du 17* siècle , séjourna
plusieurs années dans les pays étrangers ;
il exerça le commerce de la librairie à
leydc , où il pul)lia une Histoire abrégée
de l'Europe, 1G86, 5 vol. in-18, espèce
ûtx journal politique rédigé par Jacques
Bernard. Renonçant ensuite à cet éta-
blissement, il se relira dans un village
du Barrois avec une pension du roi de
France , et il y rédigea les observations
qu'il avait faites pendant le cours de ses
voyages. Il y joignit les mémoires manu-
scrits que lui avait laissés un de ses amis,
et fit paraître le tout sous le litre de
Voyages historiques en Europe . depuis
1692 jusqu'en i700 , 8 vol. in-l2 : cet ou-
Trage obtint beaucoup de succès, et eut
plusieurs éditions en France et à l'étran-
ger. En 1704 Claude Jourdan rximmença
à Luxembourg et continua à Verdun un
journal qui a pris le nom de Journal de
Verdun , et qui avait pour litre : Clef du
cabinet des souverains; ce journal parut
jusqu'en 1727, époque où les infirmités
de l'âge forcèrçnt Jourdan à cesser ce
travail qui avait été accueilli avec faveur.
Jourdan a encore donné un Choix de
bon s mots , ou Pensées des gens d'esprit
sur toutes sortes de sujets , Amsterdam ,
1709, in-12, et 1716, in-8°, seconde édi-
tion considérablement augmentée par
ï'auteur.
JOrRDAN { Jeax-Baptiste ) , né à
Marseille , vers 1711, est auteur d'une co-
médie inti\\x\ée l'Ecole des prudes { 1753),
et des ouvrages suivans : | Le Guerrier
philosophe, la Haye (Paris), 1744, in-12 ;
j Histoire d'Aristomene , général des
Blesseniens , avec quelques réflexions sur
la tragédie de ce nom, Paris, 1749, in-12;
\ Histoire de Pyrrhus, roi d'Epire, Ams-
terdam, 1749, 2 vol. in-12 ; | Jbrocome
et Anlhia. 1748, in-12 , roman traduit du
grec, etc.'Il est mort en 1793.
•JOURDAN (Matthieu JOUVE), sur-
nommé Coupe-téte , un des plus lâches
scélérats qu'ait enfantés la révolution,
naquit à Saint -Just, près Lé Puy, en
1743. Après avoir été boucher pendant
quelques années, puis garçon maréchal,
contraint de fuir les poursuites de la
justice , il se fit contrebandier sur les
frontières de la Savoie. Quelques disputes
qu'il eut avec ses camarades de métier le
déterminèrent à s'enrûler dans le rr{fi-
menl d'Auvergne. Il déserta , et se plaça
sur un vaisseau marchand qui fut pris
par les corsaires de Tunis. Emmené es-
clave à Maroc, ce fut là , comme il le di-
sait lui-même, qu'il apprit le métier de
bourreau ; et comme ce métier était assez
conforme à ses inclinations sanguinaires ,
il y devint bientôt habile. Son esclavage
fut assez long; et, de retour en France,
à l'aide de quelques sommes que ses escro-
queries ou ses vols lui avaient procurées ,
il se fixa à Paris , où , sous le nom de Pe-
tit, il ouvrit une boutique de marchand
de vin. Dès le commencement de la ré-
volution, Jourdan fut un de ceux qui
manifestèrent la haine la plus violente
contre le roi , la reine , les nobles , les
prêtres et les propriétaires , c'est-à-dire
contre le bon ordre et la religion. Aussi
on l'employa dans toutes les émeutes et
dans tous les massacres. Il signala d'a-
bord sa cruauté en arrachant le cœur
au malheureux Foulon , et à son gen-
dre l'intendant Berlhier, victimes d'une
populace effrénée qui applaudissait à
ces affreux speclacles {Voyez ces, noms.)
Le 6 octobre 1789 , il se trouvait parmi
les factieux , et coupa la tète aux deux
gardes du corps Deshuttes et Varicourt ,
que plusieurs forcenés lui livrèrent , et
dont le seul crime était d'avoir rempli
leur devoir. Les révolutionnaires ayant
résolu de s'emparer du comtat d'Avi-
gnon, y organisèrent, pour exciter une
révolte, une association de brigands qu'ils
décoraient du titre d'armée de Vaucluse;
le farouche Jourdan en faisait partie.
Celte horde sanguinaire avait déjà pris
Senas, Monteux, etc., et de sa propre au-
torité elle fit fusiller son général Patrix,
qui avait sauvé la vie à quelques pri-
sonniers. Jourdan le remplaça avec le
titre de généralissime ; il ordonna sur-
le-champ le siège de Carpentras , tandis
qu'il laissait à Avignon un de ses lieute-
nans, digne de le remplacer, appelé Les-
cuyer. Le peuple , toujours attaché à son
souverain légitime, voulant s'opposeraux
mesures arbitraires de Lescuyer, se sou-
leva, et celui-ci périt dans l'émeute. Pen-
dant ce temps, Jourdan avait inutile-
ment attaqué Carpentras, d'où il s'était
retiré avec une perltî considérable. Fu-
JOU
M
rimix de tel échec, il retourna a A\ i-
gnon, el venjjea Ja mort de Lescuycr de
la manière la plus féroce. Il lit d'abord
rassembler dans le palais appelé la Gla-
cière soixanle-une personnes , au nom-
bre desquelles se trouvaient treize fem-
mes ; il se rendit sur les lieux , et les fit
assommer à coups de barre de fer. II
tourna ensuite toute sa fureur contre les
principaux habilans, qu'il immolait en
s' enrichissant de leurs dépouilles. Les
prêtres étaient surtout l'objet de sa haine
et de, ses persécutions. Mous ne citerons
pas tous ses crimes ; la plume se refuse
à les rappeler. Il suffira de dire que le
pillage, le meurtre , l'incendie suivaient
toujours ses pas, et que les horreurs qu'il
commit dans le comtat furent telles,
qu'elles éveillèrent l'attention de l'Assem-
blée nationale. Plusieurs membres, el no-
tamment ceux du parti des Girondins^
s'étaient élevés contre les cruautés de
Jourdan; mais leurs voix avaient été
étouffées par les démagoijues de la lUon-
tagne et les salariés des tribunes. L'As-
semblée écoula enlin les justes plaintes qui
s'tilevaienl contre son i)roconsul. Décrété
d'accusation , il trouva le moyen de se
sauver; mais il était trop utile au parti
des jacobins pour qu'ils ne lissent pas
leurs efforts pour obtenir sa (jrâce. Com-
pris, en 1792, dans l'amnistie que l'as-
semblée accorda aux bri^jands d'Avignon ,
il reparut encore dans c«tle ville, où on
l'envoya pour morigéner les habilans :
c'était le mot dérisoire du lenips, et qui
signiliait en réalité piller, détruire et
massacrer. Jourdan, investi de pouvoirs
illimités, s'abandonna à tous les excès
dont il était capable. Avignon fut inondé
de sang II n'oublia pas de comprendre
dans les persécutions qu'il exerçait ceux
qu'il soupçonnait de n'avoir pas applaudi
quelques mois auparavant à sa barbarie.
De retour à Paris, il rendit compte de sa
miïsioa : la Montagne elles tribunes ap-
plaudirent, et on décréta quece monstre,
îa honte de la société, avail bien mérité
de la pallie. Depuis ce moment , il fut
employé à tous les massacres qui eureiU
lieu dans les églises et les prisons de la
capitale. Il élail le plus infatigable des
bourreaux; ce qui lui lit donner l'affreux
surnom dont il se gloriliail. Les bras nus,
et couvert de sang el de sueur, il se pre-
st'ntait ensuite à la barre de la Conven-
tion pour rendre compte de ses exploits,
tt pour recueillir de nouveaux applau-
dissf mens. Il se tenait parfois à la porte
JOU
du conùic C.'il de sulut public, pour con-
duire aux différentes prisons les victimes
qui périssaient ensuite dans les massa-
cres, ou que Ion envoyait à l'éciiafaud.
En les remettant au concierge, il lui disait
tout bas : « Je l'amène du gibier à rac-
» courcir. » Il avail chaudement servi
Robespierre dans les terribles luîtes d'où
celui-ci sortit vain;j[ueur des Girondins,
d'Hébert , de Danton el de tous ses ad-
versaires, et il devait en recueillir la justo
récompense. De nombreuses accusations
vinrent de nouveau peser sur sa tcle. Dé-
noncé comme fédéraliste, conmie ayant
usurpé, à prix de sang, des biens natio-
naux, el méconnu lesautorités publiques,
il fut condamné à mort par ce même co-
mité de salut i)ublic dont il avail si bien
exécuté les ordres. Ce n'éiait pas la pre-
mière fois que le comité vouait à la mort
ses complices et ses bourreaux. Il fut exé-
cuté le 127 mai 1794 : soixante-deux jours
après, Robespierre lui-même le suivit à
l'échafaud. La ligure, l'air et la mise de
Jourdan annonçaient l'atrocité de son
âme. Ce tigre affectait d'avoir toujours
ses habits, ses mains et sa longue et
épaisse barbe tachés de sang. 11 avait un
soin particulier de celle-ci, et quand il
pleuvait, il la couvrait avec son manteau,
de peur que l'eau n'effàcât ces taches dé-
goûtantes. Ses manières, son langage, ses
vices, étaient en tout conformes à la bas-
sesse de sa condiiion, et à celte cruauté,
jamais démentie , qui était le caractère
distiïictif de ce scélérat.
* JOTJKDA.\ ( Athaxvse-Jeam-Lk-
ger) , avocat à la cour royale de Paris,
naquit le 29 juin 17J1, à Saint-Aubin-
des-Chaumes dans le déparleinenl de \n
Nièvre , se livra de bonne heure à létudo
approfondie du droit romain , de l'his-
toire et de la philosophie , cl fut reçu
docteur en droil à la faculté de Paris eu
1812. 11 se destina à l'enseignement do la
science du droit , et noua des relation:»
avec les plus savans professeurs des uni-
versités de l'Allemagne, se mettant ainsi
en mesure de pouvoir réj)andre plus
promptement en France le résultat des
recherches faites parles publicisles étran-
gers. M. INebuhr, étant à Vérone en 1816,-
avait découvert dans la bibliothèque de
la cathédrale de cette ville , plusieurs
vieux manuscrits sous lécrllvire desquels
l'œil attentif pouvait apercevoir quebiues
traces de fragmens de droit ron<ain. Au
moyen de procédés chimiques habilement
employés, deux ccrilures disparurent
4.
JOU l
successivemenl el laissèrenl voir un Icxte
qu'on reconnut pour celui de Gains. I\[.
le professeur Goeschin publia le jtrcniier
une édition de celle jjrécieuse décou-
verte ; M. Clossus de Tubingcn en ap-
porta un excm|)îaire à Paris, et Jourdan,
de concert avec MM. Blondcau et Du-
caurroy, lit connaître au moyen delà T/ié-
mis toutes les circonstances relatives à la
ilérouverie des Institutes de Gaïus : il en
a publié avec les mêmes professeurs une
excellenle édition ; il a réuni en outre,
sous le titre de Jun's civilis ecloya les
Institutes de Gutus . celles de Justinien ,
les Sentences de Paul et les fragmens
d'Ulpien. dont il lit la base de l'ensei-
gneincnt du droit romain. Peu de temps
après cette découverte, il api)rit que
l'abbé Mai avait trouve dans ia biblio-
thèque Valicane de nouveaux manuscrits
palimpsestes contenant des textes Antè-
Justiniens : il s'empressa de prendre des
arranyemens pour faire à Paris, en même
temps qu'à Rome, la publication de ces
fragmens, et c'est à celte circonstance
que l'on doit la prompte apparition des
Fragnœnla juris romani l'aticana. Ce
fut dans le but de propager l'élude de
l'ancien droit romain qu'il lit paraître,
sous les auspices du célèbre jurisconsulte
allemand Haubold , ses Tabulœ chrono-
logicœ , l'un des ouvrages les plus utiles
en droit qui aient paru depuis long-temps.
Aiyant reçu en 1820, du gouvernemeritla
/lission d'aller étudier l'organisation des
justices de paix en Angleterre, il y lit à
ce sujet plusieurs voyages, et finit par
connaître à fond les institutions politi-
ques et judiciaires de ce pays. Dans la
dernièie course qu'il lit dans le but d'ap-
profondir la législation coloniale , il fut
atteint, au. moment où Q se disposait à
revenir en France, d'une lièvre ardente
qui se convertit en lièvre cérébrale , et il
en mourut à Déal jirès de Douvres, le 27
août 1826. On doit à ce jeune publiciste ,
dont la mort prématurée a élé une perte
immense pour la science , plusieurs ou-
vrages importans : | Relation du con-
cours ouvert à Paris pour la chaire
de droit Rofnain , vacante par la mort
de M. lierthelot . Paris , Baudouin , 1819,
in-8° ; | Juris civilis ecloga in quâ . cum
Justinianeis institutionibus . novellisque
IIS et i^T continentur : Gaii institutio-
iium commentarii IV. Ulpiani regula-
rum liber singularis , Pauli senlenliaruin
libri V, et breviora quœdam veteris pru-
dentiœ monumenta , etc., Paris, 1822, in-
2 JOU
12, que l'on joint ordinairement aune
nouvelle édition des institutes , conférée
avec le nouveau Gains; | Faticana juris
romani fragmenta . Romœ nitper ab Jn-
gelo Majo détecta et édita, etc., Paris,
1823, in-S"; | Tabulas chronologie a s qui-
bus historia juris romani externa illus-
tratur A. V. C. JJaubold concinnatas^
etc., Paris, 1823, in-fol. ; | Code des che-
mins vicinaux j etc., précédé d'un ex-
posé entièrement refondu des principes
de la malière, 2' édition, Paris, 1825,
in-8" ; | avec Decursy et Isambert : Re^
cueil général des anciennes lois fran-
çaises , Paris 1822 et années suivantes ,
12 vol. in-8°. La portion de cet ouvrage
relative au règne de Louis XVI jusqu'en
i781, c'est-à-dire, les tomes 15 et 14 , a été
plus particulièrement conliée à ses soins.
Il a élé aussi l'un des premiers collabo-
rateurs de la Thémis ou Bibliothèque da
jurisconsulte de 1819 à 1827 , à laquelle il
a fouriii un grand nombre d'articles.
* JOUUDAîV ( Jeaîv-Bai'tiste , comte),
pair et ntaréchal de France , né à Limo-
ges le 29 avril 1762 , était lils d'un chirur-
gien de celle ville. 11 conunença sa car-
rière militaire en 1778, dans le régiment
d'Auxerrois, et lit la guerre d'Amérique.
Après la conclusion de la j)aix, il revint
dans sa patrie , et lorsque les puissances
étrangères menaçaient la France en 1792,
il conduisit à l'armée du Nord le 2"' ba-
taillon de la Haute-Vienne , dont il était
chef. Ses talens et sa bravoure ne tardè-
rent pas à le' faire remarquer : nommé
général de brigade le 27 mai 1793, géné-
ral de division le 50 juillet suivant, il se
distingua de la manière la plus brillante
à la bataille de Jiondschoote , où il fut
blessé. Promu peu après au grade de gé-
néral en chef, il gagna le 17 octobre , la
bataille de Wallignies, et força le prince
de Cobourg à lever le siège de Maubeuge ;
Il fut ensuite nonnné au commandement
de l'armée de la Moselle , et ouvrit la
campagne de 179/». par le combat d'Arien .
où l'ennenû fut complètement battu. Il
se réunit alors avec quarante mille
hommes à l'aile droite de l'armée du
Nord, devant t.harlcroi, et les troupes
placées sous son commandement prirent
le nom d'armée de Sambre-el-Meuse!
Celte même armée remporta, le 26 juin,
la mémorable victoire de Fleurus , reprit
les places de Landrecies, du Qucsnoy ,
de S''alericiennes, de Condé; plus la:d
elle s'empara des forteresses de Maes-
Iricht, de Luxembourg, et planta ses dra-
JOU
43
JOU
peaux sxiT le Kliin. En scplt mbre, Jour-
dan passa ce fleuve de vive force. Les
liyncs de Mayence ayant clé forcées , il
marcha au secours de lariuée du Rhin-
el-Moselle , et conviul d'un armistice
après une courte, mais brillante campa-
gne dans le Hundsruck. Au printemps
suivant, il s'empara de Francfort, de
VVurlzbourg, et poussa ses succès jusque
près de Ilatisbonne. Il quitta , à cette épo-
que , le commandement de l'armée , et
fut nommé, en 17'J7, par le département
de la Haute-Vienne , au conseil des Cinq-
cents, dont il fut élu président le 23 sep-
tembre. Après avoir donné sa démission
le 15 octobre, et re'çu du Directoire le
commandement de l'armée du Danube ,
il passa le RUin le l*""" mars 1799 , et entra
dans la Souabe, dont l'ijabileté de ses
opérations le rendit bientôt maître, sans
même avoir besoin de combattre. Il ren-
tra plus tard au conseil des Cinq-cents,
cl parut contraire aux vues ambitieuses
de Bonaparte. Cependant il fut nommé
en 1800, par le premier consul, ministre
extraordinaire, puis administrateur-gé-
néral du Piémont, fonctions qu'il exerça
avec autant de talent que d'intégrité. Le
roi de Sardaif];ne voulaiU reconnaitre les
services qu'il avait rendus à cette époque,
lui envoya, en 18t(), son portrait enrichi
de diamans. Nommé maréchal de l'empire
et grand-cordon de la légion-d'honneur
au mois de mai 1804, il passa ensuite au
commandement de l'armée d'Italie. II
remphl les.haules fondions de gouver-
neur de Napleset reçut le titre de grand-
dignilairc des Deux-Siciles. Après avoir
ensuite occupé le poste de major-généraî
de l'armée d'Espagne, où il avait suivi
le roi Joseph en 1808, il sollicita son
rappel en 181/t. Il envoya son adhésion
à la déchéance de Napoléon , ainsi qu'à
tous les actes du gouvernement provi-
soire, et fut confirmé par Louis XVIII
dans son gouvernement de la 15' division
militaire. Il reçut aussi de ce monarque
la croix de Saint-Louis, et au commence-
ment de l'année suivante le titre de
comte. En 1817, il fut nommé gouverneur
de la 7" division militaire, et, en 1818,
le roi l'appela à la chambre des pairs.
Le 11 août 18â0 , Jourdan fut nommé
par le pouvoir né de la grande révolu-
tion qui venait de s'opérer, gouverneur
des Invalides. Il est mort le 26 novembre
1833. Il avait reçu, en 1805, de l'électeur
de Pavière la croix de l'ordre de Sainl-
Hubert. On a du maréchal J ourdan :
Mémoires pour servir à l'histoire de ta
campagne de 1796, Paris, 1818, in-S".
*JOl'llGMAC-SAL\T-MÉARD (Fran-
çois de ), chevalier de Saint-Louis , né eu
1745 à Bordeaux , d'une famille noble et
ancienne, originaire du Limousin, cu-
ira en 1766 dans le régiment du roi (in-
fanterie) , et s'était élevé au grade de ca-
pitaine, lorsque son régiment fut dissous
en 170O. A l'époque où la garnison do
Nancy se révolta, le chevalier de Sainl-
Méard qui se trouvait dans celte ville fuï
investi liu conuiiandemenl général par
les soldats révoltés qui voulurent se por-
ter sur Lunéville; niais trois jours après
ils le condaumèrent à mort, prétendant
être trahis par lui. Il parvint à s'échapper,
mais quelque temps après, il fut arrêté
et enfermé à l'Abbaye , où il était encore
à l'époque des massacres des 2 et 3 sep-
tembre ; il ne dut son salut qu'à une es-
pèce de miracle. 11 lit lui-même connaî-
tre la manière dont il fut épargné datjs
une brochure qui eut plus de 50 éditions,
et qui est intitulée : mon agonie de trente-
six heures. 11 osa signaler dans cet ou-
vrage les égorgeurs des prisons qu'il avait
étonnes jiar son courage , sa présence
d'esprit et par une gaité féconde en sail-
lies. Lié avec des écrivains du parti mo-
narcliiijue au commencement de la révo-
lution , il lit paraître avec eux le Journal
de la cour et de la ville qui eut beaucoup
de vogue. Il s'associa encore à plusieurs
autres publications. On roimaîl de lui une
tragi-comédie en 5 actes sur l'affaire de
Nancy ^ et Correspondance de Mesmer
sur les trois découvertes du bacquct octo-
gone . de V homme-bacquet et du bacquet
moral, 1 vol. in-12 , qu'il composa avec
MM. de For lia de Piles, et Louisde Boisge-
lin. Le chevalier de Saint-Méard est mort
à Paris le 5 février 1828.
JOUSSE (Daa'iel), conseiller hon<i-
raire au chàlelet d'Orléans, né dans cette
ville le 10 février 1704, mort le 21 août
1781 , s'est fait une réputation distinguée
par ses travaux et ses lumières eu ma-
tière de jurisprudence. Il fut l'émule et
l'ami de Pothier. Peu d'auteurs ont été
plus cités de leur vivant, surtout dans le»
matières criminelles. On a de lui :
I Traité de la juridiction des présidiaùx ,
tant en matière civile que criminelle,
avec un recueil de règlemens , Paris , 1764 ,
in-12; | Nouveau commentaire sur ledit
du mois d'août 1G95 , concernant la juri-
diction ecclésiastique . avec un recueil des
jprincipaux édits^ ordonnances et décla-
JOU 4
rations relatifs à la maticre, Paris , 1767,
, 2 vol. iu-12; et d'autres ouvrages estimés ,
niais qui se resscnlcml ricanuioins de la
I précipitation et de Icsprit compilateur
! de ce siècle. La liste complète de ses cu-
■ vrages dont la i»lupart sont classiques en
juiisprudence, se trouve dans les Lettres
sur la profession d'avocat, de Camus.
JOUVE (JosEi'u), jésuite, né à Em-
brun en 1701, morl le 2 avril 17;)8 , est
auteur d'une Histoire de la conquête
de la Chine par les Tartares Mant-
ihoux^Lyoa, illik , 2 vol. in-12. Il s'est
déguisé sous le nom de ï^ojea de Bru-
tiem; il a joint un accoid chronologique
des annales de la uionarchie chinoise avec
les époques de l'ancienne histoire, de-
puis le déluge jusqu'à Jésus -Christ. On
prétend que le père Jouve a tiré celte
histoire de l'élablissemenl de la dynastie
régnante, des Jnnales de la Chine du
père de Mailla, qui n'avaient pas encore
été imprimées ; sources peu propres à
donner de la confiance. On a encore du
même •.Histoire de Zénobie, impératrice.
7'eine de Pal/Il ijre . Paris, 17j8, in-12,
sous le nom de Euvoi de Hauteville ,
écrite d'une manière intéressante, et qui
a eu beaucoup de succès.
JOUVE-JOUllDAN. Voyez JOURDAN
(Mathieu).
JOUVEXCY ou JOUVANCY (Joseph ),
jésuite parisien, né le li septembre 1645,
professa les humanités à Caen, à la Flè-
che et à Paris , avec un succès peu com-
mun, et mourut le 29 mai 1719 à Rome,
où ses supérieurs l'avaient appelé, e'n
1699, pour y continuer V Histoire de la
société. Il eut des désagrémens, parce
qu'il pensait à peu près conune le chan-
celier de Chiverny sur le compte de son
confrère Guignard ( Voyez ce nom ),
quoiqu'il déleslàl la doctrine du tyran-
nicide, comme il s'exprime lui-même
dans celle Histoire : Hanc doctrinam
(ty7-annicidii) detestamur. ut humanis
divinisque legihus vetitam. « Quand on
» songe , dit un auteur moderne , que
» la plus téméraire d* s assertions anti-
» royalistes imputées aux jésuites n'est
» pas comparable pour la hardiesse aux
» maximes de la philosophie, honorées
» aujourd'hui comme des vérités, et mises
» en pratique par l'Assemblée nationale,
» on est bien tenté de gémir sur le sort de
» l'espèce humaine... Mânes de Gretzer,
» de Keller, de Rusembaum, do Jou-
* vency, dont la justice séculière a flétri
» les oijinions , paraissez au milieu de
l JOU
n nous, pour reprociu-r à uu siècle sans
n principes, son inronséqiu'n;:e et son in-
» justice. Votre ci itne est d'avoir autorisé
» des droits vrais ou prétendus contre les
» tyrans ; le suprême mêrile de la pliilo»
» Sophie est de tourner ses sophismescon-
» tre des souverains justes et suges... Im-
» prudens ! en même temps que vous ae«
/> créditiez peut-être une erreur, vous re««
» pecliez l'ensemble des vérités antiques
» de la foi. Vous élitz ciiretietis. Oh !
» voilà ce que l'on ne pardonne pas! A
» la doctrine du tyrannicide, que n'ajou-
» tiez-vous celle de l'athéisme, et \ous
» deveniez oracles de la po!iti(jue. » ( Vo'/.
SANTAREL. ) L'ouvrage du père Jeu-
vency forme la cinquième partie de
l'Histoire des jésuites, depuis 1591 jus-
qu'en 1616, in-fol., impriuié à Rome en
1710. L'historien y traite de la puissance
du pape sur le temporel des rois , suivant
les principes ullramontains ; cela seul
suffisait pour faire condamner celte His-
toire en France : aussi fut-elle supprimée
par deux arrêts du parlement, le premier
du 22 février 1713 ; le second du 24. mars
de la même année; peut-être même le
parlement ne se fùl-iî pas contenté d'une
simple suppression, si le roi n'eût dé-
clare qu'il ne voulait pas qu'on poussât
plus loin celte affaire, content de la dé-
claration faite et adressée à ce sujet par
les jésuites, après laquelle le roi , dit l'a-
vocat-général ( M. Joly de Fleury) dans
son plaidoyer, les ajuycsplus dignes que
jamais de la protection dont il les honore.
L'ouvrage du père Jouvency est écrit
avec autant de pureté que d'élégance ; il
a été continué avec succès par le père
Jules-César Cordara, Rome, 1730, 1 vol.
in-fol. En 1715, on imprima à Liège un
Recueil iri-12 , touchant cette histoire. Ce
recueil n'est pas commun. On a encore du
père Jouvency : | des Harangues latines.
prononcées en diverses occasions , en 2
vol. in-12; | un trailé De ratione disce7idi
et docendi , Lyon, 1692, in-12, ouvrage
excellent, et dont Rollin parle dans des
termes très avantageux, mais que le Traité
des éludes de ce dernier a rendu moins
utile. Il a été réimprimé à Paris, in-12,
1778, chez Barbou, et traduit en français
par M. Lefortier, Paris, 1803, in-12. On,
trouve dans la partie qui regarde l'ensei-
gnement des réflexions sages , des règles
du goût le plus sûr, formé sur les excelîens
modèles de l'antiquité ; des préceptes tra-
cés par la raison et par l'expérience, une
méthode claire et mise à la portée de tous
JOU
45
JOU
les esprils, l'amour de la verlu,le /ile
pour le pi<){jrès des sciences et des bonnes
mœurs. Ce qui parait surtout précieux
dans l'ensemble des différens avis que le
père Jouvency doinie aux maîtres . c'est la
noblesse et la force des motifs qui doivent
dirijjer et soutenir les pénibles travaux
de l'instruction; motifs qui ne prennent
leur essor et leur activité que dans les-
pril de la reljyion cbrétieime, et qui par
là même sont devenus bien rares, et
qu'on ne trouve plus que dans un petit
noinbre d'individus (jue le piïilosopbisme
n'a pas subjugués. On ne peut rien ajouter
à celte {jrande leçon , pleine de senliment,
de tendresse, d'une sage et bienfaisante
philosophie, et qui seule sufiil pour faire
un excellent instituteur : Certat tawiuam
sub persona laleiitem , in exiguis corpus-
culis. divinœ speciem originis ^ linea-
menla cœleslis cognationis , sanguinnn
Christi; in eisdetn prelium crucis, jus
regni, hœredilatem a'ternitatis . conWm-
pletur : tuni vero quam non modo liben-
ier^sed etiam arnbitiose docendi munus
exercebit ! Dans les avis relatifs à la ma-
nière d'apprendre, l'auteur est moins
heureux ; il parait qu'il ne connaissait pas
assez la nature de l'esprit bumain, les
différentes formes et propriétés sous les-
quelles lise développe, pour le diriger
sûrement dans ses travaux. En suivant
ses leçons à la lettre, les génies vifs, ra-
pides et profonds essuieraient tous les
inconvéniens d'une servitude incompa-
tible avec leurs facultés intellectuelles. Le
père Jouvency accumule tellement et fait
succéder si rapidement les lectures les
plus disparafes, qu'il est impossible qu'il
n'en naisse de la confusion et du désor-
dre, et que l'esprit, privé de sa liberté et
du loisir de la réflexion, n'éprouve le
malheur de la stéiililé au milieu de l'a-
bondance , le dégoût et la satiété dans le
sein de la variété et de la plus riche opu-
lence. ( yoyez SACCHIiSl. ) | Appendix
de Dits et heroibics poelicis. C'est lui ex-
cellent abrégé de mythologie que l'on suit
encore, et dont M. Roger a donné une
édition en 1803 avec des notes sur les-
quelles on trouvera une critique judi-
cieuse dans \c Magasin eiicyclopédirpie de
1806, 1. 1", p. hhd. I Des Notes pleines de
clarté et de précision sur Térence, Ho-
race, les Métamorphoses d'Ovide, Perse,
Juvénal, Martial, et sur quelques ou-
vrages de Cicéroii. C'est lui qui le pre-
mier imagina de donner des éditions
d'anciens auicuis classiques avec des
suppressions, ou ediliunes expurgatcc. On
reconnaît dans tous ces écrits un homme
qui s'est nourri des bonnes productions
des anciens. La pureté, l'élégance, la
facilité de son style, la richesse de ses
expressions, l'égalent presque aux meil-
leurs écrivains de l'antiquité. Tous ceux
qui s'intéressent aux belles-lettres et aux
bonnes mœurs lui auront une éternelle
obligation d'avoir mis les auteurs latins
en elat d'être lus par la jeunesse , sans
aucun danger de se corrompre le cœur
en se formant l'esprit.
JOLIVE.XKT (Jea?i), peintre, né en
1647 à Rouen d'une famille d'artistes dis-
thigués, mort à Paris en 1717, reçut le
l)inceau de la main de ses pères. Le ta-
bleau contm sous le nom du Mai^ qu'il fit
à l'âge de 1<J ans, et dont le sujet est la
guérison du paralytique ^ annonça l'ex-
cellence de ses talens. Le Brun présenta
ce maître à l'académie, où il fut reçu en
1675. On le nounna depuis directeur et
recteur perpétuel. On connaît les quatre
morceaux qu'il composa pour l'église de
Saint-Mai lin-des-Chumps. Le roi voulut
les voir, et en fut si satisfait , qu'il or-
donna à Jouvenel de les recommencer,
pour être exécutés en tapisserie. Jouvenet
peignit donc les mêmes sujets ; mais en
homme de génie , sans s'attacher servi-
lement à ses premières idées. Il se sur-
passa lui-njéme dans ces derniers ta-
bleaux, qui sont aux Gobelins. Le czar
Pierre l" ayant vu les tapisseries qui
étaient exécutées d'après lui, en fut
frappé, et les choisit pour la tenture que
le roi lui avait offerte. Louis XIV connais-
sait le rare mérite de Jouvenel; il le
chargea de peindre à fresque les douze
autres , au-dessous de la coupole de l'é-
glise des Invalides; et l'illustre artiste
l'exécuta de la plus grande manière. Son
pinceau fut aussi employé dans la clia-
pelie de Versailles, lin travail excessif
altéra sa santé ; il eut une attaque d'apo-
plexie, et demeura paralytique du côlé
droit. Cependant il dessinait encore de la
main droite , avec beaucoup de difticulté.
Eniin il s'habitua à se servir de la inain
gauche. On voit plusieurs magnifiques
ouvrages qu'il a exécutés de cette main,
entre autres le tableau appelé le Magni-
ficat, dans le chœur de Noire-Dame de
Paris. Les autres ouvrages les plus es-
timés de ce peintre sont : La Magdeleine
chez le Pharisien ; Jésus-Christ chassant
les vendeurs du temple ; La Pêche mira-
cideuse ; La Résurrection de Lazare ; La
jov U
descente de croix ; Lslher devant yissué-
rus ; un grand nombre de Fresques, etc.
Le Musée du Louvre possède huit Ta-
bleaux ou portraits de Jouvenel. Ce pein-
tre avait une imagination vive, beaucoup
d'enjouement dans l'esprit, de franchise
el de droiture dans le caractère. Son pin-
ceau ferme et vigoureux, la lichesse de
sa composition, sa grande manière, char-
ment et étonnent, mais son coloris est
trop négli;jé.
JOU Y ( Lodis-Fp.axçois de ) avocat au
])arlem('nl el du clergé de France, né à
l'aris le 2 mai \l\k, mort dans la ménie
ville le 7 février 1771 , se livra particu-
/lèrcment aux matières ecclésiastiques. 11
fut chargé d'îs affaires du clergé, el s'en
acquitta avec hoimeur. On a de lui :
I Principes sur les droits et obligations
des gradués, ip-i!2; | Supplément aux lois
civiles dans leur ordre naturel, in-fol. ;
I Arrêts et règlemcns recueillis et nds en
ordre, i752, in-4"; ] Conférences des or-
donnances ecclésiastiques, 1753, in -4".
Après sa mort, on trouva chez lui ma-
nuscrits : Principes et usages concernant
les dîmes, 1770, in-i2, el la Coutume de
Me aux , ouvrage qu'il avait déjà mis au
joiu-, el dont il avait préparé une nou-
velle édition.
JOVE ou GIOVIO (Paul), historien
célèbre , né à Corne eu Lombardie le 15
avril li83 , vécut sous quatre pontifes,
savoir : Léon X, Adrien VI , Clément YII
dcMédicis, son constant protecteur, el
Paul III. D'abord médecin, il fut ensuite
élevé sur le siège épiscopal de Nocera. Il
désira en A ain d'être transféré à Côme ;
Paul III lui refusa constamment cet évè-
ché. François P' le traita avec plus de
di->linctio!». Il lui écrivit des lettres pi-
teuses , el lui accorda une pension consi-
dérable. Celte pension fut retranchée par
le connétable de Monlniormci, sous le
règne de Hemi II. Paul Jove s'en vengea
en maltraitant le connétable dans le 51'
livre de son histoire. Il ne faisait pas dif-
licullé d'avouer « qu'il avait deux plu-
» mes, l'une d'or et l'autre de fer, i)Our
» traiter les princes suivant les faveurs
s ou les disgrâces qu'il en recevait. » Il
paraît , par ses lettres , qu'il avait l'àme
cxtrèmemeiil intéressée. On n'a jamais
quêté avec autant d'assurance : il de-
mande à l'un des chevaux, à l'autre des
cmûlures. Charles -Quint, les ducs de
Milan , d'Urbin, de Mantoue, de Ferrare,
de Florence, le marquis de Pescaire, et
autres princes , le comblèrent de présens.
11 amassa de grandes richesses, doiit il
employa une grande partie à balir, au
bord du lac de Cùnie el sur les ruines de
la superbe Villa de Pline le Jeune, un
palai.-i magnifique , orné de jardins somp-
tueux. Les chefs-d'œuvre des arts qu'il y
réunit firent donner à ce palais le sur
nom de Musée. Il y avait, entre autres,
une superbe collection de portraits des
personnages les plus célèbres. Au sac de
Rome, par le comiélable de Bourbon, il
perdit tout , jusqu'à un coffre de fer où
étaient enfermés son argenterie et ses
écrits. Ce colfre tomba au pouvoir de
deux Espagnols , l'un d'eux garda l'argen-
terie, et l'autre céda les écrits pour un
canonicat que lui accorda Clément VII.
Cet historien mourut à Florence en 1532,
à 70 ans : il était conseiller de Côme de
Médicis. On a de lui : | une Histoire en
45 livres, qui commence à l'an 14%, et
qui finit en 1544 ; Florence, 1530 et 1552,
2 vol. in-fol. Il y en a une vieille traduc-
tion française, Lyon, 1552, in-fol. La
\ariétc el l'abondance des matières la
font lire avec plaisir. La scène est tour à
tour en Europe, en Asie, en Afrique. Les
principaux événemens de cinquante an-
nées, décrits avec beaucoup d'ordre et de
clarté, forment un corps d'histoire qui
pourrait élre très utile si la fidélité de
l'historien égalait la beauté de la matière.
Pensionnaire de Charles-Quinl , et pro-
tégé par les Médicis, il parle de ces
princes avec des éloges quelquefois ou-
trés. Il consacra 57 ans à la composition
de son Histoire, qu'il commença étant
encore fort jeune. Léon X en ayant lu
quelques passages devant les cardinaux,
le compara à Tile-Live. | Les Fies des
fiommes illustres ; \ Les Eloges des grande
hommes. Ou reproche à ces deux ouvra-
ges, ainsi qu'à sa grande Histoire, un
style trop oratoire, un ton trop enflé;
mais ils sont utiles pour la connaissance
des faits el dits des hommes célèbres.
I Fies des douze Visconti , souverains de
Milan; j Plusieurs autres Ouvrages ,Adin%
lesquels on remarque de l'esprit, mais
peu de goût et peu de justesse. On a re-
cueilli toutes ses OEuvres à Bâle, en G
vol. in-fol., reliés ordinairement en trois.
C'est l'édition la plus complète, elle est
de 1578. — Son frère, Bk\oit JOVE, com-
posa plusieurs ouvrages , entre autres une
Histoire des Suisses; et son petit-neveu ,
Paul JOVE , qui fut aussi évéque de INo-
cera, el mourut en 1382, cultiva avec
succès la poésie italienne.
JOV 47
•JOVELLAAOS (don Gaspard-Mei.-
cmoR de), savant espagnol, naquit. à
Gijon dans les Asluiies , en 17i9. Il étudia
dans l'université d'Alcaia-de-IIénaiès, et
ensuite à Salanianque. 11 était profondé-
ment instruit dans les lois, dans les lan-
gues savantes, l'histoiie, l'antiquité, la
lillcrature ancienne et moderne; il pos-
sédait l'anylaiSjle fraiiçais et l'italien;
ses poésies le mirent au ranjj des pre-
miers poètes espagnols de son temps.
Quelques L'ssais lyriques qu'il publia lui
raérilèrcnt d'être reçu, en 1770, à l'aca-
déuiie espagnole ; il avait alors 21 ans. Le
minisire l'Iorida-Bianca ayant su appré-
cier les talons de Jovellanos, le présenta
à Charles 111, qui le nomma cpnseiller
d'état, et lui contia les affaires les plus
délicates qu'il conduisit toujours avec
homieur et succès. A la mort de ce mo-
narque, le minisire ayant été ron\oyé,
le crédit de Jovellanos diminua ; mais il
sut se maintenir encore U ans en place.
Ses ennemis n'attendaient qu'une occa-
sion pour le perdre toul-à-iait. 11 la leur
fournit lui-même en proposant, pour
subvenir aux besoins de l'Espagne, que
ruinait l'alliance de la France, d'imposer
une forte taxe sur le haut clergé. On exila
Jovellanos; cependant sa proposition fut
mise à exécution peu de temps après. Il
fut ra])pelé (Mi l/UD , et remplaça Llaguno
dans le ministère de grâce et de justice
( de l'intérieur ). Jovellanos voulut être
chef indépendant du département qui lui
avait été conlié ; ce qui ne pouvait guère
se concilier avec le despotisme que le
prince de la Paix exerçait sur les autres
ministres. Ce favori lit exiler de nouveau
Jovellanos à l'Ile Majorque, où il fui ren-
fermé dans le couvent des Chartreux de
Paîma, après avoir été 8 mois seulement
ministre. On l'accusa d'avoir fait j)ar-
venir à Charles IV un mémoire où il dé-
voilait la conduite assez équivoque de
son favori. Quoi qu'il en soit de ce mé-
moire , ainsi que de bien d'autres, qui ne
produisirent aucun effet sur l'esprit du
roi, Jovellanos fut soigneusement gardé
dans le couvent des chartreux de cette
ville. A l'invasion des Français en Espa-
{jne ( 1808 ) , on lui rendit la liberté, et il
lut élu un des membres de la junte su-
prême. Deux ans après , il refusa le mi-
nistère de, l'intérieur que Joseph Napo-
léon lui avait fait offrir. Cependant ses
liaisons avec le comte de Caharrus, et la
prédilection qu'il avait toujours monlrée
pour la France, où il avait fait plusieurs
JOV
voyages, le rendirent suspect aux yr/iix
d'une nalion indi{;nemenl trahie j»ar re
gouvernement jjour qui elle avait fait ks
plus grands sacrifices. On le désigna
connue traître, en l'accusant de conser-
ver des intelligences avec l'ennemi, et il
périt en 1812 dans une énu'ute populaire,
avant môme qu'on pût vérilier ces accu-
sations. Jovellanos avait un caractère
affable; il élait lié avec les savans et les
hoimnes de lettres les plus distingués do
la nation, tels que Campomanès, Caba-
nillas, Yriarte, Moralin , Melendez , etc.,
et fut en correspondance avec plusieurs
académies de l'Europe. Dans le cours de
sa vie, on peut seulement l'accuser d'a-
voir été l'auteur d'une mesure peu con-
venable à un honnne qui semblait atta-
ché à la religion et à ses ministres. Il a
laissé : | Recueil de Poésies, Madrid,
1780, in-8°, où l'on trouve sa comédie FA
Delinquente hotiorailo ( L'honnèle cri-
minel), qui eut un succès méiité, et fui
traduite en français i)ar l'abbé Meylar, vi-
caire-général de Marseille. I Discours pro-
noncé dans r académie des heaux-ai'ls de
Marseille en 1781 , Madrid, 1782. Ce dis-
cours, écrit en français, fut couronne i)ar
cette même académie. On y remarque un
parallèle assez. j)iquant entre Gongora et
Gionlano; le premier, coiiupteur du bon
goût dans la jtoésie, et le second dans la
peinture. L'anglais Cumberland publia,
d'après cet éciit, ses lié/lexion s sur les ar-
tistes espagnols (Londres, 1784). | Mé-
moi7~es sur rélahlissement des monls-de-
pièté. Madrid , 1784, in-4" ; | Réflexions sur
la législation d' Espagne ^ ibid. , 178a;
morceau cxcelienl (pii prouve le talent de
l'auteur comuie jurisconsulte ; | Lettre
adressée à Ca/iipomanès , sur le projet
d' un trésor public , ibid.,178G; j Informe
sobre la leij agraria , ou Rapport sur la
loi agraire, ibid., 1795,1821 : c'est l'ou-
vrage qui a fait le plus d'honneur à Jo-
vellanos. Cet excellent ouvrage a été tra-
duit littéralement par M. de Laborde , et
inséré dans son Itinéraire de l'Espagne^
dont il forme la partie principale du litre
Agriculture ,''1'^ \^i\., p. 105-2%. On lui
doit aussi une tragédie. Le Pelage, }ou€tî
à Madrid en 1790, et qu'on cite comme
une des meilleures que possède l'Espa-
gne ; plusieurs savans Mélanges sur dif-
ferens sujets politiques, économiques,
administraLifs, etc. ; des Traductions des
classiques français, italiens et anglais,
notamment une version en vers espagnols
du Paradis /j^/y/w de Milton, qu'on croit
JOV
A8
JOV
bien supérieure à celle qui a paru depuis.
Il avait légué de son vivant aux élèves de
l'académie de marine dans les Asluries ,
sa riche bibiiotlièque, composée de plus
de quatre mille volumes.
JOVIEN ( Flavius - Ci.audius JOVIA-
NUS), fils du comte Varrouien, naquit
l'an 550 à Singidon, aujourd'hui Segedin
(quoique d'autres prétendent que Singi-
don est Belgrade ou Semendria), ville
de la Mysie. Liu empereur par les sol-
dats de l'armée romaine , après la mort
de Julien l'Apostat , en 503, il refusa d'a-
bord la couronne impériale, témoignant
qu'il ne voulait point coivmander à des
soldats idolâtres ; mais tous lui ayant pro-
testé qu'ils étaient chrétiens, il reçut la
pourpre. Les affaires étaient en très mau-
vais état ; il tâcha d'y mettre ordre, et
rommença par faire la paix avec les
Perses. Quelques auteurs ont blâmé très
mal à propos cette démarche, puisque
sans cela il ne pouvait retirer ses troupes
du pays où Julien les avait engagées :
et si celte paix fut peu honorable, ce fut
la faute de son imprudent et fougueux
prédécesseur, et non pas la sienne. L'ar-
mée romaine, en effet, était dans un état
tellement fâcheux, que l'auteur Ammien,
qui faisait partie de l'expédition, dit,
en parlant de cette paix , qu'elle,« fut
» une faveur de Dieu, que les Romains
» n'eussent osé espérer. » Il commanda
de fermer les temples des idoles, et dé-
fendit leurs sacrilices. Il eut surtout un
soin extrême de rappeler saint Athanase
et les autres prélats exilés , et de témoi-
gner aux hérétiques qu'il ne voulait point
souffrir de discorde. Cependant il ne
jouit ijas long-lemps de l'autorité dont il
se servait si dignement. Il mourut, étouffé
par la vapeur du charbon, qu'on avait
allumé dans sa chambre pour la sécher ,
ou empoisonné . à l'âge de 35 ans, dans un
lieu appelé Dadasiane, entre la Galatie et
la Bilhynie , en ôG/», n'ayanî tenu l'empire
que sept mois et vingt jours. Jovien avait
été capitaine de la garde prétorienne du
temps de Julien, et ce fut dans ce temps
que ce prince, que l'ignorance ou la
mauvaise foi nous représente aujour-
d'hui comme un philosophe tolérant, vou-
lait le faire i énoncer à sa religion, ce
qu'il refusa généreusement. Son règne
fut trop court pour qu'on puisse connaiiro
s'il aurait été glorieux ; mais l'on ne peut
douter que J()\ien. élant bon chrétien,
n'eût clé bon ])rince. L'abbé de la Blet-
fene a écrit son IJntoire ea i vol. in-i2.
II fut appelé Joviumis en l'honneur du
corps des Joviens, fermé par Dioclélien,
surnommé Jo^'jus , qui en donna le com-
mandement à Varrouien. U avait d'abord
exercé auprès de Julien la charge hono-
rable de jji-emier domestique , qui, plus
lard , devint , ainsi que celle de iogothète,
une des plus émineulesde l'empire.
JOVL\ , noble gaulois, et capitaine
plein de bravoure, fut déclaré empereur
à Mayence l'an ili , dans le temps qu'on
assiégeait le tyran Consianlin à Arles. Il
dut ce dangereux honneur à la brigue de
Goar, Alain, et de Gundicaire, chef des
Bourguignons. Il associa à cette dignité
son frère Sébastien ; mais ils ne jouirent
pas long-temps de la pourpre. L'an /n3,
Atauli)he, roi des Visigoths, qui suivait
le parti de Jovin, l'ayant abandonné, cet
usury)aleur fut lue dans le temps qu'on
le conduisait à l'empereur Honorius, qui
était alors à Rave nue, et auquel on porta
aussi la tète de Sébastien.
JOVIiME!\ , hérésiarque du 1* siècle,
moine de Milan, infecta plusieurs mo-
nastères de ses erreurs, après être sorti
du sien , où il avait vécu très austère-
ment , ne mangeant qu'un peu de pain,
buvant de l'eau, marchant nu-pieds, et
travaillant de ses mains. II passa de Mi-
lan à Rome, et engagea plusieurs vierges
à se marier, voilant son libertinage, et
celui de ses disciples, de la fausse maxime
que l'état de mariage est aussi parfait que
celui de la virginité; doctrine contraire
à celle de J.-C. , et réfutée par l'apôtre
saint Paul. Les erreurs qu'il soutint en-
core furent, que la mère de J.-C. n'était
pas demeurée vierge après l'enfante-
ment ; que la chair du Sauveur n'était
pas véritable , mais fantastique ; que les
jeûnes et les autres œuvres de pénitence
n'étaient d'aucun mérite. Ce moine se
conduisait suivant ses principes. Saint
Augustin et saint Jérôme, qui combat-
tirent ses impiétés et ses relàchemens,'
lui reprochent son luxe , sa mollesse et
son goût pour le faste et les plaisirs. Jo-
vinien fut condamné à Rome par le pape
Sirice , et à Aliîan par saint Ambroise,
dans un concile tenu en 590. Les empe-
reurs Théodose et Honorius l'exilèrent,
le premier dans un désert , et l'autre dana
une île , où il mourut misérablement ,
comme il avait vécu, vers l'an 412. Saint
Jérôme exprime son genre de mort d'une
manière si énergique , qu'il serait bien
difficile de la rendre en français : Inter
phasides aves el cames suillas non tant
JOY A9
emisit spiritum quam eructavit. Voyez
VIGILANCK.
JOVIÏA RAPICIUS, né dans le Bres-
san, est auteur d'un ouvrage divisé en
cinq livres sur le nombre oratoire : il pa-
rut à Venise l'an 1554, dédié au cardinal
Polus, de l'iuiprimerie de Paul Manuce,
lils d'Aide. Quelques {jens d'esprit et de
lettres regardaient le nombre oratoire
comme une chimère, dont l'objet n'a rien
de fixe , et varie au gré de nos caprices.
Rapicius montre qu'il y a un ihythme ,
une cadence propre de la prose comme
du vers ; il donne d'excellenles leçons
sur la m.anière de le répandre dans le
discours, et lait sentir, en finissant, les
mépiises où sont tombés Philippe Mè-
lanchthon et Gérard JJulcodian^ en dé-
cidant qu'il était impossible ou inutile
de donner sur cette matière des instruc-
tions qu'on pût ramener à la pratique.
JOVEÏISE ( Guillaume , vicomte de ),
était fils puîné de Jean de Joyeuse , gou-
verneur de ISarbonne, d'une famille il-
lustre. Il naquit- au château de Joyeuse
dans le Vivarais. On le destina d'abord
à l'Eglise, et il eut même Tévêché d'A-
leth , du vivant de Jean Paul, son frère
aine-, mais comme il n'élait pas lié par
les ordres sacrés et que son frère vint à
mourir , il embr«ssa la profession des
armes. Il servit utilement le roi Charles
IX dans le Languedoc , durant les guerres
civiles de la religion, fut fait maréchal de
France en 1582 , par le roi Henri III, et
mourut fort âgé , en 1592. Il avait épousé
en 1560 Marie de Dutaruny, quilul donna
sept fils.
JOYEUSE ( Anne de ) , fils du précé-
dent, duc et pair, et amiral de France,
premier gentilhomme de la chambre, et
gouverneur de Normandie, naquit vers
1361. On le désigna d'abord sous le nom
d'Arqués. Il fut un des principaux favoris
du roi Henri III qui lui fit épouser Mar-
guerite de Vaudemont-Lorraine, sœur
puinée de la reine Louise Vaudemont
son épouse, et se chargea de la dépense
de son mariage, qui s'éleva à 1,200,000
livres, somme exorbitante pour le temps ,
et la situation de la France alors ruinée
par les guerres civiles. Le prince le créa
dans un âge encore tendre duc et pair ,
amiral de France , premier gentilhomme
de la chambre et gouverneur de Nor-
mandie. Joyeuse commanda, l'an 1586,
une armée dans la Guyenne contre les
huguenots ; il y remporta quelques avan-
tages. Il se distingua au siège de la Fère,
7.
JOY
où il eut la mâchoire brisée d'un coup
d'arquebuse : le roi le récompensa ma-
gnifiquement. Joyeuse ne voulut faire
aucun quartier à un détachement qu'il
surprit au Wont-Saint-Eloi. Cette sévé-
rité fut punie bientôL après par une vé-
ritable barbarie ; car ayant été vaincu à
Coutras le 20 octobre 1587, les huguenots
le tuèrent de sajig-froid , en triant le
Mont-Sai7it-Eloi! quoiqu'il offrit 100. QOO
écus pour racheter sa vie. L'amiral de
Joyeuse , inexorable les armes à la main ,
était doux cl généreux dans la société.
Un jour ayant fait attendre trop long-
temps les deux seciétaires d'clat dans
l'antichambre du roi, il leur en lit ses
excuses, en leur abandonnant un don de
100,000 écus que le roi venait de lui
faire.
JOYEUSE (FiîAAçoïs de), cardinal,
frère du précédent, né en 1562, fut suc-
cessivement archevêque de Narbonne,
de Toulouse et de Rouen. Il fut chargé
des affaires les plus {'pineuses et les plus
importantes ])ar les rois Henri III, Henri
IV et Louis XIII. Il s'acquit tous les suf-
frages par sa prudence , par sa sagesse
et par sa capacité dans les affaires. Il
présida l'assemblée générale du clergé
en 1003 , devint en 1606 légat du pape en
France, sacra Marie de Médicis à Saint-
Denis et Louis XIII k Reims , présida les
états-généraux en 1614 , et mourut à Avi-
gnon, doyea des cardinaux, en 1615, à
53 ans. Il s'était illustré par plusieurs fon-
dations ; 1° d'un séminaire à Rouen ; 2°
d'une maison pour les jésuites , à Pon-
loise ; 5" d'une autre à Dieppe pour les
Pères de l'Oralolre. Aubery a publié
VHistoii'e du cardinal de Joyeuse , etc. ,
Paris, 1634, in-fol. [voyez AUBERY.)
JOYEUSE (Henri de), frère des pré-
ccdens,né en 1567, porta d'abord les
armes avec distinction jusqu'en 1587. La
perte d'Anne son frère et de sa femme,
et une vision qu'il crut avoir eue , le dé-
terminèrent à faire profession chez les
capucins, sous le nom de frèi'c Ange.
L'année d'après , les Parisiens ayant ré-
solu de députer à Henri III, pour le
prier de revenir habiter la capitale , frère
Ange se chargea de la commission, mais
ce fut sans succès. Il resta dans sonordie
jusqu'en 1592. Le grand-prieur de Tou-
louse son frère, s'étanl noyé dans le
Tarn, vers ce temps-là, les ligueurs du
Languedoc l'obligèrent de sortir de son
cloilre pour sa mettre à leur tèle. Le
guerrier capucin combattit vaiilanuîicut
JUA
50
JUA
pour le parli de la ligue , jusqu'en 1596,
«ju'il lîl son accommodement avec le roi
Henri IV. Ce prince l'honora du bâton de
maréchal de France; mais, quelque temps
après, le roi lui ayant adressé quelques
paroles un peu fortes , il reprit son an-
cien habit. Le cloilre ne fut plus pour
lui qu'un tombeau. Livré aux jeûnes,
aux veilles, et à la plus rigoureuse péni-
tence , il ne pensa plus au rôle qu'il avait
joué sur le théàtie brillant et fragile du
inonde, que pour répandre des larmes
cimères. Il mourut à Rivoli, près de Tu-
rin, en 1C08, à 41 ans. 11 avait épousé la
sœur du ducd'Epernon,qui ne lui donna
qu'une lille, Henriette - Catherine , la-
quelle épousa en lo99 le duc de Monlpen-
sier, et en 1611 le duc de Guise. Elle
njourut en 1656, à 71 ans. M. de Callières
a écrit la Vie de frère Ange de Joyeuse ,
Paris, 15iM,iii-8". Ml-: est édiliante , et
bien propre à \t jusiilier contre ceux qui,
sans raison, oui voulu suspecter la sincé-
rité de sa piété.
JIIA.\ d'AUTRICHE ( don ). fils na-
turel de l'empereur Charles-Quint, qui
déclara ce secret en mourant à Philippe II
son {ils. naquit à Ralisbonne en 1546. C'est
1res ealomnieusement , comme le failob-
.servcr le président Hénault, qu'un for-
cené a avancé que Charles l'avait eu dé sa
propre sœur Marie d'Autriche, gouver-
nante des Pays-Bas ; il l'a eu d'une alle-
mande, fille de condition, nommée Barbe
lîlomberg ; et stlon quelques-uns , d'une
princesse . mais qui n'était pas de sa fa-
mille , et cela dans le temps qu'il était
veuf, car si ce grand et religieux prince
ne fut pas toujours à l'abri des faiblesses
humaines , il ne viola jamais la foi con-
jugale. Le jeune prinee fut élevé secrè-
tement à la campagne par la femme de
Tx)uis Quijada , grand maître de la maison
de l'empereur. Après la mort de Charle.s-
Quint , Philippe II l'appela à la cour d'Es-
pagne , où il se distingua de bonne heure
par sa politesse et sa grandeur d'âme.
Philippe II l'envoya en 1570 contre les
Maures de Grenade , qu'il réduisit. La
haute réputation qu'il acquit dans celte
guerre le fit choisir pour généralissime
d'une flotte de près de 500 voiles, que l'Es-
pagne et l'Italie avaient préparée contre
les Turcs. Les chrétiens et les musulmans
en vinrent aux mains le 7 octobre 1571 ,
avec un acharnement sans exemple, vers
le golfe de Lépante , proche de ces mêmes
lieux où Antoine et Auguste combatti-
rent autrefois pour l'empire du monde.
Don Juan partagea ses vaisseaux en trois
divisions : la droite était commandée par
le célèbre André Doria, la gauche par Bar-
baiigo, amiral vénitien ; le prince com-
mandait le centre. Par sa valeur, il força
la victoire à se déclarer pour lui , s'em-
para de lacapilane ennemie, et obligea les
Turcs à prendre la fuite. Les vainqueurs
prirent 150 galères . en brûlèrent ou cou-
lèrent à fond 55 , tuèrent 25,000 Turcs,
parmi lesquels était Ali-Bacha, leur géné-
ral , firent 10,000 prisonniers , et délivrè-
rent 15,000 esclaves chrétiens. Don Juan
donna le combat malgré don Louis de Re-
quesens , qu'on avait chargé de modérer
l'ardeur de ce prince intrépide. Il voulait
aller droit à Conslanlhiople ; c'était le seul
parti qu'il avait à prendre ; son conseil s'y
opposa. Dans la consternation où étaient
les musulmans, on pouvait non-seulement
se rendre maître de la capitale de leur
empire, niais encore chasser de la Thrace
et de la Grèce ces fiers ennemis des chré-
tiens. Don Juan d'Autriche se fit par ses
exploits la plus grande réputation dont
peu de capilaints ont joui, o Chaque na-
» tion, dit un historien, ne compte queses
» héros, et né^jUge ceux des autres peu-
» pies. Don Juan, comme vengeur de la
» chrétienté, était le héros de toutes les
» nations. » On le com[ftirail à l'empereur
Charles-Quinl , son père , dont il avait la
figure, la valeur, l'activité, le génie, et
surtout l'humanité, la générosité, le zèle
de la religion , qui achèvent et assurent
les conquêtes. Il mérita surtout l'amour
et l'admiration des peuples , lorsque deux
ans après il prit Tunis , comme Charles-
Quint, et en eunnena le roi prisonnier.
Don Juan se couvrit d'une nouvelle gloire
lorsque en 1576, il eut été nommé gou-
verneur des Pays-Bas. Il employa d'a-
bord les voies de la douceur ; mais no
pouvant vaincre l'obstination des habi-
tans, il fut obligé de recourir à la force,
Il se rendit maitre de Namur , de diver-
ses places , et défit entièrement les rebel-
les dans les plaines de Gembours, le 51
décembre 1577. Les ennemis perdirent
6,000 hommes dans cette journée , qui ,
au rapport de Ferreras, ne coûta la vie
qu'à 200, et suivant Strada à 100 espagnols.
Le général Goignies fut pris avec l'artil-
lerie, les bagages et les drapeaux. Le
vainqueur profita de la victoire , en sou-
mettant rapidement Louvain , Diest, Ni-
velle, Philippeville, Limbourg. Une mort
prématurée enleva ce héros au milieu de
ses conquêtes. 11 mourut lei"oclobrc de la
JUA SI
même année , ù 35 ans, sons les tnnrs de
Namur, d'une maladie si aifruëet si extra-
ordinaire , que l'on crut que sa mort n'é-
tait point naturelle ; et Strada rapporte
que deux anglais accusés et convaincus
d'avoir conspiré contre sa vie , furent mis
à mort par ordre d'Alexandre de Parme.
Cependant , selon M. de Thou , il avait
contracté sa maladie au siège de Philippe-
ville , où il s'était prodigieusement fatigué
en partageant avec les soldats les travaux
du siège. Selon d'autres , il mourut de la
peste. La vie de don Juan d' Autriche
a été écrite en espagnol par don Laurent
van der Hammen , Madrid, 1G27 , in-i",
et en français (par Bruslé de Monlplein-
chainp) Amsterdam, 1690, in-12. M. Alexis
Dumesnil a publié une Histoire de don
Jufln d'Autriche , Paris, 1827, in-8°.
JUAN D'AUTRICHE (don ), fils naturel
de Philippe [V, et de Marie Calderona, co-
médienne, né à Madrid en 1629, fut granîl-
prieur de Caslille , et commanda en 1647
les armées du roi d'Espagne en Italie, où il
réduisit la ville de Naples. Don Juan sou-
mil dabord la Catalogne , qui , eu 1652 ,
s'était mise sous la protection de la France;
il alla ensuite en Flandre, où il fut rejoint
par le grand Condé , et où il perdit la ba-
taille des Dunes ( 14 juin 1658 ) contre
Turenne, qui l'obligea d'évacuer les Pays-
Bas. Il commanda ensuite en Flandre ,
devint généralissime des armées de terre
et de mer contre les Portugais. Il eut quel-
ques succès, et défit en 1661 les Portugais
à Badajoz ; mais le résultat de l'expédition
ne fut pas heureux. Don Juan se flattait
qu'il n'aurait qu'à se présenter, et que
le Portugal se soumettrait. Il se croyait si
assuré de le subjuguer, qu'il fil afficher
dans Madrid l'état des troupes, de l'arlil-
lerie , des munitions de toute espèce qu'il
avait préparées pour cette conquête. Il
trouva la punition de sa vanité à Extremos
où il fut entièrement défait par le comte
de Schomberg en 1663. « C'est une re-
» marque constamment vérifiée, dit un
» historien , que les généraux présomp-
» tueux ont toujours eu contre eux le Dieu
» des armées , qui seul dispose de la vic-
» toire.» Don Juan eut la principale admi-
nistration des affaires à la cour du roi
Charles II, et mourut à Madrid en 1679,
à 50 ans. On peut consulter pour plus
de détails Vllistoire de la révolution de
j Naples ( en italien ) par Augustin Nicolas
^Amsterdam, 1660, in-8° ; V Histoire de
l'expédition de don Juan en Catalogne
( en espagnol ) par don Fr. Fabro Bre-
JUB
mondanio, Saragosse, 1673, in-foUd;
Vllistoire de l^ campagne de Portugal en
1662 (espagnol ) par don Jer. Mascarinas,
Madrid ,1663, in-4'', et la vie de Don Juan
d'Autriche . par Grégorio Léli , Cologne,
1686, iii-12.
JUAN Y SANTACILIA (don Geouges),
espagnol, chevalier de Malte, comman-
deur d'Aliaga , naquit à Orihuela , près de
Valence, en 1712 , et mourut à Cadix, le
21 juin 1774. Il se distingua par ses con-
naissances dans les mathématiques. Il
fut choisi avec D. Antonio de Uiloa, capi-
taine de frégate, pour accompagner MM.
Bouguer, la Condamine et autres académi-
ciens français , envoyés l'an 1735 au Pérou
pour déterminer la ligure de la terre. Ce
fut par les soins de don Georges Juan
qu'on réussit, au Pérou, à mesurer la
hauteur des montagnes au moyen du ba-
romètre. A son retour en Espagne, il fut
nommé chef d'escadre et commandant des
gardes marines. Il consacra alors tous ses
soins à faire prospérer les chantiers de
construction , qui jusqu'en 1808 furent
des plus beaux de l'Europe. 11 publia en
espagnol ses Observations astronomiques
sur l'objet de ce voyage , dans un grand
ouvrage,dont la partie historique, rédigée
par D. Antonio de Ulloa [voyez ce nom et
CONDAMINE), a paru traduite en français
Amsterdam, (Paris) 1732, 2 vol. in-4° fig.
Il fut agrégé à l'académie des sciences do
Paris , où il vint en 1745 , et à celle de
Berlin , en 1750. On a de lui , en langue
espagnole, plusieursouvrages très instruc-
tifs sur la marime.
JlIBA I*^"", roi de Mauritanie et de Nu-
midie, succéda à son père Hiempsal, vers
l'an 50 avant ^.-C, et suivit le parti do
Pompée contre Jules-César, par qui il
fut défait. Après la mort de Pompée, Juba,
si fier avant la bataille , étant vaincu, se
vit réduit à demander la vie à ses sujets. II
les pria de le sauver ; mais aucune ville
ne voulant le recevoir, il se fit donner la
mort à la fin du repas, par Pélréius ,
compagnon de son malheur, l'an 42 avant
J.-C. 11 avait gouverné ses peuples en
tyran, et ne méritait pas un meilleur
sort. « On voit ( dit AI. Turpin de Crissé
» dans ses Notes sur César ) son désordre
» et son malheur avec plaisir, et l'on
» croit revivre quand il est près de mourir.
» On se met sans peine à la place des ha-
» bilans de Zama , qui croyaient toujours
» voir le bûcher où il voulait livrer aux
» flammes ses sujets, ses femmes, ses en-
» fans , ses trésors et lui- incme. » Son
JUB
b'2
JUB
royaume fui réduit en province romaine
par César.
JUBA II, fils du précédent, fut mené à
Rome, et servit à orner le triomphe de
César. Il fut élevé à la cour d'Au{jusle,
qui lui fit épouser Cléopùtre ( Séléné ) la
jeune, fille d'Antoine et de la fameuse
Cléopàlre , et lui doima le royaume des
deux Maurilanies et une partie de la Gé-
tulie. Il se distingua par les agrémens de
son caraclcre et les connaissances de son
esprit. Cet avantage le rendit plus illustre
que la couronne qu'il portait. Il se livra
surtout à l'élude de l'histoire et des scien-
ces naturelles ; il avait composé en grec
une Histoire d'Jrabie dont Pline a con-
servé quelques fragmens , une Histoire
des antiquités de V Assyrie et de Rome ;
une autre de la peinture et des peintres ;
une enfin des Théâtres dont quelques
fragmens se trouvent dans Athénée et
Hésychius : il avait aussi fait des Re-
cherches sur les sources du Nil ^ et
une Dissertation sur la corruption du
langage. Aucun de ces ouvrages ne nous
est parvenu. L'abbé Sevin a inséré dans
le tome 4' des Mémoires de l'académie
des inscriptions une savante Dissertation
sur la F'ie et les écrits de Juba.
JlIBAL, fils de Lamech et d'Ada, et
frère de Jabel , inventa les instrumens de
musique, ( Genèse . IV, 21 ).
* JUBÉ (Jacques), curé d'Asnières ,
naquit à Vanvres près de Paris, le 27 mai
1074. Quoique sesparens fussent pauvres,
11 put néanmoins entreprendre ses études,
et fit des progrès remarquables dans les
belles-lettres et les langues classiques.
Jubé eut pourmailre de philosophie Da-
goumer, qui , admirant ses talens préco-
ces et n'ignorant pas le mauvais état de
sa forlune, paya pour lui les frais d'une
thèse publique , que Jubé soutint avec
honneur; Dagoumer fit encore les frais
nécessaires pour le faire recevoir maître-
ès-arts. Jubé avait embrassé la carrière
ecclésiastique , et eut pour maître en théo-
logie le célèbre et savant Bailtet. Aussitôt
qu'il eut pris les^ ordres , on lui donna la
cure de Vaugrigneuse, d'où le cardinal
de Noailles le fit passer, en 1701 , à celle
d'Asnières. Pieux, excessivement sobre ,
et ayant les moeurs les plus austères, l'abbé
Jubé ne tarda cependant pas à se faire
remarquer par la singularité de son ca-
ractère et de ses opinions sur la rubrique.
Il avait un esprit vif, entreprenant , iné-
branlable dans ses principes , et propre à
former un chef de parti. Pendant quelque
temps il fut regardé, par les anli-constl-
lulionriaires , counne une des plus solides
colonnes de leur parti ; mais l'abbé Jubé
ne suivait que son propre sentiment, et
ne reconnut toute sa vie d'autre parti que
celui de l'indépendance. Aussi , lui seul
et de son seul aveu, il voulut être le réfor-
mateur du culte et de la discipline de lE-
glise. Jadis il aurait été digne de figurer
dans la secte des iconoclastes, et s'il ne bi i-
sait pas les images des saints, il les avait
prises en aversion, lesconsidéranl comme
objets d'un culte superstitieux. L'église do
sa paroisse était précisément remplie de
figures et d'images de vierges et de saints
pour lesquelles le peuple avait une granile
vénération. Afin de mieux réussir dans
son projet de réforme , il commença par
dire que son église était trop petite et peu
décente ; puis excitant la piété des parois-
siens , dont il avait captivé le respect et
l'affection , il recueillit des fonds sufflsans
pour une nouvelle église. Il fallait , en
outre préparer ces mêmes paroissiens
aux innovations qu'il se proposait d'intro-
duire , et c'est ce qu'il fit pendant qu'on
bâtissait l'église. Il leur donna tous les
livres de Y Ecriture- sainte en français,
et leur en recommanda la leclure. Ses ser-
mons, ses abondantes aumônes , ses bonnes
moeurs , firent le reste ; et , lorsqu'il crut
que les esprits étaient bien disposés, il
leur fit aisément adopter sa doctrine. En
attendant, la nouvelle église avait été ter-
minée; elle était jolie , mais sans figures,
ni images, de sorte qu'elle ressemblai! à
un temple de proteslans. L'autel , sans
crucifix, sans cliandeliers ni oruemens
d'aucune sorte, n'était composé que d'une
simple table de marbre blanc. Au moment
des offices, on le couvrait d'une nappe ,
et l'on allumaU deux cierges attachés
contre la muraiHe. Pendant tout Vintroit
de la messe , le curé était assis auprès de
l'autel , tandis que son diacre chantait
l'épîlre et l'évangile eu lai in ; et se tour-
nant ensuite vers l'auditoire , il les lirait
et les expliquait en français. Ce n'est qti'à
l'offertoire que le curé montait à l'axitel,
récitant à haute voix les secrètes et le ca-
non, et à la fin de toutes les prières , les
auditeurs répondaient amen. Une colombe
en vermeil, suspendue sur l'autel, con-
tenait le saint sacrement, qui n'était jamais
exposé avec pompe. Le jour du jcuùi
saint, après avoir lavé, dans l'église , Us
pieds à douze pauvres, le curé les faisait
asseoir avec lui à une table qui figurait la
Cène. Il bénissait le pain, en présentait uu
JUB
morceau à lous, en disant : T'oicL mes
frères ^ comme le Sauveur institua l'eu-
charistie. Il faisait la inème cérémonie et
disait les mêmes mots avec io vin qu'il
mettait dans un calice, et dont goûtait
chacun des douze convives. On trouvera
bien extraordinaire que l'abbé Jubé ne
fût point inquiété à cause de ces singula-
rités : aucun évêque , ni le régent ( Phi-
lippe d'Orléans ), ne sévirent contre lui.
Mais on sait quel était alors le relâche-
ment de notre cour, où un Dubois se trou-
vait ministre. La discipline que l'abbé
Jubé établit parmi ses paroissiens était
excessivement sévère ; et si, par exemple,
«ne tille se laissait séduire, elle devait
rester trois mois sous le porche de l'église
sans qu'il lui fût permis d'entrer. L'abbé
Jubé était également rigide envers les
grands comme envers le peuple. La mar-
quise do Parabeyre avait une maison à
Asflières : cette dame était aimée du ré-
gent, qui lui faisait quelques visites. Ce
commerce galant ne fut pas ignoré du
curé, qui lit dire poliment à la marquise
qu'elle ne vint plus aux ofiices divins, car
il ne pouvait pas les célébrer, en vertu
des canons, devant les pécheurs publics.
La dame méprisa cet avis , et se présenta
un jour à l'église. A peine le curé l'eùt-
il aperçue, qu'il lui envoya dire à loreille
«le se retirer à l'instant. Elle prit cela en-
core pour une plaisanterie; mais, voyant
que le curé ne sortait point , elle envoya
v\i\ laquais pour savoir quand la messe
commencerait. « Dès qu'elle sera partie ,
» réyiondit l'inflexible curé, et assurez
» votre maîtresse que je retournerai plu-
» tôt chez moi que de monter à l'autel en
» sa présence. » La marquise moule dans
sa voilure, et va toute furieuse se plaindre
au régent de l'affront qu'elle vient d'es-
suyer... « Vous ne deviez pas vous y expo-
»ser, madame, lui répondit le prince;
» vous deviez connaître l'hoaune; et , s'il
» m'eût fait à moi-même une pareille
» menace, je ne ni'y serais pas fié. «Après
la mort du régent, le nouveau minisirc
de Louis XV examina de plus près la con-
duite du curé d'Asnières, et, en \Tik, il
mandachez lui l'abbé Jubé, mais il s'évada
et se tint caché pendant quelque temps.
L'année suivante, on allait tenir à Rome
un concile, etl'évéque de Montpellier en-
voya l'abbé Jubé à la première de ces
villes, aider de ses lumières les théolo-
giens qui devaient assister à cette assem-
blé. Mais la cour de Rome était instruite
des singularités de Jubé, qui, dans la
53 JUB
crainte d'être puni , se relira h. Napli-s; îî
ne s'y crut pas plus en sûreté , et préféra
de revenir en France, où il ne resta pas
long-temps. S'élant rendu en Hollande, il
y prit le nom de Lacour ^ voyagea en-
suite en Angleterre, en Allemagne , en
Pologne, et partit pour la Russie en qua-
lité de précepteur des enfans de la prin-
cesse Dolgorouki. En 1717, la faculté de
Sorbonne avait fait présenter au czar
Pierre I*"" un Mémoire tendant à opérer
l'union des églises latine et russe. Ce Mé-
moire n'ayant eu aucun résultat , elle en
rédigea un autre , et les docteurs l'adres-
sèrent à l'abbé Jubé , qui devait traiter
de cette union avec les prélats de Russie.
Le fameux évéque de No^vogorod lit
avorter ce plan par l'influence qu'il exer-
çait sur le czar. Par suite de ces négocia-
tions, il parut un ouvrage ayant pour titre:
Ecclesia romana cum ruthenicâ irrecoU'
ciliabilis^clc, que plusieurs bibliographes
croient avoir été publié par ''évéque de
Nowogorod, et d'autres par Budens , pro-
fesseur de théologie à léna. Quelque temps
après, les Dolgorouky tombèrent en dis-
grâce, et l'abbé Jubé se réfugia en France,
passa ensuite en Hollande el revint à Paris
sous le faux nom de Lacour. Il y tomba
dangereusement malade, et, se trouvant
dans un état voisin de la misère, il se lit
transporter à l'Hôtel-Dieu, où il mourut,
/«.près avoir reçu lous les secours de la
religion > le 20 décembre 17i4, à l'àgc de
soixante-dix ans. Jubé eut part au livre
intitulé f^ie des sainls . de Baillel. On le
croit aussi éditeur de quelques ouvrages.
Dans une brochure publiée en Wik, qui
a pour titre: ISouvelle litturgie d' Asnière .
el qu'on attribue à M. Blin . chanoine do
Rouen, et dans la Notice que lui a consa-
crée M. A. A. Barbier dans son Examen
critique des Dictionnaires. on trouve des
détails curieux sur les singularités de
Jubé.
* JURE ( Aur.usTE, baron de la PE-
RELLE), maréchal de camp, né le 12 mai
17<35 à Leuville, près de Alontlhéry, fut
d'abord allaciié à l'adminislralion de la
marine à Cherbourg , et devint successi-
vement chef de la première lésion des
gardes naiionales delà Manche ( 17U2 ),
inspecteur des côtes de ce département,
puis inspecteur-général tn 179/t. I^Jumme
adjudant-général en 1796, il servit sous
le général Hoche, qui en fil son chef-
d'état-major. Il se trouvait au 18 brumaire
an 8 (9 novembic 1797; commanûanl de la
garde du Directoire, lorsque ce gou ver*
JUB
54
JUD
nemenl fut renversé par Bonaparte. Il fut
char{ïé de l'organisation de la garde des
consuls ; puis il lit partie du Tribunal où
il déploya quelques talons oratoires. Il fut
nommé ensuite préfet de la Doire dans
le Piémont , puis du Gers , où il resta
jusqu'en 1814. A cette époque il fut appelé
comme historiographe au dépôt de la
jjuerre. En 1816 il obtint sa retraite avec
le grade de maréchal-de-camp et le cor-
don des deux ordres de Saint-Louis et
do la légion d'honneur. Le général Jubé
s'occupa de littérature, dans laque-Ile il
aurait pu obtenir de grands succès, sans
le mauvais état de sa santé qui ne lui a
même pas permis d'achever sesou\ rages.
Ou a de lui : | Histoire des guerres des
Gaulois et des Français en Italie . avec le
tableau des événemens civils et militaires
d/rpuis Bellovèse jusqu'à lamortde Louis
XII ^ 1 vol. in-8" ; ouvrage qui a été con-
tinué jusqu'au traité d'Amiens par le gé-
néral Servan.etqui forme 7 vol. in-8",
avec allas, 1803; | Hommage des Fran-
çais à r empereur Alexandre ^nne. feuille
in-8° ; 1 le Temple de la gloire, ou les fastes
militai?-es de la France depuis le règne
de Louis XIV jusqu'à nos jours , l'a-
ris, 1819, 2 vol. in-folio avec 40 gravu-
res ; I Histoire générale militaire des
guerres de la France depuis le commen-
cement du règne de Louis XI V jusqu'à
Vannée 1815 ; l'ouvrage devait avoir tro-s
vol. et il n'a donné que les deux premiers.
Le général Jubé a aussi coopéré, en 1818
et années suivantes à la rédaction du Jour-
nal général, feuille de l'opposition. Il
est mort à Dourdan ( Eure-et-Loire/le i""
juillet 1824 , âgé de 59 ans.
♦ JLBIN (saint), fils de Hugon III,
comte de Dijon , ayant embrassé l'état ec-
clésiastique , devint grand-vicaire de l'é-
glise de Laiîgres, puis archevêque de Lyon
après la démission de Humbert I*^ II s'op-
posa inutilement à ce choix qui avait été
fait par les évêques réunis au concile
provincial àAulun;on le contraignit d'ac-
cepter celle dignité qui n'était à ses yeux
qu'un pesant fardeau. Arrivé à Lyon, sa
piété ranima la foi et la discipline, et il
gagna par sa douceur tous les esprits. Son
habileté soutenue par son zèle infatigable
produisit dans la première église des
Gaules le plus grnnd bien. Aussi le pape
Grégoire VII , lui adressa en 1078 une
décrétais pleine déloges, dans laquelle il
lui confirmait ainsi qu'à ses successeurs le
litre de primat des Gaules. Dans plu-
sieurs autres occasions , le même pontife
lui témoigna combien il avait pour lui
d'estime et de confiance dans ses lumiè-
res. Cependant telle était la modestie do
saint Jubin , que dans les huit lettres qui
nous restent de lui ; il ne prend d'autre
titre que celui d'indigne prêtre de l'église
de Lyon, Jamais il n'usa de linlluence
qui lui avait été accordée que pour paci-
fier les troubles de plusieurs églises , et
mettre fin à de fâcheuses divisions. Il as-
sista au concile tenu à Lyon en 1080, et y
concourut à l'adoption de sages rcglemens.
Enfin , après avoir fait plusieurs pieuses
fondations, il termina le 18 avril 1083
ime vie entièrement consacrée à l'exer-
cice de toutes les vertus chrétiennes. Ses
reliques ont eu le don des miracles : Voy.
l'Abrégé historique des martyrs de Lyon,
par M. Guérin , chanoine de St.-Irénée.
M. J, B. Durand , curé de St.-Irénée , a
publié une Notice sur saint Jubin. ar-
chevêque de Lyon . avec une dissei-faHon
sur l'authenticité de son co?'ps; quelques-
unes des guérisons obtenues par son in-
tercession ; une neuvaine de méditations
et prières ; la messe et les vêpres à l'hon-
neur de ce saint pontife . et le chemin de
la croix. Lyon, 1827, 1 vol. in-12.
JUDA , patriarche , 4' fils de Jacob et
de Lia, naquit vers 1735 avant J.-C. Lors-
que les lils de Jacob voulurent mettre à
mort Joseph leur frère , il leur conseilla
plutôt de s'en défaire en le vendant , et
cet avis sauva la vie à ce dernier. Juda
épousa la fille d'un Chananéen nommé
Sué . et il en eut trois fils , lier , Onan et
Séla. Il eut aussi de Thamar, femme de
l'ainé de ses fils , dont il jouit sans la con-
naître. Pliai es et Zara. Lorsque Jacob bé-
nit ses enfans , il dit à Juda : a Le sceptre
» ne sortira point de Juda , ni le législa-
» leur de sa postérité , jusqu'à la venue
» de celui qui doit être envoyé, et à qui
» les peuples obéiront- » Cette prédiction
s'accomplit évidemment en la personne
de Jésus-Ciirisl; car, de quelque ma-
nière qu'on l'explique , il reste vrai que
la Judée ne cessa d'être un royaume, el
le peuple juif une nation rasscimblée en
corps , ayant ses chefs , ses lois , jusqu'à
l'arrivée de J.-C. (i). Juda mourut l'an
1636 avant l'ère vulgaire, âgé de 119 ans.
(i) Par U timple IranspoiitioD d'uoc virgule, le
tCKle présente une explication plut facile et ptui per-
toDDellemcnt applicable au Meiste. iV«ii auferelur
seeptrum de Juda et dur , de Joemore ejuê dente ve-
ntât qui mitlendu» est. Le iceptre et le chef ne tor-
tiront point de Juda, jusqu'à que GiiLCI qui' doit
ttrc envoyé' naisie de so poitérite'.
JUD
55
JUD
Sa tribu tenait le premier rang parmi les
autres; elle a été la plus puissante et la
jtlus nombreuse. Au sortir de l'Egypte ,
elle était composée de 74,600 hommes ca-
pables de porter les armes. Cette tribu
occupait toute la partie méridionale de la
l'alesline. Le royaume passa de la tribu
de Benjamin , d'où étaient Satil et Isbo-
selh . dans la tribu de Juda qui était celle
de David , et des rois ses successeurs. Les
dix tribus sétant séparées, celle de Juda
et celle de Benjamin demeurèrent atta-
chées à la maison de David , et formè-
ri'iit un royaume qui se soutint avec éclat
contre la puissance des rois d'Israël. Après
la dispersion et la destruction de ce der-
nier royaume, celui de Juda subsista, et
se maintint même dans la captivité de
Babylone. Au retour, celte tribu vécut
selon ses lois, ayant ses chefs; les restes
des autres tribus se rangèrent sous ses
t leudards, et ne firent plus qu'un peuple
que l'on nomma Juif. Les temps où de-
vait s'accomplir la promesse du Messie
étant arrivés, la puissance romaine, à
qui rien ne résistait, assujétit ce peuple,
lui ôta le droit de se choisir un chef , et
lui donna pour roi Hérode, étranger et
Iduméen. Ainsi cette tribu, après avoir
conservé le dépôt de la vraie religion, et
l'exercice public du sacerdoce et des cé-
rémonies de la loi dans le temple de Jé-
rusalem, et avoir donné naissance au
Messie, ftit réduite au même état que les
autres tribus , dispersée et démembrée
comme elles.
JUDA (LÉON de ), fils de Jean de Juda,
piètre de Germoren, naquit en Alsace,
en 1482, d'une concubine ; il entra dans
Tordre ecclésiastique , et embrassa depuis
les erreurs de Zuingle. Erasme lui ayant
reproché sa lâche apostasie, s'attira une
réponse très aigre de la part de cet apostat.
Juda s'acquit une grande réputation dans
son parti, et mourut à Zurich , en 1542 ,
à 60 ans. Sa Version latine de la Bible est
celle qui est jointe aux Notes de Valable.
On a de lui d'autres ouvrages qui piou-
vcnt son érudition.
JUDA Voyez lÂO'S.
' JUDA-HIOUG ou CHIUG , ou selon les
arabes , lahia- Ben-David- Jben-Zaclia-
ria. célèbre rabbin , natif de Fez , et sur-
nommé le Prince des grammairiens juifs.
^vivait au IT siècle. On a de lui divers
.'ouvrages manuscrits en arabe, qui sont
très estimés , entr'autrcs un Dictionnaire.
qui, imprimé, pourrait cire for», utile
pour l'intelligence de l'Ecriture sainte.
JUDA nAKKADOSCII, cest-à dire le
Saiîit. rabbin célèbre par sa science , par
ses richesses et par ses talcns , fondateur
de l'école de Tibériade, fut, selon les
Juifs, ami et précepteur de l'empereur
Anlonin. Il naquit selon le Thalmud à Sè-
phora (Tzippurl)l'an 120, et mourut l'an
194 ; il était entré fort jeune dans le San-
hédrin , et fut proclamé par le peuple
Nassi. c'est-à-dire prince très riche et cé-
lèbre par sa sagesse. Il recueillit, vers le
milieu du 2*^ siècle, les conslilutions et
les traditions des magistrats et des doc-
teurs juifs , particulièrement de Hillcl ,
qui l'avaient précède, et en composa,
avec quelques autres docteurs . un livre
qu'il nomma Mischna (première partie
du Thalmud) , et il le divisa en 6 parties
La 1"^' traite de Yagriculture et des se-
me)ices ; la 2*^ des jours de fêtes ; la 5* des
mariages, ei de ce qui concerne les
femmes ; la 4' des dommages-intérêts, et
de toutes sortes d'affaires civiles; la 5'
des sacrifices . et la 6*^ des puretés et im-
puretés légales. Il y consacra, dit-on , 50
ans 159-189 ). Surrhenusius a donné une
bonne édition de ce livre en hébreu et en
latin avec des notes, Amsterdam, 1698,
6 vol. in-fol.
JUDACILIUS se distingua durant le
siège que Pompée avait mis devant As-
coll , sa patrie. Il était à la tête d'une
troupe de rebelles ; il résolut de s'en ser-
vir pour donner du secours à celte ville
assiégée. Dans ce dessein , il avertit ses
compatriotes , que dès qu'ils le verraient
aux prises avec les Romains , ils fissent
une sortie pour le soutenir. Quelques
bourgeois d'Ascoli détournèrent les au-
tres de seconder Judacilius, et lorsqu'il
se présenta devant la ville , aucun des as-
siégés ne remua. Il ne laissa pas , l'épée à
la main, de se faire jour , et d'arriver à
la porte de la ville, qui lui fut ouverte.
Dès qu'il fut entré dans Ascoli , il lit égor-
ger ceux qui avaient empoché qu'on ne
se joignît à lui. Puis ayant invité ses ami?
à un grand repas, quand la bonne clière
et le vin l'eurent un peu échauffé, il se
fit apporter une coupe pleine de poison,
et l'avala , pour n'être pas témoin de la
profanation des temples de sa pairie , eî
de la captivité de ses compatriotes. Il se
lit porter ensuite dans un temple, où Ll
avait fait préparer son bûcher funèbre. Il
y mourut au milieu de ses amis, et son
corps y fut réduit en cendres. Bientct
après Ascoli se rendit à Pompée.
JUDAS , dit Machabée , 5" fils de Ma-
JUD
S6
JUD
Ihathias , de la famille des Asmoneens ,
succéda à son père dans la dignité de gé-
néral des Juifs , l'an 167 avant J.-C II
descendait par Joiarib de lafaniilie d'E-
léazar , grand sacrificateur , lils aîné
«l'Aaron Matliathias le préféra à ses au-
tres enfans, et le chargea de couiballre
pour la défense d'Israël. Judas ne trompa
point ses espérances : secondé de ses
frères, il marcha contre Apollonius, gé-
néral des troupes du roi de Syrie , le dé-
lit et le tua. Il tourna ses armes contre
Séron , autre capitaine, qui avait une
nombreuse armée, qu'il battit é{];aleiiienl,
quoique avec des troupes fort inférieures
en nombre. Antiochus, ayant appris ces
deux victoires, envoya contre Judas trois
généraux de réputation , Plolémée , Ni-
canor et Gorgias. L'armée considérable
qu'ils firent marcher en Judée épouvanta
d'abord ceux qui accompagnaient Judas;
mais son courage ayant ranimé celui de
ses gens , il tomba sur cette multitude , et
la dissipa. Lysias, régent du royaume
pendant l'absence d'Antiocluis, désespéré
de ce que les ordres de son prince avaient
été si mal exécutés , crut qu'il ferait
mieux par lui-même. Il vint donc en Ju-
dée avec une armée nombreuse ; mais il
ne lit qu'augmenter le triomphe de Ju-
das , qui l'oblijjea de retourner en Syrie.
Le vainqueur profita de cet intervalle
pour réiahlir Jérusalem ; il donna ses pre-
miers soins à la réparation du temple ,
détruisit l'auti 1 que les idolâtres avaient
profané, en bàtil un autre, fit faire de
nouveaux vases , et l'an 165 avant J.-C, 5
ans après que ce temple eût été profané
par Anliorhus, il en fit célébrer la dédi-
cace. La paix ne fut pas de longue durée.
Judas fut obligé de reprendre les armes,
et eut partout l'avantage : il défit Timf>-
thée et Bacchides, deux capitaines sy-
riens, battit les Idum^ens , les Ammo-
nites, délit les nations qui assiégeaient
ceux de Gaiaad, et revint chargé de ri-
ches dépouilles. Il n'y eut qu'une seule
occasion où la victoire fut disputée , et où
plusieurs Juifs périrent dans le combat.
Gimmcon trouva qu'ils avaient péché en
emportant des choses consacrées aux ido-
les, ce que la loi défendait, « le pieux gé-
» ncral envoya , dit l'auteur du second li-
■ vredesMachabées, 2000draclimesd'ar-
» gent à Jérusalem , alin qu'on offrit des
» sacrifices pour les péchés de ceux qui
» étaient morts ; car il éiait persuadé
» qu'une grande nnséricorde esi réservée
■ à ceux qui meurent dans la piété : ainsi
» c'est une sainte et salutaire pensée de
^ prier pour les morts , afin qu'ils soient
» délivrés de leurs péchés. » Passage qui
prouve la croyance et l'usage des anciens
Juifs sur la prière pour les morts , et sur
l'existence du purgatoire. Antiochus Eu-
pator , qui avait succédé à Antiochus Epi-
phanes, irrité des mauvais succès de ses
généraux, vint lui-même en Judée, et
assiégea Bethsure. Judas marcha au se-
cours de ses frères. Du premier choc, il
tua COO hommes des ennemis; et ce fut
alors que son frère Eléazar fut accablé
sous le poids d'un éléphant qu'il tua ,
croyant faire périr le roi. La petite armée
de Judas ne pouvant tenir léle aux trou-
pes innombrables du roi, ce général se
relira à Jérusalem. Eupator l'y vint as-
siéger ; mais , averti de quelques mouve-
mens qui se tramaient dans ses états, il
fil la paix avec le général hébreu , qu'U
déclara chef el prince du pays. II retourna
ensuite en Syrie , où il fut tué par Démé-
trius , qui régna en sa place. Le nouveau
roi envoya Bacchides et Alcime, avec la
meilleure partie des troupes. Les deux
généraux marchèrent contre Judas , qui
était à Béthel avec 5000 hommes. Cette
petite armée fut saisie de frayeur à la vue
des troupes ennemies ; elle se débanda ,
et il ne resta que 800 hommes au camp.
Judas , sans perdre courage, les exhorta
à mourir courageusement, fondit sur
l'aile droite et fut tué dans la mêlée, l'an
161 avant J.-C. Simon et Jonalhas, ses
frères , enlevèrent son corps , et le firent
porter à Blodui , où il fut enterré avec
magnificence dans le sépulcre de son
père. Les Juifs pleurèrent sa perte plu»
long-temps qu'ils n'avaient coutume de
le faire pour les rois mêmes. Les froids
moralistes qui ont prétendu que la guerre
faite à Antiochus était contraire à la sou-
mission due aux rois, méritaient bien
d'être eux-mêmes les victimes de sa ty-
rannie. S'il n'est pas permis aux particu-
liers de se soulever contre une autorité
quelconque, une nation entière devra-
l-elle se laisser massacrer , voir anéantir
ses lois et son culte , parce que le caprice
du tyran l'ordonnera ainsi? On cite
l'exemple des chrétiens qui se laissaient
égorger; mais ces chrétiens étaient des
particuliers soumis à l'autorité établie, et
dont la religion contrariait celle de l'em-
pire. « Vous ne pouvea , dit à ce sujet un
» jurisconsulte éclairé , vous prévaloir de
B la conduite des premiers chrétiens, sôus
1» le règne du paganisme : ils devaient
JUD 57
» s'exclure absolument de la société pu-
» blique, toute vouée aux horreurs de li-
pdolàlrio, à une impiété plus détestable
» encore , et à toute espèce d'abomina-
» lions. Contraints en quelque sorte de vi-
» vre inconnus , ils n'avaient point une
» existence civile dans l'empire romain ,
» étant considérés comme des coupables ,
» à cause de la nouvelle religion qu'ils
» professaient et cherchaient à répandre ;
» ils étaient, sous Néron et d'autres mons-
» très couronnés , dans le cas des parti-
i> culiers, que nous convenons ne pouvoir
» pas résister au prince. La Sagesse éter-
» nelle a fait servir cette situation des
» chrétiens à sa gloire : elle a fait éclater
» en eux l'esprit de paix , d'humilité ,
» d'une charité sans bornes , d'un déta-
» chement héroïque, d'une douceur et
» d'une patience admirables, au milieu
n d'un monde corrompu , qui avait be-
» soin de ces leçons et de ces exemples ;
» les chefs-d'œuvre de cet enchaînement
» de miracles qui devaient terrasser l'in-
» crédulité , adoucir et subjuguer la féro-
» cité , faire taire les passions et convertir
» l'univers. Mais inférer de là qu'une na-
» tion entière, ses chefs et ses représen-
» tans, doivent livrer leurs possessions,
» leur vie , leurs lois et leur culte aux ca-
» prices et aux violences d'un tyran, c'est
> ce qui certainement n'est ni dans les
» rèjjles de la bonne logique, ni dans celles
» de la bonne justice. » ( Voyez BURLA-
MAQUI. ) Bossuet , qu'on ne soupçonnera
pas d'affaiblir l'autorité des rois, justifie
hautement les Machabées , parce qu'An-
tiochus voulait détruire leur religion et
la nation mérae , en la corrompant par
les rites idolâtres , pour la mêler et con-
fondre avec les nations infidèles. « Antio-
» chus , dit-il, ne se proposait rien moins
» que de détruire la nation et le culte
r qu'elle professait , et en éteindre lamé-
r. moire , profaner le temple , y effacer le
» nom de Dieu , et y établir l'idole de Ju-
s piter Olympien. Voilà ce qu'on avait
» entrepris, et ce qu'on exécutait contre
» les Juifs avec une violence qui n'avait
> point de bornes... Lorsque Dieu ne leur
ï donnait aucun ordre d'abandonner la
» terre promise , où il avait établi le
a siège de la religion et de l'alliance, ni
B ne leur montrait aucun moyen de con-
» server la race d'Abraham, que celui
» d'une résistance ouverte , comme il
» leur arriva manifestement dans cette
• cruelle persécution des rois de Syrie,
;» c'était une nécessité absolue et une suite
JUD
» indispensable de leur religion , de se
» défendre. » 5* Avcrtiss. aux protest.,
n. 24 { I ). M. Rainouard a composé un
poème sur Machabée.
JUDAS , lils de Sarriphée , s'étant joint
à Matthias, fils de Margalotte, docteur de
la loi , persuada à ses disciples et à quel-
ques autres Juifs , d'abattre l'aigle d'or
qu'Hérode le Grand avait fait poser sur
le plus haut du temple , en l'honneur
d'Auguste. Ce prince cruel le condamna
à être brûlé vif. Après la mort d'Hé-
rode , le peuple , qui aimait Judas , de-
manda à son successeur Archelaiis la pu-
nition des auteurs d'un supplice si inhu-
main ; et , sur le refus qui en fut fait , il
s'éleva une sédition qu'on ne put éteindre
que par le sang de 3,000 hommes. (Jo-
sèphe , Histoire des Juifs , livre 17 ,
chap. 8.)
JUDAS, chef de voleurs , après la mort
d'Hérode le Grand , assembla une troupe
de déterminés , avec lesquels il pilla les
trésors du roi, et se rendit assez redou-
table pour pouvoir aspirer à la couronne.
( Josèphe, v!//«/7/7 Jud.,\\.\. 17, chap. 12.)
JllDAS, ou JUDE, surnommé Barsa-
bas. Voyez ce nom.
JUDAS ESSÉEN, se rendit célèbre par
quelques prophéties. 11 prédit qu'Anti-
gone, premier prince des Asmonéens,
périrait dans la tour de Straton. Cepen-
dant le jour même qu'il avait assuré que
le roi mourrait, il parut douter du suc-
cès de sa prédiction , parce qu'il savait
que ce prince était à Jérusalem , éloigné
de la tour de Straton d'environ 25 lieues.
Il fut surpris , peu de temps après d'ap-
prendre que le roi venait d'être tué dans
tine chambre du palais , qu'on appelait
la Tour de Straloîi, endroit qu'U avait
nommé sans le connaître , trompé par la
ressemblance des noms. C'était un saint
homme. Quelques savans pensent que ce
Judas est le même que l'auteur du 2"^ livre
des Machabées.
JUDAS de GAULAN, chef d'une secte
avec Sadoc parmi les Juifs, s'opposa au
dénombrement que fit Cyrinus dans la
Judée, et excita- une révolte. Il préten-
dait que les Juifs étant libres, ils ne de-
vaient reconnaître aucune autre domi-
nation que celle de Dieu. Ses sectateurs
aimaient mieux souffrir toutes sortes
de supplices que de donner le nom de
Maître oit de Seigneur à quelque homme
(i) On peut ajouter qocl'aulorile de
ïttr la Jude'e ne provenait fjue du droit
rois de Syrie
lu plus fort.
JUD
bs
iui)
que ce fût ( Josèphe , Histoire des Juifs.
liv. 18, cil. i.) Le même Judas est
nommé le Galiléen dans les Acles des
apôtres , parce qu'il était de la ville de
Gamala dans la Gaulanite , petit pays de
la Galilée.
JUDAS ISCARIOTE, ainsi appelé parce
qu'il était d'une ville de ce nom dans la
Iribu d'Ephraïm, fut choisi par J.-C,
pour être l'un des douze apôtres ; mais il
répondit mal au choix et aux bontés de
l'Homme -Dieu. Son avarice lui lit cen-
surer l'action de la Madeleine, qui ré-
pandait des aromates précieux sur les
pieds du Sauveur, et lui lit livrer aux
Juifs le Fils de Dieu pour 50 dt;niers. Il
reconnut ensuite l'atrocité de sa trahi-
son, jeta dans le temple l'arjjent qu'il
avait reçu d'eux , se pendit de désespoir .
et son corps devint, comme dit saint
Pierre dans les Jetés des apôtres, un
objet d'horreur , en s'ouvrant et présen-
tant le plus affreux spectacle. Casaubon,
Jacques Gronovius, Daniel Heinsius, ont
assez inutilement disserté sur ce phéno-
mène , qui , disent-ils, ne résulte pas de
la strangulation. On peut voir dans la
Physica sacra de Scheuchzer une expli-
cation naturelle , rendue sensible par une
estampe pittoresque. Mais il y a plus de
vérité peut-être dans ce passage d'un
théologien moderne : Post buccellam ^ ut
ait Scriptura, introivit in eum Salanas^
quem minime mirum. est devotum, ac de-
volutum sibi cadaver decerpsisse. Les
savans ne sont pas d'accord entre eux
sur la valeur des 50 deniers que reçut
Judas. Les hérétiques cérinthiens hono-
raient cet apôtre infidèle d'une manière
particulière, et se servaient d'un évan-
gile qui portait son nom.
JUDDE (Claude , le père ) , jésuite , né
à Rouen le 21 décembre 1661 , est connu
par divers ouvrages moraux et ascé-
tiques, qui décèlent un homme con-
sommé dans les voies de la perfection
chrétienne. Après avoir prêché quelque
temps avec succès , il fut chargé à Rouen
de la direction du second noviciat, où
les jeunes jésuites prêtres, après avoir
enseigné les humanités et étudié pen-
dant quatre ans en tliéologie , étaient for-
més au, ministère apostolique , avant de
faire leurs vœux solennels; il fut ensuite
jusqu'en 1721 , supérieur du premier no-
viciat à Paris,, d'où il passa à la retraite
de ce même noviciat, et de là à la mai-
son professe, où il mourut en 1755. Ses
principaux ouvrages sont : ) Réflexions
chrétiennes sur les grandes vérités de la
foi et sur les principaux mystères de la
Passion, Paris, 1756, in-12, ouvrage tiré
des manuscrits de ce jésuite par l'abbé le
Mascrier. Le père Chéron, théalin , a
publié en 1780 | ses Exhortations sur les
principaux devoirs de l'état religieux^
Paris, 1780, 2 vol. in-12; I Retraite spi-
rituelle pour les personnes religieuses^
Paris, 1746. in-12. En 1781 et 1782 , l'abbé
Lenoir Duparc a donné une Collection
complète des OEuvres spirituelles du
père Judde , Paris, 7 vol. in-12, réim-
primée en 1815-1816, Besançon, 7 vol
in-12, 1825-26, Paris. 5 vol. in-12; moins
complète que les précédentes. On a aussi
publié à Besançon : Traités sur la con-
fession à l'usage des séminaristes et
des communautés religieuses ^ tirés des
œuvres spirituelles du père Judde , 1825,
in-8". Ce qui prévient beaucoup en fa-
veur du père Judde , c'est le cas tout par-
ticulier que le père Bourdaloue faisait
de ses lumières ; il souhaita en mourant
qu'on lui confiât ses papiers, sans doute
pour qu'il les mît en ordre. Mais ce grand
prédicateur avait mis, sans le prévoir,
un obstacle à Texéculion de celte de-
mande , ayant indiqué le père Judde
pour un emploi qui, le tirant de la pré-
dication , fixa son attention sur des ob-
jets dlfférens.
JUDE (saint), apôtre, nommé aussi
Lebbée , Thadée ou le Zélé ^ frère de
saint Jacques le mineur et parent de J.-C.
selon la chair, fut appelé à l'apostolat
par le Sauveur du monde. Dans la der-
nière cène, il lui dit : « Seigneur , pour-
» quoi vous manisf esterez -vous à nous,
» et non pas au monde? » Jésus lui répon-
dit : tt Si quelqu'un m'aime, il gardera
B ma parole , et mon Père l'aimera ; et
» nous viendrons à lui; et nous ferons en
» lui notre demeure. » Après avoir été
visité par le Saint-Esprit avec les autres
apôtres, Jude alla prêcher l'Evangile dar»s
la Mésopotamie , l'Arabie , la Syrie , l'I-
dumée et la Libye. On dit qu'il reçut la
couronne du martyre dans la ville de
Béryte , vers l'an 80 de J.-C. Nous avong
de lui une Epitre . qui est la dernière
des sept Epi très catholiques. Il l'écrivit
après la prise de Jérusalem , principale-
ment pour les Juifs convertis au chris-
tianisme. Il y attaqua les nicolaïtes, les
siinoniens, les gnostiques et les autres
hérétiques, qui combattaient la nécessité
des bonnes œuvres. On avait d'abord fait
quelque difficulté de mettre celle Epître
JUD b
I dans le canon des Ecritures , à cause de
; la cilalion du livre apocryphe d'Enoch ;
ij mais elle y est placée communément dès
I a\anl la lin du i' siècle. Le passaye rap-
I porté j)ar cet apôtre peut être réellement
d'Enoch, quoique le livre qui le ren-
ferme soit apocryphe , c'est-à-dire d'une
autorité incertaine ; la tradition . quelque
ai^cien écrit , ou une inspiration parti-
culière, peuvent avoir appris à saint
Jude que ces paroles sont véritablement
d'Enoch. Il a pu d'ailleurs citer un livre
célèbre et estimé de son temps, pour
faire impression sur les esprits et donner
plus d'horreur des hérétiques contre les-
quels il écrivait. Le saint apô.re dépeint
ces imposteurs avec des couleurs fort
•vives. On y reconnaît trait pour trait les
philosophes dogmatisans de notre siècle.
C'est avec raison qu'Origène dit de cette
lettre , « qu'elle ne contient que très peu
» de paroles, mais quelles sont pleines
» de la force et de la yràce du ciel. »
JUDEX. (Matthieu), dont le véritable
nom était Jiichfer en allemand, ce qui
veut dire Ju^e , né à Tippolswald en
Misnie , l'an 1528, est un des principaux
écrivains des Centuries de IMagdeboury,
publiées à Bàle , 1552 à 1574 . 8 vol. in-fol.:
ouvrage destiné à bouleverser toutes les
notions de llnstoire ecclésiastique, ré-
futé par Baronius, Bellarmin, etc. I!
enseigna la théologie avec réputation dans
son parti , et ne laissa pas d'essuyer beau-
coup de chagi ins dans son ministère. Il
mourut à Uoslock le 15 mai 1564. On a de
lui plusieurs Ouvrages cités dans 5e Dic-
tionn. de Bayle, plus ou moins entachés
des préventions et de»; erreurs de sa secte.
JUDITH, rcyez HOLOKERNE. Nous
nous contenterons de dire que l'action de
cette sainte et courageuse veuve ne doit
pas être, au moins avec toutes ses cir-
constances, jugée sur les règles ordinaires
de la morale , auxquelles le souverain lé-
gislateur peut déroger dans des cas que
sa sagesse et sa justice peuvent seules dé-
terminer. Il faut observer «-ncore quil
s'agissait d'un ennemi particulièrement
odieux par une férocité et une brutalité
sans exemple, ravageant et détruisant
lout, blasphémant le nom du Dieu vi-
vant, et se proposant de placer dans son
temple les idoles des nations. {Voyez
JÉHU. ) H est difficile de liîCer le temps
auquel cette histoire est arrivée, et il
est presque impossible, quelque parti
qu'on piennc, de satisfaire pleinement
à toutes les objections ; mais celte dif-
9 JUD
(iculté ne doit pas faire recourir à la
supposition gratuite de Scaliger et de
Grotius , qui prétendent que le livre de
Judith n'est qu'une parabole, composée
pour consoler ii-s Juifs dans le temps
qu'Antiocluis - Epipliune vint en Judée.
L'authenticité (lu livre de Judilhaétécon-
testée ; niais tous les doutes doivent être
lixés par l'auloi ilé du concile de Trente ,
qui l'a confirmé dans la possession où il
était de passer pour ins])iré. Saint Jé-
rôme nous assure qu'il a été aussi re-
connu comme tel par le concile de^icée.
L'auteur , qui est toul-à-fail inconnu , écri-
vit son ouvrage en langue chaldaïque,
et il fut traduit en latin jiar saint Jérôme ;
on en a une version en hébreu , en grec
et en syriaque. Quelques - uns veulent
que ce soit Judith elle-même; d'autres,
le grand-prêtre Eliaciuj, dont il est parlé
dans ce livre ; mais tout cela est sans au-
cune preuve. Montfaucon a donné une
savante dissertation sous le titre de Vé-
rité de l'histoire de Judith (i).
'JÎIDITII de BAVIÉKE, seconde femme
de Louis le Débonnaire , empereur et lils
de Charlemagne , nacjuit vers «06. Louis
étant devenu \euf et voulant se remarier,
les plus nobles et les plus belles lilles do
l'empire accoururent pour se disputer la
main d'un si (jrand monarque. La beauté,
les grâces et l'esprit de Judith lui firent
(i) Le iiijel de Judith a inipiré pliiiieiirt e'crivaint ,
entre aiilret l'aLbif Buyrr, fpii en fit une tra);é(lie ,
imprimée rn 1695 ( vo/rt BOYEK Claude ), du Bar-
las et Mlle (.alagei <|ni en ont fait At% pormei. On
trouve dans l'ouvr.ige de cette dernière, imprime' en
1640, à Touluiise ( voyei CALAGES) , et qui ic com-
pose de luiit livres, des vers d'une pureté d'autant
plus remarqualile , qu'ils furent écrit» avant que le
Cid K.iiV paru. Nous en citerons les suivant (Judit^
quitte ses vètemen» de deuil pour reprendre ceu«
qu'elle portail le jour de son union avec Manassès )
Elle louctie et cent fois elle arrose de larmes
L'Iiabit dont son époux voulut parer ses charmes ,
Quand, aux yeux des Hébreux, t'avançaotà faute».
Tous deux se sont jurés un amour éterneJ.
Qu'un soin bien différent lajjite et la dévore !
Ah ! ce n'est pas pour plaire à lobjet qu'elle «do.-*
Que Judith a recour» à ces vains ornemens.
Elle entend tout à coup de longs gémissement ;
Son bras , avec effroi , comme eochaîné »'»rr«'K ;
Elle frémit , soupire et détourne la tète ;
Ij'un nuage confu» »on vil est obscurci ,
D'un tremblement soudain tout son corps est i»lrî.
A la p.Mc lueur dune sombre lumière ,
V!n fanlAroe effrayant vient frapper sa paopi^te:
C'est fllanassfs qui s'offre à son cŒur attendri ,
Tel que se» yeux l'ont vu , quand cet époux chéri.
Exbata dans ses bras son àme fugitive , etc.
L'éditeur ( Mlle de Viliandon ) avait dédiif rt poème-
à la reine Aone d'Autriche , «lort réjente .
JIJD
60
JUE
oLtenii la préférence (819); mais elle
lui coûta bien cher dans la suite. Louis
avait eu de sa i)nMnièTe feiiiu)e trois lils :
Lothaire, Pépin et Louis, entre lesquels
il avait parlajjé plusieurs de ses nom-
breux états. Cependant Judith jouit de
quelque bonheur jusqii'au niomeni où
elle accoucha d'un iils , connu depuis
sous le nom de Charles le Chauve. L'em-
pereur, alin de laisser aussi un royaume
à son quatrième enfant, voulut faire un
nouveau parla{;e , et ce jjrojet mit tout
l'empire en combustion. Les trois princes
aines , jusqu'alors peu d'accord, se réu-
nirent pour i)rendre les armes contre
l'auteur de leurs jours. Mais pour mieux
réussir à déshériter leur frère Charles,
encore enfant , ils calomnièrent la vertu
de sa mère. Déjà la préférence dont l'a-
vait honorée l'empereur lui avait donné
pour ennemies toutes les familles de ses
rivales. Louis, d'un caractère faible,
quoique peul-élre convaincu de l'inno-
cence de sa femme , ne lui pouvait servir
d'aucun appui. Dans ces circonstances
critiques, Judilh eut recours à un puis-
sant el vaillant yuerrier, Bernard, comte
de Barcelone et duc de Scptimanie ( i ).
Il vint à la cour de Louis, s'attira la bien-
veillance de cet empereur, qui le nomma
successivement premier ministre , {^rand-
chambellan et gouverneur du jeune
Charles. Ces faveurs et la fermeté de Ber-
nard à soutenir les droits de son royal
élève irritèrent encore davantage les trois
j)rinces révoltés. Ils accusèrent l'impéra-
trice d'entretenir des liaisons criminelles
avec le comte. Celui-ci, pour défendre
l'honneur outragé de l'impératrice, appela
à un combat singulier quiconque vou-
drait se porter pour son accusateur. Au-
cun n'osa se présenter; mais succombant
enfin aux efforts cacliés de ses ermemis,
il fut contraint, par ordre de l'empereur,
de se retirer à Bai celone. Judith, exposée
alors à toute la rage de ses calomniateurs,
se vit bientôt airachée d'auprès de son
époux, et renfermée dans un cloître, où
l'on voulait l'obliger de prendre le voile.
Cependant la division s'étant -mise entre
les princes révoltés , les mécontens, qui
avaient été séduits par leurs promesses, et
qui ne voyaient pas celics-ci se réaliser ,
se révoltèrent à leur tour contre eux, et
(i) La Sep/imant'f comprenait une grande partie du
Languedoc, <iu Iloutsillon , de la Catalogne, dont
Barcelone elail Ij c.pliale. On Tappi^ait Seplimanie
» faute de ^ej-l grandn \illes ou cili't <]ui t'y Irou-
rendirent à l'empereur son fils et son
éjjouse. L'impératrice , soit par ambition,
soit plutôt par un sentiment maternel,
réclama de l'empereur l'exécution du
dernier projet de partage. Nouvelle ré-
volte de la part des princes : l'empereur,
abandormé des siens, vient se livrer entre
les mains de ses enfans rebelles avec sa
femiTie et son fils. On fait alors revivre
l'ancienne calomnie contre l'honneur de
l'iiTipératrice : elle est contrainte de se
justifier par Véjyreuve du feu. Malgré
son innocence recoimue par cette même
épreuve, on la livre à son plus mortel
enneiTii , son beau-fils Louis , roi de Ba-
vière, qtii lui fait raser les cheveux et la
relègue dans une forteresse de la Lombar-
die. Elle y mourut quelcpie temps après
en 8i5, sans avoir eu le bonheur ni de
voir son époux remonter sur le trône , ni
son lils, tant persécuté, ceindre la cou-
ronne de France. {V. LOUIS le Débon-
naire. CW h.JM^)î^S le Chauve.)
JUDITH, tille de Charles l- Chauve.
avait été d'abord mariée à Ethulphe, el
ensuite à Ethelrède , rois anglais. Celui-ci ,
las de la tyiannie qu'elle voulait exercer
sur lui, la chassa de son lit et de son
trône. Revenue en France , elle se lit en-
lever par Baudouin Forestier de Flandre ,
qu'elle épousa. Charles le Chauve lit son
gendre comte de Flandre vers l'an 870,
et ce fut la souche de tous les autres
princes de ce nom. Judith était galante
et impérieuse; ses époux li'élaient que
ses premiers esclaves.
JIIELLUS. Voyez JE'VVEL.
JIJEMA ou JUENNIN (GASPAno),
prêtre de l'Oratoire , né à Varembon en
Bresse, en 1(350, mort à Paris en 1713,
professa long - temps la théologie dans
plusieurs maisons de sa congrégation , et
surtout au séminaire de Sainl-Magloire.
Sa piélé et son érudition le firent esli»
mer. On a de lui : | Instructiones theo'
logicœ ad usuni seminariorum , nou-
velle édition , Paris , 1700 , 7 vol. in-12.
On n'avait pas encore vu de meilleure
théologie scolastique ; mais l'auteur y
ayant glissé avec beaucoup d'art quel-
ques erreurs nouvellement condamnées,
son ouvrage fut proscrit à Rome le 25
septembre 1708, par plusieurs évèqucs
de France, notamment par les évéques
de Chartres, de Laon, d'Amiens, de Sois-
sons, et par le cardinal de Noailles. Le
cardinal de Bissy opposa une critique
très solide à celte théologie. | Coiiunen-
taiius historiens et dogmaticiis de sacr^ar
JUG
6i
JUG
mentis. Lyon , 1696, en 2 vol. in-fol. , dont
l'auteur tira 3 vol. ln-12 , sous le litre de
Théorie pratique des sacremens ; \ un
Abrégé de ses Institutions , à l'usage de
ceux qui se préparent aux examens qui
précèdent les ordinations, i vol. in-12,
en latin; | 77i<?o?o^?e morale, par demandes
t't par réponses, Paris , 1741, 2 vol. in-12;
I Résolution des cas de conscience sur la
vertu de justice et d'équité j A vol. in-12.
Ces deux derniers ouvrages sont pleins
de décisions appuyées sur l'Ecriture et
sur les Pères , et écrits avec clarté et avec
méthode.
• JUGE-SAINT - MARTIN (Jacques-
Joseph), fils d'un conseiller auprésidial
de Limoges, né dans cette ville en 17/».3,
devint professeur d'histoire naturelle à
Limoges , et fut un agronome distingué.
II couvrit plus de 200 hectares de mau-
vaise terre qui formaient son patrimoine,
d'une foule d'arbres de toutes espèces qui
n'avaient jamais été cultivés dans son
canton : ce qui lui valut une médaille
d'or et le titre de correspondant de la
société royale d'agriculture de Paris. On
lui doit plusieurs ouvrages sur l'agricul-
ture et sur l'histoire naturelle : ] Traité
de la culture du chêne . 1788 , in-8° ; c'est
un des meilleurs ouvrages qui aient
paru sur cette matière. | Notice des arbres
et arbustes du Limousin . Limoges, 1790,
in-8°; j Observations météorologiques et
économiques faites pendant l'année 1791
dans le département de la Haute-Vienne ,
i791 , in-S" ; | Proposition d'un congrès de
paix générale, 1798, in-i2 ; | Théorie de la
2)ensée . de son activité primitive et de sa
continuation par les songes . 4806 , in-8° ;
I Changemens surverms dans les mœurs
des habitans de Limoges depuis une cin-
quantaine d'années , 2' édit. augmentée ,
Paris, 1817, in-8°. Ce savant agronome
est mort à Limoges au commencement
de 182i.
JUGURTHA, roi de Numidie, fils de
Manastabal et d'une concubine, né avec
les grâces de l'esprit et de la figure , fut
élevé à la cour de Micipsa, son oncle.
Celui-ci ayant démêlé dans son neveu
beaucoup d'ambition , lui donna le com-
mandement d'un détachement cpi'il en-
voyait à Scipion , qui faisait alors le siège
de Numance. Micipsa espérait qu'il ne
reviendrait pas de cette expédition; mais
ïl fut trompé. Jugurtha , courageux sans
être téméraire , fit éclater sa valem- et
échappa à la mort. Son oncle l'adopta
dans son testament , et le nomma héritier
7.
avec ses deux fils, Adherbal et Ilû-mpsal,
espérant que les bienfaits du père l'at-
tacheraient aux enfans ; il se trompa
encore. Qu'était - ce que le tiers d'un
royaume pour un ambitieux tel que son
neveu? L'ingrat, le perfide Jugurtha fit
mourir Hiempsal, fil la guerre à Adher-
bal , l'obligea à s'enfermer dans Cirthe ,
sa capitale , l'y réduisit par la famine à
se rendre à composition , et le fit périr
dans les plus cruels tourmens, contre la
foi du traité. Adherbal avait eu recours
aux Romains ; il était venu lui-même se
plaindre au sénat : mais l'or de Jugurtha
lui en avait fermé toutes les avenues.
Cependant Rome ne resta pas indifférente
à la perfidie de Jugurtha, elle lui dé-
clara la guerre ; mais celui-ci , ayant cor-
rompu les sénateurs et les généraux qu'on
envoya contre lui, obtint une paix avan-
tageuse. Enhardi par ce succès, il vint lui-
même plaider sa cause à Rome ; ses
largesses lui procurèrent de puissans
protecteurs, et il aurait encore réussi
dans ses projets, s'il n'eût, pendant son
séjour dans cette ville , poussé l'audace
du crime jusqu'à faire assassiner un
prince numide, nommé Massiva , dont les
droits au trône l'inquiétaient. Ayant reçu
l'ordre de quitter l'Italie , ce fut alors que
sortant de Rome , il dit o que cette ville
» n'attendait pour se vendre qu'un ache-
» leur , et qu'elle périrait bientôt s'il s'en
n trouvait un. » Cécilius Ikiélellus, qui fut
envoyé contre lui , ne se laissa gagnerni
par les promesses ni par les présens. Jl
vainquit Jugurtha , et le réduisit à quit-
ter ses états pour aller mendier du se-
cours chez les Gélules et les Maures. Ma-
rius et Sylla, qui continuèrent la guerre
après Métellus , la firerit avec le même
succès. Bocchus , roi de Mauritanie , beau-
père de Jugurtha, le livra à SylIa, l'an
103 avant Jésus-Christ. Le monarque cap-
tif, après avoir été donné en spectacle
au peuple romain , depuis la porte triom-
phale jusqu'au Capilole , attaché au char
de triomphe de Marins , fui jeté dans un
cachot ( I ) , où il mourut au bout de six
jours : fin très peu assortie à ce que l'on
voudrait nous faire accroire de la clé-
mence et de l'humanité de ces vainqueurs
du monde.
(i) Il paraît constant que ce fàt dam un cul de batte
foiie , où il ne pouvait respirer qu'un air infect et ex-
trêmement humide. L'amour de la vie et la force de
sa constitution prolongèrent ton existence jusqu'à»
tixiime jour, dans l'horrible sgpplice qu'il y endura,
^tant condamné À y mourir de faim.
6
JUI
• jrUIGîVÉ ( Antoine -Ei.ÉoxoRE-LÉo\
LECLERC de ) , archevêque de Paris , né
en cette ville , en 1728 , était fils du mar-
quis de Juigné , d'une famille illustre du
Maine , et qui fut tué à la bataille de
Guastallafen 1734), où il était colonel du
régiment d'Orléans. Antoine de Juigné
lit ses premières éludes au collège de Na-
varre, ensuite au séminaire de Saint-Ni-
i:olas iu Cliardonnet ; il revint faire son
lours de licence et prendre les ordres
au même collège de Navarre. Son parent
M. de Bezons , évêque de Carcassonne ,
I appela auprès de lui , et le nomma son
grand-vicaire. Il fut choisi en 1760 , pour
être agent du clergé. Les fonctions atta-
chées à ce litre duraient cinq ans, à moins
que l'agent ne fût nommé à un siège épi-
scopal. M. de Juigné les avait à peine com-
mencées qu'on lui offrit l'évêché de Com-
minges. Il préféra continuer ses travaux
<;t fut promu en 1764 , à l'évêché comté-
])airie de Cliàlons. Sous son prédécesseur
<lans ce diocèse , le jansénisme avait fait
des proijrcs rapides : il rencontra pour
l'extirper plusieurs obstacles, et se vit
obligé de recourir à des mesures très sé-
vère contre plusieurs prêtres des plus
obstinés qu'il interdit ou expulsa. Après
avoir rétabli la paix dans le diocèse , il
ne songea qu'à y faire du bien ; et c'est
à sa sollicitude toute paternelle que l'on
dut la reconstrtlclionda grand séminaire,
la fondation d'un autre plus petit, rt con-
sacré à instruire gratuitement les enfants
de la campagne que l'on croyait propres
à l'état ecclésiastique. Humain , doux ,
charitable, il était généraleuient aimé dans
son diocèse, où le pauvre trouvait en lui
un constant bienfaiteur. Dans une occa-
sion il donna une preuve du rare courage
«[u'inspire cette religion, dont le premier
précepte est d'aimer et de secourir son
prochain. Au milieu d'une nuit obscure ,
le ciel en feu annonce un incendie dans
le voisinage de Châlons. Le pieux évêque
en est averti, et ne balance pas à courir
lui-même au secours des incendiés. Dirigé
par les flammes et à la têle de ceux qui
l'accompagnaient, il arrive à Saint-Dizier,
qu'il trouve réduit en cendres. L'espoir
de sauver quelque victime lui fait affron-
ter tous les périls ; il se fraie un chemin
au travers des décombres , entouré de
flammes et de fumée. On crut , pendant
quelques instants qu'il avait péri, iorsqu'on
parvint à le retirer de ce lieu où l'on ne
trouvait plus que des ruines et des cada-
vres déligurés. Le retour de M. de Juigné
62 ÏUI
à Châlons ramena la tranquillité parmi les
habilans, qui avaient tremblé pour les
jours de leur prélat. Ces événemcns mal-
heureux était fréquents en Champagne ,
où la plupart des maisons sont construites
en bois. M. de Juigné s'empressa d'éta-
blir un bureau de secours pour les incen-
diés. A peu près à celle époque, on lui
offrit l'archevêché d'Auch, un des plu»
riches du royaume ; M. de Juigné le
refusa, se fondant sur le texte des canons,
qui enseignent quune augmentation de
l'evefius ne doit pas être un motif pour
changer de siège. Cependant , après la
mort de M. de Beaumont, archevêque de
Paris (4781 ), le roi, dé son propre mou-
vement, l'appela à ce siège. Sa modestie
et ses scrupules durent alors céder aux
ordres réitérés du monarque. Le vertueux
prélat vint à Paris animé des mêmes sen-
timens qui avaient jusqu'alors dirigé sa
conduite dans ses fonctions pastorales.
Les revenus de son vaste patrimoine et
de son archevêché étaient, en grande
partie, employés en aumônes et en éta-
blissemens pieux ; dans le rigoureux
hiver de 1788 à 1789, ayant presque épuisé
ses moyens, il vendit sa vaisselle d'argent,
engagea son patrimoine ; et, leur produit
ne suffisant pas pour subvenir aux be-
soins des nombreuses familles dont la
misère affligeait son cœur , il emprunta
des sommes considérables jusqu'à la va-
leur de cent mille écus , dont son frère
aîné , le marquis de Juigné , garantit le
paiement. Peu de temps après eurent
lieu les états^énéraux , auxquels l'arche-
vêque de Paris fut élu député ainsi que
ses deux frères. Il siégea parmi la mino-
rité, et s'attira delà sorte la haine des
factieux , qui excitaient les passions du
peuple. Il ne tarda pas à éprouver l'in-
gratitude de ce même peuple qu'il venait
d'arracher aux tourmens de la faim. Le
pieux archevêque sortait, le 24 juin 1789,
de l'assemblée de Versailles , lorsque sa
voiture fut attaquée et poursuivie long-
temps à coups de pierres, au miheu des
insultes de la populace. Il n'échappa qu'a-
vec peine à la fureur de la multitude h
laquelle il promit de se réunir au tiers-
état. Il assista à la fameuse séance du k
août, où tous les membres de l'assemblée
parurent se confondre dang un même
sentiment de bien public, et où le clergé
et la noblesse rivalisèrent avec le tiers-
élat de dévouement dans leurs généreux
sacrifices. Séduit par ces appat-ences
trompeuses de la pari de ceux qui vwu-
JLI
63
JUL
laient tout envahir, le bon arcbcvéque
proposa de chanter un Te Deum . pour
solcnniscr celle nicmorahle journée. Les
affreux désordres qui suivirent éclairè-
rent bientôt M. de Juigné sur ce que
l'on devait attendre de ces conuiience-
mens. Ayant obtenu du roi la permission
de quitter la France, il se relira à Chani-
béri, où il reçut l'accueil le plus affec-
tueux du marquis de Clermont-Sainl-
Jean, qui était son allié. Il se rendit en-
suite à Constance et c'est de cette ville
qu'il publia son mandement et plusieurs
autres écrits relatifs au serment à la con-
stitution civile du clergé. D'autres évo-
ques et plusieurs prêtres émigrés le re-
joignirent. M. de Juigné les aida de sa
bourse , et de ce que produisait la vente
de quelques effets précieux qui lui res-
taient encore. Les obstacles ne faisant
qu'enflammer davantage sa charité toute
chrétienne , il sollicita , en faveur de ses
compagnons d'inforlune , l'impcralrice
de Russie Catherine II, difféiens pré-
lats et princes de l'Allemagne , et en ob-
tint d'abondans secours. Infatigable dans
son zèle, il parvint à établir à Con-
stance un séminaire pour l'instruction des
jeunes clercs destinés à remplacer les
prêtres qui périssaient journellement en
France sous la hache révolutionnaire.
En 1799, les Français s'étant emparés de
Constance , M. de Juigné et tous les émi-
grés qui s'y trouvaient durent quitter
cette ville. Il se rendit à Augsbourg , et
reçut de l'électeur de Trêves un accueil
honorable. Api es le concordat de 1802
M. de Juigné ne revint dans sa patrie
que pour donner la démission de son ar-
chevêché entre les mains du pontife Pie
VIL II vécut dès lors dans le sein de sa
famille , et il allait quelquefois visiter le
nouvel archevêque, le cardinal de Belloy,
qui le recevait avec empressement. M. de
Juigné mourut à Paris\ le 19 mars 1811 ,
âgé de quatre-vingt-trois ans. Ses restes
alors déposés dans le cimetière commun
furent à l'époque de- la restauration en
1814, transportés dans le caveau del'égUse
de Notre-Dame. Ce prélat était ami de
la bonne litlérature , et possédait si bien
la Bible que lorsqu'on en citait un pas-
sage, il pouvait en indiquer tout de suite,
non-seulement le livre , mais le chapitre
et le verset. On a de lui : ] des Mandemens;
I un Rituels Chàlons, 1776, 2 vol. in-4°.
On reproduisit cet ouvrage avec plusieurs
changcmens , sous le titre de Pastoral de
Paris, 1786, â vol. in-4°. On croit que les
éditeurs de cette édition et des change-
mens qu'on y remarque, furent les abbés
Revers, chanoine deSaiiji-Houoré ; Plun-
kett , professeur au collège de Navarre, et
P.-J.-fiippolyte Charlier, secrétaire et
bibliothécaire de M. l'archevêque de Pa-
ris. Quoiqu'il en soit, les jansénistes coru-
baltirent ce livre par divers écrits , tels
que , Observations sur le Pastoral ; ré-
flexions sur le Rituel ; Examen des prin-
cipes du Pastoral ^ sur l'ordre , lapéni-
tence , les censures , le mariage . écrits
qu'on attribua à Maullrot et à de Lar-
rière- Les jansénistes ne se bornèrent
pas là ; leurs clameurs furent telles que
le Pastoral fut dénoncé au parlement , le
19 décembre 1786, par le conseiller Ro-
bert de Saint-Vincent. Malgré ses instan-
ces pour qu'on en fît arrêter la distribu-
tion, séance tenante, le parlement ordon-
na qu'on le remit aux gens du roi, qui ne
donnèrent pas de suite à la dénoncia-
tion, au grand déplaisir des jansénistes.
Il y a une Fie de M. de Juigné archevê'
que de Paris, par M. l'abbé Lambert,
Paris, 1821, un vol. in-S" ; et 1823, în-8°
Cette seconde édition accompagnée d'un
portrait lithographie de M. de Juigné , a
été vendue au profit des petits séminaires
de Paris et de Châlons , pour honorer la
mémoire du vénérable prélat qui en a
occupé les sièges : M. l'abbé Jallabert ,
vicaire-général, prononça l'oraison funè-
bre de M. de Juigné.
JUILIARD. Voyez JULIARD.
JULES-CÉSAR. Voyez CÉSAR.
JULES CONSTANCE, père de l'empe-
reur Julien , et fils de l'empereur Con-
stance Chlore, et de Théodora, sa seconde
femme, était un prince doux et modéré ,
qui vit sans jalousie le diadème sur la tête
de son frère Constantin. Il fut le particulier
de son siècle le plus illustre par sa nais-
sance, par ses richesses , par son crédit ,
et peut-être le premier sénateur de Rome
qui ait fait profession publique du chris-
tianisme. Il avait été engagé dans le parti
du tyran Maxence ; mais Constantin vic-
torieux ^respecta dans ce grand homnie
les talens supérieurs, et une vertu encore
supérieure aux talens. Il le fit consul,
préfet, etc. Jules Constance périt l'an 337,
dans le massacre de sa famille par les fils
de Constantin après la mort de leur père.
JULES ( saint ) , soldat romain , servit
long-temps avec valeur dans les armées
des empereurs , et eut la tête tranchée
vers l'an 502, par ordre de Maxime, gou-
verneur da la basse Mœsie.
JULES I" ( saint ), Romain, successeur
du pape saint Marc le 6 février 337, en-
voya ses légats au concile de Sardique
en 347 , et soutint avec force la cause de
saint Athanase, qui en avait appelé à lui
comme au chef de l'Eglise et au juge
des évoques. ( Voy. APIARIUS , ATHA-
NAvSE, INNOCENT I"). Il mourut après
avoir illustré son siège par la science et
les vertus des saints, le i2 avril 352. On a
de lui deux Lettres admirables dans les
OEuvres de saint Allianase , et dans les
E pitre s des papes de D. Constant , qui
sont , au jugement de Tillemont , cfcux
des plus beaux monumens de l'antiquité
ecclésiastique. Les autres ouvrages que
l'on attribue à saint Jules sont supposés.
JULES II (Julien delà ROVÈRE), ne-
veu du pape Sixte IV , né au bourg d'Al-
bizale près de Savone, l'an 1454, fut élevé
successivement sur les sièges de Cai;pcn-
tras, d'A^bano, d'Oslie , de Bologne , d'A-
vignon. Le pape Sixte IV, son oncle, l'ho-
nora de la pourpre en 1471 , et lui confia
la conduite des troupes de l'état contre
les peuples révoltés en Ombrie. Le car-
dinal delà Rovère, né avec un génie
guerrier, dompta les rebebes. Ses exploits
et SCS entreprises lui acquirent beaucoup
de pouvoir dans Rome. Cependant, à son
avènement au pontificat, le pape Alexan-
dre VI , son ennemi déclaré , l'exila. Le
cardinal de la Rovère remua alors toute
l'Italie. La conquête de Naples par Char-
les VIII, le soulèvement des Génois, l'ex-
jmlsion de Ludovic Sforce , furent en
grande partie son ouvrage. A la mort
d'Alexandre VI , il fit élire le cardinal
Piccolomini ( Pie III ) , vieillard infirme
<iui ne régna que 26 jours. Il fit alors en-
irer dans ses intérêts César Borgia et
l'emportant sur le cardinal d'Amboise ,
son compétiteur , il fut élu pape au pre-
nùer scrutin , en 1505. Son premier soin
fut de faire construire l'église de Saint-
Pierre ; il en posa la première pierre en
l;i06. Cet édifice, le plus beau que les
hommes aient élevé à la Divinité, fut
bâti sur le Vatican , à la place de l'église
construite par Constantin : « Monument
» célèbre dans toutes les langues , dit un
» voyageur, et toujours supérieur à l'idée
■ qu'on s'en fait, pourvu que le bon sens
» règle l'imagination ; temple auguste ,
» qui n'eut jamais d'égal en grandeur , en
» majesté , en richesse ; où la religion a
» rassemblé tout ce qui pciit servir à
» animer et à nourrir la piété ; où la eu
64 JUL
» gcnte trouve de quoi se satisfaire, re-
» vient sans cesse aux mêmes objets, e1
» ne les quitte que déterminée à revenir
» encore ; où les artistes en tout genre les
» plus critiques et les plus habiles vien-
» nent admirer et s'instruire. » ( Voy.
FONTANA , Charles. ) Des idées diffé-
rentes occupèrent bientôt le pontife. Jules
II, qui, comme ses prédécesseurs , aurait
voulu chasser les étrangers de l'Italie,
cherchait à renvoyer les Français au-de-
là des Alpes ; mais il exigeait auparavant
que les Vénitiens lui remissent les villes
dont ils s'étaient saisis après la mort d'A-
lexandre VI. Ces républicains voulurent
garder leurs conquêtes ; Jules II s'en
vengea en liguant toute l'Europe contre
Venise. Cette ligne , connue sous le nom
de Ligue de Cainbrai^ fut signée en 1508,
entre le pape , l'empereur Maximilien, lo
roi de France Louis XII , et le loid' Ara-
gon Ferdinand le Catholi([ue. Les Véni-
tiens, réduits à l'extrémité, demandèrent
grâce et l'obtinrent à des conditions assez
dures. Ils cédèrent à Jules une partie de
la Romagne , et alors le pontife n'eut plus
besoin des Français. Il ne les aimait pas
d'ailleurs , parce qu'ils avaient traversé
son élection au pontificat , et qu'ils perpé-
tuaient les guerres d'Italie par des préten-
tions et des vues de conquêtes toujours
renaissantes. Il se ligua contre eux la
même année, avec les Suisses, avec le roi
d'Aragon , et avec Henri YIII , roi d'An-
gleterre. Il fit demander à Louis XII quel-
ques villes qu'il occupait en Italie, et sur
lesquelles le saint Siège prétendait avoir
des droits; Louis les refusa, et fut excom-
munié. La guerre commença vers Bolo-
gne el vers le Ferrarais. Le pape assié-
gea laMirandole en personne, pour don-
ner de l'émulation à ses troupes. On vil
ce pontife septuagénaire , le casque en
tête et la cuirasse sur le corps, visiter les
ouvrages , presser les travaux et entrer on
vainqueur par la brèche le 20 janvier
1511. MaisTrivulce, général des Iroupei
françaises , s'empara de Bologne , et l'ar-
mée papale unie à celle des Vénitiens
fut mise en déroute. Jules II, obligé de
se retirer à Rome , eut le chagrin de voir
en passant à Rimini les placards affichés
pour intimer l'indiction d'un concile à
Pise. Louis XII excommunié en avait ap-
pelé à cette assemblée, qui inquiéta beau-
coup le pape. Après diverses citations, il
fut déclaré suspens par contumace dans
la S'' session tenue le 21 avril 1512. Ce
riosité la plus avide et la plus intelli- fut alors que Jules ne gardant plus au-
JUL 6
cune mesure , mit le royaume de France
en interdit. Louis XII fit excommunier à
son tour Jules II , et fit battre des pièces
de monnaie qui portaient au revers :
PERDAM BABYLONIS NOMEN : Je dé-
truirai jusqu'au nom de Babylone : dé-
marche qu'on ne saurait excuser, qui mar-
que la passion et l'aveuglement de la co-
lère. Louis pouvait se défendre et même
6e venger , sans outrager l'Eglise et le
saint Siège. Jules opposa au conciliabule
ile Pise , qu'il ne faut pas confondre avec
le célèbre concile de ce nom en i/iO'J , le
Doncile général de Latran , dont l'ouver-
ture se fit le 3 mai 1512 ; mais il n'en
vit pas la fin. Une fièvre lente , causée ,
dit~on, par le chagrin de n'avoir pu por-
ter les Vénitiens à s'accommoder avec
l'empereur, remporta le 21 février 1513.
Il pardonna aux cardinaux de l'assem-
blée de Pise, avec cette restriction, qu'ils
ne pourraient assister à l'élection de son
successeur. « Comme Julien de la Rovère,
■ dit-il, je pardonne aux cardinaux schis-
• matiqut's; mais comme pape, je juge qu'il
» faut que la justice se fasse... » Jules II avait
dans le caractère un fonds d'inquiétude
qui ne lui permettait pas d'être sans pro-
jets, et une certaine audace qui lui faisait
préférer les plus hardis S'il eut l'enthou-
siasme propre à communiquer ses pas-
sions à d'autres puissances, il manqua de
la probité qui rend les alliances sincères ,
et de l'esprit de conciliation qui les rend
durables. Jean Stella, auteur contempo-
rain, dans ses Vies des papes , peint au
contraire ce pontife avec les plus belles
couleurs ; on ne peut rien ajouter à l'é-
loge qu'il en fait : d'autres historiens en
font uu portrait affreux. On ne peut
guère se fier à ce que les auteurs disent
des grands hommes qui ont vécu dans des
temps de trouble : chacun en parle selon
le parti qu'il a épousé. Au reste , ce que
l'on peut assurer, c'est que le sublime de
sa place lui échappa ; il ne vil pas ce que
voient si bien aujourd'bui ses sages suc-
cesseurs : que le pontife romain est le
père commun, et qu'il doit être l'arbitre
de lapaix, etnonle flambeau de la guerre.
Tout entier aux armes et à la politique,
il ne paraissait chercher, dans la puissance
spirituelle , que le moyen d'accroître la
temporelle. Il n'est pas vrai cependant
nu' il jeta un jour dans le Tibre les clefs
de saint Pierre, pour ne se servir que de
l'cpée de saisit PauL comme tant d'histo-
riens protcsfans et catholiques l'ont dit ,
d'après h' tcmoignaged'un mauvais poète
i JUL
satirique Les papes n'ont i>as conservé
tout ce que Jules II leur avait donne.
Parme et Plaisance , détachées du Mila-
nais , furent jointes par ce pape au do-
maine de Rome, du consentement de
l'empereur, et en ont été séparées depui^.
II fut favorable aux savans, et avait même
une trop bonne opinion de l'influence des
lettres , si un propos qu'on lui prête est
véritable. Il encouragea la peinture , la
sculpture, l'architecture; et de son temps,
les beaux-arts commencèrent à sortir des
décombres de la barbarie gothique. Le
pape Jules II fut le premier qui laissa
croître sa barbe , regardant l'usage con-
traire comme l'effet de la frivolité et de
la mollesse. François \" , Cbarles-Quint
et tous les autres rois suivirent cet exem-
ple, adopté à l'instant par les courtisans
et ensuite par le peuple. Léon X lui suc-
céda.
JULES m ( Jeak-Makif. GIOCCHI,
pape sous le nom de), né, selon quelques-
uns, dans le diocèse d'Arezzo , et selon le
continuateur de Fleury, à Rome, dans le
quartier del Parione, d'une famille ori-
ginaire de Monte-San-Savino, dans le dio-
cèse d'Arezzo, d'où il avait le nom del
Monte, se fit estimer de bonne heure par
ses connaissances en littérature et en ju-
risprudence. Il eut successivement l'ad-
ministration de plusieurs évêchés, l'arche-
vêché de Siponte , et enfin le chapeau de
cardinal en 1536. Il succéda au pape Paul
III en 1550, et prit le nom de Jules III.
Né avec de la fermeté dans le caractère,
il avait paru, avant son pontificat , selon
Panvini , d'une grande sévérité ; mais
lorsqu'il eut été placé sur le trône de saint
Pierre en 1550, ses mœurs parurent s'al-
térer, et son amour pour la justice dimi-
nua. D'autres auteurs ont porté de ce pape
un jugement tout opposé , et on dit que
Jules III, depuis son élévation, n'eut
d'autres plaisirs que ceux qu'il trouvait,
dans les affaires et dans le maintien de
l'ordre public. Il avait présidé au concile
de Trente sous Paul III ; il le fit rétablir
et continuer dès qu'il fut souverain pon-
tife. Il prit les armes ensuite avec l'em-
pereur , contre Octave Farnèse , duc de
Parme , et mourut en 1555 Ce pontife
avait établi en 1553, une nombreuse con-
grégation de cardinaux et de prélats ,
pour travailler à la réforme de l'Eglise :
mais celte congrégation nout aucna
succès. Jules III eut Marcel IH pour suc-
cesseur.
JI LES AFRICAIN. Voy. AFRICALv.
ti.
JUL
66
JUL
JULES ROMAIN. Voyez ROMAIN.
JULIA DOMNA (Pia-Felix-Aucusta),
fille d'un i)rêlre du Soleil, née vers l'an 170
à Apamée , dans la Phrygie , ou à Emèse en
Syrie, épousa l'empereur Septime-Sévère.
Sûre du cœur de son époux , qu'elle avait
enclianfé par son esprit et par sa beauté,
elle se livra à toutes ses passions. Ses dé-
bauches allèrent jusqu'aux derniers excès.
Plautien, favori de Septime-Sévère, crut
Ja perdre auprès de l'empereur, en dé-
voilant ses infamies ; mais il péril lui-
même. Julia reprit son crédit, et recom-
mença ses prostitutions. Après la mort de
Sévère, les plaisirs fuirent d'auprès d'elle.
vSes deux fils , altérés du sang l'un de
l'autre, étaient à tout moment sur le point
de se poignarder. Caiacalla massacra Géta,
son frère , entre les bras de leur mère
commune. Les malheurs de Julia ne la
corrigèrent pas. Si l'on en croit Sparticn,
elle se prostitua à Caracalla, son fils.
Telles étaient les mœurs de ces temps,
qu'on ose rappeler à des chrétiens comme
des siècles de vertus. Après la mort de cet
empereur, déterminée à ne pas lui sur-
vivre , elle avança le terme de ses jours,
en irritant un cancer qu'elle avait au sein.
Elle mourut à Antiochc vers la fin de l'an
217, à l'âge de Ul ans. Elle avait protégé
les lettres , et ce fut à sa sollicitation que
Philostrate composa le roman intitulé La
Vie d'Apollonius de Thyane. Diogène
Laërce lui dédia ses ouvrages sur la Vie
et les opinions des philosophes grecs. Il
existe des médailles de Julia Domna.
Bayle lui a consacré un article remarqua-
ble dans son Dictionnaire.
JULIA RD ou JUILIARD (Guillaume),
docteur en théologie et prévôt de la ca-
thédrale de Toulouse , neveu de la fa-
meuse madame de Mondonville, institu-
trice des Filles de l'enfance . défendit la
mémoire de sa tante contre Rcboulet,
auteur d'une Histoire de cette congréga-
tion. Il publia deux brochures à ce sujet :
I L" Innocence justifiée; \ Le Mensonge
con/bnrfu. L'abbé Juliard mourut en 1757,
à 70 ans, après avoir réussi à faire con-
damner au feu par le parlement de Ton
louse, l'ouvrage de son adversaire. « Ju-
» liard était connu, dit Ladvocat , par son
» appel delà bulle Unigenitus au futur
. concile. » Voyez MONDONVILLE
( Jea:v.\e de ).
JULIE ( sainte ), vierge et martyre de
Cartilage. Celte ville ayant été prise et
saccagée en 459 par Genséric, roi des
Vandales 1 Julie fut vendue à un mar-
chand païen , et menée en Syrie. Quel-
ques années après , ce marchand s'étant
embarqué avec elle pour transporter des
marchandises en Provence, le vaisseau
s'arrêta au Cap-Girse pour y célébrer une
fêle en l'honneur des fausses divinités
Julie, qui n'y prenait aucune part , fut
citée devant le gouverneur Félix comme
chrétienne, et elle reçut la couronne du
martyre.
JULIE , fille de César et de Cornélie,
passait pour la plus belle et la plus ver-
tueuse femme de Rome. Son père la ma-
ria d'abord avec Cornélius Cépion, maifi
il l'engagea ensuite à faire divorce , pour
lui faire épouser Pompée, que César vou-
lait s'attacher par ce lien. Julie fut effec-
tivement le nœud d'amitié de ces deux
grands hommes; mais étant morte en
couches l'an 53 avant J.-C. on vit bientôt
naître ces querelles funestes qui finirent
par la ruine de la république. Pompée
avait aimé tendrement Julie, ettantqu'elle
vécut, il parut oublier les armes et les af-
faires pour complaire à son épouse , et ne
pas troubler la douceur de celte union.
JULIE , fille unique d'Auguste, et de
Scribonie, sa troisième femme, épousa
Marcellus. Son rang lui fil des courtisans,
et sa figure des amans. Loin de les dédai-
gner, elle s'abandonna avec eux aux plai-
sirs de la débauche la plus effrénée. Deve-
nue veuve , elle épousa Ag.'-ippa, et ne
fut pas plus sage. Son mari était vieux;
elle s'en consola , en se livrant à tous les
jeunes gens de Rome. ( Voyez OVIDE. )
Après la mort d' Agrippa, Auguste la fil
épouser à Tibère , qui , ne voulant être
ni témoin ni dénonciateur des débauches
de sa femme , quitta la cour. Sa lubricité
augmentait tous les jours; elle poussa
l'impudence jusqu'à faire mettre sur la
statue de Mars autant de couronnes qu'elle
s'était prostituée de fois en une nuit.
« Quand les cours et les trônes , dit un au-
n leur, sont souillés par de telles infamies,
» que la luxure y est en honneur, ou sui-
» vie seulement de tardives et timides
» punitions , on peut assurer que la chuta
» de l'empire n'est pas ,loin. » Auguste,
honteux enfin de ses excès , l'exila dans
l'île Pandataire , sur la côte de Cam-
panie , après avoir fait défense à tout
homme libre ou esclave d'aller la voir
sans une permission expresse. Cédant ce-
pendant aux sollicitations politiques de
Tibère, il cliangea le lieu de son exil, ^et la
fit transférer à Rhége, dans la Calabie ;
mais il fil prononcer, en même temps,
JUL
67
JUL
son (llvorceavec Tibère. Aufiruste ne rap-
pela pas Julie par son testament ; et ce
fut sous ce prétexte que Tibère, devenu
empereur, lui ôta sa pension , et la laissa
mourir de faim dans son exil, l'an ik de
J.-C. — JULIE sa fille, femme de Lépidus,
fut aussi exilée pour ses débauches.
JULIE , surnommée Liville ( Julia Ju-
jiiOK ) , troisième fille de Germanicus et
d'Agrippine , née dansl'ile de Lesbos , l'an
17 de Jésus-Christ , fut mariée à l'âge de
16 ans, au sénateur Marcus-Vinucius.
Elle jouit d'abord d'une grande faveui-
sous l'empereur Caligula son frère , qui
ayant été, dit-on, son premier corrupteur,
l'avait livrée ensuite aux compagnons de
ses débauches. Mais ce prince s'élant ima-
giné qu'elle était entrée dans une conspi-
ration contre lui, l'exila dans l'ile de
Ponte. Rappelée a Rome par Claude son
oncle , l'au 41, elle ne resta pas long-temps
dans cette capitale. Messaline , jalouse de
son crédit , la fit exiler de nouveau, sous
prétexte d'adultère , et massacrer peix de
temps après par un de ses satellites. Elle
n'avait encore que 24 ans. Ses mœurs
étaient très corrompues. On prétend que
lo philosophe Séncque fut un de ses
nombreux amans, et qu'il fut relégué dans
l'île de Corse pour l'avoir séduite : tant il
est vrai que dans tous les temps la phi-
losophie, abandonnée à elle-même , a fait
plus de froids et hypocrites moralistes
que de sages dignes de ce nom.
JULIE, fille de l'empereur Titus , fut
mariée à Sabinus, son cousin-germain.
Domilicn, son frère, en devint amoureux,
et elle n'eut point horreur de répondre à
sa passion infâme. Ce prince étant par-
venu à l'empire , fit assassiner Sabinus
et répudia en même temps sa femme.
Julie s'étant retirée dans le palais impé-
rial , devint publiquement la concubine
de son frère. Mais ayant voulu se faire
avorter, le breuvage que Domitien lui fit
donner à cet effet agit d'une manière si
violente qu'elle en moumt l'an 80 de Jé-
sus-Christ, quoiqu'elle fût, dit-on, accou-
tumée à ce crime. Domitien la plaça au
rang des divinités : il en fallait de telles à
ce monstre, ^oyez SABINE.
JULIE DOMiVE. royez JULÏA.
JULIE. Foy. DRUSILLE, GONZAGUE
et SOEMIAS.
JULIEiV ( saint), premier évêque du
Mans et l'apôtre du Maine , sur la fin du
5* siècle , doit être distingué de saint Ju-
lien, martyrisé en 318, dit-on , à Brioude
en Auvergne , sous Dioclélien. Quoiqu'on
ne puisse contester à saint Julien la gloire
d'avoir prêché l'Evangile dans le Maine:
on n'a aucun monument , ni du temps
auquel il a vécu, ni des actions qui signa-
lèrent son épiscopat.
JULIEN ( saint ) , illustre archevêque
de Tolède, en 680 , présida au 12* concile
de Tolède, et aux trois suivans.Il mourut
en 690 , et laissa : | un Traité contre les
Juifs, dans le livre intitulé : Testamen-
tum 12 Prophelarurrij Haguenau, 1532,
in-8° ; | Pronostica futuri sœculi . dans la
Bibliothèque des Pères ; | De expeditione
IVambce Régis in Paulum ducem Nar-
bonensem, dans les Historiens de France
de Duchesne ; ] d'autres Ecrits sa vans et
solides. Il avait l'esprit aisé, fécond, agréa-
ble, et les mœurs douces et pures.
JULIEN ( DiDius Servus-Juliakus ).
Voyez DIDIER-JULIEN.
JULIEN ( Flavius-Claudius ), dit l'J-
postal, fameux empereur romain , fils de
Jules-Constance, frère du grand Con-
stantin, et de Basiline sa seconde femme,
naquit à Constantinople en 551. Il pensa
périr avec son frère Gallus dans l'hor-
rible massacre que les fils de Constantin
firent de sa famille, massacre dans lequel
son père et ses plus proches parens fu-
rent enveloppés ; il ne fut sauvé que par
les soins de Marc, évêque d'Arélhuse, qui
le cacha dans le sanctuaire de son église,
circonstance qui ajouta dans la suite à
l'horreur de son apostasie, et de la per-
sécution qu'il souffrit que l'on exerçât
contre les chrétiens , lorsqu'il fut sur le
trône. Eusèbe de Nicomédie, chargé de
l'éducation de Julien et de Gallus, leur
donna un gouverneur nommé Mardo-
nius, qui tâcha de leur inspirer de la gra
vite, delà modestie et du mépris pour
les plaisirs des sens. Ces deux jeunes prin-
ces entrèrent dans le clergé, et firent l'of-
fice de lecteurs ; mais avec des sentimeus
bien différens sur la religion. Gallus
avait beaucoup de piété , et Julien avait
un secret penchant pour le culte des fau-x
dieux. Ses dispositions éclatèrent lors-
qu'il fut envoyé à Athènes , à l'âge de 24
ans. Il s'y appliqua à l'astrologie, à la
magie , et à toutes les vaines illusions du
paganisme. Il s'attacha surtout au philo-
sophe Maxime , qui flattait son ambition,
en lui promettant l'empire. C'est princi-
palement à cette curiosité sacrilège de
coiyiaître l'avenir, et au désir de domi-
ner, que l'on doit attribuer l'apostasie de
ce prince, qui ne la fit connaître qu'a
ii:vs la mort de Constance Celui-ci le lit
JUL
Césat l'an 55b. Julien eut , en cette qua-
lité, le commandement général des trou-
pes dans les Gaules, et se si{;nala dans
tet emploi par sa prudence et son cou-
rage. Il remporta une victoire sur sept
rois allemands auprès de Strasbourg,
vainquit plusieurs fois les barbares, et
les chassa des Gaules en très peu de
temps. Constance auquel il était devenu
suspect par tant de succès , lui envoya
demander pour l'affaiblir une partie con-
sidérable de ses troupes, sous prétexte
de la guerre contre les Perses. Mais les
soldats de Julien se mutinèrent el le dé-
clarèrent empereur malgré sa résistance,
n était alors à Paris , où il avait fait bâtir
un palais, dont on voit encore les restes.
L'empereur Constance indigné contre
lui songeait aux moyens de le soumettre,
lorsqu'il mourut le 5 novembre 361. Ju-
lien alla aussitôt en Orient, où il fut re-
connu empereur comme il l'avait élc en
Occident. Le luxe, la mollesse, une foule
de maux désolaient l'empire ; Julien y
remédia avec zèle , et fit naître les plus
fortes espérances d'un règne heureux;
mais les philosophes dont il était envi-
ronné les firent évanouir. Ils lui per-
suadèrent d'anéantir le christianisme el
de faire revivre l'idolâtrie. Julien or-
donna par un édit général d'ouvrir les
temples du paganisme. Il fit lui-même
les fonctions de souverain pontife , avec
toutes les cérémonies païennes, s'effor-
çant d'effacer le caractère de son bap-
tême avec le sang des sacrifices. Il assi-
gna des revenus aux prêtres des idoles,
dépouilla les églises de (ous leurs biens,
pour en faire des largesses aux soldats,
ou les réunir à son domaine; révoqua
tous les privilèges que les empereurs
avaient accordés à l'Eglise, et ôta les pen-
sions que Constantin avait données pour
nourrir les clercs, les veuves et les vier-
ges. Plus adroit que ses prédécesseurs , il
ne crut pas d'abord devoir employer la
violence pour abolir le christianisme : il
savait qu'elle avait donné à l'Eglise une
plus grande fécondité. Il affecta même la
douceur envers les chrétiens , el rappela
lous ceux qui avaient été exilés sous Con-
stance, à cause de la religion. Son but
était de les pervertir par les caresses, les
avantages temjjorels, et les vexations co-
lorées de quelque prétexte étranger. S'il
enlevait les richesses des églises, c'é-
tait, disait-il, pour faire pratiquer aux
chrétiens la pauvreté cvangélique : il leur
défcniluil de plaider , de se défendre en
68 JUL
justice, et d'exercer des charges publi-
ques. Il fit plus; il ne voulut pas qu'ils
enseignassent les belles-lettres , sachant
les grands avantages qu'ils tiraient des
livres profanes pour combattre le paga-
nisme et l'irréligion. Quoiqu'il témoignât
en toute occasion un mépris souverain
pour les chrétiens , qu'il appelait toujours
Galiléens, cependant il sentait l'avantage
que leur donnait la pureté de leurs mœurs
et l'éclat de leurs vertus ; il ne cessait de
proposer leurs exemples aux prêtres
païens. Tel fut le caractère de la persé-
cution de Julien : la douceur apparente
et la dérision de l'Evangile. Il en vint
néanmoins ouvertement à des moyens
violens quand il vit que les autres étaient
inutiles. Il donna les charges publiques
aux plus cruels ennemis des chrétiens, et
les villes furent remplies de troubles et
de séditions. Il y eut un grand nombre de
martyrs dans la plupart des provinces,
et même à sa cour, où, par des ordres se-
crets , on se défaisait des plus illustres
partisans du christianisme. Il fit mourir
à Chalcédoine les deux ambassadeurs de
Perse, Manuel et Ismaël, parce qu'ils
étaient chrétiens. Maris, évêque de cette
ville, qui était aveugle, lui ayant reproché
publiquement ses impiétés, Julien lui ré-
pondit en souriant , « que son Galiléen ne
» le guérirait pas de la perte de sa vue.
» — Je loue le Seigneur, répondit Maris.
» d'être aveugle pour n'avoir pas les yeux
» souillés par la vue d'un apostat tel qu«
» toi... » Julien voulant convaincre de
faux la prédiction de Notre-Seigneur sur
le temple de Jérusalem , entreprit de le
faire rebâtir par les Juifs , environ 300
ans après sa démolition par Titus ; mais
tous leurs efforts ne servirent qu'à véri-
fier la parole de J.-C. Les Juifs , qui s'é-
taient rassemblés tle tous côtés à Jérusa-
lem, en ayant creusé les fonde mens , il
en sortit des tourbillons de flammes qui
consumèrent les ouvriers, et l'ouvrage
commencé. Les maçons s'opin'iâtrèrent à
diverses reprises , à construire les fonde-
mens du temple ; mais tous ceux qui osè-
rent y travailler périrent par les flam-
mes. Ce fait est constaté par Ammien
Marcellin , auteur païen très estimé , et
par un grand nombre de témoins authen-
tiques. L'empereur Julien, résolu d'é-
lemdre le christianisme , voulait aupara-
vant terminer la guerre contre les Perses,
11 fit des préparatifs et des sacrifices sa n?
nombre, et jura, en partant, de ruiner
l'Eglise à son retour : mais Dieu la ga»
JUL
rantit de ses menaces insensées. Ce prince
s'étant engagé sans cuirasse dans le pre-
mier combat, il fut blessé dangereuse-
ment. Comme illevail les bras pour ani-
mer les troupes, en criant Tout à nous! il
fut frappé d'un dard qui le blessa à mort.
Théodoret et saint Grégoire de Nazian7.e
rapportent qu'il prit alors dans sa main
du sang de sa blessure, et qu'il s'écria en
lejelanl vers le ciel : Tu as vaincu j, Ga-
liléen ! Trait que quelques critiques ont
révoqué en doule, mais que sa haine
contre Jésus-Christ et ses vains efforts
pour détruire le christianisme rendent
Jrès croyable, el que M. Le Beau, dans son
Histoire du Kas-Empire_. a suspecté sans
raison sur le simple silence d'Ammien
Marcellin. « Lorsque, dit un critique, à
» l'autorité de Théodore! , si voisin de ce
» temps-là, on ajoute celle de saint Gré-
» goire de Nazianze, auteur contemporain,
» écrivain solide el judicieux, et qui con-
» naissait si bien Julien (i) ; lorsque l'on
» considère que le silence d'Ammien Mar-
» cellin ne prouve rien , puisqu'il n'est
» pas naturel qu'un auteur païen rapporte
» l'aveu de la victoire de Jésus-Christ,
» échappé à son héros mourant ; lorsqu'on
» se rappelle que Julien avait résolu d'ex-
■B tirper le christianisme à son retour;
i> que redit de persécution était déjà en-
» voyé en Afrique, et que les païens claient
» si persuadés de sa prochaine deslruc-
» tien, que Libanius osa demander à un
» grammairien chrétien : Que fait main-
» tenant le fils du charpentier {2)? lors-
» qu'on songe que les païens mêmes ont
» regardé la mort de Julien comme une
» vengeance du Christ ( 3 ) / lorsqu'on
« réfléciiit à l'exclamation tout- à- fait
j) fluide et insignihante ( Soleil tu as
» perdu Jidien), que M. Lebeau substitue
» à l'énergique f^lcisti Galilœe ! si bien as-
» sorti au caractère de haine que Julien
t> portail à Jésus-Christ, si naturellement
lorsqu
(i ) Ct saint'avait et»; coriflisciple de Jul
ce dernier étudiait à Ailunes
(a) Il fait un cercueil, répondit le grammairien.
(3) Saint Jérftme, qui (ftwil àg,-: de aaans quand
Julun muurul, raronle qu'au milieu des stîmisscmens
quesa mortarr.ithailà l'idûlàtrie, il entendit ces pa-
role» de la bouche d'uD pa'jen : . Comment les chrp-
. liens peuvent-iU vanter la patience de leur Dieu?
• Ilien n'est si prompt que sa colère. Il n'a pu sus-
. pendre pour un peu de temps son indignation . Oc -
Uvc de Mile: , Théodorel , Sozomènc ."etc . rappor-
tent des propos semblables. Or. qui ne voit que ce
lûr.g-ige des païens . qui ne croyaient point en la pais-
»snce de J .-C, ne poavaii iire fondé q-ae sur tes der-
tti^re; par<}le3 de- Julien,
6.9 JUL
«lié aux circonstances, si digne du vain*
» queur et du vaincu ; lorsqu'on se sou-
» vient de la mort d'autres ennemis du
» christianisme , surtout de ceux qui ont
» eu contre son divin fondateur une haine
» personutillc , et qu'on a vu renouveler ce
•i> Vicisti à'wnç. manière terrible, etc.;
» lorsque, dis-je, on rasseml)le toutes ces
» considérations, on n'hésite point à soup-
» çonner de légèreté l'historien , d'ailleurs
» très estimable , qui a paru révoquer en
» doute une ancienne et générale tradi-
n tion. » Julien employa ses derniers mo-
mens à s'entretenir avec le philosophe et
le magicien Maxime , et expira la nuit
suivante, le 26 juin 563, à 52 ans. Il avait
épousé Hélène, sœur de Constance, la-
quelle mourut à la fleur de son âge. II
n'y a guère de prijice dont les auteurs
aient parlé plus diversement, parce qu'ils
l'ont regardé sous différens points de vue,
et qu'il était lui-même un amas de con-
tradictions. II fit paraître des vertus tant
qu'il fut en tutelle, et réduit à tremble
continuellement pour ses jours ; lorsqu'il
fut maître , il donna l'essor à son carac-
tère. Une dissimulation profonde , tme
hypocrisie raflinée , dont il avait contracté
l'habitude, fut le voile dont il sut couvrir
de très grands vices... Son courage est in-
contestable ; mais il fut bouillant , témé-
raire, avide de gloire à un excès puéril.
Maître de conclure avec les Perses une
paix avantageuse , il eut la folie de vou-
loir imiter Alexandre ; il se laissatrompcr
par un espion, malgré les remontrances
de ses généraux ; il exposa son armée à
une perte certaine, en faisant bnîler sa
flotte. Il mit l'Assyrie à feu et à sang;
la manière dont il traita les villes de Dia-
cires, Ozogardane et Maogamalgue , fait
horreur. Il fut d'une tempérance exem-
plaire, mais il poussait la malpropreté rt
l'extérieur cynique à une indécence qui
avilissait l'empereur et le philosophe.
Dans les fêtes de Vénus , il ne rougissait
point de se mêler à la troupe des prosti-
tuées et des efféminés qui célébraient la
déesse ; il fil pour les sacrifices des pro-
fusions insensées. Ammien Marcellin dit
que s'il était revenu vainqueur des Per-
ses, l'empire n'aurait pas pu fournir asser,
de bœufs pour servir de victimes. Il fai-
sait lui-même les fonctions les plus vilts
desacrihcateur, et paraissait conlinuellu-
ment dans l'équipage d'un boucher... Dans
plusieurs occasions il donna des exemples
de clémence, dans d'autres il montra de la
cruauté. Il laissa tourmenter impunéu)eat
JUL
Marc, évoque d'Aréthuse, qui lui avait
sauvé la vie pendant son enfance ; il paya
de la même ingratitude le trésorier Ursu-
lus, qui avait tenu son parti dans les Gau-
les : la mort de cet homme irréprochable
lit murmurer tout l'empire. Il lit mourir
deux officiers, parce qu'ils étaient demeu-
rés fidèles à Constance , leur maître. 11
ne vengea aucune des cruautés que les
païens exercèrent contre les chrétiens
sous son règne ; il punit au contraire les
gouverneurs de province qui voulurent
les réprimer. Par une libéralité fort mal
entendue, il causa une famine à Antio-
che. Il était d'une application infatigable
au travail , fit plusieurs ordonnances très
sages , et retrancha beaucoup d'abus; mais
il en fit naître de nouveaux, et commit
plusieurs injustices ( voyez Ammien
Marcellin, liv. 24 ). A la place des tyrans
subalternes qu'il déposséda , il mit en fa-
veur des sophistes dont l'orgueil, l'inso-
lence et les vexations indignaient tout le
monde. L'apostasie, sous son règne, tint
lieu de mérite ; on vit un certain Ecebe-
lus , qui avait été un de ses maîtres ,
changer trois fois de religion sous trois
règnes. Enfin parmi les philosophes même
de ce siècle , qui ont tenté de faire de Ju-
lien un héros et un sage , il s en est trouvé
de sincères qui en ont parlé avec vérité.
Celui qui a traité de la félicité puhliqrie a
porté de ce prince un jugement plus équi-
table, que ses confrères. Il convient que la
manière dont on en a parlé est moins hu-
miliante pour le faux zèle que pour la
philosophie ; que c'était un crime de la
part de Julien d'opprimer le christianis-
me ; qu'au lieu de montrer sur le trône
un philosophe impartial , il ne fit voir en
lui qu'un païen dévot et fanatique. « Je
» ne sais, dit-il, quel caractère de comé-
» dien domine dans l'esprit de Julien ;
B tantôt c'est Marc-Aurèle , tantôt Trajan,
» tantôt Alexandre qu'il s'empresse de co-
» pier. Ses ouvrages sont ceux d'un so-
» phiste et d'un rhéteur. Dans ses mœurs
» c'est un stoïcien : au temple c'est un
1» idolâtre ; et dans son cabinet un mau-
I» vais platonicien, qui cherche à cor-
» rompre la doctrine de cette secte par
» l'indigne alliage de la magie. » Saint
Grégoire de Na/.ianze fait le portrait sui-
vant de sa figure, de ses attitudes et de
ses manières : « Il y a beaucoup de gens ,
» dit-il, qui n'ont connu Julien que lors-
» qu'il s'est fait connaître par ses actions
» et par l'abus de la puissance absolue ;
» mais pour moi, je connus ce qu'il était
70 JUL
» dès que je le vis et que je le pratiquai à
» Athènes , et je ne lui trouvai aucune
B marque de rien de bon. Il portait la
» tête au vent , renmait sans cesse les
» épaules , tournait les yeux de côté et
» d'autre à tout moment , avait le regard
» farouche ; il ne pouvait tenir ses pieds
» en place , enflait ou retirait ses narines
i> continuellement , en signe de colère ou
» de mépris ; s'exerçait à dire des bons
» mots et des bouffonneries froides, riait
» à gorge déployée ; ac<:ordait ou refusait
» légèrement une même chose d'un mo-
» ment à l'autre , parlait sans ordre et
» sans fondement , faisait des interroga-
» lions importunes et des réponses hors
» de propos. Mais pourquoi est-ce que je
» m'arrête à faire un si long détail de son
» extérieur ? Pour conclusion, je le con-
» nus dès lors par là, avant que de le con-
» naître dans ses actions, et, depuis , elles
» n'ont fait que me confirmer dans mon
» premier jugement : car ceux qui étaient
» alors avec moi pourraient rendre témoi-
» gnage, s'ils étaient présens, que dès
B que j'eus observé toutes ses manières,
» je dis aussitôt que la république romaine
» nourrissait un serpent bien dangereux.
i> Je le dis, et je souhaitais en même temps
B d'être un menteur ; et sans doute il eût
0 beaucoup mieux valu que je l'eusse été
» et que Ion n'eût point vu tant de maux
» qui ont désolé toute la terre. » A ces di-
vers portraits de Julien , nous joindrons
celui qu'en fait M. Le Beau dans son His-
toire du Bas-Empire ; le dernier trait
surtout est caractéristique. « On aperçoit,
B dit-il , dans cette âme tout le jeu de la
» vanité. Avide de gloire comme les ava-
B res le sont des richesses , il la chercha
» jusque dans les moindres objets. Sa tem-
» pérance , poussée à l'excès devint une
B vertu de théâtre ; une grande partie de
B ses sujets ne trouva jamais en lui de
B justice ; s'il eût été vraiment le père de
B ses peuples, il eût cessé de haïr les chré-
» liens , et ne leur eût pas fait la guerre
B du moment qu'il devait leur empereur.
B II n'épargna leur vie que dans ses pa-
B rôles et dans ses édits. Julien est le mo-
B dèle des princes persécuteurs , qui veu-
B lent sauver ce reproche par une appa-
B rence de douceur et d'équité. » On peut
consulter son Histoire, très bien écrite ,
par M. l'abbé de la Bletlerie, réimprimée
à Paris en i vol. in-12 ; ou bien encore
celle qu'a publiée M. Jondot, 1817, 2 vol.
in-8°. Ce prince a été encore l»ien jugé
par un autour déjà cité , dont les prin-
JUL
7J
JUL
cipes anti -chrétiens ne sont pas équivo-
ques ( Chastdlux, De lafélicité publique ) ;
<1 mieux encore par le cardinal Gerdil,
Considérations sur Julien. L'aLbé Bau-
douin dans une savante explication de
VJpocahjpse. publiée en 178/j , Paris , 2
vol. in-12 , prétend que Julien est le per-
sécuteur dont le nom est exprimé d'une
manière énigmatique au chap. 15, et que
le mot ocTToçaTviç, devenu son surnom, et
sa qualité dislinctivc, donne exactement
le nombre 6G6 , suivant la valeur numé-
rique qui se trouve dans tous les diction-
naires grecs. Il nous reste de cet empe-
reur plusieurs Discours ou Harangues ,
des Lettres , une Satire des Césars ^ la
Fable allégorique Afi Misopogon ou l'En-
nemi de la barbe, satire par laquelle il
répondait aux habitans d'Antioche qui
avaient tourné en ridicule son extérieur
philosophique. Ces différens opuscules
publiés plusieurs fois séparément l'ont
été collectivement; à Paris, 1583, in-8",
grec latin; ibid. 1650, in-4°, et Leipsick,
1696, in-fol. La Blettcrie en a traduit une
partie [voijez BLETTERIE) : le marquis
d'Argens a traduit ses Discours contre les
chrétiens avec des notes nouvelles de di-
vers auteurs (de Voltaire), nouvelle édi-
tion, Berlin ( Genève ), 1768, deux par-
ties in-8". Les 12 Césars ont été traduits
par Ezéchiel Spanheim , avec des remar-
ques et preuves , et 500 médailles gravées
par B. Picart, Amsterdam, 1728, in-4°.
On a publié en 1821 les OEuvi-es com-
plètes de l'empereur Julien, traduites
I)our la première fois du grec en fran-
çais, etc. , par R. Touret, Paris, 5 vol.
in-8°.
JULIEN, oncle maternel de l'empereur
Julien, comte d'Orient, haïssait les chré-
' tiens autant que son neveu ; mais il ca-
chait beaucoup moins sa haine. Altéré de
leur sang, il saisissait toutes les occasions
de leur faire subir le dernier supplice.
Il fit fermer toutes les églises d'Antioche.
K'ayant jamais pu obliger le prêtre Théo-
doret, économe d'une église catholique,
à renier J.-C, il le condamna à perdre
la tète , après lui avoir fait souffrir des
lourmens inoxiïs. Le même jour, il se
rendit à l'église principale, profana les
vases sacrés d'une manière détestable,
qu'il n'est pas permis de raconter, et donna
un souflet à un évêque qui voulait l'en
empêcher, o Qu'on croie maintenant, dit
6 ce sacrilège , que Dieu se mêle des af-
o faires des chrétiens ! » L'empereur Ju-
lien ayant appris la mort du prêtre Tbéo-
doret , au lieu d'arrêter la cruauté de son
oncle en le punissant, comme il le devait,
se contenta de lui en faire quelques froids
rcproclics. « Est-ce ainsi , lui dit-il, que
« vous entrez dans mes vues? Tandisque
» je travaille à ramener les Galiléens par
» la raison, vous faites des martyrs sous
» mon règne et sous mes yeux. Ils vont
» me liétrir , comme ils ont flétri leurs
» plus odieux persécuteurs. « Ce qu'il y a
ici de plus étonnant, c'est que ce même
Julien qui fait ces reproches à son oncle
savait faire des martyrs aussi bien que
lui, et les annales de l'Eglise en comptent
un grand nombre sous son règne. ( Voy.
l'article précédent. ) Cet homme sangui-
naire et impie mourut au commence-
ment de l'an 363, peu de temps après le
martyre de saint Théodoret et la profa-
nation dont nous avons parlé. Sa maladie
et sa mort furent tout-à-fait semblables
à celles d'Anliochus.
JtlLIEP^', gouverneur de la province de
Vénétieen Italie, prit le titre d'empereur
après la mort deNumérienenSSi. Comme
il avait de la bravoure, il se maintint pen-
dant quelque temps en Italie contre les
troupes de l'empereur Carin. Mais les
deux concurrens à l'empire s'élant ren-
contrés dans les plaines de Vérone, Julien
fut vaincu. Les uns disent qu'il périt dans
la bataille ; d'autres, qu'il se tua lui-même
après. Il n'avait porté la powpre impé-
riale qu'environ 5 à 6 mois.
JULIEN d'ESCLANE était fils de Mémo
aius , évêque de Capoue. Il fut d'abord
marié , mais ayant perdu sa femme , il
entra dans les ordres et obtint l'évêché
d'Eclane, petite ville située entre laLam-
panie et la Pouille. Il se distingua par son
éloquence et par les grâces de son esprit
et de son style. Ses talens lui gagnèrent
le cœur de saint Augustin, qui avait été
l'ami intime de son père ; mais ils se
brouillèrent, lorsque Julien refusa de
souscrire aux anathèmes lancés en 418
contre les Pélagiens , dans le concile de
Carthage. Julien se joignit à 17 autres
évêques de sa secte pour faire une confes-
sion de foi, dans laquelle ils prétendaient
se justifier. Le pape, sans y avoir égard,
le condamna avec ses complices. Ces fa-
natiques en appelèrent à un concile gé-
néral; mais saint Augustin, un des plus
ardens adversaires du pélagianisme , dé-
montra que cet appel était illusoire ;
démontra que ceux qui se prétendent
aujourd'hui les disciples de ce saint doc-
teur devraient sérieusement méditer. Ju-
JUL
72
JUL
lien mourut en i50, après avoir été chassé
de son église, analliématisé par les papes
cl particulièrement par saint Léon, et
proscrit par les empereurs. On a de lui
quelques ouvrages, 1668, in-8°.
• JULIEN (Simon), peintre, élève de
Carie Vanloo , naquit à Toulon en 1756.
Ayant remporté le prix de l'académie ,
il fut envoyé à Borne , où il séjourna
pendant dix ans. Leduc de Parme l'honora
de ses bienfaits ; et , pour lui témoigner
sa reconnaissance , il prit le nom de Ju-
lien de Parme , qu'il conserva toute sa
■vie. De retour en France , il fit quelques
tableaux célèbres, parmi lesquels on cite
\ Etude qui répand des fleurs sur le Temps ^
qu'il exposa au salon de 1788, et Jupiter
sur le mont Ida^ endormi dans les bras
de Junon, qui a été gravé par Benoît. Il
mourut le 25 février 1800. — Il y a eu un
statuaire du même nom, né à Saint^Pau-
Jien, près du Puy en Velay, et mort à
Paris en 1804, qui fut un des plus habiles
artistes de son siècle. On estime surtout
ses statues du Guerrier mourante de La
Fontaine, du Poussin, de la Baigneuse ,
et une Galatée , qui fut regardée comme
une des statues les plus parfaites que l'on
connût.
JULIEN DE FONTENAI. Foyez COL-
DOBÉ.
JULIENNE , prieure du monastère du
Hlont-Cornillon, près de Liège , naquit en
1193 au village de Bétine, dans la ban-
lieue de cette ville, et mourut à Fosse en
1258 , en odeur de sainteté. Une vision
qu'elle eut donna lieu à l'institution de
la fête du Saint-Sacrement, qui, célébrée
ù'abord dans quelques églises particu-
lières, le fut ensuite dans l'Eglise uni-
verselle {voyez URBAIN IV); espèce
de triomphe que la Providence préparait
d'avance, et qui devait subsister toujours
dans l'Eglise de Dieu, en réparation des
outrages que ce mystère auguste essuie-
rait de la part des sectaires des derniers
siècles. Julienne n'a point été canonisée
dans les formes ; mais on la trouve qua-
lifiée de sainte dans quelques martyro-
loges, et de bienheureuse dans d'autres.
L'abbaye de Saint-Sauveur d'Anvers, or-
dre de Cîleaux , conserve ses reliques.
JULIUS CANUS a rendu so6 nom cé-
lèbre sous l'empereur Caligula. Ce tyran,
irrité sans sujet contre lui, l'avertit de se
préparer à la mort : Je vous suis bien
obligé , César , répondit Julius sans pa-
raître ému. On le conduisit en prison, et
lorsqu'on vint le prendre pour le mener
au supplice, on le trot. va jouant aux
échecs. Son jeu était plus beau que celui
de s()n compagnon, et afin que celui-ci ne
se glorifiât j)as après sa mort de l'avoir
gagné, il pria le centurion d'être témoin
de l'avantage qu'il avait sur lui. Il se leva
ensuite, et suivit l'exécuteur avec une
fermeté qui étonna les spectateurs. C'est
au moins ce que nous raconte Sénè(jue ;
mais le fait , suppose exactement vrai ,
prouve bien plus d'ostentation et de va-
nité puérile que de véritable courage.
JULIUS-CAPITOLINUS. frayez CA-
PITOLÎNUS.
JULIUS-FIRMICUS. roy. FIRMICUS.
JULIUS-PAULUS. Koyez PAUL.
JULIUS-POLLUX. rotjez POLLUX.
• JULLIEN (Mauc-Aistoiive) , surnom-
mé de la Drôme, parce qu'il fut député de
ce déparlement à la Convention, naquit au
Péage de Romans en Dauphiné, en 1744,
et était fixé à Paris à l'époque où la révo-
lution éclata ; il en adopta les principes
et entretint une correspondance politique
avec les principaux habitans du Dau-
phiné. Ces lettres dans lesquelles ses com-
patriotes remarquèrent beaucoup de cha-
leur et d'énergie contribuèrent à le faire
nommer député aux deux assemblées lé-
gislatives dont il fil partie. Dans la pre-
mière il se lit peu remarquer : dans la se-
conde il vota avec la majorité , et lors du
procès de Louis X\I, il vota la mort
du monarque, en déclarant qu'il avait
toujows haï les rois, et que son hu-
ma?iité éclairée ayant écouté la voix
de la justice é terne, lie , lui ordonnait de
prononcer la mort. Durant le reste de la
session, il ne parla presque point, en
sorte qu'il échappa facilement aux pros-
criptions réaclionnaires. Rentré dans la
vie privée, il s'occupa paisiblement de lit-
térature, jusqu'en 1814, époque à laquelle
il quitta Paris pour se retirer dans son
pays natal. JuUien ne signa point l'acte
additionnel et n'accepta point de fonc-
tions publiques durant les Cent-joiu-s. En
conséquence , il ne fut pas atteint par le
loi de 1816 contre les régicides. En 1821 ,
il était à un balcon fort élevé, lorsqu'il
fut saisi d'un violent élourdisseraent : il
se laissa tomber et expira sur-le-champ.
Jullien avait entretenu des relations de
correspondance et d'amitié avec l'avocat-
général Servan, son compatriote, avec
l'abbé de Mably et la duchesse d'Anville.
Il a composé un grand nombre de mor-
ceaux de poésie qui sont épars dans plu-
sieurs recueiU ; ils ont été réunis dans
JlîM 7!^
un volume in-8", et on y en a ajouté quel-
ques autres qui n'avaient point encore vu
le jour : cet ouvrage intitulé : Opuscules
en vers^ a été publié à Paris, en 1807.
JuUien a laissé aussi en manuscrit des
Contes pour les enfans dont il existe plu-
sieurs copies. C'est l'aîné de ses fils qui a
dirigé jusqu'en 1830 la Revue encyclo])é-
dique^ recueil scientifique et littéraire.
* J€MELIN (Jean-Baptiste), profes-
seur de physique et de chimie, né en 1715
près de Cherbourg , fit ses études che/
les eudistes de Caen, puis vint à Paris
où il fut maître d'étude ou de quartier
dans un des collèges de l'université.
Pendant les loisirs que lui laissait son
emploi, il suivit les cours de méde-
cùie, et se livra particulièrement aux
sciences physiques. Il était devenu mem-
bre du bureau de consultation des arts
et métiers, et ses talens comme médecin
et comme physicien lui avaient acquis
de la célébrité, lorsque M. de Choiseul-
Gouffîer, nommé à l'ambassade de Cons-
tantinople.le choisit pour l'accompagner.
Pendant tout le temps que Jumelin sé-
journa dans la capitale de l'empire otto-
man , il s'occupa de recherches relatives
à l'histoire naturelle de la Turquie. Con-
jointement avec l'abbé Spallanzani son
ami, il fit un grand nombre d'expériences,
dont les résultats amenèrent plusieurs
découvertes précieuses. En parcourant
les rives de la mer Noire, il trouva les
ruines de la ville de Githium dont aucun
auteur n'avait parlé avant lui , et à celte
occasion, il rédigea un Mémoire qu'il
présenta à l'institut de France. On doit à
ce savant l'invention d'une machine pneu-
matique d'une structure particulière,
celle d'une nouvelle pompe à feu, etc.
Une suite nombreuse d'expériences l'avait
amené à reconnaître tous les effets que
peut produire l'électricité sur l'économie
animale. Jumelin a en outre laissé plu-
Sieurs bons ouvrages parmi lesquels on
distingue Traité élémentaire de physique
et de chimie^ Paris, 1809, 4 vol. in-8°;
précédé d'une notice sur la vie et les ou-
vrages de l'auteur , parN.-L. Desessarts;
le second volume qui devait traiter des
sciences physico-mathématiques est resté
manuscrit. Ses OEuvres diverses concer-
nant les sciences et les arts avaient paru
en 1800, Paris, in-8°. Jumelin fut intime-
ment lié avec La voisier. Il mourut en 1807
à Paris, après avoir été professeur de phy-
sique et de chimie au lycée impérial.
• JUMILIIAC (domPiERRE-BEXoiT de).
7.
JUM
bénédiciin de Saint-Maur, né dans le Li-
mousin en 1611 , d'une famille illustre,
entra fort jeune dans la congrégation oà
il parvint aux premières dignités. Il mou-
rut le 22 mars 1082 , à l'abbaye de Saint-
Germain des Prés. 11 était très versé dans
la n)usique, et on lui doit la Science et la
pratique du plain chant, Paris, 1C77, in-4.°.
C'est un traité divisé en 8 parties , danti
lequel on trouve une exposition complète
et méthodique de la doctrine de Gui d'A-
rezzo. On a attribué ce traité à dom Jac-
ques Leclerc; mais domMartenne et don
Tassin ont fait connaître son véritable
auteur.
* JUMILIIAC -CHAPELLE (N. baron
de ) , issu d'une famille ancienne , entra
de bonne heure dans l'état militaire, et
fit ses premières armes dans le régiment
d'Artois ( cavalerie ). Plusieurs missions
diplomatiques lui furent ensuite confiées
par le gouvernement français pour l'Al-
lemagne , et il séjourna quelque temps à
Berlin. De retour en France , il obtint le
brevet de colonel et fut nommé conseil-
ler d'ambassade en Portugal , où il resta
deux ans. Ayant épousé M""^ de Launay,
fille du gouverneur de la Bastille, il avait
obtenu la promesse de remplacer son
beau-père après sa mort ; mais la révolu-
tion en disposa autrement. Il paraît que
le baron de Jumilhac ne quitta point la
France, même pendant l'époque de la ter-
reur. En 181S il reçut le brevet de maré-
chal de camp, et la croix de Saint-Louis,
et il présida dans le mois de septembre
de la même année , le collège électoral de
Seine-et-Oise qui le nomma membre de
la chambre des députés. Lorsque dans le
mois d'avril 1816, M. Lachèse-Murel pro-
posa de remettre entre les mains des prê-
tres les registres de l'état civil, Jumilliac
appuya fortement cette proposition et pu-
blia même son opinion , dans laquelle il
s'attacha à prouver que cette mesure était
nécessaire sous le rapport des principes
religieux ; que , sous le rapport civil, elle
l'était au moins autant, pour éviter les
erreurs très graves qui se commettaient
fréquemment, et dont il cite plusieurs
exemples. La mesure proposée ne fut
point adoptée. Jumilhac vcrta constam-
ment pendant cette session avec la majo-
rité. Après l'ordonnance du 5 septembre
1816, il fut renommé président du collège
électoral de Seine-et-Oise qui le réélut.
Depuis cette époque Jumilhac fit partie
de la minorité royaliste. Jumilhac est
mort dans son château de GuigneviJle
JUM 7
près iVAipajon, le o juillet 1820. On a de
Wii : I Réflexions sur V état des finances,
Paris, 1816, in- 8'*; | Opinion sur la propo-
sition tnidant à rendre aux ministres
de la religion les fondions de l'état civil.
^810, in-«°; | et quelques articles d'écono-
mie rurale, insérés dans les Mémoires de
la société d'agriculture de Scine-et-Oise
dont il était membre , et où une notice
nécrologique lui a été consacrée , 21* an-
née , page 92.
• JUMILIIAC (Antoine -Pierre -Jo-
seph de CHAPELLE , marquis de), naquit
dans le midi de la France , le 51 août 1764.
Ne voulant pas adopter les maximes ré-
volutionnaires , et croyant ne pouvoir pas
défendre son roi en restant en France ,
il imita l'exemple de plusieurs milliers de
gentilshommes, et émigra en 1792. S'é-
tant enrôlé dans les années des princes ,
il en fit les campagnes. Lors de la disso-
lution de leurs armées, il se rendit à
Londres, d'où il partit comme officier
dans l'expédition de Quiberon. Après la
reprise du fort Peuthièvre , par les répu-
blicains, et la bataille sanglante qui en
fut la suite , abandonné sur le sol français
avec les autres fidèles royalistes, il fut,
avec eux , amené prisonnier à Vannes.
Les émigrés, par l'héroïque action du
comte de Sombreuil(t'0?/<?2 Mémoires sur
l expédition de Quiberon, Paris, Lenor-
h)ant , 1822 , 2 vol. in-8° ) , qui se voua à la
mort pour sauver ses camarades , comp-
taient sur la capitulation conclue entre ce
chef et le général Hoche; mais TalHen
sut la rendre nulle , et tous les émigrés
furent successivement fusillés, àl'exri'p-
tion de six ou sept officiers seulena'ut ,
qui parvinrent à s'échapper. Le marquis
de Jumilhac fut de ce nombre. De retour
à Londi es , il publia une Relation sur ce
malheureux événement. Après le i8 bru-
lur.ire , il rentra en France , prit du ser-
vice dans les armées de l'empire . et se
maria à une soeur du duc de Richelieu.
A la restauration, Louis XVHI le nomma
lieutenant-général de cavalerie , le 50
août 4814, commandant de la 16" division
militaire, à Lille, le 21 octobre 1815 , et
commandeur de Saint -Louis, le 3 mai
1816. Elu président du collège électoral
du Nord, il en lit l'ouverture le 8 octobre
par un discours où Ion remarqua le pas-
sage suivant... « Le roi n'attend de nous
» ni félicitations ni adresses; les seules
» preuves qu'il exige de notre amour sont
* de n'accorder nus suffrages qu'à des
»i honuncs recommaudablcs par leurs
* JUJ\
» principes en faveur de la légitimité,
» par leur modération, par leur amour
» pour lui et pour la France , dont il veut
» assurer le repos... » Le 20 août 1817, il
fut de nouveau nonmié président de ce
même collège électoral. Il est mort le 19
février 1826 , âgé de C2 ans. L'ainé de ses
cnfans a pris les noms et les litres de duc
de Richelieu.
JUNCKER ( CnRiSTiA:v ), philologue
allemand , né à Dresde en 1668. Il fut suc-
cessivement recteur à Schleusingen, à
Eisenach et à Altenbourg, où il mourut,
en 1714 , avec le titre d'historiographe de
la maison de Saxe-Ernest, et de membre
de la société royale de Berlin. La mort
subite de sa femme accéléra la sienne. Il
a fait un grand nombre de traductions
allemandes d'auteurs anciens, et donné
plusieurs éditions d'auteurs classiques,
avec des notes, dans le goût des éditions
de Minellius. On a encore de lui : | Sche-
diasma de Diariis eruditonim . etc.,
Leipsick, 1692, in-12; | Centuria fevii-
naruin eruditione et scriptis illustrium ; '
1 Theatrum latinitatis tiniversœ reghe-
rojunckerianum ; \ Tabulœ synopticce his-
toriée philosophicce lineamentis eruditio-
nis, Altenbourg , 1714 , in-4" ; | Vita Mar-
tini Lulheri et successuum evangelico-
rum. Ouvrage qui, lu par un esprit aîttn-
tif et impartial , fournit les plus profondes
réflexions en faveur de l'Eglise catholique.
I Vita Jobi Ludolphi , etc. ; | une traduc-
tion latine de la Science des médailles
pnr le père Jobert. Sa pauvreté l'obligeait
de travailler un peu à la hâte , et ses ou-
vrages se ressentent de cette précipitation,
Jl'\CTE ( les ). Voyez JUNTE.
JIL\CT1I\, qu'on appelait en italien
Giuntino qui est son véritable nom , ma-
thénrtaticien, né à Florence en 1523, avait
été d'abord carme ; il apostasia ensuite.
Après avoir mené ime vie errante, liceu-
cieuse et inquiète, il fut écrasé, dit-on,
sous les ruines de sa bibliothèque, qu<»i-
qu'il crût avoir lu dans les astres qu'il
mourrait d'un autre genre de mort. On a
de lui : | des CommeJitaires latins sur la
Sphère de Sacrobosco , 1577 et 1578,2
vol. in-8° ; | Spéculum astrologiœ . Lyon,
1581 ,2 vol. in-fol. ; | un Traité en fran-
çais sur la comète qui parut en 1577, in-
8' ; I un autre sw la réformation, du ca-
lendrier par Grégoire XIII , en latin ,
in-S**. Il mourut en 1590. à Lyon. H était
rentré dans l'Eglise catholique , saus être
plus réglé.
JLr\(ii:ïlMA.>N (G< nEinui), fils d'un
JUN
7S
JUN
professeur en droit de Leipsick, est connu
l)ar une Edition recherchée d'une an-
cienne version grecque des sept livres de
la guerre des Gaules de Jtdes - César ,
Francfort , 1606 ,2 vol. in-h" ; et par une
Traduction latine des Pastorales de Lon-
gus , avec des notes ^ Hanau, 1605 , in-S".
On a aussi de lui des Lettres imprimées.
11 mourut à Hanau le 16 août 1610.
JUKGERMAKN (Louis), frère du pré-
cédent, né en 1572, cultiva avec succès
l'histoire naturelle, et s'appliqua parti-
culièrement à la Lolanique. Il mourut à
Altorf en 1653, professeur d'anatomie et
de botanique, et directeur du jardin.
C'est à lui qu'on attribue Ilortus Eystet-
tensis ( voyez BESLER ) ; Catalogus plan-
tai-um quœ circa Altorfium nascuntur ^
Altorf, 16A6, in -8°; Cornue opia Florœ
Giessensis ^ Giessen, 1623, in-i°.
JUNIE (JuNiA CalviN/v), différente
de Junia Silana , autre dame romaine,
fameuse par ses galanteries, descendait
de l'empereur Auguste eu droite ligne.
Elle joignait à l'éclat de sa naissance une
rare beauté, mais qui n'était pas relevée
par la sagesse. Son intimité avec Silanus
son frère la fit accuser d'inceste , et exiler
par l'empereur Claude. Elle fut rappelée
par Néron, et vécut jusqu'au règne de
Vespasien. Racine, dans sa tragédie de
Britannicus ^ la peint bien autrement que
les écrivains anciens. Comme Britannicus
était un prince vertueux , le poète a sup-
posé que son amante avait les mômes
qualités, et a fait de Junie une vestale
digne du cœur de son héros Une telle
licence ne devrait pas être permise,
même aux poètes ; outre qu'elle tend à la
subversion totale des notions historiques ,
elle est proscrite par la grande règle
d'Horace :
Aul famani lequere, aut »ibi convenientia finge.
JUMEN (saint ) , célèbre solitaire natif
de Briou en Poitou , fonda un monastère
à Maire , dont il fut le premier abbé. Il
mourut le 13 août o87, le même jour que
sainte Radegonde, avec laquelle il avait
été en commerce de lettres et de spiri-
tualité.
JUNILIUS, évêque d'Afrique, au 6*=
siècle. On a de lui deux livres De la loi
divine, ou Apparat pour l'étude de l'E-
criture sainte, en forme de dialogues,
dans la Bibliothèque des Pères.
JUMUS, ou der JONCHE, le jeune,
( AoRiE-v ) , né à Horn en Ilollaïu'.e , lan
1512, mort à Armuyden en 1575, laissa
I des Commentaires peu connus sur di-
vers auteurs latins ; | un poème en vers
prosaïques, intitulé la Philippide , Lon-
dres, 1554, '\a-k°, sur le mariage de
Philippe II, roi d'Espagne, avec Marie,
reine d'Angleterre; | quelques Traduc-
tions d'ouvrages grecs; mais elles sont
peu fidèles , et dans la seule version d'Eu-
napius , il a fait plus de 600 fautes ; | six
livres d' Animadversorum , que Gruter a
insérés dans son Trésor critique ; \ Phalli
ex fungorum génère in Hollandiœ sabu-
letis passim crescentis descriplio et ad
vivumexpressa figura, Btilît. 1564, Leyde,
1601, in-4"; Dordrecht, 1652, in-8". On
trouve dans cette édition des lettres de
Junius , mais il n'y a pas de ligure. | iVo- ■■
menclator omnium reiiim, propria no~ »
mina variis linguis explicata indicans,
Augsbourg, 1555, in-8°; Anvers, 1577,
in-8". Cet ouvrage est curieux et recher-
ché. Il est auteur d'autres ouvrages scien-
tifiques, au nombre de douze, parmi les-
quels un de poésie, intitulé : Poemata
pi a et moralia, Leyde, 1598, in-8°. Ju-
nius mourut de chagrin : s'étant rendu
auprès du prince d'Orange, en qualité de
médecin, dans son absence, sa bibliothè-
que et ses manuscrits furent pillés. Le
séjour d'Harlem lui devint odieiix , et il
se retira à Middelbourg, puis chez un
ami, à Armuyden où il termina sa car-
rière au bout de quelques mois.
JlJi\IUS ou du JON (François), né à
Bourges en 1545 , se rendit habile dans le
droit, dans les langues et dans la théo-
logie , et devint ministre de l'église pré-
tendue réformée dans les Pays-Bas. Il fut
choisi en 1597 pour enseigner la théologie
à Leyde, où il mourut en 1602, à 57 ans.
On a de lui : [ une Version latine du texte
hébreu de la Bible , qu'il fit avec Emma-
nuel Tremelius. Elle a souvent été im-
primée en différentes formes : celle qui a
plus de notes est d'Herborn, 1645,4 vol.
in-fol. ]Des CoTm/ie/î/aires sur une grande
partie de l'Ecriture sainte, etc., publiés à
Genève , 1607, en 2 vol. in-fol.
JlîWUS (François), fils du précé-
dent, né à Heidciberg en 1589, prit d'a-
bord le parti des armes ; mais après la
trêve conclue en 1609, il se livra tout
entier à l'étude. II passa en Angleterre en
1620, et demeura pendant 30 ans chez le
comte d'Aiundel. Il mourut à Windsor, '
chez Isaac Vossius, son neveu, en 1678, à '
89 ans, laissant ses manuscrits à l'uni-
vcrsilé dOxford. On a de lui : | un traité
De piclurâ veterum. Il y a peu de choses
JUN 76
dans les auteurs grecs et latins sur la
peinture et sur les peintres, qui aient
échappé aux recherches laborieuses de
l'auteur. La meilleure édition est celle de
Rotterdam en 169i, in-fol. | L'Explica-
tion de l'ancienne Paraphrase gothique
des quatre Evangiles^ corrigée sur de
bons manuscrits , et éclaircie par les notes
de Thomas Maréchal, 1665, in-4°; | un
Commentaire sur la concorde des quatre
Evangiles ^ par Tatien , manuscrit ; | un
Glossaire en cinq langues , dans lequel il
explique l'origine de-s langues septentrio-
nales. Ce dernier ouvrage a été donné au
public à Oxford, en 17i3 , in-fol., par M.
Edouard Lye, savant anglais. Junius
était aussi très versé dans les langues
orientales.
* JUNKER ( George- Adam ) , né à Ha-
nau, et mort à Fontainebleau en 1803, a
donné : | Nouveaux principes de la lan-
gue allemande j Hanau, 1760, in-8°, plu-
sieurs fois réimprimés ; | Introduction à
la lecture des auteurs allemands ^ en
allemand et en français, 1765, in-12;
I une traduction du Théâtre allemand^
avec Liébault , Paris, -1772 -8a , 4 vol. in-
12; | la Découverte de l'Amérique ^ tra-
duite de l'allemand de Campe , Ham-
bourg, 1783 , 2 vol. in-S» ; | Leçons de droit
public. Paris , 1786 , 2 vol. in-8°.
* JUNOÏ, duc d' AERANTES (Andoche),
général de division, colonel-général des
hussards , gouverneur de Paris , etc. , na-
quit le 23 octobre 1771, à Bussy-le-Grand,
près de Semur ( Côte-d'or). Etudiant en
droit , lorsqtie la révolution éclata , il s'é-
tait acquis un certain fonds de connais-
sances , et était plus instruit que la plu-
part des jeunes gens qui prirent les armes
à cette époque. Junot servit comme gre-
nadier dans un des bataillons du départe-
ment où il avait reçu le jour, et ce fut,
en 1790 , pendant le siège de Toulon que ,
Bonaparte le remarqua et se l'attacha
comme secrétaire. Une circonstance où
il fit preuve d'un grand sang-froid ajouta
encore à l'estime que son protecteur avait
pour lui. Bonaparte lui dictant un jour
une dépèche , une bombe éclata à côté de
Junot, qui fut couvert de terre. Il se
contenta de secouer la poussière qui s'é-
tait répandue sur le papier, et disant d'un
ton très calme : « La bombe est venue
■ fort à propos ; j'avais besoin de poudre
» i)our sécher mon écriture. » Junot ne
cessa depuis d'accompagner Bonaparte ;
il fit en qualité de sou aide-de-camp les
fampagnes d'Italie, et passa en peu de
JUÎV
temps , par les grades de chef d'escadron,
de colonel et de général de brigade. Dans
l'expédition d'Egypte , il se distingua par-
ticulièrement au combat de Nazareth , où,
suivi de trois cents cavaliers seulement ,
il osa attaquer 10,000 Turcs qu'il mit en
déroute, soutenu par Kléber. Revenu en
France avec le général en chef, il prit
part à la révolution du 18 brumaire , et ,
au commencement de 1804 , il fut nonmié
commandant puis gouverneur de Paris ,
poste dans lequel il déploya un faste ex-
traordinaire. Il passa ensuite avec le
grade de général de division à l'armée
destinée à faire une descente en Angle-
terre, et reçut le titre de colonel-général
des hussards. Junot fut envoyé la même
année en Portugal en qualité d'ambassa-
deur, quitta momentanément Lisbonne
pour se rendre à l'armée d'Allemagne , et
si; conduisit d'une manière brillante à la
célèbre journée d'Auslerlitz. Il retourna
ensuite à Lisbonne , revint encore en
France , et reçut à la fin de 1807, le com-
mandement de l'armée assemblée à
Rayonne et destinée à faire la conquête
du Portugal. Cependant Junot était dé-
pourvu des qualités indispensables dans
un chef d'armée , et il avait le tort de se
laisser aller à des transports de fureur qui
pouvaient quelquefois laisser soupçonner
quelque dérangement dans ses facultés
intellectuelles. Il pénétra en Portugal ,
sans rencontrer d'autres obstacles que
ceux qui naissaient de la difficulté des-
chemins et du manque de vivres. Ce ne
fut qu'à Abrantès , petite ville située sur
le Tage, à vingt-cinq lieues de Lisbonne ,
que l'armée trouva des ressources , et
c'est sans doute pour celte raison que Na-
poléon donna à son général le titre de duc
d' Abrantès Junot, maître de Lisbonne
et de tout le royaume , indisposa la na-
tion contre les Français , par sa cupidité,
son intempérance et, il faut le dire, son
incapacité. Les Portugais se soulevèrent,
et après un échec, éprouvé par les
Français à Vimeira , où triompha sir Ar-
thur Welleslcy, depuis lord M'cUington ,
à la tête des forces anglaises supérieures
en nombre, Junot, assiégé dans Lisbonne,
fut obligé de capituler. La convention si-
gnée le 30 août 1808 au village de Cintra
fut très honorable pour l'armée française,
dont le général Kellermann, chargé de la
négociation , avait habilement exagéré k'S
ressources. L'armée revint en France
après avoir occupé neuf mois le Portugal.
Junot fut froidement accueilli par l'empd-
JUR 77
rcur qu'il accompagna néanmoins en Es-
pagne, Dans la seconde campagne contre
le Portugal , il conunanda un des corps
sous les ordres du maréchal Masséna. En
4812, il reçut le commandement du 8*
corps de la grande armée de Russie , et ,
après la retraite de Moscou , Napoléon le
nomma gouverneur-général des provinces
îllyriciuies. Sa raison s'étant tout-à-fait
égarée , on le ramena en France , et il
arriva le 22 juillet 1815, chez son père,
qui demeurait à Montbard. Il y avait à
peine deux heures qu'il y était arrivé,
que , dans un moment de délire , il se
précipita par une fenêtre. Sa cuisse s'é-
tant brisée , il fallut recourir à l'amputa-
tion. Le malheureux général arracha
l'appareil qui y fut appliqué , et mourut
le 28 du même mois. Bien que son édu-
»;ation n'eût pas été soignée , Junot ai-
mait les lettres, et il avait réuni un assez
grand nombre de manuscrits précieux et
de tableaux rares. Sa femme , ijiadame la
duchesse d' AERANTES , a donné des 3Ié-
moires écrits avec esprit.
JUNTE, en italien GIUNTA, et ZONTA,
est le nom de plusieurs célèbres impri-
meurs d'Italie dans les IS*"' et iC siècles, qui
ont été long -temps crus originaires de
Lyon; ils tenaient le second rang dans l'I-
talie, après les Maauces. Philippe, l'un
d'eux, commença, à imprimer à Gènes en
1497, et mourut vers 1519. Il eut pour frère,
ou cousin, Bernard, qui exerça la même
profession avec autant de célébrité. Les
éditions grecq^ies de Philippe Junte sont
infiniment estimées. Les OEuvres d'Ho-
mère. lol9, in-8°, sont le dernier livre
qu'il imprima. Le Florelegium diverso-
i-um epiyramjnaturn , in 8° , fut imprimé
par ses héritiers.
JUPPIN (Jean -Baptiste), natif de
Namur, perfectionna ses talens pour la
peinture, sous d'habiles maîtres en Italie.
Il se fixa ensuite à Liège , où il se fit con-
naître par des Paysages d'une grande
beauté. On regrette ceux qui avaient été
feîts pour riiôte) des états , et qui furent
consumés par un incendie; les étrangers
en ressentent encore plus la perte, en
admirant ceux qui ornent le chœur des
Chartreux. Ses sites sont très heureuse-
ment choisis; ses points de vue à travers
les forêts sont admirables ; ses coups de
lumière, d'un grand effet ; son feuiller,
délicat; ses eaux, presque inimitables. Il
mourut à Namur l'an 1729.
JURE (Jean-Baptiste de SAINT), né
à Motz en 1588, entra chez les jésuites en
JUR
1604, à l'âge de 16 ans, et se disting^tvi ~
par ses travaux continuels pour le salut
des âmes et particulièrement pour la
direction des collèges : il fut pendant 12
ans chargé de ceux d'Amiens, d'Alençon
ou de Paris. Il passa en Angleterre avec
quelques autres membres de son ordre,
du temps de la reine Henriette , femme
dp Charles \" . Les ouvrages ascétiques
qu'il publia décèlent un homme consom-
mé dans les voies de Dieu et la science
des saints. On estime surtout le Livre des
£ lus , ou Jésus crucifié (qu'il ne faut pas
confondre s.vec Jésus-Christ crucifié de M.
Duguel), Paris, 1771, in-12 ; La Connais^
sauce et l'amour de Jésus- Christ , in-4",
abrégé et réimprimé à Paris, en 1791, in-12,
et dont il a été fait depuis plusieurs éditions
en divers formats. Cet ouvrage est divisé
en quatre livres : le premier contient les
motifs qui doivent nous porter à nous
appliquer à la connaissance et à l'amour
de Jésus-Christ; le deuxième expose et
explique les exercices de cet amour ; le
troisième en montre les effets, et le qua-
trième présente les exemples des saints
qui ont fait une "I)rofession particulière
d'aimer Notre-Seigneur. L'auteur , natu-
rellement fécond et accoutumé à méditer
sur ce qui lient à la vie spirituelle, s'est
beaucoup étendu sur ces divers objets, et
il épuise en quelque sorte la matière :
cependant il ne fatigue jamais , parce qu'il
a rattaché à son siijet toute l'économie de
la religion, et qu'il parcourt tout ce qu'il
y a d'important dans les doctrines et les
pratiques du christianisme. Ce livre pré-
cieux a été réimprimée à Lyon en 1825 ,
en 0 vol. in-S", et l'on a eu soin de re-
toucher le slyle qui en avait besoin. Des
tables à la fin de chaque volume montrent
les divisions et subdivisions des chapitres,
et peuvent servir à guider des lecteurs
dans le choix du sujet. L'abbé de Sainl-
Pard, pour mettre cet ouvrage à portée
d'un plus grand nombre de lecteurs, en
a publié , en 1775, un abrégé en un vol
in-12, sous le titre de la connaissance et
de l'amour de N. S. J.-C Cet abrégé est en
trois parties seulement, les motifs «.u'
l'amour de Dieu, les caractères de k
charité, et le récit abrégé des saints. Il ;i
été réimprimé à Paris en 1824, avec de»
Corrections et augmentations. Le Père de
Sainl-Jure a laissé en outie la F'ie de M.
de Reniij ^ L'Homme religieux, etc. Il
mourut à Paris le 50 avril 1657.
JURET (François), né à Dij«n ea
1535, chanoine de Lngres, mort eu 1626.
7.
JUR
78
JUR
à 73 ans, cultiva l'étude et les belles-let-
tres avec beaucoup d'assiduité. On a de
lui : J quelques Pièces de Poésie qu'on
trouve dans Deliciœ poetarumgallorum;
I des Notes sur Symmaque , Paris , 1604 ,
in-4° ; sur Yves de Chartres , 1610 , in-8° ;
sur Cassiodore. Elles sont remplies d'éru-
dition.
JURIEU (Pierre), fils d'un ministre
protestant de Mer , dans le diocèse de
Blois , et neveu des fameux Rivel et du
Moulin, naquit le 24 décembre 1637, et
succéda à son père dans son ministère. Sa
réputation le fit choisir pom professeur
de théologie et d'hébreu à Sedan. L'aca-
démie de cette ville ayant été ôlée aux
calvinistes en 1681, il fut destiné aux fonc-
tions de ministre à Rouen; mais averti
que la cour voulait le faire arrêter, comme
auteur d'un libelle intitulé : La politique
du clergé rfe France, il passa à Rotterdam,
où il obtint une chaire de théologie. Ju-
rieu, homme d'un zèle ardent et emporté,
s'y signala par ses extravagances , et par
ses querelles avec les philosophes de son
parti Bayle , Basnage ^de Beauval et Sau-
rin. Il se mêla de présages , de miracles ,
de prophéties. Il osa prédire (dans son
Accomplissement des prophéties. 1686 , 2
vol. in-12) qu'en 1689 le calvinisme serait
rétabli en France. Il se déchaîna contre
toutes les puissances de l'Europe oppo-
sées au protestantisme , et fit frapper des
médailles qui éternisent sa démence et
sa haine contre Rome et sa patrie. C'est
ce fougeux insensé que Bayle eut à com-
battre. Cette guerre eut diverses causes ,
et la véritable est, sans doute , la jalousie
qu'inspira à Jurieu le succès de la criti-
que de Y Histoire du calvinisme de Maim-
bourg j qu'il avait censurée en même
temps que Bayle. L'abbé d'Olivet a pré-
tendu ti'ouver le principe de la hairte de
Jurieu dans les liaisons de Bayle avec
madame Jurieu. Cette femme de beau-
coup d'esprit connut , dit-il , Bayle à Se-
dan, et l'aima. Son amant voulait se fixer
en France ; mais lorsque Jurieu passa en
Hollande , l'amour l'emporta sur la patrie,
et Bayle alla joindre sa maîtresse. Ils y
continuèrent leurs liaisons, sans même
en faire trop de mystère. Tout Rotterdam
s'en entretenait; Jurieu seul n'en savait
rien. On était étonné qu'im homme qui
voyait tant de choses dans l'Apocalypse ne
vit pas ce qui se passait chez lui. Il ou-
vrit enfin les yeux. Un cavalier en pareil
cas (dit le même académicien) lire l'é-
péc» un homme de rote inlenlc un pro-
cès , un poète fait une satire ; Jarieu fit
des livres. Ce procès occupa long-temps
la Hollande. Quoi qu'il en soit de ces
anecdotes , la contention et la chaleur
avec lesquelles Jurieu écrivit jusqu'à la
fin de ses jours épuisèrent son esprit. Il
s'imaginait que les coliques dont il était
tourmenté venaient des combats que se
livraient des cavaliers qu'il croyait avoir
dans le ventre. Il tomba dans l'enfance, et
il est fort douteux si ce qu'il faisait dans
cet état de langueur ne valait pas autant
que ce qu' il avait fait dans la force de l'âge.
Il mourut à Rotterdam le H janvier 1713,
à 76 ans. Les catholiques et les protestans,
du moins ceux qui sont capables d'équité,
se réunissent aujourd'hui dans le juge-
ment qu'on doit porter de ses écrits et de
sa personne. Ils convieniient qu'il avait
beaucoup de feu et de véhémence, qu'il
était capable d'en imposer aux faibles par
son imagina! ion; mais ils avouent en même
temps que son zèle allait jusqu'à la fu-
reur et au délire ; et qu'il était plus digne
de prêcher à des frénétiques qu'à des
hommes raisonnables. Ses principaux
ouvrages sont : | un Traité de la dévo-
tion; I un écrit sur la nécessité du
Baptême ; \ une Apologie de la morale
des pi-étendus réformés, contre le livre
du docteur Arnauld, intitulé Le ren-
versement de la morale par les calvi-
nistes . Idi Haye, 1685, 2 vol. in- 8°;
I Préservatif contre le changement de la
religion^ in-12, opposé au livre de V Ex-
position de la foi catholique de Bossuet;
I des Lettres contre l'Histoire du calvinis-
me, de Maimbourg, k vol. in-12 , et 2 vol.
in-i.°; | d'autres Lettres de controverse,
contre V Histoire des variations de Bossuet:
ce prélat les a anéanties par ses Avertis-
semens aux protestans; | Traité de la
puissance de l'Eglise. Quedilli, 1677,
in-12 ; | Le vrai Système de l'Eglise^ 1686,
in-S"; I Unité de l'Eglise. 1688, in-8°. Il y
prétend qu'elle est composée de toutes
les sociétés chrétiennes qui ont retenv ce
qu'il lui plaît d'appeler les fondemens de
la foi : comme si tous les hérétiques n'ac-
commodaient pas à leurs idées la nature
et le nombre de ces fondemens . comme
les autres articles de la croyance chré-
tienne, et qu'on put adhérer sincèrement,
et conséqucmment, à quelques points de la
religion , en rejetant les autres également
consacrés par l'autorité qui donne la sanc-
tion à tous. Les fanatiques de tous les
siècles qui ont été proscrits par l'Eglise
catholique entrent de cette façon dans
JUS 79
les i]ii)tyques de Jurieu. Bayle lui-même
fut scandalisé de l'indifférenee ou del'im-
piété du ministre prolestant , et le mena
assez mal dans son traité : Janua cœlo-
rum reserata cunctis religionibus à cele-
bri admodum viro domino Petro Jurieu j
avec l'épigraphe :
Porta patcDs esto , nulli claiidatur hoocsto.
Mais Jurieu avait pour cela ses raisons.
Il était au pied du mur par le terrible
argument des catholiques, touchant la
perpétuité de l'Eglise, la succession non
interrompue des pasteurs, la continuité
et la persévérance de la doctrine : il
fallait bien compulser les annales du dé-
lire et de la scélératesse, pour donner à
son parti un air d'antiquité et de suc-
cession. I Une Histoire des dogmes et des
cultes de la religion des Juifs , Amster-
dam , 1704, in-12 , livre médiocre ; | l'Es-
prit de M. Jrjiauld. 1684, 2 vol. in-12 :
satire caustique et furieuse contre cet
écrivain , qui avait porté de violens
coups au parti de Calvin ; | Traité histo-
rique d'un protestant sur la théologie
mystique, à l'occasion des démêlés de Fé-
nélon avec Bossuet , etc. , 1699 , in-8° , peu
commun ; | La Religion du Latitudinaire ,
Rotterdam , 1686 , in-8° ; | La Politique du
clergé de France, 1681, 2 vol. in-12;
I Préjugés légitimes contre le papisme ,
1683, in-4° ; | desLettres pastorales, 3 vol.
in-12, où il soufflait le feu de la discorde
entre les nouveaux catholiques et les pro-
lestans , etc., etc. F^oyez JACQUELOT.
JURI\' (Jacques), secrétaire de la so-
ciété royale de Londres, et président des
médecins de cette ville , mort à Londres ,
en 1750 , dans un âge avancé , cultiva avec
an succès égal la médecine et les mathé-
matiques. Il contribua à rendre les ob-
servations météorologiques plus commu-
nes, et à répandre l'inoculation, par
les écrits qu'il publia sur cette matière
( royez CON» AMINE). Il eut de violen-
tes disputes avec Michellolti , sur le mou-
vement des eaux courantes; avec Robins,
8ur la vision distincte ; avec Keill et Se-
nac,sur le mouvement du cœur; et avec
les partisans de Leibnitz , sur les forces
vives.
JUSSIEU (Antoine de), secrétaire du
roi de France, docteur des facultés de
Paris et de Montpellier, professeur de
botanique au Jardin Royal , naquit à Lyon
en 1686. La passion d'herboriser fut très
vive en lui dès sa jeunesse, et lui mérita
une place à l'académie des sciences en
1712. Il parcourut une partie des provin-
JUS
ces de France , les îles d'Hières.. la vallée
de Nice, les montagnes d'Espagne, et il
rapporta de ses savantes covurses une
nombreuse collection de plantes. Devenu
sédentaire à Paris , il enrichit les volumes
de l'académie d'un grand nombre de Mé-
moires sm le café, sur le Aa/i d'AUcante ;
sur le cachou ; sur le macer des anciens,
ou simarouba des modernes ; sur Valtô^
ration de l'eau de la Seine arrivée en 1731 ;
sur les mines de mercure d'Jlmaden ;
sur le magnifique recueil de plantes el
d'animaux, peints sur vélin, qu'on con-
serve à la bibliothèque du roi ; sur une
fille qui n'avait point de langue et qui
parlait cependant distinctement ; sur les
cornes d'Ammon; sur les pétrifications
animales ; sur les pierres appelées pierres
de tonnerre. C'est lui qui a fait VJppen-
dix de Tournefort , et qui a rédigé l'ou-
vrage du père Barrelier, sur les plantes
qui croissent en France , en Espagne et
en Italie, 1714, in-4° {voyez BARRE-
LIER). On a imprimé son Discours sur
les progrès de la botanique, 1718, in-4".
A ses occupations littéraires, il joignait
la pratique de la médecine , et il voyait
les pauvres de préférence. Il y en avait
tous les jours chez lui un nombre consi-
dérable; il les aidait non seulement de
ses soins , mais de son argent. Il mourut
d'une espèce d'apoplexie, le 22 avril
1738, âgé de 72 ans. —Son frère, Ber-
nard de JUSSIEU, né à Lyon, en 1699,
se distingua comme lui dans la pratique
de la médecine, et par ses connaissances
dans la botanique. Ses'talens lui procu-
rèrent la chaire de démonstrateur des
plantes au Jardin du Roi , et une place à
l'académie des sciences de Paris. On lui
doit l'édition de VIIistoi?-e des plantes qui
naissent aux environs de Paris , par
Tournefort, 1723, 2 vol. in-12, qu'il en-
richit de notes, et dans laquelle il lit con-
naître plusieurs plantes qu'il avait décou-
vertes dans des herborisations. II est mort
en 1777, dans sa 79*^ année après avoir
reçu les secours de la religion. Il avait été
choisi par Louis XV pour former le Jar-
din des plantes de Trianon ; toutes ces
plantes étaient indigènes, et servaient
d'école botanique nationale. Le cèdre du
Liban manquait au Jardin du Roi. Jussieu
eut le plaisir de voir deux pieds de cet
arbre, qu'il avait apportés d'Angleterre
dans son chapeau, croître sous ses
yeux, et leurs cimes élevées au-dessus
des plus grands arbres. Son travail favori
fut toujours l'élude des plantes, et sur-
JUS
80
JUS
tout leur distribution en familles, fondée
sur la ressemblance générale de leurs par-
ties , ou ce que l'on appelle méthode na-
turelle. Le neveu de Bernard devenu si
célèbre , par un ouvrage classique sur
cette matière , a reconnu qu'il devait à
son oncle sa première instruction el l'é-
bauclie de son talent. Bernard de Jussieu
était membre des académies de Berlin ,
de Saint-Pétersbourg, d'Upsal, de l'insti-
tut de Bologne, de la société royale de
Londres , etc.
JUSTE ou JUST (saint) , né de parons
nobles du A'ivarais, pieux el savant évc-
que de Lyop , quitta ce siège à l'occasion
d'un frénétique qui fut mis en pièces par
le peuple ; ce malheur lui flit si sensible ,
qu'il se retira dans les déserts de l'Egypte,
où il vécut en saint jusqu'à sa mort, ar-
rivée vers la fin du h'^ siècle. Il avait as-
sisté , étant évêque , à deux conciles , l'un
tenu à Valence en 37/» , et l'autre à Aqui-
lée en 581. — Il y a eu d'autres saints de
ce nom et des personnages illustres : un
évcque d'Urgel , mort en 540 , auteur
d'un petit Commentaire sur le Cantique
des cantiques , inséré dans la Bibliothè-
que des Pères; et un archevêque de To-
lède dans le 7* siècle , célèbre par son
savoir et sa piété.
JUSTE-LIPSE. royez LIPSE,
JUSTEL (Christophe), parisien, con-
seiller et secrétaire du roi de France, né
en 1580, mort dans sa patrie en 1649,
était l'homme de son temps le plus versé
dans l'histoire du moyen âge. Il possé-
dait parfaitement celle de l'Eîjlise et des
conciles. C'est sur les recueils de ce savant
homme, que Henri Justel , son fils, non
moins savant , mort à Londres en 1693 , et
Guillaume Voël . publièrent la Btbhoiheca
juris canonici veteris , en 2 vol. in-fol. ,
Paris, 1601. C'est une collection très bien
faite de pièces forl rures sur le droit canon
ancien. On y trouve plusieurs canons grecs
et lalins, tirés de manuscrits inconnus
jusqu'à lui. On a de Christophe Justel :
I le Code des canons de V Eglise univer-
selle ^ ouvrage justement estimé; | YFIis-
toire généalogique de la m,aison d^ Au-
vergne s in-fol. , pleine de recherches.
JUSTIN (saint), philosophe platoni-
cien , naquit vers l'an 103 , à Naplouse
(autrefois Sichein en Palestine). Il fut
fonverti à la religion de Jésus-Christ l'an
133 , par le spectacle touchant de la pa-
tience, de Ja douceur, de la charité, du
courage et de toutes les vertus que les
chrétiens faisaitnl éclater dans les cruelles
persécutions qui éprouvaient leur foi.
Quoiqu'il eût embrassé le christianisme,
il garda l'habit de philosophe, nomuié
en latin pallium. C'était une espèce de ,
manteau. TertuJlien remarque que non
seulement les philosophes , mais tous les
gens de lettres portaient cet habit. Plu-
sieurs chrétiens le prirent, non comme
philosoi)hes , mais comme faisant profes-
sion d'une vie plus austère. La persécu-
tion s'étant allumée sous Antonin, suc-
cesseur d'Adrien, Justin composa une
Apologie pour les chrétiens. L'empereur
en fut si satisfait , qu'il donna un édit en
faveur des chrétiens. Justin en présenta
une autre dans la suite à Marc-Aurcle ,
dans laquelle il prouve la religion chré-
tienne par les mœurs admirables de ceu»
qui la professaient, par l'accomplissement'
tout récent des prophéties, et par l'expo-
sition simple et naïve de ce qui se pas-
sait dans les assemblées des premiers chré-
tiens. Il dit que « le christianisme a exis-
» té même avant Jésus-Christ, parce que
» Jésus-Christ est le Verbe de Dieu, et la
» raison souveraine dont tout le genre liu-
« main participe ; et que ceux qui ont
» vécu suivant la raison sont chrétiens. •
Effectivement, on ne peut vivre selon la
raison sans se soumettre aux lois de Dieu ,
sans adhérer à une révélation dont il esl
l'auteur , el dont il ne refuse pas la lumière
à ceux qui la cherchent de bonne foi. I.t-s
saints de l'ancien Testament croyaient au
Messie qui devait venir, et nous croyons
au Rlessie qui est venu. Cette seconde apo-
logie n'eut pas , à beaucoup près , le succès
de la première. Marc-Aurèle avait un
faible étonnant pour les philosophes (ie
sa religion, hypocrites habiles qui abu-
saient de sa confiance pour assouvir leurs
passions particulières. Crescent le Cyni-
que était le plus irrité contre Juslin.
Ils avaient eu ensemble une conférence ,
où l'orgueil du cynique n'eut pas lieu
d'être satisfait. Le saint docteur en sentit
d'abord les conséquences, puisqu'il an-
nonça que Crescent lui procurerait la mort.
Il fut martyrisé à Rome l'an 165 , selon le
Père Labbe ; l'an 167 ou 168 , selon Tille-
mont , peu de temps après saint Poly-
carpe. On peut regarder saint Justin
comme le premier ou le plus ancien des
pères de l'Eglise, après les disciples du
Sauveur et des apôtres. Eusèbe dit qu'en-
tre les grands hommes qui éclairaient le
second siècle de l'Eglise, le nom de
Justin les surpassait tous par son éclat.
Quoiqu'il eût donné beaucoup de lempa
JUS 8ft
à la philosophie profane , il parle de nos
luyslcres avec une exaclilude remarqua-
Me enlre les auteurs de celte première
antiquité, ei il entend bien les Ecritures.
0 Ce pieux et solide écrivain, dit un cri-
» tique moderne , néglige assez habituel-
> lement les ornemens et l'élégance de la
» diction; mais il ravit ses lecteurs par
» l'éclat de la lumière , avec lequel il leur
» présente la vérité. Ainsi , quoique ex-
» trèmement persuasifs , pleins de force
» et d'instruction, ses discours sont bien
» plus marqués au coin du philosophe
" qu'à celui de l'orateur. Il parait avoir
» eu peur de corrompre la beauté simple
» et naturelle de la philosophie par des
» couleurs empruntées de la rhétorique.
» Son caractère propre est une science
» profonde des matières philosophiques ,
« avec une vaste érudition et une ample
» connaissance de toutes sortes d'histoires.
«Comme, depuis son baptême surtout,
» il avait beaucoup plus étudié les maxi-
» mes des prophètes , suivant l'expression
ji de saint Basile , que les préceptes d'Iso-
» crate ou de Démosthènes , il se rencon-
» Ire souvent dans son style un certain
» genre de digressions , et des endroits
» rompus , qui demandent une grande
» application pour être bien saisis. » Il
rendit compte de son changement de
religion par un petit discours qui com-
mence ainsi u Ne croyez, pas, Romains,
» que ce soit sans raisons et sans examen
B que j'ai renoncé à vos rites et à votre
» culte. Je ne l'ai fait que parce que je
» n'y ai rien trouvé ni de saint, ni qui
» fût digne des regards de la Divinité. »
Et tout de suite il fait voir, avec une ra-
pidité et une précision admirables , que
les dieux qu'ils adoraient s'étaient livrés
aux plus infâmes passions : que dans leurs
fêtes, leurs assemblées , leurs festins , on
s'abandonnait à des excès qui déshono-
raient la raison et outrageaient la nature.
A tout cela il oppose la sainteté et la pu-
reté des rites et des mœurs des chrétiens.
■ Notre maître, dit-il, ne daigne pas re-
» garder la beauté du corps ni les riches-
* ses de la parure ; il ne fait attention qu'à
«la beauté, c'est-à-dire à la sainteté de
* l'àme. Venez vous instruire , ô Romains,
* j'ai été aulrefois comme vous, soyez
» aujourd'hui comme moi. C'est la force
» et l'énergie delà religion chrétienne qui
» m'a éclairé , qui a délivré mon âme de la
•> servitude des sens et des passions , qui
» y a fait régner la tranquillité et la séré-
> nilé. L'àmc ainsi délivrée est sûre d'al-
JUS
» 1er se réunir à celui qui l'a créée , parce
» qpi'il est juste qu'elle retourne à celui
» des mains duquel elle est sortie. » Outre
ces deux Apologies, il nous reste de lui :
I un Dialogue avec le Juif Tryphon ;
I deux Traités adressés au gentils;] un
Traité de la monarchie ^ ou de l'unité de
Dieu; \ son Traité à Diognète sur les
raisons qu'ont eues les chrétiens , et d'a-
bandonner le culte des dieux, et de ne
point s'attacher à la religion des Juifs.
On lui attribue encore d'autres ouvrages.
Les meilleures éditions de saint Justin sont
celles de Robert Etienne en 1551 et 1571 ,
en grec et en latin ; celle de Commelin ,
1593 , en grec et en latin ; celle de Morel ,
en 1656 , et enfin celle de dom Marand ,
en 174.2 , in-fol. L'authenticité des autres
ouvrages qui portent le nom de saint Jus-
tin est justement suspecte , même celle de
la Lettre à Dï0^nèf(? ( qu'on trouve parmi
ses OEuvres ) , qui n'en est ni moins
belle , lii moins utile à la religion , et qui
parait encore antérieure aux écrits de ce
saint docteur. M. Guillon a donné , dans sa
Bibliothèque choisie des Pères de l'église
grecque et latine^ la plupart des principaux
ouvrages de ce saint docteur. Nous avons
une traduction française de la première
apologie et un abrégé de la seconde , dans
la suite des anciens apologistes de la reli-
gion chrétienne ^ traduits ou analysés par
l'abbé de Gourcy, Paris, 1785 , 2 vol. in-S".
JUSTIN 1", r^ncien , empereur d'O-
rient , naquit en 450 à Bédariane , dans
les campagnes de la Thrace. Son père
était un pauvre laboureur. Le fils, man-
quant de pain , s'enrôla dans la milice ;
et quoiqu'il ne sût ni lire ni écrire , il par-
vint de grade en grade , par sa valeur et
par sa prudence , jusqu'au trône impérial.
Justin parut digne de la couronne. L'em-
pereur Anastase, prédécesseur de Justin,
et haï pour ses vices , avait trois neveux
qui ne pouvaient prétendre au trône. En
même temps, l'eunuque Amantus, grand
chambellan , voulant y placer une de ses
créatures , se confia à Justin et lui donna ,
pour faire réussir son projet, une grosse
somme dont celui-ci se servit pour se
faite des partisans qui le portèrent au
trône l'an 518. Il avait alors 68 ans. Peu de
temps après , Amantus fut décapité. Le
premier soin du nouvel empereur fut
d'examiner les lois. Il confirma celles
qui lui parurent justes , annula les au-
tres, accorda au peuple plusieurs immu-
nilés, retrancha beaucoup d'impôts, fil
des heureux, et sut l'être. Cependant on
JUS
82
JUS
reproche à sa mémoire d'avoir fait assas-
siner Vitellien, prince golh, qui s'était ac-
quis l'amour du peuple romain. L'inva-
sion des Perses dans l'Ibérie el la Lazique
cl les factions dites des verts et des bleus
troublèrent son règne. Il se déclara pour
le concile de Chalcédoine, rappela tous
ceux qui avaient été exilés pour la foi,
demanda un Formulaire au pape Hor-
misdas , et le lit signer dans un concile
tenu à Constant inoplc ; mais le zèle de cet
empereur devint funeste à l'Eglise, dans le
temps même qu'il voulait la faire triom-
pher; car, en poursuivant les ariens
avec trop de chaleur pour réprimer leur
audace , il aigrit ïhcodoric , roi des Ostro-
goths, contre les catholiques d'Occident,
qui essuyèrent une persécution cruelle.
Il mourut en 527 , à 77 ans , après avoir
nommé Juslinien , fils de sa sœur, pour
lui succéder. L'année précédente , sa
vieillesse avait été affligée par un horrible
tremblement de terre , qui engloutit pres-
que toute la ville d'Antloche. Cette cala-
mité fut si sensible à l'empereur , qu'il se
revêtit d'un sac par esprit de pénitence,
et s'enferma dans son palais , pour ne
s'occuper qu'à gémir, et à fléchir celui
qui élève et fait crouler les villes et les
empires.
JUSTIIV M, le Jeune ^ nevea et suc-
cesseur de Justinien en 565, était fils de
Vigilantia, sœur de cet empereur. La 2'
année de son règne fut marquée par un
forfait. Il fit étrangler Justin, son parent,
petit -neveu du dernier empereur, et
qui pouvait avoir quelque droit à l'em-
pire. Il eut la basse cniaulé de se faire
apporter sa tête et de la fouler aux pieds.
Incapable de porter le sceptre, esprit
faible, caractère voluptueux , làcJie el
cruel , prince sans politique et sans valeur,
il se laissa gouverner par Sophie son
épouse. Cette princesse ayant raillé sans
nénagement l'eunuque Narsès , gouver-
neur en Italie , celui-ci appela les Lom-
bards (peuple de la Germanie) , qui dès
lors commencèrent à y régner. Les Perses,
d'un autre côté, ravagèrent l'Asie, et
Justin n'opposa à leurs conquêtes que de
vaines bravades. Il mourut en 578 , après
avoir régné près de 13 ans. Il était sujet
depuis k ans à des accès de frénésie qui
ne lui laissaient que peu d'intervalle de
raison. Il choisit pour son successeur Ti-
bère Constantin , son gendre , qu'il adopta.
En le revêtant des marques de sa dignité ,
il lui donna les meilleurs conseils , et il
termina son discours par ces paroles ;
« L'éclat ^u diadème m'a ébloui.... Puisse
I) le Dieu du ciel et de la terre inspirer à
» votre cœur tout ce que j'ai négligé ou
» oublié! » Il passa les quatre dernières
années de sa vie dans une obscurité pai-
sible.
JUSTIK, historien latin du 2' siècle,
selon l'opinion la plus probable , abrégea
la grande Histoire de Trogue-Pompée ,
et par cet abrégé fit perdre, dit-on, l'o-
riginal. Son ouvrage , instructif et curieux
est écrit avec agrément, el même avec
pureté , à quelques mots près , qui se res-
sentent de la décadence de la langue la
tinc. On lui reproche un peu de mono-
tonie, et d'avoir négligé d'extraire de
Trogue les détails érudils que celui-ci
avait publiés sur les origines et les anti-
quités des peuples. Sa narration d'ail-
leurs est nette, ses réflexions sages, quoi-
que communes, ses peintures quelque-
fois très vives. On trouve chez lui plu-
sieurs morceaux de la plus grande beauté,
des harangues éloquentes, mais trop de
goût pour l'antithèse. On le blâme aussi
de rapporter quelques traits minutieux ,
et quelques faits absurdes , mais c'est le
défaut d'un grand nombre d'hisloiiens
de l'antiquité. Certains maîtres hésitent de
le mettre dans les mains des pnfans, tout
estimable qu'il est , parce que ces expres-
sions ne sont pas toujours modestes. Les
meilleures éditions de Justin sont celles
de Paris en 1677 , in-h.°, par le père Can-
tel , jésuite ; d'Oxford en 1705, in-S", par
ThoniEis Hearne; de Leyde, in-S"; de Paris
chez Barbou , 1770 , in-12 , sur plusieurs,
manuscrits de la Bibliothèque du roi de
France. Il y en a une d'Elzévir, 1640, ia-
12; la première est de 1470, in-fol. M.
l'abbé Paul , qui s'est exercé avec suc-
cès sur Paterculus , a publié, en 1774,
une bonne Traduction de Justin en 2 vol.
in-12 , qui n'a pas fait oublier celle de M.
de la Martinière , donnée avec des remar-
ques , Paris, 1694 , 2 vol. in-12. La traduc-
tion de l'abbé Paul a été réimprimée en
1817 : cet écrivain entend assez bien son
auteur , mais son style est faible , dénué
de mouvement , sans précision , et quel-
quefois d'vme trop grande familiarité.
Nous citerons encore celle de MM, J. Pier-
rot et Boitard , qui fait partie de la Colles^
tien in-8° des classiques latins avec tra--
duction. publiée par Panckoucke.
JLSTII\iE (Flavia Justixa Augcsta ) ,
née dans la Sicile, de Juste , gouverneur
de la Marche d'Ancône, fut mariée au
tyran Maguence, niurt en oSo. Sa beauté
JUS
83
JUS
et son esprit charmèrent Valenlinien l" ,
qui l'épousa en 5G8. Elle fut mère de
«Hiatre enfans, Valenlinien II, Jusla,
Galla etGrala. Son lils fut élevé à l'em-
pire en 573 , quoiqu'il n'eût que 5 ans.
L'empereur Gratien confirma celte élec-
tion, et après la mort de ce prince, elle
eut en 383 la régence des états de son fils,
c'est-à-dire dune partie de l'empire d'Oc-
cident. Son penchant pour ïan'anisme la"
rendit l'ennemie des évéques orthodoxes.
Elle se préparait à chasser saint Ambroise
de Milan , lorsque le tyran Maxime la
chassa elle-même de cette Yille en 387.
Obligée d'abandonner l'Italie , elle se re-
tira à Thessalonique , où elle mourut
l'année suivante, dans le temps que Théo-
dose son gendre, vainqueur de Maxime,
allait rétablir Valenlinien dans l'empire
d'Occident.
JUSTIMANI ( saint Laurent ) , né à
Wenise en 1381 , premier général des cha-
noines de Saint-Georges in-Jlga^ en 1424 »
donna à celte congrégation d'excellens
règlemens. Le pape Eugène IV le nom-
ma évéque et premier patriarche de Ve-
nise en ik^i. Saint Laurent Justiniani
mourut en li53 , à 74 ans , après avoir
gouverné son diocèse avec sagesse. On a
de lui plusieurs Ouvrages de piétés re-
cueillis à Brescia, 1506 , 2 vol. in-fol., et
à Venise , 1755, in-fol. La famille des
Justiniani en Italie , qu'on écrit aussi , et
même plus exactement, Gnistiniani ^ a
produit un grand nombre de personnes
illustres.
JIISTINIAJM (BERNiAnD), neveu du
jirécédent , mort en 1489 , à 81 ans , fut
élevé aux charges les plus importantes de
^'enise. il cultiva les lettres avec succès ,
et laissa divers écrits. Le plus considé-
rable est une Histoire de Venise , depuis
son origine jusqu'en 809 , in-fol. , Venise ,
1472 et 1304 ; elle est en italien. Il écrivit
dans la même langue en 1473 , in-4° , la
f^ie de son oncle sahit Laurent : c'est un
panégyrique.
JUSTIiyjIANI (Augustin), évéque de
Nebbio en Corse , naquit à Gènes , en 1470,
d'une maison illustre , se fit dominicain à
l'âris, en 1488 , et s'y acquit un nom par
ion habileté dans les langues orientales.
Il fut nommé , en 1314, évéque de Nebbio ,
par le pape Léon X. H assista au S*" concile
de Latran , fit fleurir la science et la piété
dans son diocèse , et périt dans la mer en
passant de Gènes à Nebbio , l'an 1336, avec
ie vaisseau qui le portait. Son principal
ouvrage est un Psautier en hébreu, en
grec , en arabe et en chaldéen , avec des
versions latines et de courtes notes , sans
date (Gènes, 1319) , in-fol. C'est le pre-
mier Psautier qui ait paru en diverses
langues. L'auteur le fit imprimer à ses dé-
pens. On tira 2000 exemplaires sur du
papier , et 30 sur du parchemin ou sur du
vélin , pour les princes. Il espérait en
retirer une somme considérable pour le
soulagement des pauvres ; mais peu de
personnes achetèrent ce livre, quoique
tous les savans en parlassent avec éloge.
Le titre de cet ouvrage estimable est:
Psalterium hebrœum ^ arabicum et chai-
dœum , cum tribus latinis interpretatio-
nibus et glossis. On a encore de lui des
Jlnnales de Gènes , en italien ; ouvrage
posthume , publié in-fol. , en 1537. Il re-
vit le traité de Porchelli, intitulé : Vic-
toria adversus inipios Judœos . qui fut
imprimé à Paris , in-fol. , en 1520 , sur
papier et sur vélin. Cette dernière édi-
tion est recherchée des curieux et peu
commune.
JUSTINIANI ( Benoit) , né à Gènes ,
l'an 1350, se fit jésuite, et enseigna la
théologie à Toulouse , à Messine et à
Rome. Clément VIII l'envoya en Pologne
avec le cardinal Cajetan,ran 1596, en
qualité de théologien du cardinal. Il mou-
rut l'an 1622 , à Rome , dans le collège
de la pénitencerie , qu'il avait gouverné
pendant plus de 20 ans. On a de lui des
Commentaires sur l'Ecriture sainte, 5
vol. in-fol.
JUSTÏIVIANI ( Fabio ) , né à Gènes, en
1568 , de Léonard Taranchelti , qui fut
adopté dans la famille de Justiniani, pour
n'avoir pas voulu tremper dans la con-
juration des Fiesques, mourut en 1627. Il
entra dans la congrégation de l'Oratoire
de Rome , et fut en 1616, nommé évéque
d'Ajaccio , où il est enterré dans son église
cathédrale. On a de lui : | Index univer-
salis alphabeticus , materias in omni fa-
cultate pertractans, casunique scriptores
et locos designans ^ Rome , 1612 , in-fol. ;
I Commentarius de sacra scriptura et de
sacris interpretibus ^ Rome, 1614, Paris,
1618, in-8" ; | de sacra Concionatore ^
Cologne , 1619 , in-4° ; | Tobias explana-
tus. 1620 , in-fol.
JUSTIIVIAM ( le marquis Vincent ) ,
de la famille illustre de Bernard Jusii-
niani , fit graver par Bloemaërt, Mcllan ,
et autres , sa Galerie . Rome, 1642, 2 vol.
in-fol. Il en a été tiré, depuis 1730 , des
épreuves qui sont bien inférieures aux
anciennes.
JUS
84
JLS
jrSTlMANI (l'abbé Beunard), de
tu famille du précédent , donna , en ita-
lien, V Origine des ordres militaires j, Ve-
nise , 1C92 , 2 vol. in-fol. On en a extrait
l'Histoire des ordres militaires , Amster-
dam , 1721 , 4 vol. in-S", à laquelle se
joint l'Hisloire des ordres religieux , Ams-
terdam, 1716, k vol. in-S".
JUSTINIE\ I", neveu de Justin l'An-
cien , naquit à Tauresium , petit village
de la Dardanie, le 11 mai 485, d'une famille
obscure. L'élévation de son oncle pro-
duisit la sienne. Il lui succéda en 527.
L'empire grec , faible reste de la puis-
sance romaine , ne faisait que languir.
Justinien le soutint , en étendit les bor-
nes , et lui rendit quelque chose de son
ancien éclat. Il mit à la tête de ses troupes
le vaillant Bélisaire ( voyez son article ) ,
qui releva le courage des légions, et fit
rendre aux Barbares ce qu'ils avaient en-
levé aux Romains. Les Perses furent
vaincus en 528 , 542 et 543 , les Vandales
exterminés , leur roi Gilimer fait prison-
nier, l'Afrique reconquise, les Goths
subjugués , les Maures réduits et les dis-
sensions intestines étouffées. Les Bleus et
les F'erts . deux factions qui avaient pris
naisssuice dans les jeux du cirque , entre
les conducteurs des chars , et qui déchi-
raient l'empire depuis plusieurs années ,
furent réprimés. Après avoir rétabli la
tranquillité au dedans et au dehors, il
mit de l'ordre dans les lois , qui étaient
depuis long-temps dans une confusion
extrême. Il chargea dix jurisconsultes ,
choisis parmi les plus habiles de l'em-
pire , de faire un nouveau Code tiré de
ses constitutions ou ordonnances , et de
celles de ses prédécesseurs. Ce code fut
divisé en douze livres , et les matières
séparées les unes des autres , sous les ti-
tres qui leur étaient propres. Ce Code
à été traduit en français par Tissot , Metz,
1807-1810 , 4 vol. in-4°. Il fut suivi en 553 :
I du Digeste ou les Pandectes ; recueil
d'anciennes décisions répandues dans plus
de deux mille livres. Il fut imprimé à Flo-
rence , en 1553 , in-fol. , qui se partage
en 2 ou 3 vol. Il faut qu'il y ait à la lin 8
feuillets non chiffrés , cotés eeee. On a
encore l'édition que M. Pothier en a don-
née à Paris , 1748 , 3 vol. in-foi. , qui est
estimée : elle a été réimprimée en 1782 et
1818. Le Digeste a été traduit eu français
par Hullot et Berthelot , Metz , 1803-1805,
7 vol. in-4° , ou 35 vol. in-12. | Des Jn-
stitutes, qui comprennent en 4 livres,
d'une manière claire et précise , le germe
de toutes les lois , et les élémens de la
jurisprudence. Cet ouvrage a clé traduit
en français par HuUol, Mot?,, 1807, in-4",
ou 5 vol. in-12 : il en existe aussi une tra-
duction par Perrière , Paris , 1770, 7 vol.
in-12 ; | du Code des Novelles , dans lequel
on recueillit les lois faites depuis la publi-
cation de ces différentes coUerlions : les
Novelles ont été traduites en français par
Bérenger fils, 1810-1811, 2 vol. in-4» , ou
10 vol. in-12. Les Pandectes ont été tra-
duites parBréard de Neuville, et publiées
sons ce titre : les Pandectes de Justinien
mises dans un nouvel ordre avec les lois
du Code et les Novelles qui confirment,
expliquent ou abrègent celles des Pan-
dectes, parR.-J. Pothier, et la traduction
en regard du texte, par Bréard de Neu-
ville, Paris, 1818-1824, 24 vol. in-8°. Il
faut joindre à cet ouvrage la Table analy-
tique et raisonnée des Pandectes, par Mo-
rcau de Montalin, Paris, 1825, 2 vol. in-S".*-
Les meilleures éditions de ces ouvrages ,
réunis sous le titre de Corpus juris civilis
sont : I celle dElzévir , 1664 , 2 vol. in-S".
plus belle que la réimpression de 1681 ;
I celle avec les grandes gloses et \ Index
de Daoyz , Lyon , 1627 , 6 vol. in-folio ;
I celle avec les notes de Godefroy , Paris,
Vitré, 1628, 2 vol. in-fol. ; | Amsterdam,
chez Elzévir, 1663 , 2 vol. in-fol. Si l'on
veut plus de détails sur les diverses par-
ties qui composent le corps du droit ro-
main, on peut consulter le 3Ianuel de
Jacques Godefroy; V Histoire de la Juris-
prudence romaine par Terrasson , et
l'histoire du droit romain par Berriat-
Saint-Prix , Paris , 1821 . 1 vol. in-8°. On
trouve dans les Lettres sur la profession
d'avocat par Camus , et dans le Manuel
du libraire de Brunet, l'indication des
nombreux comrrienlateurs de Justinien.
Ce prince attentif à tout , fortifia les pla-
ces , embellit les villes , en bâtit de nou-
velles , rétablit la paix dans l'Eglise. Il
bâtit un grand nombre de basiliques , et
surtout il reconstruisit celle de Sainte-
Sophie , ou de la Sagesse divine . à Con-
stanlinople , qui avait été brûlée dans une
sédition, et qui passe pour un chef-
d'œuvre d'architecture. Son malheur fut
de vieillir sur le trône. Sur la fin de ses
jours , ce ne fut plus le même homme. Il
devint avare . méfiant , cruel ; il accabla
le peuple d'impôts, employa les voies les
plus iniques pour amasser des trésors
destinés à satisfaire ses fantaisies et ses
passions , ainsi que celles do l'impératrice
Thcodora et d'Antonine , femme de Bé-
JUS
8H
JUV
lisaire ; îl ajouta foi à toutes les accusa-
tions, voulut être juge de l'affaire des Trois
Chapitres > persécuta les papes A{ïapet ,
Silvère et Vigile. Il se précipita si on en
croit Evagre, dans l'erreur des Jphthartes
ou incorrujjtibles , branclie de Veulychia-
nisme; persécuta le saint patriarche Euty-
chius, qui tâchait de le désabuser de cette
erreur, et mourut le li novembre 565,
à 83 ans , haï , et peu regretté même de
ses courtisans. Sa femme ïhéodora , qu'il
avait prise sur le théâtre , où elle s'était
long-temps prostituée , et qui conserva
sous la pourpre tous les vices d'une cour-
tisanne , le gouverna jusqu'à sa nunl.
Cellarius porte un jugement plus favora-
ble de Justinien,au moins quanta sa
religion ; il nie qu'il ail donné dans l'er-
reur des incorruptibles; et Danès, dans
sa A^otio temporum^ paraît adopter le
sentiment de Cellarius. 11 a paru à ce
sujet un ouvrage plein de recherches , in-
titulé : Justiniaiius imperalor cathoUcus,
par André Corvin, Vienne, 1767. Il sem-
ble que dans ces sortes de contestations ,
il faut toujours , quand on lo peut , pren-
dre le parti Je plus favorable aux hommes
célèbres, le plus propre à affaiblir le
triomphe de l'erreur, en diminuant le
nombre des erraris. Voyez IJistoria uni-
versa romani imperii^ Wurtzbourg,
1754 , tome 2, i)ar le père Daude , jésuite.
JUSTIMEN II, le Jeune ^ surnommé
Rhinotmète, ou le Nez-Coupé ^ était fils
aine de Constantin Pogonat. Il monta sur
le trône après son père, en 686. à 16 ans.
Il reprit quelques provinces sur les Sar-
rasins, et conclut avec eux une paix assez
avantageuse. Ses exactions, ses cruautés
et ses débauches ternirent lu gloire de
ses armes. Il ordonna à l'eunuque Etienne,
qu'il avait fait gouverneur de Constaiiti-
nople, de faire massacrer dans une seule
nuit tout le peuple de la ville, à commen-
cer par le patriarche. Cet ordre barbare
ayant transpiré, le patrice Léonce souleva
le peuple et fît détrôner ce nouveau Né-
ron. On lui coupa le nez, et on l'envoya en
exil dons la Chersonèse, en 69o. Léonce
fut aussitôt déclaré empereur; mais Ti-
bère-Absimare le chassa en 698. Celui-ci
régna environ sept ans, au bout desquels
Trébellius, roi des Bulgares , arma une
flotte, en 705 , pour le reconduire à Con-
slantinople. Une tempête s'étant élevée
pendant son trajet, un de ses officiers lui
dit : « Faites vœu que si vous échappez
au péril, et si vous remontez sur le trône
impérial, vous pardonnerez à tous vos
7.
ennemis. » « Je veux, lui repondit Justi-
nien , que Dieu me fasse périr, si le par-
donne .i un seul. » Il tint parole. Léonce
et Til ère-Al)simare furent ]junis de mort.
Justinicn II continua d'exercer ses cjxian-
lés , et régna en^ore six ans depuis son
rétablissement. Philippe Bardane, pro-
clamé empereur par les Chazares, se
rendit maître de Conslaulinople. et en-
voya le général Elie pour le combattre.
Eliele joignit dans les jjlaines de Dama-
tris , et après avoir déterminé ses soldat»
à l'abandonner, il lui lit couper la tète,
qu'il envoya à Constanlinople , pour y
être exposée , l'an 711. En lui fut éteinte
la famille d'HéracIius. Jusliiiien fut le
fléau de ses sujets et l'horreur du genre
humain. Le peuple, sous son règne, fut
accablé d'impôts, et livré à des minisire»
avares et lâches, qui ne sonj^eaicnt qu'à
ïîjvontcr des calomnies contre les parti-
culiers, pour les faire périr et cnvaliir
leur patrimoine.
Jl'STlMEN de TOURS. /^'oy.FEBUKE
(MlCUEI.)-
JUVÉïNAL (DÉciMcs ou Décius-Ju-
Nius), poète latin, d'Aquinum , aujour-
d'hui Aquino dans l'Abruzze, passa à
Rome, où il commença par faire des dé-
clamations, et finit par composer des sa-
tires. 11 s'éleva contre la passion de Néron
pour les spectacles , et surtout contre un
acteur nomméPa/Ys, bouffon et favori de
cet empereur. Le déclamateur satirique
resta impuni sous le règne de Néron, mais
sous celui de Domitien , Paris eut le cré-
dit de le faire exiler. 11 fut envoyé, ù
l'âge de 80 ans, dans la Pentapole, sur le»
frontières d'Egypte et de Libye. On pré-
texta qu'on y avait besoin de lui pour
commander la cavalerie. Le poète guer-
rier eut beaucoup à souffrir de l'emploi
dont on l'avait revêtu par dérision : mais,
quoique octogénaire, il survécut à son
persécuteur. Il revint à Rome après sa
mort . et il y vivait encore sous Nerva et
sous Trajan. Il mourut, à ce qu'on croit ,
l'an 128 de J.-C. Nous avons de lui seize
Satires^ qui ne furent connues que sous
Adrien. Son style est fort, âpre, véhé-
ment ; mais il manque souvent d'élégance,
de pureté , et surtout de décence. Il y a
cependantd'cxcellcrites maximes morales^
des réflexions justes et piquantes. Quel-
ques savans l'ont mis à côté d Horace,
mais c'est sans doute le mettre trop haut.
Ces Satires forment avec les annales de
Tacite , le tableau le plus vrai , le plus
profondément tracé des mœurs publiques
JUV
et privées de celle époque de corruption.
Elles oui fu un grand nombre d'éditions
' depuis 1a 1'* qui a été faite en i/i70. Parmi
les plus récentes, on distingue celles de
G.-Alex. Ruperti, Leipsick , 1801 , 2 vol.
in-8° ; de Firmin Didot', avec les Com-
mentaires nouveaux de N.-L. Achainire,
Paris, 1810, 2 vol. in-8" ; enfin celle de
M. Leu'aire dans sa Collection des classi-
ques latins. On estime la traduction de
ce poète par le père Tarîeron, et celle
qu'en a publiée Dussaulx , Paris , 1782
in-8", réimprimée en 1803, 2 vol. in-8°,
et i806, 2 vol. in-12; cette même traduc-
tion a reparu, en 1821, revue par Achain-
tre, puis par M. J. Pierrot en 182G, 2 vol.
in-8°, dans la Collection des classiques la-
tins de Panckoucke , M. Baillot en a pu-
blié une autre, Paris, 1825, in-8°. Les Sa-
tires de Juvénal ont été traduites en vers
français par L.-V. Raoul, Meaux, 1811,
i815, Tournay, 1818, 2 vol. in-S", et Bru-
ges 1826. in-8"; par le baron Méchin, Paris,
-•817, 2 parlies in-8"; et en 1825, par
M. Vicl. Fabre de Karbonne, Paris, 1825,
3 vol. in-8".
JIJVEACUS ( Caius Veccius Aquili-
Kus), l'un des premiers poètes chrétiens,
naquit en Espagne, d'une fanùUe illustre.
11 mit en vers latins la Vie de Jésus-
Christ, en h. livres, vers 529. Ce poème est
86 JUV
cslimablc, moins par la beauté des vers
et la pureté du latin, que par l'exactitude
scrupuleuse avec laquelle l'auteur a suivi
le texte des évangélistes. On le trouve
dans la Bibliothèque des Pères , et dans
le Corpus poelarum de Maitlaire. Saint
Jérôme en cite avec éloge ce vers sur
l'adorat'on des mages :
Thus, anrtiin , myrrhatn, Ilcgique , Honiin!<iue,
Dcuque,
Doua fcniot.
JL' VEÎVEL des URSINS. Voy. URSINS.
JUVEIVEL ou JOUVENEL ou JUVÉ-
NAL, de CARLENCAS ( Félix de), naquit
à Pézenas , au mois de septembre, en
1679. Après avoir fait ses études chez les
Pères de l'Oratoire de sa ville , il fit un
voyage à Paris, où il demeura une année ;
il revint chez lui, et s'y maria. II écrivit,
pour l'instruction de son fils, les Prin-
cipes de l'Iiistoire. C'est un vol. in-12,
publié à Paris , en 1755. Carlencas fil en-
suite ses lissais sur l'histoire des sciences^
des belleS'lellres et des arts ,• il y en a eu
quatre éditions à Lyon , dont la dernière
en 17t)7, 4 vol. in-8". Cet ouvrage, catalo-
gue assez imparfait des richesses littérai-
res des différens siècles, a eu beaucoup de
succès. Il a été traduit en allemand et c;i
anglais. L'auteur mourut à Pézena.v,le ii
avril 1760, âgé de 80 ans.
KAE
KAE
KaAB. Voyez CAAB.
RABEL. Voyez VANDER-KABEL.
KAEMPEEK , ou CAEMPFER ( Esigkl-
beut), médecin et voyageur célèbre , né
en 1651 à Leingow, en Westphalie, d'un
ministre, passa en Suède, après s'être
adonné pendant quelques années à l'élude
de la niédecine, de la physique et de l'his-
toire naturelle. On le sollicita vivement
de s'arrêter dans ce royaume; mais sa
passion extrême pour les voyages lui fil
préférer à tous les emplois qu'on lui of-
frit la place de secrétaire d'ambassade, à
la suite de Fabrice , que la cour de Suède
envoyait au roi de Perse. Il partit de Stock-
holm en 1685, s'arrêta 2 mois à Moscou,
et passa 2 ans à Ispahan, capitale de la
Perse. Fabrice voulut l'engager à revenir
avec lui en Europe; mais son goût pour
les voyages augmentant les connaissances
qu'il acquérait , il se mit sur la flotte de
Ja compagnie hollandaise des Indes orien-
tales, en qualité de chirurgien en chef,
Kaempfer fut à portée de satisfaire sa cu-
riosité; il poussa ses courses jusqu'au
royaume de Slain et au Japon. De retour
en Europe en 1695, il se fit recevoir doc-
teur de la faculté de Leyde, et revint dans
sa patrie. La composition de divers ou-
vrages, la pratique de la médecine, et
l'emploi particulier de médecin du comte
de Lippe, son souverain, l'occupèrent
jusqu'à sa mort, arrivée en 1716. Parmi
les ouvrages de cet observateur, on dis-
tingue ; I Jmœnitalum exoticarum poli-
tico-physico-medicarum fascicidi ginn-
que., etc. , Lemgow , 1712, in-i", avec un
grand nombre de figures. Cet ouvrage
qui est rare et recherché , entre dans
un détail curieux et satisfaisant sur l'his-
toire civile et naturelle de la Perse et des
autres pays orientaux. | Ilerbarium ultra-
Gungeticum; \ Histoire naturelle . ecclé-
siaUique cl civile de l'empire du Japon»
KAE
87
KAE
eu allernantl ; lrad.iile en anglais jiar les
soins de Scheuch/.cr ; et en français sur
cette version , jiar Ucsmaizeaux , la Haye,
1729, en 2 vol. in-foi. , avec quantité de
ligures, cl 1751, en 3 vol. in-I2, avec les
cartes seulement. Celte histoire n'est
qu'un amas de niatoriaux informes, sans
suite et souvent sans ordre ; l'auteur était
bien éloigné de donner à ses Journaux et
ï ses Mémoires le litre important sous le-
quel on les a imj)riniés après sa mort ; il
ies a remplis des iiréjugés de sa secte , et
l'histoire sous sa plume prend souvent la
forme dune satire contre les catholiques.
11 ne rougit pas de calomnier d'une ma-
nière atroce l'église naissante du Japon ,
qui a reproduit avec le courage des mar-
tyrs toutes les vertus des premiers chré-
tiens. Le P.Charlevoix a mis au jour une
inlinilé de ses erreurs, conlradictions et
assenions, qui ne peuvent être sans mau-
vaise foi : il prouve son ignorance dans
l'histoire, comme la petitesse de ses vues
en politique; j Le liecueil de tous ses au-
tres Voyages , Londres , 1756 , en 2 vol.
in-fol., avec ligures. On y trouve des des-
criptions plus exactes que toutes celles qui
avaient ])aru avant lui de la cour et de
lempire de Perse , et de quelques autres
contrées orientales.
' RAESTMiR ( ABHAHAM-GOTTnELF),
professeur de malhématiques à l'univer-
sité de Gœttingue, et poète satirique, né à
Leipsick. en 1719, suivit dès l'âge de dix
ans les cours de jurisprudence de son
père, professeur de droit à l'université de
cette ville. Il étudia surtout lesniathéma-
liques sous le célèbre Hausen. Ce maître
habile lui lit adopter la méthode géomé-
trique des anciens, à laquelle Kaestner
s'est nriontré constamment attaché. En
même temps il forma son style d'après
les principes que Goltsched s'efforçait
d'inspirer à ses concitoyens, en leur don-
nant le goût de la bonne littérature : en
sorte qu'il apporta dans les ouvrages
scienlitiques une pureté de diction jus-
qu'alors inconnue. Nommé professeur de
malhémaliques à Gœttingue, il se lit une
grande réputation par la netteté et la
clarté de son enseignement. Kaeslners'ap-
pliqua encore à l'astronomie et fit un
grand nombre d'observations, d'abord
avecun instrument grossier et imparfait :
il s'occupa beaucoup delà comète de 1742 ;
mais n'ayant pas cru devoir publier les
observations faites avec un tel instru-
ment , il les chanta dans une Ode qu'on
trouve dans ses Mélatigcs. Muni d'une
lunellc qui grossissait 23 fois, il put élti-
dier avec quelque succès la comète de
ilkh, et, lorsqu'il fut pourvu d'inslru-
mens encore meilleurs , il découvrit sur
le soleil les taches blanchâtres que Schroe-
ler de Lilienlhala observées aussi avec des
télescopes do la plus grande perfection.
Toutes ses études astronomiques étaient
faites de concert avec l'opticien, J.-Cbré-
tien Baumarm, dont il épousa la sœur. Il
devint directeur de l'observatoire deGœt-
tingue. Kaestner cultiva aussi avec succès
les belles-lettres et il a laissé un grand noin»
bre d'épigraninus estimées, mais qui sou-
vent ont jeté le trouble dans ses relations
civiles et littéraires. On a de lui différen-
tes traductions, entre autres, celle des il/<î-
rnoires de l'académie de Suède ; celle do
Vy/rt de la teinture, par Hellot; celle de
l 'optique de Smith. c\.c. Il remporta un prix
à l'académie de Berlin, pour une disserta-
tion écrite en français, sur les devoirs qui
résultent de la conviction que les événeiwns
fortuits dépendent de la volonté de Dieu.
Etant parvenu avec Heyne à rapprocher
les membres de la société littéraire de
Goetlingue désunis depuis quelque temps,
il rédigea les Mémoires At zv^Ki'ù sociélé
pendant l'espace de 14 ans, et publia 47
dissertations iusirées depuis le volume
de 17or) à celui de 17(36. Dans le 14* vo-
lume de ces Comment iiliones , il publia
son Spécimen unalyseos gcomctricœ cum
algebraica comparatœ. 11 fut aussi l'un
des rédacteurs de la Gazette littéraire de
Gœttingue. dans laquelle il donna d'excel-
lens articles de mathématiques, de phy-
sique , d'astronomie , etc. La liste de ses
ouvrages occupe douze pages dans le DiC'
tionnaire de Meusel, et comprend plus de
200 titres. Nous nous bornerons à citer :
I Prima quœ post inventant ttjpographiani
prodiit Euclidis c<//?îo , Leipsick , 1750,
in-4" ; | De habitu matheseos et physicœ
ad religionem . Leipsick, 1752 ; | Elémens
de mathématiques . contenant : l'arith-
métique , la géométrie plane et sphérique,
la trigonométrie . la perspective , la mé-
cainque , t optique , l'astronomie , la géo-
graphie, la chronologie , la gnomonique,
l'analyse des grandeurs finies , l'analyse
des infinis , la mécanique transcendante .
l'hydrodijnamique , Gœttingue, 1758 et
années suivantes, 6' édition 1800 | iV'ou-
velle démonstration de l'immortalité de
l'âme, ib., 1767, in-4" ; | Notices ou Eloges
de Leihnitz . Tohie-Mayer , Rœderer^
Erxlehen. Meister . Lichtenberg , etc.
I Histoire des mathématiques depuis la
KAH
8a
KAL
renaissance des sciences jusqu'à la fin
du ib' siècle, Gcellingue, 1796-1800, k vol.
in-8" : la mort de l'aïUeiir ne lui nennit
pas d'achever ce savant ouvrage , qui va
seulement jusqu'au milieu du 17* siècle.
I Mélanges^ Allenbourgf, 17oo, in-8".
Kaestner mourut le 20 juin 1800 : il avait
lui-même écrit sawi> que Baldenger a in-
sérée dans ses Biographies des médecins
et des naturalistes vivans ^tome i" ; elle
se trouve aussi dans ï Histoire de l'uni-
versité de Gœttingue^ par Pulter. Heyne
a publié dans le tome 15 du Recueil de
l'académie de Gœllingue l'éloge de Kaest-
ner^ en l'honneur duquel le comte Guil-
laume \" de Schauemburg et Lippe a fait
frapper une médaille d'or en 1770. Ce sa-
vant professeur avait opéré une espèce
de révolution dans l'enseignement, et il
concourut puissanmient à répandre en
Allemagne le goût des sciences mathé-
matiques. A l'époque où la doctrine de
Kant occupait en Allemagne tous les es-
prits, Kaeslner persislail à ne point vou-
loir l'étudier : je possède, disail-il à ceux
qui lui reprochaient celle négligence pour
un système dont la terminologie bizarre
est le moindre défaut , je possède douze
langues tant anciennes que modernes ;
elles me suffisent : à mon âge je ne veux
pas en apprendre une treizième.
KAFOUR-EL-ARIICUYDY, noir el eu-
nuque , parvint de l'esclavage à la royauté.
Ce ne fut ni par la force des armes ni
comme usurpateur qu'il devir»t roi d'E-
gypte et de Syrie , ce ne fut que par son
seul mérite. Il avait été acheté 18 dinars
par Aboubekr- Mohammed-Al-lkhchid,
souverain de ce royaume. Il fit des pro-
grès si rapides dans les bonnes grâces de
son maître, que ce dernier, à sa morl
arrivée en 945 , lui laissa la tutelle de ses
deux fils et la régence du royamine, pen-
dant la minorité d'Aboul - Cacem-Auou-
djour. Kafour remplit ce double emploi
avec sagesse, el sa conduite prouva tant
de grandeur d'àme, que ses pupilles étanl
morts, il fut choisi d'un commun accord
pour leur succéder. Son règne fut sage el
paisible. On place sa mort en l'année 968.
Elle fut le signal d'une révolution dans
l'empire musulman, et de l'avénemenl
des kalifes Fatimites au trône d'Alexan-
drie.
KAHLER ( WiGAND ou Je\!W ), théolo-
gien luthérien , né à Wolmar, dans le
landgraviatdeHessc-Cassel, en 1649, fut
professeur de poésie , de mathématiques
et de Uiéologie à Rinteln , et membre de
la société de Gœltingen. Il mourut en 1729.
On a de lui un grand nonibre de Disser^
tationes juvéniles sur des matières de
théologie et de philosophie, réunies en
2 vol. in-12 , Rinteln, 1710 el 1711.
KAIN. royez LEKAIN.
KALDÏ ( GEoncES ) , né à Tyrnau en
Hongrie, l'an 1570, d'une ancienne famille,
refusa la prévôté de Strigonie pour se
faire jésuite, prêcha avec succès à Vienne,
enseigna la théologie à Olmutz , et fit bâtir
le collège de Presbourg, où il mourut le
20 octobre 1654, universellement regretté
pour ses belles qualités et ses vertus.
Pierre Pa/mann, cardinal et archevêque
de Strigonie , fit son Eloge funèbre. On a
de lui : | la Bible, traduite en hongrois ,
Vienne . 1622 , in-fol. ; | des Sermons en
hongrois, Presbourg, 1651 , in-fol., el plu-
sieurs ouvrages qui sont restés manus-
crits. P. Pazmann , cardinal et archevê-
que de Strigonie a fait l'éloge funèbre de
G. Kaldi.
* KAEF (Guillaume ), peintre hollan-
dais , né à Amsterdam en 1630 , mort des
suites d'une chute, en 1695, fut élève de
Henri Pot. Ses sujets ordinaires étaient
des vases qu'il peignait avec la plus grande
délicatesse el un éclat extraordinaire. On
trouve beaucoup de ses ouvrages en Hol-
lande el en Flandre , mais ils sont très
rares en France : les plus connus sont un
Melon coupé en deux , le Benedicite hol-
landais, la Batteuse de Beurre . un Inté-
rieur de cuisine : ce dernier tableau est
au musée du Louvre.
KALIL. royez PATRONA.
* R VLK \R ( HExni de) , chartreux cé-
lèbre, originaire de Calcar dans le duché
de Clèves ; il était surnommé /Eger , tK
naquit l'an 1528. Etant venu en France , il
étudia à Paris,- où il reçut le bonnet do
docteur. Dans ces siècles d'ignorance, on
le regardait comme un prodige de savoir.
Celle réputation lui obtint un canonicat
dans l'église de St.-Georges de Cologne.
Il avait déjà trente-sept ans , quand il en-
tradans l'ordre de.s chartreux ; il y remplit
les principaux emplois , el fut prieur à
Arnheirn , recteur à Ruremonde , prieur
à Cologne el à Strasbourg. Afin d'établir
une sage réforme dans les couvens de son
ordre, il parcourut, en qualité de visi-
teur, la France, l'Angleterre et mourut
en odeur de sainteté , l'an 1428 , âgé de
80 ans. Il laissa plusieurs ouvrages manus-
crits, dont les plus connus sont les suivans :
( une chronique, de ortu ac progressu
ordtnis carlusiensis. On lit, à la fin do
l'ouvra[jc,ccs mots : saipfum anno Doim-
ni 1598, circa festum B. Joh. Bapt. L'au-
teur suit dans ce livre la tradition de la
conversion miraculeuse de saint Bruno,
et telle qu'on la trouve ( dil-il lui-même)
dans le Spéculum historiale du frère Vin-
rent de Beauvais. Celte chronique , écrite
dans la chartreuse de Coloyne, y était con-
servée, et on la conserve dans la l)iblio-
thèquc de Strasbourg, dans la Collection
des lettres de Kalkar. | Chronica priorum
Cartusiœ majo?'is . ayant la souscription :
C.ompilata Jicec suni ah Ilenrico de Kal-
har, subanJio 1598 , circa festtivi B. Joan-
m's Baptistœ ; \ Epistolœ rarce ad diversos.
Ces lettres roulent la plupart sur des sujets
ascétiques , et comprennent les années
depuis 1570 jusqu'à 1407, Pierre Canisius
fait mention de Kalkar dans son Marty-
rologe allemand, à la rubrique du 20 dé-
cembre. On en parle aussi dans les Mé-
langes de Bonaventure d'Argonne. Kalkar
est du nombre des auteurs à qui Ion a
attribué Y Imitation de J.-C.
•RALRBRENM:R ( Christiaim ) , cé-
lèbre compositeur allemand , naquit à
Munden , dans la liesse , en 1755 d'une
famille juive : après avoir reçu des leçons
(lu célèbre professeur Bach, et avoir été
attache de bonne lieure à la cliapelle de
l'électeur . il passa à Berlin en 1778 , et fut
successivement maitre de la chapelle de
la reine et du prince Henri , frère de Fré-
déric Il , qui le nomma directeur du
théâtre italien de celle ville. Il composa
])lusieurs opéras , entre autres la Veuve de
Malabar . Démocrite, la Femme et le Se-
cret. Il publia aussi un Traité d'accompa-
gnement. En 179G il quitta Berlin et voyaga
ensuite en Allemagne, en Italie, en France,
se fixa à Paris , et fut reçu à l'académie
de musique. Il donna à ce théâtre Olym-
pie qui n'eut pas un grand succès, OEnone
qui ne fut point représentée , Saiil. Don
Juari, etc. Il mourut le 10 août 1806. Il
a laissé d'autres ouvrages, tels qu'un Traité
de la fugue ei du contrepoint, d'après le
système de Biclier , et une Histoire de
la musique, Paris, 1802, 2 vol. in-8", qui
est estimée des connaisseurs; mais il n'a
pu lui donner toute l'extension dont il le
jugeait susceptible.
* KALKREtlTH ( Adolphe-Frédéric .
comte de ) , feld-maréchal prussien , na-
quit en 1756 : pendant la guerre de sept
ans , il était adjudant-général du prince
Henri de Prusse, aux succès duquel il
contribua beaucoup par ses avis. En 1789
il fut noinmc commandaal de l'armée do
89 RAL
Pologne, n s'oppo.«a à la guerre (pie Ton
voulait faire à la France ; et lorsque mal-
gré lui elle eut élé décidée , il n'en com-
battit pas moins avec distinction dans les
campagnes de 1792, 1793 et 1794. Dan»
celte dernière année il s'empara de la
ville de Trêves ; il en résulta d'assez vive»
discussions entre ce général et les offi-
ciers autrichiens qui lui reprochaient de
chercher à détruire la puissance de la
maison d'Autriche : mais cette accusation
injuste fui repoussée victorieusement par
un mémoire qu'il publia pour exposer et
jusliiier sa conduite. r<ommé en ISOii
commandant de l'armée x)russienne ras-
semblée en Poniéranie. il devint en 1806
gouverneur de Thorn et de Dantzick, puis
inspecteur-général de la cavalerie prus-
sienne et colonel en chef des dragons de
la reine. La même année il quitta la Po-
méranie pour entrer en Saxe, afin da
réunir les troupes à la grande armée prus-
sienne. Après la bataille d'Iéna il com-
mandait une partie delà réserve; il sol-
licita alors vainement auprès de Napoléon
un armistice de six semaines : n'ayant pii
l'obtenir , il se retira sur Brunswick et
défendit peu de temps après la ville de
Dantzig qui fut assiégée par le maréchal
Lefèvre. Le 27 mai 1807 il fut obligé de
conclure une capitulation par laquelle il
obtint que la garnison ne serait point pri-
sonnière de guerre. Le 24 juin suivant il
signa aussi pour son souverain le traité de
Tilsitt. Le comte de Kalkreuth était en 1810
gouverneur de Perhn, lorsqu'il fut envoyé
par le roi de Prusse à Paris pour y com-
plimenter l'empereur français au sujet do
son mariage avec Marie-Louise. A son re-
tour, il devint gouverneur de Breslau cl
fui chargé en 1814 du goiivernement du
grand duché de Varsovie. Il occupait celui
de Berlin lorsqu'il mourut dans cette vilie
le 10 juin 1818 , à l'âge de 82 ans.
* KALRA.Vr ( Abraqah van ), peintre
de paysages hollandais , né à Dordrccht
en 1045, mort eu 1721 , étudia la sculplum
chex les frères Emile et Samuel Hulp; il
s'ailorma ensuite plus parliculièrcment k
la p' iiilure. Il a peint plusieurs villes,
dont la vue est prise des bords du Rhin ;
ses tableaux sont enrichis de figures rt
d'animaux dessinés avec beaucoup dy
goût.
RALTEY.SEX ( Hexri ) , dominicain ,
né dans un château près de Coblenl?, , de
parens nobles , fut maitre du sacré palaii*,
et inquisiteur général en Allemagne. H
parut avec éclat au concile de Bàlo , :jù il
8.
KAN 90
réfuta avec force les héréliqius de Bo-
hème, eu 1435, Il devint ensuite arrlie-
vêque de Dioiitlieitn en NoI■^véîJe et de
Césaréc. Ce prélat se retira sur la lin de
ses jours dans le couvent des frCrfs-prè-
cheura à Coblentz, où il mourut le 2 oc-
tobri! ik(')Ti. Il nous reste de lui un Dis-
cours qu'il prononça au concile de Bàle,
sur la manière de prêcher la parole de
Dieu. C'était un des hommes les plus la-
horieux de son ordre.
KAMKI. royez KK^G-m.
R>\MI»1':>;. Voyez CAMPEN.
*IiAMPi:\HAU.SKi\ (le baron Bai-tha-
SAii ), né dans le district de Riga en 1772.
mort à Saint-Pétersbourg, le 17) septembre
1823 , occupa plusieurs fonctions impor-
tantes , entre autres celles de directeur de
V Ecole du commerce. On a de lui plusieurs
ouvrages allemands dont voici les titres
en fiançais : | Principe du droil politique
russe ^ Gœttingue, 1792, in-fol. \ Essai
d'une description geoyraphico-slatislique
du gouvernement de l'empire russe ; pie-
mier cahier renfermant la Description du
goiwei-nenient d'Olonctz. Gœttinfjue. 1795
in-8°; \ Histoire remarquable du gower-
nement de Sai)d-Pétersbourg . première
partie, 1797 : cet ouvrage et le précédent
n'ont pas été achevés ; | Magasin de Li-
vonie . tome premier. Gotha, 1803; la
deuxième partie de cet ouvrage qui était
entre les mains du libraire Ettinguer ,
ne s'est pas retrouvée à la mort de ce der-
nier ; I Histoire généalogique et chronolo-
gique de la dynastie des Romanof . Leip-
sick, 1803, in-S"; le célèbre Meusel, dans
son Allemagne savante, ajoute encore un
volume de Poésies, publié à Itével en
4788 ; mais il est probablement d un autre
auteur du même nom.
IvAi\I)LEll ( Jea.\-Joachim ), commis-
saire de la cour électorale de Saxe, né en
1706 à Sélingstadt, en Saxe, mort en
177G, fut le maître des modèles de la fa-
brique de porcelaine de Messein. Il excella
dans ce genre. On a de lui \\n grand
nombre d'ouvrages, exécutés par lui ou
sur ses dessins, et on ne peut rien trouver
de j)lus élégant et de plus moelleux.. Tels
sont V yj pâtre saint Paul, de grandeur na-
turelle; Saitd Xavier mourant , la Fla-
gellation du Sauveur . les 12 Apôtres . un
Carillon tout de porcelaine , divers cru-
cifix . etc. Il fut chargé par le roi Au-
gas*e d'apporter en présent à Louis XV
un magniliquc trumeau en glace de
Dresde , avec un cadre de sa composition,
oraé de guirlandes et de fleurs en relief:
KAN
on assure que cet ouvrage est son chef-
d'œuvre.
KA\G-ni 1", empereur de la Chine,
petit-fils du prince tarlawe qui la conquil
en lGi4, appartient à la dynastie des
Tsing ou Mandchous qui règne encore
aujourd'hui sur celte vaste contrée : il
naquit en lGo3, d'une des femmes du 2'
rang de l'empereur Chun-Tchi. Il n'avait
que Sans lorsque son père mourut ( 16G1 ;.
Il monta alors sur le trône ; mais , suivant
les usages chinois , le gouvernement fut
confié à quatre régens ; Tun de ces der-
niers étant mort en 16G6 , Kang-Hi , âgé
de 13 ans, saisit celte occasion pour
])rendre les rênes de l'état et secouer le
jougdes trois autres régens. Le prince jus-
liiia bientôt sa démarche par de grandes
qualités. Peut-être outra-t-il l'orgueil et
le faste des Asiatiques. Sa curiosité n'avait
point de bornes, et voulait savoir jus-
qu'aux choses qu'il lui convenait d'igno-
rer. Un jour il voulut senivrer , pour
connaître par lui-même l'effet du vin.
Néanmoins les historiens nous représen-
tent ce prince comme un sage : mais c'est
qu'à la Chine, pour mériter ce titre, il
suflit de ne pas avoir tous les vices. 11
ainmit les missionnaires, et rendait jus-
lice à la religion chrétienne, en faveur
de laquelle il doiuia un édit célèbre, qui
contient les plus grands éloges de cette
religion divine, la lumière et la consola-
lion des mortels. Kang-Hi renchérit sur
ceux qu'on lit dans l'édit donné par un
de ses prédécesseurs en G3G, plus de mille
ans atiparavant. C'est lui qui lit mettre
sur l'église chrétienne à Pékin, cette in-
scription , écrite de sa propre main , qui
prouve combien l'idée de Dieu est exacte-
ment la même chez- toutes les nations, dès
le moment que la superstition cl les pas-
sions ne l'altèrent pas : <« AU VRAI PRIN-'
. CIPE DE TOUTES CHOSES. Il est infini-
» ment bon et infiniment juste ; il éclaire et
» soutient; il règle tout avec une suprême
» autorité et avec une souveraine justice.
» Il n'a point eu de commencement, et il
» n'aura point de fin; il a produit toutes
» choses dès le commencement : c'est
• lui qui les gouverne, et qui en est le
B véritable seigneur. » ( Voyez SAADI ).
C'est à tort qu'on l'a accusé d'a\oir exigé
par une suite de la vanité chinoise , que,
dans les caries géographiques, la Chine
fut placée au milieu du monde : cette ri-
dicule prétention est bien plus ancieime.
Le père Matthieu Ricci avait déjà dû s'y
conformer dans la carte qu'il présenta à
KAN
91
ItlX
rempcreur Vanli, datis le siècle précé-
dent. Kang-Hi eut à soutenir plusieurs
guerres dont il sortit triomphant. Il vain-
quit le fameux Ou-San-Konei,kan tartare
qui pouvait disposer d"une armée de
quatre-vingt mille liommes, et lit périr
son lils, qui avait tenté de soulever les
esclaves de l'empire. Il délit Galdan-Con-
Jaïsch , prince mongol , qui avait conquis
plusieurs provinces sur les Musulmans.
Le père Gerbillon, jésuite, qui avait ac-
compagné Kang-Hi dans deux expéditions
contre ce prince , a écrit la relation de la
dernière qui fut suivie de la dispersion
des troupes nombreuses réunies par Gal-
dan , et de la mort de ce dernier. Par len-
Iromise de la mission de Pékin, ses ba-
tailles contre Galdan furent gravées en
France, d'après des dessins faits sur les
lieux, et ensuite renvoyées en Chine avec
des planches. Ce fut sous le règne de
ivang-Hi, que la cour de Russie envoya
un ambassadeur à Pékin, et que les pro-
cédés astronomiques des Européens fu-
rent déclarés préférables à ceux des Chi-
nois : le père Verbiest «jésuite, fut nommé
président du bureau des astronomes de
l'empire. Kang-Hi avait un esprit vaste
et pénétrant, qui embrassait toutes nos
sciences. Outre différens morceaux de
poésie et de littérature recueillis avec soin
et qui forment une collection de plus de
100 vol., on a encore de cet empereur un
recueil de maximes pour le gouverne-
ment des états, traduit en anglais, et pu-
blié sous le titre d'Edils sacrés par M.
Mihie , missionnaire prolestant. Il fut en
quelque sorte le disciple des jésuites, qu'il
protégeait spécialement et qui ont fait les
plus grands éloges de ce monarque , dont
lePoîtrait historique . a été publié par le
père Bouvet, en WM. On peut consulter
sur ce prince et ses ouvrages les Mémoires
concernant les Chinois où l'on trouve une
traduction italienne des Inslilutions mo-
rales^ laissée par Kang-Hi et publiée par
Bon iils : d'après celle-ci, il en a été fait
une en français.
K-AAOLD ( Jeax ) , médecin de Bres-
Jaw , mort en 1729 , à 49 ans , laissa des
Mémoires en allemand , sur la nature et
sur les arts, très curieux.
• KAAT ( Emmanuel ), célèbre philoso-
phe prussien, fondateur d'un nouveau
système, auquel MlM. Royer-Collard et
Couôin oiîl dotuié quelque vogue en France
et qui en Allemagne a succédé pendant
quelque temps à celui de Leibnitz , naquit
àKœuigsberg en Pj.usse, le 22 avril 1724;
il descendait d'une famille écossaise, et
son père, après avoir été caporal au ser-
vice de Suède , exerçait l'état de sellier.
Le jeune Kant reçut sa première instruc-
tion dans une école de charité; il entra
ensuite au gymnase , puis à l'université
de Kœnigsberg. D'abord répétiteur , puis
précepteur des cnfans d'un ecclésiastique,
il devint en 1770 professeur de philoso-
phie. En 1786 il remplit les fonctions de
recteur de l'université , fut nouimé en
1787 membre de l'académie de Berlin , et
mourut à Kœnigsberg le 12 février 1804.
L'histoire de sa vie est tout entière dans
celle de ses travaux ; on y remarque deux
époques bien distinctes : l'une dans la-
quelle il s'occupa avec le plus grand suc-
cès de V enseignement de la physique , de
l'astronomie , de la mécani(|ue , de la géo-
graphie et de la philosophie : la seconde
qui date de 1 78 1 , et dans laq uelle il se livra
exclusivement à la philosophie, et écrivit
sur celte science les ouvrages qui lui ont
fait tant de réputation. Ces ouvages sont
nombreux ; ce sont : | Critique de la raison
pure, Riga, 1781-1787, etc. in-S" ; | Prolé-
gomènes ou Traités préliminaires à toute
métaphysique^ 1785; | Base d'une mé-
taphysique des mœurs. 1784; | Princi-
pes métaphysiques de la science de la
fiature, 1786; | Critique de la raison pra-
tique , Riga , 1787 ; | Essai d'anthropolo-
gie, 1788; I Critique du jugement ( où il
traite spécialement du beau ), 1790, in-S";
I La religion d'accord avec la raison.
Kœnigsbeig, 1793; | Essai philosophique
surlajiaix perpétuelle^ ibid. 1795 ; ! Prin-
cipes métaphysiques de la science du
droit . 1796, in-8"; | Principes métaphysi-
ques de la doctrine de la vertu . 1797. On
a en outre un extrait de ses manusci'its
un Manuel pour l'enseignement de la Lo-
gique. 1803^ et un traité de l'éducation,
publié sous le titre de Pédagogique , 1805.
C'est dans ces ouvrages qu'il a exposé sa
doctrine que l'on peut résumer en peu de
mois; car le trait caractéristique de ce
piiilosophe, c'est d'avoir distingué dans nos
connaissances ce qui appartient aux clio-
ses, aux objets (ce qu'il nomma Vobjectif)^
de ce que notre esprit y ajoute et qui n'api
partient qu'au sujet pensant (cest là la
subjectif) : c'est ainsi que Kant rapporte
à l'esprit seul les notions de nombres , de
temps, d'espace, de causalité, de nécessité^
qui, selon lui, en sont comme les formes j
et dont par une illusion naturelle , uouà
revêtons les choses ( matière ) , comme si
elles leur étaient propres Le philosopha
KAIV
92
KAN
prussien passe en revue toutes nos con-
iiuissaiiccs pour faire dans chacune la sé-
paration de V objectif d'a\ ce le subjectifrde
la forme d'avec la matière ; et il arrive à
celte conclusion que l'expérience seule
peut donner la certitude de l'existence
réelle ou objective, et que , même dans
cet ordre de faits, nous ne pouvons être
assurés que les choses soient telles qu'elles
nous apparaissent. Cependant il fait une
exception en faveur des vérités morales,
de la loi du devoir, dont il nous est possible
de percevoir la réalité objective et la certi-
tude absolue. « Kanl a adopté, dit l'auteur
» des Mémoires pour servir à l'histoire
• ecclésiastique pendant le 18' siècle, une
» métaphysique fort extraordinaire et peu
» aisée à comprendre. Il se perd dans des
» abstractions et dans une idéologie vague
» et obscure. Les uns l'admirent; les au-
» très se plaignent qu'il ait détruit la reli-
» giosité en voulant l'expliquer ; que sa
» raison pure et sa raiéoii critiqua ne
» soient autre chose que le déisme pur :
» que l'auteur, en ne voulant considérer
» le christianisme que comme une religion
• purement éthique ou morale , annonce
» assez qu'il n'en reconnaît pas lesmyslè-
» res ; qu'il fasse de J.-C. un idéal dont il
» consent qu'on honore la doctrine, mais
» dont il ne permet pas d'adorer la per-
• sonne: que l'église soit aussi un idéal;
» qu'il ne faille dans ce système, ni priçies
• ni sacrilices , ni cérémonies, etc. Au
» surplus toute celte théorie est si embar-
» rassée , que les disciples se sont dispu-
» tés pour savoir quelle était la doctrine
» du maître. SchellingetFichte prétendent
» l'avoir perfectionnée. Kanl n'avait fait
» que les mettre sur la voie : ils se flattent
» de s'être élevés plus haut; ils ont cha-
» cun leur école , et on dispute aussi pour
• savoir ce quils ont pensé, tant ils ont
» mis de prix à être entendus. Cependant
• cette doctrine hiéroglyphique s'est ré-
» pandue ; on l'a adoptée dans plusieurs
V universités d'Allemagne , et on a beau-
» coup écrit poxir et contre. Il ne semble
• paw que ces progrès du kantisme aient
» contribué à fortilier la religion en Alle-
• magne. La vogue de la raison pure ,
• parmi lesprofesseurs et parmi les élèves,
• a secondé au contraire la propagation
• do l'esprit d'incrédulité. » A ce jugement
vrai et modéré, nous ajouteronssur le phi-
losophe de Kœnigsberg et sa doctrine
quelques observations pen suspectes. Elles
nous sont fournies par un auteur qui se
déclare assc» hautement le partisan du
criticisme : après avoir exalté les décou-
vertes idéologiques de Kant , et avoir fait
tous ses efforts j)our établir qu'elles sont
éminemment favorables à l'idée de Dieu ,
comme dirigeant et secondant l'éducation
morale de l'espèce humaine, et que Kant
n'a jamais nié ni l'impossibilité ni l'in-
vraisemblance d'une révélation : « Ce-
» pendant, ajoute-t-il , on est aussi étonné
» qu'affligé de trouver dans ses livres la
» preuve de sa répugnance à admettre
» l'origine surnaturelle du christianisme...
» Dans sa critique de la raison pure , il
» refuse à l'argument physico-théologique
» pour l'existence de Dieu toute force pro-
» bante... Interrogé peu de temps avant
» sa mort sur ce qu'il se promeUait de la
» vie à venir : Jiie?i de déterminé , ré-
» pondit-il après avoir réfléchi. Je n'ai
r> aucune notion de l'état futur ,a.\!^lt-il
» dil auparavant à une pareille question
» qu'on lui avait adressée. Une autre fois,
» il se déclara pour une espèce de métem-
» psycose. »Le même auteur ne dissimule
pas qu'un nombreux parti accuse Kant
« d'avoir créé une terminologie barbare ;
» innové sans nécessité, ens'enveloppant
» à dessein d'une obscurité presque impé-
Bnélrablo; enfanté des systèmes absur-
» des ou funestes ; augmenté l'incertitude
» sur les intérêts les plus graves de l'hu-
» manité; d'avoir, par le prestige du ta-
» lent , détourné la jeunesse d'études po-
» sitives; d'avoir, par son idéalisme trans-
» cendental, conduit ses disciples rigou-
» reusement conséquens , les uns à l'idéa-
» lisme absolu, les autres au scepticisme,
» d'autres encore à un nouveau genre de
» spinosisme , tous à des systèmes aussi
» absurdes que funestes. » Si les ouvrages
de Kant sont dangereux sous le rapport
religieux , ils ne le sont pas ujoins pour
l'esprit qui cherche la lumière dans les
questions naturellement obscures de la
métaphysique. Kanl est, du consentement
de tous ceux qui l'ont étudié, le plas
obscur de tous les philosophes : sa ter^
minologie est tellement neuve et peut-
être si singulière qu'avant de lire Kant ,
il faudrait apprendre son dictionnaire.
Néanmoins Kant est devenu chef d'une
école nombreuse qui l'a placé à la tète
des métaphysiciens du Nord, et qui la
révère comme, un génie du premier
ordre. Sa doctrine s'est répandue dans
toute l'Allemagne et, pendant quelque
temps , on l'a prêchée publiquement dans
plusieurs églises de Kœnigsberg , sous le
nom bizarre de Christianisme national.
KAP
93
KAR
Mais depuis quelque temps de nombreux
systèmes philosopliiques ont été enfantés
par le {«énie métaphysique des Allemands.
Kant n'a plus qu'un petit nombre de par-
tisans. Charles Villers fut le premier qui
introduisit en France cette nouvelle doc-
trine dans l'ouvrage français, intitulé: la
Philosophie de Kant, Melx , ^80l , in-S".
M. Tissot, professeur de philosophie à
B()ur{;fs, a publié les Pî'incipes méta-
physiques de la morale de Kant, et a pro-
mis la traduction de la Critique de larai-
son pure. M. de Gérando dans Yllistoii-e
comparée des systèmes de philosophie
relativement aux jjrincipes des connais-
sances humaines . fait bien connaître le
philosophe de Kœnigsbcrg et ne s'en
montre pas enthousiaste. L, Jourdan, dans
la traduction de l'Histoire de la philoso-
phie moderne . depuis la renaissance des
lettres jusqu'à Kant, peut être ausi con-
sulté avec avantage. Les ouvrages scien-
tifiques de Kant sont : | Pensées sur la
véritable évaluation des forces vives, et
critique des démonstrations employées
par Leilmitz et d'autres mathématiciens
dans cette matière, 240 pages in-8", avec
deux planches , 1746 ; | Histoire naturelle
du monde et théorie du ciel d'après les
principes de Newton , 1755; | Théorie des
vents, 1756, in-4°; | Nouvelle Théorie du
mouvement et du repos des corps, avec
un essai de son application aux élémens
de la physique, in-4", 1738 ; | Essai sur les
quantités néyativcs en philosophie , in-8°,
1763 ; I Précis de géographie physique
extrait de ses manuscrits , 1802 , etc. Le
professeur Tieflrunk a recueilli une partie
de ses ouvrages, Halle, 1799-1807, 4 vo-
lumes in-8°. On en a publié aussi un cJioix
sous le titre de Opéra ad philosophiam
perlinentia lat. vert. F.-G. Born , Leip-
sick , 179G-1798 , 4 vol. in-8". Quelle que
soit l'opinion que l'on ail sur les ouvrages
do Kant , on ne peut s'empccher de dire
que pendant toute sa vie il se lit remar-
quer par ses vertus, sa probité et l'aus-
térité de ses mœurs.
K A.\TEMIR. ployez CANTEMIR.
KAPMOIV. Voyez REUCHLIN.
IvAPOSl (Samuel), né en Hongrie
d un ministre, parcourut, pour étendre
ses connaissances, l'Allemagne, la Hol-
lande et l'Angleterre. Doué d'une mé-
moire extraordinaire , il apprit le grec et
l'hébreu en très peu de temps. De retour
dans sa patrie , il fut fait professeur de
l'Ecriture sainte à Alba Julia , aujour-
d'hui Carlsbourg, et mourut l'an 1715,
dans un âge peu avancé. On a de lui ;
I Memoriale hebraicuîn , Coloswar, 1698,
in-8° , et Utrei ht , 1758. Ce sont des vers
techniques qui renferment les i èglcs de la
lan^îue hébraïque ; | Breviarium bibli-
cum, Colos-war , 1699, et plusieurs ou-
vrages manuscrits.
KAPRII\AI (Etiexne) . né à Neuheu-
sel, dans le comté de Neitia, en 1714,
entra chez, les jésuites en 1729 , enseijfna
l'histoire et l'éloquence sacrée dans l'uni-
versité de Cassovie , et se fit connaître
par plusieurs ouvrages, où l'érudition
marche à côté de l'amour le plus ardent
pour la patrie; car c'est particulièrement
à tirer de l'oubli les écrits et les monu-
mens qui ont illustré la Hongrie , qu'il
consacrait ses recherches et ses veilles. Il
avait rassemblé avec des peines incroya-
bles une collection très précieuse de li-
vres , de manuscrits , de Chartres , de mé-
dailles, de monnaies propres à répandre
la lumière dans les annales de cette brave
et généreuse nation. Il s'en servit pour
donner un grand nombre d'écrits rela-
tifs à cet objet , parmi lesquels on distin-
gue : Hungaria diplomatica lemporis Ma-
tliiœ de Ilunyad, régis Hungariœ, Vienne,
1767-1772, 2 vol. in-4". On a encore do
lui : I De eloquentia sacra generatim .
Cassovie , 1 vol. in-8° ; | De eloquentia
sacra speciatim , ex veterum ac recen-
tiorum prœceptionibus adornata , ibid. ,
1 vol. in-S" ; I un excellent Discours sur
la présence réelle de Jésus-Christ dans
l'eucharistie^ où il presse les calvinistes
par ce dilemme : Vel Christus est in Eu-
charistia^ vel non est Deus. Effective-
ment, les preuves de ces deux vérités
sont les mêmes, et ceux qui rejettent la
première ne peuvent tenir sans inconsé-
quence à la seconde : raison pour laquelle
le calvinisme dégénère partout dans le
socinianisme. {Voyez LENTULUS , MÉ-
LANCHTHON, SERVET, VORSTIUS.) 11
est mort au commencement de 1786. Le
xèle pour la pureté de la foi , pour l'in-
itruction du peuple chrétien , la fran-
chise et les qualités sociales de cet homme
estimable , égalaient son application el
son savoir.
RARA-MEIIEMET, hacha turc, si-
gnala son courage aux sièges de Candie ,
de Kaminieck et de \ienne, el se distin-
gua au conihal donné à Choczim. Après
avoir été pourvu du gouvernement do
Bude en 1084, il lit une merveilleuse ré-
sistance contre les Impériaux, mais il
mourut pendant le siège, d'un éclat de
KAR
94
KAR
canon qu'il reçut en donnant désordres
êur les remparts. Il avait, peu de temps
auparavant , fait tuer quarante esclaves
chrétiens, en présence d'un ofticier qui
l'était allé sommer de se rendre , de la
part du prince Charles de Lorraine : ac-
tion horrible qui ternit toute sa gloire.
KARA MUSTAPHA. Voyez CARA-
MliSTAPHA.
* KARAMZm ( Nicolas -MiKHAiLo-
vvitch), historiographe de l'empire de
Russie , conseiller d'état , grand cordon
de l'ordre de Ste-Annc, chevalier de Sl.-
Wladimir, membre de l'académie russe ,
naquit le 1" décembre 1763, d'une famille
noble , dans le gouvernement de Sim-
birsk : il fit d'excellentes études , cl dé-
buta, jeune encore, dans la carrière des
lettres, par des poésies qui annonçaient
une imagination vive et brillante. A l'âge
de 24 ans, il entreprit un voyage en Alle-
magne, en Suisse, en France et eu Angle-
terre. Après avoir fréquenté dans chacun
de ces pays les hommes les plus distin-
gués de la littérature , et notamment en
Suisse, Bonnet, l'auteur de la. Paltnfféné-
sie. et d'autres ouvrages qu'il voulait tra-
duire, il publia les Lettres d'un voyageur
russe , qui, accueillies avec enthousiasme,
obtinrent plusieurs éditions < et furent
traduites en allemand. Ses Souve7îirs his-
toriques sur le chemin de Moscou à
Troïtza (i), sa. Marthe. sa Possadnitza (2),
ou la Soumission de Nowogorod, Natha-
lie fille d'un boyard, ci plusieurs autres
jtroductions du premier ordre , augmen-
tèrent sa réputation, tt prouvèrent qu'il
avait su perfectionner la prose russe et
lui donner un charme que l'on ne trouve
dans aucun des écrivains qui l'ont pré-
cédé. Rédacteur de plusieurs journaux ,
le CouiTier de l'Europe dont il fut le fon-
dateur, les Aonides^ Jglaé, il semblait
s'être voué exclusivement aux ouvrages
d'imagination. L'empereur Alexandre le
nomma historiographe de l'empire . et le
chargea d'écrire l'histoire de la Russie.
Après 14 années de recherches et de tra-
vaux assidus, Karamzin fit paraître les
huit premiers volumes de son Histoire ,
qui produisirent la plus vive sensation ,
non seulement en Russie, mais dans toute
l'Europe : 3000 exemplaires de la première
édition furent vendus en 28 jours. Cet
ouvrage ne laisse rien à désirer sous le
(1) Ancien monastère aux environs de 3Toscoii.
{a) fossadnilta veut dire fera me du Possadnilc,
fTtmiti magistrat de la re'publiiiue de NowogoroJ.
rapport de la composition , des dtMcils et
du style : il doit prendre place à côté de^i
chefs-d'œuvre des historiens modernes.
Cependant une pareille entreprise offrait
plus d'une difficulté; car jusqu'alors on
avait envisagé ces commence mens des
annales russes , commo trop arides pour
être étudiés. Malheureusement cette his-
toire reste inachevée. Tendant qu'il y tra-
vaillait, Karamzin se sentit accablé par la
fatigue : l'empereur Nicolas qui avait hé-
rité de la bienveillance de son frère pour
cet écrivain , l'engagea par un ukase du
2o mai 182G, à aller rétablir sa santé dans
un climat plus tempéré, et lui fit con-
naître en même temps qu'une pension
annuelle de 50,000 roubles réversible à
sa femme et à ses enfans, lui était accor-
dée coumie une récompense de ses tra-
vaux et de son dévouement à la personne
du prince uéfunl. Le Journal des Débats
du 27 juin 1827 a reproduit en entier ce
rescrit impérial ; mais Karamzin ne put
jouir lui-même de cet avantage; car il
mourut le 22 mai (3 juin) 1826. Outre
son Histoire de l'empire de Russie qui a
été traduite en français, les neuf pre-
miers volumes par MM. St.-Tliomas et
Jauffret, 1819 elsuiv. ; les deux autres en
1826 par M. de Divoff , conseiller d'état
actuel et chambellan de l'empereur de
Russie, Karamzin a publié un grand
nombre d'autres ouvrages, doi>t trois édi-
tions complè'es ont paru à Moscou en
1804 , 1815 et 1820 ; parmi ceux-ci on
distingue un Recueil de nouvelles . dont
une {Julie) a été traduite en français par
M. Boreilley ; plusieurs discours; \e Pan-
théon des auteurs russes ; le Panthéon de
la littérature étrangère. Il a encore tra-
duit en russe les contes de Marmonlel ,
( Moscou , 17% et 1815 ) et ceux de M"" de
Genlis(ibid. 181C).
K VRG ( JEA\-FRÉDÉnic) , minisire de
Maxiinilien-Emmanuel, électeur de Ba-
vière, et ensuite chancelier de son frère
Joseph-Clément , électeur de Cologne ,
mort en 1719 , est connu par plusieurs ou-
vrages sur la politique et sur le droit ca-
non. Celui qui lui a donné le plus de cé-
lébrité est Pax religiosa , Wurlzbourg ,
1680. L'auteur envisage les religieux
comme des corps auxiliaires , envoyés
aux ministres de l'EgKse , et dont les ser-
vices et le zèle ne peuvent qu'être d'une
utilité très marquée , pourvu qu'ils se dé-
ploient selon les règles et les constitu-
tions de la hiérarchie ecclésiastique.
Cette idée est heureusement exprimée
KAR 9
dans une estampe qui est à la tête de Tou-
vrage , où l'on voit dans un navire lés
apôtres occupés à tirer un filet si bien
rempli, qu'ils sont obliges d'appeler à
leur secours des pécheurs qui étaient dans
une barque voisine. El annuerunt iis qui
erant in alia navi ^ ut venirent et acija-
parent. Soit que, malgré sa circonspec-
tion , l'auteur eût moniré quelque parlia-
lilé contre les religieux , soit que les in-
quisiteurs de Rome aient jugé l'ouvrage
avec un peu de sévérité , ils ont mis à Yin-
dfX la Vax religiosa , donec corrigatur.
Le docile auteur a corrigé en effet son
ouvrage, et eu le conigeant , il l'a aug-
menté et enrichi de plusieurs traits d'é-
rudition, fllais les imprimeurs de Venise,
ignorant ces changemens, ont réimprimé,
en 1778, le livre tel qu'il avait paru en
^(iSO. Le manuscrit destiné à la nouvelle
édition , est dans la bibliothèque de feu
RT. le baron de Clerc, à Liège. Le fameux
Sébastien Leclerc a gravé la planche du
frontispice ; le sujet est le même que celui
qu'on voit dans lancienne édition, mais
il est mieux dessiné et exécuté d'une ma-
nière digne de cet artiste célèbre. On a
encore de Karg , Vues pacifiques sur la
réunion des religions qui divisent l'Alle-
fnagne . Wurtzbourg, 1 vol. in-16. Une
Vie de saint Jean JS'éj)omucène ^ Borm ,
1702, in-12. etc.
RAIUB-SCIIAH , descendait des an-
ciens rois des Kileks , peuple de la pro-
vince de Kilan , dans le royaume de
Perse. Né avec de l'ambition et du cou-
rage, il voulut ôter la possession de cette
province à Schah-Sophi , roi de Perse,
successeur de Schali-Abbas , qui l'avait
conquise en 1600. Il leva une armée de
14,000 hommes, et prit d'abord la ville
de Rcschl. Il occupa ensuite toutes les
avenues de Kilan ; mais le roi de Perse
envoya contre lui une armée de 40,000
hommes , qui défit entièrement la sienne,
et se saisit de sa personne : ce prince fut
mené à Casbin , où était le Sophi, le-
quel ordonna qu'on lui fit , par dérision,
une entrée magniiique : îiOO courtisan-
nes , qui l'accompagnèrent dans cette ridi-
cule cérémonie, lui firent essuyer mille
hidignités. Lorsqu'il eut été condamné à
mort , on commença son exécution par un
supplice assez extraordinaire. Il fut fjrré
aux pieds et aux mains comme un cheval ;
et, après qu'on l'eut laissé languir ainsi
pendant trois jours , il fut attaché au bout
d'une perche , et tué à coups de flèches.
Le roi lira le premier coup ; action bien
:; KVT
propre à faire oublier les torts de Tusur-
I)ateur !
* KASSOU , l'un des plus vertueux pré-
lats du 5' siècle, professa d'abord le mé-
tier des armes pendant plusieurs années
Après la mort de son épouse, il embrassa
l'état ecclésiastique ; ses vertus et ses ta-
lens relevèrent à l'évèché de Daron ,
grande province de l'Arménie majeure.
Il mourut vers l'an 478 , en odeur de sain-
teté. On coimaît de lui deux ouvrages ma-
nuscrits, qui sont fort estimés ; | YHiS'
toire de rétablissement du christianisme
en Arménie ; \ Réponse aux m.anickéens.
et à ceux qui admettaie7it les deux prin-
cipes.
*RATEB (Ibn), ou mieux IBN-AL-
KHATIB , célèbre écrivain arabe-espa-
gnol , plus connu sous le nom de Liçan-
Eddyn (la langue de la religion) naquit à
Grenade l'an 713 de l'hégire ( 1513 de
J.-C. ). Il fut attaché à la cour d'Ibn-
Alahmar , souverain de ce royaume, et
ren)plit avec distinction les postes les
plus éminens de l'état. Malgré son crédit
et le haut rang qu'il occupait , ayant été
soupçonné de trahison , il fut décapité le
même jour que l'accusation eut lieu, sans
avoir pu faire connaître son innocence.
Il a laissé les ouvrages suivans : | Ilis
toire des rois de Grenade et de celte ville
en particulier; \ Histoire des califes d'Es~
pagne ;\ Chronologie des califes d'Espagne
et des rois d'Afrique . en vers, avec un
conmjentàire de l'auteur. Cet ouvrage a
été traduit en latin. | Table chronologie
que des aglabites et des fathimites qui ont
régné en Afrique et sur la Sicile. On la
trouve avec une version latine dail^ VHis-
toire des Arabes en Sicile , par dom Gré-
goire, 1 vol. in-foK; | De l'utilité de l'his-
toire ; I De la monarchie^ ouvrage sin-
gulier , en 50 sections ; | Bibliothèque
arahico-espagnole. Ce livre a été com-
posé l'an 1361 de J.-C. Le savant Casiri
ertfait un grand éloge ; il en a inséré des ex-
traits dans le 2^ volume de sa Bibliothèque.
Cinq des onze parties qu'il contient sont
conservées dans la bibliothèque de l'Es-
curial. Ibn Kateb a écrit aussi plusieurs
ouvrages de médecine ; | un Traité sur
les devoirs d'un visir ; \ un Poème sur le
régime politique; \ un Recueil de poé"
sies. etc., etc. On trouve à la bibliulhè-
([ue du roi la Vie de cet écrivain, écrite
par Ahmed-Ben -Mohammed-Al-Mocry.
• RATO\A (Etikiwxe j, chanoine et
iiislorien allemand, mort vers 17^8, a
laissé en lalin ; j une Hisloiie critique
KAU
96
KAU
des rois de Hongrie^ Pesth el Bude , 1779-
4806, 41 vol. in-S"; ouvrage rare en
France; | Epitovie chi-onologice rerum
hunçaricai-um j, Bude, 1796, 3 volumes
in-S".
• KAUFFMA1\N ( Marie-Anne-Ange-
LiCA-CATHEnixE), célèbrc dame qui a
cultivé la peinlure avec succès, naquit à
Coire, dans le pays des Grisons, en 1741.
Elle prit les premières leçons de son père
Jean-Josepli Kaufimann, artiste assez mé-
diocre, et peignit Icportrailayecun grand
talent, dès l'âge de 11 ans. Après sètre
perfectionnée à Rome où elle suivit un
cours de perspective , elle fit partie de la
société royale de peinture de Londres.
es. Klopslock et Gessner ont célébré
dans leurs écrits le mérite et les grâces de
celte aimable arliste. Elle passa à Lon-
dres, et eut l'honneur de faire le portrait
de Georges III et de toute la famille royale.
C'est dans cette ville que son amour-pro-
pre fut sensiblement blessé. Ayant refusé
de s'unir à un peintre anglais qui avait
recherché sa main , celui-ci en tira une in-
digne vengeance; il fit habiller somp-
tueusement un jeune homme d'une fi-
gure agréable , mais pris dans la dernière
classe du peuple. Ajjrès lui avoir appris
à jouer le rôle de baronet, il le fit intro-
duire sous le nom de Frédéric de Ilom,
chez Angelica, qui dupe de ses protesta-
lions, tomba dans le piège , lui donna .«on
cœur et l'épousa. Le peintre rebuté se
hâta bientôt de dévoiler sa fourberie ; la
jeune arliste en tomba malade de dia-
grin , mais, ayant fait ensuite ses récla-
mations , le peintre fut puni , et elle ob-
tint un acte de séparation le 10 février
17C8, moyennant une pension qu'elle fit
à son mari, dont les vices accélérèrent
bientôt la mort. Devenue veuve, elle se
maria à un artiste vénitien, nommé Zuc-
chi , se rendit avec lui à Rome , où elle
fixa sa demeure. Sa maison était fréquen-
tée par ce qu'il y avait de plus distingué
dans la ville ; aucun étranger de marque
n'y serait passé sans assister aux sociétés
du cardinal de Bernis et à celle» d'Ange-
lica Kauffinan (on l'appela toujours de
son nom de lille ). Les ouvrages que cette
dame peintre a laissés sont innombrables
et répandus dans toute l'Europe ; elle pei-
gnait également l'histoire et le portrait ,
mais elle excellait dans ce dernier genre.
La grâce, la ciiaieur et un coloris parfait,
sont les qualités |irincipales qui distin-
guent SOS ou\ra;5es, dont les principaux
sont :1a mort de Léonard de Finci: le
retour d'Jrminius vainqueur des lé-
gions de Varus ; la pompe funèbre par
laquelle Enée honore la dépouille de Pal-
las. Celle célèbre arliste était aussi cxcel
lente musicienne : à 20 ans elle avait été
sur le point de débuter sur un théâtre
comme cantatrice : elle s'est représentée
elle-même dans un tableau, placée entre
la musique el Va peinture, et adressant de
tendres adieux à la première. Elle mou-
rut à Rome le 5 novembre 1807. Angelica
mena toujours une vie régulière , et on
l'estima autant pour ses talens et ses
mœurs que pour la douceur de son ca-
ractère. Sa vie a été écrite par Gherardo
de' Rossi , Florence , 1810 , in-8°.
' RAUÎVITZ-RIETBEUG ( Venceslas-
prince de), ministre d'état, naquit en
Autriche en 1710 , et jouit pendant sa vie
d'une réputation à laquelle ses talens di-
plomatiques ne répondaient pas entière-
ment. Dès son enfance , il avait été des-
tiné à l'état ecclésiastique , mais la mort
de son frère aîné changea ces disposi-
tions. Sa naissance lui ouvrit l'entrée à la
cour de l'empereur Charles VI, qui le
nomma son chambellan , et l'employa en-
suite à quelques missions peu difficiles ,
mais dont il s'acquitta avec succès. En-
voyé ensuite par l'empereur au congrès
d'Aix-la-Chapelle, il signa le fameux trailô
de 1748 , qui rétablissait la paix en Eu-
rope. Bientôt après, il fut chargé d'une
négociation bien plus importante ; il ne
s'agissait rien moins que de détacher le
cabinet de Versailles des intérêts de la
Prusse , et de rendre alliée de l'Autriche
la France , qui avait fait la guerre la plus
cruelle à Marie-Thérèse lors de la succes-
sion au trône impérial de l'Allemagne.
Kaunitz , plus adroit courtisan qu'ha^
bile diplomate, connut aussitôt, dès son
arrivée à Versailles, les ressorts qu'il
fallait mettre en mouvement pour réussir
dans son projet. La marquise de Pompa-
dour s'attirait alors tous les hommages de
la cour de Louis XV , dominait l'esprit de
ce monarque el dirigeait par conséquent
les opérations des ministres. C'est à cette
favorite que Kauniti s'adressa principa-
lement. Une mise recherchée, quelques
agrémens d'esprit, des flatteries bien mé-
nagées, lui attirèrent la bienveillance de
la marquise , qui ne tarda pas à adopter
les vues du diplomate autrichien. En
même temps, Marie-Thérèse, fille de
Charles VI , ne dédaigna pas d'écrire à la
favorite des lettres très aimables ,' que
M™' de Pompadour montrait et citait avec
RAU
orgueil. Cette manœuvre rcussil complè-
tement ; et , après plus de deux siècles
(depuis Charles-Quint et François V)
d'une constante inimitié entre la France
et l'Autriche , la paix fut conclue entre
ces deux maisons. Louis XV , allié de
Frédéric, roi de Prusse, devînt son en-
nemi , et d'ancien ennemi de Marie-Thé-
rèse il devint son allié. Ce traité, au grand
élonnement de toute l'Europe , fut conclu
à Versailles dans le mois de mai 1750. La
destruction du grand édifice politique
élevé par le cardinal de Richelieu, fut
tout à l'avantage de l'Autriche, et la nou-
velle alliance mérita justement le nom
Vunio7i monstrueuse. On en lit honneur
à l'abbé de Bernis ( depuis cardinal ) ,
alors ministre d'état, qui ne dissimula
pas que ce traité deviendrait peut-être
funeste à la France. Il voulut se faire
écouter ; mais la favorite lui fit ôter le
portefeuille. Kaunitz se vit élevé à la di-
gnité de ministre, et en exerçales fonctions
sous Marie-Thérèse et sous Joseph IL II
accompagna ce prince , lors de son en-
trevue à Neustadt , en 1770, avec le roi
de Prusse. Le ministre avait reçu de l'im-
pératrice des instructions secrètes, qu'il
ne devait pas même communiquer à l'em-
pereur son fils. En parlant de celte en-
trevue, Frédéric ÎI dit dans ses Mémoi-
res : « M. de Kaunitz eut avec moi de
» longues conférences , dans lesquelles ,
» étalant avec emphase le système de sa
» cour , il le présenta comme un chef-
» d'œuvre de politique dont il était l'au-
» teur. » Mais Kaunitz avait affaire à un
prince aussi habile dans son cabinet qu'à
la tête de ses armées, et bien souvent sa
politique dut fléchir devant celle du roi
de Prusse. Dans la première de ces con-
férences, Frédéric écouta avec sang-froid
Je ministre d'Autriche , et rendit aussitôt
compte à Joseph II de son entretien avec
Kaunitz. Celui-ci, dans les entrevues sui-
vantes^, fit usage de toute son adresse
pour faire adopter ses projets ; mais Fré-
déric fut inébranlable, et la négociation
échoua. Il n'eut pas plus de succès dans
celles qui eurent lieu , en 1778 , sur la
succession de Bavière. Frédéric se refusa
à toutes les propositions de Kaunitz, et
pénétra sa duplicité. Ce prince le dit lui-
même dans ses Mémoires de la guerre de
1778 , et il ajoute encore : « L'impératrice
"Marie-Thérèse était mal secondée par
% son minjstre , le prince de Kaunitz, qui,
» par des vues assez communes aux cour-
» lisans, s'attachait plutôt à l'empereur,
7.
7 KAU
» dont la jeunesse ouvrait une perspec-
» tive plus brillante à la famille de ce mi-
» nislre , que l'âge avancé de l'impéra-
» trice.... La déclaration inattendue de la
» Russie en faveur de la Prusse fut un
» coup de foudre pour la cour de Vienne,
» Le prince de Kaunitz fut embarrassé,
» n'ayant rien prévu. » Cependant l'échec
qu'éprouva ce ministre dans ses négocia-
tions à l'égard de la Bavière , que l'Au-
triche aurait voulu réunir à ses vastes
états , ne diminua en rien son crédit au-
près de ses souverains, qui se virent con-
traints de signer la paix de Teschen , en
1778. Cette dernière défaite éclaira néan-
moins les cabinets de l'Europe sur les ta-
lens tant vantés de Kaunitz. Il avait ce-
pendant des qualités estimables, et dans
l'exercice de ses fonctions , il n'écoutait
ni la jalousie, ni la vengeance ; on cite
de lui , sous ce rapport , im trait qui lui
fait honneur. Un jour il proposa à l'im-
pératrice un feld-raaréchal pour être pré-
sident du conseil aulique de guerre....
«Mais cet homme, dit Marie Thérèse ,
» est votre ennemi. — Madame, reprit
» Kaunitz , il est l'ami de l'état , et c'est
» la seule chose qu'il faut prendre en con-
» sidéralion, » Il ne mérite pas les mêmes
éloges dans sa conduite postérieure. Après
la mort de Marie-Thérèse, en 1780, il
gouverna presque en maître. Joseph II
avait pour lui une déférence qui ressem-
blait au respect filial ; aussi il donnait
parfois le nom de père à son vieux mi-
nistre , qu'il visitait souvent , afin de ne
pas le déranger , tandis qu'il s'occupait
des affaires. Dans les fréquens voyages
que ce prince entreprit dans toute l'Eu-
rope , Kaunitz restait comme l'arbitre de
l'état, et il fut généralement accusé d'à'
voir été le principal auteur des innova-
tions que Joseph II voulut introduire
dans les églises de son empire , et notam-
ment dans les Pays-Bas. C'est donc à lui
qu'il faut reprocher les troubles qui eu-
rent lieu dans celte belle province , et qui
curent pour chefs Van-Espcn et Vander-
Noot, défenseurs des droits de leur reli-
gion et de leur pays. Ce furent aussi ces
dangereuses innovations qui amenèrent
le pontife Pie VI à Vienne , où il ne fut
pas reçu ainsi qu'il devait l'être , comme
chef de l'Eglise, ni même comme prince
temporel. Les diverses conférences que
le pape eut avec Joseph II ne produisant
aucun résultat favorable , et Pie VI n'ayant
pour but que le bien de l'Eglise, S. S.
oublia pour un moment sa dignité , et alla
KAY
98
KEA
en personne faire une vislle à Kaunilz, ,
qui n'avait pas cru devoir le prévenir.
Quand le pape entra dans le cabinet de
ce minisire , celui-ci daigna à peine se
lever de son siôge, et, lorsque le pontife
se retira, il n'eut pas même l'allention de
l'accompagner. Pie VI eut encore à souf-
frir d'autres mortifications de la part de
ce favori orgueilleux; il quitta donc
Vienne , navré de douleur et sans avoir
rien pu obtenir dans ses réclamations ,
objet d'un si long voyage. On peut lire ,
sous ce rapport , X Histoire civile j politi-
que et religieuse de Pie VI. Kaunitz fut
du petit nombre des ministres qui, pen-
dant une longue carrière politique , ne
subirent jamais de disgrâce. L'affection
que lui portèrent les divers souverains
qu'il servit, semblait être comme héré-
«litaire , et passa successivement de
Ciiarles VI à Marie-Thérèse, de Fran-
çois I" à Joseph II , à son frère , Léo-
pold II, et enfm au fils et successeur de
cet empereur, François II, actuellement
régnant. Chacun de ces princes le combla
d'honneurs et de richesses. Kaunitz par-
vint à l'âge de quatre-vingt-quatre ans ,
sans avoir éprouvé de maladie sérieuse.
A cette époque, il voulut se guérir d'un
ihume très léger en apparence , anais qui
devint bientôt une infirmité grave , et le
conduisit au tombeau, le 24 juin 1794.
Dès le commencement de la révolution
française, il se déclara ouvertement contre
elle.
KAUT , fameux hérétique anabaptiste ,
qui s'éleva à Worms l'an 1550 , et qui
pensa plonger le palatinat dans de nou-
velles guerres civiles. Il prêcha avec le
même esprit que Muncer. Il annonça
même qu'il fallait exterminer les princes,
et qu'il avait reçu pour cela l'inspiration
infaillible ou Très-Haut, Tel était le fruit
du fanatisme, qui fit éclore dans ce
siècle une multitude de sectes conjurées
contre l'Eglise catholique, et qui en même
temps qu'il attaquait l'ancienne croyance,
ébranlait les fondemens de l'ordre civil.
On tâcha vainement de gagner ce fanati-
que par la douceur , et on ménagea vai-
nement ses turbulens disciples. La prison
seule et les supplices délivrèrent le Pala-
tinat d'une peste qui commençait à l'in-
fecter : tant il est vrai que la rigueur
bien dirigée ne sert pas à propager les
sectes ( comme de faux politiques l'ont
avancé ) , mais qu'elle les étouffe dans
leur berceau.
li.lYE. Voyez CAIUS.
KAYOTIMARATS, premier roi de
Perse. Il établit cet empire vers l'an 890
avant J.-C, malgré la résistance que lui
opposèrent les Arabes et les Tartares,
peuples sauvages voisins , et les habitant
de ces contrées. Il choisit l'Alzcrbaijan
pour sa résidence, et on lui attribue la
fondation d'istbakhar ou Persépolis On
dit que Kayoumarats , chef d'un peuple
qu'il avait civilisé , était ce roi d'Elam
dont parle l'Ecriture sainte. Il fonda la
dynastie de Pychdàdyens. Cependant M.
Langlès et d'autres savans croient que
celle des Abadyens, qui régnait sur la
Perse et sur l'Inde , est la première , el
que les Pychdàdyens ne s'établirent que
par le résultat d'une scission de pouvoir
avec celle-ci.
* KAZA?l^YNY ( Zacharia Ben- Mo-
hammed ben-Mahmoud ), naturaliste et
géographe arabe , a laissé plusieurs ou-
vrages très étendus qui lui ont mérité le
surnom de Pline des Orientaux. Le plus
important est : | Y Jdjaïb-ûl-Makhloucât
wa Gharaïb-al-Mawd ^ dont plusieurs
fragmens ont été publiés soit en arabe ,
soit dans les langues modernes de l'Eu-
rope , entre autres en allemand ( ce qui
dans ce livre concerne les constellations),
par M. Ideler, Berlin, 1809, in-8°; par
M. Bochart ( pour ce qui regarde les élé-
mcns, le mouvement de la terre, les mé-
téores, etc.), dans son Hierozoïcon; ces
derniers fragmens ont été réimprimés
par Jahn dans sa Chrestomathie arabe;
M. Wahl , en a aussi donné dans sa Neuâ'
j7-abische anthologie ; ainsi que le che-
valier Ouseley , dans ses Oriental, collée-
tions; M. de Chtzy en a traduit la des-
cription des Trois règnes de la nature^ en
y ajoutant des notes. Voyez le troisième
volume de la Chrestomathie arabe de
M. de Sacy. L'autre ouvrage de Kazwyny
a pour titre ] \ Jthar âl-Bilâdwa Akhbar
al-lbad ou Description de l'univers et
Histoire de ses habitans : c'est un très
long traité de géographie précédé de prfn
légomènes. Ce savant arabe est mort vers
l'an 682 de l'hégire (1283 de notre ère),
après avoir été khadi de Wacet et de Hil-
làh, dans llrakArabi. — Hamdo'llau ben
Abybekr ben Hamdo'llah Almostaoufy al
KAZWYNY mort en l'an dôoO de notre
ère , a aussi écrit en persan un traité de
géographie et d'histoire naturelle qui a
pour titre : Nozhato'lcoloub ; le savant
I^nglès en avait entrepris la traduction.
KEATE ( Georges ), littérateur an-
glais, issu d'une bonne famille, naquit en
KEA
99
KET
1729 ou i7ôa. Il fil ses études au coîlé{;e
de Kingston , et voyagea ensuite en Eu-
rope. Se trouvant à Genève , il connut
Voltaire, auquel il communiqua quel-
ques-uns de ses écrits. De retour en An-
gleterre , il suivit les cours de jurispru-
dence à Cambridge , et se livra quelque
temps au barreau ; mais , n'y -obtenant
pas de grands succès, il le quitta pour
s'adonner à l'étude des antiquités etàla lit-
térature. Keate, jouissant d'une honnête
fortune, put, sans se mettre aux gages
des libraires, travailler avec tranquillité,
et donner ainsi à ses ouvrages cette élé-
gance et ce fini qui en forment un des
principaux ornemens. Il en avait déjà
écrit plusieurs , tandis qu'il voyageait , et
ce fut à Rome qu'il composa sa Rome an-
cienne et moderne , qui commença à éta-
blir sa réputation. Ses talens le firent re-
cevoir membre de la société royale de
Londres et de celle des antiquaires ; il
occupait la place d'assesseur au collège
de droit du Temple , à Londres , où il
mourut en 1797, âgé de soixante-sept
ans. On a de lui : 1 Rome ancienne et mo-
derne , poème, Londres , 1760 ; | Tableau
abrégé de l'histoire ancienne du gouver-
nement actuel et des lois de la république
de Genève j 17G1 , in-8°. L'auteur dédia
cet ouvrage à Voltaire : ce philosox^he se
proposait de le traduire en français, mais
il abandonna ce projet , piqué sans doute
de ce que Keate, dans l'ouvrage suivant,
en parlant de Voltaire lui-même , fit un
pompeux éloge d'un autre auteur. | Fer-
ney ^ épître à M. de Voltaire^ 1769.
Keate , dans celte épître , n'épargne pas
les louanges au philosophe de Ferney;
mais , pour mieux lui plaire , il devait
s'en tenir là, et ne point faire le panégy-
rique de Shakespeare. L'amour- propre,
d'ailleurs très susceptible , de l'auteur de
Mahomet^ en fut vivement blessé. Le
maire elles représentans de Stratford sur
l'Avon , pour se montrer reconnaissans
de l'éloge que Keate avait fait de leur il-
lustre compatriote, lui donnèrent une
écritoire montée en argent, et faite du
bois du fameux mûrier planté par Sha-
kespeare. I Les Alpes, poème, 1765. C'est
le meilleur ouvrage de l'auteur. | L'ab-
baye de Netley , 1764; deuxième édition ,
augmentée et corrigée , 1769 ; | Le Tom-
beau dans l'Ârcadie , poème dramati-
que , 1775 ; I Esquisses d'après nature ,
dessinées et coloriées dans un voyage à
Margatej. 1779, 2 vol. in-12. C'est une
heureuse imitation du Voyage sentimen-
tal de Sterne, et qui eut un grand succès ;
il a été traduit en français, 2 vol. in-8°.
I Vllelvétiade, 1780. Ce n'est que le fiag-
ment d'un poème en dix chants sur la ré-
volution suisse, et que, d'après l'avis de
Voltaire , auquel il avait communiqué
son manuscrit , il ne piiblia pas en en-
tier ; I Relation des îles Pelew ; composée
sur les journaux et les communications
du capitaine Henry Vilson , et de plu-
sieurs de ses officiers , qui en août 1785 ,
y firent naufrage , 1788 , in-4**. Keate en-
treprit cet ouvrage , afin d'en distribuer
le produit de la vente entre les mal-
heureux naufragés. Sa relation est fort
bien écrite et pleine d'intérêt. Elle a été
traduite en français. Perceval Hockin
ayant obtenu de nouveaux renseigne-
mens du capitaine Wilson , donna un
Supplément à la relation originale , Lon-
dres , 1804 , ïi\-k°, fig. Keate a traduit en
anglais la Sémiramis de Voltaire. Il publia
un Recueil de ses œuvres poétiques, Lon-
dres, 1781, 2 vol. in-8". Il passe pour
être un des meilleurs poètes et écrivains
anglais du 19* siècle.
REATING ( Jeffery ), docteur et prê-
tre catJiolique irlandais , natif de Tippe-
rary, moit en 1650, est auteur d'une JF/is-
toire des j^octes de sa nation , traduite de
l'irlandais en anglais , imprimée magni-
fiquement à Londres, en i758,in-fol,
avec les généalogies des principales fa-
milles d'Irlande, lia aussi laissé plusieurs
ouvrages manuscrits parmi lesquels on
distingue Simon_. poème burlesque, dont
son domestique était le héros.
RECRERMAI^N ( BAUTHÉtEMi ), pro-
fesseur d'hébreu à Heidelberg, et de phi-
losophie à Dantzick , sa pairie , mourut
dans cette ville en 1609, à 56 ans. On a
de lui plusieurs ouvrages , recueillis à
Genève, 1614 , 2 vol. in-fol., qui ne sont
que des compilations. Les plus connus
sont deux Traités sur la rhétorique ; le
premier publié d'abord en 1600, sous
le titre de Rheto7'icfV ecclesiasticœ libri
duo, et le deuxième en 1606, sous le titre
de Systema rhetoricœ. Ces deux produc-
tions sont assez méthodiques.
RlîïLL (Jeax), professeur d'astronomie
à Oxford, membre de la société royale da
Londres, naquit en 1671 à Edimbourg,
en Ecosse , et mourut en 1721 , à 50 ans.
C'était un philosophe modéré, ami de la
retraite et de la paix. Il fut, dit-on, le
premier qui enseigna les élémens de New-
ton , à Oxford , où il fut nommé profes-
seur suppléant de philosophie naturelle
KEI
100
REI
en 1700 et professeur titulaire d'astrono-
mie en 1710. Il eut dans cette université
une discussion très vive avec Leibnilz
qui contestait à Newton l'honneur d'a-
voir inventé la méthode des fluxions.
Avant de se livrer à renseignement, Keill
avait publié (1698) V Examen de la théo-
rie de la Terre de Burnett , et il y joi-
jnit quelques remarques sur la JSou-
velle théorie de la Terre de V»hislon.
Cet habile mathématicien laissa plusieurs
ouvrages d'astronomie, de pliysiquc cl
de médecine, tous également estimes des
connaisseurs. Le plus connu est son Jn-
troduction à la véritable physique, en 14
leçons, 1700, et en 16 leçons, 1705; en
1718, parut son Introduction à la véri-
table astronomie^ qui devint classique en
France , lorsque la philosophie newto-
nlenne commença à s'y établir. M. le
Monnier le fils, célèbre astronome, l'a
traduite en français , Paris , 17ii6, in-4".
Keill est un des premiers qui aient réfuté
les visions de Hartsocker et d'autres as-
tronomes , touchant les villes , les forêts
et les mers de la lune ; il assure que toutes
ces imaginations s'évanouissent au moyen
d'un bon télescope , et <[ue les taches de
la lune sont l'effet des inégalités et des
cavernosités de cette planète. Cet auteur
était aussi religieux que savant; on lit,
dans la préface de l'ouvrage que nous
avons cité, le passage suivant : « De
» toutes les sciences que nous acquérons
» par les lumières de la nature , il n'y en
» a aucune qui nous conduise plus stire-
» ment à la connaissance d'un être sou-
f verain et tout parfait. » — Jacques
KEILL, son frère, excellent médecin, né
en 1G73, mort à Northampton en 1719, à
46 ans , est auteur de plusieurs écrits sur
son art, qui ont été recherchés, entre
autres du Tableau de la sécrétion ani-
male^ etc., Londres, 1708 , réimprimé en
1717 et traduit en lathi. Foyez JURIN.
KEITII (Geokges ), fameux quaker ou
trembleur, né en Ecosse d'une famille
obscure , embrassa de bonne heure l'état
ecclésiastique, fut presbytérien, puis
quaker, et se distingua par la bizarrerie de
£es opinions. Il niait l'éternité des peines
de l'enfer, enseignait la métempsycose,
et plusieurs autres idées extravagantes.
Celle des deux Christs ( l'un terrestre et
corporel, fils de Marie, né dans le temps;
l'autre spirituel, céleste et éternel, rési-
dant dans tous les hommes, depuis la
constitution du monde ) lui causa de lon-
gues et fàcheuises affaires. Il parcourut
l'Allemagne, la Hollande, l'Amérique,
semant partout ses rêveries, qu'il mêlait
avec les vérités les plus augustes. Cet in-
sensé fut plusieurs fois condamné sans
vouloir se soumettre. De retour en Eu-
rope , en 1694 , il pai ut au spiode géné-
ral de la secte des trembleurs, tenu à
Londres, la même année , et y fut con-
damné malgré son enthousiasme et son
babil. Quelque temps après, il rentra
dans l'église anglicane , et publia un li-
vre intitulé : Examen de l'état des qua-
kers, Londres, 1702, in-8°, pour prou-
ver son orthodoxie. Il mourut dans l'ob-
scurité. ( "Voyez les Jeta eruditontm .
année 1703, p. 590; 'Walch , Bibliolhcca
iheolog. sel. t. 2 ; le père Catrou, Histoire
du quakérisme. )
REITII ( Jacques ) , feld-maréchal des
armées du roi de Prusse, était fils cadet
de George Keilh , comte maréchal d'E-
cosse, et de Marie Drummond, fiUe du
lord Perth, grand -chancelier d'Ecosse
sous le règne de JaccfUes II. Il naquit t n
1696, à Fréteressa, dans le shérifsdon de
Kincardine. Ayant pris parti avec son
frère aîné pour le prétendant, elles entre-
prises de ce prince n'ayant pas été heu-
reuses en 1715, il passa avec ce frère en Es-
pagne. Il y fut ofticicr dans les brigades
irlandaises, pendant dix ans. Il alla en-
suite en Moscovie, où la clarine le nomma
brigadier général , e-t peu de temps après
lieutenant-général. Il signala son courage
dans toutes les batailles qui se donnèrent
entre les Turcs et les Russes sous le règne
de cette princesse , et à la prise d'Ocza-
kovv^, il fut le premier à la brèche, et
fut blessé au talon. Dans la guerre entre
les Russes et les Suédois, il servit en
Finlande en qualité de lieutenant-géné-
ral. Ce fut lui qui décida le gain de la
bataille de Wilinanstrand, et qui chassa
les Suédois des îles d'Aland, dans la mer
Baltique. A la paix conclue à Abo en
1745 , il fut envoyé par l'impératrice am-
bassadeur à la cour de Stockholm, où
il se distingua par sa magnificence. De
retour à Pélersbourg, l'impératrice l'ho*
nora du bâton de maréchal ; mais ses ap-
poiulemens étant trop modiques, il se
rendit auprès du roi de Prusse qui lui
assura une forte pension, et le mit dans
sa confiance la plus intime. Il parcourut
avec lui la plus grande partie de l'Allo-
magne , de la Pologne et de la Hongrie.
La guerre s'étant déclaiée eri 1736, Keiih
entra en Saxe en qualité de feld-maré-
chal de l'armée prussienne, Ce fut lui qui
KEL
JOJ
KEL
assura la belle relraile de cette année,
après la levée du siège d'Olmutz,, en 1758.
Il fut tué celle même année , lorsqtie le
comte de Daun surprit le camp des Prus-
siens à Hockirchen. Le général Keilh
était homme de tête et homme de main ;
il avait médité beaucoup sur l'art mili-
taire.— Son frère Georges KEITH, comte-
maréchal d'Ecosse , nommé communé-
ment Milor^ Maréchal, suivit le parti du
prétendant, qu'il quitta ensuite. Après
avoir séjourné quelque temps en Espa-
gne , à Avignon , à Venise , en Suisse , il
mourut en Prusse en 1778. Il ne serait
guère connu sans un Eloge que d'Alem-
bert s'avisa d'en faire, on ne sait pour-
quoi , en 1779 ; pièce remplie d'anachro-
nismes , d'assertions fausses , de propos
injurieux à de grands princes, et de toutes
les petites gentillesses philosophiques.
Voyez X Année littéraire. 1779, n°' 12
et 17.
* KELGREN (Henri ), philosophe , lit-
térateur et poète suédois , né en Sca-
nie , le 1" décembre 1751, fit d'excellentes
études à l'université d'Abo en Finlande,
obtint le titre de maître-ès-arts, et donna
pendant quelque temps des leçons publi-
ques dans cette ville. Il se rendit à Stock-
holm , et y fut chargé de l'éducation des
deux fils du feld - maréchal comte de
Meyerfeldt. Mais poussé par son goût pour
la poésie, il s'occupabientôt exclusivement
de littérature : alors le besoisi se fit sentir,
et il se vit en butte aux attaques de la fouie
des mauvais poètes. Enfin il trouva un
protecteur dans le prince Gustave III ,
qui le chargea de corriger ses produc-
tions et de mettre en vers les opéras dont
il avait esquissé le plan : ce prince l'en
récompensa en le nommant un des dix-
huit premiers membres de l'académie
suédoise , instituée à l'instar de l'acadé-
mie française en 1786. Kelgren s'occupa
aussi avec succès d'histoire et de pliiloso-
phie, et, lorsqu'il mourut le 12 avril
1793, il mérita celte inscription que ses
amis placèrent sur sa tombe : Poetie. phi-
losopha. civi. aiyiico lugentes amici. Le
recueil de ses OEuvrcs a été fait peu de
temps après sa mort, en k vol. avec une
Notice sur sa vie par Rosenstein : elles
se composent principalement, d'Odes.
d'Epilres . de Tragédies lyriques ^ parmi
lesquelles on remarque Christine et Gus-
tave-irasa. des Traductions d'Horace.
de Tibulle . de Voltaire . des Essais de
philosophie morale, etc. Ses poésies se
distinguent par l'élévation , la grâce et la
finesse : ses ouvrages en prose, par nn
style clair et précis , ei. par des idées
profondes ou des vérités utiles. Kelgren
rédigea pendant quelque tc;mps la partie-
httéraire d'un journal intitulé Stockholm
Posten.
KELLER ( .Tacqdes), Cellarius. jé-
suite allemand , né à Seckingen , dans le
diocèse de Constance, en 1508, mort a
Munich, en 1651 , professa avec distinc-
tion les belles-lettres , la philosophie, la
théologie, devint recteur du collège de
Ralisbonne , puis de celui de Munich , et
fut long-temps confesseur du prince frère
de l'électeur et de la princesse de Ba-
vière ; il se signala dans les conféiences
de controverse, et disputa publiquement
avec Jacques Hailbrunner, le plus célè-
bre ministre du duc de Neubourg. On a
de lui divers ouvrages contre les luthé-
riens et contre les puissances qui fai-
saient, en leur faveur, la guerre aux
princes catholiques d'Allemagne. Il s'y
déguise souvent sous les noms de Jacob
Sylvanus. Fabius Hercynianus. par allu-
sion au lieu de sa naissance qui est dans
laForét-Noire, dH Aurimontius (traduction
du mot Goldberg , nom allemand de sa
mère), etc. Son ouvrage contre la France.
\\\\x\\\\c, Mysteria politica.iîiVù , in-ii", fut
brûlé par sentence du Châtelet , censuré
en Sorbonne, et condamné parle clergé
de France. Keller n'avait pu compren-
dre , sans recourir aux mystères de la
politique, pourquoi la France prenait
parti pour les hérétiques en Allemagne,
tandis qu'elle les l>rûlait chez elle ; cela
était effectivement peu facile à compren-
dre en bonne logique ; et , ce que ni le
Châtelet , ni la Sox'bonne , ni le clergé
n'ont expliqué, le cardinal de Richelieu
eût pu le faire ; mais il no l'eût fait ,
comme Keller , que par les viystèi'es de
la politique. On a reproché à ce dernier
quelques maximes contraires à l'indépen-
dance des rois ; et c'est ce qui a fait con-
damner ses ouvrages au feu par le par-
lement de Paris. Foyez JOUVENCY, SAN-
TARKL. Voyex aussi la Bibliothèque du
père Sotwell et le tom. 1" p. 202 du Die
tionnaire des livres condamnés au feu,
de Peignot. Un des écrits les plus curieux
de Keller a pour titre : Tyrannicidium seii
sciturn catholicum de tyranni inteme-
cîo«<?, Munich, 1611, in-4°, où l'auteur s'al-
tache à laver les jésuites du reproche d'a-
voir enseigné le régicide.
KELLER ( Jeas-Baltiiasar), né à Zu-
rich en 1638, excellent ouvrier darxs l'arl
0,
KEL
102
KEL
de foudre en Lronzc , jeta en fonte la sta-
tue équestre de Louis Xiy^ que l'on voyait
a Paris sur la place de Louis le Grand.
Celte statue, haute de 20 pieds, et d'un
seul jet, fui terminée le 1" décembre
1 G92.il fut fait inspecteur de la fonderie
de l'arsenal , et mourut en 1702. — Jea\-
Jacqces KELLER, son frère, était aussi
1res habile dans le même art, et mourut
commissaire d'artillerie du roi à Colnrar
en 1700 , âgé de 65 ans. Plusieurs des sta-
tues en bronze qui décorent les jardins de
Versailles et des Tuileries sont l'ouvrage
do ces deux artistes.
• KELLERMANN ( Fp.ançois-Chris-
tophe), pair et maréchal de France, duc
de Valmy, grand-cordon de la légiun-
d'honneur,grand'croix des ordres de Saint-
Louis , de l'Aigle d'or de Wurtemberg , de
la Fidélité de Bade , naquit le 30 mai 1755
à Strasbourg ( Bas-Rhin ). Il entra au
service en 4752, et obtint dans la guerre
de sept ans le grade de capitaine. Après
avoir été chargé de différentes missions
en Pologne et en Tartarie, en 1765 et
4766 , il fut du nombre des officiers en-
voyés par le roi en Pologne , en 1771, pour
seconder la confédération de Bar, et il se
signala au combat de Cracovie. Avant la
lin de 1785, il était parvenu au grade de
maréchal-de-camp. S'étant déclaré en fa-
veur de la révolution, il fut investi, en
1791 , du commandement de l'Alsace , dé-
couvrit les intelligences que le prince de
Condé et Mirabeau entretenaient sur cette
frontière, pourvut à la défense des places
de cette province et permit aux soldats de
fréquenter les sociétés populaires. La ville
de Landau lui décerna, en reconnaissance
de ses efforts patriotiques , une couronne
civique et des remercimens solennels.
Kellermann, nommé général en chef des
troupes qui se rassemblaient sur la Sarre,
au camp de Neukirck, le fut ensuite de
l'armée du centie, en remplacement de
Luckner, nommé généralissime. Le 19
«epterabre 1792 , il opéra à la tête de vingt-
deux raille hommes sa jonction avec Du-
njouriez, et ses manœuvres à la bataille
de Valmy (20 septembre), où il resta
vainqueur, méritèrent les applaudisse-
raens de ses ennemis mêmes. Après cette
victoire la république fut proclamée. Kel-
lermann , employé ensuite sous Cusline
à l'armée de la Moselle , fut dénoncé par
lui pour ne s'être point emparé de Trêves
et de Mayence. Il répondit , le 6 novembre
à la Convention « que cette dénonciation
» ne pouvait être que l'effet de la folie ou
i> du vin. » Il lui fallut néanmoins com-
paraître le 14 novembre 1792 à la barre
de l'assemblée où il donna des protesta-
tions de dévouement. Une seconde dé-
nonciation de Custine n'eut pas plus do
succès que la première. Kellermann fut
nommé, le 21 mai 1793, au commande-
ment en chef de l'armée des Alpes et d'I-
talie , délivra, en passant à Lyon, deux
conventionnels qui étaient tardés à vue
et dont les jours étaient menacés, et se
rendit à JNice pour se concerter avec le
général Biron , qui commandait l'armée
d'Italie. Il fut obligé, sur la réquisition dea
commissaires de la Convention à Lyon ,
d'envoyer conîre celte ville une partie
assez, considérable de son armée, et il
publia une proclamation pour faire ou-
vrir les portes aux représentans. Amar,
qui l'accusait de trahison , ayant demandé
le 27 août 1795 , qu'on fit tomber la lèle
du général , celui-ci fui défendu par Du-
bois-Crancé , qui ne le reconnaissait cou-
pable que de mollesse. Kelltrinann vint
lui-même sous les murs de Lyon ; il savait
que les Lyonnais étaient encouragés dans
leur résistance par l'espoir que les Pié-
montais forceraient la ligne du Mont-Blanc
et viendraient les secourir. Il écrivit en
conséquence à Paris que c'était à la fron-
tière que Lyon devait être prise. Mais ce
ne fut que plus tard que l'assemblée lui
permit de quitter momentanément la
ville assiégée pour aller au-devant de
l'armée piémontaise , à qui la supériorité
du nombre venait d'assurer quelques
avantages. Peu de temps après Keller-
man , à la tète de huit mille hommes,
chassa l'ennemi de la Tarcntaise et de la
Maurienne , et lui enleva dix-sept pièces
de canon et presque tous ses équipages.
La ville de Lyon s'était rendue , et Kel-
lermann avait reçu le 18 octobre l'ordre
d'aller prendre le commandement du
siège de Toulon, lorsque tout à coup il
fut destitué , arrêté et conduit à Paria.
Fouquier - Tainville, à qui l'on avait
transmis plusieurs fois l'ordre de le
remettre en jugement , répondait qu'il
ne trouvait pas même l'apparence d'une
base d'accusation. La révolution du 9
thermidor étant survenue, Kellermann
fut enlin acquitté , et , après treize mois de
détention, il fut nommé de nouveau géné-
ral en chef des armées des Alpes et d'Italie.
Il se livra un gi and nombre de combats ;
mais le général français se borna à/ dé-
fendre son terrain contre l'ennemi (!onl
les forces étaient bien supérieures aux
KEL
103
KEM
siennes. Kellermann qui voulait entrer
dans l'intérieur de l'Italie , était parvenu
enfin à obtenir des renforts du comité du
salut public; mais l'exécution de sou pro-
jet fut confiée à Schérer. Il contribua en-
core à la prospérité des armes de Bona-
parte , fut chargé en 1797 d'organiser la
gendarmerie , et fut nommé membre du
bureau militaire établi près du Directoire.
Kellermann prit peu de part aux événe-
mens du 18 brumaire an 8 ( 9 novembre
1799 ). Il entra au sénat conservateur,
dont il devint président , le 2 août 1801 ,
fut nommé grand -aigle de la légion
d'honneur, le 13 pluviôse an 13 ( 2 fé-
vrier 18G5), puis maréchal de France,
et duc de Valmy. En 1803, il alla organi-
ser les gardes nationales en Alsace , fut
aussi chargé de l'organisation des régi-
mens provisoires à Mayence , et obtint,
en 1808 , le commandement en chef de
l'armée de réserve d'Espagne , puis celui
du corps d'observation de l'Elbe. Après la
bataille de Hanau (50 et 51 octobre 1815 ),
il prit le commîMidcment de toutes les ré-
serves à Metz. Il vota, le l*^' avril 1814 ,
la déchéance de Napoléon , et la création
d'un gouvernement provisoire, et fut
nommé la même année , commissaire du
roi dans la troisième division militaire,
et pair de France. Resté sans emploi du-
rant les Cent-jours , il rentra ensuite à la
chambre des pairs où il vota avec l'op-
position ; son fils y a hérité de sou titre. Le
maréchal Kellermann est mort le 12 si'p-
tembre 1820 , à l'âge de 85 ans , après
avoir demandé par son testament que son
coeur fût déposé dans les champs de A'al-
uiy : son fils a rempli ce vœu. M. Mahul
a consacré à ce général une notice dans
h; premier volume de sou Annuaire né-
crologique.
* ïiELLY ( Joiix ), savant ecclésiastique
anglais, né en 1730 à Douglas, capitale
de l'ile de Man , devint successivement
gouverneur du marquis de Huntley , vi-
caire d'Ardleigh et recteur de Copford
près de Colchester. Il s'adonna de bonne
heure à l'étude de la langue de son pays
qui est un dialecte du celtique. A l'âge de
17 ans , il composa une grammaire et un
dictionnaire de cet idiome particulier, et
surveilla ensuite la traduction dans ce
dialecte de différens livres religieux , en-
traulres de Y ancien Testament. Il publia
en 1805, son ouvrage inlilulc; Grammaire
pratique de l'ancienne langue y alli que ou
de Vile de 3fan, vulgairement appelée le
Manks, et il faisait inipriiner chez les Ki-
cliols un Dictionnaire triglotte des langues
erse , irlandaise et manks . quand un in-
cendie qui dévora la maison de ces im-
primeurs détruisit les résultats de ses tra-
vaux. Kelly mourut du typhus , en 1809,
à l'âge d'environ 60 ans.
' REMBLE ( Jean-Philippe ) acteur cé-
lèbre, né en 1757, à Prescot, dans le
Lancashirc, débuta à Tàge de 10 ans par
le rôle du duc d'York de la tragédie de
^Charles I'^^ , sur le théâtre de Worcester
dont son père était le directeur. Celui-ci
voulant détourner son fils de la carrière
dramatique, l'envoya dans un séminaire
catholique du comté de Slafford. Le jeune
Kemble vint ensuite en France, à l'âge
de 15 ans, et étudia pendant 5 ans au
collège de Douai , où ïalma fut , dit-on ;
son condisciple. 11 y termina son éduca-
tion, et il était de retour en Angleterre
avant sa 20' année. Après avoir occupé
une place dans un bureau de poste , il
reparut au théâtre dans le rôle de Théo-
dose , de la pièce intitulée la Force de
l'amour, dans celui de Bajazet et dans
d'autres encore : il joua à Sheffield, à
Neuwcastle et à Edimbourg. Il prit même,
avec l'acteur Tate Wilkinson , la direction
du théâtre de cette dernière ville, et dé-
buta en 1782 sur celui de Dublin dans le
rôle de Hamlet. Les succès toujours crois-
sant qu'il obtint dans celte pièce, qui fut
toute sa vie son triomphe, le détermi-
nèrent à venir l'année suivante débuter
sur le théâtre de Drury-Lane à Londres,
dans le même personnage : il y obtint un
succès éclatant. En 1788, Kemble fut chargé
de la direction de ce théâtre dans lequel il
s'empressa d'établir le système des déco-
rations et des costumes conformes à la vé-
rité historique. Il continua à jouer avec
un talent extraordinaire dans plusieurs
pièces , entre autres dans Macbeth où il
remplissait le rôle de Malcolm : il relit
plusieurs pièces anciennes et enrichit la
scène anglaise de quelques chefs-d'œuvre
étrangers. En 1802 il vint sur le continent
pour rétablir sa santé chancelante, visila
iMadrid et Paris, se lia d'amitié avec
Talaia, et perfectionna son talent à l'école
de ce grand acteur. De retour en Angle-
terre, il prit avec son frère la direc-
tion du théâtre de Covent-Garden dont il
était devenu propriétaire ; il y parut dans
de nouveaux rôles et fut couvert d'applau-»
dissemens mérités. A l'époque de l'ouver-
ture du nouveau théâtre de Covent-Gar-
den il encourut pendant quelque temps
la disgrâce du public; mais il rccou\ra
KEM
104
KEM
Lienlôt sa faveur et il en jouit jus(ru'au
moment où il prit sa relraile ( 1817 ).
Kemble mourut à Lausanne en 1823. Ses
principaux rôles étaient Caton ^ Bi-utus ,
Coriolaris Macbeth. Richard III, le roi
Jean^ le roi Lear, Pierre ( clans la Roue
de la fortune), et snrioui Hamlet dans le-
quel personne ne l'a surpassé. KeniLle a
laissé plusieiirs ouvrages dramatiques :
nous citerons le Point d'honneur, comé-
die , 1800 , in-8° ; le Vagabond, histoire
dramatique, 1808, in-8°; Intrigue eU
contre-intrigue, farce , 1808 , in-S"; et des
Essais sur Macbeth et Richard III. 1817,
in-8" Voyex yinnualbiography,{%^U..\o\.
in-8". On a publié : Memoirs ofthe life of
J. Ph. Kemble. Londres, 1825, 2 vol. in-8°.
KEMIVITIUS. Voyez CHEMNITZ.
* KEMPELEN (Wolfgaxg, baron de ),
fameux mécanicien hongrois , né à Près-
bourg le 25 janvier 1754, se livra dès
sa jeunesse à l'étude des sciences, et,
s'occupant avec le plus grand succès de
la mécanique , construisit des machines
très ingénieuses. Il fit voir en 1769 un au-
tomate qui jouait aux échecs et exécutait
les combinaisons de ce jeu de manière à
gagner un adversaire de force médiocre.
En 1784 Kempelen l'amena à Paris où il
excita la curiosité publique. L'automate
était assis devant un bureau monté sur
quatre roulettes et contenant un cylindre
et des rouages ; il levait le bras avec len-
teur, l'avançait de même et enlevait avec
dextérité la pièce que le jeu indiquait de
prendre pour la transporter sur la case où
elle devait être; lorsqu'une faute était
commise par l'adversaire, il la faisait con-
naître par un mouvement de tête ; la par-
tie se continuait ainsi jusqu'à la fin. Cette
figure répondait aussi aux diverses ques-
tions qu'on lui faisait , en indiquant les
lettres propres à faire sa réponse. Les ob-
servateurs cherchèrent le secret d'un pa-
reil mécanisme. Il y en eut qui suppo-
sèrent que c'était un nain caché qui diri-
geait tous les mouvemens; mais cette
conjecture se trouva fausse. L. Dutems
s'assura de l'impossibilité de cacher dans
aucune des parties de la machine , même
l'enfant le plus petit. Il est bon de re-
marquer que Kempelen en dirigeait,
de son propre aveu, tous les mouve-
mens , quoiqu'il se tint à six pieds de la
machine; maison ignore encore aujour-
d'hui par quel moyen il communiquait sa
volonté à son ingénieuse mécanique. Du-
tems et Ch. Golllieb de Windisch ont
publié plusieurs lettres sur \c joueur d'é-
checs automate ; les premières ont été in-
sérées dans le Mercure de France du
mois de juillet 1770 ; les autres ont été
traduites en français, et publiées dans les
Jmiales encyclopédiques de 1817, tom. 5.
Kempelen avait aussi une autre ligure
qui au moyen d'un soufflet et d'une tra-
chée-artère, articulait quelques mots et
même de petites phrases : il donna lui-
même la description de cette mécanique
sous ce titre : Le mécanisme de la parole,
suivi de la description d'une machine
parlante, et enrichie de 27 planches.
Vienne , 1791 , grand iii-8". Cethabile mé-
canicien composa plusieurs autres chefs-
d'œuvre parmi lesquels nous remarquons
sa presse à l'usage des aveugles. Kempe-
len était aussi un littérateur distingué ;
on a de lui plusieurs poésies allemandes
et quelques pièces de théâtre parmi les-
quelles on cite Persée et Andromède,
drame, et V Inconnu bienfaisant , comé-
die. Le baron de Kempelen était con-
seiller de finance de l^empereur d'Au-
triche, directeur des salines de Hongrie,
et référendaire de la chancellerie hon-
groise à Vienne. H est mort dans cette
dernière ville le 22 ( ou le 26) mars 1806.
* KEMPER (.Iea\-Melchior ), juriscon-
sulte , né en 1776 à Amsterdam , fut reçu
docteur en droit à l'université de Leyde en
1796, obtint en 1799 la chaire de droit ci-
vil et naturel à Hardervvick, remplaça
Cras en 1806 pour le cours de droit civil
à l'Athénée d'Amsterdam , et fut appelé
en 1809 à Leyde pour y professer le droit
naturel et le droit des gens. 11 avait ap-
plaudi aux premières manifestations de
la révolution française; mais il ne tarda
pas à se désabuser sur ses suites, et il pu-
blia en 1806 sous le voile de l'anonyme
un Recueil de lettres hollandaises dans le-
quel il se prononça contre l'influence que
le gouvernement français prenait de jour
en jour sur la république batave. En
1813 , à l'époque des revers de Bonaparte,
il contribua par l'influence qu'il exerçait
sur la jeunesse à accélérer le mouvement
de l'insurrection hollandaise. Le prince
d'Orange récompensa ses services'en lui
conférant la dignité de recteur honori-
fique de l'université de Leyde , le collier
de commandeur du Lion de Belgique , des
lettres de noblesse et le titre de conseiller
d'état honoraire. Chargé de l'organisation
de l'université et des collèges , U rédigea
aussi le projet de code civil pour le'nou-
veau royaume des Pays-Bas. 11 fut député
par la province de Hollande aux éiai
K£M
lOS
KEM
généraux en 1817, et il y fit preuve d'une
grande étendue de connaissances et d'une
modération rare , unie à une brillante
cloculion. Il mourut d'une attaque d'apo-
plexie le 20 juillet 1824. Kempcr avait pu-
Llié en 1810 une édition du Code crimi-
nel de la Hollande avec une introduction
et un commentaire qui lui valurent les
suffrages de tous les jurisconsultes. On lui
doit en outre les ouvrages suivans : | De
jure naturœ imniutahili et œterno , Har-
derwick, 1799, in-4° ; | De populorum le-
gibuSj ojJtimis increscentis vel decrescen-
tis humanitatis indiciis ^ Amsterdam ,
1806 ,,in-/i."; I De œtatis nostrce fatis exem-
plu gentibus ac prœsertim Belgiis nun-
f/uam neyligendo M Leyde ,1816 , in-4°. Il
a laissé de plus un grand nombre de Dis-
sertations latines , des Discours en langue
hollandaise, sur différens sujets , dédiés
au prince souverain des Pays-Bas, 1 vol.
in-8° ; des Observations sur diverses par-
ties du droit français ; un Essai sur la
nécessité des idées religieuses qui lui va-
lut une médaille d'argent au concours de
1801 , et un Mémoire intitulé : de \ In-
fluence qu'ont exercée les événemens po-
litiques sur les lumières, la religion et les
mœurs des peuples de l'Europe, cou-
ronné en 1818 par la société de Harlem,
et qui a été traduit en allemand sur la
2' édition par Dielrich, Leipsick, 1823.
KEMPFER. royez K^MPFER.
• REMPIIEll ( GÉRARD ), poète hollan-
dais , naquit vers 1680 , et fut pro-rec-
teur de l'école latine d'Alckmaër, dans la
Nord-Hollande. On ignore l'époque de sa
moit ; il a laissé : | une Traduction d'Ana-
créon en vers , 1726 ; | un Recueil d'I-
dylles ; I Hélène en Egypte, tragédie imi-
tée d'Euripide, 1757. On lui doit des Ob-
servations très savantes sur les trois pre-
mières églogues de Calpurnius ; ces ob-
servations sont insérées dans la belle édi-
lion des Poetce lalini rei venaticce scrip-
tores et bucolici antiqui , Leyde et la
Haye, 1728, in-i°. Kempher publia, en
outre, la Clironique d'Egmond, ou An-
nales des jjrinces-abbés d'Egmond , que
Jean de Leyde écrivit en latin. Corneille
van Herk la traduisit en hollandais , et
Gérard Kempher l'a revue et continuée ,
Alckmaër, 1732, in-i".
KEMPIS ( Thomas H^.MMERLEIN ou
HvEMaiERCHEN , en latin Malleolus, dit
de ou à ), né de parens pauvres, au
village de Kcmpen , diocèse de Cologne ,
en 1380, fut disciple de Florent Radewin.
U entra, en 1599, dans le monastère des
chanoines réguliers du Mont -Saint- Agnès,
près de Zwoll , dans l'Over-Yssel, où son
frère était prieur. U fut fait prêtre en
1413. Ses actions et ses paroles portaient
à la vertu. Doux avec ses confrères,
humble et soumis avec ses supérieurs,
charitable et compatissant envers tous ,
il fut le modèle de cette piété aimable qui
change en paradis l'enfer de ce monde.
Son occupation principale était de copier
des ouvrages de piété et particulièrement
la Bible. Il lit aussi plusieurs manuscrits
admirables sous le rapport calligraphique.
Il composa en outre des ouvrages de piété.
Ceux que nous avons de lui respirent une
onction , xuie simplicité , qu'il est plus i'à^
cile de sentir que de peindre. Les meil-
leures éditions que nous en ayons sont
celles de Sommalius, jésuite , à Anvers,
1600 et 1615, 3 vol. in-S"". La plus grande
partie de ces excellentes productions a été
traduite eri français par l'abbé de Belle-
garde, sous le litre de Suite de l'Imitation
de J. C, in-24; et par le père Valette,
doctrinaire , sous celui à^ Elévation à J.-C.
sur sa vie et ses mystères, in-12. Les titres
des originaux sont : | Soliloquium animœ ;
j f^atlis liliorum ; j De tribus taberna-
cidis ; I Gemitus et suspiria animœ pccni-
tentis ; \ Cohortatio ad spiritualem pî'ofec-
tum. Thomas A-Kempis avait été sous-
prieur ( 1423 ) , puis prieur de son monas-
tère (1448) ; il mourut saintement en 1471,
à 91 ans. Son principal ouvrage est, selon
quelques critiques , le livre de l'Imitation
de J.-C, qui ne prêche que la douceur et
la concorde , et qui a été un sujet de
querelle entre les bénédictins de Saint-
Mauretles chanoines réguliers de Sainte-
Geneviève. ( Voyez NAUDÉ) Gabriel ,
GERSNE, AMORT, QUATREMAIRE ,,
ROSWEIDE. ) Cet ouvrage admirable,!
malgré la négligence du style, touche,
beaucoup phis que les réflexions pétil-'
lantes de Sénèque , les arides mora-
lités d'Epiclèle et de Marc-Aurèle. II
charme à la fois le chrétien et le philo-
sophe. Il a été traduit dans toutes les
langues-, et partout il a été infiniment
goûté. On rapporte qu'un roi de Maroc
l'avait dans sa bibliothèque, et qu'il le
lisait avec complaisance. ( Koyez SCI»
POLI. ) La première édition latine est de
1492 , in-12, gothique. Il en existait alors
une vieille traduction française , sous le
titre de Y Internelle consolation, dont le
français a paru à quelques critiques aussi
ancien que Thomas A-Kempis; mais il
paraît qu'il est d'une date postérieure.
KEM
106
KEM
L'abbé Lenglet a tiré de cette ancienne
traduction un chapitre qui n'était pas
dans les versions latines. Ce livre de
V Internelle consolation a été imprimé
plusieurs fois dans le 16' siècle, in-8°.
M. l'abbé Valart publia une jolie édition
de Y Imitation^ chez Barbou, en 1758,
in- 12 ; mais en voulant mettre en bon
lai in les expressions négligées et un peu
barbares, ou qui lui paraissaient telles,
en réformant ou supprimant celles qui
démontrent que l'auteur était allemand,
non seulement il défigura l'original, mais
il en affaiblit l'onction et dérogea à sa
précieuse simplicité. ( Voyez VALART. )
Beauzée opposa à cette édition une autre,
conforme au texte primitif, et très bien
imprimée chez Barbou , 1787. Avant Va-
lart, le protestant Castalion avait déna-
turé cet ouvrage précieux d'une manière
bien plus condamnable, en retranchant
ou réformant tout ce qui était contraire
aux erreurs de sa secte. On comprend ce
que le quatrième livre , qui traite de l'eu-
charistie, est devenu dans celle opéra-
tion. L'élégance grammaticale qu'il a sub-
stituée à la simplicité de l'original, a
fait de tout l'ouvrage un didactisme aride,
sans onction et sans suc. Ferœ 2>ictatis
gustum non habuit ^ dit le Père Sarama-
lius, persiiadendi efficaciam ademit_.
nervos vii-tutis inciditj, denique ipsam
quasi animarn authoris elisit. Nouvelle
preuve que l'hérésie ne doit ni traiter de
pareilles matières , ni toucher à de pa-
reils ouvrages. ( Voyez BARRAL, LA-
BADIE , PASCAL.) Bassompierre a donné,
à Liège, une bonne édition de ce livre,
en 1783. Celle d'EIzévir, in-12 , à Leyde,
sans date, avec deux figures au frontis-
pice, est recherchée. Il y en a eu aussi
une édition au Louvre, 16/tO , in-fol., en
gros caractère, dont l'impression est très
belle ; mais elle n'est pas d'un usage com-
mode, et ne peut servir que dans les
grandes bibliothèques. Une des plus belles
éditions, parmi les différentes versions
françaises qu'on en a faites, est celle de
la traduction de Beuil ( Saci ) , 1665 , in-S",
avec figures. Ceux qui désireront con-
naître les efforts que ks bénédictins ont
faits pour enlever cet ouvrage à Thomas
à-Kempis, peuvent consulter la disserta-
tion d'Eusèbe A mort, de l'abbé Ghes-
quière, et du père Desbiilons, sur cette
matière. La dernière , la plus complète de
toutes , a paru en 1780 ; elle est à la tête
d'une édition très exacte du texte origi-
nal, mais qu'on aurait dû diviser par
versets comme les autres ; car cette divi-
sion tient évidemment au style du livre,
à la nature et au ton des sentences , et à
l'intention de l'auteur, comme on l'a
montré dans le Journal historique et lit--
ter aire , lo mai 1788, p. 108. Le livre de
Y Imitation a, depuis sa publication , altirô
l'attention des savans, qui ont cherché à
en connaître l'auteur. Le premier qui l'at-
tribua à Thomas à-Kempis fut le savant
Jodours Budius Uscensius , imprimeur à
Paris , mais flamand de nation. Son sen-
timent fut suivi par François de Toi,
chanoine régulier. D'un autre coté, le
père Possevin, jésuite, est le premier
qui ait attribué cet ouvrage à J. Gerson ,
dans son Jpparat sacré. Il fut imité par
le père Cajelan, religieux du Mont-Cassin,
et par les bénédictins de Saint-Maur. On
peut voir la relation curieuse de ce point
de critique, donnée par dom Vincent
Thuillier, bénédictin, à la tète du pre-
mier tome des OEuvres posthumes des
Pères Mabillon et Ruinart. Les critiques
modernes ne se sont pas moins exercés
sur cet ouvrage. M. Barbier a publié une
Dissertation sur les traductions fran-
çaises qui en ont été faites , et M. Gence
a fait paraître des considérations sur
' l'auteur de ce précieux livre. Les recher-
ches de M. Barbier sont intéressantes et
curieuses ; et les raisons de M. Gence , en
faveur de Gerson, qu'il regarde comme
l'auteur de l'Imitation, sont solides , quoi-
que peut-être pas toujours concluantes.
Elles ne nous ont pas paru démonstra-
tives, quoiqu'elles aient fait naître bien
des doutes dans notre esprit ; et nous
avons conclu de la lecture de sa disser-
tation, que l'auteur de l'Imitation a su
s'envelopper de tant de ténèbres, qu'on
ne pourra jamais le connaître avec cer-
lilude. Nous croyons faire plaisir à nos
lecteurs en rapportant ici ce que pense
à cet égard le savant et modeste ré-
dacteur de L'Ami de la religion dang
ses n"' 2021 et 205/i, à l'occasion d'ime
réimpression des Considérations de M.
Gence. « Il est , comme on sait , trois per-
» sonnages pour lesquels on revendique
» principalement l'honneur d'avoir com-
y> posé V Imitation. Ces personnages sont
» Thomas à-Kempis , chanoine régulier ,
» Jean Gerson, chancelier de l'église et
» de l'université de Paris , et Jean Gersen,
D abbé de Verceil. L'existence de ce der-
» nier persormage est assez douteuse. Le
» manuscrit d'Aione dans lequel seul
» Gersen est nonuné et qualifié abbé est
KEM 107
» le litre prineipal qui fait supposer un
» auteur distinct du chancelier Gersori.
» Mais l'histoire et les monumens se tai-
« sent sur Gersen. On le suppose abbé de
n Saint-Etienne de Verceil, contemporain
^ de saint François d'Assise et originaire
p de Cavaglia ou Canabacum près Verceil;
„ ces suppositions, il faut l'avouer, ne
.t reposent que sur des indices bien faibles
» et sur des données fugitives. Le seul
,1 témoignage de quelque poids est le ma-
» nuscrit d'Arone, manuscrit apporlé de
» Gênes en 1579, et trouvé dans la mai-
» son des jésuites d'Arone , i)rès Milan ,
» qui était jadis un monastère de béné-
» dictins. Ce manuscrit était regardé
» comme très ancien ; il fut apporté en
» France es 1686 , et livré à l'examen de
» 19 savans , parmi lesquels Sainle-Beuve,
» le président Cousin, -Ducange, Renau-
j> dot, Baluie , Alexandre, Elles Dupin ,
» Hardouin, Bulteau, Chamillart , Oudin,
» etc., qui, réunis dans l'abbaye Saint-
» Germain-des-Prés, déclarèrent dans une
5. espèce de procès- verbal du 28 juillet
* 1687, que ce manuscrit avait au moins
» 300. ans d'antiquité. Mais d'autres savans
n ont depuis émis une opinion contraire;
» nous citerons, entr'autres , le professeur
B Hartzheim, le chanoine Amort et le jé-
» suite Zaccaria. De plus M. Gence, ayant
» reçu de M. Vernaxz.a , bibliothécaire de
» Turin, le fac simile de six pages du
» manuscrit d'Arone, l'a soumis à l'in-
» spcctiun de plusieurs savans modernes,
r qui l'ont jugé du iu'' siècle. Tel a été
» l'avis de MM. Dacier, Gosselin , van
» Praët , Petit-Radet , Hase , etc. Dans ce
» fac simile . que M. Gence a reproduit
» dans son édition latine de l'Imitation
i> de 1826 , le nom de Gersen n'est même
» pas bien écrit, et on lirait plutôt Gesen.
r D'autres manuscrits portent le nom de
» Gessen. et quelques-uns lui donnent 'la
» qualité de chancelier de Paris ^ ce qui
9 indiquerait que ce nom de Gersen était
> une faute de copiste , et que c'était
i Gerson que l'on voulait désigner. Ce-
» pendant ce Gersen a eu de nombreux
» partisans; Cajelan, Valgrave, Metzler,
» Quatremaire, Deltau , Mabillon , le car-
rdlnal d'Aguire, Valarl, et en dernier
«lieu, Cancellieri, Napione et Grégori
» ont soutenu l'attribution de limitation
» à Gersen. Serait- il vrai qu'ils eussent
» adopté ce sentiment parce qu'ils étaient
> bénédictins ou italiens , et que l'hon-
» neur de leur ordre et de leur patrie ait
» influé à ce point sur leur jugement et
KE3I
sur leur critique ; c'est ce qu'il sérail
aussi injuste qu'impoli de dire de tous.
Quoi qu'il en soit, M. Gence nous paraît
assez fondé dans ce qu'il dit de la fai-
blesse des motifs sur lesquels repose
l'attribution à Gersen. L'attribution au
religieux à-Kempis est peut-être moins
aisée à détruire. Thomas Haemmerchen
ou Hœmmerlein, en latin Malleolus, était
vers 1580 à-Kempen , au diocèse de Co-
logne , d'où lui vient le nom d'à-Kempis.
Il lit profession dans la maison des cha-
noines réguliers à Sainte-Agnès près de
ZwoU dans TOver-Yssel, et fut fait
prêtre en 1413. Il mourut en li7i , en
réputation de piété , et on lui attribue
plusieurs ouvrages antiques. M. Gence
lui-môme qui ôte au bon religieux la
gloire d'avoir composé V Imitation j, le
cite comme auteur d'un assez grand
nombre de sermons , d'un traité de Fi-
delis dispensator et d'un dialogue sur le
Mépris du monde ; du reste il le con-
sidère surtout comme un habile calli-
graphe. A-Kempis , dit-il , copia d'abord
des livres de chant , puis deux Missels ,
puis une Bible entière en h vol. in-foL,
qui se conservait au monastère du Corps-
du-Chrisl , à Cologne. Il transcrivit en-
suite le recueil où , en tête de plusieurs
traités , se trouvent les quatre livres de
l'Imitation. Ce recueil est souscrit de la
même formule que la Bible : Finitus et
complétas anno lUiL per manu s fratris
Thomœ Kemp. Il est assez remarquable
que la même formule se trouve sur la
Bible transcrite par le bon religieux en
1439, sur le Missel et sur les opuscules
de saint Bernard , copiés également par
lui. D'où M. Gence conclut que à-Kempis
n'a eu d'autre part à l'Imitation que de
la copier avec plus d'habileté et d'intel-
ligence. Le mot per manus semble en
effet indiquer un travail tout-à-fait ma-
nuel. Dans la chronique du couvent de
Sainte-Agnès , il est dit que à-Kempis
écrivit la Bible en entier, et beaucoup
d'autres livres, pro modo et pretio^
c'est-à-dire sans doute pour l'usage de
la maison , et pour le céder moyennant
un prix à d'autres communautés : c'é-
tait un des revenus de la maison. Le
recueil connu sous le nom de manuscrit
d'Anvers existait chez les jésuites de
cette ville , et a servi aux célèbres Bol-
landistes. Quatre éditions principales
ont été faites sur ce manuscrit par Som-
malius, Rossweydes , BoUandus et Chii-
flet ; elles ont été plusieurs fois réim-
KEM
primées , et passent pour les plus soi-
gnées. Néanmoins M. Gence, dans son
édition latine de V Imitation j y a remar-
qué des variantes plus ou moins vicieu-
ses. Ce manuscrit d'Anvers, dit M.
Gencç , est le plus ancien connu avec le
nom de Kempis ; celui d'Augsbour^j de
1440, supposé sans nom par Bollandus,
est réellement anonyme. Il n'en a pas
été produit d'antérieur pendant et de-
puis la contestation élevée au 17' siècle
entre Fronteau , Qualremaire et Naudé,
sur l'auteur de l'Imitation. Fronteau
qui était parent d'à-Kempis, obtint un
arrêté du parlement de Paris, du 12
février 1652, qui, sur la contestation
entre les chanoines réguliers et les bé-
nédictins, ordonnait que les livres de
Ylmitation seraient dorénavant impri-
més au nom d'à-Kempis , et défendait
d'y mettre le nom de Gerson ; jugement
qui n'a pas empêché que plusieurs édi-
tions aient paru depuis sous le nom de
Gerson. Le manuscrit que Ghesquière a
fait connaître et qui a appartenu depuis
à van Hultem, ne porte de date plus
ancienne, avec désignation de nom,
I que dans une note ajoutée à la marge ;
et le manuscrit de Louvain, cité par
Desbillons depuis Rosw^eyde , est ano-
nyme et sans date. M. Gence ne nous
reprochera certainement pas d'avoir ici
affaibli ses arguraens contre à-Kempis;
car nous avons le plus souvent cité ses
propres paroles , tirées soit de ses nou-
velles considérations j, soit de ses ar-
ticles de la Biographie universelle. Nous
' ne devons pas dissimuler néanmoins
que à-Kempis a eu un grand nombre de
zélés défenseurs, Sommalius, Ros-
wreyde, BoUand, Chifflet, Fronteau,
Naudé, Heser, Weslhi, Raynaud, Amort,
Desbillons, Ghesquière, etc. Heser et
Rosweyde sont ceux qui ont soutenu
cette cause avec le plus de talent. M.
Gence leur rend justice , tout en com-
battant leur sentiment ; il discute quel-
ques-uns de leurs argumens, il exa-
mine entr'autres l'autorité de la chro-
nique Wendesleem. Il remarque qu'au-
cun manuscrit du texte daté n'offre
d'attribution directe de Ylmitation à
Thomas, comme auteur, que bien
après 1441 , si ce n'est après 1471 ; et
que V Imitation ne se trouve point dans
la plus ancienne édition des œuvres de
Kempis , donnée à Utrecht même , peu
de temps après sa mort. Malgré cela,
il faut avouer que l'opinion qui fait
108 REM
honneur du livre au bon religieux est
fort répandue. 11 y a des pays où Vltni'
talion s'appelle vulgairement Yà-Kem^
pis. N'est-ce là qu'une prétention popu-
laire comme le croit M Gence , c'est ce
que nous n'oserons décider... M. Gence.
qui , dans son édition latine de Ylmi-
tation^ a donné une description des
manuscrits et des éditions les plus an-
ciennes de Y Imitation ^ indique les ma-
nuscrits et les éditions quf portent le
nom de Gerson. Un manuscrit de Salx-
bourg, en 1463, porte pour titre : De
Imitatione Christi, Joh. Gers., abrégé
sans doute de Jean Gerson. Le savant
Amort cite un manuscrit de Pollingen ,
sous le nom de Gerson. Un manuscrit
de Reichersberg , en 1477, porte le nom
i de Jean Gerson , chancelier de Paris f
un autre, de Jean Gersen, chancelier
de Paris. Ici la méprise est évidente,
et M. Gence s'en sert pour montrer que
plusieurs des manuscrits qui portent le
nom de Gersen peuvent être regardés
comme des témoignages en faveur de
Gerson. La langue et la prononciation
allemande ont pu contribuer à celle
erreur . M. Gence a un manuscrit d'Augs-
bourg , sans date , où il est dit que le
compilateur de Ylmitation fut Thomas,
ou selon d'autres , Jean Gersen , chan-
celier de Paris. Une édition à Ulm en
1487, et une à Nuremberg, en 1490,
donnaient également Ylmitation a Ger-
son. Voilà pour l'Allemagne. En Belgi-
que , on cite une édition de Louvain ,
peut-être avant 1474, époque où l'on
commença à mettre l'année sur les
livres imprimés; le titre commence
ainsi : Incipit liber magistri Johannis
Gerson, Cancellarii Parisiensis... Il y a
à la bibliothèque du roi deux exem-
plaires de cette édition ; sur l'un on a
effacé Gerson et mis à la place Thomas-
à-Kempis. En France, on aie manu-
scrit de l'abbaye de St-Germain de Paris,
de 1460, avec le nom de Jean Gerson;
le manuscrit Léchassier , qui appartient
aujourd'hui à M. Gence, et qui, outre
le nom de Gerson , offre son portrait en
habit de docteur ( on croit que ce ma-
nuscrit peut être de 1472 ) ; le manu-
scrit de Sainte-Geneviève , qui, en don-
nant Ylmitation à saint Bernard , ajoute
qu'on l'attribue à Jean Gerson, chan-
celier de Paris. Parmi les éditions qui
ont le nom de Gerson, on compte celle
de Paris , peu après 1481 , celle de Lyon
vers 1488; une version française de
KTM
109
KEIV
Toïilousc, où l'on dit que Vlmilation a
été composée par saint Bernard, mais
qu'elle est attribuée à Gerson. En Italie,
de'ix manuscrits de Florence portent le
nom de Gerson , chancelier de Paris;
un manuscrit de Vérone, Jean Ger-
son^ chancelier de Paris; un ma-
nuscrit de Turin , Jean Gerson chan-
celier de Paris ; deux manuscrits de
Venise , J. Gerson ; une édition Prin-
ceps de Venise, en 1482, offre le nom
de J. Gerson , chancelier de Paris;
il s'en est fait dans la même ville plu-
sieurs éditions semblables. D'autres édi-
tions du 15"^ siècle à Padque, à Brescia,
à Milan , portent également le nom de
Gerson. M. Gence a fait un extrait du
volumineux index du Vatican , qui con-
tient en plus de 50 vol. in-folio l'indica-
tion de tous les livres exislans dans la
bibliothèque des monastères d'Italie
avant IGOO; il a remarqué qu'il ne s'est
îjurres écoulé d'années, depuis 1470
jusqu'à celle époque, où il n'y ait eu
plusieurs éditions lutines ou italiennes
, de V Imitation avec le nom du chance-
lier de Paris, à Venise, à Florence, à
Home ou ailleurs, tandis qu'il ne s'en
est trouvé aucune sous celui de Gersen,
■et très- peu sous celui d'A-Kempis.
' Ccsl d'après toutes ces autorités que
31. Gence a pu dire que Gerson est le
plus ancien auteur, sans en excepter
saint Bernard, auquel V Imitation ait
été attribuée. Il cite l'opinion de Bos-
sue t : La vie de Gerson fut si sainte ^
et ses écrits si édifiants, qu'il mérita
d'être regardé comme l'auteur de l'Imi-
tation. M. Daunou, qui a examiné la
question de l'auteur dans le Journal des
Savans , de décembre 1826 , croit que
Gerson, réfu{jié en Allemagne, s'y est
consolé de ses disgrâces en composant
' le traité De Consolatione theologicCj. et
celui qui a pour titre : De Tmitatione
Christij ou Intemarum consolationum.
L'un et l'autre sont réunis dans un
manuscrit de 1421 , trouvé en 1527 à
' l'abbaye de Moclk , en Autriche : et plu-
sieurs autres copies de ses derniers ou-
' vrages se conservaient dans le même
monastère. On a trouvé dans celte ab-
' baye jusqu'à dix manuscrits au moins
de V Imitation. Après avoir présenté
I celte idée sommaire de la discussion ,
• nous dirons quelque chose de plus par-
' ticulier sur les Nouvelles Considéra-
> tions de M. Gence. Cet écrit est partagé
' en quatre scellons : dans la première,
» l'auteur montre Gerson comme ayant la
» possession la plus ancienne, Kempis
» comme un simple copiste , et Gersen
» comme un être imaginaire, créé sur
» l'autorité d'une seide lettre, cl adopté
» par esprit de corps ou par des affec-
» tions de patrie ; dans la seconde section,
» il discute les raisons alléguées récem-
» ment, en faveur de Gersen, par qucl-
» ques savans italiens ; dans la troisième
» section, il résume les preuves qui éta-
» blissent , selon lui , que X Imitation n'est
» ni d'un moine , ni du 13" siècle , et que
» cet admirable ouvrage , inconnu au 14*
» siècle , appartient au commencement
» du 15''; enfin, dans la quatrième section
» M. Gence rassemble tous ses motifs pour
» attribuer l'ouvrage à Gerson , l'autorité
ï> des manuscrits, la comparaison de la
» doctrine et des maximes de V Imitation
» avec celles des autres ouvrages de Ger-
»son, plusieurs passages du livre qui
» semblent indiquer un docteur et un
» membre de l'université {ubi suntomnes
» illi doinini et magistri... ), la piété du
» chancelier, sa vie retirée dans les der-
» niers temps, les germanismes et les
» gallicismes du style , etc. S'il nous
T était permis d'avoir une opinion sur la
» question, nous dirions que l'auteur des
■ Considérations nous paraît i)lus fort
» quand il réfute les partisans d'A-Kempis
0 ou de Gersen, que quiuid il veut établir
» l'attribution à Gerson, Il rassemble bcau-
» coup de probabilités en faveur decelui-
»ci; mais il ne dissipe pas encore tous
» les nuages. » Ts'ous avons aussi une
bonne traduction française de l'Imitation
par M. Gence. Plus récemment encore.
M. Genoude et M. F. la Mennais , en ont
publié de nouvelles traductions qui ont
eu du succès. Voyez GERSON.
KEN ( Thomas ) , évcque de Bath, en
Angleterre , instruisit son clergé, fonda
des écoles, secourut les pauvres, et a
laissé plusieurs ouvrages de piété , esti-
més par les anglicans. Il était né à Bar-
hamslead, dans la province de Ilereford,
en 1647, et il mourut à Longe-Leate, en
1711, à 64 ans. Quelqu'un l'ayant accusé,
auprès du roi, sur certaines propositions
d'un sermon qu'il avait prêché à Wiltc-
hal , ce prince l'envoya chercher pour
qu'il se lavât de ce reproche : l'évéque de
Bath lui dit, sans s'ébranler : » Si votro
» majesté n'avait pas négligé son devoir,
» et qu'elle eût assisté au sermon , mes
» ciuiemis n'auraient pas eu occasion de
» m'accuser. » Il justilia ensuite ce qu'iJ
10
KEN
no
KEN
avail dit dans soo sermon, et le roi ne
s'offensa point de sa liberté. Il obtint de
la reine Anne une modique pension.
Outre plusieurs ouvrages de polénii(iuc
religieuse , il a laissé quelques pièces de
poésie sacrée et un poème épique en 13
chants, intitulé Edmo^id. Tous ses écrits
ont été recueillis après sa mort et impri-
més en 1721, k vol.
KENiXEDY ( J\CQUEs), illuslro écos-
sais, archevêque de Saint- André, issu de
rare royale par sa mère Marguerite , lille
de Robert III, roi d'Ecosse, était né en
1404. Son père était sir William Ken-
nedy, qui avait épousé cette princesse.
Jacques Kennedy renonça à tous les avan-
ta{jes de sa naissance pour embrasser l'é-
tat ecclésiastique : il fut d'abord abbé d'A~
I,erbrot-Wic. Appelé à la réfrénée pen-
dant la minorité de Jacques II , et à la
place de chancelier d'Ecosse, il montra
dans ces postes éminens autant de vertu
(|ue de capacité; il aimait les sciences et
protégeait les savans. Ayant été nommé
archevêque de Saint-André, il édifia son
diocèse par sa piété, et l'enrichit d'éta-
blissemens utiles à la religion et aux let-
tres. Il fonda à Saint-André même le col-
lège de Sainte-Marie, et le dota libérale-
ment. Cet illustre prélat mourut en 1472.
KEXNEDY ( Jeas ), théologien de l'é-
glise anglicane , fut recteur de Bradli-yau
roinlé de Derby, dans le siècle dernier.
«^)n a de lui | une Chronologie de l'Ecri-
ture sainte , 175! , in-8°. On l'accuse de
n'être point toujours exacte : | un Exa-
men des antiquités chronologiques , du
/{. M. Jackson . 1755 , in-8" ; j Doctrine
(le la cominensurabililé des mouvemens
diurnes et annuels.
IvE.\NET ( WniTE ), évêque de Péler-
l)orough,né à Douvres en 1660, fonda
uns bibliothèque d'antiquités et d'his-
toire, dans sa ville épiscopale, se lit un
nom par ses sermons et .ses écrits. Les ou-
vrages qui restent de lui , presque tous
en anglais, décèlent un homme savant et
im bon littérateur. Ce sont : | un petit
Poème contre les JVighs , 1681; | la tra-
duction de \ Eloge de la folie d'Erasme ;
! celle du Panégyrique de Trajan; | le
.■>* vol. d'une Histoire complète d'Angle-
terre . commencée par Hughes, 1706,
Londres, a vol. in- fol. L'ouvrage fut réim-
primé en 1719. Il aida beaucoup Wood
pour la rédaction de son Jlhenœ-Oxo-
nienses. Il laissa aussi quelques manus-
crits dont plusieurs passent pour avoir
de l'importance. Il mourut en 1728.
KEx\.\ET ( B.\sn.E ), né en 1C74 à Post-
ling, dans le comté de Kent , frère du
précédent, autant distingué par sa science
que i)ar la pureté de ses mœurs , mort à
Oxford en 1714, où il venait d'être élu
président du collège du Christ, laissa plu-
sieurs ouvrages en anglais , parmi les-
quels on distingue | les Vies des poètes
grecs ^ 1&97 , in-8°; | \c?, Antiquités r<y
maincs. 1696, 2 vol. in-12;l ^^^ Sermons, en
5 vol. in-8" ; | Paraplirase en vers des
Psaumes, 1706, in-8" ; | et une versiomXvk
Traité des lois de Puffendorf.
KEi\i\ICOTT ( Beîvjamiiv ), anglais, sa-
vaut dans les langues, et habile critique,
naquit en 1718 à Torness, au comté de
Devon, fut d'abord maître des écoles de
charité dans son pays natal. Il entra en
1744 à l'universitéd'Oxford.el acquit une
telle réputation, même avant d'en être
sorti, qu'il fut appelé connue professeui
au collège d'Exeter. Il fut nommé ensuite
successivement conservateur de la biblio-
thèque de Radcliffe , docteur en théolo-
gie, chanoine de l'église du Christ à Ox-
ford, ministre à Culham, dans le ménuj
comté. Kennicott s'était d abord fait coiv-
naître par des Dissertations sur l'arbre
de vie j et sur le sacrifice de Cain et d'A~
bel. 1747. Mais ce qui lui a fait une répu-
tation parmi les savans, c'est la Bible hé-
braïque, qu'il a publiée, en 2 vol. in-fol.
à Oxford. Il a suivi l'édition de van dcr
Hoogt, qui passe pour la plus corrcclf,
et a rassemblé au bas des pages toutes les
variantes . recueillies d'après tous les ma-
nuscrits hébreux , chaldaiques et sama-
ritains. Il avait collalionné lui-même 250
manuscrits, et sous sa direction et à ses
frais les plus habilts hébraïsans de l'épo-
({ue en coUalionnèrenl 550 , ce qui fuit
600 manuscrits. liiea ne nous manque
donc j»lus jtour avoir le texte hébreu dans
loute la correction dont il est suscepiible
axijourd'liui; mais qui, après tout ce qu'il
a essuyé, ne peut en aucun sens avoir
l'autorité des Septante ni de la Vu!{jate.
[Voyez CAPPEL, ELÉAZAIl, GOROt'lUS,
MASCLEF.MORIN, PTOLÉMÉE. ) Ken-
nicott mourut à Oxford, à 65 ans, le 18
septembre 1783.
* KEÎ^T ( Edouard- AucrsTE, duc de),
quatrième lils de Georges III , roi d'An-
gleterre, naquit à Londres , le 2 novem-
bre 1767. Après avoir terminé ses pre-
mières éludes, il fut envoyé en Allema-
gne à l'âge de 17 ans , pour y faire son
éducation militaire. Il conuncnça son
service à Luxembourg, dans l'électoral de
KEN
111
KEP
son père, en qualilé de simple ctulel; puis
se rendit à Hanovre. Pendant deux an-
nées, il n'eut que mille livres sterling de
revenu, dont son gouverneur disposait,
deux [juinées par semaine exceptées. A
l'âge de vingt ans, 11 fut élevé au grade
de capitaine aux gardes, sans que ses re-
venus fussent augmentés. Rappelé en
d790, en Angleterre, il fut créé colonel du
70*^ de ligne ; et, au bout de dix jours , il
reçut l'ordre de son pèfe de se rendre à
Gibraltar pour rejoindre son régiment.
Dans l'hiver de 17!) l, à l'époque de la
guerre contre la France, il s'embarqua
pour le Canada; mais il reçut en roule
l'ordre d'aller se réunir à l'armée que com-
mandait sir Charles Gray, dans les Indes
Occidentales. Le duc de Kent fit ses pre-
mières armes dans celte expédition, se
signala par sa bravoure à l'aîtaque du
Fort-Royal delà Martinique, et à celles
de Saint-Lucie et de la Guadeloupe. Il se
rendit, en 1796, dans l'Auiérit^ue du nord,
où il fut élevé au grade de lieutenant gé-
néral, et nommé gouverneur de la Nou-
velle-Ecosse. Une chute de cheval qu'il
fit à Halifax en 1801 le força de revenir
en Angleterre , où il fut admis à. la cham-
bre des lords, et reçut les titres de duc
de Kent et de Stratherne et de comte de
Dublin. La même année, il eut le com-
mandement en chef des armées anglaises
en Amérique. Il s'y rendit de nouveau;
mais une maladie bilieuse l'obligea, en
1800, de retourner en Angleterre; il fut
nommé colonel de Royal-Ecossais, et
gouverneur de Gibraltar en l}i02. Arrivé
dans cette forteresse, il y établit aussitôt,
parmi la garnison , la plus sévère disci-
pline dont il donnait l'exemple le premier.
Des murmures commencèrent à se faire
entendre et furent bientôt suivis d'un sou-
lèvement. Les soldats avaient envoyé une
(lépulation au duc de Kent, pour le prier
de leur permettre de passer en fête la nuit
de Noël. Le duc refusa non-seulement son
consentement, mais fit mettre la dépula-
t ion aux arrêts; à cette nouvelle, une
partie de la garnison se révolta, et voulut
faire embarquer le duc de Kent, et le
remplacer par le général Barnet. Le UW
régiment fit feu sur les insurgés , et ren-
dit par là l'insurrection plus terrible ; mal-
gré les efforts du général Barnet , dans la
nuit du 26 décembre, toute la garnison
était soulevée. Le duc de Kent se mit alors
à la tète du régiment resté fidèle et suivi
de deux pièces de campagne, il attaqua les
mutins. Le feu dura plusieurs heures :
ceux-ci furent enfin dispersés, elungrand
nombre condamnés par une cour mar-
tiale. Le prince fut rappelé à Londres, où ,
pour le dédommager de la perte de son
gouvernement , le roi son père le nonnna
feld-maréchal. Cependant le duc de Kent
avait contracté plusieurs dettes, à cause
de la modicité de son revenu, qui, de-
puis 1790 jusqu'en 1799, ne fut que de
5,000 livres sterling, dont il réservait le
cinquième pour ses créanciers. A celte
époque . le parlement augmenta ce revenu
de 7,000 livres sterling : cette augmenta-
tion ne suffisant pas p/our acquitter ses
dettes, le duc de Kent en sollicita le paie-
ment à la chambre des comnmnes, par
un mémoire qu'il rédigea d'accord avec
ses cinq frères. Sa démarche n'ayant pas
obtenu de succès, il se retira , en 1816, à
Bruxelles, où il vivait en simple particu-
lier. En 1810, il épousa Marie-Louise-Vic-
torine de Saxe-Cobourg, veuve du prince
de Linange , el sœur du prince Léopold ,
époux de la princesse Charlotte d'Angle-
terre. Il retourna ensuite à Londres, et
devint le protecteur de plusieurs sociétés
consacrées au soulagement des pauvres ,
et à l'amélioration de l'éducation publi-
que. On lui doit l'établissement utile des
écoles rcgimentaires , introduites dans les
armées anglaises. Il fut emporté par une
maladie aiguë le 25 janvier 1820, âgé de
53 ans, laissant deux filles de son mariage
avec la princesse douairière de Linange.
KEPPtL Foyez ALBEMARLE.
REPPLER en latin Keplerus (Jean ) ,
célèbre astronome, né le 27 décembre
1571 , à Magstatt , village situé près de la
petite ville de Weil , dans le Wurtem-
berg, d'une famille illustre, mais peu
riche, étudia sous Mœstlin, et devint, à
l'âge de 22 ans, professeur de mathéma-
tiques et de morale à Gratz, (Styrie ). S'é-
tant attaché ensuite à la théologie, il fit
au peuple quelques discours qui annon-
çaient moins de talent pour l'éloquence
que pour d'autres études. Il en fut lui-
même persuadé, et se livra exclusive-
ment à l'astronomie. En 1594, il remplaça
Sladt dans la chaire des mathématiques
à Gralz. Un calendrier qu'il fît pour les
grands de Styrie , auxquels il devait sa
chaire, lui fit un nom distingué. Tycho-
Brabé l'ajjpela auprès de lui en Bohème,
l'an IGOO, et. pour quil se rendit plus vite
à son invitation , il le fit nommer mathé-
maticien de IV.mpercur Rodolphe II. De-
puis, ces deux hommes ne se quittèrent
plus. Si Tyclio-Brahé fut d'un grand se-.
KEP II
cours par ses lumières à Kepi)lcr, celui
ci ne lui fut pas moins utile par les sien-
nes. La mort lui ayant enlevé cet illustre
ami, ce généreux bienfaiteur, en IGOI,
Keppler manifesta ses regrets dans une
iléyie touchante. Le disciple survécut 50
ans à son maître, et mourut à Ratisbonne
Je \o novembre KiôO.à 59 ans. Ce mallié-
roaticien fut le premier maître de Des-
caries en optique, et le précurseur de
Ne^vlon en physique. On Ic regarde
comme un législateur en astronomie.
Tycbo-Brahé lui avait donné le conseil
de renoncer à ses vaines spéculations
pour s'en tenir à l'observation. Kep]>ler
dont l'esprit rigoureux et méthodique m;
8'accommodait pas des résultats isolés de
l'astronomie de son temps, continua ce-
pendant ses tentatives et ses calculs pour
trouver les lois qui gouvernent les révo-
lutions des planètes, et il y parvint en
1618. C'est à lui qu'on doit la règle con-
nue sous le nom de Lois ou Règle de Kejh-
pler ^ selon laquelle on suppose que les
planètes se meuvent. Moins philosophe
qu'astronome, Keppler croyait que les
astres étaient animés; que les comètes
naissaient dans l'élher comme les balei-
nes dans l'Océan; que le soleil attirait à
soi les planètes en tournant sur lui-même,
mais qu'elles ne tombaient pas dans le
soleil, parce qu'elles font aussi une révo-
lution sur leur axe. « En faisant cette ré-
svolulion, dit-il, elles présentent au so-
» leil tantôt un coté ami, tantôt uri côté
» ennemi : le côté ami est attiré, etlecôté
r ennemi est repousé , ce qui produit le
» cours annuel des planètes dans l'éclip-
» tique. » Il faut avouer, pour 1 humilia-
tioii de la philosophie , que c'est par de
tels raisonnemens que les hommes les
plus célèbres ont tâché d'expliquer la na-
ture. Kej)i)ler devina la rotation du soleil
sur lui-même , pîns de quinze ans avant
que Galilée l'annonçât à l'aide des téles-
ïopes. On lui attribue aussi lu decou-
rerte de la vraie cause de la pesanteur
Ses corps ; mais cette cause est encore
inconnue, comme elle l'était du temps
lie Keppler, et il est d'ailleurs certain que
l'expérience sur laquelle il fondait cette
découverte est tout-à-fail illusoire et
étrangère à son oltj ."t. ( Voyez LEUCIP-
PE ). 11 devança Desearles et Newton
dansl'idée d'attribuer le flux et le reJliix
à laclion delà luné : explication dont Ga-
lilée se mociua, attribuant tout bonne-
ment ce jdiénomène au mouvement de
la terre. ( J'otjez EULER. ) Kepiilcr di-
> KEP
sai: qu'il pré ferait la gloire de ses invetu
(ions à l'électoral de Saxe : vanité ])ar-
donnable dans un auteur et surtout dans
un astronome, appréciant ses connais-
sances sur l'élévation de leur objet. Kej)-
pler consigna les premiers résultats de ses
travaux d'abord dans son /'roc/romu.s, puis
en dGl'.>, dans son IJannonique du monde.
« Le sort en est jeté, dit-il, dans sa prê-
» face; j'écris mon livre, il sera lu par
» l'âge présent ou par la postérité , peu
» m'importe; il pourra attendre son lec-
» teur : Dieu n'a-l-il pas attendu G, 000
« ans un contemplateur de ses œuvres? »
Ses principaux ouvrages sont : | FrodrO'
mus dissertationum cosmograpnicaruni ,
Tubingen . 1596, in-/i°. Il donna aussi à ce
livre le titre de Mgslerium cosrnographi-
tinn : \ Paralipomena quihus astronomiœ
pars oplica traditur, 1604, in-i" ;| De Stella
nova in pede serpentaiii . Prague, 1606,
in-i"; | De cometis libri très , Augsbourg,
ton , in-4° : | Eclogce chronicœ , Francfort,
1615; I Epliemerides «ov^, Linlz, 1610,
in-i"; I Tabalœ Rodolplnnœ . Ulm, 1627,
in-fol. : ouvrage qui lui coûta vingt ans
de travail ; | Epitome astronomie Coper-
nicanœ , 1655, 2 vol. in-8*^; j Aslronomia
nova , seu physica caleslis tradita corn-
mentariis de molibus stellœ Martis ex
observationihus G. V. Tyclionis Brahe j,
1609, in-fol.; Lalande a dit que tout
astronome devait lire cet ouvrage au
moins une fois en sa vie. | Chilias loga-
rithrnorum , etc., in -4"; | Nova ste~
reometria doliorum vinariorain , etc. ,
1615, in-fol.; | une Dioptrique . in-/».°;
I De vero natali aniio CHllISTI, in-4".
Keppler ordonna qu'on mil sur son tom-
beau cette épitaphe, qui ne donne pas
une grande idée de sa poésie :
McDSus eraiD coelos , budc tcir» mctior umLrcii i
Mens coclcitis crat , corporit uinbra jacct.
Mais on ignore si l'on mil même une
pierre sur sa tombe; il n'en restait du
moins aucun vestige lorsqu'on lui a élevé
en 1808 un monument eu marbre de Car-
rare , dans le cimetière de Saint-Pierre où
il fut enterré , à Ratisbonne. Voyez sa
Vie par M. Gott. Ilanschius , à la tête de
ses Lettres, imprimées en latin à Leip-
sick. en 1718, in-fol., et NarratiodeJoh.
Kepleii , theologia et rcligioue , par C.
Fred. Standlin , Gœttingue, 1794, 111-4",
réimprimée avec des augmentations dans
les Mélanges du même auteur, 1797, tome
1, tt" 7.
KEPPÎ.rr. (LotîSj, fils du précédent,
KER
lis
TŒR
médecin à Kœnigsberjï en Prusse, publia
l'ouvrage de son père, intitulé : Somm'um,
seu De astionomia lunuri , Francfort ,
1G34, in-4°. C'est dans cette production
qu'il débite les rêveries dont nous avons
parlé plus haut. Louis naquit à Prague en
1G07, et mourut à Koenigsberg en 1G65.
On a de lui quelques écrits.
* KÉRALIO (Louis-FÉMX GUINEMENT
de), chevalier de Saint-Louis, major d'in-
fanterie, ancien professeur à l'école mili-
taire, membre de l'académie des inscrip-
lions et belles-lettres, de celle des sciences
de Stockholm, etc., naquit à Rennes le 17
septembre 1751. Il embrassa d'abord la
carrière des armes et parvint au grade de
lieutenant-colonel. Après avoir obtenu ,
avec sa retraite , la croix de Saint-Louis ,
il se retira à Paris, où il se livra à l'étude
des belles-lettres. Vers 1756 , il fut appelé
à Parme avec Condillac , pour diriger, en
qualité de gouverneur, l'infant de Parme,
don Ferdinand. La protection du duc de
Choiseul lui fit ensuite obtenir la place
de professeur à l'école militaire, dont
il fut plus tard inspecteur. Il mourut
à Grosley, dans la vallée de Montmo-
rency , le 10 décembre 1793. On lui doit
les ouvrages suivans : | Traduction de
différens morceaux sur l'histoire natu-
relle et civile des pays du Nord ^ Paris,
1753, 2 vol. in-12 ; | Voyage en Sibérie^
traduit de l'allemand de Gmelin , ibid. ,
1767 , 2 vol. in-12 ; | Recherches sur les
principes généraux de la tactique, ibid.,
1769, in-12 ; | Histoire naturelle des gla-
ciers de la Suisse^ traduit de l'allemand de
Gruner, ib., 1770, in-4" : | Mémoires de l'a-
cadémie royale de Stockholm^ concernant
l'histoire naturelle^ l'anatomie^ la chimie ^
l'économie^ les arts; traduction, tomel",
in-i" ; I Essai sur les moyens de rendre
les facultés de l'homme plus utiles à son
bonheur^ traduit de l'anglais de J. Gre-
Kory , 1776, in-12 ; | Histoire de la guerre
des Russes et des Turcs^ en 1730-59, et de
ta paix de Belgrade qui la termina, 2
vol. in-12, 1777', 1780, 1789, avec cartes
«■t planches, traduite en allemand , Leip-
8ick, 1778 , 2 Nol. in-8°. | Histoire de la
guerre entre la Russie et la Turquie . et
particulièrement de la campagne t/el7u9,
avec des notes, etc., du prince de Ga-
litzin, Pétersbourg (Amsterdam), 1773,
in-4", in-8°, et en 2 vol. in-12; traduite
en allemand, 1777-78, in-8°. Cet ou-
vrage est loué par Pélisson et déprécié
par Laharpe. Le chevalier Kéralio fut
l'un des rédacteurs du Journal des sa-
vans, depuis 1783 jusqu'en 1792 , époque
de sa suppression , et du Mercure Natio-
nal. Il avait épousé mademoiselle Marie-
Fkaxçoise ABEILLE, qui a traduit de l'an-
glais les Fables de Gay . suivies du poème
de \ Eventail. Paris, 17o3 , in-12; et le
Succès d'un fat, roman, ibid. , 17G2.
' KÉRALIO ( LouiSE-FiiuciTÊ GUINE-
MENT de), fille du précédent, né à Paris
en 1758, épousa M. Robert, et mourut à
Bruxelles en 1821, après avoir publié plu-
sieurs ouvrages parmi lesquels on remar-
que : I Histoire d'Elizabelh, rei7ic d'An-
gleterre ; I Collection des meillews ou-
vrages français composés par des fem mes.,
1786-1789, h volumes in-S" ; | Jmélic et
Caroline^ ou VJmour et l'amitié^ 1808 ,
5 vol. in-12 ; | Alphonse et Mathilde ^o\\
la Famille espagnole , 1809, h volum<,'s
in-12, etc. ; elle a encore traduit de l'an-
glais et de l'italien différens ouvrages :
I le Voyage dans les Deux- Sicile s . par
Swinburne, 1783, in-8'' ; | Voyage en Hol-
lande et dans le midi de V Allemagne , ejc,
ibid. , 1809 , 2 vol. in-8" ; | M Etranger en
Irlande, ou voyage, etc. , par John Carr ,
1809, 2 vol. in-S" ; | Différens morceaux
des mémoires de V académie de Sienne .
1777, in-12. Elle a tradviit d'autres ou-
vrages sous le voile de l'anonyme '.voyez
les n<" 5753, 3976 et 8028 du Dictionnaire
des anonymes. W°^ Robert de Kéralio a
travaillé au Censeur utiiversel et au Mer-
cure national.
KERCADO. Voyez MOLAC.
KERCKRmO (TnÊODonE), célèbre
médecin d'Amsterdam, membre de la so-
ciété royale de Londres, se fit beaucoup
d'honneur dans la pratique de la méde-
cine, qu'il exerça long-temps dans la pre-
mière de ces deux villes. Condisciple de
Spinosa, il fut élève et ensuite gendre do
François van Eude. Il embrassa la religion
catholique, et quitta la Hollande pour pas-
ser en France , d'où il se rendit à Ham-
bourg ; il y mourut en 1G93. Il se fil un
nom par ses découvertes et par ses ou-
vrages. C'est lui qui trouva le secret d'a-
mollir l'ainbrc jaune sans lui oter sa trans-
parence. Ses principales productions rou-
lent sur l'anatomie : | Spicilegium anoi-
tomicum, Amsterdam, 1G70 et 1673, in-A";
\ Anthropogeniœ iconographia , Amster-
dam , 1670 , in-i.", où il soutient que l'on
trouve dans les corps de toutes les femmes
desœufs, dont, selon lui, les hommes sont
engendrés. ( Voyez GRAAF REîxifï(.)On
lui attribue encore une Anatomie, impri-
mée en 1G71, in-folio.
10.
KER U
• RF-RCI I:i.E\-TIU:M\UEC (Yves-
Joseph t!e ), brave iiiaiiii français, naquit
fi Quiinpcr en Bretagne vers 1745. Dès sa
jeunesse il montra un Roùt prononcé pour
ia navigation, entra de bonne beure dans la
marine, e! était déjà lieutenant de vaisseau,
en 17C7, àl'âgede 22 ans. A cette époque le
(îouvernement lit armer une frégate dans
le but de proléger la pécbe de la morue
sur les (ôtes d'Irlande : Kerguelen en
ayant reçu le rommandemenl, s'acquitta
parfaileinent de cette mission. A son re-
tour il fut cliargé de se rendre en Angle-
terre, j)oury faire des observations sur la
construction navale; il reprit ensuite le
commandement de sa frégate pour une
expédition à peu près semblable à la pre-
mière, et à son retour en France il rendit
compte de ses deux voyages dans un mé-
moire au roi. Il se distingua dans la
guerre de 1778 contre les Anglais, fit deux
voyages dans les mers des terres australes
et des Indes, dont le résultat fut la décou-
verte d'une île de deux cents lieues, à
laquelle le capitaine Cook donna le nom
de Kerguelen. Lorsqu'il revint dans sa
patrie , il fut accusé par un de ses officiers
d'avoir abandonné une embarcation dans
les parages déserts qu'il avait visités , et
condamné par un conseil de guerre à être
renfermé au château de Saumur. Il obtint
ensuite son élargissement , et fil encore
quelques courses sur mer avec ses deux
fils. Kerguelen entra au service de la ré-
publique française; niais il fut compris
dans les réformes de 1796. Il réclama , et
on le nomma adjoint au ministère de la
marine, et puis commandant d'une divi-
sion de l'armée navale de l'Océan. Un
fjouvcrncment anarchique est toujours
soupçonneux , et souvent envers ceux-là
mêmes qui lui sont le plus dévoués. On
arrêta Kerguelen à Krest, au moment où
il allait s'enibarqucr, et on l'amena à Pa-
1 is. Il mourut en 1797, peu de mois après
Bvoir recouvré sa liberté. On a de lui; | Re-
lation d'un voyage dans la mer du Nord .
flux côtes d' Islande , du Groenland , de
ferro . de Schettland ; des 0/ codes et de
yzrwégejait en 1767 <?n768, Paris, 1771 ;
I flclalion de deux voyages dans les mers
australes et des Indes . fail'i en 1771 et
Mlh , "pour la vérification d'une nouvelle
route à la Chine .Var'is, 1782, in-8°; | His-
toire des événemens des guerres mariti-
mes . des causes de la destruction de la
rfua-ine française^ et des moyens d'y re-
iiiédicr; précédée de la Relation descom-
pais et dcs.évcnemens de la guerre mari-
4 keh
timc de 1778, entre la France et l'Angle-
terre, Paris, 17%, in 8".
KI:RI(Je.vn), Hongrois, embrassa l'or-
dre de Saint-Paul, premier ermite (ordre
fondé en 1213 jiar Eusèbc, évéque deStri-
gonie), et qui n'existe quà P.ude en Hon-
grie, s'y distingua par sa j)iélé et par son
7,èle apostolique. Il fut ensuite fait surces-
sivementévéquede vSirmichetdeWal/.en,
et mourut à Tyrnau fan 1685, après avoir
publié : I Fci-ocia Martis Turcici. C'est
une histoire de la guerre A\i.i Turcs ea
Hongrie de son temps ; | un Cours de phi'
losophie^ en 5 vol.
KI:RI (Fraaçoïs-Borgia), né dans le
comté de Zeniplin en Hongrie , au com-
mencement du 18*^ siècle, se fit jésuitç, et
se distingua dans celte société par la va-
riété de ses connaissances dans la pbilo-
soj)lii<; et les malbématiques, qu'il pro-
fessa, et par sa grande pieté. Il mourut à
Bude l'îin 1769. On a de lui : | une Histoire
des empereurs d'Orient, depuis Constan-
tin le Grand jusqu'au dernier Constantin,
Tyrnau, Mkk , iii-fol. , en latin , ornée de
figures et de médailles ; | Histoire des
empereurs ottomans , depuis la prise de
Constantinojde , Tyrnau, 17/i9, 9 petits
volumes. Le père Nicolas Schmith, jésuite,
a continué cette Histoire , et en a publié
2 volumes in-fol. qui la conduisent jus-
qu'en 1718. 1 Dissertations sur le vide, sur
le mouvement des corps et sur les causes du
mouvement ^Tymau, in-8". 11 contribua
beaucoup à perfectionner le télescope , et
se fil un corn célèbre ])ar ses observa-
tions astronomiques. M. Cassini de Thury
l'ayant vu à Tyrnau , admira ses talens et
le zèle qui l'animait pour faire briller
dans sa patrie le flambeau des sciences.
« Vous possédez chez vous, lui dit-il, dans
» une lettre du 15 juillet 1761, des trésors
» immenses en littérature ; vous êtes le
» Blécène des sciences. Vous avez posé des
» monumens éternels; et je désirerais que
» vous le fussiez aussi , pour le bonheur
» de la société, pour le bien de la religiou,
» et pour le progrès des sciences. »
' KERIVALA.NT (N... Le DEIST de),
maître à la chambre des lomptes de Bre-
tagne, fut auteur de plusieurs remon-
trances que cette chambre fit au roi dans
des circonstances délicates. La révolu! ion
l'ayanl prive de celle place, il se livra
tout entier à la liltéralure. Il fut un des
fondateurs de la société académique de
Nantes, qui porta d'abord le nom d'in^lilut
départemental, cl à laquelle il lui un
grand nombre de pièces de vers qu'on
KER Jl
trouve dans Jes procè.s-verLD.ux dosscan-
CCS publiques de cette société. Il a aussi
fourni des vers à divers recueils, notam-
ment à la Jfuse Brcto7ine et au Mercure
de France. Mais son principal ouvrage
est une traduction en vers des Epigram-
mes de Martial, (\\iW allait publier, quand
sa mort, arrivée en 1814, l'en a empêche.
On a encore de Kcrivalanl, outre un ou-
vrage manuscrit intitulé : Essai sur l'o-
rigine s les progrès et le génie de la lan-
gue française, A^s traductions imprimées,
parmi lesquelles on remarque plusieurs
odes d'Horace , des élégies de Tibulle ,
quelques morceaux de Catulle, et des
pièces choisies parmi les poètes italiens
et anglais, notamment V Hymne au créa-
teur de Tliompsou, et le Cimetière de
Campagne de Gray.
KEURllERDÈiÛ: ( Jeax-Gérard), né
vers 1678, à Fauquemont, petite ville du
j)ays d'Oulre-Meuse hollandais, à deux
lieues de Maëslriclit, fit de bonnes études
dans celte dernière ville, étudia la philo- j
Sophie et la théologie à Louvain, se con-
sacra à l'étude des langues savantes, de i
la critique sacrée et de l'antiquité; ensei-
gna les belles-lettres pendant phisieurs I
années , donna des leçons d'histoire au 1
collège des Trols-Langues , fut fait hislo- j
riographc de l'empereur Joseph \" , eu
i708 , et mourut le 16 mars 17.'58. On a de '
lui : I Sijstema apocalyplicum , Louvain,
1708, in-12 : c'était comme un es.sai <i'un
ouvrage plus considérable, qu'il inlilula :
De nionarchia Rornœ paganœ sccunduin
concordiam inter sanctos prophctas Da-
nielcm et Joannem : consequens historia
a monarchiœ conditoribus , usque ad iir-
bis et imperii riiinam. y/ccessit soies
historice apocabjplicœ . Louvain, 1727,
in-12 {voyez GUYAUX); | Prodromus
danielicus t sive novi conatus liislcriri ,
critici:. in celchcrrimas difficxdtulcs his-
toria; veteris Testanienti, inonarchiaruni ;
yisiœ ^ etc. . ac prœcipue in Danielem \
\trophetam , Louvain, 171 1, in-12. L'éru- j
dilion est répandue à pleines mains dans j
CCS deux ouvrages ; les hypothèses qu'on
y propose ont de grandes vraisemblances,
tt jettent beaucoup de jour sur les difli-
cullés historiques, chronologiques et géo-
graphiques de l'Ecriture sainte. | De situ
paradisi ferrestris . Louvain, 1731, in-12.
11 place le paradis terrestre un peu au-
dessus de la Bubyloisie, prend pour le
Phison le bras occidental de l'Euphrate,
jusqu'à son embouchure; et pour le Ge-
hon, le bras oriental du même fleuve.
n KER
depuis la ville de C.ippara, où il se niéle
à un bras du Tigre, jus(ju'à l'emliinicluire
du même Tigre, près de la ville et l'ile
de Charax : ce système différent de celui
delluet est peut-être aussi i)robable. Kcr-
kherdèrc a fait précéder ce traité du Co-
natus novus de Ceplia reprehenso , où il
soutient que ce Céphas est diiférent de
saint I'ierre.(/^^oyezCÉPHAS.) On trouve
encore dans ce volume une Disscrtaliun
sur le nombre des années pendant les
quelles le Sauveur a instruit le peuple
et une autre intitulée: J)e Ceplia ter cor
repto. I Grammatica lalina ^ Louvain
1706, in-12 de 117 pages, où il y a plus
d'érudition que dans la ])lu[)art des
grammaires, même volumineuses; ( un
grand nombre de Poésies latines, qui lui
assurent uiie j.lace distinguée sur le Par-
nasse ; I plusieurs ouvrages manuscrits,
entre autres: Quatuor œtates , (\u\ , s"\\
avait été imprhné, aurait pu éclaircir
plusieurs endroits de la Genèse; Ojyus
quatuor mona?c hiai-um, auquel le Mo-
narchia Jiomœ paganœ devait servir de
4*^ partie ; un Traité des 70 semaines de
Daniel , qui était entre les mains du cen-
seur lorsque l'auteur mourut.
REULEREC ( Lotis BILLOUART de),
L'rigadier des armées navales de France ,
gouverneur de la Louisiane , né à Quim-
per, en 1704, s'est acquis une considé-
ration distinguée par sa probité cl la vi-
gueur de son administration dans un pays
lointain, où l'esprit des lois et les intérêts
de l'état ne peuvent se suuienir que par
la fermeté et la vertu. De retour en
France, en 1 764 , après que la province
dont il était gouverneur eût été aliénée
par le traité de 1763, il acquit restimc de
ce qu'il y avait de plus respectable à Ver-
sailles et îi Paris. Le dauphin, fils de
Louis XV, et la reine, lui témoigncrenl la
])îus grande coniiance. Mais la franchise
avec laquelle il s'exprima sur des ma-
tières d'état, el surtout sur la destruction
des jésuites, lui lit un ennemi puissant
dans la personne du ministre Choiseul,
([ui, après avoir suscité contre lui divers
accusateurs, lui défendit de leur répon-
dre, sous prétexte que sa culpabilité était
trop évidente. En août 1769, le conseil
des déiiêchcs exila l'ancien gouverneur,
avec 1 honorable témoignage par lequel
on reconnaissait en lui des services nù-
litaires distingués cl dignes d'éloges , de
grands talens pour l'administration, une
jirobité intacte et sans reproche. En 1779,
il était parvenu à confondre ses adver-
KÉR
lie
KER
taircs, et à trioiripher avec éclat, lorsqu'il
mourut à Paris, au mois de septembre de
la môme année.
* KERU (Robert), chirurgien et natu-
raliste écossais , n'est connu que par ses
ouvrages. Plein d'estime pour nos savans,
il a transporté dans sa lan{jue maternelle
i:n grand nombre de productions fran-
çaises : ainsi il a traduit | les Elèmens de
chimie de Lavoisici- , 1793, in-8"; | V Essai
sur la nouvelle méthode du, blanchiment
par Vacide inurialique oxigènè de Ber-
Iholetf I V Essai sur la théorie de la terre
par Cvvicr. Cet ouviage posthume a paru
tn 1815 ])ar les soins du professeur Ja-
meson qui y a ajouté une introduction et
des notes Les autres ouvrages de Kerr
sont le Rè(/7ie animal ou système zoolo-
gique de Linnée^ 1792, in-i° ; | Histoire
naturelle des quadrupèdes et des serpens,
h volumes in-S" ; | Mémoire de la vie de
M. jniliam-Smelli . 1811, 2 vol. in-8° ;
j Histoire de l'Ecosse durant le règne de
Robert Bruce, 1811, 2 vol. in-8''. Kerr
avait commencé une collection générale
des voyages qui devait avoir 18 vol. in-8°.
Il était membre de la société royale et de
la société des antiquaires d'Edimbourg :
il mourut dans cette dernière ville en
i814.
• KERSAIAT ( AnjiAXD-Giii-Sniox) ,
capitaine de vaisseau, d'une famille noble
de Bretagne , naquit à Paris vers 1741.
Après avoir servi dans la marine avec
lionneur, et obtenu le grade de capitaine
de vaisseau, il embrassa la cause de la
révolution , et se montra un des plus ar-
dens propagateurs des nouveaux prin-
cipes. Dans le mois de septembre 1791, il
fut nommé administrateur du départe-
ment de Paris dont il présida le corps
électoral, et membre suppléant de l'as-
semblée Législative oij il remplaça Mos-
neron. Il j)arlagca les opinions d^s répu-
blicains les plu.i déterminés, et se ranj^jea
du parti des Girondins. 11 dénonça le 2.j
juillet 1792 le pouvoir exécutif, pour n'a-
voir pas fait déclarer la guerre à la Sar-
daigne. Il demanda même que sa dénon-
ciation fût renvoyée à une commission
extraordinaire, pour examiner si le roi
n'avait pas, à cette occasion, encouru la
déchéance. S'il ne proposa pas des me-
sures violentes, il n'osa pas les combattre,
«m il les appuya. Témoin des affreuses
journées des 5 et G octobre 17S9 , de colle
du 18 août 1791, etc., et de la plus funeste
de toutes, celles du 10 août 1792 , tant de
Itrribles événernens lui dessillèrent enr=^-
les yeux. L'emprisonnement du roi aclieva
de l'éclairer sur le véritable état des choses,
et il frémit des dangers qui menaçaient
Louis XVI au commencement de 1793. Il
vola le 16 janvier 1793 pour la réclusion
jusqu'à la paix, et le 20 il écrivit au pré-
sident de la Convention la Icllrc suivante,
oîi , en blâmant sa conduite passée , il
disait entre autres choses : « Si un en-
» chaînement d'erreurs m'a réduit à être
» le collègue des panégyristes et des pro-
» moteurs des massacres de septembre,
» et de tous les excès qu'on a commis dans
» le cours de la révolution , je veux au
» moins tâcher de défendre ma mémoire
» du reproche d'avoir été leur complice;
» et il ne me reste plus qu'un moment :
» demain il ne serait plus temps; ainsi,
» monsieur, acceptez ma démission; je
» ne fais plus jiartie du corps que vous
» présidez. » Cette lettre répandit le tu-
multe parmi tous les membres de l'as-
semblée. On dénonça Kcrsainl comme
traître et ennemi de la république. Mandé
à la barre, ilse défendit (22 janvier) avec
fermeté. Soit quason discours fit quelque
impression , soit que les factieux portas-
sent alors leur attention sur une affaire
plus grave, la mort de Louis XVI , Ker-
sainl eut le temps de quitter Paris, et de
se cacher dans une obscure retraite; mais
il y fut découvert, arrêté et conduit à Pa-
ris. Le tribunal révolutionnaire le fit traî-
ner à l'écliafaud, le h. décembre 1793 : il
avait alors 52 ans. Victime d'une cause
qu'il avait défendue avec tant d'ardeur ,
Kersaint eut le bonheur de réparer, par
un noble dévouement , ses erreurs pas-
sées. Plus heureux encore, s'il put abjurer
les doctrines philosophiques qu'il avait
eu le malheur d'embrasser ! Il avait pu-
blié, avant la révolution, un opuscule
intitulé Le bon sens, 1788, in-S", dans lc«
quel il attaquait les privilèges , et même
l'existence des deux premiers ordres de
l'étal. On a encore de lui quelques autres
ouvrages : | Institutions navales , ou pre*
mières vues sur les classes etTadmifiistra-
tion maritime, 1790, in-8°; | Considéra^
fions sur la force publique et l'institution
des gardes nationales , 1790 ; | Lettre en
réponse à M. Alex. Lamelh; | Le Rubi-
con. par l'auteur du Bon sens. 1789, in-S".
Kersaint a concouru avec Condorcet, Du-
pont de Nemours, etc., à la rédacUon du
Journal de la société de 1789.
• KERVELEGAIM ( Auguste-Bernaro-
François le GOARRE de ), député aux
(>i..<'c_£rônéraux et à plusieurs des asscm-
KER
117
KES
l)lccs lotîislalivcs de France , naipiil i\
Qiiiini>er le 2'.) septembre ilklj. Avant la
révolution , il clail sénéchal du présidial
de cette ville , où il fut élu député aux
états généraux . en ^789 ; à peu près à
relte époque il publia un écrit intitulé
Réflexions d'un philosophe breton sur les
affaires présentes. Il parla peu dans l'as-
semblée Constituante, mais il fut membre
lie la fameuse réunion révolutionnaire
connue sous le nom de comité breton^ qim
formèrent à Versailles les députés du
tiers-état de sa province , et auxquels se
joignirent tous les démafjogues riu jour.
Kervelegon fit ensuite partie du comité
chargé de l'aliénation des domaines natio-
naux , dans lesquels n'étaient alors com-
jiris que les biens ecclésiastiques. Il eut à
soutenir plusieurs débats avec différens
membres qui n'étaient pas de son avis,
et apportaient une sage modéiation dans
cette inesurearbitraire: à celle occasion,
Kerveleyan se battit au pistolet avec le
vicomte de Mirabeau, frère du fameux
Mirabeau, député du tiers-état , et il le
blessa. Jusqu'alots il n'avait professé
que desopiivjons exaltées; mais après le
voyaj^îe de Varenues, il changea de système,
et se montra purement constitutionnel. Le
département du Finistère l'ayant nommé
à la Convention , il vota , lors du procès
de Louis XVI, pour la détention et le ban-
nissement à la paix. Il était attaché au
parti delà Gironde , avec lequel il vola
constamment. Ce fut Kerveleyan qui, le
premier, dénonça, en décembre 1795, le
journal incendiaire de Marat. La nou-
velle commune de Taris s'était violem-
ment installée, le 10 août 1792, dans l'hô-
tel-de- ville, après en avoir chassé les
membres de l'ancienne coinmune, moins
révolutionnaires ou plus modérés. C'est
dans cette même journée que Louis XVI
fut attaqué dans son propre palais des
Tuileries, d'où il passa à la tour du Tem-
ple, et de là sur l'échafaud. La commune
empiétant de jour en jour sur tous les
pouvoirs, la Convention forma , le i8 mai
4793, une couuuission de douze membres,
parmi lesquels fut nommé Ker>elegan,
et qui devait faire la recherche des com-
plots tramés par Robespierre et ses com-
plices. Mai.s le parti des Montagnards, sa-
tellites de la commune, l'emporta sur ce-
lui des autres mcml)resde l'assemblée, et
le 31 du même mois, un décret de pro-
scription fut prononcé contre les Giron-
dins. Kervelej',an avait prévu ce coup, et
et dès le 28, coniointcmcr.l avec plusieurs
ruembrcs de la Gironde, il avait donné
sa démission; mais cette jjrécaution n'em-
péclia pas qu'on ne le mit hors la loi avec
ses autres collègues. Il put néanmoins se
soustraire aux poursuites, et se cacher
dans son département, où il facilita même
un asile à quelques autres proscrits. Ceux-
ci, obligés entin de quitter la Bretagne,
furent arrêtés près de Bordeaux , et tom-
bèrerjl la plu])art , sous la hache de Ro-
bespierre. Ce m.uslre ayant ])éri à son
tour sur l'échafaud, le 9 thermidor (28
juillet 1794 ) et sa chute ayant enlraiii6
(elle des Montagnards. Kervelegan rentra
dans la Convention , et de\"'lnt membre
du comité de sûreté générale. Les jaco-
bins, qui étaient encore en grand nom-
bre, ne se tinrent pas pour battus, et our-
dirent la révolution du \" prairial ( 20
mai 179G ). Ils attaquèrent la Convention ;
niais ils furent vaincus à leur tour et en-
suite désarmés. JKervelegan se battit, et
fut blessé dans cette journée, où le député
Ferraud fut assassiné et sa tète placée sur
le bureau du président iîoissy-d'Anglas.
Nommé en sejilembre 17'J6, au conseil
des Anciens, Kervelegan passa, au mois
de mars 1799 , à celui des Cinq-cents . ad-
héra à l'établissement du consu'al , et
sous rem|)ire il fut élu au corps législa-
tif. Il y était encore en 1815, lorsque
cette assemblée fut dissoute au retour
des Bourbons. Depuis cette époque, Une
se mêla plus d'affaires publiques, et vécut
retiré dans ses propriétés, où il est mort,
le 24 février 1825 , âgé de quatre-vingts
ans.
RERVILLARS ( Jean-Makix de ) , jé-
suite, né à Varmes en 1668, mort en 1745,
à Paris , où il professait la philosophie ,
avait du goût et de la littérature. Nous
avons de lui une assez, bonne Traduction
des Fastes et ElégiesdOvide, 5 vol. in-12,
1724, 1726 et 1742. Il avait travaillé quel-
que temps aux Mémoires de Trévoux.
KESLtU ( André ), théologien luthé-
rien, pensionné par Jean-Casimir, duc
de Saxe, naquit à Cobourg en 1595, et
mourut en 1645, avec la réputation d'un
bon prédicateur et dun assez bon ronlro-
versiste. Il laissa une Philosophie ^ en 3
vol. 111-8", dont on ne parle plus ; et des
Commentaires sur la Bible, in-4''.
* KKSSI:L( Jea\ van ) , célèbre pein-
tre, né à Anvers en 1626 , excellait à pein-
dre les fleurs , les oiseaux et les insectes.
Ses tableaux sont rares et chers. Le musée
royal possède deux tableaux de ce maitre ;
ce sont deux guirlandes de fleurs et de
KET
118
KHA
fruits dont l'une entoure déjeunes enfans
soufflant des huiles de savon ( les figures
sont de Téniers ) : et dont l'autre encadre
la vierge, l'enfant Jésus et deux anges
\{ les figures sont de Frank le jeune ). Ce
•peintre recherchait trop le fini : il en ré-
sulte quelquefois de la sécheresse. — Son
fils, Ferdikano van , né à Bréda en ICGO,
peignait dans le même genre que son
père , mais il ne l'égalait pas ; il fut pre-
mier peintre de JeanSobieski, roi de Po-
logne. On distingue parmi ses tableaux
les 4 élémens et les h parties du monde.
Le musée rq^al possédait de lui un lièvre
mort et des racines ; mais ce tableau fut
revendiqué en 1815 par le duc de Brun-
swick.
* KETEL ( Corneille ) , peintre, né à
Gouda en 1548, vint jeune en France , et
se vit obligé à l'époque des troubles re-
ligieux qui signalèrent le règne de Char-
les IX de passer en Angleterre où ses
productions furent généralement esti-
mées ; il revint ensuite en hollande où
il mourut vers 1610. Il excellait dans le
portrait. Il peignit la reine Eliy.abelh, le
comte d'Oxford et les principaux person-
nages delà cour. Sa réputation était telle
qu'il pouvait à peine suffire à toutes les
demandes qui lui étaient adressées. Par
une bizarrerie singulière ou pour aller
plus vite , il se mit à peindre , sur la fin
de ses jours, avec ses doigts au lieu de
pinceaux , et il fit d'assez bons tableaux.
KETT ( Guillaume ) , chef dune ré-
bellion sous Edouard VI roi d'Angleterre,
était fils d'un tanneur et tanneur lui-
même. Son esprit était au-dessus de sa
naissance ; il était délié , souple , rusé ,
plein de hardiesse et de courage. S'étant
mis à la tête du peuple de Norfolck , il
s'empara de la ville de Norw^ich ; mais le
duc de Warwick, ayant eu ordre de mar-
cher contre lui , le prit et le fit pendre à
un chêne , avec dix des principaux com-
plices de cette révolte.
KETTLEWELL (Jean), théologien
anglican , né dans la province d'York ,
mort de consomption en 1695 , est connu
dans son pays par plusieurs ouvrages,
dont le plus célèbre est intitulé : Les
mesures de l'obéissance chrétienne. Les
Anglais républicains ne trouvent pas ces
mesures tout-à-fail exactes. L'auteur était
zélé royaliste. Il avait dédié son livre à
Compton, évêque de Londres, partisan
de l'autorité royale comme lui ; mais ce
prélat ayant changé de sentiment, et s'é-
tant mis à la tête d'un régiment de gen-
tilshommes contre leur prince , Kcltle-
well fit ôler la dédicace.
KEIILEN. rotjez VAN KEULEN.
KEYLER ( Jean-Georges ) , antiquaire
allemand , né à Thornau , dans l'électoral
de Hanovre en 1689, voyagea en France,
en Angleterre , en Suisse , en Italie , en
Hollande , en Allemagne, en Hongrie, et
se fit estimer par son érudition. Il fut
trouvé mort dans son lit eu 1743, dans
une terre appartenante à M. de Born-
slorff, premier ministre du roi d'Angle-
terre, dans l'élcctorat d'Hanovre. Il avait
accompagné les petits-fils de ce seigneur
dans leurs voyages, et il en a écrit la re-
lation sous le litre de Voyage iJistructif
très détaillé en Allemagne , etc. Cet ou-
vrage a été traduit en anglais sur la 2"
édition, Londres. 1756. 4 vol. in-ii'', et in-8"
avec fig. Son principal ouvrage fut publié
en 1720 à Hanovre, sous le titre 6'Jnli-
quitates sélect ce septentrionales et celticœ»
in-8°. On y voit une grande connaissance
des antiquités. Keysler était membre de
la société de Londres depuis 1718.
* KilADYDJAII, première femme du
faux prophète Mahomet. Elle naquit l'an
564 de notre ère et était fille de Khowaï-
led, homme très considéré dans la tribu
des Coraïchites, et était une des riches
marchandes du pays. Khadydjah deve-
nue veuve de deux maris , avait déjà at*
teint sa quarantième année. Elle avait
pour facteur le jeune Mahomet , âgé do
vingt-cinq ans , et qui passait pour avoir
de l'intelligence ; mais, dépourvu de for-
tune, il attendait tout de son oncle, Abou-
Thâleb. Envoyé en Syrie par sa maîtresse,
qui lui avait donné pour compagnon un
esclave affidé, il vendit très avantageu-
sement ses marchandises à Damas , et en
rapporta d'autres qu'il débita avec un
égal succès à la Mecque. Khadydjah, très
contente de son facteur, qu'elle aimait
d(\jà. lui donna le triple de la somme qui
lui revenait pour sa spéculation commer-
ciale. Ce voyage eut, pour Mahomet, un
plus important résultat. Ambitieux , en-
treprenant et adroit, il avait déjà formé
un plan pour s'élever au-dessus du com-
mun des hommes, et il y réussit en les
trompant. Soit que pendant le voyage il
eût ébloui , par des récils merveilleux ,
l'ignorance de l'esclave qui l'accompa-
gnait ; soit qu'il l'eût séduit en lui pro-
mettant une récompense, celui-ci ne ces-
sait do raconter les prodiges que Dieu
avait opérés , pendant la route, en faveur
de Mahomet. L'imposteur se fit voir, en
KHA
H9
KHE
rsvcnaiil chez Khadydjah, au milieu de
deux anjes qui le couvraient de leurs
niles, pour le garantir de la chaleur du
jour. Khadydjah lit , de sa terrasse , re-
marquer ce miracle à deux feinmes qui
se trouvaient avec elle, et depuis ce temps
elle témoigna à Mahomet un respect di-
gne de celui qu'elle appelait Y£nvot/é de
Dieu. Malgré ce respect, au bout de deux
mois , elle se servit du même esclave
pour annoncer à Mahomet son désir
d'être sa femme. La réponse du facteur
nepoilvail que lui être favorable; cepen-
dant elle lui envoya un second message ,
avec un écrit contenant ces mots : Epou-
sez-moi. Le jour des noces fut lixé : Abou-
Thâleb vint chez Kliadydjah, suivi des
chefs de la tribu des Choraichites;il unit
son neveu avec Khadydjah, qui eut pour
douaire vingt jeunes chameaux femelles.
Elle fut la première femme de Mahomet ;
tant qu'elle vécut , il n'en épousa pas
d'autres. Il eut de ce mariage huit gar-
çons, qui moururent en bas âge, et quatre
iilles, dont l'ainée Falimeh, favorite de
Mahomet , est encore en vénération
parmi les Musulmans. Ce fut Khadydjah
qui mit en vogue la prétendue mi-^sion di-
V ine de Mahomet : elle racontait à ses am is,
à ses parens et à toute la tribu, les conver-
sations qu'elle disait avoir entendues en-
tre l'ange Gabriel et Mahomet , et notam-
ment celle où l'ange gardien lui avait dit:
Tu es le prophète de celle nation. Un
matin, au sortir de la couche nuptiale ,
Mahomet conduisit Khadydjah auprès
d'une fontaine, qu'il avait fait jaillir en
frappant la terre de son pied . et , après
s'y être purifiée, elle lit sa prière debout,
se prosterna deux fois , à l'exemple de
Mahomet, qui institua ainsi les ablutions
pratiquées ensuite par les Musulmans ,
avec les mêmes cérémonies. Ils regardent
Khadydjah comme leur mère , la citent
comme le modèle des épouses, et l'invo-
quent dans leurs pressans besoins. Elle
mourut, l'an 628 de notre ère , âgée de
soixante-cinq ans , après une union de
vingt-quatre ans et demi. Mahomet avait
alors cinquante ans, et avait su répandre
dans presque tout lOrienl sa fausse doc-
trine, établie moins par ses faux miracles
que par le fer et le feu. Il montra tou-
jours une grande tendresse pour sa
femme, et en parlait souvent après sa
mort ; ce qui excitait la jalousie de ses
auires épouses, et surtout d'Aïcliah , qui
lui dit un jour : « Celle que vous vantez
» et que vous regrettez était veuve et
» vieille , et Dieu l'a remplacée par une
n épouse jeune et vierge , qui doit vous
» plaire davantage. » — « Non, répondit
« brus(iuement Mahomet ; Khadydjah a
» cru en moi quand tous les hommes
« m'accusaient de mensonge et d'impos-
» tare ; elle fut généreuse envers moi
« lorsque tout le monde me persécutait. »
Mahomet. p.our témoigner sa reconnais-
sance envers Khadydjah , la plaça au
nombre des quatre femmes qu'il appelait
prédestinées . savoir : Jcyt. épouse de
Pharaon; Mariùm., lille d Omrau et sœur
de Moïse ; Khadydjah , lille de Khowaï-
led, et Falimeh, S^Mk. de Mahomet. Pour
augmenter encore davantage la vénéra-
tion de ses sectaires envers sa femme , il
leur fit accroire que, peu avant la mort
de celle-ci , l'ange Gabriel était venu lui
dire : « Puisque Khadydjah l'a enrichi
» de tous ses biens quand tu étais dans
» l'indigence, salue-la de la part de Dieu
• et de la mienne , et annonce-lui qu'on
» lui prépare un palais bâti dans le ciel ,
» et où elle n'éprouvera ni douleurs ni
» soucis. )» D'après ce que nous venons
de dire, on i)eut aisément conclure que
la secte absurde que suivent tant de mil-
lions d'hommes, doit son commenccmeijt
aux rêveries et aux faux rapports d'un
esclave, et à l'hypocrisie ou à la crédu-
lité d'une femme éprise de celui qu'elle
proclamait comme un envoyé du Ciel,
à un peuple superstitieux et slupide.
IvHA.XGIIl , empereur de la Chine.
royez KANG-m.
' KIÎL\.J\-LOLIi\G, en chinois protection
céleste ^ empereur de la Chine , né en
1709, monta sur le trône en 1753 , après
la mort de son père , Young-Tching , et
fut le troisièuje empereur de la dynastie
des Mandchous, actuellement régnante. Il
se montra d'abord ami du la justice , et
son premier acte de souveraineté fut de
rendre la liberté à plusieurs princes de
sa famille, qui avaient été mis en prison
ou envoyés en exil au commencement
du règne de son prédécesseur. Mais il
obscurcit cette belle action et d'autres
traits de clémence que nous pourrions
citer de lui, par les persécutions cruelles
qu'eurent à subir les chrétiens. Pour ter-
miner les querelles qui existaient entre
deuxprinces tartares.Dawadji elAmour-
sanan, il entra , en 17oG , dans leur pays
avec une puissante armée, et lit couron-
ner Amoursanan; mais ce prince , s'ctanl
bientôt aperçu qu'il ne régnait que comme
tributaire de la Chine, se révolta; et fui
Kni
i20
KHI
vainqueur par la défection des Tarlares
qui servaient dans l'armée des Chinois.
Ceux-ci furent plus heureux dans leur
seconde expédition , et Amoursanan ,
battu par le {{encrai Tchao-hoeï, fut obligé
tle fuir «n Sibérie , où il mourut peu de
temps après de la petite vérole. Khian-
Loung, n'ayant pu le saisir vivant , vou-
lait au moins avoir son cadavre La cour
de Russie en refusa l'extradition , et se
borna à le faire montrer aux délé{;ués de
l'empereur. Par la chute et la mort d'A-
iiioursanan, Khian-Loung agrandit son
empire des vastes pays appartenant aux
Tartares, de ceux habités par les Musul-
mans , et devint ainsi mailre d'une im-
mense portion de l'intérieur de l'Asie.
Fier de ce triomphe, Khian-Loung remit
en usage les anciennes cérémonies, qu'on
pratiquait quand les armes chinoises
avaient triomphé des ennemis. On éleva
à dix lieues de Pékin, et sur Ja route par
où devait passer le général vainqueur ,
un autel à la victoire , à côté duquel se
Iroiivait une tente magnifique. L'empe-
reur, suivi de toute la cour et de ses
principaux officiers, mil pied à terre de-
vant l'autel , et alla à la rencontre de
Tchao-liocï; il lui fit un gracieux compli-
ment, rendit avec lui grâces à X Esprit
de la vicloircj et conduisit ensuite le gé-
néral dans sa tente, où de ses propres
mains il lui présenta tme tasse de thé. Le
général voulut, d'après l'étiquette , rece-
voir à genoux la tasse ; mais , d'après
l'éliquelle aussi, l'empereur s'y opposa el
le releva. Après cette cérémonie, le cor-
tège .reprit sa marche : le général, cou-
vert de son casque et de sa cuirasse, mar-
chait à cheval, un pas en avant de l'em-
pereur, qui, assis sous un superbe dais,
était porté par six mandarins. Le jour où
l'empereur atteignit sa cinquantième
année ( en 1761 ), il y eut à Pékin de
grandes fêtes ; elles furent plus magnifi-
ques encore six an» après , lors de la fa-
meuse cérémonie 4u labourage, où l'em-
jiereur, comme on sait, pour encourager
Tagricullure , conduit une charrue , et
fait un sillon. En 1770 la tribu Mongole
écs Tourgots établie sur les bords du
Wolga, vint, à travers mille périls, s'of-
frir à la domination Chinoise ; d'antres
tribus suivirent cet exemple. Cet événe-
ment fut regardé par les Chinois comme
le plus heureux ; la rentrée de ses anciens
sujets et l'arrivée des Tourjwts eurent
lieu le jour même où l'on célébrait le
fjualrc- vingtième anniversaire de l'im-
péralrice-mère ; l'empereur fêta ce dou-
ble événement par un discours qu'il
composa en mandchou, et que l'on tra-
duisit en chinois, en mongol et en thibé*
tain. Cette pièce d'éloquence fut (i) gra-
vée sur une pierre que l'on plaça dans
un temple dédié à Fo ou Foé, et sur une
colonne élevée sur les rives de l'Ile, ileuve
qui donne le nom au pays des Tourgots.
Le reste de cette nation , formant 200
mille âmes, arriva en Chine l'année sui-
vante. Son chef fut appelé à la cour par
Khian-Loung, qui le comlila d'honneurs.
L'n autre événement, regardé aussi comme
très glorieux par les Chinois, fut la ré-
duction, en 1777, des Miao-Tseu , nation
de race thibétaine, et qui demeurait sur
des montagnes escarpées. Les Miao-Tseu
avaient de fréquentes rixes avec les offi-
ciers chinois en garnison dans leurs fron-
tières, ce qui leur faisait donner le nom
de brigands. Khian-Loung voulut à tout
prix les soumettre , el envoya contre eux
le général Akhoui, qui, en un an et demi,
ne put avancer que de dou/.e' lieues dans
ces montagnes sauvages, où il était coa-
traint de livrer à chaque instant un com-
bat. Etant parvenu à faire monter l'ar-
tillerie sur les rochers de Miao-Tseu , il
prit le Ruisseau-d'Or , nom de leur ville
capitale ; s'empara ensuite de Kara'i ,
forteresse élevée sur des rocs, et jusqu'a-
lors jugée inexpugnable. Repoussés jus-
qu'à leurs derniers retranchemens , les
Miao-Tseu , hommes, femmes, enfans,
tous armés, livrèrent leur dernier com-
bat, furent vaincus et presque tous ex-
terminés.. Les princes, les chefs, ce qui
restait des guerriers de ce malheureux
peuple, fut conduit dans les fers , à Pé-
kin, et mis à mort par ordre de l'empereur.
Non content de cet acte barbare et d'un
triomphe aussi sanglant, il le célébra par
un chant en vers mandchous composés
I)ar lui-même. Il parait que le ciel vou-
lut punir Khian-Loung de son atrocité ;
car il perdit en peu de temps sa mère,
son premier ministre, homme d'un grand
mérite , el son fils aîné, le prince héré-
ditaire , qu'il aimait tendrement. Malgré
son grand âge , il se livrait à toutes les
plus minutieuses cérémonies des Chinois,
et il eu exigeait la pratique de tous ses
sujets. Lorsque ses infirmités |e rete-
naient chex lui, et qu'il ne pouvait rem-
plir ces cérémonies, il s'en justifiait par
(i) Elle * rlc traduile par le p?rc Aroyo». «Ion ]■
Xiovit *u tum. I Je ici JUem. tur li i C'fOiê.
Km
âes maiùfestes publics. Il apportait la
même assiduité aux affaires de l'état ; et,
quoiqu'il eût 80 ans , il se levait avant le
solt'il ou même pendant la nuit , pour
donner audience ou pour tenir conseil
avec ses ministres. Une vie aussi labo-
rieuse dans un souverain et vm vieillard
si avancé en âge étonnait les ambassa-
deurs étrangers et les missionnaires qui
l'approchaient : car ces pères étaient
rentrés en grâce auprès de l'empereur ,
qui toléra de nouveau les chrétiens. Dans
le cours de son règne , il visita six foix
les vastes provinces du midi ; et, à l'occa-
lion de son anniversaire ou de celui de
sa mère , il accorda cinq fois la remise
générale de tous les impôts , qu'on ac-
quitte en or ou en argent, et trois fois celle
des droits qu'on paie en nature, sans
compter les remises faites à différentes
provinces, ni les secours distribués aux
pauvres coftsislant en plusieurs milliers
d'onres d'or et d'argent. Il fit construire
des digues pour contenir la mer , fit ré-
gler le cours des grands fleuves, l'Hoang-
ho et le Kiang, et sut maintenir une lon-
gue paix dans ses états, qu'il agrandit par
de rapides conquêtes. Il réprima l'orgueil
des grands, et son règne fut encore illus-
tré par les ambassades que lui envoyèrent
la Grande-Bretagne et la Hollande. Son
caractère était ferme, son esprit péné-
iranf ; il se plaisait à rendre justice au
plus humble de ses sujets. Cependant ces
qualités furent ternies par ses mesures
violentes contre les chrétiens, mesures
qu'il parut cependant désavouer dans la
suite, et par le sang des infortunés Miao-
Tseu qu'il fil répandre. Il avait désiré
jouir d'un règne aussi long que celui de
son aïeul Khan-Hi , et avait fait serment
d'abdiquer quand il serait parvenu à ce
terme : il tint parole , et, le 8 février 1796
il remit la couronne à son fils , et se re-
tira des affaires. Khian-Loung vécut en-
core trois ans, et mourut, le 7 février
1799, après un règne de 64 ans. Il était sa-
vant, littérateur et poète , et a laissé plu-
sieurs ouvrages très estimés parmi les
Chinois, tels que V Histoire de la conquête
du royaume d'Olet{ 1735), La Transmi-
gration, des Tourgols, La Réduction des
Miao-Tseu , pièce en vers, et une autre
Pièce en vers sur le thé. Ces trois mor-
ceaux , traduits par le père Amyot ( les
deux premiers dans ses Mémoii-es sur les
Chinois , tom. 1"" , et le 3*= séparément )
furent gravés sur des pierres par l'ordre
de l'empereur et placés sur des monu-
J2i KHI
mens qu'il faisait élever pour éterniser
les événemens glorieux de son règne. II
composa en outre un Eloge de laville de
Moukden, en vers, que Yoltaire célébra
dans une Epitre dédiée à Khian-Loung.
Un Abrégé de Vhistoire des Ming ; une
Collection en cent volumes de monumcns
chinois, anciens et modernes , avec des
Explications rédigées par l'empereur et
autres savans et artistes chinois ; uu
Choix de ce qu'il y a de mieux dans la
littérature chinoise, qui était très avant
ce en 1787, et qui devait contenir en
tout 180,000 volumes ; une Edition ma-
gnifique du Thoung-Kian-Kang-Mou eu
chinois ; une Rédaction soignée du Mi-
roir_. c'est-à-dire , d'un dictionnaire uni-
versel des mots mantchous et chinois,
accompagné d'un Index et de supplémens
qui contiennent les mots nouveaux in-
ventés par l'empereur lui-même , pour
exprimer les idées nouvelles que les Tar-
tares ont acquises dans les livres et le
commerce des Chinois : ces mots sont
en mantchou avec la traduction en chi-
nois. Non seulement les nationaux, mais
les étrangers eux-mêmes admiraient les
grands talens de Khian-Loung : ceux qui
l'ont connu en font le plus grand éloge ,
et l'on trouve , en tête des Mémoires sur
les Chinois^ et au bas du portrait de l'em-
pereur , ces vers composés par les mis-
sionnaires :
Occcpé tans telâebe à tons les soîns divers
D'un gouvernement qu'on admire ,
Le plus grand potentat qui soit dans l'unîvert
£st le meilleur lettre' qui soit dans son empire.
Le père Amyot a aussi rendu en français
\ Eloge de Moukden ^ et cette traduction
a été publiée en 1770 , avec des Noies,
renfermant, entre autres choses, trente-
deux sortes de caractères chinois , ce qui
prouve d'ailleurs l'abondance unique de
celte langue, dont la connaissance la
la moins imparfaite exige toute la vie
d'un homme , et les études el l'applica-
tion assidue d'un savant.
KIIILROFF ( le prince Aivdp.ë Jacob
Levitch ), historien russe, ambassa-
deur en Suède, y fut retenu prisonnier,
lorsqu'on 1700 Pierre I" commença la
guerre contre Charles XII. Il tâcha de
se désennuyer en composant pendant sa
détention un Abrégé de l'histoire russe^
qui se termine à la bataille de Pultawa.
Ce petit ouvrage est estimé chez les
Russes, et a été imprimé en 1770 à Mos-
cou , in-8°. Il mourut dans la prison de
11
KÎL
i23
Kim
Vesicras en 1718, lorsqu'il était sur le
point de recouvrer sa liberté.
KHIIIVU AT. Voyez KUNRAT H.
KIDDER ( Richard ) , prélat anglais ,
né en 1G49 à Suffolk, d'abord ministre à
Londres, doyen de Pélerborough , en-
suite évêque de Balh et de Wels, fut
écrasé dans son lit avec sa femme par la
chute d'une cheminée, qu'une grande
lempèle renversa le 26 novembre 1703.
Ce jirélat était profondément versé dans
la littérature hébraïque et rabbinique.
On lui doit : | un savant Commenlaire
sur le Pentateuque, avec quelques Let-
tres contre Jean Le Clerc, 169i, en 2 vol.
in-8° ; | vme Démonstration de la venue
du Messie, en 3 vol. in-8°, 1684-1700;
j des Ouvrages de controverse ; \ des Li-
vres de morale; \ des Sermons.
* KIERIAGS (Alexandre) , peintre de
paysages , né à Ùtrecht en 1590 , mort en
i6i6, a imité la nature avec une rare et
scrupuleuse exactitude. Ses tableaux sont
d'uu fini parfait. Il s'attachait à rendre
jusqu'à l'écorce , jusqu'aux plus petites
libres des arbres. Il travaillait ordinaire-
ment avec Poëlembourg, qui se chargeait
de peindre les ligures de ses tableaux.
KILIAIV , ou van KIEL ( Corneille ),
savant laborieux, né à Duffel, près de Ma-
lines, avant le milieu du 16' siècle, mort
dans un âge avancé en 1607, fut pendant
cinquante ans correcteur de l'imprime-
rie de Plaiilin, qui dut une partie de sa
gloire à son attention scrupuleuse. Nous
avons de lui : | Etymoloyicum linguœ
teutofiicœ^ Anvers , 1588 , in-8°. C'est un
dictionnaire flamand-latin, le premier
qui ait été fait avec soin ; Juste-Lipse en
a parlé avec éloge L'auteur y compare
les mots teuloniques avec ceux des lan-
gues italienne , française , espagnole, an-
glaise , grecque et latine , qui ont quel-
que ressemblance , pour en découvrir les
étymologies. Gérard Hasselt en a publié
une nouvelle édition enrichie d'additions
importantes, Utrecht, 1777, 2 vol. in-4°;
I une traduction en flamand des Mé-
moires de Commines ; \ Solitudo. sive
Fitce fœminarum anachoretarum , car-
mine elegiaco explanatœ, in-fol. C'est un
recueil d'estampes avec un quatrain au bas
de chacune. Il a fait un grand nombre
d'épigrammes latines ; une des plus heu-
reuses est une Apologie des correcteurs
d'imprimerie contre \qs auteurs; on la
trouve dans le Theatrum vitœ humance
lie Beyerlinck, tome 7.
KiLlAIM ( Jacques ) , né à Prague , le
ik février 1714 , entra chez, les jésuites à
Cracovie, en 1731 , et fit de grands pro-
grès dans la physique et la géométrie.
Les ouvrages qu'il a laissés supposent les
talens des Kircher, des Scholt, des Bo-
nanni et des Boscowich ; les principaux
sont : I Causa efficiens motûs astrorum
ex princijnis pyrotechnicœ nuturalis ,
avec fig., Danlzick , 1769 , 1 vol. in-12 ;
I Prodromus physico-astronomicus py-
rotechnici systematis vorticum. Dant-
zick, 1770, in-8". On ne peut disconvenir
qu'il n'y ait dans ces ouvrages des idées
systématiques , et si l'on veut para-
doxales , mais aussi il y a bien de l'élude
et du génie. La nouvelle hypDlhcse sur
la cause du mouvement des astres suffit
au moins pour affaiblir la confiance qu'on
a pu donner aux autres. Il a écrit en-
core : Ars demittendi se ah alto ; Naviy
horologia solaris ; Statua Memnonis s
sibilosolem, salutans; mais ces ouvrages
restés en manuscrit sont perdus. Après la
destruction de la société , il se retira chez
un gentilhomme près de Kaunitz, et mou-
rut en 1774.
* RILIUAINE ( Charles- Joseph ), gé-
néral des armées de la république fran-
çaise , né à Dublin en 1754 , d'une famille
noble, passa au service de France, et
suivit M. de La Fayette en Amérique, où
il se distingua. Il était capitaine des hus-
sards dans le régiment de Lauzun-hus-
sards, au commencement de la révolu-
tion ; le désir de parvenir lui lit adopter
les nouveaux principes. Son avancement
fut rapide; en 1791 , il était déjà général
de brigade. Il servit en cette qualité dans
les armées des Ardennes et du Nord, et
il se fit remarquer à la bataille de Je m-,
mapes. Il fut ensuite envoyé dans la Ven-
dée , puis il revint à l'armée du Nord ;
et il se signala à la bataille du camp de
César; mais bientôt dénoncé comme plu-
sieurs autres généraux , il fut destitué cl
incarcéré pendant 18 mois. Rendu à la li-
berté après la chute de Robespierre, il pas-
sa à l'armée d'Italie, et cueillit de nou-
veaux lauriers dans les plaines de Casti-
glipne et de Mantoue. Il obtint ensuite le
commandement de l'armée destinée à
faire une descente en Angleterre. Ce pro-
jet n'ayant pas reçu son exécution , il fut
employé successivement dans l'intérieur,
dans la Hollande et en Suisse. Enfin, rem-
placé par Masséna, il revint à Paris, où
il mourut le 15 décembre 1799.
KIMCHI (David), rabbin espagnol,
mort vers 1240 , fut nommé en 1252, ar?
KtIV
123
îtlN
})ilre de la querelle survenue entre les
synagogues d'Espagne et de France, au
sujet des livres de 3Iaimonides. C'est de
lous les grammairiens juifs celui qui,
avec Judas Chiug, a été le plus suivi,
même parmi les chrétiens, lesquels n'ont
presque composé leurs dictionnaires et
leurs versions de la Bible que sur les li-
«7res de ce savant rabbin. On estime par-
ticulièrement sa mélhode , la netteté el
l'énergie de son style : les Juifs mo-
dernes aussi le préfèrent à tous les gram-
mairiens. Il s'est illustré par divers ou-
vrages : I une grammaire hébraïque ,
intitulée Michlol. c'esl-à-dire Perfection,
Venise , 1S45 , in-8" ; Leyde , 1651 , in-12.
C'est cette grammaire qui a servi de mo-
dèle à toutes les grammaires hébraïques;
I ufi livre des Racines hébraïques , 1555,
in-S", ou in-fol., sans date; | Dictiona-
rium talmudicuin^ Venise, 1506, in-fol. ;
I des Commentaires sur les Psaumes, sur
la plupart des autres livres de l'ancien
Testament, imprimés, au moins la plus
considérable partie, dans les grandes Bi-
bles de Venise et de Bâle. L'on n'y a pour-
tant point mis ses Commentaires sur les
Psaumes, qui se trouvent imprimés sé-
parément, en Allemagne. Dom Janvier,
bénédictin de Saint-Maur, en a donné
une version latine en 1669 , in-i°. Ces
commentaires, ainsi que tous les autres
de cet illustre rabbin, sont ce que les
Juifs ont produit de meilleur et de plus
raisonnable sur l'Ecriture. Voyez pour les
autres ouvrages de Kittichi la Bibliothè-
que hébraïque de Wolf , tom. 1, p. 501 et
suiv. ou le Dizionario storico digli au-
to7i ebrei et dette loro opère, Aq Rossi.
David Kimchi était fils de Joseph, et frère
de Moïse KIMCHI, tous les deux sa vans
docteurs juifs. On cite, entre autres ou-
vrages du premier, un Commentaire sur
Jérémie, et du second . Delicice animœ.
On croit que le père et les deux fils mou-
rurent à Narbonne, où ils s'étaient établis.
KING ( Jean ), né en 1559 à Warnhall,
dans le duché de Kinghamshire, en Angle-
terre, devint chapelain de la reine Eliza-
beth, prédicateur du roi Jacques , doyen
de l'église du Christ à Oxford , enfin évè-
que de Londres. Il mourut en 1621, après
avoir donné plusieurs ouvrages , parmi
lesquels on distingue ses Commentaires
sur Jonas , et des Sermons.
KÏIVG ( HExni ) , fils du précédent , né
àVfarnhalï en 1591, mort en 16G9 , évè-
que de Chichester , laissa différens ou-
vrages en anglais et en latin, en prose et
en vers ; les meilleurs sont des Sermons ,
une explication de l'Oraison domini-
cale, et une Traduction des Psaumes.
KIKG (Guu.laume), né à Antrim en
Irlande, en 1650 , d'une ancienne famille
d'Ecosse . prit des leçons de philosophie
et d'histoiie soxis le fameux Dodwel. Par-
ker, archevêque de Toam (siège quia
été transféré à Gallowai), lui procura
divers emplois , et enfin le doyenné de
Dublin en 1688. King fut nommé par trois
fois différentes , lun des lords de jus-
tice d'Irlande; peu fidèle au roi Jac-
ques II, son souverain, il manifesta ou-
vertement son attachemt nt au prince d'O-
range. 11 fut mis en prison , mais quand
le gendre eut détrône le beau-père, il eut
pour prix de sa félonie l'êvêché de Derby,
el ensuite l'archevêché de Dublin. Il mou-
rut en 1729 , à 79 ans, sans avoir jamais
voulu se marier. Ses ouvrages sont :
I l'Etat des prctestans d'Irlande sous le
règne du roi Jacques ^ Londres , 1692 ,
in-8°, 5' édition; ouvrage vanté par le fa-
meux G. Burnet, mais dont M. Leslie ,
évêque de Ross, a fait une bonne réfuta-
tion; I Discours sur les inventions des
hommes dans le culte de Dieu. DuLIIn ,
1694, in-/t°, souvent réimprimé; | un
Traité de l'origine du mal, en latin, ibid.
in-4°, 1702, 4*^ édit. traduit en anglais
par Edmond Law , 1752, réimprimé en
1759,2 vol. in-8°.Le traducteur a chargé sa
version de longues Notes, dans lesquelles
il prétend réfuter les objections que Bayle
et Leibnitz avaient faites contre ce traité.
C'est le plus connu des ouvrages de King.
I Des Ecrits polémiques ; \ des Ser~
mous. etc.
KING. rotjez CHING.
KI>iG ( Guillaume ) , jurisconsiilte an^
glais, était d'une illustre famille. La reine
Anne le fit son secrétaire , et il accompa-
gna le comte de Pembroke en Irlande. Il
aurait pu s'enrichir par les emplois im-
portans qu'il exerça dans ce pays, mais
il aima mieux retourner en Angleterre
pour cultiver les sciences et la litlérar
ture. L'élude n'affaiblit point sa gaieté
naturelle. Il aimait à dire et à entendre
de bons ntiots, et passait pour en être u»
excellent juge. Il mourut en 1712, et fut
enterré à l'abbaye de Westminster. On a
de lui un grand nombre d'écrits en an-
glais, remplis de saillies. Ses Réftexiona
sur le livre de M. Molesworlh , touchant
le Danemarck, furent fort goûtées : elles
ont été traduites en français.
KING ( Pierre ), grand chancelier
khv
i2â.
KIN
d'Ançlclcrre, né à Excester dans le Dc-
vonshire, l'an i669 , était fils d'un épi-
cier, el exerça quelque temps la profes-
sion de son père ; mais Locke, son parent,
du côté maternel, ayant reconnu ses bon-
nes dispositions pour l'étude, l'encoura-
gea à s'y consacrer entièrement, et lui
laissa la moitié de sa bibliothèque ; ce fut
aux conseils de Locke que King dut son
illustration et sa fortune. Ses progrès
dans l'étude des lois et son mérite réle-
vèrent à plusieurs dignités, et enfin à
celle de grand-chancelier. II mourut pa-
ralytique en 173/i, à Ockam, après avoir
publié en anglais deux ouvrages , où les
critiques orthodoxes trouvent bien des
inexactitudes : | Recherches sur la con-
stitution^ la discipline et l'unité du
culte dans la primitive Eglise ^ pendant
les trois premiers siècles, Londres, 1691
et suivans , 2 part. in-S" ; | Histoire du
Symbole des apôtres j avec des réflexions
critiques sur ses différens articles , ibid.
1702, in-8°, trad. en latin par Godefroy
Olearius , Leipsick , 170G-1708.
KIXG ( Jean-Glen ) , théologien angli-
can , né au comté de Norfolk , en 1751 ,
Tuuri en i757 à Wormiey (KcrifordshireJ,
fit ses études au collège de Caïus , dans
l'université de Cambridge , et y prit le
degré de docteur. Il était habile numis-
mate et savant dans les antiquités. L'im-
pératrice de Russie lui confia la garde de
son cabinet de médailles. Il a laissé plu-
sieurs ouvrages importans, parmi les-
quels on distingue \ les Rites et cérémonies
de l'Eglise grecque , contenant une expo-
sition de sa doctrine j son culte et sa dis-
ciplineA77^, in-i", fig.; | des Observations
sur le climat de la Russie et des autres
contrées du Nord^ avec une vue des mon-
tagnes voisines de Pétersbourg , 1778 ;
1 Observations sur le vase Barberini ; ce
dernier écril se trouve dans le 8' vol.
des Transactions de la société des anti-
quaires.
RI\G ( Edouabd ) , savant anglais, né
dans le comté de Norfolk en 1753 , mort
le 16 avril 1807, avait commencé ses
études à Cambridge et les termina dans
la société de jurisprudence du Temple. Il
fut ensuite nommé greffier de Lynn. Un
Essai sur le gouvernement anglais qu'il
publia en 1767 lui ouvrit les portes de la
société royale de Londres , et de celle des
antiquaires en 1770 , dont il devint prési-
dent en 1784. Son principal ouvrage est
une Histoire des anciens châteaux, qu'il
publia sous ce litre : Mwiimenta aniiqua.
or observations on ancicnt castles, Lon-
dres, 1799-1805, k vol. in-fol. fig. ; ou-
vrage rempli d'érudition et de reclierches,
et en même temps d'idées singulières et
de conjectures insoutenables; on trouve
des singularités du même genre dans ses
Fragmens litté?'aires.
KIASCUOÏ (Henri de), jurisconsulte,
né en iUki, d'une bonne famille deTurn-
hout , près d'Anvers, mort à Bruxelles
en 1608 , a donné Responsa sive Const-
liajuris,Lonv&in, 1653, in-*fol., (jui ont
été augmentés par son fils Français de
Kinschot, chancelier de Brabant, mort
le 5 mai iG54 , Bruxelles , 1655.
KL\SCIIOT ( Gaspard ) , né à la Haye
en 1622 , s'appliqua avec succès aux bel-
les-lettres et à la jurisprudence. Il fut un
des sept députés des étals-généraux pour
la paix de Weslphalie. Il mourut à la
Haye en 1649, âgé seulement de 27 ans.
On a de lui des Poésies latines , distri-
buées en h livres, la Haye , en 1685 , in-
12. Il y a beaucoup d'imagination, de la
netteté et de l'élégance.
* KIASBEIIGEN ( Jeaiv-Heîvri van ) ,
célèbre marin hollandais, né le l'^'' mai
1755 àlïoesburg, entra au service mili-
taire à l'âge de 9 ans, et cinq ans Qprès
dans la marine : son avanceinent fut ra-
pide ; il n'était que cadet lorsqu'il com-
mença sa carrière : quelques actions d'é-
clat, une grande intelligence et des cir-
constances heureuses qui se présenlèrcnt
dans plusieurs voyages de long cours, le
firent parvenir jusqu'au rang de lieute-
nant-amiral. Ennuyé du repos auquel le
coîidamnait la paix dont jouissait son
pays , il obtint la permission de passer
en Russie, où Catherine 11 lui confia le
commandement des forces maritimes do
l'empire. Bientôt l'occasion se présenta
de se signaler contre les Turcs, et à deux
reprises différcrites il défit leurs flottes
dans la Mer-Noire , malgré la supériorité
du nombre de leurs vaisseaux. Après avoir
été au service de la Russie pendant 9 ans
(1767-1776), malgré la perspective bril-
lante qui lui élait offerte dans ce pays,
il revint en Hollande, fut aussitôt char-
gé de négocier la paix avec l'empereur
de Maroc , et remplit cette mission avec
talent et succès. En 1781 il contribua
puissamment à la victoire que remporta
l'amiral Koutman sur l'amiral Poker, et
ses services furent récompensés par une
médaille d'or que lui donna la république
batave, par le titre de contre-amiral et
par d'autrqs distinctions non moins flat-.
KIN
12S
KIP
teuses ; aussi s'emprcssa-t-il pendant toute
sa carrière de se signaler par son activité
et par son zèle. Pendant la guerre que la
Hollande avait alors à soutenir contre
l'Angleterre, il établit et fortifia le port du
Helder, et, quand la paix fut signée avec
celte puissance, il resta dans sa patrie
malgré les offres avantageuses que plu-
sieurs gouvcrnemens lui firent différentes
ois. En 1793 , il repoussa Dumouriez et
préserva son pays de l'invasion des Fran-
çais. En 1795 il fut licencié , puis arrêté :
ayant recouvré la liberté, il se rendit en
Danemark où il prit du service et y resta
Jusqu'en 1806. Lorsque le royaume de
Hollande fut organisé, Louis, frère de Bo-
naparte, le nomma maréchal-conseiller
d'étal, chambellan, et à ces distinctions
il ajouta le titre de comte de Doggers-
bank, pour perpétuer le souvenir de la
f.loire dont il s'était couvert à la journée
de ce nom. A l'époque de la réunion de
la Hollande à la France , Kinsbergen fut
nommé sénateur. II mourut en 1820 à 84
ans, laissant la réputation d'un des offi-
ciers les plus distingués de son pays. La
Hollande lui doit rétablissement d'un in-
stitut ou école militaire dont l'état fit les
frais ; mais ce fut avec sa propre fortune
qu'il fonda linslilutde la marine à Amster-
dam, l'institut des sourds-muets à Gro-
ningue , les académies de Utrecht et de
Hardenwick , et une foule d'autres insti-
tutions particulières. Il chercha surtout à
inspirer aux jeunes gens l'amour de la
gloire, en mettant sous leurs yeux les let-
tres des personnages dont s'honore laHol
lande. En général la marine lui doit de
grands perfeclionnemens : dans le combat
qu'il livra aux Turcs, il fit l'essai d'un
nouvel ordre de bataille qu'il avait in-
venté et qui fut adopté plus tard par les
marins anglais et français : il se servit
aussi des nouveaux signaux mobiles qui
furent dans plusieurs occasions d'une
très grande utilité. Il savait écrire aussi
bien qu'il savait combattre : outre plusieurs
mémoires^ il composa quelques ouvrages
qui sont restés pour la plupart inédits ;
parmi ceux qui ont paru , plusieurs ont
été publiés sous le nom de ses élèves. Les
principaux sont : | Ordres et instruclions
concernant le service de la marine^ le
service de vaisseau, par le chevalier van
Kinsbergen, publié par C. A. Vcrhuel ;
I Exercice du canon sur un vaisseau de
guerre, publié par le même ; | Manuel du
marin augmenté et rectifié par le cheva-
lier van Kinsbergen; \ le Service général
du vaisseau, par le chevalier van Kins-
bergen, publié par C. A. Verhuel ; | Priîi'
cipes de la tactique de mer, publié par
le même. Catherine II a fait traduire cet
ouvrage en langue russe pour l'usage de
sa marine. | Le grand livre général des
signaux de jour et de nuit, avec un grand
nombre de figures ; | VÂrlillerie pratique
de marine ; \ Nouvelle carte de la Crimée,'
avec une description de cette province
(cette carte est très estimée); | Carte delà
mer de Marmara ; \ Description de l'ar-
chipel, avec une nouvelle carte générale.
ouvrage excellent, qui a été traduit en al-
lemand en 1792, et publié avec des re-
marques ; I Introduction à la guerre de
mer, par le chevalier van Kinsbergen ,
publié par A. Makay; | Manuel politique
à l'usage des jeunes officiers de marine^
par le chevalier van Kinsbergen, publié
par J. H. Ollenhausen ; | Sur la formation
des batteries de mer; \ Projet de l'établis-
sement d'un fonds pour les veuves de ma-
rins, sans frais pour l'état; | Rêves d'un
marin ; \ Sur la nécessité de tenir en ser-
vice permanent un corps de matelots;
I Sur la formation d'une académie de
marine.
KIPPIXG (Heivri), Kippingius. philo-
logue allemand , né vers 1G23, à Rostock,
fut pris par les enrôleurs, qui l'obligèrent
de porter les armes. Dans cette nouvelle
profession , il ne laissa pas de s'adonner
aux études. Un jour qu'il était en faction
à Stade, dans le duché de Brème, M. Er-
skeim, conseiller du roi de Suède, l'a-
peryul tenant d'une main un livre ( c'était
Statius), et de l'autre ses armes; il l'in-
terrogea, s'aperçut facilement que c'était
un homme de lettres , et le fit son biblio-
thécaire. Kipping mourut en 1678, sous-
i-ecteur du collège de Brème. 11 est connu
par plusieurs ouvrages. Les principaux
sont : I un Supplément à VHistoii'e ecclé'
siastique, par Jean Pappus en allemand ,
1677 , in-fol, ; | un Traité des antiquités
romaines, Leyde, 1713, in-S», en latin;
I un autre sur les ouvrages de la créa-
tion , Francfort , 1676 , in-4° ; | plusieurs
Dissertations ou Exercitations sur l'an-
cien et le nouveau Testament, etc.; | des
Dissertations philosophiques sur le droit
public. ( Henri Erh. Hceren a publié Orat.
de Henric Kippingio. Brème, 1756, in-4".) '
* KIPPIS (André ), théologien et bio-
graphe anglais, naquit en 1725 à Noltin-
gham. Il fit ses études à Northampton,
sous le docteur Doddridge, célèbre thro-
loîiien dissident. Il devint en 17.'i6 miais-
11.
KIP
126
KIR
tre de Boston , au comté de Lincoln , et
passa à Dorking au comté de Sussex, en
4750. Il était en 1755 pasteur d'une con-
grégation à Westminster. Il s'occupait en
même temps d'objets de littérature, et
travaillait au Slonthly magazine. Il en-
treprit en 1761 un ouvrage périodique ,
intitulé: Bibliothèque {Library). Celte
spéculation ne lui ayant point réussi, il
prit une place de professeur dans une
académie destinée à l'éducation déjeunes
ecclésiastiques dissidens. On a de lui :
j Défense des ministres protestatis dissi-
dens j relativement à leur dernière adresse
au parlement ^ i76ô ', ouvrage qui donna
occasion à une discussion amiable entre
Kippis et le docteur Tucker; | une nou-
velle Edition de la Bibliothèque britati-
nique^ 1778-93, dans laquelle il fit preuve
de son érudition. Cinq volumes de cet ou-
vrage furent publiés pendant sa vie , et
il avait, avant de mourir, préparé la plus
grande partie du sixième ( il devait y en
a\ oir 15. ) | p^ie du capitaine Coo/Cj, 1788,
1 vol. in-4", et 2 vol. in-8° ; on la joint
ordinairement aux trois voyages de
Cook ; I F^ie du docteur Lardner^ laquelle
se trouve à la tète de ses œuvres, dont
Kippis donna l'édition en 11 vol. in-8";
1788; I Histoire des connaissances et des
progrès des sciences et du goût dans la
Grande-Bretagne, pour le Nevo annual
register; \ Editions nouvelles Ô-qs six dis-
cours de John Pringle , avec la V^ie de
l'auteur, 1782 , in-S" ; [ Leçons et explica-
tions du nouveau Testament , par le doc-
leur Doddridge , avec la yie de l'auteur ,
1792. On a en outre de lui divers autres
ouvrages, et des Sermons, et une 2' édi-
tion considérablement augmentée de la
Biographica brilannica (en anglais), 1778-
93, 13 vol. in-fol., ouvrage précieux. L'u-
niversité d'Edimbourg lui fit offrir le
grade de docteur, comme un hommage
rendu à son rare savoir. Il était de la so-
ciété royale de Londres , et de celle des
antiquaires. C'était un écrivain recom-
mandable par la pureté et la correction
llu style , et non moins laborieux qu'in-
telligent ; mais du côté des principes re-
ligieux , il était unitaire déclaré , et lali-
tudinaire au dernier point. Auteur ou édi-
teur de divers ouvrages très répandus , il
y semait ses sentimens. On a dit qu'il
croyait à la révélation ; il serait difficile
de dire en quoi : il n'admettait ni la Tri-
nité, ni l'éternité des peines, ni plusieurs
putres dogmes essentiels du cluristianisme.
JJi n'a paa médiocrement contribué à la
liberté d'opinions qui a prévalu dans l'é-
glise anglicane , et qui plus que jamais
fait d'affreux ravajjcs dans les églises pro-
testantes. Kippis mourut à M'estminster
en 1795.
KIRCîI (Corist-Fried) , astronome do
la société royale des sciences de Berlin,
correspondant de l'académie de Paris,
naquit à Gubcn en 1694, acquit de la ré-
putalion aux obscrvaloires de Daiilzick
et de Berlin, et niounil dans cette der-
nière ville où il était directeur de l'obser-
vatoire, en 1740, à 46 ans. Kirch, ainsi que
WoKf, allribuait aux étoiles fixesun mou"
vemcnt propre , et c'est pcut-clre à ce
mouvenieiil qu'il faut rapporter quelques
apparences que d'autres astronomes ont
tâché d'accorder avec d'autres causes.
Kirch a laissé : fun écrit Sur le passage;
de Mercure autour du soleil, pour le 6
mai 1720 ; \ des Observations aslrûnomi-
ques {Observationes aslronomicœ scleC"
/io;-^s), Berlin, 1750, in-i"", 1 Cma Mémoires,
etc. — GoDEFROi KIRCH , son père , et
]\îai\ie-3Iarguerite V/1^XKELMANN, sa
mère , s'étaient fait un nom par leurs
observations astronomiques. Celle famille
entretenait pour cet effet une coi respou^
dance dans toutes les parties de i'Eui ope.
Les ouvrages qui nous restent d'elle en
ce genre sont très estimés. Il faut consul-
ter sur les Kirch la Bibliographie astro-
nomique de Lalande.
* KIRCIîBERGER( Nicolas Aïvtoixe),
baron de Liebistorf, philosophe suisse,
né à Berne le 13 janvier 1759, d'une fa-
mille ancienne de l'Helvélie , fut pendant
quelque temps au service de lu Hollande,
et commanda un détachement formant
la garnison du fort Saint-Pierre près de
Maestricht. Au milieu même des camps ,
il se livra avec constance à son goût pour
les lettres et les sciences philosophiques :
il lut les écrits de Leibnitz el de Wolf , et
conçut ensuite le plan d'un grand ouvrage
dont il confia l'idée et l'exécution à son
ami le conseiller Eckartshausen. De re-
tour dans sa patrie, Kirchberger prononça
en 1765 dans une réunion de jeunes ber-
nois un discours en l'honneur des habi-
tans de Soleure, qui en 1518, défendirent
leur ville contre Léopold \", duc d'Ati-
triche ; dans un combat qui eut lieu pen-
dant ce siège, les Soleurois ayant vu une
foule de leurs ennemis tomber dans l'Aar,
par suite de la rupture du pont jeté sur
cette rivière , s'empressèrent de voler à
leur secours, parvinrent à les sauver', et
après leur avoir prodigué tout ce qui leur
KIR
127
KIÎV
élait nécessaire , les ronvoyèrcnl sans ran-
çon. En célébrant ce trait de générosité ,
Kirijhberger excita l'admiration de tous
ceux qui l'entendirent. Il était en relation
avec J. J. Rousseau qui parle de lui dans
ses Confessions, livre 12 , élait lié aussi
avec St.-jVIartin et s'occupait avec lui des
matières obscures de la théosophie. 11 s'é-
leva avec force contre- une secte d'illumi-
nans ou à'éclaireurs dont le chef était Fré-
déric Nicolaï , éditeur de la Bibliothèque
Germanique, et qui se propageait rapide-
ment en Allemagne. C'est d'après ses avis
que le chevalier Zimmermann rédigea
contre ces novateurs des Mètnoires qui
parvinrent à l'empereur Joseph II, et qui
Ûélerminèrent ce prince à prendre aussi-
tôt,de concert avec la cour de Berlin, des
mesures capables d'arrêter les progrès de
ces dangereux sectaires. Indépendam-
ment de ses études philosophiques et re-
ligieuses, Kirchbergercultivales sciences
naturelles et surtout l'agriculture ; il con-
tribua surtout à éclairer les habitans de
son pays sur l'emploi de certains pro-
cédés utiles, et propagea l'usage du gypse
dans les prairies arlilicielles : il inséra
un Mémoire à ce sujet dans le Journal
de l'ahhé Rozier en 1774 ; ce fut aussi
dans une feuille périodique qu'il écrivit
contre les illuminans. Enfin son discours
sur les habitans de Soleure fut imprimé
sous le titre à' Histoire de la vertu helvé-
tique, Bàle, 176S, iu-S". Kirchberger par-
vint dans sa patrie aux charges les plus
importantes. 11 se délassait chaque année
de ses importantes fonctions , en allant
jouir du repos , de la nature et de ses li-
vres , dans le sein de sa famille à sa cam-
pagne de Morat. Il mourut en 1800.
KIIICIIER ( Athanase ) , célèbre jé-
suite allemand , l'un des plus laborieux
et des plus savans hommes de cet ordre ,
naquit à Geysen près de Fulde le 2 mai
1602 , et entra chez les Pères de la compa-
gnie à Mayence en 1618. 11 professait la
philosophie elles mathématiques à Wiirlz-
bourg , dans la Franconie , lorsque les
Suédois troublèrent par leurs armes le
repos dont il jouissait. Il se retira on
France, passa à Avignon et de là à Rome,
où il mourut en 1080, à 79 ans. Il ne cessa
d'écrire qu'en cessant de vivre. Kircher
avait embrasse toutes les sciences, phy-
sique, histoire naturelle, philosophie,
mathématiques, théologie, antiquités, mu-
sique , langues anciennes et modernes :
ses nombreux ouvrages se divisent en
trois classes ; 1" sciences, physique et ma-
thématiques ; 2" langues et hiéroglyphesî
5° histoire et antiquités. Les principaux
fruits de sa plume laborieuse et féconde
sont : I P7'œlusiones magneticœ . 1654 , in-
fol.; I Ars magna lucis et umbrœ , in-
fol., Rome , 1645 , 1646 , 2 vol. : traité d'oi>-
tique, profond et lumineux pour son
temps , ainsi que le suivant ; | Primitice
gnomonicœ catoptricœ, in-4° ; | Musurgia
universalis, sive ars magna consoni et dis»
soni^ in decem libros digesta, ibid , 1650,
in -fol. , 2 vol.; | Obeliscus 2\imphilius^
ICoO, in-fol. ; | Obeliscus œgyptiacus , in-
foL ; I 0£dipus œgyptiacus, Rome , 1652 et
1655 , 4 vol. in-fol. C'est une explication
d'un grand nombre d'hiéroglyphes, expli-
cation telle qu'on peut l'attendre d'un Sa-
vant qui avait quelquefois une façon de
voir toute particulière, mais toujours fon-
dée en érudition et en raison. Ce livre
est rare. | Iter extaticum, in-4°. C'est un
voyage idéal dans les planètes et les régions
supérieures du ciel. On conçoit que le
voyageur n'a pu rien nous dire de bien
positif, mais il en parle d'une manière
pleine d'intérêt et de sentiment ; son style
est élégant , pur , riche , et semble s'éle-
ver avec les objets dont l'auteur s'occupe.
Il n'y a que le génie desséché par les cal-
culs et les aridités géométriques, qui
puisse avoir dicté à Maclaurin la cen-
sure dédaigneuse qu'il a faite de cet ou-
vrage. I Mundus subie rraneus , in quo
universœ naturœ majeslas et divitice de-
monslrantur, Amsterdam, 1664 ou 1668,
in-fol. , 2 vol. , troisième édition , aug-
mentée , 2 vol. in-folio , ligures , 1678;
plein de recherches, écrit avec élégance
et intérêt; on y voit quelques préjugés
en matière de physique, mais c'étaient
ceux de son siècle. Entre une inllnité d'ob-
servations , on y trouve une théorie vaste
et hardie de la génération des êtres , dont
quelques vues sont reconnues pour faas-
ses; d'autres sans être peut-être plus
vraies, ont été adoptées par des hommes
célèbres : le système des molécules, si
éloquemmenl exposé par RI. de Buffon ,
y est pris enlicrcment quant au fond, et
souvent même quant aux expressions,
comme on l'a démontré dans \Examen
impartial des époques de la nature.
[Voy. GRAAFReimrr , LEUWENHOECK,
MUYS.) j China illustrata, Amsterdam,
1667, in-fol. Struviiis en porte ce juge-
ment : Kircheri China est vera auctoris
phantasia : sic autem judicatur ^ eo quod
Patres jesuitœ nuper reduces ^facta ple-
raque in illo libre improbent. Ce livre a
KIK
128
KIU
été traduit en français par d'Alquié , 1670,
in -fol. j Arca JSoe , in-fol. ; | Turris Ba-
bel, in-fol. , Amsterdam, 1679. Cette pro-
duction, peu commune et vraiment sin-
gulière, traite de la construction de la tour
de Babel et de la dispersion des peuples;
I Phonurgia nova de prodigiosis sonorum
effectibus el sermocinatione per machinas
sono animatas. où l'on trouve des choses
curieuses, 1673, in-folio; | Jrs ma-
gna sciendi\ 1669, in-fol. : ouvrage plus
8ul)lil qu'utile , plein de combinaisons
pénibles et de spéculations techniques,
moins propres à faire des savans qu'à
dégoûter des sciences; | Polyg raphia .
seu artificium linguarum, quo cum omni-
bus populis totius mundi poterit quis cor-
respondere. Rome, 1665, in-fol.; | La-
tium^ 1671, in-fol. : ouvrage savant, et
qui a coûté beaucoup de recherches;
I Scrutinium physico-medicum conta-
giosœ luis, Leipsick , 1671 , avec une pré-
face de Langius. C'est un traité sur la
pesle, fort utile et bien écrit. | Mundus
magnes, in-/».°, où l'on voit l'idée de l'at-
traction universelle; | Magia catoptrica,
où l'on trouve les miroirs d'Archimède
etdeBuffon(roytfzARCHIMÈDE); | Spé-
cula inclitensis enctjclica, etc.. Messine,
1658 , in -12. C'est le plus rare de tous les
ouvrages de Kircher. ] Lingua œgyptiaca
restituta, sive Institufiones grammatica-
les, et lexicon cophticum, Rome, 1644,
in-4°. Cet ouvrage fut le premier qui ré-
pandit en Europe des notions exactes sur
la langue cophte. Il est rare et doit avoir
un supplément, etc. Les connaissances
extrêmement variées de ce jésuite , la ma-
nière grande, neuve et approfondie dont
il a traité plusieurs sciences difficiles et
peu cultivées jusqu'alors , l'eussent fait
regarder conmnïe un savant universel ,
s'il pouvait y en avoir, et si l'esprit de
l'homme pouvait embrasser un espace
dont l'imagination même ne saisit pas le
terme. Son style est coulant, pur, abon-
dant , vigoureux , animé par des citations
en vers et en prose, ingénieusement ap-
pliquées à la matière qu'il traite. Lors
même qu'il s'égare , soit par quelque er-
reur qui lui est propre , soit par celles
qui étaient universellement adoptées de
son temps, on reconnaît encore le savant
et l'homme de génie. Des écrivains mo-
dernes ont uni leurs efforts pour obscur-
eir la gloire de ce jésuite célèbre , qui a
fourni bien des matériaux à leurs sys-
tèmes et à leurs spéculations. Au lieu de
reconnaître leur bienfaiteur, ils ont cru
qu'en le décriant, on ne soupçonnerait
point qu'ils lui devaient quelque chose.
Pline croyait au contraire « qu'il était de
» la probité et de l'honneur de rendre
» une sorte d'hommage à ceux dont on
» avait tiré quelque secours et quelque
» lumière ; et que c'était une extrême
» petitesse d'esprit d'aimer mieux être
» surpris honteusement dans le vol, qu9
» d'avouer ingénument sa dette. » Vrœf-
hist. nat. Cet homme rare et peut-être
unique par la multitude et la variété de
ses connaissances , avait manqué d'être
renvoyé du noviciat , le recteur le ju-
geant inepte aux sciences. On voit en-
core à Mayence la chapelle où le novice
désolé se retirait pour demander au Ciel
les lumières nécessaires à l'état qu'il vou-
lait embrasser. On peut dire qu'il a été
exaucé au-delà de ses vœux. Le père
Kircher a occupé à Rome la chaire de
mathématiques , au collège Romain. Son
amour pour la science lui faisait braver
les plus grands dangers. Dans un voyage
à Naples, voulant connaître l'intérieur du
Vésuve, il se fit descendre , par la pre-
mière ouverture , par un homme vigou-
reux qui l'y tint suspendu à l'aide d'une
corde , jusqu'à ce qu'il eût satisfait sa cu-
riosité. Plusieurs souverains, et, entre
autres, le duc de Brunswick, lui fournis-
saient les sommes nécessaires pour ses
expériences, et lui envoyaient des rare-
tés dont il composa un des plus beaux ca-
binets de l'Europe , décrit par Ph. Bo-
nanni , Rome , 1709, in-fol. M. Battara a
donné , en 1774 . une nouvelle description
des pièces relatives à l'histoire naturelle,
qu'il renfermait. Ce laborieux jésuite a
donné trente-deux ouvrages qui roulent
sur presque toutes les sciences. On peut
consulter sur ce savant jésuite le mémoire
qu'il a donné lui-même sur sa vie et ses
ouvrages dans le Fasricuhis epistolarum
de Langenmanlel, pag. 65 etsuiv.
KIRCHER (Cosirad), théologien lu-
thérien né dans le 16' siècle à Augsbourg,
s'est rendu célèbre par sa Concordance
grecque de l'ancien Testament, qu'il fit
imprimer à Francfort, en 1607 , en 2 vol.
in-4°. Cet ouvrage peut servir de diction-
naire hébreu. L'auteur met d'abord les
noms hébreiix , et ensuite l'interprétation
que les Septante leur ont donnée , et cite
les endroits de l'Ecriture où ils se trouvent
différemment interprétés. Le principal
défaut est, sans contredit , d'y avoir suivi
l'édition des Septante de Francfort, 1597,
au lieu de suivre celle du Vatican, rrue
KIR
J29
KÎU
lous les sàvans préfèrent. La Concoi'dance
de Troinmius n'a pas fait tomber celle
de Kircher , comme l'a démontré Jean
Gaynier d'Oxford. Voyez TROMMIUS.
Kircher a publié un abrégé de son ou-
vrage sous ce titre : De concordav^tiarum
bibltcarurrij maxime veteris Teslamen-
ti grœcarum, hebrœis vocibus responden-
tium^ vario ac muUiplici in sacro-sancta
theologia usu . Wittenberg , 1G22 , in-4°.
On ignore l'époque précise de sa mort.
RIllClIER ( Jea\ ) , théologien né dans
le 17' siècle à Tubingen , publia en 1646 ,
en latin , Motifs de sa conversion du lu-
théranisme à la religion catholique ,
Vienne , 1640, in-S". Les luthériens ont
vainement essayé de réfuter cet ouvrage.
RIRCIII»IA!\I\ (Jean), savant anti-
quaire allemand, né en 157S à Lubcck ,
fut recteur de l'université de cette ville,
exeiça cet emploi avec beaucoup de dis-
tinction jusqu'à sa mort , arrivée en 1643,
à 68 ans. Ses principaux écrits sont ; | De
futieribus Romanorum libri IV^ Leyde ,
1672 , in-12 : traité savant, qui lui acquit
une grande réputation , et lui procura un
riche mariage ; | De onnulis liber singu-
larîs . Lubcck , 1G23, ûi-S", et Leyde ,1672 ,
in-12 : ouvrage plus curieux qu'utile ; des
Oraisons funèbres, etc.
KIRCIIMANN (N.) , professeur de phy-
sique à Pétersbourg, est devenu célèbre
par ses expériences sur la matière élec-
trique , et par le genre de mort qui ter-
mina ses jours , le 0 août 1753. Il avait
dressé un conducteur pour soutirer la
foudre; un globe de feu en sortit au mo-
ment quil en approcha, et lui brûla la
tète. Depuis cette époque, le système des
conducteurs a éprouvé diverses destinées :
tandis que les uns les regardent comme
un préservatif contre le feu du ciel,
d'autres , fondés sur des exemples multi-
pliés , les envisagent comme une inven-
tion empirique et dangereuse. Les pré-
cautions infinies qu'il faut observer pour
en prévenir les mauvais effets ( et sur les-
quelles on n'est rien moins que d'accord,
les uns voulant une chose , les autres une
autre), en rendent l'exécution presque
impossible. Cependant les nouveaux pro-
grès de la science ont levé toutes les
difficultés , et l'usage des conducteurs est
maintenant sans danger, f^oyez le Journ.
hist. et lilt. 13 juillet 1782, page 412 ; —
1"='' mars 1785, page 557, et l'article
Pringle. Un poète latin a fait à Kirch-
roan cette épilaphe imitée de Yirgile, au
6"^ livre de l'Enéide :
Vidi et crudeles d;ialem Salrnonea pœnaj ,
Dum flammas Jovis et sonilm non curai OlyrapJ,
Démens, qui nimbos ac irrilabile folmcn
Igniferis filis ferroque lacessit aciiio.
At Pater omnipotens densa inler nubila lelum
Contorsit ( non ille levés de culmine tecli
Scintillas) rapti'.mque immaoi turbine volvit.
KIRCIIMAYER (George -Gaspard),
professeur à Witteni)erg , et metnbre des
sociétés royales de Londres et de Vienne,
naquit à Uffenheim en Franconie, l'an
1633 , et mourut en 1700 , après avoit
publié plusieurs ouvrages d'érudition el
de physique. Les principaux sont : | des
Commentaires sur Cornélius Népos, Ta-
cite, et d'autres auteurs classiques; ] des
Oraisons et des Pièces de poésie; \ De
corallo, balsamo et saccharo , 1661 , in-4° ;
I De iribulis, 1692, in-4°; | six Disserta-
tions, sous le titre de Hexas disputa-
tionum zoologicariim. Elles roulent sur le
basilic, la licorne, le phénix, le béemelh
et l'araignée. | Pathologia vêtus et nova;
I Philosophia melallica; \ Institutiones
metallicœ . etc.
KIRCIIMAYER. r. NAO-GEORGES.
' RIRRLAND (Thomas), médecin et
chirurgien anglais , membre de la vSociété
royale d'Edimbourg et de plusieurs socié-
tés savantes, naquit en 1720, et consacra
toute sa vie à l'exercice de son art. Il prit
part à toutes les discussions importantes
qui s'élevèrent entre les médecins du 18'
siècle. On a de lui | un ouvrage sur \agan-
g?\'neAt6h; \ unIJssaisur les fièvre s AI dT',
I des Observations sur les fractures com-
pliquées 1770 , suivies en 1771 d'un Jp-
pendice et en 1780 d'un Supplément; \ des
Cominentaires sur les maladies apoplec-
tiques et paralytiques ; \ un Traité sur la
coqueluche, etc.; mais de tous ces ou-
vrages, le plus remarquable et le plus
estimé , c'est celui qui a pour titre : Exa^
men de l'état présent de la chirurgie ,
où il examine l'analogie entre ies mala-
dies internes et externes, et le danger
qu'il y aurait à séparer deux branches
d'un art qui ont entr'elles des rapports si
intimes; Kirkland mourut à Ashby dans
le mois de janvier 1798, âgé d'environ
77 ans.
♦KIRRPATRICR (James), major-gé-
néral anglais, fut long-temps employé par
la compagnie des Indes dont il devim
l'ambassadeur près des cours de Madadji-
Scindiah et du grand Mogol Schah-Aalem.
II résida aussi au nom de la même com-
pagnie , auprès de Nizam , ainsi qu'à Ha'i-
derabad. Pendant son séjour dans l'Inde,
Il cludla les langues d'Asie, et devint
nn des plus habiles orientalistes; il s'oc-
cupa aussi beaucoup de l'histoire des an-
tiquités , des religions des contrées qu'il
visita. On a de lui:| une Biographie des
poètes persans Afaidiihe de Daoulet-Schah
et qui a été insérée dans le New-Asiatic-
Miscellany . Calcutta, 1789, in-4°; | Des-
cription du royaume de Népal avec une
carte et des planches, Londres, 1811 , in 4° ;
I Choix des lettres du sultan Tippoo-Saèb.
il)id. , 1811 , in-4°. Kh-kpatrick est mort le
22 mars 1812.
KIRSCHMEYER f Jeak-SIGISMOND ) ,
né à AUendorf en Hcsse , l'an 1674 , pro-
fesseur de philosophie et de théologie à
Marpourg, mourut en 1749. On a de lui :
I plusieurs Dissertations académiques ;
1 un Traité en latin contre les enthou-
siastes ^ pour prouver que l'unique prin-
cipe de la foi est la parole de Dieu. Les
protestans en font cas ; mais les catlx)-
liques ont démontré que les principes de
l'auteur justifient les sociniens et tous les
hérétiques, puisqu'ils se fondent tous sur
la parole de Dieu.
KIRSTEIV (Pierre), médecin et orien-
taliste , né à Bre?l»vi en 1577, eui la direc-
tion des collèges de cette ville, après
avoir acquis de vastes connaissances par
des voyages dans toutes les parties de
l'Europe, en Asie, et par l'élude des
langues savantes, notamment de l'arabe ,
qu'il avait apprise pour entendre parfai-
tement Avicenne, et dans laquelle il se
rendit fort habile. Son emploi lui déro-
bant trop de temps, il se dévoua entière-
ment à la médecine , et se retira en Prusse
avec sa famille. Le chancelier Oxenstiern
l'y ayant connu, l'emmena en Suède, et
lui procura la chaire de professeur en
médecine dans l'université d'Upsal. Il y
mourut en 1G40, à 65 ans. Son application
avait accéléré sa vieillesse , et il était déjà
fort affaibli quand il se rendit en Suède.
Son épitaphe porte qu'iY savait vingt-six
langues; cela peut être, mais il ne les
connaissait pas certainement comme sa
langue maternelle. On a de lui un grand
nombre d'ouvrages : | Traité de l'usage
et de l'abus de la médecine , Francfort ,
1610, in-8"; | Les quatre évangélistes .ti-
rés d'un ancien manuscrit arabe , Franc-
fort, 1609, in-fol. ; | Notes sur l'Evangile
de saint Matthieu , confronté sur les textes
arabe , syriaque , égyptien , grec et latin ,
Breslau, 1613, in-fol.; | une Grammaire
arabe Ares estimée.
KIRSTEMUS ou KIESCHSTEIN
150 KIR
( Georges ), habile médecin et savant natu-
raliste , né à Stettinen 1613, fit long-temps
et avec succès des exercices publics sur
la physique , la médecine , la botanique,
l'anatomie , etc. On fait cas de ses hxer-
citationesphilologicœ. Slettin, 1651 , in-4°.
Il mourut en 1660, à 47 ans. On peut con-
sulter sur ce médecin le tome 41 des
Mémoires de Nicéron et le Dictionnaire
de Chauffcpié.
RIRWAN ( Richard ) , célèbre chi-
miste , né en Irlande , étudia d'abord la
jurisprudence , mais son goût l'entraîna
vers les sciences naturelles auxquelles il
s'adonna tout entier. Il s'établit à Londres
ou aux environs vers l'an 1779, et lut ,
aux séances de la société royale , dont
plus lard il devint membre , différens
mémoires qui lui méritèrent, en 1781,
la médaille, fondée par Copley. Il re-
tourna dans son pays natal en 1789 , et
fut bientôt nommé président de la société
royale d'Irlande. Il fût aussi président de
la société royale de Dublin , et membre
ou associé des premières compagnies lit-
téraires et savantes de l'Europe. Il mou-
rut le 22 juin 1812. Kirwan a donné son
nom à la société Kirtuanienne instituée
depuis peu de temps à Dublin. Presque
toutes les sciences naturelles doivent à
ses grands travaux quelques progrès. Il
publia un grand nombre d'ouvrages sur
la chimie , la géologie , la minéralogie . la
métaphysique , etc. ; quelques-uns d'entre
eux se trouvent dans les Transactions phi-
losophiques d'Irlande : on trouvera sur
les autres de longs détails dans la Biblio^
thèque britannique imprimée à Genève.
Nous citerons : | Estimation de la teni'
pérature de différens degrés de latittide^
trad. en français par Adel, Paris, 1789,
1 vol. in-8" ; | £ssai de réponse à la ques"
tion suivante , proposée par la société
royale d'Irlande : Quels sont les engrais
qu'on peut appliquer avec plus d'avan-
tage aux diverses espèces de solSj, et quelles
sont les causes de leurs bons effets dans
chaque cas particulier? 1794 , couronné
par l'académie de Dublin, et traduit en
français par F. G. Maurice, Genève, 1800
et 1806, in-8°. | Réflexions sur l'état pri-
mitif du globe et la catastrophe qui lui a
succédé. 1796, ouvrage rempli de rappro-
chemens ingénieux. On en peut hre un
extrait dans la Bibliothèque britannique
(littérature), vol. 9% an 7, page 228.
j JSssai sur le phlogistique et sur la con-
stitution des acides . ouvrage important ,
traduit en français par Mad. Lavoisier,
RLA I5i
avec des notes par Guylon-Morveau, La- bre
\oisier , etc. , Paris , 1788 , in-S" ; | Expé-
riences sur une nouvelle terre trouvée
près de Strontian^ en Ecosse^ 1794. La
Strontiane. comme on sait, est mise au-
jourd'hui au nombre des terres élémen-
taires. I Elémens de minéralogie > 17% ,
^ vol. io-8°, traduit de l'anglais par Gibe-
lin, 1785, in-S"; ] Essais de métaphtjsi-
yue, contenant les principes et les objets
■fondamentaux de cette science^ 1809,
in-S".
♦ KL APROTII (Martin-Henri ), un des
chimistes les plus distingués de l'Allema-
gne , docteur en philosophie , conseiller
du comité sanitaire et de médecine de
Prusse , et professeur de chimie, naquit
à Berlin le 1" décembre 1743. Il exerça
la profession de pharmacien jusqu'en 1788,
époque à laquelle il vendit sa pharmacie
et fut nommé chimiste auprès de l'acadé-
mie des sciences. Klaproth avait apprécié
l'importance de l'analyse des minéraux
pour établir une bonne classification de
ces corps, et cette idée lumineuse le con-
duisit à d'importantes découvertes. C'est
à lui que les chimistes doivent la décou-
verte de la Zircone , qu'il trouva dans le
jargon de Ceylan , ainsi que celle du titane,
de l'urane et du tellure. Il a démontré
que la potasse existe dans les produits
volcaniques et dans le grenat blanc, et
que la mine d'argent rouge est un sulfure
d'argent et d'antimoine. Il fit connaître le
molybdate do plomb et le sulfate de stron-
tiane. Ce chimiste distingué est mort
dans la capitale delà Prusse le 1" janvier
1817, laissant les ouvrages suivans: | Con-
naissances chimiques des minéraux^
Berlin, 1790, in-8°; | Supplément aux
connaissances chimiques des minéraux j.
Berlin, 1795-182S, 6 vol. in-8°; les deux
premiers volumes ont été traduits en fran-
çais par Tassaert , Paris 1807, 2 vol. in-S".
I Dictionnaire de chimie (avec F.Wolf),
Berlin, 1807-1809, 5 voL in-8". II a paru
postérieurement h. vol. de supplément.
Bouillon Lagrange en a traduit les pre-
miers volumes en français, Paris, 1810-
1811, 2 vol. in-8°. Klaproth a encore
écrit un grand nombre de mémoires con-
signés dans les Mémoires de la société
d'histoire naturelle de Berlin, dans les
Annales de chimie de Crell , dans les Mé-
moires de l'académie des sciences de Ber-
lin , dans la Bibliothèque physico-chimi-
que de Hermstaedl, et dans divers autres
recueils. Il était chevalier de l'ordre de
Taigle rouge de troisième classe et mem-
KLE
d'un grand nombre de sociétés
savantes.
KLAUSWITZ ( Benoit -Gotlieb), né
à Leipsick en 1692, professeur de théolo-
gie à Hall , mourut en 1749. Il a donné :
I plusieurs Dissertations académiques;
I des Explications de divers passages de
la Bible; | un Traité en allemand sur
la raison et l'Ecriture sainte , et sur l'u-
sage que nous devons faire de ces deux
grandes lumières.
* K LEBER (Jean - Baptiste ) , général
français , né à Strasbourg en 1734 , était
fils d'un terrassier attaché à la maison du
cardinal de Rohan. Son père le destinant
à l'état d'architecte, il vint à Paris , où il
étudia sous d'habiles maîtres , mais une
circonstance imprévue vint changer sa
carrière. Se trouvant un jour dans un
café où quelques étourdis insultaient des
étrangers, Kléber prit la défense de
ceux-ci. C'étaient deux gentilshommes
bavarois, qui, reconnaissans du service
qu'il leur avait rendu , l'invitèrent à les
suivre à Munich. Ils lui ouvrirent dans
celte ville l'entrée de l'école militaire, où
Kléber se distingua par son assiduité au
travail. Le général Kaunitz, fils du pre-
mier ministre , le prit en amitié , et , frap-
pé de sa belle taille et de son esprit ,
l'emmena avec lui à Vienne, où il lui
donna une lieutenance dans son régi-
ment. L'Autriche se trouvant en guerre
avec la Porte , Kléber fit sa première
campagne en 1776, et mérita les éloges
de ses chefs; mais après 7 ans de service
n'ayant guère pu obtenir d'avancement,
il donna sa démission, revint en Al-
sace , et obtint par la protection de
l'intendant Galaisière la place d'inspec-
teur des bâtimens publics à Béfort. Il
reprit alors l'étude de l'architecture.
Après six ans d'une vie paisible , il vit
éclater la révolution dont il embrassa
les principes. Le régiment Royal-Louis,
qui restait fidèle à la cour, s'élant op-
posé à certaines mesures ordonnées par
les officiers municipaux, Kléber prit le
parti des municipaux , repoussa les sol-
dats , et présenta même un défi au colonel.
En 1792 , il entra comme simple grenadier
dans un régiment de volontaires du Haut-
Rhin. Il s'y fit bientôt remarquer , et le
général Wimpfen, qui commandait à
Brissac, lui accorda le grade d'adjudant-
major dans un bataillon qui allait se réu-
nir à l'armée de Custine à Mayence. Isom-
mé adjudant -général, il commanda et
exécuta les sorties de Biberacb et de M^"
KLE
152
KLË
rîenborn. Après la prise de Mayence, il
vint à Paris : appelé devant le tribunal
révolutionnaire comme téirioin dans l'ac-
cusation intentée contre Custine , il eut
le courage de déposer en sa faveur. Kléber
nomn^é général de bri{jade,fut envoyé
dans la Vendée et rencontra à Torfou ,
l'armée royaliste forte de vingt mille
hommes : il n'en avait que quatre mille
et 6 pièces de canon. Après une vigou-
reuse résistance, il fit une habile retraite
et comprit qu'on ne pouvait vaincre les
Vendéens qu'en imitant leur tactique. Il
éprouva un nouvel échec au delà de la
Loire, échec qui fut attribué aux géné-
raux en sous -ordre. Il s'ensuivit une al-
tercation entre Kléber et le jeune Mar-
ceau son rival de gloire qui remplaça
le premier au commandement en chef. Dès
que Marceau vit Kléber disgracié, il lui
remit toute l'autorité, servit sous lui, et
ne garda que le titre de général. Kléber
victorieux au Mans, poussa de marche
en marche les débris des Vendéens entre
la Loire et la Vilaine, et dit : « C'est ici où je
» les voulais. » Les commissaires de la Con-
vention, qui suivaient toujours les armées,
lui ordonnent de commencer l'attaque
pendant la nuit : « Non , dit Kléber , il est
» bon de voir clair dans une affaire sé-
» rieuse, et celle-ci doit se décider au
» grand jour. » Il défit complètement les
Vendéens près de Savcnay. Il répondit
alors sur sa tête de la tranquillité des pro-
vinces insurgées; mais le comité de salut
public ne voulut rien accorder , ni re-
courir en aucune manière à des moyens
de clémence. Kléber fit son entrée à
Nantes; on lui donna une fête, et au
moment où une couronne de laurier des-
cendait sur son front , un des trois com-
missaires conventionnels s'écria : o que
» ces lauriers n'étaient pas dus aux gé-
» néraux , maî's aux soldats ; » — Nous
» avons tous vaincu, répondit Kléber avec
» fierté ; je prends cette couronne pour la
» suspendre aux drapeaux de l'armée. »
Les exécutions horribles qui avaient lieu
après les batailles contre les prisonniers
excitèrent en lui une indignation, qu'il ne
dissimula pas. La Convention l'exila, et on
commença à le regarder comme suspect et
ennemi de la liberté. Son caractère franc,
et souvent brusque, lui faisait en outre
tles ennemis , et retardait son avance-
ment ; mais on avait besoin d'un grand gé-
néral, et Kléber en avait toutes les quali-
tés : il lut en conséquence rappelé et suc-
cessivement employé à l'armée du Nord,
puis à celle de Sambre-et-Meuse , comme
général de division. Il passa la Sambre
en présence des armées alliées , et à la
bataille de Fleurus, 26 juin 179i, il com-
mandait l'aile gauche opposée au prince
d'Orange (qu'il arrêta au pont de Mar-
chiennes). S'étant ensuite porté sur Mons,
avec trois divisions , il força le camp re-
tranché du mont Panisel et le passage de
la Roër , repoussa l'ennemi jusqu'à la
rive droite du Rhin, et après vingl-hnil
jours de tranchée ouverte et quarante*
huit heures de bombardement , il entra
victorieux dans Maastricht. Dans le mois
d'octobre 1793 , il commanda l'aile gauche
de l'armée de Jourdan , et dirigea le pas-
sajje du Rhin devant Dusseldorf. Quand
cette armée , s'avançant sur le Mein, fut
tournée par le général Clerfayt , Kléber
dirigea sa retraite avec autant de sang-
froid que d'habileté. Il seconda, en 1796,
toutes les opérations de Jourdan , et con-
tribua à ses succès. A la tête de l'aile
gauche, il força le passage de la Sieg, et
mit en déroute l'armée du prince de Wur-
temberg, sur les hauteurs d'Altenkirchen.
Atteint par l'armée de l'archiduc Charles,
forte de 60 mille hommes , et n'en ayant
que 20 mille , il prit une position avan-
tageuse sur les hauteurs d'Ukrad , d'où
l'ennemi ne put pas le déloger. II battit
ensuite le général Kray à Kaldieck, et
le prince de Warlenslebcn à Friedberg.
Il commanda l'armée j)ar intérim pen-
dant quelques jours, et il allait opérer sa
commimication avec l'armée de Rhin-et-
Moselle, par Heilbronn, et s'emparer de
Francfort, lorsqu'une intrigue l'éloigna
de l'armée dont il méritait si bien le com-
mandement en chef. Quoique les jour-
naux eussent annoncé , en 1797 , qu'il ob-
tiendrait ce grade à l'armée de Sambre-
et-Meuse , ce fut à Pioche qu'on le déféra.
Kléber, mécontent du Directoire, se re-
tira à une maison de campagne qu'il
avait achetée aux environs de Paris, où
il s'occupait de rédiger des mémoires sur
ses campagnes , lorsque Bonaparte l'en-
gagea en 1798 à le suivre en Egypte. Il
débarqua le 50 juin de la même année de-
vant Alexandrie, et recul un coup de feu
en en escaladant les remparts. Bonaparte,
qui se portait sur le Caire, lui laissa le
commandement de celte place. Kléber
l'accompagna fhi ver suivant en Syrie, à
la tête de l'avant-garde , prit le fort d'El-
Arisch, suivit sa route dans le désert,
s'empara de Gaza , de la ville et des forts
de Jaffa. Pendant le siège de Saint-Jean
KLE
133
KLE
d'Acre . il fui détaciu- du camp, battit
les Turcs au Mont-Thabor , et les força
de se retirer vers le Jourdain. Après
la levée du siège , il commanda Tarrière-
garde, et protéjjea la retraite de l'armée.
Il se signala de nouveau en Egypte , au
combat d'Aboukir, où les Turcs furent
entièrement défaits. A son départ pour
l'Europe, Bonaparte lui remit le com-
mandement; Kléber se trouvait dans la
position la plus diflicile. Les fréquens
combats . les marcbcs forcées dans le dé-
sert avaient affaibli notablement l'armée ,
qui se trouvait en outre dépourvue de
nnmitions et d'argent, tandis que le
(;rand visir s'avançait par la route de
Damas avec 80 mille hommes et 60 pièces
de canon , et que le fort d'El-Ariscli était
déjà tombé en son pouvoir. Ne pouvant
ni obtenir de secours, ni conserver l'E-
gypte . Kléber conlinuaavec les Ottomans
les négociations entamées par Bonaparte;
mais n'espérant d'elles aucun résultat
sans l'entreunse des Anglais, il choisit
pour médiateur le coiimiodore Smith. Le
traité d'El-Arisch fut conclu : il portait
que l'armée française serait embarquée
el transportée en France avec armes
et bagages; l'Egypte devait être entière-
ment évacuée, et tous les Français pri-
sonniers mis en liberté ; mais à peine
Kléber, fidèle au traité, eut-il remis aux
Turcs tous les forts de la haute Egypte ,
la ville de Damietle , comme il se dispo-
sait à évacuer le Caire, l'amiral Keith
lui écrivit que son gouvernement lui dé-
fendait de permettre l'exécution d'aucun
traité, à moins que l'armée française ne
mît bas les armes, et ne se rendît prison-
nière de guerre. Kléber indigné fil im-
primer cette lettre pour lui servir de
manifeste, et y ajouta ces mots : » Sol-
» dats , aux arma^l voais répondrez à
» ime telle insulte par des victoires. »
Depuis ce moment , Kléber vola de succès
en succès. Ayant rapidement concentré
son armée , il la développa dans les plai-
nes de la Koubeh, défit l'avant-garde tur-
que, retranchée devant le village de Ma-
tarié ; et rencontra l'armée du grand visir
déjà rangée en bataille , au moment qu'il
s'approchait de l'obélisque d'Héliopolis;
elle était dix fois supérieure à la sienne ;
Kléber l'attaqua immédiatement et rem-
porta la célèbre victoire d'Héliopolis. Il
dispersa les Turcs dans le désert , se ren-
dit maître , à Salahieh , de tous les bagages
de l'ennemi et d'un butin considérable ,
©t reprit de vive force le Caire , où l'in-
7.
surrection avait éclaté, ainsi qu'à Boulak.
La révolution du 18 brumaire lui fai-
sait espérer de prompts secours de la part
du premier consul. Sa victoire récente
lui offrait la possession paisible de l'E-
gypte, au moins pour une année ; l'armée
elle-même montrait le désir de conserver
cette conquête; tandis que les Ejjyptiens,
étonnés de voir l'armée nombreuse du
grand visir battue par une poignéede Fran-
çais , crurent désormais que ces derniers
resteraient leurs maîtres. Les contributions
extraordinaires imposées à la vilie du
Caire, en punition de la révolte, mirent
Kléber à portée de payer li millions d'ar-
riéré, y compris la solde. Il forma une
légion grecque, et un corps deCophtes,
qu'il fil instruire et habiller à la française.
Il établit aussi un parc de 500 chameaux,
et des ponts volans sur le Nil , pour fa-
ciliter le passage du fleuve aux troupes
qui auraient à marcher de la côte aux
frontières de la Syrie. Kléber s'occupa
ensuite de la sûreté et de la prospérité
de l'Egypte ; il mit un terme aux dilapi-
dations , établit un comité adtr»inistratif.
Respecté par les peuples conquis , aimé
de ses subalternes , chéri de tous ses
soldats, il exerçait un pouvoir souve-
rain et nullement disputé. Il quitta
le Caire le 3 juin 1800, pour faire une
tournée en Egypte ; le 14 , il passa la re-
vue de la légion grecque , dans l'île de
Rhouda, et revint au Caire voir les em-
bellissemens qu'on faisait à son hôtel. Il
se promenait sur la terrasse de son jardin
lorsqu'un jeune Turc, nommé Soleyman,
égaré par son fanatisme, lui porta quatre
coups de poignard , dont il expira quel-
ques momens après. On arrêta aisément
l'assassin , qui n'opposa pas la moindre
résistance, et qui semblait regarder ce
meurtre atroce comme une action inspi-
rée par le Ciel. Il fut condamné par une
commission militaire à périr au milieu
des tourmens. Kléber est sans contre-
dit un des plus grands hommes de guerre
qu'ail produits la révolution. Une activité
infatigable , un rare sang-froid , beaucoup
d'enthou.'«asmc pour la gloire de son pays,
un coup d'oeil juste, une connaissance
profonde de la tactique de son art, voilà
les qualités qui le distinguaient comme
général. Désintéressé, humain et très res-
pecté, d'un seul regard il arrêtait les sé-
ditions, le brigandage et l'effusion du
sang. Peu de chefs d'armée ont établi une
discipline aussi exacte parmi les soldats ;
et peu d'hommes , pouvant disposer
12
KLE 134
des richesses conquises, ont micitx suies
mépriser. Safranchise, une cerlainefierlé.
et un caractère facile à s'emporter, ren-
daient souvent son abord pénible à cetix
qui raj)prochaient; mais ses actions et son
équité loi ja;juaienl bientôt leur estime.
Sus restes, rapportes à Marseille, furent
déposés au château d'If. Louis XVIII or-
donna, en 1818, qu'ils fussent recueillis et
placés dans un uioiiumenl qui lui fut élevé
à Strasbourg. Un autre uïonument, qui
ne fut pas terminé, lui avait été décerné
sur la place des Victoires; c'est là que Garât
jirononça son élojje funèbre, qui fut iui-
])rimé avec celui du {jénéral Desaix , par
le même auteur , à Paris (an 9 ) , 1800 ,
iii-S". N. P^ourrier, devenu depuis secré-
taire général de l'académie des sciences
et alors membre de l'institut d'Egypte,
avait déjà fait insérer dans la Décade
égyptienne , \o\\i'ivd.\ qui s'imprimait au
Caire, l'oraison funèbre qu'il prononça
lors de la cérémonie des funérailles, en
juillet 1791). Ce morceau a été reproduit
dans le tome 12 de l'ouvrage intitulé :
f^ictoires et Conquêtes , etc.
* KMCL\ ( JAcyUES-TiiÉODORE ) , natu-
raliste, membre de l'académie des sciences
de Saint-Pétersbourg, de la société royale
de Londres, et de rinslilul de Bologne,
naquit à Ko:iigsberg en 1083, et mourut
àDanîxick, où il exL'r«;a la ciiarge de se-
crétaire du sénat, le ti7 février 1759. Il a
laissé un grand nomlire d ouvrages qui
laissent délirer plus de {joùl , mais qui ren-
ferment prescpie tous quelques faits ou
quelques ligures qui les renoent utiles
aux natnralisies. Les principaux sont :
i Descriptioiieb tubnloruin marinorum ,
ï>antz.iri' . 1751 . in-/i.°, (ig., réimpriuiéen
illô, in-4 ; I Nnttii^dlis clispositio echino-
dennatum , ibid. 1754 et Leipsick, 1778 ,
ia-i", iig., Irad. en français d'après la pre-
mière édition, sous ce titre : Ordre na-
turel des oursins de mer, Paris, ilok .
in-8° ; | fJistoria nuturalis piscium. 1740
— 49, 5 part., en un vol. in-4", Iig. Il y
a des exemplaires datés de Leipsick, 1802,
ifui diffèrent des autres par la réimpres-
sion du premier fascicule, augmenté d'uxe
note au verso de la page 55 , ei par l'ad-
dition d'une (i' partie. C'est celui des ou-
vrages de Klein quel'on consulte le pins.
I Ilistoriœ avium prodromus . 1750. in-4° ;
1 Tentainen methodi ostracologicœ. Leyde,
4755, in-4'', figures. | Stemmata avium,
4759. in-4''; ] Uitcrior lucub ratio subter-
ranea de terris et mineraîibus , Péters-
liOTirg, 1760, in-'i^. C'est un des ouvrages
KLE
les plus rares de l'auteur. | Ora avium
pturimarum^ allemand et latin, 17(i6.
Iig. coloriées ; [ Spécimen descriptionis
petrefactorum gedanensium , alicinand
et latin, Nuremberg, 1770, in-4", fig. colo-
riées. Plusieurs de ces ouvrages ont clé
traduits en anglais et en hollandais.
* KLKIIM ( EnwKST-F'ERuimA^'D) , jiuis-
consulte prussien, né à Breslau en 1745,
étudia dans le gymnase de sa ville natale
et à l'université de Halle , et se fit re-
cevoir ensuite avocat. En 1779 il publia
un recueil de Mémoires sur le droit et
sur la législation^ ouvrage qui com-
mença à le faire connaître, et fixa sur
son auteur l'attention du chancelier Cra-
mer qui l'appela à Berlin en 1780 , pour
coopérer à la rédaction du nouveau code
prussien. Il en rédigea les parties les plus
importantes avec Suarcz son ami , entre
autres celles qui concernent les délits et
les peines. Klein devint ensuite directeur
de l'université de Halle et membre ordi-
naire de la faculté de droit. Rappelé quel-
ques années après à Berlin, il fut l'un des
juges du tribunal suprême, puis conseil-
ler privé et secrétaire d'état au déparle-
ment de la justice. Il mourut le 28 mars
1810. Il était décoré de l'ordre de i'Aigle-
rouge, et était membre de l'académie des
sciences de Berlin qui avait couronné son
Mémoire sur la puissance palejnel/e , et
correspondant de la coumiission de légis-
lation établie à St.-Pétersbourg. On a de
lui un asscA grand nombre d'om>rages
dont la liste se trouve dans la Bibliothè-
que générale allemande . avec son poil rait,
14*= volume ; nous citerons : | Annales de
la législation et du droit dans les états
prussiens .''Qç.vWn el Slellin. 24 volumes
In-S", 1788-1807; i Principes du droit
pénal allemand el prussien. Halle , 1799,
in-8° ; | Système du cùmil naturel. Halle,
1797, in-8"; | Système au droit civil prus-
sien . ihid. , 1801, in-8° ; | Archives du
droit criminel ( avec Kleinschrod), 1798-
1809, 7 vol. in-8°.
RL1:L\ARTS. T-^oyez CLÉNARD.
KLEIST (EwALO-CuRiSTiASide), mili-
taire el poète allenjand , né le 5 mars
1715, à Zellin en Poméranie, marcha sur
les traces du célèbre Gessner , son ami ;
il a dorme aux acteurs de ses Idylles les
mêmes sentiuiens de vertu et de bienfai-
sance qui distinguent le« bergers de Gess-
ner, mais il ne s'est pas borne à des ber-
gers : il a introduit dans l'églogue des
jardiniers et des pécheurs, à l'exemple
de Sannazar , de Grotius et de Théocrile
KLE
ISS
KLI
lui-même. Kleist mourut en 1759 , des
blessures qu'il avait reçues à la bataille
de Kunnersdorf , où il commandail le ré-
giment de Hanssen, au service du roi de
Prusse. Ce soldat poète était d'une inlré-
pidilé rare. Au moment qu'il tomba cri-
blé de blessures , il s'écria aux soldats :
« Mes enfans, n'abandonnez pas votre
» roi. i> Sa perte excita les re{i;rets dt; l'Al-
lemagne entière. C'est un des poètes les
plus distingues de sa nation, et un de ceux
qui ont le plus contribué à former la lan-
gue allemande. Son principal ouvrage est
le Poème du Printemps . 1749 . in-S" , où
l'on trouve une peinture iidèle et animée!
des beautés de la nature. Il a été traduit
en italien , en latin et en français. Cette
dernière traduction, faible et décolorée ,
n'acepeadant pas détruit toutes les beautés
de l'original. Elle se trouve dans le Choir
des poésies allemandes de M. Huber. Il a
paru depuis deux nouvelles traductions
françaises de ce jioème; l'une à Berlin
4781 , in-S" , l'autre en vers ; mais elles
ne valent pas mieux. On a encore de lui
des Odes, des Chansons^ des Idylles, des
Contes et des Fables, diverses petites
pièces de vers, plusieurs morceaux inti-
tulés Rapsodies. Ces morceaux sont , avec
le Printemps^ ce qu'il a écrit de plus ori-
ginal et de plus poétique. Cissidès et Pa-
chès, petite épopée qui n'a d'autre mérite
que celui de peindre avec force le mérite
guerrier ; et quelques fragmens en prose
dans le genre du Spectateur. Le recueil
de ses poésies a été souvent réimprimé
sous le litre de Poésies de l'auteur du
Printemps.
♦ KLEIST DE NOLLEIVDORF ( Emile-
Frédéric, comte de), général d'infanterie
prussienne , né à Berlin en 1762 , était
colonel de hussards en 1793, lorsque se fil
la campagne du Rhin dans laquelle il se
distingua à plusieurs reprises , notam-
ment au siège de Mayence, à l'affaire de
Monbach et à la bataille de Laulern ( 13
juillet 1794 ) où il fut blessé ; nommé plus
tard major-général il contribua à la dé-
Caile des Polonais. Kleist recul le grade
de lieutenant-général en 1812, et, après
{a défection du général York , il le rem-
plaça en qualité de commandant du corps
prussien qui agit de conceit avec les
Français contre les Russes, et fut sous les
ordres de Joachitn Murât, roi de Naples.
Lorsqu'on 1813 le roi de Prusse se fut dé-
claré hostile à Bonaparte, Kleist, encore
placé à la tète d'un corps de Prussiens ,
se distingua dans la journée de Bautzen ,
à l'allaque des hauteurs de Burg, et, le
29 mai. il signa avec le général russa
Srhouwatoff et le duc de Vicence à Plei-
witz un armistice qui suspendit les hos-
tilités jusqu'au 8 juillet. Le 17 août il se
signala devant Dresde, et, quelques jours
après, à l'affaire de Culm où il mit en dé-
route et lit prisonnier le corps du géné-
ral Vandamme : ce fut à la suite de celte
brillante affaire qu'il reçut le titre de
comte de Nollendorf, du nom d'un village
auprès duquel il avait attaqué les Fran-
çais. Le comte de Kleist se conduisit avec
la même dislinclion à la bataille de Leip-
sick, où ses troupes faisaient partie de la
colonne commandée par le général Barclay
de ToUy. Le 1" janvier 1814, il passa le
Rhin, s'avança avec l'armée de Silésie
dans l'intérieur de la France, s'arrêta de-
vant Thionville. et assista à la bataille de
Laon (9 mars 1814). Après s'être battu
avec lionneur le 26 du même mois à La-
ferté-Gaucher d'où il délogea les Français,
ainsi qu'aux affaires de Sézannc et de
Coulommiers, il s'empara de Villc-Parisis
et de Monsaigle, positions importantes
que les Français lui disputèrent vivement
et qu'ils furent obligés de céder. Chargé
de faire la principale attaque sur Paris,
il s'empara le 50 mars do Saint-Denis, de
la Villeiie et de la Chapelle, et il venait
d'enti-er dans ce dernier village, lorsqu'il
reçut la nouvelle de la capitulation de
Paris , et de la cessation des hostilités.
Le comte de Kleist fut récompensé de
ses services par le titre de gouverneur du
grand duché de Berg. Ce général est mort
à Berlin le 16 février 1823, avec la répu-
tation d'un habile tacticien.
KLESCI! ( CnRiSTOPiiE), fameux prédi-
cant luthérien , né à Tglan, dans le comté
de Scepus en Hongrie , et mort à Berlin
en 1697, s'est fait connaître par un grand
nombre d'ouvrages , dont les derniers
sont remplis de visions et entachés d'un
fanatisme qui marque assez le dérange-
ment de sa Icle. En assurant que le pape
est la bète à sept tètes de l'Apocalypse ,
il montre que Louis XIV est la bête à
dix cornes , comme roi de France et de
Navarre. Il trouve dans le nom Ludovi-
cus le nombre 666, dont il est parlé au
verset 18 du chap. 13. Ce nombre y est
effectivement selon la valeur des lettres
romaines , et c'est ce qu'il y a de vrai
dans le Commentaire de Klesch.
KLI^G. J^oyez CLING.
* RLL\GER ( Frédébic-Maximilibn
de), né à Francforl-sur-le-Mein, en 1753»
KLI
i56
KLI
résida d'abord à Weimar , où il composa
quelques bluettes dramatiques ; et se ren-
dit ensuite en Russie , pour y tenter la
fortune. Il fut nommé ofUcier en 1780 ,
et parvint de grade en grade à celui de
lieutenant-général, qu'il occupait lorsque
la mort vint le surprendre , à Saint-Pé-
tersbourg, le 23 février 1831. Ce célèbre
écrivain a pris une part active au mou-
vement qui fut imprimé à la littérature
allemande il y a environ cinquante ans.
Klinger débuta par un drame intitulé :
les Jumeaux , écrit dans la manière de
Shakespeare. Il publia ensuite plusieurs
romans : | Fie. faits et gestes et descente
de Faust aux enfers ; \ Histoire de Giafar,
le Barmécide ; \ Histoire de Raphaël de
Jguilar; \ Voyages avant le déluge ;\ le
Faust de l'Orient; \ Histoire d'un alle-
mand des derniers temps ;\ L'homme du
monde et le poète ; \ enfin. Considérations
et pensées sur divers sujets de inorale et
de littérature. Ses œuvres complètes ont
été publiées à Kœnigsberg, 1819, en douze
volumes.
• KLINGLm (N... le baron de), né
français , était maréchal-de-camp au ser-
vice de France , lorsque la révolution
éclata. M. de Bouille le chargea en partie
des détails relatifs au départ de Louis XVI
pour Varennes au mois de juin 4791. La
part qu'il prit à cet événement lui valut
les honneurs de la proscription : décrété
d'accusation , il alla se placer dans les
rangs des émigrés dont il commanda un
corps l'année suivante. Nommé général-
major au service de l'empereur d'Au-
triche, il fit les campagnes du Rhin de
1796 et 1797 : un de ses fomgons qui con-
tenait la correspondance entre le prince
de Condé et Pichegiu , fui |)ri3 par Mo-
reau. Les lettres publiées ofliciellemeut
compromirent beaucoup de personnes,
et devinrent la base de l'accusation qui
fut portée contre Pichegru après le 18
fructidor (4 septembre 1797 ). Le générai
Klinglin, qui doit toute sa célébrité à cet
événement fut employé en 1800 à l'armée
de Brisgaw et est mort en Autriche.
♦RLINGSPOIIRE (Mauiwce, baron de),
feld-maréchal suédois , fit avec honneur
ses premières armes en France. De retour
dans sa patrie en 1788, il mérita la faveur
des rois Gustave III et Gustave IV ; il fut
employé dans la guerre de Finlande , et
l'année suivante, il fut chargé, après le
renvoi du général Toll , du commissa-
riat général et des approvisionnemensde
l'armée. Malgré l'épuisement du pays, il
s'acquitta de celte commission avec zèle
et intelligence , jusqu'à la paix de Wc'
roelé. En 1808. le roi Gustave IV lui con-
fia le commandement en chef de l'armée
de Finlande, dans la funeste guerre qu'il
venait de s'attirer avec la Russie. Le
général Klingsporre défendit pied à pied
la province qui lui était confiée , contre
une armée quatre fois plus nombreuse
que la sienne. Ne pouvant se mesurer en
bataille rangée , il se contenta de harce-
ler l'ennemi dans des affaires d'avant-
postes. Il fit brûler la flottille des lacs qui
se trouvait dans les ports de Saint-Michel
et de Christine , et se battit avec opiniâ-
treté dans les défilés de Tawastéhus;
mais grâce à la supériorité du nombre ,
les Russes s'emparèrent de Swartholin,
de Sweaborg, d'Abo et de presque toutes
les places de la Finlande. L'intrépide
Klingsporre obtint cependant à Sikojoki
et à Kewolax des succès inespérés , à la
suite desquels il reprit momentanément
l'offensive. La fortune ne lui sourit pas
long-temps : d'un côté les troupes étaient
fatiguées et réduites à un petit nombre,
de l'autre les Russes furent renforcés par
une armée nouvelle que leur amena le
général Barclay de "Tolly. Il lui fallut
battre en retraite : le désordre se mit
dans les rangs de l'armée , et Klingsporra
eut beaucoup do diflicullé à réunir quel-
ques débris du corps qu'il commandait.
La Suède se trouvait dans un état de com-
bustion : l'armée de l'Ouest qui avait été
opposée aux Danois et aux Norwégiens
venait de faire un armistice et marchait
sur Stockholm pour y changer le gou-
vernement. Dans cette conjoncture il ne
restait d'autre moyen de salut à la Suède
que de conclure la paix. Mais Gustave IV
refusait d'entendre à cet égard aucun
conseil. Le 15 février 1809, il avait mérne
défendu de laisser entrer personne dans
ses appartemens ; le maréchal Klhigsporre
suivi de deux autres officiers généraux,
osa violer la consigne, eut un court en-
tretien avec le roi , et peu d'inslans après
la Suède eut un nouveau monarque :
Gustave IV avait abdiqué. Les états du
royaume donnèrent la couronne au duc
de Sudermanie qui prit le nom de Charles
XIII ( 1809 ). ( Voyez CHARLES XIII. ) Le
maréchal Klingsporre est mort en 1820 ,
dans un âge très avancé.
RLli\GSTET (Claude-Gustave), pein-
tre, né en 1657 à Riga en Livonie, mort
à Paris en 1734, âgé de 77 ans, 3'étail
destiné à la profession des armes sans
Kï.O I
ftégligerlestalens qu'il avait pour la pein-
ture, et qu'il eût bien fait d'exercer sur
des sujets moins libres et moins offcn-
sans pour les mœurs. Attaché à Pliilippe
d'Orléans régent de France, il voulut que
ses tableaux fussent conformes au {joût
dépravédesonprotecteur et de cette épo-
que de corruption. On ne peut point dire
qu'il ail eu , dans un haut deyré , la cor-
rection du dessin et le yénie de l'inven-
tion ; cependant plusieurs des morceaux
de sa composition sont assez bien traités.
Ses ouvrages sont , pour, l'ordinaire , à
l'encre de la Chine. Il a excellé dans la
miniature : il donnait beaucoup de relief
zt de caractère à ses figures. On l'appelait
le Raphaël des Tabatières.
KLOPPE\BURG (Jea\). royez CLOP-
PENBURG.
• KLOPSTOCK (Frédéric-Gottlieb ),
un des plus célèbres poètes de l'Allema-
gne , naquit à Quedlinbourg , le 2 juillet
4724, à l'abbaye de ce nom où son père
avait un emploi. Le jeune Klopstock qui
était l'aîné de dix enfans , étudia à l'é-
cole de Pforla près de Naumbourg, et
après avoir fréquenté différentes univer-
sités de l'Allemagne , il fit ses cours de
théologie à léna et à Leyde , puis em-
brassa l'état ecclésiaslique. Il avait de
bonne heure révélé son génie poétique
par des odes et des pastorales pleines de
1 verve et d'harmonie. Ce fut durant le
cours de ses éludes théologlcjucs qu'il
conçut le projet de donner à l'Allemagne
un poème épique, et le Messie fut le sujet
qu'il choisit pour celte composition qui
devint dès lors l'objet exclusif de ses
méditations, et dont il termina les trois
premiers chants à Leipsick. Il les com-
muniqua à quelques-uns de ses amis
qui les livrèrent au public dans des re-
cueils périodiques de Brème et de Halle
en 1748, et ce'.te publication fit en Allema-
gne la plus vive sensation.Appelé à Zurich
par Bodmer, Breilinger et Gessner , qui
avaient formé dans cette ville une réunion
littéraire, il y séjourna, chez le premier
de ces trois écrivains, pendant neuf mois.
Il retourna ensuite dans sa patrie ,et reçut
de Frédéric roi de Danemarck l'invitation
de se rendre à Copenhague, où une pension
de 2,000 francs lui était assurée ( 1751 ) :
il devait cette faveur au comte de Berns-
torff , ambassadeur danois près la cour du
France, qui avait lu avec admiration les
premiers chants de la Messiado , et qui
en recommanda l'auteur à son souverain.
Lorsque ce ministre fut disgracié, Klops-
37 KLO
tock se retira à Hambourg qu'il ne quitta
plus que pour faire quelques excursions
auprès du landgrave de Hesse qui lui
avait fait aussi une pension. Pendant son
séjour en Danemarck, Klopstock conti-
nua la Messiade . el les dix premiers
chants furent iiriprimés en 1755 aux frais
du roi. La muse lyrique lui inspira sou-
vent aussi plus d'un chant sublime , et
plusieurs critiques ont placé ses odes au-
dessus de son épopée. Il adopta avec pas-
sion les principes de la révolution de
France, et ses chants patriotiques lui va-
lurent le titre de citoyen français dont
le diplôme lui fut envoyé par l'assem-
blée Constituante; mais, lorsqu'il villes
crimes que l'on commettait au nom de la
liberté, et qu'il apprit les massacres des 2
et 3 septembre, il renvoya ce diplôme à
la Convention. Il consacra une ode inti-
tulée les Deux Tombeaux^ à la mémoire
du duc de Larochefoucault assassiné à
Gisors et de Charlotte Corday : il voua
Marat à l'exécration publique el se dé
chaîna contre la révolution. Les moeur»
de Klopstock étaient douces et pures : il
possédait toutes les vertus qui honorent
le talent , sans avoir aucun des défauts
qui déparent souvent l'homme de lettres.
Il est mort le 15 mars 1805 , vivement re-
grellé par les habitans de Hambourg, qui
célébrèrent ses funérailles avec une ma-
gnificence extraordinaire. La ville d' Al-
loua s'associa d'une manière solennelle
aux regrets universels qui éclatèrent à sa
mort. La Messiade est dans toutes les bi-
bliothèques. Le choix du sujet, la manière
neuve et brillante avec laffirelle il a été
traité, la beauté des images, la profon-
deur des pensées , un style soutenu et
souvent sublime , ont assigné à Klopstock
un rang honorable parmi les plus grands
poètes épiques. Le sentiment leltçieux se
montre partout exalté et profond dans
cet ouvrage, qui esi loin toutefois d'être
sans défaut. On remarque surtout dans la
seconde partie de la Messiade un mor-
ceau sur la mort de Marte sœur de Mar-
the et de Lazare : c'est le tableau da
la mort du juste : Klopstock , avant d'ex-
pirer, récitait ce passage d'une voix fai-
ble , afin de s'exhorter à bien mourir. La
traduction la plus récente de ce poème
est celle de M. J. d'Horrer, Paris, 1825-
1826, 3 vol. in-8''. Outre ce poème qui
avait coûté à son auteur vingt années de
travail, et ses odes qui lui ont mérité le
surnom de Pindare de V Mlemagne ,
Klopstock composa quelques tragédie»
RLO
138
KLO
qui eurent du succès. Voici la liste do
ses principales productions : | la Mes-
stade, poème en 20 chants, Halle, 1769,
4 vol. in-S**; Altona, 1780, traduite en
français; Aix-la-Chapelle, i801, 5 vol.
in-8"; | plusieurs Poèmes et poésies lyri-
ques. Hambourg, 1798; | des Tragédies,
parmi lesquelles on remarque la Mort
d'Adam, traduite dans presque toutes
les langues de l'Europe , et dont il existe
deux traductions en français , celle de
l'abbé Roman , avec un discours prélimi-
naire, Paris, 1762, in-12; et celle de
l'abbé de Sl.-Etner, ibid., 1770 , in-8", les
Dardits , c'est le titre de trois pièces,
dont le héros est le célèbre Jrminius ou
Hermann. et qui sont d'un genre tout-à-
fait nouveau; | Salom.on, David, etc. Les
tragédies de Klspstock sont les plus ré-
gulières du théâtre allemand , et se dis-
tinguent par le style, par le plan, par
des senlimens énergiques, et une ex-
trême sensibilité. | Aa république des let-
tres allemandes, 1774; | Traité sur l'or-
thographe allemande , 1778; | Fragmcns
sur la langue et la poésie. 1779; j des Dia-
logues grammaticaux . 1794 ; | Discours
sur la langue allemande. Klopslock avait
enrichi plusieurs Journaux et recueils
périodiques d'articles intéressans. Ses
OEuvres ont été publiées à Leipsick , 1799,
1809, 7 vol. in-4". Goeschen, éditeur de
celte belle collection, en a publié une
autre qui est aussi très estimée en 10 vo-
lumes in-8' de 1798 à 1806. Pour plus de
détails bibliographiques, on peut con-
sulter le Dictionnaire de C. //. Joerdens.
ainsi que V Allemagne littéraire de Meu-
sel : ou peut aussi recourir au Dictionnaire
bibliographique d'Elbcr t, pour l'indication
des diverses versions qui ont été faites des
productions de ce grand poète. Klopslock
fut nommé en 1802 associé étranger de
J'insiilul de France , et M. Dacier a lu son
Eloge dans la séance publique du 22 mars
180o : voyez le Magasin encyclopédique,
1803,' tome 2, page 358. M. Ohnmacht,
auii de Klopslock et statuaire habile de
Strasbourg, a fait le buste de ce poète.
— Klopslock , en allant à Copenhague en
1751 , lil à Brunswick la connaissance de
!^I/\RGUEitiXE MOLLER, femme spirituelle
» t aimable , plus connue sous le nom de
META , qu'il épousa en 1754 , et qu'il a si
souvent célébrée dans ses chants, sous
le nom poétique de Cidli. Elle est morte
en 1758. laissant diverses compositions
cfue Klopslock a publiées sur le titre
à^ Œuvres posthumes de Marguerite Klop-
slock : on y dislingue des Lettres de morti
à des vivons . et une Tragédie de la
mort d'Abel; il y a joint quelques lettres
adressées par lui à la défunte, et une /Vb-
tice SUT la vie de cette fenune, qu'il a
tendrement aimée.
• RLOTZ ( Chrétien-Adolphe ) , litté-
raleur allemand , naquit à Bischofswerda
le 1? novembre 1738, d'un ministre protes-
tant, auteur de trois Dissertations latines
très estimées , sur Tyron , affranchi de
Cicéron. Dès 1 âge de sept ans il montra
pour l'étude de grandes dispositions, que
son père s'empressa de cultiver. Il apprit
les premiers éléiiumsdes lettres à Meissen
et à Gorlitz, et se rendit ensuite à Leipsick,
où il suivit peu les leçons publiques, trou-
vant mieux son compte à s'instruire lui-
même dans les meilleurs livres. Son père,
qui vivait dans l'aisance , lui fournissait
le m oyen de se livrer tranquillement à lé-
tude : le jeune Klotx fil de rapides progrès.
II quitta Leipsick et se rendit à léna , où il
était avantageusement coiuiu ])arde nom-
breux écrits qu'il a\ ait publiés depuis l'âge
de dix-neuf ans. Cédant aux instances de
plusieurs littérateurs, il ouvrit une école,
où il commença par expliquer Horace
avec beaucoup de succès. Kloli était versé
dans plusieurs sciences et possédait les
langues savantes. Le roi d'Angleterre te
nomma professeur de pbilosoplnieà l'uni-,
versité de Gollingue. liienlôt après le
prince de Darmstadl et le général Quintus
Icilius ( roijez GUISCHAUDT). au nom
du roi de Prusse, lui offrirent en même
temps, le premier, la chaire des langues
orientales à l'université de Giessen; et le
second . celle d'éloquence à l'université de
Halle. Klolz préféra pour lors rester à Got-
tingue , d'aulant plus qu'on lui conféra le,
titre de professeur honoraire, et qu'on aug-j
menla ses appoinlemens- Mais, invité do
nouveau par Frédéric II , il se rendit à
l'université de Halle, pour y professoi
l'éloquence, et y reçut le titre de conseiller
aulique. Sa réputation s'étendait de jour
en jour, et le roi de Polo^jne . Slanislas-
Auguste !I , devant établir une académie
pour la jeune noblesse, l'appela à Varso-
vie, en lui offrant une pension de douze
cents thalers et le litre de conseiller. Fré-
déric, voulant conserver dans ses états
un honuTie d'un tel mérite , augmenta les
appoinlemens de Klotz et le nomma son
conseiller inlime. Le roi de Pologne ren-
chérit alors sur les honneurs et sur les
appoinlemens pour gagner ce dernier;
mais la reconnaissance le retint à Halle,
I
KLO iô
OQ il travaillait , ca outre, à plusieurs ou-
vrages iinporlans. Quoiqu'il fût un peu
irascible et piquant dans ses écrits , Klotz
était d'un caractère jovial et généreux.
Tout à coup , et lorsqu'il eut atteint sa
quarantième année, il devint triste et
avare, sans qu'on pût en deviner d'abord
la cause : mais on ne tarda guère à recon-
naître, dans ce cliangemenl, les syinplô-
nics d'une maladie séreuse qui menaçait
ses jours. Klotz , dans son lit de douleur,
sentant sa tin a[)pr()cber, pria son ami
Mangelsdorf de lui lire le Phédon de Men-
delssohn, où il est tiaiié de l'immortalité
de l'âme. Klot/- intenompil la lecture, et
coumiença à disculei avec son ami sur
différens passages du livre de Aiendels-
sohn, puis s'écria :« Ces discussions ne
» prouvent rien ; la religion nous donnera
» de plus forts argumens. » Il lit appe-
ler un ministre, dans les bras duquel il
mourut, le 51 décembre 1771, à l'âge de iô
ans. L'assiduité de Klotz au IravaH était
extraordinaire, ainsi qu'on le voit par
les nombreux ouvrages qu'il a publiés
dans une aussi courte carrière, et dans l'es-
pace de douze ans. Nous nous bornerons à
indiquer les suivans ; ] La Ruine de Zil-
taUj en vers latins, 1738; | une Disser-
tation pour la défense du caractère de
Cicéron , contre Dion, Cassius et Plutar-
que; | une Lettre sur Homère , dans la-
quelle il suppose que nous n'avons du
poète grec qu'une édition corrigée et mu-
tilée par Cynethus de Chio. Cependant
les preuves dont l'auteur appuie ses con-
jectures ne paraissent pas très convain-
cantes ; I Les Mœurs des érudits ; | Le
Génie du siècle ; \ les Ridicules littéraires.
Ces trois ouvrages satiriques, publiés de
1761 à 17(52, suscitèrent à Klotz un grand
nombre d'ennemis; | un Discours pro-
noncé dans la société latine de léna , et
où il défend la latinité de Juste-Lipse,
1761 ; I Remarques sur les Caractères de
Théophraste . 1761. Cet ouvrage , critiqué
par Fischer, excitaentre ces deux auteurs
des discussions d'autant plus vives, que
Klotz, naturellement caustique, avait
blessé l'amour-propre de Fischer par des
articles satiriques insérés dans des jour-
naux auxquels il travaillait.il indisposa
également contre lui et par le même motif
le savant Burmann , non moins irascible
que Klotz, et une discussion polémique
s'établit entre eux, pendant laquelle Klotz
publia son : | Jntiburmanus ^ léna et
Utrecht, 1761, et auquel Burmann riposta
par son Antildotsias. | Dissertation sur
9 RLU
l'heureuse hardiesse d'Horace, 1762, réim-
primée dans le Classical Journal, t. {7> ,
Londres, 18 17; | f-'indiciœ horatiancc .
contre le père Hardouin , 1764 ; nouvel. e
édition, corrigée, augmentée, et sous le
titre de Lectiones Venusinœ , 1770 ,
\Fra(jmens de Tyi-fée . i76k, accompagnés
d'un commentaire justement crLliqtié
co:nme prolixe. Cet ouvrage a été réim-
primé en 1767 ; ] Opuscule varia argu-
menti , contenant divers morceaux acadé»
miques, et entre autres des Programme»
sur les défauts de Sénèque le tragique,
sur le style d'Isocrate, sur le clinquant da
Tasse, contre Boileau, sur l'interprétation
des poètes anciens, sur le vrai caractère
de l'histoire littéraire, sur le génie de
Callimaque , etc. | un Traité sur la nu-
mismatique ^ 3 petits volumes. Le pre-
mier est un supplément à la Jurispru-
dentia numismatica deHonuuel. Le deu-
xième contient l'histoire des médailles ob-
sidioiiales; letroisièuïe, celle des médailles
satiriques. | Miscellanea critica, etc. Il
fut , en outre , un des rédacteurs du jour-
nal périodique intitulé Jeta litleraria ,
et des journaux de lena et de Leipsick.
Klotz écrivait avec beaucoup de facilité;
son style était correct et élégant; mais il
se livrait un peu trop souvent à ce genre
satirique qui dégrade parfois le plus beau
talent, et lui fait des ennemis irréconci-
liables.
KLOTZîUS ( Etienxe ), théologien lu-
thérien , né à Lipsladt en 1606, gouverna
en qualité de suriniendant-général, les
églises des duchés de Sleswick et de Hols-
tein, et eut beaucoup de crédit auprès de
Frédéric III, roi de Danemarck. Il mourut
à Flonsbourg en 1668. On a de lui plu-
sieurs ouvrages de théologie et de méta-
physique, peu connus , entre autres Pneu-
matica, seu Theologia naturalis de Deo,
1640, in-8°; \De doloribus animœ Christi
in horto et in cruce ; De sudore Christi ,
1750 , in-i".
* KLL'IT ( Adhien ), historien et pu-
bliciste hollandais, naquit le 9 février
1753, àDordrecht, fit ses premières étu-
des dans cette ville , et passa ensuite à
Utrecht, pour y apprendre la médecine.
Bientôt son goût pour l'histoire et la lit-
térature donna à ses travaux une autre
direction. En peu d'années, il devint pro-
fondément instruit dans la philologie hol-
landaise , dans l'histoire , la critique sa-
crée , la diplomatie, la langue grecque,
et même la poésie. Dans sa première jeu-
nesse, il publia des ouvrages eu vers
KLtJ l/tO
Lullandais, qui eurentTseaucoup de vo{jue.
Il avait eu pour maître deux des plus sa-
\ans hommes de l'Europe , Weselirij; , et
Saxius. A peine eul-il terminé ses études,
qu'il fut nomnjé précepteur et recteur,
d'abord à Rotterdam, et puis à la Haye,
à Alckmaër, à Leeuwarden , à Middel-
bourg , dans les écoles dites Latines. A
Middelbour{j, il obtint, outre les titres
déjà cités, celui de lecteur en éloquence
et en langue grecque. Enfin, en 1776, il
fut décoré d'un titre, olijet de ra\nbilion
de tous les sa vans hollandais, celui de pro-
fesseur, considéré bien au-dessus de tous
les autres titres littéraires. II rangea dans
un ordre exact les aichives de 5liddel-
bourg , et y puisa de précieux documens
pour ses ouvrages historiques. En 1779,
il fut nommé professeur d'archéologie
hollandaise et d'histoire diplomatique à
l'université de Leyde, où il se lixa défl-
nitivement. Il ouvrit ses leçons par un
Discours sur le droit qu'avaient eu les
Hollandais d'abjurer la domination de
Philippe II, leur légitime souverain et
maître. Dans ce discours , l'auteur aurait
dû retrancher du moins le mot légitime ,
puisqu'il prenait la défense de la rébellion.
Nous n'examinerons pas, de notre côté,
les droits que pouvait avoir un souverain
pour punir des sujets rebelles; mais,
quoi qu'il en soit, le but de Philippe n'é-
tait que de combattre les fausses doctrines
propagées dans la Hollande , et de main-
tenir les habitans dans la religion de leurs
pères. Kluil publia, à des époques diffé-
rentes , 1785 , 179Ô et 1794 , trois écrits
diamétralement opposés aux opinions qui
régnaient alors sur la liberté et C indépen-
dance des peuples , et ces écrits lui tirent
perdre sa chaire ça 1795. Le courageux
écrivain souffrit patiemment sa disgrâce,
et se borna à donner des leçons particu-
lières jusqu'en 1802, époque à laquelle on
lui rendit son litre de professeur. Quatre
ans après (180(5) on créa pour lui une chaire
de statistique du royaume de Hollande,
soumis alors à Louis Bonaparte , frère de
Napoléon. Kluit, généralement estimé,
jouissait d'une vie douce et tranquille ,
lorsqu'un funeste accident vint terminer
ses jours , et répandre le deuil sur toute
la ville de Leyde. Un bateau chargé de
poudre fut amarré au quai près de la
maison de Kluit. Vers le soir du 12 janvier
1807 , ce bateau fit une explosion terrible,
renversa de fond en comble la maison de
Kluit, sous les ruines de laquelle celui-ci
fot enseveli avec sa femme. Lt-s cadavres
KLU
mutilés des deux époux nft purent élrc
retirés que cinq jours après , et furent
mis dans la même tombe. Kluit avait alors
soixante-onze ans. Il laissa un fds unique
directeur de la posteaux lettres, à Leyde,
et qui n'a pu retrouver que des fragmens
presque inutiles de la bibliothèque, des
recueils et des manuscrits de son malheu-
reux père, dont nous allons citer les prin-
cipaux ouvrages : | Vindiciœ articuli , ô,
v], To, m novo Testamento . en 5 parties;
Ulrecht, 1708, 1771; | Traité sur les IQ
semaines de Daniel, avec le titre de yati-
cinium de Messia duce priniarium. Mid-
delbourg, 1771, in-8" ; | Historia critica co-
7nitatûs Ilollandiœ et Zelandice. ib., 1777,
1782, 2 toin. in-4"; | Réfuiationde l'ouvraga
de Bent , sur les antiquités hollandaises;
I Economie politique de la Hollande, y
compris ses colonies ; \ Histoire de l'ad-
ministration politique de la Hollande juS'
qu'en 1795 , Amsterdam , 1802-1805 , 5 vol.
in-8". Cet ouvrage est considéré comme
le chef-d'œuvre de Kluit; | plusieurs Z)/*-
cours académiques, tels que : pro impe-
ratore Juliano apostata; Pro Mythica;
De superstitiosissimo atque pemiciosissi-
mo in templis et urbibus sepetiendi ritu ;
De eo quod nimium est in studio j'uris pu-
blici universalis. sive dedamnis exabusu
j'uris publici universalis in omnem socie-
tatemredundantifjus .e[c.',\ des Opuscules^
des Traités élémentaires ^ des Mémoires
insérés dans les OEuvres de la société de
philologie hollandaise , et dans d'autres
recueils . soit pour ses cours , soit relati-
vement à l'iiistoire ou la statistique de la
Hollande, etc. ; |des Thèses tX des Disser-
tations, au nombre de seize , écrites en
hollandais; | La souveraineté des Etats
de Hollande, maintenue contre la mo-
derne doctrine de la souveraineté du peu-
ple, 1785 ; I Les droits de l'homme consa-
crés par la constitution hollandaise.
1793; I Coup d'œil sur la guerre avec l'An-
gleterre et sur les intérêts du peuple hol-
landais, 179/t. Ce furent ces trois écrits
qui firent perdre à l'auteur la chaire dans
laquelle il fut ensuiie réintégré.
* KLUK (l'abbé CnRisTOPUE), célèbre
naturaliste polonais , né en 1739 , à Ciec-
hanowiec dans le palatinat de Podlaquie ,
se voua de bonne heure à l'état ecclésias-
tique et fut nommé successivement cha-
pelain chez Ossolinski , prévôt de sa ville
natale , doyen de Drohyczim , enfin cha-
noine de Kruschwitz. Il est mort en
1796 , laissant les ouvrages suivans : | Dés
plantes utiles et particulièrement indi-
KNE
m
K\0
çèngs dont on peut faire uaage et de la
manière de les tnuftiplixr yai:'(y\ ic , 1778-
4780, 3 vol.; | La botanique à l'usage
des ccotes nationales, avec li{;ures , 1785 ;
cet ouvrage écrit d'après le plan du doc-
teur Cz.empitiski, devint classique; | Dic-
tionnaire des plantes selon Linnée , Var-
sovie, 1788, 5 vol.; [ Histoire naturelle
des animaux domestiques et sauvages .
particulièrement de ceux de ta Pologne .
Varsovie, 1779-1780. k vol.; | un trailé
intitulé : Des 7ninéraux.2 vol., Varsovie ,
1781. L'abbé Kluk, infatigable dans ses re-
cherclies, avail parcouru toute la Polo-
gne dans les intérêts de la science , el ses
ouvrages, qui sont devenus populaires,
attestent les connaissances les plus éten-
dues en histoire naturelle , en même
temps qu'ils portent l'ejnpreinte de l'ori-
ginalité. Voici comment le savant luud-
zill, son illustre compatriote, abbé comme
lui et naturaliste, s'est exprime à son su-
jet : « A l'époque où le célèbre Gilibert ,
» précédé d'une grande- renommée , fut
» appelé en Pologne pour organiser l'en-
j> seignement des sciences naturelles dans
» l'académie de Wilna , le modeste et sa-
j> vant naturaliste Kluk, dans sa paisible
» retraite, composait des ouvrages d'une
» utilité générale, restant ainsi long-temps
» inconnu au public, alin de lui devenir
» plus utile un jour. » Une partie de ses
écrits qui traitent des abeilles a été tra-
duite du polonais en langue samo^jiHenne
et lithuanienne, er. 18ti5, à Wilna, par
Cyprien-Joseph Nie/.abilowski, chanoine
de Minsk et curé de Wielona en Lilbuanie.
Il a paru une nouvelle édition du Dic-
tionnaire des plantes de Kluk , corrigée
et considérablement augmentée par le
docteur Dziarkowski el le pharmacien
Siennicki, Varsovie, 1823-1825, k vol.
in-8°.
KîVAEP (Jeax). rogez SERVILIUS.
KNELLEU ( GoDEFROY ) , excellent
peintre dans le i;orlrait, naquit à Lubeck
en 1648. Après s'être appliqué quelque
temps aux tableaux d'histoire , il se livra
tout entier au portrait , et passa en An-
gleterre , où il fui comblé de biens el
d'honneurs. Il y devint premier peintre
de Cnarles II. de Jacques II, de Guillaume,
delà reine Anne, qui lui témoignèrent la
plus grande bienveillance. Il fut créé che-
valier par le roi Guillaume III, et enlin
nommé baroimet. Il mourut à Londres au
moisd'octobre 172r), et non en 1726.comme
ont dit plusieurs biographes : cette date est
confirmée par l'épilaphe que Pope, son
ami, fit graver sur le toiTi,beau qu'on
lui éleva dans l'abbaye de Westminster.
La louche de îCneller est ferme sans être
dure. On a grave d'après co mailre. Knel-
1er lit les portraits de presque tous les
souverains de l'Europe , et vint à Pari?
pour faire celui de Louis XIV. — Son frère
Zacuahie se distingua dans la peinture à
fresque , et par son talent à représenter
les monumcns anciens.
* Ki\OUR ( GEORfiES- Wolfgang), gra-
veur allemand , naijuità Nuremberg le 30
décembre 1705, el mourut le I7septembre
17GI. Il cultiva aussi la peinture et pei-
gnit quelques paysages. Il a publié plu-
sieurs ncueils qui ont été traduits en
fiançais et recherchés pour la beauté des
gravures : | Thésaurus rei herbarice hor-
tensisque universafis, etc., Nuremberg,
1750, in-fol. . avec 501 planches enlumi-
nées; I Recueil des monumcns des ca-
tastrophes que le globe de la terre a es-
suyées , contenant des pétrifications et
d'autres pièces curieuses , Nuremberg,
1708-78, 5 touu-sen 5 vol. in-fol. , figures
coloriées; | Les délices d'S yeux et de
l'esprit ,o\x collection des différentes es-
pèces lie coquillages que la mer renferme,
1700-73,6 part, en 5 vol. in-i", fig. color. ;
I Délices physiques choisies, ou Choix de
tout ce que les trois règnes de la nature
renferment de plus digne des recherches
d'un amateur curieux ^ 1766-67, 2 vol.
in-fol. fig. color.
RxNOUIlde ROSENROTH (Cdristian),
savant allemand du 17' siècle, néàAll-
Rauteu, près de Liegnitz en 1656, est
connu principalement par un ouvragu
qu'on lui attribue, et qui a pour titre :
Kabbala denudata. L'auteur a approfondi
el l'on peut dire épuisé la matière qu'il
traite. Parmi les rêveries, les folies et les
chimères qu'il discute, on trouve d'excel-
lenles recherches sur la philosophie des
Hébreux , et surtout des rabbins. Cet ou-
vrage est en 5 vol. in-i". Les 2 premiers
furent imprimés à Sulzbach en 1677 , le 5*
à Francfort en 1684 : ce dernier vol. est
peu commun. Knorr mourut en 1689 , à
55 ans.
K\OTT. dont le vrai nom est Matiiias
WIL.SON (Edouard), jésuite anglais, natif
du Northumberland, en 1580, auteur d'un
livre sur la hiérarchie , censuré par le
clergé de France ei par la Sorbonne. Ce
livre, intitulé : Modestes et courtes dis-
cussions de quelques propositions du doc-
leur Kellisson par Nicolas Smith , in-12,
Anvers, 1631, est aftjourd'hui parfaite-
KNd H2
ment ignoré , ainsi que ses livres de coa-
Iroverse, Knott mourut en 16y6.
KNOX (Jean ). fameux ministre écos-
sais, un des principaux Imulofcux du cal-
vinisme el du preslJyU'rianismcen Ecosse,
naquit à Gifford ( Lolliiati oriimlal ) , en
<o05, et fut d'abord cliapelain d'Edouard
VI. Chassé, à la iiiorl de ce prince, par
les catholiques, il se retira à Genève, où
il aida puissamment Calvin. De retour
dans son i)ays , où il fut rappelé par les
chefs du parti prolestant qui j)renail cha-
que jour de nouvelles forces , il seconda
le comte de Murrai ( vouez ce nom )dans
pcs attentais , ou plutôt il l'y prépara. Le
clergé catholique d'Ecosse le cita deux fois
devant son tribunal à Edimbourg. Ayant
refusé d'y comparaître et s'étanl réfut;ié
de nouveau à Genève , il fut brûlé en ef-
figie. C'était un moine apostat, accusé
par plusieurs historiens d'un commerce
infâme avec sa belle-mère, avec une mul-
titude de dévotes abusées , et accusé
même des plus abominables pratiques de
la magie. Poussé par la fureur qu'inspire
uneconscienccbourrelée parles crimes et
les rcniords,ilcomnuiniqua sa frénésie aux
peuples et aux nobles, qu'il entraînait à
.sa suite par ses prêches forcenés et ses
calomnieux blasphèmes. Il renversa les
églises et les monastères , chassa les pré-
Ires et les évéques, pilla les biens consa-
crés à Dieu , et commit contre les catholi-
ques et les choses les plus saintes les pro-
fanations et les cruautés les plus inouïes.
Passant du mépris de la religion à celui
du diadème , il lit abroger l'autorité de la
reine régente et la transféra aux chefs du
parti, qu'on décora du titre de conseil-
lers, et principalement au barbare comte
de Murrai, qui n'aspirait qu'à ravir le
trône à la jeune Marie . sa sœur. Il mou-
rut en 1572, à G7 ans. On a tle lui des Ou-
vrages de conlrovei-se marqués au coin
du plus atroce fanatisme, ainsi qu'une
Histoire de la réfortnation de l'Eglise
d'Ecosse, Londres, 16/i4 . in-fol. Ce
monstre va jusqu'à appeler yo/ewse nar-
ra^ion la relation qu il donne de l'assas-
sinat du cardinal Béton . que les Ecossais
nomment Bealoun, archevêque de Saint-
André, qui fut lâchement massacré par
les satellites de la réforme. Un des pam-
phlets qu'il lança contre Marie , reine
d'Angleterre , avait pour litre : Le pre-
mier son de la trompette contre le mon-
strueux gouvernement des femmes. Il ne
«e montra pas moins acharné contre la
reine d'Ecosse , et il contribua à sa mort :
KIVU
Tel est l'homme dont Bèzc parle ccmmc
d'un apôlre.
• KIVOX (VicEssijius) , littérateur et
prédicateur anglais, né le 8 décembre
1752, à Newington-Green dans le comté
de MiddU'sex, était très versé dans la
connaissance des lettres {jrecques et la-
tines et reçut le grade de docteur en
théologie par un diplôme expédié de
Philadelphie , à la suite du succès popu-
laire que ses essais de morale avaient ob-
tenu en Amérique. Il obtint quelques
modestes bénéhces , et fut pendant 33 ans
supérieur de l'école de Tunbridge. Il se
livra à la prédication, parut avec succès
dans les chaires ecclésiastiques de Lon-
dres el fut constanmient attaché au parti
des whigs. En 17U3 , lorsque les esprits
étaient irrités contre la révolution fran-
çaise il s'attacha à établir dans un sermon
prononcé à Brighion, que toute guerre
offensive est un crime contre le christia-
nisme et l'humanité. Knox est mort à
Tunbridge , le 6 septembre 1821. Il avait
débuté jeune encore dans la carrière lit-
téraire par des Essais de morale et de
littérature, 1777, in-12, 2' édit. 1778, 2
vol. in-i2. Cet ouvrage qui a été réim-
primé plusieurs fois depuis, établit sa
réputation d'écrivain pur el harmonieux,
et de penseur profond. Ses autres pro-
ductions sont: I Education libérale, ou.
Traité pratique sur les moi/ens d'acqué-
rir une instruction utile et convenable ,
1781 , in-S" ; nouvelle édition augmentée,
2 vol. in-8" , 1783 ; | Soirées d'hiver, 1787,
5 vol. in-S", plusieurs éditions; | Ser-
mons sur la foi . l'espérauce et la cha-
rité, 1792, in -8"; j Delà noblesse person-
nelle, ou Lettres à un jeune noble. 1793 ,
in-12; ] Lectures de famille , 1794, in-S";
1 Considérations sur la nature et l'effica-
cité de la sainte Cène . 1794 , in-12 , ou-
vrage qui fut recommandé par l'évêque
Horsley , à l'attention du clergé , comme
un monument de la piété et du savoir de
l'auteur; | Philosophie chrétienne . 1795,
2 vol. in-12; | Sermon prêché à V ouver-
ture de la société philanthropique , 1807,
in-4° ; | Ànti-polémon ou Plaidoyer contre
la guerre, trad. d'Erasme, 1794, in-12.
On lui doit encore une édition d'Horace
expurgata et quelques compilations plu-
sieurs fois imprimées sous ces titres. Mor-
ceaux choisis en prose. 1783, in-8"'; Mor-
ceaux choisis en vers , 1790, in-8°, etc.,
KMJTZE\ ou KNUZEN (MATniAS),
fanatique du 17* siècle, né à Oldens-
worth, vers 1640 dansl» luchédeSleswig,
KOG Ik
s'avisa, après avoir fait ses éludes à
Kœiiijjsberg en Prusse, de courir le
monde, et de s'éri(jer en nouvel ajjolre
de l'alhéisinë. En l(»7/i., il répandit dans
divers endroits de l'Aile ma{îne , et sur-
tout à léna, en Saxe et à AUdorf, une
Lettre latine, et deux Dialogues alle-
mands , qui contenaient les principes
d'une nouvelle secte, qu'il voulait établir
sous le nom de secte des consciencieux.
c'est-à-dire des gens qui ne feraient pro-
fession de suivre en toutes choses que les
lois de la conscience et de la raison. Ce
chef des consciencieux xndÀi l'existence de
Dieu, rinnuorlalltéde l'àme , et par con-
séquent raulorité de l'Kcriture sainte;
conime si ces vérités étant ôtées , ïl j)ou-
vait rester dans l'homme qtielque con-
science «et quelque principe de vertu. Les
historieixs ne nous apprennent pas quelle
fut la lin de ce fanatique.
KAIJÏZCN (MAnTix), né à KœnijîS-
hcffi; eu 1715, y fut professeur* en philo-
sophie et bibliothécaire. Il mourut en
1751. On a de lui un grand nombre d'ou-
vrages, dont la liste se trouve dans la
Bibliographie allemande. Les uns sont en
allemand , et les autres en latin. Les prin-
cipaux de ceux-ci sont: | Systematacau-
sarum efficientiutn; \ Elemcnta vhilo-
sophiw rationalis . methodo mathematicâ
demonstrala; \ Theovemata de par aboli s
infinitis, etc. Celui de ses livres alle-
mands qui lui fait le plus d'honneur est
une Défense de la religion chrétienne ^
in-,V»
KOEIAD. royez CABADES.
* KOBELL (KiiiioixA.Mu) , peintre et
ffraveur allemand, né à Manheim en
■5740. Il excellait dans le paysage. Les
siens se font remarquer par le choix des
sites et la fraîcheur du coloris. On re-
cherche aussi ses gravures, qui repré-
sentent des scènes ciiampétres de peiite
cl de moyenne grandeur : elles soit au
nombre de 60. 11 mourut en 17%. Son
caractère n'était pas moins estimable que
fes lalens. Il a laissé deux llls héritiers
de ses ver'ns et de son art.
' KOCîI (ClIKÏSTOPHE-GuiIXAUME dc ) ,
savant professeur de droit public à Stras-
bourg, né le 9 mai 1737, à Bouxwillier ,
chef-lieu de la seigneurie de Lichlenberfî,
en Alsace, qui appartenait alors au land-
grave de Hesse-Darmstadt, était (ils d'un
conseiller et membre de la chan-bre des
linances de ce prince. Après avoir fait ses
premières études dans l'école de sa petite
vilbj natale , le jeune de Koch entra à l'âge
3 KOC
do 13 ans dans l'université protestante dfl
Strasbourg, oii il fit son cours de droit.
En même temps il se livra, sous le cé-
lèbre Schœpflin , à l'élude des anciennes
chartes qu'il apprit à lire et à compren-
dre. Il s'occupa surtout du droit canoni-
que , et publia même sur ce sujet deux
ouvrages qui commencèrent sa réputa-
tion : Commentatio de collatione digni'
tatum et beneficiorurn ecclesiasticorum
in imperio rotnano germanico. qui parut
en 1761, et qui fui le prélude du Commen-
taire sur la sanction pragmatiqueger-
manique , qui ne parut qu'en 1789. En
1762, Koch reçut les grades académiques
et vint la même année à Paris où il fut
accueilli et reclierché pur les savans les
plus distingués. Pendant son séjour dans
la capitale de France , il recueillit des ma-
tériaux précieux pour la continuation de
XHistoria Zoeringo- Badensis . dont le
premier voknne seulement avait été ré-
digé par Schœpflin , quoique l'ouvrage
entier ait été publié depuis sous le noiii
de ce savant. De retour à Strasbourg, il
continua à travailler sous son illustre
maître ; celui-ci vint à mourir en 1771 ;
il avait légué, en 17()6 , son cabinet, et sa
riche bibliothèque à la ville de Strasbourg,
à condition que Koch en serait nommé
conservateur. Le legs fut accepté, et Koch
qui en eut le déput obtint aussi la permis-
sion de continuer l'espèce d'école politi-
que que Schœpflin avait fondée à Stras-
bourg, et à laquelle sa haute réputation
lit accourir de toutes parts des jeunes gens
appartenant aux premières familles de
l'Europe. Cependant, d'après les règle-
nu'ns de l'université, la chaire de Schœ-
pflin fut donnée au plus ancien profes-
seur : mais tous les élèves suivaient les
leçons de Koch qui devint le chef de cette
école diplomatique, d'où sortirent pen-
dant 60 ans un grand nombre de ministres
et d'hommes d'état. En 1779 le gouverne-
ment hanovrien lui offrit la chaire de
droit public germanique à Gottingue;
malgré les émolumens considérables que
l'on avait attachés à cette place . Koch re-
fusa de quitter Strasbourg. Il reçut de
l'empereur Joseph II le diplôme de che-
valier de l'eufpire. Promu à la chaire
de droit public dans l'université de Stras-
boui^g. il conserva cette place et la rem-
|)iit avec talent jus([u'à la suppression
de cet établissenu-nt. En 17S9 , il fut
chargé par les protestans d'Alsace d'aller
solliciter auprès de Louis XVI et de l'as-
semblée Constituante la conservation d»
KOC
U&
KOC
leurs droUs civils et religieux , qu'ils
avaient olitcnns par dos traités. Sa de-
niaiide fut arcucillie : le décret du 17
aoi'it 1700 ratitia les privilèges des pro-
testans. et re detrel fui enr<Me<'tendu par
un aulre du 1"^ decemUre de la luéiiic an-
née : il déclarait ([ue leurs biens ecclé-
siastiques n'claient pas compris dans ceux
que le déciet du t" novembre i78;i avait
mis à la disposition de la nation. La ré-
volution française avant disséminé les
jeunes {jens des universités dans les
camps, l'école de Kocb fut déserte : cet
babilc i»rofesseur se livra dés lors aux
affaires publiques et fut nommé député
à la première assemblée législalive. Les
principes religieux el monarcliiques trou-
vèrent dans ce député protestant un dé-
fenseur courageux : ami de la religion
et du trône, il se ])n)non9a contre toutes
les persécutions auxquelles les prêtres
catholiques et les cungrés furent si long-
temps en butte. Klu président du comité
diplomatique, il s'opposa à la guerre
contre l'Aulrichc (rapport du mois de
mars 1792 j ; mais ses efforts furent vains.
Après la terrible journée du iO août,
Kocli écrivit à son département pour ex-
primer son opinion personnelle sur les
mesures qui avaient préparé el qui sui-
virent ce massacre : il espérait que ses
concitoyens partageraient son indigna-
lion ; mais son vœu ne fut pas rempli ; il
attira même sur lui le ressentiment des
révolutionnaires qui le firent incarcérer
et le laissèrent dans les prisons jusqu'a-
près la révolution du 9 thermidor qui vit
périr Robespierre. Rappelé à Strasbourg
pour faire partie du directoire du dépar-
tement , il défendit constamment les in-
térêts de ses administrés, empêcha la
vente des fabriques et des hospices, et
se signala dans toutes les circonstances
par son amour de l'ordre. Il se hâta de
quitter des fonctions qui le détournaient
de ses occupationj savantes : rendu à ses
travaux, il ouvrit en 1793 son cours de
droit public, qu'il professa jusqu'en 1802.
Le sénatus-consulle du mois de mars de
cette année le nomma membre du tribu-
nal. Ce fut dans nnlenlion d'être utile à
ses coréligiormaires qu'il accepta celte
place : il eut en effet une grande part à l'or-
ganisation du culte protestant en France ,
el au rétablissement de l'académie protes-
tante de Strasbourg. Après la suppres-
sion du tribunal, Koch ne voulut ac-
cepter aucune place : mais le gouverne-
r/ieni, sans qu'il l'cûi demandée, lui fit
une pension de 3000 francs ( 1808) et lui
donna le titre de recteur honoraire de
l'académie de Strasbourg (1810): Koch
mourut le 23 octobre 1813, à làge de 76
ans. Ses principaux ouvrages sont : | Com-
rnentatio de collalione diguitatum et
bencficiorxun ccclesiasiicorum in imperio
roinano germanico , Strasbourg, 1761.
C'est comme une introduction à sdi prag~
matique snnctioJi. \ Tables généalogiques
des maisons souveraines de l'Europe,
(du midi et de l'ouest j, Strasbourg,
1782, I vol. in-4"; | Sanctio pragmalica
Gennanorum illustrata , ibid., 1789. Cet
ouvrajTe fut très bien accueilli par les
catholiques allemands , et les prélats
même en firent de grands éloges. | Abré-
gé de l'histoire des traités de paix en-
tre les puissances de l'Europe, Bâie,
1796 , i vol in-S". Il commence depuis la
paix de Wesîphalie ; M. Schœll l'a conti-
nué jusqu'au traité de Paris en 1815, 15
vol. in-8°; | Table des traités eiitre la
France et les puissances étrangères . de-
puis la paix de ff^estphalie jusqu'à nos
jours, suivie d'un Recueil de traités et
actes diplomatiques qui n'ont pas encore
vu le jour. Bàle, 1802, 2 vol. in-S";
I Tableau des révolutions de l'Europe,
depuis le bouleversement de l'empire ro-
main, en Occident . jusqu'à nos jours .
1807, 3 vol. în-8" , nouvelle édition,
Paris, 1813-18H, k vol. in-8°, accompa-
gnés de sept cartes géographiques , de
tables généalogiques et chronologiques.
Le quatrième volume n'est qu'un supplé-
ment aux trois volumes de la première
édition. | Tables généalogiques des mai'
sons souveraines de l'est et du nord de
l'Europe, ouvrage posthume, publié par
les soins deF.Schœ'.l, in-4°. Les livraisons
qui ont paru contiennent la généalogie des
rois de la Scandinavie , des souverains de
la Russie , de la Pologne, de la Silésie, etc.
I Historia Hoeringo-Badensis ( voyez ci-
dessus.) I Plusieurs Mémoires sur des
sociétés savantes, tels que la Notice sur
un code de règlemens ecclésiastiques. Ce
code avait été écrit , en 787, par ordre de
Rachion , évéque de Strasbourg, et il est
relatif à Y Histoire des fausses décrétales.
On trouve cette notice dans les Notices
et extraits des manuscrits de la biblio-
thèque du roi. I Mémoire sur la société
littéraire que Jacques Jf'^einpheling avait
fondée à Strasbourg vers la fin du 15*
siècle. Il est inséré dans les Mémoires des
sciences historiques et politiques de l'in-'
slilut de France. On a trouvé , parmi loa
KOE
i4S
KOEIV
manuscrits de Koch , des 3fémoires sur
sa vie , en allemand; et d'autres sur l'état
et le régime des prolestans, etc. M. J.-G.
Schweighacuser fils a fait, au nom du
séminaire prolestant de Strasbourg , une
Vie de Koch, sans date , in-8° de 78 pa-
ges: une BxxXre Notice sur ce savant se
trouve à la tête de la nouvelle édition des
Traités de paix , etc. , de Koch. Les pro-
fesseurs de Strasbourg lui ont fait ériger
un tombeau en marbre blanc , exécuté
par M. Ohnmacht, habile statuaire de
Strasbourg , dans le temple de St.-Tho-
mas de cette ville , à côté des monumens
élevés en l'honneur de Schœpflin et d'O-
berlin. La septième édition de celte bio-
graphie fait une singulière erreur en sup-
posant que l'église de St.-Thomas est
consacrée à la religion catholique , et à
cette occasion le rédacteur s'indigne de
voir la dépouille d'un protestant dans un
temple du culte romain : nous partage-
rions son mécontentement , si le fait était
vrai : mais l'église de St.-Thomas est pro-
testante.
KODDE ( Jean , Adrieiv et Giber , van
der). Voyez CODDE.
KOEBERGEU (Wenceslas), premier
peintre et architecte des archiducs Albert
et Isabelle , à Bruxelles , né à Anvers en
1360 , étudia l'architecture et la peinture
sous Martin de Vos, et alla perfectionner
son goût en Italie , où il séjourna quelque
temps. De retour dans sa patrie , Koeber-
ger construisit plusieurs églises à Bru-
xelles , à Louvain , à Anvers et ailleurs ;
il dessécha les marais des environs de
Dunkerque et de Bergues-Saint-Vinox,
fit écouler dans la mer plusieurs eaux
dormantes qui infectaient l'air du canton,
bâtit des fontaines, et eut Êeaucoup de
part à l'établissement et à la construction
des monts-de-piété, dont il obtint la sur-
intendance générale. Cet artiste , mort
en 1630, à Bruxelles, était encore versé
dans la connaissance des médailles. Il avait
composé un ouvrage considérable sur la
peinture , l'architecture , la sculpture ,
les images des dieux et les médailles im-
périales , dont on ignore le sort. En 1621,
il publia en flamand à Malin es, une
Apologie des monts-de-piété , in-i". On
lui doit les tableaux suivans : Le Martyre
de saint Sébastien. Le Christ détaché de
la croix. Le Christ présenté au peuple.
Le Christ au tombeau , etc.
KOÉGLER (Ignace), né à Landsberg
en Bavière en 1680 , entra chez les jésuites
en 1696, et se distingua particulièrement
7.
dans l'élude des mathématiques, qu'i
enseigna avec beaucoup de réputation
dans l'université d'Ingolsladt. Ayant dé-
siré de se dévouer aux travaux des mis-
sions étrangères , il fut envoyé à la Chine
en 171S , où il devint président du tribu-
nal des mathématiques, et mandarin dans
le tribunal des rites. Il jouit de la con-
fiance et de la considération de l'empereur
Yung-Tching , au point que , durant la
grande persécution que ce prince exerça
contre les chrétiens , le père Kocgler fut
presque le seul qui pût calmer ses fu-
reurs. Ses forces commençant à s'épuiser,
il obtint pour associé dans ses fonctions
de président de mathématiques, le père
Augustin Hallerstein, qui le remplaça
après sa mort. Il mourut à Pékin en 1746,
à l'âge de 66 ans. L'empereur lui fit faire
des obsèques magnifiques. Ses Observa^
tions astronomiques, recueillies par le
père Hallerstein, et envoyées à Vienne,
ont été imprimées dans cette ville avec
celle du père Hallerstein, par les soins du
père Hell , 1768 , 2 vol in-4°. On cite du
même auteur un ouvrage Sur les Eclip-
ses, et un autre intitulé : Notilice circa
SS. Biblia Judœorum. m Càifung-fu in im-
perio sinensi. On le trouve dans les No~
titiœ Bibliorum , etc . , de Murr , Halle ,
1803. On a encore de Koegler Litterœ
patentes imperaloris Sinarum Kang-Hi ,
sinicè et latine, cum interpretatione, pu-
bliées par de Murr, qui y joignit le texte
chinois, Nuremberg, 1802, in-8".
KOEMPFER. Voyez KyEMPFER.
KOEIVIG ( Georges - Matiiias ), bio-
graphe allemand né à Altdorf en 1616,
mort dans cette ville en 1699, fut profes-
seur de poésie et des langues latine et
grecque , et bibliothécaire de l'université
de sa patrie. La plupart des savans ne le
connaissent guère que par sa Bibliotheca
vêtus et nova e prima mundi origine ,
gros in-fol. publiée en 1678, à Altdorf.
Cet ouvrage méritait d'être plus soigné.
Ce qu'il y dit des auteurs est ou superfi-
ciel ou inexact, et a été relevé en grande
partie par Jean MoUerus. Il publia en
outre de nouvelles éditions du Lexicon^
Trilingue de Garth. Des notes sur \Histo-
ria Evangelica de Juvencus , etc. On
trouve la Vie et la liste des ouvrages da
cet auteur dans Jpini vitce professorum
philosophice , academiœ Jltorfinœ. —
Son père, Georges KŒNIG , natif d'Am-
bert, mort en 1654, à 64 ans, fut profes-
seur de théologie à vVltdorf, et a laissé
un Traité des cas de conscience . in-4° ,
13
KOEN
U6
KOL
1673 , et d'autres livres Uiéologiqucs,
lels que des Commentaires sur diverses
parties de l'Ecriture sainte ; beaucoup de
Thèses et de Sermons.
ROE!\IG ( David) , suisse de nation,
mort à Rotterdam en 1727 , à 22 ans, des
coups qu'il reçut à Franeker. La populace
l'entendant parler français , le prit pour
un espion de la France, et l'eût mis en
pièces , si le sénat académique ne l'avait
arraché à cette troupe mutinée ; les bles-
sures qu'il reçut le mirent au tombeau
quelques mois après. On lui doit la Tra-
duction latine des Tables que le docteur
Arbuthnot mit au jour sur les monnaies
des anciens, en 1727, in-h". Cet ouvrage ne
fut publié qu'en 17S6 , in-4° , par Reitz ,
professeur à Utrecht, qui l'orna d'une
préface curieuse et utile.
KOEKIG (Samuel), frère du précédent,
né en 1712 , se fit connaître de bonne
heure par ses lalens pour les mathémali-
ques. Il alla demeurer quelque temps au
château de Cirey , avec la marquise du
Châtelet, et lui donna des leçons. Il ob-
tint ensuite une chaire de philosophie et
de droit naturel à Franeker, Mhk. En
1747, on joignit à cette place celle de pro-
fesseur de mathématiques. Il passa en-
suite à la Haye pour être bibliothécaire
du prince stathouder , et de la princesse
d'Orange. L'académie de Berlin se l'asso-
cia, et le rejeta ensuite de son sein. On
sait à quelle occasion Kœnig disputa à
Mauperluis sa découverte du iirincipe
universel de la moindre action. Il écrivit
contre lui, et cita, en la réfutant, un
fragment d'une lettre de Leibnitz, dans
laquelle ce philosophe disait avoir remar-
qué que , dans les modifications du mou-
vement, l'action devient ordinairement
un maximum, ou un minimum. Mauper-
tuis fit sommer son adversaire par l'aca-
démie de Berlin , de produire l'original
de cette lettre ; l'original ne se trouvant
plus , le philosophe suisse fut condamné
par l'acadcinle. Toute l'Europe a été in-
struite des suites de cette querelle. Kœ-
nig en appela au public, et son Appel,
écrit avec la clialeur de style que donne
le ressentiment, mit plusieurs personnes
de son côté : le récit qu'on lit de celte af-
faire dans la première Vie de Frédéric II
lui est favorable. En général , quand un
différend se décide par autorité, quand
le manège des cours ou des académies in-
tervient dans le jugement, les préjugés
sont en faveur du condamné. « Rien, dit
» un auteur moderne, ne nuit plus à une
» cause quelconque dans l'opinion publi-
» que , que l'intervention de l'autorité et
» de la force. Si de deux hommes qui ont
» un différend, l'un est appuyé de la cour
» et ne rougit point d'employer les moyens
» de violence, qui dans ces foyers d'ini-
» quilé sont toujours prêts, on peut être
» foncièrement convaincu que son adver-
» saire a pour lui la justice et la raison. »
On a de Kœnig d'autres ouvrages. Il
mourut en 1757 , regardé comme un des
plus grands mathématiciens de ce siècle.
KOEMG (Emmanuel), célèbre méde-
cin, professeur de physique et de méde-
cine à Bàle sa patrie, mourut en 1731 , à
75 ans, après avoir publié plusieurs ou-
vrages sur son art , qui décèlent une vaste
lecture. Le plus connu est son Regnum
minérale, générale et spéciale, Bâle ,
1705 , in-li° , qui fut suivi du Regnum ve~
getabile , Bâle , 1708 , in-4° ; et du Regnum
animale, 1703, in-l".
KOERTEN ( JoAîïTWE ) , femme de
Block Adrien. Voyez BLOCK.
• ROFFLER (Jeaiv) , missionnaire en
Cochinchine , où il demeura 14 ans , par-
vint à être médecin du roi , emploi qu'il
exerça pendant sept ans. Ayant quitté ce
pays en 1735 pour revenir eii Europe , il
fut arrêté en Portugal. Il profita du loisir
de sa détention pour rédiger des mémoi-
res sur son voyage. Il résulta de son tra-
vail une Description succincte de la Co-
chinchine. Le père Eckart la divisa en
chapitres et la publia avec des notes.
M. de Murr la fit réimprimer en 1805 sous
ce titre : Joannis Koffler histo7ica Co-
chinchinœ descriptio , in epitome redacta
ah Ans. Eckart , edente Chr. de Murr,
126 pages in-S". Koffler ayant recouvré
sa liberté , fut envoyé en mission en Tran-
sylvanie , et y passa le reste de ses jours.
Il mourut en 1780. On trouve dans l'in-
troduction de son ouvrage quelques par-
ticularités qui lui sont personnelles. Il y
donne aussi des détails sur le collège Clé-
mentin à Prague , tenu alors par les jé-
suites.
KOLBE (Pierre ) , célèbre voyageur ,
né en 1£75 , à Wunsiedel , dans le pays de
Bayreuth , a publié une très bonne Des-
cription du Cap de Bonne- Espérance, pu-
bliée par Jean Bertrand, Amsterdam, 1741,
3 vol. in-12, très préférable à celle deM. Le
Vaillant, et même à celle de Sparman.
( Voyez le Journal hist. et litt., 1790,
pag. 452. ) L'ouvrage de Kolbe fut d'a-
bord publié à Nuremberg en 1719. Il y
trace l'histoire de la découverte du pays,
KQM
et de l'établissement des Hollandais ; il y
donne une description des mœurs, usages,
origine , langage et caractère des Hotten-
toîs. — Il ne faut pas le confondre avec
le père KOLBE , jésuite , dont on a une
bonne histoire abrégée des papes , intitu-
lée : Séries romanorum pontificum.
• KOMARZEUWSRY (Jean-Baptis-
te ) , écrivain et général polonais , né à
Varsovie vers Vlkk , mort à Paris en 1809,
reçut sa première éducation chez les jé-
suites. Il suivit la carrière des armes et
obtint la bienveillance du roi Stanislas
Poniatowski, qui le nomma général en
1780. Sous le règne de ce prince il rem-
plit diverses missions en Russie, en Alle-
magne et à Constantinople : il devint en-
suite chef du bureau de la guerre , lieute-
nant-général , premier aide -de-camp du
roi , et enfin intendant général des mines
de Pologne. Il accompagna ce roi à Ka-
nef lors du voyage de Catherine H dans
la Tauride, en 1787. Sincèrement atta-
ché à son souverain auquel il devait son
élévation , il partagea tous ses malheurs ,
et il se prononça ouvertement contre la
Russie , lors du premier démembrement
de la Pologne en 1772 ; il professa les
mêmes principes lorsqu'on opéra un se-
cond partage de ce royaume entre les trois
monarques de Russie , d'Autriche et de
Prusse. Dès l'année précédente , les trou-
pes russes avaient envahi les étals de
Stanislas. Après l'abdication forcée de ce
monarque , Komarzeuwski se livra à la
culture des sciences et des lettres. Il était
très versé dans la géométrie et la géogra-
phie , avait été membre de la société lit-
téraire de Varsovie, et de l'académie
royale de Londres. Appelé à la cour de
Catherine II , il fit un séjour de quelques
années en Russie ; puis , après avoir par-
couru l'Italie , l'Angleterre et plusieurs
régions du Nord , il vint en 1806 à Paris,
se lia avec les principaux savans , et se
<it aimer par ses talens et par l'cgalilé de
son caractère. C'est là qu'en 1809 il donna
la Carie hydrographique de Pologne qu'il
avait dressée en commun avec le colonel
de Perthes par ordre du roi Stanislas-Au-
guste. Avanà celte époque il avait déjà
exécuté le Graphomètre souierrain , ac-
compagné de cartes et de gravures, ins-
trument très utile pour tous ceux qui
veulent faire exploiter des mines , et des-
tiné à remplacer la boussole dans les tra-
vaux souterrains : à l'invitation de lin-
slitut de France il le fît paraître en 1803.
Anx titres de mathématicien et de miné-
U7 KOR
ralogiste , Komarzeuwski joignit celui de
littérateur. Il publia : Coup d'œil sur la
révolution de Pologne , Paris , 1806 , ia-
8° ; ouvrage assez bien écrit , et qui se
termine par un panégyrique du roi Ponia-
towski. Plusieurs raisons politiques ont
contribué au succès de cette histoire,
mais il a été de courte durée. Presque en
même temps parut l'ouvrage posthume
de Rulhière sur le même sujet, et on ou-
blia aussitôt celui du comte Komarzeuw-
sky. On a imprimé et réimprimé en 1814
un éloge de cet illustre polonais , prononcé
sur sa tombe par M. Bazot , au nom de
plusieurs sociétés de bienfaisance dont il
faisait partie.
KOPERMK. Voyez COPERNIC.
• ROUF i le baron Andké ) , sénateur
de Russie , né près de Millau en 1765 »
mort à St.-Pétersbourg le 12 décembre
1823 , a laissé un Essai statistique sur la
monarchie prussienne , dédié à Frédéric-
Guillaume II, 1791, un vol. in-S", T
édit., 1798 ; cet ouvrage écrit en français
est le seul de cet auteur qu'il ait fait im-
primer. Il a composé en outre les ouvra-
ges suivans qui n'ont pas encore été pu-
bliés; i I7isloi?'e contemporaine j extraite
des journaux contemporains , qui s'étend
de 1812 à 1823 (octobre) et formerait à
lui seul plus de 10 vol. in-fol. ; | Manuel
de législation russe ^ 1 vol. ; | Histoire de
la hiérarchie russe; \ Recueil de diffé-
rentes pièces y x)lusieurs volumes ; | Re-
cueil de toutes les notions relatives à la
mort de Kotzebue , 1 vol. ; | Description
géographique , historique et politique de
l'empire russe ^ 1812,5 parties ; ] un grand
nombre de cahiers de géographie et de
statistique.
KORNMAA'N (Henri ) , jurisconsulte
allemand , né vers la fin du 16'= siècle à
Kircheim dans le Wurtemberg , visita la
France et l'Italie , alla ensuite s'établir à
Francfort , où il mourut postérieurement
à 1620. Il publia divers livres au com-
mencement du 17* siècle ; | Templum na-
turce , seu de miraculis quatuor elemen-
toruniy Darmstadt , 1611 , in-8° ; | De mi-
raculis vivorum^ Kircheim , 1614 , in-8" ;
I De miraculis mortuorutn , 1620 , in-8°.
Ces trois ouvrages, surtout les 2 derniers,
sont curieux et difficiles à trouver ; | De
virginitate > virginum statu et jure trac-
tatus jucundus, 1610 , in-8" ;^| Linea amo~
ris. 1610, in-S". Quoique ce livre et le
précédent soient superficiels, il s'y trouve
des choses qui supposent des rechercbes.
Ses OEuvres complètes ont paru sous le
K09
ikS
KOS
litre d'Opéra curiosa^ etc. , Francfort,
4696 et 1726, in-8°.
KORTIIOLT (Christian), fameux
théologien protestant, né en 1653 à Burg,
dans l'île de Femcren , professeur de grec
à Roslock , en 1662 , devint vice-chance-
lier perpétuel et professeur de théologie
dans l'université nouvellement fondée à
Kiel. Il mourut en 1694 , à 61 ans, avec
la réputation d'un homme érudit. On a
de lui : 1 Tractalus de calumniis pagano-
rum in veteres christianos. Kiel , 1698 ,
in-/».*' : ouvrage curieux et intéressant
pour ceux qui aiment la religion ; | Trac-
talus de origine et natura christiaynsmi
ex mente genirUum . Kiel , 1672 , in-4° ,
livre non moins curieux que le précé-
dent; 1 Tractatus de persecutionibus Ec-
clesice primitivœ, veterumque martyrum
cruciatibus , Kiel , 1689 , in-4° ; | Tracta-
tus de religione ethnica^ mahummedana
etjadaicaAn-k", Kiel, 166S ; | De Christo
ci-ucifixo, Judceis scandalo^ gentilibus
staîtitia, Kiel, 1678, in-4°; | De tribus
impostoribus magnis liber^ Edoardo Her-
bert^ Thomoe Ilobbes et Benedicto Spino-
sce opposituSj dont la meilleure édition
est de 1701, in-4°, donnée à Hambourg par
Sébastien Kortholt, son fils. L'auteur de
ces sa vans ouvrages se déshonora par des
Traités de controverse, dont les titres
annoncent le fanatisme et la fureur. Le
papisme plus noir que le charbon; Le
Béelzébut romain; Le pape schismati-
que ^ etc. On trouve la Vie de ce théolo-
gien , écrite par Joachim Lindeman, son
gendre, "Sans le livre de Pippiny, inti-
tulé : Sacer decadum septenarius j. Leip-
sick , 178S , in-8°. — Curistiaiv KOR-
THOLT , son petit-fils , travailla au Jour-
nal de Leipsick jusqu'en 1756 , et mourut
à l'âge de 40 ans, en 1731, professeur
de théologie à Gottingen. On lui doit,
I une Edition des Lettres latines de Leib-
nitz , en k vol., des Lettres françaises du
rcème , en un seul vol ., et un Recueil de
diverses pièces philosophiques, mathé-
matiques et historiques de ce philoso-
phe ; I De Ecclesiis suburbicariis ; \ De
enthusiasmo Mahummedis; \ de savantes
Dissertations ; | des Sermons, etc.
* KOSCIUSZKO (Thadée), général
polonais, né le 28 octobre 1746 en Li-
tbuanie, d'une famille noble, mais peu
riche , fut élevé à Varsovie , dans l'insti-
liilion des Cadets, ou jeunes nobles qui se
destinaient à la carrière militaire. Il s'y
distingua par ses heureux progrès dans
les mathématiques et dans le dessin, et
mérita d'être désigné pour un des quatre
élèves qui voyageaient aux frais de l'état,
dans le but de perfectionner leurs études.
Le jeune Thadée vint passer plusieurs
années en France , et , à son retour dans
sa patrie, il obtint le grade d'ofûcier dans
un régiment , puis celui de capitaine ;
une intrigue d'amour l'ayant forcé de
s'expatrier, il se rendit dans l'Amérique
du Nord , où les colonies anglaises ve-
naient de secouer lo joug de la métropole,
et se présenta à Wa&liington , qui l'admit
au nombre de ses officiers. Le congrès
des états le nomma, sur le rapport do
comité de la guerre , ingénieur de l'armée
avec le rang de colonel ; il devint ensuite
général , et il ne repassa en Europe que
lorsque l'indépendance américaine eut été
reconnue en 1783 par l'Angleterre. Kos-
ciuszko rentré en Pologne, vécut dans la
retraite jusqu'en 1789, époque à laquelle
il fut nommé général-major par la diète
polonaise , qui réunissait ses efforts à
ceux du roi Stanislas pour s'opposer aux
envahissemens de la puissance russe , et
à l'influence progressive des puissances
étrangères. Commandant d'une division
des forces nationales , sous les ordres da
jeune prince Joseph Poniatowski, neveu
du roi ( voyez PONIATOWSKI ) , Kos-
ciuszko se conduisit de manière à exciter
l'enthousiasme de ses compatriotes , dans
la bataille livrée contre les troupes de
l'impératrice Catherine le 18 juin 1792,
près de Zielence dans la Volhynie. Les
Russes s'étant ensuite rendus jusqu'à la
rivière du Bug, dirigèrent principale-
ment leur attaque contre le général Kos-
ciuszko, placé près de Dubienka (17 juil-
let 1792 ) , et ce dernier leur fit perdre
beaucoup de monde. Cependant les en-
nemis ayant obtenu de l'Autriche la per-
mission de diriger une de leurs attaques
par la frontière de Galitzie , cet incident
imprévu força le général polonais à la re-
traite , qu'il fit dans le plus grand ordre
possible jusqu'à Chelm. Ce fut alors qu'on
lui conféra la croix militaire virtuti mili-
tari. Mais Stanislas ayant accédé aux con-
ditions imposées par la Russie , Kos-
ciuszko se démit de son grad» , ainsi que
plusieurs autres officiers supérieurs , et
s'éloigna de la Pologne. Il s'était retiré à
Leipsick, lorsqu'il apprit que l'assenablée
nationale de France , par un décret so-
lennel du 26 août 1792 , lui avait déféré
le titre de citoyen français. La Pologne
avait été soumise à un partage dans la
diète de Grodno, et il y avait plus dun an
KOS
U9
ROT
que Koscîuszko vivait en Saxe , lorsque
ses compatriotes , qui se disposaient à se-
couer le joug des Russes, lui envoyèrent
une députation pour l'inviter à se mettre
à leur tôte. Kosciusxko accepta avec em-
pressement ce périlleux honneur, en con-
seillant toutefois de différer encore le si-
gnal de l'insurrection. Après un délai
d'un mois , informé que l'ardeur des Po-
lonais ne pouvait plus être contenue , il
se rendit à Cracovie (24 mars W94), au
moment où le {jénéral Antoine Madalinski
venait de commencer les hostilités, et où
on venait de le déclarer lui-même géné-
ralissime de toutes les armées de la répu-
blique. En un instant toute la Pologne
fut en feu , cl l'acte d'indépendance na-
tionale fut dressé à Cracovie , le jour
même de son entrée dans cette ville. In-
vesti d'un pouvoir illimité , il marcha
aussitôt contre les Russes avec cinq mille
hommes, et mit ses adversaires en pleine
déroule à Resîawice (4 avril). Ce pre-
mier succès acheva de ranimer l'ardeur
des Polonais, les Russes évacuèrent Var-
sovie , et Kosciuszko se vit à la tète de
bO,000 combattans. La Prusse s'étant réu-
nie à la Russie, Kosciuszko eut à lutter
contre des forces de beaucoup supé-
rieures à celles dont il pouvait disposer.
La lutte continua cependant encore , et il
ne fallait pas moins que toute l'énergie
de la nation polonaise pour balancer par
des avantages les revers qu'elle éprouva.
Enfin , attaqué par les Russes près de
Macieïowice , Kosciuszko, après avoir
long-temps disputé la victoire, fut ren-
versé de cheval, percé de coups, et céda
à sa mauvaise fortune en s'écriant : Finis
Poloniœl Vêtu du costume d'un paysan,
il allait expirer sous le fer des Cosaques ,
lorsque des officiers le reconnurent, et le
firent prisonnier. On le conduisit à Saint-
Pétersbourg , où il resta deux ans enfermé
dans un cachot , et il n'en sortit qu'après
la mort de Catherine ( novembre 1796 ).
Paul l", qui s'empressa de lui rendre la
liberté , en montant sur le trône , le com-
bla de témoignages d'estime, et lui fit
même une pension dont le fier Polonais
lui renvoya le brevet aussitôt qu'il eut
quitté la Russie. Kosciuszko se rendit
bientôt après en Angleterre, puis en Amé-
rique, et en revint en 1798, en France,
où il fut reçu avec enthousiasme. Il con-
tribua par ses représentations et ses dé-
marclies auprès du Directoire à opérer uu
rapprochement entre la France et les
Etats-Unis, et proposa de procurer à la
France un grand nombre d'auxiliaires
parmi ses compatriotes , demandant en
retour que l'indépendance de la Pologne
fût garantie lorsqu'on traiterait delà paix i
générale. Mais il ne fui pris à ce sujet au-
cune détermination. Kosciiiszko vécut
obscurément , jusqu'en 1814 , soit à Paris ,
soil dans une maison qu'il avait acquise
près de Fontainebleau. Napoléon voulut,
en 1806 , se servir de son nom pour opé-
rer un soulèvement en Pologne. Mais le
brave général, comprenant quel était 1«
but du conquérant Français, répondit aux
avances qui lui furent faites par un refus
formel. On publia néanmoins dans les
journaux une proclamation aux Polonais
que l'on donnait comme étant émanée de
lui , et les réclamations qu'il voulut élever
dans celte circonstance ne furent pohit
accueillies. A l'époque de l'invasion de
1814 , les Russes lui témoignèrent des
égards; l'empereur Alexandre, avec qui
il eut une longue entrevue, le pressa de
retourner dans sa patrie , et l'exilé à son
tour demanda au monarque sa réinté-
gration au rang des nations libres. Kos-
ciuszko fit même un voyage à Vienne où
toutes ses généreuses espérances achevë-
renl de s'évanouir; il revint de cette ville
en Suisse, où il est mort à Solcure, le l,>
octol)re 1817. Ses restes ont été transférés
en Pologne , avec les plus grands hon-
neurs, et déposés dans la cathédrale de
Cracovie entre la tombe de JcanSobieski
et de Joseph Poniatowski. En 1817, durant
son séjour à Soleure, Kosciuszko avait af-
franchi, par un acte notarié, les serfs de
la petite terre qu'il possédait en Lithuanie.
Il déposa, entre les mains du célèbre Jef-
ferson, un legs ùi 13,000 dollars pour
fonder un collège destiné à rinstruction
des noirs ; celte volonté a reçu son exécu-
tion , et l'établissement a été fondé à
Newark. M. A. JuUien, directeur de 1»
Revue encyclopédique^ a publié, dans
les Annales des faits et des sciences mili-
taires (Paris, Panckoucke, 1818-1819),
une Notice biographique sur Kosciuszko;
elle a paru séparément, Paris, 1818, in-
8° de 48 pages.
ROSROU et KOUROM. Foy. GEHAN-
GUIR.
ROTTER (CnniSTOPHE), corroyeur de
Sprotau en Silésie , devint fameux dans
le parti protestant par les visions qu'il
disait avoir. Commenius ayant fait con-
naissance avec lui, se rendit promuiga-
teur de ses prophéties. Connue elles an-
nonçaient de grands malheurs à la maison
13.
KOT
im
KOT
d'Autriche , et de grands avatitages à ses
ennemis, on le mit au pilori à Breslau,
en 1627 , et on le bannit ensuite des états
de l'empereur. Cette légère punition ne
le corrigea pas. Il passa dans la Lusace ,
et y prophétisa jusqu'à sa mort , arrivée
en 1647, à 62 ans. Commenius publia les
• iclires de ce visionnaire, et ceux de Dra-
bitius et de Christine Poniatovia, sous le
titre de Lux in tenebris , Amsterdam,
1G65. L'édition de 1657 est beaucoup moins
ample.
• KOTZEBUE ou KOT^BUE ( Auguste-
Frédéric-Ferdinand de), littérateur alle-
mand, né le 5 mai 176l,àWeimar, où son
père était conseiller de légation, com-
mença son éducation dans sa ville natale,
et la termina dans les écoles deDuisbourg
et à l'université d'Iéna. Après avoir ache-
vé avec succès son cours de droit, il pa-
raissait devoir embrasser la carrière de
la jurisprudence ; mais à l'âge de 20 ans ,
i! fut appelé à Saint-Fétersbourg par le
comte de Gocrtz , ami de son père , qui le
plaça dans cette capitale en qualité de se-
crétaire de M. de Bauer , général du gé-
nie. Ce dernier, qui mourut doux ans
après, le recommanda dans son testament
à l'impératrice Catherine. Cette princesse
qui connaissait le talent de Kotzebue le
nomma conseiller titulaire , et le plaça
dans l'administration de Revcl en Esto-
nie , où il devint en 1783 assesseur au
premier tribunal, et ensuite président du
gouvernement civil avec le grade de lieu-
tenant-colonel. Ayant donné sa démission
en 1793 , il se relira dans une petite pro-
priété qu'il possédait près de Narva ; puis
il devint directeur du théâtre de Vienne,
qu'il quitta bientôt pour retourner à
Weimar. Il s'était marié en Russie , et sa
femme y était morte, en lui laissant
deux fils qui étaient élevés au collège des
cadets à Saint-Pétersbourg. Il partit en
1800 pour cette ville. Arrivé sur les fron-
tières de l'empire, il fut arrêté par ordre
de Paul 1" qui le croyait auteur de quel-
ques pamphlets diffamatoires où il était
j)ersonnellement insulté , et on l'exila à
Kurgaii en Sibérie. Cependant l'empereur
après avoir lu une de ses pièces intitulée :
le cocher de Paul I", qui contenait un
panégyrique de ce prince et qui avait été
traduit en langue russe , le rappela, l'ac-
cueillit à la cour, et lui donna la direction
du théâtre de Saint-Pétersbourg. Kotze-
bue ne conserva pas long-temps cet em-
ploi : le désir de voir sa famille l'engagea
à demander sa démission qu'il ne put ob-
tenir qu'après la mort de Paul I". A gon
arrivée à Weimar , il eut avec Goethe
et les frères Schlegel quelques démêlés
à la suite desquels il vint à Paris , où il
fut reçu avec empressement des savans
les plus distingués. Il parcourut aussi
rilalie et l'Allemagne, et il se trouvait
vers la fin de 1805 à Berlin. Il corres-
pondit dès lors continuellement avec la
cour d'Alexandre, et accompagna en 1813
les armées du czar comme écrivain poli-
tique. Iloi)tinl ensuite la place de consul-
général de Russie à Kœnigsberg , fut at-
taché en 1816 aux affaires étrangères à
Saint-Pétersbourg en qualité de conseiller
d'état , et revint en 1817 dans sa patrie,
avec le titre de correspondant littéraire
de l'empereur et une pension de 15,000
roubles. Il fut frappé le 23 mars 1819 , de
trois coups de poignard que lui porta l'é-
tudiant Sand, et dont il mourut sur-le-
champ ( voyez SAND ). Kotzebue a lui-
même raconté une partie de son histoire
I dans VJnnée la plus remarquable de
ma vie ; c'est la relation de son exil en
Sibérie, ouvrage qui a toute l'apparence
d'un roman ; il eut , dit-il, à essuyer mille
mauvais iraitemens de la part de ses
gardes, qui d'abord le conduisirent à Mit-
tau, puis en Sibérie, d'où il s'évada.
Après avoir long-temps erré en Livonie ,
il retomba au pouvoir de ses persécu-
teurs, fut amené à Tobolsk, et enfin à
Kurgau, lieu qui devait lui servir d'exil;
tout cela est assaisonné d'un grand nom-
bre daventures pathétiques. Un de ceux
qui dévoilèrent ce qu'il y avait de faux
dans ce récit, fut M. Masson , que Kot-
zebue avait assez mal traité dans son
Àn7iée la plus remarquable > à l'occasion
d'un ouvrage du premier intitulé Mé-
moires secrets de la Russie. Masson avait
à son tour attaqué son adversaire d'une
manière viclorieuse.Néanmoinscelui-ciré-
pliqua ensuite (en 1802), par une brochure
intitulée Réponse courte et modérée . etc.
Lorsque Kotzebue se rendit à Paris , le
succès qu'avaient obtenu deux de ses co-
médies ( Misanthropie et les deux Frè-
res ) lui avait préparé dans cette capitale
la réception la plus bienveillante. Chaque
littérateur surtout s'empressait de fêler
ledramatiste allemand, dont la conver-
sation était d'ailleurs très spirituelle. Il se
montra néanmoins peu reconnaissant des
politesses sans nombre qu'il reçut des
Français; et dans son ouvrage intitule
jUes Souvenirs de Paris . qui ont été tra-
duits en français par Guilberl de Pixéié-
KOT
151
ROT
courl, Paris , 1803 , 2 vol. iii-12 , il ne se
borne pas à rapporter des jugemcns faux,
desanecdolcs conlrouvées, mais il insulte,
il calomnie ceux-là même qui l'avaient
reçu dans leurs maisons avec générosité
et confiance. ] Dans ses Souvenirs de Rome
et de Naples j il ne ménage pas les Ita-
liens ; et plusieurs de ses compatriotes al-
lemands ne furent pas mieux traités par
sa verve satirique. Parmi ses autres écrits,
qui ont.exercé une si grande influence en
Allemagne, nous citerons : | une Histoire
de l'ancienne Prusse > 1808 , k vol. in-8" ;
c'esl un bon ouvrage de critique et d'é-
rudition ; il est de plus écrit avec esprit
et avec chaleur, mais non pas avec toute
la gravité convenable au genre histori-
que. Il consulta pour cette histoire les ar-
chives secrètes de l'ordre teutonique : elle
est poussée jusqu'en 1466 , à la paix de
Thorn. | Histoire de l'empire d'Allema-
gne; elle est inférieure à la précédente : au
reste ni l'une ni l'autre n'ont eu beaucoup
de succès. Un grand nombre de Romans
dont le plus connu a pour titre les 3fal-
heurs de la famille d' Orthemberg . On
cite sous le nom de Kotzebue près de 500
tragédies, comédies, drames, opéras,
farces, tant en vers qu'en prose. Mais on
sait qu'il en a acheté la plus grande par-
tie , à bas prix, de plusieurs étudians, et
qu'après les avoir retouchées, il les a
vendues très cher aux différens théâtres
de l'Allemagne. 11 en a imité quelques-
unes d'auteurs espagnols, italiens et fran-
çais. L'Homme de quarante ans est une
imitation de la Pupille de Fagan. La Pe-
tite Ville d' Allemagne est tirée de la Pe-
tite Ville de Picard. D'autres pièces telles
que la Fausse Honte, la Veuve et le Che-
val , sont de véritables satires, qui lui at-
tirèrent à Hambourg et à Bremen beau-
coup de dcsagrémens. Ses tragédies les
plus accréditées sont : Gusiave-JVasa ;
I.cs Hussiles; Oclavie ; le Siège de Nauem-
bourg ; La Prétresse du soleil ( imitée d'un
opéra italien, la Vergine del sole); Les
Espagnols au Pérou; Hugo-Grotius, etc.
Ou distingue parmi ses drames , Les
deux Frères^ traduit en français par
MM. Weiss, Jauffret et Patrat , et Misan-
thrnjne et Repentir j, traduit en français ,
par M. Mole, etc. n On ne peut lui refuser,
» dit M""= de Staël , une intelligence par-
» faite des effets du théâtre. Les deux
» Frères, Misanthropie et Repentir j les
» Hussites . les Croisés . Hugo-Grotius ,
» Jeanne de Mont faucon Ja mort de Rol-
» h, ont excité le plus vif intérêt partout
» où ces pièces ont été jouées. Toutefois
» il faut avouer que Kotzebue ne sait don-
» ner à ses personnages ni la couleur des
«siècles dans lesquels ils ont vécu, ni
» les traits nationaux, ni le caractère
» que l'histoire leur assigne. Ses per-'
» sonnages , à quelque pays , à quelque
» siècle qu'ils appartiennent, se montrent
» toujours contemporains et compatrio-
» tes ; ils ont les mêmes opinions , les
«mêmes mœurs modernes; et soit qu'il
i> s'agisse d'un homme de nos jours ou de
» la fille du soleil , l'on ne voit jamais
» dans ses pièces qu'un tableau du temps
» présent, naturel et pathétique. Si le
» talent théâtral de Kotzebue , unique en
i> Allemagne , pouvait être réuni avec le
» ton de peindre les caractères tels que
B l'ixistoire nous les a transmis , et si son
» style poétique s'élevait à la hauteur des
» situations dont il est l'ingénieux inven-
» teur, le succès de ses pièces serait aussi
» durable qu'il est brûlant. » M"*' de Staël
lui reproche encore de n'avoir pas asser
respecté la religion, surtout dans ses pre-
mières productions. On peut ajouter à ce
reproche , que , dans presque toutes ses
pièces , l'action marche au hasard , et que
les événomens arrivent 'par la seule rai-
son que l'auteur en a besoin pour un dé-
noûment ; que le goût français est conti-
nuellement choqué par le mélange des
détails comiques et tragiques ; et qu'enfin
son style n'a que bien rarement de la con-
cision et de l'élévation. Ses OEuvres dror
matiques ont été recueillies à Leipsick,
1797, 5 vol. in-8°, et 1798-1819, 23 vol. in-
8°. Plusieurs de ses pièces ont été tra-
duites ou imitées en français. Outre celles
que nous avons citées de lui , on remar-
qua dans le temps un petit' drame inti-
tulé ; Ze club des jacobins , où il osa re-
tracer avec franchise le double caractère
de folie et de scélératesse de ceux qui
alors déshonoraient le nom de la liberté.
— Les opinions de Kotzebue ont subi de
singulières variations suivant les circon-
stances où il s'est trouvé. Une de ses pre-
mières productions politiques fut une Dé-
fense de lanoblesse, publiée en 1792, où il
développe avec une grande force le prin-
cipe de la nécessité d'une noblesse héré-
ditaire dans une monarchie. Plus tard il
adopta les idées révolutionnaires, qu'il
propagea même dans divers pamphlets.
Après son voyage à Paris , il se déchaîna
contre Bonaparte; il rédigea à Berlin,
de concert avec M. Merkol , "un journal
dont le titre était le Sincère , dans lequel
KOT
152
KOU
U comballait avecTorceel beaucoup d'es-
prit la politique de ce conquérant. Ce
journal commença à paraître en septem-
bre 1803 : et voici cependant comment il
s'exprimait, en iSOA., dans son livre qui a
• pour titre Voyage de Paris à Berlin... :
• Le système de politique , dit l'auteur,
» qui rend un peuple heureux et glorieux
» est toujours jxiste et légitime... La pos-
» té rite ne jugera que par les résultats
» Vhomme héroïque qui, comme Jupiter,
» fait trembler la terre en fronçant le
» sourcil. Peu importe qu'il ne se fasse pas
» de scrupule de sacrifier les hommes,
» qu'il ne les regarde que comme des in-
» slrumens qui lui servent à arriver au
s but qu'il se propose , s'il rend heureux
» tous ceux qu'il ne sacrifie pas... ! » On
sait que Napoléon , en 1804 , s'était fait dé-
clarer empereur. Peu avantcetle époque,
Kotzebue reçut un affront public auquel il
parut très sensible. S'étant brouillé avec
son corédacteur Merkel, celui-ci écrivit
contre lui dans son journal, et dévoila
des faits que Kotzebue aurait voulu tenir
caches atout le monde. Réconcilié avec la
cour de Russie , il se dévoua entièrement
à son service etonle regarde comme l'au-
teur de plusieurs proclamations et d'autres
pièces qui émanèrent alors du cabinet de
Saint-Pétersbourg , et dans lesquelles on
remarque un contraste frappant entre ses
opinions de 1800 et celles de 1812. L'em-
pereur Alexandre lui ayant accordé la
])ermission de se fixer dans sa patrie, le
chargea en même temps de lui rendre
compte de l'esprit public de ce pays.
Deux prédécesseurs immédiats d'Alexan-
dre avaient eu de semblables correspon-
dans. Grimin le fut de Catherine II, et
Laliarpe de Paul I"". Moins heureux que
ses devanciers, Kotz,«bue dut à cette cor-
respondance sa mort tragique. On sait
combien est répandue dans l'Allemagne
la secte des Carbonarij ou des Illuminés.
Kotzebue, dans ses lettres à l'empereur
Alexandre, la peignait avec les couleurs
les plus vives, montrait comme éminem-
ment dangereux les principes qu'elle pro-
fessait, et ne cachait pas qu'elle visait
sourdement à la destruction des trônes,
iau bouleversement de l'Europe , et mémo
[du monde entier. Comme les étudians de
i l'université de l'Allemagne sont les plus
attachés à la secte des illuminés , c'étaient
eux principalement que Kotzebue com-
ballait. Ceux de leurs partisans qui se
disaient le mieux instruits prétendirent
qu'il y avait de l'exagération dans ses at-
taques. Quoi qu'il en soit, le lésultatn'en
fut pas moins terrible pour leur antago-
niste. On ignore par quel hasard plusieurs
lettres de la correspondance de Kotzebue
furent rendues publiques : elles tombè-
rent entre les mains des étudians. Un de
ceux-ci, nommé Sand, quitte son univer-
sité, se rend à Manheim , puis à la mai-
son de Kotzebue , et demande à lui par-
ler ; il est introduit dans son cabinet, et,
sans prononcer un seul mot, le frappe de
son poignard, et Kotzebue expire au mo-
ment même. On ne saurait exactement
définir le caractère de Kotzebue ; mais il
est certain que dans plusieurs occasions on
lui reprocha justement d'être envieux ,
versatile et avide. Il serait cependant
injuste de lui refuser du talent, un
style vif, animé et plein de coloris. Ses
connaissances étaient très variées, et il
s'exerça presque dans tous les genres,
excepté dans le genre épique. Nous ne
pouvons pas faire le même éloge de son
jugement ni de son bon goût, qu'on pou-
vait appeler anti-classique. Il disait lui-
même qu'il n'avait jamais pu voir dans la
Vénus de Médicis ^ « qu'une jolie servante
» surprise en grand déshabillé par le
» jeune maître de la maison , dont elle ne
» se presse pas trop de fuir les regards. »
C'est à peu prèsle jugement qu'aurait porté
sur cette statue un brasseur de Weiniar.
Le groupe de Laocoon ne lui représen-
tait «que les convulsions repoussantes d'un
» scélérat que le bourreau fait expirer sur
» la roue. » Quelqu'un lui ayant demandé
ce qu'il avait trouvé de bon à Paris, il
répondit par une basse platitude que nous
dédaignerons de rapporter. Malheureuse-
ment ce faux jugement et ce mauvais
goûl régnent dans to'utes ses pièces drama-
tiques , quoiqu'il faille convenir qu'on y
trouve beaucoup d'imagination , une par-
faite connaissance du théâtre , des scènes
comiques et intéressantes, un dialogue
facile , plein de verve et de saiUieS pi-
quantes ; mais Kotzebue connaissait mieux
les dehors de l'homme que son cœur et
ses passions.On trouve des détails snr Kot-
zebue , dans l'ouvrage allemand de Eich-
horn, intitulé Histoire générale de la
littérature j Xoxtx. k, sect. 2. M. flenricha
a aussi donné une Notice sur ce grand
écrivain dans la Revue encyclopédique,
tom. 6, pag. 52.
KOTIC ( Pierre ). Voyez CŒCK.
KOULI-RAIV (Thahas ), roi de Per^e,
appelé aussi Nadir-Schah, naquit en
1688 (1100 de l'hégire ), à Calot, dans la
KOU
155
KOU
province du Khorasan, une des pjus
orientales de la Perse, et sujette aux in-
cursions des Tarlares Usbecs contre les-
quels il eut à combattre dès l'âge de 13 ans,
pour défendre ses propriétés. Le père de
Nadir était gouverneur de la forteresse
de Calot : cette dignité depuis long-temps
était héréditaire dans sa famille , et de-
vait par conséquent revenir à son fils,
qu'il laissa mineur à sa mort; mais l'on-
cle de celui-ci s'empara du gouverne-
ment, sous prétexte d'en prendre soin
jusqu'à la majorité de son neveu. Nadir,
indigné d'une telle conduite , s'expatria.
Après divers exploits , plus dignes d'un
brigand que d'un capitaine , il se distin-
gua honorablement en rçjf)0ussant les
Tartares Usbecs qui ravageaient le Kho-
rasan; mais il irrita en même temps, par
son orgueil , le gouverneur de cette pro-
vince , au point que celui-ci lui fît don-
ner la bastonnade sous la plante des pieds,
jusqu'à ce que les ongles des orteils lui
fussent tombés. Cet affront obligea Nadir
à prendre la fuite ; il se joignit à deux vo-
leurs de grand chemin, enrôla des ban-
dits, et se vit dans peu à la tète de 500
hommes bien montés. Avec ce corps, il
ravagea tout le pays, et brûla les maisons
de tous ceux qui refusaient de contri-
buer. Les Aghwans s'étaient rendus
maîtres d'Ispahan sous la conduite de
Maghmud , qui venait d'envahir la Perse.
Les Turcs el les Moscovites s'étaient, d'un
autre côté, jetés sur divers états delà Perse;
de sorte que Schah-Thamas, légitime
successeur de Hossein, n'avait plus que
deux ou trois provinces. Un des généraux
de son armée, dont il était mécontent, se
retira secrètement auprès de Nadir avec
1500 hommes. L'oncle de Nadir, appré-
hendant alors qu'il ne vînt le dépouiller
du gouvernement à main armée , lui
écrivit qu'il obtiendrait, s'il voulait, le
pardon de tout ce qu'il avait fait , et qu'il
pourrait entrer au service du roi. Il ac-
cepta cette offre, et partit sans différer
pour Calot, avec le général fugitif et cent
hommes d'élite. Il fut bien reçu, mais
la nuit suivante il fit investir la place par
500 hommes, et étant monté dans la
chambre de son oncle , il le tua en 1727.
Schah-Thamas ayant besoin de monde,
fit dire à Nadir qu'il lui pardonnerait en-
core ce crime, s'il venait le joindre, et
qu'il le ferait Min-Baschi, ou comman-
dant de mille chevaux. Nadir, ravi de
cette proposition, se rendit auprès du
monarque, s'excusa , et promit beaucoup
de fidélité. Après s'être signalé en di-
verses rencontres contre les Turcs, il
fut fait lieutenant-général. Il sut raéme
si bien s'insinuer dans l'esprit du roi, et
rendre suspect le général de ses troupes,
que ce dernier ayant eu la tête tranchée.
Nadir se vit général au commencemenl
de l'an 1729. C'est alors qu'il déploys
toute l'étendue de ses talens , et le roi se
reposa sur lui de toutes les affaires mili-
taires. Dans le mois d'août de cette année,
Thamas apprit qu'Aschruff, successeur de
Maghmud , s'avançait avec trente mille
hommes vers le Khorasan : Nadir marcha
contre lui ; la bataille se donna, et Aschruf f
y ayant perdu 12,000 hommes , se retira
à Ispahan avec environ le tiers de son
armée. Thamas , pour récompenser de
tels exploits, fit à son général le plus grand
honneur qu'un roi de Perse puisse faire.
Il lui ordonna de porter son nom ; de sorte
qu'il fut nommé THAMAS -KULI ou
KOULI , l'esclave de Thamas , en y ajou-
tant le mot KAN , qui signifie seigneur.
L'esclave voulut bientôt être le maître.
Kouli-Kan excita une révolte contre Tha-
mas , le fit enfermer dans une prison ol)-
scure , et se plaça sur le trône d'où il l'a-
vait fait descendre. Il fut couronné en
1736, àKasbin. Le Grand-Seigneur et le
Mogol le reconnurent pour roi de Perse.
Il partit au mois de décembre , avec une
armée de plus de 80,000 hommes, ayant
laissé son fils Beza-Kuli-Mirla, pour com-
mander dans Ispahan pendant son ab-
sence. Il prit Kandahar après un siège de
dix-huit mois. Quelques ministres de Ma-
hommed-Schah , empereur du Mogol ou
de rindoslan, écrivirent à Kouli-Kan pour
l'inviter à s'emparer d'un empire dont le
monarque indolent et voluptueux n'était
pas digne. Dès que le roi de Perse eut
pris ses sûretés, il ne,se refusa pas à cette
conquête , si conforme à son inclination.
Après s'être emparé des villes de Gorbim-
det et de Ghoznaw, il marcha droit à Ca-
bul capitale de la province du même nom,
et frontière de l'Indostan, et s'en rendit
maître : ily trouva d'immenses richesses.II
écrivit au Grand-Mogol que « tout ce qu'il
» venait de faire était pour le soutien de la
» religion et de l'empereur. » Mahommed
ne répondit à cette lettre qu'en levant des
troupes. Kouli-Kan envoya un second am-
bassadeur pour demander environ 100
millions de notre monnaie et 4 provinces.
L'empereur, fort nonchalant , et trahi par
ses ministres , ne fit aucune diligence.
Pendant ces tergiversations , le Persan se
KOU
154
KOU
rendait devant Peishor, dont il s'empara,
après avoir défait un corps de 7,000 hom-
mes, campé devant celte place, au mois
de novembre 1738. Le 19 janvier suivant
il se vit maître de Lahor. Enfin , l'armée
du Grand-Mogol s'ébranla , et le monar-
que partit de Dehli le 18 janvier. Kouli-
Kan alla au-devant de lui. Son armée était
d'environ 16,000 hommes de cavalerie.
Il alla camper à une petite distance de
celle de l'ennemi. Le combat se donna ,
et le Persan remporta une victoire com-
plète , quoiqu'il n'eût fait agir qu'une
partie de ses troupes. La consternation et
la terreur se répandirent dans le camp de
l'empereur. On tint un conseil, et on fit
faire des propositions d'accommodement
à Kouli-Kan, qui exigea qu'avant toutes
choses le Grand-Mogol vînt s'entretenir
avec lui dans son camp. L'empereur fit
ce qu'on demandait de lui ; et après que
le roi de Perse l'eut fait asseoir à côté de
lui dans le même siège, il lui parla en maî-
tre et le traita en sujet . Il ordon na ensuite à
un détachement de cavalerie de s'emparer
de toute l'artillerie du Grand Mogol,et d'en-
lever tous les trésors, tous les joyaux, toute
les armes et les munitions de l'empereur
et des émirs. Les deux monarques se ren-
dirent 'ensuite à Dehli , capitale de l'em-
pire , et ils arrivèrent avec leurs troupes
le 7 mars 1739. Le vainqueur enferma le
vaincu dans une prison honorable , et se
fit proclamer empereur des Indes. Tout
se passa d'abord avec beaucoup de tran-
quillité ; mais une taxe que l'on mit sur
le blé causa un grand tumulte , et quel-
ques-uns des gens du roi de Perse fu-
rent tués. Le lendemain 11. le tumulte fut
plus grand encore. Kouli-Kan monta à
cheval et envoya un gros détachement de
ses troupes pour apaiser le tumulte, avec
permission de faircy main-basse sur les
séditieux , après avoir employé la dou-
ceur et les menaces. S'élant rendu dans
une mosquée , il y fut attaqué à coups de
pierres ; on tira même sur lui. Ce prince,
se livrant alors à toute sa fureur, ordonna
un massacre général ; il le fit cesser enfin :
mais ayant duré depuis 8 heures du ma-
lin , jusqu'à trois heures après-midi , il y
eut un si grand carnage , que l'on compte
qu'il y périt plus de 40,000 habilans.
Pour se délivrer d'un hôte si formidable,
il s'agissait de lui payer les sommes qui
lui avaient été promises. Kouli-Kan eut
pour sa part des richesses immenses en
bijoux , en diamans. Il emporta beaucoup
plus de trésors de Dehli que les Espagnols
n'en prirent à la conquête du Mexique.
Ces trésors , amassés par un brigandage
de plusieurs siècles, furent enlevés par
un autre brigandage. On fait monter le
dommage que causa cette irruption dea
Persans, à 125 millions de livres sterling.
Un dervis , touché des malheurs de sa
patrie , osa présenter à Kouli-Kan la re-
quête suivante : « Si tu es Dieu , agis en
» Dieu : si tu es prophète , conduis-nous
» dans la voie du salut ; si tu es roi, rends
» les peuples heureux , et ne les détruis
I) pas. n Kouli-Kan répondit dans le style
d'Attila : Je ne suis pas Dieu , pour agir
» en Dieu ; ni propliète , pour montrer le
» chemin du salut ; ni roi , pour rendre
» les peuples%eureux. Je suis celui que
» Dieu envoie contre les nations sur les-
n quelles il veut faire tomber sa ven-
» geance (i). » Le monarque persan, qui
était en droit de tout exiger de Mahom-
med , finit par lui demander en mariage
une princesse de son sang pour son fils ,
avec la cession de toutes les provinces si-
tuées au-delà de la rivière d'Atek , et de
celle de l'Indus, du côté de la Perse. Ma-
hommed consentit à ce démembremenl
par un acte signé de sa main. Kouli-Kan
se contenta de la cession de ces belles
provinces, qui étaient conliguës à son
royaume de Perse , et les préféra à des
conquêtes plus vastes , qu'il eût conser-
vées difficilement. Il laissa le nom d'em-
pereur à Mahommed, mais il donna le
gouvernement à un vice-roi. Comblé de
richesses, il ne songea plus qu'à retourner
en Perse. Il y arriva après une marche
pénible, qui fut traversée par plusieurs
obstacles , que sa valeur et sa fortune sur-
montèrent. Ses autres exploits sont peu
connus. Cependant on sait que son neveu
Ali ayant levé l'étendard de la rébellion ,
Kouli-Kan marcha contre lui; il était
campé à Feth-Abud, lorsque l'inleruianl
de sa maison et plusieurs généraux l'al-
laquèrent de nuit dans sa tente ; il se dé-
fendit vaillamment ; mais, ayant fait une
chute , il fut percé par leurs coups , et on
lui trancha la tète le 20 juin 1747. « Les
» assassins, dit un historien persan, firent
» une balle de paulme de celle têle que
» l'univers , i)eu de temps auparavant ,
» n'était pas capable de contenir. » Son
(i) Od doit ajouter qu'il te moquait de toutes les
religions , m«!me de la sienne. Un des chefs de cette
dernière lui ayant remontre que, tout grand prince,
tout invincible qu'il était, il n'avait pas le dioil 4'«n-
nover en religion, Kui)!i-Kao , poui toute léponsef
le 6t e'irar.gler.
KOU ISS
neveu Ali Kouli-Kanse fit proclamer roi
de Perse. Ses conquêtes ne furent mar-
quées que par des rava^jes. II nefutqu'nn
illustre scélérat. 11 aimait excessivement
les femmes , et semblait nourrir son hu-
meur sanguinaire par la jouissance des
plaisirs sensuels. Sa taille était de six pieds
sa constitution fort robuste , et sa voix
extrêmement forte. L'histoire de ses
exploits est une vérification bien sensible
de la réflexion de Montesquieu. « Que l'on
» se mette devant les yeux , d'un côté les
» massacres continuels des rois et des chefs
» grecs et romains , et de l'autre la deslruc-
» tien des peuples et des villes par ces
ï mêmes chefs, Timur etGengis-Kan, qui
» ont dévasté l'Asie , et nous verrons que
» nous devons au christianisme , dans le
» gouvernement, un certain droit poli-
» tique , et dans la guerre , un certain
» droit des gens , que la nature humaine
» ne saurait assez reconnaître. » Tout
en aspirant à la monarchie universelle.,
Kouli-Kan eut le dessein de réunir par
une même croyance les chrétiens , les
juifs elles mahométans. Il est certain qu'il
fit traduire en persan le Pentaieuque et
YEvangile. Il voulut aussi introduire des
innovations dans la religion musulmane,
ce qui mécontenta beaucoup ses sujets.
Menacé d'hydropisie , un médecin mu-
sulman le soigna avec succès. Après le
départ de celui-ci, il se 'confia aux soins
du frère Basin, jésuite, qui ne le quitta
plus, et qui a donné une Relation exacte
de ses dernières années. L'histoire de
Nadir-Schah ^ par Mahommed-Mahdy-
Khan , écrite en persan , a été traduite en
français , par William Jones , Londres ,
1770, in-4°.
* KOURARIN ( le prince Alexandre
de ) , ancien ministre d'état russe près la
cour impériale de France , bailli de l'or-
dre de Saint-Jean de Jérusalem , chan-
celier des ordres de Russie , grand-croix
de la légion d'honneur , membre des or-
dres de Prusse , de Danemarck , de Ba-
vière, etc., naquit, en 1732 , d'une des fa-
milles les plus illustres de la Russie. Le
jeune Kourakin fut élevé avec le grand-
duc Paul, depuis empereur, qui eut tou-
jours pour lui une bienveillance portée
jusqu'à l'intimité. Il l'accompagna dans
ses voyages en Allemagne , en France et
en Italie. Nommé en 1796 ministre et vice-
chancelier de l'empire , il se démit de ses
fonctions , après la mort violente de
Paul r' ( en 1801 ) , et s'absenta quelque
temps de la cour. Cependant , cédant aux
KOU
ordres de l'empereur Alexandre , fils ef
successeur de Paul, il accepta en 1802
l'ambassade de Vienne. Ce fut le prince
de Kourakin qui entama les négociations
avec la France , et signa le traité de paix
de Tilsitt en 1807. Alexandre le créa alors
conseiller privé de première classe, et
feld maréchal; et l'année suivante , il le
nomma son ambassadeur à Paris , où il
demeura quatre années. Le prince de Kou-
rakin faillit périr à l'occasion de la fôte
que le prince de Schwartzemberg , am-
bassadeur de François II, donnait à Na-
poléon pour célébrer son mariage avec
une archiduchesse d'Autriche , fille de cet
empereur. Le feu prit à la salle du bal , el
dans la confusion générale , il tomba dans
l'escalier, fut foulé aux pieds, et perdit
connaissance. Quand on l'emporta, il
était couvert de blessures qui le firent
long-temps souffrir , et plusieurs brûlures
qu'il avait à la main ne purent être cica-
trisées entièrement. La Russie ne voulant
plus adhérer au système continental ,
établi par Bonaparte contre le com-
merce anglais , la bonne harmonie fut al-
térée entre les deux empereurs. Le prince
de Kourakin montra dans les négocia-
tions qui eurent lieu à cette occasion les
lalens d'un habile diplomate, et une fer-
meté qui fait honneur à son caractère. Na-
poléon lui ayant dit : « J'ai 500,000 hom-
» mes pour mes amis ou contre mes en-
» nemis : — Non , sire , vous n'en avez
» que 250,000, » lui répondit Kourakin.
Il avait obtenu ces renseignemens exacts
de deux commis au ministère de la guerre ,
qui furent condamnés par une commis-
sion militaire à être fusillés. La guerre
contre la Russie ayant été déclarée en
mai 1812, le prince de Kourakin se re-
tira dans une maison de campagne qu'il
avait à Sèvres , où il attendit long-temps
ses passeports. Avant la rupture défini-
tive de la paix, il s'établit, entre les
agens français , le comte de Romanzow
et le prince de Kourakin , une corres-
])ondance officielle qui offre un grand
intérêt politique. Quand il lui fut permis
de quitter la France , le prince de Kou-
rakin se rendit à fliemel , où on lui re-
fusa de nouveau des passeports. Sa po-
sition devint alors très critique : la com-
munication entre Memel et Wilna, où se
trouvait l'empereur Alexandre , était in-
terrompue , et le prince de Kourakin ne
pouvait pas même faire parvenir ses let-
tres à son souverain. Cependant les Fran-
gais s'avancèrent vers Moscou , et le
KOlî 15
prince Kourakin apprit à Memel l'incen-
die de cette ville , qui lui causa des pertes
considérables. La retraite désastreuse
des Français lui permit de rejoindre
l'empereur Alexandre , dont il reçut un
honorable accueil. Le sénat russe, qui,
après le succès des alliés en Allemagne ,
avait décerné le litre de Béni à l'empe-
reur , choisit le prince de Kourakin pour
aller le complimenter. A Berlin , il fut at-
taqué d'une longue maladie , qui l'empê-
cha de prendre part aux affaires. Alexan-
dre le nomma ensuite son conseiller d'é-
tat; et en 1817, il lui donna la permission
de voyager en pays étrangers. L'empe-
reur lui continua pendant tout ce temps
ses appointemens , pensions , et argent de
table , et ajouta dans sa dépêche : « Quand
» il aura obtenu du soulagement dans son
» état actuel , le prince de Kourakin ne se
r> refusera pas , sans doute , à être de nou-
» veau utile à son pays » Il se trouvait
à Paris au mois de septembre 1822 ; l'an-
née suivante , il partit pour Saint-Péters-
bourg, et mourut dans cette ville, vers
la fin de 1824 , âgé de 73 ans. Sa mort
fut vivement sentie par l'empereur Alexan-
dre , qui avait en lui un sujet aussi distin-
gué par ses talens que par sa loyauté et
son zèle.
* KOUTOUSOFF - DE - SMOLENSK
(Michel LAVRIONOVITCH - GOLENIT-
CHEFF ) , général russe , né en 174S , ter-
mina son éducation à Strasbourg , où il
apprit le français et l'allemand : il com-
mença sa carrière militaire à 16 ans , servit
d'abord dans l'artillerie comme caporal ,
et devint la même année lieutenant dans
le régiment commandé par le célèbre Su-
warow. Le prince de Holstein-Beck le
choisit en 1762 pour son aide-de-camp.
En 1764 il fut envoyé en Lithuanie avec
le grade de capitaine , et fit cinq campa-
gnes contre les Polonais. Il passa en 1770
à l'armée de Romanzoff, qui se battit
contre les Turcs avec tant de succès. Le
jeune Koutousoff s'était fait remarquer au
combat de Ribaja-Moguila , le 10 juin
4770 ; à celui de Pruth le 5 juillet ; au pas-
sage de la Lagre et à la bataille de Ka-
goul. Nommé successivement major, lieu-
tenant-colonel, colonel, général-major,
il signala sa valeur en plusieurs occa-
sions, notamment au siège d'Ismaïlow,
( 1790 ) où il vint prendre le commande-
ment de la 6* colonne , qu'il conduisit au
terrible assaut où les Turcs perdirent
plus de 30,000 hommes. Devenu lieute-
nant-général en 1791 , il contribua au
6 KOU
gain de la bataille de Matchine, qui amena
la paix. Use signala encore dans la guerre
qui eut lieu entre l'Autriche et la France,
notamment à Crems , où le combat fut
très opiniâtre et le succès balancé. Il perdit
la bataille d'Austerlitz ; mais elle avait été
livrée contre son avis ; il voulait qu'aupa-
ravant on se réunit au généralBcnningseu
qui arrivait avec des forces considéra-
bles. Lorsque la paix fut conclue , il se
rendit en Ukraine , ensuite à St.-Péters-
bourg. n fut chargé en 1809 , à la mort du
comte de Karaensky , du commandement
des troupes desthiées à combattre les
Turcs. Après quelques avantages , il par-
vint à envelopper le grand-visir Nazir-
Pacha, et le força de se rendre à discrétion
le 26 novembre 1811 , quoique son armée
fût inférieure à celle de l'ennemi. Un suc-
cès si important lui valut le titre de comte
et un portrait enrichi de diamans; mais
il devait bientôt obtenir une gloire plus
réelle et surtout plus utile à sa patrie.
Il parvint par d'habiles négociations à
conclure une paix avantageuse , lors-
qu'il lui était ordonné de la faire à tout
prix, parce qu'elle était devenue de la
plus urgente nécessité. Il la signa à Bu-
charest , le 16 mai 1812. L'empereur
Alexandre , pour le récompenser d'un si
grand service, l'éleva à la dignité de
prince. Lorsque la guerre éclata entre la
France et la Russie, il fut nomme géné-
ralissime des armées russes , et il livra ,
le 26 août 1812 , à Bonaparte , la bataille
de la Moskow^a , la plus sanglante qui ait
été donnée dans cette guerre. Les talens
et la bravoure qu'il y développa le firent
nommer feld-maréchal. Cependant Bona-
parte pénétra dans Moscou ; pendant ce
temps son habile adversaire, se recrutant
chaque jour, l'environnait de toutes parts,
et lui coupait toute communication avec
le Sud. Il le força, après l'avoir battu à
Dorogobouj et Krasnoy,de se rejeter vers
le nord et de parcourir de nouveau un
pays dévasté et ruiné, où il perdit pres-
que toute son armée dans les glaces. Les
débris qui en échappèrent ne durent leur
salut qu'aux fautes de quelques généraux
subalternes. Koutousoff obtint pour ce
nouveau triomphe , le grand cordon de
Saint-George. Les Russes pénétrèrent en-
suite en Prusse , et de là en Saxe ; mais
tandis qu'ils assuraient ainsi l'indépen-
dance de l'Allemagne , leur général , at-
teint d'une maladie cruelle , suite de ses
longs travaux , était près de terminer sa
glorieuse carrière. Il mourut le 16 avrij
KRA
137
KRA
18i3, dans la petite ville de Bunzlau,
en Silésie,au moment de voir ses tra-
vaux couronnés par les plus grands ré-
sultats. Livré dès l'enfance à l'étude de
l'art militaire , il en avait long-temps mé-
dité les principes et pratiqué les opéra-
tions. Il ne donnait rien au hasard , et
jamais il ne s'écartait des règles établies.
Il parvint ainsi à porter la gloire des ar-
mes russes plus loin que tous ceux qui
l'avaient précédé. Son caractère était liant,
ses mœurs douces ; il aimait la littéra-
ture française , cultivait les arts avec suc-
cès, et parlait purement plusieurs langues.
KRACHENIÎNIVIKOYV ou KRASCHE-
NINNIKOF ( Etienne ) , voyageur russe, né
à Moscou, en d7i2, fut du nombre des
jeunes élèves attachés aux professeurs de
l'académie de St.-Pétersbourg. Cette com-
pagnie ayant envoyé quelques-uns de ses
membres au Kamtschatka, par ordre de
l'impératrice , en 1733 , pour donner une
relation de ce pays, le jeune Kracheninni-
kow suivit le professeur d'histoire natu-
relle. Il en revint en 17i3, avec un
certain nombre d'observations, dont
quelques-unes peuvent paraître intéres-
santes. L'académie le nomma adjoint en
1745, et professeur de botanique et d'his-
toire naturelle en 1753. Il mourut en
4754 ;il avait été chargé par sa compagnie
de dresser une Relation des découvertes
des académiciens, et de la combiner avec
celle de M. Stellert , qui était mort en
4745. C'est cet ouvrage dont la traduc-
tion forme le second volume du Voyage
de Sibérie^ de l'abbé Chappe d'Aulero-
che, Paris , 1768 , 2 tomes en 3 vol. in-4° ,
avec fig. , magnifiquement exécuté. Il
avait été publié séparément en 1767 , 2
vol. in- 12. La meilleure traduction est
celle de Saint-Pré , Amsterdam , 1771 , 2
vol. În-S".
KRAKTZ ou CRANTZ (Albert), chro-
niqueur allemand, professeur de philoso-
phie et de théologie à Rostock , puis
doyen de l'église de celte ville , qui était
sa patrie , naquit vers le milieu du 15*
siècle, fut employé par les villes anséati-
ques dans diverses négociations , et s'en
acquitta avec autant d'intelligence que
de zèle. Il était l'arbitre des différends ,
la ressource des pauvres et l'exemple de
son chapitre. Il fut choisi pour média-
leur entre les rois de Danemarcket de
Holstein, en 1500. Cet homme estimable
mourut en 1517, laissant plusieurs ouvra-
ges. Les plus connus sont : Chronica re-
gnorum Aquiloniorum Daniœ, Suecice*
7.
Norwegiœ j Strasbourg, 154G, in-fol. ,
réimprimée à Francfort dans le même
format , par les soins de Jean Wolf ;
I Saxoniaj. sive De Saxonicœ gentis ve-
tusta origine^ Francfort, 1573, 1580,
1621, in-fol. ; [ fFandalia ^ sive Histoiia
Wandalorum , Cologne, 1600, in-fol.,
réimprimée avec jjIus de soin en 1619, à
Fiancfort, in-fol. , par Wechel ; | Metro-
poliSj, sive Bistoria ecclesiastica Saxoniœ,
Francfort , 4373, 1590 et 1627, in-fol. Elle
ne regarde que l'histoire de Westphalie
de Jutland. | Ordo missœ , secundiim ri-
tum Ecclesiœ Hamhurgensis , Rostock ,
1303, in-fol. , etc. Tous les ouvrages de
cet auteur offrent beaucoup de recher-
ches; mais il se perd quelquefois dans les
origines des peuples, quoiqu'il soit le pre-
mier qui ait travaillé à purger l'histoire
septentrionale des fables dont elle était
farcie. Si ses Histoires ont été mises à
V Index ^ avec la clause donec expurgen-
tur^ c'est que les sectaires les ont défigu-
rées : car Krantz était très bon catholique;
et mourut avant que Luther eût produit
le triste schisme quia désolé l'église d'Al-
lemagne. Voyez les Mémoires de Nicéron,
tom. 58.
RRASICKI( Ignace), comte deSiczen,
évêque polonais, né à Doubiecko le 3 fé-
vrier 1753, d'une famille illustre dans les
sciences et dans les armes, fut destiné
par ses parens à l'état ecclésiastique , et
devint prince évêque de Warmie , puis
archevêque de Gnesne. Krasicki fut un
des plus célèbres littérateurs polonais du
18* siècle : ses vers et sa prose, qui se dis-
tinguent par le goût, l'agrément et la faci-
lité , lui ont valu le surnom de Voltaire
de laPologne. Il excellait dans la peinture
des ridicules; ne pouvant défendre sa pa-
trie comme la plupart de ses amis , avec
l'épée, il la défendit avec sa plume. Lors-
que la Pologne eut été partagée pour la
première fois en 1772, et que par suite de
ce partage , il se trouva sous la dépen-
dance de la Prusse et perdit en consé-
quence le titre de sénateur de la Pologne,
il se retira à Berlin , où le fameux Frédé-
ric l'honora de son amitié. Ce prince lui
ayant dit un jour: Monsieur l'archevêque,
j'espère que vous me ferez entrer en pa-
radis sous votre manteau épiscopal. —
iVon^SiV^, répondit le Prélat, Votre Ma-
jesté me l'a rogné si court qu'il me serait
impossible d'y cacher de la contrebande.
Le comte Krasicki est mort à Berlin le
14 mars 1801. On ade lui : | Les aventures
de Nicolas Doswiadczj/nski ,i7Tîi, ir-S** ;
14
KRA
1S8
KRA
lia Mxjcheide. 1776, 1780, in-S", poème hé-
roï-comique en 10 chants, sur l'aventure
An roi Popiel manjjé par les rats, au rap-
port d'une ancienne chronique de l'évê-
que Kadlubek. Ce poème a été traduit
en français par Dubois en 1784 , puis par
J. B. Lavoisier. sous le titre de la Sou-
riade, Paris , 1818 , in-8"; | la Monoma-
clxie ou la Guerre des Moines^ 1778 ,
{)oème en C chants, qui passe pour son
rhef-d'œuvre et qui fut fait à la solUcita-
>ion de Frédéric ; plusieurs livres de
Fables et Contes, n7'ù, in-8''; M. de Vienne
en a traduit plusieurs en vers français,
Paris , 1828 , in-S"; | des Satires . 1780 ;
j la Guerre de Chocim. poème épique en
12 chants, 1780 , in-8° ; c'est le premier
poème épique en 12 chants qui ait paru
en Pologne : le sujet est tiré des victoires
remportées sousle règne deSigismondlII,
par Chodkiewicx , sur le sultan Osman.
j Des Lettres et Mélanges en prose et en
^ ers; \L' histoire ^partagée en deux livres;
I la traduction en polonais d'une partie des
poésies d'Ossian, celle des Vies des grands
hftmmes de Plutarque, etc. Ses ouvrages
ont été recueillis pour la plupart et pu-
bliés par François Dmochowski , Varso-
vie, de l'imprimerie des Pierisles , 1803
i-i suiv., 10 vol. in-S". Entre autres édi-
tions faites plus récemment, nous devons
mentionner celle qu'on a donnée à Paris
f n 1850. Le libraire Barbezat , qui a pu-
blié plusieurs ouvrages relatifs à la Po-
logne, a publié les OEuvres complètes de
Krasicki. en un seul volume à deux co-
lonnes , petit-texte , avec le portrait de
l'auteur. J.-B. Lavoisier, chanoine de
Mohilew, a traduit en français les Aven-
ture de Nie. Doswiadczyn$ki^VdiVi%, 1818,
1 vol. in-8°, précédées de V Eloge de
Krasicki T^dx Stanislas -Kostka Potocki ,
sénateur palatin {voi/ez POTOCKI ).
KHATZ. F^oyez FISCHET.
KRATZ ( Georges ) , né à Schongau
en Bavière, en 1714 , jésuite en 1750, en-
seigna les mathématiques dans l'univer-
sité d'Ingolsladt , avec une répulation ex-
traordinaire, et mourut à Munich en
1766. On a de lui un grand nombre d'ou-
vrages , entre autres : | De viribus cor-
porum ; \ De genuino pri7icipio œquilibrii
corporum solidorum , Ingolstadt , 1739 ;
I Observatio transitas Veneris per discum
solarem. 6 j unit 1761 ; I Methodus cujus-
cumque non pe7'fecte quadrati radicem
verè quam proximam brevi labore de-
terminandi , 1702 ; | De ratione motûs
fnedtee lunce a terra ad vires quibus in
lunam premitur. 1762. On a publié après
sa mort, Nova virium thenria de pressions
fluidorum, Ingolstadt, 1763, et Principia
hydraulicœ. Ingolstadt, 1770.
KRAIJSou KRAUSEN ( Jeaiï-Ulbich),
habile graveur allemand , né en 1645 è
Aiigsbourg , dont nous avons l'ancien et
le nouveau Testament , très élégamment
exécutés en taille-douce. La délicatesse
des figures fait rechercher le recueil
qu'on en fit à Augsbourg en 1703 , 2 vol.
in-fol., qui doivent contenir 133 planches.
Les Epitres et Evangiles sont gravés sé-
parément en 1706 , 1 vol. in-fol. L'expli-
cation étant en allemand, cet ouvrage ne
peut être recherché de ceux qui ne sa-
vent pas cette langue , qu'à cause de la
beauté des gravures. Voyez WEIGEL.
Kraus est mort dans sa patrie en 1719.
KRAUS. Voyez CRUSIUS.
* KRAUSE ( Charles-Chrétie;v-Fré-
DÉRic), docteur en philosophie et l'un
des plus savans professeurs de l'Allema-
gne , naquit en 1781 , à Eisenbcrg , dans
le duché de Saxe-Gotha. Il suivit , à l'uni-
versité d'Iéna , les cours de philosophie
de Fichte et de Schelling , et il donna, de
1802 à 1804, dans la même université, des
leçons particulières de mathématiques ,
de philosophie et de droit naturel avec le
titre de professeur extraordinaire. Il se
rendit ensuite à Rudolstadt , où il exa-
mina en détail le célèbre musée du prince
de Schwartzbourg, et de là à Dresde , où
il se livra à des recherches sur l'histoire
des beaux-arts. Les événemens de la guerre
l'en firent sortir en 1813, et Krause alla à
Berlin, où il tint plusieurs cours gratuits
et publics , et fonda, avec quelques autres
savans , la société de langue allemande ,
dont les statuts , imprimés en 1817 , ont
été rédigés par lui. L'accroissement de
sa famille , et la difficulté d'obtenir en
Prusse une place convenable, le détermi-
nèrent à retourner à Dresde. Deux ou-
vrages qu'il publia dans cette ville, et in-
titulés, le premier : I^s trois plus anciens
monumens de l'aria et l'autre : Origine
des idiomes du peuple allemand, lui as-
signèrent un rang parmi les hommes les
plus érudils de sa patrie. En 1817, il
voyagea avec un de ses amis en Alle-
magne, en Italie et en France, puis il ob-
tint une chaire de philosophie à l'univer-
sité de Gœttingue. Krause est mort è
l'âge d'environ 52 ans , le 27 septembre
1852, d'une attaque d'apoplexie, à Mu-
nich , où il s'était rendu pour rétablir sa
santé. On a de lui plusieurs ouvrages, tels
lillE 15
que : | Système de morale^ Leipsick, 1810,
\ Archétype de l'humanité ^ 2' édition,
Dresde, 1819; | Géométrie transcendante,
Berlin , 1825 ; 1 Cours de philosophie .
Goettingue , 1828. Afûlié à la franc-ma-
. çonnerie, Krause étudia l'histoire de celte
société, et publia quelques brochures
asseï curieuses dans lesquelles il démon-
tre combien la conduite mystérieuse af-
fectée par la plupart des francs-maçons
était ridicule et absurde.
• KRAY ( N...., baron de ), général au-
trichien, né en Hongrie, d'une famille dis-
tinguée , prit le parti des armes ; après
avoir fait la guerre contre les Turcs , en
qualité de colonel , il fut nommé général-
major à la paix , en récompense de ses
faits d'armes, et servit d'une manière
distinguée en 1793, 94 et 95, dans les Pays-
Bas et sur le Bas-Rhin. Elevé l'année sui-
vante au grade de feld-maréchal-licute-
nant, il continua de rendre à l'armée les
plus grands services , et il se fit surtout
remarquer par ses manœuvres savantes,
aux batailles d'Altenkirchen, de Bamberg,
Vetzlar et Giessen. Au commencement de
Tannée 1797 , cette même armée dans la-
quelle servait Kray,etqui était comman-
dée par Werneck, fut mise en déroute par
les troupes de Hoche : presque tous les
officiers généraux furent, à la suite de ce
désastre, traduits devant un conseil de
guerre tenu à Vienne : Kray qui était de
ce nombre fut acquitté. Dans le mois de
juillet, et après la mort du prince d'O-
range, ïl prit le commandement des trou-
pes autrichiennes. En 1799 , il fut envoyé
en Italie , et il prépara, par les avantages
qu'il y obtint, les succès des généraux
Mêlas et Suwarow. Chargé du siège de
Mantoue , il s'en empara après deux mois
de travaux , et reçut de l'empereur l'ac-
cueil le plus flatteur lorsqu'il se rendit à
Vienne en 1800. Peu après on lui confia
le commandement de l'armée du Rhin ,
que quittait l'archiduc Charles ; mais ses
succès ne furent pas aussi brillans daris
celte campagne que dans les précédentes.
n mourut à Vienne , en janvier 1804. On
ie regarde comme un des généraux les
plus habiles qui aient commandé les Au-
trichiens pendant la guerre de la révolu-
tion.
* K.RESA (Jacques), jésuite allemand,
né en Moravie en 1648 , avait fait ses pre-
mières éludes à Brinn. On ignore l'époque
précise de son entrée dans la société ; mais
^ peu de ceux qu'elle admit dans son sein
contribuèrent davantage à son illustra-
9 KRE
lion. Le père Kresa avait, pour ainsi dire
tout étudié et presque tout appris. Ceux
qui ont fait mention de lui parlent de la
vaste étendue de ses connaissances : iî
écrivait et parlait avec une singulière fa-
cilité le latin , le grec, l'hébreu , l'italien,
le français , l'espagnol et le portugais. Il
possédait à fond la philosophie et la théo-
logie, et était un des plus habiles mathé-
maticiens de son siècle ; il fut professeur
d'hébreu à Prague et à Olmutz. Sur sa
réputation, ou l'appela à Madrid pour
professer les mathématiques , et U passa
quinze ans dans cet emploi ; cela ne l'em-
pèchail ni de prêcher ni de diriger les
consciences. Il fut en Espagne confesseur
du roi et de la reine ; il l'avait été précé-
demment du roi et de la reine de Bo-
hème. Il était allé en Bohème après la
mort de Charles II, mais on le fit revenir
sous son successeur. Cependant il retour-
na à Brinn , et y mourut en 1715 , à l'àge
de 67 ans. On a de lui : | une Traduction
d'Euclide en espagnol; | Analysis spe-
ciosa trigonotnetriœ sphœricce, primo mo-
bili, Iriangulis rectilineis , progressioni
arilhmeticœ et geometricœ , aliisque pro~
blematibus ^ a 11. P. Jacobo Kresa j. Pra-
gue, 1 vol. in-4°, 1721 ; œuvre posthume.
RRETZCUMER ( Pierre), né dans le
Brandebourg vers 1700, conseiller des do-
maines du roi de Prusse , mort en 1764 ,
se distingua par sa patience en fait d'ex-
périences économiques , d'agriculture ,
et par des observations plus curieuses
qu'utiles et praticables. La plus fameuse
est celle qu'il annonça dans un excellent
Mémoire sur la multiplicalion d'un grain
d'orge. Les tiges d'une touffe d'herbe ,
produite par ce graiti semé au printemps,
ayant été transplantées ailleurs, produi-
sirent d'autres touffes ; et ainsi de suite
par le même procédé, ce grain produisit
jusqu'à 15,000 épis. On sent que cette dé-
couverte , si c'en est une (car on peut
donner la même fécondité à toutes les
plantes qui se propagent par marcottes ),
demande trop de bras pour être de quel-
que utilité. Ce même auteur s'était pro-
posé d'introduire en Piusse le labourage
à deux charrues : il le proposa dans un
autre Mémoire. L'idée n'était pas neuve,
Olivier de Serres en parle dans son Théâ-
tre d'agriculture; et il faut bien qu'on ne
l'ait pas trouvée avantageuse , puisqu'on
ne s'est point avisé de la réaliser.
•K.REUÏZ, ouCREUTZ, ou CREUZ
( FRÉDÉRic-CuARi.ES-CASîMia , baron de),
poète allemand, VYoung de son pays.
KRE
160
KRI
naquît à Hambourg sur le Hartz, en 1724 ,
el mourut à l'âge de A5 ans, le 6 septem-
bre 1770. Ses ouvrages, tous fort lugubres,
ont été publiés et recueillis. Ils compren-
nent : 1 le poème intitulé : Les Tombeaux^
Francfort-sur-le-Mein , 1769. Nulle mé-
thode , de l'obscurité , des vers parfois
))rosaïques et durs, de' grandes beautés,
des images sublimes, un sentiment pro-
fond du sujet, voilà les défauts et les qua-
lités de cet ouvrage. Il serait à souhaiter
qu'il fût traduit en français. | Des Odes :
la diction en est pure , noble ; mais on
n'y trouve pas ce feu, cette élévation que
demande la poésie lyrique. ] Sénèque ^
tragédie en S actes. Elle eut peu de succès.
])arce qu'on n'y remarque presque aucune
situation intéressante. | Essais sur l'hom-
me. L'auteur, après avoir parlé du bon-
heur en général, entre dans quelques dé-
tails sur celui que l'homme peut trouver
en cultivant les sciences et les arts; et il
attaque souvent les principes que Rous-
seau a présentés sur ce sujet.
* KREUTZER (Rodolphe), célèbre
compositeur de musique , el l'un de nos
premiers violonistes , naquit à Versailles
en 1767 d'un musicien attaché à la cha-
pelle du roi , et fut élevé par son père ,
puis par A. Stamitz. Il cultiva les heu-
reuses dispositions qu'il avait pour le vio-
lon , et à l'âge de 13 ans , il parut au con-
cert spirituel et y exécuta avec un art et
«n aplomb qui excitèrent l'étonnement et
l'enthousiasme un concerto qu'il avait
composé lui-même. Admis à la cour , il
joua dans plusieurs occasions , et mérita
par son talent la protection de la reine
qui l'appela dans ses concerts particu-
liers. Kreutzer fit partie du conservatoire
dès sa création} il fut envoyé en 1797 en
Italie pour y recueillir les ouvrages des
maîtres de l'école italienne , et voyagea
en Allemagne ainsi qu'en Hollande : à son
retour il devint successivement premier
violon de la chapelle el de la musique
particulière de Bonaparte, premier violon
de l'académie de musique ; premier violon
à l'école de musique et de déclamation , et
premier chef d'orchestre de l'académie
royale de musique. Il publia plusieurs
concertos et fil représenter plusieurs opé-
ras qui obtinrent du succès, surtout celui
de Paul et Vt7'ginie qui est un de ses
principaux titres de gloire. Voici la liste
des principaux ouvrages de Kreutzer :
— LA V Académie de musique : \ Aslya-
nax , opéra en trois actes , paroles de De-
jaure, 1801 , remarquable par un air du
caractère le plus tragique, el surtout par
les chœurs ; | Flaminius à Corinlhe ( avec
Nicolo), paroles de Guilbert et Lambert,
1801; I Aristippe, opéra en deux actes, pa-
roles de MM. Giraud et Leclerc, 1808, ou-
vrage gracieux ; | La mort d'AbeL opéra
en trois actes, paroles de M. Hoffmann,
1810; I le Triomphe du mois de mars^
opéra en un acte , paroles de M. Dupaty,
1811; I Y Oriflamme (avec MM. Michel,
Paer et Berton ) opéra en un acte, paroles
de MM. Etienne et Baour-Lormian, 1814;
I La princesse de Babylone ^ opéra en 3
actes , paroles de M. Tigée, 1815; | les
Deux rivaux (avec MM. Persuis, Spontini
et Bcrlon), opéra en un acte, paroles de
MM. Dieulafoi et Brifaut. Kreutzer a com-
posé la musique de plusieurs ballets :
Paul et Virginie , 1806 ; Antoine et Cléo-
pâtre ^ 1808; la Fêle de mars, 1809;
V Heureux retour (avec MM. Persuis et
Berton), 1813; le Carnaval de Venise ,
1817 ; la Servante justifiée , 1818 ; Clari ,
1820. — II. A l'Opéra comique : \ Jeanne-
d'Arc; | Loddisha dont l'ouverture est
connue de tout le monde ; ] Paul et Vir-
ginie ; I le Franc Breton : | Charlotte el
fVerther; \ le Petit page ; | François T*"";
I Jadis et aujourd'hui; | l'Homme sans
façon; \le Campde Sobieski; \ Constance
et' Théodore; \ le Béarnais (181i); | la
Perruque et la Redi7igoite ( 4814 ) ; | le
Maître et le Valet ( 1816 ) , etc. On doit
encore à Kreutzer des concertos de vio-
lon, des symphonies concertantes, des
quatuor, des trios . des duos et des sonates
de violon. Il est auteur avecM. Baillot de
l'excellente méthode de violon rédigée
pour l'enseignement du conseivatoire de
musique. Cet habile virtuose est mort âgé
de 64 ans, à Genève , au mois de janvier
1831. — KREUTZER ( Auguste ) , élève
de son frère Rodolphe, fut aussi premier
violon à l'Opéra , et membre de la cha-
pelle du roi, et succéda à son frère comme
professeur au Conservatoire. Il s'était dis-
tingué dans l'exécution des concertos de
Viotti et de R.Kreutzer, et composa aussi
un concerto remarquable. Il est mort à
Paris vers la fin d'août 1852.
* ivRIEG ( Jean-Frédéric ), général
badois , naquit à Lahr, en Souabe, en 1750.
Entré dans les armées françaises , à l'âge
de 16 ans, il fit toutes les campagnes de
la guerre d'Hanovre , sous le comte Mau-
rice , maréchal de Saxe. Il reçut sept bles-
sures à la bataille de Rosbach, et y fut
fait capitaine de cavalerie par le maréchal
de Broglie, qui le nomma major de 'a
KRO
même arme , à la bataille de Miiiden. A
celle de Klosteicamp, en protégeant la
retraite de l'armée française, il reçut seize
blessures qui le mirent hors d'étal de re-
paraître à l'armée pendant trois ans. Une
batterie floîtante qu'il commandait au
siège de Gibraltar , en 1782 , ayant été dé-
faite , il fut obligé de se sauver à la nage.
il commandait en seconda Thionville ,
lorsque cette place fut assiégée ; il parut
dans toutes les sorties. Les nombreux ser-
vices que Krieg avait rendus à la France
n'empêchèrent pas qu'il ne fût arrêté en
1793. On le transféra à Paris, où il lan-
guit dans les prisons pendant d3 mois.
Nommé ensuite chef d'une armée de la
Vendée , il y donna de nouvelles preuves
de ses talens et de sa valeur, et il ne la
quitta que pour venir occuper la place de
commandant en chef de Paris , laquelle il
remplit pendant 18 mois. Au bout de ce
temps , il demanda et obtint sa retraite.
Alors il se fixa à Bar-sur-Ornain, où il se
montra le soutien des pauvres, après
s'être montré le père des soldats. Il mou-
rut dans celte ville en 1800, ayant S4 ans
de service effectif , dans lequel il avait
reçu 33 blessures.
RROMAYEU ( Jean ) , né en 1576, à
Dobelen, en Misnie , fut ministre à Eisle-
ben, prédicateur de la duchesse douai-
rière de Saxe , et enfin surintendant à
Weimar , où il mourut en 16i5. On a de
lui : \Ilarmonia Evangelistarum ; \ His-
torice ecclesiasticœ Compendium ; \ une
Paraphrase estimée , sur Jérémie et sur
les Lamentations ; elle se trouve dans la
Bible de Weimar.
KRQMAYER ( Jérôme ), neveu du pré-
cédent, né à Zeitz en 1610 , mort en 1670,
à Leipsick, où il était professeur d'his-
toire, d'éloquence et de théologie, a donné
plusieurs ouvrages infectés des erreurs
de Luther, entre autres : | Theologia po-
sitivo-polemica ; \ Historia ecclesiastica ;
I Polymathia theologica, etc.
KROUST ( Jean-Marie ) , entra chez
les jésuites, fut professeur de théologie
plusieurs années à Strasbourg, puis con
fesseur de Mesdames de France , en par
ticulier de madame la dauphine , mère
des rois Louis XVI ^ Louis XVIII et Char
les X. Il travailla quelque temps au Jour-
nal de Trévoux. Il mourut à Brumpt en
Alsace, en 1770. On a de lui un ouvrage
en latin , en h vol. in-S", intitulé : Insli
Uitio clcricorum, Augsbourg, 1767. Ce
sont des méditations pour tous les jours de
l'année , très propres à former les prêtres
161 RIVU
à la sainteté de leur état , et au ministère
de la chaire. Il a encore donné un vol.
in-8°, contenant une Retraite de huit
jours , à l'usage des ecclésiastiques ; réim-
primée à Fribourg , en Brisgau , 1765 , à
Augsbourg, en 1792. On trouve dans ces
livres le langage onctueux de l'Ecriture
et des Pères.
* KRUDE!\ER ou KRUDNER (Julie ou
Valérie de WITTINGHOFF , baronne
de ) , femme d'un gentilhomme livonien,
qui fut ambassadeur de Russie à Madrid,
à Copenhague et à Berlin, et qui mourut
dans cette dernière ville en 1802 , se fit
la réputation d'illuminée ou d'enthou-
siaste. Née en 1766 à Riga en Courlaude ,
d'une famille noble et opulente de cette
contrée de l'empire russe , elle était fille
du baron de VTittinghoff , gouverneur de
cette ville, et arrière-petite-fille du célèbre
maréchal Munich. Son père la conduisit
à Paris àl'âge de neuf ans, et sa maison de-
vint le rendez-vous des plus célèbres phi-
losophes du jour, parmi lesquels on comp-
tait alors Diderot, d'Alembert, Heivé-
tius et Grimm. A l'âge do U ans, elle
était citée comme un modèle de beauté et
d'esprit : mais on remarquait déjà en elle
un caractère ardent et une imagination
exaltée, a Une physionomie ravissante ,
» dit un de ses biographes , un esprit fa-
» cile et léger , des traits mobiles qui ex -
» primaient toujours le sentiment et la
» pensée ; une taille moyenne et parfaite :
» des yeux bleus toujours sereins, tou-
» jours vifs, dont le regard pénétrant sem.
» blait vouloir, comme disait si bien Di-
» derot , traverser le passé ou l'avenir ;
» des cheveux cendrés retombant en bou-
» clés sur ses épaules ; quelque chose de
» neuf, de singulier, d'imprévu dans ses
» goûts et SCS mouvemeus : tels étaient les
» avantages qui disthiguaient la baronne
» Valérie de Krudcner. » Mariée au baron
de Krudener, elle le suivit dans différens
voyages , notamment à Venise où celui-ci
resta plusieurs années comme ambassa-
deur. Une passion fatale qu'elle inspira
au secrétaire de légation de son époux fit
alors beaucoup de bruit. Le malheureux
jeune homme , n'osant avouer l'état de
son cœur, ou n'espérant pas de retour,
quitta la maison de l'ambassadeur et se
retira dans les montagnes de la Suisse où il
mourut de consomption. Bl"** de Krudener
avait des mœurs légères , mais au fond
exemptes de blâme ; elle avait un amour-
propre assez vain poui' désirer de faire
des conquêtes et elle se plaisait mniie a
14.
KRU
162
KRU
en faire l'énutnération. De là une foule
d'aventures romanesques dont on trouve
les détails plus ou moins amplifiés dans
le roman publié par elle sous le litre de
Falérie ou Lettres de Gustave de Linar
à Ernest de G Paris, i805 ,5* édition
4803, 2 vol. in-12, ouvrage qui a eu de-
puis tme continuation. (Voyez, le tom, 30
des OEuvres du Prince de Ligne .) En 1791
clîe était mère de deux cnfans lorsque son
époux rompitavecelleparundivorce. Au
commencement de la révolution fran-
çaise, elle séjourna dans le midi de la
France, avec sa belle-fille Sophie de Kru-
dener, mariée depuis à un espagnol. Elle
voyagea ensuite en Allemagne, en Suisse,
en Italie , et elle était à Berlin en 1805 :
elle avait été admise àlinlimitéde la reine
de Prusse , et elle fut témoin de la mort
,de cette malheureuse princesse. Cet évé-
nement fit sur elle une forte impression, et
elle se jeta tout à coup dans l'enthousiasme
religieux le plus exagéré. Disciple du fa-
meux visionnaire allemand lung Stilling,
dont elle outrepassa bientôt le mysticisme,
elle commença ses excursions à Heidel-
berg en 1815 ; chassée du royaume de Wur-
temberg , elle eut le même sort dans le
duché de Bade. M™* de Krudener se pré-
sentait sous la forme d'une Madeleine pé-
nitente : elle se disait envoyée de Dieu,
pleurait sur les hommes, sur leurs er-
reurs , sur les siennes , et se croyait ap-
pelée à rétablir sur la terre le règne
du Christ. En 1814, elle suivit à Paris
l'empereur Alexandre qu'elle appelait
Voint du Seigneur , et qu'elle regardait
«:oro.me choisi d'en-haut pour être le régé-
nérateur du monde. Ce monarque assista
plusieurs fois à la célébration des mysti-
ques exercices de la moderne prêtresse.
M™' de Krudener prophétisait , et , il faut
le dire , parmi ses prophéties , il y en eut
quelques-unes qui s'accomplirent; par
exemple , la chute de Bonaparte , son
retour de l'Ile d'Elbe et les événemens
de Waterloo. Plusieurs grands person-
nages ont cru qu'elle exerçait sur Alexan-
dre une grande influence, et ils ont été
jusqu'à lui attribuer l'idée première de la
Sainte alliance. M"" de Krudener n'eut
d'autreappui que ses talens et son adresse.
La nouvelle prophétesse reprit ses prédi-
cations après avoir quitté Paris. Elle s'était
associé un ministre de Genève nommé
Empeytaz. On ne saurait déterminer
quelle espèce de secte ou de doctrine pou-
vait résulter des principes d'une dame
née dans l'église grecque schismatique ,
et de ceux d'un ministre de Calvin. Les
uns crurent que la secte qu'ils voulaient
établir était celle dite des piétistes ; d'au-
tres l'assimilèrent à celle desméthodistes,
des puritains^ etc., etc. ; mais il est prouvé
qu'elle ne ressemblait à aucune ; que tan-
tôt Yinspirée parlait de Dieu sans se sou-
venir de J.-C. et tantôt menaçait des châ-
timens du Ciel sans faire mention du Père
ni du Fils. Comme elle avait laissé dans
le pays de Bade de nombreux prosélytes,
elle demanda la permission d'y faire en-
core une mission : ne pouvant l'obtenir,
elle écrivit au ministre du grand-duc
une lettre qu'elle fit imprimer , datée du
17 février 1817, et où l'on remarquait,
entre autres, le passage suivant : « Je n'au-
» rai pas à me défendre là où je n'aurai
» pas à traverser le désert de la civilisa-
» lion , et à lutter contre des lois réprou-
» vées par le seul code que je reconnaisse,
» celui du Dieu vivant. » Dans une autre
lettre au même ministre elle s'exprime
de la sorte : « C'est au Seigneur à ordon-
» ner, et à la créature à servir, c'est lui qui
» expliquera pourquoi la voix d'une fai-
i> ble femme a retenti devant les peuples,
» a fait ployer le genou au nom de J.-C,
» arrêté le bras du scélérat, fait pleurer
» l'aride désespoir , demandé et obtenu
» de quoi nourrir des milliers et milliej's
i> d'affamés... Il fallait Une mère pour
» avoir soin des orphelins, et pour pleurer
» avec les mères... une femme élevée
» dans les demeures du luxe, pour dire
» aux pauvres qu'elle était plus heureuse
Dsur un banc de pierre, en les servant...;
» une femme simple et non aveuglée par
» le faux savoir et qui pût confondre les
«sages...; une femme courageuse qui,
D ayant tout possédé sur la terre , pût dire
» même aux rois que tout n'est rien ; qui
» détrônât les préjugés et les idoles des
X salons, en rougissant d'avoir voulu briller
» par quelques misérables talens... » On
conviendra aisément que malgré ce mé-
lange d'humilité et de vanité , un pareil
langage pouvait séduire des gens de bonne
foi et surtout des paysans , dont M'^' de'
Krudener s'attirait d'ailleurs la vénérai ion
par d'abondantes aumônes. En entrant
en Suisse , elle s'arrêta à Bàle , et logea à
l'auberge du Sauvage, où elle forma des
exercices spirituels. Ces exercices , com-
mencés d'abord dans la chambre de M""*
de Krudener, furent transportés dans la
grande salle de l'auberge, qui pouvait à
peine contenir les auditeurs , dont lé nom-
bre augmentait de jour en joar. Après
KRU
165
KRU
une longue oraison mentale , M. Ereipey-
ta» récitait une prière, suivie d'un dis-
cours que terminait une autre prière que
les assistans faisaient à genoux. Quand on
avait fini cet acte préliminaire de piété ,
quelques-uns obtenaient une audience
particulière de M'°' de Krudener, que l'on
apercevait souvent au fond de plusieurs
chambres sombres , à genoux , en habit
de prêtresse. Son œil pénétrant observait
ceux dont le recueillement et la crédulité
donneraient plus de pouvoir à son in-
fluence; elle en fit l'épreuve avec succès
sur plusieurs jeunes gens, notamment sur
de jeunes demoiselles , appartenant aux
familles les plus distinguées. Elles auraient
tout sacrifié pour M""^ de Krudener ; mais
les pères et mères ne partageaient pas cet
enthousiasme. Les exercices publics , et
surtout les conférences particulières , pa-
rurent suspects aux autorités , qui en dé-
fendirent la continuation. La prophétesse
et son associé , n'ayant pu établir leurs
missions aux environs de Bàle , se rendi-
rent dans le canton d' Arau , où ils formè-
rent un grand nombre de prosélytes. Les
paysans désertaient leurs campagnes et
venaient écouter les prédications ; à ceux-
ci se réunissaient une foule de mendians
et de vagabonds ; on remarquait aussi des
curieux ou des spéculateurs politiques,
qui venaient examiner quel parti ils pour-
raient tirer de l'enthousiasme qu'excitait
la sibylle russe. Mais tous ces rassemble-
mens inquiétèrent à la fin les gouverne-
mens suisses , et la prophétesse reçut
l'ordre de quitter le pays. M. Empeytaz,
qui commençait à craindre pour sa sûreté
personnelle, se sépara de madame de
Krudener : elle n'en continua pas moins
ses voyages mystiques. Quand elle était
expulsée d'un canton ^ elle passait dans
un autre , entraînant à sa suite plus de
trois cents personnes , la plupart couver-
tes de haillons. Elle faisait souvent des
lialtes , au milieu des bois , sur le haut des
montagnes , où , debout sur une pierre ,
elle catéchisait ses dévots et distribuait
des secours aux plus pauvres , sans que
ie froid le plus rigoureux , la neige , la
pluie, lui fissent interrompre ses prédica-
tions. De toutes parts on accourait pour
l'entendre , et les mendians demandaient
en route, où était la bonne dame qui don-
nait de V argent el apprenait à prier Dieu.
Elle occupa quelque temps une maison
près ds Lucerne , et l'on remarqua qu'elle
y recevait beaucoup de lettres qui n'arri-
vaient pas par la poste, mais par des mes-
sagers qui venaient souvent de pays tréâ
éloignés En peu de temps , elle dépensa
en Suisse plus de dix mille florins , et ,
avant de quitter ce pays , elle reçut des
lettres-de change pour toucher de grosses
sommes , qui devaient sans doute avoir la
même destination. Forcée à Schaffouse de
sortir de la ville , elle se rendit à pied à
Randegg, demanda l'hospitalité pour elle,
tandis que sa suite alla loger à l'auberge ;
mais , au milieu de la nuit , le bailli de
Rodolphell lui envoya l'ordre de partir le
lendemain avec tout son cortège. La nou-
velle de l'arrivée de madame de Krudener
s'était répandue en peu de temps- dans
tout le pays, et avant le jour , plusieurs
personnes étaient arrivées àBandegg, eu
voiture, à cheval, ou à pied, et toutes
demandèrent à voir et entendre la pro-
phétesse. Madame de Krudener, à peine
sortie de^son lit , prit son costume de pré-
tresse, enveloppa une baguette d'une
manière mystérieuse ; et , après avoir fait
mettre à genoux tous les siens et les nom-
breux étrangers, se promena au milieu
d'eux en agitant la baguette , et menaça
trois fois , du courroux du ciel , le bailli
et un monde corrompu et impénitent.
Parmi ses auditeurs se trouvaient quel-
ques juifs, attirés par la curiosité; elle
les recormut, leur reprocha leur ophiià-
treté et leur endurcissement. Après cet
anathème et cette remontrance , la pro-
cession se mit lentement en marche
vers Rodolphell, où elle arriva à dix heu-
res. Le bailli, étonné de cette audace, et
voyant tout ce monde qui était venu à la
suite de madame de Krudener , se tran-
sporta chez elle , et lui demanda où elle
voulait aller avec ce cortège. Une conver-
sation très vive s'établit entre eux ; le bailli
la termina en lui signifiant l'ordre de
partir. Madame de Krudener n'en fit au-
cun cas , et, le lendemain, toutes les au-
berges étaient encombrées des nouveaux
voyageurs qui étaient venus entendre la
sibylle : elle commença son sermon à
l'aube du jour, se plaignit en même temps
des persécutions qu'elle essuyait , de le.
dweté des coeurs^ des suggestions de
Sala7i^ dont ses persécuteurs étaient V or-
gane ; elle n'oublia pas de placer le bailli
parmi ces derniers. Forcée enfin de partii ,
elle fît donner deux écus neufs à l'admi-
nistrateur de la paroisse ( sa bourse était
épuisée dans ce moment ) : mais les pau-
vres, qui connaissaient par expérience
la générosité de la bonne dame., crurent
qu'elle avait donné cent louis, cl furent
&RU
164
RRU
ffor le point de saccager la maison de l'ad-
ministrateur. Elle erra encore dans di-
vers cantons , d'où elle fut également
expulsée. Contrainte de quitter Zurich,
elle se retourna vers la ville , et , éten-
dant les bras... « Je te maudis , dit-elle;
» malheur à toi , ville profane , où les en-
» fans eux-mêmes ont déjà des mines
» d'Holopherne... ! » C'était son usage de
maudire les lieux qu'elle était forcée de
quitter, elle secouait ensuite la poussière
de ses pieds, reprochait aux magistrats
qui l'expulsaient leur dureté envers Ven-
voyée du Seigneur; leur annonçait les
derniers malheurs , les menaçait du feu
du ciel , et de toutes les vengeances d'un
Dieu irrité. Ne pouvant plus trouver en
Suisse un seul pays qui voulût lui donner
asile , elle pénétra en France , et se pré-
senta à Colmar ; mais les autorités lui en
défendirent l'entrée. Madame de Krude-
ner parcourut encore quelques'pays , et
on la repoussa de toutes parts. Elle était
devenue un eimemi redoutable pour tous
les gouvernemens , et il est curieux de
voir tous les souverains se réunir contre
une faible femme, dont ils croyaient avoir
à craindre l'ascendant. En effet , dans les
proclamations imprimées qu'elle publiait
dans les divers pays où elle devait faire
ses prédications, tout en parlant d'amour
divin et de charité , elle paraissait exciter
les peuples à la révolte. Quelques-uns ont
cru que madame de Krudener était l'a-
gent du parti philosophique , dont le but
était de détruire , par les prédications de
la fausse prophétesse , la religion catholi-
que , et même la protestante , et d'y sub-
stituer un culte éphémère, qui bientôt
aurait conduit au déisme. Quant à nous ,
nous n'embrasserons ni cette opinion, ni
celle qui avait d'abord donné à ces prédi-
cations un but tout politique : et nous
nous bornerons à ne voir dans madame
de Krudener qu'une imagination exallée,
une enthousiaste qui travaillait pour son
propre compte , c'est-à-dire pour attirer
sur elle l'attention de l'Europe, et pour
jouir de la gloire de devenir un jour chef
d'un grand nombre de prosélytes. Quoi
qu'il en soit, restée seule , abandonnée
par ces mêmes prosélytes, elle trouva
une retraite à Sackingen, dans le grand-
duché de Bade, où elle était étroitement
surveillée. Forcée pour la troisième fois
de sortir de ce pays, madame de Krude-
ner retourna en Russie. Elle trouva un
instant de repos dans l'une des terres qui
lui restaient encore près de Riga. Ses
communications sympathiques avec les
Hernutes ou frères moraves, qui habitent
cette contrée l'y retinrent d'abord : elle
forma ensuite le projet d'aller fonder en
Crimée un établissement chrétien de cor-
rection, pour les criminels et les pécheurs.
Elle mourut à Karason-Bazar le 25 dé-
cembre 1824. Outre son roman de Fa-
lérie^ M™' de Krudener a publié une bro-
chure intitulée le camp des vertus j Paris
et Lyon , 1815 , in-8°. Son adepte princi-
pal, M. Empeylaz , est devenu le chef de
l'association dirigée en Suisse sous le nom
de momiers : un autre de ses disciples ,
M. Liedner, de Leipsick, a publié un
ouvrage iniiiu\é : Macbenac ^ en faveur
des opinions de M"'' de Krudener. Peu
de temps auparavant, le professeur Kriig
avait fait paraître ses Entretiens avec M^'^
de Krudener^ Leipsick, 1818. Enfin M.
Marignié a publié en 1817 , une brochure
in-8°, sous ce titre : Sur M^^de Krudener.
en réponse à l'article sur cette dame ^ et
contre M. de Bonald. inséré dans le Jour-
nal de Paris jN° du ?H) mai 1817. On trouve
une lettre de JE/""' de Krudener à Ber-
nardin de Saint-Pierre, parmi celles
qu'on a jointes à l'édition des Œuvres
de cet écrivain, publiées en 182i, par
M. Aimé-Martin.
KRUGER ( Jean-Cbrêtiex), né à Ber-
lin, de parens pauvres, mort à Ham-
bourg, en 1750, âgé de 28 ans, a donné
une Traduction allemande du Théâtre
de Marivaux, et un recueil A& Poésies^
imprimé à Leipsick : les ouvrages qu'il
contient sont ses Poésies diverses^ ses
Prologues et surtout ses Comédies^ qui
sont très peu de chose.
* KRUNITZ (Jean-Georges ), né à Ber-
lin en 1728, étudia à Gottingue, Halle et
Francfort-sur-l'Oder, se fit d'abord rece-
voir docteur en médecine , dans cette der-
nière ville et commença à professer cet
art à Francfort-sur-lOder ; mais ayant eu
peu de succès , il alla s'établir à Berlin,
où il donna successivement un grand
nombre de traductions et de compilations
écrites en général avec une prolixité fati-
gante. On assure qu'il ne donnait pas
moins de trois feuilles à l'impression par
jour. Une maladie dont il fut affecté sur
la fin de sa vie ne mit aucun obstacle à sa
fécondité. Le style de ses écrits est né-
gligé ; mais l'auteur a beaucoup d'érudi-
tion. La plus considérable de ses produc-
tions est une Encyclopédie économico-
technologique , qui ne devait être d'abord
I qu'une traduction de rEnrycl"pédic d'Y-
KUL
165
KUi\
verdon ; mais Krunitz trouvant trop de
lacunes dans cet ouvrage, résolut de mar-
cher seul dans cette grande entreprise , et
publia, jusqu'à sa mort, 72 gros vol. in-
8°. Cette collection a été continuée par
les deux frères F.-J. et H.-G. Flœrke.
Elle diffère de l'Encyclopédie française ,
en ce que Krunitz n'a visé qu'à l'utile;
mais son ouvrage n'est qu'un magasin in-
forme , rempli de matériaux bruts , en-
tassés sans mesure et sans choix. On y
trouve cependant de précieux renseigne-
mens, qui attestent l'érudition de l'au-
teur ; aussi a-t-il obtenu une 2*^ édition en
1786 et années suivantes. On en a publié
un abrégé j qui est encore un recueil très
volumineux : plusieurs articles fort éten-
dus ont été imprimés à part , le curé de
Campagne j les écoles rurales, etc. Il a
traduit de l'anglais l'Histoire de l'électri-
cité, par Priestley, 1772; | V Histoire na-
turelle desCoralines par EUis, 1767, in-4''.
KUHLMANN ( Quirinus ) , fameux vi-
sionnaire, était né en 1651 à Breslau, en
Silésie, avec un esprit sage et pénétrant ;
une maladie dérangea ses organes à 18
ans ; il se crut inspiré de Dieu , et s'ima-
gina être dans un globe de lumière qui
ne le quittait jamais; il ne voulut recevoir
aucune leçon , parce que , disait-il , le
Saint-Esprit était son maître. Cet écer-
velé , qu'il aurait fallu enfermer, fut brûlé
l'an 1689 , à Moscou, pour quelques pré-
dications séditieuses. Il avait parcouru
auparavant l'Angleterre, la France, l'Al-
lemagne , l'Orient, et n'avait pas fait beau-
coup de prosélytes. On a de ce visionnaire
plusieurs ouvrages pleins de rêveries les
plus absurdes. Il en préparait un qu'il
devait intituler : La clé de l'éternité et
du te77ips; c'était la suite d'un ouvrage
qu'il avait publié en 1674, à Leyde, sous
le titre de Prodromus quinquennii mira-
bilis. Voyez Adelung, Histoire de la folie
humaine , tom. 5 p. 5-90.
KUlli\ ( JoACiuM ) , en latin Kuhnius,
professeur de grec et d'hébreu dans l'uni-
versité de Strasbourg , né à Grispsvrald ,
en 1647 , mort en 1693 , laissa des Notes
sur Polluxj Pausanias , Elien . Diogène-
Laërce . et d'autres écrits dans lesquels
on remarque un grand fonds d'érudition.
Le plus conim est intitulé : Quœstiones
philosophicœ ex sacris veteris etnovi Test,
aliisque scriptoribus, Strasbourg, 1698,
3 tom. in-4".
KULCZIiVSKI (Ignace), abbé deGrod-
no , né à Wlodimir en Pologne, l'an 1707,
entra de bonne heure dans l'ordre de St—
Basile, et fut envoyé à Rome en qualité
de procureur-général de cet ordre. Il
mourut dans son abbaye de Grodno, en
1747, après s'être acquis une grande répu-
tation par son Spécimen Ecclesiœ ruthe-
nicce. On a encore de lui, en manuscrit^
Opus de vitis sanctorum ordinis Basilii
magni, 2 vol. in-fol.
KULPISIUS ( Jean-Georges ), profes-
seur en droità Gieslein, puis à Strasbourg,
assista au congrès de Ryswick en qualité
d'envoyé du duc de Wirteraberg , et mou-
rut en 1698. Le plus estimé de ses ouvra-
ges est un Commentaire, in-4", sur Gro-
tius, sous le titre de Collegium Grotianum,
qui est très estimé.
RUNADUS ( André ) , théologien lu-
thérien, né à Dobelen en Misnie , l'an 1602,
fut professeur de théologie à Wiltenberg
et ministre général à Grimma. Il mourut
en 1662. On a de lui : ] une Explication
de l'Epttre aux Galates; \ \m Abrégé des
lieux communs de théologie ; | des Dis-
sertations sur la tentation au désert, sur
la confession de saint Pierre...., sur ceux
qui ressuscitèrent au temps de la passion,
in-4°, etc.
KUNCKEL de LOEWENSTERN (Jean),
né à Hutlen , dans le duché de Sleswick ,
en 1650, fut chimiste de l'électeur de Saxe,
de celui de Brandebourg, et de Charles
XI , roi de Suède. Ce monarque récom-
pensa son mérite par des lettres de no-
blesse , et par le titre de conseiller métal-
lique ou conseiller des mines. Si l'on en
croit Beërbaave, il aurait peut-être sur-
passé Boyie , s'il eût été moins prévenu
en faveur de l'alchimie. Kunckel rriourut
le 20 mars , en 1702 , après avoir fait plu-
sieurs découvertes , entre autres celle du
phosphore d'urine. Parmi le grand nombre
d'ouvrages qu'il a publiés en allemand ,
et dont quelques-uns ont été traduits en
latin, on distingue ses Observationes chi-
micce , Londres , 1678, in-12; et son Ari
de la verrerie, traduit en français par le
baron d'Holbach , et imprimé à Paris , en
1752 , in-4". Ils sont écrits d'un style fort
bas et avec peu d'ordre. Les chimistes
qui l'avaient précédé avaient cultivé la
chimie pour augmenter les lumières de
la médecine ; Kunckel en fit usage pour
perfectionner les arts. C'était un artiste
qui avait peu de théorie , mais qui por-
tait dans la pratique une sagacité et
une intelligence qui lui tenait lieu de
savoir. Il s'attacha surtout à suivre le tra-
vail de Neri , sur la vitrification ; et ses
découvertes donnèrent beaucoup d'éten-
KUS
166
KUT
due à celle partie imporlanlc de la chi-
mie. Une de ses expériences paraîl dé-
monlrer, conlre Buffon, que l'or n'esl
pas viirifiable; Kunckel en a tenu dans un
feu de verrerie pendant plus d'un mois ,
sans qu'il ait diminué d'un grain, ni reçu
la moindre altération.
KUIVRATH ou KHUENRATH (Henri),
chimiste delà secte de Paracelse , et aussi
visionnaire que son maître, né en 15C0
dans la Saxe, fit beaucoup parler de lui au
commencement du 17' siècle, et fut pro-
fesseur en médecine àLeipsick.sa patrie.
Mollerus prétend que Kunrath était un
adepte qui possédait la pierre philoso-
phale. Il nous apprend lui-même « qu'il
» avait obtenu de Dieu le don de discer-
» ner le bien et le mal dans la chimie. »
Il mourut à Dresde , en 1603. On a de lui
plusieurs ouvrages d'une obscurité im-
pénélrable, qui ne servent qu'à montrer
le fanatisme ou la charlatanerie de leur
auteur. Les curieux recherchent son ^m-
phitheatrum sapientiœ^ cetemœ^ chris-
tiano - cabalisticum , divino - magicum ^
Hanau , 1619, in- fol. On y mit un nouveau
titre en 16o3. Ce livre fut censuré par la
faculté de théologie de Paris.
RU\Z de Kauffungen, gentilhomme
saxon au 15' siècle, après avoir fidèlement
servi l'électeur de Saxe, Frédéric le Doux,
reçut quelque mécontentement de ce
prince, et pour s'en venger, lui enleva ses
deux fils Ernest et Albert. Ce dernier s'é-
tanl fait connaître à un charbonnier, dans
une vaste forêt , celui-ci, aidé de ses com-
pagnons, s'empara de Kunz , qui fut dé-
capité. La postérité du charbonnier reçoit
encore aujourd'hui deux muids de seigle
par an, à titre de récompense.
KURT SPRENGEL. Koy. SPRENGEL.
KUSTER ( LuDOLPHE ) , philologue et
commentateur, né à Blomberg , dans le
comté de Lippe , en 1670 , du premier
magistrat de cette ville , se distingua de
bonne heure par l'étendue de sa mémoire.
Il fut d'abord précepteur des enfans du
comte de Swerin , premier ministre du
roi de Prusse; il voyagea ensuite pendant
dix années : de retour à Berlin, un passe-
droit qui lui fut fait l'engagea à se rendre
à Paris, où l'abbé Bignon , son ami , l'in-
vitait à venir. Les réflexions, qu'il avait
faites sur la nécessité de reconnaître une
Eglise dont l'autorité infaillible mît fin
aux controverses , l'engagèrent à se faire
catholique. La cérémonie de son abjura-
tion se fit le 25 juillet 1713. L'abbé Bignon
le présenta à Louis XIV, qui le gratifia
d'une pension de 2,000 liv. L'académie
des belles-lettres lui ouvrit ses portes , en
qualité d'associé surnuméraire : distinc-
tion qu'elle n'avait faite à personne avant
lui. Ce savant mourut peu de temps après,
en 1716, à kl ans. Ses ouvrages les plus
estimés sont : | une Edition de Suidas, en
grec et en latin , Cambridge , 1705 , for-
mant 3 vol. in-fol. Cet ouvrage deman-
dait une prodigieuse lecture : l'auteur
n'épargna rien pour le rendre parfait en
son genre. C'est aussi la meilleure édition
que nous ayons du lexicographe grec.
L'université de Cambridge récompensa
l'éditeur, en le mettant au nombre de ses
docteurs. | Bibliotheca novorum libro-
rum, 5 vol. in-S". Il commença en avril
1697, et finit avec l'année 1699. L'auteur
s'était associé, pour ce travail, Henri Sike.
Historia critica Homeri , 1696, in-8°, cu-
rieuse ; I Jamblicus de vita Pythagorœ ,
Amsterdam, en 1707, in-4.° ; | Novum Tes-
tamentum ^ en grec , 1710 , Amsterdam ,
in-fol. , avec les variantes de Mill , aug-
mentées et rangées dans un ordre métho-
dique; I une belle Edition d'Aristophane,
en grec et en latin , 1710 , in-fol. Voyez
ARISTOPHANE.
* RUTTi\ER ( Charles Gottlob ) , sa-
vant voyageur saxon , né le 18 février
1755, à Wiedemar , près de Delitsch en
Saxe. Après avoir fait de bonnes études à
Leipsick, il embrassa la profession d'insti-
tuteur, qu'il exerça pendant 8 ans à Bàle.
Il fut ensuite chargé de l'éducation d'un
lord irlandais avec lequel il fit plusieurs
voyages dans les principales contrées de
l'Europe : plus tard il en entreprit de
nouveaux, avec plusieurs jeunes anglais ,
qui voulaient s'instruire dans des courses
scientifiques. Il mourut dans la retraite
à Leipsick , le 14 février 1803. On lui doit
divers voyages, en allemand , qui renfer-
ment des renseignemens positifs. | Lettres
sur l'Irlande , Leipsick , 1783 ; | Lettres
d'un saxon^ écrites de Suisse^ ibid., 1783 ,
3 vol. I Voyage e7i Allemagne, en Dane-
marck . en Suède, en Nonvége. et dans une
partie de l'Italie. 1801 et 180't; | Des Ob-
servations surl'yingleterre,, les Pays-Bas
et la France ; | Des Extraits et des Mé^
moires insérés dans les journaux litté-
raires d'Allemagne.
167
LAB
LAB
Fj-IAR. Foyez LAER.
LABADIE (Jean), fanatique du iT
siècle, fils d'un soldat de la citadelle de
Bourg, en Guienne, naquit en i610. Les
jésuites de Bordeaux, trompés par sa piété
apparente , et charmés de son esprit, le
reçurent dans la société, et il y resta
quinze ans. Quoique dès lors son esprit
donnât dans les rêveries de la plus folle
mysticité , il sut si bien se déguiser que ,
lorsqu'il voulut quitter la société, les su-
périeurs et les inférieurs mirent tout en
usage pour le retenir. Rendu au siècle, en
1659, il parcourut, en prêchant, plusieurs
villes de la Guierme, prêcha aussi à Paris,
et fut employé dans le diocèse d'Amiens,
où M. de Cauraartin , alors évéque de
cette ville, lui donna une prébende dans
l'église collégiale de Saint-Nicolas. Les
succès qu'il obtint dans la chaire enflèrent
son orgueil, et il «e persuada qu'il était
un nouveau Jean-Baptiste, envoyé au
monde pour annoncer un second Messie.
On le croyait un saint ; mais un commerce
criminel avec une dévote , et d'autres
liaisons plus que suspectes , découvrirent
en lui un scélérat hypocrite. L'évêque
d'Amiens, Caumartin , allait le faire arrê-
ter , lorsqu'il prit la fuite. Il se sauva à
Paris , et se cacha quelque temps chez
MM. de Port-Royal. Il demeura ensuite à
Bazas ; il passa de là à Toulouse , dont il
trompa l'archevêque, qui lui confia la di-
rection d'un couvent de religieuses ; mais
bientôt celui-ci, informé de ses désordres,
dispersâtes religieuses, poursuivit le cor-
rupteur, qui alla se cacher dans un ermi-
tage de carmes, près de Bazas, s'y fit ap-
peler Jean de J.-C. , parla en prophète ,
et y sema son enthousiasme et ses détes-
tables pratiques. Contraint de s'enfuir , il
se fit calviniste, en 1650, et exerça le mi-
nistère pendant 8 ans. « Après avoir été
3 fort estimé (dit M. Collet, Vie de saint
» Vincent de Paul^ 1. 1", pag. 536) de
» l'abbé de Saint-Cyran , et fort zélé pour
» les sentimens de Port-Royal, il se fit
» huguenot à Monlauban, et pour justi-
» fier son apostasie , il publia im écrit , où
» il prouva que du jansénisme dont il
» avait fait profession, au calvinisme qu'il
» venait d'embrasser , il n'y avait qu'un
» pas à faire. » Labadie passa à Genève,
d'où il fut encore expulsé, et de là à Mid»
delbourg , où il épousa, dit-on , la célèbre
Schurman , si habile dans les langues sa-
vantes , et qui attira à la secte des laba-
distes la princesse palatine Elizabeth.
Après diverses courses et aventures en
Allemagne et en Hollande, il mourut
d'une colique violente à Altona , dans le
Holstein , en 1674 , âgé de 64 ans. Il avait
été déposé , peu de temps auparavant ,
dans le synode de Dordrecht. Les ouvra-
ges de ce fanatique sont en grand nombre.
Voyez-en la liste aux tom. 18 et 20 des
Mémoires de Nicéron ^ et au tom. 3 de la
Cimbria Utterata. Ils sont tombés dans
l'oubli; il les intitulait singulièrement :
I Le Hérault du çr and roi Jésns, Amster-
dam, 1667, in-12 ; | Le véritable Exorcisme^
ou runique moyen de chasser le Diable
du monde chrétien , Amsterdam , 1667 ,
in-12; | Le Chant Royal du roi Jésus-
Christ. Amsterdam, 1670, in-12; | Les
saintes Décades. Amsterdam, 1671, in-8°;
I L'Empire du Saint-Esprit . Amstei'dam,
1671, in-12; | Traité du soi, ou le renon-
cement à soi-même , etc. , etc. Les disci-
ples de ce dévot libertin s'appelèrent la-
badistes; on assure qu'il y en avait encore
il y a peu de temps dans le pays de Clè-
ves ; mais il est incertain s'il s'en trouve
encore aujourd'hui. « Cette secte , dit un
» auteur moderne, n'avait fait que joindre
» quelques principes des anabaptistes à
» ceux des calvinistes , et la prétendue
» spiritualité dont elle faisait profession
I) était la même que celle des piétistes et
» des hernutes. Le langage de la piété , si
» énergique et si touchant dans les prin-
» cipes de l'Eglise catholique n'a plus de
» sens , et parait absurde , lorsqu'il est
» transplanté chez les sectes hérétiques ; il
B ressemble aux arbustes qui ne peuvent
» prospérer dans ime terre étrangère. »
Voyez BARRAL, KEMPIS, PASCAL. »0n
a publié une vie de Jean Labadie, la Haye^
1670, in-12.
LABAN , fils de Bathuel et petit-fils de
Nachor , demeurait à Haran, en Mésopo-
tamie. Il fut père de Lia et de Rachel,
qu'il donna l'une et l'autre en mariage à
Jacob, à condition qu'il le servirait pen-
dant quatorze ans. Comme Laban vit que
ses biens fructifiaient sous les mains dç
LAB 168
Jacob, il voulut le garder encore plus
long-temps par avarice ; mais Jacob quitta
son beau-père sans lui rien dire. Celui-ci
courut après lui durant sept jours, dans
le dessein de le maltraiter, et de ramener
ensuite ses biens , ses fils et ses filles.
Mais Dieu lui apparut en songe, et lui dé-
fendit de faire aucun mal à Jacob. L'ayant
atteint sur la montagne de Galaad, ils of-
frirent ensemble des sacrifices , et se ré-
concilièrent. Laban redemanda seulement
à son gendre les idoles qu'il l'accusa de
lui avoir dérobées. Jacob, qui n'avait au-
cune connaissance de ce vol , lui permit
de fouiller tout son bagage. Rachel assise
dessus s'excusa de se lever, feignant d'être
incommodée , pour ne pas restituer à son
père un objet de superstition et de faux
culte. Ils se séparèrent contens les uns
des autres, l'an 1739 avant J.-C. On croit
que Laban s'attacha dans la suite exclu-
sivement à l'adoration du vrai Dieu , à
l'exemple et par les exhortations de son
gendre et de ses filles.
LABARRE. Voyez BARRE (La).
• LABARTUË (Pierre), né le 9 juin
1760 à Dax, d'une famille noble, qui avait
fondé à Bordeaux un établissement com-
mercial, fit ses études dans l'université
de cette ville , et embrassa la carrière du
barreau qu'il abandonna bientôt pour en-
trer dans l'administration des colonies ,
en qualité de secrétaire de l'intendant-
général; il devint en 1794 chef du bureau
des colonies orientales et des côtes d'A-
frique, et il occupa cette place jusqu'en
1808. Elle fut pour lui une occasion de
recueillir de précieux matériaux dont il a
composé les ouvrages suivans : ] Essai
sur l'étude de la législation de la marine^
1796, brochure in-8°; | annales mari-
times et coloniales (an 7), 1799, in-S";
1 Voyage au Sénégal pendant les années
1784-83, d'après les mémoires de Laf aille,
ancien officier de marine, Paris (an 10),
1802, in-S", traduit en allemand, Weimar,
1802, in-8°; | Voyage à la côte de Guinée,
ou Description des côtes d'Afrique de-
puis le cap Tagrin jusqu'au cap de Lopès-
Gonzalès (an 11), 1803, in-8°, traduit en
allemand par J. Ad. Bergk, Leipsick,
1803, in-8°; | Synonymes anglais, 1803,
2 vol. in-S" ; | Harmonies maritimes et
coloniales, contenant un précis des éta-
blissemens français en Amérique, en
Afrique et en Asie, Paris, 1813, in-8°;
( Intérêts de la France dans l'Inde, 1816,
brochure in-8°. On trouvera le détail de
ses autres ouvrages dans Idi Bibliographie
LAB
de la France, année 1824, page 566. Ce
laborieux écrivain qui avait pris sa re-
traite en 1808, parce que le travail du ca-
binet diminuait sensiblement sa vue , est
mort le 6 juin 1824. M. Allut a donné une
Notice sur la vie et les ouvrages de Lor
harthe . dans les Annales maritimes et
coloniales, rédigées par M. Bajot (cahiers
de juillet et d'août 1824 , p. 162-64 ).
LABAT (Jean-Baptiste), dominicain
parisien, né en 1663, fut d'abord profes-
seur de philosophie à Nancy, puis il fut
envoyé en Amérique l'an 1693. Il y gou-
verna sagement la cure de Macouba , et
visita comme supérieur des missions de
son ordre toute la chaîne des Antilles
française , anglaise et hollandaise , depuis
la Grenade jusqu'à Sauit-Domingue. Les
Anglais étant venus en 1703 attaquer la
Guadeloupe où il se trouvait, le père La-
bat donna ses preuves d'un grand cou-
rage , et contribua à la défense de la co-
lonie par ses conseils éclairés. Etant re-
venu en France par l'Espagne , en 1705
et 1706, il se rendit à Rome en 1709 pour
y veiller aux intérêts de la mission des
Antilles. Il revint d'Italie à Paris en 1716,
et mourut dans cette ville le 6 janvier
1738 , à 73 ans , dans le couvent de son
ordre , de la rue Saint-Honoré. On a de
lui : I Nouveau Voyage aux iles de l'A-
mérique, contenant l'Histoire naturelle
de ce pays, l'origine , les mœurs , la reli-
gion et le gouvernement des habitons an-
ciens et modernes ; les guerres et les évé-
nemens singuliers qui y sont arrivés pen-
dant le long séjour que l'auteur y a fait .
le commerce, les manufacture s qui y sont
établies, et le moyen de les augmenter,
avec une description exacte et curieuse
de toutes ces iles, ornée défigures, Paris,
1722, 6 vol. in-12; la Haye, 1724, 6 vol.
in-12 , ou 1758 2 vol. in-4° ; Paris , 1742 ,
8 vol. in-12. « Ce livre agréable et instruc-
» tif est écrit (dit l'abbé Fontaines) avec
» une liberté qui réjouit le lecteur. On y
» trouve des choses utiles, semées de traits
» historiques assez plaisans. Ce n'est peut-
B être pas un bon livre de voyage , mais
» c'est un bon livre de colonies. Tout ce
» qui concerne les nôtres y est traité avec
» étendue. On y souhaiterait seulement
» un peu plus d'exactitude dans certains
• endroits. » On a critiqué la partie bo-
tanique. Il a été traduit en allemand par
CF. C. Schad , avec le voyage de La-
borde aux iles Caraïbes, Nuremberg,
1783-87, 6 vol. in-8'', avec fig. | Voyages
en Espagne et en Italie , Paris, 1730, 8
LAB
169
LAB
vol. in-12, fig. écrits avec autant de gaieté
que le précédent. Ses plaisanteries cepen-
dant ne sont pas toujours de bon aloi, il
prend quelquefois un ton satirique qui
déroge à sa sagesse et à sa circonspection
ordinaire. Ils ont été réimprimés à Ams-
terdam; 1731, 8 vol. in-i2, fig., et traduits
en allemand par C. F. Troltsch, Francfort,
1738-61, 8 volumes. | Nouvelle relation de
l'Afrique occidentale» Paris , 1728, 5 vol.
ih-12 , fig. > composée sur les Mémoires
qu'on lui avait fournis ( de Brue ) et par
conséquent moins certaine que la Relation
de son voyage en Amérique ; | Voyage du
chevalier Desmarchais en Guinée» îles
voisines, et à Cayenne, avec des cartes et
des figures, Paris, 1730, k vol. in-12. On
y donne une idée très étendue du com-
merce de ce pays. | Relation historique
de VEthiopie occidentale» 1732, S vol,
in-12. Cette Relation traduite de l'italien
du capucin Cavazzi, est augmentée de
plusieurs relations portugaises des meil-
leurs auteurs, et enrichie de notes, de
cartes géographiques et de figures. | Mé-
moires du chevalier d^Arvieux » envoyé
du roi de France à la Porte»Veins, 1735, 6
vol. in-12. Le père Labat a recuelli et mis
en ordre les Mémoires de ce voyageur sur
l'Asie, la Palestine, l'Egypte, la Barbarie.
A peine ces Mémoires avaient-ils vu le
jour, qu'il en parut une critique, par
M. Pétis de la Croix , sous le nom d'un
secrétaire de l'ambassadeur Méhémet-Ef-
fendi : cette critique est estimée. Le style
de tous les ouvrages du père Labat est en
général assez coulant, mais un peu diffus.
On peut le considérer comme un des voya-
geurs les plus dignes de la confiance du
lecteur.
* LABAT (Pierre-Daniel), religieux
bénédictin de la congrégation de Saint-
Maur , né en 172S à Saint-Sever, en Gas-
cogne, fit profession dans l'ordre de Saint-
Benott , au monastère de la Daurade à
Toulouse , en 1742. Prieur de la Daurade
en 1768, il se distingua par beaucoup de
talent dans les conférences ecclésiasti-
ques ordonnées dans ce diocèse par M. de
Brienne , alors archevêque, et qui eurent
lieu en 1769 à Marmoutier ; mais un écrit
sur la Grâce» de 24 pages in-4*, où l'on
reconnut quelques erreurs déjà combat-
tues, et réfutées depuis près d'un siècle ,
fit interrompre ces conférences. En 1770,
D. Coniac ayant proposé à Labat de venir
se joindre à lui au monastère des Blancs-
Manteaux de Paris pour y travailler à la
Collection des conciles de France» celui-
7.
ci l'accepta , vint se fixer dans la capitale,
et se vit bientôt chargé seul de conduire
l'ouvrage des conciles. Les temps étalent
peu favorables ; mais, au moyen de quel-
ques secours du gouvernement, et de quel-
ques souscriptions , le premier volume
parut en 1789. La moitié du second était
déjà imprimée quand la révolution dé-
pouilla le clergé de ses biens, et força La-
bat à abandonner son entreprise. Peu
d'exemplaires du premier volume ont été
mis en circulation, et le travail du savant
religieux a été presque perdu. Pendant la
révolution , toujours fidèle à ses devoirs ,
dom Labat vécut tranquille et ignoré à
Saint-Denis , jusqu'à l'époque plus calma
où il put, quoique fort âgé, se livrer h
l'exercice du ministère. Il mourut le 10
avril 1803, regardé comme un savant
pieux et estimable , mais qui n'avait pas
toujours été exempt d'un certain esprit de
parti. Dom Labat fut aussi d'un grand se-
cours à dom Clémencet pour l'édition des
œuvres de saint Grégoire de Nazianze ,
dont il n'a paru qu'un volume. Il publia
en 178S V Histoire de l'dbbayé de Saint-
Polycarpe » in-12, et aida l'abbé Rastignac
dans ses ouvrages contre la constitution
civile du clergé. Son éloge historique a
été publié en 1803, sous le voile de l'ano-
nyme, par dom Brial.
LABAUME. Voyez BAUME ( la ).
LABBE ( Philippe), jésuite, né à Bour-
ges en 1607 , professa les humanités , la
philosophie et la théologie avec beaucoup
de réputation. Il mourut à Paris le 25
mars 1667 , dans sa soixantième année ,
avec la réputation d'un savant profond
et d'un homme doux et poli. Le père
Commire lui fit cette épitaphe :
Labbeus hic titus est : vitam , moresque requirlt ?
Vita libroj illi scribere , morsque fuit.
O nim'tum felix! qui patrura antiqua retractans
Concilia, accessit coaciliit Saper&m.
Il avait une mémoire prodigieuse , une
érudition fort variée , et une ardeur infa-
tigable pour le travail. Toutes les années
de sa vie furent marquées par des ou-
vrages , ou plutôt par des recueils de ce
qu'il avait ramassé dans les livres des
autres, ou de ce qu'il avait déterré dans
les bibliothèques. La liste qu'on en a
publiée contient 64 articles. Voyez le
tome 25 de» Mémoires de Nicéron. Ses
principales compilations sont : J De By^
zantinœ historiée scriptoribus» 1648 , in-
fol. C'est une notice et un catalogue des
écrivains de l'histoire byzantine par ordre
chronologique. | Nova bibliotheca manu."
13
LAB
170
LAB
scriptorum, 1657 , 2 vol. in-fol. : compi-
lalionde plusieurs morceaux qui n'avaienl
pas encore été imprimés ; j Bibliotheca
bibliothecarum. 1664,1672 et 1686,în-fol.,
et Genève, 1G86, in-i**, avec la Biblioth.
nummaria j et ua yïuctuanutn ^imprimé
en 1703 ; | Concordia chronolo(/icaA670,
5 vol. in-fol. Les i premiers volumes de
cet ouvrage , fort embrouillé , peu utile ,
mais bien imprimé, sont du père Labbe,
et le 5' est du père Briet. Cependant il y
a des choses qu'on chercherait inutile-
ment ailleurs : telle est VJriadne chro-
nologicaj qui est au premier volume. Cet
ouvrage ne s'étant pas vendu d'abord ,
Cramoisi, séduit par l'esprit d'intérêt, en
envoya inconsidérément une partie à la
beurrière : c'est ce qui le rend rare au-
jourd'hui. I Le Chronologiste français .
6 vol. in-12 ^ 1666, assez exact , mais écrit
avec peu d'agrément ; | Abrégé royal de
V alliance chronologique de l'histoire sa-
crée et profane j avec le lignage d'Outre-
mer, 2 vol. in-i", 1651. Cet Abrégé royal
est fort confus , mais on y trouve des
extraits et des pièces qu'on ne pourrait
découvrir ailleurs. | Concoi'dia sacra et
profana chronologiœ, ab orbe condito ad
annum Christi 1658, in-12 : | Méthode
aisée pour apprendre la chronique sacrée
et profane j m-l2 , en vers artificiels si
mal construits, que cette méthode aisée
deviendrait fort difficile pour un homme
qui aurait du goût. En général , les vers
techniques sont un mauvais moyen d'ap-
prendre ; on doit les employer tout au
plus dans l'enseignement des langues : le
mot, le genre, le régime, etc., faisant tout
l'objet de la leçon, elle peut être tout en-
tière renfermée dans un vers, mais il n'en
est pas ainsi des traits historiques. Celui
qui ne sait que les noms et les dates ne
sait rien , et ces dates s'apprennent
mieux dans la suite et l'ensemble de
l'histoire, que dans ces espèces de grimoi-
res rimes. | Plusieurs Écrits sur l'his-
toire de France A^ plupart ensevelis dans
la poussière : La Clef d'or de l'histoire
de France... Les Mélanges curieux... Les
Eloges historiques ^ etc.; | Pharus Gal-
lice antiquœ^ 1668, in-12. L'auteur y relève
quelques erreurs de Sanson ; mais celui-
ci répliqua vivement et attaqua le père
Labbe à son tour. | Plusieurs autres ou-
Trages sur la Géographie ; \ beaucoup
d'écrits sur la grammaire et la poésie
grecque , entre autres un excellent P,e-
cueil de racines grecques , et YEtymolo-
çie de plusieurs mots français^ 1661, in-
12, contre le Jardin des racines grecques
de messieurs de Port-Royal. Lancelot ,
dans une deuxième édition , défendit
vigoureusement l'ouvrage attaqué. | Bi-
bliotheca antijanscniana. in-ili.° : c'est xin
catalogue des écrits composés contra
Jansénius et ses défenseurs ; | Notitia di-
gnitatum omnium imperii romani, 1631 r
in-12, ouvrage utile ; j De scriptoribus ec"
clesiasticis dissertationes . en 2 vol. in-8°.
C'est une petite bibliolhèque des écri-
vains ecclésiastiques , utile mais trop-
abrégée ; on y trouve une bonne disser-
tation contre la papesse Jeanne. ( Voyez
BENOIT III. ) î Conciliorum collectio
maximaj 17 vol. in-fol., 1672, avec des
notes. Les huit premiers volumes de cette
collection sont du père Labbe , les autres
sont du père Cossart son confrère , plus
judicieux et meilleur critique que lui. On
y a joint un 18* volume. C'est le plus rare.
Il est sous le titre de Jpparatus aller,
parce que le 17"^ tome est aussi un appa-
rat : cependant ce 18* volume n'est autre-
chose que le Traité des conciles de Jaco-
balius. Cette collection est recherchée,
quoiqu'elle renferme un assez grand nom-
bre de fautes. Le jésuite Hardouin s'était
chargé d'en donner une nouvelle ; mais
on peut voir dans son article comment il
l'exécuta. Nicolas Coleti a donné une Col-
lection des conciles plus ample , Venise ,
1728 et t732 , 25 vol. in-fol., et Jean-Do-
minique Mansi a donné des Supplémcns
très estimés de cette édition , Lucques ,
1748 ; I une édition des Annales de Mi-
chel Glicas, en grec et en latin , in-fol. ,
et une de V Institution du roi chrétien par
Jonas, évêque d'Orléans ; | enfin ce sa-
vant et infatigable compilateur publia,
en 1659, un Tableau des jésuites illustres
dans la république des lettres j, suivant
l'ordre chronologique de leur mort :
ouvrage sec, et qui ne peut avoir d'uti-
lité que par rapport aux dates. En 1663 ,
il mit encore au jour une Bibliographie
des ouvrages que les savans de la société
avaient publiés en France , dans le cou-
rant de 1661, et au commencement de
1662.
LABBE ( Marin ) , né au village de
Luc, près Caen , fut destiné , en 1678 , à
la mission de la Cochinchine. Rappelé
en 1697, il fut nonxmé évêque de Tilopo-
lis par le pape Innocent XII. Il remplit
pendant IS ans les devoirs de vicaire
apostolique dans la Cochinchine, où il
était retourné, et mourut en 1723. On a
de lui une Lettre au pape Clément XI ,
LAB
sur le cuUc des Chinois ; et un Mcinoire
«[ui, ainsi que la Lettre^ semble annoncer
certaines préventions, et un zèle un peu
aaier.
LABBEY DE POMPIERES (Guil-
laume-Xavier ). Voyez POMPIERES.
LABE ( SÉBASTIEN ) , né à Rokyczan en
Bohème le 26 février lG3o, entra chez les
jésuites en 1655 , où il enseigna avec dis-
tinction les belles-lettres. Il fut pendant
15 ans prédicateur à Prague, et ensuite
20 ans missionnaire. Il mourut à Klattau
en 1710 , après avoir publié : Salés epi-
çrammatici j dont on a fait plusieurs édi-
tions ; la dernière de Prague, 1701, in-8".
On a encore de lui des Cantiques spi7'i~
tuels en langue bohémienne , fort répan-
dus parmi le peuple , et qui ont produit
de grands fruits.
LABÉ (Louise), surnommée la belle
Cordïèrej parce qu'elle avait épousé un
riche négociant en cables et en cordes, est
néo à Lyon en 1526. Son père Charly, dit
Labé , lui donna une éducation très soi-
gnée, lui fit apprendre la musique et
plusieurs langues. Elle reçut des leçons
d'équitation , et de tous les exercices mi-
litaires. A 16 ans , en 1542 , elle figura
parmi les guerriers français, au siège de
Perpignan. Son nom de guerre était le
capitaine Loys. Sa première campagne
ne fut pas heureuse ; les Français ayant
éléobligés de lever le siège de Perpignan,
elle renonça au métier de la guerre ,
pour se livrer à l'étude. Ce fut alors
qu'elle se maria. Son époux Ennemoud
Pcrrin, mort en 1565, sans enfans, l'avait
faite son héritière universelle ; ce testa-
ment semble contredire l'idée que des
biographes ont voulu nous donner de ses
mœurs. Son cabinet élait rempli de livres
italiens, français et espagnols Elle faisait
des vers dans ces trois langues. Les beaux-
esprits de son siècle l'ont célébrée. Ses
OËuvres furent imprimées à Lyon, en
J555, et réimprimées dans la même ville
en 1762, in-12, avec la Vieàe cette muse.
La meilleure pièce de ce recueil est inti-
tulée : Débats de Folie et dJmour^ dia-
logue en prose. Ces deux divinités , qui
devraient être fort unies , se disputent le
pas à la porte du palais de Jupiter , qui
avait invité tous les dieux à un festin.
n Cet ouvrage, dit l'auteur des Trois Siè-
> clés , est plein d'images , de naturel , de
» finesse ; le sujet est aussi ingénieux que
» la morale en est utile...» On trouvera
l'indication exacte des OEuvres de cette
femme spirituelle dans lédiliu'i la plus
m LAB
récente cl la plus estimée ; c'est celle quî
a paru sous le lilre à'OEuvres de Lovize
Labé Lyoniwise .Lyon, 182/i. , un vol. in-
S** : cette édition ([ui a été publiée par les
soins de M. Bréghot et aux frais d'une so-
ciété de gens de lettres de Lyon , contient
un Dialogue entre Sapho et Louise Labé,
par M. Dumas , et ime Notice historique
par M. Cociiard avec des notes de M. Bré-
ghot, auteur du commentaire et du glos»
saire qui terminent le volume. On a
publié en 1825 le testament de Louise Labé,
in-S", de 15 pages. Louise Labé mourut
dansle mois de mars 1566.
LABEAU31ELLE. KoyecBEAlBIELLE.
LABÉDOYÈRE. Voyez BÉDOYÈRE.
LABELLE ( Pierre-Fraxçois), prêtre
de la congrégation de l'Oratoire, mort
le 14 janvier 1760, âgé de 64 ans , est au-
teur du Nécrologe des appelanset oppo-
sans à la bulle UNIGENIïUS , en 2 vol.
in-12. Le titre de cet ouvrage suffit pour
faire connaître ses senlimcns, le caractère
et l'objet de son zèle.
LABELLE ( Etie.vsie ). Voyez BELLE.
LABEO , surnom commun à plusieurs
familles romaines, qui exprimait un dé-
faut, comme des taches de rousseurs labes
ou des lèvres trop épaisses {labia).-—
LABEO ( Q. Fabius-Labeus ) , d'abord
questeur , puis consul romain , l'an 183
avant J.-C, fut homme de guerre et
honmie de lettres. Il remporta une vic-
toire navale sur les Candiotes, et aida»
dit-on , Térence dans ses comédies. Il fut
plus illustre pour son courage que pour
sa bonne foi.
LABEO ( Ca'ius-Abîtistius -Labeus ) ,.
tribun du peuple , l'an 148 avant J.-C. ,
voulut se venger du censeur Métellus,
qui l'avait rayé de la liste des sénateurs
Il le condamna , sans forme de procès , à
être précipité du roc Tarpéien ; et il au-
rait fait exécuter son arrêt sur-le-champ
sans un autre tribun qui survint et forma
opposition , à la prière des parens de
Métellus ; car rien n'est plus terrible
qu'un démocrate assuré du mobile et
méprisable suffrage de la multitude. Non
seulement Labeo demeura impuni, mais
il reprit sa place au sénat en vertu d'una
nouvelle loi , par laquelle il fit statuer
« que les tribuns auraient voix délibéra-
» tive dans cette compagnie ; » et pour
([u'il n'eût rien à désirer dans son triom-
phe, il prononça la confiscation des biens
de Métellus, et les fît vendre sur la place
à son de trompe. Tant il est vrai que
dans les républiques, au moins dans
LAB
172
LAB
celles où des ambitieux peuvent dominer
le peuple, la violence et le despotisme
sont souvent plus redoutables que dans
une monarchie, et qu'en général la liberté
n'est qu'ujn vain nom.
LABEO ( Antistics - Labeus ) , savant
jurisconsulte , refusa le consulat qu'Au-
guste lui offrit. Il passait six mois de
l'année à converser avec les savans, et les
autres six mois à composer. Il laissa plu-
sieurs ouvrages qui sont perdus. Son père
avait été un des complices de l'assassinat
de Jules-César , et s'était fait donner la
mort après la perte de la bataille de Phi-
lippes, 51 ans avant J.-C.
LADÉRIUS ( Decimus ) , chevalier ro-
main , composait avec succès de petites
comédies satiriques on mimes ^ pour les-
quelles son humeur caustique lui donnait
beaucoup de talent. A Rome , un homme
de naissance qui composait des poésies
pour le théâtre ne se dégradait point ,
mais il ne pouvait les représenter lui-
même sans se déshonorer. Jules- César
pressa vivement Labérius de monter sur
le théâtre pour y jouer une de ses pièces.
Le poète s'en défendit en vain : il fallut
céder. Dans le prologue de cette pièce,
Labérius exhala sa douleur d'une manière
fort respectueuse pour César, et en même
temps fort touchante ; c'est un des plus
beaux morceaux de l'antiquité , suivant
Rollin : « Comment , dit-il , aurais-je pu
» refuser quelque chose à celui auquel
» les dieux mêmes n'ont rien refusé ?
Eteniin ipsi dii negare cui nihil potuerunt ,
Horaiuem me denegare , quis posiet pati !
Il déplora ensuite son sort en ces termes :
Ergo bit tricenis actis sine nota,
Eqaet romanus lare egrestus meo
Domum rcvertarmimus .
Mais dans le cours de sa pièce , il lança
contre César divers traits satiriques. Ce
dictateur l'en punit, en donnant la pré-
férence à Publius-Syrus, rival de Labé-
rius. Cependant , lorsque la pièce fut fi-
nie, il lui donna un anneau , comme pour
le rétablir dans la noblesse qu'il avait
perdue. « Quel expédient , dit un auteur
» moderne , employèrent Néron et les
» autres fléaux de Rome pour affermir
» leur empire odieux ? Ces monstres ,
• pour abâtardir le peuple et le rendre
» insensible à ses maux , l'enivraient par
» la continuité et l'appareil des spectacles;
» et l'aspect d'un mime en faveur faisait
» oublier des monceaux de victimes que
» la cruauté immolait tous les jours aux
» yeux du public. Et sans parler des ty-
i> rans et des fléaux de l'espèce humaine,
» tous les ennemis de la liberté et du droit
» public ont saisi ce moyen comme le
» plus efficace pour consolider leur usur-
» pation. Jules-César regardait comme un
» chef-d'œuvre de politique l'invention
» de faire jouer sur le théâtre les cheva-
» liers romains. Dans les beaux temps de
» la république , on n'avait point d'idée
» d'histrions : de quoi eussent servi les
» gesticulations et les mignardises de ces
» gens-là aux Camille et aux Cincinna-
» tus ? » Labérius , descendu du théâtre ,
alla cherclier une place au quartier des
chevaliers ; mais chacun jugeant qu'il
s'était rendu indigne de ce rang, ils firent
en sorte qu'il n'y en trouvât plus aucune.
Cicéron le voyant dans l'embarras, le
railla en diseuit et en faisant allusion au
grand nombre de sénateurs que César
avait faits : Recepissem te , nisi auguste
sederem. Labérius lui répondit : Mii^um si
auguste sedesj qui soles duabus sellis se-
dere. Il lui reprochait ainsi de n'avoir
été ami ni de César ni de Pompée , quoi-
qu'il affectât de le paraître des deux. La-
bérius mourut à Pouzzole, 10 mois après
Jules César , 44 ans avant Jésus-Christ.
Il avait coutume de dire : Beneficium
dando accepit, qui digno dédit. Ou trouve
quelques fragmens de lui dans le Corpus
poelarum de Maittaire ; la Bibliothèque
latiue de Fabricius contient les titres de
40 de ses mimes. Le prologue de celle de
ces pièces qu'il joua devant César a été
conservé par Macrobe , et Henri Etienne
a donné plusieurs fragmens de Labérius ,
Paris , 1564, in-8° , réimprimés dans plu-
sieurs recueils Veterum poetarum.
LABERTIIOIVIE ( Pierbk-Thomas ),
dominicain, naquit à Toulon le 7 février
1708. Il prêcha avec succès à Paris , par-
ticulièrement contre les incrédules , et
montra beaucoup de zèle pour le main-
tien de la régularité dans son ordre : ce
zèle se manifeste dams l'ouvrage qu'il pu-
blia sous ce titre : Exposé de l'état et
obligation des frères prêcheurs^ i767 ,
in-4° et in-12. Les preuves de la religion
qu'il avait exposées en chaire avec autant
de lumière que de solidité , sont consi-
gnées dans la Défense de la religion chré-
tienne contre les incrédules ^ les Juifs ^
etc., 1779, 3 vol. in-12. On a encore de lui
la Relation de la conversion et de la mort
de M. Bouguer ^ 1784. Les difficultés et
les doutes de l'incrédtile sont très bien
aplanis dans cet ouvrage {Voyex BOU-
JLAB il
GUER ). Il a été réimprimé en 181 1 Sous
le titre de Supplément aux OEuvres du
père Laberthoniej avec une conférence
avec un déiste : examen critique d'un
écrit spinosiste sur l'existence de DieUj,
etc. Le pèreLabertlionie mourut en 1774.
* LABEY ( Jeaiv-B.vptiste ), professeur
de mathématiques, né dans le dcparle-
menl du Calvados, enseigna à l'école mi-
litaire de Paris , puis aux écoles centrales
de la Seine, en fin à l'école polytechnique et
au lycée Napoléon. Il est mort à Paris en
1825, après avoir publié: \ Introduction à
l' analyse infinitésimale ^ par Léonard
Euler . traduit du latin en français, avec
des notes et éclaircissemens, Paris, 1799,
2 vol. in-4° ; | Lettres à une i^rincesse
d Allemagne sur divers sujets de physi-
que et de philosophie, nouvelle édition re-
vue et augmentée de diverses notes, Paris,
i812, 2 vol. in-8°; cette édition est esti-
mée. I Traité de statique, Paris, 1812 ,
in-8°, fig.
LABIENUS (Titus), historien et ora-
teur du temps d'Auguste, né l'an 98 avant
J.-C, fut tribun l'an C3 avant J.- C.
pendant le consulat de Cicéron. Sué-
tone parle de lui dans la Vie de Caligula.
Sénèque en fait mention dans la préface
du 5* livre des Controverses. On ne croit
pas qu'il soit le même que LABIENUS,
lieutenant de César dans les Gaules, qui
suivit depuis le parti de Pompée , et qui
fut tué en Espagne , comme on le voit
dans les Commentaires de César, et dans
la Continuation de Ilirtius. Il s'était dis-
tingué sous César par un grand nombre
d'exploits hardis et heureux, mais il n'eut
pas les mêmes succès sous Pompée. Le
«omle de Turpin Crissé, dans ses Notes
sur les Commentaires de César, parle
ainsi de celte révolution dans les travaux
militaires de Labiénus. « Pourquoi, dit-il,
» Labiénus se montra-t-il dans la guerre
» civile si différent de ce qu'il avait paru
» dans les Gaules ? C'est le sort de ceux
j» qui passent d'un parti à un autre. L'his-
» toire ancienne et moderne en fournit
» mille exemples. La désertion , non seu-
» lement est une tache à la gloire , mais
» presque toujours elle rend encore inu-
» tiles les plus heureuses qualités et les
» plus beaux talens. » Il faut convenir ce-
pendant que la cause de Pompée étant
telle de la républiqu© et de la patrie , la
désertion de Labiétms ne manque pas de
raisons justifiantes.
* LABLA^CHEUIE ( Mammès-Claude
PAHINde ), littérateur, naquit à Langres
3 LAB
le 29 décembre 1732. Il s'attira quelquev<t
épigrammes de Rivarol, pour avoir pris
le litre faslueux d'agent général de la
littérature, à l'occasion d'un bureau de
correspondance pour les sciences et le»
arts qu'il essaya sans succès d'établir à
Paris. Au commencement de la révolution
il se retira à Londres , où il mérita par
son caractère et ses talens l'estime des
plus grands seigneurs de l'Angleterre.
On a de lui : | Essai du Journal de mes
voyages, ou Histoire d'un jeune homme
j}our servir d'école aux pères et aux
mères, Vax'is^ 1776, 2 vol. in-12. L'idée
de cet ouvrage , qui présente le double
tableau des suites d'une bonne et d'une
mauvaise éducation, est excellente ; mais
l'exécution n'y répond pas. | Correspon-
dance générale sur les sciences et les
arts, ou Nouvelles de la république des
lettres depuis 1778 jusqu'en 1788. Ce jour-
nal, devenu fort rare, forme 8 vol. in-ii.°,
rare. | Essai d'un Tableau historique des
peintres de l'école française depuis Jean
Cousin en V6QQ jusqu'en 1783^ 'm-k'*. L'an-
née littéraire y a relevé plusieurs erreurs.
I Quelques brochures. Lablancherie mou-
rut à Londres en 1811.
LABLA]\DINIÈRE. F^oyez BLANDI-
NIÈRE.
LABLETTERIE. Voyez BLETTERIE.
LABOISSÏÈRE. Voyez BOISSIÈRE.
LABORDE. Voyez BORDE et DELA-
BORDE.
*LABOREAU ( Jeatv-Baptiste), né en
1732, à Saint-Claude dans le département
du Jura, fut pendant 13 ans attaché à
l'ambassade française à Londres en qua-
lité de secrétaire, puis receveur dans
l'administration des domaines à Sens
où il est mort, le 20 décembre 1814. Il a
publié sous le voile de l'anonyme une
Traduction du précis philosojihique et
politique de l'histoire d'Angleterre , dans
une suite de lettres écrites par un lord à
son fils, Londres et Paris, 1776, 2 vol.
in-12. Laboreau a partagé l'erreur de ceux
qui attribuent cet ouvrage à lord Lyttel-
ton, tandis qu'il appartient réellement à
Olivier Goldsmilh.
*LABORIE(J. B. P.), médecin, né à
Montpellier en 1797 , se livra de^ bonne
heure à l'étude et à la poésie. Doué d'heu-
reuses dispositions , il a été enlevé trop
tôt à l'art auquel il destinait sa vie, et
auquel il avait déjà donné des gages so-
lides de succès. Laborie est mort le 23
novembre 1823, dans des sentimens
religieux. Il a laissé : 1 Dissertations sur
^ ' 15.
LAB
i74
LAB
te Tétanos traumatique, Montpellier, 1820;
i>i-8° ; I les Pronostics d'Hippocrate, com-
mentés par A. Piquer ^d'après les Obser-
vations pratiques des auteurs tant anciens
que modernes ; ouyraQC traduit de l'es-
pagnol, et augmenté d'une notice biogra-
phique , Paris , d822 , in-8° ; | Eclaircis-
semens analytiques sur la doctrine phy-
siologique de Barthez, imprimés dans
les Nouvelles Annales cliniques de la so-
ciété de médecine pratique de Montpel-
lier. Ce sont les prolégomènes d'un cours
de physiologie fait à Montpellier, par La-
borie , durant les deux dernières années
de sa vie.
* LABOULLAYE-MARILLA.C (Pierre-
Charles-Madeleine, comte de), chi-
miste, né en 1771 à Billom, f Puy-de-
Dôme ), était lieutenant-colonel , lorsque
la révolution éclata. Il fut un des pre-
miers às'offrir comme otage de Louis XVI;
il alla ensuite se joindre à l'armée des
princes, dans laquelle il resta jusqu'à son li-
cenciement. Il trouva cependant du temps
pour se livrer à l'étude des sciences , s'a-
donna surtout à celle de la chimie et à
celle de la médecine, et se fit recevoir
docteur en médecine à l'université de
Gottingue. Après avoir pourvu parla pro-
fession de médecin à sa subsistance et
à celle de son père qui mourut pendant
l'exil, il revint en France où il continua
ses travaux chimiques. Il s'occupa surtout
des applications de la chimie aux arts,
et découvrit douze couleurs inaltérables :
le 1" janvier 1817, il obtint la place de
directeur des teintures de la manufac-
ture royale des tapisseries des Gobelins ,
où il fit un cours public de chimie appli-
quée à la teinture. Chaque année , à la fin
de son cours, il exposait les procédés dont
il était l'inventeur, et par lesquels il était
parvenu à teindre les draps en pièce, en
écarlate, en bleu, et en toute autre cou-
leur, aussi profondément au centre qu'à
la surface, etc. Laboullaye était en outre
contrôleur des dépenses au ministère de
la maison du roi. Il est mort à Paris le
25 août 1824, après avoir publié un Mé-
moire sur les couleurs inaltérables pour
la teinture^ suivi du rapport fait à ce
sujet par MM. F'auquelin^ Gay-Lussac^
^te., Paris, 181i, brochure in-4°. Il a
donné , avec Tonnellier, Voyages entre-
pris dans les gouvernemens méridionaux
de l'empire de Russie dans les années
i793 et 1794, par le professeur Pallas, tra-
duit de l'allemand , Paris , 180S , 2 vol.
in-4° et atlas in-folio -, 1811, 4 vol. in-S"
et atlas in-4''. Il avait déjà paru, de 1799
à 1801 à Leipsick, une traduction de cet
ouvrage en 2 vol. in-4° et atlas in-folio.
LABOUREUR (Jean le), historien,
né à Montmorency, près de Paris, en 1623,
fit gémir la presse dès l'âge de 19 ans. Il
était à la cour en 16iSi4, en qualité de gen-
tilhomme servant, lorsqu'il fut choisi
pour accompagner le maréchal de Gué-
briant dans son ambassade en Pologne ,
où il allait pour accompagner Marie de
de Gonzague , fiancée à Wladislas VII. De
retour en France , il embrassa l'état ec-
clésiaslique , obtint le prieuré de Juvi-
gné, la place d'aumônier du roi, et fut fait
commandeur de l'ordre de Saint-Michel.
Ce savant, mort en 1675, à 53 ans, est
connu par plusieurs ouvrages : | Recueil
des tombeaux des personnes illustres .dont
les sépultures sont dans l'église des cè-
le stins de Paris . 1642 ; in-fol.; | Relation
du voyage de la reine de Pologne et du
retour du maréchal de Guébriayit.Vasls,
1647, in-fol., plus exacte qu'élégante ;| une
bonne Edition des Mémoires de Michel
de Castelnau, en 2 vol. in-fol., avec des
commentaires historiques, très utiles pour
l'intelligence de plusieurs points de l'his-
toire de France ; | Histoire du roi Charles
f^^ traduite du latin en français, en2 vol.,
in-fol. , 1663; elle est estimée des sa vans;
I Traité de l'origine des armoiries, 1684,
in-4°. On y trouve des choses curieuses et
recherchées. | Histoire de la pairie. 8
manuscrits déposés à la Bibliothèque du
roi. Le mauvais Poème de Charlemagne^
in-8° , 1664 , n'est point de lui , mais de
son frère Louis , mort en 1679, qui inonda
le Parnasse, dans le dernier siècle, de ses
productions. Jean le Laboureur a été l'é-
diteur des deux derniers volumes des
Mémoires de Sully.
LABOUREUR (dom Claude le), né vers
1601, était prévôt de l'abbaye de l'île Barbe
près Lyon. Il fut obligé de résigner ce bé-
néfice , pour se soustraire au ressenti-
ment du chapitre de Lyon, dont il avait
parlé d'une manière peu mesurée, en
présentant à l'archevêque ses Notes et ses
Corrections sur le Bréviaire de ce diocèse,
1643, in-8°. On a de lui les Masures de
V abbaye de Vile Barbe les Lyons. 2 vol.
in-4", 1681 ; ouvrage plein d'érudition ;
c'est une histoire de l'abbaye dont il avait
été le prévôt. On ignore l'époque précise
de sa mort ; il parait qu'il vivait encore
en 1682.
LABOURLIE. Voyez BOURLIE.
LABOURLOTTE (Claude), l'un des
LAB
I7S
LAB
plus braves capitaines de son" siècle, na-
quit en Bourgogne d'une famille obscure;
il passa par tous les degrés de la milice ,
jusqu'à celui de commandant des troupes
wallones, au service du roi d'Espagne.
Ayant appris, dans sa jeunesse, l'état de
chirurgien, il entra , en cette qualité , au
service du comte de Mansfleld , par la
protection duquel il parvint à s'avancer
dans la carrière des armes. Il se distin-
gua à Noy on, A rdes et Nieuport, et fut
anobli par Philippe II, roi d'Espagne. Ja-
mais il ne s'engageait plus volontiers à
cne entreprise que lorsqu'elle était fort
périlleuse. Il fut blessé en diverses oc-
casions , et enfin tué d'un coup de mous-
quet , le 24 juillet 1600, pendant qu'il fai-
sait travailler à un retranchement entre
Bruges et le fort Isabelle.
LABRE ( le vénérable Benoit-Joseph),
né à Amettc , dans le diocèse de Boulo-
gne-sur-Mer , en 1748 , se distingua , dès
son enfance , par sa piété et l'innocence
de ses mœurs. Sa santé l'ayant obligé de
quitter les Chartreux, et ensuite l'abbaye
de Sept-Fonts, où il avait résolu de se
consacrer au Seigneur, il alla à Rome,
y vécut dans la pauvreté et dans l'exer-
cice des vertus chrétiermes, et y mourut
en odeur de sainteté , le 16 avril 1783. Un
décret de la congrégation des rites a auto-
risé à lui donner le titre de vénérable.
Sa Fie^ écrite en italien par M. Alégiani,
a été traduite en français , et augmentée
d'un avertissement plein d'éloquence et
de raison , Liège , 1784 , petit in-12. On a
imprimé quelque temps après un Recueil
des miracles opérés à son tombeau^ Paris
et Liège, 1784, et une autre Fie par l'abbé
Marconi , son confesseur : elle a été tra-
duite en français par Roubaud, Paris,
1784, in-12. Dans un mandement de l'é-
vèque de Boulogne, donné le 3 juillet
1783, on trouve un très bel éloge de Be-
noit-Joseph Labre , né dans ce diocèse.
« Quoique son extérieur fût abject , dit
» ce prélat, et parût, aux yeux delà chair,
» n'avoir rien que de rebutant et d'af-
» freux, cependant son insigne piété , son
» humilité profonde , son amour aussi
• grand pour la pauvreté que généreux
• pour les pauvres, avec qui il partageait
» les aumônes qu'il avait reçues sans les
n avoir demandées, lui avaient attiré l'es-
» time, la bienveillance et la vénération
» de tous les vrais appréciateurs de ses
» excellentes vertus, surtout de sa conti-
« nuelle application à la prière, dont l'as-
• siduité, que vous, ô faux sages de notre
» siècle ! cherchez tant à décrier, à d»S-
» primer, à détruire , comme n'étant que
» le vil partage des personnes inutiles à
» la société, ne peut toutefois être trop
» louée, trop exaltée, trop protégée, puis-
»que, selon un oracle divin {Multum
» valet deprecatio justi assidua,. Jac. v,
» 16 ), auquel les discours artificieux de
» la sagesse humaine n'opposent que des
» raffinemens vains et illusoires , elle a
» beaucoup de pouvoir auprès du souve-
» rain maître des temps, des coeurs et des
» événemens. » A la suite de ce mande-
ment, on lit la traduction en français de
l'inscription latine, mise avec l'approba-
tion du saint Siège , dans le cercueil de
Benoît- Joseph Labre, et deux lettres adres-
sées à M. l'évêque de Boulogne , par M.
Fontaine, chargé à Rome des affaires de
la congrégation de la mission, dont il est
membre. Ces lettres contiennent des dé-
tails aussi édifians que curieux. Les mi-
racles opérés à son tombeau furent l'oc-
casion de la conversion de M. Thayer,
ministre protestant à Boston. Voyez la
Belation du néophyte lui-même, Liège ,
1788, in-12, Joui-n. hist. et littér., 1" fév.
1789, pag. 161.
LABROSSE. Voyez BROSSE et ANGE
de Saint-Joseph.
* LABROSSE (Pierre de), vivait dans
le treizième siècle. Après avoir été bar-
bier chirurgien de Saint-Louis, il devint
chambellan sous Philippe le Hardi. On
l'accusa d'avoir voulu empoisonner l'hé-
ritier de la couronne , et il fut exécuté le
30 juin 1278. La justice de cette accusa-
tion, intentée par tous les barons, est
douteuse ; voici ce qu'on lit à ce sujet
dans la chronique de Saint-Magloire :
L'an mil deux cenk teptante et htiît,
S'accordèrent li barons tait
A Pierre de Labrotse pendre s
Pendu fut lani raençon prendre |
Contre la volonté du roy.
Fut il pendu , si , com je croy
Mien encient , qu'il fut desfet
Plut par envie que par fct.
LABROUE. Voyez BROUE.
* LABROUSSE ( Clotilde - Susaxne-
CouRCELLES de ) , qu'on pourrait appeler
la Krudener française ( voyez ce nom ),
naquit àVauxain, dans lePérigord, le 8
mai 1747, d'une honnête famille; dès son
plus jeune âge elle donna dans un mysti-
cisme exalté, et pratiqua des mortifi-
cations extraordinaires. Couchée sur le
dos, elle passait des journées entières à
contempler la ciel , et , pour y monter
LAB
176
LAB
plus tôt, elle tenta, âgée de 9 ans, de s'em-
poisonner en avalant des araignées. Cette
espèce de folie ne fit que s'accroître.
Comme elle avait un teint très animé , la
jeune Labroussc appliquait la nuit , sur
son visage , de la chaux vive, se flattant
ainsi d'y faire paraître des rides et des
cicatrices ; mais le remède ( à ce que dit
l'auteur de sa Fie ) n'opéra point , et ne
fit pas même disparaître son beau coloris.
Elleinrenta alors un autre genre de tour-
ment, et remplit non seulement sou lit ,
mais ses souliers de petits cailloux , de
sorte qu'elle ne pouvait faire un pas sans
ressentir des douleurs très aiguës. Elle
aimait naturellement la bonne chère;
pour réprimer sa sensualité, elle avait
toujours dans sa poche un cornet rempli
de cendres mêlées avec du fiel et de la
suie, et quand elle était à table, elle en
jetait sur les mets qui lui paraissaient les
plus délicats. Outre cela , Clotilde portait
toujours dans un flacon de l'eau mêlée
avec du fiel de bœuf ; elle le flairait sou-
vent, buvait même de cette eau, qui lui
écorchait le gosier et lui occasionait une
extinction de voix. Du reste ^ ajoute le
même auteur, sa santé allait toujours
son train. Ayant pris l'habit des tierce-
retteS:. ou religieuses du tiers -ordre de
Saint-François, la méditation, le jeûne
et la solitude exaltèrent encore davan-
tage son imagination : elle se crut défini-
tivement inspirée , et destinée à parcou-
rir le monde pour convertir les héréti-
ques et les pécheurs. Elle en fit part à
ses supérieures, les assurant qu'elle en
avait recula mission de Dieu lui-même,
dans des révélations et des communi-
cations extatiques. Cependant ses supé-
rieures furent assez prudentes pour s'op-
poser à ce projet. Ne sachant que faire de
mieux, elle écrivit sa Vie ^ et soumit cet
ouvrage à M. de Flamarens, évêque de
Périgueux,quineparulpasy faire grande
attention. Il n'en fut pas ainsi du prieur
de la chartreuse de Vauclaire, appelé dom
Gerle : ayant lu cet écrit , que le hasard
fit tomber , en 1759, entre ses mains , il
devint enthousiaste de mademoiselle La-
Lrousse, et s'empressa d'entamer une cor-
respondance épistolaire avec elle. C'est
à ce religieux qu'elle dut sa première
réputation d'însjoîr*?^ et àe prophète s se. Il
assura quoique temps après , qu'elle lui
avait prédit qu'il serait membre d'une
assemblée nationale , et qu'elle avait éga-
lement prédit la révolution française.
Quand celle-ci éclata , mademoiselle La-
brousse trouva un autre admirateur dans
M. Pontard, évêque constitutionnel de la
Dordogne. Il appela mademoiselle La-
brousse à Paris , où son titre de prophé-
lesse et ses prédications pouvaient être
utiles pour affermir les maximes du jour.
Les couveus ayant été supprimés, à la
grande satisfaction de mademoiselle La-
brousse, qui désirait jouer un grand rôle
dans le monde, elle se rendit à l'invita-
tion de M. Pontard , vint à Paris , et alla
loger chez une dame de haut rang, la
duchesse de B... Mademoiselle Labrousse
commença à remplir sa mission en prê-
chant et prophétisant en faveur de la
constitution du clergé, contre la cour de
Rome, et ne manqua pas de se faire un
parti parmi des gens crédules et des spé-
culateurs : l'évêque Fauchet fut de ces
derniers : mais il revint bientôt de son
erreur. Il parut à cette époque un Recueil
des prophéties de mademoiselle La-
brousse j, imprimé aux frais de la même
dame ( la duchesse de B... ) par Didot, 2
vol. in-S". En même temps, l'évêque Pon-
tard disait dans ses écrits... : « C'est dans
» les cahiers de mademoiselle Labrousse
» qu'il faut apprendre à connaître la re-
» ligion ; non point cette religion que les
j> vices de l'ancien clergé ont rendue si
» différente de son origine , mais cette
n émanation pure des lumières célestes. »
Dora Gerle devenu membre de l'assemblée
Constituante, comme l'avait prédit made-
moiselle Labrousse , parla dans celte as-
semblée en faveur de la prophétesse ;
mais, malgré tous ses éloges , on ne vou-
lut point l'écouter. De retour dans son
pays, mademois'jlle Labrousse médita un
grand projet : c'était de se rendre à Rome,
pour prêcher aux cardinaux , et au pape
lui-même, les principes de fraternité ^
liberté, égalité. Outre cela elle devait en-
gager le saint Père à faire l'abdication de
sa puissance temporelle. Mademoiselle
Labrousse entreprit donc ce voyage, pen-
dant lequel elle prêchait sur les routes
publiques , dans les villes , les villages ,
les clubs, les églises ; faisant usage , au
commencement de tous ses discours,
de la formule jacobinique : Frères et
amis... etc. Elle arriva à Bologne en août
1792, et elle ne pouvait choisir une ville
dont le peuple fût moins crédule et plus
porté à la plaisanterie. Mademoiselle La-
brousse y essaya ses prédications ; on y
répondit par des sarcasmes. Le cardinal-
légat mit un terme à cette comédie, en
chassant Vinspirée^ qui passa à Yiterbe ,
LAB
177
LAC
où des ordres avaient déjà été dbnnés
pour l'arrêter et la conduire à Rome.
Soit qu'on eût négligé ces ordres , ou
qu'elle sût les éluder , mademoiselle La-
brousse arriva sans obstacle dans la capi-
tale du monde chrétien , où les nouvelles
maximes avaient déjà pénétré , et donné
naissance à quelques clubs secrets. La
prophélesse y prononça des discours et
contre le pape , et contre tout le clergé
non assermenté. Elle avait voulu planter
sa chaire dans un des plus vastes empla-
cemens de Rome , la place Naçone ^ où
abonde le menu peuple, mais elle fut
arrêtée et enfermée au château Saint-
Ange. Un autre visionnaire ( ou pré-
tendu tel ) d'une espèce différente , s'y
trouvait aussi prisonnier depuis 1789;
c'était le fameux Balsamo, surnommé
Cagliosiro. Mademoiselle Labrousse pré-
tendait avoir des visions divines, et Ca-
glîostro avait voulu faire accroire qu'il
était en communication directe avec le
démon ; si la première trouva des per-
sonnes crédules , le second eut aussi de
nombreux partisans.même dans les classes
éclairées... Quel exemple pour abaisser
l'orgueil de l'esprit humain.... ! Cepen-
dant mademoiselle Labrousse était mieux
traitée dans sa prison que le charlatan
sicilien. Celui-ci languissait dans un ca-
chot, où il mourut en 1793 , et la prophé-
tesse française occupait une chambre
commode, où on lui avait permis de gar-
der une suivante. Son emprisonnement
causa un vif regret à M. Ponlard, de-
venu de plus en plus théosophe. Nul
doute qu'il fit toutes les démarches pos-
sibles pour délivrer l'objet de sa profonde
vénération. Enfin, en 1796, le Directoire
demanda à la cour de Rome l'élargisse-
ment de mademoiselle Labrousse , ce qui
fut accordé sur-le-champ : mais elle ne
voulut pas quitter sa prison, alléguant
qu'en y restant , elle obéissait à une in-
spiration céleste. Elle changea néanmoins
d'avis deux ans après, lorsque les troupes
françaises s'emparèrent de Rome. Made-
moiselle Labrousse revint à Paris ; et , se
rappelant les suites fâcheuses de ses pré-
dications , et moins courageuse que ne le
fut madame de Krudener, elle se con-
damna à la retraite ; cependant elle se
croyait toujours inspirée, et disait que
les anges lui avaient préparé un trône
dans le ciel. Elle eut dans sa retraite la
satisfaction de se voir entourée d'un
petit nombre d'amis fidèles , à la tête des-
quels était M. Pontard, qui, pendant la
captivllc de la prophétcssc , avait publié
un Recueil des ouvrages de la célèbre
mademoiselle Labrousse ( Bordeaux,
Brossier, 1797, 1 vol. in-8° de 296 pages).
De son vivant , il parut aussi un autre
ouvrage en italien , intitulé : Discorsi. ou
Discours de la citoyenne Courcell^s-La-'
brousse^ avec le texte français, Rome,
1798, in-8° Dans sa retraite, elle com-
posa des ouvrages mystiques , commenta
la Bible et Y Apocalypse. Mademoiselle
Labrousse conserva ses liaisons avec M.
Pontard jusqu'à sa mort, arrivée en 1821,
à l'âge de 74 ans. Elle avait nommé son
ancien ami pour son exécuteur testamen-
taire, et lui laissait 3,000 fr. qui lui ont
été contestés par la famille de la défunte,
ce qui a donné lieu à un procès devant
les tribunaux, et à un Mémoire de M.
Pontard , où il se plaint de l'ingratitude
de la famille Labrousse. Quant aux écrits
de cette visionnaire , nous devons nous
borner à dire qu'ils ne sont que des rêves
d'une imagination exaltée , qu'ils con-
tiennent de violentes déclamations contre
la cour de Rome, des prophéties j des ex-
tases^ des missions célestes^ auxquelles
on ne peut croire sans avoir le cerveau
aizssi malade que cqlui de l'auteur.
LABRUYÈRE. Ployez BRUYÈRE.
LACAILLE. Foyez CAILLE.
LACARRY ( Gilles ) , jésuite, né au
diocèse de Castres en 1603 , professa avec
succès les humanités , la philosophie , la
théologie morale , l'Ecriture sainte , fit
des missions, obtint les emplois de sa so-
ciété , et mourut à Clermont en Auver-
gne , l'an 1684. Malgré la multitude et la
variété de ses occupations , il trouva le
temps de composer un grand nombre
d'ouvrages très utiles , surtout pour ceux
qui s'appliquent à l'histoire de France.
Les pruicipaux sont : | Historia Gallia-
rum sub prcefectis prcetorii Galliarum»
1672 , in-ii." : morceau bien fait et plein
d'érudition. Elle commence à Constantin,
et finit à Justinien; | Historia coloniarum
tum a Gallis in exteras nationes missa-
rum ^ tum ab exteris nationibus in Gah
lias deductarum, 1677, in-4° : ouvrage
estimé , écrit avec autant de savoir que
de discernement ; j Epitome historiée re-
gum Francice . 1672 , in-4° : petit abrégé
tiré du Doctrina temporum de Pctau;
I De regibus Francice et lege Salica^ in-
4" ; I Comelii Taciti liber de Germania,
in 4° , 1649 , avec de savantes notes , que
Dithmar a suivies dans l'édition qu'il a
donnée du même ouvrage en 1726, in-8%
LAC
à Francfort -sur -l'Oder; | Historia ro-
mana. depuis César jusqu'à Constantin,
appuyée sur les médailles et les autres
monumcns de l'antiquité. Cet ouvrage ,
publié en 1671, in-4°, contient des in-
structions utiles en faveur des personnes
peu versées dans la connaissance des mé-
dailles, et offre desavantes discussions sur
plusieurs faits. Il renferme aussi Séries
et numismata regum Syriœ^ u^gtjpti, Si-
ciliœ et Mesopotamicc ; \ une bonne Edi-
tion de Velleïus Paterculus, avec des
notes; | Ilisloria christiana imperatorum.
consulumetpî'œfectorum; \Notitia magis-
tratuum et provinciarum imperii utrius-
que^ cum notis^ i66S , \a.-h°. On voit dans
tous ces ouvrages un homme profondé-
ment versé dans les matières les plus
épineuses et les plus recherchées de l'his-
toire , et un savant en qui l'érudition n'a
pas éteint le goût. ,
• LACATHELIMERE (Ripaitlt de),
officier des armées royales de la Vendée,
né vers 1760 , fut choisi au mois de mars
d793, parles paysans insurgés du pays do
Retz, pour leur commandant, et s'em-
para d'abord du port St.-Père, de Bourg-
neuf, et des principaux bourgs de ce
canton. Charette {Votjez CHARETTE),
s'étant mis à la tête des insurgés de Ma-
checoul , marcha de concert avec lui
contre Pornic qui fut pris sur les républi-
cains. Ces deux chefs combinèrent depuis
habituellement leurs opérations. Lacathe-
linière commandait l'avant -garde à l'at-
taque de Machecoul , le 20 juin 1793 ;
mais il ne s'engagea dans aucune des ex-
cursions de Charette , à qui il envoya
quelquefois des renforts , sans vouloir
jamais sortir de son canton pour faire la
guerre. Durant l'hiver de 179i, lorsque
les républicains poursuivaient sans re-
lâche l'armée de Charette , Lacathelinlère
s'était retiré dans la forêt de Pornic , où
il se défendait contre les attaques et les
recherches de l'ennemi. Un républicain
l'ayant tiré à bout portant , et blessé
de deux balles, il se cacha pour se guérir
dans sa maison de Frossay. Plusieurs
soldats y vinrent, et un d'entre eux,
en poursuivant une pouls , la fit fuir
■vers un pressoir. Le soldat y trouve un
homme caché , déguisé en paysan , et à
demi mort de ses blessures : « Qui es-tu ,
» demanda-t-il ? » Lacalhelinière, répondit
le vendéen. On le conduisit à Nantes , où
il périt sur l'échafaud cette même année
4794. Lacathelinlère commandait à des
hommes qui manqiiaient de discipline ,
178 LAC
mais il avait le talent de les conduire et
de s'en faire respecter.
* LACi:PÈDE ( Bernard- Geummi»-.
Etic Nxr. DE LAVILLE-SUR-ILLON, comte
de ), savant naluralisle, né à Agen le 26
décembre 1756, était fils du comte de
Laville. Héritier d'un oncle maternel , il
dut en prendre le nom. Il s'occupa do
bonne heure d'histoire naturelle, se mit
en correspondance avec Buffon , et cul-
tivait aussi les beaux arts , surtout la mu-
sique, dont le célèbre symphoniste Beck
lui avait donné des leçons. Il n'avait que
vingt ans , lorsqu'il vint en 1776 à Paris ,
et déjà il avait entrepris de remettre en
musique VArmide de Quinault ; mais il
renonça à son prqjet quand il apprit
que Gluck l'avait devancé. Il y continuait
ses travaux scientifiques sous Buffon et
ses études musicales sous Gossec , et il ve-
nait de faire paraître une OEuvre de sym-
phonie concertante , quand sa famille ob-
tint pour lui \in brevet de colonel dans
les cercles de l'empire ( Bavière ) : son
service militaire dans ce grade se borna
à deux voyages qu'il fit en Allemagne. Il
était fixé à Paris en 1781. A cette époque
était en répétition son opéra d'Omphale^
qu'il avait composé par les conseils de
Gluck avec lequel il était très lié, mais
qui cependant ne fut pas représenté.
Dans le même temps il publia ses pre-
miers écrits : | Essai sur l'électricité na-
turelle et artificielle , 1781, 2 vol. in-8'*;
Physique générale et particulière ^ 1782-
1784, 2 vol. in-12, ouvrages dont la forme
pouvait plaire aux gens du monde, mais
qui n'étant point à la hauteur de la science ,
firent naître contre leur, auteur des pré-
ventions tellement défavorables , que La-
cépède s'empressa de racheter les exem-
plaires qui se trouvaient en circulation ,
pour n'avoir point à craindre que sa réptn
tationen souffrit. Ce fut alors que Buffon ,
pour lui faciliter les études qu'il avait be-
soin de compléter , lui offrit la place de
garde et sous-démonstrateur du cabinet
d'histoire naturelle, dont Daubenton jeune
venait de se démettre. Quoique le poste
parût au-dessous de ce que Lacépède
avait droit d'espérer, celui-ci accepta.
Après avoir publié en 178o la Poétique de
la musique , Paris , 2 volumes in-8° , il
commença ses études d'histoire naturelle
dont les résultats furent à la fois si glo-
rieux pour lui et si utiles à la France. On
vit paraître successivement r/^?5foire na-
turelle des quadrupèdes ovipares et des
serpens^ 1788-1789, 2 vol. in-4°, ou 4 vol.
LAC
479
LAC
în-12; Histoire naturelle des reptiles^
1789, 1 vol. \n~h.° , ou 2 vol. in-12 : His-
toire naturelle des Poissons j 1798-1805,
6 val. en 5 tomes, ou 11 vol. in-12; His-
toire naturelle des cétacées^ 1804, in-i",
ou 2 vol. in-12, que l'auteur regardait
evec raison comme le plus complet et le
plus méthodique de ses livres. Lacépède,
dans ses descriptions, n'a pas le brillant
de l'auteur qu'il continue ; mais il décrit
exactement ; et l'on voit qu'il clierchail
plus à satisfaire celui qui veut s'instruire
qu'à éblouir par un attrayant langage.
Ces quatre ouvrages qui ont été publiés
dans l'espace de 16 ans forment la suite
et le complément de l'édition originale
de Buffon, sortie des presses de l'impri-
merie royale : ils ont été imprimés deux
fois et presque toujours avec les OEuvres
de Buffon. et ont été traduits en allemand.
A l'époque de la révolution , Lacépède
ut du nombre de ceux qui adoptèrent les
idées de réforme. D'abord nommé par la
section du jardin des Plantes comman-
dant de bataillon, il présida ensuite les
deux premières assemblées conslilulion-
nelles, accepta la plaça d'administra-
teur de Paris, puis fut appelé à l'as-
semblée Législative , qui le choisit pour
son président le 28 novembre 1791. On
vantait beaucoup la modération des prin-
cipes de Lacépède; ce fut néanmoins
sous sa présidence que cette assemblée
fit une adresse au roi contre les émigrés
réunis sur les bords du Rhin, et qu'elle
décréta la formation de la haute cour
d'Orléans, d'odieuse mémoire. Il refusa
alors, dit-on, le poste difficile de gou-
verneur du dauphin. La s«ession étant
finie, Lacépède reprit ses occupations
scientifiques, et se démit de toutes ses
fonctions pour vivre dans la retraite. En
1796 1 il fut nommé membre de l'institut
de France, et trois ans après, celui de
Bologne l'admit au nombre de ses asso-
ciés. Chargé d'organiser l'expédition du
capitaine Baudin, il désigna pour en
faire partie deux jeunes savans, MM.
Eory de Saint -Vincent et Péron. Lors
de l'établissement du consulat, Bona-
parte appela le comte de Lacépède au sé-
nat conservateur, dont il devint prési-
dent en 1801 ; deux ans après , il fut
nommé grand- chancelier de la Légion-
d'Honneur, et en 1805, grand-aigle de
cette même Légion : l'année d'aupara-
vant, il avait été créé titulaire de la sé-
natorerie de Paris. Chargé très souvent
de porter la parole à Napoléon , il fut un
de ses plus chauds panégyristes , et îl dot
en grande partie les honneurs dont il fut
investi à son éloquent enthousiasme pour
celui qui les dispensait. Une seule fois
cependant il osa, à la tête du sénat , par-
ler de paix à Bonaparte : ce fut le 12
janvier 1814. Il s'exprima en ces termes :
a Nous combattons entre les tombeaux
» de nos pères et les berceaux de nos en-
» fans. Obtenez la paix ^ sire , et que vo-
» tre main tant de fois victorieuse laisse
» échapper les armes , après avoir signé
» la paix du monde. » Ce conseil venait
trop tard : les alliés foulaient déjà le sol
de la France, et après avoir tout refusé
au congrès de Châtillon, l'empereur ne
pouvait plus parler de paix : il touchait
à sa chute. Lacépède suivit à Blois l'im-
pératrice Marie - Louise , et envoya ce-
pendant plus tard son adhésion à la dé-
chéance de Napoléon. Le gouvernement
provisoire priva Lacépède de sa charge
de grand-chancelier de la Légion-d'Hon-
ncur, qui fut provisoirement donnée à
M. de Pradt. Le roi Louis XVIII l'en dé-
dommagea, en le nommant pair le 4 juin
1814. Au retour de Napoléon de l'Ile
d'Elbe, Lacépède refusa la place de grand-
maître de l'miiversité , mais il siégea dans
la nouvelle chambre des pairs , dont il
fut exclu par l'ordonnance royale du 24
juillet 1815. Le roi Louis XVIII, toujours
indulgent et ami de la science , l'y rap-
pela quelque temps après. Depuis ce mo-
ment , il ne joua pas un grand rôle dans
les affaires publiques , et se livra exclu-
sivement à ses études favorites. Au mi-
lieu de sa carrière politique, Lacépède
avait continué ses travaux. On lui doit
plusieurs Discours qu'il prononça comme
professeur d'histoire naturelle au jardia
des Plantes : il avait été nommé élève à
l'école normale par les administrateurs
de Corbeil après le 9 thermidor, et en
1793 on avait créé pour lui une 15* chaire
au muséum d'histoire naturelle. Les dis-
cours les plus remarquables qu'il fit pour
l'ouverture ou la clôture de son enseigne-
ment sont ceux de 1798 , 1799 , 1800 et
1801 : ils contiennent des vues élevées et
nouvelles sur quelques parties d'histoire
naturelle. On lui doit encore ( avec MM.
Cuvier et GeoffroiSaint-Hilaire ), | la Mé-
nagerie du Muséum d'histoire naturelle ,
ou Description et histoire des animaux
qui y vivent ou qui y ont vécu , Paris ,
1801 cl années suivantes, grand in-folio :
il n'en a paru que 10 livraisons ; \nisloire
générale^ physique et civile de V Europe
LAC
depuis les deimières années du 5
jusque vers le milieu du i8', Paris, 1826,
i8 vol. in-8°. 2' éd. , 1835. L'auteur revoyait
les dernières feuilles de ce grand ouvrage
dans les derniers jours de sa vie : il n'a été
publié qu'après sa mort. Il enribrasse dans
son plan les usages , les lois , les mœurs ,
les sciences, les lettres, les arts, les fi-
nances, l'agi-iculturc, la population, les
guerres, l'esprit de chacun des siècles
dont il s'est proposé de tracer le tableau.
I Fîtes générales des progrès de plusieurs
branches des sciences d'histoire naturelle
depuis la mort de Buffon^ 1819 et 1822 ,
in-S"; \nistoi7-e naturelle de l'homme^
1827, in-8° et in-18; | Les Ages de la na-
ture et l'histoire de l'espèce humaine,
1830, 2 vol. in-8° ; [ plusieurs Eloges on No-
tices historiques sur le prince de Bruns-
wick-Lunéhourg^ sur Davbenton ^ Mon-
tesquieu^ etc.; Ides Articles oxi Mémoires
insérés dans la Décade philosophique ,
dans le Magasin encyclopédique , dans le
Recueil de l'Institut^ dans les Annales du
Muséum d'histoire naturelle, dans le Dic-
tionnaire des sciences d'histoire natu-
relle^ où il a fourni celui de V homme et
tom ceux qui concernent les reptiles et
\qs poissons^ dans la Revue encyclopédi-
que, etc. Lacépède fut aussi l'éditeur de
plusieurs éditions de Buffon. Il continua
de cultiver la musique avec passion jus-
qu'à sa mort : et on a de lui plusieurs
opéras , une Messe de requiem , etc. Il a
même mis en musique \ Action générale
et les différens épisodes du Télémaque
de Fénélon. Après avoir rempli une car-
rière aussi belle, Lacépède, qui était
membre d'un grand nombre d'académies
et de sociétés savantes, mourut de la pe-
tite vérole le 19 septembre 182S , dans sa
maison de campagne à Epinay , près de
Saint -Denis, où depuis long -temps il
avait coutume de passer la belle saison.
On a cité de ce naturaliste divers traits
de bienfaisance qui font honneur à son
caractère. Personne n'était plus laborieux
que lui; rarement il donnait plus de
deux heures chaque nuit au sommeil : le
reste du temps il était couché , et c'était
dans son lit qu'il composait ses ouvrages;
il les écrivait ensuite quand il en avait
le loisir. Ses fonctions administratives ne
lui ont jamais fait négliger ses études, et
il remplit exactement les devoirs de se-
crétaire , soit du muséum d'histoire na-
turelle , soit de la classe des sciences phy-
siques et mathématiques de l'institut. 11
entretenait des correspondances avec
iSO LAC
siècle toutes les académies de l'Europe , et il en
était très peu qui ne le comptassent aa
nombre de leurs associés. On a donné une
édition do ses écrits ( commencée en
182G ) , qui porte ce titre : OEuvres com-
plètes de M. Le comte de Lacépède ^ avec
la synonymie des auteurs modernes les
plus célèbres, nouvelle édition rédigée par
iV. Desmarets , 10 vol. in-8*», accompa-
gnés d'autant de cahiers de figures colo-
riées. Outre les éloges prononcés ou im-
primés à l'époque de sa mort , au nom
des corps savans dont il faisait partie , il
a paru sur cet illustre naturaliste trois
notices,V\xnÇi de M. Mahul dans la sixième
année de son Annuaire nécrologique ; la
seconde de M. d'Amalricdansle 29' tome
de la Revue encyclopédique , et la 3' de
M. Julia Fontanelle, Paris, 1825, in-S**.
LACERDA. royez CERDA.
• L ACHABEAUSSIÈRE ( Ange-Etieîv-
ive-Xavier POISSON de), littérateur, né
à Paris en 1752 , était fils d'un avocat au
parlement qui fut, dit-on, instituteur du
célèbre Mirabeau. Dégoûté de la carrière
des armes, qu'il avait d'abord embrassée,
il se livra entièrement à la littérature , et
eut quelques différends avec Mirabeau
relativement aune traduction de Tibulle,
publiée sous le nom de celni-ci (Tours,
1796, 3 vol. in-8°), et dont Lachabeaus-
sière réclama la propriété. Il est l'auteur
du Catéchisme républicain. Sous le régime
de la terreur, et sur la dénonciation da
son propre gendre , qui l'accusait d'avoir
donné asile à Julien de Toulouse ( excla
delà Convention et proscrit), avec lequel
il n'avait jamais eu de relation , Lacha-
beaussière fut enfermé aux Madelon-
nettes , et cette persécution s'étendit sur
toute sa famille. Sa femme fut confinée
dans la prison de la Bourbe, et deux de
ses filles enfermées à Sainte-Pélagie. La-
chabeaussière , croyant sa mort inévita-
ble , écrivit , peu de jours avant celui où
l'on devait prononcer son arrêt, un. Adieu
envers, qu'il confia à un des prisonniers,
afin qu'après ses derniers momens il le
fît parvenir à son épouse et à ses filles.
Le 10 thermidor an 2 ( 28 juillet 1794 ), il
devait être conduit au supplice ; mais ce
jour-là Robespierre périt lui-même sur
l'échafaud. Lachabeaussière et sa famille
sortirent de prison, et quelques mois après
( septembre 1795), il fut compris dans la
liste des hommes de lettres auxquels on
accordait une pension. L'année suivante,
le conseil des Cinq-cents le nomma mem-
bre du comité d'instruction publique, et.
LAC
181
LAC
en 1798 , administrateur de l'Opéra. Ac-
cusé de dilapidation, en i799, il eut à se
justifier devant les tribunaux qui pro-
noncèrent son acquittement; ce qui n'em-
pêcha pas un des membres du conseil
des Qnq-cents, M. Pons de Verdun , d'im-
proviser contre lui une épigramme vi-
rulente, qu'il fit circuler, et qui finissait
par ces vers :
Petit Poisson deviendra grand
Pourvu que Dieu lui prête vie.
Lachabeaussière a travaillé à plusieurs
écrits périodiques; tels que la .Décade ^
les Soirées littéraires^ YMmanach des
Muses j dont Vigée était l'éditeur. A la
mort de celui-ci, il devait lui succéder dans
la direction de ce recueil. Mais il succom-
ba bientôt après à une longue maladie ,
le 10 septembre 1820, à l'âge de 68 ans.
Il a laissé : | Catéchisme français, ou
Principes de morale républicaine ( en
vers), Paris, 1793; 5* édit., 1800, iu-8°;
trad. en hollandais, par M™' Brinckmarm,
Amsterdam , 1796 , in-16 ; en allemand ,
par S.-H. Catel, avec le texte français,
Berlin, 1798, in-8°. L'époque et le titre de
cet ouvrage, destiné aux écoles primaires,
font aisément connaître l'esprit dans le-
quel il a été rédigé. | OEuvres dii^erses^
Paris, 180J, in-S". Elles contiennent des
poésies, des traductions en vers, d'Ho-
mère, de Virgile, d'Horace, et autres poètes
classiques ; des apologues nouveaux , des
contes, etc. , etc.; | Poésies galantes et
gi-acieuses d'Ânacréon^ Bion , Moschus^
Catulle et Horace^ imitées en vers fran-
çais^ etc. ibid., 1803 , 1 vol. in-8'' ; | Jpo-
logues m,oraux imités pour la plupart de
Saadi le Persan , ibid. . 1814 , in-8° de 3
feuilles. Ses comédies ont pour litre :
I V Intrigante jQXi 5 actes et en vers, 1776
( M. Etienne a donné, en 1813 , une comé-
die sous le même titre : elle a eu trois
représentations); \ Les Maris corrigés,
en 3 actes et en vers , 1781 ; | Le Sourd,
en 1 acle et en prose , 1783 ; ( Les deux
Fourbes, en 1 acte et en prose ; | La Con-
fiance dangereuse^ en 2 actes cl en vers ;
I Les Charlatans, en 5 actes et en vers ;
I L'heureuse erreur ^ 1793; | Lamentine ,
tragédie burlesque, 1779. Ses opéra-co-
miques sont intitulés : ] L'Eclipsé totale^
1782 ; I Le Corsaire, en 3 actes ; | Jzémia
ouïes Sauvages, en 3 actes ; | Gulistan ou
le Huila de Samarcande ; j Dilara, cic;
cl plusieurs f^audevilles qui , de même
que ses autres ouvrages dramatiques,
eurent du succès. Il a aussi laissé en ma-
7.
nuscrit une traduction en prose de Vir-
gile, dont il avait lu des fragmens à
l'Athénée. Lachabeaussière avait un ta-
lent supérieur pour la lecture et pour
la comédie de société. Il était mem-.
bre de l'Athénée de Paris , de la société
libre des sciences , lettres et arts , secré-
taire perpétuel de la société philotechni-
que, de celle des enfans d'Apollon , et se-
crétaire général de celle des Amis des arts,
LACHAISE. Vorjez CHAISE.
LACHALLMÈRE. Koyez CHALI—
NIERE.
LACHALOTATS. F^oyez CHALOTAIS.
LACHAMBRE. ^oyez CHAMBRE.
LACIIAMUS, seigneur gaulois, père
de Rutilius Numatianus , s'acquit beau-
coup de gloire dans les charges de ques-
teur, de préfet du prétoire et de gouver-
neur de Toscane. Il était né à Toulouse ,
ou, selon dom Rivet, à Poitiers. Les peu-
ples charmés de sa bonté, de son équité ,
et surtout de son attention à les soulager,
lui firent ériger plusieurs statues en dif-
férens endroits de l'empire 11 mouruJ
vers la fin du 15" siècle.
LACHAPELLE (Marie-Louise DU-
GES , femme ) , sage-femme en chef de
la maison d'accouchement ( hospice de
la Maternité ), née à Paris en 1769 , prit
les premières leçons de son art auprès de
sa mère madame Dugès , sage- femme
en chef de l'Hôtel-Dieu, et mérita par
ses succès de lui être adjointe de bonne
heure dans ses fonctions. A l'âge de 15
ans et demi, elle donna des preuves
d'un talent précoce et de beaucoup de pré-
sence d'esprit dans un accouchement très
difficile où elle eut le bonheur de sauver
la mère et l'enfant. Mariée à 22 ans,
et devenue veuve peu de temps après,
elle se consacra tout entière aux détails
de son état : en 1791 elle fut nommée pro*
fcsseur en chef à l'école de la Maternité,
Après avoir formé dans ses leçons jour-
nalières, tant théoriques que pratiques,
un très grand nombre d'élèves distingués
elle mourut en 1821. La vie de cette
femme fut une suite de bonnes actions.
Outre plusieurs observations importantes
insérées dans le 1" volume de V Annuaire
médico-chii-urgicaï, on a d'elle Recher^
ches sur les maladies des nouveau-nés ^
1 volume in-4°, et Pratique des accouche^
mens ou Recueil de mémoires et observa^
tions sur les points les plus imjwrtans de
l'art, Paris, 1821-1823, 5 volumes in-S** :
cet ouvrage a été rédigé sur les notes de
l'auleur, par son neveu le docteur Dugès.
16
LAC
182
LAC
LACHAPETXE. Voyez CHAPELLE.
LACnASTRK. Voyez CFIASTRE.
LACHATAIG\ERAYE. Voyez CHA-
TEIGNERAYE (Fuançois deVIVONNE,
seigneur de la).
LACHATRE (Claude-Louis, comte,
puis duc de ), naquit à Paris le 50 sep-
tembre 17A.5 , d'une ancienne famille du
Berri , et entra de bonne heure dans la
carrière des armes. ïl était maréchal-de-
camp et grand-bailli d'épée du Berri en
i789 , et fut élu par la noblesse député
aux états-généraux. Il parut peu à la tri-
bune ; mais il montra dans les comités sa
haine pour toute innovation et il signa
les protestations des 12 et 13 septembre
1791 contre les opérations de l'assemblée
nationale. Il émigra après la session, et
servit dans l'armée des princes en 1792.
Plein de zèle et d'activité, il organisa à
Londres, en 1793, un régiment sous le
nom de Loyal émigrant, qui se fit re-
marquer par sa bravoure et sa discipline
dans l'armée des princes, et qui soutint ,
en plusieurs occasions , les efforts des ré-
publicains victorieux, particulièrement
à Merlin et à Quiberon. Ce corps fut em-
barqué en 1796 pour le Portugal, et licen-
cié en 1802. Le comte de La Châtre se
retira à Londres, et conserva le titre de
colonel dans l'armée anglaise avec le trai-
tement qui y est attaché. Lo,uis XVIII le
nomma, en 1807, son chargé d'affaires
confidentiel auprès du cabinet britanni-
que ; et l'année suivante, il l'attacha à sa
maison ivec le titre de premier écuycr.
Après la restauration de 1814, il fut nom-
mé ambassadeur à la cour de Londres,
puis pair de France, duc et premier gen-
tilhomme de la chambre. Ayant pris parti,
en 1824, pour le vicomte de Chateaubriand
qui venait de perdre le portefeuille des
affaires étrangères , il fut remplacé , dans
ses fonctions de premier gentilhomme
de la chambre , par le comte Charles de
Damas. Frappé de cette disgrâce , il eut ,
peu de jours après , une attaque de pa-
ralysie, dont il mourut à Meudon le 18
juillet 1824.
LACHAIISSÉE. Voyez NIVELLE.
• LACHIMTH (Louis-Wenceslas), com-
positeur dramatique, né à Prague en 17b6,
mort en 1820 , possédait un talent très
distingué sur le cor, lorsqu'il vint à Paris
en 1773 : il se perfectionna par les leçons
elles conseils de Rodolphe, et parut avec
distinction au concert spirituel ; mais le
mauvais élat de sa santé l'obligea de
quitter cet instrument. Il renonça même
entièrement à l'éxecution, et se livra dé»
lors à la composition sous la direction de
Philidor. Parmi ses ouvrages, on remarque
I une Méthode de doi y té pour le forté-piano
qui a été adoptée par le Conservatoire ;
il la lit avec Adam ; mais il y ajouta deux
parties. ] Dix-huit œuvre s de musique ^ tels
que Symphonies ^ quatuor^ concerto^ so-
nates, pour le piano et la harpe ; | des
ouvrages dramatiques, parmi lesquels on
distingue : les Mystères d'ïsis arrangés,
quant à la musique, d'ai)rès la Flûte en"
chantée de Morart; il y a ajouté plusieurs
airs ; don Juan sur lequel il fît le même
travail; Y Oratorio de Saille pastiche
formé des chefs-d'œuvre des plus grands
maîtres et composé avec Kalkbrenner
père, ainsi que la Pn'se de Jéricho, autre
oratorio dans le même genre; YHeu7-€usc
} éconciliation. joiiéc aux Italiens en 1785,
Eugénie et Linval aux Variétés en 1798 ;
les Fêtes Lacédémoniennes dont les pa-
roles sont de Loudet du Sancerre : cette
pièce est restée en portefeuille ; la musi-
que de ces trois derniers opéras est de-
Lachnith seul. Lachnith avait plus de ta-
lent pour l'enseignement musical que
pour la composition : aussi a-t-il laissé
plus de bons élèves que de chefs-d'œuvre.
• LACLEDE (N... de) , historien du 18*
siècle , n'est connu que par son Histoire
générale du Portugal. Paris, 1755, 2 vol.
in-4°, ou 8 vol. in-12. C'est l'ouvrage lo
plus complet que nous ayons sur ce
royaume ; mais on reproche à l'auteur
de s'y livrer à des digressions trop fré-
quentes et à des déclamations outrées
contre les papes et la cour do Rome. Cette
histoire a été traduite en portugais, avec
des notes, Lisbonne, 1777, 16 vol. in-S".
Le même ouvrage a été publié de nou-
veau en 1828, 10 vo}. in-S", avec une con-
tinuation jusqu'à don Miguel , par M. le
marquis Fortia d'Urban et M. Miellé. Les
nouveaux éditeurs ont fait subir à cet
ouvrage phisieurs cbangemens impor-
tans.
•LACLOS (PiERKE-AsiBROiSE- Fran-
çois CHODERLOS de), naquit à Amiens^
en 1741. A l'âge de 18 ans , il entra dans
le corps royal du génie en qualité d'aspi-
rant , et fut nommé sous-lieutenant un
an après. Capitaine en 1778, il fui envoyé
à l'ile d'Aix pour y construire un fort.
Né avec des talens , de l'esprit et de l'a-
mabilité , Laclos cultiva la littérature au
milieu des occupations de l'état militaire.
Il eût été peut-être plus heureux pour sa
mémoire qu'il se fût borné »ux cormais»
LAC
183
LAC
sance3 qu'exigeaient ses fonctions; il
xi'aurait pas laissé dans les lettres une ré-
putation d'écrivain licencieux, et dans
l'histoire de notre révolution un nom
souillé de plus d'un crime. Un roman,
en 2 vol. in-8°, intitulé les Liaiso7is dan-
gereuses^ lui donna tout à coup une place
parmi les écrivains déhontés, qui ne crai-
gnent pas d'offenser la moralité publique
en dévoilant les turpitudes les plus hon-
teuses. La jeunesse , déjà imbue des doc-
Irines philosophiques, le lut et le loua
avec enthousiasme. A peine convenait-on
du défaut de naturel et de l'inlidélité des
tableaux et des caractères. En 1789 , La-
clos devint secrétaire surnuniéraire du
<luc d'Orléans, et fut bientôt un des con-
lidens intimes de ce prince. De confident,
il devint conseiller; et l'on se souvient
qu'en 1789, il faisait partie d'un club qui
se tenait au village de Mont-Rouge, près
Paris , où des personnages puissans déli-
béraient sur le sort du royaume. C'est
lui, dit-on, qui, pour faire armer les
Français qu'on voulait porter à l'insur-
rection, hiventa la fable des brigands
qui devaient venir ravager la France au
même jour et à la même heure. Chacun
s'arma pour les repousser et resta sous
les armes. Ainsi les conspirateurs eurent
tout à coup à leur disposition tme masse
énorme do soldats prêts à tout entre-
prendre. Il fut aussi un des meneurs des
terribles journées des 5 et 6 octobre. Vi-
vement inculpé à ce sujet, il suivit le duc
d'Orléans en Angleterre , lorsqu'une mis-
sion supposée exigea ce voyage , et rédi-
gea , dit-on , les lettres du duc d'Orléans
au roi, publiées pendant la révolution.
De retour à Paris en juillet 1791, il fut un
des principaux rédacteurs du Journal
des amis de la constitution , écrivit avec
Brissot la fameuse pétition qui provoqua
le rassemblement du Champ-de-Mars ,
où l'on demandait que le roi fût mis en
jugement, et la colporta dans les rues de
Paris à la tête des séditieux, ^'ommé en
4792 maréchal-de-camp et gouverneur de
tous les établissemens français dans l'Inde,
il ne partit point pour sa destination, prit
part dans le quartier du Palais-Royal aux
délibérations populaires, et finit par être
«nfermé par suite des mesures prises
îontre le duc d'Orléans. Livré à ses pen-
lées au fond de sa prison, il envoyait aux
îomités des plans de réforme, et imagina
Dne nouvelle espèce de projectiles dont
il proposa de faire l'expérience. Il fut
relâché, fit ses essais à Moudon, cl le suc-
cès les justifia. Arrêté encore une fois, il
resta en prison jusqu'au 9 thermidor; il
fut alors nommé secrétaire-général de
l'adiniiuslratiou des hypothèques, em-
ploi dont »1 s'acquitta de la manière la
plus satisfaisante. Après la réforme de
cette administration, il reprit la car-
rière militaire , servit en qualité de gé-
néral de brigade d'artillerie dans les ar-
mées du Rhin et d'Italie , et succomba à
Tarente, le 5 octobre 1805, après bien
des fatigues et bien des traverses. Outre
le roman dont nous avons parlé, on a en-
core de lui des Poésies fugitives . et une
Lettre à l'académie française , à l'occa-
sion du prix proposé pour YEloge de
Vauban , où il exagère au-delà de toute
mesure les dépenses que cet illustre ma-
réchal a occasionées à la France pour
ses fortifications. Il les porte à 1440 mil-
lions (i).M. Barbier lui a attribué la rédac-
tion des Causes secrètes de la révolution
du 9 au 10 thermidor, par Villate, 1795 ,
in-8°.
LACOLOMBIÈRE. V. COLOMBIÈRE.
• LACOLOME (Jean-Martin de ) , né
à Bordeaux en 1674 , embrassa la profes-
sion des armes et passa au service de l'é-
lecteur de Bavière. Il se distingua dans
la guerre d'Allemagne, parvint au grade
de maréchal-de-canip, et fit en celte qv alité
la campagne de 1717 contre les Turcs ,
soùs les ordres du prince Eugène. Com-
blé des témoignages d'estime de l'empe-
reur, il revint dans sa patrie, et mourut
le 20 novembre 1739. Il a laissé des Mé-
moires contenant les événcmcns de la
guerre depuis le siège de Namur en 1692
jusqu'à la bataille de Belgrade, Bruxel-
les (Bloisj, 1757, 2 vol. in-12; Francfort
(Bordeaux), 17S0, aussi 2 vol. in-12,
écrits avec prolixité ; mais on y trouve
des particularités curieuses. On lui at-
tribue l'Histoire de la ville de Bordeaux,
1737, 3 vol. in-12, où l'on trouve de l'exac-
titude et beaucoup de recherches : mais
le style en est négligé , et les grands évé-
nemens de l'Histoire de France sont con-
fondus avec les faits particuliers qui con-
cernent Bordeaux.
*LACOMBE (François), né à Avignon
en 1733 , mort vers 1795 , à Montpellier
où il était commissaire de police , est au-
teur I du Dictionnai>-e du vieux langage
français, Paris, 1763-67, 2 vol. in-8°, tou-
(i) Voyci le Journal de t satant de Tannée 1786,
page 556 «à cette atiertioa a e'ié comple'tcment ré-
futée.
LAC
184
LAC
jours recherché , quoique moins complet
«juc celui de M. de Roquefort ; \ des Obser-
vations sur Londres et ses environs, etc.,
1780, in-12 , ouvrage réimprimé sous le
titre de Tableau de Londres <^de ses en-
virons. On a encore de lui | des traductions
de quelques ouvrages anglais . tels que
les Lettres de milord Shafstesbury sur
l'enthousiasme, les Lettres historiques et
philosophiques du comte d'Orréry .. sur
la vie et les ouvrages du docteur Sivift :
quelques poésies de Pope et de Dryden,
etc. Il a été l'éditeur des Lettres choisies
de Christine^ reine de Suède^ Paris, 1759,
in-12.
* LACOMBE ( Jacques ) , littérateur
distingué, né à Paris en 1724, fit ses cours
de droit, et se consacra au barreau ; mais
s'en étant dégoûté , il obtint la patente de
libraire. Devenu ensuite auteur, il publia
un grand nombre d'ouvrages qui eurent
beaucoup de succès. Lacombe, dont la
vie n'offre rien de bien remarquable ,
mourut à Paris , le 16 septembre 1801. 11
était beau-père du célèbre Grétry. Voici
la liste de ses principaux ouvrages : 1 Pro-
grès des sciences et des beaux-arts sous
le règne de Louis XV^ ode, 1750. Elle est
insérée dans le Recueilàe l'académie d'An-
gers , et avait obtenu le prix que cette
même académie avait proposé en 17i9.
I Dictionnaire portatif des beaux-arts^
Paris , 1752, in-8°, 3^ édit. , 1759. Ce dic-
tionnaire a eu plusieurs autres éditions ,
et a été traduit en italien , Venise, 1758 ,
in-8° ; | Le Salon en vers et en prose , ou
Jugement des ouvrages exposés au Lou-
vre^ en 1753, in-12 ; | Abrégé chronologi-
que de l'histoire ancienne j \Tol . in-8° ;
\ Le spectacle des beaux-arts. 1738 , in-12,
4762, in-12 ; | Abrégé chronologique de
l'histoire d'Espagne et de Portugal^ (avec
Hacquer ) , commencé par le président
Hénault, 1759, 2 vol. in-8° ; 2' édit., 1765 ;
j Histoire des révolutions de l'empire de
Russie, 1760, in-8", traduit en allemand,
4761 ; I Abrégé chronologique de l'his-
toire du Nord. 1762 , 2 vol. in-8" ; | Mé-
moires secrets de la duchesse de Ports-
mouth. avec des 7iotes historiques . 1805 ,
a vol. in-S", avec Chamfort ; | Précis de
l'art dramatique des anciens et des mo-
dei^nes , 1808 , 2 vol. in-8" ; ] Scipion à
Carthage, opéra en 3 actes , in-12. La-
combe a travadllé au journal intitulé, VA-
vant-courcur. ou Le Mercure de France.
et a donné à l'Encyclopédie méthodique
I le Dictionnaire des arts et métiers mé-
caniques. 8 vol. ; à celui Des chasses et
à celui De l'art aratoire et du jardinage,
1 vol. ; des pèches . 1 vol. ; à celui Dea
amiisemens des sciences . l vol. Il a coo-
péré aussi à V Encyclojyédiana, 1 vol. ; au
Dictionnai7-e des jeux mathématiques et
des jeux familiers . 1 vol. Lacombe avait
beaucoup d'instruction , un talent varié ,
et un style clair, élégant et assez correct.
• LACOMBE de PRÉZEL ( Honoré),
frère du précédent , né à Paris en 1725 ,
fut aussi avocat et mourut au conmience-
ment de la révolution ; il a publié : | Dic-
tionnaire d'anecdotes, de traits singuliers
et caractéristiques . 1756 , 2 vol. in-8'' ;
I Dictionnaire iconologique, ou Introduc'
tion à la connaissance des peintures. m<?-
dailles. estampes, etc.. 1756, in-12 ; 1 Les
progrès du commerce. 1760, in-12 ; | Dic-
tionnaire portatif de jurisprudence. 176:5,
3 vol. in-12 ; | Les pensées de Pope . 1760,
in-12 ; | Dictionnaire des portraits his-
torique s. il &^, 3 vol. in-8°. On remarque
dans ces différentes compilations , de la
méthode et du goût , de l'arrangement et
du choix dans les matières.
LACOMBE ( J.-B. ), né à Toulouse, fut
d'abord instiluieur, et vint ensuite tenter
fortune à Bordeaux , d'où différentes es-
croqueries le forcèrent de se retirer. Il
ouvrit une école dans un village , où il
resta jusqu'à la révolution du 31 mai
1793.11 osa alors reparaître à Bordeaux,
où il parvint à se rendre agréable aux re-
présentans en mission, et fut nommé
président du tribunal, ou commission
militaire, dite 7'évolutionnaire. c^mûi cou-
ler tant de sang dans cette ville. Ce bour-
reau ne laissait pas même aux accusé»
la faculté de se défendre ; il les inter-
rompait en disant : Le tribunal est fixé
sur ton compte ; et il se hâtait de pro-
noncer l'arrêt de mort. Il en condamnait
jusqu'à 50 dans le même jour. Son prin-
cipal but étant de s'enrichir, il dénonçait
lui-même les plus riches habitans de
Bordeaux, et s'emparait de leurs dépouil-
les ; il parvint ainsi à devenir en peu de
mois un des hommes les plus riches du
pays. Mais dénoncé à son tour comme
ayant dépassé les pouvoirs qui lui avaient
été confiés , il fut arrêté et condamné k
mort par le même tribunal qu'il avait
présidé , et qui avait clé renouvelé après
le 9 thermidor. On ne lui accorda aucun
moyen de défense. Lorsqu'il entendit sa
condamnation, il s'écria : « Bordeaux m'a
» les plus grandes obligations ; si j'avais
, «suivi les ordres que j'avais reçus , j'au-
» rais fait périr deux fois autant d'accusés.
LAC {'6
i>ct plusieurs de ceux qui m'ccouitnl
M n'existeraient plus. «Une foule immense
l'accompagna au supplice en poussant des
cris de joie et en l'accablant de malédic-
tions. Il fut exécuté le 15 août 179i.
• LAC03iBE SAINT-MICHEL ( Jean-
Pierre ) , général français , né vers 1740
d'une famille noble du Languedoc , em-
brassa le parti des armes. Il était, au mo-
ment de la révolution , capitaine dans le
7* régiment d'arlillerie, et avait obtenu la
croix de St. -Louis. Il ne s'en déclara pas
moins ouvertement l'ennemi du trône.
Son régiment avait reçu ordre de marcher
sur Paris pour contenir le peuple , qu'on
«xcitait à l'insurrection par des intrigues
et des manœuvres de toute espèce ; mais
il manifesta lui-même dès le 12 juillet 1789
des principes si opposés à l'ordre qu'on
voulait rétablir, que le maréchal de Broglie
le fit partir avec son régiment la nuit sui-
•\ante. Elu député au mois de septembre
1791 , il dénonça les officiers de l'armée
qui donnaient leur démission , proposa
lies mesiires pour les punir et les rem-
placer. Réélu à la Convention , il vota la
mort du roi sans appel et sans sursis.
Peu de temps après il fut envoyé en
Corse et dans les Ardennes en qualité de
commissaire. On a de lui le Rapport sur
sa mission en Corse , 1793 , in-8°. De re-
tour à Paris, il devint membre du comité
de salut public ; mais il ne s'y fit point
remarquer. Il passa de là au conseil des
Anciens , et il en devint président le 28
octobre 1797. Sorti du Corps législatif en
1798, il reprit son rang dans l'artillerie ,
et la même année le Directoire le nomma
ambassadeur à Naples; maisil fut abreuvé
de dégoûts à cette cour, et il la quitta en
lévrier 1799. Il fut alors employé comme
général, et se distingua dans la campagne
d'Italie en 1803 , et dans celle de 1806
contre les Prussiens ; enfin il passa en
Espagne ; mais le mauvais état de sa
santé l'obligea de rentrer en France, il
mourut le 27 janvier 1812 des suites de ses
blessures.
• LACOMBE ( Dominique ) , évéque
d'Angoidême naquit le 25 juillet 1749, à
Montrejeau , dans la Haute-Garonne dio-
cèse de Comminges. Apiès avoir fait ses
études chei les doctrinaires de Tarbes , il
entra dans leur congrégation en 1766 , y
occupa divers emplois , et devint en 1788
principal ou recteur du collège de Guyenne
à Bordeaux. Il occupait encore cette place
à l'époque de la révolution dont il adopta
les principes. Il devint curé de St.-Paul à
:> LAC
Bordeaux, prêta le serment constitution-
nel, et fut nommé député à l'Assembléa
lét'islutive ; mais le lendemain du jour
où fut décrclée la loi qui prohibait tout
costume ecclésiastique, il donna sa démis-
sion de représentant (7 avril 1792). De re-
tour à Bordeaux , il reprit l'exercice de
ses fonctions sacerdotales, et conserva
néanmoins assez d'influence pour se ga-
rantir non - seulement de toutes pour-
suites, mais encore pour sauver la vie à
plusieurs citoyens accusés de fédéralisme.
Après la mort de M. Pascaueau, évéque de
Bordeaux ( 1797 ) il fut appelé à lui suc-
céder. Sacré le 14 février 1798 , il tint
avec son clergé constitutionnel un con-
cile en 1802. Il assista à l'assemblée diie
concile nationalj à Paris , prit une part
très active aux affaires du concordat,
donna sa démission de son siège de Bor-
deaux ainsi que ses collègues, sur la réqui-
sition du gouvernement consulaire, et fut
compris parmi les douze évêques constitu-
tionnels qui firent partie du nouvel épi-
scopat français. Envoyé à Angouléme ,
après avoir refusé sa rétractation que lui
demandait au nom du pape le cardinal
Caprara^ légat en France, il resta attaché
à ses principes qu'il proclama même dans
une lettre adressée le kjuin 1802, au vé-
nérable prêtre JBinos ^ ancien chanoine
de St.-Bertrand ^ auquel il faisait part
des motifs de son refus. Lacombe eut à
l'occasion de ses doctrines, plusieurs al-
tercations assez vives avec quelques
membres de son clergé. Lorsque Bona-
parte dépouilla le pape de ses étals, La-
combe approuva cette mesure dans un de
ses mandemens; cette conduite était d'au-
tant moins généreuse que le pape venait
d'être arrache de Rome et conduit en
France. Il assista aussi au champ de mai, et
exhorta son clergé à remercier le ciel du
retour de Bonaparte de l'ile d'Elbe. Ce
prélat mourut presque subitement le 7
avril 1823. L'Jmi de la religion lui a con-
sacré une Notice très détaillée , tora. 3^
pag. 357.
LACOMBE. Foyez GUYON.
LACO-\DAMIîVE. Foyez CONDAMINE.
* LACOSTE ( Elie) , médecin, né vers
1740 , à Montignac , dans le département
de la Dordogne, fut député à la Conven-
tion nationale à l'époque de la révolu-
tion. Devenu en 1790 administrateur do
la Dordogne , il fut élu députe do ce dé-
partement à l'Assemblée législative , puis
fi la Convention , où il vota la mort da
Louis XYI, sans appel et sans sursis. Il sié-
16.
LAC
186
LAC
Çfca constamment à la Montagne, fut nom-
mé présidenlde l'assemblée le {"messidor
an 2 ( 19 juin 17% ) , et fit toujours partie
du fameux comité de sûreté générale , qui
fut, pendant quatorze mois , le complice
de tous les crimes du comité de salut pu-
blic. Envoyé en mission dans le nord , il
s'y conduisit avec assez de modération. Il
se prononça fortement contre Robespierre
au 9 thermidor , et fit décréter, dès le
même jour , la suppression du tribunal
révolutionnaire , dont l'action n'était plus
redoutable que pour la faction qui venait
d'être renversée. Lorsque Lecoinlre de
Versailles dénonça les membres de l'an-
cien gouvernement , Lacoste le combat-
tit vivement , et demanda son arresta-
tion. Dénoncé par Gouly, le 28 mai 1795,
comme un des auteurs de l'insurrection
des premiers jours de prairial, il fut à son
tour, décrété d'arrestation. Il fut rendu à
la liberté par l'amnistie de brumaire an k ,
et retourna dans sa ville natale , où il re-
prit ses fonctions de médecin ; il y mourut
obscurément en 1803.
'LACOSTE (Pierre-François), prêtre,
chanoine honoraire, naturaliste distingué,
naquit à Plaisance, j)rès de Toulouse, em-
brassa l'état ecclésiastique, et fut pendant
plusieurs années professeur de morale à
Toulouse , d'histoire naturelle ( minéralo-
gie) à l'école centrale du département du
Puy-de-Dôme , et de la même science » la
facidté de Clermonl-Ferrand en Auvergne.
C'est dans ce département qu'il se livra à
l'étude de la géologie, de la minéralogie,
et de l'histoire naturelle en général. Il
étudia et explora toutes les parties de
cette province sur laquelle il a fait pa-
raître plusieurs ouvrages importans. Lors
de la révolution française , il adhéra à la
constitution civile du clergé, ainsi que le
témoignent ses premiers ouvrages , dont
voici la liste : 1 Lettre de M. l'abbé Lacoste,
de Plaisance, vicaire delaDalbade, à un
Turé non conformiste, 1791 , in-8°; {Réponse
à la lettre d'un curé non conformiste^
4791, in-8° ; | Discours sur les devoirs des
citoyens envers la patrie^ Toulouse, 1792,
in-8° ; | Discours pour une fête civique .
il 793, in-8" ; | Discours sur les obligations
que les Français se sont imposées en ac-
ceptant la constitution , Toulouse , 1795 ,
in-8° ; | Discours sur les vertus républi-
caines, Toulouse , 1795 , in-S". Le renver-
sement du Directoire et le nouvel ordre
de choses qu'amena le consulat de Bona-
parte parurent faire une diversion aux
Idées républicaines de Lacoste , qui ne
s'occupa plus que de sujets scîenlîfiqties,
et publia : | Observations concernant l'or-
griculture dans les montagnes des dépar-
temens de l'Jnvergne^ Clermont, 1799,
in-8"; | Quelques observations concernant
l'agriculture dans les montagnes du dé'
jmrtement du Puy-de-Dôme j 1801, in-8**;
I Discours sur les dispositions des habi'
tans du département du Puy-de-Dôme
pour les sciences, 1801 , 10-8" ; [ Discours
sur les avantages qui résultent de l'étude
de l'histoire naturelle, avec des notes, 3*
édit. , 1801, in-8° ; | Observations sur les
volcans d'Auvergne, suivies de notes sur
divers objets recueillis dans une course mi'
néralogique, 1802, in-8°,2'' édition, 1803;
I Lettre miner alogique , et géologique sur
les volcans de l'Auvergne, écrite dans un
voyage fait en 1804 , 1805, in-8° ; | His-
toire naturelle de l'Auvergne, et des dé-
partemens environnans : (il en a lui-même
rassemblé les matériaux), 3 vol. in-8°.
Lacoste est mort le 18 avril 1826.
• LACOSTE ( Jeatv-Baptiste), avocat,
fut député à la Convention par le dépar-
tement du Cantal et vota la mort de
Louis XVI, sans appel ni sursis. Pendant
le reste de la session , il fut presque tou-
jours en mission , et fut envoyé dans les
départemens de la Haute-Loire , du Bas-
Rhin , de la Moselle et près des armées
du Nord. Il accompagna aussi l'armée qui
fit la conquête de la Hollande, et il s'y fit
remarquer par son intrépidité , notam-
ment à Haguenau et à Kaiserslautern ,
mais il était dans les villes qu'il parcou-
rait le proconsul le plus sanguinaire.
Dans une lettre datée de Strasbourg le 14
nivôse 3 janvier 1794, il se vantait des
profanations qu'il avait ordonnées à
Spire, et envoyait la dépouille des églises,
les reliques, les ciboires, et, selon ses ex-
pressions, d'autres instrumens de sottise'.
A son retour, il fut accusé (1" juin 1795)
d'avoir organisé la commission qui en-
sanglanta l'Alsace sous la direction de l'ac-
cusateur public, i'infàmc Schneider. Un
député prit la parole en sa faveur, car il
était absent pour maladie : son défenseur
demanda pour Lacoste l'autorisation de
rester chez lui sans gendarmes; car,
dit-il, il n'a pas les moyens de les payer.
Lacoste n'en fut pas moins décrété d'arres-
tation ; il fut ensuite amnistié. Bonaparte
l'appela en 1800 à la préfecture des Fo-
rets, et en 1815 à celle de la Sarthe. Atteint
par la loi du 12 janvier 1816 , il se retira
en Belgique , d'où il obtint ensuite la la-
veur de rentrer en France. En 1818 il
XAC 187
fut attaqué à Mauriac pa»* une riialatlie
qui faillit l'envoyer au tombeau : il paraît
que ses remords l'avaient préparc à un
changement sincère ; il fit appeler M.
l'abbé d'Auzers , curé de la ville , et ce
vénérable ecclésiastique le fortifia dans
ses heureuses dispositions. Lacoste se
soumit humblement à tout ce qui lui était
prescrit , et ce ne fut pas chez lui une
disposition passagère ; car pendant les
trois années qu'il vécut encore , il persista
dans les mêmes sentimens, et manifesta
souvent en public son vif repentir de ses
crimes et de ses folies. Il est mort en
chrétien le 13 août 1821. Voyez VAmi de
la religion, tome 59 , page 512.
LACOUR. Voyez COUR.
• LACOUR (N.... ), peintre français,
né en 1746 , à Bordeaux , mort dans sa
ville natale le 28 janvier 1814, apprit les
premiers élémens do son art dans l'atelier
de Vien , et alla ensuite perfectionner son
talent à Rome ; il se fixa ensuite A Bor-
deaux , malgré les offres brillantes qui lui
étaient faites pour l'attirer à Paris , et
il a orné presque toutes les églises de
cette ville de ses tableaux. Son chef-
d'œuvre est celui qui représente Saint
Paulin archevêque de Bordeaux . accueil-
lant dans son palais une foule de mal-
heureux persécutés. On remarque aussi
un de ses tableaux représentant la Fa-
çade des Chartrons. Cet artisie a ex-
posé au Louvre différentes productions
parmi lesquelles on a distingué un Avare
endormi sur son trésor, wa. Mendiante des
paysages , des têtes d'études et des m.a-
rines. etc. Il peignait avec succès dans
plusieurs genres, et ses tableaux d'his-
toire sont estimés. Il n'est pas moins cé-
lèbre comme professeur. Jusqu'alors on
n'enseignait à Bordeaux q\ic les premiers
principes de l'art du dessin; il introduisit
l'étude delà peinture dans l'établissement
où il avait été placé, et forma en peu de
temps une foule d'élèves très distingués.
* LACRETELLE ( PinnnE-Louis) pu-
bliciste et littérateiu", membre de l'insti-
tut , né à Metz en 1751 , était fils d'un
avocat de Nancy qui le destina lui-mpme
au barreau. La première cause que le
jeune Lacrelelle plaida dans cette ville
fut perdue; mais il fit à celte occasion un
mémoire qui mérita l'approbation géné-
«•ale. Il fut inscrit, en 1778, au tableau
des avocats de Paris , et se vit chargé , en
partie , de la rédaction du Grand Réper-
toire de Jurisprudence. Il publia aussi
plusieurs mémoires, obtint divers succès
LAC
littéraires et se lia avec les Gingnené, les
Suard, les Fontanes. En 1781, il obtint
l'accessit au prix proposé par l'académie
française pour Y Eloge de Sainte-Maure,
duc de Mon(ausier{ i ). Déjà , en 1774 , il
avait été couronné par l'académie de 3Ieti
pour un discours dont le sujet était : As-
signer les causes des crimes et donner les
moyens de les rendre plus rares et moins
funestes. Il le fut de nouveau, en 178i ,
à la même académie , pour son discours
sur le Préjugé des peines infamantes qui
obtint le premier prix ; le second fut dé-
cerné à Robespierre. Lacretelle donna
aussi plusieurs articles au Mercure et vit
s'ouvrir devant lui les portes de l'institut.
Il fit paraître en outre en 1784 une Lettre
sur la réparation qui serait due aux ac"
cusés jugés innocens. une Dissertation
sur le ministère public et ùes Réflexions
sur la réforme de la justice criminelle^
formant un volume in-S" ; et de 1786 à
1791 , une Logique . une Métaphysique , et
une Moraîe,en 4 volumes in-4'', faisant par-
tie de l'Encyclopédie méthodique.En 1787,
Malesherbes , qu'il voyait souvent , l'avait
fait nommer de la commission que Louis
XVI chargeait de préparer des projets de
reforme dans la législation pénale. Il
adopta , mais avec modération, les prin-
cipes de la révolution, fut élu député
suppléant à l'assemblée Constituante , et
ne siégea que dans l'assemblée Législative.
Après la journée du 10 août , il renonça
aux affaires publiques , et vécut dans la
retraite juscfu'après le 9 thermidor. Après
avoir été, du temps du Directoire, un
des jurés de la haute-cour nationale, il
entra, en 1801, au corps législatif, où il
vota plusieurs fois contre le projet du
gouvernement; il n'y fut point réélu. Peu
de temps après la réorganisation de l'in-
stitut, Lacretelle fut choisi pour rem-
placer Laharpe, et, durant la période
du règne de Napoléon, il se montra en
quelque sorte hostile au gouvernement
impérial. Il composa encore plusieurs
mémoires consultatifs parmi lesquels se
remarque celui qu'il écrivit pour le prince
de Carignan , de la maison de Savoie.
Plus tard il coopéra avec MM. Etienne,
Jay, etc., à la rédaction de \di Minerve
française 3 recueil périodique, conçu
dans le sens de l'opposition libérale , et
qui avait remplacé le Mercure. Lorsque la
première loi de censure sur la presse pé-
riodique eut paru en 1820 , Lacretelle
(i) Ce fut Garât qui obtint le prii
LAC
188
LAC
crut pouvoir en éluder les diposilions en
se faisant libraire, et publia quelques
brochures politiques destinées à faire suite
à la Minerve. Il fut traduit à celte occa-
sion devant la police correctionnelle , et
condamné à un mois de prison que le roi
lui remit. La classe de l'institut., qui re-
prenait le nom d'académie française le
choisit pour un de ses chanceliers. Après
avoir relouché ses écrits, et en avoir pré-
paré une édition générale, Lacretelle vit
avec calme approcher sa fin , et mourut à
Paris le 5 septembre 1824. Sous les divers
gouvernemens qui s'étaient succédé en
France , il fut du petit nombre de ceux
qui conservèrent leur indépendance, et
son honorable pauvreté n'excila jamais en
lui ni plainte ni regret. Il n'a pas eu le
temps de voir se terminer l'édition com-
plète de ses Œuvres , dont il n'a. vu impri-
mer que 6 volumes , des quinze volumes
in-S' dont elle devait se composer. Il
avait précédemment publié : | Essai sur
l'éloquence du barreau; \ Discours sur ce
sujet : assigner les causes des crimcSs
etc. ( voyez plus haut ), Nancy, 1774, in-8°;
I Plaidoyers . Bruxelles ( Nancy ), 1773,
in-8° ; | Discours sur la multiplicité des
lois , 1778 , in-S" ; | Mélanges de juris-
prudence ou divers plaidoyers , précédés
d'un Essai sur l'éloquence et suivis de
différens morceaux de philosophie et de
jurisprudence j Paris , 1779, in-8° ; réim-
primés en 1807; | Eloge de Charles de
Sainte-Maure j. duc de Montausier, 1781 ,
10-8°; I Discours sur le préjugé des peines
infamantes^ 1784, in-8°; réimprimé l'an-
née suivante avec d'autres morceaux;
I Convocation de la prochaine tenue des
états généraux en France, novembre
1788 ; I Mémoire sur l'institution des bu-
reaux des finances et futilité de leurs
fonctions. 1789, in-8°; \ De l'établisse-
ment des connaissantes humaines, et de
l'instruction publique dans la constitution
française . 1791, in-8°; | Du système du
gouvernement pendant la session ac-
tuelle, elc, 1797, in-8°; \ Sur le i7 bru-
maire , à Syeyès et à Bonaparte ( an 7 ),
1799, in-8° ; | Idée sommaire d'un grand
travail sur la nécessité, l'objet et les avan-
tages de l'instruction , sur les difficultés
qui s'y opposent, et sur leur aplanisse-
ment au moyen d'une collection complète
€t méthodique de toutes les connais-
sances humaines.jiaTJi. L. C, 1800, in-8";
, \OEuvres diverses, ou Mélanges de philo-
sophie et de littérature , i80^-l807 , 5 vol.
în-8°; l Fragmens politiques et littéraires.
1817, in-8^ etc. Parmi les morceaux que
Lacrelelle a fournis au Mercure on re-
marque une Notice sur Legouvé ( le père
de l'auteur de la Mort d'Abel). On lui
attribue en outre la publication de la tra-
duction en français des Lettres d'un cul-
tivateur américain , par S. John Crève-
cœur, Paris, 1784 , 2 vol. in-8°. L'édition
en 16 volumes in-S**, dont nous avons
parlé plus haut comprend quelques pro-
ductions encore inédites , telles que : les
Etudes sur la révolution et Mes soirées à
Malesherbes. M. Parent-Réal a consacré
une notice à Lacretelle dans la Revue en-
cyclopédique ,\.omc 24 , page 351.
LACROIX. Voyez CROIX DU MAINE,
NICOLLE et PETIS.
LACROIX (Claude), jésuite, né à
Saint -André, village entre Hervé et Da-
lem, dans la province de Limbourg, l'an
1652, se fit jésuite l'an 1673, enseigna la
théologie morale à Cologne et à Munster,
et mourut à Cologne le 1" juin 1714. On a
de lui un Commentaire sur la Théologie
morale de Busembaum , Cologne , 1719 , 2
vol. in-fol. Lacroix donne en entier dans
son Commentaire le texte de Busem-
baum , pour l'expliquer et fixer le vrai
sens des décisions : s'il a eu tort , les cen-
seurs caustiques qui l'ont accablé d'in-
jures et d'accusations odieuses ne sont
pas non plus à l'abri des reproches. {Voy.
BUSEMBAUM, ESCOBAR, PASCAL. ) Le
nère François-Antoine Zaccaria a justifié
plusieurs opinions des deux jésuites que
Coucina etPatuzzi avaient censurées avec
aigreur : il est certain que , en bornant ,
au cas précis , supposé par les auteurs ,
la plupart dei décisions qui paraissent re-
lâchées, on verra presque toujours dispa-
raître ce qu'elles semblent présenter de
révoltant. Il est également vrai encore
que toutes ces opinions avaient été ensei-
gnées avant les jésuites, qui n'ont fait que
les adopter et les répéter. ( Voy. MOYA. )
L'édition , qu'on dit avoir été faite à Co-
logne en 1737, est supposée. Ce n'est qu'un
nouveau titre et une nouvelle table ajou-
tée à l'aBcienne édition.
* LACROIX ( Jean-François), né à
Compiègne , est auteur des ouvrages sui-
vans : | Abrégé chronologique de l'his-
toire ottomane, 1768 , 2 vol. in-8'' ; ] DiC'
tionnaire des dits et faits mémorables,
1768,2 vol. in- 8°; | Dictionnaire histori-^
que portatif des femmes célèbres , 1769,
2 vol. in-8°; | Dictionnaire historique dç s
sièges et batailles mémorables de l'histoire
ancienne et moderne , 1770, 3 vol. petit
LAC
iS9
LAC
îil-8° ; ! Dictionnaire historique des cultes
religieux, i770, réimprimé en 1775, en 3
vol. petit in-8*; | Dictionnaire historique
des saints personnages ^ 1772, 2 vol. petit
in-8° ; 1 Dictionnaire poétique d'éduca-
tion . 1775 , 2 vol. petit în-8°. Ces diffé-
rentes compilations sont faites avec mé-
thode et avec goût.
• LACROIX ( J. P. de ), né en 1754 à
Pont-Audemer, d'une famille bourgeoise,
entra très jeune dans l'aiicienne gendar-
irferie de France. Après la dissolution de
ce corps, il se fil avocat, et en exerça la
profession à Anet. Lorsque la révolution
arriva , il en embrassa les principes avec
enthousiasme. Elu, en 1791, procureur-
général-syndic du déparlement de l'Eure,
il fut l'année suivante député par ce dé-
partement à l'assemblée Législative. Un
bel organe , une figure agréable , une
taille noble , élevée, quelque esprit, une
imagination ardente et d'assez bonnes
manières , le firent rechercher de tous les
partis : il se rangea d'abord du côté de
la cour ; mais les ennemis de la monar-
<:hie le séduisirent à force de présens.
Dès lors on ne le vit que rarement garder
quelque mesure, et les ministres, les gé-
néraux , les émigrés , la garde du roi , le
comité dit autrichien:, devinrent tour à
tour l'objet de ses dénonciations et de ses
invectives; les prêtres furent surtout en
butte aux poursuites de Lacroix qui,
étendant sa haine jusqu'au monarque lui-
môme , accusa Louis XVI d'être la cause
des troubles qui agitaient la France par
son refus de sanctionner les décrets re-
latifs au clergé. A cette occasion , il fit
mander, séance tenante, le ministre de
l'intérieur à la barre pour y rendre
compte de sa conduite. Par suite de ses
motions révolutionnaires, les ministres de
la guerre et des affaires étrangères furent
aussi obligés de comparaître , et de se
disculper des accusations qu'il avait por-
tées contre eux. Le 20 juin 1792 , on le
vit encore exiger que le maire et la mu-
nicipalité fussent appelés à l'assemblée,
pour y rendre compte de ce qui se pas-
sait dans Paris ; mais , peu de jours après,
il provoqua lui-même la levée de la sus-
pension de Pétion , prononcée par le dé-
partement. Quoiqu'il eût fait voir aussi
beaucoup de haine pour M. de Lafayette,
<iu'il trouvait encore trop modéré , il vota
néanmoins, dans la séance du 8 août
J792 , contre sa mise en accusation. Le 10
août , il se fit remarquer par do nou-
velles violences, et fit décréter la créa-
tion d'une cour martiale, pour juger,
sans désemparer, les Suisses faits pri-
sonniers à l'attaque du château des Tui-
leries. Le 19 août, il fut nommé prési-
dent de l'assemblée Législative. Réélu en
septembre de la môme année , à la Con-
vention nationale, il y vota la mort de
l'infortuné Louis XVI, sans appel et sans
sursis , fut chargé trois fois , avec Danton,
de missions pour la Bel;j[ique , et rentra
dans la Convention , après avoir considé-
rablement accru son patrimoine, qui était
fort médiocre avant son entrée dans la
carrière politique. Méprisé des députés de
la Gironde et du côté droit , Lacroix fut
vivement inculpé par eux sur sa conduite
dans la Belgique et ses liaisons avec Du-
mouriez; mais la Montagne le soutint
alors fortement. Le 27 mai 1793 , il prit
hardiment la défense de Robespierre, de
Danton et de Marat, accusés par le côté
droit d'être les instigateurs de la conspi-
ration du 10 mars , et des troubles qui,
en ce moment même , agitaient Paris. Six
jours après , il fit créer une armée ré-
volutionnaire de six mille hommes. Mais
la faction de Robespierre voulant à son
tour écraser celle des cordeliers , à la-
quelle Lacroix appartenait, renouvela
contre celui-ci les imputations alléguées
par les Girondins. Lacroix triompha une
seconde fois, le 28 janvier 1794; et
croyant désormais n'avoir plus rien à
redouter , il se livra à ime sécurité
qui fut la cause de sa perte. Lié inti-
mement avec Danton, son collègue, ils
ne s'occupaient plus ensemble que de
jeu et de plaisirs , tandis que la haine et
l'ambition de Robespierre veillaient tou-
jours pour écraser ses ennemis. Ils fu-
rent arrêtés ensemble, conduits à la pri-
son du Luxembourg, et condamnés à
mort , avec Desmoulins , Hérault de Sé-
chelles , etc. Lacroix fut exécuté le 8 avril
179/1.. On rapporte que, pendant son in-
carcération, il conversait assez gaiement
avec son ami sur le sort qui les attendait,
et qu'ils se demandaient quelle grimace
ils feraient lorsque le rasoir national leur
couperait la parole. Ce sang-froid les
suivit jusqu'aux pieds du tribunal, où ils
s'amusaient à jeter de petites boulettes de
pain à la figure des juges et des jurés:
calme affreux ! que l'excès seul de leur
perversité peut faire concevoir. Ce fut
Lacroix qui le premier distingua l'opi-
nion des différens membres de l'assem-
blée où il siégeait , par le nom de côté
gauche et de coté droit.
LAC
190
LAC
• LACnOIX de CONSTANT ( Charles
de ) , né à Givry en Champagne , le 4/*
avril 1754, fui, avant la révolution, chef
de bureau au contrôle général des finan-
ces, sous Turgot, auprès duquel il resta
quatre années. Nommé, en 1792, parle
département de la Marne , député à la
Convention , il y vota la mort de Louis
XVI, sans appel et sans sursis. Avant et
après le 9 thermidor, il fut chargé de di-
verses missions dans les départcmens.En-
•voyé en 1794 dans les départemens des
Ardennes et de la Meurthe , il obligea par
un arrêté , tous les prêtres à se rendre
au chef-lieu de leur district , sous la sur-
veillance la plus scrupuleuse des comités
révolutionnaires. Rentré dans la Conven-
tion , il s'opposa à ce que les biens des
condamnés pendant la terreur fussent ren-
dus à leurs parens. Il fut envoyé dans le
département de l'Oise en 4793, 'se livra à
des orgies scandaleuses, notamment à
Lucienne , dans la maison qui avait ap-
partenu à la comtesse du Barry ; entre
autres plaisirs , il s'y donna celui de dé-
chiqueter à coups de sabre tous les por-
traits des rois de France. Lacroix fut mem-
bre du conseil des Anciens après le 13
vendémiaire ( 5 octobre 1793). Le 27 du
'Miême mois il fut appelé au ministère des
relations extérieures , et, en cette qualité,
il eut l'impudence d'inviter deux ambas-
sadeurs étrangers à la cérémonie de l'an-
niversaire du martyre de l'infortuné Louis
XVI. Les ambassadeurs indignés ne firent
point de réponse. Son impéritie fut d'au-
tant plus remarquée qu'il eut pour suc-
cesseur M. de Talleyrand. Le 16 juillet
4797, il fut remplacé dans ses fonctions
ministérielles , et envoyé comme ambas-
sadeur en Hollande , où il seconda la ré-
volution démocratique qui s'opéra dans
ce pays en 179S. Appelé par les consuls,
après le 18 brumaire, à la préfecture des
Bouches du-Rhône , il donna de l'éclat à
son administration par les beaux monu-
mens qu'il fit construire à Marseille , et
passa de là à la préfecture de la Gironde.
Il mourut à Bordeaux , dans les premiers
jours de novembre de l'année 1805.
*LACUOSSE ( Jean-Baptiste- Ray-
mond, baron de ) , contre-amiral , naquit
à Meilhan ( Lot-et-Garonne) , le 3 sep-
tembre 1760 , d'une des familles les plus
remarquables de la Guyenne : son père
était lieutenant des maréchaux de France
pour cette province. Après avoir fait ses
études au collège de Juilly, il entra à
l'âge de 18 ans dans la marine royale.
comme simple garde sur la Friponne :, fit
la campagne d'Amérique , et assista sur
cette frégiUe à deux combats, contre des
vaisseaux anglais qui furent pris; il s'em-
barqua ensuite sur le vaisseau \ Argo-
naute, et se battit encore dans le golfe de
Gascogne ; Lacrosse était enseigne de vais-
seau sur la frégate la Cléopâtre, attachée
à l'escadre du bailli de Suffren , qui déli-
vra à la suite d'une fameuse bataille, la
ville de Gondelour , alors assiégée par
terre etpai- mer. Pendant la paix , il fat
attaché à plusieurs stations lointaines
(178:^-1789 ). Il était parvenu, en 1792, au
grade de capitaine de vaisseau; mais sous
la terreur il fut incarcéré et n'échappa
que par miracle à l'échafaud , sur lequel
périrent tant d'officiers distingués, tels
que les Kersaint , les d'Estaing , etc. Le
Directoire le rendit à son poste et il était
chef de division dans la célèbre et mal-
heureuse expédition d'Irlande , que com-
mandaient Morard de Galles et Hoche.
C'est au retour de cette campagne qu'il
soutint , sur le vaisseau les Droits de
l'homme, l'un des combats les plus fjlo-
rieux de la dernière guerre : les Anglais
rendirent hommage au sang-froid et au
talent de Lacrosse, et quoiqu'on eût à dé-
plorer la perte de ce vaisseau , cette af-
faire lui fit beaucoup d'honneur. Nommé
contre-amiral, Lacrosse eut à soutenir
une espèce de siège dans le port de la
Hogue , avec la flottille qu'il commandait
et qui fut bombardée par les Anglais. A
l'époque où l'on s'occupa pour la première
fois sérieusem cnt d'une descente en An-
gleterre , il reçut la place d'inspecleur-
général des côtes, depuis Cherbourg jus-
qu'à Anvers. Mais les démonstrations de
guerre que l'on faisait alors n'avaient
d'autre but que de détourner l'attention
de l'expédition d'Egypte que l'on prépa-
rait avec activité. Plus tard, lorsque l'ar-
mée navale , commandée par l'amiral
Brueis, mit en mer, le contre-amiral La-
crosse fut chargé d'aller à Madrid pour
décider le cabinet espagnol à faire sortir
ses escadres de Cartliagène et de Cadix,
afin qu'elles se réunissent à la flotte fran-
çaise, et il réussit dans celte mission.
Lorsque la révolution du 18 brumaire eut
été consommée, on lui proposa le minis-
tère de la marine qu'il refusa. Après la
paix d'Amiens, le gouvernement le nom-
ma capitaine-général de la Guadeloupe, et
Lacrosse séjourna pendant deux ans dans
cette colonie. Ne sachant pas , quand il
revint, que la paix avait été rompue, il
LAC
19i
LAC
ne chercha point à éviter les \aîsscaux
anglais, et tomba dans une croisière en-
nemie qui bloquait le port de Brest. Ce-
pendant il échappa , et il parvint même à
s'emparer d'une corvette qu'il fit entrer
dans un port d'Espagne. Nommé , à son
retour en France , préfet maritime du 2*^
arrondissement au Havre, puis directeur-
général de l'armement . et commandant
en second de la flotlille destinée à une
descente en Angleterre, il remplit ses fonc-
tions avec un zèle qui fut récompensé par
la place de commandant , après la mort de
Brueis. Il avait déjà préservé les vaisseaux
de l'incendie qu'avaient cherché à y allu-
mer les Anglais : il se défendit avec succès
contre leurs nouvelles attaques, jusqu'à
ce qu'il fut envoyé à Rochefort, comme
préfet maritime. Après la seconde restau-
ralion ( en 1816 ) il fut mis à la retraite.
Il est mort le 10 septembre 1829, avec la
réputation. d'un de nos marins les plus
distingués.
LACROZE. l'oyez CROZE.
LACTAIVCE ( Lucius Coeuus-Firmia-
Nus ), orateur et défenseur de l'Eglise, né
( suivant l'opinion la plus commune )
dans le 5' siècle , étudia sous Arnobe, à
Sica en Afrique. On ne connaît ni son
pays, ni sa famille ; presque tous les his-
toriens le font africain; mais le Père
Franceschini, carme, prétend qu'il était
de Ferme, et ses raisons sont très plausi-
bles. Son éloquence lui acquit une si
grande réputation , qvie Dioclélien le fit
venir, vers l'ain 290 , à Nicomédie , où il
tenait son siège , et l'engagea à enseigner
la rhétorique latine ; mais il y eut peu de
disciples , parce qu'on y parlait plus grec
que latin. Là il vit commencer, l'an 303
de Jésus-Christ, celte terrible persécu-
tion contre les chrétiens; et, s'il n'était
pas lui-môme alors attaché à la religion de
VEvangile ( ce qu'on ne peut décider,
parce qu'on n'a rien de certain sur l'épo-
que de sa conversion ) , son humanité du
moins le trouva sensible aux maux qu'il
voyait souffrir aux chrétiens. Sa vertu et
son mérite le rendirent si célèbre , que
Constantin le fit venir dans les Gaules et
lui confia l'éducation de son fils Crispus,
l'an 517. Lactance n'en fut que plus mo-
deste : il vécut dans la pauvreté et dans
la solitude , au milieu de l'abondance et
du tumulte de la cour. Il ne reçut les
présens de l'empereur que pour les dis-
tribuer atix pauvres. Go grand homme
mourut vers l'an 323 à Trêves , à ce qu'on
présume, dans un âge très avancé. Le style
de Cicéron avait été le modèle du sien;
même pureté, même clarté, même no-i
blesse, môme élégance. C'est ce qui le fit
appeler le Cicéron chrétien. Parmi les
ouvrages dont il a enrichi la postérité,
les plus célèbres sont : [ les Institutions
divines^ en sept livres. L'auteur y élève
le christianisme sur les ruines de l'idolâ-
trie ; mais il réfute beaucoup plus heu-
reusement les chimères du paganisme,
qu'il n'établit les vérités de la religion
chrétienne. Il traite la théologie d'une
manière trop philosophique ; il parle des
mystères avec peu d'exactitude. Il parait
néanmoins que le père Petau et d'autres
ont jugé trop sévèrement quclqucs-une,
de ses expressions, sans considérer que
dans ce temps le langage théologique
n'était pas encore fixé, quoique la foi
fût sûre et constante. Un critique plus
modéré en a parlé de la manière suivante :
a Plusieurs censeurs trop rigides y ont
» noté un assez grand nombre d'erreurs
D théologiques; mais la plupart sont seu-
» lementdes façons de parler peu exacte?,
» et qui sont susceptibles d'un sens orlho-
n doxe , lorsqu'on ne les prend pas à la
w rigueur. Il faut se souvenir que cet au-
i> teur n'était pas théologien, mais orateur;
» qu'il n'avait pas fait une longue étude
Dde la doctrine chrétienne, mais qu'il
» possédait très bien l'ancienne philoso-
■D phie. Quoiqu'il ne fût pas assez instruit
» pour expliquer avec précision tous les
» dogmes du christianisme , il a cepen-
» dant rendu à la religion im service cs-
» sentiel , en mettant au grand jour les
» erreurs, les absurdités et les contradic-
» lions des philosophes. » Ce traité a été
traduit en français par René Famé, Paris»
lS.'i2, in-fol. Le 1"" livre de ses Institution»
a été aussi traduit par Drouet de Mau-
pertuy, Avignon , 1710, in-12. Il en a été
fait un abrégé, Institutionum epitome.
I Un Traité de la mort des persécuteurs^
publié pour la première fois par Baluze,
d'après xm manuscrit trouvé à l'abbaye
deMoissac, en Quercy, et réimprimé à
Utrecht, ln-8°, en 1693. ( Ployez BAUL-
DRI et FOUCAULT , Nicolas. ) On y a
ajouté une dissertation de Dodvrel, De
ripa striga , qui est d'une sécheresse ex-
trême; mais on y voit avec plaisir la
préface du père Ruinard, ad Jeta martyr
nwi, qui réfute supérieurement une autre
dissertation de cet anglais : De paucitate
martyrum. Dom Le Nourry , trompé sans
doute par les prénoms Lucius Cœlius, a
prétendu que cet ouvrage était d'un Lu-
LAC
193
LAC
cîus G»ciliu3, qui vivait, selon lui, au
commencement du k' siècle : mais il a été
réfuté par d'habiles critiques. Ce livre
est cité par saint Jérôme , dans le cata-
logue des ouvrages de Lactance. Le but
de Lactarice est de prouver que les em-
pereurs qui ont persécuté les chrétiens
ont tous péri misérablement. Cetouvrage^
propre à faire des Impressions profondes
et consolantes pour les fidèles, pourrait
aisément être augmenté par des additions
que fournit l'histoire de tous les siècles.
Il a des rapports marqués avec le traité
de. Henri Spelman : De la fatalité des sa-
crilèges. L'abbé de Maucroix l'a traduit
eu français, Paris, 1680, in-12; il l'a été
plus récemment encore par Basnage (d'a-
près la version anglaise, de Burnet ),
Utrecht , 1687 , in-8" , et par l'aibé Godes-
card. On trouve cette traduction dans
l'édition de la Vie des saints de cet au-
teur, Versailles, 1820. | Un Hvre de Y Ou-
vrage de Dieu ^ où il prouve la Provi-
dence par l'excellence de son principal
ouvrage , par l'harmonie qui est dans
toutes les parties du corps de l'homme, et
paf les sublimes qualités de son âme ;
I un livre De la colère de Dieu. Ces écrils
furent imprimés d'abord collectivement
in-fol. au monastère de Sublac en 1463.
C'est le 1" livre imprimé en Italie avec
date : il l'a été et plusieurs fois ensuite,
séparément ou ensemble. L'édition la plus
correcte de toutes ces différentes produc-
tions , est celle du père François-Xavier
Franceschini, carme, Rome, 1754-1760,
10 vol. in-S" , avec des dissertations plei-
nes do critique et de jugement. La plus
répandue en France est celle de Le Brun
des Marettes, publiée en 2 vol. in-4°,
1748. On attribue à Laclance xm poème
intitulé Symposium^ que Heumann a fait
imprimer à Hanovre , 1722 , in-S". On le
croit aussi l'auteur d'un autre poème,
Phénix j, qu'on trouve dans la Collection
des poètes latins du second ordre , par
Wumdorff , tom. 3, 1782. On cite encore
de Lactance plusieurs autres ouvrages qui
sont perdus.
• LAGUXZA (Emmanuel), jésuite,
connu par ses rêveries mystiques et sa
bizarre interprétation de l'Apocalypse,
naquit le 19 juillet 1731 , à Saint-Iago, ca-
pitale du Chili , d'ime famille espagnole
noble mais sans fortune. Il se voua à l'é-
tat ecclésiastique , et après avoir fait ses
éludes chez, les jésuiles, il entra, en 1747,
dans leur sociéié et y reçut les ordres. Il
66 livra pendant queUjue ternies avec suc-
cès à la prédication, et s'appliquait en
outre à l'étude de la géométrie et de l'as-
tronomie. Sa profession solennelle eut
lieu le 2 février 1766. La compagnie de
Jésus ayant été abolie en 1767 , et ses
membres expulsés , par ordre du roi d'Es-
pagne, de tous ses états, Lacunta se ren-
dit en Italie et se fixa à Imola , où il se
séquestra entièrement de toute société ,
se servant lui-même , se couchant au
point du jour, et passant la nuit à tra-
vailler. Le soir, il faisait seul une prorae«
nade à la campagne. Il poussait la so-
briété au point de ne pas prendre quel-
quefois la nourriture nécessaire. C'est
après avoir adopté ce genre de vie, qu'il
composa l'ouvrage intitulé : Avénemeni
du Messie dans sa gloire et daiis sa ma-
jesté^ ( en espagnol ) qui parut à Londres ,
1816, k vol. in-S", imprimé aux frais d&
l'envoyé de la nouvelle république de
Buenos-Ayres en Angleterre. Il y en avait
eu précédemment une édition incom-
plète , faite dans l'île de Léon , près do
Cadix, en 2 petits volumes in-12, sous 1©
nom de Jean-Josaphat Ben-Ezen ; il fut
traduit en latin par un mexicain qui garda
l'anonyme. Le singulier systèsne de La-
cunza n'est au fond qu'un millénarisme
mitigé. L'auteur croit que « Jésus-Christ
» descendra du ciel lorsque le temps sera
» venu, qu'accompagné des anges et de»
» saints , il régnera visiblement avec eux
» durant mille ans , et qu'enfin , mais sans
» être remonté aux cieux , il se montrera
» dans toute sa majesté pour juger tous
» les hommes. » Lacunza s'efforce de ré-
pondre aux objections qu'on peut faire
contre ses idées , et traite de prévention
l'enseignement des théologiens sur cette
matière. Son ouvrage suppose toutefois
une grande connaissance de l'Ecriture.
Va de ses partisans (M. Agier) qui se
montre en môme temps favorable à nn
parti que les jésuiles ont toujours com-
battu {voyez AGIER) a fait paraître une
brochure intitulée : Fues sur le second
avènement de Jésus-Christs ou Analyse
de l'ouvrage de Lacunza sur cette imjyor-
tante matière , Paris, 1818, in-8° de 120
pages. On trouve à la suite de cette ana-
lyse une notice curieuse sur le jésuite
espagnol. Le 17 juin 1801 , on trouva lo
malheureux Lacunza sans vie , sur les
bords du Santerno , rivière qui baigne les
murs d'Imola , et dans lequel il parait
qu'il s'était laissé tomber en faisant un&
de ses promenades noclurnes.
LACURPiE. Fouez SAINTE-PAL AYR.
LAC
193
LAC
LACL'SON. Voyez TROST.
• LACY ( don Louis), général espa-
gnol, naquît le 11 janvier 1775, à Saint-
Roch près de Gibraltar , d'une famille ir-
landaise dont l'origine remonte au duc de
Normandie, et dont un des ancêtres avait,
dit-on, accompagné son parent Guillaume
ie Conquérant dans l'expédition d'Angle-
terre. Son père , Patrice Lacy , major au
régiment d'infanterie d'Ullonie, mourut
avant d'avoir pu soigner l'éducation de
son fils. Sa mère s'étant remariée et ayant
[icrdu son second époux , alla joindre ses
frères qui étaient officiers dans le régi-
ment d'infanterie de Bruxelles. Le jeune
Lacy , qui n'avait alors que 9 ans , entra
dans ce corps en qualité de cadet , et ,
après l'avoir suivi à Porto-Ricco, revint
avec lui en Espagne. Lacy servit avec
fant de distinction, qu'après avoir passé
par tous les grades intermédiaires, il était
parvenu au rang de capitaine en 1794. Il
se signala dans la guerre contre la répu-
blique française. Après la conclusion de
la paix , il s'embarqua pour les îles Cana-
ries (31 décembre 1798 ). Le capitaine-
général qui gouvernait ces îles eut avec
Lacy quelques démêlés à la suite desquels
ce dernier fut exilé à l'île de Fer : indi-
gné de cette injustice, ce bouillant ofiicier
lui écrivit des lettres outrageantes, et fut
traduit devant un conseil de guerre pour
cette infraction à la discipline, qui em-
portait la peine capitale : il ne fut néan-
moins condamné qu'à un an d'emprison-
nement , parce que ses juges voulant le
sauver admirent qu'il y avait aliénation
mentale. Lacy, envoyé à Cadix, où il reçut
sa retraite, demanda, à l'époque de la
guerre contre le Portugal , à faire la cam-
pagne en qualité de simple grenadier :
ce qu'il ne put l'obtenir. Il résolut alors
de venir en France chercher du service.
Il partit de Cadix à pied pour Boulogne-
sur-Mer , où il s'enrôla comme siujple
soldat dans le 6* régiment d'infanterie lé-
gère : vingt-neuf jours après son eu'réc
dans ce corps, il était déjà sergent; et
bientôt il reçut le brevet de capitaine ad-
judant-major dans la légion irlandaise qui
se formait à Morlaix, Ce corps ayant été
envoyé à Quimper, Lacy se maria dans
cette ville en juin f806. Il devint plus
tard commandant d'un bataillon de ce ré-
giment et fut chargé de le conduire en
Espagne. Lacy qui aimait son pays , ne
put voir sans douleur les projets d'usur-
pation de Bonapaile : aussi, après nvoir
déterminé sa firnme à se retirer auprès
7.
de sa famille à Quimper (il se trouvait
alors en Hollande où son épouse l'avait
suivi), forma-t-il le desseih de se réunir
aux amis de l'indépendance espagnole.
Arrivé à Madrid , à la tête de sa troupe ,
il quitta aussitôt l'armée française et se
rendit à Sé\ ille , où se trouvait la junte
suprême qui le nomma lieutenant-colone)
commandant le bataillon de Ledesma.
sous les ordres du général Cuesta. C'est
avec ce corps qu'il se battit à Logrono , à
la retraite de l'Ebre et à Guadalaxara. Sa
bravoure lui valut le grade de colonel,
avec le commandement du régiment d'in-
fanterie de Burgos; il continua à se si-
gnaler par sa valeur, défendit avec ses
soldats plusieurs passages de la Sierra-
Morcna, et surprit 5,000 chevaux à Fo-
ralva. Nommé brigadier, il commanda la
division d'avant-garde, et se battit avec
intrépidité à la Cuesta de la Reyna , à
Aranjuez, àAlmonacid, à Ocana, à Des-
pena Perros. Les revers des Espagnols
l'ayant obligé de se retirer à Cadix , il y
fut nommé successivement sous-inspec-
teur d'infanterie , major-général, maré-
chal-de-camp, chef de l'étal major, et
commandant général de l'ile de Léon. 11
prit une part très active à la bataille de
Ciiiclanale 5 mai 1811, et reçut au mois de
juin suivant le commandement en chef
de la Catalogne. Il partit aussitôt pour
cette province dans laquelle il n'arriva
qu'au moment où Tarragone venait d'être
prise d'assaut. II se mit à la tête des restes
de l'armée espagnole dont il releva le
courage abattu ; en peu de temps il par-
vint à organiser une nouvelle armée , et
sut tenir tète pendant vingt mois aux
troupes françaises, dans soixante-dix-huit
affaires générales ou partielles. En 1812 il
fut nommé lieutenant-général , commau'
dant de l'armée de Galice et capitaine-
général de celte province. Quoique cet
ofiicier eût contribué à élever le trône
de Ferdinand VII , il perdit son comman-
dement en 1813 à cause de son attache-
ment pour la constitution. Il se retira à
Vinaroz dans le royaume de Valence , et
ce fut dans cette retraite que le mécon-
tentement le rendit rebelle. De concert
avec quelques-uns de ses anciens compa-
gnons d'armes, il avait formé le projet de
ijétablir la constitution de 1812 , dite des
Cortès. Ce complot allait être exécuté,
lorsque le gouverneuncnt en fut informé :
Lacy fut arrêté et traduit aussitôt devant
un conseil de guerre qui désida qu'il serait
passé par les armes, mais sans être de-
LAD
194
LAD
grade. Conduit à l'île de Mallorca, dans
le château de Bel ver, il y fut fusillé le 5
juillet 1817.
LACYpES, philosophe grec, natif de
Cyrène , disciple d'Arcésilaiis, succéda à
son maître la h^ année de la 134' olym-
piade , l'an 241 avant Jésus-Christ ; il fut
aimé et estimé d'Atlalus, roi de Pergame
qui lui donna un jardin où il philosophait.
Ce prince aurait voulu le posséder à sa
cour ; mais le philosophe lui répondit tou-
jours, que le portrait des rois ne devait
être regardé que de loin. Les principes
de Lacydes étaient : « Qu'il fallait toujours
» suspendre son jugement , et ne hasarder
» jamais aucune décision. » Lorsque ses
domestiques l'avaient volé et qu'il s'en
plaignait , ils ne manquaient pas de lui
dire : Ne décidez rien^ suspendez votre
jugement. Fatigué de se voir battre sans
cesse avec ses propres armes, il leur ré-
pliqua : a Mes enfans, nous parlons d'une
» façon dans l'école , et nous vivons d'une
» autre manière dans la maison » La-
cydes suivait ce jjrincipe à la lettre. Tout
philosophe qu'il était , il fil de magni-
fiques funérailles à une oie qu'il avait
beaucoup chérie; enfin il mourut d'un
excès de vin l'an 212 avant Jésus-Christ.
Tels étaient les sages que l'antiquité pro-
fane regardait comme ses héros et ses
maîtres (voyez COLLIUS). Lacydes avait
composé plusieurs ouvrages sur la phy-
sique et la philosophie : rien ne nous en
est parvenu.
•LADERCHl (Jacques), oratoricn de la
congrégation de Saint-Philippe de Néry,
né à Faënza dans la Romagne : c'était un
savant distingué , qui florissait au com-
mencement du 18*^ siècle , et n'était pas
moins recommandable par sa piété que
par son savoir. Il tourna toute son appli-
catioa vers l'érudition ecclésiastique, et
fit de la fondation dos églises et des actes
des martyrs, l'objet de ses principales
recherches. Il mourut à Rome le 25 avril
4758. Il est auteur de nombreux ouvrages,
dont on trouvera la liste dans la Biblio-
theca Faventina du P. Mittarelli, et dont
voici les principaux : | Acta sanctcrum
Chrisli martyrum vindicata, Rome,
4723, 2 vol. in-4° ; | Jlnnales ecclesinstici
ab anno 1566, ubi Oldericus Raynaldus
desinit^seu tomi 22, 23, 24, Annalium
baronianorum ^ Rome, 1727-1728, 3 vol.
in-fol. ; celte continuation des Annales de
Barcnius est peu estimée. L'édition de
Cologne do 1733 est surtout remplie de
fautes ; | Fita sancti Pctri Damiani S. R.
/?. cardinalis . etc. , in sex libres disfri-^
buta, Rome, 1702, 3 vol. in-4°. Cetouviage
donna lieu à une critique amère et indé-
cente . intitulée : Nugce Laderchianœ , te
diaîogus Sejani et Rufini . Paris. 1705;
I De sacris basilicis sanctorum martyrum
Pétri et Marcellini . dissertatto historica,
Rome, 1705. Ces deux martyrs, saint Mar-
cellin , prêtre , et saint Pierre , exorciste ,
avaient été martyrisés l'an 302, et décapités
à dix mille de Rome , dans un endroit ap-
pelé alors Sylva nigra; et qui , depuis, fut
nommé Sylva candida. Peu après le mar-
tyre de ces saints, leurs corps furent
transportés à trois mille de Rome , dans
l'endroit où saint Tiburce avait été marty-
risé, sur le chemin nommé Vialavicana,
et Constantin y avait fait bâtir une église
en leur honneur. Une troisième qui leur
était aussi dédiée , avait été bâtie dans
Rome même, et l'opinion du père Lader-
chi était que cette dernière avait été éri-
gée en titre du temps de saint Grégoire le
Grand. Il en prend occasion de traiter des
titres, cardinalistes^ qu'il croit n'avoir été
dans le commencement que des maisons
de chrétiens distingués et riches , où les
fidèles étaient reçus pour la célébration
des saints mystères, et recevaient des au-
mônes ou trouvaient un asile dans la per-
sécution. Selon Laderchi, les évé(jues de
Rome préposèrent un prêtre à chacune
de ces maisons devenues des églises. Ces
prêtres furent nommés cardinaux^ du
mol incardinare (attacher à une église).
On attribue au pape Evarisle la division
de Rome en 25 litres ; on sait qu'originaire-
ment la dénomination de cardinal était
commune à tout ecclésiastique titulaire
d'un bénéfice à charge d'âmes , et que ce
n'est que par la suite des temps, qu'elle
fut réservée exclusivement aux membres
du sacré collège. | Acta passionis sanc-
torum martyrum Crescii et sociorutn,
ex manuscriptis codicibus biblioth. Me^
diceo - laurentianœ , Florence , 1707 ;
I Apologia pro actis eorum sanctorui7i ,
Florence, 1708; | Acta sanctœ Ceciliœ et
Traristibei'ina basilica illustrata^ Rome,
1725 , S vol. in 4° ; | La Critica d'oggidi .
osia Vabuso délia critica odicma, Rome,
1726, in-4°. Outre ces ouvrages, Lader-
chi a laissé aussi une ample collection de
mémoires manuscrits.
LADISLAS 1", roi de Hongrie , après
Geysa en 1079, était né l'an 1041, en
Pologne , où son père Bêla l" s'était retiré
pour éviter les violences du roi Pierre.
i Apres diverses révolutions , il monta sur
LAD
y fit éclater
le trône , et y lit éclater le courage
dont il avait donné de bonne heure des
preuves. Il soumit les Bohémiens, battit
it's Huns , les chassa de la Hongrie , vain-
quit les Russes, les Bulgares, lesTartares,
agrandit son royaume des conquêtes faites
sur eux, et y ajouta la Dalmatie et la
Croatie , où il avait été appelé pour déli-
vrer sa sœur des mauvais traitemens de
Zuonimir, son cruel époux. Ce héros
avait toutes les vertus d'un saint. Il fut
l'ami des pauvres et de la justice, dota
plusieurs églises , et fonda un grand
nombre de monastères. Il mourut l'an
1095 , au moment où il se préparait au
voyage de la Palestine. Ce prince est cé-
lèbre dans l'histoire par sa piété. Céleslin
III le canonisa l'an 1198. Sa Vie a été
écrite en latin , par un moine contem-
porain, Cracovie, 1511, et insérée dans
les Bollandistes avec des noies, Acta
sanctorum ^ tom. 5.
* LADISLAS II , roi de Hongrie , suc-
céda en 1200 à Emcric son père ; son
règne s'annonçait sous de bons auspices ;
mais il ne goxiverna son royaume que
pendant six mois, ayant été enlevé par
une mort prématurée. Il eut pour succes-
seur André II , son oncle.
* LADISLAS III , roi de Hongrie , suc-
céda en 1272 à son père Etienne IV, et
aida puissamment l'empereur Rodolphe à
détrôner Ottocare, roi de Bohème. Plus
lard il fut attaqué lui-même par les Tar-
tares et les Cumans : alors il eut recours
à l'empereur, à qui il avait rendu service ;
mais celui-ci désirant affaiblir son rival
ne lui envoya d'abord que des secours
insufiisans, et bientôt l'abandonna tout-
n-fait. Ladislas ne put se défendre contre
ses nombreux ennemis ; tombé au pou-
voir des Cumans dans un combat qu'il
leur livrait , il fut emmené hors de ses
états et massacré dans sa tente , par les
Tartares, l'an 1290. André III lui succéda.
LADISLAS IV, grand-duc de Lithuanle,
fut appelé au trône de Hongrie , en l/tiO,
après la mort d'Albert d'Autriche. Il pos-
sédait déjà celui de Pologne depuis l'es-
pace de six ans, sous le nom de Wladislas
■^'I , comme successeur de son père , le
fameux Jagellon. La veuve d'Albert d'Au-
triche, dernier roi de Hongrie, appuyée
par l'empereur Frédéric, avait fait sacrer
son fils, âgé de quatre mois; et, à l'ap-
proche de Ladislas, s'était enfuie, en em-
portant la couronne qui avait servi au
sacre. Mais les Hongrois, qui avaient be-
soin d'un prince capable de s'opposer aux
J9S LAD
Turcs, n'en proclamèrent pas moins La-
dislas; cl à défaut de diadème royal, on
lui plaça sur la tétc une couronne qui dé-
corait la statue d'Etienne 1"^"^. Amurat 11
porta ses armes en Hongrie ; mais ayant
été battu par Huniade, général de Ladislas,
et se voyant pressé de retourner en Asie,
il conclut la paix la plus solennelle que
les chrétiens et les musulmans eussent
jamais contractée. Le prince turc et le roi
Ladislas la jurèrent tous deux, l'un sur
l'Alcoran, et l'autre sur l'Evangile. A
peine était-elle signée que Ladislas en eut
des remords, parce que par là il avait
violé la parole donnée à l'empereur Pa-
léologue et aux. Vénitiens , d'agir de con-
cert avec eux contre l'ennemi commun.
Le cardinal Julien Césarini, légat en
Allemagne, arrivant dans ces circon-
stances, jugea qu'effectivement Ladislas
n'avait pu faire la paix sans ses alliés, (et
non pas , comme l'a écrit faussement un
ministre calviniste , qu'il ne fallait pas
garder la parole donnée aux infidèles ;
caloiTinie victorieusement réfutée par le
cardinal Pazinan). Ayant donc repris les
armes, le roi livra bataille à Amurat,
près de Varnes, en ihkh. ; il fut battu et
percé de coups. ( Voyez AMURAT lî. )
Sa tète, coupée par un janissaire, fut
portée en triomphe de rang on rang dans
l'armée turque , ce qui réfuie sufiisam-
rnent ce que quelques auteurs rapportent
des honneurs qu' Amurat fit rendre au
corps de ce roi ennemi. Cet échec causa
en partie la ruine de la Hongrie et celle
de l'empire grec , en ouvrant une nou-
velle porte aux conquérans ottomans. Si
on en peut juger par l'événement , la
Providence a puni une perfidie qui faisait
blasphémer son nom. parmi les gentils :
mais le secret des conseils de Dieu doit
nous empêcher d'assigner trop affirma-
tivement la cause des malheurs dont il
frappe les peuples et les rois. Voyez
CÉSARINI.
* LADISLAS V, roi de Hongrie , était
fils d'Albert d'Autriche. Lorsque son père
mourul , il était trop jeune pour régnei :
et ce fut la crainte d'une minorité ora-
geuse qui décida les grands à nommer
Ladislas IV ( voijez l'article précédent ).
A la mort de cehii-ci, Ladislas V, roi lé-
gitime d'après les lois de la Hongrie , fut
appelé sur le trône par ses fidèles Hon-
grois ; ceux-ci furent obligés d'employer
la force des armes, pour arracher ce
jeune prince des mains de l'empereur
Frédéric , qui s'était déclaré son tuteur.
LAD
196
LAD
Sous son règne les Turcs ajltaquèrcnt de
nouveau la Hongrie , et ce royaume fut
sauvé une seconde fois i^ar le brave Jean
Huniade. Après la mort de ce héros libé-
rateur de son pays, l'ingrat Ladislas fit
périr son Txls aîné sur l'échafaud; cette
exécution le rendit si odieux , qu'il
fut obligé de s'enfuir à Vienne , puis à
Prague. Il allait épouser Madeleine, fille
de Charles VII , roi de France , lorsqu'il
mourut dans cette dernière ville en 1458 :
Mathias Corvin , second lils de Jean Hu-
niade, fut son successeur.
* LADISLAS VI , roi de Hongrie, était
déjà roi de Pologne et de Bohème , lors-
qu'il monta sur le trône de Hongrie après
la mort de Mathias Corvin. La couronne
de Hongrie était élective, et elle lui avait
été disputée par de puissans compétiteurs.
Les difficultés qu'ils avaient ai)portécs à
son élection, le déterminèrent à faire re-
connaître de son vivant son successeur,
Louis son lils aîné : il rendit ainsi la cou-
ronne héréditaire. Il présenta en 1514, à la
sanction des états de Hongrie , le recueil
des lois du pays qu'il avait rassemblées et
mises en ordre. Il mourut en 1516, regretté
de ses sujets du bonheur desquels il s'était
constamment occupé.
LADIl^LAS, ou LANCELOT, roi de
Naples, surnommé le Victorieux et le Li-
béral, fut l'un et l'autre; mais ces qua-
lités furent ternies par une ambition sans
bornes et une cruauté inouïe. Il naquit
en 1576, et était fils de Charles III , de
Puras, qui conquit le royaume de Naples
sur Jeanne V. Charles fut assassiné en
Hongrie en février 1386, laissant à Naples
sa femme Marguerite , avec deux enfans,
Jeanne, qui régna depuis, et qui avait
alors seize ans; et Ladislas, qui en avait
dix. Le parti d'Anjou contraignit Mar-
guerite à s'enfermer dans Gaëte, où se
•passa la jeunesse de Ladislas. Il se disait
comte de Provence et roi de Hongrie. Il
se fit donner tetle dernière couronne à
Javarin, en 1405, durant la prison du roi
Sigismond, qui bientôt après le contrai-
gnit de retourner à Naples. Il avait suc-
cédé à son père Charles de Duras, dans
le royaume de Naples, en 158G; mais les
Napolitains ayant appelé Louis II, duc
d'Anjou, ces diverses prétentions cau-
sèrent des guerres sanglantes. Le pape
Jean XXIII était pour le prince d'Anjou ,
à qui il avait donné l'investiture de Naples.
Lancelot fut battu à Roquesèche , sur les
bords du Garigliana en 1411. Après cette
défaite , dont le vainqueur ne sut pas pro-
fiter, Jean XXIII reconnut Lancelot , son
ennemi, pour roi (au préjudice de Louis
d'Anjou , son vengeur ), à condition qu'on
lui livrerait le vénitien Corario, son con-
current au saint Siège. Lancelot , après
avoir tout promis, laissa échapper Cora-
rio, s'empara de Rome et combattit contre
le pape son bienfaiteur, et contre les Flo-
rentins, qu'il força d'acheter la paix cu
1413. Ses armes victorieuses lui promet-
taient de plus grands succès , lorsqu'il
mourut à Naples en 1414, à 38 ans, dar.3
les douleurs les plus aiguës. La fille
d'un médecin , dont il était passioimémeiU
amoureux, l'empoisonna avec une com-
position que son père lui avait préparée,
soit pour plaire aux Florentins, soit pour
se venger de ce qu'il avait séduit sa fille.
LADISLAS, roi de Pologne. Voyez
WLADISLAS.
LADISLAS , fils aîné d'Etienne Dragu-
tin, épousa, un peu avant la mort de
son père , la fille de Ladislas , vaivode de
Transylvanie; et à cause de cette alliance,
faite avec une princesse schismatique ,
fut excommunié par le cardinal de Mon-
tefiore, légat du saint Siège. Ladislas
était l'héritier présomptif de la couronne
de Servie : son père, en y renonçant,
avait réservé le droit des enfans. Milu-
tin , son oncle , voulant posséder ce trône ,
fit enfermer Ladislas après la mort de son
père , et le ti nt en prison j usqu'à sa propre
mort, arrivée en 1421. Ladislas, devenu
alors roi de Servie, refusa l'apanage à
Constantin son frère , qui n'ayant pu l'ob-
tenir de gré, le lui demanda à la tète
d'une armée. Il fut vaincu et fait prison-
nier : Ladislas poussa la cruauté jusqu'à
le faire pendre, et ensuite écarteler. Cette
barbarie atroce lui attira la haine des
peuples, qui offrirent la couronne à
Etienne, fils naturel de Milutin, banni
alors à Conslantinople. Ladislas, aban-
donné de tout le monde , fut pris à Sir-
mick, el jeté dans une prison, d'où il ne
sortit plus.
LADVOCAT ( Lobis-Fraxçois ) , né à
Paris en 1644 , mort dans la même ville ,
doyen de la chambre des comptes, le 8
février 173S , à 91 ans , avait exercé les
fonctions de conseiller du roi. Son prin-
cipal ouvrage est intitulé : Entretiens sur
un nouveau système de morale et de phy-
sique ^ ou la Recherche de la vie heu-
reuse selon les lumières naturelles. Paris,
1721, in-12. La seule idée de présenter
dans le IS*^ siècle un Nouveau système cle
philosophie^ établi sur la nature de&
LAD
197
LJETi
choses connues par elles-mêmes . auquel
on a joint un traité de la nature de l'âme
et de l'existence de Dieu , prouvées lune
et l'autre par une chaîne suivie d'aryu-
mens capables de convaincre les plus in-
crédules^ et les plus opiniât7-es, ibid.
i728, 2 vol. in- 12, montre assez que l'au-
teur n'était pas destiné à trouver la vie
heureuse. Le principe sur lequel repose
le système de l'auteur , dans Je premier de
ces deux ouvrages est que , de l'obéis-
sance aux lois dérive le plaisir^ et de leur
transgression , la douleur. Il y a ajouté
de nouveaux développemens dans son
Nouveau système , etc.
LADVOCAT (Jean-Baptiste), né en
1709, du subdélégué de Vaucouleurs. dans
le diocèse de Toul , fut docteur , biblio-
Ihécaire , et professeur de la chaire d'hé-
iireu en Sorbonne. Après avoir fait ses
études de philosophie chez les jésuites de
Pont-à-Mousson , qui voulurent en vain
l'attacher à leur société, il alla étudier
en Sorbonne. 11 fut admis en 173/t à l'hos-
pitalité , et à la société en 1736, étant
déjà en licence. Rappelé dans son diocèse,
il occu; a la cure de Domremy, lieu cé-
lèbre par la naissance de la Pucelle d'Or-
léans. Mais la Sorbonne l'enviant à la
province , le nomma en 1740 à une de ses
chaires royales, et lui donna le titre de
bibliothécaire en 1742. Le duc d'Orléans,
jirince aussi religieux que savant, ayant,
dans l'année 1751 , fondé une chaire en
Sorbonne , pour l'explication de l'Ecriture
sainte selon le texte hébreu , y nomma
iabbé Ladvocat , qui remplit cet emploi
avec succès jusqu'à sa mort , arrivée le 29
décembre 1765. C'était un homme plus
éruditquejudici eux, possédant les langues
anciennes , l'hébreu , le chaldéen , les ma-
thématiques. Ce savant avait un cœur
digne de son esprit ; une noble franchise
animait tous ses sentimens. Il n'ornait ni
ci; qu'il écrivait ni ce qu'il disait ; maison
tentait dans toutes ses actions celte huma-
nité et cette douceur qui est la vraie source
fie la politesse. Nous avons de lui: | Dic-
tionnaire géograjohique portatifs in-S",
plusieurs fois réimprimé. Cet ouvrage,
publié sous le nom de Vosgien , et donné
f omme une traduction de l'anglais, est un
iissez bon Abrégé du Dictionnaire géogra-
phique de La Marlinière. Le livre fran-
yais est beaucoup plus exact que l'anglais,
avec lequel il n'a presque aucun rapport ;
mais Ladvocat voulut accrédiler son ou-
vrage, en le présentant au public comme
une production de lAngleterre. On a fait
usage de ce Dictionnaire dans la rédaclioi":
d'un autre plus ample et jilus correct,
imprimé pour la seconde fois à Liège ,
chez Bassompierre, 1791 à 1794, 2 vol
in-8". I Dictionnaire historique portatif
des grands hommes, Vax'is, 1752 , en 2 vol.
in-S" : la meilleure édition est celle de M.
Lelronne avec des additions importantes,
Paris, 1815, dont il y a eu plusieurs édi-
tions et contrefaçons. Quelques-unes ont
été défigurées et altérées de toutes les
manières; les jansénistes et les proteslanp
y ont glissé leurs préventions et leurs er-
reurs. Il en a paru une en 3 vol. , à Paris,
1777 , avec des augmentations les unes
bonnes, les autres mauvaises. Les bornes
dans lesquelles l'auteur avait circonscrit
son ouvrage ne lui ont pas permis de
donner à un grand nombre d'articles un
développement convenable ; mais son im-
partialité, son attachement aux droits de
la religion et de la vertu , rendent son
Dictionnaire , tout imparfait qu'il est ,
très préférable à la plupart de ceux par
lesquels on a voulu le remplacer. Dans
une dernière édition publiée à Paris de
1821 à 1824 , 5 vol. in-8°, on a fondu avec
le corps de l'ouvrage le supplément de
1789, un vol. in-8°, par Charles-Guillaume
Leclerc. Cet ouvrage a été traduit en ita-
lien , Milan , 1758, 5 vol. in-8°, et en alle-
majjd, l'im, 1761, 2 vol. in-S". {Grammaire
hébraïque, 1755 , 1765, 1789, 1822, iu-8^
L'auteur l'avait composée pour ses élèves ;
elle réunit la clarté et la méthode néces-
saiios. I Dissertations latines sur le Pen-
tateuque , sur Job et sur les Psaumes , et
une Dissertation en français sur le lieu
du naufrage de saint Paul; | Tractatus de
conduis in génère , Caen , 1769, in-12, et
Porto , 1773, in-8°; | Dissertation sur le
psaume 67, Exurgat Deus.. . ; \ Lettre
sur l'auto? ité des textes originaux de
l'Ecriture sainte, Caen ,1766, in-8''; | Ju-
gemens sur quelques nouvelles traduc-
t/ons de l'Ecriture sainte, d'après le
fe:r^^/ie'Jr(îu. Ces quatre derniers ouvrages
sont posthumes, et ont été imprimés à la
Haye en 1767. C'est une bonne réfutation
du système de l'abbé Villefroy et des ca-
pucins élèves de cet abbé. L'éloge histo-
rique de Ladvocat se trouve dans Y Année
littéraire, 1766, tom. 2 , et dans le Nécro-
loge de 1767.
Lyi':LîE.\ , LOLLIEN ou ŒLÎEN ( Ul-
pius -Cornélius L.elianus) est un de ces
généraux qui prirent le titre d'empereur
dans les Gaules, sur la fin du règne de
Gallien, II. fut proclamé Auguste par ses
LAE
«98
LAE
soldats à Maycnce , l'an 266. Il était d'un
âge avancé, mais il avait de la valeur et
de la politique. Laelien ne régna que pen-
dant quelques mois. Les soldats , qui l'a-
vaient proclamé, et qu'il occupait à réta-
I)lir les villes gauloises qu'avaient dé-
truites les Germains et à construire de
nouvelles forteresses pour contenir les
Barbares, ne voyant pas de terme à leurs
travaux, se révoltèrent et lui ôtèrent la
vie au commencement de l'an 267, au
moment où Posthume, qui aspirait aussi
au Irônedes Césars, marchait contre lui.
On l'a confondu mal à propos avec le ty-
ran Lollien , qui prit la pourpre après
lui; et avec Pompoiiius JLlianus, qui se
révolta sous Dioclétien.
L;ELIIIS (Caius), surnommé Sapiens^
tiudia la philosophie sous Diogène le
stoïcien et sous Pansetius : il fréquenta
<nsuite le forum , et se fit remarquer par-
mi les orateurs de son temps. Il fut d'a-
bord préteur et consul l'an 140 avant
J.-C. ; et était l'intime ami de Scipion
l'Africain le jeune. Il signala sa valeur en
Espagne, dans la guerre contre Viriatus,
général des Lusitains ou Portugais. Il ne
se distingua pas moins par son goût pour
l'éloquence et pour la poésie, et par la
protection qu'il accorda à ceux qui les
«ultivaient. On croit qu'il eut part aux
Comédies de Térence. Son éloquence
éclata plusieurs fois dans le sénat pour la
veuve et pour l'orphelin. Ce grand homme
était modeste. N'ayant pas pu venir à bout
de gagner une cause , il conseilla à ses
parties d'avoir recours à Galba, son émule;
et il fut le premier à le féliciter lorsqu'il
sut qu'il l'avait gagnée. Son amitié pour
Scipion ne se démentit jamais , et Cicéron
a immortalisé cette liaison en plaçant le
nom de Lselius en tète de son dialogue De
omicitia. — Son père Caius-LjELIUS-NE-
rOS, consul romain, 190 ans avant J.-C,
accompagna le premier Scipion l'Africain
en Espagne et en Afrique , et eut part aux
victoires remportées sur Asdrubal et sur
Syphax.
• LAENNEG ( RÉNÉ-TnÉopHiLE-HYA-
cixtue) docteur en médecine, chevalier
de la légion d'honneur, médecin de son
altesse royale madame la duchesse de
Berry , lecteur et professeur royal de mé-
decine au collège de France , membre de
l'académie royale de médecine , naquit à
(^uimper en itsi ; il fit ses premières
études médicales à Nantes , sous les yeux
d'un de ses oncles , médecin en chef des
hôpitaux de celte ville, vint à Paris en
1799, ei y suivit le cours de Corvisart.
Après avoir rempoi té en 1802 , les deux
grands prix de médecine et de chirurgie,
décernes par l'institut , il se livra à la
pratique de sa profession, et écrivit un
grand nombre de Mémoires qu'il inséra
dans le Journal de médecine . des articles
pour le Dictionnaire des sciences médi-
cales^ etc. : ses observations lui valurent
une mention honorable dans le rapport
fait à l'institut, en 1810, sur les progrès
des sciences. En 1802, il publia, dans le
Journal de médecine, son premier travail
sur VAnatomie pathologique, intitulé Mé-
moire sur la péritonite. Les journaux de
la môme époque contiennent plusieurs
découvertes dont il est l'auteur, entre
autres le procédé anatomique pour dissé«
qucr la membrane interne des ventri-
cules du cerveau , dont l'existence n'a-
vait été jusqu'alors admise que par ana-
logie , et la découverte d'une membrane
propre du foie qui a été vérifiée par plu-
sieurs savans médecins, et dont on peut
voir la description dans le Journal de mé-
decine, année 1803. En 1804 lu faculté de
médecine inséra dans ses Mémoires la
Monographie des vers vésiculaires , qui
contient la description de plusieurs nou-
velles espèces de vers. Laennec lut à cette
société différens mémoires sur des vers
intestinaux inconnusjusqu'alors, sur Van-
gine de poitrine ; sur les mélanoses^ espèce
d'altération organique , etc. Mais ce qui
lui a valu une réputation européenne, ce
sont les travaux qu'il entreprit sur les
maladies de poitrine. La propriété qu'un
corps solide frappé à une extrémité a de
transmettre fidèlement à l'autre l'impres-
sion qu'il a reçue , lui donna l'idée d'un
instrument qu'il a appelé Pectoriloque ou
Sthétoscope^par le moyen duquel l'oreille
la moins exercée peut connaître l'état des
poumons et du cœur : après trois années
de recherches , poursuivies avec un zèle
infatigable , il consigna cette découverte
qui lui appartient en entier, dans son ou-
vrage intitulé : De l'Auscultation médiate^
ou Traité du diagnostic des maladies
des poumons et du cœur_, Paris, 1819,
2 vol. in-8°; il en a été rendu compte de
la manière la plus avantageuse dans les
Annales encyclopédique s^ et dans les An-
nales politiques , morales et littéraires. lî
en a paru une seconde édition améliorée
au point de pouvoir être considérée comme
un ouvrage presque neuf , en 1826, 2 vo-
lumes in-8°. La santé de Laënnec s'étanl
altérée par suite de nombreux travaux, il
LAE
199
LAE
alla respirer l'air natal. Après deux an-
nées d'absence , il revint à Paris-où Hailé,
qui l'avait désigné pour le remplacer dans
le poste de médecin de S. A. R. Madame
duchesse de Berry , ayant , par sa mort ,
laissé vacante la chaire du collège de
de France , Laënnec fut choisi pour l'oc-
cuper. L'ancienne faculté de médecine
ayant été supprimée vers le même temps
parime ordonnance royale, il fil partiede
la commission chargée de l'organisation de
la nouvelle , où il fut lui-même nommé
l)rofesseur de clinique interne, préférant
celte chaire au litre plus élevé de membre
du conseil royal de l'instruction publique
qu'on lui offrit. On assure que plusieurs
jirofesseurs lui durent la conservation de
leurs chaires , et son mérite lui avait as-
suré une très grande influence. Cepen-
<lantla pulmonie, dont il avait relardé les
progrès, recommença à lui faire sentir
ses atteintes, et dans l'espoir que l'air
natal lui serait une seconde fois favo-
rable, il repartit pour la Bretagne. Mais
il n'arriva à Kerlouannec , dans le Finis-
tère , que pour y mourir le 13 août 1825.
Cet habile anatomiste était médecin de la
Salpétrière et de l'hôpital Necker. Il était
très versé dans les langues anciennes, et
surtout dans les différens idiomes cel-
tiques. On cite de lui plusieurs traits de
bienfaisance et d'humanité, qui prouvent
que l'on rencontrait chez, lui l'alliance de
la science et de la vertu , et la fermeté
doses conviclions religieuses ne fléchissait
devant aucun respect humain. On a de
Laënnec : | Description d'un nouveau mode
de dissection, et divers mémoires sur
des sujels d'anatomie , insérés dans le
Journal de médecine de Corvisart , année
1803; I Des «ïij'moori d'anatomie patho-
logique, dans le Bulletin de la faculté de
juédecine , n° 1 8 ; | un Mémoire sur la
péritonite , même journal, fructidor an 1 1
( août 1803 ) ; | Monographie des vers vé-
siculaires ( voyez ci-dessus ) ; | Mémoire
sur une nouvelle espèce d'hernie, im-
primé à la suite du traité de Scarpa, sur
les hernies , traduit par M. Cayrol; | Traité
de f auscultation médiate ( voyez ci-des-
sus). L'académie des sciences décerna à
l'auteur une médaille de 3,000 francs, lors
de la première , et une autre de 5,000
francs lors de la seconde édition de cet
admirable ouvrage; dont une troisième
édition auguienlée d'un grand nombre de
noies, a paru en 1831, Paris, 3 volumes
In-S". I Les articles qu'il a fournis au Dic-
liomiaire de» sciences médicales sont :
Jnatomie pathologique. Ascarides, Car-
tilages accidentels . Déçénération encé-
phaloide. Le docteur Laënnec se montra
toujours contraire au système du célèbre
Broussais , qui appartient à la même pro-
vince que lui.
LAENSBERGH (Mathieu), chanoine
de St.-Barthélemy de Liège, vivait vcr^
l'an 1600 ; il passe pour l'auteur, du pre-
mier Ahnanach de Liège , imprimé pou ?
la première fois suivant la tradition la plus
commune en 1636. Cet Mmanach a été
réimprimé depuis annuellement , avec de
nouvelles prophéties et pronostications.
On n'a aucun document certain sur ce
Mathieu Laensbergh dont le nom ne s'est
point trouvé dans la liste des chanoines
de Liège à cette époque. Mais ce nom
adopiif est devenu célèbre par la splen-
deur qu'il reçoit du
Sabllme lUge ,
D'où flanqnc de trente-deux venti ,
L'auteur de l'AlmaDacb de Liège
Lorgne l'hist'ùre du beau temps.
Et fabrique avec privilège
Ses asl(ooomii]ues roinsni.
Gres£et.
LAER ou LAAR ( Pierre de), sur-
nommé Bamboche, peintre né en 1615 ,
à Laaren, village proche de Naarden, en
Hollande , mourut à Harlem , l'an 1673
Le surnom de Bamboche lui fut donné à
cause de la singulière conformation de sa
ligure. Il était d'une grande gaieté , rem-
pli de saillies, et tirait parti de sa diffor-
mité pour réjouir ses amis , le Poussin ,
Claude le Lorrain , Sandart , etc. Mais
celte gaieté n'était que dans ses organes ;
et dès qu'il cessait de faire le plaisant , il
était eu proie à la mélancolie la plus
noire , qui augmenta encore avec l'âge.
Son cœur n'était pas fait pour goûter la
joie. Comme il ne tenait aucun compte
des pratiques de religion , il fut surpris
avec quatre autres , mangeant de la
viande en carême , par un ecclésiastique
qui les réprimanda avec un zèle qui les
irrita (i) ; Bamboche, aidé des autres
qui étaient avec lui, noya le prclre. Lt5
remords que ce crime lui causa, joints à
quelques disgrâces qu'il eut à essuyer,
hâtèrent sa mort ; quelques - uns disent
qu'Use précipita dans un puils. Ce pcin-
(i) Le prêtre e'tait levenu plusieart fois à la charge,
et avait fini par leur faire peur de l'iaquisition : ils le
noyèrent, cioyaot noyer son accusation avec lai. Ce
crime e'iait d'autant plus grand , qu'il était gratuit,
puisque l'inquisition o'a jamais regarde comme ma-
tière à accusation la violation simple de l'abstinence
LAE
200
LAF
Ire ne s'est exercé que sur de petits su-
jets. Ce sont des foire s. des jeux d'en fans.
des chasses, des paysages. Le Musée de
Paris possède deux tableaux de cet artiste :
le Dépdrt de l'hôtellerie , et une femme
qui trait un" chèvre à côté d'un pâtre
jouant du chalumeau.
LAERCE. royez DIOGÈNE LAERCE.
L A.ET { Jean de ), géographe allemand,
et directeur de la compagnie des Indes ,
savant dans l'histoire et la géographie ,
naquit à Anvers , à la fin du IG* siècle ,
et y mourut en 1649. On a de lui 16 ou-
vrages dont quelques-uns peuvent être
consultés avec fruit: Novus o7-bis.Lcjde,
1653, in-fol. , avec un grand nombre de
cartes et de figures qui représentent les
animaux, les plantes et les fruits de l'A-
mérique. Cette description du nouveau
monde, en 18 livres, quoique quelquefois
inexacte, a beaucoup servi aux géogra-
phes. Laët traduisit lui-même son ouvrage
en français. Cette version fidèle , mais
plate , parut à Leyde en 1640 , in-fol. ,
sous le titre d'Histoire du Nouveau-
Monde ; I De gemmis et lapidibus libri
duo , Leyde , 1647 , in-8" ; | Respublica
Belgarium^ in-24 , assez exacte ; | G allia ^
in-24, moins estimée que la précédente ;
1 De régis Hispanice regnis et opibus^ in-
24 ; I Hisloria naturalis Brasiliœ G. Pi-
sonis, et Georgii Margravii, Leyde, 1648,
in-fol. , avec fig. ; | Turcici imperii sta-
tus. in-24 ; | Persia^ seu regni persici stOr-
tus, in-24 ; | De imperio magni Mogolis,
1631 ; I Portug allia, 1641 ; 1 Respublica
Poloniœ, Lithuaniœ. Prussiœ et Livonice,
1642. Tous ces petits ouvrages, imprimés
chez Eizévir, contiennent une description
succincte des différens pays dont le
royaume, que le géographe parcourt, est
composé. On y parle des qualités du cli-
mat, des productions du terroir ; du gé-
nie, de la religion , des moeurs des peu-
ples ;du gouvernement civil et politique;
de la puissance et des richesses de l'état.
Les géographes qui sont venus après
Laët ont beaucoup profité de ses ouvra-
ges. On estime infiniment son édition de
T'itruve , avec les notes de Philandre ,
de Barbaro, de Saumaise , accompagnée
de plusieurs Traités de divers auteurs
sur la môme matière (architecture), chez
Elxévir , en 1649, in-fol.
LyETA , dame romaine , fille d'Albin ,
grand-pontife , épousa , sur la fin du 4*^
siècle, Toraxe, fils de sainte Paule. Albin
fut si louché de la vertu de son gendre
et de la sagesse de sa fille , (^u'il renonça
au paganisme et em})ra8sa la religion
rhrctienae, Lceta fut mère d'une fille
nommé Paule , comme son aïeule : c'est
à cette occasion que saint Jérôme lui
adressa une épître d'une éloquence vive
et pleine de choses, qui commence ainsi :
Apostolus Paulus scribcns ad Corinthios .
etc. , dans laquelle il lui donne des in-
structions pour perfectionner l'éducation
de cet enfant chéri.
L/ETUS ( QufXTUS-^Mus ) , capitame
de la garde prétorienne de l'empereur
Commode, dans le 2* siècle, empêcha
que ce prince barbare ne fil brûler la
ville de Rome , comme il l'avait résolu.
Commode ayant voulu le faire mourir
avec quelques autres, celui-ci le prévint,
et de concert avec eux et avec Marcia ,
concubine de ce monstre , lui fit donner
du poison, l'an 193. Le poison n'agissant
pas avec assez de promptitude , il le fit
étrangler par un athlète, avec lequel
Commode s'exerçait souvent à la lutte.
Laetus éleva à l'empire Pertinax; et trois
mois après il le fit massacrer, parce qu'il
rétablissait trop sévèrement la discipline
militaire , et que , par l'innocence et la
droiture de ses moeurs , il lui reprochait
tacitement sa dissolution. Didier-Julien
le punit de mort peu de temps après.
L./ETUS POMPOMIJS. Voyez POMPO
NIUS.
L^VmuS TORRENTIUS. Voy. TOR
RENTIUS.
LiEVIUS , ancien poète latin , dont il
ne nous reste que deux vers seulement
dans Aulu-Gelle , et six dans Apulée. On
croit qu'il vivait avant Cicéron.
* LAFAGE ( Jean-Pierhe de ), prédi-
cateur du roi, naquit vers 1753 , à Mausy ,
près de Rieux en Languedoc : son père ,
qui était syndic-général de la province,
l'amena à Paris à l'âge de M ans : le
jeune Lafage y reçut la tonsure des mains
du cardinal de la Roche- Aymon , alors
archevêque de Toulouse. Il n'avait que
14 ans lorsqu'il fut pourvu d'un canonicat
de l'église de Rieux. II fit ses cours de
philosophie et de théologie en Sorbonne,.
et, après avoir été ordonné prêtre, il en-
tra à la communauté de Saint-André- des-
Arcs, sous la direction de M. Léger, curé
de cette paroisse ; école alors célèbre et
d'où sortirent des prélats et des sujets
très distingués. ( Voyez LÉGER. ) II pa-
raissait naturel que l'abbé de Lafage re-
tournât à Rieux , où l'appelait son' cano-
nicat, où il avait toute sa famille, et dont
révcc^ue l'avait dt';jà nommé son grami-
LAF
20i
LAF
vicaire; mais M. Léger qui avait aperçu
dans le jeune ecclésiastique un germe de
talent qui pouvait se développer avec
avantage dans la capitale, engagea M.
de Beaumont , archevêque de Paris, à le
retenir dans son diocèse. L'abbé de La-
fagc fut nommé promoteur de l'ofticia-
litc, et eut un canonicat de la métropole.
C'est alors qu'il se livra entièrement à la
prédication , où il obtint des succès mé-
rités. Son éloquence était grave, son dé-
bit simple, maisnoble. Dans son discours,
il ne courait pas après les vains orne-
mens; mais son raisonnement était solide
et instructif, et on sortait de ses sermons
persuadé et touché. Ses discours produi-
saient d'autant plus d'effet qu'il paraissait
bien pénétré des vérités qu'il annonçait.
En un mot il rappelait les orateurs sacrés
de la bonne école. La révolution l'arrêta
au milieu de sa carrière utile ; elle le dé-
pouilla de tout, comme ceux qui appar-
tenaient à l'Eglise, mais il resta en France
pendant les temps les plus orageux, et sut
se soustraire aux fureurs des tyrans
démocrates de la France. Après le con-
cordat de 1801, il fut nommé à l'évêché
de Montpellier; il s'excusa et se fixa
à Versailles, où il accepta un canonicat.
Jl reprit alors le ministère de la chaire,
prêcha à Versailles , à Paris , et dans plu-
sieurs villes de province : con âge avancé
ne l'empêcha pas de se charger de grandes
stations. Ce n'était pas seulement le même
z.i'le , c'était la même vigueur, le même
feu qu'il montrait étant jeune. Il avait
été nommé pour prêcher devant le roi
lecarêmede 1813. Une indisposition em-
pêcha Louis XVIII de l'entendre les pre-
mières semaines , et l'on connaît les évé-
nemens sinistres qui forcèrent bientôt
après la cour de quitter la France. L'abbé
deLafage ayant été appelé, en 1818, à
prêcher de nouveau à la cour , le roi le
suivit pendant toute la station. Cet ora-
teur avait alors 85 ans. Peu de temps
après, il perdit l'usage de ses jambes, et
de graves symptômes annoncèrent sa fin
prochaine. Il s'empressa de recevoir les
secours spirituels , et mourut le 25 dé-
cembre 1818, honoré des regrets de tous
ceux qui l'avaient connu , et laissant un
grand vide dans le petit nombre de pré-
dicateurs qui ont survécu à nos troubles,
eu qui se sont formés depuis.
* L/VFAGE ( AivToiiVE de ) , baron de
Pailhès , seigneur de Mancie, membre de
la société d'agriculture , et du conseil-gé-
néral de la Haute-Garonne, naquit en
1753 à Toulouse. Il s'adonna d'abord au^
arts et donna des preuves de son talent
en peinture , en sculpture et en architec-
ture , puis il s'occupa d'une science non
moins utile, de la science de l'agriculture.
Ne se bornant point à de vaines spécula-
tions, il prouva la bonté de ses découver-
tes par l'heureuse application qu'il en fit,
et qui quadrupla les revenus de sa terre de
Mancie. Il fut arrêté à l'époque de la ter-
reur : rendu à la liberté il. reprit ses tra-
vaux champêtres et mourut le 16 septem-
bre 1806. On lui doit : | Nouveau système
d'agriculture fondé sur l'expérience;
I Observation sur les 7'ouleaux à battre
les grains ; \ Mémoires sur la construc-
tion des cuves j foudres et citeimes en ma-
çonnerie ; I plusieurs autres Mémoires .
imprimés dans la Feuille du cultivateur
et dans le Journal des propriétaires ru-
raux du département de la Haute-Ga-
ronne.
LAFAILLE. ^oyez FAILLE.
LAF ARE ( Charles- Auguste, marquis
de ), né au château de Valgorge , dans le
Vivarais, en 164i, fut capitaine des gardes
de Monsieur et de son lils, depuis régenl
du royaume. Il plut à ce prince par l'en-
jouement de son imagination et la déli-
catesse de son esprit. Ses poésies respirent
cette liberté , cet air riant et facile que
l'art tenterait en vain d'imiter ; mais elles
ont aussi lesdéfauts de la nature livrée à
elle-même : le style en est incorrect et
sans précision , sans parler d'un autre
défaut beaucoup plus grave. C'est l'A-
mour, c'est Bacchus , plutôt qu'Apollon ,
qui inspiraient le marquis de Lafare. Les
fruits de sa muse se trouvent à la suite
des anciennes éditions ^es OEuvres de
l'abbé de Chaulieu, son ami. Le n.arquis
de Lafare mourut en 1712 à 68 ans. Outre
ses Poésies, réimprimées à part en 1781 ,
1 vol. petit in-12, on a de lui Cies Mémoires
et des Réflexions sur les principaux évé-
nemens du règne de Louis XIV, in-12. Ils
sont écrits avec une liberté qui est sou-
vent poussée trop loin. On a encore de
lui les paroles d'un opéra intitulé Pan-
théej dont le duc d'Orléans fil en partie
la musique.
• LAFAUE ( Ax\E-Louis-HExni de ) ,
cardinal , né le 8 septembre 1732 , dans
le diocèse de Luçon , fut élevé au collège
Louis le Grand, et s'étant voué à l'état ec-
clésiastique , obtint , jeune encore , ie
prieuré de Donchéry près de Sedan. En
1778 , il était grand-vicaire de Dijon et
doyen de.la Sainte-Chapelle de cette ville.
LAF
202
LAF
Elu , en celte qualité syndic des états de
Bourgogne , il se trouvait ainsi à la tète
de l'administration de cette province. En
1783, il obtint en outre l'abbaye de Lic-
ques, ordre de Prémontré, dans le diocèse
de Boulogne. Nommé àl'évêchéde Nancy,
en 1787 , il fut sacré le 13 janvier 1788 :
ce siège lui donnait les titres de primat ,
de chancelier de l'université de Nancy
et de conseiller-prélat-né du parlement
de Lorraine. Le clergé de son diocèse le dé-
puta aux états-généraux, et il y prononça
le discours d'ouverture, qui, au milieu de
la fermentation des esprits , ne produisit
pas tout l'effet qu'on aurait pu en attendre.
Il parla plus d'une fois dans l'assemblée
pour faire déclarer la religion catholique
religion de l'état , pour empêcher la sup-
pression des ordres religieux , pour s'op-
poser à la confiscation des biens de l'E-
glise , ainsi que dans plusieurs autres
circonstances importantes , et fut un des
signataires de l'exposition des principes
que rédigea la minorité en 1790. Le 8
janvier 1791, Lafare adressa à son clergé
une lettre pastorale sur le serment pres-
crit, et aux administrateurs du dépar-
tement de la Meurthe une Lettre en
forme de déclaration et à la même date,
pour leur annoncer qu'il refusait de con-
courir à toutes les innovations renfer-
mées dans les décrets. Ce prélat coura-
geux avait déjà fait paraître plusieurs
brochures dans lesquelles il soutenait les
intérêts de la religion, entre autres des
) Considérations politiques sur les biens
temporels du clergé j 1789, in-8° ; | Quelle
doit être l'influence de l'Assemblée na-
tionale sur les matières ecclésiastiques
et religieuses , 1789, in-8°. L'évêque de
Nancy se retira d'abord à Trêves , puis à
Vienne , où il fut pendant vingt ans l'a-
gent et le correspondant du roi et des
princes. Lorsque Madame, fille de Louis
XVI, arriva dans cette ville, il remplit les
fonctions d'aumônier auprès de celle
princesse, et suivit les négociations pour
son mariage avec le duc d'Angoulème. Il
ne donna point la démission de son évê-
ché et il signa même les réclamations de
1803 : il avait adressé au pape une lettre
particulière qui est datée de Vienne
le 2 novembre 1801, et qui se trouve dans
le Recueil des pièces imprimées à Londres
en 1802, et réimprimées en 1814 à Paris.
( Voyez page 59 du volume. ) Du reste
ce prélat s'abstint constamment de l'exer-
cice de sa juridiction, et fut un des pre-
miers à remettre sa démission au roi,
lorsqu'il en fut requis. Sa qualité d'ageul
du roi à Vienne attira l'attention de Bo-
naparte qui le contraignit de sortir de
cette capitale : il passa plusieurs années
en Moravie , et courut même quelque
danger lorque les armées françaises en-
vahissaient l'Allemagne. Rentré en France
en 1814 , il fut adjoint à la commission
chargée de l'administration des affaires
ecclésiastiques, et fut nommé archevêque
de Sens. Il ne prit possession de ce siège
que le 27 novembre 1821. Il fut promu au
cardinalat en 1823, et obtint le titre près-
bytéral de Sle-Marie m Transpontina.
Il était en même temps pair de France,
ministre d'état, premier aumônier de ma-
dame la dauphine , et commandeur de
l'ordre du St.-Esprit. Le cardinal de La-
fare a assisté aux deux derniers conclaves.
Il est mort à Paris au mois de décembre
1829. Plusieurs de ses mandemens et de
ses cf?5C0Mrs mériteraient d'être recueillis :
on lui doit aussi un Eloge de M. de Ber-
niSt archevêque de Rouen ; une Notice
sur M. de Girac. ancien évêque de Ren-
nes, etc. On assure qu'il a laissé des manu-
scrits très précieux sur son émigration et
sur les affaires dont il avait été chargé
par le roi à Vienne : il est à désirer que
l'on publie ces mémoires.
* LAFAYETTE (Marie- Paul- Jeas-
RocH - Yves-Gilbert MOTIER , marquis
de), naquit le 6 septembre 1757 , à Cha-
vagnac en Auvergne. Issu d'un famille
illustre, il reçut une éducation conve-
nable à son rang , et fit au collège du
Plessis des études qui lui donnèrent une
connaissance assez étendue de l'antiquité.
Il n'avait que seize ans lorsqu'il épousa
m'^* de Noailles , fille du riche duc
d'Ayen. Cette alliance semblait ouvrir
devant lui la route des honneurs ; mais il
dédaigna les succès faciles que lui assu-
raient sa naissance et sa position dans le
monde , pour se faire une carrière à part
où réclat de tous les avantages qu'il pa-
raissait mépriser devait ajouter un nou-
veau lustre à sa renommée. L'indépen-
dance, qui dès ses premières années avait
été son goût dominant , devint la vocation
de sa vie. Il se sentait porté vers la li-
berté par une passion irrésistible , qu'il
comparait plus tard à l'entraînement de
l'amour ou à l'enthousiasme de la reli-
gion. L'insurrection des colonies anglaises
de l'Amérique lui offrit une occasion écla-
tante , de manifester par des actes ,ses
croyances politiques. On sait que l'armée
américaine composée de milices levées à
LAF
205
LAF
la hâte , essuya d'abord plusieurs échecs.
Le gouvernement français hésitait encore
à se déclarer pour les insurgés. Ce fut
dans ce moment critique que Lafayette
conçut l'aventureux projet d'aller combat-
ire dans les rangs de l'indépendance. Ses
amis et Franklin lui-même cherchèrent
vainement à le détourner d'une entre-
prise qui paraissait téméraire dans ces
circonstances. Lafayette partit sur un na-
vire qu'il fréta lui-même , et aborda à
Georgps-Town dans l'été de 1777. Reçu de
la manière la plus flatteuse par le con-
tirès, il fut revêtu du grade de major-
fjénéral dans l'armée des Etats-Unis ,
rjuoiqu'il eût demandé à servir en qualité
de simple volontaire. S'étant rendu au
camp des insurgés , il se vit accueilli
avec honneur par Washington, et bien-
tôt s'établit entr'eux une amitié qui dura
jusqu'à la mort de cet homme illustre.
Lafayette fut blessé près de Philadelphie,
dans la premièie affaire à laquelle il prit
part , et scella ainsi de son sang son
union avec les Américains. Le sang-froid
qu'il déploya dans celte occasion aug-
menta la confiance qu'on avait en lui , et
chaque phase noxivelle de la révolution
vint ajouter à son nom un nouvel éclat.
Non content de servir de son épée la
cause américaine, il engagea pour la sou-
tenir une grande partie de sa fortune.
Pendant la campagne de 1778 , il déga-
gea un corps de 2, 000 hommes que
l'armée anglaise avait enveloppés à Ba-
linkill. Dans l'affaire qui eut lieu dans
les défilés de Freehold , près de Mont-
mouth , Lafayette , en dirigeant l'avanl-
gardc contribua au triomphe de Was-
liinglon. Peu après il prévint la més-
intelligence qui était au moment d'écla-
ter entre les Français et les Américains ,
à l'occasion de la retraite de l'escadre
française qui devait concourir à l'attaque
de Rhodisland , et il conserva ainsi aux
insurgés un puissant allié. Les combats
ayant été suspendus pour quelque temps,
î afayetle profita de cet intervalle de re-
pos , pour revoir la France , où il pouvait
servir encore la cause qu'il avait em-
brassée , en hâtant les secours destinés
aux Etats-Unis. Au moment de son dé-
part , Franklin , au nom de ses compa-
triotes . lui offrit une épée sur la coquille
de laquelle il était représenté blessant
le léopard britannique , et recevant un
laurier de l'Amérique délivrée. En re-
mettant les pieds dans sa patrie , où l'o-
pinion publique s'était hautement pro-
noncée pour la cause américaine, il se
vit entouré de distinctions et d'hommages.
La cour qui s'était opposée à son départ
l'accueillit comme un héros; Voltaire
l'applaudit , et il fut chanté par tout ce
qu'il y avait de poètes en France. Profi-
lant de cette bienveillance universelle
pour servir la cause des insurgés , il
pressa les armemens destinés à secourir
les Etats-Unis , et passant en Espagne , il
obtint de cette puissance un traité de
commerce qui bientôt fut changé en dé-
claration de guerre contre l'Angleterre.
De retour en Amérique, Lafayette prit
une part active aux opérations de la
guerre. Le général Arnold, après avoir
trahi la cause de l'indépendance, ayant
été chargé par les Anglais de ravager les
côtes de la S'^irginie , Lafayette nommé au
commandement de l'armée américaine
dans cet état, lutta avec avantage contre
lui. Bientôt il tint tête à un plus redou-
table adversaire , à lord Cornwallis, qui
avait des forces supérieures aux siennes ,
et qui avait écrit à Londres que le petit
garçon ne pouvait lui échapper; c'est
ainsi qu'il appelait Lafayette. Celui-ci mit
tous ses soins à éviter une bataille , et
après avoir enfermé son adversaire dans
une position désavantageuse, il attendit
pour l'attaquer l'arrivée de Washington,
qui amenait avec lui le corps de Ro-
c.hambeau. La victoire fut complète du
côté des Américains, et la capitulation
d'Yorck-Town ( 1781 ), qui en fut la suite,
décida du sort de la guerre. Heureux de
voir se consolider l'indépendance amé-
ricaine , Lafayette partit de nouveau pour
l'Europe où la conclusion de la paix vint
bientôt consacrer les résultats obtenus
par la force des armes. Après en avoir
envoyé la première nouvelle au congrès,
il partit pour Madrid où il renoua les re-
lations politiques quelque temps inter-
rompues entre l'Espagne et les Etats-Unis.
Après des événemens d'une si haute
importance , il voulut visiter encore une
fois sa patrie adoptive. Partout il fut ac-
cueilli avec des transports d'allégresse ;
son nom fut donné à plusieurs forts et à
deux comtés, et son buste fut inauguré
au Capilole de Virginie. Les principes
d'indépendance qui venaient de triom-
pher en Amérique , se propageaient et se
fortifiaient chaque jour en Europe, et
Lafayette , qui en était pour ainsi dire le
représentant , jouit bientôt dans son pays
d'une popularité égale à celle qu'il avait
acquise aux Etats-Unis, Le moment ap-
LAF
204
LAF
prochait où des esprits ardens allaient
essayer en France une régénération so-
ciale. Lafayette se croyait prédestiné à
cette réforme partout où elle serait ten-
tée. Après son retour en Europe on le vit
s'occuper avec Naleshcrbes du sort des
protestans, et de l'amélioration de la
condition des nègres ; les catholiques
d'Irlande, les patriotes Bataves excitèrent
vivement ses sympathies. Dans les deux
assemblées des notables il se signala par
la hardiesse de ses propositions. Il s'y
prononça pour la suppression des lettres
de cachet et des prisons d'état , et il de-
manda la convocation de la nation repré-
sentée par ses mandataires. Nommé en
1789 député aux états-généraux, il y
parla pour la première fois le 8 juillet
de la même année, à l'appui de la cé-
lèbre motion de Mirabeau pour l'cloigne-
raent des troupes , et il offrit à l'assem-
blée un projet de déclaration des droits
de l'homme , qui fut adopté. Nommé
vice-président, il occupait le fauteuil
pendant les nuits terribles des 13 et 14
juillet. Le IS , il se rendit à Paris à la
tète d'une députation de soixante mem-
bres de l'assemblée. Il y trouva le peuple
encore ému et frémissant sur les ruines
sanglantes de la Bastille. Dans ce mo-
ment, plusieurs esprits conçurent l'idée
d'organiser une garde nationale afin de
l'opposer tour à tour , et selon le besoin
au peuple et à l'autorité royale. Qn déli-
liérait à la commune sur le choix du chef
à donner à cette force ; le nom de La-
fayette réunit tous les suffrages , et il fut
proclamé d'une voix. Quelques jours
après, il présenta à l'asseuiblée des élec-
teurs la cocarde tricolore , symbole de
la révolution qui commençait. Cette co-
carde ^ dit-il, fera le tour du monde.
Après le massacre de Foulon et de Ber-
Ihier, il donna sa démission; mais les
instances qui lui furent faites le décidè-
rent à reprendre son commandement. Le
5 octobre , après une émeute , il marcha
avec la garde nationale sur Versailles où
s'était porté le peuple de la capitale , et
le 6 il ramena dans Paris la famille royale
que son intervention tardive avait eu
peine à soustraire à la fureur d'une mul-
titude soulevée. Ces scènes violentes,
amenées par les progrès de la révolution,
n'étaient aux yeux de Lafayette que des
accid^ns déplorables en eux-mêmes ,
mais dont le blâme ne pouvait retomber
sur les principes qu'il professait. Dans la
discussion du 20 février 1790 , il proclama
que l'insurrection est le plus saint des
devoirs, lorsque l'oppression et la ser-
vitude rendent une révolution néces-
saire; principe dangereux, qui pous-
sant tous les mécontens à la révolte, et
les faisant juges dans leur propre cause ,
tend à bouleverser incessamment les
états. Lorsque le club des Jacobins se fut
organisé , Lafayette , de concert avec
Bailly, lui opposa celui des feuillans,
destiné à offrir un point de réunion aux
partisans plus modérés de la liberté. Lors
de la fuite de Louis XVI , Lafayette se
vit accusé par les deux partis opposés ,
les uns lui reprochant d'avoir laissé par-
tir le roi, les autres de l'avoir fait ar-
rêter. Il est vrai de dire qu'il protégea
dans cette grave circonstance les jours
de la famille royale ; mais il approuva
la suspension de Louis XVI , et il ne re-
connut les droits de ce prince qu'après
qu'il eut accepté la constitution. Le dé-
cret qui , à ceite condition , rétablissait le
roi sur le trône, ayant excité un soulè-
vement, Lafayette dissipa par la force les
attroupemens qui s'éiaicrit formés au
champ de Mars pour signer une pétition
factieuse. Plusieurs républicains furent
tués. Le 8 octobre 1791 , après avoir lait
accepter l'airmistie proposée par Louis
XVI , il se démit de son commandement,
et prit congé de la garde nationale dans
une lettre où il exposait les principes poli-
tiques qui avaient dirigé sa conduite ;
quelques jours après, il quitta la capitale.
Lorsque la première coalition se fut for-
mée contre la France , il fut désigné pour
commander une des trois armées desti-
nées à repousser cette agression. Le gé-
néral en traversant Paris fut reçu en
triomphe. Son premier soin après avoit
rejoint l'armée fut d'y rétablir la disci-
pline. Il battit l'ennemi à Philippeville,
à Maubeuge et à Florennes; malgré ces
succès il se vit bientôt en butte aux ac-.
cusations des Jacobins. Dans une lettre
écrite le 16 juin à l'assemblée Législative ,
il osa dénoncer les démagogues, qui , di-
sait-il, tuaient la liberté par les crimes
de la licence. Quelques jours après, ij
vint lui-même à la barre de l'assemblée
appuyer sa dénonciation , et demander
le châtiment des attentats du 20 juin. Le
discours qu'il prononça fut vivement ap-
plaudi par le côté droit. Le roi devait le
lendemain passer en revue quatre mille
gardes nationaux. Lafayette résolut de
profiter de cette circonstance pour y)or!er
un coup décisif aux fadieux. Mais soit
LAF
que les Jacobins fussent parvenus à le
rendre suspect à un corps qui lui avait été
dévoué, soit que la revue eût été contre-
inandéc dans la nuit , peu d'hommes ré-
pondirent à l'appel , et Lafayette repartit
pour son armée avec la triste conviction
que sa popularité s'était en grande pai tic
évanouie. Quelques jours après son dé-
part son effigie fut brûlée au Pahûs-Royal ;
et au mois d'août suivant, sa mise en ac-
cusation fut discutée dans l'assemblée Lé-
gislative. Malgré les menaces et les cris
des forcenés entassés dans les tribunes ,
celte question fut résolue en sa faveur
à une majorité de plus des deux tiers dos
voix ; mais tous ceux qui avaient voté
pour lui furent hués , poursuivis et mal-
traités par le peuple au sortir de la
séance. Indigné des scènes de désordres
qui se succédaient dans la capitale , La-
fayette conçut le projet de marcher sur
Paris , de chasser les républicains et de
rétablir le roi et la constitution; mais il
s'aperçut bientôt que son armée était peu
disposée à seconder ses desseins , et il se
décida à passer en pays étranger avec un
petit nombre d'officiers dont la vie était
évidemment compromise. Le général et
CCS compagnons au nombre de vingt-
deux , tombèrent dans un poste autri-
chien qui refusa de les laisser passer.
Lafayette ayant été reconnu, il n'en fallut
pas d'avantage pour qu'on les arrêtât. La
plupart d'entre eux furent conduits àNa-
mur, à Nivelle et ensuite à Luxembourg.
Lafayette avec trois de ses compagnons,
anciens membres de l'assemblée Consti-
tuante , fut envoyé à Wez-el comme pri-
sonnier d'état. Transféré à Magdebourg ,
il y resta un an , renfermé dans un sou-
terrain humide el obscur. Il passa ensuite
dans les cachots de Glatx , de Neiss , el
enfin d'Olmiitz , où l'Autriche le fît traiter
avec ime grande rigueur , le regardant
«ans doute comme un des principaux au-
teurs de la révolution qui avait conduit
à l'échafaud Louis XVI et Marie-Anloi-
nette. On le dépomlla de ce que les Prus-
ftiens lui avaient laissé , et on confisqua
jtisqu'aux livres qu'il avait avec lui- Ce-
pendant un médecin hanovrîen , nommé
Bollman, et un jeune américain , nommé
Iluger, entreprirent de le délivrer, et
profitant d'une des promenades qu'on lui
faisait faire régulièrement à cause du dé-
labrement de sa santé , ils parvinrent à
l'enlever ; mais divers accidens firent
échouer leur entreprise. Lafayette fut
atteint et repris à huit lieues d'Olmiilx ;
7.
£05 LAF
et ses deux amis arrêtés également, ex-
pièrent dans les prisons leur courageux
dévouement. Cependant, après avoir passé
seize mois dans les cachots de Robes-
pierre, M"'= de La fayelte vint avec ses
filles partager la captivité de son époux,
et celle réunion compensa pour le gé-
néral prisonnier le redoublement de sé-
vérilé dont on usait envers lui, de-
puis sa tentative d'évasion. Des menv-
bres du parlement d'Angleterre, et des
agens du gouvernement des Elais-Unis
élevèrent en vain la voix pour deman-
der sa liberté , l'Autriche fut inflexi-
ble : elle ne devait céder qu'à l'ascendant
de la victoire. Bonaparte , à qui ses suc-
cès en Italie donnaient une si grande in-
fluence en Europe, fut chargé par le
Directoire de négocier la délivrance des
prisonniers d'Olmiitz. Ce ne fut pourtant
qu'après cinq mois de pourparlers réitérés
qu'il obtint leur mise en liberté. Sur ce»
entrefaites le 18 fructidor eut lieu. La-
fayette qui desapprouvait ce coup d'état
resta en pays étranger , el alla s'établir à
Uîrecht. Les événemens du 18 brumaire
lui ouvrirent les portes de la patrie.
De retour en France, il vécut éloigné du
théâtre des affaires publiques. Ce fut seu-
lement après la bataille de Marengo qu'il
eut occasion de voir Bonaparte. Lafayette
fut accueilli très amicalement par le pre-
mier consul avec qui il passa trois jour»
à la campagne chez son frère Joseph.
Cependant toutes les instances qui lui
furent faites ne purent le décider à ac-
cepter une place de sénateur. Entrevoyant
déjà les projets ambitieux de Bonaparte,
il pensait qu'il ne lui convenait pas d'en-
trer dans un ordre de choses contraire à
ses principes , et où il aurait eu à com-
baltre l'homme auquel il se sentait atta-
ché par la reconnaissance. Lorsque le
consulat à vie eut été proposé à la sanc-
tion des suffrages du peuple , Lafayette
déclara qu'il ne pouvait voter pour une
pareille magistrature jusqu'à ce que la
liberté publique eût été sufiisamnaent ga-
rantie; ajoutant qu'alors il donnerait sa
voix à Napoléon Bonaparte. Ses relations
avec Bonaparte cessèrent , à dater de
l'érection du trône impérial. Le vain-
queur de l'Europe s'étonnait de trouver
un homme qui osât lui résister avec tant
d'obstination. « Tout le monde en France,
» disait-il, est corrigé des idées extrême»
» de liberté ; il n'y a qu'un homme qui
» ne le soit pas , et cet homme c'est La-
» fayelte. Vous le voyei tranquille! Eli
LAF
206
LAF
» bien , s'il y avait une occasion de ser-
» vir SCS chimères , il reparaîtrait plus
» ardent que jamais. » En 1814 , Lafayelte
se présenta une fois chez le roi et chez
Monsieur , et il fut bien reçu par ces
princes. Pendant les cent jours il refusa
la pairie , parce que l'hérédité de cette
magistrature était contraire à ses prin-
cipes, et il protesta contre les articles des
constitutions de l'empire et de l'acte ad-
ditionnel qui pouvaient attenter à la sou-
veraineté nationale. Elu par le départe-
ment de Seine-et-Marne membre de la
chambre des représenlans , il fit déclarer
oprès la bataille de Waterloo que l'as-
«emblée était en permanence , que toute
tentative pour la dissoudre était un crime
de haute trahison. Lorsque Bonaparte,
effrayé des dispositions de la chambre ,
»e fut décidé à abdiquer, Lafayelte exclu
par une intrigue du gouvernement pro-
visoire, fut envoyé en qualité de com-
missaire près des puissances alliées pour
demander une suspension d'armes. Ses
démarches et celles de ses collègues
n'ayant eu aucun résultat, il revint à
Paris, oii déjà les armées étrangères
étaient entrées par suite d'une capitula-
«ion. Quelques jours après les portes du
rorps législatif furent fermées et mises
sous la garde d'un poste de Prussiens.
Lafayette , après avoir protesté avec plu-
sieurs députés contre cette violence, se
retira dans sa terre de Lagrange où il
▼4cut dans la retraite. Nommé en 1818,
membre de la chambre des députés par le
département de la Sarlhe, il prit place sur
les bancs de l'extrême gauche, et s'y si-
gnala par une opposition dans laquelle il
gutallier l'inflexible énergie des principes
révolutionnaires à des formes exemptes
d'aigreur et de violence. La prédiction de
Bonaparte s'accomi>lissait. En reparais-
sant sur la scène politique, Lafayette
s'y montrait l'ardent apôtre des doctrines
les plus absolues de souveraineté du peu-
ple et d'insurrection , et il les développait
à la tribune avec une conviction qui se
fortifiait des souvenirs de deux révolutions
auxquelles il avait pris une part active.
Ses souffrances d'Olmîitz n'avaiont en
rien modifié ses principes. Le vieux dé-
puté de 1820 parlait comme le jeune vo-
ilontaire de 1777, et on aurait pu dire de
jlui ce qu'on disait des émigrés, qu'il n'a-
vait rien oublié^ ni rien appris. A l'occa-
sion de tous les complots qui éclatèrent
gous la restauration, le nom de Lafayette
lut prononcé; mais il fut imposftil>le de
prouver qu'il y eût participé. Rendu k la
vie privée , le compagnon d'armes de
Washington sentit le désir de revoir sur
le déclin de l'âge le peuple pour lequel
il avait combattu dans sa jeunesse. Plus
d'une fois ses nombreux amis d'Amérique
l'avaient sollicité de venir les visiter. II
se rendit enfin à leur vœu , et s'embarqua
au Havre sur le Cadmus\& 13 juillet 1824.
Après trente-trois jours de traversée, il dé-
barqua sur le rivage où il avait fait ses pre«
mières armes. Le congrès lui accorda dos
honneurs qu'il n'avait jamais accordés à
Washington ; il fut proclamé l'hôte de la
nation, et fut successivement fêté partous
les états de l'Union. Entouré des popula-
tions qui se pressaient sur son passage, il
visita le tombeau de Washington , et les
champs de bataille où il avait partagé
les périls de ce grand homme. Ce voyage,
qui dura plus d'un an , ne fut pour lui
qu'une suite de fêtes où se retrempa son
enthousiasme républicain. La prospérité
des Etals-Unis dont il venait d'être témoin
l'attacha de plus en plus aux maximes
qu'il avait professées toute sa vie, et
lorsqu'en 1827 il fut envoyé de nouveau
à la chambre des députés par l'arrondis-
sement de Meaux , on le vit défendre avec
une ardeur nouvelle les principes démo-
cratiques. Ennemi déclaré de la restaura-
lion , il appelait de ses vœux le moment
de sa chute. Son expérience lui faisait re-
connaître dans tout ce qui se passait au-
tour de lui les symptômes d'une révolution
nouvelle, qu'il prédisait à ses amis pour
ranimer leur courage défaillant. Quand
le trône de Charles X s'écroula en 1830 .
il vit sans étonnement ce mouvement po-
pulaire et il se remit à l'œuvre, comme en
1789. Après avoir repoussé toutes les pro-
positions du frère de Louis XVI, en décla-
rant qu'il était trop tard, son influence con-
tribua à rattacher à la dynastie de Louis-
PhiUppe les hommes les plus exaltés dn
parti libéral. En paraissant à côté du nou-
veau roi sur le balcon de l'Hôtel-de-ville ,
il sembla contracter une alliance solen-
nelle avec le pouvoir né des barricades .
et le mot fameux ; c'est la meilleure des
républiques^ qu'il prononça selon les uns,
et qu'on lui attribua faussement selon les
autres, fut répété dans toute la France et
jeté comme un cri de ralliement à l'opi-
nion publique ; mais en se faisant l'auxi-
liaire de la royauté , Lafayette était loin
d'avoir renoncé aux théories de sa jeu-
nesse. Comme au temps où il conseillait
l'infortuné louis XVI* il prétendait allitr
LAF
207
LAF
deux choses qui semblent incompatibles ,
la monarchie , et des institutions républi-
caines. Mais Louis-Philippe recula devant
cette carrière de concessions , que lui ou-
vrait le vétéran de la révolulion française,
et dont il craignait sans doute que le terme
ne fût une catastrophe. Bientôt Lafayeltc
s'aperçut que d'autres avis que les siens
étaient écoutés. Investi dans les premiers
jours de la révolution de juillet du com-
mandement en chef des gardes nationales
de France , il dut renoncer à ce titre par
suite d'un amendement introduit par un
député dans la loi relative à la milice ci-
toyenne. Dès lors sa scission avec le pou-
voir devinldejour en jour plus profonde,
et il vit se rallier autour de lui une op-
position composée de républicains ar-
dens , dont il lâchait de calmer les impa-
tiences. La marche de la royauté nouvelle
l'affligeait, mais sans altérer sa confiance;
il attendait du temps bien plus que de la
violence un retour aux principes qu'il
professait, et sur la tin de sa vie il
croyait fermement à un dernier triomphe
de la révolution dont il ne lui serait pas
donné d'èlre le chef ni même le témoin.
Ayant voulu , malgré son grand àj^e , sui-
vre à pied le convoi du malheureux Du-
long , enlevé d'une manière si déplorable ,
la fatigue que lui causa cet effort altéra
sa santé. Après une convalescence appa-
rente, il éprouva une rechute qui bientôt
ne laissa plus d'espoir. Il est mort à Paris
le 20 mai 1851. Ses restes ont été inhumés
au cimetière de Picpus. Peu d'hommes
depuis soixante ans ont joué un rôle aussi
important que Lafayette sur la scène po-
litique. Sans jamais avoir tenu les rênes
du pouvoir, il influa immensément sur
les destinées de son siècle. Trois révolu-
lions partagèrent sa vie; celle d'Améri-
que , celle de 1789 et celle de 1830. Mais si
la première opérée par les armes, répon-
dit complètement à ses espérances , les
deux autres furent fécondes pour lui en
désappointemens. Proscrit comme mo-
déré par les patriotes de 92 , accusé d'exa-
gération par les libéraux de 1850 , il vil
tour-à-tour la révolution de France aller
au-delà ou rester en-deça de ses vœux ,
et la liberté , telle qu'il l'avait rêvée ,
échappa deux fois comme une ombre
vaine à ses poursuites. Malgré la droiture
de ses intentions et la pureté de ses mo-
tifs, sa conduite fut souvent accusée à
juste litre. On lui reprocha , et non sans
raison, la téméraire imprudence avec la-
quells il déchaînait les passions popu-
laires, sans avoir aucun moyen de les
maîtriser, et l'aveugle confiance avec la-
quelle il se laissait entraîner par des évé-
nemens plus forts que ses théories. Mal-
gré le brillant courage dont il fit preuve
en diverses circonstances, il parut man-
quer plus d'une fois de résolution, et ses dé-
terminations ne répondirent pas toujours
à la grandeur des circonstances dans les-
quelles il se trouva placé. La postérité lui
reprochera de graves erreurs , mais elle
dira aussi qu'il se trompa de bonne foi,
et qu'une conviction profonde régla le
cours de sa vie politique. Au milieu delà
nation la plus changeante de l'univers, et
malgré la plus étonnante succession d'é-
vénemens dont l'histoire ait conservé le
souvenir, il donna le rare exemple d'une
longue vie consacrée tout entière à la dé-
fense des mômes principes. Ennemi des
excès et des violences de toute espère, il
exposa plus d'une fois une popularité qui
lui était chère pour arrê'er Ses désordres.
Les efforts qu'il fit au mois de décembre
1850 pour protéger la vie des ministres
de Charles X menacée par le peuple
ameuté , honorent son caractère et son
courage. Dans la vie privée , la facilité de
ses mœurs , une complaisance à toute
épreuve, et un mélange piquant d'urba-
nité française et de franchise républicaine
le faisaient aimer de tous ceux qui l'en-
touraient. La mort d'un tel homme a
laissé un vide immense dans son parti, et
l'on a eu raison de dire que la république
avait perdu son drapeau.
LAFAYETTE. Voyez FAYETTE.
LyVFÉRAADiÈRE ( Marie-Amable-
PÉTITAU , épouse de Louis -Antoine
Rousseau , marquis de ) , née à Tours
en 1756, morte à Poitiers en janvier 4817,
cultivait en secret les muses, lorsqu'une
jolie chanson qu'elle adressait à sa fille,
ayant été insérée dans le Mercure par
l'indiscrétion de quelques amis , valut è
l'auteur des vers charmans qu'elle ne crut
pas devoir laisser sans réponse. Dès lors
le Mercure et V Abnanach des muses
s'enrichirent de ses productions : eUe se
fit remarquer par des pièces en vers plei-
nes de grâce , de facilité et d'élégance. ^
Elles ont été réunies sous ce titre: OEit-'
vresde madame de Lafér.... Paris, 1806,
2 vol. in-12. Il en parut la même année
une seconde édition augmentée.
• LAFERRO.NAYS (Jules-Basile de )
évéque de Lisieux , né le 2 janvier 1735,
au château de Sl.-Mards-lès-Ancenis, près
de Nantes, dut à sestalcns autant qu'à sa
LAF 208
naissance sa prompte élévation aux di-
gnités ecdésiasliques. Il fut pourvu très
jeune de divers bénéfices , et devint
grand-vicaire de M. de Marnays , évcque
de Couscrans, qui lui donna aussi la di-
fTnilé de présenteur de son chapitre.
I/abbé de la Ferronays assista à l'assem-
blée du clergé en 17G5 , et fut conclavisie
du cardinal de Bernis au conclavede 1769.
Le 24 décembre de la même année, le roi
le nomma à l'évêché de Sl.-Bricuc , et il
fut sacré le 8 avril 1770. Il fut appelé en-
tuile successivement au siéjje de Rayonne
( 1775 ) , et à celui de Lisieux ( 1783 ).
Il s'attacha à pacifier ce diocèse que des
divisions avaient troublé sous son prédé-
cesseur, M. de Condorcet , prit part aux
réclamations de ses collègues contre les
décrets de l'assemblée Constiluanle ,
adopta r Exposition des principes , et pu-
blia une lettre pastorale pour adiiérer à
l'instruction de M. de Bourevilles , évo-
que de Soissons. Il émigra en 1790, se re-
lira en Suisse et résida quelque lemps
près de Genève , puis à Soleure. S'étanl
réuni à sa famille en Franconie, il se ren-
dit ensuite à Bruxelles où il conféra avec
un certain nombre d'évéques français qui
«'y trouvaient à celte époque : une nou-
velle invasion de l'armée républicaine
dans les Pays-Bas le força de s'éloigner.
Le l'"'' juillet 179iil se rendit àDusseldorf,
puis en 179a à Munster et en 1796 àBrun-
.«jwick. En 1797 il songeait à revenir en
France, où l'étal des choses semblait don-
ner quelques espérances ; mais le 18 fruc-
tidor le lit renoncer à son dessein. Les
progrès de l'armée française l'obligèrent
de changer de retraite ; il alla d'abord à
Constance où il rejoignit sa famille , et
enfin lise fixa à Munich. C'est dans cette
dernière ville qu'il succomba à une lon-
gue maladie le 15 mai 1799. On trouve de
plus amples détails sur ce prélat dans
une Notice qui a été publiée à Lisieux
en 1850.
LAFFICHARD. Voyez AFFICHARD
(Tqouas r).
• LAFFITTE-CLAVÉ ( N.... ), général
français , né à Clavé ( Gascogne ) en 1730,
servit en 1783 dans la guerre des Turcs
' contre la Russie , et reçut du sultan en
récompense de ses services, une ma-
gnifique épée. Laffîlle-Clavé avait fondé à
C/onslanlinople une école militaire ^ et
publié , pour l'instruction des élèves de
cet établissement, un Traité élémentaire
(le la castramélation et de la fortifica-
tion passagère . ouvrage écrit en langue
LAF
turque et imprimé magnifiquement dans
le palais de l'ambassadeur de France à
Péra, 1787, deux parties in-4» avec 20
planches. De retour en France , il fut
nommé colonel et chargé des fortificationa
de Valenciennes. Promu au grade de gé-
néral de brigade en 1792, il commanda
l'arme du génie à l'armée du Nord , et
mourut du chagrin que lui causa une
destitution injuste dont on voulut ensuite
réparer le tort, lorsqu'il n'élail plus temps.
Outre l'ouvrage dont nous avons parlé,
on a de lui un Mémoire militaire sur la
frontière du Nord. 1779, in-8°.
♦ LAFFON DE LADÉBAÏ ( André-Da-
niel), né à Bordeaux le 50 novembre
1746 , d'une famille distinguée de celte
ville, acheva son éducation dans l'uni-
versité de Franeker (Frise hollandaise),
et était de la religion prolestante. Il par-
tagea quelque temps les travaux de son
père, chef d'une maison de commerce 1res
considérable, se maria en 1775, et se re-
tira à la campagne où il s'occupa des
soins qu'exigeait sa famille. Il s'appliqua
à l'étude de l'économie politique , et y ac-
quit des connaissances très élendues, sur-
tout dans la partie des finances et de l'a-
griculture. Il fut un des fondateurs de
l'académie de peinture do Bordeaux , de-
vint membre de l'académie des sciences
et arts de la même ville, et correspon-
dant des sociétés d'agriculture et d'en-
couragement de Paris. A l'époque de la
convocation des états-généraux, Laffon
publia sur la formation de cette assem-
blée et sur le mode des élections divers
écrits de circonstance. La noblesse de la
Guyenne ne s'étant point entendue sur
la nature et les limites des pouvoirs à
donner aux députés , il fut chargé d'aller
réclamer auprès des étals-généraux contre
les nominations qui avaient été faites
avec des mandats spéciaux , et de nou-
veaux pouvoirs furent donnés aux dé*
pûtes. En 1791 Laffon fut nommé membre
de l'assemblée Législative : il se rangea
parmi les défenseurs du trône, et s'oc-
cupa , dans le comité des finances dont il
faisait partie , des moyens qui pouvaient
apporter l'ordre dans les dépenses de
l'état et soutenir le crédit menacé. Le 20
juin 1792 il se rendit au château où il
s'efforça de protéger la famille royale,
présida l'Assemblée , du 23 juillet au 10
août , journée dans laquelle , après avoir
reçu Louis XVI dans l'assemblée et fait
de vains efforts pour rétablir l'ordre , il
dut quitter le fauteuil. Il parvint pendaat
LAF
209
LAP
les massacres de septembre à arracher à
la mort l'abbé Sicard : ce fut aux démar-
ches qu'il fit près de Chabot ( Foy. CHA-
BOT) que l'insliluteur des sourds-muets
dut la vie. Dans- le mois de décembre
•uivant , Laffon fut dénoncé sous le faux
prétexte qu'il avait reçu des fonds de la
liste civile. Mis en étal d'arrestation chez
lui pendant quelques jours, il recouvra
ensuite la liberté, fut arrêté de nouveau
en 1794, et n'échappa à la proscription
que parce que l'on avait besoin de ses
lalens pour assurer le service des subsis-
tances. En septembre 1795 les départe-
mens de la Seine et de la Gironde le dé-
putèrent au conseil des Anciens , dont il
fut nommé secrétaire le 20 mai 1797 , et
président le 20 août suivant. Il parla dans
cette assemblée sur la plupart des ques-
tions de finances , se montra opposé aux
projets du Directoire , et fut déporté après
le coup d'état du 18 fructidor (4 septem-
bre 1797 ) , dans les déserts brûlans de Si-
namary. Il y fut atteint de la maladie
violente qui enleva plusieurs de ses com-
pagnons d'infortune, et resta seul avec
M. de Marbois sur cette terre inhospita-
lière. Après 21 mois d'exil , ils furent tous
deux rappelés. Comme Laffon avait au-
trefois demandé la destitution du général
Bonaparte, dans le conseil des Anciens ,
il ne put être admis dans le sénat, quoique
plusieurs départemcns l'eussent proposé
pour en faire partie. Il se chargea de la
direction de la banque territoriale ; mais
il n'y fut pas heureux. Il devint plus tard
un des administrateurs de l'institution
royale des jeunes aveugles. Il est mort à
Paris le 14 octobre 1829 , à l'âge de 83
ans. Parmi les diverses brochures que
Laffon-de-Ladébat a publiées , nous ci-
terons; I Examen impartial des nou-
velles vues de sir Rohefi't Owen et de ses
établissemens à New-Lanarck en Ecosse
pour le soulagement et l'emploi le plus
utile des classes ouvrières et des pau-
vres ^ pour l'éduca tion de leurs enfans , e te .
avec des observations sur l'application
de ce système à l'économie politique de
tous les gouverneme?is^ par Henri-Grey
Macnab , traduit de l'anglais , Paris, 1820,
in-8°; | Eloge de John Oiven^ l'un des
secrétaires el des fondateurs de la société
biblique britannique et étrangère^ fait au
nom du comité de la société biblique pro-
testante à Paris ^ Paris , 1823 , in-S". Laf-
fon-de-Ladébat a aussi publié des obser-
vations sur la Guyane françabe , et a
coopéré jusqu'en 1827, à la rédaction de
la Revue encyclopédique pour la partie
des sciences politiques et morales. On
trouve sur cet auteur une Notice dans le
quatrième volume de 1829 de ce recueil,
page 537.
LAFITAU (JoSEPn François), mis-
sionnaire et historien, né à Bordeaux ,
entra de bonne heure dans la compagnie
de Jésus , où son goût pour les belles-
lettres et pour l'histoire le tira de la foule.
Il se fit connaître dans la république des
lettres par quelques ouvrages ; | Les
mœurs des sauvages américains ^ corn-
parées aux mœurs des premiers temps ,
imprimées à Paris en 1723 , en 2 vol. io-
4°, fig., et 4 vol. in-12; c'est un livre très
estiiTMible , attaqué fort mal à propos par
Roberlson dans son Histoire de l'Améri-
que, ouvrage superficiel, plein d'obser-
vations fausses et de principes pernicieux.
{Voyez le Joum. hist. et lit. ^ 13 mars
1778.) Le père Lafitau avait été mission-
naire parmi les sauvages ; aussi n'avons-
nous rien d'aussi exact sur ce sujet. Son
parallèle des anciens peuples avec les
Américains est fort ingénieux , et supposa
ime grande connaissance de l'antiquité ,
qtxoique tout n'y soit pas également plau-
s.iblc , et qu'il y ait plusieurs rapproche-
mens forcés. | Mémoire concernant la
précieuse plante Ging-Seng^ de Tartarie,
Paris , 1718 , in-8** ; | Histoire des décou-
vertes des Portugais dans le Nouveau-
Monde, 1733, 2 vol. in-4°, et 1754, 4 vol.
in-i2, exacte et bien écrite. L'auteur
mourut en 1740.
LAFITAU (Pierre-François), parent
du précédent, évéque de Sisteron, naquit
à Bordeaux en 1685 , d'un courtier de vin,
et dut sa fortune à son esprit. Il entra
fort jeune chez les jésuites , et s'y distin-
gua par son talent pour la chaire. Ayant
été envoyé à Rome au sujet des disputes
élevées par les jansénistes contre la bulle
Unigenitus , il plut à Clément XI. Sa con-
versation vive et aisée , son esprit fécond
en saillies , donnèrent au pontife une idé»;
favorable de son caractère et de ses ta-
lens. 11 sortit de son ordre et fut nommé
à l'évêché de Sisteron (1719); il y fui
l'exemple de son clergé. Après avoir passé^
sa vie dans l'exercice des vertus épis-'
copales, il mourut en 17G4, à soixante-
dix ans au château de Lurs, qui apparte-
nait aux évêques de Sisteron. L'cvéque
de Sisteron s'était toujours montré en-
nemi ardent du jansénisme. On a de lui
plusieurs ouvrages : ! Histoire de la con-
stitution UWGENITI'S , 1757 . el 1738 en
18.
LAF
210
LAF
î vol. ln-12. « On y trouve , dit l'auteur
• dcs.TVo»* siècles j. le vrai, qui doit être
• la base de tout ouvrage historique , et
» avec le vrai, de l'ordre, de la clarté, du
• développement, un style noble, con-
» venable à l'histoire , et une modération
» dont on ne doit jamais s'écarter. » Il en
a paru une nouvelle édition à Maeslricht,
^789 , 2 vol. in-12. | Réfutations des anec-
dotes ^ ou Mémoires seci'ets sur l'accepta-
tion de la Constitution UNIGENITUS, par
nilefore^ Gray, 1734, 5 vol. in-S" ; ouvrage
qui prouve, ainsi que le précédent, qu'il
connaissait à fond la secte dont il dévoi-
lait les intrigues. Cette connaissance allait
Jusqu'à voir bien avant et d'une manière
bien précise dans l'avenir, comme il pa-
raît par le passage suivant , si llltérale-
ment vérifié lors de la révolution de
^789 : « Qu'on revienne présentement
» sur tout ce qu'on a lu dans cette his-
» toire, et on trouvera que le Quesnellisme
• n'est au fond que le calvinisme même,
» qui n'osant se montrer en France à dé-
» couvert , s'est caché sous les erreurs du
»> temps. C'est ce qu'on a vu dans ces fa-
» mcux projets où les quesncUistes vou-
■ laicnt réunir l'Egrise de France à l'E-
» glise anglicane ( voyez DUPIN ) , et dans
» tous ces fameux libelles où ils ont éngé
» un tribunal à l'esprit particulier. Mais
» c'est ce qui paraîtrait encore mieux
» dans une de ces occasions critiques, que
• Dieu veuille détourner^ où il s'agirait
• de troubler tout pour établir une entière
» libei-tê de conscience ; pour lors il est
I» indubitable qu'on verrait les quesnel-
» listes s'associer ouvertement aux pro-
» testons, pour ne plus faire qu'un même
» corps , comme ils ne font déjà qu'une
» même âme avec eux. » L'auteur avait
signalé dans un mandement les anecdotes
qu'il accompagna de la Réfutation; l'un
et l'autre furent supprimés par un arrêt
du conseil. Il avait désapprouvé la con-
sultation des avocats de Paris en faveur
de l'cvéque de Senei , qui fut condamné
au concile d'Embrun, où Lafilau assista.
I Histoire cfo Clément XI, en 2 vol. in-
i2 ; I des Sermons, en h vol. in-12 , qui ne
répondirent point à l'attente du public.
Ce prélat avait plus de geste et de repré-
sentation que d'éloquence. Il cite rare-
ment l'Ecriture et les Pères, les preuves
manquent de choix , et les meilleurs res-
tent souvent de côté : ils sont cependant
bien supérieurs aux discours légers de la
plupart de nos orateurs modernes. Il trai-
Uxil U morale avec plus de succès que les
mystères ; [ Retraite de quelques jours ,
in-12; I Avis de direction , in-12; | Con^
férences pour les missions. in-i2 ; | Let-
tres spirituelles, in-12. Tous ces ouvra-
ges, remplis de bonnes moralités, sont
quelquelois faiblement pensés ; ils sont
cependant très utiles pour la direction
des consciences ; | La Vie et les mys-
tères de la sainte Vierge. 1759, 2 vol.
in-12. L'auteur y montre plus de piété
que de critique , et associe à des choses
incontestables des traditions incertaines
ou fausses.
•L.\FITE ( Marie -EuzABETH, dama
de ), née à Paris vers 1750 , morte à Lon-
dres en 1794, est particulièrement connue
par ses Entretiens, drames et contes mo'
raux, à Vusage des enfans, Paris , 18(M ,
4 vol. in-12 ou in-S", très souvent réimpri-
més. On a encore d'elle : | Réponses à dé-
mêler, ou Essai d'une manière d'exercer
l'attention. 'i.dLXit&nnc, 1791, in-12; \ flis-
toire de la conversion du comte Struen-
sée, traduite de l'allemand de Munster,
Lausanne , 1773, in-8 ; | Mémoires de iW"'
de Stemheim. traduits de l'allemand do
Wieland, 1773, 2 vol. in-12; ] Vie et let-
tres de Gellert. 177o , 3 vol. in-8°, aussi
traduites de l'allemand.
• L.\FOLIE ( Ch4rles-Jeai« ) , né le 23
janvier 1780 , à Paris, était employé à
l'administration déparlementale de la
Seine , à l'époque du premier procès du
général Moreau. II prit la défense du
vainqueur de Hohcnlinden ; et , la veille
du jour où le jugement devait être prtn
noncé, il publia et dédia à Bonaparte une
brochure intitulée: Opinion publique sur
le procès du général Moreau ( 1804 ).
On assure que ce livre produisit quelque
impression sur l'esprit du guerrier qui
gouvernait la France. L'année suivante
l'auteur fut nomftié chef de bureau de
M. Méjean , ministre de la justice du
royaume d'Italie , et il conserva cet em-
ploi jusqu'en 1812 : M. Méjean était à cette
époque en Autriche, où il avait accompa-
gné le vice-roi d'Italie. Lafolie peignit
vivement au ministre le mécontentement
des Italiens, que les charges continuelles
dont on les accablait , irritaient chaque
jour davantage ; il fut destitué. Cepen-
dant peu de temps après , il fut nommé
secrétaire-général de la préfecture du Ta-
gliamento, puis sous-préfet de Ravenne.
La restauration do 1814 le ramena en
France , où il ne tarda pas à recevoir la
place de conservateur des monumens des
art» à Paris, sous la direction du ministre
LAP
211
LAF
de l'intérieur. Il est mortle 4 février 1824,
oprès avoir publié plusieurs ouvrages,
dont M. Beuchot a donné la liste dans la
Bibliographie de France . \%2k, page 446.
On lui doit: | une édition revue ànJanua
tii}guce latiîicCt de J. Amos Comenius,
1802, in-12 ; june 5' édition delà Gram-
maire italienne de MM. de Port-Royal ^
précédée de réflexions sur cette, gram-
maire > Paris , 1803, in-8°; | une traduc-
tion en italien (VElizabeth , ou les Exilés
en Sibérie, de M"" Coltin ; J V Angleterre
jugée par elle-même ou Aperçus moraux
et politiques sur la Grande-Bretagne .
extrait des écrivains anglais, traduit de
ntalien. Milan, 1806, in-S" ; Paris, 1508,
in 12; | une Table chronologique des
hommes les plus célèbres de C Italie de-
puis le temps de la grande Grèce jus-
qu'à nos jours, insérée dans une édition
italienne de la géographie de Guthrie,
donnée à Milan en 1810 ; j Notice des mo-
numcns publics, palais, édifices, musées,
galeries, etc. , de la ville de Paris , avec
l'indication des ministères , Paris , 1820 ,
in-12; \ Histoire de l'administration du
royaume d'Italie pendant la domination
française . etc. , par M. Frédéric Corac-
dni, pseudonyme, traduit de l'italien, Pa-
ris, 1823, in-8°. M. Beuchot prétend que
Lafolie n'est pas le traducteur, mais l'au-
teur de cette histoire, quoique ce dernier
l'ait désavouée dans les journaux. Cet
ouvrage a été reproduit l'année suivante
sous le litre de Riémoires sur la cour du
prince Eugène et sur le royaume d'Italie.
Lafolie a publié plusieurs autres écrits
moins importans, de politique et de litté-
rature, et donné des notices biographiques
dans l'ouvrage intitulé : Galerie française,
ou Collection des portraits des hommes
et des femmes célèbres qui ont illustré la
France dans les IGS 17* et 18'^ siècles, Pa-
ris, Didol , 1822-24 , in-4". Il a aussi coo-
péré, durant son séjour en Italie, au
journal littéraire intitulé : il Poligra-
pho.
LAFONT, LAFOSSE. p-Quez à la let-
tre F.
• LAFONTAÏNE ( Auguste ) , un des
romanciers les plus féconds de noire épo-
que , naquit à Brunswick , le 6 février
4756, d'une famille prolestante de réfu-
giés français. Son père qui étaii peintre, le
destina à l'état ecclésiastique , cl il fit ses
cours de théologie à l'université d'Hclm-
stadt ; mais , ne se sentant aucune voca-
tion pour le sacerdoce , il accepta eu i7y6
l'emploi de gouverneur des enfans du gé-
néral prussien Thadden, résident à Halle.
Cependant il devint ministre , et obtint
en 1789 la place d'aumônier d'un régi-
ment qu'il suivit dans toutes ses campa-
gnes jusqu'au traité de Bàle. Il revint
alors à l'université de Halle , dont il s'est
rarement éloigné depuis. Il a composé
une foule de romans : la France littéraire
de M. J. M. Quérard en compte 78, dont
la plupart ont été traduits en français par
madame Isabelle de Montolieu, M™' Elisa
Voïarl , M. J.-B.-J. Breton , M. de Pro-
piac, M™' de Cerenville , M™* la comtesse
de Montholon , M. Andrieux , etc. Nous
en citerons quelques-uns : | Aristomène.
traduit par madame de Montolieu , 1810 ,
2 vol. in-12; | Charles et Emma^ ou les
amis d'enfance, traduit par Chazet, 1810,
2 vol. in-12 ; | Les deux Fiancés, traduit
parle chevalier de Propiac, 1810, 5 vol.
in-12 ; \la Ferme aux abeilles , ou les
Fleurs de lys , traduit par madame de
Montolieu, 1814, 2 vol. in-12 ; | Ludwig
d'Ëisach ou les Educations „ traduit par
madame Elise Voïard , 1818, 3 vol. in-12 ;
I liiSpectre des ruines, traduit i)ar Maxier
du Heaume , 1826 , in-12 , etc. , etc. On
trouve en général dans ces ouvrages du
naturel , de la sensibilité , de la gaité , de
la critique sans aigreur et des portraits
d'une originaHté piquante. Madame do
Staël, dans son ouvrage sur l'Allemagne,
dit, en parlant des romans deLafoulaine,
« qu'ils sont en général plus intéressans
» par les détails que par la conception
» même du sujet. » On le regarde dans ce
genre de littérature , comme le fondateur
d'une école qui excelle moins dans l'an
de peindre les caractères, que dans celui du
distinguer les habitudes. Il a aussi donné
une édition avec commentaires de Y A'
gamemnon et des Coéphores d'Eschyle ,
Halle, 1821 , 2 vol. Ce romancier est mort
le 20 avril 1851.
LAFO\'TAL\E ( Jean de ) , Voyes
FONTAINE.
• LAFOUEST ( N... de) custode et curé
de Sainte-Croix de Lyon, se signala par
son 7.èle pour la conversion des proles-
lans, et pendant quarante ans qu'il exerça
son ministère, il eut le bonheur d'en lar-
mener plusieurs dc.ns le sein de l'Eglise.
II a consigné les moyens qu'il avait em-
ployés pour cette noble lin dans un ou-
vrage qui a pour titre : Méthode d'in-
struction pour ramener les prétendus ré"
formés à l'église romaine . et confirmer
les catholiques dans leur croyance, Lyon,
1783, Ln-i2 , un des meilleurs ouvrage*
LAF
212
LAG
que nous ayons sur ce sujet : ce sont des
enlreliens dans lesquels il expose sim-
plement, avec force et clarté, les dogmes
de notre religion , donne les preuves qui
se rapportent à chacun d'eux, et détruit
les objections des incrédules. Les six pre-
miers entreliens sont spécialement con-
sacrés à prouver que l'église catholique
est l'Eglise de J.-C, et les six derniers à
la discussion des points particuliers sur
lesquels les catholiques sont en dissidence
avec les protestans. C'esl dans le même
but que l'abbé de Laforest avait fait des
conférences dont M. Lasausse a recueilli
le fonds , et qu'il a publiées sous le titre
do Dialogues chrétiens sur la religion^
les commandemens de Dieu et les sacre-
mens^ Lyon, 1802, 2 volumes in-8°. On
doit encore à l'abbé de Laforest l'ouvrage
qui a pour titre : Traité de l'usure et des
intérêts ^ augmenté d'une Défense^ et de
Diverses observations , Cologne et Paris,
4760; deuxième édition, Paris, 1777 , in-
12. Ce vénérable ecclésiastique est mort
vers 1786.
• LAFOSSE ( Anne CHARLIER), fille
d'un coutelier de Paris, et femme d'un
ébéniste, est connue par un miracle bien
surprenant opéré sur sa personne l'an
1725. Elle était attaquée depuis 20 ans
d'une perte considérable , et si affa-blie,
qu'elle pouvait à peine se soutenir. \h\e
protestante, sa voisine, lui donna le con-
seil de demander, à l'exemple de l'Hémor-
roïsse de l'Evangile, sa guérisou à Jésus-
Christ. Poussée par una inspiration se-
rrèle , elle en forma sur-le-champ lu ré-
solution, et choisit pour l'excculer It^îour
delà Fête-Dieu, où la procession passait
devant sa porte. Elle se iit descendre à ce
moment dans la rue, et lorsqu'elle aper-
çut le Saint-Sacrement, elle essaya de se
mettre à genoux , et pria d'une foi si vive,
en faisant tous ses efforts pour le suivre,
qu'elle se sentit tout à coup plus de force,
et qu'elle pût mêmeaccompagnerlaproces-
sion jusqu'à l'église. En y entrant elle
sentit le sang s'arrêter, assista à la grand'-
raesse.et revint chez elle, seule et sans
appui, au grand étonnement de tous ceux
qui la connaissaient. Depuis ce jour elle
fut complètement guérie. Cet événement
fit beaucoup de bruit; on venait la voir de
toutes parts. Des médecins de la faculté
royale furent choisis pour l'examiner avec
une exactitude rigoureuse , et sur leur
rapport , le cardinal de Noailles, archevê-
que de Paris , publia un mandement par
lequel il déclarait la guérison surnatu-
relle et mîracideuse , et ordonnait une
procession et un Te Deum en actions de
grâces. Pour en conserver la mémoire , il
voulut qu'on gravât le dispositif de son
mandement sur une pierre érigée dans
l'église de Sainte-Marguerite. Un office
annuel avec octave se célèbre dans celte
église en commémoration de ce miracle.
Cette solennité, interrompue pendant la
révolution, a été reprise le 31 mai 1818.
L'office qu'on ydit a élé imprimé en 1728
et 1761. Les hymnes latines ont été com-
posées par Coffin. Le cardinal envisagea
cette guérison comme un témoignage so-
lennel que Dieu avait voulu rendre au
dogme de la présence réelle , pour éclai-
rer les protestans qui étaient en grand
nombre dans le faubourg Saint-Anlome,
où demeurait M""' Lafosse. Le miracle
opéré en sa faveur a donné lieu à une
correspondance polémique outre le cha-
noine Hoquiné et le pasteur Jacob Ver-
net, de Genève, imprimée en 1725, 3
vol. in-S". Voyez V Histoire littéraire de
Genève, par Sénebier.
• LAFOSSE ( Philippe-Etienne ) , cé-
lèbre médecin-vétérinaire et maréchal
ordinaire des écuries du roi , mort à Vil-
leneuvc-sur-yonnc, au mois de juin 1820.
Jon père , qui mourut en 1765 , s'était déjà
rende recommandable dans la même
profession , et avait publié quelques bro-
chures sur différentes maladies des che-
vaux. On doit au fils plusieurs ouvrages
importans et estimés : | le Guide du ma-
réchah avec un traité sur la ferrure.
Paris, 1766, in-i"; 1767, in-8% très sou-
vent réimprimé ; \ Cours d'hippiatrique.
ou Traité complet de la médecine des
chevaux, ornr! ds 63 planches, >774 , in-
folio ; ouvrage très bien exécuté ; j ZJic-
tionnaire raisonné d' hippiatrique . cava-
lerie, manège et maréchallerie . 1775,9
vol. in-4°; îruxell^.s, 1736 , k vol. in-8"*;
I Observations et découvertes d'hippia^
trique, lues dans plusieurs sociétés sa-
vaîUes. 1801 , in-S" ; | Manuel d'hippiatri-
que. 5' édition, 1813, in-I2.
LAGALLA ( Jules-César ), naquit en
1571, d'un père jurisconsulte à Padula,
petite ville de laBasilicale, au royaume de
Naples (i). Après avoir fait ses première»
études dans sa patrie, il fut envoyé à
Naples, à l'âge de 11 ans, pour y étudier
la philosophie. Son cours étant achevé , il
s'appliqua à la médecine, et fit tant de
(i) Saivinl J. N. Erilhrzui ( Rotsi ) , Bibl Fi.
cetheta I Lagalls serait ai à Lcccc.
LAG
215
LAG
progrès dans celte science, qu'après avoir
été reçu docteur gratuilenient , par une
distinction que le collège des médecins de
Naples voulut lui accorder, il fut nommé,
à l'âge de 18 ans , médecin des galères du
pape. A 19 ans, il se fit recevoir docieur
en philosophie et en incdccine dans l'uni-
versilé do Rome ; et à 21 ans , il fut ju^jé
digne, par Clément VIII, delà chaire de
logique du collège romain , qu'il occupa
avec une grande réputation jusqu'à sa
mort , arrivée en 1624.. Les travaux de
celte place lui laissaient peu de temps
pour pratiquer la médecine; aussi est-il
plus connu comme philosophe que comme
médecin. On avait cependant une telle
opinion do ses talensdans l'art de guérir,
que Sigismond III , roi de Pologne et de
Suède, voulut l'avoir auprès de lui en
qualité de médecin, ce que sa mauvaise
santé ne lui permit pas d'accepter. Ce
savant était doué d'une mémoire admira-
ble , cl ce don de la nature lui fut plus
utile qu'à tout autre, car son écriture
étant indéchiffrable, il n'écrivait qu'avec
la plus grande répugnance. Aussi est-il
resté peu d'ouvrages de lui. Leo-AUatius,
qui adonné sa Fie^ y cite un Traité in-
titulé Disputatio de cœlo animato . Hei-
delberg, 1622 ; et un autre sur l'immor-
talité de l'àme, Rome , 4621 , in-Ji°. La Vie
de Lagalla, publiée en latin par AUalius,
Paris, 1644, in-8°, a été insérée par Guil-
laume Bâtes dans ses Vitœ selcctce aliquot
virorunxj, Londres, 1681, in-i".
LAGALLISSOi\MÈRE. Koyez GAL-
LISSONNIÈRE.
LAGAUAYE. Voyez GARAYE.
LAGARDIE. Voyez GARDIE.
LAGERLOEF, ou LAGERLOFF , Lau-
rifolius (Pierre ), savant suédois, né
dans la province de Wermeland , le k no-
vembre 1048, devint professeur d'élo-
quence àUpsal, et fut choisi parle roide
Suède pour écrire l'histoire ancienne et
moderne des royaumes du nord. Il mou-
rut le 7 janvier 1699. On a de lui, entre
outres : | Ilistoria linçuce grœcœ , Upsal,
1683, in-S"; | De antiquiîaleet situ gentis
suionicœ, ibid. 1689 ; | Ilistoria repertœ
navigationis in album mare . ibid., 1C91 ;
I De gfintis gothicœ sedihus , ibid., 1691;
j Observaliones in linguam suecanam.
ibid. 1694; | De magno sinarumimpei'io^
ibid. 1697; \ De veris et aritiquis gentis
sedibus asserendis , ibid. 1709, in-S".
LAGNEAU ( David ), fameux adepte
des sciences occultes , connu seulement
par sa folie pour la pierre philosophale,
qui lui fit perdre le jugement et sa for^
tune, et qui l'engagea à traduire et à aug-
menter le livre insensé de Basile Valcn-
lin , intitulé Les douze clefs de philoso'
phie. La traduction de Lagneau fut im-
primée à Paris en 1600 , in-8°. Les fous
comme lui la recherchent. Il est aussi
l'autour d'un livre traduit en français par
Veillulil, sous le titre de Harmonie myS'
tique^ ou accord des philosophes chimi-
ques, Paris, 1656, in-8". Cet auteur mou-
rut sur la fin du 17"^ siècle.
LAGxW ( TuoMAS FANTET, sieur de ),
célèbre mathématicien, né à Lyon en
1660 , fut destiné par ses parens au bar-
reau ; mais la physique et la géométrie
l'emportèrent sur la jurisprudence. Connu
de bonne heure à Paris, il fut chargé de
l'éducation du duc deNoailles. L'académie
des sciences lui ouvrit ses portes en 1695,
et , quelque temps après , Louis XIV lui
donna la chaire d'hydrographie à Roche-
fort. Son mérite le fit rappeler à Paris 16
ans après, et lui obtint une place de
pensionnaire de l'académie , celle de sous-
bibliothécaire du roi pour les livres de
philosophie et de mathématiques , et une
pension de 2,000 livres, dont le duc d'Or-
léans le gratifia. Ce prince le nomma en
1716 sous-dlrecteur de la banque géné-
rale : en cela pareil à Newton qui, comme
on le sait, avait été nommé directeur de la
monnaie de Londres. Lagny ne fut point
étourdi par ce passage soudain de la mé-
diocrité à la richesse , et quitta ses fonc-
tions délicates sans que sa probité eût été
un moment soupçonnée. Cet homme il-
lustre mourut en 1734 , regretté des gens
de lettres , dont il était l'appui et l'ami, e»
des pauvres, dont il était le père. Les ou-
vrages les plus connus de ce célèbre ma-
thématicien sont : I Méthodes nouvelles
et abrégées pour l'extraction et Vappro-
ximation des racines.V&rïs, 1692 et 1697,
in-4" ; | Elémens d'arithmétique et d'al-
gèbre, Paris, 1697, in-12; | La cubature
de la sphère, La Rochelle, 1702. in-12;
I Analyse générale, ou Méthode pour
résoudre les problèmes, publiée à Paris ,
par Richer, en 1733 , in-*" ; | plusieurs
Ecrits importans dans les Mémoires de
l'académie des Sciences; ils décèlent tous
un grand géomètre.
• LA{;OMARSL\I ( Jérôme ) , célèbre
jésuite italien et philologue célèbre , issu
d'une famille noble , naquit à Gènes le 30
septembre 1698 , et fit ses premières étu-
des de la manière la plus distinguée , au
collège de Prato, en Toscane, dirigé pa> lut
LAG
2I&
LAG
jésuites, chez, lesquels il entra le 13 novem-
bre J715. Après avoir fini son noviciat, il fut
envoyé en 1721 à Arezzo pour y enseigner
les belles-lettres. Quelques écrits qu'il pu-
blia , firent connaître son talent et sa pro-
fonde connaissance du latin. De là date
son intimité avec le célèbre Facciolati,
qui s'occupait alors de l'amélioration du
Vocabulaire de Calepiii. Ce savant en-
trevit combien le père Lagomarsini pou-
vait l'aider dans cette pénible lâche , et il
eut souvent recours à ses lumières. C'est
sur ces entrefaites que les supérieurs de
Lagomarsini le rappelèrent à Rome pour
y faire sa théologie. Lorsqu'il l'eut ache-
vée, il fut envoyé à Florence en qualité
de professeur de rhétorique. Après avoir
rempli dignement cette place pendant
vingt ans , il fut rappelé à Rome , pour y
enseigner la langue grecque au collège ro-
main. Il mourut dans les plus grands sen-
timens de piété, le 18 mai 1775, dans sa
76' année. Cet illustre jésuite a laissé un
grand nombre d'ouvrages , dont les prin-
cipaux sont : I Antonii Mariœ Grattant de
scriptis, invita Minerva , ad Aloijsium fra-
trem libri 20 , cum notis Hieronymi La-
gomarsini^ Florence, i746, 2 vol. in-4°.
Les notes sont nombreuses et savantes :
elles sont d'ailleurs écrites dans la lati-
nité la plus pure. Le 1" volume est dédié
à Muratori, en reconnaissance de son
Christianesimo felice nel Paraguai ^ si
honorable à la société des jésuites. L'autre
volume est dédié au marquis Maffei ; | Ju-
lii Poggiani sunensis epistolœ et oratio-
nes ^ olint collectes ab Antonio-Maria
Gratiano, nunc ab Hieronymo Lagomar-
sino^ è societatc Jesu^ illustratce ac pri-
mum ediice^ Rome, 1762, 4 vol. in-4°. Cet
ouvrage, auquel l'auteur employa plu-
sieur» années , donne des lumières qu'on
ne trouverait point ailleurs , non seule-
ment sur l'histoire du concile de Trente,
mais encore sur la littérature du 17'siècle.
On trouve à la fin du second volume une
pièce éloquente intitulée : In Jacobum
Augustwn Thuanum , posteritatis notni-
tie ^ ad çuam ille quodam suo carminé
provocavit , actio , qui , dit-on , par la
latinité pure , mérite d'être comparée
aux fameuses VeiTines de l'orateur ro-
main : I Hieronymi Lagomarsini ^ soc.
Jesu . orationes septem^ editio sexta ,
vetractatior et auctior;'acceditjam epi-
stola édita, qua quid in Marci Tullii Cice-
ronis, contra L. Pisonem. oratione inter-
cideril demonstratur , Rome, 1755. Lago-
marsini avait prononcé ces harangues à
Florence, et les avait dédiées au savant
cardinal Clément Argenviîliers. Elles fu-
rent fort applaudies du public. ] R. P.
Hieromjmi Lagomarsini, soc. Jesu , epi-
stolce ad amicum exemplum in quajudi-
cium fertur de aliquot locis opcris tJi-
scripti , Noctiiim s'armalicarum vigiliœ,
editio post polonicam et germanicam ter-
ftrt, Bologne, 1733. Le père Lagomarsini
avait été consulté par un habitant de Var-
sovie, au sujet de l'ouvrage intitulé iVoc-
tium sarmaticarum vigilice , du père Ubal-
do Mignoni, imprimées dans celte ville,
en 1751. Il émit son opinion dans les lettres
dont on vient de donner le titre. Elles
sont insérées dans le Recueil de Calogera
fom. 10, pag. 435, et adressées au célèbre
Facciolati. | R. P. Lagomarsini , soc.
Jesu. litterarum ad JoannemVincentium
lucensem exemplum, quibusjudicium fer-
tur de aliquot locis libelli. Romce , mense
septembri, anno 1753, vulgati, hoc titulo :
F. Vincentii'Mariœ Dinelli . cathcdratici .
casanatensis ordinis prœdicatorum, ad
Carolum Nocctium, soc. Jesu theologum.
epiHolce, Trente, 1734. Ce dominicain
avait attaqué le père Noceti, avec les ar-
mes de la plaisanterie, au sujet du pro-
babilisme. Lagomarsini , dans ces lettres,
prend la défense de son confrère, et répond
au professeur dominicain sur le même ton :
I Giudicio degli autori délia storia let-
teraria d' Italia , intomo l'ultimo librode
teatri del pâtre Concina , Venise , 1736 ;
I Angelo Marice , cardinali Quirinio , de
Dione Cassio epistola. Il y est question
des corrections faites à Dion Cassius par
Reimaro. Cette pièce se trouve dans le 14*
volume délia Storia letteraria d'/talia,
pag. 167. I Letlera del Padre Lagomar-
sini al signore marchese Maffei, intomo
allasuaMerope. Cette lettre est insérée au
même volume, page 284, avec la réponse
du mar(iuis. ] De origine fontium, carmen.
Ce poème , composé en 1726 , avantageu-
sement connu à Rome , fut traduit en
vers libres, par le père Jean-Pierre Ber-
ganlini, théatin, qui le publia avec la
traduction délie Cose botaniche di Savas-
tano, Venise, 1749, in-8°, et y joignit une
épîtredédicatoireen veis, où il fait l'élogo
de Lagomarsini et de ses ouvrages. \ de
aleœ januensis , scu De alece romance,
Romam traductœ, ratione, elegiacon. auc-
tore Golmario Marsiliano , pièce d'une
facilité et d'une élégance dignes d'Ovide,
publiée dans le 12' volume du Recueil de
Calogera, et dans l'ouvrage de Azevcdo,
intitulé : Fenetce urbis descriptio, Venise,
LAG
21K
LAG
1780. On est loin d'avoir cilé tous les ou-
vrages de LajTomarsinL; il était infatiga-
ble, et on a peine à concevoir comment un
seul homme a pu autant écrire. Son seul
travail pour une édition de Cicéron est
immense; il avait coUationné et comparé
plus de trois cents manuscrits de ce classi-
que, tirés de la bibliotlièque Laurentiane.
Il contribua en outre à plusieurs grands
ouvrages de littérature , fut, comme on
l'a déjà dit , d'un grand secours à Faccio-
lati pour son Vocabulaire, prit part aux
fameuses lettres d'JtroJiio Trascomaco,
contrôle livre de l'abbé Lami, De eru-
ditione apostolorum , etc. 1741, et aux
notes sur le poème de Jof^eph Marianus
Parthenius, ( pseudonyme du P. Mazzo-
lari ) touchant l'électricité. On sait enlin
qu'il fut d'une grande utilité au père
Bandiera, d'abord jésuite , et ensuite ser-
vite, pour ses traductions des oraisons et
des épitresde Cicéron, ainsi que pour les
notes qui y sont jointes. On le consultait
de toutes parts, et il trouvait du temps
pour satisfaire à tout. Il était extrême-
ment attaché à son ordre : il en prévoyait
la suppression, qui en effet eut lieu peu
de temps après sa mort ; et, comme il était
déjà malade, il se félicitait d'un état qui
lui faisait espérer de n'en pas être le té-
moin. L'honneur de la société lui tenait
fort à cœur: il avait rassemblé en sa fa-
veur un grand nombre de mémoires et
d'autorités, qui la justifiaient pleinement
dos odieuses inipul;itions de ses ennemis,
lien avait composé un recueil , auquel il
avait donné le titre de Testimonta vi?-o-
rum illustrium de societate Jesu j inde
usque ab initio ejusdem repetita, ordine
chronologico, adnosti-am œtatem perpé-
tua, nec unquam interi'upta, annorum
série digesta. Ce recueil était composé do
50 volumes : sa seule correspondance en
formait 20. Lagomarsini laissa aussi de
nombreux manuscrils, qui se sont perdus
lors de la suppression de la société. Une
petite partie de son immense travail sur
Cicéron i)assa entre les mains de Jean-
Baptiste Lavagna, jésuite génois, son
jiarent , qui la transmit au savant Ban-
«lini, chanoine de Florence. D'autres ma-
nuscrits enrichirent la bibliothèque du
collège romain, et celle du cardinal Ze-
lada, amateur distingué, qui souvent avait
contribué de ses propres fonds aux en-
treprises littéraires de Lagomarsini, et qui
fut l'un des cinq cardinaux chargés de
Burvciller les dépouilles des différens col-
lèges des jésuites. On ne peut refuser à
Lagomarsini l'honneur d'avoir été l'un
des hommes les plus éclairés et les plus
érudils du 18' siècle. A sa mort , tous les
savans de l'Europe s'empressèrent de
rendre hommage à sa mémoire, et de lui
payer le tribut d'éloges qui lui était dû.
On fit graver son portrait à Florence, avet
ce distique :
Ej! Li^omarsirans vullu j jed pîngere vocetn
Si liceal, qiiivii dixerit: e»l Ciceio.
* LAGR AI\"GE (Joskph-Louis, comte de),
célèbre géomètre, l'un des plus grands ma-
thématiciens des temps modernes, naquit
à Turin le 23 janvier 1756. Il était d'origine
française comme l'indique son nom. Son
bisa'ieul avait servi Louis XIV, en qualité
de capitaine de cavalerie, et était parent
d'une dame d'atours de la reine, mère de
ce prince. Cet officier avait passé dans les
armées de Charles-Emmanuel II, duc de
Savoie , qui l'avait marié à une demoi-
selle Conti , issue d'une famille illustre de
Rome. Le père de Joseph Lagrange oc-
cupait à Turin la place de trésorier au
ministère de la guerre; mais des mal-
heurs imprévus vinrent lui ravir une
grande partie de sa fortune. Son jeune
lils étudiait alors dans l'université de sa
ville natale. Les revers de sa famille aug-
mentèrent le désirqu il avait d'acquérir une
instruction que sa position lui rendait
plus nécessaire. On a remarqué que celui
qui devait aller si loin dans la carrière des
sciences, ne montra d'abord de disposi-
tion que pour les lettres : re ne fut qu'à
la 2' armée de son cours de philosophie
que la lecture d'un mémoire de Halley lui
révéla son génie pour les mathématiques.
A cet âge où l'on peut à peine classer ses
idées sur les éludes qu'on a parcourues
( 19 ans ), il devint professeur de malhé-
malhiques à l'école d'artillerie de Turin ;
il se mit en correspondance avec plusieuri
savans de l'Europe, et plus particulière-
ment encore avec le célèbre Euler. Son
premier essai fut le fameux problème
maximis et minimis des formules inté-
grales indéfinies. Euler , qui avait depuis
dix ans invité les savans de l'Europe à
résoudre ce problème, quand il vil Ja
solution savante du jeune Lagrange , fut
frappé d'étonncment. Admirateur, à son
tour , de ce grand géomètre , Lagrange
en étudiait les ouvrages , les commentait,
y faisait des notes, et s'identifiait, pour
ainsi dire, avec l'auteur. Un simple aperçu
lui ouvrait le chemin à des connaissances
nouvelles, et la solution d'un problème
LAG
216
LAG
Ittl offrait le développement d'une théorie.
Son travail sur les maximis et minimis
lui découvrit une nouvelle branche de
malhéinaliques , le calcul des variations.
et lorsqu'il le trouva, il n'avait pas encore
atteint sa 22*année. Quelque temps après,
aidé par le chevalier Saluées ( depuis
marquis de ce nom ) et par le docteur
Cigna , il fonda l'académie des sciences
de Turin, sous la protection immédiate
du roi Victor-Amédée III. Ce fut aussi
80US les auspices de ce monarque , pro-
ifcleur des sciences, que la nouvelle aca-
démie publia bientôt les résultats de ses
travaux , parmi lesquels se distinguaient
toujours ceux de l'infatigable Lagrange.
Dans l'espace de trois années , il parut
deux volumes des mémoires de ladite
académie , le premier en 1739 , et le se-
cond en 1760. Au premier volume, et
dans les précieuses découvertes de La-
jfrange , on remarque principalement sa
Dissertation savante sur la propagation
du son , qui lui fournit les moyens de
perfectionner et d'étendre le calcul que
d'Alembert avait imaginé pour résoudre
les problèmes de physique ; calcul qui
produisit un résultat aussi invariable que
certain. Le savant astronome Monlucla a
donné une analyse de cette opération dans
le Journal étranger ^ mai 1790. On y re-
marque le passage suivant... « M. La-
» grange s'attache d'abord à montrer l'in-
» suffisance de la théorie de Newton, et
■ à l'aide de la théorie des variations, il
» résout la question par les principes di-
» rects et lumineux delà dynamique;
» toutes les propriétés de la transmission
» sont renfermées dans les formules géné-
» raies de M. Lagrange. Voici les consé-
» qnences principales qu'il en tire.l" Que
» la vitesse du son ne dépend aucune-
■ ment de la vitesse ou delà force de l'é-
» branlement imprimé à l'air ; 2° que le
» son se propage également de tous les
» côtés du corps qui le produit ; 5" que la
» vitesse est la même, dans toute l'étendue
» de la fibre élastique; 4° que cette vitesse
» ne dépend pas de la longueur de cette
» fibre, c'est-à-dire que le son se transmet
» avec la même vitesse dans un air libre
» que dans celui qui est renfermé. La plu-
» part de ces conséquences étaient, il est
» vrai , déjà connues par l'observation ,
» mais nous pensons qu'il n'y a aucun
» physicien qui ne reconnaisse le mérite
» d'avoir déduit ces faits d'une solide
» théorie. » A l'appui du passage précé-
dent noua citerons celui d'un habile théo-
ricien en musique , M. Chéron. « Passant
» ensuite, dit-il, à l'examen de la réflexion
» ou formation des échos , Lagrange n'a
» besoin pour cela que de développer quel-
» que cas de la formule ; elle lui montra
» que si la fibre aérienne est terminée de
n l'un et de l'autre côté par un obstacle
» quelconque, la vibration des parlicult»
» do l'air doit retourner en arrière avec la
» même vitesse. L'oreille pourra donc en-
» tendre une seconde fois, par réflexion,
» le son qu'elle aura déjà entendu dirccle-
» ment. Si la fibre aérienne n'est termi..
B née que d'un côté , l'écho sera évidem-
» ment simple ; mais si cette fibre est ter-
» minée par les deux bouts , elle sera
1» multipliée , car le son réfléchi par Tune
» des extrémités le sera de nouveau par
» l'autre, et cela aurait lieu à l'infini, si
» ce mouvement ne s'affaiblissait et ne
» s'anéantissait à la fin. Cette explication
» des échos est sans doute la véritable ,
» et il ne resterait rien à désirer dans la
» théorie de ce phénomène , si l'on con-
» naissait les circonstances nécessaires
» pour procurer celte espèce de réflexion,
» ou pour la rendre perceplible. » Euler ,
loin de ressentir uuft basse jalousie des
progrès desonémule, conçut pour lui uno
affection toule paternelle ; il l'encoura-
geait dans ses travaux , et le fît nommer
membre de l'académie de Berlin , dans la
classe des mathématiques, dont il était lo
directeur. En 17C4 , Lagrange remporta
le prix proposé par l'académie de Paris ,
sur la théorie de la libration de la lune .
Il résolut ce problème par le principe dej
vitesses virtuelles^ combiné avec celui
de d'Alembert; il y détermina l'inclinai-
son de l'équateur lunaire sur l'écliptiquo,
et parvint ainsi à démontrer la raison da
la coïncidence des nœuds de l'équateur
et de l'orbite lunaire. Ces savantes re-
cherches lui inspirèrent la conception de
la Mécanique analytique s ouvrage célè-
bre ) qui enseigne et qui prouve que toute
la perfection de la mécanique dépend de
la perfection du calcul intégral , calcul
dont New^ton et Leibnitz se disputent l'in*
venlion , et que Lagrange débarrassa de
toutes ses entraves. Il remporta en I7(;6
le prix proposé par l'académie des scien-
ces de Paris , sur les mouvemens des sa-
tellites de Jupiter , et qui avait pour but
de déterminer les mouvemens exact»
d'une planète , soit Jupiter ou Saturne ,
qui, par les attractions qu'exécutent, sur
[elle les satellites, est continuellement
dérangée dans sa marche. La solution de
LAG
ce problème offrait un grand avanlage
pour la navigation : elle perfeclionnait
les tables de Jupiter et de Saturne , et
facilflait par conséquent la détermination
des longitudes en pleine mer. Nous ne
suivrons pas le savant géomètre dans
toutes ses importantes découvertes; il nous
suffira de dire qu'il a perfectionné toutes
les branches appartenant aux sciences
mathématiques, sans en excepter l'algèbre.
Désirant connaître à Paris les savans
avec lesquels il était en correspondance ,
il vint dans celte capitale et y accompagna
«on ami, le marquis de Caracciolo , qui y
venait en qualité d'ambassadeur. Une
maladie assez sérieuse força Lagrange
de retourner à Turin. D'Alemberl ayant
refusé l'offre de Frédéric II , qui l'avait
nommé directeur de l'acadéuiie de Berlin,
proposa à ce monarque Lagrange , qui
fut accepté , et en donna avis à celui-ci
par une lettre. Lagrange en fit part à
Yiclor-Amédée , qui ne parut pas content,
et voulut voir la lettre de d'Alembert.
Ayant lu celte plu-ase : o II faut que le plus
V grand géomètre de l'Europe se trouve
» auprès du plus grand de ses rois. Allez,
» monsieur , dit-il à-^ La Grange , allez
» joindre le plus grand roi de l'Europe. »
Arrivé à Berlin, Lagrange reçut de Fré-
déric l'accueil le plus distingué. Il fil
venir de Turin une de ses parentes avec
laquelle il se maria , et quil perdit quel-
ques années après. Il se concilia l'estime
et l'amitié du roi de Prusse , qui le nom-
mait le philosophe sans crier. Lagrange
fut pendant vingt ans directeur de l'aca-
démie de Berlin, sans faire regretter l'ab-
sence d'Euler, qu'il y avait remplacé. Il
fournit à ce corps savant plus de soixante
Mémoires ou Dissertations , et ne négli-
gea point pour cela l'académie de Turin.
Mirabeau, se trouvant à Berlin, avait en-
gagé M. de Breteuil, ambassadeur de
France à écrire au ministre de Vergen-
nés d'attirer Lagrange à Paris. Louis XVI
à qui on en parla , témoigna le désir de
l'avoir , et , après la mort de Frédéric II,
obtint de son successeur Guillaume-Fré-
déric qu'il cédât le savant géomètre. La-
grange refusa les propositions que lui
firent les ambassadeurs de Sasdaigne,
de Naples et de Toscane, et vint à Paris
en 1787. Il y reçut une pension de 6,000
francs, qui était égale à celle qu'il avait à
Berlin , et il eut un It^ement au Louvre ,
avec le titre de pensionnaire vétéran .
qui le mettait à même de jouir du droit
de suffrage dans les délibérations de l'a-
7.
2i7 LAG
cadémie dont il était, depuis 1772, associé
étranger. En 1788 , par les soins de M.
l'abbé Maire et de M. Legendre parut se
mécanique analytique. Considéré du roi,
protégé par la reine , estimé de tous les
savans> il se dégoûta tout-à-coup de cette
même science qui lui avait procuré tant
jde gloire , d'honneurs , et une heureuse
aisance. On avait remarqué le même chan-
gement chez d'Alembert; mais ce qui pa-
raissait dégoût n'était, pour ainsi dire,
qu'une lassitude cérébrale^ causée par
une application assidue sur des calculs
longs, difficiles, et qui demandaient
quelque temps de repos. Lagrange tourna
ses idées vers l'histoire des Religions,
sur les théories de la musique ancienne,
des langues^ de la médecine, elc II s'oc-
cupa également de chimie, et disait
« qu'elle était devenue aussi aisée à ap-
» prendre que l'algèbre.» Il fit partie de la
commission cliargée d'établir un système
métrique. En 1791 , il devint membre du
bureau chargé des récompenses pour les
découvertes utiles; et au mois de mars
1792 , il fut nommé un des trois adminis-
trateurs de la monnaie. Deux mois après,
il épousa m"' Lemonnier , dont le grand-
père , le père et l'oncle , avaient siégé à
l'académie. Jusqu'alors la révolution n'a-
vait porté atteinte nia. sa fortune ni à sa
personne ; mais il manqua d'être frappé
par le décret du 16 octobre 1793, qui
excluait tous les étrangers du territoire
français. Guyton-Morveau le sauva en le
faisant mettre en réquitîsion pour con-
tinuer les calculs sur la théorie des pro-
jectiles. Il fut vivement affecté de la
mort tragique de Bailly et du savant La-
voisier et dit , en parlant de ce dernier t
« Il ne leur a fallu qu'un moment pour
» faire tomber cette tête , et cent année»
» peut-être ne suffiront pas pour en rc-
» produire une semblalile. » Il courut
quelques dangers à cette époque , mais le
régime de la terreur cessa enfin par la
supplice de Robespierre. Lors de la for-
mation de l'école normale , il y fut nom-
mé professeur de mathématiques , et oc-
cupa la même chaire à l'école polytechni-
que , où conjointement avec Laplace et
Monge , il opéra une révolution complèto
dans l'enseignement des sciences exactes..
Ces trois savans avaient l'un pour l'autre
une véritable estime et une sincère
amitié. Lagrange était un juste appré-
dateur du sublime talent de Newton , et
admirait surtout son système du monde.
Il fut des premiers admis à Tinslilut , lora
LAO
SIS
LAG
de la création de ce corps. Sous le gou-
vernement de Bonaparte , il se vit comblé
d'Iionaeurs , et fut noamié membre du
sénat, grand-officier de la légion-d'hon-
neur , comte de l'empire , grand-croix de
l'ordre de la Réunion, etc. Lagrange
succomba à une courte maladie , le 10
avril 1813 , à l'âge de 75 ans , et fut en-
terré au Panthéon. MM. Laccpcdc et de
Laplace prononcèrent chacun un discours
funèbre. Plusieurs écrits ont été publiés
sur ce géomètre célèbre, savoir son Eloge
par feu Delambre , une Notice dans le
Journal de VEmpire^ 28 avril 1813 ; une
lettre dans le Moniteur^ 26 février 1814 ;
Précis historique sur la vie et la mort de
Lagrmige , par MM. Virey et Potel , Pa-
ris, 1813, in-ii.°; et enfin, un éloge de La-
grange par Cossali ( en italien), Padoue,
1813, in-8°. Lagrange a laissé : | Additions
à l'algèbre d'Euler (dans l'édition de cc;t
ouvrage, Lyon , 1774, 2' édition, 1799, 2
vol. in-i" ). Ces additions se trouvent au
2' volume, et contiennent 300 pages.
{Mécanique analytique^ Paris, 1787,
in-4°, 2' édition, l"" vol. en 1811; 2' vol.
en 181S ; [ Théorie des fonctions analyti-
ques ^Taris, 1797-1803, in-4° ; I Résolution
des équations numéi'ique s ^ih'iA. 1798-1808
in-4° ; | Leçons sur les calculs des fonc-
tions Ellesont eu plusieurs éditions , dont
la plus estimée est celle de 1808, in -8".
} Leçons d'a?ithmétique et d'algèbre^
données à l'école uormcde , publiées dans
les cahiers 7 et 8 du Journal de l'école
polytechnique et en d'autres collections ;
J Essais d^ arithmétique politique ( dans
la collection de M. llœderer), 1786 , in-4";
j plus de cent Mémoires , insérés dans les
recueils des académies de Turin, de Ber-
lin, de Paris , dont il était membre , ainsi
que d'autres sociétés , excepté celles de
l'Angleterre. Carnot, alors ministre de
l'intérieur, fit acheter ( en 1815 ) parle gou-
vernement , les manuscrits de Lagrange
qui n'ont pas encore été imprimés. Ce
savant, naturellement bon et affable , et,
dit-on, asse.z religieux^ avait un carac-
tère un peu original. Il se plaisait beau-
coup dans la société des jeunes gens et des
femmes, dont il aimait la conversation,
de quelque âge qu'elles fussent : aussi
disait-il qu'il n'avait jamais trouvé de
femme à 00 ans ; c'est-à-dire qu'il ne cher-
chait dans le bean sexe que cette amabi-
lité, cette sensibilité et celte douceur que
lui a données la nature, et que développe
une sage éducation.
LAGRAIVGE. Voyez GRANOE.
•LAGRE^'EE l'aîné (Loms-jEA\-FnAi».
çois ), peintre , naquit à Paris , le 30 dé-
cembre 1724. On le croit élève de Carie
Vanloo : il suivit au moins la manière de
ce maître. Il a joui d'une réputation que
le temps a vu diminuer , à mesure que le
goût antique a repris son heureuse in-
fluence sur les arts. Son premier ouvragft
représentant Joseph expliquant les son»
ges . obtint le grand prix : il alla ensuite
se perfectionner â Rome. De retour à Pa-
ris, il fut reçu à l'académie et son tableau
de réception représente Z?<?y/7??j7-(? enlevée
par le Centaure. Il se rendit en Russie , à
l'invitation de l'impératrice Elixabelh, qui
lenomma son premier peintre; mais il re-
vint bientôt en France, et fut professeur
de l'académie de Paris. Le roi le choisit
quelque temps après, pour directeur de
son académie à Rome, où il demeura j/Ju-
sieurs années. Rappelé à Paris, il obtint
la place de recteur de l'académie ; on lui
donna, aux galeries du Louvre, un de
ces logemensdont Henri IV récompensait
les artistes. Ce grand roi disait : o Je tiens-
» à l'honneur d'avoir auprès de ma per-
» sonne. ceux que j'estime, et qui contri-
» buent le jilus à la gloire du gouvcrne-
i> ment. » On a gravé entre autres ta-
bleaux de Lagrenée celui qui représente
If s Grâces lutinées par les Jmours. Il
est mort le 19 juin 1805 âgé de 81 ans».
Ses tableaux, qui sont très nombreux,,
eurent tme grande réputation ; mais il*
sont aujourd'hui beaucoup moins recher-
chés. Il n'avait que peu d'invention.
Sa manière manquait de vigueur ; mais
il plaisait par la fraîcheur et le moel-
leux de ses carnations : ce qui l'avait fait
appeler par ses contemporains V Jlbane^
français.
* LAGRENÉE ( Je A!V- Jacques ), dit le
Jeune^ peintre et frère du précédent dont
il fut l'élève , naquit vers 1740 ; aprt»
avoir perfectionné son talent en Italie, il
alla en Russie. De retour en France, il de-
vint professeur de l'académie de pein-
ture de Paris, et fut attaché pendant quel-
que temps à la manufacture de Sèvres
où ses dessins produisirent une heureuse
révolution dans les formes et les orne-
mens des ouvrages en porcelaine que l'on
y fabrique. Cet artiste a reproduit les
peintures de quelques thermes , de plu-
sieurs vases étrusques et un grand nom-
bre d'arabesques sur les émaux , la toile ,
le bois, le verre et le marbre , au moycrt
des procédés les plus ingénieux. Les p^ein-
turcs gracieuses, mais décentes, et les
I
LAG
219
LAH
«Sessins de Lagrenôe jeune , sont cncoïc
recherchés par les aina leurs. Il est inorl
à Paris le iZ février 1821.
* LAGIIENÉE ( Anthklme ), peintre
d'histoire, issu d'une famille ancienne et
célèbre dans la peinture, naquit en 1778.
Ayant payé sa dette dans les premières
guerres de la révolution, il étudia parti-
culièrement les chevaux, leurs allures et
leurs formes. Il parvint à traiter cette
partie de l'art avec une grande vérité.
On peut en juger par les jolis tableaux
liistoriques des usages et costumes russes
qu'il peignit à Saint-Pélersbourg, où il
resta plusieurs années. Il est mort le 17
avril 1855 , àV&Qe de 54 ans.
LAGlin.Lli (Louis), jésuite, né à Au-
tun, en 1658, mort à Ponl-à-Mousson , en
d742 , se lit estimer par ses vertus et ses
talens. Il s'était trouvé au congrès de
Eade , en 1714; et le zèle pour la paix,
qu'il avait fait paraître dans cette assem-
blée , lui valut une pension. On a de lui
plusieurs ouvrages. Le principal est une
Histoire de la province d'Jlsace, ancienne
et moderne j depuis César jusqueti 1725,
Strasbourg, 1727, 3 part, in-fol. Celte his-
loire commence par xme Notice utile de
l'ancienne Alsace , et finit par plusieurs
titres qui lui servent de preuves, et des-
quels on peut tirer de grandes lumières.
Jj'yilsatia illastrata de M. Schœpflin n'a
point fait oublier cet ouvrage du père
Laguille. 11 a aussi publié quelques livres
de piété, entre autres : Préservatifs pour
un jeune homme de qualité , contre l'ir-
réligion et le libertinage^ 1739, in-12. Le
père Laguille fut trois fois élu provincial
de son ordre, après avoir été recteur de
plusieurs de ses collèges.
LAGUI\AouLACUNA(AivDnÉ), méde-
cin, né à Ségovie , en 1499, passa une
grande partie de sa vie à la cour de l'em-
pereur Charles -Quint, qui avait une
grande confiance en lui et qui le lit son
premier médecin. Il se rendit à Metz, l'an
d540 , prodigua tous ses soins à ses habi-
tans, durant une épidémie pestilentielle,
et s'acquit par là leur estime et leur re-
connaissance, dont il profita adroitement
pour resserrer les nœuds qui les atta-
chaient à l'Eglise romaine et à leur souve-
rain. Il se rendit de là à Rome , où Léon X
lui donna des marques d'une grande es-
time ; il parcourut ensuite l'Allemagne ,
les Pays-Bas , et alla enfin finir ses jours
dans sa patrie, en 1560. Le pape Jules III,
pour récompenser son mérite, l'avait
nommé archidiacre et créé comte |ul;'.;la
et chevalier de Saint-Pierre. Ce médecin
était aussi un bon critique , et, aux ton-
naissances médicales il joignait une étude
piofonde des langues grecque et latine.
On a de lui : | Anatomica methodust
Paris, 1635 , in-S" ; | Epitome Guleni ope-
rum . adjectis vita Galeni et libella de
pondcribus et mensuris . Lyon , 1643 , in-
fol. ; I Annotatioyies in Dioscorideni ,
Lyon, 1554, in-12; | une J^ersion espa^
gnole des ouvrages de Dioscoride , Va-
lence, 1636, in-fol., etc. Laguna a beau-
C(Tup d'autres écrits remarquables, plu-
sieurs fois réimprimés.
LAGUS ( Daniel) , luthérien profes-
seur de théologie à Gripswald, mourut
en 1678. On a de lui : 1 Theoria meteoro-
logica; \ Astrosophia mathematico-phy~
sica; \ Steichologia Psychologia
Archeologia : ce sont trois traités diffé-
rens; | Examen triwn confessionum, re-
formatiorum^ machiacx . lipsiensis et
throrunensis ; \ des Commentaires sur les
Epîtres aux Calâtes, aux E[)hésiens et aux
Philippiens.
* LAHARPE ( Amédée-Emmancul), gé-
néral de division, né en 1754 au château
des Uttins , près de PioUe , dans le pays
de Vaud , qui dépendait alors du canton
de Berne, entra au service de Hollande
dans le régiment de May , que comman-
dait Constant de Rebecque, père de Ben-
jamin Constant. Obligé bientôt de revenir
dans son pays , et de renoncer à la car-
rière des armes pour surveiller l'ad-
ministration de ses biens, il prit part au
soulèvement des Vaudois contre le gou-
vernement de Berne. 5a conduite politi-
que le fit condamner à mort, et ses biens
furent confisqués. Laharpe , père de six
enfans, vint chercher en Franée un asile
et des ressources. Il fut nommé sur la fin
de 1791 chef du 4* bataillon de volontaires
du département de Seine-et-Oise , et fut
placé par le maréchal Luckner , dans le
château de Rodemak à trois lieues de
Thionville, avec une partie de ses sol-
dats : c'élait de ce côté que devait com-
mencer l'invasion dont on était menacé,
Laharpe reconnut bientôt rhnpossibilité
de défendre cette forteresse avec d'aussi
faibles moyens : mais décidé au sacrifice
de sa vie, il fait part de sa résolution hé-
roïque aux braves de la garnison , et les
dermine à employer tous les moyens de
résistance, ou si elle devenait impossi-
ble, à s'ensevelir avec les assaillans sous
les ruines du château. Déjà les souterrains
se remplissaient d'une grande quantité
LAH
220
LAH
de poudre, lorsque Luckacr qui en fut in-
formé, ordonna l'évacuation de Rodemak ,
Laharpe en retire les munitions et l'ar-
rillerie et les fait entrer à Thionville en
présence même de l'ennemi. Le général
en chef, en le recevant dans le camp de
Richemont, lui donna, en présence de
toute l'armée, le surnom de brave. Chargé
du commandement du fort de Bitche , il
étouffa, dans les environs de cette place,
quelques tentatives d'insurrection , et se
et remarquer par son caractère sage et
conciliant autant que ferme et énergique.
Après avoir pris quelque part aux atla-
<pies dirigées près de Trêves par le géné-
ral Beurnonville, Laharpe fut nommé au
conimslndemenl de Briançon, fit la guerre
dans les Alpes, obtint le grade de général
de brigade en prenant d'assaut un des
forts de Toulon , et commanda pendant
quelque temps la ville de Marseille. Il re-
prit ensuite son poste à l'avant-garde de
l'armée d'Italie , et continua de se distin-
guer. Lorsque Kellermann se vit forcé de
reculer devant les troupes Austro-Sardes
commandées par Devins, Laharpe fut
chargé de couvrir sa retraite , et sa con-
duite intelligente et courageuse, surtout
pendant les combats de Vado et de Sa-
vone (juin 1793), permit à l'armée de
prendre ses positions. Promu au grade
dégénérai de division, il se signala en-
core à la sanglante bataille d© Loano , et
eut plus tard une grande part aux succès
des combats de Montenotte, de Millésimo
et de Dego. Pendant que Bonaparte cher-
chait à isoler l'armée pîémontaise dans le
dessein de détacher de la coalition le roi
de Sardaigne , Laharpe reçut l'ordre de
tenir en échec les autrichiens. Il se dis-
tingua de nouveau à Mondovi , et , après
le traité de Cherasco conclu avec le roi
de Sardaigne , il reçut l'ordre de passer
le Pô à la tête de l'avant-garde en surpre-
nant l'ennemi. Il y réussit , et força l'en-
nemi de se retirer. Il revenait pendant la
cuit à son quartier-général, lorsque dans
Tobscurité qui ne permettait pas de le re-
connaître , les troupes françaises croyant
que des Autrichiens s'approchaient, firent
une décharge dans laquelle il fut tué.
li'armée lui donna de justes regrets. La-
harpe a laissé quatre fils , dont deux ont
«ervi dans les armées françaises : l'un
d'eux est mort de ses blessures.
• LAHARPE (Jean-Fbançois de), lit-
térateur et critique célèbre, né à Paris le
20 novembre 1759, fut orphelin avant l'âge
de 9 ans : il nous apprend lui-même que
pendant six mois les sœurs de la charité
de la paroisse Saint-André-des-Arcs lo
nourrirent et prirent soin de lui. Ces
bonnes soeurs, poussant leur bienfaisanca
au-delà de la première éducation , par-
vinrent à lui donner des professeurs, au
nombre desquels fut le respectable abbé
Asselin , principal du collège d'Harcourt ,
qui le prit en amitié et lui fit obtenir une
bourse dans cet établissement. Le voile
qui couvre l'origine de Laharpe n'a ja-
mais été entièrement levé; on lui a re-
proché dans vingt pampldetsrillcgitimilé
de sa naissance. Laharpe dédaigna long-
temps et avec raison de repousser une
accusation qui ne retombait pas sur lui.
Cependant en 1790 il déclara pour la pre-
mière fois dans une lettre adressée aa
Mercure de France^ et dirigée principale-
ment contre l'abbé Royou, que le hasard
l'avait fait naître d'un bon gentilhomme
du pays de Yaud : ce qui ne décidait rien
pour la question ; il ne parlait point de sa
mère, et ce silence a été regardé par quel-
ques personnes comme un aveu tacite du
fait controversé. Ce qu'il y a de certain,
c'est que , lorsque le général Laharpe fut
tué en Italie, cette circonstance fut invo-
quée auprès du Directoire, comme une
raison d'adoucir la situation de l'homme
de lettres qui portait le même nom, et qui
gémissait alors sous un décret d'exil à la
suite du 18 fructidor : cette réclamation
appuyée par M. de Talleyrand et parChé-
nier ne resta pas sans effet. Le jeune La-
harpe fit au collège d'Harcourt de bril-
lantes études, et deux années de suite il
obtint le prix d'honneur en rhétorique ,
avantage qui n'a été ohtenu depuis La-
harpe que par M. Noël et par M. Victor
Leclerc , devenu depuis professeur d'élo-
quence à la faculté des lettres de l'aca-
démie de Paris. Mais la douceur de ce
triomphe fut empoisonnée par une humi-
liation cruelle : il s'était permis de com-
poser des couplets satiriques contre quel-
ques personnes du collège d'Harcourt,
probablement contre des maîtres d'étu-
des : cette faute fut expiée par une dé-
tention ignominieuse à Bicètre; on le
transféra de cette maison, par une espèce
de grâce , à la Force, où il resta encore
plusieurs mois. L'opinion publique ag-
grava sa faute , et on répandit que cette
satire avait été dirigée contre son bien-
faiteur. Le fait était faux ; mais ses enne-
mis (et peu d'écrivains en eurent autant
que Laharpe ), jaloux de quelques succès
qu'il avait remportés, voulaient, par cette
LAH 'i'ii
odieuse calomnie , noircir la répulaUu.i
d'un homme dont le talent leur portait om-
brage. Laharpe repoussa cette imputation
dans lia avertissement mis à la fin de sa
tragédie de Timoléon : « il est bien vrai
» qu'à l'âge de 19 ans , je lis 1res impru-
» demmuiit quelques couplets contre des
» particuliers du collège d'flarcourt ; quel-
» ques-uns de mes camarades les recueil-
» lirent, et y en ajoutèrent d'autres ; mais,
«dans ces couplets, il n'est nullement
» question de personnes envers qui j'eusse
» le moindre devoir à remplir... ; » et il
invoque à cet égard le témoignage de
H. Asselin lui-même. La détention qu'il
subit eut pour résultat d'aigrir son res-
sentiment contre le pouvoir. En sortant de
sa prison, il se consacra «tout entier à la
•arrière des lettres dans laquelle ses pre-
«niers succès semblaient lui en présager
de nouveaux. Laharpe débuta par quel-
ques épures ou héroïdes qu'il lit paraître
en 1759, entre autres les épitres de Mon-
iéziime à Cortès et A'Elizaheih à don
Carlos, qui étaient précédées d'une Dis-
lertatioji sur Vhcroïde. Ces deux pièces
furent vivement critiquées par Fréron,
<iui, dans un article de Y Année littéraire^
blâma cet écolier d'avoir osé. d'une main
encore soumise à îa férule, peser le mé-
rite d'un poète . f. que Ovide. L'injuste
critique excita h liaine de Laharpe, et
dès lors entre ces doux hommes de let-
tres il y eut guerre ouverte. Les applau-
dissemens qui furent donnés aux Hé-
roïdes encouragèrent le jeune auteur,
qui lit jouer en 1763 à la cour , puis au
Théàlre-Franyais , la tragédie de ff^ar-
tvick; celle pièce eut un grand succès :
elle lui valut l'honneur d'être présenté à
Louis XY. La noblesse du style , la vi-
gueur du rôle principal , la simplicité de
l'action, et surtout la vérité du dialogue .
ont fait rester cette pièce au théâtre .
quoique l'histoire n'y soit pas respectée ,
et que le dénoùment en soit un peu ro-
manesque. Cependant les jouissances d'a-
mour-propre que fit éprouver à Laharpe
le succès de sou premier ouvrage dra-
matique furent un peu tempérées par les
nombreuses critiques qui en parurent,
et auxquelles il répondit avec ce ton de
supériorité dédaigneuse qui, par la suite,
Indisposa contre lui tant d'esprits. Résolu
d'imposer silence à ses détracteurs , et
entr'autres à Piron , qui avait dit de lui
avec sa causticité ordinaire : « Ce jeune
» homme n'a que cette pièce dans le ven-
» tre, » il continua de marcher dans la
LAH
carrière où il venait de se distinguer;
mais il ne sotilint pas cet éclatant début.
Laharpe avait dédié sa tragédie à Voltaire.
A coiui)ler de celte époque il s'établit en-
tre le maîlre et le disciple des relations
de l'amitié la plus intime : il y avait môme
de la part du philosophe de Ferney quel-
que peu de bonhomie. Chabanon nous a
transmis quelques anecdotes à ce sujet :
on jouait souvent à Ferney quelques pièces
de Voltaire, et chacun y prenait un rôle.
Laharpe, dominé par son penchant irré-
sistible pour la critique, se liasardait quel-
quefois à corriger les vers qui se trou-,
vaient dans le sien ; un jour que Ton de-
vait représenter Adélaïde du GuescUn ,
il dit à Voltaire : a Papa, j'ai changé qucl-
« ques vers qui me paraissaient faibles. »
Voltaire écoute lescliangeuiens, et lui dit
ensuite : «Bien ! mon lils, cela vaut mieux,
» changez toujours de même, je ne puis
» qu'y gagner. » Dans d'autres circon-
stances Laharpe qui était entier dans seg
opinions, contrariait Voltaire, et il pous-
sait souvent sa patience à bout : cepen-
dant le philosophe ne se fâchait point, et,
comme plusieurs personnes lui en témoi-
gnaient leur étonnement, il leur dit : « Que
» voulez-vous ! il aime ma personne et
» mes ouvrages. » Un an après la repré-
sentation de Warwick, parut Timoléon
(176/t) qui fut froidement accueilli; et
PA«r«?nonfl?^ qu'il donna en i765 , ne réus-
sit pas aux premières représentations. De
malins censeurs s'empressèrent de pro-
fiter de ce double échec. J'ai vu , écri-
vait alors Dorât ,
J'ai vu, raaigré la canicule.
Mourir de froid Timoieon ;
J'ai vu le public sans scrupule
Bâiller au nom de Pharamuad.
Ces épigrammes plus piquantes que jus-
tes, et le défaut de succès qui y avait don-
né lieu, ne déconcertèrent cependant pas
Laharpe, qui donna successivement au
théâtre , quoiqu'à de grands intervalles ,
Gustave ff^asa ( 1766 ), Menzikoff{ 1776 ),
Les Bamiécides ( 1778), Les Muses riva-
les ^ espèce d'apothéose en l'honneur de
Voltaire (1779) ; Jeanne de Najiles, Les
Brames (1783) , et Coriolan (1784). Le
sort de ces differens ouvrages ne fut pas
le même à beaucoup près : Menzikoffj,
Jeanne de Naples et Coriolan furent les
seuls qui eurent quelques succès. Les nom-
breux ennemis de l'auteur triomphaient
déjà de tant de chutes; mais Laharpe se
vengea pleinement par Philoctcte , qui
est, avec Warwick. son plus beau titre à
19.
LAH 222
ta gloire dramatique. Soit que, soutenu
par Sophocle , qu'il a plutôt traduit qu'i-
mité, et que , se trouvant affranchi du
soin d'inventer un plan et de créer des
caractères, Laharpe pût s'attacher exclu-
civenientà embellir et à épurer son style,
avantage inappréciable pour un auteur
chez qui l'imagination n'était pas la fa-
cilité la plus puissante ; soit que son amour
passionné pour les chefs-d'œuvre de la
Grèce et de Rome lui fournît d'heureuses
inspirations, il est certain que, dans cet
ouvrage , il se plaça , du moins sous le
rapport de la diction, à peu de distance
des maîtres de l'art. Jeanne de Naples
mérita le succès qu'elle obtint; les Brames
ne parurent que pour justifier une plai-
santerie du marquis de Bièvre {voyez
BIÈVRE). Un ouvrage distingué par son
exécution, quoique appartenant à un genre
moins recommandable , vint accroître en-
core la réputation de Laharpe. Ce fut Mé~
lanie , drame en 3 actes , qu'il composa en
4770. On prétend qu'il en puisa le fonds
dans une aventure affreuse et récente , et
qu'il se plut à y retracer les vertus de
8on bienfaiteur , M. Léger , curé de Saint-
André-des-Arcs. Cette pièce , écrite avec
une élégance et une pureté peu commu-
nes , eut un succès peu proportionné à
son mérite , et reçut plusieurs fois les ap-
plaudissemens d'une assemblée qui écou-
tait avec enthousiasme les sentences phi-
losophiques dont elle est remplie , et ve-
nait pleurer sur la triste aventure d'une
Jeune insensée , qui se donne la mort
plutôt que d'entrer dans un couvenJL où
ses parens veulent l'envoyer. Ce sujet ,
qui était en rapport avec la haine qu'in-
spiraient déjàles institutions religieuses à
ceux qui les détruisirent depuis avec tant
d'inhumanité , fut la cause principale de
cet accueil trop favorable. L'on ne voulut
point voir combien il était inconvenant
de mettre sur la scène l'intérieur d'un
couvent , et des personnages tels qu'un
pasteur vénérable et une jeune novice.
Laharpe lui-même l'a si bien senti depuis ,
qu'un an avant sa mort il a retiré du
théâtre cet ouvrage , qu'il regretta sin-
cèrement d'avoir fait représenter. Les
succès dramatiques ne furent point les
seuls que Laharpe sut obtenir. Il était
entré dans la carrière des concours aca-
démiques , où la nature de son talent
semblait l'appeler particulièrement. Les
Eloges de Henri IV, de Racine et de
Pénèlon accrurent sa réputation , et con-
tribuèrent éminemment à lui faire ou-
LAH
vrlr les portes de l'académie
où il fut
reçu en 1776 , après avoir été couronné
huit fois par celte compagnie. Pou do
temps après, il publia sur une traduction
littérale, faite par d'Hermilly, une tra-
duction en prose poétique , de la Lu-
siade, quoique, dit-on, il ne sût point
le portugais. Mais si sa version ne re-
produit pas souvent la verve et l'éclat
de l'original , elle est au moins recom-
mandable par la correction et la clarté ,
qualités caractéristiques du style de La-
harpe. Cette traduction , accompagnée de
notes et de la vie du Camoëns , a paru en
1776, Paris, 2 vol. En 1780 il fit paraître
son abrégé de ï Histoire des voyages de
l'abbé Prévost ; volumineux recueil , où
des observations précieuses et des faits
du plus grand intérêt se trouvent le plus
souvetït confondus parmi des détails mi-
nutieux. Quoique cetiavail, fort étran-
ger par sa nature aux occupations habi-
tuelles de Laharpe , ne pûl guère èlre, de
sa part, qu'une spéculation de 'librairie ,
l'on ne peut nier que cet abrégé ne soit
rédigé avec goût , et ne se fasse lire avec
beaucoup d intérêt. TI réduisit à 21 vo-
lumes in-8" les 43 volumes in-i" de l'abbé
Prévost. La tournure de son esprit le por-
tant à disserter, un attrait de prédilection
le ramenait sans cesse vers l'épineuse
profession de journaliste. Pendant qua-
rante ans, il enrichit divers journaux
d'articles où régnent les principes con-
servateurs du bon goût, lorsqu'aucun
motif de partialité ne l'égaré. Ses renïar-
ques sont quelquefois minutieuses, mais
en général sa discussion annonce le vé-
ritable esprit d'analyse. Dans les mor-
ceaux qu'il soigne, sa dialectique est sûre
et pressante ; à la clarté , à la précision ,
à la correction de son style, on reconnaît
le disciple zélé de nos classiques. Il rem-
porta aussi des prix de vers ; mais en gé-
néral le plus grand mérite de ses poé-
sies , c'est la correction du style et la pu-
reté du goût ; il manque presque tou-
jours de feu , d'invention et de coloris ;
on trouve difficilement dans ces compo-
sitions poétiques une tirade de vingt vers
digne d'être retenue ou citée. Laharpe
avait travaillé pendant plusieurs années
à la rédaction du Mercure : à l'époque
où la révolution éclata, il coopéra de
nouveau à ce recueil périodique , dans la
partie littéraire duquel il se montra }q
défenseur enthousiaste des nouvelles
idées. Attaché au Lycée, maintenant \A~
thénée des arts . depuis 1786 , en qualité
LAH
223
LAH
de professeur de littérature, il y impro-
visa ou lut le's leçons qui ont été impii-
nices sous le titre de Lycée ou Cours da
littérature ancienne et moderne ^ ouvrage
souvent réimprime, dans lequel on trouve
beaucoup de pages excellentes ; il serait
en tout un modèle de critique, si le pro-
fesseur eût été plus fort dans les études
grecques, cl aussi juste envers ses con-
temporains qu'envers ses devanciers ; si
à une connaissance plus grande des chefs-
d'oeuvre de la Grèce il eût pu ajouter
l'oubli de quelques querelles ou rivalités
anciennes. Cette production importante
valut à son auteur le titre de Quintilie?i
français. Apôtre zélé de l'école philoso-
phique, il parut à son cours le 3 décem-
bre 1792 , le bonnet rouge sur la tète et
récita un hymne à la liberté. Tant de ga-
ges donnés à la révolution , soit par sa
conduite , soit par son enseignement, soit
par ses articles du Mercure , ne le sau-
vèrent point do la proscription : en 1794
il fut détenu plusieurs mois dans la pri-
son du Luxembourg. C'est de cette époque
que date sa conversion politique et reli-
gieuse. H nous apprend lui-même que sa
conversion fut entièrement opérée, lors-
qu'ouvrant au hasard l'Imitation deJ.-C.^
il tomba sur ces paroles : a Me voici, mon
» fils , je viens à vous , parce que* vous
» m'avez invoqué. » Pendant sa déten-
tion , il traduisit le Psautier^ à la tète
duquel il a mis un excellent Discours sur
i'ssprit des livres saints et le style des
prophètes. Depuis ce temps , Laharpe fut
on homme et surtout un écrivain tout
nouveau. Rendu à la liberté , il ne crai-
gnit pas de donner à sa conversion la pu-
blicité qu'exigeait le scandale qu'il avait
pu causer; et, bravant à la fois les sar-
casmes des révolutionnaires et des phi-
losophes, il donna, dans ses leçons pu-
bliques, des témoignages certains de son
changement. En 1799 il fit paraître son
Cours de littérature dont nous avons déjà
parlé , après lui avoir fait subir toutes les
modifications convenables, 14 tom. , en 17
vol. in-S". Dans ce même temps, Laharpe
•e réunit avec MM. de Fontanes et de
Vauxcelles , pour rédiger un journal ( Le
Mémorial ) ^ où il attaqua sans relâche la
domination du Directoire , et où il cher-
chait à ramener aux bonnes mœurs et
aux saines doctrines un peuple déjà lassé
de révolutions , et qui commençait à être
honteux de ses excès. Sa franchise, et
surtout un écrit qu'il fit paraître dans
le même temps, intilulé />u Fanatisme
dans la langue révolutionnaire ^ plein
d'une énergie qu'on ne lui connaissait
point encore , le fit comprendre parmi
les proscrits du 18 fructidor. Il fut obligé
de se cacher aux environs de Paris, d'où
il fit paraître la Corres2)ondance littéraire.,
que, depuis 1774 jusqu'en 1791, il avait
entretenue avec le grand-duc de Russie.
La sévérité avec laquelle la plupart des
écrivains du temps s'y trouvent jugés, lui
valut des désagrémens qu'il aurait pu
s'épargner. Ses écrits et ses discours contre
le parti philosophique , que semblait fa«
voriser Bonaparte , lui attirèrent un ordre
qui l'exilait à vingt-cinq lieues de Paris ;
il obtint ensuite de regagner à CorLeil la
retraite dans laquelle il avait échappé aux
marais infects de Sinamary : mais le dé-
périssement de sa santé lui fit bientôt ac^
corder la permission de revenir à Paris.
Dès ce moment , on reconnut eu lui les
effets de la résignation chrétienne : pres-
que uniquement occupé des exercices de
piété , il se i)répara à paraître devant
Dieu ; et , malgré les secours de l'art , il
expira le 11 février 1803, dans sa G4' an-
née. M. de Fontanes, au nom del'inslitul,
fit entendre sur sa tombe les regrets de
l'amitié , et en 180i> , à l'ouverture de l'A-
thénée , M. de Chazet prononça son éloge.
On trouve sa F'ie et l'histoire touchante
de sa conversion dans l'édition du Cours
de littérature de Coste , 16 vol. in-12 ,
1815 ; c'est M. Mely-Jauin qui en est l'au-
teur. Outre les ouvrages de Laharpe dont
nous avons parlé , on lui doit encore :
I Mélanges littéraires^ ou Epîires et
pièces philosophiques^ 1763, in-12 ; | lYa^
duction de la vie des douze Césars de
Suétone, avec des notes et des réflexions,
1770, 2 vol. in-8". Celte traduction , géné-
ralement élégante, n'est pas toujours
fidèle ; | Discours de réception à l'acadé-
mie française ^ 1776 , in-4° ; | Eloge de
Foltairel 1780 , in-8° ; 1 Eloge de Cati-
nat^ couronné en 177o, par l'académie
française ; \ De la guerre déclarée par
nos derniers tyrans à la raison j, à la
morale^ aux lettres et aux arts ^ 1796,
ift-8°; I quelques pièces de vers, dont
plusieurs ont été couronnées , telles que
la Délivrance de Saleme, le Portrait du
sage» les Avantages de la paix. Conseils
à un jeune poète , Brutus au Tasse ,
Tangu et Félime , etc. ; | Commentaires
des tragédies de Racine , ouvrage pos-
: ihume, Paris, 1807, 7 vol. iï\-%° ;\ Com-
mentaires sur le théâtre de Voltaire .
\ 1814, 1 vol. in-8°; | le Triomithe de la
LAH
224
LAI
réligioyi. ou le Roi martyr, épopée en
six chants , 1814. Cei ouvrage est au-des-
sous de la réputalioa de son auleur. La-
liarpe a donné lui-inèmo un choix de ses
œuvres,, Paris, 1778, 6 vol. in-8". Le
Lycée ou Cours de littérature a élé réim-
primé en 1813, 8 vol. iu-12, précédé de
la vie de l'auteur, par L. S. Auger; la
même année à Toulouse en 12 volumes
in-8°, suivi d'une Table analytique et
d'une Notice historique sur l'auteur ; la
même année à Paris en 16 volumes in-12,
avec la Notice de M. Mely-Janin dont
nous avons déjà parlé; en 1814 à Paris,
46 volumes in-18 , chez Ledoux et Temé ;
cette édition a été reproduite par les
mêmes éditeurs en 1817, 1820 et 1822;
en 1816 Lefèvre en a donné une édition
en 13 volumes in-8°; en 1817, Verdière
3'a réimprimé en 5 volumes in-S" , avec
ime notice par M. Villenave ; Deler ville
et Lefèvre l'ont publié en 1818 , 16 volu-
mes in-8°. Les autres éditions du même
ouvrage sont celles données à Dijon par
M. Peignot, 1820, 16 volumes in-12; de
Verdière avec une notice . par M. Saint-
Surin , 1821 , 1823 , 16 volumes in-8° ; de
Garnery (édition stéréotype ) , 1822, 1824,
48 volumes in-i8 et 20 vol. in-12; de De-
pelafol, 1825, 14 volumes in-8°; de Manie,
4823 , 16 volumes in-32 ; de Delaunay ,
4823 , in-8" : cette édition devait avoir
25 livraisons , il n'en a paru que 3 ; de
M. Buchon avec un Discours prélimi-
naire; de M. Daunou, 1823, 1826, 18
volumes in-8°; des frères Baudouin ( édi-
tion stéréotype ) , avec itne notice par
M. Léon Thiessé , 1826 , 1829, 18 volumes
în-8° ; d'Emler avec la notice de M. Saint-
Surin , 1829 , 16 volumes in-S". Il a paru
en 1818 un Nouveau supplément au Cours
de littérature de Laharpe , 1 volume
in-8**, réimprimé en 1823. Ses OEuvres
choisies et posthumes, Paris, chez Mi-
gneret , 1806 , ont été publiées par M. Pe-
litot, qui parait s'être conformé aux in-
tentions de l'auteur dans les retranche-
niens qu'il a faits. Il y a inséré plusieurs
productions inédites , au nombre des-
quelles sont les Fragmens de l'apologie
de la religion; ouvrage que Laharpe avait
entrepris, mais qu'il n'a pu terminer.
Ces Fragmens remplissent presque en-
tièrement le dernier volume. On y re-
marque , outre la pureté et l'élégance or-
dinaires à l'auteur , une onction et ime
élévation qu'il avait puisées dans se»
senlimeus religieux et dans 1 Ecriture
sainte, qui a fait l'objet principal de ses
lectures et de ses méditations sur la fin
do sa vie. Son Théâtre a été imprimé en
1779; il en a élé fait un clioix qui a paru
en 1816, Ses OEuvrcs cojnpîctes ont paru
en 1820 , 16 volumes in-8" , et ses OEu-
vres choisies avec une notice sur l'auteur
par M. Fayol en 1818.
LAHIRE. Foyez VIGNOLES.
LAHUERTA. Foyez HUERTA.
• LAIGIMELOT ( Joseph François ) ,
député à la Convention nationale par le
département de Seine-et-Oise, naquit à
Versailles en 1732. Il fit représenter en
1779 sur le théâtre de sa ville natale , et
en 1782 à Paris, une tragédie intitulée
./gis , qui réussit. Appelé en 1792 à siéger
à la Convention , il vota pour la mort du
roi, sans sursis, et fut quelque temps
après envoyé en mission à Brest , à Lo-
rient, à la Rochelle. En septembre 1794,
il parla avec énergie contre Carrier, et ,
le 3 novembre de la même année , il fut
nommé membre du comité de sûreté gé-
nérale; le 12, Laignelot fit, au nom des
quatre comités rémiis, un rapport sur
l'urgente nécessité de suspendre les
séances des Jacobins , qui fut bien ac-
cueilli. Plus tard, il fut accusé d'avoir
pris part aux mouvemens populaires du
12 germinal ( 1" avril 1795 j, et à la révo-
lution jacobine des 20 , 22 et 24 mai da
la même année. Il fut en conséquence
décrété d'arrestation avec Duquesnoy ,
Romrae , Bourbotte , etc. ; mais grâce au
dénuement de preuves , il ne partagea
pas le sort de ses collègues , et fut rendu
à la liberté par l'amnistie du 4 brumaire.
En 1796 , s'étant jeté dans la conspiration
de Babeuf, il fut de nouveau mis en ar-
restation , et jugé par la haute cour de
Vendôme qui l'acquitta. En 1799, on lui
offrit une place qu'il refusa pour se livrer
à l'étude des belles-lettres. Il fit paraître
en 1804 une seconde édition de sa tragé-
die de Rienzi, qui fut saisie sur le rap-
port du ministre duc d'Olrante , et le fit
exiler. Laignelot n'ayant occupé aucune
fonction durant les cent jours , ne fut pas
atteint parla loi du 12 janvier 1816 con-
cernant les régicides. Il s'occupait depuis
quelque temps de faire des cliangenjens
à sa tragédie d^Agis, et relouchait ses tra-
gédies de Caton et de Jean S force, lors-
qu'il est mort à Paris le 23 juillet 1829.
LAIMAN, ou LAYIMAN (Paul), jé-
suite, né à Inspruck en 1576, enseigna la
philosophie , le droit canon et la théolo-
logie à Ingolstadt , à Munich et à Dillin-
gcn, et mourut à Constance en 1635 , à 60
LAI 22
ans. On a de lui une Théologie morale .
in-fol., en 5 parties, à Munich, lC2j ;
elle est d'un {jrand usaye , non-seulement
pour les tliéolojiens , mais aussi pour les
canonistes. On en a fait plusieurs éditions ;
<;elle de Paris , 1622 , est estimée.
LAI^AS. Voyez LAISNÉ.
LAI!\É. Voyez LAISNÉ.
LAIKEZ, ou plutôt L AYNEZ (Jacques ),
deuxième général des jésuites , né en 1512,
à Almançiirio , bourg du diocèse de Si-
guenza en Castille, contribua beaucoup
à l'établissement de la société de Jésus.
Deux ans après la mort de saint Ignace ,
dont il fut im des premiers compagnons ,
il lui succéda dans le généralat. Il assista
au concile de Trente comme théologien
de Paul III, de Jules III et de Pie IV. Il
s'y signala par son savoir , par son esprit,
et surtout par son zèle contre les sectes
de Luther et de Calvin , et s'y fit telle-
ment estimer, qu'ayant la fièvre quarte,
les congrégations des théologiens et des
cardinaux ne se tenaient point les jours
de sa fièvre. Laînez parla fortement
contre l'usage du calice ^ demandé pour
les Allemands par le roi Ferdinand et le
duc de Bavière , malgré les grandes obli-
gations que la société naissante avait à
ces princes ; persuadé que ces sortes de
condescendances, au lieu de contenter
les novateurs , ne font que les enhardir.
Ce fut devant ce concile qu'il prononça
la harangue célèbre dans laquelle il cher-
cha à établir la prééminence du pape sur
les autres évéques , ses délégués. Laînez
vint en France à la suite du cardinal de
Ferrare , légat de Pie IV , et y parut au
colloque de Poissi , pour s'opposer aux
prétentions des calvinistes. Ses premiers
traits s'adressèrent à la reine Catherine
de Médicis. Il eut le courage de lui mon-
trer l'inutilité et le danger de ces sortes
de disputes , qui semblent rendre la vé-
rité problématique. Il disputa pourtant
contre Bèze dans cette assemblée , et parla
avec force contre les erreurs modernes.
De retour à' Rome , il refusa la pourpre,
et mourut en lo6u, à 53 ans. Sa Vie,
écrite en espagnol par le père Ribade-
neira, a été traduite en latin par André
Schott et en français par Michel d'Esne ,
seigneur de Bettancourt, Douai, 1597,
in-b". On a de lui quelques ouvrages de
théologie et de morale. Théophile Ray-
naud le fait auteur des Déclarations sur
les constitutions des jésuites ; et quelques
écrivains lui attribuent les Constitutions
mêmes; mais c'est une erreur réfutée
o LAI
par les dates et les faits les plus hicon-
leslables. ( Voyez IGNACE.) Ce que quel-
ques auteurs ont écrit touchant les chan-
gemens apportés par Luinez dans l'insti-
tut des jésuites est également fabuleux (i ).
Personne ne saisit mieux que lui l'esprit
du fondateur, et ne s'appliqua avec plus
d'ardeur à le conserver parmi ses enfans.
On trouve la liste de ses ouvrages dans la
bibliothèque de Sothwell.
LAIIVEZ ou LAYNEZ (Alexandre),
poète de la même famille que le précé-
dent, né à Chimai, dans le Hainaut,
vers 1650 , se distingua de bonne heure
par ses talens pour la poésie et par son
goût pour les plaisirs. Après avoir par-
couru la Grèce , l'Asie-Mineure , l'Egypte,
la Sicile, l'Italie, la Suisse, il revint
dans sa patrie dépourvu de tout ; mais ce
poète trouva de l'accueil par ses saillies
et ses vers , qu'il faisait souvent sur-le-
champ. Content d'être applaudi à table le
verre à la main , ce poète épicurien ne
voulut jamais confier à personne les fruits
de sa muse. La plupart des petites pièces
qui nous restent de lui, recueillies par les
soins de Tilon du Tillet, en 1753 , la Haye
(Paris) in-8°, ne sont presque que des im-
promptu. Lainez mourut à Paris , le 18
avril 1710, à 60 ans. Il avait imaginé folle-
ment de se faire mener dans la plaine de
Montmartre , et d'y mourir , pour voir
encore. une fois lever le soleil (trait imité
par J.-J. Rousseau , qui fit ouvrir sa fe-
nêtre pour voir encore une fois la belle
nature). Il avait mené une vie volup-
tueuse qui avait influé sur ses sentimens.
Tous ses écrits n'en sont qu'un trop
fidèle tableau. Le choix qu'il avait fait de
Pétrone pour le traduire en prose et en
vers , marque aussi son penchant. Cette
traduction n'a point été imprimée.
* LAIR ( le baron Pierre-Jacques-Ga-
briel), inspecteur-général du génie ma-
ritime, né à Caen le 10 août 1769, fut ad-
mis en 1788, à l'école des ingénieurs de
vaisseau dirigée par Borda. Employé d'a-
bord à Brest, il fut plus tard envoyé au
Havre , pour y diriger en chef les con-
structions militaires. Il prit ensuite une
(i) Lrs biographei qui lui ont imputé de s'être fait
donner les pouvoirs les plus e'tendus pour Ini et sel
successeurs, tels que le généralat à perpétuité, le
droit de passer toutes sortes de contrats sans délibé-
ration commune , celui d'interpréter de mîme, et de
modifier les constitutions de l'ordre, col c'.é induits en
erreur. Tout était arrangé avant Lainez , qui pouvait
bien y avoir contribué , mais comme adjoint , et non
cominc général de la société.
LAI
226
LAI
grande pari à réquipemenl do la llolllllt'-
qui se préparait à Boulogne; il suppléa à
la rarelc du bois de Gayac par des rouets
de poulie en fer coulé , auxquels on sub-
stilua, dans les ports du Calvados , des
rouets en porcelaine. Ce fut principale-
ment à Anvers qu'il déploya sa science
profonde et toute l'activité de son esprit :
il y concourut à l'exécution d'un magni-
fique bassin , dirigea l'établissement d'un
arsenal immense , et la construction d'une
flotte qui donna de grandes inquiétudes à
l'Angleterre , et seconda puissamment le
général Carnol, dans la défense de cette
place en 181/».. Avant M. Browes, ingé-
nieur anglais , qui a formé en i82i des
embarcadères d'une longueur considé-
rable, Lair avait établi des ponts volans,
et des embarcadères flotlans : l'essai qu'on
en fit en 1813 réussit complètement , et son
procédé légèrement modifié , a été em-
ployé au débarquement de l'armée fran-
çaise en Afrique. Nommé, en 1815, direc-
teur des constructions navales au port de
Brest , M. Lair s'occupa dans cette ville ,
avec succès, de perfectionner l'art de la
corderie. Sa santé fayant forcé de se re-
tirer, il alla établir près de Caen une ma-
nufacture de sucre de betteraves. Il est
mort le 27 mars 1830, dans le village
de Matthieu, où naquit le poète Marot,
et qu'habitait dans sa jeunesse Augustin
Fresnel. Il était depuis 1824, comman-
deur de la légion d'honneur, et avait
reçu de Louis XVIIl les titres d'inspecteur-
pénéral du génie maritime et de baron.
Aucun autre ingénieur n'a contribué plus
que lui à soutenir et à accroître la supé-
riorité de la France dans les cohslructions
navales, supériorité que l'Amérique du
Nord avoue , et qui ne nous est plus con-
testée, même par l'Angleterre.
*LA1RE (François-Xavier), religieux
minime de l'académie des Arcades de
Rome, de la société Colombaire de Flo-
rence , et de l'académie de Besançon, cé-
lèbre bibliographe, naquit le 10 novembre
1738, à Yadans, village près de Gray en
Franche-Comté. Il embrassa la vie reli-
gieuse dans l'ordre des minimes , professa
la philosophie au collège d'Arbois, et ob-
tint de ses supérieurs, en 1774, la per-
mission d'aller en Italie. Arrivé à Rome ,
il visita avec une attention particulière
les manuscrits des bibliothèques de celle
Cfrande ville, et obtint par ses connais-
sances en bibliographie , le titre de bil>lio-
thécairc du prince de Salm-Salm , qui lui
accorda la plus grande bienveillance. En
178(} , le cardinal de Briennc Uii fit pro-
poser la place do son lublioliiécaire , qu'il
accepta avec joie , dans l'espérance de
[>ouvoir se livrer à son goût pour la l)ibliO"
graphie. Il obtint de ce cardinal la facilité
de visiter les bibliothèques les plus consi-
dérables de l'Italie, et retourna dans ce
pays pour y poursuiv/e sc;s recherches.
Pendant son séjour à Rome, le pape Pie
VI lui accorda des marques d'une estime
particulière, et essaya, mais en vain , de
le retenir par une place de conservateur
à la bibliothèque du Vatican. En 1791, il
adressa au gouvernement un Mémoire
sur les mesures à prendre pour prévenir
la dégradation des monumens des arts,
s'opposa avec une fermeté qui n'ctait pas
alors sans danger aux fureurs des Van-
dales modernes , et parvint à sauver une
foule de monumens historiques très pré-
cieux. Lors de l'organisation des écoles
centrales, il fut nommé bibliothécaire du
département de l'Yonne, et ouvrit à
Auxene, lieu de sa résidence, un cours
de bibliographie très intéressant. Il con-
serva cette place jusqu'à sa mort , arrivée
le 27 mai 1801. On trouve une Notice sur
le père Laire dans le Magasin encycloiié-
dique , année 1801 ; et dans le Recueil de
l'académie de Besançon de 1816 , par dom
Grappin. On a de lui : | Mémoires pour
servir à l'histoire de quelques grands
hommes du 15' siècle, avec un supj}lé7nent
aux annales typographiques de Mait-
taircj en latin , Naples, 1776 , in-4"; | Spé-
cimen historicum typographies romanes
Xf^seculi, cum indice librorum. Rome,
1778, in-8°; cet ouvrage fut vivement
critiqué par Audiffrédi ; | Epistola ad ab-
balem Ugolini^ etc., imprimée à Pavie,
avec la fausse indication de Strasbourg,
in-8° ; | De l'origine et des progrès de
l'imprimerie en Franche-Comté, avec un
catalogue des livres qui y furent impri-
més, Dole, 1784, in-12; | Série deW edi-
zionialdine , Pise , 1790, in-12 ; une 2" édi-
tion augmeutée, Padouc , 1790,in-i2;
une 5* édition, Veni.se, 1792, même format;
1 Index librorum ah inventa typogruphia
ad annum 1500 , Sens , 1791 , 2 vol. in-8°.
C'est un catalogue liislorique et raisonne
da tous les livres imprimés dans le
15* siècle, qui faisaient partie de la
magnilique bibliothèque du cardinal de
Brienne; [ Recherches et observations
historiques sur un tnonument des art:,
qui existait dans V église de Sens; cHcs
sont insérées dans le Magasin encyclopé-
dique^ année 3*, pag. 542. Ce monuaicnt
LAI
227
LAI
est un superbe mausolée élevé à la' mé-
moire du rhancelicr Dupral, mort en
il}T)j cardinal et archevêque de Sens.
1 Lettres surdifférens monumens antiques
trouvés à Juxerre j insérés dans le même
journal.
LAIU ESSE (GÉRARD de), peintre et gra-
veur, né à Liège en 1640, mourut à Am-
sterdam en 1711. Il avait l'esprit cultivé;
la poésie et la musique firent tour à tour
son amusement , et la peinture son oc-
cupation. Son père , peintre de l'évêquc
de Liège , fut son maître dans le dessin ;
il suivit aussi les leçons de Barlholet Flé-
mael : Lairesse réussissait , dès l'âge de
15 ans, à peindre le portrait. Il gagnait de
Vargent avec bcavicoup de facilité, et le
dépensait de méinc. L'amour fit les plai-
sirs et les tourmens de sa jeunesse; il
pensa être tué par une de ses maîtresses,
qu'il avait abandonnée. Pour ne plus être
le jouet de l'inconstance , il se maria. Ce
peintre entendait parfaitement la poé-
tique de la peinture ; ses idées sont belles
et élevées; il inventait facilement, et ex-
cellait dans les grandes compositions ; ses
tableaux sont distingués par un riche fond
d'architecture. Ou admirait une Assomp-
tion à la cathédrale de Liège, un Orphée
et Euridice ^ chez le chanoine Diffui , la
Conversion et le Baptême de saint Au-
gustin aux Ursulines. On lui reproche
d'avoir fait des figures trop courtes et peu
gracieuses. Devenu aveugle à 50 ans, il se
consola de ce malheur en présidant à des
conférences sur la peinture , et en dictant
en hollandais toute sa théorie. Ces leçons,
recueilh'es avec soin par ses auditeurs et
ses disciples, forment un traité complet
de peinture, dont M. Jansen a donné
nne traduction française, sous le titre de
Grand livre des peintres, Paris, 1787,
2 vol. \n-k°. On y trouve aussi les Prin-
cipes du dessin, q\n avaient été impri-
més long-temps avant. Lairesse a laissé
beaucoup d'estampes à l'eau-forte. On a
gravé d'après ce maître. Lairesse fut père
de trois fils , dont deux furent ses élèves
dans son art. Sa facilité était si prodi-
gieuse , qu'il fit la gageure de peindre en
un seul jour Apollon et les Muses ; il y
réussit, et y ajouta, en outre, la léte très
ressemblante de celui contre lequel îlavait
fait cette gageure. Le Musée de Paris con-
serve de Lairesse les tableaux suivans :
L'Institution de l'Eucharistie; Hercule
jeune entre le Vice et la Vertu : Le Dc-
étaienl aussi peintres, Eunest et Jean, qui
s'attachèrent à peindre des animaux , et
Jacques, qui représentait fort bien les
fleurs. Ce dernier a composé en flamand
un ouvrage sur la Peinture pratique.
LAÎRSVELS (Sekvais), né à Soignies
en Hainault , l'an 1560, abbé de Sainte-
Marie-aux-Bois, et réformateur de l'ordre
de Prémontré , fil approuver sa réforma
par Louis XIII , qui lui permit de l'intro-
duire dans les monastères de son royaume,
et par les papes Paul V et Grégoire XV.
L'abbé Lairsvels eut la consolation de voir
revivre en France , comme en Lorraine ,
l'esprit de pauvreté, de charité, d'humi.
lité et de mortification , qui anima les
premiers disciples de saint Norbert. II
mourut à l'abbaye de Sainte-Marie-aux-
Bois en 1631 , après avoir publié quelques
ouvrages de piété , écrits d'une manière
diffuse : | Statut de la réforme de l'ordre
de Prémontré ; \ Catéchisme des novices ;
I V Optique des réguliers de l'ordre des
Augusdns, etc.
LAIS, fameuse courtisane, née vers
l'an 420 avant J.-C. , à Hyccara, ville de
Sicile, fut transportée dans la Grèce,
lorsque Nicias, général des Athéniens, ra-
vagea sa patrie. Corinlhe fut le premier
théâtre de sa lubricité. Princes, grands,
orateurs, philosophes, tout courut à elle.
Laïs avait un goiit décidé pour les philo-
sophes. Le dégoûtant cynique Diogène
lui plut. Aristippe, autre philosophe, dé-
pensa avec elle une partie de son patri-
moine. Cette femme badinait quelquefois
sur la faiblesse de ces gens qui prenaient
le nom de sages : « Je ne sais ce qu'on
» entend , dit-elle , par l'austérité des phi-
» losophes ; mais avec ce beau nom, ils ne
» sont pas moins souvent à ma porte que
» les autres Athéniens. » Après avoir cor-
rompu imc partie de la jeunesse de Co-
rinthe, Laïs passa en Thessalie, pour y
voir un jeune homme dont elle était amou-
reuse. On prétend que quelques femmes,
jalouses de sa beauté, l'assassinèrent dans,
un temple de Vénus, vers l'an 340 avant
J.-C. I-a Grèce lui éleva des monumens,
à la honte de la décence et des mœurs,
que l'aveugle gentililé ne connaissait pas,
et dont la divinité, comme dit saint Paul,
était la parfie la plus honteuse de l'être
corporel : Quorum deus venter est , et
gloria in confusione eorum. Phil. 5. Il no
faut pas confondre cette Laïs avec une
autre qui vivait environ 50 ans plus tard.
barquemcnt de Cléopûtre an port de Visconli dans son Iconograjjhie grecque
7'ariV.— Lairesse avait trois frères qui ! a fait graver une médaiUe corinllnenne,
LAI 228
sur laquelle on trouve d'un côté le mau-
solée que Corinlhe éleva à la première de
ces deux courtisanes, et de l'autre côté
une tète qu'il suppose être celle de Laïs.
Le Goux de Gerland a donné une His-
toire de Laïs avec quelques anecdotes
sur les philosophes de son temps, Paris,
1736, in-12.
LAISi\É , ou LAINAS (Vinck.nt) , père
de l'Oratoire de France, né à Lucques en
1633 , professa avec distinction , et lit des
Conférences sur l'Ecriture sainte à Avi-
gnon , à Paris et à Aix. Elles furent si ap-
plaudies, que dans cette dernière ville on
fut obligé de dresser des échafauds dans
l'éfïlise. Sa santé avEiit été toujours fort
délicate. On l'avait envoyé à Aix pour la
rétablir; il y mourut en 1677, à 45 ans.
On a de lui : ] les Oraisons fwièbres du
chancelier Séguîer et du maréchal de
Choiseul. Les louanges y sont mesurées , et
les endroits délicats maniés avec adresse.
Son éloquence est à la fois fleurie et chré-
tienne. 1 Des Conférences sur le concile
de Trente , imprimées à Lyon ; | des Con-
férences manuscrites, en 4 vol. in-fol. sur
l'Ecriture sainte. Un magnistrat d'Aix les
conservait dans sa bibliothèque. M""= de
Sévigné, dans une de ses lettres à sa
iille, parle avec beaucoup d'éloge du ta-
lent oratoire de Laisné, qu'elle avait en-
tendu débiter l'une de ses oraisons fu-
nèbres , et l'assimile à Mascaron , dont ce
père était l'ami.
• LAISNÉ (Antoixe) , avocat au parle-
ment de Paris, secrétaire du roi à Lyon,
et directeur de l'hôtel des monnaies de
cette ville, naquit à Paris vers la fin du
17' siècle. Il est auteur de quelques écrits
sur la numismatique en général , et l'ar-
chéologie, sciences à l'étude desquelles
il- se livra avec succès ; nous citerons seu-
lement : 1 Disquisitio in dissertationem
eut titulus est : Tumulus T. Flavii mar-
tijris illusiratus. Lyon , 1728, in-4° ; | Ex-
plication d'une médaille singulière de
Vomitien, présentée à l'académie de
Lyon^ Paris, 1735, in-12; | Dissertation
sur les médailles de l'cmjJereur Com-
mode , frappées en Egypte ^ insérée dans
les Mémoires de Trévoux , mai 1737.
LAITH , ou LEITH , était un chaudron-
nier qui éleva trois enfans, nommés Jacob^
jàmrou et Jli. Le père et les enfans s'cn-
nuyant de leur métier , voulurent porter
les armes. Lailh se mit donc en campagne
avec ses trois fils, et ayant ramassé quel-
ques gens de fortune , dont il se fit le chef,
il devint capitaine de voleurs. 11 volait
LAK
pourtant en galant homme,* car il ne dé-
pouillait jamais entièrement ceux qui"
tombaient entre ses mains, se contentant
de partager avec eux ce qu'ils avaient. Il
fut connu et estimé pour sa bravoure et
pour celle de ses enfans, par Darhan , qui
régnait alors dans le Ségestan. Ce prince
l'attira à sa cour, et l'avança jusqu'aux
premières charges de l'état : de sorte que
Laith , en mourant , laissa à son fils Jacob
l'espérance et les moyens de parvenir à
qtielque chose de plus grand. En effet , ce
fut ce même Jacob qui fonda la dynaslio
des Soff arides.
*LARE (Gérard), lord, vicomte, gé-
néral anglais , né en 1744 , d'une famille
très ancienne , embrassa de bonne heure
la carrière des armes et s'éleva par soa
propre mérite. Il se distingua pendant la
guerre de sept ans, et en Amérique , sous
le général Cornwallis. Lorsque l'Angle-
terre eut déclaré la guerre à la France ,
en 1795 , il fut envoyé en Hollande à la
tête de la première brigade des gardes;
il revint avec l'armée anglaise , que le»
Français forcèrent en 1794 d'abandonner
le continent ; en 1797, il reçut ordre de se
rendre en Irlande, pour apaiser la révolte
qui y avait éclaté. Le 21 juin de cette
môme année, il défit les insurgés à Vine-
garhill ; peu après, les Français ayant dé-
barqué sous les ordres du général Hum-
bert, Lake fut battu à Castlebar, où il
laissa six pièces de canon. Il reprit sa re-
vanche le 8 septembre 1798, pris de
Ballynamuck; étant très supérieur en
nombre , après un combat opiniâtre , il
força les Fi ançais et les Irlandais qui n'é-
taient point restés sur le champ de ba-
taille de mettre bas les armes. L'Irlande
se soumit ; Lake, qui y était en horreur,
avait contribué, par ses mesures d'une
sévérité excessive , à y exaspérer les es-
prits. En 1800, il fut nommé commandant
en chef de l'armée anglaise dans les Indes.
Au mois de novembre 1801 , il décida le
nabab Vézier, à céder à l'Angleterre une
portion de territoire, en remplacement
du subside auquel il était soumis. En 1802 y
il défit les zémindars de Sasni et de
Colchoura , et s'empara de toutes leur»
places. Le 29 août 1805, il entra sur le
territoire des jMahrates, et après avoir
repoussé le général français Perron, il
s'empara de la forteresse Aly-Ghor. Le 11
septembre 1805, il attaqua le général fran-
çais dans la plaine de Debly,ct força ^
après un combat sanglant, deux de ses
brigades à se rendre prisonnières. Ayaot
LAL
229
LAL
chassé les troupes mahrates et françaises
de la ville d'Agra, il se trouva maître des
possessions de Scindia , à l'est de la ri-
vière Tomboul. Vers la fin de l'année , il
conclut un traité avec le rajah de Djei-
poure. Le 17 novembre 180/i., il surprit
dans son camp Holcar , chef des Mahrates,
et le défit complètement. Au mois de
îanvier 1806, il investit Bertpore , la seule
place qui restât à Holcar. Après une courte
paix , les hostilités recommencèrent. Hol-
car ayant tout perdu , conclut , au mois de
février 1807, un second traité, après la
conclusion duquel Lake revint en Angle-
terre (1807). Nommé pair du royaume,
avec le titre de lord Lake , baron de Dehly
et de Laswarri , vicomte , gouverneur de
Plymouth , il mourut le 21 février 1808,
n'ayant joui que quelques mois de sa haute
élévation. — Geobges- Auguste -Fuédé-
Bic, son second fils, qui avait fait sous
lui la campagne des Indes, fut tué le 17
août 1808, à la bataille de Roleia en Por-
tugal. Wellington en faisait le plus grand
cas.
LALANDE (Jacques de}, conseiller el
professeur en droit à Orléans, sa patrie ,
naquit en 1622 , et mourut en 1703. Il fut
aussi regretté pour son savoir que pour
son zèle et son inclination bienfaisante ,
qui lui méritèrent le titre de Père du
peuple. On a de lui : [ un excellent Com-
mentaire sur la Coutume d'Orléans , Or-
léans , in-fol. , 1673 ; réimprimé en 170/i.
et en 1712 , 2 vol. in-fol. augmenté des
mémoires de l'auteur et des notes de
Gyves, revu... par Perreaux ; la première
édition est la meilleure ; [ Traité du ban
et de l'arrière-ban . 'm-k° , Orléans, 1673 ;
I plusieurs ouvrages de droit en latin.
Voyez les Mémoires de Nicéron , tome 63.
LALANDE ( Michel-Ricuard de), mu-
sicien français, né à Paris en 1657, mou-
rut à Versaillesenl726.Il s'attacha à l'or-
gue et au clavecin, et se fit bientôt dési-
rer dans plusieurs paroisses. Louis XIV
le choisit pour montrer à jouer du clave-
cin aux deux jeunes princesses ses filles ,
mesdemoiselles de Blois et de Nantes. Il
obtint successivement les deux charges
de maître de musique de la chambre, les
deux de compositeur , celle de surinten-
dant de la musique, elles quatre charges
de maître delà chapelle. Les Motets qu'il
a fait exécuter devant Louis XIV et Louis
XV , toujours avec beaucoup de succès
et d'applaudissemens , ont été recueillis
en 2 vol. in-fol. On admire surtout le
Cantate, le Dixit, le Miserere.
7.
* LAL AXDE (JosEPii-JÉROME LEFR AN-
ÇAIS de), célèbre astronome, né à Bourg;
en Bresse, le H juillet 1732, manifesta
de bonne heure cet amour de la célébrité
qui fut constamment sa passion domi-
nante. D'abord destiné par son père à Is^
carrière du barreau, il fut placé dans une
maison de jésuites à Lyon, où il prit le
goût de la dévotion, et, à l'âge de 10 ans»-
il composait des romans mystiques, et
même lies sermons qu'il débitait dans la
chaire en habit de jésuite. Il étudiait lea
mathématiques sous le père Beraud, aa
collège de Lyon , lorsqu'arriva la grande
éclipse du 25 juillet 1748, et il suivit avec
la plus grande attention les observatiolis
que faisait son professeur sur ce phéno»
mène. Quelque temps indécis sur sa vo-
cation, il se détermina alors à se livrer
à l'astronomie. Lorsqu'il fit son cours de
philosophie , ses vues se tournèrent vers
la religion et il voulut se faire jésuite;
mais ces sentimens de piété ne purent
étouffer en lui l'amour de -la science à la-
quelle il devait plus tard donner tant
d'illustration. Dans la retraite où il aurait
vécu , s'il s'était associé à la société de
Jésus, il espérait trouver les ressources el
la tranquillité nécessaires pour se livrer
sans distraction à son étude chérie. Mais
ses parens s'opposèrent à ses désirs, et
l'envoyèrent à Paris pour faire son cours
de droit. Il fut en effet reçu avocat. La»
lande avait fait la connaissance de Delisle
qui avait établi un observatoire dans l'hô-
tel même qu'il habitait ; il suivit ses le-
çons , assista au cours d'astionomie que
Messier faisait au collège de France et
fréquenta celui de physique-mathémati-
que, que donnait alors dans le même éta-
blissement le professeur Lemonnier , de-
venu célèbre pour la mesure d'un degré
au cercle polaire. Lalande sut gagner l'a-
mitié de ses maîtres , et profila de leur
enseignement. On s'occupait alors d'une
grande question astronomique : il s'agis~
sait de déterminer la parallaxe de la lune»
ou , en d'autres termes , la distance de \»
lune à la terre. Lacaille s'était rendu au
cap de Bonne-Espérance pour y faire des
observations relatives à la solution de
cette question, et il avait invité les savana
de l'Europe à le seconder par des obser-
vations correspondantes à celles qu'il
allait entreprendre. La position de Ber*
lin était celle qui paraissait la plus con-
venable, parce qu'elle se trouve à peu
près sous le méridien du Cap ; rriais l'ob-
servatoire de cette ville n'avait alors ni
20
LAL
bon instrument ni astronome
230
LAL
suffisam-
ment exercé. Lemonnier, après avoir ob-
tenu du gouvernement l'auforisation de
se rendre à Berlin, n'eut pas de peins à
se faire remplacer par son élève auquel
il confia son grand quart de cercle , le
meilleur qui existât alors en France. La-
lande partit donc pour Berlin, n'ayant
à cette époque que 19 ans. Il fut pré-
senté par Maupertuis à Frédéric qui s'é-
tonna de voir un si jeune astronome , et
qui à cette occasion lui dit les choses les
plus flatteuses. Lalande reçu membre de
l'académie de Berlin, passait les nuits
dans son observatoire , les matinées chez
Euler dont il recevait des leçons sur l'a-
nalyse, et les soirées avec d'Argens, Mau-
pertuis, Lamettrie , et les autres philoso-
phes de la cour du roi. Pendant qu'il fré-
quentait cette société, il se manifestadans
ses sentimens religieux un changement
sensible. A son retour , il publia le résul-
tat de sesohservations dans une brochure
qui avait pour titre : D.Delalande, astro-
nomi regii^ de observatmiibus suis Bero-
linensibus^ ad parallaxim lunce definien-
dam Epistola. ( acta eruditorum , augusti
17S2, et Mém. de l'acad. de Paris , années
4751 et 1752 ). Il revint ensuite à Bourg , où
sur les instances de son père , qui aimait
mieux avoir dans son fils un avocat qu'un
académicien , il plaida plusieurs causes
dans le barreau de celte ville. Quoique
ses opinions religieuses, comme nous ve-
nons de le dire , se fussent un peu modi-
fiées, il parut encore attaché à la religion
et accompagnait sa mère dans ses exer-
cices pieux. En 1753, Lalande âge de 21
ans fut nommé professeur d'astronomie ,
et revint à Paris. Sur ces entrefaites, La-
caille et Lemonnier eurent une dispute
sur le degré d'Amiens : Lalande se pro-
nonça contre son maître. Le ressentiment
de celui-ci dura dix-huit ans, ou, comme
. le disait Lalande , une révolution entière
des nœuds de la lune. Pour tirer des ob-
servations faites au Cap et à Berlin le parti
le plus sûr et le plus avantageux , il était
nécessaire de connaître avec la dernière
précision le diamètre de la lune. Lalande,
à l'aide d'un héliomètre de 18 pieds, par-
vint à déterminer ce diamètre, et son
rapport constant avec la parallaxe hori-
zontale. Deux passages de J-^énus sur le
soleil devaient avoir lieu : Lalande repré-
senta sur xme carte géographique, alin de
pouvoir choisir sur un globe les situations
lis plus favorables, l'heure de l'entrée cl
de la sorlLe do Fénus. pour les diflcrens
pays de la lorrc. Il seservit( tout en la dé-
veloppant) do la méthode de Dc!i:ile, qui
devint ainsi la sienne. Lagrange la prit,
quelques années après pour sujet d'un
grand mémoire , où l'analyse la plus sa-
vante le conduisit aux mêmes procédés
que Delisle et Lalande avaient indiqués les
premiers. Lalande s'occupa aussi de gno-
monique ; il expliqua plusieurs cadrans
d'une espèce particulière, tels que celui
de Bourg en Bresse, celui de Besançon (i),
celui de Pingre, destiné pour la colonne
de la Halle au blé , bâtie sur l'emplace-
ment de l'iiôtel de Soissons. Il fit une Dis-
sertation savante sur la comète de 1765,
dont Halley avait préditle retour, et donna
dans la suite de nouveaux détails sur la der-
nière apparition de cette comète. Maraldi
ayant abandonné la direction de la Con-
naissance rf^s <em/>.ç^ Lalande lui succéda,
et eut la préférence sur Pingre , quoique
cet astronome fût avantageusement conna
par un Etat du ciel , rédigé spécialement
pour la marine. Lalande perfectionna
l'ouvrage dont il était devenu rédacteur ;
et, depuis 1760 jusqu'en 1775 inclusive-
ment, il en composa seize volumes. Les
améliorations faites à cet ouvrage exi-
geant de plus amples explications, il les
réunit dans un volume qu'il publia sépa-
rément, avec le XWtqCC Exposition du cal-
cul astronomique^ Paris, 1752. Dans cette
même année, Delisle, son premier maître
à Paris, accablé par l'âge, lui céda la
chaire d'astronomie qu'il occupait au col--
lége de France. Lalande la remplit avec
hormeur, et il sortit de son école d'exccl-
lens élèves, tels que Henri, Barry, Piaxzi,
son neveu Lefrançais Lalande , Méchain
et autres, qui devinrent très utiles à la
marine, en introduisant sur les vais-
seaux l'usage des instrumens et des mé-
thodes astronomiques. Ces services lui
(i) Ce cadran , pîacï par un conseiller nomme' IJi-
zot , ëtait sous un auvent; quand le soleil e'iait ton-
vert, on ne voyait qu'un ange dont le doigt srmLialt
indiquer quelque chose qu'on n'apercevait p-ns. Des-
que le soleil venait à paraître, on voyait r.ii cadrai»
lumineux et mobile, et l'heure s'y plaçait sous le doigt
de l'ange. Celui de liourg était aussi d'une espèce «in-
gutiè.re ; on n'y voyait ni style , ni gnomon j mais en
se plaçant «ur des points marqués pour les diffe'ren».
jours de l'année , l'observateur, tournant le dos ao
soleil , voyait son ombre couvrir le chiffre qui indi-
quait l'heure. On conçoit cependant que ce moyen
n'était pas d'une grande précision, f'oyet \c ^Ue'moire
que Lalande écrivit à ce sujet dans le volume de < ySy
de VAcade'mie des sciences, et VEnc/^-lope'dU ptélhe.
dique (1789) , où cet astronome , peu satisfait de son
premier essai , inséra une seconde dcmonslralion ^u&
est encore asseï pénible.
LAL
251
LAL
t»6ritcrenl dètie admis au nombre des
membres de racadémie do Brest, et une
pension de 1000 livres, que lui accorda
le gouverneiucnl. Il rendit encore un ser-
vice important à la science qu'il profes-
sait, en réparant dans son Traité d'as-
trono?nie les omissions qu'on reprochait
à plusieurs ou vraies, tels que les Elémens
<lc Cassini, les Institutions astronomi-
ques de Lcmonnier, cl les Leçons élémen-
taires de la Caille. On était dans l'année
d769, où l'on attendait le passage de f^é-
nus sur le soleil : Lalande s'empressa
d'inviter tous les astronomes de l'Europe
à faire leurs observations. Ces suvans lui
en adressèrent les résultais , excepté le
père Hell, astronome distingué, et connu
■par SCS F2^hétné7'ides de Vieime^ ville où
il résidait. Cela donna lieu à quelques
différends entre les deux astronomes;
niais enliu Lalande fut contraint d'avouer
<ïue Tobscrvation du père HcU sur le
passage de Ténus avait été la plus com-
plète. Du reste, s'il ne l'avait pas adressée
à Lalande, c'était par ordre de son gou-
vernement. Cependant LalanHc publia
en 1772 son Observation sur ce même
passage, qui servit à déterminer, le plus
exactement possible, la distance du soleil
à la terre. Ayant lu , en 1775, dans les
JElémens de la philosophie de Newton,
par Voltaire , « que la rencontre d'une
» comète qui viendrait choquer la terre
» aurait pu l'embraser, mais que la Pro-
» vidence avait tout disposé de manière
» à rendra celle rencontre impossible ; »
et Clairaut , de son côté, à l'occasion de
ïa comète de 1739, ayant démontré « que
» les attractions planétaires pouvaient al-
» lérer sensiblement une orbite, » Lalande
se déclara contre la première assertion,
el, adoptant en quelque sorte la seconde,
il conclut que la chose n'était pas abso-
lument impossible, mais extrêmement
invraisemblable, cl composa sur ce
sujet le J/<?'moîr^ intitulé : Réflexions sur
les comètes qui peuvent approcher de la
'terre. On eut connaissance de cet écrit ;
et la possibilité que ce litre indiquait
qu'une comète s'approchât du globe ter-
restre, et 2iar conséquent l'embrasât,
mit l'alarme dans le public. On croyait
que la fin du monde arriverait dans l'ins-
tant où on l'attendrait le moins. Celte
crainte redoubla quand on apprit que ce
Mémoire n'avait pas été lu à la séance
pour laquelle on l'avait destiné ; car on
pensa que ce n'était que pour cacher le
malheur qu'on y annonçait. Lalande, qui
aimait tant la célébrité, l'obtint dans celle
occasion, aux dépens de la frayeur gé-
nérale; clic fui telle, que le lieutenant de
police se fit remettre \o Mémoire , et,
convaincu qu'il ne conienait rien d'alar-
mant , il en ordonna la publication. Celle
démarche prudente ne calma pas les es-
prits, et l'on se persuada que l'auteur
avait retranché l'annonce terrible que
l'on redoutait. La tranquillité ne se réta»
blil qu'insensiblement, jusqu'à ce qu'on
eût oublié el le Mémoire et les comètes.
Peu de temps après , Lalande se trans-
porta à Béziers, où l'on jouit du ciel le
plus pur , pour observer la disparition
qu'on avait annoncée de l'anneau de Sa-
turne ; mais la faiblesse de sa vue rendit
son observation moins exacte que celles
qu'on avait faites à Paris cl à Londres. Il
eut à ce sujet plusieurs discussions avec
Cassini de Thury; mais des amis com-
muns mirent d'accord les deux astrono-
mes. Lalande fit paraître , en 1775 , un
globe céleste d'un pied de diamètre ; il
s'occupa ensuite de terminer un ouvrage
sur les diamètres des satellites de Jujji-
ter, que Bailly avait laissé incomplet , et
sur lequel celui-ci lui laissa liberté en-
tière. Dans l'année 1789 , tous les astro-
nomes se mirent en mouvement : il s'a-
gissait d'un passage de Mercure, qui de-
vait avoir Heu le 3 mai. Lalande le fit
annoncer dans le Journal de Paris , et
avait déterminé la minute et la secondo
à laquelle Mercure devait quitter le dis-
que du soleil. Lalande se trompa, et fut
forcé d'en convenir ; mais il faut dire
aussi que ce jour là le ciel était couvert
de nuages. Il avait pour compagnon de
ses travaux sonne veu, qui élaitson élève,
dont il parle avec avantage dans la pré-
face de son Histoire céleste française,
etc. « Ce recueil, dit-il, pourra renfermer
» de nombreuses observations de Cassini,
» de Lemonnier, de Delisle , de Messier,
» etc.; mais j'ai cru devoir commencer
» par les plus récentes, et surtout par les
• observations des étoiles, qui sont le
» premier fondement de l'astronomie
» J'avais délégué à Lepaule-Dagelet la.
» description du ciel étoile : il commença
» en 1782, el l'on trouve dans ce volume
» une partie de ses observations. Le
» voyage de La Pérouse nous l'enleva le
» 15 juin 1785. Michel Lefrançais Lalande,
» mon neveu, me seconda au-delà de mes
» espérances , et il est arrivé à cinquante
» mille étoiles. « Cet éloge de son neveu a
été confirmé par le célèbre docteur 01-
LAL
232
LAL
bcrs, qui ne balance pas à dire qiie celte
fustoire céleste est une des plus impor-
tantes productions du 18' siècle, et il ajoute
« Je suis très persuadé que la postérité
m confirmera ce jugement , et que les as-
» tronomes sentiront un jour tout le prix
» d'une description si lidèle et si complète
» du ciel. j> A la fin du 18' siècle, Lalande
fit , par son crédit . bâtir l'observatoire
•de l'Ecole militaire, et «tcheler par le gou-
vernement le quuî't de cercle^ qui fut
confié à Dagenet , et ensuite à Michel La-
lande son neveu ; enfin, il fonda une mé-
daille que l'institut décerne tous les ans
à l'auteur de l'observation la plus inté-
ressante ou du Mémoire le plus utile aux
progrès de Vastronomie. Il rédigea les
Ephèmérides jusqu'en 1775, qu'il fut
chargé de la Connaissance des temps.
Ayant quitté ce journal , il le reprit en
4794, elle continua encore jusqu'à sa
tnort. Dans sa vieillesse , Lalande tomba
clans des singularités assez communes à
ceux qui s'appliquent aux sciences de cal-
cul , et dont le but principal était de faire
parler de lui ; il se tenait le soir sur le
Pont-Neuf, et faisait voir aux curieux, qui
l'entouraient en grand nombre, les varia-
tions de l'éclat de l'étoile Algol, leur par-
lait d'astronomie ; et répétait qu'il s'ap-
pelait Lalande. Enthousiaste de Montgol-
fier ( voyez ce nom , et GlfSMAO ) , et
pour devenir de plus en plus populaire ,
il voulut aller à Gotha dans un ballon
aérostatique. Il annonça publiquement
cette détermination, monta sur le ballon,
•qui s'éleva dans les airs ; mais son con-
ducteur, prévenu à temps, le descendit
au bois de Boulogne , et protesta que le
vent était contraire au voyage de Gotha
Forcé de l'interrompre , Lalande se con-
sola en pensant que le public aurait su
apprécier son courage, et qu'il serait l'ob-
jet dp toutes les conversations. Au com-
mencement de la révolution il en em-
brassa la cause avec transport, et pro-
nonça publiquement, en 1793, un discours
contre l'existence de Dieu. Comme il
«tait petit et laid, on eût dit, lorsqu'il prê-
chait sa désolante doctrine , un démon
disgracié, qui mettait son bonheur à nier
la divinité. Lorsque des temps plus heu-
reux permirent à chacun de suivre sa
croyance , il continua d'afficher et de
prêcher l'athéisme , et aida Sylvain Ma-
réchal dans la composition du Diction-
maire des athées. Il publia même deux
Supplémens à cette mauvaise compila-
tion, lesquels sont pleins de mensonges et
de jactance ; enfin il porta si loin sa manie
de vouloir faire des prosélytes, que dans
les maisons qu'il fréquentait, il catéchi-
sait jusqu'aux domestiques, et qu'il reçut
ordre du gouvernement d'être plus cir-
conspect et de ne plus rien écrire sur cet
article. On a attribué sa conduite dans
cette occasion à l'en vie qu'il avait de fixer
l'attention sur lui, n'importe comment. Il
disait lui-même qu'il était une toile cirée
pour les injures, et une éponge povir les
louanges. Il a fait imprimer à plusieurs
reprises, qu'il croyait posséder toutes les
vertus de l'humanité. « J'ai peut-être eu
» tort de parler ainsi , ajoute-t-il quelque
» part, mais ma conscience intime m'en a
» fait une loi. » Un homme d'esprit di-
sait : Au moins, de ses vertus, il faut en
excepter la modestie. Son caractère sin-
gulier et bizarre, et l'habitude qu'il avait
contractée d'émettre continuellement son
opinion , même sur les matières qui n'é-
taient pas de son ressort , avait animé
contre lui une foule de mécontens et de
détracteurs qui en vinrent jusqu'à l'acca-
bler d'outrages dans les derniers temps
de sa vie. On prétend « que tous les ans ,
» dans la semaine sainte , il se faisait lire
» la Passion de Jésus-Christ. » On nous
permettra d'être un peu sceptiques sur
ce point, et la fin de Lalande ne justifie
que trop nos doutes. Pendant long-temps,
il s'était soumis à un régime qui consistait
à faire diète, à boire beaucoup d'eau,
et à entreprendre de longues courses. Ce
régime , qu'il suivait dans les saisons les
plus rigoureuses, finit par altérer sa
santé , qui n'était pas d'ailleurs très ro-
buste. Il prévit que son dernier moment
allait arriver, sans se mettre en peine de
se procurer les secours de la religion. Le 4
avril 1807, au matin, il dit à ceux qui l'en-
touraient : Je n'ai plus besoin de vous ,
allez vous reposer. On revint quelques
momens après ; il avait expiré , âgé de
soixante-quinze ans. Tout le monde con-
naît son goût bizarre pour les chenilles
elles araignées, qu'il avalait avec une
affectation ridicule; et il trouvait plai-
sant, lorsqu'il se trouvait en la compagnie
des dames , de renouveler en leur pré-
sence ces dégoûtantes scènes de poly-
phagie. C'était là ce que Lalande appelait
se mettre au-dessus des préjugés. Ayant
dit un jour à madame Condorcet qu'il
trouvait à cet étrange mets une saveur
de noisette : — a Je comprends, répliqua
» cette dame; c'est à peu près comme oa
» peut trouver à l'athéisme une odeur de
LAL '2
» pliilosopliie. j>Le chevalier de Piis fit à
ce sujet le couplet suivant :
Quand sur voire blanche Atsiette
La noire arachné courra,
Pour la croquer sans fourcliette
Entre vos doigts prenez la :
Si non de vous , landerlrctte ,
monsieur de Lalande rira.
Son cynisme répondait, dans les derniers
temps de sa vie à ses habitudes et à ses
doctrines. II a laissé : ] Exposition du cal-
cul astronomique , Paris , 17G2, 1 vol. ;
] Traité d'astronomie, d764, 2 vol. in-4° ;
îl en donna deux autres éditions : celle
de 1790 contient ses nouvelles tables des
planètes; un quatrième volume, publié
en 1780, renferme un grand nombre d'ob-
servations sur les marées. On y trouve
aussi un Mémoire de Dupuis sur l'origine
astronomique de toutes les fables , et qui
fut le germe de l'ouvrage peu orthodoxe
de l'Origine de tous les cultes; | Mémoire
sur le passage de J^énus ^ observé la 5
juin 1769 , pour servir de suite à l'expli-
cation de la cqrte publiée en 1764^ Paris ,
1772, In-4°; | Réflexions surles comètes qui
peuvent approcher de la terre, ibid., 1774;
] Lettre sur l'anneau de SatU7me décrite
par M. Lalande à M. Cassint, au sujet de
son avis imprimé dans le Journal politi-
que d'août 1773, Toulouse, in-8°; | Abrégé
de navigation historique,, théorique et pra-
tique , par M. Lalande ^ avec des tables
horaires, calculées par madame Lalande,
sa nièce, Paris, 1773, 1 vol. in-4°. L'au-
teur y a inséré le catalogue de tous les
bons livres de navigation qui ne sont pas
indiqués dans la Bibliographie astrono-
mique. ( Astronomie des Darnes^ 1793,
d vol. in-18 ; | Catalogue de mille étoiles
circompolaires^ d79o ; | Mémoire sur la
hauteur de Paris au-dessus du niveau de
la mer, 1793 ; \ Histoire céleste française ,
contenant les observations de plusieurs
astronomes français, 1801, imprimée par
ordre du gouvernement; | y'oyage au
Mont-Blatic. fait en août 1796, in-8° de
4'ingt pages ; | Voyage en Italie ( en 1765
et 1766), 2" édition, Paris, 1786, 9 vol.
in-12; excellent ouvrage, avec un atlas,
contenant les plans topographiques des
principales villes. L'auteur, loin d'y affi-
cher cette manie d'athéisme qui le fit
mépriser même de ses partisans sur la fin
de ses jours, parle convenablement de la
religion, de la cour de Rome, des papes
et du clergé. Il regarde les cérémonies
de l'Eglise comme respectables en dépit
d'une philo s oj}hie destructive de toute iné-
33 LAL
g alité , de toute religion, de tout pouvoir,
et il se moque d'un médecin génois nom-
itié Riva, dont la folie était de prêcher
l'athéisme, ne prévoyant pas que ce se-
rait un jour sa folie à lui-même. Il a été
éditeur des Leçons élémentaires d'astrO'
nomie de La Caille . 4*^ édition, 1780 ; d\x
Traité de la Sphère et du Calendrier,
par Rivard, d798, nouvelle édition; de
V Histoire des mathématiques de Montu-
cla, d800, etc. Il a en outre travaillé à la
Bibliographie astronomique, a. presque
tous les Journaux ou Recueils savans de
l'Europe ; il a écrit plusieurs mémoires
séparés, des discours, des réflexions,
des Eloges peu estimés, etc., etc., etc.,
dont la nomenclature serait trop longue,
et que l'on peut trouver dans la Fratice.
littéraire, à l'article Lalande, par J. M,
Quérard. L'éloge de Lalande fait par
M. Delambre se trouve dans le tome
5 des Mémoires de l'Institut. Madame la
princesse Constance de Salm a lu en
1809 à l'Athénée des arts un éloge his-
torique de Lalande ; ce morceau suivi
de notes extraites des Mémoires de La-
lande, se trouve dans le tome 2 du Maga-
sin encyclopédique, 1810. On peut con-
sulter aussi sur les ouvrages de Lalande
le Dictionnaire d'Ebert, la Bibliothèque
astro7iomique , la France littéraire de
Ersch , le Supplément au Dictionnaire
des anonymes de M. A. A. Barbier.
LALAIN'E (Piekise), rimeur parisien,
fils d'un garde-rôles du conseil privé ,
ii'est connu que par quelques Stances et
une espèce ^Eglogue insérée dans le
tome 4 du Recueil des plus belles pièces
des poètes français, par mademoisells
d'Aunoi , et quelques autres pièces re-
cueillies en 17o9 , in-12 , avec celles de
Montplaisir. Elles se trouvent aussi dans
un autre recueil publié par Lefèvre de
Saint-Marc, Amsterdam (Paris), 1759, 2
vol. in-12. Il mourut vers 1761. Il était lié
avec Ménage , à qui il a adressé une de
ses pièces réputée la meilleure : elle. est
écrite en stances.
LALANE (NoEL de), fameux docteur de
Sorbonne , né à Paris , était abbé de Notre-
Dame de "Valcrolssant. Il fut le chef des
députés envoyés à Rome, en 1653, pour
l'affaire de Jansénius , à la défense du-
quel il travailla toute sa vie. Ce fut lui
qui prononça devant Innocent X la ha-
rangue rapportée au chapitre 22 de la 6*
partie du journal de Saint-Amour. On lui
attribue plus de 40 ouvrages différens
sur ces matières, sur lesquelles l'autorité
20.
LAL
234
LAL
ile l'Eglise eût dû lui donner dea senll-
«nens différens. Les principaux sont : | De
imlio pice voluntatis ^ 1650, in-12; | La
Crâce victorieuse ^ in-4°, sous le nom de
Beaulieii : la plus ample édition est de
i666 ; I Conformité de Jansénius avec les
thomistes sur le sujet des cinq Proposi-
tions ; I Vindiciœ sancti Thomœ circa
<gratiam sufficientem, ^ contre le père Ni-
colaï, dominicain, avec Arnauld et Ni-
cole. Lalane mourut en 1673 , à 53 ans. Il
«ut part à plusieurs des écrits d'Arnauld
et de Nicole.
• LAL\UBIE ( Louis-Henry-Guy DE-
t.OLM de), médecin distingué d'Aurillac,
et maire de cette ville, mort en 1829, étu-
dia au collège Louis le Grand, et vint
exercer la profession de médecin dans
son pays. Pendant la révolution , il avait
publié un opuscule sur la loi naturelle^
dont quelques passages attaquaient la ré-
vélation : peu de temps avant sa mort ,
le 3 novembre 1828 , il a rétracté cet ou-
vrage par un acte ainsi conçu : Dans le
discours sur la religion naturelle , que
i'ai publié pendant la révolution , je re-
grette beaucoup d'avoir ajouté à la fin
tout ce que j'ai dit contre la révélation ^
particulièrement dans l'application que
jen faisais à la religion chrétienne. Il a
paru à Aurillac , une Notice nécrologique
sur Delolm Lalaubie , où ce fait est re-
laté.
* L ALLEMAND (Jean-Baptiste), pein-
tre, né à Dijon, vers 1710, fut d'abord
obligé , à cause de son peu de fortune ,
de travailler avec son père , tailleur d'ha-
bits , et de négliger l'art pour lequel il se
sentait le penchant le plus prononcé. Il
employait néanmoins les momens de loi-
sir dont il pouvait disposer à manier le
crayon ou le pinceau. Ayant obtenu de
son père la permission d'aller travailler
à son métier de tailleur à Paris , il se ren-
dit dans la capitale. Un jour une personne
•dit en sa présence qu'elle avait besoin de
tableaux pour décorer sa maison. « Je me
* charge de les faire , » repart vivement
le jetune tailleur qui en ce moment tenait
Taiguille. L'étranger ayant regardé avec
Tin sourire cet instmment de son métier,
^allemand la jette avec dépit ,dnsiste, et
parvient à inspirer de la confiance. Notre
tailleur-peintre se met à l'œuvre , et exé-
cute quatre tableaux représentant lés
i^fuatre saisons ^ qui furent généreuse-
ment payés. Le premier succès fut bientôt
suivi d'autres qui procurèrent au nouvel
artiste les moyens de passer en Angle-
terre où ses ouvrages furent achetés par
les personnages les plus distingués. La
température de ce climat lui étant con-
traire , il revint passer quelque temps
dans le sein de sa famille à Dijon, puis se
rendit à Rome où il demeura plusieurs
années , s'occupant de composer un assez
grand nombre de tableaux , et de se per-
fectionner par l'étude des chefs-d'œuvre
des grands maîtres. Plusieurs cardinaux
employèrent ses talens, et il fit pour le Va-^
tican différentes compositions. Il épousa
une romaine , peu riche , mais douée de
vertus, et vint se fixer à Paris, où l'acadé-
mie de Saint-Luc le reçut dans son sein.
Lallemand fit pour les moines de Saint-
Martin, près d'Aulun, six grands tableaux
qui excitèrent l'admiration. Ce sont des
paysages héroïques et des marines , dont
deux surtout sont au-dessus de tout élo-
ge. On a placé ses productions à côté do
celles de Vernel , au génie duquel il était
le premier à rendre hommage. Le musée
de Dijon possède quelques-uns de ses ou-
vrages. Ce peintre est mort en 1802 ou
1803.
• LALLEMAND (Dominique) , baron ,
né à Metz , embrassa la carrière militaire,
et dut à sa valeur et à ses connaissances
les différens grades qu'il obtint. Parvenu
au rang de général de brigade dans l'ar-
tillerie , il se battit en cette qualité pen-
dant la première invasion en 18 ii. Le
gouvernement royal l'avait décoré de la
croix de Saint-Louis ; toutefois à la nou-
velle du débarquement de Bonaparte re-
venu de l'ile d'Elbe , il chercha à opérer
un mouvement en sa faveur dans le
département de l'Aisne ; ses tentatives
ayant échoué , Lallemand fut arrêté , et
détenu jusqu'à l'arrivée de Napoléon à
Paris : alors il fut nommé lieutenant- gé-
néral, et combattit à Waterloo, à la tête
de l'artillerie de la garde. Après avoir
suivi l'armée dans sa retraite sur Paris,
puis au-delà de la Loire , il passa aux Etats-
Unis. Compris dans l'article 2 de l'ordon-
nance du 24 juillet 181S, et condamnée
mort par contumace , il résolut conjoin-
tement avec son frère Charles , lieutenanfr
gétiéral , de fonder une colonie d'exilés
français au Texas , sous la dénomination
de Champ-d' Asile : cette entreprise ne
put réussir, et la colonie fut dissoute. Elle
avait été en France l'objet des souscrip-
tions nombreuses des partisans du gou-
vernement déchu ; Lallemand se fixa en-
suite aux Etats-Unis , où il épousa la fille
d'un riche négociant. 11 est mort le 13 sep-
LAL
tcmbre 1823, à Borden-Town , dans la
province de New-Jersey. On a de lui un
Traité d'a7'tillerie , estimé, qui a été tra-
duit en anglais par le professeur Rcn-
wick.
* LALLEMANDET (Jean), théologien,
né à Besançon en 1593, embrassa la vie
religieuse dans l'ordre des Minimes. Ses
supérieurs l'envoyèrent en Allemagne
professer la théologie et la philosophie,
en 1641 il fut nommé provincial , et chargé
de la surveillance des maisons de son or-
dre , dans la haute Allemagne , la Bohème
et la Moravie. Il est mort à Prague, le 10
novembre 1617, âgé de 52 ans. On a de
lui les ouvrages suivans : | Decisiones
philo soj)hic ce tribus partibus comprehen-
scB y Munich, 16i5 et 1646, in-fol. ; réim-
primé sous ce litre : Cursus philoso-
phicus^ etc., Lyon , 1656 , in-fol ; f Cursus
théologiens in quo, discussis hinc indè
Thomistarum et Scolistarum prœeipuis
fundamentis ^ decisiva sententia pronun-
tiatur. Lyon , 1636 , in-folio. Ces deux ou-
vrages ont joui long-temps eu Allemagne
d'une grande célébrité. Il avait laissé en
manuscrit un traité de Eucharistia; Elu-
cidationes in institutiones juris civilis; et
Institutumjuris canonici. Le père Lalle-
mandet avait d'abord refusé par modestie
le doctorat que lui offrit l'université de
Prague. Mais il finit par accepter un di-
plôme qui lui donnait le droit d'argumen-
ter dans les concours publics , droit ré-
servé aux seuls gradués.
LALLKMAIXT (Louis), jésuite, né à
Châlons-sur-Marne en 1578, mort recteur
à Bourges, en 1655 , est auteur d'un Re-
cueil de Maximes , qu'on trouve à la fin
de sa Vie , publiée en 1694, in-12 , par le
père Champion , et qui a paru depuis sous
le titre de Doctrine spirituelle ; la der-
nière édition est d'Avignon , 1781. Il y a
d'excellentes choses , fruits d'une grande
expérience dans les choses de Dieu ; mais
aussi quelques minuties , des mysticités
un peu exotiques , et des assertions au
moins incertaines.
LALLEMAÎ^T (Pierre), chanoine ré-
gulier de Sainte-Geneviève, né à Reims
vers 1622, n'embrassa cet état qu'à l'âge
de 33 ans. La chaire , la direction et les
ceuvres de piété remplirent le cours de
5a vie. Il la termina par une mort sainte
en 1673, à 51 ans, après avoir été prieur
de l'abbaye de Sainte-Geneviève et chan-
celier de l'université. Nous avons de lui :
\ le Testament spirituel , in-12 ; | Les
saints désirs de la mort ^ m-i'2 ; [ La mort
255 LAt
des justes j in-12. Ces trois ouvrages sont
entre les mains do toutes les personnes
pieuses; | Abrégé de la vie de sainte
Geneviève ^ 1663 , in-12 , réimprimé en
1683 , avec des notes du père Dumoulinet ,
in-8" : elle manque de critique ; | Eloge
funèbre de Pompone de Bellièvre , 1671 ,
in-4°, prononcé à l'Hôtel-Dieu de Paris,
le 17 avril 1637.
L ALLEMAIVT ( Jacques - Phillippe ) ,
jésuite , né vers 1660 à Saint-Valery-sur-
Somme , mourut à Paris en 1748. Il était
un des plus zélés défenseurs de la consti-
tution Unigenitus^eiiXQ l'autorité de l'E-
glise. On a de lui : | Le Véritable Esprit
des nouveaux disciples de saint Augustin.
1705 et 1707 , 4 vol. in-12 : tableau vrai à
certains égards , mais quelquefois outré.
I Le sens propre et littéraire des Psau^
mes^ en prose, in-12 , et qui met dans un
beau jour les sublimes cantiques du pro-
phète roi. On en a fait une multitude d'é-
ditions; et ce livre ne saurait être trop
familier aux chrétiens ; c'est le meilleur
livre de prières qu'on puisse leur suggé-
rer. Le père Goldhagen a donné une pa-
raphrase allemande sur ce modèle ,
Mayence, 1780, in-8°. {V. DAVID). [ Ré-
flexions sur le nouveau Testament^ 12 vol.
in-12, qu'il opposa à celui de Quesnel.
Si , comme l'ont prétendu les gens de
parti , il lui est inférieur pour les grâces
du style , ce désavantage est bien réparé
par une exacte orthodoxie. Il y a à la fin
de chaque chapitre do très bonnes notes
pour l'intelligence du sens littéral , par le
Père Languedoc ; | une Traduction do
l'Imitation de Jésus-Christ , 1 vol. in-12.
Plusieurs Ouvrages contre les réfractaires
aux décisions de l'Eglise. -
* LALLEMAIVT (Richard CONTERAY),
imprimeur célèbre par ses belles éditions
des classiques, né à Rouen, en 1726, y
mourut le 3 avril 1807, après y avoir
rempli différentes fonctions municipales.
Louis XV lui avait expédié des lettres de
noblesse. Parmi les ouvrages classiques
sortis de ses presses , on distingue le PetiJ
Apparat royale ou Nouveau Diction-^
naire fi-ançais-latin ^^onan , 1760, in-8°:
13' édition, corrigée et augmentée de
1500 aclicles, par M. Boinvilliers, Paris,
Delalain, 1818, in-8° ; | V Ecole de la
chasse aux chiens courans . par Verrier
de la Conterie , 1763 , in-8° ; Lallemant a
fait précéder cet ouvrage de la Bibliothè-
que des théreuticographes s c'est-à-dire,
des auteurs qui cmt traité de la chasse. Ce
morceau de la bibliographie, très estimé.
LAL 25
est Icrmîné par une table, qui est elle-
même un chef-d'œuvre. —Nicolas, et Ri-
chard-Xavier-Féux, frères du précédent,
s'aidèrent dans ses travaux typographi-
ques. Le dernier, né le 8 mars 1729 , ayant
embrassé l*état ecclésiastique , fut vicaire-
général du diocèse d'Avranches. Outre le
Dictionnaire français-latin ^ dont nous
venons de parler, on doit aux trois frères :
1 le Rudiment latin ^ avec la méthode ^
fn-12; I le Dictionnaire français-latin ^
■par le Père Lebrun^ augmenté, in-4° ;
J Ovide ^ latin-français, par Fontanelle,
augmenté, 2 vol. in-12 ; | Virgile^ en la-
lin, avec les notes du père Jouvency,
augmenté , in-12 ; ] Fables de Phèdre ^ en
latin-français , avec des notes ; | Sallustii^
et Cornelii Nepotis Opéra j avec des no-
tes. Ces ouvrages classiques ont été si
souvent réimprimés , qu'il serait inutile
d'en indiquer les éditions.
* LALLEMEIMT (Guillausie), journa-
liste, né à Metz le 2o décembre 1782, mort
en 1828 à Paris, débuta dans la carrière des
lettres par quelques poésies en l'honneur
de Napoléon. On a de lui : ] une Histoire de
la Colombie, 1826, in-8°, 1827 , in-32 , ou-
vrage remarquable pour le style et pour
l'exactitude , et le premier qui ait paru
sur celte république ; | Petit Roman d'une
grande histoire ou Wimjt ans d'une plume ^
facétie , \W\, , in-8" ; j le Secrétaire royal
parisien j ou Tableau indicatif de tout ce
gui J dans Paris , peut intéresser etc. ,
4814, in-12; | De la véritable légitimité
des souverains ^ de V Elévation et de la
chute des dynasties, 1814, in-S". Lalle-
ment avait aussi fourni des articles à la
feuille quotidienne intitulée \Aristarque.
Ses opinions l'ayant placé en 1816 parmi
les Français réfugiés en Belgique , il y
publia successivement le Journal de la
Flandre Orientale et Occidentale ^ qui
s'imprimait à Gand, et la Gazette de Liège ^
puis il inséra des articles dans le Vrai li-
béral de Bruxelles. Rentré en France
deux ans après, il fournit des articles à
plusieurs journaux , tels que le Diable
boiteux, le Frondeur , etc. Lallement est
en outre l'éditeur du Choix de rapports ^
opinions et discours prononcés à la tribune
nationale depuis i789 jusqu'à nos jours,
4819 et années suivantes , et a rédigé la
Table de l'histoire de France de l'abbé de
ifonfgaillard.
LALLI. Voyez LALLY.
LA.LLI ( Jean - Baptiste ) , Lallius ,
poète et jurisconsulte italien , né en 1572 ,
lut employé par le duc de Parme et par
6 LAL
le pape au gouvernement de plusieuri
villes , et mourut à Norcia dans l'Oinbrie ,
sa patrie , en 1637, à 64 ans. On a de lui
plusieurs poèmes italiens : j Domiziano II
Moschicida. ( Domitien le destructeur
des mouches) poème en quatre chants,
in-12; ( Il mal f?-ancesse ,'m-i2; \ La
Gerusalemne desolata, in-12 ; | L'Enéide
travestita. 1653, in-12; | un vol. de Poé-
sies diverses , 1638 , in-12
LA.LLOUETTE (Ajibroise), chanoine
de Sainte-Opportune , né à Paris , vers
1653, mort eu 1724, à 71 ans, s'appliqua
avec succès aux missions pour la réunion
des protestans à l'Eglise romjdne On lui
doit : I des Traités sur la présence
réelle ^ sur la communion sous une espèce,
réunis en 1 vol. in-12 ; j l'Histoire des tra-
ductions françaises de l'Ecriture sainte^
1692, in-12. L'auteur parle des change-
mens que les protestans y ont faits eu
différens temps , et entre dans des détails
curieux, mais quelquefois inexacts. [ La
Vie d'Antoinette de Gondi, supérieure du
Calvaire, in-12; | la Vie du cardinal Le
Camus, évéque de Grenoble, in-12. On
lui attribue communément YHistoire et
l'Abrégé des ouvrages latins , italiens et
français pour et contre la comédie et l'o-
péra, in-12.
LA.LLOUETTE (Jean-François) , mu-
sicien français, disciple de LuUi, mort à
Paris en 1728, à 75 ans, obtint successi-
vement la place de maître de musique de
l'église de Saint-Germain-l'Auxerrois , et
de celle de Notre-Dame. Il a composé
plusieurs motets a grand chœur, qui ont
été fort applaudis ; mais on n'a gravé de
ses ouvrages que quelques motets pour
les principales fêtes de l'année, aune,
deux et trois voix, avec la basse continue.
Son Miserere surtout est très estimé.
LALLY (Thouas-Authur, comte de),
baron de TuUendally ou Tollendal en Ir-
lande, gentilhomme irlandais de Tan-
cienne famille des O' Mul-Lally dont les
ancêtres suivirent la fortune de Jacques II,
roi d'Angleterre , lorsqu'il chercha un
asile en France , naquit à Romans en
Dauphiné en 1702 , et fut destiné à la car-
rière des armes ; on a dit qu'il fut solda t
en naissant , et , en effet , dès 1709 , c'est-
à-dire , à l'âge de moins de huit ans il ob-
tint une commission de capitaine dans le
régiment irlandais de Dillon , dont son
père , sir Gérard Lally, était colonel com-
mandant , et son oncle colonel proprié-
taire. Au mois de septembre de la même
année, son père le lit camper avec lui
LAL
237
LAL
anprès de Giionuc , voulant, disait -il,
lui faire sentir au moins la poudre pz-ur
gagner son premier grade , et à 12 ans ,
en 1714 , il monta sa première tranchée à
Barcelone. Après celte récr cation des va-
cances^ le jeune Lallyfut renvoyé au col-
lège et il fit réellement ses premières ar-
mes , en 1733 , en qualité d'aide-major du
régiment de Dillon. Le régent qui mou-
rut en 1723 avait voulu le faire colonel ,
à l'âge de 18 ans ; mais sir Gérard Lally
s'y était opposé, on ne sait trop pour
quelle raison. Il se distingua en 1734 , à
l'attaque des lignes d'Etlingen où il sauva
la vie à son père alors brigadier des ar-
mées , grade que celui-ci dut aux services
et aux réclamations de son fils. La paix
ayant été conclue en 1737 , le comte de
Lally passa en Angleterre , afin d'y jeter
les semences de ces conjurations qui tant
de fois faillirent replacer les Sluarts sur
le trône. Il parcourut les trois royaumes, y
établit des correspondances avecles prin-
cipaux partisans de Jacques III , et fut à
son retour chargé auprès de la cour de
Russie, parle cardinal Fleury, d'une négo-
ciation secrète et périlleuse dans laquelle
il échoua , non toutefois sans avoir fait
preuve de zèle et de talens diplomatiques.
Il devint successivement colonel d'un ré-
giment de son nom , puis lieutenant-gé-
néral, se distingua à la bataille deDeltin-
gue, perdue en 1743, et à celle de Fon-
tenoi, dont le succès lui fut dû en grande
partie , et fut nommé , en 1756 , gouver-
neur des possessions françaises dans l'In-
de. Il arriva à Pondichéry le 28 avril 1758.
La guerre était déclarée entre la France
et 1 Angleterre. Il s'empara d'abord de
Gondelour et de Saint-David ; mais il
échoua devant Madras ; et, après la perte
d'une bataille , il fut obligé de se retirer
sous Pondichéry, que les Anglais blo-
quèrent et prirent le 16 janvier 1761. Sa
garnison fut prisonnière de guerre , et la
place rasée. Lally avait indisposé tous
les esprits par son humeur violente et
hautaine, et par les propos les plus ou-
trageans. Les Anglais le firent conduire
à Madras le 18 janvier, pour le soustraire
à la colère des officiers français. Arrivé
en Angleterre le 23 septembre suivant , il
obtint la permission de retourner en
France. Le consul de Pondichéry et les
habitans l'accusaient d'avoir abusé du
pouvoir que le roi lui avait confié. Il fut
renfermé à la Bastille. La parlement eut
ordre de lui faire son procès, et il fut
condamné , le 6 mai 1766 , à être décapité ,
comme dûment atteint d'avoir trahi les
intérêts du roi ^ de l'état et de la compas
gnie des Jndes, d'abus d'autorité ^ vexa-
tions et exactions. L'arrêt fut exécuté, et
ce lieutenant-général finit sa vie sur un
échafaud. En 1778 , un fils du comte de
Lally [voyez l'article suivant), dont la
légitimité était contestée par une nièce
( madame la comtesse de la Heuse ) , se
pourvut en cassation de l'arrêt prononcé
contre son père. Il réussit aie faire casser
en effet , et à faire renvoyer ce procès au
parlement de Dijon. Ce tribunal confirma
la sentence du parlement de Paris , par un
arrêt du 23 août 1783 ; mais, en vertu d'un
arrêt du conseil , l'arrêt du parlement fut
cassé. Le Factura que Voltaire a publié
en faveur de cet infortuné général est
rempli d'assertions fausses et calom-
nieuses : il est toujours beau de prendre
le parti des malheureux , mais il ne faut
pas sacrifier à leurs dépens l'innocence
et l'honneur d'autrui.
• LALLY -TOLLEND AL (Trophime-
GÉRAKD, marquis de) , fUs du précédent,
pair de France , membre de l'académie
française, naquit à Paris le 5 mars 1751.
A l'époque où son père fut envoyé à l'é-
chafaud , le jeune Trophime étudiait au
collège d"Harcourt, et il ne connut le se-
cret de sa naissance que la veille du jour
où il devint orphelin. Il n'avait pas en-
core seiz.e ans , lorsqu'il adressa à son pro-
fesseur Mauduit tme pièce de vers latins
sur le procès de Jean Calas , dans laquelle
la mort de son père était indiquée avec
chaleur. Les tribimaux retentirent bien-
tôt de réclamations , et ses nobles efforts
allaient être couronnés d'un plein succès,
sans la révolution qui, en éclatant, fit
suspendre l'affaire à Rouen , où elle avait
été portée en dernier lieu.Louis XVI avait
même voulu consacrer la réhabilitation,
universelle du général Lally dans diver-
ses lettres et brevets, en exprimant sa
satisfaction particulière de la conduite du
fils, et en y disant : Nous avons ap^^
plaudi à sa piété filiale. Ce prince ne lui
accordait plus une seule marque de sa
spéciale protection sans la motiver par ces
mots : en considération des services de
sa famille et du régimetit de son nom.
Lally-Tollendal occupait le poste de grand
bailli àEtampes (Seine-et-Oise), lorsque
la noblesse de Paris le choisit pour son
député aux états-généraux. Partisan des
idées de réforme et des systèmes finan-
ciers de Necker, il se réunit avec la mi-
norité de la noblesse aux communes, le
LAL 2
2o juin 1789 , et se prononça dans l'assem-
blée pour une monarchie tempérée qu'il
aurait voulu baser sur la constitution an-
glaise. Le ik juillet , jour de la prise de la
Bastille, il fut de la députation chargée
d'apaiser l'agilatiou des esprits, et haran-
ftua la multitude le lendemain à l'hôlel-de-
ville. Le 17, lorsque Louis XVI, s'y rendit,
il exposa au peuple tous les bienfaits dont
le monarque l'avait comble. Ses discours
no purent satisfaire entièrement les es-
prits. Il se prononça ensuite en faveur de
la cour, attaqua Mirabeau dans une de
ses allocutions , et présenta, en qualité de
rapporteur du comité de constitution ,
mais sans succès , un système de gouver-
nement où il avait pris pour modèle celui
qui régit l'Angleterre. Un second projet ,
qu'il rédigea avec Mounier, Bergasse et
l'archevêque de Bordeaux, éprouva le
même sort que le premier, et on nomma
un nouveau comité qui produisit la con-
stitution de i79i. Lally-ToUendal vota
pour le veto absolu , et se plaignit de la
trop grande extension dormée aux conces-
sions faites le 4 août par les deux pre-
irâers ordres. Après les journées des S et
6 octobre , désespérant du salut de la mo-
narchie , il se relira avec Mounier en
Suisse , où il composa son ouvrage inti-
tulé : Quintus Capitolinus aux Romains^
critique détaillée des diverses opérations
de l'assemblée nationale. Rentré en France
en 1792, il cherclia, de concert avec Ber-
trand de Molleville , Malouet et Montmo-
rin , à s'opposer à la marche de la démo-
cratie , et fut emprisonné à l'Abbaye après
le 1 0 août. Il échappa aux massacres de sep-
tembre, et se rendit en Angleterre, où une
modique pension lui fut accordée par le
gouvernementbritannique. Du lieu de son
exil, il écrivit à la Convention pour lui
demander l'autorisation de venir défen-
dre Louis XVI , et n'en ayant point reçu
de réponse , il fit paraître le plaidoyer
qu'il avait préparé. Les événemens du 18
brumaire le ramenèrent dans sa patrie ;
Il se fixa à Bordeaux , d'où il vint en 1805 ,
à Paris, présenter ses hommages au sou-
verain pontife, et resta étranger aux af-
faires sous le gouvernement impérial.
Louis XVIII le nomma membre de son
conseil privé, et il suivit, en cette qua-
lité, le prince à Gan.d, durant les cent-
jours. Ce fut lui qui fit le rapport d'après
lequel fut rédigé le Manifeste du roi à la
nation française. Créé pair de France le
19 août iSlo , il demanda avec Desèic que
le 21 janvier fût un jour de deuil national ;
58 LAL
ii se fit plusieurs fois écouter avec intérêt
à la tribune. Lors du procès de Louvel,
Lally-Tollendal adressa au coupable cette
sommation solennelle : « Louvel, je vous
» adjm-e au nom du Dieu vivant de dé-
» clarer si vous n'avez point de complices. »
Il fut appelé à siéger à l'académie fran-
çaise par ordonnance du 21 mars 181G. II
est mort le 11 mars 1830, dans les sonti-
mens de religion qu'il avait toujours pro-
fessés , et a laissé les ouvrages suivans :
I Observations sur la lettre écrite par
M. le comte de Mirabeau au comité des
recherches , contre M. le comte de Saint-
Priest^ mi7iistre d'état ^ 1789, in-S" ; | Rap-
port sur le gouvernement qui convient à
la France^ 1789, in-8° ; | Lettres à ses
commettanSj réunies en un volunie,
Paris , 1790 , in-8° ; | Mémoire ou seconde
lettre à ses commettans ^ 1790 , in-S" ;
I Quintus Capitolinus aux Romains > ex-
trait du troisième livre de Tile-Live ^ 1790,
in-8°; | Lettre à Edm. Burice . 1791, in-
8°, et un Post-scriptum , 1791, in-8" ;
I Seconde lettre à Burke^ 1791, in-S";
I Lettre à M. l'abbé /)"*, grand-vicaire ^
auteur de l'écrit intitulé : Lettre à M. le
comte de Lally, par \\n officier français ,
1793 , in-S" ; I Plaidoyer pour Louis XVI,
1793, in-8°, réimprimé dans le Barreau
français^ publié par Panckoucke ; [ Mé-
moire au roi de Prusse , pour réclamer
la liberté de Lafayettc , 1793, in -8°;
I Le comte de Strafford^ tragédie en 5
actes et en vers, Londres, 1793, in-S";
cette tragédie avait été reçue en 1792 au
Théâtre-Français , mais elle n'a pas été
représentée ; | Essai sur la vie de T.
Wentworth. comte de Strafford, Lon-
dres, 1795, in-8°; Leipsick, 1796, in-8'';
Paris, 181i, in-8°; | Défense des émigrés
français, adressée au peuple français,
1797,* 2 vol. in-8° ; 2' édiUon , Paris , 1823 ,
in-S" ; I Lettre au rédacteur du Courrier
de Londres , sur le bref du pape aux évê-
gues français, 1801, in-8°; [ Lettre aux
rédacteurs du Journal de l'empire, 18H,
in-8°; réponse à un article de ce journal
où la mémoire du père de l'auteur avait
paru attaquée ; | Déclaration demandée
par M. Ferris, 1814, in-S" ; | Observa-
tions du marquis de Lally-Tollendal, pair
de France, sur la déclaration de j)lu~
sieurs pairs de France, publiée dans le
Moniteur du mardi 27 novembre 1821 ,
Paris , 1821 , in-S" ; elles eurent deux édi-
tions ; I Extrait de la défense des émi-
grés français, Paris, 1819, în-8°; [ Ob-
servations sur la nature de la propriété
LAL 2!
littéraire, présentées à la commission
nommée par le roi, pour l'examen pré-
paratoire au projet tendant à améliorer,
dans l'intérêt des gens de lettres et artis-
tes, la législation nouvelle sur le droit
des auteurs et de leu?'s héritiers, 1826 ,
in-8°, deux cdilions. Lally-Tollendal a
traduit des Oraisons de Cicéron, et a
fourni plusieurs articles à la Biographie
universelle, etc.
• LALUZERIVE(CÉSAn-GuiLLAUME de),
cardinal- évêque de Langres , pair de
France , naquit à Paris le 17 juillet 1738,
d'une ancienne famille de Normandie. Il
était allié par sa mère aux Lamoignons, et
fut d'abord chevalier de Malle ; mais il se
destina bientôt à l'état ecclésiastique , et
entra dans le séminaire de Saint-Ma-
ploire à Paris. Lo crédit de son grand-
père, le chancelier de Lamoignon , lui fit
obtenir de bonne heure plusieurs béné-
fices : nommé en 1734, chanoine in mino-
ribus de la cathédrale de Paris,. et deux
ans après abbé de Mortemer , il fit son
cours de théologie au collège de Navarre,
fut le premier de sa licence en 1762, et
deviiit grand-vicaire de M. Dillon , ré-
cemment appelé à occuper le siège ar-
chiépiscopal de Narbonne. La province
de Vienne dans laquelle il possédait la
chapelle de Notre-Dame de Pitié (Dio-
cèse de Grenoble ), le nomma en 1763,
agent du clergé; il s'acquitta avec xèle et
succès de cette place , difficile à celte épo-
que , à cause des contestations survenues
entre le clergé et les parlemens. De con-
cert avec M. de Cicé , son collègue, il pré-
senta requête au conseil dans le mois de
mars 1766 , contre le réquisitoire de M.
Castillon, avocat-général au parlement de
Provence , sur les actes du clergé. ( Voy.
les Jetés de la dernière assemblée du
clergé sur la 7'eligion vengée par le clergé
et par le roi, des attaques de M. de Cas-
tillon, 1767, in-12. ) Le conseil ordonna la
suppression du réquisitoire. En 1770,
l'abbé de Laluzerne succéda àM. deMont-
morin, mort cette même année dans l'é-
vêché de Langres, qui avait le titre de
duché-pairie. Il resta néanmoins cha-
noine honoraire de la métropole de Paris,
et assista à l'assemblée du clergé de celle
année, et à celle de 1775. Chargé d'un
grand diocèse , il partageait son temps
entre l'étude et les devoirs du ministère
pastoral. Il prononça en 1773 l'oraison
funèbre du roi de Sardaigne devant le
comte d'Artois, et l'année suivante, il
prononça dans la même église , celle de
9 LAL
Louis XV devant Monsieur. Il remit . er»
1782, son abbaye de Mortemer, et fut
nommé à celle de Bourgueil , au diocèse
d'Angers. Il publia d\v erses Ordonnance s
et Lettres ])ast07-ales dignes de son talent
et de ses vertus évangéliques. Laluzerna
fui appelé à l'assemblée des notables en
1787 ; il siégea l'année suivante dans la
dernière assemblée du clergé ; et en 1789,
il fut nommé aux états-généraux. S'étant
aperçu des suites qu'auraient les pre-
mières opérations du tiers-état , il pro-
posa que le clergé et la noblesse se réu-
nissent dans une chambre ; mais ce projet
fut rejeté par les trois ordres : Mirabeau
consacra trois lettres à ses commettans
pour réfuter le système de Laluzerna
qui était calqué sur les formes du gou-
vernement anglais. Cependant Laluzerne
fut le second des évèques qui présida
l'assemblée ; l'esprit qui y dominait ne
pouvait plaire à un si sage prélat ;
aussi, après les 5 et G octobre , il se retiia
dans son diocèse , où les novateurs ne le
laissèrent pas en repos. 11 adhéra à Yex^
position des principes des trente évéques,
refusa le 1" décembre 1790, de coopérer
à la suppression de son chapitre, et, le
20, il adi-essa aux administrateurs de la
Haute-Marne une lettre énergique qui
réclamait contre leurs arrêtés, et rendait
compte de ses principes. Il adressa encore
d'autres lettres non moins courageuses,
et qui combattaient les principes du jour,
savoir : aux officiers municipaux de Lan-
gres, sur son refus du serment civique ;
à M. Becquey, procureur général et syn-
dic du département, qui répliqua, el au-
quel le prélat fit une réponse victorieuse.
II publia aussi un Examen de l'instruc-
tion de V Assemblée natioyiale sur l'orga-
nisation prétendue civile du clergé; une
Instruction aux curés et aux autres prê-
tres de son diocèse quin^ avaient pas prêle
le serment (13 mars 1791), et qui fut
adoptée par Irente-trois évêques ; et une
Instruction pastorale sur le schisme de
France ( réimprimée à Langres en 1803),
où il parle à fond sur les principales ma-
tières contestées. Cette courageuse résis-
tance ne pouvait que redoubler les per-
sécutions. On le priva de son évêcbé;
bientôt il fut obligé de quitter la France.
Il se relira en Suisse, et se fixa à Con-^
stance. où il prêcha, le jour de Pâques
1795 , un sermon sur les causes de l'/n-
crédulité ( imprimé en 1818 ). Il séjourna
plusieurs années dans cette ville , et y ac-
cueillit les prêtres de son diocèse émigrés
LAL
240
LAL
comme lui. Il en avait toujours au moins
douze à sa table : pour remplir celte
œuvre de charité , il vendit jusqu'à ses
boucles d'or et sa croix épiscopale. S'é-
tant rendu en Autriche, au près de son
frère, CéSar-Henrl , qui demeurait à Ber-
neau, près de Wels , il y resta jusqu'à la
mort de cet ancien ministre de Louis
XVI, arrivée en 1799. Il passa en Italie,
et fixa son séjour à Venise, où il s'occupa
de la rédaction de ses nombreux ouvra-
ges. Les soins qu'il donnait aux prison-
niers français dans les hôpitaux lui firent
contracter une maladie grave dont il se
ressentit long-temps : il ne cessa de visi-
ter et de secourir six cents de ses com-
patriotes malheureux attaqués du typhus.
En 1801 , et à la demande du pape Pie
VII, il donna sa démission de son siège
de Langres et ne vint en France qu'en
4814, après la chute de Bonaparte. Son
passage par Langres fut un triomphe.
Lorsqu'il fut arrivé à Paris , le roi Louis
XVIII le nomma pair de France. Sur la
fin de la même année , Laluzerne fut un
des neuf évêqucs réunis en commission
pour délibérer sur les affaires de l'Eglise.
Lors du retour de Bonaparte en France,
il ne quitta point Paris , et ne fut pas in-
quiété. Après la seconde restauration,
ayant été présenté par le roi, il fut élevé
au cardinalat et reçut la barrette le 24
août 1817. Quoique Laluzerne eût pu,
comme d'autres anciens évêques, obtenir
un archevêché, il préféra son siège de
Langres; mais de nouvelles négociations
entamées avec la cour de Rome l'empê-
chèrent de se rendre à son diocèse. A
celte époque , il fut le seul prélat admis
dans le conseil des ministres , tenu pour
discuter le concordat -, peu de temps après,
le roi le nomma ministre d'élat. Il fit aussi
partie de l'assemblée que tinrent plusieurs
évêques au sujet de ce même concordat,
et signa les lettres qui furent adressées
au pape et au roi. On le croit auteur de
celle qui fut écrite à Louis XVIII, en
juin 1818, signée par plus de trente évo-
ques, qui y réclamaient l'exécution dudil
concordat. Il s'éleva, dans la chambre des
pairs, ainsi que trois autres évêques,
membres de la même chambre, par une
déclaration publique , le 10 mai 1819 ,
contre le refus de mentionner dans un
projet de loi la répression des outrages
faits à la religion. Au moisd'octobiel819,
il reçut le cordon bleu. Malgré son âge
avancé et ses infirmités , Laluzerne par
exercices de piété. Il se levait à quatre
heures du matin , et observait un régime
austère. Depuis long-temps , sa santé dé-
périssait. Attaqué d'une maladie qui a
durécinquante-cinqjours.et, «entant appro-
cher sa dernière heure , il réclama aussi-
tôt les secours de la religion , et les reçut
en présence de sa famille , à laquelle U
adressa une pieuse exhortation. Lalu-
zerne conserva toute sa présence d'esprit,
jusqu'au moment de sa mort , arrivée le
21 juin 1821, à l'âge de 83 ans. Son corps
a été scellé dans un cercueil de plomb et
déposé à côté de celui de l'abbé Legris-
Duval, dans un caveau de l'église des
Carmes de la rue Vaugirard. M. Corloi»
de Pressigny , archevêque de Besançon,
a prononcé à la chambre des pairs V éloge
de M. le cardinal de Laluzerne. Cet
éloge a été inséré dans le Moniteur du 2&
juillet 1821.... « A l'expérience des vieil-
» lards, dit VAmi de la religion et du roi^
» tom. 28, p. 232, il joignait la vivacité de
» la jeunesse et la piété la plus vraie; il
» pratiquait la vertu simplement ; aprè»
» avoir étonné par ses connaissances et sa
» mémoire les gens les plus instruits , il
» étonnait encore plus dans l'intimité par
» sa gaieté franche. Il aimait les enfans et
» en était aimé. Excellent ami, patriarche
» de sa famille , il fut constamment sujet
» fidèle, prélat attaché à ses devoirs, écri-
» vain laborieux , ^t défenseur zélé des
» principes de la religion et des droit*
n de l'Eglise. Il a rempli avec honneur
» une longue carrière, et laisse au dedans
» et au dehors de son diocèse le souvenir
» de ses qualités et de ses services. » On
a de lui : 1 Oraison funèbre de Charles^
Emmanuel III, roi de Sardaigne^ 1773,
in-4° et in-12 : 1 Oraison funèbre de Louis
Xy^ roi de France, 1774 , in-4° et in-12 ;
I Instruction pastorale sur l'excellence de
la religion, Langres, 15 avril 1786 , in-12 ^
ibid. , 1809 ; Paris, société typographique^
1810; Biaise et Potel, 1818; Lyon, Rusand,.
1810-1815 ; traduit en italien par Gio. Pro*
doscimo Zabeo, Venise, 1799, in-S"; ibid.»
Carli, 1810 ; | Institutions sur le rituel de
Langres, Besançon , Couché ( sans date ),
1786, in-4*; Paris, Méquignon fils aine,
1817, in-4°; | Examen de l'instruction de
V Assemblée nationale, sur l'organisation
prétendue civile du clergé, 1791, 70 pa-
ges ; I Considérations sur divers points de
la morale chrétienjie, Venise, Carti, 1799,.
5 volumes in-12; Lyon, 1816,4 volumes
in-i2; ] Explications des évangiles, dos
tageait son temps entre l'étude et les 1 dimanches et de quelques-unes des prinr
LAM
241
LAM
cipalc3 fêtes de l'année. 1807-1816 , 1822,
h vol. in-il;] Dissertations sur les églises
catholique et protestante . 1816, 2 vol.
ln-12 ; 1 Eclaircissemens sur l'amour pur
de Dieu, 1815, in-12, de 214 pages.
I Dissertation sur la loi naturelle, in-12;
{Dissertation sur la spiritualité de Vâme.
et sur la liberté de l'homme; | Consi-
dérations sur l'état ecclésiastique. Paris,
société typographique, 1810, in-12; \ Dis-
sertation sur l'instructio7i publique, V&ris,
d8i6, in 8°; 1 Sur la responsabilité des
ministres, 1816, in-8°; \ Projet de loi sur
les élections, ibid. , Egron, 1820, 2 feuil-
les. Laluzerne est auteur de beaucoup
d'autres ouvrages , parmi lesquels les
Dissertations imprimées à Langres , de
1802 à 1808 , chez Bournot , forment 11
tom. en 6 vol. in-12. Il a laissé en ma-
nuscrit un traité théologique sur le p7'ét
à intérêt, pouvant former 3 vol. in -8°,
et un traité concernant la supériorité des
évêques sur les prêtres. Ce prélat a fourni
en outre plusieurs articles aux journaux
intitulés : Le Conservateur et La Quoti-
dienne, dont le premier a cessé de pa-
raître en 1823. L'histoire ecclésiastique
le rangera parmi les défenseurs les plus
lélcs de la religion et du trône; les rai-
sonnemenssans réplique répandus dans
ses écrits , sont présentés avec chaleur,
avec force, avec onction, dans un style
attrayant , et ont produit dans le clergé
français les effets les plus salutaires.
Le cardinal de Laluxerne avait deux frè-
res, César-Hexri qui fut ministre de la
marine sous Louis XVI , et Anne-Césau
qui fut ambassadeur à la cour de Londres.
LAMARCHE ( Jeaiv - Fraivçois ) , jé-
suite, né en Bretagne en 1700, s'est dis-
tingué par des ouvrages dont la justesse
et la solidité font le principal mérite ; tels
sont : la Foi justifiée de tous reproches de
contradiction, 1762, in-K'i,; Instructions
dogm.aliques sur les indulgences , 1751,
in-12. On a encore de lui un Discours
sur la géométrie. Il mourut en 1703.
• LAMARCK. ( Jean-Baptiste-Pierre-
A-NToiNE de MONET, chevalier de ), qu'on
J)0urrait surnommer le Linnée français,
membre de l'académie des sciences, pro-
fesseur au Jardin des Plantes , naquit le
i" août 1744, à Bazentin en Picardie,
d'une famille noble fort ancienne. Destiné
d'abord à l'état ecclésiastique , il quitta le
séminaire à la mort de son père , et entra
au service à l'âge de dix-sept ans dans
le régiment de Beaujolais, avec lequel il
fit la guerre de sept ans. Sa conduite à la
7.
journée de Filinghausen ( 16 juillet 1761 )
fut si brillante , que le général en chef ,1e
maréchal de Broglie , le nomma officier
sur le champ de bataille, malgré les ordres
du duc de Choiseul , minisire de la guerre
qui avait enjoint de ne faire aucune pro-
motion. Son grade lui fut confirmé ; mais
un accident grave qui lui survint , tandis
qu'il était en garnison à Toulon, l'obligea
de venir se faire traiter à Paris , et le
porta même à renoncer au service en
1765. La médecine occupa alors son atlen-t
tion et il l'éludia pendant quatre ans ,
pour se créer par elle des ressources qu'il
ne trouvait pas dans «a fortune qui était
très médiocre. lU' abandonna ensuite pour
la botanique , et la Flore-Française fut le
résultat de ses travaux. Cet important ou-
vrage ayant reçu de l'académie française
la plus brillante approbation , le gouver-
nement , à la sollicitation de Buffon, le fit
imprimer à ses frais , en 1778. Lamarck
déclara avec franchise que M. Haliy avait
donné. à son style le fini et l'élégance qui
lui manquaient. Buffon chargea aussi
Daubenton de composer pour ce livre un
Discours préliminaire, où seraient expo-
sées les idées de l'auteur. En 1781, Lamarck
fut commissionné comme botaniste par le
gouvernement , et parcourut successive-
ment les Pays-Bas , la Hollande, la Prusse,
l'Allemagne, la Hongrie, etc., pour en
visiter les musées , les jardins botaniques,
et spécialement les mines ; il visita sur-
tout avec un soin particulier les mines de
Chemnilz , illustrées par les beaux ou-
vrages d'Agricola , et celles du Hartz que
les découvertes de Werner ont rendues
célèbres. Lorsqu'il fut de retour à Paris ,
J.-J. Rousseau l'admit à ses herborisa-
tions , et il s'occupa de rédiger la partie
botanique de l'Encyclopédie méthodique ,
publiée parPanckoucke. Son premier de-
mi volume parut en 1783, et le second en
1788. Des difficultés s' étant élevées entre
l'auteur et l'éditeur, ce fut M. Poirct qui,
long-temps après, termina l'ouvrage. La-
marck fut adjoint , en 1788 , à Daubenton,
dans la garde du cabinet du roi , sous la
titre de conservateur des herbiers, ci
nommé sous-démonstrateur. Il passa, avec
assez de sécurité, le règne de la terreurr
et, dès que le calme parut revenir, il pro-.
posa un projet d'organisation du Muséum,
qui avait pour but de soustraire ce corps
enseignant à l'autorité d'un chef unique ,
en même temps qu'à la domination des
médecins; son projet , d'abord froîdemeut
accueilli, fut ensuite largement mis à
21
LAM
^L%
LAM
contribution, quand on rédigea le décret
d'institution du Muséum qui parut en
1793. Desfontaines , professeur de bota-
nique dès le temps de Buffon , fut main-
tenu dans son poste. La cbaire de bota-
nique rurale avait été donnée à Antoine
de Jussieu , fils du célèbre Bernard de
Jussieu, de sorte que pour placer La-
marck, ou ne trouva d'autre expédient
que de partager l'enseignement de la
toologie : Géoffroy-Saint-Hilaire eut la
partie des animaux vertébrés, et la classe
des animaux invertébrés, dont l'étude
étoit presque dédaignée, échut à La-
marck. Il était lui-même étranger à cette
partie de la science ; mais telles furent la
persévérance et la sagacité qu'il apporta
dans ses études nouvelles , et l'habileté de
ses laborieuses investigations, qu'au bout
d'un an il fut en état de faire son cours, et
qu'on lui dut plus tard sur la matière un
des meilleurs ouvrages de l'histoire natu-
relle moderne, je veux parler du Traité
des animaux invertébrés, dont le premier
volume parut en 1815. Lamarck s'était
aussi occupé de météorologie, et, dès
d778, il avait soumis à ce sujet des obser-
vations à l'académie des sciences qui lui
avait donné des encouragemens. Dominé
par cette idée que la lune exerçait une ac-
tion bien marquée sur notre atmosphère,
qu'elle amenait les changemens de temps,
et qu'ainsi en combinant ses phases avec
ses différens degrés d'éloignement de la
terre et son obliquité, il n'était point im-
possible de prédire , avec quelque préci-
sion, les changemens de temps , il com-
mença à publier son Annuaire météoro-
logique, auquel il dut bientôt renoncer (i).
la physique et la chimie prirent une part
de son temps , et il donna ses Recherches
sur les causes des principaux faits phy-
siquesoùVon trouve des idées singulières,
qui ont eu très peu de partisans , et que
nous ne pouvons suivre et relever ici.
Lamarck devint aveugle, dans ses der-
nières années , par suite d'une cataracte
qui, dès 1818, l'avait obligé de se faire
remplacer dans sa chaire de zoologie par
Latreille («oyez LATREILLE). Il se ren-
dait néanmoins assidûment aux séances de
l'académie , pour y recevoir son jeton de
(i) On «lU dire 2t K»polcon qii'vn membre de l'în-
-.titul composait dcf Almanachi , et qiie celte cireoo-
il«oce pouvait jeter de U deconsidc'ralion lur le cnrpi.
L'empereur eo fil dei reprochet à l'Aittcur, dam une
teceptioD Je l'institut, et VAnniiaiu mileorologique
cciM de p4raî;rt.
présWice , auquel l'état de sa fortune qu'iï
avait négligée, ne lui permettait pas de
renoncer. L'académie décida, en 1825,
sur la proposition de Fouricr, qu'il en
jouirait quoique absent. Le chevalier de
Lamarck est mort à Paris, le 19 décembre
1829, laissant les ouvrages dont les litres
suivent : [ Flore française ou Description
succincte de toutes les jjlantes gui crois-
sent en France, Paris, 1778, 3 vol. in-S";
ibid., 1795 ; nouvelle édition , par MM.
de Lamarck et Decandolle , Paris, 1805,
5 vol. in-S"; | Annuaire météorologique
pour Van 8 de la république française ,
Paris, 1799-1810, in-12. Il n'a paru que
onze numéros de ce recueil ; | Hydrœolo-
gie, Varis, 1801, in-S"; traduit en alle-
mand, parWrede, Berlin, 180S, in-S" ;
I Recherches sur les causes des princi-
paux faits physiques, Paris, 1801, 2 vol.
in-8°; | Système des animaux sans ver-
tèbres, Paris, 1801, un vol. in-8°; traduit
en allemand, par Froriep, sous le titre de :
I Nouveau système de conchyliologie de
Lamarck, Weimar, 1807, in-S" ; \ Re-
cherches sur l'organisation des corps vi-
vans , particidièrement sur leur origine ,
sur la cause de leur développement, des
progrès de leur composition et celle qui
amène la mort, Paris , 1802, in-8° ; | Phi-
losophie zoologique, Paris, 1809, 2 vol.
in-8°; | Extrait des cours de zoologie sur
les animaux sans vertèbres, Paris , 18 1 2,
in-8°; Système analytique des connais-
sances positives de l'homme , Paris, iMQ\.
in-S" ; I Histoire naturelle des animaux
saJis vertèbres, Paris, 1818-1822, 7 voL
in-S** ; 1 Histoire naturelle des végétaux-
classes par familles , Paris, 1802 et 1826,
15 vol. in-18. Les deux premiers volume*
seulement sont de Lamarck; les treize der-
niers sont de M. Brisseau-Mirbel. Lamarck:
est encore auteur des premiers volume*
du Dictionnaire de botanique , et des II-
lustrationes generum , faisant partie de-
l'Encyclopédie méthodique. On a encore
de lui plusieurs mémoires insérés parmi
ceux de l'académie des sciences , et dw
muséum d'histoire naturelle , et il a coo-
péré au Journal de physique, ainsi qu'au
Journal d'histoire naturelle, qui com-
mença en 1772 , et n'eut que deux vo-
lumes. On a voulu donner les noms de
Monetia et de Lamarckea à des plante»
qui ne les ont point retenus , à l'excep-
tion d'une graminéo auquel Manch &
donné le second de ces deux noms.
LAMARE. Voyez MAUE.
LAM ARQUE ( le comte Maximiliem),
LAM
243
îîculenanl-général, graml-officier de la
légion d'honneur, chevalier de Saint-
liouis, fils d'un membre de l'assemblée
Constituante, né à St.-Sever, département
des Landes, le 21 juillet 1770, s'enrôla
comme simple soldat en 1792, et devint
au bout de quelques mois , capitaine des
grenadiers de Latour d'Auvergne, Il fit
la campagne de 1793 , à l'armée des Py-
rénées-Orientales, et reçut deux blessures
graves en arrêtant, le 3 février, une co-
lonne espagnole avec une seule compa-
gnie. Plus tard, il s'empara de Fontarabie
à la tête de 200 grenadiers , fait d'armes
qui lui valut le grade d'adjudant-général.
Employé depuis aux armées d'Angleterre
et du Rhin , il fut nommé général de bri-
gade en 1801, et se distingua en cette
qualité à la bataille de Hohenlinden.
Après la paix de Lunéville , il commanda
une division sous les ordres de Leclerc ;
fit la campagne d'Allemagne de 1805 , et
rejoignit ensuite les troupes qui mar-
chaient sur Naples. Dans ce voyage du
Nord au Midi il se vit exposé plusieurs
fois à de grands dangers , surtout en tra-
versant les montagnes du Tyrol et les
frontières du royaume de Naples , où il
fut attaqué par 50 brigands , que comman-
dait le fameux Fra-Diavolo. L'armée fran-
çaise ouvrit la campagne de Naples , par
le siège de Gaète où Lainarque se fit re-
marquer. Chargé en 1807 de réduire les
insurgés calabrois , il prit d'assaut Came-
rotta , battit près de Marattica 1200 an-
glais qui étaient débarqués pour soutenir
l'insurrection, obligea la ville de capituler,
et fit 1200 prisonniers. Ces brillans ser-
vices lui valurent le grade de général de
division. Le roi Joseph le nomma son
thef d'étal-major ; Joachim , qui succéda
à Joseph sur le trône de Naples , chargea
Lamarque de prendre Caprée , où com-
mandait sirHudson-Low^e, celui-là même
qui depuis s'est fait à Sainte-Hélène un
autre genre de célébrité. Lamarque partit
avec 1800 hommes d'élite , et , après des
prodiges d'audace et de valeur, força les
assiégés à capituler. Salicetti , ministre de
Naples, disait en parlant de Caprée:
« J'y ai trouvé les Français, mais je ne puis
» pas croire qu'ils y soient entrés. » Après
cette brillante expédition , que Napoléon
lui-même admira , Lamarque fut appelé
dans la haute Italie où il eut le com-
mandement d'une division dans l'armée
du vice-roi. Il se distingua dans cette nou-
velle campagne à Villa -Nova, sur les
bords de laPiave, à Laybach,àEi!ccu-
LAM
à Wanram , où il eut quatre che-
dorfcn
vaux tués sous lui. C'est dans celte cam-
pagne que Napoléon le nomma grand-of-
ficier de la légion -d'honneur. Après la
journée de Wagtam, le général Lamar-
que fut envoyé à Anvers, où il rendit de
nouveaux services. Employé en 1812 dans
la campagne de Russie , il fut rappelé en-
suite en Espagne, et pendant trois ans
de périls et de succès il fit preuve de dés«
intéressement et d'humanité. Rentré en
France après la première restauration ,
Lamarque fut nommé chevalier de St.-
Louis le 27 juillet 1814. Au retour de l'ile
d'Elbe , Napoléon lui donna successive-
ment le commandement de Paris et celui
d'une forte division sur les frontières de
la Belgique; et enfin, dans le mois de
mai , il fut nommé général en chef de
l'artnée de la yendée. Il débuta par pren-
dre des mesures sévères contre les pa-
rens des royalistes vendéens; mais, dans
le cours de cette campagne , il se montra
généreux autant qu'habile; plus jaloux
d'épargner les Vendéens que de les dé-
truire , il leur écrivait le 9 juin : « Je ne
» rougis pas de vous demander la paix ;
» car , dans les guerres civiles , la seule
» gloire est de les terminer.» Après avoir
obtenu quelques succès à Laroche-Ser-
vière , il réussit à opérer une pacifica-
tion dont les articles fuirent signés !» Chol-
Iet,le 26 juin 1813. Le lendemain rSM.
Duchesne et Duperat vinrent lui porter
de la part de MM. de Sapinaud et La Ro-
chejaquelein , le vœu unanime des Ven-
déens de se réunir à ses troupes et de
combattre sous ses ordres comme fran-
çais , pour s'opposer à toute tentative des
puissances qui aurait pour but le démem-
brement de la France. Après le retour du
roi, le général Lamarque fut compris
dans la seconde liste de l'ordonnance du
26 juillet, et se retira d'abord à St.-Sever,
sous la surveillance du ministre de la po-
lice. Il se réfugia ensuite à Bruxelles où
le roi Guillaume lui fit im accueil distin-
gué : le prince d'Orange s'entretenait
avec lui dans les jardins de Tervuren.
Rappelé en France en 1820, le général
Lamarque habita Paris et se livra dès
lors à la culture des lettres- Il publia
quelques brochures qui furent remar-
quées. Il fit paraître d'abord un ouvrage
sur la nécessité d'une armée perma-
nente, avec un projet d'une organisa-
tion d'infanterie plus économique que
relie qui avait été adoptée jusqu'a-
lors En 1825 , il donna un mémoire sur
LAM 2
tes avantages d'un canal de navigation
parallèle à VJdour^ considéré sous les
rapports agricole^ commercial et mili-
taire^ Paris , in-8° , et en 1826 il publia
une brochure sous ce titre : de l'Esprit
militaire en France j, des causes qui con-
tribuent à l'éteindre ^ de la nécessité et des
moyens de le ranimer^ Paris, in-8°; 2' édit.,
même année et même format. En 1829, La-
inar({ae fut élu à la chambre des députés
par le département des Landes. Il siégea
BU côté gauche , et partagea l'exaltation
fle ceux de ses collègues qui occupaient
le même banc; il prit la parole dans
presque toutes les questions importantes
qui s'agitèrent à la tribune , et défendit
les intérêts de ses anciens compagnons
d'armes , en faveur desquels il réclama
constamment l'attention du gouverne-
ment. Il a traité la plupart des questions
d'administration militaire , avec la jus-
tesse et la clarté que l'on devait atten-
dre d'un orateur habile et d'un savant
militaire. Le général Lamarque a rendu
un éclatant hommage à la campagne de
1823, qui fut dirigée, selon ses expressions,
par Mgr. le Dauphin , « avec une habileté
» et une prudence admirables. » Quelque
temps après la révolution de 1830, il fui
de nouveau envoyé dans les départemens
de l'Ouest; mais il commençait à peine
des opérations dont on se promettait d'heu-
reux succès, qu'il fut rappelé et réformé.
Depuis cette époque, il se livra exclusi-
vement à ses fonctions de député. Il sié-
geait pour la quatrième fois à la cham-
bre, lorsqu'il mourut à Paris , le 3 juin
4832. Ses obsèques eurent lieu le 5 juin.
I.e convoi se composait d'une foule im-
mense ; le maréchal Clauzel au nom de
l'armée, M. Mauguin au nom de la cham-
bre des Députés et le général Lafayette
prononcèrent des discours sur sa tombe;
le général polonais Uminski, le nonce
telewel, le général portugais Saldanha,
rendirent hommage au défenseur de leur
cause. Mais un tumulte inattendu trou-
bla cette fête funèbre. Le bonnet rouge
fut arboré, et pendant deux jours la capi-
tale fut ensanglantée. La postérité re-
tranchera sans doute quelque chose aux
éloges donnés au général Lamarque
comme orateur. On lui a reproché de
viser trop souvent à l'effet , et chei lui
l'homme politique valait mieux que l'é-
crivain. Il a du reste dans sa vie militaire
assez de titres qui le recommandent à l'es-
time de la postérité. Le général Lamarque
a été un des rédacteurs du Journal des
Ut. LA3i
sciences militaires ^ et un des collabora-
teurs de \ Encyclopédie moderne , pu-
bliée par M. Courtin : il a fourni à cet
ouvrage les articles Armée ^ Bataille,
Combat s qui ont été imprimés séparé-
ment.
• LAMARTILLIERE (N..., comte de )
général d'artillerie et pair de France , né
en 1732, entra au service en 1757, en
qualité de sous-lieutenant d'artillerie , fit
la guerre de sept ans, et fut ensuite en-
voyé à la Guadeloupe. En 1789 il était de
retour en France , et fut nommé colonel
dans son arme. Il fit les premières campa-
gnes de la révolution , et obtint le grade
de maréchal-de-camp. Chargé du com-
mandement de l'artillerie à l'armée des
Pyrénées orientales,, il concourut à la
conservation do Perpignan, dirigea avec
habileté la défense du fort Bellegarde,
et fut blessé du même coup qui , le 17
novembre 1794, fit périr le général Du-
gommier ( Voyez DUGOMMIER ). Il con-
tribua aussi à la prise du fort la Trinité
et de la citadelle de Roses. Ses succès lui
valurent le grade de général de division ;
il continua à se signaler dans les armées de
Rhin-et-Moselle , d'Allemagne et d'Italie ,
fut nommé sénateur en 1802 , et reçut en
180o la sénalorerie d'Agen. Louis XVIII
le nomma pair de France et .l'appela au
conseil de perfectionnement et d'inspec-
tion de l'école polytechnique. Le général
Lamartillière est mort en 1819 , âgé de 87
ans. Il avait acquis la réputation d'un
des plus savans et des plus habiles offi-
ciers de son arme. On a de lui les ouvrages
suivans : | Recherches sur les meilleurs
effets à obtenir de l'artillerie j, 1812, 2
vol. in-S"; | Réflexions sur la fabrication
en général des bouches à feu, Paris,
1817, in-8"*. Ces ouvrages sont très es-
timés.
* LAMARTINE aîné ( N.... de ), né à
Mâcon, en l'an 1750, mort dans celte
ville en 1827, servit quelques années dans
les chevau-légers de la maison du rci ,
se relira de bonne heure du service et se
livra à l'étude des sciences.Chimiste, phy-
sicien , agronome , il possédait aussi l'his*
toire , et était surtout curieux d'antiqui-
tés. La révolution le surprit au milieu
de ses paisibles occupations : persécuté ,
et emprisonné avec toute sa famille , il
soutint ces épreuves avec courage et re-
prit ses études en recouvrant sa liberté.
Il était correspondant de la société ipoyale
des antiquaires de France, et il a en-
richi le recueil de cette société d'ua
LAM
Siîi
LAIVÏ
ïTicmoîre sur ua sépulcre suh ascia ,
trouvé à Mâcon le 21 juillet 1814 ( toiïie
premier, 1817) et d'un autre mémoire
sur quelques médailles. Les cahiers des
académies de Mâcon et de Lyon contien-
nent aussi plusieurs de ses productions.
Lamartine appartenait à la même famille
<iue le poète de ce nom qui illustre au-
jourd'hui notre littérature.
• LAMB (lady Caroline) , fille de lord
Ponsonby comte de Berborough , née en
1785, épousa l'an 1805, à l'âge de 20
ans, William Lamb, depuis lord Mel-
bourne, et mourut d'hydropisie le 27
janvier 1828. Ce qui l'a rendue célèbre ,
ce sont ses liaisons avec lord Byron : il
paraît que le commerce d'inl imité qui
s'établit entre cette femme spirituelle , et
le dernier, peut-être le plus grand poète
de la Grande-Bretagne , dura trois ans ,
après lesquels celui-ci la délaissa. Alors
lady Lamb publia un premier roman ^ in-
titulé Glenarvon^ dans le héros duquel
le public a reconnu généralement lord
Byron. Elle en a publié deux autres qui
ont pour litre, Graham^ Hamilion et
Jda Rcis. Ses ouvrages sont pleins d'i-
magination et d'originalité ; mais ils sont
remplis d'invraisemblance souvent ex-
travagante. Lady Lamb connaissait le la-
tin , le grec et plusieurs langues vivantes :
«lie aimait la littérature avec passion.
*LAMBALLE ( Marie-Tbérèse-Louise
de SAVOIE-CARÏGNAN, princesse de )
née à Turin, le 8 septembre 1749, fille
de Louis-Victor-Amédée- Joseph, prince
de Carignan , et de Catherine Henriette ,
princesse de Hesse-Rinfeld-Rottembourg,
femme douée d'éminentes vertus, épousa,
à l'âge de seize ans , Louis-Alexandre-Jo-
seph-Stanislas de Bourbon -Penthièvre,
prince de Lamballc, dont elle devint
lîicntôt après veuve sans enavoir eu d'en-
fans. Ce prince était mort à 20 ans , en
1708, au milieu de ses débauches. Malheu-
rexise pendant son court mariage, elle
s'était liée de bonne heure avec la reine
Marie-Antoinette , et ces deux princesses
se confiaient leurs chagrins mutuels ; car
la reine prévoyait les malheurs de la ré-
volution française, et en était effrayée.
Sa place de surintendanle de la maison
de Marie-Antoinette la mettait continuel-
lement en relation avec toute la cour, dont
elle était l'ornement par ses grâces et par
sa Leauté. Aux premiers troubles qui
agitèrent Paris , la reine craignant pour
la sûreté de son amie , l'engagea à partir
pour l'Angleterre; mais la princesse de
Lamballc ne consentit qu'avec la plus
grande peine à cette triste séparation :
les uns disent qu'elle ne s'y décida que
lorsqu'elle eut été informée du dé par
prochain du roi pour Varennes ; les au-
tres prétendent qu'elle ne fut pas mise
dans cette confidence. Cependant elle
partit le même jour, 20 juin 1791 pour
Dieppe , d'où elle s'embarqua pour l'An-
gleterre; elle y fut accueillie avec tous
les égards dus au malheur et à la beauté.
Elle eût* pu traverser, sur cette terre
hospitalière, l'époque de notre révolu-
tion. Mais lorsqu'elle ^t appris que
Louis XVI avait été ramené à Paris, et
qu'il avait accepté la constitution, dès
lors elle voulut revenir en France par-
tager les dangers de la famille royale.
Elle devint la compagne inséparable de
Marie-Antoinette , et lorsque la reine fut
arrêtée, elle la suivit dans sa prison du
Temple (13 août 1792). Elle n'y passa que
quelques jours. Arrachée de la tour le 19
août, et conduite à la prison de la Force,
à l'instant où l'on préparait les massa-
cres , dans lesquels la commune de Paris
avait résolu de la comprendre, on lui an-
nonça , le 3 septembre au matin , lorsque
déjà le sang ruisselait à grands flots aux
portes de la prison, qu'elle allait être trans-
férée à l'Abbaye. Elle répondit qu'elle ai-
mait autant demeurer dans cette prison
que d'aller dans une autre ; mais un garde
national, s'approchant de son lit , lui dit
avec dureté que sa vie dépendait de son
obéissance.Un grand mouvement se mani-
festait alors dans sa prison ; mais les cris
des mourans ne pouvaient encore pénétrer
jusqu'à la chambre de madame de Lam-
ballc. Ce mouvement, et surtout la ter-
reur empreinte sur les visages, lui inspi-
rèrent un tel effroi, qu'elle demanda quel-
ques instans pour reprendre ses esprits
et s'habiller. Appelant ensuite le garde
national pour lui donner le bras , elle fut
conduite au tribunal de sang, où sié-
geaient Hébert , Lhuillier et Cheppy, re-
vêtus de leur écharpe municipale, et as-
sistés des bourreaux qui, les mains , Je
visage et les habits teints de sang , atten-
daient impatiemment les victimes. A la
vue de cette horrible assemblée , et aux
cris des malheureux qu'on égorgeait tout
près de là, la princesse s'évanouit; dès
qu'elle eut repris connaissance , on lui
demanda son nom et ses qualités, et si
elle avait eu connaissance des complots de
la cour avant le 10 août. On lui adressa
plusieurs questions sur la reine. « Hélas l
Si.
LAM
246
LAM
• s'écria l elle , je n'ai rien à répondre.
» Mourir un peu plus tôt , un peu plus
» lard , m'est indifférent. Je suis toute
» préparée. » — Oh! dit le président, elle
» refuse de répondre; à l'abbaye! » —
Ce mot était l'arrêt de mort des prison-
niers de la Force , comme le mot à la
force était l'arrêt de mort des prison-
niers de l'Abbaye. On entraîna aussitôt
'infortunée hors des guichets, et à peine
eut-elle passé le seuil de la porte qu'elle
reçut un coup de sabre sur le derrière de
la tète. Plusieurs voix s'élevèrent dans la
loule , qui demandèrent grâce ! grâce !
mais un infâme soldat la terrassa d'un
coup de massue. Son corps devint en-
suite l'objet des outrages les plus san-
glans ; on en sépara la tête ; on lui ouvrit
le sein ; son cœur fut arraché , et mis au
bout d'un croc de fer. Aussitôt se forme
un horrible cortège. Cette tête , à qui la
mort n'avait point encore enlevé toute
son expression, est placée sur une pique,
et le cœur sanglant est trainé dans les
ruisseaux ; un fifre et un tambour précè-
dent les assassins, qui, après avoir par-
couru divers quartiers de Paris, passent
devant l'hôtel de Toulouse (aujourd'hui la
Banque de France ) , lieu de la résidence
de madame de Lamballe, font le tour
du jardin du Palais-Royal , et portent l'é-
pouvantable trophée au Temple , sous les
yeux de la reine, que les monstres appel-
lent à grands cris pour la rendre témoin
de cette scène d'horreur. Belle , douce ,
obligeante , d'une verlu sans tache , sans
intrigue, et modérée au sein de la fa-
veur, madame de Lamballe ne demanda
jamais rien pour elle-même. Une fureur
aveugle versa son sang , car elle n'avait
point d'enne,mis ; aucune vengeance per-
sonnelle ne s'attachait à elle : on regor-
gea sans la haïr. Celait le cœur de Ma-
rie-Antoinette qu'on voulait atteindre,
en perçant celui de son amie la plus
chère. Ce qui prouve à quel point ma-
dame de Lamballe était respectée , c'est
que ceux-là même qui la firent assassiner
n'osèrent jamais dans leurs libelles calom-
nier sa mémoire. On a publié en 1826
chez Treultel et "Wurtz un ouvrage très
curieux et plein de détails ignorés jus-
qu'ici : on l'a dit rédigé d'après des notes
autographes de la princesse elle-même;
mais l'authenticité en a été contestée par
de grands personnages. Nous nous bor-
nerons à en indiquer le titre : Mémoires
relatifs à la famille royale de France
jtendant la, révolution^ publiés pour la
première fois j d'après lejoumaL les let-
tres et les entretiens de la princesse de
Lamballe, par une dame de qualité { ma-
dame Catherine Hyde , marquise Govion
Broglio Solari ), attachée au service con-
fidentiel de cette infortunée princesse,
Paris, 2 vol. in- 8*.
LAMBECIUS ( Pierre ), célèbre bi-
bliographe allemand , né à Hambourg en
1628 , fit des progrès si rapides dans la lit-
térature , qu'à l'âge de 19 ans , il publia
ses savantes Remarques sur Aulu-Gelle.
Des voyages dans les différentes contrées
de l'Europe répandirent son nom et aug-
mentèrent ses connaissances. De retour
à Hambourg , il fut nommé , en 16S2 ,
professeur d'histoire , et en 1664 , recteur
du collège. Deux ans après, il épousa
une femme riche, mais vieille, avare
et acariâtre. Ne pouvant plus vivre avec
cette furie , il passa à Rome , où il em-
brassa publiquement la religion catholi-
que. Là , le pape Alexandre VII et la reine
Christine lui firent un sort heureux. Il
oublia aisément sa patrie, où l'envie,
après avoir critiqué ses études et ses ou-
vrages , l'avait accusé d'être hérétique et
même athée. Il devint ensuite bibliothé-
caire, conseiller et historiographe de
l'empereur , et mourut dans ce poste à
Vienne, en 1680, à 52 ans. Les ouvrages
qui honorent sa mémoire sont : | Origines
Hamburgenses ab anno 808 (urbis con-
dilae epochâ)a£f ffnnMml292, Hambourg,
2 vol. in-i", 1632-1661 ; et in-fol., 1706 et
1710, ouvrage chargé d'érudition. Lam-
bedus promettait à cet ouvrage une con-
tinuation , qu'on n'a pas trouvée dans ses
papiers. | Animadversiones ad Codini
Origines Constantinopolitanas^ très sa-
vantes , Paris , 1655, in-fol. ; j Commenta'
riorum de bibliotheca cœsarea vindobo-
nensilibri VIII, 1665-79, 8 vol. in-fol. C'est
un catalogue savant des manuscrits de la
bibliothèque de l'empereur. Il faut join-
dre à cet ouvrage le Supplément de Da-
niel de Nessel, 1690 , 2 vol. in-fol. ; | Pro-
dromus historiée litterariœ, et Iter Gel-
lense, ouvrage posthume, publié en 1710,
in-fol., par Jean- Albert Fabricius.
LAMBERT ( saint ) , né vers l'an 640 ,
évêque de Maestricht , sa patrie , succéda,
vers 670 , à Théodoret son maître , et fut
chassé de son siège après la mort de Chil-
déric II, roi d'Austrasie, l'an 674, par le
barbare Ebroïn , qui mourut 7 ans après,
Lambert, qui s'était réfugié danslemo-
nastère de Stavelo, fut rétabli sur le
trône épiscopal par Pcpin d'Héristal l'an
LAM
247
LAM
681 : il coavertit un grand nombre d'in-
fidèles de la Toxandrie , adoucit leur fé-
rocité , et fut tué en 709 par Dodon ( sui-
vant les Bollandistes , et en 696 ou 697
selon d'autres) , à cause de la liberté avec
laquelle il reprit Pépin d'Héristal, qui
menait une vie scandaleuse avec Alpaïs.
Dodon était parent de cette concubine.
D'autres attribuent sa mort à une cause
différente ; ils prétendent que deux ne-
veux de l'évêque ayant assassiné deux
frères de Dodon , celui-ci se vengea par
ce meurtre d'un crime auquel cependant
Lambert était étranger. Son martyre ar-
riva à Liège , qui n'était qu'un petit vil-
lage , et qui devint par cet événement
une ville considérable , la dévotion des
fidèles y ayant attiré beaucoup de peu-
ples. Saint Hubert fut son sviccesseur. La
Bibliothèque historique de France , t. 1 ,
«° 8746-8760 , indique li vies de ce pré-
lat. — Il y a eu deux autres saints du nom
de Lambert, l'un archevêque de Lyon,
mort en 668; l'autre évêque de Vence,
mort en 1114. Voyez la Vie des saints.
LAMBERT, empereur et roi d'Italie,
était fils de Gui, duc de Spolette, auquel
il succéda en 894 après avoir été associé
au pouvoir en 892. Il eut pour compéti-
teurs Bérenger et Arnolphe; mais il re-
couvra sur eux Milan et une partie de la
Lombardie ; il finit par s'entendre avec
Bérenger, et mourut d'une chute de che-
val, qu'il fit à la chasse en 898. Ce prince
donnait les plus belles espérances, qu'il
aurait sans doute réalisées s'il eût régné
plus long-temps.
LAMBERT D'ASCHAFFENBOURG cé-
lèbre bénédictin de l'abbaye d'Hirchfel-
den, en 10o8, entreprit le voyage de Jéru-
salem. De retour en Europe , il composa
une CAroni^rue depuis Adam jusqu'en 1077.
Cette chronique n'est qu'un mauvais abré-
gé jusqu'à l'an 1050 ; mais depuis lOSO jus-
qu'en 1077, c'est une histoire d'Allemagne
d'une juste étendue. Ce monument fut im-
primé à Bâle en 1669, in-fol. , avec celui
de Conrad de Lichtenau , et dans le pre-
mier volume des Ecrivains d'Allemagne
de Pistorius. Un moine d'Erfurt en a
donné une continuation jusqu'à l'an 1472,
mais elle est peu estimée. Cette continua-
lion se trouve aussi dans le Recueil de
Pistorius.
LAMBERT , évêque d'Arras , né à Guî-
nes , se distingua tellement par la prédi-
cation pendant qu'il était chanoine de
Lille, que les Artésiens, désirant sépa-
rer leur église de celle de Cambrai, à
laquelle elle élait unie depuis îJOO ans »
l'élurent pour leur évêque en 1112. Ur-
bain II confirma cette élection , et sacra
le nouvel évêque à Rome , malgré les op-
positions des Cambraisiens. Lambert as-
sista à quelques conciles , et mourut en
1115. Il fut enterré dans sa cathédrale, où
on lui mit une épitaphe qui annonce, que
« la sainte Vierge était apparue à Lam-
» bert , et lui avait donné un cierge qui
« avait la vertu de guérir du mal des ar-
» dens , alors si commun en France. » On
a , dans les Miscellanea de Baluze , un
Recueil de chartes et de lettres concer-
nant l'évêché d'Arras, et qui est attribué
à Lambert.
LAMBERT, surnommé Begh ou le
Bègue j à cause de la difficulté de sa pro-
nonciation, mourut l'an 1177, à son retour
de Rome, où Raoul, évêque de Liège,
l'avait envoyé. Ce fut lui qui institua les
béguines des Pays-Bas ; établissement fort
répandu dans ces provinces , et qui est
de la plus grande utilité à la religion et à
la société , en assurant à une multitude
de filles les moyens de vivre vertueuse-
ment, sans leur ôter la liberté de rentrer
dans le monde. Plusieurs auteurs attri-
buent l'institution des béguines à sainte
Bègue ; on peut voir les raisons de cette
attribution dans la Diplomat. belgica de
Foppens, tom. 2, pag. 948.
LAMBERT ( Fkaxçois ),cordelier d'A-
vignon , où il naquit en 1487, quitta son
couvent en 1522 pour prêcher le luthé-
ranisme, et surtout pour avoir une femme.
Luther en fit son apôtre dans la Suisse et
en Allemagne, et lui procura la place de
premier professeur de théologie à Mar-
purg. Il y mourut de la peste en 1530,
après avoir publié : [ deux Ecrits . l'un
pour justifier son apostasie, et l'autre
pour décrier son ordre , 1523 , in-8". Le
premier a été réimprimé avec plusieurs
de ses Lettres et de ses Questions théolo-
giques, dans les Amœnitates litterariœ de
Selhorn ; des Commentaires sur saint Luc,
sur le mariage, sur le Cantique des can-
tiques, sur les petits Prophètes et sur l'A-
pocalypse, in-8°; un Traité renfermant
plusieurs discussions théologiques , sous
le titre assez juste de Farrago . in-8°. Ce
moine apostat se déguisa long-temps sous
le nom de Johannes Serranus, Jean de
Serres. Ses écrits sont aussi bouffis d'em-
portement que vides de raison. Il était
contemporain du trop fameux Zvringle,
avec lequel il eut plusieurs conférences
sur divers points de doctrine. La liste
LAM
2/1-8
LAM
<Ic ses ouvrages est dans le tome 59 des
Mémoires de Nicéron.
LAMBERT ( Michel ) , musicien fran-
çais, né en 1610 , à Vivonne , petite ville
en Poitpu, mort à Paris en 169G , excellait
à jouer du luth , et mariait , avec beau-
coup d'art et de goût, les accens de sa
voix au son de l'instrument. Il fut pourvu
d'une charge de maître de musique de la
chambre du roi. Il a fait quelques petits
vwtets^ et a mis en musique des Leçons
de ténèbres. On a encore de lui un Re-
cueil contenant plusieurs airs à une,
deux , trois et quatre parties , avec la
basse continue. Ce musicien était très es-
timé , el l'on peut lire à ce sujet Boileau ,
dans sa o^ Satire. La Fontaine en parle
dans la 5'^ Fable du livre XI, et Titon du
Tillet lui a consacré une Notice dans son
Tamasse français.
LAMBERT ( Jean ou Jon-v ) , général
des troupes d'Angleterre sous la tyrannie
de Cromwell , exerçait les fonctions d'a-
vocat lors des premiers démêlés de Char-
les I"" et de son parlement. Ayant em-
brassé le parti des républicains, il obtint
un rang dans l'armée , signala sa valeur
dans différentes occasions, et eut les qua-
lités d'un chef de parti. Il accompagna
Cromwell en Ecosse, où il remporta une
importante victoire dans le comté de Fife,
el eut une grande part à celle de Wor-
cester, qui détruisit les espérances du
prince Charles, depuis Charles II. Crom-
well ayant cassé le parlement l'an 1653 ,
établit un conseil dont il nomma chef
Lambert , lorsque lui-même fut déclaré
prolecteur de la république. Lambert,
qui avait contribué à lui obtenir cette
dignité , dans laquelle il espérait lui suc-
céder, empêcha qu'il ne fût déclaré roi.
Cromwell le regarda dès lors comme son
rival, et lui ôta le généralat. Après la
mort du protecteur, arrivée en 1658,
Lambert se ligua avec le chevalier Vane
contre le parlement et contre le nouveau
protecteur, Richard Cromwell , fils d'Oli-
vier. Il s'opposa ensuite de toute sa force
au rétablissement de la monarchie ; ses
intrigues furent inutiles. Son armée ayant
été défaite, il fut pris par le général Monk,
qui le fil mettre dans la tour de Londres
avec Vane, son complice. Il fut con-
damné à mort l'an 1662 ; mais le roi mo-
déra cette sentence , et se contenta de re-
léguer Lambert dans l'Ile de Guernesey,
où il mourut trente ans après, totalement
oublié , et ayant embrassé la religion ca^
ibolique.
LAMBERT ( Anxe TnénÉSE de MAR-
GUENAT de COURCELLES, marquise
de ) , naquît à Paris , vers 1647 , d'un
maître des comptes. Elle perdit son père
à l'âge de trois ans. Sa mère épousa en
secondes noces le facile et ingénieux Ba-
chaumont , qui se fit un devoir et un amu-
sement de cultiver les heureuses dispo-
sitions qu'il découvrit dans sa belle-fille.
Cette aimable enfant s'accoutuma dès lors
à faire de petits extraits de ses lectures.
Elle forma peu à peu un trésor littéraire
propre à assaisonner ses plaisirs et à la
consoler dans ses peines. Après la mort
de son mari , Henri Lambert , marcpiis de
Saint-Bris , qu'elle avait épousé en 1666,
et qu'elle perdit en 1686 , elle essuya de
longs et cruels procès , où il s'agissait de
toute sa fortune. Elle les conduisit et les
termina avec toute la capacité d'une per-
sonne qui n'aurait point eu d'autre talent.
Libre enfin, et maîtresse d'un bien consi-
dérable, qu'elle avait presque conquis, elle
établit dans Paris une maison où il était
honorable d'être reçu : c'était la seule ,
à un petit nombre d'exceptions près , qui
se fût préservée de la maladie épidémi-
que du jou, et où l'on se rendit pour par-
ler raisonnablement. Aussi les gens frivo-
les lançaient, quand ils pouvaient, quel-
ques traits malins contre la maison de
M""= de Lambert, qui , très déUcate sur les
discours et sur les opinions du public,
craignait quelquefois de donner trop à son
goût. Cette dame illustre mourut le 12
juillet 1755 , à 86 ans. Ses principaux ou-
vrages sont : I Les Avis d'une mère à son
fils et d'une m.ère à sa fille^ 1727, in-12 ,
3* édit. Ce ne sont point des leçons sèches
qui sentent l'autorité d'une mère; ce sont
des préceptes donnés par une amie , et
qui partent du cœur. C'est un philosophe
aimable, qui sème de fleurs la route par
laquelle il veut faire marcher ses disci-
ples, qui s'attache moins aux frivoles dé-
finitions des vertus qu'à les inspirer en
les faisant connaître par leurs agrémens.
Tout ce qu'elle prescrit porte l'empreinte
d'une âme noble et délicate , qui possède,
sans faste et sans effort, les qualités qu'elle
exige dans les autres. On sent partout cette
chaleur du cœur qui seule donne le prix
aux productions de l'esprit. Les Jvis
d'une mère à sa fille ont été traduits
en allemand. Cette traduction , avec une
version française littérale interlinéaire ,
a été publiée par M. Boulard, Paris,
1800, in-8° : | Nouvelles réflexions sur les
femmes^ ou Métaphysique d'amour» elles
i
LA3I
Bont pleines d'imagination, de finesse et
d'agrément ; [ Traité de Vamitîé. L'ingé-
nieux auteur peint les avantages , les
charmes, les devoirs de l'amitié, avec au-
tant de vérité que de délicatesse ; | Traité
de la vieillesse, non moins estimé que ce-
lui de l'Amitié ; | La Femme ermite^ pe-
tit roman extrêmement touchant; | des
Morceaux détachés de morale ou de lit-
térature. C'est partout le même esprit, le
même goût, la même nuance ; il y a quel-
•quefois, mais raremBnt, du précieux. Les
Œuvres de madame Lambert ont été re-
cueillies, 1748, 2 vol. in-12 avec un abrégé
4^6 sa Fie, et 1813, 2 voL in-18.
LAMBERT ( Joseph ) , fils d'un maître
des comptes, naquit à Paris en 1654 , prit
le bonnet de docteur de Sorbonne , et ob-
tint le prieuré dePalaiseau, près de Paris.
L'église de Saint- André-des-Arcs , sa pa-
roisse, retentit long-temps de sa voix
douce et éloquente. Il eut le bonheur de
convertir plusieurs calvinistes et plusieurs
pécheurs endurcis. Il donna tant à Paris
qu'à Amiens des conférences qui ont été
imprimées. Sa charité pour les pauvres
allait jusqu'à l'héroïsme : ils perdirent le
plus tendre des pères , le plus sage conso-
lateur, et le plus généreux protecteur,
lorsque la mort le leur enleva le 31 jan-
vier 1722, à 68 ans. Ce fut à la réquisition de
ce saint homme , que la Sorbonne fit xme
déclaration qui rend nulles les thèses de
ceux qui s'y seraient nommés titulaires
de plusieurs bénéfices. On a de lui :
j L'Année évangélique , ou Homélies, 7
vol. in-12. Son éloquence est véritable-
ment chrétienne, simple , douce et tou-
chante. Tous ses ouvrages sont marqués
au même coin , et l'on ne peut trop les
recommander à ceux qui sont obligés par
état d'instruire le peuple. Si le style en
est négligé , on doit faire attention qu'il
écrivait pour l'instruction des gens de la
campagne, et non pour les courtisans,
j Des Conférences , en 2 vol. in-12, sous
le titre de Discours sur la vie ecclésiasti-
que; I Epitres et évangiles de Vannée,
avec des réflexions, en 1 vol. in-12 ; cet
ouvrage a été réimprimé en 2 parties en
4831 , et chaque partie a 2 vol. in-12 ;
j Les Ordinations des saints, in-12 ; | La
manière de bien instruire les pauvres,
in-12 ; | Histoires choisies de l'ancien et
du nouveau Testament, i vol. in-12: re-
cueil utile aux catéchistes ; [ Le Chrétien
instruit des mystères de la religion et des
vérités de la morale; \ Instructions cour-
tes et familières pour tous les dimanches
249 LAM
et principales fêtes de l'année , en faveur
des pauvres, et particulièrement des gens
de la campagne ; | Instructions sur le
Symbole, '2 \o\. in-12, réimprimés en 1831,
3 vol. in-12 ; sur les comtnandemens de
Dieu et de l'Eglise. 2 vol. in-12 ; | Deux
Lettres sur la pluralité des bénéfices^
contre l'abbé Boileau. VAmi de la reli-
gion a rendu un compte avantageux do
ces ouvrages qu'il recommande aux pas-
teurs et aux fidèles.
LAMBERT ( Claude-François ) , com-
pilateur fécond et laborieux , né à Dôle,
eut la cure de St.-Etienne; dans le diocèse
de Rouen , qu'il abdiqua ensuite. Il vint à^
Paris , et s'y mit aux gages des libraires,
pour lesquels il compila divers ouvrages,
qui lui coûtaient peu , et qui ne valaient
pas ce qu'ils lui coûtaient. Les principaux
sont : I Le nouveau Télémaque, ou Mé-
moires et aventures du C. de*** et de son
fils, 3 vol. in-12 ; | La Nouvelle Marian-
ne, 3 vol. in-12 ; | Mémoires et aventures
d'une femme de qualité, 3 vol. in-12. On
voit que , dans ces divers romans , il a
cherché à persuader qu'il copiait de
bons modèles; mais cela ne parait que
dans le titre , et c'est à ce titre qu'ils ont
dû tout leur succès. Us sont dénués d'i-
magination et d'élégance : | L'infortunée
Sicilienne, in-12 ; | Recueil d'observations
curieuses sur les moeurs, les coutumes,
les arts et les sciences des différens peu-
ples de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amé-
rique, Paris, 1749, 4 vol. in-12; | His-
toire générale civile, naturelle, politique
et religieuse de tous les peuples dumonde^
Paris, 1750, 14 vol. in-12, qui se relient
en 15. Il a réuni dans ce livre tout ce qui
se trouve répandu dans les différens voya-
geurs ; mais il manque d'exactitude danâ
les faits et de grâce dans la narration.
j Histoire littéraire de Louis XI f^, 3 vol.
in-4*', qui lui valut une pension : ce n'est
qu'une compilation indigeste et mal écrite
des Mémoires de Nicéron, des Eloges des
différentes académies , des jugemens des
journalistes. L'auteur y a mis des Discours
préliminaires sur les progrès de chaque
science sous le règne illustre de Louis le
Grand ; mais ces discours , vides de pen-
sées , ne sont pleins que de phrases em-
phatiques. Cet ouvrage a été traduit en
allemand , Copenhague , 1759 , 3 vol. in-
8°. I Histoire de Henri II, 2 vol. in-12 ;
I Bibliothèque de physique, 7 vol. in-12;
j Mémoires de Pascarilla , in-12 , mau-
vais roman, etc. 11 mourut à Paris en 1765.
Lçi manie compilatrice de l'abbé Lambert
LAM 2"
est devenue parfaitement épidémique.
Celle nuée épaisse de brochures de tous
les genres , et ces romans plus ou moins
encyclopédiques qui inondent la terre,
sont un effet de cette maladie.
• LAMBERT ( Georges ) , peintre an-
glais et graveur à l'eau-forte , né dans le
comté de Kent, en 1710, mort à Lon-
dres en 176S. Il réussissait très bien dans
le paysage. Il avait pris pour modèle
Wooton, et surtout le Guaspre, qu'il s'ef-
força d'imiter. On cite de lui deux pay-
sages d Angleterre j d'un bel effet; et
deux vues^ l'une de la ville de Douvres^
l'autre du château de Saltwood. Ces quatre
tableaux ont été gravés avec beaucoup de
perfection par James Mason. Lambert a
gravé à l'eau-forte un paysage orné de
ruines et de figures^ in-i"; et troispetiles
figures dédiées à James Robinson de
Wandsworth. Ces estampes sont rares.
LAMBERT ( Jean-Henri ) , mathéma-
ticien , naquit à Mulhausen , en Alsace,
vers l'an 1728, et mourut à Berlin de con-
somption, le 2S septembre 1777. Fils d'un
pauvre tailleur cliargé d'une nombreuse
famille , il ne put d'abord satisfaire son
goût pour l'étude; cependant il alla dans
une école gratuite où on lui donna les
élémens des langues latine et française :
le reste, il l'apprit seul et dans les livres;
et telle était sa facilité qu'il parvint à con-
naître à fond , le grec, le latin , l'anglais,
l'allemand , la physique , la mécanique,
l'astronomie, la théologie , la philosophie,
l'éloquence et même la poésie. Son esprit
avait quelque chose de singulier et d'o-
riginal. Ayant été présenté au roi de
Prusse, et interrogé par ce prince sur ce
qu'il pourrait entreprendre en fait de
science j astronomie, histoire, ou enfin
quelque autre partie , il répondit tout.
Quoique cette réponse prévînt contre lui,
le prince l'excusa, sans doute à raison de
la légèreté et de la suffisance du siècle,
dont les jeunes gens se défendent diffici-
lement, et lui fit accueil ; il devint pen-
sionnaire de l'académie de Berlin, et con-
seiller au département des bâtimens. Il
commença par être précepteur des petits-
fils du comte Pierre de Salis, établi à Coire
et accompagna en cette qualité ses élèves
dans leurs voyages en Allemagne, en Italie
et en France, où il connut d'Alembert, qui
le recommanda au roi de Prusse. Lam-
bert possédait plusieurs langues vivantes
et passait pour un bon helléniste. Il avait
une prédilection marquée pour les choses
nouvelles et extraordinaires, et les saisis-
0 LAM
sait avec celle vicacilé qui se tient si près
de l'erreur. Le prétendu satellite de Venus
est une de ces découvertes du siècle dans
laquelle il s'exerça beaucoup. Il assura
que ce satellite paraîtrait d'une manière
évidente le 1" juin 1777, et bien des as-
tronomes l'attendirent avec une attention
et une patience qui prouvent bien le cré-
dit dont jouissait parmi eux celui de Ber-
lin. Outre les pièces qu'il inséra dans les
Mémoires de Berlin, de Bâle, de Munich,
on a de lui un grand nombre d'ouvrages ;
les principaux sont: | une Perspective,
Zurich , 1758 ; | un ,Traité sur les pro-
priétés les plus remarquables de la route
de la lumière, la Haye , 1759 ; | une Pho-
tométrie, Augsbourg, 1760; | un Traité
sur les orbites des comètes , Augsboui g ,
1761; I des Opuscules mathématiques,
etc. M. Mérian, de l'académie de Berlin, a
publié le Système du monde, par M. Lam-
bert , en 1770 ; la seconde édition a paru
en 1784 , in-8°. Cet astronome fait de toutes
les étoiles visibles ( celles de la voie lactée
exceptées) un seul et même système (tour-
billon , ensemble , machine ) : elles tour-
nent toutes en masse, avec notre soleil,
autour d'un corps opaque d'une grandeur
monstrueuse, et qu'on dit se trouver dans
Orion, où depuis long-temps il se voit
une lueur pâle, qui est à coup sûr ledit
corps , centre do tout le système. La voie
lactée en fait autant de son côté, et rend
le même hommage à son corps opaque.
Mais ces grands systèmes ne sont encore
que de petites parties d'un autre systèmcj
et la voie lactée n'est qu'une appartenance
d'une autre voie lactée , une petite roue
d'une machine composée de cent autres
roues, etc. On peut voir diverses ré-
flexions sur ce système dans le Journ. hist.
et littér. 13 mai 1786, p. 97. Eberhard
a consacré à Lambert une notice biogra-
phique dans un ouvrage posthume de cet
auteur qui a pour titre Pyrométrie , et
qui a été publié en allemand, Berlin,
1779, in-i", avec une préface de Karsten.
* LAMBERT ( Bernard ) , religieux de
l'ordre de Saint-Dominique , né à Saler-
nes , en Provence , en 1758 , fit ses vœux
dans le couvent de Saint-MaxirRin , dont
alors les religieux étaient interdits pour
cause de jansénisme ; il prit l'esprit et les
principes de la maison , et en soutint la
doctrine dans des thèses publiques ; de-
venu ensuite proTesseur du couvent de
Limoges , il l'enseigna dans ses leçons.
Une thèse qu'il y fit soutenir, le 14 août
1765, fut mise à Vindex, le 18 février 1766.
LAM
Il tint la même conduite à Grenoble , où
il enseigna aussi la théologie. M. de Mon-
ta/et, archevêque de Lyon, l'y appela , le
mit dans son conseil , et en fit son théo-
logien. Il quitta néanmoins ce prélat pour
venir s'établir à Paris. Ses principes
étaient trop opposés à ceux de M. de Beau-
mont pour qu'il l'y souffrit volontiers.
Quelques évêques néanmoins intervin-
rent en sa faveur, et promirent qu'il
n'écrirait plus que contre les philosophes
et les incrédules ; à cette condition , qu'il
ne viola point pendant la vie du ferme
et pieux archevêque , il lui fut permis de
se rendre dans un couvent de la capitale.
Il est auteur de beaucoup d'ouvrages. On
a de lui : | L'Idée de l'ceuvre des secours
selon les sentimens de ses véritables dé-
fenseurs, Paris, 1786, in-i°. Le P. Lam-
bert y préconise les convulsions ; il le fit
encore dans l'avertissement aux fidèles ,
etc., et dans l'Exposition des prédictions,
etc. ; I Recueil de passages sur l'avéne-
ment intermédiaire de Jésus-Christ , sou-
mis à l'éditeur du Discours de M. l'é-
véque de Lescar (de THoé), sur l'état futur
de l'Eglise^ Paris , 1785, in-12 ; | Adresse
des Dominicains de la rue du Bac, à l' As-
semblée nationale , 1789 ; | Lettre de M***,
à M. l'abbé A. ( Asseline ), censeur et ap-
probateur du libelle intitulé : Discours à
lire au conseil, etc., sans date, 1787;
I Adresse des dominicains de la rue Saint-
Jacques , à l'Assemblée nationale^ 1789 ;
j Apologie de l'état religieux^ in-12 ; I Mé-
moire sur le projet de détruire les cor-ps
religieux^ 1789^ in-8°; ] Mandement et
instruction pastorale de M. l'évéque de
Saint-Claude, pour annoncer le terme du
synode , et rappeler aux pasteurs les pre-
miers devoirs e7ivers la religion, 1790,
in-4.*' et in-S"; | Avis aux fidèles, ou Prin-
cipes propres à diriger leurs sentimens
et leur conduite dans les circonstayices
présentes^ Paris , 1791 , in-S"; | Préservatif
contre le schisme ( de Larrière ) , con-
vaincu de graves erreurs , 1791 , in-8
I l'Autorité de l'Eglise et de ses mi-
nistres ^ défendue contre l'ouvrage de
M. Larrière j intitulé : Suite du préser-
vatif contre le schisme, ou Nouveau
développement des principes qui y sont
établis , 1792 , in-8° ; | Avertissement aux
fidèles sur les signes qui annoncent que
tout se dispose pour le retour d'Israël et
V exécution des menaces faites aux gentils
apostats^ Paris, 1793, in-8°; | Devoirs du
chrétien envers la puissance publique , ou
Ptincipc s propres à diriger les sentimens
2ol LAM
et la conduite des gens de bien , au mi-
lieu des révolutions qui agitent les empi-
res, Paris, 1793, in-8°; | Réflexions sur
la fête du il Janvier, in-S" de 32 pages;
I Réflexio7is sur le serment de la liberté
et de l'égalité^ 1793, in-S"; | Apologie
de la religion chrétienne et catholique ^
contre les blasphèmes et les calomnies
de ses ennemis, Paris, 2' édition, 1796,
in-S"; I Cinq Lettres aux ministres de
la ci-devant église constitutionnelle , 1795
et 1796, in-8°; I La vérité et la sainteté
du christianisme, ve?igées contre les
erreurs du livre intitulé : Origine de
tous les cultes par Dupuis, 1796, in-8°;
I Traité dogmatique et moral de la jus-
tice chrétienne ^ 1798, in-12 ; | Essai sur
la jurisprudence universelle, 1799, in-i2 ;
I Lettre à l'auteur de deux opuscules
intitulés, l'un. Avis aux fidèles sur le
schisme dont la France est menacée ;
l'autre. Supplément à l'avis aux fidèles,
in-8". Cet auteur est le père Minard,
doctrinaiire , partisan de la constitution
civile du clergé. | Remontrances augou-
vernemenf français , sur la nécessité et
les avantages d'une religion nationale^
1801, in-8°; ] Manuel du simple fidèle,
où on lui remet sous les yeux, 1° la
certitude et l'excellence de la religion
chrétienne, 1° les titres et prérogatives de
l'Eglise catholique , 5° les voies sûres qui
mènent à la véritable justice, iSOZ , 1 vol.
in-8'' ; | quatre Lettres d'un théologien à
M. révéque de Nantes ( du Voisin ), 1805.
On y a fait deux réponses qui se trouvent
dans le tome k des Annales littéraires.
I La pureté du dogme et de la morale
vengée contre les erreurs d'un anonyme,
( l'abbé Lassausse , dans son Explication
du catéchisme ), par M. P. T., Paris, 1808;
I La Vérité et l'Innocence vengées, contre
les erreurs et les calomnies des Mé-
moires pour servir à l'histoire ecclésias-
tique, pendant le 18' siècle, 1811, in-8°.
II publia quelques autres écrits sur la
même matière dans une controverse
entre lui et Reynaud, curé de Vaux,
diocèse d'Auxerre; ] Ti-aité contre la
philanthropes; | Cours d'instructions sur
toute la religion. Ces deux derniers ou-
vrages sont restés manuscrits. Il avait
fourni les matériaux de l'Instruction pas-
torale contre l'incrédulité, publiée par
M. de Montazet, en 1776. Ces ouvrages
ont été publiés sous le voile de l'anonyme;
on en trouve la liste dans le Diction-
naire de M. lîarhicr. Lambert mourut à
Paris le 27 féviicr 1813 , âgé de 75 an».
LAM
252
LAM
Le père Lambert avait du savoir et des
connaissances en théologie. Si parmi ses
ouvrages il s'en trouve qui contiennent
une doctrine répréhensible , et parmi
ceux-là il faut compter non seulement
ceux qu'il a composés en faveur du parti
auquel il s'était attaché , et dans lesquels
il essaie de justifier une résistance cou-
pable aux décisions du chef de l'Eglise ,
mais encore ceux où il renouvelle les
erreurs du millénarisme , il en est d'au-
tres dont le but est louable ; tels sont ceux
où il poursuit l'incrédulité à outrance ,
ceux où il combat l'Eglise constitution-
nelle, ceux où il défend l'état religieux,
etc. Tous ces écrits font regretter que le
père Lambert, s'il est permis de se servir
de cette expression, ait semé l'ivraie avec
le bon grain. On aimerait à n'avoir point
à lui reprocher le tort d'avoir fait revivre
d'anciennes erreurs, et d'en avoir sou-
tenu de nouvelles; d'avoir manqué de
respect envers des ecclésiastiques consti-
tués en dignités , quand ils n'étaient point
de son sentiment; d'avoir trempé sa plume
dans le fiel , quand il écrivait contre ses
adversaires, et enfin d'avoir fait l'apo-
logie absurde des folies du secourisme ^
qu'il a défendu opiniâtrement , quoique
méprisées et rejetées par les plus raison-
nables de ceux avec lescpiels il faisait
cause commune C'était, au reste, un
religieux attaché à sa profession , en rem-
plissant les devoirs , même après y avoir
été arraché.
♦ LAMBERT, baron LECHARRON(Ax-
i)BÉ-Lot'is ) , d'une famille du Gatinais ,
né en 1739, fut élevé à l'école militaire,
et en sortit, en 1776, pour entrer dans le
régiment de Limousin. Lorsque l'insubor-
dination des troupes força la plupart des
officiers de se disperser, le baron Lechar-
ron fut de la dernière garde qui mérita
l'attachement de Louis XVL II partagea ,1e
lOaoût, le danger du monarque, et trouva
le moyen de rejoindre l'armée des princes
en Champagne. Il devint officier dans le
régiment de Loyal-Emigrant et d'Hervilly,
et passades campagnes meurtrières de la
Flandre , à la fatale expédition de Qui-
beron. Fait prisonnier dans la presqu'île,
il comparut deux fois devant le tribunal
d'où l'on ne sortait que pour aller à la
mort , et deux fois sa présence d'esprit fit
suspendre pour lui la cruelle sentence.
Plus tard il se relira à Montfort-l'Amaury
avec le rang de colonel et la croix de Saint-
louis , et il y est mort au mois de no-
vembre 1825 à l'àgc de 68 ans. Il a laissé :
I Expédîtîoji de Quiberon^ suivie de V éva-
sion des prisons de Vannes : avec une
carte de la presqu'île de Quiberon ré-
duite par l'auiew d'après celle de Cassini
et 4 gravures par Bence j ouvrage dédié
au rot et faisant suite aux mémoires sur
la révolution française ^Vaxis, 1826, in-18.
• LAMBERTI ( Louis ) , helléniste ita-
lien , naquit en 1758 à Reggio , en Lom-
bardie. Il fut reçu avocat à Modène ; mais
il quitta bientôt cette profession pour se
livrer à la littérature. Il devint d'abord
secrétaire du nonce de Bologne , passa en-
suite à Rome , où il gagna l'amitié du sa-
vant antiquaire Visconti , qui l'introduisit
dans la maison de Borghèse. Lambcrtl
décrivit, sous la direction de son protec-
teur , les antiques et les beUes statues de
la villa de ce nom. Au commencement
de la révolution française , il se rendit à
Reggio , et de là à Milan, lors de l'inva-
sion de Bonaparte en 1796. Au mois do
mars de l'année suivante , eut lieu l'éta-
blissement delà république Cisalpine , qui
fut précédée à!vin congrès ^ dit national,
dans lequel Lamberti fit décréter l'abo-
lition de la noblesse et de tous les sym-
boles monarchiques ; il s'opposa à l'éta-
blissement de la polygamie, proposée par
Compagnoni. Il fut membre du grantJ
conseil législatif, puis membre du Direc-
toire exécutif. Les victoires de Souwa-
row en Italie ( 1798 et 1799 ) forcèrent
Lamberti de quitter Milan : il y revint
après la bataille de Marengo , gagnée par
Bonaparte , qui s'était fait premier con-
sul après son retour d'Egypte. Lamberti ,
nommé membre de l'institut italien, qu'on
créa à cette époque , témoigna sa recon-
naissance par une Ode^ à la louange du
vainqueur. Il obtint, peu de temps après,
la chaire de belles-lettres à l'université
de Bréra , et la place de directeur de la
bibliothèque du même nom, qu'il enrichit
d'une suite d'éditions du lo' siècle, comme
celles des Aide , de Comino , de la Crusca,
etc. Il fut décoré des ordres de la légion
d'honneur et de la Couronne-de-Fer ; et ,
en 1810 , étant venu à Paris présenter à
Napoléon , devenu empereur en 1804 , sa
magnifique édition d'Homère imprimée
par le célèbre Bodoni , il en reçut pou r
récompense la somme de 12,000 fr. De
retour à Milan, il y mourut le 4 décembre
1813 , âgé de 53 ans. On a de lui , en ita-
lien : I des Poésies^ Parme, Bodoni, 17%,
1 vol. in-18 ; | Description des sculptures
du palais de la villa Borghèse. dite Prin-
ciana^ Rome, 1796, 2 tom. in-6°; | Ode à
LAM
Xapoh'on pour la fête nationale de
253
mz,
ode imprimée avec celles de Savioli et
nionti, publiées à la même occasion ; | Dis-
cours sur les belles-lettres j Milan, 1803 ,
iu-S"; I Ode à Napoléon ( pour son cou-
ronnement comme roi d'Italie ) , Milan ,
1808; \ Alexandre dans Jrmotie . can-
tate, ib., 1808, etc. , in-fol.; | Poésies d'é-
crivains grecs ^ saso'w : les Cantiques de
Tyrtée , l'Œdipe de Sophocle , et l'hymne
à Cérès d'Homère, traduits en vers ita-
liens, Brcscia, 1808, in-8"; | des Obser-
vationsa ajoutées à celles du père Marn-
hclli, sur la langue italienne { voyez les
CJassici ilaliani, en 1809 ) ; | l'Homère
en {jrec, avec des corrections et des chan-
{îcniens, Parme, Bodoni, 1810, grand
in-fol. C'est la plus belle édition que l'on
(oimaisse de ce grand poète. Elle a mérité
les éloges de l'institut de France , suivant
le compte qu'en a rendu M. Boissonnade ;
j O^ixervazioni soprà alcune lezioiii délia
'riiade d'07nero.KA\a.i\, 1813 , iii-8".
' nïRElVriM. rorj. BENOIT XIV.
■ ?.A.HBESC( CnARï-ES-EuGÈNE de Lor-
rahio , duc d'ELBEUF, prince do ), né le
2") sej)tembro 17ol , d'un des princes de la
maison de Lorraine , parent de la reine
IVia: ie- Antoinette, montra pour cette priu-
jcsse un grand dévouement. Il était entré
liés jeune au. service de France, et sa
prolectrice lui obtint la charge impor-
tante de grand-écuyer. Il était colonel
propriétaire du régiment royal-allemand,
et avait une grande influence à ia cour.
Dès le commencement de la révolution,
il s'en montra l'ennemi le plus déclaré.
La tournure que prenaient les affaires
obligea le gouvernement de former, en
juillet 1789, un camp près de Paris. Le
prince de Lambesc y fut employé , et le
i!2 de ce mois, des groupes tumultueux
étant venus sur la place Louis XV , le
prince de Lambesc fut chargé de les dis-
siper. A la tête de son régiment, il fran-
chit le Pont-Tournant et entra au galop
dans les Tuileries. Les autres corps ne le
soutinrent pas; on vit même les gardes-
françaises se réunir au peuple , barrer le
chemin avec des chaises , braver les sol-
dats du prince , tandis qu'une grêle de
pierres tombait sur eux. Forcé de se re-
tirer, mais sans beaucoup de danger, il
retourna au camp ; le triomphe du parti
populaire au ik juillet entraîna sa mise
en accusation. Il fut accusé à l'Assemblée
nationale, et dénoncé comme chef de la
t(^!ispiralio!i aiiti-révouitiounaire Tra-
duit devant le Châtelct, comme ayant agi
LAM
il fut acquitté par
contre la nation,
juges. Le prince évita d'ailleurs les suites
de cette affaire en se réfugiant en Alle-
magne , où son régiment le réjoignit en
1792 , pour servir dans l'armée des prin-
ces, frères de Louis XVI. Le prince de
Lambejc entra dans la Champagne avec
les Prussiens. Après qu'ils eurent évacué
le territoire français, il prit du service en
Autriche , et y obtint les grades de géné-
ral major et de fcid-marcchal-lieutenant.
On croit que ce prince a aussi fait les
campagnes du Rhin et d'Italie contre les
Français: mais il n'eut point de comman-
dement en chef. Il se maria, en 1803,
avec la comtesse Amie de Cetmer , veuve
du comte Cajétan-Poloki, et épousa en
secondes noces ( 1812), la comtesse douai-
rière de CoUoredo. Ala restauration (1814)
il revint en France. Créé pair, il était,
retourné à Vienne , où sa qualité de prince
du sang lui assignait le premier rang après
les archiducs. Le prince de Lambesc est
mort le 20 novembre 1823 , âgé de soixante
quatorze ans , ne laissant point d'héritier.
En lui s'est éteinte la branche mâle de la
maison de Lorraine.
LAMBIN ( Denys ), savant français, né
à Montreuil-sur-Mer en Picardie , vers
1516. Il voyagea en Italie avec le cardinal
de Tournon, et obtint par son crédit la
place de professeur en langue grecque au
collège royal de Paris. Il l'occupa jusqu'à
sa mort, occasionée en 1572, par la
perte de son ami Ramus , tué dans l'exé-
cution de la Saint-Barthélemi. Il avait
alors o6 ans. On a de lui plusieurs ou-
vrages , dans lesquels on trouve une éru-
dition vaste, mais quelquefois accablante.
Le soin qu'il a de rapporter les diverses
leçons avecla plus scrupuleuse exactitude
ennuya bien des savans , et fit naître le
mot de lambiner. Lambin a donné des
Commentaires sur Lucrèce, 1563, in-4°;
sur Cicéron, 1585, 2 vol.; sur Plante,
1588, et sur Horace, 1603; tous trois in
fol. Son travail sur Horace a été applaudi;
mais il a été moins heureux dans les cor-
rections qu'il a faites aux œuvres de l'o-
rateur latin. Il change le texte de Cicéron
à sou gré , sans être autorisé par les an-
ciens manuscrits. Il ôte les mots des édi-
tions qui se trouvent entre les mains
de tout le monde , pour en substituer de
nouveaux, qu'il n'a pris que dans sa bi~
zarre imagination. André Schott assure
que toutes les f(^is qu'il ajoute ces mots :
Invitis et repugnanlibas libris om.nibus ,
on peut assurer qu'il se trompe.
22
LAM 2
• L.VMÎÎINET ( PiEunE ), bibliographe,
çaccessivement jésuite, préniontré et
prêtre séculier, naquit en 1742. à Tournes,
village près de Mézières ( Ardeniies ). Il
lit SCS éludes chez les jésuites, et entra
(!ans leur société à Pont-à-iMousson , à
ràfje de 15 ans ; il y resta jusqu'à sft sup-
pression. Rendu au monde, il y passa
({uclques années, après quoi il se pré-
senta à l'abbaye de Lavaldicu, ordre de
Préinonlré, pour en embrasser l'inslitut.
il y l)rit l'habit de Tordre, et alla faire
profession à l'abbaye de Villers-Cotlerels.
Il quitta celte maison et l'habit reli^jieux,
sinon de l'aveu formel de ses supérieurs,
au moins sans qu'ils s'y opposassent, et
se rendit à Bruxelles , où il fil l'éducation
des deux lils du duc de Croquenbourg.
Après l'avoir finie , il s'adressa à Rome
l)our obtenir un bref de sécularisation,
qui lui fut accordé , sur le consentement
de l'abbé de Prémontré. L'abbé Lambine!
s'était toujours occupé de belles-lettres ,
et principalement de recherches biblio-
graphiques. Il avait visité un grand nom-
bre de bibliothèques, et entrepris des
voyages pour étendre ses connaissances
.sur cette partie de la littérature. Il publia
plusieurs ouvrages dont les titres suivent :
I Eloge de l impératrice Marie-Thérèse .
Bruxelles ; | Table raisonnée des matières
contenues dans l'esprit des journaux de-
puis 177^2 jusqu'en 1784 inclusivement ^
Paris et Liège, sans date, 4 vol. in-12^
I Notice de quelques manuscrits qui con-
cernent l'histoire de la Belgique j et qui se
trouvent dans la bibliothèque publique de
Berne . insérée dans le tome 5 , 2*^ partie
des Mémoires de l'académie de Bruxelles,
p. 2o2-265. L'abbé Lambinet rédigea cette
notice avec le secours de M. Wilhelmi ,
bibliothécaire de Berne; elle fut lue à
l'académie de Bruxelles, le 12 octobre
1780. I Recherches historiques et litté-
raires j. sur l'origine de l'imprimerie^
particulièrement sur ses premiers éta-
ijlissemeîis , au 15' siècle^ dans la Bel-
(jique, Bruxelles, an 7( 1798, in-8"),
réimprimées à Paris en 1810, sous ce litre :
Origine de l'imprimerie, d après les titres
autheiUiqiies , l'opinion de M. Daunou et
celle de M. Fan-Praèt.^\o\. in-8°.La pre-
mière édition fut vivement critiquée par
^L de la Serna Santander , Dictionnaire
hihlioyraphique du 15*^ siècle, partie V
pag. 588 et 58!) ; j Remarque s bibliog r a phi-
i-ues et critiques surune édition lutine de
l Imitation de Jésus-Christ, donnée par
Heuuzée de l'académie française , chez.
Barbou, 1788, et sur plusieurs autrei
éditions du même livre , insérée dans le
Journal des curés, 23 cl 27 août 1809, n"**
117 et 119. A cet otivrage,M. Gence oi>
posa, dans le même journal , un écrit in-
titulé : Défense de l'édition latine de l'I'
mitation , donnée par Beauzée. Il y
prouve que la prétendue édition de Beau-
zce, attaquée par Lambinel , n'est autre
chose que celle de Valart, revêtue du
frontispice de l'édition de l'académicien.
( Voyez l'article GERSON. ) L'abbé Lam-
binet a levu et augmenté la Notice des
éditions de l'Imitation , publiée par lo
pèreDesbillons. lia donné lui-même une
édition stéréotype de ce livre célèbre, et
a pris part aux disputes élevées sur son
auteur, qu'il prétend être A Kempis,
contre l'opinion de M. Gence. La lutte
qu'il eut à soutenir à cet égard avec de
célèbres adversaires altéra, dit-on, sa
santé. Il fut frappé d'un coup d'apoplexie
et mourut le 10 décembre 1813. L'institut
a donné des éloges à ses connaissances, el
des sa vans l'ont mis au nombre de ceux
qui ont bien mérité de la bibliographie.
* LIMBLARDIE ( Jacqces-Elie ), di-
recteur de l'école des ponts et chaussées,
et de l'école polytechnique depuis sa fon-
dation (1795) , né à Loches , département
d'Indre-el-Loire , est mort à Paris le 26
novembre 1797. Employé d'abord comme
sous-ingénieur sur les côtes de la Nor-
mandie , il fut, en 1793, nommé ingé-
nieur du port du Havre , qui, d'après les
travaux qu'il y commença , est devenu
un des plus beaux el des plus utiles que
la France ait sur l'Océan. On y admire le
pont à bascule , établi sur la plateforme
qui sépare l'ancien bassin de celui qui le
joint au nord ; Lamblardie l'a décrit dans
son Mémoire sur les diverses espèces de
ponts mobile?. Devenu ingénieur en chef
dans le département de la Somme, mem-
bre de la commission des travaux du pont
de Cherbourg , il fut ( 1793 ) appelé à Pa-
ris pour diriger avec Perronnet l'école
des ponts et chaussées; enfin, à l'époque
de la formation de l'école polytechnique,
il en fut nommé le premier direttrur. Le
Mémoire qu'il a publié ( 1789 , iM-4" ) sur
les côtes de la haute Normandie . est
rempli de vues profondes et neuves, ap-
plicables aux constructions dans la mer,
et à la direction des jetées dans les ports.
M. de Prony a donné dans le 5' cahier
du Journal de l'école Polytechnique ^
!om. T, une notice sur la vie el les ou-
vrages de Lamblardie.
• LAMIiUrCIlTS (Charles- JosEPii-
fllATTiiiEU ) , sénateur , né <à Saiul-Tron ,
dans les Pays-Has en 17o3, étudia à l'u-
niversilc de Loxivain , et s'adonna sur-
tout au droit civil et canonique. Après
avoir été reçu docteur, il fut nommé en
1777 professeur dans cette même univer-
sité, et fut chaifïé en 1788 par Joseph II,
empereur d'Allemagne , de visiter les
diverses universités de ce pays. Lam-
brechts fut obligé de s'exiler de sa patrie en
1790 , lorsqu'elle s'insur(;ea contre le gou-
vernement autrichien, auquel les Bçlges
le soupçonnaient détre resté lidèle. Apres
le rétablissement de la domination autri-
chienne , Lambrechts retourna à Bruxel-
les où il reprit la pratique du droit . et il
fut choisi pour faire partie du grand-con-
seil de Malines , lorsque les troupes fran-
çaises chassèrent les Impériaux de la
Éelijique. lise rangea aussitôt du côté des
vainqueurs , obtint les premières fonc-
tions administratives, et après le 18 fruc-
tidor, il fut appelé à Paris pour remplacer
Merlin de Douai , au ministère de la jus-
tice (4 septembre 1797). Remplacé à son
tour par Cambacérès au mois de juillet
1799 [voyez CAMBACÉRÈS) , il retourna
dans sa patrie où il devint président du
département de la Dyle. Après le 18
brumaire , le gouvernement consulaire le
nomma sénateur. Mais il apporta dans
l'assemblée où il élail appelé à siéger des
idées d'indépendance et d'opposition qui
le firent remarquer; il se prononça avec
force contre les envahissemens de Bona-
parte , et fut un des trois membres du
sénat qui refusèrent leurs suffrages à l'é-
rection du trône impérial. Pendant les
treize ans qu'il siégea dans celte assem-
blée, il fit toujours partie de la minorité.
Ce fut lui qui en 181/» rédigea les fameux
considérans de Vactede déchéance rendu
contre Bonaparte ; il lit aussi partie du
comité qui proposa à Louis XVIII l'acte
constitutionnel que ce prince refusa d'a-
dopter. Il reçut du gouvernement royal
des lettres de grande naturalisation ; mais
il ne fut point du nombre des sénateurs
qui entrèrent à la chambre des pairs.
Pendant les cent-jours il vota contre l'acte
constitutionnel; les départemens de la
Seine-Inférieure et du Bas-Rhin le nom-
mèrent député en 1819 : le mauvais étal
de sa santé ne lui permit pas de paraître
souvent à la chambre où il avait pris place
dans les rangs de l'extrême opposition.
Lambrechts est mort à Paris le k août
1823 : il avait reçu le titre de comte et le.
grade de commandant de la légion-d'hon-
neur. Parmi ses dispositions testamentai-
res on remarque un legs do 12,000 francs
pour la fondation d'un hospice exclusive-
ment destiné au soulagement des protcs-
tans aveugles, et celui d'une somme de
2000 francs destinée nu meilleur ouvrage
en faveur de la liberté des cultes , el que
le ministre de l'intérieur n'autorisa pas
l'académie française à accepter : son hé-
ritier (M. Charles d'Oulreponl ) a chargé
la société de la morale chrétienne do
mettre cette question au concours, el le
prix a été en effet décerné en 1826. On a
de lui : Principes politiques ,1815, in-8" .
et quelques Réflexions à l'occasion du
livre de M. l'abbé de Fi-ayssitious , inti-
tulé : des Frais principes de Vcglise gai-
licane ^Par'is, 1816, in-8°. Il a aussi écrit
quelques détails sur sa vie, publiés après
sa mort , sous le titre de Notice trouvée
dans les papiers de M. le comte Lam-
brechts, Paris, 1823, in-S".
* LAMBRlJSCiîIM ( Jëan-Baptiste ) ,
évéque d Orviète , né le 28 octobre 1735 ,
à Seslri-di-Levante dans le diocèse de
Brugnato, fit ses études chez les jésuites
de Gènes et embrassa l'état ecclésiastique.
Nommé professeur de théologie dans le
séminaire de cette ville , il rendit les plus
grands services aux jeunes gens qui sui-
vaient ses cours, en leur donnant des
moyens de se prémunir contre les séduc-
tions de quelques théologiens novateur*;.
Lors de la révolution de Gènes en 1797 ,
Lambruschini fut arrêté avec plusieurs
autres personnages de distinction : ren-
fermé dans la forteresse de Savone, il ne
recouvra la liberté qu'au bout de quelque
temps et à la condition de ne point ren-
trer à Gènes. Il y revint cependant, lors-
que les alliés obtinrent des avantages sur
les Français el fut nommé grand-vicaire
en 1799. Obligé de fuir une seconde fois,
il se réfugia à Rome, où le pape l'accueil-
lit avec honneur et le nomma évèqus
d'Azoth in parlihus , puis administrateur
apostolique du diocèse d'Orviète , enfin
évéque de ce siège en 1807. Il se rendit
au milieu de ses diocésains : mais n'ayant
point voulu prêter le serment exigé de
lui par le gouvernement français, il fat
exilé d'abord à Turin , pias à Bourg, et
enfin à Belley. où il resta jusqu'en 1814.
Lambruschini se hàla alors de retourner
dans son diocèse où il s'occupa de faire
refleurir la religion et do réparer les maux
de l'invasion étrangère. 11 fonda plu-
sieurs écoles, entre autres une maison
LAM 2
des frères des écoles chréliennes, cl dix
couvens d« religieux des deux sexes s'é-
levèrent en peu de temps sous ses auspi-
ces C'est ou milieu de ces travaux qu'il
fut frappé d'une attaqué d'apoplexie qui
l'enleva le 24 novembre 1827. On doit à
ce vertueux prélat plusieurs ouvrages ,
en Ire autres : | Théologien dogmala ^
Gènes, 1788, in-il.'', qui embrasse en
trente-trois articles toute la théologie
dogmatique ; | un Abrégé de tliéologie ^
en latin, sur la grâce ^ Gènes, 1789,
in-S"; I un Discours prononcé , en 1804,
à V académie de la religion catholique ^
dont il fut un des premiers membres ;
I la Guide spirituelle pour l'usage d'Or-
vii;ts, Rome , 1825 , in-12.
LAMECH , de la race de Caïn , fils de
Malhusacl , père de Jabel , de Jubal , de
Tubalca'in et de Noëma , est célèbre dans
l'Ecriture par la polygamie, dont on le
croit le premier auteur. Il époxisa Ada et
Sella. Un jour Lamech dit à ses femmes :
« Ecoutez-moi, femmes de Lamech! J'ai
» tué un homme pour ma blessure , et
« un jeune homme pour ma meurtris-
» sure. On tirera vengeance sepî fois du
» meurtrier de Ca'in , et soixante-dix fois
« de Lamech. » (Genèse, 4.) Ces paroles
lenferment une obscurité impénétrable ;
on n'a pu les expliquer que par des conjec-
tures, parce qu'on n'est point instruit de
tout le détail des choses qui se passèrent
dans ces premiers temps du monde. Il
paraît cependant qu'une partie de ce dis-
cours regarde Ca'in , qu'on croit avoir été
tué par Lamech , et dont le meurtrier de-
vait être puni au septuple , comme il est
dit au chapitre 4 de la Genèse. Ce qu'on
peut conclure en général, c'est que La-
mech était un liomme violent et emporté,
dont Dieu a puni la bruîale colère , et
que la divine justice a^jgravait le châti-
ment de rhomicide par une sévérité crois-
sante , à mesure que cette barbarie atroce
gagnait parmi les enfans des hommes.
Dom Calmet et le continuateur de Bullet
ont travaillé à éclaircir ce passage de
l'Ecriture sainte, et à résoudre les diffi-
cultés qu'il a fait naître.
LAMECH , fils de Malhusalem , père de
Noé , qu'il eut à l'âge de 182 ans; après
la naissance de son fils , il en vécut en-
core o7i). Ainsi tout le temps de sa vie fut
de 7o7 ans. Il mourut la cinquième année
avant le déluge , l'an du monde 1631.
• LAMESENGÈRE ( Pierre de ) ,
homme de lettres , né à la Flèche , le 28
juin 1701 , avait été doctrinaire avant la
16 LAM
révolution. Il dévnit professeur de belles-
lettres et de philosophie au collège de la
Flèche. Il succéda à Scllèque dans la ré-
daction et la direction du Journal d^s
dames et des modes ^ depuis 1797 jusqu'à
sa mort , c'est-à-dire pendant près de 54
ans. On lui doit : \ Géographie de là
France d'après la nouvelle division en 83
déparfemens ,Varï?,, 1791, in-S" ; j A'o?^-
velle bibliothèque des enfans. ibid., 1794,
in-12 ; | Histoire naturelle des quadru-
jH'des et des reptiles . îbid. , 1794, in 12 ;
I Géographie historique et littéraire de la
France, ibid. , 1796 . 4 vol. in-12 ; | Dic-
tionnaire des proverbes français, ibid. ,
1821 , in-8" : presque tous ces ou crages
ont eu plusieurs éditions. Lamesengère a
été l'éditeur des Voyages en France , en
vers et en prose, auxquels il a ajouté des
notes. 1798, 4 vol. in-18. Il est mort à Pa-
ris, le 22 février 1831 : il était membre
du lycée des arts de Paris.
LAMET. Voyez DELA:\IET.
• LAMETn (Alexandre de), membre
de l'Asse-mblée constituante , naquit à
Pans le 28 octobre 17C0. Il était encore
au berceau , lorsqu'il perdit son père.
Après avoir fait de bonnes études classi-
ques, il embrassa la carrière militaire et
entra comme ses frères dans un régiment
de cavalerie. A l'époque où les colonies
anglaises se séparèrent de leur métro-
pole, Lameth partit pour défendre les in-
surgés et devint aide-de-camp du général
Rochambeau. Il commanda comme adju-
dant l'attaque dirigé contre la Jamaïque,
et à son retour en France , il devint co-
lonel du régiment Royal-Lorraine. Lors-
que l'année 1789 vint ouvrir en France la
carrière des changcmcns puliliqnes, La-
meth embrassa avec une convicUon ar-
dente, la cause de la révolution. Député
aux élals-généraux , par la noblesse de
Péronne , il fut un des 45 députés de cet
ordre qui passèrent les premiers dans
l'assemblée du tiers-état. Dans la fameuse
nuit du 4 août, que Rivarol appelait la
Saint-Barthélemi des privilèges, il se si-
gnala ainsi que son frère i)ar le sacrifice
des siens. Comme la plus grande partie
des membres de l'assemblée il voulait
pour la France une monarchie représen-
tative. Mais sa haine pour l'ancien régime
l'entraîna dans de graves erreurs ; et au
lieu de fonder le gouvernement sur un
juste équilibre des pouvoirs , il livra la
royauté désarmée aux attaques des fac-
tieux. Dans la discussion sur la sanction
royale Alexandre de Lameth se trouva m
opposition formelle avec Mirabeau, cl
•vota contre le veto absolu. Il lut;a encore
contre le môme orateur dans les débals
qui s'élevèrent sur le droit de i)aix et de
guerre , et malgré tous les efforts de Mi-
rabeau pour défendre l'autorité royale
contre les empiétemens excessifs de la
démocratie, il fit décider avec l'aide de
Barnave et après cinq jours de discus-
sion , que la guerre ne pouvait être dé-
clarée sans un décret de l'Assemblée. En
1790, il présenta un plan d'organisation
de l'armée qui satisfit tellement l'assem-
blée , que par une acclamation unanime
il fut adjoint au comité militaire. La loi
3ur l'avancement dans l'armée fut adoptée
sur sa proposition. Ce fut lui (mi à l'oc-
casion d'une députalion de la ville de
Liège , demanda et obtint la liberté en-
tière des join-naux , liberté qui devait
bientôt dégénérer en licence. Ce fut lui
encore qui fit consacrer par un décret la
liberté des cultes. Lors du voyage du roi
à Varennes , il proposa d'envoyer une
députation de l'assemblée pour garantir
les jours de la famille royale. Lameth
prit part à toutes les discussions impor-
tantes de cette mémorable session dans
laquelle il vota presque toujours avec
Barnave son ami , et fut élevé à la prési-
dence le 20 novembre 1790. La confiante
audace qu'il avait montrée à son début
dans la carrière législative fit place à des
craintes sérieuses sur l'avenir que la
révolution commencée préparait à la
France. Il sentit que l'assemblée com-
mettait ime faute immense en déclarant
qu'aucun de ses membres ne pourrait
être réélu, et il s'éleva avec force contre
cette délicatesse intempestive. Il parait
qu'à celte époque Louis XVI demanda ses
conseils et eut morne avec lui quelques
conférences particulières , qui n'abouti-
rent à rien. Peu de temps avant le 10
août, Lameth, effrayé de la voie sanglante
où s'engageait la révolution , chercba un
asile à l'armée et alla défendre le terri-
toire en qualilé de maréchal-de-camp
sous les ordres de Luckner. Il fit tracer
le camp de Maulde, occupé depuis par
Dumouriez, et passa après la catastrophe
du 10 août sous les ordres de Lafayt^lte.
Décrété d'accusation avec ce général , il
l'accompagna dans son émigi-alion, et fut
arrêté avec lui par les autrichiens. En-
voyé comme prisonnier à Magdebourg, sa
captivité dura trois ans et trois mois.
Rendu au bout de ce temps à la; liberté ,
il passa en Angleterre , où les Fox , les
)7 T. A M
Schoridan cl tous les chefs de l'opposition
l'accueillirent avec distinction. Mais bien-
tôt le gouvernement lui ayant intimé
l'ordre de quitter ce pays, il se retira à
Hambourg où, de concert avec son frère
et le duc d'Aiguillon, il éleva luie maison
de commerce qui prospéra. Renlré en
France sous le gouvernement directorial,
le 18 fructidor le força de nouveau à
chercher un asile en pays étranger. L'é-
tablissement du consulat au 18 brumaire
fil cesser la proscription qui pesait sur
lui. Alexandre de Lameth fut successive-
ment appelé à la préfecture des Basses-
Alpes en 1802, à celle de Rhin-et-Moselle
en 180b, à celle de la Roer en 1806, et
enfin à la préfecture du Pô en 1809. Bo-
naparte le noumia en outre maître des
requêtes , baron de l'empire , et officier
de la légion d'honneur. Louis XYIII le fit
préfet de la Somme et lieutenant-général
en 1814 ; ce qui ne l'empêcha pas d'ac-
cepter pendant les cent -jours la pairie
impériale. Après la seconde restauration,
Lameth resla sans fonction jusqu'en 1819.
Nommé à celle époqxie membre de la
chambre des députés par le département de
la Seine-Inférieure, il y prit place sur les
bancs de l'opposition, et sembla quelque-
fois retrouver la fougue impétueuse do
sa jeunesse pour attaquer l'émigration cl
le minislère. Il fit partie do toutes les
législatures qui se succédèrent jusqu'à sa
mort, qui arriva le 19 mars 1829. On a de
lui : I Un électeur à ses collègues^ Paris ,
1824 , in-8°. | La septenualité du parle-
ment d' Angleterre , ou Journal des dis-
cussions qui ont eu lieti dans les deur
(hambres, lors de cette proposition ^ etc.
Paris, 1824, in-8°, ( extrait de la revue
encyclopédique. ) La censure dévoilée ,
Paris, 1824, in-8". A. de Lameth a fourni
en outre un grand nombre d'articles à la
Minerve , et à la revue encyclopédique. Il
a aussi composé une histoire de l'assem-
blée constituante^ dont deux volumes ont
paru de son vivant.
* LAMETH ( Cuarles-Malo-François
de), frère du précédent, et comme lui
membre de l'assemblée Constituante , n,i-
quil le 5 octobre 1757. Il servit en Amé-
rique dans l'armée de Rochambeau conunn
aide-maréchal-générul-iles-logis , el s'y
distingua par son courage et ses lalens.
Blessé grièvement à la prise d'une re-
doute devant Yorck-Town, il obtint avec
la croix de St. -Louis le grade de colonel en
second des dragons d'Orléans. De nou-
velles récoiupi'nH's l'allendaienl à son
LAM 25
telour dans sa patrie. Nommé colonel du
régiment des cuirassiers du roi , il reçut
en môme temps le titre de gentillioînme
d'iionueur du coînte d'Artois. Mais il se
démit de cette dernière place, lorsqu'il fut
appelé en 1789 , à faire partie des états-
généraux , comme députe de l'Artois. Il
s'empressa comme son frère de se réunir
nu tiers-état avec plusieurs de ses collègues
de la noblesse , et il figura comme lui
parmi les plus ardens réformateurs de
l'assemblée Constituante. Dans la discus-
sion sur le cens d'éligibilité , il repoussa
l'institution du marc d'argent, parce
qu'elle tendait, disait-il, à consacrer l'a-
ristocratie des richesses. Il se prononça
pour le libre exercice de tous les cultes
et vola pour la liberté de la presse, en
déclarant qu'il vouait le plus souverain
mépris aux pamphlétaires et aux libel-
listes. Il demanda la suppression des jus-
lices prévô.tales , et s'opposa à ce que le
pouvoir exécutif eût le droit de faire
grâce. Provoqué par le duc de Castries
pour les opinions libérales, il so battit
avec ce seigneur et en reçut un coup
d'épée. Cet événement irrita le peuple
qui se porta sur l'hôtel du duc , en brisa
les meubles et les jeta par les fenêtres.
Pendant la discussion sur le livre rouge ,
Charles de Lameth garda le silence , et
lit reporter au trésor public la somme
de 60 mille francs que son éducation et
celle de ses frères avaient coulée au roi.
Lorsqu'on agita la question du droit de
paix et de guerre , il opina pour que la
guerre ne fût jamais déclarée qu'avec
l'assentiment des représentans do la na-
tion. Il ilt à la tribune celle profession
de foi politique : « Je suis ennetni de
j> toute aristocratie : j'entends par aristo-
» cratie le désir de dominer, déjà contraire
» à réga.'itc politique... Je faisais auire-
i> fois partie d'un ordre qui avait quel-
» ques avantages aristocratiques; j'y ai
» renoncé par amour pour mon pays. >'
En janvier 1791, il demanda que les places
des ecclésiastiques qui auraient refusé de
jtréter serment à la constitution fussent
déclarées vacantes. Après la fuite du roi,
il sollicita vivement l'assemblée de pren-
dre de promptes mesures de salut public,
et il provoqua le serment de fidélité à la
nation , que prêtèrent les représentans
«lui remplissaient des fonctions militaires.
Porté à la présidence de l'assemblée le 3
juillet 1791, il occupait encore le fauteuil
lors des événemens du Champ-de-lMars ,
le 17 du même mois, et il cmpétha la dé-
8 L.\?il
chéance de Louis XVI en contribuant aux
différentes mesures qui amenèrent la
dispersion des insurges. En 1792, il se
rendit à l'armée de Lafayelle où il com-
mandait la division de cavalerie. Après
la révolution du 10 août, Charles de La-
meth , qui était absent de l'armée par
congé, partit pour conduire sa femme et
sa tille au Havre. Arrêté en route et trans-
féré sous bonne escorte à Rouen , il resta
quarante sept jours enfermé au secret.
Rendu à la liberté par suite des pressaiites
soUif.-ilalions d'un de ses frères, il qiiitla
la France au moment où le comité de sa-
lut public venait d'envoyer l'ordre de
l'arrêter de nouveau , et il se réfugia à
Hambourg et ensuite à Bàle. Rentré en
France vers le commencement de ISOl, il
se retira dans ses foyers avec le grade de
général de brigade en réforme, et il y
resta jusqu'en 1807, époque où il fut réin-
tégré dans l'armée en qualilc daide-dc-
camp de Murât. Après avoir fait la cam-
pagne de 1809 contre l'Autriche , il fut
nommé gouverneur du grand duché de
Wurt7.bourg, et mérita dans ce poste la
reconnaissance du grand duc qui lui of-
frit la décoration de commandeur de son
ordre de Saint-Joseph. En juin 1812 ,
Charles de Lameth alla prendre le com-
mandement de Santona, place située sur
les côtes de la Biscaye. Il dcfentUt avec
succès ce poste imporlatst, dont il ne fit
la remise aux Espagnols que le 16 mai
1814 , d'après l'ordre de Louis XVIII. A
son retour en France, il fut nommé lieu-
tenant-général. Depuis cette époque il
vécut ,presqu'ignoré. Nommé député de
Pontoise après la révolution de juillet, il
prit place à la chambre, parmi les dépu-
tés ministériels, et ne parut que très ra-^
rement à la tribune. Comprenant un peu!
tardée que les révolutions ont de funeste,'
il répudia les aventureuses théories pro-
fessées x'ar son ancien ami , Lafayelle , et
il mit dans sa conduite politique autant de
circonspcclion et de réserve, qu'il avait
mordre dans sa jeunesse d'effervescence
et d'audace. Charles de Lameth est nmrt
le 28 décembre 1852. Ses restes ont élé
inhumes au cimetière du père Lachaise ,
à côté de ceux de son frère Alexandre.
La popularité dont il avait savouré l'i-
vresse, à l'entrée de sa carrière politique,
ne lui était point revenue dans sa vieil*
lesse. Le mépris et les insultes des jour-
naux de l'opposition avaient accueilli .^es
complaisances ministérielles; la mort de
cet liomme, qui voyait jadis le peuple pa-
LAM 2
fisicn se presser e:i fr)uie snr son passafjo,
n'a ciriu personne, et son cercueil, comme
reiiiî de l'homme le plus vulgaire, n'a
élc suivi que d'unpetil nombre de parens
et d'amis.
LAMÉTIIERIE. Voyez MÉTHERIE.
LAMETTRIE. Voyez MEÏTRIE.
* LAMEY( AxDRÉ ), savant antiquaire,
ne en 1726 , à Munster , déparlement du
Haut-Rhin , fut nommé par l'électeur de
Bavière conservateur de sa bibliothèque ;
en 1765, il devint*secrétaire perpétuel de
lacadémie de Manheim , où il mourut le
i7 mars 1802. Après avoir passé toute sa
vie à visiter les bibliothèques de l'Allema-
{pie et de l'Italie , il a publié ; | YAlsatia
ih'plomatica de Schœpflin {voy. ce nom) ;
j Codex principis olim Laweshamiensis
abbatice diplomaiicus , ex œvo maxime
carolingico , diu multumque desideratas,
?Ȕanheim, 1768,5 vol. m-k" ; \ Jlisloire di-
plomatique des anciens comtes de Ravens-
berg ( allemand ) , avec une table {jénéa-
lof;iq\!e , des cartes et cent trente-neuf
pièces justificatives, Manheim, 1776, in-i";
I vinfrt-sept Dissertations dans les ATé-
moires de l'académie de Manheim , dont
Lamey publia les sept premiers volumes,
de 1706 à 1794.
LAMI (dom Frwçois), bénédictin, né
à Montreau, village du diocèse de Char-
Ires, l'an 1656, de parens nobles, porta
d'abord lés armes , qu'il quitta ensuite
pour entrer dans la congrégation de
Saint-Maur. Il y lit profession en lGo9,
et mourut à Saint-Denis le 4 avril 1711.
II fut infiniment regretté , tani pour les
lumières de son esprit que pour la bonté
de son cœur, la candeur de son caractère,
et la pureté de ses mœurs. Les ouvrages
dont il a enrichi le public portent l'em-
preinte de ces différentes qualités. On
en peut voir la liste dans la Bibliothèque
des auteurs de la congrégation de Saint-
MauTj par dom Tassin. Les principaux
sont : I un Traité estimé De la coj^nais-
mnce de soi-même ^ Paris , 1694-1698 , 0
vol, in-12» dont la plus ample édition est
celle de 1700. Celui d'Abbadie , sur le
même sujet , semble être plus profondé-
ment pensé I Nouvel athéisme renversé^
Paris , 1696 , in-12 , contre Spinosa : ou-
vrage assez faible, et où l'auteur n'assxire
point à ses raisonnemcns le triomphe
éclatant que les absurdités de Spinosa
rendaient bien facile: | Les gémissemens
de rà?ne sous la tyrannie du corps . Pa-
ris, 1701, in-12; | Lettres philosophiques
iw divers sujets, Paris, 1705, in-12;
)9 LAM
I Les premiers FJémens . ou rentrée nnx
connaissances solides, suivi d'un 7^55(7/
de logique en forme de dialogue , Paris,
1706, in-12 ; | Lettres théologiques et vin-
rales. Paris, 1708, in-12 ; | L'incrédule
amené à la religion par la raison.on En-
tretien sur Vaccord de la raison et de la
/bï^ Paris, 1710, in-12 : livre estimé et
peu commun ; | De la connaissance et
de l'amour de Dieu. Paris, 1712, in-12,
ouvrage posthume ; | Réfutation du
système de la grâce universelle, de Ni-
cole?; I Réflexions sur le traité de la
prière publique, de Duguet. Un petit
traité de physique , fort curieux , sous ce
titre : Conjectures sur divers effets du
tonnerre, 1689, in-12 ; | Les leçons de la
sagesse sur l'engagement au service de
Dieu, Paris, 1705 , in-12 ; | La Rhétori-
que du, collège trahie par son apologiste,
in-12, contre Gibert. Le sujet de la que-
relle était la question, si la connaissance
du mouvement des esprits animaux dans
chaque passion est d'un grand poids à
l'orateur pour exciter celles qu'il veut
dans le discours. Le professeur Pourchot
avait soutenu l'affirmative; le bénédictin
la soutint avec lui contre le professeur
de rhétorique. Il parait cependant que
tout ce qui est l'effet de telles spécula-
tions est naturellement faible pour con-
vaincre et toucher. Le père Lami brillait
surtout dans la dispute. Il en eut une
assez sérieuse au monastère de La Trappe
avec le célèbre abbé de Rancé , au sujet
des études monastiques , et devant un
auditoire nombreux et clioisi. Le béné-
dictin remporta la victoire , ce qui ne
fit qu'augmenter sa réputation.
LAMÏ ( BiiR.WRD ) , prêtre de l'Ora-
toire, né à Mans, en 1645 , d'une bonne
famille, professa les humanités et la phi-
losophie dans divers collèges de sa con-
grégation, et dans tous avec le plus grand
succès. Ce fut un ecclésiastique aussi re-
marquable par sa piété sincère que par
ses connaissances étendues. Son zèle
pour les opinions de Descaries souleva
contre lui les partisans d'Aristote. Il es-
suya des chagrins àSaumur et à Angers,
où il enseigna successivement la philoso-
phie ; on en vint jusqu'à demander et
obtenir une lettre de cachet contre lui.
Le savant oratorienfut privé de sa chaire,
et relégué à Grenoble. Le cardinal Le Ca-
mus, évêque de cette ville, l'associa au
gouvernement de son diocèse , le nomma
vicaire-général , et lui confia la place de
professeur en théologie dans son sémi-
LAM
260
LAm.
naîre. Ce fui pendant son séjour dans
celte ville qu'il ramena à la foi calholique,
Vigiila, ministre protestant, qui jouissait
d'une grande réputation. Latni joijjnil
l'Ecriture sainte à la théologie , et dès
lors il prépara les matériaux des ouvra-
ges qu'il a publiés sur cette matière. Ce-
lui qui a fait le plus de bruit est sa Con-
corde des éçangélislcs , dans laquelle il
avança trois senlimensqui le brouillèrent
avec M. de Harlay , archevêque de Paris ,
et rengainèrent dans de longues contesta-
tions. Il y soutenait, premièrement , que
saint Jean-Baptisle avait été mis deux
fois en prison, la première fois par l'ordre
des prêtres et des pharisiens, la deuxième
par celui d'Hérode ; secondement , il pré-
tendait que J.-C. ne mangea pas l'agneau
pascal dans la dernière cène, et que le
véritable agneau pascal fut mis en croix,
pendant que les Juifs immolaient le typi-
que ou le figuratif; troisièmement , les
deux Maries et la pcclieresse étaient , se-
lon lui, la même personne , en quoi il pa-
raît avoir dit vrai. ( roT/ez MADELEINE.)
Bulteau , Tiilemont , Mauduit , Wilasse ,
Daniel , Piednud , attaquèrent ces opi-
nions avec beaucoup de feu , celle de la
Pâque surtout, qui ne semblait pas s'accor-
der avec le récit évangélique : yàpud te
facto Pascha cum discipulis meis. Le père
Lami était un homme très estimable , ami
de la retraite, simple, modeste; ses mœurs
étaient pures et austères. Il parlait aisé-
ment et sur toutes sortes de matières. La
république des lettres le perdit en 171S.
Il mourut à 70 ans, du chagrin qu'il res-
sentit d'avoir vu retourner à l'hérésie un
jeune homme qu'il avait converti et asso-
cié à ses travaux. On a do lui onze ou-
vrages qu'il publia de 1670 à 1701 : | Elé-
niens de géométrie et de înathématiques ^
2 vol. in-12. Il les composa dans iin
voyage qu'il fit à pied de Grenoble à Pa-
ris. I Traité de l'équilibre. 1687, in-12 ;
\ nannonia sive Co)icordia evangelica ^
Lyon , 1099, 2 vol. ïn-hT ; | Traité de per-
spective^ 1700, hi-S"; I Traité de la gran-
deur en général, in-12. Tous ces diffé-
rens traités furent bien reçus dans le
temps , mais à présent ils ne sont d'au-
cun usage. I Entretiens sur les sciences
et sur la manière d'étudier, 1706 , in-12 :
ils forment une composition estimable ,
dont la lecture serait très utile aux
jeunes gens assez, sages pour vouloir s'in-
struire , avant d'exercer leur plume au
hasard et sans principes. L'auteur leur
donne des avis très judicieux contre la
présomption et la précipitation qui le9
égarent , et peint fort bien les savans de
notre siècle. ( Voyez SPIZELIUS. ) \Dé-
ynnnstration de la sainteté et de la véj-ité
de la morale chrétienne, en 5 vol. in-12,
1706 à 1716 ; [ Introduction à l'Ecriture
sainte, traduite de VJpparatus Biblicus
de Boyer, 'in-h° : l'édition latine est 'mS°.
Il y en a un abrégé. 'ia-i'2. L'abbé de Bel-
legarde l'a aussi traduit sous le titre
d'./pparat de la Bible. in-S". Ce livre
remplit son litre , et Ton gagne beaucoup
aie lire avant que d'étudier les livres
saints. [ De tabernaCido fœderis . de
sancla civitate Jérusalem et de templo
fjus. in-fol., ouvrage savant; | une Rhé-
torique. avec des Réflexions sur l'art
poétique^ 1715, in-12. Le style de cet écri-
vain est assez net et assez facile , mais il
n'eci pas toujours pur. M. Pote, ex-pro-
fesseur de mathématiques à l'école cen-
trale de la Sartlie , a publié un Eloge du
père Lami . Le Mans , 1816 , in-8".
LAMI ( Jew ) , théologien du grand-
duc de Toscane , professeur d'iùsloire
ecclésiastique dans l'université de Flo-
rence, né en 1697 au village de Santa-
Croce, entre Pise et Florence , mort dans
cette ville le 6 janvier 1770 à 75 ans, s'est
fait connaître par un grand nombre d'ou-
vrages latins, entre autres par les Délices
des savans. Florence, 1756-69, 18 vol. in-
8", et par le Vrai sentiment des chré-
tiens sur le mystère de la très sainte Tri-
mfe', divisé en 6 livres , Florence , 1735 ,
in-i". On a aussi de lui De Eruditione
apostoldfrum liber singularis. Florence,
1758, in-8", ibid., 1766, 2 vol. in-i°. Il
rédigea de 17i0 à 1770 , à Florence, les
Nouvelles littéraires. L'éloge de Lami se
trouve au tome k des Elogi degli nomini
illustri Toscani : l'abbé François Fontanl,
bibliothécaire de la Riccardiana. en a pu-
Wié un autre plus complet, Florence,
1789, in-4°.
LA.MIA, nom d'une illustre famille ro-
maine , de laquelle descendait >ïlius La-
mia, qui est loué dans Horace. — Il y eut
un Lucics MiAV.s LAMIA , qui fut exilé
pour avoir embrassé avec trop de cha-
leur le parti do Cicéron contre Pison. Il
fut édile , puis préteur après la mort de
César. On croit que c'est lui que Pline
place, avec Aviola etTubéron, au nombre
des hommes qui ont été crus morts, et
qui ont été réveillés par le feu du bûcher
qui devait les consumer. Ilist. nat. .1. 7.
c. 52. Mais ces asphyxies n'ont rien de
comparable à celle dont il est parlé dans
LAM
26 J
LAM
le Journal hisl. et litt.. i" décenibrc 1776,
p. /i90. On peut voir diverses réflexions
sur CVS évenctiieus , ibid. , ï" décembre
i/'.M. p. 402.
Î.ASîli:. fameuse courtisane , fille d'nn
Athénien . après avoir été joueuse de
fliite. devint maîtresse de Ptoléméer"",
roi dE{fy{)te. Elle fut prise dans la bataille
navale que Démétrius Polyorcète gagna
sur ce prince auprès de l'île de Chypre.
Le vainqueur l'aima autant que le vaincu,
quoi(iu'oUe fui déjà d'un âge assez avancé.
Les Athéniens et les Thébains lui élevè-
rent, comme à toutes les célèbres corrup-
trices des bonnes mœurs , un temple sous
le nom de Vénus Lamie.
* LAMIOT (Louis-Marie), né vers
177;) dans le diocèse d'Arras , entra dans
la congrégation de St.-La/.are, en 1787, et
partit pour les missions en 1789, avec
MM. Clet et Pené, n'étant encore que dia-
cre. Il fut ordonné prêtre à Macao , et
alla à Canton , puis à Pékin où il devin.l,
depuis la mort de M. Raux , interprète du
gouvernement chinois pour les langues
européennes. Il y dirigeait en même
(emps un séminaire de jeunes Chinois,
et enseignait les mathémaliques, M. Clet,
avant élé pris dans le Ho-Nou où il prê-
chait , Lamiot fut arrêté sous prétexte
qu'il entretenait des rapports avec lui.
Durant sa translation dans le Hou-Pé,
où on le menait pour le confronter avec
cet ecclésiastique, on lui lit souffrir plu-
sieurs mauvais traitemensatin de lui arra-
cher unavcu. Le ti'ibunal décida qu'il n'é-
tait pas prouvé que Lamiot fût en rap-
port avec M. Clet , mais qu'il fallait le
renvoyer en Europe. M. Clet fut étranglé
dans sa prison, le 17 février 1820 (voyez.
l Ami de la religion, tom. 2, G. n" G24 ) ,
après avoir reçu la communion des
mains de Lamiot , qui avait trouvé le
moyen de pénétrer jusqu'à lui. Lamiot
fut conduit à Canton ; arrivé dans cette
ville au mois d'avril 1820, il se rendit peu
de temps après à Macao , où il est mort
le 5 juin 1831. Il avait fondé dans cette
ville un collège ou séminaire pour les
jeunes Chinois , et il a augmenté la mis-
sion d'au moins quinze prêtres. Il eut
aussi l'heureuse idée d'envoyer en France
de jeunes Chinois pour y faire de fortes
études.
• L-\.M[RA.L ( D<.on\iQUE-HAPXorRT ) ,
voyageur français , né à Lyon, vers l'an
1750, servit d'abord comme soldat dans
ie régiment de Provence ; il était en gar-
nison au lîâvre, lorsque M. Eyriès, lieu-
tenant de vaisseau , fut nommé gouver-
neur du Sénégal. Cet officier de marine
ayant reconnu en lui une belle écriture
avec quelque talent pour le dessin , et
pour la levée des plans, acheta son congi»
et le prit pour son secrétaire. Lamiral
satislit son prolecteur, qui le lit nommer
agent de la compagnie commerciale de la
Guyane en Afrique. La fortune lui sourit
et il acquit d'immenses richesses , qu'il
eul bientôt dissipées par sa folle î)rodiga-
\At. Il lit de nouveau fortune et dissipa
une seconde fuis ses trésors. 11 mécon-
tenta ses supérieurs, fut rappelé en 1757,
et assista à l'aurore de la révolution fran-
çaise. Après s'être vu arrêter deux fois,
il linit par occuper un emploi modeste
dans une adjninistralion, et vécut obscu-
rén)ent jusqu'à sa mort arrivée à Paris,
dans le mois de septembre 1795. Il a pu-
blié VJffrique et le peuple affriquain con-
sidérés sous tous les rapports avec notre
commerce et nos colonies, Paris, 1789, in-
8°, ouvrage qui n'a de remarquable que le
titre et qui n'est guère qu'une longue dia-
tribe'contre la compagnie au service de
laquelle il s'était enrichi. On a encore de
lui un Mémoire sur le Sénégal, Paris ,
1701, in-8°.
LAMOIGIVOX , nom d'une ancienne
famille du Nivernais , distinguée dans
les armes depuis le 15'^ siècle, et qui dans
le IC* s'ouvrit la carrière de la magistra-
ture. — LAMOIGNOÎS ( Charles de ) .
seigneur de Fiàville , né en 151/». , étutlia
le droit à Ferrare , sous le célèbre Alciai,
et fut le premier de sa famille qui en!; n
dans la magistrature : il mourut en 157." .
maître des requêtes. 11 fut visité plusieurs
fois dans sa l'ornière maladie par le roi ;
sa sagesse et son intégrité lui avaient mé-
rité cette distinction. — Son fils , PiERra
deLAMOIGNON, mort en 1584, conseiller
d'é'.-t, était un bon poète latin. Chri:-
TZE\, son autre fils, fut père du suivant.
LA3îOîG\0.% Guii.LAL.ME de), marquis
de Bàville , était petit-tils du précédent,
et naquit en 1G17. Il fut reçu conseiller
au parlement de Paris en 1635, maître
des requêtes en 1044, et se distingua dans
ces deux places par ses lumières el par
sa probité. Son mérite lui procura la
charge de premier président du parle-
ment de Paris en 1658, après la mort du
premier président de Eellièvre. Lors de
sa nomination, Louis XIV lui adressa ces
paroles flatteuses : « Si j'avais connu un
» plus homme de bien et un plus digne
i> sujet, je l'aurais choisi : » Le président
LAM
262
LAM
deLamoignon remplit tous les devoirs de
sa place avec autant de sa^jcsse que de
zèle ; il soutint les droits de sa compafïnie ;
il éleva sa voix pour le peuple ; il dés-
arma la clùcane par ses arrêts ; enfin il
crut que sa santé et sa vie étaient au pu-
blic, et non j)as à lut : c'étaient les ex-
pressions dont il se servait. Il eut quel-
ques démêlés avec Fouquet , au sujet de
ses énormes dépenses. Cependant , à l'oc-
casion du procès de ce surintendant , il
s'abstint autant qu'il put, de présider le
parlement , et il n'y assista pas le jour de
la sentence. Ses amis le pressant de re-
prendre sa place à la chambre , il répon-
dit : Lavavimanusmeas....quomodo in-
quinabo cas ? Il reconnaissait Fouquet
coupable, mais il désapprouvait l'achar-
nement avec lequel Colbert voulait pré-
cipiter l'arrêt contre un homme qu'il
haïssait. Au commencement de son règne,
Louis XIV ayant tenu un lit de justice, le
maître des cérémonies se présenta pour
saluer le parlement après les' évêques.
« Saintot, dit le premier président, la
» cour ne reçoit point vos civilités. » —
» Je l'appelle M. Saintot . réplique
• Louis XIV. » — «Sire , reprend le magis-
» trat. votre bonté vous dispense quelque-
»fois de parler en maître, mais votre par-
» lement doit toujours vous faire parler
» en roi. n Ses harangues, ses réponses, ses
arrêtés, étaient tout autant d'écrits solides
et lumineux. Son âme égalait son génie.
Simple dans ses mœurs , austère dans sa
conduite , il était le plus doux des hom-
mes, quand la veuve et l'orphelin élaijent
à ses pieds. Il se délassait de ses travaux
par les charmes de la littérature. Les
Boileau , les Racine , les Bourdaloue ,
composaient sa petite cour. Il mourut en
1G77 à 60 ans. Fléchier prononça son
oraison funèbre, et Boileau le célébra
dans ses poésies. Ses Arrêtés sur plu-
sieurs matières importantes du droit
français parurent à Paris en 1702, in-i"
et in-S", 17G8. Ils ont été réimprimés en
i78ô, avec une Vie du président de La-
moignon, écrite d'après les papiers de sa
famille.
LVMOIGiV'ON ( Chrétien -François
de ) , fils aîné du précédent , naquit à Pa-
ris en le/i'i.. Il reçut du ciel, avec un es-
prit grand, étendu, facile, solide, propre à
tout , un air noble, une voix forte et agréa-
ble, une éloquence naturelle, à latjuelle
l'art eut peu de chose à ajouter ; une mé-
moire prodigieuse , ua cœur juste et un
caractère ferme. Son père cultiva ces
heureuses dispositions. Reçu conseiller
en 1666 , sa compagnie le chargea des
commissions les plus importantes. Il de-
vint ensuite maître des requêtes, et enfin
avocat-général ; place qu'il renii)lit pen-
dant 25 ans, et dans laquelle il parut tout
ce qu'il était. Au commencement de 1690,
le roi lui donna l'agrément d'une charge
de président à mortier ; mais l'amour du
travail le retint encore 8 ans entiers dans
le parquet , et il ne profita de la grâce
du prince que lorsque sa santé et les in-
stances de sa famille ne lui permirent
plus de fuir un repos honorable. L'acadé-
mie des Inscriptions lui ouvrit ses portes
en 170/t , et le roi le nomma président de
cette compagnie l'année d'après. Boileau
lui adressa sa 6' épître. C'est lui qui fit
abolir l'épreuve , aussi ridicule qu'in-
fâme, du congrès. On n'a imprimé qu'un
de ses ouvrages , tel qu'il est sorti de sa
plume ; c'est une Lettre sur la mort du
père Bourdaloue, jésuite, qu'on trouve à
la fin du tome 5" du Carême de ce grand
orateur. Il avait fait la vie de son père ,
premier président.
' L\MOIGIVOi\ ( Nicolas) , seigneur
de Bâville, intendant du Languedoc, con-
seiller d'état , était le 5' fils du premier
président Guillaume deLamoignon (voyez
ci-dessus son article ), et frère de Chrétien-
François qui fait le sujet de l'article pré-
cédent. Il naquit en 1648, fut destiné à la
magistrature , et exerça pendant h ans les
fonctions d'avocat avec quelque succès.
Nommé conseiller au parlement en 1670,
puis maître des requêtes en 1673, il suivit
la carrière administrative, et occupa suc-
cessivement les intendances de Monlau-
ban, de Pau, de Poitiers, de Montpellier.
Il resta dans celle-ci l'espace de 33 ans
sans revenir à la cour. On l'a accusé d'a-
voir agi avec rigueur contre les protes-
tans à l'époque de la révocation de l'édit
de Nantes, et de la révolte des Ce venues.
On a dit, pour le disculper , que la posi-
tion dans laquelle il se trouvait , ses obli-
gations envers Louis XIV, qui avait com-
blé sa famille de grâces et de faveurs ,
ne lui laissaient pas la liberté d'hésiter
sur ses déterminations , et que dans ces
circonstances difficiles , les moyens de
douceur et de persuasion ne furent pas
toujours mis à la disposition des magis-
trats. Rhulières a dit que « M. de Bàville
» passait dans ce lemps-là pour un homme
» doux et modéré. « On peut consulter à ce
sujet les mémoires pour servir à l'his-
toire du Languedoc . que Lamoignon do
Bàville ccnvail par ordre du roi et pour
l'iuslruclion du duc de Bourgogne , en
iG98 : cet ouvrage a été imprimé en 17311.
à Marseille , sous la rubrique d'Amsler-
daiTi, sur un manuscrit déposé à la hi-
Miollièque du roi. Lamoignou quitta l'in-
tendance du Languedoc en 1718, et mou-
rut à Paris , en 1724. — Son fils Urbain-
Guillaume deLAMOIGNON, comte de
Launay-Courson , né en 1674, fut inten-
dant de Rouen en 170V , et de Bordeaux
en 1707. Diiclos elle de lui des traits d'ar-
bitraire et de despotisme dont l'effet fut
tel que l'intindant se vit oblige de renon-
cer à sa charfje. Il devint en 1717 conseiller
d'état ordinaire.
* LAMOIG\0\ ( Guii.LAUMii II de ) ,
seigneur de Maleslierbcs , second fils de
Chrétien-François de Lamoignon , prési-
dent au parlement, naquit en 1683, et fut
successivement avocat-général, président
du parlement de Paris, premier président
de la cour des Aides, et enfin chancelier
de France en 175.0 , sans avoir toutefois
les sceaux de l'état. En 1765 , une intrigue
de cour lui donna pour successeur dans
cette dernière place le fameux Maupeou:
Lamoignon, n'ayant point voulu donner
sa démission, fui exilé ; mais le parlement
refusa de recoimaîlre M. Maupeou sous
le titre de vice-chancelier. Plus tard
(""1768 ) cédant à des obsessions de tout
genre , Lamoignon se démit de son em-
ploi, et alors Maupeou le fils lui succéda,
avec le titre plein et entier de chancelier.
Il mourut en 1772. Giiillaume de Lamoi-
gnon fut le père de l'illustre Malesherbes
( Voyez ce nom ). Ce magistrat avait ré-
voqué le privilège de V Enctjclopédie.
" LAMOIGNOîV ( CiinÊTiEK-FnANÇOis
II de ), arrière petit-fils du président
Chrétien-François Lamoignon , dont il
descendait par le frère aîné du chancelier
Guillaume II, naquit le 18 décembre 1755,
et fut président à mortier du parlement
de Paris, en 1758. Il paitagea en 1772
l'exil du corps auquel il appartenait , fut
rappelé dès les premiers jours du règne
de Louis XVI, et se montra dès lors con-
stamuient dévoué à la cour. A l'époque
de l'assemblée des notables, en 1787, il fut
nommé garde des sceaux en remplace-
ment de Hue de Miromesnil et fut aussi
chevalier de l'ordre du Saint-Esprit. Il
travailla de concert avec le principal mi-
nistre Lomén-e de Brlenne , aux édils du
timbre et delà subvenlioii terriloriale,
dont le refus d'enregistrement occasiona
l'exil du parlement à Troyes. Ces deux
265 , LAM
ministres prirent d'autres mesures qui
éprouvèrent la même résistance de la
part de cette cour souveraine, et ils furent
obligés de se retirer. Lamoignon donna
sa démission dans le mois d'octobre 1788,
trois mois après celle de Loménie de
Brienne : il se retira dans sa terre de Bà-
ville , où il mourut le 16 mai 1789, d'un
accident de chasse dont on n'a pas connu
la vraie cause. Sa précieuse bibliothèque
fut vendue après sa mort : les plus beaux
ouvrages passèrent en Angleterre. Il laissa
trois liis ; l'aîné était conseiller au parle-
ment ; le second péril à Quiberon , et le
troisième est le vicomte Christian dont il
est question dans l'article qui suit.
' LAMOIGNOX ( Christian , vicomte
de), fils puîné de Chrétien -François II,
garde-des-sceaux sous Louis XVI, naquit
en 1770. Il suivit la carrière des armes ,
émigra au commencement de la révolu-
tion et servit dans les armées des princes.
Il fit partie, avec son frère aîné, de l'ex-
jjédilion de Quiberon; blessé à la reprise
du fort Penthièvre par les républicains,
commandés par le général Hoche , il fut
du très petit nombre de ceux qui purent
se sauver, sur les vaisseaux anglais; après
la défaite des royalistes il retourna à Lon-
dres, et il revint en France lors de l'établis-
sement du consulat. Quelque temps après,
il épousa sa nièce , sœur du comte Mole ,
ministre de Napoléon , et qui le fut de-
puis de Louis XYIII. En 1812, Lamoignon
fut nommé membre du conseil-géné-
ral du département de la Seine. Un bio-
graphe dit : <ï Que le nom de M. Lamoi-
» gnon se trouve au bas de la célèbre
» adresse que ce conseil vota dans la
» même année à Napoléon , après la dé-
i> fection des Prussiens » (dans la dernière
campagne contre la Russie , 12 janvier
1815). Cependant, lors de la restauration,
on a essayé de prouver que M. Lamoi
gnon ne s'était point trouvé à l'assemblée
quand l'adresse fut votée. Il est certain
qu'il signa celle qui fui rédigée par M. Bel-
lart, le premier avril 1814, contre Bona-
parte. Louis XVIII l'en récompensa en
le nommant chevalier d* la légiou-
d'honneur et pair de France. Au retour
de Napoléon , il ne siégea pas dans la
chambre haute ; on ne le vit y reparaître
qu'à la seconde restauration. Lors de
l'examen du projet de loi sur l'abolition
du divorce en avril 1816, il fut rapporteur
de la commission formée pour le faire, et
appuya fortement ce projet. En 1819, il se
prononça contre le ministère d'alors , et
LAM
26/i
LAM
devint un des membres les plus actifs de
la majoiilé de la chambre. Cille majorité
devenant menaçante, une ordonnance du
I> septembre et la crcalio/i d'un {j''ii"ii
nombre de nouveaux pairs en diminuè-
rent l'influence. On effectua celte nomi-
nation le y mars suivant ; elle donna
lieu à une séance très orageuse, pendant
laquelle M. de Lamoignon proposa une
adresse au roi, pour exprimer à sa ma-
jesté « le regret avec lequel la chambre
» haute voyait l'augmentalion du nombre
I) de ses menibres. » Mais cette remon-
trance resta sans effet , le roi ayant, parmi
ses prérogatives , celle de créer des pairs
à sa volonté. Dans 1. s sessions suivantes,
M. de Lamoignon a toujours voie avec la
majorité. Il est mort le 12 mars 1826, âgé
de otJans
LAMOIGNOIV DE MALESIIERBES
( Chrétien-Guillaume de ). Voyez MA-
LESHERBES.
* LAMON^OYE ( Anselme -Fuaxçois-
Marie de ) , littérateur français , mort à
Paris le 19 juillet 1829, a publié : | la Jé-
rusalem délwrée, poème du Tasse, nou-
velle traduction envers français , 1818,
in- 8° -, I quelques pièces fugitives d'un
Almanach des Muses. Il avait été édi-
teur des OEuvres de Chcwles-J. Demous-
(ier_, Paris, B. A. Renouard , 1805 , 2 vol.
in-S**, ou 5 vol. in-18.
LAMORINIÈilE ( SuioN-BAinnÉLEr-u-
JosEPU NOËL de ). f^oijez NOËL DE LA
MORINIÈRE.
* LAMOTIIE-PIQUET ( N.-F. ) né en
1720. entra dans la marine royale, et par-
vint rapidement , grâce à l'intelligence
et à l'intrépidité dont il fit preuve, au
grade de capitaine de vaisseau. Ilavait déjà
rendu de grands services à son pays, no-
lanuTient dans les mers de l'Inde , lors-
qu'une nouvelle action d'éclat dans les
mers d'Amérique , acheva d'illustrer son
nom. Avec un seul vaisseau , YJnnihaL
qui pouvait à peine tenir la mer, il attaqua
audacieusement quatorze vaisseaux an-
glais , et parvint à sauver un convoi
français qu'ils étaient sur le point de cap-
turer. Le grade de lieutenant-général des
armées navales devint sa récompense,
et Lamothe-Piquet continua de porter la
terreur dans la marine anglaise. Il mou-
rut à Brest , le 10 juin 17'.)1. Le quatrain
suivant a été placé au bas de son ;);nirait :
LAMOTTE. rotjez HOUDAF.D,
LAMOÏJRETTE ( Aoriex ) , évoque
constilulionntl de Lyon, na([uil à Fré-
vent , dans le Boulonais, en 1742. Il entra
dans la congrégation des lazaristes, et fui
successivement supérieur du séminaire
de Toul, directeur à Saint -Lazare , tt
grand-vicaire d'Arras en 1789. Il s'était
distingué jusqu'alors par une piété aj)pa-
rente, ou, si elle était sincère, du moins
elle fut pou constante et trop faible pour
lutter contre les séductions du siècle. Ce-
pendant il avait déjà publié quelques
écrits, où, parmi les maximes de religion,
il avait mêlé des idées philosophiques.
Celle tendance aux innovations révolu-
tionnaires le lit choisir par Mirabeau
pour son théologien, et il se servait de la
plume de Lamourelto lorsqu'il avait à
parler sur des matières religieuses. Ce fut
Lamourelîe qui rédigea le projet d'A-
dresse au peuple français, sur la consti-
tution civile du. clergé ^ que Mirabeau lut
à rasseiïiblée Constituante. Ayant prêté
le serment exigé, Lamouretle fut nommé
à l'évècaé de Lyon , et sacré à Paris le 27
mars 1791. Le département de Saône-et-
Loire le choisit pour député à l'assemblée
Législative, 'OÙ il se montra d'abord un
des plus modérés. Lamouretle se déclara
contre la liberté des cultes, contre la ré-
publique et les deux chambres , et de-
manda qu'oii fit cesser toutes les recher-
ches relatives aux chefs de l'insurrec-
tion du 20 juin 1792, contre la famille
royale, dans le château des Tuileries, c'est
à celle époque qu'il lit sa fameuse motion,
à laquelle il doit la plus grande partie
de sa célébrité , el qui tendait à réunir
dans un même esprit tous les membres
d3 l'assemblée Législative. Le résuliat de
cet appe! à l'union et à la fraternité fut de
détruire passagèrement les distinctions
de partis qui y existaient, et l'on vit Du-
n)as et Bazire , Chabot et Gentil, Jaucourt
et Merlin , Paslurct et Coiidorcet , Albitle
et Ramond , etc., etc., se serrer mutuel-
lement dans leurs bras (i). LamourcUe
parut insensible au terrible événement
du 10 août de la vnême année. Lorsque
Louis XVI fut enfermé avec sa famille
dans la tour du Temple, il demanda que
toute coaununication fut interdittî entre
les membres de la famille royale. Le MO'
niteur sélant trompé de nom , et ayant
y\
irin , dès ta prem
ière .i.-.i-or(-
V,
.tirUr. .cher ini-n
f. .1 tes tiv.-i
1.
E
Fraoce s.iit et: qi
l'Angleterre plus
e lu vaux ,
encore.
(i) Dos plaisant ne virent dans celle (J'-montUati
de fraternité que le càté <]ui pouvait pr"
ItmLuurg , el l'appeltTcnt le bai:i
■de Lama
LAM
265
LAM
sî{înalé M. Damourctte , honnête culliva-
îcurdes Ardennes, confime auteur de cette
motion cruelle, ce député réclama contre
'• ite assertion, et le Moniteur se rétracta
le 6 septembre 1792 , en déclarant pour
véritable auteur de la motion l'abbé La-
isiourelte, évéque de Lyon. Il revinlbien-
tot à des idées plus humaines et plus
équitables, lorsqu'il vit répandre le sang
innocent ; il attaqua les factieux , parla
avec courage et vigueur contre les mas-
sacres du 2 septembre , où périrent dans
les prisons et les églises tant d'infortu-
nés, parmi lesquels on comptait un grand
nombre de prêtres. A la clôture de l'as-
semblée Législative, il se retira à Lyon ,
où, pendant le règne des terroristes, il se
prononça en faveur des habitans de cette
malheureuse ville. Tombé plus tard au
pouvoir des factieux , Lamouretle fut
conduit à Paris, et enfermé dans la Con-
ciergerie, où il trouva l'abbé Emery. Les
conseils de ce respectable ecclésiastique
et sa propre conscience l'amenèrent à
signer , le 7 janvier 1794 , une rétracta-
tion de ses erreurs passées : l'original de
cette pièce se conserve à Lyon. Il s'y dé-
clara auteur des discours prononcés par
Mirabeau sur les matières ecclésiastiques.
-Goiidamné à mort par le tribunal révolu-
tionnaire , il monta à l'échafaud avec un
calme çt une résignation chrétiennes qui
édifièrent les autres victimes qui l'accom-
pagnaient au supplice. Il fut exécuté le
10 janvier de la même année 1794 ; ilavait
alors B2 ans. Quelles qu'aient été les
fautes de ce pécheur repentant , il faut
avouer qu'il fut plus imprudent que cou-
pole. Il a laissé : | Pensées sur la philo-
/sophie de l'incrédulité^ on Réflexions sur
l'esjjritet le dessein des philosophes irré-
ligieux de ce siècle , 1786, in-8° ; | Pen-
sées sur la philosophie de la foi^ ou Le
système du christianisme considéré dajis
ton analogie avec les idées naturelles de
l'entendement humain^ 1789, in-S" ; | Les
Délices de la religion, ou Le pouvoir de
l'Evangile jmur nous rendre heureux .
i788, in-12, traduit en espagnol , Madrid,
1791, in-8°; | Décret de l'Assemblée na-
tionale sur les biens du clergé, justifié par
la nature et les lois de l'institution ecclé-
siastique. 1789-1790 , in-8° ; | Lettre pas-
torale^ suivie de la. Lettre au pape. Lyon,
i790-1791 ; | Prône et J^épres. ou Le pas-
teur patriote 1 1790- 1791 ; | Coiisidéra-
tions sur l'esprit et le devoir de la vie
religieuse , publiées après sa mort, 1793 ,
in 12.
7.
' LAMOUROllX ( JEAiv-Vr!«CE!<T-FÉ-
Lix ) , naturaliste distingué, né à Agen,
en 1779, était fils d'un manufacturier de
toiles peintes, et étudia d'abord la chimie
et la botanique dans le but d'aider son
père dans ses travaux; mais son profes-
seur de botanique , Saint-Amans , ne
tarda pas à remarquer en lui de rares dis-
positions pour la science , et il le désigna
même souvent pour le suppléer dans ses
cours publics. En 1808, Lamouroux s'é-
tant vu obligé par suite des circonstances
d'abandonner ses affaires commerciales,
accepta la chaire d'histoire naturelle à
la faculté des sciences de l'académie de
Caen. Il la remplit de la manière la plus
honorable, et mourut d'une attaque d'a-
poplexie foudroyante dans cette ville
le 26 mars 1825. Sa méthode d'enseigne-
ment n'a pas moins contribué à sa réputa-
tion que ses différeas écrits. Sa position
lui avait permis de se livrer à son goût
favori pour l'histoire naturelle , surtout
pour la partie qui concerne la mer , à la-
quelle il a fait faire de grands progrès :
ses collections étaient très riches ; la
ville de Caen les a acquises pour son
musée. Outre un grand nombre d'articles
insérés dans divers journaux et recueils
scientifiques et dans le Dictionnaire clas-
sique d'histoire naturelle j il a publié les
ouvrages suivans. | Dissertation sur plu-
sieurs espèces de fucus peu connues ou
nouvelles, avec leur description eri latin
et en français, Agen, 1805, in-4", avec 50
planches ; | Essai sur les genres des
thalassiophijtesnon ai'ticulées. 1815, in-4".
avec fig. ; | Histoire des polypiers coral-
ligènes flexibles vulgairement nommés
Zoophyfes . Caen et Paris, 1816, in-S",
avec 19 planches ; | Exposition métho-
dique des genres de l'ordre des poly-
piers . avec leur description, etc. Paris ,
1821, in -4° ; | Résumé d'un coun
élémentaire de géographie physique j
autorisé par l'université pour l'enseigne-'
ment de cette partie de l'histoire natu-
relle. Caen et Paris , 1821 , in-S". | Notice
sur les Aras bleus nés en France et accli-
mates dans le département du Calvados^
Paris, 1825, in-8° ; ] Notice sur lamustée^
poisson qui vit dans l'Orne, etc. Il a fait
en grande partie V Histoire des vers dans
V Encyclopédie méthodique, et il a publié
un supplément aux Icônes zoophitorum
d'Esper. On lui doit encore la publication
de quelques volumes d'une édition de
Buffon. en 40 vol. in-8°, commencée en
1824, et continuée par M. Desmarets.
23
LA.1UPE ( Frédéric-Adolphe ) , théolo-
gien protestant , né à Dethmold, dans le
comté de la Lippe, le 19 février 1683,
fut successivement ministre de plusieurs
églises, puis docteur et professeur en
théologie, et d'histoire ecclésiastique, à
Utrecht, et mourut pasteur de Saiiil-
Etienne de Brème, d'une hémorragie, en
1729 , à 46 ans, laissant plusieurs ouvra-
ges, parmi lesquels on distingue son traité
ne cymbalis veterum^ Utrecht, 1703,
in-12 avec fig. et son commentaire sur
i Evangile de saint Jean, 1724-23, en 3
gros vol. in-i" , plein de savantes minu-
ties. On a encore de lui : un Abrégé de la
théologie naturelle /\n-%'^ . Il travailla avec
Tlicodore de Hase , à un Journal intitulé
lUbliotheca historico philogolico-tkeolo-
(jica bremensis a et donna une édition de
Jlist. ecclesiœ reformatœ in Hungaria et
Transilvania de Paul Emhert , avec des
siipplémens, Utrecht. 1728, in-8"- La vie
(ie Lampe a été publiée dans le t. 2 des
Miscell. Duisburgensia et dans les Jeta
£ruditormn gcrman. sect. XXXV^ etc.
* LAMPILLAS ( l'abbé don Fraxçois-
Xavier ), ecclésiastique et littérateur es-
pagnol , naquit à Jaen , dans l'Andalou-
sie , en 1759. Jeune encore , il entra chez
les jésuites, et y resta jusqu'à la destruc-
tion de cette société. Il occupait la chaire
de belles-lettres au collège de Séville ,
lorsqu'il fut forcé de quitter son pays par
suite des mesures sévères que l'on prit
contre les religieux de son ordre : il se re-
tira à Gènes avec plusieurs de ses con-
( frères. Là, uniquement occupé de l'étude
de la langue et de la littérature italienne,
il mit au jour son Saggio storico j ou Es-
.sai historique et apologétique de littéra-
ture espagnole, qui était une réponse
à deux écrits des pères Bettinelli et Ti-
raboschi , où ces derniers parlent avec
beaucoup de prévention de la littérature
espagnole. Cet ouvrage parut à Gènes, en
1778-1781 , en 6 vol. in-8° ; il eut un très
grand succès. L'abbé Lampillas y fait
preuve d'une érudition peu commune;
il prouve aux Italiens qu'ils ont été les
premières causes de la décadence des let-
tres et de la littérature : ce qui n'aurait
point été répondre à ses adversaires , s'il
n'avait fait voir en même temps qu'au
milieu de la plus profonde ignorance des
nations , l'Espagne conservait encore des
génies distingués, et qu'elle a été pres-
que le berceau de la renaissance des let-
tres en Europe. On pourrait peut-être lui
disputer cet éloge; mais Charles III , roi
266 LAM
d'Espagne, eu prince reconnaissant, com-
bla de bienfaits l'auteur qui employait sea
talens à la gloire de sa patrie. Bettinclii
cl Tiraboschi répondirent à cet Essai his-
torique par deux lettres^ auxquelles Lam-
pillas répliqua à son tour. Ces diverses
pièces furent imprimées à Rome en 1781.
Il a ajouté à ses productions des Poésies
italieimes , qui ne sont pas sans mérite. 11
est mort à Gènes en novembre 1798.
LAMPRIDE ( y'Elius Lampridius), his-
torien latin du 4"^ siècle, sous les règnes
de Dioclétien et de Constance Chlore ,
avait composé la FUe de plusieurs empe-
reurs , mais il ne nous reste que celle de
Commode, de Diadumène, fils de Macrin ,
d'Héliogabale et d'Alexandre Sévère. Ces
ouvrages, qui lui sont attribués à tort,
selon quelques critiques , ont été impri-
més une première fois à Milan , et on les
trouve dans Historiœ Jugustœ scriptores,
Leyde , 1671 , 2 vol. in-8". Cet auteur of-
fre des choses curieuses, omises par la
plupart des historiens et qui concourent
cependant à donner une idée juste de ces
souverains de Rome. Son style est plutôt
celui d'un recueil d'anecdotes que d'une
histoire suivie. Vossius {Dehist. lat. ) et
Fabricius {Biblioth. lat. ) croient que
Lampride et Sparlien ne sont qu'un seul
et même écrivain, mais de Moulines a
réfuté cette opinion, et a donné ce qui
reste de Lampride dans sa traduction des
Ecrivains de l'hist. d'Auguste. Ces frag-
mens ont aussi été traduits en français
par de Marolles.
LAWPÎUDE (Benoit) , célèbre poète ,
né à Crémone , vers la lin du IS' siècle,
enseigna les langues grecque et latine avec
répulalionàRome,oùLéonX le protégea.
Après la mort de ce pontife , il se retira
à Padoue , et fut ensuite précepteur du
fils de Frédéric de Gonzague, duc de
Mantoue. On a de lui des Epigrammes .
des Odes, et d'autres pièces en vers , eu
grec et en latin, Venise, 1540, in-8° :
elles ont été insérées depuis dans le ô*^ vol.
des Carmina illustrium poetarum Italo-
rum, Florence, 1719 et dans d'autres re-
cueils. Il mourut en 1340, ou suivant Ti-
raboschi en 1542.
LAMPSOIV ou LAMPSONIUS (Domini-
que), littérateur flamand , né à Bruges
en 1532 , s'attacha au célèbre cardinal Po-
lus , le suivit en Angleterre , cl se relira
à Liège après la mort de ce prélat , en
15S8. Il y fut secrétaire des évéqucs et
princes Gérard de Groësbcck et d'Ernest
de Ba\icre. Mal^jré ses occupations, il
LAN
267
LAN
trouva le loisir de prendre avec fruil des
leçons de peiiiUire de Lambert Lombart.
Par reconnaissance, il écrivit la Fie de ce
peintre , qui fut publiée à Bruges par Hu-
bert Golliius, en 1565 , in-8°. Il célébra
aussi en vers lalins les peintres les plus
renommés des Pays-Bas dans un ouvrage
qui a pour titre : Elogia i^ effigies pic-
torum celebrium Germanice infériorisa
Anvers, 1572, in-i°. Il mourut à Liège
l'an 1599.
LAIVA-TERZI (François de), né à
Brescia ( Brixia^ qu'il ne faut pas con-
fondre avec Brixinium, Brixen ) Tan 1631,
se fit jésuite, et enseigna avec beaucoup
de distinction la philosophie et les ma-
thématiques. On a de lui plusieurs ou-
vrages sa vans et curieux sur la physique,
écrits en italien , entre autres un recueil
des nouvelles inventions , sous le,titre de
Prodromo ail' artemaestra^Br cscia, 1670,
in-fol. ; ouvrage qui a reparu dans ia
même ville en 168i , sous le titre de Ma-
gisterium naturce et artis^ 3 tom. in-fol.,
avec fig. {Voyez STURM Christopue, et
le Journ. hist. et littér., l"mars 1784, p.
346.) Les Œuvres de François Lana et
de Philippe Lobmeir , sur la navigation
dans les airs, ont été traduites en alle-
mand avec des remarques , par M. Heer-
brandt, Tubingeu , 1784, in-8" de 80
pages. Ce Philippe Lobmeir mit au jour,
à Wittenberg , en 1C79 , une dissertation
avec ce titre : Exercitatio phxjsica de ar-
tificio navigandiper aerem. Il parait avoir
copié Lana ou plutôt Sturrn , dont le Col-
legiuin avait paru 3 ans avant son Exer-
citatio. Le père Lana publia d'autres ou-
vrages sur divers points de physique. Il
est mort à Brescia en 1687. Les détrac-
teurs de Montgolfîer ont prétendu qu'il
avait puisé la première idée de ses aéro-
stats dans l'ouvrage de Lana-Terzi dont il
a été donné un extrait intitulé Navis Vo-
lans j. Naples , 1784.
LAIVCELOT, ou plutôt LANCELLOTI
( Jeax-Paul ) , jurisconsulte célèbre de
Pérouse, mort dans sa patrie en 1591,
à quatre-vingts ans , composa divers ou-
vrages, entre autres celui des Insti-
tutes du droit canon en latin , à l'imita-
tion de celles que l'empereur Juslinien
avait fait dresser pour servir d'introduc-
tion au droit civil. Il dit dans la préface
de cet ouvrage , qu'il y avait travaillé par
ordre du pape Paul IV , et que ces insti-
tutes furent approuvées par des commis-
saires députés pour les examiner. Nous
en avons diverses éditions avec des notes.
La meillciire est celle de Doujaf, en
2 vol. in-12. M. Durand de Maillane en a
donné une Iraduclion en français avec
des remarques, en 10 vol. in-12, Lyon ,
1770. On a encore de Lancclot un Corps
du droit canon, in-4''.
LA?.'CELOT (dom Clacde), habile
grammairien , né à Paris en 1615 , fut
employé, par les solitaires de Port-Royal,
dans une école qu'ils avaient établie à
Paris , enseigna les humanités et les ma-
thématiques. Il fut ensuite chargé de l'é-
ducation des princes de Conti. Celle édu-
cation lui ayant été ôtée après la inort de
la princesse leur mère, il prit l'habil de
Saint-Benoît dans l'abbaye de Saint-Cy-
ran. Ayant contribue à élever quelques
troubles dans ce monastère , il fut exilé à
Quimperlay en Basse-Bretagne , où il
mourut en 1693 , à 79 ans. Les vertus que
lui attribuent les Mémoires sur Port-
Royal ne s'accordent guère avec ce qu'en
disait le comte de Brienne en 1685.
« Claude Lancelot, né en 1616, est bien
» le plus enlété janséniste et le plus pé-
» dant que j'aie jamais vu. Son père étoit
» mouleur de bois à Paris. Il fut précep-
i> teur de messeigneurs les princes do
» Conti , d'auprès desquels le roi le chassa
D lui-même , après la mort de la princesse
» leur mère , ce qui l'obligea de se retirer
» en l'abbaye de Saint-Cyran , où il a voit
» déjà reçu le sous-diaconat. Depuis son
» retour dans cette abbaye , il y faisoit l;i
» cuisine, et très mal; ce qu'il continua
«jusqu'à la mort du dernier abbé de
» Saint-Cyran. » Ses principaux ouvrages
sont I : Nouvelle méthode pour appren-
dre la langue latine ,Vdx'\.% , 1644; in-S",
3* édition, avec des augmentations con-
sidérables, 1656; autre, avec un indev
général des mots lalins , 1761 ; nouvelle
édition avec de courtes notes , 1819.
Lancelot est le premier qui se soit af-
franchi de la coutume de donner à des
enfans les règles du latin en latin même ;
coutume qui , avec des difficultés d'a-
bord rebutantes, avait l'avantage de
hâter les progrès des écoliers , et de leur
donner la pratique avec la théorie : aussi
s'aperçoit-on que depuis qu'on l'a négli-
gée, l'usage de la langue latine est fort
déchu. Les grammaires de Despautèro.
d'Alvarès , et d'autres qui ont fait tant de
bons latinistes, étaient écrites en latin.
On a beau dire que cela est absurde, quil
est contre la nature et l'ordre des choses
d'enseigner une langue dans cette langue
même ,puisque cela suppose qu'on la sait
LAIV
268
LAN
déjà ; dans les langues mortes cela est ab-
solument nécessaire ; c'est le seul moyen
de se les rendre familières, et de sup-
pléer l'avantage qu'on a dans l'appren-
tissage des langues vivantes. Dès qu'on
en sait assez pour comprendre imparfai-
tement quelques constructions , il faut s'at-
tacher aux grammaires latines. C'est le
cas d'un enfant qui apprend à marcher ,
à danser ; ce n'est qu'en pratiquant ces
choses qu'il les apprend. Savait-il la lan-
gue maternelle quand on a entrepris de
la lui apprendre? [Voy. la défense de ces
observations dans le Joum. hist. et lit-
tér., 15 janvier 1783. ) On peut regarder
l'ouvrage de Lancelot comme un extrait
de ce que Valle , Scaliger , Scioppius, Sa-
turnius et surtout Sauctius ont écrit sur la
langue latine. On y trouve des remar-
ques curieuses sur les noms romains, ses-
terces, sur la manière de prononcer et
d'écrire des anciens ; | JSouveile Méthode
pour apprendre le grec. Elle vit le jour
en 1653, in-8°, chez Vitré, et réimprimée,
souvent , l'a été encore en 1819 : ces deux
ouvrages ont été traduits en anglais ; | des
Abrégés de ces deux ouvrages. On pré-
tend que Louis XIV se servit de la mé-
thode latine. Les vers français de ces
deux ouvrages sont de Sacy ; | Le Jardin
des racines grecques j in-8° , 1657. ( Voyez
LABBE. ) Cet ouvrage a eu un grand nom-
bre d'éditions ; il a servi de modèle à bien
d'autres Jardins de racines pour l'étude
de diverses langues , et dont le succès n'a
fié égalé par celui d'aucune de ses nom-
breuses imitations ; une Grammaire ita~
tienne^ in-i2 ; \ une Grammaire espa-
fjnole, in-12; 1 Grammaire générale et
raisonnée, in-12, réimprimée en 1754
par les soins de Duclos , secrétaire de l'a-
cadémie française. Cet ouvrage , fait sur
le plan et sur les idées du docteur Ar-
nauld, a été traduit en plusieurs lan-
gues ; I Deleclus epigrammatum ^ en 2
vol. in-12 , avec une Préface par Nicole ;
! Mémoires pour servir à la vie de Sainl-
Cyran, en 2 parties in-12 : ouvrage d'un
enthousiaste , qu'il faut apprécier sur la
vie et les qualités connues de son héros.
' Voij. VERGER) ; | Dissertation surVhé-
miyie de vin et la livre de pain de Saint-
Henoit, in-i2. Le savant Mabillon réfuta
inodeslement l'opinion de l'auteur ; | les
Dissertations^ les Observations et la Chro-
nologie sacrée^ qui se trouvent dans la
Bible de Vitré , Paris , 1662 . in-fol.
LAIVCELOT, roi de Naples. Voyez
LADISLAS ,
LAXCISI (Jean-Marie), célèbre mé-
decin italien, né à Rome en 1654 , mort
dans cette ville en 1720, professeur d'a-
natomie au collège de la Sapience , méde-
cin et camérier secret d'Innocent XI et de
Clément XI, exerça ses emplois avec
beaucoup de succès. Il laissa une nom-
breuse bibliothèque, qu'il donna à l'hô-
pital du Saint-Esprit, à condition qu'elle '
serait publique. L'abbé Christophe Car-
sughi immortalisa ce don précieux par sa
Bibliotheca Lancisiana^ Rome, 1718,
in-i». La plupart de ses productions ont
été imprimées à Genève en 1718 , 2 vol.
in-i<*, réimprimées en latin en 1739, in-
fol., et en 1745, 4 vol. in-4''. On y trouv»;
différens Traités curieux sur les moris
subites, sur les mauvais effets des va-
peurs de marais, sur le ver solitaire, sur
les maladies épidémiques des bestiaux .
sur la manière dont les médecins doivent
étudier. On a encore de lui une édition
de la Metallotheca vaticana de Michel
Mercati , Rome , 1717 , avec un Supplé-
ment de 1719 , qui manque souvent.
LANCIVAL. Voyez LUCE de.
LANCRET (Nicolas), peintre pari-
sien, né en 1690, mort en 1743, aimé cl
estimé, étudia sous Pierre d'Ulin et Gil-
lot : il eut aussi Watteau pour maître :
mais il ne saisit ni la finesse de son pin-
ceau , ni la délicatesse de son dessin. Il a
fait pourtant plusieurs choses agréables
et d'une composition riante. On a gravé
plus de 80 sujets d'après ses tableaux.
LA1\DA ( Catheriive ) , dame de Plai-
sance , cultivait les lettres sans vanité,
et n'avait pas les défauts ordinaires des
femmes savantes. Elle écrivit en 1526 une
Lettre latine à Bembo, qui se trouve avec
celles de cet habile homme. Elle était
sœur du comte Augustin Lando, et femme
du comte Jean Fermo Trivulcio.
* LANDAIS ( Pierre ) , était fils d'un
tailleur de Vitré , et travaillait de son état
chez le tailleur de François II, duc de
Bretagne, en 1475. Il s'insinua dans les
bonnes grâces de ce prince qui l'éleva ra-
pidement jusqu'à la place importante de
grand trésorier. Landais était peut-être
le plus adroit politique qu'il y eût alors
en Europe. Entreprenant et infatigable ,
il était en même temps d'une dureté t- 1
d'un orgueil qui le rendirent le tyran du
peuple et l'oppresseur de la noblesse.
Ennemi de tous ceux qui pouvaient lui
faire ombrage ( Voyez V Histoire des ducs
de Bretagne par Desfontaines , tome 2 ,
page 141 ) , il ne craisnît pas d'accuser
LAIV
2C9
LAIV
(le concussion le vertueux chancelier
Chauvin , qu'il fit jeter dans une prison ,
où il mourut misérablement , et il dis-
posa de sa place en faveur de Fr. Chré-
tien , un de ses flatteurs. Ce dernier crime
acheva de le rendre odieux , surtout aux
{grands, qui essayèrent , mais inutilement
de le perdre. Enfin François II , voyant
ses sujets prêts à se révolter , consentit à
un examen juridique de la conduite de
son indigne favori, et le remit entre les
mains du chancelier , en rappelant à ce
dernier qu'il devait sa charge à Landais.
La perte du grand trésorier était jurée.
Les commissaires , chargés de lui faire
son procès, le condamnèrent à être pendu,
et cet arrêt fut exécuté le J9 juillet 1483 ,
sans avoir été présenté à la sanction du
duc , qui lui aurait sans doute accordé sa
grâce. La confiscation de ses biens, qui
étaient immenses , avait été prenoncée ;
mais la fille de Landais en obtint la re-
mise, et elle épousa, peu de temps après,
un noble breton. Landais avait marié sa
sœur à Adenet Guillé. Elle eut six en-
fans , dont le second nommé Michel , fut
évéque de Dol, et ensuite de Rennes; le
troisième, nommé Robert, fut évéque
de Nantes , cardinal et ambassadeur près
du pape Innocent VIII.
* LAIVDAZURI ( JoACHiM ) , prêtre es-
pagnol, naquit à Vittoriaen 1754, embrassa
rétat ecclésiastique, et se livra avec un
ïèle particulier à l'étude de l'histoire de
son pays. Il a laissé plusieurs ouvrages
(ians ce genre, très intéressans par les
détails que l'on y trouve , et par la ma-
nière dont ils sont rapportés. Charles III,
reconnaissant des services qu'il avait ren-
dus à son pays, lui accorda une pension
et l'académie espagnole le reçut parmi
ses membres. On a de cet historien ; | His-
toire ecclésiastique et politique de la Bis-
caye. Vittoria, 1752, S vol. in-i»; | Géo-
yraphie de la Biscaye. 1760 , 2 vol. in-8°.
C'est de toutes les gcographies de cette
province celle qui se distingue le plus par
son exactitude : | Histoire des hommes
illustres de la i?wa?/e. Vittoria, 1786,
in-i". Landazuri mourut à Vittoria, le 12
■janvier 1806, regretté de tous ses com-
(palriotes, auxquels il avait consacré pres-
jquc tous les travaux de sa vie.
LAIVDERIC. roijez LAKDRI.
LAXDES. J^oijez DESLANDES.
LAIVDINO et non LANDINI ( Christo-
l'HE ) , littérateur italien , né à Florence
en 1424, a traduit V Histoire natwelle de
Pline. Sa Fersion. qui n'est pas toujours
exacte , fut imprimée par Janson , à Ve-
nise, en 1476 , in-fol. En 1482 , on impri-
ma à Florence , in-folio , ses Commen-
taires latins sur Horace , et à Venise en
1520 , ceux qu'il a faits sur Virgile. Ils
ont été réimprimés plusieurs fois depuis :
mais la première édition est la plus re-
cherchée. On lui doit aussi des Notes sur
le Dante , qui ont été jointes à celles de
Vellutello sur le même auteur, par San-
sovino , etc. lia donné en outre Disputa-
tionum camaldulensium librilF. Dialogi
de nobilitate animce. etc. Il était de l'a-
cadémie platonique de Florence.
LANDO ou LANDI ( Ortensio ), mé-
decin milanais du 16' siècle , ne tarda pas
à quitter sa profession, trop grave pour
un esprit aussi léger que le sien. Après
avoir voyagé en France et en Italie, il
s'attacha aux évêques de Catane et de
Trente , assista à l'ouverture du concile
tenu dans cette dernière ville , et mourut
à Venise en 1560. Il est auteur de plu-
sieurs ouvrages , qu'il se plaisait à pu-
blier sous des noms supposés. On a de
lui : I un dialogue intitulé : Forciancf
quœstioneSj où il examine les mœurs et
l'esprit des divers peuples d'Italie , et
où il prend le nom de Philalethes Polyto-
piensis.Lou\ âin, 1550, in-8° ; | deux autres
BialoguesA'un intitulé : Cicero relega-
tus. et l'autre Cicero revocatus. qui ont
été faussement attribués au cardinal Jé-
rôme Alexandre. Ils parurent à Lyon, où
Lando était alors, en 1 534, in-8°. Plusieurs
de ses opuscules ont été réimprimés à Ve-
nise, en 1554, sous ce titre : Farj-com-
ponimentid'Orlensio Lamio , cioè dialo-
ghi, novelle . favole ; c'est uti vo!. in-S".
Lando , dans ses voyages en Allemagne,
en Suisse , etc. , s'était laissé corrompre
par les novateurs ; plusieurs de ses ou-
vrages ont été rais à l'index. On peut con- |
sulter le tom. VII de la Storia Letteraria
d'Italia. par Tiraboschi , et le tome pre-
mier des Memorie per la Storia letteraria
de Piacenza. par Poggiali.
* LANDOLPIIE ( Jean-Fraivçois ) , ca-
pitaine dans la marine marchande et mi-
litaire , né à Auxonne en Bourgogne, le 3
février 1747, était le dernier de vingt-
deux enfans. Il vint étudier la chirurgie
à Paris, et y renonça au bout d'un an pour
entrer dans la marine. S'ctant rendu
à Nantes , il s'engagea comme mousse à
bord d'un bâtiment marchand , et s'em-
barqua en 1766; pendant les nombreux
voyages qu'il fit depuis cette année jus-
qu'en 1786, il donna des preuves dé cou-
23.
LA]V
270
LAl^
rage et de capacité. A celle époque une
riche compagnie le chargea de l'établis-
sement et de la direction d'un comptoir
dans les régions inconnues qui bordent
le golfe de Guinée. Landolphe raconte
lui-même dans ses Mémoires tous les dé-
tails de cette expédition périlleuse. Il
nous y apprend qu'étant parvenu à .se
concilier la bienveillance du roi d'Ouère,
il en obtint la permission de construire
un fort à l'embouchure du fleuve de
Bénin, et de mettre en culture un ter-
rain très étendu. Cet établissement pros-
pérait, lorsqu'en 1792 quelques indivi-
dus mis à terre près du fort, par deux
vaisseaux de commerce anglais , armés
de canon , se présentèrent au nom de la
maison Dobson et compagnie de Liver-
l)ool , se disant chargés de remettre au
capitaine Landolphe de riches présens,
en reconnaissance des services qu'il avait
rendus l'année précédente à un bâtiment
de cette maison : les présens furent ac-
ceptés, et la journée se passa en fêtes;
mais pendant la nuit , Landolphe fut as-
sailli par ces brigands , et obligé , pour
sauver ses jours, de se jeter dans les fos-
sés du fort qui étaient remplis d'eau. Au
bruit des armes , les nègres de la colonie
sonnent le tocsin, et cherchent les Anglais
qui venaient de fuir , après avoir mis le
feu aux différens magasins , et surtout à
celui de poudre qui sauta. Cet acte de bri-
jfandage et de piraterie n'a jamais donné
lieu à une enquête , ni à une réparation
quoiqu'il eût été commis en pleine paix :
la guerre qui éclata peu de temps après
entre la France et l'Angleterre , ne per-
mit pas de s'en occuper, et Landolphe ne
put rien obtenir à l'époque du traité d'A-
miens. Cependant il s'en était vengé lui-
même au commencement de la révolution:
ayant pris du service dans la marine mili-
taire, il s'empara de l'ile du Prince , où il
captura 64 bâtimens ennemis, et 930 piè-
ces de canon évalués à 43 millions de
francs. Ce brave capitaine est mort d'une
attaque d'apoplexie, à Paris le 15 juillet
4825. Depuis 22 ans , de graves blessures
l'avaient éloigné du service ( 1802 ).
5es Mémoires, écrits d'une manière un
peu emphatique, sont intitulés : Mémoii'es
du capitaine Landolphe ^ contenant l'his-
toire de ses voyages pendant trente-six
ans s aux côtes d'Afrique et aux deux
Amériques^ rédigés sur son manuscrit par
J. S. Quesné, Paris, 1823, 2 vol. in-8°,
ornés de figures. Le célèbre Palisot de
licauvais, àqui il avait facilité les moyens
de pénétrer très avaut en Afrique » lui
a consacré sous le nom de Landolphia
owariensis une très belle plante de cette
contrée.
LAIVDOîV , pape , successeur d'Anas-
tase III , en 91/i. , mourut à Rome, après
six mois de pontificat. Soumis aveuglé-
ment aux volontés de la fameuse Thécn
dora, mère de Marosie, il ordonna arche-
vêque de Ravenne le diacre Jean, un des
favoris de cette femme impérieuse. La
mort enleva ce pontife peu de temps
après.
' L.VNDON ( C. P. ), peintre et littéra-
teur, né vers l'an 1760, se livra de bonne
heure à l'étude de la peinture, et obtint
plusieurs prix , qui lui méritèrent d'être
envoyé à Rome , comme pensionnaire de
l'académie française. De retour à Paris,
il fut nommé directeur du Musée. Artiste,
écrivain et éditeur d'ouvrages relatifs
aux beaux-arts , il devint correspondant
de la 4* classe de l'institut, et membre
de plusieurs sociétés savantes. Il est mort
le 7 mars 1826, âgé de près de 67 ans, et
a publié : | Nouvelles des arts^ 5 vol. in-S" ;
I Annales du Musée et de l'école modems
des beaux arts^ 1"^' collection, de 1801 à
1810, 17 vol. in-S"; 2' collection, 1810-17, 12
vol. in-8". On joint ordinairement à cet
ouvrage les Paxjsages et Tableaux de
genre, 180S , 4 vol. in-8° ; | Annales du
Musée , 2* collection , qui comprend le
Salon de 1817, 12 vol. in-8'' ; ] La Galerie
Giustiniani et la Galetie Massias. 33 vol. ;
chacun des trente-trois volumes qui com-
posent cette précieuse collection contient
72 planches gravées au trait. Les princi-
paux tableaux qui y sont retracés ne se
trouvent plus en France, ayant été ren-
dus ( en 1815 ) à leurs premiers proprié-
taires ; I Vies et œuvres des peintres les
plus célèbres, 1803 et suiv. , 20 vol.in-4°.
Elles renferment les portraits elles œuvres
complètes du Dominiquin , de Michel-
Jinge, de Raphaël , du Poussin et de Le-
sueur, avec un choix des productions les
plus remarquables de l'Albane , de Da-
niel , de Volterre , de Baccio-Bandinelli,
et le premier volume de peintures anti-
ques : I Description de Paris et de ses
édifices, avec un Précis historique, et des
observations, par Legrand, 2 vol. in-S**,
de 1806 à 1&09; | Galerie historique des
hom77ies les plus célèbres de tous les siè-
cles et de toutes les nations, 12 vol. in-8";
I Choix de biographies anciennes et mo-
de/mes, 2 vol.in-l2, avec l-U portr. C'est
un abrégé de l'ouvrage précédent. ) Art'
LAN
271
LAIV
tiquités d'Athènes d'après Stuart, 3 vol.
in -fol. , avec le texte traduit en français ;
1 Description de Londres et de ses édifi-
ceSj 1 vol. in-8° , avec 42 planches ; | Le
saint Evangile de N. S. J.-C. , imprimé
par Didot, avec ol planches au traita
d'après Raphaël , Poussin et l'Albane ;
I Recueil des ouvrages de peinture et
sculpture qui ont concouru pour les prix
décennaux, in-8°, avec 45 planches ; ] At-
las du Musée, ou Catalogue figuré de ses
Tableaux et Statues; \ Lfi Amou?'s de
Psyché et de Cupide^, in-fol. , imprimé
par Didot , 52 planches au trait , d'après
llaphaël.
LA.NDRI ou LANDE RIO, maire du pa-
lais de Qotaire II, sut défendre ce roi de
Neustrie pendant sa jeunesse contre Chil-
debert II ( 584-628 ). Landri fit avancer
vers le camp de Childebert quelques
troupes , avec des rameaux qu'elles plan-
tèrent; de sorte que les gens de Childe-
bert s'imaginaient être auprès d'un bois-
taillis. Mais, au point du jour, les soldats
de Landri sortirent de ces feuillages , et
attaquèrent si brusquement ceux de Chil-
debert, qu'ils les mirent en fuite en 593.
Stratagème digne de figurer parmi ceux
que rapporte Julius Frontinus dans son
traité de Stratagematibus, tl qui est assez
semblable à quelques-uns de ceux qu'il
dit avoir le mieux réussi. Ses relations cri-
minelles avec Irédégonde ne sont que
trop réelles.
LANDRI ( saint) , évêque de Paris , si-
gnala sa charité durant la grande famine
qui affligea cetle ville l'an 651. Ce fut lui
qui fonda vers le même temps l'hôpital
qui dans la suite a pris le nom d'Hôtel-
Dieu. Après sa mort, sa précieuse dé-
pouille fut déposée dans l'église de Saint-
Germain-l'Auxerrois, qui alors était sous
linvocation de saint Vincent.
LANFANT ( le père ) roy. LENFANT.
LAINFRANC, archevêque de Cantor-
béry , naquit à Pavie vers l'an 1005; il
était fils d'un conseiller du sénat de cetle
ville. Après s'être distingué par sa science
et avoir enseigné le droit à Pavie, il passa
en France et se consacra à Dieu en 1041
dans le monastère du Bec, dont il devint
prieur. Il y ouvrit son école , qui devint
la plus célèbre de l'Europe : il en établit
une autre de littérature à Avranches ;
mais, en allant d'Avranches à Rouen,
ayant été arrêté par des voleurs , qui le
laissèrent attaché à un arbre , il fut dé-
goûté du monde. H se distingua aussi par
le zèle avec lequel il combattit les er-
reurs de Béranger au concile de Rome,
en 1059, et dans plusieurs autres conciles.
Guillaume, duc de Normandie , le tira de
son monastère pour le mettre à la tête
de l'abbaye de Saint-Etienne de Caen,
en 1063. Lanfranc y ouvrit encore xme
école qui devint aussi fameuse que celle
du Bec. En i070, Guillaume, devenu
roi d'Angleterre, appela Lanfranc, et lui
donna l'archevêché de Cantorbéry. Le
nouvel archevêque rebâtit la cathédrale
de Cantorbéry, et y fonda plusieurs hô-
pitaux. Guillaume avait une telle con-
fiance en lui , qu'il le chargeait du gou-
vernement de l'Angleterre, quand il était
obligé de passer en Normandie. Ce saint
prélat mourut en 1089 , illustre par ses
vertus et par son zèle pour le maintien de
la discipline , des droits de son église et
des immunités ecclésiastiques. Il fut re-
gardé à la fois comme un homme d'état
habile, et comme un prélat savant. Ses
ouvrages ont été recueillis par dom d'A-
chery, et imprimés à Paris chez Biluine
en 1648 , in-fol. On y trouve : | son fa-
meux Traité du corps et du sang de IVo-
tre-Seigneur, contre Béranger; \ des Com-
mentaires sur saint Paul ; | des Notes sur
Cassien; ] des Lettres; des Sentences, où
il est parlé en détail des exercices de la
vie monastique , ouvrage découvert par
dom d'Achery, après son édition des écrits
de Lanfranc, et inséré dans le 4' tome de
son Spicilége. « Cet auteur, dit l'abbé
B Bergier, se sent moins que ses contera-
B porains de la rudesse du siècle dans le-
» quel il écrivait; il montre une grande
» connaissance de l'Ecriture sainte , de la
» tradition et du droit canonique. On
» trouve dans ses écrits plus de naturel ,
» d'ordre et de précision, que dans le»
» autres productions du il' siècle. Les
» protestans , qui ont témoigné en faire
» peu de cas parce qu'il était moine ,
» avaient oublié que son mérite seul le
1) fit placer sur le premier siège d'Angle-
» terre ; qu'il gagna la confiance de Guil-
»laume le Conquérant; que pendant l'ab-
» sence de ce prince, Lanfranc gouverna
» plusieurs fois le royaume avec toute la
» sagesse possible. Il ne faut donc juger
» des hommes , ni par l'habit qu'ils ont
«porté, ni par le siècle dans lequel ilsont
» vécu : le cloître fut et sera toujours le
» séjour le plus propre pour se livrer àl'é-
» tude, pour acquérir tout à la fois beaucoup
» deconnaissanceselde vertus. Onn'aqu'à
û confronter ce qu'a écrit Lanfranc , pour
I » établir le dogme de l'eucharistie, avec
LAN
272
LAN
• ce que les plus habiles ministres proles-
B tans ont fait pour l'attaquer ; on verra
» de quel côté il y a plus de justesse et de
» solidité. » Quelques écrivains satiriques
et détracteurs ont attaqué la mémoire de
ce prélat; mais on trouve une réfutation
solide de ce qu'ils ont avancé dans Yjdn-
çlia sacra de Warthon. Lanfranc avait
fait encore une Histoire ecclésiastique^ la
Vie ôiQ Guillaume le Conquérant, et un
Commentaire sur les psaumes , qui sont
perdus. Scsœuvres se trouvent aussi dans
la Bibliothèque des Pères.
L.\^'FRAI\C, médecin de Milan, du
13* siècle, professa avec succès en cette
ville la médecine et la chirurgie. Cepen-
dant il essuya des chagrins, dont il ne dit
point le sujet , mais qui paraissent être
relatifs aux querelles des Guelfes et des
Gibelins ; il fut même arrêté et mis en
prison. Le vicomte Matthieu lui permit de
se transporter où il jugerait à propos , et
dès qu'il eut choisi la France , ce sei-
gneur l'y fit conduire; Il fut appelé en
divers lieux du royaume, et demeura
quelque temps à Lyon. L'an 1293 il se
rendit à Paris , sur les instances de plu-
sieurs seigneurs et maîtres en médecine,
mais particulièrement de maître Jean de
Passavant , et d'après les sollicitations des
bacheliers en médecine , pour enseigner
publiquement la chirurgie et démontrer
les opérations de cet art. La chirurgie
était entièrement abandonnée aux bar-
biers ou à des empiriques ignorans. Il éta-
blit entre les médecins et les barbiers
une classe de sa vans, qui joignaient la
pratique des opérations manuelles à la
science médicale, comme faisait Lanfranc.
De là est venu le collège des chirurgiens
de Saint-Côme, à Paris , qui a commencé
du temps de saint Louis. On a de lui :
Chirurgia m,agna et parva ^ Venise, 1490,
in-fol. , réimprimée plusieurs fois de-
puis : dans l'édition de Lyon, 1553, on
trouve les écrits de Roger, de Bertapalier,
de Roland et de Gui de Chauliac , sur la
chirurgie. Lanfranc a souvent copié
Guillaume Salicet sans le citer. Son ou-
vrage a été traduit en français par maître
Guillaume Yvoire , Lyon , li90 , in-i", et
en allemand par Othon Brunfels , Franc-
fort, 1566, in-S".
LAIVFRAIVC ( Jean ), peintre né à
Parme en 1581 , mort à Rome en 1647,
à 66 ans, fut d'abord page du comte Scotti;
mais étant né avec beaucoup de disposi-
tions et de goût pour le dessin, il en fai-
sait son amusement. Le comte s'en aper-
çut , et le mena lui-même dans l'école
d'Augustin Carrache , et depuis dans celle
d'Annibal Carrache. Les progrès rapides
que Lanfranc faisait dans la peinture lui
acquirent bientôt un grand noui . et lui
méritèrent la dignité de chevalier. Ce
peintre avait une imagination vaste, qui
exigeait de grands sujets. Il ne réussissait
que médiocrement aux tableaux de che-
valet. Il a surtout excellé à peindre des
coupoles: on cite comme ses chefs-d'œuvre
en ce genre , celles de saint- André délia
P^alle j du Jésus et du trésor du Saint-
Sauveur , à Naples. Le Musée du Louvre
possède de ce maître les tableaux suivans :
^gar dans le déserta saint Pierre^ saint
Paul, et saint Jugustin. Il a gravé aussi
à l'eau forte , et en partie d'après ses pro-
pres compositions , la bible de Raphaël,
1607, 51 feuilles in-4°.
* LANFREDLM ( Jacques ), savant
cardinal, naquit à Florence le 26 octobre
1670. Ayant embrassé l'état ecclésiastique,
il courut la carrière de la prélalure ro-
maine. La première charge qu'il occupa
fut celle d'auditeur civil du cardinal ca-
merlingue, en 1722. L'année suivante, il
fut déclaré prélat domestique, membre
de la congrégation consistoriale , et réfé-
rendaire de l'une et l'autre signature. Le
16 mars 1727, il reçut l'ordre de la prê-
trise des mains du pape Benoît XIII. Clé-
ment XIII, son compatriote , le nomuja
en 1730 à un canonicat de Saint-Piet ru.
Il fut successivement secrétaire de la con-
grégation du concile, volant de la signa-
ture de grâce , dalaire de la pénitencerie,
enfin cardinal le 24 mars 1735. Il quitta
alors le nom d'Amadori , qu'il avait porté
jusque là, pour prendre le nom de Lan-
fredini , qui était celui de sa famille. Le
27 du même mois , le pape le proposa en
consistoire pour les évêchésunis d'Osimo
et de Cingoli dans la Marche d'Ancône ;
et le 4 avril suivant , il fut sacré par le
cardinal Guadagni. C'était un prélat sa-
vant et zélé , qui ne s'illustra pas moins
par ses vertus épiscopalesquepar sa pro-
fonde érudition. Il mourutle 16 mai 1741,
laissant dans son diocèse de grands exem-
ples de sagesse et de charité. Il était dans
la 71' année de son âge. Ou a de lui :
I Raccoltad'orazioni sinodali epastorali,
Jesi, 1740^ in-4° ; j Lettere pasloralij etc. .
Turin, 1768, 2 vol. in-8°; | Letlere scritiel
alla nobiità ed agli artisti. in-S". L'abbé
Lami publia sa P'ie dans le tome '2 des
Memorabilia Italorum eruditione pra-
stantium. Guarnaci et Buonamici en p.ir-
LAN
273
LA]«
lent avec éloge, le premier, dans son livre
intitulé : f^itœ et gâsta pontificum roma-
norum^ et S. R. E. cardinalium ^ pag,
681, Rome , 1751, 2 vol. ; et l'autre dans
son ouvrage , De clans pontifie, epist.
scriptoribus, pag. 286.
LANG (Jean-Micbel ), né à Ezelwan-
gea , dans le duché de Sultzbach , en 1664,
obtint la chaire de théologie à Allorf.
Mais s'y étant attiré des ennemis, il quitta
cette place , et alla demeurer à Prentzlow,
où il mourut !e 20 juin 1731. On a de lui :
I De fàbulîs mohammedicis^ 1697, in-4°;
I plusieurs Traités latins sur le mahomé-
tisme et l'Alcoran; | Dissertationes bota-
nico - theologicce ^ Altorf, 1703, in -4°;
I Philologia barbaro-grœca, Nuremberg ,
1708, in-4°.
LANGALLEUIE (Philippe de GEN-
TILS , marquis de ), premier baron de
Saintonge, naquit à la Motte-Charente,
en 1656. Il se consacra aux armes dès sa
jeunesse, fit trente-deux campagnes au
service de Franco, donna de grandes
preuves de valeur , et parvint au grade
de lieutenant-général en 1704. Son carac-
tère hautain et son excessive ambition lui
puscitèrent des discussions désagréables ,
qui l'engagèrent à passer au service de
l'empereur en 1706. Il fut jugé en France
comme déserteur , et condamné à être
pendu. Ayant obtenu dans l'armée de
l'empereur l'emploi de général de la ca-
valerie , il ne le garda pas long-temps ,
parce qu'il s'attira la disgrâce du prince
Eugène qu'il avait acompagné au siège
de Turin, et sous lequel il avait failles
deux campagnes suivantes. Il quitta l'em-
pereur, passa en Pologne, où il fut fait
général de la cavalerie lithuanienne , et
ne fut pas plus tranquille. Il se fit luthé-
rien en 1711 , dans l'espérance de trou-
ver plus facilement de l'emploi chez les
princes protestans. Après diverses courses
à Francfort , à Berlin , à Hambourg , à
Brème, à Cassel, il partit pour la Hol-
lande , où il se lia très étroitement avec
l'aga turc, ambassadeur à la Haye, qui
conclut un traité avec lui au nom du
Grand-Seigneur. On n'en a jamais bien su
les articles, mais en général on croit qu'il
s'agissait d'une descente en Italie, dont le
marquis devait commander les troupes.
C'était l'effet des intrigues du cardinal
Alberoni, qui s'était ligué avec les Otto-
mans pour donner de l'occupation à l'em-
pereur, et réaliser son vaste et chimérique
projet. Le marquis passait à Hambourg
jîour faire préparer des vaisseaux, lors-
que l'empereur le fit arrêter à Stade en
1716. On le conduisit à Vienne , puis au
château de Raab ou Javarin dans la Hon-
grie , où il mourut de chagrin en 1717. Il
a paru , en 1743 , des Mémoires du mar-
quis de Langallerie ^ Histoire écrite par
lui-même dans sa prison à Vienne i la
Haye , in-12. Cette prétendue histoire est
un roman qu'on a voulu débiter à la fa-
veur d'un nom connu : les noms, les faits,
les dates , tout en démontre la fausseté.
On prétend que le marquis de Langal-
lerie avait formé le projet de rassembler
dans les îles de l'Archipel les restes de la
naUgn hébraïque. On peut consulter sur
ce personnage le Manifeste de Philippe de
Gentils, marquis de Langallerie . écrit
par lui-même^ en 1706, Cologne, 1707.
in-4°; la Guerre d'Italie ou Mémoires
historiques^ politiques etgalqns du mar-
quis de Langallerie, Cologne , 1709, 2 vol.
in-12, espèce de roman historique , où
l'on trouve beaucoup de fautes grossières.
LANGBAI^iE (Gérard), né à Barton-
Kirke, dans le "Westmoreland, en Angle-
terre, mort en 1638, à 50 ans, fut garde
des archives de l'université d'Oxford. On
a de lui plusieurs écrits, dans lesquels
l'érudition est semée à pleines mains. Les
plus connus sont : | une Edition de Lon-
gin, en grec et en latin, avec des notes,
1656 in-8° ; | Fœderis scotici examen^ en
anglais , 1644, in-4'*; | une Traduction an-
glaise de l'Examen du concile de Trente,
par Martin Chemnitz. ( Voyez ce nom. )
I Platonicorum aliquot qui etiamnum su
persunt authorum ^ grœcorum iinpri-
mis. mox et latinorum syllabus alpha-
beticus^ à la suite de l'AlcinouSj in Pla-
tonicam philosophiam introductio du doc
teur Fell , 1667, in-8°.
LANGE (Rodolphe), gentilhomme de
Westphalie et prévôt de la cathédrale de
Munster, fut envoyé par son évêque et
par son chapitre, vers le pape Sixte IV,
pour une affaire importante , et s'acquitta
fort bien de sa commission. A son retour,
il fit étabUr un collège à Munster. Lange
fut, par cet établissement et par ses écrits,
le principal restaurateur des lettres en
Allemagne. On a de lui plusieurs Poèmes
latins ( sur le dernier siège de Jérusalem ,
sur la sainte Vierge, sur saint Paul), que
l'on ne croit pas avoir été imprimés
Maittaire en indique cependant une édi-
tion de Munster, i486, in-4°. Lange mou-
rut en 1519 , à 81 ans , pleuré de ses con-
citoyens, dont il avait été le bienfailcui
et la lumière.
LAN
274
LAN
LANGE (Paul) , bénédictin allemand,
el ensuite disciple de Luther , natif de
Zwickau en Misnie, parcourut en 1513
les couvens d'Allemagne , afin de recher-
cher des monumens. Il est auteur d'une
Chronique des évéques de Zeitz^ en Saxe,
depuis 968 jusqu'en 1515, hupiimée dans
le premier tome des écrivains d'Alle-
magne. Il 7 loue Luther , Carlostad et Mé-
lanchthon , et y déclame contre le clergé :
c'est ce qui l'a rendue si précieuse aux
protestans; comme si le suffrage d'un
moine apostat pouvait justifier le schisme
fatal par lequel ils ont déchiré l'Eglise.
LANGE (Jean), né à Lœwenberg, en
Silésie, l'an li8b, mort à Heidelberg, en
1565, exerça la médecine en cette ville
avec distinction , et fut médecin de quatre
électeurs palatins. On a de lui : Episto-
larum medicinalium opus miscellaneum ^
Francfort , 1689 , in-8° : recueil rempli
d'une rare érudition , et dont la lecture
est utile à tous ceux qui veulent ap-
prendre l'histoire de la nature. — Il est
différent de Curistopee-Jean LANGE, né
à Pégau dans la Misnie , en 1635, profes-
seur en médecine à Leipsick , mort en
1701, dont les ouvrages ont paru à Leip-
sick , 1704 , en 2 tomes in-fol.
LANGE (Joseph) , Langius^ né à Kei-
sersberg, dans la Haute- Alsace, mort vers
1650 , fut professeur de grec à Fribourg ,
dans le Brisgau , vers 1610, se fit ensuite
catholique, et publia la compilation inti-
tulée Polyanthea nova, Genève, 1600,
in-fol. Lyon, 1604 , Francfort, 1607. On
y trouve des passages sur toutes sortes
de matières. On a encore de lui Flori-
geliiim, recueil alphabétique de sen-
tences , apopîitliogm^s , etc. Strasbourg ,
1615, in-8" ; Elcmentàle mathematicum ,
m-8°. On lui doit aussi des éditions de
Perse, de Juvénal, avec des Index très
amples.
LANGE (CnARLES- Nicolas), habile
naturaliste suisse, a donné en latin :
j Historia lapidum figxiratorum Helvetiœ,
Venise , 1708 , \n-h° ; | Origo lapidum fi-
guratorunij, Lucerne, 1706, in-4°; | Me-
thodus testacea marina distribvendi ,
Lucerne , 1722, in-h.". Ces ouvrages , el
surtout le premier , sont recherchés par
les naturalistes.
LANGE (François), avocat au parle-
ment de Paris, natif de Reims en 1610,
mort à Paris en 1684 , à 74 ans , s'est fait
un nom par le livre intitulé Le Praticien
français ; il parut pour la première fois
sous le nom de Gastier, procureur au
parlement. Il en était à sa 4* édition,
lorsque les nouvelles ordonnances de
1667 et de 1670 en mettant de l'ordre
dans la procédure civile et criininelk-, ,
et en changeant la jurisprudence dis
arrêts, forcèrent de le refondre. Depuis
il en parut un grand nombre d'éditions,
La dernière est celle donnée par Pimont,
conseiller référendaire à la chancellerie ,
Paris, 1755,2 vol. in-4°.
LANGEAC ou LANGHAC (Jean de),
né d'une ancienne maison à Langeac,
diocèse de Saint-Flour , acheva ses étudeo
à Paris, et embrassa l'état ecclésiastique.
La quantité de bénéfices qu'il posséda est
étonnante ; mais il faisait un bon usage
de ses revenus. François I", qui l'aimait ,
le lit son aumônier en 1516 , maître des
requêtes en 1518, ambassadeur en Portu-
gal, en Pologne, en Hongrie, en Suisse,
en Ecosse, à Venise, à Ferrare, en An-
gleterre, et enfin à Rome. Ce fut à sa
recommandation que Robert Cenalis lui
succéda en l'évêché d'Avranches. Dai.s
tous les lieux où il se trouva, il ne fut
occupé que du bien public. Sa mémoire
subsiste encore à Limoges , où on l'ap-
pelle le bon évêque. Il aimait et protégeait
les lettres. Etienne Dolet lui dédia ses trois
livres , De officio legati, quem vulgo am-
bassiatorem vacant; de immunitate lega-
torum; de legationibus Langiachi epi-
scopi Lemovicensis , imprimés à Lyon en
1541 , in-4°. Ce digne prélat mourut la
même année à Paris, très regretté.
LANGELY. Voyez ANGELY (1' ).
LANGEVIN ( Raoul ), chanoine do
Bayeux , composa en 1209, le fameux Cai-
tulaire de cette église , si connu sous le
nom de son auteur. C'est une compila-
tion des statuts, usages et cérémonies qui
se pratiquaient de son tetnps dans cette
cathédrale , à laquelle elle sert encore di;
loi. Ce manuscrit précieux fut sauvé , par
un accident heureux , des horribles ra-
vages des protestans, en 1562.
LANGEVIN ( Eléonor ), docteur do
Sorbonne, natif de Carantan, mort en
1707, est auteur d'un livre intitulé : VI/i-
faillibilité de V Eglise , touchant la foi et
les mœurs, contre Masins, professeur de
Copenhague, Paris, 1701 , 2 vol. in-12.
LANG-JEAN (Rémi), peintre , natif de
Bruxelles, mort en 1671, fut le meilleur
des élèves de Van Dyck. Il forma sa ma-
nière sur celle de son maître, et il a as-
sez bien saisi son coloris; mais il n'a pu
atteindre à la même lincsse de dessin. On
voit peu de tableaux de cht-valct de Lai)j;-
LAIV
27S
LAN
Jean. Ses principaux ouvrages sont des
sujets de dévotion , peints en grand.
LANGIUS. royez LANGE.
LANGIUS, ou LANGE (Charles), né
selon quelques-uns à Gand, et selon
d'autres à Bruxelles , fut chanoine de l'é-
glise de Liège , où il mourut dans un âge
peu avancé , le 29 juillet 1573. Il fut étroi-
tement lié avec Juste-Lipse et plusieurs
autres savans de son temps. Langius était
1res versé dans le grec et le latin , bon
poète , et l'un des plus judicieux critiques
de son siècle ; tous ceux qui en ont parlé
conviennent qu'il réunissait en lui une
érudition extraordinaire et une piété très
exemplaire. Nous avons de lui des Co7n-
mentaires sur les Offices de Cicéron^ sur
les Comédies de Plante ^ et plusieurs Pîèces
de vers.
LAKGLADE. Voyez FAYARD de LAN-
GLADE.
LANGLE (Jean-Maximilien de), mi-
nistre protestant, néàEvreux, mourut
en 1674 , âgé de 84 ans. Il a laissé 2 vol.
de Sermons^ et une Dissertation pour la
défense de Charles I" , roi d'Angleterre.
LANGLE (Pierre de), né à Evreux en
1644 , docteur de Sorhonne en 1670 , fut
choisi , à la sollicitation du grand Bossuet
son ami, pour précepteur du comte de
Toulouse. Louis XIV le récompensa en
1698, de ses soins auprès de son élève,
par l'évêché de Boulogne. Le Mandement
qu'il publia en 1717, au sujet de son ap-
pel de la bulle Unigenitus^ scandalisa les
catholiques , causa sa disgrâce à la cour ,
et excita des troubles violens dans son
diocèse. Les habitans de Calais se soule-
vèrent ; ceux de Quernes , en Artois , le
reçurent dans une visite à coups de pierres
et à coups de bâton. Ce prélat s'opposa ,
avec l'évêque de Montpellier, Colbert, à
l'accommodement de 1720. Cette dé-
marclie irrita le régent, qui l'exila dans
son diocèse. Il y mourut en 1724 , à 80 ans,
ayant sacrifié les douceurs de la paix, les
avantages de la soumission à l'Eglise , la
satisfaction attachée aux devoirs d'un
pasteur fidèle, à l'esprit de dispute et de
parti.
* LANGLE (le marquis de), dont le nom
était Jérôme-Charlemagne Fleuriau , na-
quit en Bretagne vers 1742, se consacra à
la littérature , et mourut à Paris le lô oc-
tobre 1807. Il a laissé : | Voyage de Fi-
garo en Espagne^ Saint-Malo (Paris),
1785, 2 vol. in-12; pamphlet contre la re-
ligion et les prêtres , qui fit beaucoup de
bruit, eut plusieurs éditions, et fut tra-
duit en anglais, en danois, en italien cl eh
allemand. 11 a été condamné à être brûlé.,
par arrêt du parlement du 26 février 1788.
La dernière et sixième édition, la seule
avouée par l'auteur , a pour titre : Voyage
en Espagne par M. Langle , Paris, Perlet,
1805, in-8° ; on a publié une critique de
cet ouvrage sous le titre de Dénoncia-
tion au public du voyage d'un soi-disant
Figaro en Espagne^ par le véritable Fi-
garo, 1785, ii)-i2. I Tableau pittoresque de
la Suisse^ Paris, 1790, in-8"; Liège, 1790,
in-12; | Soirées villageoises ^ on Anec-
dotes et aventures, avec des secrets inté-
ressans^ 1791, in-12; mauvais ouvrage,
dont le public lit justice, ainsi que des
suivans : Paris littéraire, 1791, in-12, en
partie reproduit sous le titre de VJlchi-
miste littéraire, ce sont l'un et l'autre des
libelles contre les hommes de lettres les
plus distingués; | Mon voyage en Prusse, ou
Mémoires secrets sur Frédéric le Grand
et sur la cour de Berlin , 180G, in-8° ; | Né-
crologie des auteurs vivons, 1807 , in-S".
L'auteur n'y a pas oublié son nom , et a
la modestie de se reprocher , à la page 35.
l'abus excessif d'esprit; plusieurs articles
sont extraits du Paris littéraire; \ des
Opuscules ( voyez La France littéraire de
M. Ersch, et le Mercure du 30 janvier
1808). M. Fleuriau s'est jugé lui-même,
quant à l'abus d'esprit , mais il a omis d'a-
jouter que son style , presque toujours
satirique , est parfois aussi prolixe qu'in-
correct et sans coloris. Sur la fin de ses
jours il revint à la religion et reçut les
sacre mens de l'Eglise.
* LANGLE ( Honoré - François - Ma-
rie) , compositeur de musique, né à Mo-
naco en 1741 , étudia à Naples sous Caf-
faro , et se rendit à Gènes pour y diriger
à la fois lé théâtre et le concert des nobles ;
il vint à Paris en 1768, où il se fit uns
grande réputation, et devint membre «t
bibliothécaire du Conservatoire. Il est
mort le 20 septembre 1807. On a de lui ;
I Traité d'harmonie et de modulation ;
I Traité de la basse sous le chant. On y
trouve une excellente analyse des trois es-
pèces principales de contrepoint. | Traite
de la fugue. Ses préceptes sont plus métho-
diques et plus clairs que ceux de Martini.
I Nouvelle méthode pour chiffrer les ac-
cords. Il avait fait la musique de Cori-
sandre, qui fut généralement applaudie :
il entreprit ensuite 2 tragédies lyriques ,
Mahomet II et le Choix d'Jlcide^ qu'il
ne put parvenir à faire représenter.
* LAIVGLÈS (LoDis -Matthieu), savant
LAN 2
orientaliste , membre de l'inslitut , de la
société asiatique de Caloulla , de la société
royale des antiquaires de France , de celle
de géo^^raphie , membre de l'académie
impériale de Saint -Pétersbourjï, de la
société philosophique de Philadelphie ,
des académies royales de Munich, de
Gottingen, etc. naquit le 25 avril 1703, à
Péronne en Picardie. Il était lils d'un an-
cien militaire , chevalier de St.-Louis, qui
le destinait à la carrière des armes : mais
il sollicita de ses parens la permission
d'apprendre les langues orientales , afin
de pouvoir servir dans l'Inde ou comme
officier ou comme diplomate , et , après
avoir commencé son éducation à Monf-
didier , il la termina à Paris, où il suc-
céda en 1785 à son père , dans la charge
d'officier près le tribunal des maréchaux
de France de la connétablie. Il mit à profit
les loisirs de sa place , pour suivre les
différens cours des langues orientales
qu'il voulait connaître , et fréquenta
au collège de France les leçons d'a-
rabe de M. Caussin de Perceval, et
celles de persan de M. Ruffin. Les mi-
nistres Berlin et de Breleuil l'engagèrent
à étudier le mandchou > et il publia en
1787 un alphabets qu'il dédia à l'acadé-
mie des inscriptions ; cet ouvrage tartare-
tnandchou ,hn valut des éloges exagérés ;
mais il lui attira en même temps l'injuste
reproche de s'être approprié Valphabet
de Deshauterayes , gravé 20 ans aupara-
vant dans les planches de V Encyclopédie.
L'Alphabet de Langlès avait été composé
sur le manuscrit du Dictionnaire tartare-
mandchou-français j ^i\ père Amiot, qui
en avait envoyé de Chine le manuscrit à
M. Berlin. Langlès fut chargé de la pu-
blication de ce même Dictionnaire qui fut
imprimé à Paris, parDidot aîné, 1789-90,
5 vol. in-i". Dès 1787, Langlès avait tra-
duit du persan, et publiéles Instituts poli-
tiques et militaires de Tamerlan ; cette
t raduction , par laquelle il avait débuté
dans la littérature orientale, lui avait ac-
< uis la protection du maréchal de Riche-
lieu, et lui fit obtenir une des douze pen-
sions que le tribunal des maréchaux de
France accordait aux hommes de mérite
attachés à son service. Langlès fit impri-
mer peu de temps après un livre intitulé
Contes^ Fables et Sentences^ tirés de dif-
férens auteurs arabes et persans : dans
le discours préliminaire duquel l'auteur
prétend avoir le premier fait connaî-
tre en France et même en Europe l'exis-
tence et les travaux de la société asiatique
76 LAN
de Caltutla. La même année (1788) il fil
paraître les Ambassades réciproques
d'un roi des Indes ^ de la Perse ^ etc. et
d'un empereur de la Chine ^ traduit du
persan , avec la vie de ces princes , et un
précis historique sur les Mahratles , tra-
duit du persan, dialecte de l'Inde. Langlès
désirait passer dans les établissemens
français d'outre-mer; la révolution ne lui
permit pas de réaliser ce projet. Il con-
tinua de se livrer à l'étude des langues
orientales vivantes, qu'il regardait comme
nécessaires aux entreprises commerciales,
et favorables au progrès des sciences et
de la littérature, et ce fut dans le but de
déterminer le gouvernement à proléger
et à encourager ce genre d'études , qu'il
adressa en 1790 un mémoire à l'assem-
blée Constituante : la même année il pu-
blia encore des Fables et des Contes ?'«-
diens^ avec un discours préliminaire et
des Notes sur les mœurs ^ la l'eligion et
la littérature des Indous ^ un vol. in-8".
Nommé en 1792 conservateur des manu-
scrits orientaux de la Bibliothèque royale,
il fit partie en 1793 delà commission tem-
poraire des arts qui , adjointe au comité
d'instruction publique , sauva du vanda-
lisme révolutionnaire plusieurs monu-
mens de sciences et d'arts. Il devint en
1794 garde du dépôt littéraire des Capu-
cines de la rue Saint-Honoré à Paris, et la
même année il obtint la création de l'é-
cole des langues orientales vivantes, j)la-
cée près de la bibliothèque dite alors na-
tionale , création qu'il avait long-temps
sollicitée. Langlès en fut nom.mé admi-
nistrateur, et il y professait en même tenips
le persan ; mais il n'a jamais été profes-
seur de mandchou ni de malais, quoiqu'il
en ait pris le titre. En 1795 il devint l'un
des huit cooservateurs de la bibliothèque
nationale, et chargé spécialement des ma-
nuscrits orientaux. Nommé membre de
l'institut , à l'époque de sa création , il
refusa de faire partie de l'expédition d'E-
gypte, quoiqu'il connût personnellement
Bonaparte. Langlès professait des opinions
républicaines. Une fut point inquiété pen-
dant le cours de la révolution , ayant su
se faire des protecteurs et des amis parmi
ceux qui étaient à la tête des affaires.
Langlès s'occupa de publier divers ou-
vrages , surtout des relations de voyages
en Asie, et se livrait à l'enseignement des
langues orientales qu'il est parvenu à
faire goûter en France. Après avoir ainsi
traversé le temps de l'empire et de la
restauration au milieu de ses études fa-
LAN
277
LAN
vorîtes, il est mort le 28 janvier 182i, ûgé
de 60 ans. L'érudition philologique qu'il
possédait lui a servi à éclaircir une foule
de points d'histoire , de géographie et de
statistique des diverses contrées de l'Asie.
Mais on doit être en garde contre les
nombreuses erreurs parsemées dans ses
écrits. Sa bibliothèque particulière com-
prenait un nombre immense de livres
relatifs à l'Orient; le catalogue en est cu-
rieux , il a été publié par M. Merlin , en
182S , in-8". Langlès reçut du gouverne-
ment royal la croix d'honneur; il était
aussi décoré de l'ordre de Sainl-Wiadimir
de Russie. On peut voir la nomenclature
de ses nombreux ouvrages dans le Dic-
tionnaire des anonymes,, dans la France
littéraire de Ersch , et dans \ Annuaire
nécrologique de M. Mahul^ 1824 , page
457-162. Nous citerons : | Instituts politi-
ques et militaires de Tamerlan, traduits
en français sur la version persane ^ avec
la vie du conquérant, Paris , 1787, in-8° ;
( Alphabet tartare - mandchou , Paris,
1787, in-4°; 5' édit. 1807, in-A°. C'est le
premier ouvrage de cette langue qui ait
été imprimé en caractères mobiles. | Con-
tes s fables et sentences tirés de différens
auteurs arabes et persans , Paris, 1788,
vol. in-8° et in-18; | Ambassades réci-
proques d'un roi des Indes , de la Perse
et d'un empereur de la Chiyie, traduites
du persan , Paris , 1788 , in-8° ; | Diction-
naire tartare-mandchou-français , com-
posé d'apj'ès un dictionnaire mandchou-
chinois, par le père Amiot , 1788-90, 5
vol. '\VL-h° ; I Adresse sur l'importance des
langues orientales pour l'extension du
commerce, les progrès des lettres et des
sciences, présentée à l'assemblée Consti-
tuante, 1790, in-8° ; | Fables ei Contes in-
diens nouvellement traduits, avec un dis-
cours préliminaire et des noies sur la
religion, la littérature , les mœurs, etc.,
des Indous, 1790, in-18 ; ] Description du
Pégu et de l'île de Ceylan , traduite de
l'anglais et de rall,emand , Paris, 1791,
in-8° ( anonyme); | Collection portative
de voyages, traduite de différentes lan-
gues orientales et européetines , avec des
notes géographiques et historiques, Paris,
1 797-1805, in-8°, 5 vol. et atlas petit m-k";
I f avec J.-B. Lamarck) Voyage de C.P.
Thunberg au Japon, etc. ; traduit et aug-
menté de notes considérables sur la re-
ligion, le gouvernement, le commerce, l'in-
liustrie et les langues de ces différentes
contrées , Paris , 1796 , 2 vol. in-A°, ou h
^ol. in-8°; | Voyage du Bengale à Pé-
7.
tcrsbourg , traduit de l'anglais avec addi^
fions et une notice chronologique des Kans
ae Crimée , etc., Paris, 1805, 5 vol. in-8°,
avec 2 grandes cartes géographiques ;
I Voyage de Hornemann dans l'Afi'iqae
septentrionale , depuis le Caire jusqu'à
Moursouk, traduit de l'anglais et aug-
menté de notes et d'un mémoire sur les
Oasis, d'ajirès les auteurs arabes. Paris,
1803, 2 vol. in-8° avec cartes. Barbier,
dans son Dictionnaire des auteurs ano-
nymes, n"' 19,287, 2^ édit., attribue cette
traduction à Labaume ; | Recherches sur
la découverte de l'essence de rose, Paris,
1804 , petit in-12 ; |- Catalogue des manu-
scrits sanskrits de la bibliothèque im-
périale , avec des notices du contenu de
laplupart des ouvrages (avec Hamilton),
el augmenté de notes. Langlès qui ignorait
le sanskrit , n'a eu part à cet ouvrage que
comme traducteur et commentateur.
1 Notice sur l'état actuel de la Perse, en
persan, en arménien et en français , par
Myr Davoud Zadour , Chahan de Cirbied
et Langlès, 1818, in-18; | Monumens an-
ciens et modernes de l'Indostan.... en 150
planches, Paris, Didol aîné , 1821 , 2 vo-
lumes in-folio, ligures ; cet ouvrage n'est
pas terminé. | Analyse des mémoires con-
tenus dans le 14' volume des Asiatick re-
searches avec des notes et un appendice,
1825, in-4°, avec 2 planches , et plusieurs
autres ouvrages. Il a encore coopéré à
une nouvelle édition ( 1795) des Voyages
lie Pallas, 8 vol. in-S" ; des voyages d'^-
gypte et de Nubie , par Norden , 3 vol.
in-4°. Il a aussi donné des éditions du
Voyage en Chine et en Tartarie, à la
suite de l'ambassade de lord Macartney .
par Holmes, 1805, 2 vol. in-8°, du Cheva-
lier Chardin en Perse 10 vol. in-8", et atlas.
Il a encore contribué à \ Histoire d'Egypte
sous le gouvernement de Mohammed- Ali,
2 vol. in-8''; aux Recherches asiatiques,
trad. par Labauine ; à la Grammaire de
la laiigue arabe vulgaire et littérale , ou-
vrage posthume de Savary ; enfin, il a
fourni des Dissertations .Mémoires, No-
tices ou Articles dans les Mémoires de
l'Institut, dans les Notices et extraits des
jnanuscrits de la bibliothèque du roi, dans
la Biographie universelle de Michaud et
dans le Magasin encyclopédique , la. Revue
encyclopédique et dans le Mercure étran-
ger. On trouve sur Langlès dans le t. 4
du Journal asiatique une notice véci-olo-
gique par M. Abel Rémusal , son succes-
seur i\ la place de conservateur des ma-
nuscrits mandchou de la bibliothèque
24
LAN
278
LAN
royale , et une autre dans le Moniteur du
i" septembre i82S, par M. Dacier, secré-
taire perpétuel de l'académie des inscrip-
tions et belles-lettres (i).
LAIVGLOIS ( Jean-Baptiste) Jésuite ,
né à Nevers en 1663, et mort en 1706 , pu-
blia divers écrits coniveV Edition de saint
Augustin, donnée par les bénédictins de
Saint-Maur. Nous avons de lui un ouvrage
estimable par les grandes recherches , la
orltique et la diction noble , aisée et sou-
vent pleine de chaleur et d'élégance : c'est
5on Histoire des croisades contre les al-
biçeois, Far'is, 1703, in-l2. Ce qu'il rap-
porte des vices, des erreurs et des excès
des albigeois prouve combien des écri-
vains modernes ont eu tort de blâmer les
rigueurs exercées envers ces sectaires.
Nous avons encore de lui la Journée spi-
rituelle^ à l'usage des collèges, et un petit
in- 12, Dm respect humain^ imprimé à
Paris, en 1703.
' LANGLOIS (Isidore), journaliste, né
à Rouen le 18 juin 1770 , rédigea pendant
plusieurs années delà révolution le Mes-
sager du soirj et chercha à réparer , par
les principes qu'il y répandit, le tort qu'il
s'était fait par la part active qu'il avait prise
aux premiers troubles de la France II atta-
qua sans ménagement les tyrans, dont on
ne bravait pohit impunément la haine et
l'amour-propre , et fut au 18 fructidor
proscrit comme journaliste et frappé de
déportation. Il parvint à s'échapper ; mais
arrêté en 1798, il fut renfermé au Temple,
et envoyé à Oléron. Rappelé par les con-
suls après le 18 brumaire , il mourut à
Paris le 12 août 1800. On a de lui : Des
gouvernemens qui ne conviennent pas à
la France. 1793, in-S"; \Jppel à mes juges
et à mes concitoyens. 1795, in-8°.
♦ LANGLOIS ( JEA?v-TnoMAS) , journa-
liste, ancien avocat au parlement de Paris,
(0 La brillante rëpnlation que Langlfts s'était ac-
qaiie par une érudition qui , à ce qu'il paraît , ne
reposait na» «iir des fondenit;nj très solidfis , a été vio-
ieraraenl attaquée par divers écrivains. Le savant
M. Audlffret, auteur de l'article Lang/ès dans la
Biographie des contemporains , le juge très sévère-
ment. Après
me bé
chronolo
S'<i"«
commise par cei auteur .lans un de ses ouvrages,
ÎM Audiffret ajoute : • Tout ce qui esl sorti de la
t piame de Langlès est écrit avec la miime négligence,
» la iiaîtne étourderie , et , pour trancher le raol, avec
» lu mém( ignorance. • • Les lioinincs pcri instruits,
• ajoiite-t-il plus bas , l'ont cru sur parole, et ont
» loue «es ou\ rages parce ([u'ils y trouvaient tant bien
• que mal , des choses qu'ils ignoraient et qu'ils tie
» voulaient point approfondir , et les $aifans Its ont
- ii'^'t ilu-dfttoiis de la criti<lu€. *
où il était né en 1748 , concourut en 17ÎH
et 1792 à la rédaction d'un journal intitulé
les Actes des Apôtres (publié d'abord par
Peltier 1789, et opposé aux principes de
la révolution, 1791,10 volumes iri-8°).
Il s'était tenu constamment éloigné de
tous les emplois, et ne s'occupait que de
la rédaction de quelques Mémoires. Il a
fourni des articles dans les colonnes de la
Quotidienne et du Précurseur. On cite
comme un modèle celui qu'il publia en
1804, en faveur des députés de la Guade-
loupe, et auquel ceux-ci durent leur salut.
Langlois mourut à Gisors en 1805, à l'âge
de 57 ans.
LAIVGIJET ( HuBEnT ) , né à Vitteaux
en Bourgogne, l'an 1518, étudia en droit à
Boulogne. Ayant lu le livre des Lieux-
Communs . de Mélanchthon, il prit la ré-
solution de l'aller voir à Witlemberg. Il y
arriva en 1549, et y lia une étroite amitié
avec cet homme fameux , qui lui inspira
les erreurs de Luther. Après la mort de
Mélanchthon , Languet se retira auprès
d'Auguste, électeur de Saxe , qxi'il suivit
au siège de Gotha , et qui lui confia les
négociations les plus importantes. Il fut
député en 1568, à la diète de Spire, et as-
sista en 1570 , aux conférences de Stetin.
Envoyé en France, dans le coxirant de la
même année, il fit une harangue inso-
lente à Charles IX , au nom des princes
protestans d'Allemagne ( elle se trouve
dans les Mémoires de ce roi). Les diffé-
rends survenus en Saxe entre les luthé-
riens et les zuingliens sur l'eucharistie
obligèrent Languet de demander son congé
au duc de Saxe , dont il était un des pre-
miers ministres. Il mourut à Anvers en
1581, à 63 ans, au service du prince d'O-
range. Languet fut, suivant la pensée de
Duplessis-Mornai , ce que bien âiCS gens
tâchent de paraître, et il vécut de la façon
dont les gens de bien veulent mourir j
mais on sent assez que dans les éloges que
les gens de parti font les uns des autres ,
il y a souvent beaucoup à rabattre. On a
de lui plusieurs ouvrages ; les principaux
sont : I des Recueils de lettres en latin ,
à l'électeur de Saxe, publiées à Hall, in-4'',
en 1699 ; à Camerarius , père et fils , im-
primées en 1685, Francfort, in-12; au che-
valier Sidnei, mises au jour en 1646, in-12.
I Vindiciœ contra tyrannos. publiées sous
le nom de Stephanus Junius Brutus.
1579, in-8°, traduites en français , 1581 ,
in-8°. C'est la production d'un républi-
cain qui ne ménage rien , et qui pense sur
les monaïques, comme on parlait dans !^
LAN
279
LAN
sénat de Rome après l'expulsion des Tar-
«{uins. I Une Relation de Vexpédilion de
l'électeur Au^jaste , contre Guillaume
Grumbach et autres révoltés de Saxe ^
avec V Histoire de ce que fit l'empereur
contre ce prince, 1562, in-i° ; | on lui at-
tribue YJpologie du prince d'Orange
contre le roi d'Espagne , 1581 , in-i" ; sa-
tire grossière et caloivmicuse, que le fa-
natique Watson a osé donner comme une
pièce authentique , sur laquelle on de-
vait juger Philippe II. {Voyez ce nom.)
Sa Vie a été écrite par La Mare, conseil-
ler au parlement de Dijon , Halle , 1700 ,
in-12.
LAIVGUET deGERCY ( Jeak-B/vptiste-
Joseph), arrière pelit-neveu du précé-
dent, naquit à Dijon en 1675 , du procu-
reur-général au parlement de cette ville.
Il prit le bonnet de docteur de Sorbonne
en 1703, et obtint la cure deSaint-Sulpice
en 1714. L'église de sa paroisse n'était
guère digne de la capitale : on voulait la
rétablir, et on avait déjà construit le
chœur; mais le reste était imparfait.
L'abbé Languet conçut le vaste dessein
d'élever un temple capable de contenir
ses nombreux paroissiens. Il entreprit ce
grand ouvrage, n'ayant d'autres fonds
qu'une somme de 100 écus. Il employa
cet argent à acheter des pierres qu'il fit
étaler dans toutes les rues adjacentes , et
il eut soin de faire annoncer qu'elles
élaient destinées à la construction de son
église. Les secours lui vinrent aussitôt de
toutes parts , et le duc d'Orléans , régent
du royaume, lui accorda une loterie. Ce
prince posa la première pierre du portail
l'an 1718 ; et le curé de Saint-Sulpice n'é-
pargna, pendant toute sa vie, ni soins, ni
dépenses, poiir rendre son église l'une
des plus magnifiques de la France, en ar-
chiteclure et en décoration. La consécra-
tion s'en fit en 1745. Un autre ouvrage ,
qui ne fait pas moins d'honneur à l'abbé
Languet , est l'établissement de la iTiaison
de Y Enfant Jésus^ en faveur des pauvres
femmes et filles, et d'un certain nombre
de demoiselles nobles : il est maintenant
destiné aux enfans malades. L'abbé Lan-
guet ne cessa de soutenir cette maison
jusqu'à sa mort, arrivée en 1750, à 75
ans, dans son abbaye de Bernay. .Jamais
homme ne fut plus habile et plus indus-
trieux que lui à se procurer d'abondantes
aumônes et des legs considérables. On sait
de bonne part qu'il distribuait environ un
niillion chaque année. Il préférait tou-
jours les familles nobles réduites à la pau-
vreté, et l'on a appris, de personnes dignes
de foi. qu'il y avait dans sa paroisse quel-
ques familles de distinction , pour les-
quelles il dépensait jusqu'à 50,000 livres
par an. Généreux par caractère , il don-
nait grandement , et savait prévenir les
besoins. Dans le temps de la cherté du
pain , en 1725 , il vendit , pour soulager
les pauvres , ses meubles , ses tableaux .
et autres effets rares et curieux , qu'il
avait amassés avec beaucoup de peine. 11
n'eut depuis ce temps-là , que trois cou-
verts d'argent, point de tapisserie , et un
simple lit de serge que madame de Cavois
ne fil que lui prêter, parce qu'il avait
vendu jusqu'alors pour les pauvres tous
ceux qu'elle lui avait donnés en différens
temps. Bien loin d'enrichir sa famille, il
distribua jusqu'à son patrimoine. Sa cha-
rité ne se bornait point à sa paroisse-
Dans le temps de la peste de Marseille, il
envoya des sommes considérables eu Pro-
vence, pour soulager ceux qui étaient
affligés de ce fléau. Il s'intéressa sans
cesse et avec zèle à l'avancement et au
progrès des arts, au soulagement du peu-
ple et à la gloire de la nation. L'abbé Lan-'
guet refusa constamment Tévêché de
Conserans, celui de Poitiers, et plusieurs
autres. Sa piété et son application conti-
nuelle aux œuvres de charité ne l'empê-
chaient point d'être gai et agréable dans
la conversation. Il y faisait paraître beau-
coup d'esprit , et avait des reparties fines
et délicates. On lui a élevé dans l'église de
Saint-Sulpice un superbe mausolée qui fut
enlevé pendant la révolution.
L/kiNGUEÏ (Jean-Joseph) , frère du
précédent, entra, à la sollicitation du
grand Bossuet, son ami et son compa-
triote, dans la maison de Navarre, dont
il devint supérieur; il y prit le bonnet de
docteur de Sorbonne, et fut nommé évé-
que de Soissons en 1715. Son zèle pour la
constitution Unigenitus ne contribua pas
peu à lui procurer la milre, et ce zèle ne
diminua point lorsqu'il l'eut obtenue. Il
signala chaque année de son épiscopat par
des Mandcmens et par des Ecrits contre
les anti-constitutionnaires , les appelans ,
les réappelans, les convulsionnaires et les
dévots au diacre Paris. Ses adversaires
prétendirent que Tournely avait eu la
plus grande part à ces différens ouvrages
contre eux ; et après la mort de ce doc-
teur, l'évêque ayant mis au jour la Vie de
Marie Alacoque^ un mauvais plaisant du
parti dit que Tournely avait emjwrté l'es-
p^'it de l'évêque de Soissons j. et quil ne
LAN
280
LA]?Î
lui avait laissé que la Coque. Celle plai-
santerie n'était pas plus fondée que cette
autre antithèse, enfantée par je ne sais
qui, lorsqu'il eut été admis à l'académie
française et au conseil d'état : « L'évêque
» de Soissons a traité la théologie sans en
» être instruit, il était académicien sans
• en avoir les talens, et conseiller-délai
» sans être instruit des affaires. «Tous ces
traits portent à faux. Languet n'était ni
un Fénélon, ni un Bossuet, on le sait très
bien, mais il savait écrire, et même avec
élégance. Ses ennemis devraient l'avouer
et l'avoueraient, si le bandeau de l'esprit
de parti ne cachait toute vérité. Il se peut
qu'il ait trop donné à son zèle dans ses
ouvrages polémiques ; qu'il n'ait pas assez
distingué le dogme de l'opinion; qu'il
n'ait pas toujours vu le mérite de ses ad-
versaires, mais il n'est pas moins vrai que
plusieurs morceaux de ses productions
font honneur à son savoir et à son esprit.
Ce prélat passa, en 1751, de l'évêché de
Soissons à l'archevêché de Sens, et mou-
rut en 1735, à l'âge de 76 ans, regardé
comme un prélat pieux et charitable. Ses
ouvrages polémiques ont été traduits en
latin, et imprimés à Sens en 1753, en 2
vol. in-fol. On a encore de lui : | une Tra-
duction des Psaumes, in-12 ; | De l'espi'it
de l'Eglise dans ses cérémonies , contre
le traité de Claude de Vert , trésorier de
Cluny, sur les cérémonies de l'église;
I des livres de piété pleins d'onction,
entre autres le Traité de la confiance en
la miséricorde de Dieu, bien propre à la
faire naître dans le cœur des fidèles ; | des
Remarques sur le fameux Traité du jé-
suite Pichon, touchant la fréquente com-
munion; I nua Réfutation des Lettres de
Jacques Varie t ( voyez ce nom ) ; | la
y^ie de Marie Alacoque ^ 1729, in-i** ;
I plusieurs Discours dans les recueils de
l'académie française. Ils prouvent qu'il
était très capable de composer lui-même
ses ouvrages. Son style est un peu diffus,
niais clair , naturel , élégant et assez
noble.
L.VNGVKLDT. Voij. MACROPÉDIUS.
* L ANJUIAAiS (Jea\-Dems, le comte),
]»air de France , membre de l'académie
des inscriptions et belles-lettres, né le 12
mars 1733, à Rennes, était fils d'un avo-
cat au parlement de cette ville ; il se voua
à la même carrière que son père , fut ad-
mis dans l'ordre des avocats , par dispense
d'âge en 1771 , et s'appliqua si bien à l'é-
tude des lois qu'il obtint 18 bonnet de doc-
teur en 1772. H fut nommé, trois ans
après, à la suite d'un brillant concours,
professeur de droit ecclésiastique, Kn
1779 il fut choisi pour être un des conseil-
lers des états de Bretagne , par chacun
des trois ordres qui les composaient. Le
tiers-état de la sénéchaussée de Rennes ,
le chargea en 1789 de la rédaction du ca-
hier de ses vœux , oii l'on trouve ex-
primée la demande d'une constitution
monarchique et représentative , et relut
pour son député aux états-généraux , où
Lanjuinais vota contre la noblesse, con-
tre les parlemens et contre tous les privi-
lèges. Quoiqu'il eût été un de ceux qui
contribuèrent le plus à la rédaction de la
constitution civile du clergé, il vola con-
tre le décret qui déclara sans exception ,
tous les biens du clergé biens de l'étal.
Pendant qu'on délibérait sur la conslilu-
tioii , Mirabeau ayant demandé que les
ministres fussent admis dans l'assemblée ,
sauf à décider plus tard s'ils pourraient
en faire partie , Lanjuinais s'y opposa^ ol
fit décréter que, pendant la session, au-
cun député ne pourrait faire partie du
ministère. Lanjuinais fut compté parmi
ces hommes nommés réviseurs dont le
but était de maintenir la constitution ,
et de s'opposer à ce qu'ils appelaient les
prétentions de la cour. Après la session,
Lanjuinais retourna à Rennes où il devint
professeur de droit constitutionnel, pro-
fesseur de grammaire générale, et mem-
bre de la haute cour nationale (1792). Au
mois de septembre de la même année , le
département d'Ile-et-Vilaine le nomma
membre de la Convention, et dans celte
assemblée Lanjuinais se montra le dé-
fenseur du trône. Il se pronotiça dès le
24 septembre contre les provocateurs
à l'assassinat , et appuya la dénoncia-
tion de Louvet contre Robespierre. Lors
du procès de Louis XVI , il demanda
qu'on laissât à ce prince les mêmes moyens
de défense et d'appel qu'aux autres accu-
sés : le 26 décembre il attaqua l'acte d'ac-
cusation. Le 16 janvier 1793, il vota non
comme yw^e^ mais comme représentant ^
la réclusion et le bannissement à la paix,
demandant toutefois que le jugement
n'eût force de loi que s'il réunissait les
deux tiers des suffrages; cet avis , le seul
qui pût sauver Louis XVI , fut rejeté.
Lanjuinais s'opposa, malgré les menaces
des Montagnards qui venaient à l'assem-
blée avec des armes pour effrayer leurs
collègues , à ce qu'on rapportât le décret
qui ordonnait des poursuites contre les
auteurs des massacres de septembre ; ses
LAN
281
LAN
efforts n'eurent aucun résultat ; ils ne fu-
rent pas plus heureux quand il combattit
la création d'un tribunal extraordinaire ;
mais il refusa courageusement de se ren-
dre au comité de législation dont il était
membre , et d'y coopérer à la loi qui de-
vait constituer ce monstrueux tribunal ,
devenu si fameux sous le nom de tribu-
nal révolutionnaire. Une commission de
douze membres avait été formée au sein de
l'assemblée pour s'opposer aux envaliisse-
mens de la commune : la Montagne ayant
demandé la suppression de cette commis-
sion, Lanjuinais s'éleva vigoureusement
contre ces fauteurs de l'anarchie , et dé-
nonça Chabot et le reste du comité d'iu-
surrection qui s'assemblaient dans la salle
de l'archevêché : une lutte violente s'en-
gagea entre la majorité révolutionnaire et
la minorité qui s'opposait aux désoidres.
Lanjuinais faisait partie de cette dernière
fraction : le 2 juin 1793 , il attaqua de
nouveau Chabot comme un des auteurs
du projet de proscription médité contre la
minorité : plusieurs députés de la 3Ion-
tagne , parmi lesquels on remarquait le
boucher Legendre et Chabot, s'élancèrent
vers lui , le pistolet à la main , pour le
faire descendre de la tribune : Lanjuinais
se tournant avec calme vers l'apostat
Chabot, lui dit : « On a vu dans l'antiquité
» orner les victimes de fleurs et de
» bandelettes ; mais le prêtre qui les im-
» molait ne les insultait pas. » Les pre-
scripteurs étonnés n'osèrent pousser plus
loin leur audace , et Barrère affectant une
modération hypocrite proposa une me-
sure de pacification : il fallait , disait-il ,
que les membres accusés se suspendissent
eux-mêmes ; mais Lanjuinais s'y opposa
dans undiscours éloquent quine fitqu'irri-
ter de plus en plus ses ennemis ; cepen-
dant un décret proclama l'innocence des
députés incriminés ; mais sur la fin du
jour im nouveau décret ordonna que Lan-
juinais et plusieurs autres membres se-
1 aient gardés à vue chez eux. Lanjuinais
l»arvint à s'évader, et se rendit à Rennes,
où , caché durant 18 mois dans sa propre
maison, il dut la vie au courage de sa
femme et à celui de sa domestique , Marie
Poirier. Leur dévouement a été célébré
par Legouvé dans son poème intitulé Le
Mérite des femmes. Après le 9 thermi-
dor, Lanjuinais reparut sur la scène poli-
tique , et il rentra le 8 mai 1793 à la Con-
vention dont il devint président. Lorsqu'il
reprit la parole, ce fut pour plaider de
nouveau la cause de l'humanilê et de la
religion, etiloLtintl'ouverture des églisc^^
Après le règne de la Convention et l'éta-
blissement du Directoire, soixante-lreiy.e
départemens le portèrent au conseil
des Anciens, dont il devait secrétaire,
le sort l'en fit sortir dans le mois de mai
1797. Après la révolution du 18 brumaire
an 8, il fut nommé deux fois candidat au
sénat par le Corps législatif, et enfin ad-
mis dans cette assemblée le 22 mars 1800.
Il s'y prononça contre l'établissement du
consulat à vie et du gouvernement impé-
rial; et fit partie de la minorité qui s'op-
posait aux vues ambitieuses do Bonaparte.
Cependant il reçut le titre de comte et le
cordon de commandant de la légion-d'hon-
neur. Le premier avril 1814 , il adhéra à
la déchéance de l'empereur, vota l'établis-
sement d'im gouvernement provisoire , et
coopéra à la rédaction de la constitution
que le sénat présenta à Louis XVIIL Lan-
juinais fut placé sur la liste des pairs nom-
més le k juin 181/1. , et refusa pendant les
cent-jours de prêter serment à Napoléon.
La ville de Paris l'ayant choisi pour son
député, il fut élu à la presque unanimité
président de la chambre des représentans.
Louis XVIII, rentré en France, le main-
tint à la chambre des pairs , où il fit partie
jusqu'à sa mort , de la minorité constitu-
tioiuielle. Depuis 1808 il a\ait été admis à
l'institut, et lors de la réorg-anisation des
quatre académies , il entra dans celle des
inscriptions et belles-lettres. Lanjuinais est
mort à Paris le 13 janvier 1827. Plusieurs
discours furent prononcés sur sa tombe,
notamment i)ar M. Abel Rémusat, au
nom de l'académie des inscriptions et
belles-lettr*3. M. le comte de Ségur pro-
nonça son éloge funèbre à la chambre des
pairs dans la séance du T*" mars. Outre ses
rapports et ses discours à.d.n'i les diverses
législatures dont il a fait partie, Lanjuinais
a publié plusieurs ouvrages scientifiques
et littéraires, ainsi que divers écrits
d'économie politique. Ils sont intitulés :
I Èlémoire sur l'origine^ l'inscriptibilité ,
les caractères distinclifs des différentes
espèces de dîmes ^ et sur la présomption
légale de l'origine ecclésiastique de toutes
les dîmes tenues en fief^ 1786 , in-8" ;
I Rapport sur la nécessité de supprimer
les dispen^s de mariage , et d'établir une
forme purement civile pour constater l'é-
tat des personnes^ 1791, in-8", 2*^ édition
ISlo. L'époque où parut pour la première
fois cet écrit indique assez dans quel es-
prit il était rédigé. | Discoïirs sur la ques-
tion de savoir s'il convient de fixer un
24.
LAN
282
LAN
maximum de population pour les coin-
munes de la république^ 1793, in-8° ;
I Dernier mot de Lanjuinais aux assem-
blées primaires ^ sur la constitution de
1793, Rennes, 1793, in-S", 2' édition,
1793 ; I Notice sur l'ouvrage du sénateur
Grégoire^ intitulé : De la littérature des
nègres^ 1808 , in-S" ; | Histoire naturelle
de la parole j par Court de Gébelin , avec
un Discours préliminaii-e sur l'histoire
de la grammaire générale^ Paris , 1816 ,
in-8°; | Appréciation du projet relatif aux
trois concordats , 1817; | La religion des
Jndous ^ selon les Védah > ou Anahjse de
tOupnehhat ^ publié par M. Jnquetil-
Duperron en 1802, 2 vol. in-4°, Paris,
1823, in-8°; | De l'organisation munici-
pale en France (avec M. de Kératry);
I Discours sur la compétence de la cham-
bre des pairs . au crime d'attentat à la
sûreté du roi ; ' Histoire abrégée de l'in-
quisition religieuse en France ^ 1821 , in-
8° ; I Etudes biographiques et littéraires
sur Antoine Amauld^ Nicole et Necker,
avec une notice sur Christophe Colomb ,
etc. , Paris , 1823 , in-8° ; | Rapport sur
l'effet rétroactif des lois du 5 brumaire
et du 17 nivôse an 2 ( 179o ) , in-8* ; | Mé-
moire justificatif ^ 181S , in-8" , 2* édition ;
\Constitutions de la natioti française, p?-é-
cédées d'xcn Essai historique et politique
sur la charte,. Paris, 1819, in-8"; | la
Bastonnade et la Flagellation pénales
considérées chez les peuples anciens et
chez les modernes ^ 1823, in-18, 2 édi-
tions ; I Tableau général de l'état politi-
que intérieur de la France depuis I8I/1.,
et de l'Angleterre depuis 1716, etc., 1824,
in-8°; | Les Jésuites en miniature, ou le
livre du jésuitisme analysé , avec quelques
mots sur des réflexions nouvelles de
M. l'abbé de la Mennais , et sur la vie de
Scipion Ricci , évéque de Pistoie , 1826,
in-è"; I Extraits de la grammaire slave de
la Camiole, du Mithridate d'Adehmg, etc.
dans les mémoires de l'académie celtique;
I Plusieurs analyses, notices et autres
morceaux littéraires lus à Tinstitut , ou
insérés dans le Magasin encyclopédique,
la Chronique religieuse , la Revue ency-
clopédique , etc. Lanjuinais fut en outre
avec Grégoire , co-édileiu' et co-réviseur
de la Vie et des Mémoires de Scipion
Ricci, par de Polter, Paris, 1823, k vol.
in-8°.
* LAANEAU ou DELANNEAU (P. A.
V. de), ancien directeur du pensionnat
de Sainte-Barbe à Paris, mort dans celte
ville, le 50 mars 1830, fut élève de l'école
militaire en lî67, puis théàtin et préire;
il fut professeur au collège de Tulle et
ensuite vicaire épiscopal à Autun en 1791.
Ai)rès avoir été procureur-syndic du dis-
trict de la même ville et membre du
club, il quitta le sacerdoce , se maria et
établit un pensionnat qui fut fréquenté
par un grand nombre d'élèves. Les étu-
des de cette maison y étaient en généra!
assez bien dirigées ; mais Iti part des ha-
bitudes religieuses y était nulle dans le
principe, et jamais elle n'y fut très grande.
On assure que Lanneau présenta une sup-
plique au cardinal-légat pour faire réha-
biliter son mariage après le conœrdat.
vSans doute l'esprit de parti contribua
beaucoup au succès de son établissement ;
mais noire impartialité nous force de dire
que Lanneau était bienfaisant. 11 a trans-
mis son pensionnat à son fils, quelque
temps après la restauration. Plusieurs
journaux , et entre autres le Journal du
commerce , lui ont consacré à^s Notices
nécrologiques. On lui doit quelques ou-
vrages pour l'enseignement , parmi les-
quels on cite un Cours de leçons pratiques
de grammaire française.
* LAINES ( Jean ), duc de Montébello ,
général français, né d'une famille esti-
mée mais pauvre, à Lectoure (ancienne
Guyenne ) , dans le département du Gers ,
!e 11 avril 1769, est parvenu par des pro-
diges de valeur à une haute illustration
militaire. Il faisait ses éludeS dans sa ville
natale, lorsqu'il fut obligé d'y renoncer
par suite de la perte que son père fit alors
du peu de bien qu'il possédait et qui con-
sistait en une métairie. 01)ligé de prendre
une profession , le jeune Lannes fut mis
en apprentissage chez im teinturier; en
1792 , il fut appelé par la loi qui met-
tait en réquisition tous les jeunes Français
en état de porter les armes. Lannes partit
un des premiers , en qualité de sergent-
major, pour l'armée des Pyrénées-Orien-
tales dans le bataillon des volontaires du
département du Gers , ancien comté d'Ar-
magnac. Actif, intelligent et brave, son
avancement fut rapide , et dès l'année
1793 il était colonel (chef de brigade).
Après le traité de Bàle, qui établit la paix
entre la France et l'Espagne , Lannes ne
fut pas placé dans le nombre des offi-
ciers supérieurs en activité. Il fut com-
pris dans le nombre des officiers que le
conventionnel Aubry fit destituer après
le 9 thermidor, pour cause d'incapacité.
Le repos auquel il semblait condamné l'in-
digna, et il se rendit au commencement
LAN
283
LAM
de 1796, en qualité desimpie volontaire,
à l'armée d'Italie , où sa valeur le fit re-
marquer, et fixa particulièrement sur lui
l'attention du général Bonaparte , qui se
rappela qu'à la journée du 13 vendé-
miaire an /t (18 octobre 179S ), au moment
où la Convention était menacée par les
sections de Paris, cet officier avait été
sous ses ordres , et qu'il s'était distingué
par son sang-froid et son courage. Fait
colonel du 29' régiment (32' demi-brigade) ,
sur le champ de bataille de Millésime (2o
germinal an 5, ik avril 1796), il fit des
prodiges de valeur au passage du Pô , à
la bataille du Pont de Lodi (21 fioréal, 10
mai 1796), à la bataille de Bassano (22
fructidor, 8 septembre 1796), où il prit
deux drapeaux ; à l'assaut de Pavie , à la
suite duquel il fut fait général ; au siège
de Mantoue, où il enleva le faubourg
Saint-George à la baïonnette ; aux com-
bats de Fombio et do Governolo; enfin à
la mémorable bataille d'Arcole , 25 bru-
maire an k, (la novembre 1796), où les
Français remportèrent sur les Autrichiens
une dès plus importantes victoires de la
rampagne, et à laquelle Lannes avait voulu
assister malgré les vives souffrances que
lui faisaient éprouver des blessures reçues
à un précédent combat. Lorsque l'armée
d'Italie marchait sur Rome, le général
Lannes arriva le premier à Imola, dont il
enlevales retranchemens;et cet événement
décida aussitôt de la soumission du véné-
rable et malheureux pape Pie VI , auprès
duquel le vainqueur fut envoyé pour trai-
ter de la paix. Après le traité de Campo-
Formio ( 23 vendémaire an 6, 17 octobre
1797), le général Lannes se rendit à Paris
où il devait prendre un commandement
dans l'expédition dirigée contre l'Angle-
terre ; mais celle d'Egj'pte ayant été dé-
cidée dans cet intervalle, il y accompagna
Bonaparte , qui le regardait depuis long-
temps comme un de ses plus braves gé-
néraux. Dans cette canjpagne , où tout
était nouveau pour l'armée française ,
ennemis, armes^ localitcs, climat, Lannes
fut constamment cliargé du commande-
ment des avant-gardes. Au débarquement
de l'armée sous les reurs d'Alexandrie,
dans tous les combats qui précédèrent
l'entrée des Français au Caire, au siège
de Saint-Jean d'Acre, à la bataille d"A-
boukir , il se signala par une étonnante
intrépidité, et fit preuve des plus grands
talens militaires. Sa division se porta
contre les Turcs, sur la montagne de Sa-
bles , défendue par six canons de gros
calibre; et la terreur qu'il répandit dans
leur armée fut telle que les soldats, éper-
dus et fuyant de toutes parts, se précipi-
taient dans la mer pour échapper au fer
des vainqueurs ; plus de dix mille y pé-
rirent, refoulés vers le rivagç par la ca-
valerie du général Murât. Lannes investit
Aboukir , attaqua la redoute dont il em-
porta de vive force les relranchemens , el
fut dangereusement blessé dans ce com-
bat. Lorsque Bonaparte quitta l'Egypte
pour revenir en France , Lannes fut un
des sept officiers qui l'accompagnèrent ,
et un des généraux qui lui furent le plus
utiles dans les journées des 18 et 19 bru-
maire an 8 ( 9 et 10 novembre 1799 ). En.
voyé à Toulouse à la suite de ces événe-
mens, il fut chargé du commandement
des 9' et 10' divisions militaires, dont sa
ville natale faisait partie; et, quoiqu'il
eût plus de courage sur un champ de ba-
taille que d'habileté pour une négociation,
sa gloire, sa fermeté , sa franchise, l'es-
poir que l'on fondait dans le gouverne-
ment qui venait de s'établir, parvinrent
à dissiper les troubles que les factions
espéraient y maintenir encore. Rappelô
à Paris, il fut nommé commandant en chef
de la garde consulaire- La guerre s'étani
rallumée en Italie , et le premier consul
ayant quitté Paris le 16 floréal an 8 ( 6 mai
1800 ) pour se mettre à la tête de l'armée.
Lannes fut chargé du commandement de
l'avant-garde , marcha une seconde fois
sur Pavie , qu'il avait prise d'assaut deux
ans auparavant, passa le Pô, enleva lu
position avantageuse de Stradella, fit
preuve de talens à la bataille de Casteggio,
et se fit remarquer à celle de Marengo, par
plusieurs faits d'armes auxquels il prit
part comme général et comme soldat. Un
sabre d'honneur fut la récompense de sa
belle ct>nduile. Envoyé, en novembre 1801,
en qualité de ministre plénipotentiaire , à
Lisbonne , il sut y maintenir la dignité
de la nation qu'il représentait , et quitta
ce poste à la suite de difticultés ocrasio-
nets par le droit q'a'ii prétendait avoir de
faire entrer dans le Tage des bàtimens
chargés de marciiandises , sans être sou-
mis à aucune visite ni payer de droits. Il
fut élevé àladignlté de maréchal d'empire
le 29 floréal an 12 ( 19 mai 1804), puis
créé successivement chef de la 9' colîorle.
grand officier de la légion-d'honneur et
duc de Montébelio. A la reprise des hos-
tilités avec l'Autriche, en 1803, il obtint
le conunandemcnt de l'avant-garde de la
grande armée, se porta sur Louisbourg,
LAN
284
LAN
et pénétra en Bavière, où il commença
la campagne de la manière la plus bril-
lante. Il contribua aussi aux succès du
combat de Werlinf^en , à la défaite de
Mack , à la prise d'Ulm , et notamment à
la victoire d'Holabrunn, où il ordonna
une charge de cavalerie qui décida l'af-
faire en faveur de l'armée française.
Chargé du cominandcment de l'aile gau-
che de la grande armée, à la bataille
d'Austcrlit?- , deux de ses aides-de-camp
furent tués.à ses côtés dans cette iniporlanle
journée, qui décida du sort de l'Autriche,
et au succès de laquelle le duc de Monté-
bello contribua par ses savantes manœu-
vres et par la prodigieuse activité de ses
raouvemens.La campagne contre la Prusse
ayant commencé en octobre 1807, le ma-
réchal se signala dans toutes les affaires :
léna, Eylau, Friedland, furent les nou-
veaux théâtres de sa gloire; mais ce fut
surtout dans la terrible bataille d'Eylau
qu'il fit des prodiges de valeur qui lui mé-
ritèrent l'admiration et la reconnaissance
de toute l'année. Lorsque Bonaparte
partit pour l'Espagne , le duc de Monlé-
bello l'y accompagna; il commanda un
corps d'armée à la bataille de Tudela; il
dii igea le siège de Saragosse et obtint di-
vers succès dans cetleguerre injuste, puis-
qu'elle était dirigée contre l'indépendance
et la liberté d'un peuple. Cependant l'Au-
triche, toujours vaincue, mais toujours re-
doutable, venait de relever pour la cin-
quième fois contre Napoléon l'étendard de
la guerre. De retour en France , où il était
marié civilement depuis plusieurs années
( il avait répudié sa première femme ) , le
duc de Montébello jouissait de quelque loi-
sir dans la belle terre de Maisons, qu'il
avait acquise aux environs de Paris , lors-
qu'il reçut l'ordre de partir pour l'Alle-
magne ; il n'abandonna sa retraite qu'avec
les plus funestes pressenlimens, embrassa
sa femme et ses enfans, et versa des larmes
en quittant son château , qu'il ne devait
plus revoir. A la tcte de ces braves légions,
qui avaient souvent vaincu sous ses or-
dres, le duc de iMontébello, après une
suite non interrompue de victoires, s'em-
para de Ratisbonne , et marchait de succès
en succès aans le cours de cette campagne,
lorsqu'à la bataille d'Esling, livrée le 22
mai 1809, un coup de canon lui emporta
la jambe droite toute entière et la gauche
au dessus de la cheville; on désespéra
aussitôt de sa vie, et l'on se hâta de le
transporter sur un brancard auprès de
Bonaparte. Quoique occupé à donner des
ordres que le sort à peine assuré de la
bataille rendait pressans , il ne put , à ce
douloureux aspect, se défendre d'une vive
émotion. Le maréchal , qui avait perdu
connaissance, revint à lui en ce moment
et dit à Napoléon : « Dans une heure ,
» vous aurez perdu celui qui meurt avec
» la gloire et la conviction d'avoir été
» votre meilleur ami. » Ces mois furent
entendus de tous ceux qui les environ-
naient , mais ce qui ne l'a été que d'un
très petit nombre de personnes, et de
manière à ce qu'il est impossible d'eu
donner vm récit exact , c'est la conversa-
tion entrecoupée du maréchal avec Na-
poléon, et les conseils qu'il lui donna en
expirant, pour l'engager à mettre un
terme à l'excès d'une ambition qui, après
avoir entraîné successivement au tom-
beau tous les compagnons de sa fortune ,
finirait de l'y précipiter lui-même. La
réalité de celle conversation est hors cio
doute, mais nous n'oserions répondre de
l'exactitude des détails qui en ont été doii-
nés. Un petit nombre de spectateurs , à
qui Bonaparte avait donné l'ordre do s'é-
loigner, parvhuent seulement à saisir
quelques paroles , et à juger par la chaleur
avec laquelle s'expiimait le maréchal
mourant , et par l'altération sensible de
Napoléon, que ce qui se passait entre eux
tenait à de grands intérêts. Le duc de
Montébello expira le 5i mai 1809, après
neuf jours passés dans les plus vives dou-
leurs, i)roduites par une double amjju-
tation. Son corps, déposé d'abord à Stras-
bourg, a été transporté à Paris le 22 mai
de l'année suivante , un an après sa mort
et inhumé au Panthéon le 6 juillet , anni-
versaire de la victoire de 'VV'ayram. La
seconde épouse de Lannes , M"' de Gué-
héneuc, était fille d'un ancien commis-
saire des guerres. Le maréchal a laissé
trois enfans, dont l'ainé a été créé pair
de France , le 17 août 1815 , sous le nom
de Montébello. Un fils de la première
femme qui réclamait une part dans la
succession du maréchal , avait été précé-
demment déclaré adultérin par les tribu-
naux. On aune Vie militaire de J. Lan-
nes, t\.c., par M. René Perin, Paris, 1810,
in-8°.
LAKNOY ( CHAULts de ) , général au
service de Charlcs-Quinl, était issu d'une
des plus illustres maisons de Flandre, où
il naquit vers 1470; il servit d'abord
dans les armées de l'empereur Maiimi-
lien , qui le fit chevalier delà Toison-d'Or
eu liiiG, gouverneur de Tournai en lli21.
LAN
28S
LAft
Lannoy dc*'int vice-roi de Naples pour
l'empereur Charles-Quint en 1322. Il eut le
commandement général dos armées de ce
prince, après la mort de Prosper Colonne
en 1523, et s'immortalisa à la journée de
Pavie, en 1525, où François 1" iut fait
prisonnier. On sait que ce prince ne voulut
ge rendre qu'au vice-roi. a M. de Lannoy.
• lui dit-il en italien, voilà l'épée d'un
• roi qui mérite d'être loué , puisqu'avant
» que de la rendre il s'en est servi pour
> répandre le sang de plusieurs des vô-
» très. » Cela était vrai , et le roi avait
un peu trop profité de la certittide où
il était que les Impériaux ne voulaient
pas le tuer, pour en tuer lui-même très
inutilement et impunément plusieurs
qui cherchaient à le faire prisonnier.
Aussi de Lannoy , en prenant son épée ,
et lui en donnant une autre lui dit : a Je
» prie votre majesté d'agréer que je lui
B donne la mienne , qui a épargné le sang
» de plusieurs des vôtres. » Le généreux
Lannoy traita toujours François T'^en roi.
Craignant que ses troupes n'entreprissent
de se saisir de la personne de ce prince ,
pour s'assurer de leur paiement , il le fit
mener dans le château de Pizzighitone.
ensuite, pour l'engager à passer en Es-
pagne, il lui dit qu'il pourrait s'aboucher
avec l'empereur , et qu'ils s'accorderaien)
facilementensemble, lui promettant qu'au
cas qu'ils ne pussent convenir , il le ra-
mènerait en Italie. Le traité ayant été fait
entre Charles-Quint et François l", ce fut
Lannoy qui conduisit le roi près de Fon-
tarahie , sur le bord de la rivière de Bi-
dassoa, qui sépare la France de l'Espagne.
L'empereur Charles- Quint lui donna la
principauté de Sulmone , le comté d'Ast
et celui de la Roche en Ardenncs. Il mou-
rut à Gaëte en 1527, d'une fièvre ardente
qui l'emporta en quatre jours. Lannoy
était un général réfléchi, mesuré, capa-
ble de décider la victoire par ses talens
militaires autant que par son courage.
Propre au cabirjet comme à un champ de
bataille , il savait traiter une négociation
et ménager une affaire.
* LA\AOY ( JcLiEi«iVE-Co:iNÉLiE , ba-
ronne de), née à Breda en 1758, une des
dames hollandaises qui ont cultivé la
poésie avec le plus de succès , a laissé
trois tragédies, qui ont été accueillies
avec la plus grande faveur sur le théâtre
d'Amsterdam ; leurs litres sont : Léon le
Grand, 1767, in-12 ; le Siège de Harlem,
4770 ; et Cléopâtre, 1776. La baronne de
Lannoy a remporté , en outio , un grand
nombre dé prix de poésie. Elle a publié
elle-même deux volumes de ses produc-
tions poétiques , Leyde , 1780, in-S". Après
sa mort arrivée à Bréda , en 1782, M. de
Bildcrdik en a fait paraître un troisième,
1785, in-8°. Celte femme poète se distingua
principalement dans l'épître , l'ode et dans
la satire. 11 y a dans ses compositions de
la verve, souvent de l'originalité » et tou-
jours de l'élégance.
LAÎVOUE. Voyez NOUE.
LAîVSBERG ( Jeaiv , en latin Lansper-
gius ), natif d'une ville de son nom en
Bavière, se fit chartreux à Cologne, mou-
rut en 1559, n'ayant pas encore atteint la
50^ année de son âge , avec le surnom de
Juste , et laissa un grand nombre d'ou-
vrages ascétiques, qui respirent une piété
tendre. Ils ont été recueillis à Cologne en
1693 , en 5 vol. in-4". Ses Entretiens de
Jésus-Christ avec l'âme fidèle, Alloquium
Jesu-Christi ad anim.am fidelem, Lou-
vain , 1572 , in-12 , ont été traduits en
français et dans plusieurs autres langues.
Nous devons citer aussi Enchiridion mi-
lUiœ christiance , Paris , 1546 , et Cologne
1507, in-12. L'auteur était un homme zélé
qui travailla avec ardeur à faire rentrer
dans le sein de l'Eglise ceux que les er-
reurs de Luther en avaient fait sortir.
LA.\SBERG (Matthieu.) Fby.LAENS-
BERGH.
LANSBERG, et non LANDSBERGHE ,
et LANSBERGHE (Pbilippe), mathémati-
cien et astronome protestant , né à Gand
en 1565 (i) , fut pendant quelque temps
ministre à Anvers. Cette ville étant ren-
trée sous l'obéissance de Philippe II , le
17 août 1585 , il se vit obligé de chercher
un asile dans les Provinces-Unies. Il y fut
ministre à Ter-Go es en Zélande, et se
retira sur la fin de ses jours à Middel-
bourg, où il mourut en 1652, à 71 ans. On
a de lui : | Progytnnasmata astronomiee
restitutœ,M\CiA.GVDO\xrQ, 1619, in-i"; ibid.
1629; traduit du hollandais en latin par
Martin Hortensius, Middelbourg, 1650,
in-/«.°, et en français par N. Goubard, ib.,
1659, in-fol. ; | Commentationes in mo-
lum terrœdiurnum et annuum, etc., 1629,"^
trad. en français par N. Goubard , Mid-
delbourg, 1653 , in-folio, avec des tables.
L'auteur se déclare pour le système de
Copernic. Uranometrice libri très, Mid-
(i) Suivant Foppens, dans sa Bihliolhtca Btlgiea.
lAIais Philippe L.insberg nous apprend lui-rat^me dans
la préf.ice de son Uranometria , tic, (ja"il était ne,
en i56i , dans ta Zëiande-
LAjV
delbourg, 1031 , in-i" ; | Tabuîœ tKotumn
cœlestium perpétua , Middelbourg , 1632,
in-fol. On dit (ju'il travailla iO ans à ces
tables. 1 Introductio in quadrantcrn tum
astronomicwn ^ tum geometricum^ etc.
Middelljourg , 1635 , in-fol. ; une Chrono-
logie sacrée . Middelbourg , 1623 , in-i" ;
I Horologiographia nova^ etc. Tous ces
ouvrages, hormis le premier, ont été réu-
nis à Middelbourg, 1663, in-folio. — Son
fils Jacques LANSBERG s'appliqua aussi
aux mathématiques et publia une Apolo-
gie des ouvrages de son père , Middel-
bourg , 1653 , 'm-k°, et mourut en Hollande
en 1657. — Il ne faut pas le confondre avec
un autre Jacques LAjNSBERG, connu par
une Description de la ville de llulst^ la
Haye , 1687, in-S°; ni avec N. LANSBERG.
habile ingénieur hoUïuidais, qui publia
La nouvelle manière de fortifier les pla-
ces^ la Haye, 1712, in-i". Cet ouvrage est
curieux par la nouveauté du système que
l'auteur y propose , et par la critique qu'il
y fait des places qui paraissent le mieux
fortifiées.
LA.VSiUS, ou LANZIUS (Thomas),
jurisconsulte allemand , né en 1577 à Ber-
gen dans la haute Autriche, voyagea beau-
coup, acquit ime grande connaissance des
mœurs et des lois des différentes nations
et devint professeur de jurisprudence à
Tubingen, On a de lui : Orationes ^ seu
Consultatio de principatu inter provin-
cias Europœj, Amsterdam , 1656 , ia-8°.
Il faut bien se garder de croire toutes les
anecdotes qu'il annonce dans cet ouvrage ;
il y en a d'absolument fausses et calom-
nieuses, en particulier ce qu'il raconte du
cardinal Bembq. Lansius mourut octogé-
naire en 4657.
• LAIVTARA ( Simox-Matiiuriîï ) célè-
bre peintre de paysages, né en 1745 , dans
un village près de Montargis était doué du
talent le plus vrai , et de la plus heureuse
facilité : il n'eut pour ainsi dire d'autre
maître que la nature. Il aurait pu acquérir
de la fortune ; mais la paresse la plus in-
vétérée, et l'insouciance la plus complète
l'empêchèrent toujours de sortir de l'in-
digence. Il mourut dans l'hospice de la
Charité le 22 décembre 1778. Ses tableaux
sont peu nombreux et très recherchés.
Quelques-uns ont été gravés par P. J. Da-
ret, entre autres \di rencontre fâcheuse^
le pécheur amoureux^ l'heureux bai-
gneur, le berger amoureux ^ h estampes
en long. Piquenot a gravé la nappe d'eau
et les chasse-marées, 2 estampes en long ;
el Lebas , le premier livre des p^ues des
286 LAN
environs de Paris, 12 petites feuilles en
long.
• LAIVTIER ( E.-F. de ), membre de
plusieurs académies Uttéraires et cheva-
lier de Saint-Louis, naquit à Marseille,
en 175/t, d'une famille considérée. Il vint
très jeune à Paris, où plusieurs poésies
légères le firent connaître avantageuse-
ment. Il donna ensuite plusieurs comédies
qui furent jouées , non sans succès , telles
que I Y Impatient , en un acte et en vers ,
1778 ; I Le Flatteur, en cinq actes , publié
par Grimod de la Reynière , 1782 , in-S";
I Les Coquettes rivales, en 5 acte» et en
vers , 1786 ; | L'Inconséquent, en trois ac-
tes et en vers , 1788. Dans cet intervalle .
il avait publié : | Le Fakir, conte en vers,
1780 , in-8°, que la Reynière , qui en a été
l'éditeur, affirme n'être point de Lantier.
Le même la Reynière s'est déclaré auteur
de l'ouvrage suivant qu'on a aussi attribué
à Lantier : | Réflexions philosophiques sur
le plaisir, par Un célibataire, ouvrage qui
n'a rien de moral, Paris , 1783 ; | Travaux
de l'abbé Mouche, ihid., 1784, in-I2 ; | ffer
minie, potme en 3 chants, 1788, in-12;
I Voyages d'Aniénor en Grèce et en Asie,
Paris , 1798 , 3 vol. in-8° ; cet ouvrage est
celui qui lui a acquis le plus de réputation;
il a eu plusieurs éditions , et a été traduit
en allemand , en anglais , en espagnol , en
portugais et en russe. Il paraît que M.
Lantier s'était proposé dedonnerune suile
ou complément à l'excellent ouvrage de
l'abbé Barthélémy ( Voyage d' Anachar-
sis ), mais il s'est placé bien loin de son
modèle. Cependant, un style souvent cor-
rect, facile , quoique un peu affecté , dc>
aventures intéressantes en rendraient la
lecture assez agréable, s'il n'était pas en-
tremêlé de tableauxun peu trop lubriques
et d'un esprit d'indépendance civile et
religieuse qui ne fait pas l'élogo des prin-
cipes de l'auteur. Une nouvelle Aspasie ,
que dans l'ouvrage on appelle Lasthénie,
et un libertin bel-esprit, nommé Phanor,
donnent à l'ouvrage de Lantier une cou-
leur plus que licencieuse. Le voyage d'Ar.
ténor n'est qu'un roman d'imagination ,
dont on ne peut tirer que des idées im
parfaites et souvent même fausses des
mœurs de l'ancienne Grèce. On l'a sur-
nommé avec raison VAnacharsis des bou-
doirs ;\es passions y sont mises beaucoup
trop en jeu , et elles en rendent la lecture
dangereuse. En résumé, le livre de M.
Barthélémy est classique dans son genre ,
tandis que loVo/age d' ^nténorn'esl qu'un
roman rempli de saillies qu'on s'est plu à
LAN
287
LAN
trouver spirituelles, parce qu'elles bravent
souvent les bonnes mœurs. On a encore
de M. Lantier : | Contes eJi prose et en vers^
suivis de pièces fugitives^ 1801, 3 vol.
in-18; | Les Voyageurs en Suisse^ 1803,
5 vol. in-8°, 1817, in-12, traduit en an-
glais, 6 vol. in-12 ; ] Voyage en Espagne
du chevalier de Saint-Gervqis ^ officier
français^, de ses divers événemens , 1809,
2 vol. in-8° ; | Correspondance de made-
moiselle Suzette-CésaiHne cVJrly , 1814,
2 vol. in-8"; 1815, 5 vol. in-12; | Recueil
ds poésies^ 1817, in-S". Lantier est mort
à Marseille le 31 janvier 1826, à l'âge
de près de quatre-vingt-douze ans. Quel-
ques mois avant de mourir , il donna en-
core son poème de Geoffroi- Rudel^ ou
le Troubadour^ en huit chants, 1825,
in-8°, qui fut son dernier ouvrage et qui
offre , à travers beaucoup d'imperfec-
tions , un assez grand nombre de vers
remarquables par leur élégance et leur
pureté.
LANUZA ( Jékome-Baptiste de SEL-
L AN de), surnommé le Dominique de
son siècle , naquit à Ixar , dans le diocèse
de Saragosse, en 1353, se fit dominicain,
et devint provincial de son ordre. Il exer-
çait cet emploi avec beaucoup de distinc-
tion, lorsqu'il présenta une requête à
Philippe III, contre la doctrine de Molina,
et la liberté que les papes laissaient aux
théologiens de l'enseigner. Cette requête
peut faire honneur au zèle de l'auteur
pour la prédétermination physique, mais
elle n'en fait pas à sa modération. Les
pontifes avaient laissé la liberté, parce
qu'ils voyaient que dans les questions
controversées , rien n'intéressait la foi.
( Voyez LEMOS. ) Ce pieux dominicain
fui élevé en 1616, sur le siège de Balbastro,
en 1622, sur celui d'Albarazin. Il mourut
dans cette dernière ville en 1625, après
une vie remplie par les devoirs d'un
évêque et par les exercices ji'un reli-
gieux. Philippe III faisait tant de cas de
sa vertu, qu'il le fit prier, à son avène-
ment au trône, de lui indiquer les ecclé-
siastiques et les religieux qu'il jugerait
dignes des premières dignités de l'Eglise.
On a de lui des ] Traités évangéliques ,
écrits simplement et solidement; des
I Homélies, en 3 vol., traduites de l'espa-
gnol en latin assez fidèlement , par Oné-
sime de Kien , Mayence , 1649, k vol.
in-i" ; et en français , par Louis Amari-
ton , avec peu d'exactitude ; ( la Requête
contre les jésuites. Lanuza était nn peu
fàrhé du crédit dont ils jouissaient ; s'il
eût été prophète, il n'aurait point perlé
envie à leur destinée.
* LAIVZE (ViCTon-AMÉDÉE délie), en
français, le cardinal des Lances, 'ndi(\vi\i
à Turin, le 1" septembre 1712, d'une fa •
mille illustre. Il fut successivement cha-
noine régulier de Sainte-Geneviève à
Paris, ensuite vicaire à Turin. Créé car-
dinal par le pape Benoit XIV, le 10 avril
1747, il fut bientôt après archevêque de
Nicosie, préfet du concile, aumônier du
roi de Sardaigne, et abbé commendataire
de l'abbaye de Saint-Benigne, où il mou-
rut le 25 janvier 1784. Si Lanze fut élevé
au comble des dignités ecclésiastiques, il
le dut plus encore à ses talons et à ses
vertus qu'à sa naissance. A une érudition
profonde, il joignait une doctrine pure
et une piété rare , qu'il relevait encore
par un caractère généreux et une ardente
charité. On a de lui : | Synodus dicece-
sana Segusii (Suse) in Gallia subalpi?ia ,
coacta anno 1743^ a Victoria Amedœo à
Lanceis; \ Synodus diœcesana insignis
abbatiœ fi'uctuariensis Sancti-Benigni
de Sancto-Benigno , Turin, 1752. On
trouve l'éloge de ce prélat dans la Storïa
letteraria d'Italia, page 325, et dans la
Nuova raccolta degli opuscoli , etc. , du
célèbre père Calogera.
* LANZI (l'abbé Louis), savant ita-
lien, naquit à Monte-del-Olmo , près de
Macerata, en 1752, étudia chez les jé-
suites , et entra dans cet ordre en 1750.
Il professa la rhétorique, la philosophie ,
la théologie : après la suppression de son
ordre , le grand-duc Léopold le nomma
sous-directeur de la galerie de Florence ,
où il mourut le 51 mars 1810. Ce fut sans
contredit un des plus habiles philologues
et des archéologues les plus savans de l'i-
talie. On lui doit la fondation d'un cabinet
étrusque, qu'il disposa dans un ordre ad-
mirable. Il a laissé 28 ouvrages estimés ,
dont on peut voir la liste dans une no-
tice publiée par l'abbé Mauro Boni, tra-
duite en français au tome 4 des Annales
eticyclopédiques , 1817, et dont nous ci-
terons ceux qui ont contribué le plus à sa
réputation. | Guide de la galerie de Flo-
rence, Florence, 1782 , in-8° ; | Essai sur
la langue étrusque, Rome, 1789, 3 vol.'
in-8° , qui fut applaudi par les savans de
l'Europe; | une traduction excellente en
vers , des Travaux et des Jours d'Hé-
siode , avec des notes, ibid., 1808,
in-4°. I Dissertation sur les vases appelés
communémetit étrusques, Florence, 1790 ;
I Histoire de la peinture en Italie, Bassano,
1.AP
288
XAP
1792, 6 vol. in-8°, ouvrage supérieur dans
son genre. Tous ces ouvrages sont en
ilalien. Lanzi conservait un si tendre
souvenir de l'ordre auquel il avait appar-
tenu , qu'on le voyait s'attendrir toutes
les fois qu'il rencontrait un de ses con-
frères.
LA.i\ZIUS. Voyez LAT^SIUS.
LANZOI>iI ( Joseph), médecin et pro-
fesseur à Ferrare, membre de l'académie
des Curieux de la nature j naquit à Fer-
rare en 1665 , et montra dès l'enfance un
vif penchant pour l'élude. La réputation
qu'il acquit dans l'exercice de la méde-
cine, lui mérita la confiance de plusieurs
personnes illustres. Tout le temps que
sa profession n'absorbait point , il l'em-
ployait à la littérature , ou à l'étude de
l'antiquité. Plusieurs académies d'Italie
et étrangères se l'associèrent. Il a été le
restaurateur et le secrétaire de celle de
Ferrare. Il mourut en 1750. On a impri-
mé en 1738, à Lausanne , le Recueil de
ses ouvrages manuscrits avec ceux déjà
imprimés , 3 vol. in-4°, en latin.
* LAOS ( Philippe ) , né à Bouxvillers ,
mort à Paris le 7 octobre 1819. Les prin-
cipaux ouvrages qu'il a rédigés sont :
I Archives des découvertes et inventions
nouvelles faites dans les sciences^ les arts
et les manufactures, tant en France que
dans les pays étrangers , H vol. in-8°,
publiés depuis l'année 1808; | Journal
de la littérature étrangère, année 1801 à
1819, formant 11 vol. in-8°; ] Histoire des
plus anciens chrétiens dans les déserts
de l'Orient, en allemand , 2 vol. in-8" ;
I Encyclopédie , pour les artistes , en al-
lemand, 6 vol. in-8°, Eerlin, 1794-98.
LAPARELLl ( Fraivçois ), ingénieur
et architecte, naquit à Cortone, le 5 avril
1321. Son application aux sciences mili-
taires et mécaniques le fit estimer de
Côme r'"', grand-duc de Toscane. Il ob-
tint sous Pie IV une compagnie de 200
hommes, avec laquelle il fut chargé de
garder Civita-Vecchia dont il fortilia les
murs et le port. Michel-Ange Buonarotti
lui confia ensuite l'exécution de ses des-
sins pour l'église de Sàint-Pierre. Soli-
man II, en 1565, ayant résolu de chasser
de Malte, avec 240 voiles , les chevaliers
de Jérusalem , Pie IV y envoya François
r>aparelli. Il travailla à fortifier l'île , et
donna le projet d'une nouvelle ville, la-
quelle porta le nom de la Valette, parce
q ue Jean Parisot de la Valette était alors
grand-maître de Malte. Dans la suite, les
Turcs ayant formé des entreprises sur
l'île de Chypre, LaparelU offrit ses ser-
vices aux Vénitiens ; et étant arrivé à
Candie, où toute la flotte chrétienne s'é-
tait réunie, il y mourut de la peste le 26
octobre 1570.
* LAPEIROUSE ( Philippe PICOT de \
naturaliste, né à Toulouse, le 20 oc-
tobre 1744^ entra d'abord dans la maf^is-
trature , et obtint à 24 ans la place d'a-
vocat-général près la chambre des eaux
et forêts du parlement de Toulouse. Lors
de la révolution opérée en 1771 dans la
magistrature par le chancelier Maupeou,
il se retira dans les Pyrénées , où il se li-
vra entièrement à l'étude de l'histoire na-
turelle. Lié avec le célèbre Dolomieu , il
lui servait de guide dans ses excursions
sur les montagnes qui a voisinent Barréges,
et il eut même le bonheur de lui sauver
la vie sur le pic de l'Hierio. A l'époque
de la convocation des états-généraux ,
Lapeirouse, qui avait hérité d'un de ses
oncles , du titre de baron avec une for-
tune asses considérable , fut chargé de
rédiger les cahiers de la noblesse de la
sénéchaussée de Toulouse , et en 1790 , il
devint un des administrateurs du district
de cette ville; mais deux ans pins tard,
lorsqu'il vit la marche que suivait la ré-
volution, il se démit de cet emploi. Peu
après il fut arrêté , et il n'obtint sa liberté
qu'après le 9 thermidor. Il reprit dès lors
ses occupations scientLtiques,et fut nommé
successivement inspecteur des mines , et
professeur d'histoire naturelle à l'école
centrale de Toulouse. En 1800 , Lapei-
rouse fut appelé aux fonctions de maire
de cette ville, qu'il remplit six années,
durant lesquelles il fonda un jardin bota-
nique, un observatoire, un cabinet do
physique et de chimie , plusieurs biblio-
thèques, un muséum et une école de pein-
ture, sculpture et architecture. Destitué
en 1808, il fut nommé après le 20 mars
1815, président du collège électoral du
département de la Haute-Garonne et
membre de la chambre des représentans.
Depuis la seconde restauration jusqu'à sa
mort arrivée à Toulouse, le 18 octobre
1818, il se livra à ses études favorites, et
publia divers ouvrages. Le nombre des
plantes nouvelles qu'on lui doit s'élève à
plus d'une centaine. Le principal objet
de ses travaux, avait été une Histoire dé-
taillée des plantes des Pyrénées : cet ou-
vrage devait avoir 200 jdanches in-fol.,
il n'en a paru, en 1795, que 45. Ses prin-
cipaux ouvrages sont : | Description de
plusieurs now.'clles espèces d'orthocéra-
LAP
289
LAP
b'tes et d'ostracites^ 1781 , in-folio, avec
i3 planches coloriées ; | Traité des mines
et forges à fer du co?nté de Foix^ Tou-
louse, 1786, in-S", plusieurs fois réim-
primé et Irad. en allemand, Berlin, 1789,
in-S" ; I Table méthodique des mammi-
fères et des oiseaux j ftbservés dans le dé-
partement de la Haute-Garonne , 1789 ,
in-S" ; I Flore des Pyrénées ^ dont nous
avons parlé, Paris, 1793, in-fol. avec
di\\^%;\ Monographie des saxifrages, 1801,
in-folio ; | Histoire abrégée des plantes
des Pyrénées^ et itinéraire des bota-
nistes dans cette con^ree^ Toulouse, 1815 ,
in-S", avec un supplément , 1818. Lapei-
rouse était membre correspondant de l'in-
stitut et faisait partie d'un grand nombre
de sociétés savantes. Plusieurs de ses
Mémoires onXéiQ insérés dans les recueils
des académies de Toulouse, de Stockholm,
etc. ; le Journal de physique contient
aussi plusieurs de ses articles. M. Cuvier
lui a consacré une notice dans la Biogra-
phie universelle de Michaud. Lapeirouse
avait un frère qui s'occupa beaucoup de
littérature dramatique. Voyez PICOT.
* LAPÉROUSE ( Jeak-Fraxçois GA.-
LAUP de), célèbre navigateur français,
né à Albi en 1741 , d'une famille noble
de Toulouse, entra dans le corps de la
marine en 1758 , et devint eiiseigne en
4764. Durant les 14 ans de paix qui sui-
virent , il eut l'occasion do parcourir
une grande partie du globe. Lors de la
reprise des hostilités, en 1778, il com-
manda une frégate dans l'escadre du
comte d'Estaing , et mérita par sa belle
conduite le grade de capitaine de vais-
seau ( 1780 ), dont il se rendit de plus en
plus digneparde nouveaux failsd'armes.
En 1782 il détruisit les établissemens an-
glais de la baie d'Hudson. Louis XVI , qui
avait reconnu ses talens, lui confia la di-
rection d'un voyage autour du monde. 11
partit de Brest le 1"=' août 1785, sur la fré-
gate la Boussole , avec plusieurs savans ,
et les instrumens de physique, de mathé-
matiques et d'astronomie les plus exacts,
pour faire des découvertes, ou plutôt pour
continuer celles de Cook. Il avait sous
ses ordres la frégate \ Astrolabe^ com-
mandée par le capitaine de Langle , son
ami, officier d'un grand mérite. Les équi-
pages des deux frégates étaient composés
des hommes les plus robustes , les plus
sains , les plus intelligens qu'on eût pu
trouver. Louis XVI, à qui on avait pro-
posé ce voyage maritime comme une
expédition qui illustrerait son règne .
7.
en traça lui-même le plan, et rédigea,
dit-on , les instructions , qui furent don-
nées à Lapérouse, commandant en chef
l'expédition. Toutes les sociétés savante»
lui avaient fourni des mémoires , et
tous les gouvernemens de l'Europe lui
avaient promis la protection et l'assis-
tance de leur marine. Après avoir visité
la Conception, l'île de Pâques et les îles
Sandw^ith, il arriva sur la côte nord-ouest
de l'Amérique septentrionale, vers le
58"^ degré de latitude nord et le 159"^ de
longitude occidentale, où il découvrit
l'entrée d'une baie profonde , qui n'avait
encore été vue d'aucun navigateur. La
passe, hérissée de brisans sur un courant
rapide , était d'un accès difficile et péril-
leux ; mais l'intérieur promettait tout ce
qu'on peut désirer dans une relâche. Les
deux frégates , pressées par le besoin
d'eau, de vivres et de bois, en hasardè-
rent l'entrée sans accident, mais non sans
un extrême péril, le plus grand, dit Lapé<
rouse, qu'il ait jamais vu courir à des na-
vires. Celte baie prit, sur la carte de l'ex-
pédition, le nom de Port des Français ;
il s'y trouva en effet un excellent mouil-
lage près d'une petite île inhabitée, mais
abondante en bois, en eau et en gibier.
Jusque-là , Lapérouse n'avait eu à bord
ni morts ni malades ; il voulut, avant de
quitter l'île, placer des sondes sur le plan
levé par ses ingénieurs , et il y employa
un grand et un petit canot de la Boussole
et un canot de lAstrolabe. Les trois ca-
nots se séparèrent de leur bord à 6 heures
du matin, et à 10, k': petit canot revint
seul, avec la nouvelle aussi terrible qu'in-
attendue de la perte des deux autres. Le
premier canot avait été emporté sur les
brisans de la passe par un mouvement de
mer, dont il ne pouvait ni prévoir ni évi-
ter l'effet, le second s'y élait précipite vo-
lontairement, dans l'espoir de sauver ses
compagnons. Cet accident fut d'autant
plus sensible à Lapérouse , qu'il perdait
six officiers distingués , dont un lui était
proche parent , et lui tenait , dit-il lui-
même , lieu de fils. Il dirigea ensuite sa
route du nord au sud , pour reconnaître
la côte occidentale de l'Amérique, et ar-
riva le 3 janvier 1787, à Macao où il eut
la joie de trouver un bâtiment frsuiçais
de marine royale. Il se rendit de là à Ma-
nille , et il se reporta au nord par les
mêmes latitudes qu'il avait parcourues
sur la côte d'Amérique ; mais cette navi-
gation, dans des parages sinueux et parse-
més d'îles, fut plus longue, plus périlleuse
:25
VAV 290
el remplie de bien plus d'événemens. Le
8 septembre il arriva à Avatscha , dans
la presqu'île du Kamlschalka, où il s'ar-
rêta pendant 20 jours. Il mit à la voile le
l*"" octobre 1787, pour reconnaître les
lies du Japon et le détroit qui les sépare,
soit du continent de l'Asie , soit entre
elles, opération difficile que Cook ni
King n'avaient pu effectuer. Le 9 décem-
bre il était devant l'une des iles des Na-
vigateurs; une partie de l'équipage vou-
lut prendre terre. M. de Langle, qui com-
mandait en personne l'expédition, fut
massacré avec on/.e hommes par les peu-
ples barbares du pays , un grand nombre
d'autres furent blessés grièvement. Il pa-
raît certain qu'on eût prévenu ce massacre
en ne laissant pas approcher les sauvages;
mais il eût fallu recourir à la force , et
tous les chefs de l'expédition s'étaient fait
un point d'honneur de revenir en Eu-
rope sans avoir versé une seule goutte
de sang indien. Lapérouse, privé du plus
habile do ses officiers , d'une partie de
ses équipages et de ses chaloupes que les
sauvages avaient mises en pièces en un
clin d'oeil, prit le parti de se rendre, sans
prendre terre nulle part, à Botany-Bay,
où il arriva le 29 janvier 1788 , près de
trente mois après son départ. Depuis
cette époque, on n'a pas reçu de ses nou-
velles. Dans sa dernière lettre au minis-
tre, dajtée du 7 janvier 1788, il annonçait
l'intention de remonter aux îles des Amis,
de passer entre la nouvelle Guinée et la
nouvelle Hollande par un autre canal que
celui de l'Endeavour , si toutefois il en
existait un , de visiter le golfe de la Car-
pentarie et toute la côte occidentale de la
nouvelle Hollande, jusqu'à la terre de Dié-
men, de manière cependant à pouvoir
arriver à l'île de France, au commence-
ment de décembre 1788. Il est probable
qu'il a péri par un naufrage , ou sous les
coups de quelques hordes barbares. L'as-
semblée Constituante ordonna, en 1791,
que deux vaisseaux seraient envoyés à sa
recherche. D'Entrecasteaux ( f^. ENTRE-
CASTEAUX) fut chargé de cette expédi-
tion; et, quoiqu'il ait visité avec soin
toutes les côtes que Lapérouse devait
parcourir après son départ de Botany-
Bay, il n'a pu trouver aucune trace de
cet infortuné navigateur. Lapérouse avait
envoyé depui* son départ , plusieurs fois
\e journal de son expédition, le croquis
d'un assez grand nombre de cartes, quel-
ques mémoires sur plusieurs objets de
sciences : ce& différens matériaux ont été
LAP
recueillis «ous le titre do Voyage de La-
pérouse autour du monde . publié et ré-
digé par M. L. A. Milet-Mureau , général
de brigade dans le corps du génie:, Paris,
1794, 4 vol. in-4", édition exécutée avec
luxe, ornée d'un atlas, de plusieurs vues
pittoresques et de «llétails d'iiistoire na-
turelle fort bien exécutés. Ge voyage a
été réimprimé en 1798 , en h vol. in-S",
avec l'atlas. Cette édition se vend souvent
sans atlas. On a trouvé en 1826 (\t% lellreâ
inédites de Lapérouse sur lesquelles on
peut consulter la Revue encyclopédique ^
lom. 1", 1^27, pag. 523.
LAPEYRÈllE. Voyez PEYRÈRE.
LAPEYROINIE. Voyez PEYRONJE.
LAPIERRE. Voyez MALLEROT et
PIERRE ( Corneille de la).
*LAPLACE (Pieiieb-Simon), un dçs
plus grands géomètres de notre temps,
né le 23 mars 1649 , à Beaumont-en-Auge
dans le Calvados, était fils d'un culti-
vateur. Malgré la pauvreté de ses paceo^,
il sut triompher des obstacles qui s'op-
posaient à son éducation, dont se chargè-
rent plusieurs personnes riches qui avaient
reconnu en lui une aptitude rare pour
les mathématiques. Après avoir professé
cette science à l'école militaire établie
dans le bourg où il avait pris naissance ,
il vint à Paris où ses talens et ses con-
naissances lui procurèrent en peu de
temps d'utiles protecteurs : de ce nombre
furent d'Alembert , qui le dirigea dans
la carrière des sciences , et le président
Saron qui fit imprimer à ses frais les pre-
miers Mémoires du jeune auteur qui les
lui avait dédiés. Il fit de bonne heure
une découverte importante , celle de \ In-
variabilité des distances moyennes des
planètes au soleil. Nommé bientôt à la
place de Beiput , examinateur des élèves
du corps royal de l'artillerie en 1784 , il
devint membre de l'académie des sciences,
et continua de se livrer avec ardeur
à la recherche des lois qui régissent le
système du monde ; il publia sur ce sujet,
en 1796 , un ouvrage qui fit une grande
sensation dans toute l'Eucppe savante ; il
en fit hommage au conseil des Cinq-cents ,
et le 26 septembre de la même année , il
vint à la tête d'une députatipn rendra
compte à ce conseil , des travaux (jle l'in-
stitut depuis sa création: dans le discours
qu'il prononça à cette'occasion , il rappela
les noms de ceux qui avaient honoré lai
France par leurs talens et par leur amour |
des sciences, et, dans cette liste, de sar|
vans qu'il vouait ediMi ila ref:onnfUaiajD«9
LAP
291
LAP
de son pays , il n'oublia point de rendre
hommage à la mémoire de son bienfaiteur ,
le pi-ésîdent Saron. Laplace avait adopté
les principes de la révolution , mais il
n'occupa aucun emploi public jusqu'à l'é-
poque de rétablissofuent du gouverne-
ment consulaire : alors il fut nommé
(novembre 1799 ) ministre de l'intérieur ;
il paraît que sa capacité pour les affaires
n'égalait point son habileté dans les
sciences, et il fut remplacé par Lucien
Bonaparte au bout de six semaines. Bo-
naparte a dit de lui : « Géomètre du pre-
» mier rang , il ne tarda pas à se montrer
» adteiînistrateur plus que médiocre. Dès
» son premier travail, nous reconnûmes
» que nous nous étions trompés : Laplace
» ne saisit aucune question sous son vrai
» point de vue ; il cherchait des subtilités
» partout, n'avait que des idées problé-
»matiques,et portait enfin l'esprit des
r> rr^nimetït -petits dans l'administration. »
Laplace fut appelé à la fin de la même
année au sénat, dont il fut élu vice-pré-
sident en juillet 1805, et chancelier le
mois suivant. En 180j il fut chargé de
faire au sénat un rapport sur la nécessité
d'abandonner le calendrier de la répu-
blique pour reprendre le calendrier gré-
gorien. Bonaparte lui donna le titre de
comte (1806) et le grand cordon de la
légion - d'honneur. Laplace devint en
1811 président de la. Société maternelle^
et de\ix ans après grand-officier de l'ordre
de la Réunion. Pendant toute la durée de
l'empire il avait paru attaché au gouver-
nement impérial dont il avait reçu tant
de faveurs; néanmoins il vota la déchéance
Je Napoléon, et se prononça un des pre-
miers pour l'élahlissemenl d'un gouver-
nement provisoire. Louis XVllI Téleva à
la dignité de pair, le 14 juin 1814, et lui
donna le titre de marquis. Laplace ne pa-
rut point aux Tuileries pendant les cent-
jours , et reprit sa place à la chambre des
pairs , dès que le trône royal fut i établi. Il
fut nommé membre de l'académie fran-
çaise en 1816 et en était président en 1817.
Lorsque cette compagnie résolut de mettre
sous les yeux du roi une supplique où
seraient exposés les iuconvéniens qui de-
vaient, suivant elle, résulter de l'adoption
du projet de loi sur la répression des dé-
lits de M presse , qu'on discutait alors à
la chambre, le marquis de Laplace qui
occupait le fauteuil, combattit vainement
la résolution de ses confrères, et par
suite de cette circonstance, il se retira.
Il est mort le 6 mars 1827 à Paris. Le
3/oniteur du 20 du même mois contient
les discours prononcés par MM. Daru,
Poisson et Biot, au nom de rinstilut , sur
la tombe du marquis de Laplace , et, celui
du 12 avril, son Oraison funèbre pronon-
cée à la chambre des pairs par le marquis
de Pastoret. Les principaux ouvrages de
ce grand géomètre sont : | Théorie du
mouveinent de la figure elliptique des
planètes^ 1784, in 4"; | Théorie des at-
tractions des sj}héroides et de la figure
des planètes^ 1783, in-4'' ; | Exposition
du système du monde ^ 1796 , 2 vol. in-8° ,
5' édition revue et augmentée par l'au-
teur, 1824, iii-4°, avec portraits, en '2
vol. in-S**; | Traité de mécanique céleste.
1798-1805 , S vol. in-4"; ] Théorie analy-
tique des probabilités . 1812, in-4'', 5' édi-
tion , 1820 , avec un Supplément publié
en 1823 , in-4° ; | Essai philosophique sur
les probabilités . 1814, in-8°, 5* édition,
1823; \ Précis de l'histoire de l'astrono-
mie^ 1821 , in-8" ; | un grand nombre de
mémoires dans le Journal de l'école po-
lytechnique. Laplace s'est encore occupe
de chimie. On lui doit l'invention d'un
calorimètre , et il a répété les expériences
de Cavendish et de Monge sur la décom-
position de l'air. Le résultat de ces expé-
riences a été inséré dans le Journal
polytype du 26 juillet 1786. Les travaux do
Laplace ont rempli sans interruption
plus de soixante années, et pendant plus
d'un demi -siècle il a enrichi les recueils
de l'académie , des inventions et des dé-
couvertes les plus remarquables. C'est
dans ces recueils qu'on trouve consigné
ce grand résultat de ses recherches , la
certitude de la siabiUtédu système solaire.
Ses ouvrages sont écrits avec élégance
et pureté, particulièrement son Exposi-
tion du système du monde, et il a prouvé
que des démonstrations scientifiques n'ex-
cluent pas le mérite du style. L'importance
de la plupart de ses travaux a été sage-
ment appréciée par M. Delambre dans
son Rapport sur le progrès des sciences
du 6 février 1808. Laplace était membre
de presque toutes les sociétés savantes.
La société d'Arcueil, créée pour encou-
rager le progrès des sciences , le eocaptait
au nombre de ses fondateurs.
LAPLACE. f". DELAPLAGE et PLACE.
• LAPORTE ( Arnaud de ) , intendant
de la liste civile sous Louis XVI , naquit à
Paris en 1757 , étudia au collège de Louis
le Grand , dirigé par les jésuites, et em-
brassa ensuite la carrière administrative.
Il était contrôleur de la marine à Brest ,
LAP
292
LAP
lorsque la mort de son père, en 1770, le
fit entrer à la chambre des comptes de
Paris; mais le gouvernement , pour ne
pas rôter à la marine , le nomma ordon-
nateur à Bordeaux , place qui lui donnait
des rapports directs avec le ministre. M, de
Sarline ayant été appelé , en 177!> , au dé-
partement de la marine, fit accorder à
Importe l'intendance à Brest, où il déploya
ses talens administratifs , et surtout à
l'occasion de la guerre d'Amérique. M.
de Castries ayant remplacé M. de Sartine
en 1780, appela auprès de lui Laporte,
et lui conféra le titre d'inlendarit-général.
Au commencement de la révolution , il
s'était réfugié en Espagne ; mais en 1790,
Louis XVI, qui savait apprécier le mérite
de Laporte , l'ayant nommé intendant de
la liste civile, il partit de Vittoria, et
revint à Paris. A cette époque, toutes les
I)ersorine3 probes et dévouées au roi
étaient l'objet des pamphlets des factieux :
il en parut un en 1791, où l'on accusait de
faiblesse et d'incapacité l'intendant, qui
pria le monarque de lui accorder sa dé-
mission.... « Comment, dit cet excellent
■ prince, est-ce que vous voudriez me
• quitter? » Laporte contirma donc ses
fonctions, etmé.'-ita constamment la con-
liance de son auguste maître. Le 21 juin
47'Jl , et lors du voyage du roi à Va-
rennes , il se présenta à la barre de
l'Assemblée nationale, et y déposa la dé-
daralion par laquelle ce prince faisait
connaître les motifs de son départ secret.
Cette révélation donna lieu à plusieurs
murmures , mais Laporte n'en fut pas in-
timidé; et, sommé de produire une lettre
«lîie le roi lui avait écrite , il s'y refusa ,
malgré toutes les vociféi-ations et les me-
naces. Il montra le même courage le 28
mai 1792 quand il fut accusé d'avoir livré
aux flammes cinquante-deux ballots ren-
fermant, disail-oh , la correspondance du
comité autrichien. Laporte répondit que
les ballots en question contenaient les
Mémoires de madame de La Mothe sur
la scandaleuse affaire du collier {voyez
LA MOTHE et ROHAN) , et dont l'édition
tout entière avait été achetée et sup-
primée. Et en effet , il avait été décidé
qu'elle serait brûlée dans les fourneaux
de la manufacture de Sèvres. A la mal-
heureuse journée du 10 août 1792, lors-
que le roi, attaqué pour la seconde fois dans
sa demeure, devint captif de ses propres
sujets, Laporte n'abandonna pas son poste.
Le soir , rentré chez lui , il reçut l'ordre
de se rendre le lendemain à l'assemblée ,
pour y présenter les registres de la liste
civile. Il répondit à toutes les demandes
avec calme , précision et clarté ; et , ce
qui doit étonner , il eut les honneurs de
la séance. Les quatre jours suivans furent
employés à visiter ses papiers et les en-
droits les plus cachés de sa maison. On
déplaça les plaques des cheminées, on
souleva les parquets, et l'on ne trouva
aucune pièce qui pût fournir matière
d'inculpation contre lui. Le 15 août, cl
au moment même où la famille royale
était transportée de la salle de l'assemblée
à la tour du Teniple , ce serviteur lidèla
fut conduit à l'Hôtel-de-ville où il fut in-
terrogé par Billaud-Varennes, et de \l\
conduit à la prison de l'Abbaye. Le 2"> ,
il comparut devant le tribunal révolu-
tionnaire. « Il était accusé d'être un des
» agens de la conspiration de Louis Capel
» et de sa famille contre le peuple français,
» dans la journée du 10 août. » Il fut en-
suite , dans le procès du roi , cité « commo
» ayant fait passer par ordre de ce prince,
» de l'argent à plusieurs émigrés, etc., «
La fermeté de sa contenance et la justesse
de ses réponses imposèrent à ses juges,
qui paraissaient ne pouvoir se résoudre à
prononcer sa condamnation. A cette épo-
que d'horrible mémoiie, la guillotine
était permanente, et le peuple accou-
rait entendre tous les arrêts de mort.
Voyant les juges interdits , et ne pronon-
çant pas encore celui de Laporte , le
peuple s'écria : Une sera donc pas jugé î
Ce cri mit fin à l'irrésolution des juges,
et Laporte fut condamné à mort. Son cou-
rageux avocat , M. Julienne , assura dans
la suite qu'il n'y eut pas, pour le con-
damner, la majorité requise, La multi-
tude parut alors s'attendrir . et la com-
passion devint encore plus visible lorsqu'il
fut conduit au supplice. Laporte avait
toujours été fermement attaché à la reli-
gion , et cet homme , dont l'aspect était
si doux et si modeste , montra dans ses
derniers momens, non le courage du
désespoir, ni le délire d'une crainte mal
simulée , mais le calme de l'homme juste,
et la résignation, la sérénité d'un chré-
tien. 11 fut exécuté le 28 août 1792. Avant
que- le bourreau fit tomber sur sa tête le
fatal couteau, il adressa au peuple ces
paroles , prononcées d'une voix ferme et
sonore : Citoyens _, je meurs innocent;
puisse mon sang rendre la paix à ma
patrie ! Il n'a laissé qu'un fils , qui ( en
1820) était chef d'escadron dans l'artil-
lerie de la garde royale.
LAP
293
LAR
• LAPORTE ( Sebastien de) , avocat à
Belfort , fut nommé député en 1791 par
te département du Haul-Rhiu. Il parla dif-
férentes fois, et après s'être signalé par
l'exagération de ses principes révolution-
naires , il fut envoyé en mission près de
l'armée du général Luckner , après le 10
août 1792 : il dit, dans son rapport, qu'il
avait trouvé le service désorganisé et que
cette désorganisation devait être attribuée
à la trahison du pouvoir exécutif. Dans
le mois de septembre 1792, Laporte fut
réélu par son déparlement à la Conven-
tion , où il rota la mort du roi , et fut
ensuite envoyé en qualité de commissaire
à l'armée des Ardennes. Les habitans de
Philippevillc , refusant d'accepter les as-
signats en paiement des denrées que con-
sommait la garnison , Laporte menaça de
placer une potence sur les remparts , afin
de pendre sur-le-champ ceux qui s'obsti-
neraient dans leur résolution : la menace
produisit son effet, et les soldats station-
nés dans cette ville furent pourvus de
vivres. Lors du siège de Lyon , il fit mar-
cher contre celte ville les gardes nationales
du département de Saône - et-Loire , et
proposa le partage des biens de ceux qu'il
appelait des rebelles, entre les sans-cu-
loUes. Il contribua cependant à son retour
à Paris à la chute du parti des Monta-
gnards, applaudit à la révolution du 9
thermidor et rejeta sur les terroristes
toutes les atrocités qui avaient été com-
mises. Devenu secrétaire de la Conven-
tion, le 22 septembre 1794, il demanda
peu de temps après que les fonctionnaires
publics conservés ou nommés depuis le
9 thermidor, rendissent compte de la
conduite qu'ils avaient tenue depuis celte
époque. Il s'éleva avec force contre ceux
qui se donnaient le titre exclusif do pa-
triotes . et qui appelaient aristocrates
tous ceux qui n'étaient pas terroristes.
Après avoir fait partie du comité de sûreté
générale et de celui de salut public, La-
porte s'opposa de tous ses efforts aux ten-
tatives du parti démagogique contre la
Convention , et le 13 vendémiaire an 4 ,
il fut adjoint à Barras avec lequel il diri-
gea la force armée contre les sections
insurgées. Il passa au conseil des Cinq-
cents , où il s'occupa beaucoup de finan-
ces , et proposa des projets de loi pour
l'établissement de quelques impôts. Il
vécut depuis l'an 7 , dans l'obscurité. II
n'exerça aucun emploi sotis le gouver-
nement impérial , et ne fut pas aUeint
par le loi rendue contre les régicides. Il
est mort an commencement de 18S5.
h'Jmi de la religion et du roi dit que :
« Touché de Dieu , il a eu recours aux
» consolations de la religion , et qu'il a
» témoigné son regret des actes publics
» qu'il avait à se reprocher , notamment
» dans son vote pour le procès du roi , et
» qu'il a reçu avec beaucoup d'édification
D les sacremensdes niourans , » ( tome 3r! ,
page 391 )• Laporte était neveu de l'abbé
de Laporte , auteur du Voyageur Fran-
çais et de plusieurs autres ouvrages.
( rayez PORTE. )
LAPORTE. Voyez DELAPORTE et
PORTE.
LAPPAREîVT ( Charles COCHON ,
comte de ). Voyex COCHON.
LAPPO. Voyez GIOTTINO.
LAQUIIVTIiME. Voyez QUINTINIE.
LARCHAND ( Nicolas de Grimouville
de ), principal du collège de Bayeux , sa
patrie , mort en 1736 , cultivait la poésie
latine, mais il la consacra à des sujets in-
fâmes , tels que le Philotamis de l'abbé
Grécourt.
* LARGUER (Pierre-Henri ), savant
helléniste, né à Dijon, le 12 octobre 1726.
d'une famille ancienne et distinguée dans
la magistrature, fut destiné à la carrière
dans laquelle s'étaient illustrés ses an-
cêtres. Son père, conseiller aubureaudes
finances de D'jon , lui fit faire ses pre-
mières études dans cette ville; il les con-
tinua à Pout-à-Mousson, chez les jésuites.
Se sentant une autre vocation que celle
qu'on lui destinait, il s'enfuit de la mai-
son paternelle et se rendit à Paris, au col-
lège de Laon, où il se livra sans obstacle
à son goût pour les lettres et les sciences.
Pour se perfectionner dans la langue aii-
glaise, qu'il avait apprise avec succès, il
fit un veyage à Londres , où il eut occa-
sion de connaître le chevalier Pringle,
savant médecin, dont il traduisit l'ouvrage
intitulé : Observations sur les maladies
des armées. Il donna dans la suite d'autres
traductions de l'anglais , dont nous parle-
rons plus bas ; mais l'étude de cette lan
gue ne l'empêcha pas de se livrer au grec
avec assiduité , de sorte qu'il devint un
des plus fameux hellénisles de notre épo-
que. De retour à Paris , il y mena une
vie tranquille jusqu'en 1769, qu'eurent
lieu ses querelles avec Voltaire. Celui-ci
avait publié sa Philosophie de l'histoire :
Larchereni-elevade nombreuses erreurs
dans l'ouvrage ayant pour tilre : Supplé-
ment à la philosophie de l'histoire. Vol-
taire, le plus iiascible des philosophes,
2o,
LAR
s'en monlra vivement piqué
cussion prenait une tournure sérieuse,
lorsque d'Alembert s'en mêla. Il écrivit
à Voltaire, pour le calmer, une lettre où
il disait : « Larcher, qui vous contredit
» sur je ne sais quelles sottises d'Héro-
• dote, est un galant homme, tolérant,
» modéré , motîeste. » Les bons offices de
d'Alembert et ces éloges ne servirent qu'à
échauffer davantage la bile du philoso-
phe de Ferney, déjà irritée par le savoir
et le sang-froid de Larcher. Il répliqua
par La Défense de mon oncle ; satire vi-
rulente , et écrite contre toutes les con-
venances littéraires. Larcher voulut ri-
poster par un autre pamphlet , intitulé :
Réponse à la Défense de mon oncle ; mais
comme il est presque impossible qu'un
géomètre devienne plaisant et légei\ son
pamphlet ne fit rire personne , et la pal-
me de celte polémique resta à Voltaire,
comme le plus caustique et le plus im-
j)udent. Depuis cette époque, Larcher ne
s'occupa que des sciences dans lesquelles
il s'acquit une réputation méritée. En
4778 , il devint associé de l'académie des
inscriptions et belles-lettres, et y rem-
plaça le célèbre Lebeau, auteur de \ His-
toire du Bas-Empire. Absolument étran-
ger aux affaires politiques, et menant une
vie solitaire, il n'attira sur lui, pendant la
révolution, les regards ni de ceux qui
pouvaient lui donner des emplois lu-
cratifs, ni de ceux qui auraient pu le
perdre; et tandis que Dupuis, GUyton-
Morveau, Bosquillon, Dolomieu, etc.,
étaient portés à des fonctions publiques,
il demeura tranquille dans son heureuse
obscurité. Une seule fois les commissai-
res de sa section vinrent visiter ses pa-
piers ; n'y trouvant que du grec et du
latin , langues qui n'étaient pas bien fa-
milières aux autorités du peuple souve-
rain^ ils laissèrent en repos le pacitique
géomètre. Il traversa donc sans danger
les règnes des innovations , de la terreur.
«lu directoire, du consulat etde l'empire ,
sous lequel il reçut la croix de la Légion-
d'honneur. A celte époque , BI. de Fon-
lunes, créé grand-maitre de l'université,
nomma Larcher professeur de langue
grecque à l'université de Paris ; mais cet
emploi n'était qu'honoraire, et Larcher
avait alors plus de 83 ans. Peu de temps
après, il fit une chute, et cet accident,
presque toujours funeste dans un âge
avancé , le conduisit au tombeau , le 22
décembre 1812. Il avait atteint sa 86* an
29/t LAR
et la dis- éprouva quelques variations: il fut d'abord
attaché à la religion, devint ensuite phi-
losophe, et mourut avec les senlimens
d'un chrétien. Dès l'an 179S, il avait ré-
digé et signé une rétractation; il la re-
mit à un ecclésiastique qui avait toute sa
confiance , nous en rapporterons ici les
passages les plus importans : Je soussi-
gné. Pierre-Henri Larcher, reconnais que
m' étant lié avec quelques-uns des préten-
dus philosophes, je résolus, avec plu-
sieurs d'entre eux , de détruire , autant
qu'il serait en mon pouvoir, la religion
chrétienne. Dans cette vue j'ai avancé,
dans mes notes sur Hérodote , des maxi-
mes et des propositions tendant à la sub-
version de toute religion. (Dans la seconde
édition d'Hérodote, ces notes sont réfor-
mées. ) Persuadé de toutes les vérités
qu^enseigne la religion catholique ', apo-
stolique et romaine, je déteste sincèrement
et de cœur ces odieuses maximes . et ces
absurdes opinions. Je voudrais ne les
avoir jamais avancées , et j'en demande
pardon à Di'U et aux hommes que j'ai
scandalisés. Je veux vivre et mourir dans
le sein 'le V Eglise catholique, apostolique
ri romaine Je crois toutes les vérités
quelle enseigne, et je veux, avec la grâce
de Dieu, y conformer toutes mes actions.
Fait à Paris, ce 5 mflM793. Signé LAR-
CHER Les principaux ouvrages de ce
savant, outre le Supplément à la philoso-
phie de l'histoire . sont : | une traduction
à' Electre, d'Euripide, 4750, et dans lo
Théâtre bourgeois. 17oS, in-12 ; 1 une autre
de Charilon , roman grec, 1763, réimprimé
dans la Bibliollièque des romans grecs,
tom. 8 el9 ; I Réponse àla Défense de mon
oncle. 1767, 1769, in-S". L'auteur y avait
joint la traduction de V Apologie de Socra-
te, par Xénophon. | Mémoire sur Fénus^
1773 , in-8" , qui a remporté le prix à l'a-
cadémie royale des inscriptions et belles-
lettres; I La retraite des Dix-Mille, par
Xénophon, Paris, 1778, 2 vol. in-12; | Hé-
rodote, 1786, 7 vol. in-S", 6 vol. in-4°. Cet
ouvrage, le chef-d'œuvre de Larcher, est
remarquable moins par le style que par
le commentaire et l'importance de ses
recherches géographiques et chronologi-
ques; deuxième édition , 1812 , avec des
additions et corrections. | Des Disserta-
tions (dans les lom 43-48 de l'académie)
sur les vases Thérocliens et Maroliens;
sur les fêtes des assyriens, sur les fêtes
des Grecs, omises par Castellanus et par
Meurs ius; sur Phidore ,roi d'Jrgos; sur
Bée. La croyance religieuse de Larcher ' l' /iixhontat de Créon ; sur l'Expédition
LAR
295
LAR
de Cyrus le jeune; sur l'Histoire de Cad-
tnus; sur l'Ordre équestre chez les
Grecs, etc. , etc. ; | il a traduit de l'an-
glais, Essai sur le blanchiment des toiles;
Essai sur le sénat romain. Ces deux ou-
vrages sont de Home. | Martinus Scrible-
■lus, satire de Pope contre les érudils , Lon-
dres, 1755, in-i2 ; le Discours du même au-
teur sur là. Pastorale ; plusieurs ^norcé-attr
extraits des Transactions philosophiques
insérés dans la Collection académique.
Larcher a revu le poème d'IIudibras ,
traduit en vers français par Townlay,
et auquel il a ajouté des remarques, 1757 ,
3 vol. in-12; et 1820, 3 volumes iu-12.
On peut voir la liste de ses nombreux
Mémoires dans la France littéraire de
M. J. M. Quérard , tome k. Larcher fut
unhomme très érudit et très profond;
mais il n'avait pu acquérir les grâces et
l'harmonie du style sans lesquelles les
plus savantes observations et les pensées
les plus justes ne peuvent attacher le lec-
teur. M. Boissonnade a inséré dans plu-
sieurs Journaux savans et étrangers une
Notice sur la vie et les écrits de Larcher.
Son Eloge a été prononcé par M. Dacier
à l'académie des inscriptions.
LA.RDi\EIl ( Natuaniel ) , théologien
anglais, naquit àHaw^kherstdansle comté
de Kent, l'an 1684 , et mourut pauvre le
24 juillet 1768. Sa vie offre un exemple
de plus de l'indigence où se trouvent sou-
vent les gens de lettres. Nous avons de
lui des ouvrages estimables , quoique peu
nouveaux pour le fonds des choses. Le
premier est intitulé : La crédibilité de
l'histoire de l'Evangile^ en 8 vol. in-12,
publiés en 1755, 1756,1757. Le deuxième a
pour titre : Le témoignage des anciens juifs
et païens en faveur de la religion chré-
tienne. Il est en 4 vol. , qui ont paru en
1763, 1765, 1766 et 1767. M Bullet et le père
de Colonia l'avaient devancé dans celte
carrière. Il a encore donné au public plu-
sieurs écrits moins considérables, tels que
\ Essai sur le récit de Moïse ^ concernant
la création et la chute de l'homme , pu-
blié en 1753 ; ouvrage systématique où
l'auteur donne ses idées pour celles de
l'Ecriture, où l'on n'apprend rien qui ex-
plique les véritables difficultés de la Ge-
nèse. C'est une physico-théologie aussi
arbitraire que celle de Burnet.
LARÉVELLIÈRE-LEPAUX ( Louis-
Mahie ) , membre de plusieurs législa-
tures de France , né le 25 avril 1733 , à
[Montaigu en Poitou , commença ses étu-
des dans sa ville natale, les continua au
collège de Beaupréau en Anjou, et se fit
recevoir licencié en droit à l'université
d'Angers. Pour complaire à ses parens ,
il se destina d'abord à la carrière du bar-
reau et vint à Paris où il prêta le serment
d'avocat ( 1775 ) ; mais il n'y obtint aucun
succès, et il reporta son application sur les
sciences morales et politiques. De retour
dans son pays , il y épousa une femme
d'esprit qui lui inspira l'amour de la bo-
tanique ( M"*^ Boyleau de Chaudoiscau) :
elle lui en apprit les premiers élémens ,et
plus tard il en donna lui-même un cours
public à Angers , où il parvint à popula-
riser cette science. Il avait formé le projet
de quitter la France et d'aller s'établit
avec sa famille et quelques amis en Suisse
ou aux Etats-Unis, lorsque le grand évé-
ment de révolution de 17891e fit renoncer
à son projet. 11 embrassa avec enthou-
siasme les principes des modernes nova-
feurs, fut nommé d'abord syndic de sa
commune et député aux états-généraux
par le tiers-état de l'assemblée bailliagère.
Larévellière-Lepaux prit part aux débats
de cette mémorable session : d'après les
discours qu'il prononça, on ne peut ca-
ractériser d'une manière bien nette ses
opinions politiques de cette époque : il
vota constamment dans le sens d'une
grande réforme, sans assujélir l'indé-
pendance de ses principes à la marche
d'aucun parti. Cependant quoiqu'il se fût
prononcé pour la monarchie , on remar-
qua la tendance républicaine de ses opi-
nions : il demanda qu'on privât I-ouis
XVI de ses prérogatives les plus im-
portantes , que les membres de la fa-
mille royale ne portassent pas le titre
de princes; que les juges fussent élus par
le peuple; que sur les drapeaux aux trois
couleurs l'on inscrivît ces mots la liberté
ou la mort. Après avoir fréquenté le club
des Jacobins, il alla pendant quelque
temps à celui des Feuillans où se réunis-
saient quelques royalistes; mais il revint
bientôt à la première assemblée démago-
gique. Après la session il fut juré près la
haute cour nationale établie à Orléans ,
puis membre de l'administration centrale
de son département. Il prêcha et fit prê-
cher la liberté et l'égalité dans la Vendée
qui commençait alors à s'insurger, et
fut élu député à la Convention natio-
nale. Avant d'aller s'asseoir à cette nou-
velle assemblée , il avait coopéré à la
création d'un club et à la rédaction d'un
journal, dont il dirigea l'esprit dans le
sens desespropres opinions républicaines.
LAR
296
LAR
Ce <ul lui qui fit adopter , en réponse au
manifeste de Brunswick , le décret d'en-
couragement à la révolte et de propa-
gande républicaine , portant que la na-
tion française viendrait au secours de tous
tes peuples opprimés qui voudraient re-
couvrer leur liberté. A l'assemblée Con-
stituante il avait dit ces paroles mémora-
bles : le jour oi'i la France cessera d'a-
voir un roij elle perdra sa liberté et son
repos , pour être livrée au despotisme
zffrayant des factions ( séance du 18
mai 1791 ). Néanmoins dans le procès de
Louis XVI, après s'être prononcé pour
l'incompatibililé de toutes espèces de
fonctions et par conséquent de celle de
juge , avec celle de législateur , il vola
pour la mort el contre le sursis et l'appel
au peuple. Il s'éleva contre la Montagne^
se mesura souvent à la tribune avec le fé-
roce Danton, et ses efforts contribuèrent,
surtout dans la séance du 11 mars 1703, à
relarder de quelques jours le triomphe
de l'anarchîe : il parvint à empêcher par
une énergique improvisation et par son
attitude impassible devant les sicaires,
dont on avait encombré la salle des
séances , que l'on adoptât le décret en
vertu duquel de nouveaux minisires de-
vaient être pris dans le sein de la Conven-
tion, c'est-à-dire parmi les Montagnards.
Moins heureux dans une discussion pré-
cédente, il s'était opposé inutilement à
rélablissemeat du tribunal révolution-
naire. Pour prévenir les mesures sangui-
naires de ce parli , il demanda l'appel no-
minal plusieurs fois sans pouvoir l'obtenir.
Cependant ii avait triomphé des Monta-
gnards ^ et en parliculier de Danlon, dans
la séance où devait être consommée la
périodes Girondins : ceux-ci abattus par
les menaces et les dangers dont ils étaient
environnes, sentirent leur courage se re-
lever alors; mais attaqués de nouveau par
les démagogues qui avaient juré leur
niort, ils furent vaincus au 31 mai et au
2 juin , malgré la défense courageuse de
taréveliière , qui protesta contre l'arres-
tation de 26 d'entre eux. Dès lors Laré-
velliëre monta tous les jours à la tribune;
saiis cesse il demandait l'appel nominal
pour constater son vote d'opposition : mais
les Montagnards . qui voulaient faire
croire que toutes les décisions de l'as-
semblée étaient prises à l'unanimilé
étouffaient ses paroles par leurs vociféra-
tions. Dans cette guerre active et con
tinuelle, ce député natureilement fai-
et était mkié pat une fièvre lente ; il ne
pouvait .plus monter à la tribune qu'ap-
puyé sur les bras de ses amis. En fm voyant
ses efforts inutiles pour détruire la puis-
sance anarchique des démagogues , il dé-
clara qu'il se retirerait et qu'il cesserait
d'assister aux séances, rie voulant pas
qu'on pût croire que par son vote ou par
son silence, il avait contribué aux mesures
extravagantes ou atroces que chaque
jour voyait adopter. A cette déclaration,
les Montagnards s'écrièrent : Au tribunal
révolutionnaire. — Ne vous gênez pas ,
leur rcpondil-il : un crime de plus ou de
moins ne doit pas vous couler beaucoup :
le président allait consulter l'assemblée
sur la proposition qui venait d'être faite ,
lorsqu'une voix qui voulait sans doute le
sauver , sortit de la Montagne ^ et dit en
termes grossiers qu'il était inutile de
s'occuper de Larévellière qui allait bien-
tôt mourir. Cette considération empêcha
d'aller aux voix ; mais deux heures après,
le comité de sûreté générale lança contre
lui un mandat d'arrêt et le mit bientôt
liors la loi. Réfugié par les soins dé M.
Bosc, membre de l'académie des sciences -,
dans Termitage de Ste.-Radegonde , situé
dans la forêt de Montmorency , il cher-
cha ensuite à travers mille dangers , un
nouvel asile chea un de ses amis, M.
Buire, son ancien collègue à l'assemblée
Constituante, qui demeurait près de Pé-
ronne, et y resla jusqu'au 9 thermidor.
Le 8 mars 1793 , il reparut à la Conven-
tion , devint secrétaire de cette assem-
blée , puis membre de la commission
pour les lois organiques, dont l'idée avait
été donnée par le boucher Legendre ,
et enfin président. C'est à cette époque
et au moment même qu'il avouait que
le gouvernement républicain ne conve-
nait pas à la France , que se riianifesta
toulesaliainepourlespretres.il demanda
que les prêtres non assermentés, qui , dans
deux mois , ne sortiraient paâ du terri-
toire de la république ^ {ussehl assimilés
aux émigrés, c'est-à-dire punis du dernier
supplice. Le 1" septembre , il entra au
comité de salut public , passa ensuite au ;
conseil des Anciens , et , Ife 31 , il fut élu ;
membre du Directoire. Carnol, Hewbell, i
Barras , Letourneur et Larévellière gou- \
vernèrent alors la France. Ce fut dans ,j
ce temps qu'il imagina le culte bizarre et r
impie appelé théophilanthropique ^ cl
dont il se constitua le pontife. « Il Voulut
cependant j dit une Biographie, que
hle épuisa ses forces : il crachait le sang I » celte secte eût des prctreSi et chacun fleî
LAB
297
LAR
> sectaires dut l'être à son tour ; les offi-
» clans étaient revêtus de robes blanches
«avec des coiffures tricolores ^ et ils ré-
» citaient en chaire des hymnes et des
j) cantiques philosophiques en invoquant
» If 'Heu de la nature. Ces nouveaux re-
B ligionnaires exerçaient leur culte dans
» les principales é{jlises de Paris , con-
B curremment avec les catholiques. »
Comme ce qui est nouveau plaît en France
et surtout à Paris , cette secte attira d'a-
bord l'attention, et eut un certain nom-
bre de prosélytes ; mais bientôt elle fut
vouée au ridicule , et le culte théophilan-
Ihropique eut le même sort que celui de
la /?aiso«^ inventé par Chaumette. Le-
paux n'osa entrer dans le parti clichien^
parce qu'il y avait des royalistes ; il se
jeta dans celui de Barras, où la peur le
rendit un des plus ardtens proscriplcurs.
Lareveillère présidait le Directoire dans
la journée du 18 fructidor ( y. AUGE-
RE AU). Après ce coup d'état il continua à
partager le pouvoir avec Re%vbell et Bar-
ras , mais toujours dans des travaux de se-
sond ordre. Son pontificat dans le culte
théoi)hilantliropique avait fait croire qu'il
voulait parce moyen arriver au pouvoir
suprême : on s'affermit dans cette suppo-
sition , en voyant qu'il s'occupait tou-
jours de Ihéophilanthropie, et il fut chassé
du Directoire en juin 1799 : alors des
pamphlets et des caricatures sur sa taille
contrefaite tombèrent sur lui de tous
côtés. Lepaux était membre de l'institut;
il refusa de prêter le serment à Bona-
parte, lorsqu'il se fut fait proclamer em-
pereur, et se relira dans une petite terre
qu'il avait achetée à Sologne , à trois
lieues d'Orléans. En 1809 , il revint à Pa-
ris, et faisait de fréquentes promenades
au Jardin des Plantes , pour s'occuper de
botanique. Souvent on le rencontrait sur
les quais, dans un costume assez, négligé,
feuilletant des livres chez les libraires éta-
lagistes. Il ne fut point atteint par la loi sur
les régicides, lors delà seconde restaura-
tion, parce qu'il n'avait occupé aucun em-
ploi dans les cent-jours. Il est mort à Pa-
ris en 1824, âgé de 71 ans. On a de lui :
i Réflexions sur le culte , sur les cérémo-
nies civiles et sur les fêtes nationales, lues
à l'institut le 12 floréal an 5 ( 1" mai 1797 ),
dans la séance de la classe des sciences
morales et politiques , Paris , an 5, in-8° ;
traduit en allemand , 1797 , in-8° ; \ Essai
sur les moyens de faire pai-ticiper l'uni-
versalité des spectateurs j à tout ce qui se
pratique dans les fêtes nationale s Avi dans
la même classe de l'institut le 22 vendé-
miaire an 6 (13 octobre 1797) , in-8" ; ] Du
Panthéon et d'un théâtre national. Paris,
frimaire an 6 (décembre 1797), in-8°; \J.u
citoyen Texier-Olivier. membre du con-
seil des cinq-cents , signé , N. E. Lacour,
rue Noire-Dame Nazareth. C'est une
justification du système suivi par le
Directoire contre le parti démocratique.
I Réponse de L. M. Larévellière- Lepaux
aux dénonciations portées au corps légis-
latif contre lui et ses anciens collègues^ 15
thermidor an 8 ( 3 août 1800 ) , in-8» :
I Discours prononcé à la cérémonie fu-
nèbre exécutée^ en mémoire du général
floche , au Champ-de-Mars . le iO ven-
démiaire an 6 , in-8°, etc. Larévellière-
Lepaux a aussi donné quelques articles
dans les journaux , et plusieurs morceaux,
entre autres un Essai sur le patois ven-
déen . dans les cahiers de l'académie
Celtique. M. Mahul, dans son Annuaire
nécrologique J tome 5, a recueilli la liste de
ses ouvrages, qui a été aussi conservée par
M. Quérard dans la France littéraire ,
tome h.
LAIIGILLIÈUE ( Nicolas) , excellent
peintre dans le portrait , naquit à Paris
en 1636 : il fut élève d'Antoine Goubeau,
peintre d'Anvers , qui le renvoya lors-
qu'il avait à peine 18 ans , disant n'avoir
plus rien à lui apprendre. Le jeune ar-
tiste passa en Angleterre où son laleiïl
fut vivement apprécié ; mais il fut obligé
de quitter Londres par suite de la loi qui
proscrivait les catholiques. Le célèbre Le
Brun le fixa en France. L'académie le
reçut comme peintre d'histoire : il réus-
sissait en effet très bien dans ce genre :
mais l'occasion le fit travailler principa-
lement au portrait. A l'avènement de
Jacques II à la couronne d'Angleterre ,
Largillière fut mandé pour faire le por-
trait du roi et de la reine ; il retourna
ensuite en France, et mourut à Paris, en
1746, laissant de grands biens. Ce maître
peignait, pour l'ordinaire , de pratique ;
cependant son dessin est correct , et la
nature parfaitement saisie. Sa louche est
libre , savante et légère ; son pinceau
moelleux , sa composition riche et ingé-
nieuse. Il donnait une ressemblance par-
faite à ses têtes ; ses mains sont admira-
bles , et ses draperies d'un grand goût.
Le succès avec lequel ce peintre exécu-
tait le portrait lui mérita le surnom de
Van-Dick français. Il a fait aussi d'excel-
lens tableaux comme Le repas donné par
la ville J en 1687, à Louis XJF; le mariage
lAU
298
LAR
du duc de Bourgogne , en 1697 ; et un
autre grand tableau représentant le vœu
de la ville de Paris, placé à Sainte-Gene-
viève. Plus de 60 de ses portraits ont été
gravés. —Un de ses fils , mort en 1742 , a
laissé quelques pièces de théâtre.
♦ LAllIVÉ ( J. MAUDUIT de ), célèbre
tragédien français , naquit à La Rochelle
en 1749. Ayant embrassé la carrière théâ-
trale, il débuta à Lyon : il eut ensuite
l'avantage de devenir l'élève delà fameuse
ihademoiselle Clairon. A l'âge de 21 ans, il
parut au Théâtre-Français le 3 décembre
1^70, dans le rôle de Zamore de la tragé-
die àHAlzife. Son talent fut d'abord mé-
connu par le public , dont Le Kain s'at-
tirait toute l'admiration. Larive repa-
rut sur la scène à Paris, le 29 avril 177S ,
dîBfis le rôle à!Oreste^ ô! fphigénie en Tau-
ride , et fut reçu la même année pour
doubler Le Kain. Il fit de grands progrès,
mérita des applaudissemens , et les par-
tagea pendant six années avec son chef
d'emploi. La mort de ce dernier , arrivée
en 1778 , le laissa maître absolu du scep-
tre de Melpomène.Il brillait surtout dans
les rôles de Tancrède, di' Achille ^ de Co-
rioïan ^ de Bayard et de Montaigu. Un
physique d'une beauté rare , un organe
sonore , qu'il savait sagement employer ;
une prononciation pure , et une connais-
sance profonde de son art , établirent ses
succès toujours croissans. Il en jouit pen-
dant dix années , lorsque Talma vint les
lui disputer, par une méthode nouvelle.
Les anciennes traditions furent oubliées,
et l'école de Baron parut céder à celle du
jeune acteur. ( Voyez l'article TALMA. )
Larive lutta quelque temps avec snn
rival, jusqu'à ce que des intrigues de
coulisse l'éloignèrent de la scène. 11 se
retira dans une terre qu'il possédait à
Molignon, dans la vallée de Montmorency,
et devint rtiaire de sa commune. Larive,
avait adopté les principes de la révolu-
tion , mais avec une telle modération ,
qu'il fût arrêté en 1793 avec plusieurs de
ses camarades, et se vit retenu en prison
|usqu'à la mOrt de Robespierre ( en juil-
let 1794. ). Il jouissait dans son domaine
d'une existence tranquille ; son emploi
de naaire ne l'empêchait pas d'exercer
son art : aussi il parcourait les provinces
avec une utilité réelle pour sa renommée
et ses intérêts. De retour à Paris , en
4804, il ouvrit un cours de déclamation,
et, deux ans après , Napoléon ayant placé
son frère Joseph sur le trône do Naples ,
laiive suivit le nouveau roi en qualité
de lecteur. Il revint en France , lorsque
Joseph alla prendre possession de la cou-
ronne d'Espagne, usurpée sUr Charles IV
et sur Ferdinand VII son fils. Après une
absence de 15 années , et à l'âge de 67
ans, en 1816, Larive joua le rôle de Tan-
crède dans une représentation au bénéfice
d'un ancien acteur. Il réunit tous les suf-
frages , et , malgré sa vieillesse et une si
longue interruption , on lui reconnut
encore le même talent qui l'avait distin-
gué dans les plus heureux temps de sa
carrière dramatique. Depuis ce moment ,
il quitta pour toujours le théâtre, et mou-
rut en novembre 1826 , à l'âge de 77 ans.
Nous ne répéterons pas sur le talent de
cet acteur, ni les éloges peut-être exagérés
de Dazincourt , ni la sévère critique de
l'auteur de \ Histoire du Théâtre fran"
çais. Larive, quoique placé entre Le Kain
et Talma , fut , comme eux , un des plus
beaux ornemens de la scène française,
et si on lui reproche un certain manque
de sensibilité, il remplaçait ce défaut par
d'autres qualités qui lui étaient particu-
lières, et qui le mirent au premier rang
parmi nos grands acteurs. Larive était
lié d'amitié avec le général Lafayette,
auquel il fit présent , le 12 février 1790 ,
de la chaîne qu'avait portée à son cou le
chevalier Bayard. Il ne manquait pas
d'instruction , et était depuis 1805 mem-
bre de l'académie de Naples ; il y fut
réélu en 1817, et le roi Ferdinand IV con-
firma celte élection. Larive est auteur
des ouvrages suivans : | Pyrame et
Thysbè. scène lyriqtie, 1784 , in-8°, 1791 ,
irt-S" ; I lîé/lexio7is sur l'art théâtralASOi,
in-8° ; | Cours de déclamation^ divisé en
douze séances ^ 1804 , in-8". Cet ouvrage
est aussi bien écrit qu'intéressant par
les anecdotes curieuses dont l'auteuT à su
l'embellir.
LARIVIÈRE. Foijez RIVIÈRE.
LA ROCHE. Voyez ROCHE.
LAROCHE-DU-MAINE. V. LUCHET.
LAROCHEFOUCAULT. F. ROCHE-
FOUCAULT.
* LAROCHE JAQUELEÏN ( Henri de ),
l'un des plus illustres chefs des armées
vendéennes, naquit au château de Frube-
lières, près de Châtillon-sur-Sèvres, dans
le Poitou, le 30 aoitt 1772 ; il était fils du
marquis de Larochejaquelein, colonel
du régiment de Royal-Pologne ( cavale-
rie ). Destiné à suivre la carrière de;s ar-
mes, il fut envoyé à l'école militaire de
Sorèzè. Il n'avait que 16 ans , àl'époqpie
où la révolution éclata, et il n'accompagna
pas son père dans l'é migration : le désir
de défendre le Irône le fit entrer dans la
garde constitutionnelle de Louis XVI ;
mais la terrible journée du 10 août vint
détruire ses espérances. Il dit , en quit-
tant la capitale.... « Je vais dans ma pro-
K vince, et bientôt on entendra parler de
D moi. » Il se retira dans la terre de Clis-
son, auprès de Lescure , son ami et son
parent ; ils ne tardèrent pas à prendre une
part active aux tentatives déjà commen-
cées dans leur province pour le rétablis-
sement de la monarchie. Le mauvais suc-
cès du premier soulèvement deBressuire
ni; découragea pas Larochejaquelein. Le
10 mars 1793, un nouveau soulèvement
ayant eu lieu , un paysan vint annoncer à
Larochejaquelein que les habitans des
])arois3es voisines avaient pris les armes
pour se réunir aux insurgés , et qu'ils
l'avaient choisi pour leur chef. ( Voyez
LESCURE.) Il accourut, et avec sa troupe,
il se joignit à Bonchamp et àd'Elbée. Une
armée républicaine ayant pénétré dans la
Vendée , il se transporte à Châtillon et à
Saint-Aubin , où sont les propriétés de sa
famille ; des milliers de paysans viennent
de toutes parts, et le proclament leur
chef. Il leur fait une harangue énergi-
que, qu'il termine par ces mots : « Je suis
• encore bien jeune, sans expérience ;
• mais je brûle de me rendre digne de
» vous commander ; allons chercher
• l'ennemi : si je recule, luoz-moi; si
» j'avance, suivez-moi ; si je meurs, ven-
1 gez-moi... » Les Vendéens, pleins d'en-
thousiasme, volent à la rencontre de l'en-
nemi, qu'ils trouvent retranché dans le
cimetière des Aubiers. Ils attaquent le
bourg, s'élanconl sur les républicains, les
repoussent, s'emparent de leur artillerie,
et leur chef les ramène aussitôt sur Châ-
Ullon et sur Tiffauge, où il partage les
munitions enlevées avec d'autres insur-
gés, qui se rangent sous ses drapeaux.
Dans ce moment, le marquis de Lescure,
pressé par le danger , avait envoyé l'or-
dre à plus de quarante paroisses de
prendre les armes, lorsque Larocheja-
quelein arriva avec sa troupe , aux cris
ievive le Roi ! La château de Clisson,
devenu une place d'armes , se remplit do
soldats mal disciplinés, mal armés , mais
aaimês d'an courage à toute épreuve.
Le corps de Larochejaquelein se réunis-
sait ordinairement à la grande armée
d? Anjou, forte d&lS,00(^ hommes ; aussi
il prit part, le 2 avril, au glorieux combat
de Beaupréau , par suite duquel les repu-
blicai.ns furent chassés au-delà de Fa
Loire. A l'attaque de ThOuars, Laroclic-
jaquelein, monté sur les épaules du brave
Texier de Courlai , arrache de ses mains
les pierres des murailles et commence la
brèche. On suit son exemple ; et les ré-
publicains assiégés mettent bas les ar-
mes. Il commanda l'aile gauche à la pre-
mière bataille de Fonlenai, perdue par
les Vendéens. A la seconde bataille , il
chargea avec la cavalerie , et compléta la
déroute des ennemis. Le 7 juin, il enleva
le camp retranché de Varins, et armé
de son sabre, il poursuivit les fityards et
tua un dragon qui venait de tirer sur
lui et qui l'avait manqué. Il montra le
même courage à la prise de Saumur ,
où il entra l'un des premiers. En cinq
jours, les Vendéens s'étaient emparés de
80 pièces de canon , d'une grande quan-
tité de munitions, et avaient fait 12 mille
prisonniers. Saumur fut confiée à Laro-
chejaquelein ; il n'en sortit qu'après l'é-
chec de Nantes. A la bataille de Luçon, il
commanda l'aile gauche , et couvrit la
retraite de l'armée royale. C'est depuis
celte époque que commença la guerre
d'extermination contre la Vendée ; mais
rien ne pouvait ralentir la valeur des
héros royalistes. Larochejaquelein em-
porta, avec Bonchamp , la forte position
d'Ernée; et, quoiqu'il eût le pouce fra-
cassé par une balle , il ne quitta pas le
champ de bataille. Les armées républi-
caines s'élant concentrées , Stofflet ,
Lescure et Larochejaquelein essayèrent
inutilement de couvrir Châtillon. Ils
voulurent attaquer les républicains près
de Cholet; malgré des prodiges de valeur,,
ils perdirent la bataille, et Lescure, Bon-»
champ , d'Elbée , y furent blessés à
mort. Larochejaquelein fut entraîné par
les fuyards jusqu'à Beaupréau, et ce
fut contre son avis que l'on exécuta le
funeste passage delà Loire. Quatre-vingt
mille fuyards arrivèrent le 18 octobre à
Saint-Florent , pour se soiistraire à la
formidable artillerie des républicains , e
gagnèrent la rive droite de ce fleuve. I
19 octobre, une nouvelle armée royale s<
trouva réunie à Varades, et sur la rive
droite. D'Elbée et Bonchamp n'existaient
plus , et Lescure , blessé mortellement
comme eux, avait peu de temps à vivre. II
désigna Larochejaquelein comme le seul
capable de ranimer le courage abattu des
Vendéens , et tous les chefs le procljamè-
rent généralissime: il n'avait que 20 ans.
En vain ce jeune et modeste héros refuse,
LAU
300
LAR
les larmes aux yeux , cet honneur ; il est
contraint de céder, et il s'entend saluer
comme chef suprême par une armée de
braves. Elle se met en naarche le 20 oc-
tobre , vers les côtes de la Bretagne , où
les Anglais avaient promis des secours.
Un corps de républicains qui couvrait
Laval fut attaqué et dispersé par la cava-"
ierie vendéenne. En poursuivant l'en-
nemi, Larochejaquelein se trouva seul,
sans armes , et un bras en écharpe , dans
un chemin étroit, et en face d'un répu-
blicain qui le couche en joue. Laroche-
jaquelein évite le coup, pousse contre lui
son cheval, le terrasse, et le défend ensuite
contre ses soldats qui sont accourus et
veulent tuer le républicain. « Va, lui dit
» Larochejaquelein , va , retourne vers
» les républicains, et dis-leur que le géné-
» rai des royalistes , sans armes et privé
» d'un bras, t'a terrassé eti'alaissé la vie. »
Cependant il fallut livrer bataille au gé-
néral Séchelle , qui marchait sur Laval.
Celle bataille dura un jour et une nuit ;
elle eut lieu entre celte ville et le bourg
d'Aulrain : le général royaliste y déploya
les talens d'un grand capitaine. Les répu-
blicains culbutés perdirent beaucoup de
inonde , leur bagage et leur artillerie.
L'armée royaliste se reposa quelques
•ours à Laval. Larochejaquelein , ayant
divisé son armée en trois corps , sortit
victorieux de deux autres attaques, et
s'empara d'Ernée et de Fougères. Use
dirigea ensuite par Dol, vers Granville ,
que son armée, forte de 50,000 hommes,
attaqua sans succès. Ce revers découra-
gea tellement les Vendéens , qu'ils de-
mandèrent à grands cris à retourner
dans leurs foyers , et furent sur le point
de se révolter. Larochejaquelein parvint
à les calmer , et s'éloigna de ces rivages.
En les quittant , les royalistes perdirent
l'espoir de se réunir aux forces anglaises,
qui les attendaient en Bretagne. Lord
Moira, qui les commandait , n'avait point
encore mis à la voile , à cause de la con-
trariété de vents. En se dirigeant vers
Dol, Larochejaquelein rencontra , le 16
novembre , le général Weslermann ; le
combat dura 22 heures , et les royalistes
remportèrent une victoire complète :
leur général eut son cheval blessé, mais il
força les républicains à fuir dans le plus
grand désordre, et cette victoire lui livra
Eruée et Mayenne, d'où il se porta sur La-
val. Le S décembre , il attaqua Auge ; il
y éprouva le même sort qu'à Granville.
Contraints de tourner le dos à la Loire
et d'éviter le pont de Ce , défendu par de
forts détachemens ennemis, les Vendéens
voulaient cependant rentrer dans la Ven-
dée , et ils suivirent la route de Bcaugé.
Arrivés devant La Flèche, ils trouvèrent,
sur le soir , le pont coupé , et de l'autre
côté , la ville défendue par une forte gar^
nison. Larochejaquelein, se voyant
placé entre la rivière et les ennemis ,
prend une détermination digne du géné-
ral le plus expérimenté. Il choisit 400 ca-
valiers qui , ayant chacun un fantassin
en croupe, remontent la Loire ; il trouve
un gué , le passe le premier sur une
chaussée couverte d'eau , et , suivi des
siens, surprend et met en déroute la gar-
nison , se rend maître du faubourg , s'y
retranche , rétablit le pont , s'empare
de la ville , sauve l'armée , et ajoute de
nouveaux lauriers à sa gloire. Cependant
l'armée manquait de tout : pour l'appro-
visionner, il se dirigea sur le Mans et s'en
empara ; mais le jour suivant, il se voit
attaqué sur trois routes différentes. Le 15
décembre s'engageaune bataille sanglante
qui fut comme le tombeau d'une ar-
mée aussi fidèle qu'intrépide. Larocheja-
quelein ayant rassemblé un peu de cavale-
rie, et rallié un grand nombre de fuyards
arriva avec ces débris à Laval, toujours
harcelé par les républicains, qui , le len-
demain , entrèrent dans Craon. On mar-
chait nuit et jour, dans l'espoir de passer
la Loire à Ancenis. Les royalistes attei-
gnent enfin Pouancé, et ensuite Ancenis,
où ils entrent le 16, sans trouver de résis-
tance. Mais la rive opposée était occupée
par l'ennemi, et il n'y a%ait sur la rivière
ni pont ni bateaux. On aperçoit de l'autre
côté de la rivière quatre barques char-
gées : il faut s'en emparer... qui l'osera !
c'est l'intrépide général. Il fait enlever
d'un étang voisin im batelet que l'on
transporte sur un charriot ; il s'y jette
avec Slofflct et Laville de Beaugé ; il
tient par la bride son cheval, qui suit à la
nage le batelet. Ce frêle bateau , sans di-
rection et endommagé , tantôt s'enfonce,
tantôt reparaît sur les flots , et parvient
enfin à la rive. Dans ce moment, l'armée,
qui était arrivée successivement , con-
struisait des radeaux pour passer la ri-
vière. Les royalistes sont interromptis
dans ce travail par une attaque soudaine
des républicains. Le massacre fut horri-
ble ; ce furent les derniers efforts de cette
brave armée, qui, deux mois auparavant,
était maîtresse de la Loire et victorieuse
des républicains dans le Maine, I^Breta-
LAR
çue, et avait arboré dans plusieurs villes
le drapeau de Henri quatre. Ceux qui
survécurent à cette fatale journée , allè-
rent périr glorieusement dans Jes plaines
de Savenay. Témoin de ce désastre, La-
rocliejaquelein , qui se trouvait sur la
rive opposée, suivi de Stofflct,deBeau,'ïé,
de Lanyerieet d'une vinjjtaine de soldats
qui avaient pu les rejoindre , veut s'en-
foncer dans l'intérieur du pays. Ils sont
surpris par une patrouille ; leurs soldats
se dispersent , et ils restent seuls ; tous
quatre errent à l'aventure , le reste du
jour , et arrivent le soir à une métairie.
On leur offre un repas fruîjal. Accablés
de fatigue et de sommeil, ils tombent sur
ime meule de paille. Ils sont bientôt ré-
veillés par leur hôte, qui vient les aver-
tir qu'une patrouille s'approche... mais
le sommeil est plus fort que l'amour de la
vie : ils cèdent à ce besoin impérieux.
Los soldats républicains arrivent , et , ac-
cablés eux-mêmes de sommeil, et de lassi-
tude, ils s'endorment de l'autre côté de la
meule, auprès des quatre Vendéens qu'ils
n'ont pas aperçus. Larochejaquelein et
ses compagnons d'infortune partirent au
point du jour , et pendant quarante-huit
heures, ils vécurent du pain qu'ils enle-
vaient à des républicains isolés qui tom-
baient sous leurs coups. Ayant parcouru
plusieurs chemins de traverse, La Roche-
»aquelein arrive la nuit à Châlillon : les
républicains y avaient un poste. II tra-
verse la ville, ne répond pas au cri delà
îcntinelle, et gagne une métairie, près de
Saint- Aubin de Beaubigny. Il retrouve
dans cette métairie sa tante , madame de
Larochejaquelein , qui s'y tenait cachée
depuis quelques jours. Il prend du repos,
et au moment du départ, cette dame
courageuse , qui partageait la noble réso-
lution de son neveu, l'invite à combattre
encore pour la cause royale. « Si tu
» meurs, lui dit-elle , tu emporteras mes
» regrets et mon estime. » Larochejaque-
lein reprend sa marche ; mais , entouré
d'ennemis , les ruines de son propre châ-
teau de Frubelières, où il avait pris nais-
sance et que les républicains avaient
brûle, lui servirent de retraite pendant
quelque temps. Son arrivée et le lieu qui
lui servait d'asile, furent bientôt connus.
Un délachement de républicains vint
fouiller le château : il ne se déroba à
leur vue , qu'en se tenant couché sur
f entablement des mars delà façade prin-
cipale, qui ne s'étaient pas écroulés. Dé-
livré encore de ce péril , et ayant appris
SOI LAK
que Charelte est entré dans le Bas-Poi-
tou , il vole auprès de ce général pour
concerter avec lui de nouvelles opéra-
lions. Il fut reçu froidement, et lorsqu'ils
se séparèrent , Ciiarelle dit à Laroche-
jaquelein : a Je pars pour Mortagne ; si
» vous voulez me suivre, je vous ferai
«donner un cheval — » — IMoi , vous
» suivre ! répondit fièrement le généra?
» en chef de la Vendée , sachez que je
» suis accoutumé à être suivi moi-même,
» et que c'est moi qui commande ici. »
En disant ces mots, il s'éloigna, et, la
même jour, huit cents hommes quittèrent
Charette , et vinrent reconnaître Laro-
chejaquelein pour leur général. Dans ce
moment les républicains portaient le fer
et le feu dans la Vendée, ce qui fit donner
à leurs détachemens le nom de colonnes
infernales. La Rochejaquelein ne tarda
pas à avoir trois engagemens sérieux avec
le général Cordelier , qui ne yjut cepen-
dant vaincre les royalistes. Mais les dan-
gers se multipliant , et Larochejaquelein,
n'ayant pas assez, de monde pour résister
à des masses énormes , se mit sur la dé-
fensive dans la forêt de Vezin ; il y fil
construire des baraques, s'y cantonna , et
établit sur la roule de Cholet un poste
composé des plus braves de sa petite ar-
mée. Pendant le reste de l'hiver, il s'oc-
cupa à couper les communications des
républicains , à enlever leurs patrouilles,
leurs escortes , leurs munitions et leurs
convois. Une circonstance imprévue vint
grossir le nombre de ses guerriers. Il fit
afficher dans toutes les paroisses un or-
dre, trouvé sur un adjudant - général
qu'on avait pris : cet ordre portait de
donner des sauf- conduits aux paysans
vendéens ; de les saisir ensuite et de les
fusiller. Les paysans , n'ayant plus de sû-
reté que dans leur propre défense , s'ar-
mèrent et accoururent auprès de Laro-
chejaquelein. A la tête d'une armée plus
nombreuse, il se met en campagne , me-
nace les cantonnemens républicains , et
obtient quelques avantages sur le général
Cordelier. La garnison de Cholet éla«t
.sortie pour aller brûler le village de
Nouaillé , Larochejaquelein l'attaqua au
moment où elle y mettait le feu... Hélas!
ce devait être le dernier combat de eu
héros ! Une partie des Vendéens cerne
les incendiaires, dont plusieurs périssent
dans les flammes qu'ils viennent d'allu-
mer; d'autres Vendéens s'élancent sur
les ennemis, et leur cavalerie en fait un
massacre Iwrrible. Larochejaquelein. ca
26
LIR
!02
LV!\
poursuivant les fuyards , aperçoit deux '
(jrenadiers caches derrière une liaie ;
* Rendez-vous, leur dit-il, je vous fais
» grâce. » Ils se disposent à obéir ; le {jé-
néral veut les interro-jer et s'approclie
d'eux, maigre les représentations de ses
ofliciers qui le suivent. On prononce son
nom , et un des {grenadiers se dévoue ;
tandis que Larociiejaiiuekin se penche
de dessus son cheval pour se saisir de son
arme, le grenadier l'ajusta, et lire à bout
portant ; la balle frappe le front du {îéné-
ral , qui tombe et ex[)ire dans l'instant
même ( le k juin 1795 ) , lorsqu'il n'avait
pas encore atteint sa vingt-troisième an-
née. Son meurtrier est massacré , mais
les royalistes ont perd;» leur chef et leur
héros ! Son corps fut inhumé dans l'en-
droit même où il avait rendu le dernier
soupir, et sa mort excita les regrets des
royalistes et ceux des républicains. En
dix mois il avait remporté seize victoires
avec les plus faibles moyens , et dans les
circonstances les plus difficiles. « Laro-
chejaquelein était d'un tempérament ro-
buste, il maniait un cheval avec grâce,
aimait passionnément la chasse , et les
exercices violens... Il avait une physio-
nomie pleine de douceur et de noblesse,
cl un air guerrier ; ses yeux , naturelle-
ment vifs, devenaient si ardens , si tiers
au milieu d'une action, que son regard
semblait alors le coup d'œil de l'aigle.
Hors des combats, il s'abandonnait à la
gaité,à l'enjouement de son âge, ne déve-
loppant son grand caractère que dans les
momens décisifs. Dans les conseils , il
avait toujours l'avis le plus sage; mais
ii cédait volontiers à l'opinion des chefs
dont la maturité semblait annoncer plus
de lumières et d'expérience. Décidez ,
tlisait-il, et ]' exécuterai. Brûlant de l'a-
mour de la gloire, il semblait, tel que nos
anciens preux, appartenir aux temps hé-
joïques de la chevalerie... » On exhuma
SCS 1 estes en i815 , cl on les déposa dans
l'église paroissiale de Choîlet. Le 7 mai
■1817, ils furent réunis à ceux de ses ancê-
tres, à Saint-Aubin. Voyez les Mémoires
de madame la marquise de Larocheja-
oueleirij avec deux cartes du théâtre da
la guerre de la Vendée, 1816, 1 vol. in-8";
Mémoires su?' l'expédition de Quiùeron ,
Paris, Le Normanl , 2 vol. in-8". Ces der-
niers Mémoires forment une suite de
l'histoire desguerresde la Vendée.
• L\UOCHEJAQUELEI\ (Louis DU-
VERGIKU , marquis de ) , frère puîné du
|ireccdcnt , né eu 1777 , à Saint-Aubin de
Baubigny dans le Poito;j , suivit son père
dans l'émigration, et lit à seize ans ses
premières armes dans le régiment autri-
chien de Latour. Il passa ensuite au ser-
vice de l'Angleterre , lit deux campagnes
dans l'île de St.-Domingue , et rentra en
1801 en France, où il épousa la veuve du
général vendéen , marquis de Lescure. Il
vivait dans la retraite , lorsqu'en 1813 il
entra en relation avec un agent de Louis
XVIII. Il prépara dans la Guienne et la
Vendée les esprits à la restauration des
Bourbons, et, dès qu'il connut qiie le duc
d'Angoidème était à St.-Jean-de-Luz , il
alla offrir à ce prince l'hoimnage de la
ville de Bordeaux qui reçut en effet ce
prince avec enthousiasme. Nommé com-
mandant des grenadiers royaux de la
garde , Laroclicjaquelein protégea au 20
mars la retraite du roi, qu'il accompagna
jusqu'à Gand, d'où il se rendit en Angle-
terre. Il sollicita et obtint du gouverne-
ment britannique quelques secours avec
lesquels il revint vers la Bretagne et dé-
barqua sur la côte de St. -Gilles. Un grand
nombre d'habitans du pays se réunirent
à sa voix , et d'anciens chefs vendéens ,
MM. d'Autichamps , Sapinaud , et Suzan-
net, etc., le reconnurent pour général en
chef. Le gouvernement impérial parvint
à semer la division dans les rangs des
vendéens en proposant une amnistie , des
suspensions d'armes, etc. Plusieurs chefs
licencièrent leurs troupes ou se retirèrent
dans l'intérieur. A cette nouvelle, Laro-
clicjaquelein, qui se trouvait alors auprès
de l'arniral anglais commandant la croi-
sière sur cettf partie des côtes de France,
s'indigne : il apprend en même temps que
le général Travot arrive avec un fort dé-
tachement de troupes impériales , pour
s'opposer au nouveau débarquement d'ar-
mes et de numilions qu'on s'occupait
d'exécuter. Sans calculer les dangers
d'une rencontre ùiégale,Larochejaquclei!i
s'avance contre l'armée de Napoléon. Il
rencontre au village des Matthes , près de
Sainte-Croix de Vie , le général Estève à
la tête d'une colonne : là eut lieu u!i
combat durant lequel Larochejaquelein
reçut une balle dans la poitrine ; il cxpini
sur le champ de bataille, et samort aclieva
la déroute des Vendéens. Son fils aîné a
été nommé pair de France , et son fi ère
Auguste qui fut blessé dans l'affaire que
nous venons de rapporter , reçut le com-
mandement des grenadiers à cheval do
la garde royale.
LAUOQUE. Fotjez ROQUE (la).
LAR
I.AÏ\11EY ( IsA.vc de ) , liisloricu, né à
IVTonlivilIiers , dans le pays de Caux , de
parons calvinislcs , en 1()58 , exerça pen
dant quelque temps la profession d'avo-
cat dans sa patrie. Il appartenait à la re-
li{jiou proloslanle , et avait élevé ses en-
fans dans la mcmc croyance. Une ordon-
nance de Louis XIV, enlevant aux léfor-
més toute autorité sur leurs enfans , dès
([ue ceux-ci annonçaient le désir de so
faire catholiques, une des filles de Larrey
âjïée de 12 ans, profita de cette loi, el
entra dans un couvent. Apres d'inutiles
efforts pour l'arracher à cet asile, Larrey
voulut s'expatrier : il passa en Hollande,
et devint historiographe des états-géné-
raux. L'électeur de Brandebourg l'appela
ensuite à Berlin, e( l'y fixa par une pen-
sion. Il y mourut en 1719 , à 81 ans. La
vivacité de son esprit rendait son hu-
meur inégale , et le portait quelquefois
uux extrémités opposées. Doué d'une mé-
moire excellente, il s'y fiait trop , et ne
faisait pas d'extraits de ses lectures. De
là les inexactitudes qui fourmillent dans
quelques-uns de ses écrits. Les plus con-
nus sont : I Histoire d'Auguste ^ Rotter-
dam ( Berlin ) , 1690 , in-8° , le premier
ouvrage historique de Larrey , écrit d'un
style ferme et avec beaucoup de vérité.
Il a été réimprimé avec V Histoire des
triumvirats ^\>tir Cilry de la Guette (voyez
ce nom ). | V Héritière de Guienne, ou
Histni?'e d'Eléonore , fille de Guillaume^
dernier duc de Guienne , femme de Louis
VII roi de /''r«ntr> Rotterdam , 1691, in-
8° ; lC92,in-12 : morceau d'histoire écrit
d'un style emphatique , vif et un peu ro-
manesque; I Histoire d'yingleterre^ d'Ir-
lande et d' Ecosse , en k vol. in-fol., 1707
à 1713. Cet ouvrage , qu'on ne lit plus au-
jourd'hui, eut un grand succès dans sa
naissance ; mais on ne tarda pas à reve-
nir de ce préjugé. | Histoire des sejJt
sages^en 2 vol. in-S**, ibid., 1715-16, com-
posée pour amuser les oisifs, et qui ne par-
vient pas toujours à son but. Larrey parut
aussi sur la scène, en qualité de contio-
versiste. Il donna, en 1709, | une Réponse
à l'Avis aux réfugiés^ réimprimée à
Rouen, in-i2, 1714 et 1715 ; | Histoire de
Louis XIV. 1718, 3 vol. in-i" , et 9 vol.
in-12 : compilation de gazettes infidèles ,
sans agrément dans le style et sans exac-
titude dans les faits, les dates et les noms
propres : dans une infinité d'endroits, c'est
une répétition des calomnies des protes-
tans , auxquelles l'auteur en ajoute de
nouvelles. Les trois derniers volumes
LAR
jri'. ()n remarqua des
503
sont de la Marlii
différences essenlielics entre Larrey écri-
vant la Vie de Louis XI V^ et Larrey
écrivant les Pies de Ciiarles II, Jacques
ÎI el Guillaume III.
* LA.UII F.Y ( Alexis ) , chirurgien, né à
Baudéan (Basses-Pyrénées ) en 1750, fit
son éducation à Toulouse et entra à l'hos-
pice de St.- Joseph-de-la-Grave pour se
former dans l'art de guérir. Ses heureu-
ses disposilioilS lui valurent la protection
'de son maître, M. Bonnet , alors chirur-
gien-major de cet établissement. Aprèa
la mort de ce dernier , un concours fut
ouvert pour son remplacement; Larrcv
fut le vainqueur, et il épousa la fille de
son prédécesseur. Nommé intendant de
chirurgie des deux hospices de Toulouse,
il déploya dans ce poste difficile tous les
trésors de sa vaste expérience. A l'épo-
que de la dispersion des écoles sous le
régime de la terreur , il fonda des cours
publics pour l'enseignement de la méde-
cine et de la cliirurgie, desquels sont
sortis [)lusieurs hommes habiles, Delpech,
Rumèbe et son neveu le baron Larrey. Il
devint directeur de l'école de médecine
de Toulouse , dès sa création , et il fit en
même temps le cours d'an«tomic. Lors-
que l'académie des sciences, inscriptions
et belles-lettres fut rétablie , Larrey en
devint membre honoraire et il reçut le
même titre dans la société de médecine,
cliirurgie et pharmacie de Toulouse. Il
est mort dans cette ville après une longue
et douloureuse maladie , le 17 décembre
1827. On a de Larrey plusieurs i/^mozV(?«
et Observations intéressantes, qui furent
envoyées avec des pièces pathologiques ,
à l'académie royale de chirurgie. — LAR-
REY (CLAUDE-Fr.ANÇois-Hn.AiRE), chi-
rurgien , né aussi en 177i à Bodéan , près
Bagnères-de-Bigorre , fut d'abord chi-
rurgien-major dans un régiment . et fit
en cette qualité plusieurs campagnes. Ad-
mis à la retraite , il fut nommé chirur-
gien en chef de l'hôpital militaire et civil
de Mmes , et se fit connaître avantageu-
sement surtout par une opération césa-
rienne qui fut couronnée de succès; l'en-
fant et la mère survécurent tous deux. Il
contribua de tous ses efforts à la propa-
gation de la vaccine dans son déparle-
ment. Quoiqu'il fût très occupé, il trouva
toujours le temps de donner ses soins aux
pauvres des campagnes environnantes ,
et sa mort, arrivée en octobre 1819. et
qui fut causée par une affection du cœur,
fut sans doute avancée par son trop grand
LAR
zèle pour l'exercice de son arl. Il u fait
un {jrand nombre de rapports à rinstiliU
du Gard , cl publié quelques ouvrages,
parmi lesquels nous cilerons : | Discours
sur les précautions que doivent prendre
les mères pour procurer une bonne con-
stitution à leurs enfans. suivi de quelques
réflexions sur les accouchernens , Niines
1805, in-8°; | une ihèse sur V Application
Uu trépan , 1805, in-8°, à Montpellier ,
OÙ il était venu se faire reeevoir docteur
en médecine ; | Larrey aux habitons de
Ntmes . Nîmes , 1801 , in-8° , opuscule en
faveur de la vaccine. Ces deux chirurgiens
appartiennent à la même famille que le
célèbre médecin du même nom , collabo-
rateur, pour la partie médicale, du grand
ouvrage sur l'Egypte.
* LARU 1 ÈRE ( NoEi,-CASTERA de ) , né
à Aillas , près Bazas , en 1755 , s'occupa
toute sa vie, quoique laïc, de matières ec-
clésiastiques ; élevé dans les principes des
appelans , il s'occupa particulièrement
de défendre leurs démarches , et prit la
plus grande part aux querelles du temps.
Il avait été envoyé en Hollande par le
parti , et il y travailla long-temps sous les
yeux de l'abbé Arnauld , qui lui faisait ,
dil-on , une pension. Il se montra favo-
1 able à la révolution , sans cependant en
approuver les crimes, et défendit avec
un zèle, particulier la constitution civile
du clergé. Il a publié en ce sens : | Préser-
vatif contre le schisme ou Questions rela-
tives au décret du 27 novembre. 1790 , in-
8° ; I Préservatif contre le schisme accusé
et non convaincu de graves erreurs . en
réponse à l'écrit du P. Lambert contre ccf
ouvrage, 1791 {voijez LA.MBERT); | la
Suite du préservatif ou Nouveau déve-
loppement des principes qui y soiit éta-
blis. 1792, in-8''; | une Lettre à l'auteur
de l'autorité de l'église et de ses mi-
nistres défendus ; \ et trois Lettres en ré-
ponse à la critique de Vauvilliers. Lar-
lière a aussi travaillé aux Nouvelles ecclé-
siastiques ^ on il a inséré plusieurs arti-
cles en faveur de ses ouvrages. Il a rédigé
quelque temps les Annales de la religion
de l'évéque constitutionnel Desbois de
Rochefort; et il essaya en 1798, de créer
un nouveau journal sous le titre à! An-
nales religieuses ; mais il n'eut que huit
nmnéros , et fut supprimé par le Direc-
toire. Larrière assista , en 1797 , au con-
cile des constitutionnels , et appuya leur
cause de toutes les ressources de son es-
prit et de ses connaissances. La persécu-
tion du Directoire l'obligea de retourner
LAR
il mourut d'une apoplexie
504
à A illas , où
l'oiidroyante , en sortant de table , le i
janvier 1805. Outre les ouvrages que nous
avons cités, il a publié : | Entretiens d'Eu-
sèbe et de Théophile sur le sacrifice de la-
messe, brochure in-12 . 1779 ; |des Obser-
vations sur le pastoral de M. de Juigné,
archevêque de Paris, au nombre de trois,
1786 et 1787, in-12; | la Vie d: Arnaud.
Lausanne, in-i", jointe à l'éditicn des
œuvres de ce docteur , donnée par les
soins de l'abbé de Bellegarde. On lui at-
tribue des Principes sur l'approbation
des confesseurs . 1785.
LVRROQUE (Matthiko de), minis-
tre protestant, né à Leirac , près d'Agen,
en 1019, de parens calvinistes, prêcha à
Charenlon avec applaudissement. La du-
chesse de la Trimouille l'ayant entendu,
le choisit pour ministre à Vitré en Bre-
tagne. Après avoir servi cette église pen-
dant 27 ans , il alla exercer le ministère à
Rouen , où il mourut en {(tSk , à Ou ans.
Ses principaux ouvrages sont : | une His-
toire de l'euchaiistie, Amsterdam, Elzé-
vir , 1G69 , 'm-k° , et lG7i , in-8° : malgré
l'érudition qu'il y étale, c'est l'un des
écrits les plus faibles que les prolestang
aient publiés contre ce mystère , qui ,
comme les autres dogmes chrétiens, peut
bien prêter à des difiicullés de raisonne-
ment , mais contre lequel il n'est pas pru-
dent de chercher des preuves dans l'his-
toire, la tradition et la doctrine des Pè-
res. I Réponse au livre de M. de Meaux
(Bossuet), de la Communion sous les
deux espèces. 1G85, in-12; ( un Traité
sur la régale. Rotterdam, 1685, in-12;
I deux Dissertations latines sur Photin
et Libère ; | plusieurs autres Ecrits de
controverse , estimés dans son parti. On
trouvera la liste de ses autres ouvrages
dans le Dictionnaire de Bayle et les Mé'
moires de Nicéron.
LARROQIIE ( Daniel de ) , fils du pré-
cédent , né à Vitré en Bretagne , vers
1660 , quitta la France après la révoca-
tion de redit de Nantes , passa à Londres,
de là à Copenhague , ensuite à Amster-
dam , et enfin revint à Paris pour em-
brasser la religion catholique. Un écrit
satirique contre Louis XIV (à l'occasion
de la famine de 1695) , auquel il avait eu
part , fit pendre l'imprimeur , et le con-
duisit au Chàtelot , d'où il fut transféré
au château de Saumur Etant sorti de sa
prison , cinq ans après , par la protection
de l'abbesse de Fonlevrault , il obtint un
poste dans le bureau des affaires étran-
LAS
5ÔS
LAS
{^ères , cf ensuite uno retraite de 4. 000
liv. dans le temps de la régence. Il mou-
rut en 17il , à 70 ans. On a de lui : | Vie
de l'imposteur BJahmnet , traduite de
l'anglais du savant Prideaux .Amsterdam,
1698, et Paris, 1G99 , in-12; | deux mau-
vais romans satiriques, l'un sous le titre
de Véritables motifs de la conversion de
Ilcmcé , abbé de la Trappe, Cologne,
1085, in-12; l'autre sous celui de Vie de
Mézerai Vhistmien . in-12. L'auteur était
jeune, dit l'abbé d'Olivet, lorsqu'il lit ce
dernier ouvrage : mais l'était-il lo'-squ'il
le publia en 1720? | Traduction de l'Mis-
toire romaine d'Ecbard , retoucbée et pu-
bliée par l'abbé des Fontaines. ( Voi/. ce
nom.) I L'abbé d'Olivet lui attribue .^vi.s
mix réfugiés. 1690, in-12. On crut cepen-
dant dans toute la Hollande que Bayle
était l'auleur de ce livre; on le croit en-
core coiniminément aujourd'hui. L'au-
teur , quel qu'il soit, y donne de très bons
conseils aux réfugiés, dont les déclama-
tions contre la France ne rendaient pas la
cause meilleure. Il travailla aux Nou-
velles de la république des lettres ^ pen-
dant une maladie de Ravie.
• LASAIISSE ( Jeax-Baptiste), ecclé-
siastique , né à Lyon , le 22 mars 1740 ,
f'Tt successivcmt;nt directeur du sémi-
naire de la congrégation de Sainl-Sulpice
à Tuile et à Paris. C'est à tort que la
Biographie des hommes vivans et celle
des contempo7-ains ont avancé qu'il a été
grand-vicaire deLamourette; c'estun au-
tre ecclésiastique du même nom et de la
même ville. L'abbé Lasausse accompa-
gna à l'échafaud Cbâlier, surnommé le
Marat de Lyon , et parvint à exciter en
lui quelques sentimens religieux et lui lit
baiser le crucitix avant l'exécution. Il a
publié, peu de temps après, l'exposé des
principales circonstances qui accompa-
gnèrent la mort de Cbâlier et la lettre
qu'il en avait reçue à la suite de sa con-
damnation. Lasausse est mort le 2 novem-
bre 1S26 ; il avait composé , abrégé , tra-
duit , ou édité un grand nombre d'ouvra-
ges qui sont : | Cours de méiUtations
ecclésiastiques. Tulle , 1781 , 2 vol. in-12 ;
2*^ édition, 5 vol. in-i2 ; | Cours de médi-
tations religieuses^ ibid., 2 vol. in-12;
j Cours de méditations chrétiennes, ibid.,
2 vol. in-12 ; | Retraite du père Cataneo ,
traduite de l'italien, in-18 , Paris , 1783 ;
{ le Vrai pénitent, traduit de l'italien ,
în-12, Tulle, ensuite Lyon, 1783; nou-
velle éd'it., 1788, sous ce' titre : Le vrai
Pénitent formé sur le modèle de David on
Motifs et moijcns de conversion , ouvrage
très utile aux simples chrétiens et à ceux
qui sont spécialement consacrés à Dieu.
Cette édition est augmentée de \ Abrégé
de la vie du bienheureux Benoit- Joseph
Labre. \ V Ecole du Sauveur, traduction
libre de l'ouvrage latin intitulé : Schola
Christi. Paris, 1791 , 7 vol. in-i2; | Le-
çons quotidiennes , 7 vol. in-12. Il y a
une leçon pour chaque jour de l'année
et de courtes réflexions sur le saint du
jour. I Tableau de la vraie religieuse , 1
vol. in-12, 2*^ édition; | Psautier des
amans de Jésus, oii l'on trouve le nom
de Jésus après chaque verset . in-12 et
in-18; | Soupirs d'un chrétien, in-12,
I Vie sacerdotale et pastorale , suivie de
méditations pour chaque jour du tnois ,
petit in-12, 2*^ édition; | Jésus et Marie
parlant au cœur , avec 13 lig. 2' édition
encadrée; ] Doctrine de l'évangile, in-
18; I Dévotion au Saint-Sacrement , in-18,
2'^ édition'; | Dialogues entre deux chré-
tiens sur les grandes vérités du salut ,
in-18; \ les Chrétiens catholiques, in-18;
I V Amante du Sauveur avec des figures
sur la passion , in-18 ; | le Présent utile à
tous , in-2('i ; | le Fervent chrétien , nou-
velle édition considérablement augmen-
tée , in-18 et in-ô2 ; | Etrennes pour les
fidèles, in -32; | Pieux fidèles, in -52;
1 Science de l'oraison, { vol. in-12; | le
Chrétien brûlant d'amour pour Jésus c?'u-
cifié , 1 vol. in-12; | Conversations in-
structives et intéressantes sur la religion.
in-12 ; | Dialogues chrétiens sur la ?-eli-
gion , les commandernens de Dieu et les
sacremens, Lyon, 1802 , 3 vol. in-8°, dont
le fonds est tiré des conférences préchées
par M. de Laforest, ancien curé de Lyon ;
( Cours amiuel de sujets de piété, Paris,
180S , 3 vol. in-8°; | Vie deJésus-CJvist.
suivie de réfiexions après chaque lecture,
2 vol. in-12 ; | Doctrine de Jésus-Christ
puisée dans les épitres des apôtres, Pa-
ris , 1807, 2 voL in-12; | Entretiens in-'
structifs et pieux sur la confession et la
communion , Paris , 1808 , in-lS ; | les Pé'
cheurs pensant à l'éternité , Paris, 1811,
in-32; | le Sage réfléchissant sur l éter-
nité , etc., in-24. , Paris , 1815 ; \le Fervent
ecclésiastique , in-12. Il y a des réllexioris
pour chaque jour de l'année, | Explica-
tion du catéchisme , avec des traits his-
toriques après chaque explication , Paris,
1814, édition stéréotype. Cet ouvrage a
donné lieu à quelques critiques; | Y Heu-
reuse amiée ou Année sanctifiée, traduc-
tion libre de l'ilalicn , Tulle , ensuite
23.
LAS 5
Rouen, 1814 ; | l'y/mi zélé donnant des
conseils à son ami chaque jour de l'an-
née, Paris, 1815, in-2/«. ; | VJyni zélé des
pécheurs , où après de courtes réflexions
se trouvent des anecdotes, Paris, 1817,
in-12 ; j Homélies sur la liberté , l'égalité
ei la philosophie moderne, traduites de
l'italien de M. Gr. Turchi, évèque de
Parme , avec le texte original en regard,
Paris, 1816, in-12; | le Chrétien sanc-
tifié, nouvelle édit. 1819 , gros vol. in-12 ;
I V Imitation du sacré cœur de Jésus, ou-
vrage calqué sur l'Imitation. Il y a de
même quatre livres, et dans chaque livre
autant de chapitres , dont chacun ren-
ferme une effusion de cœur, et ensuite
une leçon sur un sujet de piété qui a rap-
port à celui de l'Imitation, Lyon, 1819,
in-12 ; | Plaintes et complaisances du Sau-
veur, in-52 , avec beaucoup de figures,
plusieurs éditions ; | Plaintes rt complai-
sances de la sainte Vierge ,Wï'^ , in-18,
avec ou sans ligures. Chaque page con-
tient une plainte ou une complaisance ,
une plainte à la sainte Vierge et un avis
du saint du jour, qui peut servir pour la
méditation; | V Amant de Jésus en orai-
son , nouvelle édition , 1820 , in-52 ; | Dé-
votion aux mystères de Jésus-Christ et
de Marie , connue sous le nom de la dé-
votion des quinze samedis . 5' édition ,
in-18, augmentée de prières pour la
messe, et des leçons de Jésus-Christ sur
les moyens d'obtenir un grand amour
l)Our Dieu. Il y a aussi des prières pour
la communion; | le Solitaire chrétien,
ouvrage divisé en deux volumes; le pre-
mier a pour titre : le Solitaire chrétien
réfléchissant et priant pour exciter les
fidèles à faire oraison et apprendre à la
bien faire ; le second est intitulé ; le So-
litaire chrétien instruisant et exhor-
tant, etc. Ce volume renferme des entre-
tiens du solitaire avec des personnes
de différentes conditions , et ensuite des
réflexions du même pour chaque jour du
mois. I Les Chrétiens instruits à l'école
de la sagesse^ 1 vol. in-12; | le Prêtre
cité au tribunal de Dieu au ?noment de sa
7nort , 1 vol. it»-12. On y trouve une suite
de méditations pour une lelraite eccié-
siasli(iuo. Lasausse a encore publié : Vie
et œuvres spirituelles de M. Cormeaux ,
3 vol. in-12 ; Doctrine spirituelle des Pères
Jlerlhier, Surin . Saint- Jure , de M. d'Or-
léans de la Motte , et de sainte Thérèse ,
in-12, plusieurs éditions; et le Prédicateur
de l'amour de Dieu , ouvrage posthume
du père Surii^i , 2*= édit., 1 vol. in-12.
06 LAS
LASCA. T'oijcz GRAZZINI.
LASt.ARIS (TiiKODonE), prince da
Bas-Empire , d'une ancienne famille grec-
que , avait épousé, en 1200, Anne , fille
d'Alexis L'Ange, sur qui son frère Isaac
venait d'usurper le sceptre. A l'époque
du siège de Constantinople par les Croi-
sés, il chercha en vain à s'opposer à leur
débarquement, et après la prise de celte
ville par les Lalins, il passa dans la Na-
tolie et prit le litre de despote. 11 s'unit
aux Bulgares et au sultan d'Iconiuin pour
combattre les Français. L'empire grec
était déchiré de toutes parts, Lascaris
profita de l'état de faiblesse où il était,
pour se faire déclarer empereur à Nicée
en 120G. Devenu veuf une première fois,
et ayant répudié sa seconde femme , il
épousa en troisièmes noces Marie, lille de
Pierre de Courteuay, empereur français
à Constantinople. Après avoir donné di-
verses preuves de valeur, il mourut en
1222. C'était un prince estimable, qui
retarda par son courage et sa prudence
la chute de l'empire d'Orient. — Jean
Ducas Vataco , son successeur et son gen-
dre , eut un fils nommé aussi TnÉoDOUE
LASCARIS , dit le jeune. Ce dernier ré-
gna à Nicée depuis 12;i5 jusqu'en 12o9.
Après quelques exploits assez marquan»
contre les Bulgares et les Tartarcs, ce
prince fut atteint d'une mélancolie fu-
rieuse , et ressentit plusieurs attaques d'é-
pilepsie. Celte maladie affaiblit son juge-
ment et augmenta son penchant à la co-
lère : en sorte qu'il ternit par des actions
cruelles et extravagantes un règne dont
les comincncemens avaient donné les meil-
leures espérances. Il laissa un fils nommé
Jean. Voij^z JEAN LASCARIS.
LASCAUIS (André-Jeaîs), dit Jlhyn-
dacenus. parce qu'il était de Rhyndacus,
ville située entre la Phrygie et l'Helles-
pont, de la même famille que le précé-
dent , né vers 1445 , passa en Italie, après
la i)rise de Constantinople. La Grèce était
devenue la proie des Ottomans et le sé-
jour de la barbarie. La maison de Lau-
rent de Médicis, l'asile des gens de let-
tres, fut celui de Lascaris. Ce seigneur
florentin , occupé alors à former sa vaste
bibliothèque, l'envoya deux fois à Con-
stantinople pour chercher des manuscrits
grecs. A son retour, il vint en Franc* ,
sous le règne de Charles YIII ; il y donna
des leçons de grec à Budé et à Danes.
Louis XII l'envoya deux fois à 'N'eni'se
comme ambassadeur; fonction à laquelle
il était moins propre qu'à celle de biblio*
LAS
507
LAS
Ihécaire. Quelque temps après , le cardi-
nal de Mcdicis ayant été élevé au ponli-
licat sous le nom de Léon X, Lascaris,
son ancien ami, passa à Rome, el obtint
de ce pape la direction du collège des
Grecs , que ce pontife venait de fonder.
En 1515 il le chargea d'une mission im-
portante près de François I"'. Ce prince
lui confia le soin de former avec Budé sa
bibliothèque de Fontainebleau et l'envoya
de nouveau à Venise où il resta jusqu'en
1535. Il reprit alors le chemin de Rome ,
sur les instances de Paul III. Avant d'ar-
river près de ce pontife , il mourut de la
goutte en 1555 , à 90 ans. On imprima à
Eàle en 1557 , et à Paris , en lljkk , in-i" ,
quelques Epigrammes de Lascaris en
grec et en latin, car il possédait parfai-
tement ces deux langues. Son style a de
la vivacité et de l'harmonie. Une des
grandes obligations qu'on lui a , c'est d'a-
voir apporté en Europe la plupart des
beaux manuscrits grecs que nous avons.
La bibliothèque de ce savant fut dans la
suite transportée en Espagne, et forme
une des plus rares collections de la Biblio-
thèque de l'Escurial. On lui doit la tra-
duction latine de quelques traités de Po-
lybe sur l'art militaire. Le savant Lasca-
ris ne dédaigna pas de remplir les fonc-
tions de correcteur à Florence , ensuite à
Rome : c'est à lui qu'on est redevable des
éditions aussi précieuses que rares des
ouvrages suivans : | Anthologia epîgram-
matum grœcorum . libri VII , graece,
Florence, 1494 111-4"; | Callirnachihijmni
grœci, cum scholiis grœcis ^ ibid., 1492,
10-4°; I Scholiagrœca in Iliadem, in inle-
grum reslituta^ Rome , 1517 , in-folio, etc.
M. Villemain a publié un ouvrage aussi
intéressant qu'instructif, sous le titre de
Lascaris ou les Grecs du 15' siècle^
Paris , 1825 , in -8".
LASCARIS (CoxsTAXTix) quitta Con-
Slantinople , sa patrie , en 1454 , lorsque
les Turcs s'en furent rendus maîtres, et se
réfugia en Italie, où ses talens reçurent
l'accueil qu'ils iriéritaient. Il enseigna les
belles-lettres à Milan, ensuite à Naples ,
et enfin à Messine. De son école sortirent
Bembo et d'autres hommes illustres. Il
laissa sa bibliothèque , qui contenait beau-
coup de manuscrits précieux qu'il avait
apportés de Conslantinople , au sénat de
Messine, qui l'avait honoré du droit de
bourgeoisie en 1465 , et qui lui fit élever
un tombeau de marbre. On a de lui une
Grammaire grecque , en grec seulement,
Milan , 147G, in-4". C'est la première pro-
duction grecque de liinprimcrie; elle a
été rcimj)rimce avec quelques autres trai-
tés de grammaire, Venise , 1557 , in-4".
LAS-CASAS ( Bauthéleju ). Foyex
CASAS.
LASCÈNE. Voyez LASENA.
LASCUS, ou LASCO (Jean), d'une
famille illustre de Pologne, fut prévôt de
Gnesne, puis évéque de Vesprin en Hon-
grie. Il abandonna la foi catholique pour
embrasser la prétendue réforme, qu'il
prêcha en Hollande et en Angleterre ; en
ayant été chassé parla reine Marie, il
parcourut l'Allemagne, le Danemark, et
mourut en Pologne l'an 1560. Ses princi-
paux ouvrages sont : | Tractàtus de sa^
cramenWs , Londres , 1552, in-S";] For-
ma ministerii in peregrinorum ecclesia ,
instituta Londini^ an. V6b0 , per Eduar-
dum VI ^ in-S".
• LASCY (Joseph-François-Madrice,
comte de), né en 1725 à Pétersbourg,
était fils du comte Pierre de Lascy, qui
s'était illustré au service de la Russie sous
Pierre le Grand, et qui mourut en 1751
gouverneur de Livonie.îl embrassa la car-
rière des armes , dans laquelle ses ancê-
tres s'étaient déjà distingués, el marcha
noblement sur leurs traces. En 1744, il
passa au service de l'Autriche , commença
par être aide-de-camp du comte de Bro-
\vn,fit sa première campagne en Italie
et eut trois chevaux tués sous lui au com-
bat de Velletri. Aussi heureux que brave,
on le vit se signaler au siège de Maëstricli
en 1748 , et monter au grade de colonel.
En 1756, il sauva à Lowositx l'armée au-
trichienne, et fut fait général-major pour
prix de sa valeur et d'une blessure grave
qu'il avait reçue. Le 22 novembre 1757, il
prit une grande part à la bataille de Bres-
lau, et fut nommé lieutenant-général et
chef d'élat-major. Ce fui à ses sages dis-
positions que le mî»échal Daun fut rede-
vable de la victoire ■*& Hochkirch. Elevé
au grade de lieutenant général d'artil-
lerie en 1759, il pénétra l'année suivante
jusqu'à Berlin, à la télé de quinze mille
honuTies, et reçut de Marie -Thérèse le
collier de commandeur de son ordre, et
le grade de maréchal d'empire en 1762.
La paix , qui survint peu de temps après,
ne le laissa point dans l'inaction : il lit
fortifier les frontières delà Bohème, et
réparer plusieurs forteresses. Dans le
conseil aulique , où il était admis , on lui
dut des avis très sages, qui furent sou-
vent utiles à l'Autriche, et tirent taire
l'envie que son mérite lui avait suscitée
LAS
508
LAS
par des acJions qui n'appartiennent qu'à
une prande âme entièrement dévouée au
service de son souverain. Marie-Thérèse
ne réfjnait plus : Joseph ÏI , qui la rem-
plaçait sur le trône, avait entrepris en
4788 une guerre contre les Turcs, dans
laquelle ni la valeur de l'empereur ni ses
propres conseils n'en avaient pu empê-
cher les mauvais succès. Lascy n'hésita
point en celte circonstance de proposer
Laudon , son ennemi , comme le seul qui
pût réparer l'honneur des armes autri-
chiennes. Parvenu à un à^c avancé, il
continua d'éclairer de ses conseils le sou-
verain qu'il ne pouvait plus défendre cala
tète des armées , et mourut à Vienne , le
50 novembre 1801. Général actif , d'une
constance à toute épreuve, et surtout
d'une valeur très brillante, le maréchal
de Lascy aurait encore plus de droit à la
reconnaissance de l'Autriche, s'il ne s'é-
tait pas fait un système de lignes et de
cordons qui a occasioné de grands dé-
sastres dans la guerre contre les Turcs,
et dans les premières campagnes contre
la France. On trouve sur lui d'amples
détails dans les Mémoires du prince de
Ligne.
LASE^'A ou LASÈNE ( Pierre), avo-
cat né en 1590, àNaples, originaire de Nor-
mandie, habile dans les belles-lettres et
dans la jurisprudence , mourut à Rome, le
5 septembre 1636 , à iô ans. On a de lui :
I Nepanthes Homeri , seu De aholendo
luctu,^ Lyon, i62/i. , in-'8" ; | Cleombrotus .
sive De i/s qui in aqais pereunt^ Rome,
1637, in-8°; | Dell' antico gymnasio na-
^ofcfa??o, Naples, 1688, in-ii.".
LASilJS. Voyez LAZIUS.
L.\S.\E ( Michel ) , dessinateur et gra-
veur, né à Caen, l'an 1596, mort en 1667,
âgé de 72 ans, a donné quelques planches
au burin , d'après Raphaël , Paul Véro-
nèse, Josepin, Rubens, Annibal Carra-
che, Vouet, Le Rrun et autres. Il a aussi
fait beaucoup de morceaux de génie , dans
lesquels on admire son talent pour expri-
mer les passions. Il a imité avec succès
la manière de Villamena et C. Blomaert.
Son œuvre se compose de 600 pièces pres-
que toutes très recherchées des amateurs,
et dont les prip.cipales sont un Christmorl
étendu sur une pierie et pleuré par la
Vierge^ 1641; la Visitation d'après Louis
Carrache ; la Vierge assise dans les nues
sur un cj'oissant , d'après l'Albanc; un
portrait de Louis XIII à cheval^ pro-
clamé par la Reiiommée.
LASSA.LA d'abbé Manuel), jésuite es-
pagnol, né à Valence en 1758, pTofessail
la rhétori(}ue au séminaire des Nobles de
cette ville, lorsqu'il fut obli;jé d'en sortir
à l'époque de la dispersion de la société.
Il passa en Italie , se fixa d'abord à Bolo-
gne , puis se rendit à Ferrare , où il en-
seigna la philosophie. Lors de l'avcne-
ment au trône de Charles IV, il rentra en
Espagne et mourut dans sa ville natale , le
22 mars 1806. Il a laissé, en espagnol :
I Essai sur l'histoire générale ancienne
et moderne ,\A\encs , 17;5'),3 vol. in-i°;
I Notice sur les poètes castillans . ihid.,
1757, in -4.°; [plusieurs Traductions des
tragédies de Sophocle et d'Euripide,
ibid., 1758-1760 ; | Joseph présenté à ses
frères j tragédie en 5 actes, en vers, Va-
lence , 1762 ; I Don Sancho Aharea . idetn,
ibid., 1765. On a de lui en italien les tra-
gédies suivantes : | Iphigénie en Atdide ^
imitation d'Euripide et de Racine , Bolo-
gne , 178Ô ; I Ormisinda , en 5 actes , ibid. ,
1783 ; I Lucia Miranda . en 5 actes , ibid.,
1784. Le sujet de cette tragédie est tiré de
l'histoire des Espagnols dans le Paraguay.
II a publié en latin : | Rhenus Emnianue^
lis Lassale ^ 'ihid., 1781; poème composé
à l'occasion du débordement du Rhin,
rivière qui traverse la ville de Bologne,
et qu'on appelle communément le petit
Rhin ; | Tabulœ Lochmani sapieniis.^ ex
arabica sermone latinis versibus inter-
pretatœ, ibid., 1781, dédiées à son ami don
François Perez Bayer, savant espagnol.
Tous les ouvrages de l'abbé Lassala eu-
rent un grand succès. Raymi- Diosdado
Caballero, son compatriote et son con-
frère, a donné, pages 175-76 de son pre-
mier Supplément cà la bibliothèque de
Sotivell . la liste des divers écrits de ce
jésuite.
LASSEMTJS (Jean), né l'an 1636 , à
V/aldau, en Poméranie, voyagea avec un
jeune seigneur de Dantr,ick, en Hollande,
en France, en Angleterre, et visita les
bibliothèques et les savaus de ces pays,
avec lesquels il forma des liaisons. Etanî
à Nuremberg, il se lit des affaires fâcheu-
ses, en publiant un libelle intitulé ClaS'
sicumbelli turcici , contre deux jésuites,
les pères Olton d'Augsbourg et Ntmhau-
sen de Ralisbonne, et contre le docteur
Jaeger. On l'enleva secrètement, et on
l'enferma dans une prison en Hongrie.
Ayant obtenu sa liberté, il fut nommé
pasteur de diverses églises lutliériennes
en Allemagne, puis professeur de théolo-
gie à Copenhague, où il mourut en 1692.
Il a laissé un grand nombre d'ouvrages
LAS JÎ09
en allemand, peu connus, même des ki-
Ibrricîis.
L ASSIIS , ou L ASUS , musicien et poêle
dithyrambique, né à Hcrmione, dans le
Péloponèse , l'an 500 avant J.-C, l'un des
sept sages de la Grèce, après la mort de
Périandre , fut le premier qui écrivit sur
la théorie de la musique, et qui donna
des règles de composition et de chant.
Quelqu'un lui demandant ce qui était le
plus capable d'inspirer la sagesse, il ré-
pondit : c'est l'expérience.
L.VSSUS, ou di LASSO (Orlaxoo),
célèbre musicien du seizième siècle , né
aîMons, en 1520, et mort à Munich le
d5 juin 1595 , était le premier homme de
son art , dans un temps où la musique n'é-
tait pas ce qu'elle est aujourd'hui. Il fit
briller ses talens dans les cours de France,
d'Angleterre , de Bavière , etc., fut maître
de musique à Naples, chef et maître de
la chapelle de Saint -Jean -de- Lai ran à
Rome. On a de lui un grand nombre de
pièces de musique sur des sujets sacrés et
profanes , sous le titre de Mélanges d'Or-
lando LassuSj, Paris, 1576; et Continua-
tion des 3Iélanges^ 1584. On doute de
l'existence des autres ouvrages que lui at-
tribuent communément les bibliographes,
tels que Thcatrum musices , Patrocinium
musarunij, Motetorum et madrigalium
lihri. Liber missarum , etc. Ses contem-
porains le vantèrent comme la merveille
de son siècle , et le mirent au-dessus d'Or-
phée et d'Ampliion. Un poète a dit de
lui :
Hic illc est Lassus lassum qui reerctt orbem,
Discordemque sua copalat harmoDia.
* LASSUS ( Pierre ), chirurgien de
Paris , né en 1741 , se livra dès l'âge de 24
ans , avec succès , à l'enseignement parti-
culier : il fut ensuite nommé professeur
de l'histoire de la médecine ; et peu de
temps après , il obtint la place de démons-
trateur , dans laquelle il se distingua par
une méthode et une clarté remarquables.
En 1770, il fut nommé chirurgien ordi-
naire des dames de France , filles de Louis
XV, auxquelles il demeura toujours atta-
ché et qu'il accompagna lorsque les évé-
nemcns politiques le contraignirent de se
retirer en Italie. Après sa rentrée en
France , il trouva moyen d'échapper à la
loi contre les émigrés , en montrant les
travaux dont il s'était occupé à l'étranger,
et dont il rapportait les fruits dans sa pa-
trie. Lorsque les nouvelles écoles de mé-
decine eurent été rouvertes, Lassus fut
LAT
nommé successivement professeur de
l'histoire de la médecine, professeur de
pathologie externe, inembre de la pre- ,
mière classe de l'institut, secrétaire et
bibliothécaire du même corps savant. Il
est mort le 17 mars 1807. Il a publié plu-
sieurs ouvrages ; les principaux sont : | un
Traité élémentaire de médecine opéra-'
taire . Paris, 17'J3 . 2 vol. iii-8"; | Patholo-
gie chirurgicale . Paris , 1805 , ISOti , 2 vol.
in-S"; I jjlusieurs Mémoires insérés dans
le recueil de l'inslilut. MM. Tho'uret , Pel-
lelan, Pierre Sue et Cuvier ont chacun
publié l'éloge de Lassus.
'LATVPiE (Fra\çois-ue-Paule), bota-
niste, né à Bordeaux le 8 juillet 1739, d'un
arpenteur feudisle de Troyes, attaché à
Montesquieu, commença son éducation
sous les auspices de ce grand écrivain, et
devint le secrétaire de son fils, qu'il accom-
pa'ïiia dans ses voyajjes en Italie et en
d'autres contrées de l'Europe. Il y prit le
goût de l'histoire naturelle et de la tech-
nologie, et fut nommé, à son retour à
Bordeaux , inspecteur des arts et manu-
factures de la province de Guyenne. En
1783 , l'académie des sciences de cette ville
le chargea de faire un cours de botanique
dans le jardin des plantes créé par elle, et
depuis celte époque, il se livra continuel-
lement à l'enseignement de l'histoire na-
turelle et de la littérature grecque , dans
différens élablissemens d'instruction pu-
blique à Bordeaux, jusqu'à sa mort arri-
vée le 8 octobre 1825. Il a laissé par son
testament à la commune de la Brède une
propriété du revenu de 500 fr. pour doter
la lille la plus vertueuse de l'endroit, et a
fait en outre plusieurs legs, pour réta-
blissement de prix à distribuer dans di-
verses écoles publiques de Bordeaux. On
a de Latapie : } M Art de former les jar-
dins modernes ou VJrt des jardins an-
glais de If^hateley . traduit de l'anglais ,
Paris, 1771, in-8"; | Hortas Burdigalen-
sis ou Catalogue du jardin des plantes de
Bordeaux. 1784, in-12; | Description de
la commune de la Brède j dans le t. 5 des
F'ariétés bordelaises, et plusieurs articles
dans le Journal d'agriculture de l'abbé
Rosier. On a encore de lui une Notice sur
les arts et manufactures en Guyenne . de
plus de 300 pajîes in-4'', conservée en ma-
nuscrit à la bibliothèque de Bordeaux, On
trouve une notice sur Latapie, dans le
Musée d' Aquitaine, tome 2, page 250.
' LATASSE ( Claude ) , né à Nancy en
1743, fit son cours de théologie chez les
jésuites, à Pont -à- Mousson, où il obtint
LAt 5
le boMnct (le docteur. Elevé à la dignité
sacerdotale , son évêque , M. Drouas , vou-
lant tirer avantage de ses talens , l'agré-
gea à la compagnie des missionnaires de
Nancy. Il devint successivement curé, et
ensuite prcbendier à la catlicdrale de cette
ville. Quoique cette dernière place ne l'o-
iiligeât quà l'assislance au chœur , son
zèle ardent pour la religion lui faisait par-
tager les fatigues du miuislère pastoral.
Souvent il allait prêcher les habilans des
campagnes, leur donner des retraites et
des missions. Ce fut pour eux qu'il rédi-
gea la Bonne journée j ouvrage précieux,
qui leur apprend à sanctifier leurs peines :
c'est aussi vers ce temps qu'il fit paraître
la Famille sainte . ou Tobie. Cette his-
toire peut être présentée pour modèle aux
familles chrétiennes ; l'auteur a trouvé le
moyen d'y faire des réflexions utiles et
intéressantes; il a obtenu un très grand
nombre d'éditions, qui prouvent son uti-
lité mieux que tous les éloges qu'on en
pourrait faire. A l'époque de la révolu-
tion, Latasse fidèle à sa conscience, re-
fusa courageusement toute espèce de ser-
ment, et il émigra en Allemagne. i)ès
que l'on connut son mérite, on lui donna
une chaire de théologie. Toujours occupé
du salut des âmes, il employa ses loisirs
à combattre les impies et les hérétiques
dans un petit ouvrage intitulé : Le Catlio-
lique instruit. Sous la forme simple du
dialogue il expose les principales vérités
de la religion, et il répond aux diverses
objections que l'on a faites jusqu'à ce jour.
De retour dans son diocèse , il fut nommé
supérieur du séminaire ; mais il occupa
peu de temps cette charge. Il resta néan-
moins attaché à cet établissement, donnait
des conférences sur la religion et sur le
gouvernement des paroisses. Il mourut
d'une hydropisie de poitrine, le 6 janvier
4SiG, sincèrement regretté de tous ceux
qui l'ont connu. C'était un pasteur zélé.
un directeur sage et éclairé , aussi scru-
ï)uleusement observateur des principes
sur le déclin de l'âge que dans la ferveur
de la jeunesse; il avait surtout le rare
talent de rendre ses auditeurs attentifs , et
de faire désirer au sortir d'un de ses exer-
cices le retour du suivant. Ouvrier infa-
tigable et propre à tout, il a laissé beau-
coup de sennons manuscrits et un grand
nombre d'extraits des saints Pères , dont
ses amis ont hérité.
LATERANUS ( Plautius ) , fut désigné
consul l'an 65 de Jésus-Christ. Avant de
prendre possession de son consulat, il fut
10 LAT
tue par ordre de Néron, pour être entré
dans la conjuration de Pison contre co
prince. C'est de Plautius Lateranus que
le célèbre palais de Latran a tiré son nom,
parce que c'était autrefois la maison
qu'habitaient ceux de cette famille. Les
auteurs contemporains mettaient cette
maison au nombre des plus magnifiques
de Rome.
LATES (BoxKTde). Voy. BONET.
LATIIBER (Ji:,v!v), cordelier anglais
du 15' siècle, a fait des Commentaires
estimés sur les Psaumes , sur Jérdmie et
sur les u-ïctes des Âpôtrcs. Il a lini celui
sur Jérémie en 1406.
LATÏÎMI ( Latixo ) vit le jour à Viterba
en 1515. Il fut employé à la correction du
Décret de Gralien , et mourut à Rome en
1593, après avoir publié des remarques
et des corrections sur l'ertullienj et sur
plusieurs autres écrivains, et une savante
compilation, sous le titre de Bibliotheca
sacra et profana. Ce recueil d'observa-
tions, de corrections, de variantes, de
conjectures, fut imprimé à Rome en 1607
par les soins de Dominique Macri , qui
l'enrichit delà l^ie de l'auteur. C'est faus-
sement qu'on a accusé celui-ci d'avoir
supprimé les pièces des anciens qui ne
s'accordaient pas avec ses sentimens.
Juste-Lipse l'appelle Probissimus senex ^
et omnilitlerarum, génère instructissimus.
Quoiqu'il eût une santé très délicate, il la
ménagea si bien qu'il poussa sa carrière
jusqu'à 80 ans. Il fut successivement se-
crétaire des cardinaux Rodolfo Pio , del
Pozzo et Colonne.
LATLM rBnuNETTo). V. BRUNETTO.
L ATLMJS PACATUS DREPANIUS ,
orateur latin, né à Drépane dans l'Aqui-
taine, dont nous avons wvi Panégyrique
de Théodose le Grand . prononcé devant
ce prince en 389 , après la défaite du ty-
ran Maxime. Il y en a une édition de 1651,
in-8° ; et on le trouve dans les Panegyrici
veteres , 1677, in-i".
L\TL\US (Jean), nom sous lequel est
connu un célèbre Ethiopien , disciple du
fameux Clénard, est célèbre dans le monde
savant. Il développa un génie et des con-
naissances qu'on était bien loin de soup-
çonner dans un Africain du 16"^ siècle , et
donna des leçons publiques de musique ,
de poésie et de langue latine dans un col-
lège de Grenade. Sa réputation était ex-
traordinaire, et tous les curieux accou-
raient pour voir un Nègre briller dans^ les
connaissances des beaux esprits de l'Eu-
rope, et les enseigner aux Européens
LAT
311
LAT
mîmes, tt Nouvelle preuve, après tant
» d'aulres, dit un physioloîïue , que la rai-
»> son de l'iioiiuiie est à elle-même ; que
» c'est un feu céleste , comme s'exprime
» un ancien , qui se développe partout où
» il peut, divinœ particula aurœ j. et que
» si des circonsiances locales ou organiques
» mettent des obstacles à son essor, ou lui
p donnent des facilités, elles ne peuvent
• jamais en être la cause productive. »
Lalinus mourut vers 1590. On a de lui un
petit poème intitulé : De navali Joannis
Justriaci ad Echinadas insulas Victo-
ria , etc.
LATOMl'S (Jacques), savant théolo-
gien scoiaslique, né à Cambron , dans le
Hainaut , vers 1475, était docteur de Lou-
vain , chanoine de Saint-Pierre de la
même ville et de la cathédrale de Cam-
brai , et inquisiteur de la foi. Il écrivit
contre I-uther, et fut l'un des meilleurs
controversistes de son temps. Il mourut en
1544. T^)us ses ouvrajjes furent recueillis
et donnés au public en 15 jO, in-fol. Les
luthériens furent si sensibles aux coups
que leur porta Latomus, qu'ils le déchi-
rèrent de son vivant et après sa mort , par
des satires, des romans , et par les termes
les plus injurieux. — Jacques LATOMUS,
son neveu, né à Cambron, au commen-
cement du 16' siècle , chanoine de Saint-
Pierre à Louvain, mort le 129 juillet 1.596,
s'était appliqué à la poésie latine , et a
donné Vsalmi omnes Davidis m carmen
conversi, Anvers , 1587, in-S". Buchanam
et le père Commire l'ont surpassé dans ce
genre.
LATOMUS ( Bartuélemi ), né à Arlon,
dans le duché de Luxembour^j, en 1485,
fut un des hommes de son siècle les plus
versés dans les belles-lettres. Il professa
la rhétorique à Cologne, fut principal au
collège de Fribourg en Brisgau , et passa
ensuite à Paris, où François I" le nomma,
l'art 1554, pour remplir le premier une
chaire d'éloquence latine dans le Collège
royal de France, qu'il venait d'établir.
Sur la lin de la même année, les sacra-
mentaires avant eu l'audace d'afficher des
écrits insolens contre l'auguste sacrement
de nos auîels et contre le roi, on en ac-
cusa les Allemands qui étaient à Paris , et
on se souleva contre eux indistinctement,
Latomus craignit d'être enveloppé dans
ce soulèvemeni ; mais François I" ayant
fait faire ime exacte recherche des auteurs
de ce» libelles , trouva qu'ils étaient tous
Français : il y en eut au moins vin-;l-
q[uatre qui périrent par le dernier sup-
plice. Latomus enseigna jusqu'à l'an 1542..
avec distinction ; puis il se retira à Co-
blentz, où il fut fait conseiller de 1 élec-
teur de Trêves. Les hérétiques, et en par-
ticulier Martin Bucer, ratta(juèrent dans
sa retraite; il se tira de ces disputes avec
honneur, et en homme bien instruit de
sa religion, La réputation qu'il se lit par
ses ouvrages de controverse engagea
Charles-Quint à l'envoyer au colloque de
Batisbonne, tenu en 1546, pour y assister
en qualité d'auditeur du coté des catho-
liques. Il mourut à Coblenlz en 1566. Nous
avons de lui un grand nombre d'ouvrages
de littérature, entre autres des Notes sur
une grande partie des ouvrages de Cicé-
ron. Ces notes ont été rassemblées dans
une édition de Cicéron, donnée par Jean
Oporin , Bàle , 1553, in-fol.
LITOUCIÎÎÎ. Foyez CBEUZÉ-LA-
TOUCllR.
L ATOIICIIE-TRÉVILLE. T^oijes TRÉ-
VILLE.
LATOUCIIE. rorjez GUIMOND de la
TOUCHE.
• LATOUR-D'AIJVERGÎVE ( TuÉo-
puiLE-MALO CORRET de'^ . surnommé le
■premier grenadier de f tance , naquit le 25
novembre 1743, à Carhaix en Bretagne , et
descendait de l'illustre maison de Bouil-
lon. La légitimité de sa libation lui fut
contestée; mais un arrêt de la cour du
parlement l'autorisa à en prendre le nom
et les armes. Après avoir étudié au
collège de Quimper, puis à l'Ecole-IMili-
taire, où il se distingua, il entra au régi-
ment d'Angoûmois et continua de consa-
crer à l'élude tous les momens dont il
pouvait disposer. Aussi la plume et l'épêe
lui furent également familières. Il est au-
teur d'un Traité estimé des origines
gauloises (Paris, 1792), d'un Glossaire
en quarante-cinq langues et d'un Diction-
naire français-celtique ^ et il possédait
presque tous les idiomes connus. Latour-
d'Auvergne servit, durant la guerre d'A-
mérique, sous le duc de Crillon.qui corn-
inandait l'armée espagnole, et, au siège
de Mahon , il coula une frégate anglaise
sous le feu de la mousqueterie et du ca-
non de la place, et brûla les bâtimcns
munilionnaires de l'ennemi. Le roi d'Es-
pagne lui envoya avec une pension do
mille flancs qu'il refusa, la croix de
l'ordre de Calatrava. Capitaine à l'époipia
où éclata la rêvolulion française, Lalour-
d'Auvergne se dévoua, un des premiers,
à la défense du territoire, et prit en qualité
du plus ancien capitaine, le conimand©-
LAT
512
LAT
ittcnl de toutes les compagnies de grena-
diers réunies sous le nom de Colonne in-
fernale. Le trait suivant donnera uneidée
del'intrépidité de celui qui la conduisait :
devant Saint-Sébastien situé sur un rocher
au milieu de la nier, il se jette dans un
esquif avec une seule pièce de huit, arrive
sous la place , et feignant que les Français
ont amené toute leur artillerie , il par-
vient à intimider le commandant qui ré-
pond : u Mais, capitaine, vousn'aveï pas
r fait tirer un seul coup de canon sur la
» ciladelle ; faites-moi du moins l'honneur
» de la saluer, sans cela je ne puis vous la
» rendre. «Latour-d'Auvergne retourne à
son esquif où il fait jouer la pièce de huit,
puis revient à ia ciladelle dont les clefs
lui sont aussitôt remises. Sa conduite,
j)endant le reste de la campagne répondit
à ce brillant début; son chapeau et son
manteau, qu'il avait l'habitude de tenir
sous son bras gauche en combattant, fu-
rent vingt fois criblés de balles, sans
qu'il fût blessé « Notre capitaine a le don
i> de charmer lesballes,» disaient ses grena-
diers. liOrsqu'on voulut le destituer comme
noble, ses braves s'y opposèrent avec tant
d'énergie que les représenlans furent obli-
gés de le respecter. Après l'expiration de
la guerre , Latour d'Auvergne fut pris par
les Anglais sur le vaisseau qui le rame-
nait, et pasca sur les pontons dix-huit
mois, au bout desquels il revint à son ré-
giment; mais on avait disposé de sa place.
Il se Ilxa alors au village de Passy, avec
une pension de retraite, et il se livrait à
ses studieuses et paisibles occupations,
lorsqu'il apprit la triste situation de Le
liiigant (voyez ce nom) à qui la réquisi-
tion allait enlever ledernier de vingt-deux
lils , le seul qui lui restât pour consoler sa
vieillesse. Latour-d' Auvergne , alors âgé
de 53 ans, se présente aussitôt au Direc-
toire, et obtient de remplacer le jeune
homme qu'il rend à son père. 11 se signala
sur les bords du llhln par de nouveaux
exploits, jusqu'à l'époque du traité de
Campo-Formio, qui lui permit de ren-
trer dans ses foyers. 11 les quitta de nou-
veau, bientôt après, pour rejoindre en
Suisse ses compagnons d'armes. Il conti-
nua ainsi de servir, sans vouloir accepter
d'autre récompense que celle du beau
surnom que nous avons énoncé en com-
mençant cet article , et qui lui fut donné
par Bonaparte . avec im sabre d'iionneur,
dont il ne voulut point se parer avant de
l'avoir (-prouvé contre l'enneiui. Lalour-
d'Auvargiie tiouva la murt sur ie champ
de bataille de Neubourg, où un coup de
lance de hulan lui perça le coeur (27 juin
1800 ). Sur la demande de ses cauiaradcs,
son coeur fut placé dans une urne , et
porté par un fourrier à la tête de sa com-
pagnie. Le général DessoUe laissa son
poste vacant; à chaque appel, le sergent
commençait par ce nom illustre, et le
fourrier répondait : Mor( au champ d'hon-
neur. L'armée porta son deuil pendant
trois jours. La terre où le grand 'Turenne
et son petit-neveu avaient marché en
vainqueurs a reçu ses restes; le Moniteur^
en rendant compte des Origines gauloises^
avait dit que l'auteur descendait de Tu-
renne ; Lalour-d' Auvergne s'empressa de
répondre qu'il n'était sorti que d'une
branche bâtarde de la maison de Bouillon.
Il se trouva quelquefois dans un assez
grand dénuement. Tandis qu'il était en
Espagne, im rcprésenlant du peuple lui
vantait un jour son crédit, dont il lui of-
frait d'user : « Eh bien, dit Latour-d'Au-
» vergne, demande/, pour moi — Un
«bataillon? un régiment? — Non, une
» paire de souliers. »
" L\TOUîl-M\UBOURG (MAnm-Vic-
TOR FAY, marquis de ), lieutenant géné-
ral, né le il février 1756, d'une ancienne
famille du Vivarais , entra en 1782 avec le
grade de sous-lieuteuant dans le régiment
de Beaujolais (infanterie), et devint en
1786 , capitaine dans le régiment d'Or-
léans (cavalerie), puis en 1789, sous-
lieutenant des gardes du corps du roi. Il
donna le o octobre 1789, des preuves do
son dévouement à Louis XVI , près du-
quel il était de service. Il émigra à la
suite des événemens du 10 août 1792, et
ne rentra en France qu'après le 18 bru-
maire. A idc-de-camp de Kléber, dans l'ex-
pédition d'Egypte, il était parvenu au
grade de colonel lorsqu'il fit la campagne
d'Austerlitz. Il se signala dans cette jour-
née mémorable , reçut le grade de géné-
ral de brigade , et fit les campagnes de
Prusse et de Pologne. Il fut blessé au com-
bat de Deypen, fut nommé le 10 juin
1807, général de division, et fut blessé de
nouveau à la bataille de Friedlaiid . Le mar-
quis de Latour-Maubourg, comaïaïuia en
1808 en Espagne , la cavalerie de l'armée
du Midi , et prit part à un grand nombre
d'affaires. Sa conduite dans ce royaume
lui avait attiré l'affection des Espagnols,
et dans plusieurs occasions, il en reçut
des témoignages, notamment dans la^ re-
traite de Cordoue. F.n 18 j -2, il }assa n la
grande aruu'e de Rusiie . se conduisit
LAT 3
d'une manière brillante à la bataille de
Mojaisk, et opéra sa retraùte dans le meil-
leur ordre à la tête de son corps. Chargé
en 1815 du commandement du i" corps
de cavalerie , il se couvrit de gloire à
Dresde (27 septembre ), et à Leipsick (i),
où un boulet de canon lui emporta une
cuisse ( 18 octobre ). En 1814 , le marquis
de Latour - Maubourg adhéra à la dé-
chéance de Napoléon, fut nommé par le
comte d'Artois membre d'une commis-
Bion chargée de la réorganisation de l'ar-
mée , et fut appelé par le roi , le 2 juin, à
la chambre des pairs. Il ne remplit pen-
dant les cent "jours aucune fonction,
rentra, sous la seconde restauration, à la
chambre des pairs, et en 1820 fut chargé
du portefeuille de la guerre. Après la
mort -du maréchal duc de Coigny, il de-
vint gouverneur des Invalides ; il est
mort dans ce poste en 1831. Bonaparte
l'avait nommé successivement comte de
l'empire , et grand-croix de la légion-
d'honneur : Louis XVIII le fit comman-
deur de l'ordre de St. -Louis , et plus lard
chevalier de l'ordre du St .-Esprit.
' LA.TREILLE ( Pierre-André), natu-
raliste, né à Brives ( Corrèze) le 29 no-
vembre 1762, fit ses études à Paris au col-
lège du cardinal Lemoine, où il s'attira
la bienveillance du célèbre minéralogiste
Haijy, et fut destiné à l'état ecclésias-
tique. A la mort du baron d'Espagnac son
protecteur, qui l'avait appelé dans la ca-
pitale en 1778 , il retourna à Brives ( 1786 ),
après avoir reçu la prêtrise , et consacra
tous ses loisirs à des recherches sur les
insectes. Quelques plantes curieuses dont
il lit hommage au célèbre Lamarck, dans
un nouveau voyage à Paris , lui procu-
rèrent la connaissance de ce grand natu-
raliste, auquel il succéda dans la chaire
de professeur au muséum d'histoire na-
turelle {voij. LAMARCK). Arrêté à Brives,
sous le régime de la terreur, comme étant
prêtre, il fut conduit et enfermé au fort
du Ha à Bordeaux, et là, condamné, lui
soixante-treixième, à la déportation. Au
milieu de ses infortunes , il chercha dans
la science ses consolations , et elle fut pour
lui une occasion de salut. Le médecin
des prisons de Bordeaux s'étonnant im
jour de voir un prisonnier absorbé dans
(l) Pendanl qu'on le (ranipnrtAÏt jiir un brancard,
■on domestii^uc marchant à ci'ité de lui, ne put s'im-
pScber de pleurer : « Contole-toi , mon ami , lui dit
• Latoor-lMaubourg, IVre'nemf nt n'e.it pat si malhcu*
• ren« pour loi que lu pourrai» le croire ; deturmait
■ tu n'fiirai >ilu< iju'uue botle i tirer. •
7.
13 LAT
la contemplation d'un insecte , quand sa
tête est menacée : C'est un insecte très-
rare, répond Latreille aux question» '
qu'il lui adresse. L'insecte est demandé et
obtenu pour un naturaliste de Bordeaux
( M. Bory de Saint-Vincent ). Ce dernier,
flatté de tenir ce don d'un entomologiste
déjà connu par d'honorables travaux
s'impose le devoir de soustraire Latreille
au danger qui le menace, et bientôt»
malgré les obstacles qu'offrait cette noble
tentative, le prêtre naturaliste est rendu
à la liberté. M. Martignac contribua aussi
beaucoup à son élargissement. Il fut
proscrit de nouveau en 1797 ; mais , en-
touré de l'estime de ses concitoyens, ij
put revenir l'année suivante dans la ca-
pitale. Peu de temps après, il fut nommé
correspondant de l'institut et obtint une
place au muséum d'histoire naturelle où
il fut chargé de l'arrangement métho-
dique des insectes. En 1814, il remplaça
sou ami Olivier à l'académie des sciences,
et Louis XVIII le nomma en 1821 cheva-
lier de la légion-d'honneur. Lalreille s'est
placé, de l'aveu même de ses rivaux, au
premier rang des entomologistes , et
presque toutes les académies de l'Europe
s'empressèrent de s'associer un écrivain
aussi distingué. Il est mort le 6 février
1833, laissant les ouvrages suivans : | Con-'
sidér citions sur l'ordre naturel des ani-
maux composant les classes des crusta-'
cées j des arachnides et des insectes j avec
un tableau méthodique de leurs genres ,
disposés par famille s, V&v'is, Schœll, 1810,
in-S" ; I Cours d'entomologie , ou de l'his-
toire naturelle des crustiicécs ^ des ara-
chnides ^ des tnyriapodes et des insectes ^
à l'usage des élèves du muséum d'histoire-
naturelle, première année, Paris, 1831,
in-8", avec un cahier de 24 planches,
I Esquisse d'une distribution générale du
règne animal, Paris, 1824 , in-S» ; i Essai
sur l'histoire des fourmis en France^
Brives, 1798, in-12 ; | Familles naturelles^
du règne animal, exposées succincte-
ment et dans un ordre analytique , avec
l'indication de leurs geJires, Far'is, 1825,
in-8° ; I De la formation des ailes des in-
sectes et de l'orga7iisation extérieure de
ces animaux comparée, en divers points,,
avec celle des arachnides et des crusta-
cées, Paris, 1820, in-8°; 1 Gênera crus^
taceorum et insectorum secundàm ordi~
nem naturalem in farnilias disposila, ico-
nibus exemplisque plurimis explicata ,
Parisiis , et Argentorali, 1S06-180J, 4 voU
, in 8°. C'est de toutes les productions de
27
LAT
3U
LAT
M, Latreille la plus importante et la plus
estimée. | Histoire naturelle des fourmis^
fit recueil de mémoires et d^ observations
sur les abeilles , les g.raignées ^ les fau-
cheurs t et autres insectes ^ Paris , 1802 ,
in-8** avec 12 planches ; | Histoire natu-
relle des reptiles^ avec figures dessinées
d'après nature, Paris, 1802, k vol. in-
48; — Nouvelle édition, Paris, 1826,
h vol. in-18. (Avec Sonnini. ) Cet ou-
vrage fait partie de l'édition de Buffon,
dite de Castel. | Histoire naturelle des sa-
lamandres de France , précédée d'un ta-
bleau méthodique des autres reptiles in-
digènes^ avec figures coloriées, Paris,
Crapelet, 4800, in-8''; | Histoire naturelle
des singes^ faisant partie de celle des qua-
drupèdes de Buffon, présentée sous un
ordre dans lequel les supplémens sont
confondus avec le premier texte, et aug-
mentée de notes, d'additions considé-
rables , avec 79 figures , gravées sur des
dessins neufs de Barraband, Paris, 1801,
2 vol. in-8°; | Histoire naturelle^ et icono-
graphie des.insectes coléoptères d'Europe^
Paris, 1822, et années suivantes, in-8'',
ligures ( avec le comte Dejean ), Cet ou-
vrage a été promis en 14 à 16 volumes
avec planches , il n'y a encore que le pre-
niicr qui ait paru, j Histoire naturelle^ gé-
nérale et particulière des crustacées et
insectes, Paris , 1802 — 1803 , 14 vol. in-8°
iig. faisant partie du Buffon , édit.de Son-
nini; I Mémoires sur divers sujets de l'his-
toire naturelle des insectes . de géogra-
phie ancienne et de chronologie^ Paris,
4819, in-S"; | Observations sur le système
métrique des peuples anciens les plus
connus, appliqué aux distances itiné-
raires, Paris , 1817, in-8° ; | Passage des
animaux invertébrés aux vertébrés, Paris,
4820 , in-8° ; | Précis des caractères géné-
riques des insectes, disposés dans un
ordre naturel , Brives, 1796, in-S"; | Re-
cherches g éographiqu,es sur l'Afrique cen-
trale, d'après les écrits d'Edrisi et de
Léon l'africain , cornparés avec les rela-
tions modernes , Paris , 1824 , in-8"; | Re-
cherches sur les zodiaques égyptiens ,
Paris, 1821 , in-6**; 1 Le règne animal dis-
tribué d'après son organisation, j^our
servir de base à l'histoire naturelle des
animaux, et d'introduction à l'anatomie
comparée, par le baron Cuvier ( et La-
treiUe), Paris, 4816, 4 vol. in-8° avec 45
planches. — Nouv. édit. revue et aug-
inentée par Latreille, Paris, 4829, 5 vol.
111-8" avec 20 planches. Outre les ouvrages
Uéjà cités , Latreille est encore auteur
d'un nombre considérable de mémoires ^
dont il a enrichi le Magasin encyclopé-
dique, le Bulletin de la société philoma-
thique, les Annales et mémoires du mU*-
séum d'histoire naturelle. Il a contribué-
par un grand nombre d'articles à la pu-
blication d'ouvrages importans, et a tra-
vaillé 9M Dictionnaire d'histoire naturella
de Déterville, à Y Encyclopédie métho-^
dique , pour la partie de l'entomologie , au
Recueil d'observations de zoologie et d'a-^
natomie comparée du Voyage de M. Hum-
boldt et Bonpland.
LA.TTAIGIVANT ( Gabriel - Charle»
de ) né en 1697, à Paris , fut chanoine de
Beims , et mourut en cette ville en 1778.
Il s'adonna d'abord à la poésie légère , et
enfanta un grand nombre de chansons où
il paraît oublier la décence de son état. 11
faut cependant lui rendre cette justice ,
que jamais il ne se permit de ces trans-
ports qu'on appelle philosophiques ; tou-
jours il respecta dans ses vers la religion».
On peut même dire à sa gloire qu'il ré-
para les légèretés de sa muse par des pro-
ductions plus dignes de ses talens. Ses
cantiques spirituels lui feront plus d'hon-
neur dans les esprits sages , que ses ou-
vrages de galanterie ne lui ont attiré d'ap-
plaudissemens de la part des esprits fri-
voles. Millevoie a donné un choix des
poésies de l'abbé Lattaignant, en 4810V
in-18. Ses principales productions ont été
publiées* collectivement par l'abbé de la
Porte , 4757, 4 vol. in-12 , auxquels il faut
joindre un 5' vol. publié en 1779, sous la
titre de chansons et poésies fugitives.
♦LATUDE (Henri MASERS de), connu
par sa longue captivité, naquit en 1725 à
Montagnac , en Languedoc , d'une famille
honorable de ce pays, et fut destiné à
l'arme du génie. Tourmenté du désir de
faire fortune, il vint à Paris à l'âge de 20^^^
ans, et crut avoir trouvé le moyen de se
rendre fort important , en donnant à ma-
dame de Pompadour, alors maîtresse en*
litre de Louis XV, l'avis d'un prétendu
complot formé pour l'empoisonner. Pour
cela, il s'agissait de se servir d'une boil&
qui devait parvenir à la favorite , et que
Latude avait préparée lui-même. L'affaire
fit grand bruit , mais l'intrigue ne tarda
pas à être découverte, et le donneur d'a-
vis ayant été arrêté , fut d'abord enfermé
à Bicctre , d'où il tenta de s'échapper , c&
qui le fit transférer à Vincennes. De nou-
veaux efforts pour se procurer la liberté
le firent traiter encore plus sévèrement r
il fut enfermé à la Bastille. Dix-huit mois
LAT
31»
LAU
«près il fui transporté, du cachol dans le-
quel on l'avait jeté, dans une chambre
«ù il eut pour compagnon d'infortune
«n jeune homme nommé d'Alègre , que
M""* de Pompadour retenait aussi dans
cette prison. Il s'échappa aveclui en 1736,
fut arrêté à Amsterdam et ramené à la
Saslille (i). On lui mit les fers aux pieds
«t aux mains : malgré la gène de sa posi-
tion, il finit par s'habituer à son état, el
£oûta même des momens de satisfaction.
Il apprivoisait des rats , rêvait des projets
^'utilité , et se consolait toujours par l'es-
poir d'être un jour libre. Cependant Içs
années s'écoulaient sans apporter le moin-
dre changement à son sort : il tomba dans
le désespoir, et il avait résolu de se lais-
ser mourir de faim, si ses gardiens n'eus-
sent adouci les rigueurs de sa captivité.
La mort de M*"' de Pompadour n'apporta
aucun adoucissement à son sort. Trans-
féré à Vincennes en 1764 , il s'évada une
-seconde fois , el fut encore repris ; ra-
mené à Vincennes , il fut conduit à Cha-
renton où ses ennemis le firent traiter
pendant 2 ans pour une folie qu'il n'avait
pas. Enfin en 1777 il recouvra la liberté ,
sous la condition de rester dans sa ville
natale. Lalude enfreignit cet ordre, fut
arrêté de nouveau el enfermé à Bicêtre ;
il y languit plusieurs années au milieu
des malfaiteurs de tout genre. En 1784 ,
tin mémoire qu'il fit pour le président de
<iourgues , tomba entre les mains de M™'
I.e{;ros , marchande à Paris , qui s'inté-
ressa à son sort et parvint à intéresser
■également en sa faveur le cardinal de
Hohan, MM. de Latour-Dupin , de Saint-
Priest , etc. , et par leur protection à le
faire sortir de sa prison. En 1790, l'as-
semblée nationale accorda une pension
alimentaire à Latude , mais en 1791 , l'as-
semblée Constituante rejeta une pétition
dans laquelle il' demandait des secours ,
«t il était sans ressources , lorsqu'en 1793
II obtint une pension par un jugement,
contre les héritiers de madame Pompa-
dour et de M. Amelot, auteurs de sa cap-
tivité. Il est mort à Paris le 1" janvier
4803, à l'âge de 80 ans. M. Thierry, avo-
cat, a publié le Despotisme dévoilé ou
Mémoires de Latude rédigés sur les pièces
originales, Paris , 1791 , 1792, 3 vol. in-18 ;
i793,2 vol. in-8".
(i) D'Alègre, qui était parti le premier, déguisé
«D paysan , fut arrêté à Bruxellei , AH <on arrivée
^ans celte ville , et reconduit à la Bastille , et de là à
<.'harentoo, oà Latude le retrouva vingt années plus
âard, enfermé avee les font.
LAU ( Théodore-Louis ) , fameux spl-
nosiste du 18' siècle, conseiller du duc de
Courlande , s'est malheureusement fait
connaître par un traité imprimé à Franc-
fort, en 1717, sous ce titre : Meditationes
philosophicce de Deo , mundo > homine ,
in-8" de 48 pages , sans date ni lieu de
publication ( Francfort , 1717 ). Ce livre
fut proscrit , ce qui l'a rendu fort rare.
Il a été reproduit en 1770 avec la tra-
duction française , sous la rubrique de
Kœnigsberg, et forme le lom. 7' de la Bi-
hliûîhèque de Bon sens. Lau y dit ( para-
gr. 4 ) : Deus est maieria simplex ; ego
materia modificata Dcus oceawjLZ ;-
ego fluvius.... Deus terra ; ego gleba
Tels sont les délires où s'engage l'altière
et imprudente raison , quand elle se sé-
pare de la révélation, fidèle conservatrice
de ses lumières. II a fait aussi quelques
traités de politique qui ne valent pas
mieux que ses traités théologiques.
LAUBANIE (TRIER DE MAGONTHIER
de ) , né en 1641 , dans le Limousin , par-
vint par ses services au grade de lieute-
nant général , et s'en rendit digne parles
preuves de courage qpi'il donna dans quan-
tité d'occasions. Nommé gouverneur de
Landau en 1704 , il y fut assiégé par deux
armées , commandées par le prince Louis
de Bade et le prince Eugène , soutenues
par l'armée d'obse r vallon de mylord Mari-
borough; il défendit la place durant 69
jours , et obtint la plus honorable capitu-
lation. Il fut fait grand'-croix de l'ordre
de Saint-Louis , el se retira à Paris , où il
mourut en 1706.
L'AUBESPIXE. Voyez AUBESPINE.
LAUBRUSSEL ( Ignace de ) , jésuite,
né à Verdun en 1663 , professa avec dis-
tinction dans son ordre , fut provincial
de la province de Champagne et ensuite
préfet des éludes du prince Louis de»
Asluries ; et lorsque ce prince se maria ,
il devint confesseur de la princesse. I]
mourut au Port-Sainte-Marie en Espa-
gne , l'an 1740 , après avoir publié quel-
ques ouvrages. Les plus connus sont :
I Traité des abus de la critique en ma-
tière de religion. Paris, 1710, 2 vol. in-12,
dédié à M. de Rohan , depuis cardinal ;
I la Vie du père Charles de Lorraine,
jésuite, Nancy , 1733 , in-8°. Son but était
de venger la religion des coups impuis-
sans que lui portent les incrédules et les
hérétiques ; il y a de bonnes choses , mais
elles pourraient être énoncées avec plus
de dignité et de force.
LAUD ( Guillaume ) , archevê<iue do
LAU
316
LAU
Cantorbéry , et ministre d'clat sous Char-
les 1", illustre par ses talons et par sa
constance dans ses malheurs , naquit à
Beading en Angleterre, l'an 1373. Il prit
le bonnet de docteur à Oxfort, fui d'a-
bord chapelain de Jacques 1" , puis suc-
cessivement évêque de Saint-David, de
Balh, et de Laodes ; après la mort d'A-
boot, son adversaire, il obtint le siège
de Canlorbéry. On l'accusait de persécu-
1er les puritains^ qui depuis causèrent
sa perte. Il succéda dans le ministère au
fameux duc de Buckingham. On lui attri-
bue le règlement fait en 1622 , par le roi
Jacques , pour défendre aux prédica-
teur» de traiter en chaire les questions de
la prédestination et de la prérogative
royale. Il engagea le roi à faire réimpri-
mer les treijle-neuf articles de la confes-
sion anglicane; et son désir était de ren-
dre le rit anglican commun à toutes les
églises britanniques, et de rétablir dans
le culte la pompe des cérémonies ro-
rnaines , afin de devenir le primat uni-
\'ersel de la religion. Sou attachement à
Charles I'"" lui fut funeste. Les ennemis
de ce prince firent mettre l'archevêque à
la Tour de Londres. Il fut accusé par le
parlement d'avoir voulu introduire la re-
ligion catholique, d'avoir entrepris de
réunir l'église romaine avec l'anglicane.
Charles ayant été entièrement défait , et
les séditieux n'ayant plus rien à craindre,
on fil couper la tête à cet illustre prélat,
en 1G44 : il avait alors 72 ans. On a de lui
une Apologie de l'église anglicane contre
Fischer, Londres, 1659, in-fol. C'est l'a-
pologie du schisme et de l'hérésie , qui
prouve assez, que c'est sans fondement
-qu'on l'accusa d'avoir fait des démarches
en faveur de l'Eglise catholique. Warthon
pviblia en 169S , in-fol. , la Vie de cet ar-
chevêque. Elle est curieuse et recherchée.
On y trouve l'histoire^du procès de Laud,
composée par lui-même dans la Tour de
Londres, avec beaucoup de vérité.
• LAUDENOT (Louise), dite aussi,
«près sa profession religieuse , la Mère
de Saint-Jacques ^ était fille d'un méde-
cin du roi, et recommandable par sa piété.
Ayant pris la résolution de renoncer au
monde, elle entra chez. leS'bénédiclines
>de l'abbaye de Montmartre , y fit profes-
sion , et s'y distingua par sa régularité et
ses vertus. Elle avait reçu une éducation
-soignée , avait du talent , et écrivait avec
iacilité. Louise fit tourner à la gloire de
Dieu ces heureuses dispositions , en com-
posant divers ouvrages de spiritualité
propres à l'édification du prochain. On
lui doit: | Catéchisme des vices et des
vertus ; i Méditation sur les Vies des
saillis pour toutes les fêtes de l'année . et
sur les principales fêtes de Notre-Sei-
gneur et de la Vierge; \ Exercices pour la
sainte commu7iion et pour la inesse ^ etc.
Celte pieuse fille mourut saintement dans
son couvent, le 27 niai J636.
LAUDON ( GiîDÉoN- Ernest, baron
de ), propriétaire d'un régiment d'in-
fanterie allemande, grand-croix de l'or-
dre militaire de Marie - Thérèse , feld-
maréchal des armées autrichiennes , un
des plus habiles et des plus heureux,
capitaines du 18' siècle, naquit à Toot-
zen en Livonie , en 1716 , d'une ancienne
famille du pays. Il fil ses premières cam-
pagnes sous le maréchal Munich , dans
la guerre de 1738, et se trouva à la
prise d'Oczakow , aux batailles de Cho-
czim et Slawutschane , où les Turcs fu-
rent entièrement défaits. En 1736, étant
à peine entré au service de la maison
d'Autriche avec le grade de lieutenant-
colonel , il se fraya tellement le chemin
à la gloire, qu'en moins d'une année il se
vit général d'artillerie et en trois ans com-
mandant en chef d'une armée entière. Il
délivra Olmulz du siège des Prussiens,
battit le roi à Kunesdorf , près de Franc-
fort-sur-l'Oder, et après avoir fait pri-
sonnier le général Foucquet à Landshut,
il emporta d'assaut Glatz etSchweidnilz,
et arrêta enfin les progrès de Frédéric
dans une guerre qui aurait pu être fa-
tale à la maison d'Autriche. Ce fui lui
également qui , l'année 1778 , ayant été
fait maréchal et misa la tête de 60,000
hommes, empêcha que le prince Henri
de Prusse ne réunît son armée à celle du
roi son frère en Bohème. En 1788 et 1789,
il se rendit maître de Dubitza, de Novi,
Gradisca et Belgrade. Ayant été nommé
en 1790 commandant-général en Bohème
et en ftloravie, il mourut le 14 juillet,
dans son quartiei'-général de Neu-Dist-
chen , dans la 7b' année de son âge. Fré-
déric II estimait ses talens militaires , en
même temps qu'il redoutait sa vigilance
et son extrême activité. Il l'appelait sa
sentinelle et disait qu'il estimait les diS'
positions des autres généraux^ mais qu'il
craignait les batailles de Laudon. La
carrière de ce grand général n'a pas tou-
jours été également brillante, et il y a eu
plusieurs époques où il restait comme
dans le plus parfait oubli ; car , pour ce
qui regarde la faveur de la cour, il no
LAU 317
put s'en assurer que dans les derniers
mois de sa vie. Simple dans toutes ses
manières, ennemi de l'adulation et de
l'intrigue , privé de tous les moyens
qu'ont les riches de se faire valoir dans
la capitale , et tout isolé au milieu de ses
rares qualités , Laudon se refusa toujours
à la moindre démarche pour gagner l'ami-
tié des courtisans , pour lesquels son grand
mérite ne fut qu'un objet d'étonnement ,
■comme il était celui de l'admiration des
ministres et de tous les citoyens. Il avait
«té élevé dans la religion luthérienne;
mais il se fit catholique avec pleine con-
naissance de cause , et fut fidèle à tous
les devoirs que la religion prescrit. Il re-
çut, avant de mourir, les saints sacre-
mens avec beaucoup de piété. Il avait
donné le même exemple en partant , en
4788 , pour le camp de Dubitza, et sortit
<le l'église pour aller directement à l'ar-
mée. Arrivé au camp , il remarqua qu'on
négligeait la prière du matin et du soir ,
€t n'eut rien de plus pressant que de ré-
tablir cette pratique chrétienne. L'armée
le pleura comme un père, comme le
gage et le garant de ses victoires. Dans
■ses derniers momens , voyant les officiers
•qui environnaient son lit fondre en lar-
mes, il les consola et les raffermit par des
paroles puisées dans la vraie philosophie :
il leur recommanda d'unir toujours la
religion à la valeur guerrière , de se dé-
fendre de ce qu'on appelle les maximes
des esprits forts , ajoutant ces paroles re-
iiuarquables : « Je dois à ma confiance en
» Dieu tous les succès que j'ai eus, comme
» les consolations que je goûte dans le
» moment de paraître devant lui. » C'est
d'un témoin oculaire qu'on tient ces dé-
tails. Il a donné lui-même pour inscrip-
tion à mettre sur son tombeau : Com-
memoratio mortis optima philosophia.
M. de Pe7,z.l a publié sa Vie en allemand,
€t elle a été trad. en français par M. de
Bock , 1 vol. in-12.
LAUDUIV. Voyez DELAUDUN.
LAUGIER ( Marc-Antoine) , né à Ma-
nosque en Provence, en 1713, entra de
bonne heure chei les jésuites. Use con-
sacra à la chaire, et prêcha à la cour
avec applaudissement. Ayant quitté la
compagnie de Jésus , il se tourna du côté
<les beaux-arts. Son Essai sur l'archi-
tecture. Paris, 1753, in-12, 1755, in-8°,
prouva qu'il était né pour les cultiver. Il
y a sans doute quelques réflexions hasar-
dées dans cet ouvrage ; mais on y trouve
encore plus de vues justes et d'idées
LAU
saines. Il est d'ailleurs bien écrit. Quel»
que temps après , il publia des Observa^
fions sur l'architecture^ 1763, in-12, et
Manière de juger des ouvrages de pein^
ture , 1771 , in-12 , qui achevèrent de
prouver qu'il avait le talent de saisir les
principes et les finesses de ces arts. Soo
Histoire de la république de ftfnwtf, qu'il
publia en 12 vol. in-12 , 1759 et années
suivantes (i) , et celle de la paix de Bel'
grade ^ en 2 vol. in-12, 1763, lui assu-
rent un rang honorable parmi les his-
toriens. Il réunit dans l'une et dans l'au-
tre, à quelques endroits près, le carac-
tère de la vérité au mérite de l'exacti-
tude. On pourrait désirer un style plus
soigné dans certains morceaux, moins
ampoulé , moins surchargé de traits plus
oratoires qu'historiques, et de comparai-
sons amphigouriques. Eugène Labaume
a publié en 1812, l'abrégé de l'histoire
de la république de Venise de Laugier, 2
vol. in-8°, et depuis, M. le comte Daru a
traité le même sujet avec une grande su-
périorité, Paris, 1819, 7 vol. in-8», 2' édit.,
1820, 8 vol. in-8°. On a encore de lui : \ Pa-
raphrase du MisererCj trad. de l'italien
du P. Segneri , in-12 ; | Voyage à la mer
du Sud, traduit de l'anglais, 1756, in-i", et
in-12 ; | Apologie de la musique fran-
çaise , contre J.-J. Rousseau , 1754 , in-
8° ; I Oraison funèbre dû prince de Bom-
bes , pleine de beautés d'une vraie élo-
quence. Cet écrivain estimable mourut
au mois d'avril 1769. M. François de Neuf-
château a publié Vêlage de Laugier. Voyez
le Nécrologe des hommes célèbres , an-
née 1770.
• LAUGIER (André) , habile chimiste,
professeur du jardin du roi, né à Lisieux
au mois d'août 1770, étudia la chimie
sous le célèbre Fourcroy, son cousin-ger-
main. Son père, ayant perdu la plus
grande partie de sa fortune par des cir-
constances malheureuses , André Laugier
ne se fit point un établissement de phar-
macie, comme il en avait eu d'abord le
projet. Nommé pharmacien de 2' classe, et
répétiteur des cours de chimie et de phar-
macie à l'hôpital militaire d'instruction
de Toulon , il y fit ensuite un cours élé-
mentaire de botanique qui commença
(i) Celle Histoire était U plut coniplite qui cdt
paru lur la republique de Veniie , avant celle de
Daru \toytt DARU ). Le» Italien» euï-mèmt» fai-
laient cas de cette biitoirc , qui, raal'ré quelque*
défauts de style , plaît surtout par son e«actitude.
Elle a été traduite en ilaltco , et imprimée plusieur»
fois i Vcnitw , notamment va 1778, is vol. i«-8**.
27.
LAU 5
sa rêpulation , et qui lui valut d'être ap-
pelé à la chaire de chimie à l'école cen-
trale du département du Var. Fourcroy
l'amena en 1802, de Toulon à Paris, et le
choisit pour son suppléant au muséum
d'histoire naturelle. A la mort de Four-
croy, Laugier devint titulaire. Il a enrichi
la science d'un grand nombre d'analyses
toutes remarquables par leur précision
et leur exactitude. Ses travaux ont été
consignés dans les Atmales de chimie^ le
JSulletin de la société philomathique , les
Annales et mémoires du Muséum d'his-
toire naturelle , etc. On peut en voir la
liste dans la France littéraire de M. Qué-
rard , à l'article Laugier. On doit à ce sa-
vant un Cours de chimie générale : ce
sont les leçons qu'il faisait au jardin du
roi , et qui ont été recueillies par une so-
ciété de sténographes, Paris, 1828, 5 vol.
in-8**, avec atlas. Laugier a donné aussi
plusieurs articles au Dictionnaire Tech-
nologique. Plusieurs de ses analyses, telles
<que celles des gramatiles blanches et grises,
de l'aplome, etc., ont été citées par M.
Berzelius , dans son Traité de minéralo-
gie, comme ayant des résultats conformes
aux proportions définies et démontrées
par le calcul , quoiqu'elles aient été faites
avant que ce système parût. I-augier était
directeur de l'école centrale de pharma-
cie , et membre de l'académie de méde-
cine. Il est mort du choléras-morbus à
Paris, dans le mois d'avril J852.
*LAUJOIV (Pierre), poète, né à Pa-
ris, le 3 janvier 1727, fut lié avec Piron,
£ollé. Panard, et tous les hommes facé-
tieux de son temps , dont il imita fort
bien les saillies , qui dégénéraient parfois
en traits mordans et satiriques. Il fut
membre de l'académie française, doyen
des chansonniers , et président du ca-
veau moderne. Il mourut à Paris le 15
juillet 1811, et a laissé : ] Jsmène et Jsmé-
nias^ tragédie en trois actes , 1770 : | l'/n-
£07iséquent ou les Soubrettes^ comédie en
cinq actes, en prose, jouée en 1777; | L'E-
£ole de l'amitié; La Nouvelle Ecole des
jnèreSj comédies en un acte chacune ; | Le
Couvents comédie en un acte , 1790 ; c'est
un tribut qu'un vieillard de 65 ans crut
devoir àlarévolution ; | desopéras comme
Sylvie^ en trois actes , 1770 ; des opéra-
comiques, tels que L'Amoureux de quinze
<ans, en trois actes; Le Poète supposée en
trois actes, le ballet d'Eglé^elc, etc.;
des parodies , des ballets, et un recueil de
chansons publié sous le titre d' A-propos
■de société. 1776 , 3 vol. in-12 On remar
18 LAU
que dans les poésies de Laujon delà faci-
lité, de la chaleur et beaucoup d'imagina-
tion. On a recueilli ses OEuvrea. Paris,
1811 , U. vol. in-8°.
* LA.ULAII1\IER ( Michel-Joseph de),
évéque d'Egée in partibus , né au Chey-
lard dans le Vivarais en 1718 , fut sacré
évêque en 1776. Il consacra son temps et
sa plume à la défense de la i eligion, et pu-
blia, sous le nom d'un ancien militaire ,
plusieurs ouvrages contre les philoso-
phes modernes. On a de lui : | Essai sur
la religion chrétienne et sur le système
des philosophes modernes , accompagné
de quelques réflexions sur les campagnes,
par un ancien militaire retiré, Paris,
Pierre, 1770, in-12 de 311 pages; \ Pensées
sur différens sujets, Langres , Jean Bon-
nin, et Paris, Humblot, 1773, in-12 de 551
pages : | Réflexions critiques et pa^
trioliques pour servir princiimlement de
préservatif contre les maximes de la phi-
losophie, 3* édition, revue, corrigée et
augmentée , Nyon l'aîné, 1780, in-12 de
410 pages. L'auteur du Dictionnaire
des anonymes pense que les deux pre-
miers ouvrages ont été fondus dans le der-
nier, et que c'est pour cela qu'il est pré-
senté comme une troisième édition. On
croit que cet évêque mourut vers la fin
de 1788.
LAUNAY (PiEHRE de ) , écrivain de la
religion prétendue réformée, né à Blois
en 1573, quitta une charge des finances ,
le titre de secrétaire du roi, et toutes les
prétentions de fortune , pour se livrer à
l'étude des livres sacrés. Les protestans
de France avaient en lui une confiance
extrême. II fut député à tous les synodes
de sa province , et à presque tous les
synodes nationaux qui se tinrent de son
temps; et mourut en 1662, à 89 ans, très
regretté de ceux de sa communion. On
a de lui : | des Paraphrases sur les Epl-
tres de saint Paul, sur Daniel, l'Ecclé-
siaste, les Proverbes et l'Apocalypse ; | des
Remarques sur la Bible, ou Explication
des mots, des phrases et des figures dif-
ficiles de la sainte Ecriture, Genève,
1667, in-4°. Ces deux ouvrages sont esti-
més des calvinistes.
LAUNAY (François de ), publiciste,
né à Angers en 1612, reçu avocat à Paris
en 1658, suivit le barreau, plaida, écrivit
et consulta avec un succès égal. Il occupa
le premier la chaire de droit français,
fondée en 1680 au collège de Cambrai, et
fit l'ouverture de ses leçons par un dis-
cours, dans lequel il prouva « que le droit
LAU 519
• commun romain n'est pas le droit de '
» France. » Du Gange, Bigot, Coutelier,
Ménage et plusieurs autres savans, se fai-
saient un plaisir de converser avec lui.
Jls trouvaient dans ses entreliens un
fonds inépuisable des maximes les plus
<:ertaines de la jurisprudence ancienne et
moderne. Ses mœurs relevaient beau-
coup son savoir; elles étaient douces et
pures, sa piété solide , sa charité bien-
faisante. Il ne savait rien refuser , mais
«n secourant les misérables, surtout ceux
qui mendiaient plutôt par paresse que
par besoin, il leur disait : ^ Vous pourriez.
* bien travailler pour gagner votre vie ;
» je me lève à cinq heures du matin pour
» gagner la mienne. » Cet homme esti-
mable mourut en 1693, à 81 ans. On a de
lui : I un traité du Droit de chasse j. 1681,
in-12 ; | des Remca'ques sur l'imtibition du
droit romain et du. droit français^ in-i",
1686; I Commentaire sur les Jnstitutes
coutumières d'Antoine Loysel, i688,
in-8°.
♦ LAIIINAY ou LAUNEY ( Berîvaud-
Resé JOURDAN de ), naquit à Paris le
9 avril 1740, à la Bastille, dont son père
était gouverneur. Il succéda dans cette
cliarge en 177G au comte de Jumilhac de
Cubjac, et la remplit jusqu'en 1789, épo-
que de la destruction de cette forteresse.
Son nom est devenu fameux à cause de
cet événement, dans lequel on vit le peu-
ple de Paris se porter à des excès jusque
là inouïs, par lesquels il préludait aux ex-
cès plus.grands encore de la révolution. De-
puis quelque temps on représentait la
Bastille coir.nie luic forteresse dauge-
veuse pour la ville de Paris , et ceux qui
y étaient enfermés comme des victimes
de l'arbitraire et du despotisme. On avait
plusieurs fois parlé de l'abattre, et en cas
de refus de la part du gouvernement et du
gouverneur, de la prendre de force, et
de rendre à la liberté les individus que
l'on y retenait. Sur le bruit que Launay
était déterminé à se défendre jusqu'à la
dernière extrémité, et que le ministre de
la guerre, dans la nuit du 12 au 13 juillet,
y avait fait transporter les poudres qui
étaient à l'Arsenal, on résolut de s'en em-
parer. Le 14 juillet au matin, plusieurs
députations de l'hôlel-de-ville , sous pré-
texte de parlementer avec le gouverneur,
Ainrenl examiner l'état de la place et les
forlifications, Launay montra les inten-
tions les plus pacifiques , et jura de ne
faire feu qu'en cas d'attaque : tnaisle peu-
ple avait déjà devancé les vœux du dis-
LAU
trid; tiéjà lo premier pont était abattu^
et ie second tout près de l'être. Launay
crut devoir faire tirer, comme il l'avait
annoncé. Celte décharge intimida un in-
stant le peuple , qui, revenant de sa pre-
mière frayeur, essaya de briser à coups
de haches les portes du quartier , et mit
le feu au corps-de-garde avancé de l'hôtel
du gouverneur et aux cuisines. Ce l\it
alors que l'on (ira un coup de canon à
mitraille , le seul qui ait été tiré pendant
quatre heures que dura l'attaque. En ce
moment arrivent au secours des révoltés
les gardes françaises avec des mortiers et
des canons : les assiégés , alarmés , ou
peut-être vendus en partie , veulent se
rendre; le gouverneur s'y oppose, et
voyant son autorité méconnue, veut met-
tre le feu aux poudres, et faire sauter la
forteresse et une partie du fauboui'g ;
mais il en est empêché par deux sous-
ofJiciers. Cependant le tumulle augmen-
tait dans la garnison : le gouverneur
voulait que l'on continuât la défense et
que l'on dispersât à coups de canon cette
populace qui n'auraitpas manqué de s'en-
fuir. Mais M. de Flue , commandant des
Suisses, qui conservait plus de sang-froid,
au milieu de tout ce trouble, propose de
capituler, et adresse la parole aux assié-
geans ; il demande que la garnison se re-
tire avec les honneurs de la guerre. Sur
leur refus , il propose de mettre bas les
armes, si on promet de ne pas massacrer
la troupe, et il ajoute : Nous avons vingt
milliers de poudre ; nous ferons sauter
la garnison et tout le quartier^ si vous
n'acceptez pas nos propositions, abais-
sez le 2'Oni^ s'écria-t-on, il ne vous sera
rien fait; et le nommé Elie, un des chefs
des assiégeans, ajouta : Foi d'officier,
nous l'acceptons; baissez les ponts. !>&%
ponts se baissent, et la multitude furieuse
se précipite en insensée dans la forte-
resse. On cherche d'abord le gouverneur,
que l'on trouve difficilement. Un nommé
Cholat, marchand de vin, s'empara le pre-
mier de lui, et deux gardes françaises
l'escortèrent jusqu'à l'hôtel de ville, où il
arriva criblé de coups de sabres et de
baïonnettes , et il expira enlre l'arcade
Sainl-Jcan et le pont de l'hôtel. Les têtes
du gouverneur, de M. de Losmc de Sal-
bray , major, tué à la Grève ; de M. de
Miray, aide-major ; de M. Person , lieu-
tenant des invalides , de M. de FlesseUe,
prévôt des marchands, massacrés dans la
même journée, furent promenées en
: triomphe dans les rues de Paris, dont les
LAU 520
babitans commencèrent à s'accoutumer à
ces horribles spectacles. Les corps furent
tous transportés à la morgue, excepté
celui du gouverneur, qui ne fut point re-
trouvé. La Bastille , au moment où elle
fut attaquée , avait pour sa défense qua-
tre cents biscaïens , quatorze coffrets de
boulets rames, quinze mille cartouches ;
trente-un milliers de poudre renfermés
dan» cent vingt-cinq barils; les tours
Étaient armées de quinze canons, qui
n'avaient d'autre destination que de ser-
vir aux réjouissances ; et le gouverneur
avait fait entrer douze fusils de rempart ,
portant chacun une livre et demie de
balles. Non contente de s'exercer sur les
assiégés, la fureur du peuple se tourna
contre la forteresse elle-même , qui dis-
parut en peu de jours , et dont les débris
furent dispersés dans les départemens,
avec un plan gravé incrusté dans une
pierre provenant des démolitions de la
forteresse.
* LAUNAY ( Nicolas et Robert de ),
graveurs , nés à Paris, le premier en 1739
et le second en 1754. Le premier mourut
le 2 avril 1792 ; le second en 1814. Ils ont
gravé avec succès plusieurs sujets d'his-
toire et un grand nombre de vignettes
pour les libraires. On cite parmi les ou-
vrages de Nicolas la marche de Silène,
d'après Rubens ; la partie de plaisir, d'a-
près Wœninx ; la bonne mère et Vescar-
polette. d'après Fragonard. Parmi ceux
du second , nous remarquons le malheur
imprévu, d'après Greuze ; les adieux de
la nourrice, d'après Aubry, etc.
••LAUNAY (Jeam-Baptiste), célèbre
fondeur, né à Avranches le 20 mars 1768 ,
fit ses études chez les jésuites dans l'in-
tention d'embrasser l'état ecclésiastique.
Les évcnemens de 1789 changèrent ses
projets : rappelé chez ses parens à cette
époque, il se voua avec passion à l'exer-
cice des arts mécaniques jusqu'au mo-
ment où la réquisition le plaça sous les
drapeaux. De simple soldat , il ne tarda
pas à devenir capitaine. Attaché au ma-
tériel de l'armée , il fut chargé de la di-
rection de la fonte des canons et projec-
tiles. En 1802 , Launay suivit les travaux
de la fonte du Pont-des-Arts , en 1805 ,
celle du pont d'Austerlitz , et en 1806,
celle des bronzes de la colonne de la
place Vendôme qui fut terminée le 15
août 1809. Mais abreuvé de dégoûts et
d'injustices, il cessa bientôt de concourir
aux travaux projetés par le gouverne-
ment , et ce ne fut pas lui qui éleva la
LAU
coupole de la Halle au blé de Paris,
dont le modèle lui était dû sous le dou-
ble rapport de l'invention et de l'exécu-
tion. Une maladie longue et douloureuse
l'enleva le 23 août 1827. Il a laissé en
manuscrit : Manuel du fondeur sur tous
les métaux ou Traité de toutes les opé-
rations de la fonderie , contenant tout ce
qui a rapport à la fonte et au moulage
du cuivre, à la fabrication des pompes à
incendie et des machines hydrauliques f
la manière de construire toutes sortes
d'établissemens pour fondre le cuivre et
le fer ; la fabrication des bouches à feu
et des projectiles pour l'artillerie de terre
et de mer ; la fonte des cloches, des sta-
tues, des ponts, etc.. avec des exemples
de grands travaux propres à aplanir les
difficultés du moulage et de la fonte, 2
vol. in-18, avec un grand nombre de
planches. Cet ouvrage fait un complé-
ment indispensable à l'ouvrage du célè-
bre Monge sur la fonte des canons , et il
est d'un intérêt d'autant plus réel pour
les officiers d'artillerie, qu'ils trouveront,
dans les expériences faites par M. Launay,
une discussion toujours raisonnée, et sou«
vent la solution des questions que l'on a
de tout temps agitées sur les fontes.
LAITNOY ( Matthieu de ), prêtre de la
Ferté-Alais, au diocèse de Sens, se fit pro-
testant en 1560 , et exerça le ministère à
Sedan, où il se maria. Une scène scanda-
leuse qu'il donna dans cette ville l'obligea
de fuir. Il redevint catholique , et fut
pourvu d'un canonicat à Soissons. Ayant
embrassé le parti de la ligue, il se mit à
la tête de la faction des Seize , et fut le
promoteur de la mort du président Bris-
son. Le duc de Mayenne ayant fait pour-
suivre les meurtriers de ce magistrat,
Launoy passa en Flandre , et y mourut.
On a de lui : les Motifs de sa conversion,
et une Réponse aux calomnies qu'il pré-
tendait que les ministres avaient semées
contre lui, et quelques Ecrits de contro-
verse.
LAUNOY (Jean de), né à Valdéric ,
village de Normandie, près de Yalognes,
( dans le diocèse de Coutances ) , en 1603,
prit le bonnet de docteur en 1634. Un
voyage qu'il fit à Rome augmenta son
érudition, et lui procura l'amitié et l'es-
time d'Holstenius et d'AUatius. De retour
à Paris, il se renferma dans son cabinet ,
recueillant les passages des Pères et des
auteurs sacrés et profanes sur toutes sortes
de matières. Les Conférences qu'il tint
chez lui tous les lundis furent une espèce
LAU
521
LAU'
tVécole académique , t>ù l'on trouvait à
s'instruire , et quelquefois aussi à s'éga-
rer ; et, comme elles prenaient l'air de
conventicules , où se rendaient des gens
d'une humeur dogmatisante, le roi les
interdit en 1636. On s'y occupait beaucoup
de Richer , de ses opinions, et ou cher-
chait à établir un système démocratique
et anarchique, qui , ne convenant à au-
cune société , renverserait par ses bases
l'autorité de l'Eglise catholique. Pour dé-
tourner l'attention du public, on faisait
la guerre aux légendes , en attaquant les
fables qu'elles renferment , et en même
temps plusieurs faits vrais ou probables,
que la critique de Launoy ne distinguait
pas des faits supposés. C'est ce qui le fit
surnommer Launoy le Dénicheur de
saints. Aussi le curé de Saint-Roch di-
sait : « Je lui fais toujours de profondes
«révérences, dans la crainte qu'il ne
» m'ôte mon saint Roch. » M. le président
de Lamoignon le pria un jour de ne pas
faire mal à saint Yon , patron d'un de
ses villages: « Comment lui ferais-je du
«mal, répondit le docteur, je n'ai pas
» l'honneur de le connaître. » Il avait rayé
de son calendrier sainte Catherine^ mar-
tyre ; et le jour de sa fête, il affectait de
dire une messe de requiem^ comme si
le défaut d'authenticité dans les actes
d'une sainte honorée dans l'Eglise de
Dieu pouvait conclure contre son exis-
tence ou sa sainteté. ( Voyez CATHE-
RINE. ) Soit goût, soit affectation, il vé-
cut toujours pauvrement et simplement,
ennemi du cérémonial. 11 aima mieux se
faire exclure de la Sorbonne que de sou-
scrire à la censure du docteur Arnauld ,
condamné par Rome et par l'Eglise de
France. Il fit plus, il écrivit contre le
FORMULAIRE de l'assemblée du clergé
de 1036. Il mourut en 1678 dans l'hôtel
du cardinal d'Estrées. L'abbé Grand a
donné une édition de ses ouvrages, Ge-
nève, 1731-2-5, en 5 tom. ou 10 vol. in-fol.;
il y a joint la Vie de l'auteur , et plusieurs
do ses écrits qui n'avaient poirt encore vu
le jour. Ce critique n'écrit ni avec pu-
reté ni avec élégance : son style est dur
et forcé. Il s'explique d'une manière
toute particulière, et donne des tours
singuliers à des choses très communes.
Ses citations sont fréquentes , cxtraordi-
nairement longues , et d'autant plus ac-
cablantes, qu'il ne craint pas de les ré-
péter : il faut bien s'en défier : quand un
passage le gênait , il le corrompait , et le
rapportait tel qu'il l'avait créé, avec une
impudence incroyable ; l'édileur mémo
de ses œuvres en rapporte un exemple
frappant. Dans le dessein de prouver
que l'adultère rompt le lien conjugal , il
allègue une lettre du pape Jean YIII, où
il est dit ; Nulla ralione prorsus illi con-
ceditur aliam vivente priore conducere;
et, ajustant la lettre à son système, il re-
tranche les mots nulla ralione prorsus^
et s'en tenant aux paroles illi conceditur,
il conclut d'une manière triomphante en
s'écriant: quid clarius , vel expressius ?
Et ce n'est pas la seule altération de ce
genre dans cette même lettre de Jean VIII.
( Voi/. le Journ. hist. et litt., i" novem-
bre 1787, page 338, et le huitième volume
des Recl. Belg., page 193.) La plupart
de ses raisonnemens ne sont pas plus
justes que ses citations, et il semble quel-
quefois avoir eu d'autres vues que celles
qu'il annonce. Ses principaux ouvrages
sont : 1 De varia Jristotelis fortuna in
academia Parisina {V. ARISTOTE); | De
duobus Dionysiis ; \ Regii Nwarrœ His~
toria gymnasii Parisiensis, Paris , 1677 ,
2 part., in - 4", pleine de savantes re-
cherches ; I Inquisitio in chartam immu-
nitalis Sancti-Germani-a-Pratis, ouvrage
très abondant en citations ; | De commen-
titio Lazari, Magdalenœ , Marthœ et
Maximini in Pronnciam appulsu > où il
réprouve absolument la tradition des
Provençaux, touchant l'arrivée de Lazare,
de Madeleine et de Marthe en Provence;
tradition à laquelle les boUandisles onl
paru plus favorables ; | De auctoritate
negantis argumenti. Launoy donne trop
de force à cet argument ; mais il en fai-
sait un si grand usage dans ses critiques >
qu'il ne pouvait s'empêcher de le faire
valoir. | De veteribus parisiensium basi-
licis. savant et curieux ; | Judicium de
awtore libroi-um DE IMITATIONS
CHRISTI {voyez AMORT ); [ De fréquent i
confessîonis et eucharistice usu ; \ De
cu7-a Ecclesiœ pro sanctis et sanctorum
reliquiis, ouvrage judicieux; [ De cura
Ecclesiœ pro miseris etpauperibus, plein
d'érudition; | De veteri ciborum délecta
in jejuniis, qui mérite le même éloge que
le précédent. L'auteur y montre qu'on
pourrait, absolument parlant, jeûner avec
de la viande ; il le fit au sujet du siège de
Paris. Dans ces dernières années, des
esi)rits sujjcrficiels en abusèrent pour
renverser la discipline de l'EgUse. | De
scholis celebrioribus , seu a Carolo Ma-
gnoj, seu post Carolum per occidentem
imtaiiratis liber. Taris , 1672, in-8°; ii
LAU
y a des recherches; | De sacramento
unctionis ' extremœ ; | Romance Eccle-
site traditio circa simoniam ; la matière
y esl épuisée; | De vero auclore fidei
frofessioïiis qtue Pelagio^ jàugustino et
Hieronxjmo tribut solet; \ des Lettres.
imprimées séparément, Camhridge, 1689,
in-fol. ; I plusieurs écrits sur la véritable
tradition de l'Eglise^ touchant la grâce ^
et sur divers points de critique histori-
que , etc. ; I Regia in matrimonium po-
iestas^ 1 vol. in-4" ; ouvrage où le mariage
chrétien devient une affaire purement
civile , puisque l'auteur ôte à l'Eglise le
droit d'élahlir des empéchemens diri-
mans, et l'attribue exclusivement aux
princes , contre la doctrine expresse du
concile de Trente : car tel est certaine-
ment le sens du canon qui dit anathème
à ceux qui nient que l'Eglise ait le pou-
voir de poser des empéchemens diri-
mans. Les écrivains orthodoxes de toutes
les nations en conviennent. « Jamais , dit
» le cardinal archevêque de MaUnes, dans
» sa déclaration de 1789, il ne s'est élevé
> à ce sujet aucune dispute entre les doc-
» teur» catholiques ; ils ont soutenu
» comme une vérité constante très as-
» surée , que l'Eglise avait reçu de Jé-
* sus-Christ le pouvoir d'établir des em-
» pêchemens dirimans du mariage , et ont
» placé cette doctrine parmi les points
» définis dans le concile de Trente , de
> sorte que, dans tous les pays catholiques,
» on fut saisi d'étonnement et d'indigna-
» tion, lorsque le docteur Launoy eut la té-
» mérité de contester ce pouvoir à l'Eglise.
» Cette témérité excita d'abord les récla-
> mations des écrivains contemporains, et
» attira sur l'auteur le blâme des évêques
» de sa nation et de toute la chrétienté. Son
> étrange système ne produisit aucune ré-
» volution, ni dans la théologie , ni dans la
» jurisprudence : l'ouvrage déféré à Rome
» y fut relégué parmi les livres perni-
» cieux , d'où il tomba dans l'oubli et le
» mépris. Lorsqu'on ressuscita, sur la fin
» du dix-huitième siècle , la prévention
» de Launoy, elle rencontra, dans les
p écoles chrétiennes, les mêmes opposi-
> tions qu'elle avait éprouvées au dix-
)• septième ; et l'Eglise romaine , la mère
> et la maîtresse de toutes les églises, tou-
» jours attentive à conserver le dépôt
» commun de la doctrine , dont la garde
*lui est spécialement confiée, n'a pas
* manqué de se déclarer contre cette
k vieille nouveauté, ainsi qu'il en conste
» par plusieurs rescrits du pape régnant.»
522 LAU
Indépendamment de ces observations,
on peut dire que le sentiment de Launoy
conduit à la destruction totale des mœurs
chrétiennes : car si la validité des ma-
riages dépend uniquement de l'autorité
profane , qui empêchera les chrétiens
d'épouser leurs sœurs , comme les illus-
tres Ptolémée. et avec eux toute l'Egypte ?
d'établir la communauté des femmes,
comme le voulait l'incomparable Platon ,
et comme le pratiquait le grave Caton ?
de devenir polygames par l'avis du pro-
phète arabe ? de renouveler les noces abo-
minables de Néron et Sporus....?Et qu'on
ne parle pas de la loi naturelle comme
opposée à ces infamies : la connaissons-
nous mieux , celte loi naturelle, que les
Platon , les Caton , les Socrate , etc. ? Ne
savons-nous pas que l'on fait ce que l'on
veut de la nature, ainsi que de la raison,
lorsque ces éternelles pupilles ne se trou»
vent pas sous la tutelle de la religion.' On
voit par là à quelles conséquences Lau-
noy se laissait entraîner par le goût des
paradoxes et l'amour de la singularité ,
les grands mobiles et la règle de ses opi-
nions. Cet ouvrage , proscrit par sa na-
ture même et son but au tribimal de
tout lecteur chrétien , fut condamné à
Rome par un décret du 10 décembre
1688. On peut voir sur cette matière le
traité de l'autorité des deux puissances ,
seconde édition, 1788 et 1791, tome 3,
page 158 et suivantes ; VJpologie du ma-
riage chrétien^ 1788 / Recueil des repré^
sentations belqiqucs. tome 6 , page 179
( Voyez DOMINIS, ESPENCE , GERBAIS,
Jea\, GIBERT, Jean-Pierbe. )Un autre
écrit dont on a beaucoup parlé a été
brûlé avant sa mort. Un lexicographe
soutient qu'il roulait sur la prétendue al-
tération du dogme par la scolastique.
Mais il est certain que l'ouvrage qui rem-
plit ce but absurde existe , et qu'il n'est
pas de Launoy, mais de Faydit. L'écrit
brûlé était contre le père Alexandre. Lau-
noy avait eu de vifsdémêlés avec les do-
minicains ; et c'est le canif de ces pères
(et non celui des jésuites, comme M.
Chaudon l'insinue) qu'il feignait de crain-
dre. Il le dit clairement dans sa Confira
matio dissertât, de vera plenarii apuâ
jiugusl, concilii notione , tome 2, part. 2,
pag. 141 et 169 ; mais cette crainte simulée
était une injure atroce à l'égard des uns
comme des autres religieux. Launoy av^it
dans le caractère quelque chose de sinis-
tre, qui se décelait sur sa physionomie.
Arien de Valois le peint comme une âme
LAU 523
lûche et adulatrice , comme un parasite
importun et de la plus ferme contenance.
Quotidien dit-il, ad opttmatum mensas
non invitatus accedis^ quotidie procenim
patinas lingis, et tu quidem eosamicos ac
etiam admiratores tuos arbilraris . cum
pie tique te adversentur ^ spernantque et
irrideant; improvisa venientem excipiant
inviti^ quoniatn honeste excludere^ do-
move expellere nequeunt. fforum e pro-
cerum convivatorumque tuorum numéro
quidam^ magno vir ingenio^ magnaque
virtute ^ nuper interrogatus ab amico ^
quid ita Launoium petulantis linguœ et
caîami scriptorem mensa sua dignare-
tur^ ita respondit ; Quid faciam ? hune
ego hominemainare non possem, sedmo-
lestum, effugere nonvaleo; discedenlem
e curia in extremis gradibus stans dili-
çenter observât. Adr. Val. Def. dissert,
de basilicis. On trouve le même passage
dans le* Œuvres de Launoy, t. k, part.
2, fol. 36t.
♦ LAURAGUAIS ( Louis-Léon-Féli-
ciTÉ, duc de BRANCAS , comte de ), pair
de France, né à Paris, le 3 juillet 1733,
s'est rendu célèbre par les services qu'il
a rendus au lettres et aux sciences , et par
la piquante originalité de son esprit. Il
était lils du duc de Villars-Brancas , pair
de France et lieutenant-général des ar-
mées du roi. Après avoir débuté dans la
carrière militaire, par la campagne de
4757 qu'il fit avec le grade de colonel, et
dans laquelle il se distingua par sa valeur,
il quitta les armes pour se livrer à la cul-
ture des lettres et des arts. Son nom restera
attaché à la suppression des banquettes
placées sur la scène du Théâtre-Fran-
çais, et qui étaient occupées par les pe-
tits-maîtres de la cour. Voltaire avait de-
mandé vainement qu'elles fussent enle-
vées : Lauraguais obtint cette réforme en
])ayant une somme considérable , et l'au-
teur de VEcossaise lui dédia sa pièce
à cette occasion. Ce seigneur publia iui-
mémc deux tragédies : Clytemneslre ^
4764, in-S", ciJocaste. 1781, in-8° : elles
n'ont point été représentées et il n'en est
resté que le mot de Grimm sur la se-
conde : ce qu'il y a déplus clair dans cette
piècCj, disait-il, c'est l'énigme du Sphinx.
Lauraguais s'occupa aussi de chimie et
d'anatomic, et on lui doit la découverte
de la décomposition du diamant qu'il fit
avec son ami Lavôisier. Il contribua de
sa fortune à la propagation de l'inocula-
tion, en faveur de laquelle il écrivit, fut
nommé adjoint mécanicien à l'académie
LAU
des sciences en 1758, et endevint associé
vétéran en 1771. Son goût pour les plai-
sirs et les grandes dépenses qu'il fit pour
diverses expériences dérangèrent sa for-
tune et le forcèrent de vendre en 1770 la
magnifique bibliothèque qu'il possédait :
les bibliographes en recherchent encore
le catalogue, qui est intitulé : Catalogue
d'une collection de livres choisis prove-
nant du cabinet de M.***, Paris, 1770,
in-8°. La révolution acheva la ruine du
comte de Lauraguais ; il en avait adopté
les principes avec modération, mais il en
maudit les excès, en les persifflant. Ce fut,
dit-on , pour le punir de ses sarcasmes ,
que les démagogues envoyèrent son
épouse à l'échafaud. Il fut lui-même jeté
dans les prisons de la Conciergerie , où
il fut oublié jusqu'au 9 thermidor. Il con-
serva son caractère gai et frondeur sous
la république et sous l'empire , et enga-
gea une lutte avec Geoffroy. En 1814, il
fut élevé àla pairie par Louis XVIII avec le
titre de duc de Brancas. Il n'y parutguère
que pendant la première session, où il se
prononça pour la liberté de la presse; ses
infirmités le forcèrent ensuite de rester
chez lui. Un accès de goutte qui se fixa
sur la poitrine, l'enleva après quelques
jours de maladie , le 9 octobre 1824. Le
comte de Lauraguais sentant sa fin ap-
procher, voulut recevoir les secours de
la religion, et il s'y prépara dans les sen-
timens d'une vive piété : chaque événe-
ment , chaque progrès dans les arts fu-
rent pour lui l'occasion d'une foule de
brochures plus ou moins spirituelles. Na-
turellement frondeur, on le vit toujours
dans les rangs de l'opposition. Parmi ses
différens écrits, nous citerons | Mémoires
sur l'inoculation^ 1763, in-12 ; | Du droit
des Français, 177L in-4°; | Mémoire pouf
moi, par moi Louis de Brancas, etc.
Londres, 1775, in-8°; | Lettres de L-B.
Lauraguais à M.'**, Paris, 1802, in-8° ;
I Lettres à l'abbé Geoffroy, 1802, in-8° ;
jdes Observations sur le mémoire de M.
Guettard , concernant la porcelaine ,
1766, in-12; \ un Mémoire sur la compagnie
des Indes, précédé d'un discours sur le
commerce en général, 1769, in-4°; | Becueil
de pièces historiques sur la convocation
des états-généraux et sur l'élection de
leurs députés^{7S8, in-8°; | Dissertation
sur les assemblées nationales sous les
trois races des rois de France, 1788.
in-S"; I Dissertation sur l'ostracisme,
Paris, an 6, in-8°; | Lettres aux ci-
toyens le Breton et Cuvicr^ à l'occasion de
LAU 5
T éloge (lu citoyen Darcet ^ 1802 ^ in-S" ;
I Lettres à M. l'abbé Geoffroy, rédacteur
du feuilleton du Journal des débals ,
1802, in-8°; ] Lettres des consonnes B R
à la voxjelle E, 1819 , in-8° ; | Expériences
sur les mélanf/es qui donnent l'élher. et
Mémoire sur la dissolution du souffre
dans l'esjjrit de vin. dans les Méjnoires
de l'académie des sciences, et plusieurs
Lettres eX Discours sur différens sujets.
On trouve aussi diverses pièces de lui
dans les Mémoires secrets, la Correspon-
dance de Grimm. etc. Mahul a recueilli
le titres de ses diverses productions dans
son Annuaire nécrologique de 1824. On
cite un grand nombre de bons mots du
comte de Lauraguais ; nous ne rapporte-
rons que le suivant: comme on lui deman-
dait un jour pourquoi il n'allait plus chez
une certaine dame où l'on dînait mal, et
où l'on médisait beaucoup , il répondit :
Je ne veux pasmangermon prochain sur
du pain sec.
LAURATI. Voyez LORENZETTI.
LAURE. Voyez NOVES.
LAUREA. Voyez LAURIA.
LAURENS ( André du ) , natif d'Arles ,
disciple de Louis Duret, devint professeur
de médecine à Montpellier, et premier
médecin du roi Henri IV. On a de lui ,
entre autres , un bon Traité d'anatomie.
en latin , in-fol. qui a été traduit en fran-
çais. Du Laurens mourut en 1609.
LAUREIVS ( HoivoRÉ du), frère du pré-
cédent, et avocat-général au parlement
de Provence, se distingua dans Je parti de
la ligue. Devenu veuf, il embrassa l'état
ecclésiastique, et Henri lY lui donna l'ar-
chevêché d'Embrun. Il gouverna son dio-
cèse avec sagesse , et mourut à Paris en
1612. On a de lui : | un Traité sur l'édit
de Henri III pour réunir les protestans à
l'Eglise catholique , 1588, in-8° ; | la Con-
férence de Surène. entre les députés des
états généraux et ceux du roi de Navarre,
4593, in-8°.
LAURENS ( He\ri-Josepu du ). Voy.
DULAURENS.
LAURENS. Voyez LORENS.
LAURENT ( saint ), diacre- de l'Eglise
romaine sous le pape Sixte II , adminis-
trait en celte qualité les biens de l'Eglise.
L'empereur Valérien ayant allumé le feu
de la persécution par un édit cruel, Sixte
fut mis en croix , et du haut de son gibet
il promit à Laurent , impatient de le sui-
vre, qu'il recevrait dans trois jours la
couronne du martyre. On l'arrêta bientôt
»près, et le préfet de Rome lui demanda.
^^ LAU
au nom de l'empereur, les trésors qui
lui avaient été confies. Laurent ayant ob-
tenu un délai de trois jours , pendant le-
quel il rassembla tous les pauvres chré-
tiens qu'il présenta au préfet. Voilà, lui
dit-il , les trésors de l'Eglise. Ce barbare
le lit étendre sur un gril ardent, après
l'avoir fait déchirer à coups de fouet. Le
héros chrétien, tranquille sur les flammes,
dit à son tyran : « J'ai été assez long- temps
«sur ce côté, faites-moi retourner sur
» l'autre , afin que je sois rôti sur tous le?
» deux. » Le préfet, d'autant plus furieux
que Laurent élait plus intrépide , le fit
retourner. « Mangez hardiment, dit le gé-
» néreux martyr à cet homme de sang, et
» voyez si la cliair des chrétiens est meil-
» leure rôtie que crue. » Il pria ensuite
pour ses persécuteurs, pour ses bourreaux ,
pour la ville de Rome ,et expira le 10 août
258. Sa mort fit beaucoup de chrétiens.
Plusieurs païens, touchés de sa constance,^
ne tardèrent pas d'embrasser la religion
qui la lui avait inspirée. Quelques criti-
ques pensent que les actes qui existent
sous le nom de saint Laurent sont l'ou-
vrage d'un moine du moyen âge.
LAURENT, évêque dc Novare , trans-
féré au siège de Milan, s'est illustré dans
le cours du 6' siècle , par ses vertus et
son zèle pastoral. On trouve quelques-unes
de ses Homélies, dans la Bibliotheca Pa-
trum. tom. 9. Voy. D. Cellier, XVI, 175.
LAURENT ( saint ) , moine et prêtre
de Rome, envoyé par saint Grégoire le
Grand , avec saint Augustin , pour con-
vertir les Anglais , en baptisa un grand
nombre. Il succéda à saint Augustin dan»
l'archevêché de Cantorbéry, et termina
ses travaux apostoliques en 619. — Il ne
faut pas le confondre avecsaint LAURENT
issu du sang royal d'Irlande , qui fui abbé
de Glindale, puis archevêque de Dublin.
Il mourut dans la ville d'Eu en Norman*
die, l'an 1181.
LAURENT de LIÈGE, religieux béné>
dictin du monastère de Saint-Laurent ,
près de Liège , d'où il lire son nom , passa
de là dans le monastère de Saint-Vannes
et composa une Chronique des évêques de
Verdun et des abbés de Saint- Vannes , de-
puis l'an 1040 jusqu'en iiliU. , insérée dans
le 12* tom. du Spicilége de dom d'Achery
et dans le 1"" tom. de V Histoire de Lot-
raine de dom Calmet. .
LAURENT de la RÉSURRECTION ( la
frère), convers de l'ordre des carmes-dé-
chaussés, né à Hérimini en Lorraine ^
mourut à Paris en 1691 , à 80 ans. Fcné-
LAU
523
LAU
Ion, archevêque de Cambrai, qui avait
été fort lié avec lui , le peint comme un
homme gai dans ses plus grandes mala-
dies , et eu tout et partout un homme de
Dieu. On a publié sa Vie à Châlons en 1694
sous le titre de Mœurs et Entretiens du
frère Laurent.
LAUREI^iT de BRINDES ( le Bienheu-
reux) , supérieur général de l'ordre des
capucins, né à Brindes dans le royaume
de Naples , en 1559 , se rendit illustre par
sa piété , sa mortification , son zèle et ses
connaissances. Il jouit de la plus grande
considération auprès de l'empereur Ro-
dolphe II, de Philippe III, roi d'Espagne,
de l'électeur de Bavière , et de tous les
princes catholiques ; il confondit les héré-
tiques dans plusieurs occasions, et rendit
à l'Eglise les plus grands services. Il avait
été nommé nonce apostolique et résident
du roi d'Espagne à la cour de Bavière ;
appelé successivement à Milan, à Gènes,
à Venise et à Rome, il parvint à main-
tenir la paix entre des puissances que leur
position rendait rivales. Il mourut à Lis-
bonne en I619.Un auteur connu en a tracé
le portrait suivant : a Sous le pauvre et
» austère habit de capucin , sous les de-
» hors et dans l'impression de l'humilité
» chrétienne profondément sentie , le père
» Laurent de Brindes avait un grand
»cœur, un esprit vaste, un jugement
»sùr, une sagesse agissante , et ces ver-
» tus fécondes qui en engendrent d'autres
» et répandent au loin ce que la vivacité
» de la foi et du zèle ne saurait circon-
» scrire dans les bornes d'un espace quel-
» conque. Les pontifes et les rois l'ont
» écoulé avec respect ; il fut le père et le
» protecteur des peuples , la terreur des
» hérétiques , et le grand défenseur de la
» foi dans la Germanie ; en un mot , c'était
» un saint et un grand homme , attributs
6 qui se réunissent si aisément et si na-
> turellement quand les circonstances fa-
» vorisent ou provoquent le développe-
j> ment des qualités du vrai chrétien. » Ses
ouvrages, qu'il laissa manuscrits, consis-
tent en des SeTTnons et des Traités de
Controverse. Pie VI l'a mis au nombre
des bienheureux ( 1783). Sa Fie, impri-
mée à Paris , 1787, in-12, est diffuse, mais
édifiante et instructive. On trouve à la
fin le Catalogue de ses ouvrages, qu'on
conserve en manuscrit au couvent des
capucins de Venise,
LAURENT ( Jacques), fils d'un tréso-
rier de l'extraordinaire des guerres en
France, porta long-temps Thabit ecclé-
7.
siaslique, qu'il quitta dans un âgeassex
avancé. Il fut secrétaire du duc de Riche-
lieu , père du maréchal vainqueur de Ma-
hon. Laurent cultivait la poésie : mais il
est moins connu par ses vers, qui sont
très médiocres, que par la traduction de
\ Histoire de l'empire Ottoman de Sagredo,
en 6 vol. in-12 , Paris , 1724. Le traduc-
teur, après avoir poussé sa carrière jus-
qu'à 85 ans , fut brûlé dans l'incendie de
sa maison , arrivé le 6 mars 1726.
• LAIIRE]\T( Pierre ), graveur, naquit
à Marseille en 1759, fut 5 mois élève de
Balechou; mais il travailla ensuite de pré-
férence d'après Berghem, Lauterbourg
et le Poussin. Il coHçut le premier l'idée
de publier la gravure des principaux chefs-
d'oeuvres que contenait la galerie du
musée ; travail qu'il fut obligé d'abandon-
ner , après y avoir consacré son temps
et une partie de sa fortune : la première
série fut cependant publiée de son vivant.
Cette entreprise a été continuée par son
fils M. Henri Laurent avec un succès mé-
rité. MM. Hubert et Rost donnent la no-
menclature de dix-huit pièces de ce tra-
vail , parmi lesquelles on remarque sur-
tout la mo7-t du chevalier d'Assas^ d'a-
près Casanova. Mais le travail qui fait le
plus d'honneur à Laurent, c'est la gravure
du Déluge d'après le Poussin , qu'il com-
posa dans toute la maturité de l'âge et du
talent , et qui vaut seule beaucoup d'ou-
vrages. L'exécution de Laurent est pleine
de feu et de rapidité; il a surtout réussi
dans le genre des paysage? etdes animaux.
Cet artiste est mort k Paris , le 50 juir»
1809, des suites d'une attaque d'apo-
plexie.
LAURENT JUSTINIEN. Voyez JU&-
TINIANI.
LAURENTIA. Voyez ROMULUS.
LAURENT d'UPSAL. Voyez GOTH.
LAURENT de MÉDICIS Voyez MÉ^
DICIS.
LAURENTIEN ( Laurent), professeur
en médecine à Florence et à Pise dans le
15' siècle, traduisit en latin le Traité de
Galien surles fièvres . commenta les Pro"
nostica d'Hippocrale , Lyon , 1550 , in-12..
Ses bonnes qualités étaient obscurcies par
une noire mélancolie , qui le rendait in-
supportable à lui-même. Il finit par se
précipiter dans un puits.
LAURÈS ( Antoine , chevalier de ) ,
poète languedocien, né à Gignac dans le
diocèse de Montpellier, d'une bonne fa-
mille, s'appliqua avec succès à la littéra-
ture, et surtout à la poésie. Il remporta
28
LAU 526
jjualre fois le prix au jeux floraux et fut
quatre fois aussi couronné à l'académie
française. Il est connu par sa traduction
ou plutôt son imitation en vers de la Phar-
sale de Lucain , 1 vol. in-S" , 1775. On
trouve dans le tom. 3 de l'esprit des Jour-
naux ( mai 1779 ) une lettre d'Imbert sur
ce poète. Laurès mourut à Paris en 1778.
LAURI ou plutôt LAUR ( Philippe ),
peintre, né à Rome en 1623, mort dans
cette ville en 1694 , a excellé à peindre en
petit des sujets de Métamorphoses^ des
Bacchanales et des morceaux &' histoire.
Sa touche est légère, ses compositions gra-
cieuses , son dessin correct; mais son co-
loris, rarement dans le ton convenable,
est tantôt faible et tantôt outré. Il a fait
quelques paysages où l'on remarque beau-
coup de fraîcheur et de goût. Le musée
du Louvre possède de cet artiste un ta-
bleau représentant saint François d'As-
sise malade^ écoutant avec extase un
chœur d'esprits célestes.
LAIJIIIA ( François-Laurent de ), ti-
rait ce nom de la ville de Lauria, dans le
royaume de Naples, où il était né, car
son nom de famille était Brancati. Il se
fit cordelier, et, de dignité en dignité, il
parvint à la pourpre romaine en 1G87 ,
sous Innocent XI. Ce cardinal mourut à
Rome, en 1693, à 82 ans, laissant plu-
sieurs ouvrages de théologie , dont celui
qui est intitulé De prœdestinatione etre-
probationej. in-i°, Rome, 1688, Rouen,
d70o , a eu de la célébrité parles critiques
et les éloges qu'on en a faits.
LAURIÈKE ( Eusèbe-Jacob de ), avocat
au parlement de Paris, y naquit en lCo9.
Il suivit le barreau pendant quelque
temps ; mais son goût pour les travaux du
cabinet l'obligea de l'abandonner. Il fouilla
toutes les parties de la jurisprudence an-
cienne et moderne ; il débrouilla le chaos
de l'ancienne procédure et porta la lu-
mière dans la nuit obscure des Coutumes
particulières de diverses provinces de la
France, et, par des recherches épineuses
il se rendit l'oracle de la jurisprudence.
Les savansles plus dislinguésde son temps
se firent un honneur et un plaisir d'être
liés aveclui. Laurière fut associé aux étu-
des du jeune d'Aguesseau, depuis chance-
lier de France. Cet habile homme mourut
à Paris, en 1728 , à 69 ans. On a de lui :
( De l'origine du droit d'amortissements
1692, in-12; l'auteur y traite aussi du
Droit des francs-fiefs ^ qui est fondé sur
les mêmes principes ; ] Texte des Coutu-
xnes de la prévôté de Paris , réimprimé
LAU
avec beaucoup de notes nouvelles, 1777y
Paris, 3 vol. in-12; | Bibliothèque des
coutumes s in-/».", avec Berroyer. Cet ou-
vrage , qui n'est proprement que le plaa
d'un édifice immense , renferme la Pré-
face d'un nouveau Coutumier général , et
une Dissertation profonde sur l'origine
du droit français ; | Glossaire du droit
français^ in-i", 17 O/»-. Ce Dictionnaire do
tous les vieux mois des ordonnances des
rois de France et des autres titres anciens'
avait été donné d'abord par Ragueau,
Laurière le mit dans un meilleur ordre :
I Institutes coutumières de Loisel , avec
de savantes notes, 2 vol. in-!2 , Paris;
le l'='"et 2* tom. du Recueil curieux et im
mense des Ordonnances des rois de Fran^
ce, qui forme aujourdlmi 11 vol. in-fol.
( Voyez SECOUSSE ) ; | Table chronologi-
que des ordonnances s in-i", avec deux de
ses confrères; | une édition des Ordon-
nances compilées par Néron et Girard,
1720, 2 vol. in-fol.
* LAURISTOA ( Aiexandre-Jacques-
Bernard LAW, marquis de ), maréchal et
pair de France , né à Pondichéry, le 1"'
février 1768, était fils d'un gouverneur-gé-
néral des établissemens français au-delà
du cap de Bonne-Espérance , et petit-fils
du fameux Law, dont le système finan-
cier bouleversa tant de fortunes sous la
régence ( Voyez LAW ). IL entra dans le
corps royal d'artillerie en 1784, après avoir
fait toutes ses études en France , et était
déjà colonel d'un régiment d'artille-
rie légère en 1793. Bonaparte , dont il
avait fixé l'attention , en fit un de ses
aides-de-camp à l'époque du consulat, et
en 1800, il l'éleva au grade de général do
brigade, et de commandant en chef de
l'école d'artillerie de Lafère ; en même
temps, il le chargea de la défense de Belle-
Ile en mer. En 1801 , après avoir rempli
une mission diplomatique à Copenhague,
dont il seconda les efforts contre les Anglais
qui la bombardaient , Laurislon fut en-
voyé à Londres pour y porter la ratifica-
tion du traité de paix conclu à Amiens ,.
entre la France et l'Angleterre. Il fui
accueilli à Londres avec des transports de
joie et le peuple détela même les chevau»
de sa voiture pour la traîner. Une discuS'
sion qu'il eut avec Caulaincourt au sujet
de l'arrestation du duc d'Enghien , contre
laquelle il s'exprimait , fut la cause d'une
disgrâce momentanée. On lui donna pour
l'éloigner le commandement d'un dé^ot
d'artillerie à Plaisance. Peu de temps aprè»
Laurislon fut nommé général de divisioa
LAU
et commandant en chef de l'armée eni-
larquée à Toulon sur l'escadre de l'amiral
de Villeneuve , pour se rendre sur les
côtes d'Espagne. Après la bataille de Tra-
falyar , à laquelle il n'assista point , ayant
reçu auparavant l'ordre de rejoindre la
grande armée d'Allemagne , il fut nommé
commissaire impérial pour prendre pos-
session de Venise , de la Dalmalie et des
Bouches du Cattaro. Cette dernière opé-
xation ayant rencontré des obstacles, Lau-
riston fut chargé de s'emparer de Ragusc
( 180G ). A peine y fut- il entré, qu'il fut
attaque par 1500 Russes et une foule de
Monténégrins. Quoique ses troupes fussent
bien inférieures en nombre à celles de
l'ennemi, il leur résista long-temps avec
vigueur , et fut enfin secouru par le gé-
néral Molilor. Bonaparte, qui connaissait
toute l'importance de ce poste, ordonna
à Lauriston d'y rester pendant la cam-
pagne de Prusse. 11 concourut à l'attaque
de Casiel-Nuovo , et , dans cette expédi-
tion difficile , il se plaça au rang des plus
habiles généraux de l'armée française. Peu
de temps après il fut nommé au gouver-
nement de Venise. En 1808 il accompagna
Napoléon à la grande conférence d'Erfurlh
et dans les états de la confédération du
Rhin ; il le suivit en Espagne, et contribua
à la prise do aiadrid. En 1809 il lit partie
de l'armée d'Italie, qu'il suivit en Hongrie,
et il.se signala encore dans plusieurs affai-
res, à celle de Landshutt, à la bataille d'Ess-
liug , à la bataille do Raab et au siège de
celte ville dont il s'empara. Bonaparte le
rappela pour lui confier le commande-
ment de l'artillerie de la garde, à la tête
de laquelle il combattit à Wagram. Lau-
riston fut nommé la même année comte
de l'empire. Après cette campagne, il fut
chargé d'une mission en Autriche , et six
mois après il suivit l'archiduehesse Marie-
Louise, qui venait s'unir à Napoléon.
Lauriston fut nommé ambassadeur en
Russie, en février 1811, en remplacement
de Caulaincomt ; il quitta ce poste l'année
fiuivante et rejoignit la grande armée à
Smolensk. Après le désastre de Moscow,
il conclut un armistice avec le général
Koutusof, commanda l'arrière-garde pen-
dant la retraite, et alla organiser àMag-
debourg le 5*^ corps d'armée. Durant la
campagne de 1813, il s'empara de Lei-
psick, battit les Russes et les Prussiens
réunis à "Wessig , commanda la gauche de
l'armée à la bataille de Bautzcn , et s'em-
para de Bresla\v. Chargé ensuite du cmn-
inandemenl provisoire des 5* et 11' corps
527 LAtr
d'armée , il battit le général Blucher sur
les hauteurs de Goldberg, et se distingua
à Dresde et à Leipsick. Dans celte der-
nière affaire qui mit Leipsick au pouvoir
des ennemis ( 19 octobre 1813 ) , il se re-
tirait par le pont de Lindenau ; le trou-
vant rompu, il s'élança à cheval dans la
rivière ; mais il fut fait prisonnier sur
l'autre bord. Conduit à Berlin, il ne ren-
tra en France qu'après la restauration.
Louis XVIII l'accueillit avec distinction,
le décora de la croix de St-Louis et du
grand cordon de la légion d'honneur, et
après la mort du général comte de Nan-
souty, il le nomma capitaine-lieutenant
des mousquelaires-gris (26 février 1815 )
Au 20 mars , Lauriston accompagna le
roi jusqu'à Béthune , et se relira ensuite
dans sa terre de Bichemont où il ne fut
point inquiété. Louis XVIII, à son retour,
réleva à la dignité de pair de France, et
le chargea du commandement de la pre-
mière division de la garde royale. Le 3 mai
1816, Lauriston fut créé commandant de
l'ordre du Saint-Esprit. En 1820, il devint
ministre de la maison du roi , quitta ce
portefeuille en 1823 pour recevoir le bâton
de maréchal, et fit partie de l'armée d'Es-
pagne. Ce général est mort d'une attaque
d'apoplexie, le 11 juin 1828. Il avait été
nommé, en 1827, grand-croix de la lé-
gion-d'honneur.
LAURO ( ViKCENT ), né à Tropea en
Calabre, cultiva de bonne heure la m.é-
decine, et joignit à cette science une
grande capacité pour les affaires. Pie V ,
qui connaissait tout le mérite de ce sa-
vant , lui conféra l'évêché de Mondovi en
Piémont. Sous le pontificat de Grégoire
XIII , Lauro fut envoyé nonce en Pologne.
Il remplit cette nonciature, successive-
ment auprès de Sigismond Auguste , de
Henri de Valois, duc d'Anjou, et d'Etienne
Battori. A sa persuasion , Jean III, roi de
Suède , reçut à sa cour le jésuite Antoine
Possevin, qui ramena Sigismond, fils de
ce prince , à la religion catholique. Gré-
goire XIII, en reconnaissance des services
de Lauro, le décora de la pourpre romaine
en 1583. Dans cinq conclaves consécutifs,
Lauro eut un grand nombre de voix pour
être placé sur la chaire de saint Pierre.
Il mourut à l'âge de 70 ans, en 1592 , avec
la gloire de n'avoir dû son élévation qu'à
son mérite.
LAURO ( Jean-Baptiste ) , né à Pé-
rouse en 1381, devint camérier d'Urbain
VIII, chanoine de Sainte-Marie, secré-
taire du consistoire , etc. On a de lui :
LAU
328
LAU
I Poemata. 1623, in-l2 ; I Epistolœ. I6-2i,
in-S" ; i lin Eloge abrégé des savcuis qui
vivaient à Rome de son temps, Rome, i625,
in-S". Il mourut en 1629 , âgé de 48 ans.
* LALTH ( TeosAS ) , professeur d'a-
natomie et de physiologie à la facuké de
Strasbourg, membre de la légion-d'hon-
neur et de plusieurs sociétés savantes , né
dans cette ville le 19 août 1738 , était fils
de Jean-Georges Lauth, médecin et ac-
coucheur distingué. Thomas Lauth était
déjà avant la révolution professeur d'ana-
tomie , de physiologie et de chirurgie à
l'ancienne université de Strasbourg. A de
vastes connaissances il réunissait une pro-
fonde érudition, et joignait au plus grand
«èle pour les sciences et renseignement
une humanité qui lui mérita d'être sincè-
rement regretté. Il est mort à la suite dun
voyage qu'il venait de faire en Allemagne
à Bergzabern , le 16 septembre 1826. Ses
ouvrages principaux sont relatifs à la mé-
decine : I Des élémens de myologie et de
iyndesmologie , 1798, 2 vol. in-8°; | plu-
sieurs dissertations sur le scorbut, lesam-
putahons à lambeaux, sur l'urine, etc.;
] un premier volume de l'Histoire de Va-
natomie, qui va jusqu'à Harvey et que
son fils Em.-^Vlex- Lauth se propose de
continuer, 1815, 1 vol. in-8° ; 1 la rie
'de Jean Hermann, Strasbourg, 1802,
în-8° ; I Nosologia chirurgica, Strasbourg,
1788, ia-8*; I de l'Esprit de l'instruction
publique, 1816, in-8*', dont l'auteur fit
hommage à la chambre des députés en
1816 , in-8* ; j plusieurs Dissertations en
latin et quelques autres ouvrages; j Scrip-
torum latinonun de anevrismatibus col-
lectio, 1783, in-4**; 1 Uberden Einfluss des
tnondes aufdie fieber, von Baflour. A. D.
E. miteiner Vorrede von Th. Lauth, 1786 ;
J P^om ausziehen fremder Kœrper aus
Sekusswwiden von Percy, A. D.Fr. Uber-
seztung mit^nmerkungen herausgegeben
von Th, Lauth, 1789 ; | Fom IVitterangs
Zustand, dem scharlach friefelund detn
bosen Hais, M. V. , 1800.
LALTREC. Voyez FOIX [ Ocdet de ).
LAUZUX ( Aîrro.vix-î<oMPAR de CAU-
MOXr, duc de), né vers 1652, sut s'atti-
rer les bonnes grâces de Louis XIV. On
peut voir , sur le caractère de ce favori et
l'histoire de sa vie , des particularités re-
marquables dans les Mémoires du duc de
Saint-Simon : le résultat ue donne pas de
lui une idée favorable. Mais il se corrigea
beaucoup dans les dernières années de sa
vie, fini» par une mort très édifiante au
couvent des Petit5-Augu5tins à Paris , en
1723, âgé de 91 ans. 11 ne laissa point de
postérité de son mariage avec la fiUe du
maréchal de Lorges , qu'il avait épousée
après la mort de mademoiselle de Mont-
pensier. La charge de grand-maître de
l'artillerie étant devenue vacante, en 1669,
par la démission du duc de Mazarin , le
roi la promit à J.auzun; mais Louvois sut
persuader au monarque de ne pas la lui
accorder. Lauzim eut l'audace de sommer
Louis XIV de tenir sa promesse : il osa
même briser son épée en sa présence , en
disant « qu'il ne servirait jamais un prince
» qui manquait à sa parole. » Le roi , jus-
tement irrité, leva sa canne; mais il la
jela par la fenêtre, en s'écriant: ■ Ja'uraii
» trop de regret, si j'osab frapper un gentii-
B homme.» Lauzun fut mis à la Bastille et
ce ne fut qu'après plusieurs mois de né-
gociations qu'il consentit à accepter, en
échange de la charge qu'il convoitait , le
grade de capitaine des gardes. Il rentra tel-
menten faveur, qu'en 1670, le roi autorisa
son mariage avec mademoiselle deMont-
pensier , petite-fille de Henri IV. Lauzun
prétendit donner à cette union un grand
éclat ; mais pendant les délais nécessaires
aux préparatifs qu'il fit à ce sujet , ma-
dame de Montespan (qui aimait Lauzun),
et les princes du sang , obtinrent du roi
qu'il révoquât son consentement. Anque-
til cependant assure que le mariage eut
lieu secrètement , et qu'après la mort de
Mademoiselle , Lauzun en porta le deuil.
Quoi qu'il en soit , Louis XIV nomma son
favori maréchal de France. Depuis cette
époque , madame de Montespan étant de-
venue l'objet des injures de Lauzun ,
s'unit à Louvois, et tous les deux parvin-
rent à le faire disgracier. Il fut arrêté le
23 novembre 1671 , et enfermé pendant
plusieurs années dans un cachot du châ-
teau de Pijnerol : il y trouva le surinten-
dant Fouquet , qui y était depuis 1663.
Lauzun tenta inutilement deux fois de
s'évader; enfin, on lui permit de passer
en Angleterre. Lorsde la révolution contre
Jacques II, ce monarque confia à Lauzun
la reine et le prince de Galles pour les
amener en France , où Louis XIV , par
une lettre écrite de sa main , lui permit
de rentrer. Il fut admis à la cour, mais il
ne jouit plus de la bienveillance du mo-
narque. Jacques II le décora de Tordre de
la Jarretière , et obtint pour lui le titre
de duc en 1692. Mademoiselle de Mont-
pcDsier lui avait fait don de plusieurs
fiefs , et entre autres du duché de Saint-
Fargeau et de la baronie de Thiers.
LAV 5
LAVAL ( Gilles de;, seigneur de H^u,
maréchal de France , d'une maison illus-
;rede Bretagne, féconde en hommes 11-
listres, se ?iignala par son courage sous
Charles VI et sous Cîiarles VII. Il contri-
bua beaucoup à chasser les Anglais de la
France. Les services qu'il rendit à sa pâ-
li ie lauraient iiamortâlisé, s'il ne les avait
pas ternis par des meurtres, des impiétés
tl des débauches effrénées. Ayant ajouté
à ses autres crimes celui de félonie et de
trahison envers le duc de Bretagne , il fut
condamné à être brûlé vif dans la prairie
de Nantes en 14i0. Le duc , témoin de
cette exécution , permit q\i'on létranglât
iiuparavant, et qu'on ensevelit son corps.
Le duc de Laval était d'une prodigalité
extrême. Il consuma en folles dépenses
deux cent mille écus d'or comptant , dont
il hérita à 20 ans , et plus de 50,000 liv.
de rente, qui en valadenl dans ce temps-
là 500,000 de celui-ci. Quelque part qu'il
Lillàt, il avait à sa suite un sérail , des co-
n^édiens. une musique , des instrumens.
des devins, des magiciens, une compagnie
de cuisiniers , des meutes de chiens de
toute espèce, et plus de 200 chevaux de
riiain. Méieray dit qu'il entretenait des
sorciers et des enchanteurs pour trouver
des trésors: et corrompait de jeunes gar-
çons et de jeurtes filles quil tuait après,
pour en avoir le sang , afin de faire ses
cliurmes. De telles abominations seraient
iiicrovalîes si on ne connaissait pard'au-
ti t.- L xe I le? de quel excès de corruption
Li de sctl' ialesse le cœur humain est ca-
pable. î^'avons-nous pas vu dans le 18' siè-
cle une dame hongroise immoler plus de
rlx cents lilles à la cliimérique idée de
^'embellir par leur sang, et se nourrir
enfin de leur cliair? On peut voir cette
histoire incontestable dans lélégant ou-
vrage du père Turoczi, Exuigaria cum
suis regionibus, p. 189. T'oyez TUROCZI
(Laoisl4s).
L.W'AL ( A\DRÉ de), seigneur de Lo-
héac et de Ret» , deuxième fils de Jean
de MonlTurt , seigneur de Kergorlay, et
d'Anne de Laval, dont il prit le nom et les
armes, rendit des services signalés au roi
Charles VII, qui le fit amiral , puis maré-
chal de France. Il fut suspendu de sa
charge au commencement du »*gne de
Louis XI ; mais ce prùicc le rétablit peu
de temps aprè-S, et lui donna le collier de
l'ordre de Saint-Michel en 1469. Il mourut
en ii86 , à 75 ans, sans laisser de posté-
rité, et plus riche en réputation qu'en
biens. Lnvoye en 1455 contre JcanV,
29 LAV
comte d'Armagnac, qui était excommunié
pour avoir épousé publiquement sa pro-
pre sœur, il l'avait poussé si vivement,
qu'en une seule campagne il l'eut dé*
pouillé de ses états.
LAVAL ( Urb%ix de), marquis de Sablé
et de Bois-Dauphin , maréchal de France
et gouverneur d'Anjou , se signala en di-
vers sièges et combats. Il suivit le parti
de la b'gue , fut blessé et fait prisonnier
à la bataille d'Ivry en 1590. Il fit ensuite
son accommodement avec Henri IV. Son
crédit augmenta sous le règne suivant.
Lorsque le prince de Condé et beaucoup
d'autres méconlens se furent unis . pour
empêcher le mariage de Louis XIII avec
l'infante d'Espagne , la reine Marie de
Médicis , et le marquis d'Ancre son con-
fident, firent commander à Laval l'armée
qu'ils mirent sur pied pour combattre
celle des mutins : mais il ne répondit pas
à lopinioa qu'on avait de ses tâlens. A la
fin de ses jours, il se relira dans mie terre,
où il mourut tranquillement en 1629.
LAVAL ( AxTOixE de), sieur du Belair,
maître des eaux et foréls du Bourl>onnaig,
puis capilaine des châteaux de Beauma-
noir-les-Moulins , était savant dans les
langues, l'hbtoire et la théologie. Il a
laissé un grand nombre d'ouvrages. Le
plus considérable est : Desseins de pro-
fessions nobles et publiques j. contenant
entre autres V Histoire de la maison de
Bourbon, Paris, 1603, in-4°. On peut
consulter sur ces ouvrages la bibliothè-
que de Bourgogne. Il mourut en 1631 , à
80 ans.
LAVAL-MO\TMOREXCY ( François
de), premier évéque de Québec, était fib
de Hugues de Laval , seigneur de Monti-
gni. Il fut d'abord archidiacre d'Evreux,
et ensuite nommé au siège nouvellement
érigé à Québec, qu'il alla remplir en 1675.
Il fonda un séminaire , s'y fit estimer de
tout le monde par sa vertu et par son
éminente piété, et y mourut en 1708. à 80
ans. après s'être démis de son évéché.
Labbé de la Tour . doyen du chapitre de
Montauhan, a écrit sa T'ie , in-12.
LAVARDIX. Vouez BEAUMA>Om,
MASCARON et HILDEBERT.
LAVATER (Locis), controversiste pro-
testant, né à Kybourg , dans le canton de
Zurich, en 1327, mort clianoine et pasteur
de cette dernière ville , en 1586 , a laissé
une Histoire sacramentaire , des Com^
mentaires et des Homélies. Ces divers
ouvrages sont lus par les gens de son parti.
Mais son curieux traité De spectrii le~
28.
LAV
350
LAV
wnuribus. et magnis atque insolilis frago-
ribus et prœsagitionibus quce obitum ho-
minum ^ clades , mutationesque irnperio-
rum prœcedunt, Zurich, 1370, in-12, Ge-
nève, IbSO , in-8°, et Leyde , 1687, in-12 ,
•est recherché de tout le monde. Il a été
Iraduit en français en 1571, in-8°.
• LAVATER ( Jeaîv-Gaspard), célèbre
physîognomoniste et ecclésiastique pro-
testant, naquit à Zurich le 15 novembre
4741 ; tout en étudiant la théologie , son
imagination ardente , encore enflammée
par la lecture du poème de Klopstock , et
des ouvrages philosophiques de Jean-
Jacques Rousseau, se portait sur d'autres
objets : son premier ouvrage qu'il publia
avant d'avoir terminé ses cours , fut un
libelle virulent contre un bailli qui s'était
rendu coupable de quelques abus de pou-
voir. Afin d'apaiser l'effervescence de son
imagination, ses parens crurent devoir le
faire voyager en Allemagne. Lavaler se
rendit à Berlin en 1763 avec Hess et
Fucssli, depuis peintre célèbre, et se lia
avec le vertueux Spalding auquel il avait
«té recommandé , et chez lequel il de-
meura long-temps. De retour dans sa pa-
trie, il fut nommé diacre en 1769, ît quel-
ques années après pasteur de l'église pro-
lestante de Saint-Pierre à Zurich. Il se
livra avec succès à la prédication ; et prit
part à des discussions théologiques qu'il
soutint d'abord avec modération , mais
qu'il poussa dans la suite jusqu'à l'into-
lérance. Quoiqu'il fût au reste d'une
grande douceur de caractère, il fit exiler
quelques-uns de ses compatriotes , entre
autres M. Meister, le plus spirituel de ses
panégyristes, qui se vengea plus tard
en comblant d'éloges l'ennemi dont il ne
regardait point la faute comme celle du
cœur. En 1798, lorsqu'eut lieu l'invasion
des Français en Suisse, il crut que celte
époque allait voir réformer un grand
nombre d'abus , et que notre Directoire
n'était mudans celte circonstance que par
des sentimcns généreux : mais une triste
expérience lui ayant appris que le bien-
être de la nation helvétique était loin
d'être le mobile qui faisait agir le gou-
vernement français , il ne craignît pas
d'écrire au représentant Rewbell, une
lettre pleine de patriotisme et de dignité,
dans laquelle il protesta avec force contre
les mesures vexatoires dont les prétendus
amis de la liberté accablaient la patrie de
Guillaume-Tell. L'année suivante, lors
-de la reprise de Zurich par les Français,
SI eut une légère dispute avec un soldat
logé chez lui, qui lui lira dans le bas ven-
tre un coup de fusil , et lui fit une bles-
sure dont il mourut après 43 mois de
douleurs aiguiis ( en 1801 ) , sans avoir
voulu que l'auteur de cet assassinat fût
recherché (i). Lavaler a composé plu-
sieurs écrits. Deux ouvrages en plusieurs
volurnes intitulés, l'un Ponce-Pilate et
l'autre Bibliothèque manuelle^ renfer-
ment le développement de ses opinions
particulières en théologie et en morale,
dont plusieurs ont paru fort minutieuses,
d'autres fort paradoxales, et sur lesquelles
les adversaires de l'auteur n'ont cessé
de l'attaquer avec l'arme du ridicule. Ses
compositions en prose réunissent, dit uti
biographe, l'ascétisme de M"* Guyon,
l'esprit paradoxal de J. J. Rousseau , le
style dvux de Fénclon et l'illuminisme de
Boehm. Lavaler a aussi composé des
vers d'une philosophie douce et conso-
lante , mais négligés pour le mécanisme
et diffus pour le style : la nouvelle Mes-
siade^ Joseph d'Arimathie , le Cœur hu-
main^ esquisses où l'on trouve de nom-
breuses beautés , mais qui sont imparfai-
tes ; et une foule de drames religieux et de
poésies détachées qui offrent une facilité
rare , mais dont la facture est peu soi-
gnée. Ses Vues sur l'éternité^ ou Considé-
rations sur l'état de la vie future (1768) ,
offrent le plan et pour ainsi dire le com-
mentaire d'un poème qu'il avait projeté.
L'auteur y a déposé le germe de concep-
tions très élevées et très poétiques. On
distingue encore ses Chansons helvéti-
ques ( 1767 ), hymnes populaires qui sont
répétées maintenant par les paysans et
par les pâtres de Morat, de Lucerne et de
l'Oberland. Mais l'ouvrage qui a fait sa
réputation en Europe est le suivant : | JSS'
sais phrjsiognomoniques . Leipsick, 1772,2
vol. in-8** ; ouvrage reproduit et augmenté
sous le titre de : Fragmens physiogno-
moniques pour propager les connais^
sances des hommes et la bienveillance en-
vers leurs semblables^ ib.jkvo]., in-ii'*, de
1775 à 1788. Il en parut un Abrégé^ pu-
blié par Michel Amubrusler, Zurich, 1785
et 178/i , 2 vol. in-8''. Lavaler ne se borna
pas à son ouvrage en allemand; il en fit
publier une édition en français, d'après
un nouveau manuscrit, avec des dessins
(i) Od lit dan» la Biographie dcf Contrmporalm que
tel assajtinat fut un acte de vengeance parliculiirc
d'un compatriote de Lavaler, et elle regirde comme
une calomnie , l'imputation qu'on en a faite à uo ioU
dat franf.iis.
LAV
331
LAV
plus soignés et plus nombzxux , imprimés
sous ce titre : De la j)hysiognonionie ,
ou l'Art de connaître les hommes et de
les faire aimer ^ la Haye, 1783, 5 vol.
in-4°. Les éditions les plus estimées sont
celles publiées par Prudhomme, à Paris ,
1806, 10 vol. in-r, et 1807, 10 vol. in-8°,
avec ce titre : L'art de connaître les
hommes par la physionomie , par Gas-
pard Lavater, précédé d'une notice histo-
rique sur l'auteur, et avec les opinions
de La Chambre , de Porta, de Cooper,
de Gall , sur la physionomie, etc. M. Mo-
reau y a ajouté une histoire anatomique
de la face , et plusieurs articles nouveaux
sur les caractères des passions, des ma-
ladies, etc.; le tout orné de 600 gravures.
Lavater s'était proposé de créer une
science aussi diflicile qu'extraordinaire ,
qui avait attiré son attention dès sa jeu-
nesse , mais dont il avait été distrait par
<l'autres études. Cette science consiste à
connaître par les traits du visage et la
physionomie , non-seulement les inclina-
tions et le caractère d'une personne ; mais
encore à deviner son heureux ou funeste
Avenir. Zopire , Hippocrate et Aristote ,
parmi les Grecs, et parmi les modernes ,
Porta, Buffon. Lebrun, La Chambre,
avaient déjà fait sur la physiognomonie
iXQS recherches et des observations. Mais
c'est Lavater qui le premier a cherché à
y fixer des règles et des principes. Il com-
mença par observer la physionomie des
animaux en la rapportant à l'instinct par-
ticulier qui distingue chacune de leurs
espèces. Il tourna ensuite ses observa-
tions sur les images sculptées des grands
hommes et des grands criminels. Il crut
voir le talent et la malignité peinis sur la
physionomie de Voltaire , qui tenait à la
foLs de l'aigle et du singe ; dans celles de
Néron et de Caligula, il remarqua l'en-
semble monstrueux des vices les plus cra-
puleux et de la cruauté la plus raffinée ;
l'image de Corneille lui représentait le
^énie créateur, et celle de Bossue t,
J'homme grand et vertueux. Ces premiè-
res observations faites, il s'appliqua à
connaître les différens caractères des
hommes et des femmes, qu'il tâchait de
-comparer à leur physionomie respective ;
et après un grand nombre d'examens et
de recherches, après une étude constante
de plusieurs années , il se persuada qu'il
pouvait lire dans les traits extérieurs les
secrets les plus cachés, et en déduire des
résultats non équivoques. 11 publia pour
]a première fois ses idées dans une espèce
de prospectus ou dissertation qu'il pré-
senta à la société de Zurich. Ses autre»
ouvrages sur la même matière, ayant ré-
pandu son nom par toute l'Europe , on
venait de toutes parts pour consulter ce
nouvel oracle. Parmi plusieurs anecdotes
qu'on raconte à ce sujet , nous soumet-
trons les suivantes à la sage critique du
lecteur. — Un seigneur allemand , aima-
ble et bel homme , se présenta dans la
société de Lavater; lorsqu'il sortit de la
salle , quelques dames s'écrièrent : Foilà
une physionomie heureuse! Vous n'y
avez rien à redire, M. Lavater? « J'en
» suis fâché pour lui, répondit-il, mais je
» remarque quelques lignes qui annou-
1) cent un caractère emporté, et je crains
» qu'il ne finisse malheureusement. »
Trois mois après, dit-on, sur une réponse
malhonnête que lui fit un postillon, le
seigneur allemand lui brûla la cervelle :
on l'arrêta, et il fut pendu. — Le fameux
Mirabeau se présenta chez Lavater d'ua
air cavalier et de persifflage ( il venait de
Paris ) , et débuta par ces mots : « Mon-
» sieur le sorcier, j'ai fait le voyage tout
» exprès pour savoir ce que vous pensez
B de ma physionomie. Regardez-moi, je
» suis le comte de Mirabeau ; si vous ne
» devinez pas juste, je dirai que vous êtes
» un charlatan. — Votre conduite , mon-
» sieur, est très inconsidérée, je ne suis
» pas un nécromancien. » Mirabeau in-
siste, et alors Lavater lui dit : « Votre
» physionomie annonce que vous êtes né
» avec tous les vices , et que vous n'avez
» rien fait pour les réprimer. » a Ma foi ,
» vous avez deviné, » répondit Mirabeau,
et il se retira un peu déconcerté (i). Ce
jugement n'était pas difficile, pour peu
que l'on connût le nom du personnage.
L'anecdote suivante est encore plus ex-
traordinaire. Une dame de Paris vint
consulter Lavater sur le sort d'une fille
chérie : le physiognomoniste la regarde
et refuse de s'expliquer. Cédant aux in-
stances de la mère, il lui promet une
lettre, la lui donne, à condition qu'elle ne
la décachètera qu'au bout de six mois.
Au bout de cinq , cette dame voit mourir
sa fille , ouvre alors la lettre du devin,
qui était conçue en ces termes. « Mada-
» me , lorsque vous ouvrirez cette lettre,
» je pleurerai avec vous la perte que vou«
» avez faite. La physionomie de voire
(i) La Biographie que noui avoi
pre'cédenle dit que I. avaler devin
sirnfU lilhouetlt.
cite'e dïns ta note
Miraheati $ur unt
LAV
552
LAV
> fille est une des plus parfaites que j'aio
» encore vues ; mais j'ai remarqué des
» traits qui annoncent qu'elle mourra
■» dans les six mois qui s'écouleront de-
» puis l'instant que j'ai eu le plaisir de
» vous recevoir. » Nous ne nous arrête-
rons pas à démontrer lin vraisemblance
des faits contenus dans ce récit , et nous
nous bornerons à faire observer que le
système nouveau que professait Lavater,
et ses prétendus pronostics sur l'avenir ,
étaient peu dignes d'un homme éclairé,
et encore moins convenables à un chré-
tien et à un ecclésiastique. Il ne pouvait
i{ïnorer qu'il n'y a rien de plus blâmable
«!l de plus ijrésomptueux pour la créa-
ture, que de voxdoir prédire le sort de ses
semblables, qui dépend immédiatement
de la volonté de Dieu; et que cette raison
que l'homme en a reçue en partage, doit
exclure toute idée de fatalisme, que d'ail-
leurs des signes extérieurs pourraient mal
annoncer. Le système de Lavater a pro-
bablement fait naître celui du docteur
Gall : ce dernier borne ses recherches au
crâne; Lavater les étend à toutes les par-
ties du corps , et surtout aux différens
traits de la physionomie. L'un et l'autre
système pourraient avoir le même fond
de vérité que ces jeux de cartes où les
gens crédules vont lire leur destinée. La-
vater était, comme nous l'avons dit, d'un
caractère doux et bienveillant : son com-
merce était facile et instructif; il ne disait
lien, et ne faisait rien qui ne décelât le
désir le plus vrai d'être agréable et utile
à tout le monde. Mais ses démarches po-
litiques lui attirèrent l'animadvei'sion
d'une partie du gouvernement helvéti-
que : il fut déporté à Baie, d'où il put
bientôt, grâce aux réclamations du parti
modéré, revenir à Zurich. Lavater a écrit
lui-même l'histoire de sa déportation ,
2 vol. 1800. On lui a reproché durement
son penchant à croire l'extraordinaire,
qui le rendit l'enthousiaste et la dupe des
charlatans de son temps.
*L.VVAU (PiEuv.E- Fraxçois), né à
Neuilly, en 175/»., cl mort à Versailles en
J823, fut un des professeurs les plus dis-
tingués des écoles centrales de Seine-et-
Oise. Il était surtout versé dans le grec,
et il a traduit avec succès le Songe de
Lucien^ la f aide des Alcrjons, et le Misan-
thrope, du même auteur, 1801, in-8°. On
lui doit encore une traduction en vers des
OEuvres lyriques d' Horace , 1810, in-12,
©ù l'on trouve plus de fidélité que d'élé-
gance ; et un volume de divers morceaux
littéraires, etc. Lavau, ami de Leuliette,
connaissait, comme ce savant écrivain,
tout ce que la littérature ancienne offre
de remarquable. Quoique déjà âgé, lors-'
qu'il fut attaché comme professeur à l'in-
stitution qui s'était formée à l'Hermitagc-
Saint-Antoine , il traduisit cependant avec
une énergie d'expression rare les Catili-
naires de Cicéron. Lavau était membre
de plusieurs académies. Il a laissé de
nombreux manuscrits , entre autres une
traduction de la Cyropédie de Xénophon.
LAVAU. Voyez FLONCEL.
LA\ AUR ( Guillaume de ) , avocat au
parlement de Paris, mort en 1750 à Saint-
Ceré, dans le Quercy, sa patrie, âgé de
7G ans , fut l'oracle de son pays par ses
connaissances. Il joignait à un cœur bon
et généreux, une mémoire prodigieuse
et une vaste littérature. Ou a de lui :
I Histoire secrète de Néron , ou le Festin
de Trimalcion j traduit de Pétrone, avec
des remarques historiques, in-12 , 1726;
I Conférence de la Fable avec l'Histoire
sainte , 1730, 2 vol. in-12. L'auteur prouve
que les grandes fables, le culte et les mys-
tères du paganisme , ne sont que des
altérations des usages, histoires et tra-
ditions des anciens Hébreux. Il y a beau-
coup d'érudition dans ce livre ; mais les
conjectures n'y sont pas toutes également
heureuses. Huet avait eu la même idée
avant l'auteur; il n'est pas difficile de s'a-
percevoir que Lavaur a profité de sa Dé-
monstration évangélique. L'abbé Guérin
du Rocher a répandu beaucoup de lu-
mière sur cet objet dans sa savante His-
toire des temps fabuleux, vainement
attaquée par messieurs Laharpe , de Gui-
gnes et du Voisin, et défendue avec feu
par M. l'abbé Chapelle. On doit voir aussi
Hérodote, historien du peuple hébreu j,
sans le savoir, par l'ahbé Bonnaud , Liège,
1790, in-12. Il est certain que les Grecs
ont pu facilement avoir communication
des Livres saints, soit par les Juifs qu'ils
faisaient esclaves, comme on le voit dans
le prophète Joël , soit par les Phéniciens,
qui ont fait transpirer dans la Grèce,
comme dans les autres parties de l'Eu-
rope et de l'Afrique, tant de connais-
sances utiles. « Les philosophes de ce
«siècle, dit un critique, ont une aver-
j) sion décidée de cette espèce de combi-
» naisons. Ils ne peuvent souffrir que
» l'Ecriture ait servi de fonds aux écrits
» historiques et mythologiques des an'-
» ciens. Un Gcbelin, un Bailly, ont mieux
» aimé faire des romans puérils de chio-
LAV
535
LAV
» nologic, de géographie, ilc pliysique et
» d'histoire , que d'adhérer à une obser-
» vation simple el préremptoire. » Voyez
OPHIONÉi-.
LAVEAUX ( Jean - Charles THIE-
BAULT de), homme de lettres, né à Troyes
le 17 novembre 1749, commença ses études
dans sa ville natale et les termina à Paris.
Au sortir de ses humanités, il accepta
*me place de professeur de langue fran-
çaise à Bàle. S'élant rendu ensuite à
Sluttgard, il y fut nommé professeur de
littérature française et membre de l'uni-
versité Caroline. Enfin sur l'invitation
de Frédéric , il alla occuper une chaire à
l'université de Berlin, où il fut accueilli
par tous les savans de cette ville , et par
les littérateurs qui fréquentaient la cour
du roi philosophe. A l'époque où éclata
la révolution française , Laveaux qui en
adopta sur-le-champ les principes, ne
voulut pas rester étranger aux événe-
mens qui se préparaient el dont il pou-
vait espérer quelques changemens avan-
tageux pour sa fortune. Il rentra donc en
France, et vint à Strasbourg où il se char-
gea de la rédaction du journal que le li-
braire Treuttel venait d'y créer , sous le
titre de Courrier de Strasbourg. Ses opi-
nions politiques indisposèrent plusieurs
personnes contre lui , entr'autres le maire
Diétrich qui le fit arrêter ; mais Laveaux
fut remis en liberté peu de temps après,
et se rendit à Paiis avant la fameuse
journée du 10 août 1792. Il occupa divers
emplois , fut membre du tribunal insti-
tué le 17 août , pour juger ceux qui avaient
été pris en défendant le roi , et se con-
duisit avec modération dans celte circon-
stance. Le 14 août de l'année suivante , il
accusa le maire de Strasbourg de l'arres-
tation arbitraire dont il avait été l'objet.
Quelque temps après il devint rédacteur
en chef du Journal de la Montagne;
mais ses articles sur les généraux el les
députés en mission lui altirèrent quel-
ques désagrémens : ceux-ci ennuyés
d'être dénoncés à chaque instant, par-
vinrent à le faire arrêter. Relâché par
suite de la recommandation de la société
des Jacobins , il fut dénoncé par Hébert
et arrêté de nouveau. La même société
obtint encore sa mise en liberté. Fatigué
de tant de désappoinfemens , il renonça
au rôle de journaliste, retourna à ses tra-
vaux littéraires , professa les langues an-
ciennes, et devint ensuite chef du bureau
militaire du département de la Seine.
Après rétablissement du gouvernement
lonstilaire, il sort il des biu'caux de la pré-
fecture pour remplir les doubles fonctions
de chef de division des prisons el hospices
du département de la Seine , cl il les con-
serva jusqu'cà la seconde restauration. La-
veaux est mort à Paris le 15 mars 1827.
Parmi les ouvrages qu'a laissés ce labo-
rieux écrivain , nous citerons : | OFuvres
du chevalier Charles Hedlinger ou Re-
cueil de s médaille s de ce célèbre artiste,
2 parties , l'une de planches , l'autre d'ex-
plications (celle-ci rédigée par Laveaux),
Bâle , 1776 et 1778, 2 vol. in-fol. ; | Entre-
tiens avec les enfans sur quelques his-
toires de la Sible ^XrSiduHs de l'allemand,
1782, in-S"; | Leçons de langue française
données à quelques académiciens et
autres auteurs français de Berlin j, Franc-
fort, 1782, in-12; [ Défense de l'abbé
Raynal et de Borelli contre les attaques
clandestines de quelques chenilles litté'
raires^ 1783, in-8'' ; | les Nuits champêtres ^
1783 et 1784 , in-S" ; | le Maître de langue
ou Remarques instructives sur quelques
ouvrages français écrits en ^llemagne^
4783, in-8°; | Cours théorique et pratique
de langue et de littérature française^
ouvrage entrepris par ordre du roi de
Prusse^ Berlin, 1784, in-8°; 1 de V:^rt de
penser^ 1784 , in-8° ; | Dictionnaire fran-
çais-allemand et allemand -français,
1784-85, 2 vol. in-8°; 4' édit. , 1789 , en-
trepris également à la demande du roi de
Prusse ; | Musarion ou la Philosophie des
grâces, poème en 3 chants, traduit de
l'allemand de Wieland, Kell, 1784, in-8°;
I Histoire des Allemands , traduite de
Schmidt , 1784 , 9 vol. in-8" ; ] Eusèbe ou
les Beau:»; profits de la vertu dans le siècle
où nous vivons, Amsterdam , 1785 , in-8'';
I Essais sur le peuple, trad. de l'allemand,
de Gossler, 1786, in-8° ; | Réponse à M. le
président de Renberau sujet dunouvel or-
dre judiciaire établi en Prusse, 1786, i n-8° ;
I les Vrais principes de la languie fran-
çaise, 1787, in- 8° ; ! Tactique pure pour
'l'infanterie, la cavalerie et V artillerie^
trad. de l'allemand, deMullcr, 1787; [ Ta-
bleau des gvLcrres de Frédéric le Grand,
traduit de l'allemand, de Louis Muller,
Strasbourg et Paris, 1788, in-4°; des
exemplaires portent la date de Berlin ;
I Vie de Frédéric II. roi de Prusse, Stras-
bourg, 1788 , 4 vol. m-8°. On y joint or-
dinairement l'ouvrage suivant : | Lettres
sur Frédéric II, roi de Prusse, Stras-
bourg, 1789, 5 vol. in-8° et in-12; | Fré-
déric II. Voltaire, J.-J. Rousseau, S'A-
lembert et l'académie de Berlin vengés
LAV ^:
du secrétaire perpétuel de celte acadéinir
( Formey ), Paris, i789 , pctit-i)i-8";
j Grammaire de Jf^ailly pour les Alle-
mands ^ 1790, in-8°; | Histoire des pre-
miers peuples libres qui ont habité la
France, 1798, 3 vol. in-S"; | Histoire des
origines, des progrès et de la décadence
des sciences dans la Grèce ,\raùu\[c de
l'allemand, de Meincrs, 1798, 3 vol. in-
8° ; I Histoi7'e de Pierre III. empereur de
Russie , suivie de l'histoire secrète des
ainours et des principaux amans de Ca-
Iherine IL Paris , 1799 , 5 vol iii 8° ; | Bic-
tionnaire de l'académie française, nouv.
Mit. augmentée de plus delOMOai'ticles,
où l'on trouve les mots et les locutions
adoptés dejmis la dernière édition de
4762 ; l'explication des termes et des ex-
pressions synonymes; les termes des
sciences, des arts et des métiers , et par-
ticulièrement ceux de la nouvelle nomen-
clature chimique , Paris , 1802, 2 vol. in-
h'*. MM. Bossange et Masson , qui étaient
propriétaires du Dictionnaire de l'acadé-
mie , poursuivirent les édileui-s de cette
nouvelle édition comme contrefacteurs,
et gagnèrent leur procès, particulière-
ment par rapport au titre qu'on n'aurait
pas dû copier. Depuis , Laveaux en a
donné une 2* édition avec des augmenta-
tions considérables, intitulée : nouveau
Dictionnaire de la laxigue française, où
l'on trouve le recueil de tous les mots de
la langue usuelle ; les étymologies néces-
saires; un grand nombre d'acceptions
non indiquées jusqu'à présent ; l'éxplica-
iion détaillée des synonyma; des remar-
ques sur la prononciation et Vorthogra-
phe;les noms des outils et instrumens
des arts et métiers avec l'indication de
leurs usages divers ; les termes des arts
et des sciences ; la critique de plusieurs
mots recurillis ou insérés mal à propos
dans quelques dictionnaires modernes,
etc. On a public , en 1828 , une 5' édition
de ce livre qui areçu encore d'importantes
améliorations; | Dictionnaire raisonné
des difficultés grammaticales et littérai-
res de la langue française , 1818 , in-8° ;
2* édition considérablement augmentée,
4822, 2 vol. in- 8"; 1 Dictionnaire de
la langue française, extrait du nou-
veau Dictionnaire, etc., 1825 , 2 vol. 'vn-
8°i 1 Nouveau Dictionnaire portatif de la
langue française , 1823, in-16; | Diction-
naire synonymique de la langue fran-
çaise, 182G , 2 vol. in-S*". Laveaux a publié
encore : OEuvres complètes de Frédéric
JJ. roi de Prusse , Berlin, 1788, 13 vol.
Vi LAV
ia-S". et il a coopéré à la 7tIonarchie
prussienne sous Frédéric le Grand, par
le comte de Mirabeau , Londres , 1788 ,
4 vol. Iw-k" ou 8 vol. in^" et atlas.
* LAVILLEHEURNOÏS ( Berthelot
de ), naquit en 17i!i0, se fixa à Paris où il
occupa différentes places et devint maître
des requêtes. Il ne quitta pas la capitale
pendant nos orages politiques. Attaché à
la l'oyauté, il ne partagea pas les princi-
pes de la révolution ; il s'efforça au con-
traire partons les moyens d'être utile à
la cause légitime. Il imagina, vers 1796,
de former en France plusieurs compa-
gnies, à l'instar de celles des chouans, et
de les faire soulever ensuite, afin de re-
placer les Bourbons sur le trône. Il s'é-
tait associé Duverne de Presie et l'abbé
Brotior; mais, trahi par le colonel Malo, à
qui il avait fait part de son projet , il fut
traduit devant un conseil de guerre de-
vant lequel il parla avec courage, et fut
condamné au mois d'avril à une année
de détention ; après le 18 fructidor , les
membres duDirecloire le firent compren-
dre dans la déportation du 18 fructidor à
Caïenne ; il y fut conduit avec Pichegru
et autres , et y mourut en juillet 1799.
LA.VIROTTE ( Louis- An xe ) , méde-
cin, né à Nolay, diocèse d'Autun, mort
le 3 mars 1739 , dans la 34" année de son
âge, était bon physcien et observateur
habile. Il a traduit de l'anglais : 1 Observa-
tions sur les crises par le pouls , de Ni-
hell, in-12 ; | Dissertation sur la transpi-
ration, in-i^; ]... sur la chaleur, in-12,-
I Méthode pour pomper le mauvais air des
vaisseaux, 1740, in-S** ; i Découvertes phi-
losophiques de Newton, par Maclaurin,
1749, in-4" ; 1 Nouvelles observations mi-
croscopiques de Needham , 1730 , in-8".
II a donné de son propre fond, des Obser-
vations sur une hydrophobie spmitanée,
suivie de la rage, in-12
* L VVOISIER ( Antoiîve- Laurent) ,
célèbre chimiste, né à Paris le 16 août 1743,
fil ses études au collège Mazarin, et ob-
tint ensuite de son père qui avait acquis
dans le commerce une honorable fortune,
la permission de se livrer à son goût pour
les sciences. Il les étudia toutes, les ma-
thématiques et l'astronomie avec La-
caille, la chimie avec Rouelle, la botani
que avt'C Bernard de Jussieu. Il n'avait
pas encore vingt-trois ans lorsqu'il rem-
porta , en 1766, le prix proposé par l'aca-
démie des sciences, sur un meilleur niode
d'éclairage à donner à la ville de Paris.
On assure que ce jeune savant , qui s'c-
LAV 33
tait assujéti à ne se nourrir que de lait,
et qui n'avait d'autre société que celle de
ses maîtres et de quelques-uns de ses plus
laborieux condisciples , s'enferma pen-
dant six mois dans une chambre tendue
de noir pour rendre ainsi ses yeux plus
sensibles aux divers degrés d'intensité de
la lumière des lampes. Lavoisier présenta
ensuite à la même académie plusieurs
mémoires intéressans , un entre autres
sur les couches des montagnes : ses tra-
vaux sur Vair et sur les fluides élastiques
le firent admettre en 17G8 à l'académie,
eu qualité d'associé à la place de Baron
qui venait de mourir : il avait alors à
peine 23 ans. Il continua ses recherches ;
mais, jugeant que de grands moyens pé-
cuniaires étaient nécessaires à ses expé-
riences , il demanda et obtint en 17G9 la
place de fermier-général, et épousa en
■1774, m"' Paulze, dont le père exerçait la
même charge. Sa fortune et les revenus
de cet emploi furent consacrés au pro-
grès des sciences : il encourageait les
jeunes gens et leur donnait les moyens de
se perfectionner dans la carrière scienti-
fique qu'ils voulaient parcourir , et réu-
nissait chez lui les savans : dans leurs
discussions, auxquelles prenaient part les
géomètres et les chimistes, les uns s'ha-
bituaient àl'observation des faits particu-
liers, les autres à la rectitude du raisonne-
naent. Tout en rendant d'immenses ser-
vices aux sciences d'observation , il ne né-
gligeait nullement ses fonctions. Nommé
en 1776 régisseur des poudres et salpê-
tres, il en perfectionna la fabrication.
Ayant été appelé à la trésorerie nationale
en 1791, il publia sur les finances un ou-
vrage qui éclaira d'un jour effraj^ant leur
élal véritable ; il mil aussi dans la comp-
tabilité un ordre exact et sévère , par le-
quel on pouvait vérifier chaque soir l'é-
tat de toutes les caisses. La révolution ne
lui permit pas de s'occuper en paix de sa
science favorite : ceux qui battaient mon-
naie avec leséchafauds sur les places pu-
bliques, savaient qu'il était riche : il pos-
sédait en effet des terres considérables
dans l'Orléanais, où ses bienfaits ont
rendu sa mémoire chère aux habilans.
Dénoncé par un misérable qui devait
tout à la générosité de M. Paukc son
beau-père, et traduit au tribunal révolu-
tionnaire il fut condamné à mort avec 28
collègues. Une des imputations qui lui
élaient faites, était celle d'avoir trop for-
tement humecté le tabac mis en vente par
la fi^nuc générulo. Il demanda à ses juges
5 LAV
de différer de quinze jours l'exécution de
son jugement , pour qu'il pût terminer
des expériences utiles pour l'humanUé :
« Je ne regretterai point alors la vie, s'é-i
» cria-t-il, et j'en ferai avec joie le sacri-
» fîce à ma patrie. » Le farouche prési-
dent du tribunal ( Coffinhal ) lui répon-
dit : « La république n'a pas besoin de sa-
» vans et de chimistes ; le cours de la jus-
» lice ne peut être interrompu. » Il monta
àl'échafaud d'un pas ferme, le 8 mai
17%, et mourut sans montrer aucune
faiblesse. On regrette d'autant plus qu'il
n'ait pu obtenir un sursis au jugement,
qu'un délai de quelques semaines pouvait
le conduire à l'époque où les échafauda
furent renversés. Lavoisier renversa
l'existence du 2^hlogistiqu^ ^ prétendu
principe de combustion que l'autorité de
Beckcr et de Stahl avait accrédité dans le
monde savunl : il démontra jusqu'à l'évi-
dence que îa calcinatiou des métaux est
due à leur combinaison avec l'air, puis-
que cette partie de l'air ainsi absorbée
est respirable. Cavendish avait découvert
que la combustion de l'air inflammable
donne de l'eau pour produit : suivant
cette idée féconde , Lavoisier établit par
de belles expériences que l'eau peut se
décomposer en air inflammable et en air
respirable , et il appliqua bientôt cette
donnée à tous les êtres des trois règne»
naturels. Après cette importante décou-
verte, Lavoisier qui venait de s'ouvrir
une route nouvelle , écrivit un grand
nombre de mémoires qu'il présenta à l'a-
cadémie des Sciences. M. Quérard, dans
la France littéraire^ tome h, en compte
soixante-trois, depuis 1768 jusqu'à sa
mort, sans parler de ceux qui furent h\-
sévés dAns les Jnnales de chimie j et de
quelques autres que l'on imprima à la
suite de la Traduction de l'ouvrage d'Her-
manu sur la fusion à l'aide de l'air ^ etc.
Ses écrits sont : | Opuscules chimiques et
classiques, Paris , 1773, 2 vol. in-S" ; | iVow-
velles recherches sur l'existence d'un
fluide élastique^ 1775, in-8°. C'est l'ou-
vrage qui a le mieux établi sa réputation.
I Rapport des commissaires chargés de
Vexamen du magnétisme animal., 1783;
I Instructions sur les nitricres et la fabri-
cation du salpêtre^ 1777 , in-8" ; nouvelle
édition, 1794 ; | Méthode pour la nomen-
clature chiinique ^ in-S" , très souvent
réimprimée; | Traité élémentaire de chi-
mie. 1789, 2 vol. in-S", et 1800 , 3 vol. in-
8" ; I De la reproduction et de la consom-
mation comparées à la population^ in -8*^
LAAV 5
I Traité de la richesse territoriale de la
France A791 , in-8°. Ce n'est qu'un extrait
d'un grand ouvrage , auquel l'auteur tra-
vaillait depuis long-temps, et dont les ma-
tériaux étaient rassemblés , mais qui est
perdu pour nous, ainsi que plusieurs
autres fruits du génie de Lavoisier. Son
éloffc a été prononcé par Fourcroy dans
tme séance publique du Lycée des arts ;
et M. de Lalande a publié une Notice sur
la vie de ce savant illustre et modesle, qui
réunissait toutes les qualités bienfaisantes
du cœur à toutes les richesses de l'esprit.
LAW ( Jban ), écossais, célèbre par
le ruineux système de finances qu'il éta-
blit en France , naquit en avril 1671 à
Edimbourg, d'un orfèvre -banquier et
selon d'autres, en 1668 ou 1681. Ayant sé-
duit à Londres la fille d'un lord , il tua
le frère de sa maîtresse , et fut condamné
à être pendu. Obligé de fuir de la Grande-
Bretagne ( 1694 ) , il passa en Hollande,
et de là en Italie. Il avait , depuis long-
temps , rédigé le plan d'une compagnie
qui paierait en billets les dettes d'un état,
et qui se rembourserait par les profits.
II proposa cet établissement au duc de
Savoie, depuis i" roi de Sardaigne ( Vic-
tor-Amédée ), qui répondit qu'î7 n'était
pas assez puissant pour se ruiner. Il vint
proposer son plan au contrôleur-général
de France ( Desmarets ) en 1709 ou 1710,
et ne réussit pas mieux. Enfin il fut ac-
cueilli sous la régence du duc d'Orléans,
et obtint en 1716 des lettres-patentes :
deux milliards de dettes à éteindre , un
prince et un peuple amoureux des noù-
Acautés, voilà les circonstaiiccs qui favo-
risèrent son entreprise financière. Il éla-
Llit d'abord une banque en son propre
nom , l'an 1716 ; elle devint bientôt un
bureau général des recettes du royaume.
On y joignit une compagni»j du Mississipi,
compagnie dont on faisait espérer de
grands avantages. Le public, séduit par
l'appât du gain , s'empressa d'acheter
avec fureur des actions de cette compa-
gnie et de cette banque réunies. Les ri-
chesses , auparavant resserrées par la dé-
fiance , circulèrent avec profusion ; les
billets doublaient , quadruplaient ces ri-
chesses. La banque fut déclarée banque
du roi en 1718 ; elle se chargea du com-
merce du Sénégal, des fermes-générales
du royaume , et acquit l'ancien privilège
de la compagnie des Indes. Celle banque
étant établie sur de si vastes fondemens,
ses actions augmentèrent vingt fois au-
Wlelà de leur première valeur. En 1719,
36 LAW
elles valaient quatre-vingts fois tout l'ar-
gent qui pouvait circuler dans le royaume^
Le gouvernement remboursa en papier
tous les rentiers de l'élat ; et ce fut l'épo-
quo de la subversion des fortunes les
mieux établies. L'on donna alors à Law
( en 1720 ) la place de contrôleur des fi*
nances. On le vit en peu de temps d'écos-
sais devenir français par la naturalisation;
de protestant, catholique; d'aventurier,
seigneur des plus belles terres , et de ban-
quier, ministre d'état. Le désordre était
au comble. Le parlement de Paris s'op-
posa , autant qu'il le put , à ces innova-
tions , et il fut exilé à Pontoise. Enfin,
dans la même année, Law, chargé de
l'exécration publique , fut obligé de quit-
ter le pays qu'il avait voulu enrichir,
et qu'il avait bouleversé. Il se retira
d'abord dans une de ses terres en Brie ;
mais ne s'y trouvant pas en sûreté, il
parcourut une partie de l'Allemagne , et
descendit en Italie par le Tyrol. Après
avoir entrepris quelques autres courses
de Hollande en Angleterre, en Dane-
marck, Law se fixa enfin à Venise , où il
mourut l'an 1729, l'esprit plein de projets
imaginaires et de calculs immenses. Le-
jeu avait commencé sa fortune , et cett&
passion servit à la détruire. Quoique son
état ne fût guère au-dessus de Tindigcnce,
il joua jusqu'à sa mort. Trayez l'Histoire
du système des finances par du Haut-
Champ, la Haye , 1754 , 6 vol. in-12, et
les Mémoires de la régence, 5 \o\. in-12,
1749. En parlant du système de Law, un
auteur s'exprime en ces termes : « Il se-
i> rait difficile de peindre l'espèce de fré-
i> nésie qui s'était emparé des esprits, à la
» vue des fortunes aussi rapides qu'énor-
» mes qui se firent alors. Tel qui avait
» commencé avec un billet d'état, à force-
» de trocs contre de l'argent , des actions
» et d'autres billets, se trouvait avoir des
» millions en quelques semaines. La rue
» Quincampoix était le rendez-vous de
» tous les actionnaires, elle théâtre de leur
I) manie. La foule s'y pressait au point que
» plusieurs personnes y furent étouffées.
i> 11 n'y avait plus dans Paris ni commerce
» ni société. On ne s'occupait que du pria
» des actions. Les fortunes les plus consi-
» dérables furent renversées , et il s'en
» éleva de prodigieuses. Le désordre trou-
» vait des alimens dans les obstacles
» mêmes qu'on tenta d'y opposer. Tel
» fut, par exemple , l'effet de la défense
» faite aux habitans de Paris, de garder
1 » chez, eux des espèces monétaires. » Oa
hWV 5
a publié les OEuvres de Law^ c'est-à-
dire, ses Principes sur le numéraire , le
commerce, le crédit et la banque, trad.
de l'anglais par de Senovert, Paris , 1790,
in-8°. Voyez l'arlicle de M. Thiers sur le
système de Law, dans Y Encyclopédie p?'o-
gressive^ année 1826.
LAW DE LAURISTON. Voyez LAU-
RISTON.
LAW (Edmond), f^. KING, Guillaume.
* LAYA (Jean-Louis), professeur de
littérature à la faculté des lettres de Paris,
et membre de l'académie française , na-
quit à Paris, le k décembre 1761 , d'une
famille originaire d'Espagne , et étudia au
collège de Lixieux , où Dumoustier , Col-
lin-d'Har le ville , Legouvé, etc. furent ses
condisciples. En sortant du collège, il
publia avec ce dernier un recueil d'iié-
roïdes intitulé : Essai de deux amis. Il
était parent de madame Dufresnoy à qui
il inspira, dès l'âge de seize ans, le goût
des vers , et dont il dirigea long-temps
les pas dans la carrière poétique. Laya
publia , en 1789 , des considérations poli-
tiques sous le titre de Voltaire aux Fran-
çais sur leur constitution^ et un écrit in-
titulé : La Régénération des comédiens
en France j, ou leurs droits à l'état civil.
Tous les hommes de nos jours qui vivaient
à l'époque désastreuse de 1793, se rap-
pellent encore l'immense sensation que
produisit Vudmi des lois^ œuvre coura-
geuse qui fut représentée pour la pre-
mière fois le 3 janvier 1793, au milieu
des débats du procès de l'infortuné mo-
narque. Cette pièce , où l'auteur s'était
rendu l'interprète hardi des protesta-
tions de tous les honnêtes gens contre le
système de la terreur , excita un enthou-
siasme prodigieux dans les départemens
comme à Paris (i). A Marseille , elle fut
(i) On recooDut Robespierre dans le rôle de JSo-
T.ophagf, et Marat dans celui de Duricrane. Non» ci-
Serons les vers suivans qui donneront à la fois «ne
■Je'e et de la noble andace qui a inspire' celte pièce,
fcl de la versification de l'auteur :
Ce sont tous ces jongleurs, patriotes de places,
IVun faste de civisme entourant leurs giimaces ,
Prêcheurs d'iigalite' pétris d'ambition j
Ces faux adorateurs , dont la dtfvotioD
N'est ({u'ui^ dehors plâtre' , n'e-»t qu'une hypocrisie ;
("es bon» et francs croyans dont l'âme apostasie,
Oui, pour faire haïr le plu» beau don de» cieuz ,
Nous font la liberté sanguinaire comme eux..
JYÎais non ; la liberté chez eux méconnaissable
A fondé dan» dos coeurs son trône impérissable.
<^iie ton» cet charlatans , populaire» larron» ,
Kt Ae patriotisme insolent fanfarons,
Ptirgent dï leur aspect cette terre affranchie !
Guerre , guerre éternelle aux fauteur» d'anarchie!
7.
57 LAW
représentée deux fois en un jour sur le
môme théâtre. La commune de Paris,
alarmée de l'effet de la pièce sur le public,
essaya vainement d'en arrêter la repré-
sention , à laquelle assistait chaque fois
une foule immense. Elle fit même avan-
cer (12 janvier 1795) des canons contia
la salle. Mais la Convention , craignant
les suites d'une pareille démonstration ,
cassa l'arrêté de la comumne , et les ac-
teurs purent jouer devant deux mille
spectateurs, dans une salle qu'environ-
naient trente mille citoyens. Le général
Santerre , s'élant montré sur le théâtre
pour haranguer le peuple , fut couvert de
huées. Au troisième acte , un des assis-
tans s'écria : Mlons murer les jacobins
dans leurs repaires^ et le public accueil-
lit avec joie celte proposition. Peut-être
(ainsi que le remarqua M. le duc de
Lévis , dans sa réponse au discours de
réception de M. Laya dans l'académie
française), ne manqua-t-il à cette mul-
titude si noblement exaltée qu'un chef,
pour empêcher le crime qui devait se
consommer le 21 janvier. Louis XVI, in-
formé de .ces circonstances, fit prier
l'auteur de lui faire connaître son ou-
vrage , et Laya le lui fit parvenir dans sa
prison. Marseille avait envoyé une dépu-
tât ion à l'auteur de VAmi des lois; cet
hommage voté par les sections , et con-
signé dans le registre des séances que
Fréron rapporta de cette ville au comité
de salut public , le lit jeter dans les pri-
sons , où il resta 15 mois. Plusieurs per-
sonnes furent même envoyées à la mort ,
par le seul motif qu'on avait trouvé chez
elles un exemplaire de l'ouvrage. Laya
eut le bonheur de se soustraire à l'écha-
faud. Il reparut le 9 thermidor. Le Rapport
qu'il rédigea sur les papiers trouvés chez
Robespierre , rapport que l'abbé Mulot et
Courtois modifièrent dans le sens révolu-
tionnaire [voy. COURTOIS) , le fit porter
au coiTiilé de sûreté générale (i). Sous le
gouvernement consulaire , Laya voulut
embrasser la carrière administrative ;
mais un des trois consuls lui refusa obsti-
nément la sous-préfecture de Fontaine-
bleau,/?arce qu'il avait cultivé leslettrei
et fait des tragédies. Plus tard , il suivit
M. Alexandre de la Rochefoucault à son
ambassade de Dresde, puis fut nommé
(!) On attribue aussi i Laya la motion d'ordre da
Courtois , qui fit fermer le club anarthiqiie eu IMa-
nége , ainsi que l'opinion prononcée à la tribune par
ce conventionnel , pour la rettitution des bisns des
coadamnéf .
29
LAW 3
smppléant de M. de Saint- Ange à la chaire
de belles-lettres du lycée Charlemagne ,
d'où il passa, en 1809, à celle du lycée
Napoléon ( collège de Henri IV ). La
même année , il fut appelé à remplir la
chaire d'histoire littéraire et de poésie
française de la faculté des lettres que la
mort de Delille avait laissée vacante. Les
noms de MM. Casimir Delavigne, Cousin
(le Wailly, Patin , qui furent ses élèves ,
attestent assez, les succès de l'enseigne-
ment de Laya, qui remplaça, le 6 août
i8l7 , à l'académie française M. de Choi-
seul-Gouffier ( voyez CHOISEUL-GOUF-
FIER ). Laya est mort, à l'âge de soixante-
treize ans , au mois d'août 1853. Les titres
de ses ouvrages sont ■; \ Essais de deux
amis, Paris , 1786 , in-8° (avec Legouvé) ;
! La régénération des comédiens en
France^ ou leurs droits à l'état civile
Paris , 1789 , in-16 ; I Voltaire aux Fran-
çais sur leur constitution^ Paris, 1789,
in-8°; | Jean Calas, tragédie en cinq
actes et en vers , précédée d'une pré-
face historique sur Jean Calas, Paris,
1791 , in-8° ; | Discours qui devait être
prononcé par le citoyen Laya, auteur
de l'Ami des lois , à la barre de la Con-
vention , Paris , 1793 , in-8° ; | Les dan-
gers de l opinion , drame en 5 actes et
en vers , Paris , 1790 , in-8°. Ce drame où
l'auteur attaquait le préjugé des peines
infamantes, eut beaucoup de succès.
I L'ami des Lois, comédie en 5 actes et en
vers, Paris , 1822 , in-8'' {voy. plus haut);
I Les derniers momens de la présidente
de Tourvel, héroïde , Paris, 1799, in-8°;
j Epitre à un jeune cultivateur nouvelle-
ment élu député, 1799, 1818, in-8°, dont
le but est de prouver que les demi-con-
naissances , si dangereuses dans tous les
arts , le sont surtout dans la législation ,
et que le simple bon sens y est préfé-
rable au faux savoir. | Essai sur la sa-
tire. Paris, 1800, in-12 , morceau ex-
trait des Veillées des muses, tiré à un
petit nombre d'exemplaires qui n'ont pas
été destinés au commerce; [ Eusèbe ,
hérdide, Paris, 1807, in-8°, réimprime
sous ce titre : Lettre d' Eusèbe à son ami,
Paris, 181S , in-8°; | Discours prononcés
dans la séance publique tenue par l'aca-
démie française , pour la réception de
M. Laya, le 30 novembre 1817, Paris,
1817, in-4°; | Un mot sur M. le directeur
de l'imprimerie et de la librairie, ou Jbus
de la censure théâtrale, Paris, 1819,
in-8°; | Falkland, ou la conscience, drame
,en cinq actes et en prose , représenté en
38 LAZ
1799, Paris ,1821, in-8°. Laya a fourni en
outre , des poésies à l'Almaiiach des
Muses : il a coopéré aux Veillées des
Muses (avec Arnault, Legouvé, Vigée,
etc. , 1799 - 1802 ) , à VObservateur des
spectacles, à la Nouvelle bibliothèque des
Romans ^ et il a été chargé pendant 15
ans de la partie critique littéraire du
Moniteur. Laya a encore composé une
comédie en deux actes , intitulée une
Journée du jeune Néron, qui, représen-
tée en 1799 , n'a pas été imprimée.
LAYMAIV. Voyez LAIMAN.
LAZARE, frère de Marie et de Marthe,
demeurait à Béthanie. Jésus , qui l'aimait,
allait quelquefois loger chez lui. Le Sau-
veur vint en cette ville quatre jours après
la mort de Lazare , se fit conduire à son
tombeau, et en ayant fait ôter la pierre, il
lui rendit la vie. Ce miracle éclatant,
opéré aux portes de Jérusalem, et dont
l'objet sensible et subsistant repoussait
tous les doutes , ayant été rapporté aux
princes des prêtres et aux pharisiens, ces
ennemis de la vérité prirent la résolution
de faire mourir Jésus-Christ et Lazare.
Ils exécutèrent leur mauvais dessein en-
vers le Sauveur ; mais à l'égard de Lazare,
l'histoire sainte ne nous apprend pas ce
qu'il devint. Les Grecs disent qu'il mou-
rut dans l'ile de Chypre , où il était
évéque, et que ses reliques ont été trans-
portées à Constantinople sous l'empe-
reur Léon le Sage. Quelques anciens
martyrologes d'Occident semblent confir-
mer cette tradition. Il parait que l'on n'a
parlé qu'assez tard de son voyage en Pro-
vence avec Marie-Madeleine et Marthe,
ses sœurs, et que l'on a supposé qu'il est
mort évoque de Marseille. Voyez MA-
DELEINE.
LAZARE , pauvre, véritable ou sym-
bolique , que le Fils de Dieu nous repré-
sente, dans l'Evangile , tout couvert d'ul-
cères, couché devant la porte d'un riche,
où il ne désirait que les miettes qui tom-
baient de sa table , sans que personne les
lui donnât. Dieu, pour récompenser la
patience de Lazare , le retira du monde,
et son âme fut portée dans le sein d'Abra-
ham. Le riche mourut aussi, et eut l'enfer
pour sépulture. Lorsqu'il était dans les
tourmens, il vitd« loin Lazare, et lui
demanda quelques rafraîchissemens ; mais
Abraham lui répondit , qvJ ayant été dans
les délices pendant que Lazare souffrait,
il était juste qu'il fût dans les tourmens
petidant que celui-ci était dans la joie.
Quelques interprètes ont cru que ce q^e
LAZ
339
LAZ
le Fils de Dieu rapporte ici de Lazare et
du mauvais riche est une histoire réelle ;
d'autres prétendent que ce n'est qu'une
parabole; et enfin quelques-uns, tenant
10 milieu, veulent que ce soit un fond his-
torique, embelli par le Sauveur de quel-
ques circonstances paraboliques.
LAZARE ( saint ), religieux grec, qui
avait le talent de la peinture, consacra
son pinceau à des sujets de piété. L'em-
pereur Théophile, iconoclaste furieux,
lit déchirer le peintre à coups de fouet,
et lui fit appliquer aux mains des lames
ardentes. Lazare, guéri de ses plaies, con-
tinua de peindre Jésus-Christs la. sainte
Vierge et les saints. Il mourut à Rome en
867, où l'empereur Michel l'avait envoyé.
11 a été mis au nombre des saints ; le Mar-
tyrologe romain met sa fêle au 25 février.
LAZARE. Vo7/ez PONCE DELAZARE.
LAZARELLI ( Jean-François ), poète
italien , né en 1710, à Gubio, d'abord au-
diteur de rote à Macerata, ensuite prévôt
de la Mirandoîe, mourut en 1791, âgé de
plus de 80 ans. On a de lui un poème
singulier, intitulé : La Cocceide legitlima.
La deuxième édition, qui est augmentée,
est de Paris, sans date, in-12, et a été
réimprimée une troisième fois. C'est un
recueil de sonnets et de vers mordans
contre un nommé Arrighini ^ son collè-
gue à la rote de Macerata.
LAZER3IE ( Jacques ), professeur de
médecine en l'université de Montpellier^
mort au mois de juin 1736 , âgé de plus
de 80 ans, est auteur d'un ouvrage inti-
tulé : I Tractatus de morbis internis ca-
pitiSj 1748, 2 vol. in-12; ouvrage qui n'a
été mis au jour que par le désir d'être
utile aux jeunes médecins. M. Didier des
Marèts l'a traduit en français. II a été
imprimé à Paris , en 1754, sous ce titre :
Traité des maladies internes et externes
de la tête, 2 vol. in-12. On a encore de
lui : I De suppiirationis eventibus , 1724,
in-8° ; | De febre tertiana intermittente ^
1731, in-8° ; j Curationes morborum, 1731,
2 vol. in-12, mises en français sous ce
titre : Méthode pour guérir les maladies^
traduite du latin de M. Lazerme, Paris,
1753, 2 vol. Cet ouvrage est un peu su-
perficiel.
LAZIUS ( WoLFGANG ), professeur de
belles-lettres et de médecine à Vienne
en Autriche, sa patrie, naquit en 1514, et
mourut en 1565, avec le litre d'historio-
graphe de l'empereur Ferdinand I", ot
avec la réputation d'un homme fort la-
borieux, mais mauvais critique. On a de
lui : I Viennœ-Austriœ, seu rerum Vien^
nensiumCommentariisBà.\e, 1646, in-fol.,
savant, mais semé de fautes. Les états de
Vienne jugèrent cependant son travail
digne d'une récompense honorable. | Geo-
graphia Pannonice j dans Ortelius ; \ un
savant traité De gentium aliquot migra-
tionibuSs sedibus fixis, reliquiis^ etc. libri
X7/,Bâle , 1557 , 1572 , in-fol. et Franc-
fort, 1600, in-fol. Il roule principalement
sur les émigrations des peuples du Nord.
I Commentariorum reipublicce romance»
in exteris provinciis bello acquisitis con-
stitatœ libri XI I^ 1398 , in-fol. pleins de
lecherches et d'inexactitudes ; | In genea-
logiam austriacam Commentarii^ 1394,
in-fol. , etc. La plupart des ouvrages de
Lazius ont été recueillis à Francfort,
1698, en 2 vol. in-fol.
*LAZO\VSKI, né en Pologne, vers
1730 , quitta sa patrie à l'époque de la ré-
volution de France, et vint se fixer à
Paris; il y obtint, bientôt après, une
place d'inspecteur des manufactures, qu'il
perdit ensuite. Entraîné par un caractère
ardent et ambitieux , il sacrifia tout au
désir de se faire remarquer, quitta le cos-
tume élégant qu'il avait porté jusqu'a-
lors, se travestit en sans-culotte, devint
capitaine de quartier de la garde natio
nale de Paris, et dirigea le 10 août 1792
l'artillerie des fédérés contre le châteai
des Tuileries. On le vit au nombre des
principaux acteurs des massacres de sep-
tembre , tant dans la capitale qu'à Ver-
sailles. Quelques mois après, il dirigeait
les proscripteurs qui venaient sans cesse,
au nom des jacobins et de la commune,
demander à la barre de la Convention la
tète des députés fidèles , qui leur furent
enfin livrés le 2 juin 1793. Décrété d'ar-
restation au mois de mars 1793, sur la
proposition de Vergniaud, il fut vivement
défendu par ceux de ses complices qui
siégeaient à la Montagne. Il fut attaqué
peu de temps après d'une fièvre inflam-
matoire, et cet égorgeur finit, dans son lit,
une vie qu'il aurait dû perdre par la
main du bourreau. Les jacobins lui ren-
dirent des honneurs funèbres, €t Ro-
bespierre ne dédaigna pas de prononcer
son éloge. Le corps de ce misérable fut
déposé au 'pied du l'arbre de la liberté,
alors planté sur la place du Carrousel , et
journellement arrosé du sang des vic-
times. Il en fut retiré et jeté à la voi-
rie, lorsqii'après le 9 thermidor onaballil
l'espèce de monument qu'on lui avait
élevé sur cette place.
LEB
540
LEB
LEANDRE ( sainl ) , fils d un gouver-
neur de Carthagène , vers le milieu du
e'^ siècle, embrassa d'abord la vie mo-
nastique , et fut ensuite archevêque de
Séville , où il célébra un concile. Il tra-
Jvailla avec beaucoup de succès à la con-
version des ariens de son diocèse , opéra
plusieurs conversions, entr'autres celle
d'Herménégilde , et fut condamné à l'exil
par le roi Leuvigilde qui fit mourir le
jeune prince Herménégilde. Mais ce mo-
narque rappela bientôt l'archevêque à
Séville, et lui recommanda d'instruire
dans la religion catholique Récarède son
fils. Il assista avec éclat au concile de
Tolède en 589 , qu'il présida , et mourut
le 27 février 596. Quelques-uns lui attri-
buent le Rite mozarabîque. ( V. ORTIZ
Alphonse. ) Saint Grégoire le Grand lui
dédia ses Morales sur Job , qu'il avait en-
treprises à sa persuasion. On a de saint
léandre une Lettre à Florentine sa sœur ,
qui renferme des avis fort utiles pour les
religieuses. On la trouve dans la Biblio-
thèque des Pères , ainsi que son Discours
sur la conversion des Goths ariens , in-
séré aussi à la fin des Actes du 3' concile
de Tolède.
LÉANDRE (le Père), capucin, mort
à Dijon , son pays natal , en 1667, com-
posa plusieurs ouvrages qui lui firent un
nom. Les plus accueillis sont : ] les Vérités
de l'Evangile , 1661 et 1662 , Paris , 2 vol.
in-fol. I et un Commentaire sur les Epitres
de saint Paul, 1663, 2 vol. Ce dernier
est en latin.
LABACICCÏ. Voyez BACICCI..
* LEBARBIER ( Jean-Jacques-Fran-
çois), peintre distingué, membre de la
classe des beaux-arts de l'institut, et de
plusieurs académies et sociétés savantes ,
né à Rouen, le 11 novembre 1738, mort
à Paris lo 7 mai 1826 , à 87 ans , avait
appris les élémens de la peinture dans les
écoles royales de Normandie, et rem-
porté en 1755 et 1756, les prix au con-
cours de l'académie de Rouen. Il reçut
ensuite à Paris les leçons et les conseils
de M. Pierre, premier peintre du roi, et
directeur de l'académie. Lebarbier alla
passer quatre ans à Rome , et pendant ce
temps il recueillit une fou\e de beaux
dessins d'après les grands maîtres, dont
presque tous ont été gravés. En 1776, le
gouvernement le chargea d'aller lever en
Suisse, des vues et des dessins, pour le
magniiique ouvrage de M. Zurlauben,
qui a pour titre Tableaux topographi-
ques, etc., de la Suisse, 1780-88, 4 vol.
in-folio ; c'est pendant ce voyage , qu'il
fit la connaissance du poète Gessner ; a
son retour, il publia une édition fran-
çaise des œuvres de cet illustre étranger,
Paris , Barrois aîné , 1786-1793 , 3 vol. in-
k° , qu'il orna de ses dessins. Parmi les
tableaux de Lebarbier , nous citerons le
Siéffe de Beauvais^ 1772, qui le fit ad-
mettre à l'académie de peinture et lui
valut le titre de citoyen de la ville de
Beauvais qui possède cette composi-
tion : le Siège de Nancy > placé dans
l'Hôlel-de-Ville de celte cité ; Jupiter sur
le Mont-Ida^ dans la galerie de Ver-
sailles; Aristomène ^ dans le château de
Compiègne; saint Louis prenant l'ori-
flamme^ et V Apothéose de saint Louis j
tous deux à saint Denis; un Christ^ au-
dessus du maître-autel de la cathédrale
de Sens ; Sully aux pieds de Henri IV ^
aux Gobelins; Le Tombeau des Cana-
diens, etc. Cet artiste avait autant d'in-
struction que de modestie , et fut un des
premiers peintres de notre nouvelle
école , qui s'attachèrent aux règles inva-
riables du bon goût. On a aussi de lui
l'opuscule suivant : Des causes physiques
et morales qui ont influé sur les progrès de
la peinture et de la sculpture chez les
Grecs, 1801, in-8°. On a publié le Cata-
logue des tableaux , dessins , etc., prove-
nant de la bibliothèque de feu M. Lebar-
bier, membre de l'institut, par Piéri-Bc-
nard , Paris, 1828, in-8° de 62 pages , pré-
cédé d'une courte notice sur ce peintre.
* LEBAS (Pierre) , né à Frévent en
1760, d'une famille estimable, venait
d'être reçu avocat lorsque la révolution
française éclata : il en adopta les prin-
cipes, et fut nommé en 1790, adminis-
trateur de son département. Elu député
du Pas-de-Calais à la Convention na-
tionale , il y vola la mort de Louis XVI ,
sans appel et sans sursis, et, s'il ne se
prononça en faveur des attentats des 51
mai, 1*"" et 2 juin, qu'avec une sorte de
réserve, celte apparente modération te-
nait beaucoup moins à la droiture de sa
raison qu'à des formes naturellement
timides et réservées. Le 14 septembre
1793, il fut nommé membre du comité
de sûreté générale. Lié d'une amitié
étroite avec Sainl-Just et Robespierre,
il puisa dans ces âmes atroces cette fé-
rocité qui n'était point lo caractère de
la sienne. Chargé successivement de mis
sions dans les départemens du Pas-de-
Calais, de la Somme, du Haut et du Bas-
Rhin, sa tpannic devint si épouvanta-
LEB
34i
LEB
Lie , qu'un grand nombre d'Alsaciens se
réfugièrent dans la Forêt-Noire , que les
cIiaiTips et les ateliers furent abandonnés,
et que plusieurs communes demeurèrent
désertes. Quoique ami de Robespierre et
de Sairit-Just, il aurait peut-être échappé
à l'arrêt de condamnation qui les frappa ,
bI son fanatisme aveugle ne l'avait en-
traîné à sa perte. A peine eut-il entendu
décréter l'arrestation de ces deux révolu-
tionnaires , qu'il s'écria « qu'il ne vou-
* lait pas partager l'opprobre de ce dé-
» cret , et qu'il demandait la même me-
» sure contre lui-même. » Elle fut en
effet portée à l'instant. Arrêté et conduit
avec ses collègues dans une des prisons de
Paris, il fut délivré avec eux, et entraîné
à la commune insurgée contre la Conven-
tion, et qui se préparait à marcher contre
elle. Dans la séance du 9 thermidor , il
fut mis hors la loi ; mais au moment où
il allait être arrêté par la troupe con-
ventionnelle, commandée par Beurnon-
ville , il se tua d'un coup de pistolet , dans
la nuit du 24 juillet 1794 , pour ne point
tomber au pouvoir de ses ennemis.
LEBAUD ( Pierre ). Ployez BAUD.
LEBBÉE. yoyez JUDE (saint).
LEBEAU. royez BEAU.
*LEBERRIAYS ( RÉxÉ ), agronome, né
àBrecey,prèsd'Avranchesen 1722, mort
à Avranches le 7 janvier 1807 , était issu
d'une famille de propriétaires cultiva-
teurs, et étudia à Avranches et à Vire. On le
destinait à l'état ecclésiastique. Mais il n'en
reçut que les premiers ordres. On a de lui
un Traité des jardins^ ou le nouveau La
Qmntinie^V&vis, 1773, 2 vol. in-8°,dorit il
donna lui-même un abrégé sous le titre de :
Le petit La Quintinie ^ Avranches , 1791 ,
in-18.Leberriays, s'occupa presque exclu-
sivement d'agriculture , et surtout des
soins à donner aux arbres fruitiers ; on
lui doit presque en entier le Traité des
arbres fruitiers , qui parut en 1768 , sous
le nom de Duhainel-Dumonccau. Joi-
gnant la théorie à la pratique , il fit une
foxile d'expériences curieuses , et parvint
à obtenir plusieurs variétés de fruits, et
notamment des cerises remarquables par
leur grosseur et leur goût délicieux. Il
taillait lui-même ses arbres , et soignait
ses It gumes. Il avait composé un Traité
sur les haricots^ orné de 49 planches en-
Imninées, dont il avait fait présent à
M. Barcnton, d' Avranches, et qui est
resté manuscrit. Pendant les orages de la
révolution, il fut obligé de se cacher à
Rouen; il revint en 1794 , au Bois-Guérin,
et reçut , en 1800 , l'hommage honorable
des médailles d'or décernées par la so-
ciété d'agriculture de Paris , à ceux qui
avaient été le plus éminemment utiles à
quelques parties de cet art. M. Lair se-
crétaire de l'académie de Caen, a publié
son Eloge , Caen , 1808 , in -8°.
LEBEUF. royez BŒUF.
LEBID , le plus ancien des poètes ara-
bes qui ont vécu depuis l'origine du ma-
hométisme. Mahomet employa sa muse à
répondre aux chansons et aux satires
que les poètes arabes lançaient contre lui.
Ce prophète disait que la plus belle sen-
tence qui fût sortie de la bouche des Ara-
bes était celle-ci de Lebid : Tout ce qui
n'est pas Dieu^ n'est rien. Celle de saint
François, Deus meus et omnia^ est
néanmoins plus énergique et plus simple.
Le versificateur arabe mourut âgé , dit-
on , de 140 ans.
LEBLANC. F. BEAULIEU et BLANC
(le).
LEBLANC (Marcel), jésuite , né à
Dijon en 1653 , fut un des 14 mathémati-
ciens envoyés par Louis XIV au roi de
Siam. Il travailla à la conversion des Ta-
lapoins , et s'embarqua pour la Chine ;
mais le vaisseau sur Içcpiel il était , ayant
été battu i>ar la tempête , le père Leblanc
reçut un coup à la tête , dont il mourut
en 1693 , à Mozambique. On a de lui :
Y Histoire de la révolution de Siam en
1688, Lyon , 1692, 2 vol. in-12, avec un
détail de l'état présent des Indes. Cette
relation est exacte ; le 2' vol. offre plu-
sieurs remarques utiles aux navigateurs.
LEBLANC DE BEAULIEU , évêque de
Soissons , Voyez BEAULIEU.
* LEBLOND ( Auguste - Savinieiv ) ,
mathématicien, mort à Paris, le 22 février
1811. Il fut im de ceux qui contribuèrent
le plus à l'adoption des nouvelles mesu-
res , et proposa le premier en 1790 de
désigner les mesures linéaires par le nom
de mètre. Il inventa aussi un cadran lo-
garithmique adapté aux poids et mesures ;
mais \'arithmo(jraphe ^ autre instrument
dans le même genre , inventé par M. Gat-
ley, a obtenu la préférence. On a de lui,
outre divers ouvrages sur les mesures :
I Le Portefeuille des enfans, mélange in-
téressant d'animaux , de fleurs , fruits ,
habillemens, cartes , etc. , avec de courtes
explications et divers tableaux élémen-
taires, Paris, 1784, in-4°. Cet ouvrage,
très estimable , publié par cahiers , dont
le 22" était sous presse en 1798 , n'a pas
été terminé. Le texte a été imprimé à
29.
LEB 5
part, sous le litre de Livret du Portefeuille
des enfans, 1798 , 2 vol. in-18 ; \ Dic-
tionnaire abrégé des hommes célèbres de
l'antiquité et des temps modernes^ 1802,
2 vol. in-12.
LEBLOND. T^oyez BLOND.
• LEBLOND ( Gaspauo-Michel ), savant
antiquaire, rué à Caen, le 2i novembre
1758, embrassa l'état ecclésiastique, et
ne tarda pas à se faire connaître par des
travaux importans, sur des médailles, et
quelques autres objets d'antiquités. En
1772 , il fut reçu à l'académie des inscrip-
tions. Nommé peu auparavant sous-biblio-
thécaire du collège Mazarin , il remplaça
pendant la révolution, dans la place de
conservateur en chef de cette biblio-
thèque , l'abbé Hooke, qui a";aît refusé en
17'J1 , le serment que l'on exigeait des
fonctionnaires publics. Leblond fut char-
gé, en qualité de membre de la commission
des arts , du dépouillement des archives
et des bibliothèques des anciennes maisons
religieuses, et enrichit la bibliothèque Ma-
r.arine d'environ 50,000 volumes (i). Lors
de la première organisation de l'institut ,
il devint membre de la classe des anti-
quités. L'abbé Leblond quitta Paris, à
l'époque de l'établissement du gouver-
nement impérial , et se retira dans la pe-
tite ville de l'Aigle . où il est mort le 17
juin 1809. On a de Leblond des mémoires
insérés dans le Recueil de l'académie des
Inscriptions, et dans celai de l'institut.
Ses principaux ouvrages sont : | Obser-
vations sur quelques médailles du cabinet
de M. Pellerin. Paris, 1771, in-4" ; la
bibliothèque du roi possède un exemplaire
de cet ouvrage , enrichi de notes parti-
culières de M. Pellerin lui-même ; | avec
l'abbé Lachau , Description des princi-
pales pierres gravées du cabinet du duc
d'Orléans . Paris, 1780-84, 2 vol. in-4°,
ouvrage précieux et très estimé des sa-
vans; | dans le Journal de Paris, plu-
sieurs ZeWres en faveur des inscriptions en
langue latine ;! un index poin- le Mémoire
sur yénuSj. par Larcher, in-12, et autres
opuscuks. Imbu des désolantes doctrines
de l'athéisme , il consacra plus d'une fois
son érudition au développement de ses
principes irréligieux , et a eu une grande
part à la puJblicalion du livre de V Origine
de tous les cultes, de Dupuis; il passe
pour l'éditeur des Motiumens de la vie
privée des douze Césars et des dames
(i) Voyer la R,»,!i' ,
»&►>. »îH, :i6i>
c!ope\îi'j':c dti
42 LEB
romaines, recueils infâmes , Caprée
( Paris ) , 1780 et 1784. Il avait composé
plusieurs autres ouvrages qui étaient en
manuscrit , mais il les a brûlés quelques
jours avant sa mort , dans un accès de
lièvre violente.
• LEBOIV ( JosEPu) , membre de la
Convention , un des plus cruels révola-
tionnaires , naquit à Arras , en 1765 ,
d'une famille pauvre, et fit de bonnes
études dans sa ville natale. Son éducation
fut toute chrétienne ; Lebon entra dans
la congrégation de l'Oratoire , reçut les
ordres , et se fit remarquer par la régula-
rité de ses mœurs, et sa ferveur religieuse.
Après avoir professé la rhétorique à Dijon,
il eut avec ses supérieurs quelques dé-
mêlés , à la suite desquels il quitta sa
congrégation. Il fut nommé curé consti-
tutionnel de Neuville , et il recueillit chez
lui ses parens qui étaient sans ressources.
Lorsque la révolution éclata , il s'en
montra zélé partisan, et se lia d'une étroite
amitié avec Robespierre , Guffroy , Saint-
Just, Lebas, etc. Cependant Lebon n'an-
nonça pas d'abord le caractère féroce, qu'il
montra dans la suite. On le vit, à Arras
dont il avait été nommé maire, en 1791 , se
prononcer , après le 10 août , contre les
attentats de cette journée. En septembre
suivant, il fit chasser de la ville les com-
missaires envoyés par la commune de
Paris , pour justifier les massacres commis
dans les premiers jours de ce mois, et
inviter les départemens à en faire autant ;
et dans plusieurs autres fonctions qu'il
remplit, quoique l'on vît toujours en lui un
partisan des mesures nouvelles, il donna
des preuves d'une modération qui était
loin de faire pressentir ce qu'il deviendrait
plus tard. Lebon avait été nommé succes-
sivement procureur -général -syndic du
département du Pas-de-Calais , et député
suppléant à la Convention nationale; il
ne siégea toutefois dans cette, assemblée ,
qu'après la mort de Louis XVI. Lebon
remplit ensuite deux missions différentes
dans les départemens de la Somme et du
Pas-de-Calais. Dénoncé par son collègue
Guffroy , comme un modéré et comme
incapable d'exécuter des mesures de salut
public^ il fut mandé au comité de ce
nom , on il reçut de vifs reproches sur
sa conduite pusillanime, fut traité da
patriote sans énergie , et menacé de la
haine du comité , si désormais il proté-
geait les conspirateurs et les ennemis Je
la république. Ces reproches produisirent
I leur effets Lebon fut renvoyé à Arras
LEB 5
pour y mettre â exécution le système ré-
volutionnaire adopté par les décemvirs ;
et ce prêtre apostat ne fut plus qu'une
bête féroce altérée de sang. H établit dans
cette ville un tribunal révolutionnaire ,
dans lequel furent nommés par lui juges
et jurés son beau-frère , trois oncles de
sa femme ( Lebou fut un des premiers
ecclésiastiques qui rejetèrent le célibat ),
et tous les hommes sanguinaires qu'il put
trouver. Il annonçait d'avance la mort
inévitable des accusés , et , quelque sou-
mis que fussent les juges qu'il avait choi-
sis , il lui arriva souvent de casser leurs
arrêts quand il les trouvait trop doux , et
d'envoyer le soir, à l'échafaud, ceux
qu'ils avaient acquittés le matin, il était
vêtu comme un homme de la lie du peu-
ple , et armé de pistolets et d'im sabre
nu , n'ayant point de maison à lui , il
s'installait successivement dans celles des
plus riches citoyens qu'il avait fait con-
damner à mort. Un des plus paisibles
habitans fut envoyé à l'échafaud , parce
qu'il avait un perroquet , dans le jargon
duquel les agens de Lebon avaient cru
reconnaître les mots de Vive le roi. On
parla sérieusement de guillotiner le per-
roquet lui-même , que la femme de Lebon
pût seule sauver, en promettant de lui
apprendre à dire : Vive la montagne! Il
lit tout à la fois parade d'apostasie , de
libertinage , de cruauté , et se vanta
d'avoir acquis une réputation incompa-
rable de scélératesse parmi les commis-
saires de la Convention. Chaque jour ,
après son diner , il se plaçait sur son
balcon, et assistait au supplice de ses
victimes. Un jour, il fit suspendre l'exé-
cution de l'une d'entre elles , déjà liée
sur l'échafaud , pour lui faire donner
lecture des nouvelles qu'il venait de re-
cevoir de l'armée , « afin , dit-il, qu'elle
» allât annoncer chez les morts les
» triomphes de la république. » Il fit pla-
cer des musiciens près de l'échafaud , et
ordonna au tribunal qu'il avait formé ,
de juger tous ceux qui étaient distingués
par leurs richesses , leurs vertus ou leurs
talens. Dans les spectacles , il publiait la
loi agraire , le sabre à la main , et excitait
le peuple au meurtre et au pillage. Do
jeunes filles , contraintes de se livrer à sa
lubricité , passèrent de ses bras sur l'é-
chafaud. Il enseignait aux valets à dé-
noncer leurs maîtres ; aux femmes, leurs
maris ; aux enfans, leurs pères, et me-
surait ses récompenses sur l'importance
de lo dénonciation. En un mol, il n'est pcut-
43 LEB
être pas de forfait dont ce monstre n'ait eu
la pensée , et de la pensée à l'exécution il
n'y avait point d'intervalle. Il fut dénoncé
plusieurs fois ; mais, toujours protégé par
ses confrères , il échappa trois fois à la
peine due à ses crimes ; le 9 thermidor
vint mettre fin à ses fureurs : à peine
était-il entré dans le sein de l'assemblée ,
qu'une députalion des habitans de Cani-
brai , vint l'accuser à la barre : aussilô
un grand nombre de membres se levèrent,
et prirent la parole contre lui. Lebon
chercha à se justifier , en rejetant sur
tous ses collègues , les crimes dont il
disait n'avoir été que l'agent : un pareil
moyen de défense ne put être accueilli.
Décrété d'accusation le 27 juillet 1795 ,
il fut traduit au tribunal criminel du dé-
partement de la Somme , et y fut con-
damné à mort le 13 vendémiaire an 4
( 5 octobre 1795 ) , le jour même où son
parti triomphait à Paris, et lorsqu'une
amnistie prononcée par la Convention ,
allait l'absoudre de tous ses forfaits. Ivre
d"eau-de-vie à l'instant où on le conduisit
au supplice , ce misérable avait conservé
encore assez de présence d'esprit pour
s'écrier lorsqu'on le revêtit de la chemise
rouge : a Ce n'est pas moi qui devrais
» l'endosser ; il faudrait l'envoyer à la
» Convention , dont je n'ai fait qu'exé-
n cuter les ordres. » Il n'était encore âgé
que de 50 ans. Guffroy a publié les Mé-
moires secrets de /, Lebon et de ses com-
plices ^ Paris 3 vol. in-S".
LEBOSSU. P^oi/ez BOSSU.
LËBOUCIIER (Odet-Jolien), cheva-
lier de la i.égion-d'honneur , naquit le 13
juin 17/i/t ; il est mort au commencement
d'octobre 182(3 , laissant une Histoire de
la dernière guerre entre la Grande-Bre-
tagne et les Etats-Unis de l'Amérique .
la France^ l'Espagne , etc. Paris. 1787,
in-4°.
LEBOUCQ. Voyez BOUCQ.
* LEBRASSEUR ( J.-A. ) , intendant de
Saint-Domingue et des deux conseils su-
périeurs du cap , né en 4745 à Rambouil-
let , entra en 1762 dans l'administration
de la marine et des colonies. Son zèle et
ses talens le portèrent successivement aux
places de commissaire des colonies , d'or-
donnateur à Gorée , d'administrateur
général , et enfin de commissaire en 1774.
En 4779 il fut élevé à l'tnlendance dy
Saint-Domingue , et à la présidence des
deux premiers conseils supérieurs du
cap. En 1784, on le nomma commissaire-
général des colonies , et , peu de temps
LEB 5U
après , ordonnateur faisant les fonctions
d'intendant. Le 1" avril 1788 , Lebrasseur
obtint le titre d'intendant -{jénéral des
fonds de la marine et des colonies , et
remplit cette place importante jusqu'à sa
suppression par l'assemblée Constituante.
Il avait été choisi, en 1792, par Louis XVI,
j)Our ministre de la marine ; mais le con-
seil, ennemi des nouveaux principes , fit
tomber le choix du monarque sur Lacoste.
Lebrasseur qui possédait de grandes
connaissances sur la marine , aurait pu
faire un bon ministre. Il fut plus tard
arrêté comme suspect , et condamné à
mort le i5 juin 1794. On a de lui : | De
l'étal de la marine et des colonies ^Varis,
1792, in-S"; | De l'Inde, ou Réflexions
sur les moyens que doit employer la
France . relativement à sespossessiojis en
^siô. Paris, 1790-1793 , in-8°.
• LEBRETON ( JoACHiM ) , ancien se-
crétaire de la classe des beaux -arts à
J'uietitut , né à Saint-Méen en Bretagne ,
le 7 avril 1760 , d'un maréchal-ferrant
qui avait une famille nombreuse , fit ses
études d'une manière brillante , dans un
collège où on lui avait fait obtenir une
bourse , et entra dans l'ordre des théa-
tins qui l'envoyèrent professer la rhé-
torique dans un de leurs collèges à
Tulle ; il était prêtre depuis plusieurs
années lorsque la révolution l'éloigna du
ministère ecclésiastique. Il s'occupa d'a-
bord uniquement de science et de litté-
rature , épousa la fille aînée de M. d'Ar-
cet , directeur des monnaies , et occupa la
place de chef de bureau des beaux-arts au
ministère de l'intérieur. II fît ensuite partie
du tribunal où il resta à peu près inconnu,
et enfin devint secrétaire de la classe des
beaux-arts de l'institut. Ces fonctions le
mirent en rapport avec beaucoup d'ar-
tistes célèbres dont il se concilia l'amitié
Lebreton était aussi membre de la classe
de littérature et d'histoire ancienne. Exclu
de l'une et de l'autre à la seconde restau-
ration , il partit en 1816 pour le Brésil avec
une colonie d'artistes , peintres , sculp-
teurs, architectes et graveurs , afin d'in-
troduire le goût des beaux-arts dans le
Nouveau Monde ; mais il mourut à Rio-
Janeiro , le 9 juin 1819 : sa mort dérangea
les espérances de ses compagnons de
voyage , qui sont rentrés pour la plupart
en France. Ses principaux ouvrages sont:
! Z ogiqxie adaptée à la rhétorique , in-B",
impriuiée à Tulle , pendant son profes-
sorat ; I Rapport sur l'état des beaux arts.
ii'iO, pour le concours des prix décen-
LEB
naux ; [ plusieurs Notices qu'il a rédigées
comme secrétaire de la classe de l'institut
à laquelle il appartenait , et des Eloges
historiques qu'il a prononcés à l'occasion
de la mort d'un grand nombre de ses
membres. On a encore de lui une Notice
sur Raynal dans la Décade philosophique,
et beaucoup d'articles dans différons jour-
naux. Barbier lui attribue aussi V Accord
des vrais principes de l'Eglise, de la mo-
rale et de la raison sur la constitution
civile du clergé par les évéques constitu-
tionnels. 1791 , in-8° ,
LEBRIGANT. Voyez BRIGANT.
LEBRIXA. Voyez ANTOINE NEBRIS-
SENSIS.
LEBRUN. FbytfjîBRUN.
• LEBRUN ( Ponce - Denis ECOU-
CHARD ) , poète lyrique , né à Paris en
1729 , fit ses études au collège Mazarin ; il
dut sa première éducation aux soins du
prince de Conti (le grand prieur), dans
la maison duquel il était né , et à la per-
sonne duquel son père était attaché. Ce
prince le nomma de bonne heure secré-
taire de ses commandemens. Marié à une
épouse aimable , vertueuse et spirituelle ,
qu'il a célébrée sous le nom de Fanny .
Lebrun aurait pu jouir pendant toute sa
vie du bonheur qu'il goùla auprès d'elle
pendant 14 ans ; mais il ne sut point mé-
nager assez long-temps cette bonne intcl-
Ugence. En 1774, son épouse le quitta
et plaida en séparation ; il eut la douleur
de voir sa mère et sa sœur déposer contre
lui dans ce procès. Le jugement de sépa-
ration fut rendu par le Châtelet , et con-
firmé en 1781 par le parlement. Né avec
un caractère fier et irascible , le poète
se vengea de ses juges , et , ce qui est
plus impardonnable encore, de ses parens
par les épigrammes les plus mordantes.
Le prince de Conti mourut peu de temps
après. Il ne resta à Lebrun pour toute
fortune qu'une faible pension de 1500 fr.,
qui fut bientôt réduite à 1000 francs, La
banqueroute du prince de Rohan , sur
lequel il avait placé le reste de ses fonds,
qui consistait en une somme de 18,000 fr.,
acheva de le ruiner. La fortune , long-
temps cruelle, lui sourit enfin. M. de
Calonne , nouvellement appelé au con-
Irôle-général des finances, et à qui le
comte de Vaudreuil avait recommandé
Lebrun, lui fil accorder par le roi une
pension de 2000 livres, et reçut de la
reconnaissance du poète des éloges et des
vers. Louis XVI lui-même fut à celte épo-
que le noble sujet de ses chants; mais l'on
LEB
545
LÈB
vit bienlôt que la muse de Lebrun s'atta-
chait plus au bienfait qu'au bienfaiteur.
La révolution vint , et Lebrun en fut un
des partisans les plus exaltés ; il ne perdit
pas son enthousiasme , même au temps
de la terreur. Il fut le poète de la déma-
gogie, etobtintdela Convention un loge-
ment au Louvre. Il modéra ses opinions
lorsque les temps furent eux-mêmes plus
modérés , et finit par brûler son encens
devant le premier consul, après avoir
vomi mille diatribes contre la tyrannie
des rois , et célébré en vers pleins d'en-
thousiasme et d'énergie ce qu'il appelait
la liberté. En 1800 , il obtint une pension
de 6,000 fr., entra à l'institut lors de sa
formation , et fut un des deux membres
choisis par le Directoire pour former la
section de poésie dans la classe de litté-
rature et beaux-arts ; il fut aussi créé
membre de la légion-d'honneur. Depuis
long-temps sa vue s'affaiblissait considé-
rablement: et il était devenu presque
aveugle, lorsqu'il succomba le 2 septembre
1807. Lebrun possédait au suprême degré
l'énergie, l'enthousiasme , l'élévation ,
et surtout ce que Von nomme la couleur
poétique ; mais son élévation tient quel-
quefois de l'enflure , et sa hardiesse du
néologisme. Il s'était déclaré poète de
bonne heure : à l'âge de douze ans, étant
encore au collège Mazarin , il fit des vers
qui annonçaient déjà ce qu'il serait un
jour. Il reçut les conseils du fils du grand
Racine , et il les suivit , en ne prenant
pour modèles que les anciens. C'est en
marchant par cette route qu'il s'est élevé
au rang de nos premiers lyriques, et a mé-
rité le surnom de Pindare finançais. Parmi
ses œuvres , on remarque VOde qu'il
adressa au jeune Racine qui , désespérant
de pouvoir suivre les traces de son aïeul,
avait quitté la carrière des lettres pour
celle du commerce : le poète lui reproche
cette espèce d'apostasie dans une pièce
élincelante de beautés, quoique inférieure
à celle dans laquelle il déplora peu de
temps après la mort de ce même ami ,
englouti à Cadix , dans un débordement
de la mer ; désastre occasioné par le
terrible tremblement de terre qui ren-
versa une partie de la ville de Lisbonne
en 1755. Lebrun marchant sur les traces
de Til)ulle chanta ses peines et ses plaisirs
dans des élégies qui portent l'empreinte
d'un grand talent: mais on a dit de ce poète,
que si ses élégies ont été dictées par son
cœur, ce cœur était plus irritable que sen-
sible, et que son amour ressemblait plus
aux fureurs d'Alcée qu'à la tendrcsSe de
Sapho. En 1760, il adressa une Ode à l-^ol-
taire.^OMi lui recommander une nièce de
Corneille : on sait que Voltaire écouta la
voix éloquente du poète, et qu'une édition
des deux Corneille rendit l'aisance à l'hé-
ritière du nom de l'un de ces écrivains.
Lebrun avait commencé un Poème inti-
tulé La Nature ^ qui ne fut point achevé;
il n'en reste que des fragmens. Il en avait
encore entrepris un autre , qui avait
pour titre les Feillées des muses ^ et qui
ne fut pas non plus terminé. Les odes
et les épigrammes de Lebrun sont ses
principaux titres de gloire. On aime
surtout à citer parmi les premières YOde
sur le vaisseau le Vengeur^ les deux
odes à Buffon, sa traduction de l'ode
Pindarum quisquis^ celle de XExegimo-
numentum^ etc. Lebrun sera sans doute
mieux jugé lorsque les passions politiques
qu'il partageait et qu'il a contribué peut-
être à enflammer par quelques-unes de
ses productions, seront éteintes, lorsqu'il
aura, comme Milton, d'autres lecteurs
que ses contemporains. Quel que soit le
rang qu'on lui accorde par rapport à J. B.
Rousseau, qu'il n'égala pas toujours, et
qu'il surpassa quelquefois, chacim con-
vient qu'il approche de lui dans le genre
épigrammalique. On compte dans le re-
cueil de ses OEuvres jusqu'à 636 épi-
grammes. Si l'on veut avoir celles dont
le génie de Lebrun peut s'honorer, il
faut en retrancher un grand nombre ,
soit parce qu'elles sont relatives à la ré-
volution , soit parce qu'elles portent sur
des faits controuvés, soit enfin parce
qu'elles blessent les mœurs. Ses OEuvres
ont été réunies par M. Ginguené, son
ami, à Paris, 1811, k vol. in-8°, avec
une notice sur sa vie. Le premier volume
contient six livres d'Odes; le second,
quatre livres d'Elégies ^ deux d'Epîtres ^
des fragmens des Veillées du Parnasse
et du Poème de la nature^ des Traduo-
tions en vers^ et enfin quelques Pièces
de la jeunesse de l'auteur; le troisième,
six livres d! Epigrammes et les Poésies
f/2Vc7'5^5; le quatrième enfin, la Carres-^,
pondance de Lcb»un avec Voltaire , Buf-
fon, du Belloy, etc., et plusieurs mor-
ceaux en prose sur divers sujets de litté-
rature. L'éditeur a cru devoir supprimer
plusieurs productions écrites pendant la
révolution , et dont la mémoire n'est
point assez honorable pour Lebrun. Il eût
peut-être niicux fait d'en supprimer en-
core un grand nombre qui, sans nuire à
LEB
546
LEB
la mémoire de l'auteur , pourront peut-
être faire quelque tort à sa gloire litté-
raire. On a publié en 1821 les OEuvres
choisies de Lebî-un , Vdsïs , 2 vol. in-18.
l^'Eloge funèbre de Lebrun a été pro-
noncé par Chénier , qui lui a donné de
nouvelles louanges dans son Tableau de
la littérature française.
•LEBRUIV (Pierre), naquit à Mont-
pellier, en 1761 , et y remplit une charge
de conseiller à la cour des aides , qui fut
supprimée sous la révolution. Il vint en
4791 , se fixer à Paris , et fut nommé juge
à la cour d'appel. Il mourut le 17 novem-
bre 1810. Il a publié un Recueil pério-
dique de causes célèbres , et une traduc-
tion de Salluste^ Paris, 1809, 2 vol. in-12,
qui , sous le rapport de l'exactitude et de
la précision, est une des meilleures que
l'on connaisse. II a aussi coopéré au Jour-
nal du barreau. C'est lui qui , dans la tra-
duction en vers français des poésies d'Ho-
race^ publiée par M. Daru, son beau-frère,
a fourni la version de l'art poétique.
• LEBRUIV (Charles-François), duc
de Plaisance, naquit à Saint-Sauveur-Lan-
delin, près de Coutances, d'une famille
originaire de Bretagne , le 19 mars 1759.
Charles-François, un des sept enfems qu'a-
vait eus Lebrun de la Senière, vint à
Paris, et entra comme pensionnaire dans
le collège des Grassins. Ses heureuses
dispositions et son amour pour l'étude lui
gagnèrent l'amitié de M. Le Beau , son
professeur. Mazéas , à qui l'on doit l'ex-
cellent ouvrage des JElémens de géomé-
trie^ fut *on maître de philosophie au
collège de Navarre. Il y connut un neveu
du père Berthier, jésuite et rédacteur du
fameux Journal de Trévoux. Le jeune
Berthier mit Lebrun en relation avec son
oncle , qui , à ce qu'il paraît , dirigea ses
études , et lui donna le conseil de s'ap-
pliquer au droit naturel. Lebrun se con-
sacra entièrement à ce travail : il s'occupa
aussi de l'examen de l'Esprit des lois du
célèbre Montesquieu. Cet ouvrage, si rem-
pli d'éloges pour le gouvernement anglais,
fit entreprendre à Lebrun le voyage de
Londres ; mais la France se trouvant alors
en guerre contre la Grande-Bretagne , il
passa par la Hollande, dont il étudia le
commerce, les mœu.i et les lois, et se
rendit ensuite en Angleterre , où il fit les
mêmes observations. Pressé par sa famille
de prendre un état , il choisit le barreau ,
et fit ses cours sous M. Lorry, qui lui pro-
cura la protection de Maupeou , dont le
fils était condisciple de Lebrun, et devint
ensuite son protecteur. La famille Mau-
peou jouissait d'une grande considéra-
tion. Le père était vice-chancelier et
gardc-des-sceaux , et le fils président à
mortier au parlement de Paris. Le pre-
mier prit Lebrun pour secrétaire ; mais
les discussions qui s'élevèrent entre lu
cour et le parlement dégoûtèrent Lebrun
de la carrière des lois ; il n'abandonna
pas cependant la place qu'il occupait au-
près de Maupeou ; on le crut même l'au-
teur des Discours prononcés par le prési-
dent lors des querelles du duc d'Aiguillon
avec le parlement. Lebrun avait été nom-
mé successivement censeur royal, payeur
des rentes, et inspecteur-général des do-
maines de la couronne. Il perdit ces em-
plois sôus le ministère du duc d'Aiguillon,
qui remplaça Choiseul , et fut , après la
mort de Louis XV , remplacé à son tour
par Maurepas. Au milieu de ces change-
mens diplomatiques , Maupeou, qui était
devenu chancelier , fut disgracié. Lebrun
s'était marié en 1773, avec m"' de La-
goutte ; il se retira dans sa terre de Gril-
lon, qui avait appartenu au poète Re-
gnard, et y demeura pendant 15 années.
En 1789 , et au commencement de la ré-
volution , il publia un écrit intitulé La
voix du citoyen^ où il se prononce pour
une monarchie constitutionnelle; après
avoir prédit , en quelque sorte , les fu-
nestes événemens d'une révolution où
l'on s'éloignerait de ce principe, il montre
l'anarcliiedans toutes ses horreurs, et s'é-
crie : a Bientôt s'élèvera un homme au-
» dacieux, un nouveau Eevellerdéiermi-
» né, qui, sur les débris de vos anciennes
» formes , établira une constitution nou-
» velle Le vœu général remettra dans
» ses mains toute la pubsance publique ;
» alors sera établi un despotisme légal, et
» nos fers à tous seront rivés au titre
» même de la constitution. «Nommé dans
la même année , par la noblesse du bail-
liage de Dourdan , aux états-généraux , il
y montra, ainsi que dans l'assemblée Con-
stituante, une modération qui ne pouvait
plaiAi aux novateurs. Il parla sur les di'
mesj sur les biens du clergé et sur les as-
signats. Après la session , il fut nommé
membre et président du directoii-e du dé-
partement de Seine-et-Oise, en présida le
directoire, et parvint à calmer les trou-
bles que la disette des grains amena dans
ce département, où le peuple massacra le
maire d'Etampes. Il en fit le rapport à la
barre de l'assemblée Législative, et signala
cet événement comme un résultat de l'a-
LEB
547
LEO
narehie. Après la journée du 10 août
1792 {voyez LOUIS XVI) , il se déiixit de
toute fonction publique, vécut dans la re-
traite jusqu'au 1" septembre 1793, époque
où il fut arrêté comme suspect d'aristo-
cratie, et enfermé dans la maison des Ré-
collets de Versailles ; six mois après il fut
relâché. Emprisonné de nouveau en juin
!79i, il ne dut la vie qu'à la chute de Ro-
J)espierre , qui fut exécuté le 28 du mois
suivant (le 10 thermidor). Cependant Le-
brun ne sortit de prison que trois mois
après celte mémorable époque. Il présida
encore une fois le directoire de Seine-
el-Oise ; et , nommé au conseil des An-
ciens, il devint membre de diverses com-
missions de finances , fit en leur nom des
rapports sur la trésorerie nationale , sur
les monnaies , sur les parens des émi-
grés, etc. Au 18 brumaire, il présidait le
conseil des Anciens, et il parait qu'il n'eut
aucune part aux événemens de cette jour-
née. Cependant, soit que Bonaparte vou-
lût donner au parti royaliste un gage de
sa modération à venir , soit qu'il comptât
sur la souplesse et la timidité du carac-
tère de Lebrun, il le choisit pour son troi-
sième consul. Dans ce poste élevé, Le-
brun laissa la politique à ses collègues
poiu" s'occuper exclusivement des finan-
ces, et c'est à lui que l'on doit le rétablis-
sement de la cour des comptes. Bona-
parte devenu empereur (en 1804), le nom-
ma , dans vn court espace de temps , ar-
chitrésorier , duc de Plaisance , et prince
de l'empire. En 1803, il fut envoyé à
Gènes pour organiser les nouveaux dé-
partcmens. Plusieurs communes de ces
pays se révoltèrent. Lebrun dut alors sor-
tir de son caractère, et montrer une éner-
gie qui, sans répandre une goutte de sang,
produisit un bon effet. Il resta deux ans
dans ces départemens , avec le titre de
gouverneur-général, et parvint à se faire
aimer des Génois. Il présida en 1809 le
conseil électoral du Rhône , et fonda , à
l'académie de Lyon, un prix annuel pour
encourager l'industrie. Louis Bonaparte,
roi de Hollande, ayant abdiqué en 1811,
Napoléon nomma Lebrun gouverneur-
général de ce pays. Il y demeura jusqu'à
la fin de 1813 , lors de la marche des sou-
verains alliés contre Napoléon , laquelle
donna lieu à l'insurrection des villes de
Rotterdam , d'Amsterdam et de la Haye ,
contre les Français. Lebrun revint à Pa-
ria,-et quoiqu'il ne prît aucune part à
l'acte du Sénat qui prononça la déchéance
de Bonaparte, il signa le rappel des Bour-
l)ons. En iSUi , il présida le collège élec-
toral de Seine-et-Oise. Au retour de Na-
poléon , il fut nommé grand-maître de
l'université et pair de France. Louis XVIII
étant remonté su-r son trône en 1815 , ex-
clut Lebrun de la pairie, mais l'y rétablit
en 1819. Il présida le conseil des prisons,
qu'on venait d'établir , et , à l'âge de 80
ans , il y prononça un discours fort re-
marquable. Lebrun est mort en 1824 : il
faisait partie de l'institut ( académie des
inscriptions et académie française). Les
titres de ses ouvrages sont : | la Jérusalem
délivrée,, traduite de l'italien, Paris, 1774,
2 vol. in-8° (anonyme), souvent réim-
primée , nouvelle édition précédée de la
Vie du Tasse (par M. Suard ), Paris, 1813,
2 vol. în-8° ; | V Iliade d'Homère^ traduc-
tion nouvelle en prose , Paris, 1776, 2 vol.
in-12 (anonyme); la même presque en-
lièrement refaite , Paris, 1809, 2 volumes
in-12 ; | X Odyssée d'Homère, Paris , 1819 ,
2 vol. in-12 (anonyme). Le genre de tra-
duction adopté par Lebrun est libre et
poétique : il s'attache bien moins à la let-
tre qu'à l'esprit de l'auteur : mais aucune
idée principale n'est omise, et le caractère
particulier de l'ouvrage original se ré-
fléchit tout entier dans sa copie : quand
on a lu les traductions de Lebrun, on peut
se former une idée générale du génie
de l'écrivain qu'il a traduit.
LEGAT. Voijez CAT (le).
♦ LEC VRPEATIER (C.-L.-F.), pein-
tre et liltérateur , fils d'un architecte de
Rouen ( voxjez CARPENTIER AiVT.-Mi-
CDEL ), naquit en 1730 , et devint profes-
seur à l'école des arts de Rouen : il dut à
son mérite la place de membre corres-
pondant de l'institut et de plusieurs au-
tres sociétés littéraires et savantes. Il est
mort dans le mois de septembre 1822,
après avoir publié les ouvrages suivans .
1 Galerie des peintres célèbres , avec dei
remarques sur chaque maître , i8i0-i82l,
2 vol. in-8° ; 1 Itinéraire de Rov^n ou
Guide des voyageurs , pour visiter avec
intéi-ét les lieux les plus remarquables
de cette ville et des environs , 1816, in-S",
2' édit. 1819 , in-18 ; i Essai sur le pay-
sage, dans lequel on traite des diverses
méthodes pour se conduire dans l'étude
du paysage , suivi de courtes notices sur
les plus habiles peintres en ce genre ^
Rouen, 1817,in-8°.
♦ LECARPEINTIER (Jean-Baptiste) ,
fameux conventionnel, naquit à HeslcviUe
près de Cherbourg (Manche), et était
huissier à Valogne , lorsque la révolution
LEC
5&8
LEC
6ilata. Dans le mois de septembre 1792,
le département de la Manche le nomma
député à la Convention, où il vota la mort
du roi en prononçant un discours où
se révélait un caractère cruel. Il marcha
constamment avec le parti de la Monta-
gne ^ fut envoyé dans les départemens de
la Manche , d'Ile-et-Vilaine et des Côtcs-
du-Nord, et se rendit la terreur de ces
contrées. Pabry donne sur lui d'assez
grands détails dans ses Missionnaires de
1793 ; Montgaillard dans son Histoire de
France, page 43, le cite après Lcbon, qui
fut la terreur d'Arras; Maignet, l'incen-
diaire du Comtat; Collot-d'Herbois cl
Fouché de Nantes , les assassins de Lyon ,
etc. Après la révolution du 9 thermidor
an 2 ( 27 juillet 1794 ) , Lecarpentier
resta confondu parmi les membres silen-
cieux de la Convention, et no se remit en
évidence qu'à l'époqpie de l'insurrection
du premier prairial an 3 (20 mai 1793 ).
Accusé d'être un des principaux chefs de
ce soulèvement , il fut arrêté et conduit
au château du Taureau , situé à l'entrée
du port de Morlaix dans le département
du Finistère : il fut compris dans l'am-
nistie du 3 brumaire an 4, et vécut depuis
dans l'obscurité. Après la seconde restau-
ration il dut sortir de France ainsi que
les autres régicides qu'atteignait la loi
portée contre eux en 1816 ; il fut arrêté à
la fin de 1819, et conduit dans les prisons
de Cherbourg. La cour royale de Caen
renvoya Lecarpentier devant les assises
de Coutances : il se pourvut en cassation
centre cet arrêt; le pourvoi fut rejeté le
G janvier 1820 , et Lecarpentier fut com-
damné le 13 mars suivant, à la peine de la
déportation, comme ayant signé l'acte
additionnel, et enfreint son ban. Enfermé
dans la maison centrale du Mont-Saint-
Michel , il est mort dans ce lieu de déten-
tion le 27 janvier 1829.
* LECCHl ( Jean-Aîvtoine ) , jésuite et
mathématicien célèbre , né à Milan le 17
novembre 1702 , fut professeur de belles-
lettres et d'éloquence aux universités de
Pavie et de Milan, où il remplit ensuite
une chaire de mathématiques. L'impéra-
trice Marie-Thérèse le nomma mathéma-
ticien de la cour en 1739 ; il obtint le
même emploi du pape Clément XIII, qui
le chargea de l'inspection des fleuves des
trois légations de Bologne, de Ferrare et
de Uavenne. Ce savant et pieux religieux,
après avoir survécu à la suppression de
son institut , mourut le 24 août 1776. On
cite parmi ses nombreux ouvrages :
I Theoria lucis, opticam, perspectivatn,
catoptricam ^ dioptricam , compleclens ,
Milan , 1739 ; | Jwertenze ^ etc. , ou Avis
contre l'histoire du probabilisme du père
Gabriel Concina. Einsilden , 1744, in-
4°, etc. ; I Arithmetica univer salis Isaact
Netvionis , sive de compositione et reso-
lulione aiithmetica ^ perpetuis commen-
tariis illustrata etaucta, ibid. , 1732, 3
vol. in-8° ; | Elementa geomelricœ theo-
ricce et practicœ ^ ibid. 1755, 2 vol. in-8°;
1 Elementa trigonoTnetrice, theorico-prac-
ticœ , plance et sphericœ . ibid., 1756,
2 vol. in-8° ; | De sectionibus conicis ,
Milan, 1738, in-8° ; \ lUroslalica. etc.,
ou Hydrostatique examinée dans ses
principes, et rétablie dans ses règles .
sous le rapport des eaux courantes . Mi-
lan, 1765, in-4°; | Trattato . eic. , ou Traité
des canaux navigables, ibid., 1776, in-4°.
* LEGIIAPELIER (Isaac-Réivé-Gdi),
né à Rennes en 1754 , d'un avocat dis-
tingué qui avait obtenu des lettres de no-
blesse sur la demande des états de sa pro-
vince , acquit lui-même une grande ré-
putation au barreau. Il se fit remarquer
dans les troubles qui éclatèrent entre la
cour et les parlemens , et fut député par
le tiers-état à l'assemblée Constituante.
Doué d'une grande facilité à s'énoncer ,
d'un organe sonore et de beaucoup de
lucidité dans les idées , il fut mis au rang
des meilleurs orateurs de cette assemblée,
et se déclara l'ennemi de la magistra-
ture , de la noblesse et des anciennes in-
stitutions. Le 13 mai 1789, il proposa de
sommer les deux ordres privilégiés de se
réunir au tiers-état. Le 13 juillet suivant,
veille de la prise de la Bastille , il s'éleva
contre le rassemblement des troupes ap-
pelées vers Paris, provoqua la formation
des gardes nationales , et se prononça en
faveur de Necker et des autres ministres
disgraciés. Nommé membre du comité de
constitution , il s'opposa à la violation du
secret des lettres ; et le même jour il fit
créer le fameux comité des recherches. -
Il demanda que les députés de tous les
ordres et des différentes provinces ne fus-
sent plus regardés comme les représen-
tans de leur ordre ou d'une province ,
mais comme les représentans de la nation
entière. Pendant les années suivantes il
continua d'attaquer les anciennes institu-
tions, fut accusé d'avoir causé par &t%
lettres l'incendie do plusieurs châteaux
de Bretagne, et rédigea le décret portant
abolition de la noblesse. Il obtint pour
les protestons d'Alsace Je libre exercice de
LEC
549
LÉO
leur culte et les droits de citoyens actifs ,
présenta le plan d'organisation de la haute
cour nationale et du tribunal de cassation,
et prit part à un grand nombre de dé-
crets sur l'organisation judiciaire. Vers
la fin de la session, il parut se repentir
d'avoir trop contribué à ébranler l'édifice
de la monarcliie; il voulut revenir sur ses
pas, et tenta de mettre des bornes à la
trop grande influence des clubs ou socié-
tés populaires. Mais le mal était fait , et
le torrent révolutionnaire trop impétueux
pour pouvoir être contenu. Le rapport
fait par Lechapelier à ce sujet fut dans la
suite le prétexte de sa condamnation. Après
la session il passa en Angleterre, et revint
bientôt à Paris , à l'occasion du décret qui
mit le séquestre sur les biens des absens.
Il y fut arrêté , traduit devant le tribunal
révolutionnaire, et condamné à mort le
22 avril 1794, comme ayant conspiré de-
puis 1789 en faveur de la royauté. Il fut
exécuté avec ses collègues Thouret et d'E-
préménil («oyez EPRÉMÉNIL). Lechape-
lier a concouru, avec Condorcet, à la ré-
daction de la Bibliothèque d'un homme
public. 1790-92, 28 vol. in-8°.
LECHE (N.), mort en 1764, membre
de l'académie des sciences de Stockholm,
professeur d'histoire natm-elle à Abo , a
été le rédacteur d'un ouvrage entrepris
par l'ordre du roi de Suède, et qui a paru
peu après la mort de l'auteur , sous ce ti-
tre : Instruction sur la plantation des ar-
bres et arbrisseaux sauvages ^ etc. C'est
un extrait des ouvrages de Linnée et de
plusieurs autres savans naturalistes, re-
latifs à cette matière.
* LECHELLE (A.-B.) , général des ar-
mées républicaines , était maître d'ar-
mes à Saintes, et vivait dans la pauvreté,
.lorsque la révolution commença. Il
>'enrôla dans les gardes nationales de la
Charente-Inférieure, où son talent pour
l'escrime lui procura d'utiles protecteurs
parmi les militaires. Nommé chef d'es-
cadron du même corps , il fut employé
dans les armées en activité ; de grade en
grade il devint général de brigade . et en-
suite général de division. Lechelle n'a-
vait pour tout talent que l'audace d'un
îventurier qui affronte tous les périls
pour faire fortime. Le ministre Bou-
chotle, qui le protégeait , le fit nommer ,
malgré son incapacité reconnue, général
en chef de l'armée de la Vendée. Il rem-
porta quelques avantages à Mortagne et à
Chollet contre des paysans sans officiers
et sans discipline mais bientôt après,
7.
ayant affaire à des chefs expérimentés, u
fut défait à Laval, où il perdit plus de dix
mille hommes. La Convention, pour se
venger de cet échec, fit arrêter Lechelle ;
il fut conduit à Nantes, et mis eu prison ,
où il mourut de chagrin , ou par suite du
poison qu'il avait avalé , ainsi qu'on le
prétendit dans le temps.
LECRZIKSKA. Foyez MARIE LEC-
ZINSKA.
LECKZmSKI. r. STANISLAS LEC-
ZINSKI.
LECLAIR (Jean-Marie), né à Lyon
en 1697, d'un père musicien, obtint la place
de symphoniste de Louis XIV, qui l'ho-
nora de ses bontés. Après un voyage en
Hollande, il se fixa à Paris , où le duc do
Grammont, dont il avait, été le maître, lui
donna une pension. Leclair jouissait et»
paix de sa réputation et de l'estime des
honnêtes gens, lorsqu'il fut assassiné dans
la nuit du 22 au 23 octobre 1764. Il amé-
liora le premier l'art du violon , il en di-
minua les difficultés , en fit ressortir les
beautés, et il fut le créateur de celle exé-
cution brillante qui distingue nos orches-
tres. Ses ouvrages sont : | quatre livres
de sonates^ dont le premier parut en 1720 :
I deux livres de duo; \ deux de trio;
I deux divertissemens sous le titre de Hé-
créations; \ l'opéra de Scylla et Glaucus.
où l'on a trouvé des morceaux d'harmo-
nie du premier genre.
LECLERC. roy. BRUÈRE , BUFFON ,
JUIGNÉ et SEPTCHÊNES.
LECLERC. Foyez CLERC (le), LES-
SEVILLE et le père JOSEPH.
LECLERC. Foyez JOSEPH LECLERC
DUTREMBLAY.
• LECLERC D'OSTIN (Chahles-Emma-
NUEL ), général français, que son expé-
dition à l'île Saint-Domingue a surtout
rendu célèbre , naquit en 1772 , à Pon-
toise, et appartenait à une famille de
riches commerçans de farines. Entre
jeune au service , il se distingua , en
1792, par quelques traits de bravoure, et
surtout par son enthousiasme révolution-
naire. Adjudant-général en 1793 , il se lia
très intimement avec Bonaparte au siège
de Toulon. Lorsque cette ville eut été re-
prise par les Français , il fut nommé gé-
néral de brigade, et envoyé à l'armée du
Rhin. Le 17 octobre 1794, il fit partie
de la commission du gouvernement en-
voyée dans le Midi , et fut nommé com-
mandant de Marseille lorsque le général
Brune, qui occupait ce poste, fut rappelé
à Paris. Il accompagna Bonaparte en Ita-
30
LEG
550
LEC
lie, et s'y dislingua dans les différentes
batailles qui y furent données , entre au-
tres à Mîncio et à Rovéredo. Envoyé à
Bordeaux pour commander en chef Tar-
inée d'observation de la Gironde , après
qu'il eut formé et organisé cette année ,
il fut ensuite un de ceux qui contribuè-
rent le plus au succès de la révolution du
<8 brumaire. Après avoir paru à l'armée
du Rhin, et s'être distingué à Landshutt,
il fut chargéde conduire celle qui traversa
l'Espagne pour aller soumettre le Portu-
gal, et il força le prince du Brésil de signer
à Badajoz , un traité humiliant, en vertu
duquel le Portugal paya vingt millions à
Bonaparte. Cette stipulation, qui resta se-
crète , enrichit Lucien Bonaparte et Le-
clerc. En novembre 1801 , Leclerc obtint
le commandement de l'expédition en-
voyée à Saint-Domingue. Après de longs
et sanglans combats et des négociations
difficiles avec les chefs de l'insurrection,
il venait d'en désarmer une grande partie
lorsqu'une cruelle épidémie le força de se
retirer à l'île de la 'Tortue , où il succom-
ba, le 3 novembre 1802, à la maladie qui
avait déjà moissonné un grand nombre
de Français. Son corps, rapporté en Eu-
rope, a été inhumé dans sa terre de Mont-
gobert , près Soissons. Le général Leclerc
avait épousé, cnlSOl, Pauline Bonaparte,
mariée depuis au prince Camille Bor-
ghèse. Leclerc avait deux frères plus âgés
que lui ; Louisraîné, fut agent consulaire,
membre du corps législatif, et préfet de
la Meuse. Il mourut en 1821. Le cadet
Loxjis-Nicoi:-as-Ma.riïv , se distingua dans
la carrière des armes. Il mourut le 16 mai
1820, après avoir mérité par ses services
tes grades de maréchal-de-camp, comman-
deur de la légion-d'honneur et .chevalier
de Saint-Louis.
* LECLERC (Jea\-Baptiste), conven-
tionnel, né à Chalonne, vers 1753, fut en-
voyé à la Convention en 1792 par le dé-
partement de Maine-et-Loire , et vota la
mort du roi sans appel et sans sursis ; il ne
prit aucune part à la proscription des Gi-
rondins le 31 mai 1793, donna sa démis-
.sion au mois d'août suivant , et se retira
dans ses foyers. Leclerc vivait étranger
aux affaires politiques , lorsqu'en 179 j , il
fut élu par son département au conseil
des Cinq-cents. Il se fit remarquer dans
cette assemblée par le zèle qu'il mit à la
propagation de la religion théophilanthro-
pique, et proposa en 1797 d'adopter ce
culte; mais après de nombreuses et vives
discussions, sa proposition fut rejetée
Président de l'assemblée le 21 janvier 1709.
il prononça en celte qualité un discours
où il prêcha le régicide , et en déclamant
contre les parjures, menaça le roi de Ka-
ples du sort de Louis XVI. Au mois de
mai de la même année , il sortit du con-
seil, entra au Corps législatif , après le 18
brumaire, et , lorsque ses fonctions légis-
latives eurent cessé, il se retira pour ne
plus reparaître sur la scène politique. Il
n'accepta sous l'empire aucun emploi :
pendant les cent-jours il ne signa point
l'acte additionnel, et il dut à cette circon-
stance de n'être point atteint par l'ordon-
nance du 2i juillet 1816. Leclerc mourut
à Chalonne , dans le mois de novembre
1826. Il était correspondant de la classe
d'histoire et de littérature ancienne de
l'institut de France depuis son établisse-
ment. On a de lui : | Mes Promenades
champêtres ou Poésies pastorales ^ 178C,
in-8°; 2"= édition, 1798, 2 vol. in-12 ; trad.
en allemand par L.-H. Heydenreich,
Leipsick, in-8°; | Essai sur la propagation
de la musique en France , 1796, in-8°:
I divers opuscules, insérés avec ceux de la
Reveillère-Lepaux , sous ce titre : Opus-
cules moraux de X. M. Lareveillère-
Lepaux et J. B. Leclerc; Abrégé de
l'histoire de Spa ( anonyme ), Liège,
1818, in-18.
LÉCLUSE. royez ECLUSE.
* LEGOAT ou LECOUT (Yvës-Marie-
Gabriel-PierkeJ, baron de Saint-Haouen,
contre-amiral et chevalier de St.-Louis ,
né en 1756 ou 1757 , d'une famille distin-
guée de la Bretagne , entra très jeune au
service de la marine, et fit plusieurs cam-
pagnes dans les mers de l'Amérique et
de l'Inde. Nommé bientôt enseigne de
vaisseau, il passa de grade en grade jus-
qu'à celui de chef de division des armées
navales qu'd obtint en 1796. Jeté pendant
la terreur dans la prison de l'Abbaye,
il recouvra la liberté au 9 thermidor. Il
était en 1800 chef d'étai-major de l'amiral
Latouche Tréville. Il fut chargé de mis-
sions importantes, s'en acquitta avec hon-
neur et mérita d'être choisi pour diriger
la grande expédition projetée contre l'An-
gleterre. Parmi les services importans
qu'il rendit alors , on cite la manœuvre
brillante et hardie par laquelle il parvint
à réunir les divisions de Dunkerque et
de Calais, à l'armée combinée dans le port
de Bologne, et le combat naval où il força
les Anglais à la retraite , quoique ceux-ci
fussent supérieurs en nombre. L'année
suivante, Lecoat se distingua de nouveau
LEC 5
par son intrépidité contre les Anglais qui
lançaient des brûlots incendiaires contre
la flottille : il les attaqua, les surprit elles
contraignit encore de se retirer. En 1814
Lecoat fut chargé d'aller présenter à Louis
XVIII à Hartwel les hommages de la ma-
rine française. Il se relira durant les cent-
jours dans une campagne de Normandie,
et après la seconde restauration, Louis
XVIII le nomma contre-amiral, préfet ma-
ritime, et major-général au port de Brest.
11 fut mis à la retraite en 1817, et mourut
le 7 novembre 1826 , à Calais, où il avait
eu le commandement du port pendant
plusieurs années. Lecoat est connu par-
ticulièrement comme inventeur d'un nou-
veau système de télégraphes. Son inven-
tion fut d'abord approuvée par une com-
mission nommée par l'institut , mais elle
fut peu goûtée en France. Ses fonctions
l'empêchèrent pendant quelque temps de
donner suite à son projet; mais il s'en
occupa sérieusement, lorsqu'il fut mis
hors du service , et en 1823 , après plu-
sieurs expériences faites à Paris et au Ha-
vre, il reçut l'ordre de former une bri-
gade télégraphique , qui fut placée à la
suite du duc d'Angoulême dans la campa-
gne d'Espagne. Lecoat espérait tirer de
son système les moyens de diminuer con-
sidérablement le nombre des naufrages.
Il allait, dit-on, partir pour l'Angleterre,
d'après une invitation de capitalistes,
pour mettre à exécution son grand et utile
projet de télégraphie universelle de terre
el de mer, de jour et de nuit , lorsqu'il
mourut. Le télégraphe dont il est l'inven-
teur est le premier dont on se soil servi
la nuit, et l'usage en est si économique
que chacun de ses fanaux ne consume que
pour cinq centimes d'huile par heure. Il
est extrêmement simple, et un de ses prin-
cipaux avantages est de faire connaître
aux navigateurs , pendant la imit, le point
précis où ils se trouvent.
* LECOIÎVTE - PlIIRAVAUX (Mat-
TuiEu), membre de plusieurs législatures,
exerçait à l'époque de la révolution la
profession d'avocat à Saint-Maixent. S'é~
tant prononcé avec empressement pour
le nouvel ordre de choses il obtint la place
d'administrateur du département des
Deux-Sèvres , puis fut nommé député à
l'assemblée Législative en 1791. Le 10 dé-
cembre de cette année, des habitans de
Paris avaient présenté une pétition con-
tre les ministres. Lecoinle la soutint vi-
vement el dénonça lui-même le ministre
Dujwrtail. Après avoir attaqué avec achar-
31 LEC
nément l'évcque de Mcnde, il s'éleva
avec véhémence contre les prêtres inser-
mentés , et contribua de tous ses efforts
à faire rendre le décret de déportation qui
fut prononcé contre eux. Réélu dans le
mois de septembre par le même déparle-
ment à la Convention nationale, il lit dé-
créter que les ministres ne pourraient
être choisis parmi les membres de l'as-
semblée. Sa dénonciation contre Marat,
le 14 octobre , à l'occasion des massacres
de septembre , le lit accuser d'être d'in-
telligence avec le parti des Girondins :
lui-même parut confirmer cette supposi-
tion en votant, dans le procès du roi, en
faveur de l'appel au peuple ; mais il se
prononça ensuite pour la mort sans sursis.
Il se montra encore plusieurs fois en op-
position avec la Montagne^ et appuya la
proposition qui avait été faite d'appeler
contre les efforts réunis de Robespierre
et de Danton une force militaire qui as-
surât l'indépendance de la représentation
nationale : les J/on?«j7narc?s remportèrent
dans cette occasion. Lecointe-Puiravaux,
envoyé en mission dans le département
des Deux-Sèvres , dans le mois de mai
1773 , n'y resta pas long-temps : témoin
des succès des Vendéens à Fontenay, il
se hâta de revenir à la Convention , où il
j'.islifia la destitution de Rossignol , dé-
fendit le général Biron, el s'opposa avec
vigueur à l'adoption de la proposition de
déclarer suspects les marchands qui ven-
draient à des prix élevés les denrées de
première nécessité : aussi faillit-il être
proscrit avec les restes du parti de la Gi-
ronde. Appelé au conseil des Cinq-cents,
il provoqua des mesures rigoureuses de
répression contre les magistrats qui
avaient refusé de prêter le serment de
haine à la royauté ; contre les émigrés,
dont il voulait que les biens et même ceux
de leurs parens fussent séquestrés ; contre
les marchands qui introduisaient des
marchandises anglaises ; contre les écri-
vains et la liberté de la presse, etc. Le-
coinle présida l'assemblée en 1797 : il
en sortit la même année pour occuper la
place de commissaire du Directoire exé-
cutif dans son déparlement, et rentra an
conseil des Cinq-cents en 1798 : à peine
fut-il de retour dans l'assemblée, qu'il parla
contre les émigrés et les chouans, et pro-
voqua les visites domiciliaires qui furent
faites dans Paris et dans toute la France ,
dans le but de les rechercher. Porté de
nouveau au fauteuil le 20 juillet , il pré-
sida les fêtes du 9 thermidor cl du IQ
LEC 5
aoûl, el les discours qu'il prononça dans
Ces deux occasions furent imprimés par
ordre du conseil : il s'opposa avec succès
en 1799 à la mise en accusation de Merlin,
Laréveillèr«-Lepaux et Rewbell , mem-
bres éliminés du Directoire exécutif. A
la suite de la révolution du 18 brumaire
(9 noyembre 1799), il fut envoyé en mis-
sion extraordinaire dans les départcmens
de l'Ouest, où, de concert avec le général
Hédouville, il parvint à négocier un traité
de pacification qui fut signé à Angers.
Tendant son absence il avait été nommé
membre du tribunat. Il y siégea peu de
temps et fut nommé commissaire général
de police à Marseille. En 1805, le gouver-
nement consulaire lui offrit la place d'ad-
ministrateur de la Louisiane que Lecointe
refusa. Il vécut éloigné des affaires jus-
qu'en 1815 , époque à laquelle Bonaparte
le nomma lieulenant-général de police
pour plusieurs déparlemens du midi :
il était à Lyon lorsqu'il apprit le désas-
tre de Warterloo, et il y fut exposé à de
grands dangers. Le gouvernement royal
le maintint dans ses fonctions ; mais Le-
cointe ayant jugé prudent de fuir et de
s'embarquer , fut arrêté en mer par la
flotte de lordExmouth, et jeté ensuite
par la tempête sur les côtes de la Pro-
vence; il erra dans les montagnes, fut ar-
rêté de nouveau et conduit à Marseille.
Il parvint à s'évader et s'enfuit à Bruxel-
les, où il est mort dans le mois de janvier
1827.
LECOINTE. Voyez COINTÉ.
• LECOINTRE (Laurext), connu sous
le nom de Lecointre de Versailles j révo-
lutionnaire subalterne, exerçait, avant
les troubles de 1789 , la profession de
marchand de toiles à Versailles , sa patrie.
Il embrassa les idées des novateurs avec
ime véhémence extrême, et contribua
puissamment à les propager dans une
ville où son commerce et sa fortune lui
donnaient beaucoup d'influence. Lors du
fameux serment du Jeu de paume ( voy,
BAILLY ), il se forma dans la capitale une
société patriotique qui prit le nom de cet
événement, et dans laquelle Lecointre fut
admis. On le voyait tous les jours assister
à ses séances, puis retourner à Ver-
sailles , où il en répandait les doctrines.
On sait que cette société ne tarda pas à
se réunir au club des jacobins. A l'époque
de la formation de la garde nationale de
Versailles, Lecointre en fut nommé
commandant en second , sous le comte
d'Estaing {^voyez ESTAING3; il fut le
^2 LEC
premier dénonciateur du malheureux
repas des gardes-du-corps , qui servit de
prétexte aux attentats des 5 et 6 octobre
1789, et il épouvanta le comte d'Estaing
lui-même par ses déclamations. La mu-
nicipalité de Versailles s'étant dissoute ,
Lecointre, au lieu de calmer l'irritation
du peuple, lui fit distribuer des armes
et des munitions , et excita à la révolte
le régiment de Flandre , qu'on avait fait
venir à Versailles pour empêcher les
émeutes occasionées en apparence par
la cherté des vivres ( voyez DUPORT el
THÉROIGNE ). Il fit ensuite un si grand
nombre de dénonciations , que personne ,
peut-être , depuis 1789 jusqu'à la disso-
lution du Directoire n'a plus dénoncé que
lui. Lors de la formation des autorités ,
en 1791 , il devint président du départe-
ment de Seine-et-Oise, et ce même dé-
partement le choisit pour son député à
l'assemblée Législative. Au mois de dé-
cembre de cette année , il dénonça l'an-
cienne municipalité de Versailles comme
ennemie de la révolution. En 1791 , et
1792 , Lecointre dénonça le ministre de
la guerre Duportail , et ne cessa de dé-
clamer contre les officiers de l'ancienne
armée, contre le ministre Narbonne, et
contre plusieurs particuliers qu'il fît tra-
duire à la haute cour d'Orléans. Il dé-
nonça aussi Théobald Dillon, au moment
même que l'assemblée décernait des hon-
neurs à la mémoire de ce général, assas-
siné à Lille , et proposa de mettre hors do
la loi tous les prêtres qui refuseraient de
prêter serment à la constitution civile du
clergé. Apres la journée du 10 août 1792 ,
dans laquelle il ne figura point , Le-
cointre fut envoyé en qualité de com-
missaire dans le département de la Seine-
Inférieure. Député à celte époque à la
Convention par son département, on l'y
vit s'acharner contre la famille royale. Le
15 décembre , il demanda que Louis XVI
ne pût communiquer qu'avec ses enfans ,
et que ceux-ci ne pussent voir leur mère
ni madame Elisabeth , leur tante, qu'après
le supplice de leur père , dont il vota la
mort sans appel au peuple et sans sursis.
Il reprit ensuite le cours de ses dénoncia-
tions, et le 12 août 1793 , il demanda que
la Convention accélérât le jugement de la
reine, qu'il appelait insolemment ^a^rm»ifi
Capetj et contre laquelle il fut ensuite
appelé à déposer. Lecointre se déclara
contre Robespierre, et il le poursuivit
plusieurs fois de ses accusations et de ses
invectives, notamment le jour où celui-
LEC 33
ci vial déclarer du haut d'une montagne
factice, élevée dans le jardin des Tuile-
ries , que la nation française reconnais-
sait l'Etre suprême et l'immortalité de
l'âme (juin 179/».). Lecointre l'apostropha
continuellement durant celte cérémonie
du cri : A bas le tyran ! et après le 9 ther-
midor, il accusa devant la Convention ses
complices CoUol-d'Herbois , Billaud- Va-
rennes, Barrère et Vadier. Sa dénoncia-
tion qui présentait vingt-six chefs d'ac-
cusation , après trois jours de discussions,
fut déclarée calomnieuse; lui-même fut
obligé de quitter, sur la demande des re-
présentans Bernard et Duhem, le bureau
des secrétaires qu'il occupait , et les jaco-
bins l'éliminèrent , ainsi que Fréron et
Tallien , de leur club , où l'avaient dé-
noncé Carrier et Lacombe. Le 50 no-
vembre , il combattit une proposition qui
tendait à faire emprisonnner les prêtres
qui se trouveraient dans les lieux où il y
aurait émeute. Au mois de mars 1793,
lorsqu'une nouvelle accusation fut inten-
tée contre Billaud Varennes, Collot-
d'Herbois, etc., on le vit avec surprise
prendre la défense de ces mêmes hommes
qu'il avait poursuivis avec tant d'animo-
sité. Il s'opposa , mais sans succès , à la
rentrée des proscrits du 31 mai dans la
Convention, et accusa peu de temps après,
Louvet, Pétion , Buxot , Barbaroux , et
Guadet d'avoir signé un serment pour le
rétablissememt de la royauté. Accusé,
le 5 avril, par Tallien, d'avoir pris part
à un mouvement qui avait éclaté contre
la Convention , il fut décrété d'arresta-
tion , puis dut sa liberté à la loi d am-
nistie du k brumaire an k. Après l'orga-
nisation des deux conseils , n'ayant point
fait partie des deux tiers réélus, il tenta,
plusieurs fois, aux époques des élec-
tions , de gagner les suffrages des élec-
teurs , en couvrant d'une multitude
d'affiches, signées de lui, les murs de
Paris et de Versailles. Il fut compromis
dans l'affaire de Babeuf {voyez ce nom)
et, après la chute du Directoire, quand
le gouvernement consulaire soumit à
l'acceptation publique l'acte constilu-
lionel de l'an 8 , il fut le seul des habitans
de Versailles qui inscrivit un vote né-
gatif. Exilé de celte ville pour quelque
temps, il y revint ensuite et mourut à
Guignes, dans un âge fort avancé, le 4
août 180S. On a de lui : ] Les crimes des
sept membres des anciens comités de sa-
lut public et de sûreté générale , ou Dé-
nonciation formelle à la Cons^ention na-
5 LEC
tionale contre Billaud-P^arenncs ^ Bar-
rère. Collot-d' Herbois^ Vadier. Vouland.
Amar et David, an 3 , iu-S". M. Dulaure
a publié un Supplément aux crimes des
anciens comités du Gouveimement j etc.
I Les abus illimités ^ avec des réflexions
sur l'état présent de la république , 1793,
in - 8° ; | Laurent Lecointre au peuple
souverain^ an 2, in-8'' ; c'est une réfuta-
tation de quelques repooches absurdes
que lui avaient adressés Bourdon et Bil-
laud-Varennes. | Conjuration formée dès
le 6 prairial par neuf représentans du
peuple contre Maximilien JRobespierre
pour l'immoler en plein sénat , an 2 , in-
8°; les neuf conjurés étaient Lecointre,
Barras, Fréron, Courtois, Garnier de
l'Aube, Rovèro, Tallien, Thirion et
Guffroy.
LFXO.^TE. Voyez CONTE.
LECOUUAYER. Voyez COURAYER.
* LECOURBE ( Claude-Joseph ) , lieu-
tenant-général des armées françaises , na-
quit à Lons-le-Saulnier , en 1739 , d'un
ancien officier d'infanterie retiré du ser-
vice. Il abandonna ses études pour s'en-
rôler dans le régiment d'Aquitaine dans
lequel il servit pendant 8 ans , et après
avoir obtenu son congé, il était rentré
dans le sein de sa famille, à l'époque où
éclata la révolution. Nommé commandant
delà garde nationale du canton deRuffey,
puis chef du 7^ bataillon de volontaires
du Jura , il joignit avec ses soldats l'armée
du Haul-Rhin, et ensuite celle du Nord.
II se distingua , avec son bataillon, au
combat de Hondscoote où il lutta contre
doux escadrons hanovriens, dont l'un
resta prisonnier. Il entra le premier , un
fusil à la main , lors du déblocus de Mau-
beuge , dans les lignes de Watignies, et
reçut le grade de chef de brigade. Il com-
mandait à la bataille de Fleurus trois ba-
taillons avec lesquels il soutint pendant 7
heures l'attaque d'une colonne de 10,000
Autrichiens. Lecourbe passa successive-
ment avec le grade d'oflicier-généial dans
les armées de Sambre-et-Meuse, de Rhin-
et-Moselle , du Danube et d'Helvélie , et
actiuit par les talens qu'il déploya une
grande réputation. Il avait combattu avec
Moreau : après la paix de Lunévillc lors-
que ce général fut mis en jugement , Le-
courbe se déclara pour lui , et s'attira la
disgrâce de Bon aparté cpii l'exila à Lons-le-
Saulnier et ensuite à Bourges. Il ne reprit
d'activité que sous la restauration : Louis
XVIII lui conféra successivement les t itres
de grand-officLer de la légion d'honneur
.50.
LEC
35/t
LEC
cl de comte. Ce prince venait de le nom-
mer inspecleuT général-d'infanterie, lors-
que Bonaparte débarqua en France. D'a-
l)ord il se refusa aux instances du maré-
chal Ney qui l'invitait à se ranger du côté
de l'empereur : il vint même à Paris
prendre les ordres du roi. l^Ius tard cepen-
dant il reçut de Napoléon le commande-
ment du corps d'observation du Jura dont
le quartier général était à Béfort. L'ar-
mée de l'archiduc Ferdinand vint l'atta-
quer; beaucoup plus nombreuse que ses
troupes, elle lui enleva, à la fin du mois
de juin , sa première ligne de défense :
maisLecourbe conserva auprès de Béfort
la position de son camp retranché. Il fit
un des premiers sa soumission au roi , et
mourut dans celte ville , le 23 octobre
1815.
*LECOURT (Hk\ri), occupait avant
1789 un emploi à Versailles. Durant les
premières années de la révolution, il se
livra avec un nouveau zèle, peut-être
parce qu'il avait plus de loisir, à son goût
dominant, qui était l'élude de l'instinct
des animaux. Il observa en particulier les
mœurs de la taupe, à cause de l'utilité
qu'il espérait tirer de ses remarques pour
les cultivateurs. En 1800, une digue de re-
tenue ayant fait eau, venait d'clre réparée
d'une manière insuffisante, et elle né-
cessitait tous les jours de nouvelles répa-
rations , lorsque Lecourt constata la pré-
sence de quelques familles de taupes qui
s'étaient établies dans les terres de levée ,
et qu'il fallait détruire avant tout. Il y
réussit, et ce service éveilla l'attention de
l'autorité , qui le mit à même de former
une école pratique de l'art du taupicr. M.
C.adet de Vaux a publié les observations
de ce praticien consommé, dans un ou-
vrage ayant pour litre : De la taupe ^ de
ses mœurs et des moyens de la détruire^
1802, in-12. Lecourt est mort à Ponloise,
en 1823.
LECOQ. Voyez COQ ( le ) et NAN-
QUIER.
*LECOUVREUR( AouiEXXEJ.néeen
1G90 , à Fismes , en Champagne , est une
des plus célèbres actrices qui aient paru
sur la scène française. La nature ne l'a-
vait pas douée des avantages extérieurs ;
mais elle sut s'en passer à force d'âme et
de talent. Elle savait, comme le fameux
Baron , parler naturellement la tragédie,
en évitant également le ton d'une fami-
liarité triviale, et l'emphase de la décla-
mation. Elle jouait aussi dans la comédie ;
mais c'est par la tragédie qu'elle s'est il-
lustrée. Elle excellait dans presque tous
les rôles, surtout dans celui de Phèdre.
Elle mourut d'une violente hémorragie
d'entrailles, le 20 mars 1730. On a cru
qu'elle avait été empoisonnée. Elle a
écrit des lettres pleines de noblesse et do
sentiment. On cite aussi d'elle des vers
agréables et des réparties fort ingénieuses.
* LECOZ ( Claude ) , archevêque de
Besançon , membre de l'académie de cette
ville et de l'académie celtique, naquit à
Plounevez-Porzai, au diocèse de Quimper,
le 22 décembre 1740, et fut professeur au
collège de celte ville, dont il devint en-
suite principal. A la révolution, il en em-
brassa les principes, et se montra patriote
ardent. Ce zèle pour le nouvel ordre de
choses fut récompensé lors des élections
pour les sièges épiscopaux , établis par la
constitution civile du clergé. Lecoz fut
nommé évêque constitutionnel d'Ile-et-
Vilaine, etsacré en cette qualité le 10 avril
1791. Son dévouement lui valut une autre
distinction. Après la clôture de l'assem-
blée Conslituante, son département l'élut
membre de l'assemblée Législative , et il
vint y siéger. Le 3 février 1792, il de-
manda la suppression des associations de
religieux séculiers j qui, dit-il, ont fait
de tous les séminaires des repaires d'a-
ristocraties ecclésiastiques ; mais, en
attaquant les congrégations séculières ,
assurément bien à tort , il fit l'éloge des
congrégations régulières enseignantes,
notamment de celle des doctrinaires. Daiis
la séance du 19 octobre 1791 , il avait pris
la défense du célibat des prêtres, et dans
celle du Ui novembre de la même année,
Isnard déclamant contre les prêtres mser-
mentéSj Lecoz, quoique assermeiue, s'é-
leva contre lui, et qualifia son discours
de code d'athéisme. Enfin , il désapprouva
hardiment la conduite d'un de ses suffra-
gans qui avait fait donner la bénédiction
nuptiale à un prêtre. Il fut mis en prison
sous le règne de la terreur. En 1793, il
reprit ses fonctions épiscopales, et adhéra
aux deux lettres encycliques des évêques
réunis. Il assista au concile qui s'ouvrit le
13 août 1797 dans la cathédrale de Paris,
et le présida. Il tint un synode en 1799,
préliminaire , sans doute , au 2* concile
constitutionnel, ouvert le 29 juin 1801,
et qu'il présida encore. Il s'y opposa au
projet d'un sacramenlaire français^ d'un
abbé Poinsignon, et mit la mémeopposi-'
lion à une motion de Desbois, évêque de
la Somme , pour que le comité adojiiàl et
proclamât une des proposilions condani-
LEC
55S
LEC
nées par la bulle Unigenitus. Un concor-
dat ayanl été signé avec le pape la même
année, et rendu public, en 1802, Lecoz
donna sa démission , et fut nommé à l'ar-
chevêché de Besançon. En changeant de
siège , il ne changea point de senlimens ;
il ne fil point faire les rétractations que
dans d'autres lieux on demandait aux prê-
tres constitutionnels, et gouverna son
diocèse d'après ses anciens principes.
Il consigna même dans un écrit l'apo-
logie de la constitution civile du clergé,
et l'éloge de ceux qui s'y étaient soumis.
Cependant , en 1804, lorsque le pape était
à Paris , il se rendit chez le saint Père
comme les avitres constitutionnels , et il
signa , dit-on , un acte d'adhésion et de
soumission aux jugemens émanés du
saint Siège et de l'Eglise catholique ^
apostolique et romaine,, sur les matières
ecclésiastiques de France. On ajoute
que , dans un entretien particulier avec
le souverain pontife , il protesta avec lar-
mes de sa sincérité. Lecoz ne vit point,
dit-on , la restauration avec plaisir et la
défense qu'il reçut de paraître devant un
de nos princes qui passait à Besançon a
accrédité cette opinion. En mars 1813 , il
fut un des premiers à se déclarer pour Na-
poléon. On assure qu'il cherchait à soule-
ver le peuple contre les alliés , lorsqu'il
mourut le 3 mai 1813 , à Villevieux , dans
le Jura.Ona delui: Accord desvvais prin-
cipes de V Eglise , de la morale et de la rai-
son, sur la constitutio7i civile du clergé
1791, in-12. Quelques uns le disent auteur
de cet ouvrage , quoique le Dictionnaire
des Anonymes . t. 2. p. 492, l'alliibue à
M. Lebreton. \ Lettre pastorale, 1797.
L'auteur y déclame d'une manière indé-
cente et outrageante contre Pie VI, el
l'accuse d'avoir provoqué une guerre de
religion; | des Statuts et P.èglemens pour
sou diocèse dllle-et-Vilaine, 1 vol. in-12:
ils avaient été dressés dans le synode de
1799; I un Avertissement pastoral sur
l'état actuel de la religion catholique ;
I des Observations sur les zodiaques d'E-
gypte , 1802 ; I Défense de la révélation
chrétienne, et preuves de la divinité de
J.-C, contre le Mémoire en faveur de
Dieu, de Delisle de Sales, in-8"; | une
Instruction pastorale du 20 décembre
1813, sxxr l'amour de la patrie , etc. ; | Ob-
servations sur le décret de l'assemblée
pour la constitiition civile du clergé, adres-
sées aux citoyens du Finistère , 1790 :
Lecoz était alors procureur-syndic du dis-
trict de Quimper. L'abbé Barruel réfuta
ces observations dans son Journal ecclé-
siastique, novembre 1790. Il parut aussi
cinq lettres contrôles Observations. \Lettre
aux auteurs de la réponse aux Observa-
tions. ( Voyez la Collection ecclésiastique
de M. Guillon, tome T).\Letlre à M. l'évéque
de Rennes, 2 mars 1791. Il lui annonçait
son élection , parlait de sa perplexité , se
jetait aux pieds de l'évéque , et le conju-
rait de revenir à son troupeau. Réponse
de M. de Girac, du 7 mars, dans la Coll.
ecclés. de M. Guillon, tom. 11 ; | Deuxième
lettre au même , publiée par Lecoz. ( Voy
VOiylonnance, de M. de Girac , du 27 avril
1791 ). I 'DQs3Iandemens,en 1791 et 1792;
\ Préservatif contre l'impiété, dans le ca-
rême de 1793 ; I Lettre sur le célibat ecclé-
siastique : c'est probablement la lettre
adressée au club de Rennes en septembre
1793 ; elle n'a pas été imprimée. Lecoz
assure qu'elle était très forte. C'est peu
après que l'auteur fut arrêté , enfermé à
Rennes, puis au IVIont-Saint-Michel;|Z<?f?r(j
à la Convention, 24 floréal an 2, en
lui dénonçant un arrêté de Carpentier.
Elle est signée Lecoz. évéquc d' llle-et-Vi-
laine , ci-devant membre de l'assemblée
législative, incarcéré par l'ordre de Car-
rier. Elle est insérée dans les Annales du
9 avril 1796; | Lettre sur son élargissement ;
nous croyons qu'on l'a confondue avec \i\
suivante ; I^ettre aux prêtres non-asser-
mentés du diocèse de Rennes , sur leur
élargissement ; 14 pages in-4". Elle est
dans les Annales des Constitutionnels du
4 juUlet 1793 ; | Accordde la religion catho-
lique avec le gouvernement républicain .
1793 , 79 pag. in-S". A la fin est une ré-
ponse au sieur Lefranc, qui avait attaqué
laletlre précédente. \ Aux Amis de la vé-
rité, de l'humanité et de la religion, ou
Lettre au citoyen M... é sur sa déclara-
tion d'être soumis aux lois de la républi-
que, 14 juillet 1793; 43 p. in-S". C'est un
plaidoyer contre les prêtres insermentés.
I Lettre à Real, au sujet d'un article du n°
164 du Journal des Patriotes de 1789,
Rennes, 10 février an 4. C'est une apo-
logie de lareligion contre les déclamations
de ce Journal. Il y a un post-scriptum eu
réponse au n° 181 du même journal : elle
est insérée dans les Annales des Constitu-
tiomiels, n" 20 et 21 ; | Réflexions sur la
lettre de Rallier à Grégoire, 20 pages.
C'est encore une apologie de la religion
contre le .philosojjhe Rallier. Annales .
tom. 5; I Lettre à Bénézech, ministre de
l'intérieur , 29 prairial an 4. Elle n"a que
3 pages, et a pour but de demander que
LEC 5
Ton remie aux communes les presbytères
et les cloches, annales, t. 3 ; [ Lettres aux
Catholiques sur la réti'actatioii de Panis-
set ; 17 pag. Annales^ t, 5 ; | Lettre à Ral-
lier j 20 août 1796 , 14 pag. C'est une ré-
l>lique à Rallier qui avait répondu aux
Réflexions précédentes ; | Réponse à une
lettre cTun auteur célèbre sur la rétracta-
tion de Panisset , 15 janvier 1797 , 27 pa-
pes. Il y a des détails curieux sur sa vie.
L'auteur célèbre était M. l'abbé de Bou-
logne. Annales, t. i ; ] Lettre au rédacteur
>ie s Annales catholiques. Voy. celles-ci,
tom. 2, pag. 363 ; | Lettre à M. de Lorry ,
évêque d'Angers , pour l'invitera repren-
dre ses fonctions ; [Lettre pastorale pour
ordonner un l'e Deum pour les victoires
de la république , citée dans les Annales
cathol.. tom. 3 , pag. 331. Le pape y est
iiidignemeni Ivadlé.Les Annales des Const.
n'en parlent pas ; ] Coup-d'œil philosophi-
que sur les affaires du moment. Cet opus-
cule était anonyme , et avait rapport aux
élections. Annales, tom. 6 ; | Lettre à Gré-
goire sur sa lettre au grand inquisi-
teur, 10 pag. Elle roule sur le mouvement
de la mer. Grégoire y répondit. Voy. An-
nales, totn. 7, pag. 717 ; I Observation sur
le dimanche et le décadi, 30 frimaire an
7 ; 18 pag. Voy. Annales, tom. 8. pag. liS ;
I Justification de plusieurs vérités chré-
tiennes. 26 prairial an 7, 30 p. C'est une
lettre au journaliste Perly. Annales, t. 9;
I Statuts et règlemens d'un synode te7iu à
Rcirnes en août 1799 , avec deux mande-
mens. Le tout forme IGO pages , in-8°. On
imprima à part un extrait du synode sur
la nécessité et le moyen de perpétuer le
sacerdoce ; | Sur une instruction relative
aux indulgences, insérée au tom. 9 des
Annales. La lettre de Lecoz est du 12
octobre 1799 : elle a 12 pages , et relève
quelques erreurs deMauviel, auteur de
V Instruction. Celui-ci répondit. La lettre
et la réponse ne sont point dans les An-
nales; mais elles sont imprimées à la suite
du Précis historique et dogmatique sur
les indulgences, publié sous le nom des
Réunis, en 1800 ; | Aver'tissement pastoral
sur l'état actuel de la religion catholique.
avec des notes ; 46 pages sans les notes.
Une des noies a été réimprimée à part,
sous le titre à' Hoinmages rendus à la re-
ligion par des philosophes modernes. Dé-
claration contre l'emploi de la langue
vulgaire dans la liturgie. 3 décembre 1799,
ime page. Annales, t. 10, p. 121 ; | Lettre
au clergé de Nantes, pour annoncer qu'il
a été nomme à ce siège. Elle est aussi très
o6 LEC
courte. Les Annales reprochent à Lecoz
de n'avoir pas rempli les sièges de Nantes
et d'Angers; | Réflexions sur les causes des
mécontentemens des peuples de l'Ouest,
adressées à Bonaparte, 16 pages. Annales.
t. 10^ p. 307 ; I Lettre particulière sur les
troubles de l'Ouest. 16 janvier 1800 ; 8
p. Annales . 1. 10, p. 358 ; | Observations
sur le décadi, U pages. Annales, loni. 10,
p. 465 ; 1 Lettre sur l'assassinat de l'évéque
Audrein . 5 frimaire an 9. C'était Lecoz
qui avait sacré Audrein à Quimper, le 22
juille 1798. Audrein périt le 10 novembre
1800 : il avait voté la mort de Louis XVI ;
[ Sur le Manuel des missionnaires, 5 mai
1801, 2 pages. Annales, tom. 13 ; | Lettre
du synode de Rennes aux prêtres incom-
municans. 16 juin 1801; 15 pages in-8*';
I Instruction sur la soumission due à la
puissance civile, au nom du concile de
1801 ; 52 pages. Annales t. 13 , p. 433 ;
I Discours pour la clôture du concile de
1801, 16août; [Réflexions sur le divorce, {ô
août, 1801 ; 10 pages. Annales, t. 15 ; | Sur
le Défi général à l'incrédulité. Préambule
de Lecoz à cet écrit , qui avait paru en
1737, et qu'il lit réimprimer. Son préam-
bule a Hj pag. ; le Défi en a 14. Annales .
t. 14, p. 1; [Réponse à M. Spina, sur le
bref du pape, 16 octobre 1801. Annales ,
t. 14, p. 68. 11 parut depuis, dans les An-
nales , une lettre de Lecoz à Godet, juge
à Rennes , pour assurer qu'il ne s'était
point rétracté. La Réponse est assez im-
pertinente ; I Motifs de sa conduite sur le
refus de sépulture fait à un prêtre marié
mort sans sacremens , à Rennes , 17 mai
1801 ; 21 pages. Lecoz se montre très sé-
vère dans cet le lettre : il dit que si le prêtre
marié eût demandé et reçu les sacremens,
il eût fallu lui refuser encore les prières
de l'Eglise , dans le cas où après avoir ma-
nifesté l'intention de réparer le scandale,
il n'en aurait pas eu le temps. L'auteur
s'appuie de l'autorité de Durand de Mail-
lanne lui-même ; | Observations sur une
lettre de Fournier touchant les zodiaques,
18 pages. Annales, \. 14, p. 435; | Lettre
pastorale pour son entrée à Besançon,
22 prairial an 10; 2 pag. Il y prêchait
Tunion ; | Lettre au maire de Salins , 10
messidor an 10; 2 pages. Annales . tom.
15, p. 579 ; I Lettre aux prêtres de son dio-
cèse.ô])a.ges. Annales, t. 15, p, 494 ; | Let-
tre sur la désertion des conscrits, I page.
Annales, tom. 16.. page 138 ; ] Lettre sur la
réduction des fttes. 7 pages. Annales ,
t. 16, p. 596; [Instruction pastorale pour
l'organisation de son diocèse • elle est fort
LEC
557
LED
éleniîiic. Voy. un extrait dans les Anna-
les, t. 17, p. 104 ; I Lettre aux ecclésiasti-
ques sur la vaccine j de 9 pages. On s'en
moqua dans les deux camps. Les Annales
disent à ce sujet que Lccoz parlait souvent
de ce (ju'il ne connaissait pas assez bien.
I Défense de la révélation chrétienne et
preuve de la divinité de Jésus-Christ^
contre le Mémoire en faveur de Dieu^ de
Delisle de Sales , 1802, in-S"; | Sur la con-
stitution civile du clergé; \ Observations
sur une lettre de l'abbé Babey, son grand-
vicaire ; I Lettre aux non-assermentés ;
I Aux auteurs de la réponse imprimée aux
observations sur la constitution ; | Lettre
à MM. Marion^ Rabaut^ et Mestrezat ^ 8
novembre 1804, de 12 pages, dans laquelle
il leur proposait de travailler à la réunion
des deux communions ; | Lettre à M. de
Beaufort sur son projet de réunion , 2o
mars 1807, de loi pages, in-8°; | Lettre aux
catholiques de son diocèse, ou Réflexions
sur une réponse de M de Beaufort, 1808 ,
de 216 pag. in-8°; | Lettres pastorales des
26 avril et 19 mai 1814;| Mandement pour
le retour de Bonaparte en 181.^. La collec-
tion des mandemens de Lecoz forme, dit-
on , 5 volumes in-8°. On peut voir dans la
Chronique i-eligieuse, tome !"■ page 407 ,
une lettre d'un de ses amis écrite en sa
faveur. L'abbé Grappin son secrétaire ,
publia après la mort de Lecoz , une pro-
duction de cet archevêque intitulée :
Quelques détails sur Latour-D' Auvergne
Corretj, 1815, de trois feuilles in-8".
LECTIUSou LECT (Jacques), juris-
consulte, né à Genève en 1560, fut quatre
fois syndic de Genève, et jouit d'une grande
considération dans sa petiîe république.
II fut l'élève du célèbre Cujas. Ses compa-
triotes l'envoyèrent auprès de la reine
Elizabeth pour réclamer sa protection en
faveur des proteslans. Il obtint aussi du
prince d'Orange 14, 000 liv. pour le réta-
blissement de l'académie de Genève. Il
ranima le courage des habitans , lors de
la guerre avec le duc de Savoie, qui fut
repoussé avec une perte considérable des
siens (1602). On a de lui : | édition des
Poetœ grœci veteres heroici, Genève,
1606, in-fol.; 1 des Poésies en latin, ib. 1609,
in-8°; ( des Discours dans la même lan-
gue , 1615 , in-I2. Les Poetœ grœci veteres
tragici^ ont paru en 1614, in-fol. Leclius
mourut le 23 août 1611 , à 51 ans. Ses Ou-
vrages sur le droit se trouvent dans le
tome 1"" du Thésaurus juns romanis
Leyde, 1725.
hEDM^.yoyez DAIN.
LEDESMii (Pierre), dominicain, na-
tif de SalaiTianque , mort en 1616, ensei-
gna à Ségovie , à Avila et à Salamanque.
On a de lui un Traité du mariage, une
Somme des sacremens, et divers autres
ouvrages. — Il ne faut pas le confondre
avec Diego de LEDESMA, jésuite espa-
gnol, natif de Cuellar, qui s'acquit l'estime
du pape Grégoire XIII , et qui mourut à
Rome en 1575 : on a de lui divers écrits.
— Il y a eu deux autres dominicains de ce
nom, tous les deux théologiens scolasti-
qucs, le premier, Barthélejui, né à Niéva,
près de Salamanque, mourut évéquo
d'Oxaca en 1604 ; le 2', M.vrti.v , finit ses
jours en 1584 : l'un et l'autre laissèrent
des ouvrages.
LEDESM A. ( A^PQONSE ) , né à Ségovie ,
appelé par les Espagnols le Poète divin ;
il est cependant peu connu des étrangers.
Il mourut en 1623 , à 71 ans. On a de lui
diverses Poésies sur des sujets sacrés et
profanes. On y trouve de la force et de la
noblesse ; mais l'auteur s'est trop aban-
donné à son imagination , et n'a pas assez
consulté le goût. Au reste le nom de divin
bii fut moins donné à cause de la subli-
mité de son génie , que parce qu'il s'ap-
pliqua à traiter en vers des sujets pris de
l'Ecriture sainte.
• LEDOUX ( Claude- Nicolas ) , ar-
chitecte , naquit en 1736 , à Dormans en
Champagne, et étudia les premiers élé-
mens de l'architecture sous la direction
de Blondel. Passionné pour le genre grec,
il forma son goût par une étude appro-
fondie de son art dans les anciens, et
commença à se faire connaître par plu-
sieurs ouvrages qu'il fit pour de riches
particuliers. La ville de Besançon lui con-
fia l'exécution de son théâtre ; et la fer-
me générale ayant obtenu du ministre des
finances la permission d'entourer Paris de
murs , chargea Ledoux de la construction
des barrières. Le plan qu'il en fit était
magnifique ; mais il se vit forcé de le res-
treindre, à cause des dépenses qu'en au-
rait entraînées l'exécution. Néanmoins on
regardera toujours comme des monumens
remarquables les barrières de la Villette,
des Champs-Elysées , de Mouceaux . d'f-
talie^ de Charonne, et surtout les colonnes
triomphales de la barrière du Trône.
Après avoir enriclii Paris de toutes ces
constructions, il consacra une grande
partie de sa fortune à faire graver par les
meilleurs artistes le recueil de ses csuvrei
et de ses projets, sous le titre d'Archilec^
ture de C.-N. Ledoux. Cet ouvrage devait
LED
r
former cinq volumes ; le prèirûer seul a
paru; il a pour litre : L' Arclntectute con-
sidérée sous le rapport de l'art, des mœurs
et de la législatio7i , Paris, 1804, in-fol.,
ornée de 125 planches. L'exécution en est
magnifique; mais le texte, rédigé en en-
lier par Ledoux , est d'une emphase qui
le rend quelquefois inintelligible. Invio-
lablement attaché à la famille des Bour-
bons et à la monarchie, il éprouva en
1793 une longue et honorable détention,
et mérita autant par ses sentimens que
par ses travaux l'hommage que lui a con-
sacré Delille dans son poème de l'Imagi-
nation. Ledoux mourut à Paris le 20 no-
vembre 1806. Ses i)rincipaux ouvrages
ont été gravés dans les Annales du Mu-
sée par M. Landon."
LEDRAIN" ( Henri-François ) , parisien,
chirurgien fameux , surtout pour la li-
thotomie, mort à Paris le 17 octobre 1770,
à 85 ans, brilla également par la dextérité
de la main et par l'étendue des lumières.
On a de lui : | Parallèle des différentes
manières de tirer la jnerre de la vessie^
Paris , 1750 et 1740 , in-8° , avec fig., trad.
eu allemand, Berlin, 1757, in-8° ; en an-
glais, Londres, 1758, in -8". Il a donné
une ?uite à cet ouvrage en 1756 ; | Obser-
vations de chirurgie^ Paris, 1731, 2 vol.
in-12 , et 1751 , même format ; | Traité des
opérations de chirurgie j Paris, 1731 et
i742,in-8° , Londres , 1749 , in-8'' , avec des
notes et additions de Chcselden; | Réfle-
xions pratiques sur les plaies d'armes à
/eu, Paris, 1757, 1740, 1759, in-12; tra-
duit en allemand, Nuremberg, 1740, in-
8°; I Consultations sur la plupart des ma-
ladies qui sont du ?-essorl de la chirurgie,
Paris , 1765 , in-8" ; | Traité économique
de Vanatomie du corps humain^ 1768, in-
12 ; ouvrages moins estimé que les autres
productions de cet habile homme, qui
ont mérité les suffrages , non seulement
des Français , mais aussi des étrangers : la
plupart ont été traduits en allemand et en
anglais. Il était chirurgien-major et dé-
monstrateur d'analomie à la Charité^
membre de l'académie royale de chirur-
gie , et associé de la société royale de Lon-
dres.— Son père, Henri LEDRAN, fut
un des plus grands opérateurs de son
siècle ; il s'acquit cette réputation surtout
dans les armées et à la cour. Il mourut
l'an 1720.
LEDROU ( Pierre -Lambert), natif
de Huy, religieux augustin, docteur de
Louvain, professa la théologie dans l'uni-
versité de celle ville avec beaucoup de
.558 LEP
ùtation. Innocent XI, histruit de son
te , le fit venir à I^mc, et lui donna
la préfecture du coUégeVie la Propagande.
Les. papes )llexandre VIll, Innocent XII
et Clément XI , n'eurent pas moins d'es-
time pour lui. Innocent le nomma à l'é-
vêché m partibus de Porphyre. Ayant eu
quelque désagrément à 1 occasion de l'af-
faire du père Quesnel , dans laquelle il
avait été nommé consulleur, il se retira
à Liège avec la qualité de vicaire-général
de ce diocèse. Il y mourut le 6 mai 1721 ,
à 81 ans. On a de lui k Dissertations sur
la contrition et l'altrition^ Rome, 1707,
et Munich ,1708.
* LEDRU ( Nicolas -Philippe ), plus
conim sous le nom de Cornus . physicien,
naquit à Paris en 1731. Il se livra d'abord
à la physique expérimentale , et voyagea
en 1751 dans les provinces et dans les
pays étrangers , où il se fit une réputation
par ses Récréations physiques et mathé-
matiques. Il étudia avec beaucoup de soin
le corps humain et la physiologie , et ac-
quit dans cette partie des connaissances
très profondes. De retour à Paris , il fut
placé par Louis XV auprès du duc do
Bourgogne , en qualité de physicien , et
nommé professeur de mathématiques au-
près des enfans de France. Etant à Lon-
dres en 1766, il fit coiistruirc par Nairn
des boussoles verticales et horizontales,
et plusieurs autres instrumcns de physi-
que. Ce fut Ledru qui donna le modèle de
l'aiguille d'inclinaison dont se servit le
capitaine Phipps dans son voyage au pôle
boréal. Afin d'encourager ses travaux,
Louis XV lui accorda un brevet pour con-
vertir le fer en acier à la manière de
Knight et des Anglais , et lui permit de
compulser les dépôts des cartes de la ma-
rine et les cartons qui renfermaient lea
observations magnétiques, pour en ex-
traire ce qu'il croirait convenable à ses
projets. Ce recueil d'extraits fut immense.
Ledru les mit en œuvre pour composer,
d'après un autre système que celui de
Halley, des cartes nautiques, dont il
remit en présence de Louis XVI, le 22
mai 1785 , des exemplaires manuscrits à
Lapérouse, dont le voyage a confirmé en
grande part-ie le système du laborieux
physicien. En 1772 , il avait commencé à
montrer les effets de la catoptrique ou
fantasmagorie, qu'il s'attacha depuis à
perfectionner. L'empereur Joseph II as-
sista en 1777 à deux de ses séances par-
ticulières. L'électricité était alors fort à la
mode. La médecine avait voulu s'en en»-
LEE
359
iSi''
LEF
parer, et Ledruj pour en démontrer les
efffts, l'appliqua aux affections nerveu-
ses , notamment à l'épilepsic et à la cata-
lepsie. En 1782 , la faculté de médecine
nomma une commission de sept mem-
l;res pour examiner ses traitemens. Le
rapport en fut très avantageux , et Ledru
obtint jjour lui et ses deux fils le titre de
physicien du roi. Ce rappoi't fut imprimé
la même année , in - 8° , précédé d'un
npeiçu du système de l'auteur. Ledru fut
mis en arrestation sous le régime révo-
lutionnaire, et après sa détention, il se
étira à Fonlenay-aux-Roses , où il se li-
vra à la botanique. Il mourut à Paris le
6 octobre 1807.
• LEDYARD ( Jean ) , voyageur amé-
ricain, du 18' siècle, né dans les provin-
ces anglaises de l'Amérique septentrio-
nale, est connu pour le plus intrépide
marcheur qui ait existé. Il fut tourmenté
dès son enfance du désir de visiter les pays
inconnus, et alla passer plusieurs années
parmi les Indiens sauvages pour éludier
leurs usages et leurs mœurs. Après avoir
fait le tour du monde avec le capitaine
Cook, comme caporal des troupes de ma-
rine, il résolut de traverser à pied toute
l'Europe septentrionale, dans l'intention
de passer le détroit de Behring pour ga-
gner les établisscmens anglais de la baie
d'Hudson. Il ne put exécuter que la pre-
mière partie de son projet et fut ensuite
chargé de voyager en Afrique pour faire
des découvertes; mais il périt au Caire
vers la fin d'octobre 1788. On a publié les
renseignemens qu'il avait recueillis en
cette ville, dans les Mémoires de la so-
ciété instituée pour encourager les dé-
couvertes dans l'intérieur de l'Afrique j.
Londres, 1790, in-i", réimprimés en 1810,
"i vol. in-8°. Ces Mémoires ont été tra-
duits de l'anglais par Lallemand , sous le
titre de Voyages de Lcdyard et Lucas ^
en Afrique^ Paris, 1804, 1 vol. en deux
parties in-8°. — Il ne faut pas le confon-
dre avec Thomas LEDYARD, auteur dune
F'ie de Marlhorough . en anglais, Lon-
dres, 1755, 2 vol. in-8°, et d'une Histoire
navale d'Angleterre , Londres, 2 vol. in-
folio, traduite en français par de Pui-
sieux, Lyon, 1751, 3 vol. in-4°.
LEE (Nathaniel), poète dramatique
anglais, du 17* siècle, élevé dans l'école
de Westminster, puis au collège de la
Trinité à Cambridge , a laissé seize Pièces^
représentées avec succès sur le théâtre
anglais. Les sujets n'en sont pas toujours
bien choisis, ni lea intrigues bien con-
duites , mais il y a de beaux vers. Il mou-
rut en 1691 ^ 1692 dans un état de dé-
mence. Addisson lui a donné des louan-
ges. Ses pièces ont été réunies et publiées
à Londres , 1734 , 5 vol. in-8°.
LEEU ( GÉRARD ) , se fit une grande ré-
putation dans le 15* siècle par son im-
primerie , qu'il établit vers 1477 à Goudc,
en Hollande , et qu'il transporta vers 1484,
à Anvers, où il mourut l'an 1492. Il sortit
un très grand nombre de livres de ses
presses. C'était un homme qui avait beau-
coup de connaissances.
LEEUWEÎV ( SinoN Van ), juriscon-
sulte hollandais, né à Leyde en 1625,
exerça long-temps la profession d'avocat
avec beaucoup de réputation dans sa ville
natale , et mourut à la Haye , le 13 janvier
1682. Il était veraé dans le droit romain,
mais encore plus dans celui de son pays.
Ses ouvi-ages seraient estimés plus qu'ils
ne le sont , s'il avait mieux possédé les
belles-lettres. Il a donné : | Pratique à l'u-
sage des notaires , en flamand, etc., Rot-
terdam , 1741 , 2 vol. in-8° ; | Censura fo-
rensis . Leyde, 1741, 2 vol. in-fol. ; | une
Edition du Corps de droit civil, grec et
latin, avec les notes d'un grand nombre
de savans, Leyde, 1663, in-fol., belle
édition. | De origine et progressu juris
civilis romanis 1672, ia-8°; | Description
de la ville et de l'université de Leyde ^ en
flamand, Leyde , 1672 ; [ Traité de l'ori-
gine ^ des usages^ etc.^ des anciens Ba-
tavcs ^ en flamand, la Haye, 1685, in-
fol., etc.
• LEFEBVRE ( François-Joseph ) , duc
de Dantzick , maréchal pair de France ,
naquit le 25 octobre 1755, à Ruffach,
en Alsace, d'un simple hussard, qui
après avoir quelque temps servi, comman-
dait la garde bourgeoise de cette ville.
Il perdit son père dès l'âge de 18 ans , et
fut confié aux soins d'un oncle paternel,
qui était alois curé-recteur de Guémar.
Le jeune Lefebvre avait été de bonne
heure destiné à l'état ecclésiastique ; mais
il renonça à suivre celte carrière, lorsqu'il
eut appris que son frère venait d'être
nommé officier au régiment de Stras-^
bourg. Il s'enrôla le 10 septembre 1773
dans les gardes françaises, où il parvint
le 9 avril 1788, au grade de premier
sergent ( compagnie de Vaugiraud ) ; il se
trouvait encore dans le même poste, à
l'époque du licenciement de cette troupe,
fut incorporé avec la moitié de sa com-
pagnie , dans le bataillon des Filles-St.-
Thomas, et chargé de l'instruction des
LEF
560
LEF
soldais de ce corps. Lefebvre avait, dès le
commencement de la révolution , donné
des preuves de son courage et de son
amour de l'ordre : le 12 juillet 1789, il
avait saiivé la vie à plusieurs officiers do
sa compagnie , attaqués par une multi-
tude furieuse qui voulait enfoncer la porte
de la caserne , et les massacrer ; on le vit
encore protéger à la tête d'un détache-
ment de son bataillon , la i-entrée au châ-
teau des Tuileries , de la famille royale
qui avait tenté vainement de se rendre à
St.-Cloud ; plus tard il favorisa le départ
pour Rome, de Mesdames, tantes du roi.
En 1792, son courage et son sang- froid
préservèrent du pillage la caisse d'es-
compte. Dans ces diverses circonstances,
Lefebvre qui plusieurs fois avait été blessé,
montra des talens remarquables ; du grade
de capitaine d'infanterie légère il s'éleva
à celui de général de brigade ( 2 décem-
bre 1793 ) ; et le 10 janvier 1794 , il fut fait
général de division, à la suite des combats
de Latnbach et de Gicsberg. Dès lors son
nom se rattache à tous les exploits des ar-
mées des Vosges , de la Sarre , de la Mo-
selle , du Rhin-et-Moselle , de Sambre-et-
Meuse , du Danube , et dont il commanda
presque toujours l'avant-garde. Chargé,
en 1794, du commandement des quatre
divisions qui eurent ordre d'assiéger le
fort Vauban , il entra à leur tète dans le
palatinat , et bloqua le pont de Manheim
sur la rive gauche du Rhin. Victorieux à
Anspach, à Sainte-Croix près d'Arlon, à
Nadelange , à Dinant , il prépara par ses
succès les glorieux résultats de la bataille
de Fleurus ( 8 messidor an 2 ) ; le général
Lefebvre y commandait la droite de l'ar-
mée française ; et il contribua puissam-
ment par son sang-froid, sa bravoure
et ses bonnes dispositions, à l'éclatante
victoire que les Français gagnèrent dans
cette journée. La campagne de cette an-
née se termina par les combats de Mar-
mont , de Nivelles , de Florival et de Fri-
mont, auxquels il prit une part très ac-
tive. L'année suivante , sa division com-
battit seule à Ept et à Ochtrup ; elle con-
courut aux affaires de la Roër et du Welp;
le 20 fructidor , il franchit le Rhin ; ce fut
le premier passage de ce fleuve , entre-
pris par les armées de la révolution : il
Vopéra avec autant d'intrépidité que de
bonheur , près d'Eichelkamp ; il força en-
suite Spick, et Angerbach, et se porta
$ur Angermund , après avoir chassé l'en-
nemi de Koranne. Ces succès furent sui-
vis du combat d'Enef, où le géaéral Le-
febvre donna seul avec sa division, et
repoussa les Autrichiens jusque sur les
hauteurs d'Anilshorn , d'où il les débus-
qua de nouveau. En novembre 1796, il
marcha sur la Sieg, combattit à Niddael
à Oberdiefenbach , et se replia ensuite sur
son point de départ, pour tenir en échec
la colonne ennemie du général Boroz. Un
armistice vint suspendre les hostilités ;
mais elles recommencèrent dès le prin-
temps de l'année suivante, par l'attaque
de Siegberg, qui fut enlevé par le gé-
néral Lefebvre. Il poursuivit l'ennemi
jusqu'à Altenkirchen, et là il eut à sou-
tenir le combat le plus disputé et le plus
glorieux de cette campagne. Il prit pari
ensuite aux journées de Kaldeich, de
Friedberg , de Bamberg et de Sulibach ,
pendant la campagne de l'an 7 ( 1798 ). Le
général Lefebvre reçut , après la mort du
général Hoche, le commandement pro-
visoire de l'armée de Sambre et Meuse ,
et fut désigné pour commander l'expédi-
tion projetée contre l'électoral de Hano-
vre. Cette entreprise n'ayant pas eu lieu,
il fut employé , en l'an 8 ( 1799 ) , à l'ar-
mée du Danube , sous les ordres de Jour-
dan ; et le 30 ventôse , il opposa une vi-
goureuse résistance à 56,000 Autrichiens
qui l'avaient attaqué à Slockach, où il
n'avait que 8,000 hommes. Grièvement
blessé d'un coup de feu au bras , il quitta
l'armée et revint en France , où il reçut
du Directoire tme armure complète en
récompense de ses services, et obtint le
commandement de la division militaire
dont Paris était le chef-lieu. Le 18 bru-
maire , il était présent à la fameuse séance
de l'orangerie de St.-Cloud, et il rendit
dans cette journée des services très grands
au général Bonaparte , qui , pour l'en i é-
compenser , lui conserva le commande-
ment de la division qui lui avait été con-
fiée. Lefebvre concourut depuis à la paci-
fication des départemens de l'Eure , de la
Manche , du Calvados et de l'Orne ; fut ad-
mis au sénat , le H germinal an 8 ( i" avril
1800 ) , sur la proposition du premier con-
sul, et fut nommé préteur de ce corps,
avec Clément de Ris ; fonctions qu'il a con-
servées jusqu'à la dissolution du sénat.
Elevé , le 19 mai 1804 , à la dignité de ma-
réchal d'empire , il fut nommé successive-
ment chef de la 5' cohorte, grand-officier
et grand-aigle de la légion d'honneur. Lors
de la reprise des hostilités avec l'Autri-
che, en 1805, il fut chargé du comman-
dement général des gardes nationales de
la Iloër, du Rhin -et- Moselle, du Muni-
LEF 561
Tonnerre, et rupanit, en 1806, à la tête
d'une division, contre les Prussiens. Il
commandait la garde à pied , à la bataille
de léna , le 14 octobre , et protégea avec le
premier corps les derrières de l'armée , à
Thorn, sur la gauche de la Visttile, jus-
qu'après la victoire d'Eylau ( 8 février
1807), époque à laquelle il reçut l'ordre
d'aller investir Dantzick, avec l'armée po-
lonaise , l'armée saxonne et le contingent
de Bade. La place fut attaquée le 10 mars ;
le premier bombardement eut lieu le 23
avril ; la garnison prussienne , qui avait
fait des sorties vigoureuses et multipliées,
se rendit le 26 mai, après 51 jours de
tï-anchée ouverte ; et le général Kalkreuth,
qui la commandait, obtint la même capi-
tulation que celle qu'il avait accordée 14
ans auparavant à la garnison française
de Mayence. Le 28 mai , le maréchal Le-
febvre reçut le titre de duc de Dantzick.
Employé en Espagne, en 1808, à la tète
du 4' corps , il soutint dans cette guerre
injuste et désastreuse , la réputation mili-
taire qu'il avait précédemment acquise.
Le 51 octobre , il gagna la bataille de Du-
rango sur les généraux Blacke et la Ro-
mana. Le 4" novembre, il entra dans
Bilbao, et triompha encore, le 15 novem-
bre, à Espinosa. Rappelé en Allemagne
lors de la guerre de 1809, il y fut chargé
du commandement de l'armée bavaroise,
ayant sous ses ordres le prince royal de
Bavière et les généraux de Wrède et de
Roi; il combattit à Tann, à Abenberg, à
Eckmulh, à Wagram, et dans l'intervalle
de ces opérations . il parvint à soumet-
tre le Tyrol insurgé. Cette campagne,
dans laquelle la Russie fut axixiliaire de
la France, se termina par la paix de
Vienne , en octobre 1809. La paix ne fut
pas de longue durée, et dans la campa-
gne de Russie, où l'Autriche, à son tour,
unit momentanément ses armes à celles
des Français, le duc de Dantzick com-
manda en chef la garde impériale. Les
chances de la guerre ayant ramené sur le
territoire français les débris de cette ar-
mée naguère si florissante et si redouta-
ble , le maréchal en dirigea l'aile gauche,
et cosnbattit à Montmirail , à Arcis- sur-
Aube, à Champ-Aubert, et ne rentra dans
la capitale qu'après l'abdication de Bo-
naparte. Il fut créé pair de France le 2
juin 1814. Après le débarquement de Bo-
«japarte, échappé de l'ilc d'Klbe, le duc
de Dantzick siégea dans la chambre des
pairs, et aida de ses conseils Napoléon,
qxi'il ne pouvait p!as, à cause de son grand
LEF
âge, accompagner dans les combats.
Après la deuxième restauration , il fut
compris dans la loi d'exclusion du 24 juil-
let 1815; mais il fut confirmé, en 181G,
dans son titre de maréchal de France, et
reçut le bâton des mains du roi. Resté
depuis cette époque sans fonctions et sans
commandement , le duc de Dantzick a été
rappelé à la cliambre des pairjs par l'or-
donnance royale du 5 mars 1819. Un cou-
rage réfléchi, un coup-d'œil juste, une
expérience consommée, ont acquis au
duc de Dantzick la réputation d'un des
meilleurs généraux de l'armée française.
A d'éminentes qualités, comme guerrier,
il joignait toutes les vertus du citoyen, et
surtout une simplicité de mœurs qui ne
s'est jamais démentie, avec un noble dé-
sintéressement, et une grande modestie.
La France le perdit le 14 septembre 1820.
Son éloge a été prononcé à la chambre
des pairs, par le maréchal duc d'Albu-
fera.
* LEFEîiVRE DES NOUETTES ( Cuar-
LES , le comte j , lieutenant général , né à
Paris le 14 décembre 1775 , d'un marchand
de draps, s'enrôla, en 1792, à l'armée de
Dumourier. Il était capitaine à Marengo,
colonel à Austcrlitz, et passa en 1806 au
service de Jérôme, roi de Westphalic.
Rentré bientôt dans les caxlres de l'armée
française, il fut nommé le 28 août 1808,
général de division, puis colonel-comman-
dant des chasseurs à cheval de la gaide
impériale : il fut en cette qualité en-
voyé en Espagne, y fut blessé, fuit pri-
sonnier et conduit en Angleterre. S'élant
échappé de la ville qui lui servait de pri-
son , il reprit du service au commence-
ment de la campagne de 1809 , pendant
laquelle il commandait les chasseurs de la
garde. En 1812 , il suivit Napoléon en Rus-
sie , et l'accompagna dans la retraite sur
un des traîneaux qui formaient son es-
corte. L'année suivante, il contribua aux
succès de la bataille de Bautzen, fut vaincu
à Altenbourg, le 29 septembre 1813, et
répara peu de jours après cet échec, en
mettant en déroute un corps de cavalerie
russe. Lefebvre-Des-Nouctles se distingua
par sa bravoure à la bataille de Erienne
en 1814, où il reçut plusieurs coups de
lance, et un coup de baïonnette ; et lorsque
Bonaparte eut abdiqué à Fontainebleau, il
prit le commandement de l'escorte qui le
conduisit jusqu'à Roanne. Louis XVIII lui
donna la croix de St. -Louis, et le com-
mandemeitl des chasseurs royaux. Néan-
moins, lorsque Bonaparte revint de l'iie
51
LEF
362
LEF
d'Elbe, il tenta de soulever les chasseurs
ci)!itrc l(î monarque et cherclia avec les
frères Lallemant à s'emparer de Lafèrc.
Napoléon le nomma membre de la cham-
bre des ])aîrs. Après avoir combattu à
FIcurus et à Waterloo, il se vit oblifré de
quitter la France. Comme il avait été un
des premiers à se déclarer en faveur de
Bonaparte, il fut compris dans l'article
1" de l'ordonnance royale du 24 juillet
181S, et condanmé par contumace à la
peine de mort , par le deuxième conseil
ilv. guerre permanent de la première di-
vision militaire; mais il était parvenu à
s'embarquer pour l'Amérique septentrio-
nale, et il vivait tranquillement dans les
Etats-Unis, lorsqix'en 1822, le désir de
rentrer dans sa patrie, et de voir sa
femme qui l'attendait, le détermina à faire
voile pour la Belgique. Le paquebot qu'il
montait fut battu par la tempête, et
échoua contre les côtes de l'Irlande. Le-
febvre des Nouettes périt dans ce nau-
frage, le 22avriH822.
• LEFÈVIIE-GIIVEAU (le chevalier
Louis) , membre de l'institut et de la lé-
•ïion-d'honneur, naquit en i754, dans le
département des Ardennes. Il fit de rapi-
des progrès dans l'étude des sciences
exactes , et fut d'abord attaché à la biblio-
thèque du roi. On lui donna en 1786 , la
chaire de professeur de mécanique au
collège de France, qui convenait plus à
ses goûts, et qui devint plus tard celle de
physique expérimentale. Lefèvre-Gineau
fil, peu de temps après , l'expérience de
la combustion du gaz hydrogène, et acheva
de démontrer que l'eau n'est pas un élé-
ment ou corps simple. Nommé trois fois
électeur de Paris pendant les quatre pre-
mières années de la révolution, il devint
aussi memt)re du conseil de la commune ,
ofUcier municipal, et administrateur des
subsistances dans des temps où ce dernier
emploi n'était pas sans difficultés. Après
la journée du 10 août 1792 , il fut dénoncé
et frappé de trois mandats d'arrêt sous
l'étrange et contradictoire dénomination
de modéré oulré. Lefèvre-Gineau se ca-
cha et ne reparut qu'après la journée du
9 thermidor an 2. En 1795, il avait été du
nombre des physiciens envoyés dans les
départemens pour s'y occuper de recher-
ches minéralogiques , et le Journal des
mines de cette époque renferme plusieurs
de ses rapports. Devenu membre de l'in-
stitut national qui fut établi en l'an 3, il fit
partie de la co^nmission des poids et me-
. ture?, et fut particulièrement chargé de
la détermination du kilogramme. Lefèvre-
Gineau contribua puis-^ammenl avec Du-
reau de Lamalle , du Theil , IMorellet . du
Prony, etc., au rétablissement de l'instruc-
tion pul)U<iue, et succéda à Delambre
{voyez DELAMBRE), comme inspecteur-
général des études. Au commencement de
l'an 12, la décoration de la légion-d'hon-
neur lui fut donnée , et lors de la fonda-
lion de l'université, il fut investi de la
double fonction d'inspecteur-général el
de conseiller ordinaire. Nommé par le
département des Ardennes candidat au
corps législatif, il devint dans cette as-
semblée membre de la commission des
finances, y rentra en 1813, cl fit plus
tard partie de la chambre des députés ,
où il vola avec l'opposition. Le 11 mai
1814, Lefèvre-Gineau avait porté la pa^-ole
devant le roi , comme président de la
première classe de l'institut. Il perdit, efi
1827, sa place de professeur au collège do
France , et mourut à Paris le 8 février
1830. Il avait fait paraître, en 1780 , uno
nouvelle édition des Infiniment petits ,
du marquis de l'Hôpital, qu'il enrichit de
notes , et qu'il dédia aux professeurs du
collège de France , dont il avait été l'élève.
L'auteur des Trois règnes de la nature
assistait , afin d'en tirer profit pour son
poème, aux cours de Lefèvre-Gineau, qui
concourut avec Cuvier à la rédaction des
notes qui accompagnent cette production
poétique..
• LEFÈVRE ( Pierre - François -
Alexa:«due), peintre et poète dramatique,
naquit le 29 septembre 1741 à Paris, et de-
vint en 1804 professeur de belles-lettres
au prytarjée de Saint-Cyr, transporté de-
puis à la Flèche, où ce professeur mou-
rut le 8 mars 1813. Il s'était destiné
d'abord à la peinture , sous le célèbre
Doyen; mais, entraîné par son goût pour
les lettres , il s'adonna au théâtre , et com-
posa 5 tragédies , dont 4 furent représen-
tées au Théâtre-Français : | Cosroé's qui
obtint 10 représentations; ] Florinde^pièa
romanesque et mal conçue qui tomba à
première représentation (1770) ; | Zutn^
qui eut un brillant succès et lui valut
l'emploi de lecteur du duc d'Orléans avec
une pension de 1,200 livres; ] Elizabeth
de France ou don Carlos^ fils de Phi-
lippe II. La cour d'Espa^jne s'opposa à ce
que cette pièce fût représentée sur un
théâtre public ; mais l'auteur la fit jouer
sur un théâtre de la chaussée d'Antin qui
appartenait au duc d Orléans son protec-
teur celle fut vivement lippi.uiJic. IVlitol
LEF 56
l'a insérée dans k tome 6 de son Théâtre
français ^ hWiXonda 1818, avec une no-
lice sur la vie el les ouvrajjes de l'auteur ;
j Hercule au mont OEta.qni n'oblinl au-
cun succès ( 4787) , el l'cloigna pour tou-
jours de Ja scène. Lefèvre a laissé en outre
des poésies diverses, la plupart inédites, et
un poème de plus de 10,000 vers intitulé :
Stockholm sauvé ou Gustave Jfasa ,
qui n'a jamais été imprimé et qui offre,
dit-on , de grands défauts dans le plan el
beaucoup d'inégalité dans le style; mais
des beautés supérieures dans les détails.
On trouve en lui , dit un biographe mo-
derne , les talens et les défauts qui tien-
nent à une imagination exallée : pensées
fortes, rendues avec précision et énergie ,
mais revêtues d'un style bicarré et incor-
rect. Il était de la famille de Taiiuegui
Lefèvre, père de la célèbre M™"^ Dacier,
et fils d'un marchand mercier établi sur
le pont Saint-Michel avant la destruction
des maisons qui encombraient ce pont.
LEFEVRE. Vorjez FÈVRIÎ.
* LEFORT (FuANÇois), général et ami-
ral de Russie, né à Genève en I65(i, où son
père, Jacques Lefort , était membre du
grand-conseil , n'avait pas quatorze ans
lorsqu'il alla servir en qualité de volontaire
dans la citadelle de Marseille. Il devint en-
suite cadet dans un régiment des gardes-
suisses en France, passa de là sous les dra-
peaux du duc de Courlande qui avait un
régiment à la solde des Hollandais , puis
se rendit en Russie , où il fut nommé ca-
pitaine par le cxar Fédor Alexicwilch.
Lefort fit avec distinction les campagnes
de 1678 à 1681 contre !cs Turcs, el obtint
après cette guerre , un congé . dont il pro-
fita pour venir dans sa patrie. A son re-
tour, il trouva l'empire russe ensanglanté
par la guerre civile qu'avaient allumée
après la mort de Fédor, la princesse So-
phie et ses deux frères I\an el Pierre. Ce
dernier prince qui avait été désigné par
le czar défunt pour lui succéder, quoiqu'il
fût le plus jeune , distintjua Lefort auijuel
il donna le grade de m;ijor, et en lit son
favori et son conseiller. On assure que
c'est à cet oftîcier qu'il faut allribuer la
plupart des pensées géuéreuscs qui pré-
sidèrent au gouvernement de Pierre l*"" :
Lefort lui inspira ces grandes idées dont
l'accomplissement changea la face de la
Russie , et fit dune nation presque sau-
vage , un des peuples les plus puissans. Il
fut nommé lieutenant-général et amiral.
Chef de l'année russe , il la réorganisa :
les troupes russes avant lui n'étaient com-
3 LEF
posées que de réunions de soldais plus
ou moins nombreuses , souvent indépen-
dantes et nullement façonnées à la disci-
pline. Cinquante hommes exercés et ha-
billés à l'allemande, formèrent le noyau
de ces arniées qui devaient battre Charles
XII à Pulta\va, et qui ont paru avec tant
d'avantage sur les bords de la Vistule, de
l'Elbe et du Rhin. Lefort contribua aussi
puissanmicnl à former la marine de l'ea»-
pire russe qui , à cette époque, n'avait pas
une barque, et ce fut par ce moyen qu'il
s'empara, eu 101)6, d'Azof , aprts un se-
cond siège contre cette ville, le premier
ayant été sans résultat. Lefort enseigisa
à Pierre \" les élémens de la science fi-
nancière et de la diplomatie , cl j)résida la
fameuse ambassade de 1697 , dont le c/.ar
faisait lui-même partie, et qui devait se
rendre dans les cours de l'Europe pour
faciliter l'exécution des projets formés.
Après avoir administré toutes les riches-
ses de Russie et avoir fait porter au trésor
commun tous les piésens qu'il avait re-
çus des différens souverains de l'Europe .
Lefort mourut à Moscou, le 12 mars 1699.
ne laissant pas de quoi faire les frais de
ses funérailles : elles furent toutefois cé-
lébrées avec une grande pompe , et hono-
rées de la présence du czar qui s'était
chargé des obsèques d'un serviteur si utile
et si dévoué. Ce ministre avait su con-
server pendant toute sa vie la confiance
do Pierre l*^"", quoiqu'il lui eût souvent
dit de dures vérités; il n'avait même pas
craint de lui reprocher les vices dégra-
dans auxquels il se livrait et dont il se
souilla encore davantage , lorsqu'il eut
perdu ce solide appui de sa gloire. Les
historiens n'ont pas rendu à Lefort toute
la justice qu'il méritait. Basseville a écrit
sa We d'une manière assez exacte, mais
un pi'u emphatique. On trouve aussi sur
ce sujet des détails dans XUistoire de
Pierre 7=^ par M. de Ilallend, 1805 (en
allemand), cl dans les Favoris russes,
1809 , dans la même langue.
* LEFORTIEU ( Ji:a\-Fkaxçois), lit-
térateur, né vers 1771. à Paris , professa
les belles-lettres en 1798, à l'éeolo cen-
trale du Morbihan. L'année suivante il
obtint au concours la chaire de littérature
à l'école centrale de Seine-et-Marne, et en
1805 , il passa à l'école militaire de Fon-
tainebleau, puis à celle de Saint-Cyr. où
il remplit les mêmes fondions. Mis à !.i
retraite en 1814, il est mort à Paris le 21
octobre 1825. Lefortier s'était occupé eu
i79a , pendant quelques mois , de la rédac-
LEG o
lion d'un journal intitulé Correspondance
politique et littéraire : il coopéra depuis
à la rédaction du Journal général, et au
Journal des maires ; on lui doit aussi
quelques opuscules; un Discours pro-
noncé à l'ouverture de l'école centrale
de Vannes; Aperçu sur les causes des
progrès, et de la décadence de l'art di'a-
matique en France, une Traduction de
l'ouvrage du père Jouvency, intitulé :
Ratio discendi et docendi . 1803, in-12;
ou lui attribue aussi la Géographie du
premier âge . dont la 7' édition a paru en
1814, in-18 ; cependant d'après la Biblio-
thèque de la France^ les lettres L.-B.B.,
seraient les initiales du nom de l'auteur
de cet ouvrage.
* LEFRAiVC (N... ) , supérieur du cou-
vent des eudistes de Caen , fut massacré
avec les autres prisonniers renfermés au
couvent des Carmes à Paris, le 2 septem-
bre 1792 : il avait publié : ] Le voile levé
pour les curieux . ou Secret de la révolu-
tion révélé à l'aide de la franc-maçonne-
rie. Paris, 1791 , in-S"; | Conjuration con-
tre la religion catholique et les souve-
rains. 1792, in-8°- Il avait composé un
poème intitulé Les abus, qui n'a pas été
imprimé , et avait en outre préparé un
ouvrage sur les hommes célèbres du Co-
tenlin.
LEFRANC. rogez FRANC ( le ) de
POMPIGNAN.
* LEGALLOÏS ( JuLiE:t-JEAX Cksar ) ,
médecin, né à Cherneix, près de Dol en
Bretagne, vers l'an 1775, était fils d'un
cultivateur aisé , et faisait ses cours de
médecine à la faculté de Caen , lorsqu'il
prit en 1793 , les armes avec le parti fédé-
raliste contre les démagogues de la Con-
vention. Obligé de se cacher pour éviter
les poursuites dirigées contre lui , il trouva
un asile dans les hôpitaux de Paris , où il
resta confondu avec les nombreux élèves
qui les fréquentaient. Le comité des pou-
dres et salpêtres ayant besoin d'hommes
capables de présider à l'exploitation des
nitrières , il se présenta comme candidat,
subit avec distinction les examens voulus,
et fut envoyé par le comité de sûreté gé-
nérale dans son déparlement pour y cire
ciiargé de la fabrication des poudres.
Bientôt trois écoles de médecine furent
établies en France : Legallois fut choisi
par l'administration de son district, pour
être un des élèves de celle de Paris. Il se
lit recevoir docteur en 1801 : on remar-
qua sa thèse inaugurable qui traitait cette
question importante : Le sang est-il iden-
C4 LEG
tique dans tous les vaisseaux qu'il par-
court? Ce livre qui est resté un ouvrage
classique, n'était que l'introduction d'un
ouvrage plus important , qui l'a placé au
premier rang des physiologistes. 11 porte
le litre de : Expériences sur le principe
de la vie et notamment sur celui des mnu-
vemens du cœur, et sur le siège de ce prin^
CJ>(?, Paris, 1812, in-S". Devenu Tannée
suivante médecin de la maison de Bicc-
tre , Legallois mil tant de zèle dans lac-
complissement de ses devoirs , qu'il fut
atteint au mois de février 1814 d'une pc-
ripncumonie à laquelle il succomba. Le-
gallois, dans ses Expériences sur le prin^
cipe de la vie. a rectifié quelques-iuies
des erreurs de Bichat : il a déterminé le
siège ou principe de la vie qu'il place dans
la continuité de la moelle épinière ; et
cette doctrine entièrement neuve , il u
cherché à la démontrer par une foule
d'expériences faites sur des animaux vi-
vans , sous les yeux des professeurs de la
faculté de médecine, et des menibres do
la faculté des sciences. Legallois a fait en
outre , un grand nombre de Mémoires
sur des objets importaas de physiologie ,
qui ont été pour la plupart insérés dans
différens recueils et lus à l'institut. On lui
doit la Partie anatomique et phgsiologi-
quede l'excellent article Cccurûu Diction-
naire des sciences médicales. Ses OEuvres
ont été publiées avec des notes de E. Pa-
riset, Paris, 1824, 2 vol. in-8''.
' LEGAY (Louis-Pierre-Phudent),
né à Paris , le 15 avril 1744 , remplit d'a-
bord divers emplois en province , et entra
ensuite à l'époque de la révolution, dans
l'administration des subsistances mili-
taires, dont il devint directeur. Chargé,
en celte qualité, d'opérations assez im-
portantes, telles que l'achat des grains à
l'étranger, l'approvisionnement des pla-
ces de guerre , etc., il ne voulut point pro-
filer pour sa fortune , du désordre que les
troubles politiques jetèrent souvent dans
celte partie de l'administration. Lorsqu'il
perdit sa pJace de directeur de l'adminis-
tralion des vivres , Legay s'occupa de la
culture des lettres , et publia un grand
nombre de romans, où malheureusement
la décence est trop souvent blessée. Mais
comme ils sont dépourvus de talent, ils
ne peuvent guère trouver de lecteurs.
Sous la restauration , il obtint un modique
emploi dans les bureaux de l'université,
et, malgré son grand âge , il en remplit les
devoirs avec assiduité, jus(iu'à sa mort ,
survenue le 4 janvier 182G. Il a laissé :
LEG o
) Jgatlte, ou la destinée, Paris, 1825,
k \ol. in-12; 1 Le comiétahle de Bour-
bon et la duchesse d' Angouléme , Paris ,
1818, 2 vol. in-12; | Le duc de Guise,
Paris, ISii , in-12 ; | L'envieux et sa vic-
time, Vnris, 1818, 5 vol. in-12; | Le fils
chéri et le fils abandonné , ou le Mentor
moderne, Paris, 1809. 5 vol. in-12;
I L'hermile de la vallée de Lwz , Paris ,
1816, 3 vol. in-12; | Mes souvenirs et au-
tres opuscules poétiques, Caen, 1788, 2
vol. in-12, etc., etc.
• LEGEIVDRE (Louis), historien, na-
quit à Rouen en 1655. Sa famille étant
pauvre . l'archevêque de cette ville, M. de
Harlay, lui lit faire ses études. Après
avcftr einhrassé l'état ecclésiastique, il
suivit à Paris son généreux protecteur ,
qui lui procura un canonicat à Notre-
Dame. L'abbé Legendre consacra toute sa
vie à rétude et à ses exercices de piété ,
et mourut le i" février 1755. Il a laissé :
1 Mœurs et coutumes des Français ^ Pa-
ris , 1712 ; deuxième édition, 1755, in-12;
ce volume est extrait de l'ouvrage sui-
vant dont il forme la partie la plus cu-
rieuse : Nouvelle Histoire de France jus-
qu'à la mort de Louis XIII , Paris, 1718,
2 vol. in-fol., 1719,8 vol. in-12; ouvrage
estimé; | Vie du cardinal d'Amboise mi-
nistre de Louis XII, 1724, 2 vol. in-12 ;
I Essai du règne de Louis le Grand. Cet
ouvrage eut cinq éditions consécutives ;
I Deux Eloges de l'archevêque de Har-
laij (dont l'un en latin) ; | la Vie de ce
même prélat. 1720, in-i** ; \ deux Eloges en
Jatin , pour Claude-Joly et pour Cl. Thé-
venin . chanoine de Paris , etc. La Vie du
cardinal d'Amboise de l'abbé Legendre
fui vivement critiquée par le Journal de
Trévoux. Néanmoins, cet auteur écrivait
d'un style élégant, correct; sa critique
est judicieuse, impartiale, elles faits qu'il
rapporte sont toujours appuyés de preu-
ves convaincantes ; enfin l'abbé Legendre,
sans être un historien du premier rang ,
offre toujours de l'intérêt et de l'instruc-
lion,
• LEGEIVDRE ( Gilbert- Charles ) ,
marquis de Saint-Aubin-sxu'-Loire , na-
quit à Paris en 1688. Il fut conseiller au
parlement, puis devint en 1714 maître
des requêtes de l'hôtel du roi , charge
qu'il abandonna bientôt pour se livrer à
la littérature. Il mourut à Paris , le 8 mai
1746, âgé de 58 ans. On a de lui : | Traité
de l'opinion ou Mémoires pour ser'nr à
l'histoire de l'esprit humain. Paris, 1755,
6 voL ia-12; quatrième édition, 1758, 9
vol. in-12. L'auleur a tiré son sujet du li-
vre italien intitulé Délia opinione regina
del mondo. Pascal lui en lit venir l'idée,
parle désir que cet éloquent écrivain té-
moignait de lire le livre italien. Au reste,
le principal but du marquis de Saint-
Aubin , en entreprenant cet ouvrage ,
était d'abaisser l'orgueil de l'homme^ et
il y réussit complètement. | Des antiqui-
tés de la maison de France et des mai-
sons mérovingienne et carlovîngieiine ,
Paris , 1759 , in-4°. Le système de l'auteur
sur la descendance d'Hugues-Capet offre
la même obscurité qui règne dans la Chro-
nique d'Helgaud , moine de l'abbaye de
Fleury-sur-Loire , sur un passage très
vague de laquelle Legendre l'a fonde.
I Antiquités de la nation et de la mo^
narchie françaises, ibid. , 1741, in-4".
L'auteur fait descendre les Francs de la
Scythie, suivant l'opinion de Goropius
Becanus , et les Gaulois , des Celtes , dont
il établit la généalogie depuis les enfans
de Noé. I Dissertation sur le temps et Vau-
thenticité de Roricon ( Mercure , octobre ,
1741). Legendre prétend* que ce moine,
auteur d'une Chronique qui va presquà
la mort de Clovis , fut contemporain de ce
roi, tandis que l'abbé Lebeuf le place,
avec plus de raison, au IT siècle. (Acad.
des Inscriptions tom. 17 , page 228.)
• LEGEi\DKE (Louis) , memb0 de la
Convention, né à Paris, en 1736, avait
été matelot pendant dix ans lorsqu'il re-
vint dans la capitale et y établit une bou-
cherie. Sans avoir acquis aucune instruc-
tion, il avait dès son enfance annoncé des
dispositions naturelles à f éloquence, et
s'était fait par la lecture des romans un
jargon qu'il maniait facilement. On l'a
surnommé le Paysan du Danube. Dans les
soirées des 1" et 2 juillet 1789, il était à
la tête des niouvemens populaires dans
lesquels les bustes du duc d'Orléans et de
M. Necker furent portés en triomphe et
promenés dans Paris. Le 14 juillet an
malin, il harangua le peuple de la sec-
tion qu'il habitait pour l'engager à le sui-
vre et à forcer l'hôlel des Invalides, à
s'emparer des armes et des canons , et à
marcher sur la Bastille. On a dit que Le-
gendre était , sans s'en douter, l'agent de
certains meneurs qui n'avaient point as-
sez d'audace pour se mettre en évidence
dans les premiers mouvemens pojju-
laires. Il se lia successivement avec Dan-
ton, Camille Desmoulins. Fabre d'K-
glanline , qu'il avait rencontrés dans les
prenùères assemblées des di«tri(!s. Dià
5i,
LEG
366
LEG
-lors il s'éloigna peu à peu de ses premiers
protecteurs, devint lui-même une sorte
de puissance, et fut un des fondateurs
du club des cordulicrs , qui s'érigea en
autorité rivale de celle des jacobins. Le-
gendre cependant ne cessa point de
fréquenter ces derniers, qui bannirent
successivement de leur assemblée tous
fes premiers amis de la liberté. Il fut
obligé de prendre la fuite pour se sous-
traire aux différens décrets d'arrestation
prononcés contre lui , soit à raison des
discours violens qu'il avait tenus contre
le décret qui consacrait l'inviolabilité du
roi , soit à la suite des événemens ar-
rivés au Champ-de-Mars, le 17 juillet
4791. Il reparaissait de temps en temps
dans la capitale , jusqu'à ce que de nou-
veaux motifs vinssent encore le contrain-
dre de fuir ou de se cacher, et fut un des
provocalmirs et des auteurs des journées
des 20 juin et 10 août 1792 ; mais il refusa
constamment de prendre aucune part aux
massacres des 2 et 3 septembre , dont il
eut néanmoins plus tard la lâche faiblesse
de provoquer, l'impunité. Nommé, en
septembre de la même année , député de
Paris à la Convention nationale , il s'y
montra l'un des ennemis les plus ardens
de Louis XVI , et s'écria ie 11 décembre ,
au moment où ce prince allait paraître à
la bar/e , « qu'il fallait que les députés
» ainsi que les tribunes gardassent le plus
» profond silence quand le coupable entre-
» rait dans la salle, alin que le calme des
» tombeaux l'effrayât. » Le 16 janvier
4793 , il vota la mort du roi , en rappe-
lant qu'il avait été l'attaquer au 10 août,
dans son château des Tuileries ; et, le 20,
veille de l'exécution , il proposa , à la
tribune des jacobins, découper son corps
en quatre-vingt-quatre morceaux pour les
envoyer aux quatre-vingt-quatre dépar-
tcinens. Nommé membre du comité de
sûreté générale le jour môme de la mort
du roi (21 janvier) , il fut un des provo-
cateurs les plus ardens des crimes du 31
mai , et dans la séance du 28 de ce mois, il
prit à la gorge et tenta de précipiter de
la tribune Lanjuinais , qui s'efforçait de
rappeler les proscripteurs à la justice et à
l'humanité. Envoyé en mission à Lyon ,
il y prépara par sa faiblesse et son igno-
rance du véritable état de ce pays, les
voies aux forfaits que CoUot-d'Herbois vint
y consommer quelques mois après. Rap-
pelé à la Convention , il fut chargé d'une
mission nouvelle à Dieppe. A une épo-
que où les suisisîarucs élaicnt rares, il
répondit pliis d'une fuis au peuple qui lui
dciuaiidait du pain : fous manquez ds
pain ? hé bien . mangez les aristocrates.
De retour dans la Convcnlion, son an-
cienne intimité avec Danton se resserra
de plus en plus, et celui-ci qui , dès long-
temps , ne le désignait plus que sous le
nom de son lieutenant , l'associa à tous
ses projets. Peu de caractères ont pré-
senté dos contrastes plus remarquables
que celui de Lcgendre : énergique cl in-
trépide en certains momens , il paraissait
en dautres momens , irrésolu et timide.
Robespierre exerçait sur lui un asceiidanl
terrible; ainsi , après avoir défendu Dan-
ton, il annonça lui-même son arrestation
à l'assemblée, dans la séance, du 10 ger-
minal an 2 (50 mars 1794). Après avoir dé-
claré qu'il regardait ce député connue
aussi pur que lui-même , après avoir rai>-
pelô qu'en 1792 il avait fait lever lu
France entière, et demandé qu'il fût en-
tendu à la barre , il se rétracta de toutes
ses assertions et de sa demande , du mo-
ment où Robespierre, en lui répliquant,
lui eut fait entendre que les amis de Dai>
ton pourraient bien partager son sort. Dès
ce moment, ce révolutionnaire , autrefois
si terrible, se vil sans cesse menacé de
l'échafaud, et se crut atout instant près
d'être arrêté. Blâmé par Coulhon peu de
temps après pour avoir pris la défense de
Danton, il déclara « que s'il avait com-
» mis une erreur, elle était involontaire. »
Ayant été averti qu'il devait être arrêté,
il adjura, dans l'assemblée, quiconque
aurait quelque fait à alléguer contre lui
de le déclarer à l'instant. Toujours plus
lâche à mesure que ses terreurs redou-
blaient , il dénonça les prétendus conseils
anonymes qui lui avaient été donnés d'as
sassiner Robespierre et Saint-Just , et dé-
clara quil ne doutait plus que Danton
n'eût dt's complices dans lu prison du
Luxembourg,» protestant qu'il était main-
» tenant convaincu de la réalité de la ron-
» spiration pour laquelle ce député avait
» péri, et avouant qu'il avait été sou
» jouet. » Il y a peu d'exemples d'hommes
«ur lesquels la frayeur ait exercé un plus
grand empire. A aucune époque , Legen-
dro n'avait pensé sur Danton ce que la
terreur lui arrachait alors, et il en a sou-
vent fait l'aveu après le 9 thermidor. Peu
de temps avant la chute de Robespierre ,
il avait annoncé aux jacobins qu'il ferait
à ce député un rempart de son corps.
Lorsque la jeune et infortunée Cécile Re-
naud , âgée de 20 ans, fut mi.i à uunt ,
LEG
367
LECr
comme ayant voulu assassiner Robes-
pierre , Lcgcutlre s'écria à la tribune des
jacolnns : « La main du crime s'était levée
v pour assassiner la vertu , mais le Dieu
» de la nature n'a pas souffert que le crime
» fût consomme. * Après la mort du dé-
puté d'Arras, Lcyendre, qui toutefois
n'avait pris aucune part active aux glo-
rieux événemeus qui délivrèrent la Con-
vention et la république de la tyrannie la
plus horrible qui ait jamais existé , devint
ui\ des accusateurs les plus ardens des
complices de celte tyrannie ; et l'on doit
avouer que de grands dangers existaient
encore pour ceux qui poursuivaient les
licritiers du sanglant système qui venait
d'être détruit : mais Robespierre n'était
plus là, et Legendre n'était plus frappé du
prestige de terreur imprimé à ce nom. Elu
membre du comité de sûreté générale, le
ik thermidor an 2 (l*^*^ août l'/'J'i-; , aucun
de ses collègues n'a signé en moins de
lemps un plus grand nombre de mises en
liberté. La Convention ayant décrété, le
22 brumaire an 3(12 novem])re d794),
sur le rapport de ses trois comités de sa-
lut public, de sûreté générale et de léga-
lisation , que la salle des jacobins serait
fermée , ce fut Legendre qui se chargea
de l'exécution du décret, et rapporta à la
Convention les clefs de cet antre de l'anar-
chie. Dans le cours du procès de Carrier,
contre lequel il lit, comme membre du
comité de sûreté générale , prendre toutes
les mesures propres à prévenir sa fuite ,
il parla plusieurs fois contre ce monstre ,
déroula l'effroyable tableau de ses crimes,
et on remarquadans ses discours des traits
qui produisirent une impression pro-
fonde sur l'assemblée et les tribunes. Bil-
laud-Yarennes ayant témoigné des crain-
tes hypocrites sur les résultats de la mise
en liberté de madauie deTourzel, Le-
gendre invita la Convention « à frapper
» cette poignée d'hommes de joroie qui
» obscurcissaient l'horison politique par
» les vapeurs du crime ^ » et prit le peu-
ple à témoin qu'il voudrait que l'auteur
lie la nature les condamnât à ne mourir
jamais. Elu président de la Convention
le 17 brumaire an 5(7 novembre 1794) ,
il rentra le 13 frimaire (5 décembre 179i)
au comité de sûreté générale , dont il était
sorti le mois précédent. Après avoir con-
tribué plus puissainment qu'aucun de
ses collègues à conduire Cari ier à l'écha-
faud , Legendre attaqua Maignet avec
non moins d'énergie , mais avec moins
Uc succès, car Maigaet ne fut point pour-
suivi. Liunt îilors riiiipuiiilé de ce der-
nier avec cclliî des membres des anciens
comités de salut public et de sûreté géné-
rale , alors en état de prévention devant
la Convention nationale : « Il y a des
n hou)mes, s'écria-t-il , qui voulant tou-
» jours mener la Convention nationale,
» lancent en avant des légions de lieute--
» nans. Ce sont ces hommes qui ont fait
» charrier dans l'Océan la preuve de leurs
» crimes , et qui ont rougi la mer par le
» reflux ensanglanté de la Loire; ceux
» qui ont porté l'incendie et la dévasta-
» tion dans les départemcns ; ceux qui
» ont mis les jacobins en feu , et qui en
» ont fait un théâtre où chacun joue un
» rôle plus ou moins odieux. L'histoire
» est sur les planches ^ et Robespierre est
» au trou du souffleur. » C'était presque
toujours avec cette bizarrerie d'images ,
qui ne pouvait produire d'effet que dans
sa bouche , et unie à son geste , que Le-
gendre était constamment assuré de pro-
duire plus d'impression. Lors des insur-
rections anarchiques, des 12 germinal an
5 ( 1" avril 1795), i" prairial (20 mai de
la même année ) , et 13 vendémiaire an k
(5 octobre 1793) , Legendre montra un
courage et une activité infatigables; il
marcha plusieurs fois à la tète des trou-
pes qui délivrèrent la Convention, et
contribua à son triomphe. Devenu mem-
bre du conseil des Anciens, il y prit
plus rarement la parole , parce que
son genre d'éloquence avait dû trouver
nécessairement moins d'occasions de ^e
faire remarquer , et perdre beaucoup de
son effet, à mesure que la tourmente ré-
volutionnaire s'apaisait , et que les esprils
commençaient à se calmer. Après la dé-
couverte de la conspiration de Drouet et
Babeuf, il vota leur accusation, et de-
manda même l'expulsion de Paris dt'S
ex-conventionnels, ses anciens collègues.
« Que les conspirateurs, dit-il alors, ne
» vantent pas les services qu'ils ont pu
» rendre en d'autres temps ; ce n'est point
» pour ses services passés, mais pour ses
» crimes actuels que Manlius fut préci-
» pité de la roche tarpéienne. » Il est hors
de doute qu'avec de l'instruction et une
éducation soignée , Legendre, qui fui
quelquefois cruel dans ses discours, mais
qui montra d'une manière non équivo-
que, après le 9 thermidor , qu'il y avait
beaucoup plus de lâcheté dans son cœur
que de fermeté dans son caractère , eu*,
été l'imdes personnages les i)luséloqu<ns,
peul-éire même l'un des plus importuns
LEG
568
LEG
de la révolulioa française. Dans les der-
niers temps de sa carrière convcnlio-
nclle, il prenait des leçons de grammaire,
et s'clait décidé à apprendre la langue la-
tine. Il avait toujours conservé pour sa
demeure l'ancien local de son établisse-
ment, rue de Beaune. Leyendre est mort
à Paris le 15 décembre 1797, âgé de 41
ans , et a légué son corps à la faculté de
médecine , alin , dit-il dans son testa-
ment , d'être encore utile aux hommes ,
inèuic après sa mort.
* LEGEXDUE (Adrien-Marie), de
Toulouse, savant mathématicien, membre
de l'académie des sciences , fut d'abord
professeur de malhémaliques à l'école mi-
litaire de Paris, et se lia avec Lagrange
et Laplace qui lui confièrent des calculs
de la plus haute importance. Lorsqu'il fut
question, en 1787, de vérifier la position
des observatoires de Londres et de Paris,
Legendre fut choisi avec Cassini et Mé-
chain pour procéder à celte opération , à
laquelle prirent part des géomètres anglais.
On fit usage à celte occasion pour la pre-
mière fois des grands moyens trigonomé-
triques et dun graphomètre , tel que ce-
lui dont on se sert aujourd'hui. On trouve
les détails de cette mensuration dans un
rapport intitulé : Exposé des opérations
faites en France , en 1787, et description
d'un nouvel instrument propre à donner
la. mesure des angles, à la précision d'une
seconde^ Paris, 1792. Legendre publia, en
1794 , un Mémoiî'e sur les transcendantes
elliptiques, et il donna la même année son
traité des Elémens de géométrie^ in-8"
avec des notes dont la deuxième édition
parut en 1799, augmentée de la trigonomé-
trie. Cet ouvrage, devenu classique, était
parvenu, en 1827, à sa treizième édition.
L'auteur a constamment suivi dans ce
livre la iT>éthode des anciens , qu'il s'est
appropriée , et qui lui a semblé plus à la
portée de rintelligence des commençans ,
que rebuterait la sévérité de l'analyse. En
1795, Legendre fut nommé membre de
\ Agence temporaire des poids et mesures,
et il conserva celle place jusqu'en 1805,
époque à laquelle l'agence fut réunie au
ministère de l'intérieur. Peu d'hommes
ont fourni une carrière aussi fructueuse
pour la science; les Mémoires de l'acadé-
mie des sciences renferment un grand
nombre de ses découvertes. Ses recher-
ches sur l'attraclion des sphéroïdes ellip-
tiques qu'il counuença en 1782, ont été
très utiles à Laplace, qui en a déduit des
lois importantes pour son système du
monde. Legendre a démontré le premier
que la ligure elliptique peut seule conve-
nir à l'équilibre d'une masse fluide ho-
mogène , engagée dans un mouvement de
rotation, pendant que toutes les molé-
cules dont elle se compose s'attirent en
raison inverse du carré des distances. 11
fut désigné comme le seul homme capable
do faire tous les développemens de cal-
culs que Lagrange n'avait fait qu'indiquer
dans sa Mécanique anal g tique ^ el il s'en
acquitta avec une patience égale à son
habilelé. En 1789, une ai)plicalion des
transformations indiquées par Eulcr et
Lagrange pour siinplilier l'intégration
des differenlioilcs partielles, prises suc-
cessivement par rapport à diverses va-
riables, le conduisit à démontrer, sans le
secours des séries, que si deux sphé-
roïdes elliptiques ont leurs trois sections
principales décrites d'un jnême foyer,
les attractions qu'ils exercent sur un
même point extérieur auront une même
direction, et seront entre elles dans la
proportion des masses qui les produisent.
Peu de temps après, en 1790, Legendre
présenta à l'académie le résultat de ses
recherches sur les sphères des hétéro-
gènes, dont il découvrit les lois, en s'ai-
dant de l'équation différentielle partielle
que Laplace avait employée le premier.
Lorsque on s'occupa de la division du
cercle en quatre cents degrés, afin de
compléter le système des mesures déci-
males, Legendre concourut avec M. de
Prony à la confection des nouvelles tables
trigonométriques que nécessitaient les
changemens apportés dans la longueur
des arcs , et il imagina des formules très
élégantes pour déterminer les différences
successives des sinus. En 1808, ce savant
modeste fut nommé conseiller à vie ho-
noraire de l'université, et membre de la
commission d'instruction publique. Il fut
plusieurs fois chargé de l'examen des can-
didats pour l'école polyteclmique. Sur la
fin de sa vie , dont il passa les derniers
temps dans la retraite, il se vit privé
momentanément de sa place et de sa pen-
sion , qui étaient à peu près son unique
ressource. Mais sa pension lui fut bien-
tôt rendue. Legendre est mort à Paris le
9 janvier 1835 ; ses restes furent transpor-
tés sans pompe, comme il l'avait de-
mandé, dans le village d'Auteuil, où lis
ont été ensevelis. Outre ceux de ses ou-
vrages que nous avons déjà mentionnés,
on a de lui : | Essai sur la théorie des
nombres^ 179i>; 2" édition, 1808, hi-4";
LEO 5
plus deux sui)plémens dont l'un a paru
en 18iG, et le second en 182o. Cet ou-
vrage, dans lequel l'auteur a traité une
matière des plus épineuses, est celui où
il a déployé, au plus haut degré, son ha-
bileté dans la science de l'analyse. | Nou-
velle théorie des parallèles ^ 1803, in-8" ;
I IVouvelle méthode pour la détermination
des orbites des comètes^ I8O0 , in-8", plus
deiyî supplémens, dont le second a i)aru
en 1820. Cette niélliode est entièrement
fondée sur des principes d'analyse ptire.
Dégagée de toute considération géomé-
trique , elle a été jugée assez sévèrement
dans le rapport qui en fut fait , en 1808 ,
à l'institut, et dans lequel on lit les phrases
suivantes : « Elle a les avantages et quel-
» ques uns des inconvéniensde toutes les
«solutions analytiques, c'est-à-dire, la
» longueur des calculs , le grand nombre
» de lettres et de symboles dont il est
» presque impossible de retenir la signi-
» lication; enlin l'espèce d'obscurité qui
» fait que le calculateur ne sait pas lou-
» jours ce qu'il fait et où il va. » Legendre
reçut avec docilité les reproches adressés
à sa méthode , qu'il a depuis beaucoup
améliorée. Il n'a plus dédaigné, comme
auparavant, de faire concourir l'observa-
tion à la correction de ses calculs , et il
l'appelle à son secours comme moyen de
vérification. L'usage des indéterminées
dans le calcul logarithmique est entre les
innovations dont il est l'auteur, celle qui
intéresse le plus les astronomes. Il en
avait essayé l'introduction , dèsl788, dans
I)lusieurs mémoires. | Exercices du colciU
intégral; | Cousiruclion des tables ellip-
tiques, 1818-1819. 5 vol. hi-W ; cet ouvrage
qui a été publié par cahiers , est un des
plus utiles que Legendre ait composés.
' LKGEINTIL (Labahbinais), voyageur
français du 18* siècle, né , à ce qu'il pa-
rait en Bretagne, partit de Cherbourg en
1714 pour se rendre au Chili, et visita
plusieurs des colonies espagnoles, diffé-
rens ports de la Chine , l'ile Bourbon , le
Brésil; il revint par Gènes en France, et
publia la relation de ses voyages sous ce
litre : Nouveau voyage autour du monde,
avec une description de la Chine , Paris ,
1728, 5 vol. in-12, cartes et fig. Amster-
dam, 1728 et 1731, 3 voL in-12, %. : ce
voyage , rédigé en forme de lettres , est
Écrit d'une manière agréable , mais l'au-
leur s'abstient de toutes remarques nau-
tiques; et l'on voit même en plusieurs
endroits qu'il n'avait que des notions assex
communes de la gc ograpliic générale ; il
69
LKO
se borne à décrire les lieux qu'il a vus et
les ujoeurs qu'il a observées; on y trouve
cependant des particularités intéressantes
sur le port d'Einouï peu fréquenté parles
Européens, sur plusieurs petites iles du
détroit de la Sonde et sur la colonie de l'ild
Bourbon , alors nommée Mascarin. L'au-
teur de l'Histoire des Voyages dit que
« il néchappe à Legenlil rien qui puis'-e
» faire mal juger de son esprit et de sa
» bonne foi. »
* li:ge\til de l\ galmsîèbe
( GL'illaume - Joseph-Hvac.ixti!i;-Jea\-
Baptîste), astronome et voyageur, na-
quit à Coutances, le 12 septembre 1725.
Il devait embrasser l'état ecclésiastique ;
mais, ayant assisté aux leçons de Delisle ,
il se passionna pour l'astronomie, science
qu'il cultiva avec succès, et dans laquelle
il eut pour maître le célèbre Cassini. En
175.3, il fut admis à l'académie, qu'il en-
richit de plusieurs savans Mémoires. Il
fut du nombre des astronomes voyageurs
qui allèrent observer le passage de Vénus
sur le disque du soleil. Destiné pour Pon-
dichéri, les mauvais temps et la guerre
qui éclata entre la France et l'Angleterre
l'empêchèrent d'arriver dans cette viile ,
qui tomba au pouvoir des Anglais. Ce fui
en pleine mer qu'il vit, le 6 juin 1761 , le
passage de l'émis sur le soleil. Un second
passage de Vénus devant' avoir lieu huit
ans après, savoir le 5 juin 1769, il ré-
solut de rester dans les Indes jusciu'à
celle époque. Il visita les îles de France
et de Bourbon, de Rodrigue et de Mada-
gascar, les Philippines et la côte Coro-
mandel. S'étant rendu à Manille, en
août 1766 , il alla ensuite à Pondirhéri , et
y lit ses préparatifs pour observer le
passage de Vénus; mais ce jour là le ciel
devint nébuleux, et l'astre passa sans
qu'il pût faire ses observations : le même
contre-temps arriva aux Anglais à Ma-
dras; mais deux de ses amis qu'il avait
laissés à Manille, où d'abord il avait
eu le projet de faire ses observations,
furent plus heureux que lui. Legeatil re-
vint en France, où l'attendaient d'autrei
désagrémcns. Ses héritiers, le croyaric
mort , s'étaient partagé ses biens ; il pai-
vinl à les recouvrer ; mais son procureur,
bas Normand , fut volé au moment qu'il
allait lui rendre ses comptes. Legentil
plaida, perdit son procès, et fut cou-
damné aux dépens. Il se consola par l'é-
tude, s'occupa de ses ouvrages et d'un
grand nombre de Mémoires qu'il fournit
encore à l'académie. Lcgi-nlil est mori
LEG 5
à Paris, le 22 octobre 1792, âgé de 67
ans. Il a laissé : | Mémoire sur le pas-
sage de Vénus sur /éJio/eiYavecTrébuchel
{Journal des Savons, mars 1760); | Voyage
dans les mers de l'Inde^ à l'occasion du
passage de Vénus sur le disque du soleil.
Paris, 1779-1781 , 2 vol. in-i", %., caries
et plans ; — Jd., Hcidelberg , 1782 , 8 vol.
in-8°, fig. On trouve dans cet ouvrage de
précieux renseignemeiis sur les mers des
Indes, cl sur tout ce qui concerne les In-
diens. Legentil rapporta en France la
connaissance du zodiaque des Indous et
de l'astronomie des Brames, selon lui
très conforme à celle des anciens Chal-
déens. Ce ne fut pas sans peine qu'il put
se procurer des Brames les tables qui
leur servent à calculer les éclipses, et
apprendre d'eux la manière d'en faire
usage. II découvrit que le nombre prodi-
gieux d'années que les Chaldéens don-
naiciil à chaque âge du monde n'est qu'une
combinaison des révolutions de 1 équi-
noxe et que les quatre iougains, ou âges
du monde, dont les Brames parlent avec
tant d'emphase, ne sont que des périodes
astronomiques du mouvement des étoiles,
en longitude que l'on peut varier et re-
monter à l'inihii. Le voyage de Legentil
a été abrégé et traduit en allemand avec
d'autres relations semblables, Hambourg,
1780-1782, 5 vol. in-8". M. T.-D. Cassini
a publié V Eloge de Legentil, Paris, 1810 ,
in-8°.
LÉGER (saint), Leodegarius ^ évêque
d'Autun, né vers l'an 616, fut ministre
d'élat sous la minorité de Clotaire III, et ,
suivant quelques auteurs, maire du palais
sous Cbildéric II. Il n'était encore qu'abbé
de Saint-Waxent en Poitou, lorsqu'il fui
appelé à la cour par sain'e Mathilde ,
mère du roi, pour former, avec saint
Lloi de Noyon et saint Ouen de Rouen ,
une espèce de conseil de régence pendant
la minorité du jeune prince. L'évéché
d'Autun fut la récompense des services
de saint Léger. Après la mort de Clotaire
III, il contribua puissamment à l'élection
de Childéric, roi d'Austrasie. Il ne s'oc-
cupa qu'à faire régner ces princes avec
justice et humanité. Les courtisans l'ayant
rendu suspect à Childéric , il se retira à
Luxeuil , mais sa retraite ne le mit pas à
l'abri de la persécution. Ebrpïn lui fit
souffrir des tourmens horribles ; enfin cet
évéque fut décapité Tan 678. dans la forêt
de Lucheu en Picardie , diocèse d'Arras.
Il nous reste de lui des Statuts synodaux ,
dans les Conciles du père Laijbe, et une
70 LEG
Lettre de consolation . à Sigrade . dans la
liihliothèque des manuscrits . du père
Labbe. On trouve la vie du saint Prélat
dans la Collection des historiens de France
et dans les vies des saints de l'ordre de
Saint- Benoit.
LÉCLU (ANTOINE), théologien protes-
tant, né à Ville-Sèche, dans la vallée de
Saint-Martin en Piémont, l'an 159 V, alla,
en qualité de chapelain de l'ambassadeur
des états-généraux , à Constantinople. Il y
lia une étroite amitié avec le patriarche
Cyrille Lucar, qu'il confirma dans les er-
reurs de Luther, et dont il obtint une
Confession de foi. que les Grecs ont hau-
tement désavouée. De retour dans les
Vallées, il y e;cerça le ministère : mais le
duc de Savoie l'ayant fait condamner à*
mort comme fanatique et séditieux , il se
retira à Genève où il obtint une chaire
de théologie. Il y mourut en 1661 , à
soixante-sept ans. On a de lui une Edi-
tion du nouveau Testament en grec ori-
ginal et grec vulgaire, 2 vol. in-i". — A;v-
ToixE LÉGER, son fils , né à Genève eu
1652 , mourut dans cette ville en 1680. On
a de lui 5 volumes de Sermons imprimes
après sa mort. Il publia diverses Disserta-
tions, sur des su^els phgsiques et théolo-
giques, imprimées de 1705 à 1715; et quel-
ques Traités de Théologie.— Jea\LÈGEI\,
né en 1625, neveu d'Antoine Léger, mi-
nistre de l'Eglise de Saint- Jean , obtint de
Louis XIV, après la destruction des Vau-
dois, et sur la recommandation de Crom-
well , la permission de faire en France
une quête en leur nom. Ayant, en 1655,
assisté aux conférences qui se tinrent à
Sigueros , il eut à ce sujet des démêlés
avec le duc de Savoie, qui fit raser sa
maison, et le déclara criminel de lèse-
majesté. Il devint ensuite pasteur de l'E-
glise wallone à Leyde, et il remplissait
encore cette place en 1665. Il a laissé
Vilistoire des Eglises évangèliques des
vallées du Piémont, in-fol. ; c'est le fruit
du ressentiment uni à l'esprit de secte.
LÉGER (Claude), né à Atticbi, petite
ville du diocèse de Soissons , en 1609,
embrassa l'état ecclésiastique , et en eut
toutes les vertus. Devenu curé de Saint-
André-des-Arcs , à Paris, il gagna l'es^
time et le respect de tous les gens de bien
par sa charité , son zèle , son désintéres-
sement. Il mourut à Paris en 1774 , re-
gretté surtout d'un grand nombre de pré-
lats qui avaient été ses élèves dans les
sciences du saint minisîère. A l'occasion
du iiioaument «]Ui liii fut érigé en 1781,
LEO 5
l'évèque de Sôiioz (M. de Reauvuisj pro-
nonça son éloge funèbre , vrai chef-
d'œuvre en ce penre ; et en incme temps
excellent traité des obligations et des ver-
tus pastorales, écrit avec chaleur et avec
acnliment, et animé par les applications
et les citations les plus heureuses. L'il-
lustre orateur ne fait point difliculté, en
appliquant à ce respectable curé un pas-
sage de saint Hilaire. de dire que les
évoques mêmes auraient cru s'élever
trop haut s'ils s'étaient mis à côté de
ce simple prêtre : Nenio unquam epis-
coporum sibi tantum assumpsit , ut se
prtshi/teri illius collegam computaret.
* LKGEH ( F. P. A. ) , comédien et au-
teur né vers 1757, avait embrassé l'état
d'instituteur et pour se donner quelque
relief, portait le petil collet, mais jamais
il n'entra dans les ordres. La révolution
le jeta dans une carrière tout opposée :
secrétaire de la muiiicipalilé de Sainl-
Denis, il débuta ensuite dans le mois de
janvier 1792 , comme acteur au tliéâtre
du Vaudeville , et se mit en 1799, à la tète
de la troupe des Troubadours qui jouait
dans la salle de la rue Louvois; mais sa
gestion ne fut pas heureuse. Il dirigea
dans ses dernières aimées, le théâtre de
Nantes et mourut le 27 mars 1823. On
trouvera la liste do ses nombreux ou-
vrages dans le 4^ vol de V Jnyiuaire né-
crologique de M. Mahul. Nous citerons
seulement : \ L'homme sans façon ou le
Vieux cousin j comédie en 5 actes et en
prose , représentée au Théâtre-Français ;
I Marie ou la Demoiselle de compagnie .
jouée à rOdéon : | le Corsaire comme il
n'y en a points au théâtre de la rue de
Bondy , et un grand nombre de l^aude-
villes, seul ou en société avec Barré,
Chazet , Deschamps, Désaugiers et autres.
II est encore auteur [d'une Rhétorique épis-
tolaire^ ou Principaux élémens de l'art
oratoire^ appliqués au genre épistolaire j
suivis d'un traité sur la manière de lire
et de réciter à haute voix, 1804, in-i2;
î do John Bidl ou Voyage à Vile des Chi-
mères, 1818, 3 vol. in-12, et de Poésies
et Chansons erotiques, etc., Paris, 1819,
in-18.
LEGET (Antoine) , né dans le diocèse
de Fréjus, fut supérieur du séminaire
d'Aix sous le cardinal de Grimaldi. On a
de lui : ] une Retraite de dix jours,
in-12 ; | la Conduite des confesseurs dans
le tribunal de la pénitence, in-12; | Véri-
tables Maximes des saints sur l'amour de
Dieu. Il mourut en 1728, à soixante-on/.e
7i LEG
ans , directeur de la maison de Sainte-
Pélagie.
• LEGIER (Piehre) , littérateur franc-
couitois , né en 1734 , à Jussey, fit de
bonnes études , et , ayant embrassé la car-
rière des armes, alla combattre en Bo-
hème. La faiblesse de sa santé l'obligea
de renoncer au service , et il vint étudier
le droit à Paris , où il dut à quelques vers
agré^ables l'entrée des cercles les plus
brillans. Il s'essaya aussi , mais avec peu
de succès , dans le genre dramatique , re-
vint dans sa famille et obtint la charge de
maire et de lieutenant-général de police.
Légier est mort d'une maladie de poitrine,
à Jussey, le 7 janvier 1791 , laissant les
productions suivantes : | Le Rendez-vous,
opéra en un acte et en vers , représenté
en 1763; | Les Protégés, comédie, en 3
actes et en vers, Paris, 1769, in-12; où
l'on trouve une versification facile, mais
peu d'originalité et d'intérêt ; | ^muse-
mens poétiques . Londres (Orléans) , 1769,
in-12 ; c'est un recueil de contes , épî-
tres, etc. On y trouve le jargon mis à la
mode par Dorât ; mais Légier n'en a pas
du moins outré les défauts; | L'influence
du luxe sur les mœurs et les arts, dis-
cours en vers , prononcé le jour de sa ré'
ception à l'académie de Besançon, 1780,
in-8° ; | L'orateur, poème , à l'abbé de
Talbert , 1784 , in-S", où l'on rencontre de
bons passages ; | Susky, conte moral ; ce
morceau , le seul en prose qu'on ait do
Légier, a été imprimé dans les affiches
de Franche-Comté, année 1783; | Le
Berger, fable, présentée à M. l'évèque
de Chàlons (Mgr. de Clermonl-Tonnerre),
Besançon, 1782, in -8°; | Epilre à un
amateur des beaux arts , Besançon , 1782 ,
in-8". M. Weiss, bibliothécaire de Besan-
çon, a consacré une Notice à Légier dans
les Mémoi7-es de la société d'agriculture
du département de la Haute-Saône.
LEGIONENSIS. Voy. LÉON Aloysius.
•LEGIPOAT (dom Olivieu ) , bénédic-
tin de la congrégation de Bursfeld , naquit
à Soiron, village dans le duché de Lim-
bourg, diocèse de Liège, le i" décembre
1698. Ses études furent des plus brillantes ;
et , le 1" mars 1720 , il entra dans l'ab-
baye de Sain:~Martin de Cologne, prit le
grade de licencié dans l'université de celte
ville, et professa la philosophie dans son
monastère, dont il devint prieur. Ayant
étudié le droit , il l'enseigna à ses co-re-
iigleux par une méthode nouvelle et fa-
cile. Doué d'une pénétration rare, d'une
mémoire prodigieuse, et infatigable dans
LEG 5
et travail , dom Olivier parcourut presque
toutes les branches des sciences et de la
lilléralure, même des arts : il était phi-
losophe, historien, canoniste, juriscon-
sulte, théologien, helléniste, latiniste,
bihliogiajjhe , philologue, numismate,
orateur, poète, peintre, musicien , et con-
naissait plusieurs langues modernes. Il se
lia d'amitié avec dom Bernard Pèse , cé-
lèbre religieux de l'abbaye de Molk, qui
lui inspira son goût pour les recherches
savantes. II visita les bibliothèques et les
chartriers de l'Allemagne, où il puisa la
connaissance de monumens littéraires et
historiques jusqu'alors inconnus , et mit
en œuvre plusieurs archives et biblio-
thèques, dont il dressa les catalogues. Ce
savant religieux mourut à l'abbaye de
Saint - Maximien de Trêves, le 16 juin
4758, âgé de 60 ans. Dom Juan-François,
de la congrégation de Saint-Maur , donne,
dans sa Bibliothèque générale des écri-
vains de l'ordre de Saint-Benoît , la liste
des ouvrages de dom Olivier, dont dix-
neuf ont été publiés et cinquante-un sont
restés inédits. Nous citerons les plus con-
nus : I Dissertationes philologico-bibho-
graphicœ de ordinanda et omanda bi-
blioiheca , Nuremberg , 1726 , in - 4° ;
I Uibliographiœ benedictince corïspectus ,
Mayence , 1738 ; | Monaslicum moguntior
num, sive succincta motiasteriorum in
ejiiscopalu nxoguntino notitia . Prague,
17/i6, in-/t**; | Nolum anonesmi submis-
saque mediorum insinuatio pro semi-
nario benedictino^ una cum academia
nobilium Ileidelbergœ eligendo, Colonfœ
in semilanio, 1748, in-8° ; | Sacrœ metro-
poleos coloniensis anttquitas et prœroga-
tivœ adversus illius gloriœ œmulos as-
sena , Cologne , 1748 ; | Introductio ad
studiam numismatum roinanorum pro
illustri jw^entute , Wurtzbourg , 1737,
in-8"; | Methodus studiorum^ Ratisbonne,
4752 ; I Systeyna engendœ societatis litte-
rariœ, elc. , Vienne et Wurlzbourg , 1754,
Kcmplon , 1758, irj-S"; | flistoria rei litte-
rarice ordinis sancti Bénédictin in qua-
P.ior partes distributa ^ aie. , Vienne et
\Vurl7.bourg, 1754 ( K. ZIEGELBAUER) ;
J une nouvelle Bibliographia benedic-
iina, etc., 12 vol. in-fol.
LEGOBIE.X;. royczGOBIEN.
• LEGOUVÉ (Gabriel -M AuiE - Jean-
Baptiste), littérateur et membre de
l'institut , naquit le i'3 juin i7()4, à Paris;
il était lils d'un avocat distingué, et re-
çut les premières leçons de poésie de son
père , qui cultivait en secret les muses, et
72 LEG
aucfiicl on doit une tragédie intitulée Ai-
tilie qui n'a pas été rt^prcsentée , mais
qui fut imprimée deux fois. Se% premiers
essais , laborieusement produits , étaient
d'une désespérante médiocrité. Mais il
produisit ensuite successivement de meil-
leures compositions, qui lui ouvrirent les
portes de l'institut en 1798; lorsque De-
lille ne put plus continuer son cours de
poésie latine au collège de France, Le-
gouvé fut chargé de suppléer cet illustre
écrivain. Dans ses dernières années, la
mort d'une épouse qu'il chérissait tendre-
ment, et des circonstances non moin»
affligeantes qui en furent la suite, al-
térèrent ses facultés mentales et détrui- ■
sirent en peu de temps sa santé. A ces
causes de dépérissement se joignirent les
suites d'une chute qu'il lit dans la maison
de campagne de mademoiselle Contât , et
il y succomba dans une maison de santé à
Montmartre, le 50 août 1812. Legouvé avait
lame naturellement aimante et sensible:
elle le portait à peindre les affections
douces et mélancoliques : il débuta dans
la carrière littéraire par une Iléroide de
la mère des Brut us à B?-utus son mari,
revenant du supplice de ses fils ; ce tte pièce,
où se trouvent quelques beaux vers qui
rachètent ce que le fonds a de défectueux ,
a été insérée avec deux autres du même
genre par M. Laya , dans les Essais de
deux amis {voyez LAYA), Paris , 1786,
in-8". On lui doit plusieurs poèmes : la
Sépulture ^ les Souvenirs ^ la Mélancolie , le
Mérite des femmes. Ces poèmes sont peu
remarquables sous le rapport de l'inven-
tion, mais ils offrent un grand mérite de
style : une versification pleine de char-
mes y rajeunit sans cesse des idées peu
nouvelles , et le coloris le plus agréable
vient rafraîchir des tableaux déjà connus.
Son poème sur la Mélancolie est plein de
charme et de sentiment : les mêmes qua-
lités se font remarquer dans ses pièces de
vers qui ont pour objet les souvenirs et
les sépultures. Mais celui de ses ouvrages
qui a obtenu le plus de célébrité est son
poème intitulé : Le Mérite des femmes^
qui parut pour la première fois en 1801 ,
in-12. Il s'y est particulièrement attaché
à rendre hommage au généreux dévoue-
ment et à l'héroïque résignation que mon-
trèrent tant d'épouses, de mères, de
sœurs et d'amantes, pendant le règne af-
freux de la terreur. Nous ajouterons à
cette nomenclature *ine Nouvelle en
prose intitulée : Elisabeth et Blanche,
ainsi que (lUi^lc^Vits pièces fugitives^ parmi
LEG
57!
LEG
lesquelles on reiuarquc un pelil nombre
d'ôpigramines , que d'injustes attaques
arrachèrent à sa douceur naturelle. Le-
gouvé a aussi composé des pièces de
théâtre. La Mort d'Abel (1792), dont il
puisa le sujet dans l'Ecriture , et les traits
principaux dans le poème de Gessner,
révéla un talent supérieur : on y remar-
qua la peinture touchante et fidèle du
berceau du monde ; le caractère de Caïn
est tracé avec énergie , et plusieurs scènes
sont du plus puissant intérêt. Celte pièce
obtint un grand succès, mais non le suf-
frage de Laharpe , qui la censura 'vive-
ment dans le Mercure de France. Epi-
charis et Néron, son second ouvrage ,
représenté en 1794 , obtint aussi un bril-
lant succès , dû sans doute en partie aux
circonstances politiques, qui ne pou-
vaient manquer de concourir à la réussite
d'un ouvrage dont l'objet était de retracer
le triomphe de la liberté sur la tyrannie ;
mais le mérite intrinsèque de cette pièce
suffisait pour la faire accueillir favora-
blement. Le personnage d'Epicharis est
dessiné avec autant de vigueur que d'ori-
ginalité; l'intrigue est habilement con-
duite , et le cin«{uicme acte . que remplit
presque seul Néron , caché dans le sou-
terrain où il se dérobe à la vengeance des
Romains, offre la peinture aussi vraie
que terrible des fureurs impuissantes et
des lâches terreurs du tyran abattu. Le
style de cette pièce est vraiment celui de
la tragt die , et il s'y rencontre quelques
traits qui paraissent inspirés par le génie
de Tacite. La Mort de Henri IV, dernier
ouvrage de Legouvé, et dont la lecluye fut
faite par Talma à Napoléon , dans une
réimion à laquelle assistait l'impératrice
Joséphine , malgré les critiques dont elle
fut l'objet , ne nuisit point à sa réputation.
On pourrait encore citer son Etéocle et
Poîynice, dans lequel il s'efforça d'imi-
ter l'énergique simplicité des tragiques
grecs ; et Quintus Fabius ^ où il essaya de
peindre la sévérité du caractère romain.
Aucune de ses pièces n'est restée au
théâtre. Choisi pour reprendre le cours
de poésie latine au collège de France,
qu'avait interrompu Delille par son émi-
gration, il composa son Cours de poésie la-
tine. On lui doit en outre divers morceaux
de prose et de vers, insérés dans les Veil-
lées des muses. Il a travaillé avec dix ou
dou7.e autres auteurs à deux pièces d'un
mauvais genre intitulées , M. de Jiièvre
ou YJbus de l'esprit, en un acte , 1799,
in-S", et Christophe Marin ou Que je suis
fâché d'être riche, 1801 , in-8**. Il a aussi
fait un nouveau troisième acte à l'opéra
de Montano et Stéphanie de Dejaure.
MM. Bouilly et Charles Malo ont publié
les OEuvres complètes de Legouvé, Paris,
1826-1827, 3 vol. in-8» : le dernier volume
contient ses OEuvres posthumes : M.
Bouilly a placé en tête de cette édition
une Notice sur Legouvé^ dont \ éloge a
été prononcé à l'institut par M. Regnaud
de Saint-Jean d'Angely.
LECRAND, LEGRAS, et autres. Voyez
la lettre G.
* LEGRAVEREND ( Jean -Marie-Eh-
manuel) , savant jurisconsulte , né à Ren-
nes, dans le mois de mai 1776, fil d'excel-
lentes études dans cette ville et fut nommé
en 1792 , à l'âge de 16 ans, secrétaire en
chef de l'administration du département
d'Ile-et-Vilaine. Trois ans après il quitta
cet emploi, et alla occuper à Paris celui
de chef de bureau dans le ministère de la
justice. En 1813, il y <ievirit chef de divi-
sion des affaires criminelles. Louis X"VIII
le nomma l'année suivante , membre de la
légion -d'honneur, et directeur des af-
faires criminelles et des grâces à la chan-
cellerie de France. Pendant les cent-jours,
le département de l'Ile-et "Vilaine l'élut
à la chambre des représentans , et en
1817 le même département le nomma
membre de la chambre des députés.
Sans cesser de demeurer attaché au mi-
nistère de la justice, il se fit inscrire en
1819, sur la liste des avocats aux conseils
du roi et à la cour de cassation. Nommé
en 1819 maître des requêtes , en service
extraordinaire, il passa ensuite conseiller
à la cour royale de Rennes , et se con-
sacra dès lors entièrement au travail
du cabinet. Legraverend est mort le 24
décembre 1827. Il siégea à la chambre
sur les bancs de la minorité dite consti-
tutionnelle. Il ne fut point réélu depuis
1822. Ses ouvrages de droit criminel lui
ont fait une réputation européenne; ce
sont : I Traité de la procédure criminelle
devant les tribunaux militaires et mari"
timcs de toute espèce , 1809, 2 vol. in-8"*;
1 Traité de la législation criminelle en
France,i8l6, 2 vol. in-8"; 2" édition, 1823,
2 vol. in-8°; | Observations sur le jury ^
1819, in-8°; 2* édit. 1827 ,- revue et aug-
mentée , etc. I des Lacunes et des besoins
de la législation française en matière po-
litique et en matière criminelle ou du dé'
faut de sanction dans les lois d'oi'dre
puhlic, Paris, 1824, 2 vol. in-8"; | Uti mot
sur le projet de loi relatif au sacrilège,
52
LEG 3
Paris, 182o , in-8"; 1 Lettre à M le comte
de Montlosier. 18'26 .'in-S".
• LEGRIS -DUVAL ( Réxé - Michei),
ecclésiastique, prédicateur ordinaire du
roi, né le 16 août 1765, à Laudernau en
Bretagne, lit ses études au collège Louis-
Ic-Grand. Il entra au séminaire de Saint-
Sulpicc, où son oncle le pèrg Qoerbcuf,
ancien jésuite, lui avait fait oLl«nir une
bourse, et s'y lll remarquer par ses ta-
lens. II fut ordonné prêtre le 20 niars
1790. La révolution venait d'éclater en
France, et, quoiqu'elle n'eût point dé-
ployé ce caractère terrible qu'elle prit
I)eu de temps après , les malheurs qui se
préparaient pour l'Eglise et la monarchie
ne tirent qu'enflammer le zèle de l'abbé
Lcgris-Duval , qui n'avait d'aulre ambi-
tion que celle de travailler au salut des
âmes, et d'autre désir que celui de ré-
pandre sou sang pour la foi. Il respirait
encore toute la ferveur de son ordination,
lorsque les mesures sévères dirigées
contre les ecclésiastiques insermentés
vinrent à être mises en vigueur. Vivement
affecté du sort des fidèles que lafulted'un
grand nombre de pasteurs laissait sans
ressources, l'abbé Legrls-Duval ne quitta
point la France , et , secondé par un de
ses amis , il se relira à Versailles , où il
exerça avec zèle les fondions du saint
ministère. Lorsqu'il apprit que Louis
XVI avait été condamné , l'abbé Legris-
Duval , bravant tous les dangers, partit
de celle ville le 20 janvier au soir, se
rendit à la commune de Paris, et s'a-
dressant aux membres qui la compo-
saient : Je suis prêtre . dit-il , j'ai appris
que Louis Xf^^J venait d'être condamné
à mort ; je viens lui offrir les secours de
mon ministère. Tant de courage et de
{générosité étonna les membres de la
commune : cependant Us allaient lui faire
])ayer cher celle généreuse démarche , si
l'un d'entre eux, nommé Matthieu , qui
avait été son camarade de collège, ne
l'eût pris sous sa protection , et n'eût
répondu de lui. Moins Intimidé do l'air
farouche avec leciuel son offre avait
été reçue, que content dappiendre que
le roi n'avait pas besoin de ses secours, il
retourna à Versailles, où il continua,
pendant lu terreur , à exercer dans la
ville et les environs , les périlleuses fonc-
tions auxquelles il s'était dévoué. Lors-
que l'orage révoluUonnalre commença à
s'apaiser, l'abbé Lcgrls-Duval fut un des
premiers à faire entendre sa voix apo-
stolique, r.a iJ'JG, M. le duc tle Doudenu-
74 LEG
ville lui confia l'éducalion de son fils So-
Ihènes de la Rochefoucauld. L'abbé Le-
gris-Duval ne cessa pas néanmoins d'ac-
comj)lir dans toute leur intégrité les fou-
lions du sacerdoce. etil.se montrait surtout
infatigable dans ses exercices de charité.
Pendant la révolution il avait fait des col-
lectes ponr les émigrés. En 1810, lorsqu'un
grand nombre de cardinaux furent pro-
scrits en France, ces prelals exilés durent
j\ son zèle et à ses soins des secours très
abondans. L'abbé Legrls-Dnval s'était
livré aussi à la prédication , et sa parole
produisit le plus grand bien. La cour vou-
lut connaître celte éloquence qui opérai»
partout tant de merveilles. L'abbé Legris-
Duval y prêcha plusieurs fois , et y rem-
porta des suffrages auxquels sa modestie
était loin de prétendre. Le roi voulut ré-
compenser ses travaux en 1817 , en lui of-
frant un évèché; mais 11 refusa cette di-
gnité , ainsi que la charge d'aumonier
ordinaire de Monsieur et de grand-vicaire
de Paris, Il accepta seulement une modi-
que pension de l,oOO fr., dont il ne jouit
que très peu de temps. Il fui promoteur
d'une association en faveur des pauvres
Savoyards, d'une autre pour la visite des
malades dans les hôpitaux, el d'une troi-
sième pour l'Instruction des jeunes pri-
sonniers. Il ne se faisait point dans Paris
une bonne œuvre dont 11 ne fût ou l'insti-
gateur ou le protecteur; et, quoiqu'il fût
lui-même sans ressource , n'ayant jamais
eu que le simple nécessaire, il animait,
pour ainsi dire, tout lé bien qui se faisait
dans cette immense capitale. Il succomba
aux travaux multipliés de son zèle et de
sa charité le 18 janvier 1819, pleuré des
pauvres dont il était le père, des grands
dont II était l'orateur, el du clergé dont li
était la gloire et l'ornement. Ses dépouil-
les mortelles furent portées à l'église des
Carmes, au-dessous de cette chaire où il
avait peu de temps auparavant fait en-
tendre sa voix, pour célébrer la glorieuse
mort des prêtres et des évéques massa-
crés en 1792. Ses Sermons ont été publiés
après sa mort, en 2 vol. in-12. Le premier
vol. , précédé d'une notice Intéressanle
sur sa vie , par M. le cardinal de Bausset,
contient son Jvent^ qu'il prêcha devani
le roi en 1816. Cette station est la seule
qu'il ait remplie, le mauvais état de sa
santé ne lui permettant pas de prêcher
des carêmes. Les sermons, au nombre de
six, sont remarquables par l'élégance et
la pureté du slyle, par la justesse des
pensées , par la sagesse des conseils, et
LEG
575
LEH
par ce ton d'oncfion cl de piété qui n'a-
bandonnait jamais l'orateur. Le second
volume ne renferme que des sermons dé-
tachés, qui avaient été faits pour diffé-
rentes cérémonies, pour des assemblées
de charité, pour des réunions pieuses.
On y remarque le discours qu'il prêcha
en présence du roi le ik mai 181/i, lors
du premier service solennel célébré pour
Louis XVI; le discours qu'il prononça la
même année dans l'é^flise des Carmes, sur
le triomphe des martyrs dans la dernière
persécution ; et un sermon sur la Cène^
qui fit une vive impression par les no-
bles sentimens dont il est rempli. C'est le
dernier discours qu'il prêcha devant le
roi. Les autres sermons de ce volume ne
sont pas tous également travaillés : il y
en a que l'auteur n'a prêches qu'une seule
fois et qu'il n'a pas retouchés. On doit
avoir de l'indulgence pour les taches lé-
gères qu'on pourrait y apercevoir, el
qu'une composition moins rapide aurait
fait aisément disparaître. Son éloquence
était entraînante et persuasive. Il avait
une facilité prodigieuse à parler sur toutes
sortes de sujets sans préparation. Mais il
excellait particulièrement dans ceux où il
fallait attendrir les spectateurs sur le sort
des malheureux. D'immenses aumônes
étaient chaque année le prix de ses infa-
tigables travaux. Dans un salon où l'on
devait faire une faible quête , deux dis-
cours non préparés produisirent plus de
40,000 fr. , tant était séduisant et irrésis-
tible le charme de ses paroles. On a en-
core de lui le Mentor chrétien , ou Calé-
chisme de Fénélon j, ^yCW. composa pour
l'éducation du jeune de La Rochefou-
cauld. Cet ouvrage devait avoir 3 vol. Il
n'a publié que le preinier. où il se borne
à exposer les principes de la religion na-
turelle ; le second devait offrir les preuves
de la religion révélée, et le troisième, les
caractères de la religion catholique. Il
existe encore de ce pieux ecclésiastique,
\AM%\\;\x\'^pièccsmanuscriles, entre autres
un Traité sur l'immortalité de l'àrne ,
dont les amis de la religion désirent vi-
vement la publication.
* LEGROS ( Joseph ;, l'une des plus
belles hautes-contre qu'on ait entendues
à l'opéra, né le 7 septembre 1739 , à JMo-
uampteuil, village du diocèse de Laon ,
fut d'abord enfant de chœur à la cathé-
drale de celle ville. La beauté de sa voix
le lit appeler à l'académie royale de mu-
sique, où il débuta le i" mars 1764, avec
le plus brillant succès II donna, en 1775,
l'acte d'ff/las et Sylvie . dont il refit la
musique en société avec Desormcry père.
Son embonpoint excessif l'obligea de.
quitter le théâtre en 1783, avec sa pen-
sion de retraite. Depuis 1777, il s'était
chargé de l'entreprise du Concert spiri-
tuel, qu'il continua de diriger jusqu'à la
suppression de cet établissement en 1791.
II mourut à la Rochelle, le 20 novembre
1793. ,
LEGROS. rayez GROS.
* LEGUAT ( François), né dans la
Bresse, vers Tan i638, l'ut contraint de se
réfugier en Hollande en 1689, par suite
de la révocation de l'édit de Nantes. Les
états-généraux de ce piys ayant formé sur
la proposition de Henri Duquesne, fils du
célèbre marin de ce nom , le projet d'en-
voyer une colonie de protestans français
à l'île de IMascarin ou Mascarègne, aujour-
d'hui l'ile Bourbon , Léguât en fit partie.
Le M mai 1691, il fut abandonne par le
capitaine avec huit de ses compagnons
dans l'îlo Rodrigue. Après deux ans de
séjour dans cette île sauvage, ils parvin-
rent à se sauver à l'île de France où de
nouveaux malheurs les attendaient : le
gouverneur leur lit subir mille mauvais
traitemens, auxquels plusieurs succom-
bèrent ; Léguât et deux de ses compagnons
seulement y survécurent. De retour en
Europe , Léguât se fixa à Londres, où il
mourut en 1733 , après avoir publié :
Voyages et aventures de François Léguât
et de ses compagnons en deux (les déser-
tes des Indes orientales, avec la relation
des choses les plus remarquables qu'ils
ont observées dans Vile Maurice^ à Bata-
via , au cap de Bonne-Espérance, dans
l'ile Sainte-Hélène et en d'autres endroits
de leur j-oute , Londres, 1708, 2 vol. in-
12 , avec cartes et figures, 1720, 2 vol. in-
12 ; et Amsterdam , 1708. Ce livre . écrit
avec simplicité, ne manque pas d'intérêt,
et plusieurs fois il a été cité comme au-
torité. On ne sait ce qui a pu déterminer
Brn/.endela Martinière à le traiter de fa-
buleux. On l'a réimprimé plusieurs fois
en hollandais, en allemand el en anglais.
Un bibliographe français cite celle der-
nière traduction qui parut à Londres 1708,
2 vol, in-8°, comme l'ouvrage original.
• LEHOC ( Louis-GRÈGOinE ) , diplo-
mate et littérateur français, naquitàParis,
en 1743, d'un médecin distingué, qui fit pa-
raître plusieurs écrits contre l'inoculation.
Il fut nommé en 1778 par Louis XVI com-
missaire-général de la marine pour l'é-
change des prisonniers faits dans la guerre
LEH
576
LEI
d'Amérique , cl le cartel d'échange qu'il
rédiiïea fut regardé comme un modèle
en son genre. 11 suivit le comte de Clioi-
seuI-Gouffier dans son ambassade à Con-
stantinople avec le titre de premier se-
crétaire de légalion, et alla visiter les
ruines d'Athènes avec Delille ( Voxjez
CHOISEUL-GOUFFIER et DELILLE ).
Rappelé en 1787 par M. de Calonne,pour
concourir aux travaux préparatoires de
l'assemblée des notables, il fut ensuite
intendant des finances du duc d'Orléans,
pendant les années 1788 et 1789. Elu pré-
sident de sa section, et chef d'un des ba-
taillons de la garde nationale , il reçut de
l'assemblée Constituante, après le voyage
de Varennes,la mission de garder le jeune
dauphin : il s'acquitta de ce pénible de-
voir avec délicatesse, et par l'étendue de
ses connaissances , par l'aménité de son
esprit, il parvint à donner quelque con-
solation à la famille royale. Louis XVI,
rendu un moment à la liberté , le nomma
en 1791 son ministre à Hambourg. Dis-
gracié peu do temps après par la Conven-
tion, il fut incarcéré pour avoir donné
des conseils au roi, dans un mémoire qui
fut trouvé dans la fameuse armoire de
fer : mais oublié dans sa prison , où il
resta 9 mois, il recouvra la liberté après
le 9 thermidor. En 1795, le Directoire le
nomma ambassadeur extraordinaire en
Suède, et il occupa ce poste jusqu'après
la révolution du 18 brumaire. Depuis
cette époque il vécut paisiblement dans
une terre qu'il possédait à quelques lieues
de Paris , devint membre du conseil-gé-
néral du département de l'Oise, puis
président du même conseil. Il se livrait
aussi à la culture dos lettres , et il fit re-
présenter eu 1807 uno tragédie intitu-
lée Pyrrhus , qui fut jouée avec succès
au Théâtre-Français, et qui obtint une
mention du jury des prix décennaux ;
mais elle fut défendue peu de temps après
par la police impériale , (jui redoutait les
allusions et les applications qui naissaient
du fonds du sujet, puisqu'il" s'agit d'un
prince légitime qui vient réclamer sa
couronne. Lehoc est mort à Paris, d'une
maladie de poitrine . le la octobre 1810.
Dès sa jeunesse il s'était occupé de litté-
rature : il avait, à différentes époques
de sa vie, traduit des contes de l'anglais,
et un grand nombre de sonnets de Pétrar-
que; il avait aussi composé deux . opéras
et fait l'éloge du chancelier de l'Hôpital.
• LEHODEY de SAULT-CHEVREUIL,
(Exu:nne), homme de lettres, né en
1754 à Saull-Chcvreuil en basse Norman-
die, assistait régulièrement aux séances
des états-généraux à Versailles ; le désir
d'en faire connaître les résultats au public
lui inspira l'idée de publier une feuille
qu'il intitula Journal des élals-généraux,
puis Journal de V Assemblée nationale;
Rabaud Saint-Etienne en fut le principal
rédacteur. L'Assemblée nationale s'étanl
transpoilée à Paris , le libraire Panckou-
cke publia le Moniteur universel . qui lit
tomber le journal de Lehodey. Celui-ci
fît alors paraître le Logographe , loiinvàX
que Louis XVI favorisa et puur lequel
la liste civile lui fournit des sommes con-
sidérables. Les discours y étaient rappor-
tés textuellement et avec fidélité : pour
les obtenir, Lehodey avait attaché à sou
entreprise un grand nombre de jeunes
gens qui recueillaient sur des feuilles
éparses et numérotées , au moyen d'une
écriture tachygraphique, tout ce qui était
dit dans l'Assemblée. Ce journal fut sup-
primé dans le mois de septembre 1792,
sur la dénonciation de Thuriol , et plu-
sieurs fois Lehodey fut dénoncé lui-même
et obligé de paraître à la barre de la Con-
vention. On sait qu'un des chef daccusa-
tion qui furent articulés plus tard contre
Louis XVI était d'avoir fourni des fonds
a.u Logographe. Lehodey obtint en 1799 la
place de chef du bureau chargé de sur-
veiller les journaux et l'esprit public à la
police générale, et en 1800 il passa en qua-
Utéde secrétaire-général à une préfecture
de la Belgique. Il occupa peu de temps ces
fonctions. De retour à Paris , il se livra
à l'enseignement , et professa la rhétori-
que dans l'institution Labbé. A l'époque
de la restauration, il devint un des rédac-
teurs de la Quotidienne à laquelle, malgié
ses infirmités , il travaillait encore sur la
fin de sa vie. Il est mort à Paris le k avril
1830. Il a publié : | De la conduite du
Sénat sous Napoléon Bonaparte^ ou
les causes de la journée du 51 mars [8iU;
I Ilisloire de la régence de l'impératrice
Marie-Louise, et du gouvernement provi-
soire^ 1814, in -8° ; | Pai'alléle et critique
impartiale des traductions des Bucoliques
en vers français, de MM. Tissot et Henri
de Villodon, Paris, 1820, in-8".
LEIBMTZ (Gdillaumb-Godefroi, Ba-
RO!W de ), philosophe et mathématicien, né
à Leipsick le 3 juillet 1646, du professeur
Frédéric Leibnilz. Après avoir fait ses pre-
mières études , il s'enferma dans la nom-
breuse bibliothèque que son père lui avait
laissée, et s'abandonna entièrement aux
LEI S
ScicMiccs. Poètes, orateurs, hisloriens, ju-
riscousulles , tliéologiens , philosoplies ,
inalhématiciens, furent l'objet de ses élu-
des ; il ne donna l'exclusion à aucun {jenrc
de lillératiire. Dès Vînç'^c de 20 ans , il fut
nommé docteur en droit , et l'université
d'Altorf lui offrit une chaire dans cette
faculté. Il préféra se rendre à Nuremberg,
où étaient réunis beaucoup de savans.
Là, il s'attacha au baron de Boineboury,
chancelier de l'électeur de Maycnce ,
le prince de Neubour;; , et fut , par le
crédit de son protecteur, nommé conseil-
ler de la chancellerie en 1669. Tout en
remplissant les fonctions de cette place, il
se livrait avec ardeur à l'étude et pu-
bliait sur le droit , la politique , la théolo-
gie et la physique, des ouvrages qui prou-
vaient qu'il était également propre à se
distinguer dans ces sciences diverses.
Trois ans après ( 1672 ), il accompagna à
Paris, comme gouverneur, le fils de M.
de Boinebourg, et trouva ainsi l'occasion
d'entrer en relation avec les savans les
plus distingués de l'époque. L'académie
des sciences lui proposa de l'admettre
dans son sein, .s'il voulait se faire catho-
lique , ce qu'il refusa. De Paris il se ren-
dit à Ix)ndres, où l'on s'empressa de l'ad-
Tneltre dans la société royale. Les prin-
ces de Brunswick, instruits de ses lalcns
pour l'histoire, lui conlièrenl celle de leur
maison. Il parcourut l'Allemagne pour
ramasser les matériaux de" cet ouvrage, et
passa de là en Italie, où les ducs de Tos-
cane, de Liijurie et d'Est, sortis de la
nu'me souche que les princes de Bruns-
wick, avaient leurs principautés. De re-
tour de ce voyage en 1G90 , il commença
à faire part au public de la récolte abon-
dante qu'il avait faite dans ses savantes
excursions. Son mérite , connu bientôt
dans toute l'Europe ,lui procura des pen-
sions et des charges honorables. L'élec-
teur Ernest- Auguste le fit , en 1696 , son
conseiller privé de justice; il l'était déjà
de rélecteur de Mayence et du duc de
Brunswick-Lunebourg. En 1699, il fut
mis à la tête des associés étrangers de l'a-
cadémie des sciences de Paris ; il n'avait
tenu qu'à lui d'y a voir place beaucoup plus
tôt, et avec le titre de pensionnaire. Dans
un voyage qu'il fit en France, on voulut
l'y fixer fort avantageusement , pourvu
qu'il quittât le luthéranisme; mais, tout
tolérant qu'il était, il rejota cette condi-
tion. Il inspira à l'électeur de Brande-
bourg le dessein d'établir une académie des
sciences à Berlin , cl en fut fait président.
77 LE!
Un champ non moins vaste et non moins
glorieux s'ouvrit à lui en 1711. Le czar le
vit à Torgau , et ce législateur de barbares
traita Leibnitz avec la considération qu'un
sage couronné a pour un sage qui mérite-
rait la couronne. Il lui fit un n)agnilique
présent, luidonnale litre de son conseiller
privé de justice , avec une pension con-
sidérable. L'empereur d'Allemagne ne le
traita pas moins généreusement que ce-
lui de Russie ; il lui donna le titre de
conseiller auliqueavec une forte pension,
et lui fit des offres considérables pour le
fixer dans sa cour. La vie de Leibnilz ne
fut marquée que par des évcnemens flat-
teurs, si l'on en excepte la dispute de la
découverte du Calcul différentiel. Celte
querelle'couvait sous la cendre depuis
1699; elle éclata en 1711. Les admirateurs
de Newton accusèrent le philosophe alle-
mand d'avoir dérobé à celui-ci l'invention
de ce calcul. La chose n'était pas aisée à
prouver ; Keill l'en accusa pourtant à la
face de l'Europe. Leibnilz commença par
réfuter celle imputation avec beaucoup
d'impétuosité dans les journaux de Leip-
sick, et finit par se plaindre à la société
royale de Londres, en la demandant pour
juge. L'examen des commissaires nom-
mes pour discuter les pièces de ce grand
procès ne lui fut point favorable. La so-
ciété royale donna à son concitoyen l'hon-
neur de la découverte ; et pour justifier
son jugement, elle le fit imprimer avec
toutes les pièces qui pouvaient servir à
appuyer l'arrêt. Les autres tribunaux de
l'Europe savante jugèrent Leibnilz avec
moins de sévérité , et peut-être avec plus
de justice. Bien des gens pcnstrenl que le
philosophe anglais et le philosophe alle-
mand pouvaient avoir saisi chacun la
même lumière et la même vérité. Ce qui
les confirma dans leur opinion, c'est qu'ils
ne se rencontraient que dans le fond des
choses ; ce que l'un appelait fluxions,
l'autre le nommait différences. L'infini-'
ment petit éiaLil marqué, dans Leibnilz,
par un caractère plus commode et d'un
plus grand usage que le caractère em-
ployé par Newton. Leibnilz n'apprit qu'a-
vec un chagrin mortel la perte de son
procès ; et, par vme faiblesse qui fait bien
voir le peu de ressource de la philoso-
phie , ce chagrin le consuma peu à peu,
et hàla, dit-on, sa mort, arrivée à Haiio-
vrc le ii novembre 1716, dans sa 70*^ an-
née. Ce philosophe no s'était point marié,
et la vie qu'il menait ne lui permettait
guère de l'être. Il ne prenait point ses
S9.
LEI
578
LEI
repas à des heures réglées, mais selon ses
éludes ; il n'avait pas de ménage , et était
peu propre à en avoir. Il était toujours
d'une humeur gaie, mais il se mettait ai-
sément en colère; il est vrai qu'il reve-
nait aussitôt. On l'a accusé de n'avoir été
qu'un rigide observateur de la loi natu-
relle, et d'avoir aimé l'argent. Quoiqu'il
eût un revenu très considérable , il vécut
toujours assez mesquinement. Sa mémoire
était admirable : toujours prêt à répon-
dre sur toutes sortes de matières , il mé-
rita que le roi d'Angleterre l'appelât
son Dictionnaiî'e vivant. C'était le sa-
vant le plus universel de l'Europe ; mais
il poussa l'amour de cette universalité si
I in , qu'il se fit de fausses idées sur une
infinité de choses qu'il n'avait pu appro-
fondir assez pour en avoir de justes. Ce
goût qu'il avait pour l'universalité des
talens, et peut-être l'ambition d'être ré-
puté pour un homme qui n'ignorait rien,
l'engagea à joindre à ses autres titres de
gloire celui de poète. Il fit sur la con-
quête de la Terre-Sainte un poème qui
ne servit qu'à lui donner un ridicule , et
à prouver la réflexion de l'abbé Desfon-
taines, touchant la difliculté d'allier une
grande étude de la géométrie , avec les
richesses de l'imagination et le génie des
belles-lettres ; de même que ses idées ro-
manesques et paradoxales vérifient l'ob-
servation de Pascal et de Scaliger, tou-
chant l'influence de la géométrie sur les
autres facultés intellectuelles. ( Voyez
CHRISTIAN WOLFF. ) Nous avons de
Leibnilz : | Scriptorcs ret^m brunswica-
riun.Z vol. in-fol. 1707; recueil utile pour
l'Histoire générale de l'empire et l'His-
toire particulière d'Allemagne ; | Codex
juris Pentium diplomaticus . avec le sup-
plément, publié sous le titre de Mantissce
Codicis juris. etc., Hanovre, 1693, 2 vol.
in-fol. C'est une composition de différens
traités pour servir au droit public, précé-
dés d'excellentes préfaces. Il y remonte
aux premiers principes du droit naturel
et du droit des gens; | Dejuresuprematxts
ac legationis principum Germaniœ, 1687,
sous le nom supposé de César Furstner ;
ouvrage composé pour faire accorder aux
ambassadeurs des princes de l'empire ,
non électeurs , les mêmes prérogatives
qu'aux princes d'Italie ; | le i" vol. des
Mémoires de l'académie de Berlin , en
latin, in-i", sous le titre de Miscellanea
berolinensia ; \ Notifia oplicce promotce .
dans les ouvrages posthumes de Spinosa ;
\ De artc comhinatoria , 1690, in-4° ;
I une foule de Questions de physique et
de mathématiques, résolues ou projiosécs
dans les journaux de France, d'Angleterre,
de Hollande et surtout de Leipsick. Ce fut
dans ce dernier journal qu'il inséra, en
1684 , les Règles du calcul différentiel ;
I Essais de Théodicée sur la bonté de
Dieu, la libellé de l'homme j Amsterdam,
1747, 2 vol. in-12 ; fruit d'une métaphysi-
que singulière et fausse à plusieurs
égards, mais qui ne manque pas de vues
justes et profondes. Il y a de bonnes ré-
flexions contre les manichéens; mais l'au-»
teur semble donner dans l'extrémité con-
traire, en niant l'existence du mal, ou U
défigurant de manière à ne pas s'y re-
connaître. Son Optimisme a donné à un
philosophe moins amateur de systèmes
l'occasion de faire les réflexions suivan-
tes : « 1° L'on ne peut nier que , par rap-
» port à Dieu , tout ne soit bien , parce
» que Dieu ne saurait rien faire qui soit
» mal, quoiqu'il puisse augmenter le bien
» et le perfectionner à l'infini; 2° par rap-
» port à l'homme, considéré dans cette
I) vie précisément et sans espérance de
» l'avenir, il est certain que tout n'est pas
» bien, et c'est insulter à ses maux que
» d'oser lui dire le contraire; 5° le système
» de l'optimisme^ qui, pris dans le sens
» de ses partisans, n'est qu'un raffinement
» métaphysique, né dans une imagination
» plus riante que vraie , se vérifie en
» quelque sorte dans la personne de
» l'homme juste, dont les vertus s'accrois-
» sent dans le malheur , et chez qui l'al-
» tente du bien avenir est toujours un
» soulagement aux maux présens. Dans
» l'une et dans l'autre fortune , il jouit en
» paix de son Dieu , comme il jouit de
j> lui-même ; il jouit avec transport de
» toute la nature ; il jouit sans crainte et
» sans envie de tout ce qu'il y a de bon
» dans les autres : il supporte sans ai-
» greur , sans amertume , le mal qui s'y
» rencontre et qu'il ne peut y corriger ;
» il prête à tout ce qu'il voit le jour le
» plus favorable , il embellit tout ce qu'il
» touche ; il sait que Dieu a placé dans
» les souffrances même le germe de la fé-
«licitédeses enfans. Les senlimens de
» patience, de paix, de consolation, d'es-
» pérance , qui accompagnent cette con-
» naissance , font de cette vie même une
» vie heureuse. La paille est séparée du
» grain sous la main du batteur. L'huile
» coule épurée, après avoir passé sous la
» meule qui a brisé l'amande et ses enve-
» loppes. La même main qui s'appesantit
LEI
579
LE!
» snr le juste, l'éprouve et le purifie, tan-
» dis que le pécheur se désespère et se
» damne. Ci'eatura enim libi factori de-
» setvtens , exardescit in tormentum ad-
» versuis injuslos^ et lenior fit ad benefa-
» ciendum us qui in te confidunt. Sap.
» 16. Diligentibus Deum omnia coope-
> ranturin bonum. Rom. 8. Una eadem-
» que vis irruens bonos probat . purifient,
B cliquât ; malos vastat, damnât ^extenni-
» nat. August. » [Plusieurs <?cnÏ5 deméta-
vhysiquCj. sur l'espace, sur le temps, sur le
•vide, sur la matière , sur l'union du corps
et de l'âme , et d'autres objets qu'il dis-
cute quelquefois en homme d'esprit plu-
lot qu'en philosophe profond. Il semble
moins chercher à expliquer la manière
dont les choses existent réellement, qu'à
proposer d'ingénieuses hypothèses , pro-
pres à embarrasser ceux qui voudraient les
attaquer, ce que l'on voit surtout dans ses
Monades , imaginées pour donner une
idée des premiers élémens de la matière ;
et dans son Harmonie jjrèétablie ^ des-
tinée à rendre compte de l'union du corps
et de l'âme. Du reste, si Leibnitz a échoué
dans ces recherches , il est dans le cas de
tous les savans qui ont essayé de remon-
ter aux principes des choses, et à franchir
les barrières qui environnent le sanc-
tuaire de la nature. « Plus on avance en
» l'observant , dit un physicien , plus
» elle semble de venir secrète, et repousser
» ceux qui l'approchent de trop près. »
( Voy. le Catéch. phil., t. 5, n" 418. ) Les
idées politiques de Leibnilz peuvent être
mises- à côté de ses idées métaphysiques.
Il voulait réduire l'Europe sous une seule
puissance quant au temporel , et sous un
chef unique quant au spirituel. L'empe-
reur et le pape auraient été les chefs de
ces deux gouvernemens, l'un du premier,
et l'autre du second. Rajoutait à ce projet
celui d'une langue universelle philoso-
phique pour tous les peuples du monde ;
projet imaginé long-temps avant lui , et
proposé encore après lui , mais que ni la
philosophie ni la politique ne parvien-
dront à réaliser. « Ne doutons pas, a dit
» quelqu'un à celte occasion , que la di-
» versilédes langues ne soit l'ouvrage de
> celui qui répandit la confusion parmi
fc les hommes, lorsqu'ils étaient encore
». réunis dans l'usage d'une seule, et
» qui , en répartissant sur la terre ces tri-
» bus éparses , les différencia par leur
» langage autant que par les bornes de
i> leurs habitations, comme dit l'Apôtre ,
» et le temps circonscrit de leur gloire
» et de leur durée. Definiens staluta fem-
»pora et terminos habitationis corum.
» Acl. 17. » I Theoria motiis abstracti
et motus concreti j, conTre Dcscarlcs;
I Jccessiones historice.'i vol. in-k°; recueil
d'anciennes pièces ; | De origine Fran-
corum disquisitio , réfutée par le père
Tourneminejésuile, et par dom Vaisselle,
bénédictin; | Sacro-Sancta Trinitas , per
nova iiïventa logica defensa , contre Wis-
sovalius, neveu de Socin, Il y a de 1res
bonnes idées. L'auteur prouve que non
seulement une bonne logique n'est pas
contraire à la croyance do ce mystère,
mais qu'elle fournit des argumens propres
à repousser victorieusement les attaques
des sociniens. Effectivement , il en est de
ce mystère comme des autres que la ré-
vélation nous a manifestés , et que Dieu
nous ordonne de croire. La raison ne les
enseigne pas , ne les prouve pas , mais
elle les défend du reproche de contra-
diction et d'impossibilité. ( Voyez CLAY-
TON, MALEZIEU. ) | Des Lettres à Pé-
lisson, sur la tolérance civile des religions,
Paris , 1692 , in-12 ,avec les réponses de
Pélisson ; | plusieurs volumes de Lettres^
recueillies par KORTHOLT ( voyez cet
article ) ; | des Poésies latines et françai-
ses ; elles prouvent la justesse de l'obser-
vation que nous avons faite sur le peu
de talent qu'il avait pour ce genre de
composition. Malgré une cerlaine origi-
nalité de caractère, et un penchant assez
marqué pour les idées extraordinaires ,
ou même bizarres, Leibnilz avait des
principes auxquels il tenait. Né dans une
religion qui n'a point de base assurée, il
vécut dans une espèce de fluctunlion qui
lui fit former le projet de se réunir aux
catholiques ; projet pour lequel il fui
quelque temps en correspondance avec
Bossuet ( I ). Voy. MOLANUS , GÉRAno. )
II fut toujours zélé pour le christianisme.
Il ne parlait des Livres saints qu'avec
respect. « Ils sont remplis, disait-il, d'une
» morale nécessaire aux hommes. » 0:i
ne croyait pas encore de son temps que
le verbiage philosophique ou philanthro-
pique pouvait remplacer l'Evangile. li
parlait presque toujours honorablement
de l'Eglise romaine et de ses pontifes ; il
reconnaissait hautement les avantages
qu'elle avait sur les sectes séparées de sa
(i) La Biographie universelle aUribue à Boisiict la
ruplare dit» négociatioDi commencées avec Leiboitz ,
dans la note Ji la pag. 634, tom. 33 ; mais 1 la page
599 , elle CD a assigne le* ve'ritabU-i motifs dans leâ
dépositions de l'clecteur de Hanovre.
LEI
580
LEI
cnmniunion. « Voilât dit-il dans une d.e
> ses lettres , la Cliine ouverte aux jé-
» suites, le pape y envoie nombre de
» missionnaires. Notre peu d'imion ne
»nous permet pas d'entreprendre ces
» grandes conversions. » Quelques-uns
ont écrit qu'il était mort dans le sein de
l'Eglise romaine ; mais cela ne paraît pas
fondé. Cependant M. de Murr , savant
protestant , dans son Journal pour les
arts et lilter., septième part. , fait men-
tion d'un manuscrit de Leibnilx , qu'on
çjarde dans la bibliothèque électorale de
Hanovre, « où, dit-il , la doctrine catholi-
» que, dans les points même auxquels les
» protestans sont le plus opposés, est dé-
j> fendue avec tant d'ardeur, que si on ne
» connaissait pas l'écriture de Leibnitz
» par mille et mille feuilles écrites de sa
» main, on ne pourrait le croire l'auteur
I) de cet ouvrage. » La collection la plus
étendue des Œuvres de Leibnilz, due aux
soins de Louis Dutens, a été publiée sous
ce litre : Opéra omnia LeihnUii collecta
studio Lud. DutenSj Genève, 1768, 6 vol.
ia-k°, fig. On y joint ordinairement les
OEuvres philosophiques, latines et fran-
çaises, publiées par Lud. Eric , que Du-
tens a exclues de sa collection. Ces deux
collections ne renferment passes ouvrages
historiques , tels que Scriplores ?'erum
hrunstvicarum, etc. L'abbé Emery a pu-
blié l'Esprit de Leibnitz , Lyon , 1772 , 2
vol. in-12 , réimprimé en 1803, sous le
titre de Pensées de Leibnitz sur la reli-
{]ion et la morale, 2 vol. in-S", et Expo-
zition de la doctrine de Leibnitz sur la
religion, suivie de pensées extraites des
ouvrages du. niiîme auteur^ Paris, 1819,
in-S". C'est la traduction française du
Systema theologicum de Leibnitz, ouvrage
qui était resté manuscrit dans la biblio-
thèque de Hanovre. M. Emery ayant ap-
pris l'exislence de ce manuscrit, en sol-
licita l'envoi lorsque les armées françaises
se furent emparées de cet ville. Ce fut
par I intermédiaire du constitutionnel
Grégoire, avec qui M. Emery avait des
rapports de science, qu'il obtint la com-
munication de ce précieux manuscrit ,
qui, suivant M. de Murr, devait faire plus
de sensation que fous les autres écrits de
Leibnitz. M. Emery en ayant fait une
copie exacte, se proposait de la publier,
mais la mort l'en empêcha. M. Garnicr,
son héritier, l'a conliéc depuis à M. Mol-
levault , à qui nous devons la traduction
du Sijstcma theologicum. M. do Genoude
en a éié l'éditeur. Parmi les ouvrages
posibumes de Leibnitz, nous citerons
son Plan d'invasion et de colonisation de
l'Egypte ^ publié en anglais , Londres,
1803, in-8". Son Projet de langue philo-
sophique a été, en 18H , l'objet d'un con-
cours qu'avait proposé l'académie de Co-
penhague. La Vie de ce savant a été
écrite par son intime ami Eckham , qui
fournit à Fontenelle des matériaux pour
son Eloge de Leibnitz. Le premier de ces
ouvrages a été inséré dans le tome VII
du Journal pour l'histoire des arts , par
M. de Murr, Berlin, 1747.
LEICII ( Jean-Heivri ) , professeur
d'humanités et d'éloquence à Leipsick ,
où il était né en 1720, travailla au Jour-
nal et aux Nouvelles littéraires de cette
ville, et y mourut en 1750. Ses ouvrages
sont : I De origine et incrementis topo-
graphice lipsiensis / | une Edition du
Thésaurus eruditionis scholasticœ s par
Basile Faber, Francfort, 1749, 2 vol.
in-fol. ; I DevitaetrebusgestisConstan-
tini Porphyrogeneti ; \ De diptychis vete-
rum. et de diptycho Emin. Card. Quiritti
diatriba , Leipsick , 1743, in-4°; | De Pho-
tii Bibliothecâ , etc. Au nombre de ses
amis , Leich, comptait les cardinaux Pas-
sionei et Quirini. Il était en correspon-
dance avec la plupart des savans de l'Eu-
rope et avait formé une collection pré-
cieuse de tableaux et de pierres gravées.
L'éloge de ce savant se trouve dans les
Acta Eruditorwn, 1732.
LEIDRrlDE , 40"= archevêque de Lyon ,
bibliothécaire de Charlemagne , né à Nu-
remberg vers 736 , mort en 816 , dans le
monastère de Sainl-Médard de Soissons ,
après s'être démis de son archevêché, eut
une grande réputation de savoir et de
piété. Il fut un des missi Dominici de
Charlemagne, c'esl-à-dire un des person-
nages que ce souverain envoyait dans les
différentes parties de son vaste empire
pour écouler les plaintes des peuples, el
s'assurer de l'exacte administration de la
justice. Ce prélat combattit avec succès
les doctrines de Félix d'Urgel, et d'Elipand
de Tolède. Il fonda deux écoles dans son
église métropolitaine. Il nous reste de lui
un Traité sur le baptême ; quatre Lettres
qu'on trouve dans la Bibliothèque des
Pères, et divers Opuscules dans les Ana-
lecles de dom Mabillon. Baluze a donné
une édition de ses OEuvres avec celles
d'Agobard,
LEIGII (Edouard ), clicvalier anglais,
né en 1602 dans le comté de Leiccsler,
s'est fait un nom par plusieurs oavraijes,
LEI 5
dans lesquels règncnl la connaissance des
langues et une critique sage. Les princi-
paux sont : I des réflexions en anglais
sur les cinq livres poétiques de l'ancien
Testament, Job, les Psaumes, les Prover-
bes , l'Ecclésiaste et le Cantique des can-
tiques, à Londres, 1C57, in-fol. ; | un Com-
vicntaire sur le nouveau Testament ,
1650, in-fol. ; ) un Dictionnaire hébreu
et un Dictionnaire grec , qui se joignent
ensemble sous le titre de Critica sacra.
in-fol., à Amsterdam, 1696. Le premier a
paru en français en 1703 , par les soins
de Wolzogue, sous ce titre : Dictionnaire
de ta langue sainte , contenant ses origi-
nes, avec des obsejvations ; \ un Traité
de la liaison qu'il y a entre la religion et
la littérature, matière mieux traitée de-
puis par l'évêque du Puy, Lcfranc de
Pompignan, sous le titre de La dévotion
réconciliée avec l'esprit . Paris, 1753 ; et
dans un excellent discours de M. de la
Tour du Pin, Alliance des sciences avec
ta religion. Ce savant mourut en t671.
LEIGH ( Charles ) , né à Grange, dans
le ducbé de Lancastre pratiqua avec
beaucoup de succès la médecine en An-
gleterre , et particulièrement à Londres,
où il fut fait membre de la société royale.
Il parcourut presque toute l'Angleterre
en habile naturaliste, étendit ses observa-
tions jusqu'en Amérique , et mourut au
commencement du 18* siècle. Les fruits
de ses recherches sont : | Histoire natu-
relle des provinces de Lancastre ^ de
Chester et de Derbi^ avec le détail des an-
tiquités qu'on trouve dans ces provinces,
Oxford, 1630, in-fol. ; Londres, 1700, avec
fig., en anglais ; | Exercitationes de aquis
rnineralibus, Londres, 1697, in-8° ; | His-
toire de la Virginie. Londres, 1703, in-12;
ouvrage superficiel.
• LEISSEGL'ES( ConENTiN-URBAiN-
Jacques - Bertrand de ) , vice - amiral ,
commandeur des ordres de la légion-
d'honneur et de Saint-Louis, né près de
Quimper ( Finistère ) le 29 août 1758,
entra comme volontaire dans la marine
royale en 1776, et lit les campagnes de
mer du règne de Louis XVI. Il était par-
venu, en 1792 , au grade de capitaine de
vaisseau, et commanda le brick le Furet
pendant la campagne du banc de Terre-
Neuve. Nommé capitaine de vaisseau
l'année suivante, il conduisj'. aux Iles-du-
Vent les commissaires de la Convention
et un bataillon de troupes de ligne, et con-
courut, avec 400 marins, à la prise de la
Guadeloupe, qui, après un siège de qua-
81 LEI
tre mois cl demi , tomba au pouvoir des
Français. Il continua de commander les
troupes navales de cette île avec le grade
de contre-amiral , et soutint avec hon-
neur et succès plusieurs sièges dirigés par
les Anglais. Il fut chargé , en 1799, de
l'inspection des côtes depuis Flessingue
jusqu'à Saint-Malo , pour y constater la
situation des bâtimens de guerre ainsi que
le nombre de petits bâtimens disponibles.
Le contre-amiral de Leissègues comman-
dait les ports d'Anvers , Flessingue et
Ostende , lorsque le gouvernement lui
confia le commandement des forces na-
vales françaises et bataves réunies dans
l'ile de Walcheren, qu'il mit dans un état
de défense respectable. Il parcourut , en
1802 avec deux vaisseaux et trois cor-
vettes les principaux ports d'Afrique ,
obtint du dey d'Alger les satisfactions exi-
gées par le gouvernement français , et la
délivrance d'un grand nombre d'esclaves
pris en Sardaigne lors d'une descente de»
Barbaresques. Le dey le chargea de nom-
breux présens pour le premier consul, et
Leissègues alla chercher à Tunis un am-
bassadeur extraordinaire que le prince
d'Alger envoyait à la république. Le con-
tre-amiral , chargé de transporter dans
l'Orient l'ambassadeur Brune ( voyez
BRUNEj et divers autres envoyés, se ren-
dit ensuite à Malte, où il se convainquit de
l'inexécution du traité d'Amiens , qui
stipulait la remise de cette lie à l'ordre
qui en avait pris le nom. Au mois d'oc-
tobre 1804, Leissègues , qui était à la tète
d'une des escadres de l'armée navale de
Brest, prit le commandement en chef de
cette armée pendant l'absence de l'ami-
ral Ganlheaume. Chargé en 1808, de
transporter à Saint-Domingue , des trou-
pes et des munitions , il partit de Brest
le 13 décembre et arriva à sa destination
après avoir beaucoup souffert d'une tem-
pête qui le surprit à la hauteur des îles
Açores. Son escadre eut à subir dans
une baie de cette île contre l'amiral an-
glais Duckworth {voyez DUCKWORTfl )
un combat où le contre amiral Leissègues
lit preuve de beaucoup de bravoure et
d'habileté , et que Napoléon regarda
comme un des plus beaux faits d'armes
de la marine française. Leissègues ,
forcé de se jeter à la côte, après avoir,
malgré l'infériorité de ses forces, extrê-
mement maltraité l'ennemi, emporta avec
lui l'aigle impériale et les pavillons qu'il
avait si vaillamment défendus. En 1809 ,
il fut chargé de défendre Venise , de
LEÎt o
concert avec l'armée de terre, et le 25
août 1811, un décret impérial l'investit du
commandenMUt des forces navales fran-
çaises, italiennes et napolitaines dans les
îles Ioniennes. Promu, en 1816, au
grade de vice-amiral , mis à la retraite
l'année suivante, Leissègues est mort à
Paris au mois de mars 1852.
LEJAY. Voyez JAY.
LE JEUNE. Voi/ez JEUNE ( le ).
'LEltAïN ( He.vri-Louis ) , acteur cé-
lèbre, né à Paris le 11 avril 1728, d'un or-
fèvre, qui le destinait au même état. Il
était déjà recherché pour la perfection de
son travail ; mais entraîné par une pas-
sion irrésistible pour le théâtre, il renonça
bientôt à ses oulils et à son atelier pour
jouer la comédie. Voltaire , qui aperçut
en lui le germe d'un grand talent , solli-
cita pour Lekain un ordre de début à la
comédie française, et il y fut reçu après
17 mois d'applaudissemens publics et de
contradictions particulières. H m'a fait
pleurer^ dit Louis XV, moi qui ne pleure
guères. Par reconnaissance pour son pro-
tecteur , il s'adonna particulièrement à
l'étude de ses pièces , et il assura le suc-
cès de plusieurs. Son premier rôle avait
été le Z'iiws^dans le Brutus de Voltaire,
et le dernier où il ait paru fut celui de
Vendôme dans Adélaïde Duguesclin. Il
mourut d'une inflammation de poitrine
le 8 février 1778. D'après le jugement de
Voltaire, qui est un bon juge en ce genre,
l'art de la représentation théâtrale a été
porté par Lekain plus loin que par aucun
de ses prédécesseurs, et personne ne l'a
remplacé. Il était tellement identifié
avec le caractère des personnages qu'il
représentait, qu'il était tour à tour Oreste,
Néron, Genghiskan , Mahomet. Son en-
trée sur la scène, dans ce dernier rôle,
était surtout admirable. Il provoqua dif-
férentes réformes utiles , entre autres la
sui)pression des banquettes qui garnis-
saient les deux côtés du théâtre, et qui
étaient destinées pour la classe de specta-
teurs la plus distinguée , mais qui défi-
guraient la scène. Il fit aussi, de concert
avec m"' Clairon , disparaître des cos-
tumes turcs, romains et grecs, les paniers,
les queues, la poudre, les bourses, les cha-
peaux et les souliers à talon rouge. Sa taille
était épaisse , il avait le col gros et court ,
l'air dur, la figure peu agréable ; mais
tous ses traits étaient fortement pronon-
cés, une âme de feu les animait , et leur
mobilité était un véritable pliénoinène.
Mole a donné une notice sur ses Mémoires^
i52 tËL
1801 , in-8°. On a publié en 1816 Lekain
datis sa jeunesse, ou Détails historiques
de ses premières années, écrits par lui-
même, in-8°. Le fils aîné de Lekain a pu-
blié : Mémoires de H. L. Lekain , suivis
d'une Co7-respondance de Voltaire, Gar-
rick, Colardeau, Lebrun, etc., 1801, in-8",
réimprimée en 1826 dans la Collection des
Mémoires sur l'art dramatique , précédés
de réflexions sur Lekain et l'art théâtral ,
parTalma.
LELAND ( Je,\x ) . né à Londres au
commencement du 16' siècle , obtint du
roi Henri VIII , dont il était chapelain,
le titre d'antiquaire et une forte pension.
Il parcourut toute l'Angleterre et fit une
ample moisson ; mais il ne put pas pro-
fiter des matériaux qu'il avait amassés.
Sa pension ne lui étant point payée , il
perdit l'esprit de chagrin , et mourut fou
en 1552. On conserve ses manuscrits dans
la bibliothèque Bodléïennc. Le plus es-
timé de ses ouvrages imprimés est un sa-
vant Traité des écrivains de la Grande-
Bretagne,, en latin , Oxford^ 1709, 2 vol.
in-8°. Il passe pour exact. On accuse
Cambden d'en avoir beaucoup profité ,
sans en rien dire. On a encore de lui :
I V Itinéraire d'Angleterre , en anglais ,
Oxford, 1710, in-8°, 9 tomes ; | De rébus
britannicis coUectanea, Oxford , 1715 , 6
vol. in-8°.Lelaad était catholique, et en-
tra dans le luthéranisme pour plaire à
Henri VIII, qui protégeait celte nouvelle
religion ; cela fit soupçonner que les re-
mords avaient pu contribuer à lui trou-
bler l'esprit. — 11 ne faut pas le confondre
avec Jean LELAND , né à Wigan en An-
gleterre, en 1691, ministre puriiain à
Dublin, auteur | de \ Avantage et néces-
sité de la révélation chrétienne . 2 vol.
in-/*"; Irad. en français, 4 vol. in-12. C'est,
au jugement deLaharpe.un des ouvrages
qui ont assuré jusqu'ici à l'esprit anglais
la palme en cette espèce de lutte du
christianisme contre l'incrédulité. | De
V Examen des écrits des déistes. Ces dif-
férens ouvrages firent regarder Leland
comme un des plus forts adversaires de
l'incrédulité. Us sont pleins de reclierches
et de critique , et en même temps de sa-
gesse et de modération.
* LELAND ( TnoMAS ) , savant théolo-
gien et historien anglais , né à Dublin en
1722. En 1768 , il fut nommé chapelain de
lord Townsend, lord-lieutenant d'irlapde,
et ses amis ne doutaient pas qu'il n'ob-
tint bientôt un évêché, lorsqu'il monrn»
en 1782. Ses principaux ouvrages sont :
LEJL
583
LE3Î
t les naraïujuesde Démoslhcnes, traduites
en anglais, avec des noies critiques et his-
toriques, d756-i6-70,3 vol. in-h°. Celte
traduction est estimée, | Histoire de la vie
et du règne de Philippe, roi de Macédoine,
Dublin, 17o8, 2 vol. h\-h" ; Londres, 1806,
2 vol. in-8"; | Histoire d' Irlande depuis
l'invasion de Henri II, a^^ec un discours
préliminaire sur l'ancien état de ce
roi/awnCjUnhVm, 1773, 5 vol. in-i" , tra-
duite en français, Macslricht, 1770, 7 vol.
in-12, ouvrage plus estimé pour l'élé-
gance du style que pour rexactilude ;
I Discours et semions ^ Dublin , 1788, 5
vol. in-8'', avec une nolice sur la vie de
teland.
LELIO. royez CAPÎLUPI.
* LELLI ( Hercule ) , peintre , arclû-
lecte, sculpteur et anatomiste , né à Bolo-
gne vers l'année 1700, mort en 1766, s'est
acquis une grande réputation par les pré-
parations anatomiques en cire qu'ilfitpour
l'institut de sa ville natale et qui consis-
tent en statues et en tableaux : il a re-
présenté avec la plus grande exactitude
tout ce qui est relatif à l'anatomie. Non
moins habile dans la perspective linéaire,
il inventa une machine au moyen de la-
quelle il réduisait et arrêtait avec pré-
cision les contours des portraits qu'il
voulait graver. Léonard de Vinci et Al-
bert Durer avaient déjà mis en usage un
pareil procédé ; mais les améliorations
qu'y apporta Lelli, peuvent faire regar-
der la machine qu'il employa comme une
invention nouvelle. On a reproduit de nos
jours un moyen analogue , sous le nom
de Phijsionotrace ( voyez CHRÉTIEN ,
Gilles-Louis ). Il a aussi publié quelques
estampes , parmi lesquelles on dislingue
Agar et Ismaè'l dans le désert, la Vierge,
\ Enfant Jésus et saint Joseph , saifite-
Thérèse en prières, etc. Ses gravures sont
marquées des lettres E et L. Il a composé
pour l'instruction de la jeunesse , Com-
pendio Jnatomico per uso de pittori e
scultori^ ouvrage qui ne fut pubUé qu'a-
près sa mort.
LELLLS ( saint CAMILLE de ) , né à
Bacchiano danslAbruîze en 1530, entra,
après une vie fort déréglée et très vaga-
bonde, dans l'hôpilal de Saint-Jacques
des Incurables, à Rurae. Devenu économe
de cette maison, ilse proposa de prendre,
pour soulager les malades , des moyens
plus eflicaces que ceux qu'on avait em-
ployés jusqu'alors. Son état de laïque lui
faisant craindre de grands obstacles pour
son projet, il se mit au rudimcnl à 32 ans,
et parvint dans peu de temps au sacer-
doce. C'est alors qu'il jeta les fondemens
d'une congrégation de clercs réguliers .
ministres des infînïies. Les papes Sixte
V, Grégoire XIV , et Clément VIII ap-
prouvèrent ce nouvel ordre, digne en ef-
fet de tous les suffrages et de tous les en-
couragemcns qu'on a vu prodiguer à des
associations moins utiles. Le cardinal de
Mondovi lui laissa tous ses biens à sa
mort , arrivée en 1592 , après l'avoir pro-
tégé pendant sa vie. Lellis voyant son
ouvrage affermi et sa congrégation ré-
pandue dans plusieurs villes, se démit de
la supériorilé en 1G07, et mourut sainte-
ment en 1614. Benoit XIV le béatilia en
1642 et le canonisa en 1646. Cicatello, son
disciple, a écrit sa Vie en italien. Le père
Halloix, jésuite, en a donné une bonrjo
traduction latine, Anvers, 1632.
LELOXG. Voyez LONG.
LELORîlAIxN. Voyez LORRAIN.
LELY (Pierre van der FAES, surnom-
mé le chevalier) , peintre , né en 1618 à
Soest en WestphalieT mort à Londres en
1680. Il s'appliqua d'abord au paysage ;
mais le talent de faire des portraits le fixa,
Lely passa en Angleterre , à la suite de
Guillaume II de Nassau, prince d'Orange,
et peignit toute la famille royale.
* LEMAIRE (NicoLAS-Ei.oi), profes-
seur de poésie latine à la faculté des
lettres de Paris, né le i"" décembre 1767,
à Triancourt , près de Bar-le Duc (Meuse),
fit ses études au collège de Sainte-Barbe
où ses succès lui valurent une bourse.
En 1787, il eut le prix d'honneur au con-
cours général comme vété?'a?i, et il obtint
tous les prix du collège Duplessis ainsi
que tous ceux de Sainte-Barbe. Après ses
deux années de philosophie , il fut reçu
maître-ès-arts , et concourut en 1789,
avec un brillant succès pour l'aggréga-
tion dans les hautes classes. Binet ayant
été nommé recteur de l'université en
1790 , Lemaire âgé de 25 ans fut chargé
de remplacer dans la chaire de rétliori-
que son professeur , et deux ans après il
fut nommé professeur titulaire au collège
du cardinal Lemoine. Obligé en 1793 , do
demander un certificat de civisme à sa
section dite des sans-culottes , présidée
par Henriot , celui-ci lui reprocha d'être
toujours V enfant de la fille ainée des rois
(l'université). Lemaire qui avait em-
brassé les principes de la révolution,
n'eut pas de peine à se laver de cette ac-
cusation. Nommé président tempoiaire,
puis juge suppléant du tribunal civil du
LEM
6* arrondissement de Paris, il rendit
quelques services à des savans poursuivis
par la fureur des démagogues. De ce
nombre furent les professeurs du Jar-
din des plantes , notamment Daubenlon ,
qu'il fit passer pour un berger de mou-
tons de Monlbard. Le 10 novembre 1793,
il présenta à la Convention, comme ora-
teur de la section des sans-culottes , huit
prêtres apostats , et il prononça en cette
occasion un discours parfaitement ana-
logue à la circonstance. Le 27 mars 17%
il demanda la suppression du costume
des juges, qui retraçait, disait- il, le sou-
venir des nobles et des prêtres : ses ex-
ploits révolutionnaires ne l'empêchèrent
pas d'être accusé d'avoir épousé une prin-
cesse de Lorraine : l'accusation, pour être
ridicule , n'en était pas moins dange-
reuse ; comme il venait d'épouser la fille
d'un notaire d'un village voisin du sien,
la dépulation de la Meuse fut obligée de
certifier le fait. Pendant les quatre an-
nées qui survinrent , Lemaire fut étran-
ger aux affaires publiques ; en l'an 7 il
fut nomrné commissaire du gouverne-
ment près le bureau central de police à
Paris. Chargé de former la société du
Manège qui voulait encore une fois pro-
clamer la patrie en danger, il parvint à
en disperser les membres , et il mérita ,
par le courage qu'il montra dans cette
affaire, les suffrages des gouvernans
d'alors qui songèrent à lui donner le mi-
nistère de l'intérieur ou celui de la po-
lice : sa nomination fut même annoncée
dans les ■ journaux ; mais sur ces en-
trefaites Bonaparte, revenu d'Egypte,
fit disparaître le Directoire (18 bru-
maire an 8); il supprima même la place
de commissaire près le bureau central ,
qui ne fut rétablie que plus tard , sous le
nom de préfecture de police. Lemaire
rentra alors daris la vie privée , et eut
pour ennemi Constant Fouché qui le
desservit auprès de Bonaparte. Il occupa
pendant quelque temps un emploi au
ministère de l'intérieur ; puis il se vit
contraint d'abandonner une position qui
devenait de jour en jour plus dange-
reuse. Il voyagea en Italie où il improvisa
publiquement en vers latins , comme le
font si habilement dans leur langue les
improvisateurs italiens. Après avoir
excité l'admiration à Milan , à Parme et
à Turin , il visita le lac de Côme et les
ruines de la maison de Pline : ce fut là
qu'il forma le projet de publier les clas-
siques latins , projet qu'il commença
384 LEM
d'exécuter en 1819. La Collection des
classiques latitis , présente quelques
taches et des négligences , mais elle est
encore la plus importante de toutes celles
qui ont paru, et les commentaires en
sont supérieurs , en général , à ceux des
éditions dites Variorum. Les Anglais pu-
blient sur le modèle de ce grand ouvrage
une pareille collection ; si ceMe de Le-
maire lui est inférieure sous le rapport
de l'exécution typographique et de la
beauté du papier , elle lui est bien préfé-
rable pour le plan , et même pour la cor-
rection : Louis XVIII en avait accepté la
dédicace : YEpitre dédicatoire qui est
écrite en vers latins est un modèle de ta-
lent et de goût. Lemaire remplaça , en
1811, Luce de Lancival, comme profes-
seur de poésie latine à l'académie de
Paris. II composa en l'honneur de Napo-
léon et sur la naissance du roi de Borne des
vers latins , faits avec le plus grand art
de mots, d'hémistiches, et même de ti-
rades , empruntées à l'auteur de l'Enéide,
et qui prouvent qu'il connaissait parfaite-
ment toutes les richesses de la langue de
Virgile. Ces productions sont intitulées :
I Carmen in proximum et auspicatissi-
mum Jugustœ prœgnantis partum ^ 1811,
in-i" ; | Premier anniversaire de la nais-
sance de S. M. le roi de Rome . ou Vir-
gile expliqué par le siècle de Napoléon^
1812, in-4°. Lemaire fut long-temps
membre et même président du conseil-
général de son département ( Meuse ). Il
est mort à Paris le h octobre 1832, d'une
maladie de foie. M. Patin , ancien maître
de conférences à l'école normale , connu
par des discours que l'académie française
a couronnés, a été nommé pour le rem-
placer à la faculté des lettres.
LEMAIRE. Voxjez MAIRE.
LEMAISTRE. Voyez MAISTRE.
•LEMERCIER (N.), dit la Vendée,
né d'un aubergiste à Château-Gontier , se
mit dans les rangs de l'armée vendéenne
lorsqpi'elle passa dans sa ville natale , et
se lia d'une amitié particulière avec
Georges Cadoudal. 11 se distingua par son
courage et se trouva au siège de Gran-
villc, aux batailles de Dol et du Mans,
et à la déroute deSavenay. Il rentra avec
Cadoudal dans le département du Morbi-
han , fut fait prisonnier avec lui , et en-
fernié dans les prisons de Brest , d'où ils
s'évadèrent en 1794. Ils parvinrent à for-
mer une armée de chouans , dite division
des côtes, qui protégèrent la descente de»
émigrés à Quiberon. Devenu général oa
LEM 585
chef sous Georges, Lemercicr fui envoyé à
rUe Dieu pour communiquer avec le comte
d'Artois, qui , après l'avoir embrassé, le
créa chevalier de Saint-Louis. Lemer-
cier retourna , plein d'un nouveau zèle ,
auprès de son ami , qu'il seconda dans
toutes ses opérations, et accompagna
dans tous les combats. Il fut un des pre-
miers moteurs de l'insurrection de 1799.
Le 1" janvier , il prit Saint-Brieuc , mais
il n'y demeura que trois heures. Etant
parti, après la dernière pacification,
pour aller en Angleterre avec une mis-
sion de Cadoudal , il fut tué près de Lou-
déac dans les Côtes-du-Nord , au mo-
ment où il se portail sur la côte. On lui
prit ses papiers , qui firent connaître les
projets des chouans sur Brest et Belle-
Isle. Doué d'un esprit vif, d'une péné-
tration peu commune, et surtout d'une
intrépidité à toute éprouve, il fut très
regretté de son parti, dont il était un des
principaux chefs et l'un des meilleurs
généraux. Il est mort à la fleur de son
âge.
* LEMERE ( Ignace ) , ecclésiastique ,
né à Marseille en 1697 , fit d'abord partie
de la congrégation des Oratoricns de
Marseille , qu'il quitta pour venir se fixer
dans la capitale , où il se livra tout en-
tier à la composition de ses bons ou-
vrages, et à la pratique des bonnes
œuvres. On a de lui : | Pensées chré-
tiennes et morales sur la Genèse^ 1734 ,
2 vol. in-12 ; une traduction des Homélies
de saint Chrysostôme^ 1741, 4 vol. in-8°,
et une traduction du Traité de la Pro-
vidence, de Théodoret, 1740, in-8°. Il
mourut à Paris en 1752.
LEMERY (Nicolas), célèbre chimiste
et médecin, né à Rouen, en 1645 , d'un
I)rocureur au parlement , se consacra à
l'étude de la chimie , et parcourut toute
la France pour s'y perfectionner. Cette
science était alors une espèce de chaos,
où le faux était entièrement mêlé avec
le vrai. Lemery les sépara ; il réduisit la
chimie à des idées plus nettes et plus
simples, abolit la barbarie inutile de
son langage , semblable à la langue sa-
crée de l'ancienne théologie d'Egypte et
aussi vide de sens; il ouvrit des cours
publics de cette science , lesquels furent
fréquentés par une foule d'élèves , et par
quarante Ecossais, qui quittèrent leur
patrie pour venir suivre ses leçons.
Comme il était calviniste , on lui ôta son
brevet, et il se rendit alors en Angle-
terre, où Charles II agréa la dédidace
7.
LEM
de la 5"^ édition de son Cours de Chimie,
De retour en France , il dut en sortir en-
core par suite de la révocation de l'édit
de Nantes; mais ne pouvant vivre loin
de son pays et de sa famille , il y rentra
une seconde fois , et se fit catholique en
1686. L'académie des sciences se l'associa
en 1699, et lui donna ensuite une place
de pensionnaire. Elle le perdit en 1715,
à 70 ans. C'était un homme infatigable,
bon ami , d'une exacte probité, et d'une
simplicité de mœurs assez rare. Il ne
connaissait que la chambre de ses ma-
lades , son cabinet , son laboratoire et
l'académie. Il fut une preuve que qui ne
perd point de temps en a beaucoup. On
a de lui : | un Cours de Chimie , dont la
meilleure édition est celle de M. Baron ,
en 1756, in-4° , avec de savantes notes.
La première édition de ce livre, traduit
dans toutes les langues de l'Europe, se
vendit comme un ouvrage de galanterie
ou de satire. | Un Traité universel des
drogues simples j, 1697, in-4'> : ouvrage
qui est la base du suivant , et qui est tout
aussi estimé; ] une Pharmacopée uni-
verselle^ 1697, in-4°. C'est un recueil
tiès exact de toutes les compositions des
remèdes décrits dans les meilleurs livres
de pharmacie. | Un Traité de l'antimoine,
: in-8". Lemery s'était beaucoup enrichi
par le débit de blanc d'Espagne, qu'il
posséda seul pendant long-temps.
LEMERY (Louis), fils du précédent,
et digne de lui par ses connaissances en
chimie et en médecine , fut pendant 53
ans médecin de l'Hôtel-Dieu de Paris ,
acheta une charge de médecin du roi ,
et obtint une place à l'académie des
sciences. Il mourut le 9 juin 1743 , à 46
ans, aimé et estimé. On a de lui | un
Traité des aliinens , 1702 , in-12 ; ouvrage
clair et méthodique, réimprimé en 2
vol. ; I lin grand nombre d'excellens Mé'
moires sur la chimie , insérés dans ceux
l'académie des sciences; | trois Lettres
contre le Traité de la génération des vers
dans le corps de l'homme , par Andry ,
1704 , in-12.
* LEMIERRE (Antoine-Marix) , do
l'académie française , né à Paris en 1721,
et selon plusieurs biographes , en 1733,
était fils d'un simple employé aux finan-
ces , et tenait par sa mère à la famille du
cardinal Duperron. Il étudia au collège
des jésuites , sous le célèbre père Porée ,
dont la mémoire lui fut depuis si chère
que, dans les dernières années de sa vio,
il en parlait encore avec attendrissement.
53
LEM 386
Son api)lication au travail et son amour
pour l'élude inspirèrent aux jésuites le
désir d'acquérir un sujet qui donnait de si
belles espérances : Lemierre, un moment
incertain , sans doute par atiachement
pour ses maîtres , se détermina , après
y avoir réfléchi quelque temps , à entrer
dans le monde. Ses qualités charmèrent
M. Diipin , fermier-général, ami parti-
culier de son père , qui se l'attacha comme
secrétaire et qui aurait assuré sa for-
tune, si la passion des vers n'eût eia-
])êclié ce jeune poète de profiter de
l'occasion qui lui était offerte de s'en-
lichir. C'est chez M. Dupin qu'il composa
ses premiers ouvrages. Son poème sur la
Tendresse de Louis Xiy pour sa fa-
mille fut couronné en 1755 par l'académie
française. Ceux qu'il composa sur la
Sincérité^ et V Utilité des découvertes
faites sous le règne de Louis XV ^ rem-
portèrent également la palme à l'acadé-
mie de Pau en 1754 et 17o6 , et ceux de
\ Empire de la mode ^ 1754, et du Com-
merce, l'obtinrent à l'académie française.
Aspirant à des triomphes pUis éclatans ,
Lemierre entreprit sa tragédie à.'Hyperm-
nestre^qjixï fut représentée au Théâtre-
Français en 1758. Le brillant succès qu'il
obtint ne lui permit plus de se partager
entre la finance et les lettres, et, malgré
les sollicitations d» M. Dupin, qui lui
offrit de nouveaux avantages, il aban-
donna tout , pour ne plus songer qu'à
ses vers : il s'occupa de composer qnc\-
ques poésies légères ^ et donna successi-
vement les pièces intitulées Térée ,
(1761), IJonénée (1764), Artaxerxe
( 1766 ) , GaUlaume Tell ( 1766 ) , Céramis
( 1785 ) , et Bai-nevell ( 1790 ) ; | sa Fleuve
de Malabar (1770). eut 40 représenta-
tions non interrompues. Térée, joué en
1761 , et Jdoménée qui le fut trois ans
après , furent reçus froidement du pu-
blic; il en fut à peu près de rnéme
à.' Artaxerxe j quoique cet ouvrage soit
rempli d'un intérêt puissant et que la
position soit originale ; mais Guillaume
Tell . malgré l'effroyable dureté du style ,
dont on trouva, sous ce rapport, la cou-
leur locale beaucoup trop prononcée ,
excita un vif intérêt, auquel ne contribua
pas peu ( surtout lors de la reprise de
cette pièce en 1790) l'esprit d'audace et
de liberté dont est empreint ce sujet , el
qu'avait conservé la touche naturelle-
ment mâle et sauvage de Lemierre. De
belles scènes , un ton général de vigueur,
mci Itèrent à .BamevcU rapprobalioii des
connaisseurs, malgré la longueur des
premiers actes et de nomlsreux vices de
diction. La fleuve de Malabar, dont lo
dénoûmenl n'est pas moins piltorosquo
que celui d'Hypermnestrc , obtint Ici}
plus vifs applaudissemens. Les littérateurs
jugèrent néanmoins que les personnages
étaient en général trop discoureurs , le
style trop tendu , et habituellement l'o-
cailleiix; ce fut le terme dont se servit
Fréron pour le caractériser, el on le
trouva plaisant. On prétend que ma-
demoiselle Clairon disait qu'elle était
obligée de cracher les vers de Lemierre.
Le même défaut domine dans son poème
de la Peinture^ en trois chants, 1769, in-
8". Ce poème, qui n'apprend pas grand'
chose aux jeunes peintres, et qui n'est
qu'une déclamation en vers , manque
souvent de variété, d'élégance et d'har-
monie. Plusieurs beaux morceaux animés
de l'esprit poétique , tels que V Invocation
au soleils l'origine de la Chimie ^ la Fic-
tion allégorique de l'ignorance ^ etc..
font regretter qu'il n'en ail pas fini un
plus grand nombre d'autres qu'il n'a fait
qu'ébaucher, o Lemierre , dit M. de La-
» harpe, trouva le moyen, en s'appuyant
» fort adroitement sur un poète lalin
» moderne , qui lui fournissait les idées
» et les images , de faire un poème sur la
» peinture , dont la versification est gé-
» néralement beaucoup plus passable qu»
» celle de ses tragédies, et de temps en
» temps beaucoup meilleure qu'à lui n'ap-
» partient. Il était difficile de profiter da-
» vantage de son modèle ; sa marche est
I) exactement la même que celle de l'ou-
n vrage de l'abbé de Marsy {voy. M ARSY; ;
j> il traite , comme lui , du dessin , ensuilti
» des couleurs, puis de l'invention et de
» ce qu'on appelle la poésie d'un tableau ;
» il donne les mêmes préceptes et cite
«les mêmes exemples; les pensées, les
» transitions , les images , sont presque
1) partout celles du poète latin ; enfin la
» version est souvent littérale dans des
j) morceaux de 40 à 50 vers. » Ce qu'on
vient de dire du Poème de la peinture
peut s'appfiquer avec plus de raison à
celui des Fastes et des usages de l'an-
née en seize chants, 1779, in-8°. C'est là
qu'on trouve la description la plus com-
plète des coutumes et même des amuse-
mens populaires, faite d'une manière
dont les deux vers suivans, sur la lan-
terne magique, pourront donner l'idro :
Opéra jur roulette , et qu'on porte i do« d'horotno ,
Où Ton voit par ua Ircu les héro» qu'on renomme ,
Quelques beautés de détail semées çà ci
là, entre autres la description du clair de
lune j n'empêchent pas que l'oreille ne
soit cruellement blessée par le ton géné-
ral de la versilicalion de l'auteur. Person-
ne , ce semble , ne devait posséder moins
le vrai style des pièces fugitives que Le-
mierre; il en a cependant donné un Re-
cueil en 1782. Si l'on n'y remarque pas la
facilité et les grâces du genre , on y trouve
de la variété, des images, des pensées,
et quelquefois de l'originalité, ainsi qu'un
heureux emploi de la fable. En compa-
rant ses poésies légères à celles de Vol-
faire , Lemierre disait assez plaisamment;
« Entre Voltaire et moi il n'y a qu'un
» saut de loup. » Ce poète avait une ima-
gination vive et féconde , il connaissait
l'art de produire de grands effets sur la
scène par des dénoùmens pittoresques ; on
trouve dans ses poésies des figures rian-
tes, et des comparaisons toujours justes.
On a peine à concevoir que le même
homme ait pu flatter quelquefois Toreillc
par les accords les plus doux et la déchirer
bien plus souvent encore par les sons les
plus discordans. Ce défaut venait peut-
être de la répugnance qu'il ressentit dès
sa jeunesse , pour cette littérature froide
et décolorée qui met tout son art à noyer
quelques idées dans un déluge de mots
harmonieux. Du reste, il possédait un
Jugement sain et il fut souvent consulté
par des hommes qui depuis sont devenus
célèbres. L'abbé Maury lui soumettait
tous ses discours : il était rare qu'il ne
mît pas ses observations à profit , et c'est
peut-être à Lemierre qu'il a dû de s'être
préservé de cette éloquence , de ce fracas
de mots que Thomas et quelques autres
académiciens avaient mis à la mode.
Lemierre travaillait avec une étonnante
facilité. Jamais on ne le vit pensif ou
préoccupé; en quelque moment qu'on
lui parlât , on ne paraissait pas l'interrom-
pre ; son cabinet était partout , partout
il s'occupait de ses vers, parce qu'il s'en
occupait sans efforts. C'est en déjeunant
au Palais- Royal , que remarquant l'allure
de ces petits oiseaux qui viennent bec-
queter autour des tables , il fit ce joli vers
dont l'idée est si gracieuse :
Même quand l'oiieaa marche , on sent «ju'il a des
»îl". (Faste» , liv. I.)
Il avouait sincèrement qu'il croyait ses
pièces supérieures à celles de tous les
autres poètes. Ses amis , entrant un jour
avec lui au théâtre où l'on devait don-
37 LEM
ner une de ses tragédies , lui dirent :
a Mais , Lemierre , il n'y a personne ? —
»Tout est plein, leur répondit-il; mais
» je ne sais pas où ils se fourrent. » Dans
une autre circonstance , voyant la salle
également dégarnie : « Société peu noni-
» brcuse , s'écria-t-il , mais bien choisie.»
On raconte qu'on le trouva un jour seul
sur la scène ; on lui demanda ce qu'il y fait
sait : « Je prends, réponclit-il, la mesuie
» d'une tragédie. » Il disait en parlant de
ce vers qui se trouve dans son poème sur
le Commerce :
Le Trident de Neptune est le tceptre du mondt; ,
« c'est le vers du siècle. » Comme ce vers ,
dont l'idée est réellement très belle,
se trouvait perdu dans un grand nom-
bre de choses bi/.arrcs ou insignifiantes ,
on l'appela, par un .calembourg assez
plaisant, le vers solitaire. On raconle
(ju'un de ses confrères de l'académie fran-
çaise , à laquelle ses diverses productions
l'avaient fait admettre, l'ayant rencontré
dans les bureaux de la marine , lui de-
manda ce qu'il faisait là : « Eh ! mon vers,»
répondit le poète avec le sérieux le plus
divertissant. Il déclarait franchement ce
qui lui paraissait bon dans ses écrits;
mais il ne cherchait pas à lever im tribut
sur l'admiration de personne, et recevait
avec simplicité toutes les observations
qu'on jugeait à propos de lui faire ; ja-
mais on ne lui a vu un seul moment dai-
greur pour toutes les critiques dont ii
était l'objet, et, quoiqu'il ftîl naturelle-
ment enjoué , il no se serait pas permis de
laisser échapper un bon mot qui pût
blesser quelqu'un. Tout le monde connaît
ce trait de piété filiale qui montre com-
bien il y avait de candeur et de simpli-
cité dans son âme. Pendant plusieurs an-
nées il se rendit , à pied , chaque luois ,
de Paris à Villiers-le-Bel , pour porter à
sa mère le fruit des économies qu'il faisait
en se bornant au plus strict nécessaire.
Lemierre avait pour la religion le respect
et l'attachement le plus sincère : chrétien
par conviction , il ne craignait pas d'en
pratiquer les devoirs , et dans un temps
où l'impiété faisait toutes les renommées,
et disposait de toutes les réputations lit-
téraires , il eut le noble courage de rester
constamment fidèle à la foi de ses pères.
On trouve dans un exemplaire de ses
poésies légères , qui faisait partie de sa
bibliothèque, une preuve touchante de
la délicatesse de sa conscience, et de la
sincérité de sa foi : c'est une note sur son
LEM
J588
LEM
épître à M""^ de "", (la comtesse de Bois-
roget) sur la mort de son fils; le dernier
vers,
Quelque part qu'il soîl , il repose ;
est ainsi chauffé ,
Au tein de Dieu mi>ine il repose.
Ensuite on lit cette réflexion écrite et
signée de sa main : Quoique cette pièce
soit religieuse , je ne la trouve pas chré-
tienne , et je désavoue les vers qui ne sont
pas dans cet esprits faisant profession
de vivre et de mourir chrétien. Chacun a
retenu ce vers sublime d'une de ses tra-
gédies. Le fils de Barneveldt lui conseille
de se soustraire à l'ignominie par la
mort et lui dit :
CatoQ se la donna....
Barneveldt lui répond :
Socrale l'attendît.. , !
Lemierre resta toujours étranger aux in-
trigues et aux cabales. Il se maria peu
de temps après sa réception à l'académie
française, où il avait succédé à l'abbé
Balteux, en 1781 , après s'être mis précé-
demment en concurrence d'abord avec
Ducis (à la mort de Voltaire ) , puis avec
Chabanon, qui passèrent avant lui.
Il fut aussi bon époux qu'il avait été
bon fils. Les excès de la révolution firent
une telle impression sur l'âme sensible
de Lemierre que sa santé en fut altérée,
et qu'il en tomba, dit-on, dans une sorte
de stupeur. Après six mois de maladie il
expira , soutenu par les secours de la re-
ligion, à laquelle il s'était empressé de
recourir. Il mourut à Saint-Germain en
Laye, le 29 juin 1795. Les OEuvres de
A.-M. Lemierre , de l'académie française,
précédées .d'une Notice sur la vie et les
ouvrages de cet auteur , ont été recueil-
lies par René Périn , Paris, 1810, 3 vol.
in-8".
* LEMIERRE D'ARGY ( A-.J.) , neveu
du littérateur précédent, et traducteur-
interprète auprès de différens tribunaux
et ministères , naquit vers 1760. Il possé-
dait plusieurs langues , et ne manquait
pas de talens ; mais une conduite déré-
glée le faisait souvent manquer du né-
cessaire. Il embrassa les principes de la
révolution; heureusement pour lui, il
n'y joua pas un grand rôle ; il consacra
cependant à ses faux principes plusieurs
de ses écrits. Souffrant d'une maladie
honteuse , et plongé dans la misère , il fut
contraint de se réfugier dans un hôpital ,
où il se fit inscrire sous un faux nom , et
OÙ il mourut le 12 novembre 1813 , à l'âge
de 53 ans. Il a laissé : | Olivia, romon
traduit de l'anglais , Paris , 1787,2 vol.
in~12; | L'Elevé du plaisir, traduit de
l'anglais , ibid. , roman mauvais et très
immoral ; | Nouveau Code criminel de
l'empereur Joseph II ^ traduit de l'alle-
mand , ibid. , 1788 ; c'est le fameux Code
où ce monarque innovateur remplace la
peine de mort par une détention à vie ,
pendant laquelle le coupable expiait ses
crimes par une torture continuelle plus
terrible peut-être que la mort. La prison
dite Pizzighettone, établie près de Milan,
où les grands criminels étaient enfermés,
inspirait plus d'horreur que le dernier
suppUce par lequel le coupable , en rece-
vant sa punition méritée , cessait en peu
d'instans de souffrir. | Calas ou le Fa-
natisme^ drame en 4 actes et en prose ,
joué pour la première fols au théâtre du
Palais-Royal ( les Français ) , le 17 dé-
cembre 1790. Le lendemain, M. Laya
donna sur un autre théâtre un autre
Jean Calas. Sept mois après, le 7
juillet 1791, Chénier fit représenter sur
le Théâtre dit de la République une tra-
gédie en 5 actes , intitulée Calas. La fu-
reur avec laquelle ces trois auteurs sem-
blaient s'arracher un sujet où les prêtres
n'étaient pas ménagés , faisait peu d'hon-
neur à leur générosité , au moment où
les ministres de l'autel souffraient la plus
cruelle persécution. | Les cent Pensées
d'une jeune Anglaise { en anglais et en
français), avec des Mélanges, dos Apo-
logues moraux et une Desciiption allé-
gorique des Voyages d'iai jeune homîne
au pays du Bonheur j Paris , 1798, in-12;
I Poésies de Gray , trad. de l'anglais ;
I Joscelina ^ de madame Kelly, trad. de
l'anglais, ibid., 1799 , 2 vol. in-12 ; | Code
général pour les Etats prussiens, avec
MM. Brosselard et Weis , trad. de l'alle-
mand, ib., 1801, 2 tom. en 5 vol. in-8°; | le
Château de l'Indolence, -par Thomson,
avec deux autres poèmes, tous trois tra-
duits de l'anglais, ibid., 181/i; \ Mémoires
de la reine d'Etrurie, écrits par elle-
même , trad. de l'italien, ibid., 181/t,
in-8°. Ces Mémoires , que la reine d'Etru-
rie n'a jamais écrits , sont d'une fausseté
manifeste, et nous doutons tnéme qu'ils
existent en italien. | Relation authentique
de l'assaut donné le & juillet 1809 au pa-
lais Quirinal , et de l'enlèvement du sou-
verain Pontife (Pie VII) trad. de l'italien
1814, in-8°; \ La femme errante, pav
miss Burney, trad. de l'anglais ( avec
M. Breton). Lemierre d'Argy a laissé ma-
LEM 5
nnscrîle une Iragédie intitulée Maza-
niello.
• LEMIUE (Noël) , célèbre graveur,
naquit à Rouen en 1724 et fut élève de
Lcbas. Il a laissé plusieurs ouvrages dont
les connaisseurs font beaucoup d'éloges ,
pour la correction , l'exactitude et la grâce:
ils estiment surtout ceux qui font partie
de la magnifique galerie de Florence. On
recherche particulièrement les Portraits
du grand Frédéric^ de Henri IV^ de
Louis XV ^ de Joseph II ^ de JVashing-
ion^ etc. Son chel-d'œuvre est le Partage
de la Pologne ou le Gâteau des Rois^ qu'il
a signé Erimel qui est l'anagramme de
son nom. Il était membre des académies
de Lille , de Rouen et de Paris , et mourut
dans cette dernière ville en 1801.
LEMXIUS ou LEMMENS (Lievewou
LcBvinus ) , médecin hollandais , né à
Ziriczée en Zélande, l'an 1505, acquit de
la réputation dans l'exercice de son art.
Il avait été disciple de Vesale , de Dodo -■
née et de Conrad Gesner. * près la mort
de sa femme , il fut élevé au sacerdoce ,
et devint chanoine de Ziriczée, où il
mourut en 1568. On a de lui : | De occul-
tis naturœ miracalis ^ lib. II, Anvers,
{■m, in-12;libri IV; ibid. 1504, in-12 ;
ouvrage curieux et savant pour le temps
où il parut; | De astrologia, in-8° ; | De
plantis biblicis , Francfort , 1591 , in-12.
Lemnius est le premier qui ait traité des
plantes dont il est fait mention dans l'E-
criture , mais il en parle d'une manière
assez superfi'^iello et inexacte ; Scheu-
chzeramieux fait dans sa Pliysica sacra.
On a donné un Recueil des ouvrages de
Lemnius, Francfort, 1628, auquel on a
ajouté le traité De gemmis de Rucus. Le
latin de Lemnius est estimé des connais-
seurs. A ces ouvrages de Lemnius il faut
ajouter : [ De vita animce et corporis 7-ecte
instituenda , ioSl ; | De zelandis suis coin-
tnentariolus ^ dans la Batavia illastrata,
du père Scriverius; \ Dionysius libyens
poeta j de situ kabitabilis orbis^ à Simo?ie
Lemnio^ poeta laureato , nuper latinus
/acfus, Venise , 1545 , in-12. C'est le poème
de Denys, intitulé Periegète. On trouvera
la liste de ses ouvrages dans la Biogra-
phie médicale publiée par C.-L-F. Pan-
ckouke. — Guillaume LEMNIUS, son fils,
né vers 1550 , à Ziriczée , fut premier mé-
decin d'Eric XIV, roi de Suède. On le fit
mourir lorsque ce prince fut détrôné en
1568. — Il y a un poète de ce nom , Simon
LEMNIUS , qui vivait en 1550 , et dont on
a de mauvaises Epigrammes ^ in-8".
89 \.VM
LEMOINE. Voyez MOINE.
LEMONIVIER (Pierpe), né àSt.-Sevef,
auprès de Vire, en 1675, d'une famille
honnête, mérita par ses talens une chaire
de philosophie au collège d'Harcourt à
Paris ( 1725 ). L'académie des sciences se
l'associa en 1757 , et le perdit la même
année. On a de de lui , | Cursus philoso-
phicuSj. 1750, en 6 vol. in-12. Ce cours a
eu du succès ; on l'a dicté dans plusieurs
collèges de province. L'on y trouve non-
seulement les notions géométriques né-
cessaires à tout physicien , mais encore
les questions de physique traitées avec
assez d'étendue, et pour l'ordinaire avec
méthode et clarté. Son système général
est le cartésianisme corrigé, étayé de
faits supposés , si communs à tous les
faiseurs d'hypothèses , qui supposent tou-
jours ce qu'il faudrait démontrer, et qui
élèvent souvent des colosses dont les pieds
sont d'argile , semblables à ccikc de la
statue que Nabuchodonosor vit en songe.
L'académie , dont Lemonnier était mem-
bre , lui doit aussi des Mémoires. Il a en-
core laissé : Premiers traités élémentaires
de mathématiques ^ dictés en l'université
de Paris , ouvrage posthume et ano-
nyme , 1758 , in-8'*.
• LEMO.MVIEU (PiERRE.Cn.\RLEs),filsdu
précédent, célèbre astronome , de l'acadé-
mie des sciences et de l'institut, né à Paris,
le 23 novembre 1713, n'avait pas seize ans
lorsqu'il lit en 1731 ses premières observa-
tions sur l'opposition deSalurne. Reçu en
1756 à l'académie des sciences, il suivit
Mauperluis dans son voyage au Nord pour
mesurer un degré du méridien. A son
retour il se signala presque chaque année
par quelque découverte ou quelque tra-
vail important. Nommé professeur de
physique au collège de France , il eut La-
lande pour élève. A la formation de l'ins-
titut , Lemonnier fut membre de la section
d'astronomie ; il est mort à Héril près de
Bayeux , en 1799 , des suites d'une attaque
de paralysie. Ses principaux ouvrages
sont : \Inslitations astronomiques ^ 1746,
in-4° , un des meilleurs ouvrages , dit
Lalande, qu'on ait faits en français sur
l'astronomie élémentaire ; | .'astronomie
nautique lunaire , où l'on traite de la la-
titude et de la longitude en mer , 1771 .
in-8°; | Essai sur les marées et leurs effets
aux grèves du mont Saint-Michel . 1774 ,
in-S"; I Description et usage des prin-
cipaux instrumens d'astronomie^ 1774.
in -fol. C'est un des cahiers de la grande
Desci'iption des arts et métiers.\Mémoii-ef
53.
concernant diverses questions d' astrono-
mie et.de physique , 178i el 1784, in-4";
î Histoire céleste ^ 1741 , in-4°; | Théorie
des comètes j. 1743, in-8° ; | le TVbupeoM
zodiaque réduit à l'année I7b5, 175o, in-8";
\ Lois du magnétisme.. 1776, in-S". 2*
partie 1778 i in-S"; | une Traduction du
Traité de la construction des vaisseaux ,
par le suédois Chapman , 1779, in-fol. Le
ioma oàts Mémoire s àe l'institut (sciences
phys. ef math. ) , contient l'éloge de Le-
monnier, par Lefebvre Gineau. Voyez sur
ses ouvrages la Bibliothèque astronomi-
que de Lalande. ,
• LEMOMVIER (Louis - GurtLAUME ) ,
frère du précédent, de l'académie des
sciences , el premier médecin du roi , né
en 1717, mort le 21 fructidor an VII (7
septembre 1799 ) , s'appliqua particulière-
ment à la physique , et fut , avec l'abbé
Nollet, un de ceux qui inspirèrent le
îjoùt de la physique expérimentale , dont
tous deux donnaient des cours. Il se dis-
tinjjua surtout par des expériences cu-
rieuses sur l'électricité, de l'air, expé-
riences qui , jointes à celles que Dalibard
fil à Marly-la-Ville , ont démontré pour
la première fois à l'Europe, l'identité du
fluide électrique et de la foudre. Il culti-
vait aussi avec succès la botanique. Ses
principaux ouvrages sont : | Leçons de
Physique expérimentale sur Véquilihre
des liqueurs^ et sur la nature et les pro-
priétés de l'air., traduit de V anglais de
R. Cotes, 1742 in-S"; | Observations d'his-
toire naturelle. 1744, in-4°; | une édi-
tion de la Phai-macopée de Charas; | Lettre
sur la culture du café . ilTh , in-12 ; | beau-
coup de mémoires dans le recueil de l'a-
cadémie des sciences ; | plusieurs articles
dans l'Encyclopédie : Jlimant , Electri-
cité . etc. On a de M. Challan un Eloge
historique sur sa vie , 1799 , in-8°.
• LEMONNIER ( Pierre-René ), né à
Paris en 1731, fut secrétaire du maréchal
de Maillebois, puis commissaire des guer-
res, et mourut à Metz le 8 janvier 1796.
Il a donné plusieurs pièces de théâtre
écrites avec élégance, dont plusieurs ont
eu quelque succès , entr'autres : | le Ma-
riage clandestin, comédie en 3 actes et en
vers libres , imitée de Garrick , représen-
tée en 1775 et non imprimée ; | le Maître en
droit, opéra comique en 2 actes, 1760,
in-8°; | le Cadi dupé, el Renaudd'Jst. co-
médie en 2 actes molée d'ariettes, 4765,
in-8° : le même sujet a été traité avec
plus de bonheur en 1787 , par M. Radet.
• LEMOANÎEîl ( Gi:iîJ.AUME-A\ roiNE ,
90 LEM
l'abbé ) , directeur de la musique de la
Sainte -Chapelle, né à St. -Sauveur-le-
Vicomte, en 1721 , fit ses éludes au col-
lège de Coutances , et vint ensuite à Pa-
ris, où il fut nommé en 1743, chapelain
de la Ste.-Chapelle. Il obtint plus lard
dans la basse Normandie une cure, dont la
révolution le priva. Pendant la terreur ,
Lemonnier fui renfermé dans les prisons
de Sainte-Marie-du-Mont , puis amené à
Paris à Sainte-Pélagie. Rendu à la liberté
après le 9 thermidor, la Convention le
comprit dans la liste des gens de lettres
à qui elle accorda des secours. Quelque
temps après il fut nommé bibliothécaire
du Panthéon , et mourut le 4 avril 1797.
On lui doit : | une traduction fidèle et élé-
gante des comédies de Térence. 1770 , 5
vol. in-8°, avec le texte en regard et des
notes ; réimprimée en 1831, dans le Théâ-
tre complet des Latins, publié par Levée;
I une traduction des Satires de Perse,
1771, in-8'', avec des notes; | Fables,
contes et épitres , 1773 , in-8" ; 1 quelques
pièces de théâtre dont une seule a é4é
jouée, le Bon fils. Il existe une Notice
sur la vie de G. -A. Lemonnier, par Mulot,
Paris , 1797, in-8°.
• LEMONMER ( Amcet- Charles-Ga-
briel), peintre d'histoire, né lu 6 juin
1743, à Rouen, fut un des élèves de Vien,
et après avoir remporté, en 1770. le grand
prix de peinture , se rendit à Rome eu
1774 , en qualité de pensionnaire de l'a-
cadémie de France. Son séjour en Italie
fortifia son talent : parmi I«s productions
de cet artiste , on admire surtout le ta-
bleau de St.-Charles Bo7'romée portant
les secours de la religion aux pestiférés
de Milan, qui fut exposé au salon de 1783,
et celui de Cléombrote . qui parut au sa-
lon de 1787, tous deux recommandables
par le goût de la composition, l'expres-
sion des personnages, la fermeté du pin-«
ceau : nommé à l'académie royale de
peinture en 1789, Lemonnier prit dans
la mort d'Antonin le sujet de son mor-
ceau de réception. Pendant la révolu-
tion, Lemonnier fit partie de la com-
mission des monumens; c'est en partie
à ses soins qu'est duc la conservation
d'un grand nombre d'objets précieux,
que le vandalisme révolutionnaire vou-
lait détruire. Nommé en 1810, adminis-
trateur de la manufacture des tapisse-
ries de la couronne , il fit exécuter des
ouvrages très beaux , notamment la peste
de Jaffa, d'après le baron Gros. Le-
monnier fut destitué en 1816 : la ville de
LEM
391
LEM
Rouen le dédotnmafjea de la perle de son
emploi, par une pension de 3,000 fr. Il
continua de consacrer à son art les der-
nières années de sa vie, et mourut à Pa-
ris, en 182i. Au nombre des bonnes com-
positions qu'on lui doit , on remarque une
Lecture chez M"" Geoffririj QT&\ée par
Jazel ; François I" recevant à Fontai-
nebleau la Ste.- famille de Pi.aphacl;
Louis XIV assistant dans le parc de
Versailles à l'inauguration de la statue
de Miloji de Crotone, du Pu^et ; ces trois
tableaux qui rassemblent les personnages
les plus illustres du dernier siècle , ont
tléac(xuis par le prince Eugène, pour la
yalerie de Municb. On distingue aussi les
.ambassadeurs romains venant deman-
der à VJrèopage la communication des
lois de Solon. Les tableaux de Lemon-
nicr se font surtout remarquer par la
lidélité des attributs, la belle expression
des tètes , et un grand art do draper. Le
musée de Rouen possède 12 de ses pro-
ductions. Son fils a publié une Notice
sur sa vie et ses ouvrages ^ Paris , 182i ,
in-S".
' LEMONTEY ( Pierre -Edouard ),
membre de l'académie française, naquit
le \k janvier 1763 , à Lyon, d'une famille
respectable de négocians. Après avoir
fait d'excellentes études dans sa ville na-
tale, il suivit la double carrière du bar-
reau et des lettres, et en même temps qu'il
se distinguait par ses plaidoyers , il rem-
portail des couronnes pour ses discours
littéraires; il eut en 1783, le prix d'élo-
quence à l'académie de Marseille , pour
X Eloge de Fabry de Peyresc, et fut en-
core couronné en 1788 pour \ Eloge du
capitaine Cook. Le premier de ces dis-
cours est imprimé dans les Mémoires de
celle académie, le second le fut à Paris
en 1792 , in-8". La convocation des états-
généraux en 1789 changea la direction
des idées de Lemontey : il embrassa la
carrière de la politique. Son premier ou-
vr.age dans ce g[enre fut V Examen im-
partial des réflexions sur la question de
savoir si les protestans peuvent être élec-
teurs ou éligibles pour les états-géné-
raux. L'édit de 1787, avait accordé aux
protestans l'état civil, mais les avait ex-
clus des places de l'administration : la
question des droits électoraux était resiée
indécise ; malgré l'avis d'un grand nom-
bre d'écrivains, Lemontey fit triompher
la cause des protestans : ceux de Lyon
en voyèretil un député aux états généraux.
Cbanjé de la rédaction du cahier de l'as-
semblée électorale de Lyon , extra mn-
ros, Lemontey fit paraître ime brochure
qui a pour tilre , Quelques demandes
pour les campagnes, et l'année sxxivante.
Réflexions sur les devoirs des conseils
des accusés, et avis aux électeurs sur le
choix des juges. A l'époque de la forma-
tion des municipalités, il fut nommé sub-
stitut du procureur de la commune de
Lyon, et dans plusieurs occasions impor-
tantes , il parla au nom de cette grande
cité. Elu en 1791 , député à l'assemblée
Législative , il se rangea du côté des
constitutionnels, devint membre du co-
mité diplomatique , secrétaire et prési-
dent de l'assemblée , et exerça cette der-
nière fonction pendant une grande partie
de la session : ce qui l'éloigna plusieurs fois
de la tribune. Néanmoins il s'opposa aux
lois contre l'émigration , et s'il ne réussit
pas dans ses efforts sur ce point , il par-
vint du moins à faire excepter de cette
loi de proscription , les sa vans, les artistes
et les voyageurs. Obligé, en qualité de
secrétaire, de faire part à l'assemblée des
dépêches arrivées, il ne put retenir ses
larmes et ses sanglots , lorsqu'il lut le ré-
cit des massacres d'Avignon ; et fut forcé
de descendre de la tribune. Il présidait
l'assemblée Législative, lorsque Louis
XVI s'y présenta, en 1791 : on venait d«
décréter subitement qu'il ne serait ré-
pondu au discours du monarque que par
écrit , en sorte que le président ne put
faire au roi , qui n'avait point été pré-
venu et qui fut étrangement surpris, que
cette réponse sèche : Sire, VAssemblée
nationale décidera sur les propositions
que vous venez de lui faire . et vous in-
struira par un message de ses résolu-
tions. Le lendemain, Lemontey voulut
exprimer dans son projet de message la
peine que lui avait fait éprouver le si-
lence de la veille ; l'assemblée s'y opposa
et le força d'effacer cette partie de son
discours. Après la fin de la session, pen-
dant laquelle il s'était fait remarquer en
général par la modération de ses vues et
par ses connaissances en droit, Lemontey
se retira dans sa ville natale. La terreur
le força de se cacher , et , lorsque Lyon
s'insurgea contre la Convention, il se
rangea parmi ses défenseurs. Après avoir
vu périr presque tous les membres de sa
famille, il n'échappa lui-même à la mort
qu'en se réfugiant en Suisse , sous le dé-
guisement d'un soldat. Il ne revint en
France qu'en 1793 , fut nommé adminis-
trateur du district de Lyon , et s'efforça
LEïff
592
LEM
de faire rappeler les exilés. En 1797,
Lyon ayant été en proie à la disette , il fut
chargé d'aller demander des secours au
gouvernement. Après avoir rempli cette
mission , il parut avoir renoncé enlière-
nient aux affaires publiques, fil un voyage
en Italie , et vint se fixer à Paris , où il
jouit en paix des douceurs de l'amitié et
de l'élude. En 1798 , il fil jouer l'opéra de
Palma ou le voyageur en Grèce, en deux
actes , qui eut plus de cent représenta-
tions ; en faisant paraître sur la scène
les barbares qui démolissaient les chefs-
d'œuvre des arts dans la Grèce, l'auteur
se proposait de vouer à la haine publique
les vandales révolutionnaires qui avaient
détruit les monumens de la France. Quel-
que temps après il donna l'opéra de Roma-
gnesi, qui eut plus de 20 représentations.
L<jrsque l'ordre des avocats fut rétabli,
Lcmontey se fît inscrire sur le tableau de
ceux de Paris, et dévint membre du con-
seil de Tadministration des droits réunis.
En 1804, le gouvernement ayant voulu
confier la censure des pièces de théâtre
à un jury composé de trois hommes de
lettres, Lemontey fut le chef de cette
commission ; il s'acquitta honorablement
de cette tâche difficile , et la remplit al-
ternativement sous divers titres, après la
restauration et pendant les cent-jours. En
^819, il fut élu membre de l'académie
française, où il remplaça l'abbé Morellet.
Il mourut le 27 juin 1826, et eut pour
successeur dans ce corps savant M. Fou-
rier. Outre les ouvrages que nous avons
cilés , outre d'imporlans manuscrits dont
l'ensemble devait former une Hisloii-e
critique de la France depuis la rnorl de
Louis XIV , quelques articles signés le
Frileux^ dans le Journal général, en 1814
et 1815, diverses notices dans la Minerve
littéraire , V Abeille, la Revue orcyclopé-
dique, etc., ses discours et ses mémoires
lus à rinstilut , Lemontey a laissé : | Rai-
son-Folie, chacun son mot^ petit cours
'Je morale à la portée des vieux enfans .
Paris, 1801, in-8», ouvrage rempli d'es-
prit et de grâce, qui obtint 2 éditions dans
la même année; 3' édition augmentée,
1816, 2 vol. in-S"; | Récit exact de ce
qui s'est passé à la société des observa-
teurs de la femme , le mardi 2 novembre
1802, Paris, 1803, in-18, production dans
le^genre de la préfcédente, mais qui lui
est bien inférieure ; ] La vie d'un soldat
français , ou trois dialogues composés
par un conscrit, Paris, 180S, in-S"»;
I Irons-nous à raris ou la Famille du
Jura, Paris, 1804, in-12, brochure de
circonstance qui eut 4 éditions la mémo
année ; | Thibault ou la naissance d'un
comte de Champagne , poème en quatre
chants, sans préface et sans notes, tra-
duit de la langue maure, sur l'original
composé en 1230, jiar Robert de Sor-
bonne, clerc du diocèse de Reims, Paris,
1811, in-12. ( Essai sur V établissement mo"
narchiquede Louis XI F et sur les altéra-
tions qu'il éprouva durant la vie de ce
prince, qu'il publia en 1818, à la suite de
nouveaux Mémoires de Dangeau. Ce mor-
ceau devait servir d'introduction à une
histoire critique de la France pendant le
18* siècle, ouvrage important qui n'a pas
été publié. On a reproché à Lemontey de
montrer beaucoup de partialité, quand
il s'agit des grands noms de la monarchie
française , et d'avoir faussé l'histoire par
des systèmes ; \ De la peste de Marseille
et de la Provence pendant les années 1720
et 1721 , fragment de l'Histoire critique
de la France indiquée ci-dessus , Paris ,
1821 , in-S** ; | Etude littéraire sur la par-
tie historique du roman de Paul et Vir-
ginie . accompagnée de notes officielles
relatives au naufrage du vaisseau le
Saint-Géran, Paris, 1823, in-S° et in-18;
1 Fables russes tirées du recueil de M.
Kriloff, précédées d'une introduction
française de Lemontey, et imitées en vers
français et italiens , par divers auteurs.
publiées par le comte Orloff, Paris, 1825,
2 vol. in-8"; | Eloge historique de Vicq
d'Jzir, 1823 , in-4" ; | des Bons effets de
la caisse d'épargne et de prévoyance, ou
les trois visites de M. Bruno, Lille , 1821,
in-12 ; 2*^ édition : petit écrit ingénieux
qui a beaucoup favorisé rétablissement
des caisses de prévoyance. Il a été réim-
primé un grand nombre de fois dans di/-
férentes villes. On a placé en tête dei
Mémoires de l'abbé Morellet, 1821-1822.
2 vol. in-8°, V Eloge de cet académicien
par Lemontey, et en tête des Poésies de
Chaidieu, une notice biographique et
littéraire sur ce poète, dont Lemontev
est aussi l'auteur. En vertu d'une ordon-
nance rendue en juillet 1826 , par le pré-
sident du tribunal de première instance,
confirmée par un arrêt de la cour royale
de Paris, les copies et extraits faits par
Lemontey des pièces originales à lui con-
fiées en 1808, par le ministère des rela-
tions extérieures, ainsi que ceux dqscs
manuscrits contenant des citations de ces
mêmes pièces, ont été mis en dépôt chez
le notaire Chodron. M. ViUemain, alors
LEM
59:^
le:*i
directeur de racadémie française, a fait
X Eloge funèbre de Lemontey.
LEMOINE. rotjez MOINE.
LEMOS ( Thomas ) , dominicain , né de
parons nobles à Rivadavia en Galice , en
i5i5 selon Moréri, vers 1559 selon le père
Quétif , est célèbre par le zèle avec lequel
il combattit pour saint Thomas contre
Molina. Il entra fort jeune dans l'ordre de
Saint-Dominique. Il professait la théolo-
gie à Valladolid en 15%, quand le moli-
nisme commença à troubler les écoles. Le
cnapitre général de son ordre , convoqué
à Naples en 1600, le chargea d'aller à
Rome pour défendre la doctrine des écoles
dominicaines ou thomistes. On était à
examiner le livre de Molina, de la Con-
corde du libre arbitre et de la grâce : le
père Lemos excita les juges de cet ou-
vrage de vive voix et par écrit. Il parut
avec éclat dans les congrégations de auxi-
lits ; les papes Clément VIII et Paul V,
qui les avaient convoquées, applaudirent
plusieurs fois à sou éloquence et à son sa-
voir. Le jésuite Valencia, si on en croit
les dominicains , fut terrassé par cet ha-
bile homme, et mourut peu de temps
après, consumé par le chagrin. Pierre
Arrubal, son confrère, le remplaça, mais
il ne put tenir contre le dominicain. Ou-
tre que la nature avait fait naître celui-ci
avec une poitrine de fer , il était envi-
ronné d'une gloire . en manière de cou-
ronne, qui éblouissait ses adversaires^ et
les cardinaux même. C'est ïe R. père
Chouquet , dominicain , qui nous atteste
ce prodige dans son curieux livre des
Entraille s maternelle s de la sainte Vierge
pour l'ordre des frères prêcheurs. On
sent bien que les jésuites se donnent éga-
ment l'avantage dans ces disputes. ( Voyez,
Jlistoria controversiarum de auxiliis di-
vines gratiœ ^ a Ligino Meyer. ) Elles fu-
rent terminées, comme l'on sait, par une
permission donnée aux deux parties d'en-
seigner et de défendre leurs sentimens ;
ce qui prouve assez que les papes ont jugé
qu'il n'y avait ni dans les uns ni dans les
autres rien qui intéressât essentiellement
la foi. Effectivement, les dominicains et
les jésuites, en raisonnant diversement
sur la prédestination et la grâce, se réunis-
saient pî^rfaitement dans les conclusions
générales que l'Eglise oppose aux héréti-
ques. ( Voy. MOLINA. ) Le roi dEspagne
offrit à Lemos un évcché qu'il refusa. Il
se contenta d'une pension, dont il jouit
jusqu'à sa mort, arrivée en 1629, à SA ou
a 70 ans. Il était depuis long-temps con-
suîteur-gcnéral de liiiquisilion et s'était
relire au couvent de la Minerve On a de
lui: I Panoplia gratiœ^ 2 vol. in -fol.,
1676, à Béziers, sous le nom de Liège. Il
y traite à fond des matières de la grâce
et de la prédestination; mais après avoir
lu tout ce qu'il en dit, on finit par où
les théologiens devraient commencer ,
par cette exclamation si sage de l'apôtre
des gentils : O altitudo diviliai-nm! elc.
I Un Journal de la congrégation de
Auxiliis, Reims, 1702, in-fol. ,sou3 le
nom de Louvain ; | un grand nombre
d'autres Ecrits sur les questions de la
grâce, qu'on ne demande pas assez, et
sur laquelle on dispute trop. En tète de
cet avant -dernier ouvrage se trouve la
vie de Lemos, par l'éditeur, le père
Serry.
•LEMOT (le baron Fra\çois-Fuédé-|
Ric ), statuaire , membre de l'institut , pro-
fesseur à l'école royale des beaux-arts de
Paris, officier de la légion d'honneur,
chevalier de l'ordre de Saint-Michel, na-
quit à Lyon , le ii. novembre 1771. Il était
fils d'un menuisier de cette ville, qui étant
venu se fixer à Paris , l'emmena avec lui,
à l'âge de douze ans, et le fit recevoir à
l'école gratuite de dessin pour lui faire
apprendre la géométrie pratique et l'or-
nement. Un jour que l'enfant était allé
visiter le parc de Sceaux , le célèbre sta-
tuaire Dejoux l'y rencontra , dessinant,
dans le bosquet d'Eole et de Scylla , le fa-
meux Hercule gaulois de Pierre Pujet , et,
charmé de l'ébauche , il lui proposa d'en-
trer à son école. Le jeune Lemot accepta
avec joie cette proposition. Il fit des pro-
grès immenses, et après quatre années
d'études , il osa concourir pour le grand
prix de sculpture (1790), dont le sujet
proposé par l'académie , était le jugement
deSalomon. Lemot, âgé alors de 19 ans,
offrit son bas-relief qui fut admiré et ob-
tint le prix. Présenté à la reine Marie-
Antoinette et au Dauphin , il alla ensuite
à Rome , comme pensionnaire du roi ; il
se formait dans cette ville depuis trois ans
à l'art si difficile du statuaire , lorsque la
révolution, en 1793, étendit ses désastreux
effets jusqu'en Italie. Le jour de l'assassi-
nat de Hugon de Basse ville ( voyez
BASSEVILLE), ambassadeur de la répu-
blique , la populace romaine se porta à
l'académie de France, y mit le feu , pour-
suivit et maltraita les élèves qu'elle y
trouva. Lemot et ses confrères cherchèrent
un asile à Naples et ensuite à Florence.
Les secours qu'ils obtinrent de l'envoyé
6-ançais auprès du grand duc furent si
insuffisans , que Lemot se décida à venir
à Paris pour solliciter du gouvernement
une pension qui permît aux élèves de
l'académie d'achever leurs études en Ita-
lie, nfut alors atteint par la réquisition,
et, après avoir à peine eu le temps d'at-
teindre le but qu'il s'était proposé en re-
venant en France , il partit pour l'armée
du Rhin , commandée par le général Pi-
chegru. Il servait comme artilleur aux
avïiat-postes, lorsqu'en 179S la république,
voulant ériger une statue colossale en
bronze , représentant le peuple frauçais
sous les traits d'Hercule , le rappela dans
la capitale : cette statue , de cinquante
pieds de proportion qui devait être pla-
cée sur le terre-plein du Pont-Neuf, et
pour la confection de laquelle la Conven-
tion avait appelé le concours de tous les
artistes, ne fut point exécutée. Mais Le-
mot en fit le modèle qu'il présenta au
jury nom^mé pour cet objet. Ou le chargea
de faire , pour la salle du conseil des Cinq-
cents , le modèle en plâtre de la statue de
Numa-Pompilius, et, sous le consulat, il
exécuta poiir la salle du tribunat, au Pa-
lais-Royal , ime statue en marbre de Cicé-
ron , que l'artiste a représenté au moment
où cet orateur fait tonner dans le sénat sa
Catilinaire. Sous le consulat, il fut chargé
de faire le modèle en plâtre d'une statue
de Léonidas aux Thermopyles , pour la
salle des délibérations du sénat conserva-
teiur, et , pour le vestibule du palais , celui
d'un bas relief représentant deux Renom-
mées . dont on admire le style et le dessin.
Du temps de l'empire , il fit des modèles
en plâtre des statues de Lycurgue et de
BrutuSj pour la salle des séances du corps
législatif. Lemot fit encore pour la tribune
du corps législatif un bas-relief allégo-
rique en marbre, d'une belle ordonnance;
Le buste de la liberté , posé sur un socle
élevé, occupe le milieu de cette composi-
tion , et au-dessous est un médaillon , pré-
sentant l'image de Janus ; deux figures de
femmes, de grandeur naturelle, là. Re-
nommée et Y Histoire , se voient lune à
droite et l'autre à gauche, et deux en-
seignes militaires , ornent le fond de ce
bas-relief, qui est tout-à-fait dans le goût
du célèbre Goujon. L'institut lui ouvrit
ses portes en 1805. Lemot est de plus au-
c'eur du char et des deux figures de la
Victoire -et de la Paix , qui accompa-
gnaient sur l'arc de triomphe du Carrou-
sel le célèbre quadrige de bronze du por-
tail de l'église Saint-Marc à Venise. Ces
trois morceaux, er. plomb doré, furent
mis en place sur la fin de 1808. En 1810.
Lemot termina l'immense bas-relief qui
remplit le tympan du fronton du Louvre,
du côté de Saint-Germain l'Auxerrois , su-
perbe ouvrage , désigné par le jury
pour le prix décennal, et qui offre vingt-
quatre mètres de longueur sur cinq do
hauteur. La même année , il succéda à
Chaudet [voyez CHAUDET ) dans la place
de professeur de sculpture à l'école des
beaux-arts de Paris, et fut nommé membre
associé de l'académie de Lyon. Parmi le»
autres compositions de Lemot nous cite-
rons le buste colossal de Jean Bart exécuté
pour Dunkerque; la sculpture de l'arc-de-
Iriomphe sur le pont de Chàlons-sur-
Marnc, qui a été détruite par l'ennemi
en 1814; la statue équestre de Henri IV
sur le Pont-Neuf à Paris, dont l'exécution
lui fut confiée en 1814, et qui fut inau-
gurée le 25 août 1818, en présence du roi;
la statue équestre de Louis XIV qui fut
mise en place le 4 novembre 1823 sur la
place Bellecour à Lyon ; elle valut à l'ar-
tiste ce compliment du roi de Prusse, qui
l'avait vue dans ses ateliers : quand on fait
un si bel ouvrage , on coule sa réputation
en bronze. Une Hébé en marbre , versant
le nectar à Jupiter changé en aigle ; enfin
Lemot a fait l'esquisse entière d'un groupe
de la Religion et de la reine de France ,
Marie- Antoinette j-gonr la chapelle expia-
toire construite à Paris, dans la prison
de la conciergerie. Cet habile sculpteur
est mort à Paris, le 6 mai 1827, des suites
d'une chute qu'il fit à la pose de sa statue
de Henri IV. Ses restes ont été transférés,
comme il l'avait demandé , à son beau
château de Clisson, qui, la veille même
de sa mort, avait été érigé en majorât, li
possédait des connaissances variées, et
son style était pur et élégant. On a de lui
une Notice ( anonyme ) publiée à Paris ,
en 1817, sur la trille et le château de
Clisson^ imprimée chez Didot, et faisant
suite au Voyage pittoresque dans le Bo-
cage (Vendée) par Thiénon, peintre,
1817, in-4°. On trouve une notice sur Le-
mot dans le Voyage de Clisson, par M.
Edouard Richer, Nantes , Mellinet-Ma-
lassis, 5= édition, 1818, in-8".
LEMOYNE. Voyez MOINE.
• LEIVIPRIBRE (John), ecclésiastique
et littérateur anglais , né dans l'île de Jer-
sey , fut d'abord maître de grammaire à
l'école d'Exeter , puis obtint la place de
recteur de Meeth dans le comté de Devcn,
qu'il occupait encore lorsqu'il mourut en
LEIV
S9S
LEN
182â. On lui Joil : | le premier volume
(tune Traduction d'JJéi-odote . qu'il ne
«■oatinua pas , à cause du succès mérité
qu'obtint, dans le même temps, la tra-
duction complète du même historien , par
M. Beloe ; | Bibliothèque classique , ou
Dictionnaire classique , 1789 , in-8", ou-
vrage composé en grande partie d'après
les Siècles littéraires de Sabatier de Cas-
tres, nouv. édit. fort augmentée , 1 vol.
in-4°, trad. en français par Christophe,
1S04; I Biographie universelle . 1808, in-
4", dont il a donné un abrégé in-8". Il a
aussi laissé plusieurs Sermons.
LENCLOS ( Anne , dite NINON de ) ,
naquit à Paris en 1616, de parens nobles.
■Sa mère , qui était de la famille des Abra
de Raconis, de d'Orléanais, voulait en
faire une fille vertueuse ; son i)ère , sei-
gneur Tourangeau, homme dissipé et
frivole , réussit beaucoup mieux à en faire
une épicurienne. Ninon perdit ses parens
à l'âge de 15 ans. Blaitresse de sa destinée
dans une grande jeunesse , elle se forma
toute seule. Son imagination s'étaitxxal-
tée et égarée sur plus d'un article essen-
tiel par la lecture des ouvrages de Mon-
taigne et de son copiste Charron ; lecture
que le célèbre Malebranche croyait la
plus propre à corrompre les jeunes gens-
Elle était déjà connue dans Paris par ses
bons mots, sa philosophie, et la parade
qu'elle faisait d'une manière de penser
tout-à-fait particulière. Un goût décidé
pour le libertinage l'empêcha de se prêter
à aucun engagement solide. Ayant mis
son bien à fonds perdu, elle jouissait de
huit à dix mille livres de rente viagère.'
Le plan de vie qu'elle se traça n'avait
point eu d'exemple. Elle ne voulut pas
faire un trafic honteux de ses charmes ,
mais donner à son libertinage un air de
décence , et , s'il est permis de le dire , un
air de dignité. Ce dessein extravagant ne
lui réussit que trop bien, la corruption
humaine accueillant avec empressement
tout ce qui semble dénaturer le vice et
lui donner part aux honneurs de la vertu.
Sa maison fut le rendez- vous de ce que la
cour et la ville avaient de plus poli. Scar-
lonla consultait sur ses romans, Saint-
Evremont sur ses vers, Molière sur ses
lomédies, Fontenelle sur ses dialogues.
Car telle est la lâche lé des beaux esprits
et des philosophes , prétendant à la célé-
brité, que le jugement d'une courtisane
l)eut les flatter assex pour la faire l'arbitre
de leurs pensées et de leurs talens. Les
Coligni, les Villarceaux, les Se vigne, le
grand Condé, le duc de la Rochefoucauld,
le maréchal d'Albret , Gourville , Jean
Bannier, la Châtre, furent successive-
ment ses amans ; mais tous reconnurent
que Ninon n'était pas susceptible d'atta-
chement. Le dernier l'éprouva surtout
d'une façon singulière. Obligé de rejoin-
dre l'armée, incrédule aux sermens lef
plus tendres , Ninon le rassura par un
billet signé de sa main , dans lequel elle
lui donnait sa parole d'honneur que,
malgré son absence , elle n'aimerait que
lui. A peine eut-il disparu, qu'elle se jeta
dans les bras d'un nouvel amant. Madame
de Maintenon voulut , dit-on , l'engager à
vivre en femme honnête et chrétienne,
et l'invita même à venir la voir. Ninon ,
asservie à un long désordre , préféra sa
voluptueuse indépendance à la gêne d'être
vertueuse en si bonne compagnie. En vain
des directeurs sages voulurent la ramener
à la religion , elle n'en fit que plaisanter.
Ninon n'aimait point pourtant qu'on fit
parade de l'irréligion. Un de ses amis re-
fusant de voir son curé dans une maladie,
elle lui mena ce prêtre : « Monsieur , faites
» votre devoir; je \qias assure que, quoi-
» qu'il raisonne , il n'en sait pas plus que
» vous et moi. » Elle définissait elle-même
parfaitement la passion à laquelle elle sa-
crifiait son honneur et sa conscience , en
disant que c'était « une sensation plutôt
» qu'un sentiment ; un goût aveugle , pu-
» rement sensuel ; une illusion passagère
» que la satiété détruit ; un plaisir ma-
» chinai, commun à l'homme et à la brute,
» qui ne suppose aucun mérite , ni dans
» celui qui le donne , ni dans celui qui le
» reçoit. » Ninon tâchait de mettre tant de
décence dans sa conduite extérieure , que
des dames du plus haut rang furent, dit-
on , liées avec elle d'une amitié intime,
comme mesdames de la Suze, de Castel-
neau, de la Ferté, de Sully, de Fiesque,
de la Fayette, etc. La reine Christine
voulut l'emmener avec elle à Rome , mais
Ninon n'était pas disposée à quitter ses
voluptueuses habitudes. On a fait beau-
coup d'éloges de sa probité à garder in-
tact un dépôt d'argent que lui avait laissé
son amant Gourville , et qu'elle lui rendit
à son retour , après de longues années ;
mais en agir autrement aurait été com-
mettre un vol, et ne pas s'en rendre cou-
pable , ce n'est qu'avoir une probité assea
commune. Ce trait a servi à Voltaire de
sujet pour sa comédie du Dépositaire.
Il avait été , au sortir du collège , présenté
à Ninon pcr l'abbé de Chàteauueuf j et
LEN
596
LEIV
elle lui laissa deux mille francs pour ache-
ter (les livres. Cette épicurienne si char-
mante aux yeux des hommes mous et
lâches, mais si coupable aux yeux de
Dieu, mourut le 17 octobre 1706 , suivant
les uns, comme elle avait vécu, suivant
d'autres , dans des sentimens plus chré-
tiens. Elle avait alors 90 ans et cinq mois.
Elle laissa quelques enfans. L'un de ses
fils est mort ofûcier de marine. Avant
qu'il vînt au monde , un militaire et un
ecclésiastique se disputèrent le criminel
honneur de la paternité. La chose était
douteuse , le sort en décida. On prit des
dés, et l'abbé perdit cette funeste gloi*-e.
Un autre fils de Ninon finit ses jours d'une
manière bien tragique. Il devint amou-
reux de sa mère, à qui il ne croyait pas
appartenir de si près ; mais dès qu'il eut
découvert le secret de sa naissance, il se
poignarda de désespoir : tous les genres
d'horreur paraissent devoir se réunir
dans cette longue scène de prostitution.
Sa manie était d'avoir l'air et les manières
d'un homme , et de disputer à ce sexe les
avantages qu'il a sur le sien. « A la bonne
» heure , a dit à cetteoccasion J.-J. Rous-
» seau ; mais je ne voudrais pas plus de
» cet homme-là pour mon ami que pour
» ma maîtresse. » Deux auteurs nous ont
donné la Vie de cette nouvelle Laïs : M.
Bret en 1751 , in-12 ; et M. Damours , à la
tête des Lettres qu'il a supposées écrites
par Ninon au marquis de Sévigné , 1764 ,
2 vol. in-12, dans lesquelles il y a beau-
coup d'esprit, des sentimens exaltés et
romanesques, qui eu prouvent la sup-
position. En 1790, on a donné la Corres-
pondance secrète entre Ninon de Lenclos^
le marquis de Villarceaux et madame de
Maintenon. Il n'est pas possible de s'y
méprendre , ce n'est ni le ton , ni le style
de cette époque qui n'était point encore
celle du brillant persiflage. Il n'existe que
7 ou 8 lettres qui soient vraiment de Ni-
non de Lenclos. Elles ont été insérées dans
les OEuvres de Saint-Evremont. Ce sont
des espèces de billets écrits sans préten-
tion. Plusieurs critiques lui ont attribué
un petit écrit intitulé la Coquette cor-
rigée^ 1659, in-12 de 48 pages; cet opus-
cule est une critique de l'ouvrage do
Fr. Jouvenel, qui a pour titre Portrait
de la Coquette. Voyez les n" 3052 et
10, 105 du Diclonnaire des anonymes. On
peut consulter pour plus de détails : Mé-
' moires sur Ninon par Bret, Paris, 1751,
ln-12, ouvrage dont nous avons parlé.
LE\ET ( Philibert - BER?iARD ), cha-
noine régulier de Sainte-Geneviève, né à
Dijon en 1677, professa la théologie à
l'abbaye de Saint- Jacques de Provins, et
y prononça l'oraison funèbre de François
d'Aligre , qui en était abbé commenda-
taire. Lenet fut aussi abbé du Val-dcs-
Ecoliers. Il est auteur de quelques ouvra-
ges qui ont eu de la célébrité , et lui ont
mérité une place parmi les écrivains ec-
clésiastiques du 18*^ siècle. On a de luî,
outre l'oraison funèbre ci-dessus , Paris ,
1712 , in-4° : Traité de V amour de Dieu ,
nécessaire dafis le sacrement de péni'
tence ; ouvrage posthume composé en la-
tin par Bossuet , évcque de Meaux , avec
la traduction française ( par le père Le-
net ) , publié par M. Bossuet , évêque de
Troyes, Paris, 1736, in-12; [ Traité des
principes de la foi chrétienne j par Du-
guet, avec un avertissement ^ par le père
Lenet , génovéfain , Paris, 1756, 3 vol. in-
12 ; I Conférences ecclésiastiques de Du-
guet ( rédigées par le père Lenet, cha-
noine régulier ) , Cologne , 1742 , 2 vol.
in-4°. Le père Lenet n'avait point mis son
nom à ces divers ouvrages rapportés dans
le Dict. des anonymes. Il travailla au
Missel de Troyes , sur l'invitation de Bos-
suet, évêque de cette ville, dont il était
parent. Il mourut en mars 1748. Il était
de la même famille que le suivant.
LENET ( Pierre), fils et petit -fils de
deux présidens du parlemerU de Dijon, a
été lui-même , en 1657 , conseiller dans co
corps, ensuite procureur - général , et
enfin conseiller d'état. Il fut pendant le
siège de Paris, en 1649, l'un des inlen-
dans de justice, de police et des finances.
Le siège fini , il retourna à la cour , où
l'on se servit de lui en beaucoup d'occa-
sions importantes. On a imprimé ses Mé-
moires , contenant V histoire des guerres
civiles des années 1649 et suivantes, prin-
cipalement de celles de Guienne. Ils ont
paru en 1729 , en 2 vol. in- 12 , sans nom
de ville ni d'imprimeur. Ces Mémoires
ne sont pas bien écrits , mais ils contien-
nent quelques faits intéressans. L'auteur
n'y dit presque rien que ce qu'il a vu, et
il a eu part à la plus grande partie des
choses qu'il raconte. Il mourut on 1671.
LEIVFANT ( David ) , dominicain pa-
risien, mort dans sa ville natale en
1688, à 85 ans, publia plusieurs com-
pilations, dont les principales sont :
I Biblia hemardiniana , Biblia augusti-
niana, Biblia Thomœ Jquinatis , en 3
vol. in - 4°. Ces ouvrages renferment
tous les passages de l'Ecriture expliques
LEjV
597
LEIV
par ces Pères. | Un recueil des Sentences
de saint Augtistin , sous le titre de Concor-
dantice augustinianœ. 2 vol. in-fol. \ ' une
Histoire générale^ superficielle et mal
écrite, en 6 volumes in -12, 1684. Une
sin(jularité de cet ouvrage , c'est que l'au-
teur observe ce qui s'est passé de parti-
culier dans l'univers , chaque jour de l'an-
née, depuis la naissance de Jcsus-Cluist.
Le père d'Avrigni y a relevé plusieurs
fautes dans les dates.
LEi\FAIVT ( Jacques ) , né à Bazoches
dans la Beauce , l'an 1661 , d'un père qui
était ministre protestant , fit ses études à
Saumur et à Genève. Il passa à Heidel-
berg en 1681 , et y obtint les places de mi-
nistre ordinaire de l'église française , et
de chapelain de l'élect-rice douairière pa-
latine. L'invasion des Français dans le
Palatinat, en 1688, l'ayant obligé de se
retirer à Berlin , il y fut prédicateur de
la reine de Prusse, Sophie-Charlotte, et
chapelain du roi son fils , Frédéric-Guil-
laume. Lenfant fut agrégé, en i710, en
Angleterre, à la société de Xtk propagation
de la foi, et devint membre du Consis-
toire français établi pour diriger les af-
faires des réfugiés. Il mourut d'une pa-
ralysie en 1728 , à 67 ans. Les plus connus
de ses ouvrages sont : | Histoire du con-
cile de Constance, Amsterdam, 17 Ht, in-
k°', ibid. 2 vol. in-4°, 1727; celle du con-
cile de Pise, ibid., 2 vol. in-4°, 1724;
Utrecht, 1731 , 2 vol. in-4°; celle du co7i-
cile de Bâle, 1731, même format et même
nombre de volumes. Ces trois histoires,
défigurées par l'esprit de parti et de secte
qui animait l'auteur , ont été réunies en
i73i , en 6 vol. in-4''. | Nouveau Testa-
ment, traduit en français sur l'original
grec, avec des notes littérales, conjoin-
tement avec Beausobre , en 2 vol. in-4**.
Dartis , ministre de Berlin , a accusé les
traducteurs d'avoir affaibli les preuves
de la divinité deJ.-C. | VHistoire de la
papesse Jeanne , 1694 , in-12. Lenfant re-
vint dans la suite de ses préjugés au sujet
de celte fable si ridiculement inventée;
mais Desvignoles donna une nouvelle édi-
tion de son ouvrage en 1720 , en 2 vol.
hi-12, avec des augmentations considé-
rables, dans lesquelles il fit de vains
efforts pour appuyer ce roman. ( Voyez
BENOIT IIL ) i Une Traducticm latine du
livre de la Becherche de la vérité, du
père Malebranche, en 2 vol. in-4°; | Pog-
giana, en 2 vol. in-12 : ouvrage aussi
inexact que toutes les productions de ce
genre. C'est ime Vie du Pogge, avec un
recueil de ses bons mots et quelques-uns
de ses ouvrages. | Des Sermons . 2 vol.
in-12; [ Des Ecrits de controverse. Le
plus connu est intitulé : Préservatif contre
la réunion açec la siège de Rome , 1725,
en o vol. in -8®. Il y prétend réfuter ut»
ouvrage de mademoiselle de Beaumonl,
qui met au néant les raisons de la sépa-
ration des proteslans d'avec l'Eglise ro-
maine. I Traduction des I-ettres choisies
de saint Cyprien aux confesseurs ot aux
martyrs , avec des reinai'ques historiques
et morales , in-12 ; [ plusieurs Pièces dans
la Bibliothèque choisie et dans la Biblio-
thèque germanique /&\di(\ue\\Q il eut beau-
coup de part, et qui par là se ressentent
de ses préjugés.
' LENFAIVT ( Alexandhe-Charles-
Amve ), célèbre prédicateur jésuite, né
à Lyon , le 6 septembre 1726 , d'une fa-
mille noble du Maine , fit ses premières
études dans cette ville, chez les pères de
cette compagnie, et fut admis, en 1741 , au
noviciat d'Avignon. Charj^é de l'enseigne-
ment de la rhétorique à Marseille , il so
livra en même temps à la prédication, et
obtint dans la chaire tant de succès quo
ses supérieurs le fixeront dans cette car-
rière. Il prêcha, jusqu'à la suppression
de cet ordre en 1775 , dans plusieurs
villes de France , et partout son éloquen-
ce excitait l'admiration. Elle opéra même
d'éclatantes conversions , particulière-
ment à Malines , celle d'un anglais pro-
testant, qui était l'ami d'Young, auteur
des Nuits. Lorsque la Société de Jésus
fut abolie en France , le père Lenfant
avait 47 ans : il continua ses travaux
apostoliques et fit entendre la parole de
Dieu, notamment à "Vienne devant Jo-
seph II. Parmi ses auditeurs on remarqua
plus d'une fois des hommes qui faisaient
profession d'incrédulité ; Diderot et d'A-
lembert assistèrent à ses sermons pendant
tout un carême. On raconte qu'après
avoir entendu un de ses discours sur la
foi . Diderot dit à son ami : Quand on a
entendu un sermon semblable , il devient
difficile d'être incrédule. Le père l-icn-
fant se faisait remarquer par la force de
sa composition plus que par les charmes
de son style. Sans avoir un débit pom-
peux , il avait de l'harmonie dans la voix,
et surtout un ton de conviction profonde.
En 1791, il prêchait un carême à la cour
de Louis XVI , lorsque le refus qu'il fit de
prêter le serment à la constitution , le
força d'interrompre la station Conduit à
la prison de rAl)baye , le 50 août 1792 , i)
34
LEN
39S
LEN
prévit que sa fin n'était pas éloignée. Le
lendemain il donna à un huissier tout
l'argent qu'il avait sur lui, et se pré-
para à la mort. « Le père Lenfant et l'ab-
» bé de Rastignac parurent dans la tri-
» bune de la chapelle qui nous servait de
» prison ; ils annoncèrent que notre der-
» nière heure arrivait , et nous invitèrent
K à nous recueillir pour recevoir leur bé-
» nédiction. Un mouvement électrique
» qu'on ne peut définir nous précipita
» tous à leurs genoux , et, les mains join-
» tes , nous la reçûmes. « Le témoin au-
quel nous devons ce récit , échappa par
hasard au massacre qui eut lieu le même
jour sur les prêtres, sur le comte de Mont-
morln et sur les vSuisses. L'arrestation de
«e digne ecclésiastique excita un vif in-
térêlchezles personnes sensibles. Maillard
lui-même consulta les administrateurs de
police et de surveillance sur le sort de
l'abbé Lenfant. Ceux-ci lui répondirent
de la Mairie : « Nous déclarons au peuple
» qu'il importe beaucoup à T intérêt public
» que l'abbé Lenfant soit conservé, mais
j> qu'il ne soit pas mis en liberté, au con-
» traire , très étroitement gardé. » Ces
bonnes intentions ne purent se réali-
ser . et les cannibales de cette époque ne
voulurent pas laisser échapper cette in-
nocente victime. Quand le peuple vit ar-
river l'abbé Lenfant devant le tribunal
révolutionnaire, il demanda à grands
cris qu'il fût épargné. Les bourreaux qui
devaient l'immoler l'ayant relâché , on
entendit de toul-',s parts lui dire.... Sau-
vez-vous....! Il avait traversé la foule,
qui lui ouvrait un passage, et était déjà
dans la rue de Bussy , lorsque quelques
femmes s'écrièrent , innocemment peut-
être, mais bien indiscrètement : C'est le
confesseur du roi! .... et par ces mots le
désignèrent aux satellites du tribunal san-
guinaire , qui le saisirent et l'amenèrent
(le nouveau à l'Abbaye. Arrivé dans la
cour , il lève les mains au ciel , et mon-
trant une résignation chrétienne , il dit
ces dernières paroles : 3fon Dieu ! je vous
remercie de pouvoir vous offrir ma vie ^
comme vous avez offert la vôtre pour
moi! Il se met à genoux , et tombe ex-
pirant sous les coups de ses bourreaux.
C'était le 3 septembre 1792. L'abbé Len-
fant a laissé : | Oraison funèbre du dau-
phin :, -pcre de Louis XVI (prononcée à
INancy ) , 1766 ; | Sermons pour Vavent et
pour le carême^ Paris, 1818, 8 vol. in-12 ;
I Oraison funèbre de M. de Belzunce ^
évéque de Marseille, prononcée en latin
et imprimée avec une traduction fran-
çaise , 4756 , in-8°. On a publié le Recueil
de ses sermons ^ Paris, 1818, 8 vol. in-
12. On trouve en tète de cette collection,
une Notice sur l'auteur par M. N. S. Guil-
Ion.
LE\GLET (Pierre), natif de Beau-
vais , professeur royal d'éloquence , fut
recteur de l'université de Paris en 1660,
et mourut en 1707. On a de lui un Recueil
de poésies héroïques , où il y a du goût ,
un style aisé et pur , intitulé : Pelri Len-
gleti carmina ^ 1692 , in-S".
LENGLET du FRESNOY (Nicolas),
savant ecclésiastique , naquit à Bcauvaia
en 1674. Après le cours de seg premières
études, qu'il fit à Paris, la théologie fut
le principal objet de ses travaux ; à 22 ans
il débuta par quelques ouvrages qui fi-
rent croire qu'il s'occuperait exclusive-
ment de cette étude ; il la quitta ensuite
pour la politique et la diplomatie. En
1703 , le marquis de Torcy , ministre des
affaires étrangères , l'envoya à Lille , où
était la cour de l'électeur de Cologne ,
Joseph-Clément de Bavière. Il y fut ad-
mis en qualité de premier secrétaire pour
les langues latine et française. Il fut
chargé en même temps de la correspon-
dance étrangère de Bruxelles et de Hol-
lande. L'abbé Lenglet avait eu occasion
de connaître le prince Eugène après la
prise de Lille , en 1708. Dans un voyage
qu'il fit à Vienne en 1721, il vit de nou-
veau ce prince , qui le nomma son biblio-
thécaire ; place qu'il perdit bientôt après.
Son séjour dans ce pays porta ombrage
à la cour de France, qui le fit arrêter à
son retour , en 1723 ; et il fat détenu pen-
dant six mois dans la citadelle de Stras-
bourg. L'abbé Lenglet ne sut jamais pro-
filer des circonstances heureuses que la
fortune lui offrit, et des protecteurs puis-
sans que son mérite et ses services lui ac-
quirent. Il voulut écrire , penser , agir et
vivre librement. Il dépendit de lui de
s'attacher au cardinal Passionei , qui au-
rait voulu l'attirer à Rome, ou à Le Blanc
ministre de la guerre : il refusa tous les
partis qui lui furent proposés. Liberté^
liberté : telle était sa devise. Cet éloignc-
ment pour la servitude s'étendait jusqua
sur son extérieur. Il était ordinairement
assez mal vêtu, mais il ne le croyait pas.
Malgré cela, on le recevait avec plaisir
dans plusieurs maisons , parce qu il
avait beaucoup de feu et d'agrément
d'esprit, et surtout une mémoire admi-
rable. Ce don de la nature lui inspira
LEN
599
LEIV
le goût des ouvragées d'érudition. Tou-
tes ses études étaient tournées du côté
des siècles passés ; il en affectait jusqu'au
langage gothique. Il voulait , disait-il ,
être franc Gaulois dans son style comme
dans ses actions : aussi serait-'on tenté de
le prendre, dans quelques-uns de ses ou-
vrages, pour un savant du 16' siècle,
plutôt que pour un littérateur du 18'. Il
y a dans ses notes et dans ses jugemens
une causticité mordante. C'est ce qui lui
occasiona tant de querelles avec les cen-
seurs de ses -manuscrits. Il ne pouvait
souffrir qu'on lui retranchât une seule
phrase ; s'il arrivait que l'on rayât quel-
que endroit auquel il fût attaché , il le ré-
tablissait toujours à l'impression. Il a été
mis à la Bastille dix ou douze fois dans
le cours de sa vie : il en avait pris en
quelque sorte l'habitude. Depuis plusieurs
années , il s'appliquait à la chimie , et
l'on prétend même qu'il cherchait la
pierre philosophale. Parvenu à l'âge de
82 ans, il périt d'une manière funeste, le
16 janvier 1735. Il rentra chez lui sur les
six heures du soir , et s'étant mis à lire
un livre nouveau, il s'endormit et tomba
dans le feu. Ses voisins accoururent trop
tard pour le secourir. Il avait la tête pres-
que toute brûlée lorsqu'on le tira du feu.
Les principaux fruits de sa plume vive,
féconde et incorrecte, sont : | un Nou-
veau Testament en latin, enrichi de notes
historiques et critiques , ni trop longues ,
ni trop courtes , mais assez claires , à
Paris , 1703 , 2 vol. in-16 , réimprimé en
i73S , même format ; | le Rationarimn
temporum du savant Petau, continué de-
puis 1631 jusqu'en 1701, 2 vol. in-12 ,
Paris , 1700. Cette édition est incorrecte ,
et ce que l'abbé Langlet y a ajouté est
d'une latinité assez médiocre. | Com-
mentaire de Du Puy sift le Traité des li-
bertés de V Eglise gallicane de Pierre
Pithou, 1713 , 2 vol. in-4°: édition belle
et correcte. Cet ouvrage essuya de grandes
contradictions. | limitation de J.-C.^
traduite et revue sur l'ancien original
latin ^ d'où l'on a tiré un chapitre qui
manque dans les autres éditions , Ams-
terdam , 1731 , in-12 ; | Jrresta armo-
rum cum commentariis Benedicti Cur-
tiiAl^i, en 2 vol. in-12. Cette édition,
devenue rare , est d'une grande beauté,
la préface offre des endroits curieux et
piquans. | Réfutation des erreurs de
Spinosa ^ par Fénélon , Lami et Bou-
lainvilliers . 1731 in-12 ; | OEuvres de Clé-
mente Jean et Michel Marot^ la Haye ,
1729, en 4 vol. în-4° , édition plus ma-
gnifique qu'utile, sur le plus beau papier,
chaque page encadrée; et en 6 vol. in-12,
édition très inférieure à la précédente ,
étant l'une et l'autre pleines de fautes.
Des diverses pièces qui grossissent ce
recueil , les unes offrent des observations
curieuses et fort justes , les autres des
plaisanteries d'un mauvais ton , des obs-
cénités dignes de la plus vile canaille, des
déclamations satiriques , qui méritaient
un châtiment exemplaire. L'abbé Len-
glet se cacha sous le nom de Gordon de
Percel. \ Les Satires et autres OEuvres
de Régnier e 1733 , grand in-Zt" : édition
qui plaît autant aux yeux qu'elle déplaît
au cœur et à l'esprit. L'abbé Lenglet
éclaircit un texte licencieux par des no-
tes plus licencieuses encore. Il avait du
goût pour tout ce qui avait rapport à la
plus sale lubricité. On lui a attribué ( et
ce n'est pas tout à fait sans fondement)
des éditions de VJloysia Sigea , du Cabi-
net satirique , et de plusieurs autres in-
famies. I Une Edition du Roman de la
RosCj avec d'autres ouvrages de Jean de
Meun , Paris (Rouen) , 1733, 3 vol. in-
12. On y trouve une préface curieuse , et
des notes , dont beaucoup sont com-
munes , et par conséquent inutiles , quel-
ques-unes ridicules , d'autres obscènes ,
et un glossaire très abrégé et très super-
ficiel. I Une Edition de Catulle , Pro-
perce et Tibulle , comparable à celle des
Elzévirs pour la beauté et la correction,
à Leyde ( Paris , chez Cpusteliçr ) . 1745 ,
in-12; | le 6' volume des Mémoires de
Condée 1745, in-4° , Londres (Paris),
belle édition , mais pleine de traits si
vifs et de réflexions si hardies , que l'é-
diteur en fut puni par un assez long sé-
jour à la Bastille ; | Journal de Henri III,
ilhk , en 3 volumes in-8* , Paris , sous le
nom de Cologne , avec un grand nombre
de pièces curieuses sur la ligue ; | Mé-
moires de Commines , 1747 , 4 vol. in-4°
{voy. COMMINES ); | une Edition de
Lactance ( voy. LACTANCE ) ; | Mémoi-
res de la régence de M. le duc d'Orléans^
1749 , en 3 vol. in-12. L'abbé Lenglet n'a
été que le réviseur de cet ouvrage , qui
est de M. Piossens. Il a ajouté des mor-
ceaux essentiels , surtout la conspiration
du prince de Cellamare et l'abrégé dxi
fameux système. | Métallurgie d'Al-
phonse Barba , traduite de l'espagnol en
français , 1751 , 2 vol. in-12 : le 2' vol.
est de Lenglet; | Cours t^e chimie de Nicolas
Le Fèvro, 1751,5 vol. in-12, dont les
LEN
400
LEN
deux derniers sont de l'éditeur ; ] Mé-
thode pour étudier V histoire^ avec un
Catalogue des principaux historiens ^ en
12 vol. in-12 , et en 7 vol. in-/i.° ; le meil-
leur ouvrage que nous ayons en ce genre.
L'auteur y établit les principes et l'ordre
qu'on doit tenir pour lire l'histoire utile-
'ment ; il discute plusieurs points histo-
riques inléressans ; il fait connaître les
meilleurs historiens , et accompagne le
litre de leurs ouvrages de notes histori-
ques , littéraires , critiques , et le plus sou-
(Vent satiriques. Ce livre serait plus esti-
mé si l'auteur n'avait pas encombré son
Catalogue de tant d'historiens inconnus ,
<;t s'il s'était borné à faire un ouvrage de
goût plutôt qu'une compilation. La cin-
quième édition, de 1729, attira l'atten-
tion du ministère , qui y fit mettre un
grand nombre de cartons. Le recueil de
ces morceaux supprimés forme un in-4°
assez épais , qui se vendit séparément et
sous le manteau , à un prix considérable.
Cet ouvrage a été réimprimé en 1772 ,
en 15 vol. in-12 , avec des additions et de
prétendues corrections qui se ressentent
étrangement de la coruption que l'his-
toire a subie dans ce siècle ; | Méthode
pour étudier la géographie. Elle est re-
cherchée , malgré quelques inexactitudes.
On y trouve un Catalogue Ats meilleures
cartes et un jugement sur les difterens
géographes. La dernière édition est de
1767, 10 vol. in-12, avec les augmenta-
tions et corrections nécessaires. | De l'u-
sage des romans ^ où l'on fait voir leur
utilité et leurs différens caractères^ avec
une bibliothèque des romans, 1754 , 2 vo-
lumes in-12 ; ouvrage proscrit par tous
les gens sages comme un livre scanda-
leux. I L'Histoire justifiée cojitre les ro-
mans ^ 1755, in-12. C'est le contre-poi-
son du livre précédent, que l'auteur n'a-
vait pas intérêt qu'on lui attribuât ; mais
l'antidote est plus faible que le venin. Les
auteurs qui se rétractent par des considé-
rations humaines ont toujours soin de lais-
ser subsister leurs erreurs , et de ne les
combattre que par des coups qui ne les
abattent pas. | Plan de l'histoire géné-
rale et particulièt^e de la monarchie
française. Il n'en a donné que 5 voL, et il
a fort bien fait de ne pas continuer , car
ce livre est mal fait et mal écrit. | Lettre
d'un pair de la Grande-Bretagne sur les
affaires présentes de l'Europe . 1745 , in-
12 ; elle est curieuse ; | L'Europe pacifiée
par l'équité de la reine de Hongrie j par
M. Albert van Heussen , etc., Bruxelles ,
1745 , în-12 : ouvrage recherché à cause
des traits hardis , mais vrais , qu'il ren-
ferme ; I Calendrier historique , oit l'on
trouve la généalogie de tous les princes
de l'Europe^ 1750, in-24. Ce petit ou-
vrage le fit mettre à la Bastille. | Diurnàï
romain, latin et français, 2 vol. in-12,
1705. Il fit cette version à la sollicitation
de madame la princesse de Condé , qui
disait tous les jours son bréviaire.
I Géographie des enfans > en un petit vol.
in-12 ; | Principes de l'histoire ^ 1736 et
années suivantes, 6 vol. in-12 : ouvrage
faible , écrit incorrectement , et dont les
faits ne sont pas toujours bien choisis ;
l'auteur l'avait composé pour servir à
l'éducation de la jeunesse ; | Histoire de
la philosophie hermétique ,Z vol. in-12,
Paris, 1742. Cette mystérieuse philoso-
phie y est traitée de façon à ne pas faire
connaître la manière de penser de l'au-
teur sur son objet. | Tablettes chronologi-
ques ^ publiées pour la première fois en
1744 , en 2 vol, in-8°, de nouveau en 1778,
avec les corrections et les augmentations
dont cet ouvrage très instructif avait be-
soin. On n'a pas tout corrigé , à la vérité,
mais comment le pourrait-on dans des
livres si chargés de noms et de dates?
I Traité historique et dogmatique sur les
apparitions^ les visions, etc., 1751,2
vol. in-12; curieux, mais mal digéré,
presque sans ensemble et sans résultat.
Le jugement de l'auteur n'égalait pas , à
beaucoup près, sa mémoire;] Recueil
de Dissertations anciennes et nouvelles
sur les apparitions^ les visions, les
songes, etc. , 4 vol. in-12, 1752 , collec-
tion plus ample que bien choisie ; il n'a
pas fait difficulté d'y insérer l'absurde
dissertation d'un nommé Meyer , qui
prétend que les chevaux, les boeufs morts
peuvent plutôt revenir en ce monde que
les hommes. | Histoire de Jeanne d'Arc »
1753, in-12, en trois parties, composée
sur un manuscrit d'Edmond Richer. Ou
l'a lue avec plaisir. Le style est , comme
celui de ses autres productions, vif, fa-
milier et incorrect. | Traité historique
et dogmatique du secret inviolable de la
confession. Paris, 1713, in-12; livre
utile , et lun des meilleurs de ce fécond
écrivain. Michault, de Dijon, a publié,
en 17()1 , des Mémoires curieux pour ser-
vir à l'histoire de la vie et des ouvrages
de l'abbé Lenglet. On lui attribue aussi
d'autres ouvrages qui ne sont pas de
lui , comme V Histoire de la philosophie
pdienne^(l\xi est de Buvigny (1724).
LEN
401
LEN
• LENKOX ( Charlotte ), dame auteur,
naquit à New-Yorck en 1720. Elle vint à
l'âge de 15 ans en Angleterre, et ses liai-
sons avec Johnson lui donnèrent du goût
pour les lettres. On ignore à quelle épo-
que elle se maria avec M. Lennox et quelle
était la profession de son époux. Les ou-
vrages qu'elle publia eurent presque tous
du succès. Les principaux sont : | Le Von
Quichotte femelle^ 1752 ; traduit libre-
ment en français, Lyon, 1773, 2 vol
in-12; | Les Héros de Shakespeare , o\x
Shakespeare éclairci . 1753-54, 3 vol.
in-12, où l'auteur donne les histoires ou
contes où le tragique anglais a pris le su-
jet de ses pièces ; | Mémoires d'Harriot
Stuart^ 1751 ; \ Mémoire de la comtesse
de Berry ; \ plusieurs Comédies^ comme
La Sœur ^ Les mœurs de la vieille cité.
représentées en 1773; | une Traduction
des Mémoires de Sully ; [ une Traduction
du Théâtre grec du père Brumoy. Char-
lotte Lenuox, malgré le succès de ses
ouvrages, mourut dans \\n état voisin de
l'indigence, le h janvier 1804.
•LE\OELE (Pierre-Madeleine), com-
missaire ordonnateur des guerres, naquit
à Autun en Bourgogne, en 1772. Il adopta
les principes de la révolution, et les pro-
pagea dans un journal intitulé le Cosmo-
polite. En 1792, il fut nommé commissaire
des guerres , et employé à l'armée de la
Belgique commandée par Dumouriez.
L'année suivante , il passa aux armées de
rOuest, et il se signala dans cette malheu-
reuse contrée par plusieurs traits d'huma-
nité. Enl794, il fut nommé commissaire-
ordonnateur, et plus tard il passa dans le
corps des intendans militaires. Lenoble est
mort le 28 mai 1824, à Paris. Il était cheva-
lier des ordres de Saint-Louis et de la lé-
gion d'honneur. On a de lui : | Projet de loi
vour les mariages . présenté à l'assem-
blée nationale. 1790, in-8°; | Projet sur
l'établissement des greniers d'abondance.
1792 ; I Mémoire sur la panification, 1798 ;
I Découverte sur le galvanisme . comme
cause des sensations de l'organe deVouie
et des effets de la voix. 1803; | Mémoire
sur la formation d'un dépôt de l'admi-
nistration de la guerre. 1815 ; I Considé-
rations générales sur l'état actuel de
l'administration militaire en France au
i^^ janvier 1816, Paris, in-4°; | Projet de loi
ou d'ordonnance pour l'institidion d'une
magistrature militaire. Paris, 1817, in-4°;
I Mémoires sur les opérations militaires
des français en Galice , en Portugal et
dans la vallée du Tage. en 1809 , Paris ,
1821, in-S" et atlas, in-folio ; | Examen gé-
néral et détaillé des récoltes et des con-
sommations de blé en France . avec indi-
cation des moyens propres à remédier à
la surabondance et aux disettes. Paris,
1822 , in-8°.
* LENOIR ( Nicolas ) , architecte , né
en 1726 , fut élève de Blondel , remporta
le grand prix au concours de l'académie
de Paris, et fut envoyé par le gouverne-
ment français à l'école de Rome. Il y de-
meura plusieurs années, y étudia les
beaux modèles de l'antiquité avec tant
de soin que ses camarades l'appelaient le
Romain. Lenoir, ccmme tous les artistes
chez lesquels l'imagination domine, est
toujours heureux dans ses compositions;
mais les détails manquent de correction.
Il s'est créé un style particulier qui n'ap-
partient qu*à lui seul. Sa facilité était
extrême. Après l'incendie de l'opéra , au
Palais-Royal, il dessina et éleva en moins
de cinquante jours la salle de la porte
Saint-Maj'tin. Paris lui doit plusieurs de
ses édiiiccs et des rues entières , qui ont
contribué à son embellissement. Son
nom a été donné à l'une des rues qui
aboutissent au marché de Beauveau ,
construit d'après ses plans et sous sa di-
rection. Lenoir mourut le 50 juin 1810,
à Paris, à l'âge de 83 ans.
• LENOIR (Jean- Charles- Pierre ) ,
ancien lieutenant de police de Paris , na-
quit dans celte ville, en 1732 : son père
avait été lieutenant-particulier au Châ-
telet : le fils occupa le même emploi après
avoir été conseiller, et fut ensuite suc-
cessivement lieutenant-criminel, maître
des requêtes et intendant de Limoges. Il
obtint en 1774 la place de lieutenant-gé-
néral de police à Paris; en 1775, celle de
lieulenant-civii et de conseiller d'étal, et
en 1783 il fut président de la commission
des finances et bibliothécaire du roi. Dans
toutes ces charges et principalement dans
celle de lieutenant de police , il montra
un désintéressement , une philanthropie
et un zèle à toute épreuve ; il créa plu-
sieurs ctablissemens utiles et s'occupa
avec le plus grand soin des hôpitaux, des
prisons et des approvisionnemens. Sa
sagesse et sa prudence se manifestèrent
en diverses occasions. Chargé, en sa qua-
lité de conseiller , du rapport de la com-
mission établie pour juger le président
LaChalotais, il remplit cette fonction dé-
licate avec la plus grande cii-conspecticn,
puisqu'il parvint à calmer les ressenti-
mens d'un minisire qui se croyait offensé,
54.
LEIV
402
LEIV
el sauva l'honneur du magistrat pour-
suivi. Son opposition au système de
Turgot ( il s'ayissait des approvision-
nemens , de Paris ) l'éloigna pour un
instant des affaires ; mais les essais de ce
ministre n'ayant point été heureux, il
fut bientôt rappelé et il continua jusqu'en
1790 de rendre les plus importans ser-
vices à la capitale. On doit à cet habile
administrateur l'établissement d'une école
de boulangerie , la couverture des halles
aux blés et aux toiles , l'instilution du
Mont -de -Piété, l'éclairage non inter-
rompu des rues de la capitale , la sup-
pression des vaisseaux de cuivre des lai-
tières et des comptoirs de plomb des
marchands de vin , la construction des
halles aux veaux, aux cuirs et à la marée,
lu suppression du cimetière desinnocens
el l'établissement des piliers dans les car-
rières qui régnent principalement sous
la partie sud de Paris. La police inté-
rieure était entre ses mains un refuge de
paix ; il serait impossible d'énumérer les
désordres qu'il a prévenus par sa pru-
dence , les larmes qu'il a taries par sa
bonté, les services qu'il a rendus aux fa-
milles, le plus grand nombre ayant été
enseveli dans les ombres du silence ; et,
ce qu'il y a de bien étonnant, c'est la mo-
dicité des sommes qu'il employait pour
une police aussi bien faite. Fouché , qui
le consultait souvent pendant son minis-
tère , eut peine à le croire , lorsqu'il lui
en donna les détails. Lenoir fut un de
ceux qui contribuèrent le plus à l'aboli-
tion de la torture. On peut consulter pour
bien connaître son administration un ou-
vrage rédigé par lui, el q-ui a pour titre :
Détails sur quelques établissemens de la
ville de Paris, demandés par sa majesté
impériale, la reine de Hongrie, à M. Le-
noir conseiller d'état et lieutenant-géné-
ral de police. Paris, 1780, in-S". En 1790,
Lenoir quitta la France, se retira en
Suisse et de là à Vienne : les progrès de
l'armée française lui firent souvent chan-
tier de retraite. Pendant qu'il était en Au-
triche , l'empereur Paul \" lui fit des of-
fres avantageuses et chercha à le fixer à
sa cour : Lenoir répondit qu'il n'avait
pas renoncé à revoir sa patrie, mais qu'il
offrait à l'empereur de lui consacrer une
ou deux années de sa vie. Cette négocia-
tion fut rompue par la mort de Paul 1"" et
Lenoir revint en France en 1802. Comme
sa fortune avait été détruite pendant la
révolution, Bonaparte permit au Monl-
de-Piété dont il était le fondateur , de lui
faire une pension de i.OOO francs. Un
homme qu'il avait obligé et qui était de-
venu riche, lui donna une petite campa-
gne , près de Paris, où il passa tranquil-
lement ses derniers jours. Il venait sou-
vent à Paris, où il mourut en 1807, à
l'âge de 75 ans.
* LENOm-LAROCnE (Jean-Jacques,
le comte ), né à Grenoble, le 29 avril 1749,
fils d'un avocat distingué, suivit la même
carrière , où des éludes profondes sur
Cochin , d'Aguesseau et Montesquieu , le
firent bientôt distinguer et lui procurè-
rent d'honorables patrons; admis dans
la société intime de Servan , il reçut les
conseils de ce magistrat qu'il prit pour
modèle. Lenoir exerçait son état à Gre-
noble, lorsque une circonstance inatten-
due l'amena à 30 ans dans la capitale. Le
barreau de Grenoble ayant cru avoir à se
plaindre du parlement, se retira par une
délibération unanime, et pendant une
année les avocats ne se firent point en-
tendre devant cette cour. Lenoir profita
de ce temps, pour venir soutenir au con-
seil d'état, les affaires qu'il avait gagnées
dans la capitale du Dauphiné. Il retourna
ensuite dans sa ville natale ; mais en 1783,
de nouveaux intérêts le ramenèrent dans
la capitale où il se fixa. Bientôt il fut
chargé par les états du Dauphiné de
présenter au gouvernement un mémoire
où ils demandaient la restitution de leurs
droits politiques, qu'ils avaient perdus de-
puis plus d'un siècle : ils s'étaient réunis
pour dresser les articles de leurs an ciennes
constitutions, mais ils étaient sans ordre
et sanspreuve. Lenoirdéveloppa les prin-
cipes d'après lesquels ils avaient été éta-
blis , et à cette occasion il traita plusieurs
questions importantes qui fixaient déjà
tous les esprits : ce mémoire, qui formait
une brochure in-8°, était intitulé : Consi'
dérations sur la constitution des états du
Dauphiné applicables aux états-géné-
raux, 1788 , ( anonyme ) ; l'auteur fut élu
membre des états-généraux par la pré-
vôté et vicomte de Paris , extra muras.
Lenoir ne parut point à la tribune d'où
réloignait d'ailleurs la faiblesse de son
organe; il fit connaître les travaux de
l'assemblée dans un journal qui parut
alors sous le titre de Journal de Perlet.
Après la session, il travailla dans le Mer-
cure et dans le Moniteur , et il défendit
constamment les principes républicains ,
tout en combattant les démagogues et les
royalistes. L'article qu'il écrivit dans le
Mercure sur l'abus des mots et de leur
LEN
405
LEN
influence dans la révolution , fut traduit
par les journaux étrangers. A l'époque
du procès de Louis XVI , il osa élever la
voix en faveur de ce monarque : dans
trois Lettres qu'il publia sous le nom
d'un anglais, il défendit cette cause , en
l'appuyant sur la constitution qui ne
prononçait que la déchéance , et sur les
véritables intérêts de la France , que ses
ennemis cherchaient à perdre. Lenoirfit
paraître aussi diverses brochures de cir-
constance. Echappé au glaive des terro-
ristes, il professait la législation à l'école
centrale du Panthéon , lorsque le Direc-
toire l'appela au ministère de la police en
remplacement de Cochon. Mais il nccon-
Berva cette place que huit jours, le direc-
toire ayant compris la nécessité d'avoir
à la police un homme d'énergie , et non
un homme timoré et amoureux de belles
doctrines. Il alla reprendre sa chaire
dans laquelle il chercha à montrer la né-
cessité de l'union de la morale avec la
politique. Ses leçons et ses articles pali-
tic[ues lui firent une grande réputation
parmi les partisans du gouvernement ré-
publicain , aussi fut-il nommé membre
du conseil des Cinq-cents. Lenoir con-
courut à la révolution du 18 brumaire,
et entra au sénat conservateur, où il sié-
gea jusqu'en 181i, sur les bancs de la
minorité. Il adhéra à la déchéance de
Bonaparte, et fut ensuite nommé pair de
France, titre qu'il conserva après la se-
conde restauration. Il est mort le 17 fé-
vrier 1825. Son éloge a été prononcé à la
tribune par M. le comte Lemercier. Ou-
tre l'ouvrage que nous avons déjà cité et
les articles nombreux qu'il inséraau Mer-
cure et au Moniteur, Lenoir-Laroche a
publié : I de l'Esprit de constitution qui
convient le mieux à la France , 1795,
in-S" ; I Coup-d'œil raisonné sur les as-
semblées primaires de Paris Al'è'S, in-8°;
j Discours prononcé au cercle constitu-
tionnel sur la constitution de l'an '5 , et
sur les motifs qui doivent y attacher tous
les citoyens, 1798. in-8°. — Sa femme,
M™* Claire REGUIS , née à Grenoble en
1762 . morte à Paris en 1821 , s'est fait
connaître par l'exaltation de ses idées
mystiques, et a publié, sous le voile de
Vanonyme : | La Grèce et la France ou
Réflexions sur le tableau de Léonidas,
de David, Paris, 1815, in-8° ; | Description
du Calvaii-e des Lauriers^ 1820, in-S".
Elle a laissé plusieurs manuscrits, parmi
lesquels on cite une Interprétation mysti-
que de la fable de V Amour et Psyché.
LENONCOIJRT ( Robert de ) , d'une
des plus anciens maisons de Lorraine ,
fut archevêque de Reims. Il se distingua
tellement par son éminente piélé et par
sa charité, qu'il s'acquit le titre de Père
des pauvres. Il sacra le roi François I"
et mourut en odeur de sainteté l'an 1531.
LEÎSO^ COURT ( Robert de ). neveu
du précédent, fut évêque de Châlons-sur
Marne, puis de Metz. Paul III l'avait fait
cardinal en 1538. Lenoncourt fut aussi
archevêque d'Embrun, d'Arles, etc. Il
mourut à Charité-sur-Loire en 1561. Les
huguenots, ayant pris cette ville l'année
suivante . portèrent la fureur jusqu'à ou-
vrir son tombeau et en tirer son corps.
Il avait assisté à quatre conclaves pour
l'élection de Jules IV, de Marcel II, de
Paul IV, et de Pie IV.
LENONCOURT ( Philippe de ) , neveu
du précédent, cardinal et archevêque de
Reims, s'acquit l'estime et la confiance
de Henri III et de Henri IV, et du pape
Sixte V. Il mourut à Rome en 1591, à
soixante-cinq ans. Il avait autant d'esprit
que de piété.
LEÎVOSTRE. Fbye^ NOSTRE.
LE.\S, ou LENSEI ( Arxoul de Lensœus)
naquit au village de Bel-Œil , près A th.
dans le Hainaut. Après avoir fait un
voyage dans les Pays-Bas, il passa en Mos-
covie, devint médecin du czar, et périt à
Moscou lorsque celle ville fut brûlée par
les Tarlares , l'an 1575. Nous avons de
lui une introduction aux Elémcns d'Eu-
cJide, imprimée à Anvers, sous ce titre :
Isagoge in geomelrica Elementa Eucli-
diSj imprimé à Anvers.
LE\S ( Jea\ de ) , frère du précédent,
chanoine de Tournai , et professeur de
théologie à Louvain, né à Bailleul dans le
Hainault , en 1541 , mourut en 1593. Il n
laissé plusieurs ouvrages de controverse.
11 fut un de ceux qui composèrent, en
1588 , la Censure de l'université de Lou-
vain contre Lessius , sur la doctrine de
la grâce. ( Voyez LESSIUS. ) Il se dis-
tingua plus honorablement contre Baïus,
et composa, par ordre de la faculté de
théologie , une formule de doctrine con-
tradictoire aux propositions condamnées
de ce novateur.
* LENS ( AwDRÉ-CoRSEiLLE ) , peintre,
né à Anvers, le 31 mars 1739, étudia son
art dans sa patrie et à Rome. Il devint
professeur de dessin , à l'académie de sa
ville natale , et fit un grand nombre de
bons élèves. Il contribua puissamment
aux progrès de la peinture en Belgique,
LEN
404
LEX
auquel il adressa à ce sujet des réclama-
tions, que les peintres ne fussent plus as-
sujélis, comme ils l'avaient été jusqu'a-
lors, à la maîtrise. L'empereur Joseph II,
dans un voyage qu'il fit en Belgique , lui
lit les offres les plus brillantes pour l'at-
tirer à Vienne ; mais cet artiste les refusa.
Il quitta Anvers en 1781, pour se rendre
à Bruxelles, où il se maria et où il resta
jusqu'à sa mort , arrivée le 50 mars 1822.
Lens produisit un grand nombre de ta-
bleaux de chevalet, qui sont répandus
dans les diverses contrées de l'Europe ,
et particulièrement en Angleterre. Ses
ouvrages les plus estimés sont plusieurs
tableaux qui ornent l'église de Lierre, et
dont les sujets sont tirés de l'Ecriture
sainte; plusieurs autres tableaux pour
l'église de la Madeleine à Gand , dont les
sujets sont pris dans l'histoire de cette
sainte ; une Annonciation pour l'église de
Saint-Michel à Gand ; quelques tableaux
représentant différens sujets mythologi-
ques , qui ont été transportés à Vienne ;
des peintures à fresqua qui ornent les
salles d'une maison de Bruxelles. La
grâce, la simplicité, et une certaine svia-
vité dans le coloris, distinguent les diffé-
rentes compositions de Lens. On lui doit
en outre : le Costume ou Essai sur les
habillemens et les usages de plusieurs
peuples de l'antiquité ^ prouvé par les
»;jonum(?ns ^ Liège , 1770 , in-8° , avec 37
figures; nouvelle édition, revue par
G. A. Martin, Dresde, 1783, m-k" ; \ Du
Ben goût ou de la Beauté de la peinture^
considérée dans toutes ses parties^
Bruxelles, 1811 , in-8°, figures.
LENTULUS-GETULICUS ( Cnésus ) ,
d'une famille consulaire illustre et an-
cienne, fut élevé au consulat l'an 26 de
Jésus-Christ. Il était proconsul dans la
Germanie, lorsque Séjan fut tué à Rome.
II fut accusé d'avoir eu dessein de donner
sa fille en mariage au fils de ce ministre :
Lenlulus s'en défendit par une lettre si
éloquente, qu'il échappa au danger qui
le menaçait, et fit exiler son délateur;
mais l'affection des soldats pour Lentulus
ayant donné ensuite de la jalousie à Ti-
bère , ce princÈ le fit mourir. Suétone
parle, dans la F'ie de Caligula, d'une His-
toire écrite par ce consul. Martial dit
aussi , dans la préface du premier livre
de ses Epigrammes ^ qu'il était poète. —
Un sénateur de même nom fut mis à
mort en prison , pour être entré dans la
conjuration de Catilina.
LE\TULUS (Scipion), napolitain, né
diias le 15' siècle, se retira dans le pays
des Grisons, où il embrassa le calvinisme
et exerça le ministère à Chiavenne. Il est
connu par son Apologie d'un édit des
Ligues-Grises contre des sectaires ariens,
in-8°, 1570 : et par une Grammaire ita-
tienne j publiée à Genève en 1568. Baylo
remarque , à l'occasion de son Apologie »
« que les apostats affichent un grand zèle
» pour la religion qu'ils ont embrassée ,
» et que , quoiqu'ils aient grand besoin de
» tolérance, ils sont ordinairement très
1) intolérans. » Cette Apologie ^ d'ailleurs,
ne fait que mieux remarquer l'inconsé-
quence des protestans, qui s'élèvent contre
les ariens, après avoir secoué eux-mêmes
le joug de l'Eglise. Car si les protestans
ont le droit de s'en tenir à l'Ecriture sainte
et de l'expliquer même par Vesprit privée
pourquoi les ariens n'auraient-ils pas le
môme privilège? Et si l'on peut expliquer
arbitrairement contre l'autorité de l'Eglise
la tradition et les saints Pères , les passa-
ges de l'Ecriture touchant la présence
réelle, pourquoi ne prendrait-on pas la
même licence à l'égard des passages qui
regardent la divinité de Jésus-Christ? On
peut voir cette observation établie avec
autant de force que d'évidence dans un
petit traité du jésuite Kaprinay, publié
contre les calvinistes de Hongrie : P'el
Christus est in Eucharistia. vel non est
Deus. On la trouve aussi très bien discu-
tée dans la Perpétuité de la foi . tom. 1,
pag. i7 , 48 , 50 , etc. ( Voyez SERVET ,
MÉLANCHTHON , VORSTIUS Conrad. )
*LEO (LÉONARD ), l'un des plus grands
compositeurs harmo^nistes, né à Napîes
en 1694 , ou selon Piccini en 1701, étudia
la musique sous Alexandre Scarlatti , de-
vint maître du conservatoire de Santo-
Onufrio et composiieur particulier de la
chapelle du roi. C'est lui qui a employé
le premier , dans la composition , ces ac-
compagnemens expressifs et variés, ce
style grandiose et plein d'effet, qui carac-
térisent sa musique et qui ont servi de
modèles à ses successeurs. Il a laissé de la
musique d'église, deux oratorio, Santa
Elena et la Morte di Ahele ; un Miserere
à huit voix qui passe pour son chef-d'œu-
vre ; un Ave Maris Stella . et un grand
nombre d'opéras, Sophonisbe^ 1781 ; O/mt-
piade j Demofonte^ Cajo Grâce o ^ 1720;
Tam.erlaneAl^'i; Timocrate , 1723; Ca-
tone in Utica, 1726; la Clemenza di Tito
1755; Achille in Sciro. 1740 ; il Cioè /etc.
Léo mourut en 1 742, selon Burney , en 1 743,
selon Piccini , ou selon Gerber, en 1745.
LEO
LEON ( saint ) , surnommé le Grand.
premier pape de ce nom , vit le jour à
Rome suivant les uns, et enToscane sui-
vant d'autres. On ne sait rien de particu-
lier sur ses premières années. Les papes
saint Céleslin {'"^el Sixte III l'employèrent
dans les affaires les plus importantes et
les plus épineuses, lors même qu'il n'était
que diacre. Après la mort du dernier de
ces pontifes, en 440, il fut élevé sur le
saint Siège par le clergé de Rome. Le
peuple apprit son élection avec transport
et le vit sur le trône pontifical avec ad-
miration. Léon réprima , par sa fermeté,
les progrès des hérétiques , et en ramena
plusieurs à la foi par sa douceur. Ayant
découvert à Rome un nombre infini de
manichéens , il fit contre eux une infor-
mation juridique etpublique, mil au grand
jour les infamies ténébreuses de leurs
mystères, et livra les plus opiniâtres au
bras séculier. Il s'arma du même courage
contre les pélagiens et les priscillianisles,
et extermina entièrement les restes de
ces hérétiques en Italie. Son zèle, non
moins ardent contre les eutycliiens, le
l)orla à protester par ses légats contre les
actes du Brigandage d'Jiphèse ^ oix Yer-
rcur avait été préconisée en 449. L'em-
pereur Marcien ayant assemblé , à la sol-
licitation de Léon , un concile œcuméni-
que à Clialcédoine en 451, saint Léon y
envoya quatre légats pour y présider. La
2' session fut employée à lire une lettre du
saint pape à Flavien, patriarche de Con-
stanlinople , dans laquelle il développait
d'une manière admirable la doctrine de l'E-
glise catholique sur l'incarnation. Le con-
cile lui donna tous les éloges qu'elle méri-
tait. L'erreur fut proscrite, et la vérité prit
sa place. Dans le temps qu'on tenait ce
concile en Orient. Attila ravageait l'Occi-
dent et s'avançait vers Rome pour la ré-
duire en cendres. L'empereur Valentinien
choisit saint Léon pour arrêter ce guer-
rier terrible et pour faire des pro;)osilions
do paix. Le pontife lui parla avec tant de
majesté, de douceur et d'éloquence , qu'il
amollit son caractère féroce. Ce roi bar-
bare sortit de l'Italie et repassa le Danube
emportant dans son cœur de l'amitié, du
respect et de l'admiration pour le pontife
romain. Gcnséric fit ce qu'Attila n'avait
pas fait. Il surprit Rome en 4o5 et l'aban-
donna au pillage ; ses troupes saccagèrent
la ville pendant 14 jours avec une fureur
inouïe. Tout ce que put obtenir saint
kOn LEO
Léon fut qu'on ne commettrait ni meur-
tres ni incendies , et qu'on ne toucherait
point aux trois principales basiliques de
Rome, enrichies par Constantin de pré-
sens magnifiques. L'illustre pontife, en
veillant aux biens spirituels , ne négligea
point les intérêts temporels des peuples,
et mourut en 461 , avec la réputation d'un
saint et d'un grand homme. Sun pontificat
embarrasse étrangement ceux qui rappor-
tent la grande autorité des papes aux faus-
ses décrétales. Jamais le siège de Rome ne
fut pl'us respecté, ni ses décrets d'une force
plus marquée que sous le pape Léon. (f^og.
GRÉGOIRE le GRAND, INNOCENT V\
ISIDORE MERCATOR, LUTHER, saint
PIERRE. ) C'est le premier pape dont nous
ayons un corps d'ouvrage. Il nous reste
de lui 96 Sermons ^ et 141 Lettres. Plu-
sieurs savans lui attribuent aussi les livres:
De la vocation des gentils, Epître à Dé-
métriade : mais le pape Gélase ,qui vivait
à la fin de ce siècle, cite ces livres comme
étant d'un docteur de l'Eglise, sans les
attribuer à saint Léon; quelques-uns,
parmi lesquels se trouve l'abbé Anthelmi,
les attribuent à saint Prosper, mais le style
n'est pas favorable à cette opinion , car
c'est réellement celui de saint Léon ; slylo
poli, coulant, nombreux, plein de dignité
et de force , d'une latinité pure et riche.
Toutes ses périodes ont une certaine ca-
dence mesurée , qui surprend sans dé-
plaire. Il est semé d'épilhètes bien choi-
sies et d'antithèses très heureuses , mais
un peu trop fréquentes. Le père Quesnel
a donné une édition des ouvrages de ce
saint père, laquelle parut à Paris , en 1675
en 2 vol. in-4", ensuite à Lyon, l'an 1700,
in-fol. Baluze , Anthelmi , Jean Salinas et
dom Constant ont reproché au père Ques-
nel un grand nombre de falsifications ; il
paraît avoir pris à tâche d'affaiblir dans
plus d'un endroit l'impression de l'auto-
rité pontificale , plus forte dans les ouvra-
ges de saint Léon que dans ceux de la plu-
part des papes postérieurs , comme Ca-
saubon lui-même l'a marqué. On prétend
même que c'est dans ce dessein que le
père Quesnel , intéressé à combattre l'au-
torité du cliefde l'Eglise, a entrepris cette
traduction. Les OEuvres de saint LéoTiont
été publiées de nouveau à Rome en 1733,
en 2 vol. in-fol. par le père Cacciari, carme,
et à Venise en 1755 par les frères Bal-
lerini; l'une et l'autre éditions sont en 5
vol. in-fol. Le père Cacciari a fait paraître
en 1751-55-53, une nouvelle édition avec
des ExercHationes in Opcra sancti Léo-
LEO
A06
LEO
niSj in-fol. Ce sont des dissertations d'un
style assez, négligé, mais pleines de choses.
L'abbé de Bellegarde a donné une traduc-
tion française des sermons de ce saint
père , Paris, 1701 , et M. l'abbé Guillon en
a donné dans sa Bibliothèque choisie des
pères de l'Eglise grecque et latine une
analyse très distinguée par l'élégance de
sa traduction et par le goût qui a présidé
aux choix qu'il a faits des morceaux les
plus remarquables qu'ils renferment. Le
père Maimbourg a écrit l'histoire de son
pontificat, in-i", ou 2 vol. in-12. Voyez
saint Hilaire d'Arles. L'Eglise honore la
mémoire de ce saint pontife le 11 avril.
LEON II ( saint ) , sicilien , successeur
du pape Agathon en 682 . envoya l'année
suivante le sous-diacre Constantin , réli-
gionnaire du saint Siège , à Constantino-
ple , en qualité de légat. Il le chargea d'une
lettre pour l'empereur, dans laquelle il
confirma par l'autorité de saint Pierre , la
définition du sixième concile, et disait
anathème à Théodore de Pharan, à Gyrus
d'Alexandrie, à Sergius, à Pyrrhus, à
Paul et Pierre de Constantinople , à Ma-
caire , à Etienne et Polychrone , et même
au pape Honorius : « parce que, comme
» il s'en explique dans une lettre aux évé-
» ques d'Espagne, Honorius n'a point
» éteint dans sa naissance la flamme de
» la doctrine hérétique comme il conve-
> nait à son siège. » {Voyez HONORIUS.)
Léon II mourut le 23 du mois de mai 684,
après avoir tenu le bàlon pastoral avec au-
tant de fermeté que de sagesse. Il institua
le baiser de paix à la messe , et l'asper-
sion de l'eau bénite sur le peuple , perfec-
tionna le chant grégorien , et composa
plusieurs hymnes pour l'office de l'Eglise.
On lui attribue quatre Epilres , que Ba-
ronius croit supposées. L'Eglise honore sa
fêle le 28 juin, jour auquel il fut enterré.
LÉON III , romain , monta sur la chaire
de saint Pierre après Adrien l", le 26 dé-
cembre 795. Une de ses premières dé-
marches fut d'envoyer à Charlemagne des
légats chargés de lui présenter les clefs
de la basilique de Saint-Pierre et l'éten-
dard de la viUe de Rome , en le priant de
députer un seigneur pour recevoir le
serment de fidélité des Romains. Il se
forma, peu de temps après, une conju-
ration contre Léon. Elle éclata le 23 avril
799 , le jour de saint Marc. Le primicier
Pascal , et Campule, sacellaire , ou sacris-
tain , tous deux neveux du dernier pape,
à qui ils n'avaient pu succéder , étaient à
la tête. Après avoir assailli le pontife avec
une troupe de scélérats , tandis qu'il sor-
tait à cheval du palais de Latran pour se
rendre à la procession des grandes lita-
nies , ils le jetèrent par terre , le maltrai-
tèrent avec fureur , et firent tous leurs
efforts pour lui arracher la langue et les
yeux. De la rue il fut traîné au monas-
tère de ^Saint-Silveslre, où ils réitérèrent
leurs cruautés, pour s'assurer que jamais
il ne ferait usage de la vue ni de la pa-
role. Il ne perdit néanmoins ni l'un ni
l'autre ; ce que les auteurs et les plus
grands personnages du temps regardèrent
comme un miracle. Dans la nuit, on vint à
son secours. Albin, son camérier , et quel-
ques gens l'enlevèrent du monastère , le
firent descendre par la muraille de la ville,
et le conduisirent en France auprès de
Charlemagne. Ce monarque lui donna une
escorte pour retourner en Italie. Il rentra
à Rome comme en triomphe, au milieu de
tous les ordres de la ville , qui vinrent au
devant de lui avec des bannières. Charle-
magne passa en Italie l'an 800, le pape
l'y couronna empereur d'Occident le jour
de Noël de la même année , et obtint de
lui la grâce de Pascal et de Campule ,
que ce prince avait condamnés à mort.
Les ennemis de Léon ayant de nouveau
conspiré contre lui après la mort de Char-
lemagne , il en fit péiir plusieurs par le
dernier supplice , en 815. 11 mourut le 11
juin 816, regardé comme un pontife poU-
tique. On a de lui treize Epltres^ Helms-
tadl, 1G55, in-4°. On lui attribue mal à
propos VEnchiridion Leonis papoe ^ petit
livre de prières contenant les sept psau-
mes et diverses oraisons énigmatiques ,
dont les alchimistes font cas , et que les
curieux recherchent par cette raison. Il
a été imprimé à Lyon en 1601 et 1607,
in-24 , et à Mayence en 1623. Mais l'édi-
tion recherchée est celle de Rome, en 1525
in-24 ; et la meilleure après celle-là est
celle de Lyon, en 1584, aussi in-24.
LÉON IV ( saint) , romain , pape élu le
12 avril 847 , après Sergius II , mourut
saintement, le 17 juillet 855. Il illustra le
pontificat par son courage et par ses ver-
tus. Il eut la douleur de voir les Sarra-
sins aux portes de Rome , prêts à faire
une bourgade mahomélane de la capitale
du christianisme. Les empereurs d'Orient
et ceux d'Occident semblaient l'avoir
abandonnée. Léon IV, plus grand homme
qu'eux, prit dans ce danger l'autorité
d'un souverain , d'un père qui défendîmes
cnfans. Il employa les richesses de l'E-
glise à réparer les murailles, à élever dts
LEO 407
tonrs, à tendre des chaînes sur le Tibre.
Il arma les milices à ses dépens ; il en-
gagea les habitans de Naples et de Gaëte
à venir défendre les côles et le port d'Oslie ;
11 visita lui-même tous les postes, et reçut
les Sarrasins à leur descente , non pas en
écpiipage de guerrier, mais comme un
pontife qui exhortait un peuple chrétien,
et comme un roi qui veillait à la sûreté
de ses sujets. Il était né romain. « Le cou-
» rage des premiers âges de la république
» (dit l'auteur de V Histoire générale) re-
» vivait en lui dans un temps de lâcheté
» et de corruption, n Son courage et ses
soins furent secondes. On reçut les Sarra-
sins courageusement à leur descente ; et
la tempête ayant dissipé la moitié de leurs
vaisseaux, une partie de ces conquérans,
échappés au naufrage, furent mis à la
chaîne. Le pape rendit sa victoire utile ,
en faisant travailler aux fortifications de
Rome et à ses embellissemens les mêmes
mains qui devaient la détruire. Il enferma
ensuite d'une bonne muraille tout le mont
Vatican, où il se forma un nouveau quar-
tier, ou une nouvelle ville, qui prit le nom
de Cité Léonine. Il s'appliqua fortement
6 la réformation des mœurs et au réta-
blissement de la discipline ecclésiastique,
tint à ce sujet un concile à Rome en 833 ,
et, pour faire un exemple, déposa Anas-
tase, cardinal - prêtre de Saint-Marcel,
pour n'avoir pas résidé dans sa paroisse.
C'est le même Anastase qui disputa la pa-
pauté à Benoît III. Nous avons de Léon
iV une Homélie adressée aux évêques et
aux pasteurs sur leurs devoirs. Elle a été
publiée par le P. Labbe , et se trouve dans
le Pontifical romain. Cinq jours après sa
mort , Benoît III fut élu pape : ce qui dé-
truit l'opinion fabuleuse de ceux qui ont
p'.acé le pontificat prétendu de la papesse
Jeanne entre ces deux pontifes. Voyez
BENOIT III et Jean VII.
LÉOISi V , natif d'Andréa , succéda au
pape Benoît IV en 903. Il fut chassé et mis
en prison environ un mois après par
Christophe , qui s'empara de son siège.
Léon y mourut de chagrin le 6 décembre
de la même année.
LÉON VI , romain , succéda au pape
Jean X , le 6 juillet 928 , et mourut au
commencement de février 929. Quelques-
uns prétendent que c'était un intrus^
placé sur le saint Siège par les ennemis de
Jean X. Etienne VII fut son successeur.
LÉOIV VII , romain , fut élu pape après
la mort de Jean XI , en 936 , et n'accepta
cette dignité que njalgré lui. Il fit paraître
LEO
beaucoup de zèle et de piété dans sa con-
duite, et mourut en 959. Il est appelé Léon
VI dans plusieurs catalogues.il eut Etienne
VIII pour successeur. On a de lui une
Lettre à Hugo , abbé de Tours , insérée
dans le Spicilége de dom d'Achery. Elle
est une preuve de son zèle pour la disci-
pline monastique.
LÉON VIII fut élu pape après la dé-
position de Jean XII , le 6 décembre 963,
parTautorité de l'empereur Othon. Fleury
en parle comme d'un pape légitime ; mais
Baronius et le père Pagi le traitent d'm-
trus et d'antipape. Au reste , ce fut la
grande probité de Léon qui détermina
les suffrages en sa faveur ; et quoique pen-
dant la vie de Jean XII on n'ait pu le re-
garder comme canoniquement élu , rien
n'empêche qu'il ne puisse être considéré
comme pape légitime après la mort de ce
pontife, surtout lorsque Benoît V, qui
avait été élu pour succéder à Jean XII ,
eut, pour finir le scandale , acquiescé à
sa propre déposition, quoique injuste.
Enfin , en le plaçant dans le catalogue des
papes légitimes , on ne fait que suivre
tous les anciens qui lui ont accordé cet
honneur. Il mourut au inois d'avril 965 ;
et le 5 juillet de cette année , Jean XIII
fut élu pape après la mort de ces deux
pontifes.
LÉON IX ( saint ) , appelé auparavant
Brunon , fils du comte Egisheim , né en
Alsace le 21 juin 1002, passa du siège de
Toul à celui de Rome le 11 février 10i9,
par le crédit de l'empereur Henri III , son
cousin , qui le fit élire à Worms par les
évêques , les grands de l'empire et les lé-
gats de l'église romaine. Elevé au pontifi-
cat malgré lui, il partit pour Rome en habit
de pèlerin , et ne prit celui de souverain
pontife que lorsque les acclamations de joie
du peuple romain l'eurent déterminé à
accepter la tiare. Le nouveau pontife as-
sembla des conciles en Italie , en France,
en Allemagne , soit pour remédier au
mal, soit pour introduire le bien. En 1050,
il tint à Rome un concile où les erreurs
de Bérenger sur l'eucharistie furent con-
damnées. La simonie et le concubinage
étaient alors les deux plus cruels fléaux
de l'Eglise ; mais la vigilance sévère avec
laquelle les souverains pontifes les repous-
sèrent prouve assez que le mal n'était ni
général , ni toléré. Léon IX porta un dé-
cret , dans un concile tenu à Rome en 1051 ,
où il était dit, que « les femmes qui, dans
» l'enceinte des murs de Rome, se se-
n raient abandonnées à des prêtres , se-
LEO
408
LEO
• raient h l'avenir adjugées au palais de
» Latran comme esclaves. » C'est sous son
pontificat que le schisme des Grecs , dont
Pholius avait jeté les premiers fondemens,
éclata par les écrits de Michel Cerularius,
patriarche Constantinople. Léon réfuta
solidement ces écrits, et fit une belle
apologie de la discipline observée parmi
les Latins. En 1053 , il se rendit en Alle-
magne pour demander du secours contre
les Normands, et en obtint. Ayant armé
contre ces guerriers, il fut battu et pris
près de Bénévént, qui , sous son pontifi-
cat, avait été donné au saint Siège par
l'empereur Henri IlL Après un an de
prison , il fut conduit à Rome par ses vain-
queurs, et mourut le 19 avril 1054. Il avait
passé le temps de sa captivité dans les
exercices de la pénitence. L'archidiacre
Wibert a écrit en latin sa Vie , que le père
Sirmond a mise au jour , Paris, 1615 , in-
8°, et qui se trouve dans le Thésaurus
Anecdotorum de dom Martène. On a de ce
saint pontife des Sermons dans les Œuvres
de saint Léon , des Epitres décrétales
dans les conciles du père Labbe , et une
Vie de saint Hidulphe j dans le Thés,
anecdot. de dom Martène.
LÉON X ( Jean et non Julien de MÉ-
DICIS ) , fils de Laurent de Médicis , na-
quit à Florence le 11 décembre 1475. Il fut
créé cardinal à 13 ans, par Innocent VIII,
et devint dans la suite légat de Jules II. Il
exerçait cette dignité à la bataille de Ra-
venne, gagnée par les Français en 1512,
et il y fut fait prisonnier. Les soldats qui
l'avaient pris , charmés de sa bonne mine
et de son éloquence , lui demandèrent
humblement pardon d'avoir osé l'arrêter.
Après la mort de Jules II , il obtint la
tiare , le 5 mars 1513. Léon X fit son en-
trée à Rome le 11 avril, le même jour
qu'il avait été fait prisonnier l'année pré-
cédente , et monté sur le même cheval.
Ce pontife avait -reçu l'éducation la plus
brillante : Ange Politicn et Démétrius
Chalcondyle avaient été ses maîtres. Sa
famille était celle des beaux-arts ; elle re-
cueillit les débris des lettres chassées de
Constantinople par la barbarie turque , et
mérita que ce siècle s'appelât le siècle des
Médicis. Léon X joignait au goût le plus
fin la magnificence la plus recherchée. Le
nouveau pontife vécut , si on en croit
quelques auteurs, en prince voluptueux ;
mais Paul Jove , qui d'ailleurs ne lui est
pas favorable , en condamnant ses dé-
penses excessives et ses profusions , rend
le plus beau témoignage à la pureté de
ses mœurs. Dans le sein de la magnifia
cence et des plaisirs fastueux , Léon X
n'oublia pas les intérêts du pontificat. Il
termina les différends que Jules II avait
eus avec Louis XII, et conclut en 1517 le
concile de Lalran. Il choisit ses secrétaires
parmi les plus beaux esprits de l'Italie.
Le style barbare de la daterie fut aboli
et fit place à l'éloquence douce et pure des
cardinaux Bcmboet Sadolet. Il fit fouiUer
dans les bibliothèques , déterra les anciens
manuscrits, et ne ménagea aucune dé-
pense pour se les procurer ; il acheta 500
sequins ( 5,500 fr. ) un seul exemplaire
des cinq premiers livres de Tacite , qui
furent trouvés dans l'abbaye de Corwey,
en Westphalie ; il se procura des éditions
exactes des meilleurs auteurs de l'anti-
quité. Les poètes étaient surtout les objets
de sa complaisance ; il aimait les vers , et
en faisait de très jolis. Dans le temps
qu'il préparait aux hommes des plaisirs
purs, en faisant renaître les beaux-arts,
il se forma une conspiration contre sa vie.
Les cardinaux Petrucci et Soli , irrités de
ce que ce pape avait ôté le duché d'Ur-
bain à un neveu de Jules II , corrompi-
rent un chirurgien qui devait panser un
ulcère secret du pape ; et la mort de Léon
X devait être le signal d'une révolution
dans beaucoup de villes de l'état ecclé-
siastique. La conspiration fut découverte ;
il en coûta la vie à plus d'un coupable. Les
deux cardinaux furent appliqués à la ques-
tion et condamnés à la mort. On pendit
le cardinal Petrucci dans la prison en 1517;
l'autre racheta sa vie par ses trésors. Léon
X, pour faire oublier le supplice d'un car-
dinal mort par la corde , en créa 51 nou-
veaux. 11 méditait depuis quelque temps
deux grands projets : l'un était d'armer
les princes chrétiens contre les Turcs,
devenus plus formidables que jamais sous
le sultan Sélim II ; l'autre d'embellir Rome
et d'achever la basilique de Saint-Pierre
commencée par Jules II, le plus beau mo-
nument qu'aient jamais élevé les hommes.
Iliit publier en 1518 des indulgences plé-
nières dans toute la chrétienté , pour con-
tribuer à l'exécution de ces deux projets.
Il s'éleva à cette occasion une vive que-
relle en Allemagne , entre les dominicains
et les auguslins. Ceux-ci avaient toujours
été en possession de la prédication des
indulgences; ils virent avec peine la pré-
férence donnée aux dominicains. Luther
se fit l'organe de leur mécontentement.
C'était un moine ardent , infecté des er-
reurs de Jean Huss. {Voyez LUTHER. )
LEO
409
LEO
ses prédications et ses livres enlevèrent
des peuples entiers à l'Eglise romaine,
Léon X tenta Tainement de ramener l'hé-
résiarque par la douceur ; il fut enfin forcé
de l'anathématiser par deux bulles consé-
cutives , l'une en 1520, l'autre en 1521.
Le feu de la guerre s'alluma vers le même
temps dans toute l'Europe. François 1" et
Charles-Quint recherchant l'alliance de
Léon X, ce pontife flotta lon^j-temps entre
ces deux princes; il fit presque à la fois
un traité avec l'un et avec l'autre; en 1520
avec François l'', auquel il promit le
royaume de Naples, en se réservant Gaëîe;
et en 1521 avec Charles-Quint, pourchas-
ser les Français de l'Italie , et pour livrer
le Milanais à François Sforce , fils puîné
de Louis le Maure , et surtout pour donner
au saint Siège Ferrare, qu'on voulait tou-
jours ôter à la maison d'Est. On a ridicu-
lement prétendu que les malheurs de la
France dans cette guerre lui causèrent
tant de plaisir qu'il fut saisi d'une fièvre
dont il mourut le 1"" décembre 1521 , à 46
ans moins dix jours. Mais il parait plus
probable que le poison termina sa vie. Son
talent était de manier les esprits ; il s'em-
para si bien de celui de François 1"^ dans
une entrevue qu'ils eurent à Bologne en
1515, que ce prince consentit à l'abolition
de la Pragmatique. {Voy. FRANÇOIS 1". )
Le goût du luxe , goût plus convenable à
un prince qu'à un pontife , les moyens
qu'il employa pour élever sa famille , son
humeur vindicative , ternirent l'éclat de
ses bonnes qualités, et celui que les beaux
arts avaient répandu sur son pontificat.
II ne faut pas croire cependant tous les
bruits répandus sur Léon X par les pro-
testans , qui l'ont peint comme un athée
qui se moquait de Dieu ^des hommes.
Ces bruits scandaleux ne sont fondés que
sur de prétendues anecdotes , et sur des
propos qu'il est impossible qu'il ait tenus.
On sent assez que ces sectaires ont dû se
déchaîner contre le pontife qui avait lan-
cé la première excommunication sur le
patriarche et ses adhérens. Un auteur
moderne , calviniste anglican , rend à
Léon X plus de justice que ses coreligion-
naires. Voici comment il le juge après
avoir balancé les opinions etlesjugemens
divers des historiens. « Il nous reste les
» témoignages les plus satisfaisans sur la
9 pureté de mœurs qui distingua ce pape
• tant dans sa première jeunesse que lors-
• qu'il parvint au souverain pontificat ;
» et l'exemple de chasteté et de décence
» qu'il a donne est d'autant plus remar-
7.
» quable qu'il était plus rare dans le sièciâ
» où il a vécu. » « Le gouvernement d«
B Léon X, dit un écrivain judicieux, est
» le tableau d'un siècle entier, auquel il
» a eu la gloire d'imposer son nom. » Non
seulement ce siècle fut celui des grands
hommes , mais des femmes aussi s'y dis-
tinguèrent, telles que Constance d'Avalos,
Tullie d'Aragon , Laure Baltiua, Victoire
Colonne , Véronique Gambara , Gaspara
Stampra. Léon X ne dédaignait pas
d'admettre à sa table les beaux esprits do
son époque. C'était son délassement après
les soins assidus qu'il donnait à ses étals.
Protecteur éclairé des lettres, il avait
choisi ses secrétaires parmi les bons écri-
vains de l'époque. Il rétablit le gymnase
de l'université de Rome , et lui rendit ses
revenus, employés depuis long-temps à
d'autres usages ; des professeurs y furent
appelés de toutes parts pour y enseigner
la théologie, le droit canon , le droit civil,
la philosophie morale , la rhétorique , la
logique, les iTiathématiques, la médecine,
la langue grecque , etc. On ne connaît do
ce prélat qu'une jo/èci? de vers latins, com-
posée pendant son cardinalat , sur une
statue de Cléopàtre qu'on venait de dé-
couvrir. On peut consulter V Histoire de
Léon X \}B.TWi\\. Roscoë, Londres, 1805,
k vol. in-i", traduite en français parP.-F.
Henry, Paris , 1808 , 4 vol. in-8°.
LÉOîV XI ( Alexandre-Octavien , de
la maison des Médicis, cardinal de Flo-
rence), fut élu pape le l" avril 1605 , et
mourut le 27 du même mois , à 70 ans ,
infiniment regretté. Ses vertus et ses lu-
mières présageaient aux Romains et à
l'Eglise un règne glorieux.
LÉON (Pierre de), antipape. Foyez
INNOCENT II.
*LÉON XII (le cardinal Anwibal délia
GENGA), né le 2 août 1760 , dans la terre
de ce nom, ancien fief de sa maison, situé
dans le diocèse de Spolette, fut promu par
Pie VI à l'archevêché deTyr {in partibus).
en 1793 , et envoyé nonce à Cologne ; plus
tard , Pie VII lui confia la mission impor-
tante de nonce extraordinaire à la diète de
Ratisbonne , pour pourvoir aux besoiûs
des églises d'Allemagne , après les sécula-
risations et les envahissemens de 1803. Il
eut à ce sujet plusieurs conférences à Ra-
tisbonne en 1804, et il y déploya beau-
coup de zèle et de talent, mais il ne put
triompher de la difficulté des circonstan-
ces ; au bout de quelques années , il se
vit obligé de quitter l'Allemagne et de re-
tourner en Italie. Délia Genga y fut témoin
55
LEO
MO
LEO
de la persécution suscitée par Napoléon
contre Pie VII, et après que ce pontife eut
été arraché de sa capitale, il se relira dans
sa famille. Le pape , en rentrant dans ses
états, en ISli, le nomma nonce extraor-
dinaire à la cour de France , et le chargea
de complimenter Louis XYIII sur son re-
tour. L'archevêque de Tyr reviht à Rome
sur la fin de la même année , et fut le
premier cardinal nommé dans la nom-
breuse promotion du 8 mars 1816. Il suc-
céda , en 1820 , au cardinal Lilta dans les
fonctions de cardinal-vicaire de sa Sain-
telé , et était de plus préfet des congréga-
tions de la résidence des évêques, des
immunités ecclésiastiques , et du spirituel
du collège et séminaire romain, lorsqu'il
fut élu pape après la mort de Pie VII le
27 septembre 1823; alors il prit le nom de
Léon XII. Son couronnement eut lieu le
5 octobre. Il s'occupa d'abord du soula-
gement des pauvres et remit en vigueur
une ancienne coutume introduite par
saint Grégoire le Grand, qui voulait que
tous les jours douze pauvres trouvassent
è dîner dans son palais. Léon s'occupa
aussi des besoins de l'Eglise, et s'empressa
de pourvoir aux évêchés vacans. Le 5
février 1829, il commença à ressentir les
atteintes de la maladie qui devait l'em-
porter : il rendit le dernier soupir le 10 du
même mois , vers les 10 heures du matin ,
après unelongue et tranquille agonie. Léon
XII excita le zèle des fidèles pour la recon-
struction de l'église de St-Paul ; délivra les
environs de Rome des malfaiteurs qui les
infestaient; embellit Rome, encouragea
les sciences et les arts , enrichit la biblio-
thèque du Vatican et les musées , donna
des soins particuliers à l'instruction et
aux études , fit des règlemens très sages
sur l'administration publique, la justice
et le commerce, favorisa les établissemens
do charité et remplit tous les devoirs de
pontife , de prince et de père commun. Il
aidait de ses conseils tous ceux qui avaient
en lui quelque confiance. L'élection de
Léon XII , dit le Mémorial catholique de
mars 1829 , avait été une marque de la
protection divine sur l'Eglise. Les plus
touchante» vertus s'alliaient en lui à la
prudence et à la fermeté, si nécessaires
aujourd'hui. Ses hautes lumières égalaient
sou zèle. 11 connaissait les besoins du
siècle , et méditait , dans sa sagesse , les
grands devoirs que le nouvel état du
•nonde prépare à la souveraineté spiri-
tuelle. Qu(jique la courte durée de son
poaliflrai ne lui ait pas permis de dé-
ployer ses salutaires desseins, entourés
d'ailleurs d'obstacles de tout genre , quel-
ques-uns de ses actes font connaître
quelles étaient ses vues. Il croyait que,
sans changemens brusques et violens,
l'autorité spirituelle devait tendre à se
dégager des Uens politiques, et à exercer,
avec une pleine liberté, là puissance qui
lui appartient. C'est ce que montre sa
conduite à l'égard des républiques de
l'Amérique méridionale. Au lieu de subor-
donner à des considérations d'un ordre
inférieur les intérêts de la religion, il s'é-
leva au-dessus des questions agitées par
la diplomatie, et remplit avec indépen-
dance le premier devoir d'un pape , ce-
lui de pourvoir en tout état de choses, à
la perpétuité du ministère pastoral. Le
même Mémorial nous apprend que les
derniers jours de la vie de ce pontife ont
été attristés par l'abus que l'on a fait en
France de la lettre écrite par le ministre
secrétaire-d'état du gouvernement pon-
tifical au sujet des ordonnances relatives
aux séminaires ; mais que la vérité n'a
pas tardé à percer à travers toutes les in-
trigues, et il cite un passage de la réponse
du pape , qui prouve que ce pontife n'a
pas approuvé une circulaire, rédigée par
quelques évêques , et adressée à M. Feu-
trier, laquelle reconnaissait au gouverne-
ment des droits de surveillance. Le pape
souligna ces mots , et y joignit les obser-
vations suivantes :<i. Cette note tombe sur
» cette expression qui , dans le sens si
» large qu'elle peut présenter ici , ne doit
» certainement pas être soufferte dans
» l'église du Christs et a été re jetée d'une
» voix unanime dans plus d'u7i concile.
» La même expression ne peut être ad-
D mise et employée maintenant par un il-
» lustre corps d'évêques ; car elle ne peu\
» l'être sans un grave scandale et au dé'
» triment de l'Eglise. » Nous terminerons
cet article en citant ce passage de la Quo'
tidienne du 19 février : o Léon XII a vécu
» orné de vertus et de science; c'était un
» des esprits les plus grands de son siècle;
» son caractère était doux et ferme , il sa-
» vait les hommes et les choses de son
» temps ; rien ne manquait à ce pontife
» pour gouverner l'Eglise de Dieu, de ma-
» nière à la faire sortir triomphante du
» milieu des tempêtes. L'Italie a béni la
» douceur de son sceptre , et le monde a
» admiré la prévoyance de son autorité ; il
» a calmé des irritations profondes et
» apaisé des haines furieuses. L'église de
> Belgique commençait i jouir de sa
LEO
&il
LEO
» sainte et souveraine intervention ; les
» états dissidens cédaient à l'ascendant de
» son génie ; l'Allemagne s'étonnait de
» voir plusieurs de ses grands princes
» passer sous l'autorité de la foi divine,
» dont il leur présentait le flambeau. De
» grandes conquêtes ont illustré son court
p pontificat. Le catholicisme s'étendait de
» toutes parts. L'Amérique, agitée parles
» usurpations , gardait l'antique lumière
» et le lien vénérable de la religion ; et
» pour mêler à ces sacrés devoirs du pon-
» tifîcat des bienfaits d'un ordre moins
» imposant , la culture des sciences et des
» beaux-arts donnait du charme à l'aus-
» tère dignité de son commandement.
» L'Italie présentait le doux exemple d'un
» peuple gouverné comme une famille ;
» l'autorité des patriarches se rendait vi-
» vante , et le monde pouvait savoir ce
» que c'est que le sceptre de la royauté,
» lorsqu'il est adouci par la religion et
» sanctifié parles vertus, i»
EMPEnEURS.
LÉON r% le Grand ou l'Jnct'gn^ empe-
reur d'Orient, monta sur le trône après
Marcien, l'an 457. On ne sait rien de sa
famille ; tout ce qu'on connaît de sa pa-
trie , c'est qu'il était de Thrace , et qu'il
fut d'abord simple soldat. Il s'avança ra-
pidement dans les grades de l'armée par
la faveur d'Aspar qui commandait en chef
les troupes de l'empire. Il était à la tête
d'un corps sous les murs de Selymbria ,
lorsqu'il fut proclamé empereur. Ce choix
fait par Aspar fut confirmé par le sénat,
et Léon reçut la couronne des mains d'A-
natole, patriarche de Conslanlinople : ce
qui ne s'était point encore pratiqué jus-
qu'alors. Il signala les commencemens
de son règne par la confirmation du con-
cile de Chalcédoine contre les eutychiensj
et parla paix qu'il rendit à l'empire, après
avoir remporté de grands avantages sur
les Barbares. La guerre avec les Vanda-
les s'élant rallumée , Léon marcha contre
eux , mais il ne fut pas heureux , ayant
été trahi par le général Aspar. Cet hom.me
ambitieux l'avait placé sur le trône, dans
l'espérance de régner sous son nom. Il
fut trompé , et dès lors il ne cessa de sus-
citer des ennemis à l'empereur. Léon fit
mourir ce perfide , avec toute sa famille,
en 471. Les Goths, pour venger la mort
d'Aspar, leur plus ferme appui dans l'em-
pire , ravagèrent pendant près de deux
ans les environs de Constantinople , et
firent la paix après divers succès. Léon
mourut en 474, loué par les uns , blàm^
par les autres. Son zèle pour la foi, la ré-
gularité de ses mœurs, lui méritèrent des
éloges. L'avarice obscurcit ces vertus ; il
ruina les provinces par des impôts oné-
reux , écouta les délateurs , et punit sou-
vent les innocens.
LÉON II, ou le Jeune ^û\a de Zenon dit
Vlsaurien^ et d'Ariane , fille de Léon I",
succéda à son aïeul en 474. Mais Zenon
régna d'abord sous le nom de son fils , et
se fit ensuite déclarer empereur au mois
de février de la même année. Le jeune
Léon mourut au mois de novembre sui-
vant , et Zenon demeura seul maître de
l'empire. Léon avait environ 16 ans, et
non pas 6 ; il avait ruiné sa santé par des
débaiiches qui hâtèrent sa mort.
LEOi\ III, l'Isaurien ^ empereur d'O-
rient , était originaire d'Isaurie. Ses pa-
rens vivaient du travail de leurs mains,
et étaient cordonniers. Léon s'enrôla dans
la milice comme simple soldat. Justinien
II l'incorpora ensuite dans ses gardes , et
Anastase II lui donna la place de général
des armées d'Orient, après diverses preu-
ves de valeur : c'était le poste qu'il occu-
pait lorsqu'il parvint a l'empire en 717.
Les Sarrasins , profitant des troubles de
rOrient, vinrent ravager la Thrace, et
assiéger Constantinople avec une flotte
de 80 voiles. Léon défendit vaillamment
cette ville, et brûla une partie des vais-
seaux ennemis par le moyen du feu gré-
geois. Ses succès l'enorgueillirent ; il
tyrannisa ses sujets, et voulut les forcer à
briser les images ; il chassa du siège de
Constantinople le patriarche Germain , et
mit à sa place Anastase , qui donna tout
pouvoir au prince sur l'église. Léon ,
ayant en vain répandu le sang pour faire
outrager les tableaux des saints , tâcha
d'entraîner dans son parti les gens de
lettres, chargés du soin de la bibliothèque.
N'ayant pu les gagner ni jjar promesses
ni par menaces , il les fit enfermer dans
la bibliothèque, entourée de bois sec et
de toutes sortes de matières combustibles,
et y fit mettre le feu. Des médailles , des
tableaux sans nombre , et plus de 50.000
volumes, furent consumés par cet inreii •
die. Le barbare fut excommunié par Gré-
goire II et par Grégoire III. (^oyez GRE-
GOIRE Il ). Il équipa une flotte pour se
venger du pape ; mais elle fit naufrage
dans la mer Adriatique, et le tyran mou-
rut peu de temps après, en 741, regardé
comme un fléau de la religion et de Ihu-
manité. Son règne fut de 24 ans. On a
LEO 412
quelques roédailles en or à l'effigie de
cet empereur : elles attestent l'anéantisse-
ment total des arts du dessin à celte
époque.
> LEOIM IV , surnommé Chazare . fils de
^Constantin Copronyme , naquit en 751, et
'succéda à son père en 775. C'était un
temps où les disputes des iconoclastes ou
briseurs d'images agitaient tout l'Orient.
Léon feignit d'abord de protéger les ca-
Itioliques ; mais ensuite il se moqua éga-
lement de ceux qui honoraient et de ceux
qui détruisaient les images. Son règne ne
{ut que de 5 ans , pendant lesquels il eut
Je bonheur de repousser les Sarrasins en
Asie. Il mourut en 780 , d'une maladijj
pestilentielle, dont il fut frappé, disent le^
historiens grecs, pour avoir osé porter
une couronne ornée de pierreries qu'il
avait enlevées à la grande église de Con-
stantinople. Il avait épousé la fameuse
Irène. Voyez ce nom.
LÉON V, V Arménien^ ainsi appelé parce
qu'il était originaire d'Arménie , né vers
la fin du 8' siècle, devint par son courage
général des troupes sous Nicéphore ; mais
ayant été accusé de trahison contre cet
empereur, il fut battu de verges, exilé , et
obligé de prendre l'habit monastique. Mi-
chel Rhangabé, devenu empereur, l'ayant
rappelé, lui donna le commandement de
l'armée ; mais, profitant de l'imprudence
et du malheur de son maître , il s'éleva à
sa place, et en fut jugé digne. Ce fut à la
noblesse de son extérieur, tout petit qu'il
était, à un air ferme et imposant, à une
voix de tonnerre, très utile dans un jour
de bataille, à l'hypocrisie même et à l'art
du déguisement, talent d'importance dans
h nation qu'il avait à gouverner, qu'il
dut les suffrages des gens de guerre. Les
troupes le proclamèrent empereur en 813,
après avoir destitué Michel dit le Bègue.
Il remporta l'année d'après une victoire
signalée sur les Bulgares , et fit avec eux,
en 817, une trêve de 50 ans. Ce qu'il y eut
de singulier dans ce traité , c'est que l'em-
pereur chrétien jura par les faux dieux
de l'observer; elle roi Bulgare, qui était
païen, appela à témoin de son serment ce
«lue le christianisme a de plus sacré. La
rruauté de Léon envers ses paren« et les
défenseurs du culte des images ternit sa
gloire et avança sa mort. Les conjurés
s'étaient déguisés en prêtres et en clercs,
et se rendirent à la chapelle du palais,
où Léon assistait habituellement aux ma-
tines. Ce prince fut massacré la nuit de
Noël, en 820, comme il entonnait une
LEO
antienne : le patriarche Nicéphore , qui
avait été persécuté et exilé par Léon , en
apprenant sa mort, s'écria...» La reli-
» gion est délivrée d'un grand ennemi ;
» mais l'état peçd un prince utile. » Ce
jugement a été confirmé par l'histoire.
LÉOÎV VI , le Sage et le Philosophe .
fils de Basile le Macédonien , monta après
lui sur le trône en 886. L'empire était ou-
vert à tous les Barbares : Léon voulut
dompter les Hongrois , les Bulgares , les
Sarrasins ; mais il ne réussit contre aucun
de ces peuples. Les Turcs , appelés à son
secours, passèrent en Bulgarie, mirent
tout à feu et à sang, enlevèrent des ri-
chesses immenses , et firent un nombre
prodigieux de prisonniers qu'ils vendirent
à Léon. En se servant des armes des
Turcs , Léon leur ouvrit le chemin de
Constantinople , et après en avoir été
les soutiens, ils en furent les destruc-
teurs. Il se montra meilleur politique en
chassant de son siège le patriarche Pho-
tius. Un des successeurs de cet homme
fameux, le patriarche Nicolas , excommu-
nia l'empereur, parce qu'il s'était marié
pour la quatrième fois ; ce que la disci-
pline de l'église grecque défendait. Il
trrmina cette affaire en faisant déposer
le patriarche. Léon mourut de la dyssen-
terie en 911, à l'âge de 16 ans. Il fut ap-
pelé le Sage et le Philosophe par des flat-
teurs qui distribuaient, comme aujour-
d'hui, la célébrité selon leurs intérêts.
« Ce prince, surnommé le Philosophe, je
I) ne sais pourquoi ( dit le traducteur des
» Jlvis de l'empereur Basile à Léon son
h fils et son collègue ), ne fut qu'un pé-
» dant sans vertus , qui fit des livres , se
» laissa battre par ses ennemis, et donna à
» ses sujets l'exemple d'un libertinage
» scandaleux. » Il se plaisait à composer
des Sermons, au lieu de s'occuper de la
défense de l'empire. Nous en avons 55
pour différentes fêtes dans la Bibliothè-
que des Pères. Combefis , Savil, Maffei et
Gretser en ont publié quelques-uns. L'é-
loquence de ce prince tenait beaucoup de
le déclamation. Il nous reste encore de
lui : I Opus BasilicoUj dans lequel on avait
rassemblé toutes les lois des empereurs
grecs. Les Basiliques ( Opus Basilicon)
avaient été compilés par Basile :ils furent
retouchés par les soins de Léon VI; ils
étaient en 60 livres , dont kl ont été pu-
blics en 1647 , par G.-A. Fabrot ; k autres
ont été pubUés depuis par Reiz , avec une
version latine de Ruhnkenius, sous ce litre:
Operis Basilici Fabroliani suppletnen
LEO
413
LEO
twn^ Leyde, 1765, in-fol. ] Novellce consti-
tutioiies^ au nombre de 113, avec des Epi-
tome, pour corriger plusieurs nouveautés
que Justinien avait introduites. Leuncla-
vius les a données à la fin de son abrégé
du Basilicon. Bâle , 1573. | Un Traité de
tactique, publié par Meursius, Leyde,
1612. C'est le plus intéressant de ses ou-
vrages. On y voit l'ordre des batailles de
îon temps, et la manière de combattre des
Hongrois et des Sarrasins. Ce livre , im-
portant pour la connaissance du Bas-Em-
pire , a été traduit en français par M. de
Maizeroy, Paris , 1771 , 2 vol. in-8°. On a
encore de cet empereur un Cantique sur
le jugement dernier^ traduit en latin par
Jacques Ponlarus ; 17 Prédictions sur le
sort de Constantinoplej publiées par Geor-
ge Codinus dans son ouvrage De impera-
toribus constantinopolitaniSj, Paris, 16S5,
et une lettre à Omar, pour prouver la
vérité de la religion chrétienne et l'im-
" piété de celle des Sarrasins ; on la trouve
dans les nouvelles éditions de la Biblio-
thèque des Pères. Léon VI avait la pré-
tention de prédire l'avenir, et il nous
reste de lui 17 Oracles obscurs , qui ne
trouvèrent de croyance que chez les
Grecs superstitieux. Rutgersius a publié
les 16 premiers avec une version latine,
et Leunclaviiis y a ajouté le 17' qui était
resté inédit. Les bibliothèques de Flo-
rence et du Vatican possèdent plusieurs
autres ouvrages manuscrits de Léon. L'on
trouve de lui 27 vers rétrogrades en grec,
dans les Excerpta grœc. rhet. , de Léo
Mlatius. Rome, 1641 , in-8° , p. 398.
LÉOÎV deBYZANCE. natif de cette ville,
3e forma à l'école de Platon. Ses talens
pour la politique et pour les affaires le
firent choisir par ses compatriotes dans
toutes les occasions importantes. Ils l'en-
voyèrent souvent vers les Athéniens, et
vers Philippe, roi de Macédoine, en qua-
lité d'ambassadeur. Ce monarque ambi-
tieux, désespérant de se rendre maître
de By/.ance tant que Léon serait à la tète
du gouvernement, fit parvenir aux Byzan-
tins une lettre supposée , par laquelle ce
philosophe promettait de lui livrer sa pa-
trie. Le peuple, sans examiner, court fu-
rieux à la maison de Léon , qui s'étrangla
pour échapper à la frénésie de la popu-
lace. Cet illustre infortuné laissa plusieurs
écrits d'histoire et de physique , mais ils
ne sont pas parvenus jusqu'à nous. Il
florissait vers l'an ôfJO avant J.-C.
LÉOIV ( saint ), évoque de Bayonne, et
j apôtre des Basques, était de Carcntan en
Basse -Normandie. Il fut chargé d'une
mission apostolique par le pape Etienne
V, pour le pays des Basques, tant en-deçà
qu'au-delà des Pyrénées ; mais pendant
qu'il exerçait son ministère , il fut mar-
tyrisé vers l'an 900 par les idolâtres du
pays.
LEON le Grammairien, qai vivait dans
le IS"^ siècle, composa une Chronique de
Constantinople, sous le titre de Chrono-
graphia res à récent, imperator. gestas
complectens : elle comprend l'histoire des
empereurs depuis 813 jusques à 929, c'est-
à-dire , depuis Léon l'Arménien jusqu'à
Constantin VIL Elle est jointe à la Chro-
nique de saint Théophane , imprimée au
Louvre en 1655, in-fol , et fait partie de
la Byzantine ; elle a été traduite en la-
lin par Jacques Goar et en français par
Cousin.
LÉ0Xd'0RVIÈTE(Z(70 Urbevetanus),
natif de cette ville, dominicain suivant les
uns, et franciscain suivant d'autres, laissa
deux Chroniques^ l'une des papes, qui
finit en 1314, et l'autre des empereurs ,
qu'il a terminée à l'an 1308. Jean Lami
les publia tputes deux en 1737 , en 2 vol.
in-S". Le style de Léon se sent de la bar-
barie de son siècle. Il adopte plusieurs
fables que la lumière de la critique a dis-
sipées. A ces défauts près > son ouvra^je
est iitile pour l'histoire de son temps.
LEON (Jean) , surnommé l'Africain.
habile géographe arabe du 16* siècle,
était natif de Grenade , et s'appelait pri-
mitivement Alkaçan-ebn Moha7nmedAl-
vazas Alfasi. Il fut élevé à Fez , suivit à
l'âge de 16 ans son oncle dans une ambas-
sade envoyée vers le roi deTombuth,
et ne revint qu'au bout de quatre ans.
Après avoir long-temps voyagé en Eu-
rope , en Asie et en Afrique , il fut pris
sur mer par des pirates. Il abjura le ma-
hométisme en 1513, sous le pape Léon X,
auquel les pirates en avaient faut présent.
Le pape l'avait fait instruire dans le ca-
tholicisme, et il lui donna des marque,
singulières de son estime. Léon apprit
le latin, l'italien, et ouvrit un Cours A&
langue arabe. Son disciple le plus cé-
lèbre fut le cardinal Antonini , ex -général
des Augustins. Il ne tarda guère à donner
des preuves d'une conversion peu sin-
cère. Il prit de nouveau le turban , et
mourut vers 1526. Nous avons de Jean
Léon les Vies des philosophes arabes,
que Hottinger fit imprimer en latin à Zu-
rich en 1664 , dans son Bibliothecarius
quadri-parCitus. On les a insérées aussi
3j.
LEO
AJA
LEO
dans le tome 13 de la Bibliothèque de
Fabricius , sur une copie que Cavalcanli
avait envoyée de Florence. Il composa en
arabe la Description de l'Afrique . qu'il
traduisit ensuite en italien. Elle est assez
curieuse et assez estimée ; il y traite prin-
cipalement des arbres, herbes et racines
de cette partie du monde. Jean Tempo-
ral la traduisit en français , et la fit im-
primer à Lyon en i556, en 2 vol. in-fol. ,
sous le titre de Historiale description de
T Afrique. Il y en a une mauvaise Tra-
ductionldXma par Florian. Louis Marmol,
qui ne cite jamais Léon , Ta copié presque
partout.
LÉON DE MODÈNE , célèbre rabbin de
Venise au 17' siècle , dont le véritable nom
était Juda Arié ^ est auteur d'une excel-
lente Histoire des rites et coutumes des
Juifs j en italien. La meilleure édition de
cet ouvrage est celle de Venise , en 1638.
Richard Simon a donné une traduction
française de ce livre, Paris , 1674 , in-12 ,
qui instruit en peu de mots des coutumes
des Juifs , et surtout des anciennes, aux-
quelles l'auteur s'attache plus qu'aux mo-
dernes. Le traducteur a enrichi sa version
de deux morceaux curieux , sur la secte
des Caraïtes. l'autre sur celle des Sama-
ritains d'aujourd'hui. On a encore de
Léon un Dictionnaire hébreu et italien ^
Venise , 1612 , in-4", 2* édition augmentée ,
Padçue , 1640.
LÉON ( Louis de ) , Aloysius Lcgio-
nensis. religieux augustin , professeur de
théologie à Salamanque , se rendit très
habile dans le grec et dans l'hébreu. Il
fat mis à l'inquisition pour avoir com-
menté d'une manière assez inconsidérée
le Cantique des cantiques. Il y donna des
exemples héroïques de patience et de
grandeur d'âme, et sortit de son cachot
ay bout de deux ans. On le rétablit dans
sa chaire et dans ses emplois. Il mourut
en 1591 , à 64 ans. Il avait le génie de la
poésie espagnole , et ses vers avaient de
la force et de la douceur ; mais il est plus
connu par ses livres théologiques. Son
pricipal ouvrage est un savant traité en
latin , intitulé : De utriusque Agni . tij-
pici et veri , immolationis legitimo tem-
pore. Le père Daniel a donné ce livre en
français, 1695, in-12, avec des réflexions.
L'original et la copie sont également cu-
rieux. Son Commentaire sur le Cantique
des cantiques parut à Venise en 1G04 ,
in-8°, en latin.
LÉON (PiEBRE CIEÇAde), voyageur
espagnol , passa en Amérique à l'âge de
15 ans, et s'y appliqua pendant 17 ans â
étudier les mœurs des habitans du pays.
Il composa Y Histoire du Pérou , et l'a-
cheva à Lima en 1550. La première partie
de cet ouvrage fut imprimée à Se ville
l'an 1555 , in-fol. , en espagnol ; et à Ve-
nise , en italien , in-8°, 1555 et 1557 :
elle est estimée des Espagnols, et elle
mérite de l'être.
LÉON ( dit l'Hébreu , ou JUDA le rab-
bin), fils aînéd'Isaac Abrabanel , célèbre
rabbin portugais ( voyez ABRABANEL),
né dans le royaume deCastille, suivitson
père qui se réfugia à Venise, après l'ex-
pulsion des Juifs par Ferdinand le Ca-
tholique. On a de lui trois Dialogues sur
l'amour^ Rome , 1555, traduit de l'italien
en français par Denys Sauvage et Pon-
tus de "Thiard : cet ouvrage a été sou-
vent imprimé in-S" et in-12 , dans le 16*
LÉON de SAINT-JEAN , carme , né à
Rennes l'an 1600, était appelé , avant son
entrée en religion , Jean Macé : il fut
élevé successivement presque à toutes
les charges de son ordre, dont il devint
provincial , et s'acquit l'estime de Léon XI ,
d'Alexandre VII , de plusieurs cardinaux,
et des grands hommes de son siècle. Il
prêcha devant Louis XIII et Louis XIV
avec applaudissement. Ami intime du car-
dinal de Richelieu , il recueillit les der-
niers soupirs de ce ministre. Il mourut
le 30 décembre 1671 , à Paris, après avoir
publié un très grand nombre d'ouvrages ;
les principaux sont : | P^ie de François
d'Amboise, Paris, 1634; | Fie de sainte
Madeleine de Pazzi, Paris, 1636, in-8° ;
I Histoire de la province des Carmes de
TourSj en latin , Paris, 1640, in-4° ; | Jour-
nal de ce qui s'est passé à la maladie et
à la mort du cardinal de Richelieu , Paris,
1642, in-4*; I plusieurs ouvrages ascé-
tiques ; et quelques-uns pour soutenir la
prétendue antiquité de son ordre; [ Stu-
dium sapicntiœ universalis . 3 vol. in-fol. :
le premier parut à Paris en 1657 ; il com-
prend les sciences profanes; les deux
autres ont été imprimés à Lyon , en 1664 ;
ils ont pour but la science de la religion :
on estime principalement ce qui regarde
la théolotjjie dogmatique. Le style de cet
ouvrage est pur et coulant. ] La Somme des
sermons parénétiqucs et panégyriques ,
k vol. in-fol. , Paris, 1671-75.
LÉON. Voyez LÉONTIUS.
LÉON de CASTRO Voyez CASTRO.
LÉONARD ( saint ), solitaire du Limou-
sin, mort vers le milieu du 6*^ siècle, a
LEO
ki\
LEO
donné 5on nom à la petite ville de SL-
Léonard-le-Noblet , à 5 lieues de Limoges.
Il avait été baptisé, dit-on, par saint
Rémi , qui , après l'avoir cliar^jé de prê-
cher la foi aux peuples , le présenta à la
cour de Clovis. Léonard demanda pour
toute faveur la permission de visiter les
prisonniers, et de délivrer ceux qui sem-
bleraient mériter leur grâce. Après s'être
acquitté de ce devoir, il revint dans sa
retraite. Le concours de néophytes qui
l'y suivirent fut si grand, qu'il donna
naissance à la petite ville de St-Léonard-
le-Noblel, à cinq lieues de Limoges. 'L'His-
toire de sa vie , écrite par un anonyme ,
est pleine de faussetés et de fables ab-
surdes : on estime celle de l'abbé Oroux,
imprimée à Paris, chez Barbou , en 1760,
et dans Baillet , au 6 novembre , jour où
l'Eglise honore sa mémoire.
LÉONARD de PISE {Leonardo Fibo-
nacci)j mathématicien, est le premier
qui fit connaître en Italie , au commen-
cement du 13* siècle, les chiffres arabes
et l'algèbre , et qui y enseigna la manière
d'en faire usage. On conserve à Florence,
dans la bibibliothèque de Magliabecchi,
un traité d'Arithmétique , en latin , inti-
tulé : Liber abaci^ compositus a Leo-
nardo filio Bonacci . Pisano^ in anno
1202. L'auteur y dit, dans la préface,
qu'étant à Bugie, ville d'Afrique, où son
père était facteur pour des marchands
pisans, il avait été initié dans la manière
de compter des Arabes, et que l'ayant
trouvée phis commode , et de beaucoup
préférable à celle qui était en usage en
Europe (en quoi il disait bien certaine-
ment vrai ), il avait entrepris ce Traité
pour la faire connaître en Italie. C'est de
là que les chiffres arabes et l'algèbre se
répandirent ensuite dans les autres pays
de l'Europe , à l'égard de laquelle Léo-
nard de Pise peut presque passer pour
inventeur , ayant enseigné le premier les
règles de celte science, et l'ayant même
perfectionnée. Il est encore auteur d'un
Traité d'arpentage ^ que l'on conserve
dans la même bibliothèque. Léonard pré-
K'nd que les chiffres arabes pourraient
bien nous venir plutôt des Grecs que des
Indiens.
LÉONARD MATTHEID'UDINE, domi-
nicain du 15' siècle , ainsi nommé du lieu
de sa naissance, enseigna, en 1428, la
théologie avec réputation , et fut l'un des
plus célèbres prédicateurs de son temps.
En 1435 il prêcha à Florence devant Eu-
gène IV ; puis il parut avec éclat à Ve-
nise, à Rome, à Milan, etc.» et devint suc-
cessivement prieur du couvent de St. -Do-
minique de Bologne, ensuite provincial de
toute la Lombardie. Il mourut vers l'an
1470. On a de lui un grand nombre de
Sermons latins , dont le mérite est très
médiocre ; mais , comme les éditions en
sont anciennes, quelques curieux les re-
cherchent. Les principaux sont : ceux De
sanctis, 1473, ceux du Carême , Quadra-
gesimale aureum^ Paris, 1478, in-fol. ; il
a laissé aussi un Tractatus mirabilis de
sanguine Christi^ iniriduo mortis effuso :
anfueritunitusDivinitatil Venise, 1627,
in-4°. Cette question théologique occu-
pait les écoles d'Italie , en 1465.
LÉOI^ARD. royez VINCI et MALES-
PEINES.
* LÉONARD (Nicoi.as-Germain), poète
pastoral , naquit à la Guadeloupe en 1744.
Etant venir fort jeune en France , il y fit
ses études avec honneur. Protégé par le
ministre Chauvelin, il embrassa la car-
rière diplomatique, et obtint, en 1772, la
place de chargé d'affaires à Liège. Quoique
Léonard fût d'un caractère mélancolique ,
il était ennemi du repos : fatigué de Liège
et de la diplomatie , il quitta cette ville et
les affaires, et revint à Paris. Tourmente
d'ennui , et ne se plaisant nulle part , il
retourna dans sa patrie ; il n'y resta pas,
et revint encore en France, croyant y
trouver aussi une tranquillité durable.
Il se trompa, tt bientôt après il allait
encore entreprendre le voyage de la
Guadeloupe, lorsqu'il succomba à une
maladie de langueur. Il mourut à Nantes,
le 26 janvier 1794, âgé de 50 ans. On a
de lui : | Le Temple de Gnids , imité de
Montesquieu , 1772 , in-8° ; ce fut sa pre-
mière production. Il en donna deux
autres éditons augmentées de | L'Jmour
vengé, i77c>, in-4''; 1775, in-8"; | Lettres
de deux amans de Lyon, 1773, 2 vol.
in-l2. Ce roman , traduit en amgîais et en
italien, eut beaucoup de vogue et un
grand nombre d'éditions ; il est du même
genre que l'ancienne et la nouvelle //é~
loïse, le Werther de Goethe (traduit ds
l'allemand) et les Lettres de Jacopo Or~
tis (trad. de l'italien ). Inférieur à ces
deux ouvrages, sous le rapport du style
et des autres qualités littéraires, la lecture
n'en est pas moins dangereuse pour la
jeunesse , en ce qu'elle y puise le délire
effréné des passions. ] La Nouvelle Clé-
mentine, ou Lettres d'Henriette de lier'
ville, 1774, in-13 et in-S": [Idylles et Poèmes
champêtres, 1775, ia-8°, Paris, 1782,
LEO
416
LEO
prnnd in-18. C'est le meilleur ouvrage de
Léonard; | Alexis, roman pastoral , où
les mœurs sont aussi simples que pures ;
I Lettres sur un voyage aux Antilles ,
1790. L'auteur y décrit avec exactitude
les sites de la Guadeloupe et les mœurs
de ses habitans. | Les saisons , poème
ïmilé de l'anglais de Thompson. Léonard,
lors de son retour en France , publia la
quatrième édition de ses ouvrages, Paris,
1787, 5 vol. in-8°. Son neveu, M. Cam-
penon , en a donné aussi une édition com-
plète, Paris, 1798, 3 vol. in-S".
LEOîVARDI (Jean), instituteur de la
congrégation des Clercs-Réguliers de la
Mère de Dieu, de Lucques, né à Décimo
en 1541 , érigea cette association en 1583.
II avait d'abord éludié la pharmacie à
Lucques ; il s'associa ensuite à un artisan
de celte ville qui consacrait le produit de
son travail au soulagement des pauvres
religieux et pèlerins. Au bout de dix ans
il commença ses études théologiques et
fut ordonné prêtre en 1571. Après avoir
ouvert des conférences , il engagea ses
plus assidus auditeurs à faire parSie de
sa congrégation. Le but de cet institut
est de consacrer une vie pauvre et labo-
rieuse à l'instruction de la jeunesse. Le
pieux instituteur essuya des contradic-
tions à Lucques ; mais il en fut dédommagé
par l'eslime du pape Clément VIII , et du
grand-duc de Toscane, Il mourut à Rome
en 1609, à soixante-neuf ans. On a de lui
quelques ouvrages peu connus, et il est
plus recommandable comme fondateur
que comme écrivain. Sa Fie a été dormée
en italien par Maracci , prêtre de sa con-
grégation, Venise, 1617, in-fol. On en
trouve un extrait dans VUist. des ordres
religieux du père Hélyot, tom. /j. ; une
autre Vie de Léonardi a été publiée par
le père Ch. Ant. Erra, Rome , 1759, in-8".
LEONCE, philosophe athénien , est prin-
cipalement célèbre parce qu'il dorma le
jour à Athénaïs, qui devint impératrice
d'Orient. Voyez EUDOXIE, femme de
Théodose le Jeune.
LÉONCE (saint), né à Nîmes en Lan-
guedoc, évéque de Fréjus en 361 , se fit
un nom par son savoir, et édifia par le
spectacle des plus éminentf s vertus. C'est
lui qui engagea saint Honorât , son ami ,
qui voulait mener la vie solitaire , à se
fixer dans son diocèse, et lui désigna l'île
de Lérins, où il bâtit le célèbre monastère
de ce nom. Cassien , fondateur de l'ab-
baye de Saint-Victor de Marseille . dédia
à saint LéQncc , vers l'an 423, le» dix pre-
miers livres de ses Conférences. Quelques
auteurs ont cru qu'elles furent dédiées à
un évèque nommé aussi Léonce, mais
autre que le saint dont nous parlons ; ce
sentiment n'est point appuyé sur des
preuves satisfaisantes. Saint Léonce mou-
rut , suivant la commune opinion , vers
450; mais Anthelmi, dans son ouvrage
De initiis Ecclesice Forojuliensis , parait
prouver solidement qu'il mourut vers
l'an 432 ou 433. On compte ce saint évéque
parmi ceux des Gaules auxquels les papes
Boniface et Céleslin écrivirent pour des
affaires importantes. La lettre du pre-
mier concernait les mesures à prendre
dans la cause de Maxime de Valence,
contre lequel on avait porté des plaintes
graves au saint Siège. Il s'agissait , dans
celle de Célestin, d'imposer silence aux
semi-pélagiens, qui attaquaient la doc-
trine de saint Augustin sur la grâce. On
a quelquefois donné à cet évéque le titre
de martyr, mais sans fondement.
LÉONCE le Scholastique , prêtre de
Constantinople dans le 6' siècle , a laissé
plusieurs livres d'histoire et de théologie ,
entre autres un Traité du concile de
Chalcédoine, qu'on trouve dans la Biblio-
thèque des Pères, et dans le quatrième
volume à.QS Anciennes leçons de Canisius,
in-4^
LÉONCE, Leontius, empereur d'Orient,
né dans le 7' siècle , d'une famille origi-
naire d'Isaurie, entra jeune dans la mi-
lice de l'Empire , et parvint aux premiers
grades. Il donna des preuves de son cou-
rage sous Justinien II. Le père de Justi-
nien ( Constantin Pogonat), fut son bien-
faiteur et l'avança dans la carrière des
armes ; il jouit même d'une grande faveur
dans les commenccmens de l'empire de
Justinien; mais cet empereur, prévenu i
ensuite contre lui par ses envieux , le tint]
trois ans dans une dure prison. Léonce,
ayant eu sa liberté , déposséda Justinien , !
et se mit sur son trône en 695. Il gouverna
l'empire jusqu'en 698, que Tibère Absi-
mare lui fit couper le nez et les oreilles,
et le confina dans un monastère. Justi-
nien , rétabli par le secours des Bulgares,
condamna Léonce à perdre la tête , ce qui
fut exécuté en 705. Le soin que cet usur-
pateur avait eu de conserver la vie à Jus-
tinien donne une idée assez avantageuse
de son humanité , et peut-être Justinien
l'eût-il traité avec plus de douceur s'il
avait pu le faire sans danger.
LEONICENUS (Nicolas), célèbre mé-
decin , né en 1428, à Lonigo, en latin Léo-
LEO
ki7
LEO
nicum. dans le Viceîilin,d'où lui est venu
son nom, professa, pendant plus de 60
ans la médecine à Ferrare avec beau-
coup de succès. C'est à lui qu'on doit la
première traduction latine des Œuvres
de Galien.Il parvint à un âge fort avancé,
et mourut en 1524, dans sa 96'" année,
emportant les regrets des savans et du
peuple. Paul Jove lui ayant demandé
par quel secret il avait conservé si long-
temps une mémoire sûre , des sens en-
tiers, un corps droit et une santé pleine
de vigueur, il lui répondit que c'était l'ef-
fet de l'innocence des mœurs, de la tran-
quillité d'esprit et de la frugalité: Plvi-
ilum ingenium jierpetiia vitœ innocentia,
salubre vero corpus hilari frugalitatis
prœsidio. facile luemur.{ Voij. HASECH,
TOSCHEL, ) Le duc et le sénat de Fer-
rare firent élever un monument à sa mé-
moire. Il ne s'attacha que très peu à la
pratique de la médecine, « Je rends , di-
» sait-il , plus de services au public que
» si je visitais les malades , puisque j'en-
» seigne ceux qui les guérissent. » On a
de lui plusieurs ouvrages. Les principaux
sont : 1 une Gj-ammairc latine ^ 1473,
in-4° ( 1 }; I une Traduction latine des Apho-
rismes d'Hippocrate ; | celle de plusieurs
Traités deGalien ; | un traité curieux : De
Plinii et plurixmi alioi'urn média, in me-
dicinaerroribus, Bàle, 1532, in-fol. , ou-
vrage rare ; I des versions italieiines de
l'Histoire de Dion et de celles de Procope;
1 une autre des Dialogues do Lucien ;
1 trois livres à' Histoires diverses . in-fol,
en latin. On les traduisit en italien, et cette
version parut à Venise , in-8° , en 1544 ;
I De morbo gallico liber ^ Eàle, 1536,
în-4°. On voit par ces différentes produc-
tions que Leonicenus, en cultivant la mé-
decine, n^'avait pas négligé la littérature et
l'étude de l'antiquité. Ses ouvrages furent
recueillis à Bàle, 1535, in-fol.
LEOMCUS THOM^US ( Nicolas ), sa-
vant philosophe vénitien et originaire
d'Albanie, étudia le grec à Florence, sous
Démélrius Chalcondyle. Il rétablit le goût
des belles-lettres à Padoue, où il expliqua
le texte grec d'Arislote. Il mourut en 1551
(i) 'NicoU» Leonicenu» n'est poinl auteur d'une
grammaire latine. L'abbé Ftller a confondu ici cet
écrivain avec Leonicenus (Omnibonus) , tjui a com-
posa Ici trois ouvrage» «uivans : | Liber de oi'o par-
lihus oralionis , Venise , i473 , in-4"; | Dr rersu 'ie-
reTco lihfr, ïMilan, 1473, in-4''î | Tractulus ad scan-
dcndum, in-4", imprime de 1470 à i48o. Ces troi»
ouvrages ont i.\r. réuni» sous ce titre : Grammalicet
rudimfnla, cum liheHo de nrie metricd, Vicence, i5o6.
à 75 ans. On a de lui une Traduction du
Commentaire de Proculus sur le Timée
de Platon, et d'autres F'ersions italiennes
et latines.
LÉOXIDAS l", roi des Lacédémoniens,
de la famille des Agides , s'acquit une
gloire immortelle en défendant, avec trois
cents hommes d'élite, le détroit desTher-
mopyles contre l'armée de Xerxès , roi
des Perses , dix mille fois , dit-on , plus
notnbreuse, l'an 480 avant Jésus-Christ.
Les Spartiates, accablés par le nombre,
périrent dans cette journée avec leur mo-
narque. Xerxès lui ayant demandé ses
armes, il ne lui répondit que ces mots :
f'^iens les prendre. Comme quelqu'un lui
rapporta que l'armée ennemie était si
nombreuse que le soleil serait obscurci
de la grêle de leurs traits : Taiit mieux,
dit Léonidas ; nous combatt7'ons à l'om-
bre. Lcouidas avait sept mille hommes
aux Thcrmopyles ; car son armée s'était
grossie en roule. Xerxès craignant ces
hommes déterminés à vaincre ou à mou-
rir, offrit à Léonidas la souveraineté de
toute la Grèce s'il voulait se ranger sous
ses drapeaux. Léonidas ayant repoussé
avec indignation cette offre , l'impérieux
Xerxès le lit attaquer deux fois, et deux
fois les Perses furent repoussés. Mais un
habitant delaTrachinie, appelé Ephialtes,
indiqua au roi im sentier par lequel il
pomrait entrer dans la Phocide sans pas-
ser par les Thermopyles. Léonidas apprit
cette trahison et se vit abandonné par la
plupart de ses soldats. Il ne resta qu'avec
trois cents Spartiates qui périrent les armes
à la main. Le barbare Xerxès fit attacher
à une potence le cadavre de ce héros. Le
vainqueur de Platée, Pausanias, fit trans-
porter, quarante ans après , les ossemens
de Léonidas à Lacédénjone. Les lettres et
les arts se sont exercés sur ce beau fait de
Léonidas. L'anglais Glover et M. de Fon-
tanes y ont puisé chacun le sujet d'un
poème épique : celui de M. de Fontau'-s
est resté inédit. David en a fait le per-
sonnage principalde son beau tableau des
Thermopyles^ et sa statue par Lemot est
un des ornemens de la galerie du Luxem-
bourg.
LÉONIDAS II, roi de Sparte, vers l'an
256 avant Jésus-Christ, fut chassé par
Cléombrote son gendre, et rétabli ensuite.
Il était petit-fils de Cléomène II, et suc-
cesseur d'Arée II,
LÉOIMÎV ou LEEW ( Elbert ou Ex-
GELBERT ) , de l'ilc de Bommel , dans lu
Gueldre , enseigna le droit à Louvain
LEO
U8
LEO
avec un succès extraordinaire. Il eut la
ronliance la plus intime du prince d'O-
range, qui l'employa beaucoup dans l'é-
tablissement des Provinces-Unies. Léonin
fut chancelier de Gueldre après le départ
de l'archiduc Mathias , en 4581 , et l'un
des ambassadeurs que les états envoyè-
rent à Henri III, roi de France. Cet ha-
bile politique mourut à Arnheim en 1598,
à 79 ans. Il ne fut point prolestant , et ne
voulut jamais prendre part aux desseins
des mécontens contre la religion catholi-
que. On a de lui plusieurs ouvrages, entre
autres : | Centuria conciliorum ^ Anvers,
1S84, in-fol. I Emendationum septem li-
hrij, Arnheim, 1610, in-4°. Les juriscon-
sultes se sont beaucoup servis autrefois
de ces deux productions.
LEONIUS, poète latin de Paris, célèbre
dans le 42* siècle par l'art de faire rimer
l'hémistiche de chaque vers avec la fin,
dont voici un exemple, dans un apologue
qui ne peint que trop bien les pénitences
tardives et forcées :
Dacmon langaebat , mon.ichu$ tune esse volebat.
Ast ubi coDvaluit , manslt ut aote fuit.
Voici comme ces deux vers ont été tra-
duits en français :
Iic'ctzebud Unguissaît trîjte et blême ;
Lort vers le froc il tourne tous ses voeux ;
Mais , revenu de cet e'tat piteux ,
Le fin matoii resta toujours le même.
ou bien
Le diable est-îl malade, il se fait solitaire ;
L'ir.nrmilc le quitte; il quitte aussi la haire.
En voici un autre sur la providence et la
justice de Dieu :
Vos malegaudetis , qnia tandem perclpîetis
Nequiti»! fructiim , lenebras, ioeendia , luctum ,
Nara pius indullor, justusque tamen Deus ullor,
Qua; tua sunt munit , qu£ sunt hostilia punit.
Il mit en vers de ce genre presque tout
l'ancien Testament. Ces vers , un peu
barbares , mais qui souvent exprimaient
d'utiles vérités, furent appelés ?(?onm5^
non parce que Léonins en fut l'inventeur,
mais parce qu'il y réussit mieux que les
autres. L'abbé Le Beuf a donné une Dis-
sertation pour détruire lopinion com-
mune qui fait Léonins chanoine de Saint-
Benoit de Paris; il prétend qu'il était
chanoine de Notre-Dame. Sa plus forte
preuve est que Léonins, dans une de ses
pièces, invite uii de ses amis à venir à la
fête des Fous (pieuse farce qui ne se fai-
sait alors que dans l'église de Paris ), pour
y déposer l'office de bâtonnier, et le trans-
mettre à un autre avec la nouvelle année.
Il parle de cet ami comme d'un de ses
confrères , et par conséquent ils étaient
l'un et l'autre chanoines de INotre-Dame.
Comme cette discussion n'est pas bien
importante, et que d'ailleurs les preuves
du savant dissertateur ne sont que des
conjectures , on ne s'y arrêtera pas da-
vantage.
LEOA'OR, évêque régionnaire en Bre-
tagne, au 6* siècle, était du pays de Galles.
Ses travaux apostoliques et ses vertus
l'ont fait mettre au nombre des saints.
LÉOXORE. Voyez ELÉONORE.
LEOrVTIUM , courtisane athénienne ,
philosopha et se prostitua toute sa vie •
Epicure fut son maître , et les disciples do
ce philosophe ses galans. Métrodore fut
celui qui eut le plus de part à ses faveurs ;
elle en eut un fils , qu'Epicure recom-
manda en mourant à ses exécuteurs tes-
tamentaires. Léontium soutint avec cha-
leur les dogmes de son maître , qui avait
été aussi son amant. ( Voyez EPICURE. )
Elle écrivit contre Théophraste avec plus
d'élégance que de solidité. Son style, sui-
vant Cicéron {De nat. Deor.^ lib. 4.),
était pur et attique. Léontium eut aussi
une fille nommée Danaé , héritière de la
lubricité de sa mère. Cette fiUe fut aimée
de Sophron , préfet d'Ephèse ; ayant fa-
vorisé l'évasion de son amart condamné
à mort , elle fut précipitée d'un rocher.
Elle fit éclater dans ses derniers momens
des sentimens extravagans et impies, tels
qu'on devait les attendre d'une prosti-
tuée , disciple d'Epicure.
LÉOIVTIUS-PILATUS, ou LÉON , dis-
ciple de Barlaam , moine de Calabre , est
regardé' comme le premier de ces savans
grecs à qui on est redevable de la renais-
sance des lettres et du bon goût en Eu-
rope. C'est lui aussi qui enseigna le pre-
mier le grec en Italie vers le milieu du
li* siècle : Pétrarque et Boccace furent
au rang de ses disciples. Il passa dans la
Grèce pour en rapporter des tuanuscrits ;
mais il fut tué d'un coup de tonnerre sur
la mer Adriatique , en retournant en Ita-
lie. Ce moine, très versé dans la littéra-
ture grecque, ne connaissait que médio-
crement la latine. Voyez sa Vie dans l'ou-
vrage de Humfroi Hody, De Grcecis il-
lustribus jin-8'*, Londres, 1742 ^
LÉOPARD ( Paul ), humaniste d'Isem-
bcrg, près de Fumes, aima mieux passer
sa vie dans un petit collège à Bergues-
Saint-Vinox, que d'accepter une chaire
de professeur royal en grec qu'on lui of-
frit à Paris. U mourut en 1567, à 57 ans.
LEO
419
LEO
On a de lui en latin des Remarques cri-
tiques ^ divisées en vingt livres. Les dix
premiers ont été imprimés à Anvers ,
1568, in-4°. Les dix derniers ont paru
pour la première fois en 1604 dans le 5"^
vol. du Fax artium de Gruter, On con-
vient généralement que ces Remarques
sont pleines de savoir, de bon sens et de
bon goût. Il a donné encore une Traduc-
tion assez- fidèle de quelques Vies de Plu-
tarque, Anvers, 1556, in-8°.^ — Il y a eu
encore de ce nom JÉnoaiE LÉOPARD, ou
plutôt Léopardi , poète florentin peu
connu.
LÉOPOLD (saint), fils de Léopold le
Bel, marquis d'Autriche, succéda à son
père en 1096. Sa vertu lui mérita le titre
iePieux. Pénétré des maximes de l'Evan-
[jile, dont il avait fait de bonne heure une
étude particulière , il sentit que la reU-
gion était la même pour les princes et
pour les particuliers; il mortifia ses pas-
sions, renonça aux plaisirs du monde,
nourrit son âme de la prière , pratiqua
toutes sortes de bonnes œuvres, et répan-
dit surtout des aumônes abondantes dans
le sein des malheureux. Les Autrichiens
étaient alors aussi grossiers que supersti-
tieux ; il travailla à adoucir leurs mœurs,
à les former aux œuvres et au véritable
esprit du christianisme. Ces entreprises
réussirent au-delà de ses espérances. Léo-
pold fil le bonheur de ses sujets, diminua
les impôts, traita avec une égale bonté le
pauvre et le riche , et fit rendre à tous
une justice très exacte. Sa valeur , égale
à sa piété, éclata sous l'empereur Henri
!V , et se soutint sous Henri V , qui lui
donna, en 1106 , Agnès sa sœur en ma-
riage. Après la mort de ce prince , il eut
plusieurs voix pour lui succéder à l'em-
pire ; mais Lothaire l'ayant emporté, Léo-
pold se fit un devoir de le reconnaître.
Après un règne glorieux, ce prince mou-
rut saintement en 1136 : il avait fondé
plusieurs monastères. Innocent VIII le
canonisa en 1485. Il avait eu d'Agnès 18
enfans, 8 garçons et 10 filles, qui se mon-
trèrent dignes de leurs illustres parens.
LÉOPOLD, duc d'Autriche, fit la guerre
aux Suisses , qui avaient secoué le joug
de sa maison : il fut vaincu et tué à la
bataille de Sempach , le 7 juillet 1586. On
conserve encore son armure dans l'arse-
nal de Luceme.
LÉOPOLD 1", empereur, second fils de
Ferdinand III et de Marie-Anne d'Espa-
gne, né le 9 juin 1640, roi de Hongrie en
1663 , roi de Bolième en 1656 , remplaça
son père sur le trône impérial en i6j8, à
l'âge de 18 ans. Un article de la capitula-
lion que les électeurs lui firent signer en
lui donnant la couronne impériale, fut
qu'il ne donnerait aucun secours à l'Es-
pagne contre la France dans les guerres
dltalie. Le jeune empereur , qui s'était
déjà signalé par sa valeur , dirigea ses
armes, mais sans de grands succès, contre
la Suède. Les Turcs menaçaient alors
l'empire. Ils battirent les troupes impé-
riales et ravagèrent la Moravie , parce
que l'empereur continuait de soutenir
le prince de Transylvanie , qui avait
cessé depuis six ans d'envoyer un tribut
annuel de 200,000 florins , que ses pré-
décesseurs avaient promis de payer à
l'empire ottoman. MontécucuUi , général
de Léopold, soutenu par un corps de 6,000
français choisis , sous les ordres de Coli-
gni et de la Feuillade , les défit à Saint-
Gothard en 1664 , après un combat san-
glant, où la victoire fut long-temps dou-
teuse. Les Turcs n'en furent guères affai-
blis, et firent une jjaix avantageuse; ils
retinrent leurs conquêtes, et on consentit
que le prince de "Transylvanie fût leur
tributaire. L'Allemagne et la Hongrie dés-
approuvèrent ce traité; mais le minis-
tère impérial avait ses vues. Les finances
étaient en mauvais état. On songeait à as-
sujettir absolument les Hongrois, et à ter-
miner les troubles qui s'élevaient sans
cesse dans ce royaume. La paix, ou plutôt
la trêve , fut conclue pour 20 années.
Bientôt après la Hongrie occupa les ar-
mes de l'empereur. Les seigneurs de ce
royaume voulaient à la fois défendre
leurs privilèges et recouvrer leur liberté ;
ils songèrent à se donner un roi de leur
nation. Ces complots coûtèrent la tête à
Sereni, à Frangipani, à Nadasli et à plu-
sieurs autres ; mais ces exécutions ne cal-
mèrent pas les troubles. Tékéli se mit à
la tête des mécontens , et fut fait prince
de Hongrie par les Turcs, moyennant un
tribut de 40,000 sequins. Cet usurpateur
appela les Ottomans dans l'empire. Ils
fondirent sur l'Autriche avec une armée
de 200,000 hommes , et mirent le siéger
devant Vienne en 1685. Cette place était
sur le point d'être prise , lorsque Jean
Sobieski accourut à son secours , tandis
que l'empereur se sauvait à Passau. Se-
condé de l'armée impériale sous la con-
duite du duc Charles de Lorraine , le roi
de Pologne attaqua les Turcs dans leurs
retranchemens et y pénétra. Une ten-cuc
panique saisit le grand-visir Mustapha ,
LEO
420
LEO
qui prîl la fuite et abandonna son camp
aux vainqueurs. Après celle défaile , les
Turcs furent presque toujours vaincus, el
les Impériaux reprirent toutes les villes
dont ils s'étaient emparés. Léopold regar-
dant les rebelles de Hongrie comme la
cause des maux qui avaient menacé l'em-
pire , ordonna qu'ils fussent punis avec
rigueur. On éleva dans la place publique
d'Eperies, en 1687, un échafaud, où l'on
immola les victimes qu'on crut les plus
nécessaires à la paix. Les principaux no-
bles hongrois furent convoqués; ils dé-
clarèrent au nom de la nation que la
couronne était héréditaire. Léopold eut
d'autres guerres à soutenir. Ce prince ,
qui ne combattait jamais que de son ca-
binet , ne cessa de s'opposer à l'humeur
conquérante de Louis XIV, premièrement
en 1671 , d'abord après l'invasion de la
Hollande, qu'il secoiu-ut contre le mo-
narque français ; ensuite , quelques an-
nées après la paix de Nimègue, en 1686,
lorsqu'il fit celte fameuse ligue d'Augs-
bourg , dont l'objet était d'accabler la
France et de chasser Jacques II du trône
d'Angleterre ; enfin en 1701 , à l'avéne-
ment du duc d'Anjou (Philippe V), petit-
fils de Louis XIV , à la couronne d'Espa-
gne , Léopold soutenait les prétentions
de son frère Charles (depuis Charles VI)
fils comme lui d'une infante espagnole.
Charles ne fut guères reconnu en Espa-
gne que par les Catalans, qui le proclamè-
rent sous le nom de Charles III. ( Vorjez
CHARLES VI. ) Léopold sut intéresser
l'empire germanique à toutes ces guerres,
et les faire déclarer ce qu'on appelle
guerres de l'empire. La première fut assez
malheureuse , et l'empereur reçut la loi
à la paix de Nimègue, en 1678. L'intérieur
de l'Allemagne ne fut pas saccage , mais
les frontières du côté du Rhin furent mal-
traitées. La fortune fut moins inégale
dans la 2"" guerre , produite par la ligue
d'Augsbourg, La 5' fut encore plus heu-
reuse pour Léopold. La mémorable ba-
taille dHochsledt, donnée en 1704 , chan-
gea tout , et ce prince mourut l'année
suivante le 6 mai, à 63 ans, avec l'idée
que la France serait bientôt accablée , et
que l'Alsace serait réunie à l'Allemagne ,
ce qui effectivement serait arrivé si on
avait profité de l'humiliation de la France
pour conclure à Gertruidenberg la paix
à laquelle elle était prête à souscrire. Ce
qui servit le mieux Léopold dans toutes
ces guerres , ce fut la grandeur de Louis
XIV, qui «'étant produite avec trop de
faste , irrita tous les souverains. L'empe-
reur allemand, plus doux et plus modeste,
lut moins craint, mais plus aiiné. Il avait
été destiné dès son enfance à l'état ecclé-
siastique, et son éducation avait été con-
forme à celle résolution prématurée : on
lui avait donné de la piété et du savoir;
mais on négligea de lui apprendre l'art
de gouverner. Il régna cependant avec
succès ; ses sujets furent heureux et l'ai-
mèrent comme leur père, tant la religion
a de ressources pour tenir lieu de toute
autre science. Ses ministres le gouver-
nèrent quelquefois, mais leur rôle était
difficile à soutenir : dès que le prince s'a-
percevait de sa subjectioujune prompte
disgrâce le vengeait d'un ministère im-
périeux. Cependant presque tous ses choix
furent heureux, et si le ministère de
Vienne commit des fautes pendant un
régne de 46 ans , il faut avouer qu'avec
une lenteur prudente il sut faire presque
tout ce qu'il voulut. On lui a reproché de
s'être ligué avec les ennemis de Jacques
II, et d'avoir par là détruit les espérances
que ce prince avait fait naître en Angle-
terre en faveur de la religion catholique ;
mais Jacques étant intimement lié avec
la France, ennemie de l'Espagne et de
l'Allemagne, il n'était pas au pouvoir de
Léopold de prendre des arrangemens dif-
férens. D'ailleurs Louis XIV fomentait
continuellement les mouvemens des Hon-
grois, et par là favorisait les Turcs, contre
lesquels l'empereur ne pouvait se flatter
d'avoir des succès durables, sans occuper
la France ailleurs. Léopold fut marié
trois fois, d'abord à Marguerite-Thérèse ,
fille de riiilippe IV, roi d'Espagne, et qui
mourut en couches ; ensuite à Claude-
Félicité d'Autriche , que la passion pour
la chasse conduisit au tombeau en 1676;
enfin à Eléonore- Madeleine -Thérèse,
princesse palatine de la branche de Neu-
bourg, qui survécut à son époux et mou-
rut en 1720. Elle avait traduit du français
en allemand un grand nombre d'ouvrages
ascétiques, entre autres le livre intitulé :
Réflexions pieuses pour tous les jours du
mois. On a la Vie de cette princesse cé-
lèbre par ses vertus. Les fils de Léopold
qu'il avait eus de cette dernière prin-
cesse , Joseph 1" et Charles VI , rempli-
rent successivement le trône impérial.
François Wagner, jésuite, a écrit l'histoire
de Léopold en latin. Vienne, 1719-1754,
deux volumes in-fol. ; elle est estin^ée.
LÉOPOLD II , grand-duc de Toscane
et empereur d'Allemagne , second fils de
LEO A
l'empereur François l" et de Marie-Thé-
rèse d'Autriche, naquit à Vienne le 5 mai
-174.7, tt succéda à son père dans le duché
de Toscane, en 1765. Il gouverna d'abord
cette province d'une manière paisible et
heureuse pour lui et pour les peuples ;
mais ayant adopté le système des philo-
sophistes, jansénistes, économistes, il
forma des projets qui mécontentèrent la
multitude. Le peuple se souleva à diffé-
rentes fois , surtout à Pistoic et à Prato.
M. Ricci , qui avait ces deux évêchés ,
ayant tenu un synode presbytérien en
1786, pour abolir la discipline actuelle de
l'Eglise universelle , et introduire des
nouveautés singulières, fut condamné au
concile de Florence en 1787 : mais le
grand-duc supprima les actes du concile,
et les fit ensuite paraître avec de pro-
lixes commentaires qui en combattaient
les décisions. L'empereur Joseph II étant
mort le 20 février 1790 , Léopold se ren-
,dit à Vienne pour prendre le gouverne-
ment de ses états : le mécontentement
des Toscans éclata alors d'une «lanière
terrible ; pour les apaiser, on leur accoi'da
le redressement de leurs griefs ; mais
bientôt ils furent sévèrement punis , et
plus de 600 furent condamnés aux ga-
lères. Son second fils , Ferdinand , ayant
été déclaré grand- duc en 1791 , chassa
l'évêque di? Pistoie , qui fut remplacé par
un prélat sage et orthodoxe , anéantit
toutes les opérations de son père, et ren-
dit le calme à la Toscane. Léopold , cou-
ronné empereur le 9 octobre 1790 , con-
clut, l'année suivante, la paix avec les
Turcs en rendant Belgrade et presque
toutes les places conquises. Il voulut pa-
cifier les Pays-Bas insurgés par suite des
innovations que Joseph II y avait faites.
Il offrit de les détruire, toutes ; mais les
deux partis aristocrate et démocrate,
conduits l'un par Vander-Noot et Van-
Espen, et le second par l'avocat Vorck et
le général Vander-Mergch , refusèrent de
se soumettre. Trente mille Autrichiens
entrèrent alors dans les Pays-Bas , qui
furent pacifiés au bout d'un an. Léopold
était, dit-on , sur le point de prendre un
parti quelconque dans les affaires de
France , lorsqu'il mourut à Vienne , le 2
mars 1792 , à l'âge de 44 ans , après trois
jours de maladie. Les hésitations qu'il
avait montrées jusqu'alors , et dont était
cause la crainte que lui avait inspirée son
ministre Kaunltz , de se voir enlever les
Pays-Bas par la France , ne laisse pas
c! oire qu'il eût poussé celte entreprise
7,
■n LEO
avec une grande activité. On est d'ail-
leurs persuadé qu'il approuvait la plu-
part des effets de la révolution française 5
mais il eût voulu les concilier avec l'au-
torité royale : comme si cette autorité
pouvait subsister quand ses fondemens
et sa sanction n'existent plus. Il avait
épousé , eu 1765 , Marie-Louise , infante
d'Espagne, dont il eut 16 princes et prin-
cesses. François, son fils aîné, lui succéda
dans ses étals héréditaires sous le nom da
François II ; mais ayant échangé depuis
ce litre d'empereur d'Allemagne contre
celui d'empereur d'Autriche, il fut appelé
François l". Mallet-du-Pan, qui, dans ses
notices historiques , met pour l'ordinaire
beaucoup de modération , et n'exagère ,
quand certains préjugés ne l'égarent pas ,
ni en louanges ni en blâme , parle ainsi
de Léopold II dans son Mercure français.
du 24 mars 1792 , pag. 218. « Ce monar-
» que, enlevé à l'Allemagne dans la force
» de l'âge et de l'expérience , gouverna
» vingt-chiq ans lo grand- duché de Tos-
» cane , où sa mémoire ne périra point.
» Quoique au milieu des innombrables
» ordonnances par lesquelles il adminis-
» tra ce petit état, on découvre un amoiv
» excessif du régime réglementaire , une
» attention exagérée à des détails fort au-
» dessous du souverain , un penchant à
» des innovations dont l'utilité n'a pas
» toujours été reconnue ; ses lois sur la
» détention des débiteurs , ses encourage-
» mens aux défricliemens, et plusieurs
» autres actes de son administration , mé-
» ritèrent à ce souverain des éloges qui
» allèrent jusqu'à l'enthousiasme, surtout
» en France, où les nouveautés quelcou-
» ques ont des admirateurs tout prêts. Ou
» lui a reproché une trop grande écono-
» raie, la passion de gouverner dans cha-
» que détail , une \igilance fatigante sur
» les actions même indifférentes du ci-
» toyen; des imitations peu heureuses de
» changemens qui offensaient non seule-
» ment les préjugés du peuple , mais en-
» core ses sentimens ; telles , par exem-
» pie, que cette ordonnance bientôt reti-
0 rée pour les sépultures communes. En-
» fin , on a paru craindre que l'habitude
» de gérer trop minutieusement les affaires
» d'un petit état, l'empereur ne l'appor-
» tàt dans l'administration d'une grande
» monarchie. »
LEOPOLD- GUILLAUME , archiduc
d'Autriche , évêque de Passau, de Stras-
bourg , etc. , grand-maître de l'ordre
teutonique et gouverneur des Pays-Bas ,
56
LEO
A22
LEO
fils de l'empereur Ferdinand II, com-
manda les armées autrichiennes contre
les Suédois et les Français , durant la
guerre de 30 ans , que sa maison soutint
pour le maintien de la religion catholique
en Allemagne. Il eut de grands succès et
de grands revers. C'était un prince sage,
doux et pieux ; il ne manquait ni de cou-
rage, nidetalens militaires ; mais il n'é-
lait pas le maître de ses opérations, et
ceux dont il dépendait le secondaient mal.
Il mourut à Vienne en 16.o2.
LÉOPOLD,duc de Lorraine, fils de
Charles V et d'Eléonore d'Autriche , na-
quit à Inspruck en 1679. Il porta les ar-
mes dès sa plus tendre jeunesse , et se
signala en 1695 à la journée de Témes-
war. Le duc Charles V son père , ayant
pris parti contre la France , avait vu la
Lorraine envahie , et elle était encore au
pouvoir de la France à sa mort, arrivée
en 1690. Léopold fut rétabli dans ses états
par la paix de Ryswick en 1697, mais à
des conditions auxquelles son père n'a-
vait jamais voulu souscrire. IL ne lui était
pas seulement permis d'avoir des rem-
parts à sa capitale. Quelque mortification
mie dût lui donner la perte d'une partie
des droits régaliens , il crut pouvoir être
utile à son peuple , et il ne s'occupa dès
lors que de son bonheur. Il trouva la
Lorraine désolée et déserte , il la repeu-
pla et l'enrichit. Aussi grand politique
que brave guerrier , il sut conserver la
paix, tandis que le reste de l'Europe était
ravagé par la guerre. Sa noblesse, réduite
à la dernière misère , fut mise dans l'o-
pulence par ses bienfaits. Il faisait rebâ-
tir les maisons des gentilshommes pau-
vres, il payait leurs dettes, il mariait leurs
filles. Protecteur des arts et des sciences ,
il établit un collège à Lunéville , eJt alla
chercher les talens jusque dans les bou-
tiques et dans les forêts, pour les mettre
au jour et les encourager. « Je quitterais,
» disait-il, demain ma souveraineté, si je
» ne pouvais faire du bien. j> Il mourut
en 1726 à Lunéville , à 50 ans. Il laissa
son exemple à suivre à François l" son
fils, depuis empereur, et jamais exemple
n'a été mieux imité. Léopold avait épousé
Elizabeth , fille du duc d'Orléans , morte
en 1744 , femme sage et vertueuse , qui
conspirait avec son époux à faire le bon-
heur de leurs sujets.
* LÉOPOLD (Charles-Guillaume de),
secrétaire d'état de Suède un des 18 de
l'académie suédoise, naquit le 2 avril 1766
À Stockliolm. Son père alors simple con-
trôleur des douanes, n'aurait pu lui don-
ner qu'une éducation incomplète, si un
Français instruit ne se fût aperçu de ses
heureuses dispositions et ne lui eût ap-
pris sa langue. On le plaça à l'école de
Soder-Koping et^ ensuite à l'université
d'Upsal, et bientôt il publia une disser-
tation latine De origine idearam mora-
lium. 1773, et une Ode sur la naissance
du prince royal Gustave-Adolphe , 1778.
Léopold réduit à se créer par son travail
les moyens de continuer ses éludes, par-
vint, à force d'économie , à se procurer
ce dont il avait besoin pour se rendre à
l'université de Greifsw^ald ; il y reçut le
grade de docteur en philosophie, après
avoir soutenu une thèse sur cette, ques-
tion : De origine juste introductœ pro-
prietatis ^ ilM. Il traita aussi un autre
sujet : Causée cur tôt vete?-um scriptape-
rierint. et. fut nommé agrégé à cette uni-
versité. Quelques tentatives furent faites
auprès de ce jeune savant pour le fixer
en Poméranie et l'attacher à la bibliothè-
que de Ij régence de Stralsund ; mais il
revint en Suède en 1784 , et devint con-
servateur de la bibliothèque donnée par
le savant Liden à l'université d'Upsal.
Guillaume III le fit venir à Stockholm ,
paya les dettes qu'il avait faites pendant
ses études , et lui donna un appartement
dans son palais. Léopold fit partie de l'a-
cadémie suédoise, et futundes cinq mem-
bres appelés en 1786 à compléter le nom-
bre de dix-huit dont elle se composa au
moment de sa fondation. En 1787 il fut
chargé de labibliofhèque de Drontingholm
et en 1788 il devint secrétaire particulier
du roi. Il suivit le monarque à l'armée
et chanta, comme les anciens bardes, les
exploits des Suédois. Son Ode sur la
Ficfoire de Hogland, son Epître en vers
sur la bataille de Uttis et sur le combat
naval de Freidrikshamn.etc. iureni faites
au milieu du tumulte des camps , ainsi
que sa tragédie d'Oden qui fut repré-
sentée en 1790 au théâtre de Stockholm.
Après la représentation , le roi lui écrivit
la lettre suivante , en lui envoyant una
bague de prix et deux branches de lau-
rier cueillies sur le tombeau de Virgile.
« L'auteur de Siri Drahe j. en présentant |
n ses complimens à celui d'Oden, le pria
n de vouloir bien lui procurer un billet
» de parterre pour demain . et lui offre
» ces feuilles de laurier cueillies , il y a six
» ans, sur le tombeau du plus grand poète
» du siècle d'Auguste : elles se sont un
» peu fanées entre ses mains, mais elles
LEO
425
LEP
<» reprendront une nouvelle fraîcheur ,
>» lorsquelles seronl placées sur la têle du
» poète, n Après la mort de Gustave III ,
qui entraîna la suppression de l'académie
de Suède , Léopold s'éloigna de la capitale
jusqu'au rétablissement de l'académie par
le roi Gustave-Adolphe IV. Dès lors il re-
çut les distinctions les plus flatteuses ;
chevalier de l'Eloile polaire en 1798, con-
seiller de la chancellerie en 179'J , mem-
bre de l'académie des belles-lettres , de
l'histoire et des antiquités en 1803, mem-
bre de l'académie des sciences en d804 ,
il fut anobli en 1809, devint commandeur
de l'Etoile polaire en 1815 , et reçut le
titre de secrétaire d'état en 1818. Il no
jouit pas du bonheur qu il méritait de
goûter sur la fin de sa carrière : son
épouse , dont la raison s'altéra dans ses
dernières années , mourut en mai 1829 ;
il était devenu aveugle depuis long-temps
lorsqu'il expira le 5 novembre suivant.
Les OEuvres de Léopold sont imprirnées
en 5 vol. in-S**. Parmi ses œuvres drama-
tiques^ Oden et Virginia ont été traduites
en français et se trouvent dans le tome IV
des Théâtres étrangers. Léopold a laissé
aussi des manuscrits.
LÉOPOLD. Voyez BRUNSWICK.
LEORÏER DEL'ISLE (Pierre-Alexan-
dre), célèbre manufacturier, né à Valence
en 1744, avait d'abord suivila carrièi'e mi-
litaire, et étaitlieulenant dans un régiment
de dragons , lorsqu'«ne affaire d'honneur
avec un de ses chefs l'obligea de quitter
le service. Ayant été chargé de la direc-
tion de la fabrique de papier de Langlée
près deMontargis, qui se trouvait dans un
état de décadence déplorable , il parvint ,
par l'activité qu'il déploya et par ses
connaissances étendues , à la relever, et
à y ramener la prospérité. Léorîer de
risle inventa de nouveaux procédés : il
fit du papier avec les plantes , les écorces
et les végétaux les plus communs , et on
en trouve des modèles dans le Supplé-
ment aux loisirs des bords du Loing ,
par Pelée de Varennes. 1784 , in-18. Ils
sont annoncés dans YEpitre dédicatoire
des œuvres du marquis de Villette^ 1786 ,
in-16. Les 136 premières pages sont im-
primées sur papier de guimauve ; après
quoi l'on y trouve des feuillets composés
de diverses substances, savoir : ortie,
houblon, mousse, roseaux, écorce d'osier,
de saule, de peuplier, elc. Il quitta ensuite
cette fabrique pour celle qvi'il créa lui-
même non loin de Langlée, à Buges; puis
il acheta celle de Langlée elle-même , et
fit longtemps fabriquer les papiers des
assignats et du timbre. Malgré l'ordre
qu'il mettait dans ses affaires, les dépen-
ses énormes qu'entraînait l'entretien de
ces fabriques le mirent dans la gène, et il
s'ensuivit un procès qui s'est terminé par
une expropriation forcée. Léorier de
risle mourut à Montargis lo 25 aoxit
1826,.
LÉOTAUD ( Vincent ), jésuite, né dans
le diocèse d'Embrun en 1395 , habile ma-
thématicien , professa pendant 14 ans à
Dole en Franche-Comté , et ensuite à
Lyon, Il mourut le 13 juin 1672 , après
avoir publié un ouvrage savant, oii il
montre que l'on travaille vainement à la
démonstiation de la quadrature du cer-
cle. Il a pour titre Etgmon circuli qua^
draturce. Lyon , 1633 , in-4°. On lui doit
aussi Geometriœ practicœ elem,enta. Dole
1631, in-16 ; Magnelologia . Lyon , 1648 ,
in-4"; Cyclomalhia, ibid.. 1663, in-4° ;
Institutionum arit/mieticarum libri IV ,
ib. 1660, in-4''.
LÉOTYCIIIDES, roi de Sparte , et fîh
de Ménaris , monta sur le trône en rem-
placement de Démocrate son cousin , dé-
claré illégitime par l'oracle de Delphes ,
défît les Perses dans un grand combat
naval près de Mycale, l'an 479 avant J.-C.
Dans lasuite, ayant été accusé d'un crime
capital par les éphores , il se réfugia à
Tégée dans un temple de Minerve , où il
mourut l'an 473 avant J.-C. Archidamus,
son petit-fils, lui succéda.
LÉOWITZ ( Cyprien ) , en latin Leo-
vitiuSj habile astronome bohémien , né à
Leonicia près de Hradisch en Bohème :
il eut, en 1569, une conférence sur l'astro-
nomie avec Tycho-Brahé, qui fit un
voyage exprès pour le voir. Il finit ses
jours à Lawingen , en 1374, âgé d'environ
30 ans. On a de lui : \Description des éclip-
ses An-îol.; \d.QS EphémérideSj, in-fol. ;
i Prédictio7is ûexiMh 1564 jusqu'en 1607,
in-8" , 1363 ; | De indiciis natiçitatum,
in-4° , et d'autres ouvrages en latin. Il
donnait dans l'astrologie judiciaire, et on
lui attribue des prédictions que l'événe-
ment ne justifia point : ainsi il avait an-
noncé pour l'an 1384 la fin du monde par
un nouveau déluge.
♦ LEPAGEde LIIVGERVÏLLE( Louis-
Piehre-Nicolas-Marie ), docteur en mé-
decine né à Montargis , dans le départe-
ment du Loiret, en 1762 , fut député à la
Convention nationale , où il vota la dé-
tention de Louis XVI, et son bannissement
à la paix. En septembre 1792, l'assemblée
LEP
424
LEP
l'envoya à Orléans pour calmer un mou-
vement populaire , qu'avait occasioné la
suspension de la municipalité, accusée
d'avoir laissé accaparer les grains , et
d'avoir montré du dévouement à la cour.
Le 20 mars 1793 , Lepage osa dénoncer à
la convention les troubles de Montargis ,
où l'ex-député Manuel avait été couvert
ide blessures pour avoir voté en faveur
ide. Louis XVI, et improuvé l'exaltation
qui régnait à cette époque. Apres la ses-
sion conventionnelle, Lepage obtint dans
les bureaux de l'administration de la lo-
terie une place de chef qu'il remplit du-
rant quinze années. Il est mort le 7 sep-
tembre 1823 , d'une attaque d'apoplexie
foudroyante. Lepage était très versé dans
les langues latine et grecque. On lui doit :
I Traité de la médecine par CcUe, lalin-
français en re/jard , texte conforme à
celui de l'édition de Léonard Targa,
traduction de Henri Nititun ^ revue et
corrigée par M. L *** docteur en méde-
cine, Paris , 1821 , 2 vol. in-12.
* LEPAIJTE ( Jean-Aîvdré ) , horloger
célèbre , naquit en 1709 , à Montmcdi.
C'est à lui que l'on doit la plupart des hor-
loges qui décorent les édifices publics de
Paris , entre autres , celle que l'on voit
aux Tuileries, les horloges du Palais-
Iloyal , du Jardin du Roi , et l'horloge
horizontale qui a été placée en 1755, au
palais du Luxembourg, la première de
ce genre qu'on ait vue dans la capitale. Il
présenta la même année, à l'académie
des sciences , une pendule à une seule
roue de son invention. Lalande fut un des
commissaires chargés de l'examiner , et
cette circonstance établit entre eux une
amitié durable qui tourna au profit de
tous deux. Lepaute a composé quelques
écrits sur son art , entre autres : | un
Trente d'horlogerie > publié en 1755 , in-
k^ ; I Supplément au traité d'horlogerie^
Paris, 1760 ; il renferme la description
d'une pendule polycamératique , ainsi
nommée parce qu'elle peut marquer
l'heure dans différentes pièces d'un pa-
lais ou d'un château , et d'une pendule à
secondes qui marque le temps moyen et
le temps vrai avec plus de justesse que
les pendules à équation. Lalande a eu
part à la rédaction de cet ouvrage; \ Des-
cription de plusieu7's ouvrages d horlo-
gerie , 1764 , in-12. Il mourut à Sahit-
Cloxid, le 11 avril 1789. — Jeax-Baptiste
LEPAUTE , son frère et son associé , se
distingua aussi dans l'art de l'horlogerie.
On cite de lui la belle horloge de l'Hôlel-
de- ville de Paris, posée en 1786. Jean-
Baptiste mourut à Paris , en 1802.
• LEPAllTE ( Nicole-Rei:«e ETABLB
de LABRIÈRE ), épouse de Jean- And ré
Lepaute, naquit à Paris le 5 janvier i7l>.">.
Elle manifesta, dès sa jeunesse, beaucoup
lie goût pour les sciences ; mariée à un ar-
tiste habile , elle lui révéla une partie des
secrets de son art , et coopéra à son Traité
d'horlogerie. Liée avec tous les savans
de son temps , elle concourut avec Clai-
raut et Lalande au travail que ces astro-
nomes avaient entrepris pour calculer
l'attraction de Jupiter et de Saturne sur
la comète annoncée par Halley , aQn de
prédire exactement son retour ; elle tra-
vailla à la Connaissance des temps , aux
Ephémérides. calcula en 1764 , pour tout a
l'étendue de l'Europe, l'éclipsé annulaire
du soleil, prédite pour le 1" avril de cette
année, et publia une carte où l'on voyait
de quart d'heure en quart d'heure la mar-
che de l'éclipsé et ses différentes pbases.
A l'occasion de plusieurs éclipses qu'elK;
avait calculées, elle sentit l'avantage d'un j
table des angles parallactiques, et elle eu
fît une très étendue qui parut dans la
Connaissance des temps en 1763, et dans le
livre intitulé : Exposition du travail as-
tronomique. On a encore d'elle plusieurs
mémoires intéressans pour l'académie do*
Béziers, dont elle était associée. Madame
Lepaute mourut à Paris le 6 décembre
1788, à l'âge de 05 ans. Cette femme sa-
vante fut aussi un modèle de dévouement
conjugal : pendant sept ans elle soigna
elle-même son mari atteint de la maladie
qui termina sa laborieuse carrière ; elle
mourut quelques mois avant lui. Lalande
a inséré VEloge de M""' Lepaute dans
son Histoire de l'asti-onomie, année 178«.
LEP AUTRE, LEPAYS et autres. Voy,
à la lettre P.
* LEPÉKUIN (Iwan), savant méde-
cin russe , né vers le milieu du dix-hui-
tième siècle , étudia à Saint-Pétersbourg
et vint se faire recevoir docteur en mé
decine à l'université de Strasbourg. Après
son retour en Russie, il fut nommé en
1771 , membre de l'académie impériale
dans la classe d'histoire naturelle. Il mé-
rita par l'étendue de ses connaissances
dans celle partie, d'être mis à la tête
d'une société de savans chargée de par-
courir l'empire russe pour en étudier et
décrire les productions naturelles , et d'ob-
server les grands phénomènes physiques
qui s'y renouvellent le plus souvent. Le-
pékhin fut nommé , eu 1783 , secrétaire
LEP
perpt'lucl , el reçut de Callierliie II une
médaille d'honneur. Il reçut aussi le lilre
de membre correspondant de la société
des scrutateurs de la naliu-e de Berlin, et
fut fait conseiller-d'état peu de temps
avant sa mort arrivée le 18 avril d8G2. On
a de Lcpékhin , outre quelques opuscules
séparés et plusieurs mémoires insérés
dans les collections de l'académie des
sciences de Saint-Pétersbourg, un ou-
vrage important sur l'histoire naturelle
de son pays , intitulé : Journal ( en lan-
gue russe ) des Voyages en plusieurs
parties de la Russie ; ce Journal a été
liaduit en allemand par Hase, Alten-
bourg, 177/i., 3 vol. in-/t.°, avec figures.
* LEPEL (HEivni, comte de) , homme
d'état et savant , né en Prusse vers 1755 ,
exerça jusqu'en 1790 les fonctions d'am-
bassadeur de Prusse en Suède ; il s'oc-
cupa beaucoup depuis cette époque des
sciences et des arts : l'académie de Berlin
lui doit une belle collection de médailles
et de dessins , qu'il avait recueillis avec
le plus grand soin pendant toute sa vie ,
et qu'il lui a donnée avant sa mort arrivée
à Berlin le 20 janvier 1826. Lepel publia à
Dresdo, en 180G, les OEuvres de Claude
Gelée. On lui doit encore le Catalogue
des estampes exécutées d'après Raphaël,
qu'il a donné sous le nom de Tansicus
eubœus^ et un Catalogue des ouvrages
originaux des grands maîtres. Il a laissé
en manuscrit un ouvrage sur la numis-
matique.
LÉPICïÉ (Bernard), graveur, né à
Paris en 1698, mort dans la même ville le
17 janvier 1753, âgé d'environ 57 ans,
maniait parfaitement le burin. Ses gra-
vures sont d'un beau fini , et traitées avec
beaucoup de soin et d'intelligence. On a
de lui un Catalogua raisonné des tableaux
du roi ^ 2 vol. in-i"; ouvrage curieux et
instructif pour les peintres el les ama-
teurs. — Son fils , professeur de l'acadé-
mie de peinture et sculpture de Paris , a
composé plusieurs tableaux qui sont loin
d'être sans défaut , mais qui cependant
méritent des éloges. Il a peint aussi les
scènes familières dont nous citerons : la
Douane^ la Halle, le Repos d'un vieil-
lards le Braconnier. Il mouruf le 17 sep-
tembre 1784.
LÉPIDÏIS ( M. ^MiLius ), triumvir avec
Octave et Marc-Antoine, naquit l'an 70o
de Bome ou 48 avant J.-C. Il était d'une
des plus anciennes et des plus illustres
familles de Rome, et parvint aux pre-
miers emplois de la répuldique. 11 fut
A.2S LEP
grand pontife , maître de la cavalerie
( magister equitum ) , et obtint deux fois
le consulat les années 42 et 46 avant J.-C.
Il contribua à faire nommer Jules-Cégar
dictateur, et celui-ci à son départ pour
l'Espagne lui laissa le commandement de
Rome. Pendant les troubles de la guerre
civile, excités par les héritiers elles amis
de Jules-César , Lépidus se mit à la tête
d'une armée et se distingua par son cou-
rage. Marc-Antoine et Auguste s'unirent
avec lui. Ils partagèrent entr'eux l'uni-
vers. Lépidus eut l'Afrique. Ce fut alors
que se forma cette ligue funeste appelée
triumvirat. Lépidus lit périr tous ses en-
nemis , et livra son propre frère à la fu-
reur des tyrans avec lesquels il s'était as-
socié. Il eut part ensuite à la victoire
qu'Auguste remporta sur le jeune Poni-
pée en Sicile. Comme il était venu du
fond de l'Afrique pour celte expédition ,
il prétendit en recueillir seul tout le fruit,
et se disposa à soutenir ses prétentions
par les armes. Auguste le méprisait ,
parce qu'il savait qu'il était méprisé par
ses troupes. Il ne daigna pas tirer l'épée
contre lui. Il passa dans son camp, lui
enleva son armée, le destitua de tous ses
emplois , à l'exception de celui de grand
pontife , et le relégua à Circeïes , petite
, ville d'Italie , l'an 36 avant J.-C. Lépidus
était d'un caractère à pouvoir supporter
l'exil. Plus ami du repos qu'avide de puis-
sance , il n'eul jamais cette activité opi-
niâtre qui peut seule conduire aux grands
succès et les soutenir. Il ne se prêta qvi'a-
vec une sorte de nonchalance aux circon-
stances les plus favorables à son agran-
dissement , et , pour nous servir des ex-
pressions de Paterculus , il ne mérita
point les caresses dont la fortune le com-
bla long-temps.
* LEPITRE (Jacques-François), né
en 1764 , fut d'abord professeur de rhétt>
rique , puis maître de pension à Pai-is : il
était membre de la commune de cette
ville en 1792, et fut chargé du soin de
surveiller la famille royale au Temple (i).
Ses manières, bien différentes de celles
de plusieurs de ses collègues, lui gagnè-
(i) Lepîlre , se trou.ant un jour de garde avec un
de «es collrguc» auprès de Louii XVI , demanda au
roi 11 permission de prendre un Viigile qui était tiir
sa cluinirn-e. • Vous savez donc le lalin ? lui .iit ce
» prince Oui sire ,
I Non rgo, cuni Daiiait trojanam cxscindere g^nlctn
> Aiiiile,juiavi. .
Un rcgairt du roi lui fa entendre qu'il l'av.iit corn-
pri.. .^^
LILÏ^ 426 LER
la coriiiancc du roi. Se- son inslriiment, suspendirent le pillago
Tcnl facilemen
ronde par un autre commissaire , nommé
Toulan , et de concert avec le chevalier
de Jarjayes , il procurait à ce prince les
journaux cl les livres dont on le privait :
il avait même conçu le projet de faire
évader la famille royale , et tout était prêt
pour l'exécution, lorsqu'un soulèvement
qui fut excité dans Paris le jour même où
l'évasion devait avoir lieu , déconcerta
toutes les mesures, et fit même deviner
le complot. Toulan péril sur l'échafaud ;
tepitre, envoyé à Sainte-Pélagie, et tra-
duit devant le tribunal révolutionnaire ,
n'échappa à la mort que par un bonheur
inespéré. En iSik, il fut présenté à
M""^ duchesse d'Angoulême et nommé
professeur de rhétorique au collège royal
de Rouen. Il est mort dans le mois de
janvier 1822 à Versailles. On a de lui :
I Histoire des dieux j. des demi-dieux et
des héros adorés à Rome et dans la Grèce j
nouvelle édition, 1814, in-12 , et 1819,
in-12; | Cinq romances composées en
1793 et i7%^ pour les illustres prisonniers
du Temple , musique de M™' Cléry , Pa-
ris, 1814; I Quelques souvenirs ou notes
fidèles sur mon service au Temple, etc.
1814 , et 1817 , in-8°.
LEPOIS. roijez POIS.
• LEPRINCE ( Jean ) , peintre naquit à
Metz en 1753. Il était frère de madame
Lcprince de Beaumont. ( Votjez BEAU-
MONT. ) 11 vhit à Paris jeune encore, et
se lit connaître par son talent sur le vio-
lon. Il fut élève do Boucher, et commença
par graver à la pointe des paysages très
bien exécutés. Il s'adonna ensuite à la
peinture et lit plusieurs tableaux dans le
genre de Téniers et de Wauwermans,
qui sont assez estimés. Il s'était marié , et
il quitta bientôt sa femme pour passer à
Saint-Pétersbourg, où il peignit les pla-
fonds du palais impérial. Après la mort
tragique de Pierre III, Leprince revint en
France , et fut reçu à l'académie. Cet ar-
tiste était surtout renommé pour les des-
sins lavés à l'encre de la Chine, Il mou-
rut à Denis-du-Port près de Lagny en
1781 , âgé de 47 ans. Son talent sur le vio-
lon le tira une fois d'une assez mauvaise
affaire. En passant par mer en Hollande,
pour se transporter à Pétersbourg , son
vaisseau fut pris par des corsaires anglais,
qui se partagèrent aussitôt les dépouilles
de leurs prisonniers; Leprince, sans se
troubler, prit son violon, et se mit à
jouer avec, le plus grand calme : les cor-
saires, charmés des sons mélodieux de
et lui rendirent, dit-on^ tout ce qu'ils lui
avaient pris.
LE QUESNE et autres. Voyez à la let-
tre Q.
LERAC. Vorjez CAREL.
LERA\BERT (Louis), peintre et
sculpteur , né en 1614 à Paris , reçu à la-
cadémie de peinture et de sculpture en
16G3 , mort en 1670 , s'est acquis un grand
nom par ses ouvrages. Il avait appris la
peinture à l'école de Vouet et la sculp-
ture sous Sarraz.in. Il succéda à son père
dans la place de garde des antiques et
marbres du roi, qui lui fut ôtée en 166").
Ceux de ses ouvrages qu'on voit dans le
parc de Versailles , sont un groupe d'une
Bacchante avec un Enfant qui joue des
castagnettes, deux Satyres, une Dan-
seuse, des Enfans, et des Sphinx.
LERI ( Jea\ de) , ministre protestant ,
né en 1554, à la Margelle, village de
Bourgogne, fit en 1356 le voyage du Brésil
avec deux ministres et quelques autres
proies tans, que Charles Durand de Villcga-
gnon, chevalier de Malle et vice-amiral de
Bretagne, avait appelés pour y former une
colonie de huguenots, sous la protection
de l'amiral de Coligny. Cet établissement
n'ayant pas réussi, Léri revint en France.
Il essuya dans son retour tous les dan-
gers du naufrage et toutes les horreurs do
la famine. Il se vit réduit avec ses com-
pagnons à manger les rats et les souris ,
et jusqu'aux cuirs des malles. On a de lui
une Relation de ce voyage , imprimée
in-S", en 1378, et plusieurs fois depuis.
Elle est louée par de Thou. Léri se trouva
dans Sancerre lorsque colle ville fut as-
siégée par l'armée catholique en 1373, et
il publia l'année suivante , in-8" , un Jour-
nal curieux de ce siège et de la cruelle
famine que les assiégés y endurèrent. Il
mourut à Berne en 1611.
LÉRIDANT (Pierre), avocat au par-
lement de Paris , né en Bretagne , fut un
de ces jurisconsultes du 18' siècle qui con-
tribuèrent le plus par leurs écrits à cor-
rompre les notions du droit , et surtout h
renverser les antiques principes qui font
la base d© la société civile et religieuse ;
tels sont : | l'Examen de deux questions
importantes sur le mariage , 1733 , in-4° ,
qui n'est qu'un petit plagiat fait à Launoy,
tout comme celui-ci avait dépouillé le
fameux de Dominis : car ces hétérodoxes
docteurs n'ont pas même le mérite de
l'originalité. M. Jacques Clément , cha-
noine de Gand , a réfuté cet examen dans
LER
427
LER
son Traité du pouvoir de l'Eglise sur le
mariage des catholiques j Liège, 1768,
in-i"; {Toyez LAUNOY.) | Consulta-
tion sur le mariage d'un Juif^ 1758 , in-i";
I Code matrimonial ^ \n.-h° , infecté de
diverses erreurs. Il a écrit encore sur
d'autres matières, comme \l' Antifinancier
1764, in-12; | Institutiones philosophicœ^
1761 , 5 vol. iu-12. Il mourut le 28 novem-
bre 17GS.
LERME (FuANçois de ROXAS de SAN-
DOVAL, duc de) , l''" ministre de Phi-
lippe III , roi d'Espagne , fut le plus chéri
lie SCS favoris. Il était d'un caractère plu-
tôt indolent que pacifique. Il avait les
qualités d'un bon particulier , mais non
les talons d'un ministre. Il négocia avec
l'Angleterre , fit une trêve avec la Hol-
lande , pacifia l'Aragon , et lâcha d'en-
courager l'agriculture ; mais il mit le plus
grand désordre dans les finances. Il semble
qu'un gouvernement ami de la paix , et
qui n'établissait point d'impôt odieux,
aurait dû le faire aimer des peuples;
mais le maître était faible, livré à ses
favoris, elle ministre, également inca-
pable , se laissait gouverner par des com-
mis insolcns et avides; c'est ce qui rendit
lie Lerme l'objet de l'horreur et du mé-
])ris. Les moyens de le décrier manquè-
rent; on eut recours à la calomnie. Il
fut accusé d'avoir fait empoisonner la
reine Marguerite par Rodrigue Caldéron ,
sa créature et son confident. Quelque
éloignée que celte action fût de son ca-
ractère , le roi ne pul tenir contre la haine
des courtisans. De Lerme fut disgracié
en 1618. Il était entré dans l'état ecclé-
siastique, après la mort de sa femme,
et Paul V l'avait honoré de la pourpre.
Le cardinal de Lerme mourut quatre ans
après avoir été, en 1625 , dépouillé de la
plus grande partie de ses biens par Phi-
lippe IV. Le ducd'Uzéda, son fils , s'était
montré son plus cruel ennemi , et lui
avait succédé dans le ministère; mais sa
faveur avait cessé trois ans avant la mort
de Philippe III , arrivée en 1621. Le ca-
raclère de ce ministre a été dépeint dans
le roman de Gil-Blas ^ de Lesa^e, liv. 8
et 9.
LERXUTIUSouZ^mouf ( Jean) , poète
ne à Bruges en 1545 , après avoir achevé
ses études , voulut connaître les princi-
pales universités de France , d'Italie et
d'Allemagne; il entreprit ces voyages
avec Juste-Lipse.De retour dans son pays,
malgré les embarras de quelques charges
dont il y fut honoré, il n'abandonna point
les muses, dont il faisait ses délices : il
mourut le 29 septembre 1619. On a re-
cueilli ses poésies sous ce titre : Jani
Lernutii Basia , Ocelli et alla poemata ,
Leyde , Elzévir, 1612. Elles lui assurent
un rang parmi les Ijons poètes latins.
* LEROUX ( Jea\-Jacques) , cheva-
lier de la légion-d'honneur, professeur de
la faculté de médecine, membre titulaire
de l'académie royale de médecine , et de
plusieurs sociétés savantes, naquit à Sèvres
le 17 avril 1749. 11 s'était fait recevoir
bachelier de l'ancienne faculté de méde-
cine en 1776, et docteur-régent en 1778,
et exerçait la médecine à Paris avec suc-
cès quand la révolution éclata. En 1792
il fut nommé ofiicier-municipal , et en-
suite administrateur des élablissemens
publics. Il se trouva le 10 août auprès do
la personne du roi , qu'il accompagna à
l'assemblée Législative, et se retira ensuite
à Senteny, village près de Brie-cemte-Ro-
bert. Trois mandats d'arrêt furent lancés
contre lui ; mais son ami Fourcroy les
lit lever , et obtint pour lui une chaire de
professeur à l'école de sauté en 1793.
Leroux conserva cette place quand l'éta-
blissement devint successivement école
de médecine , et faculté de médecine. En
1810 il en fut nommé doyen, titi-c qu'il
possédait depuis douze ans , lorsque les
ordonnances rendues en 1822, supprimè-
rent la faculté , et pourvurent à la réor-
ganisation de la nouvelle. Leroux est
mort ducholéra-morbus en 1852 , laissant
les ouvrages suivans : | Compte rendu à
l'école de médecine, Paris, 1807, in-4'';
I Cours sur les généralités de la médecine
pratique et sur la philosophie de la mé-
decine, Paris, 1825-26, 8 vol. in-8°;
I Discours prononcé à la séance publique
de la faculté de médecine de Paris , le 14
novembre 1810 . Paris , 1810 , in-4°; | Dis-
cours prononcé le 30 juillet 1816 , pour
l'inauguration des salles de clinique,
Paris, 1816, in-4'*; | Discours prononce
sur la tombe de Leclerc , en 1808, sur la
tombe de Baudelocque <?n 18 1 0 , sur celle de
Touret, e« 1810, — sur celle de Corvi-
sarten 1821 ; — sur la tombe de Halle, en
1822, in-8"; I Instruction sur le typhus,
fièvre des camps, fièvre des hôpitaux ,
fièvre des prisons, Paris, 1814, in-4'';
I Mémoire et plan d'organisation pour la
médecine etla chirurgie , par MM. Leroux
et Dupuytren , Var'is , 1816, in-4''; | Rap-
port fait à l'école de médecine de Paris
sur la clinique d'iJwculationparMM. Pine
et Leroux, Vdivis, 1800, in-S"; | Rapport sur
LES
423
LES
le cimetière de la ville de la Ferte-sous-
Jouan-e , par MM. le baron Desgenettes
et Leroux^ Paris , 1820, in-8°; i 2'able indi-
cative des matières ^ et table des auteurs
pour lés 65 premiers volumes du journal
de médecine ^ 1788, in-4°. Leroux a été
pendant dix ans, le rédacteur principal du
Journal de médecine de Bâcher, et ensuite
propriétaire éditeur du Joumalde méde-
cine chirurgie ^ pharmacie j par Cor vi-
sart , Leroux et Boyer ; il a été aussi un
des rédacteurs du Codex medicamenta-
rius. Outre ces divers écrits, dans la plu-
part desquels se reproduisent les vues
justes et étendues du médecin qui possède
bien son arl, on doit encore à Leroux les
ouvrages litléraires suivans : | J rassem-
blée nationale ^ ou réflexion sur le choix
d'un instituteur du dauphin^ Paris , 1791,
in-S"; \ Au diable le meilleur. coniQ, Paris,
1820 , in-8''; | Essais de littérature, Paris,
1830, 2 vol. in-8°. Ces essais se compo-
sent d'idylles, de stances, d'épîtres, de
fables, etc. \Le Factionnaire , 1790 , in-8° ;
I la Journée de Salaminey tragédie,
Paris , 1819 , ou 1822 , in-8"; | Rapport sur
l'opéra, présenté au corps municipal le
il août 1791 , Paris , 1791 , in-8°.
LERUELZ. Voyez LAIRUELS.
LEÎ5.Y. Voyez LERL
LESAGE ( Hervé -Julien ). Voyez
SAGE.
LESAGE. Voyez SAGE (Alain-René).
LESBONAX , orateur et philosophe de
Milylène au premier siècle de l'ère chré-
tienne, enseigna la philosophie dans cette
ville avec beaucoup d'applaudissement.
II avait été disciple de Timocrate , mais
il corrigea ce qui lui paraissait trop aus-
tère dans les mœurs et dans les leçons
de son maître. Ses compatriotes eurent
tant de considération pour lui qu'ils firent
frapper sous son nom une médaille.
Elle avait échappé jusqu'à nos jours aux
recherches des antiquaires. Cary, membre
de l'académie de Marseille, l'ayant recou-
vrée, la lit connaître dans ime Disserta-
lion curieuse , publiée en 174i , in-12 , à
Paris, chez Barrois. Lcsbonax avait mis
au jour plusiexus ouvrages , mais ils ne
sont pas parvenus jusqu'à nous. On lui
attribue néanmoins | deux Harangues.
que nous avons dans le Recueil des an-
ciens orateurs d'Aide, Venise, li>15, 5 vol.
in- fol. ; et Paris, Henri Etienne, 1575 ;
I De figuris grammaticis , publié pour la
première fois, à la suite du traité d'Am-
monius; | De ad finium. vocabiUorum dif-
ftretuiâj gr., par Valkenaer, Leyde, i759,
2 part. in-4° (i). Potamon, son ûls , fui un
des plus grands orateurs de Mitylène.
LESCAILLE ( Jacques ) , poète et im-
primeur hollandais , natif de Genève, fit
des vers heureux , et donna des éditions
très nettes et très exactes. L'empereur
Léopold l'honora en 1663 de la couronne
poétique. Il mourut en 1677, à 67 ans.
LESCAILLE ( Catherine ) , surnom-
mée la Sapho hollandaise et la dixième
Muse, était fille du précédent. Née à
Amsterdam vers 1649 , elle était d'origine
genevoise. Elle surpassa son père par ses
vers. Le libraire Ranck, son beau-frère,
recueillit ses Poésies en 5 vol. in-i°, 1728.
On trouve dans cette collection 7 tragé-
dies qu'on ne doit pas juger avec rigueur.
Les règles y sont souvent violées ; mais
on y aperçoit de temps en temps des
étincelles de génie. Catherine Lascaille
mourut le 8 juin 1711.
LESCARBOT ( Marc) , avocat au par-
lement de Paris , natif de Vervins , alla
dans la Nouvelle-France ou Canada, et il
y séjourna quelque temps. A son retour,
il publia une Histoire de cette vaste par-
lie de l'Amérique , 1609 , in-8° ; seconde
édition augmentée , 1611 ; avec de nou-
velles additions , 1618, in-8°, Paris. Cette
histoire était assez bonne pour sou temps ;
celle du père Charlevotx l'a entièrement
fait oublier. Lescarbol aimait à voyager ;
il suivit en Suisse l'ambassadeur de
France, et il publia le Tableau des
treize cantons, en 1618 , in-4", en vers
fort plats et fort ennuyeux.
LESCHASSIER ( Jacques ), avocat
et substitut du procureur général au par-
lement de Paris, sa patrie , né en 1550 ,
mort en 1625 , à 75 ans , se lia d'amitié
avec Pibrac , Pithou , Loisel,et d'autres
savans hommes de son siècle. Pendant
la guerre de la ligue , il sortit de Paris
pour suivre Henri III et Henri IV. La
plus ample édition de ses OEuvres est
celle de Paris en 1652 , in-4.°. Son petit
Traité de la liberté ancienne et canoni-
que de l'Eglise gallicane a été plus ap-
plaudi des protestans que des catholiques.
Sa Consultation d'un Parisien jtn faveur
de la république de Venise , lors de ses
différends avec le pape Paul V, 1606,
in-A.°, lui valut une chaîne d'or. Leschsis-
sier avait acquis une si grande réputa
(i) L'abbe Ftllcr se In.mpe en altribiianl cercu-
vrage à Lc&bonax <le IMilyli'nc. Il est d'un autre
graiDmairit^n fie mi-rnc nctn , poslrrictir » crAui-CÎ , cl
qui floiiisji: i Cori'.Ui.iiaople.
LES
429
LES
lion, qu'il était toujours consulté sur les
matières civiles et canoniques. Il a écrit
sur le droit de nature ^ sur la loi saliquej
etc.
♦ LESCIIENAULT de la TOUR (Louis-
TiiÉODORB ) , voyageur naturaliste , né à
Châlons-sur-Saône, où son père était pro-
cureur du roi, le 13 novembre 1773, partit
l'an 1800, sur la corvette le Géographe.
avec le capitaine Baudin, Il ne revint pas
avec ses compagnons de voyage , en 1804,
ayant été laissé malade à Timor; il ne re-
vit la France que très long-temps après,
rapportant avec lui ime riche collection
et des observations intéressantes. Son
Mémoire^ sur la végétation de la Nou-
velle-Hollande et de la terre de Van-Die-
men , qui a été imprimé dans le second
volume du Voyage aux terres australes
de Pérou et Frcycinet, est un des résultats
de ce premier voyage qu'il termina i)ar
une excursion aux Etats-Unis. Plusieurs
autres récits de lui ont été publiés dans les
Mémoires du Muséum d'histoire natu-
relle. En 1814 , Leschenault partit pour
l'Angleterre, aiin de solliciter de la com-
pagnie des Indes la permission de visiter
rindostan atlantique et Ceylan. Sir Jo-
seph Banks lui obtint toutes les recom-
mandations dont il avait besoin, et il partit
pour Calcutta. Son séjour à Ceylan a
procuré aux sciences des découvertes in-
téressantes ; à l'île Bourbon la possession
du cannelier le plus estimé ; et au jardin
du roi de Paris une multitude d'objets
nouveaux. Il procura aussi au Sénégal un
très bel arbre de l'Inde, qui a l'avan-
tage de croître dans les sables. Ce second
voyage dura quatre ans. Dans un troi-
sième entrepris en 1820 , il vit le Brésil,
Cayenne , et la Guyane hollandaise. Il est
mort le 14 mars 182G. On lui doit encore
une Notice sur l'épizootie qui a régné
en 1812 sw les troupeaux de bêtes à laine
des départemens méridionaux de l'eîn-
pire, Paris, 1813 , in-S".
LESCOT ( Pierre de ) , seigneur de
Clagny et de Clermont , conseiller au
parlement et chanoine de Paris , né dans
cette ville en 1310, se rendit célèbre dans
l'architecture, qu'il cultiva sous les règnes
de François 1*"^ et de Henri II. C'est à lui
qu'on attribue l'architecture de la Fon-
laine des Saints-Innocens ^ rue Saint-De-
nis, admirée des connaisseurs pour sa
belle forme , son élégante simplicité , ses
ornemens sages et délicats , et ses bas-re-
liefs, dont le fameux Goujon a été le sculp-
teur. L'un et l'autre ont aussi travaillé
de concert au Louvre. 1,0. façade de l'hor-
loge. seule partie de son ouvrage qui
subsiste encore, est regardée comme un
chef-d'œuvre. Il mourut à Paris, en 1571,
âgé d'environ GO ans.
LESCUN. Voyez FOIX (Thomas de )
* LESCURE ( Louis-Marie , marquis
de), général des armées vendéennes, né
le 13 octobre 1766, d'une famille distin-
guée du Poitou et originaire de l'Albi-
geois , fut élevé à l'école militaire et en
sortit à l'âge de 16 ans. Nommé comman-
dant d'une compagnie de cavalerie du
régiment de Royal-Piémont, il resta dans
ce corps jusqu'en 1791, époque à laquelle,
suivant l'exemple des gentilshommes qui
émigraient, il se rendit au-delà des fron-
tières ; mais à peine les eut-il dépassées,
qu'il rentra en France et revint à Paris.
Le spectacle des crimes dont il était té-
moin allait le déterminer à émigrer de
nouveau lorsque Louis XVI le retint dans
la capitale. Cet infortuné monarque , me-
nacé des plus grands dangers, avait be-
soin de serviteurs lidèles, et malheureu-
sement il n'en voyait pas un grand nom-
bre autour de lui. Dans la journée du 10
août ce fut en vain que Lescure , secondé
de Larochejaqueiein [voy. ce nom) et de
quelques-uns de ses amis , donna des
preuves du dévouement le plus héroïque
Le meilleur des rois fut obligé de cher-
cher un refuge au milieu de ses ennemis,
qui le conduisirent dans une prison , et
de là sur l'échafaud. Le marquis se retira
alors dans son château de Clisson près
deBressuire. Peu de temps après, le gou-
vernement révolutionnaire ayant ordonné
une levée de 500 mille hommes, les
paysans du Poitou se révoltèrent, et l'in-
surrection éclata à Saint - Florent. Elle
n'eut pas, pour le moment , des suites sé-
rieuses ; mais le mécontentement général
fermentait , se propageait, et finit par
porter les paysans à se choisir leurs sei-
gneurs pour chefs, afin de combattre les
républicains. Larochejaqueiein se trouvait
chez son cousin Lescure , dont les pro-
priétés touchaient presque aux siennes ^
lorsque les paysans vinrent le proclamer
leur chef. Il n'hésita point sur le parti
qu'il devait prendre, et Lescure l'y encou-
ragea . Larochejaqueiein se rendit vers
Chàtillon; mais les paysans des environs
de Clisson se soumirent aux républicains
et des troupes inondèrent bientôt le pays.
Le marquis de Lescure et sa famille fu-
rent retenus prisonniers dans le diàteau
de Brcssuire ; au bout de quelques jours
LES
450
LES
une armée vendéenne vint le délivrer ;
elle précéda celle de Larochejaquelein,
qui venait de triompher à Chàtillon. Pro-
clamé un des principaux chefs de l'armée
royaliste, Lescure donna des preuves du
courage le plus brillant. Les républicains
gardaient un point devant Thouar s ; Les-
cure s'y précipite le premier, les siens le
«uivent, et ils mettent en fuite les répu-
blicains. Peu de temps après , afin de dé-
livrer des prisonniers vendéens , il entra
seul dans Fontenay ; son exemple encou-
ragea ses soldats , et ses compagnons d'ar-
mes furent sauvés. ASaumur, il reçut
une blessure assez grave : au combat de
Torfou il montra une valeur héroïque et
battit l'ennemi ; ce fut le dernier succès
des Vendéens sur la rive gauche de la
Loire. Cependant ils parvinrent à repous-
ser pendant dix à douze jours les troupes
de Klcber. Au dernier combat contre ce
général , Lescure , voyant que l'ennemi
allait leur arracher la victoire , mit pied
à terre, et cria aux paysans découragés :
« Y a-t-il quatre cents hommes assez
» braves pour venir périr avec moi ?
» — Oui , monsieur le marquis.... , » ré-
pondirent les paysans de la paroisse des
Ecliaubroignes. Il se mit à leur léte , et
tint ferme pendant deux heures, tandis
que le reste de l'armée se retirait en bon
ordre. A la malheureuse affaire de la
Tremblaye, après s'être battu comme un
lion, il fut atteint d'uxie balle qui le ren-
versa de cheval. Relevé par un de ses do-
mestiques , il fut obligé de suivre sur un
brancard l'armée vendéenne , qui , après
la défaite de Chollet ( voyez LAROCHE-
JAQUELEIN ) , se vit forcée de passer la
Loire. Sur le point de descendre au tom-
beau, Lescure aida de ses conseils et de son
exemple ses vaillans compagnons : il con-
tribua puissamment à faire nommer son
cousin, Larochejaquelein , généralissime
de l'armée. Le passage de la Loire ayant
éfé effectué, non sans de grands obstacles,
Lescure fut contraint de suivre la mar-
che précipitée des «troupes vendéennes.
Lo6 revers multipliés, le manque de re-
pos , et parfois de secours , envenimè-
rent sa blessure , déjà très grave, et pen-
dant une marche de l'armée entre Ernée
et Fougères , ce valeureux chef rendit le
ticrnier soupir, le 3 novembre 1793 : il
n'avait que 27 ans. Sa mort , digne à la
fuis d'un fidèle royaliste et d'un vérita-
ble chrétien , fut accompagnée des lar-
me» de toute l'armée. Son épouse , M"'
^e Donnissan, au désespoir, l'assista dans
ses derniers momens. Elle a publié des
Mémoires sur son brave et vertueux
époux, l'un des plus héroïques défen-
seurs de la cause des Bourbons. Lescure
était aussi humain que brave; et, au
moment où les deux armées se per-
mettaient le terrible droit des repré-
sailles, que chaque général combattait
son ennemi corps à corps comme un sim-
ple soldat , et que lui-même , Lescure ,
donnait des preuves de la valeur la plus
insigne , il ne laissa jamais péiùr ni même
mallraiterun prisonnier, et ne tua jamais
un seul homme. Le trait suivant peindra
mieux que tous les éloges la générosité
de son caractère. Un républicain tire un
jour sur lui à bout portant : il écarte
froidement le fusil, et dit aux siens :
« Emmenez ce malheureux.... » Mais
aussitôt, et à son insu, les paysans le mas-
sacrèrent ; il court pour les en empêcher;
il étail trop tard. Alors cet homme , na-
turellement doux et pacifique, jure et se
livre à la plus violente colère : on ne
l'avait jamais vu aussi irrité. C'était la
première fois, disait-il, qu'il s'était permis
des juremens , et il en parut confus et re-
pentant Tous les chefs de l'armée ven-
déenne ont immortalisé leurs noms par
leur fidélité et leurs exploits. Ceux de
Larochejaquelein, de Charette, etc. , pa-
raîtront peut-être encore plus brillans que
celui de Lescure , mais aucun ne s'est ac-
quis une gloire plus pure et plus digne
d'un soldat chrétien. Lescure avait fait
de très bonnes études militaires, c'était
sans contredit l'officier le plus instruit
de l'armée vendéenne. Il était naturelle-
ment pieux et avait des mœurs aus-
tères
LESDIGUIÈRES (François de BONNE,
duc de ) , l'un des principaux capitaines
de Henri IV, né à Saint-Bonnet de Champ-
saur, dans le ïlaul-Dauphiné , en 1545,
d'une famille ancienne, porta les armes
de fort bonne heure , et avec beaucoup
de valeur. Simple archer en -1562, ses
grandes qualités pour la guerre le firent
choishr pour chef par les calvinistes, après
la mort de Montbrun en 1573. Il fil
triompher leur parti dans le Dauphiné,
et conquit plusieurs places. Henri IV,
qui faisait grand cas de lui lorsqu'il n'é-
tait encore que roi de Navarre, lui donna
toute sa confiance lorsqu'il fut monté sur
le trône de France. Il le fit lieutenanl^gé-
néral de ses armées de Piémont , de Sa-
voie et de Dauphiné. Lesdiguières rem-
porta de grands avantages sur le duc de
LES ho
Savoie, qu'il défit aux combats d'Espar-
roii en 1591, de Vigort en 1592, de Gresl-
lane en 1597. On raconte un fait qui fait
lionneur à la sagacité de ce général. Le
duc de Savoie bâtissait le fort de lîarraux
sur les terres de France et en face de
l'armée que commandait Lesdiguières ,
sans que celui-ci y mît la moindre oppo-
sition. En ayant reçu des reproches de la
part du roi, il répondit : « Puisque le duc
r veut faire la dépense de ce fort , il faut
» le laisser faire ; quand il sera fini, je
» m'engage à le prendre. » Il tint parole ,
et en deux heures le fort tomba au pou-
voir des Français. Ses services lui méri-
tèrent le bâton de maréchal de France
en 1608. Sa terre de Lesdiguièrcs fut éri-
gée en duché-pairie. Quelque temps après
la mort de Henri IV , il servit utilement
Louis XIII contre les huguenots, dont les
rébellions continuelles lui étaient enfin
devenues odieuses. Il assiégea en 1G21
Saint-Jean-d'Angély et Montauban. Ce
grand général s'y exposa en soldat. Ses
amis le blâmant do cette témérité : « Il
» y a soixante ans, leur dit-il, que les
» mousquetades et moi nous nous con-
» naissons. » L'année d'après, il abjura le
calvinisme à Grenoble , et reçut à la fin
de la cérémonie, des mains du maréchal
de Créqui son gendre, des lettres de con-
nétable, /;oz«r«voîV toujours été vainqueur
et n'avoir jamais été vaincu. En 1625 ,
il prit quelques places sur les Génois; il
se signala à la bataille de Bestagne , et fit
lever le siège de Vérue aux Espagnols. Les
huguenots du Vivarais avaient profité de
son absence pour prendre les armes ;
Lesdiguièies parut , et ils tremblèrent.
Ayant mis le siège devant Valence, il fut
attaqué d'une maladie dont il mourut en
1626 , à ^k ans. Sa répvitation était si
grande en Europe, que la reine Elizabeth
d'Angleterre disait que « s'il y avait deux
» Lesdiguières en France, elle en deman-
» derail un à Henri IV. » Les lecteurs qui
voudront connaître plus particulièrement
ce grand homme , peuvent consulter sa
Kte ^ par Louis Videl , son secrétaire,
in-fol., 1638 ; ouvrage curieux et intéres-
sant, quoique écrit d'une manière ampou-
lée. L'auteur ne dissimule point les vices
4le son héros, tels que son avidité pour les
richesses , ses débauches publiques avec
la femme d'un marchand , les mariages
incestueux qu'il fit faire dans sa famille
pour y conserver ses terres, etc.
LESDIGUIÈRES. Foyez CRÉQUI
CCbarles.)
1 LES
LESEUR. Voyez JACQUIER.
LESLEY (on prononce LELIE) , Zg*.
lœus ( Je,v\ ), évêque de Ross en Ecosse,
né en 1527, était d'une des plus nobles
familles de ce royaume ; il fut ambassa-
deur, en 1571, de la reine Marie-Stuart à
la cour d'Angleterre, et y souffrit de
grandes persécutions. Il rendit di.s ser-
vices imporfans à cette princesse , et u(v
gocia pour sa liberté à Rome, à Vienne
et dans plusieurs autres cours. Il fonda
trois séminaires pour les Ecossais , l'un à
Rome , l'autre à Paris , et le troisième à
Douai , et exerça pendant sept ans les
fonctions épiscopales dans le diocèse do
Mafines. Il mourut à Bruxelles, le 51 mai
1596. On a de lui une Histoire d'Ecos-ie
en latin, sous ce titre : De origine ^ mo~
ribus et rébus gestis Scotorum^ Rome ,
lo78 , 1 vol. in-4° ; et quelques écrits en
faveur du droit de la reine Marie et de
son fils à la couronne d'Angleterre. Les
protestans ont accusé son Histoire de
partialité; mais elle ne pouvait manquer
d'essuyer ce reproche de leur part, à
moins d'en arracher les faits les plus
vrais et les plus connus. Voyez KING.
LESLEY ( Charles ) Lelie , évêque de
Carlisle , mort en 1722 , fut tout à la fois
zélé défenseur du christianisme , et zélé
partisan de la maison de Stuart. Il est
auteur de plusieurs traités estimés des
anglicans : | Méthode courte et facile
contre les déistes^ h»-8", traduite en la-
tin, in-/j." ; I Méthode courte et facile con-
tre les Juifs^ plus étendue que la précé-
dente, et tirée en partie de l'ouvrage de
Limborch, intitulé : Arnica coUatio cum
e7'udito Judœo ( voyez LIMBORCH )
I Défense de la méthode contre les dé/s--
tes ; I Lettre sur le dieu des Siamois ,
Satn7nonochodon ; \ Lettre à un déiste
converti; \ La vérité du christianisme
démontrée, dialogue entre un chrétien et
un déiste , 1711, in-8°; | Dissertation sur le
jugement particulier et sur l'autorité en
matière de foi. Tous ces écrits, excepté
le sixième , traduits de l'anglais par le
père Houbigant de l'Oratoire, ont parti
à Paris, l'an 1770, en un vol. in-8**.
LESMAN (Gaspard), habile graveur
en pierres fines, vivait à la fin du 16'
siècle, sous l'empereur Rodolphe II , dont
il était valet de chambre. Il a découvert
une nouvelle méthode de graver. C'est à
cette pratique , conservée dans les fabri-
ques de Bohème , qu'on doit ces ouvrages
de verre dont la délicatesse et le grand
fini étonnent même les connaisseurs.
LES
452
LES
Î.ESSEVILLE(EcsTAcnE le CLERC de),
d'î Paris , d une famille noble, se signala
lellcment dans ses études , qu'il fut choisi
recteur de l'université de celte ville avant
I âge de 20 ans. Il devint docteur de la
maison et société de Sorbonne , l'un des
aumôniers ordinaires du roi Louis XIII ,
conseiller au parlement, et enfin évoque
de Coutances. Il s'acquit l'estime et l'a-
mitié de ses diocésains, et fut l'arbitre
des affaires les plus importantes de la
province. Une connaissance profonde de
la théologie et de la jurisprudence le ren-
dirent particulièrement recommandable.
Cet illustre prélat mourut à Paris en I6GS,
pendant l'assemblée du clergé , à laquelle
il était député.
* LESSIAG (Gotthold-Ephraim) , un
des écrivains allemands qui ont rendu le
plus de services à la littérature de son
pays , naquit à Kamcnz dan^ la Lusace ,
le 22 janvier 1729, et , après avoir reçu
les premières leçons de son père , minis-
tre luthérien, fut confié aux soins d'un
précepteur nommé Mylius, dont le frère
devint plus tard l'ami intime de Leissing.
Les succès précoces de l'enfant exigeant
un plus grand développement dans l'in-
struction qui lui était donnée , il fut en-
voyé au collège de Meissen , puis acheva
ses études à Leipsick où il se rendit en
17i6. Il suivit les conférences du célèbre
Kaeslner , demeura quelque temps à Ber-
lin, et se rendit ensuite à Wittenberg,
où il fut reçu maître-ès-arls. Plus tard il
fut chargé à Leipsick de l'éducation du
fils d'un riche négociant, qu'il accompa-
gna dans ses voyages en Saxe et en Hol-
lande. Après avoir séjourné quelque
temps à Leipsick , après son retour , il se
fixa à Berlin, où il fut nommé membre
honoraire de l'académie des sciences en
1760 ; peu après il quitta la capitale de la
Prusse , pour aller occuper à Breslau , la
place de secrétaire du gouvernement au-
près du général Faunzein. Il conserva ce
poste pendant cinq ans , au bout desquels
il revint à Berlin en 1767 , et s'établit à
Hambourg , où une société d'amis de l'art
dramatique l'appela , en lui offrant des
conditions avantageuses. En 1770, il fut
nommé bibliothécaire de Wolfenbuttel et
conseiller aulique. Ayant ensuite obtenu
en 1773 la permission de voyager, Les-
sing alla à Vienne , où il trouva le prince
Lcopold de Brunswick, avec lequel il
partit pour l'Italie. Mais il ne put visiter
que le nord de cette terre classique des
boaux-arts, et au bout de 8 mois il revint à
Wolfenbuttel , où il termina le 13 février
1781 , à l'âge de 52 ans , une carrière qui
n'avait pas été sans chagrins. Il avait été
surtout profondément affecté de la perle
de sa femme morte en 1778. Lessing était
très versé dans les belles-lettres, la philo-
sophie , les mathématiques , les langues
anciennes cl modernes. Ses nombreux
ouvrages ont exercé la plus grande in-
fluence en Allemagne , et la plupart sont
regardés comme classiques. La langue al-
lemande lui doit cette précision , celte
élégance et même cette douceur dont on
ne la croyait pas susceptible. J. Ad.
Schlegel , Mylius , Zachariae , Wcisse ,
Kaeslner , etc. furent ses amis. Ses prin-
cipales productions sont : I Mémoires pour
servir à l'histoire et aux progrès du théâ-
tre^ Berlin , 175 ; | des Fables avec
une Théorie sur l'jpologue; elles ont
été traduites en français par d'Antelmy,
Paris, 1764, in-12. Le principal tort de
ces fables est d'être en prose , et l'au-
teur parait l'avoir reconnu lui-même
quand il écrivait : « J'ai mieux aimé
B prendre une route différente et plus
B mauvaise , que de m'exposer au dan-
B ger d'une comparaison défavorable avec
» les Gleim et les Lafonlaine » | La Fie de
Sophocle ; \ Lettre sur la Littérature ;
I Laocoon^ ou des limites respectives de
la peinture et de la poésie , Berlin, 1765.
Cet ouvrage est très estimé ; il a été tra-
duit en français par M. Vandcrbourg,
Paris , 1802 ; | De& Images de la mort
chez les anciens. 1763. Cet écrit, ainsi
que le précédent, traite de la théorie di»
beau dans les arts. On trouve une tra-
duction de ce dernier ouvrage dans le
Recueil de pièces intéressantes concer-
nant les antiquités > Paris , 1786. Lessiiij
engage les peintres à offrir l'image de la
mort sous la figure d'un ange , et non
sous celle d'un squelette, fondé, entre
autres choses, sur un passage de l'Ecii-
ture qui parle d'un ange de la mort.
I Dramaturgie , ou Préceptes sur l'art
dramatique : cet ouvrage parut par nu-
méros à Hambourg en 1767 et 1768. L'au-
teur prétend que les Français , dans leul
théorie dramatique , ont mal compris les
Grecs : il critique sévèrement les prin-
cipales pièces de Voltaire et de plusieurs
autres auteurs français ; et , sans attaquer
Racine , il semble présenter la correction
de cet illustre poète comme sa qualité do-
minante. Cet ouvrage de Lessing, où l'on
remarque beaucoup de prévention natio-
nale , est cependant plein d'éloquence et
LES 4
d'érudition. Il a été traduit en français
par Cacaiilt, revu, corrigé et ptiblié par
G.-A. Junker, Paris, 1783, 2 vol. in-8".
I Mémoires historiques et littéraires ^ ti-
rés des trésors de la Bibliothèque ducale
de TFolfenbuttel , 1773 ; | Fragmens d'un
inconnu; \ Pope métaphysicien, ou Exa-
men du système de ce poète philosophe ;
I Ernest et Falk. dialogue pour les francs-
maçons. Lessing a fait, en outre , en al-
lemand , les traductions suivantes ; | Exa-
man de los Ingénias, ou Examen des es-
p?its . propres aux sciences, par D.-J.
Huartc , espagnol ; | Histoire des Arabes
sous les califes , par l'abbé Marigny ;
I Système de philosoj)hie morale, par
l'anglais Hutcheson ; | Le théâtre de Di-
derot. On cite parmi ses pièces : Le Jeune
Sav^ant ; Les Juifs , Le Misogyne (ou En-
nemi des femmes) , IJ esprit fort. Lessing
a donné ces comédies à l'âge de 20 à 22
ans. Le Trésor, imité de Plaute ; Miss Sara
Samson, 1773, première tragédie bour-
geoise allemande; Philofas, tragédie,
i7b9', Emilia Galottt,lTasédie, 1772; Âfin-
nade Barnhelm, comédie en prose, 1763,
imitée par Rochon de Chabanne , sous
le titre des Amans généreux , in k-, Na-
than le Sage, 1779 , pièce trop longue pour
être représentée , mais qui eut à la lecture
un prodigieux succès ; elle est tirée d'une
Nouvelle de Boccace , et a été imitée par
Chénier; Minna de Barnhelm, Nathan
le Sage , et Emilia Galotti, ont été tra-
duites par M. de Barante , dans les chefs-
d'œuvre des Théâtres étrangers , publiés
par Ladvocat. Les OEuvres de Lessing
ont été imprimées à Berlin par Voss , 50
vol. in-18 , 1771-1794. Ils se terminent par
la Correspondance de l'auteur avec les
littérateurs les plus renommés de l'Alle-
magne. Parmi les Notices écrites sur Les-
sing, la plus étendue est celle qui se
trouve dans le Dictionnaire des poètes et
prosateurs allemands, de Joerdens, tome
4*. Quoiqu'il lût avec une espèce de pré-
dilection les écrits de Diderot , Lessing le
considérait cependant « comme un de ces
» philosophes qui cherchent beaucoup
» plus à rassembler qu'à dissiper les nua-
■ ges : partout où ils portent leurs yeux ,
» dit-il , on voit s'ébranler les bases des
»> vérités les mieux établies... » Malgré
cet aveu, Lessing mérita le même repro-
che dans ses fameux Fragmens d'un in-
connu, ouvrage qui lui suscita de justes
critiques de la part des théologiens.... « Il
» était convaincu, dit un de ses biogra-
* phes , que la publication de ses f rag-
f.
3 LES
» mens devait cire utile à la religion , en
» provoquant l'examen et la réfutation
I) des objections qu'ils contenaient contre
» plusieurs points du christianisme, tels
D que la révélation , la résurrection , le
» but de Jésus-Christ et de ses disci-
i> pies, etc.. » Ce moyen de faire triom-
pher les dogmes de la religion chrétienne
parait tout-à-fait étrange : c'est comme si
l'on blessait de plusieurs coups de poi-
gnard un homme innocent et respecta-
ble, pour avoir ensuite le plaisir , d'ail-
leurs incertain, de le voir guérir et jouir
d'une meilleure santé. Les Fragmem
d'un inconnu furent vivement réfutés par
Semler, Dœderlein. le ministre fjoëze, etc.
Quelque temps auparavant , Lessing avait
publié un ouvrage de Bérenger sur V Eu-
charistie, qu'il avait trouvé manuscrit
dans la bibliothèque de Wolfenhutlel. Il
y joignit une Préface où il explique les
nombreuses variations du fameux archi-
diacre d'Angers; il tâche de combattre
l'autorité des anathèmes lancés contre
l'auteur, et quelques synodes ou conciles
tenus à ce sujet , dont même il révoque
en doute l'existence ; il veut prouver en-
fin que l'ouvrage sur l'eucliaristie est pos-
térieur aux autres ouvrages de Bérenger.
Dans sa Dramaturgie ( T' part. , p. 24 ) ,
il semble indigné contre un vers d'une
tragédie dont le sens est qxie le ciel par-
donne , mais qu'un prêtre ne pardonne
jamais ; et il ajoute : « Dans toutes les re-
n ligions , des prêtres ont fait du mal ,
» non comme prêtres , mais comme scé-
» lérals , et ils auraient profité , pour sa-
I) tisfaire leurs passions, des privilèges
» de tout autre état. » Le mélange de poi-
son et d'antidote que renferme cette
maxime n'en écarte pas la n-ortelle amer-
tume , et il aurait mieux valu , pour la
réputation de Lessing et pour sa propre
tranquillité , qu'il eût mieiix connu ou
plus respecté les vérités concernant l'E-
glise. Mais il voulait dogmatiser à tous
risques et périls. Aussi en même temps
qu'il reproche (t. 30 , p. 537 ) aux ortho-
doxes {\\\'(hi'v\&n%)leur intolérance , il dit
être convaincu que les théologiens de la
nouvelle école, si on leur permet de pren-
dre le dessus, finiront par tyranniser plus
que n'ont jamais fait les premiers Voilà
les théologiens luthériens accusés d'into-
lérance par un de leurs sectaires , eux
qui ont accusé les théologiens catholiques
d'être des despotes inlolérans. Au reste ,
ce n'est point à ceux de ses écrits qui
contiennent ces principes que Lessing
37
LES
434
LES
doit sa célébrité, il était là comme hors
de sa roule , et ne pouvait que s'égarer.
On peut consulter sa vie par son frère ;
le T^écrologe de Schmid , etc.
LESSIUS ( LÉONARD ) , né à Brechtan ,
village près d'Anvers , en 1554, prit l'ha-
bit de jésuite l'an 1572, et professa avec
distinction la philosophie pendant sept
ans à Douai , et la théologie à Louvain
depuis l'an 1583 jusqu'en 460S. Il fit sou-
tenir , de concert avec Hamélius , son con-
frère , en 1586 , des Thèses qui parais-
saient opposées aux senlimens de saint
Thomas. La faculté de théologie de Lou-
vain censura 34 propositions tirées des
thèses de Lessius. Elle crut voir que le
jésuite, en combattant le hàianisme ^ s'é-
tait jeté dans le semi-pélagianisme. Sta-
pleton , professeur à Louvain, se déclara
contre cette censure dans une lettre à i'é-
vèque de Middelbourg, insérée dans
l'Histoire des congrégations De auxiliis
du père de Meyer, p. 32. L'université de
Douai se joignit à celle de Louvain. Il
1 ègne dans la censure de Douai un air de
vivacité qui montre un peu de passion.
Lessius en ayant appelé à Rome, Sixte V
lit examiner dans une congrégation la
doctrine condamnée dans Lessius, et
après un rigoureux examen , ses propo-
sitions furent déclarées sanœ doctrinœ
articuli. La censure fut cassée et le juge-
ment pontifical publié à Louvain , par
ordre du nonce Octavio, évêque de Ca-
jazzo en 1388. Quesnel et Gerberon pu-
blièrent chacun une Apologie historique
de la Censure ; mais ces deux apologies
furent condamnées par Iimocent XII en
1097. Lessius fil déclarer pour lui les ufii-
versités de Mayence, de Trêves et d'In-
golsladt. On peut voir ce qui regarde
cette affaire, amplement détaillé par Ha-
bert , évêque de Vabres , dans son livre
De la défense de la foi sur la grâce^
chap. 14, § 3. On sait que Habert n'était
pas favorable aux jésuites , et sa relation
acquiert par là une considération particu-
lière : elle est toute à la décharge de Les-
sius. Ce jésuite célèbre mourut en 1623,
à 69 ans. Il savait la théologie , le droit ,
les mathématiques, la médecine et l'his-
toire ; ses ouvrages en sont un témoi-
gnage. Les principaux sont : \ De justifia
et jure actionum humanarum Aibri IV ,
Anvers, 1021, Lyon, 1033, in-fol. Saint
François de Sales eslimail beaucoup cet
ouvrage , comme il paraît par une lettre
qu'il lui écrivit, et dont l'original fui
gardé jusqu'en 1775 au collège des jésuites
à Anvers. C'est dans la même lettre qua
le saint évêque se déclare pour les senli-
mens de Lessius sur la prédestination et
la grâce ( i ). | De potestate summi poU'
tificis, ouvrage solide et bien écrit ; mais
dans lequel l'auteur paraît tenir encore à
l'opinion de la puissance temporelle des
papes ; | Hxjgiaslicon^ seu ver a ratio va'
letudinis bonce et vitce^ una cum sen-
suum et judicii et memoriœ integritate
ad extremam senectutem conservandœ ;
Anvers , 1613 et 1014, in-8°, avec le traité
de Louis Cornaro sur la même matière ,
traduit de l'italien par Lessius , Cam-
bridge , 1654 , in-8°. Ces deux traités ont
été traduits en français par Séb. Hardi ,
Paris , 1646 , et enrichis de noies par de
la Bonnodière , Paris , 1701 ; | plusieurs
(i) Le père Graveson {voyet ce nom) ayant nié la
réalité de cette lettre, on fit graver l'original en
1729, avec la plus grande exactitude cbatcograpbi-
que , et des copiei imfiriraées aa/ac simile en furent
répandues partout. C'est sur une de ces copie» qui
deviennent rares, que nous la traoscrivons ElU est
S' propre i faire connaître le saint prélat et 1". savant
religieux, qu'on ne sera pas fâché de la trouver ici.
• Admodum révérende in ClirUto Paler , Ailulit mi'i
Palernilalia Vestrcg lilleras dileelissimus no&it ma-
gisler Gabriel , tjiice ni perhonorifica , ila tl jucundis-
simce mihi fuerunl . Amabam jam pridem , imo eiiarn
venerahar te nomenque luum, mi Fater, non soliim quia
toleo quidijuid ex vestfa illa SocirtaU proadit ma-
gni/acere , led etiam quia sigillatim de vêtira rt«e-
rentia multa audivi prceclara primum , deinde tidi ,
inspexi et suspcxi. P'idi namque ante aliquot annot
opus illud utilissimum : De justitia et juie , in quo et
hrcvlter sirnul et lucuienler, di/ficullales ilhus partit
Iheologiœ, prce calerii autoribus quos viderim, egregit
solvis. Vidi postea consilium quod a magni consilii
angelo per le morlalibus dalum est De vera religione
eligcnda , ac demum ohilcr vidi in hibliotheca cotlegti
lugdunensis Iraclalum De prœdestioalione ; et quam-
vis non nisi sparsim, ut fi/, ociilos in eum injicere con-
tigerit, cognovi tamen, Falernilalem ^es/ram senten-
tiam illam, antiquitale , suavitale , ac Scriplurarum
naliva aulorilate iiobilissimam. De prsdestioatioac ad
gluriam posl praevisa opéra ampUcli ac tueri ; ,quod
tara mihi gratissimum/uil qui nimirum eam sempir ,
ut Dei misericordice ac graliœ magis consentaneam ,
veriorem ac amabiliorem exislimavi ; quod eliam
tanlisper in libella lie araore Dei indicavi. Cum igitut
ila erga Falernilalii Veslrce merila , quam dudum
laudaveranl apud me opéra ejus , affectus essem , m»»
rifice profecIO gavisus sum, me libi vicissim utrumque
etiam earum esse ; quod ut semper conlingat , et dic-
lum magistrum Gabrielcm sommmdalissimum habee,
et si quid unquam polero q/iod tibi plactre cognoscam,
id cxequar quam impemissime, Valeal intérim reve-
renda Faternilas tua , et te Deus usque in tenectaii tt
senium numquam derelinquat , sed canos lues biiiedic
tionibus calesllbus omet et tompleal, Annessi (iilru-
ninsium , 26 Augnsti i6i3. Admodum Revrrendir Pa-
lemilatis yestrcf humitlirnus et addictiisimus f rater tt
strvus in Chrisio l'ianciscut episeopus Gibenneif
LES
455
LES
Opuscules recueillis en 2 vol. in-fol. ,
pleins de lumières et de sentimens, écrits
avec beaucoup de clarté , d'éléyance et
d'intérêt. On y dislingue le petit traité
De capessenda vera religione^ ouvrage
qui, dans sa brièveté, fait un excellent
traité de controverse , par lequel beau-
coup d'hérétiques ont été ramenés à l'E-
glise; et celui />er Providentia Numinis ;
plein de pensées justes, profondes et
touchantes. La vie de ce jésuite a paru
sous ce titre : De vita et moribus L. Lessù\
Paris , 1644 , in-12. On garde dans la bi-
bliothèque de l'archcvêclié de Malines les
Informations manuscrites sur sa vie et
5es vertus. On les avait prises d'abord
après sa mort , dans la croyance que l'on
travaillerait un jour à sa béalilication.
Lessius possédait le grec, l'histoire, le
droit canon , le droit civil , les malhéma-
tiques et la médecine. Juste-Lipse fait
les plus grands éloges de ce savant.
Voyez la Fie de Lessius par Foppens ,
Bibl. Belg.
LESTAIVG (François et Christophe
de), dont le premier fut président à mor-
tier au parlement de Toulouse , et le se-
:;ond, évêque de Lodève, puis d'Alet et
de Carcassonne. Ils furent l'un et l'autre
attachés à la ligue ; mais lorsque la paix
eut élé rendue à la France, ils servirent
utilement Henri IV et Louis XIII. Fran-
çois mourut en 1617, à 76, ans, laissant
quelques ouvrages de pieté et de litiéra-
lure; et Christophe en 1621.
' LESTIBOIJDOIS ( JEA?f-B.\PTiSTE ) ,
médecin , né en 1713 , à Douai , cultiva
la botanique avec succès, devint en
i759 , pharmacien en chef de l'armée
française, et décrivit les plantes qui crois-
sent dans les pays de Brunswick et de
Cologne. Nommé, en 1770, professeur
do botanique à Lille , il conserva cette
chaire jusqu'à sa mort arrivée dans la
même ville, le 20 mars 1804. En 1707, il
avait publié un mémoire sur la pomme
de terre ( Solanum taberosum) , à l'usage
de laquelle l'ignorance avait attribué une
épidémie qui était survenue. Lestiboudois
fut le premier qui indiqua tous les
avantages qu'on peut tirer de ce précieux
végétaLIlfut,en 1772, le principal ré-
dacteur de la Nouvelle Pharmacopée
de Lille, et composa en 1774 , une Carte
de Botanique ^ qui offre la combinaison
de la méthode de Tournefort avec le sys-
tème de Linnée , et qui est accompagnée
d'un Abrégé élémentaire de botanique.
Valmont de Bomare s'en est servi pour
la partie phytologique de son Dictionnaire
d'histoire naturelle. Il ne faut pas con-
fondre ce médecin comme l'ont fait quel-
ques biographes , avec son fils , Fraî«-
çois Joseph LESTIBOUOOIS qui fut aussi
médecin et professeur de botanique à
Lille. Celui-ci est auteur d'une Bofano-
graphie Belgique, i voL in-8°, 1781; 1*
édition ,1796, 4 vol. in-8°, et d'une zoolo-
gie élémentaire „ ou Abrégé de l'histoire
naturelle des animaux, à l'usage des
com.mençans , Lille, 1803, în-8°. Il était
né à Lille , et il y mourut en 1813
LESTOIVAC ( Jeanne de ) , fondatrice
de l'ordre des Religieuses bénédictines
de la compagnie de Noti'e-Dame , naquit
à Bordeaux en 1536. Elle était fille de
Richard de Lestonac, conseiller au par-
lement de cette ville , et nièce du cé-
lèbre Michel de Montaigne. Après la
mort de Gaston de Mont-Ferrand, son
mari, dont elle eut sept enfans , elle
institua son ordre pour l'instruction des
jeunes filles , et le fit approuver par le
pape Paul Y en 1607. Quand ce pontife
eut donné sa bulle , il dit au général des
jésuites : « Je viens de vous unir à de
» vertueuses filles , qui rendront aux
» personnes de leur sexe les pieux ser-
» vices que vos pères rendent aux hommes
» dans toute la chrétienté. » Madame de
Lestonac , en se consacrant à la vie reli-
gieuse , avait sacriiié tous les agrémens
de la figure et les avantages de la nais-
sance. Sa congrégation se répandit en
France , et y eut un grand nombre de
maisons , que la révolution de 1789 n'é-.
pargna pas plus que les autres élablisse-
mens édifians et utiles. Voyez l'Histoire
des religieuses de Notre-Dame , par Jean
Bouzonie : et la Vie de madame Lesto-
nac, par le père Beaufils , jésuite, Tou-
louse, 1742, in-12.
• * LESTRAI>iGE ( le père Augustin
de ) , abbé de la Trappe , un des plus il-
lustres réformateurs de l'ordre de Cîteaux,
né vers 1730 , entra jeune encore dans un
des couvens de cet ordre : à l'époque de
la révolution , il était maitre des novices
dans la province du Perche. En 1790,
des commissaires du déparlement de
l'Orne vinrent signifier à ces bons céno-
bites la suppression de leur maison , dé-
crétée par l'Assemblée nationale. Les
religieux de la Trappe sous la conduite
de leur chef, se rendirent au canton du
Fribourg en Suisse. Il paraît qu'ils clioi-
sirent cet asile afin d'être à portée de
suivre les évenemens de la révolution et
LET
A36
LET
d'attendre l'occasion de rentrer en France.
Cet espoir ne se réalisa qu'en 1817, époque
où une partie des religieux trapistes
levinrent sur le sol natal , ayant à leur
ttte le père Lestrange, dont les vertus
l'avaient élevé à la dignité d'abbé, II
trouva que tous les biens de la Trappe
jflvaicnt été vendus ; d'autres obstacles
^vinrent s'opposer au rétablissement de
ison ordre; mais sa piété fervente, et
j activité de son zèle parvinrent à les sur-
{Ofionter. En peu d'années, il établit la
nnaison mère à Soligni ( département de
fl'Orne ) , et il fonda plusieurs succursales
Laval, à ChoUet , à la Meilleraie, à Lyon
tl à Aiguebelle , en Savoie. On a aussi
érigé ( en 1818) , et par ses soins , à Soli-
t'ni, un collège séparé du monastère,
qui compte un grand nombre d'élèves.
De temps en temps, l'abbé de Lestrange
venait voir ses succursales : c'est dans
une de ces visites qu'il est mort à Lyon ,
le 16 juillet 1827 , âgé de plus de 76 ans.
LESUEUR. roïjez SUEUR.
LESIJIVRE. Foijez SUIVRE.
LETELLIER. Foyez TELL 1ER (le).
• LETIIIÈRES ( GuiLLAU»iE-45uii.LON ) ,
célèbre peintre d'bistoire , né en 1760 à
la Guadeloupe, au quartier Ste,- Anne,
vint en France en 1774 , et suivit pendant
3 ans les leçons de M. Descamp , profes-
seur de peuiture à l'académie de Rouen.
Il remporta plusieurs prix dans cette
école , et entra ensuite chez M. Doyen ,
peintre du roi , où il continua ses études ,
jusqu'en 1786. Ayant remporté cette même
année le grand prix de peinture , il se
rendit à Rome comme pensionnaire du
roi. Pendant son séjour dans la capitale
des beaux-arts , il envoya à l'académie ,
les éludes d'usage parmi lesquelles on
distingua son Junius Brutus. De retour
à Paris , en 1792 , Lethières continua de
travailler avec succès jusqu'à l'époque
où M. Suvé, directeur de l'acadéiiiie de
iiome , étant venu à mourir , Lethières
lut désigné par l'académie de Paris pour
lui succéder. Il remplit cette place pen-
dant 9 ans. Lorsque la k^ classe de l'in-
stitut l'admit au nombre de ses membres,
en 1813, le roi, auprès de qui on avait
" desservi le peintre, n'approuva point l'é-
lection. Louis XVIII bientôt mieux éclairé,
agréa le choix de l'académie , et nomma
Lethières professeur. Parmi les belles
productions de ce peintre , on dislingue
son grand tableau de Junius Brutus con-
damnant ses fils . qui se voit dans la
grande galerie du Luxembourg ; Enèe et
Didon fuyant Vo7-age ^ exposé au salon
de 1819 ; Philoctète gravissant les rochers,
de Lemnos^ placé au corps législatif;
VActe héroïque de St.-Louis pétulant la
peste de Tunis ^ au musée de Bordeaux;
le passage du pont de Vienne par les
troupes françaises : François I" au mi-
lieu des savons et des artistes de son
temps . ax:cordant l'établissement du col-
lège de Frayice ; Homère chantant ses
rhapsodies ; le Jugement de Pâtis ; une
Scène religieuse dans les Catacombes ; le
Christ apparaissant sous la forme d'un
Jardinier^ dans l'église de St. - Roch.
Lethières voyagea beaucoup pour étudier
son art. Artiste désintéressé, il cherchait
plutôt des amis pour lui donner des con-
seils , que des protecteurs qui lissent sa
fortune , ou des flatteurs qui lui prodi-
guassent des éloges. Il est mort à Paris ,
le 22 avril 1832 , d'une maladie chronique
dont il était atteint depuis plusieurs
années.
LÉTI (Grégoibe) , né à Milan en 1630 ,
d'une famille bolonaise, montra de bonne
heure beaucoup d'esprit et peu de vertu.
Après avoir fait ses études chez les jé-
suites , à Cosenza et à Rome, il se mit à
voyager , ot se fil connaître pour un
homme d'un caractère ardent. L'évêque
d'Acquapendente , son oncle, qu'il alla
voir en passant , fut si choqué de la liar-
diesse de ses propos sur la religion , qu'il
le chassa , en lui prédisant qu'il se
laisserait infecter du poison de l'héré-
sie. Ses craintes n'étaient pas sans fon-
dement. Léli vit à Gènes un calviniste
qui lui inspira ses principes. Il passa de
là à Lausanne , où il fit profession de la
nouvelle religion. Un médecin de cette
ville lui fit épouser sa fille. De Lausanne
il alla à Genève en 16C0 ; mais une hu-
meur querelleuse l'ayant obligé de sortir
de cette ville , après y avoir demeuré
environ vingt ans, il se réfugia d'abord
en France. A son arrivée à Paris , il s'y
fit connaître en présentant à Louis XIV
son ouvrage cité : £a Renommée jalouse
de la Fortune; mais les protestans étant
mal vus à la cour , il quitta bientôt la
France d'où il se rendit à Londres.
Charles II le reçut avec bonté, et dès la
première audience il lui fit un préseul
de mille écus , et lui promit la charge
d'historiographe. Ce bienfait n'empccha
pas qu'il n'écrivit VBistoire d'Angleterre
avec une licence qui lui fit donner son
congé. Amsterdam fut son dernier asile.
Il y mourut en 1701, à 71 ans , avec le
LET
457
LET
litre d'hisloriographe de cette ville. Léli
était un historien famélique, qui, en
écrivant , consultait plus les besoins de
son estomac que la vérité. Il offrit ges
services à tous les potentats de l'Europe.
Il leur promettait de les faire vivre dans
la postérité ; mais c'était à condition qu'ils
ne le laisseraient pas mourir de faim
dans ce monde. Sa plume est toujours
flatteuse ou passionnée. Plus soijîueux
d'écrire des faits extraordinaires que des
choses vraies, il a rempli ses ouvrages
de mensonges, d'inepties et d'iuexacfi-
ludes. Son style est assez vif, mais diffus,
mordant , hérissé de réflexions pédantes-
ques et souvent très mauvaises , et de
digressions accablantes. On a de lui un
grand nombre d'ouvrages en italien.
Paruïi ceux qui ont été traduits en fran-
çais, on cite : ] la Monarchie universelle
du roi Louis Xir. 1689,2 vol. in-12.
Il y eut une réponse à cet ouvrage , sous
le titre de L'Europe ressuscitée du tom-
beau de M. Léti, Utrecht, 1690, in-12 ; j Le
Népotisme de Rome ^ in-12, 1667, trad.
en franc, en 1C69 , 2 tom. in-12 ; | la Fie
du pape Sixte-Quint , traduite en fran-
çais en 2 vol. in-12 , Paris , 1683 ; et
plusieurs fois réimprimée depuis. L'au-
teur répondit à une princesse qui lui de-
mandait si tout ce qu'il avait écrit dans
ce livre était vrai : « Une chose bien
» imaginée fait plus de plaisir que la vé-
» rite dépourvue d'oruemens. » Excepté
quelques propos prêtés sans doute à Sixte
V , et sûrement très contestables , c'est
peut-être la seule histoire où Léti se soit
le plus approché de la vérité. Quant aux
interprétations qu'il donne à des faits
certains, elles ressemblent à toutes celles
des sectaires ennemis de Rome. Le tra-
ducteur y fit des relrauchenicns, et en
eût dû faire davantage. | La Fie de Phi-
lippe 11^ roi d'Espagne. Elle a été traduite
en 1734 , en 6 vol. in-12. L'auteur ne s'y
montre ni catholique ni prolestant. Si ,
pour être bon historien , il suflisait de
n'avoir ni religion ni amour pour sa pa-
trie, Léti l'aurait été à coup sûr. | La
Fie de Charles-Quint , traduite en fran-
çais, en 4 vol. in-12, par ks filles de
l'auteur : compilation ennuyeuse; | la
Fie d'Elizabeth ^ reine d'Angleterre^
1694 et 1741 , 2 vol. in-12. Le roman y est
mêlé avec Thistoire. | U Histoire de Crom-
u;eW,i694 et 1705, 2 voL in-12, ramas
confus de tout ce qu'il a lu ou entendu ;
celle de l'abbé Raguenet est d'un tout
autre goût, et incomparablement mieux
écrite. I La Fie de Pierre Giron , duc
d'Ossone^ 1700, Paris, 3 vol. in-12,
assez intéressante, mais trop longue;
I Le syndicat d'Jlexandre Fil . avec
son Foyage en l autre mon: le j 1669, in-12;
satire emportée, telle qu'on devait l'at-
tendre d'un apostat. Ce n'est pas la seule
qu'il ait publiée contre Rome, les papes
et les cardinaux ; mais de telles horreurs
ne doivent pas même être citées. | Critique
histoîique^ politique . morale^ économique
et comique sur les loteries anciennes et
nouvelles^ en 2 vol. in-12. C'est'un fatras
satirique , où il maltraite beaucoup de
personnes. Parmi ses ouvrages italiens ,
on distingue : | son Histoire de Genève.
L'auteur n'y ménage pas cette ville. | Son
Théâtre de la Grande-Bretagne^ 1684,
qui le fit chasser d'Angleterre. L'un et
l'autre sont en 5 vol. in-12. [Le Théâtre de
la France j 7 vol. in-4°, fig., mauvais ou-
vrage ; I le Théâtre de Belgique , 2 vol.
in-8", aussi mauvais que le précédent ;
I V Italie régnante^ 4 vol. in-12; | \ His-
toire de l'empire romain en Germanie ^
4 vol. in-4°; j le Cardinalisme de la
sainte Eglise. 1G68 , 3 vol. in-12 : c'est
une satire basse et sans esprit ; | La juste
balance dans laquelle on pèse toutes les
maximes de Rome et les actions des car-
dinaux vivans ^ 4 vol. in-12; libelle du
même genre et dans le même goût que
le précédent ; | le Céfrémonial historique .
6 vol. in-12; \ Dialogues politiques sur
les mojens dont se servent les républiques
d'Italie pour se conserver , 2 vol. in-12.
I Abrégé des vertus jmtriotiques . 2 vol.
in-8"; | La Renommée jalouse de la For-
tune ; i Panégyrique de Louis XIF, in-4° ;
I Eloge de la chasse j, in-i2 ; | des Lettres .
1 vol. in-12 , où il avoue lui-même que
sa vie n'élait pas fort réglée , et qu'il me-
nait celle d'un débauché (part. I, pag. 14,
lett. 5, pag. 26., letl. 5); \X Itinéraire
de la cour de Rome , 5 vol. in-S" ; | His-
toire de la maison de Saxe . 4 vol. in-4'';
I de celle de Brandebourg , in-4° ; [ Le
carnage des réformés innocens , in-4*';
I Les précipices du siège apostolique. 1672.
in-12, etc. Léli avait encore fait divers
autres ouvjages qu'il a eu raison de dés-
avouer. Tous ceux qui portent son nom
ont été généralement condamnés à Rome
le 22 octobre 1700. Léti a écrit plus de
cent ouvjages qu'il doit pîulôl à son ima-
gination quà l'histoire, qu'il consultait
rarement. Voyez le Diclioimaire de AIo-
réri . les Mémoires de JSicéron. tom, 2
et 3 et le Dictionnaire de Chauffepié.
57.
LET &
• LETOURNEUR ( Charles-François-
Louis-HoxoRÉ ) , connu sous le nom de
Leloumeur de la Manche^ né à Grand-
ville en 1751 d'une famille aisée, se dis-
tingua dans l'étude des sciences mathé-
matiques , et entra dans le génie militaire
€ti 1768. Il était capitaine dans cette
arme à Cherbourg, et avait obtenu la croix
(le Saint-Louis quand la révolution éclata.
Partisan du nouvel ordre de choses, il fut
député par le département de la Manche
à l'assemblée Législative, où il tit quel-
ques rapports sur la marine. Sur la fin
de l'année 1792 , il fut chargé de la direc-
tion des travaux du camp , que l'invasion
des Prussiens forçait à établir sous les
murs de Paris. Réélu à la Convention, il
vola dans le procès du roi d'abord pour
l'appel au peuple : puis il se prononça
pour la mort. Ses rapports avec l'armée
l'occupèrent ensuite presque exclusive-
ment au comité militaire dont il faisait
partie. Letourneur fut nommé président
de la Convention, dans le mois de janvier
1795, et quitta peu après le fauteuil pour
aller, en qualité de commissaire de la
Convention, sur la flotte de la Méditerra-
née, où il remplaça Jean-Bon-Saint-An-
dré. A son retour à Paris il fut nommé
membre du comité de salut public près
du Directoire exécutif. Lorsqu'il sortit
par la voie du sort le 30 floréal an 5,
( 19 mai 1797 ), il fut appelé à exercer
les fonctions d'inspecteur général de l'ar-
tillerie , et fut choisi ensuite pour traiter
des conditions de la paix avec lord Mal-
mcsLury : il se rendit à Lille pour enta-
mer les négociations ; mais les journées
des 18 et 19 fructidor les ayant interrom-
pues, il revint à Paris, et fut nommé
après la révolution du 18 brumaire, pré-
fet de la Loire-inférieure (1800). Desti-
tué en 1804 . il resta sans fonctions jus-
qu'en 1810 , époque à laquelle en le
uomma conseiller à la cour des comptes,
I 11 perdit cette place sous la première res-
tauration , la recouvra pendant les cent
jours et fut exilé par la loi du 12 janvier
1816. Il mourut à Lacken près de Bruxel-
les le k octobre 1817.
LETOUR\EUR. (Pierre) F. TOUR-
NEUR.
* LETOURKEUR ( Antoixe-Pierre,
le marquis), lieutenant-général, né à Paris
en 17o2, était issu d'une des plus an-
ciennes familles du royaume, dont le vrai
nom était Lctowneux , provenant d'un
lief qtii lui fut enlevé pendant les guerres
de la ligue, et qui lui fut restitué 40 ans
o8 LEt
apiès. Le marquis Letourneur commença
sa carrière militaire en 1765 , dan» la 2*
compagnie des mousquetaires, et deux ans
après il devint capitaine de cavalerie. En
17G9 sa bravoure lui valut le litre de ma-
réchal-généial des logis de l'armée, et
en 1775 le grade de colonel. A l'époque
de la révolution, il était major des gardes
du comte d'Artois, depuis Charles X. Il
resta en France par ordre de ce prinre ,
et courut de grands dangers à cause de
son atlacheujent à la famille royale. Lcuis
XVI fut même obligé de lui défendre de
rester auprès de sa personne, parce que
son dévouement pouvait le compromet-
tre. Letourneur se relira à Chantilly;
mais il se trouvait au château lors de la
scène dite des poignards^ et il était prêt à
défendre le roi et à favoriser sa fuite.
Instruit par madame Elisabeth du pro-
cliain départ de Louis XVI pour Varennes,
il précéda ce prince de 2Ï heures, et ce
ne fut qu'après avoir failli deux fois être
arrêté, qu'il parvint à Deux-Ponis. De là
il se rendit à Bengen, ensuite à Coblentz,
auprès de Monsieur comte de Provence
depuis Louis XVIII. Letourneur fut char-
gé d'organiser les gardes du corps des
princes ; en même temps il remonta leur
cavalerie dans laquelle on lui donna uu
commandement important. Dans les cam-
pagnes de 1792 et de 1795 il commanda
les avant-postes. Après le licenciement de
l'armée des émigrés, il passa en Anglo-
terre , entra dans le régiment de Royal-
Louis qui était en garnison àLindsors,
et fut chargé de le recruter et de l'in-
struire. Letourneur fit partie de la mal-
heureuse expédition de Quiberon et de
l'Ile-Louis. Nommé en 1797 maréchal de
camp par Louis XVIII, il servit depuis
continuellement auprès de Monsieur avec
lequel il est rentré en France en 1814, et
qu'il accompagna en 1815 dans la Belgi-
que. Sous la seconde restauration il a
reçu le titre de lieutenant-général et le
cordon de commandeur de Saint-Louis.
Il était encore major des gardes du corps
du comte d'Artois , lorsqu'il mourut en
1824.
LETOURNEUX ( Nicolas ). royez
TOURNEUX.
' LETROSNE (Goillaome-Fraîwçois ) ,
avocat dû roi et conseiller honoraire au
bailliage et présidial d'Orléaris, né dans
cette ville , le 13 octobre 1728, fut élève de
Polh'er et mourut à Paris le 20 mai Ùii\).
Il était lié avec Turgot , Gerbier , labbé
Beaudeau et plusieurs autres personnages
LET /
célèbres. On a de lui un grand nombre d'ou-
vrages parmi lesquels on dislingue : | Me-
thodica juris naturalis cuni jure civili col-
^tï/jo^l7oO,in-i°; | la Liberté du commerce
des grains toujours utile et jamais nui-
sible^ 1764 et 17G5, in-12 ; [ Recueil de plu-
sieurs morceaux économiques ^ Amster-
dam, (Paris), 17G8, in-12 ; \Eloge historique
dcM.Polhier, 1773, in-12 ; | de l'Ordre so-
cial, 1777, in-8°; | de l'Intérêt social, suite
du même ouvrage; | T^ues sur la justice
criminelle, Paris, 1777 , in-8°; | Les Ef-
fets de l'impôt indirect prouvés par les
deux exemples de la gabelle et du tabac ,
1770, in-12, réimprimé en 1777 sous ce
litre : Examen de ce que coûtent au roi
et à la nation la gabelle et le tabac ;
I Réflexions politiques sur la guerre ac-
tuelle de l'Angleterre avec ses colonies ,
Orléans, 1777, in-S"; | de l'Administration
provinciale et de la réforme de l'impôt ,
suivi d'une Dissertation sur la féodalité^
Bâle , 1779 , in-ii.° , ouvrage important ,
couronné par l'académie de Toulouse. Il
fut un des collaboi-ateurs du Journal d'a-
griculture, commerce et finances, Paris ,
1779» 15 vol. in-12 , et des Ephémérides
du citoyen.
* LETTSOM (John-Coakley), médecin
anglais , né vers 17/i.7 dans une petite île
située près de la Tortola , dans les pa-
rages de Sl.-Domingue, fut envoyé en
Angleterre à l'âge de six ans par ses pa-
rens pour faire son éducation. Il étudia
les belles lettres au collège de Warington,
et s'appliqua à la pharmacie, à Yorkshire,
puis à la médecine à Londres , où il eut
pour maître le docteur John Fothergill.
La mort de son père l'obligea de retourner
aux Indes occidentales , pour y régler les
affaires d'une succession qui consistait
en partie en esclaves; Lettsom s'empressa
de donner la liberté à tous ses nègres.
II revint à l'âge de 23 ans en Europe ,
dont il visita les différentes parties , se
lit recevoir docteur à l'université de
Leyde , et alla se fixer à Londres , où.
il fut nommé licencié du collège royal
de médecine et membre de la société
royale. Son nom était inscrit sur les
dyptiques de presque tous les corps
savans. Sa bienfaisance n'avait pas de
bornes, et souvent il aida de sa bourse
les pauvres qui s'adressaient à lui. Pen-
dant une partie de l'année , il résidait
dans une maison de campagne délicieuse,
appelée Grove-lJill , près Camber\vc-1, à
quelques milles de Londres , qui a été
chantée dans un poème de ce nom par
59 LEU
M, Maurice, et par plusieurs autres po'étes,
tels que Jean Scot et Jones Boswel. Il
est rnorl à Londres le 1" novembre 1815,
à l'âge de 72 ans , après avoir publié
d'exceilens ouvrages sur la médecine, la
botanique et l'économie politique. Les
principaux sont : | Observationes ad his-
toiiam theœ pertinentes , Leyde, 17C9,
in-4° ; | Histoire naturelle de l'arbre à
thé, Londres, 1772, in-4° , ouvrage es-
timé, traduit en français, Paris, 1775,
in-12. L'auteur y combat avec force l'usage
du thé ; I Le Compagnon du naturaliste
et du voyageur, 1772 , in-8*', 5' édition,
1800, traduit en français par le marquis
de Lézay-Marnésia, sous le titre de Voya-
geur naturaliste ; \ Réflexions sur le trai-
tement général et la guérison des fièvres,
ïlTi , in-S" ; ] Mémoires sur la médecine
du dispensaire général de Londres ,
mil, in-8'* , traduit en français Paris,
1787, in-8" ; | Amélioration de la mé-
decine à Londres , basée sur le bien pu-
blic , 1773 , in-S" ; ] Observations prépa-
ratoires à l'usage des remèdes du doc-
teur Mayerbach , 1776 , in-8° ; | Histoire
de l'origine de la médecine et de son état
avant la guerre de Troie, \11% , in-i" ,
discours prononcé devant la société royale
de Londres; i Sur la culture et l'usage
de la racine de disette, traduit du fran-
çais de l'abbé Commerel ; | Observations
sur les dissections humaines . 1788, in-8" ;
! I Histoire de quelques-uns des effats de
l'ivrognerie , in-4° , 1789 ; | Essai sur les
I malheurs du pauvre, 1794 , in-8°; | Essai
pour la fondation d'une société de bien-
\f aisance, 1796, in-8°; | Essai on projet
\ pour répandre la bienfaisance , la tem-
pérance et la science médicale , in-8'' ,
de 1797 à 1802 ; | Observations sur la
persécution religieuse , 1800 , in-8°. Il en
a encore fourni plusieurs morceaux cu-
rieux dans les Transactions philoso-
I phiques , dans les recueils des sociétés
! de médecine de Londres , de Bath , etc. ,
I et il a publié une Echelle de santé, pour
j faire connaître les effets des liquides sur
: la santé de l'homme et les suites funestes
de l'excès des boissons. Lettsom s'était
montré attaché aux quakers , avec lesquels
cependant il se brouilla vers la fin de sa
vie.
LEU (saint), appelé aussi saint Loup .
évèque de Sens , succéda à saint Artè:ne
I l'an 609 , se fit estimer du roi Clotaire II ,
' et aimer de son peuple ; il mourut le 1"
; septembre 623, après l'avoir édifié par
ses vertus.
LEU
440
LEU
LKUCIPPBj philosophe grec du 4*
siècle avant J.-C, disciple de Zenon, était
d'Abdcre , suivant la plus commune opi-
nion. Il inventa le fameux système des
atomes et du vide ^ développé ensuite
parDémocrite et par Epicure. Les livres
que ce philosophe a composés ne sont
I)oint parvenus jusqu'à nous; mais Dio-
gène Laërce nous a transmis sa doctrine.
L'hypothèse des tourbillons^ perfectionnée
par Descartes, est aussi de l'invention
de Leucippe , comme le savant Huet l'a
prouvé. On a cru trouver dans le sys-
tème de Leucippe le germe de ce grand
principe de mécanique que Descartes
emploie si efficacement : Les corps qui
tournent s'éloignent du centre autant
qu'il est possible ; parce que le philosophe
grec enseigne que les atomes les plus
subtils tendent vers V espace vide comme
en s'élançant. Mais ce n'est pas à raison
du tournoiement que les atomes les plus
subtils tendent vers l'espace vide ; par
cette raison, les moins subtils y tendent
davantage. Les deux principes sont donc
très différens et en quelque sorte opposés.
Il paraît néanmoins que Keppler et ensuite
Descartes ont suivi Leucippe à l'égard
des tourbillons et des causes do la pesan-
teur, et ont été, comme l'on sait, ac-
cusés de n'être que les copistes du sys-
témateur grec; mais il se peut que le
reproche ne soit pas juste. Les idées de
Leucippe n'étoient pas assez merveilleuses
pour croire qu'elles n'aient pu venir à
l'esprit de ceux qui auraient ignoré la
doctrine de ce philosophe. Leucippe vi-
vait vers l'an 428 avant Jésus - Christ.
Ce philosophe avait aussi adopté le prin-
cipe que la terre portée comme dans un
chariot , tourne autour du centre ; ce qui
se rapproche du système de Galilée, sur
le mouvement de la terre.
LEUFROI (saint), premier abbé de
Madrid, dans le diocèse d'Evreux , où il
était né d'une famille noble, mourut l'an
738. Ce monastère, nommé anciennement
en latin Madriacense ^ du nom du village
où il était situé , s'appela dans la suite
la Croix Saint - Chien , puis la Croix
Saint- Leuf roi. Sa raense conventuelle
fut unie au petit séminaire d'Evreux, par
décret de l'ordinaire , au mois de mars
1741 , confirmé par lettres-patentes du
mois d'avril de la môme année.
• LEULIETTE ( Je\n-Jacques), écri-
vain français, né à Boulogne, le 50
novembre 1767 , fut d'abord garçon ser-
rurier : il se lia avec Mercier , oblint une
place subalterne dans l'administration ,
et se livra à l'élude des lettres. Après la
révolution de 1789 , dont il avait embrassé
les principes avec ardeur , il fut nommé
professeur de littérature à l'école centrale
de Seine -et-Oise, et donna ensuite des
leçons à l'Athénée de Paris : elles ont été
imprimées. Leulietle a laissé les ou-
vrages suivans : | Des émigrés français^
ou Réponse à M. Lally-Tollendal , Paris ,
1797 , in-8°. L'auteur y établit la diffé-
rence de criminalité politique qu'il y
avait à faire entre les émigrés avant le 3i
mai , et les émigrés après le 31 mai;
il absout ceux-ci et condamne ceux-là.
I Réflexions sur la journée du 18 fructi-
dor^ et réponse à Richer-Cerizy , Paris ,
1798, in-S"; | Essai sur la cause delà
supériorité des Grecs sur les Romains
dans tes arts d'imagination , ibid , 1805 ;
I Discours sur l'abolition de la servitude ^
i vol. in-8° ; | De l'influence de Luther
sur le siècle où il a vécu . Paris , 1804 ,
I vol. in 8''(i); |une Vie de Richardson .
traduit de l'anglais, de madame Barbaul ,
Paris , 1808, in-8° ; | Histoire de la Grèce ,
traduction de l'anglais de Gillies , Gold-
smith et Gast , 1808 , 2 vol. in-8° ; Leu-
liette n'a fait que revoir dans cette tra-
duction le travail de M. Villeroy ; | Ta-
bleau de la littérature en Europe depuis
le 16' siècle jusqu'à la fin du 18', et
examen des causes politiques , morales
et religieuses qui ont influé sur le génie
des écrivains et sur le caractère de leurs
productions , Paris, 1809 , in-S". Des
Mémoires littéraires ^ quelques ouvrages
anglais, etc. Il travailla aussi à plusieurs
journaux , notamment à la Sentinelle.
Leuliette est mort à Paris le 23 décembre
1808, des suites du choc d'une voiture
qui le renversa violemment, au moment
où il se disposait à professer un cours
de littérature à la chaire de l'Athénée.
LEUIVCLAVIUS ( Jean), en allemand
Lœwenklau , né en 1553, à Amelbeuern.
en WestpliAlie , d'une famille noble ,
voyagea dans presque toutes les cours de
l'Europe. Pendant le séjour qu'il fit en
Turquie , il ramassa de très bons maté-
riaux pour composer l'histoire ottomane ;
et c'est à lui que le public est redevable
de la meilleure connaissance qu'on en ait.
II joignit à l'intelligence des langues sa-
vantes celle de la jurisprudence. Cet
érudit mourut à Vienne en Autriche en
(i) Ce discours fut placé par l'Institut en «eeondc
ligne de celui de Charles ^'iIle^s, qui obtint le pri».
LEU kk{
1593, à 60 ans. Ses mœurs n'étaient pas
trop pures, si on en ci'oit Scaliger , qui
dit : Ilabebat scorta secum . mais cet
écrivain satirique peut l'avoir calomnié.
On a de lui : j l'Histoire Tnusulmane _.
i591 , in-fol. ; | les Annales des sultans
othomanides . in-fol. qu'il Iraduisii en
latin, sur la version que Jean Gaudier ,
autrement Spiegel , en avait fait de turc
en allemand ; la Suite de ces Annales , qu'il
continua jusqu'en I088, sous le liUc de
Pandectœ turcicœ ; on trouve ces deux
ouvrages à la lin du Chalcondyle du
Louvre. On peut proiUer de ses recher-
ches, mais en les rectifiant, cumme a
fait le père Nicolas Schinit. {Votjez ce
nom. ) I Des Versions latines de Xéno-
l)hon , de Zozime , de Constantin Manas-
sès , de Michel Glycas , de l'Abrégé des
Basiliques : celle-ci parut en 1596 , 2 vol.
in-fol. ; I Commentatio de Moscovitarum
bellis adversus finitinios gestis ^ dans le
Uecueil des liistoriens polonais de Pisto-
rias , Bàle, io81 , 3 vol. in-fol. ; | De jure
grœco-romano > Francfort , 1596 ; | un
Abrégé du Basilicon de l'empereur Léon
VI, avec les Novellce Constitutiones^ Bàlc,
1575. On trouve une notice sur sa vie
dans Mclchior Adam , ^itce germanor.
philos.
L E U P 0 L D ( Jacques ) , ingénieur
saxon, né en 1674 , à Planitz, conseiller
et commissaire des mines du roi de Po-
logne , membre de la société royale de
LEU
gt'cis^ 1672, in-8°; j Clavis hehraica et
pliilologica veleris Teslanienti^ 1685, in-4°;
I Onomasticon sacrum, Ulrecht, 1G84,
in-8** ; | Compendiuin biblicum veteris Tes-
tatnenli ,i&SS, in-8°; | Compendium grce-
cum novi Testamenti , dont la plus ample
édition est celle de Londres en 1688, in-12;
I Philulogus hebrœus. 1593 , in-i° ; | Phi-
lologus hebrœo-grœcus , 1693, in-4°;
I Philulogus hebrœo-mixtus , 1699, in-i*;
I des Notes sur Jonas. Joël et Ozée, etc.
I C'est à lui qu'on est redevable des Edi'
fions correctes de Bochard, de Lighfoot
et de la Synopse des Critiques de Polus :
) on lui doit aussi la meilleure Edition
de la bible d'Athias , imprimée à Amster-
dam, en 2 vol. in-S", 1703, et du nou-
veau Testament syriaque, 1708,2 vol.
ia-4". Voyez pour la liste complète de
ses ouvrages la Bibliothèque sacrée du
père Lelong, et de Urscs Parental Leus-
den. — Rodolphe LEUSDEIS , son liis, a
donné une Edition du nouveau Testament
grec.
LEUTARD, paysan fanatique du Louig
de Vertus , dans le diocèse de Châlons-
sur-Marne, vers la lin du 10"= siècle , bri-
sait les croix et les images , prêchait qu'il
ne fallait pas payer les dîmes, et sou-
tenait que les prophètes avaient dit di-s
choses répréhensibles. Il se faisait suivre
par une multitude innombrable de per-
sonnes qui le croyaient inspiré de Dieu.
Gibuin, évéque de Chàlons, désabusa
Berlin, et de diverses autres, fut un des et convainquit ces pauvres gens. L'héré-
~ siarque désespéré de se voir abandonné ,
se précipita dans un puits. Ses erreurs
ont aujourd'hui des partisans en France,
et Leutard aurait passé pour un pro-
phète ou un apôtre dans les clubs et dani
l'Assemblée nationale.
LELITIAGER (Nicolas), historien et
voyageur , né en 1347 , à PoUich dans le
Brandebourg, professeur de belles-lettres
et minisire luthérien mourut, àWitten-
berg en 1612, à 64 ans. On a de lui une
Histoire de Brandebourg , depuis 1499,
jusqu'en 1594; elle parut avec ses autres
ouvrages et sa Vie^ à Francfort, en 1729,
2 vol. in-4°.
LEXJWEN. Voijez LEEUWEN.
LEUWî.MIOECR ou LEEUWEN-
HŒCK ( Antoine de ) , célèbre pbysicien
et naturaliste, né à Delft en 1632, ex-
cellait à faire des verres pour des mi-
croscopes et pour des lunettes. Ses dé-
couvertes lui ont fait un nom distingué ;
plusieurs sont utiles et réelles , mais d'au-
tres sont parfaitement chimériques. Scm
plus habiles hommes de l'Europe pour
les instrumens de mathématiques. Ce
mécanicien imagina une marmite plus
simple que celles de Papin ; il perfec-
tionna la pompe pneumatique de Hauks-
bée , et lit beaucoup d'expériences sur
les miroirs. Il mourut à Leipsick en
1727 , après s'être rendu célèbre par son
grand ouvrage intitulé : Theatrum ma-
chinarum^ Leipsick, 1724, 3 volumes in-
folio. Cette compilation est utile et re-
cherchée.
LEUSDEX ( Jevx) , savant philologue
hollandais naquit à Ulrecht, en 1624, fut
professeur d'hébreu dans sa pairie, et
s'y acquit avec justice une grande répu-
tation. 11 mourut en 1699, à 75 ans.
Quoique cet écrivain n'ait point fait do
nouvelles découvertes dans la critique
grammaticale , il la connaissait bien , el
il l'enseignait avec autant de clarté que
de méthode. On a de lui plusieurs ou-
vrages estimés: | JSovi Testamenti clavis
grtzca t cum annoiatioîiibiis philolo-
LEV
khi
LEV
système des vers spermatiques, dont il
faisait le principe de la génération , n'a
eu d'autre vogue que celle de la nou-
veauté ; croyant étruirc l'ovarisme , il lui
substitua une hypothèse beaucoup plus
défectueuse , et qui ne soutient point le
premier regard d'un homme judicieux. Ce
qui l'excuse , en quelque sorte , c'est l'im-
puissance reconnue où sont tous les phy-
siciens de rien dire de satisfaisant sur ce
profond mystère de la nature. Le moyen
qu'il crut a voir d'y parvenir était illusoire,
comme l'a très bien remarqué M. Fabre
dans son Essai sur les facultés de l'âme .
Paris , 1783. « Ce n'est pas , dit-il, dans le
» développement du germe que consiste
» le mystère de la génération , mais dans
» sa formation ; et c'est là où les observa-
» tions microscopiques ne sauraient at-
» teindre. » ( Voyez GRAAF , KIRCHER,
MUYS. ) Le goût sûr qui décide de la soli-
dité d'une observation lui manquait abso-
lument, aussi-bien que la littérature , qui
porte la lumière dans toutes les sciences.
On doit cependant lui savoir gré d'avoir
contribué à la découverte des germes,
qui suivant un philosophe de ce siècle ,
suffit seule pour anéantir l'athéisme ; il
l'anéantirait en effet, si les sectateurs
d'une si monstrueuse opinion pouvaient
saisir la justesse d'une conséquence. Il
mourut en 1723, à 91 ans ; on lui a élevé
un beau mausolée à Delft, dans la vieille
église, avec une épitaphe emphatique. Il
a publié différens ouvrages en hollandais,
qui ont été traduits en latin, et ont paru
sous le titre à'Jrcana nalurœ délecta .
Dclfl, 1695 à 1719, 4 vol. in-4"., Leyde 1722.
On a imprimé en 1722. in-i", ses Lellres à
la société royale de Londres, dont il était
membre , et à divers savans.
LEVAILLA.IVT ( François ). Voijez
VAILLANT.
• LEVASSEUR (C.-J-A. ) , naquit en
4723 , à Rouen , d'une famille distinguée
dans le commerce. Il suivit d'abord cette
profession , fut ensuite nommé adminis-
trateur des hospices civils, puis échevin,
membre delà chambre de commerce, et
président de la juridiction consulaire. Le
lièle et la probité avec lesquels il remplit
ces divers emplois lui attirèrent l'atten-
tion du gouvernement : et Louis XVI , de
son propre mouvement , lui envoya des
lettres de noblesse. A l'époque de la ré-
volution , il fut successivement nommé
officier municipal , et administrateur de
la Seine-Inférieure. Il ne figura cepen-
dant dans aucun parti, et on ne lui re-
procha jamais aucun crime. En 1792 , il
devint président du tribunal de com-
merce , et entra en 1800 au sénat conser-
vateur. Il est mort à Paris, le 8 août 1802.
— Il ne faut pas le confondre avec un
autre LEVASSEUR, ancien avocat au
parlement, et mort en 1808 . connu par
plusieurs ouvrages, tels que Manuel des
nouvelles justices de paix; Explication
de la loi du k germinal an S ^ sur la fa-
culté de tester et de disposer entre-vifs ,
1 vol. in-8°; — ni avec LEVASSEUR
( RENÉ ) , chirurgien , et membre de la
Convention, où il vota la mort de Louis
XVI , et dont M. Achille Roche a fait les
Mémoires^ pour lesquels cet écrivain a
été condamné à quatre mois de prison et
1,000 francs d'amende. On peut consulter
à cet égard VJmi de la religion^ du 15
mai 1830.
* LEVAVASSEUR (Bernard -Marc-
Francis ) , membre du conseil-général du
déparlement de l'Oise, né à Bretcuil
(même département) le 15 septembre
1775 , mort en 1830 , manifesta dès sa pre-
mière jeunesse un goût décidé pour la
poésie. Dès l'âge de dix-huit ans, il s'y
était essayé en composant quelques piè-
ces fugitives , des odes, et une tragédie
qui ne fut point imprimée. Il s'occupa
aussi avec succès des utiles et honorables
travaux de l'agriculture, dans laquelle
son père s'était distingué. Introducteur
de divers procédés nouveaux dans la cul-
ture de ses fermes, il fut appelé à coopé-
rer aux travaux du conseil royal d'agri-
culture comme membre correspondant.
Levavasseur qui n'avait pas renoncé pour
cela aux lettres, fît des livres de l'Ancien
Testament, et principalement du livre
Job, l'objet principal de ses recherches
et de ses méditations. Ce fut comme il lo
dit lui-même, aune source féconde, qu'il
puisa l'enthousiasme et la chaleur poéti-
que qui brillent dans deux odes qu'il a
publiées sur des sujets religieux , notam-
ment dans VOde à l'Eternel. Il n'avait
toutefois fait paraître encore que quelques
opuscules , lorsque il mit au jour sa tra-
duction complète en vers français du li-
vre de Job. Cette noble entreprise dont
les difficultés n'avaient pu être vaincues
par des hommes d'un génie supérieur, fut
exécutée par lui avec un succès remar-
quable. Les plus sévères critiques ont
rendu hommage au savoir de l'auteur , à-
l'érudition qu'annoncent sa préface et ses
notes , et surtout au talent du poète. La
iraduclion de Levavasseur est intitulée :
LEV
&43
LEV
Le livre de Job . traduit en vers français,
avec ie texte de la Vulgale en regarda,
suiVÙ de notes explicatives , etc., Paris,
182^ in-8°. Plusieurs sociétés savantes
s'empressèrent d'admettre Tauteur dans
leur^sein.
LÈVE, ou plutôt LEYVA (Antoine de),
Navarrois, prince d'Ascoli, diié^e Terre-
Neuve , général 'des arnUes de Charles-
Quint, naquit vers 1480, dans l'obscurité,
et fut d'abord simple soldat. Il parvint au
commandement par d'utiles découvertes,
et par une suite d'actions la plupart heu-
reuses et toutes hardies. Un extérieur
ignoble ne lui ôtait rien de l'autorité qu'il
devait avoir , parce qu'il joignait au ta-
lent de la parole une audace noble à la-
quelle les hommes ne résistent pas. Il se
signala d'abord dans le royaume deNaples,
sous Gonsalve de Cordoue, et ensuite
dans le Milanais , d'où il chassa l'amiral
Bonnivet en 1523. Il se signala à la ba-
taille de Rebec en 1524 , et défendit Pavie
l'année suivante contre François I" , qu
y fut pris. Uno sortie qu'il fit , dans la
quelle il attaqua vigoureusement les
Français, détermina la victoire. Ses suc-
cès lui procurèrent des distinctions flat-
teuses. Charles -Quint s'étant rendu en
Italie , le fit asseoir à côte de lui , et , le
voyant obstiné à ne pas se couvrir , il lui
mit lui-même le chapeau sur la tête , en
disant : « qu'un capitaine qui avait fait
» soixante campagnes , toutes glorieuses ,
• méritait bien d'être assis et couvert de-
» vant un empereur de 50 ans. » Ce grand
général soutint sa réputation en Autriche,
où il fut envoyé en 1529 , contre Soliman
qui assiégeait Vienne , et en Afrique , où
il suivit l'empereur en 1535. L'année d'a-
près, il fut témoin du mauvais succès de
l'expédition de Provence , et en mourut
de douleur en 1536 , à 76 ans ; il fut en-
terré à Saint-Denis, près de Milan. On
a raconté de lui des anecdotes romanes-
ques qui ne méritent aucune croyance.
« Il était, dit Brantôme , goutteux , mala-
» dif , toujours en douleurs et en lan-
» gueurs , mais il combattoit porté en
» chaise , comme s'il eût été à cheval. »
— Ses fils , Sancbe et Antoine de LÈVE ,
servirent l'Espagne avec zèle , et se si-
gnalèrent en divers combats. Le premier
eut deux fils , Alphonse et Sanche , qui
se distinguèrent sous le duc de Parme ,
aux Pays-Bas.
* LÉVÊQUE (Pierre) , célèbre mathé-
maticien , naquit à Nantes ( Loire-Infé-
rieure), le 3 septembre 1746. Il étudia
chez les pères jésuites de sa ville natale
et se livra particulièrement aux mathé»
matiques , dans lesquelles il fit de grands
progrès. Désirant connaître par pratique
ce qu'il avait appris par théorie sur la na-
vigation, il s'embarqua à l'âge de 18 ans,
avec un emploi fort modeste, sur un
vaisseau de l'état. En moins de deux ans,
il apprit ce qui concerne la construction,
la manœuvre navale et le pilotage. Après
ses voyages maritimes, il revint en
France , et enseigna les mathématiques à
Mortagne, à Breteuil et ensuite à Nantes,
où il obtint , en 1772 , la chaire royale
d'hydrographie. Il fut le premier qui
donna, dans cette ville, le spectacle d'un
aérostat. On lui doit aussi une des pre-
mières machines à vapeur qui aient été
construites en France. Il possédait l'his-
toire , les langues anciennes et modernes,
les sciences naturelles , l'administration ,
le commerce , etc., et joignait à ces con-
naissances un jugement profond et solide.'
Depuis 1786 , il était examinateur royal
de la marine, lorsque survint la révolu-
tion , dont il n'adopta pas les principes
subversifs. La protection de quelques amis
put le faire respecter jusqu'à l'époque de
la terreur. Obligé alors de fuir pour
échapper à la mort , il ne reparut qu'a-
près la chute de Robespierre. Il fut nom-
mé , en 1797 , membre du conseil des An-
ciens, et lors delà révolution du 18 fruc-
tidor ( 4 septembre 1797 ) , il fut proscrit
de nouveau. ( T^oyez AUGEREAU. ) Les
temps étant devenus plus calmes, il re-
vint à Paris. En 1801 , il fut admis à l'in-
stitut, à la place de Cousin, et reçut, peu
de temps après , la croix de la légion-
d'honneur. Modeste dans ses goiits et ses
désirs, il menait une vie heureuse et
tranquille , lorsqu'il perdit un fils , âgé
de 27 ans, officier distingué dans le corps
du génie. Cette mort hâta la sienne , et il
succomba à une attaque d'apoplexie , au
Havre, le 16 octobre 1814 , âgé de 68 ans.
L'Eloge de Lévêque^ prononcé le 8 jan-
vier 1815 à l'institut, par Delambre, sa
trouve dans les Mémoires de ce corps sa-
vant pour 1818. Ses principaux ouvrages
sont : I Tables générales de la hauteur et
de la longitude du nonagésime ^ Avignon,
i776 , 2 vol. in-8° , avec des tables de-
hauteur et d'azimut, calculées par Tre-
buchet. Les tables que Ptolémée n'avait
calculées que pour sept climats , Lévêque
les a étendues sur tout le globe , et elles
sont même plus estimées que celles de La-
grange -, l Le Guide du navigateur. Nantes,
LEV
444
LEV
I7T9, 1 vol. in-8°, fig. On y trouve les
tables nécessaires pour la navigation.
Lalande a jvigé cet ouvrage supérieur à
ceux qui ont paru sur ce sujet ; | Examen
marithne , ou Traité de la mécanique
appliquée à la construction et à la ma-
nœuvre des vaisseaux , Nantes , 1782 , 2
vol. in-i". C'est une traduction de l'ou-
vrage de D. George Juan , savant espa-
gnol ( V. ce nom ) , entreprise par ordre
du ministre de la marine, et enrichie de
Notes par Lévêque , qui en a donné une
2' édit., intitulée : De la construction et
de la manœuvre des vaisseaux ^ etc.,
Paris, 1792, 2 vol. in-i". | Rapport à
l'institut^ sur les observations astronomi-
ques et nautiques de don Joseph Joachim
de Ferrer ( astronome espagnol ) , 1798 ;
I Mémoire à l'occasion d'un ouvrage de
Afaingon^ ayant pour titre : Mémoire con-
cernant des explications théoriques et
pratiques sur une carte trigonométrique
servant à réduire la distance apparente
de la lune au soleil, ou à une étoile, en
distance vraie, et à résoudre d'autres
questions de pilotage. Paris , 1798. Sui-
vant Lalande , « ce rapport contient une
grande érudition et des réflexions im-
portantes sur la méthode ingénieuse,
exacte et facile, proposée par l'auteur
du Mémoire , pour faire usage d'une
seule carte, au lieu du grand nom-
bre de celles qui ont été publiées par
Margetts. » | Rappoî-t ( à l'institut ) sur
un nouveau système de mâts et d'assem-
blage pour les vaisseaux, 1799; | Mé-
moire sur l'usage qu'on peut faire des
cartes horaires de Margetts, 1802. La-
lande fait un grand éloge de ce Mémoire,
qui a été inséré dans la Connaissance
des temps pour 4802 ; | Mémoire sur les
observations qu'il est important de faire
sur les marées dans les divers ports de la
France» 1805 ; | Description nautique des
côtes orientales de la Grande-Bretagne et
des côtes de Hollande, du Jutland et de
Norwége, Faris, 1801, in-4°. (Cette des-
cription, extraite de l'anglais, a été publiée
par le dépôt général de la marine. ) Par-
rai les ouvrages inédits de Lévêque , et
qu'il n'a pu achever , on cite : | Traité
théorique et pratique de la construction
et de l'usage de tous les instrumens nau-
tiques; I Traité pratique de la manœuvre,
enrichi des morceaux les plus intéressans
de la Tactique de Mazzaredo ( amiral es-
pagnol), de Clarke et autres auteurs;
I des matériaux pour un Dictionnaire po-
lyglotte de tous les termes de marine;
I des notes pour un ouvrage sur les ma-
rées; \ et un grand travail sur le Jau-
geage des vaisseaux. Lévêque a traduit ,
suivant Lalande, l'ouvrage anglais mti-
tulé : Traité de la Perspective (de Fer-
gusson ). Lalande lui attribue en outre
des OpusciUes nautiques. Quand la mort
le surprit ,x^êaiie préparait une nou-
velle édition, revue et augmentée, de son
Guide du navigateur.
LÉVESQUE de GRAVELLE (Michel-
Philippe ), conseiller au parlement de
Paris, mort en 17S2, avait le goût des
beaux-arts. On lui doit un Recueil de
pierres gravées antiques, 1752 et 1757, 2
volumes in-/».° , curieux et recherché.
LÉVESQUE de POUILLY ( Locis-
Jeax ) , né à Reims en 1691 , d'une famille
ancienne, membre de l'académie des in-
scriptions , se consacra d'abord aux ma-
thématiques, et à vingt -deux ans il en-
treprit d'expliquer les principes de la
philosophie naturelle de Newton ; mais sa
mauvaise santé le fit renoncer à cette
étude. Il voyagea en Angleterre , où il fut
bien reçu par lord Bolingbroke et par
Newton. De retour dans sa patrie , il fut
élu lieutenant -général de la ville de
Reims en 1746. Il fit venir dans cette ville
des eaux de fontaine plus salutaires que
celles de puits, qui incommodaient beau-
coup les habilans, et mourut en 1750, à
39 ans. De Pouilly est surtout connu par
sa Théorie des sentimens agréables, petit
ouvrage imprimé pour la i' fois en 177i,
in-8° : c'est la production d'un esprit net
et délicat, qui sait analyser jusqu'aux
plus petites nuances du sentiment. Il y a
quelques propositions auxquelles on pour-
rait donner un mauvais sens, mais un
lecteur sage doit toujours choisir le plus
favorable : le mieux serait sans doula
qu'on ne pût leur en donner d'autre.
• LÉVESQUE de POUILLY ( Je\«-
SiMOJW ) , fils du précédent , naquit à
Reims, en 1754. Son père lui-même avait
dirigé son éducation, et les succès du
jeune Lévesque furent tels qu'à l'âge de 13
ans il était déjà très instruit dans les belles-
lettres anciennes et modernes. S'étant
rendu très jeune à Paris, il y trouva de
puissans protecteurs , et fut successive-
ment président, lieutenant-général, com-
missaire enquêteur et examinateur hono-
raire. En 1768, il devint membre de l'a-
cadémie royale des inscriptions et belles-
lettres de Paris , et, le 20 février 1782,
les habitans de la ville de Reims le choi-
sirent pour leur lieutenant. En 1790, il
LEV
44S
LEV
était conseiller d'état. Il cniigra trois ans
après, et se réfugia en Allemagne, mais
il rentra bientôt en France , et vécut dans
ses terres pendant plusieurs années. Lé-
vesque de Pouilly était aussi membre ho-
noraire de l'académie de Chàlons- sur-
Marne. Il mourut le 24 mars 1820 , âgé de
86 ans. Il a laissé : | Eloge de M. Royier
de Mavelin^ lieutenant de la ville de
Reims, 1755; | Vie de Michel de l'Hôpi-
tal, Londres ( Paris ) , 17u/4. , in-12 ; | Eloge
de Charles-Bonnet ( imprimé en Allema-
gne ) ; I Théorie de V Imagination , Paris,
1803, 1 vol. in-i2. Cet ouvrage ne man-
que pas de mérite , mais il est inférieur à
la Théorie des sentimens agréables. \ Plu-
sieurs Mémoires insérés dans la collec-
tion de ceux de l'académie de Paris. V An-
nuaire de la Haute-Marne a donné une
notice sur Lévesque de Pouilly. Ce litté-
rateur avait un style correct et élégant.
* LÉVESQUE ( PiEKRE-CiiAhLES ) , his-
torien et traducteur , membre de l'acadé-
mie des inscriptions, né à Paris le 20
mars i736 , fit ses études avec distinction
uu collège Mazarin , et fut obligé de vivre
à Paris du produit de son travail comme
graveur et dessinateur: car ses parens en
quittant la capitale où la médiocrité de
• leur fortune ne leur permetlait pas de
rester, l'avaient destiné à la carrière des
beaux-arts. La passion du jeune Lévesque
pour les lettres , sa bonne conduite et ses
succès dans les différens ouvrages dont il
fut chargé , lui méritèrent des protecteurs
parmi des personnages très distingués et
des écrivains très connus. Diderot le re-
commanda à l'impératrice Catherine II,
et cette princesse lui offrit une place de
professeur de belles-lettres dans son école
des cadets -nobles. Lévesque partit pour
la Russie en 1773 , et ne revint en France
qu'en 1780. Pendant son séjour dans ce
pays, il recueillit les matériaux d'une
histoire des Russes qu'il publia à son re-
tour dans sa patrie , et qui lui ouvrit les
portes de l'académie des inscriptions. Il
fut obligé de consulter les chroniques na-
tionales, et par conséquent d'étudier à
fond le russe et le slavon. Cette histoire
fut accueillie avec empressement en
France et en Russie , et dans ce dernier
pays elle était classique : maintenant on
Jui préfère l'histoire qu'a publiée Karam-
zin ( voyez ce nom ). Lévesque fut nom-
mé professeur de morale , et ensuite d'his-
toire au collège de France. En 1793 il
«ntra à l'institut et mourut à Paris le
12 mai 1812, âgé de 76 ans. Léves-
7.
que avait une vaste érudition ; mais il a
trop écrit pour que ses ouvrages aient pu
approcher de celte perfection qu'on n'ob-
tient que par un travail assidu. La mul-
titude des matières qu'il embrassait l'em-
pêchait de réfléchir assez sur chacune
d'elles , et surtout de donner à son style
cette facilité, cette correction dont il e^l
parfois dépourvu. Il fut lié avec les phi-
losophes , dont il partageait les sentimens,
comme on peut en juger par ses écrits :
I Les Rêves d'Aristobute, philosophe grec,
suivis d'un abrégé de la Vie de Formose,
philosophe français, Paris, 1761, 1 vol.
in-12; Carlsruhe, 1762; îc/^m^ traduits en
italien par la comtesse Guillelmine d'An-
halt, et publics par Frédéric- Auguste,
prince de Brunswick, Berlin, 1768;
I Choix des poésies de Pétrarque, tradui tes
de l'italien, Paris, 1774, 1 vol. ia-S" ; 1787, 2
vol. in-18 ; | L'Homme moral, ou l'Home
me considéré tant dans l'état de pure na^
ture que dans la société, Amsterdam,
1775, 1 vol. in-12; 4* édition sous le tilru
Aq L'Homme moral, ouïes Princiiies des
devoirs , suivis d'un aperçu sur la civi-
lisation, Paris, 1784, xm vol. in-12;
[ L'Homme pensant ou Essai sur l'his-
toire de l'esprit humaiii, Amsterdam,
1779, 1 vol. in-12; | Histoire de Russie,
Paris, 1785,5 vol. in-i2 ; Iverdun, idem,
6 vol. in-12. ) Histoire des différens peu-
ples soumis à la domination des Russes ,
ou Suite de l'Histoire de Russie, 2 vol.
in-12. Ces deux ouvrages ont été réunis
ensemble sous le premier titre d'Histoire
de Russie, augmentée et conduite jusqu'à
la fin du règne de Catherine II , Paris et
Hambourg, 1800, 8 vol. grand in -8";
autre édition , continuée jusqu'à la mort
de Paul I", avec des notes de BIM. Malte-
Brun et Depping , Paris ,1812,8 vol. in-8°
et atlas. | Eloge historique de VabbédeMa^
bly, Tar'is, 1787, in-8°. Cet éloge ])artagea
le prix extraordinaire de l'académie des
inscriptions et belles-lettres. | La France
sous les cinq premiers Valois , ou His-
toire de France depuis la mort de Phi-
lippe de Valois jusqu'à celle de Charles
VII ^ précédée d'une introduction dans
laquelle on suit les révolutions et les pro-
grès de la monarchie , depuis le règne de
Pépin jusqu'à la mort de Philippe le Bel,
Paris, 1787, 4 vol. in-12. Col ouvrage a
mérité les élogesdeM. Dacier. On y trouva
la même exactitude et la même solidité
des recherclies que dans l'Histoire do
Russie. I Dictionnaire des arts, de pein-
ture, sculpture et gravure . de concert
38
LEV
446
LEV
avec Watelcl, de l'académie française,
Taris, 1792, 5 vol. {;rand in-8°; | Histoire
de Thucydide^ Iraduile du grec, Paris,
1795, 4 vol. in-i** et in-8°. Cette Iraduc-
lion fit beaucoup d'honneur à Lévesque
et le fit connaître pour xxn profond hel-
léniste. I Etude de l'Histoire de la Grèce.
1811 , 4 vol. il» - 8° ; | différens Mémoires
dans le Recueil de l'institut , et autres ou-
V rages insérés dans la Collection des mo-
ralistes anciens, publiée par Didot l'aîné
et Dcbure, savoir : [ Pensées morales de
Confucius^ il^'i, 1 vol.; | Pensées tno-
rales de divers auteurs Chinois, 1782, 1
vol. ; I Caractères de l'héophraste ,i7S^ ,
I vol.; I Sentences de Tliéognis , Phocy-
lide , etc., 1785, 1 vol. ; | Pensées morales
de Cicéron . 1782 , 1 vol. ; | Jpophtheymes
des Lacédémoniens, extraits de Plutar-
»{ue, 1794, 1 vol.; | Fies et Jpophtheg^
tues des philosophes grecs, 1795, 1 vo!.,
etc. On lui doit aussi des mémoires , des
discours , des notices, des articles biogra-
phiques et d'autres opuscules.
LÉVI. Voyez PHILIPPE LÉVI.
LÉVI, 5* fils de Jacob et de Lia, naquit
eu Mésopotamie l'an 1748 avant J. -C.
Ces*, lui qui , voulant venger avec son
frère Siméon , l'injure faite à Dina leur
sœur, passa au fil de l'épée tous les ha-
bitans de Sichem. Jacob en témoigna un
déplaisir extrême, et prédit au lit de la
tnort qu'en punition de cette cruauté, la
famille de Lévi serait divisée et n'aurait
point de portion fixe au partage de la
terre promise. En effet elle fut dispersée
dans Israël, et n'eut pour partage que
quelques villes , qui lui furent assignées
dans le lot des autres tribus. Lévi descen-
dit en Egypte avec son père, ayant déjà
ses trois fils Gerson, Caath et Merari,
dont le deuxième eut pour fils Amram,
de qui naquirent Moïse, Aaron et Marie.
II y mourut l'an 1012 avant J.-C, à 137
ans. Sa famille fut toute consacrée au ser-
vice de Dieu; et c'est de lui que les prê-
tres et les lévites tirèrent leur origine.
Ceux de sa tribu s'alliaient souvent à la
maison royale , ainsi que le prouve la gé-
néalogie des parens de J. - C. selon la
chair. Dans un des livres de l'Ancien Tes-
lanaent ( le Léviiique ) , ce patriarche pro-
phétise que le Messie naîtra de lui et de
Judas, et il dépeint l'horrible scandale
que l'iniquité des prêtres répandra sur
le sanctuaire par la condamnation du
Christ.
: LÉVI de GERSOM , rabbin , a composé
les Guerres du Seigneur eu hébreu , "VVal-
lenstadt, 1560, in-fol., et des Commen-
taires imprimés séparément et dans les
grandes bibles. C'était un esprit singu-
lier, qui a rempli tous ses livres de vai-
nes subtilités métaphysiques. On ignore
le temps où il a vécu.
LEVI (Raphaël). Voyez BYZANCE.
LÉVIS, ou LEVI (Guy de), d'une il-
lustre maison de France , fut le chef de
toutes les branches que l'on en connaît
aujourd'hui. Il se croisa contre les albi-
geois, et fut élu maréchal des croisés.
C'est en mémoire de cette charge que sa
postérité a toujours conservé le titre de
Maréchal de la Foi. Il se signala dans
cette guerre , et eut la dépouille de ces
rebelles fanatiques , la terre de Mirepoix
et plusieurs autres situées en Languedoc.
Il mourut en 1250; il avait fondé en 1190
l'abbaye de la Roche. Ses successeurs ont
joint au nom de Lévis celui de seigneurs
de Mirepoix.
* LÉ VIS ( François , duc de ), maré-
clial de France, né en 1720, au château
d'Ajac en Languedoc, d'une famille très
ancienne, entra de bonne heure au ser-
vice , sous le nom de chevalier de Lévis , \
et s'y fit remarquer par une bravoure
calme et un grand sang-froid, qui con-
trastait sin[;ulièrement avec la vivacité
de son caractère. Seul avec le maréchal
de Lévis -Mirepoix, son cousin, dont il
était aide-de-camp , il fit deux bataillons
prisonniers. Sa conduite dans le Canada
lui attira des applaudisseujens ; mais il ne
put couservor cette importante colonie à
la France. A son retour, il fut nommé lieu-
tenant-général, et rendit de nouveaux
services , surtout au combat de Johannis-
berg. A la paix de Versailles , il obtint la
gouvernement de la province d'Artois, tt
sut se concilier l'affection des troupes et
celle des citoyens. Lorsque l'on forma , eu
1771, la maison militaire de Monsieur (i),
il eut le commandement d'une compagnie
de ses gardes , devint maréchal de France
en 1785 , et fut fait duc en 1784. Il mourut
en 1787 à Arras, où il s'était rendu pour
tenir les états de cette province. On trouve
des détails sur le maréchal de Lévis dans
les Souvenirs et po7traits, Paris, 1813,
in-8", publiés par son fil*, M. le duc de
Lévis.
* LEVIS ( M. A., duc de ) , grand bailli
de Senlis , naquit à Paris en 1759. Nom-
mé député de la noblesse aux état:<-géné-
raux de 1789, il se réunit au tiers état, et
(i) Dcpaii Louis XVIII.
LEV
44^
LEY
siégea à l'Assemblée nationale , le i" août.
Il présenta ses réflexions sur l'inutilité
de la déclaration des droits , consentant
néanmoins qu'on la mit à la suite de la
constitution. Il s'opposa quelque temps
après à l'emprunt demandé par Necker ,
et appuyait son opinion sur l'aveu des
caliiers qui défendaient aux députés d'en
consentir de nouveaux. Dans la même
année , il proposa qu'on établît des rcgle-
mens sur la liberté de la presse, et à l'oc-
casion de la dédicace des Œuvres de Vol-
taire, que Palissot présenta à l'Assem-
blée , il fit décréter .qu'on n'en recevrait
aucune. li vota le 18 mai 1790 pour qu'on
n'accordât le recours contre les auteurs
de détentions arbitraires, qu'aux pri-
sonniers contre lesquels il n'y aurait pas
de plaintes légales. Dans les différends
qui eurent lieu entre l'Angleterre et l'Es-
pagne, il fit déclarer que la France
n'entreprendrait aucune agression , mais
qu'elle saurait défondre ses droits. Quelque
modération que le duc de Levis eût mise
dans sa qualité de député , il n'avait pas
moins adopté , en partie, les principes ré-
volutionnaires. Il revint bientôt de son er-
reur , et* eut sa part des persécutions. Le
règne de la terreur arriva; il devint sus-
pect, et fut enfermé au Luxembourg,
comme complice d'une de ces conjura-
lions qui servaient souvent de prétexte
aux factieux pour immoler des victimes.
Le duc de Levis fut de ce nombre. Con-
damné par le tribunal révolutionnaire, il
fut exécuté le k mai 1794 , âgé de 53 ans.
— Son épouse subit le même sort le 10
juillet suivant : on l'accusa d'avoir pris
part à la prétendue conjuration du Luxem-
bourg, où elle était détenue.
LE YDE ( Philippe de ) , né d'une famille
noble de la ville dont il porte le nom , fut
conseiller de Guillaume de Bavière , comte
de Hollande, puis grand -vicaire et cha-
noine d'Utrecht, où il mourut en 1580.
On a de lui : De 7-epubltcœ cura_, et sorte
principantis . nonnulli alii tractatus ,
Leyde,151ô, in-fol., et Amsterdam, 1701,
in-Ji." , avec une Vie de l'auteur. Ce qu'il
a écrit sur le gouvernement civil ne vaut
pas ce qu'il dit du gouvernement domes-
tique. Il avait professé le droit à Orléans
et à Paris , et laissa d'autres ouvrages ou-
bliés aujourd'hui.
LEYDECKER ( Melchior ), théologien
calviniste , né à Middelbourg en 1642 ,
professeur de théologie à Utrecht en 1678,
mort en 1721 , à 79 ans, était un homms
dur et passionné , qui ne savait réprimer
ni sa langue ni sa plume. On a de lui plu-
sieurs ouvrages pleins d'érudition , mais
qui manquent souvent de criliquc. Les
principaux sont: | Traité de la république
des Hébreux, 2 vol. in-fol., Amsterdam,
1704 et 1710 : recueil curieux, semé d'a-
necdotes sur le judaïsme moderne. Il y a
joint une réfutation de Y Archéologie de
Burnet. Ce traité de la république des
Hébreux n'a pas fait oublier celui de Si-
gonius sur la même matière. | Un Com-
mentaire latin sur le Catéchisme d'Hei-
delberg ; | une Dissertation contre le
Monde enchanté de Becker ; | une Ana-
lyse de l'Ecriture avec la Méthode de
prêcher; | une Histoire du janséiùsme ,
Utrecht, 1695, in -8"; | Fax veritatis .
Leydo. 1677, in -8"; | la Co?itinuation
de l'Histoire ecclésiastique de Hornius,
Francfort, 1704, in-8°; | Histoire de l'E-
glise d'Afrique , in-4°; | Synopsis contro-
versiarum de fœdere. Tous ces ouvrages
sont écrits en latin, d'un style dur, et
dans les préjugés de l'auteur.
LEYDCA' (Jean de). Voyez JEAN.
LEYDEN ( Jean-Geubiiaxo de ), airjsi
nommé parce qu'il était de la ville de ce
nom, se fit carme, s'appliqua avec une
grande assiduité à toutes les fonctions do
la vie apostolique , et consacra ses mo-
mens de loisir à l'élude de l'histoire de
son pays. Il mourut l'an 1504. On a de
lui : I Chronicon Hollandiœ comilum et
episcoporum ultrajectensium , a S. JVil-
lebrordo adannuin 1417, Francfort , 1520,
in-fol.; I Chronicon egmondanum, sive
Annales abbatum egmondensiurnj publié
par Antoine Matthieu, Leyde, 1698, in-
4". On lui attribue une Histoire de l'ordre
des carmes ; ce n'est qu'une répétition de
celle d'Arnold Bostius.
LEYDE\ ( Jea\ de ) , ainsi nommé du
lieu de sa naissance ( et dont le nom est
BULCOLD ou BEROLD ), n'est connu que
par son fanatisme. Il était tailleur. Il s'as-
socia avec un boulanger et un ministre
protestant, nommé Rotman, et devint
chef des anabaptistes. Le boulanger, ap-
pelé Jean MATTHIEU , changea son nom
en celui de Moïse. Il envoya douze de ses
disciples, qu'il appela ses apôirts, se
vantant d'être envoyé du Père éternel,
pour établir une nouvelle Jérusalem. Ces
fanatiques se rendirent maîtres de Muns-
ter en 1554, et y exercèrent des indi-
gnités et des atrocités incroyables. Les
magistrats et autres citoyens honnêtes s'é-
lant opposés à leur fureur , furent mas-
sacrés ou expirèrent dans des tourmens
LEZ
US
LEZ
raffinés. Cet imposteur insensé prenait le
norh lie Roi de Jérusalem et cTIsraël^ et
no régnait que par des massacres , des
cruautés et des abominations inouïes. II
espérait établir sa puissance sur les débris
de celle des potentats de l'Europe ; mais
Vcvéque de Munster l'ayant pris avec les
j)rincipaux ministres de sa frénésie , il les
lit mourir par de rigoureux supplices en
<a5G, après les avoir promenés quelque
temps dans les pays circonvoisins , pour
répandre la terreur dans l'âme des fana-
tiques qui troublaient alors tous les états
de l'Europe , mais particulièrement l'Alle-
m.agne. Voyez MUNSTER.
LEZAIVA ( Jean-Baptiste de), carme,
naquit à Madrid le 23 novembre 1586. Il
enseigna avec réputation à Tolède, à
Alcala et à Rome ; Urbain VIII le fit as-
sesseur de la congrégation dell' Indice ,
et Innocent X de celle des Rites. Il mou-
rut à Rome le 29 mars 1659 , à 73 ans. On
a de lui : ] Summa qucestionum regida-
rium^ Lyon, 1665,4 vol. in -fol.; c'est
une théologie qui a pour objet principal
les devoirs des religieux ; | Summa theo-
loffice sacrcBj Rome, 1651,5 vol. in-fol.;
) j4nnales sacri^ prophetici et Eliani or-
diniSjClc, Rome, 165 1-1656, i vol., in-fol.
pleins de fables ridicules sur l'origine
de cet ordre; | De regulai-ium reforma-
tione , Rome , 1646 , in-4°.
* LEZAY-MARi\EZIA ( Claude-Fra\-
çois-Adriew , marquis de ) , naquit à Metz
en 1735. Il suivit d'abord la carrière des
armes , et servit dans le régiment du roi.
Le marquis de Marneiia avait fait de très
bonnes études , et , jeune encore , il quitta
l'état militaire dont les nouveaux règle-
mens lui déplurent, et se livra entière-
:nent à la littérature; il se fixa à la cam-
pagne , où il s'occupa d'adoucir le sort
de ses vassaux , et abolit dans ses domai-
nes, plusieurs années avant la révolution ,
. la corvée et la main-morte. La noblesse
du bailliage d'Aval le nomma son député
aux états-généraux de 1789 , et fut un de
ceux qui parmi les nobles passèrent à la
chambre du tiers-élat, et favorisèrent les
premières innovatioiis. Le marquis de
Marnciia avait de bons principes , un ju-
gement sain , et aimait le roi. Il ne tarda
,cis à apercevoir le but où tendaient les
factieux, et rectifia ses opinions. D'après
le sentiment de J.-.I. Rousseau lui-même,
ii s'opposa vivement à ce que les comé-
diens fussent admis aux droits de ci-
toyens actifs. Pendant la session de la
première assemblée, il montra des prin-
cipes sages et modérés. Pour fuir les
nouveaux troubles qui menaçaient son
pays, et ceux qui y avaient occupé un
certain rang, il se réfugia en Amérique,
ou il s'établit sur les bords du Scioto ,
avec le dessein de former un vaste éta-
blissement dans l'Amérique septentrio-
nale. Il emmena à cet effet des cultiva-
teurs , des ouvriers , des artistes ; mais la
compagnie du Scioto , de laquelle il avait
acheté un vaste terrain pour le faire dé-
fricher, n'ayant pas rempli ses engage-
mens, et plusieurs de ses compagnons s'é-
tant dispersés , il se _ décida à revenir en
Europe , et il rentra en France en 1792.
Il se rendit aussitôt dans sa terre de Saint-
Julien, où il espérait vivre ignoré, au
milieu des habitans dont il avait été ron>
slamment l'ami et le bienfaiteur. C'é-
tait le règne de la terreur. Son arrivée
irattendae le rendit aussitôt suspect, et il
fut arrêté et mis en prison : il eut le bon-
heur d'y être oublié pendant onze mois,
et en sortit après la chute de Robes-
pierre. Il retourna à la campagne, où il
reprit ses anciennes habitudes. Son fils
aîné ayant été compris dans la proscrip-
tion du 18 fructidor, il conçut des crain-
tes pour sa propre sûreté, et se réfugia
dans le pays de Vaud , où il fut bien ac-
cueilli de M. Necker et de sa famille ; ce-
pendant dès qu'il crut le danger passé, il
revint à Besançon, pour y travailler à un
grand ouvrage sur V Accord des principes
de la religion et de la véritable philoso-
phie. Atteint d'une maladie dont il avait
puisé le germe dans la prison , il y suc-
comba enfin en avril 1800 dans les senti-
mens d'un chrétien , qu'il avait toujours
conservés. On a de lui : | Essais sur la
nature champêtre ,\iohmQ avec des notes,
Paris, 1787 et 1800, in-8°. Il contient des
vers heureux et des détails intéressans.
I Essai sur la minéralogie du bailliage
d'Orgelet en Franche-Comté . 1778 , in-8°;
I Le bonheur dayis les campagnes . Neuf-
châtel, 1784 , 1788 et 1790, in-8°. Cet ou-
vrage est écrit avec grâce et simplicité.
I Plan de lecture pour une jeune dame ,
Paris, 1784, in-12, Lausanne, 1800 , in-8° :
livre instructif et bien écrit; | La famille
Heureuse est du petit nombre des romans
qu'on peut lire avec utilité , vu les bonnes
leçons de morale qu'il contient , 1785 , in-
12 ; I trois Lettres sur le Scioto, in- 8»;
I Le Voyageur naturaliste j ou Instruc-
tion sur les moyens de rassembler les
objets d'histoire naturelle et de les bien
conserver^ traduit de l'anglais de John-
LEZ
449
LUO
Coakley, Lettsom, Amslerdam (Paris ),
1773 , in-12. Il a laissé en outre plusieurs
pièces fugitives, au nombre desquelles on
distingue l'E pitre à mon curé, dont tous
les amateurs ont retenu ce vers :
L'>ge d'or éuil l'âge oîi l'cr ne régnait pas.
Le marquis deMarnez,ia écrivait avec une
égale facilité en prose et en vers. Son
style est agréable et pur, et sa versifica-
tion pleine d'élégance et d'harmonie.
• LKZ\Y-M/VRi\EZIA ( Adkieji , le
comte de), administrateur et publiciste ,
tils aîné du précédent , né à Saint-Julien
en 1770, entra au service de très bonne
heure, et fit partie du régiment du roi,
dans lequel avait aussi servi son père ; au
bout de quelques années, il quitta cette
carrière, pour aller à Brunswick, étudier
la diplomatie. La révolution ne lui per-
mettant pas de rentrer en France, il voya-
gea en Angleterre et en Allemagne , et
ne revint à Paris , qu'après le 9 thermi-
dor. Plusieurs écrits qu'il publia à celte
époque contre les anarchistes, et de nom-
breux articles Insérés dans le Journal de
Paris, le firent proscrire après le 15 ven-
démiaire. Proscrit de nouveau après le
18 fructidor , Lezay-Marnezia quitta le
village de Brelte ville, dans la Normandie,
où il s'était réfugié d'abord, et se rendit
avec son père dans le canton de Vaud en
Suisse. Après l'établissement du gouver-
nement consulaire , M™" Bonapai te le fit
nommer ambassadeur près de l'électeur
de Saltzbourg. Lezay-Marnezia obtint, en
1806, la préfecture de Rhin-et-Moselle , et
en 1810, celle du Bas-llhin , où sa con-
duite le fit chérir de ses administrés. Il
contribua efficacement à la prospérité de
Strasbourg, et fut conservé sous la res-
tauration. Le duc de Berry étant venu
visiter l'Alsace , Lezay-Marnezia alla à la
rencontre de ce prince; ses chevaux ef-
frayés du bruit de la inousqueterie ne pu-
rent être retenus par celui qui les guidait.
Le comte de Lezay fut précipité de sa
voiture , et mourut des suites de celte
chute peu de jours après , le 9 octobre
1814. Outre plusieurs brochures politi-
ques, il a publié : | les Ruines ou Voyage
en France pour servir de suite à celui de
la Grèce , Paris, 1791, in-8°, qui eut 4
éditioBS la même année, et fut traduit en
anglais et en allemand. C'est ime pein-
ture énergique des excès de celte faction
qui détruisit, en quelques mois, tout ce
que la sagesse et l'expérience avaient
créé durant 14 siècles ; | Pensées choi-
sies du cardinal de Retz. 1797, in-l»?
I Lettres à un Suisse sur lu fiow^elle
constitution helvétique. Neuchâtel, 1797 ,
in-8° ; | Don Carlos , infant d Espagne.
tragédie traduite de l'allemand de Schil-
ler , Paris, 1799, in-8°, avec des notes et
remarques. Celte traduction est estimée,
et l'on regrette que l'auteur n'ait pas tra-
duit les autres pièces du poète allemand.
LEZIN ( saint ), Zîcm/u5. évêque d'An-
gers en 586 , mort le 1" novembre 605.
Le pape saint Grégoire lui écrivit la Xett^<?
52 du livre 9".
L'IIÉRITII R DE BRUTELLE. Voyez
HÉRITIER.
L'UÉUITIER DE VILLANDON. Voijez
HÉRITIER.
* LIIOMOND (Charles-François), pro-
fesseur de l'université, né à Chaulnes,
diocèse de Noyon, en 1727 , entra comme
boursier au collège d'Inville , et y fit de
bonnes études. Nommé principal de ce
collège, il le fut ensuite à une chaire de
professeur d'une classe inférieure , dans
celui du cardinal Lemoine. S'étant attaché
aux jeunes enfans, il interrompit sa li-
cence et renonça à tout projet d'avance-
ment. Il refusa des places et des chaires
aussi honorables que lucralives; et, aux
instances que lui faisaient ses amis de les
accepter, il répondait toujours qu'il n'a-
bandonnerait jamais ses sixièmes. Beau-
coup de douceur, un jugement sain , la
modestie, la piété, formaient les bases de
son caractère, et ces qualités brillent dans
les livres d'enseignement qu'il composa
pour ses jeunes- élèves. Cependant à l'é-
poque de la révolution , cet homme esti-
mable n'ayant pas voulu prêter le ser-
ment alors exigé, fut arrêté en avril 1792,
avec d'autres prêtres , et enfermé avec
eux à Saint - Firmin , l'une des église»
que les révolutionnaires avaient trans-
formées en prisons. Tallien, qui avait été
son élève , lui fit obtenir la liberté ; mal-
gré cette puissante protection , quelques
mois après, sous le régime de la terreur,
l'abbé Lhomond, ne croyant pas sa vie en
sûreté, résolut de sortir de Paris. Arrivé
sur le boulevard de la Salpétriere , il se
vit attaqué par deux brigands qui lui en-
levèrent son argent, et le laissèrent pour
mort. On découvrit un des voleurs; et
M. Guyot, qui avait beaucoup de respect
pour l'abbé Lhomond, parvint à lui faiie
rendre ce qui lui avait été pris. Comme
on le pressait de poursuivre son assassin
devant les tribunaux : Je n'en ferai rien,
répontiit-il : si vous vouliez lui faire tenir
38.
Lno 4
!a moitié de la somme qu'il m'a rendue^
vous m'obligeriez ; il peut en avoir besoin.
^a tranquillité de M. Lhomoadne fut plus
Iroublée : il cultiva la botanique, et devint
1res habile dans cette science, dont il
donna les premières leçons au célèbre
Haiiy. Ses mœurs étaient aussi simples
que sa conversation était aimable et spi-
rituelle ; il faisait tous les jours quelque
temps qu'il fit, une promenade à Sceaux,
ei c'est à cet exercice qu'il fut redevable
de sa santé. L'abbé Lhomond est mort
le 51 décembre 1794, âgé de soixante-
sept ans. On a de lui les ouvrages sui-
vans, plusieurs fois imprimés, et à plu-
sieurs desquels on a fait des additions qui
ne sont pas touies heureuses : | De vi-
'ris illustribus urbis Romce^ in- 24; | JSlé-
jnens de la Gi'am,m.aire française, in-12;
I Elémens de la Grammaire latine, i vol.
in-12; ] Epitome historiée sacrœ, in-12;
I Doctrine chrétienne, en forme de lec-
tures de piété, oii l'on expose les preuves
de la l'eliyion, les dogmes de la foi, les rè-
gles de la morale, ce qui concerne les sa-
cremens et la prière, in-12 ; on y trouve
les plus solides et les plus touchantes in-
structions. Tout y respire la plus tendre
piété ; tout y est mis à la portée de la jeu-
nesse à qui il était destiné, et à qui il suffit
avec les deux suivans, pour connaître ce
que c'est que la religion, comment elle
est parvenue jusqu'à nous, et ce qu'elle
nous ordonne de croire et de pratiquer :
I Histoire abrégée de l'Eglise , <m l'on
expose ses combats, ses victoires dans les
temps de persécution , d'hérésie et de
scandale, et où l'on montre que sa con-
servation est une oeuvre divine ainsi que
S071 établissement, in-12 ; | Histoire abré-
gée de la religion avant la venue de Jé-
sus-Christ, où, l'on expose les promesses
f/ue Dieu a faites d'un Rédempteur, les
figures qui Vont représenté, les prophé-
ties qui l'ont annoncé, et la suite des évé-
nemens temporels qui lui ont préparé les
voies, et où l'on démontre l'antiquité et
la divinité de la religion chrétienne, 1'''
édit., 1791. Lhomond fil paraître le pre-
mier ouvrage , atin que la jeunesse ap-
prîlde bonne heure combien la religion
est belle dans son origine et dans ses dé-
veloppemens ; combien, en raison de son
anticpiité et de sa certitude , elle mérite
notre croyance et notre respect, et com-
bien sont méprisables ceux qui la calom-
nient pour la détruire. Mais comme son
ouvrage eût été imparfait , s'il ne leur
eût montré que cette religion subsistait
»0 LtA
encore sur la terre, il composa l'histoire
de l'Eglise , et retraça , dans un petit vo-
lume, son origine et ses progrès ; il fit
connaître les personnages qui l'ont illus-
trée, et les combats qu'elle avait eus à
soutenir, et contre les païens qui la per-
sécutèrent pendant trois siècles, et contre
les hérétiques qui l'ont si souvent divisée,
et contre les scandales qui ont tant de
fois déchiré son sein; enfin, il montra
l'Eglise triomphant de tous ses ennemis ,
et tandis que tout passe, tout périt autour
d'elle, demeurait immobile et inébranlable
au milieu des plus violentes tempêtes.
Ces deux ouvrages, très souvent réimpri-
més, ayant été altérés pendant le règne
de la terreur, on doit rechercher les an-
ciennes éditions , et à leur défaut , celles
qui ont été réimprimées depuis le retour
de Louis XVIII, et par des maisons con-
nues par leurs principes religieux.
LnOPITAL. Voyez HOPITAL.
LnOSTE. Voyez HOSTE.
LHOTSKI ( Georges ), jésuite , né à
Zbirow en Bohème l'an 1724, mourut en
1732 , étant recteur du collège de Telcz,
après avoir enseigné les lettres et les
sciences avec réputation. On a de lui :
I Controversia philosophica de systemate
philo sophice me chanicœ , idest, Mecha-
nismo cosmico et individuali, Prague,
1748, in-8° ; | Doctrina theologica de gra-
tta, justifie atione,merito, virtutibus, vitiis
etpeccatis, 1753, in-4°; | Doctrina theolo-
gica de fide , spe et charitate , ibidem ,
1733, m-k",
LIIOYD. Voyez LLOYD.
LIIUILLIER. VoyezLVlLLlER.
LIA , fille aînée de Laban, fut mariée
avec Jacobpar la supercherie de son père,
qui la substitua à Rachel, que Jacob de-
vait épouser : cependant Jacob vécut bien
avec elle , et en eut six fils, Ruben, Si-
méon , Lévi, Juda , Issachar, Zabulon , et
une fille nommée Dina.
LIA-\COURT ( Jeakne de SCHOM-
BERCt, duchesse de ),née en 1600. fille du
maréchal Henri de Schombcrg et femme
de Roger du Plessis , duc de Liancourt,
connue par les deux lettres que lui écrivit
le docteur Arnauld. Elle détacha du monde
son mari par ses leçons et par ses exem-
ples. Les deux époux se lièrent étroite-
ment avec les solitaires de Port-Royal,
et montrèrent beaucoup d'ardeur pour la
défense de Jansénius. Ils moururent' en
1G74. Le duc ne survécut que deux niois
à son épouse. On a d'elle un ouvrage édi-
fiant sur l'éducation des enfansdc l'un et
LIA kM
de l'autre sexe. L'abbé Boileau le publia
en 1698 , sous ce titre : Règlement donné
paritne femme de haute qualité à sa pe-
tite-fille^ pour sa conduite et pour celle de
sa maison^ ih-12 , réimprimé à Paris en
1779. L'éditeur joignit à cet ouvrage un
règlement qxie la duchesse de Liancourt
avait fait pour elle-même, avec un ta-
bleau des vertus de cette dame ; on sent
jiien qu'on n'y trouve pas l'humilité et
la docilité d'esprit qui opèrent la soumis-
sion aux décisions de l'Eglise. La duchesse
de Liancourt possédait plusieurs langues,
la musique , le dessin, et faisait des vers
cssez agréables. Sa vie se trouve dans les
T'aies intéressantes et édifiantes des Reli-
gieux de Port-Royale Cologne , 17S0 , 4
vol. ln-12.tom. 1.
LIANCOURT. y oyez ROCHEFOU-
CAULT.
• LLVRD ( Joseph), né à Rosières-aux-
Salines, département delà Meurthe, le 17
décembre 1747, était fils d'un architecte
de Stanislas , duc de Lorrauie , et entra à
l'ancienne école des ponts et chaussées en
1769. En 1775 il fut chargé, en qualité de
sous-ingénieur, des travaux importans
que l'on exécutait dans la Picardie et le
Hainault. Appelé en 1784 par les états de
Bretagne, il devint ingénieur en chef
lie la navigation qu'ils voulaient créer ,
dans leur province , et en 1786 , Liard
fut envoyé par le gouvernement fran-
çais dans la Hollande , dont il visita
les travaux hydrauliques. Après avoir
été attaché pendant quelque temps au
port du Havre et avoir construit le
beau pont de Roanne , il fut nommé en
1791 ingénieur en chef, place dont il exer-
ça les fonctions dans le département du
Doubs. C'est à lui que ce département
doit ses belles routes et des communica-
tions plus faciles dans un pays de mon-
tagnes. Promu au grade d'inspecteur di-
visionnaire en 1803, Liard fut chargé de
rédiger les projets de jonction du Rhône
au Rhin par le moyen d'un canal : il en a
dirigé tous les travaux qui, malgré toutes
U'S difficultés que présentaient les diver-
ses natures de terrain , ont été heureuse-
ment conduits à leur fin en 1852. Ce ca-
nal a porté successivement les noms de
canal ÎVapoléon et de canal Monsieur ^ et
jiorle aujourd'hui (1834) celui de co/îa/
de jonction du Rhône au Rhin. Liard fut
nommé connnandant de la légion d'hon-
neur. Lors de la première invasion des
alliés, il avait été chargé du commande-
ment du génie de la garde nationale de
LIB
Paris , avec le titre de général de brigade.
L'Athénée de la langue française l'avait
nommé, le 2a août 1808, membre corres-
pondant. Il est mort le 22 avril 1832, à
l'âge de 84 ans , dans une campagne au-
près de Besançon.
LIBAJ\IUS, fameux sophiste d'Antio-
che, où il naquit en 514, fut élevé à Athè-
nes, professa la rhétorique à Constanti-
nople et dans sa patrie. Saint Basile et
saint Jean-Chrysostôme furent les disci-
ples de ce maître , qui , quoique païen ,
faisait beaucoup de cas des talens et des
vertus de ses deux élèves. On prétend
qu'il aurait choisi Chrysostôme pour son
successeur, si le christianisme ne le lui
avait enlevé. L'empereur Julien n'oublia
rien pour engager Libanius à venir à sa
cour ; mais il ne put y réussir, même en
lui offrant la quatité de préfet du prétoire.
Libanius, qui n'était pas plus modeste que
les autres sages de l'antiquité païenne,
répondit constamment à ceux qui le sol-
licitaient, que la qualité de sophiste était
fort au-dessus de toutes les dignités qu'on
lui offrait. Julien , irrité contre les ma-
gistrats d'Antioche , avait fait mettre en
prison le sénat de cette ville. Libanius
vint parler à l'empereur pour ses conci-
toyens, avec une liberté courageuse. Un
homme de cour pour qui ce ton ferme
était apparemment nouveau, lui dit :
« Orateur, tu es bien près du fleuve
» Oronte, pour parler si hardiment. » Li-
banius le regarda avec dédain, et lui dit :
« Courtisan, la menace que tu me fais ne
» peut que déshonorer le maître que tu
» veux ine faire craindre ; » et il conti-
. nua. On ignore le temps de sa mort ,
quelques-uns la placent à la fin du qua-
trième siècle ( 390 ). Libanius avait beau-
coup de goût lorsqu'il jugeait les produc-
tions des autres, quoiqu'il en manque quel-
quefois dans ses écrits. Julien soumettait
à son jugement ses actions et ses ouvra-
ges ; le sophiste , plus attaché à la per-
sonne qu'à la fortune de ce prince , le
traitait moins en courtisan qu'en juge sé-
vère. La plupart des Harangues de ce
rhéteur ont été perdues , et ce n'est pas
peut-être un grand mal : sans parler des
citations multipliées d'Homère , de la fu-
reur d'exagérer, d'un luxe d'érudiliov
très déplacé, il gâte tout par l'affectation
et l'obscurité de son style, qui ne manque
d'ailleurs ni de force ni d'éclat. On esti-
me davantage ses Lettres, dont Wolf a
donné une excellente édition à Amslcr-
dani en 1738, in-fo' Ce recueil offre plo.
LIB
432
LIB
de 1600 EpîtreSj dont la plupart no ren-
ferment que des complimens. On en lit
plusieurs autres curieuses et intéressantes
qui peuvent donner des lumières sur
rUisloirc civile , ecclésiastique, littéraire
de ces temps-là. Antoine Bonjjiovanni a
publié à Venise, en 1755, 17 Harangues de
Libanius, en un vol. iii-fol., tirées de la
bibliotiièque de Saint-Marc, il faut join-
dre ce recueil à l'édition de ses OEuvres.
Paris , 1606 , et 4627, 2 vol. in-fol. Reiske
a publié aussi les OEuvres oratoires de
Libanius, Altenbourg, 1791-1797, k volu-
mes in-8°. On trouve dans les ouvrages de
Libanius de fréquentes invectives contre la
religion chrétienne, et contre l'empereur
Constantin, qu'il avoue ncanmoms avoir
été plus vertueux que tous les empereurs
romains qui ont régné avant lui. On met
au nombre des prédictions de la mort de
Julien uneréponse ingénieuse d'un gram-
mairien chrétien d'Antioche à Libanius.
Ce sophiste , pour se moquer de la reli-
gion, lui demanda, tandis que Julien était
dans l'expédition où il péril : Que fait
tnaiiitcnant le fils du charpentier^ il fait
un cercueil, répondit le graujmairieu.
LtB.\VlUS( AsiDRÉ), docteur en mé-
decine, né à Hall en Saxe , mourut l'an
1616, après avoir professé à léna l'his-
tuirc et la poésie, en 1588 , et avoir été
recteur du gymnase de Cobourg en Fran-
conie. Il publia un grand nombre d'ou-
vrages sur la chimie, et chercha toutes
les occasions de réfuter les rêveries de
Paracelse et de ses sectateurs. Ses prin-
cipaux ouvrages sont : | Syntagma selec-
torum alchimice arcanonwi ^Fr&nciort,
1613, 2 tomes in-fol. en 1 vol. ; | Âppen-
dix syntagmatîs arcanorum, 1615, in-fol.;
I Epistolarum chimicarum libri très ^
1595. La chimie a fait tant de progrès de-
puis Libavius , que ses ouvrages ne sont
plus recherchés. Il est le premier qui ait
parlé de la transfusion du sang : opéra-
lion qui a fait tant de bruit dans le \T
siècle , et qui a dû être prohibée par les
lois , à raison de l'abus étrange qu'on en
faisait. ( Voyez DENYS Jeaîv -Baptiste
MERKLIN. ) On conserve dans les phar-
macopées sous le nom de liqueur fumante
de Libavius , la composition d'un puis-
sant caustique , qui n'est autre chose que
du muriate suroxigéné d'élain.
LIBERAT (saint), abbé du monastère
de Capse en Afrique , souffrit le martyre
avec six de ses compagnons, le 2 juillet
485, pendant la persécution d'Hunéric.
LIBERAT, diacre de l'église de Car-
tilage au 6' siècle, l'un des plus zélés dé-
fenseurs des Trois Chapitres AxJX employé
dans diverses affaires importantes, et fut
envoyé à Rome l'an 535. On a dé lui un
livre intitulé : Breviarium de causa Nés-
torii et Eutychetis . que le père Garnier
donna au public en 1675, in-ô", à Paris,
avec des Commentaires qui corrigent ce
qu'il yade défectueux dans le texte.
LIBÈRE ( saint ), romain, fut élevé sur
la chaire de saint Pierre le 24 mai 352,
après le pape Jules P^ Il la mérita par sa
piété et par son zèle pour la foi. L'empe-
reur Constance , ayant tenté vainement
de le faire souscrire à la condamnation de
l'illustre Athanase, le relégua à Bérée
dans la Thrace. La rigueur avec laquelle
on le traita dans son exil , et la douleur
de voir son siège occupé par l'antipape
Félix , ébranlèrent sa constance. Il con-
sentit enfin à la condamnation d'Atha-
nase, et signa la Formule de Sirmium,
non pas celle du dernier concile, qui était
visiblement hérétique, ni celle du second,
qui était également répréhensible et qui
fut rédigée par Valens et Ursace en 357,
mais celle du premier, dressée en 351 avec
beaucoup d'art par les ariens, et qui pou-
vait à la rigueur être défendue , comme
elle le fut par saint Hilaire. Par cette fai-
blesse , il rentra dans la communion des
Orientaux. On lui lit approuver dans le
concile d'Ancyre , en 558, un écrit qui
rejetait le mol consubstanfie h mais ïi pro-
testa en même temps qu'il anathémati-
sait ceux qui disaient que le Fils n'était
pas semblable au Père en substance cl
en toutes choses. L'empereur lui permit
de retourner à Rome, où le peuple la
reçut assez froidement. Cet accueil le fit
rentrer en lui-même : il reconnut sa faute,
la pleura, fit ses excuses à Athanase , re-
jeta la confession de foi du concile de Ri-
mini en 559 , et mourut saintement le 24
septembre 366. C'est ainsi que ce pape ter-
mina sa carrière avec la gloire qui avait
illustré la très grande partie d'un ponti-
ficat de plus de 14 ans , et que sa chute,
quelle qu'elle ait été, n'a pu flétrir. Cette
faiblesse passagère se trouve réparée par
tant de traits d'un courage parfaitement
soutenu depuis son repentir, que presque
tous les Pères l'ont qualifié de bienheu-
reux. Son nom se lit dans les plus anciens
Martyrologes latins. On a de lui des E pi-
tres qui se trouvent dans celles des papo-j
par dom Constant. L'abbé Corgne a publié
en 1726 une J)issertation critique et his-
torique sur le pape Libère, et le P. Slili iny
LIB
455
Lie
a fait un commentaire critique et histori-
que sur saint Libère, inséré dans los Acta
sanctontm des bollandistes, 23 septembre.
La chute de ce pape a toujours servi d'ar-
gument aux gallicans contre l'infaillibi-
lité du pape. L'ouvrage cité montre la
faiblesse des conclusions qu'on en tire.
Saint Libère eut pour successeur saint
Damase.
LIBERGE (Marin), jurisconsulte, né
à Belon-le-Trichard près du Mans , pro-
fesseur de droit à Poitiers, fut élu éclic-
vin perpétuel de celte ville, pour avoir
apaisé deux séditions du peuple au com-
mencement de la ligue. Il professa aussi
à Angers et harangua Henri IV, lorsqu'il
passa dans cette ville en 1S9S, et ce prince
fut si charmé de son discours, qu'il l'em-
brassa, et accorda à l'université d'Angers
le droit d'apétissement des pintes^ pour
servir de gages aux professeurs en droit.
Il fut dans la suite député aux états de
Blois.Liberge mourut en 1599. Nous avons
de lui la Relation du siège de Poitiers, où
il était présent, sous ce titre : Ample dis-
cours de ce qui s'est fait et passé au siège
de Poitiers. Rouen , 1369, in-S", 2*= édit.
augmentée, Paris même année ; Poitiers,
1570, in-i"; Rouen, 162S, in-12; et quel-
ques Traités de droit.
LIBERIUSA JESU, carme, natif de
Novarre , enseigna la controverse pen-
dant 38 ans à Rome, et fut préfet de la
Propagande. Il mourut l'an 1719, après
avoir publié : Controversiœ dogmnticœ ^
Rome, 1701, in-fol. Cette édition fut dé-
fendue, parce que l'auteur y était favo-
rable au jansénisme ; mais l'ayant corri-
gée, et s'étant rétracté, on permit l'édi-
tion qui fut faite l'an 1710. Liberius , qui
avait promis 3 vol. in-fol. , quand il en
publia le premier , augmenta tellement
l'ouvrage, qu'on l'a imprimé à Milan en
11 vol. in-fol., l'an 1742.
LIBERTINLS ( Charles ), né à Mul-
hausen en Bohème , l'an 1658, entra chez
les jésuites en 1654, et mourut à Klattau
en 1683, après avoir enseigné les belles-
lettres et la langue grecque, et avoir prê-
ché avec réputation. On a de lui le traité
de Grenade, ou Georges Scholarius, sur
la prédestination ^ traduit en latin, avec
de fort bonnes notes, Prague, 1673, in-8°.
Il a publié encore Franciscus Xaverius.
Indiarum apostolus . elogiis illustratus,
Breslaw, 1681 ; Prague , 1771 , in-4°. — Il
ne faut pas le confondre avec Jean LI-
BERTINUS, aussi jésuite, né à Leutnie-
tilz en 1654, mort vers 1724, dont on a un
ouvrage, en langue bohémienne, sur l'é-
ducation de la jeunesse . Prague, 171î),
iul2 ; et un traité Delà conformité de
la volonté de l'homme avec celle de Dieu,
dans la même langue, Prague, 1710, in-12.
* LIBES ( Antoine ), savant professeur
de physique, né vers 1760 à Toulouse,
mort à Paris le 25 octobre 1832 , enseigna
sa science dans les écoles centrales de
cette dernière ville. Quoiqu'il ne fût mem-
bre d'aucune société, il n'en a pas moins
fait des découvertes précieuses. Libes a
trouvé l'électricité positive et l'électricité
négative , l'électricité à contact exécutée
parla soie, et qui paraît avoir donné lieu à
l'invention de la pile sèche. Il a d'ailleurs
composé plusieurs ouvrages importans
qui ont été traduits dans presque toutes
les langues de l'Europe : | Physicœ con-
j'ectwalis elementa. 1788, in-12 ; | Leçons
de physique chimique^ ou Application de
la chimie moderne à la physique . 1796,
in-S" ; I Théorie de l'électricité appuyée
sur des faits . confirmée par le calcul.
1800, in-4° ; | Traité élémentaire de phy-
sique^ présenté dans un ordre nouveau,
d'après les découvertes modernes j 1802 ,
in-8°; 1808, 5 vol. in-S° -, \ Nouveau dic-
tionnaire de physique^ 1806, 4 vol. in-
8° ; i Histoire philosophique des progrès
de laphysique^ 1810 , 1813, 4 vol. in-8'^';
Le monde physique^ et le monde moral,
ou Lettres à M'"'' de*'"*, 1815, in-8''. Li-
bes est encore auteur des articles de physi-
que du Dictionnaire d'histoire naturelle.
publié par DéterviUe , 1800. Il a joint des
notes au poème des 7'rois règnes de la
Nature, de l'abbé Delille, et inséré diffé-
rens Mémoires dans le Journal encyclo-
pédique.
LIBON , célèbre architecte grec, né en
Elide , florissait 458 ans avant J.-C. ( 80'
olympiade. ) C'est lui qui bâtit le fa-
meux temple de Jupiter, auprès de Pise ou
Olympie, si renommé par les jeux olym-
piques qu'on y célébrait tous les quatre
ans. Pausanias nous a laissé la description
de ce temple; il n'en reste plus aucun
vestige. Voyez l'ouvrage de M. Quatre-
mère de Quincy , intitulé Jupiter ohjm-
pien.
LICETI ( FoRTUNio ),Licetus, péripaîé-
ticien moderne, fils d'un célèbre médecin
et médecin lui-même , naquit à Rapalo ,
dans l'état de Gènes , en 1577 , dans le 7*
mois de la grossesse de sa mère. Son père
le fit mettre dans une boite de coton,, et
réleva avec tant de soin, qu'il jouit d'ime
santé aussi parfaite que s'il ne fût pas veuu
Lie
454
Lie
au monde avant le temps. Il professa la
philosophie d'Aristote à Pise, et ensuite
( 1643 ) ia médecine à Padoue, avec beau-
coup d'applaudissement. Il mourut en
IG57, à 79 ans. On a de lui un très grand
nombre de Tfuilés. Les principaux sont:
! De mon.ftrorum causiSj natura et diffe-
rentiis hbri II, Padoue, 4616, in-4° ; Ams-
terdam, 1665, in-i". On y trouve quelques
contes populaires, mais il y a de bonnes
vues et des principes sa{jes. | De cometa-
rum aUributisAn-h°; \ De his qui diii vi-
Vunt sine alimento, librilF^ Padoue, 1612,
in- fol.; I Mxindi et hominis analogia, in-i";
I De annuh's a7itiquis^Vd'me , 1645, in-4°;
Denovii astris et cometis^ Venise , 1622,
in-i"; | De spontaneo viventium ortulibri
IV, Vicence , 1618 , in-fol. ; | De animo-
rum rationaliîim immortalitate . Padoue,
1620, in-fol. ; ] Defulminum natura ^ in-
i"; I De ortu animœ humance^ Venise ,
1603, ia-k"; \ Hydrologia ^ sive De maris
tranquillitate et orlu fluminum^ Udine,
1355, in-4° ; [ De lucernis antiquorum
reconduis /jôn F/, Venise, 1621, in-4°,
Udine, 1652, in-fol. , etc. Dans ce dernier
traité, il soutient que les anciens avaient
des lampes sépulcrales qui ne s'éteignaient
point ; mais les sa vans croient communé-
ment que ces prétendues lampes éter-
nelles n'étaient que des phosphores , qui
s'allumaient pour quelques instans après
avoir été exposés à l'air. C'est le senti-
ment de Ferrari dans sa dissertation De
veterum lucernis sepulchralibus . qu'il
publia en 1683, in-Zt", dans son livre De
re vestiaria. { Voyez les Scriptores Ligu-
rin. de Mich. Giusliniani, les Mémoires de
Nicéron , et le Dictionnaire de Chauffe-
pié. ) — Joseph LICETI , père de Fortu-
nio , est auteur d'un livre intitulé : No-
bilita de principali menibri delV uomoj
Bologne, 1590, in-8".
LICHTENAU. rotjez RIETZ
LICIITEIVAW; on appelait de ce nom
CONRAD, connu aussi sous le nomd'^6-
bas Uspergcnsis. Voyez CONRAD.
♦ LICIITEXBERG ( Georgks-Chuis-
topue), physicien et moraliste allemand,
naquit à Ober-Ramstaedt, près de Darm-
stadt, le 1" juillet 1742. Son père, pasteur
de ce village, lui apprit les premiers élé-
mens des sciences, dans lesquelles le jeune
Lichtenberg se perfectionna d'abord à
Darmstadt , puis à l'université de Gottin-
gue , sous les célèbres professeurs Holl-
mann , Hcyne, Galtcrer, Kaestner et
Meister. Il prononça, en (juitlant le gym-
nase de Elarmsladt, un discours en vers
allemands sur la véritable Philosophie et
le Fanatisme philosophique, qui lui fit
beaucoup d'honneur et lui prépara une
brillante carrière dans l'enseignement pu-
blic. Après avoir achevé ses études , il se
mit à voyager et visita l'Angleterre. Il
lit dans son bas-âge une chute qui lui
courba l'épine du dos, et cet accident
qui devint la cause d'une difformité , in-
flua peut-être beaucoup sur son caractère ,
malgré ses grandes connaissances , Lich-
tenberg avait beaucoup de penchant poui
la superstition. Il interrogeait les astres,
croyait être sous la sauvegarde d'un
esprit, ou génie, comme celui de Socralc,;
et tâchait de communiquer avec les in-
telligences célestes. Il écrivit plusieurs
fois à son génie. Cependant il occupa les
chaires de mathématiques ( 1770 ) et de
physique expérimentale (1771 ) à Gottin-
gue, et eut quelques démêlés avec le fa-
meux Lavaler ( voyez ce nom ) , au sujet
d'un écrit de ce physiognome, intitulé
Recherches de Ch. Bonnet sur les preu-
ves du christianisme. Lichtenberg y ré-
pondit par une satire assez violente, sous
le titre de Revue ( 1773 ). Non content de
cette attaque, quelques années après , en
1778, il publia contre Lavater, en tête de .-,
Y Almanach de Gottingue, une satire plus^
violente encore que la première , inti-
tulée la Physiognosique contre les phy-
siognomes. Lavater répondit à son ad-
versaire avec beaucoup de modération, et
même avec des éloges. Le mordant Lich-
tenberg , aussi injuste que peu généreux,
publia une parodie amère et burlesque
de l'ouvrage de Lavaler: Essais physio-
gnomiques s et à laquelle il donna le titre
de Physionomie des Queues. Il mourut
le 24 fé-vrier 1799, âgé de 47 ans.
Pendant toute sa vie , il parut balancer
dans sa croyance religieuse , et finit pa r
avouer « que la doctrine de l'Evangile est
» le moyen le plus sûr et le plus efficace
» de répandre un repos et un bonheur
» durables sur la terre. ■ Parmi ses ou-
vrages, ceux qui firent le plus d'honneur
à Lichtenberg, furent V Explication de&
Tableaux ou Romans moraux du célè-
bre peintre anglais Hogarth, 1794-1809,
9 livraisons in-folio. Il n'a publié que les
4 premières. | Une espèce de Journal de
sa vie , où il écrivait toutes ses pensées.
Ce recueil est riche en observations
psychologiques, en données également
importantes pour le moraliste et le litté-
rateur ; mais on y trouve aussi des vue«
paradoxales et l'esprit dominant du £i&-
Lie
A5S
Lie
clc. qui tend à un scepticisme froid et dé-
daifjncux. La collection des OEuvres de
Liclilcnberg a été publiée après sa mort,
par les soins de son frère et de M. Kriès,
à Gottingue , 1800-1806, 9 vol. in-8". Elle
renferme le journal dont nous avons par-
lé, et la plupart des écrits qu'il avait
insérés dans les ^Imanachs et dans le
Magasin de Gottingue. On ne peut re-
fuser à Lichtenberg beaucoup d'esprit,
de gaîté et même de sensibilité ; mais
les analyses auxquelles il soumet les pen-
sées et les seutimens sont souvent trop
subtiles. Il eut le tort de s'opposer à la
restauration de la cliimie par Lavoisier ;
mais l'ouvrage où il le combat {Expo-
sition des idées de M. Deluc sur la for-
mation de la pluie, 1800 , in-8° ) est écrit
d'une manière si gracieuse , que l'on ou-
blie la frivolité et même la fausseté des
argùmens pour admirer la richesse et l'é-
légance du style avec lequel il les expose.
Kaestner a écrit VEloge de Lichtenberg
{Mém. de l'académie de Gottingue. 1799,
in-i"), et un anonyme a donné dans la
Nécrologie de SchUchtegroll , 10^ année,
2' volume , Gotha , 1805 , in-12 , quelques
détails sur sa vie.
LICIITE\STEL\(Joseph-Wei«ceslas),
prince de ) , duc de Troppau et de Jse-
gerndorf en Silésie , chevalier de la Toi-
son-d'Or , feld-maréchal au service de
l'impératrice Marie-Thérèse, directeur-
général de l'artillerie, naquit, à Vienne, le
iO août 1696. Il entra au service delà mai-
son d'Autriche en 1714, et fut fait colonel
d'un régiment de dragons en 1723. Il se
signala dans les campagnes de 1753 et
de 1754, et fut nommé successivement
général-major , lieutenant-général et
feld-maréchal. Charles VI l'envoya en
1738, en qualité d'ambassadeur , à la cour
de Versailles ; emploi qu'il remplit pen-
dant trois ans avec distinction. Il com-
manda en chef les armées en 1746 , et
gagna, le 20 juin, la bataille de Plaisance,
qui mil les affaires de sa souveraine dans
un état très avantageux en Italie. En 1760,
il fut nommé ambassadeur extraordinaire
à la cour de Parme , pour épouser par
procuration l'infante Isabelle, au nom de
l'arcliiduc Joseph , depuis empereur.
(Quatre ans après , il remplit à Francfort
la dignité de commissaire impérial pour
r élection du roi des Romains , et mourut
à Vienne, le 10 février 1772 , âgé de 75
ans. Lichtenstein est encore considéré
comme ayant été le plus fidèle ministre
<^t le plus zélé sujet de Marie-Thérèse dans
des temps très difficiles , et comme le
restaurateur de l'artillerie autrichienne
qui, sous sa direction, devint un des plus
formidables ressorts de la tactique mo-
derne. L'auguste princesse le regarda
comme un des soutiens de son trône, dans
les circonstances où il s'ébranlait de toutes
parts , et lui fit élever un beau monument
en bronze dans l'arsenal de Vienne. Les
artistes perdirent en lui un protecteur,
les infortunés un appui, et les pauvres
un père. Il est le créateur de la belle ga-
lerie de tableaux qui porte son nom , et
qui est devenue comme un fidéi-comrois
ou un majorât dans sa famille.
LICirVilA, vestale, fut punie de mort
avec deux autres, Emilie et Marcia,à
cause de leurs déréglemens, vers l'an 112
avant J.-C.
LICLMUS ( Caius ) , surnommé Stolo,
tribun du peuple romain, d'une famille
des plus considérables de Rome entre les
plébéiennes, fut choisi par le dictateur
Manlius pour général de la cavalerie. Li-
cinius fut le premier plébéien honoré de
cette charge. On le surnomma Slolo, c'est-
à-dire rejeton inutile ^ à cause de la loi
qu'il publia avec Sextius pendant son tri-
bunat (576 avant. J.-C. ), par laquelle il
défendait à tout citoyen romain de pos-
séder plus de 500 arpens de terre, sous
prétexte que ceux qui en avaient davan-
tage ne pouvaient cultiver leur bien avec
soin. Ces deux tribuns ordonnèrent en-
core a que les intérêts qui auraient été
» payés par les débiteurs demeurassent
» imputés sur le principal des dettes , et
» que le surplus serait acquitté en trois
» diverses années, » ce qui était une vio-
lation manifeste de la propriété ; enfin ,
a que l'on ne créerait plus de consul à
» l'avenir , que l'un d'eux ne fût de fa-
» mille plébéienne. » Ils furent tous les
deux consuls , en conséquence de cette
dernière loi, Sextius l'an 565 avant J.-C ,
et Licinius deux ans après. On a toujours
remarqué que l'ambition, la cupidité et la
jalousie cherchaient à flatter la multitude
et à gagner la faveur populaire pour par-
venir à leur but. Koyez GRACCHUS.
Licinius fut condamné, en 556 avant J.-C.
à une amende de 10,000 asses (6,700 fr.),
pour avoir trjunsgressé une des lois dont
il avait été le provocateur, en possédant
jusqu'à mille journaux de terre , tant en
sou nom qu'en celui de son fils , qu'il avait
fait émanciper pour colorer sa contra-
vention.
LICL\IUS-TEGULA (Publ.), célèbre
Lie A
poêle latin, vers l'an 200 avant J.-C. Li-
catius, cité par Aulu-Gelle, lui donne
le 4' rang parmi les poètes comiques,
fliais comme il ne nous reste de lui que
des fragmens dans le Corpus poetarum de
Maittaire , il est difficile de dire s'il mé-
ritait le rang qu'on lui assigne. On pré-
sume qu'il est le même que C. Licinius
Imbrex.
LICINIUS-CALVUS. f^oijez CALVUS.
LICI]\IUS ( Flavius-Valérius-Liciivia-
NDS), empereur romain, fils «l'un paysan
de Dacie, parvint du rang de simple sol-
dat aux premiers emplois militaires. Il
était né vers l'an 263. Galère-Maximien,
qui avait été soldat avec lui , et auquel il
avait rendu des services importans dans
la guerre contre les Perses , l'associa à
l'empire en 307 , et lui donna pour dé-
l)artement la Pannonie et la Rhétie. Con-
stantin, voyant son crédit, s'unit étroite-
ment avec Licinius ; pour resserrer les
nœuds de leur amitié , il lui fit épouser
Conslantia, sa sœur, en 313. Cette année
fut célèbre par les victoires de Licinius
sur Maximin. Il le battit, le 30 avril, en-
tre Héraclée et Andrinople, le poursuivit
jusqu'au mont Taurus, le força à s'em-
poisonner , et massacra toute sa famille.
Enorgueilli par ses succès, et jaloux de la
gloire de Constantin , avec lequel il par-
tageait l'empire, il persécuta les chré-
tiens pour avoir un prétexte de lui faire
la guerre. Les deux empereurs marchè-
rent l'un contre l'autre , à la tête de leurs
armées. Ils se rencontrent auprès de Ci-
bales en Pannonie , combattent tous les
deux avec valeur , et Licinius est enfin
obligé de céder. Il répara bientôt cette
perle , et en vint une seconde fois aux
mains auprès d' Andrinople. Son armée ,
quoique vaincue une deuxième fois ,
pilla le camp de Constantin. Les deux
princes , las de cette guerre ruineuse et
si peu décisive, résolurent de faire la
paix : Licinius l'acheta par la cession de
rillyrie et de la Grèce. Constantin ayant
passé sur ses terres en 323, son rival ir-
rité viola le traité de paix. On arma des
deux côtés , et le voisinage d' Andrinople
devint encore le théâtre de leurs combats.
L'armée de Licinius y fut taillée en pièces,
il prit la fuite du côté de Chalcédoine, où
le vainqueur le poursuivit. Craignant
d'être obligé de donner bataille, et n'ayant
que très peu de troupes, Licinius demanda
la paix à Constantin , qui la lui accorda ;
mais , dès qu'il eut reçu du secours , il
rompit encqre le traité. Il y eut une nou-
J>6 Lie
velle bataille près de Chalcédoine, où
Licinius fut derechef vaincu et contraint
de fuir. Constantin le suivit de si près ,
qu'il l'obligea de s'enfermer dans Nict)-
médie. Licinius , dans cette extrémité ,
se remit à la clémence de son vainqueur.
Conslantia, sa femme, employa les larmes
et les prières pouc toucher son frère ; Li-
cinius se joignit à elle, et se dépouilla de
la pourpre impériale. Constantin, après
lui avoir accordé son pardon et l'avoir
fait manger à sa table, le relégua à Thes-
salonique , où apprenant qu'il ne cessait
d'intriguer, et qu'il traitait secrètement
avec les Barbares pour renouveler la
guerre, il le fit étrangler l'an 324. Il avait
un fils que Constantin prit d'abord chez
lui, et qu'il fit mourir un an après. ( F^oy.
l'article suivant. ) Licinius se distingua
par son courage ; mais celte vertu était
balancée par beaucoup de vices. Il était
avare , dur , cruel , impudique ; il persé-
cuta les chrétiens, pilla ses sujets, et
leur enleva leurs femmes ; son incons-
tance et son ambition lui faisaient rom-
pre à la première occasion les traités les
plus solennels.
LICINIUS ( Fi,avi€sValeriusLicii«ia-
Mus), surnommé le Jeune ^ était fils du
précédent et de Constantia , sœur de
Constantin. Il naquit en 315 , et fut dé-
claré César en 317, ayant à peine 20 mois.
Constantin le fit élever sous ses yeux à
Constant inople. Mais sa jeunesse ne lui
permettant pas de cacher les saillies de
son imagination, il lui échappait des traits
qui faisaient connaître ses désirs ambi-
tieux et les troubles qu'il causerait dans
l'empire. On en fit des plaintes à Con-
stantin, et Fausta sa femme lui peignit
si vivement le danger de l'état, qu'il fit
mourir le jeune prince, en 326, lorsqu'il
était dans sa douzième année.
LICINIUS. royez LEZIN.
LICINIUS DE SAINTE-SCHOLAS-
TIQUE, carme, né à Saumur, mort à
Paris dans le couvent dit des Billettes ,
le IS février 1674 , après avoir publié :
I De scientiis acquirendis tam divtnis
quam humanis j 1664 ; | Preuves de l'in-
fidélité des jansénistes dans la traduction
des saints Pères ; \ Vie du père Philippe .
Thibault, auteur de la réforme des Car-
mes de l'observance de Rennes > Paris ,
1673 ; I un grand nombre ^'ouvrages as-
cétiques. C'était un homme appliqué, et
qui ne cherchait qu'à se rendre utile , à
confondre l'erreur , à démasquer l'hypo-
crisie, et à nourrir la piété.
LIE
457
LIE
LIEBAULT ( Jban ), médecin et agro-
nome, né à Dijon , mort à Paris en 1596 ,
laissa divers Traités de médecine, eut
part à la Maison rustique , ouvrage' dont
Charles Etienne , imprimeur , son beau-
père, est le premier et le principal auteur.
Ce livre, qui ne formait d'abord qu'un
volume, en compose à présent deux in-4°.
On a encore de lui : | Thésaurus sanitatis^
etc., 1578, in-8° ; | des Scholies sur Jac-
ques HoUérius, en latin, 1579, in-8°, etc. ;
I des Traités sur les maladies :, la santé ,
et la fécondité des femmes^ 1582, 3 vol.
in-S"; 1 De prœcavendis curandisque ve-
nenis commentarius.
LÏEBE (Chrétien-Sigismond), savant
antiquaire allemand, né en 1687 à Frau-
enstein ( Misnie ), mort à Golha en 1756 ,
à l'âge de 49 ans, fut successivement doc-
teur en l'université de Leipsick (1714 ),
gradué en théologie ( 1717 ) , prédicateur
à l'église Saint-Paul, bibliothécaire ad-
joint de l'académie, et enfin conserva-
teur du cabinet des antiques du duc de
Saxe-Gotha. 11 s'est principalement fait
connaître par son ouvrage intitulé : Go-
tha nummaria. Amsterdam, 1730, in-
fol. I Roma Babylonexnummis^Leipsick,
1714, in-4°, réimprimée sous ce titre ?
( Nummi Ludovici XII Galliœ regiSj Epi-
graph. : perdam babylonis nomeiv vel
PEBDA!»i BABYLONEîw, insiçncs^ Ulustroti
ac contra Harduinum defensi. Leipsick ,
1717 , in-S". Il fut un des principaux col-
laborateurs des Acta eruditor. Lipsen-
sium.
LIËBICH (Jean), né àGlogau en Silésie,
en 1681 , entra che» les jésuites , où il en-
seigna diverses sciences avec succès , fut
pendant dix ans chancelier de l'univer-
sité d'Olmutz , et mourut dans cette ville
en 1757. Ses principaux ouvrages sont :
j Queestiones theologicœ de fide, spe et
charitate, Olmutz , 1728 , in-S" ; | Brevia-
rium scripturisticum in evangelia adven-
tûs et plures dominicas seqaentes usque
ad dominicam septuagesimce ^ Olmutz,
1731, in-8° ; | Pœnitentiœ sacramentum
per resolutiones speculativo-practicas ad
munus confessariorum se disponentibus
servituras discussum ^ Troppav. , 1752,
in-8°; | Quœstio juris et facti historico-
tJieologica de conciliis sanctœ romance
Ecclesiee^ TToipl>aiU , 1732, in-12.
LIEBKNECHT (Jean-Georges), ma-
thématicien, antiquaire et célèbre profes-
seur de Giessen, né à Wasungen vers
■1680 , devint membre de la société royale
de Londres, de l'académie des sciences
7.
do Berlin, et de la société des Curieux de
la nature , et mourut à Giessen en 1729.
On a de lui un grand nombre de Disserta-
tions théologiques^ philosophiques et lit-
téraires^ estimées, et divers autres ou-
vrages. Il crut découvrir, en 1725 , une
nouvelle étoile dans la grande Ourse;
parmi ses ouvrages , qui sont au nombre
de dix, on cite une Dissertatio cosmo-
graphica de harmonia corporum mundi
totalium. nova ratione in numeris perfec-
tisgeneratim definita^ Giessen, 1718, in-4°.
Goetenn a donné la vie de Liebknecht
dans le Gelehrie Europa, 2*^ partie.
LIEMACKER (Nicolas de), surnom-
mé Roose. peintre renommé , naquit à
Gandenl576, fut élève de Guéraer et
d'Ottovenius , et rivalisa de talent avec
Rubens, qui savait l'apprécier. Il tra-
vailla plusieurs années à la cour du
prince-évêque de Paderborn. Il s'établit
ensuite à Gand , et y exécuta d'excellens
tableaux qui ornent la plus grande partie
des églises de cette ville. La confrérie
de Saint-Michel avait demandé Rubens
pour peindre une chute des anges ; mais
cet habile artiste conseilla de choisir
Roose. « Quand on possède une rose si
» belle, on peut se passer des fleurs étran-
» gères. » Ce tableau , qui existe dans la
paroisse de Saint-Michel, passe pour un
de ses chefs-d'œuvre. Parmi ses autres
ouvrages , on cite un saint Nicolas dans
l'église de ce nom^ le plafond d'une cha-
pelle de l'église de Saint-Baron, et un
tableau d'autel représentant la Vierge
avec 'l'enfant Jésus ^ au milieu d'une
gloire de saints. Il a reproduit ce même
sujet dans l'église des Bernardines. Roose
avait un grand talent pour la composition,
était bon dessinateur , et se distinguait
surtout par l'expression de ses figures;
il péchait cependant quelquefois par trop
de noir dans ses ombres, et trop de rouge
dans ses chairs. Il eut toujours des mœurs
pures, et mourut en 1646.
LIENIIART (Georges), savant abbé
de l'ordre de Prémontré à Roggenburgh,
et comme tel prélat de l'empire , naquit
le 29 janvier 1717 , à Uberlinghen en
Souabe, de parens nobles et d'une fa-
mille sénatoriale. Il quitta les avantages
que lui présentait sa naissance pour em-
brasser la vie canonique , et choisit pour
l'exécution de ce dessein l'abbaye de Rog-
genburgh, ordre de Prémontré, où il fit
profession en 1741. Après avoir fait ses
études à Constance et à Dillingen , il en-
seigna dans sa n:aison la philosophie et
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la théologie. Il y avait sept ans qu'il exer-
çait l'office de prieur lorsque l'abbaye va-
qua. Tous les suffragfes se réunirent sur
iui , et il fut élu abbé le 17 juillet 1755. En
4768, le collé^je impérial des prélats de
Souabe le choisit pour être un de ses co-
directeurs. Il est auteur des ouvrages
suivans : | Ogdoas erolhomatum ex Olto-
nis iheosophiœ scolasticce tractatibus .. pu-
blicœ luciet concertationi exposita^ Ulm,
i746 , in-8° ; ouvrage approuvé par l'uni-
versité de Dillingen, attaqué néanmoins ,
mais défendu par -son auteur d'une ma-
nière qui lui valut lès applaudissemens
de l'université de Saltabourg ; | Exhorta-
tor dornesticus rcligiosam, animam ad
perfectionem excilans , en deux parties ,
l'une imprimée à Lintz , 47Si , in- 4° , l'au-
tre à Augsbourg, 1761, même format;
I Dissertatio theologica sub titulo : B. M.
f^irginis originaria immunitas a seriori-
busLa^nindi Pritanii censuris vindicata\.
Augsb., 17o6, in-/i°; | Causa sanguinis et
sancto7-um ^ seu cultus débitas résidais in
terra SS. sanguinis et sanctœ Crucis par-
ticulis j necnon sanctorum re.liquiis , dis-
sertatione assertus ^ Augsbourg, 1758,
in-/i° ; 1 Ephemerides hagiologicœ ordinis
prœmonstratensis:, etc. Augsbourg , i76i ,
in-4°. Il en a paru, en 1767, un supplé-
ment sous le titre û'Jucîarium ^ etc. ;
j Spiritus litterarius Norbertinus . seu
Sylloge viros ex vrdine prœmonstratensi
scriptis et doctrina célèbres , nec 7ion
eorumdetn vitas^ res gestas^ opéra et
scripta tum édita, perspicue exhibens. etc.
Augsbourg, 1771, in-4°. L'auteur y prouve,
contre Casimir Oudin , déserteur de sa
profession et de sa foi , que l'ordre des
Prémonlrés n'a pas manqué d'écrivains
et de personnages célèbres qui l'aient il-
lustré. La liste qu'en donne l'abbé de Rog-
genburgh est de plus de six cents , dont
les écrits embrassent toutes sortes de ma-
tières. ( Foyez OUDIN , Casimir, et COL-
BERT, Michel.) | Des Sermons^ des Pa-
négyriques et des Oraisons funèbres.
L'abbé Lienhart est mort en 1783.
* LÏENHART (Tuibaud), ancien bé-
nédictin et professeur en théologie , né le
i" septembre 1765 , de parens cultiva-
teurs, à Truchtersheim, village près de
Strasbourg , fit avec distinction ses étu-
des au collège de Molsheim , en Alsace , et
se fit ensuite recevoir dans l'abbaye des
bénédictins de Marmoûlier, dans la même
province. Il y passa quelques années livré
aux études de la théologie jusqu'au mo-
ment de la, révolution de 1793; ce fut pen-
dant ce temps qu'il reçut la prêtrise. Lien-
hart refusa de prêter le serment de la
constitution, et se rendit dans le cou-
vent des bénédictins àSchuttern (dans le
grand-duché de Bade), où il enseigna la
théologie. Ses supérieurs, appréciant les
dispositions qu'il avait pour les langues
orientales , l'envoyèrent à l'université de
Fribourg , en Brisgaw , où il prit le grada
de docteur en théologie. Il passa ensuite
en Autriche, dans le célèbre couvent des
bénédictins de Kremsmiinster, près do
Vienne, où il fut encore chargé d'ensei-
gner la théologie, et il y resta jusqu'après
la révolution française. L'évêque de Stras-
bourg le rappela alors dans son pays et
Uii confia l'éducation des clercs. Il eut
beaucoup de difficultés à surmonter pour
donner de jeunes prêtres à l'église d'Al-
sace. Il reçut les jeunes aspirans en qui
il remarquait de la vocation, fit lui seul
pour eux les différens cours de théologie ,
aida les plus pauvres en argent , livres et
habits, et parvint ainsi à fonder le sémi-
naire. L'abbé Lienhart fut nommé cha-
noine titulaire de la cathédrale de Stras-
bourg, et chanoine honoraire de Saint-
Denis. Il avait été supérieur du grantl
séminaire de Strasbourg pendant 25 ans ,
quand la révolution de juillet de 1850 vint
interrompre sa longue et honorable car-
rière. Un changement si subit de vie et
d'habitudes ne tarda pas à altérer sa santé r
il mourut le 22 mars 1831 , après avoir
passé iO ans dans l'enseignement de la
théologie. Ce respectable ecclésiastique
rendît de grands services à la religionpar
les différens ouvrages qu'il publia. Sa
théologie dogmatique en 3 vol. et son
1"" vol. sur les liturgies lui valurent deux
brefs des souverains pontifes Pie VII et Pie
VIII, qui font un grand éloge de son éru-
dition, de sa piété et de l'orthodoxie do
ses principes. Il parut encore de lui :
I Dissertatio critica in librum Judith ;
1 Anahjsis studii biblici; \ Analysis theo'
logice dogmaticœ ; | en langue allemande,
un Avertissement aux catholiques sur la
lecture de la bible traduite par van Ess ;
I et en latin un manuel pour les séniina~
ristes. Il s'occupait , dans les derniers
temps de sa vie, à retoucher plusieurs
ouvrages. qui sont restés manuscrits, tels
que le T vol. sur les liturgies , presque
achevé ; la morale , et le Studium hibli-
cum qui était la partie dans laquelle il
excellait principalement. Les courtes
prières qu'il fit , peu d'instans avant de
consommer son douloureux sacrifice , ex-
LIG
4S9
LI^
priment d'un seul trait toute sa vie. Après
une léthargie de plusieurs jours , il parut
revenir à lui, et rassemblant ses forces il
dit d'un ton plein d'amour et de confiance :
Bone Jesu^ amavi te ^ laudavi te ^ labo-
ravi inte^ laboravi pro te^ moriar in te....
et vivam in te. L'abbé LLenhart avait ac-
compagné son évèque au concile de Paris,
en 1811 , en qualité de théologien , et fut
cause que ce prélat ne signa aucun des
actes attentatoires aux droits ou à la di-
gnité du saint Siège. Ses vastes connais-
sances en théologie lui assurèrent la même
influence sur d'autres membres du con-
cile ; aussi Napoléon avait lancé contre
lui un mandat d'arrêt, qui ne resta sans
exécution que parce que l'abbé Lienbart
avait, par un heureux hasard , quitté Pa-
ris, vingt-quatre heures auparavant.
LIEUÏAUD (Jacques), né à Arles,
vers 1600, mourut à Paris en 1733, mem-
bre de l'académie des sciences , à laquelle
il avait été associé eu qualité d'astronome.
On a de lui 27 volumes de la Connaissance
des temps ^ depuis 1703 jusqu'en 1729 , in-
12, et les Ephémérides ^ in-4°, 1704-1711.
Voyez la Bibliographie astron. de Lalan-
de , p. 349.
LIEUTAUD (Joseph), premier méde-
cin du roi de France , président de la so-
ciété royale de médecine , naquit à Aix
en Provence , en 1703. On a de lui : | Es-
sais anatomiques contenant la descrij)-
tion exacte de toutes les parties qui com-
posent le corps humain^ Paris, 1772, 2
vol. in-8°. M. Portai en a donné une nou-
velle édition en 1777 , avec des notes et
dos observations ; | Elementa Physiolo-
giœ, Paris, 17/*.9, in-8"; | Précis de la
médecine pratique , 1776, 2 vol. in-8°, et
3 vol. in-12 ; | Précis de la matière médi-
cale AllQ, 1771, 2 vol. in-8", et 3 vol. in-12 ;
( Historia anatomico-mcdica ^ 1767, 2 vol.
in-8", avec des observatioas de Portai.
Ce célèbre médecin mourut à Versailles
l^iiQ décembre 1780. Plusieurs de ses con-
frères , rassemblés autour de son lit , pro-
posaient différens remèdes. « Ah ! leur
» dit-il, je mourrai bien sans tout cela. »
LIGARIUS (QuirwTUs), lieutenant de
Caïus Considius, proconsul d'Afrique, se
fit chérir des Africains. Ils le demandèrent
et l'obtinrent pour leur proconsul , lorsque
Considius fut rappelé. Il continua de se
faire chérir dans son gouvernement, et
ces peuples voulurent l'avoir à leur tête
lorsqu'ils prirent les armes , au commen-
cement de la guerre civile de César et de
Pompée; mais il aima mieux retourner à
Rome. Il embrassa les intérêts de Pom-
pée , et se trouva en Afrique dans le temps
de la défaite de Scipion et des autres chefs
qui avaient renouvelé la guerre. Cepen-
dant César lui accorda la vie , mais avec
défense de retourner à Rome. Ligarius se
vit contraint de se tenir caché hors de l'I-
talie. Ses frères et ses amis , et surtout
Cicéron, mettaient tout en oeuvre pour
lui obtenir la permission de rentrer
dans Rome , lorsque Tubéron appuyé par
C. Pansa, se déclara dans les formes l'ac-
cusateur de Ligarius. Ce fut alors que Ci-
céron prononça pour l'accusé cette haran-
gue admirable qui passe avec raison peur
un chef-d'œuvre, et par laquelle il obtint
de César l'absolution de Ligarius , quoique
ce prince n'eût pas dessein de l'absoudre.
Tubéron fut si fâché de l'issue de sa cause,
qu'il renonça au barreau. Cependant Li-
garius devint dans la suite un des com-
plices de la conjuration où César fut as-
sassiné ; tant il est vrai que les usurpateurs
du pouvoir et les violateurs des lois pu-
blicfues ne sont jamais assurés de l'impu-
nité, lors même qu'ils se signalent par
des actes de justice ou de bonté. Ligarius
ne fut cependant pas parmi les assassins
de César : le jour de ce grand événement
(15 mars,/ti ans avant J.-C), il était
retenu au lit par une maladie , et il ne
survécut au dictateur que peu de temps.
LIGER (Louis), auteur d'un grand
nombre d'ouvrages sur l'agriculture , le
jardinage et l'économie domestique, na-
quit à Auxerre en 1658, et mourut à
Guerchi, près de cette ville, en 1717. Il
était fort honnête homme ; mais c'était un
auteur médiocre , rebattant cent fois les
mêmes choses dans ses différens ouvra-
ges. Les meilleurs sont : | La Nouvelle
Maison rustique . 2 vol. in-4°, avec fig.,
dont la onzième édition est de 1777. La
dernière édition, entièrement refondue
par J. F. Baslien, a été publiée à Paris,
1798-1804 , 3 vol. in-4° ; | Les amusemens
de la campagne :, ou Nouvelles ruses inno-
centes qui enseignent la manière de pren-
dre aux pièges toutes sortes d'oiseaux ,
quadrupèdes, etc., Paris, 4' édition, avec
fig., 1753, 2 vol. in-12; | Le Jardinier
fieujHste, in- 12. {Voyez LIEBAULT.) Il
s'attachait plus à compiler qu'à réfléchir
sur les matières qu'il traitait.
LIGHTFOOT (Jeaiv), l'un des plus
habiles hommes de son siècle dans la con-
naissance de l'hébreu , du Talmud et des
rabbins , né en 1602 , à Stoke , dans le
comté de Stafford, mort à Cambridge en
LIG
460
LIG
1675, à soixante-treize ans, fut vice-chan-
celier de l'université de cette dernière
ville, et chanoine d'Ely, La meilleure édi-
tion de ses OEuvres est celle d'Utrecht ,
1699, en 3 vol. in-fol., mise au jour par
ies soins de Jean Leusden. Ses principaux
ouvrages sont : [ Horce hebraicœ et tal-
muddicœ in geographiam Terrœ-Sanctœ.
On y trouve des observations propres à
rectifier les erreurs des géographes qui
ont travaillé sur la Palestine ; ] une Har-
monie de l'ancien Testament; \ des Com-
mentaires sur une partie du nouveau.
Ils respirent l'érudition la plus recher-
chée , ainsi que ses autres ouvrages. Il a
fait un usage heureux des connaissances
talmudiqties pour l'explication des usages
des Juifs modernes. Strype a publié à
Londres en 1700, in -8°, de nouvelles
Œuvres posthumes de Lightfoot. On
trouve dans ses écrits quelques senti-
mens condamnables , savoir : que les Juifs
étaient entièrement rejetés de Dieu ; que
les clefs du royaume des cieux n'avaient
été données qu'à saint Pierre; que son pou-
voir ne regardait que la doctrine et non
la discipline , etc. ; erreurs qui n'ont rien
de surprenant dans un calviniste. Light-
foot a pris part à la Polyglotte de Lon-
dres et au Lexique heptaglotton d'Edm.
Castel. Sa vie se trouve à la tète de l'édi-
tion de ses OEuvres de 1686 et celle de
1689. Voyez Mém.oires de Nicéron , Dic-
tionnaire de Chauffepié , et Nouvelles de
la république des Lettres^ année 1686.
LIGIVAC (JosEPH-AoRiEivleLARGEde)
naquit à Poitiers d'une famille noble. Il
passa quelque temps chez les jésuites, qu'il
quitta pour entrer dans la congrégation de
l'Oratoire. On lui confia divers emplois ,
dont il s'acquitta avec succès. Dans un
voyage qu'il lit à Rome , Benoît XIV et le
cardinal Passionei l'accueillirent avec cette
bonté et cette familiarité nobles qui leur
étaient ordinaires envers les savans. L'abbé
de Lignac mourut à Paris en 1772, après
être sorti de l'Oratoire. Il s'appliqua spé-
cialement à la métaphysique, pour la-
quelle il suivit les principes de Malebran-
che et de Descartes. Nous avons de lui :
I Possibilité de la présence corporelle de
l'homme en plusieurs lieux ^ 1754 , in-12.
L'auteur y montre, contre M. Boullier,
que le dogme de la Transsubstantiation
n'a rien d'incompatible avec les idées de
la saine philosophie ; il y a cependant
d'autres moyens plus simples peut-être de
mettre ce mystère à l'abri des chicanes
de l'erreur. {Foy. le Catéch. philos. n°/i41
etsuiv. ) \ Mémoire pour servir à commen-
cer l'histoire des araignées aquatiques ,
en 1748, in-8", 1799, in-12 ; | Lettres à un
américain sur V Histoire naturelle de M.
de Z?M/7bn, 1751-56, 9 vol. in-12, pleines
d'observations sensées ; mais quelques-
unes sont minutieuses ; ] Le témoignage du
sens intime et de l'expérience ^ opposé à
la foi profane et ridicule des fatalistes
modernes^ 3 vol. in-12, 1760; | Elémens
de métaphysique tirés de l'expérience ^
1753, in-12; | Examen sérieux et comique
du livre de l'Espnt^ 1759 , 2 vol. in-12.
Ouvrages pleins de raison et d'excellentes
observations, quoiq[ue le dernier soit quel-
quefois superficiel et contienne des choses
mal vues , en particulier une espèce de
roman touchant la condamnation de Ga-
lilée. L'abbé de Lignac travaillait à exé-
cuter le plan des preuves de la religion
que Pascal avait conçu , quand la mort le
surprit. Son style à la vérité était fort in-
férieur à celui de cet homme célèbre ,
mais il pensait profondément , surtout en
métaphysique, et tous ses ouvrages en
sont la preuve. S'il a eu des liaisons peut-
être trop marquées avec les gens du parti,
il n'a pas perdu son temps à défendre
leurs opinions. On en voit cependant ça et
là quelques symptômes dans ses ouvrages,
mais faiblement prononcés , et suscepti-
bles, pour l'ordinaire, d'une interpréta-
tion favorable.
* LIGNE ( Charles-Joseph, prince de ) ,
né à Bruxelles, en 1735, fils aine du prince
de Ligne, général d'artillerie au service
d'Autriche, et petit-fils d'un feld-maré-
chal au service du mémo pays , était issu
d'une des plus anciennes et des plus il-
lustres familles des Pays-Bas ; il fut élevé
au milieu des dragons du régiment de son
père , qui le portaient dans leurs bras, et
lui racontaient les campagnes qu'ils
avaient faites sous le prince Eugène. A
l'âge de huit ans , il avait déjà été témoin
d'une bataille, s'était trouvé dans une
ville assiégée et avait vu trois sièges des
fenêtres du château de Beiœil. Passionné
pour les armes, il s'enrôla en 1752 , dans
le régiment de son père, à l'âge de 17 ans.
D'abord enseigne, il fut 4 ans après capi-
taine et l'année suivante ( 1757 ) il fil sa
première campagne : alors la Prusse et
ses alliés faisaient la guerre à Marie-
Thérèse , reine de Hongrie , puis impé-
ratrice d'Allemagne. Le jeune prince de
Ligne se signala par sa valeur , aux affai-
res de Breslaw, de Leuthen et de Hochkir-
chen. Chargé, dans cette dernière bataille
LIG
461
LIG
en l'absence du major, du commande-
ment de son bataillou , il s'empara d'un
poste important, et mérita d'être élevé au
grade do colonel. Durant les dernières
campagnes de la guerre de 7 ans, il se dis-
tingua de la manière la plus brillante, et
mit peut-être même trop de témérité dans
sa bravoure. Un jour Marie-Tliérèse lui
annonçant sa nomination à un nouveau
prade lui dit : « En prodiguant votre vie,
0 vous m'avez fait tuer luie brigade l'an-
» née dernière : n'allez-pas m'en faire
«) tuer deux pendant celle-ci , conservez-
0 vous pour l'état et pour moi. » La guerre
de 7 ans avait eu pour résultat la conquête
par Marie-Thérèse des états héréditaires.
A l'époque du couronnement de Joseph
II, le prince de Ligne fut nommé général
major ; il inspira une grande confiance
à cet empereur, qu'il accompagna à son
entrevue avec Frédéric II, roi de Prusse,
en 1770. Ontrouve dans sa Correspondance
d'intéressans détails sur le caractère des
deux souverains ^et sur les circonstances
de cette entrevue. En 1771, le prince de
Ligne obtint le grade de lieutenant-général,
et il fit toutes les campagnes depuis cette
époque jusqu'à l'an 1778, où fut signée la
paix. Pendant la dernière guerre qui avait
lieu pour la succession de la Bavière , il
comujanda l'avant-garde sous les ordres
de Laudon : quoique cette guerre ait été
peu féconde en événemens , le prince de
Ligne trouva occasion de déploya r de
nouveaux talens militaires et d'ajouter
à sa réputation, il se Uvra alors à l'étude,
perfectionna son éducation et voyagea en
Italie , en Suisse et en France , pays pour
lequel il avait une prédilection marquée :
déjà , en 1759 , il avait été envoyé à la cour
de Versailles , pour porter à Louis XV la
nouvelle de la victoire de Maxen, et il
avait reçu l'accueil le plus distingué. Dans
ce second voyage , il ne fut pas moins bien
reçu , surtout de la reine Marie-Antoi-
nette , aux vertus de laquelle il rend de
touchans hommages dans sa correspon-
dance. Ce fut avec un vif regret qu'il
quitta la France , lorsque la cour le rap-
pela pour le charger d'une nouvelle mis-
sion. Il fut envoyé en Russie ( 1782 ), au-
près de Catherine II , qui lui témoigna la
plus vive affection, le nomma feld-maré-
chal , et lui donna la propriété d'une vaste
terre en Crimée : elle voulut nuhuc qu'il
l'accompagnât dans ie voyage qu'elle fit
avec Joseph II, dans cette province ( foy.
CATHERINE II. ) Sur ces enti efailcs , la
Russie déclara la guerre à la Porte; le
prince de Ligne était parvenu à déterminef
le cabinet de Pétersbourg à cette grande
résolution, prise dans l'intérêt de l'Au-
triche , sa nouvelle alliée. En 1788 , il re-
çut de l'empereur le grade de général
d'artillerie , et fut chargé d'une mission
à la fois militaire et politique auprès du
prince Potemkin , qui faisait' le siéga
d'Oczakow. Il remplit cette mission avec
le plus grand succès, et après avoir parta-
gé les périls du siège, il contribua l'année
suivante avec Laudon à la prise de Bel-
grade ( 1789). Ce fut là sa dernière cam-
pagne, où ses services lui avaient valu le
titre de commandeur de l'ordre de Marie-
Thérèse. Alors éclata la révolte des Pays-
Bas, causée par différentes réformes reli-
gieuses , que Joseph II avait voulu y in-
troduire ; le prince de Ligne était né
dans les pays insurgés, il y passédait la
plus grande partie de ses biens, et l'un de
ses fils était à la tète des rebelles. Toutes
ces circonstances firent naître contre
Un des soupçons que rien ne justifiait.
Joseph II, qui connaissait à fond son ca-
ractère , lui rendit bientôt toute sa con-
fiance , et lui dit en mourant : « Je vous
» remercie do votre fidélité : allez aux
» Pays-Bas ; faites-les revenir à leur sou-
» verain, et si vous ne le pouvez, restez-y :
» ne me sacrifiez pas vos intérêts , vous
» avez des enfans. » Cette exhortation de-
venait inutile pour le prince de Ligne ,
qui s'était montré contraire à la rébellion
des Belges. Ce n'est pas que leur chef , le
fameux Vander-Noot , ne lui eût écrit
pour l'intéresser à leur cause ; mais , au
lieu d'y consentir , il lui donna le conseil
salutaire de se soumettre à l'instant, pour
éviter une mauvaise fin. La mort de Jo-
seph II ( en 1690 ) causa au prince de Ligne
une vive douleur, qu'il ne dissimulait pas
devant le nouvel empereur, Léopold II.
Ce souverain, au moment qu'il faisait la
paix avec les Turcs, éloignait de sa cour
presque toutes les créatures de son frère.
Le prince de Ligne fut de ce nombre. Ce-
pendant les troubles de la Belgique ayani
été apaisés, il se relira dans ce pays, et
présida les états du liainault. Voici com-
ment il raconte la manière dont il désap-
prouva, devant les députés, le dernier
soulèvement. « Je trouvai, dit-il, un reste
» d'aigreur et d'indépendance, qyi me
» donna de l'humeur; j'en témoignai un
«jour plus qu'à l'ordinaire, dans uno
» assemblée do mes itères conscrits . el
» voyant qu'on me la rendait , je leur dia
« que si je n'avais pas été en Ciiméeavec
LIG
462
LIG
• l'empereur Joseph et l'impcralrlce de
» Russie , lorsque leur rébellion éclata,
» je l'aurais arrêtée , ou en leur parlant
» en citoyen fidèle, zélé et raisonnable,
» ou, si je n'avais pas réussipar ce moyen,
• en général autrichien, à coups de canon
Bsans boulet, mais qui les eussent fait
B mourir de peur... » Lorsque les Fran-
çais firent une invasion en Belgique, le
prince de Ligne perdit ses biens; un cha-
grin bien plus vif vint accabler son âme,
quand il apprit que son fils aîné avait péri
dans un combat lors de l'expédition des
Prussiens en Champagne, le 14 septembre
1792. La cour d'Autriche oublia entière-
ment ses services, et lorsque Laudon et
Lascy furent morts , elle ne songea point
à les remplacer par le prince de Ligne ,
qui était cependant le plus ancien des gé-
néraux autrichiens , et le plus recomman-
dable par ses services. En 1796, il ne put ob-
tenir le commandement de l'armée d'Italie,
dont le ministre Thugut, qu'il avait blessé
par quelques épigrammes, le tenait éloi-
gnée. Aussi le prince de Ligne disait-il
souvent avec amertume, je suis mort avec
Joseph II. Sa fortune était loin aussi de
prospérer, et il fut même obligé pour
vivre de vendre une partie de ses pro-
priétés. Il eut recours à l'étude pour dis-
siper ses chagrins : il s'occupa de mettre
on ordre ses divers écrits, qu'il publia
à Vienne et à Dresde , en 1807 , 50 vol.
in-12. L'empereur François II se souvint
enfin du prince de Ligne, et le nomma,
en 1807, capitaine des trabans de sa garde
et, l'année suivante , lui conféra le grade,
de feld-maréchal. Par fois on le consul-
tait sur quelques opérations militaires ,
mais on ne lui confiait plus aucun corps
d'armée, et son occupation la plus habi-
tuelle était do présider le conseil de l'ordre
de Marie-Thérèse. Aucun étranger de
marque ne passait par Vienne sans le vi-
siter; les Français surtout, qu'il aimait de
préférence, le recherchaient avec empres-
sement. Les souverains de l'Europe, réu-
nis à Vienne au congrès de 1814 , l'hono-
rcrent de leur visite, et parurent charmés
de sa gaieté , de ses saillies et de la pré-
sence d'esprit qu'il conservait malgré son
grand-âge. Pour se délasser des affaires
politiques qui les occupaient quelques
heures du jotrr , les souverains passaient
le reste du temps en bals et en fêles; ce
qui fit dire au prince de Ligne : « Le con-
» grès danse , il ne marche pas ; quand il
a aura épuisé tous les genres de spccta-
» clés , je lui donnerai celui de l'enlerre-
B^mcnt d'un feld-maréchal... » Il tint pa-
role, et mourut le 13 décembre 1814, âgé
de 79 ans. Une laissa pas de fortune ; mais
comme il voulait , selon l'usage , faire un
legs à sa compagnie de trabans, il lui
donna la Collection de ses manuscrits ,
qu'il avait évaluée à 100,000 florins; mais
ses héritiers la cédèrent à un libraire
pour un bien moindre prix". Le comte de
CoUorédo , qui lui succéda dans le com-
mandement des trabans, réclama contre
cette vente , qui les frustrait du legs du
testateur ; les parties , à ce qu'il paraît ,
s'arrangèrent à l'amiable, et les OEuvres
posthumes du prince de Ligne parurent
à Vienne et à Dresde en 1817, 6 volumes
in - 8°. Le prince de Ligne comptait
beaucoup sur le succès de ses écrits ,
et disait : « J'ai lieu de croire q^ue les
» bontés paternelles du respectable em-
» pereur François I", maternelles de la
» grande Marie - Thérèse , et quelquefois
» presque fraternelles de l'immortel Jo-
» seph II ; la confiance entière du maré-
» chai Lascy et presque entière du maré-
» chai Laudon ; la société intime de l'a-
» dorable reine de France ; l'intimité de
» Catherine le Grande mon accès chez
» elle , presque à toutes les heures ; les
» bontés distinguées du grand Frédéric ,
» rendront mes Mémoires bien intéres-
» sans...» Ses oeuvres sont écrites en fran-
çais et divisées en deux parties ; la pre-
mière contient : | Essai sur les jardins et
sur la terrti du Bel-OEil , ou Coup d'œil
sur le Bel-OEil et sur une grande partie
des jardins de l'Europe; \ Dialogues des
morts; | Lettres à Eulalie sur les théâ-
tres ; I Mes écarts^ ou nia télé eii liberté;
I Mélanges de poésies ^ pièces de théâtre;
1 Mémoire sur le comte de Bonneval; sur
la correspondance de la Harpe ^ etc. La
seconde partie a pour titre : OEuvres mi-
litaires et sentimentales ; elle comprend :
I Préjugés et fantaisies militaires ; | Mé-'
moires sur les campagnes du prince Louis
de Bade ^ sur les campagnes du comte
Bussy-Rabutin^ sur la guerre des Turcs,
sur les deux maréchaux de Lascij ^ sur
Frédéric II ; \ Instructions du roi de
Prusse à ses officiers; | Journal de la
guerre de sept ans ; de sept moiSj en 1 778,
et de sept jours, aux Pays-Bas^ en 1784 ;
I Mé7noire sur les généraux de la guerre
de t?ente ans; | Relation de ma campagne
de 1788 à 1789; | Catalogue raisonné des
livres militai?'es de ma bibliothèque. En
1809, il publia encore un ouvrage, sous
le titre de Fie du prince Eugène de Sa-
LIG
voie ^ écrite par lui-même. L'espèce de
culte qu'il rendait à ce fameux général
lui fit attribuer cet écrit dont lui, le prince
de Ligne , était l'auteur. Il croyait , par
cette petite supercherie , accroître l'in-
térêt du public pour son héros. Le style ,
dans ses ouvrages, est par fois incorrect
et diffus ; on n'y trouve ni ordre ni mé-
thode, et comme il ledit lui-même , il
écrivait les choses à mesure qu'elles lui
venaient dans la pensée , qui n'était pas
toujours juste ou régulière. Cependant ,
l'esprit qui y brille à chaque pas, les idées
originales, les saillies piquantes, la cir-
constance rare d'avoir été le témoin des
choses qu'il raconte ; des portraits d'après
nature , comme ceux de Joseph II et de
Frédéric le grand; la chaleur de son style,
la foule des événemens qui se succèdent,
contribuent à faire oublier les défauts de
ses écrits, qu'on ne saurait quitter quand
on en a une fois commencé la lecture. Le
prince de Ligne a fait des vers en plu-
sieurs occasions , mais ils sont à peine
médiocres. Il a paru plusieurs ouvrages
sur cet homme célèbre, même de son
vivant. M"" de Staël, un de ses admira-
teurs, publia : Lettres et Pensées du ma-
réchal prince de Ligne j. 1809, in-S". On
regrette qu'elle n'ait pas retranché quel-
ques opinions que ce prince avait rétrac-
tées. MM. de Propiac et Malte-Brun ont
aussi donné à.ts Extraits àç.s ouvrages du
prince de Ligne, qu'il a hautement désap-
prouvés. On doit à M. A. A. Barbier, la
nouvelle édition, revue, corrigée et aug-
mentée des Mémoires sur le comte de
Bonnevalj parle prince de Ligne , Paris,
4817 , 1 vol. in-8».
* LIGKE ( Charles , prince de ) , fils
aîné du précédent, fut employé dans la
guerre contre les Turcs , et se distingua
surtout dans la prise d'Ismaïlow. Séduit
par les idées de liberté alors en vogue
dans toute l'Europe , il prit quelque part
à l'insurrection du Brabant contre l'em-
pereur ; mais il ne tarda pas à en recon-
naître les abus , et il se dévoua plus que
Jamais à la défense de son souverain. Il
se signala contre les Français en 1792, et
fut tué le Kh septembre de la même an-
née, en attaquant une redoute avec trop
d'audace.
LIGNIÈRE. Voyez LTNIÈRE.
*LIGi\IVILLE ( Philippe - Emmanuel
de), comte du Saint-Empire, seigneur des
villes et prévôtés de Darney en Vosges ,
de Tuméjus, d'Houëcourt, etc., maréchal-
général des camps et armées de Lorraine
465 LIG
et du Palatinat du Rhin , feld-maréchal-
lieutenant de celles de l'empereur Léo-
pold , parvint à ces postes éminens après
avoir passé par les grades de capitaine et
colonel de cavalerie , de sergent de ba-
taille , de général d'artillerie , etc., etc. Il
se trouva en 1634 à la première bataille
de Nortlingiie où il fît prisonnier le comte
de Horn , général des Suédois , et con-
tribua ensuite à reprendre ou à défendre
plusieurs places en Lorraine. Il fut fait
en 1641 bailli de Nancy , en récompense
de ses services ; se signala contre le ma-
réchal de Gassion à J'attaque du camp
d'Armentièrcs, et pénétra le premier dans
Courtrai , dont la garnison aima mieux
périr les armes à la main que d'implorer
la clémence du vainqueur. De retour en
Lorraine , Philippe-Emmanuel défit Roz-
Vorms qui y était entré avec un corps de
troupes allemandes ; il fit prisonnier tout
ce qui ne périt pas dans le combat , et
après cette victoire , se rendit maître d'E-
pinal, Neufchâteau, Châtel , Mirecourt ,
Bar, et des forteresses de Ligny, Ha-
roué , Tonnoi et Savigny. Il fut ensuite
surpris près de Saint-Mihiel par le mar-
quis de Laferté , depuis maréchal de
Fiance , sans que cet échec ait affaibli sa
réputation. En 16S0 , le comte de Ligni-
ville, envoyé à la tête des troupes de
Lorraine au secours du vicomte de Tu-
renne, se distingua à la bataille de Rhétel,
et y fut mortellement blessé d'un coup de
mousquet au bas-ventre. On l'enleva de
la mêlée et on l'emporta sans connais-
sance à Stenay. Sa guérison fut lente et
miraculeuse ( i ). L'allégresse publique
célébra son retour à la vie , et , les of-
ficiers qui avaient servi sous lui firent
frapper une médaille que tous portè-
rent à la boutonnière , témoignage tou-
chant d'amour et de vénération. Quel
général en reçut jamais de plus flat-
teur ! Sa réputation fut telle que le grand
duc de Toscane le fit prier de recevoir au
nombre de ses élèves le jeune comte de
Bentivoglio, et que plusieurs seigneurs
étrangers s'empressèrent de venir appren-
dre sous un si grand maître le grand art
de la guerre. Deux fois , pour l'attirer à
son service et le détacher de celui de
l'Espagne auquel le retenait l'ordre de
Charles IV, alors prisonnier à Tolède,
Louis XIV lui offrit le bâton de maréchal
(t) Philippe-Emmanutl , »u$ii pieu* »;n"il ^[jit
brave , s'était voui; à N. D. Benoît de Vnu\ • sa C^(ô-
l rUon inallenduc fat .-«.'.ifibui't Ji ce vo-u.
Lia
464
LIG
de France : le comte de Lignl ville préféra
son devoir à la fortune , et le ravage de
ses terres fut la punition d'une iidélité
qui ne méritait que des éloges. Mais dès
que la loi du devoir ne s'opposa plus à
sctti inclination, il ramena en France l'ar-
mée de Lorraine. La retraite était dan-
pereuse. Cette armée peu nombreuse, que
la déliance espagnole avait dispersée dans
des quartiers éloignés , était pour ainsi
dire à la discrétion des troupes de cette
nation, bien supérieures en nombre et qui
l'environnaient de toutes parts. A force
de secrets et de sages précautions, il sur-
monta tous les obstacles et se couvrit de
gloire en effectuant une retraite si dif-
ficile. Il avait sacrifié à son devoir les of-
fres séduisantes de la cour de France ; en
quittant le territoire espagnol, il sacrifia
de nouveau la fortune à son devoir en
abandonnant des sommes considérables
qu'il avait dans la banque d'Anvers, ainsi
que les pensions qu'il recevait de la cour
de Madrid et qui étaient son unique res-
source. Il lui eût suffi de retarder sa re-
traite d'une heure pour retirer de son
quartier 2,000 doublons qu'il y avait, mais
il connaissait le prix du moment, et s'ou-
bliant lui-même , une seule chose l'occu-
pait, le salut de l'armée confiée à son com-
mandement. Après une marche de trois
jours et trois nuits sans prendre aucun
repos , celle armée composée de 27 régi-
mens , arriva en France , exténuée de
faim et de fatigue. A la tête de ces trou-
pes, familiarisées avec les périls, Phi-
lippe - Emmanuel fit dans l'aruiée de
Turenne les campagnes de 1056, f6o7
et 1658, se couvrit de gloire aux sièges
de Valenciennes , de Saint-Venant, de
Dunkerque, de Gravelines, de plusieurs
autres places et à la bataille des Dunes.
Turenne , trop grand pour ne pas rendre
justice au mérite des autres, peignit à
Louis XIV le comte de Ligniville comme
un dos premiers généraux de son temps,
et le monarque fit l'accueil le plus gra-
cieux à un guerrier fidèle qui avait ré-
sisté à ses offres quand il n'avait pas dû
les accepter, mais qui venait de lui ren-
dre d'imporlans services. C'est dans ce
temps que , pour l'indemniser de la ruine
de ses terres, de la perte de sa fortune et
de tant de sacrifices multipliés pour le
service de ses princes, le duc François de
Lorraine donna à lui et à ses çnfans mâ-
les , el à leur défaut aux enfans de IIe;ui-
Gaspard de Ligniville son frère, les ville ,
terres et seigneurie de Darncy, en Vos-
ges. La paix conclue entre la France et
l'Espagne en 1659, rendit inutiles à son
souverain les lalens militaires de Philippe-
Emmanuel. L'électeur de Bavière qui mé-
ditait de grands desseins , profita de ce
moment pour l'attirer à son service et lui
dotmer le commandement de son armée.
En j063 , Charles IV l'envoya à la diète de
Ratisbonne pour y défendre ses intérêts.
Le comte de Ligniville y déploya des ta-
lens qu'on ne devait pas attcidre d'un
guerrier qui avait passé 50 ans de sa vie
dans les camps. Peu de temps après , ce
duc le nomma gouverneur du jeune prince
Charles , son neveu , héritier présomptif
de ses états. Philippe-Emmanuel accom-
pagna son illustre élève dans la guerre
contre les Turcs, et comme il n'avait
aucun grade dans l'armée impériale, l'em-
pereur ne voulant pas que celui qui tant
de fois avait commandé en chef, fût, ré-
duit à la qualité de simple volontaire,
réleva au rang de feld-maréchal-lieu-
tenantdeses armées. Il combattitla même
année 1664, à la bataille do Saint-Godard
ou de Raab , à côté du jeune duc dont il
dirigea l'impétueuse ardeur, et contribua
essentiellement à la victoire par sa valeur
et ses conseils. L'empereur le félicita de
la gloire qu'il avait acquise dans cette
mémorable journée et lui écrivit :« Cher
» comte de Ligniville, j'ai été sufiisam-
» ment informé de la valeur et généro-
» site que vous avez fait paraître contre
» les Turcs dans la dernière bataille....
» Vous y avez acquis une gloire immor-
» telle, de sorte que je ne manquerai pas
» l'occasion do reconnaître vos belles ac-
» lions, cl demeure votre affectionné.
» Signé LÉOPOLD. » Il reçut aussi une
lettre non moins honorable que lui écrivit
de sa propre main le duc François de Lor-
raine, père du jeune prince Charles, de-
puis Charles V : « M. le comte , je loue
» Dieu de la bonne nouvelle d'une si heu-
» reuse bataille, et d'avoir conservé mon
» fils dans cette occasion , en lui faisant
B acquérir tant d'honneur , où vous avez
» eu une grande part, dont je vous re-
n mercie de tout mon cœur , et vous prie
» de croire que je vous témoignerai ma
» gratitude en toutes les occasions qui
» s'en présenteront , en vous faisant con-
» naître que je suis du meilleur de mon
» cœur, votre tiès affectionné ami. Signé
» FRANÇOIS de LORRAINE. » Le comte
de Lignivillesurvécul peu à cette dernière
action; il mourut à Vienne la même an-
née avec la réputation de la plus haute
Lia
46S
Lia
valeur accompagnée d'un désintéresse-
ment rare et d'une fidélité inviolable pour
ses souverains. C'est ce qu'atteste l'hono-
rable épitaphe que l'empereur fit graver
à Vienne sur son tombeau. Le prince
Charles regretta vivement la perte d'un
homme si capable de le former dans l'art
des héros. Il écrivit de sa main à Henri
Gaspard de Ligniville, son frère : «M. le
» comte , il serait superflu de vous dire
» combien je suis touché de la mort de
» feu M. le comte de Ligniville votre frère,
» puisque chacun sait l'estime que j'en
«faisais, et par conséquent vous devez
» croire que je le suis à l'excès. ..Les grands
» et notables services qu'il a rendus à ma
» maison et à moi en particulier, m'obli-
» gent d'avoir de tels sentimens , lesquels
» s'étendront jusqu'aux siens, dont vous
» formez la première branche , espérant
» un jour leur faire connaître , à vous sur-
j> tout, que je suis véritablement, M. le
» comte , votre bien affectionné. Signé le
K prince CHARLES de LORRAINE. »
* LIGNY ( François de ) , jésuite, né à
Amiens le k mai 1709, était compatriote
de Gresset , et entra comme lui, à l'âge de
16 ans, chez les Pères de la compagnie;
il resta toujours attaché à cet ordre jus-
qu'à sa suppression. Après avoir professé
les humanités pendant quelques années ,
il se livra à la prédication, et s'y distingua
par une éloquence touchante et une con-
naissance profonde dans les sciences théo-
logiqpies. Il se fit bientôt une grande
réputation et fut désigné pour prê-
cher à la cour ; mais la suppression de
son ordre le priva de cet honneur. Il se
rendit alors à Avignon , dans le comtat
Venaissin, qui faisait, à cette époque,
partie des états romains ; malgré une
santé chancelante , il continua de s'occu-
per à la fois de la prédication , du soin
des âmes , et d'études littéraires. Il mou-
rut dans cette ville , en 1788 , âgé de 79
atis. Il a laissé : | Pie de saint Ferdi-
nand^ roi de Castille et de Léon, dé-
diée à Ferdinand, prince de Parme , Pa-
ris , 1759 , in-d2. Alban Butler cite ce livre
avec éloge ; | Histoire de la vie de Jésus-
Christ, oii l'on a conservé et distingué les
paroles du texte sacré selon la Vulgate,
Avignon , 1774 , 3 vol. in-S" ; 1776 , in-i" ;
Paris , 1804 , 2 vol. in-i", avec 73 gravu-
res : Paris , 1813 , 3 vol. in-8°, avec 3 figu-
res. On doit considérer cet excellent ou-
vrage comme une ample concordance his-
torique et ascétique. L'auteur, en y mê-
lant les explications ou les réflexions qui
se lient naturellement entre elles, a form«
du texte des Evangiles une histoire exacte
et suivie. Des notes éclaircissent et déve-
loppent les d ifficultés du sens prophétique,
dogmatique ou moral. Le père Daire , en
parlant de cet ouvrage , dit « que les cho-
» ses excellentes qu'on y trouve font pas-
» ser quelques saillies d'un zèle , par fois
» un peu ardent , qu'on a cru pouvoir
» reprocher à l'auteur... » Le père Ligny
avait été chargé d'écrire l'histoire de la
province du Nivernais, mais il mourut
avant d'avoir terminé ce travail.
LIGUORI ou LIGORIO (Alphonse-Ma-
rie de), évèque de Ste. -Agathe des Goths
au royaume de Naples, et fondateur de la
congrégation des missionnaires du Saint-
Rédempteur , naquit à Naples d'une
famille noble et ancienne , le 26 septem-
bre 1696. Porté naturellement à la piété
dès son enfance , et doué des plus heu-
reuses dispositions , il eut le bonheur de
les voir secondées par le soin que pri-
rent ses vertueux parens de lui assurer
une excellente éducation. Ils le mirent
de bonne heure entre les mains d'habiles
maîtres , et il profita si bien de leurs le-
çons , qu'à l'âge de 17 ans il avait fini
toutes ses études , après y avoir obtenu
de brillans succès. Il s'appliqua alors à la
jurisprudence , et embrassa la profession
d'avocat, qu'il exerça pendant quelque
temps à Naples avec assez de réputation ;
mais en 1722 , un accident qui lui arriva
dans une cause importante le dégoûta de
cette carrière et le décida à y renoncer.
Il lui sembla alors qu'un sentiment in-
térieur l'appelait à l'état ecclésiastique
Avant d'en arrêter la résolution , il vou-
lut la mûrir. Le 31 août de la même an-
née , après y avoir bien réfléchi , il prit
l'habit ecclésiastique. Pour lors il tourna
ses études et toutes ses pensées vers ce
qu'exigeait cette nouvelle profession. Il
s'appliqua à la théologie , il lut les saintes
Ecritures et les Pères. La méditation ,
les jeûnes , les bonnes oeuvres , furent ses
exercices de tous les jours. C'est au milieu
de ces saintes occupations qu'il prit les
ordres sacrés. Dès qu'il fut prêtre , il s'at-
tacha à la congrégation de la Propagande
et s'adonna à la prédication etaux travaux
des missions avec un zèle vraiment apo-
stolique. L'onction avec laquelle il annon-
çait la parole évangélique , son austère
pénitence , la sainteté de sa vie , produi-
sirent une infinité de conversions. Il avait
remarqué que c'étaient surtout les cam-
pagnes qui manquaient dlastruction. Il
LIG
466
LIG
forma le projet de subvenir au besoin
qu'elles en avaient ; et ce fut cette idée
qui lui suggéra le dessein d'instituer
une congrégation de missionnaires des-
tinés à ce ministère. Ayant réuni quel-
ques compagnons , il en jeta les premiers
fondemens dans l'ermitage de Ste. -Marie
de la Scala > et lui donna le nom de con-
grégation du Saint-Rédempteur. Cet éta-
blissement éprouva d'abord des contra-
dictions; maisLiguori, à force de patience,
parvint à les vaincre. Sa congrégation fut
approuvée par le saint Siège , et se ré-
pandit bientôt dans diverses villes du
royaume de Naples, de la Sicile et même
de l'état romain. Tant de mérite , tant de
services rendus à la religion ne pouvaient
demeurer ignorés et sans récompense :
Clément XIII, en juin 1762, nomma Li-
guori évéque de Sainte-Agathe des Goths.
Ce ne fut pas sans peine qu'on parvint à
lui faire accepter cette dignité éminenle j
mais le chef de l'Eglise l'ordonnait : il
obéit , et se livra entièrement à ses nou-
veaux devoirs. Il rechercha les abus qui
pouvaient s'être glissés parmi son clergé,
et il les réforma. 11 fonda des monastères
et d'autres établissemens pieux , et ne
cessa d'édifier son diocèse par ses prédi-
cations, par des instructions familières
ou des lettres pastorales , par ses écrits ,
et surtout par l'exemple de ses vertus.
Après treize années d'épiscopat , et une
longue vie passée tout entière dans les
travaux- du ministère et les austérités
de la pénitence , Lignori exténué de fa-
tigues , devenu sourd et presque aveu-
gle, tourmenté d'une maladie cruelle ,
demanda au pape Pie VI et obtint, en
juillet 1775 , d'être déchargé du gouver-
nement de son église ; il avait près de 80
ans. Il se retira à Nocera de Pagani^ dans
une maison de sa congrégation. Il y vé-
cut encore près de H ans dans le recueil-
lement , la prière et autres exercices de
piété, et mourut saintement le 1"" août
J787 , âgé de 90 ans et dix mois. Le père
liguori a été béatifié le 6 septembre 1816,
et le décret nécessaire pour procéder à
sa canonisation a été donné par le pape
rie VIII le 16 mai 1850. ( Voyez VJmi de
la religion qui rapporte le décret de S. S.
n° 1657, 10 juin 1830.) On croirait que
tant de travaux avaient consumé tous les
momens de Liguori ; ils ne l'empêchè-
rent pas néanmoins de composer un très
grand nombre d'ouvrages. On a de lui :
\ Theologia moralis concinnata a R. P.
Mphonso Ligorio per appendices in
medullam R. P. Hermannis Busembaum
soc. Jesu^ Naples, 1755, 2 vol. in-i°.
Quoique Liguori, dans cette théologie,
ait travaillé d'après Busembaum, dont
il admirait bien plus la méthode qu'il
n'admettait les opinions, il ne suit qu'eu
partie ses principes, et avec une sage ré-
serve: s'il embrasse le probabilisme , ce
n'est pas dans toute l'étendue que lui ont
donnée certains auteurs. On sera d'ail-
leurs parfaitement rassuré à cet égard
quand on saura que son livre a été non
seulement loué et approuvé par Benoît
XIY, mais que ce célèbre et savant pape
l'a même cité dans son grand ouvrage
De synodo diœcesana; ce qu'il n'aurait
sans doute pas fait si la doctrine en avait
été répréhensible. Cette théologie , re-
produite sous un nouveau titre et avec
des corrections de l'auteur , a eu plusieurs
éditions, entre autres celle de Bassano,
1816, onzième édition, 3 vol. in -4°,
de Malines, 1828, et celle de Besançon,
1832-1833, 9 vol. in-8<> et 9 vol. in-12 ;
I Homo apostolicus j instruclus in sua
vocatione ad audiendas confessiones ,
Venise , 1782 , 5 vol. in-4'' ; et Besançon ,
Gauthier, 1853 , 3 vol. in-8" , et in-12;
I Directorium ordinandorum ^ dilucida
brevique m.ethodo explicatum . Venise ,
1758 ; I Institulio catechistica adpopulum
in prœcepta Decalogi^ Bassano, 1768;
I Istruzione pratica per i confessori. etc..
Bassano, 1780, 3 vol. in-12; ouvrage
plein d'onction , de modération, de dou-
ceur, de cette charité qui ne cherche que
le salut des âmes. C'est le contre-poison
du livre imprimé à Venise chez Occhi ,
sous le titre &' Istruzione dei confessoria
dei penitenti. \ Praxis confessarii ad ins-
tructionem, confes»ariorum ab italico in
latinum sermonem, ab ipsomet auctore
reddita et aucta ^ Venise, 1781; | Dis-
sertazione circa l'uso moderato deWopi-
nione probabile , Naples, 1754; | Jpo~
logia delta dissertazione circa l'uso tno-
dei'ato dell'opinione probabile contra le
opposizioni faite dal P. Lettore Adelfo
Dositeo , Venise , 1765. C'est une réponse
au père Jean-Vincent Patuzzi , domini-
cain , antagoniste zélé des défenseurs du
probabilisme. ( T^oyez PATUZZI. ) Li-
guori pensait qu'au confessional il fallait
éviter une indulgence poussée trop loin,
et un rigorisme désespérant, suivant
ce principe de saint Bonaventure : Pri-
ma sœpe salvat dam.nandum; secunda
contra damnât salvandum. \ Verilà dél-
ia fedes ossia confutazione de materia-
i67 LIL
recueil d'observalions importantes qu'il
lit paraître en suédois dans une suite do
Mémoires. Gustave III étant monté sur la
trône et voulant régénérer les finances
fixa son choix sur Westerman , à qui il
confia l'exécution de son plan , et qu'il
nomma secrétaire d'état pour les finances,
après l'avoir anobli sous le nom de Lilie-
cranlz. Ce ministre sut profiter habile-
ment des circonstances de la guerre d'A-
mérique , pendant laquelle la Suède , sous
les auspices de la neutralité armée , fit
un commerce très lucratif , pour procu-
rer au gouvernement les matières d'or
et d'argent. Liliecrantz vint à bout d'opé-
rer la réalisation au moyen de laquelle
les anciens papiers furent retirés de la
circulation , et le crédit des nouveaux
billets de la banque de Stockholm se
trouva fondé sur une base solide , qui n'a
été ébranlée depuis que par les guerres
dispendieuses survenues dans les der-
niers temps. En se retirant du ministère,
Liliecrantz entra dans le sénat ; lors de la
suppression de ce corps , il devint pré-
sident au conseil de commerce , en con-
servant le titre de sénateur et le rang
qui y était attaché. Commandeur et chan-
celier des ordre;» du roi, il fit aussi par-
tie de l'académie des sciences de Stock-
holm , à laquelle il a fourni plusieurs mé'
moires. Liliecrantz parlait avec beaucoup
de facilité le français , l'allemand et l'an-
glais, et ses diverses qualités morales et
physiques rendaient sa société agréable.
Il abandonna tout-à-fait les affaires dans
les dernières années de sa vie , et mou-
rut en 1813, laissant plusieurs fils qui
suivent la carrière des arnnes.
LIL1E^THAL (Michel) , savant phi-
lologue , né à Liebstadt en Prusse , l'an
1G86 , s'établit à Koenigsberg, où il fut
pasteur et professeur de théologie jusqu'à
sa mort , arrivée en 1730. On a de lui ;
I Acta Borussica ecclesiastica j. civilia ,
litteraria^ 1730-32, 3 vol. in-8°; (plusieurs
bonnes Dissertations académiques ; | Se-
lecta historica et lilteraria^ Koenigsberg,
1713-1719, 2 vol. in-8° ; | De machiavelis-
mo litterarioAbid. 1713, in-8°. Cetouvrage
roule sur les petites ruses dont les, gens
de lettres se servent pour se faire un nom;
ruses auxquelles presque tous les grands
hommes de nos jours doivent leur célé-
brité. I Annotationes in Struvii Intro-
ductionem ad notitiam rei litterariai j,
, , r • j D •. • .1 . , ■ . i Leipsick , -1729 , in-8°. Il a aussi publié
{\) Laminde FntoniusttX -le aAmiqufavait prit le , '^ , . ,
r:lfbrt iWuratori . dao. uo ouvrage contre le prote5- ! d autrCS OUVragCS SUr leS ttUteUrS qut Ont
int LecUrc, i écrit sur la Prusse; sur les théologiens
LIL
Usti, deistie settarjj, etc. Venise, 1781 , 2
vol. in-8" ; | La vera sposa di Chrisio
cio è la monacha santa,, Venise , 1781 , 2
\ ol. in-12 ; | Scella di materie predicabili
l'd istrutlive, etc. Venise, 1779,2 vol.
in-8° ; I Lcglorie di Maria ^ etc. Venise ,
1784, 2 vol. iu-8°. Cet opuscule fut attaqué
dans un écrit intitulé : Epistola parene-
tica di Lamindo Pritanio redivivo (i). Li-
guori y répondit par un autre , sous ce
titre : Risposta ad unautore che ha cen-
surato il libro del P. D. Alfonso di Li-
guori, sotto il titolo Glorie di Maria. \
Opérette spirituali , ossia l'amor delV a-
nime e la visita al Santissimo Sacramento^
Venise, 1788, 2 vol. in-12 ; | Discorsi sa-
cro-morali per tutte le domeniche deV-
amiOj. Venise , 1781 , in-4" ; | Jstoria di-
tutte l'eresie con loro confulazione , ( His-
toire de toutes les hérésies avec leur ré-
futation), Venise, 1773, 5 vol, in-8° ;
1 Vittorie de'martiri . ossia la Vita di
moltissimi santi martiri, Y enise , 1777,
2 vol. in-12; | Opéra dogmatica, contra
gli eretici prête si risformati^ Venise, 1770.
I Silva ou choix de sujets destinés à ser-
vir de matériaux aux prédicateurs ^ 3
vol. in-18 : l'Ami de la religion en rend
compte dans sonN" du 13 décembre 1831 ,
n" 1879 ; | l'Horloge de la passion. Tous
ces ouvrages , et d'autres moins considé-
rables , ont été plusieurs fois réimpnimés
cliez Remondini à Venise. Ils rendent de
suflisans témoignages à la doctrine , au
zèle , à la vie saintement et laborieuse-
ment occupée de Liguori. Ils ont été re-
connus pour être sans tache à Rome , où
l'on a terminé les procédures pour la béa-
tification de ce savant et pieux évèque.
Sa Vie a été publiée par Jean Card, 1828,
1 vol. in-8°. On peut voir l'Ami de la re-
ligion . tom. 36 , pag. 161 , n° 1446.
• LILlECRAINiTZ (Jea\, comte de),
ministre des finances de Suède , où il
était né , vers l'année 1730 , d'une con-
dition obscure , sous le nom de "Wester-
man, montra de borme heure des dispo-
sitions pour les sciences économiques. Il
obtint des états du royaume une somme
pour voyager dans les principaux pays de
l'Europe , et recueillir des renseignemens
sur les manufactures et le commerce.
L'Allemagne, l'Angleterre, la France et
l'Italie furent successivement le théâtre
de ses investigations, et il revint avec un
LIM
468
LIM
protestans ; sur les médailles modernes
depuis Charles-Quint ^ etc. Il a eu en outre
la principale part au journal de Kœnlgs-
berg intitulé : Erleuterte Preussen. Les
^cta Borussica déjà cités en étaient une
espèce de continuation. Ces écrits sont
pleins de savantes recherches. Il était
membre de la société royale de Berlin , et
de l'académie de Pétersbourg.
LILIO (Louis). Koy. GRÉGOIRE XIII.
LILLY ou LILY ( Gdilllaome ) , astro-
logue anglais , né en 1602 , à Dicervorth,
comté de Leicester , fut d'abord domes-
tique : ses prédictions le firent sortir de
cet état et lui acquirent une fortune con-
sidérable. On a de lui Merlinus anglicus
junior^ en anglais , Londres , 1644 , in-4°;
I Le messager des étoiles^ 1645 ; | Recueil
de prophéties^ 1646. Il se fit une espèce de
réputation, en publiant l'horoscope du
malheureux Charles I", au moment où il
fut, en 1633, couronné roi d'Ecosse. Ce
prince le consulta plusieurs fois et lui fit
de riches présens. Lilly était très lié avec
Ashmole, qui en fait mention dans le
Journal de sa Vie. Leurs goû4s et quel-
quefois l'état de leurs têtes étaient les
mêmes. Il mourut en 1681.
LILLY (Guillaume) , né en 1468, à
Odyham dans le Hampshire, voyagea
dans la Terre-Sainte , dans l'Italie , et fut
le premier maître de l'école de Saint-Paul
de Londres, fondée par Colles en 1312.
On a de lui des Poésies^ et une Grammaire
latine^ Oxford, 1673 , in^". Il mourut en
1523 , à 55 ans.
LIMBORCH ( Philippe van ) , théolo-
gien remontrante né à Amsterdam en 1633,
d'une bonne famille, étudia dans cette
ville, puis à Utrecht, de 1632 à 1654, fut mi-
nistre à Gouda en 1657 , puis à Amster-
dam en 1667. Il obtint la même année en
cette ville la chaire de théologie , qu'il
remplit jusqu'à sa mort , arrivée en 1712 ,
à 79 ans. Il était grand partisan de la tolé-
rance , et avec cela il a rempli ses écrits
du fiel le plus amer contre l'Eglise catho-
lique. Jean Le Clerc en fait un grand élo-
ge ; mais le socinianisme qui réunissait
les deux auteurs par l'attachement aux
mêmes opinions, rend cet éloge fort su-
spect. On a de lui plusieurs ouvrages esti-
més des protestans. Les principaux sont :
I De veritate religionis christiance amica
coîlatio cum erudito Judœo j. in-12; l'é-
dition de Gouda, in-4°, 1687, n'est pas
commune. On en a fait une à Bâle , in-8°,
1740 Le juif avec lequel Limborch eut
cette conférence , est Isaac Orobio de Sé-
ville, qui savait ergoter et nullement dis-
tinguer le vrai du faux. 11 n'était pas diffi-
cile à Limborch de repousser les faibles
traits de cet adversaire, mais il l'aurait
fait avec plus d'avantage dn accordant
moins à son juif , et en omettant les di-
gressions qu'il fait contre les catholiques,
digressions qui donnent lieu de croire qu'il
avait plus d'envie de déclamer contre eux
que de triompher de son antagoniste. As-
servi lui-même aux erreurs de Calvin
et de Socin, il ne pouvait réfuter celles
des Juifs avec cette raison vigoureuse et
conséquente qui n'appartient qu'à ceux
qui embrassent la vérité tout entière. | Un
Coips complet de théologie ^ 1715 , Am-
sterdam , in-fol. , selon les opinion» et
la doctrine des remontrans. L'auteur y
rejette toutes sortes de traditions ; mais
lorsqu 'il s'agit de discerner les livres
canoniques d'avec les apocryphes, il a
recours à la tradition de l'Eglise , sans
se mettre en peine d'une contradiction si
manifeste. | Flistoria inquisitionis ^ Ams-
terdam , 1692 , in-fol. On ne doit point
s'attendre d'avoir une histoire bien exacte
de ce tribunal par un protestant , ni même
de certains catholiques ( voyez LLO-
RENTE). M. Le Clerc et le père Nicéron
disent que Limborch l'a tirée des ouvrages
mêmes des inquisiteurs ; mais Limborch ,
dans la liste qu'il donne des écrivains dont
il s'est servi , y place Fra-Paolo, protes-
tant déguisé sous le froc, et Dellon, au-
teur de la Relation de l'inquisition de Goa,
qui est également protestant, etc. D'ail-
leurs , Limborch n'a pris dans les écrits
des inquisiteurs que ce qu'il a voulu , et
combien de fois n'a-t-il pas tronqué les
passages! Pour s'en convaincre , il n'y a
qu'à faire attention à sa manière de citei ;
souvent ce ne sont que de petits lambeaux
des dernières phrases. C'est dans cet ou-
vrage , dans l'abrégé qu'en a fait l'abbé
Marsollicr , dans madame d^Junoy^ dans
les Délices d'Espagne ^ dans V Histoire
générale de Voltaire , etc. , que l'on puise
l'idée affreuse que l'on se forme de l'in-
quisition : les amateurs du vrai , qui vou-
dront s'en former une plus juste, doivent
consulter M. l'abbé de Vayrac , qui a écrit
sur cette matière en homme judicieux ,
exact et très instruit {Etat présent de
l'Espagne^ édition d'Amsterdam, 1719,
tom. 2, page 381) ; et Lettres à un gen-
tilhomme russe e sur l'inquisition espa~
gnolCj, par M. le comte de Maistre , IParis,
1822. Une observation qu'il ne faut point
omettre, c'est que les nations aui ont le
LOI
469
LIM
plus déclamé contre l'inquisilion ont
exercé envers les catholiques des atrocités
que les inquisiteurs n'ont jamais imagi-
nées contre les hérétiques et les apostats.
« Les Anglais , dit un des grands adver-
n saires de l'inquisition , ont été plus su-
» perslitieux, et sont encore plus intolé-
w rans que les papistes ; eux qui dé-
1) crientavec tant de chaleur l'inquisition,
» en ont surpassé , par des lois réfléchies ,
» la barbarie et l'iniquité L'inquisi-
» tion , même dans ses cruautés , suppose
• des formes : elle admet des différences,
» tant dans les délits que dans les peines ;
» ce qu'elle punit, c'est moins le malheur
» d'avoir été engagé dans un culte erroné
» que l'obstination à y persister ; les pre-
» mières chutes ne sont châtiées que par
» des pénitences ecclésiastiques ; elle n'ap-
» pelle le bras séculier et les supplices
» que contre les relaps ; ses principes
» sont de ménager le sang des hommes
» en corrigeant leurs méprises ; ce que les
» passions de ses ministres y ont ajouté
» de défectueux dans la pratique, n'est
» pas dans l'esprit de son institution. — En
» Angleterre , la proscription dupapis'me ^
r> la peine de mort prononcée contre ses
• ministres, ne sont susceptibles ni de
» modification , ni d'adoucissement ; il
» suffit qu'un prêtre catholique soit con-
» vaincu d'avoir exercé quelqu'une de
u ses fonctions , pour être dévoué et cn-
» voyéau gibet. Cette législation est atroce:
» nos chapelains sont les mailres sans
» doute de ne pas venir dire la messe à
" Londres ; mais la loi qui attache un sup-
» plice ignominieux à un délit de cette na-
» ture est une loi plus qu'inquisitorlale ;
» il sied mal à ceux dont la religion pré-
» sente des potences pour prix d'un zèle
» indiscret, de trouver à redire aux caro-
» chas et aux san-benito des Auto-da-fé. »
On peut consulter encore un petit ou-
vrage imprimé en 1782 à Liège , sous le
nom de Rouen , intitulé : Eclaircissement
sur la tolérance. ( Voy. ISABELLE DE
CASTILLE, LUCIUS III, NICOLAS EYME-
RICH, TORQUEMADA, VAYRAC. ) On
a encore de Limborch des Sermons. Le
père Nicéron dit qu'ils sont méthodiques j.
solides et édifians : jugement qui ne fait
guère honneur à ce critique. Le Clerc lui-
même en parle moins favorablement ; il
dit que les sermons de Limborch étaient
peu travaillés et qu'il y paraissait peu
d'éloquence. Limborch a aussi procuré
la plupart des éditions des ouvrages du
fameux Egiscopius , son grand -oncle
7.
maternel, des écrits duquel il avait hé-
rité.
LIMBOURG ( Robert de ) , docteur en
médecine , membre de l'académie de Bru-
xelles , mort à Theux , bourg dans le pays
de Liège, le 20 février i792, était né
dans le même bourg, le 1"" décembre 1731
d'une famille qui, depuis près de trois
siècles , avait produit plusieurs médecins
très versés dans leur profession. Il se fit
de l'étude un plaisir plutôt qu'une occu-
pation , et s'arrêta particulièrement sur
l'histoire naturelle. Etant sur le point de
partir pour Montpellier pour y faire ses
études en médecine , il publia une dis-
sertation sur ce sujet : Quelle est Vin.'
fluence de l'air sur les végétaux ? que
l'académie des belles-lettres , sciences et
arts de Bordeaux , avait proposé pour la
seconde fois , et l'an 1757 , il remporta le
prix. Après avoir demeuré quelque temps
à Montpellier, il fut reçu docteur en mé-
decine le 12 août 1760. Associé, en 1773,
à l'académie impériale et royale des scien-
ces et belles-lettres de Bruxelles , il com-
posa diverses Dissertations qui ont été
insérées dans les Mémoires de cette com-
pagnie ; une autre , où il a proposé des
vues sur l'hydraulique , a été présentée à
l'académie des sciences de Paris , qui en
fit mention honorable , en invitant l'au-
teur à la perfectionner ultérieurement.
Il avait rassemblé un cabinet d'histoire
naturelle qui , sans être vaste , ni en ap-
parence fort précieux , contenait des ob-
jets remarquables et propres à fixer l'œil
d'un observateur.
LIMIERS (Hexri- Philippe de) , doc-
teur en droit, et membre des académies
des sciences et arts, né en Hollande
de parens réfugiés , mort en 1725 à
Utrecht, rédigea la Gazette de cette ville,
et passa sa vie à compiler de mauvais jour-
naux. Il publia ses recueils sous différens
titres : | Histoire de Louis XIV, Amster-
dam , 1717, 7 vol. in-12; 1719, 12 vol,
in-i2 ; Rouen 1720 , 2 vol. in-i» ; | Annale»
de la monarchie française^ Amsterdam,
1721 , in-fol.; | Abrégé chronologique de
V histoire de France ^ pour servir de suite
à Mézerai:, Amsterdam , 2 ou 3 vol.
in-12 ; | Mémoires de Catherine ^ impéra^
trice de Russie ; \ Histoire de Charles XI T,
roi de Suède , 6 volumes in-12 ; | Annales
historiques , 3 vol. In-fol. ; | Histoire de
l'institut des sciences et des arts établi à
Bologne en 1712, Amsterdam , 1723, in-8" ;
I Traduction de Piaule, grossièrement
travesti, 10 vol. in-12. Les productions
40
LIM 47
(le Limiers sont sans exactitude et sans
agrément. On le compare au fécond et
intarissable Caraccioli, et le parallèle est
juste quant aux productions ridicules et
gazetières du marquis auteur. Mais il
faut convenir que les premières brochures
de celui-ci annonçaient un fond de ré-
flexion et des lalens que Limiers n'eut ja-
mais , et que son imitateur n'eut pas long-
temps. On a encore de Limiers une T^er-
si'on française j. des Explications latines
des pierres antiques gravées de Stosch ,
Amsterdam, i724, et des Notes et re-
marques pour l'intelligence du poème de
Fènélon (Télémaque) dans lesédit. d'Am-
sterdam, 1719 et 1723, in-12. M. Barbier
lui attribue une part à la Magna Biblioth.
eccles.^ Cologne , 1734 , in-fol. , qui ne
contient que la lettre A et n'a pas été
continuée.
LIMN^US ou LIMNÉ (Jean), célèbre
jurisconsulte allemand , né en 1892 , à léna
où son père professait les mathématiques.
Limnaeus fut chargé successivement de
l'éducation de plusieurs jeunes seigneurs
avec lesquels il voyagea dans presque
toutes les cours de l'Europe. Enfin, Albert,
margrave de Brandebourg , qu'il avait ac-
compagné en France , le fit son chambel-
lan et son conseiller privé en 1639. Lim-
naeus exerça ces emplois jusqu'à sa mort
arrivée le 15 mars 1663. On a de lui divers
ouvrages. Les principaux sont : | De jure
imperii romano-germanici., Strasbourg ,
1629et ann. suiv., 5 vol. in-4° ; compilation
savante , mais assez mal digérée ; | Com-
menlarias ad Bullam auream^ \n~k° ,
1666, et Leyde, 1690. Celte dernière édi-
tion est la meilleure : | Capitulât ione s
imperatorum ( en allemand ) , Strasbourg ,
1631 , la-W; \ De academicis^ in-4"; | No-
titia rcgni Galliœ. libri ^7//. 165S, 2 vol.
in-/t°.
LJMOJOA de SAINT-DIDIER ( Alexan-
dre Toussaint de) , né à Avignon vers
1630, suivit, en qualité de gentilhomme,
J. Ant. de Mesme, comte d'Avaux, dans
son ambassade en Hollande , après avoir
assisté au congrès de Nimègue (1672).
Quelques années après (1689), il suivit
ce même seigneur en Angleterre, et pé-
rit dans la traversée en venant rendre
compte à Louis XIV , de la position cri-
tique de Jacques II. Il était chevalier du
Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jéru-
salem. Il s'était fait un nom par sa pro-
fonde connaissance de la politique euro-
péenne. On en a des preuves dans \ V His-
toire des négociations de Nimègue^ Paris ,
0 LfM
1680, în-l2 , ouvrage estimé; dans le
livre intitulé : | La Fille et la République
de Venise , Amsterdam (Elzévir) , 1680,
in-12. On a encore de lui : \Le Triomphe
hermétique, ou la pierre philosophale
victorieuse, ibid. , 1683 , in-12. Cette der-
nière production est curieuse , et ne con-
tient que 133 pages ; mais on préfère les
deux autres. Il était oncle du suivant.
LIMOJO\ (Ignace-François de) , co-
seigneur de Venasque et de Saint-Didier ,
neveu du précédent , naquit à Avignon en
1688 , et y mourut en 1739. Il cultiva la
poésie provençale et la française , et réus-
sit assez bien dans l'une et dans l'autre,
surtout dans la première. Il fut dans sa
jeunesse le Pindare de l'académie des
jeux floraux, qui le couronna trois fois.
L'académie française lui décerna aussi
ses lauriers en 1720 et 1721. Saint-Didier
enhardi par ses succès , voulut s'élever
jusqu'au poème épique. Il publia en 1723
in-S" , la première partie de son Clovis,
qui ne fut pas suivie d'une seconde. Il
n'en a paru que 8 chants : l'auteur en fit
plus tard 3 autres qui n'ont pas été im-
primés. Le public trouva qu'il avait pé-
ché dans le dessein de l'ouvrage , et qu'il
avait plus de génie pour trouver des rimes
et des épithètes que pour marcher dans la
carrière des Homère et des Virgile. Il y a
cependant des beautés de détail et de très
beaux vers; tels sont ceux de la descrip-
tion du siècle de Louis XIV. La Baumelle
lui a appliqué ce mot d'un ancien :
Dum fiutret latolentus, erat qood tollere Tcllei ;
et donne pour exemple ces vers sur la
Trinité :
De leurs perfection» naît leur amour immente ;
Ils ont tous même esprit, même feu, même CMrnce
Ces trois divins soleils unissant lenr clarté' ,
Forment de l'Eternel l'ineffable unité.
Voltaire a dit depuis, peut-être avec
moins d'exactitude tiiéolôgique :
La Puissance, l'Amour, avec l'Intelligence,
Unis et divise's , composent son essence.
Comparant ces vers avec ceux de Limo-
jon , la Baumelle observe qac divisés man-
que de justesse ; il faudrait distingués;
mais cela n'irait pas encore , parce que
distingué répond théologiquemenl à un ,
et non à unis. Nos mystères ne sont pas
faits pour la rime. On a encore de Saint-
Didier un ouvrage satirique , mêlé de vers
et de prose contre La Motte , Fontenelle
et Saurin, partisans des modernes, sous
le titre de Voyage au PatTiasse , Ilotter-
dam (Chartres) , 1716, in-12. Ces trois
académiciens n'y sont pas ménagés.
UN (saint), successeur immédiat de
saint Pierre sur le siège de Rome, sui-
vant saint Irénée , Eusèbe , saint Epi-
phane , saint Optât , saint Augustin , etc. ;
mais Tertullien dit, dans son livre Z)<?
prœscript.^ cap. 52, que le prince des
apôtres désigna saint Clément pour le
remplacer. On concilie ces passages en
supposant que saint Clément refusa cette
dignité jusqu'après la mort de saint Lin
et de saint Ciel. On ajoute que ce qui a
fait placer par quelques auteurs saint Clé-
ment immédiatement après saint Pierre,
c'est que , du vivant de cet apôtre et pen-
dant un de ses voyages apostoliques, il
avait été son vicaire et avait administré
pour lui les affaires de son siège. Quoi qu'il
en soit , selon l'opinion générale , saint Lin
monta sur la chaire de saint Pierre lorsque
ce premier vicaire de J.-C. eut été mar-
tyrisé; il l'occupa depuis l'an 65 jusqu'à
l'an 7G, et gouverna l'Eglise avec le zèle
ie son prédécesseur. C'est durant son
pontificat qu'arriva la ruine de Jérusa-
lem , l'an 70. Il est nommé parmi les
martyrs, dans le canon de la messe de
l'Eglise romaine , qui est d'une plus haute
antiquité que le sacramentaire de Gélase,
et d'une plus grande autorité sur ce point.
On voit, d'ailleurs, par de très anciens
pontificaux , qu'il versa son sang pour la
foi ; Stilting a réfuté l'opinion contraire
de Tillemont. Ce pape fut enterré sur le
mont Vatican , près du tombeau de saint
Pierre. Sa fête est marquée au 25 sep-
tembre, dans le martyrologe romain. On
lui a attribué faussement l'ouvrage in-
titulé : D. Lini , pontificum secundi^ de
sut prcecessoris, D. Pétri apostoli pas-
sione libellus ; item de passione D. Paidi
lihellus alter, Paris. iJjOG, et dans la Bi-
blioth. Patrum maxim. t. 2. p. 1 — 67.
LIA ACRE, ou LINACER (Thomas),
médecin anglais, né l'an 1460 à Rochesler,
suivant Frcind ; et à Cambridge ou à Can-
torbéry, selon d'autres , étudia à Florence
sous Démétrius Cbalcondyle et sous Poli-
tien, et se distingua tellement par sa po-
litesse et par sa modestie, que Laurent de
Médicis le donna pour compagnon d'é-
tude à ses cnfans. De retour en Angle-
terre , il devint précepteur du prince Ar-
Ihus, lils aîné du roi Henri VII; ensuite
médecin ordinaire de Henri YIII , frère
d'Arlhus. Il mourut en 1524 , à l'âge de
64 ans : il s'était fait prêtre sur la lin de
sa vie. C'est à Linacre que l'on doit la fon-
dation du collège des médecins de Londres.
Il en fut le premier président , et légua
71 LIN
sa maison à ce nouvel établissement.
Avant lui, les médecins étaient reçus à
la licence par les évèques. Il entra dans
les ordres et fut nommé chantre dans l'é-
glise d'Yorck. On a de lui : | De emendata
latini sermonis structura lib. VI ^ Leip-
sick, 1545, in -8° ; Paris, 1552, 1550, in-8°;
I Galienimetliodus medendi, in-8" ; | quel-
<iues autres ouvrages de Galien , traduits
du grec en latin ; | liudimenta gramma-
tices, Paris, 1555, in-8**, et d'autres écritg
qui sont estimés Ati sa vains. Son style est
pur, mais il sent trop le travail , suivant
Erasme et Paul Emile.
LINANT (Michel), né à Louviers en
1708 , fut précepteur du fds de madame
du Châtelet dans le temps où Voltaire de-
meurait à Cirey près de cette dame , et
il en reçut plusieurs conseils. Il rem-
porta trois fois le prix de l'académie
française en 1759, 1740 et 1744 , temps où
le choix des sujets se prétait peu au dé-
veloppement des talens, et où cette com-i
pagnie s'éloignait déjà de l'esprit de son
institution , sans adopter encore le fana-
tisme philosophique , dont elle fut dans la
suite une zélée propagatrice. Linant com-
posa quelques Tragédies avec des succès
divers {Alzdide , 1745, Vanda, 17 kl).
On a encore de lui des Odes et des Epîtres.
Voltaire lui rendit des services que Linant
célébra dans ses vers avec l'enthousiasme
de la reconnaissance ; cependant il ne tint
pas à lui que le protecteur ne renonçât à
sa manie anti-tliéologique ^ et il lui prédit
tous les désagrémens qu'elle répandrait
sur sa vie. Linant mourut en 1749 , à 40
ans. Il donna une édition des OEuvres de
Voltaire, Amsterdam, 1758-1759, S vol.
in-8°. On trouve une Notice sur Linant
dans le deuxième snpplément du Par-
nasse français^ par Titon du Tillet.
LIIVCIv (Henri), célèbre jurisconsulte
du 17' siècle , natif de Misnie, et profes-
seur en droit à Altorf, laissa un Traité du
droit des temples^ où il y a des choses
curieuses.
LI\DA\US (Guilladme-Daaiase), théo-
logien, né à Dordrecht en 1525, étudia
d'abord à Louvain, puis à Paris sous
Turnèbe et Mercier. Ayant ensuite reçu
les ordres et le bonnet de docteur en théo-
logie à Louvain, il fut professeur d'Ecri-
ture-Sainte à Dillingen, puis grand-vi-
caire du diocèse d'Ulrechl, et inquisiteur
de la foi dans la Hollande et dans la Frise.
Philippe II , roi d'Espagne , le nomma eu
1562 à lévêché de Ruremonde , qui ve-
nait d'être érigé, et dont il ne prit pos-
LI!V
47Î
Lm
session (pi'en V6ù9. Il y eut beaucoup à
souffrir dans le temps des troubles. Il fil
deux voyages à Rome , se fît estimer du
pape Grégoire XIII , fut tranféré à l'évé-
ché de Gand en 1588, et mourut trois mois
après, à 63 ans. On a de lui un grand
nombre d'ouvrages très estimés, entre
autres : | De optimo génère interpretandi
Scripturas^ Cologne, I5S8, in-8 ; [ Ta-
bulée analyticœ oinnium hœreseon hujus
seculi; \ Panoplia evangelica^ Cologne,
1590, in-fol. ; | Psalterium vêtus, à men-
dis 600 repurgatum et de grœco atque
hebraico fotitibus illustratum ^ Anvers,
4S67, I grand nombre d'Ecrits de contro-
verse. On lui doit aussi une Edition de la
Messe apostolique, faussement attribuée
à saint Pierre : elle parut, accompagnée
d'une Apologie et de Cojnmentaiî-es^ à
Anvers, en 1588, in-8°, et à Paris, en 1595.
La première édition est la moins com-
mune. Ce prélat, non moins éclairé que
vertueux , possédait les langues, les Pères,
et l'antiquité sacrée et profane. Il avait
d'excellens principes de théologie et de
morale , et autant d'élévation dans l'esprit
que de force dans le raisonnement. Fuit
vir ille ^àW le cardinal Baronius, non tan-
tàm omnis generis lilterarum eruditione
darissimuSj, vericm ctiam egregii confes-
soris fidei nobilitatus insignibus, quippe
qui exilia ^ proscriptiones . œrumnas in-
credibiles. ac mortes ferè fréquentes^ in-
concusso robore ^ fidei causa , sustinuit.
Sa vie a été écrite par Havensius dans
son ouvrage : De erectione novorum in
Belgio episcopatuum , et on a donné le
catalogue de ses ouvrages à Bois-le-Duc,
1584, in-8".
LINDA^US, ou LINDEN. F^oyez VAN-
DER-LINDEN.
LIADKiiORN (Jkan), né à Deventer
vers 1636, fut curé à Utrecht, et provi-
caire de l'évèché de Deventer. Il remplit
toutes les fonctions d'un pasteur zélé,
pendant iO ans, sans cesser de donner ses
ir.omens de loisir à l'étude. Il mourut le
6 août 1696. Il était fort versé dans la
théologie et les sciences qui y ont rap-
port. Il avait aussi de grandes connais-
sances dans l'histoire profane. Nous avons
de lui : | Historia seu notitia episcopatiïs
DavenlriensiSj Cologne , 1670 , in-12 , es-
timée ; I Tractatus de efficacia sacrifi-
ciorum quœ obtulit lex divino-mosaica ^
Anvers , 1677, in-12 ; j Notœ catecheticœ
in bapiismatis^ pœnitenticBj extremce-unc-
iionis. ordinis, matrimonii , sacramenta,
Cologne, 1G7,5, 1684, 5 vol. in-12, savant
et curieux ; ] Explication littérale des cir-
constances de la Passion de Notre-Sei-
gneur. Cologne , 1684-1690, 3 vol. in-12.
LINDEMiRlICK , ou LINDENBROC, ou
LINDENBROGIUS (EnroLous ), né vers
1540, à Brème, et chanoine (luthérien)
de Hambourg , a publié V Histoire ecclé-
siastique d'Adam de Brème : son His-
toria compendiosa Daniœ regum , ab in-
certo auctore conscripta^ Leyde, 1595,
in-4° : (cette histoire va jusqu'au règne
de Christiern IV), et une Histoire sur les
Ecrivains de la Germanie septentrionale,
Hambourg, 1595, in-fol. furent réimpri-
mées avec d'autres livres par Jean-Al-
bert Fabricius, Hambourg, 1706, in-fol.
Lindenbruck mourut dans sa 76' année ,
le 20 juin 1616.
LlNDENBIllJCK (Frédéric) , fils du
précédent, fut, comme son pèri-, cha-
noine de Hambourg , où il naquit en 1573 :
il étudia en Hollande où il se lia avec le
fameux Jules Scaliger. Il enseigna le
droit, et mourut à Hambourg le 6 sep-
tembre 1648 , et selon d'autres 1647. Il
donna des Editions de Virgile , de Té-
renre , d'Albinovanus, d'Ammien Marcel-
lin , etc. Ce qu'il a fait sur ce dernier se
trouve dans l'édition de cet historien par
Adrien de Valois. L'histoire et le droit pu-
blic l'occupèrent ensuite. On lui doit en ce
genre un livre curieux , intitulé : Codex
legum antiquarum^ seu Leges IVisi-
gothorum.^ Burgundiorum , Longobar-
dorum^ etc. Francfort, 1613, in-fol. Ce
livre devient rare. L'édition des Priapeia
prouve que l'amour des bonnes mœurs
et de la décence n'entrait pour rien dans
ses goûts.
LIIVDENBRUCK (Henri) , frère puîné
du précédent, né en 1570, fut directeur
de la bibliothèque que Jean Adolphe , duc
de~Holstein, avait formée à Gollorp en
1606. On a de lui des notes sur Censorin :
De die natali^ Hambourg, 1614, in-4°, et
une édition de Polycraticus, de J. de Sa-
lisbury, Leyde, 1595, in-8'*. Colomiès et
Crenius accusèrent Henri Lindeubruck
d'avoir volé , étant à Paris, des livres ma-
nuscrits de la bibliothèque de Saint-Victor.
On ajoute que, sans le crédit de MM.
Calignou et Dupuy l'ainé , il eût encouru
risque d'être pendu; car on l'avait déjà
fait conduire tête nue au cachot. Lui et
Jean Wovv^er ( celui de Hambourg, et non
celui d'Anvers) étaient nommés commu-
nément les corsaires de Hambourg. Mais
Jean Burchard Mencken attribue ces vols
à Frédéric Lindenbruck. Quelques lexico-
LIN 4
(>raphes , entre autres Chaudon , ont con-
fondu ces trois Lindenbruck , et en ont
fait un seul personnage ; ce qui a répandu
dans la notice biographique de tous les
tTois des obscurités et des antilogies diffi-
ciles à débrouiller. Nous ignorons l'année
de la mort de Henri.
' LI\DET (Robert-Thomas), conven-
tionnel, né à Bernay, en 17i3, était curé
dans cette ville à l'époque de la convoca-
tion des états-généraux de 1789. Appelé à
y siéger par les suffrages du clergé du
bailliage d'Evreux, il ne s'y fit remar-
quer que par son adhésion à la constitution
civile du clergé : il fut ensuite nommé
tivêque constitutionnel du département
da l'Eure , dans le mois de mais 1791, et
donna, l'année suivante, le scandaleux
exemple de son obéissance aux lois de l'é-
poque , en se mariant ; Lindet fut le pre-
mier évéque qui renonça au célibat.
Réélu membre de la Convention , il y vota
la mort du roi, et, le 7 novembre 1793,
il renonça à l'épiscopat : le 16 du même
mois, il remit à la Convention les lettres
de prêtrise de plusieurs ecclésiastiques du
département de l'Eure , qui avaient mar-
ché sui ses traces. Après avoir fait partie
du conseil des Anciens, d'où il sortit en
1798, il rentra dans l'obscurité, dont il
n'aurait pas dû sortir. La loi de 1816 le
força de quitter la France , où la clé-
mence royale lui permit bientôt de ren-
trer. Lindet se retira à Bernay, où il
mourut en 1823. Ses restes furent portés
au cimetière sans aucune cérémonie reli-
gieuse , et sans l'assistance d'un prêtre.
Outre les discours qu'il prononça dans les
différentes assemblées législatives dont il
fut membre, on a de lui deux lettres pas-
torales adressées l'une au clergé de son
diocèse^ 1792 , in-8° ; l'autre aux reli-
gieuses des monastères de son diocèse^
rn^-me année , et même format.
* LINDET (Jean-Baptisïe-Robert),
connu sous le nom de Robert LINDET ,
frère cadet du précédent , était avocat à
Bernay (Eure), en 1789, et fut nommé
procureur syndic du district de Bernay ;
il fut ensuite appelé à l'assemblée Légis-
lative, puisa la Convention , où il vota
la mort du roi sans sursis : ce fut Lindet
qui fit le rapport au nom de la Commis-
sion des vingt et un^ sur les crimes im-
putés à Louis XVL Le 10 mars 1793 il
proposa un projet d'organisation d'un tri-
bunal révolutionnaire qui ne fut point
adopté; ce projet portait entre autres
clioscs que les juges ne seraient soumis à
7 3 LIN
aucune forme dans l'instruction des pY>-
cès , et que dans ce tribunal où il ne devait
point y avoir de jurés, les poursuites pour-
raient être dirigées contre tous ceux qui ,
par les places qu'ils avaient occupée*
sous l'ancien régime, rappelaient des
prérogatives usurpées par les despotes.
Lindet se montra un des ennemis les pluJ
acharnés des Girondins^ et Brissot l'avait
surnommé la Hyène. Devenu membre
du comité de salut public , à la place de
Jean Debry {voyez DEBRY), il parut
changer de système, et revenir à des
principes de modération. Lindet fut en-
voyé dans les départemens du Calvados,
de l'Eure et du Finistère , pour réprimer
les fédéralistes, et il rendit des services im-
portans à quelques communes, poursui-
vies pour avoir favorisé l'insurrection
vendéenne. Les membres de la munici-
palité de Couches , malgré la promesse
d'amnistie qui leur avait été faite, ayant
été arrêtes sous prétexte qu'ils avaient
fourni des boulets aux royalistes ven-
déens, Lindet prit leur défense au sein de
la Convention et parvint à les sauver. Il
resta neutre dans la lutte qui s'éleva
entre les deux factions de la montagne qui
s'était divisée ; mais après le 9 thermidor,
il prit vivement la défense de Collot ,
Biilaud-Varennes et Barrer», et demanda
avec instance qu'au lieu d'isoler les pré-
venus, on jugeât à la fois tous les membres
qui avaient eu part au gouvernement.
Cette proposition tendait à les sauver
tous ; aussi les thermidoriens ne pour-
suivirent d'abord que quelques-uns de»
chefs les plus abhorrés. Dénoncé à la suite
de la journée du l*"" prairial an 3 (20
mai 1793 ), comme l'un des auteurs de l'in-
surrection tentée contre la Convention .
il fut décrété d'accusation : des pétitions
nombreuses arrivèrent en sa faveur do
Caen, du Havre, de Nantes, de Couches
et de presque tous les lieux qu'il avait
parcourus en qualité de commissaire de
la (Convention en 1793. L'amnistie de 1796
le rendit à la liberté. Lindet se trouva en-
core impliqué dans la conspiration déma-
gogique de Babeuf, et fut jugé par con-
tumace, par la haute cour nationale de
Vendôme , qui l'acquitta. jAprès la jour-
née du 30 prairial an 7, le Directoire l'ap-
pela au ministère des finances, qu'il con-
serva jusqu'au 18 brumaire. Alors il so
retira et vécut dans l'obscurité, jusqu'à
sa mort arrivée à Paris, le 17 février 1821),
N'ayant pris aucune part au gouverne-
ment des cent-jours, ii ne fut pas attehit
LIN 47
j)ar la loi de 1816. On a de lui : Rapport
sur les crimes imputés à Louis Capet.
fait au nom de la commission des vingl-
iin, dans la séance du 10 décembre 1792,
in-8° ; trad. en allemand , Hambourg ,
1793 , in-S", et en anglais , 179^ , in-8" ;
j Rapport sur la situation intérieure de
la République ^ 179i, in-S"; traduit en al-
lemand, 1793, in-S"; et en hollandais,
aussi 1793, in-8".
*LIÎVDSAY ( sir Dvvid), poète écossais,
né à Garmylton eu 1400, d'une famille
noble, fut d'abord page d'honneur de Jac-
ques V, et rempli» quelques emplois à la
cour. Nommé roi d'armes, puis héraut
d'armes il fut chargé de plusieurs négocia-
tions en 1331 et 1356. Il embrassa sous la
régence la cause des réformés qu'il essaya
de servir par ses ouvrages, et mourut en
1537 ou selon plusieurs biographes en 1567.
Quelques écrivains ont regardé Lindsay
comme le premier auteur de drames en
Ecosse ; mais avant sa naissance on jouait
dans ce pays des ouvrages de ce genre
sous le nom Ae moralités (moralilies) .
mais il les perfectionna beaucoup, et eut
le mérite de donner le premier des pièces
à peu près régulières. Le recueil de ses
OEuvres qui ont été souvent imprimées,
a été publié par Chalmcrs en 1806, 3 vol.
iR-8° ; il se compose d'une tragédie . d'un
drame intitulé les Trois états, de divers
poèmes parmi lesquels en remarque le
Rêve^ 15S28 ; la Complainte au roi, 1529 ;
la Complainte de Papingo. satire contre le
clergé , 1330 ; Histoire et testament de l'é-
cwjer Meldram, et d'un grand ouvrage
intitulé la Monarchie et achevé en 1335.
Ces diverses productions ont joui dans le
temps d'une grande réputation : en géné-
ral le ton de Lindsay est mélancolique et
attachant , sa versification est correcte, et
il y a de la variété dans ses tableaux. Au
reste, dit M. EUis, il dut sa popularité
fceaucoup plus à ses opinions qu'à son
mérite poétique. — Robert LINDSAY de
Petscoltie, contemporain du précédent,
est auteur d'une Histoire d'Ecosse qui
s'étend de l'an 1436 à l'an 1363 ; elle a été
publiée par Jean Graham Dalyell, sous
le titre de Chronique d'Ecosse^ 2 vol.
in-8". — John LINDSAY, savant théolo-
gien , a publié un Histoire abrégée de la
succession royale^ 1720, in-S", et une
Traduction de la Défense de l'Eglise
d'Angleterre parMason, 1726, 1727, 1728 :
il est mort à Londres en 1768, à l'âge de
82 ans,
*LL\DSAY (Mistress), dame anglaise
4 LIN
fixée en France, est, suivant M. A. A.
Barbier, Dictionnaire des anonymes .
tomfe 5, n° 19,103, 2* édition, l'auteur
d'une Traduction française de l'ouvrage
anglais de miss Knight , fie privée ^ po-
litique et militaire des Romains sous
Auguste et Tibère, Paris, 1801, in-8".
Elle est morte à Angoulème en 1820.
• LL\DSEY (Théophile), fondateur
et premier ministre de la secte religieuse
des unitaires, né en 1723 , à Middlewhich
dans le Cheshire , fit des éludes brillantes
au collège de Saint-Jean de Cambridge ,
et se voua à l'état cccléblasti(iue. Il avait
obtenu successivement des bénéfices dans
plusieurs lieux , auxquels il renonça par
suite de scrupules qui lui étaient sur-
venus sur les doctrines et les cérémonies
de l'église anglicane. Il refusa même la
place de chapelain du duc de Northum-
berland , alors vice-roi d'Irlande , et se
rendit à Londres , où il fonda en 1772 la
congrégation dite des Unitaires. Cette
congrégation, qui adopta la liturgie an-
glicane telle qu'elle a été réformée par
le docteur Clarke, tint d'abord ses as.-
semblées dans une maison louée à col
effet ; et en 1778 elle fit construire la
chapelle particulière d'Essex-Street , où
Lindsey exerça son ministère pendant 20
ans. Il fut remplacé par son beau-frère ,
le docteur Disney , et mourut dans la re-
traite en 1808. Lindsey était d'une bien-
faisance peu commune , et sa femme ,
belle-liile du docteur Blackburn , le se-
condait dans la distribution de ses bien-
faits. Parmi les nombreux ouvrages qu'il
a publiés en anglais , nous citerons : ] Apo-
logie pour résigner la cure de Catterick .
1774, in-8°, avec une suite , 1776 , in-S" ;
( Livre de prières , d'après les réformes
du doctexir Clarke ^ à l'usage de la cha-
pelle d'Essex-Street , avec des hymnes ,
1774, in-S"; | Adresse d'adieu aux pa-
roissiens de Catterick^ 1778 , in-8"; | Dis-
sertation sur l'évangile de saint Jean et
sur les prières adressées à Jésus-Christ ^
1779, in-8''; ] Le Catéchiste, on Recherches
co7icernant le seul vrai Dieu et l'objet du
cidte , 1781 , in-8'' ; | Essai historique sur
l'état de la doctrine et du culte des uni-
taires, 1783, in-8°; | Examen des preuves
alléguées par M. Robinson , en faveur
de la divinité de Jésus-Christ , 1783 . in-
8° ; I Liste de leçons et d'interprétations
fausses des Ecritures; \ Findiciœ Priest-
lianœ , ou Adresses aux étudians d'Ox-
ford et de Cambridge, i788-i790, 2 part.,
in-8" ; j Conversations sur le çoaverna-
LI?f
475
LllV
ment divin, montrant que toutes choses
viennent de Dieu,, et sont pour Dieu en
faveur de tous, 1802 , in-8° ; | Enfin Con-
sidérations sur la nécessité de révérer
la liturgie par un protestant d'accord
avec lui-même. M. Belsham a publié des
Mémoires sur la vie et les écrits de Lind-
set/s 1812, in-12.
LINECK ( Mathias ) , né à Prague en
1722 , entra chez les jésuites , où il se
distingua par son érudition , et particu-
lièrement par la connaissance de l'anti-
quité ecclésiastique; il mourut à Prague
en 1784 , après avoir publié : Commen-
tationes theologicœ de fuie ^ spe et cha-
ritate^ Prague , 1763 , in-i° , suivi de
])lusieurs autres traités théologiques ,
imprimés successivement dans la même
ville. Sa dissertation : De festis quinque
primorum sœculorum , Olmutz, 1758,
111-4°, lui a mérité les éloges des savans
par les recherches et la bonne critique
qui la, distinguent.
LIKGELBACK (Jeaiv), né à Franc-
fort en 1625 , a peint avec beaucoup d'in-
telligence des marines, des paysages,
des foires, des charlatans, des ani-
maux j etc. On remarque dans ses ta-
bleaux un coloris séduisant , une touche
légère et spirituelle, des lointains qui
semblent échapper à la vue. Il a gravé
quelques paysages, et mourut à Amster-
dam , en 1687. Le musée de Paris possède
de ce peintre un marché aux herbes. Les
six tableaux suivans du même maître en
ont été enlevés en 1813 ; un port de mer,
V arrivée de la flotte hollandaise aux
Dunes, une fête publique , les tJ^ois juifs,
une sainte famille , des paysans 7'amas-
sant du foin. On voyait dans les galeries
de Saint-Cloud un autre tableau du même
auteur , et qui fut volé de nuit en juillet
1813 ; il représentait l'arrivée des voya-
geurs à l hôtellerie.
LINGENDES ( Claude de ) , né h Mou-
lins en 1591 , jésuite en 1607 , fut pro-
vincial et ensuite supérieur de la maison
professe à Paris , où il mourut en 1660 ,
âgé de 69 ans. On a de lui 3 vol. in-4.° ou
in-8° do Sermons, qu'il composait en la-
tin, quoiqu'il les prononçât en français.
L'applaudissement avec lequel il avait
rempli le ministère de la chaire fut un
augure favorable pour ce recueil , très
bien reçu du public. Les vérités évangé-
liques y sont exposées avec beaucoup
d'éloquence; le raisonnement et le pa-
thétique s'y succèdent tour à tour. On
le regarde comme un de ceux qui ont le
plus contribué à bannir de l'éloquencfl
de la chaire les pointes , les jeux de mots
et le mauvais goût qui souvefit régnaient
dans les sermons du celte époque. Son
extérieur répondait à ses talens. On a
traduit quelques-uns de ses sermons en
français sur l'original latin , en profitant
néanmoins des manuscrits de plusieurs
copistes qui avaient écrit les discours du
père de Lingendes , tandis qu'il les prê-
chait. Ses autres ouvrages sont : | Con-
seils pour la conduite de la vie; | Foti-
vum monumentum ab urbe Molinensi
Delphino oblatum , in-i". Ce dernier fut
fait dans le temps qu'il était recteur du
collège de Moulins.
LL\GE\DES (Jea\ de), parent du
précédent, né à Moulins en 1393, fut
précepteur du comte de Moret , fils natu-
rel de Henri IV , aumônier de Louis XIII,
évéque de Sarlat , puis de Mâcon; il
mourut en 1663. Il prêcha avec beaucoup
d'applaudissement sous Louis XIII et
sous Louis XIV. Il n'emprunta point l'art
imposteur de la flatterie, et ne craignit
pas d'attaquer le vice sous le dais et sous
la pourpre. On a de lui l'oraison funèbre
de Victor Amédèe , duc de Savoie , 1627 ,
et celle de Louis XIH . prononcée en
1643.
LI.XGCNDES ( Jea\), poète français ,
né à Moulins , vers 1380 , florissait sous
le règne de Henri le grand. On se plait
encore à la lecture de ses Poésies, qui
sont faibles à la vérité, mais qui ont de
la douceur et do la facilité. Ce poète a
particulièrement réussi dans les stances.
Il mourut en 1616, à la fleur de son âge.
Ses productions sont en partie dans le
Recueil de Barbin, 5 vol. in-12. La meil-
leure est son Elégie pour Ovide. Lin-
gendes fut l'ami d'H. d'Urfé, de Davity,
deBerthelot, etc., qui lui rendirent am-
plement les éloges qu'il leur prodiguait.
LI\(iER VILLE, rayez LEPAGE DE
LINGERVILLE
* LIA'GUET (Simoiv-Nicolas-Hewri),
avocat et publiciste , né à Reims le 14
juillet 1756 , étudia d'abord au collège de
Beauvais à Paris , où son père avait été
professeur, et obtint en 1751 les trois
premiers prix de l'université. Un succès
aussi brillant attira sur lui l'attention du
duc de Deux-Ponts qui l'emmena avec
lui en Pologne. Lo jeune Linguet revint
bientôt en France , se rendit à Lyon et
chercha à y établir une fabrique d'une
espèce de savon de suif, fait à froid d'a-
près des procédés au'il avait trouvés lui-
LIN
476
hîH
même. N'ayant pu réussir, faule de fonds,
il vint à Paris où il se lia avec plusieurs
gens de lettres, notamment avec d'Alem-
bert , qui devint son ami et lui fit obtenir
la place de secrétaire , ou d'aide-de-camp
du prince de Beauvau pour la partie
du génie. Linguet suivit ce général en
Espagne pendant la guerre de Portugal ,
et profita de son séjour dans la Pé-
ninsule pour en apprendre la langue ,
ayant déjà conçu le projet de faire con-
naître plus tard le théâtre de cette nation
cpii n'avait pas encore été traduit en fran-
çais. Revenu en France, à l'âge de 2G
ans , il se mit à étudier la jurisprudence ,
sans toutefois renoncer à la litlérature. Il
débuta avec éclat dans le barreau : trois
causes célèbres qu'il défendit et qu'il
gagna lui firent une grande réputation :
son orgueil lui persuada qu'il pouvait
se permettre impunément toutes sortes
de sarcasmes contre ses confrères, sur
la plupart desquels il l'emportait par
ses connaissances littéraires et par ime
diction claire , facile et élégante. Ainsi ,
d'un côte Linguet eut des admirateurs ,
et de l'autre beaucoup d'ennemis. Sa dé-
fense du duc d'Aiguillon arracha ce dernier
à la poursuite des tribunaux : ce grand
seigneur devenu ministre , se montra peu
reconnaissant du service que lui avait
rendu son avocat , qui se plaignit de son
ingratitude avec toute la vivacité de son
caractère; et jamais le duc d'Aiguillon ne
lui pardonna d'avoir écrit publiquement
qu'il l'avait empêché d'aller à l'échafaud.
Son caractère autant que ses succès contri-
buèrent à lui faire fermer les portes du
barreau : il fut rayé du tableau des avo-
i;ats. Remis sur le tableau après la réin-
tégration de l'ancien parlement , Linguet
ne put échapper à la haine opiniâtre de
ses confrères qui l'expulsèrent du bar-
reau une seconde fois. Ses réclamations
auprès de Malesherbes restèrent sans
fruit, tant l'opinion avait été prévenue
sur son compte. Après avoir exhalé sa
bile et mis par ses emportemens les torts
les plus graves de son côté, il rédigea
mie feuille qu'il intitula Journal politi-
que. En même temps il publia diverses
brochures dans lesquelles se décelait un
esprit novateur : sa Théorie des lois fit
beaucoup de bruit , à cause de la singula-
rité des opinions de l'auteur ainsi que de
celle de son style. Linguet mil contre lui
le ministre Maurcpas qui fit supprimer
son journal. Craignant pour sa liberté ,
il passa à l'étranger, visita la Suisse, la
Hollande, l'Angleterre , et se fixa quel-
que temps à Bruxelles. Après la mort de
Maurepas, le ministre comte de Ver-
gennes lui permit de rentrer en France :
mais sur de nouvelles plaintes auxquelles
on croit avec assez de fondement que lo .
duc d'Aiguillon ne fut pas étranger , Lin>|
guet fut arrêté et enfermé à la Bastille :"
ce ne fut qu'au bout de deux ans qu'il '
put en sortir , dans le mois de mai 1782 ,
après avoir promis toutefois d'être plus
modéré, et avoir indiqué le moyen de
faire passer en deux heures un avis de
Brest à Paris. Exilé à Rhétel , il ne resta
pas long-temps dans cette ville , et repassa
en Angle terre où il fit de nouvelles bro-
chures ; puis revint à Bruxelles où il
continua son journal inlihilà ^ annales
politiques. Les éloges qu'il donna à l'em-
pereur Joseph II lui valurent une grati-
fication assez considérable et la permis-
sion de se rendre à Vienne. Linguet qui
avait le talent de se faire des ennemis
même de ses protecteurs , se montra in-
grat envers l'empereur qui l'avait ac-
cueilli avec tant de bonté , et se prononça
en faveur des révoltés des Pays-Bas. Mais
il ne conserva pas long-temps l'amitié des
rebelles qui le soupçonnèrent de vou-
loir leur nuire , et dirigèrent contre
lui des poursuites auxquelles il parvint
difficilement à se soustraire. Forcé de
quitter les Pays-Bas à l'époque de l'inva-
sion de ce pays par les Autrichiens , il
revint en France. En 1791 il défendit à la
barre de l'assemblée Constituante l'as-
semblée coloniale de Saint-Domingue , et
y plaida la cause des Noirs. Dans le mois
de février 171)2, il dénonça à l'assemblée
Législative Bertrand de Molleville , mi-
nistre de la marine : sa dénonciation
ayant été accueillie avec mépris, il dé-
chira son mémoire en présence de ras-.|
semblée. A l'époque de la terreur, Lin-l
guet se réfugia à la campagne ; découvert!
et arrêté, il fut traduit devant le tri-
bunal révolutionnaire , qui le condamna
à mort le 27 juin 1794 , pour avoir encensé
dans ses écrits les despotes de F'ienne et
de Londres. Il alla au supplice avec cou-
rage. Parmi ses nombreux ouvrages, qui
sont de genres fort différens , et qui sont
généralement écrits avec chaleur , on re-
marque trop souvent la manie du para-
doxe et une véhémence inexcusable : il
y a toujours de l'exagération dans ce qu'il
dit , soit en bien soit en mal : nous cite-
rons : I Voyage au labyrinthe du jardin
du roi^ 1753, in-12; | Les Femmes-FilU's ,
LIN
477
LIN
parodie de la tragédie AUTijpermnestre ,
Paris, 1759, in-12; ] Histoire du siècle
d'Alexandre . Amsterdam (Paris), 1762 ,
in-12. L'auteur composa cet écrit pendant
son séjour en Espagne. Le style en est
élégant, mais trop é.pigrammalique pour
le genre de l'histoire. | Mémoire sur ut
objet ifitéressant pour la province de Pi-
cardie , ou Projet d'un canal et d'un port
sur les côtes. i764, in-S"; ] Lettre du
mandarin Hoeit-Ching à son ami I/oeit-
Chang ^ 1762, in-8°; cette brochure a
rapport aux affaires des jésuites; | Epître
en vers d'un G. de D. à un de ses amis,
supplément aux Mémoires d'une fameuse
acadéînie , Liège , 1764 , in-S" ; on trouve
dans cette épttre quelque talent poétique.
I Le fanatism,e des philosophes . Abbe-
ville , 4764, in-8°; | Nécessité d'une ré-
forme dans l'adtninistration de la justice
et des lois civiles de France. Amsterdam,
1764 , ln-8° ; [ Socrate . tragédie en S actes
qui n'eut aucun succès, quoi qu'il y ait
des vers heureux ; | La Diîne royale avec
tous ses avantages, 1764 , nouvelle édit.,
Londres et Paris, 4787, in-8°; | L'aveu
sincère . ou Lettre à une mère sur les
dangers que court la jeunesse . en se li-
vrant à un goût trop vif pour la littéra-
ture, Vat-tis , 1768, in-12; | Lettre sur une
nouvelle traduction de Tacite par M. L.
D. B. ( La Bletterie ) , 1768 , in-12 ; | His-
toire des révolutions de l'empire romain,
1766, 2 vol. in-12. Linguet s'attache, dans
cet ouvrage, à justifier la conduite de
quelques-uns de ces empereurs que Tacite
et Suétone nous ont peints sous de si
noires couleurs. On lui a reproché d'être
l'apologiste de la tyrannie; maison au-
rait pu faire le même reproche à Dureau
de la Malle ( dans son excellent Discours
préliminaire de la traduction de Tacite),
qui est de son avis sur bien des points.
1 Théorie des lois civiles . Londres , 1767,
2 vol. in-S". La dernière édition est de
1774, 3 vol. in-12. | Histoire impartiale
des jésuites , 1768, in-8°. Cet ouvrage
que la nécessité avait inspiré à l'auteur ,
dans le temps que venant d'être reçu au
barreau, les Intrigues de ses confrères
ne lui laissaient encore aucune cause à
plaider, fut brûlé par arrêt du parlement
de Paris , au pied du grand escalier du
Palais. I Mémoires sur la Bastille. Lon-
dres, 1783, in-8°; ( Les Canaux navi-
gables pour la Picardie pour la France.
4769 , in-12 ; | Continuation de V Histoire
universelle de Hardion. Cette continuation
forme les tomes 19 cl 20. — Théâtre espa-
gnol. 1770, 4 vol. in-12. Cette traduction esl
élégante et correcte. | Théorie du libelle ,
ou L'Art de calomnier avec fruit . Am-
sterdam (Paris) , 4775 , in-12 , en réponse
à la Théorie du paradoxe . écrit polémi-
que et plein de force , où Linguet avait
été vivement attaqué par l'abbé Morel-
let. \Du plus heureux gouvernement.
ou Parallèle des constitutions de l'Asie
avec celles de l'Europe. 1774, 2 vol. in-
12. On y trouve peu de profondeur dans
les recherches, mais des aperçus poli-
tiques qui ont eu leur exécution , et des
faits intéressans sur l'établissement des
ordres religieux. | Réflexions des six
corps de la ville de Paris sur la suppres-
sion des jurandes . 1776; | Essai philoso-
phique sur le m.onachistne, 1777 , in-S" ;
[Lettre au comte de Vergennes. Londres,
1777, in-18; | Aiguilloniana. Londres ,
1777, in-S". ( Voyez le Journal de la li-
brairie. 1816, page 54.) | ylppel à la
postérité, 1779, in-8'' ; | Réflexions sur la
lumière, 1787, in-8'', où l'on trouve
des aperçus et des idées très remar-
quables ; I Considérations sur l'ouverture
de l'Escaut, 1787, 2 vol. in-8°; | La
France plus qu'anglaise . 1788 , in-8'' ;
{Examen des ouvrages de f^ol taire consi-
déré comme poète, cotnme prosateur,
comme philosophe. Bruxelles , 1788 , in-
8° ; I Point de banqueroute, plus d'em-
prunt, et si l'on veut, bientôt plus de
dettes en réduisant les impôts à un
seul, i7S9, in-8"; | Discours sur l'utilité
et la prééminence de la chirurgie sur la
médecifie . Bruxelles et Paris , 1787 ,
in-8°; | Onguent pour la brûlure, i788,
in-S° ; I Lettre à Joseph II sur la ré-
volution du Brabant, 1789 , in-8'' ; ] Lé-
gitimité du divorce , 1789 , ih-8" ; | Code
criminel de Joseph II. 1790 , in-S" ;
\La Prophétie vérifiée. 1790, in-8''; | Col-
lection des ouvrages relatifs à la révolu-
tion du Brabant, 1791, in-8''; {Recueil
des Mémoires judiciaires, 7 vol. in-12
On y trouve une logique pressante , de
l'adresse dans les développemens , un ta-
lent marqué pour l'art oratoire. | Jour-
nal politique et littéraire :\\ parut depuis
1774 jusqu'en 1778; {Annale s politique s. ci-
viles et littéraires du dix-huitième siècle ;
elles commencèrent en 1777 , furent in-
terrompues , reprises à diverses époques ,
et très répandues. Dans ces annales,
écrites avec chaleur, l'auteur attaque
sans cesse et sans ménagement tantôt
l'un , tantôt l'autre , et tranche sur tout.
Elles eurent la plus grande vogue ; 179
Lïi\
h7S
LIi\
numéros forment 19 volumes in-S",
1777-1792. M. Gardaz, avocat à Lyon a
publié un Essai historique sur la vie et
les ouvrages de Linguet ^ et M. Alexandre
De vérité a fait paraître une Notice pour
servir à l'histoire de la vie et des écrits
de S. N. H. Linguet. On a aussi Lingue-
tiana ou Recueil des reparties ingénieuses
et bons mots de cet auteur , in-18.
LmiEIlE (François PAYOTde ), poète
français, né à Paris en 1628, mort en
1704, à 76 ans, entré de bonne heure au
service , et moins connu aujourd'hui par
ses vers que par ses impiétés. On l'appe-
lait \ Athée de Sentis > et il avait mérité
ce nom , non seulement par ses propos ,
mais par plusieurs chansons abominables.
C'est sans raison que madame des Hou-
lières , dont le sort , dit un auteur , fut de
donner au public de bonnes choses , et
de prendre toujours le parti des mau-
vaises, a voulu justifier Linière, dans
une de ses premières pièces, intitulée
Portrait de Linière. Ce blasphémateur
mourut comme il avait vécu. Il se brouilla
avec Boileau , qui lui reprocha son irré-
ligion. Uni avec Saint-Pavin , autre im-
pie , il fit des couplets contre le satirique ,
qui s'en vengea à sa manière , et lui dit
qu'i7 n'avait de l'esprit que contre Dieu.
Le libertinage de l'esprit avait commencé
dans Linière , comme dans presque tous
les incrédules , par celui du cœur. Le vin
et l'amour remplirent toute sa vie, et ne
lui laissèrent pas le temps de faire des
réflexions. Il avait le talent de traiter fa-
cilement un sujet frivole. Ses vers sati-
riques ne manquaient pas de feu ; mais
ils lui attirèrent plus de coups de bâton
que de gloire. On cite de lui : Dialogues^
en forme âe satire^ du docteur Méta-
phraste et du seigneur Albert , sur le
fait du mariage , 1 vol. in-12 , 46 pages.
Il paraît que c'est à torl que Charpentier
lui a attribué la parodie de Chapelain dé-
coiffé. On croit communément qu'elle est
de Furetière.
• LIjNN ( John-Blair ), poète et minis-
tre américain, né en 1777, à Shippen-
sbourg en Pensylvanie , étudia d'abord
au collège deNew-Yorck, puis à celui de
Colombie, où il développa et fortifia son
goût pour la poésie et la critique litté-
raire. Il se livra ensuite à l'étude des
lois ; mais les travaux sur la jurispru-
dence étaient souvent mis de côté par le
jeune poète qui s'essayait dans le genre
dramatique. Des applaudissemens ac-
cueillirent la représentation de sou pre-
mier drame , et ses amis crurent que ce
succès déciderait sa carrière, et que Linn
suivrait celle des lettres. Ils s'étaient
trompés; ce jeune auteur étudia la théo-
logie à Shenectady , sous le docteur Ro-
meyn, prit ses licences , se livra à la pré-
dication , fut attaché à l'église presbyté-
rienne de Philadelphie, et devint ensuite
ministre adjoint au docteur Ewing. Linti
s'occupait presque uniquement de ses de-
voirs de pasteur, lorsque Priestley fil pa-
raître son traité dans lequel il comparait ,
de la manière la plus absurde , J.-C. à
Socrate. Linn attaqua cet ouvrage ; mais
dans cette controverse il écrivit avec tant
d'amertume qu'il en rougit lui-même ;
son repentir lui dicta une lettre qu'il
adressa à son antagoniste ; Prestley mou-
rut avant de l'avoir reçue. Après avoir
ainsi combattu les sociniens , Linn ter-
mina sa carrière à Philadelphie, en 1804.
Outre des Mclaj^ges poétiques qu'il publia
sous le voile de l'anonyme , et son drame
du Château de Bourville ^ on a de lui :
I la Mort de JP^ashington ^ poème dans
la manière d'Ossian, Londres, 1800 ; | La
Puissance du génie j poème, 1803; | le
fragment d'un poème intitulé, Va-
lérien^ dans lequel l'auteur se proposait
de décrire les premières persécutions
contre les chrétiens, et l'influence du
christianisme sur la civilisation, Nevv-
Yorck, 180o, iu-i**. Cet ouvrage est pré-
cédé d'un Essai sur la vie de Lixm , par
Brown. Tous ces poèmes , écrits d'un
style pur, sublime, renferment des
beautés du premier ordre, et sont surtout
remarquables par la sagesse du plan.
I Deux Traités de sa controverse avec
Priestley.
LIIMNÉE ( Charles von), onLinnœus^
botaniste célèbre, naquit le 24 mai 1707 ,
à Roeshult , village de Smolande , en
Suède , de Nils ou Nicolas Linnseus, curé
de ce lieu. Il fut un des hommes les plus
iflustres du 18"^ siècle. Jusqu'à sa mort ,
son génie n'a cessé de porter la lumière
dans l'histoire naturelle et dans la médt
cine. Il a été l'un des fondateurs de l'a-
cadémie de Stockholm ; il en fut le pre-
mier président, et a aussi procuré undj
grande célébrité à l'université d'Upsc
par ses leçons de botanique. Son père,1
peu favorisé des dons de la fortune, le
fit d'abord étudier dès l'âge de 10 ans
dans la petite ville de Vexiœ, pour y ap-
prendre le latin ; mais, voyant qu'il aban-
donnait la classe pour aller chercher des
fleurs à la campaguy, et s'ctanl formé
LIIV hl
«ne fausse idée desdisposllions de l'éiève,
il le mit en apprentissage chez un cor-
donnier (1724): Linnée y trouva occa-
sion d'étudier le livre de Tournefort. que
lui prêta un médecin nommé Rothman.
Ce même médecin le plaça chez Kilian
Stobaeus, professeur d'histoire naturelle
à l'université deLund. Linnée étudia en-
suite à l'université d'Upsal, où il vécut
long-temps dans la gêne et les privations,
entra de là chez Olaiis Celsius , profes-
seur de théologie , qui l'employa pour la
composition de son ffiero-botanicon^iiuis
chez Olaiis Rudbeck, professeur de bota-
nique , à Upsal , qui lui confia la direc-
tion du jardin, et se fit quelquefois rem-
placer par lui dans ses cours. Très jeune
encore, il fut envoyé en 1752 en Lapon ie
pour en recueillir et en décrire les plantes.
Il voulut ensuite donner des leçons à
Upsal; mais les intrigues du professeur
Rosen qui redoutait sa supériorité, l'obli-
gèrent de se retirer à Fahlun dans la
Dalécarlie. Delà il se rendit à Hambourg,
où ses ressources pécuniaires se trouvè-
rent épuisées. Il réussit néanmoins à ga-
gner la Hollande et se présenta au célè-
bre Boërhaave, qui, après l'avoir aidé de
tous ses moyens, le recommanda à Georges
Cliffort, riche amateur de botanique, qui
le retint auprès de lui pendant trois an-
nées. C'est à cette époque qu'il publia
ses premiers ouvrages, qui lui donnèrent
en peu de temps, une renommée euro-
péenne. Cependant, s' étant rendu peu
de temps après en Angleterre, il y fut
accueilli avec froideur par Sloane et Dil-
lenius, alors les plus fameux naturalistes.
H se rendit à Paris, où il se lia avec Ber-
nard de Jussieu, et revint en Suède, où
il éprouva encore bien de^ désagrémens.
Enfin la protection du comte de Tessin
aplanit tous les obtacles , et il fut nommé
successivement médecin de la flotte, pro-
fesseur de botanique à Stockholm (1758 ),
médecin du roi, et président de l'acadé-
mie des sciences (1759), et enfin (1741)
professeur de botanique à Upsal, emploi
qu'il occupa pendant 57 ans. Le Sysiema
natures et la Philosophia botanica^ ont
élé réimprimés en plusieurs pays , tra-
duits en plusieurs langues, et commentés
par les naturalistes les plus fameux. Ano-
bli et décoré de l'ordre de V Etoile po-
laire de Suède , il fut demandé par le roi
d'Espagne Charles HI, et par celui d'An-
gleterre Georges III ; Louis XV lui en-
voyait des graines recueillies de sa main;
mais ces honneurs ne l'enorgueillirent
9 Lî!V
pas, otses mœurs furent toujours simples
et pures. Les attaques de ses antagonistes
ne pouvaient le troubler, et, suivant en
cela un conseil que Boërhaave lui avait
autrefois donné, il ne prit jamais la peine
de leur répondre , quoiqu'il en eût ce-
pendant de bien puissans : Buffon , Hal-
1er, Adanson, qui l'ont souvent traité avec
injustice. Linnée mourut en 1778, à l'âge
de 71 ans. Gustave III, pour éterniser la
mémoire de ce savant, a fait frapper une
médaille représentant d'un côté son buste,
et de l'autre la déesse Cybèle, symbole de
la nature, affligée et entourée des attri-
buts du règne minéral, de plantes et de
quadrupèdes. On lit à l'entour : Deam
luctus angit amissi : et à l'exergue : Post
obitum^ Upsaliœ^ D. 10 januarii ^ M.
DCC. LXXVIII, Rege jubente. Réfor-
mateur de la méthode de Tournefort,
Linnée en a imaginé une nouvelle pour
lu division des plantes en classes , en
genres et en espèces. Les différentes
parties qui servent à la fructification lui
ont fourni les règles qu'il a suivies.
Il a proposé vingt-quatre classes de
plantes différenciées avec tant de jus-
tesse et de discernement, qu'elles vien-
nent, pour ainsi dire , se ranger d'elles-
mêmes dans la place qui leur convient.
Les botanistes ont trouvé beaucoup d'a-
vantages dans la iiiélhode de Linnée, et
elle est aujourd'hui presque universelle-
ment reçue. Ce savant a donné au public
un très grand nombre d'ouvrages , pres-
que tous écrits en latin, qui feront vivre
son nom aussi long-temps que l'on cul-
tivera l'histoire naturelle. Il n'y a point
de physicien qui ait montré plus d'appli-
cation à suivre la nature dans Ses plus
petits détails, et qui ait fait plus d'obser-
vations longues et pénibles, pour former
des résultats aussi sûrs que curieux. Ses
principaux ouvrages en latin sont : | Sys-
tema natures^ seu régna tria naturcB^
Leyde, 1755, in-fol., et 1756, 2 volumes
in-8°. Ce fut par cette production remar-
quable qu'il débuta pour la réforme de la
botanique. Cet ouvrage a été réimprimé
avec des augmentations considérables ; la
l""' édition consistait en 5 tableaux chacun
d'une feuille , et contenant une division
synoptique des trois règnes : la 2*^, 1740,
in-8° , a 80 pages ; la G'', 1748 , in-8°, en a
252; la 10% 1757, est de 3 vol. in-8°; la
12% 1766, en a 4 ; la 14' donnée par Gme-
lin , en a 10 : on a encore celles de Leip-
sick, 1788-95, et de Lyon, 1789-96, 10 vol.
in-8°. 1 Bibliotheca botanica^ Amsterdam,
LIN
480
LIO
1756, 174i et 1751 , in-8°. Il y donne une
notice de plus de mille ouvrages sur les
plantes. | Hortus Cliffortianus ^ Amster-
dam, 1737, in-fol. avec fîg. C'est une des-
cription des plantes rares que George
Cliffort cultivait à Hortecamp en Hol-
lande. I Critica botanica^ Leyde, 1737,
in-S". Il y fait voir la nécessité de chan-
ger les noms dans les genres et les espèces
des plantes. | Flora Laponica ^ Amster-
dam, 1737, et Londres , 1792, in-8°. C'est
le fruit d'un voyage qu'il fit en Laponie
en 1752, d'où il rapporta 536 plantes ;
I Gênera plantarum^ secundùm nume-
runij figtirarrij silum et proportionem
omnium fructificationis partium^ Leyde ,
1737 , in-S" , 8*= édition, Francfort, 1789 et
1791 ( voyez TOURNEFORT ). | Flora
Suecica, Leyde, 174S. C'est le tableau
des plantes de la Suède. | Fauna Suecica.
Stockholm, 1746, in-8", avec fig. On y
trouve les quadrupèdes, oiseaux, poissons,
insectes, etc., de la Suède. [ Flora zey-
lanica^ Stockholm, 1747, in-8°. Ce sont
les plantes de l'île de Ceylan , dont Paul
Hermann avait donné la description , ar-
rangées selon le système de Linnée.
\ Ifortus upsalte?isis j Stockholm, 1748,
in-8", avec fig. C'est le catalogue des plantes
étrangères que Linnée a procurées pour
le jardin botanique d'Upsal, depuis 1742
jusqu'à 1748. | Amœnilates academ,icœ.
Stockholm, 1749-1763, 6 vol. in-8°,et 178S-
1790, 9 vol. in-8°, avec fig. , dissertations
intéressantes en forme de thèses; | Philo-
sophia botanica^ Stockholm, 1751 , in-8°.
Cet ouvrage a été réimprimé un grand
nombre de fois dans diverses villes , et
il y en a eu plusieurs contre-façons de
qui ont peu de valeur. Il a été traduit
en français par Quesné , Paris , 1788 ,
in-8°, avec fig. | Materia medica ^ Stoc-
kholm, 1765, in -8°; | Animaliam specie-
ru?n in classes ^ Leyde , 1759 , in-8° ;
I Oratio de incrementis telluris habitabilis^
Leyde, 1744, in-S". Par la raison que la
terre a été entièrement couverte d'eau
dans les jours de la création , et que cet
amas d'eau s'est retiré pour laisser la
terre à découvert, il prétend que les mers
continuent de se retirer insensiblement.
Système qui n'a point augmenté sa répu-
tation, et qui est suffisamment réfuté par
l'état de l'ancienne géographie , compa-
rée avec la moderne. Buffon lui a donné
plus d'étendue , et y a attaché des consé-
quences qui paraissent opposées à l'his-
toire de la création de Moïse , et à toutes
les notions reçues. On en trouve une ré-
futation détaillée dans V Examen impar^
liai des Epoques de la nature ^ i volume
in-8°, Luxembourg. 1780, Embrun , 1781 ,
Maëstricht, 1792. \Nemesisdivina, recueil
d'observations pour prouver que Dieu
punit les impies et les scélérats , même
en ce monde ; ouvrage qui, pour le fonds ;
des choses , ressemble en partie à celui
de Salvien, De Providentia. Son nom doit,
être inscrit dans la liste des philosophes ;
qui ont été amis de la religion. Il avait
fait mettre sur la porte do son cabinet ce
fragment d'un vers connu :
looocui vivite, Namen adcit.
On a publié, en 1789, ime Revue gêné"
raie des écrits de Linnée; ouvrage dans
lequel on trouve les anecdotes les plus in-
téressantes de sa vie privée^ un abrégé de
ses systèmes et de ses ouvrages ^ un extrait
de ses Aménités académiques ^ etc. par
Richard Pulteney ; traduit de l'anglais par
Millin de Grandmaison, avec des notes et
des additions du traducteur , 2 vol. in-S".
LINTII. Foyez ESOiER de la LINTH.
LIO\NE ( Pierre de ) , célèbre capi-
taine du 14' siècle , d'une des plus an-
ciennes maisons du Dauphiné, rendit de
grands scrvi-ces aux rois Jean , Charles V
et Charles VI, contre les Anglais et contre
les Flamands. Il se signala surtout à la
journée de Rosbecq en 1382 , et mourut
en 1599.
LIOIViNE ( Hugues de ) , de la même fa-
mille que le précédent , ministre secré-
taire d'état sous Louis XIV , naquit à Gre-
noble en 1611. Il fut d'abord premier
commis d'Abel Servien, son oncle; mais
celui-ci ayant été disgracié , il refusa les
offres de Richelieu , partit pour l'Italie ,
où il s'acquit l'amitié et la confiance du
cardinal Mazarin, et se distingua plus tard
dans ses ambassades de Rome , de Madrid
et de Francfort. Il devint ministre d'état,
et fut chargé des négociations les plus
difficiles. Lionne termma les différen»
qui existaient entre le pape et le duc de
Parme; et, en sa qualité d'ambassadeur
extraordinaire auprès du saint Siège , il
assista , en 1655 , au conclave qui élut Ale-
xandre VII , et parvint à le faire pro-
noncer en faveur de la France. Il suc-
céda , en 1661 , au cardinal Mazarin , dans
le ministère des affaires étrangères, et
après la démission de M. de Brienne, il
fut nommé secrétaire d'état. Ce fut Lionne
qui ménagea l'acquisition de la ville do
Dunkerque. Il mourut à Paris , en 1671 , à
60 ans. Ce ministre était aussi dis-iipé
LIO
481
LIP
lîans la société que laborieux dans le ca-
binet. Prodigue à l'excès , il ne regardait
les biens et les richesses que comme un
moyen de se procurer tous les plaisirs. Il
se livra sans ménagement à ceux du jeu,
de l'amour et de la table : sa santé et sa
fortune en souffrirent également. On a
ses Négociations à Francforts in-4* ; et des
Mémoires imprimés dans un recueil de
pièces, 1668, in-d2; ils ne sont pas com-
muns. Sa Fie se trouve dans les Mélan-
ges curieux qui font suite aux oeuvres de
St-Evremond,tom. i, page 161. — Arthus
de LIONNE , l'un de ses fils , fut évêque
de Rosalie, et vicaire apostolique dans la
Chine. Il mourut à Paris, le 2 août 1713,
à 58 ans , avec ime grande réputation de
verlu et de zèle. Il a eu part à divers
écrits des missionnaires sur les supersti-
tions des Chinois.
LIOKNET. Voyez LYONNET.
* LIONNOIS ( l'abbé ) , principal du col-
lège de Nancy, né dans cette ville en 1730,
est principalement connu par son Traité
de la mythologie . ou Explication de la
fable par V histoire ^ 6^ édition ^ augmen-
tée des hiéroglyphes des Egyptiens , vé-
ritable source de la fable ^ ornée de 216
gravures en taille-douce ^ Nancy, 1816.
C'est le meilleur traité de mythologie que
nous ayons et le plus complet. On doit
encore à l'abbé Lionnois une Histoire des
villes vieille et neuve de Nancy ^ 2 vol.
in-8°, et plusieurs TVa/fi?'* pour différentes
branches d'enseignement. L'abbé Lionnois
8sl mort à Nancy, le Ujuin 1806.
LIONS Voyez DESLYONS.
* LIOTARD ( Jeaw-Etiexne ), peintre
et graveur, né à Genève en 1702, réus-
sissait très bien dans la miniature, le
dessin, la perspective et la peinture en
émail : il excellait surtout dans l'art de
saisir la ressemblance. Il demeura trois
ans à Constantinople , où il avait adopté
le costume levantin , qu'il conserva tou-
jours; ce qui le fît surnommer le Peintre
turc. Il visita aussi l'Italie, l'Allemagne,
l'Angleterre, la Hollande; et ses portraits
lui acquirent une grande réputation. Il a
essayé de donner à ceux qu'il a faits en
émail des dimensions inusitées jusqu'a-
lors. On connaît de lui des émaux qui ont
jusqu'à un pied et demi de hauteur sur
un pied de large. Plusieurs artistes ont
gravé d'après lui. Il a gravé lui-même à
l'eau forte quelques - uns de ses por-
traits. Il mourut vers 177G. — Jevn- Mi-
chel LÎOT ARD , sou frère , un des meil-
leurs élèves de Benoit Audran, fut appelé
7.
en Italie pour graver les sept grands car-
tons que Cignani avait exécutes pour
le duc de Parme , ainsi (pie sept grands
tableaux tirés de l'histoire sainte , peints
à Venise par Ricci. Ces gravures ont été
publiées à Venise sous ce titre : Car. Cig-
nani monochi'omata septem, 17 A3, in-
fol. ; Opus Sebast. Ricci Bellunensis ab-
solutissimum , ab J. M. Liotard Geneve7is.
œre expressum , 1743, grand in -fol. U
mourut à Genève vers 1760.
LIPEKIUS (MAKTiiv ), luthérien alle-
mand, né à Gortze, dans le Brandebourg .
en 1650 , mort en 1692, à62 ans , épuisé da
travail , de chagrins et de maladies , était
un laborieux compilateur et un savant
bibliographe. On a de lui : | un Traité
curieux sur les étrennes^ Luipsick, 1670,
in -4°; | Bibliotheca realis theologica .
Francfort, 1685,2 volumes in-fol. Biblio-
theca realis juridica^ ibid. 1679, in-fol. ;
Bibliotheca realis philosophica ^ ibid.
1682,2 vol. in-fol.; Bibliotheca realii
medica. ibid. 1679, in-fol., en tout 6 vol.
in-fol. C'est une table universelle, mais
très inexacte, des matières pour les dif-
férentes sciences, avec le nom et les ou-
vrages des auteurs qui en ont traité. La
liste complète des OEuvres de ce savant
est dans le tom. 19 des Mémoires de Ni-
céron.
LIPMA.N , rabbin allemand , dont on a
un Traité contre la religion chrétienne,
qu'il composa en hébreu en 1599. II est
intitulé Nitsachon s c'est-à-dire Victoire.
Mais rien n'est moins victorieux pour les
Juifs que ce pitoyable ouvrage. Théo-
doric Hakspan le publia en 1644 , à Nu-
remberg, in -4°. On trouve dans Têtu
ignea Satanœ de "Wagenseil , un abrégé
de cet ouvrage, avec la réfutation.
LIPPI ( fra FiMPPO ) , peintre , né a
Florence, vers 1412, mourut âgé de 57
ans, en 1469, avec la réputation d'un
homme qui avait plus de talent que de
mœurs. Il eut beaucoup de partisans dans
sa patrie, et le jour de son enterrement
toutes les boutiques furent fermées. Il
n'avait eu d'autre maître que lui, et
d'autre guide que les ouvrages de Mas-
saccio. On voit au musée du Louvre un
tableau de ce peintre, représentant le
Saiyit-Espiit présidant à la naissance de
J.-C. Les mœurs de Lippi étaient si dé-
pravées, qu'après avoir enlevé une no-
vice d'un couvent de Prato , près de Fio-
rence, et obtenu une dispense du pape
pour l'épouser , il l'abandonna , et la jeûna
fille fut encore admise dans le couvent.
41
LIP
482
LIP
— Il 1 lissa un fils, nommé aussi Philippe
LIPPI, qui fut peintre comme lui. Il l'a-
vait eu d'une jeune pensionnaire qu'il
corrompît dans un monastère de Flo-
rence, où il avait été appelé pour son art.
Ce fils, aussi réglé dans sa conduite que
Sun père avait été débauché, mourut en
•loOo, à kU ans.
LIPPI (LoRENZo), peintre et poète de
1" lorence, où il naquit en 1606, est auteur
d'un poème burlesque, intitulé : IlMal-
mantile racquistato, imprimé à Florence
en 1676 , et 1688 , in-4°, sous le nom de
Perlons ZipolL qui est l'anagramme de
Lorenzo Lippi. On l'a réimprimé en 1731,
2 vol. in-4°, à Florence , avec des notes
<le Salvin et de Biscioni. Lippi est plus
connu par cette production de sa muse
que par celles de son pinceau, quoique
SCS tableaux relevassent au-dessus du
commim. Il mourut en 1604.
* LîPPIUS ( Nicolas ) , célèbre méca-
nicien , né à Bàle , lit en 1398 l'horloge
remarquable de l'église de St-Jean de
Lyon, et ensuite celle de Strasbourg, et
mourut bienlot après.
LIPPOMAiM ( Louis ) , évêque de Ber-
game, savant Vénitien , né en 1500, fut
chargé des affaires les plus importantes ,
et parut avec éclat au concile de Trente,
fi fut l'un des trois présidens de ce con-
<:ile sous le pape Jules III , dont il était
l'im des secrétaires. Paul IV l'envoya
îivec la qualité de nonce en Pologne , l'an
i5j6 , et le lit son secrétaire , ensuite évê-
que de Modon , puis de Véronne, et enfin
de BergaiTie. Il mourut en 1559. Ce prélat
l)Ossédail les langues, l'histoire ecclésias-
tique , sacrée et profane, et surtout la
thét)logie, et ne s'acquit pas moins d'es-
time par l'innocence de ses mœurs que
par sa doctrine. Il s'opposa fortement
itux Juifs et aux hérétiques pendant sa
nonciature en Pologne. On a de lui : | huit
volumes de couipilation de J^ies des
saintSj. 1568, in-fol. , recueillies sans cri-
tique et sans choix : \Catenam Gene-
sim, in Exodiim^ et in aliquot Psalmos ^
3 vol. in-fol. ; | Confirmatio dogmatum
calholiconim ; | i:xposilio v^dyuj-is
Syniboli apostolici et Orationis domi-
niae.
LIPPOMAM (JÉiiôjiE ), noble véni-
tien, tour à tour ambassadeur à Turin,
à Dresde, à Naples , à Conslanlinople ,
s'acquitta des corrunissions les plus im-
portantes avec beaucoup de succès.. Mais
«\'ont été accusé, devant les inquisiteurs
dcial, d'avoir vendu le secret de la patrie
auxprmces avct lesquels il avait eu à
traiter, il fut arrêté à Conslanlinople, e*
conduit à Venise. Lippomani prévint son
supplice par sa mort : un jour, ayant amusé
ses gardes, il se jeta dans la mer pour se
sauver à la nage. Les mariniers le repri-
rent; mais il mourut deux heures après,
en 1591.
UPSE ( Juste), célèbre philologue hol-
landais, né à Ober-Isque (Overyssche j,
village près de Bruxelles , le 18 octobre
1547, commença à écrire lorsque les au-
tres enfans commencent à lire. A 9 ans il
fit quelques poèmes , à 12 des Discours .
à 19 son ouvrage intitulé Varice lertiones.
Il étudia successivement à Bruxelles, à
Ath , à Cologne et enfin à Louvain. Le car-
dinal de Granvelle , surpris et charmé de
son génie, le mena à Rome, en qualité de
son secrétaire, et Lipse passa deux ans
auprès de ce prélat. Après son retour,
il s'arrêta en Allemagne , et prit du goiit
pour les opinions des protestans ; il
professa avec beaucoup d'applaudisse-
ment l'histoire à léna ( 1572-1574), et
à Leyde ( 1579-1591 ). Mais les remords
le ramenant vers la religion qu'il avait
abandoniiée , il se rétracta solennelle-
ment , et fut depuis celte époque , un
excellent catholique, tant par sa foi que
par sa conduite. En 1593 , il enseigna à
Louvain avec tant de réputation , que
l'archiduc Albert et l'infante Isabelle son
épouse allèrent entendre ses leçons avec
toute leur cour, et le firent conseiller iïé-
tat. Philippe II l'honora du titre d'histo-
riographe. Henri IV , Paul V , les Véni-
tiens , voulurent l'enlever à Louvain,-
mais ils ne purent le gagner , ni par les
présens, ni par les promesses. Scaliger ,
Casaubon et lui passaient pour les Trium-
virs de la république des lettres. On n«
se contentait pas d'admirer Lipse , tous
li;s jeunes gens cherchaient à l'imiter. L«
goût du public a été de tout temps uno
vraie machine, qui s'est élevée et qui
s'est abaissée au gré des auteurs célèbres.
Juste Lipse eut assez de réputation dans
son temps pour être pris universellement
pour modèle. Sa latinité est effectivement
belle , riche et en général pure ; mais
qu Iquefois un peu obscure et gênée ;
ce qui parait être l'effet d'une trop grande
attention à vouloir imiter Tacite. Il savait
par cœur cet historien, et il s'obligea u:i
jour à réciter mot par mot tous les en-
droits de ses ouvrages qu'on lui marque-
rait. 11 mourut à Louvain, le 24 mars
iOUi), à 58 ans, entre les bras du père Léi^
i
nard ticssuis. Comme dans ses douleurs
on lui parlait de îa force sloïque dont il
avait paru faire l'éloge dans un de ses Trai-
tés, il répondit : f^anasunt ista ; et mon-
trant l'image du Sauveur crucifié : llœcest
ve'^a patientia. Les ouvrages de Lipse ont
été recueillis en 6 vol. ia-fol. , à Anvers ,
4GÔ7 ; et cette collection n'est guère feuil-
letée que par des savans. Elle a été im-
primée aussi à Wesel , 1675 , k vol. in-8".
Les principaux écrits qu'elle renferme
sont : I un Commentaire sur Tacite, es-
timé. Muret prétend que ce qu'il y a de
mieux dans cet ouvrage a été tiré de ses
écrits ; mais cette prétention ne se sou-
tient pas à l'examen. Les savans de ce
tinnps-là s'accusaient mutuellement de
plagiat, et s'inquiétaient par toutes sortes
de querelles , peu convenables et peu ho-
norables au paisible règne des lettres.
I Ses Saturnales ; \ Traité De militia ro-
mana; \ Electcs, ouvrage d'une critique
raisoimable; | Traité delà constance ; son
meilleur ouvrage, suivant quelques criti-
ques, qu'il seml)le avoir fait pour s'affer-
mir et affermir les autres dans la vertu,
dont ilavail manqué lorsqu'il s'était laissé
séduire par les protestans ; | Diverses le-
çons, ouvrage do sa tendre jeunesse, écrit
d'une manière plus naturelle et plus agréa-
ble que les productions de ses derniers
jours ; I Monita et exempta politica ; re-
cueil utile aux maîtres et administrateurs
des états, et propre à les garantir de bien
des erreurs funestes à eux et aux peuples;
I Politico7-um sive civilis doctrinœ libi'i
sex. qui ad principatum maxime spec-
tant. On y lit , entre autres avis impor-
lans, celte réponse d'une sage politique :
De religione curam principi esse ^ unarn
illi retinendam ; puniendos . nisi aliter
expédiât, qui disse ntiunt; falsam pacem
esse toleratttismuni ; hune esse divini
numinis irrisionetn, publicte felicitatis et
legum destruciorem. \ De una religione ;
c'est là qu'il exprime particulièrement
son attachement à la seule religion caiho-
Uque,donl il établit l'exclusive vérité;
J De diva Virgine Hallensi ; De diva Fir-
gine Sichemiensi , sive de Aspricolle. Ce
sont des histoires de l'image de Notre-
Dame à Halle et à Montaigu ; elles sont
bien écrites, et avec discernement, quoi
qu'en paissent dire les esprits forts. Juste
Lipse n'était ni crédule ni enthousiaste.
Dans un petit livre écrit postérieurement
avec autant de candeur que de bon sens ,
touchant l'image de Notre-Dame de Mon-
taigu , on trouve 137 guérisons surnalu-
3 Lïil
relies , attestées par la justice munici^^'ale
de différens endroits , examinées par la
sage et judicieux Miraeus, évéïjue d'An-
vers, approuvées par le grave el prudent
Hovius, archevêque de Malines. U en est
plusieurs dont on ne saurait lire les dé.
tails sans une pleine conviction. Mais si
de ces 157 faits miraculeux il n'en est
qu'un seul vrai, l'incrédulité est tout
aussi bien confondue que s'ils étaient vrais
tous. I De cruce libri très, Leyde , tfiOa,
in-12, plein d'érudition et de bonne cri-
tique ; I De crucis supplie io apud Roma-
nos usitato. dans les Antiquités romaines
de Kippingius ; | De amphitheatris.dan»
les Antiquités romaines de Grévius, et
beaucoup d'autres ouvrages , recherché.i
et consultés par les savans. Les huit f/a-
rangues qui ont paru à lénasous son nom
sont une production du mensonge et do
la calomnie , comme il l'a prouvé hii-
méme péremptoirement. Aubert Le Mire
a écrit sa Fie en latin , Anvers , 1609. On
a encore : Defensio Lipsii posthuma,
écrite avec autant de vérité que d'élé-
gance par le père Charles Scribani.
Jusle-Lipse a défendu, par son testament,
que, hors une partie de sa Correspondance.
ou n'imprimât aucun do ses manuscrits
Voy. Nicéron, tom. 2i de ses Mémoires.,
qui lui attribue ol ouvrages, el le Diction-
naire des Anonymes où l'on trouve l'in-
dication de plusieurs ouvrages de Juste
Lipse traduits en français. Son Traité De
re numeraria se garde en manuscrit dans
la bibliothèque de Besançon.
LIRE Voyez NICOLAS de LYRE
LIR01\ ( dom Jean ), bénédictin de la
congrégation de St.-Maur, naquit à Char-
tres en 1665 , et mourut au Mans en 1748,
Nous avons de lui deux ouvrages : [ la
Bibliothèque des auteurs chartrains. Pa-
ris, 1719, in-i". Une foule d'évéques ,
de chanoines, de curés, de petits écri-
vains , connus seulement par «ne
chanson non imprimée, y font une figure
inutile : les éloges y sont prodigués à des
écrivains qui en méritent bien peu. | Lis
Singularités historiques et littéraires.
Paris, 1734-1740, 4 vol. in-12. Ce sont des
faits échappés aux plus laborieux compi-
lateurs, des noms tirés de l'oubli, des
points de critiques éclarcis . des bévue,'^
d'écrivains célèbres relevées , des opi-
nions combattues , d'autres établies. Li-
ronaida le Nourry à terminer son Appa-
ratus ad Bibliothec. SS. Palrmn ; et
mit en ordre les archives de la célèbrei
iibbaye de Marmoulicrs. On le regarde
LÎS
484
LIS
ronriiiie un dos principaux coUaboraleui s
♦ie Y Histoire littéraire de la France^ Paris,
i7ô8.
LISIAS. Voyezl.YS\\S.
MSIE€X. royez ZACIIARIE de Li-
sicux.
LïSLE ( Claude de), naquît à Vaucou-
leurs en Lorraine, en 1614. 11 était fils
il'un médecin , et se fil recevoir avocat ;
mais l'étude de la jurisprudence n'étant
l)as de son goût, il se livra tout entier à
l'histoire et à la géographie. Pour se per-
fectionner , il vint à Paris , et s'y fil bien-
tôt connaître. Il y donna des leçons par-
ticulières d'histoire et de géographie , et
compta parmi ses disciples les principaux
seigneurs de la cour, et le duc d'Orléans,
depuis régenl du royaume. DeLisle mou-
rut à Paris , le 2 mai 1720 , à 7G ans, lais-
sant quatre fils et une lille. On a de lui -,
I une Relation historique du royaume de
Sianiji&Sk, in-12, assez exacte ;| \\n
Abrégé de l'histoire universelle^ de-
puis la cré.ition du monde jusqu'en
1714, Paris, 1731, 7 vol. in-12. Cetouvrage,
ennuyeux et superficiel , est le fruit des
leçons que de Lisle avait faites sur l'his-
toire. Il y a cependant quelques singula-
rités qui le firent rechercher dans le
temps. I Une Introduction à la géogra-
phie^ avec un Traité de la sphère, 2 vol.
in-12 , Paris , 1746 : livre publié sous le
nom de son fils aîné , le géographe.
LîSLE ( Guillaume de ) , fils du précé-
dent, naquit à Paris en 1675. Dès l'âge de
huit ou neuf ans il commença à dessiner
des cartes, et ses progrès dans la géogra-
])hie furent tous les jours plus rapides. A
la fin de 1699 , il donna ses premiers ou-
vrages, une Mappemonde^ quatre Cartes
des quatre parties de la terre , et deux
Globes^ l'un céleste, l'aulre terrestre, qui
curent une approbation générale. Ces
ouvrage furent suivis de plusieurs autres,
qui lui méritèrent une place à l'académie
des sciences en 1702, le litre de i)remier
géographe du roi, el une pension en 1718.
Choisi pour montrer la géographie à Louis
XV, il entreprit plusieurs ouvrages pour
l'usage de ce jeune monarque ; il dressa
une Carte générale du monde , et une de
la fameuse Retraite des dix mille. L'illus-
tre élève profita de ses leçons, el composa
avec succès un Traité du cours de tous
les fleuves. La réputation de de Lisle était
si répandue et si bien établie, qu'il ne pa-
raissait presque plus d'histoire et de
voyage qu'on ne voulût l'orner de ses
caries. Il travaillait à ctllc de Malle pour
l'histoire de l'abbé de Vertot , lorsqu'il
fut emporté par une apoplexie, en 1726,
à 51 ans. Ses cartes sont en très grand
nombre et très estimées ;on peut en voir
la liste dans le Mercure de mars 1726. li
devait donner une Introduction à la géo-
graphie , dans laquelle il aurait rendu
compte des raisons qu'il avait eues de
faire des changemens aux cartes ancien-
nes (î); mais sa mort prématurée priva le
public de cette utile production.
LISLE ( JosEPH-NrcoLAS de ) , frère du
précédent , naquit à Paris en 1688. Après
avoir fait de bonnes études au collège
iMazarin , il se consacra tout entier aux
mathématiques. L'astronomie avait sur-
tout des attraits puissans pour lui. L'é-
clipse tolale du soleil arrivée le 12 mars
1706 fui comme le signal que la nalure
sembla donner à son génie. La place d'é-
lève que l'académie des sciences lui
donna en 1714 fut un nouveau lien pour
le jeune astronome. Les mémoires de
cette compagnie furent bientôt ornés de
ses réflexions et de ses dissertations. Il
proposa, en 1720, de déterminer la figure
de la terre en France ; et ses vues à ce
sujet furent mises en exécution avec des
résultais diffcrens , et dont on n'a p\i
donner encore une théorie bien sûre.
( Voyez CONDA>IINE. ) Il fil , en 1724 ,
le voyage d'Angleterre, el y fut très bien
accueilli par Newton et Halley. La société
royale et successivement d'autres compa-
gnies savantes de l'Europe s'empresscrenl
de s'associer M. de Lisle. Appelé en Rus-
sie en 1726, il y obtint une pension con-
sidérable el un observatoire vaste et com-
n)ode , et ne revint dans sa patrie qu'en
1747 : il y termina sa longue carrière en
1768. Une piété vraie, des mœurs douces ,
une société tranquille, le désintéressement
le plus grand , telles étaient les qualilcs
(i) « La Mi-diterraoc'e , dit Fontenelle , dans tes
éloge» , U Méditerranée , mer connue de toul temps
par Us nations savantes, toujourt couverte de leurs
vaissiaiix, traversée dans tous les sens possibles par
une inimité de navigateurs, n'avait ( dans les cartel
de (juiliaunie de Lisie ) que 860 lieues d'occidcat
• Q orient , au lieu de 1 160 qu'on lui donnait : errecr
presqut. incroyable. L'Asie était pareillement rac-
courcie de 5oo lieues ; ta position de la terre d'Ytito,
changée de 1700. Une infinité d'autres correctiuiis
moins frappantes el moins sensibles, ne surpre-
naient que les yeux des savans : encore M. de Lisle
avail-it jugé à propos de respecter jusqu'à un certain
point les préjugés établis , et de n'user point à t<iute
rigueur du droit que lui donnaient set décoarertei •
tant le faut s'attire d'égards par une certaine p<k>-
scsîior où il se trouve toujours! •
LIS
485
LIS
de r.cl aslronome. La dioiUire de son àmc
éclata datis toute sa conduite ; et s'il ne
fut pas toujours cominunicatif, il ne con-
nut pas non plus ces aigreurs, ces jalou-
sies qui divisent quelquefois les savans.
Il a laissé un grand nombre de porte-
feuilles, renfermant plusieurs collections
qui peuvent être ulilt-s aux astronomes,
aux {jcographes, aux navigateurs Nous
avons encore de lui : | d'excellens Mé-
moires pour servir à l'histoire de l'as-
ironomie^ 1758 , en 2 vol. in-4° ; | divers
Mémoires insérés dans ceux del'acadé-
niiedes sciences et dans quelques jour-
naux ; I Nouvelles Cartes des découvei'tes
de l'amiral de Fonte. 1753 , in-i.".
LISLE Y)2 LA DREVETIÈRE ( Louis -
Fr.wçois do), né à Zuzela-Rousse en
Dauphlné, mort au mois de novembre
1756, est auteur de plusieurs comédies.
On a encore de lui : 1 Essai sur l'amour
propre, i)oème , 1758 , in-S" ; | la Décou-
\'erte des longitudes , in-12, 1740 ; | Da-
naiis, tragédie, 1732.
LISLE DE SALES f Jean-Baptiste-
C.LAUDE ISOARD de ). Ployez DELISLE,
LÏSOLA ( François-Paul, baron de),
né à Salins en 1G15 , fit ses éludes à Dole ,
en Franriie-Comté , et commença par
exercer la profession d'avocat à Besançon.
Il était parvenu en 1638 à se faire élire
membre du conseil annuel ; cette nomi-
nation fut cassée, parce qu'elle n'avait pas
été faite librement. Lisola, craignant d'ê-
tre poursuivi, s'enfuit en Allemagne , où
il se fit remarquer par ses talens. Il n'a-
vait pas plus de trente ans lorsque l'em-
pereur Ferdinand III le nomma son mi-
nistre à la cour d'Angleterre, puis à celle
de Pologne , de Madrid, où il conclut le
mariage de Léopold I"" avec une infante
d'Espagne. Il signa , en 1668 , le traité de
Portugal, et eut part, dans la même année,
à la paix d' Aix-la-Cliapelle. Il fut employé
dans tous les traités les plus célèbres , et
mourut en 1677 , un peu avant les confé-
rences de Nimègue. On a de lui : | un ou-
vrage intitulé : Bouclier d'état et de jus-
tice, dans lequel il réfute les droits que la
France s'attribuait sur divers états de la
monarcbie d'Espagne. Cet ouvrage plut
beaucoup à la maison d'Autriche , et fut
naturellement très désagréable à la
France. Verjus, l'un des plénipotentiaires
au traité de Ryswich , en 1697, écrivit
contre cet auteur avec jilus de vivacité
que de raison. Lisola lui réponditpar une
brochure qu'il intitula : La sauce au
verjus, (sous le noiii de Warendorp ), Co-
logne, 1674, in-!2, faisant allusion au nom
de son adversaire. Louis XIV semble
avoir décidé ce procès en faveur de Li-
sola , lorsqu'il se repentit de ses guerres
légèrement entreprises , et qu'il exhorta
son successeur à ne pas l'imiter en ce
point. I Bouclier d'Etat et de justice
contre le desseinmanifestement découvert
delà monarchie universelle, 1667, in-12 ;
I Lettres ci Mémoires, in-12. Voyez pour
plus amples détails la Bibliothèque histo-
rique d", France, du père Lelosig.
* LISSOJ II ( Remacle) , abbé de la Val-
dieu, ordre de Prémontré, né à Bouil-i
Ion, le 12 février 1730, entra dans ce mo-
nastère et y fit profession, en 1749. Il de-
vint successivement maître des novices ,
professeur de théologie, prieur, et enfin
abbé en 1766. Il augmenta la bibliothèque
de son monastère, refondit les livres li-
turgiques des Prémontrés , et fut très
utile à son ordre , dont les chapitres na-
tionaux l'avaient nommé visiteur. Lors
de la révolution, il perdit son abbaye et
fut nommé en 1791 curé constitutionnel
de Charleville. Enfermé pendant la ter-
reur, quand il recouvra sa liberté, il vint
dans la capitale, s'attacha au Journal de.
Paris, et assista au concile des constitu-
tionnels, en 1797. Après le concordat , il
obtint une place d'aumônier des invalides,
et mourut le 13 mai 1806 , âgé de 76 ans.
II avait publié un ouvrage intitulé : De
Vétat de l'Eglise, et de la puissance légi-
time du pontife romain. Wurtzbourg
( Bouillon ) , 1766 , 2 vol. in-12. C'est un
abrégé du Febronius de Hontheim , où
Lissoir conteste au pape le pouvoir sur
toutes les églises , sur la convocation des
conciles, etc. Il s'exprime ainsi dans
son avertissement : Je le dis sérieuse-
ment, si j'étais théologien ultramontain,
je ti'oserais seulement pas sourciller en
présentée de l'auteur d'Emile. Lissoir
avait de l'instruction , était exact à rem-
plir ses devoirs , et eût mieux mérité de
la religion s'il avait été un peu plus juste
envers la cour de Rome. — Il ne faut point
le confondre avec un autre LISSOIR, son
neveu , curé dans le diocèse de Sens. Jl
fut élu évêquc de Samana (Saint-Domin-
gue ) au concile de 1797 ; mais il n'a point
été sacré.
LISTER (Martix), médecin et nalu-
raliste anglais , né à Radelissc , dans le
Buckingham, vers 1638, fut nommé par
Charles II membre du collège de St.-Jean
de Cambridge (1660), voyagea en France ,
puis re\inl en Angleterre (1670). et se fi:.a
41.
LIT 48
ilan> !o comlc d'Yorck où il s'appliqua aux
.''Cienccs nalurelles et à la pratique de la
médecine. Lister suivit, en 1698, le comte
dePorlland envoyé comme ambassadeur
en France, sous le rè{;i)c de Guillauuie d'O-
range. 11 fut médecin ordinaire d'Aune,
reine d'An jlclerre, sous le règne de la-
ijuelle il mourut au couunencemeut du
!i8'=siccle, pratiqua la médecine avec
lieaucoup de- succès, cl en exposa la
ilicoriedans plusieurs ouvrayes. Il écri-
xit aussi beaucoup sur rhislohenaluielle.
Ses livres fes plus connus sont : | IJistoriœ
sive Synopsis conchtjliorum lihri IF cum
appendice^ Londres , 1683 à 1695, 5 tom.
en 2 vol. in-fol. Ce ne sont que des fi{ju-
res, au bas desquelles se trouve le nom
de la coquille qui y est représentée. Il y
a 1057 planches. On en a donné une nou-
velle édition à Oxford, 1770, in-fol., avec
des Tables de Guillaume Huddesford.
I ExcrcUatio analomica de buccinis fla-
vialilibus et marinis cum exercitatione
de variolis, 1693 , in-8" ; | Voyage de Pa-
ris, en anglais, Londres, 1699, in-8" : il
• st curieux ; ( Tractatus de araneiz cl de
cochleis AnrjUœ ; accedit Tractatus de
(apidibus ejusdcm insuice adcochleamm
quamdam imaginern fujuratis , 1678 , in-
4' ; I De morbis chronicis disscrtatio ;
I Exercitatio analomica de cochleis,
maxime terre si ribas , et limacibus, 1078 ,
iii-4" ; I une Edition du traité d'Apicius
De opsoniis el condimentis , 1709 , in-8" ,
avec des remarques ; 1 Exercitatione s et
descriptiones thermarum. ac fontium
Angliœ, in-12.
LLSZI\SRI (Casimir), gcnlilliomme
polonais, fut accusé d'alhéisme à la diète
«le Grodno, en 1688 , par l'évéque de Pos-
iiauie. On trouva chez lui des écrits où il
avançait , entre autres propositions , cette
assertion abominable , ou plutôt ce délire
«l'impiété , que Dieu n'était pas le créa-
teur de l'homme , mais que V homme était
le créateur d'un Dieu qu'il a<,mil tiré du
néaixt. Commentaire di[fue de l'absurdité
]>élronicnne : Primus in orbe deos fccit
iimor. Liszinski fut arrêté : il tâcha de
s'excuser, en disant qu'il n'avait écrit ces
extravagances que pour les réfuter ; mais
on ne l'écouta point. Il fut condamné à
jiérir dans un bûcher, cl la sentence fut
exécutée le 50 mars 1689.
LITLE ou LE PETIT ( Guillaume) , sur-
nommé de ^'EUBRIDGK ( Neubrigensis),
du nom du collège où il demeurait , né en
1156, à Bridlinlon, dans la province
d'Yorck, était chanoine régulier de Saint-
6 LIT
Au[;usiin en Air;k>lerre, el mourut verîi
1208 ou 1220. Il laissa une Histoire d'An
gleterre,enb livres, dont la meilleure
édition est celle d'Oxford par Ilearne,
1719, en 5 vol. in-8", avec des .Xotes de
plusieurs savans, et trois /lomélies aiUi-
biiées au même Lille. Elle commence en
1066 , et finit en 1197. Les historiens trou-
veront dans cet ouvrage des matériaux
utiles, en les débarrassant de quelciues
faits faux ou exagérés.
LÎTOLPHI-51AUOM ( IIiîtvri ) , évêque
de Bazas, était de la famille des marquis
de Suzarre Lilolphi-Maroni , originaire de
Manloue. Il naquit à Gauville , à une lieue
d'Evreux , devint aumônier du roi , et fut
nommé par Louis XIII à révéché de
Bazas. Lilolphi fut très attaché aux soli-
taiies de Port-Royal , et prit Singlin pour
son directeur. Il se distingua dans l'as-
semblée du clergé de France qui con-
damna les maximes des casuistes relâ-
chés, et mourut en 1643 à Toulouse, où
il était allé pour se rendre à l'assemblée
du clergé, qui allait se tenir. Godeau ,
évêque de Vence, fit son Oraison funcbi'c.
On a de lut une Ordonnance pour pi ou-
ver l'utilité des séminaires ; il la composa
lors de l'érection du sien : elle fut impri-
mée ln-4°, 1646, chez Vitré, et réimpri-
mée avec la traduction des livres du Sa-
cerdoce de saint Jean-Chrysostôme.
• LITTA ( Lauhext de ) , cardinal , na-
quit à Milan le 15 février 1756. Il étudia
à Rome , au collège Clémentin ,. fut suc-
cessivemenl protonotaire apostolique,
membre de la consulte , archevêque de
Thèbes et nonce en Pologne. Ariivé le
24 mais 1794 à Varsovie, il fut témoin de
la révolution opérée par Kosciuszko. Il se
conduisit avec autant de prudence que de
courage dans des circonstances aussi dif-
ficiles, et s'attira le respect et l'estime des
Polonais, par la juste mesure qu'il sut
observer. Il obtint la grâce de l'évéque
de Chelm , qui avait été condamné à mort.
Pie VI satisfait de sa conduite, l'envoya,
en avril 1797 , à Moscou , pour assister, eis
qualité d'ambassadeur du saint Siège , au
couronnement de Paul l". De là, et en
cette même qualité, il alla à Pèlersbourg,
où il obtint de l'empereur la conservation
de six diocèses du rit latin, et de trois
diocèses du rit grec -uni. De retour en
Italie, il se trouva au conclave tenu à
Venise pour l'élection de Pie VII, qui le
nomma trésorier de la chambre en 1800,
et, l'année suivante, îui accorda le cha-
peau de cardinal ^25 février 1801, et la
LIT
487
LIT
place de ptcfel de Yinder. Lors de l'in-
vasion des Français, il quitta Rotno avec
les autres cardinaux, et fut conduit sous
escorte à Milan. Mandé à Paris, en 1809,
il en fut exilé en 1810 , avec dou7,e autres
cardinaux , à cause de leur refus d'assis-
ter au mariage de Napoléon avec l'archi-
duchesse Marie- Louise. On leur relira
leurs pensions , et ils reçurent la défense
de porter les marques de leurs dignités.
Le cardinal Lilla fut relégué à Saint-
Quentin jusqu'en 1813, qu'on l'appela à
Fontainebleau auprès du pape , et, l'an-
née suivante, on lexila à Nîmes. A la
chute de Napoléon , il retourna à Rome ,
où Pie VU le nomma préfet de la Propa-
(jande , et le fit entrer dans l'ordre des
cardinaux-évcques, sous le titre de Sain-
te-Sabine. Quand Murât, alors roi de Na-
I)lcs, envahit Rome, en 1815, Litta suivit
le pape à Gènes, d'où il adressa, le 26
avril 1816 , un rescrit au vicaire apostoli-
que de Londres, au sujet du veto royal
relatif à la nomination des évêques. On a
publié une Lettre du même cardinal, du
16 mai suivant, sur le serment et les
jirières demandés aux ecclésiastiques fran-
çais par Bonaparte , lors de son retour de
l'île d'Elbe à Paris. La seconde abdication
de celui-ci ramena le pape et les cardi-
naux dans la capitale de l'Eglise, d'où
Litta alla à Milan complimenter l'empe-
reur d'Autriche. A son retour à Rome,
le pape lui accorda, en 1818, la dignité de
grand-vicaire. Comme il faisait, en avril
1820 , la visite de son diocèse , il fut sur-
j»ris par luïe forte pluie qui lui occasiona
la fièvre. Il était achevai, dans un en-
droit monlagnoux, et éloigné de tout vil-
lage. Transporté dans une pauvre ca-
bane , ce vertueux prélat y mourut deux
jours après, le 1"" mai 1820, âgé de 66
ans. Son corps fut transporté à Rome , et
inhumé avec de magnifiques obsèques. Il
parut presque aussitôt une Notice sur sa
A ie. On attribue au cardinal Litta un ou-
vrage fort bien écrit en français , qui a eu
trois éditions , et qui a pour titre : Lettres
( au nombre de vingt-neuf) sur les quatre
tn-ticles dits du clergé de France ; troi-
sième édition , revue . corrigée et augmen-
tée par l'auteur , Bruxelles ( ou plutôt
Lyon), 1818, ia -8°, de 142 pag. Le car-
dinal Litta s'y prononce pour la suprême
autorité du pape dans presque toutes les
matières ecclésiastiques; mais il ne pense
pas que le pape seul tienne immédiate-
ment son anlorilé de Dieu; que les évê-
ques soient les simples vicair'cs du pape ;
qu'il n'y ait que lui qui ait le droit de di'
cider les questions de foi. ni qu'il puisse
faire des lois ecclésiastiques. Voyez le
tom. 24, p. 113 de l'Ami de la religion,
qui lui a consacré ime intéressante no-
tice.
LITTLETON (Ai>\m), savant Imma-
nisle, né en 1G27, à Halles-Ovcn dan»; le
Shropshire , fit ses études dans l'école
de Westminster, et en devint le second
maître on 1658. Ses vastes connaissances
le firent surnommer le grand dictateur
de la liltéraiure. Il enseigna ensuite à
Chelsea, dans le Middlesex, et fut fait
curé de cette église en 1GG4. Eniin il de-
vint chapelain ordinaire du roi, chanoine,
puis sous-doyen de Westminster, et mou-
rut à Chelsea en 1694. Son principal ou-
vrage est un Dictionnaire latin-anglais ,
1685, in-4°, qui est d'un grand usage en
Angleterre. Il en avait commencé un
pour la langue grecque , qu'il n'eut pas le
temps d'achever. Le littérature orientale
et rabbinique , les historiens , les orateurs,
les poètes anciens, lui étaient très fami-
liers. La préface latine des ouvrages de
Cicéron, publiés à Londres en 1G81, en 2
vol. in-fol., est de lui. 11 est encore au-
teur d'une dissertation latine De jura-
iwmto mcdicorutn, in -4°, 1693; d'une
Traduction anglaise du Janus Anglorum
de Scldcn ; de Sermons en sa langue , in-
fol., etc., etc.
LITTLETON ou LYTTLETON ( Geor-
ges ), né en 1709 , fit ses études à Oxford ,
voyagea en France, en Italie, et à son re-
tour fut député au parlement , et se distin-
gua dans le parti de l'opposition, du temj)s
que Robert Walpole était principal mi-
nistre d'Angleterre. Le prince de Galles,
ayant quitté la cour, choisit Litlletoa
pour son secrétaire. Il devint ensuite tré-
sorier de l'épargne, conseiller privé, et
mourut le 22 août 1773. On a de lui : I La
Religion chrétienne démontrée par la
conversion et l'apostolat de saint Paul j
1747 : ouvrage traduit en français par
l'abbé Guénée, Paris, 1754, in -12. On
voit par cet ouvrage que Littleton, en-
traîné dans le déisme, a été ramené ou
christianisme par les réflexions qu'il a
faites sur la conversion de saint Paul ,
telle qu'il la rapporte lui-même dans Us
Actes des Apôtres et dans les Epîtres. Il y
a des vues profondes et parfaitement con-
vaincantes : il est à regretter que l'auteur
ait fait contraster avec les meilleurs rai«
sonnemens les ]»réjugés de sa secte, jus-
qu'à a--slnuler Ijs niirades de l'Eglise eu-
LIV
488
LIV
Iholiqnc aux scènes honteuses de Saiut-
Médard ; | Dialogue sur la mort , in-8";
1 Histoire de Henri II . 176/», 3 vol.
LITTLETO.X' (,Tiio>ias), jurlsconsulle
anglais, naquit à Frank-Ley, dans le
Wurcesler, vers l'i20 , fut créé chevalier
de Balh, et l'un des ju{jes des communs
plaidoyers sous le règne d'Edouard IV.
Il mourut en 1482. On a de lui un livre
célèbre : Tenures de Liltleton^ IGO/i , in-
8", qui selon Cambden , son commenta-
teur , est à l'égard du droit coutumier
anglais . ce qu'est Justinien par rapport
au droit civil. Cet ouvrage a beaucoup
servi à M. Da\id Ilouard, auteur des
Anciennes lois des Français conservées
dans les coutumes anglaises, Rouen, 1766,
2 vol. in-i", suivis, en 1776, de k autres
vol. in-i".
LITTRE (Alexis ), né à Cordes en Al-
bigeois, l'an 1658, se lit une réputation
à Paris par ses connaissances anatomi-
ques. L'académie des sciences se l'associa
en 1690, et il fut choisi quelque temps
après pour être médecin du Chàtelet. Il
mourut d'apoplexie en 1725. La facilité
de parler lui manquait absolument ; mais
il avait en revanche beaucoup de préci-
.sion, de justesse et de savoir. On re-
marquait ces différentes qualités dans les
ouvrages qu'il lisait à l'académie , et dont
elle a orné ses Mémoires. Ses princi-
paux ouvrages sont: Observations sur une
nouvelle espèce de hernie, 1700. Descrip-
tion de l'urètre de l'homme ^ ibid. Obser-
vation sur lin fœtus humain, etc.
*LIVEIlPOOL ( Chaules JENKINSON,
baron de HAWKESBURY, premier comte
de), né dans le comté d'Oxford , le 10 mai
1727, était fils du colonel Charles Jenkin-
son. Il étudia à Burford, puis à Oxford, et
se fit bientôt connaître par des vers qu'il
composa sur la mort du prince de Galles ,
par plusieurs articles insérés dans le
journal Monthlxj Revietv ^ et par plu-
sieurs brochui'es politiques ; une entre
autres intitulée : Dissertation sur l'éta-
blissement d'une force natioiiale et con-
stitutionnelle ^ indépendante d'une armée
permanente. Son Discours sur la con-
duite du gouvernement de la Grande-
Bretagne à l'égard des puissances neu-
tres, pendant la guerre présente ( 17u8 ),
fixa sur lui l'attention publique; il iil
alors quehîues couplets en l'honneur de
sir Edw. Turnei'; celui-ci le présenla à
lord Bule qui en fil daboi d son secrétaire
particulier , et le nomma ensuite sons-
bccrclairc d'étal, lorsque lui-même fui
arrivé au nfiinislère en 1761. Elu l'année
suivante membre du parlement, par le
bourg de Cockermouth , Charles Jenkin-
son devint trésorier de l'artillerie, puis
secrétaire -adjoint de la trésorerie. En
1763 , il perdit toutes ses places par suite
de l'élévation du marquis de Rockin-
giiam à ce ministère. Cependant il ne
tarda pas à obtenir un honorable emploi:
la reine-mère le nomma, la irième année,
auditeur de's comptes. Après la retraite de
son protecteur, lord Bule, il fut le cheÉ
du parti que l'on appelait les amis du roi.
Jenkinson devint en 1766 secrétaire de la
trésorerie , en 1767 lord de l'amirauté ;
en 1772 vice-trésorier d'Irlande et mem-
bre du conseil privé ; en 1775 secrétaire
des rôles en Irlande; en 1776 grand-maître
de la moimaie , et en 1778 secrétaire d'é-
tal de la guerre. Après avoir soutenu un«
lulfe\ive et prolongée contre l'opposition,
il succomba en 1782 avec tout le minis-
tère. Tiit le rappela en 1786 et le lit nom-
mer chancelier du duché de Lancaslre ,
puis baron de Hawkesbury, et plus lard
( 1796 ) pair , comte de Liverpool , prési-
dent du conseil de commerce et receveur
des douanes. En 1801 , ses infirmités le
forcèrent de renoncer aux affaires publi-
ques. Il est mort à Londres le 17 décem-
bre 1808 , laissant toutes ses dignités à son
: fils. L'Angleterre lui doit son traité de
commerce avec l'Amérique, et la créa-
lion de la pêche de la baleine dans la
mer du Sud. On a de lui , outre les bro-
chures dont nous avons parlé , une Col-
lection des traités de 1G48 à 1785, trois
vol. in-8", 1783, et un Traité sur les mon-
naies dans une lettre au roi, 1803, in-4".
' LIVERPOOL ( Robert-Baxks JEN-
KINSON, deuxièmecomlede), ministre cé-
lèbre d'Angleterre, né le 7 juin 1770, était
fils du premier comte de Liverpool qui fait
le sujet de l'article précédcnl : il fil de bril-
lantes éludes, et acquit des connaissance»
très étendues dans les langues anciennes,
le commerce, les manufactures et le.«
finances. II vint ensuite en France sui
vanl l'usage des Anglais de dislinctici
qui terminent communément leur édu
cation par un voyage sur le conlinenl, el
il se trouvait à Paris à l'époque de la dcs-
truclion de la Bastille. De nouveaux per-
sonnages ayant paru sur la scène politi
que , le jeune Jenkinson les fit connaître
à son gouvernement , el donna une sorte
de statistique morale de la France , dans
laquelle il peignit tous les hommes qui
exerçaient alors quoique influence. Ce
LIV
489
LIV
premier essai donna une haulc idée de
son esprit d'observation et do discerne-
ment à toutes les personnes qui virent
son travail , et notamment au premier
ministre. Il fut élu en 1790 à sou retour
en Angleterre membre du pai Icment ,
par le bourg de Rye ; mais n'ayant pas
l'âge requis parla loi électorale, il revint
Gur le continent et ne prit place à la cham-
bre des communes qu'en 1791. En 1792
il défendit le ministère attaqué par M.
H'ithbread, qui lui reprochait d'avoir dé-
claré la guerre à la Russie. Il traça un
tableau très frappant de la situation de
l'Europe relativement à l'Angleterre, et
n'hésita pa.s à dire : « La force et lapuis-
» sance du royaume de France sont à
» leur déclin : cette nation si long-temps
» notre rivale n'est plus à craindre ; il
» est une autre puissance dont il faut sur-
» veiller la politique inquiète et l'ambi-
» tion menaçante; c'est la RUSSIE, » Son
discours fut remarquable par la force
de ses raisonnemens , et par la facilité
de son élocution, qui firent présager
qu'il serait un jour \m des orateurs les
plus distingués de la Grande-Rretagne.
Nommé le 22 juin 1793 l'un des commis-
saires pour les affaires de l'Inde, il reçut
l'année suivante, le commandement de
la cavalerie des Cinq-Ports. Plus tard il
devint intendant de la monnaie, membre
du conseil privé, président du conseil de
commerce et des colonies. Réélu en 1796
par le même bourg de Rye, Jenkinson
fut un des éloquens et des plus habiles
défenseurs du ministère de Pilt, et s'op-
posa de toutes ses forces à la reforme par-
lementaire, sollicitée déjà à celte époque
par l'opposition libérale. Le ministère
anglais ayant été changé en 1801 , Jen-
kinson, devenu lord Hawkesbury, fut
norïimé secrétaire d'état pour les affaires
étrangères. La part active qu'il prit aux
troubles de l'Irlande serait à peine re-
marquée , si ce ministre n'eût pas con-
tribué, comme il le fit, à l'acte de réu-
nion des deux royaumes. Il signa en 1801
la paix d'Amiens. Jusqu'à cette époque,
il avait souvent manifesté à la tribune,
dans les termes les plus virulens, la haine
qu'il portait à la France et à la révolu-
tion de ce pays. Son langage devint plus
modéré ; mais ce changement n'eut d'au-
tre durée que celle de la paix : le traité
d'Amiens fut bientôt rompu et les hosti-
lités recommencèrent. Lord Hawkesbury
se prononça contre Bonaparte : de con-
cert avec Pitt il ne cessa d'ajTiir contre
l'ambition démesurée de ce conquérant.
Apres la mort de Pitt, arrivée en 1806,
lord Hawkesbury refusa de lui succéder,
et fut nommé gouverneur des Cinq-Ports;
sous le ministère de Fox , il se rangea du
côté de l'opposition, et après la mort de
ce ministre survenue en 1807 il rentra
au ministère, avec le portefeuille de l'in-
térieur. Pendant son administration, il
présenta au parlement le bill destiné à
réprimer les insurrections nouvelles de
l'Irlande , et combattit le projet que l'op-
position présentait pour l'émancipation
des catholiques, et qui a été enfin adop-
té le 50 mars 1829 : lord Hawkesbury
succéda à lord Castlereagh dans le secré-
tariat de la guerre en 1809 , et prit celte
même année, où son père mourut, le
titre de comte de Liverpool. Il fut, après
la mort de Perceval, nommé en 1812 pre-
mier lord de la trésorerie , et continua de
se montrer l'ennemi de Napoléon, des
fautes duquel il sut adroitement tirer
parti. La capitulation de Paris en 1814 et en
1815 le fit triompher. Liverpool conserva
le ministère jusqu'au mois de janvier
1827, époque à laquelle une attaque d'a-
poplexie le força de renoncer aux af-
faires. Pendant cet intervalle il profila
habilement de la paix pour remédier
à quelques-unes des plaies que la guerre
avilit faites aux finances de l'état et à l'in-
dustrie des trois royaumes : il s'occupa
d'un grand nombre d'améliorations finan-
cières et commerciales, fit d'utiles re-
formes dans la législation et l'administra-
tion ; et parvint, par les économies di-
verses qu'il fit , à daniimer quelques-uns
des impôts et à supprimer les plus oné-
reux. C'est à ce ministre qu'on doit l'a-
bolilion de la traite des noirs , mesure
d'humanité à laquelle toutes les puis-
sances de l'Europe ont adhéré , excc]):é
le Portugal. Lord Liverpixjl mourut ie
premier décembre 1827 à CoInbe^voo.l.
Il était très versé dans la connaissance (ie
la constitution du royaume , entendait
fort bien les questions commerciales et
politiques, et parlait facilement et avec
précision. C'était, après Pitt, dit un jour-
nal anglais, l'homme le plus capable , par
ses talens et ses ressources intellectuelle^,
de faire face aux difficultés saiiS nombre
de l'époque où il dirigea les affaires. Il
est vrai, dit un biographe français, « qu'il
» fut secondé dans toutes ses opérations
» par les autres membres du ministère;
» mais il faut convenir qu'une grande
n partie de la gloire de ee.lie administra-
» tîon lui revient de droit; car c'est lui
» qui a donné l'impulsion, et qui a été
» en quelque sorte l'intermédiaire entre
» les divers clémens de l'oligarcliie an-
p glaise , dont le concours était indispen-
V sable pour la réussite des plans combi-
» nés pour l'avantage de la nation.
LIVIE DRt SILLE ( Livia Drusiila
AucusTA ), de l'illustre famille Claudia,
lille de làvius Drusillus Claudianus , née
en l'an de Rome 693 , épousa Tibère
Claude Néron , préteur et ensuite pon-
tife, dont elle eut deux enfans, l'empe-
reur Tibère, et Drusus, surnommé Ger-
manicus. Elle avait les grâces de la figure
et tous les talens de l'esprit. Auguste en
devint passionnément amoureux. Il l'en-
leva à son mari, et quoiqu'elle fût grosse
de Tibère , il ne laissa pas de l'épouser ,
de l'aveu des prêtres de Rome , plus ef-
frayés de la puissance du triumvir qu'at-
tachés aux lois et à l'équité. L'esprit vif
et insinuant de Livie lui donna beaucoup
d'empire sur Auguste, qui partagea avec
elle ses soins et sa puissance. Son ambi-
tion ne se borna pas à être la femme d'un
empereur , elle voulut en être la mère.
Elle fit adopter par Auguste les enfans
(lu'elle avait eus de son premier nriari ;
et pour combler l'espace qui était entre
le trône et eux, elle fit périr, dit-on, 'tous
les parens d'Auguste qui auraient pu y
prétendre. On l'accusa même d'avoir hâté
la mort de son époux, dans la crainte
qu'il ne désignât Agrippa Posthume pour
son successeur au préjudice de Tibère.
Ce fils, le motif de tous ses crimes, la
traita avec la plus noire ingratitude , et
pendant sa vie et après sa mort , arrivée
l'an 29 de Jésus-Christ , à 83 ans. Il ne
prit aucun soin de ses funérailles , cassa
son testament , et défendit de lui rendre
aucun honneur. Cette femme intrigante
a été mise au rang des plus grands politi-
ques, c'est-à-dire, dans le sens du monde ,
des plus habiles scélérats. Claude , petit-
fils de Livie par Drusus, lorsqu'il fut par-
venu à l'empire , lui fit décerner les hon-
neurs divins. Livie, que Caligula, son
arrière petit-fils , nommait un Ulysse en
jupe, avait, suivant Tacite, une partie de
la dissimulation de son fils Tibère^ com-
binée avec toute l'adresse d'Auguste son
mari : cum artibus mariti , siniulatione
fllii bene composita. Annal. \ih. V. cap. i.
LIVINEIUS ( Jean ) , natif de Dender-
monde , était originaire de Gand. Lévi-
uus Torrentius, évéque d'Anvers, son
oncle maternel , lui inspira le goût de la
A9Ô tîV
littérature sacrée. Etant allé à Rome, il y
trouva les savans cardinaux Guillaume
Sirlet et Antoine Caraffa, qui l'associè-
rent à leur travail sur la Bible des Scp'
tante qui parut en 1387 avec l'autorisa-
tion de Sixte V. Il profita de son séjour
à Rome pour tirer des copies de divers
manuscrits grecs de la bibliothèqtie du
Vatican et de quelques autres. Livinéius
a donné des f^ersionsde plusieurs opus-
cules des Pères grecs, qu'il a accompa-
gnées de notes qui prouvent qu'il était
bon critique; mais son latin est dur. Ili
fut ensuite chanoine et chantre d'Anvers,
et y travailla avec Guillaume Cantcrus à
examiner et à confronter quelques ma«
nuscrits de la version des Septante , et
leurs observations servirent à la partie
grecque de la Polyglotte de Plantin : d'a-
près son épitaphe, il mourut en 1399, âgé
de 32 ans. Nous avons de lui : | une pre-
mière Edition latine et grecque des Li-
vres de la Virginité , de saint Grégoire de
Nysse , et de saint Jean-Chrysostôme ,
qui ont passé toutes les deux dans le re-
cueil des OEuvres de ces deux saints
Pères , par le père Fronton du Duc ;
I Panegyrici vetei'es^ Anvers, 1399, in-8'*,
I une première J^ersion des Sermons de
saint Théodore Studite , et des Homélies
de saint Eucher , Anvers, 1602, 1 vol.
in-8°.
LIVOXIÈUE ( Claude POQUET de ) ,
jurisconsulte, né à Angers en 1632, se fit
recevoir avocat. Après avoir servi pen-
dant quelque temps, il suivit le barreau
à Paris , où il se distingua. L'amour de
son lieu natal le fit revenir à Angers ; il
y occupa une place de conseiller au pré-
sidial, et une de professeur en droit,
qu'il céda à son fils en 1720. Il mourut en
1726, à Paris, où il était revenu suivre un
procès. On a de lui : | un bon Recueil des
commentaires sur la Coutume d'Anjou ,
Paris , 1725 , 2 vol. in-fol.; | Traité des
fiefs ^ 1729, in-i" ; | Règles du droit fran-
çais ^ 1730 et 1738 , 1 volume in-12, qu'on
attribue avec plus de raison à son fils
aîné. Le père et le fils connaissaient bien
les lois romaines et la jurisprudence fran-
çaise. Ils furent souvent consultés.
LIVOY (TiMOTHÉE de) , barnabite, né,
vers 1713 , à Pithiviers , devint membre
de l'académie des Arcades , et mourut en
1777. Il avait professé les humanités
dans différens collèges et voyagé en
Italie. Sur la fin de ses jours il s'occupa
particulièrement de littérature. Il est
auteur du DicUonnaire des synonymes
HZ
français . Paris , 1767 , in-S" , plusieurs
fois réimprimé et assez utile- Livoy
a traduit de l'italien : | Tableau des révo-
lutions de la littérature , de Denina ,
17G7 , 2 vol. in-12 ; | Traité du bonheur
public , de Muratori , i772 , 2 vol. in-12 ;
( L'homme de lettres , du père Bartoli,
1768 , 2 vol. in-12 ; | L'exposition des ca-
ractères de la vraie religion , du père
Gerdil, in-12; | Voyage d'Espagne ^ fait
en 1755 , avec des notes historiques , géo-
graphiques et critiques, 1772, 2 vol.
in-12.
L1ZET( Pierre), né dans la Haute-Au-
vergne, fut d'ahord avocat-général, puis
premier président au parlement de Paris;
ayant eu le malheur d'indisposer contre
lui lamaison de Lorraine, alors toute-puis-
sante à la cour de France , il se vit con-
traint de donner sa démission, en 1550 ,
obtint en considération de sa pauvreté
l'abbaye de Saint-Yictor , et y reçut la
prêtrise. Il mourut, en 1554, à 72 ans.
il a publié des Ouvrages de controverse,
en 2 vol. On voit qu'il avait lu beau-
coup, et qu'il était animé d'un zèle ar-
dent pour la défense de la vraie foi ;
mais comme il n'était pas théologien , il
ne raisonne pas toujours juste : ce qui
fournit matière à Bèze de le ridiculiser
dans une satire, d'ailleurs très mauvaise.
' LIZOT ( Piekre-.Teaîv- Charles-Flo-
rent ) , membre de la cliambre des dé-
putés , naquit à Brionnê dans la Norman-
die , le 1" novembre 1768, d'un avocat au
parlement de Rouen , et était avocat lui-
même au commencement de la révolu-
tion. En 1790, il refusa de plaider devant
les tribunaux nouvellement organisés. Re-
tiré au bourg de Montfort, il fut mis en
état d'arrestation en 1795, et fut traduit en
179/1., devant le tribunal criminel , pour
avoir outragé les insignes de la liberté :
il échappa, par la fuite, mais non sans
peine , à ces persécutions. Sous le gou-
vernement de Bonaparte, Lizot devint
procureur-impérial près le tribunal de
Bernay , place qu'il conserva après le re-
tour des Bourbons , et même pendant les
cent-jours, quoique le 22 mars 1815 il eût
requis, en sa qualité de procureur du roi,
l'enregistrement de l'ordonnance royale
qui déclarait Bonaparte traître et rebelle.
Dans le mois d'août 1815, il fut nommé
secrétaire du collège électoral de l'Eure
et élu député par ce même département;
il y présida les élections en 1816, et, de-
puis celle époque jusqu'à sa mort, il lit
toujours partie de la chambre des dépu-
491 LLO
tés, où il siégeait sur les bancs ministé-
riels. Il était juge de paix du 10' arron-
dissement de Paris, lorsqu'il mourut le
ôi janvier 1827.
* LLOREXTE (don Joan-Axtonio ) ,
ex-chanoine de Tolède et littérateur es-
pagnol , secrétaire du saint-office , con-
seiller de .Joseph Bonaparte, naquit à
Rincon del Solo , près de Calahorra , dans
la vieille Castille , le 30 mars 1756, d'une
famille pauvre , mais honnête et noble.
Elevé par les soins de deux ecclésiastiques
respectables , don Gonzalès de Mendiza-
bal , son oncle maternel , et de don Emma-
nuel de Medrano , il fit ses éludes avec
tant de succès à Tarragone où il avait
suivi ce dernier, qu'à l'âge de 18 ans il
obtint la tonsure, ce qui le rendait habile
à posséder des hénéiices patrimoniaux.
On l'envoya en 1773 à Saragosse pour y étu-
dier le drdit, et il alla ensuite compléter ses
études à Madrid où il fut reçu bachelier
en 1776. A la même époque Llorente ol)-
lint un bénéfice patrimonial, re«;ut en
1779 la prêtrise, et fut admis en 1780 doc-
leur en droit canon à Valence. Il concou-
rut la même année avec succès pour im
canonicat de la cathédrale de Tarragone ,
se fit recevoir avocat au conseil suprême
de Caslille et devint membre de l'acadé-
mie canonique de Saint-Isidore à Madrid ,
puis en 1782 procureur-fiscal et vicaire
général de l'évéché de Calahorra. Il fixa
sa résidence dans cette ville , et y prêcha
la moitié d'un carême. En 1785 Llorente
fut nommé commissaire du saint-office de
la ville de Logrono , et trois ans après le
nouvel évoque de Calahorra le choisit
pour examinateur syndical des prêtres de
sou diocèse en matières théologiques. A
la même époque ayant conçu le projet de
substituer un corps de jurisprudence na-
tionale à l'étude des lois romaines, il en
fit part au comte de Florida-Bianca ; mais
ce ministre éclairé le fit renoncer à ce
projet intempestif dont l'exécution, faite
d'après les idées de Llorente , aurait mis
en combustion toute l'Espagne. Appelé à
Madrid en qualité d'avocat consultant
auprès de la duchesse de Sotomayor , il
resta dans la capitale jusqu'en 1801 et fut,
à la mort de celte dame , chargé par lo
roi de la tutelle du jeune duc, neveu et
hériiier de la défunte. A cette occasion ,
il se livra à l'élude de la généalogie de la
maison Solo-Mayor et écrivit poui éclair-
cir des quesn'ons de droit l'ouvrage inti-
tulé : Histoire du procès de la 7naison de
Solo-Mayor j concernant plusieurs droits
LLO
seigneiuiaux depuis le 15* siècle. Il com-
posa aussi quelques Mémoires sur des
sujets de localilés ecclésiastiques, sur La
prééminence des ambassadeurs d'Es-
pagTie .sur ceux de France ^ auprès des
conciles généraux de la cour de Rome et
les autres assemblées diplomatiques, etc.
Kn 178*) il fut nommé secrétaire de l'in-
quisiteur de la cour, puis chanoine de la
cathédrale de Calahorra : c'est à cette
époque qu'il fut chargé d'un travail fort
inipoi tant sur le saint-office, travail pour
lequel le grand inquisiteur lui avait con-
fié des papiers très précieux ; il fut ac-
cusé davoir abusé de cette confiance
pour révéler dans une correspondance
philosophique les secrets de l'inquisition.
Llorente perdit ses litres inquisiloriaux et
fut envoyé dans un couvent de recollets,
dans le désert de Calahorra. Cette espèce
d'exil ne dura pas long-temps : des let-
tres pleines de soumission et de repen-
tir, et des amis qu'il s'était ménagés au-
près du prince de la Paix , parvinrent non
seulement à lui faire rendre la liberté ,
mais encore à lui faire obtenir plus tard
le titre de chanoine écolàtre de Tolède et
la croix de l'ordre de Charles III. A l'é-
poque où les Français'' envahirent l'Es-
pagne , il s'était attaché à la cause des
Bonaparte ; nommé par le grand duc de
Berg ( Muratj pour faire partie de l'as-
semblée des notables qui devaient donner
une nouvelle constitution à l'Espagne, il
se rendit à Bayonne, et fut un des pre-
miers et des plus zélés courtisans du roi
Joseph, qui le choisit pour son conseiller
intime , et le fit ensuite garde des ar-
chives de l'ancienne inquisition. Alors on
vit deux ecclésiastiques espagnols suivre
des routes tout opposées ( voyez ESCOI-
QUITZ). Le saint-office avait été suppri-
mé par un décret du nouveau roi (1809);
un ordre du même prince fit mettre
à la disposition de Llorente les papiers
des différens tribunaux de l'inquisition
répandus en Espagne, et le chargea
d'en écrire l'histoire. Llorente publia
plusieurs brochures ou Mémoires desti-
nés à préparer les esprits à l'histoire à la-
quelle il travaillait ; il avait déjà attaqué
dans plusieurs écrits le saint Siège ,
notamment dans sa Collection diplo-
matique sur les dispenses matrimo-
niales. Pendant qu'il s'occupait ainsi
de son ouvrage sur l'inquisition , il fai-
sait paraître des brochures politiques en
faveur de Joseph ; il se chargea de l'exé-
cution de l'ordre qui supprimait les cou-
A92 LLO
vens, accepta la place de directeur gé-
néral des biens nationaux , et ayant pria
à tâche de se rendre agréable à son
maître , il se multipliait et se trouvait par-
tout où il y avait un service à rendre à
la cause de l'usurpation. Lorsque Ferdi-
nand VII «ut recouvré sa couronne , Llo-
rente qui était venu chercher un asile ea
France , lors de l'évacuation de la Pénin-
sule par l'armée française , reçut du gou-
vernement espagnol défense de rentrer
dans sa patrie. A l'époque de la restaura-
tion française en 1814 il se rendit eu An-
gleterre; mais il revint bientôt en France
où il publia un Mémoire pour servir à
l'histoire de la révolution d'Espagne s
I vol. in-S", qui eut beaucoup de succès.
Llorente , n'ayant plus rien à attendre de
la famille Bonaparte, voulut rendre un
hommage à l'antiquité de celle des Bour-
bons , en faisant paraître V Illustration de
l'arbre généalogique du roi d'Espagne
Ferdinand VII. 1815, in-folio. Il prouve
que ce monarque est le 5i' descendant en
ligne directe , de Sigerdus, roi des Saxons,
mort en G53. Celte adroite soumission au
pouvoir existant en Espagne n'ayant pro-
duit aucun effet, Llorente écrivit des
lettres à Ferdinand VII , et au chapitre
de Tolède , dans lesquelles il tâchait ,
non-seulement de faire excuser, mais de
faire approuver sa conduite passée ; ces
lettres restèrent sans réponse. A la même
époque il traduisit , dit-on , en espagnol ,
le roman intitulé : le Chevalier Faublas,
ouvrage rempli de grossières turpitudes.
Le député M. Clausel de Coussergues
ayant dit à la tribune, le 28 février
1817, que le saint-office avait adopté de-
puis long-temps , en Espagne , un système
de modération , les amis de Llorente le
lancèrent dans la lice , et il répondit au
député par une lettre traduite en fran-
çais , et imprimée le 30 mars , dans la-
quelle il prétendait que , outre les vic-
times déjà immolées, l'incpiisition en avait
fait périr dans les flammes mille cinq
cent soixante-dix-huit , depuis 1700 jus-
qu'à 1808 On a défié tous les partisans
de Llorente de citer une preuve légale
de ce fait , preuve d'autant plus difficile,
que depuis que la maison de Bourbon
règne en Espagne, c'est-à-dire depuis
1709 , on ne se souvient pas que ce tribu-
nal ait fait brûler aucune victime. Il est
avéré que de grands coupables enfermés
dans les prisons s'accusèrent, en dernier
ressort, de crimes imaginaires contre la
religion , afin qu'on les Iranspoilàt dana
LLO
&.9o
LLO
ces terribles cachots du saint-oflicc , où
ils lecovaicnl un traitement plus doux. Il
est certain aussi , qu'en i799, une soi-di-
sant sorcière, qui avait empoisonné avec
des philtres trois jeunes gens, fut unique-
ment condamnée par ce tribunal à une
détention perpétuelle dans une maison
de réclusion. Quelque sévère que puisse
avoir été, dans les siècles passés, le saint-
oflice, il est indubitable qu'il délivra l'Es-
pagne de ces guerres de religion qui
désolèrent la France et l'Alhunagne, et
où périrent miile fois plus de victimes
qu'il n'en est péri par los lois rigoureuses
de l'inquisition. Peu de temps après
sa lettre à M, de Coussergues, Llorente
publia l'Histoire de ce tribunal , que des
journaux mirent en vogue , et pour la-
quelle ils prodiguèrent des éloges à l'au-
teur. Lorsque les corlès d'Espagne furent
rétablies momentanément , Llorente pu-
blia un ouvrage sur les papes et commit
quelques imprudences qui le firent ren-
voyer de France par le gouvernement .
Il se rendit à Madrid, où il mourut
quelque temps après son arrivée, le 25
février 1823, à l'âge de 67 ans. Llorente
était instruit dans les droits civil et canon.
Il connaissait peu la littérature de son
pays ; mais il en possédait la langue , dans
laquelle il écrivait avec pureté et avec
élégance. C'est la seule , excepté le latin ,
qu'il connût ; il parlait fort mal le fran-
çais , et tous ses ouvrages publiés à Paris
furent écrits en espagnol et traduits en
français par M. Pallier et autres. Llorente
aurait pu être utile aux sciences et à la
religion; mais de mauvais conseils, des
encouragemens perfides, une ambition
sans bornes, lui firent oublier ce qu'il de-
vait à son caractère , et il se laissa égarer
par de fausses opinions. Indépendam-
ment de quelques ouvrages de peu d'im-
portance , on a de lui : | Mémoire sur
un cirque romain à Calahorra ^ Madrid ,
1789 , in-i° ; | Dissertation sur la situa-
tion géographique de l'ancienne Segobia ^
dédiée à l'académie de Séville dont il était
membre honoraire, ibid. 1790 ^ in-8°;
I Notices historiques sur les provinces
dAlava, Guipuscoa et Biscaye^ avec
l'origine de leurs lois fondamentales,
Madrid, 1790, 5 vol. m-8°; cet ouvrage
n'a pas été terminé; | Mémoire héral~
dique sur les armes d Espagne ^ avec un
nouveau projet d'armoirie^ Madrid , 1809,
dédié au roi Joseph Napoléon ; | Collec-
tion diplomatique de plusieurs écrits an-
ciens et modernes sur les dispenses ma-
7.
trimoniales, ibid., 1810, in-8° : c'est une
violente attaque contre les droits du saint
Siège. I Quelle a été l'opinion générale
sur l'inquisition, ibid., 1811 , hi-S" ; | Sur
l'opinion nationale en Espagne , relative-
ment à la guerre contre la France , Sa-
ragosse, 1813, in-4°; | Observations sur
les dynasties ( qui ont régné ) en Espagne.
Valence , 1812; et Saragosse, 1813, in-4**.
L'auteur soutient dans cet écrit que toutes
les familles qui ont régné en Espagne ont
été d'origine française. | Mémoires pour
servir à l'histoire de la révolution d'Es-
pagne . par M. Nellerlo ( anagramme do
Llorente ) Paris, 181o et 1816 , 3 voL in-8**;
I Dissertation sur une constitution reli-
gieuse^ Paris, 1819, in-12; cet ouvrage
fut censuré par l'autorité ecclésiastique
de Barcelone. | OEuvres complètes de
Barthélémy Las-Casas ^ 1822, 2 vol. in-
8° ; I Lettre à M. de Coussergues sur l'in-
quisition d'Espagne, Var'iS, 1817, in-S",
I Histoire critique de l'inquisition d'Es'
pagne ( traduite en français par M. Pellier)
Paris , 1818 , 4 vol. in-8°. C'est une froide
compilation, sans ordre, sans méthode,
écrite d'un style lourd, prétentieux, et
souvent obscur. Nous avons déjà fait re-
marquer que ce fut par ordre de Joseph
Napoléon que Llorente entreprit cet ou-
vrage ; ce qui suffit pour rendre très s>is-
pecte la véracité de l'auteur. Il cite des
textes, des faits ; mais ces textes et ces
faits sont la plupart altérés par cet histo-
rien, qui semble vouloir qu'on le croie
sur parole. Depuis près d'un siècle , au
moins, le saint-oflice n'avait plus ni de
tortures ni de bûchers, et la plupart de
ses prisonniers étaient enfermés pour des
délits politiques, et par ordre du gouver-
nement, qui voulait éviter ainsi le scan-
dale d'une procédure. Si le saint-office
avait encore eu la force et le pouvoir que
Llorente suppose , il n'aurait point vou-
lu perdre , comme il l'avait fait , de ses
prérogatives en devenant comme un tri-
bunal de police, ou d'état, soumis aux
volontés d'un ministre (voyez l'article
LIMBORCH). On a fait plusieurs extraits
de cet ouvrage, en français, en allemand
et en anglais, j Dissertation sur la divi-
sion des évêchés en Espagne, attribuée au
roi Tf^amba, au T siècle; \ Ilisloiî-e d'An-
toine Ferez, premier secrétaire d'état du
roi Philippe II; \ Dictionnaire topographi-
que de l'Espagne , avec les noms anciens
et mode7-nes ,^ vol. in-8° ; ces»trois der-
niers ouvrages sont manuscrits. | Défense
canonique ctpcUtique de D.Jean Jittoine
LLO A9/t
Llorenle contre les injustes accusations
ifc crimes supposés , et qui appartiennent
à plusieurs Espagnols réfugiés en France^
Taris, 4818, in-8°. Celle brochure est
moins une défense pour l'aulcur qu'un
libelle contre différens Espagnols respec-
tables , qui ne pouvaient pas admirer la
conduite de Llorenle , lors de l'invasion
lies Français ; | Portraits politiques des
yapes , 1822 , 2 vol. in-8''. Dans ce der-
nier ouvrage l'auteur déploie plus d'éru-
<U:ion que de jugement, de critique cl
de droiture d'intention ; pour donner une
juste mesure de la confiance qu'il mérite,
il sufiil de dire qu'entre antres faits apo-
cryphes et absurdes , on y trouve repro-
duite l'histoire de la prétendue papesse
Jeanne. | Il donna aussi une nouvelle
édition des Lois promulguées en Espa-
gne par les rois Goths; \ Notice biogra-
phique de D. Jean-Jnioine Llorente ^ ou
Mémoires pour servir à l'histoire de sa
vin . écrits par lui-même , Paris , Bobée ,
18 IS, avec le portrait de l'auteur; | 06-
sejvations ci'itiques sur le roman de Gil
nias de Santillane. Paris, 1822, in-8° ;
I-lorcnte avait déposé le manuscrit de cet
ouvrage au secrétariat de l'académie fran-
çaise. C'est d'après ce manuscrit, auquel
l'auteur a fait des changemens avant l'im-
pression, que François de Neufchâteau
publia , dans le 47*^ n° de VJlbum, une
réfutation de l'opinion systématique de
LIorentc. ( Voyez FR7VNÇOIS DE NEUF-
CHATEAU , ISLA. ) Llorenle était mem-
bre de l'académie royale de Madrid de-
puis 1791. Il fut "un des fondateurs et
des membres les plus zélés des sociétés
dites des Méthodes et de la Moi'ale chré-
tienne de Paris. M. Mahul a donné une
Notice sur sa vie dans la Revue encyclo-
pédique, t. 1", page 23 , et dans son An-
nuaire nécrologique ^ 5* année. Il parait
que les mœurs de Llorente étaient bien
loin d'élre sans reproche ; coipme on l'a-
vait accusé, durant son séjour à Paris , d'a-
voir des relations illicites avec une com-
tesse , ses amis prétendaient le justifier ,
en assurant qu'il était marié avec cette
dame, et Llorente était prêtre 11 s'oc-
cupa, comme on l'a vu, de traductions
d'ouvrages peu chastes, et fit, outre celle
dont nous avons parlé, la traduction
des animaux parlans {voyez CASTI) qui
est restée inédite. Des amis intéressés
lui ont donné le surnom de vénérable,
mais on peut douter qu'il lui soit confir-
mé par la postérité.
U.OYD (GtiLL/vuKE) , savant prélat
LLO
anglais, naquit à Tylchurst, dans le Bcrk-
sliire, en 1627; il fut successivement
ciiréde Saint-Martin-des-Champs de Lon-
dres, chapelain du roi d'Angleterre en
IGGG, docteur de théologie en 1G67 , puis
évèquede Sainl-Asaph en 1680. Lloyd fut
un des six prélats qui, avec l'archevêque
vSancroft , s'élevèrent contre YEdit de to-
lérance publié par Jacques II. Cette con-
duite déplut au roi , et les sept censeurs
mitres furent mis à la tour de Londres.
Aussitôt après la révolution, Lloyd se
déclara pour le roi Guillaume et la prin-
cesse Marie. Il fut nommé aumônier du
roi, puis évêque de Cowentry , de Licht-
fidld en 1002 , et de Worcesler en 1699 ,
où il résida jusqu'à sa mort, arrivée en
1717, à 90 ans. C'était un prélat incon-
stant , qui de la tolérance avait passé à l'in-
tolérance lapins outrée ; car il avait pen-
sé d'abord qu'on devait souffrir les ca-
tholiques , cl opina depuis à les opprimer
sans ménagement. En général, la tolé-
rance des sectaires n'est qu'en faveur de
l'erreur , et la vraie foi seule leur paraît
intolérable. On a de lui : | une Descrip-
tion du gouvernement ecclésiastique , tel
qu'il était dans la Grande-Bretagne et en
Irlande , lorsqu'on y reçut le christianis-
me , 1684 , in-8" ; | Séries chronologica
olympiadumj dans le Pindarc de l'édition
d'Angleterre, 1697 et 1700, in-fol. ; | une
Histoire chronologique de la viedePytha-
gore, 1699, et d'autres auteurs contem-
porains de ce philosophe. On comprend
que c'était fouiller dans les matières les
phis obscures de l'antiquité, rien n'étant
plus incertain que tout ce que l'on raconte
de ce philosophe , des gens et des choses
de la même date.
LLOYD (Nicolas), né en 1634 àHolton,
devint pasteur deNewinglon-Sainte-Ma-
rie , près de Lambeth, où il mourut en
1G80 , à 46 ans, regardé comme un littéra-
teur doux et poli. On a do lui un Dic"
lionnairc historique , géographique el
poétique , dont Hoffman et Moréri se sont
beaucoup servis. Cet ouvrage fut impri-
mé pour la pre.nière fois à Oxford , 1G70,
in-fol. La meilleure édition est celle de
1695, in-4". Le fonds de ce lexique ap-
partient à Charles Etienne ; Lloyd y a fait
des corrections et des additions, mais il
n'a pas supprimé toutes les fautes , et il y
en a mis de nouvelles. — 11 ne faut pas liJ
confondre avec Humphkey LLOYD ou
LHOYD , savant antiquaire el médecin
anglais du 16* siècle, natif de Debinga ,
daîis la province de Galles, do:Jt un a De
m
MonUi Druidian insula , anliqailati suœ
estitula, in-i", et plusieurs aulies ou-
raye«; ni avec Edouard LLOYD ou
JUYD, g-arde du cabinet d'Ashmol à
xford, mort en i709 , dont on a : | un
bon ^ôr^i"? del'iiisfoire des pierres, in-
titulé : LUhophijlacii brilannici ichono-
graphia^ Londres , iG09 , in-8" ; ] Archœo-
loyia britannica _. Oxford, 1707, in-fol.;
I des Mémoires sur la botanique^ dans
les Transactions philosophiques.
LLOYD (Sylvestre), évèque catho-
lique de Killaloë, et ensuite de Waler-
ford en Ixlande , en 1739 , est connu par
une Traduction en anglais du Catéchis-
me de Montpellier, contre laquelle écri-
vit le père Manby , jésuite. L'évêque
Lloyd mourut à Paris vers la fin de 1747.
LOAYSA (Gaucias de), cardinal espa-
gnol, né vers 1479, à Talavera en Cas-
tille, se fit dominicain à Salamanque ,
et parvint par son mérite à la place de
général de sonordreet àl'évêché d'Osma
Ciiarles-Quint le choisit pour son confes-
seur, le fit président du conseil des Indes,
\rj transféra au siège archiépiscopal de
Scville, et lui obtint le chapeau de car-
dinal en 1530. Ce prélat mourut à Madrid
en i546, dans un âge avancé, laissant
une mémoire respectable. Lorsqu'on dé-
libéra au conseil de Charles-Quint , sur
la conduite qu'on devait tenir à l'égard
de François I", fait prisonnier à la ba-
taille de Pavie , le généreux Loaysa fut
d'avis quon lui rendit la liberté sans
rançon et sans condition. L'é\êncment
justifia qu'on avait eu grand tort de ne
pas suivre ce conseil , inspiré par la po-
litique autant que par la majjuaninnlé;
car François \" ayant manqué de parole,
ne céda point la Bourgogne qu'on avait
mise pour prix à sa liberté, et l'Espagne
ne retira aucun fruit de sa prison , sans
que le prisonnier lui sût gré de son élar-
gissement. C'est faussement que quelques
lexicograplies attribuent à Loaysa , évè-
que d'Osma , Concilia hispanica, Madrid,
1595, in-fol.; ouvrage de Giron Garcias
de Loaysa, archevêque de Tolède. Voyez
GIRON.
LOBEL (Matuias de), né en 1538 à
Lille, médecin et botaniste de Jacques l",
avait étudié la médecine à Montpellier;
il exerça à Anvers et à Dclft, fut médecin
du prince d'Orange, après la mort du-
quel il passa au service des états-géné-
raux. Il mourut à Highathe, près de
Londres, en KilG, à 78 ans. On a de lui :
I Planfarum seu stirpium historia^ An-
9.; LOB
vers, 157G, in-ful. ; ] Diiucidœ simpliciiini
medicamentorum expUcdtiones et slir-
piuin adversaria nova, etc., Londres,
1(505, in-fol.; | Icônes stirpium, 1581. in-
4° ; I Balsami explanatio. Londres , 1598 ,
in-4''; | Stirpium illustrationes^ Londres,
1655, in-4". Plumier a donné le nom d«
Lobelia à un genre de la famille des Cain^
panulaçées.
LOBEUE (Aiv\E), plus connue sous le
nom D'ANNE de JÉSUS, née à Médinîi
delCampo, d'une famille illustre, eu 1545,
embrassa l'institut de sainte Tliérèse , et
fut la fidèle adjulrice de ses travaux pour
la réforme du Carmel. Après avoir fondé
divers monastères en Espagne, elle fut
appelée en France pour la iijcme fin , et
de là aux Pays-Bas , où les archiducs Al--
bert et Isabelle l'honorèrent de leur con-
fiance intime. Elle mourut à Bruxelles en
odeur de sainteté, le 4 mars 1621, dans
sa 7^^ année. Lorsque . sous le règne de
Jost'pli II, les caruiélitcs des Pays-Bas
cherchèrent un asile en France, elles em-
portèrent le corps d'Anne avec celui de
saint Albert, et celui d'Anne de Sainl-
Barthélenii , autre compagne de sainte
Thérèse, et les placèrent dans l'église des
carmélites de Saint-Denis , où ils restè-
rent ju-squ'en 1790, que la révolution des
Pays-Bas rappela ces vertueuses filles
dans leur patrie, avec les respectables
dépôts qu'elles avaient emmenés. L'abbé
de Montis a écrit la Vie d'Anne de Jésus.
Paris, 1788, in-12. Voyez le Joum. hist
etlitt., 15 mars 1791, p. 421.
LOBLVEAU (Gui-AiExis ), savant, né
à Rennes en 1G66, fut bénédictin en 1685,
et mourut en 1727, à (ti ans, à l'abbaye de
Saint- Jagut , près de Sainl-lMalo. Ses ou-
vrages roulent sur l'histoire, à laquelle il
consacra toutes ses éludes. On lui doit :
I V Histoire de Bretagne. Paris (Rennes}.,
1707, en 2 vol. in-fol. dont le second est
utile par le grand nombre de titres qua
l'auteur y a rassemblés. L'abbé de Yer-
tot et l'abbé Moulinet des Thuileries l'at-
taquèrent vivement. L'un et l'autre pré-
tendirent que dom Lobineau s'était plus
livré aux préjugés et à l'amour de sa pa-
trie qu'à celui de la vérité. Ils tâchèrent
de conserver à la Normandie des droits
que l'historien breton s'était efforcé de
lui enlever. Lobineau a un style un peu
sec , et il est avare d'ornemons ; mais il
a de la netteté , et il évite autant la ru-
desse que l'affectation. L'histoire de dom
Morice est plus estimée; depuis, M. Daru
a fait une excellente Histoire des ducs de
LOB
496
LOC
Bretagne {V DARU). V Histoire des deux
conquêtes d'Espagne par les Maures^
1708, in-fS : ouvrage moitié roman esqiie,
moitié historique, traduit de l'espagnol
de Bligûel Luna; | Histoire de Paris ^
Paris, 1725, en li vol. in-fol. , commencée
par dom Félibien, achevée et publiée par
dom Lobineau qui en a fait les trois der-
niers volumes. ( Voyez FÉLIBIEN , dom
MicHKL. ) On trouve à la tête du 1^"^ vol:
une savante Dissertation sur l'origine du
(orps municipal, par Le Roy, contrôleur
<'es rentes de l'Hôtel-de-ville. | U Histoire
des Saints de Bretagne^ Paris (Rennes) ,
1724, in-fol. Ce livre a de l'exactitude, mais
il manque d'onction. | Les Ruses de guerre
de Pollen , traduites du grec en français,
Paris, 1738, 2 vol. in-12, version estimée.
L'auteur avait beaucoup de goût pour la
littérature grecque, et il avait traduit plu-
sieurs comédies d'Aristophane; mais
cette version n'a pas vu le jour, et ce n'est
pas une perte. Enfin, on a attribué à tort
à dom Lobineau les Aventures de Pompo-
nius ^ chevalier romain^ ouvrage satiri-
que, in-12, qui est de dom Labadie. Voyez
\q Dictionnaire des Anonymes ^n. 1455.
LOBKOWITZ ( BoHUSLAsde HASSEN-
STEIN , baron de ) , issu d'une des plus
illustres maisons de Bohème, entreprit
de longs voyages afin de se perfectionner
dans les sciences, pour lesquelles il avait
beaucoup de goût. A son retour , il prit
le parti des armes , où il se signala , mais
son amour pour l'étude l'emportant sur
toute autre passion, il préféra l'état ecclé-
siastique, et fut secrétaire d'état en Hon-
grie, et grand-chancelier de Bohème. Ces
emplois ne l'empêchèrent pas de se livrer
à son goût dominant. Il était juriscon-
sulte, historien, poète, littérateur. Ce sa-
vant mourut dans son château de Has-
senstein en 1510, laissant des Poésies la-
tines , et différens Traités , imprimés à
Prague en 1563 et 1570.— De la même fa-
mille était le prince Georges-Chrétieiv
de LOBKOWITZ, mort en 1753, dans sa
68* année, après avoir commandé long-
temps les troupes autrichiennes sous l'im-
péralrice-reine de Hongrie. Voyez FOU-
QUET, Charles-Louis.
LOCROWr/Z. Voyez CARAMUEL.
LOBO ( JÉRÔME ), missionnaire portu-
gais, naqriit à Lisbonne, en 1593, et fut
envoyé en 1621 dans les missions des
Indes ; il pénétra jusque dans l'Ethiopie
ou Abyssinie , et y demeura plusieurs
années. De retour dans sa patrie , il sol-
licita vaineiTKîn»: l'établissement de plu-
sieurs comptoirs dans ce pays, et y fil un
nouveau voyage. Lorsqu'il revint, il fut
fait recteur du collège de Coïmbre , où il
mourut en 1678 , âgé d'environ 83 ans.
On a de ce missionnaire une Relation cu-
rieuse de V Abyssinie. Il y entre dans des
détails satisfaisans sur la source du Nil
et d'autres objets. {Voyez PAIS. ) L'abbé
Joachini Le Grand en publia une tra-
duction française en 1728 , in-4° , avec
des Dissertations ^ des Lettres, et plu-
sieurs Mémoires très instructifs.
LOBO ( Rodriguez-François ) , poète
portugais, né à Leiria, se noya en reve-
nant dans un esquif d'une maison de
campagne à Lisbonne. Ses Poésies ont
été recueillies en 1721 , in-fol. Sa meil-
leure pièce, ou du moins la plus applau-
die par les Portugais, est sa comédie
à.'Euphrosine.
* LOCATELLI (Antoine), célèbre
sculpteur, né à Vérone en 1725, et mort
à Milan en 1805, a été, après Canova, un
des plus habiles artistes qu'ait produits
l'Italie dans le dernier siècle. On a de lui
plusieurs groupes d'un fini parfait, une
Vénus j une Diane ^ une Latone avec Apol-
lon, qui excitent l'admiration des con-
naisseurs. Il passa plusieurs années à
Rome, et y obtint une pension de l'archi-
duc Ferdinand, gouverneur de la Lom-
bardie autrichienne.
*LOCATIouLOCATO (frère Humbert)
naquit à Plaisance vers 1520 ; il entra
dans l'ordre des prédicateurs , fut inqui-
siteur à Pavie et ensuite à Plaisance,
commissaire-général de l'inquisition à
Rome (1566 ) , confesseur de Pie V , puis
(15C8 ) évéque de Bagnarea. En 1581, il
se démit de son évêché et se retira au
couvent des Dominicains de Plaisance ,
où il est mort en 1587. Il a laissé quelques
ouvrages dont le plus remarquable esl
Italia travagliata, etc. ou Des guerres,
des révolutions, épidémies , etc. qui ont
eu lieu en Italie depuis Eriée jusqu'à Jios
jours, Venise, 1576, in-i".
LOCCENIUS (Jean), historien sué*
dois, né en 1399, à Itzchoe en Holsleiu,
Il fut professeur royal à Upsal, et publia
une Histoire de Suède, depuis l'origine
de la monarchie jusqu'au règne de
Charles XI, Upsal, 1554, in-8°, et plusieurs
Ecrits sur les lois , la politique et les an-
tiquités de son pays. Ses ouvrages sont
en latin. Il a aussi laissé des Notes sur
quelques auteurs anciens , Cornélius-Ne-
pos, Qiiinlc-Curce, etc. , dont il a dopné
des (vî il ions.
LOC 49
LCCIION (Etiek\e), cliarlrain, doc-
leur de la maison de Navarre , fut pen-
dant quelques années curé de Bretonvil-
liersjdans le diocèse de Chartres. Sa mau-
vaise santé l'obligea de quitter cette cure.
Il mourut à Paris vers i720, après avoir
publié plusieurs ouvrages de pieté et de
morale. Les principaux sont : \Jbrégé de
la discipline de l'Eglise pour l'instruc-
tion des ecclésiastiques ^ en 2 vol. in-S" ;
I Les Entretiens d'un homme de cour
et d'un solitaire sur la conduite des
grands, 1715, in-12. C'est une fiction
rieuse, dans laquelle l'auteur fait con-
verser le fameux réformateur de la
Trappe avec le comte de*** | Traité du
iecret de la confession^ in-12, ouvrage
propre à instruire les confesseurs et à
rassurer les pénitens , in-12. C'était le
meilleur Traité sur cette matière im-
portante , avant que celui de l'abbé Len-
glet n'eût paru.
LOCKE (Jean), naquit à Wrington,
près de Bristol , en 1032. Son père était
capitaine dans l'armée que le parlement
leva contre Charles \" . Le jeune Locke
fit ses études à Westminster , puis à Ox-
ford, et obtint dans cette ville un bénéfice
(chaire sans fonction) au collège de Christ-
Chiirch. Après avoir fait les études or-
dinaires , il se dégoûta des universités et
surtout de la philosoi)hie scolaslique, et
s'enferma dans son cabinet pour lire et
méditer. Il s'attacha pendant quelque
temps à la médecine ; la faiblesse de sa
santé ne lui permit pas d'exercer cet art.
Après deux voyages, l'un en Allemagne
et l'autre en France, il se chargea de l'é-
ducation du fils demilord Ashley, depuis
comte de Sliaflesbury. Ce lord , devenu
grand-chancelier d'Angleterre, lui donna
la place de secrétaire de la présentation
des bénéfices, qu'il perdit l'année suivante
par suite de la disgrâce de son prolecteur
(ir)75). La crainte de tomber dans la
pîithisie l'obligea d'aller à Montpellier
en IG74 ; de là , il vint à Paris, d'où il fui
rappelé, en 1679, par son prolecteur, qui
venait d'élre nommé président du con-
seil ; mais celui-ci ayant été bientôt dis-
gracié, il passa en Hollande, et Locke l'y
suivit. Ce fut dans ce pays qu'il acheva
son Essai sur l'entendement humain ,
ouvrage qu'il avait commencé depuis l'an
1670 et qui a fait beaucoup de bruit. Il
n'y avait pas un an que Locke était sorli
d'Angleterre , lorsqu'il fut accusé d'avoir
fait imprimer en Hollande des libelles
contre le gouvernement anglais. Cette
7 LOC
affaire, dans laquelle on reconnut a^-
pendant plus tard son innocence , lui {il
per-dre sa place dans le collège de Christ
à Oxford. Jacques II le fit demander aux
étals-généraux de Hollande, et Locke fut
obligé de se caclier jusqu'à ce que le
monarque anglais fut délrônê par le
prince d'Orange, son gendre (1G89). Il
retourna alors danssa patrie sur la flotte
qui y conduisit la princesse depuis reine
d'Angleterre, et devint commissaire du
commerce et des colonies anglaises; placo
dont le traiU-ment était de mille livres
sterling, et qu'il remplit jusqu'en 1707.
Il s'en démit, parce que l'air de Londres
lui était absohimeiit contraire , et se re-
tira à dix lieues de celte ville, chez le
chevalier Marsham, son ami. Pendant le
reste de ses jours, il partagea son temps
entre la prière et l'étude de l'Ecriture
sainte : occupation bien remarquable
dans un homme qui avait essayé d'attri-
buer la pensée à la matière. 11 mourut
en philosophe chrétien on 1704, à 72 ans.
Il nous reste de lui un grand nombre
d'ouvrages en anglais , dans lesquels on
voit briller Tesprit géométrique, quoîq;:e
l'auteur n'eût jamais pu se soumettre à
la fatigue des calculs , ni à la sécheresse
des vérités mathématiques. Ils ont été
recueillis à Londres, en 5 vol. in-fol., 1714
1725,1752; et 4 vol. in-4°, 1768,1777.
1784; l'édition de 1801, 10 vol. in-8",
est la plus estimée. Les principaux ou-
vrages de Locke sont : Essai philosojjhi-
que concernant l'entendeînent humain,
dont la meilleure édition en anglais est
celle de 1700, in fol. Il a été traduit tu
français par Cosle, sous les youx de l'au-
teur, 1729, iii-4°, réimprimé en 4 vol.
in-12. Cette version a élé abrégée en i
vol. in-12. Il aurait élé à souhaiter que
l'auleur n'eût pas t(jujours consulté la
physique dans une matière que son flam-
beau ne peut éclairer. En voulant déve-
lopper la raison humaine, comme un
analomiste explique les ressorts du corp»
Iiumain , il a fait presque une machine de
l'être spirituel qui l'anime. Son idée, que
Dieu par sa toute-puissance pourrait
rendre la matière pensante, a paru, avec
raison, d'une dangereuse conséquencs,
ainsi qu'elle est en elle-même fausse et
contraire à toutes les lumières dune
saine métaphysique. 11 n'est pas vrai ce-
pendant, comme quelques écrivains plus
zélés qu'intelligens l'ont avancé , que
cette erreur de Locke renverse le dogmo
de riaimorlalitc de l'ûaie ; car il faudrait
LOC
498
LOC
f our cela prouver qu'une matière capa-
li.'o d'intelligence n'est pas capable de
I imniorlalité, et qu'il est plus impossi-
Me de concevoir une matière immortelle
qu'une matière pensante. Si la matière
pouvait être élevée jusqu'à la pensée,
pourquoi n'atteindrait-elle pas à l'immor-
talité? Il y a plus: les éiéinens de la
matière sont réellement indestructibles,
à raison de leur simplicité (ou exemp-
tion de mélange ) et de leur incorrupti-
bilité; pourquoi notre âme, supposé
qu'elle fût de même nature, n'aurail-cUe
pas la même propriété? C'est ce qui a
fait dire à un lionmie de génie : « Il n'y a
» qu'un intérêt secret et honteux , con-
» traire à l'amour naturel que nous avons
» pour l'existence , qui puisse nous faire
» excepter notre âme du sort éternel des
» matières brutes et inanimées. » Non. la
spiritualité de l'âme n'est pas la -seule
preuve de son immortalité, i" La religion
chrétienne est un fait établi par des
preuves victorieuses : celte religion
m'enseigne que je suis immortel ; il faut
la convaincre de fausseté avant de cor-
riger ma croyance. 2° L'existence de Dieu
est une vérité à laquelle un homme sensé
ne peut se refuser; et cette vérité est évi-
demment liée avec l'imiuortalité de nos
âmes. L'univers est un fait qui suppose
une cause ; et nous déduisons du fait
l'existence et les attributs de la cause : or,
parmi ces attributs, il y en a qui sup-
jiosent évidemment la conservation de
i'àme humaine , quelle qu'elle soit de sa
nature. 3° La distinction du vice et de la
vertu n'est pas une chose arbitraire,
mais née avec les hommes, gravée dans
leur âme avec des caractères ineffaça-
bles; et cette distinction serait abolie , si
l'âme de l'homme n'échappait pas à la
ruine du corps Du reste l'ouvrage de
Locke est estimable pour la clarté, la mé-
thode et l'esprit d'analyse qui le carac-
térisent. M. Tabaraud , dans son I/is-
toire du philosophisme anglais^ pré-
sente un examen sévère , mais bien fait
de la philosophie de Locke. Nous avons
aussi en français , par Martin Roche , un
Traité de la nature de l'âme et de l'ori-
fjine de ses connaissances contre le sys-
tème de Locke, 2 vol., 1739. | Un traité
intitulé : Du gouvernement civil , en an-
glais, qui a été assez mal traduit en fran-
çais, in- 12, 1724; il y a une édition de
1780. Le philosophe y combat fortement
le pouvoir arbitraire, et semble même
ébranler les principes de tout gouverne-
ment monarchique. \'\ y o\% Lettres szcr ia
tolérance en niaticre de religion; \ quel-
ques Ecrits sur la monnaie et le com-
merce ; I De l'éducation des enfans. Ce
livre, estimable à beaucoup d'égards,
mais dont plusieurs endroits ont été cri-
tiqués avec raison , a été traduit en fran-
çais, en allemand, en hollandais et en fla-
nuuul. I Un traité intitulé : le Christia-
nisme 7'aisonnable . traduit aussi en fran-
çais, et imprimé en 17i5, en 2 vol. in-12.
Quelques propositions de ce livre, pris'JS
à la rigueur, pourraient le faire soup-
çonner de socinianisme. Il y soutient que
J.-C. et les apôtres n'annonçaient d'au-
tres articles de foi que de croire que J.-C.
était le Messie. Il s'excusa ou tâcha de se
justilier dans des lettres au docteur Slit-
linglleet. M. Coste a traduit La défense
de Locke^ et l'a ajoutée à celle du Chris-
tianisme raisonnable. l\ y a du reste dans
cet ouvrage d'excellentes choses et de
solides réfutations du philosophisn)e ; on
y trouve même des observations sur la
convenance et la nécessité de l'autorité
suprême du chef de l'Eglise , qui seules
suffisent pour confondre les richérisles .
les jansénistes et fébroniens. {Voyez G RO-
TI US, MÉLANCTHON. ) | Des Para-
phrases sur quelques Epîtros de saint
Paul; I des OEuvres diverses , 1710, en 2
vol. in-12. Elles renferment une Méthode
très commode pour dresser des recueils :
plusieurs savans l'ont suivie. | Des ÛCm-
vres poslhumes^qmcontiennenl des mor-
ceaux sur divers sujets de philosophie.
M. Thurot a récemment publié une tra-
duction qui renferme les ouvrages philo-
sophiques et politiques de Locke, Firmin-
Didot, 1821, 1823, 8 vol. in-S". Locke avait
une grande connaissance des mœurs du
monde et des arts. Il avait coutume dd
dire qjie « la connaissance des arts méca-
» niques renferme plus de vraie philoso-
» phie que tous les systèmes , les hypo
» thèses et les spéculations des philoso-
» phes. » Jugement qui lui fait honneur,
et qui est d'une vérité aussi sensible qu'in-
téressante. Son style n'a ni la force de
celui de la Bruyère. lù le coloris de celui
de Malebranche ; mais il a beaucoup da
justesse, de clarté, et de netteté. Sa con-
versation était enjouée. Il savait plusieurs
contes agréables, qu"'il rendait encore
plus piquans par la manière dont il les
racontait. Son humeur était portée à la
colère ; mais ses accès n'étaient que pas-
sagers, et il était le premier à reconnaître
ses torts. L'ouvr.'igc de Locke intitulé.
LOC
499
LOC
Du gouvernement civil, a beaucoup servi
à J.J. Rousseau pour son Contrai social;
et ses Lettres ou Pensées sur l'éducation
n'ont pas été non plus inutiles au piiiloso-
phe (le Genève dans son Emile ; mais on
(rouve chez Locke plus de profondeur et
de modération.
LOCMAN.ou plutôt LOKMAN, fameux
philosophe d'Ethiopie ou de Nubie. Les
Arabes en racontent mille fables. Ils pré-
tendent qu'il était esclave, et qu'il fui
vendu aux Israélites du temps de Salomon.
Quelques-uns lui donnent jusqu'à 500 et
même 1000 ans d'existence. Ils en rappor-
tent plusieurs choses que les Grecs ont at-
Iribuces à Esope. Nous avons un livre de
Fables et de Sentences que les Arabes
disent être l'ouvrage de Locman; mais l'on
« roitquc ce livre est moderne. S'il est vrai
que Locman soit le même qu'Esope, il
j)araît que les Grecs ont forgé l'histoire de
celui-ci sur celle du premier, et que dans
ce cas , comme dans beaucoup d'autres ,
ils se sont approprié avec diverses alté-
rations les hommes et les événemens cé-
lèbres qui ont illustré l'Asie ( i ). Les fa-
bles et les apologues altribués à Locman
sont trop conformes au génie des peuples
où l'on prétend qu'il a vécu , pour croire
([ue les Arabes aient ici pillé les Grecs.
Les historiens peignent Locman comme
un homme également estimable par ses
connaissances et par ses vertus. C'était
un philosophe taciturne et contemplatif ,
occupé de l'amour de Dieu, et détaché de
celui des créatures. Des savans ont pré-
tendu que Locman était Salomon , et
que ses apologues étaient ceux de ce phi-
losophe roi. « L'histoire des premiers
» philosophes dont les Grecs se glorifient
» ( dit un critique célèbre ) , et dont la
» patrie n'est nullement certaine, contient
K un grand nombre d'altérations de nos
• divines Ecritures; et spécialement quel-
» ques-uns des livres de Salomon {le Sage
» par excellence ) ont eu l'influence la
» plus marquée dans les ouvrages des
B philosophes de la Grèce , sous différens
» noms , traduits de nos livres saints. Le
» Locman des Orientaux, loin d'avoir été
» l'Esope des Grecs, selon le préjugé com-
» mun, reprendra son vrai nom de Salomon
» lequel signifie sage en hébreu, et a été
» traduit par celui do Locman , qui a le
B même sens en arabe. Les auteurs orien-
» taux parlent beaucoup de la sagesse de
(t) Voyei VHlst. vr'rit. des temps fameux , tora. 5 ,
r*8 ^7 ' > *' '" arsiclci FiciN, Lavaub, Piatou, etc,
» Salomon. De ce personnage, qu'il'? on! al-
»téré, isea ont fait plusieurs, un enlreau-
» très sous le nom de Locman. Locman est
» formé ordinairement de l'article arabe i7f.
» et du mot echm, qui signifie 5fl^e. Dius
» la Bibliothèque orientale de M. d'Hei !i;;.
» lot, on tiouve , sur le mot LOCMAN
» ALHAKIM LOCMAN, LOCMAN le Sage.
n C'est exactement le surnom de Salomon
» traduit en arabe. Quelques-uns ont pré-
» tendu qu'Esope était le même person-
i> nage que Locman et Bidpay , appelé
» vulgairement Vilpaxj^ et ont par consé-
B quent mis sur le compte de Locman les
» fables d'Esope. Si Salomon a été masqué
» sous le nom de Locman , cette décou-
» verte conduirait à un doute très grave
» sur quelques fables attribuées à Esope,
» confondu avec Locman. En attendant
» des éclaircissemens sur un fait aussi
» important , nous ferons observer que
» l'on trouve dans les Proverbes de Salo-
» mon ( VI,7), la fable de la Fourmi {i')^
» et celle du Pot de terre et du Pot de
V fer dans l'Ecclésiastique ( XIII, 3). Ce
» ne sont pas les seuls apologues qu'on
» rencontre dans l'Ecriture sainte. On y
» lit la fable des Arbres qui se choisissent
» un roi ( Judic. IX , 8 ) , celles du Riche
» et du Pauvre ^ et des Deux Fils, 2 Reg.,
»XII, { ), du Cèdre e\ du Chardon{k Reg.
» ik, 9, et 2 Parai., 2a, 18). Ainsi les écri-
» vains sacrés ont évidemment l'honneur
» de l'invention de l'apologue, puisque
» Hésiode, qui , long-temps avant Esope,
» avait donné la fable de VEpervier et
» du Rossignol ( Opéra et Dies, 1, 200 ),
a est mohis ancien que l'auteur du livre
» des Juges , où nous trouvons la fable
» des Arbres. » On pourrait citer , à l'ap-
pui de ces dévoileinens sur Locman , un
ouvrage intitulé : J'ie des écrivains
étrangers ^ tant anciens que modernes ,
par M. Le Prévôt, d'Exmes, à Paris, chcB
la veuve Duchesne , 1784 , où sont rap-
prochés les grand.» traits de ressemblance
quise trouvent entre Salomon et Locman,
On pourrait citer encore Les nouveaux
Contes Arabes, ou Supplément aux Mill^
et une Nuits, suivis de Mélanges de litté-
rature orientale et de Lettres , par M,
l'abbé*"*, â. Paris,chezPrault,in-i2de42.'i
pages. Dans les lettres qui terminent cet
(i) L'Ecriture nou» dit expret$ciaent qu'il composa
3,oco paraboles ou apologues, et too5 pormes. Locu.
lus Salomon Irta milita parabolas, el/ueninl carmma
fjus Kfuinque et mille, m. Rïg. IV, 3a. Les Sepla-ite
ont quinquies mille; mai» l'bcbrea cl le chiljeert
sont couformes à 1» Vulgalc.
LOC
500
LOD
ouvrage, on prouve presque jusqu'à l'c-
vidence que le Locman des Arabes est le
premier fabuliste ; que l'Esope des Grecs
n'en est que le traducteur, et que son
histoire, publiée par le moine Planude ,
est fabuleuse et conlrouvée, ainsi que le
recueil d'apolojjues qu'il a coitipilés très
maladroitement. De plus , dans les Pen-
sées et Adages . traduits de l'arabe , on
trouve plusieurs maximes de nos auteurs
sacrés. Le premier adage est celui-ci :
La crainte de Dieu est le commencement
de la sagesse. Ces rencontres singulières
paraissent embarrasser le traducteur. Il
les attribue à l'influence éternelle de la
nature, toujours uniforme dans ses opé-
rations j soit morales, soit physiques.
Mais, sans critiquer l'espèce de phébus
qu'on croit apercevoir dans cette influence
éternelle de la natwe , et sans demander
au traducteur pourquoi cette influence
éternelle n'a pas produit les mêmes adages
chez tous les philosophes et chez toutes
les nations , nous nous bornerons à re-
marquer que cette ressemblance des mo-
ralistes arabes avec ceux de l'Ecriture
reçoit une explication aussi simple que
satisfaisante des observations que nous
venons de faire. Erpénius a publié les
fables de Locman en arabe et en latin ,
4615 , 1636 et 1656, ïn-k" ; et M. Caussin
en a donné une édition meilleure et plus
estimée, en 1818. Le jésuite Lassala les a
traduites en vers latins, et Galland en
français, avec celles de Bidpay, Paris,1714,
2 vol. in-12; elles l'ont été aussi par Gueu-
lelle. en {Tîh , et par M. Marcel, 1799,
in-ii"; 1805, in-12, avec 4 nouvelles fables.
roxjez ESOPE , PLANUDES , MÉZIRIAC.
LOCi\ERUS ou LOCHNER ( Michel-
FRÉDÉnic ), né à Furth, près de Nurem-
berg en 1662, mort à Nuremberg, en 1720,
à 58 ans, était très versé dans l'antiquité
et dans l'histoire naturelle. On a de lui :
j Papaverex antiquitate e^-u/wm, Nurem-
berg , 1715, in-4° ; \ Heplas disserlalio-
num ad hisloriam naturalem pertinen-
tium, 1717, in-4°; | Rariora musœi besle-
riani, 1716, in-fol., et plusieurs autres ou-
vrages sur les simples exotiques.
LOCRES ( Ferry de ) , né à saint-Paul
ou Saint-Pol, ville de l'Artois , en 1571 ,
curé de Saint-Nicolas d'Arras , mort en
1614, partagea son temps entre les devoirs
de son ministère et l'élude des antiquités
de son pays. Nous devons à ses recher-
ches : I Discours de la noblesse, oii il fait
mention de la piété et de la vertu des
rois de France, Arras, 1605, in-8°-, [ His-
toire des comté . pays et ville de Saint-
Paul , Douai , 1613 , in-i" : ouvrage es-
timé ; I Chronicum belgicunt ab anno 258
ad annuni 1600, DoUai, 1616; Arras, 1618,
in-4". C'est plutôt une chronique du pays
d'Artois que des Pays-Bas. La critique y
manque, surtout pour les premiers temps.
LOCUST/V , fameuse empoisonneuse ,
vivait à la cour de Néron , l'an 00 de Jé-
sus-Christ. Ce prince barbare se servait
de cette misérable pour faire périr les
objets de sa haine et de sa vengeance."
Tacite dit qu'il craignait si fort de la p(!r-
dre, qu'il la faisait garder à vue. Il em-
ploya son ministère lorsqu'il voulut sfi
défaire de Britannicus. Comme le poisorl
n'opérait pas assez tôt , il allait ordonne!
qu'on la fit mourir. Locusta donna dem
doses de poison au malheureux Britanni*
eus : la première n'opérant pas assez su
bitement , Néron frappa Locusta , et me-
naça de nouveau de la faire périr. Elle
prépara alors un autre dose, si forte, que
Britannicus tomba mort sur-le-champ :
elle fut sauvée. Suétone rapporte que Né-
ron lui faisait préparer ses poisons dans
son palais, et que pour prix de ses abo-
minables secrets, il lui pardonna non seu-
lement tous ses crimes , mais qu'il lui
donna de grands biens et des élèves pour
apprendre son métier.
♦ LODOLI ( Charles de CONTI ) de
l'ordre de saint François , né à 'Veniso
en 1690 , cultiva avec distinction les
sciences et les arts. Après avoir occupé
les chaires de belles-lettres et de théolo-
gie , il devint chronologiste général des
écrivains de son ordre, et censeur des
livres delà republique de Venise. Il s'est
fait connaître plus particulièrement par
son goûtpour les beaux-arts II avait re-
cueilli divers morceaux d'architecture ,
de peinture, sculpture et gravure, dont
la suite mettait sous les yeux les progrès
successifs de ces arts ; mais un accidi-nt
a fait périr tous ses manuscrits et ses des-
sins. Il mourut à "Venise le 27 octobre
1771. Cette ville lui doit une école patri-
cienne, d'où sont sortis des sujets du plus
grand mérite. Les principes de Lodoli
ont été développés dans un ouvrage ita-
lien intitulé : | Elémens d'architecture,
ou l'Art de bâtir avec une solidité scien-
tifique, et une élégance non capricieuse»
Rome. 1780. ix\-k°. Ces élcmcns renfer-
ment une connaissance profonde de l'arl,
beaucoup de goût, et des vues utiles
au perfectionnement de l'archilccturc.
i Apologhi. etc. Bavano, 1787, in-8'*. Dans
LOE
501
LOE
ces apolo[;ucs, qui ne furent îuipriniés
qu'après la mort de l'auteur, et auxquels
on pourrait reprocher d'être un peu trop
satiriques , on trouve une morale saine :
ils sont en prose , mais écrits d'une ma-
nière tout-à-fait poétique.
LOEBER (CiiRisriAN), théologien alle-
mand, né à Orlamunde en 1683 , mort en
47A7, fut surintendant général à Allen-
bourg. On a de lui des Dissertations aca-
démiques et un Abrégé de théologie on
latin. II eut un fils , Gothilf Friedman , et
une fille , Christine-Dorolliée , qui se dis-
tinguèrent par leurs poésies.
LOER (Thierry ), appelé aussi Lœrius
deStratiS:, parce qu'il était natif d'Hoog-
straten en Brabant , se fit chartreux à Co-
logne, et mourut à Wurtzbourgen foo4 ,
après avoir composé sur les hosties mi-
raculeuses conservées à Bruxelles, im
ouvrage imprimé à Cologne en 155^, peu
de temps après la maladie de la suclte _,
qui avait fait de grands ravages à Bru-
xelles en 1529. C'est le premier ouvrage
qui ait été imprimé sur ces hosties si cé-
lèbres dans la Belgique. Il a pour titre :
Prœstantissima quœdam ex imm7neris
miracula^ quce Bruxellis^7iobiliapudB7-a-
bantos oppido ^ circa venerabilem Ëu-
charistiam hactenus midlis ab annis ad
Christigloriamfiant, etc. Quoique jusqu'à
présent il n'y ait aucun autre imprimé
connu avant cette époque , le fait histori-
que est authentiqueruent prouvé, tant par
les lettres originales de 1570 (époque du
miracle ) , que par d'autres manuscrits
rédigés par des témoins oculaires et cori-
temporains, joints à une constante tra-
dition et un culte non interrompu jus-
qu'à nos jours ; cidte qui n'a essuyé de
critique que de la part des hérétiques ,
vers la fin du 16^ siècle. On peut voir la
Dissertation \\\s{ov\([nc imprimée à Bru-
selles, chez Lemaire , 1790, in-8", ou le
précis qui s'en trouve dans le Joum. hist.
ï?//i«..l"' septembre 1790 , p. 7.
LOERIUS. Foyez LOYER.
LOESEL (Jean), médecin et botaniste,
né à Brandebourg , en 1G07 , a vécu jus-
qu'au milieu du 17* siècle à Kœnigsberg,
Il avait préparé sur les plantes indigènes
de Prusse un grand ouvrage qui fut pu-
blié par son fils sous le titre de Catalo-
ffus plantarum in Borussia nascentium^
Kœnigsberg, 1654, in-/i° ; puis par Golls-
ched, sous celui de Flora prussica ^ etc.
Kœnigsberg, 1703 , in-i.". Georges-André
Helwig en a donné le Supplément ^ Dant-
aick,1712, in-4".
LOi:\VEi\D/VL (Ulkk: FRÉr.ÉpjcWOL-
DF.MARD, comte de ) . né à Hambourg .
en 1700 , était arrière-pet il-llls d'un lils
naturel de Frédéric I!I , roi do Danc-
marck. Il commença à porter les armes
en Pologne en 1713, commesimple soldat;
et , après avoir passé par les grades de
bas-oflicier, d'enseigne et d'aide-major,
il devint capitaine en 171/i. L'ernpire
alors n'étant point en guerre , il alla ser-
vir comme v(jlontaire dans les troupes
de Danemarck contre la Suède, et s'y dis-
tingua par son activité et par son cou-
rage, La guerre étant survenue en Hon-
grie, il y passa en 1716, et se signala à la
bataille de Pcterwaradin , au siège de
Témeswar, et à la bataille et au siège de v*.
Belgrade. Le roi Auguste de Pologne, •'
au service duquel il entra ensuite, le créa
maréchal-de-camp et inspecteur-général
de l'infanterie saxonne. Il lit les campa-
gnes de 1734 et de 1735 , sur le Rhin. La
czarine l'ayant attiré à son service , elle
fut si contente de la manière dont il se
conduisit dans la Crimée et dansl'Ukraine,
qu'elle le nomma chef de ses armées. La
grande réputation que sa valeur lui avait
faite engagea le roi de France à se l'atta-
cher. Il obtint, en 1743 , le grade de lieu-
tenant-général , et, dès l'année suivante,
il se signala aux sièges de Mcnin, d'Ypres,
de Fumes, et à celui de Fribourgen 1744.
Dans la camp-igne de 1745, il commanda
le corps de réserve à la bataille de Fon-
tenoy, et partagea la gloire de la victoire.
Il prit , dans la même campagne , Gand ,
Oudenarde , Oslcnde , Nieuport. Il com-
mença la campagne suivante par les siè-
ges de l'Ecluse et du Sas-de-Gand, et la
linit par celui de Berg-Op-Zoom , qui fut
prise d'assaut le 16 septembre 1747. Le
duc de Parme avait échoué devant cette
place en 1588, etSpinola en 1622. Depuis
CCS sièges, elle avait été forlitiée par le
fameux Coehorn , le Vauban des Hollan-
dais, qui la regardait comme son chef-
d'œuvre. Mais des intelligences secrètes
secondèrent la valeur française ; et la
brèche, à peine praticable, s'élant trouvée
en plein midi, sans défenseurs, les assié-
geans y entrèrent sans résistance. Un ré-
giment écossais qui tenta de les en chas-
ser , fut bâché en pièces. Le lendemain
de cette journée, le comte de Loewendal
reçut le bâton de maréchal de France. IJ
ne survécut pas long-temps à sa gloire.
Un petit mal qui lui sursint au pied , et
qui fut suivi de la gangrène , l'emporta
en 1753 . à 55 ans. Il avait été constam-
LOF
502
Lon
1
mcnl attaché à la rdigion catholique ,
dont il pratiquait les devoirs , et laissa
un fil? élevé dans les mêmes sentimens,
nommé François-Xavier- Joseph.
• LOFFICIAL ( Louis- Prospère ) ,
membre de l'assemblée Constituante , de
la Convention et du conseil des Cinq-ccnls,
était, avant la révolution, lieutenant-gé-
néral du bailliage et juge royal de Vur-
vanl , séant à la Châtaigneraie , en Poi-
tou. Après avoir fait partie de l'assem-
blée Constituante , dans laquelle il ne se
lit remarquer qu'au jeude paume, il fut
appelé aux fonctions, électives alors, de
juge au tribunal du district de Parlhenai,
département des Deux-Sèvres. A la Con-
vention , il se distingua par la modéra-
tion et la droiture de ses principes , et
surtout par le courage dont il fit preuve
dans plusieurs occasions importantes,
l'imagination se repose en parcourant
ces temps désastreux, lorsqu'elle trouve
des hommes humains et courageux: Lof-
flcial fut de ce nomhre. Nous citerons
avec plaisir ce trait qui mérite d'être
connu. Profondément affecté du sort ré-
servé au malheureux Louis XVI, et ayant
entendu dire dans la salle , avant l'appel
nominal, qu'il n'y avait qu'une voix de
plus pour la mort , il s'empressa d'aller
trouver M. Duchâtel, son ami, retenu dans
son lit par une maladie grave : celui-ci
vint voter en robe-de-chambre et la tête
enveloppée de flanelle : aussitôt plusieurs
voix s'élevèrent pour demander « quel
» était le royaliste qui était allé chercher
j> un spectre pour sauver le tyran ? »
Lofficial se leva en disant : « C'est moi; »
mais heureusement et par un élan géné-
reux, Jard-Panvilliers et plusieurs autres
membres qui partageaient ses opinions^
se levèrent en même temps , et firent la
même déclaration. Ainsi on ne put con-
naître et condamner l'homme courageux
qui avait voulu sauver son roi , et Loffi-
cial fut sauvé. Celui-ci s'était borné à
voler la détention comme mesure de sû-
reté générale. On peut voir la lettre dans
laquelle il raconte lui-même ce fait avec
des détails intéressans et qui est adressée
à l'auteur de la Vie politique des députés
à la Convention; elle se trouve aussi dans
la Biographie des Coîitemporains, à l'ar-
ticle LOFFICIAL. Il parut rarement à la
tribune ; mais il travailla aux comités de
judicaturo et dans toutes les occasions il
s'opposa aux mesures de rigueur, trop
souvent admises par la majorité. Ce fut
lui qui osa le prciiuer, dans la séance du
8 vendémiaire an 5, appeler Taltention do
l'assemblée sur les crimes de Carrier , et
qui fit adopter le décret d'accusation pro-
noncé contre ce monstre : Lofficial à
cette occasion fil le tableau des atro-
cités par lui commises dans la Vendée,
et à plusieurs reprises il excita des mou-
vemens d'horreur dans l'assemblée et
dans les tribunes. Les habitans de Nanlea
s'empressèrent de lui envoyer , à l'appui
de sa dénonciation , 123 pièces qu'il dé-
posa au comité de salut public , el qui no
se retrouvèrent plus à l'époque du procès
de Carrier. Lofficial envoyé en décem-
bre 1793 , avec quelques membres de la
Convention pour pacifier la Vendée, lit
mettre en liberté les détenus. Parmi eux
se trouvait madame de Bonchamp, qui
avait été condamnée à mort, et pour la-
quelle il avait obtenu un sursis au juge-
ment qu'il fit expédier sur-le-champ à
Nantes par voie extraordinaire, el qui
arriva heureusement avant l'exécution.
De retour au sein de la Convention, il
dénonça les opérations révolutionnaires
des déi)Utés Hentz et Francastel. Réélu
au conseil des Cinq-cents par plusieurs
départemens, il fit partie de cette assem-
blée jusqu'en l'an 7 (1798 ). Depuis cette
époqiie jusqu'à sa mort arrivée en 1815 ,
Lofficial a exercé les fonctions de juge
au tribunal civil d'Angers , puis de con-
seiller à la cour royale de cette ville.
LOGOTHÊTE. Voyez ACROPOLITE.
LOIIÉAC. /^oycjs LAVAL ( André de).
LOIIEASTEIN ( Damel-Gaspar de ),
poète allemand, né l'an 1C53, à Nimplsch
en Silésie, fut conseiller de l'empereur
Joseph I", et premier syndic de la ville
de Breslaw ( 1666). Après avoir fait de
bonnes éludes, il voyagea dans toutes les
parties de l'Europe, où il s'acquit l'es-
time des savans. 11 mourut en IG83 , à i8
ans. Son génie avait été précoce ; à l'àga
de la ans , il donna trois Tragédies qui
furent applaudies. Il est le premier qui
ait tiré la tragédie allemande du chaos.
On a encore de lui : | Le généreux capi-
taine Anninius^ vaillant défenseur de la
liberté germanique^Leipsick, 1689 el 1690,
en 2 vol. in-4°. C'est un roman moral,
assez ennuyeux, dont le but est d'inspirer
de l'ardeur pour les sciences aux person-
nes destinées aux emplois publics | Des
Poésies diverses, Breslaw, 1680, et 1755;
I des Réflexions poétiques sur le 55* cha-
pitre d'Isaïe. Tous les critiques ne sont
pas d'accord sur le mérite de Lohenstein;
quelques-uns l'accusent d'avoir fondé dans
LOI 5
f.x patrie une école de inauvais goùl, et
(lavoir fait faire des pas rétrogrades à la
poésie à peine tirée du chaos par Opitz,
mais qui déjà commençait à èlre corrom-
pue par Hofmanswalldau.
F.OIR ( P^icoLAS-PiKRr.E ), peintre, né
h Paris , en 10^24, (it une élude si particu-
lière des ouvrages du Poussin, et les co-
jjiait avec tant d'art, qu'il est difficile de
distinguer la copie d'avec l'original. Louis
XIV le gratifia d'une pension de 4,000
livres. Loir s'attacha au coloris et au des-
Bin. Il avait de la propreté et de la faci-
lité. Il peignait également bien les ligu-
res, les paysages, l'architeclure et les or-
lîcmeus ; mais il excellait à peindre des
femmes et des enfans. Il fut reçu à l'aca-
démie en 1663 : son chef-d'œuvre est le
tableau de; Cléobis et Btto?i traviant le
char de leur mère. On a aussi de lui 150
gravxires à l'eau-forte. Il motirut à Paris
en 1G79. — Alexis LOIR, son frère , s'est
distingué dans la gravure. Ou estime
beaucoup sa Descente de croix . d'après
Jouvenci, ci nn Massacre des Innocens
d'après Lebrun.
* LOÏSEAU ( J!-.\\-SiMO>' ), juriscon-
sulte distingué, né le 10 mai 1776, à Frasne
en Franche-Comté , fit ses études au collège
de Pontarlier, puis à l'école centrale de
Besançon, et fit sous le célèbre Prou-
dhon ses cours de droit à Dijon, où il fut
i eçu docteur. Etant venu à Paris, il s'y fit
connaître avantageusement par sa coopé-
ration à un journal de jurisprudence esti-
mé, intitulé Jurisjinidence du Code civiL
in -8°, qu'il entreprit en 1804. avec M.
lîavoux : ce journal cessa de paraître en
1812 : il en était au 19^ vol. Loiseau acheta
en 1807 un office d'avocat à la cour de
cassation. Loiseau est mort à Paris, le
S2 décembre 1822, âge de 46 ans , et a
laisse : | Cause célèbre d'un enfant égaré
dans la Vendée, 1809, 2 vol. in-8° ; | Dic-
tionnaire des Jrrêts modernes. 1809 , 2
vol. in-S''; | Traité des enfans naturels,
adultérins . incestueux et abandonnés ,
Paris, 1811, in-S"; \ Appendice au Traité
des enfans naturel s. ibid. , Bavoux, 1819,
in-8". Ces deux ouvrages sont très estimés;
I De la juridiction des 7naires de village^
ou Ti-aité des co7itraventions de -police,
d'après les Codes pénal et d'instruction*
criminelle, ibid., 1815, in-12, deuxième
édition , 1816 ; | Mémoire sur le duel, ibid.,
1819, in-8°, de quatre feuilles et demie:
( Traité élémentaire des fromageries ,
Pontarijcr, 1821. in-S" de 80 pag. MBI. de
Giraidin et Dallu/. ont prononcé des dis-
03 LOI
cours sur sa tombe, et le Moniteur du
22 décembre 1822 lui a consacré une
Notice.
LOiSEAU. Voyez LOYSEAU.
LOIS EL ( Ai\roi.\E ), avocat au parle-
ment de Paris, né à Beau vais en 155(3,
d'une famille féconde en personnes de
mérite, étudia d'abord à Paris sons le fa-
meux llamus, qui le fit son exécuteur tes-
tamentaire, ensuite à Toulouse et à Bour-
ges , sous Cujas. Il s'acquit une grande
réputation par ses plaidoyers , et fut re-
vêtu de plusieurs emplois honorables dans
la magistrature. Il mourut à Paris en
1617, à 81 ans. On a de lui : | huit Dis-
cours intitulés : La Guienne de M. Loisel,
parce qu'il les prononça , étant avocat du
roi, dans la chambre de justice de Guien-
ne , Paris, IGOd, in-8°; | le Trésor de l'his-
toire g énéî'ale detiotre temps, depuis 1610
jusqu'en 1628, ouvrage médiocre qui n'est
pas de lui, mais de son fils Charles Loisel,
Paris, 1656 , in-8°; | Pasquier ou Dialogue
des avocats du parlement de Paris, Paris ,
1052 ; I les Règles du droit français ; | les
Mémoires de Beauvais et Beawoisis .
1717, in-4°, pleins de recherches curieu-
ses; ( les Institutes coutumières , 1710,
eri 2 vol. in-12 , réimprimées plusieurs
fois, dernière édition, 1785 ; ] des Poésies
latines ; \ Opuscules divers . in-4° , 1656
Ils furent publiés par l'abbé Joly son
neveu , chanoine de Paris , qui les orna
de la Vie de l'auteur.
LOISEL. Voyez LOESEL.
LOISOAf. Voyez LOYSON.
* LOIZEROLLES Jeax-Sihon AVED
de ), né à Paris , en 1733 , d'une famille
noble, était conseiller du roi et lieute-
nant-général du bailliage de l'artillerie à
l'arsenal de Paris , lorsque la révolution
éclata. Il ne prit aucune part à nos trou-
bles politiques ; mais ses anciens emplois,
et surtout sa naissance, étaient des titres
plus que sufflsans pour le rendre suspect.
Il fut arrêté comme tel en 1793 , et ren-
fermé avec son fils dans la maison de
Saint-Lazare. Les lieux dedétention, quoi-
que prodigieusement augmentés , ne suf-
fisant plus pour contenir les porîonnesqul
donnaient quelque ombrage, on imagina,
à défaut de preuves pour les faire périr,
les conspirations des prisons. Le 7 ther-
midor ( 25 juillet 1794 ), deux jours avant
la chute de Robespierre, l'huissier du tri-
bunal révolutionnaire se présente à Saint-
Lazare avec la liste de ceux qui devaient
(lie mis en jugement, et nomme Loize-
roiie^Iili; il doruiail en ce moment. Le
Î.GL
504
LOL
père n'hésita point à sacrifier sa vie pour
conserver celle de son fils : il suivit l'huis-
sier et parut à l'audience, où Coffinhal
fini ne voulait que des victimes , sans dis-
tinction. 86 borna à effacer sur l'acte d'accu-
sation le mot de fils, pour y substituer
celui de père. Ainsi, ce généreux vieillard,
contre lequel il n'existait pas de chef d'ac-
cusation, fut conduit à la mortel exécuté
le 27 juillet 17%. On dit qu'en montant sur
la fatale charrette , il s'écria avec trans-
port : « Dieu soit loué, j'ai réussi ! » Mais
cet acte héroïque, qui n'étonne cependant
pas dans un père, serait peut-être de-
venu inutile sans la révolution qui eut
lieu le lendemain 9 thermidor (27 juillet),
et qui renversa Robespierre avec ses
principaux complices.
LOKMAN. Voyez LOCMAN.
LOLLARD , ou LOLHARD ( Walter),
hérésiarque anglais , prêcha ses erreurs
en Allemagne, enseigna , vers l'an i3iS,
que les démons avaient été chassés du
ciel injustement, et qu'ils y seraient réta-
blis un jour, Saint-Michel et les autres
anges coupables de cette injustice devaient
êtie ( selon lui ), damnés éternellement
avec tous les hommes qui n'étaient pas
dans ces sentimens. Il méprisait les céré-
monies de l'Eglise, ne reconnaissait point
l'intercession des saints, et croyait que
les sacremens étaient inutiles. Le ma-
riage, selon lui, n'était qu'une prostitu-
tion jurée , etc. Ce fanatique se fit un
grand nombre de disciples en Autriche,
en Bohème, etc. Il établit douze hommes
choisis entre ses disciples, qu'il nommait
ses apôtres, et qui parcouraient tous les
ans l'Allemagne , pour affermir ceux qui
avaient adopté ses sentimens. Les inqui-
siteurs firent arrêter LoUard, et, ne pou-
vant vaincre son opiniâtreté , le condam-
nèrent. Il fut hrùlé à Cologne en 1522 ,
sans donner aucune marque de repentir.
On découvrit un grand nombre de ses
disciples, dont on fit, selon Trithéme, un
grand incendie. Les lollards se propagè-
rent en Allemagne , passèrent en Flandre
et en Angleterre. Ces enthousiastes sé-
duisirent beaucoup d'Anglais, et leur secte
fit des progrès dans ce royaume. Ils se
réunirent aux wicléfites, et préparèrent
la ruine du clergé d'Angleterre et le
schisme de Henri VIII, tandis que d'autres
lollards disposaient les esprits en Bohème
IK)ur les erreurs de Jean Huss , et pour la
guerre des hussiles. Tant il est vrai que
laisser germer des sectes, c'est non seule-
ment préparer drs maux inévitables à la
religion , mais ébranler encore la consti-
tution des états.
LOLLIA- PAULIN A, impératrice ro-
maine, petite-fille du consul Lollius , était
mariée à C. Memmius Régulas , person-
nage consulaire, gouverneur de Macé-
doine , quand l'empereur Caligula fut
épris de sa beauté. Afin de l'épouser dans
les formes , il obligea Memmius de se dire
le père de cette dame , dont il était le vé-
ritable mari. Elle ne porta pas long-temps
le titre si envié et si dangereux d'impé-i
ratrice. Caligula, dégoûté bientôt de la
beauté de LoUia, la répudia sans motif ni
prétexte, mais de sa seule volonté. Après
la mort de Messaline , femme de Claude,
successeur de Caligula, Lollia brigua l'hon-
neur de devenir l'épouse de Claude ; mais
Agripplne l'emporta par les intrigues da
Pallas , accusa sa rivale de sortilège , et
sous ce prétexte la fit bannir par l'em-
pereur, puis assassiner par un tribun,
l'an 49 de Jésus-Christ.
LOLLIEIN ( Spurids Servilius Lollia-
Ntjs ), soldat de fortune, né dans la lie
du peuple, s'avança dans les armes par
son intelligence et sa bravoure. Il fut
revêtu de la pourpre impériale par les
soldats romains qui venaient de massa-
crer Posthume le Jeune. Ce fut dans le
commencement de l'an 207. L'usurpateur
se défendit à la fois contre les troupes de
Gallien et contre les Barbares d'au-delà
du Rhin. Après les avoir contraints de
retourner dans leur pays, il fit rétablir
les ouvrages qu'ils avaient détruits.
Comme il faisait travailler ses soldats à
ces travaux , ils se mutinèrent et lui ôtè-
rent la vie après quelques mois de règne.
LOLLIUS ( Marcus ) , consul romain,
fut estimé d'Auguste. Cet empereur lui
donna le gouvernement de la Galatie, de
la Lycaonie, de l'Isaurie et de la Pisidie,
23 ans avant Jésus-Christ. Il le fit ensuite
gouverneur de Caïus César, son petit-fils,
lorsqu'il envoya ce jeune prince dans l'O-
rient pour y mettre ordre aux affaires de
l'empire. Lollius fit éclater dans ce voyage
son avarice et d'autres mauvaises qua-
lités qu'il avait cachées auparavant avec
adresse. Les présens immenses qu'il ex-
torqua de tous les princes pendant qu'il
fUt auprès du jeune César, découvrirent
ses vices. Il entretenait la discorde entre
Tibère et Caïus César, et l'on a cru même
qu'il servait d'espion au roi des Parlhes
pour éloigner la conclusion de la paix.
Caïus, ayant appris celte trahison , l'ao
cusa auprès de l'emperuur. Lollius, crai-
LOL
b'05
LOM
gnant d'être puni romuie il le méritait ,
s'empoisonna, laissant des biens immen-
ses à MarcusLoUius, son fils, qui fut consul
et dont la fille LoUia Paulina épousa Cali-
pula. C'est ce dernier Lollius auquel Ho-
race adresse la 2" et la 8"^ épitre de sou
premier livre, et qu'il appelle Maxime
Loin.
' * LOLME (Jean-Louis de ) , né à Ge-
nève en 1740, exerça d'abord la profes-
sion d'avocat, qu'il abandonna pour aller
examiner les coutumes et les constitutions
des différens états de l'Europe. Il fixa
d'abord ses regards sur le gouvernement
anglais, et se rendit à Londres pour l'é-
tudier. Vers 177S , il revint à Genève et
y fut membre du conseil des Deux-Cents;
mais dans la suite il retourna à Londres
et ne revint en Suisse que sur la fin de
ses jours. Il est mort à Seven sur le Ruf-
fiberg, canton de Schwitz, en juillet 1806.
II publia : | Parallèle du gouvernement
anglais et de l'ancien gouvernement de
Suède^ contenant 'quelques observations
sur la dernière révolution an*ivée dans
ce royaume^ etc. en anglais; | Constitu-
tion de l'Angleterre , ou Etal du gouver-
nement anglais, dans lequel il est com-
paré à la fois avec la forme républicaine
de gouvernement, et avec les autres mo-
narchies de l'Europe, en français , Am-
sterdam, 1771, in-8°, souvent réimprimé.
Ce livre fut bien accueilli en France.
L'auteur améliora son plan, et publia une
édition anglaise en octobre 1775. Son ou-
vrage est estimé des anglais, quoiqu'il soit
loin d'être complet et irréprochable. Il a été
vivement critiqué par l'auteur de l'Exa-
men dugouvememeyit d' Angleterre , com-
paré aux constitutions des Etats-Unis , et
surtout dans les notes ajoutées par l'édi-
teur. On ne peut se dissimuler que plu-
sieurs des reproches qu'il lui fait ne soient
fondés : | Histoire des flagellans, ou Mé-
moires sur la superstition humaine, 1777,
in-i", en anglais. C'est une paraphrase
du livre de l'abbé Boileau, et l'on repro-
che à de Lolme de n'avoir pas gardé la
mesure convenable. Le style, d'ailleurs,
n'en est pas estimé. | Observations rela-
tives aux taxes sur les fenêtres, les bou-
tiques, et à l'impôt sur les merciers am-
bulans, etc. Elles sont pleines de sens et
de jugement. | Observations sur l'em-
barras national, et sur la manière dont
le parlement a procédé à ce sujet. Il a
ciiiis la même opinion que Pitt , qui fut
adoptée par le parlement et partagée par
la grande majorité de lanation. La vie pri-
7.
vée de Lolme est remplie de singularités;
il recherchait la société des classes infé-
rieures et changeait souvent de nom. 11
était presque sans moyens d'existence et
sa fierté l'empêcha toujours de solliciter
pour en obtenir. 11 vivait de peu ; son ex-
térieur ^ ainsi que ses habitudes, étaient
devenus presque repoussans.
LOM ou LOMMIUS (Josse van), savant
médecin, né à Burin, dans le duché de
Gueldre, vers 1500 , exerça sa profession
principalement à Tournai et à Bruxelles,
et mourut vers l'an 1362. Nous avons de
lui : I Commentarii de sanitate tuenda in
primum lib. De re medica C. Celsi, Leyde,
1761 ; I Observationum medicinalium libri
très. On en a fait un grand nombre d'édi-
tions ; la plus récente est celle d'Amster-
dam, 1761, in-12. Il a été traduit deux fois
en français, Paris, 1712 et 1739; | Decuran-
dis febribus, Amsterdam, 1761. Le latin
de Lommius est pur et élégant. On pré-
tend qu'aucun médecin de son siècle n'a
fait mieux connaître les maladies, ni pres-
crit une pratique plus judicieuse et plus
sûre. Ses observations sont sages et soli-
des. En parlant des avantages de la so-
briété , il remarque que le précepte que
fait l'Eglise de la quarantaine qui a lieu
au commencement du printemps est par-
failemoiil conforme aux lois de l'hygiène,
et qu'étant observée avec régularité , elle
prévient plusieurs maladies. Tous les ou-
vrages de Lommius ont été imprimés à
Amsterdam en 1745 et 1761, 3 vol. iu-12.
LOMAZZO ( Jean - Paul ) , peintre et
savant italien, né à Milan en 1538, de-
vint habile dans la peinture et dans les
belles -lettres. La littérature lui fut d'un
grand secours quand il eut perdu la vue
à la fleur de son âge ( 35 ans ) , suivant la
prédiction que lui en avait faite Cardan.
Il mourut en 1598. On a de lui deux ou-
vrages peu communs : | un Traité de la
peinture en italien, Milan, 1584, 1585,
1590, in-4°; ouvrage excellent : le pre-
mier livre de ce traité a été traduit en
français sous le litre de Traité de la pnh
portion naturelle, Toulouse, 1649, in-fol.
fig.; I Idea del tempio délia pittura, 1590 ,
in-4°. Plusieurs poètes et savans ont cé-
lébré Lomazxo dans leurs écrits, scit
comme littérateur , soit comme peintre.
Ses Poésies sont encore très estimées, et
ses tableaux ornent les églises et les palais
d'Italie.
LOMBARD ( Pierre ). J^oyez PIERRE
LOMBARD.
LœiBARD ( Lambert ) , né à liège en
43
LOM
s'appliqua avec succès à la
Îi06
LOM
4506, s'appliqua avec succès à la pcin
lure. Il se perfectionna dans son art en
Allemagne, en France, et surtout en Ita-
lie, où il passa à la suite du célèbre car-
dinal Polus. De retour dans sa patrie , il y
établit le bon goût dans la peinture et
l'architecture, et forma des élèves qui
tirent de grands progrès dans cet art.
Hubert GoUzius publia la f^ie de Lom-
bard par Dominique Lampson, sous ce
titre : Lambertî Lombardi apud Ehuro-
nes pictoris celeberrimi Vita^ Bruges,
1565, in-8". Goll7,ius y donne un témoi-
(jnage éclatant de sa reconnaissance pour
les leçons qu'il avait reçues de Lombard.
Ce peintre était encore en vie l'an 1565 ;
on ignoré l'année de sa mort.
LOMBERT ( Pierre ) , avocat au parle-
ment de Paris , où il est né , fut uni aux
solitaires de Port-Royal , et demeura quel-
que temps dans leur maison. Il traduisit
les Ecrits des saints Pères^ et mourut en
4710, après avoir publié plusieurs ver-
sions. Les plus estimées sont : | V Expli-
cation des premiers chapitres du Canti-
que des cantiques par saint Bernard , Pa-
ris, 1670, in-8° ; | le Guide du chemin du
ciel, ou Principes de la vie chrétienne ,
écrit en latin par le cardinal Bona . Paris,
4681 ; I les Ouvrages de saint Cyprien^
Paris, 1672, 2 vol. in-i" , Rouen , 1716,
même format accompagnés de notes,
d'une nouvelle VieAe. ce Père, tirée de ses
écrits , et la traduction de l'ancienne par
le diacre Ponce , etc. ; | une Traduction
des Commentaires de saint Augustin : De
sermone Christi in monte , Paris , 1683 et
4701, in- 18; | euiin la Traduction de la
Cité de Dieu du même docteur , avec des
notes, en 2 vol. in-S", 4675; réimprimée
en 1818,3 vol. in -8°, avec la vie de saint
Augustin et une analyse de ses œuvres,
le tout extrait des f^ies des Pères de
Godescard. On peut reprocher à Lombert
ce qu'on a reproché à Dubois , autre tra-
ducteur de Port- Royal. Saint Bernard,
saint Augustin et saint Cyprien ont chez
lui à peu près le même style , les mêmes
tours et le même arrangement.
LOMBES, rayez AMBROISE de.
LOMEIER ( Jean ) , ministre réforme ,
né en 4636, à Zulphen, mort dans le
même lieu en 4699, s'est distingué par
son Traité historique et critique des plus
célèbres bibliothèques anciennes et mo-
dernes, imprimé à Zulphen en 1669, et
Ulrccht 4680, in- 8°. De tous les livres
que nous avons sur cette matière, c'est le
plus savant, mais non pas le mieux écrit;
et depuis qu'il a été publié, il y aurait
bien des additions à y l'aire.
LOMENIE ( Heivri-Auguste de), comte
de Brienne, naquit à Paris en 1594. I^
roi Louis XIII le fit capitaine du château
des Tuileries , en 4622, et l'envoya eu
\ngleterre deux années après, pour ré-
gler les articles du mariage de Henriette
de France avec le prince de Galles. II
suivit le roi au siège de la Rochelle, dans
le commencement du règne de Louis
XIV , et eut ensuite le département des
affaires étrangères. Il se conduisit avec
beaucoup de prudence durant les troubles
de la minorité , et mourut en 1666 , à 71
ans. Il a laissé des Mémoires manuscrits,
depuis le commencement du règne de
Louis XIII jusqu'à la mort du cardinal
Ma/.arin. On en a pris les morceaux les
plus intéressans pour composer l'ouvrage
connu sov le titre de Mémoires de Lo-
ménie, imprimés à Amsterdam , 1719,
4723, en 3 vol. in -12. L'éditeur les a
poussés jusqu'en 1681. Ils offrent quel-
ques déttils curieux et des anecdotes
utiles pour l'histoire de son temps. Ces
mémoires ont été réimprimés avec une
notice par M. Pelitot dans la 2^ série des
Mémoires relatifs à l'histoire de France,
lom. 55 et 36. Le père Senault de l'Ora-
toire a fait \ Oraison funèbre du comte
de Brienne.
LOMÉiME (Louis -Henri de), comte
de Brienne , fils aîné du précédent , né en
1635 , fut pourvu en 1651 , dès l'âge de 16
ans , de la survivance de la charge de se-
crétaire-d'état qu'avait son père, et com-
mença à l'exercer à 23 ans, après avoir
voyagé en différentes contrées d'Europe.
Mais l'affliction que lui causa la mort de
sa femme, Henriette de Cliavigni, en
1665, aliéna son esprit. Louis XIV fut
obligé de lui demander sa démission.
L'ex-ministre se retira chez les pères de
l'Oratoire, après avoir vainement teiilô
d'entrer chez les chartreux. Il vécut d'a-
bord avec sagesse, et reçut même les
ordres sacrés; mais il ne tarda pas à se
dégoûter d'une vie qui lui paraissait trop
uniforme. Il reprit ses voyages , passa en
Allemagne , s'enflamma , dit- on -, pour la
princesse de Mecklembourg, et lui dé-
clara sa passion. Louis XIV, à qui cette
princesse en porta des plaintes , ordonna
à Loménie de revenir à Paris, et le fil
enfermer dans l'abbaye de Saint-Gcrrriain.
On fut obligé de le confiner ensuite à
Saint-Benoît-sur-Loire, puis à Saint- La-
zare. L'écrit qui loccupa le plus dans sa
LOM !î
prison fut une Histoire du jansénisme,
sous le titre de Roman véritable, on
l'ITistoire secrète du jansénisme , dialo-
gues de la composition de M. de MÉLO-
DIE (Loinénie), siî'e de Nebrine , etc.,
d68!). Cet ouvrage n'a point été imprimé;
r,'est un mélange de prose et de vers en
9 livres. Les portraits d'Arnauld , de Lan-
celot et de quelques autres y sont peints
avec beaucoup de feu. L'auteur y ménage
peu les solitaires de Port-Royal , dont les
partisans ne l'ont pas ménagé à leur tour.
Lorsqu'il pouvait calmer les agitations de
son esprit, il était aimable; son cœur
était sensible et généreux. Quelques an-
nées avant sa mort, il eut ordre de
se retirer à l'abbaye de Saint-Séverin
de Château- Landon, où il mourut en
•iG98. Outre son Roman véritable^ dans
lequel on recueillerait quelques anec-
dotes, si l'on pouvait en séparer le sé-
rieux des plaisanteries qui y dominent,
on a de lui : | les Mémoires de sa vie en»
3 vol. in -fol.; | des Satires et des Odes;
I un Poème ^ plus que burlesque, sur les
fous de Saint-Lazare. Les ouvrages pré-
cédens sont manuscrits. | V Histoire de
ses voyages j in-8°, écrite en latin avec
assez d'élégance et de netteté , 1660 , in-
12; 1662, in-8°, revue par Ch. Patin; | la
Traduction des Institutions de Thaulcre,
1665 , in-8° ; 1 un Recueil de poésies chré-
tiennes et diverses^ 1671 , 3 vol. in-12. On
y trouve plusieurs de ses propres ouvra-
ges. L'auteur avait de la facilité et de la
vivacité ; mais son imagination n'était pas
toujours dirigée par un goût sûr. | Les
Règles de la poésie française, qu'on
trouve à la suite de la Méthode latine de
Port-Royal. C'est un canevas qui a servi
à tous ceux qui ont écrit sur la même ma-
tière. I La Vie et les révélations de sainte
Gertrude. Paris, 1673, in-8°.
* LOMÉNIE de BRIENNE, ( Etienne-
Charles de), cardinal . de l'illustre famille
de ce nom , naquit à Paris en 1727. Il em-
brassa l'état ecclésiastique , pour se con-
former aux désirs de ses parens. Attaché
dès sa jeunesse au parti philosophique , il
commença sa carrière d'une manière qui
faillit être scandaleuse. Il soutint en Sor-
i>onne, le 50 octobre 1751 , une thèse que
celle de l'abbé de Prades fit depuis ou-
blier, mais dans laquelle l'abbé Mey si-
gnala plusieurs propositions hasardées. Il
paraît cependant que , par égard pour sa
famille, il ne fut soumis à aucune cen-
sure. Il reçut de l'archevêque de Rouen
des lettres de grand- vicaire ; et sa liaison
07 LOM
avec l'évéque d'Orléans, alors chargé de
la feuille des bénéfices, lui fit obtenir eu
1760 l'évêché de Condom, et en 1765 l'ar-
chevêché de Toulouse. Il se distingua
dans ce dernier poste par une application
constante aux affaires et aux intérêts de
la province de Languedoc, et s'attira la
bienveillance de la cour. Il s'y fit remar-
quer par sa bienfaisance et quelques éta-
blissemens utiles. On le citait même com-
me un évêque administrateur , sorte de
mérite dont on faisait alors beaucoup de
cas. Aussi fut-il nommé de toutes les as-
semblées du clergé, où il acquit mal-
heureusement trop d'influence. Chargé
des mesures à prendre pour le bien de la
religion , il parut plus occupé à arrêter le
zèle de ses confrères , qu'à provoquer de
sages règlemens. On eut un exemple de
la légèreté avec laquelle il traita les af-
faires, dans le rapport qu'il fit le 25 mai
1766 sur le concile d'Utrecht, et qui
est plein d'inexactitudes. Un arrêt du
conseil l'ayant nommé, la même année,
membre d'une commission créée pour la
réforme des ordres religieux, il fut le
principal agent de cette commission , et
on l'accusa d'avoir attisé des divisions
dans les monastères, d'avoir excité les
inférieurs contre leurs supérieurs, et d'a-
voir contribué à dégoûter de leur état
des hommes que l'esprit du siècle en
éloignait déjà. Les assemblées du clergé
de 1773 , de 1773 et de 1780 , se plaigni-
rent de ces efforts sourds; et quelques
parlemens même reprochèrent à la com-
mission de s'arroger une autorité exces-
sive, et de n'avoir su que détruire, tan-
dis qu'elle avait été créée pour conserver.
Effectivement des maisons furent sup-
primées, des ordres détruits, d'autres
sécularisés, et nulle part une meilleure
discipline ne fut introduite, parce que ce
n'était point ce que l'on scuhailait. A la
mort de M. de Beaumont, archevêque de
Paris, les partisans nombreux de M. de
Brienne firent leurs efforts pour le faire
nommer à ce siège; mais le choix du
roi tomba sur M. de Juigné. L'arche-
vêque de Toulouse ouvrit plus tard un
synode diocésain, où l'on s'occupa prin-
cipalement des portions congrues et des
secours à accorder aux ecclésiastiques
vieux et infirmes ; et les mesures que l'on
prit sur ces deux points parurent sages.
On fit aussi d'utiles règlemens; on publia
un abrégé du rituel , et l'archevêque pré-
sida toutes les séances. On n'eut garde
d'oublier celte nouvelle occasion de van-
LOIVi
»08
LOM
ter le zèle du prélat que l'on voulait porter
au ministère. Habile à se ménager tous
les genres de succès , Loménie avait placé
en qualité de lecteur , auprès de la reine,
une de ses créatures les plus dévouées ,
et qui ne tarda pas à prendre un trop
grand ascendant sur l'esprit de cette
bonne et confiante princesse. C'était l'abbé
de Vermont, homme intrigant, actif,
présomptueux, mais qui se montra dans
toutes les circonstances fidèle à la recon-
naissance qu'il devait à l'archevêque. En-
nemi déclaré de Galonné, alors contrô-
leur-général des finances, Loménie,
après avoir réussi à surmonter le pen-
chant de la reine pour ce ministre, qui
trouvait en elle son principal appui, ne
fut pas moins heureux à soulever contre
le rival qu'il voulait renverser les nota-
bles du clergé et de la magistrature , et à
le faire tomber dans la disgrâce la plus
absolue du roi , qui lui retira la direction
des finances, lui ôta le cordon de ses
ordres, et l'exila en Lorraine (voyez GA-
LONNE). Fourqueux, qui n'avait occupé
qu'un moment le contrôle-général, ayant
pris sa retraite en décembre 1787, l'ar-
chevêque de Toulouse devint principal
ministre ( le litre de premier ministre ne
lui fut jamais donné), et fut nommé dans
le même temps à l'archevêché de Sens,
vacant par la mort du cardinal de Luynes,
il parut bientôt forbau-dessous des fonc-
tions qu'il avait briguées avec tant d'ar-
deur et de persévérance. On jugea ses
vues courtes , ses opérations mesquines ,
sa marche inconséquente et mal assurée.
Après avoir attaqué les plans de Galonné
et décidé la disgrâce de ce ministre, il se
rattacha à ses projets , et voulut les faire
exécuter ; mais il se vit dans l'impuis-
sance de surmonter les obstacles qu'il
avait suscités , et le parlement de Paris
s'élant constamment opposé à l'enregis-
trement de l'impôt territorial et de celui
du timbre, sur lesquels reposait tout le
système financier de l'archevêque, il reçut
l'ordre de cesser ses fonctions et de se
rendre en exil à Troyes. Ces violences
furent de peu'de durée : l'opinion publi-
que se prononça avec une telle force , et
les pamphlets, les satires , les épigram-
mes accablèrent tellement le principal
ministre, que le 2/i. août 1788 , après une
administration de huit mois , il reçut sa
démission. Le IS décembre suivant , il
obtint le chapeau de cardinal. Le roi lui
avait donné plusieurs riches abbayes et il
s'était retiré du ministère avec 800,000
francs de héncfices. La révolution ayant
éclaté peu après, le cardinal de Loménie,
mécontent de la cour, dont il accusait la
faiblesse et l'instabilité, se déclara le par-
tisan de ce grand soulèvement politique,
et se vanta même de l'avoir préparé ;
mais, dominé par l'inconstance de son
caractère, il mit 'dans les affaires delà
religion la même incertitude et la même
flucluation qu'il avait apportée dans celles
de l'état, et après avoir prêté le serment
prescrit par la constitution civile du
clergé , il refusa de sacrer les premiers
évêques constitutionnels. Ayant, depuis
lors, parlé avec "mépris de cette constitu-
tion, il changea de nouveau de langag.î
et jura de l'observer. Il chercha néan-
moins, à la suite de cette dernière dé-
marche, à s'excuser auprès du pape ; mais
bientôt après , livré à ses incertitudes et à
son inconstance habituelle , il lui renvoya
le chapeau de cardinal qui ne lui fut pas
rendu. Pie VI lui adressa de vifs reproches,
à l'occasion de son serment, dans son bref
du 23 février 1791. Depuis cette époque,
toujours tremblantpour ses jours , il s'é-
tait retiré à Sens. Arrêté le 9 novembre
1793 , et jeté dans la prison de cette ville ,
il mourut la veille du jour où l'on devait
le transférer dans un autre lieu de déten-
tion, le 16 février 1794, d'une attaque d'a-
poplexie foudroyante. On a dit qu'il s'é-
tait eiTipoisonné ; mais rien n'a justifié ce
bruit public. Il aimait beaucoup les li-
vres, et ne passait dans aucune ville sans
entrer chez tous les libraires pour y dé-
couvrir quelques ouvrages rares, propres
à enrichir sa nombreuse bibliothèque. Sa
malheureuse famille devint, quelques
mois après , victime de sa funeste célé-
brité, et périt presque tout entière sur
l'échafaud, le 21 floréal an 2 ( 10 mai
1794), le même jour que l'infortunée
sœur de Louis XVI. Considéré comme
évêque, on pourrait juger le cardinal de
Loménie non moins sévèrement que
comme homme d'état. Austère dans ses
mandemcns , il était très relâché dans ses
mœurs. Ce fut à ses liaisons avec les
hommes dont s'enorgueillissaient alors la
philosophie et les lettres, bien plus qu'à
ses titres littéraires personnels , qu'il dut
son admission à l'académie française,
Beaulieu , dans ses Essais historiques sur
la révolution de Fi-ance . le peint ainsi
dans le tableau qu'il fait des principaux
ministres de Louis XVI. « Galonné fut
» remplacé par Loménie de Bricnne,
» alors archevêque de Toulouse , prêtre
LOM
509
LOM
V» philosophe, ayant la répulalion d'être
» alliée, ami de la liberté par principes
D et despote par caractère, professant
» les opinions de J.-J. Rousseau, et se
» conduisant comme le cardinal de Ri-
» chelieu; courant après la pourpre ro-
n maine , et se moquant avec ses amis des
p statuts de Rome et de ce que la reli-
» gion a de plus sacré ; discutant avec
» habileté sur les affaires publiques , et
» ne connaissant point les hommes; esprit
• superficiel, enfin, considéré comme
o homme de gériie , dont il n'était que la
» caricature. » Beaulieu ajoute que ce ne
fut qu'avec beaucoup de peine, et après
plusieurs tentatives infructueuses de la
part aes personnes qui étaient les plus
chères au roi, qu'on put enfin le dé-
terminer à donner sa confiance à M. de
Brienne. Cet homme ne croit pas en Dieu,
disait ce religieux monarque à ceux qui
le lui proposaient. Pour vaincre cette ré-
pugnance, le rusé prélat feignit la vertu
et cacha ses vices. Outre ses rapports et
discours insérés dans les procès-verbaux
des assemblées du clergé, il a successive-
ment publié : Oraison funèbre du dau-
phin ; Compte rendu au roi^ mars , 1788 ;
Le Conciliateur ou Lettres d'un ecclé-
siastique à un magistrat , Rome , 1754 ;
enfin plusieurs Lettres pastorales et Man-
demenSj qui sont, peut-être, ce qu'il a
écrit de mieux.
LOMER (saint), Launomarus^ abbé
au diocèse de Chartres, mourut le 19 jan-
vier 59i. Ses reliques, portées dans le
diocèse de Blois , donnèrent lieu d'y fon-
der au 10' siècle une abbaye cpii porte
son nom.
• LOMET ( Antoine-François , baron
de FOUCAUX), né à Chàleau-Tliierry
(Aisne), le 6 novembre 17S9, entra en
1777, à l'école des ponts-et-chaussées , et
devint en 1782 ingénieur dans la généra-
lité de Bordeaux. Il se fixa à Agen et fut
envoyé en 1790 auprès de l'assemblée
Constituante pour faire quelques réclama-
tions au nom de cette ville. Lomet fut re-
quis en 1792 , pour se rendre à Bayonne ,
afin de seconder en sa qualité d'ingénieur,
Garrau , Lamarque et Carnot chargés de
faire la reconnaissance de la frontière des
Pyrénées. D'abord adjoint à l'état-major,
puis aide-de-camp du général Servan, il
passa l'hiver de 1793 sur les bords de la Bi-
dassoa, où l'armée était, faute d'abri, expo-
sée à beaucoup de souffrances et de mala-
dies. Lomet proposa et entreprit de l'abri-
ter tout entière , et il exécuta son projet en
moins de lo jours : 475 baraques s'é'levêf-
rent avec une célérité merveilleuse à la-
quelle l'armée dut son salut. Il eut un
jour une conversation assez remarquable
avec Bonaparte : celui-ci ayant montré
en 1794 un Mémoire qu'il avait composé
et écrit de sa main sur les moyens de de-
venir souverain de l'île de Corse : a Mais .
» lui dit Lomet, ce nouveau Théodore
» courrait la double chance d'être cou-
» ronné ou pendu. » Après quelques rao-
mens de silence , Bonaparte lui dit : « Vous
» ne connaissez pas le monde , vous n'a-
» vez étudié que les arts ; la véritable
» science est de vouloir bien ce que l'on
» veut , et de savoir employer les hommes
ï) comme les arithméticiens emploient
» leurs chiffres ; m'entendez-vous ? — Oui,
» fort bien : je comprends même que , si
B vous aviez quelque autorité sur moi ,
» j'aurais à craindre de n'être bientôt que
» le chiffre barré d'une multiplication
» complexe. » Lomet fit à l'école poly-
technique, que Carnot et le Prieur orga-
nisaient alors sous un autre nom , nn
cours de mécanique et de topographie ;
mais à l'époque de la disgrâce de Carnot ,
il fut renvoyé. Il retourna à Agen, où il
professa la physique et la chimie à l'école
centrale de Lot-et-Garonne , et refusa
d'aller en Egypte. Avant le retour du gé-
néral en chef qui s'était rendu en Orient ,
il fut attaché par Bernadolte au conseil
central des opérations des armées , présidé
alors par le général Dupont. Bonaparte ,
devenu consul, l'accueillit froidement;
toutefois, comme il connaissait son mé-
rite , il ne tarda jias à lui confier les fonc-
tions de chef de la division des opérations
militaires et du ministère de la guerre.
En 1803 , Lomet fit partie de l'état-major-
général de l'armée d'Allemagne comme
sous-chef, et, en 1807, il fut nommé
commandant de la place de Braunau sur
l'Inn , l'une des clefs de l'Autriche. Ce fut
pendant son séjour dans cette ville qu'il
s'occupa de l'art lithographique qui pre^
nait alors naissance en Allemagne. Il par-
vint à découvrir les secrets des procédés
de cette invention que l'on tenait cachés,
et après avoir continué les recherches svir
la lithographie , et avoir été gouverneur
du Haut-Aragon , en 1808 , il vint à Pa-
ris apporter les résultats de sa précieuse
découverte ; mais , soit que la pierre qu'il
employa fût mauvaise ou mal préparée,
soit que l'on ne connût pas les moyens
de tirer convenablement les épreuves,
on n'apprécia pas ses lithographies; et
45.
LOM
SJO
LON
la pierre qu'il avait apportée fut relé-
guée dans un coin du Muséum d'his-
toire naturelle^ où elle se trouve encore
classée parmi les échantillons de son or-
dre, c'est-à-dire, parmi les calcaires com-
pactes. Lomet alla en Espagne , où il prit
possession de la forteresse de Jaca , puis
demanda et obtint sa retraite en 1809. Il
était commandant de la légion d'honneur,
depuis la bataille d'Austerlitz (1803) ; et
reçut la croix de Saint-Louis , en 1814.
O'était un mathématicien très ingénieux :
il osa mystifier l'académie des sciences
par un mémoire qu'il envoya à l'un des
principaux savans , sous le nom de Ever-
Ung Slauberg ^ chimiste allemand- Ce mé-
moire , dans lequel il développe avec
adresse les procédés les plus singuliers et
et les plus impraticables , captiva les sa-
vans auxquels il était dédié , et fut inséré
dans les mémoii'es de l'académie. Lomet
est mort à Paris, le 10 novembre 1826.
Il a publié : | Mémoire sur les eaux miné-
rales et sur les établissemens thérm.aux
des Pyrénées , 1793 , in-8° ; | l'Invention
d'un nouveau sextant ^ 1799; | Théorie et
pratique du nivellement et son applica-
iion au calcul des terrasses ; \ Traité de
'a construction ^ de l'équipement et des
manœuvres des machines de théâtre^ fai-
sant suite aux 7'ecueils de charpenterie
de Krafft . grand-in-folio, texte en trois
langues. Le dépôt de la guerre possède de
lui en manuscrit un excellent Traité du
baraquem,ent des troupes. « On pourrait ,
> dit un biographe en parlant de Lomet,
» le nommer le Rabelais de la mécanique
» et le Sterne de la science. t>
LOMONOSSOFF ( Michel - Vasilie-
viTSCu), célèbre poète russe, naquit en
4711 , à Denissofka près de Kholmogori ,
sur la mer Blanche. Fils d'un pêcheur il
partagea d'abord les occupations de son
père. La lecture de quelques livres que
lui avait donnés un ecclésiastique en-
flamma sa jeune imagination : n'écou-
lant plus que son désir de s'instruire , il
s'enfuit de la maison paternelle et se
rendit à Moscou , où il fut admis à l'école
de Zaikonospask. 11 y étudia les langues
grecque , latine , allemande , française et
les belles-lettres. Envoyé en Allemagne
en 1736, aux frais du gouvernement, il y
apprit la chimie , les mathématiques ,
l'histoire, etc., d'abord à Marbourg et en-
suite en Saxe. Lomonossoff remplit à
Pétersbourg et à Moscou les chaires de
ces diverses sciences , fut membre de l'a-
çttdçnùe de cette viUe, de celle de Stock-
holm , de l'institut de Bologne , etc., ef
devint conseiller d'état, sous l'impératrice
Elizabeth ; il publia dans la langue du
pays , en 1760 , un Abrégé des annalei
de Russie ^ depuis l'origine de la nation
russe jusqu'à la mort du grand duc Ja-
roslaw r\ en 1734. Cet ouvrage a été Ira
duit en allemand par le baron de Holbach
et imprimé à Leipsiak, et en français, Pa-
ris, 1769, in-12. L'auteur l'aurait poussé
plus loin, sans sa mort arrivée le 4 avril
1763. Ses principaux ouvrages, comme
poète, sont la Pétréide , en deux chants ;
deux tragédies, et plusieurs Morceaux
lyriques. Il publia aussi un Cours de Rhé-
torique, une Grammaire russe j un Essat
de physique et de métallurgie ; Médita-
tions du soir et du matin sur la grandeur
de Dieu. On a traduit en différentes lan^
gués la plupart des ouvrages de Lomo-
nossoff. Sa vie a été écrite en russe par
l'amiral Schithkoff.
* LOi\CHAMPS (Charles de), auteur
dramatique , né en 1767 , à l'ile Bourbon ,
fut envoyé dès son enfance en Europe , et
fit ses études à Rennes , d'où sa famille
était originaire. Il retourna, en 1786,
dans son pays natal, pour y recueillir
l'héritage de son père , et , après deux
années passées dans les plaisirs, il se mit
à parcourir les Indes , sans autre but que
de satisfaire sa curiosité. Il se lia à Chan-
dornagor avec M. de Jouy, et il s'y trou-
vait , en 1791 , lorsqu'une insurrection
éclata dans celte colonie , qui participait
ainsi aux effets de la révolution française.
Lonchamps prit parti pour les insurgés.
Le gouverneur ayant été pris dans le foit
où il s'était retiré , fut envoyé en France ,
et Lonchamps fut ensuite député à l'Ile-
de-France , pour faire approuver par le
gouvernement général la conduite de la
ville de Chandernagor, mission qu'il rem-
plit avec succès et à ses frais. Il repassa en
France, en 1792 où il ne tarda pas à être
désabusé de l'idée qu'il se formait du nou-
vel ordre de choses. Arrêté, en 1793, comme
suspect, il fut détenu 7 mois à Saint-La-
zare. En sortant de prison, il fut nommé
adjoint à l'adjudant-général Jouy, son
ami. Ses dépenses excessives ayant dé-
rangé sa fortune , Lonchamps se fit une
ressource d'un talent qu'il n'avait CAllivé
que pour son plaisir, et composa pour le
théâtre du Vaudeville : | l'Arbitre^ ou les
Consultations de l'an sept. 1793; | àom-
ment faire ? ou les Epreuves de misan-
thropie et repentir, 1799; | £a Fille en
loterie, 1800. Il fit quelques autres pièces
LON
811
LON
avec MM. Dieu-la- Foy et Jouy, telles que
les suivantes : | Dans quel siècle sommes-
nous ? 1800 ; I le Tableau des Sabines ,
1799, etc., et en composa seul plusieurs,
telles que I Ma tante Awore, 1803 , opéra-
bouffon, en 3 actes, qui fut sifflé et réduit
ensuite à deux actes ; | le Duel nocturne j
opéra-comique , en deux actes , 1805 ; I Le
Séducteur amoureux^ 1803, comédie en
5 actes et en vers , qui obtint du succès
au Théâtre-Français , quoiqu'elle appar-
tienne à l'école de Marivaux et de Dorât;
\la Fausse honte^ comédie en cinq actes,
et en vers, qui ne put se soutenir, etc.
Lonchamps , dégoûté de la carrière dra-
matique, accepta la place de secrétaire
des commandemens de Caroline Bona-
parte, épouse de Joachim Murât, alors
grand-duc de Berg ; fit , avec ce dernier,
la campagne d'Austerlitz , en qualité
d'officier d'état-major, et obtint, à son
retour, la décoration de la légion-d'hon-
neur. Murât, devenu roi de Naples, lui
donna celle de l'ordre des Dcux-Siciles ,
avec les tilres de chambellan et de surin-
tendant des théâtres de sa capitale , en
4809. Dans ses dernières années, Lon-
champs se retira dans la famille de sa
fexTime à Louviers (Eure), et écrivit en-
core quelques ouvrages dramatiques ,
qui n'ajoutèrent rien à sa réputation. lia
laissé en outre deux vol. in-12 de Poésies
diverses et de chansons, 1821 , où l'on dé-
sirerait peut être que l'auteur se fût mon-
tré plus sévère sur ce qui concerne les
mœurs. On y trouve de la facilité et du
mouvement. Nous en citerons ce couplet,
où le poète a pcinl sa propre situation :
Adieu donc, stcrili; éliquelle !
Adieu pelilp vanilc ,
Graves riens , noble ennui , toilelle ,
Fl grandes frics sans gailé !
Adieu, clef dVir <iu'ont a>i derrière,
Mes colli'^Kiie» les chambellans.
Pour vivie enfin à ma manière ,
Ma foi , j'ai pris la clef des champs.
Lonchamps est mort à I-ouviers le 19 avril
1832.
LONDE (FRA.NÇo:s-RrcH.\RD de la), né
à Caen en 1683, mort en 176b, se livra
à la poésie , à la musique , à la peinture ,
au dessin eî au génie. Il a laissé : | le Plan
et les vues de Caen, exécutes avec beau-
coup de netteté; | Paraphrases en vers
des sept Psaumes de la pénitence, 1748,
in-8° ; | Mémoires concernajit le com-
merce de la Basse-Normandie , manus-
crits ; I Recherches sur l'antiquité du
château de la ville de Caen, aussi en ma-
nuscrit ; I diverses Pièces de poésies , lea
unes manuscrites , les autres insérées dans
des recueils ou journaux.
LONDOiXDERIlY. Voyez CASTLE-
REAGII.
* LONDRES ( Théophile-Igwace-Aw-
KER de) , naquit à Quimper le 1" octobre
1728. Il entra chez les jésuites, et survé-
cut à leur suppression. Il est connu par
quelques ouvrages , dont voici les litres :
I Description historique de la tenue du
conclave et de toutes les cérémonies qui
s'observent à Rome depuis la mort du
pape jusqu'à l'exaltation de son succes-
seur, Paris , Després , 1774 , in-S". Quoi-
que dans le Dictionnaire des anonymes ,
tome 1", cet ouvrage soit attribué à l'abbé
de Londres, il paraît néanmoins qu'il n'est
pas de lui , mais do Pons-Augustin AUets ,
ex-oratorien et homme de lettres. Voyez
à cet égard le même Dictionnaire, tome
4, page 262, et tome 1, page 70, article
ALLETS ; | Variétés jjhilosophiques et
li t lé rai7-es , Londres et Paris, Duchesne,
i7G2, in-12. Il est l'éditeur des Sermons
du père Le Chapelain, 1768 , in-12. On ne
sait pas l'époque précise de sa mort ; mais
il n'existait plus en 1806.
LOi\G ( Jacques le ) , prêtre de l'Ora-
toire, né à Paris en 1665, fui envoyé
dans sa jeunesse à Malte pour y être ad-
mis au nombre des clercs He St.-Jean-dc-
Jérusalem. A peine fut-il arrivé , que la
contagion infecta l'île. Il rencontra par
hasard des personnes qui allaient enter-
rer un homme mort de la peste : il les
suivit; mais dès qu'il fut rentré dans la
maison ou il logeait, on en fil murer les
portes , de peur qu'il ne communiquât le
poison dont on le croyait attaqué. Cette
espèce de prison garantit ses jours et
ceux des personnes avec lesquelles il était
enfermé. Le jeune Le Long , échappé à la
contagion , quitta l'ile qu'elle ravageait ,
et revint à Paris, où il entra dans la con-
grégation de l'Oratoire en 1686. Après
avoir professé dans plusieurs collèges , il
fut nommé bibliothécaire de la maison
de St.-Honoré à Paris. Celte bibliothèque
augmenta de plus d'un tiers sous ses
mains. L'excès du travail le jeta dans l'é-
puisement , et il mourut d'une maladie
de poitrine en 1721, à 56 ans, regardé
comme un savant vertueux. Ses princi-
paux ouvrages sont: 1 une Bibliothèque-
sacrée , en latin , réimprimée en 1725 ,
en 2 vol. in-fol., par les soins du père
Desmolels , son confrère et son succes-
seur dans la place de bibliolhécairc. Elle
LON
S12
LON
est divisée en deux parties; dans la pre-
mière , il donne un catalogue des manu-
scrits et des textes originaux de la Bible
avec leurs éditions et versions ; dans la
seconde , il donne une notice des auteurs
et des ouvrages faits sur l'Ecriture sainte,
irne nouvelle édition avait été commen-
cée par les soins de A. G. Marsch, avec
des augmentations. Il n'en a paru que
deux parties en 5 vol. in-h.° , Halle,
1778-90. I Bibliothèque historique de la
France^ in-fol. Cet ouvrage, plein d'é-
rudition et de critique, coûta bien des
recherches à son auteur : il est d'une
grande utilité à ceux qui s'appliquent à
l'histoire de la nation fran«;aise , et un
homme d'esprit ne balance pas de l'ap-
peler un véritable monument du règne de
Louis XIV. On y trouve , ainsi que dans
l'ouvrage précédent, quelques inexac-
titudes ; mais quel ouvrage , surtout de
ce genre , en est exempt? De Fontelte en
a donné , en 1768 et années suivantes ,
une nouvelle édition en 5 vol. in-fol. ,
corrigée et considérablement augmentée.
I Un Discours historique sur les Bibles
jJolygloites et leurs différentes éditions ,
1715, in-S".
• LONGCUAMPS ( PiERKE de ) , né , à
es qu'on croit, à la Rochelle, vers le
milieu du 18* siècle, embrassa l'état ec-
clésiastique ; il porta du moins le liire
d'abbé. Il resta constamment étranger
aux affaires publiques pendant la révolu-
t ion , fut membre de l'académie de la
Rochelle et mourut à Paris le 22 avril
1812. On a de lui : | Malagrida^ tragédie
en trois actes , 1765 , in-12 ( Voyez Mala-
grida); \ Tableau historique des gens de
lettres^ ou Abrégé chronologique et cri-
tique de Vhistoire de la littérature fran-
çaise , considérée dans ses diverses révo-
lutions ^ depuis son origine jusqu'au 18*^
siècle, 1767-1770, 6 vol. in-12; ce n'est
qu'un abrégé de V Histoire littéraire de
la France^ par les bénédictins {voyez
RIVET) , qui n'y est pas citée une seule
fois. L'auteur a cependant indiqué . par
des notes, les sources ou autorités de ce
«juil dit; mais il a pour cela copié les
citations faites dans l'ouvrage des béné-
dictins, et comme ceux-ci ne sont pas
au-delà du Ireizièmo siècle, c'est aussi
là que s'arrête Longchainps. Son travail
qui ne convient pas aux gens du monde
ne suffit pas aux gens de lettres. | Elégies
de PrcpercC'^ traduites en prose, 1772,
in-8°; nouv. édition augm. , 1802 , 2 vol.
in-8"; quoique cet ouvrag?, dans lequel
l'abbé de Lonchamps fut aidé par son
père , soit sa meilleure production , on y
trouve plusieurs endroits où Properc'e
est loin d'avoir été rendu. | Elégies de
Tibulle j, traduites en prose, 1776, in-8°;
I Histoire impat'tiale des événemens mi-
litaires et politiques delà dernière guerre
dans les quatre parties du monde , 1785 ,
3 vol. in-12 ; ce livre est tombé dans l'ou-
bli, et mérite d'y rester. Longchamps a
travaillé à la Nouvelle bibliothèque de
Campagne , et est encore auteur de deux
mauvais ouvrages , l'un intitulé : | Aven-
tures d'un jeune homme pour servir à
l'histoire des amou7'S. 1768 , in-12 ; l'autre
Mémoires d'une religieuse^ 1766, 2 vol.
in-12.
LONGCHAMPS (Chaules de). Voyez
LONCHAMPS.
LOXGEPIERRE (Hilaiue-Bernard de
ROQUELEYNE, seigneur de) , né à Dijon
en 1659 d'une famille noble , fut secré-
taire des commandemens du duc de Berry ,
et eut quelque réputation comme poète
et comme traducteur. Il se fit un nom
dans le genre dramatique par trois tragé-
dies : Médée, Electre et Sésostris ; cette
dernière n'a pas été imprimée. La pre-
mière est restée au théâtre , et les ama-
teurs la voient toujours jouer avec plaisir.
Ces pièces sont dans le goût de Sophocle et
d'Euripide ; les détracteurs de l'antiquité
se servirent des copies pour dépriser les
originaux. On a encore de Longepierre :
I des Traductions prolixes et faibles en
vers français , ou, pour mieux dire , en
prose riméo , d'Anacréon , de Sapho , de
Thcocrite , 1688, in-12 ; de Moschus et de
Bion, Amsterdam, 1687, in-12. L'auteur
les a enrichies de notes qui prouvent
qu'il connaissait l'antiquité, quoiqu'il ne
sût en faire passer dans la langue fran-
çaise ni les beautés ni la délicatesse; | un
Recueil d'Idylles . Paris , 1690 , in-12 La
nature y est peinte de ses véritables cou-
leurs , mais la versification en est prosaï-
que et faible. Il mourut à Paris , en 1721.
LONGÏAA'O ( Fausto de) , auteur ita-
lien du 16' siècle, dont on a | un Traité des
duels ( en italien ) , Venise , 1552 , in-8'' ;
I des Observations sur les Oraisons de Ci-
céron,ibid., 1556, in-8" ; | une Traduction
de Dioscoride en italien, Venise, 1542,
in-8".
LO^'GIN (saint), Longinus ; c'est ainsi
qu'on a appelé le soldai qui perça d'un
coup de lance le côié de Nolre-Scigncur ,
lorsqu'il était en croix. Ce nom semble
n'avoir d'autre fondement que le mol
grec d'où il est dérivé, lequel sÎQuiTie \ notes ^ dont quelques-unes peuvent être
latice. Le texte sacré n'est pas absolument
favorable à l'opinion qui confond ce sol-
dat avec le centurion qui s'écria ; Vrai-
ment cet homme était le Fils de Dieu. Il
ne faut cependant pas s'élever avec trop
de zèle ou de confiance contre ces sortes
de traditions, appuyées des martyrologes,
et peut-être d'autres témoignages qui ne
sinit pas parvenus jusqu'à nous.
LONGIN ( Denys ) , nommé par les an-
ciens auteurs Zon^mus Cassius et Diony-
sius Longinus^ philosophe et littérateur,
né à Athènes, et originaire de Syrie,
eut une grande réputation dans le 3'
siècle par son éloquence et par sa philo-
sophie. Il fut disciple d'Ammonius Sac-
cas , et ami de Plotin. Ce fut lui qui ap-
prit le grec à Zénobie , femme d'Odénat
et reine de Palmyre. Cette princesse le fit
sou ministre. L'empereur Aurélien ayant
assiégé sa capitale , Longin lui conseilla
de résister autant qu'elle pourrait. On dit
qu'il lui dicta la réponse noble et fière
qu'elle fit à cet empereur, qui la pressait
de se rendre. Longin fut la victime de son
zèle poTir Zénobie. Palmyre ayant ou-
vert ses portes à Aurélien , ce prince le
fil mourir en 273. iKjngin souffrit les plus
cruels tourmens avec constance , et con-
sola même ceux qui pleuraient autour de
lui. Cet homme illustre avait un goût dé-
licat et une érudition profonde. On disait
de lui qu'il était une bibliothèque vi-
i vaiite ^ et on disait vrai. Il avait composé
en grec des Remarques critiques sur tous
les anciens auteurs. Cet ouvrage n'existe
plus , ainsi que plusieurs autres produc-
tions de philosophie et de littérature ,
dont il ne nous reste que le Traité du su-
blime. L'auteur y donne à la fois des le-
çons et des modèles ; il y rend justice aux
beautés de l'Ecriture sainte , et admire
en particulier les expressions vives et
énergiques dont se sert Moïse dans l'his-
toire de la création. Cet opuscule est ad-
mirable par la justesse , et la profondeur
des aperçus, la délicatesse, l'élégance, la
simplicité et la force du style. C'est sans
contredit le meilleur de tous les critiques
de l'antiquité. Boileau l'a traduit en fran-
çais : sa traduction est élégante, mais un
peu froide ; les morceaux poétiques y
sont rendus en très beaux vers. Il en
existe une autre traduction par Lance-
lot. ToUius a fait imprimer celle de Boi-
leau à Utrecht , en 1694 , in-i" , avec les
remarques de différens savans. Boileau a
accompagné sa traduction de'^plusiemrs
utiles. Il y en a une édition en grec, latin,
italien et français, de Vérone, 1753, in-i".
La meilleure est celle de 'Weiske , Leip-
sick, 1809. Il nous reste aussi de Longin
quelques Fragmens des Scholies sur
Ephestion ; la préface du Traité des fins ;
quelques endroits d'une rhétorique en
fouis dans celle d'Apsine ; un passage du
livre de l'àme, et une portion de lettre à
Porphyre.
LOI\GIIV ( CÉSAR LoNGiNUS ) , est auteur
d'un livre singulier et peu commun, in-
tulé : Trinum medicum^ Francfort, 1616,
1630 ou 1673 , in-12.
LOXGINÏJS. Foyt s CASSIUS.
LONGO (Georges) , docteur et premier
garde de la bibliothèque ambrosienne de
Milan, vivait au commencement du 16'
siècle. 11 laissa un Traité en latin, plein
d'érudition , touchant les cachets des an-
ciens^ Milan, 1615, in-8°. On le trouve
aussi dans le recueil des divers traités De
annulis ^ publié à Leyde en 1671.
LONGO (PiETRo). Voyez AARSENS.
♦ LOAGOBAllDI (Nicolas ) , jésuite et
supérieur des missions étrangères à la
Chine, naquit en 156S, à Calata Girone ,
en Sicile. Il sollicita la faveur d'être en-
voyé dans les missions de l'Orient , et il
s'embarqua en 1596 x^our la Chine. Il de-
meura plusieurs années dans la province
de Kiang-si , où il opéra de nombreuses
conversions qui excitèrent la jalousie des
bonzes. Accusé par eux d'adultère , il
prouva son innocence , et pardonna à ses
calonmiateurs. Il gagna la bienveillance
de l'empereur, et ne fut plus inquiété. Le
père Ricci l'ayant désigné pour lui suc-
céder dans son emploi de supérieur-gé-
néral des missions à la Chine, il le rem-
plit avec autant de zèle que de succès. Le
père Longobardi mourut à Pékin, le 11
décembre 16o3 , âgé de 88 ans. Il connais-
sait à fond la langue chinoise , et a laissé ;
{Annu^ litterœ e Sinis anni ib98, Mayence,
1601 , in-8° ; | Prières journalières de h
sainte loij écrites en chinois, et très ré-
pandues dans les missions de la Chine.
La bibliothèque du roi en conserve plu-
sieurs exemplaires ; | des Livres de piété ;
I un Traité de l'âme; \ un autre sur le
Tremblement de terre j arrivé à Pékin, en
1624 ; 1 De Confucio ejusque doctrinatrac-
tatus j traduit en français, sous le titre
de Traité de quelques points de la doc-
trine des Chi?iois , 1701 , en espagnol, par
le père Navarrète , et inséré dans ses
Tî-atados ^ ou Traités historiQues sur la
L03V 5
Chine. Leibnilz a donné une nouvelle
édition de l'ouvragfe du père Longobardi
dans son Recueil des anciens traités sur
les cérémonies chinoises.
LONGOLIUS. J^oyez LONGUEIL.
LONGOMONTANUS (Christian), as-
Uonome danois , né à Langsberg , village
du JuUand, dans le Danemaick, en 4562,
était flls d'un pauvre laboureur. Il essuya
dans ses études toutes les incommodités
de la mauvaise fortune, partageant,
comme le philosophe Clcantlie, tout son
temps entre la culture de la terre et les
leçons que le ministre du lieu lui don-
nait. Il se déroba du sein de sa fa-
mille à l'âge de ik ans , pour se rendre
dans un collège. Quoiqu'il fût obligé de
gagner sa vie , il s'appliqua à l'étude avec
tant d'ardeur, qu'il se rendit très habile ,
surtout dans les mathématiques. Longo-
montanus étant allé à Copenhague , les
professeurs de l'université le recomman-
dèrent au célèbre Tycho-Brahé , qui le
reçut très bien en 1589. Longomontanus
passa huit ans auprès de ce fameux astro-
nome , et l'aida dans ses observations et
dans ses calculs. Entraîné par le désir d'a-
voir une chaire , il quitta Tycho-Brahé ,
et devint professeur de mathémaliqiies à
Copenhague , en 1605 , emploi qu'il rem-
plit avec beaucoup de réputation jusqu'à
sa mort , arrivée en 1647. On a de lui plu-
sieurs ouvrages estimables. Les princi-
paux sont : I Astronomia danica ^ Ams-
terdam , 1640 , in-fol. L'auteur y propose
un nouveau système du monde, composé
de ceux de Ptolémée , de Copernic et de
'Tycho-Brahé ; ce système n'a pas eu beau-
coup de sectateurs , quoiqu'il semble réu-
nir les avantages de tous les autres. Il
servit à montrer combien on avait tort
de vouloir établir un système certain sur
une chose qui pouvait être expliquée de
tant de manières diverses. ( Voy. SCHEI-
NER, COPERNIC, TYCHO, etc.) | Sys-
icma mathematicuin ^ in-8"; | Proble-
vxata geometrica , in -4°; | Disjmialio
ethica de aniniœ humanœ morbis ^ in-i".
Parmi les maladies de l'esprit humain ,
l'auteur ne compte pas cette manie qui
dévorait les philosophes de son temps,
comme ceux du nôtre , de vouloir faire
chacun un système , et de chercher sans
cesse ce qu'on ne peut trouver. Longo-
montanus y était sujet comme les autres.
Il croyait bonnement avoir trouvé la
quadrature du cercle; il consigna cette
prétendue découverte dans sa Cyclomé-
trie. 1612, in-i", et réimprimée en 1617
14 LON
etl66i ; mais Pell , mathématicien angla
lui prouva que sa découverte était un"
chimère. Voyez les Mémoires de Nice-
i-on. tome 8.
LONGUEIL (Richard-Olivier de),
archidiacre de Rouen , puis évèque du
Coulances, était d'une ancienne famille
de Normandie. Le pape le nomma pour
revoir le procès de la pucelle d'Orléans,
et il se signala parmi les commissaires
qui déclarèrent l'innocence de cette hé-
roïne et l'injustice de ses juges. Char-
les VII l'envoya ambassadeur vers le
duc de Bourgogne , le fit chef de son con-
seil, premier président de la chambre
des comptes de Paris, et lui obtint la
pourpre romaine du pape Calixte III, en
l/».56. Le cardinal de Longueil se relira à
Rome sous le pontificat de Pie II , qui lui
confia la légation d'Ombrie , et lui donna
les évê<;hés de Porto et de Sainte-Rufinc,
réunis ensemble , comme un gage de son
estime. Il mourut à Pérouse en 1170 , re-
gretté du souverain pontife et des gens
de bien.
LONGUEIL (Christophe de), Longo-
lius, littérateur célèbre , selon Scévole de
Sainte-Marthe , était fils naturel d'An-
toine de Longueil, évêque de Léon, et
naquit , en 1470 , à Malines , où son père
était ambassadeur de la reine Anne de
Bretagne , qui l'avait fait déjà son chan-
celier. Selon Erasme ( qui l'assure sur la
foi de Pierre Longueil , oncle paternel de
Christophe), il était Hollandais, de la
ville de Schoonhove. Il montra de bonne
heure beaucoup d'esprit et de mémoire ,
et embrassa toutes les parties de la litté-
rature : antiquités , langues , droit civil ,
droit canon, médecine, théologie. Le
succès avec lequel il' exerça à Paris la
profession de jurisconsulte lui valut une
charge de conseiller au parlement. Il fut
professeur de droit à Poitiers. Pour don-
ner encore plus d'étendue à son génie, il
parcourut l'Ilalie, l'Espagne, l'Angleterre,
rAllemagr»e , la Suisse , où il fut retenu
captif par le peuple , irrité contre les
Français vainqueurs à la bataille de Mari-
gnan, qui venait de se donner. L'évêque
de Sion , dans le Valais , le délivra des
mains des Suisses, et lui donna de l'ar-
gent pour aller à Rome , où il fut bieo
accueilli par le pape et les cardinaux. Il
mourut à Padoue en 1522 , à 52 ans. On a
de lui des Epîtres et des Harangues,
avec sa Vie par le cardinal Polus , Flo-
rence, 1524, in-4° ; Paris, 1753 , in-4°. La
dif tioa CD est pure et élégante , mais le
LOIV
SIS
LOIV
f )iids n'en est pas toujours assez fourni. Il
(lait du nombre des savans qui imitaient
avec succès le style de Cicéron. Dans ses
jireaiières productions, il a peut-être
trop accordé à une imagination abon-
dante et vigoureuse ; mais le jugement
et la réflexion réparèi'ent bientôt cet abus
lit' richesses. L'auteur de la vie du cardi-
nal Polus ( voyez PHILIPS Thomas) fait
de Longolius le plus grand éloge, et l'on
ne peut disconvenir que cet éloge ne
soit bien mérité. Bembo lui fit une épila-
pJie en latin , et Marot une en français.
LOINGUEIL ( Jeaîv de) , sieur de Mai-
sons , de la famille des précédens , fut
président aux enquêtes au parlement de
Paris , cl ensuite conseiller d'état en 1549,
sous Henri II. Il se rendit célèbre dans
ces emplois par son habileté et sa pru-
dence, et laissa un Recueil curieux de
271 Arrêts notables rendus de son temps.
Il mourut le i" mai 13ol.
LOXGUEIL , ou LONGOLIUS ( Gilbert
de) , né à Utrecht en 1507 , fut médecin
de Herman , archevêque de Cologne , et
mourut dans cette dernière ville en doi3.
Comme il avait paru attaché au luthéra-
nisme , on ne voulut pas l'enterrer à Co-
logne , et ses amis furent obligés de trans-
porter son corps à Bonn. On a de lui :
I Lexicon grœco-latinum ^ in-8°, Colo-
gne, 1553; I des Remarques sur Ovide,
Plaute, Cornélius-Népos , Cicéron , Lau-
rent Valla, etc., Cologne, U, vol. in-8°;
I une Traduetionlatine de plusieurs opus-
cules de Plutarque , Cologne , 4542 , in-8° ;
I une Version latine du deuxième con-
cile de Nicée ; | une Edition grecque et
iatine ^ avec des notes, de la Vie d'Apol-
lonius de Tyanes, par Philostrate, Colo-
gne, 1552, in-S" ; | Dialogus de avibus et
earumdem nominibus grcecis , latinis et
germanicis ^ Cologne , \^lik , in-8°. Voyez
Nicéron , tom. 17 et 20.
LOi\GUERUE (Louis DUFOUR de),
savant abbé de Sept-Fontaines et du Jard,
naquit à Charle ville , d'une famille noble
de Normandie, en 1652. Son père n'épar-
gna rien pour son éducation. Kichelet fut
son précepteur; d'Ablancourt , son pa-
rent, veilla à ses études, et ne manqua
pas , en bon calviniste , de lui donner du
goût pour les erreurs de sa secte. A \k
ans , il commença à s'appliquer aux lan-
gues orientales; il savait déjà une partie
des langues mortes, et quelques-unes des
vivantes: c'est cette précocité, sans doute,
et cette surcharge d'idées qui dérangea
son jugement , qui ne fui jamais au même
degré que sa mémoire. L'histoire fut la
partie de la littérature à laquelle il se
consacra , sans négliger pourtant la théo-
logie , l'Ecriture sainte , les antiquités et
les belles-lettres. Ne connaissant d'autre^
délassemens que le changement de tra-
vail et la société de quelques amis, il
leur ouvrit libéralement le trésor de ses
connaissances , et composait souvent pour
eux des morceaux assez longs ; mais ces
services n'étaient pas assaisonnés de
bonne grâce. Des traits trop vifs et sou-
vent brusques, des saillies d'humeur,
des critiques téméraires , une liberté cy-
nique , un ton tranchant et souvent trop
hardi : voilà le caractère de sa conversa-
tion. C'est aussi celui du Longueruana ,
recueil publié après sa mort. On l'y voit
en déshabillé , et ce déshabillé ne lui est
pas toujours avantageux. Ce savant mou-
rut à Paris en 1753 , à 81 ans. On a de
lui : I Dissertation latine sur Tatien, dans
l'édition de cet auteur, Oxford, 1700,
in-8° ; j Description historique et géogra-
phique de la France ancienne et mo-
derne. Paris, 1719, in-fol., 1722, in-fol.
C'est le texte d'un atlas de Danville avec
les cartes de ce géographe , et publié par
l'abbé Béraud. Les exemplaires non car-
tonnés sont rares et recherchés. Voyez ,
sur cet ouvrage , le n° 5560 du Dict. des
Anonymes de Barbier. L'auteur n'y pa-
raît ni géograj)he exact , ni bon citoyen.
Il y rapporte quantité de faits contre le
droit immédiat des rois de France sur la
Gaule transjurane et sur d'autres pro-
vinces; I Annales Arsacidarum^ Stras-
bourg, 1732, in-4°; | Traité d'un auteur
romain sur la transsubstantiation ^ Lon-
dres,1686, in-12, que l'on faisait faussement
passer sous le nom du ministre Allix son
ami, et qui n'est point favorable à la foi
catholique. Il paraît par quelques endroits
du Longueruana qu'il pensait sur cer-
tains points de doctrine comme les pro-
testans , entre autres , sur la confession
auriculaire ; il y vante le Bellum papale
de Thomas James , comme un ouvrage
utile et important. Cet abbé , léger dans
ses critiques et facile à se prévenir, n'a-
vait pas vu , sans doute , la réfutation du
père Bukentop. ( Voyez ce nom et BIAN-
CHINI. ) j Quelques Dissertations sur les
antiquités françaises et romaines; | plu-
sieurs ouvrages manuscrits^ dont on peut
voir la liste à la tète du Longueruana
par l'abbé Guyon et publié par Desma-
rets, Berlin (Paris), 1754, 2 part, in-12.
On trouve une notice des Manuscrits de
LOBÎ
516
LON
Longuerue, ainsi que de ses autres ou-
vrages , dans le recueil de pièces inté-
ressantes^ par l'auteur lui-même. On
peut consulter aussi le Dictionnaire de
Moréri et les Mélanges historiques et phi-
losophiques de Michault , tom. 2, p. 290.
LONGUEVAL (Jacques), historien,
né près de Péronne en 1680 , d'une fa-
mille obscure , fit ses humanités à Amiens
et sa philosophie à Paris avec distinction.
Il entra ensuite dans la société des jé-
suites, où il professa avec succès les
belles-lettres , la théologie et l'Ecriture
sainte. S'étant retiré dans la maison pro-
fesse des jésuites de Paris, il y travailla
avec ardeur à V Histoire de l'Eglise gal-
licane , dont il publia les huit premiers
volumes. Il continuait ce travail avec ar-
deur, lorsqu'il mourut d'apoplexie le li
janvier 1755 , à 54 ans. Cette Histoire
(Paris , 1730-1749 , 18 vol. in-4° ; Nîmes,
1782, 18 vol. in-8° et in-12, souvent
réimprimée), est, dit Sabatier, un chef-
d'œuvre. L'intérêt et l'utilité y fixent tour
à tour l'esprit du lecteur , que l'historien
sait intéresser par un mélange de mé-
tliode , de clarté, de critique et d'élégance.
Tous les objets sont présentés sous un
jour qui aide autant le jugement que la
mémoire. On aime voir les événemens
racontés sans enthousiasme et dévelop-
pés avec impartialité. Les Discours préli-
minaires (jui ornent les quatre premiers
volumes prouvent une érudition pro-
fonde et une critique judicieuse. Les
pères Fontenay , Brumoy et Bertier l'ont
continuée , et l'ont poussée jusqu'au 18^
volume in-/».** , et jusqu'à l'an 1559. On a
encore du père Longue val : | un Traité
du schisme^ in-12 , Bruxelles , 1718 ; | une
Dissertation sur les miracles^ in -4° ;
I d'autres Ecrits sur les disputes de l'E-
glise de France , dans lesquels on trouve
de l'esprit et du feu ; | une Histoire éten-
due du semi-pélagianisme ^ en manu-
scrits. On trouve l'éloge de Longueval par
Fontenay en tête de la continuation de
l Histoire de V Eglise gallicane.
LONGUEVILLE , nom d'une famille
célèbre dont la tige fut François I" d'Or-
léans, comte de Dunois et de Longue-
ville , gouverneur du Dauphiné et grand
chambellan de France. Voyez DUNOIS .
— LONGUEVILLE ( Ansîe- Geneviève
de BOURBON, duchesse de), née au
ciiùteau de Vincennes en 1619 , était fille
de Henri II , prince de Condé , et de
Marguerite de Montmorency. Elle était
sœur du grand Condé et du prince de
Conli. Lors de sa naissance , son père
était prisonnier d'état à Vincennes. Elle
épousa à l'âge de vingt-trois ans Henri
d'Orléans, duc de Longueville; elle alla
le rejoindre à Munster en 1646, et fut
reçue partout avec une grande magni-
ficence. Revenue en France, elle se jeta
dans le parti opposé à Mazarin. Son
époux, qui s'était signalé comme pléni-
potentiaire au congrès de Munster, et qui
avait le gouvernement de Normandie,
embrassa aussi le parti de la Fronde , et
ensuite la faction de Condé et de Conti,
dont il partagea la prison en 1650. Dès
qu'il eut recouvré sa liberté , il renonça
pour toujours aux partis qui troublaient
l'état. La duchesse de Longueville futj
moins sage. Ardente , impétueuse , nco j
pour l'intrigue et la faction, elle avait tâ-
ché de faire soulever Paris et la Norman-
die; elle s'était rendue à Rouen, pour
essayer de corrompre le parlement. Se
servant de l'ascendant que ses charmes
lui donnaient sur le maréchal de Turenne,
elle l'avait engagé à faire révolter l'ar-
mée qu'il commandait. Pour gagner la
confiance du peuple de Paris pendant le
siège de celte ville, en 1648, elle avait été
faire ses couches à l'Hôtel-de-Ville. Le
corps municipal avait tenu sur les fonts
de baptême l'enfant qui était né, et lui
avait donné le nom de Charles-Pains ; ce
prince, d'une grande espérance, fut tué
au passage du Rhin , en 1672 , avant d'ê-
tre marié. C'est dans son appartement
que tout se discutait et se décidait. Tou-
tefois, peu ferme de caractère , elle sem-
blait plutôt viser à la célébrité qu'à tout
autre but ; et , après la journée des barri-
cades , on la vit hésiter sur le parti qu'il
convenait de prendre. La paix ayant été
signée en 1649 , elle reparut à la cour ;
mais elle y fut reçue froidement. Lorsque
les princes furent arrêtés (1650 ), madame
de Longueville évita la prison par la fuite,
et ne voulut point imiter la conduite pru-
dente de son époux. Elle se retira en Nor-
mandie , puis à Rotterdam , à Stenay.
Elle se concerta avec Turenne qu'elle
avait conquis au parti des frondeurs pour
entrer en France , et délivrer les princes;
mais enfin la reine ayant consenti à leur
rendre la liberté , la duchesse vint de
nouveau à la cour , et tout sembla oublié.
Quelque temps après de nouvelles bi-ouil-
leries eurent lieu entre la reine et la du-
chesse. Celle-ci alla à Bourges , puis à
Bordeaux : les troubles recommencèrent ;
mais la mésintelligence s'étant glissée
LOIS
parmi les chefs , Mazarin trouva moyen
de les amener à la paix. Cependant le feu
de la guerre civile étant éteint , elle re-
vint en France; et comme il fallait un
aliment à sa vivacité et à son inquiétude
naturelle , elle se jeta dans les affaires du
jansénisme. Elle y mit la même ardeur
qu'elle avait fait paraître dans les guerres
civiles. Après la mort du duc de Longue-
ville , en 1065 , elle quitta la cour pour se
lier plus étroitement avec le parti, jit
construire à Port-Royal-des-Champs un
bâtiment pour s'y retirer , et se partagea
entre ce monastère et celui des Carmé-
lites du faubourg Saint-Jacques. Elle
mourut dans ce dernier le 15 avril 1G79 ,
et y fut enterrée. Son cœur fut porté à
Port-Royal. Ce fut elle qui forma le pro-
jet de la paix de Clément IX, qui se donna
tous les mouvemens nécessaires pour la
faire conclure , et qui n'y réussit, comme
l'on sait , que d'une manière illusoire ,
sans aucun bien durable. ( Voyez CLÉ-
MENT IX. ) Son hôtel fut l'asile des écri-
vains de Port-Royal ; elle les déroba à la
poursuite de l'autorité tant ecclésiastique
que civile , soit par son crédit , soit par
les moyens qu'elle trouvait de les sous-
traire aux arrêts qui tendaient à la des-
truction de cette secte naissante. On a de
la duchesse de Longueville un écrit im-
primé dans le Nccrologe de Port-Royal ,
où elle peint ses sentimens religieux.
"Villefore a donné sa Vie^ Amsterdam,
1739 , 2 volumes petit in-8" ; panégyrique
dicté par l'esprit de parti. L'on trouve
une notice sur sa Fie par Lémonley,
dans la 'o'' livraison de la Galerie fran-
çaise.
LONGUEVILLE (Antoinette d OR-
léans de). Foijez ANTOINETTE.
LOXGUS, rhéteur grec, dont on ignore
le véritable nom , fameux par son roman
intitulé : Pastorale de Daphnis et de
Chloé ^ en '«. livres. Comme les auteurs
anciens ne parlent point de Longus, il est
difficile de fixer avec certitude le temps
auquel il a vécu; on croit cependant que
c'est vers le milieu du 4* siècle. Les meil-
leures éditions de Longus sont celles de
Columbani , Florence , 1S98; de Junger-
man , 1605, et celle de Franeker en 1660 ,
in-4°, et celle de 1654, Paris, m-k° ; de Bo-
den ou Variorum.Leipsick, 1777 ;du doc-
teur Bernard , Paris , 1754 ; de Dulens ,
Paris, 1776 ; de Bodinio , Parme, 1786 ; de
M. Cora'i, 1802 ; de ViUoisin , de Schaefer,
Leipsick, 1803. Toutes ces éditions étaient
déparées par une longue lacune au i"
7.
517 LON
livre; mais en 1810, Paul Courier (vir/.
son article) découvrit dans un manuscrit
de Florence le passage qui manquait de-
puis si long-temps, et donna une édition
complète de Longus, 1810- Ce fragment
grec a été réimprimé depuis dans le Clas-
sical journal de M. Passow^ , Leipsick,
1811 , et dans les éditions et traductions
postérieures à cette date. Longus a été
traduit en anglais, par Thornley, 1657,
et par Craggs, 1764; en allemand par
M. Passow; en italien par Ann.Caro,
Manzzini et Gozzi , et en français par
Amyot,le Camus, Debure, Saint- Fauxbhi,
l'abbé Mulot, enfin par le père Blanchard,
1798, in-12; la meilleure est celle d'A"
myot. Courier l'a publiée plusieurs fois ,,
en 1810 ; il y a en outre intercalé la tr» •
duction du fragment nouvellement dé-
couvert. En 1813 , il corrigea ou refondit
le texte d'Amyot , en imitant toujours le
genre et les formes de style de cet auteur.
On en a donné deux autres éditions avec
29 figures dessinées par le régent, et gra-
vées par Benoit Audran. L'ouvrage de
Longus est en prose. Son pinceau est di
rigé par une imagination sans retenue ,
mais le style est d'une élégance qui dégé-
nère rarement en affectation.
LOiMCERUS ou LONICER ( Jean ), né
en 1499 à Orthern , dans le comté de
Mansfeld , s'appliqua à l'étude avec une
ardeur extrême , et se rendit habile dans
le grec, dans l'hébreu et dans les scien-
ces. Il enseigna ensuite avec réputation ,
à Fribourg , à Strasbourg, en plusieurs
autres villes d'Allemagne, et surtout à
Marpurg, où il mourut en 1569, à 70 ans.
Mélanchthon et Joachim Camerarius le
choisirent pour mettre la dernière main
au Dictionnaire grec et latin auquel ils
avaient travaillé. On a de lui plusieurs
Traductions d'ouvrages grecs en latin,
entre autres des poèmes Theriaca et
Alexipharmaca de Nicandre , Cologne ,
1S31, in-4°; et une Edition de Dioscoride
d'Anazarbe, Marpurg, 1543, in-fol. Sa vie,
écrite en latin par son petit-fils Lonicer ,
a été insérée dans la Bibliotheca chalcO'
graphica de J.-J. Boissard.
LOMCERLS ou LONICER (Adam), fils
du précédent, né à Marpurg en 1528, fui
un habile médecin, professa les belles-
lettres à Freyberg, 1547-1551 , revint à
l'étude de la médecine à Mayence, occupa
la chaire de mathématiques à Marpurg, y
reçut le doctorat (1534), fut nommé mé-
decin pensionnaire du sénat de Francfort-
sur-le-Meiu. et y mourut en 1586, à 58
44
LOP
518
LOR
ans , après avoir rempli ce[te place pen-
dant 32 ans. On a de lui plusieurs ou-
vrages d^histoire naturelle et de méde-
cine : I Methodus rei herbariœ ^ Franc-
fort , 1550 , in-ft** ; | Historia naturalis
plantarunij animalium et met allô rum ^
Francfort, 1551 - 1555, en 2 vol. in-fol. ;
I Methodica explicatio omnium corporis
humant affectuum ; \ Hortus sanitads de
Jean Cuba , dont la dernière édition est
d'Ulm , 1715 , in-fol. , fig. , etc. — Il y a
encore un Philippe LONICERUS , auteur
d'une Chronique des Turcs., pleine de re-
cherches, écrite en latin, avec élégance ,
exactitude et intérêt, 1 vol. in-fol.
LOOS ( CoRNEHxE ), théologien , né à
Gouda vers 1546 , et chanoine de cette
ville selon Yalère- André , quoiqu'il ne
soit nullement certain qu'il y ait eu une
collégiale , se retira à May en ce pendant
les troubles de sa patrie. Sa façon de pen-
ser sur les sorciers , dont il niait la réa-
lité, lui causa des chagrins. Il s'en ouvrait
dans ses conversations , et travaillait à
établir son sentiment dans un livre qu'il
imprima sous ce titre. Traité sur la vraie
€t la fausse magie . lorsqu'il fut empri-
sonné. Il se rétracta pour avoir sa liberté;
mais ayant de nouveau enseigné son opi-
nion, il fut arrêté. Il sortit cependant en-
core de prison, et il y aurait été mis une
troisième fois , si la mort ne l'eût enlevé
à Bruxelles en 1595. Il blâmait ouverte-
ment la pratique des exorcismes , aussi
ancienne que l'Eglise , qui l'approuve.
( Voyez DELRIO. ) On a de Loos : | De
iumultuosa Belyarum seditione sedanda.,
Mayence , 1582 , in-8° ; | Aniiotationes in
Ferum super Joannem; il y relève plu-
sieurs fautes de Férus ; | Illustrium Ger-
maniœ utriusque scriptonan catalogus ,
Mayence, 1581, in-8°. C'est une notice de
89 écrivains belges fort sèche et peu
exacte. | Institutionum sacrœ theologiœ
libri h, Mayence, in-i2; c'est un abrégé
de Melchior Canus, et plusieurs ouvrages
de controverse et de piété. On en trou-
vera la liste complète dans la Biblioth.
Belgic. de Foppens.
LOPEZ. Voyez FERDINAND LOPEZ.
LOFEZ DE GOMARA (François), ec-
clésiastique et historien espagnol, naquit
à Séville en 1510. Il demeura quatre ans
«•n Amérique, et à son retour en Espagne,
il publia Primera, secunda parte ^ etc. ,
ou Histoire générale des Indes^ en 3 par-
ties. Médina, 1558, in-fol. ; Anvers, 155/i,
în-S", traduite en italien, Venise, 1574, et
tn français par Irénce de Génillc, Paris >
1587. Cette histoire, qui eut dans le temps
beaucoup de vogue , renferme plusieurs
inexactitudes; elle tomba en oubli dès
que parut V Histoire de la Nouvelle Espa-
gne de Diaz del Caslillo , publiée p:ir
Alonzo Raimond (Madrid , 1652 ), que la
Conquête des Indes de Solis ( 1684 ) fit ou-
blier à son tour. Lopez de Gomara mou-
rut vers 1584.
LOPEZ de VEGA. Voyez YEGA.
* LOllDELOT (Bénigne), avocat au
grand conseil , naquit à Dijon le 12 octo-
bre 1639. Il était avocat au parlement de
cette ville, lorsque M. de Brulard, qui en
était premier président , et qyi avait un
procès au grand conseil , amena Lordelot
à Paris pour y plaider sa cause. Non seu-
lement il la gagna, mais il plaida avec un
talent si marqué, que M. de Lamoignon,
premier président du parlement de Paris,
l'engagea à se fixer dans la capitale. Il y
fut chargé de différentes causes impor-
tantes qui donnèrent lieu à un grand
nombre de plaidoyers, pour l'impression
desquels il avait obtenu un privilège dtj
M. le chancelier, excepté deux qui furent
imprimés séparément. Lordelot s'était
marié à Paris ; il y mourut le l"' mai 1720,
âgé de plus de 80 ans. Il est auteur d'un
grand nombre douvrages, qui tous prou-
vent sa piété et ses sentimens religieux.
Ce sont : | Devoir de la vie damcstique .
par un père de famille^ Paris, 1706, in-i2 ;
I Noéls pour l'entretien des âmes dévotes^
Dijon, 1660, in-i2 ; j Pensées chrétiennes
tirées des psaumes ..avec une pri/;re pour
le roi et pour la paix, Paris, 1706 , in-i2,
et 1708, in-16 ; | De la charité qu'on doit
exercer envers les en fans trouvés^ in- 12,
avec une gravure analogue au sujet,
Paris, 1706 ; | Lettres «ur les devoirs d'un
véritable religieux., écrites par un père à
son fds nouvellement religieux profès
da?is la congrégation de Saint-Augustin.
Paris, 1708, in-12 ; | Entretien du juste et
du pécheur ^ sur cette proposition. Que
l'homme souffre beaucoup plus de maux
et de peines pour se damner que pour se
sauver, Paris, 1709» in-12 ; | Nouvelle tra-
duction de V office de la Vierge, avec des
explications et des réflexions. Paris, 1711
et 1712, in-12 ; | Lettres importantes pour
arrêter les irrévérences qui se commet-
tent dans les églises. Paris, sans date
( 1712) ; I Lettre écrite par un particulier
à son ami ( l'abbé de Vallemont), sur les
désordres qui se commettent à Paris j
touchant la comédie, et sur les représevr
talions qui s'en font dans les maisons
LOR
519
LOR
particulières. Paris, 1710, in-12 ; | Lettre
écrite par un particulier à sonSami sur
les désordres du carnavals in-12, de 44
pages, 1711.
LOREDANO ( Jean-Fb ançois ) , dit le
Jeune ^ sénateur de Venise au 17*^ siècle ,
né en 1606, mort en 166i, s'éleva par son
mérite aux premières charges, et rendit
de grands services à la république. Sa
maison était une académie de gens de
lettres. Ce fut lui qui jeta les fondemens
de celle degli Incogniti. On a de lui :
I Bizzarrie academichc ; | Vila del Ma-
rini; \ Morte del Valslein; \ Rayyuagli
di Pamasso ; \ une Fie d'Jdam^ traduite
en français ; | V Histoire des rois de Chy-
pre (Lusignan), sous le nom de Henri
Giblet; \ plusieurs Comédies en italien.
On a recueilli ses OEuvres en 7 volumes
in-24 , et 16S3 , 6 vol. in-12. Sa vie a été
écrite par Antoine Lupis , Venise , 1663.
— Le doge Fraxçois LOREDANO, élu en
1752, mort dix ans après, âgé de 87 ans,
était de sa famille.
LORENS ( Jacques du), né à Château-
neuf en Thimerais dans le Perche , et
mort en 165b, à 75 ans, et suivant d'autres
en 1648, fut le premier juge du bailliage
de cette ville. Il était fort versé dans la
jurisprudence, bon magistrat, d'une pro-
bité incorruptible , et l'arbitre de toutes
les affaires de son pays. Il possédait les
auteurs grecs et latins , et surtout les
poètes et les orateurs. Il n'avait pas moins
de goût pour les beaux-arts , et en parti-
culier pour la peinture. Ses Satires furent
imprimées à Paris en 1624 , in-S" ; ibid. ,
1646 , in-4'» ; elles sont au nombre de 26.
La versification en est plate et rampante.
Son siècle y est peint avec des couleurs
assez vraies, mais grossières et dégoû-
tantes. C'est à du Lorens qu'on attribue
cette épitaphe si connue :
Ci-gît I
Pour s(
a femme.... Oh ! qu'elle ett biea,
I repoi c> pour le aieo.
On a encore de lui : Notes sur les cou-
tumes du pays chartrain^ Paris, 1645,
in-4''.
• LOREIVZ (Jean-Michel), historio-
graphe, chanoine de Saint -Michel de
Strasbourg, naquit dans cette ville en
1723. Il était instruit dans la théologie ,
les mathématiques, l'histoire , la philoso-
phie, le droit , et possédait les langues la-
tine , grecque et hébraïque. Il avait été
l'élève de Schœpflin : il fut successive-
rncnt professeur d'histoire et d'éloquence,
chanoine du chapitre luthérien de Saint-
Thomas en 1763 , et l'année suivante ,
bibliothécaire de l'université de Stras-
bourg, où il mourut le 2 avril 1801. On a
de ce savant ecclésiastique : | Urbis Ar-
gentorati brevis historia. ab A. C. 1456 ,
Strasbourg, i789 , 5' édition, in-4'*; i Ta-
bules temporum fatorwmque Germaniœ
ab origine gentis ad nostra tempora,
Strasbourg. 1761, in-4°; 1773, in-fol.;i78o,
in-8'' ; j Elementa historiée universœ. 1775,
in-8°, cum tabulis ; \ Elementa historiée
Germaniœ. 1776, in-8" , cum tabulis f
\Summa historiée Gallo-Francice civilis et
sacrte , 1793, 4 vol. in-8°, etc., etc. Une
érudition profonde, une précision exacte,
et un style correct et élégant , sont les
qualités qui distinguent presque tous les
ouvrages de cet auteur. Il a laissé plu-
sieurs manuscrits que l'on conserve dans
la bibliothèque de Strasbourg. M. Oberlin
a donné une Notice sur la vie et les écrits
de J. M. Lorenz dans le mag asin encyclo-
pédique. 6*^ année , pag. 220.
* LOREIVZANA ( François - Antoine
de), cardinal-archevêque de Tolède, na-
quit à Léon, en Espagne, le 22 septembre
1722. Sa famille , une des plus anciennes
de cette province , comptait parmi ses
ancêtres saint Vincent de Lorenzana et
saint Toribio de Mongrovejo. Après avoir
étudié chez les PP. jésuites de sa ville
natale, où il eut pour maître le pieux et
savant Pierre Zarate , il professa la phi-
losophie dans un monastère de bénédic-
tins, suivit les cours de droit canonique
àSalamanque, et de théologie dans le
grand collège d'Oviédo , d'où il passa à
Valladolid. Un concours ( comme c'est
l'usage en Espagne), ayant été ouvert
pour une prébende dans la cathédrale de
Siguenza, Lorenzana se mit sur les rangs,
et obtint la prébende. Ses talens et sa
bonne conduite lui méritèrent l'estimo
du père François Ravago, confesseur de
Ferdinand VI, qui le fit nommer chanoine
de Tolède, puis grand-vicaire, et enfin
abbé de Saint- Vincent. Devenu, en 1765,
évêque de Placencia, il fut nommé, l'an-
née suivante, à l'archevêché de Mexico,
où II fonda un hôpital pour les enfans
trouvés ; et, le 27 janvier 1772, il fut ap-
pelé au siège de Tolède, le plus riche de
la catholicité. Simple et frugal dans ses
{ïoûts et ses habitudes , il employa ses
immenses revenus à protéger les lettres
et à secourir les malheureux. Il fonda à
Tolède une magnifique bibliothèque, une
université , et fit publier à ses frais une
superbe" édition des OEuvres des PP. de
LOK
520
LOIl
Tolède. La même ville lui doit aussi une
maison de charité , et celle de Madrid une
maison de retraite pour servir d'asile aux
pauvres , en les occupant à des travaux
utiles. Lorenzana fit , en outre, rétablir
un hôpital ruiné , avec une maison et une
église pour les frères de la Charité, appe-
lés en Espagne, Frères de Saint- Jean de
Dieu. Une caserne fut également bâtie à
ses frais pour recevoir les militaires et
soulager les habitans , qui jusqu'alors
avaient été contraints de les loger chez
eux. Il faisait des provisions de vêtemens,
de toile, de quinquina et autres remèdes,
pour les distribuer aux pauvres. Quand
les ouvriers manquaient de travail, sur-
tout dans les années de disette , il les oc-
cupait à la réparation des routes ou à
d'autres travaux publics. Tous les ecclé-
siaisliques et les personnes recommanda-
bles recevaient chez lui un généreux ac-
cueil ; aussi le nom de Lorenzana était
révéré, non seulement dans son diocèse ,
mais dans toute l'Espagne. Il présida à
l'éducation de Louis de Bourbon , depuis
infant d'Espagne et cardinal ( voyez
BOURBON ) , et le fit archidiacre de son
église de Tolède. Lorenzana reçut le cha-
peau de cardinal , le 50 septembre 1789 ,
et, cinq ans après, il fut nommé grand
inquisiteur et conseiller d'état. La révo-
lution française ayant conduit en Espagne
un nombre considérable de prcires , de
religieux et de religieuses , Charles IV
chargea le cardinal de Lorenzana de leur
procurer un asile. Ce vertueux prélat
})arlagea ce soin avec le pieux évêque
(l"Orense, et entretint à lui seul cinq cents
de ces respectables proscrits. Il se trou-
vait à Madrid lors du mariage du prince
de la Paix avec mademoiselle de Valla-
briga, cousine du roi. On assure qu'ayant
refusé, ainsi que le cardinal Despuig, de
bénir cette union, parce que le bruit
courait que Godoy était déjà marié avec
une demoiselle Tudo , il fut exilé de Ma-
drid avec Despuig. On disait aussi dans
le public que les deux prélats étaient par-
tis , par ordre du roi, avec M. Musquiz,
archevêque de Séleucie , pour aller offrir
des consolations à Pie VI. Lorenzana sui-
vit ce pontife dans les différentes ex-
cursions qu'on lui fit faire , pourvut aux
besoins de cette auguste victime , à ceux
des divers cardinaux et prélats proscrits
«'t dispersés dans toute l'Italie. Le refus
<le passeports l'ayant- empêché d'accom-
pagner Pie VI en France , il parvint à
lui faire tenir secrètement des secours.
Il allait retourner en Espagne, lorsque
les mouvemens des armées lui en fer-
mèrent le chemin, et il se trouva au
conclave, tenu à Venise, on fut élu
Pie VII. Il donna, en 1800 , sa démission
de son siège de Tolède, qui fui donné à
l'infant D. Louis de Bourbon. Le cardinal
de Lorenzana établit alors sa demeure à
Rome. Pendant son séjour à Florence ,
un de ses neveux, chanoine de Tolède et
archidiacre de Calatrava, le fil son léga-
taire universel. Toujours bienfaisant , le
cardinal fit deux parts de cette succes-
sion : il en consacra une partie pour doter
des jeunes filles, et donna l'autre au grand
hospice de Madrid. Un jour, il venait d'a-
dresser une exhortation pieuse aux reli-
gieuses du couvent des Quatre -Saints-
Couronnés, lorsqu'il se sentit tout à coup
gravement indisposé : il reçut les secours
de l'Eglise , et mourut le lendemain 47.
avril 1804, âgé de quatre-vingt-deux
ans. M. Faust in Are valo, qui l'avait se-
condé dans ses travaux littéraires , pro-
nonça, en latin, son Eloge funèbre à l'a-
cadémie de la religion catholique. Il a
laissé : | diverses Lettres pastorales ;
I un nouveau recueil de Lettres de Fer-
nand Cortèz , Mexico , 1770 , in-i". 11 a
donné à ses frais de magnifiques éditions
des ouvrages suivans, savoir : | Sancto-
ram Palrum Toletanorum guotquot ex-
sta?it opéra ^ Madrid, 5 vol. in-fol., carac-
tères dlbarra , avec des préfaces et des
notes savantes. L'éditeur y a réuni les
écrits dQ ses prédécesseurs. Montâmes,
Eugène, saint Ildefonse, saint Julien,
saint Euloge , etc. avec l'abrégé de leurs
Fies. I Sancti Martini ^legionensis près-
byteri et canonici regularis ^ opéra nunc
primum in lucem édita ^ Ségovie , U vol.
in-fol. L'archevêque distribua gratuite-
ment des exemplaires de ces ouvrages, et
en envoya à M. l'abbé de Saint-Léger, qui
les répartit entre les bibliothèques de
Paris, savoir : Sainte-Geneviève, la Sor-
bonne, Saint-Germain-des-Prés et le col-
lège Mazarin. 1 OEuvres de saint Isidore
de Séville^ revues sur les manuscrits du
Vatican, et imprimées à Rome ; [ Missale
gothicum secundum régulant B. Isidori
in usum Mozarabum , Rome, 1804, in-
fol. , fig. Le cardinal de Lorenzana reçut,
par un bref très flatteur, les félicitations
de Pie VII pour son zèle à reproduire
ainsi les monumens de l'antiquité, si
utiles pour l'Eglise.
LORENZETTI ( Ambbosio ) , peintre,
ne à Sienne en 1237, mort vers 1340,
LOR
521
LOR
âgé de 85 ans, apprit de Glotto les se-
crets de son art ( i ). Mais Lorenzetli se
fit un genre particulier, dans lequel il se
distingua beaucoup. Il fut Iç premier qui
«'appliqua à représenter en quelque sorte
les vents, les pluies, les tempêtes, et ces
temps nébuleux dont les effets sont si pi-
quans en peinture.
LORENZETTI ( Pietko ) , peintre , na-
tif de Sienne, était frère du précédent
dont il reçut les leçons. Cet artiste a tra-
vaillé à Sienne et à Arer.zo ; il réussissait
principalement dans le jet des draperies,
et à faire sentir sous l'éloffe le nu de ses
figures. Il a aussi excellé dans les parties
qui regardent la perspective. Lorenz.etti a
clé aidé dans plusieurs ouvrages par son
frère Ambrosio, célèbre par son tableau^
qui est dans laMaison-de-Ville de Sienne,
représentant, par autant de figures ana-
logues, les vices d'un mauvais gouver-
nement. Des vers placés sous chaque per-
sonnage, en expliquent le caractère et le
dessein. Pietro vivait encore en 13o5.
• LOREA'ZI ( l'abbé Barthélémy ), im-
provisateur italien, né à Vérone vers 1730,
mort dans la même ville, le H février
1822, à l'âge de quatre-vingt-dix ans, est
auteur d'un poème en quatre chants , sur
la culture des montagnes ( deîla Coltiva-
zione de' monti), Vérone, 3""^ édition,
J811 , in-4°. On a encore de lui un poème
intitulé Le Berger ( Il Paslore ) qu'il com-
posa à l'âge de 88 ans. Les Italiens l'esti-
maient beaucoup comme improvisateur.
Peu d'instans avant de mourir, il impro-
visa et récita dos vers consacrés à pleurer
la mort d'un ami.
LORET (Jean), poète français de Ca-
rentan en Normandie, mort en 1665 , âgé
d'environ 65 ans, se distingua par son es-
prit et par sa facilité à faire des vers fran-
çais. 11 avait commencé, vers 1650, une
Gazette burlesque en vers, qu'il continua
jusqu'en 16G5 en partie. Il l'avait dédiée à
mademoiselle de Longueville, qui lui
faisait une gratification annuelle de 2,000
liv. , même depuis qu'elle fut duchesse
de Nemours. Cette Gazette rimée ren-
fermait les nouvelles de la cour et de la
ville. Lorel les contait d'une manière naïve
et assez piquante dans la nouveauté , sur-
tout pour ceux qui faisaient plus d'atten-
tion aux faits qu'à sa versification lâche ,
prosaïque et languissante. On a recueilli
(i) Suivant quelque» biographi-j , ce fut jon pf-re ,
nommé Lorenro, et par iliminulif Zor<'»j.-f /// , peiolre
lui-m2nK , qv\ cDseigni soo arl à AmLrojio.
ses Gazettes en 3 vol. in-fol. , 1630, 1660'
et 1663, avec le portrait de l'auteur, gravé
par Nanteuil. On y joint un autre le-
cueil périodique intitulé Lettres en vers
à Madame..., ou Gazette ^ etc. , depuis
1665 jusqu'au 27 décembre 1670, et conti-
nué jusqu'en 1678 par Dulaurens ( Charles
Robinet), 2 tom. in-fol. Il reste encore de
Loret de mauvaises Poésies burlesques.
imprimées en 1646, in-4".
LORGES (GuY-ALDONCEdeDURFORT,
duc de ), lils puîné de Guy-Aldonce de
Durfort, marquis de Duras, et d'Elizabeth
de la Tour, naquit en 1630 , et fit ses pre-
mières armes sous le maréchal de Tu-
renne, son oncle maternel. S'étant signale
en Flandre et en Hollande, et surtout au
siège de Nimègue , dont il obtint le gou-
vernement, il s'éleva par ses services au
grade de lieutenant-général. Il servait en
cette qualité dans l'armée de Turenne.
lorsque ce grand homme fut tué près de
la viUe d'Acheren, le 25 juillet 1675.
Alors, faisant trêve à sa douleur, et cher-
chant plutôt à sauver une armée décou-
ragée par la perte de son chef, qu'à
acquérir de la gloire en livrant témérai-
rement bataille, il fit cette retraite admi-
rable qui lui valut le bâton de maréchal
de France en 1676. Il commanda depuis
en Allemagne , prit Hcidelberg et chassa
les Impériaux de l'Alsace. Ses exploits lui
méritèrent les faveurs de la cour. Le roi
érigea en duché la ville de Quintin , en
Basse-Bretagne , pour lui et ses succes-
seurs mâles, sous le titre de Lorges-Quin-
tin. Il fut capitaine des gardes~du-corps,
chevalier des ordres du roi , et gouver-
neur de Lorraine. Il mourut à Paris en
1702, à 72 ans, et fut regretté comme un
digne élève de Turenne, et de plus,
comme un homme foncièrement ver-
tueux et un parfait chrétien. « On na
B point connu , dit le duc de Saint-Simon,
» une plus belle âme , ni un cœur plus
n grand ni meilleur que le sien, et cette
» vérité n'a poinJ trouvé de contradicteur.
» Jamais il n'exista un plus honnête
«homme, plus droit, plus égal, plus uni,
» plus simple , plus aisé à servir et
» prompt à obliger, et bien rarement au-
» cun qui le fût autant. D'ailleurs, son ca-
D ractcre était la vérité, la candeur même,
i> sans humeur, sans fiel, toujours porté à
n ])ardonner. » Il eut de Geneviève de
Frén)ont quatre filles et un fils , dont la
postérité soutient la gloire du maréchal
de Lorfîes. Voyez DURAS.
LORÎC!! (GÉP.AKD ), Lo7icfnus. dlla-
hh.
LOR
522
LOR
damar en Wétéravie, publia divers ou-
vrages. Le plus célèbre est un Commen-
taire latin sur l'ancien Testament, Colo-
gne, 1546, in-fol. Le Commentaire sur le
nouveau avait vu le jour cinq ans aupa-
ravant, en 1541, aussi in-fol.
LORIIV ( Jean ), jésuite , né à Avignon
en 1559, enseigna la théologie à Paris , à
Rome , à Milan , etc. , et mourut à Dôle
en 1634 , à 75 ans. On a de lui des Com-
mentaires en latin sur le Lévilique , les
Nombres, le Deuléronorae , les Psaumes,
î'Ecclésiaste, la Sagesse , sur les Actes des
apôtres, et les Epîtrcs catholiques. Il y
explique les mois hébreux et grecs en
critique, et s'étend sm- diverses questions
d'histoire, de dogme et de discipline. Mais
plusieurs de ces questions pouvaient être
traitées d'une manière x)lus concise, et
quelques-unes n'ont qu'un rapport éloi-
gné à leur sujet. C'est de lui qu'est venu
Vusage de faire à Avignon toutes les se-
maines une instruction aux Juifs ; ce qui
en a converti un grand nombre.
LORIOT ( Julien ), prêtre de l'Ora-
toire, né à Laval en 1653, se consacra aux
missions sur la fin du 17' siècle. Ne pou-
vant plus supporter la fatigue de ces pieux
exercices, auxquels il s'était livré pendant
14 ans, il donna au public les Sermons
qu'il avait prêches dans ses courses évan-
géliqucs. Ils forment 9 vol. de Morale^ 6
de Mystères, 3 de Dominicales ; en tout
18 V. in-12, 1695 à 1713. Le style en est
simple , la morale exacte, et toujours ap-
puyée sur l'Ecriture et sur les Pères. Il
^lourutà Paris en 1715.
LORITI ( Henri ) , surnommé Glarea-
nus, du bourg de Claris en Suisse , où il
était né en 1488. Il y mourut en 1563, âgé
de 75 ans. Il se rendit célèbre par ses
lalens pour la musique et pour les belles-
lettres, el fut ami d'Erasme et de plusieurs
autres savans. Son nom est plus connu
que ses ouvrages. Lorili possédait pres-
que toutes les sciences, les belles-lettres,
et était un des meilleurs poètes de son
temps. Il a écrit sur les anciens classiques
et sur d'autres savans. L'empereur Maxi-
inilien T' décerna à Loriti le laurier poé-
lique en 1512. Il était d'un caractère doux
f t très enjoué .
LORME (PuiLiBERTde), natif de Lyon,
mort en 1577, se distingua par son goût
pour l'architecture. Il alla, des l'âge de 14
ans, étudier en Italie les beautés de l'anti-
que. De retour en France , son mérite le
lit rechercher à la cour de Henri III, et
dans celle des rois ses fils. Ce fut de Lorme
qui fil le fer à cheval de Fontaîneblcatl
et qui conduisit plusieurs magnifiques bâ-
timens dont il donna les dessins ; comme
le château de Meudon^ celui d'Anet,de
Saint-Maur, le palais des Tuileries , et qui
orna et rétablit plusieurs maisons roya-
les. Il fut fait aumônier et conseiller du
roi , et on lui donna l'abbaye de Saint -
Eloi et celle de Saint-Serge d'Angers.
Ronsard ayant publié une satire contre
lui, de lorme s'en vengea en faisant re-
fuser la porte du jardin des Tuileries, dont
il était gouverneur , au satirique , qui
crayonna sur la porte ces trois mots :
Fort. Révèrent. Habe. L'architecte , qui
entendaitfort peu le latin, crut trouver
une insulte dans ces paroles , et s'en plai-
gnit à la reine Catherine de Médicis. Ron-
sard répondit que ces trois mots étaient
latins, et le commencement de ces ver»
du poète Ausone , qui avertissaient les
hommes nouvellement élevés par la for-
lune à ne point s'oublier.
Fortunam rcrerrnter L«be , quiciiraque repente
Divei a.l exili progrederere loco.
On a de de Lorme : | Dix livres d'arc ht'
lecture , 1668, in-fol. ; | un Traité sur la
manière de bien bâtir, et à peu de frais.
LORME (Charles de), né à Moulins en
1584 de Jean de Lorme, premier méde-
cin delà reine Marie de Médicis, prit des
degrés en médecine à Monli?ellier, fut re-
çu licencié en 1608, et soutint pour cette
cérémonie quatre thèses. Il examina dans
la l'^'' si les amoureux et les fous pou-
vaient être guéris par les mêmes rcmè~
des. et il décida pour l'affirmative. Ce cé-
lèbre médecin passa de Montpellier à
Paris, devint médecin ordinaire du roi,
et fut très recherché par les malades et
par ceux qui se portaient bien : il don-
nait la santé aux uns et inspirait la gaieté
aux autres. Il s'était fait admirer à Pa-
doue et à Venise. Cette dernière ville lui
conféra gratuitement le tiire de Noble
T^éniiien. que cette république faisait
payeralors cent mille écus. Il exerçait sa
profession avec beaucoup de désintéres-
sement, et se signala surtout dans la peste
de Paris en 1619. L'abbé de Saint-Martin
raconte l'invention singulière qu'il em-
ploya en cette occasion.* Il se fit faire,
y dit-il, un habit de maroquin , que le
» mauvais air pénètre très difficilement :
» il mit en sa bouche de l'ail et de la rue ;
» il se mit de l'encens dans le nex et dans
« les oreilles, couvrit ses yeux de besicles,
» et en cet équipage assista les malades, el
LOR
823
LOR
» il en guérit presque autant qu'il donna de
t remèdes. » Le même Saint-Martin cite
le moyen qu'il employa huit ans après au
siège de la Rochelle pour faire cesser le
flux de sang. « Une infinité de soldats de
» l'armée du roi mouraient de celle ma-
» ladie : de Lorme en guérit plus de dix
» mille en faisant faire du feu de vieilles
» savates sous des sièges sur lesquels il les
» faisait seoir tout nus, et il arrêta tout
» à fait le cours de ce mal dangereux. » Il
mourut à Moulins en 1678, à 94 ans. Il
avait épousé à 86 ans une jeune fille à la-
quelle il survécut encore. On a de lui
Laureœ apoUinares. in-S", Paris, 1608.
C'est un recueil des différentes thèses
qu'il avait soutenues.
LORRAIN ( le ) , peintre. T^oyez GE-
LÉE ( Claude ).
LORRAIN ( Jean le), vicaire deSaint-
lo à Rouen, son pays natal , se distingua
par la solidité de ses instructions et par
lu force de ses exemples. Son érudition
ne le rendit pas moins recommandable ;
il avait une mémoire heureuse, une vaste
lecture et beaucoup de jugement. Il prê-
chait quelquefois jusqu'à trois fois par
jour des sermons différens, et on l'écou-
tait toujours avec utilité. Il devint chape-
lain titulaire de la cathédrale de Rouen,
où il mourut en 1710, âgé de 59 ans. L'abbé
le Lorrain avait fait une étude profonde
des rites ecclésiastiques. Nous avons de
lui un excellent traité, De l'ancienne cou-
tume d'adorer debout les jours de diman-
ches et de fêtes, et durant le temps de
Pâques^ ou Abrégé historique des céré-
monies anciennes et modernes. Ce der-
nier titre donne une idée plus juste de
cet ouvrage, qui est en effet un savant
traité des cérèmionies anciennes et mo-
dernes, et plein de recherches peu com-
munes. Il est en 2 vol. in-i2 , et parut en
1700. On a encore de lui les Conciles gé-
néraux et parliculie7-s , cl leur histoire,
m><?c des remarques sur leurs collections,
Cologne, 1717, 2 vol. in-8°. Les ouvrages
de cet auteur ne sont pas communs. — Il
ne faut pas le confondre avec Pierre le
LORRAIN, connu sous le nom de Vabbé
de Vallemont. Voyez ce nom.
LORRAIN ( Robert le) , sculpteur, né
à Paris en 1666, mort dans la même ville
en 1743, fut élève du célèbre Girardon. Ce
grand maître le regardait comme le plus
iiubile dessinateur de son siècle. Il le
chargea , à l'âge de 18 ans , d'instruire ses
enfans et de corriger ses élèves. Ce fut
lui et le Nourrisson qu'il choisit pour
travailler au mausolée du cardinal de Itî-
chelieu en Sorbonne. Ses ouvrages sont
remarquables par un génie élevé , un
dessin pur cl savant, une expression élé-
gante, un choix gracieux , des têtes d'une
beauté rare. Sa Galatée est un morceau
fini. On voit de lui, à Versailles, un Bac-
chus, un Faune qui était à Marly, et une
Andromède en bronze, justement estimés
des connaisseurs; mais les ouvrages qui
lui font le plus d'honneur sont dans le
palais de Saverne , qui appartenait aux
évêques de Strasbourg. Cet artiste mou-
rut rccleur de l'académie royale de pein ■
ture et de sculpture.
LORRAINE. Voyez GUISE, CHAR
LES, FRANÇOIS, LÉOPOLD, etc.
LORRANS (le). Voyez GARIN.
LORRIS (Guillaume de), l'un des
plus anciens poètes français , mort vers
l'an 1200 ( i ) , avait été ainsi nommé de
Lorris sur la Loire (près de Montargis ),
sa patrie ; il composa le Roman de la
Rose, qui comprend 22,000 vers de huit
syllabes, et dont la meilleure édition était
celle de l'abbé Lenglet, Amsterdam, 1753,
3 vol. in-i2 ( voy. LENGLET ), avant que
M. Méon publiât la sienne , Paris, 1814,
4, vol. in-8". Cet ouvrage , imité du poè-
me de l'Art d'aimer d'Ovide, est fort-au-
dessous de son modèle. Il a eu un conli-
nuateur : 40 ans après Guillaume de Lor-
ris, Jean de Meung y ajouta la fin. L'au-
teur y a mêlé des moralités auxquelles
son style naïf et simple donne quelque
prix. On l'entendra plus facilement par
le moyen d'un Glossaire, publié en 1737,
in-12. Voyez CLOPINEL.
LORRY ( Paul-Charles ), avocat au
parlement , et professeur en droit dans
l'université de Paris , né dans celte ville
en 1719, mort le 4 novembre 1766, à 47
ans, était un jurisconsulte éclairé et pro-
fond, cslimé des magistrats et du public.
Il a mis au jour le Commentaire latin de
son père ( François LORRY ) sur les
Institutes de Justinien, 1757, in-4*', et un
Essai de dissertations ou Notes sur le
mariage, 1760^ in-12. Il embrasse dans ce t
ouvrage les opinions jansénistes. La vie
de Lorry se trouve dans la Galerie fran-
çaise, Paris, 1772, 2 vol. in-fol.
LORRY ( A'vxe-Cuarles ), né à Cros-
ne, à quelques lieues de Paris en 1726, fui
fait docteur régenl de la faculté de mé-
(i) ÏM. R;«ynùu.irii .i prouvé que (îuil'sume des
Lorii» est mort en \'j\o , et non virs i-i6o ( Vayet
le Journal des savans Je i 3 ^ G , p3g G^ et ;o,)
LOS
S2&
LOT
decine de Paris en 17i8(i). Il donna au tra-
vail du cabinul tout le temps qu'il pou-
vait dérober à une pratique aussi bril-
lante qu'étendue , et prouva par ses ou-
vrages qu'il était aussi versé dans les
belles-lettres que dans la médecine. Cet
habile homme , qui avait autant de mo-
destie que de talent , répétait souvent :
« Je ne me permettrai jamais de dire :
» J'ai guéri, mais , J'ai donné mes soins à
» tel malade , et sa maladie s'est tenni-
> née heureusement. » Il mourut le 18
septembre 1783 , à Bourbonne-les-Bains ,
après avoir publié : | Essai sur Vusage
des aliînens. Paris , 1754, in-12. Cet ou-
vrage , qui lui fit beaucoup d'honneur,
traite de l'aliment en général. Il fut suivi,
en 1757, d'un second volume, où il parle
de l'usage des alimens considérés dans
leurs rapports avec les mœurs, les climats,
les différens sujets, les lieux, les saisons,
etc. La théorie la plus satisfaisante y est
jointe aux lumières de la plus saine chi-
mie. On préfère cet ouvrage à ceux que
Lemery et Arbuthnot ont donnés sur la
même matière. | De melancholiaetmor-
bis melancholicis. Paris , 1765 , 2 vol, in-
8** : tout y est intéressant, le style plaît,
la théorie est solide et lumineuse. | Trac-
tatus de moi'bis cutaneis , 1777, in-i". Il y
ramène aux principes les plus reconnus
de l'art le traitement des maladies de la
peau, qui ont si long-temps été soumises
à l'empirisme. | Une Edition latine des
OEuvras de Richard Mead, avec une pré-
face. 1751 et 1758.2 vol. in-8''; \xine Edi-
tion de l'ouvrage de Sanctorius, intitulé :
De medicina statica aphorismi. avec des
commentaires , 1770 in-12 ; | une Edition
des Mémoires pour servir à l'histoire de
la faculté de médecine de Montpellier,
par Astruc, 1767, in-i", avec une j5r^/ace
et l'éloge historique de l'auteur ; | Apho-
rismi Ilippocratis , grcece et latine. 1750,
in-8°. Son Eloge a été écrit par Vicq
d'Aiir.
LOSERTn (Philippe ). né à Fulneck
en Moravie en 1712, entra chez les jésuites
en 1729 , et mourut à Fulneck en 1776,
après avoir enseigné avec réputation les
belles-lettres, la philosophie et la théolo-
( I ) A.-Ch. Lorry fut dirigé dans jet hnmaDilé» par
IMluWre Rollin , cl justifia les soins de «on maître
par »ci succfs. On avait proposé pour «ujet d'un
concours le» embarras du jour de l'an , et le» vers
«uivaai de Lorry furent jugt'i digoes du premitr
pri, :
Hiccr.st illa dies q>iî plcls ve^ana furcnsque ,
Se fu|;icAdo pitit, sc'iiic pe'.endo fagit.
gie. On estime son Traité De potentia
audiliva cum ejtis objecta , sono et voce.
Olmutz , 1748, in-8", et un autre De po-
tentia olfaciiva et tactiva , Olmutz , 1749,
in-8°; quoiqu'on y remarque quelques
idées péripatéticiennes, souvent les meil-
leures pour exprimer ce qu'on ne com-
prend pas. On a encore de lui : De infal-
libilitate papœ. et facultate concedendi
i7idulg enti as. Olmnlz, 1745.
LOTH, fils d'Aran, petit-fils de Tharé,
suivit son oncle Abraham , lorsqu'il sortit
de la ville d'Ur, et se retira avec lui dans
la terre de Chanaan. Comme ils avaient
l'un et l'autre de grands troupeaux , ils
furent contraints de se séparer, pour
éviter la suite des querelles qui commen-
çaient à se former entre leurs pasleurs,
l'an 1920 avant J.-C. Loth choisit le pays
qui était autour du Jourdain, et se relira
à Sodome, dont la situation était riante et
agréable. Quelque teinps après, Chodor-
lahomor, roi des Elamites, après avoir dé-
fait les cinq petits rois de la Pentapole ,
qui s'étaient révoltés contre lui , pilla So-
dome, enleva Loth, sa famille, et ses trou-
peaux, l'an 1912. Abraham en ayant été in-
formé , poursuivit le vainqueur, le défit ,
et ramena Loth avec ce qui lui avait été
enlevé. Celui-ci continua de demeurer
à Sodome , jusqu'à ce que les crimes de
cette ville infâme étant montés à leur
comble, Dieu résolut de la déiruire avec
les villes voisines. Il envoya trois anges ,
qui vinrent loger chez Loth sous la forme
de jeunes gens. Les Sodomiles, les ayant
aperçus, voulurent forcer Loth à les leur
abandonner ; mais les anges les f rappèren t
d'aveuglement, et firent sortir Loth de la
ville avec sa femme et ses deux filles. So-
dome, Gomorrhe, Adama et Séboïm furent
consumés par le feu du ciel. Les païens,
comme les juifs, ont conservé la mémoire
de ce terrible événement. Diodore de
Sicile, Slrabon, Tacite, Justin, Solin,
rapportent la tradition qui a toujours
subsisté , que le lac Asphallite a été for-
mé par ua embrasement , dans lequel
plusieurs villes avaient été détruites.
( y oyez le Journ. hist. etlitt. , l*"" mars
1792 , p. 343. ) Loth se retira d'abord à
Ségor, qui fut conservé à sa prière , et en-
suite dans une caverne avec ses filles ( car
sa femme , pour avoir regardé derrière
elle , contre la défense expresse de Dieu,
avait clé changée en statue de sel ). Les
filles de Loth, s'imaginant que la race des
hommes était perdue , enivrèrent leur
père. Dans cet état , elles conçurent de
LOT
S25
LOT
lui chacune un fils : Moab, d'où sorti-
rent les Moabites , et Amraon , qui fut la
lige des Ammonites. On ne sait ni le temps
de la mort , ni le lieu de la sépulture de
Lotb, et l'Ecriture n'en dit plus rien. On
a donné bien des manières d'expliquer le
changement de sa femme en statue de sel;
mais il est tout simple de dire qu'elle a
été entièrement pénétrée d'une vapeur
chargée de soufre, de bitume, de sels mé-
talliques et nitreux. Heidegger parle d'un
tremblement de terre où des hommes et
des animaux furent étouffés, et demeu-
rèrent sans vie et sans mouvement comme
des statues. Cela n'empêche pas que la
transmutation de la femme de Loth ne fût
miraculeuse et un effet direct de la co-
lère de Dieu , qui , par un monument
terrible et subsistant , voulait avertir les
hommes des châtnnens préparés à l'indo-
cilité et à la désobéissance. Quelques an-
ciens , comme saint Irénée , attestent
qu'elle conservait de leur temps la forme
de femme , et qu'elle ne perdait rien de
sa grosseur, quoiqu'on en arrachât toujours
quelque morceau. Ils ajoutent d'autres
circonstances prodigieuses et incroyables,
mais moins absurdes, et surtout moins
contraires au respect dû aux Livres saints,
queles lurlupinades d'un carme hébraï-
sant, nommé Taddée de Saint-yidam^
qui, par des finesses grammaticales, a ré-
duit ce grand événement à un simple
orage. ( Voyez le Joum. hist. et litt. ^ 15
octobre 1784 , p. 237 ; 1" mai 1783 , p.
257. ) Nous finirons cet article par un
avis utile , qu'un homme versé dans les
saintes Ecritures donne aux herméneutes
et autres commentateurs légers et témé-
raires. « Il est aisé de voir que tout ce faux
» appareil d'une science grammaticale et
» pédantesque est dirigé contre la réalité
» et la croyance des miracles, cette grande
» voie que la Providence a tracée à la foi
» des peuples ; celle que J.-C. a employée
» pour prouver sa divinité , et par la-
» quelle les deux lois ont commencé. Ce
» sont surtout les miracles de l'ancien Tes-
» tament, sur lesquels s'acharnent nos her-
» méneutes. Il n'y a point d'absurdités
» qu'ils n'imaginent pour ôterrinlerven-
» tion de l'Eternel dans les événemens où
» il a déployé sa puissance avec le plus
• d'éclat, et s'est montré d^une manière
» plus convaincante et plus sensible. Le
» Penlateuque , et surtout la Genèse, qui
» sont remplis de faits de cette nature,
» sont devenus , entre les mains desinter-
» prêtes tudesques, des espèces de romans
» de cabaret , où la licence et l'ivresse font
» assaut d'impertinence et d'ineptie. Mais
» ce sont précisément ces livres et ces faits
» qui attachent particulièrement l'atten-
» tion du chrétien , qui fixent ses réflexion*
» les plus sérieuses et les plus touchantes,
t> et où il trouve le plus riche fonds d'in-
» struction. Malheur àl'homme qui ne sent
» rien au récit de ces apparitions si fré-
» quentes dans les premiers temps , de ce
i> commerce si inappréciable de la Divi-
» nité avec les hommes , de cette théo-
0 cratie familière , pour ainsi dire , et do
» mestique , où Dieii , comme un bon
» père de famille , se manifestait et parlait
» à ses enfans; où sa conduite personnelle
» (que cette expression me soit permise )
» était assortie à la simplicité et à l'inno-
» cence des moeurs du temps ; où , pour
» former à la vertu le monde dans l'en-
» fance , il voulaitl'insfruire par lui-même
» avant de lui envoyer les docteurs et les
» prophètes ; où il agissait avec une
» promptitude et une force toujours pré-
» sentes, pour récompenser et punir,
» pour épouvanter et encourager ! Quelles
» scènes que celles du paradis fermé à
» l'homme, de la mort d'Abel , et de tout
» ce que dit Dieu à cette occasion ! Quellfs
» leçons profondes et terribles ! Que dire
» de la catastrophe du déluge, de Noésor-
» tant de l'arche , d'Abraham et des Anges
» ses convives , du même patriarche ar-
» rêté par une main céleste au moment
» d'un sacrifice douloureux , de Moïse
» devant le buisson ardent , de ce désert
» si fécond en prodiges et en avertisse-
» mens redoutables... ?0 pauvres criti-
» ques , qui vous exercez sur de tels sujets,
» qui cherchez à convertir en fables arides
» et stériles des choses si propres à nour-
» rir l'âme , à la fortifier, à l'avertir de
» ce qu'elle est devant Dieu même ! Oui,
» vous avez raison de dégrader et d'avilir
» la Bible ; elle n'est pas faite pour vous.
» Votre condamnation s'y trouve à cha^
» que page. Si elle pouvait s'accorder avec
» vos goûts , vos sophismes , votre fac-
» tice et théâtrale érudition , vos igno-
» rantes et herméneutiques innovations,
» elle serait l'ouvrage de l'enfer. ■
LOTH ( Jeax-Charles ) , appelé Car-
lotto par les Italiens, peintre, né à Mu-
nich, en 1632, mort à Venise en 1G98. Son
père, sa mère, et puis le chevalier Pierre
Liberi, peintre vénitien, furent ses maî-
tres pour la peinture. Loth était grand co-
loriste , et possédait aussi plusieurs autres
parties do son art. Il composa un grand
lOT
^26
LOT
nombre de bons tableaux pour les villes
de Milaa , Florence , Vérone , Venise , qui
se le disputaient. On regarde comme son
chef-d'œuvre AduTn et £>e, pleurant sur
le corps d'jibel. tableau qui a été parfai-
tement gravé par Porporati.
LOTII AIRE I", 3"= empereur d'Occident
depuis Charlemagne , fils de Louis le Dé-
bonnaire et d'Ermengarde , fille de Hu-
gues, comte d'Alsace, naquit vers l'an
793. Il fut associé à l'empire par son père,
on 817, à l'assemblée d'Aix-la-Chapelle,
et nommé roi des Lombards en 820. L'am-
bition l'emporta chez lui sur la recon-
naissance. Il s'unit avec les grands sei-
gneurs pour détrôner l'empereur, se sai-
sit de sa personne , et l'enferma dans le
monastère de Saint-Médardde Soissons.
Nous faisons connaître les suites de cet
attentat dans l'article du prince détrôné.
Louis le Débonnaire étant sorti de sa
prison par la discorde entre ses fils , les
deux cadets voulant faire augmenter leur
portion , se déclarèrent contre Lothaire ,
et l'obligèrent à demander pardon à leur
père commun. Après la mort de ce prince,
Lothaire s'arrogea la supériorité sur deux
de ses frères , et voulut les restreindre ,
l'un à la seule Bavière, et l'autre à l'A-
quitaine. Charles , depuis empereur , et
Louis do Bavière , s'unirent contre lui ,
et remportèrent une célèbre victoire à
Fontenai, l'an 841. Cette journée fut san-
glante ; il y périt , dit-on , près de 100,000
hommes. Les trois frères se disposaient à
lever de nouvelles troupes, lorsqu'ils
convinrent d'une trêve , suivie d'un traité
de paix conclu à Verdun , en 845. La mo-
narchie française fut partagée en trois
parties égales , et indépendantes l'une de
l'autre. Lothaire eut l'empire, l'Italie et
les provinces situées entre le Rhin et le
Rhône, la Saône, la Meuse et l'Escaut.
Louis , surnommé le Germanique ^ reçut
toutes les provinces situées sur la rive
droite du Rhin , et quelques villes sur la
rive gauche , comme Spire et Mayence ,
propter vint copiam^ disent les annalistes;
et Charles devint roi de toute la France ,
excepté de la portion cédée à Lothaire. Ce
t raité est la première époque du droit pu-
blic d'Allemagne. ( Pépin était mort en
838). Dix ans après cette répartition, Lo-
thaire, fatigué des troubles de son vaste
empire , et craignant la mort , abdiqua la
couronne. Il alla expier, dans le mona-
stère de Prum , à 12 lieues au nord de
Trêves , les fautes que l'ambition loi avait
fait comijneltre contre son père et contre
ses frères. Il prit l'habit monastique el
mourut six jours après , le 28 septembre
855, à l'âge de 60 ans. Il laissa trois fils,
Louis , Charles et Lothaire, entre lesquels
il divisa ses états. Louis eut en partage le
royaume d'Italie ou de Lombardie , avec
le titre d'empereur; Charles , la Provence
jusque vers Lyon ; et Lothaire , le reste
des domaines de son père-en deçà des
Alpes , jusqu'aux embouchures du Rhin
et de la Meuse. Cette partie futnommée le
royaume de Lothaire. C'est de ce dernier
qu'est venu le nom de Lotharinge ou
Lorraine ( Lohier- règne , royaume de
Lothaire ou Lohier). Voyez LOTHAIRE,
roi de Lorraine.
LOTHAÎRE II, empereur d'Occident
et duc de Saxe , né en 1075. Il était fils de
Gebhard, comte deSupplembourg; il fut
élu roi de Germanie après la mort de
l'empereur Henri V en 1127. En 1129,
Rome était divisée en dcuxparti> pour le
choix d'un pape. L'un de ces partis élut
Innocent II, et l'autre Anaclet. Innocent,
réfugié en France , alla ensuite à Liège
trouver Lothaire , 1g couronna empe-
reur ( 1130 ), et excommunia ses compé-
titeurs. Lothaire reconduisit le pape à
Rome , et obligea Anaclet à s'enfermer
dans le château Saint- Ange. Le pape sacra
Lolhaire une seconde fois dans cette ville,
et lui céda l'usufruit des terres de la com-
tesse Mathilde. Ce prince remercia lu
pontife, en lui baisant les pieds et en
conduisant sa mule quelques pas. Il avait
juré auparavant de défendre l'Eglise ^ et
de conserver les biens du saint Siège.
L'empire avait été disputé après la mort
de Henri V; Lolhaire , par l'éloquence do
Suger, fut préféré à Conrad de Franconie
et à Frédéric de Souabe , fils d'Agnès ,
sœur du dernier empereur ; ce qui causa
de grands troubles. Ce fut en 1135 que col
empereur convoqua à Magdebourg une
diète célèbre, afin d'établir ses rcglemciis
pour la police de l'Allemagne. Plusieurs
ambassadeurs et des princes étrangers y
assistèrent. Deux ans après , Lothaire ren-
tra en Italie pour défendre Innocent
contre Roger, roi de Sicile , qui soutenî
le pape Anaclet ; il le vainquit et rer
Innocent sur son siège. Il mourut sans (
fans le 4 décembre 1137, dans le villa
de Brçtten , près Trente. Ce règne fut l'é^
poque de la police établie en Allemagne ,
vaste pays livré depuis long-temps à la
confusion. Les privilèges des églises , des
évèchés el des abbayes furent confirmés,
ainsi que les hérédités el les coutumes des
LOT
S27
LOT
fief» et arrière-fiefs. Les magistratures
des bourgmestres , des maires , des pré-
vôts, furent soumises aux seigneurs féo-
daux. On se plaignait des injustices de ces
magistrats, et on eut bientôt à se plaindre
de la tyrannie de ceux dont ils dépendi-
rent. Conrad, duc de Franconie, ancien
compétiteur de Lothaire , lui succéda.
LOTHAIRE, roi de France, fils de
Louis d'Outremer et de Gerberge, sœur
de l'empereur Olhon ^^ naquit en 941,
fut associé au trône en 952 , et succéda à
son père en 93i. Jl fit la guerre avec suc-
cès à l'empereur Olhon II , auquel il céda
la Lorraine en 980 , pour la tenir en fief
de la couronne de France. Il avait cédé
aussi à Charles son frère le duché de la
Basse-Lorraine; ce qui déplut à tous les
grands du royaume. Il mourut à Com-
piègne en 986 , dans sa 45* année , empoi-
sonné , à ce qu'on croit , par Emme sa
femme, fille de Lothaire II, roi d'Italie.
Ce prince était recommandable i»ar sa
bravoure , son activité , sa vigilance , ses
grandes vues ; mais il était peu exact
à tenir sa parole, et finissait presque
toujours mal , après avoir bien com-
mencé.
LOTHAIRE, roi de Lorraine, fils de
l'empereur Lothaire I", abandormaTheut-
berge sa femme , pour épouser Valdrade
sa maîtresse. Ce divorce est approuvé par
deux conciles , l'un assemblé à Metz ,
l'autre à Aix-la-Chapelle , soit que par de
vaines raisons Lothaire eût persuadé aux
évêques que son mariage n'était pas légi-
time , soit que dans ces temps d'ignorance
la doctrine de l'indissolubilité ait souffert
quelque obscurcissement. Le pape Nicolas
I*"" cassa les décrets des deux conciles, et
Lothaire fut obligé de quitter la femme
qu'il aimait pour reprendre celle qu'il
devait aimer. Ce décret, contre lequel
personne ne réclama, prouve combien
l'autorité du chef de l'Eglise était alors
solidement établie en France. Le pape
Adrien II ayant été élevé sur le trône
pontifical , le roi de Lorraine passa en
Italie au secours de l'empereur Louis l"
son frère , contre les Sarrasins , espérant
Obtenir la dissolution de son mariage.
Mais le pape lui fit jurer, en lui donnant
ia communion, qu'il avait sincèrement
quitté Valdrade ; et les seigneurs qui ac-
compagnaient ce prince firent le même
serment. Ils moururent subitement pres-
que tous ; Lothaire lui-même fut attaqué
à Plaisance d'une fièvre violente, qui
l'emporta le 8 août 869, un mois après ce
sacrilège parjure. Foyez LOTHAIRE T*
et LOUIS m.
LOTICIIIUS ou LOTICH (Pierre), né
en 1501, dans le comté de Hanau, y de-
vint abbé de Schluchtem^ l'an 1534. Il in-
troduisit dans son abbaye le luthéranisme,
dont il fut un des plus fanatiques secta-
teurs , mourut en i567, laissant quelques
ouvrages imprimés à Marbourg, 1640,
in-12 ; ils sont aujourd'hui sans intérêt.
LOTICHIUS ( Pierre ) , médecin et
poète, neveu du précédent, se fit sur-
nommer Secundus. pour se distinguer de
son oncle. Il narpiil en 1528 à Schluchtern;
et après avoir fait ses éludes en Allemagne
sous Mél issus , Mclanchthon et Caméra-
rius , il prit le parti des armes en 1546, et
combattit sous les drapeaux de la ligue de
Smalkalde ; mais il quitta bientôt le ser-
vice militaire , voyagea en France et en
Italie , se fit recevoir docteur en méde-
cine à Padoue, et alla professer celle
science à Heidelberg, où il mourut de fré-
nésie en 1560, par suite d'un philtre qu'il
avait préparé pour un autre et qu'il avala
lui-même. C'était un habile médecin , et
l'un des meilleurs poètes que l'Allemagne
ait produits. Ses Poésies latines , et sur-
tout ses Elégies^ recueillies pour la pre-
mière fois, Paris, 1551, in-8°, réimpri-
mées par Camerarius , en 1580, in-8°, ont
quelque mérite. La dernière et la meil-
leure édition de ses ouvrages est d'Am-
sterdam, 1754 , 2 vol. in-4°.Sa candeur et
sa bonté lui firent des amis illustres. On
trouve sa Fie à la têle de ses Poésies,
publiées par Jean Hagius , médecin.
LOTICHIUS ou LOTICH (Christian),
frère puiné du précédent , mort en 1568 ,
est auteur de plusieurs pièces de vers la-
lins, estimées. Elles ont été imprimées
séparément et avec celles du suivant ,
Francfort , 1620, in-8°.
LOTICHIUSouL0TICH(Jeak-Pierre),
petit-fils de Christian, né à Francfort-
sur-le-Mein en 1398 , professa la méde-
cine avec distinction à Rinteln en Wesl-
phalie, ne dédaigna pas les muses, et
mourut en 1652. Il publia un Conv-
mentaire sur Pétrone, 1629, in-4°. On
a de lui divers autres ouvrages en vers el
en prose ( voyez l'article précédent ),
Son recueil de poésies latines, composé
principalement d'Epigrammes, a été im-
primé à Francfort , 1620, in-8°. On a en-
core de lui des Livres de médecine, une
Histoire des empereurs Ferdinand II el
III ( Rerum çermanicarum^ctc.)¥T&nc-
fort , 1646 , 4 tom in-fol. fig.
LOU
LOtJAIL (Jean), autetkf appelant^
naquit à Mayenne dans le Maine vers le
milieu du \T siècle. Après avoir demeuré
quelque temps avec l'abbé le Tourneux
au prieuré de Villiers , que celui-ci pos-
sédait, il fut mis auprès de l'abbé de
Louvois pour diriger ses études. Son élève
étant mort , Fabbé Louail se relira à Paris,
où il se donna bien du mouvement pour
le parti de Jansénius. Il mourut en 1724.
Il était prêtre et prieur d'Aurai. On a de
lui : I la I" partie de V Histoire du livre
des Réflexions morales sur le nouveau
Testament et de la constitution Unigeni-
lus , servant de Préface aux flexaplca j
en 6 vol. in-12, et en un gros vol. in-i",
Amsterdam, 1726. On peut considérer cet
ouvrage comme la base et le modèle des
Nouvelles ecclésiastiques. Il est écrit dans
le même goût, la même véracité et la
même modération que les feuilles du
Scélérat obscur^ comme l'appelle M. d'A^
lembert. ( p^oy. ROCHE Jacques. ) L'abbé
Cadry a continué celle prétendue Histoire
en 3 vol. in-/i°, et l'a conduite presque
jusqu'au temps où ont commencé les
Nouvelles ecclésiastiques ; | Réflexions
critiques sur le livre du Témoignage de
la vérité dans l'Eglise ^ par le père de la
Borde, 1740; | Histoire abrégée du jansé-
nisme ^ et des Remarques sur l'ordon-
nance de l'archevêque de Paris ^ 1698,
in-12 , avec mademoiselle de Joncoux ,
dont il revit aussi la traduction des notes
de Nicole sur les Provinciales.
LOUBÈRE ( Simon de la ) , né à Tou-
louse en 1642, fut d'abord secrétaire
d'ambassade auprès de Saint- Romain ,
ambassadeur français en Suisse. Ses ta-
lens pour les négociations déterminèrent
Louis XIV à l'envoyer à Siam en 1687, en
qualité d'envoyé extraordinaire. Il n'y
resta qu'environ trois mois , pendant les-
quels il s'occupa à rassembler des Mé-
moires sur l'histoire civile et naturelle du
pays , sur l'origine de la langue , le ca-
ractère et les mœurs des habilans. De re-
tuur en France, il fut envoyé en Espagne
et en Portugal pour y exécuter une com-
mission secrète. On croit que c'était pour
détacher ces deux cours de l'alliance qui
avait produit la révolution d'Angleterre.
Son dessein transpira. Il fut arrêté à Ma-
drid , et n'obtint sa liberté qu'avec beau-
coup de peine. La Loubère, rendu à la
France , s'attacha au chancelier de Pont-
chartrain, alors contrôleur-général des
finances- Ce fut par le crédit de ce mi-
nistre qu'il obtint une place à l'académie
528 LOU
française en 1693. Il se retira pcn de
temps après à Toulouse, y rétablit Icg
jeux floraux^ autrefois si célèbres, et
alors si dégénérés. Après s'être montré
citoyen zélé et savant , il mourut en 1729,
à 87 ans. La Loubère savait non seulement
le grec et le latin , mais encore l'italien,
l'espagnol et l'allemand. Il cultivait à la
fois la poésie , les mathématiques , la
politique cl l'histoire ; mais il n'excella
dans aucun genre. Ses principaux ou-
vrages sont ; I Poésies répandues dans
différens recueils ; | une Relation curieuse
de son voyage de Siam, en 2 vol. in-i2 ;
un traité de la Résolution des équations,
in-4°, 1729 , peu connu , etc. | L'Eloge de
La Loubère par de Boze a été inséré dans
le tom. 7 des Mémoires de l'académie
des inscriptions. On peut consulter aussi
les Mémoires de Nicéron , tom. 26 et le
tom. 2, pag. 56, de l'Histoire de l'aca-
démie des jeux floraux de M. Poitcvin-
Peitavi, 1812, in-S**
LOUCn.\LI , ou ULUZZALI , ou OC-
CHIALI , fameux corsaire , né dans la Ca-
labre en Italie , fut fait esclave par les
Turcs dès sa jeunesse , et fut mis en li-
berté en renonçant au christianisme. La
fortune et sa valeur rélevèrent jusqu'à la
vice-royauté d'Alger. Lorsque les Turcs
se préparaient au siège de Famagouste,
l'an 1570, après s'être rendus maîtres do
Nicosie dans l'île de Chypre, Louchali alla
joindre leur flotte avec son escadre, com-
posée de 9 galères et de 30 autres vais-
seaux. A la bataille de Lépante , en 1571 ,
il commandait l'aile gauche de l'armée
des Turcs , et était opposé à l'escadre de
Doria , qui le mit en fuite. Cependant il
rentra comme en triomphe dans Constan-
tinople , parce qu'il mena avec lui quel-
ques bâtimens chrétiens qu'il avait pris
dès le commencement du combat. Le
grand-Seigneur donna de grands éloges
à sa valeur , et le nomma pacha de la mer
à la place d'Hali. Ce renégat se distingua
dans plusieurs autres occasions , surtout
à la prise de la Goulette en Afrique , l'an
1574 , et mourut à la fin du 16*^ siècle.
LOUET ( Georges ) , jurisconsulte ,
d'une nobleet ancienne famille d'Anjou,
conseiller au parlement de Paris , et
agent du clergé do France en 1584 ,
s'acquit une grande réputation par sa
science , par ses talens , par sa prudence
ot par son intégrité. Il fut nommé à
l'évêché de Tréguier; mais il mourut en
1608, avant que d'avoir pris possession
de cet évêché. On a de lui : | un Recueil
LOU
S29
LOtJ
da plusieurs notables arrâls . publiés pour
la première fois , ca 1G02 , et dont la
meilleure édition est celle de Paris, 1742,
2 vol. in-fol. , avec les Commentaires de
Julien Brodeau; | un Commentaire sur
l'ouvrage de Dumoulin , des Règles de
ta chancellerie , Paris , 1656, in-4°.
EMPEREURS d'OCCIDENT.
LOUIS I", le Débonnaire . ou le Faible,
fils de Charlemagne et d'Hildegarde , sa
seconde femme , naquit à Casseneuil ,
dans l'Agénois, en 778 , fut roi d'Aqui-
taine à trois ans et associé à l'empire
on 815. Il parvint à la couronne de
France en 814, et fut proclamé empereur
la même année , âgé de 36 ans. Ce prince
signala le commencement de son règne
par la permission qu'il accorda aux
Saxons transportés en des pays étrangers ,
de retourner dans leur patrie. Louis ne
continua pas comme il avait commencé.
Ce prince obligea ses sœurs à se retirer
dans des couvens , fit crever les yeux à
plusieurs de leurs amans , et consacra à
la vie religieuse les derniers fils de Char-
lemagne ; tout cela, afin d'éviter les in-
trigues et les factions. Le zèle de Charle-
magne pour la religion avait fortifié sa
puissance , et la dévotion mal entendue
de son fils l'affaiblit. Trop occupé de la
réforme de l'Eglise , et peu du gouverne-
ment de son état , il s'attira la haine des
ecclésiastiques , et perdit l'estime de ses
sujets. Ce prince , jouet de ses passions
et dupe de ses vertus mêmes , ne connut
ni sa force ni sa faiblesse ; il ne sut ni
inspirer la crainte ni se concilier l'amour,
et avec peu de vices dans le cœur , il eut
toutes sortes de défauts dans l'esprit. Le
mécontentement du clergé ne tarda pas à
éclater. Une cruauté de Louis en fut l'oc-
casion. Bernard , roi d'Italie ( enfant illé-
gitime de Pépin , dit le Bossu . fils aîné
de Charlemagne), irrité de ce que Lo-
thaire , son cousin , lui avait été préféré
cour l'empire , prit les armes en 818.
L'empereur , ayant marché contre lui ,
l'intimida tellement par sa présence ,
que Bernard , abandonné de ses troupes .
vint se jeter à ses pieds. En vain il de-
manda sa grâce ; Louis lui fit arracher les
yeux , et ce jeune prince mourut des
suites de cette cruelle opération. Ce ne
fut pas tout : Louis fit arrêter tous les
partisans de Bernard, et leur fit éprouver
le même supplice. Plusieurs ecclésias-
tiques lui inspirèrent des remords sur ces
exécutions barbares. Les évêques et les
7.
abbés lui imposèrent une pénitence pu-
blique. Louis s'y soumit , et parut en
822, dans l'assemblée d'Atligni couvert
d'un cilice. « Il crut, dit le président
» Hénault , devoir donner cette marque
B de repentir au mécontentement des
» évêques. Nous sommes surpris aujour-
» d'hui de voir une si grande autorité aux
» évêques ; mais c'est faute de se souve-
» nir que c'était cette même autorité qui
» fut si favorable à nos rois dans l'or:-
» gine. » Les évêques , dit l'abbé du Bos ,
avaient grande part au gouvernement
d'alors > et jjrésidaient aux délibératiom
des peuples et à leurs entreprises, non
comme chefs de la religion, mais comme
premiers citoyens. Dès l'an 817 , Louis
avait suivi le mauvais exemple de sou
père , en partageant son autorité et ses
états à ses trois fils, Lothaire, Pépin et
Louis le Germanique. Il associa le pre-
mier à l'empire , proclama le second roi
d'Aquitaine , et le dernier roi de Bavière.
Il avait épousé en secondes noces Judith
de Bavière; un quatrième fils lui survint
(823); ce fut Charles le Chauve qui fut
depuis empereur. Louis voulut , après le
partage, ne pas laisser sans étal cet enfant
d'une seconde femme qu'il aimait, et lui
donna, en 829, ce qu'on appelait aloi'S
l'Allemagne, en y ajoutant une partie do
la Bourgogne. Judith de Bavière , mère
de cet enfant, nouveau roi d'Allemagne,
gouvernait l'empereur son mari, qui
avait pour ministre un Bernard, comte
de Barcelone , que Judith ( voyez ce
nom), avait mis à la tête des affaires.
Les trois fils de Louis, indignés de sa
faiblesse , et encore plus de ce qu'on ava t
démembré leurs états, armèrent tous troi»
contre leur père. Quelques évoques, ex-
cités par Ebbon , archevêque de Reims,
et plusieurs seigneurs se joignirent à eux,
et abandonnèrent le parti de l'empereur.
Les fils de Louis le reléguèrent dans un
monastère; mais une diète tenue à Nimc-
gue le rétablit la même année ( 829 ). Les
mêmes causes amènent les mêmes effets :
Louis rétablit l'ancien partage ; ses fils
reprennent les armes. Le pape Grégoire
IV vint en France, à la prière de Lo-
thaire, et ne put mettre la paix entre le
père et les enfans. ( Koy. GRÉGOIRE IV.)
Au mois de juin de l'année 833, Lothaire
se mit à la tête d'une puissante armée ,
augmentée bientôt par la défection pres-
que totale des troupes de son père. Ce
malheureux prince ,se voyant abandonné,
prit le parti de passer au camp de ses
45
LOU 5
onfans , retranchés entre Bàle et Stras-
bourg , dans une plaine appelée depuis
le Champ du mensonge ^ entre Brisacli et
la rivière d'Ill, se déclara déchu de la
dignité impériale , qui fut déférée à Lo-
Ihaire. On partagea de nouveau l'empire
entre ses trois tils , Lothaire , Pépin et
Loxiis. A l'égard de Charles, cause inno-
cente de la guerre, il fut renfermé au
monastère de Prum. L'empereur fut con-
duit dans celui de Saint-Médard de Sois-
sons , et l'impératrice Judith menée à
Tortone , dans le Piémont , après que les
vainqueurs l'eurent fait raser. Louis n'é-
tait pas à la fin de ses malheurs : on tint
une assemblée à Compiègne , où ce prince
fut engagé à se soumettre à la pénitence
publique , comme s' avouant coupable de
tous les maux qui affligeaient l'état. On
le conduisit à l'église de Notre-Dame de
Soissons ; il y parut en présence des évo-
ques et du peuple , sans les ornemens
impériaux , et tenant à sa main un papier
qui contenait la confession de ses fautes.
11 quitta ses vêtemens et ses armes , qu'il
mit au pied de l'autel ; et s'étant revêtu
d'un habit de pénitent et prosterné sur
un cilice, il lut la liste de ses délits.
Alors les évéques lui imposèrent les
mains ; on chanta les psaumes , et on dit
les oraisons pour l'imposition de la péni-
fence. Les auteurs ont parlé diversement
de cette action : les uns ont prétendu
que c'était un trait de la politique de
Louis, qui crut devoir cette satisfaction
aux évoques et aux seigneurs de son
royaume ; d'autres l'ont regardée comme
l'effet de sa vertu. Quoi qu'il en soit , il
sera toujours vrai de dire que c'était pous-
ser la vertu ou la politique plus loin
qu'elle ne devait aller. Louis fut enfermé
un an dans une cellule du monastère de
Saint-Médard de Soissons , vêtu du sac
de pénitent. Mais la désunion de ses trois
tils lui rendit la liberté et la couronne.
Louis ayant été transféré à Saint-Denis ,
deux de ses fils, Louis et Pépin, vinrent
le rétablir , et remettre entre ses bras sa
femme et son fils Charles. L'assemblée de
Soissons fut condamnée par le concile de
Thion ville en 853. Louis y fut réhabilité ;
Ëbbon , archevêque de F»eims ( voyez ce
nom), qui avait présidé à l'assemblée de
Compiègne , et quelques autres évéques ,
furent déposés. On a donc tort d'imputer
la déposition de Louisau clergé de France :
ce ne fut le crime que de quelques sei-
fneurs et prélats. Une grande partie des
vêques réclama contre cet excès, de-
50 LOU
meura attachée à Louis, et le clergé eu
corps improuva la conduite des factieux
en déposant Ebbon et en rétablissant
Louis. -Bientôt après , un de ces mêmes
enfans qui l'avaient rétabli, Louis de Ba-
vière, se révolte encore; mais il est mis
en fuite. Le malheureux "père mourut en
840 , de chagrin , dans une île du Rhin ,
au-dessus de Mayence, en disant : Je par-
domie à Louis,, mais qu'il sache quil
m'arrache la vie. On prétend qu'une
éclipse totale de soleil, qui survint pen-
dant qu'il marchait contre son fils , ef-
fraya son esprit, que les malheurs avaient
affaibli , et bâta sa mort. Il est difficile
d'accorder ce récit avec les connais-
sances astronomiques que plusieurs his-
toriens lui ont attribuées : la chose ce-
pendant n'est pas impossible , si on veut
adopter cette réflexion du père Pctau ;
Sed nec absurdum existimem , insignes
potissimum solis éclipses ita dispositas
a Ûeo , ac suis spatiis definitas, ut in ea
temporum momenla caderent^ quibus il-
lustrium eventuum indicia darc possent.
Quoi qu'il en soit, la faiblesse de Louis et
ses inconséquences firent les malheurs do
son règne et ternirent ses autres qualités.
Il connaissait les lois anciennes et mo-
dernes, et il en fit observer quelques-
unes. Il rendit au clergé de son royaume
la liberté des élections^ et se réserva
seulement le droit de les confirmer. Le
pape Pascal I" s'étant fait sacrer sans
avoir obtenu , suivant l'usage, l'appro-
bation de l'empereur, Louis menaça Us
Romains des plus grands châtimens, si
jamais ils se portaient, d'après son expres-
sion , à de semblables attentats. Les pré-
lats avaient jusqu'alors été obligés d'alhr
à la guerre. Louis 1"" le leur défendit ,
et les contraignit à déposer leurs armures.
S'étant rendu ennemis le clergé et la no-
blesse , il se livra à des ministres tirés
du néant ; ce fut Adhelard , un de se3
favoris, qui dirigea toutes ses actions,
et fut la principale cause de ses mal-
heurs. On peut consulter, sur Louis le Dé-
bonnaire , Astronome , Vita Ludovic, pii
imp.. Ermoldi Nigelli Cannen ; Thegani
(archiepiscopi Trevirensis) de gestis Lur
dovici piij les Chroniques de S^Dcnis,
ch. 8 et suiv.; Nittrard. histor.; Paschalis
Ratberti vita Venerab. Walœ abbat.\
ylnnales Bertiniani ; Pagicritica; Script.
Francic. t. VII, etc. En déplorant les tristes
dissensions qui déchirèrent son règne,
on ne peut s'empêcher d'admirer les ef-
fets dtt christianisme , qui, dans le tu-
LOU S 5
liulte même des passions, fait respecter
* un certain point la voix de la nature.
Sous le règne du paganisme, ces divisions
eussent élé terminées par des assassinats
ci des parricides , et c'eût été un tableau
d'horreurs de plus ajouté à ceux qui com-
posent l'histoire des prédécesseurs de
Constantin , et qui forme encore aujour-
d'hui les annales des nations qui ne con-
naissent point l'Evangile.
LOUIS II , le Jeune ^ empereur d'Oc-
cident , fils aine de Lothaire l" , créé roi
d'Italie en 8kk , monta sur le trône impé-
rial en 853. Les guerres civiles , sous le
règne de Louis le Débonnaire :, avaient
Duverl l'empire aux Sarrasins, qui d'a-
bord s'emparèrent du duché de Bénévent,
Ils défirent l'armée de Louis près de Gaele,
en 845 ; mais il les battit trois ans après.
Défait de nouveau par les Sarrasins, dans
la Fouille , il les vainquit en 868 , 870 et
871, et les chassa de la Calabre.Dans cette
même année , Adelgise , prince de Béné-
vent , fit arrêter Louis I" dans son propre
palais ; mais craignant la juste vengeance
des Carlovingiens, il lui rendit la liberté ;
et enfin le pape Jean YIII raccommoda
Adelgise avec l'empereur. Louis ne laissa
qu'une fille , Ermengarde , qui épousa
Boson , lequel fonda le royaume d'Arles ,
eut un différend avec les souverains de
Constanlinoplo , qui , méprisant sa fai-
blesse, lui disputaient le titre d'empereur.
Il se défendit assez mal , et n'allégua
contre eux que la possession. Louis le
Jeune mourut le 12 août 875.
LOUIS III , dit l'Ji.>eugle. né en 880 ,
de Boson , roi de Provence , et d'Ermen-
garde, fille de l'empereur Louis le Jeune,
n'avait que 10 ans quand il succéda à
son père. Il passa en Italie l'an 900 , pour
défendre ses droits contre Bérenger, qui
lui disputait l'empire ; et après l'avoir
battu deux fois, il se fit couronner empe-
reur à Rome par le pape Benoit IV. Il ne
tint que 5 ans le sceptre impérial. S'élant
laissé surprendre dans Vérone par son
rival, celui-ci lui fit crever les yeux , et
le renvoya en Provence , où il mourut
l'an 928 , ou au commencement de 929.
LOUIS IV, à\\.l'Enfa7it. fils de l'em-
pereur Arnoul , fut roi de Germanie après
la mort de son père en 900, à l'âge de 7
ans. L'Allemagne fut dans une entière
désolation sous son règne. Les Hongrois
la ravagèrent ; on ne parvint à les faire
retirer qu'à prix d'argent. A ces incur-
sions étrangères se joignirent des guerres
civiles entre les princes et le clergé. On
1 LOU
pilla les églises : les Hongrois revinrent
pour avoir part au pillage : Louis lY s'en-
fuit à Ralisbonne, où il mourut le 21 janv.
912. Il fut le dernier prince en Allemagne
de la race des Carlovingiens. La cou-
ronne , qui devait être héréditaire dans
la maison de Charlemagne , devint élec-
tive. Les états de la nouvelle monarchie
profitèrent de cette révolution. Les Alle-
mands , maîtres de disposer du trône , se
donnèrent des privilèges excessifs. Les
duchés et les comtés, administrés jus-
qu'alors par commission, devinrent des
fiefs héréditaires. Peu à peu la noblesse
et les états des duchés , qui , dans les
premiers temps , ne reconnaissaient que
la souveraineté du roi seule , furent ré-
duits à dépendre absolument de leur»
ducs , et à tenir en arrière-fief des terres
qui mouvaient auparavant en droiture
de la couronne. D'un autre côté , l'Italie
commença à être asservie à l'Allemagne,
et ce fut la source de plusieurs diffé-
rends funestes entre les papes et les em-
pereurs.
LOUIS V , nommé ordinairement
Louis de Bavière , fils de Louis le Sévère ,
duc de Bavière , et de Malhilde . fille do
l'empereur Rodolphe I" , naquit l'an
1286, et fut élu empereur à Francfort en
15U , à l'âge de moins de trente ans. Il fut
couronné à Aix-la-Chapelle par l'arche-
vêque de Mayence , tandis que Frédéric
le Bel , fils de l'empereur Albert ^^ était
sacré à Cologne , après avoir été nommé
à l'empire par une partie des électeurs.
Ces deux sacres produisirent des guerres
civiles d'autant plus cruelles , que Louis
de Bavière était oncle de Frédéric, son
rival. Les deux empereurs consentirent ,
après avoir répandu beaucoup de sang ,
à décider leur querelle par trente cham-
pions : usage des anciens temps, que la
chevalerie a renouvelé quelquefois. Ce
combat ne décida rien , et ne fut que le
prélude d'une bataille dans laquelle Louis
fut vainqueur. Cette journée , suivie de
quelques autres victoires , le rendit
maître de l'empire. Frédéric ayant été fait
prisonnier , y renonça au bout de trois
ans pour avoir sa liberté. Le pape Jean
XXIi avait observé jusqu'alors la neutra-
lité entre les deux concurrens , espérant
que Louis, dont il connaissait les mau-
vaises qualités et le peu de religion ,
scraitobligé Je céder l'empire à Frédéric,
])rince sage et vertueux ; mais après la
bataille décisive de Muhldorf, en 1322 ,
il ordonna à Louis Y de suspendre l'cxer-
LOU
S52
LOU
cice do ses droits, et de les soumettre au
jugement du pape. Il donna contre lui
plusieurs monitoires , dans lesquels il lui
reprochait de favoriser les hérétiques et
les ennemis du saint Siège, et alla jus-
qu'à déclarer l'empire vacant. ( Voyez .
au sujet de ces procédés des papes, les ar-
ticles FRÉDÉRIC BARBEROUSSE . FRÉ-
DÉRIC II , GRÉGOIRE VII , etc.) L'empe-
reur appela du pape mal instruit au pape
mieux instruit^ et enfin au concile géné-
ral. Ayant été excommunié , il entra en
Italie, enlrepril de placer de son autorité
des évêques sur plusieurs sièges d'Italie ,
et de chasser ceux qui y avaient été nom-
més par le pape ; entra dans Rome, s'y fil
couronner, fit élire l'antipape Pierre de
Corbière ou Corbario , prononça une
sentence de mort contre le pape et son
défenseur le roi de Naples , et les con-
damna tous les deux à être brûlés vifs :
trait qui donne une plus mauvaise idée
de ce prince que toutes les bulles de
Jean XXII. Comment , après de tels excès
des empereurs, les écrivains modernes
out-ils pu s'attacher à inculper exclusi-
vement les papes , dont les torts sont
toujours restés beaucoup en deçà de si
élrangcs emportemens? ( V. GELASE II.)
iS^e serait-il pas plus sage de jeter un
voile réciproque sur les fautes des pon-
tifes et des rois, et de louer la modéra-
ration dont, au moins les premiers donnent
aujourd'hui le consolant spectacle ? Les
fureurs de Louis irritèrent tout le monde ;
les Romains conspirèrent contre lui. Le
roi de Naples arrive avec une armée aux
portes de Rome; l'empereur et son anti-
pape sont obligés de s'enfuir. Celui-ci
demande pardon au pape la corde au cou.
Clément VI marcha sur les traces de
Jean XXII , son prédécesseur. Il lança les
foudres ecclésiastiques sur Louis , en
r>46. Cinq électeurs élurent roi des
Romains , Charles de Luxembourg , mar-
quis de Moravie. L'ancien et le nouvel
empereur se firent la guerre ; mais un
accident arrivé en 1347 termina ces que-
relles funestes. Louis tomba de cheval
en poursuivant un ours à la chasse, et
mourut de sa chute à soixante-trois ans.
D'autres disent qu'il fut empoisonné. Ce
]) rince est le premier empereur qui ail
résidé constamment dans ses états héré-
ditaires , à cause du mauvais élat du
domaine impérial, qui ne pouvait plus
suffire à l'entretien de sa cour. Avant
lui , les empereurs avaient voyagé con-
linuellement d'une province à l'autre.
Louis est aussi le premier qui , dans ses
sceaux, se soit servi de deux aigles pour
désigner les armes de l'empire. Ils furent
changés sous Wenceslas , et réduits à un
seul à deux tètes. C'est par la protection
qu'il accorda aux Suisses révoltés, pour
affaiblir la puissance d'une maison rivale,
qu'il a contribué à fonder la république
helvétique. Voyez TELL
ROIS DE FRANCE.
LOUIS V\ roi de France. Voy. LOUIS
le Débonnaire.
LOUIS II, le Bègue ^ ainsi nommé à
cause du défaut de sa langue, était fils
de Charles lo Chauve , né en 8i6. Il fin
couronné roi d'Aquitaine en 867 , succéda
à son père dans le royaume de France .
le 6 octobre 877, reçut honorablement le
pape Jean VIII , et se fit couronner par
lui roi de France au concile de Troyes ,
l'an 878. Il fut contraint de démembrer
une grande partie de son domaine en fa-
veur de Boson, qui s'était fait roi de Pro-
vence , et de plusieurs autres seigneurs
mécontens, et mourut à Compiègne, le
10 avril 879 , à 33 ans. Il eut d'Ansgardc,
sa première femme qu'il fut obligé de ré-
pudier par ordre de son père , Louis et
Carloman, qui partagèrent le royaume
entre eux ; et laissa en mourant Adélaïde
sa seconde femme, grosse d'un fils, qui
fut Charles le Simple. On peut voir pour
ce règne Annales Bertinianiann. 877-87;! ;
Annales Fuldenses ; Frodoardi lîist. Ec-
oles. Rhcm. lib. îll cap. 24 ; Hincmari
Archiep. Rhem. opéra; Johannis VIII
Epistolœ ; Script. Francic. tom. 2.
LOUIS lïl , fils de Louis le Bègue , et
frère de Carloman , partagea le royaume
de France avec son frère , et vécut tou-
jours uni avec lui. II eut l'Austrasie avec
la Neustrie , et Carloman l'Aquitaine et
la Bourgogne. Louis III défit Hugues le
Bâtard , fils de Lolhaire et de Valdrade ,
qui revendiquait la Lorraine; marcha
contre Boson , roi de Provence , et s'op-
posa aux courses des Normands , sur les-
quels il remporta une grande victoire dans
le Vimeu , à Saucourt , en 882. Il mourut
sans enfans , le 4 août suivant à 22 ans.
Après sa mort, Carloman, son frère , fut
seul roi de France. On peut consulter
Annales Bertiniani ; Annales Fuldenses.
Chronic. de geslis Normannorum ; Fro-
doardi Hist. eccles. Rhem. lib. II I^ cap.
30 ; Annales Vadastini; Script. Francic.
tome 2.
LOUIS IV ou d'Outremer, ainsi nommé
M
LOU
533
LOU
à cause (îe son séjour pendant treiîe ans
en Angleterre , où la reine 0(jLve sa mère
l'avait conduit, était tîls de Charles le Sim-
ple. Il succéda à Raoul , roi de France ,
en 936. Hugues Capet, dit le Grand, et
Herbert, comte de Vermandois , s'accor-
dant pour renoncer à la couronne de
France , après en avoir dépossédé Char-
les le Simple, tirent élire Louis, qui choi-
sit Hugues pour premier ministre ; el dès
lors celui-ci marcha à l'égal de son souve-
rain , et après sa mort il devint roi. Louis
voulut s'emparer de la Lorraine; mais
l'empereur Othon 1" le força de se retirer.
Les grands de son royaume se révoltèrent
plusieurs fois, et il les réduisit avec peine.
S'élant emparé de la Normandie sur Ri-
chard , fils du duc Guillaume , il fut dé-
fait et fait prisonnier par Aigrold , roi de
Danemarck,etpar Hugues le Blanc, comte
de Paris, en 944. On lui rendit la liberté
l'année suivante , après l'avoir obligé de
rendre la Normandie à Richard , et de
céder le comté de Laon à Hugues le Blanc.
Celle cession occasiona une guerre opi-
niâtre entre le comte el le roi ; mais Louis
d'Outremer étant soutenu de l'empereur
Othon, du comte de Flandre et du pape,
Hugues le Blanc fut enfin obligé de faire
la paix , et de rendre le comté de Laon en
950. Louis d'Outremer finit ses jours d'une
manière funeste : il fut renversé par son
cheval en poursuivant un loup, el mourut
à Reims de celte chute , le 10 septembre
954 , à 56 ans. Il laissa de Gerberge , fille
de l'empereur Henri l'Oiseleur , deux fils,
Lothaire el Charles. Lotliaire lui succéda,
et Charles ne partagea point la couronne,
contre la coutume de ce temps-là, tant à
cause de son bas âge que parce qu'alors il
.ne restait plus que Reims et Laon en
propre au roi. Depuis, le royaume ne fut
plus divisé également entre les frères;
i'ainé seul eut le titre de roi, et les cadets
n'eurent que de simples apanages. Ce lut
ce qui rendit à l'état une partie de son
ancienne grandeur. Louis d Outremer
était un grand prince à plusieurs égards ;
mais il ne se défiait pas assex des hommes ,
et il fut souvent trompé. Les auteurs à con-
sulter pour cette époque sont ff^illelmi
Gemetensis Ub.IlL cap. 3 et&eq.; Cliro-
nic. T^irdun. Ilugonis Flaviniacensis ;
Ifugonis Floriacensis libellus ; Frodoardi
'Chronic; Lxtitprandi Chronic. ; Ordevici
Vital. Eccles. Ifist. ; Ludovici Transma-
rini diplomata, lom. 9.
LOUIS V, le Fainéant, roi de France
îsprès Lolhaire, son père, en 986, se rendit
maître de la ville de Reims, cl fil paraître
beaucoup de valeur dès le commence ment
de son règne. Il fut empoisonné par la rein e
Blanche , sa femme, le 21 mai de l'année
suivante 987, âgé d'environ vingt ans,
Louis était d'un caractère lurbulcid el in-
quiet : le nom de Fainéant ne lui convi
nait point. Il paraît que ce nom ne lui a
été donné que parce que son règne n'offre
rien de mémorable ; mais que pouvait-il
faire dans le peu de temps qu'il occupa h-
Irône? C'est le dernier des rois de Franco
de la seconde race des Carlovingiens , la-
quelle a régné en France 236 ans. Après
sa mort, le royaume appartenait de droil
à Charles , son oncle, duc de la Basse-Lor-
raine , el fils de Louis d'Outremer ; mais
ce prince s'étant rendu odieux aux Fran-
çais , il fut exclu de la succession , el la
couronne fut déférée à Hugues Capet , duc
de France , le prince le plus puissant du
royaume. Les causes de la ruine de la SQr
conde race sont particulièrement les sui-
vantes : 1° la division du corps de l'état en
plusieurs royaumes, division suivie né-
cessairement des guerres civiles entre les
frères ; 2° l'amour excessif que Louis le
Débonnaire eut pour son trop cher fils
Charles le Chauve ; 5° la faiblesse de la plu-
part des rois ses successeurs : à peine en
compte-l-on cinq ou six qui aient eu à la
fois du bon sens et du courage ; 4° les ra-
vages des Normands , qui désolèrent la
France pendant près d'un siècle, et favo-
risèrent les révoltes des grands seigneurs
LOUIS VI, le Gros, fils de Philippe
I" et de Berthe de Hollande, né en 1081
( quelques chronologistes disent en
1078 ) , parvint à la couronne en H08.
Le domaine qui appartenait immédiate-
ment au roi se réduisit alors au duché
de France. Le reste était en propriété aux
vassaux du roi, qui se conduisaient en
tyrans dans leurs seigneuries, et qui ne
voulaient point de maître. Ces seigneurs
vassaux étaient presque tous des rebelles.
Le roi d'Angleterre , duc de Normandie ,
ne manquait pas d'appuyer leurs révoltes;
de là ces petites guerres entre le roi et ses
sujets : guerres qui occupèrent les der-
nières années de Philippe I" et les pre-
mières de Louis le Gros. Ce prince s'aper-
çut trop tard de la faute que l'on avait faite
de laisser prendre pied en France aux
Anglais, en ne s'opposant point à la con-
quête que Henri l" fil de la Normandie
sur Robert son frère aîné. Le monarque
anglais étant en possession de cette pro-
vince, refusa de raser la forteresse de
45.
LIM
5'S&
LOU
Gisors , comme on en était convenu. La
guerre s'alluma , et après des succès di-
vers, elle fut terminée en 1114 par un
Irailé qui laissait Gisors à l'Angleterre,
sous la condition de l'hommage. Elle se
ralluma bientôt. Louis le Gros ayant pris
sous sa protection Guillaume Clilon , fils
de Robert , dit Courte-Cuisse j qui avait
elé dépouillé de la Normandie , voulut le
rétablir dans ce duché ; mais il n'était plus
temps : Henri était devenu tiop puissant,
et Louis le Gros fut battu au combat de
Brenneville, en H 19. L'année suivante , la
paix se fit entre Louis et Henri , qui re-
nouvela son hommage pour la Norman-
die. Le roi d'Angleterre ayant perdu
toute sa famille et la fleur de sa noblesse,
qui périt à la vue du port de Harfîeur ,
où elle s'était embarquée pour passer en
Angleterre , cet événemenl renouvela la
guerre. Guillaume Cllton , soutenu par
plusieurs seigneurs normands et français,
que Louis le Gros appuyait secrètement ,
profita de ce temps funeste à Henri pour
l'attaquer; mais le monarque anglais vint
à bout de soulever l'empereur Henri V
rontre le roi de France. Henri lève des
troupes et s'avance vers le Rhin; Louis le
Gros lui opposa une armée considérable,
etr'empereur fut bientôt obligé de reculer.
Le monarque français aurait pu aisément
•marcher tout de suite contre le roi d'An-
gleterre et reprendre la Normandie ; mais
les vassaux qui l'avaient stiivi contre le
prince étranger l'auraient abandonné s'il
eût fallu combattre le duc de Normandie,
par l'intérêt qu'ils avaient de balancer ces
deux puissances l'une par l'autre. Louis
le Gros est le premier qui ait entrepris de
donner un gouvernement à la France.
Avant lui, depuis que les nobles avaient
forcé le roi de déclarer leurs titres héré-
ditaires, il n'y avait aucune puissance
publique ; la majesté royale était avilie.
Dès que Louis fut en état de monter à
cheval , il poursuivit les seigneurs et les
gentilshommes qui, du haut de leurs don-
jons , se répandaient pour piller dans les
campagnes sans défense, sur les grands
chemins et sur les rivières. Toute sa vie
il eut les armes à la main , courant par-
tout où les opprimés réclamaient son se-
cours , et payant de sa personne comme
m\ simple cavalier. Quand il eut mis à la
raison la plupart de ces petits tyrans, il
entreprit de rétablir l'ordre; il accorda
aux villes des chartes de communes, qui
en les déclarant libres, leur permettaient
de se choisir des maires et des cchevins
pour juger leurs procès et maintenir la
police. Devenues ainsi de petites démo-
craties, les villes fournissaient au roi un
certain nombre de gens de guerre. Chaque
paroisse combattait pour lui sous la ban-
nière de son saint. La jurisprudence oc-
cupa également ce monarque. Les justices
royales, long-temps négligées et mécon-
nues, refleurirent. Le monarque, garant
des chartes de communes, prononça sur
les différends qui survinrent entre les
villes et les seigneurs; il institua l'usage
d'appeler en plusieurs cas à ses juges , do
sentences rendues par les officiers sei-
gneuriaux. Il envoya des commissaires
pour éclairer la conduite des juges. A la
vérité, ce fut moins son ouvrage que celui
de l'abbé Suger , son principal ministre ;
mais comme on impute aux rois tout le y.
mal qui se fait sous eux , on doit aussi f
leur tenir compte de ce qui se fait de bien.
Cette entreprise importante fut confinuée
sous Louis le Jeune, son fils. Les der-
nières années de Louis le Gros furent
occupées à venger le meurtre de Charles
le Bon, comte de Flandre, et à éteindre
le schisme entre le pape Innocent II et
Anaclet. Une dyssenterie l'enleva le I'"^
août 1157. Il mourut en chrétien, couché
sur un tapis qu'il avait fait étendre à terre
et couvrir de cendre en forme de croix.
Les dernières paroles de ce monarque
sont une belle leçon pour les rois : «N'ou-
» bliez jamais , dit-il à son fils , que l'au-
B torité royale est un fardeau dont vous
» rendrez un compte très exact après votre
i> mort. i> Sa veuve, Alix de Savoie, épousa,
en secondes noces , Matthieu de Montmo-
rency, connétable; elle mourut en iVok.
Louis était un prince recommandable par
la douceur de ses mœurs, dit le président
Hénault, et par toutes les vertus qui font
un bon roi. Il est le premier roi de France
qui ait été prendre à Sain l-Denys l'or/-
flam.ine , espèce de bannière do couleur
rouge, fendue parle bas, et suspendue
au bout d'une lance dorée. La vie de
Louis le Gros a été écrite par Suger. On
peut encore consulter ïllist. ecclésias-
tique d'Onleric ^Ital, les grandes Chro-
niques de Saint-Denis, ch. 9,10, etc.; V His-
toire de Normandie de Guillaume de Jxi-
miéges, etc.
LOUIS VII, le Jeune, fils du précédent,
né en 1120 , succéda à son père en 1137,
après avoir régné avec lui quclques'an-
nces.Il eut au commencement de son règne
un différend avec Innocent II, et avec Tlii-
baud lY , comte de Champagne. Innocent
LOU
535
LOU
ayant nommé à l'archevêché de 6oarges,et
ne croyant pas devoir approuver l'éleclion
que le clergé avait faite , Louis se déclara
d'une manière violente contre le pape ,
qui l'excommunia et mit son domaine en
interdit. Le roi s'en vengea sur Thibaud,
qui était dévoué au pontife, et mit en 1141
la ville de Vitri à feu et à sang. Les tem-
ples mêmes ne furent pas épargnés , et
1300 personnes réfugiées dans une église
périrent comme tout le reste dans les
llammes. Saint Bernard lui en fit de vifs
reproches : le prince en fut louché , mais
beaucoup trop tard, et se réconcilia avec
le pontife. Le même saint , chargé par le
pape Eugène de prêcher une croisade , y
engagea Louis, contre l'avis de l'abbé Su-
ger , qui , sans désapprouver la croisade ,
s'opposait au départ du roi. ( Voyez SU-
CER. ) Cette seconde croisade ne répon-
dit point aux efforts de Louis, mais elle
eut d'ailleurs de très bons effets ; ce fut
une nouvelle époque de la liberté que les
villes achetèrent du roi ou de leurs sei-
gneurs , qui faisaient argent de tout pour
se croiser. Depuis long-temps il n'y avait
plus en France que la noblesse et les ec-
clésiastiques qui fussent libres; le reste
du peuple était esclave , et même nul ne
pouvait entrer dans le clergé sans la per-
mission de son seigneur. Le roi n'avait
d'autorité que sur les serfs des terres qui
lui appartenaient. Mais quand les villes
et les bourgs eurent acheté leur liberté ,
le roi , devenu leui défenseur naturel
contre les entreprises des seigneurs , ac-
quit en eux aulant de sujets. Cette défense
occasiona de la dépense ; il fallait qu'ils la
])ayassent , et ils devinrent ainsi contri-
iïuables du roi , au lieu de l'être de leurs
seigneurs. Ds ne firent donc que changer
de maîtres; mais la servitude du roi était
gi douce , qu'on vit dès lors renaître en
France les sciences , l'industrie et le com-
merce. Ce qui donna lieu à la croisade ,
ce fut la prise d'Edesse par Noradin. Le
roi partit en 1147, avec Eléonore sa femme
et une armée de 80,000 hommes. Il fut
défait par les Sarrasins. Il mit le siège
devant Damas, et fut obligé de le lever
en 1149, par la trahison des Grecs. C'est
ainsi du moins qu'en ont parlé la plupart
des historiens d'Occident ; les Orientaux
ne conviennent pas de cette trahison.
Louis le Jeune , en revenant en France ,
fut pris sur mer par des Grecs , et dé-
livré par le général Roger, roi de Sicile.
Ce monarque , après tant de malheurs, ne
fut pas dégoûté des croisades : à peine fut-
il arrivé 'qu'il en médita une nouvelle ;
mais les esprits étaient si refroidis qu'il
fut obligé d'y renoncer. Suger entreprit
d'en faire une à ses dépens ; mais la mort
le prévint. [Voyez GODEFROIde BOUIL-
LON, saint BERNARD, PIERRE l'ERiMITE,
saint LOUIS, etc. ) L'épouse de Louis,
Eléonore , héritière de la Guienne et du
Poitou , qui l'avait accompagné dans sa
course aussi longue que malheureuse,
s'était, dit-on, dédommagée des fatigues
du voyage avec Raimondd'Anlioche, son
oncle paternel, et avec un jeune Turc
d'une rare beauté, nommé Saladin. Louis
crut laver cette honte en faisant casser en
1152 son mariage, pour épouser en qua-
trièmes noces Alix, fille de ce même
Thibaut , comte de Champagne , son an-
cien ennemi. C'est ainsi qu'il perdit la
Guienne. Eléonore répudiée se m'kria six
semaines après avec Henri II , duc do
Normandie, depuis roi d'Angleterre, et
lui porta en dot le Poitou et la Guienne.
La guerre éclata entre la France et l'An-
gleterre en 1156, au sujet du comté de
Toulouse. Louis, tantôt vaincu, tantôt
vainqueur, ne remporta aucune victoire
remarquable. La paix conclue entre les
deux monarques, 1161 , fut suivie d'une
nouvelle guerre, terminée en 1177, par
la promesse de mariage du second fils de
Henri II et de la fille cadette de Louis le
Jeune. Ce prince mourut en 1180 à 60 ans,
d'une paralysie qu'il contracta en allant
au tombeau de saint Thomas de Cantor-
béry , auquel il avait donné une retraite
dans sa fuite. Il entreprit ce voyage pour
obtenir la guérison de Philippe son fils ,
dangereusement malade. Louis le Jeune
était pieux, bon, courageux, mais presque
sans succès , ce qu'on attribua aux excès
qui marquèrent le commencement de son
règne , et que saint Bernard regarda dès
lors comme une source de calamités. Ne
pouvant extirper de son royaume lesfillej
de mauvaise vie, il voulut au moins "
qu'elles fussent marquées par un sceau
caractéristique d'avilissement: il défendit
par un édit qu'elles portassent des cein- -
tures dorées comme les honnêtes femmes,
ce qui donna lieu au proverbe : Bonne
7'enommée vaut mieux que ceinture dorée.
LOUIS VIII , roi de France, que sa bra-
voure a fait surnommer Cœur de Lion, fils
de Philippe-Auguste et d'Isabelle de Hai-
naut, naquit le 5 septembre 1187. Il se si-
gnala en diverses expéditions sous le règne
de son père, et monta sur le trône en 1223.
Avant la mort de son père Philippe- Au-
LOtJ
gusle , ce prince , sollicité par les Anglais
révoltés contre Jean , passa à Londres ,
où il avait été proclamé roi. Il vainquit
les partisans du monarque détrôné ; mais
Jean étant mort , les Anglais se pronon-
cèrent en faveur de son fiFs. Louis fut
assiégé dans Londres, et n'obtint sa liberté
qu'en promettant que Philippe-Auguste
rendrait aux Anglais ce qu'il leur avait
pris en France. C'est le prétexte sur lequel
Henri III d'Angleterre, au lieu de venir au
sacre de Louis, se fonda pour le sommer
de lui rendre la Normandie. Louis VIIl s'y
refusa et partit avec une nombreuse armée,
résolu de combattre les Anglais et de les
chasser de la France. Il prit sur eux Niort,
Saint-Jean-d'Angely , le Limousin , le Pé-
rigord , le pays d'Aunis , etc. Il ne restait
plus q\f.e la Gascogne et Bordeaux à sou-
mettre pour achever d'éloign er les Anglais,
lorsque Louis se vit obligé de faire la
guerre aux Albigeois, qui portaient avec
le poison de l'erreur les dégâts les plus san-
glans dans les provinces méridionales du
royaume. Il fit le siège d'Avignon , à la
prière du pape Honoré III , et prit cette
ville le 12 septembre 4226. La maladie se
mit ensuite dans son armée, le roi lui-
même tomba malade, et mourut à Mont-
pensier en Auvergne, le 8 novembre 1226,
à 39 ans. Thibaut VI, comte de Champagne,
éperdument amoureux de la reine, fut
soupçonné de l'avoir empoisonné; mais
cette accusation est dénuée de fondement.
La valeur de Louis VIII, sa chasteté et ses
vertus ont rendu son nom immortel. Il lé-
gua par testament cent sous à chacune des
2000 léproseries de son royaume. La lèpre
était alors, comme l'on voit, une maladie
fort commune. Il légua encore 50,000 li-
vres une fois payées, c'est-à-dire environ
S'iO.OOO liv. de la monnaie d'aujourd'hui ,
à sa femme, la célèbre Blanche de Castille.
Cette remarque fera connaître quel était
alors le prix de la monnaie. C'est, dit un
historien, le pouls d'un état, et une ma-
nière assez sûre de connaître ses forces.
Louis VIII est le premier roi de la trui-
sicme race qui ne fut pas sacré du vivant
de son père.
LOUIS IX ( saint), fils de Louis VHI
et de Blanche de Caslille , né le 25 avril
4215 , parvint à la couronne en 1226, sous
la tutelle de sa mère : ce fut la première
fois que les qualités de tutrice et de ré-
gente se trouvèrent dans la même per-
sonne. La minorité du jeune roi fut occu-
ltée à soumettre les barons et les petits
jt^rinces, toujours en guerre entre aux, et
536 LéU
qui ne se reunissaient que pour boule-'
verser l'état. Le cardinal Romain, légal
du pape , aida beaucoup la reine par ses
conseils. Thibaut VI , comte de Cham-
pagne , depuis long-temps amoureux de
Blanche, fut jaloux de l'ascendant que
prenait Romain , et arma contre le roi.
Blanche, qui avait méprisé jusqu'alors
son amour, s'en servit avec autant d'ha-
bileté que de vertu pour ramener le comte
et pour apprendre de lui les noms, les des-
seins et les intrigues des factieux. Louis,
parvenu à l'âge de majorité , soutint ce
que sa mère avait si bien commencé , et
ne s'occupa que du bonheur de ses sujets.
Il se conduisit avec beaucoup de prudence
durant les différens de Grégoire IX et de
Frédéric II, et ne voulut pas que son frère
Robert acceptât la couronne impériale,
que le pape lui offrait. Il condamnait
hautement la conduite de Frédéric : mais
il ne croyait pas qu'on pût lui ôfer la
couT'onne^ s'il n'était condamné dans un
concile général. Ce qui prouve quelle
était sur ce point , même dans les cours ,
la jurisprudence de ce» temps reculés ,
relativement aux rois, et combien l'on a
eu tort , de nos jours , de s'élever à ce su-
jet contre les papes. ( T^oycz FRÉDÉRIC
II , GRÉGOIRE VII, GRÉGOIRE IX , etc. )
Après l'excommunication de ce prince au
concile de Lyon , et sa déposition , qu'il
semblait ne pas approuver, quoiqu'il en
reconnût la légalité , il travailla à le ré-
concilier avec le pape; mais Frédéric ne
répondit pas à ses vues. Louis leva des trou-
pes cont;e le roi d'Angleterre Henri III,
et contre les grands vassaux de la cou-
ronne de France , unis avec ce monarque.
Il les ballil deux fois , la première à la
journée de Taillebourg en Poitou , l'an
1241 ; la deuxième , quatre jours après ,
près de Saintes , où il remporta une vic-
toire complète. Henri fut obligé de faire
une paix désavantageuse. Le comte de la
Marche et les autres vassaux révoltés ren-
trèrent dans leur devoir , et n'en sorti-
rent plus. Louis n'a\ail alors que 27 ans.
Il quitta son royaume bienlôt après, pour
passer dans la Palestine. Dans les accès
d'une maladie violente , dont il fut atta-
qué en 1244, il crut entendre une voix
qui lui ordonnait de prendre la croix con-
tre les infidèles , de faire restituer aux
chrétiens les belles provinces que les Sar-
rasins leur avaient enlevées , et de les dé-
livrer du plus cruel esclavage qui fût ja-
mais : il fit dès lors vœu de passer dans
la Terre-Sainte. La reine sa mère , la reine
LOU
537
LOU
sa femme , le prièrent de différer jusqu'à
ce qu'il fût enlièremeiit rétabli; mais
Louis n'en fut que plus ardent à demander
la croix. L'évéque de Paris la lui attacha,
fondant en larmes , comme s'il eût prévu
les malheurs qui attendaient le roi dans
la Terre-Sainte. Louis prépara pendant
quatre ans cette expédition , aussi illustre
que malheureuse ; enfin , laissant à sa
mère le gouvernement du royaume, il
s'embarqua en 12/i.8 à Ai(jues-Mortes , avec
IVTarguerile de Provence sa femme , et ses
trois frères. Presque toute la chevalerie
de France l'accompagna. Arrivé à la rade
de Damiette, il s'empara de celte ville
en 1249. Il avoit résolu de porter la guerre
en Egypte , pour attaquer dans son pays le
Bultan , maître de la Terre Sainte ; il passa
le Nil à la vue des infidèles , remporta
deux victoires sur eux , et fit des pro-
diges de valeur à la journée de Massoure
en 1250. Les Sarrasins eurent bicnlôl leur
revanche : la famine et la maladie conta-
gieuse ayant obligé les Français à repren-
dre le chemin de Damiette , ils vinrent
les attaquer pendant la marche , les mi-
rent en déroute et en firent un grand car-
nage. Le roi , dangereusement malade ,
fut pris près de Massoure avec tous les
seigneurs de sa suite et la meilleure partie
de l'armée. Louis parut dans sa ])rison
aussi grand que sur le trône. Les musul-
mans ne pouvaient se lasser d'admirer
sa patience et sa fermeté à refuser ce
qu'il ne croyait pas raisonnable. Ils lui
disaient : « Nous te regardions comme
» notre captif et notre esclave , et tu nous
» traites, étant aux fers, comme si nous
» étions tes prisonniers ! » On osa lui pro-
poser de donner une somme excessive
pour sa rançon , mais il répondit aux en-
voj'és du sultan : « Allez dire à votre maî-
» tre qu'un roi de France ne se rachète
» point pour de l'argent. Je donnerai
B cette somme pour mes gens , et Damiette
y> pour ma personne. » Il paya en effet
400,000 liv. pour leur rançon, rendit Da-
miette pour la sienne , et accepta du sultan
une trêve de dix ans. Son dessein était de
repasser en France; mais ayant appris
que les Sarrasins, au lieu de rendre les
prisonniers, en avaient fait périr un
grand nombre dans les tourmens , pour
les obliger de quitter leur religion , il se
rendit dans la Palestine, où il demeura
encore quatre ans , jusqu'en 1254. Le
temps de son séjour fut employé à forti-
fier et à réparer les places des chrétiens ,
à mettre en liberté tous ceux qui avaient
été faits prisonniers en Egypte , et à tra-
vailler à la conversion des infidèles. Ar-
rivé en France , il trouva son royaume
dans un meilleur état qu'il n'aurait dû
naturellement espérer. La Providence
avait veillé sur un pays qu'il n'avait aban-
donné que par les motifs les plus chré-
tiens. Son retour à Paris, où il se fixa, fit
le bonheur de ses sujets et la gloire de la
patrie. Il établit le premier la justice du
ressort; et les peuples, opprimés parles
sentences arbitraires des juges des baro-
nies , purent porter leurs plaintes à quatre
bailliages royaux , créés pour les écouter.
Sous lui, les hommes d'études commen-
cèrent à être admis aux séances de ses
parlemens , dans lesquelles des chevaliers,
qui rarement savaient lire, décidaient
de la fortune des citoyens. Il diminua
les impôts , et révoqua ceux que l'avidité
des financiers avait introduits. Il porta
des édits sévères contre les blasphéma-
teurs et les impies , bâtit des églises ,
des hôpitaux , des monastères , et publia
une Pragmatique- Sanction en 1269 , pour
conserver les anciens droits des églises ca-
thédrales et la liberté des élections. Le
sixième canon défend de payer les sommes
que la cour de Rome pourrait exiger.
Mais Fleury observe « que ce canon man-
» que dans beaucoup d'exemplaires ; dans
» les autres canons , il n'est nullement
» fait mention de la cour de Rome , et on
» croit que le saint roi n'y a eu en vue
» que les entreprises des seigneurs et des
» juges laïques sur les bénéfices. » Le
président Hénault doute que cette Prag-
matique soit de saint Louis. Ce monar-
que reçut en 1264 un honneur qu'on ne
peut rendre qu'à un monarque vertueux :
le roi d'Angleterre Henri III et les barons
le choisirent pour arbitre de leurs que-
relles. Ce prince était venu le voir à Paris
au retour de son voyage en Palestine , et
l'avait assuré quil était son seigneur et
qu'il le serait toujours. Le comte d'Anjou,
Charles son frère dut à sa réputation et
au bon ordre de son royaume l'honneur
'd'être choisi par le pape pour roi de Si-
cile. Louis augmentait cependant ses do-
maines de raC(iuisition de Pcronne , d'A-
vranches, de Mortagne, du Perche. Il
pouvait ôter aux rois d'Angleterre tout
ce qu'ils possédaient en France : les que-
relles de Henri III et de ses barons lui en
facilitaient les moyens ; mais il préféra la
justice à l'usurpation. Il les laissa jouir
de la Guienne , du Périgord, du Limousin,
en les faisant renoncer pour jamais à la
LOU
558
LOU
Touralne , au Poitou , à la Normandie ,
réunie à la couronne par Philippe-Au-
guste son aïeul. Voyant la France floris-
sante et son gouvernement bien affermi ,
il partit pour la sixième croisade en l!270.
Il assiégea Tunis en Afrique ; huit jours
après il emporta le château , et mourut
dans son camp le 25 août de la même
Cinnée , d'une maladie contagieuse qui ra-
vageait son armée. Dès quil en fut atta-
qué , il se fit étendre sur la cendre , et
expira, à l'âge de 55 ans, avec la fer-
veur d'un' 'anachorète et le courage d'un
héros, et avec la satisfaction d'avoir fait
aux ennemis du nom chrétien une guerre
sage et juste , quoique avec des succès
variés et d'éclalans revers. ( Voyez l'ex-
cellent discours sur le troisième âge de
l'Eglise, à la fin du ik" tome de l'Histoire ec-
clésiastique de l'abbé Béraull, et les articles
LOUIS VII, PIERRE l'ERMITE , etc. ) Bo-
niface VIII le canonisa en 1297. La bulle de
canonisation du saint roi est \m éloge ma-
gnifique et très étendu, fondé, comme il
y est dit, sur une certitude entière de la
jjurelé de ses moeurs , de la régularité et
de l'austérilé de sa vie, de son amour
pour la justice, de son zèle généreux
pour le progrès de la foi, de sa charité
envers les pauvres, les infirmes, les gens
sans appui et de toute nation , en un mot
de toutes ises vertus chrétiennes, royales,
héroïques. On avait reçu à ce sujet la dé-
position sous serment de plus de 300 té-
moins, et l'on avait vérifié jusqu'à 63
miracles. Saint Louis a été, au jugement
du père Daniel et du président Hénaull ,
un des plus grands princes qui aient ja-
mais porté le sceptre : compatissant comme
s'il n'avait été que malheureux ; libéral ,
sans cesser d'avoir une sage économie;
intrépide dans les combats , mais sans em-
portement. Il n'était courageux que pour
de grands intérêts. Il fallait que des ob-
jets puissans,la justice ou l'amour de
son peuple, excitassent son âme, qui
hors de là paraissait faible, simple et ti-
mide. Prudent et ferme à la tête de ses
armées et de son conseil, quand il était
rendu à lui-même il n'était plus que par-
ticulier. Ses domestiques devenaient ses
maîtres, sa mère le gouvernait, elles
pratiques de la dévotion la plus simple
remplissaient ses journées. Il est vrai que
ces pratiques étaient ennoblies par des
vertus solides et jamais démenties ; elles
formaient son caractère. C'est à ce règne,
suivant Joinville , que se doit rapporter
l'institution des maîtres des requêtes : ils
n'étaient d'abord que trois; ils furent
portés à quatre- ving^ts par l'édit de 1732,
qui les fixa à ce nombre. Saint Louis pro-
scrivit aussi des terres de son domaine
l'absurde procédure des duels judiciaires,
et y substitua la voie d'appel à un tribu-
nal supérieur : ainsi il ne fut plus per-
mis, comme auparavant, de se battre
contre sa partie ni contre les témoins
qu'elle produisait. Joinville , La Chaise .
l'abbé de Choisy Bury et l'abbé Vély on 1
écrit sa Vie. Voyez leurs articles. On peut
consulter en outre la Vie de saint Louii
par le confesseur de la reine Marguerite;
V /lis foire d'Angletei're de Matthieu PcU
ris ; la Chronique de Guillaume de Naii-
gis ; les Chroniques de St.-Denys; V His-
toire de saint Louis par un moine de St.-
Denys; Observations de Ménard sur
l'Histoire de saintLouis ; les Etablisse-
mens de ce prince , publiés en 1786, par
l'abbé S t. -Martin; Essai sur les institu-
tions de saint Louis par Beugnot; les in-
stitutions de saint Louis par Mignet. etc.
Ce monarque a été le sujet de divers ou-
vrages de poésie parmi lesquels nous cite-
rons le poème épique du pèi-e Lemoyne ,
et la tragédie de M. Ancelot jouée en 1819.
LOUIS X , roi de France et de Na-
varre, surnommé Hutin^ c'est-à-dire
mutin el querelleur^ né le h octobre 1289,
succéda à Philippe le Bel son père le 29
novembre 1514, étant déjà roi de Navarre
par Jeanne sa mère , et s'étant fait cou-
ronner en celte qualité à Pampelune le
1" octobre 1308. Veuf de Marguerite de
Bourgogne, il différa son sacre jusqu'au
mois d'août de Tan 1315, à cause des
troubles de son royaume , et parce qu il
attendait sa nouvelle épouse, Clémence,
fille de Charles, roi de Hongrie. Pendant
cet intervalle, Charles de Valois , oncle
du roi, se mit à la tête du gouvernement,
et fit pendre Enguerrand de Marigni à j
Monlfaucon, au gibet que ce ministre j
a\ ait lui-même fait dresser sous le feu
roi , dont il était ministre. Louis X rap-
pela les Juifs dans son royaume , fit la
guerre sans succès contre le comte de
Flandre , et laissa accabler son peuple
d'impôts , sous le prétexte de cette guerre.
Il contraignit encore; le reste des serfs de
ses terres de racheter leur liberté : ce
qu'ils firent avec peme. En remplissant
un devoir connu, ils étaient tranquilles,
et ils ignoraient ce qu'on exigerait d'eux,
quand ils seraient libres. L'édit du roi
portait que, selon le droit de nature,
chacun doit naître franc ^ el il faisait
LOU î)3
acheter ce droit de nature. « On a remar-
» que en tout temps, dit un philosophe,
» que les prôneurs de la liberté ne la con-
» naissaient {îucre; et que s'ils en saisis-
» salent quelques traits , c'était tou-
» jours à leur profit. » Le dernier acte du
règne de Louis X fut la punition de plu-
sieurs exacteurs, surnommés, avec jvis-
tice , loups dévorons , et dont cependant
on ne pendit que les plus pauvres. Louis X
mourut à Vincennes le 8 janvier iôlô, à
26 ans. Il eut de Clémence un fils post-
hume nommé Jean, né le 15 novembre
4316 ; mais ce jeune prince ne vécut
que huit jours. Il s'éleva une grande dif-
ficulté au sujet de la succession. Jeanne,
fille du roi et de sa première femme , de-
vait régner, selon le duc de Bourgogne.
Les états généraux décidèrent que la loi
salique excluait les femmes de la cou-
ronne. Leur avis prévalut , et ce fut Phi-
lippe le Long, 2"^ fils de Philippe le Bel,
qui monta sur le trône de France. Jeanne
eut pour sa part la couronne de Navarre,
qu'elle porta en dot à Philippe , petit-fils
de Philippe le Hardi. Voyez pour le rè-
gne de Louis X les Ordonnances des rois
de France ; le Continuateur de Nangis ;
Pauli Ai^milii Feronensis hist. lib. VIII;
les Chroniques de Saint-Denys ^ Rymer.
acta^ etc. etc.
LOUIS Xi , fils de Charles VII et de
Marie d'Anjou, fille de Louis II, roi titu-
laire de Naples , naquit à Bourges le 5
juillet 1423. A l'âge de 17 ans, il se ré-
volta contre son père, par haine contre
Agnès Sorel et contre les ministres du
roi. Il s'enfuit à Niort, où il devint chef
d'une faction connue sous le nom de la
Praguerie. Charles VII marcha contre
lui , le défit el lui pardonna. Le Dauphin
alla combattre les Anglais , et se signala
aux sièges de Ponloise , de la Réole et de
Dieppe ( 1443 ). L'année suivante , il vain-
quit les Suisses. De retour auprès de son
père , il intrijpia de nouveau , et de nou-
veau il quitta la cour; et, poursuivi par
les troupes de son père, il se sauva en
Bourgogne, où il fut bien reçu par le duc
et le prince héréditaire, le duc de Charo-
lais. Ce prince lui assura une retraite
agréable à Genapp , en Hainaut , et pour-
vût a tous ses besoins. C'est dans cette re-
traite qu'il recueillit les cent Nouvelles
nouvelles , et qu'il lui naquit un fils d'une
princesse de Savoie , qu'il avait épousée
malgré son père ; et malgré les invitations
de celui-ci , il ne revhit en France qu'à
Vépoque de sa mort. Se croyant trahi par
9 LOU
le cardinal de la Balue , il le tint en pri-
son plusieurs années. On ne le crut paâ
étranger à la mort d'Agnès Sorel. Les
dernières années de Charles VII furent
remplies d'amertume; son fils causa su
mort. Louis XI, parvenu à la couronne,
en 1461 , par la mort de Charles VII, prit
un plan de conduite et de gouvernement
entièreiTient différent. Il ôla aux officiers
et aux magistrats leurs charges, pour les
donner aux rebelles qui avaient suivi ses
retraites dans le Dauphiné , dans la Fran-
che-Comté, dans le Brabant. Il traita la
France comme un pays de conquête , dé-
pouilla les grands , accabla le peuple d'im-
pôts , et abolit la pragmatique-sanction ;
mais le parlement de Paris la soutint avpr
tant de vigueur , qu'elle ne fui totalemen
anéantie que par le concordai fait entre
Léon X et François I". Ses violences exci-
tèrent contre lui tous les bons citoyens.
11 se forma une ligue entre Charles , duc
de Berry, son frère, le comte de Cliaro-
lais , le duc de Bretagne, le comte de Du-
nois , et plusieurs seigneurs non moins
mccontens de Louis XI. Jean d'Anjou
duc de Calabre , vint se joindre aux prin-
ces confédérés , etleur amena 500 Suisses,
les premiers qui aient paru dans les ar-
mées françaises. La guerre qui suivit
cette ligue , formée par le mécontente-
ment , eut pour prétexte la réformation
de l'état et le soulagement des peuples :
elle fut appelée la Ligue du bien public.
Louis arma pour la dissiper. Il y eut ui^n^^
bataille non décisive à Montlhéri, le l'ô!,
juillet 1465. Le champ resta aux troupes
confédérées; mais la perte fut égale des
deux côtés. Le monarque français ne dés-
unit la ligue qu'en donnant à chacun des| ,
principaux chefs ce qu'il demandait : la
Normandie à son frère ; plusieurs places,
dans la Picardie , au comte de Charolais \
le comté d'Etampes au duc de Bretagne,
et l'épée de connétable au comte de Saint-
Pol. La paix fut conclue à Conflans , le ^
octobre delà même année. Le roi accorda
tout par ce traité , espérant tout ravoir
par ses intrigues. Il enleva bientôt la
Normandie à son frère , et une partie de
la Bretagne au duc de ce nom. L'inexé-
cution du traité de Conflans allait rani-
mer la guerre civile : Louis XI crut l'é-
teindre en demandant à Charles le Té-
méraire , duc de Bourgogne , une confé-
rence à Péronne , dans le temps même
qu'il excitait les Liégeois à faire une per-
fidie à ce duc et à prendre les armes
contre lui. Charles , instruit de cette ma-
LOU
540
LOU
nœavrc, relînt Louis XI prisonnier dans
le château de Péronne, le força à conclure
un traité fort désavanlayeux , et à mar-
cher à sa suite contre les Liégeois mêmes
qu'il avait armés. Le comble de l'humi-
liation pour lui fut d'assister à la prise de
leur ville, et de ne pouvoir obtenir son
retour à Paris qu'après avoir prodigué
les bassesses et essuyé mille affronts. Le
duc de Berry, son frère, fut la victime
de cet élargissement. Louis XI le força
de recevoir la Guienne en apanage , au
lieu de la Champagne et de la Brie : il
voulut l'éloigner de ces provinces , dans
la crainte que le voisinage du duc de
Bourgogne ne fût une nouvelle source de
division. Louis XI n'en fut pas plus
tranquille. Le duc de Bourgogne fit of-
frir sa fille unique au nouveau duc de
Guienne; mais celte alliance ne se fit
pas : le duc de Guienne mourut em-
poisonné avec sa maîtresse , par une
pêche qui leur fut donnée, non sans soup-
çon^ dit le président Hénault , ro72^re le
roi lui-même. Odet d'Aidie, favori du
prince empoisonné , voulut venger la
mort de son maitre. Il enleva l'empoison-
neur, et le conduisit en Bretagne, poxir
pouvoir lui faire son procès en liberté ;
mais le jour qu'on devait prononcer l'ar-
rêt de mort , on le trouva étouffé dans
son lit. Cependant le duc de Bourgogne
se prépare à tirer une vengeance plus
éclatante de la mort d'un prince qu'il
voulait faire son gendre. Il entre en Pi-
cardie , met tout à feu et à sang , échoue
devant Beau vais, défendu par des fem-
mes , passe en Normandie , la traite comme
la Picardie , et revient en Flandre lever
de nouvelles troupes. Cette guerre cruelle
fut terminée , pour quelques instans ,
par le traité de Bouvines , en iU7k ;
mais , cette même année , il y eut une
ligue offensive et défensive formée par
le duc de Bourgogne, entre Edouard IV ,
roi d'Angleterre, et le duc de Bretagne ,
contre le roi de France. Le prince anglais
débarque avec ses troupes : Louis peut
le combattre , mais il aime mieux le ga-
gner par des négociations. Il paie ses
principaux ministres ; il séduit les pre-
miers officiers , au lieu de se mettre en
état de les vaincre ; il fait des présens de
vin à toute l'armée ; enfin il achète le
retour d'Edouard en Angleterre. Les deux
rois conclurent à Amiens, en 1473, un traité
qu'ils confirmèrent à Picquigni. Ils con-
vinrent d'une trêve de sept ans : ils y ar-
rêtèrent le mariage entre le Dauphin et
la fille du monarque anglais ; et Louis
s'engagea de payer jusqu'à la mort de son
ennemi une somme de 50,000 écus d'or.
Le duc de Bretagne fut aussi compris
dans ce traité. Celui de Bourgogne, aban-
donné de tous et seul contre Louis XI,
conclut avec lui àVervins une trêve de
neuf années. Ce prince, ayant été tué au
siège de Nancy en 1477 , laissa pour hé-
ritière Marie sa fille unique , que Louis XI,
par une politique mal entendue , refusa
pour le Dauphin son fils. Cette princesse
épousa Maximilien d'Autriche , fils de
l'empereur Frédéric III, et ce mariage
fut l'origine des querelles que la Franco
ne cessa de faire à la maison d'Autriche ,
souveraine des Pays-Bas. La guerre entre
l'empereur et le roi de France commença
peu de temps après cette union. Louis XI
s'empara de la Franche-Comté parla va-
leur de Chaumont d'Amboise. Il y eut
une bataille à Guinegate , où l'avantage
fut égal des deux cotés. Un traité , fait à
Arras en 1482 , termina cette guerre . On
y arrêta le mariage du Dauphin avec
Marguerite , fille de Marie de Bourgogne.
Louis XI ne jouit pas long-temps de la
joie que lui dévoient inspirer ces heu-
reux événemens. Sa santé dépérissait de
jour en jour ; enfin , sentant la mort ap-
procher , il se renferma au château du
Plessis-lès-Tours , où l'on n'entrait que
par un guichet , et dont les murailles
étaient hérissées de pieux de fer. Inac-
cessible à ses sujets, entouré de gardes,
dévoré par la crainte de la mort, par la
douleur d'être haï, par les remords et
par l'ennui, il fit venir de Calabre un
pieux ermite , révéré aujourd'hui sous le
nom de saint François de Paule. Il se jeta
à ses pieds , et le supplia en pleurant de
demander à Dieu la prolongation de ses
jours, o Mais le saint , dit un orateur cé-
» lèbre , lui parla en prophète , et lui dit
» comme un autre Isaïe : Dispone dojnui
» tuce , quia morieris tu , et non vives.
» Sire , mettez ordre à votre état , et à ce
» que vous avez de plus précieux dans
» votre état , qui est votre conscience :
» car il n'y a pas de miracle pour vous ;
» votre heure est venue , et il faut mou-
» rir. C'était une parole bien dure pour
» tout homme , encore plus pour un roi ,
» mais surtout pour un roi si attaché à la
» vie. » Cependant Louis écouta François
avec respect , le pria de le disposer à la
mort , et expira entre ses bras le 31 août
1483 , à 60 ans : heureux si de vifs et sin-
cères repentirs ont effacé les iniquités de
LOU 541
sa vie. Les chroniques du temps comp-
tent 4000 sujets (nombre sans doute exa-
géré) exécutés sous son règne, en pu-
blic ou en secret. Les cachots , les cages
de fer , les chaînes dont on chargeait les
victimes de sa barbare défiance, sont les
monumens qu'a laissés ce monarque.
Tristan l'ermite , prévôt de son hôtel ,
était le juge , le témoin et l'exécuteur de
ses vengeances; et ce roi cruel ne crai-
gnait pas d'y assister , après les avoir or-
données. Lorsque Jacques d'Armagnac,
duc de Nemours , accusé peut-être sans
raison du crime de lèse-majesté , fut exé-
cuté en 1477 par ses ordres, Louis XI fit
placer sous l'échafaud les enfans de ce
prince infortuné, pour recevoir sur eux
le sang de leur père. Ils en sortirent tout
couverts , et dans cet état on les conduisit
à la Bastille , dans des cachots faits en
forme de hotte , où la gêne que leur corps
éprouvait était un continuel supplice. Ce
monarque inhumain eut pour ses confi-
dens et pour ses ministres des hommes
dignes de lui. Il les lira de la boue : son
barbier devint comte de Meulan et am-
bassadeur, son tailleur, héraut-d'armes;
son médecin, chancelier. Il abâtardit la
nation en lui donnant ces vils simulacres
pour maîtres : aussi sous son règne il n'y
eut ni vertu ni héroïsme. L'obéissance et
la bassesse tinrent lieu de tout; et le peu-
ple fut enfin tranquille, dit un historien
ingénieux , comme les forçats le sont dans
une galère. Sa dévotion aurait dû, par
un effet même naturel , adoucir son cœur
dur , et corriger son caractère incon-
stant , bixarre , inquiet et perfide ; mais
sa dévotion n'était que la crainte servile
d'une âme basse, pusillanime et égarée.
Toujours couvert de reliques et d'images,
portant à son bonnet une Notre-Dame de
plomb, il lui demandait pardon de ses
assassinats, et en commettait toujours de
nouveaux. Il fit solliciter auprès du pape
le droit de porter le surplis et l'aumuce,
Bt de se faire oindre une seconde fois de
l'ampoule de Reims , au lieu d'implorer
la miséricorde de l'Etre suprême , de la-
ver ses mains souillées de tant de meur-
tres commis avec le glaive de la justice.
Si la nature le 4it naître avec un cœur
pervers , elle lui donna de grands talens
dans l'esprit. Il avait du courage ; il con-
naissait les hommes et les affaires. Il
avait, suivant ses expressions (i),<ouf507i
(i)CcUe parole eitg^aéralemcDtaUribaée an comte
dt Dammertin , qui dit uo jour a« roi , en cbevau-
7.
LOU
conseil dans sa tête : maxime conforme
d'ailleurs à son humeur ombrageuse et
défiante. Prodigue par politique, autant
qu'avare par goût, il savait donner en roi.
Paris, désolé par une contagion, fut re-
peuplé par ses soins; une police rigou-
reuse y régnait. S'il avait vécu plus long-
temps , les poids et les mesures auraient
été uniformes dans ses étals. Ce fut lui
qui établit les postes jusqu'alors incon-
nues en France (i). Deux cent trente
courriers , à ses gages , portaient les or-
dres du monarque et les lettres des par-
ticuliers dans tous les coins du royaume.
Il est vrai qu'il leur fit payer chèrement
cet établissement ; il augmenta les tail-
les de trois millions, et leva, pendant
vingt ans, 4 millions 700,000 liv. par an :
ce qui pouvait faire environ 25 millions
d'aujourd'hui; au lieu que Charles VU
n'avait jamais levé par au que 1,800,000
francs. En augmentant son pouvoir sur
ses peuples par ses rigueurs, il augmenta
son royaume par sa politique. L'Anjou, le
Maine, la Provence, la Bourgogne, le
Roussillon et quelques autres grands
fiefs, furent réunis sous lui à la couronne.
Ce prince a fai l recueill ir les Cent Nouvelîes
nouvelles^ ou histoires contées par diffé-
rons seigneurs de sa cour , Paris , Ve -
rard , in-fol. , 1486, mais dont la belle
édition est d'Amsterdam, 1701, 2 vol.
in-8° , figures de Hoogue : quand les figu-
res sont détachées de l'imprimé, elles
sont plus recherchées. ( Voyez MAR -
GUERITE DE VALOIS.) Si l'on en croit
quelques auteurs , c'est sous son règne.
chani de compagnie avec lai : < Sire, j'admire ta
• force prodilgitiise de votre cheval. Et pourquoi?
> demanda Louis. C'est qu'il p^rle le roi et tout soa
• conseil. •
(i) Il est faii mention des chevaux de poste dans \f
Code Theodosien, au titre De cursu publico , en la l.-i
3,6, 7 , 1 5 , etc. ; mais ces postes n'étaient pas éta-
blies de la m:inirre 'juVIIes le sont aujourd'hui dans
toufe.rF.uropr ; c'étaient seulement des chevaux pu-
blics. Selon Hérodote, ce fut Cyrns ou Xerxf's, i]ui
le premier ctatlit des courriers et des chevaux de
poste, afin d'jtre instruit avec plus de diligence de
tout ce qui pourrait se passer dans toute l'étzadue de
l'empire. Le mot de posie vient de ce que les chevaui
sont posés iposifi) d'intervalle en intervalle, et l'on
attribue à Louis XI d'avoir ordonné le changement
des chevaux de deux lieues en deux lieues, pour un«
plus grande promptitude : au lien que les Perses o'e»
plaçaient qu'au bout de l'espace de chemin qu'un che-
val pouvait faire par jour. L'ordre n'était pas si boa
dans l'empire romain ; les courriers élnient réduits i
contraindre 1rs villes nu les particuliers à leur four-
nir des chevaux. Ce fut l'empereur Adrien qui dé-
chargea te peuple de cette nécessité.
46.
LOtJ
55.2
XOU
en 1469 , que le prieur de SorLonne fit
venir des imprimeurs de Mayçnce ; Cliar-
les VII avait déjà tâché, quoique sans
succès , d'introduire cet art en France.
( Voyez JENSON.) On doit encore à
FiOuis XI Rozier des guerres , Paris ( vers
1521), in-4°; ibid. , 1616, in-8°. {Voyez
le Dictionnaire des anonymes ^ n"' 2178 ,
16,706 et 16,707. Voyez sur le règne de ce
prince les Mémoires de Philippe de Com-
viines; la Chronique scandaleuse par
Jean de Troyes ; Rerum gallicarum com-
mentarii ab amto \kGl ad aimum 1480, de
Beaucaire ; V Histoire de Louis XI , par
Duclos , historiographe de France (Voy.
DUCLOS). Il y en a une autre par ma-
demoiselle de Lussan, en 6 vol., et quel-
ques autres encore qu'on doit lire avec
défiance. On doit à M. Mely-Jeannin une
Comédie historique de Louis XI ^ jouée
avec succès en 1827. On trouve un excel-
lent portrait de Louis XI dans le roman
de Quentin Duîivard^ par Walter-Scott.
LOUIS XII , roi de France , naquit à
Blois , le 27 juin 1462 , de Charles , duc
d'Orléans , et de Marie de Qèves , et par-
vint à la couronne en 1498 , après la
mort de Charles VIII. Louis XI, avant de
mourir , avaiJ déclaré sa fille , madame
de Beauj eu, régente du royaume , pen-
dant la minorité de Charles VIII. Le duc
de Bourbon et le duc d'Orléans (depuis
Louis XII ) disputèrent l'autorité à la du-
chesse ; mais le roi ayant été déclaré ma-
jeur par ses états tenus à Tours , le duc
d'Orléans n'obtint que la présidence du
conseil : il était marié avec Jeanne , se-
,conde fille du feu roi. Ayant à subir
[plusieurs désagrémens de la part de la
régente , il quitta la cour , suivi de plu-
sieurs seigneurs, et se réfugia en Breta-
gne, où il devint amoureux de la célèbre
Anne de Bretagne , fille et héritière du
duc François II. La princesse de Beaujeu
convoqua un lit de justice , et fit déclarer
rebelle le duc d'Orléans , qui leva bientôt
une armée ; mais il fut battu par la Tri-
mouille et fait prisonnier. Trainé de pri-
son en;prison, le duc Louis fut enfermé
à la tour de Bourges dans iine cage de
fer où il demeura trois ans. Enfin les
prières de sa femme auprès de Charles
VIII lui obtinrent la liberté. Il coopéra en-
suite, et malgré sa passion, au mariage de
Charles avec Anne de Bretagne , et suivit
ce monarque en Italie, où il se distingua
dans Novare , par sa valeur et son intel-
ligence. A son retour en France , Charles
yill mourut , et le duc d'Orléans monta
sur le trône sous le nom de Louis XII.
Son caractère bienfaisant ne tarda pas
d'éclater ; il soulagea le peuple et par-
donna à ses ennemis. Louis de la Tri-
mouille l'avait fait prisonnier à la bataille
de Saint- Aubin; il craignait son ressen-
timent ; il fut rassuré par ces belles pa-
roles, a Ce n'est point au roi de France à
» venger les querellas du duc d'Orléans. »
Epris de l'esprit de conquête , il jeta ses
vues sur le Milanais, sur lequel il préten-
dait avoir des droits par son aïeule Va-
lenline , sœur unique du dernier duc de
la famille des Visconti. Ludovic Sforce
en était possesseur. Le roi envoya une
armée contre lui en 1499 . et en moins de
vingt jours le Milanais fut à lui. Il fit son
entrée dans la capitale le 6 octobre de la
même année; mais, par une de ces révo-
lutions ordinaires dans les guerres d'I-
talie , le vaincu rentra dans son pays ,
d'où on l'avait chassé , et recouvra plu-
sieurs places. Sforce , dans ce rétablisse-
ment passager , payait un ducat d'or pour
ciiaque tête de Français qu'on lui appor-
tait. Louis XII fit un nouvel effort ; il ren-
voya Louis de la Trimouille , qui recon-
quit le Milanais. Les Suisses qui gardaient
Sforce le livrèrent au vainqueur. Maître
du Milanais et de Gènes , le roi de France
voulut avoir Naples ; il s'unit avec Fer-
dinand le Catholique pour s'en emparer.
Celte conquête fut faite en moins de qua-
tre mois , l'an 1301. Frédéric , roi de Na-
ples, se remit entre les mains de Louis XII,
qui l'envoya en France avec une pension
de 120,000 livres de notre monnaie d'au-
jourd'hui. A peine Naples fut-il conquis,
que Ferdinand le Catholique s'unit avec
Alexandre VI pour en chasser les Fran-
çais. Se« troupes, conduites par Gonzalve
de Cordoue , qui mérita si bien le titra
de grand capitaine^ s'emparèrent en
1305 de tout le royaume, après avoir
gagné les batailles de Séminara et de Cé-
rignole. Cette guerre finit par un traité
honteux, en 1505. Le roi y promettait la
seule fille qu'il eût d'Anne de Bretagne
au petit-fils de Ferdinand , à ce prince de-
puis si terrible à la France sous le nom
de Charles-Quint. Sa dot devait être com-
posée de la Bourgogne,et de la Bretagne,
et on abandonnait Milan et Gènes, sur
lesquels on cédait ses droits. Ces condi-
tions parurent si onéreuses aux états as-
semblés à Tours en 1506 , qu'ils arrêtè-
rent que ce mariage ne se ferait point.
Les Génois se révoltèrent la même année
contre Louis XII. Il repassa les monts,
LOU
543
tou
îes défit, entra dans leur ville en vain-
queur , et leur pardonna. L'année 1508
fut remarquable par la ligue de Cambrai,
formée par JULES IL ( Voyez l'arlicle de
ce ponlife. ) Le roi de France y entra,
et défit les Vénitiens à la bataille d'Ai-
gnadel , lo 14 mai 1509. La prise de Cré-
mone , de Padoue et de plusieurs autres
places, fut le fruit de cette victoire. Jules
il , qui avait obtenu parles armes de Louis
XII à peu près ce qu'il voulait, n'avait plus
d'autre crainte que celle de voir les Fran-
çais en Italie. Il se ligua contre eux. Le
jeune Gaston de Foix , duc de Nemours ,
repoussa une armée de Suisses , prit Bo-
logne , et gagna , en 151 1 , la bataille de
ilavenue , où il perdit la vie. La gloire
»îes armes françaises ne se soutint pas ;
le roi était éloigné , les ordres arrivaient
trop tard, et quelquefois se contredisaient.
Son économie , quand il fallait prodiguer
l'or, donnait peu d'émulation. L'ordre et
la discipline étaient inconnus parmi les
troupes. En moins de trois mois, les
Français furent forcés de sortir de l'I-
talie. Le maréchal Trivulce , qui les
commandait , abandonna , l'une après
l'autre , les villes qu'ils avaient prises , du
fond de la Romagne aux confins de Savoie.
Louis XII eut la mortification de voir
établir dans Milan, par les Suisses, le
jeune Maximilien Sfoxce, fils du duc,
mort prisonnier dans ses états. Gênes, où
il avait étalé la pompe d'un roi asiatique,
reprit sa liberté et chassa les Français.
Elle fut soumise de nouveau ; mais la perte
de la bataille de Novare , gagnée par les
Suisses contre la Trimouille, le 6 juin
1513, fut l'époque de la totale expulsion
des Français. L'empereur Maximilien,
Henri VIII et les Suisses^ attaquèrent à la
fois la France. Les Anglais mirent le siège
devant Térouane, qu'ils prirent après la
journée de Guinegate, dite la Journée
des éperons, où le-s troupes françaises
furent mises en déroute sans presque li-
vrer de combat. La prise de Tournai sui-
vit celle de Térouane. Les Suisses assié-
gèrent Dijon , et ne purent être renvoyés
qu'avec 20,000 écus comptant , une pro-
messe de i.OOO , et sept otages qui en ré-
pondaient. Louis XII, battu de tous côtés,
a recours aux négociations; il fait un
traité avec Léon X , renonce au concilia-
bule de Pise , et reconnaît le concile de
Latran ; il fait un autre traité avec
Henri VIII, et épouse sa sœur Marie,
pour laquelle il donne un million d'écus.
Il avait alors 53 ans, et était d'une santé
fort délicate. Il mourut au bout de deux
mois de mariage, en 1515. Si Louis XII
fut malheureux au dehors de son royaume,
il fut heureux au dedans. On ne peut re-
procher à ce roi que la vente des charges.
Il en tira en dix-sept années la somme de
1,200,000 livres dans le seul diocèse de
Paris ; mais les tailles et les aides fu-
rent modiques. Il aurait été plus loué si .
en imposant des tributs nécessaires , il eût
conservé l'Italie, ou plutôt si, renonçant
à des conquêtes lointaines, incertaine»
et peu justes, il avait épargné le sang de
ses sujets, et donné ses soins à la bonne
administration d'un beau et grand royau-
me , qui pouvait suffire à son ambition.
Mais on peut en quelque sorte pardonner
ses fautes , en faveur de ses qualités pré-
cieuses de bon roi , de prince humain et
équitable. Lorsqu'il allait à la guerre, il
se faisait suivre de quelques hommes
vertueux et éclairés, chargés, même en
pays ennemi , d'empêcher le désordre et
de réparer le dommage lorsqu'il avait été
fait. Ces principes de probité furent sur-
tout remarqués après la prise de Gènes ,
qui avait secoué le joug de la France.
Son avant-garde ayant pillé quelques
maisons du faubourg Saint-Pierre d'A-
rena , le prince , quoique personne ne se
plaignit , y envoya des gens de confiance
pour examiner à quoi se pouvait monter
la perte , et fit donner ensuite de l'argent
pour payer la valeur de ce qui avait été
pris. L'Alviane, général des Vénitiens,
ayant été pris à la bataille d'Aignadel, fut
conduit au camp français , où on le traita
avec toute la distinction possible. Ce gé-
néral , plus aigri par l'humiliation de sa
défaite , que touché de l'humanité de son
vainqueur, ne répondit aux démonstra-
tions les plus consolantes , que par une
fierté brusque et dédaigneuse. Louis se
contenta de le renvoyer au quartier où
l'on gardait les prisonniers. « Il vaut
» mieux le laisser, dit-il ; je m'emporterais,
» et j'en serais fâché. Je l'ai vaincu , il
» faut me vaincre moi-même. » Cepen-
dant il avait quelquefois des accès de co-
lère où il n'était plus maître de lui-même,
et n'écoutait plus que la fougue de cette
passion aveugle. {Voyez JULES II.) Son
édit de 1499 a rendu sa mémoire chère à
tous ceux qui administrent la justice et a
ceux qui l'aiment. Il ordonne par cet édit
qu'on suive toujours la loi,' malgré les
ordres contraires que Viriiportunilé pour'
rait arracher du monarque. Louis XII fut
le premier des rois qui mil le laboureur à
LOU 5
rouvert de la rapacité du soldat , et qui fit
punir de mort les gens-d'armes qui ran-
çonnaient le paysan. Les troupes ne fu-
ient plus le fléau des provinces ; et loin
de vouloir les en éloigner , les peuples
les demandèrent. Il était affable , doux ,
raressant; il égayait la conversation
par des, bons mots, plaisans sans être
malins. On lui reproche avec raison d'a-
voir répudié la reine Jeanne , après un
long mariage , quoique le pape Alexandre
VI ait paru admettre ses raisons de nul-
lité. ( Voyez JEANNE DE FRANCE. ) On
a imprimé ses Ze«rtf5 au cardinal d'Am-
boise , Bruxelles, 1712, 4 vol. in-12. Louis
XII a eu un grand nombre d'historiens.
On peut consulter Saint-Gelais ^ Jean
(l'^uton^ les Louanges de Louis XII ^
par Cl. Seyssel . Philippe de Comniines^
Cuichardin ^ 3Iéinoire de la Trimouille ,
de Bayardj etc., l'Histoire de la ligue
de Cambrai par Dubos ; l'Histoire de
Louis XII jyar Varillas , 1688 , in-i",
ou 3 vol. in-12 , à laquelle on préfère la
Vie de ce prince par l'abbé Tailhé, Paris,
175S, 3 vol. in-12. M. Rœderer a publié :
Mémoires pour servir à une nouvelle his-
toire de Louis XII ^ Paris, 1820, in -8°;
cet ouvrage a été réimprimé en 1826 ,
sous le titre suivant Louis XII et Fran-
çois r"", ou Mémoires pour servir à l'his-
toire de leurrègne^ 2 vol. in-8°. Louis XII
avait pris pour devise le porc-épic avec
ces mots : Cominus et e minus ^ qui en
étaient Tàme. L'académie française ayant
proposé en 1787, pour prix, l'éloge de
Louis XII , la mémoire de ce prince fat
barbouillée par tous les lieux communs
du philosophisme ; il n'y eut qu'une pièce
écrite d'une manière digne de la vérité et
de l'histoire, et ce ne fut pas celle que
l'académie couronna.
LOUIS XIII, surnommé le Juste ^ né
à Fontainebleau le 27 septembre IGOl, de
Henri IV et de Marie de Médicis, monta
sur le trône en 1610 , après l'assassinat
de son père , sous la tutelle et la régence
«le sa mère. Cette princesse changea le
système politique du règne précédent, et
dépensa en profusions , pour acquérir des
rréalures , ce que Henri le Grand avait
amassé pour rendre sa nation puissante.
Les troupes à la tête desquelles il se dis-
posait à combattre, furent licenciées;
son lidèle ministre , son ami , Sulli , se
retira de la cour ; l'état perdit sa considé-
ration au ^chors et sa tranquillité au de-
dans. Les princes du sang et les grands
teigueurs , le maréchal de Bouillon à leur
/i4 LOU
tête, remplirent la France de factions. On
apaisa les mécontens par le traité de
Sainte-Ménehould , le 15 mai 1614; on
leur accorda tout, et ils se soumirent
pour quelque temps. Le roi, ayant élé dé-
claré majeur le 2 octobre de la même année,
convoqua le 27 les états-généraux. Le ré-
sultat de celte assemblée fut de parler
beaucoup d'abus, de disserter sur les
maux publics, sans remédier presqu'à
aucun. La France resta dans le trouble ,
gouvernée par le Florentin Concini, connu
sous le nom de maréchal d' Ancre. ( Voy.
ce nom. ) Cet homme obscur , parvenu
tout à coup au faite de la grandeur , dis-
posa de tout en ministre despotique , ( t
fit de nouveaux mécontens. Henri II,
prince de Condé , se retire encore de la
cour, publie un manifeste sanglant, se
ligue avec les huguenots, toujours prêts
à prendre les armes. Ces troubles n'em-
pêchèrent point le roi d'aller à Bordeaux,
où il épousa Anne d'Autriche , infante
d'Espagne. Cependant il avait armé con-
tre les rebelles; ces préparatifs et des
combats partiels n'ayant aucun résultat
définitif, on eut recours aux négocia-
tions. Le roi conclut avec Condé la paix
à Loudun en 1615 ; mais apprenant qu'il
tramait de nouveaux projets, il le fit
mettre à la Bastille peu de temps après.
Les princes , à la nouvelle de cet empri-
sonnement, se préparèrent à la guerre;
ils la firent avec peu de succès, et elle
linit tout à coup par la mort du maréchal
d'Ancre. Le roi , mécontent de la dépen-
dance où son ministre le tenait , el con-
duit par les conseils de Luynes son favori,
consentit à l'emprisonnement de Concini.
Vitry , chargé de l'ordre , voulut l'exécu-
ter ; et sur la résistance du maréchal , il
le tua sur le pont du Louvre , le 24 octo-
bre 1617. L'éloignement de Marie de Mé-
dicis , reléguée à Blois , suivit ce meur-
tre. Le duc d'Epernon , qui lui avait fait
donner la régence , alla la tirer de celle
ville , et la mena dans ses terres à An-
goulème. On l'avait haïe toute-puissante,
on l'aima malheureuse. Louis XIII, voyant
les dispositions du peuple , chercha à se
raccommoder avec sa mère , et y réussit
par le moyen de l'évéque de Luçon , si
connu et si craint depuis sous le nom de
cardinal de Richelieu. La paix se fit à
Angoulême en 1619 ; mais à peine fut-elle
signée , qu'on pensa à la violer. La reine,
conseillée par l'évcque de Luçon , qui
voulait faire acheter sa médiation , prit
de nouveau les armes ; mais elle fut obli-
I
LOU
S43
LOI!
gée de les quitter bientôt après. Le roi,
après s'être montré dans la Normandie
pour apaiser les mécontens , passa à An-
(jers, où sa mère s'était retirée, et la
força à se soumettre. La mère et le fils
en se voyant à Brissac versèrent des lar-
mes , et se brouillèrent ensuite plus que
jamais. La nomination de Richelieu au
cardinalat fut le seul fruit de ce traité.
Louis XIII réunit le Béarn à la couronne
par un édit solennel. Cet édit, donné en
1620 , restituait aux catholiques les églises
dont les protestans s'étaient emparés, et
érigeait en parlement le conseil de cette
province. Ce fut l'époque des troubles
que les huguenots excitèrent sous ce
règne. Rohan et Soubise furent les chefs
des factieux. Le projet des calvinistes était
de faire de la France une république ; ils
!a divisèrent en huit cercles, dont ils
comptaient donner le gouvernement à
des seigneurs de leur parti. Ils offrirent
à Lesdiguières le commandement de
leurs armées et 100,000 écus par mois ;
Lesdiguières aima mieux les combattre,
et fut fait maréchal général des armées
du roi. Luynes, devenu connétable, mar-
cha contre les rebelles vers la Loire, en
Poitou , en Béarn , dans les provinces
méridionales. Le roi était à la tête de
cette armée. Presque toutes les villes lui
ouvrirent leurs portes ; il soumit plus de
.'JO places. Ses armes, victorieuses dans
tout le royaume , échouèrent devant Mon-
tauban, défendu par le marquis de la
Force ; le roi fut obligé de lever le siège ,
quoiqu'il y eût mené six maréchaux de
France. Le nombre des chefs fut nuisible
par le défaut de subordination. Luynes
étant mort le 13 décembre de la même
année 162i , Louis XIII n'en continua pas
moins la guerre. Les avantages elles dés-
avantages furent réciproques de part
et d'autre. Le roi donna une grande mar-
que de courage en Poitou, lorsqu'à mi-
nuit à la tète de ses gardes, i.l passa dans
i'île de Riez (que quelques auteurs ont
rnal à propos confondue avecl'ile de Ré),
et en chassa Soubise , après avoir défait
les troupes qui défendaient ce poste. Il
ne se signala pas moins au siège de Royan
en Sainlonge ; il monta trois ou quatre
fois sur la banquette pour reconnaître la
place, avec danger évident de sa vie. Ce-
pendant les huguenots se lassaient de la
guerre ; on leur donna la paix en 1G23.
Pendant celle courte paix , Louis XIII
rétablit la tranquillité dans la Vallelinc
en iG24 , et secourut eu 1625 le duc de
Savoie contre les. Génois. Les troupes
françaises et les piémontaises firent quel-
ques conquêtes , qu'elles perdirent près -
qu'aussitôt. Les huguenots , toujours in-
quiets et rebelles, avaient recommencé
la guerre, continuant à vérifier le mot de
Chai-les IX : « D'abord vous ne deman-
» diez qu'une petite liberté , bientôt vous
» voudrez être les maîtres et nous chasse i
» du royaume. » La Rochelle , le boule-
vard des calvinistes , reprend les armes,
et est secondée par l'Angleterre. Les vais-
seaux anglais furent vaincus près de l'île
de Ré; et cette île, dont les rebelles s'é-
taient rendus maîtres , fut de nouveau à
la France. Richelieu méditait un coup
plus important, la prise de la Rochelle
même. Une femme (c'était la mère du
duc de Rohan , chef des hérétiques ré-
voltés) défendit cette ville pendant un an
contre l'armée royale, contre l' activité
du cardinal de Richelieu et contre l'in-
Irépiditè de Louis XIII, qui affronta plus
d'une fois la mort à ce siège. La ville se
rendit enfin le 28 octobre 4628, aprè*
avoir souffert toutes les extrémités de lu
famine. On obtint la reddition do celle
place par une digue de 747 toises de long,
que le cardinal fit construire, à l'exemple
de celle qu'Alexandre le Grand fil autre-
fois élever devant Tyr , et Alexandre de
Parme devant Anvers. Cette digue dompta
la mer , la flotte anglaise et les Rochel-
lois. ( royez GUITON et flIÉTEZEAU. )
Les Anglais travaillèrent en vain à la
forcer ; ils furent obligés de retourner en
Angleterre , et le roi entra enfin dans la
ville rebelle, qui depuis Louis XI jus-,
qu'à Louis XIII , avait été armée contre
ses maîtres. Ce dernier siège coûta 40 mil-
lions. Les fortifications furent démolies,
les fossés comblés , les privilèges de la
ville anéantis , et la religion catholique
rétablie. Les philosophisles de nos jours
déclament contre cette expédition , deve-
nue indispensable au repos du royauine.
Un écrivain judicieux et équitable a, ré-
futé leurs déclamations, en s'adressant
aux huguenots eux-mêmes, a Les temples
» sont profanés, dit-il, les choses saintes
j> outragées et brûlées , l'asile des cloîtres
» violé , les vierges saintes sont déshono -
»rées, l'autel est ébranlé, le trône lui-
» même est menacé. De sourdes conspi-
» rations ont été découvertes, et la révolte
» a éclaté. Il est temps de mettre fin a
» tant d'excès ; trop long-temps on les a
B dissimulés. C'est par l'impunité que
r s'est accrue votre audace. Contre de*
k'6.
LOU
* muux aussi grands , il faut employer
» des remèdes violens. Subissez , il en est
» temps , la peine due à tant d'attentats;
» et qu'an exemple , terrible mais néces-
» saire , arrête enfin les progrès du mal
f qui ne pourra s'accroître sans entraîner
» la ruine entière , non pas de l'Eglise
» seulement , mais de l'état entier. Ce-
» pendant vous pouvez encore éviter le
• cliâliment. Si nous armons contre vous
» des soldats pour arrêter et punir vos
> excès, nous vous envoyons des rnission-
» naires zélés pour éclairer vos conscien-
» ces. Ouvrez les yeux à la vérité ; ab-
» jurez vos erreurs ; rentrez dans le sein
» de l'Eglise , et vous nous verrez oublier
» vos fureurs passées , et vous embrasser
f comme des frères. Croyez , au fond du
» cœur, tout ce qu'il vous plaira ; coiifor-
» mez-vous seulement à l'extérieur, au
» euUe dominant. En introduire un autre,
» c'est troubler l'harmonie et la tranquil-
» lité de l'état. Nous avons la possession
» et la vérité pour nous; et si vous per-
» sistez à vouloir nous dépouiller , n'esl-il
» pas juste que nous songions enfin à
» nous défendre , et à repousser la force
>• par la force ?» La prise de la Rochelle
fut suivie d'un édit appelé Védt't de grâce ^
dans lequel le roi parla en souverain qui
pardonne. Après cet événement, si fu-
neste au calvinisme et si heureux pour la
France , le roi partit et alla secourir le
duc de Ne vers , nouveau duc de Mantoue,
contre l'empereur qui lui refusait l'inves-
titure de ce duché. Arrivé en Piémont ,
il força le Pas de Suze en IC29 , ayant
sous lui les maréchaux de Créqui et de
Kassompierre ; battit le duc de Savoie, et
s i,<îna un traité à Suze, par lequel ce prince
lui remit cette ville pour sûreté de ses
t-ngagemens. Louis XllI fil ensuite lever
le siège de Casai, et mit son allié en pos-
session de son état. Le duc de Savoie
n'ayant rien exécuté du traité de Suze ,
la guerre se renouvela en Savoie, en Pié-
mont et dans le reste de l'Italie. Le mar-
«{uis de Spinola occupait le Monlferrat,
avec une armée espagnole. Le cardinal
de Richelieu voulut le combattre lui-
nicme , et le roi le suivit bientôt après.
L'armée française s'empare de Pigrterol
et de Chambéry en deux jours ; le duc de
Montmorency remporte avec peu de trou-
pes une victoire au combat de Veillane
sur les Impériaux , les Espagnols et les
Savoisiens réunis, en juillet IGôO. La
même armée défit, peu de temps après,
les Espagnols au pont de Carignan, et
546 LOU
délivra Casai. Ces succès amenèrent le
traité de Quérasque , conclu en 1651 , et
ménagé par Mazarin , depuis cardinal
Le duc de Nevers fut confirmé , par ce
traité, dans la possession de ses états.
Louis XIII et Richelieu, de retour à Pa-
ris , y trouvèrent beaucoup plus d'intri-
gues qu'il n'y en avait en Italie , entre
l'Empire , l'Espagne, Rome et la France.
Gaston d'Orléans , frère unique du roi , et
la reine-mère , tous deux méconlens et
jaloux du cardinal , se retirèrent , l'un en
Lorraine et l'autre à Bruxelles. Se voyant
sans ressource eu Lorraine, Gaston porta
le malheur qui l'accompagnait en Lan-
guedoc, dont le duc de Montmorency
était gouverneur. Montmorency, engagé
dans sa révolte, fut blessé et fait prison-
nier à la rencontre de Castelnaudari , le
1" septembre 1631. Le moment de la
prise de ce général fut celui du découra-
gement de Gaston et de tout son parti. Le
procès fut fait au prisonnier selon la ri-
gueur deç lois , et , le 50 octobre suivant,
il eut la tête tranchée à Toulouse , sans
qtie le souvenir de ses victoires pût le
sauver. Gaston, toujours fugitif, avait
passé du Languedoc à Bruxelles , et de
Bruxelles en Lorraine. Le duc Charles IV
fut la victime de sa complaisance pour
lui. Le roi réunit le ducbé de Bar à la
couronne ; il s'empara de Lunéville et de
Nancy en 1655 , et l'année suivante de
tout le duché. Gaston ayant fait cette an-
née un traité avec l'Espagne , fut invité
à se réconcilier avec le roi , et accepta la
paix qu'on lui offrit. Les Espagnols, irri-
tés contre la F'rance , qui protégeait ou-
vertement la révolte des Hollandais, sur-
prirent Trêves le 26 mars 1633 , égorgè-
rent la garnison française , et arrêtèrent
prisonnier l'électeur , qui s'était mis sous
la protection du monarque français, au
mépris de ce qu'il devait à l'empereur et
au corps germanique. La guerre fut aus-
sitôt déclarée à l'Espagne ; il y eut un
ligue offensive et défensive entre la
France , la Savoie et le duc de Parme
Victor-Amédée en fut fait capitaine géné-
ral. Les événemens de cette nouvelle
guerre , qui dura 13 ans contre l'empe-
reur , etSo contre l'Espagne , furent mêlés
de bons et de mauvais succès. L'alliance
que fit le roi avec les Suédois et les pro-
testans d'Allemagne porta, contre ses in-
tentions , un grand coup à la religion ca-
tholique. On se battit en Alsace , en Lor-
raine , en Franche-€omlé et en Provence,
où les Espagnols avaient fait une des-
LOU
5/1.7
LOU
ccnle. Le duc de Rolian les défit siu* les
bords du lac de Cosme le 8 avril 1G36 ;
mais d'un autre côté ils prenaient Corbie.
Cet échec met l'effroi dans Paris ; on y
lève 20,000 hommes , laquais pour la plu-
part ou apprentis. Le roi s'avance en Pi-
cardie , et donne au duc d'Orléans la
lieutenance générale de son armée, forte
(le 50,000 hommes. Les Espagnols furent
obKgés de repasser la Somme ; et les Im-
périaux qui avaient pénétré en Bourgo-
gne se virent repoussés jusqu'au Rliin
par le cardinal de la Valette et parle duc
de Weimar , avec perte de près de 8,000
hommes. L'année suivante, 1637, fut en-
core plus favorable à la France. Le comte
d'Harcourt reprit les îles de Lérins , que
les Espagnols occupaient depuis deux ans.
Le maréchal de Schomberg les battit en
Roussillon , le duc de Savoie cl le maré-
chal de Créqui , en Italie , tandis que le
cardinal de la Valette prenait Landrecies
et la Chapelle, le maréchal de Châlillon
Yvoi et DamvIUiers , et que le duc de
Weimar battait les Lorrains. Ce général
soutint la gloire des armes françaises en
1638. Il gagna une bataille complète, dans
laquelle il fit quatre généraux de l'empe-
reur prisonniers , entre autres le fameux
Jean de Wert. Louis XIII eut l'année sui-
vante, 1639, six armées sur pied, l'une
vers les Pays-Bas , une autre vers le
Luxembourg , la troisième sur les fron-
tières de Champagne , la quatrième en
Languedoc, la cinquième en Italie, la
sixième en Piémont. Celle de Luxem-
bourg, commandée par le marquis de
Feuquières, qui assiégeait Thionville,
fut défaite par PIccolominl. La fin de l'an-
née 1640 fut plus heureuse : la France fit
naître une révolte en Catalogne , et en-
vahit cette province. Cependant le Por-
tugal s'était révolté contre l'Espagne , et
avait donné le sceptre au duc de Bra-
gance. On négociait toujours en faisant la
juerre ; elle était au dedans et au dehors
le la France. Le comte de Soissons, in-
quiété i)ar le cardinal de Richelieu, signa
un traité avec l'Espagne, et fit des rebelles
dans le royaume; Il remporta, le 6 juillet
1641 , à la Marféc , près de Sedan, une
victoire qui aurait été funeste au cardi-
nal, si le vainqueur n'y avait trouvé la
mort. Le maréchal de la Meilleraie et le
maréchal de Brézé eurent quelques suc-
cès en Allemaijne. La guerre y fut conti-
nuée eu 1G4;2 avec désavantage ; mais on
fut plus heureux ailleurs. La Meilleraie
fit la conquête du Roussillon. Tandis
qu'on enlevait celle province à la maison
d'Autriche , il se formait une conspira-
tion contre le cardinal. Pendant ces intri-
gues sanglantes, Richelieu et Louis XIII,
tous deux attaqués d'une maladie mor-
telle , étaient près de descendre au tom-
beau : ils moururent l'un et l'autre , le,
ministre le 4 décembre 1642 , et le roi le
14 mai 1643, dans la 42' année de son âge,
après un règne de 53 ans, et à pareil jour
que Henri IV son père. Ce fut le pèra
Dinet qui l'assista à ses derniers momens ;
il avait été choisi pour confesseur au
commencement de 1645, à la place du
savant père Sirmond, que son âge de 84
ans et sa surdité rendaient moins propre
à cette fonction. Il eut ordre de se f^endre
à St.-Germain , le mercredi 18 mars 1643.
et trouva le roi debout, et occupé à con-
sidérer im grand nombre de reliques
qu'il montra en détail à son confesseur.
Il lui fit voir aussi des livres de piété, et
parla ensuite de se confesser. Le lende-
main jour de St.-Joseph , il fit une con-
fession générale , et se trouva mieux pen-
dant quelques jours. Le jour de l'Annon-
clatioude la Sainte- Vierge, Use réconcilia,
put entendre la messe à genoux dans sa
chapelle , et communia des mains de son
premier confesseur qui l'exhorta à avoir
confiance en Dieu. Il reprit courage,
baisa des médailles pieuses , prononça la
nom de Jésus, et dit Vin manus... Après
cela II perdit l'usage de la parole et do
l'ouïe , mais conserva encore quelque
tenjps la connaissance , et l'indiqua par
un signe qu'il fit à son confesseur. Il
entra ensuite en agonie, et rendit le
dernier soupir sans efforts, et presque
sans qu'on s'en aperçût. Les vues de
ce prince étaient droites, son esprit saga
et éclairé , ses mœurs pures ; mais so:i
caractère faible et timide. Il n'eut point
à se reprocher ces passions qui désho-
norent le trône d'un si grand nombre
de princes. « Ses amours, dit un histo-
» rien , étaient purement spirituels d'àme
«à âme, et les jouissances en étaient
» vierges. Jamalsil n'usa de la moindre 11-
n berté envers les femmes. La reine ayant
» un jour reçu un billet, l'attacha à la ta-
» pisserie de sa chambre , afin de ne pas
» oublier d'y répondre. Le roi, auquel e!!e
» en voulait faire un mystère, étant eulré,
» elle dit à mademoiselle d'Hautefoi t de
» prendre et de serrer ce billet ; ce qu'elle
» fit : le roi voulut le lui ôter, et ils se
B débattirent assez long-temps en badi-
» nant ; mais mademoiselle d'IIautefort
LOU
• ne pouvant plus se défendre , nait le
» billet dftDS son sein , et le jeu finit , le
» roi n'ayant pas osé porter sa curiosité
» plus loin. » Louis XIII eut deux maî-
tresses, ou plutôt deux amies, mademoi-
selle d'Haulefort et mademoiselle ta
Fayette; mais ces liaisons étaient, comme
on l'a déjà dit, pures et dignes de son
cœur. Après avoir été long-temps éloigné
de la reine , il se rapprocha d'elle par un
simple hasard. Mademoiselle La Fayette
portant ombrage au cardinal ministre ,
celui-ci était parvenu à l'éloigner de la
cour. Elle se retira au couvent des Visi-
landines de Paris. Louis , peu de jours
après, se trouvant à la cliasse à Grosbois,
s'écarta de sa suite, et vint seul voir ma-
demoiselle La Fayette , avec laquelle il
s'entretint quatre heures. Il est à croire
qu'elle lui conseilla de se rapprocher de
la reine. Louis la quitta fort tard , et ne
pouvant plus se rendre à Grosbois , vint
au Louvre , où il ne trouva pour lui ni
table ni lit (le Louvre n'était pas son
habitation ordinaire ). La reine , ayant
appris ce qui se passait, lui proposa à
souper et à coucher, et de cette rencon-
tre imprévue naquit Louis XIV , qui
trouva déjà préparé par Richelieu le
grand siècle qui l'a illustré. Il n'imaginait
point, mais îl jugeait bien, et son mi-
nistre ne le gouvernait qu'en le persua-
dant. Fils et père de deux des plus grands
rois que la France ait eus , il affermit le
trône encore ébranlé de Henri IV , et pré-
para les merveilles du règne de Louis XIV.
Les catholiques lui ont reproché les ef-
forts qu'il lit pour maintenir ou rétablir
les protestans d'Allemagne contre les ef-
forts de l'empereur; mais des vues poli-
tiques lui cachèrent sans doute dans cette
circonstance les intérêts de la religion. Il
écrivit au pape , qui s'en plaignait , qu'il
était prêt à abandonner ses alliés , si l'Es-
pagne voulait l'aider à détruire le hugue-
iiotisme. Mais est-il vraisemblable que
l'Espagne et l'empereur surtout n'eussent
pas accepté une telle offre, si elle avait
été faite sérieusement? Bassompierre di-
sait que sous le règne de Louis XIII , le
litre de favori était une charge. Aux des-
jjoliques Concini et Luynes succéda Ri-
chelieu. Plus puissant que ses prédéces-
seurs , il fut au moins utile à la France.
La vie de Louis XIII a été écrite par Le
Vassor , le père Griffet , Dupin , M. de
Bury : celle-ci est en k vol. in-12. Un
protestant publia, en 164.5^ le prétendu
Codicile de Louis XIII ^ o petits vol
1
548 LOU
in-i8. C'est un recueil rempli d'absur-
dités , et si rare qu'il a été vendu jusqu'à
90 livres. Voyez le Mercure de France ,
septembre 4 754 , pag. 78 et suiv.
LOUIS XIV, né à Saint-Germain en
Laye le 16 septembre 1658 , fils de Louis
XIH etd'Anne d'Autriche, fut surnommé
Dieu-Donné , parce que les Fiançais le
regardèrent comme un présent du ciel
accordé à leurs vœux , après 22 anS da
stérilité de la reine. La gloire de son rè-
gne lui acquit ensuite le surnom de
Grand. Il parvînt à la couronne le ik
mai 1643 , sous la régence d'Anne d'Au-
triche sa mère. Cette princesse continua
la guerre contre le roi d'Espagne Philippe
IV, son frère. Le duc d'Enghien , depuis
le grcaxd Condé, général des armées fran-
çaises , gagna la bataille de Rocroy , qui
entraîna la prise de Thionvillc. Le maré-
chal de Bréxé battit peu de temps après
la flotte espagnole à la vue de Cartba-
gène, tandis que le maréchal de la Molhe
remportait plusieurs avantages en Cata-
logne. Les Espagnols reprirent Lérida
l'année d'après , 1644 , et firent lever le
siège de Tarragonc ; mais la fortune était
favorable aux Français en Allemagne et
en Flandre. Le duc d'Enghien se rendit
maître de Philisbourg et de Mayence
Roze prit Oppenheim ; et le maréchal
de Turenne conquit Worms, Landau, Neu-
stadt et Manheim. L'année suivante ,
1645 , fut encore plus glorieuse à la
France. Elle étendit ses conquêtes en 1
Flandre, en Artois, en Lorraine et en Ca-
talogne. Torstenson, général des Suédois,
alliés de la France, remporta une victoire
sur les Impériaux dans la Bohème. Tu-
renne prit Trêves et y rétablit lélectenr,
devenu libre par la médiation du roi. Le
duc d'Enghien ( que nous nommerons le
prince de Condé) gagna la bataille de
Nordlingue , prit Fumes et Dunkerque
l'année d'après, et remporta une victoire
complète sur l'archiduc dans les plaines
de Lens en 1648, après avoir réduit
Ypres. Le duc d'Orléans s'était distingué
par la prise de Courtrai, de Berges et de
Mardick; la flotte espagnole avait élé
battue sur les côtes d'Italie par une flolle
de vingt vaisseaux et vingt galères, qui
composaient presque toute la marine de
France ; Guébriant avait pris Rolweil ;
le comte de Ilarcourt s'était rendu maître
de Balaguer. Ces succès ne contribuèrent
pas peu à la paix conclue à Munster en
1G48, entre le roi , l'empereur Ferdinand
III, Christine, reine de Suède, et les étatj»
LOU
}ik9
LOU
deTEmpire. Parce traité , Metz, Toul,
Verdun et l'Alsace demeurèrent au roi
en toute souveraineté. L'empereur et
l'Empire lui cédèrent tous leurs droits
Bar cette province, sur Brisach , sur Pi-
gnerol, et sur quelques autres places. Dans
le temps que celte paix avantageuse faisait
respecter au dehors la puissance de Louis
XIV, les frondeurs, parti formé contre le
cardinal Mazarin forçaient le roi de quit-
ter la capitale. Il allait avec sa mère, son
frère et le cardinal, de province en pro-
vince, poursuivi par ses sujets. Les Pari-
siens, excités par le duc deBeaufort, par
le coadjuteur de Paris , et surtout par le
prince de Condé , levèrent des troupes ,
et il en coûta du sang avant que la paix
ne se fit. Les ducs de Bouillon et de la
Rochefoucauld, partisans des frondeurs,
firent soulever la Guienne , qui ne fui
calmée que par la présence du roi et de
la reine régente. Les Espagnols , proli-
tant de ces troubles , faisaient des con-
quêtes par eux-mêmes ou par leurs alliés
en Champagne, en Lorraine, en Catalogne
et en Italie ; mais le maréchal de Piessis-
Praslin les battit à Relliel , et après avoir
gagné une bataille contre le maréclial de
Turenne, lié avec le duc de Bouillon, son
frère, il recouvra Chàleau-Porcien et les
autres villes situées entre la Meuse et la
Loire. Le roi, devenu majeur, tint son lit
de justice en 1651 pour déclarer sa ma-
jorité. L'éloignement du cardinal Maza-
rin , retiré à Cologne , semblait avoir
rendu la tranquillité à la France : son
retour en 1632 ralluma la guerre civile.
Le parlement de Paris avait donné en
vain plusieurs arrêts Gontre lui : ils fu-
rent cassés par un arrêt du conseil d'état.
Le prince de Condé se tourna du côté
des rebelles, et fut nommé généralissime
des armées. Il défit le maréchal d'Hoc-
quincourl à Bléneau ; mais ayant été at-
taqué par l'armée royale dans le faubourg
Saint-Antoine, il aurailélé fait prisonnier,
si les Parisiens ne lui avaient ouvert
leurs portes, et n'avaient fait tirer sur les
troupes du roi le canon de la Bastille. On
négocia bientôt" de part et d'autre , pour
apaiser les troubles. La cour se vit obli-
gée de renvoyer Mazarin qui en était le
prétexte. Les Espagnols profitèrent en-
core de ces querelles. L'archiduc Léopold
prit Gravelines et Dunkerque ; don Juan
d'Autriche , Barcelone ; le duc de Man-
loue, Casai. Mais à peine la tranquillité
eut-elle été rendue à la France , que les
étrangers perdirent ce qu'ils avaient con-
quis. Les généraux français reprirenl
Rethel, Suinte-Ménehould, Bar, Ligny ;
le maréchal de Grancey gagna une ba-
taille en Italie contre le marquis de Ca-
racène ; on eut des succès en Catalogne:
le vicomte de Turenne battit l'armée es-
pagnole en 1G54, réduisit le Quesnoy et
lit lever le siège d'Arras. Cet exploit im-
portant rassura la France et le cardinal
Mazarin, qui était revenu de nouveau , et
dont la fortune , dit le président Hénault,
dépendait presque de l'événement de
cette journée. Le roi ne s'y trouva point,
et aurait pu y être. Ce fut dans cette
guerre qu'il fit sa première campagne :
il était allé à la tranchée au siège de Ste-
nay ; mais le cardinal ne voulut pas qu'il
exposât davantage sa personne, sur la-
quelle reposait le sort de l'armée elle re-
pos de l'état. Le maréchal de Turenne
soutint sa réputation les années suivantes,
et se signala surtout en 1658; il prit Saint-
Venant, Bourbourg, Mardick, Dunkerque,
Furnes , Dixmude , Ypres , Mortagne. Le
prince de Condé et don Juan , ayant ra-
massé toutes leurs forces , tentèrent en
vain de secourir Dunkerque ; Turenne
les défit à la journée des Dunes. La paix
fut conclue en 1659, dans l'Ile des Faisans,
par Mazarin et don Louis de Haro, pléni-
potentiaire des deux puissances. C'est ce
qu'on nomme îapaix des Pyrénées, hm
principaux articles de ce traité furent le
mariage du roi avec l'infante Marie-Thé-
rèse, la restitution de plusieurs places à
l'Espagne , et le rétablissement du prince
de Condé. Le mariage du roi se fit à Saint-
Jean-de-Luz avec beaucoup de magnifi-
cence. Les deux époux revinrent trioro-
phans à Paris , et leur entrée dans celle
capitale eut un éclat dont on se souvint
long-temps. Le cardinal Mazarin mourut
l'année suivante, 1661. Le roi, qui par
reconnaissance pour ses services n'avait
point voulu gouverner de son vivanf ,
prit en main les rênes de son empire , et
les tint avec une fermeté qui surprit dan«
un jeune monarque, chez lequel on n'a-
vait remarqué jusqu'alors que du goût
pour les plaisirs. 11 vérifia ce que Matarin
avait dit de ce prince en confidence au
maréchal de Grammonl : « 11 y a de l'é-
» toffe en lui pour faire quatre rois et un
» honnête homme. » Tout prit une face
nouvelle. Il fixa à chacun de ses minisires
les bornes de son pouvoir, se faisant ren-
dre compte de tout à des heures réglées ,
leur donnant la confiance qu'il fallait pour
accréditer leur ministère , et veillant sur
LOU
530
LOU
eux pour les empêcher d'en trop abuser.
Une chambre fut établie pour mettre de
l'ordre dans les linances , dérangées par
un long brigandage. Le surintendant
Foucquel , condanuié par des commis-
saires à un bannissement , eut pour suc-
cesseur le grand Colbert, ministre qui ré-
para tout , et qui créa le commerce et les
arts. Des colonies françaises partirent
pour s'établir à Madagascar et à Cayenne ;
ies académies des sciences, de peinture
et de sculpture furent établies ; des ma-
nufactures de glaces, de points de France,
de toiles, de laines, de tapisseries, furent
érigées dans tout le royaume. Le canal
de Languedoc , pour la jonction des deux
mers , fut commencé ; on rétablit la dis-
cipline parmi les troupes , ainsi que
l'ordre dans la police et dans la justice ;
tous les arts furent encouragés au dedans
et même au dehors du royaume ; soixante
«avans de l'Europe reçurent de Louis
XIV des récompenses et furent étonnés
d'en être connus. « Quoique le roi ne soit
» pas votre souverain , leur écrivait Col-
» berl , il veut être votre bienfaiteur ; il
» vous envoie cette lettre de change comme
» un gage de son estime. » Un Florentin,
un Danois, recevaient de ses lettres da-
tées de Versailles. Plusieurs étrangers
habiles furent appelés en France , et ré-
compensés d'une manière digne d'eux et
du rémunérateur. Louis XIV faisait à 22
ans ce que Henri IV avait fait à 50. Né
avec le talent de régner, il savait se faire
respecter par les puissances étrangères,
autant qu'aimer et craindre par ses sujets.
Il exigea en i662 une réparation authen-
tique de l'insulte faite au comte d'Eslra-
iles , son ambassadeur à Londres , par le
baron de Watteville, ambassadeur d'Es-
l^agne , qui prétendait avoir le pas sur
lui. La satisfaction que lui fît deux ans
après le pape Alexandre VU, de l'attentat
des Corses sur le duc de Créqui , ambas-
tadeurà Rome, ne fut pas moins écla-
tante. Le cardinal Chigi , légat et neveu
du pontife, vint en France pour faire au
roi des excuses publiques. Quoique la
paix régnât dans tous les états chrétiens,
il envoya au secours des Allemands , con-
tre les Turcs , une petite armée qui prit
Gigeri. Ses troupes , conduites par les
comtes de Coligni et de la Feuillade, con-
tribuèrent beaucoup à la victoire de St.-
Gothard, en 1664. Ses armes triomphaient
sur mer comme sur terre. Le duc de
Beaufort prit et coula à fond un grand
nombre 4e vaisseaux algériens ; mais il
périt dans cette action. Les Anglais et les
Hollandais étaient alors en dispute pour
le commerce des Indes occidentales. Le
roi, allié avec ces derniers, les secourut
contre les premiers. 11 y eut quelques ba-
tailles navales. Les Anglais perdirent
l'Ile de St.-Christophe ; mais ils y rentrè-
rent par la paix conclue à Bréda en 1667.
Philippe IV, père de la reine, était mon
deux ans auparavant; le roi croyait avoir
des prétentions sur son héritage , et sur-
tout sur les Pays-Bas. Il marcha en Flan-
dre pour les faire valoir, comptant iilutôt
sur ses forces que sur la légitimité de ses
droits. Il était à la tête de 3S,000 hom-
mes ; Turenne était, sous lui, le général
de celte armée. Louvois, nouveau minis-
tre de la guerre , et digne émule de Col-
bert, avait fait des préparatifs immenses
pour la campagne. Des magasins de toute
espèce étaient distribués sur la frontière.
Louis courait à des conquêtes assurées.
Les Espagnols , qui n'avaient pas même
imaginé que le roi pût envahir leurs états
au milieu de la paix, n'avaient fait aucun
préparalif. Il entra dans Charleroi comme
dans Paris. Ath , Tournay furent pris en
deux jours ; Furnes, Armentières, Cour-
trai , D( uai , ne tinrent pas davantage.
Lille, la plus florissante ville de ces pays,
la seule bien fortifiée, capitula après neuf
jours de siège. La conquête delà Franche-
Comté, faite l'année suivante 1668, fut
encore plus rapide. Louis XIV entra dan»
Dôle au bout de quatre jours de siège ,
douze jours après son départ de Sl.-Ger-
main. Enfin , en trois semaines , toute la
province lui fut soumise. Tant de fortune
réveilla l'Europe assoupie : un trailé
entre la Hollande, l'Angleterre et la Suède,
pour tenir la balance de l'Europe , et ré-
primer l'ambition du jeune roi , fut pro-
posé et conclu en cinq jours; mais il n'eut
d'autre suite que d'amener la paix , qui
se fit avec l'Espagne à Aix-la-Chapelle, le
2 mai de la même année. Le roi rendit
la Franche-Comté, et garda les villes con-
quises dans les Pays-Bas. Pendant celle
paix , Louis , continua , comme il avait
commencé, à régler, à fortifier, à embellir
son royaume. Les porls de mer, aupara-
vant déserts, furent entourés d'ouvrages
pour leurs ornemens et leur défense ,
couverts de navires et de matelots , et
continrent bientôt 60 grands vaisseaux
de guerre. L'hôtel des Invalides , ou des
soldats blessés et vainqueurs trouvent
les secours spirituels et temporels , s'éle-
vait en 1671 avec une magnificence vrai-
LOU
55i
LOU
ment royale. L'Observatoire était eom-
mencé depuis 1665. On traçait une mé-
ridienne d'un bout du royaume à l'autre.
L'académie de St.-Luc était fondée à Rome
pour former nos jeunes peintres. Les
.raductions des bons auteurs grecs et la-
fins s'imprimaient au Louvre à l'usage
du Dauphin , confié aux plus éloquens
etaux plus savans hommes de l'Europe.
Rien n'était négligé. On bâtissait des ci-
tadelles dans tous les coins de la France,
et on formait un corps de troupes com-
posé de 400,000 soldats. Louis XIV réso-
lut de conquérir les Pays-Bas, et com-
mença par la Hollande en 1672. Au mois
de mai , il passa la Meuse avec son ar-
mée, commandée sous lui par le prince
de Condé et par le maréchal de Turenne.
Les places d'Orsoy, Burick, Wcsel, Rhin-
berg , Emmerick , Groll , furent réduites
en six jours. Toute la Hollande s'atten-
dait à passer sous le joug , dès que le roi
serait au-delà du Rhin ; il y fut bientôt.
Ses troupes traversèrent ce fleuve en pré-
sence des ennemis. La reddition de plus
de quarante places , la plupart mal dé-
fendues ou mal pourvues , fut le fruit
de ce passage. Les provinces de Gueldre,
d'Utrecht et d'Over-Yssel se rendent. Les
états assemblés à la Haye se sauvent à
Amsterdam avec leurs biens et leurs pa-
piers. Dans cette extrémité , ils font per-
cer les digues qui retenaient les eaux de
la mer. Amsterdam fut comme une
vaste forteresse au milieu desi^ flots. Il
n'y avait plus de conquêtes à faire dans
un pays inondé. Louis quitte son armée,
laissant Turenne et Luxembourg achever
la guerre. L'Europe , effrayée de ses suc-
cès, était dès lors conjurée contre lui.
L'empereur, l'Espagne, l'électeur de
Brandebourg , réunis , étaient de nou-
veaux ennemis à combattre. Louis XIV ,
afin de s'assurer la supériorité d'un autre
côté, s'empara de la Franche-Comté. Tu-
renne entra dans le Palatinat où ses trou-
pes commirent des excès horribles. Le
comte de Schomberg battit les Espagnols
dans le Roussillon. Le prince de Condé
livra à Sénef , au prince d'Orange, une
bataille dont les deux partis s'attribuèrent
le succès. Turenne , qui avait passé le
*Rhin à Philisbourg , remporta quelques,
avantages sur le vieux Caprara , sur
Charles IV , duc de Lorraine , sur Bour-
nonville. Turenne, qui savait tour à tour
reculer comme Fabius, et avancer comme
Annibal , vainquit l'électeur de Brande-
bourg k Turckeim en 1675, tandis que les
autres généraux de Louis XIV soutenaient
la gloire de ses armes. Tant de prospéri-
tés furent troublées par la mort de Tu-
renne. Ce général fut tué d'un coup de
de canon au milieu de ses victoires , dans
le temps qu'il se croyait sûr de vaincre
Montécuculli. L'armée française ayant
battu en retraite, les Impériaux passèrent
le Rhin et entrèrent en Alsace ; mais ils
ne purent s'y maintenir. Le maréchal do
Créqui fut mis en déroute au combat de
Consarbruck, et fait prisonnier dans Trê-
ves. En 1676, la fortune fut entièrement
pour les Français : le duc de Vivonne ,
secondé par Duquesne, lieutenant-géné-
ral de l'armée navale de France, gagna
deux batailles contre Ruyter , amiral de
Hollande , qui périt dans la dernière , et
qui fut regretté par Louis XIV comme
un grand homme. Ce monarque était
alors en Flandre , où Condé , Bouchain ,
Aire et le fort de Linck reçurent ses lois.
La campagne de 1677 s'ouvrit par la prise
de Valenciennes et de Cambrai. Philippe,
duc d'Orléans, frère lAique du roi, gagna
contre le prince d'Orange la bataille de
Cassel , lieu célèbre par la victoire qu'un
autre Philippe , roi de France , y avait
remportée 349 ans auparavant. Le maré-
chal de Créqui battit le prince Charles de
Lorraine auprès de Strasbourg , l'obligea
de repasser le Rhin, et l'ayant repassé
lui-même, assiégea et prit Fribourg. Les
succès n'étaient pas moindres en Flandre
et en Allemagne. Le roi forma lui-mftne
en 1678 le siège de Gand et celui d'Ypres,
et se rendit maître de ces deux places.
L'armée d'Allemagne, sous les ordres de
Créqui , mit les ennemis en déroute à k
tète du pont de Rheinsfeld, et brûla ce-
lui de Strasbourg , après en avoir pris
tous les forts en présence de l'armée
ennemie. Cette glorieuse campagne finii
par la paix , qui fut signée en 1678. Il y
eut trois traités, l'un entre la France et
la Hollande, le deuxième avec l'Espagne,
le troisième avec l'empereur et . ,«^eç
l'empire , à la réserve de l'électeur de
Brandebourg. Par ces traités, la France
re^ta en possession de la Franche-Comté,
d'une partie de la Flandre , et de la for-
teresse de Fribourg. Ce qu'il y eut de
remarquable dans le traité signé avec los
Hollandais, c'est qu'après avoir été l'uni-
que objet de la guerre de 1672, ils furent
les seuls à qui tout fut rendu. On venait
de signer cette paix à Nimègue , lorsque
le prince d'Orange , qui n'en était pas
encore authentiquement informé, livra
LOU
Î)b2
Lau
le sanglant et inutile combat de Saint-
Denys , où les Français et les ennemis
tirent imc perle à peu près égale. Louis
XIV ayant dicté des lois à l'Europe , vic-
torieux depuis qu'il régnait, n'ayant as-
siégé aucune place qu'il n'eût prise, à la
fois conquérant et politique , mérita le
«urnom de Grande que l'hôtel-de-ville
de Paris lui déféra en 1680. Ce monarque
fil de la paix un temps de conquête : l'or,
l'intrigue et la terreur lui ouvrirent les
portes de Strasbourg et de Casai ; le duc
de Mantoue , à qui appartenait cette der-
nière ville, y laissa mettre garnison fran-
çaise. Louis XIV, craint partout, ne son-
gea qu'à se faire craindre davantage. Le
pape Innocent XI ne s'étant pas montré
favorable au dessein qu'avait le roi d'é-
tendre le droit de régale sur tous les dio-
cèses de sa nomination, ce prince fit don-
ner en 1682 une déclaration par le clergé
de France , renfermée en quatre propo-
sitions. La première est que le pape n'a
aucune autorité sur le temporel des rois;
la deuxième, que^e concile est au-dessus
du pape ; la troisième , que l'usage de
la puissance apostolique doit être réglée
par les canons ; et la quatrième , qu'iY
appartient principalement au pape de
décider en matière de foi^ mais que ses
décisions ne sont irréformables qu'après
que l'Eglise les a reçues. ( Voyez INNO-
CENT XII, SOARDI* SFONDRATI. ) Le
différend avec le pontife fut poussé au
pcJint de s'emparer du Comtat et à faire
craindre les dernières extrémités. L'af-
faire des franchises , qu'Innocent voulait
abolir, augmenta l'animosité réciproque ;
et l'on peut dire que le roi s'opiniàtra
peu sagement à maintenir un abus que
l'empereur et les autres princes avaient
laissé abolir sans répugnance. La con-
duite que Lavardin de Beaumanoir tint
à Rome à cette occasion , était peu digne
d'un ambassadeur de Fr.ance. Louis don-
nait en même temps son attention à di-
vers autres objets. Il établit une chambre
contre les empoisonneurs, qui en ce
temps - là infectaient la France. Une
chaire de droit français fut fondée, tandis
que d'habiles gens travaillaient à la ré-
forme des lois. Le canal de Languedoc
fut enfin navigable en 1681. Le port de
Toulon sur la Méditerranée fut construit
à frais immenses, pour contenir 60 vais-
seaux de ligne , un arsenal et des maga-
sins magniliques ; sur l'Océan, le port de
Brest se formait avec la même grandeur;
Dunkcrque , le Havre-de-Grâce se rem-
plissaient de vaisseaux ; la nature était
forcée à Rochcfort ; des compagnies de
cadets dans les places , de gardes-marine
dans les ports , furent instituées et com- >
posées de jeunes gens qui apprenaient
les arts convenables à leur profession,
sous des maiires payés du trésor public;
60.000 matelots étaient retenus dans le
devoir par des lois aussi sévères que
celles de la discipline militaire ; eniin,
on comptait plus de iOO gros vaisseaux
de guerre , dont plusieurs portaient cent
canon» : ils ne restaient pas oisifs dans
les ports. Les escadres , sous le comman-
dement de Duquesne , nettoyaient les
mers infestées par les corsaires de Bar-
barie. Alger fui bombardé en 1684, et les
Algériens obligés de faire les soumissions
qu'on exigea d'eux. Ils rendirent les es-
claves chrétiens, et donnèrent encore de
l'argent. L'état de Gènes ne s'humilia
pas moins devant Louis XIV que celui
d'Alger. Gènes avait vendu de la poudre
aux Algériens et des galères aux Espa-
gnols; elle fut bombardée la même année,
et n'obtint sa tranquillité que par une
satisfaction bien humiliante : le doge ac-
compagné de quatre sénateurs vint à
Versailles faire tout ce que le roi voulut
exiger de sa patrie. La loi de Gènes est
que le doge pei'd sa dignité et son titre
dès qu'il est sorti de la ville ; Louis vou-
lut qu'il les conservât. Des ambassadeurs
du roi de Siam avaient flatté , l'année
d'aupawivant , le goût que le monarque
français avait pour les choses d'éclat.
Tout semblait alors garantir une paix du-
rable. Pour l'assurer davantage, Louis
résolut d'étouffer le germe des guerres
civiles qui avaient tant de fois désolé
l'état. Il y avait long-temps qu'il songeait
à supprimer l'édit de Nantes : ce fut en
1683 qu'il en ordonna la révocation ; il lit
abattre les temples des calvinistes, et la
religion catholique fut rétablie dans tout
le royaume. Cet événement , qui dans le
temps où nous sommes a exalté toutes
les têtes, qui a fait la matière do tant de
satires lancées contre la mémoire de
Louis XIV ; et qu'après un siècle révolu
un autre événement, qui fut la suite im-
médiate du rappel des huguenots , a si
terriblement justifié, semble demander
ici une discusion particulière , plus lon-
gue que ne comporte la nature de ce Dic-
tionnaire, mais trop assortie aux circon-
stances pour qu'on puisse nous en faire
un reproche. Nous laisserons parler un
auteur contemporain parfaitement in-
LOU 3
shuil de lous les détails de cette rcvoca-
lion fameuse, trop inlcressé à la chose
pour dissimuler les plaies faites à un
royaume dont il était l'héritier ; trop
éclairé , trop présent à tout pour avoir
ignoré la vérité. Louis, JDauphin, père de
Louis XV , le sage et vertueux élève de
Fénélon, dans un Mémoire qui a passé à
ses descendans , et qui était en 1781 entre
les mains du roi Louis XYI, s'exprime de
cette manière : « Je ne m'attacherai pas à
» considérer ici les maux que l'iiérésie a
» faits en Allemagne, dans les royaumes
» d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, dans
^ les Provinces-Unies et ailleurs ; c'est du
• royaume seul qu'il est question. Je ne
» rappellerai pas même dans le détail
» cette chaîne de désordres consignés
» dans tant de monumens autlicntiques,
» ces assemblées secrètes , ces sermens
i> d'association, ces ligues avec l'étranger,
B ces refus de payer les tailles, ces pillages
^des deniers publics, ces menaces sédi-
s tieuses , ces conjurations ouvertes , ces
j> guerres opiniâtres , ces sacs de villes ,
B ces incendies , ces massacres réfléchis ,
» ces attentats contre les rois , ces sacri-
B léges multipliés et jusqu'alors inouïs ;
» il me suffit de dire que depuis François
» I"" jusqu'à nos jours, c'est-à-dire sous
» sept règnes différens , tous ces maux et
» d'autres encore ont désolé le royaume
» avec plus ou moins de fureur. Voilà ,
» dis-je, le fait historique , que l'on peut
» charger de divers incidens , mais que
» l'on ne peut contester substantiellement
» et révoquer en doute. Et c'est ce point
» capital qu'il faut toujours envisager
» dans l'examen politique de cette affaire.
» Or, partant du fait notoire, il m'est peu
» important de discuter si tous les torts
B attribués aux huguenots furent unique-
» ment de leur côté. Il est hors de doute
» que les catholiques auront eu aussi les
» leurs, et je leur en connais plus d'un ,
» dans l'excès de leurs représailles. Il ne
• s'agit pas môme de savoir si le conseil
» des rois a toujours bien vu et s'il a sa-
» gement opéré dans ces jours de confu-
• sion ; si la sanglante expédition de
» Charles IX , par exemple , fut un acte
» de justice, devenu nécessaire à la sù-
» reté de sa personne et à celle de l'état ,
t> comme le soutiennent quelques-uns, ou
B l'effet dune politique ombrageuse et
9 une indigne vengeance , comme d'au-
» très le prétendent , que l'hérésie ait été
D la cause directe, ou seulement locca-
» sion habituelle et toujours renaissante
7.
33 LOU
» de ces différens désordres : toujourj
n est-il vrai de dire qu'ils n'auraient ja-
» mais eu lieu sans Tliérésie ; ce qui suf-
j> fit pour faire comprendre combien il
» importait à la sûreté de l'étal qu'elle
» y fût éteinte pour toujours. Cependant
» on fait grand bruit, on crie à la tyrar>-
B nie, et l'on demande si les princes ont
B droit de commander aux consciences, et
B d'employer la force pour le fait de la
B relip-ion ? Comme c'est do la part des
» huguenots que viennent ces clameurs ,
» on pourrait pour réponse les renvoyer
» aux chefs de leur réforme. Luther pose
B pour principe qu'il faut exterminer et
» jeter à la mer ceux qui ne sont pas de
B son avis , à commencer par le pape t't
n les souverains qui le protègent ; et Cal-
B vin pense à cet égard comme Luther-
» Nos principes sont bien différens , sans
» doute. Mais, sans donner au prince des
» droits qui ne lui sont pas dus, nous lu-
B laissons ceux qu'on ne saurait lui cori-
» tester ; et nous disons qu'il peut et qu'il
B doit même, comme père de son peuple,
B s'opposer à ce qu'on le corrompe par
» l'erreur ; qu'il peut et qu'il doit même ,
B comme l'ont fait les plus grands princes
B de tous les temps , prêter son épée à la
n religion , non pas pour la propager , ce
» ne fut jamais l'esprit du christianisme,
» mais pour réprimer et pour châtier les
» médians qui entreprennent de la dé-
B truire. Nous disons enfin que, s'il n'a
B pas le droit de commander aux con-
B sciences, il a celui de pourvoir à la sù-
» reté de ses étals, et d'enchaîner le fana-
» tisme, qui y jette le désordre et la con-
B fusion. Que les ministres huguenots
» comparent, s'ils le veulent, la conduite
B modérée que l'on a tenue à leur égard,
B avec la cruauté des premiers persécu-
B teurs delà religion : j'admets la com-
B paraison , tout injuste qu'elle est, et je
» dis que les Césars eussent été fondés à
B proscrire le christianisme, s'il eût porté
B ceux qui le professaient à jeter le trou-
» ble dans l'empire. Mais les chrétiens
B payaient fidèlement les charges de l'é-
» tat, ils servaient avec affection dans les
B armées : on les éloignait des emplois
» publics, on les emprisonnait, on mettait
B à mort des légions entières ; ils ne ré-
B sistaient point ; ils n'appelaient point les
» ennemis de l'état; ils ne croyaient point
B qu'il fallait égorger les empereurs et
B les jeter à la mer. Cependant ils avaient
» pour eux la justice et la vérité. Lex:r
» invincible patience annonçait la bonté
47
LOU
S54
LOU
t de leur cause, comme les révoltes et
» i'cspril sanjjuinaire des huguenots prou-
0 vent l'injustice de la leur. Il est vrai
^ qu'ils ont causé moins de désordres
» éclatans sous le règne actuel que sous
» les prcccdens ; mais c'était moins la
» volonté de remuer qui leur manquait,
» que la puissance. Encore se sont-ils
» rendus coupables de quelques violences
» et d'une intinité de contraventions aux
» ordonnances, dont quelques-unes ont été
» dissimulées , et k'S autres punies par la
» suppression de quelques privilèges. Mal-
» gré leurs protestations magnifiques de
» lîdélité, et leur soumission en apparence
» la plus parfaite à l'autorité . le même
» esprit inijuiet et factieux subsistait tou-
» jours, et se trahissait quelquefois. Daii';
«le temps que le parti faisait au roi des
• offres de services, et qu'il les réalisait
» même, on apprenait par des avis cer-
» tains qu'il remuait sourdement dans les
» provinces éloignées, et qu'il entretenait
» des intelligences avec l'ennemi du
» dehors. ( Voyez SOULIER. ) Nous avons
» en main les actes authentiques des sy-
» nodes clandestins, dans lesquels ils
» arrêtaient de se mettre sous la protec-
» tion de Cromwell, dans le temps où
> Ion pensait le moins à les inquiéter ; cl
» les preuves de leurs liaisons criminelles
» avec le prince d'Orange subsistent éga-
» lement. L'animosité entre les catholi-
K ques et les huguenots était aussi tou-
» jours la même. Les plus sages règlemens
» ne pouvaient pacilier et rapprocher
» deux partis , dont l'un avait tant de rai-
» sons de suspecter la droiture et les
» bonnes intentions de l'autre. On n'en-
» tendait parler dans le conseil que de
» leurs démêlés particuliers. Les catlioli-
X ques ne voulaient point admettre les hu-
» guenots aux assemblées de paroisses ;
5. ceux-ci ne voulaient point contribuer
» aux charges de fabrique et de commu-
» nauté ; on se disputait les cimetières et
» les fondations de cliarité ; on s'aigris-
» sait , on s'insultait réciproquement. Les
» huguenots dans les campagnes où ils
» n'avaient pas de temples , affectaient ,
» dans le désœuvrement des jours de fêtes,
• de troubler l'oflice divin par des attrou-
» pemens autour des églises , et par des
» chants profanes. Les catholiques , indi-
» gnés , sortaient quelquefois du lieu saint
» pour donner la chasse à ces pertiuba-
• teurs ; et quand les huguenots faisaient
» leurs prêches , ils manquaient rarement
» d'user de représailles. Il arriva un jour
que les habîlans d'un village delà Sain-
tonge, tous catholiques, mirent le feu
à la maison d'un huguenot qu'ils n'a-
vaient pu empêcher de s'établir parmi
eux, donnant pour raison qu'il ne fal-
lait qu'un seul homme pour répandre
peu à peu l'hérésie dans tout le village.
Les protecteurs de la réforme firent
grand bruit de cette affaire , où il s'a-
gissait d'une chaumière estimée quatra
cent soixante livres ; et il en fut ques-
tion dans le conseil. Le roi , en condam-
nant les habitans du lieu à dédomma-
ger le propriétaire de la maison, ne
put s'eiTipêcher de dire , que ses pré-
décesseurs auraient épargné bien du
sang à la France , s'ils s'étaient conduits
par la politique prévoyante de ces vil-
lageois , dont l'action ne lui paraissait
vicieuse que par le défaut d'autorité.
Quoique le roi sût assez que les hugue-
nots n'avaient pour litres primordiaux
de leurs privilèges que l'injustice et la
violence ; quoique les nouvelles conlra-
vealions aux ordonnances lui parussent
une raison suffisante pour les priver de
l'existence légale qu'ils avaient envahie
en France les armes à la main , Sa Ma-
jesté néanmoins voulut encore consul-
ter avant de prendre un dernier parti ;
elle eut des conférences sur cette af-
faire avec les personnes les plus ins-
truites et les mieux intentionnées du
royaume, et dans un conseil de con-
science particulier , dans lequel furent
admis deux théologiens et deux juris-
consultes, il fut décidé deux choses; la
première que le roi, pour toutes sortes
de raisons, pouvait révoquer l'édit de
Henri IV, dont les huguenots préten-
daient se couviir comme d'un bouclier
sacré ; la seconde, que si Sa Majesté le
pouvait licitement, elle le devait et à la
religion et au bien de ses peuples. Le
roi , déplus en plus confirmé par celte
réponse , laissa mûrir encore son pro-
jet pendant près d'un an, employant
ce temps à concerter l'exécution par
les moyens les plus doux. Lorsque sa
Majesté proposa dans le conseil de
prendre une dernière résolution sur
cette affaire , Monseigneur , d'après un
mémoire anonyme qui lui avait clé
adressé la veille , représenta qu'il y avait
apparence que les huguenots s'atten-
daient à ce qu'on leur préparait; qu'il y
aurait peut-être à craindre qu'ils prissent
les armes, comptant sur la protection
des princes de leur religion , et que ,
LOU 5S5
» supposé qu'ils n'osassent le faire, un
» grand nombre sortirait du royaume ;
» ce qui j:iuirait au commerce et à l'agri-
» culture , et par là môme affaiblirait l'é-
D tat. Le roi répondit, qu'il avait tout
» prévu depuis long-temps, et pourvu à
I. tout , que rien au monde ne lui serait
» plus douloureux que de répandre une
» seule goutte du sang de ses sujets ; mais
» qu'il avait des armées et de bons géné-
» raux , qu'il emploierait dans la néces-
» site contre les rebelles qui voudraient
» eux-mêmes leur perte. Quant à la rai-
r. son d'intérêt, il la jugea peu digne de
• considération, comparée aux avantages
» d'une opération qui rendrait à la reli-
n gion sa splendeur , à l'état sa tranquil-
» lilé , et à l'autorité tous ses droits. Il fut
» conclu, d'un sentiment unanime , pour
» la suppression de l'édit de Nantes. Le
» roi, qui voulait toujours traiter en pas-
» leur et en père ses sujets les moins
» affectionnés, ne négligea aucun des
» moyens qui pouvaient les gagner en
» les éclairant. On accorda des pensions ,
n on distribua des aumônes , on établit
» des missions , on répandit partout des
» livres qui contenaient des Instructions à
» la portée des simples et des savans. Le
« succès répondit à la sagesse des moyens;
» et quoiqu'il semble , d'après les décla-
» mations emportées de quelques minis-
» très huguenots, que le roi eût armé la
» moitié de ses sujets pour égorger l'au-
D tre , la vérité est que tout se passa
» au grand contentement de sa Majesté,
» sans effusion de sang et sans désordre.
» Partout les temples furent démolis ou
» purifiés; le plus grand nombre lit ab-
» ju ration ; les autres s'y préj>arèrent,
» en assistant aux prières et aux instruc-
» lions de l'Eglise. Tous envoyèrent leurs
B cnfans aux écoles catholiques. Les plus
• séditieux, étourdis par ce coup de vi-
» gueur , et voyant bien que l'on était
» en force pour les châtier s'ils tentaient
» la rébellion, se montrèrent les plus trai-
» tables. Ceux de Paris, qui n'avaient plus
■ Claude pour les ameuter, donnèrent
» l'exemple de la soumission. Les plus en-
» tétés de l'hérésie sortirent du royaume,
• et avec eux la semence de tous les trou-
» Mes. El l'Europe entière fut dans l'éton-
p nement de la promptitude et de la faci-
» lilé avec laquelle le roi avait anéanli.
• par un seid édit, une hérésie qui avait
» provoqué les armes de six rois ses pré-
» décesseurs, et les avait forcés de com-
» poser avec elle. On a exagéré infiniment
LOU
» le nombre des huguenots qui sortirent
» du royaume à cette occasion, et cela
» devait être ainsi : comme les intéres-
» ses sont les seuls qui parlent et crient,
» ils aflirment tout ce qui leur plaît. Tin
» ministre qui voyait son troupeau dis-
» perse , publiait qu'il avait passé chea
i> l'étranger. Un chef de manufacture , qui
» avait perdu deux ouvriers , faisait son
« calcul conmie si tous les fabricans du
» royaume avaient fait la même perte que
» lui. Dix ouvriers sortis d'une ville , où
» ils avaient leurs connaissances et leurs
« amis, faisaient croire, par le bruit du
n leur fuite , que la ville allait manquer
» de bras pour tous les ateliers. Ce qu'il
0 y a de surprenant , c'est que plusieurs
» maîtres de requêtes, dans les instruc-
» lions qu'ils m'adressèrent sur leurs gé-
«néralités, adoptèrent ces bruits popu-
» laires , et annoncèrent par là combien
» ils étaient peu instruits de ce qui devait
» le plus les occuper. Aussi leur rapport
» se trouva-t-il contredit par d'autres,
» et démontré faux par la vérification
n faite en plusieurs endroits. Quand le
» nombre des huguenots qui sortirent de
» France à cette époque monterait, sui-
» vant le calcul le plus exagéré, à G7, 732
» personnes, il ne devait pas se trou-
I» ver parmi ce nombre, qui comprenait
» tous les âges et tous les sexes, assez
» d'hommes utiles pour laisser un grand
» vide dans les campagnes et dans les
» ateliers , et influer sur le royaumes
» entier. Il est certain , d'ailleurs , que
» ce vide ne dut jamais être plus sen-
» sible qu'au moment où il se fit. On ne
«s'en aperçut pas alors, et l'on s'en
» plaint aujourd'hui. Il faut donc en cher-
» cher une autre cause. Elle existe en effet,
n et si on veut la savoir , c'est la guerre.
» Quant à la retraite des huguenots , elle
» coûta moins d'hommes utiles à l'état ,
» que ne lui en enlevait une seule année
» de guerre civile. Il est bien surprenant
« que certaines personnes se laissent
» ébranler par les raisons les plus fri-
» voles, au point de douter s'il n'y aurait
n pas im avantage à rétablir les choses
» sur l'ancien pied, et, par conséquent,
r> si l'on n'a pas eu tort de faire ce que
» l'on a fait. Mais , dans la supposition ,
» bien fausse assurément, que l'on ait eu
» lort de faire ce que l'on fit, je main-
» liens que l'on aurait un bien plus grand
'■> tort aujourd'hui de le défaire : ce serait
» se ruiner à démolir une forteresse,
» parce qu'on se serait épuisé à l'élever.
LOU 5
» Il y a des torts dont il faut savoir pro-
» liler, des torts qui ne sauraient se rc-
» parer que par de plus grands torts en-
» core ; et cette opération , si elle eu était
• un , sciait do ce genre. Rappeler les
» huguenots , ne serait-ce pas leur dire :
» Vous nous êtes nécessaires , nous vous
» avons fait une injustice, nous vous en
» faisons excuse? Quel orgueil une telle dé-
» marche n'inspirerait-elle pas à de pareils
^ sujets?Nese croiraient-ils pas alors plus
» de droit que jamais de composer avec
» leur souverain, et plus en état de lui faire
» la loi? Rappeler les huguenots, ne sc-
» rait-ce pas rappeler les amis des ennemis
» de la France? Et ceux qui entretenaient
» des correspondances avec ces mêmes
» ennemis, dans le temps qu'on les laissait
» tranquilles, nous seraient-ils plus fidè-
» les et moins dévoués à nos ennemis , ac-
» tuellement qu'ils auraient sous les yeux
» les auteurs de leur disgrâce, et qu'ils se
» rappelleraient avec reconnaissance ceux
» qui les ont accueillis dans leurs mal-
» heurs ? Rappeler les huguenots , ce se-
» rait , dans une affaire qui a dû être et
» qui fut en offet le résultat des plus mû-
» re$ délibérations , offrir à toute l'Eu-
» rope une variation de principes pi-
» toyable.En un mot, rappeler les liugue-
» nots, ce serait s'écarter de cette politique
» de fermeté qui fait le soutien des em-
» pires, ce serait, en se donnant un grand
» ridicule, exposer l'état je ne sais à quels
» dangers. Je ne parle pas encore des in-
» térêts de la religion : car ne serait-ce pas
» en même temps imprimer à l'hérésie le
» sceau de la perpétuité en France; ne se-
» rait-ce pas exposer tous les nouveaux
» convertis aux railleries, aux persécutions
» et au danger évident de la rechute? Ne se-
9 rait-ce pas exposer la religion à se trouver
» parmi nous , avant un demi-siècle , dans
» l'état malheureux où nous la voyons
» chez les peuples qui nous avoisinent?
» Je sais que certains prétendus poli-
» tiques s'imaginent avoir fait une belle
« découverte, et trouvé le remède à tous
a les maux , dans un concordat que fe-
» raient réciproquement les princes ca-
» tholiques et huguenots de laisser en rc-
» pos les sujets des deux religions dans
» leurs états. Mais, d'abord, la partie ne
• serait pas égale , puisqu'on mettrait la
» religion du ciel en parallèle et de niveau
» avec l'hérésie Qu'à la bonne heure les
» luthériens, les zuinglicns, les calvinistes
» et autres novateurs passent entre eux ce
» concordat ; nouveauté pour nouveauté ;
06 LOU
« erreur pour erreur, il n'y aurait poînl
» de partie essentiellement lésée dans ca
» pacte , au lieu que les catho*ques ne
» pourraient le faire qu'avec un désavan-
» tage évident: ce serait comme si, pour
» arranger deux frères qui seraient en
» différend sur leur légitime, on voulait
» obliger celui qui a le droit d'aînesse à
» le partager , par égale portion, avec son
» cadet , lequel aurait encore la tache de
» bâtardise. En second lieu, est-ce una
B vérité bien incontestable, qu'un prince
» chrétien puisse permettre que le mal se
» fasse dans ses élats , pour obtenir que le
» bien se fasse dans les états'étrangers ,
» et qu'il puisse dire : Souffrez que Dieu
» soit honoré chez vous , je souffrirai qu'il
» soit blasphémé chez moi? En supposant
» qu'il le puisse , ce que je ne crois pas ,
» personne assurément ne soutiendra qu'il
» le doive. En outre, quand même tous
-) les souverains conviendraient entre eux
» de laisser en repos leurs sujets des deux
» religions, reste à savoir s'ils voudraient
» y rester , et s'il serait bien facile de les
» y obliger. Il n'est pas question de sa-
a voir ici comment les deux religions
» peuvent compatir dans d'autres pays :
a l'expérience la plus funeste et la plus
» longue n'a que trop prouvé qu'elles
» étaient incompatibles dans ce royaume;
» et c'est, encore un coup, le point au-
» quel il s'en faut tenir , et ne jamais
» perdre de vue. Catherine de Médicis ,
» en suivant précisément l'idée de ce con-
B cordât, avait prétendu ména{?er et con-
o tenir les deux partis ; que résulta-t-il de
» s-a politique ? la plus grande confusion ,
» qui conduisit entin à la scène sanglanta
» de la St.-Barthélemi, qu'elle crut né-
» cessaire pour se débarrasser une bonne
» fois des huguenots , qu'elle n'avait ren-
» dus que plus insolens et plus factieux
» en les flattant. Mais ce qui vient de se
» passer dans les Cévennes ne suftit-il pas
» pour faire toucher au doigt la sagesse
» de l'opération du roi et la nécessité de
» la maintenir? C'est par les succès inouïs
» et les horribles brigandages que les hu-
» guenols vierment d'exercer dans le Laa-
» gucdoc, qu'il faut juger desaulres maux
» qu'ils eussent pu nous faire pendant la
» guerre actuelle, s'ils se fussent trouvés au
» point de puissance où ils étaient encore
» il y a 23 ans. Et au moment où j'écris
n ceci, et où le parti semble parunemodc-
« ration feinte désavouer les horreurs aux-
» quelles se sont portés les Camisanîs ,
» des papiers interceptés nouf découvrcu)
LOU lio7
» que les liaisons avec l'Anglais subsis-
» tent toujours... » {F. Vie du Dauphin,
père de Louis XV, tome 2 , page 98 et
suivantes. On peut consulter encore deux
excellens Mémoires de l'abbé C. , intitulés
La voix du vrai patriote catholique ; et
Mémoire politico-critique ^ où l'on exa-
mine s'il est de l'intérêt de V Eglise et de
l'état d'établir pour les calvinistes du
royaume wie nouvelle forme de se ma-
rier.) C'est ridiculement et calomnieuse-
sement que M. de Mayer a avancé que
Louis XIV s'était repenti à sa mort de l'o-
pération la plus réfléchie qu'il eût faite
durant son règne; ce repentir est démenti
par les preuves les plus décisives. ( Voy.
le Journ. hist. et litt., i" mars 1790, p.
368. ) Bayle, qui ne doit pas être suspect
aux incrédules, a soutenu que les calvi-
nistes eux-mêmes ont forcé ce prince à ré-
voquer redit de Nantes ; qu'en cela il n'a
fait tout au plus que suivre l'exemple des
Etats de Hollande, qui n'ont tenu aucun
des traités qu'ils avaient faits avec les
catholiques. Il a prouvé que toutes les
lois des états protestans ont été plus sé-
vères contre le catholicisme que celles de
France contre le calvinisme. Il rappelle
ie souvenir des émissaires que les hugue-
nots envoyèrent à Cromwell en 1660, des
offres qu'ils lui tirent , des résolutions sé-
ditieuses qu'ils prirent dans leurs synodes
de la Basse-Guienne. Use moque de leurs
lamentations sur la prétendue persécution
qu'ils éprouvent , et il leur déclare que
leur conduite justifie pleinement la sé-
vérité avec laquelle on les a traités en
France. ( OEuvres de Bayle. t. 2 , p. 594. )
Toutes ces réflexions ont été vérifiées
d'nne manière terrible sous Louis XVI,
le rappel des protestans n'ayant pas pré-
cédé d'un an le délrônement du roi et le
renversement de la monarchie. Tandis
que Louis XIV travaillait à assurer la
paix dans l'intérieur de son état, une ligue
se formait secrètement en Europe entre
le duc de Savoie, l'électeur de Bavière,
l'électeur de Brandebourg ( depuis roi
de Prusse), l'empereur, le roi d'Es-
pagne , le prince d'Orange et autres
princes inquiets des projets de Louis
XIV et de son esprit de conquêtes. Le
monarque français résolut de prévenir
celte ligue connue sous le nom de li-
gue d'./ugsbourg_,el commença la guerre
en 1688, par la dévastation du Pala-
thiat. Mais l'année suivante les con-
fédérés ayant réuni leurs forces, les Fran-
çais abandonnèrent à leur approche plu-
LOU
sieurs bourgs et toutes les places qu'ils
avaient prises. Un malheur plus grand
pour la France fut le détrônement do
Jacques II , et l'élévation du prince
d'Orange sur le trône d'Angleterre. L'an-
née 1690 fut plus heureuse. Le maréchal
de Luxembourg gagna une bataille contre
le prince de Valdeck, à Fleurus. La flot le
française, commandée par le comte de
Tourville, défit dans la Manche les flottes
d'Angleterre et de Hollande. Catinat se
rendit maître du Pas-de-Suse , prit Nice ,
Ville-Franche , et remporta la victoire do
Staffarde contre les troupes du duc de Sa-
voie. Le prince d'Orange fut obligé de
lever le siège de Limerick en Irlande.
Mons dans les Pays-Bas , Valence en Es-
pagne, Carmagnole et Montmélian en
Savoie, furent les conquêtes de la cam-
pagne suivante. Ces siiccès furent contre-
balancés par la perte de la bataille navale
de la Hogue , en 1692. Le combat dura
depuis le matin jusqu'à la nuit; 50 vais-
seaux français combattirent contre 84. La
supériorité du nombre l'emporta. Les
Français, obligés de faire retraite, furent
dispersés par le vent sur les côtes de Bre-
tagne et de Normandie , et l'amiral an-
glais leur brûla 15 vaisseaux. Cette dé-
faite sur mer, une des premières époques
du dépérissement delà marine de France,
fut compensée par les avantages qu'on
remporta sur terre. Le roi assiégea Na-
mur en personne , prit la ville en huit
jours et les châteaux en vingt-deux. Lu-
xembourg empêcha Guillaume de passer
la Mehaigne à la tête de 80,000 hommes,
et de venir faire lever le siège. Ce géné-
ral gagna peu de temps après deux ba-
tailles , celle de Steinkerque en 1692 , et
celle de Nerwinde çn 1693. Peu de jour-
nées furent plus meurtrières. L'année
1694, remarquable par la disette qu'on
souffrit en France , ne le fut par aucun
succès éclatant. La campagne de 1695 se
réduisit à la prise de Casai , dont les for-
tifications furent rasées entièrement.
Comme les recrues se faisaient difficile-
ment en 1695, des soldats répandus dans
Paris enlevaient les gens propres à porter
les armes, les enfermaient dans des mai-
sons, et les vendaient aux officiers. Ces •
maisons s'appelaient des fours : il y en
avait trente dans la eapitale.Le roi, in-
struit de cet attentat contre la liberté pu-
blique, que le magistrat n'avait osé ré-
primer de crainte de lui déplaire, fit
arrêter les enrôleurs, ordonna qu'ils fus- 7
sent jugés dans toute la rigueur des lois^
47.
LOU S
rendit la libcrlé à ceux qui l'avaient per-
due par fraude ou par violence , et dit
qu'il voulait être svrvi par des soldats,
et non par des esclaves. Ou s'attendait à
de grands événeinens du coté de Tllalie
en 1696. Le maréchal de Catinat, qui avait
remporté l'importante victoire de la Mar-
jaille en 1695 sur le duc de Savoie , était
campé à deux lieues de Turin. Ce prince,
las de la guerre , conclut un accommode-
ment avec la France le 18 septembre 1696.
Par ce traité, Louis XIV lui rendit tout
ce qu'il avait pris pendant la guerre , lui
paya 4.000,000, eut la vallée de Barce-
ionaelte en échange de Pignerol , et ma-
ria le duc de Bourgogne avec la fille
aînée du duc. Cette paix particulière fut
suivie de la paix générale, signée à Rys-
wick le 10 octobre 1697. Les eaux du
Rhin furent prises pour bornes de l'Alle-
magne et de la France. Louis XIV garda
ce qu'il possédait en-deçà de ce fleuve , et
rendit ce qu'il avait conquis au delà. Il
reconnut le prince d'Orange pour roi
d'Angleterre. Les Espagnols recouvrèrent
ce que l'on avait pris sur eux depuis le
traité de Nimègue, qui servit presque par-
tout de fondement à celui de Ryswick.
Cette paix fut précipitée par le motif de
«oulager les peuples, accablés par les im-
pôts et la misère. L'Europe se promettait
vn vain le repos après une guerre si
cruelle, après tant de sajig répandu,
après les malheurs de tant d'étals. Depuis
long -temps diverses puissances soupi-
raient après la succession d'Espagne,
Charles II, mort sans cnfans en 1700,
laissa par testament sa couronne à Phi-
lippe de France, duc d'Anjou, au préju-
dice des princes de sa maison. Les po-
tentats de l'Europe , alarmés de voir la
monarchie espagnole soumise à la France,
s'unirent presque tous contre elie. Les
alliés n'eurent d'abord pour objet que de
démembrer ce qu'ils pourraient de cette
riche succession; et ce ne fut qu'après
plusieurs avantages qu'ils prétendirent
oter le trône d'Espagne à Pliilippe. La
guerre commença par l'Italie. L'empe-
reur, voulant procurer ce trône à l'ar-
chiduc Charles, y envoya le prince Eu-
gène avec une armée considérable. Il se
rendit maître de tout le pays situé entre
TAdige et l'Adda, cl manqua de prendre
Crémone en 1702. ( yoi/ez EUGÈNlv. )
L'année suivante fut mêlée de succès et
de revers, mais l'année 1704 vil cliangcr
f -.la face de l'Europe. L'Espagne fut presque
'conquise par le Portugal, qui venait d'cn-
S8 LOU
trer dans la grande alliance, et dont les
troupes étaient fortifiées par celles d'An-
gleterre et de la Hollande. L'Allemagne
fut en un moment délivrée des Français.
Les alliés, commandés par le prince
Eugène , par Marleborough , par le priace
de Bade , taillèrent en pièces à Hochstet
l'armée française , commandée par TaU
lard et Marsin. Cette bataille, dans la-
quelle 27 bataillons et k régimens de dra-
gons furent faits prisonniers, 12,000
hommes tués, 30 pièces de canon prises,
ôta aux Français 100 lieues de pays, et
du Danube les jeta sur le Rhin. L'annéa
1705 , plus glorieuse pour la France , fut
plus funeste pour l'Espagne. Nice et Ville-
Franche furent prises, la victoire de Cas-
sano fut disputée au prince Eugène par
le duc de Vendôme, la Champagne ga-
rantie d'invasion par Villars. Mais Tessé
leva le siège de Gibraltar, les Portugais
50 rendirent maîtres de quelques places
importantes, Barcelone se rendit à l'ar-
chiduc d'Autriche, le concurrent de Phi-
lippe V dans la succession ; Gironne se
déclara pour lui. En 1706, la bataille do
Ramillies fut perdue par Villeroi, mal-
heureux en Flandre, après l'avoir été en
Italie ; Anvers, Gand, Ostende et plusieurs
autres villes, furent enlevées à la France.
Alcantara, eu Espagne, tomba entre les
mains des ennemis, qui , profitant de cet
avantage, s'avancèrent jusqu'à Madrid
et s'en rendirent les maîtres. On tenta
vainement de prendre Turin : le duc
d'Orléans fut défait par le prince Eugène
devant celte ville, délivrée par cette ba-
taille. Le mauvais succès de ce siège fit
perdre le Milanais , le Modénois , et pres-
que tout ce que l'Espagne avait en Italie.
Les Français n'étaient pas pourtant dé-
couragés. Ils mirent à contribution , en
1707 , tout le pays qui est entre le Mein et
le Nccker, après que le maréchal de Vil-
lars eut forcé les lignes de Slolhoffen. Le
maréchal do Berwick remporta à AI-
manza, le 23 avril de la même année,
une victoire signalée, suivie de la réduc-
tion des royaumes de Valence et d'Ara-
gon. Le clîevalier de Forbin et Duguay-
Trouin se distinguèrent sur mer, bat-
tirent les flolles ennemies en diverses
rencontres, et firent des prises considé-
rables. En 1708, la fortune ne fut favora-
ble aux Français ni en Allemagne ni en
Italie. La ville de Lille fut prise par les
alliés, qui avaient gagné peu de temps
auparavant la bataille d'Oudenarde. Les
Impériaux, qui s'étaient rendus maîtres
LOU 5
du royaume de Naples l'année précé-
dente, s'emparèrent du duché de Man-
toue , pendant que les Anglais conquirent
lo Port-Mahon. Le cruel hiver de 1709
acheva de désespérer la France. Les oli-
viers , les oran{jers , ressources des pro-
vinces méridionales , périrent ; presque
tous les arbres fruitiers gelèrent; il n'y
eut point d'espérance de récolte ; le dé-
couragement augmenta avec la misère.
Louis XIV demanda la paix; mais la hau-
teur avec laquelle il s'était conduit à l'é-
gard de ses ennemis vaincus les rendit
tiers à leur tour. Déjà Marleborough avait
pris Tournai, dont Eugène avait couvert
le siège ; déjà ces deux généraux mar-
chaient pour investir Mons.Le maréchal de
Villars rassemble son armée, vole au se-
cours de cette ville, et près du village de
Alalplaquet il livre bataille aux deux gé-
néraux de l'empereur; Villars la perd et
y est blessé. Le roi, ferme dans l'adver-
sité, mais vivement affligé des malheurs
de ses peuples , envoya en 1710 le maré-
chal d'Uxelles et le cardinal de Polignac
pour demander la paix. Il descendit jus-
qu'à promettre de fournir de l'argent aux
alliés , pom les aider à ôter la couronne
à son petit-fils ; ils voulaient plus, ils exi-
geaient qu'il l'obligeât d'abdiquer. Cette
demande lit dire au roi : « Puisqu'il faut
» que je fasse la guerre , j'aime mieux la
» faire à mes ennemis qu'à mes enfans. »
Philippe V, ayant été battu près de Sa-
ragosse, fut obligé de quitter la capitale
de ses étals ; il y rentra par une victoire.
Les négociations pour la paix recommen-
cèrent en 1711 , et eurent un effet heureux
auprès d'Anne, reine d'Angleterre. Une
suspension d'armes fut publiée entre les
deux couronnes, le 24 août 1711. On com-
mença enfin à Utrecht des conférences
pour une pacification générale. La France
n'en fut pas moins dans la consternation ;
des détachemcns considérables , envoyés
par le prince Eugène, avaient ravagé une
partie de la ChamjTagne , et pénétré jus-
qu'aux portes de Reims. L'alarme était à
Versailles comme dans le reste du royau-
me. La mort du fils unique du roi , arri-
vée depuis un an; le duc de Bourgogne,
la duchesse de Bourgogne, leur fils aîné,
enlevés rapidement et portés dans le
même tombeau ; le dernier de leurs en-
fans moribond : toutes ces infortunes do-
mestiques, jointes aux étrangères, fai-
saient regarder la fin du règne de Louis
XIV comme un temps marqué pour la
calamité, ainsi que le commcnccincnt l'a-
S9 LOU
~ vail été pour la fortune et pour la gloire;
et Dieu, qui l'avait élevé jusqu'à en faire
uii objet d'envie et de terreur pour les
nations voisines, appesantit son bras sur
lui, et l'attaqua par les endroits les plus
sensibles. Comme père et comme roi, il
fut également éprouvé. Environné d'un©
foule de princes ses enfans, qui faisaient
la consolation de sa vieillesse, l'ornement
de sa cour, l'espérance du royaume, il
semblait que l'Europe n'aurait pas eu
assez de couronnes pour leur en donner
à tous ; et en moins de dix mois il sa
trouva réduit à souhaiter qu'il lui eu
restât un seul qui portât la sienne. Tout
couvert des lauriers qu'il avait cueillis
depuis qu'il était sur le trône, il comptait
le nombre de ses années par celui de se^
prospérités; et il vit tout à coup sa puis-
sance, auparavant si formidable, deve-
nir le jouet de la fortune et le mépris de
ses enneujis. Forcé de demander la paix
à ceux qui l'avaient attaque, lui qui avait
accoutumé d'attaquer les autres ; à ceux
qui l'avaient vaincu, lui qui avait tou-
jours passé pour invincible , il la sollicita
sans pouvoir l'obtenir. Louis, n'ayant do
ressource ni dans la modération des vic-
torieux ni dans lc3 bras des vaincus , en
trouva dans sa patience et dans sa rési-
gnation sans bornes. Naturellement fort
sensible, mais assez maître de son cœur
et de ses yeux pour ne point le paraître,
on le vit recevoir les plus tristes nouvel-
les avec un visage serein, rassurer mèmu
le courtisan et le ministre consternés. Lo
roi conquérant et le père béni comme les
anciens patriarches par une nombreuso
postérité, parurent moins admirables que
le père affligé dans sa famille, et Im con-
quérant réduit à demander la paix, parce
que les revers ne luiôtèrenl rien de celte
fermeté qui fait le caractère du véritable
héros. Quelques écrivains rapportent cette
fermeté d'âme à la prédiction qui lui avait
été faite de tous ces malhcxirs par un
Jiomme de la petite ville de Salon en
Provence. Ou peut voir cette anecdote
décrite d'une manière curieuse et iiiié-
ressante dans la ris du Dauphin, duc dO
Bourgogne, par l'abbé Proyart, toin. 2,
pug. 113. Le duc de Saint-Simon en parla
aussi dans ses Mémoires^ mais d'une
manière plus générale. ( Voi^. MARE-
CHAL de SALON. ) Au milieu de ces de-
sastres, le maréchal de Villars force le
camp des ennemis à Denain, et sauve I;i
France : cette victoire est suivie de la
levée du siège de Landrccicspar le prliice jf*"
LOU 5'60
Eugène , de la prise de Douai , de celle du
Qucsnoy, decelle de Bouchain.Ces avan-
tages, mais plus encore la défection de
l'Anfjleterre , accélérèrent la conclusion
de la paix générale. Elle fut signée à
Utrecht par la France et l'Espagne avec
l'Angleterre, la Savoie, le Portugal, la
Prusse et la Hollande, le H avril 1713 ; et
avec l'empereur, le 11 mars 171/t, à Ras-
fadt. Par ces différens traités, le roi re-
connut l'électeur de Brandebourg , roi de
Prusse ; ou plutôt il laissa à la maison
d'Autriche quelques villes qu'avant la
guerre il possédait dans les Pays-Bas ca-
tholiques; il promit de faire démolir les
for tilica lions de Dunkerque : les fron-
tières de l'Allemagne resicrent dans l'état
où elles étaient après la paix de Ryswick.
Les dernières années de la vie de ce
prince furent troublées par l'hérésie jan-
senienne, qu'il s'efforça en vain d'étouf-
fer, en joignant son autorité à celle du
pape et de l'Eglise universelle. La mort
de Louis fut celle d'un héros chrétien,
qui quitte la vie sans se plaindre, et les
grandeurs sans les regretter. Le courage
d'esprit avec lequel il vit sa lin fut dé-
pouillé de cette ostentation répandue sur
toute sa vie. Ce courage alla jusqu'à
avouer ses fautes. Il recommanda à son
successeur « de soulager ses peuples, et
» de ne pas l'imiter dans sa passion pour
» la gloire , pour la guerre , pour les bàli-
» mens. » Il expira le 1"" septembre 1715,
à 77 ans, dans la 73*^ année de son règne.
Il avait vu k rois enDancmarck, 4 en
Suède , 5 en Pologne , k en Portugal , 3 en
Espagne , k en Angleterre , 5 empereurs ,
9 papes, et plus de 100 autres princes
d'Italie ou d'Allemagne. Quoiqu'on lui ait
reproché trop de hauteur avec les étran-
gers dans ses succès, de la faiblesse pour
plusieurs femmes, de trop grandes sévé-
rités dans des choses personnelles, des
guerres légèrement entreprises , l'embra-
sement du Palatinat, et les excès horri-
bles commis dans cette province et dans
d'autres de ces contrées par ses ordres
exprès, cependant ses grandes qualités,
mises dans la balance, l'ont emporté sur
ses fautes. La postérité admirera dans son
gouvernement une conduite ferme , noble
et suivie, quoiqu'un peu trop absolue;
dans sa (^ur, le modèle de la politesse,
du bon goût et de la grandeur. II gou-
verna ses ministres, loin d'en être gou-
verné. Il eut des maltresses, mais elles
n'influèrent pas dans les affaires géné-
rales, et il cessa d'en avoir depuis que
LOU
madame de Maintenon eut fixé son cœur.
S'il aima les louanges , il souffrit la con-
tradiction. On sait jusqu'où alla son res-
pect pour les choses saintes , son attention
à la prière, sa modestie dans les temples,
son attachement à la foi de ses ancêtres ,
sa soumission aux décrets de l'Eglise, sou
zèle contre les erreurs et les nouveautés,
sa haine contre toutes sortes de vices.
L'impiété n'osa se montrer devant lui : il
put faire des hypocrites, il ne put faire
des libertins; pour lui plaire, il faWait
être homme de bien, en avoir du moins
le masque. Dans sa vie privée, il fut à h\
vérité trop plein de sa grandeur, mais
affable ; ne donnant point à sa mère de
part au gouvernement, mais remplissant
vis-à-vis d'elle tous les devoirs d'un lils;
intidèle à son épouse, mais observant
toutes les règles de la bienséance : bon
père, bon maître, toujours décent en
public, laborieux dans le cabinet, exact
dans les affaires, pensant juste, parlant
bien, et se montrant aimable avec di-
gnité. On se souvient encore de plusieurs
de ses réparties , les unes pleines d'esprit,
les autres d'un grand sens. Le marquis de
Marivaux, officier général, homme un
peu brusque, avait perdu un bras dans
une action , et se plaignait au roi , qui l'a-
vait récompensé autant qu'il pouvait le
faire pour un bras cassé : « Je voudrais
» avoir perdu aussi l'autre, dit-il, et ne
» plus servir Votre Majesté, n — « J'en se-
o rais bien fâché pour vous et pour moi, ■
lui ré])ondit le roi; et ce discours fut
suivi d'un bienfait... Lorsque le cardinal
de Noailles le vint remercier de la pourpre
qu'il lui avait fait obtenir : « Je suis as-
i> sure, monsieur le cardinal, lui répon-
» dit-il , que j'ai eu plus de plaisir à vous
» donnei- le chapeau , que vous n'en avez
» eu à le recevoir. » Il avait dit quelque
chose d'aussi obligeant à Pontchartrain,
en le faisant chancelier... Le prince de
(londé étant venu ie saluer après le gain
d'une bataille , le roî se trouva sur le
grand escalier, lorsque le prince, qui
avait de la peine à monter à cause de sa
goutte , s'écria : « Sire, je demande par-
» don à Votre Majesté si je la fais atten-
» dre. — Mon cousin , lui répondit le roi,
» ne vous pressez pas ; on ne saurait mar-
» cher bien vile, quand on est aussi chargé
» de lauriers que vous l'êtes. » — Le ma-
réchal du PlessiS; qui ne put faire la cam-
pagne de 1672 à cause de son grand âge,
ayant dit au roi« qu'il portail envie à ses
» enfans, qui avaient l'honneur de le scr-
LOU S61
» vir ; que pour lui, il souhaitait la mort,
» puisqu'il ne lui était plus propre à
• rien, » le roi lui dit en l'embrassant :
t Monsieur le maréchal, on ne travaille
» que pour approcher de la réputation
» que vous avez acquise. Il est agréable
B de se reposer après tant de victoires... »
Dans le temps que ce monarque travail-
lait à établir une discipline austère et in-
violable dans ses troupes, il chercha l'oc-
casion d'en donner lui-même un exemple
remarquable. L'armée commandée par le
grand Condé étant campée dans un en-
droit où il n'y avait qu'une maison, le
roi ordonna qu'on la gardât pour le
prince. Condé voulut en vain se défendre
de l'occuper ; il y fut forcé. « Je ne suis
i> que volontaire, dit le monarque, et je
» ne souffrirai point que mon général soit
s sous la toile , tandis que j'occuperais
o une habitation commode. » Louis XIV
encouragea et récompensa la plupart des
grands hounnes ; et le même monarque
i}ui sut employer les Condé , les Turerme ,
les Luxembourg, les Créqui, les Catinat,
les Villars dans ses armées; les Colbert,
les Louvois dans ses cabinets; choisit les
Boileau et les Racine pour écrire son
Histoire ; les Bossuel et les Fénélon pour
instruire ses enfans ; et les Fléchier, les
Bourdaloue , les Massillon pour l'instruire
lui-rnéme. « Quel siècle plus mémorable!
» dit l'auteur de la Décadence des lettres
» et des mœurs. Que Louis XIV parait
» grand quand , du haut de sa gloire, on
» le voit appuyé sur cette multitude in-
» nombrable d'hommes de génie qui lui
D doivent leur renommée, parce qu'il les
» a excités, qu'il a créé, pour ainsi dire,
» leurs talens, comme il leur doit égale-
> ment les fondemens inébranlables de sa
» grandeur ! » La révolution qui se fit
dans les arts , les esprits , les mœurs, in-
flua sur toute l'Europe. Elle s'étendit en
Angleterre; elle porta le goût en Allema-
gne, les sciences en Russie; elle ranima
l'Italie languissante. Mais c'est peut-être
aussi ce qui prépara ou avança les événe-
mens qui , sous le second de ses succes-
seurs , jetèrent la France dans un état de
dissolution, et donnèrent de si étranges
secousses à toute l'Europe : une trop
grande extension dans l'usage des lettres ,
des sciences et de la philosophie , ne pou-
vait que nuire à la multitude qui n'en a
aucun besoin , et dont les qualités essen-
sielles à la société s'altèrent par des spé-
culations étrangères à son étal. {Voy.
FRÉDÉRIC -GUILLAUME r»" , Lilio GI-
LOU
RALDI, J.-J. ROUSSEAU.) Depuis
qu'une fausse philosophie a entrepris d'a-
néantir la gloire des princes religieux
pour relever celle des héros profanes ; de
faire des annales des peuples un dépôt de
fiel et de corruption; de travestir, d'al-
térer les événemens pour les diriger vers
le but d'une subversion générale , on a vu
des écrivains contester à ce monarque le
titre de grand. Mais , en dépit de la ma-
lignité et de la calomnie, son nom vivra
dans les fastes des Français , et la posté-
rité le placera à côté de Charlemagne et
de Clovis. Moins attaché au centre de l'u-
nité, moins zélé pour la foi de l'Eglise,
il aurait trouvé des admirateurs parmi
ceux qui le décrient, des panégyristes
parmi ses censeurs. Il n'a cessé d'être
grand:, que parce qu'il a fait servir sa jmis-
sance à maintenir la foi et à exterminer
l'erreur. ( Voyez la fin des articles MAIN-
TENON et PHILIPPE II.) Limiers, Laiv-
rei, Rebûulet, Lahode et 'Voltaire ont
écrit son Histoire ; mais celui-ci est trop
court , et a trop donné à son imagination ;
les autres , trop diffus ,se sont en quelque
sorte bornés à compiler et à défigurer des
gazettes. Nous terminerons cet article en
rapportant les paroles d'un habile histo-
rien. « Louis XIV suppléa par un grand
» caractère aux dons d'un grand génie ;
» tout ce qu'il conçut, tout ce qu'il exécuta
» deplusheureuï, déplus habile pendant
» les années triomphantes de son règne,
» fut lin développement j une améliora-
» tions des plans et des actes du cardinal
r> de Richelieu. Celui-ci, inquiet sur une
» autorité précaire , fut souvent sangui-
» naire. Louis XIV fonda bien moins sur
n la terreur que sur l'admiration l'auto-
» rite absolue dont il avait reçu l'héritage.
» Les préjugés de son rang et de son siècle
» le rendirent parfois injuste sans remords.
» Il ajouta mille séductions à l'art de ré-
» gner ; il le purgea des froides scéléra-
» tesses du machiavélisme. On dirait que
» le mot de majesté fut créé pour lui. .11
B trouva le secret de tout subordonner
» sans avilir aucun ordre de l'état , sans
» dégrader aucun caractère. Il permit à
» quelques hommes d'être grands et mêuîo
» plus grands que lui. Le tiers-état ne
» reçut pas moins de lui que de ses prédé-
» cesseurs ; il n'y eut pas sous son règne un
» seul grand emploi auquel les plébéiens
» ne parvinssent. Tout vint figurer sur ce
» vaste théâtre de gloire , ouvert par Louis
» XIY. L'industrie , la vieillesse et surtout
» le génie élevèrent par degrés '-^ tiers-
LOU
562
LOU
» état.... La nation française ne peut ou-
• blier qu'elle lui doit le rang qu'elle oc-
» cupe dans l'univers » Madame de
Genlis a publié un Abrégé des mémoires
ou Journal du marquis de Dangeau ,
extrait du manuscrit originale contenant
beaucoup de particularités et d'anecdotes
sur Louis XJy ^ sa cour , etc. ( f^ogez
DANG£AU) . On a un Essai sur l'établis-
sement monarchique de Louis XI F ,
par Lemontey, Paris, 1818, in-8°, et les
OEuvres de Louis XIV. 1806, 6 vol. in-8°,
contenant les instructions pour le dau-
phin et le roi d'Espagne, plusieurs lettres
de Louis XIV , etc. Ils ont été imprimés
par les soins de Grimoard et Grouvelle.
LOUIS XV, 'h" fils du duc de Bourgogne
(depuis Dauphin) , arrière-petit-fils de
Louis XIV, et de Marie - Adélaïde de
Savoie , naquit à Fontainebleau le 15 fé-
vrier 1710, et fut d'abord nommé duc
de Bretagne. Devenu dauphin le 8 mars
1712 , par la mort de son illustre père ,
il succéda à Louis XIV, son bisaïeul,
le 1" septembre 1713. Il avait cinq
ans et demi lorsqu'il monta sur le trône.
Philippe , duc d'Orléans , son plus proche
parent, devait être régent ; mais il vou-
lut devoir cette place à sa naissance, et
non au testament de Louis XIV. Ce tes-
tament, qui aurait beaucoup gêné son
administration , fut cassé par le parlement
et la régence lui fut déférée le 2 septem-
bre, c'est-à-dire le lendemain de la mort
de Louis XIV , qui avait bien prévu que
les choses iraient ainsi , et qui avait fait ce
testament sans beaucoup espérer qu'il fût
exécuté. « Il savait très bien , dit un his-
» torien, où l'autorité royale expirait, et
» que les affaires d'état sont des choses
p qu'un roi mort ne peut plus régler. Il
» arrive cependant quelquefois que par
» respect pour le défunt morjarque, sur-
» tout lorsque l'idée de ses grandes qua-
» lités dépasse le tombeau avec l'affection
» et les regrets des peuples , que ses der-
» nières volontés sont adoptées par ses
«successeurs et par l'état, et suivies
» comme un tableau de direction et comme
» des conseils : et c'eût été le cas de Louis
» XIV , sans l'opposition du régent et des
9 parlemens. » Les premiers soins du ré-
, gent furent de rétablir les finances, qui
étaient dans le plus grand dérangement.
Il permit à Law , intrigant écossais , de
former une banque dont on se promet-
tait les plus grands avantages. {Vogez
l'article LAW , et PHILIPPE , duc d'Or-
léans.) Les suites des dangereuses nou-
veautés de Law furent la subversion de
cent mille familles, la disgrâce du chan-
celier d'Aguesseau , et l'exil du parlement
à Pontoise. Le roi ayant été couronné à
Reims en 1722 , et déclaré majeur l'année
suivante , le duc d'Orléans remit les rênes
de l'état dont il avait eu la conduite pen-
dant la minorité. Le cardinal Dubois,
alors secrétaire d'état, fut chargé pen-
dant quelque temps de la direction géné-
rale des affaires ; mais ce ministre étant
mort au mois d'août 1723 , le duc d'Or-
léans accepta le titre de premier minis-
tre. Ce prince, mort le 2 décembre de la
même année, eut pour successeur dans
le ministère le duc de Bourbon , qui s'em-
pressa de chercher une épouse au jeune
monarque. Il choisit la princesse de Po-
logne, Marie Leczinska, fille du roi Sta-
nislas. Le mariage fut célébré à Fontai-
nebleau le 5 septembre 1725 ; et une heu-
reuse fécondité fut le fruit de cette union.
Il avait d'abord été fiancé à une infanto
d'Espagne , qui vint à la cour de France
à l'âge de quatre arv5 ; mais le duc de Bour-
bon , alors ministre , s'étant brouillé avec
l'Espagne , se permit d'y renvoyer l'in-
fanle en 1723. Le nouveau ministère
ayant effarouché le parlement , la no-
blesse et le peuple par quelques édits
bursaux , le duc de Bourbon fut disgra-
cié. Le cardinal de Fleuri, jadis précep-
teur du roi, et qui prit la place du duc de
Bourbon , substitua une sage économie
aux profusions dont on se plaignait. Sans
avoir le titre de premier ministre, il eut
toute la confiance de Loxûs XV , et il s'en
ser- it pour faire le bien et réparer les
maux passés. La double élection d'un roi
de Pologne, en 1733, alluma la guerre
en Europe. Louis XV, gendre de Stanis-
las , qui venait d'être élu pour la seconde
fois , le soutint contre l'électeur de Saxe ,
fortement appuyé par l'empereur Char-
les VI. Ce dernier souverain agit si effi-
cacement pour le prince qu'il protégeait,
que Stanislas fut obligé d'abandonner la
couronne qui lui avait été décernée , et de
prendre la fuite. Louis XV , voulant se
venger de cet affront sur l'empereur,
s'unit avec l'Espagne et la Savoie contra
l'Autriche. La guerre se fit en Italie, ej
elle fut glorieuse. Le maréchal de Villars,
en finissant sa longue et brillante carrière
prit Milan, Tortone et Novare. Le maré-
chal de Coigny gagna les batailles de
Parme et de Guaslalla. Enfin en 1754 , l'em-
pereur avait perdu presque tous ses états
d'Italie. La paix lui était devenue néces-
LOU
S63
LOU
saire, il la fil; mais elle ne fut avanta-
geuse qu'à ses ennemis. Par les prélimi-
naires signés le 5 octobre 1755, et le trai-
té délinilif signé le 18 novembre 1738, le
roi Stanislas , qui avait abdiqué le trône
de Pologne , devait en conserver les titres
et les honneurs, et être rais en possession
des duchés de Lorraine et de Bar, pour
être réunis après sa mort à la couronne
de France Ainsi la réunion de cette riche
province, si long-temps désirée et si inu-
tilement tentée jusqu'alors , fut consom-
mée par une suite d'événemens auxquels
la politique ne se serait pas attendue.
La mort de l'empereur Charles VI , arri-
vée en 1740 , ouvrit une nouvelle scène.
La succession de la maison d'Autriche ,
quoique garantie à sa fille Marie-Thérèse
par la pragmatique-sanction , acceptée et
signée par les princes qui pouvaient y
paraître intéressés, lui fut disputée par
quatre puissances. Louis XV s'unit aux
rois de Prusse et de Pologne , pour faire
élire empereur Charles-Albert, électeur
de Bavière. Créé lieutenant-général du
roi de France , ce prince se rend maître
de Passau, arrive à Lintz, capitale de la
Haute- Autriche ; mais , au lieu d'assiéger
Vienne , dont la prise eût été un coup dé-
cisif, il marche vers Prague, s'y fait cou-
ronner roi de Bolième, et va recevoir à
Francfort la couronne impériale sous le
nom de Charles VII. Ces premiers suc-
cès furent suivis de pertes rapides. Prague
fut reprise en 1742 , et la bataille de Det-
tingue, perdue l'année suivante , détrui-
sit presque toutes les espérances de l'em-
pereur protégé par la France. 11 fut bien-
tôt chassé de ses états héréditaires et er-
rant dans l'Allemagne , tandis que les
Français étaient repoussés au Rhin et au
Mein. Ce fut dans ces circonstances que
Louis XV fit sa première campagne au
printemps de 1744. 11 prend Courtray,
Menin et Ypres. Il quitte la Flandre , où
il avait des succès, pour aller au secours
lie l'Alsace, où les Autrichiens avaient
pénétré. Tandis qu'il marchait contre le
prince Charles de Lorraine , général de
de l'armée ennemie, qui avait passé le
Rhin, il fut réduit à l'extrémité par une
maladie dangereuse qui l'arrêta à Metz.
Ce fut à cette occasion que les Français
lui donnèrent des témoignages sincères
de leur tendresse alarmée : il fut surnom-
mé le Bien-Aimé. A peine est-il rétabli ,
qu'il va assiéger Fribourg , et le prend le
îl novembre 1744. Les batailles de Fonte-
noi, de Rocoux etdeLawfeld, gagnées
en 1745, 1746 et 1747; la journée de
Melle suivie de la prise de Gand , Ostende
forcée en six jours , Bruxelles prise an
cœur de l'hiver, Berg-Op-Zoom emporté
d'assaut , Maestricht investi en présence
de 80,000 hommes, auraient assuré à la
France une paix glorieuse , si elle avait
eu partout les mêmes succès. Mais tandis
que tout lui cédait en Flandre , les affaires
d'Italie étaient dans le plus mauvais état.
La bataille de Plaisance , perdue en 1746
par le maréchal de Maillebois , avait force
les Français à repasser les Alpes. Les
troupes du duc de Savoie et de la reine
de Hongrie ravageaient la Proverice. Les
Anglais, aussi heureux sur mer que les
Autrichiens l'étaient en Italie , ruinaient
le commerce de la France ; ils s'empa-
raient de Louisbourg et du Cap-Breton ;
ils faisaient partout des prises immenses.
La paix fut conclue à Aix-la-Chapelle le
18 octobre 1748. Le roi assura Parme ,
Plaisance et Guastalla à don Philippe son
gendre, fit rétablir le duc de Modène son
allié, et la république de Gènes, dans
leurs droits ; mais il rendit toutes les con-
quêtes faites aux Pays-Bas. La paix fut
encore troublée pour quelques terrains
incultes de l'Acadie, dans l'Amérique
septentrionale. Les Anglais les disputè-
rent aux Français en 1755; ceux-ci les har-
celaient dans ces possessions lointaines ,
tandis que les Anglais , pour s'en venger
faisaient de grandes captures sur mer.
Le roi de Prusse, auparavant allié de»
Français, se ligue avec l'Angleterre tandis
que l'Autriche s'unit avec la France. 11.*^
Anglais furent d'abord battus dans le Ca-
nada , et craignirent une invasion dans
leurs îles. Ils perdirent le Poi t-Mahon , que
le maréchal de Richelieu prit d'assaut en
1756, après une victoire navale remportée
par le marquis de la Galissonnière. Le
maréchal d'Estrées gagnait, d'un autre
côlé, la bataille de Hastembeck sur le
duc de Cumberland. Le maréchal de Ri-
chelieu , envoyé pour commander à sa
place, poussa l'Anglais, et le força do
capituler à Closter-Séven avec toute sou
armée. L'électoral de Hanovre était con-
quis. Une armée française, jointe à celle
des cercles, marcha la même année,
1757 , contre le roi de Prusse en Saxe , et
fut battue à la fameuse journée de Ros-
bach, donnée au commencement de no-
vembre. Cette victoire fut décisive : l'é-
lectorat de Hanovre fut repris par les
Anglais , malgré la capitulation de Clos-
ter-Séven. Les Français furent encore
LOU 5
battus à Crevelt par le prince de Bruns-
wick en 1738 ; mais le duc de Broglie les
vengea en remportant une victoire com-
plète à Bergen , près de Francfort, le 15
avril 1759. Enfin , après diflérens combats
où chaque parti était tantôt vaincu, tan-
tôt vainqueur, tous les princes pensèrent
sérieusement à la paix. La France en
avait un besoin extrême ; les Anglais
avaient fait des conquêtes prodigieuses
dans les Indes; ils avaient ruiné entière-
ment le commerce des Français en Afri-
que; ils s'étaient emparés de presque
toutes leurs possessions en Amérique. Le
pacte de famille, conclu en 1761 entre
toutes les branches souveraines de la
maison de France , n'avait pas empêché
les Anglais d'enlever aux Espagnols la
Havane , l'île de Cuba dans le golfe du
iHexique, et les îles Philippines dans la
mer des Indes. Par le traité de paix qui
fut signé à Paris , au commencement de
1763 , ils rendirent quelques-unes de leurs
ronquêtes ; mais ils en gardèrent la meil-
leure partie. La France céda à l'Angleterre
Ixiuisbourg ou le Cap-Breton , le Canada,
toutes les terres sur la gauche du Missis-
sipi, excepté la Nouvelle-Orléans. L'Es-
pagne y ajouta encore la Floride. Les
Anglais gagnèrent environ 1500 lieues de
terrain en Amérique. On leur abandonna
le Sénégal en Afrique , et ils restituèrent
la Gorée. Minorque fut échangé contre
Belle-Ile. Telle fut la lin de celte guerre,
funeste à la France. Les années qui sui-
virent furent tranquilles , si l'on en ex-
cepte l'affaire du duc de Parme avec le
pape Clément XIII, qui engagea le roi à se
rendre maître du comtat Venaissin, en
1768 la conquête de la Corse et les chan-
gemens arrivés dans la magistrature en
1770 et 1771 , l'extinction des jésuites con-
sommée en France en 1764 , et qui le fut
dans toute l'Europe en 1773. Au commen-
cement de mai 1774 , Louis XV fut atta-
qué pour la seconde fois de la petite-vé-
role, et cette maladie l'enleva le 10 du
même mois. Il était dans sa 65* année , et
occupait le trône depuis 59 ans 8 mois et
quelques jours. Nous ne parlerons pas de
l'accident du 5 janvier 1757. ( Voyez DA-
MIENS.) Louis XV était, à sa mort, le
plus ancien des monarques de l'Europe.
Par malheur le règne de Louis XV fut
celui des favorites plutôt que celui des
favoris. A madame de Mailly succédè-
rent ses deux soeurs , dont la plus jeune
était la duchesse de Châteauroux. Elle
lut remplacée par madame Lenormand
fi 4 LOU
d'Elioles, depuis duchesse de Pompadone
{votj. ce nom ) , qui gouverna l'état, et
en dispensa les grâces pendant plusieurs
années. La Dubarri fut la dernière maî-
tresse en titre ; mais elle eut fort peu d'in-
fluence dans les affaires. L'infâme Lebel ,
valet de chambre du roi, lui procurait
à chaque instant de nouvelles conquêtes,
et des courtisans corrompus applaudis-
saient à ces basses turpitudes. Louis XV
était cependant juste et sensible; et ce
fut l'ambilion des courtisans qui cher-
cha à pervertir ses mœurs pour mieux
le dominer. Ce prince avait eu d'abord
le goût des beaux -arts, et connaissait
l'histoire et la géographie. On a de lui un
petit vol. in-8" 1718, sur le Cours des
principales rivières de l'Europe^ ouvra-
ge devenu rare , et qu'il avait composé
sous la direction du célèbre géographe
de Liste. Les sciences ont été encoura-
gées sous son règne. Le voyage au pôle
par Mauperluis , et à l'équateur par la
Condamine, entrepris lun et l'autre à
de si grands frais, quoique sans utilité
réelle; d'autres voyages aux Philippines,
à la Californie , en Sibérie , faits par or-
dre du gouvernement, prouvent le zèl«
du roi et de ses ministres pour tout ce qui
avait rapport à l'astronomie , à la naviga-
tion, à l'histoire naturelle. La physique
expérimentale et la mécanique ont fait
des progrès qui ont influé sur les arts né-
cessaires. Les étoffes ont élé manufactu-
rées à moins de frais, parles soins du
célèbre Vaucanson , et de quelques autres
mécaniciens. Un horloger ingénieux (M.
Le Roy) inventa une pendule qui sup-
plée en quelque sorte à la connaissance
qui nous est refusée des longitudes sur
la mer. Il faut avouer néanmoins qu'il y
a eu , surtout vers la fin de son règne ,
moins de génie et de grands talens qua
dans les beaux jours de Louis XIV. Les
sciences semblent avoir perdu en profon-
deur ce qu'elles ont gagné en superficie;
leur lumière, en frappant tous les yeux,
a produit une infinité d'ouvrages dans
tous les genres, mais très peu qui passe-
ront à la postérité. L'étude de la naiura
est devenue d'un goût général; mais l'es-
prit de système et une multitude de fausses
hypothèses ont rendu presque inutiles les
travaux des observateurs. L'histoire , at-
teinte du soufle brûlant de la philosophie
a subi une entière métamorphose ; tous
ses traits ont été défigurés pour prendre
l'empreinte des préventions dominantes,
pour servir d'aliment aux passions cl aux
LOU 56
erreurs. Les sources du beau ont été né-
gligées , le grec el le latin ont cessé d'être
en honneur. Le goût de la déclamation,
la manie des antithèses et des tours nou-
veaux, ont beaucoup altéré le style, en
ont affaibli la dignité et la vigueur; l'élo-
quence a pris le ton de la saillie et cette
délicatesse affectée qui dégénère en sé-
cheresse, et qui ramène enfin la barbarie.
Les mœurs, si on en croit un écrivain
judicieux, ont beaucoup influé sur cette
révolution. La sensibilité pour les plaisirs
ayant en quelque sorte absorbé son anta-
goniste, la sensibilité de l'esprit, on n'a
plus eu cette ardeur et ce noble enthou-
siasme , quand il s'est agi de la vérité et
du beau littéraire. Pour suppléer à ce feu
divin , on a eu recours à ce qu'on appelle
' de l'esprit; mais il n'a pas plus fait pour
remplacer la force du sentiment, que quel-
ques étincelles ne font pour tenir la place
d'une lumière brillante. Voltaire a donné
le Siècle de Louis XV, ouvrage superfi-
ciel et très inexact, bien inférieur au
Siècle de Louis XIV ^ malgré les défauts
de celui-ci : il y a des choses tout uni-
ment imaginées , et nées dans le cerveau
de l'auteur , qui ne les a tirées d'aucun
mémoire , d'aucune relation même roma-
nesque et fabuleuse. On a donné aussi sa
Vie privée / il y a parmi quelques anec-
dotes intéressantes, des preuves trop
vraies de la profonde corruption des cours,
et des réflexions de Tauteur qui ne va-
lent pas mieux que les choses qu'il ra-
conte. Il faut porter le même jugement
d'un ouvrage de Crébillon le fils, sous ce
titre anagrammatique : Amours de Zeo-
kinizul, roi des Kofirans.
* LOUIS XVI , roi de France et de
Navarre , second fils de Louis dauphin de
France et de Marie-Josèphe de Saxe , na-
quit à Versailles le 23 août 17.54, et fut
baptisé sous le nom de duc de Berry.
Lorsqu'il vint au monde toute la cour
était à Choisy. Le courrier chargé de
porter à cette maison royale la nouvelle
de l'heureux accouchement de la dau-
phine, fit une chute en arrivant et expira
sans avoir pu remplir sa mission ; ainsi
un sinistre accident signalait le commen-
cement d'une vie qui devait se terminer
par la plus terrible catastrophe. Le jeune
prince avait reçu de la nature avec une
constitution vigoureuse , d'heureuses dis-
positions intellectuelles et morales. Son
âme franche et sans déguisement s'ouvrit
de bonne heure à tous les sentimens
Vertueux, et son esprit droit et élevé à
7,
D LOU
toutes les connaissances utiles. Le dau-
phin son père, qui l'aimait tendrement,
ne négligea aucun des moyens qui pou-
vaient assurer le succès de son éducation ,
et il nomma pour y présider l'évêque de
Limoges el le duc de la Vauguyon, l'un
estimé pour la sévérité de ses mœurs,
l'autre pour sa valeur et sa probiié ri-
gide. Le- dauphin lui-même se chargea
d'enseigner à son fils la grammaire et les
langues. Les progrès du jeune duc de
Btirry furent rapides ; il acquit en peu de
temps des connaissances étendues surtout
dans l'histoire et la géographie. La bonté
naturelle, l'amour de la justice, la piété
sincère , et la vive sensibilité qui le dis-
tinguaient , firent prévoir de bonne heure
qu'il donnerait à la France un de ses
meilleurs rois. En 1765 il perdit son père
qui fut vivement regretté de la nation ,
et bientôt après sa mère qui ne put sur-
vivre à son époux. La douleur du jeune
prince fut extrême ; il refusa long-temps
de sortir, et lorsqu'on traversant les ap-
partemens il entendit dire pour la pre-
mière fois : place à monsieur le dau-
phin ! des pleurs inondèrent son visage
et il s'évanouit. Au milieu d'une cour
licencieuse, dont les désordres ne lui
inspiraient que du dégoût, il conserva
toute la pureté de ses mœurs. Un jour
de vieux courtisans lui demandaient quel
nom il prendrait à son avènement au
trône : — celui de Louis le Sévère, répon-
dit-il. Mais la fermeté que ce mot sem-
blait révéler fut loin d'être le trait domi-
nant de son caractère. La bonté qui dis-
tinguait ce prince , jointe à une excessive
défiance de lui-même , lui enleva cette
vigueur si nécessaire à un roi dans les
tourmentes populaires. On a cité de lui
plusieurs traits dignes de Henri IV. Un
jour qu'il était à la chasse , le cocher
du prince , voulait faire traverser à sa
voiture un champ de blé, afin d'arriver
plus vite à l'endroit où le cerf devait
être forcé. Le dauphin fait arrêter les
chevaux et ordonne de suivre la route
ordinaire. « Pourquoi, s'écrie-t-il, mes
«plaisirs feraient-ils tort au pauvre? ce
» blé ne m'appartient pas. » Cherchant
avidement l'occasion de soulager les mal-
heureux , souvent il allait sans suite vi-
siter le pauvre dans son réduit; et quand
une admiration indiscrète venait à révé-
ler ces visites mystérieuses : « il est Lien
«singulier, disait-il avec toute la grâce
» de la bonté , que je ne puisse aller en
» bonne fortune sans qu'on le sarhc. »
48
LOU 5C6
Après de longues dissensions la France
et l'Allemagne s'étaient réconciliées, et
pour sceller cette alliance , il fut résolu
que le dauphin épouserait la fille de
l'immorlelle Marie-Thérèse , Marie-An-
toinette d'Autriche. Les fêles données à
cette occasion par la ville de Paris (16
mai d770) , furent troublées par un hor-
rible événement. Plus de mille personnes
périrent écrasées au milieu de la foule
immense qui encombrait la place de
Louis XV. Le peuple vit , dans cette ca-
tastrophe, un sinistre présage pour le
règne du jeune prince. La nouvelle de
ces déplorables accidens affecta pro-
fondément le dauphin; voulant autant
qu'il dépendait de lui réparer ce désastre,
il s'empressa d'écrire au lieutenant de
police : Œ Je suis pénétré de tant de mal-
» heurs. On m'apporte en ce moment ce
» que le roi me donne tous les mois : je
» ne puis disposer que de cela et je vous
• l'envoie : hâtez-vous de secourir les
» plus malheureux. » Son revenu de plu-
sieurs mois fut affecté au même objet, et
il n'en détourna que les sommes néces-
saires pour secourir d'autres indigens.
De pareils traits faisaient désirer au
peuple son avènement au trône. Mais
Louis redoutait la royauté comme un
fardeau trop pesant pour lui, et lors-
qu'en 1774 , la mort de Louis XV mit en
ses mains les rênes de l'état, il n'éprouva
dans celte grande circonstance, qu'im
sentiment d'effroi , mêlé de douleur.
O mon Dieu, s'écria-t-il , en levant au ciel
ses yeux baignés de larmes, secourez
mon insuffisance ! Naturellement peu
amoureux du pouvoir, il entrevoyait
combien les plaies de l'état lui rendraient
difficile l'accomplissement de ses devoirs.
Malade et appauvrie depuis les dernières
années du règne de Louis XIV , la mo-
narchie avait marché rapidement à sa
ruine à travers les honteux excès de la
régence, et l'incurie du règne suivant.
Le commerce languissait, les finances
étaient épuisées , le découragement ré-
gnait dans les villes et dans les cam-
pagnes , et les abus signalés chaque jour
à l'opinion , avec le plus fougueux em-
portement , augmentaient le méconten-
tement général , et fortifiaient ce désir de
changement que des écrivains impré-
voyans ou ambitieux s'efforçaient de
répandre dans la nation. Bientôt une ré-
forme devint le voeu général, et Louis XVI
sentit lui-mctne la nécessité de l'opérer.
Animé d'un z.èle ardent pour le bonheur
LOU
de son peuple , il se hâta d'appeler au-
près de lui pour le seconder dans la tâche
difficile que son rang lui imposait , tous
les hon^mes que l'opinion publique , in-
terprète aveugle et souvent corrompue
des besoins d'une nation, lui désignait
comme les plus propres à diriger l'état.
Le comte de Maurepas, vieux courtisan
profond dans l'intrigue, et d'une incu-
rable frivolité , dut à la disgrâce dont il
avait été frappé sous le règne précédent,
d'être mis à la tête de l'administration
nouvelle. Le roi lui adjoignit Turgot ,
homme droit et ami du bien public,
mais partisan de cette politique maté-
rialiste , qui ne voit danffle gouvernement
des peuples que de l'argent, du com-
merce , du blé et des impôts ; et Ma-
lesherbes , esprit élevé , qui joignait des
opinions nouvelles à des vertus antiques.
Le premier ayant été bientôt écarté ,
Louis XVI lui donna pour successeur
Necker, banquier protestant et genevois ,
homme d'affaires plutôt qu'homme d'état,
avide de popularité et voulant régler la
monarchie française sur le système d'une
petite démocratie. Le jeune monarque
commença son règne par des édits qui
obtinrent l'assentiment général. Le pre-
mier remit au peuple le droit de joyeux
avènement ; par le second il rassura les
nombreux créanciers de l'état en pro-
mettant d'acquitter la dette publique.
Bientôt il rappela les parlemens exilés
par Louis XV ; il établit pour Paris le
mont-de-piété &\ la caisse d'escompte; il
supprima les corvées qu'il convertit en
impôt pécuniaire ; il fit disparaître dans
la Franche-Comté un reste de servitude
territoriale ; il abolit la torture ou qpies-
tion judiciaire avant la condamnation à
mort ; enfin il accomplit toutes les sages
réformes qui pouvaient préparer le re-
tour de la prospérité publique. Le crédit
national commença à renaître , l'agricul-
ture, le commerce et les arts refleurirent,
et tout sembla présager un règne heureux.
Le il juin 1775 Louis XVI avait été sacré
à Reims , au milieu des acclamations d'un
peuple ivre de joie. Pour exécuter tout
le bien qu'il voulait faire , le jeune roi
sentait le besoin d'une longue paix. Ce-
pendant, trois ans après, la fatalité qui
semblait présider à son règne l'entraîna
dans une guerre impolitique , dont les
résultats devaient lui être funestes. Les
anglo -américains, après avoir proclamé
leur indépendance , sentant que leur
cause était perdue s'ils n'obtenaient la
LOU
567
LOU
secours d'une puissance alliée , solli-
cilèrenl celui de la France. Louis XVI
Iiésitail à protéger un peuple insurgé ,
et à provoquer la haine et les terribles
représailles de l'Anglelorre ; mais l'élo-
quence de Franklin , l'avis unanime du
conseil, et la voix de l'opinion publique
triomphèrent de sa résistance. II recon-
nut l'indépendance américaine , et signa
sans en voir toute la portée une déclara-
tion où la souveraineté du peuple sem-
blait consacrée par ces mots : « Les anglo-
» américains sont devenus libres du jour
» où ils ont déclaré leur indépendance. »
Les armes françaises furent heureuses
dans cette guerre ; Lafayelte et Rocham-
beau sur le continent, Lamothe-Piquet
sur les mers d'Amérique et sur celles des
Indes , soutinrent l'honneur de notre pa-
villon. L'Amérique fut affranchie ; mais
si l'orgueil national peut s'applaudir de
l'heureux succès d'une protection portée
à travers les mers à un peuple du nou-
veau Monde , cette gloire eut une amère
compensation dans Tépuisement des
linances qui en fut la suite , et dans la
perte de Pondichéri. Nos jeunes guerriers
rapportèrent des Etats-Unis un amour
exalté de la liberté et de l'égalité républi-
caines ; et l'Angleterre , animée d'an res-
sentiment profond contre la France,
attendit avec impatience luie occasion de
se venger, dont elle ne profita que trop
durant la sanglante révolution qui s'ou-
vrit en 1789. Ce qui est certain , c'est qu'à
partir de ce moment , la France vit rapi-
dement diminuer son influence continen-
tale , et son commerce partout entravé
par de nouveaux ennemis ou par des
alliés infidèles, dépéril à la fois dans le
nord et dans le midi. Louis XVI avait eu
en 1781 son premier fils ; et cet événe-
ment avait été célébré dans tout le
royaume avec beaucoup de joie et de so-
lennité. A Paris la ville donna un banquet
auquel le roi assista avec toute sa famille,
l'allégresse publique fut excessive. C'était
Ie21 janvier 1782. Onze ans plus tard et le
même jour , Louis fut conduit à l'écha-
faud dans la même ville. La guerre d'A-
mérique avait épuisé les finances. Necker,
empirique heureux un moment , après
avoir cherché à les soutenir à force d'em-
prunts , se retira en laissant le trésor
dans la même détresse. Calonne fit d'a-
bord les plus rassurantes promesses , mais
bientôt se voyant engagé dans un cercle
de diffî-:ulté3 toujours croissantes , il
proposa de réunir une assemblée des
notables , et Louis XVI suivit son conseil
(1787). Les notables effrayés du déficit
de cent dou/.e millions que les comptes
présentés par Calonne leur firent aperce-
voir dans les finances , se prononcèrent
énergiquement contre ce ministre, qui
fut renvoyé , et remplacé par l'arche-
vêque de Toulouse, M. deBrienne, bel
esprit et homme de cour, mais sans vues
et sans fermeté. L'assemblée des notables
lui accorda ce qu'elle avait refusé à son
prédécesseur , et consentit à l'établisse-
ment de l'impôt du timbre et de l'impôt
territorial ; le premier pesait sur la masse
des contribuables , et surtout sur les com-
merçans ; le second atteignait les classes
élevées de l'état. La haute magistrature
des parlemens devait avoir une grande
part à ces charges ; et secrètement irritée
de la violation de ses privilèges , elle se
décida à opposer aux projets de la cour
une énergique résistance. Comme les
deux éditsfurentprésenlés simultanément
à son acceptation, elle put, en feignant
de défendre le peuple et les commerçans,
déguiser une opinion intéressée sous le
voile banal de l'intérêt public. Le parle-
ment refusa epiniâtrément d'enregistrer
les deux édils ; il récrimina contre la
cour et dénonça les dépenses et les pro-
digalités qu'un lui imputait. Dans la cha-
leur du débat le mot d'états généraux fut
prononcé, et cette parole fortuite et fri-
vole , fut bientôt répétée de toutes parts,
comme l'expression du vœu public. Ce-
pendant un lit de justice força l'enregis-
trement des édits , le parlement protesta
et fut exilé à Troyes. La pénurie des
finances se faisant sentir de jour en jour
d'une manière pms effrayante , le parle-
ment fut rappelé , à condition qu'il enre-
gistrerait un emprunt de i20 millions.
Son retour devint le signal d'une nouvelle
lutte contre l'autorité royale. Vainement
le duc d'Orléans avec deux conseillers
reçurent ordre de s'éloigner de Paris ; le
génie de la révolution était déchaîné en
France, et la royauté allait se précipiter
vers sa ruine. Necker, qui avait rem-
placé Brienne , se prononça pour la con-
vocation des états-généraux , et Louis XVI
adoptant cette idée, assembla une seconde
fois les notables pour déterminer la forme
des états et la manière d'y voter (1788).
Ce monarque alarmé des embarras crois-
sans de son règne, et du progrès de»
mauvaises passions qui menaçaient l'ordre
social , ne trouvait que dans l'affection
de son peuple un adoucissement à ses
LOU 5
cruelles anxiétés. En 1786 il avail fait un
voyage en Normandie et les transports
de la joie publique qui éclatait partout
sur son passage, avaient profondément
ému son cœur : de retour à Paris , en
souvenir du bon accueil qui lui avait été
fait , il voulut que son second fils , né
quelques mois auparavant, portât le nom
de duc de Normandie. Parmi ses ayeux,
Henri IV était celui qu'il se proposait
pour modèle , et comme le Béarnais , il
aimait tous les Français avec la tendresse
d'un père. En 1788, les députés du tiers
état de Bretagne ayant été admis à son
audience , se jetèrent aux pieds du roi
qui les releva en leur adressant ces paroles
touchantes : levez-vous, ce n'est pas à
mes pieds qu'est la place de mes enfans !
Cette affectueuse bonté du monarque ne
devait point le préserver du sort tragique
où l'entraînait le cours rapide des évé-
nemens. Le parlement, les princes du
sang dans leur mémoire au roi , insistaient
pour qu'on suivît dans la convocation
des états - généx'aux les formes suivies
dans l'assemblée de 1614. Mais l'engoue-
ment des nouveautés, la vanité de Necker,
et les intrigues des agilaleijrs en ordon-
nèrent autrement. Le tiers-état fut nom-
mé en nombre double de chacun des
deux autres ordres , et pour que cet
avantage ne fût pas illusoire , il demanda
et obtint que les délibérations eussent
lieu par tête et non par ordre. Les états-
généraux s'ouvrirent le S mai 1789 , dans
la salle des menus-plaisirs. Louis XVI
dans le discours qu'il prononça à cette
occasion , sut concilier heureusement la
dignité d'un roi, et la tendre sollicitude
d'un père, a Une inquiétude générale,
» disait ce monarque , un désir exagéré
» d'innovation se sont emparés des es-
» prits, et finiraient par égarer totalement
» les opinions , si l'on ne se hâtait de les
» fixer par une réunion d'avis sages et
» modérés. C'est dans cette confiance ,
» Messieurs , qvie je vous ai rassemblés....
» Les esprits sont dans l'agitation , mais
* une assemblée de représenlans de la
» nation n'écoulera sans doute que les
» conseils de la sagesse et de la prudence. »
Les espérances que Louis avait fondées
sur la convocation des états- généraux
furent loin d'être justifiées. Dès le lende-
main 6, le trouble et la division éclatèrent
ians rassemblée à l'occasion de la véri-
fication des pouvoirs. Le tiers-état de-
mandait une assemblée jjéncrale , et le
vote par tète , qui devait assurer sa pré-
68 LOU
pondérance ; le clergé et la noblesse s'y
opposaient. Cependant après de longa
débals , et des pourparlers qui ne produi-
sirent aucun résultat , la chambre du
tiers , sur la proposition de Sieyès , prend
le 17 juin la résolution hardie de se con-
stituer sous le titre d'asse-wi/ee nationale
et déclare toute autre assemblée illégale.
C'est en vain que la salle des états est
fermée par ordre de la cour, les députes
du tiers se réunissent au jeu de paume,
et y font le serment de ne point se sépa-
rer sans avoir donné une constitution à
la France. Cette démarche audacieuse
qui violait les lois de la monarchie , et
qui outrepassait tous les mandats donnés
aux députés , ouvrit une funeste carrière
d'innovations où se précipitèrent à l'envi
d'imprudens réformateurs qui en voulant
rajeunir les institutions , ne surent que
les détruire. La majorité du clergé , et
plusieurs membres de la noblesse ayant
le duc d'Orléans à leur tète, vinrent bien-
tôt se réuniraux députés du tiers. Vaine-
ment dans une séance royale à laquelle
il convoqua tous les ordres , Louis con-
jura les députés de mettre fm à leurs di-
visions j, déclarant que s'ils ne voulaient
pas concourir à ses projets , il ferait seul
le bien de ses peuples . et se considérerait
seul comme leur repré sentant ; vainement
il ordonna à tous les députés de se séparer
et de se rendre le lendemain dans leurs
chambres respectives, le clergé et la no-
blesse seuls obéirent ; le tiers continua
de délibérer , malgré l'injonction positive
de sortir de la salle des séances , que le
roi lui fit réitérer par M. de Bréxé. Plu-
sieurs orateurs s'y livrèrent aux décla-
mations les plus violentes contre l'autorité
royale ; la majorité des deux autres ordres
parut vouloir rester soumise à ses man-
dats et à la volonté du roi, mais les
membres de chaque minorité se rendirent
successivement dans la chambre du tiers.
Alarmé de ces défections, et de la fer-
mentation qui se manifestait parmi le
peuple , Louis XVI , invita la majorité de
ces deux ordres à se réunir au troisième;
et , comme le duc de Luxembourg lui
faisait au nom de la noblesse des objec-
tions contre cette réunion : « toutes mes
» réflexions sont faites, répondit le prince;
» dites à la noblesse que je la prie de se
» réunir : si ce n'est pas assez de ma
» prière , je le lui ordonne ; quant à moi ,
» je suis déterminé à tous les sacrifices.
T> A Dieu ne plaise qu'un seul homme pé-
I » risse jauiais pour ma querelle! » Ainsi,
LOU
569
LOU
les trois ordres se nuiurenl ou plutôt ils
turent confondus. Dès ce moment l'an-
tique monarchie française fut détruite et
la révolution consommée , les divisions
s'envenimèrent; les passions s'irritèrent
par la lutte, et les erreurs impatientes
lie succès eiifuntcreut des crimes. Ce-
pendant les faclions commençaient déjà
à se montrer à découvert ; celle d'Orléans
n'oubliait, rien pour augmenter les trou-
bles , des clubs s'établissaient, des jour-
naux incendiaires prêchaient l'anarchie
et la re voile, et insultaient chaque jour
au souverain et à sa famille. La position
critique de Louis XVI lui commandait
une inflexible énergie , mais il ne sut
qu'être bon quand ii fallait être- ferme.
^ecker ayant été éloigné des affaires, son
txil causa la plus grande fermentation
dans Paris. Au milieu de l'agitation pu-
blique, la cour qui soupçonnait la fidé-
lité des gardes françaises, lit approcher
de Versailles quelques régimens. Mira-
beau, dans un discours violent, prononcé
à l'assemblée nationale , demanda le ren-
voi des troupes cl fit décréter que les
ministres disgraciés emportaient la con-
fiance de la nation ; c'était là une véri-
table déclaration de guerre faite au roi
par l'assemblée. Cependant les bustes de
Necker et du duc d'Orléans sont portés en
Il iomphe dans Paris , la ville entière est
en mouvement, et le peuple court aux ar-
mes. Les arsenaux sont envahis, la Bas-
tille est prise , son gouverneur massacré,
et des têtes sanglantes sont promenées
dans Paris. Fatigué de ces désordres , et
alarmé des meurtres qui s'étaient commis,
Louis XVI se rend à l'assemblée à pied,
sans armes et presque sans suite. Placé
debout au milieu de la salle, il exhorte
les députés à rairiener la tranquillité pu-
blique. « Je sais, leur dit-il, qu'on cherche
» à élever contre moi d'injustes préven-
B lions; je sais qu'on a osé publier que
s vos personnes n'étaient pas en sûreté :
D des récits aussi coupables ne sont-ils pas
» démentis d'avance par mon caractère
» connu? eh bien! c'est moi qui me fie
» à vous. » Ces paroles simples et tou-
chantes excitèrent dans l'assemblée des
transports unanimes , les députés vou-
lurent servir eux-mêmes de gardes au
monarque et le conduisirent au château.
Dans la même journée , le roi , pour ne
point laisser de prétexte aux plaintes et
aux méfiances , rappela Necker au minis-
tère. Cependant il engagea ceux des mem-
bres tic sa fumil'e qui avaient montré le
plus de zèle pour la défense du tr«'';nc,
à sortir du royaume, afin de se melUe
à l'abri des fureurs j>opulaires. D'autres
sujets aussi distingués par leur courage
que par leur fidélité suivirent cet exem-
ple. Louis voulant rétablir le calme dans
la capitale , s'y rendit le 17 juillet. Bailly
en lui remettant les clefs de la ville lui
adressa ce singulier compliment : « Votre
« aïeul Henri IV avait conquis son peuple ;
» aujourd luii c'est le peuple qui a conquis
» son roi. » Louis XVI reçut à l'hôtel da
ville la cocarde nationale et fut accueilli
par des applaudissemens unanimes lors-
qu'il parut à la fenêtre avec cette cocarde
à son chapeau. Il revint le même jour à
Versailles , et crut son repos assuré pour
quelque temps ; mais les factieux qui
voulaient à tout prix des désordres , par-
vinrent bientôt encore à sovdever la po-
pulace de Paris, par des calomnies qu'ils
répandirent contre le- roi et sa famille.
Les gardes-du-corps ayant donné un re-
pas au régiment de Flandre , qui venait
d'arriver à Versailles , on répandit le
bruit que dans ce festin la cocarde trico-
lore avait été foulée aux pieds, avec l'ap-
probation du roi et de la reine qui avaient
paru un instant à cette fêle. Les agitateurs
en fai'ïant circuler dans la capitale ces
bruits injurieux , à une époque où la di-
sette s'y faisait sentir , parvinrent à
opérer des rasscmblemens , au milieu
desquels retentissaient datruccs vocifé-
rations. Le 5 octobre 1789 , des hommes
et des femmes armés de piques, et traî-
nant à leur suite des canons, se dirigèrent
sur Versailles. Dans la nuit qui suivit
celte journée le palais du roi fut envahi,
et la reine fut au moment d'être égorgée
dans son lit. Le résultat de celte auda-
cieuse expédition , fut qu'on entraîna à
Paris Louis XVI et sa famille ; le mo-
narque s'établit aux Tuileries où depuis
plus de cent ans les rois n'avaient pas
fait de résidence habituelle. Le duc d'Or-
léans fut désigné comme instigateur de
cette funeste journée ; le roi se contenta
de l'exiler en Angleterre et l'accueiliit
huit mois après à son retour par ces in-
dulgentes paroles ; mon cousin ^ que tout
soit oublié! Depuis ce moment , Louis
XVI ne compta ses jours que par des hu-
miliations et des sacrifices ; on le força
de licencier ses gardes fidèles, et d'en
accepter d'autres qui recevaient des ordres
de la municipalité. Le 14 février 1790 , il
se vit obligé d'accepter la nouvelle con-
stitution ; bientôt sa liburié personnellij
48.
LOU 570
ftît menacée. Après le départ de ses tantes,
qui donna lieu à de scandaleux débats,
on craignait aussi le sien. Un jour , au
moment où il partait pour Saint-Cloud ,
sa voiture fut entourée par la populace et
on l'oLligca de rentrer au château. C'est
alors qu'il dit avec un sentiment doulou-
reux : o je ne croyais pas être prisonnier
» au milieu de mes peuples. » Mais ce fut
en vain que le lendemain, il vint se
plaindre de cette violence à l'assemblée
nationale. « Les projets des factieux , dit
» M. de Bonald , se développaient rapide-
» ment dans cette assemblée sans frein et
» sans contrepoids , qui avait au dedans
B des tribunes pour applaudir , et au
» dehors des bras pour exécuter. Les
» parlemens , le clergé , la noblesse ,
«l'armée, les finances, les propriétés
» publiques et particulières , tout fut
» détruit ou envahi par l'assemblée na-
» tionale , et toujours au nom du roi ,
» réduit à joindre aux décrets une sanc-
2 lion , tardive quelquefois , mais toujours
« obtenue de son horreur pour le désordre
» et la violence , à force de massacres et
» d'insurrections. Le malheureux prince
» accordait tout , espérant sauver quelque
» chose , et sacrifiait l'état par compas-
n sion pour des particuliers menacés ou
» poursuivis sur tous les points de la
» France. Des lors il prit ou renvoya ses
» ministres , sous le bon plaisir de l'as-
» semblée ; et ces ministres choisis presque
» tous parmi ses ennemis , étaient forcés
» d'admirer la bonté de son cœur , la
» justesse de ses vues , l'étendue de ses
» connaissances. « De concession en con-
cession , le monarque fut amené à sanc-
tionner des décrets spoliateurs de l'église
et la constitution civile du clergé; faisant
ainsi violence aux sentimens religieux
dont il avait toujours été animé. Enfin
abreuvé de chagrins, dépouillé de son
autorité , soumis à une contrainte morale
qui le poussait incessamment à des actes
contraires à sa volonté, Louis se décida
àquilter furtivement Paris avec sa famille
dans la nuit du 20 au 21 juin 1791. Son
intention était de se rendre à Montmédy ,
où Bouille avait réuni un petit nombre
de troupes qu'il regardait comme fidèles.
Avant son départ , il avait laissé à l'as-
semblée une déclaration où se trouvaient
exposés ses justes sujets de plainte et les
motifs de son voyage. Reconnu et arrêté
à Varennes, Louis fut reconduit à Paris,
comme un prisonnier au milieu d'une
OTïTiéti de gardes nationaux et d'une foule
LOU
qui l'abreuvait d'outrages. La déchéance
du roi fut mise aux voix dans l'assemblée
nationale , et repoussce par la majorité ,
qui conservait encore un reste d'attache-
ment à la monarchie. La plupart des dé-
putés, instruits par une triste expérience,
commençaient à s'effrayer de leur ou-
vrage : n)ais à mesure que l'assemblée
ralentissait sa marche dans la voie de la
révolution, son autorité diminuait; et
bientôt honteuse et décréditée , elle so
sépara sans bruit, et fit place à l'assem-
blée Législative qui ouvrit ses séances la
l*"" octobre i791. La royauté avait été ren-
versée par la Constituante ; \a. Législative
s'acharna sur ce colosse abattu, et sembla
par son insouciance approuver lescrimes
qui se multipliaient ; les prêtres inser-
mentés furent bannis , les émigrés dé-
pouillés de leurs biens, et le monarque,
privé de tout ce qui pouvait le servir, fut
livré sans défense à la fureur de ses en-
nemis. Louis XYI ayant refusé de sanc-
tionner des décrets contre les prêtres et
les émigrés, les factieux irrités résolurent
de lui ôter le veto^ seule autorité qui lui
restât encore; et pour y parvenir, ils
préparèrent la journée du 20 juin 1792.
Vingt mille hommes armés de piques ,
avaient pénétré dans le château des Tui-
leries , cette foule furieuse rompait à
coups de hache tout ce qui s'opposait à
son passage. Déjà elle était parvenue à la
dernière porte qui la séparait de la fa-
mille royale , lorsque Louis XVI ouvrant
lui-même cette porte se présente seul et
sans armes aux fi\ctieux. « Je crois , leur
n dit-il avec une dignité tranquille, n'avoir
» rien à craindre de la part des Français. »
Tant de calme étonne les furieux , et ils
hésitent un instant ; cependant, excités
par leurs chefs , ils dépouillent bientôt
tout respect pour la majesté royale , et
ils insultent le monarque de leurs paroles
et de leurs gestes. L'un à moitié ivre lui
tend insolemment une bouteille en lui
ordonnant de boire à la santé de la nation;
l'autre tenant d'une main un pistolet et
de l'autre un sabre nu , crie à ses oreilles :
à bas le veto ! un troisième met sur sa
tête auguste un bonnet rouge. Pendant
ce temps des hommes et des femmes
criaient en brandissant leurs armes : où
est V autrichienne? nous voulons sa (été !
Un de ces brigands somme le prince de
jurer qu'il ne trahira plus les Français;
Louis répond avec calme : le peuple peut
compter sur mon amour comme sur celui
de ma famille. Dans ce moment le maire
LOU
571
LOU
Péthion se montre , et s'écrie en s'adres-
Banl au roi : « Sire , vous n'avez, rien à
» craindre ; — l'homme de bien qui a la
» conscience pure ne tremble jamais, ré-
• pond aussitôt le roi avec dignité ; il ny
» a que ceux qui ont quelque chose à se
j> reprocher qui peuvent avoir peur , » et
prenant la main d'un grenadier qu'il
place sur son cœur : « Diles à cet hounne
» s'il bat plus vite qu'à l'ordinaire. » Cette
scène effrayante dont le dénouement
pouvait être tragique, se termina sans
effusion de sang. Quand au bout de plu-
sieui's heures les appartemens furent
évacués, la reine, qui jusqu'alors avait été
dans des transes mortelles , vint se réunir
au roi avec ses enfans , et cette famille
infortunée se félicita d'avoir échappé à
la mort , qui depuis quelque temps sem-
blait toujours suspendue sur leurs têtes.
Une justice sévère pouvait seule prévenir
le retour de ces désordres; mais les in-
stigateurs de la journée du 20 juin étaient
au sein de l'assemblée , l'attentat resta
impuni et les factieux continuèrent leurs
trames. Santerre avait dit en quittant les
Tuileries : Le coup est manqué^ mais
nous y reviendrons , et cette prédiction
s'accomplit moins de deux mois après.
Depuis le 20 juin , Louis XVI ne se lit
plus illusion sur le sort qui l'attendait ,
et l'on croit même qu'il fit à cette époque
son premier testament qui est resté
ignoré. Cependant des hordes de bandits
accourues de toutes les parties de la
Fi ance et particulièrement de Marseille ;
arrivent à Paris , et se grossissent de la
fiopulace des faubourgs. Des discours in-
teadiaires circulent dans la capitale, et
(Chauffent les têtes; un grand mouvement
est préparé par les factieux pour amener
lu déchéance du roi. En (in le 10 août le
toesin sonne, un rassemblement immense
se forme sur la place du Carousel , et des
canons sont tournés contre la demeure du
loi. Louis XVI n'avait pour défendre sa
vie et celle de sa famille qu'un petit
nombre d'amis fidèles et résolus, quelques
compagnies de suisses et quelques batail-
lons de la garde nationale. Le monarque
Ut lui-même la revue de sa petite troupe,
et disposa tout pour la défense du château.
Mais par une déplorable falaUté , tandis
que des serviteurs dévoués n'attendaient
qu'un ordre de sa bouche pour dissiper
l'insurrection, Louis cédant à un conseil
1 perfide, abandonna les Tuileries pour se
rendre au sein de l'assemblée nationale
&vtc sa famille et quelques personnes de
sa suite , au milieu de mille cris affreux
qui retentissaient sur son passage. « Je
» suis venu au milieu de vous, pour évi-
» ter un grand crime, » dit Louis XVI en
entrant. « Sire , répondit lo président
B Vergniaud , vous pouvez compter sur
» la fermeté de l'assemblée nationale. »
Bientôt une décharge d'artillerie se lait
entendre , Louis tressaille et s'écrie dou-
loureusement : « ah ! j'avais donné des
«ordres pour qu'onnetirât pas. »Le fraca*
de la mousqueterie redouble et le tumulte
s'accroît. Le bruit se répand que les in-
surgés sont en fuite , et que les Suisses
secondés par leurs camarades de Ruelle
accourus à leur secours, sont vainqueurs.
Alors on force le roi de signer l'ordre
de cesser le feu. Ti'op dociles à ce com-
mandement les soldats qui défendaient le
château mettent bas les armes. Cependant
les assaillans qui avaient pris la fuite à
la première décharge , s'apercevant qu'on
leur abandonne le champ de bataille , re-
viennent sur leurs pas , et recommencent
leurs attaques contre le château qu'on ne
défendait plus. Deux bataillons de gardes-
nationales qui accouraient au secours du
roi , se réunissent aux insurgés , les
Suisses sont presque tous massacrés , et
le palais des "Tuileries devient le théâtre
d'un effroyable carnage. Le roi, en proie
à la plus horrible anxiété , demeura
vingt-quatre heures enfermé dans la loge
du logographe, d'où il entendit prononcer
sa déchéance , et l'ordre de l'enfermer
au temple avec sa famille. On le conduisit
le 15 août dans cette prison d'où il no
devait plus sortir que pour achever son
sacrifice en montant sur l'échafaud. Ce
prince qui s'était souvent montré faible
et irrésolu dans des circonstances criti-
ques , devint dès lors un modèle de rési-
gnation et de courage. La religion le
soutint au milieu des cruelles humiliations
auxquelles il fut soumis. La reine , ses
enfans , M.""^ Elizabeth partageaient sa
prison et en augmentaient l'amertume
par leurs souffrances. Jamais autant d'ou-
trages , autant de douleurs n'avaient pesé
sur l'innocence et la vertu. Les paroles,
les actions , les regards du monarque
étaient soumis à la plus mituilieuse sur-
veillance , et chaque jour on inventait de
nouveaux moyens de le tourmenter. On
alla jusqu'à ne lui pernicUre de voir sa
famille qu'aux heures des repas , et peu
avant son procès il en fut entièrement
séparé. Mais Louis surpassa par la noble
coaslance et le calme inaltérable de ôon
LOU H
Ame la férocité de ses bourreaux. Le der-
nier acte de la Lcf^islative avait été la
convocation d'une convention nationale,
destinée à juger Louis XVL Cette nou-
velle assemblée débuta dans la sanglante
rarrièie qu'elle devait parcourir par l'a-
bolition de la royauté en France , et l'é-
tablissement de la république. Cependant
les puissances étrangères comprenant un
peu tard que la cause du roi de France
était aussi la leur , avaient pris les armes
et avaient envahi le territoire français.
Les jacobins avaient répondu à ces hosti-
lités par les massacres de septembre, qui
fuient les préludes du régicide qu'ils mé-
ditaient. La Convention décréta le 25 du
même mois que le roi serait jugé par elle ,
et le 12 du mois suivant Louis XVI tiré
de sa prison fut conduit à la barre de l'as-
semblée. Une longue série d'accusations
lui ayant été présentée, il répondit atout
avec clarté et précision , sans le moindre
trouble , sans le plus léger mouvement
d'impatience ou d'indignation. Comme on
lui reprochait jusqu'à ses bienfaits, il ré-
pondit avec simplicité : « mon plus grand
■> plaisir fut de faire du bien , mais en gé-
» néral je ne me rappelle pas les dons que
» j'ai faits. » Pour donner au jugement de
Louis XVI une apparence de légalité, on
lui permit de se faire assister par un con-
seil. Le choix du roi se porta d'abord sur
Target qui refusa la glorieuse mission de
défendre son souverain. Tronchet le rem-
plaça. Malesherbes voulut partager avec
lui ce périlleux honneur, et ils s'associè-
rent Desèze, jeune avocat qui donnait les
vlus brillantes espérances. Mais les dis-
cours de Louis , l'éloquence de Desèze, et
les pleurs du vénérable Malesherbes , tout
fut inutile. L'appareil judiciaire qui fut
déjiloyé dans cette circonstance n'était
(ju'une dérision. Louis était condamné
irrévocablement par ses ennemis avant
d'avoir été entendu. La sentence fatale
fut prononcée le 17 janvier 1793. Louis
avait été déclaré par une décision pres-
qu'unanime coupable de conspiration et
d'attentat contre la sûreté de l'état. La
question de l'appel au peuple avait été
résolue négativement à une forte majorité.
Celle de la peine i)arlagea l'assemblée et 5
voix de majorité décidèrent la mort. Près
de 20 membres de la Convention se trou-
vaient abscns par différens motifs ; ainsi
la condamnation, décidée à la majorité
des votans, ne le fut pas à celle de l'assem-
blée. Dequoique manière qu'onl'envisage,
ce jugement était une infraction manifeste
72 LOU
aux lois du temps qui exigeaient les deux
tiers des suffrages pour la condamnation
d'un accusé. Les défenseurs du roi s'éle-
vèrent avec force contre cette inique sen-
tence, et en appelèrent au peuple français,
mais leur appel fut rejeté , et l'on décréta
que l'exécution aurait lieu dans les 24
heures. Celte précipitation et celte vio-
lence attestaient assezia vérité des paroles
que Desèze avait prononcées dans sa dé«
fense : « Je cherche parmi vous des juges,
» et je n'y vois que des accusateurs. •
Louis qui, dès le commencement de son
procès en avait prévu le résultat, attendit
sa fin avec le calme et la sérénité d'une
conscience pure. Nous citerons ici un
passage du journal de Malesherbes , où
se trouvent rapportées les principales
circonstances de la longue agonie qu'en
fit subir au malheureux monarque. — Dès
que j'eus la permission, dit-il, d'entrer
dans la chambre du roi , j'y courus : à
peine m' eut-il aperçu, qu'il quitta un
Tacite ouvert devant lui sur une petite
table , il me serra entre ses bras ; ses
yeux devinrent humides, et il me dit :
« Votre sacrifice est d'autant plusgéné-
» reux que vous exposez votre vie, et
» que vous ne sauvez pas la mienne. >
Je lui représentai qu'il ne pouvait j
avoir de danger pour moi, et qu'il était
trop facile de le défendre victorieuse^
ment pour qu'il y en eût pour lui. H
reprit : « J'en suis sûr, ils me feront périr;
B ils en ont le pouvoir et la volonté : n'im-
» porte; occupons -nous de mon procès
» comme si je devais le gagner, et je le
» gagnerai en effet , puisque la mémoire
» que je laisserai sera sans tache. Mais
» quand viendront les deux avocats? » —
Il avait vu Tronchet à l'assemblée Cons-
tituante ; il ne connaissait pas Desèze.
Il me fit plusieurs questions sur mon
compte et fut très satisfait des éclaircis-
semens quejeluidonnai. Chaque jour il
travaillait avec nous à l'analyse des pièces
à l'exposition des moyens, à la réfutation
des griefs , avec une présence d'esprit
et une sérénité que ses défenseurs admi-
raient ainsi que moi : ils en profitaient
pour prendre des notes et éclairer leur
ouvrage Les conseils et moi , nous
nous crûmes fondés à espérer sa dépor-:
tation; nous lui fîmes part de celte idée;
nous l'appuyâmes ; elle parut adoucir seS|
peines ; il s'en occupa pendant plusieurs'
jours ; mais la lecture des papiers publicî
la lui enleva, et il nous prouva qu'i
fallait y renoncer. Quand Desèze cul fini
fOU 873
son plaidoyer, ilnous le lut : je n'ai rien
entendu de plus pathétique que sa péro-
raison. Nous fûmes touchés jusqu'aux
larmes ; le roi lui dit : « Il faut la sup-
» primer; je ne veux pas les attendrir. »
Une fois que nous étions seuls , ce prince
me dit : « J'ai une grande peine ! Desèzc
» et Tronchet ne me doivent rien , ils me
» donnent leur temps , leur travail, peut-
» être leur vie : comment reconnaîtrai-je
» un tel service ? je n'ai plus rien , et
* quand je leur ferais un legs , on ne l'ac-
» quitterait pas. » « Sire , leur conscience
» et la postérité se chargent deleurrécom-
» pense. Vous pouvez déjà leur en accorder
» une qui les comblera. — Laquelle ? — Em-
» brassez-les ! » Le lendemain il les pressa
contre son cœur ; tous deux fondirent en
larmes. Nous approchions du jugement ;
il me dit un matin : « Ma sœur m'a in-
» diqué un bon prêtre qui n'a pas prêté
«serment, et que Son obscurité pourra
» soustraire dans la suite à la pei-sécution :
» voici son adresse ; je vous prie d'aller
» chez lui , et de lui parler , et de le prè-
» parer à venir lorsqu'on m'aura accordé
» la permission de le voir. » Il ajouta :
« Voilà une commission bien étrange pour
» un philosophe l car je sais que vous
» l'êtes ; mais si vous souffriez autant que
I) moi, et que vous dussiez mourir comme
» je vais le faire , je vous souhaiterais les
» mêmes sentimens de religion qui vous
» consoleraient bien plus que la philoso-
» phie. » — Après la séance où ses défen-
"*- seurs et lui avaient été entendus à la barre,
il me dit : « Vous êtes certainement bien
» convaincu actuellement que , dès le
• premier instant, je ne m'étais pas
» trompé , et que ma condamnation avait
D été prononcée avant que j'eusse été en-
» tendu. » Lorsque je revins de l'assem-
blée où nous avions , tous les trois , de-
mandé l'appel au peuple , je lui rapportai
qu'en sortant, j'avais été entouré d'un
grand nombre de personnes , qui toutes
m'avaient assuré qu'il ne périrait pas ou
au moins que ce ne serait qu'après eux
et leurs amis. Il changea de couleur et
me dit : « Les connaissez- vous? retournez
» à l'assemblée ; tâchez de les rejoindre ,
u d'en découvrir quelques-uns; déclarez,
o leur que j« ne leur pardonnerais jamais
» s'il y avait une seule goutte de sang
» versée pour moi : je n'ai pas voulu qu'il
» en fût répandu, quand peut-être il aurait
3 pu me conserver le trône et la vie; je
» ne m'en repens pas. » — Ce fut moi qui le
premier annonçai au roi le décret de
LOU
mort : il était dans l'obscurité , le dos
tourné à une lampe placée sur la chemi-
née , les coudes appuyés sur la table , le
visage couvert de ses mains. Le bruit que
je fis le tira de sa méditation ; il me fixa,
se leva et me dit : « Depuis deux heures
»je suis occupé à rechercher si dans le
» cours de mon règne j'ai pu mériter
» de mes sujets le plus léger reproche :
» eh ! bien , monsieur de Malesherbes , je
» vous le jure dans toute la vérité de mon
» cœur , comme un homme qui va pa-
» raître devant Dieu; j'ai constamment
» voulu le bonheur du peuple, et jamais
DJe n'ai formé un vœu qui lui fût con-
>^ traire. » — Je revis encore une fois cet
infortuné monarque ; deux officiers mu-
nicipaux étaient debout à ses côtés : il
était debout aussi et lisait. L'un des offi-
ciers municipaux me dit : « causez avec
lui, nous n'écoulerons pas. » Alors, j'as-
surai le roi que le prêtre qu'il avait désiré
allait venir. Il m'embrassa et me dit : « La
«mort ne m'effraye pas, et j'ai la plus
» grande confiance dans la miséricorde
I) de Dieu. » — L'abbé de Firmont qui
assista le monarque dans ses derniers in-
stans a fait une relation aussi simple quo
touchante des circonstances qui précédè-
rent immédiatement la mort de Louis
XVI. Nous laissons parler ici ce digne
ecclésiastique. « Louis , dit-il , avait vu
» la veille sa femme et ses enfans , et lui-
» même leur avait annoncé sa condamna-
» tion. Cette séparation avait été si dou-
» loureuse pour tous , surtout pour la
» reine, qu'il ne put se décider à la revoir
» le lendemain , malgré la promesse quïl
» lui en avait faite. En traversant la cour
» de la prison à neuf heures pour aller au
» supplice , il se tourna deux fois vers la
» tour où était sa famille , comme pour
» dire un dernier adieu à ce qu'il avait de
» plus cher. A l'entrée de la seconde cour
» se trouvait une voiture de pkice ; deux
» gendarmes tenaient la portière. Al'ap-
» proche du roi , l'un y entra et »e plaç.,
» sur le devant. Le roi monta ensuite , et
» mit à côté de lui son confesseur dans
» le fond; l'autre gendarme entra le dernier
» et ferma la portière » Le roi, ajoute l'abl; >
de Firmont , se trouvant resserré dans
une voiture où il ne pouvait me parler
ni m'entendre sans témoins , prit le parti
du silence. Je lui présentai aussitôt mon
bréviaire, le seul livre qwe j'susse sur moi,
et il parut l'accepter avec plaisir. Il témoi-
gna mèmelc désir que je lui indiquasse leg
psaumes qui convenaient k mieux à sa si-
LOU
574
LOU
tuation , et il les récitait allernativement
avec moi. Les gendarmes sans ouvrir la
bouche paraissaient extasiés et confondus
tout ensemble , de la piété tranquille d'un
monarque qu'ils n'avaient jamais vu sans
doute d'aussi près. La marche dura près
de deux heures. Toutes les rues étaient
bordées de plusieurs rangs de citoyens ,
armés tantôt de piques , tantôt de fusils.
En outre la voilure elle-même était en-
tourée d'un corps de troupes imposant ,
et formé sans doute de ce qu'il y avait
de plus corrompu dans Paris. Pour comble
de précautions , on avait placé en avant
des chevaux, une multitude de tambours,
afin d' étouffer par ce bruit les cris qui
auraient pu se faire entendre en faveur
du roi. Mais comment en aurait-on en-
tendu? Personne ne paraissait ni aux
portes ni aux fenêtres ; et ou ne voyait
dans les rues que des citoyens armés,
c'est-à - dire des citoyens qui , tout au
moins par faiblesse , concouraient à un
crime qu'ils détestaient peut-être dans le
cœur. La voiture parvint ainsi dans le
plus profond silence à la place Louis XV ,
et s'arrêta au milieu d'un grand espace
vide qu'on avait laissé autour de l'écha-
faud. Cet espace était bordé de canons;
et au-delà , tant que la vue pouvait s'é-
tendre, on apercevait une multitude en
armes. Dès que le roi sentit que la voi-
ture n'allait plus, il se retourna vers moi
et me dit à l'oreille : « nous voilà arrivés,
» si je ne me trompe. » Mon silence lui
répondit qu'oui. Un des bourreaux vint
aussitôt ouvrir la porlière, et les gen-
darmes voulurent descendre ; mais le
roi les arrêta et appuyant sa main sur
mon genou. « Messieurs, leur dit-il d'un
» ton de maître , je vous recommande
» monsieur que voilà ; ayez soin qu'après
» ma mort , il ne lui soit fait aucune in-
» suite. Je vous charge d'y veiller. » Ces
deux hommes ne répondant rien, le roi
voulut reprendre d'un ton plus haut ;
mais l'un d'eux lui coupa la parole : « oui,
» oui , lui répondit-il , nous en aurons
»soin; laissez - nous faire. » Et je dois
ajouter que ces mots furent dits d'un ton
de voix qui aurait dû me glacer , si dans
un moment tel que celui-là , il m'eût été
possible de me replier sur moi-même. Dès
que le roi fut descendu de voiture , trois
bourreaux l'entourèrent et voulurent lui
ôter ses habits. Mais il les repoussa avec
lierté et se déshabilla lui-même, il délit
également son col , ouvrit sa chemise , et
6'arrangca, de ses proj)res mains. Les
bourreaux que la contenance fière du roi
avait déconcertés un moment, semblèrent
alors reprendre de l'audace. Ils l'entou-
rèrent de nouveau et voului enl lui pren-
dre les mains. « Que prétendez-vous ,
» leur dit ce prince, en retirant ses mains
«avec vivacité?» — «Vous lier, répon-
i> dit un des bourreaux. » — « Me lier! r&-
I) partit le roi d'un air d'indignation : je
» n'y consentirai jamais ; faites ce qui
» vous est commandé ; mais vous ne me
» lierez pas : renoncez à ce projet, i» Les
bourreaux insistèrent , ils élevèrent la
voix , et semblaient déjà appeler du se-
cours pour le faire de vive force. C'est
ici peut-être le moment le plus affreux
de cette désolante matinée : une minute
de plus, et le meilleur des rois recevait ,
sous les yeux de ses sujets rebelles , un ou-
trage mille fois plus insupportable que la
mort, par la violence qu'on semblait vou-
loir y mettre. Il parut le craindre lui-même
et se retournant vers moi , il me regarda
fixement comme pour me demander con-
seil. Hélas ! il m'était impossible de lui en
donner un , et je ne lui répondis d'abord
que par mon silence. Mais il continuait
de me regarder : « Sire , lui dis-je avec
» larmes , dans ce nouvel outrage , je ne
» vois qu'un dernier trait de ressemblance
» entre votre majesté et le Dieu qui va
» être sa récompense. » A ces mots il leva
les yeux au ciel avec une expression de
douleur que jo ne saurais jamais rendre.
« Assurément , me dit-il , il ne me faudra
» rien moins que son exemple pour que
» je me soumette à un pareil affront : »
et se tournant vers les bourreaux : « faites
» ce que vous voudrez , leur dit-il , je
» boirai le calice jusqu'à la lie. » Les
marches qui conduisaient à l'échafaud
étaient extrêmement roides à monter :
le roi fut obligé de s'appuyer sur mon
bras , et à la peine qu'il semblait prendre,
je craignis un moment que son courage
ne commençât à fléchir. Mais quel fut
mon élonnement , lorsque , parvenu à la
dernière marche , je le vis s'échapper
pour ainsi dire , de mes mains, traverser
d'un pied ferme toute la largeur de l'é-
chafaud , imposer silence par son seul
regard à quinze ou vinyt tambours qui
étaient placés vis-à-vis de lui , el d'une
voix si forte qu'elle dut être entendue du
Pont-Tournant, prononcer distinctement
cts paroles à jamais mémorables : « Jo
» meurs innocent de tous les crimes qu'on
» m'irnpule; je pardonne aux auteurs de
» ma mort, et je prie IMeu que ce sang
LOU
» que vous allez répandre ne retombe
X jamais sur la France. » Il allait conti-
nuer , mais un homme à cheval et en
uniforme national, fondant tout-à-coup
l'épée à la main, et avec des cris féroces,
Bur les tambours, les obligea de rouler.
[Voyez SANTERRE). Plusieurs voix se
Ërent entendre en même temps pour en-
courager les bourreaux ; ils parurent s'a-
nimer eux-mêmes , et saisissant avec
effort le plus vertueux des rois, ils le
Jraîncrent sous la hache qui d'un seul
coup fit tomber sa tête. Tout cela fut l'ou-
vrage de peu d'inslans. Le plus jeune des
bourreaux ( il ne semblait pas avoir plus
de 18 ans) saisit aussitôt la tête et la mon-
tra au peuple en faisant le tour de l'écha-
faud : il accompagnait cette cérémonie
monstrueuse, des cris les plus atroces
et des gestes les plus indécens. Le plus
morne silence régna d'abord : bientôt
quelques cris de Vive la république se
firent entendre. Peu à peu les voix se
multiplièrent ; et dans moins de dix mi-
nutes , ce cri devint celui de la multitude,
et tous les chapeaux furent en l'air. » —
Ainsi périt Louis XVI, le 21 janvier 1793 , à
l'âge de 58 ans et k mois , laissant un
grand exemple à la postérité , une leçon
terrible aux souverains et à ses bourreaux
d'éternels remords. Son corps fut enterré
dans l'ancien cimetière de la Madeleine ,
et couvert de chaux vive par ordre de la
Convention , afin qu'il n'en restât aucune
trace. Cependant des recherches qui furent
faites en 1814 , firent découvrir une partie
de ses ossemens , et ces restes précieux
furent transportes à Saint-Denis au mois
de janvier 1815 , avec ceux de Marie-An-
toinette. M. de Boulogne , évêque de
Troyes , prononça l'oraison funèbre du
roi martyr. Le testament de cet infortuné
prince , connu de tout le monde , demeu-
rera comme un monument éternel de la
bonté de son âme , de sa piété , de sa clé-
mence. Ses ennemis ont vainement cher-
ché à ternir sa mémoire. « Louis XVI ,
» dit Malesherbes, était aussi religieux que
• Louis IX, aussi juste que Louis XII ,
» aussi bon que Henri IV, et n'avait aucun
» de leurs défauts. Ses plus grands torts ,
» ses seuls torts sont de nous avoir trop
» aimés.... ; de s'être considéré comme
» notre père , et pas assez comme notre
» roi ; d'avoir attaché son bonheur à nous
» rendre plus heureux que nous n'étions
» susceptibles de l'être. » Simple dans ses
goûts , il aimait le travail et les plaisirs
sans faste ; ses mœurs irréprochables
7 S LOU
commandaient l'eslime , et ses vertus
privées inspiraient le respect. A toutes les
qualités du cœur ce prince joignait des
talens variés , et des connaissances rares,
même chez les savans de profession.
Il parlait facilement le latin , ritali<in et
l'anglais, et il était très versé dans l'his-
toire , la géographie et l'hydrographie.
Ce fut lui qui rédigea les instructions d'a-
près lesquelles l'infortuné La Peyrouse
devait diriger son voyage et ses travaux.
Ces notes ont été insérées dans la relation
du voyage de cet illustre navigateur. On
a encore de Louis XVI : Description de
la forêt de Compiègne ^ Paris, Lottin,
1766 , in-8° de 64 pages , tiré à 36 exem-
plaires. I Les maximes morales et poli-
tiques tirées du Télémaque, sur la science
des rois et le bonheur des peuples ^ im-
primées en 1766 , par Louis-Juguste ,
dauphin , pour la cour seulement ; réim-
primées en 1814 , Paris , Didot , in-18 de
2 feuilles . On peut consulter sur la vie
de ce prince les ouvrages suivans: | Louis
XVI détrôné avant d'être roi^ et Louis
XVI et sa vertu aux prises avec la per-
versité de son siècle , par l'abbé Proyarl ;
I Histoire impartiale du procès de Louis
XVI, par Jauffret, 1795, 9 vol. in-8" ;
I Dernières années du règne et de la vie
de Louis XVI, par M. Hue, 2*^ édition ,
Paris, 1816, in-8° ; | Mémoires particuliers
pour servir à l'histoire de la fin du règne
de Louis XVI, par Bertrand de Molle-
ville ; I Histoire complète de la captivité
de Louis XVI et de la famille royale ,
1817 , in-8°. On y trouve le Journal de
Cléry. Ce Journal a paru en 1800 , in-12 ,
sous le litre de Mémoires de Cléry. Celte
édition est apocryphe ; Cléry la désavoua
hautement dans le Spectateur du Nord.
I Mémoires particuliers , formant avec
l'ouvrage de M. Hue et le Journal de
Cléry l'histoire complète de la captivité
de la famille royale à la tour du Temple ,
1817 , in-8°. Cet ouvrage est attribué à
la fille de Louis XVI.
* LOUIS XVII, fils de Louis XVI et de
Marie-Antoinette d'Autriche, né à Ver-
sailles le 27 mars 1785 , reçut à sa nais-
sance le titre de duc de Normandie, et
plus tard (4 juin 1789) celui de dauphin
que portait son frère aîné, Louis J. F.
Xavier. La première éducation de ce
jeune prince fut confiée aux soins de ma-
dame de Tourzel, qui remplaça la du-
chesse de Polignac comme gouvernante
des enfans de France. Les inclinations
les plus heureuses et l'esprit le plus pé-
LOU
B7C
LOtJ
nétrant s'unissaient en lui à une physio-
nomie charmante. Né au commencement
de nos troubles, il connut le malheur
avant de comprendre l'élévation du rang
dans lequel la providence l'avait placé. Il
n'avait que k ans lorsque , dans la terrible
journée du 5 octobre , sa mère le pré-
senta aux furieux qui s'étaient rendus de
Paris à Versailles avec les plus sinistres
projets. Il entrait dans sa septième année
lorsqu'il fit avec sa malheureuse famille
le voyage de Varennes. Au 20 juin 1792,
sa jeune imagination avait été vivement
frappée des excès de la populace , et le
lendemain, dès qu'il entendit battre le
tambour, il se réfugia tout tremblant
entre les bras de la reine, en lui disant
avec une ingénuité touchante : «maman,
» est-ce qu'hier n'est pas fini?.. » Lorsque
Louis XVI fut enfermé au temple avec sa
famille . le royal enfant partagea sa capti-
vité , et devint sa seule consolation par sa
lendresse, son application et ses réparties
ingénieuses. Louis XVI lui enseignait
l'histoire et la géographie, et trouvait dans
les soins qu'il donnait à son éducation
une distraction qui n'était pas sans quel-
que douceur, et dont la privation l'af-
fecta profondément. Lorsque le crime du
21 janvier fut consommé , il y avait deux
mois que le royal enfant était séparé de
son père. Ayant appris la condamnation
du roi , il franchit précipitamment les
premières portes de la tour ; et comme
on lui demandait où il courait : a Je vais ,
» dit-il, parler au peuple, me mettre à
» genoux , et le prier de ne pas faire mou-
» rir papa. » Devenu roi par la mort de
Louis XVI , le jeune prince ne s'aperçut
du titre auguste qui venait de lui échoir
que par un redoublement de surveillance
et de barbarie de la part de ses impi-
toyables geôliers ; et pendant que Mon-
sieur , depuis Louis XVIII , qui était alors
en Westphalie, dans la ville de Hamm,
déclarait son neveu roi de France , sous
le nom de Louis XVII , la faction régicide
imaginait cette suite d'horribles traite-
mens qui devait conduire à une mort
prématurée cette innocente victime des
fureurs révolutionnaires. Sur un rapport
de Saint-Just à la Convention , le jeune
prince fut séparé de sa mère qu'il ne de-
vait plus revoir , et remis entre les mains
du cordonnier Simon , officier de la com-
mune, le 3 juillet 1793. Ce misérable, livré
aux habitudes les plus crapuleuses , et sa
femme aussi féroce et aussi corrompue que
M , reçurent l'infâme mission d'altérer ,
par tous les moyens possibles , les forces
physiques et morales du royal enfant. Ce
couple exécrable employa pour remplit
les vues de la Convention , tout ce que
leur imagination put leur suggérer
de plus propre à altérer les organes,
et à flétrir le cœur de leur victime. On
mettait sans cesse à la bouche du jeune
prince des chants impies et révolution-
naires qu'il était obligé de répéter pour
éviter les traitemens les plus barbares.
Le vin, les liqueurs fortes, les propos
les plus obscènes , rien n'était oublié pour
achever de détruire en lui le fruit de sa
première éducation, et changer en ha-
bitudes grossières les dispositions si heu-
reuses qu'il avait montrées jusqu'alors. Le
malheureux enfant résista souvent à ces
horribles leçons avec un caractère qui
étonnait ses bourreaux, mais qui ne fit
qu'ajouter à leur cruauté. Enfin, au mois
de janvier 1794, Simon retourna siéger
dans le conseil de la commune ; mais il
fut remplacé par deux gardiens plus
atroces encore que lui. Louis XVII fut
renfermé dans un cachot plus obscur et
plus infect , gardé par deux monstres à
figure humaine. Il ne lui fut plus permis
de changer de linge ni de respirer un air
frais. Toute communication était interdite
au prisonnier , et il ne voyait pas même
la main avare qui lui faisait passer une
grossière nourriture. A la fin du jour,
une voix effroyable lui ordonnait de se
coucher; mais à peine était-il endormi
que ses bourreaux se faisaient un jeu bar-
bare de l'éveiller en sursaut en lui criant :
« Capet, où es-tu? dors-tu? » l'enfant ef-
frayé courait en chemise se présenter de-
vant ces monstres qui recommençaient
peu d'heures après, lorsqu'il s'était de
nouveau abandonné au sommeil. Les
événemens du 9 thermidor qui semblè-
rent ramener en France la modératioc
ne furent pas favorables au jeune prince.
Le parti qui triompha alors, voulait,
comme celui qu'il venait d'abattre , l'a-
néantissement de la famille royale , et les
traitemens que les nouveaux comités
firent subir au jeune roi , ne furent ni
moins cruels, ni moins homicides. Quel-
ques voix s'élevèrent à celte époque pour
demander qu'on envoyât hors de la
France ce nouveau Joas; mais Camba-
cérès , dans un rapport qu'il fit le 22 jan-
vier 1795 , établit la nécessité de retenir
captifs ce prince et sa sœur. Cependant
la santé du jeune roi dépérissait de jour
en jour. Un médecin, M. Desault, ayant
LOU
877
LOU
été envoyé au jeune prince, déclara
qu'il était trop tard. Ce même Desault
mourut peu de jours après, ce qui donna
lieu à beaucoup de conjectures. Louis
XVII expira dans sa prison, le 8 juin
1795, à l'âge de dix ans et deux mois. On a
cru long-temps que le terme de ses jours
avait été hâté par le poison , mais rien
ne justifie cette opinion. Pour le faire
mourir , ses bourreaux avaient employé
des moyens qui n'étaient ni moins sûrs,
ni moins criminels. La dépouille mor-
telle de Louis XVII fut déposée dans la
fosse commune de la paroisse Sainte-Mar-
guerite, où il a été impossible de retrou-
ver ses restes, lorsque le roi les a fait
rechercher en 181S. La chambre des pairs,
sur la proposition de M. de Chateau-
briand , décida qu'un monument expia-
toire serait consacré à cet enfant-roi. La
chambre des députés s'associa à ce vote ,
et j)]us tard une ordonnance royale an-
nonça que le monument serait placé avec
ceux de Louis XVI , de Marie-Anloinctte
et de madame Elizabeth, dans l'église de
la Madeleine. On peut consulter sur la
vie de ce prince : Mémoires historiques
sur Louis XVII :. suivis de fragmens
historiques recueillis au Temple, par
M. de Turgy, et publiés par M. Eckard.
Deux aventuriers se sont présentés de-
puis sous le nom de Louis XVII , lun en
1802, le second en 1818. Tous dvuix ont
été condamnés par les tribunaux.
• LOUIS XVIII , roi de France , qua-
trième fils du daupliin, fils de Louis XV,
naquit à Versailles le 17 novembre 17o3 ,
et reçut avec les prénoms de Louis-%SrA-
NiSL.\SrXAvrER le titre de comte de Pro-
vence. Ce prince n'avait que dix ans lors-
qu'il perdit son père qui avait voulu
présider lui-même à son éducation comme
à celle de ses autres enfans. Ou lui donna
ainsi qu'à ses frères pour gouverneur le
duc de la Vauguyon, et pour precepltjur
M. de Coëllosquet, évéque de Limoges. Le
jeune comte de Provence, montra de
bonne heure un goût décidé pour les
vsciences et les lettres, et se distingua
l>ientôt par l'étendue et la variété de ses
connaissances autant que par la rectitude
de son jugement. Des succès littéraires
qu'il obtint sous le voile de l'anonyme,
attestèrent tout le. fruit qu'il avait retiré
de ses études. Bientôt II devint le pro-
tecteur des écrivains , des savans et des
artistes ; et sa maison fut le rendez-vous
d'une foule d'hommes distingués dans
tous les genres. Le 14 mai 1771 , il
7.
épousa Joséphine de Savoie, fille de
Victor-Emmanuel III , roi de Sardaigne ,
et le 10 mai 1774, son frère aîné le duc
de Berri étant devenu roi sous le nom de
Louis XVI , il prit , suivant l'usage , le
titre de Monsieur, Lorsque Maurepas
voulut faire rappeler les parlemens exilés
par Louis XV , le comte de Provence s'op-
posa de toutes ses forces à cette mesure.
Il présenta même à ce sujet un mémoire
énergiq~ue dont nous citerons le passage
suivant : « Que reslera-t-il d'autorité au
B roi , si les magistrats liés par une asso-
» dation générale , forment de nouveau
» un corps qui puisse opposer une résis-
» tance combinée...? on me dira que \v%
» magistrats en exil ne rentreront que
«sous les conditions les plus gênantes;
» mais quelle caution offriront-ils au roi
» de leur fidélité à les remplir? ils ren-
» treront doux comme des agneaux ; ar-
» rivés en place ils seront des lions. Ils
» prétexteront les intérêts de l'état , du
» peuple , et du seigneur roi ; en déso-
» béissant, ils déclareront ne pas désobéir ;
» la populace viendra à leur secours , et
» l'autorité royale succombera un jour ,
!> accablée du poids de leur résistance. »
Ces paroles prophétiques frappèrent Louis
XVI ; mais le comte de Maurepas lui ayant
représenté que la nation entière désirait
le rappel des parlemens, ce monarque
qui voulait avant tout se faire aimer du
peuple , céda aux instances de son mi-
nistre. En 1776 , le roi donna le palais du
Luxembourg à Monsieur pour en faire sa
résidence habituelle. L'année suivante ,
le comte de Provence parcourut les pi;o-
vinces du midi et fit admirer partout les
grâces de son esprit et la justesse de ses
observations. A Toulouse, il accueillit
avec une bienveillance particulière l'a-
cadémie des jeux-floraux, assista à une
de ses séances , et se fit inscrire sur la
liste des main teneurs du gai savoir. De
retour à Versailles , il se livra plus assi-
dûment que jamais à l'étude , et vécut
dans la retraite au milieu de la cour la
plus brillante de l'Europe. Mais les évé-*
nemens politiques vinrent bientôt arra-
cher ce prince à ses occupations littéraires,
pour l'associer aux premiers débats de la
révolution. Lors de la convocation des
Notables en 1787, Monsieur présida le
premier bureau qui fut appelé le comité
des sages ^ et il ne manqua pas un seul
jour de se rendre à son poste. Ses opi-
nions étaient sages et modérées. Tout ea
avouant le bcsoiu de certaines réformes ,
40
LOU S
Il redoutait les innovations Imprudentes.
Un membre du comilé qu'il présidait
ayant cité dans une séance ce vers de la
tragédie de S^r«y7bn/, par le comte de
Lally-To'.lendal :
.a couronoe a ses
droits, tnaU le peuple a le
Monsieur répliqua sur-le-champ jmr cet
autre vers de la môme pièce :
Renvericr ud étal n'est pas le reformer.
Cependant l'assemblée s'étant séparée sans
avoir pu trouver le remède qu'exigeaient
les maux de l'état, le ministère eut recours
à des voies énergiques pour arrêter la pro-
gression effrayante du déficit des finances.
Le 6 août 1787 , le roi tint à Versailles un
lit de justice , dans lequel il fit enregistrer
les édits du timbre et de l'impôt territo-
rial. Monsieur ayant été chargé de les
présenter à la cour des comptes , les ac-
clamations du pcujUe l'y accompagnèrent,
et sa voiture eut peine à se faire jour à
travers la foule qui était accourue pour
jeter des fleurs sur son passage. L'oppo-
sition du prince aux édits était la cause
de cette popularité qui devait bientôt s'é-
vanouir. Des biographes assurent que ce
fut d'après les conseils de Monsieur, que
Louis XVI convoqua une seconde fois les
notables ; et le vœu pour la double repré-
sentation du tiers-état partit du bureau
que présidait ce prince. Il parut aussi se
rapprocher des parlemens qu'il avait si
maltraités dans son mémoire ; et cédant
à l'eut ralnement de l'opinion publique,
il applaudit en 1788 au rappel de Necker
dont il avait autrefois sévèrement blâmé
les innovations. Le comte d'Artois, les
princes de la maison de Condé, et le
prince de Conti ayant adressé au roi , des
observations sur les périls où la licence
des opinions entraînait la monarchie , le
comte de Provence s'abstint de signer ce
mémoire. La prise de la Bastille fit sur
lui une impression profonde , et il s'unit
au duc de Larochefoucaud - Liancourt
pour décider Louis XVI à se rendre à
Paris , alin d'y appaiser les troubles par
sa présence. Cependant , malgré les con-
fessions qu'il parut faire au parti popu-
laire, ce prince se vit en butte à de graves
accusations vers la fia de décembre 1789.
Le marquis de Favras, qui avait fait partie
de sa maison , ayant été arrêté pour avoir
tramé un complot don* le but était, disait-
on , d'assassiner Baiily et Lalayelte ,
Monsieur fut accusé d'avoir trempé dans
cette conspiration , et se vil signalé publi-
quen^.cnl par les aijitatears à la vengeance
78 LOU
du peuple. Aussitôt qu'il eut connaissance
de ces inculpations , le prince se rendit
à l'hôlel-de.-ville , et se justifia avec une
noble chaleur devant les représenians da
la commune : son discours fut accueilli
par des applaudissemens universels. « Le
» devoir que je viens de remplir, dit le
» prince en terminant, a été pénible pour
» un cœur vertueux ; mais j'en suis bien
» dédommagé par les sentimens que l'as-
» semblée vient de me témoigner; et ma
» bouche ne doit plus s'ouvrir que pour
» demander la grâce de ceux qui monl
» offensé. » Ces paroles émurent rassem-
blée, et l'auguste orateur fut reconduit à
son palais, au milieu des acclamalions
d'un peuple immense. Le succès de celle
démarche ne mit pas pour long-temps le
prince à l'abri des accusations de seà en-
nemis. Lorsque mesdames Adélaïde et
Victoire quittèrent Paris , le bruit se ré-
pandit que Monsieur devait les suivre de
près. Une députation tumultueuse comi»)-
sée particulièrement de femmes se rendit
au Luxembourg, pourle détourner de quit-
ter la France. Le prince répondit qu'il
ne se séparerait jamais du roi. — ï Mais ,
» reprit une d'elles , si le roi nous quit lait,
» vous nous resteriez, n'est-ce pas? » La
question était embarrassante. Le prince
se rappelant un mot du cardinal de Ret?:,
la regarda fixement , et lui répondit en
souriant : « pour une femme d'esprit ,
» vous me faites là une question bien
» bête. » Ce mot provoqua des éclats de
rire et la foule évacua les-appartemens.
Lorsque 1q roi et la reine, pour échapper
aux outrages dont ils étaient abreuvés,
se décidèrent à quitter Paris dans la nuit
du 20 juin 1791 , Monsieur accompagné du
comte d'Avaray , partit une heure après
le roi par une autre route , et arriva heu-
reusement à Mous sous le nom de comte
de Lille. Le comte de Provence se rendit
à Bruxelles où le comte d'Artois vint se
réunir à lui , et de là à Coblentz qui était
devenu le quartier général de l'émigra-
tion, cl où les deux princes trouvèrent
dans l'électeur de Trêves leur oncle tous
les soins qui peuvent adoucir l'infortune.
Ce voyage a donné lieu à une brochure
écrite par Monsieur lui-même , et intitu-
lée : Relation d'un voyage à Bruxelles
et à Coblentz , imprimée à Londres en '
1791 , et à Paris en 1823. Le comte de Pro-
vence ne resta pas inaclif après avoir
franchi la frontière. Il réclama d'abord
l'intervcntio:! des puissances eut opécniies
eu faveur de son frère, provoqua la dé-
LOU 5
elaralion de Pilnitz, et adressa ensuite
un long manifeste à Louis XVI pour l'in-
viter à résister au torrent révolutionnaire ,
et à ne pas donner son adhésion à l'acte
constitutionnel, La publicité donnée à ce
manifeste ne lit qu'empirer le sort de
Louis XVL L'assemblée Législative somma
Monsieur de rentrer dans le délai de deux
mois, sous peine d'être censé avoir abdi-
qué son droit éventuel à la régence. Le
prince résista et fui déclaré déchu de ses
droits. Le 8 août 1792, les frères du roi
signèrent avec les autres princes émigrés
un manifeste où se trouvaient exposés les
motifs de la coalition qui s'était formée
contre la révolution française. Monsieur
adressa ensuite en son nom à la noblesse
cmigrée qu'il commandait une proclama-
tion dans laquelle il déclarait « que son
» intention, en entrant en France était de
» pardonner aux erreurs commises. »
L'armée royale pénétra en France le 29
aoùl; mais la retraite des Prussiens l'o-
bligea bientôt de rétrograder. Monsieur
se retira d'abord au château de la Neu-
ville, où il se vit réduit à la nécessité de
licencier l'émigration militaire, placée jus-
que là sous ses ordres. Il passa de là au
château de Hamm en Westphalie ; et c'est
dans cette résidence qu'il apprit, vers la
fin de janvier 1795 , la mort tragique de
Louis XVI. Le comte de Provence s'em-
pressa dans une déclaration publique de
reconnaître son neveu roi de France sous
le nom de Louis XVII. Il prit lui-même
le titre de régent, et nomma son frère le
comte d'Artois , lieutenant -général du
royaume. Quelque temps après, les deux
princes se séparèrent; Monsieurse rendit
à Turin; puis à Vérone, d'où il entretint
des relations avec la France, et particu-
lièrement avec Charette qui chercliait à
relever la cause royale dans la Vendée.
Un nouveau malheur pour la famille
royale , porta Monsieur en 1793 de la ré-
gence aii rang suprême. Le jeune fils de
Louis XVI expira le 8 juin dans la tour
du Temple , et son oncle prenant aussitôt
le titre de roi sous le nom de Louis XVIII ,
lit notifier son avènement à toutes les
cours. Cependant les succès des armées
françaises en Italie , alarmèrent le gou-
vernement Vénitien , qui donna ordre au
marquis Carletli, noble véronais, d'inviter
le roi à quitter les étals de la république.
Louis XVIII répondit avec dignité : « Je
» me dispose à partir ; mais auparavant ,
» il faut qu'on raye da livre d'or le nom
» de ma famille , et qu'on me rende Tar-
79 î.otr
» mure dont mon a'icnl Henri ÏV avait
» fait présent à la république de Venise. •
Le sénat ayant insisté avec une dureté
insultante , le roi sortit de Vérone le 11
avril, et traversa le Sainl-Golhard, pour
aller rejoindre à Rastadt le corps du prince
de Condé. Mais sa présence au milieu des
troupes autrichiennes dans lesquelles les
émigrés se trouvaient en quelque sorte
incorporés, donna de l'ombrage à la cour
de Vienne qui lui fit signifier de s'éloi-
gner de l'armée. Le prince après avoir
fait à ce sujet de nobles et énergiques ré-
clamations, instruit qu'on se disposait à
employer la contrainte, prit le parti de
quitter le corps de Condé. En passant à
Dillingen en Souabe, il fut blessé au front
d'im coup d'arme à feu , parti d'une main
inconnue.... Le comte d'Avaray , voyant
le sang couler , s'écrie en accourant près-
du prince : ah ! sire , une ligne plus bas !
— J:Jh!hien! répondit tranquillement le
roi, une ligne plus bas^ le roi de France
s'appelait Charles X ! La cause de I^ouis
XVIII paraissait désespérée; et ce mo-
narque exilé ne savait plus où trouver xxn
asile... L'égoïsme de la politique était plus
puissant dans le cœur des rois que la
compassion pour une noble infortune.
Enfin un prince moins timide ou plus
généreux que les autres , le duc de Brun-
swick lui permit de résider dans la petite
ville de Blankcmbourg , dans le cercle de
la Basse-Saxe. Cléry, valet de chambre
de Louis XVI, et l'abbé Edgeworth vin-
rent l'y trouver. Le prince dit à ce der-
nier : « Je ne vous commande pasde rester
» avec moi; mais si vous n'avez aucun
» aiitre engagement et que vous puissiez
» disposer de vous-même , je vous in vile
» à demeurer ici. Je remercie sincèrement
i> la providence d'avoir daigné conserver
T) en vous un deses plus dignes ministres.
» et le confident des dernières pensées
» d'un frère dont je pleurerai sans cesse
r> la perte et dont tous les bons Français
» béniront à jamais la mémoire ; d'un
» martyr dont vous avez le premier proT
n clamé le triomphe.... Dieu veut sans
» doute qu'un témoin irréprochable at-
» teste à tous les Français l'amour dont
«leur roi fut animé pour eux, afin que
n connaissant toute l'étendue de leur
» perte , ils ne se bornent pas à de stériles
« regrets , mais qu'ils cherchent en se
» jetant dans les bras d'un père qui les
•>•> leur tend , le seul adoucissement que
i> leur juste douleur puisse recevoir. « La
roi eut la douleur de perdre à Blankeni-
LOU
580
LOU
bourg le Ijaron de riashlaiiden son idï-
nislre et son ami , qu'il l'cmplaça par le
comte de La Chapelle. Les intelligences
qu'il entretenait en France avec Barras
Camille-Jordan, et plusieurs autres per-
sonnages influens, lui faisaient espérer
un prochain retour dans sa patrie. Mais
dans le moment même où il croyait tou-
cher au terme de ses vœux , la provi-
dence mit à une nouvelle épreuve son
courage et sa résignation. Des correspon-
dances saisies compromirent plusieurs
de ses agens. Lavilleheurnois , Brothier,
Duverne-Dupresle, furent condamnés à
mort. Barras qui avait d'abord servi la
cause des Bourbons , pour repousser les
soupçons de trahison qui planaient sur sa
tète , et donner un nouveau gage à la
révolution , hâta le coup d'état de fructi-
dor qui expulsa du corps législatif la plu-
part des membres attaciiés au parti loya-
ïiste. Louis XVIII se vit bientôt obligé de
quitter Blankembourg et de s'éloigner de
j)lus en plus des frontières de France.
Paul 1" lui ayant offert , pour asile l'an-
cien château des ducs de Courlande ,
avec une pension considérable, il accepta
celle proposition et se rendit à Miltau ,
où il arriva le 25 mars 1798 , accompagné
du comte de Schouvaloff , aide-de-camp
de l'empereur de Russie. Marie- Joséphine-
Louise de Savoie , qui depuis 8 ans était
séparée de son époux , vint le rejoindre
dans cette résidence où il se forma bientôt
une petite cour composée de seigneurs ,
dont l'infortune n'avait pu attiédir le dé-
vouement. Là se firent remarquer le car-
dinal de Montmorency chargé des fonc-
tions de grand -aumônier, les ducs de
Guiche, de Villequier et de ï'ieury , les
comtes d'Avarai , de Cossé et de Saint-
Priest, le marquis de Nesle et quelques
autres. Ce fut à Mittau que se célébra le
mariage du duc d'Angoulême avec ma-
dame , fille de Louis XVI, le 10 juin 1799.
Après la cérémonie nuptiale le roi dit aux
deux époux. <t Si la couronne de France
» était de roses , je vous la donnerais ; elle
» est d'épines, je la garde.... C'est ici la
» fête des Français, ajouta-t-il ensuite en
t s'adressant aux compagnons de son exil ;
B mon bonheur serait complet si j'avais
> pu y réunir tous ceux qui se sont si-
«gnalés comme vous, par une fidélité
» courageuse envers le roi mon frère. »
Peu de temps après cette union, M. le
duc d'Angoulême quitta Mittau , pour
aller rejoindre l'armée de Condé , où se
trouvait déjà son frère le duc de Bcrry.
A la fin de 1799, les cardinaux réuni»; 5
Venise, pour un prochain conclave , an-
noncèrent à Louis XVIII la mort de Pi<»
VI , et peu après le nouveau pape Pie
VII communiqua son avènement au mo-
narque qui nomma le cardinal Maury son
plénipotentiaire auprès du saint Siège.
Cependant la conduite généreuse de Paid
ï*^"" envers la famille des Bourbons ne tar-
da pas à se démentir. Ce prince cédant à
ufiC politique versatile, après avoir rompu
en 1801 avec l'Angleterre , pour fornier
une étroite alliance avec Bonaparte qui
s'était fait proclamer premier consul ,
intima au roi l'ordre barbare de quitter
ses états dans les 24 heures. Le malheureux
prince se mit en route le 22 janvier, au
milieu d'un froid glacial , sous un des
plus rudes climats de l'Europe, sans savoir
où il pourrait fixer sa résidence. Parmi
tous les souverains de l'Europe , Frédéric
Guillaume , roi de Prusse , fut le seul qui
s'élevant au-dessus d'une politique méti-
culeuse , voidut accorder un asile au mo-
narque errant. 11 lui permit de s'établir
à Varsovie ; mais malgré ces dispositions
amicales , il fît arrêter l'année suivante,
à la demande du gouvernement français ,
plusieurs agens royaUstes parmi lesquels
se trouvaient Imhert-Colomès et Précy le
défenseur de Lyon. Paul I"^ ayant été as-
sassiné dans la nuit du 23 au 24 août
1801 , son fils Alexandre qui lui succéda ,
rétablit la pension du roi cl la porta
même à plus de deux millions. Louis
XVIII demeurait à Lajinka, maison de
plaisance des anciens rois de Pologne à
un quart de lieu» de Varsovie , et vivait
dans une retraite profonde avec sa famille
et quelques serviteurs attachés à sa cause.
En 1803, le général prussien Keller lui
fit au nom de Bonaparte la proposition de
renoncer au trône de France , et d'y faire
renoncer les princes de sa famille , lui
promettant en retour les indemnités les
plus brillantes , et lui offrant même à ce
qu'on assure, quoique indirectement, le
royaume de Pologne L'envoyé de Bona-
parte insinuait qu'en cas de refus , le
premier consul pourrait faire retirer à la
famille royale les secours qu'elle recevait
de certains gouvernemens. « Je ne crains
» pas la pauvreté , répondit Louis XVIII ;
» s'il le fallait, je mangerais du pain noir
» avec ma famille et mes fidèles servi-
» leurs; mais ne vous y trompez pas; je
» n'en serai jamais réduit là : j'ai une
« autre ressource dont je ne crois pas de-
B voir user tant que j'ai des amis puis-
LOU
iSi
Lotr
I» sans; c'est de faire connaître mon état i » jusqu'au tlcniier soupir le trùne ilenxrs
» CM France, et de tendre la main non au
» gouvernement usurpateur , cela jamais;
» mais à mes fidèles sujets ; et , croyez-
I) moi, je serais bientôt plus riche que je
» ne te suis. » A celle réponse verbale
Louis XVIII ajouta une lettre pour le
premier consul , dans laquelle il repous-
îaitavecuncnoble cncrgieles i)roposilions
qui lui avaient été faites. (Voye?, au
lommencement du l*^"" volume ie Pjécis
ile la révolution, pag. 212.) « J'ignore ,
» disait le prince , quels sont les desseins
» de Dieu sur ma race et sur lïioi; mais
ï> je sais les obligations qu'il m'a imposées
» par le rang où il lui a plu de me faire
» naître. «Louis XYIII s'empressa d'in-
struire les divers membres de sa famille
réfugiée en Angleterre el en Allemagne ,
de la tentative failc auprès de lui par l'é-
missaire de Bonaparte. Tous répondirent
que le roi , dans sa réponse, n'avait été que
le digne organe de leurs propres senti-
mens. Celte résistance à iaquelle Bonaparte
était loin de satlendre l'irrita vivement.
Cependanf un senatus- consulte ^ ayant
le 10 mai 1804 , déféré au premier consul
le titre d'empereur des Français , Louis
XVIII adressa de Varsovie à tousles sou-
verains de l'Europe une protestation contre
ce titre et contre tous les actes ultérieurs
auxquels il pourrait donner lieu. Durant le
cours de son exil il ne démentit pas un
seul instant cette généreuse fermeté, ce
noble senlimenl de ses droits et de sa di-
gnité dont il donnait un témoignage si
éclatant. Charles IV , roi d'Espagne, ayant
envoyé à Napoléon l'ordre de la toison
d'or, Louis XVIII lui adressa celle lettre:
« C'est avec regret que je vous renvoie
» les insignes de l'ordre de la toison d'or,
i> que sa fJajeslé votre père , de glorieuse
• mémoire, m'avait confiées. 11 ne peul
» rien y avoir de commun entre moi el
» le grand criminel que l'audace et la for-
41 lune ont placé sur mon trône, qu'il a
n eu la barbarie de teindre du sang pur
h d'un Bourbon , le duc d'Enghien. La re-
^ ligion peut m'engager à pardonner à un
» assassin ; mais le tyran de mon peuple
» doit toujours être mou ennemi. Dans
I» le siècle présent , il est plus glorieux de
Il mériter un sceptre que de le porter.
» La providence par des motifs incom-
» préhensibles peul me condamner à finir
» mes jours dans l'exil; iwais ni la postc-
» rite, ni mes contemporains ne pourront
» dire que, dans le temps de l'adversilé ,
»jc me suis montré indigne d'occuper
ancêtres. » Cependant l'empereur de
Russie invila Louis XVIII à venir résider
à Millau , et le roi se décida à s'y rendre.
Mais auparavant , il voulut avoir en Suède
une entrevue avec Monsieur, comte d'Ar-
tois, dont il était séparé depuis onze ans.
Les deux frères passèrent ensenible queU
ques jours à Calmar , d'où Monsieur re-
tourna en Angleterre au mois de novem-
bre 1804, tandis que le roi se mit eo
route pour Mittau. Il y vécut paisiblement
pendant trois années , el échappa heu-
reusement aux tentatives qui furent faites
pour lui donner la mort. Le séjour de
quelques prisonniers français à Millau,
lui fournit l'occasion d'exercer cette
bienfaisance qui distinguait sa famille
et dont l'exil n'avait pu affaiblir l'acti-
vité. Le prince leur prodigua tous les
secours qu'il pouvait leur offrir ; et
l'abbé Edgeworlli , s'associant à celle
œuvre piiuse et patriotique , s'empressa
d'assister les malades, el do leur porter
les consolations de la religion. Mais ce
digne ecclésiastique , qui dans l'exercice
de son saint ministère, consultait moins
ses forces que son zèle , tomba malade ,
et mourut le 22 mars 1807. Le roi profon-
dément affligé de cette perle , choisit pour
lui succéder M, Asseline , évêque de Bou-
logne. Cependant Napoléon ayant triom-
phé de la-liguc européenne, et l'empereur
Alexandre ayant fait la paix avec la France
en signant le Irailé de Tilsitt , Louis
XVIII se vit forcé d'abandonner le conti-
nent et de chercher ^m asile en Angleterre,
où il arriva vers le mois d'octobre 1807.
Il résida quelque temps à Gosfield, puis
à Wanslead , et enfin au château deHart-
weil , dans le comté de Buckingham , où
il jouit d'une pension considérable qui
lui fut assignée par le gouvernement an-
glais. Le duc d'Angouléme, el madame
demeuraient avec lui ; Monsieur qui fai-
sait son séjour ordinaire à Londres venait
les voir fréquemment. Louis XVIII eut la
douleur de perdre dans son exil plusieurs
personnes qui lui étaient chères. La reine
mourut le 15 novembre 1810 , et son corps
fut transporté en Sardaigne. Le comlo
d'Avaray, qui possédait toute la confiaurg
du roi , termina ses jours le 3 juin à
Madère , où il était allé respirer un air
plus doux; enfin M. Asseline, évoque
de Boulogne succomba à une longue, nia-
ladie le 10 juin 1815. Cependant un ave-
nir plus heureux se préparait pour les
descendans de saint Louis. Bonaparte
LOU 582
aveufîlc par ses prospcrilés, et frappe de
fcl esprit d'imprudence, qui est l'avant-
coureur de la chute des rois , avait attiré
par la guerre faite à la Russie les puis-
sances ctrangèros au sein de la France.
Louis XVIil pressentit que le renverse-
ment de la puissance impériale pouvait
lui rouvrir le chemin du trône ; mais
français avant tout , il pleura sur les
malheurs de sa patrie, et refusa de pren-
dre part à une fête brillante , donnée par
îo prince régent à l'occasion de la destruc-
tion de l'armée de Bonaparte. « J'ignore ,
» dit-il , si ce désastre est un des moyens
» que la providence, dont les vues sont
» impénétrables , veut employer pour ré-
» tablir l'autorité légitime en France ;
» mais jamais ni moi , ni aucun prince
« de ma famille ne pourrons nous réjouir
» d'un événement qui a fait périr deux
» cent. mille français. » Profondément af-
fecté de la catastrophe qui termina la
campaijfnc de iMoscou, il écrivit à l'empe-
reur Alexandre la lettre suivante : « Le
» sort des armes a fait tomber dans les
» mains de votre majesté plus de 150,000
» prisonniers , ils sont pour la plus
» grande partie français ; peu importe
» sous quels drapeaux ils ont servi ; ils
» sont malheureux ; je ne vois parmi eux
» que mes enfans. Je les recommande à
» la bonté de votre majesté impériale;
» qu'elle daigne considérer combien un
» grand nombre d'entr'eux a déjà souffert,
» et adoucir la rigueur de leur sort ! Puis-
» sent-ils apprendre que leur vainqueur
» est l'ami de leur père? Votre majesté
» impériale nepeutine donner une preuve
» plus touchante de ses sentimens pour
«moi. j> Lorsqu'en 1813, les souverains
alliés pénétrèrent sur le territoire fraa
LOU
par un sénatus-œnsuUe du 6 avril 1814.
Le roi quitta l'Angleterre le 23 avril , i-l
toucha après 23 ans d'exil ce sol français
dont la révolution semblait l'avoir banni
à jamais. Il débarqua à Calais , au milieu
des cris d'allégresse de la population, et
partit sur-le-c!iamp pour Compiègne où
les maréchaux de France s'étaient réunis
pour le recevoir. A Saint-Ouen , il reçut
le 2 mai , les félicitations des premiers
corps de l'état, et publia la fameuse dé-
claration, base de la charte qu'il promet-
tait aux Français. Le lendemain il fit son
entrée solennelle dans la capitale où il
fut accueilli avec enthousiasme par le
peuple heureux de trouver dans son sou-
vt;rain légitime , le médiateur qui récon-
ciliait la France avec l'Europe. En effet
Louis XVIIl conclut avec les diverses
puissances belligérantes un traité de
paix par lequel la France conservait
l'intégrité de ses limites telles qu'elles
existaient à l'époque du i"" janvier 1792,
avec une augmentation de territohc du
côlé do la Belgique , de l'yVllemagne et
de l'Italie. La charte consliluHonnelle oc-
troyée par le roi fut solennellement pro-
clamée dans le corps législatif le i juin.
Par cet acte le roi garantissait aux Fran-
çais rétablissement du gouvernement re-
présentatif , le libre consentemenlde l'im-
pôt par les députés des départemcns ,
l'égalité dadiWssion aux emplois , la li-
berté individuelle et celle de la presse ,
sauf la répression des abus, le libre exer-
cice des cultes ( la religion catholique
restant celle de l'élat), la responsabilité
ministérielle , le jugement par jury , l'in-
dépendance du pouvoir judiciaire , la
consolidation de la dette publique; enfin
le roi déclarait considérer la vente des
çais, on avait lieu de croire qu'ils se sou- 1 biens nationaux comme irrévocable , et
viendraient du frère de Louis XVI , de-
puis si long-temps exilé et malheureux. Il
n'en fut pas ainsi; l'opiniâtreté seule de
Napoléon devait ramener sur le trône le
fils de saint Louis. Bonaparte malgré cet
enchaînemcnl de désastres qui le poussait
au précipice que son ambition avait
creusé sous ses pas. après avoir deux fois
refusé une paix honorable à Dresde et à
Prague, repoussa encore celle que lui
l)r§posait le congrès de Ciiàtiilon. La
ville de Bordeaux prenant l'initiative sur
le reste de la France, proclama Louis
XVIII. Bientôt le nom des Bourbons re-
tentit de toutes parts. Enfin la déchéance
de Bonaparte fut prononcée , et Louis
X\Ul fut rappelé au trône de France
les opinions ainsi que les voles émis du-
rant la révolution , comme exempts di^
toute responsabilité légale. — Le roi es-
pérait par ces concessions faites à l'esprit
et aux intérêts du temps parvenir à fer-
mer l'abîme des révolutions. Mais de nou-
velles épreuves étaient réservées au roi
législateur. Quelques mois s'étaient à
peine écoulés depuis son retour dans sa
patrie , que déjà se tramait un complot,
dont le but était de relever le trône impé-
rial. Daccor J avec les mécontens , Bo-
naparte s'échappe de l'île d'Elbe qu'on lui
avait donnée pour prison, traverse rapi-
dement la France , en entraînant sous ses
drapeaux les régimens qu'il rencontre sur
son passage , et fait son cnlrûe à Paris le
LOU
585
LOU
20 mars 181;j. Le roi qui en était parti
prccipilainaient quelques heures aupara-
vant, se rendit à Gand avec sa famille ,
attendant l'issue de cette invasion que
tout annonçait devoir être éphémère. La
bataille de Wate'rloo, livrée le 17 juin,
renversa pour la seconde fois le conqué-
lant qui avait cru pouvoir fonder sa dy-
nastie sur la victoire. Les alliés péné-
trèrent encore dans la capitale; mais cette
fois , bien moins généreux , ils laissèrent
eu partant une armée d'occupation et
exigèrent la remise de plusieurs places
fortes, et des contributions énormes. On
nous enleva aussi tous les objets d'art
dont nous avions dépouillé les nations
vaincues. Louis XVIII rentra dans Paris
au mois de juillet , et s'occupa de guérir
les nouvelles plaies de la France. Sa pre-
mière pensée fat de proclamer une am-
nistie générale dont il n'excepta qu'un
petit nombre de personnages complices
du retour de Bonaparte. Sentant combien
la présence des troupes étrangères blessait
les senlimens français , il obtint qu'elles
partiraient avant le terme fixé, et qu'une
réduction serait faite sur les contributions
imposées à la France. Cependant ni ses
intentions paternelles , ni ses bienfaits ne
purent désarmer en France le génie révo-
lutionnaire. Un monstre , héritier de la
fureur impie des Marat et des Robes-
pierre, assassina le duc de Berry le 13
février 1820, au moment où il sortait
de l'opéra. Des complots contre les Bour-
bons furent tramés sur divers poinis
de la Fi-ance. Mais heureusement déjoués
ils eurent pour résultat de raffermir l'au-
torité royale. Une révolution démocra-
tique s'étant accomplie au-delà des Pyré-
nées , Louis XVIII se crut assez sûr de sa
puissance pour envoyer en 1822 , une
armée au secours de Ferdinand Vil , à
qui les cortès avaient enlevé toute son au-
torité. M. le duc d'Angouléme . revêtu
d!i titre de généralissime, dirigea avec
autant de fermeté que de modération cette
guerre qui fut heureusement terminée en
moins de six mois. Cependant les souf-
frances et les fatigues avaient altéré la santé
du roi. Malgré le dépérissement visibie de
ses forces, il continuadese montrer en pu-
blic et dans les conseils. Au mois de décem-
bre 1823, il voulut encore , malgré sa fai-
blesse, ouvrir en personne la session légis-
lative, et y prononcer le discours de la cou-
ronne. Le 23 du mois d'août suivant, jour
de la Saint-Louis, il répondit à son frère
qui lui conseillait de ne pas recevoir! « Un
» roi de France meurt , mais il ne do'l [las
» cire malade. » Il admit en effet ce jour-là
auprès de lui, les grands dignitaires de la
cour et les fonctionnaires publics ; et mal-
gré son abattement physique qui ne j)ut
cire dissimulé, sa présence d'esprit sa
manifesta encore par des paroles gra-
cieuses qu'il adressa à quelques-uns de
ceux qui passèrent devant lui. Averti pai
un prélat illusîre du danger de son état,
le prince voulut consacrer ses dernieif
jours à la piété. Calme et résigné sur son
lit de douleur, il se joignait aux prières
que l'on faisait pour lui; enfin le 16 se{>-
lembre 182/r , il s'éteignit sans effort ù 4
heures du malin , après avoir demandé
et reçu les sacremens de l'E-rlise. Ses funé-
railles furent célébrées à Saint-Denis, ou
Mgr. FrayssinO'US évêquç d'Hermopoiis
prononça son oraison funèbre. Qu'on nous
permette de citer un passage du discours
de cet illustre prélat , qui fut lui-même
témoin des derniers momens du roi ; il
servira à jusliller ce monarque des soûj.-
çons d'incrédulité qu'un biographe a
laissé planersur sa tète. « La carrière poli-
» tique de Louis XVIII , est terminée.
» Dejmis quelque temps, on remarquait
» en lui un affaissement, présage troj)
» certain de sa Un prochaine. Il conserve
» néanmoins une admirable présence d'es-
» prit : s'il est accablé, il n'est pas vaincu ;
» il lutte avec effort, voulant porter di-
» gnemcnt jusqu'au bout le poids de la
» royauté. Il disait qu'un roi peut mourii ,
» mais qu'il ne doit pas être malade. Il
» semble que la vigueur de son âme sou-
» tienne la défaillance de son corps. Les
» étrangers comme les Français admis
«aux pieds de son trône, sont étonnés
» de tout ce qu'il y a encore de vivacité
» et de sagesse dans ses discours. Cepeii-
» dant ses forces trahissent son courage ;
» il ne lui est plus permis de quitter son
» lit de douleur : dès ce moment il désire
» de recevoir les sacremens de l'Eglis-e. Sa
» piété console en l'édifiant sa famille en
«pleurs; consolé, fortifié lui-môme paï
» les secours divins qui lui ont été admi-
» nistrés , il se recueille pour méditer les
» années éternelles; bientôt après, il leva
» un bras défaillant sur des tètes augustes et
» chères , et appelle sur elles toute l'abon-
» dance des bénédictions célestes. On sait
» avec quelle sollicitude le peuple entou-
» raitsa royale demeure. Non ce n'était pas
» une curiosité vaine qui l'animait ; c'était
» un sentiment de tendre vénération : it
» gardait un religiewx silence qu'il uil'jr-
LOU
584
LOU
•> rompait à peine pour s'informer de l'étal
• de l'auguste malade , comme' s'il avait
I. craint de troubler son repos. Mais le
» mal a fait des progrès rapides. On croit
h que le moment est venu de reciter les
» prières touchantes par lesquelles la re-
V ligion dispose ses enfans à quitter la
0 vie. Il entend avec résignation cette
» parole dure à notre faiblesse , mais
» pleine d'immoilalité :« parlez , âme cliré-
» tienne, parlez. vPro/ïcisce?-e anima chris-
• tiana! peu à peu la nature s'épuise, elle
r. succombe : le roi a rendu le dernier
» soupir. Ici de quelle scène de douleur
» et de désolation n'avons-nous pas été
» les témoins ! Nous avons vu les princes
f et les princesses de la royale famille bai-
» gnés dans leurs larmes , tomber à ge-
» noux et baiser respectueusement cette
» main qui a porté le sceptre , et mainle-
» nanl glacée par la mort. La funeste nou-
» velle se répand dans la capitale ; elle
», passe dans les provinces ; partout elle
i> éveille les mêmes sentimens, et Louis
» XVIII est comme enseveli dans les re-
» grets et les bénédictions de la France. »
A ce morceau nous ajouterons le portrait
que l'auteur du génie du civistianisme
a tracé du même monarque, et qui nous
parait remarquable par l'élévation et
l'impartialité des jugemens. « Ce prince,
« dit Monsieur de Chateaubriand, com-
i> prenait son siècle et était l'homme de
» son temps : avec des connaissances va-
« riées, ime instruction rare, surtout en
» histoire, un esprit applicable aux pe-
n tites comme aux grandes affaires , une
« élocution facile et pleine de dignité, il
« convenait au moment où il parut et aux
». choses qu'il a faites. S'il est extraordi-
» naire que Bonaparte ait pu façonner à
» son joug les hommes de la république,
» il n'est pas moins étonnant que Louis
» XVIÎI ait soumis à ses lois les hommes
> de l'empire ; que la gloire , que les inté-
» rcls, que les passions, que les vanités
» même se soient tues devant lui. On
» éprouvait en sa présence un mélange de
«confiance et de respect; la bienveil-
» lance de son cœur se manifestait dans
» sa parole, la grandeur de sa race dans
» son regard. Indulgent et généreux , il
« rassurait ceux qui pouvaient avoir des
V torts à se reprocher; toujours calme et
f raisonnable , on ponvait tout lui dire; il
n savait tout entendre; pour les délits
» politiques le pardon chez, les Français
» lui semblait moins sur que l'oubli , sorte
e Ue pardon dépouillé d'orgueil, qui gué-
» rit les plaies sans faire d'autres bles-
B sures » L'auteur de l'annuaire his-
torique de 1824 , le peint ainsi en peu
de mots : « Ce prince qui dans une autre
» carrière et dans d'aulres circonstances ,
» n'aurait peut-être paru qu'un homme
» d'un esprit éclairé , laissait en mourant
» tout ce qui peut recommander les prin-
» ces à l'admiration de la postérité. Aussi
» grand dans l'infortune que sur le trône,
» il avait réconcilié la France avec l'Eu-
» rope , et il avait apporté à son peuple
» plus que de conquêtes , la liberté , le
» crédit public et les lois protectrices de
» tous les droits. Nul monarque n'avait
» pris les rênes de l'état dans des circon-
» stances plus critiques , au milieu de
» partis plus divisés ; nul n'avait laissé le
«pouvoir plus affermi, le peuple plm
» heureux ; il avait accompli la restaura-
» lion ; il était mort en roi ; on le pleurait
«comme un père; voilà qui suflit à sa
» gloiie. « On attribue à Louis XV [II les
productions suivantes : | les Mannequins^
coidc ou histoire comme on voudra, sans
dale,in-12, écrit dirigé principalement
contre Maurepas , Turgot et l'abbé Ter-
ray ; | Description historique d'utimonstre
symbolique pris vivant sur les bords du
lac Fagnu , 1784 , in-8°, brochure allégo-
rique, dirigée selon les uns contre le ma-
gnétisme ; suivant les autres, contre lo
ministère de M. deCalonne; \Ecluircissc-
ment sur le livre rouge^ence qui concerne
Monsieur, frère du roi, 1790, in-8"; 1 Re-
lation d'un voyage à Bruxelles et à €(■
blentz ( I7!)l), Paris, 1825, in-8°. C'est 1
récit de son voyage lorsqu'il quitta la
France. Il en parut dix éditions la même
année. Quelques-unes sont accompagnées
de poésies attribuées à Louis XVIII, mais
qui paraissent appartenir au marquis d€
Fulvy ; | Correspondance et écrits poty
tiques de sa majesté Louis XVJII, Paris,
1824, in- 18; \ Lettres éctites d'/Iartwei,
1824 , in-8°. Elles ont été imprimées , mais
non publiées. L'ouvrage de M, Hue, inti-
tulé : Dernières années du règne et de ta
vie de Louis XVI, a été revu , corrigé d
complété par Louis XVIII, Parmi les nom'
breux ouvrages qui ont été publiés sur ce
prince , nous citerons seulement sa Vie,
publiée de son vivant, ])ar M. Alphonse
de Beanchamp, Paris, 1821, in-S"; 5' édi-
tion, 182j, 2 vol. in-8''. Plusieurs ora-
teurs ont prononcé ou publié son Oraison
ou Eloge funèbre, entraulres 31. Frayssi-
nous, les abbés Liautard, de Bonne vie, dot
Bouvens et M. Rey, évéquc de Pi{;ncroI.
LOU Hl
LOUIS ( saint), pelii-neveu de saint
I^uis, roi de France , et neveu , par sa
mère , de sainte Elizabcth de Hongrie ,
naquit de Charles II , surnommé le Boi-
teux^ roi de Naples et de Sicile , et de
Marie, tille d'Etienne V, roi de Hongrie.
Louis commença dès l'âge de 14 ans à se
Banclifier en Catalogne , où, pour déli-
vrer son père , alors prince de Salerne,
il avait été donné en otage au roi d'Ara-
gon , qui l'avait fait prisonnier dans un
combat naval. On ne remarquait pas
seulement en lui beaucoup d'attrait pour
la prière , pour les saintes lectures, pour
la fréquentation des sa,cremens , une dou-
ceur et une modestie angélique , une dé-
licatesse de pureté, qu'une parole libre
faisait fréinir ; mais il montra encore une
force et une vertu qui alla jusqu'à se ré-
jouir de son emprisonnement , comme
d'un moyen précieux de sanctification.
Il recouvra la liberté en d!2% , par le
traité conclu entre son père et Jacques II,
roi d'Aragon. Charles Martel , son frère
aine, ayant été reconnu roi de Hongrie,
dont la possession réelle ne parvint ce-
pendant qu'à son fils Charobert, Louis
céda la couronne de Naples à Robert,
son cadet, après avoir fait vœu d'embras-
ser l'humble et austère profession des
frères mineurs , voeu qu'il voulait accom-
plir avant de recevoir l'ordination épi-
scopale. Sa famille s'étant opposée à son
entrée en religion , les supérieurs diffé-
rèrent quelque temps à le recevoir parmi
eux. quand Boniface VIII lui accorda une
dispense d'âge pour recevoir la prêtrise
à '22 ans. En vertu d'une autre dispense ,
il fut nominéà l'évéclié de Toulouse, et
obligé de l'acceptei par obéissance , ayant
fait auparavant le voyage de Rome , où
il accomplit son vœu et lit profession la
veille de Noël 1296 , dans le couvent d'^-
ra cœli. Il fut sacré évèque l'année sui-
vante. « Il parut dans son diocèse , dit un
» historien , sous l'habit d'un pauvre re-
t> ligiejxx ; mais on le reçut à Toulouse
» avec le respect dû à un saint , et avec
* la magniticence qui convenait à un
» prince. Sa modestie , sa douceur et sa
>' piété inspiraient l'amour de la vertu à
»• tous ceux qui le voyaient. Son premier
t soin fut d'y visiter les hôpitaux , et de
» pourvoir aux besoins des malheureux.
t> S'étant fait représenter l'état de ses re-
» venus , il en réserva une petite partie
» pour l'entretien de sa maison , et des-
» tina le reste aux pauvres. Il en avait
» tous les jours vingt-cinq à sa lable; il
S LOU
» les servait lui-même , et quelquefois un
» genou en terre. Tout le royaume de
» son père éprouvait les effets de ses li-
» béralités. Il lit la visite de son diocèse,
» et laissa partout des monumens de son
» zèle et de sa charité. » Effrayé de la
grandeur de ses obligations, il songeait
à quitter son évéché lorsqu'il mourut
saintement le 19 août 1297 , à l'âge de
Ning -trois ans et demi , au château de
BrignoUes en Provence, où il était allé
pour quelques affaires ecclésiastiques.
Lorsqu'il sentit api)rocher sa lin, il dit à
ceux qui étaient autour de lui :, « Après
» avoir fait un voyage dangereux , me
» voilà enfin arrivé à la vue du port,
«après lequel j'ai long -temps soupiré
« avec ardeur. Je vais jouir de mon Dieu,
» dont le monde me dérobait la posses-
» sion. Bientôt je serai délivré de ce poids
» que je ne puis porter. » Il fut enterre
chex les franciscains de Marseille, comme
il l'avait demandé. Jean XXÏI, succes-
seur de Boniface YIII, le canonisa à Avi-
gnon en 1517, et adressa un bref à ce su-
jet à la mère du saint, qui vivait encore.
On a sa /'7^ écrite avec fidélité par un
auteur qui l'avait connu intimement , et
publiée en latin par Sedulius à Anvers,
1G02 , in-S", et en français par Arnauld
d'Andilly.
LOUIS, dauphin , fils de Louis XIV, et
de Marie-Thérèse d'Autriche , né à Fon-
tainebleau en 1661 , eut le duc de Mon-
tausler pour gouverneur , et Bossuet pour
précepteur. Ce fut en faveur de ce prince,
qu'on nomme communément le Grand
Dauphin , que furent faits les commen-
taires et les belles éditions des bons au-
teurs latins, dites Ad usum Delphini.
Il joignait beaucoup de courage à un ca-
ractère bon et facile. Son père le mit à la
tète des armées en 1688; il prit Philis-
bourg, Heidelberg, Manheim ; accompa-
gna ensuite Louis XIV au siège de Mons,
à celui de Naraur , et conmianda l'armée
de Flandre en 1694. Son second fils , le
duc d'Anjou, qu'il avait eu de Marie-
Christine de Bavière , son épouse , fut ap-
pelé en 1700 à la couionne d'Espagne. Le
grand dauphin passa la plus grande par-
tie de sa vie à Meudon et à Choisy , dont
Matlemoiselle lui avait donné la jouis-
sance. Dans cette vie retirée, il se livrait
au plaisir et à l'amour, quoiqu'il fût gêné
dans ses inclinations par le roi son père.
Il s'attacha en dernier lieu à Marie-Emi-
lie de Joly de Choin , qui paraît être de-
venue son épouse. ( Voyez CHOIN ) Ce
LOU 586
prince mourut à Meudon en 1711 , de la
petite- vérole, à cinquante ans. On ra-
conte qu'on lui avait prédit que fils de
roi^ il seî'ait père de 7'oi j et qu'il ne ré-
gnerait jamais. Il passa les dernières an-
nées de sa vie dans la retraite et dans
les exercices chrétiens. Le grand dauphin
n'avait aucun crédit à la cour. « On voyait,
«dit un liistorien, un dauphin.,.,, âgé
» de plus de quarante ans, fils d'un roi
» de France et père d'un roi d'Espagne,
» n'osant prétendre à la plus petite grâce
«pour lui ni pour les autres...; passant
» des journées entières appuyé sur ses
«coudes, se bouchant les oreilles, les
> yeux fixés sur une table nue , ou assis
• sur une chaise, frappant ses pieds du
» bout d'une canne pendant toute une
» après-dinée »
LOUIS, dauphin, fils aîné du précédent
et père de Louis XV, né à Versailles en i(i82,
reçut en naissant le nom de du/; de Bour-
gogne. Le duc de Beau villiers , un des plus
honnêtes hommes de la cour, et Fénélon ,
un des plus vertueux et des plus aimables,
veillèrent à son éducation, l'un en qualité
de gouverneur , l'autre en qualité de pré-
cepteur. Sous de tels maîtres, il devint
tout ce qu'on voulut. Il était naturelle-
ment emporté; il fut modéré, doux, com-
plaisant. L'éducation changea tellement
son caractère, qu'on eût dit que ses ver-
tus lui étaient naturelles. Il fut général
des armées d'Allemagne en 1701 , généra-
lissime de celle de Flandre en 1702 , et
battit la cavalerie ennemie près de Ni-
mègue. Mais il se distingua moins par les
qualités guerrières que par les vertus
morales et chrétiennes. Les malheurs de
la guerre , toujours suivis de ceux des
peuples , l'aflligeaient sensiblement. Il
voyait les maux : il chercha les remèdes
pour les appliquer lorsqu'il serait sur le
trône. Il s'instruisit de l'étal du royaume;
il voulut connaître les provinces. Il joi-
gnit aux connaissances de la littérature et
des sciences celles d'un prince qui veut
régner en roi sage et faire des heureux,
La France fondait les plus belles espé-
rances sur lui , lorsqu'une maladie cruelle
l'enleva à la patrie en 1712 avec la dau-
phine. Il mourut à Marly, le 18 février
4712 , un an après son père , dans sa .50*^
année, non sans soupçoîi de poison. On
sait les bruits qui coururent à ce sujet
sur le compte du duc d'Orléans. Son apo-
logiste, le duc de Saint-Simon, n'a pas
cru pouvoir les réfuter. Il prouve, au
contrsiire, que le poison donné à ce prince,
LOU
ainsi qu'à son épouse , est une chose très
réelle , sans néanmoins en accuser nom-
mément personne, « L'espèce de la ma-
» ladie du dauphin , dit-il , ce qu'on sut
» que lui-même en avait cru, le soin
» qu'il eut de faire recommander au roi
» les précautions pour la conservation de
» sa personne , la promptitude et la ma-
» nière de sa fin , comblèrent la désola-
» tion , et redoublèrent les ordres du roi
» sur l'ouverture de son corps. Elle fut
» faite dans l'appartement du dauphin
» à Versailles : elle épouvanta. Fagon,
» Boudin et quelques autres y déclaré-
» rent le plus prompt effet d'un poison
» très subtil et très violent. » C'est pour
ce prince que l'illustre Fénélon composa
son Télèmaque et la plupart de ses au-
tres ouvrages. Il avait épousé Marie-
Adélaïde de Savoie, qui était morte six
jours avant lui : leurs corps furent portés
ensemble à Saint-Denys, ( Voij. les Ver-
tus de Louis de France^ duc de Bourgo-
gne ^ par lepèreMartincau, jésuite, 1712,
in-i"; et son Portrait par l'abbé Fleury,
son sous-précepteur , Paris, 1714 , in-12.)
Voltaire ne connaissait sans doute pas ces
ouvrages, quand il a dit : « Jjous avons,
» à la honte de l'esprit humain , cent vo-
» lûmes contre Louis XIV , son fils Mon-
» seigneur , le duc d'Orléans son neveu ,
» et pas un qui fasse connaître les vertus
» de ce prince qui auraient mérité d'ètro
» célébrées, s'il n'eût été que parLieuLier.n
Qui ne croirait, à entendre parler ainsi
l'écrivain le plus fécond de son siècle ,
qu'il va consacrer les premiers instans
de son loisir à réparer l'injustice de ses
contemporains? Cependant Voltaire, de-
puis ce temps-là , composa trente volu-
mes , et l'on sait quels volumes ! Et cet
ouvrage, qu'il kX'dSX honteux pour l'esprit
humain de n'avoir pas encore jjroduil ,
n'a jamais occupé sa plume. Du reste , ce
passage prouve combien le mérite de ce
prince était éminent , puisque , malgré sa
religion et sa piété , la philosophie la plus
irréligieuse lui rend un si éclatant hom-
mage. L'abbé Proyart a donné depuis sa
Vie éc?'ite sur les Mémoires de la cour^
2 vol. in-12 , 1782. Quoique en général
assez faiblement écrite , elle a l'avantage
de l'exactitude ; on y trouve des mor-
ceaux curieux et très intéressans , entre
autres les réflexions vraiment remarqua-
bles de ce judicieux prince sur la,révo-
cation de l'édit de Nantes. ( Voyez LOUIS
XIV. ) On a justement appliqué à ce
prince , qui aur-ait fait le bonheur et la
gloire de la France, ces vers du poète de
ÎCaritouc :
Kirnior.i vobis Romana propago
Visa pottns, Superi, propria h»c i\ dona fuisicnt.
LOlilS, daupliin, fils de Louis XV el
deMariedeLeckzinska,pèie de Louis XA'I,
né à Versailles en 1729, montra de bonne
heure tant de goût pour la vertu , que
la reine sa mère disait : « Le ciel ne m'a
i> accordé qu'un lils; mais il me l'a donné
» tel que j'aurais pu le souhaiter. » Il
épousa , le 23 février 1743 , Marie-Thé-
rèse , mfanle d'Espagne. Cette princesse
étant morte en 1746 , il épousa au com-
mencement de l'année suivante Marie-
Josèphe de Saxe , dont il a eu plusieurs
fils. Le dauphin accompagna le roi son
père pendant la campagne de 1763, et se
trouva à la baliiille de Fontenoy, où il
donna des preuves de valeur et d'huma-
nité. Il joiîjnait à des talens naturels des
connaissances étendues, et donnait à la
France les espérances les mieux fondées
d'un règne de sagesse et de justice , lors-
qu'il mourut à Fontainebleau le 20 dé-
cembre 17C5. Sa douceur, son affabiUté,
son ap])!icalion constante à ses devoirs,
ont rendu sa mémoire précieuse à tous
les cœurs français. On a admiré la jus-
tesse de l'application de ces paroles de
l'Ecriture, mises à la tête de son oraison
funèbre : j-ibslulit magnificos tiieos Do-
minus de medio met. Thren. 1. Il y a plu-
sieurs traits de lui qui méritent d'être
transmis à la postérité. Telle est la su-
blime leçon qu'il lit aux jeunes princes
SCS fils , 'lorsqu'on leur suppléa les céré-
monies du baptême. On apporte les re-
gistres sur lesquels l'Eglise inscrit sans
distinction ses enfans : « Voyez, leur dil-
» il, votre nom placé à la suite de celui
p du pauvre et de l'indigent. La religion et
» la nature mettent tous les hommes de
» niveau, la vertu seule met entre eux
» quelque différence ; et peut-être que
» celui qui vous précède sera plus grand
» aux yeux de Dieu , que vous ne le serez
» jamais aux yeux des peuples..,. » « Con-
» duisez mes enfans , disait ce bon prince ,
» dans la chaumière du paysan : montrez-
ï leur tout ce qui peut les attendrir; qu'ils
» voient le ytain noir dont se nourrit le
» pauvre ; qu'ils touchent de leurs mains
» la paille qui lui sert délit.... Je veux
» qu'ils apprennent à pleurer. Un prince
» qui n'a jamais versé de larmes ne peut
i> être bon.» Le roi voulait qu'on augmen-
tât sa pension. J'aimerais mieux , dit le
dauphin en refusant l'augmentation , que
87 LOU
cette somme fût diminuée sur les tailles.
Un jour qu'on parlait devant lui des livres
contraires à la religion et aux '"nœurs , et
qu'on en justiliait la circulation comme
celle d'un objet de commerce : « Malheur,
>. dit-il, au loyaume qui prétendrait s'en-
» richir par un tel commerce, qui sacri-
» fierait des richesses vraies et durables à
» des richesses factices et éphémères, qui
» étoufferait la vertu des citoyens, et
» croirait acquérir les moyens de la faire
» paraître. » Il croyait qu'il fallait cher-
cher la source de tous les désordres pro-
pres à ce siècle dans la licence effrénée
de parler et d'écrire. « On n'écrit , disait-
» il , presque plus que pour rendre la te»
» ligion méprisable et la royauté odieuse.
» Il ne paraît presque point de livres où
» la religion ne soit traitée de supersti-
» tion et de chimère, où les rois ne soient
» représentés comme des tyrans, et leur
» autorité comme un despotisme insuppor-
» table. Les uns le disent ouvertement et
» avec audace; les autres se contentent
» de l'insinuer adroitement. Et à quoi bon
i> tantde livres? La vie entièredel'homme
» ne sufiirait pas pour lire ce qu'il y a de
» mieux écrit en quelque genre que ce
» soit : on ne fait plus que répéter ce que
» les autres ont dit ; et si l'on veut s'en
» éloigner pour se frayer des roules nou-
» velles, on donne dans des écarts. Quel
» avantage y a-t-il donc à espérer , pour
» le progrès des arts et des sciences , de
» ce torrent de volumes , de brochures et
» de libelles, dont le public est inondé? en
» deviendra-l-on plus savant? Au con-
n traire ; cette liberté d'écrire à tort et h
» travers sur toutes sortes de sujets ne
» produit qu'une science légère etsuperfi-
» rielle , qui est souvent pire que l'igno-
» rance ; elle n'a servi qu'à mettre au jour
» des priricipes faux, dangereux ou dé-
» teslables , qui enivrent tous les esprits.»
La dévotion du dauphin lui avait dicté
plusieurs prières qu'il s'était rendues fa-
milières, et qui ont une onction et une
force dignes de la véritable piété. Nous
donnerons pour exemple celle qu'il fai-
sait tous les jours pour le bonheur géné-
ral du royaume, en s'adressant à Dieu
par l'intercession de saint Louis , le plus
illustre de ses aïeux , et depuis long-
temps son modèle. Elle est en latin , et
imite parfaitement l'énergie et la dignité
des anciennes oraisons de la liturgie de
l'Eglise : Alterne Deus ^ qui Francorum
irnperium bénigne favore ab initia tuta~
ris. sancti Ludovici p7-ecibus exoratus
LOU
888
LOU
et votis^ da nepotifms . da seivo luo . da
populo virilités tmitari . quas coluit; ut
pacem intus . paccm foris colentes^ ad
rcgni tsthis lœtitiam tota mente tenda-
mus , iibi reges et j^opidi tibi . soli pas-
tort et pal ri, servientes, œtei'uo inter se
caritatis fœdere sociabuntur. On a publié
en 1777 d'excellens MétJioires pour servir
à l'histoire de ce prince , recueillis par
le père Griffet, 2 vol. In-S". Sa P^ie a élé
écrite par l'abbé Proyart, Paris, 1778,
in-12. On ne peut rien voir de plus lou-
chant que le Récit des principales circon-
stances de la maladie de ce prince , Pa-
ris , i766. L'auteur de V Histoire de la ré-
volution de France (M. Monljoie) répand
des doutes sur les causes de sa mort, et
ne paraît pas trop disposé à la croire na-
turelle. Quand on réfléchit que le dau-
phin , la dauphine et la reine moururent
dans l'espace de deux ans et demi , et
avec les mêmes symptômes , ses conjec-
tures semblent prendre une certaine con-
sistance, a Peut-être, dit-il, faut-il rcgar-
» der comme un événement qui appar-
» lient à l'histoire de la révolution , la
» mort prématurée du dauphin , père du
» roi actuel. Ce prince, calomnié, tant qu'il
» vécut , avec un acharnement qui déce-
» îail des desseins bien sinistres , et loué,
» même par ses ennemis , lorsqu'on n'eut
» plus à le redouter, était imbu de prin-
» cipes bien contraires à ceux qu'on met
» aujourd'hui en pratique; et tout ce qu'on
«connaissait de sa vie privée annonçait
» qu'il soutiendrait avec fermeté ses opi-
» nions religieuses et politiques. Il avait
» des mœurs pures , l'âme sensible et
B bienfaisante , du courage , l'amour de
» l'élude , l'esprit cultivé , le jugement
» sain , un cœur droit ; tout annonçait en
» un mot qu'il serait un digne successeur
» de Louis IX, de Henri IV, de LouisXIV;
» et il est incontestable que s'il eût ré-
» gné , la monarchie existerait encore
» sur ses bases ; il les eût affermies ,
• et nous n'eussions jamais vu établi le
» gouvernement populaire. Sa mort fut
» donc une véritable conquête pour les
i> novateurs. Je n'entends pas pour cela
» leur attribuer ce nouveau régicide ; mais
» il est incontestable que les forfaits qu'a
» enfantés le désir d'une révolution ne
» sont pas, tous bien connus ; il en est de
» secrets, et qu'il n'est pas temps de révé-
» 1er. Il est certain encore que la posté-
» rite aura de grands reproches à faire au
» feu duc de Choiseul , et qu'elle lui
» demandera compte de son intimité avec
» les prétendus philosoplies , et de son an-
» tipathie pour un prince qui avait toutes
» les qualités d'un sage. » Ce prince ai-
mail beaucoup l'étude de l'histoire : «Elle
B donne, disait-il, aux enfans des leçons,
» qu'on n'osait pas faire aux pères....» Il
avait une grande effection pour le ver-
tueux comte de Muy, et il adressait cha-
que jour à Dieu une prière pour la con-
servation de sa vie, « afin, disait le dau-
» phin , que si je dois porter le fardeau
» de la couronne , il m'aide à le suppor-
» ter. » Il disait encore un jour : « Ce qui
» rend la réforme d'im état si difficile ,
» c'est qu'il faudrait deux bons régnes de
» suite, l'un pour extirper les abus, l'au-
» tre pour les empêcher de renaître...» Il
eut à souffrir bien des désagrémens de
la part de madame de Pompadour et du
duc de Choiseul. Ce ministre ne pouvait
lui pardonner la protection qu'il accor-
dait aux jésuites, que les parlemens pour-
suivaient. Louis XV le tint presque tou-
jours éloigné des affaires.
ROIS DE GERMAME.
LOUIS 1"", le Pieux ou le Vieux , roi
de Germanie, troisième fils de Louis le
Déboimaire, et frère utérin de l'empereur
Lolhaire et de Pépin , fut proclamé roi
de Bavière en 817. Il se souleva avec ses
frères contre son père, se brouilla ensuite
avec eux, gagna, avec Charles le Chauve,
son frère paternel, la bataille de Fonlc-
nay contre Lolhaire en 8^1 , étendit les
limites de ses états, et se rendit redouta-
ble à ses voisins. Il mourut à Francfort
en 876 , à 70 ans. Ce fui un des plus grands
princes de la famille de Charlemagne. I]
n'eut pas toutes les vertus d'un bon roi,
mais il eut les qualités des héros. ( Voyez
LOTHAIRE I" ).
LOUIS II, le Jeune ^ fils du précédent,
aussi courageux que lui , et son succes-
seur au trône de Germanie , fut attaqué
par son oncle Charles le Chauve, qu'il
vainquit près d'Andernach en 87(). Il
mourut à Francfort en 882, dans le temps
qu'il levait des troupes pour les opposer
aux Normands , qui commençaient leurs
ravages.
LOUIS III, roi de Germanie. Voyez
LOUIS III, empereur.
BOIS DE HONGRIE.
LOUIS I" D'ANJOU, roi de Hongrie et
de Pologne , surnommé le Grand, naquit
à Bude en lô26, et succéda en I3/i2,à
Charles Rober» le Boiteux , son père, issu
LOU b8
de Charles I", comte d'Anjou, frère de
saint Louis. Il chassa les Juifs de la Hon-
grie , fil la guerre avec succès aux Tran-
sylvains, aux Croates, aux Tarlares et
aux Vénitiens ; il vengea la mort d'André
son frère, roi de Naples, mis à mort en
1345, et fut élu roi de Pologne , après la
mort du roi Casimir, son oncle , en 1570.
Il fit paraître un si grand zèle pour la
religion catholicjue, que le pape Innocent
YI le fit grand gonfalonier de l'Eglise. Ce
prince sage et juste mourut à Tirnau en
1382, à 56 ans. « Jamais souverain , dit un
t> historien, n'a été regretté comme il le
• fut, ni aucune administration si fort
» exallée. Chacun admirait son habileté à
» maintenir la paix intérieure et le talent
» qu'il avait eu d'établir l'union entre tant
» de différons peuples soumis à sa domi-
B nation. Inaccessible aux favoris et aux
• courtisans, il gouverna constamment
» par lui-même , et déploya autant de
» sagacité que de fermeté dans la distri-
» bution des charges et dignités, qu'il n'ac-
» cordait qu'aux talens, à la vertu el au
» vrai mérite. Travesti et sans aucune
» suite, il aimait à parcourir les provinces
» de son royaume pour éclairer de près
» la conduite des officiers et des magis-
» Irats , el pour tirer avantage des obser-
» valions que lui faisaient les personnes
» qui ne le connaissaient pas. Libéral sans
» profusion, il dispensa avec économie
» les trésors de l'état ; et malgré les gucr-
» res nombreuses qu'il eut à soutenir, il
» n'établit aucun nouvel impôt. La res-
» triction des peines aux seules person-
» nés des coupables date de son règne,
» comme il fut le premier qui défendit
» l'usage desjugemens de Dieu dans les
» tribunaux. Ne pouvant réprimer l'u-
» sure des Juifs , ruineuse pour le menu
» peuple, ni faire de cette nation des ci-
» loyens utiles à l'élat , il rendit un édit
» par lequel il leur fut enjoint de sortir
» du royaume.» Sa mort fut suivie de
gj ands troubles en Hongrie. Foy. GARA.
LOUIS II, roi de Hongrie et de Bo-
lièrr.e , succéda à Ladislas VI son père en
4.") 16. Trop jeune et trop faible pour ré-
sister au terrible Soliman II, il s'engagea
inconsidérément à la bataille de Mohatz
eu 1526, et y périt à 20 ans, et avec lui
périrent presque tout le haut clergé et la
noblesse de Hongrie , rassemblés contre
l'ennemi le plus redoutable de la reli-
gion et de l'état. Le roi se noya en tra-
versant leCarasse, petite rivière maré-
cageuse, son petit cheval n'ayant jamais
7.
9 LOU
pu s'élever jusqu'au bord qui était foii
escarpé. Quelques historiens ont cru que
la Providence lavait puni de ce qu'il avait
fait jeter l'ambassadeur de Soliman avec
toute sa suite dans un vivier, où ils fu-
rent mangés des poissons; et le genre de
mort qui termina les jours du jeune roi
rend cette observation remarquable. Il
est vrai que dans ce temps les Turcs,
lorsque l'occasion s'en présentait, se por-
taient à des barbaries qui semblaient
étouffer tout sentiment d'humanité dans
le cœur des chrétiens; mais la sainteté de
l'Evangile suppose dans ses sectateur»
des vertus auxquelles ce genre de justi-
fication ïie peut suffire. Les historiens
rapportent qu'au moment où il monta à
cheval pour aller combattre , un aigle qui
couvrait son casque tomba et le blessa lé-
gèrement au visage ; ce qui fut regardé
comme un mauvais augure. On retrouva
le cadavre du prince peu de temps après
et on le transporta avec pompe à Albe-
Royale , dans le tombeau de ses ancêtres.
Ce mémorable combat est également dé-
crit par Etienne Brodericus ( F', ce nom),
et plus en abrégé par Isthuanfî. On voit
dans le magnifique arsenal de Vienne la
statue équestre de ce jeune prince, parée
des armes qu'il portait le jour de celte
bataille. On pourrait bien y mettre pour
épigraphe ce vers de l'Enéide :
lofelix puer, atque impar congrcssut Achilli !
En 1687 , le duc Charles V de Lorraine,
secondé par l'électeur de Bavière et le
prince Louis de Baden, vengea la mort
de tant de chrétiens, par une grande vic-
toire remportée sur les Turcs dans celte
même plaine de Mtjhatz.
LOUIS , prince de Tarente , neveu de
Robert le Bon . roi de Sicile, né en 1522,
épousa, le 20 d'août iokl , Jeanne, reine
de Naples , sa cousine ( voyez JEANNE ,
reine de Jérusalem), après la mort d'An-
dré son premier mari , à laquelle il avait
contribué. Contraint de sortir du royau-
me par Louis , roi de Hongrie , qui s'y
était rendu avec ime armée pour venger
l'assassinat d'André son frère , il vint se
réfugier avec la reine son épouse en Pro-
vence ; et tous deux furent déclarés in-
nocens dans un consistoire tenu par Clé-
ment VI à Avignon. Rappelés ensuite par
les Napolitains, ils chassèrent les troupes
hongroises restées dans le royaume , cl se
firent couronner solennellement à Naples
le jour de la Pentecôte 1552. Louis mou-
rut l'an 1562, sans laisser d'cnfaiia. H
50
LOU îy
3vail insliliic l'ordre du Saint-Esprit du
ycEud^ qui ne dura que pendant son
règne. Lorsque Henri III passa par Ve-
nise , à son retour de Pologne , la seigneu-
rie lui lit présent du manusciit qui con-
tenait les statuts de cet ordre. Ce prince
s'en servit pour établir son ordre A\iSai7it-
Espritj et commanda au chancelier de
Chiverny de faire brûler le livre; mais la
volonté du roi ne fut pas exécutée en ce
point, et le manuscrit fut conservé. Il a
été imprimé dans les Monumens de la
monarchie française^ de dom Montfau-
con, et depuis séparément , sous le litre
tle Mémoires pour servir à l'histoire de
France du quatorzième siècle ^ avec les
notes de l'abbé Le Fèvre , 176/t, in-8°.
LOUIS l", duc d'Anjou , deuxième lils
de Jean, roi de France, et de Bonne de
Luxembourg, naquit à Vincennes, en
4339. Il se chargea de la régence du royau-
me pendant la minorité de Charles VI,
son neveu. Il se trouva à la fatale bataille
tic Poitiers , où le roi Jean fut fait pri-
sonnier. Ce prince , devenu libre , donna
Louis pour ot-age; mais celui-ci s'évada
bientôt d'Angleterre , et fui nommé lieu-
tenant du Languedoc et de la Guienne. Il
battit les Anglais en 1573 et en 1577;
dans ce dernier combat , il fit prisonnier
Thomas Filton, leur général. Il ne s'était
occupé , pendant la régence que du soin
de remplir ses coffres, pour se mettre en
état d'aller prendre possession du trône
de Naples , que la reine Jeanne , citée
dans l'article précédent , lui avait légué,
l'an 1580 , i)ar son testament. Ce prince
»e rendit en Italie, deux ans après, avec
des trésors immenses, pour faire valoir
ses prétentions : mais quand il arriva, il
trouva le trône occupé par Charles de
Durazzo , parent de la reine, morte de-
puis peu. Il fit de vains efforts pour l'en
chasser. Trahi d'ailleurs par Pierre de
Craon ( voyez ce nom ) , qu'il avait ren-
voyé en France faire de nouvelles levées,
et qui dissipa tout l'argent à Venise avec
des courtisanes , il viiourut de chagrin à
Biseglia, près de Bari, le 20 septembre
458i, Ses descendans tentèrent , à diverses
reprises, de s'emparer de ce royaume,
et ne purent jamais y réussir.
LOUIS de FRANCE, duc d'Orléans,
comte de Valois , d'Ast , de Blois , etc. , se-
, cond fils du roi Charles V , naquit en 1571,
et eut beaucoup de part au gouverne-
ment pendant le règne de Charles VI ,son
frère. Jean, duc de Bourgogne, oncle du
roi, jaloux de l'autorité du duc d'Orléans,
00 LOU
le fit assassiner à Pai is le 25 novembre
1407. Ce meurtre fui l'origine de la i\\-
meuse division si fatale à la France entre
les maisons d'Orléans et de Bourgogne.
rotjez JEAN SANS-PEUR.
LOUIS de BOURBON , premier prince
de Condé. Voyez CONDÉ.
LOUIS de BOURBON, second prince
de Condé. Voyez CONDÉ.
LOUIS de BOURBON , |f oisième prince
de Condé. Voyez CONDÉ.
LOUIS- HEARI, duc de BOURBON,
prince de Condé. Voyez CONDÉ.
LOUIS-JOSEPH, dur. de BOURBON ,
prince de Condé. Voyez CO^Jit.
LOUIS- ArVTOmE- HENRI de BOUR-
BON-CONDÉ, duc d'Enghien. Voyez E^^
GHIEN.
LOUIS de BOURBON , duc de Montpen-
sier, souverain de Dombes , prince de la
Roche-sur- Yon , fils de Louis de Bour-
bon, né à Moulins en 1513, se signala
dans les armées sous François T"" et Henri
II , rendit de grands services à Charles IX
pendant les guerres civiles, soumit les
places rebelles du Poitou en 1574 , et mou-
rut dans son château de Champigny en
1583, à 70 ans.
LOUIS d'ORLÉANS, duc d'Orléans,
premier prince du sang, né à Versailles
en 1705, de Philippe, depuis régent du
royaume, reçut de la nature un esprit
pénétrant, propre à tout, et beaucoup
d'ardeur pour l'étude. Sa jeunesse fut
assez dissipée; mais après la mort de son
père et celle de son épouse, il quitta le
monde pour se consacrer entièrement aux
exercices de la pénitence, aux œuvres
de charité , et à l'étude de la religion et
des sciences. En 1750, il prit un appar-
tement à l'abbaye Sainte-Geneviève , cl
s'yjfixa totalement en 174'i. Il ne sortait de
sa retraite que pour se rendre à son con-
seil au Palais-Royal, ou pour visiter des
hôpitaux et des églises. Marier des filles,
doter des religieuses , procurer une édu-
cation à des enfans, faire apprendre des
métiers , fonder des collèges , répandre
ses bienfaits sur les missions, sur les
nouveaux établissemens : voilà les œuvre»
qui remplirent tous les inslans de la vie
de ce prince jusqu'à sa mort, arrivée le
4 février 1752 , et ce qui fit dire à une
auguste et pieuse princesse : Que c'était
un bienheureux qui laisserait après lui
beaucoup de malheureux. Le duc d'Or-
léans cultiva toutes les sciences ; il pos-
sédait l'hébreu, le grec, l'histoire sainte,
les Pères de l'Eglise, la géographie, la
LOU 5
physique , la peinture. On a de lui un
grand nombre d'ouvrajjcs en manuscrit.
Les principaux sont, suivant l'abbé Lad-
^•ocat, de qui nous empruntons ces par-
licularités : | des Traductions littérales ^
des Paraphrases et des Commentaires
sur une partie de l'ancien Testament;
I une Traduction littérale des Psaumes,
faite sur l'hébreu, avec une paraphrase
et des notes. Cet ouvrage est un des plus
complets de ce pieux et savant prince.
II y travaillait encore pendant la maladie
qui l'enleva , et il y mit la dernière main
peu de temps avant sa mort. On y trouve
des explications savantes et ingénieuses,
et une critique saine et exacte. Il est ac-
compagné d'un grand nombre de disser-
tations très curieuses et remplies d'éru-
dition , dans l'une desquelles il prouve
clairement que « les notes grecques sur
» les psaumes , qui se trouvent dans la
» Chaîne du père Cordier, et qui portent
» le nom de Théodore d'HéracIée , sont
» de Théodore de Mopsueste : b décou-
verte que ce prince a faite le premier.
I Plusieurs Dissertations conire les Juifs,
pour servir de réfutation au fameux livre
iiébreu intitulé Le Bouclier de la foi. Le
duc d'Orléans , n'étant point satisfait de
la réfutation de ce livre par Gousset, en-
treprit lui-même de le réfuter; mais il
n'a point eu le temps d'achever celte ré-
futation : I une Traduction littérale des
Epitres de saint Paul , faite sur le grec,
avec une paraphrase , des notes littérales
et des réflexions de piété ; | un Traité
contre les spectacles; | une Réfutation
solide du gros ouvrage français intitulé
Les Ilexaples. C'est là que ce prince
donne des preuves bien précises de son
attachement à l'Eglise , et de son cloigne-
ment d'un parti qui en combattait les dé-
cisions. Ceux qui avaient pu mal inter-
préter certaines singularités , et un air
de réforme peut-être trop prononcé , fu-
rent détrompés, et jugèrent que si ce
prince n'a pas assez évité d'être remar-
qué dans un temps où une secte insi-
dieuse abusait de l'appareil de la vertu
pour étendre ses conquêtes , c'est qu'il
u'a pas cru qu'elle pût se vanter un mo-
ment de l'avoir rangé parmi ses prosé-
lytes. I Plusieurs autres Traités et Dis-
sertations curieuses sur différens sujets.
II ne voulut jamais faire imprimer au-
cun de ses écrits.
LOUIS-GUILLAUME , prince de Ba-
den , né à Paris , le 8 avril 1655 , succéda
à son aïeul, s'attacha ensuite à l'empe-
91 LOU
reur, qui le nomma général, et se distin-
gua dans les guerres de Hongrie contre
les Turcs en 1G87. Il se trouvai la bataille
de Mohatx, et vengea, conjointement
avec le duc Charles V de Lorraine et l'é-
lecteur de Bavière, par une victoire com-
plète, la défaite que les chrétiens avaient
essuyée, le siècle précédent, dans celte
même plaine de Mohatz. 11 continua les
années suivantes à repousser les infidèles,
et les défit successivement à Jagodna,
près deNissa, ctàViddin, qu'il emporta,
après avoir battu un corps de 8,000
hommes. En 1G91, il gagna sur eux une
victoire signalée à Salankemen en Escla-
vonie ; le grand-visir resta sur le champ
de bataille avec près de 20,000 des siens.
En 1702 , il y eut entre lui et le duc de A'il-
lars , à Fridelingen , une aclion pour la-
quelle on chanta le Te Deum. à Vienne et
à Paris. Il commanda sur le Rhin les an-
nées suivantes, et se trouva à la bataille
de Hochstet en 1704 , et au siège de Lan-
dau la même année. Il fut récompensé
par le gouvernement de Javarin, et fut
nommé , peu après maréchal de camp gé-
néral de l'empire. Il mourut le 4 janvier
1707 , à 52 ans , avec la réputation d'un
des plus grands capitaines de son siècle.
LOUIS - FRANÇOIS de BOURBON,
prince de CONTI. Foyez CONTI.
LOUIS (Pierre de SAINT). J^oyez
PIERRE.
LOUIS le Maure. Voyez SFORCE.
LOUIS de LORRAINE. Foyez GUISE.
LOUIS (Antoine), célèbre chirurgien,
né à Metz le 13 février 1725 , a su réunir
au plus haut degré , dans l'exercice de la
chirurgie , la théorie et la pratiqua. Sa
théorie, dirigée sur les principes des
plus grands maîtres, était fondée sur
une connaissance approfondie des au-
teurs anciens : elle lui a fourni de nou-
veaux documens sur l'art, consignés dans
ses ouvrages , et surtout dans le Recueil
de l'académie de chirurgie. Placé très
jeune à l'armée , en qualité de chirurgien
aide-major , il s'acquit par ses talens l'a-
mitié de La Peyronie , premier chirur-
gien du roi, fut nommé en 1757, sub-
stitut de Dufouart , alors chirurgien en
chef de l'hôpital de la Charité , puis
chirurgien - major consxillant de l'ar-
mée du Haut-Rhin (1761). De retour à
Paris , s'étant livré à la grande pratique
de la chirurgie, il a toujours opéré avec
sûreté et intelligence. Devenu secrétaire
de l'acadcniie de cliirurgie, il remplit
cette i)lace autant en homme d'érudition
LOU
K92
LOU
et de lettres qu'en homme consommé dans
la science de sa profession. Parmi les di-
vers écrits de Louis, il en est qui regar-
dent des différends survenus entre les
médecins et les chirurgiens, et autres ob-
jcls qui concernent la partie littéraire
ou légale de la chirurgie. Parmi les ou-
vrages qui ont pour objet la pratique de
son art , on distingue ses Lettres sur la
certitude des signes de la jnort ^ 1753,
in-12 , ouvrage devenu rare , et le Paral-
lèle des différentes méthodes de traiter
la maladie vénérienne ^ yiubYié en 17Ci ;
les articles de chirurgie qu'il a fournis à
Y Encyclopédie j et qui ont été imprimés
séparément sous le titre de Dictionnaire
de chirurgie, Paris, 1772, in-8°; divers Mé-
moires imprimés à différentes époques ;
\ Eloges de Bassuel , Malaval et Ver-
dier, de Bertrandi, etc. Il mourut à Paris
d'une hydropisie de poitrine, le 13 fé-
vrier 1792. Il a voulu , par son testament,
que ses cendres reposassent à côté de
celles des pauvres qu'il avait servis dans
un vaste hôpital^ la Salpétrière), où il
était entré en qualité d'élève à l'âge de 21
ans , et où il avait gagné sa maîtrise par
un travail consécutif de six années. Ce-
pendant le même homme qui a voulu
être enterré au cimetière de l'hôpital de
la Salpétrière , le même homme, ancien
ami de l'abbé Prévôt , l'abandonna dans
la maladie dont mourut cet écrivain cé-
lèbre , par celte seule raison que , chré-
tien éclairé , quoique long-temps égaré ,
il avait jugé devoir consacrer à la reli-
gion ses derniers momens. On a reproché
aussi à Louis d'avoir débuté, très jeune
encore, par une Zef^re sur l'électricité,
critique amère contre l'abbé NoUet, phy-
sicien alors célèbre , dont il suivait les
leçons. Il fut l'auteur d'une Thèse donnée
sous le nom d'un de ses élèves, et qui,
par son sujet, prêta à la curiosité et à la
l)laisantcrie : Jn certœ sint virginitatis
noto," Au jugement des vrais sa vans, il
n'y développa que des vues superficielles
ou fausses. M. Pellelan, membre très
distingué de l'académie de chirurgie ,
dans un éloge nécrologique de Louis, re-
marque fort judicieusement que ce ne fut
pas un homme de génie ; mais il fut abon-
dant. Son humeur était vive, brusque et
souvent emportée ; son esprit de société
était parfois celui de la raillerie ; et son
caractère , celui d'une vanité excessive.
Franc et tranchant , il ne dissimulait ja-
mais aucune de ses opinions, quelles
qu'elles fussent , sans réfléchir sur les con-
séquences d'ane véracité imprudente, et
sans jamais douter de la justesse de ses
jugemens.
LOUISE de SAVOIE , duchesse d'An-
gouléme, fille de Philippe, comte de
Bresce, puis duc de Savoie, et de Mar-
guerite de Bourbon, épousa, en 1488, à
l'âge de 12 ans, Charles d'Orléans, comte
d'Angouléme , et fut mère du roi Fran-
çois I". Veuve à l'âge de 18 ans, elle se
retira au château de Cognac, revint à la
cour à l'avènement de Louis Xll , fut
nommée régente en 1515, au préjudice
de la reine Claude , quand François I",
devenu roi, partit pour l'Italie. Cette
princesse est principalement célèbre par
la mort du surintendant des finances
Samblançay, auquel elle extorqua six
millions de notre monnaie d'aujour-
d'hui, et qui fut condamné à la peine
capitale pour ce seul fait , dont une con-
séquence désastreuse fut la perte entière
d'une armée en Italie , qui y périt de mi-
sère , faute de cette somme que le roi lui
avait destinée. Elle est encore célèbre par
ses démêlés avec le connétable Charles,
duc de Bourbon : elle avait d'abord beau-
coup aimé ce prince, et avait même ob-
tenu pour lui l'épée de connétable : mais,
piquée ensuite de ce qu'il avait refusé de
l'épouser , son amour se tourna en une
haine violente. Elle revendiqua les biens
de la maison de Bourbon , dont elle était
héritière du côté de sa mère, et qu'elle
prétendait lui appartenir par la proxi-
mité du sang. Les juges ne furent pas
assez corrompus pour adjuger cette suc-
cession à la régente; mais ils furent as-
sez faibles pour la mettre en séquestre.
Bourbon, se voyant dépouillé de ses
biens, quitta la France , et se ligua avec
l'empereur Charles-Quint. Louise signa
en 1529 avec Marguerite d'Autriche, gou-
vernante des Pays Bas, le traité de Cam-
brai, nommé aussi, à cause de celle cir-
constance, le Traité des dames. Cette
princesse mourut peu de temps après à
Grcz en Gatinois en 1532 , à 5.'i ans, re-
gardée comme une femme aussi propre
à une intrigue d'amour qu'à une affaire
de cabinet. On trouva dans ses coffres
1,500,000 écusd'or. Cette princesse laissa
un Journal des événemens de son temps
( 1501-1522), qui a élé inséré par Guiche-
non dans les preuves de l'histoire généa-
logique de la maison de Savoie . et rjéim-
primé à la suite des Mémoiies de du Bel-
lay, et dans le tome \^>\c'i Mémoire s par-
ticnUers relatifs à l'histoire de France.
LOU 59
LOUISE - MARGUERITE de LOR -
RAINE , princesse de Conti , fille de Henri,
duc de Guise , et femme de François de
Bourbon , prince de Conti , née à Blois en
1588, perdit son époux en i61/t,etmourutà
Eu, en 4631. On a d'elle un ouvrage assez
frivole , les amours du grand Alcandre ,
dans lo journal de Henri III, 1744 ,5 vol.
in-8°. C'est une histoire des amours de
Henri IV, avec le récit de quelques ac-
tions louables et de quelques paroles de
ce prince.
LOUISE-MARIE de GONZ AGUE , reine
de Pologne. Voyez GONZAGUE.
LOUISE de FRANCE , fille de Louis XV,
née le 14 juillet 1737, religieuse carmélite
de Saint-Denys en 1771 , sous le nom de
Thérèse de Saint- Augustin , mourut d'un
coup d'apoplexie , lo 23 décembre 1787 ,
daxis la 50*^ année de son âge. Les plus
grands sacrifices n'avaient rien coûté à
cette princesse pour suivre les mouve-
mens de sa piété. Depuis le moment
qu'elle entra au couvent des carmélites
jusqu'à celui de son décès, elle ne cessa
d'édifier sa communauté par les senti-
mens les plus religieux , ainsi que par la
pratique la plus exgcte des règles austères
de son ordre. Sa mort excita les plus vifs
regrets de tous les gens attachés à la re-
ligion. C'était la mère des pauvres et des
affligés, toujours prêle à employer ses
moyens et son crédit pour toutes les
œuvres saintes et charitables; et pour ci-
ter un fait entre mille , c'est à sa soUicifa-
lion et à son z.èle que les religieuses des
Pays-Bas, expulsées sous le règne de l'em-
pereur Joseph H , furent reçues et ac-
cueillies en France. « Les fastes de TE-
^ glise , dit un auteur , nous offrent de
» fréquens exemples de reines et de prin-
» cesses qui se sont dérobées à l'éclat et
0 aux délices de la cour , pour se dévouer
9 à la solitude et aux austérités du cloître :
t> quelque admirables , quelque héroïques
» que fussent de pareils sacrifices, ils ont
p dû paraître moins étonnans, sans doute,
0 dans ce temps où la piété était en hon-
t neur, où le monde payait un tribut pu-
» blic de respects et d'hommages à ces
» âmes nobles et courageuses, qui se con-
» sacraient dans la retraite à la pratique
» des plus sublimes conseils de l'Evan-
» gile. Mais dans un siècle tel que le
» nôtre, où de vains et d'orgueilleux rai-
» sonneurs, incapables de s'élever au-des-
» sus des froids calculs de l'égoïsme ,
» o?pnt traiter de superstition et de fai-
» blesse les victoires mêmes que la reli-
5 LOU
» gion remporte sur la nature ; dans un
» siècle où les demeures sacrées qui ser-
» vent d'asile à la vertu et à l'innocence,
» contre les vices et la corruption de la
» société, sont devenues l'objet du mépris
» et de la dérision publique , et regardées
D comme des monumens du fanatisme et
» de l'imbécillité de nos aïeux ; quand on
» voit la fille du plus puissant roi de l'uni-
» vers, supérieure aux faux jugemens des
» hommes , préférer aux fastes du trône
» l'obscurité d'un monastère , s'arracher
» aux plaisirs et aux honneurs , pour se
» livrer aux exercices de l'humilité et de
» la pénitence , ce trait de grandeur d'âme
» est assurément le plus beau triomphe
» de la foi sur l'incrédulité , et il semble
i> que l'Etre suprême réservait à notre
» siècle ce grand spectacle, pour lui mon-
» trer que la religion sait , beaucoup
» mieux que la philosophie , élever une
» âme au-dessus des passions et des fai-
v> blesses de l'humanité.. » M. de Sancy fit
à cette princesse l'épilaphe suivante , qui
finit par une espèce de prophétie , trop
tôt accomplie :
Du iommet dct grandeurs au tommet du Carmcl,
Et des marcfaei du trdoe aux marches de l'autel,
Louise avait franchi cet immense intervalle,
Préférant le cilice à la pompe royale.
Mais Dieu l'a fait monter, en ce jour^lorieux
Des ténèbres du cloître à la splendeur des cieuc.
Lli , près de sain t Louis , de son angaite frère , '
Elle unira ses vœux, aux pieds du Tout-Puissant,
Pour écarter des yeux d'un prince bienfaisant
L'horrible impiété , les désordres , la guerre,
Ces fléaux destructeurs d'un état florissant.
M. François, prêtre de la mission , dans l'o-
raison funèbre, qu'il prononça dans l'église
des carmélites de la rue de Grenelle , en
l'honneur de la pieuse princesse , semble
avoir annoncé ces fléaux -dans le passage
suivant : « Saint Paul, dans Athènes, sen-
» tait son cœur frémir et ses entrailles se
» déchirer à la vue de ce peuple , le plus
» poli et le plus aimable de tous les peuples,
» plongé dans les ténèbre» de l'idolâtrie.
» Avec quel déchirement plus cruel en-
» core , Thérèse de saint - Augustin ne
» voyait-elle pas la foi de ses pères se re-
» froidir et s'obscurcir dans un royaume
» où elle avait répandu autrefois un si
» grand éclat ! les temples presque de-
» serts, les autels abandoimcs, le culte
» négligé , le refroidissement du zèle
«parmi les minisires de la religion, le
» sel de la terre affadi , le feu de la fer-
» veur éteint dans les asiles élevés pour
» sa conservation. Avec quelle tristesse et
» quelle douleur elle voyait encore la cor-
50.
LOU
u rupUon des mœurs étendre ses
» vages , la philosophie audacieuse me-
» nacer de tout envahir , les scandales de
» tout submerger, la débauclie sans honte,
» la licence sans frein , et l'indifférence
■ apathique, le dernier de tous les excès,
» parce qu'elle ne laisse presque plus au-
» cune espérance, ni de retour ni de re-
6 mède! Aussi Thcj-èse de Saint-Au{îuslin
» ne coule plus ses jours que dans l'abat-
» tement et dans la langueur : c'est Héli ,
» qui ne peut plus survivre à la prise de
» l'archo ; c'est Eléazar , qui s'immole , de
» peur d'être témoin de la désolation qui
» menace son peuple. O France ! ô nation
I) jusqu'ici favorisée des cieux! apprends
» que ce sont tes abominations qui préci-
» pitent le cours d'une vie si précieuse ,
» et que la fille de tes rois n'expire que
» de l'excès de tes maux ; mais apprends
» en même temps à profiter des derniers
j> momefts qui terminèrent une si sainte
» carrière. » U a paru une Histoire de la
vie édi/imite de cette princesse, Paris,
1788. Elle présente un tableau de vertus
pures, et des détails pleins d'intérêt pour
les âmes chrétiennes; mais l'auteur, pour
la rendre également intéressante pour les
gens du monde, y a fait entrer bien des
choses étrangères à son sujet. C'est d'ail-
leurs un mélange de vers et de prose,
qui , pour la forme , fait ressembler cette
Histoire au Voyage de Bachaumont.
Quelques-uns de ces vers sont néanmoins
bcureusemenî amenés, tels que ces vieilles
euiiices du naïf liacan :
Cet hautes qualités de tîtes couronoe'et ,
Ce$ trône», ces e'tats pendant quelques années
Contentant notre vanité;
Mais toute celte gloire est courte et variable;
Il n'en reste non plus que d'un songe agréable
Quand on est dans l'éternité.
Là , les soupirs des coeurs accablés de tristesse
Seront mieux entendus que des chants d'allégresse,
Qui sortent des esprits contens ;
Et là , les vieux lambeaux qui couvrent l'innocence.
Seront plus estimés que la magnificence
Des habits tes plus éclatans.
Cet ouvrage a été réimprimé à Lyon, en
1817, avec des augmentations considé-
rables. On en a fait disparaître tout ce qui
était étranger au sujet, tels que les vers
et des passages tirés de Voltaire. L'abbé
Proyarl a publié la Vie de madame
Louise ; ouvrage estimé et extrait de mé-
moires authentiques , Bruxelles , 1793 ,
in-12, k" édition; Lyon, 1818, 2 vol.
jn-12 , augmentée de plusieurs anecdotes
curieuses, extraites de mémoires authen-
tiques , des lettres de la princesse , dont
594 LOU
ra- le recueil a été confié à cet ecclésiastique,
et d'une relation de la suppression des
carmélites dans les Pays-Bas-, sous l'em-
pereur Joseph II , et de leur translation
au monastère de Sl.-Denys en France ,
à la sollicitation de madame Louise. Cet
ouvrage a été réimprimé à Lyon, 1829,
2 vol. in-12 : « Il n'est pas étonnant, dit
i> l'Jmi de la Religion^ du 8 juillet 1829,
» (tom. 60 , p. 272) qu'on léimprime si
» souvent un livre qui présente un aussi
» grand exemple. La fille d'un roi s'arra-
» chant aux douceurs et aux illusions de
I) la cour pour aller habiler un cloître ,
» c'est ce qui ne peut manquer d'étonner
» dans un siècle tel que le nôtre. On ad-
» mirera dans celle vie le courage , le dé-
B vouement et en même temps la slmpli-
» cité et la gaieté d'une princesse inspirée
n par une piété tendre el éclairée. » Sa vie
est en effet bien projtie à ramener les
personnes qui s'effraient au seul nom de
pénitence. Que peut-on en effet trouver
de difficile, lorsque celle princesse, élevée
dans le sein des grandeurs , d'une santé
faible et languissante , fourtût fexemplc
et le modèle de toutes les vertus? Parmi
les diverses Oraisons funèbres consa-
crées à la mémoire de cette i)rincesse ,
on dislingue , outre celle dont nous avons
parlé , celle de M. l'abbé Ainalric , pro-
noncée dans l'église des carn>éliles de
Saint-Denys ( voyez le Journal historique
et littéraire^ i" novembre 1788, page 532),
et celle de fabbé du Serre-Figon, pro-
noncée dans l'église des carmélites de
Pontoise ( ibidem . 15 mai 1789, page 103.)
LOUISE -ADÉLAÏDE de BOURBON-
CONDÉ. Vogez CONDÉ.
LOUP (saint), en latin Lupus, né à
Tout , vers le commencement du 5' siècle,
épousa la sœur de saint Hilaire , évêque
d'Arles. La vertu avait formé celle union ;
une vertu plus sublime la rompit. Les
deux époux se séparèrent l'un de l'autre ,
pour se consacrer à Dieu chacun dans un
monastère; Loup s'enferma dans celui
de Lérins. Ses vertus le firent élever sur
le siège de Troyes en k-27. l^nlièreinent
occupé des devoirs de i'épiscopat , il
mérita les respects et les éloges des plus
grands hommes de son siècle. Sidoine
Apollinaire l'appela le premier des j'ré-
lats. Les évéqucs des Gaules le dépu-
tèrent , avec saint Germain d'Aujierre ,
pour aller combattre les pélagiens qui
infectaient la Grande-Bretagne. Celle mis-
sion produisit de grands fruits. Loup . de
retour à Troyes, sau^ a cette viilcr de la
LOU 59
fureur d'AUila; ce barbare conquérant
s'appelait lui-même le fléau de Dieu , se
croyant destiné à punir les péchés des
peuples. Déjà Reims, Cambrai, Besan-
çon, Auxcrre et Langres avaient ressenti
les effets de sa fureur. Ses coups allaient
tomber sur Troyes : les habitans de cette
ville étaient dans la plus grande conster-
nation. Saint Loup intercéda pour son
peuple auprès de Dieu , auquel il adressa ,
durant plusieurs jours , des prières fer-
ventes, accompagnées de larmes, de
jeûne* et de plusieurs autres bonnes
oeuvres. Enfin , mettant sa confiance dans
la protection du Ciel, il prit ses habits
pontificaux, et alla trouver Attila, qui
était à la tête de son armée. Le prince
barbare, quoique infidèle, fut pénétré
de respect à la vue du saint évoque , suivi
de son clergé en procession et précédé de
la croix. Lorsque le serviteur de Dieu fut
auprès du roi des Huns, il lui adressa la
parole , en lui demandant qui il était :
« Je suis, dit Attila, le fléau de Dieu.
» — Nous respectons, reprit le saint, ce
» qui nous vient de la part de Dieu ; mais
» si vous êtes le fléau avec lequel le Ciel
» nous châtie , souvenez-vous de ne faire
» que ce qui vous est permis par la main
» toute-puissante qui vous meut et vous
» gouverne. » Attila, frappé de ce dis-
cours , promit d'épargner Troyes. Ainsi
les prières de saint Loup protégèrent une
ville dépourvue de tout secours, contre
une armée de 400,000 hommes, qui,
ayant ravagé la Thrace, l'illyrie et la
Grèce, avait passé le Rhin, et porté en-
suite la désolation dans les contrées les
plus fertiles de la France. Attila, ayant
tait retirer ses troupes de devant Troyes,
s'avança dans les plaines de Chàlons. Il y
fut attaqué et défait par les Romains, que
commandait le brave Aétius. Durant sa
retraite, il envoya chercher saint Loup,
et le pria de l'accompagner jusqu'au
Rhin, s'imaginant que la présence d'un
si grand serviteur de Dieu serait une
sauve-garde assurée pour lui et pour son
armée. Lorsqu'il le renvoya, il se recom-
manda instamment à ses prières. Cette
action du saint évêque déplut aux géné-
raux de l'empire : on le soupçonna d'a-
voir favorisé l'évasion des Barbares ; et
il fut obligé de quitter Troyes pour deux
ans. Mais , par sa patience et sa charité ,
il triompha de l'envie et de la malice des
hommes. On lui permit de revenir dans
son diocèse , où il mourut le 29 juillet i78
après l'avoir gouverné 32 ans. On garde
0 LOU
son corps à Troyes dans l'église qui porte
son nom. Il y avait anciennement en Aft-
gletcrre plusieurs églises dédiées sous
son invocation. Le père Sir moud a publié
une Lettre de cet illustre évêque dans le
l*^"" vol. de sa Collection des conciles de
France. L'Eglise célèbre sa méiuoire le
29 juillet. On trouve dans le Spicilège d«
doui Louis d'Acheri, lom. 5, et dans le 1"
vol. de la Collection des Conciles, ime
Lettre de saint Loup à Sidoine Apolli-
naire. — Il ne faut pas le confondre avec
saint LOUP ou saint LEU , évêque de
Lyon , mort en 542, ni avec saint LOUP
ou saint LEU, évêque de Baycux, mort
vers 465.
LOL'P, en latin Servatus Lupiis , abbé
de Ferrières , regardé comme l'écrivain
le plus poli de la France du neuvième
siècle, naquit vers l'an 805, et parut
en 844 au concile de Verneuil, dont il
dressa les canons, et à celui de Soissons
en 853. Le roi et les évêques de France
lui commirent plusieurs affaires impor-
tantes. Charles le Chauve l'envoya à Rome
vers le pape Léon IV en S/i7, et le char-
gea de réformer tous les monastères de
France avec le célèbre Prudence. On ne
trouve plus de traces de ce prélat. Loup
mourut vers 862. Il est le même que Loup
Servat, comme lont démontré le père
Sirmond et Baluze contre 5Iauguin. On a
de lui plusieurs ouvrages : | Lettres sur
différens sujets {liber Epistolanim ) ; elles
sont au nombre de 154, et mettent dans
un grand jour plusieurs affaires de son
teinps. On y trouve divers points de doc-
trine et de discipline ecclésiastique dis-
cutés ; elles ont été publiées par Papire-
Masson, Paris, 1588, in-8°, insérées dans
les Scriptores Fraiicoruin de Duchesne ;
publiées de nouveau par Baluze avec
notes ; cette édition est la meilleure, j Un
traité intitulé : Des trois questions (de la
prédestination , du libre arbitre et de la
rédemption de J.-C), contre Gotescalc.
L'auteur s'y attache à la doctrine des
Pères , et surtout à celle de saint Augus-
tin. Cet ouvrage a été publié en 1648 in-iâi,
sans nom de ville ; à Paris , 1650, in-S**,
par Sirmond dont l'édition est excellente;
1 une Fie de saint Wigbert. Le style de
Loup est clair , élégant et nerveux. Baluze
a recueilli ces différens écrits, Paris, 1664 ,
in-8°, et les a enrichis de notes curieuses.
On en a fait une nouvelle édition avec des
corrections et des additions, à Leipsirk ,
sous le nom d'Anvers, 1710. Voyez Vflist.
Utlcr. de France . tom . 5.
LOU
• LOUTHERBOURG , ou plus exacte-
ment LUTHERBURG (Philippe- Jacques),
peintre, né à Strasbourg le 31 octobre
4740, d'un père qui était lui-même peintre
et originaire de Bàle , fut élève de Tisch-
bein, et ensuite de Casanova, et devint
membre de l'académie de Paris en 1768.
Ce peintre se fut bientôt fait connaître
par son talent à rendre les batailles, les
chasses , les paysages , et surtout les ani-
maux. En 1771, il fut appelé en Angle-
terre où on lui donna un traitement de
mille livres sterling, pour y tracer le
croquis des décorations du grand opéra.
Loutherbourg exécuta aussi dans ce pays,
pour le roman de Tom- Jones , plusieurs
compositions gracieuses qui ont été re-
produites par le burin. L'impératrice de
Russie désirant avoir , de la main de cet
artiste , un tableau représentant le pas-
sage du Danube par l'armé» russe sous
le commandement de Romanzoff , Lou-
therbourg , pour mettre plus de fidélité
dans l'exécution des détails , demanda et
obtint de cette princesse un modèle de
chaque espèce d'armes des différentes na-
tions qui dépendaient de son vaste em-
pire : il se forma ainsi un des cabinets
les plus curieux de l'Angleterre. Il ac-
compagna Cagliostro en Suisse , et voulut
un moment s'y fixer; mais il revint à
Londres où il est mort vers 1814. Le mu-
sée du Louvre ne possède point de ta-
bleaux de ce maître : il existe au château
de Rambouillet une bataille qui peut être
placée à côté des meilleures productions
de Wouvermans. Ce peintre avait une
exécution facile, une touche franche et
un colorig plein de fraîcheur , quoique il
fût quelquefois un peu cru. R a lui-même
gravé avec succès, surtout d'après ses
propres compositions : l'on cite deux suites
de soldats > composées de six pièces cha-
cune; les quatre heures du jour; \di. Tran-
quillité champêtre ; la Bonne petite sœur;
»ies Costumes Maronites^ etc. On lui at-
tribue l'invention du Théâtre pittoresque
et mécanique , que l'artiste Pierre a mis
depuis en œuvre. Les essais de Louther-
bourg dans ce genre ont été décrits dans
ie Journal littéraire d'Allemagne , intitulé
l'Eïdophjjsion. Le Magasin encyclopé-
dique^ année 1819, n°4, renferme une
notice sur Loutherbourg.
LOUVART ou LOUVARD ( dom Fran-
çois ), bénédictin de Saint -Maur, ap-
pelant .naquit en 1662, à Claux-Généreux,
dans le diocèse du Mans. Il fut le pre-
mier de sa congrégation qui s'éleva contre
59(^ LOU
la constitution Unigenitus. Ce religieux ,
qui aurait dû rester dans la retraite et
dans l'obscurité, écrivit à quelques prélats
des lettres si séditieuses , que le roi le fit
enfermer à la Bastille, et en d'autres
maisons de force. Il disait , dans une de
ces lettres , qu'iY fallait soutenir ce qu'il
appelait \a vérité^ contre la fer Je feu ^ le
temps et les princes.... et dans une autre
qu'u7ie bonne et vigoureuse guerre valait
mieux qu'un mauvais accommodement.
Il s'évada de sa prison et se réfugia à
Schoonhove , près d'Utrecbt , où il mou-
rut, en 1739, âgé de 77 ans, laissant une
Protestation qui fit beaucoup de bruit,
quand elle vit le jour : il l'avait composée
au château de Nantes, 5 mois avant sa
mort. Il avait publié le prospectus d'une
édition des OEuvres de saint Grégoire de
Nazianze qui n'a point paru.
* LOUVEL (PiERRE-Louis), assassin
du duc de Berry, naquit en 1783 , à Ver-
sailles. Son père qui tenait dans cette ville
une petite boutique de mercerie le plaça
aux eufans trouvés ; et en sortant de
l'hospice , où il avait été mis, il apprit l'é-
tat de sellier, qu'il exerça ensuite à Paris,
dans les écuries de Napoléon. Dès sa pre-
mière jeunesse , il montra un caractère
sombre , mélancolique et atrabilaire. Il
fuyait toute société, et, concentré en
lui-même , il ne se plaisait que dans la
solitude. On a su plus tard qu'il faisait sa
lecture habituelle des Droits de V homme
et de \di constitution^ peut-être celle de 1793.
La chute de Bonaparte , l'entrée à Paris
des alliés, et le retour des Bourbons, ex-
citèrent dans Louvel une haine implaca-
ble contre la famille de nos rois. Il partit
pour Calais , et y attendit Louis XVIIl ,
dans le dessein de l'assassiner. N'ayant
pu accomplir son projet, il revint à Pa-
ris , et se rendit de là à Fontainebleau ,
puis à l'ile d'Elbe , mais il n'y a pas de
preuves qu'il ait parlé à Napoléon. II alla
s'établir à Chambéry , et retourna en
France pendant les cent-jours. Plus tard il
obtint un emploi de sellier dans les écu-
ries royales. Il fit encore un voyage à Meta
et La Rochelle , et revint pour la troi-
sième fois à Paris. Son dessein était de
frapper le plus jeune de nos prince»,
comme celui qui promettait avec le plus
de certitude une postérité à son auguste
famille. Un soir que le ducde Berry se trou-
vait avec son épouse au théâtre de l'Opéra
(c'était le 13 février 1820), lK)Uvel s'ap-
proche du théâtre , et tâche de lier conver-
sation avec le factionnaire auquel il offre
LOU
397
LOU
un verre dé rhum. Celui-ci refuse. LouvÈÎ
feint de se relirer ; mais au moment où le
duc de Berry sortait de la salle , recondui-
sant son éjiouse à sa voilure, il se glisse
cMilrele factionnaire et un {renlillioinme
de la suite du prince , saisit S. A. R. par
l'cpaule gauche , lui plonge dans le sein
droit un poignard qu'il laisse dans la bles-
sure, et prend Ir fuilc. Le duc de Berri
croit d'abord qu'il a été heurté par quel-
que curieux imprudent. Cependant il
chancelle, et se sent défaillir; il porte la
main sur le fer, et l'arrache de la plaie en
sccriant : a Je suis assassiné ; je tiens le
0 poignard. » {J'oijez CHARLES- FER-
DINAND ). On court après l'assassin.
Louvel s'était dirigé vers l'arcade Col-
bert : une voiture de place lui barre par
hasard le passage ; il l'évite , et va heur-
ter contre un garçon limonadier; ils lut-
tent ensemble ; un soldat arrive, saisit Lou-
vel, et le mène au corps-de-garde. On
trouva sur lui des papiers insignifians et
une. alêne de sellier longue et affilée ,
munie de sa gaine. Presque au moment
même il subit , en présence de M. Déca-
des , alors ministre de l'intérieur, plu-
sieurs interrogatoires successifs. Il avoua
son crime , qu'il attribuait à sa haine pour
les Bourbons, et déclara que depuis six
ans il méditait ce meutre; et que s'il avait
pu s'échapper, il aurait porté ses coups
sur la personne du duc d'Angoulême, et
ensuite sur le roi lui-même. Il affirma
obstinément qu'il n'avait pas de com-
plices, qu'il avait médité seul son projet.
Conduit d'abord à la conciergerie , il fut
ensuite transféré aux prisons du Luxem-
bourg. Le roi ayant ordonné qu'il sérail
jugé par la chambre dos pairs, M. le pro-
cureur-général, Bcllart , employa trois
mois à faire les plus scrupuleuses re-
clierches; il délivra 50 commissions ro-
gatoires; il entendit 1200 témoins, et après
ces informations, il déclara , dans sou
acte d'accusation, le 12 mai, « Qu'il ne
« s'était point trouvé de complices. » L'ac-
cusé comparut , le ..-i juin , à la barre de la
Cour, présidée par le chancelier Dam-
bray. 11 y conservail son air sombre , mais
calme , et reconnul le poignard , grossiè-
rement travaillé, qu'un maître coutelier
déclara n'avoir pas été fabriqué par un
homme du métier. A toutes les demandes
que lui firent M. le président et plusieurs
pairs , à toutes les exhortations par les-
quelles ils essayaient d'ébranler son âme,
on ne put obtenir de lui que les mêmes
réponses qu'il avait failes dans ses pre-
miers interrogatoires ; il soutint à plu-
sieurs reprises , d'un ton ferme et déter-
miné, qu'il n'avait point de complices,
qu'il n'avait communiqué à personne son
*odieux projet, et qu'il avait voulu être,
à lui seul , le sauveur de la France , pour
laquelle il se sacrifiait. Interrogé sur sa
religion, il répondit qu'il avait élé tantôt
catholique, tantôt prolestant, tantôt théo-
philanirope , suivant les cii-coîistances.
Il avait pour défenseurs IMM. Archam-
bault et Bonnet, bâtonniers de l'ordre
des avocats, qu'on avait nommés d'office
en vertu de la loi. Louvel voulut aussi
prendre la parole, ce qui lui fut accordé,
et il prononça un discours que nous tran-
scrivons textuellement : « J'ai à rougir
» aujourd'hui d'un crime que j'ai commis
» moi tout seul La France n'est pas
» déshonorée ; pas plus que ma famille....
» On m'accuse d'avoir assassiné un prince
» de la famille royale : Oui, j'en suis cou-
» pable ; j'ai voulu détruire les ennemis
» de la patrie. Je me suis dévoué pour la
«France Les hommes du gouverne-
» ment sont plus coupables que moi : ils
» ont pris des crimes pour des vtrtus et
» des vertus pour des crimes. Quand les
» étrangers sont entrés en France, tous
» les Français devaient se réunir. Suivant
» moi , dans mon idée , un homme exilé
» est à plaindre ; mais si un Français , qui
» est obligé de sortir de Fiance , s'occupe
» de nuire et porte les armes contre sa
» patrie, il n'est plus Français. Je ne puis
» m'empêcher de penser que si la bataille
» de Waterloo a été perdue c'est que des
» Français étaient à Bruxelles et à Gand.
» Suivant moi, dans mon senfluienl,l» mort
» de Louis XVI était nécessaire. La France
» l'a voulue. Si une poignée d'inlrigans s'é-
» tait présentée aux portes du château
» c'est différent. Il est resté en arrestation
» avec sa famille long-temps Aujour-
» dhui , suivant moi, dans nuja opiniqn ,
» les Bourbons sont coupables. La nation
» est déshonorée Je vous fais mes
1) adieux. » A ces phrases où l'on retrouve
les doctrines révolutionnaires exprimées
dans un style grossier, Louvel en avait
ajoulé,daus son écrit , plusieurs autr.
non moins révoltantes, que ses conseils
parvinrent à lui faire supprimer. L'accusé
fut déclaré coupable, après deux heures
de déiibéralion et condamné à mort. La
veille de son supplice, il eut la fantaisie
singulière de vouloir coucher dans des
draps fins; on les lui donna, et il passa
une partie de la nuit à écrire à ses pa-
LOU
598
LOU
rens , se couclia ensuite et dormit d'un
sommeil paisible! Louvcl avait refusé d'a-
bord un confesseur ; il se décida enlin à
recevoir et à entendre M. l'abbé Montés ,
aumônier de la Conciergerie. Le 7 juin
1820, jour de l'exécution, M. Bellart vint
l'interroger pour la dernière fois , mais
Bans en obtenir d'éclaircissemens nou-
veaux. On avait déployé dans toutes les
rues par où devait passer le criminel , et
sur la place du Carrousel , une force ar-
mée imposante. Louvel arriva sur la
place à six heures du soir. II éprouva un
mouvement de faiblesse à l'aspect des ap-
prêts de son supplice, et les bourreaux
furent obligés de le soutenir pour monter
sur l'échafaud. Après qu'il eut eu un court
entretien avec le confesseur, l'exécuteur
s'empara de l'assassin et, dans moins
d'une seconde , Louvel avait subi la pu-
nition de son forfait. On peut consulter
sur Louvel, l'Histoire de son procès ^ pu-
bliée par Maurice Mejan, Paris, 1820, 2
vol. in-8°.
LOUVENCOURT (Marie de), poète,
née à Paris , morte dans la même ville au
n)ois de novembre 1712 , âgée de 32 ans ,
apporta en naissant des dispositions heu-
reuses pour les beaux arts. J.-B. Rous-
seau l'a peu ménagée dans ses Epitres;
mai» l'on ne doit pas toujours s'arrêter
au jugement d'un poète piqué. Mademoi-
selle de Louvencourt a particulièrement
réussi dans la poésie erotique. Ses vers
sont la plupart des cantates mises en
musique : elles ont été gravées. On a en-
core quelques-unes de ses poésies dans le
Recueil de Vertron.
LOUVENCOURT (Marie- Joachim-
JiiLizABKTH de), née en 1747 d'une fa-
mille distinguée, et morte en odeur de
sainteté à Amiens en 1778, a donné de
grands exemples de vertu , et surtout
d'une active et courageuse charité envers
e prochain. Sa p^ie a été imprimée àMa-
jnes en 1781, un vol. in-12.
LOUVER ouLOWER (Richard), né
vers 1631 à Tremère , dans la province
de Cornouailles, disciple de Thomas Wil-
lis, exerça la médecine à Londres avec
réputation. II était du parti des wighs ,
et mourut en 1091. Ce médecin pratiqua
la transfusion du sang d'un animal dans
un autre. Il voulut même passer pour
l'inventeur de cette opération empirique
dont il promettait de grands avantages ,
et qui n'en a produit aucun ; mais il ne
fil que la présenter sous un nouveau jour ;
car il est (Certain que Libavius est le pre-
mier qui en ait donné l'idée. ( Foy. LI-
BAVIUS. ) Les principaux ouvrages do
Louver sont : | un Traité du cœur ^ du
mouvement et de la couleur du sang , et
du passage du chyle dans le sang, Lon-
dres ,'1669; Leyde, 1722 , in-8° , et 17i9;
traduit en français, 1679, in-8°. Louver
est le premier qui ait éclairci cette ma-
tière. Avant lui, on n'avait qu'une idée
très vague de ce viscère ; mais M. Senac
a depuis étendu les lumières que Louver
a répandues sur cet objet. On a ajouté au
traité du cœur la dissertation suivante ;
I Dissertation de l'origine du catarrhe et
de la saignée, Londres, 167i , in-8" ;
I une Défense de la Dissertatiofi de Wil-
lis sur les fièvres; Londres , 1G63 , in-8°.
Ces ouvrages furent recherchés de son
temps , et sont utiles. Ils sont en latin.
LOUVERTURE. Foyez TOUSSAINT-
LOUVERTURE.
LOUVET ( Pierre ), avocat du 17' siè-
cle , né en 1369 ou 1574 à Verderel vil-
lage situé auprès de Beauvais , fut
maître des req\iétes de la reine Margue-
rite, et mourut dans sa pairie en 1646.
On a de lui ; | V Histoire de la ville et cité
de Beauvais, Rouen , 1613, in-8°; | His-
toire et antiquités du pays de Beauvaisis,
Beauvais, 1631 , in-8°. Le premier de ces
deux ouvrages traite de ce qui concerne
l'état ecclésiastique du Beauvaisis ; le
deuxième, de l'état civil. ( Voyez SIMON
Denys.) I Nomenclatura et chronologia
rerum ecclesiasticarum diœcesis Bello-
vacensi$,Va.TÏ&, 1613, 1628, 111-8°; [ His-
toire et antiquités du diocèse de Beauvais,
imprimée en cette ville, 1635, in-8°; I uin-
ciennes remarques de la noblesse beau-
vaisineet de plusieurs familles de France^
1631 et 1640 , in-8", très rare. Cet ouvrage
est par ordre alphabétique , et ne va que
jusqu'à l'N ; | Abrégé des constitutions et
règlemens... pour les études et réformes
du couvent des jacobins de Beauvais,
1618. Le mérite de ces ouvrages consiste
dans les recherclies ; il serait inutile d'y
chercher les agrémens du style.
LOUVET ( Pierre) , docteur en méde-
cine , natif de Beauvais en 1617, d'une
autre famille que le précédent, professa
la rhétorique en province , et enseigna
la géographie à Montpellier. Il surchar-
gea le public , depuis 16o7 jusqu'en 1680,
époque de sa mort , d'une foule d'ou-
vrages sur l'histoire de Provence et de
Languedoc. Ses matériaux sont si mal di-
gérés, et ses inexactitudes sont si fré-
quentes, qu'on ose à peine le cilcr. On a
LOU 50
de lui : I Remarqjies sur l'histoire de
Languedoc^ 1657, iu-i"; | Traité^ en forme
d'abrégé ^ de l'histoire d'Aquitaine ^
Guienne et Gascogne , jusqu'à présent ^
Bordeaux , 1659 , in-Zi" ; | la France datis
sa splendeur j 2 vol. in-12 ; 1 Abrégé de
l'histoire de Provence ^ 2 vol. rn-12, avec
des Additions sur cette Histoire , aussi
en 2 vol. in-12 ; | Projet de l'Histoire du
pays de Beaujolais , in-4° ; | Histoire de
Villefranche ^ capitale du Beaujolais ^
in-8°; | Histoire des troubles de Pro-
vence, depuis 1481 jusqu'en 1598, 2 vol.
in-12. La moins mauvaise de ses produc-
tions est son Mercure hollandais ^ en 10
vol. in-12. C'est une histoire maussade
dos conquêtes de Louis XIV en Hollande,
en Franche-Comté, en Allemagne et en
Catalogne , et des autres événemens qui
occupèrent l'Europe depuis 1672 jusqu'à
la fin de 1679. Louvet avait quitté la mé-
decine pour l'histoire; il était aussi peu
propre à l'une qu'à l'autre , quoique ho-
noré du titie à' historiographe du prince
de Dombes.
* LOUVET de COUVRAY ( Jeaïv-Bap-
TiSTE ) , naquit à Paris en 1764 d'un mar-
chand bonnetier, et fut d'abord commis
chez un libraire. Né avec du talent et
une imagination heureuse , il débuta
dans la carrière littéraire par les Amours
du chevalier de Faublas. dont il fit pa-
raître d'abord la première partie : c'est
un roman où la licence la plus grande
règne à côté d'une ignorance complète
des mœurs de la haute société , que l'au-
teur a voulu peindre sans la connaître ,
et surtout sans l'avoir jamais fréquentée.
Louvet partagea, au commencement de
la révolution , les principes et l'exaltation
des factieux , et associa à ses travaux lit-
téraires la politique qui devint bientôt
son occupation exclusive. Le 26 décembre
1791 , il vint à la barre de l'assemblée Lé-
gislative , suivi de quelques factieux de sa
section , pour demander que les princes
et les émigrés fussent décrétés d'accusa-
tion. On se fera une idée de son style
oratoire , en lisant une phrase de la péti-
tion qu'il présenta à cet effet : « Qu'aus-
» sitôt des millions de nos citoyens-sol-
). dats se précipitent sur les nombreux
» domaines de la féodalité ; qu'ils ne s'ar-
» rètent qu'où finira la servitude; que
» les palais soient entourés de baïon-
B nettes , etc. » Le ministre Roland jugea
Louvet digne d'être le rédacteur prin-
cipal d'tm joxirnal intitulé La Sentinelle .
qui se placardait au coin des rues, et qui
9 LOU
avait pour but d'avilir la royauté et de
préparer la catastrophe du 10 août. Le
déparlement du Loiret , ayant choisi Lou-
vet pour le représenter à la Convention ,
il y figura parmi les plus ardens républi-
cains du parti de la Gironde ^ et se pro-
nonça violemment contre Robespierre,
dont il demanda , le 29 octobre 1792 , la
mise en accusation. H n'était pas difficile
de trouver dans la vie politique de Ro-
bespierre des crimes suflisans pour le
faire livrer à toutes les rigueurs de la
justice ; aussi Louvet employa pour l'at-
taquer une éloquence et une force de rai-
sonnement qui rendirent son discours
célèbre , mais qui n'empêchèrent pas que
Robespierre n'échappât aux poursuites et
aux accusations de ses ennemis. En 1795,
Louvet vota contre l'appel au peuple et
pour la mort de Louis XVI , sous la con-
dition expresse d'en différer l'exécution
jusqu'à l'établissement de la constitution.
Au mois de mai de la même année il fut
proscrit avec les chefs de la Gironde , et
décrété d'arrestation le 2 juin suivant. I|
s'échappa , se retira à Caen , d'où il écri-
vit contre ses persécuteurs , qui le mirent
hors la loi le 28 juillet. Il erra ensuite,
avec quelques-uns de ses amis , dans la
Bretagne , dans le déparlement de la Gi-
ronde , dans le midi delà France, puis
se rapprocha de Paris , et se tint caché
chez un habitant de Nemours jusqu'à la
révolution du 9 thermidor. Cependant il
ne rentra à la Convention que sept mois
après cette journée (le 8 mars 1793).
Après avoir été un des partisans les plus
ardens de la Convention, il s'attacha plus
fortement encore au Directoire , reprit
son journal La Sentinelle, et ouvrit au
Palais-Royal une boutique de librairie,
aux environs de laquelle se réunissaient
une foule de jeunes gens qui passaient
leur temps à le persiffler et à lancer des
sarcasmes contre sa femme qu'il appelait
sa Lodoïska^ du nom d'une héroïne de
son roman. Toujours persécuté et tou-
jours persécuteur, Louvet termina ses
jours au milieu des orages , des inquié-
tudes et des troubles de toute espèce. Il
mourut à Paris, le 23 août 1797 , à l'épo-
que des violens débals qui annonçaient
la révolution du 18 fructidor. Malgré ses
talens naturels et son incroyable facilité,
il était d'une ignorance profonde. On rap-
porte de lui une anecdote à peine croya-
ble : il eut à soutenir une discussion
contre Suard; ce dernier ayant terminé
i!!ie de Si'S réponses par ces mots latins ,
LOU
6C0
LOU
Verge ^ sequar ; Louvet crul qu'il s'agis-
sait d'un nom propre , et lit sérieuse-
ment une réponse adressée à M. Perge
Sequar. Ce trait de sa vie n'a point em-
pêché sa réception à l'institut (2' classe ),
lors de la foridation de cette société- On
a de Louvet : | Les Amours du chevalier
deFaublas, 2= éd., 1791, 3 vol. in-18 ; 1798,
A vol- in-S". La 1'^'' partie de cet ouvrage
avait été imprimée à Londres (Maes-
tricht), in-12, sous le titre de : Uiie an-
née de la vie du chevalier de Faublas.
Quelque temps après parurent , Six se-
maines de la vie et la fin des amours du
chevalier de Faublas. 1788 et 1790- Ce
roman a été traduit en allemand et en an-
glais ; I Emitie de f^at-mont. ou le Di-
vorce nécessaire . et les Amours du curé
Sévin, 1791, 5 vol. in-18; 1794, k vol.
in-12; ouvrage très médiocre et hideu-
sement immoral ; l'auteur y consacre le
divorce et y autorise le mariage des pré-
Ires ; I Paîis justifié. 1790. Cet ouvrage
a été dirigé contre la relation que Mou-
nier avait faite des forfaits des 5 et 6 oc-
tobre 1789 ; I La Sentinelle; \ Accusation
contre RobesjJierre . 1792, in-8°, impri-
mée par ordre de la Convention ; | le Jour-
nal des Débats (depuis le 10 août 1792
jusqu'au 10 mars 1793 ) , in-S° ; | Plaidoyer
coîitre Isidore Lan g loi s . i797, in-8";
I quelques Notices pour l'histoire et le
récit de mes périls depuis le 31 mai 1793,
Paris, 1793, in-8''; ouvrage traduit en
allemand, en danois , et en suédois. On
y joint ordinairement la Motion d'ordre
d'Antonnelle , à l'occasion de la brochure
de Louvet . in-8°de26 pages. Cet ouvrage
fait partie de la Collection des mémoires
sur la révolution , Paris , 1823 , in-8° ;
I La grande revue des armées noire et
blanche . comédie qui eut peu de succès.
On a encore de lui quelques brochures
dont on trouvera les litres dans la Notice
sur la vie et les ouvrages de J.-B. Lou-
vet, par Gabriel Villar , insérée dans les
Mémoires de l'institut. (Litt. et beaux-
arts, tome 2, hist., page 27.)
LOTJVIERS (CaAnixs-JACQUES de),
écrivain français, vivait dans le 14*^
siècle , sous le règne de Charles V , roi de
France. Il devint niembre du conseil d'é-
tal en 1376- On lui attribue assez com-
munément le Songe de du Vcrgier .
Lyon, 1491 , in-fol., et réimprimé dans le
recueil des Libertés de l'Eglise gallicane,
en 1731 , h vol. in-fol. ; Goldast en a in-
séré la traduction latine dans la Monar-
chia imperii l'omani. cl les prolestans ont
lâché de lui trouver du mérite, quoiqu'il
n'en ail pas d'autre que de flatter l'aulo-
rilé lemporeile en déprimant laspirituelle.
Ce traité ne passe pas universellement
pour être de Louviers ; car les uns l'ont
donné à Raoul de Presle , ou à Jean de
Vertus , secrétaire de Charles V , et les
autres à Philippe de Maizières.
LOIIVILLE (Jacques-Eugène d'AL-
LONVILLE, chevalier de), né au châ-
teau de ce nom en Eeaure , l'an 1G71,
d'une famille noble et ancienne, servi
d'abord sur mer, ensuite sur terre. Il fut
brigadier des armées de Philippe V , et
eut part aux affaires du gouvernement.
La paix d'Utrecht l'ayant rendu à lui-
même, il se consacra aux mathémati-
ques , et principalement à l'astronomie.
L'académie des sciences de Paris le reçut
au nombre de ses membres , et la société
royale de Londres lui fit le même hon-
neur quelque temps après. Il mourut en
1732 , à 61 ans. On a de lui plusieurs Dis-
seî'tations sur des matières do physique
et d'astronomie , imprimées dans les Mé-
moires de l'académie des sciences ; et
quelques autres dans le Mercure > depuis
1720 , contre le P. Caslel , jésuite. Son
imagination dérogeait quelquefois à son
jugement , et plusieurs de ses raisonne-
mens tiennent plus à son humeur et à ses
goûts qu'aux règles d'une bonne logique.
On l'a vu attribuer aux chaleurs de la
(;anicule la liquéfaction du sang de saint
Janvier, dont il avait été témoin oculaire
à Naples ; quoique ce phénomène se re-
produise régulièrement le 19 septembre ,
et qu'il soit contre la nature d'un sang
durci de se fondre par la cl)aleur ( Méin.
polit, etmilit. de M. de Noailles , tome 2 ,
page 42).
LOIIVOIS (le marquis de). Voyet
TELLIER (François.)
* LOUVRELEllL (Jean-Baptiste),
prêtre de la doctrine chrétienne , né à
Mende vers 1660 , y fut directeur du sé-
minaire et professeur de théologie mo- "*
raie. Il s'est fait connaître par les deux ;
ouvrages suivans : | Le Fanatisme re- ';
nouvelé . ou Histoire des sacrilèges, dei
incendies, des meurtres et autres atten-
tats que les calvinistes révoltés ont coin-'
mis dans les Cévennes. etc. Avignon,
1704 , 1706 , 4 vol. in-d2 ; 1 Lettre de l'aur
teur du Fanatisme renouvelé à M. Brueijs.
de Monlpcllicr , in-4" , traduite en an-
glais ; I Mémoires historiques sur le Gé-
vavdan et sur la ville de Mende . qui en
est la capitale , pour servir au Diction-
LOV
COI
LOV
naîre universel de la France^ Mende ,
172/1, 1 vol. in-12.
LOUVREX (Matuias-Giiii.laume de ) ,
né à Liège en 1665 d'une ancienne fa-
mille patricienne , rendit à sa patrie des
services importans dans les divers em-
plois qu'il occupa, et se distingua exlra-
ordinairement par ses connaissances dans
le droit civil et canonique. Les avocats
des nations voisines le consuîlaient fré-
quemment , surtout dans les matières bé-
néliciales , et ses décisions étaient ordi-
nairement suivies comme des règles
sûres, Fénélon , ayant appris que dans un
procès Louvrex défendait la cause de son
adversaire, voulut lire son Mémoire;
et après l'avoir lu , non content de se dé-
sister de ses prétentions , il lui envoya la
colleclion de ses ouvrages , avec une let-
tre remplie des sentimens de la plus
grande estime , et lui demanda son ami-
tié. Doué de la mémoire la plus heureuse,
il connaissait non seulement tous les li-
vres dune très ample bibliothèque, mais
il désignait souvent l'endroit du passage
dont il avait besoin : par ce moyen, après
avoir i)erdu entièrement la vue , il ne
cessa de dicter avec la même présence
d'esprit qu'auparavant. Louvrex mourut
à Liège le 15 septembre iTSh. , estimé au-
tant par la simplicité de ses mœurs , sa
modestie , son désintéressement et sa cha-
rité envers les pauvres, que par sa pro-
fonde science. Nous avons de lui : | des
Dissertations canoniques sur l'origine j,
l'élection . les devoirs et les droits des
prévôts et des dorjens des églises cathé-
drales et collégiales ^ en latin , Liège ,
1729 , in-fol. ; | Recueil contenant les édits
du pays de Liège et comté de Looz . les
privilèges accordés par les empereurs ,
les concordats et traités faits avec les puis-
sances voisines^ 8 vol. in-fol. , avec des
notes utiles et savantes , Liège , 1714 —
1735. On en a donné une édition augmen-
tée par les soins de Baudouin Hodin,
Liège, 1751 , U. vol. in-fol. ; | d'excellentes
notes sur l'ouvrage de Charles de Méan, in-
titulé: Observationes et res judicatœ^ etc.
{Voyez MEAN) ; | le 5"= vol. de VHistoria
leodiensis^ avec M. de Crassier. ( Voyez
FOULON. )
• LOVAT (SiHON FRAZER, lord ), pair
d'Ecosse, né en 1657 , fut élevé en France
chez les jésuites. De retour dans sa patrie,
il eut quelques démêlés avec les Claïis
voisins de celui dont il faisait partie, et
passa au service de l'Angleterre. Il était
en 1692 capitaine dans le régiment de Tul-
lihardine. Lord Lovât chef de sa famille
étant mort subitement , il se porta son
héritier , et épousa de vive force sa
veuve sœur du marquis d'Alhol. Ac-
cusé pour cette cause, de rapt, il s'en-
fuit en France , et vint à la petite cour de
Saint-Germain où il parvint à gagner la
conliance de Jacques III , prétendant au
trône d'Angleterre. Ce prince lui ayant
confié quelques lettres, il en changea l'a-
dresse,et s'en servit pour accuser de haulo
trahison tous ses ennemis en Angleterre ,
où il avait repassé. Il revint en France,
où il croyait pouvoir persuader que cette
dénonciation était un arlilice pour mieux
servir la cause des Stuarts; mais Louis XIV
le fit enfermer à la Bastille , d'où il ne
sortit que pour entrer dans un couvent.
Après avoir été tpnsuré et s'être fait jé-
suite, il abandonna cet état pour suivre
en 1715 le prétendant qui faisait une nou-
velle tentative dans le but de reconqué-
rir son royaume. Frazer ne pouvait man-
quer de prendre le parti du plus fort ;
aussi après la bataille d'Inverness , il se
déclara pour le roi Georges , et porta le
dernier coup aux Jacobites en s'empa-
rant de la citadelle d'Inverness. Cette tra-
hison lui valut le gouvernement de cette
ville, le titre de lord Lovât et de pair,
avec des pensions considérables. Ce sei-
gneur peu fidèle à sa parole étant devenu
le favori de Georges, servit les intérêts
de Jacques , et ne cessa d'entretenir des
relations avec les Stuarts. De concert avec
eux , il conçut le projet et médita le plan
de l'invasion de 1745; il fournit même des
secours à cette entreprise ; et lorsque l'ar-
mée fut débarquée , son fils partit pour la
rejoindre avec 1,500 hommes, l'élite de
son clan. La bataille de Culloden ayant
achevé d'abattre les sluart , lord Lovât
dont la conduite avait fait naître des soup-
çons, fut mis en accusation devant la
cour des pairs ; mais il avait enveloppé
ses manœuvres de tant de mystères, il
avait désapprouvé si haut la conduite de
son fils avec lequel il semblait tout-à-fait
brouillé , et il présenta sa défense avec
tant d'art , que les pairs allaient l'absou-
dre, lorsque Georges Murray dénonça,
dans le but de sauver sa propre vie,
4,400 fauteurs secrets de la dernière ré-
volte : il plaça le noin de Lovât sur cette
liste , et produisit en outre contre lui les
preuves les plus accablantes : Lovât in-
terdit cessa de se défendre , et eut recours
à la clémence royale ; n'ayant rien ob-
tenu du souverain, il montra le plus grand
51
LOIV
G02
LOW
courage , el termina noblement une vie
souillée par la flatterie et la trahison. Il
eut la tçle tranchée le 20 avril 1747. Voyez
les Mémoires de la vie de lord Lovât ,
Amsterdam , 1747, in-S".
LOWENDAL. roy. LŒWENDAL.
T.O\VE^^OECK. f^. LEUWENHŒCK.
LOWER. Voyez LOUVER.
* LOW^ITZ (Georges-Maurice ), astro-
nome allemand , naquit en 1722 à Furlh
près de Nuremberg. Il étudia sans maître
les sciences physiques et malhématiques,
y fit des progrès étonnans, et s'associa
d'abord avec les Homann pour la con-
«truction des globes et des cartes géogra-
phiques : lui-même exécuta deux globes
de trois pieds de diamètre, supérieurs à
ceux de Coronelli, mais dont la gravure
ne fut pas terminée, quoiqu'elle eut été
annoncée plusieurs fois par souscription,
ta 1752, il devint professeur de mathé-
matiques s Nuremberg , et fut chargé de
la direction de l'observatoire. Lowilz
fut nommé(175S) professeur de mathéma-
tiques à Gotlingue; mais, mécontent de
n'avoir pas été nommé directeur de l'ob-
servatoire de cette ville, après la mort de
Mayer en 1762 , il offrit sa démission. Il
donna ensuite quelques leçons particu-
lières, et se rendit en 17C6 à St.-Péters-
bourg où il fut reçu membre de l'acadé-
mie des sciences. Il fut chargé d'observer,
en 1769, à Gourief, le passage de Vénus
sur le disque du soleil, et de prendre les
niveaux nécessaires pour l'exécution d'un
canal destiné à joindre le Don et le Wolga.
Lowitz, s'occupait paisiblement de ses tra-
vaux àDmitrefsk, lorsque cette ville tom-
ba au pouvoir du rebelle Pougalschew ,
qui eut la barbarie de le faire élever sur
des piques, afin, disait-il avec une plai-
santerie atroce , de le rapprocher des
étoiles , et qui ordonna ensuite qu'il fût
empalé le 2i août 1774. On a de lui : | Jvis
sur les nouveaux ylobes terrestres ( en
allemand), Nuremberg, 1746, in-fol.; \Ex-
j)lication de deux cartes astronomiques ^
pour l'intelligence de la projection de
V éclipse de la terre du 25 juillet, [an
allemand ) ibid. , 1748, in-4° , traduit
en français par Delisle ; quelques autres
ouvrages moins importans , et plusieurs
Mémoires insérés dans les recueils de
Gottingue et de Saint - Pétersbourg. Son
Eloge par BernouUi se trouve dans les
Nouvelles littéraires. Berlin, 1776, et
supplément de l'année 1777. — Tobie
LOWITZ, fils du précédent, né à Gottingue
en 1757, mort le 26 novembre 1804, fut
professeur de chimie à Sl.-Pétersbourg et
membre de l'académie impériale de cette
ville. Il fit à pied un voyage en Italie, er;
France et en Angleterre , par la Suisse el
la Hollande; et cette course qu'il avait
entreprise pour recueillir des observa-
tions d'histoire naturelle, le guérit en
même temps de l'épilepsie à laquelle il
était sujet. De retour en Russie, Lcwitt
consigna ses observations dans les An^
nales chimiques de Crell et dans le Re-
cueil de l'académie de Sl.-Pétcrsbourg.
En 1790 il obtint une médaille d'or, pour
avoir donné les moyens de conserver par
le charbon l'eau douce en mer.
LO'WE.XDAL. Voy. LOEWENDAL.
• LOWMAÎV (Moïse), ministre pres-
bytérien, né à Londres en 1679, savait
parfaitement l'hébreu, et était très versé
dans les antiquités juives. Il était pasteur
d'une congrégation à Clapham ( comté de
Surrey) et s'est fait connaître par divers
écrits, dont les principaux sont : | une
Dissertation sur le gouvernement civil des
Hébreux, 1745 ; ] des Paraplirases et des
Notes sur la révélation de saint Jean ,
1748, ouvrage estimé; ] Raisons du rituel
des Hébreux; \ Traité où il entieprend
de prouver mathématiquement et à priori
l'unité et la perfection de Dieu. Ce tfaité
est devenu rare. | Trois Traités publiés
après sa mort, sur le Schechinah et le
Logos. Fort tolérant pour toutes les es-
pèces de dissidens, Lowman ne l'était
point pour le catholicisme, et il s'unit à
Londres, en 1755, avec d'autres ministres
presbytériens, pour prêcher contre l'E-
glise romaine. On croit qu'il était parti»
san d\iChristianis7ne rationnel. l\ mourut
à Londres, en 1752, âgé de 7.3 ans.
LOWTII (Guillaume ) , théologien an-
glais, pasteur à Buriton , né à Londres en
1661, étudia à Oxford et devint chanoine
de Winchester. Il est mort dans cette ville
en 1752, après s'être acquis l'estime des
savans par des noies qu'il a données sur
saint Clément d'Alexandrie, sur Josèphe,
et sur les historiens ecclésiastiques grecs,
insérées dans les éditions de ces livres
données en Angleterre. 11 a publié aussi:
I Défense de l'autorité et l'inspiration du
vieux et du nouveau Testament , 1692,
solidement écrit; mais il a pu se con-
vaincre , en composant ce livre, que l'au-
torité des livres saints n'est pas une règle
suffisante pour diriger notre foi ; | Direc-
tion pour la lecture de l'Ecriture sainte .
1708, in-12.
' LOWTÏÎ (Robert), fils du précédent,
LOY (30
né à Winchester en 1710 , étudia d'abord
dans sa ville natale , puis à Oxford , et de-
vint en 1741 professeur de poésie à Ox-
ford , à la place de Spence. Il fut silc-
ccssivement cuié d'Ovinglon et d'Eart-
Woodhay ( 1733 ). Il fut fait évèque de
St.-Daviden 1766, puis d'Oxford, et enfin
de Londres en 1777. Loiig-tetnps aupara-
vant, il avait refusé révèché de Limerick,
et depuis il refusa de même le riche siège
de Cantorbéry. Lowth mourut en 1787.
On a de lui un traité très estimé , De sa-
cra poesi Hebrœorum , q\ù a eu plusieurs
éditions à Oxford et à GoUingue, et qui
a été imprimé depuis un grand nombre
de fois ailleurs. !Nous en avons deux
traductions en français. La plus estimée
est colle de M. Sicard, sous le litre de
Leçons sur la poésie sabrée des Hébreux,
Lyon, 1812,2 vol. in-8°. M. Roger en
a donné une autre à Paris en 1815 , même
format. Ses Carmina latina ont été pu-
bliés , par l'abbé Weissenbach , Bàle , 1785,
in-l2. Ce sont des paraphrases de plu-
sieurs psaumes, cantiques, passages pro-
phétiques, etc. On a publié en anglais,
1787, in-8°. Mémoires sur la vie cl les
écrits de Vévêque Lowth.
LOYER (PiERUE le ),Loerius, sieur de
la Brosse, conseiller au présidial d'An-
gers, et l'un des plus sa vans hommes de
son siècle, dans les langues orientales,
naquit au village d'Huillé , dans l'An-
jou, le 24 novembre 1550, et mourut à
Angers en 1654 , à 84 ans. On a de lui :
I Quatre livres des spectres ou apparitions
et visions d'esprits, ayiges et démons se
montrant sensiblement aux hommes , An-
gers, 1586, in- 4°; Paris, 1605 ou 1C08 ,
même format. On y trouve une foule
de faits singuliers et curieux. | Edoni,
ou les Colonies iduméennes , en Europe
et en Asie , avec les Phéniciennes, Paris ,
1620, in-8°. On remarque dans ces deux
ouvrages une érudition et une lecture
immense, mais des idées bizarres et
un eulètemeut ridicule pour les étyniolu-
gies tirées de l'hébreu et des autres
langues. Loyer prétendait trouver dans
Homère le village d'IIuillé , lieu de sa
naissance, son nom de famille, celui de
la province. Lorsqu'on lui reprochait de
se vanter de savoir ce qu'il ne pouvait pas
connaître, il répondait que c'était la
grâce de Dieu qui opérait ces effets mer-
veilleux; \ des OEuvres et des Mélanges
poétiques , Paris , 1579, in-12.
LOYSEAU (Cdarles ), avocat au par-
lement do Paris, et habile jurisconsulte ,
3 LOY
né à Nogent-le-Roi en 1366 , issu d'une
famille originaire de la Bauce, fut lieu-
tenant particulier à Sens, son pays natal,
puis bailli deCliàteaudun, et enlin avoca
consultant à Paris, où il mourut en 1627,
à 65 ans. On a de lui plusieurs ouvrages
estimés. Ses OEuvres ont été recueillies ,
Genève , 1656 , 2 vol. in-fol. , 1640, 1660 ;
Lyon, 1701, in-fol. Son Traité du déguer-
pisscment passe pour son chef-d'œuvre, à
cause du mélange judicieux qu'il y a fait
du droit rou7ainavec le droit français.
LOYSEAU. Voyez LOISEAU.
* LOI SON (Charles) , littérateur , né
en 1791 à Chàteau-Gonthier, manifesta de
bonne heure un goût très vif pour la poé-
sie. Il fut répétiteur et maître de confé-
rences à l'école normale dont il avait été
lui-même élève, et professa aussi les hu-
manités dans un des collèges de Paris.
Sa santé faible ne lai ayant pas permis de
continuer la carrière de l'enseignement,
il renonça à la chaire qu'il occupait dans
un lycée , ne conserva que sa place de
maître de conférences à l'école normale ,
et entra dans l'administration après le re-
tour des Bourbons. Attaché d'abord à la
direction de la librairie en qualité de chef
du secrétariat, il devint immédiatement
aprèa^les c^nt-jours chef de bureau au
ministère de la justice. Loyson est mort
d'une maladie de poitrine le 50 juin 1820,
à peine âgé de 29 ans. Il avait coopéré à
la rédaction de différens recueils périodi-
ques, au Journal des Débats , au Joui'nal
général de France, aux Archives pliiloso-
phiques , au Spectateur politique et litté-
raire, au Lycée français , etc. On a de
lui : j Ode sur la naissance du roi de
Rome ( dans les Hommages poétiques ,
touie 1", page 39 ) ; | Ode sur la chute du
tyran et le rétablissement de nos rois lé-
giti?nes .Pan-is, iSikAn-S" ; \ De l'influence
de l'étude sur le bonheur dans toutes les
situations de la vî<?, discours en vers, qui
a obtenu l'accessit du prix de poésie, dé-
cerné par l'académie française, dans sa
séance du 25 août 1817, in-8'' ; | Le Bon-
heur de rétude, discours en vers, et au-
tres poésies, Paris, Guillaume , 1817, re-
cueil dédié à S. M. Louis XVIII, qui dai-
gna indiquer à l'auteur plusieurs correc-
tions utiles; | E pitres et Elégies, ibid. ,
Dclestre-Boulage, 1819, in-12; | Ode
adressée à M. Casinw'-Delavigne . auteur
des Vêpres siciliennes, 1819, in-8° ; | Ode
sur l'attentat du 15 /'^VnVr ( l'assassinat
de Louvel sur le duc de Berry), Paris,
Delugon, 1820. En général , Loyson avait
LUB
604
LUB
beaucoup de sensibilité : la plus douce
mélancolie règne dans ses éléjîics , et
SCS vers sont harmonieux et élégans.
Il s'est aussi occupé de politique :
ses principaux ouvrages en ce genre
sont : \ De la Conqitête el du démembre-
ment d'une grande nation, on Lettre écrite
par un grand d'Espagne à Bonaparte ^
ibid., 1815; 1 Tableau de la constitution
anglaise j par Georges Custance , traduit
de l'anglais AhiA. , i8i7, in-S"; | Guerre
à qui la cherche . ou Petites lettres sur
quelques-uns de nos grands écrivai?is ,
par un ami de tout le inonde , ennemi de
tous les partis ^ ibid. , in-S" ; 5*^ édition ,
1818, in-8° ; , Seconde campagne de guerre
à qui la cherche^ ou Suite de Petites let-
tres sur quelques-uns de nos grands écri-
vains, ibid. , 4818 , in-8° ; | quelques bro-
cJiures politiques. Loyson a laissé ma-
nuscrite, et en vers français, wie traduc-
tion de Tibulle. M. Cousin, ancien condis-
ciple, ami et collègue de Loyson, prononça
sur sa tombe un discours , que M. Mahul
a reproduit dans le premier volume de
son Annuaire nécrologique ; on tiouve
aussi sur lui une autre notice dans le
Lycée français^ tome 5, page 63-72 ; enfin
M. H. Patin lui a consacré un article bio-
graphique dans le tome 18 , page 78 du
Répertoire de littérature ancienne el mo-
derne.
LUBBERT (Sibbaxd), docteur protes-
tant , dans l'université d'Heidelberg , né
à Langoword , dans la Frise , vers 1556 ,
devint professeur à Franeker, où il mou-
rut en 1625. On a de lui un grand nombre
d'ouvrages qui prouvent en lui un esprit
querelleur et tracassier , qui se plaisait à
attaquer tout le monde. Il écrivit contre
les proteslans les plus raisonnables , avec
la même fureur que contre les catholi-
ques. Grolius, Arminius, Gretzer, Bcllar-
iTiin , etc. , furent l'objet constant de ses
déclamations et de ses sophismes. Scali-
ger, qui trouvait en lui un autre lui-même,
le regardait comme un savant. Son triiilé
De papa romano , 1594, in-8", est la prin-
cipale production de son fanatisme.
• LUBERSAC (l'abbé N.... de) , né en
1750 , au château de Palmanteau , dans le
Limousin, embrassa l'état ecclésiastique,
dcviiil grand-vicaire deNarbonne, prieur
de Brives~la-Gaillarde , et ensuite abbé
de Noirlac. Amateur éclairé des arts, il tint
Mes correspondances très coûteuses , qu'il
étendit jusque dans l'Amérique et l'Asie
avec les plus célèbres voyageurs. L'abbé
de Lubersàc quitta la France en 1792,
se rendit dans les Pays-Bas, et de là en An-
gleterre, où il est mort en 180i, âgé de 74
ans. Il a laissé : [ Oraison funèbre du ma-
réchal de Noailles ^ prononcée à Brivcs ,
en 17G7 , in-fol. ; ] Monumens érigés en
France à la gloire de Louis XV. 1772 ,
in-fol.; I Discours sur les monumens pu-
blics de tous les âges, avec la Description
d'un monument projeté à la gloire de
Louis XVI ^ 1775, in-fol. On a reproché
à cet ouvrage d'être superficiel et inexact.
i Discours sur l'utilité des voyages des
princes. Paris, Caillot, 1782, 1787, in-S";
I Vues politiques sur les finances , 1787,
in-4°; | le Citoyen conciliateur. 1788,
in-4" ; | Hommages religieux . politiques
et funèbres à la mémoire cfe Léopold J1
et de Gustave III . avec leurs portraits .
Coblenlz , 1792. in-8''. Le produit de cet
ouvrage était destiné au soulagement des
prêtres insermentés et réfugiés. | Rela-
tion de la journée du 20 juin, 1792, in-8° ;
I quatre Entretiens spirituels . que l'au-
teur prêtait à Louis XVI pendant sa capti-
vité; I Eloge historique de madame Âîa-
rie-Elizabeth . prononcé à Dusseldorf,
dans l'ancienne chapelle de la congréga-
tion des jésuites, en présence de plusieurs
évêques et seigneurs émigrés. — Un abbé
de LUBERSAC, que M. Ersch a confondu
avec le précédent , a publié un Journal
historique el religieux de l'éfnigration et
déportation du clergé de France en An-
gleterre .\.onàïQ%, 1802, in-8°.
* LUBERSAC (le marquis de), lieute-
nant-général, né en 1731, entra au service
à l'âge de 11 ans , fit la guerre en 17/».5, et
se trouva au siège de Tournay , où il i\\\
blessé ; ce qui ne l'empêcha pas de com-
battre à Fontenoy , quoique ses blessures
ne fussent pas encore cicatrisées. Il con-
tinua de suivre avec gloire la carrière
militaire; et pendant la guerre de sept
ans, il se fit remarquer de nouveau par
sa valeur. Il était lieutenant-général au
commencement de la révolution. N'en
partageant pas les principes , il sortit de
France avec ses enfans , et fit la guerre
de l'émigration. Deux de ses fils périrent
àQuibcron;le troisième rentra en France
avec son père. Ce respectable vieillard
mourut dans le mois de février 1820.
Plusieurs lui ont attribué les écrits sui-
vans que nous avons mentionnés déjà
dans l'article qui précède : Le Citoyen
conciliateur . Paris , 1788, in-4.° ; | lîom-
mages religieux, politiques et funèbres à
la mémoire de Léopold II et de Gustave
III ^ Coblenti, 1792, in-8'.
LUB
605
LUC
lUBIENIECKI (Stanislas), Luhieni-
cius j gentilhomme polonais , né à Craco-
vie, en 1623, fut un des soutiens du so-
cinianisme. Il n'oublia rit;a auprès des
princes d'Allemagne pour le faire auto-
riserou du moins tolérer dans leurs états ;
mais il n'y put réussir. Il était pasteur de
Lubiin, lorscpi'il fut obli{jé de se réfugier
à Hambourg. Il mourut empoisonné en
1675, après avoir vu périr de même deux
de ses lilles, et fut enterré à Alloua, mal-
gré l'opposition des ministres luthériens.
On a de lui : | Thealrum cometicwn ,
Amsterdam, 1GG8, 2 volumes in-fol. On y
trouve l'histoire des comètes , depuis le
déluge jusqu'en 1667. | Une Histoire de la
réfotmation de Pologne^ Freistadt , 1683,
in-8°, fruit de ses préventions et de ses
erreurs.
LUBIEi\SKI (Stanislas), évêque de
Pioscko , mort l'an 1660 , à 68 ans , a pu-
blié un grand nombre d'ouvrages , entre
autres : | Narralio profectionis in Sue-
ciam Siyismundi III ; \ une dissertation
intitulée : De 7'ebus silesiacis; \ De jure
regni poloidci ad russicas et moscoviti-
cas regiones ; \ VHœ plocensiutn episco-
porum j etc.
LUBIIV (saint ), né à Poitiers, deparens
pauvres , devint abbé du monastère de
Brou , puis évêque de Chartres en 544. Il
mourut en 556 , après avoir passé sa vie
dans les exercices de la pénitence et dans
la pratique des vertus.
LUBIIV (EiLHAR»), philologue alle-
mand, né à Wersterstède , dans le comté
d'Oldenbourg , en 1565 , se rendit habile
dans les langues grecque et latine. Il de-
vint professeur de poésie à Rostock , en
4595 , et on lui donna, 10 ans après, une
chaire de théologie daris ia ménie ville.
Il mourut en 1621 , à 56 ans, avec la ré-
putation d'un bon humaniste et d'un mau-
vais théologien. On a de lui : | des Notes
sur Anacréon ^ Juvénal . Perse, Horace ;
I Antiquarius j. in-12 et in-8° : c'est une
interprétation assez claire et assez courte,
par ordre alphabétique des mots vieux
ou peu usités ; | un traité sur la nature et
l'origine du mal , intitulé : Phosphorus
de causa prima et natura ?JiaIij Rostock ,
in -8°, 1596, et 1601, in-12. L'auteur y
soutient qu'il faut admettre deux prin-
cipes coéternels, savoir. Dieu et le néant;
Dieu en qualité de bon principe , et le
néant en qualité de mauvais principe. Il
prétend que le mal n'est autre chose que
la tendance vers ce néant , auquel il ap-
plique ce qu'Arislole a dit de la matière
première. Albert Grawer a réfuté cetîë^'
extravagance dans son traité De natura
niali. I Une apologie du livre précédent ,
intitulé : De causa peccali , Rostock,
1602, i\x-k°; I des Vers latins, dans le
tome 3 du recueil Delicice poetarwn tjer-
mannrum.
Ï.UBLX (Augustin), savant religieux
augustin , naquit à Paris en i62/i. Il d*;-
vint géographe du roi, et fut proviiscial
de la province de France , puis assistant
général des Augustins français à Rome. U
mourut dans le couvent des Augustins du
faubourg Saint-Germain à Paris, en 1G95 ,
à 72 ans. L'esprit de retraite et l'amour
de l'étude lui donnèrent le moyen d'enri-
chir la république des lettres de divers
ouvrages. On a de lui : | le Mercure géo-
graphique, ou le Guide des curieux,
in-12, Paris, 1078. Ce livre, qui fut re-
cherché dans le temps , ne peut guère
servir aujourd'hui. | Des Notes sur les
lieux dont il est parlé dans \ç, Marttjrologe
romain . Paris, 1661 , in-4°; | le Pouillè
des abbayes de France , in-12 ; | la Notice
des abbayes de l'Italie , m-h", en latin ;
I Orbis augustinianus , ou la notice de
toutes les maisons de son ordre , avec
quantité de caries qu'il avait autrefois
gravées lui-même, Paris, in-12 ; | Tabulai
sacrœ geographicce. , in-S", Paris, 1670.
C'est un dictionnaire de tous les lieux de
la Bible, qui est souvent joint avec la Bible
connue sous le nom de Léonard. \ Une
Traduction de l'histoire delaLaponie du
latin de Scheffer, Paris, 1678, in-4°, fig. ;
I Index geographicus , sive in AJinales
Usserianos tabulée et observationes geo-
graphicce, publiées à la tète de l'édition
d'Ussérius, faite à Paris , en 1673 . in-fol.
Tous ces ouvrages sont des témoignages
de l'érudition du père Lubin. Il était versé
dans la géographie ancienne et moderne,
et dans l'histoire sacrée et profane. Ses
livres ne sont pas écrits avec agrément ,
mais les recherches en sont utiles.
LUC (saint), évangéliste, était d'An-
tioche, métropole de Syrie, et avait été
médecin On ne sait s'il était juif ou païen
de naissance. Il fut compagnon des voya-
ges et de la prédication de saint Paul cl
commença à le suivre l'an 51 , quand cet
apôtre passa de Troade en Macédoine.
On croit qu'il prêcha l'Evangile dans la
Dalmalie, les Gaules, l'Italie et la Macé-
doine, et qu'il mourut en Achaïe; mais
on ne sait rien de certain ni sur le temps,
ni sur le lieu de sa mort. Outre son Evan-
gile , qu'il écrivit sur les Mémoires dos
îil.
LVC
C06
LUC
apôtres , cl dont le caractère est d'être
plus historique , et de rapporter plus de
fails que de préceptes qui regardent la
morale, on a de lui les Jetés des apôtres.
C'est l'hisioire de leurs principales ac-
tions à Jérusalem et dans la Judée , de-
puis l'Ascension de J.-C. jusqu'à leur
dispersion. Il y rapporte les voyages , la
prédication et les actions de saint Paul ,
jusqu'à la fin des deux années que cet
îiputre demeura à Rome , c'est-à-dire jus-
qu'à l'an 63 de J.-C. : ce qui donne lieu
de croire que ce livre fut composé à
Rome. C'est un tableau fidèle des mer-
veilleux accroissemens de l'Eglise , et de
l'union qui régnait parmi les premiers
chrétiens. Il contient l'histoire de 30 ans,
et saint Luc l'écrivit sur ce qu'il avait vu
lui-même. Toute l'Eglise l'a toujours re-
coiuiu pour un livre canonique. Il est
écrit en grec avec élégance , la narration
en est noble .et les discours qu'on y
trouve sont remplis d'une douce chaleur.
Saint Jérôuic dit que « cet ouvrage, com-
» posé par un homme qui était médecin
» de profession , est un remède pour une
» àme malade. » Saint Luc est celui de
tous les auteurs inspirés du nouveau Tes-
tament dont les ouvrages sont le mieux
écrits en grec. Il y règne une simplicité
et en même temps une grâce, une onction,
que la littérature profane n'a jamais su
rendre. La manière dont il a écrit l'his-
toire de J.-C, de ses actions el de sa
doctrine, a, comme celle des trois autres
cvangélistes , ce caractère frappant de vé-
rité, ce ton de persuasion et de convicliorj
qui subjugue l'entendement et confond
la philosophie la plus irréligieuse. « Di-
» rons-nous, demande J. -J.Rousseau, que
> l'histoire de l'Evangile est inventée à
• plaisir? Non, ce n'est pas ainsi qu'on
» invente. Il serait plus inconcevable que
» plusieurs hommes d'accord eussent fa-
» brique ce livre , qu'il ne l'est qu'un seul
■ en ail fourni le sujet. Jamais des au-
» leurs juifs n'eussent trouvé ce ton. El
» l'Evangile a des caraclères de vérité si
» grands, si frappans, si parfaileuient ini-
» milûbles, que l'inventeur en sérail plus
• étonnanlque le héros. »(/^oyez MAilC.)
On pense que c'est l'Evangile de saint
Luc que saint Paul appelle son Evangile
dans l'Epilre aux Romains. L'Eglise célè-
lire ia fêle de cet évangéliste le 18 octobre.
Saint Jérôme prétend qu'il demeura dans
\i'. célibat, el qu'il vécut jusqu'à 83 ans.
Vove7. dom Calmel, Dictioimaire de la
mhlc, Lardner el Mill.
LUC. Voyez LUCAS.
LUC (de), royez DELVC.
LUC (saint ). Voyez ESPINAY.
LUCÀ. Voyez SIGNORELLI.
LUCA ( Jevx-Raptiste de ), savant car-
dinal, natif de Venosa, daas 1* Basilicate,
mort en 1683, à 66 ans, s'éleva à la pour-
pre par son mérite; car il était d'une
naissance très obscure. On lui doit : | des
IVotes sur le concile de Trente ; | une Re-
lation curieuse de la cour de Rome^ 1680,
in-i." ; | une compilation étendue sur le
droit ecclésiastique , en 12 volumes in-fol.
Elle est intitulée : Theatruin justitiœ et
veritalis. la. meilleure édition est celle de
Rome.
LUCAI\ ( Anx.kus-Map.cus), Liicanus,
poète latin, naquit à Cordoue en Espagne,
l'an 38 de J.-C. , d'Annseus Mêla, frère do
Sénèque le philosoplie. Il vint à Rome de
bonne heure , fut admis à la cour de Ca-
Hgula, el s'y fil connaître par ses décla-
mations en grec el en latin. Plus tard Né-
ron , charmé de son génie , le fit élever
avant l'âge aux cliarges d'augure el do
questeur. Cet empereur voulait avoir sur
le Parnasse le même rang qu'il occupait
dans le monde. Lucain eut la noble im-
prudence de disputer avec lui le prix do
la poésie , et le dangereux honneur de le
remporter. Les sujets qu'ils traitèrent
étaient Orphée et Niobé. Lucain s'exerça
sur le premier , el Néron sur le second.
Cet empereur eut la douleur de voir son
rival couronné sur le théâtre de Pompée.
Il chercha toutes les occasions de morti-
fier le vainqueur, en allendanl celle de le
perdre. Elle se présenta bientôt. Lucain,
irrité contre son persécuteur , entra dans
la conjuration de Pison, el fut condamné
à mort. Toute la grâce que lui fil le tyran
fut de lui donner le choix du supplice. Il
se fil ouvrir les veines dans un bain chaud,
el prononça, dit Tacite, dans ses derniers
moinens, les vei'S de sa Pharsale qu'il
avait faits sur un soldai qui était mort do
la sorte ; mais ce sang-froid ne répond;
guère aux efforts qu'il fit pour se conser-;
ver la vie. Il accusa sa mère, el rejeta sur
elle tous les complots. Il est difficile de
concilier cette lâcheté avec les senlimena
élevés que ses ouvrages respirent : mais
on sait que les leçons des philosophes ne
sont pas toujours d'accord avec leurs ac-
tions. Il expira l'an 05 de J.-C. « TeU(^ fut,
B dit un philosophe, la fin tragique de
» Lucain , qu'une vaine dispute pour \\n
«laurier stérile avança; car peut-être
» n'eùt-jl jamais conspiré contre Néron,
LUC
u si le tyran n'eût pas eu la folie de join-
» dre à ses autres fureurs celle de vouloir
» être bel-esprit. Mais ce qui doit étonner,
» c'est que les juges, malgré la terreur et
» la crainte qu'il inspirait , aient eu le
B courage de déclarer mauvais ses vers ,
s en couronnant ceux de son rival. » De
tous les ouvrages que Lucain a composés,
il ne nous reste que sa Pharsale ^ ou la
Guerre de César et de Pompée . poème
épique. Lucain n'apas osé s'écarter de l'his-
toire dans ce poème, et par là il l'a rendu
sec et aride. En vain veut-il suppléer au
défaut d'invention par la grandeur des
scnlimens ; il est fort souvent tombé dans
l'enflure , dans le faux sublime et dans le
gigantesque. César et Pompée y sont quel-
quefois petits à force d'y être grands. Ce
poète n'emploie ni la poésie l)rillante
d'Homère, ni l'harmonie de Virgile. Mais
s'il n'apas imité les beautés du poète grec
et du latin, il a aussi des traits qu'on
chercherait vainement dans l'Iliade et
dans l'Enéide. Au milieu de ses déclama-
lions ampoulées , il offre des pensées
tnàlcs et hardies , des maximes sages et
profondément réfléchies. Lucain périt à
îàge de 27 ans : il^lail désigné consul
pour l'année suivante. La 4"^" édition de
Lucain est de Rome, 1469, in-fol. ; l'édi-
lioncwm variis lectionibus est de Leyde ,
1669 , in-8" : celle de Leyde , 1728 , en 2
vol. in-/i.°, est plus estimée que celle de
17/iO -, mais toutes le cèdent à l'édition de
Strawberry-Hill, 1767, in-/t.°, gr. pap. Il y
en a une jolie édition de Paris , Barbou ,
i767) in-12, et 1765 in-fol. (c'est celle de
lionouard tirée à 212 exemplaires). Bré-
l*euf a traduit la Pharsale en vers fran-
çais , et il ne fallait pas moins que l'ima-
gination vive et fougueuse de ce poète
{)mn- rendre les beautés et les défauts de
l'original. On a publié en 1816 un frag-
ment sous ce titre : Traduction libre en
vers du premier livre de la Pharsale de
Lucain par Aug. Sirmian, in-8°.Marinon-
tel et Masson en ont donné deux versions
«r. prose : l'ime en 1768 , 2 vol. in-8", et
J'autre en 1766, 2 vol. in-12. M. le cheva-
lier de Laurès a publié en 1770 une nou-
velle traduction de Lucain en vers, on
plutôt une imitation, 1 volume in-S°, et
M. Amar une en prose en 1816. La Phar-
sale de Lucain a été traduite en italien
par Moloncelli, Rome, 1707, in-Zi", et par
Cristoforo Borcella, Pisc, 1804, 2 volumes
iu-4°; en espagnol par D. Juan de Jau-
regui, Madrid, 1684, in-4"; en anglais par
Nie. Rowe, Londres, 1708, in-fol.
607 LUC
LUCAIVUS. Voijez OCELLUS.
LUCAR. Voxjez CYRILE LUCAR.
LUCAS. Voyez LUCA.
LUCAS DE LEYDE, peintre et graveur,
né en 1494 , apporta en naissant un goût
décidé pour la peinture , et il le perfec-
tionna par une grande application. A 12
ans , il fit un tableau estimé des connais-
seurs. Ses talens lui acquirent l'estime de
plusieurs artistes, et particulièrement
d'Albert Durer, qui vint exprès en Hol-
lande pour le voir. S'étant imaginé, au
retour d'un voyage de Flandre , qu'on
l'avait empoisonné , il passa ses six der-
nières années dans un état languissant ,
et presque toujours couché. Il ne cessa
pas pour cela de peindre et de graver :
Je veux, disait-il , que mon lit me soit un
lit d'honneur. Il mourut en 1533 , à 59
ans. Ses figures ont beaucoup d'expres-
sion, ses attitudes sont naturelles, et il
a un bon ton dans le choix de ses cou-
leurs ; mais il n'a pas jeté assez de variété
dans ses tètes; ses draperies ne sont pas
bien entendues , son dessin est incorrect,
et son pinceau n'est pas assez moelleux.
LUCAS TUDENSIS , ou LUC DE TUY,
écrivain du 13' siècle, ainsi nommé
pai'ce qu'il était diacre , puis évêque de
Tuy en Galice , fît divers voyages en
Orient et ailleurs, pour s'informer de la
religion et des cérémonies des différentes
nations. Il composa à son retoxir : | un
ouvrage contre les Albigeois, écrit d'une
manière exacte et judicieuse , imprimé à
Ingolstadt en 1612, et qui se trouve dans
la Bibliothèque des Pères ; | une Histoire
d'Espagne , depuis Adam jusqu'en 1256 ;
I la Vie de saint Isidore de Séville ,
composée l'an 1236, insérée dans Ma-
billon.
LUCAS BRUGE.\'SIS ( François ) , ou
LUC DE BRUGES, licencié en théologie
à Louvain , et doyen de l'église de Saint-
Omer , mourut en 1619 , à 70 ans. Il
possédait les langues grecque , hébraï-
que , syriaque et chaldaïque. On a de
lui : 1 V Itinéraire de J.-C, tiré dos quatre
évangélisles ; | Commentaires sur les
Evangiles; \ Usage de la Paraphrase
chaldaïque de la Bible ; \ Remarques sur
les corrections les plus notables des Bi-
bles latines; \ Notes critiques sur les
exemplaires des Bibles latines et les va-
riantes ; I ... sur les variantes des Evan-
giles, tant du texte grec que du latin.
Tous ces ouvrages , imprimés plusieurs
fois séparément , ont été recueillis avec
ordre à Lcydc, 1712, o vol. in-fol.; [ des
LUC
G08
LUC
Concordances de la Bible selon la Vul- '
pate de Sixte V. Hubert Phalésius, béné-
dictin de l'abbaye d'Afflitîliem , mort en
1658, dans le Brabant, l'avait corrigée et
augmentée, et une meilleure édition en
fut donnée à Anvers, en 1642, in-fol.
Hugues de Saint-Cher est l'inventeur de
cet ouvrage si utile pour trouver sans
peine tel passage de l'Ecriture que l'on
souhaite ; | Instructions pour les confes-
seurs ; I des Sermons et Oraisons funè-
bres. Anvers, in-8°.
LUCAS ( Paul ) , né à Rouen en 166/t
d'un marchand de cette ville , eut dès sa
jeunesse une inclination extrême pour les
voyages, et il la satisfit dès qu'il put. Il
parcourut plusieurs fois le Levant , l'E-
gypte, laTurquie et différens autres pays.
il en rapporta un grand nombre de mé-
dailles et d'autres curiosités pour le ca-
binet du roi de France, qui le no^l^■^)a
son antiquaire en 1714 , et lui ordonna
d'écrire l'histoire de ses voyages. Louis
XV le fil partir de nouveau pour le Levant
en 1723. Lucas revint avec une abondante
moisson de choses rares, parmi lesquelles
on distingua quarante manuscrits pour la
bibliothèque du roi, et deux médailles
d'or très curieuses. Sa passion pour les
voyages s'élant réveillée en 1756, il partit
pour l'Espagne, et mourut à Madrid
l'année d'après, après huit mois de ma-
ladie. Les relations de ce célèbre voya-
geur sont en 7 vol. Son Voyage au Le-
vant , en 1699 , Paris , 1704 , est en 2 tom.
in-12, qui se relient en un. Son Voyage
dans la Turquie^, V Asie, la Syrie ^ la Pa-
lestine, la haute et basse Egypte , en
1704, parut à Paris, 1719, 5 vol. in-12.
Son Voyage dans la Grèce , dans l'Asie-
Mineure , dans la Macédoine et dans
l'Afrique, fait en 1714, fut publié à
llouen , 1724 , 3 vol. in-12. On assure que
ces voyages ont été mis en ordre par dif-
férentes personnes : le premier , par
iîeaudelot de Dairval ; le deuxième, par
Fourmont l'aîné; et le troisième, par
l'abbé Banier. Ils sont passablement écrits
et assez amusans pour ceux qui, dans ces
sortes d'ouvrages, ne cherchent ni la vé-
rité ni la vraisemblance. Dans les choses
même que le voyageur était le plus à
même de vérifier , il n'a mis ni discerne-
ment ni exactitude.
LUCAS (Richard), théologien anglais
et docteur d'Oxford, né en Ecosse, mou-
rut en 171!) , âgé de 76 ans. On a de lui
des Sermons , nwii Morale sur l'Evan-
gile, des Pensées cJuctiewie s, \& Guide
des deux j et d'autres ouvrages en
glais.
* LUCAS ( Jeax-A\dré-Hekri) , m
raliste, né à Paris en 1780 , mort da
même ville le 6 février 1825 , était
d'un conservateur des galeries au
séum d'histoire naturelle : élevé dans
établissement , il s'occupa de bonne he
de l'histoire naturelle et particulièrem
de la minéralogie. Il contribua à fi
disposer avec plus de goût et d'une
nière plus avantageuse pour l'étude
différons échantillons de ce vaste cabi
r\el. Ce fut aussi dans l'intérêt de
science qu'il voyagea dans l'Italie , d'o
il rapporta une collection des produi:
volcaniques du Vésuve et de l'Etna. 0
doit à Lucas un Tableau méthodique dt
espèces minérales, V'^ partie, 1806,
8"; 2" partie, 1812, recueil utile pou
ceux qui veulent parcourir avec fruit 1(
galeries du muséum ou ranger facilemei
les collections qu'ils entreprennent, o
reconnaître les minéraux qu'ils peuvei
rencontrer dans leurs voyages ; Haiiy e
faisait l'éloge ; la seconde édition du Dii
tionnaire d'histoire naturelle, publié pa
le libraire DéterviMe , dont Patrin ava
rédigé la première édition. Lucas a re(
tifié les inexacliludes de son prédéces
seur, et il l'a porté au niveau des cor
naissances actuelles que celui-ci avait tro
négligées. Il a été aussi un des collaboré
leurs du Dictionnaire classique d'histoii
naturelle, publié sous la direction d
M. Bory de Saint-Vincent. Le huitièin
volume de ce dernier ouvrage conliei
une Notice sur Lucas.
' LUCAS ( Jean-Pacl) , peintre , né
Toulouse, où il a créé le musée, fi
obligé , pour le fonder , de lutter contre!
vandalisme brutal et impie des représeï
tans délégués dans le département de
Haute-Garonne, qui voulaient anéa
des chefs-d'œuvre, sous prétexte q-
'consacraient le souvenir de la supe
(ion et de la féodalité. On a de ce peint n
qui est mort à Toulouse en 1808, un Ce
lalogue historique et critique des ti
bleaux et autres monumens des arts d
musée de Toulouse , 5*^ édition, l8-'6, t
Préceptes sur la manière d'apprendre
6fessî;;é?/-^ Toulouse, 1804, in-y".
* LUCAS ( Fkaivçois ), sculpteur, frèi
du précédent, né à Toulouse en 173(;
mort dans la même ville en 1813, olitii
le grand prix en 1761 , et fut nommé e
1764 professeur de sculpture. Il se monti
passionné pour les modèles antiques.
1
LUC
609
LUC
réunit dans une des salles de l'académie
iutant qu'il put de ligures moulées, et
recueillit dans un voyage qu'il fit en Ha-
ie , un grand nombre de médailles celti-
bériennes , grecques et romaines , de figu-
ines antiques, etc. On a de lui en terre
uité , en plâtre , en bois et en plomb ,
plus de 150 statues en bas-reliefs , parmi
lesquelles nous citerons les Adoi-ateurs ^
le Mausolée Puyvert^ la ville de Toulouse^
VOccitanie, et surtout la Jonction des
deux mers.
LUCC.\RI (Jeaiv), jésuite italien,
né à Raguse , fut destiné dabord à l'état
ecclésiastique , et porta pendant quelque
temps le titre d'abbé ; il florissait vers
1629. Il s'était rendu célèbre dans sa com-
pagnie par son goût pour la bonne lillé-
rature et par son éloquence. Il fut
long-temps professeur de rliétorique au
collège romain, et compta parmi ses
nombreux élèves des personnes illustres,
notamment le cardinal Tolomei, et Jeau-
Fran<;ois Albani, depuis pape sous le
nom de Clément XI. On a du père Jean
Luccari plusieurs discours éloqucns dont
les principaux sont : 1 V Oraison funèbre
du cardinal Lugo , de la compagnie de
Jésus ^ prononcée à Rome , dans l'église
de la maison professe , Rome , 1660 ( V.
LUGO); I X Oraison funèbre du cardinal
Marie-Antoine Francioiti , Rome, 1666.
Ces deux oraisons funèbres sont en latin.
I Stanislas Kotska ^ drama sacrum ,
Rome, 1709. Le père Luccari mourut celte
même année , âgé de 80 ans.
LUCCHESINI (JEAN-VisfCEXT), sa-
vant prélat de Lucqucs où il était né en
1660 , fut secrétaire des papes Clément XI
et Benoit XIV , et mourut à Rome , en
Klhk, âgé de plus de 80 ans. On a de lui :
I une Histoire de son temps , estimée en
Italie, dit l'abbé Lenglet , et qui le serait
ailleurs si elle était connue. Elle a paru
à Rome, en 1723, 3 volumes \n-h.°. | Une
Traduction en latin des Oraisons de Dé-
mosthènes.
• LUCCHESmi (le marquis Jérôme
de) , diplomate prussien, d'une des plus
illustres familles de Lucques , où il na-
quit en 1746 , y reçut une éducation soi-
gnée. Quelques amis qu'il avait à Berlin
l'appelèrent dans cette ville , où il plut à
Frédéric le Grand, qui le nomma son bi-
bliothécaire et l'admit dans son intimité.
Le successeur de ce roi, Frédéric-Guil-
laume, hérita de son amitié pour le mar-
quis de Lucchesini . et l'envoya , en 1788 ,
comme son ambassadeur à Varsovie,
lors de l'ouverture de la grande diète,
où il sut flatter adroitement le parti de
l'indépendance. En mars 1790 , il réussit
à conclure un traité d'alliance entre la
Prusse et la Pologne , et trois mois après
il assista aux conférences de Reichen-
bach, où se trouvaient les envoyés de la
Hollande et du roi d'Angleterre. On y
avisa aux moyens d'empêcher la guerre
entre l'Autriche et la Porte-Oltomane.
Le traité alors ajourné, fut stipulé, en
1791, à Schistow^e. L'année suivante,
Lucchesini retourna à son ambassade de
Varsovie ; mais les nouvelles relations
qui s'établirent entre la Prusse et la Russie
l'obligèrent à rompre le traité de 1790 , et
à quitter Varsovie , les troupes prus-
siennes étant sur le point d'entrer dans
la Grande-Pologne. Nommé , en 1793 , à
l'ambassade de Vienne , il accompagna
néanmoins le roi Guillaume vers le Rhin ,
et y resta toute cette campagne. Le 1k
juin, il se trouva devant Mayence, et
signa le traité d'alliance tffensive et dé-
fensive entre la Prusse et l'Angleterre
contre la république française. Il retourna
à Vienne , qu'il quitta en 1791 , pour se
rendre auprès de son roi , qui était devant
Varsovie , et dont les troupes se retirèrent
à la fin de la campagne. Lucchesini de-
manda alors pour la troisième fois sa re-
traite ; elle lui fut accordée et il ne s'oc-
cupa jusqu'en 1797 , que de négociations
secondaires avec l'Autriche. Cependant ,
sollicité par son souverain, il vint, en
1802, à Paris, comme ministre plénipo-
tentiaire auprès du premier consul Bona-
parte. Sa mission remplie , il retourna à
Berlin. A l'époque du couronnement de
Napoléon comme roi d'Italie , Lucchesini
se rendit à Milan pour présenter à ce con-
quérant l'ordre de l'Aigle-Noir, au nom
du roi de Prusse ; ordre dont il décora
également plusieurs personnages de la
cour de Napoléon. Envoyé de nouveau
comme plénipotentiaire à Paris , il y
resta jusqu'à la fin de la campagne do
1803 contre l'Autriche , et en partit en
1806 , pour ime mission secrète relative
aux négociations commencées par le
comte dHaugwitz. Lorsque la Prusse eut
déclaré la guerre à la France , Lucche-
sini se retira à Lucques , sa patrie. Mais
accoutumé au fracas des cours , il paraît
qu'il n'en sut pas perdre l'habitude même
à l'âge de 70 ans ; aussi il entra, en qua-
lité de chambellan, au service d'Elisa
Bacciocchi,sœur de Napoléon, alors prin-
cesse de Lucques , et grande-duchesse de
LUC
CIO
LUC
Toscane. Lors de la chute de la famille
Bonaparte , il abandonna entièrement les
affaires. Il est mort le 19 octobre 1823-
^ * LUCCIIESIIVI (CÉSAR ), frère du pré-
cédent , né à Lacques , en 1736 , fit ses étu-
des à Modène , à Reggio , puis à Rome ,
et s'occupait avec succès d'études litté-
raires, lorsqu'il fut député au Directoire ,
en 1798 , pour garantir la petite républi-
que de Lucques de l'invasion des armées
françaises. Sa démarche n'eut aucun ré-
iultat , et il renonça à toute espèce de
fonctions publiques, pour se livrer à la
culture de la poésie , des belles-lettres , et
surtout de la philologie , science dans la-
quelle il s'était fait un nom célèbre. Ses
ouvrages, sur des sujets très variés, s'é-
lèvent au nombre de 102. Nous citerons :
I Essai d'un vocabulaire de la langue pro-
vençale; j Institution d'économie civile ;
I Essai sur l'Histoire du théâtre italien
dans le moyen âge ^ 1788; | Lettre à Mi-
cali sur quelques passages d'Homère ^
1819; I Origine du Polythéisme ; \ His-
toire littéraire du duché de Lucques;
I Des sources des langues anciennes et
modernes. Luccliesini est mort à Luc-
ques , à l'âge de 75 ans , le 16 mai 1852.
LUCCHI. rayez LUCHI.
LUGE, pape. J^o/ez LUCIUS.
* LUGE DE LAÎVCIVAL ( Jean-Char-
LES-JuLiE\) , poète et professeur de bel-
les-lettres, né en 1766 à Saint-Gobin , en
Picardie , fit d'excellentes études au col-
lège de Louis le Grand à Paris , et était en
rhétorique lorsqu'il composa sur la mort
de l'impératrice Marie-Thérèse, un poème
latin qui lui valut de la part de Frédéric
Il , roi de Prusse , une lettre et un pré-
sent. Peu de temps après , Joseph II lui
accorda une pension. De tels eucourage-
mens fortifièrent la verve du jeune poète ,
qui avait fait de Virgile et de Stace ses
auteurs favoris , et il donna encore un
poème latin sur la paix de 1785 (De pace
Carmen), 178/»., in-i.°. En 1783, parut
son poème sur le Globe. Le talent que ré-
vélaient ces ouvrages , où brillait un goût
pur et classique , fit appeler leur au-
teur, âgé seulement de 22 ans , à la chaire
de rhétorique du collège de Navarre. Luce
de I^ncival s'était fait remarquer de
M. de Noë , évèque de Lescar, dont il cul-
tivait la société. Après avoir abandonné
ses fonctions de professeur, il embrassa
l'état ecclésiastique , et suivit ce prélat
dans son diocèse, en qualité de grand-
vicaire. Ses sermons attirèrent la foule
depuis 17S7 jusqu'en 1790, mais ils n'ont
point été publiés. Malheureusement pfus
tard , Luce de Lancival ne comprit poiui
toute l'étendue des devoirs que son ca-
ractère sacré lui imposait. Il renonça ,
sous la révolution, à son ministère, s'oc-
cupa dans sa retraite de littérature et de
poésie , et ne reparut qu'à la fin de nos
troubles, pour occuper la place de pro-
fesseur de belles-lettres dans un lycée de
Paris. Il composa depuis des discours
destinés à être prononcés dans les céré'
monies publiques, et remarquables par
leur style brillant et soutenu. Celui qu'il fit
entendre à la distribution des prix du
Prytanée, parut en 1800, in-8". Cepen-
dant il était en proie à des maux cruels
qu'il souffrait avec courage, et, en 1790,
on lui avait fait l'amputation d'mie jambe^
opération qui fut, dit-on , la suite de ses
jnauvaises mœurs. Sa tragédie d'Hector
lui fit donner par Napoléon , la croix de
la légion-d'honneur et une pension de
6,000 francs, et dans le concours qui fut
ouvert pour célébrer le mariage de l'em-
pereur avec Marie-Louise, Luce de Lan^
cival remporta le grand prix du dis-
cours lalh». Il était sur son lit de mort,
et la gangrène s'était mise dans la jambe
qui lui restait , lorquun page , accompa-
gné des grands dignitaires de l'univer-
sité, lui apporta de la part de l'empereur
la médaille d'or et la couronne de laurier.
Il expira le lendemain , 13 avril 1810, à
l'âge de hk ans. Outre les deux poèmes la-
tinseilepoètnesicrleGlobe^qncnousavom
déjà cités, cet auteur a laissé : j Epitre à
Clarisse sur les danqers de la coquetterie,
suivie d'une Epitre à l'ombre de Caroline ;
I Folliculus, poème en 4 chants, dirigé
contre Geoffroy, dont les articles dans la
Journal des Débats l'avaien.! exaspéré;
I Eloge de M. de Noë ^ couronné par le
musée de l'Yonne, Auxerre, 1804 , in-8"}
I Achille à Scyros, Paris, 1807, in-8'
poème imité de l'Achilléide de Stace : 1^
style y est recherché, l'ordonnance défeo»
tueuse, l'action farble; mais il est gêné?
ralement assez bien versifié. | Plusieurs
tragédies : Mutins Sccevola, en 3 actes
1795 ; I Honnisdas, en 5 actes , imprimé^
en 1804; | Ar cl libald et Fernande z . toutet
deux aussi eu 3 actes ; 1 Périandre, 1798,
en 3 actes; enfin | celle d'Hector^ en !
actes, de laquelle M. Villemain a dit
qu'elle était véritablement homérique el
puisée tout entière dans llliade : c'est h
seule qui ait eu du succès au Ihcàtre. Or
a i)ul)lié en 1826 les Olùivres de Luce di
Lancival précédées d'une notice par Col'
i
LUC
611
LUC
lin de Plancy, et des discours prononcés
sur sa tombe par MM. Dcguat , Lacretelle
ft Rojjer, 2 vol. in-8°. M. Viliemain a pu-
blié dans le Magasin encyclopédique ,
1810, tome S, pag. 138, une Notice sur
Lancival.
LIJCEIVA (Jea-v), jésuite, né dans le
Portugal, l'an 1563, mort en 1600, à 33
ans, se rendit célèbre par ses sermons. li
a laissé V Histoire des missions de ceux de
sa société dans les Indes , avec la Fie de
saint François-Xavier. Cet ouvrage a été
tiad.du portugais en latin et en espagnol.
Ll'CE\A ( Louis de ), né à Guadalaxara,
dansla Nouvelle-Caslille, docteur en mé-
decine , florissait dans le 16*^ siècle. Il em-
ploya plusieurs années à faire de longs
voyages pour étudier la nature. Après di-
verses courses , il se rendit à Toulouse , où
il exerça la médecine. Ce fut dans cette
ville qu'il écrivit son traité De tuenda ,
prœserlim a peste ^ intégra valetudine ^
deque hujus niorbi remediisj imprimé en
1323, in-4°. L'auteur mourut à Rome en
1352 , âgé de 61 ans.
* LIJCET (Jean-Claude), avocat et
canoniste , naquit en 1733 à Pont-de-
Veyle en Bresse ; son père exerçait l'état
de boulanger. Il vint de bonne heure à
Paris, étudia le droit civil et canonique,
et se distingua parmi les avocats de la
capitale. Plusieurs personnages importans
lui donnèrent leur confiance ; mais Lucet
la trompa , et fut accusé de malversations.
Ces événemens influèrent beaucoup sur
son repos et sur sa santé, et peut-être
aussi sur son esprit; car dans son déses-
poir, il hâta lui-même sa fin , et mourut
le 11 juin 1806, à Vanvres, où il demeu-
rait. Les sentimens religieux qu'il avait
toujours professés dans ses ouvrages, ren-
dirent cette détermination inexplicable
pour ceux qui le connaissaient : il est à
croire que sa raison avait été entièrement
aliénée. On a de lui : | Eloge de Catilina^
Paris , 1780 , in-8''. Ce fut par cet écrit que
l'auteur se fit connaître ; j Principes du
droit canonique et universel s in-i°. Cet
ouvrage lui valut, dit-on, une place chez,
le garde-des-ceaux ; | La religion catholi-
que est la seule vraie ^ et la seule qui ré-
ponde à la dignité et aux besoins de
thomme ; \ Lettres sur différens sujets
relatifs à l'état de la religion en France ,
in-8° ; | Principes de décision contre le
divorce ; \ De la nécessité et des moyens
de défendre les hommes de mérite contre
les calomnies et les préjugés injustes ,
Paris , 1803 , in-8° (publié sous le nom du
jurisconsulte Couct); | L'Enseignement
de V Eglise catholique sur le dogme et la
morale , recueilli de tous les ouvrages de
liossuetj en conservant partout son style
noble et majestueux ^ Vatis , 1804, 6 vol.
in-8". Cet ouvrage qui est précédé d'une
Fie de Bossuet et d'une analyse raison-
née de ses ouvrages , ne porte pas l'em-
preinte d'un goût extrêmement sévère ,
et surtout d'une impartialité exempte de
l'esprit de parti. On a remarqué, entre
autres choses, qie Lucet, en donnant un
article de V Enseignement de V Eglise sur
le molinisme, se garde bien de donner celui
qui regarde le jansénisme. Les yinnales
littéraires et morales ^ tome k , page 383 ,
ont parfaitement jugé cet ouvrage, qui
eut d'ailleurs peu de succès.
*LUCH ET (Jean-Pierke-Louis, marquis
de), connu d'abord sous le nom de Laro-
che-du-Maine , officier de cavalerie et litté-
rateur, naquit à Saintes le 15 janvier 1740.
Après avoir embrassé l'état militaire, il fit
quelques entreprises de commerce , et se
mit à la tète d'une exploitation de mines.
Malheureux dans ses spéculations , il s'en-
fuit à Lausanne pour éviter les poursuites
de ses créanciers. 11 entreprit dans cette
ville en 1776 la rédaction d'un journal qui
tomba faute d'abonnés. Le landgrave de
Hesse-Cassel , auprès duquel il se rendît,
le fit son bibliothécaire , et la société des
antiquités de Cassel le choisit pour son
secrétaire perpétueL En 1788 le marquis
de Luchet alla auprès du prince Henri de
Prusse qui lui fit une pension de 2000
écus. Il rentra bientôt en France où il ré-
digea le Journal de la ville qu'il data bi-
zarrement de Charenton. 11 mourut à Pa-
ris en 179ÎJ, après avoir publié divers ou-
vrages parmi lesquels nous citerons | \ His-
toire de l'Orléanais^ depuis l'an 705 de la
fondation de Rome , Amsterdam (Paris),
1766, in-4°; | Histoire littéraire de Vol-
taire, 1782, 6 vol. in-S"; 1 Essai sur la
secte des illuminés, 1789, in-8", etc. Le
marquis de Luchet fut un écrivain fé-
cond , mais superficiel et déclamateur.
* LUCIII (Michel-Ange), cardinal, né
à Brescia le 20 août 1744 , embrassa Tin-
stitut de Saint-Benoit, dans la congréga-
tion du Mont-Cassin , et s'y distingua par
sa piété et son goût pour les études sa-
vantes. Il professa la philosophie et la théo-
logie pendant plusieurs années dans les
monastères de son ordre. Il avait une
grande connaissance des antiquités ecclé-
siastiques, et s'était rendu familières les
i langues orientales. Il visita les princi-
LUC
612
LUC
pales bibliothèques de l'Italie. Quoique son
jicnchant le portât plus particulièrement
vers l'ctude et le travail du cabinet, ilful
obligé d'accepter divers emplois dans sa
c )ngrégation , et devint abbé de Sublac,
monastère célèbre par la retraite de saint
Benoît. 11 avait été lié avec Pie VII , reli-
gieux comme lui de la congrégation du
Mont-Cassin; ce dernier, devenu pape,
créa Luchi cardinal le 23 février 1801 ;
mais il ne le fut déclaré que le 28 sep-
tembre suivant. Ce savant cardinal mou-
rut le 29 septembre 4802 , dans son abbaye
de Sublac, où il était venu pour faire la
visite ; il n'avait que 58 ans. On a peine à
concevoir comment il a pu, pendant une
vie aussi courte , suffire aux immenses
travaux qu'il a laissés. II avait rédigé des
Commentaires sur plusieurs parties des
livres saints, et entrepris une nouvelle
polyglotte qui aurait formé 50 vol. in-fol.
Il y avait réuni les remarques des plus
habiles interprètes , et rétabli le texte hé-
breu dans sa pureté naturelle ; on y trouve
une nouvelle version grecque , la plus
conforme à l'hébreu qu'il soit possible,
une seconde version latine plus littérale ,
le texte des Septante , une traduction la-
tine des mêmes, et notre Vulgate ; le tout
accompagné de variantes et d'un com-
mentaire approfondi. Ses ouvrages ma-
nuscrits sont au nombre de 195 , dont 71
en grec , et 119 en latin sur des matières
d'érudition , de critique , de théologie et
de morale. Par son testament , il légua
tous ces écrits au pape , qui les a fait dé-
poser dans la bibliothèque du Vatican ,
d'où sans doute ils sortiront un jour pour
être livrés à l'impression. Outre ce savant
et inconcevable travail, on a du cardinal
Luchi : | Venantii Honorii Clementiani
Fortunati opéra omnia, recens ad ina-
nuscriptos codices vaticanos^ nec non ad
veteres editiones collata^ Rome, 1786 et
i787, 2 tomes in-4°; ] Appiani Alexan-
drini et Herodiani selecta grcece et latine^
Rome, 1785; j Là cause de l'Eglise dé-
fendue contre l'iJijustice de ses ennemis ^
1799; I plusieurs Dialogues grecs j impri-
més à Florence.
* LUCIII ( BoNAVENTURE ) , savaut mi-
nime conventuel , oncle du précédent ,
était né à Brescia le 16 août 1700. Il pro-
fessa la philosophie à Vérone et à Vi-
cence , et devint régent du couvent de
Saint-François-le-Grand, à Milan. Après
avoir occupé pendant 6 ans la chaire de
théologie dans cette dernière ville, il fut
nommé secrétaire de son ordre, et se ren-
dit à Rome, où cette charge l'appelait. U
y exerça les fonctions de lecteur dans lei
célèbre collège de la Sapience. Etant alléj
de Rome à Padoue, il y professa la mé-1
taphysique à l'université, puis l'Ecriture
sainte. Pendant son séjour à Rome il s'é-
tait fait connaître de Clément XIII qui
appréciait ses rares talens, sa piété et ses
autres vertus. Clément songeait à faire
Luchi cardinal ; mais dès lors un parti
puissant méditait la destruction des jé-
suites, et dressait ses plans pour parve-
nir à ce grand résultat. Clément aimait
la société et ne se doutait nullement de ce
projet. On le circonvint et on lui fit pré-
férer à Luchi GanganeUi, qui lui était très
inférieur en mérite et en savoir, mais dont
on connaissait les dispositions à l'égard
des jésuites. Il eut le chapeau, et réalisa,
quand il fut pape , les espérances qu'on
avait conciles de sa complaisance. ( Voyez
CLÉMENT XIV. ) Le père Luchi a laissé
un grand nombre d'ouvrages parmi les-
quels on distingue : | Spinosismi synta-
g ma adinstaurandastudia melaphysica,
propositum anno 1730 ; | Disserlationes
duce de nuditate protoplastorum et de
serpente ientatore, Padoue, 1755 ; | Istru-
zione pratica sopra le regole e conslitu-
zioni di san Francesco d'elV ordine de
Minori comentuali , Venise, 1758; \ De
trajectione maris Idurnœi ^ de sacrificio-
rum origine et ritu , disserlationes dxiœ
habitœ in gymnasio patavino , Padoue,
1759. Dans la première de ces disserta-
tions, l'auteur combat Spinosa et Leclero;
dans la seconde, Grotius et Spencer. On
a aussi de lui quelques rfîscow?'* imprimes.
L'auteur de la Storia lettcraria d'Ilalia.
vol. 12, pag. 273, parle du père Luclù
très avantageusement, et fait l'éloge de
ses vertus, de son érudition et de sespro<
fondes connaissances. Ce savant religieux
mourut à Padoue en janvier 1785.
LUCIDO. Voyez LUCIUS JEAN.
LUCIDIIS (Jean), surnommé 5«5fwo-
theus ou SamosathenuSj se distingua dans
le 15*^ siècle par ses progrès dans les ma-
thématiques. On a de lui plusieurs ou-
yrages de clironologie en latin : | De
emendatione temporum ; j Epilomeemen-
dationis calendarii romani^ etc.
LUCIE ou LUCE (sainte ) , vierge cé-
lèbre dans l'histoire de l'église de Sicile ,
souffrit le martyre à Syracuse vers l'an
304, sous l'eujpire de Dioclétien, en pré-
disant la prochaine tranquillité de rP-glise,
qui eut effectivement lieu après la mort
des tyrans et le triomphe de Constantin.
LUC
615
LUC
Sigebert de Gemblours dit que l'empe-
reur Olhon 1'='' lit porter son corps à Metz,
où il est honoré dans l'église de Sainl-
Vincent. Les savans ne sont pas tous dis-
posés à reconnaître les actes de cette
sainte pour authentiques, quoiqu'ils soient
anciens , puisque saint Adiielme , qui vi-
vait dans le T siècle, les a cités. ( Voyez
les Acta sincera sanctœ Lucice V. M.
ex codice grœco primian édita et illas-
trata^ opéra et studio Joannis de Jeanne
Tauromenitani j. Palcrmc , 16C1 , 1758 ,
in-S".) Quelque rigueur de critique qu'on
puisse exercer à cet égard, il sera toujours
vrai que le culte de sainte Lucie , l'idée
générale de sa foi et de ses vertus, ont
des fondemens très solides , puisque son
nom se trouve dans le canon de la messe,
pièce de la plus haute antiquité, avec
ceux des saints les plus illustres des pre-
miers siècles. Voyez sainte CATHERINE,
saint ROCIL
LUCIEN, célèbre sophiste grec, né à
Samosate en Syrie, dans une condition
médiocre, vécut, selon l'opinion la
plus générale, depuis environ l'an 120
de J.-C. , jusqu'à l'an 198 ou environ.
Il fut mis entre les mains d'un de ses
oncles, habile sculpteur ; mais, ne se sen-
tant aucune inclination pour l'art de son
parent, il cassa la première pierre qu'on
lui mit entre les mains. Il embrassa la
profession d'avocat; aussi peu propre à
la chicane qu'au ciseau , il se consacra à
la philosophie et à l'éloquence. Il les pro-
fessa à Anlioche, dans l'Ionie , en Grèce,
dans les Gaules et l'Italie. Athènes fut le
théâtre où il brilla le plus long-temps.
Commode le nomma greffier du préfet
d'Egypte. Lucien demeura long-temps à
Rome, et les vices de cette ville lui inspi-
rèrent sa satire intitulée Nigrinus. Les
ouvrages qu'il écrivit pendant le temps
qu'il exerça la profession de rliéteur, fu-
rcrjt : les deux Phalaris. le Tyrannicide^
\c Médecin déshérité par son j)ère , les
Dipsades. Zeuxis , les Cygnes. Hésiode ,
Hérodote, les Bains d'Hippias, liacchus.
Hercule, le Scythe. V Eloge de la Patrie.
V Eloge de la Mouche^ etc. A quarante
ans , il renonça à l'art frivole des rhé-
teurs , et se livra au pyrrhonisme , qu'il
porta à l'exlrcme. Il écrivit alors les Dia-
logues des Dieux et des Morts ^ Ttînon.
le Jupiter tragique . le Jupiter confondu.
Charon. les Ressuscites. V Assemblée des
Dieux . Ménippe , le Coq . les Lapithes.
les Vœux, les Sectes à l'encan, les Dialo-
gues des Courtisanes. l'Ane, la Manière
7.
d'écrire Thistotre, traité dédié aux gens
de lettres ; les Eittérateurs à la solde det
grands. Chan'déme ; le Pérégriiius et lu
Philopatris ont été mis à l'index . etc. il
avait vécu à Athènes avec le vieux phi-
losophe Démonax , et il y fut témoin d(5
l'action du cynique Pércgrinus , apostat
du christianisme, qxii se brûla publique-
ment aux jeux olympiques, l'an 165 de
J.-C. Suidas rapporte que Lucien mourut
dévoré par les chiens , en punition de co
qu'il avait plaisanté sur .J.-C; mais le si-
lence des auteurs contemporains peut
rendre celle anecdote douteuse. Selon RI.
lioissonnade , Lucien serait mort de hi
goutte, et cette opinion est appuyée sur
des raisons très plausibles. On croit qu'il
mourut sous l'empereur Albin , dans un
âge fort avancé. Les divers ouvrages de
Lucien sont écrits dans un style naturel ,
vif, plein d'esprit et d'agrément. Il fait
éprouver ces sensations vives et agréa-
bles que produisent la simplicité fine et
l'enjouement naïf de la plai.sanlerit: atti-
que. Lucien est principalement connu
par ses Dialogues des morts. Il y peint,
avec autant de finesse que d'enjouement,
les travers , les ridicules et la sottise des
philosophes, qui affectent de mépriser
les richesses et les honneurs, tandis qu'ils
sont dévorés de cupidité et d'orgueil; qui
ne parlent que de vertu et de grandeur
d'âme, tandis que l'on ne connaît rien de
plus lâche ni de plus vicieux parmi les
hommes. « Pour comble d'absurdité, dii-
» il, je vis, en suivant mes philosophes
» dans les détails de leur vie, que leur
» conduite était partout en conlradiclion
» avec leurs principes. Ceux qui parlent.
» le plus du mépris des richesses sont
» aussi les plus intéressés ; on les voit
I) tous les jours prêter à usure et seplain-
» dre sans cesse de leurs débiteurs- Ils
» n'enseignent que pour de l'argent , el
» la soif de l'or les rend capables des der^
» nières bassesses. D'autres , en affectant
» la plus grande indifférence pour la
«gloire, n'ont qu'elle en vue dans tous
» leurs travaux. Tels déclament en public
» contre la volupté , qui, dans le secret
n de leur vie, en sont les esclaves les plus
» soumis. » Lucien insiste particulière-
ment sur l'ignorance et les incertitudes
qu'il avait observées dans ceux qui se
donnaient -pour précepteurs du genre hu-
main, et qui n'ont jamais pu s'accorder
un moment dans les questions les plus
intéressantes sur l'origine, le gouverne-
ment et la destination du monde '^ L'irt-
■61
LUC 614
» rertilude et le doute accompagnèrent
» les premiers pas que je fis dans la con-
■> naissance de ce que les philosophes ap-
; pelicr^t le monde. Je ne pouvais conce-
« voir ni par qui ni comment il avait pu
» être formé, quel avait été son com-
B menccment et quelle serait sa fin. Ce
• fut bien pis encore , lorsque je vins à
» examiner en détail chacune des parties
• qui le composent. Le hasard seul me
» paraissait avoir présidé à la disposition
x des étoiles, jetées en apparence sans
► ordre et sans dessein dans les espaces
» du ciel ; la matière et la nalure du soleil
» excitaient vivement ma curiosité; les
ft phases de la lune et la vicissitude de ses
► (1 if férens aspects étaient à mes yeux des
• merveilles aussi étonnantes qu'incom-
• préhensihles. La splendeur élincelante
7» des éclairs , le bruit éclatant du ton-
!> nerre, la pluie, la neige et la grêle qui
n se forment sur nos têtes : tout cela éJait
» pour moi autant de mystères inexpli-
» cables, et dans lesquels je désespérais
» de pénétrer jamais sans quelque se-
» cours. Pour sortir de cet état d'ijjno-
» rance et de perplexité , je crus n'avoir
. rien de mieux à faire que de recourir
» aux philosophes. Persuadé qu'ils étaient
• les dépositaires de toutes les vérités, et
» qu'ils dissiperaient meS doutes sur ces
» divers sujets, je m'adressai à ceux d't-n-
» tre eux que je crus les plus habiles. Je
» jugeai de leur mérite à la gravité de
» leur extérieur, à la pâleur de leur visage,
» cl à la longueur de leur barbe ; marques
» infaillibles , selon moi , de la profon-
» deur et de la sublimité de leurs con-
» naissances. Lorsque je me fus mis entre
• leurs mains, il fallut convenir du prix,
» qui n'était pas modique ; encore m'o-
» bligea-t-on d'en payer la moitié d'a-
• vance, avec promesse d'acquitter le
» reste quand le cours des leçons sérail
p fini. Je voulus d'abord être instruit de
» tous les contes qu'ils nous font sur ce
I. qtli se passe dans le ciel, et savoir com-
» ment ils s'y prennent pour nous expli-
» quer l'ordre établi dans l'univers. Quel
• fut mon étonnement, lorsque mes doctes
» maîtres , bien loin de dissiper ma pre-
» mière incertitude, me plongèrent dans
» un aveuglement mille fois plus grand
• encore ! J'avais tous les jours les
«. oreilles rebattues des grands mots de
t principes, de fins, â' atomes ^ de vide ^
» de muliire^ de formes. T.e qu'il y avait
» de plus insupportable pour moi , c'est
> que chacun d'eux, en m'enscignantpré-
LUC
» cisément le contraire de ce que m'a-
» valent dit les autres, exigeait que je
» n'eusse confiance qu'en lui seul, et me
» donnait son système comme le seul bon.»
Ces portraits, et beaucoup d'autres que
Lucien fait des anciens philosupiies, sont
remarquables par leur ressemblance
avec ceux que J.-J. Rousseau a tracés
des philosophes modernes, et prouvent
que la fausse sagesse est la même dans
tous les temps. Un autre objet des criti-
ques de Lucien était les dieux du paga-
nisme, et les délires de celte religion ab-
surde. Mais cette partie de ses ouvrages
est bien moins intéressante et moins ori-
ginale ; les chrétiens ayant déjà fait avant
lui presque toutes les observations sur
les extravagances de la mythologie. Cette
lecture peut «nême faire de très mau-
vaises impressions sur des esprits super-
ficiels. Le satirique confond le vrai et le
faux, le bon et le mauvais, cl donne à
ses sarcasmes une étendue qui compro-
met les vérités les plus respectables. Les
chiéliens , en démolissant le monstrueux
édifice du paganisme , le remplaçaient
par un bâtiment auguste, solide et excel-
lemment assorti dans toutes ses parties.
Lucien ne sait que détruire, et laisse soa
lecteur dans un désert qui ne diffère
presque point d'un néant parfait. On re-
marque aussi que ce Grec érige en héros
des misérables que la police de nos villes
ne souffrirait point dans les rues ( Voyez
DÉMON AX ) ; Lucien lui-même s'est as-
suré une place parmi eux ; il ne respecte
ni la bienséance ni la pudeur. Son goût
pour l'épicurisme parait par l'éloge qu'il
fait d'Epicure , en l'appelant un homme
diqne d'être pla<:é sur les autels , xrn es-
prit divin , un sage qui a mis dans les
routes de la vraie sagesse et du vrai bon-
heur tous ceux qui ont écouté ses leçons
11 n'a point écrit expressément contre la
christianisme; mais il a horriblement
maltraité et J.-C. et ses adorateurs, dans
son récit de la mort de Pérégrin , qu'il
suppose très faussement avoir joué un
grand rôle parmi les chrétiens. Il est dif-
ficile de comprendre après cela comment
quelques savans ont pu croire qu'il a été
clirélien lui-même. Le dialogue intitulé
Philopatris . sur lequel ils fondent son
prétendu christianisme, ne peut avoir
été fait par Lucien. L'auteur de cet ou-
vrage, écrit sur la fin du premier siècle,
dit qu'il avait vu saint Paul, et qu'il avait
reçu de lui le bapt ême ; ce qui ne convient
pas à Lucien, qui ûorissait sous Marc- Au-
LUC
615
LUC
rèle , et qui mourut un siècle après saint
Paul. [f^oy. les NotesàQ la dernière édilion
de Lucien à A.mslerdam , et une savante
Dissertation de Conrad Gesner. ) Les ou-
vrages de Lucien ont été traduits dans
plusieurs langues, en allemand, par
Wieland , en anglais par Franklin , en
ilalien par Gozzi. D'Ablancourt en a donné
une version française, Amsterdam, 2 vol.
in-8° , 1709 ; mais quiconque ne les con-
naît que par celte version lâche , infidèle
et Ironquée, ne peut en avoir qu'une très
fausse idée. L'abbé Massieu en a donné
une meilleure, Taris, 1781, 6. vol. in-12,
effacée cependant par celle qui a paru en
1788 avec des notes historiques et crili-
«jues, par Belin de Ballu, Paris, 6 vol.
iu-8°. Les éditions les plus recherchées
des ouvrages de Lucien sont : celle de
Paris , in-fol. 1615 , en grec et en latin ,
par Boudelot ; d'Amsterdam, 1687, 2 vol.
in-8°, cwn notis variorum; et de la même
ville, 1743 , 3 vol. in-/i.°, auxquels il faut
joindre un Index ^ Utrecht, 17i6, in-4°;
do Deux-Ponts, 1789-91, 10 vol. in-S**.
Voyez, la Bibliothèque de Fabricius et la
Préface de Belin de Baliu.
LUCIEN (saint), prêtre d'Anlioclie cl
martyr , né à Samosale, exerça d'abord
le sacerdoce à Nicomédie. 11 évita la fu-
reur d^ la persécution de Dioclélien ;
mais ayant été dénoncé par un prêtre sa-
bellien, il fut conduit devant Maximin ,
surnommé Daïa. Au lieu de blasphémer
la religion chrétienne, comme on voulait
le lui persuader , il composa pour sa dé-
fense ime Apologie éloquente. Maximin
le fit tourmenter de plusieurs manières ,
mais n'ayant pu ébranler sa foi, il le fit
noyer (selon quelques-uns, décapiter),
le 7 janvier 312. L'illustre martyr emporta
au tombeau une grande réputation de
savoir et de sainteté. Il avait ouvert à
Antioche une école pour développer les
principes de la religion, et pour aplanir
jes diftlcuUcs de l'Ecriture. Il ne nous
reste aucun des ouvrages qti'il avait com-
posés, sinon un fragment de la lettre
qu'il écrivit de sa prison aux fidèles de
rég)ise d' Antioche. Saint Jérôme dit qu'il
avait revu avec beaucoup de soin la ver-
sion des Septante. Toutes les églises qui
étaient entre Antioche et Constantinople
se servaient de cette version. On l'accuse
d'avoir eu du penchant pour l'arianisme.
Il est certain que les principaux chefs des
ariens avaient été disciples du saint mar-
tyr; mais ils s'éloignèrent des vérités
que leur maître leur avait enseignées,
et se servirent de son nom pour répandre
leurs erreurs. Saint Alhanase l'a justifié
de façon à dissiper tous les nuages répan-
dus sur sa foi. — Il y a eu trois autres LU-
CIEN : l'un, martyrisé sous Dèce.l'an 250;
l'autre, premier évèque de l'église .de
Beauvais; et im troisième, dont nous
avons une Lettre sur linvention du corpt
de saint Etienne. Il a vécu dans les qua-
trième et cinquième siècles, et écrivait
l'aiî /tl3. Voyez GAMALIEL.
LUCIFEU est le nom qu'on donne or-
dinairement au premier ange rebelle ,
précipité du ciel aux enfers ; dénomina-
tion fondée sur un passage d'Isaïe [chap.
14 ), où ce prophète parle à la vérité lit-
téralement du roi de Babylone , mais qui,
dans le sens figuré, exprime très bien la
chute du premier ange. Aussi les saints
pères l'ont-ils ainsi expliqué, elles ex-
pressions dont le prophète se sert mar-
quent assez qu'il prétend retracer cc\
ancien et mémorable événement à l'occa-
sion du châtiment de ce roi impie et su-
perbe. La chute des anges n'a pas été in-
connue aux sages profanes. Voyez le
Caléch. philos., n°* 264, 265, les art.
ASI\iODÉE, OPHIONÉE, etc.
LïlCIFEîl, fameux évêque de Cagliari,
métropole de la Sardaigne, où il était né
dans les premières années du h^ siècle,
convaincu que les ariens , en attaquant
saint Alhanase, en voulaient réellement
à la foi de Nicée , obtint du pape Libère
de convoquer un concile à Milan, en 355.
11 y soutint la cause de saint Alhanase
avec tant de véhémence et d'intrépidité ,
que l'empereur Constance , irrité de son
zèle , l'exila à Germanicie en Syrie. Il
trouva sur le siège épiscopal de cette ville
Eudoxe, l'un des chefs de l'arianisme.
Son ardeur contre cette hérésie ne s'y
ralentit pas, ce qui le fit transporter à
Eleulhéropolis ; il y trouva également de
quoi exercer son zèle : Eulychius, fameux
arien, en était évèque. Ce fut là que c«
dernier écrivit son premier livre contre
Constance, qui le relégua dans la Thébaïde
en Egypte , où il resta jusqu'à la mort de
ce prince. Lucifer, rappelé sous Julien,
en 561, alla à Antioche, y trouva l'église
divisée, et ne fit qu'augmenter le schisme
en ordonnant Paulin. Cette ordination
déplut à saint Eusèbe de Verceil , que le
concile d'Alexandrie avait envoyé pour
terminer cette querelle. ( Voyez MELÈCE
de Mélitine.) "Lucifer, inflexible dans set
sentimens, se sépara de sa communion ,
et ternit j par celte espèce de schisme ,
tue 616
l'oclat de ses triomphes sur rarianisme.
Il causa un autre schisme dont les consc-
fjucnrcs furent pUis funestes. Il refusa de
communiquer non -seulement avec les
Pères de Rimini, qui, après leur repen-
tir public, avaient été conservés sur leurs
siéyes , mais même avec ceux qui les re-
cevaient à la communion , c'est-à-dire
nvec le pape et toute l'Eglise. Il eut un
grand nombre de partisans en Orient ,
en E{jypte , en Afrique , en Espagne et
tn Sardaignc, qui furent appelés lucifé-
riens. Use relira à Cagliari, où il mourut
l'an 571. Il nous reste de lui : | cinq Li-
vres contre l'empereur Constance ; | un
Livre contre les rois apostats ; | les livres
intitulés : Il ne faut point épargner les
j)ccheurs ; On ne doit point cotnnmniquer
avec les héi-étiques ; Nous devons mourir
pour le Fils de Dieu, imprimés à Paris
en 1368, par les soins de Du Tillet, évê-
que dé Meaux. Le Recueil des œuvres de
Lucifer a été reproduit dans le tom. 4 de
la Bibliothèque des Pères, édit. de Lyon ,
et par les frères Coletti, Venise, 1778,
in-fol. édit. complète. Ces ouvrages sont
écrits avec aigreur; et, malgré les éloges
que quelques Pères ont pu en faire par
égard au zèle de l'auteur pour la pureté
de la foi, on ne peut disconvenir que son
ouractère n'était pas assez modéré, ni ses
expressions assez mesurées. Lucifer était
recomniandable par des mœurs pures,
l)ar son savoir , par son détachement du
inonde. Les anciens auteurs ne lui repro-
chant que son schisme , on ne doit point
lui imputer les maximes hérétodoxes que
Théodoret attribue à ses sectateurs : ceux-
ci en ont été les inventeurs; et quant à
son schisme , il peut se faire qu'il ne l'ait
point envisagé comme une vraie sépa-
ration, mais seulement comme un nrié-
i-ontentement marqué, qu'il croyait de-
voir témoigner pour ramener les autres
à une rigueur qui lui paraissait nécessaire.
« Dans ces temps, dit un auteur moderne,
► cù les communications entre les pro-
* vinces et les évêques étaient peu régu-
» lières et peu sûres, où le conflit des
» opinions et les rapports contradictoires
» rendaient l'état des choses diflicile à
» connaître , il peut se faire que Lucifer
» ait été mal instruit de l'affaire de Ri-
» mini, et des autres qui ont outré son
» zèle et dérouté sa prudence. » On célè-
bre sa fête à Cagliari le 20 mai. Les cu-
rieux peuvent consullcrun livre imprimé
dans cette ville en 1659, sous ce titre :
Defensio sanctitatis B. Luciferi. Voyez
LUC
saint Jérôme , adversiis luciferianos ;
saint Ambroise , De obiiu Satyri; Tille-
mont, dom Ceillier, etc.
LUCILIO. Voyez VANNINI
LUCILIUS (Caius), lo plus ancien
poète satirique latin dont il nous reste
quelques fragtnens, chevalier romain, né
à Suessa dans leLatium, vers l'an 14.7,
avant J.-C. , était grand-oncle maternel
de Pompée. Il porta d'abord les armes ,
suivant quelques écrivains, sous Scipion
l'Africain, à la guerre de Numance , et
fut intimement lié avec ce général, que,
par ses bons mots , il délassait des fatigues
des armes. On regarde Lucilius comme
l'inventeur de la satire parmi les Latins ,
parce qu'il lui donna sa dernière forme ,
telle qu'Horace , Perse et Juvénal l'imitè-
rent depuis. Ennius et Pacuvius avaient
à la vérité, travaillé dans ce genre; mais
leurs essais étaient trop grossiers pour
qu'on leur donnât l'honneur de l'inven-
tion. Lucilius leur fut supérieur, et il fut
surpassé à son tour par ceux qui vinrent
après lui. Horace le compare à im fleuve
qui roule un sable précieux parmi beau-
coup de boue. De trente livres de Satires
qu'il avait composées, il ne nous reste
que quelques fragmens , imprimés dans
le Corps des poètes latins de Maittaire.
François Douza les a publiés sép'arémenl
elles meilleures éditions sont celle d'Am-
sterdam, 1661, in-i", avec de savantes
remarques , et celle des frères Volpi , Pa-
doue , Comino, 1735, in-8°. Lucilius mou-
rut à Naples, âgé seulement de 46 ans,
vers l'an 102 avant J,-C. Ce poète disait
qu'î7 ne voulait ni des lecteurs trop sa-
vans . ni des lecteurs trop ignorons ; il eut «j
ce qu'il souhaitait. Ses talens firent des
enthousiastes qui , le fouet à la inain
châtiaient ceux qui osaient dire du mj
de ses vers. Leur admiration était dérai-j
sonnable à plusieurs égards ; Luciliu^
versifiait durement ; et quoiqu'il travail-'
lâtavecprécipilation.sesouvrages avaient'
un air forcé. Quintilien en fait un grand
éloge.
LUCILLE, impératrice romaine , fille
de Marc-Aurèle et deFaustine, etsœur de
l'empereur Commode, naquit l'an 146 de
J.-C. Elle ne valait pas mieux que son frère
pour lequel elle eut, dit-on, des complai-
sances criminelles, et ne donna pas une
grande idée de l'éducation qu'elle recul
du philosophe son père. Mariée, à l'âge
de 17 ans , à un homme qu'elle n'aimait
pas (Lucius Verus ), elle avait donné son
affection à un amant qu'elle voulait clo-
ley
i
LUC
617
LUC
ver aux plus hautes dignités, et ne pou-
vait souffrir de se voir obligée de céder
le pas à Crispine, épouse de Commode.
Ces raisons la portèrent à former une
conjuration contre ce prince. Pompéien,
à qui elle avait fiancé sa iille, fut le prin-
cipal acteur de celte tragédie. Elle y fit
aussi entrer Quadrat et plusieurs autres
sénateurs ; mais elle n'en dit rien à son
mari. Commode, entrant un jour dans
l'amphithéâtre par un endroit secret et
obscur, le jeune Pompéien, qui l'y at-
tendait , lui montra son poignard et lui
dit : Voilà ce que le sénat t'envoie. Tan-
dis qu'il veut le massacrer , les gardes de
l'empereur l'arrêtent; bientôt son procès
et celui de ses complices furent faits, ils
subirent le dernier supplice. Lucilie fut
envoyée en exil à Caprée, et, quelque
temps après, on la lit périr ( 184 ) ; elle
avait environ 58 ans.
LUCK^I ( Louis-M,\«iE ), religieux de
l'ordre de Suint-Dominique et cardinal,
était né à Côuie dans le Milanais, en 1666.
Plusieurs biographies placent la naissance
du cardinal Lucini en l'an 1C69 ; Moréri,
tom. 3, pag. 243, le fait naître en 16C6. 11
était issu d'une famille illustre , et avait
quitté les avantages de la naissance pour
embrasser la pauvreté religieuse. Aux ver-
tus de son état il joignait une rare capa-
cité, et jouissait d'une grande estime dans
son ordre , où il fut appelé à remplir
les emplois les plus honorables. En 1724,
il était commissaire du saint Office; en
4743 , Benoit XIV , dans sa première pro-
motion, le créa cardinal. Il est auteur des
ouvrages suivans : | Esame e difesa del
décréta puhhlicato in Pondicheri, di mon-
signor Carlo Tommaso di Tournon , etc..
approvato e confermato con brève del
sommo ponte fice Benedetto XIII . in Ro-
ma . nclla stamjyeria T^aticana. 1723,
in-4" C'est, dit im critique, un cliaos
tl'érudilion ; | Antithesis contra Hyacin-
t hxini Serri , conantem pontificiam infal-
l ihilitatem certis teî'minis circuinscribere
Milan, 1756 ; | Privilégia romani pontifi-
as, Venise, 1775. C'était un homme in-
struit, d'un jugement solide, mais très
attaché aux opinions romaines. Il mou-
rut en 1743 , âgé de 79 ans.
LlU^.îUS VERUS , empereur. Trayez
VERUS.
LlJCIUSl", (saint), monta sur la diaire
; de saint Pierre après saint Corneille, le
18 octobre 252, et fut exilé aussitôt après
son élection 11 reçut la couronne du mar-
tyre le 4 ou le 5 de mars 235 , n'ayant gou-
verné l'Eglise que cinq mois et quelque*
jours. II ne reste rien de lui. Saint Cyprien
lui écrivit une lettre sur sa promotion et
sur son bannissement, qui ne fut pas long;
il lui en écrivit une seconde lorsque le
pape fut rappelé de son exil , pour lui té-
moigner la part qu'il prenait à cet événe-
ment. Entre autres décrets qu'on lui attri-
bue , il y en a un qui ordonne que l'évé-
que sera toujours accompagné de deux
prêtres et de trois diacres, afin qu'il ait
des témoins de sa conduite. Saint Etienn •
lui succéda.
LUCIUS II ( GÉnAUD de CACCf ANE
MICI ) , natif de Bologne , bibliolhécair c
et chancelier de l'Eglise de Rome , pui •;
cardinal, employé en diverses légations .
succéda au pape Célestin II en 1144. Il eu l
beaucoup à souffrir des partisans d'Ar-
nauld de Bresse , et mourut à Rome le
15 février 1143, d'im coup de pierre
qu'il reçut dans une émeute populaire. On
a de lui dix Epitres , qu'on trouve dans
les Annales de Baronius et dans la Biblio-
thèque de Cluny. Il eut pour successeur
Eugène III.
LUCIUS III ( Ubaldo ALLINCIGOLI ),
natif de I.uçques, succéda au pape Alexan-
dre m en 1181. Le peuple de Rome s'é-
lant soulevé contre lui, il se retira à Vé-
rone ; mais peu après il rentra dans sa
capitale et soumit les rebelles avec le
secours des princes d'Italie. Il fut ensuite
obligé de se retirer de nouveau à Vé-
rone, où il mourut en 1183. On a de lui
trois Epitres. Ce pape, dans le concile
tenu à Vérone l'an 1184, où l'empereur
Frédéric fut présent, lit une Constitution
bien raisonnée , dans laquelle on voit 1«
concours des deux puissances pourl'exlir-
pation des hérésies. On y entrevoit aussi
l'origine de l'inquisition contre les héréti-
ques, en ce que cette constitution ordonne
aux évèques de s'informer par eux-mêmes
ou par des conmiissaires , des personne?
suspectes d'hérésie ; ce qui est d'ailleurs
un devoir inhérent à la qualité d'évèquo,
et l'on peut dire que l'inquisition , sage-
ment constituée et administrée, n'est
qu'un supplément de la vigilance épisco-
pale. On y voit encore qu'après que l'E-
glise avait employé contre les coupables
les peines spirituelles, elle les abandon-
nait au bras séculier, pour exercer contre
eux les peines temi)orelles. ( Voijez ISA-
BELLE deCastille, LIMBORCH, etc. ) (m
comprend que, sous ce point de vue, les
hérétiques ne l'ont pas épargné. Par un
plat calembourg , ils l'ont comparé aa
32.
LUC 618
brn'"het , en lalia Lucias . dans une épi
gramme qui commence ainsi :
(.ucius est pUcis, rex alqui- tyrannus aquarutn.
A quo dUcordat Lucius ille parum.
Lucius III eut pour successeur Urbain III.
LUCIUS (saint ), cvc^que d'Andrinople
vers le milieu du quatrième siècle, cclcbie
dans l'Eylise par ses exils, et par le icle
qu'il fit paraître pour la foi catholique
contre les ariens , était né dans les Gaules.
on croit qu'il assista au concile de Sar-
ili(iue en 347, et qu'il mourut en exil.
LUCIUS, fameux arien, fut chassé du
siège d'Alexandrie en 377, et mourut en-
suite misérablement. Il avait usurpé le
liège d'Alexandrie sur saint Athanase.
LUCIUS, LUCIDOouLUCIO ( Jeax), né
dans le 17' siècle à Trau enDalmalie, d'où
il est désigné quelquefois par le nom latin
«le Tragurensis. Issu d'une famille noble
et ancienne, il fit ses études à Rome avec
succès , et acquit l'estime des sa vans , sur-
tout d'Ugheli , qiii lui conseilla d'écrire
l'histoire de sa patrie. Il suivit ce conseil,
retourna en Dalmatie pour y faire les re-
cherches nécessaires, visita les archives,
les bibliothèques des monastères; mais il
fut arrêté au milieu de ses recherches.
Un nommé Paul Andronic, jaloux de son
mérite et de ses talens, lui suscita des dés-
agrcmens qui l'engagèrent à retourner à
Rome , où il travailla à l'histoire projeté
autant que ses Mémoires le lui permirent.
Il mourut en 1G64. Ses ouvrages sont :
] Mémoires historiques de Trau ^ Venise,
4673, 1G74 , in-4°, en italien; [ Histoire
lie la Dalmatie, et en particulier de Trau ,
de Spalatro et de Sebatic o ^yenise, iûlk
in-4°, en italien; | Dalmatia illustrata,
kPu Commenlarii rerum Dalmaticc . et
Croatiœ, 1666, in-fol. ; "Vienne, 1758,
iu-fol. ; et dans Scriptores rei-uin liunija-
ricarum. avec la T-^ie de l'auteur, par
Malliias Relius. Il y règne beaucoup de
«ritique, et les savans regrettent qu'il
n'ait pu le rendre aussi complet qu'il l'au-
rait voulu; I Inscriptiones Dalmaticce ^
etc. ; Addenda vel corrigenda in opère de
régna Dalmaliœ et Croatiœ^ "Venise, 1673,
in-r.
LUCRÈCE (LucRETiA ), dame romaine;
épousa Collatin, parent de Tarquin , roi
de Rome. Un jour que son époux était à
table avec les fils de ce monarque , il pei-
gnit la beauté de sa femuie avec des cou-
Icjirs si brillantes, que Sextus, fils aîné
de Tarquin, prit du goiit pour elle. Col-
klin l'ayant rncnéecho?, lui le mOme jour,
LUC
il vit que le portrait n'était pas flatté . et
son amour naissant devint une passion
violente. Impétueux dans ses désirs, il
se déroba quelques jours après au camp
d'Ardée pour voir l'objet de ses vœux II
se glissa pendant la nuit dans sa chambre
et menaça de la tuer, et avec elle l'esclave
qui le suivait, afin que le cadavre de ce
mallieureux, placé auprès d'elle dans un
même lit, fit croire que la mort de l'un
et de Vautre avait été le châtiment de leur
crime. Lucrèce succombe à celte crainte,
et Sextus , après avoir satisfait ses désirs ,
la laisse dans l'amertume de la plus vive
douleur. Elle fait appeler à l'instant son
père, son mari et ses parens, leur fait
promettre de venger son outrage, et s'en-
fonce un poignard dans le cœur , l'an 508
ou 509 avant J-. C. Le fer sanglant dont
elle s'était percée fut le signal de la liberté
romaine. On convoque le sénat , on expose
à ses yeux le corps de Lucrèce , et les
Tarquins sont proscrits à jamais. Le ta-
bleau que fait Ovide de cette catastrophe,
au 2* livre de ses Fastes ^ est touchant et
tracé de rhain de maître : cette infortunée
ayant commencé le récit de sa funeste,
aventure devant ses parens assemblés ,
lorsqu'elle en fut venue à l'attentat qui
consomma sa honte : Restahant ultima ,
dit le poète... Flevit. Ce dernier trait est
d'une vérité et d'une simplicité sublime.
Cette histoire prouve combien la foi con-
jugale était sacrée chez les anciennes na-
tions , aussi long-temps que le luxe et la
corruption des mœurs n'en altérèrent
point les principes. ( Foij. ABIMELECH.)
On a souvent comparé Lucrèce à Su-
sanne ; mais tout l'avantage de la compa-
raison est à celle-ci. L'une préféra la vie
à la vertu, et s'en priva ensuite dans l'ac-
cès d'uu inutile désespoir ; l'autre aima
mieux mourir et essuyer le reproche du
crime que de le commettre. On connaît
ces beaux vers latins :
Caita Susanna plïcct ; Lucretia , cède Satano» t
Tu post , illa mori maluit aote scelut.
Un auteur moderne a fait contraster avec
la faiblesse et les tardifs regrets de Lu-
crèce "l'intrépidité d'une jeune religieuse,
assaillie par cinq ou six soldats forcenés
dans le pillage d'une ville de Pologne.
« Pâle du danger que court son innocence,
i> elle se prosterne aux pieds d'un de ces
D furieux, et lui dit: Si tu veux me res-
» pecler, je te rendrai invulnérable; ce
» secret vient de mes pères, fais-en l'es-
. sai sur moi. Le soldat crédule tire son
LUC
619
LUC
> sabre, et lui tranche la tête. «Sans juger
avec rigueur la moralité de cette action
sous tous les rapports, il faut convenir
qu'en fait de courage et de chasteté , elle
est bien propre à confondre les panégy-
ristes de, Lucrèce.
I.UCRÈCr ( Titus Lucretius Carus ),
poète et philosophe, naquit à Rome d'une
ancienne famille , l'an 95 avant J,-C. Jeté
au milieu des temps les plus orageux de
la république , témoin des proscriptions
de Marius et de Sylla et de toutes les hor-
reurs de la guerre civile, il ne joua aucun
rôle dans les scènes sanglantes , se tint
dans un sage éloignement des tempêtes
politiques, et chercha dans le sein de l'é-
tude un asile contre la turbulence des
factions. Il avait fait ses études à Athènes,
et c'est dans cette ville qu'il puisa les
]»riucipes de la philosophie d'Epicure. Il
fut le premier qui fit paraître dans Rome
la physique , ornée des fleurs de la poésie.
Le poète philosophe adopta l'infini d'A-
iiaximandre et les atomes de Démocrile.
I! tâche de concilier les principes de ces
deux philosophes avec ceux d'Epicure ,
dans son poème De rerum natura ^ en
six livres. Son ouvrage est moins un poè-
me héroïque qu'une suite de raisonne-
iiiens, quelquefois bons, mais plus sou-
vent absiu'des. Jamais homme ne nia plus
hardiment la Providence, et ne parla avec
pius de témérité de Dieu. Il semble que
son but n'a été que de détruire l'empire
de la Divinité, et d'enlever à l'homme
les consolations que lui présentent la re-
ligion et une raison saine, qui , par la vue
<'t l'usage des créatures, fait remonter
jiîsqu'au Créateur. Il croit l'en dédomma-
ger par la jouissance des plaisirs sensuels
annoncés dans l'invocation même de son
poème , où il appelle Vénus la seule mère
(les plaisirs dont les homiiies et les dieux
jinissent espérer de jouir :
/Kneadutngcnitrix, divumqueUominuraque voliiplai.
r.i-tie brutale philosophie l'aveugla au
point d'assurer que les yeux n'étaient pas
faits pour voir j mais qu'on s'avisait de
voir, pa* ce qiCon avait des yeux. ( Voyez
tl'lCURE. )Lc poète ne vaut guère mieux
que ie philosophe. On a vu des littérateurs
épris de la doctrine d'Epicure, pousser
l'enlhousiasme jusqu'à préférer son
chantre à celui d'Enée. Ce paradoxe n'est
j)as nouveau; un ancien s'en plaignait
déjà : Luciliwn pro Horatio . Lucretium
yro Virgilio legunt. ( Author. anon. De
\ causis corrupUv cloq. ) \\ faut convenir
(pie pour cela la corruption du goût na
suffit pas ; il faut encore celle de l'esprit ot
du cœur. Quoique né avant Auguste, on
prendrait Lucrèce pour un écrivain pos-
térieur de trois siècles à Virgile , tant son
style est dur, sa versification négligée, sa
marche pénible et embarrassée. On a beau
dire que le pinceau de la poésie n'est pas
fait pour les objets qu'il avait à peindre ;
cette excuse, imaginée par quelques-uns
de ses partisans, est suffisamment réfutée
par les Géorgiques, dont la nature est
aussi didactique que celle du poème épi-
curien. Lucrèce se fit mourir à la fleur de
son âge , à h1 ans, la 52' avant J.-C. dans
une frénésie causée, dit-on , par un philtre
que lui donna sa maîtresse ; mais si l'on
considère la multitude des suicides que
la doctrine d'Epicure produit tous les jours
parmi nous , on ne sera pas dans le cas de
recourir au philire. 11 est d'ailleurs cons-
tant que sa tête était depuis quelque temps
dérangée par une bile noire , fruit de ses
longues méditations sur le désespérant
système du néant. La première édition
de son ouvrage , faite à Vérone en l/t86,
est recherchée. On a encore celle de Ve-
nise, Aide, 1500-15; celle de Lambin,
Paris, 1563, 1570, in-/*"; celle de Michel
Dufay (Fayiis). adusum Delphini. 1080,
in-/i.°. Celle de Gréech, avec la traduction
en anglais, Oxford, 1695 , in-8°, est plus
belle que la réimpression de 1717. Ce tra-
ducteur avait si bien médité l'original, qu'il
prit aussi le parti de se détruire à l'âge
de 41 ans. Nous avons encore l'édition de
Maittaire, Londres, 1713, in-12; celle d'Ha-
vercamp , Leyde, 1725; celle de Benlley et
Wakefield , Londres , 1796-97, 3 vol. in-4° ;
celle de Glascow, 1815, 4 vol. in-8°. I.e
baron des Coutures ( Foijez COUTURES ),
en publia une traduction française en IGS'i,
avec des notes. CetJe version, qui n'o.çt
pas exacte, et qui pourrait être mieux
écrite , a été éclipsée par celle qu'a don-
née M. La Grange, avec de savantes notes.
Paris, 1767, 2 volumes in-8° et in-12 M.
Le Blanc de Guillet en a donné en 1789
une traduction en vers, dont un critiqua
a porté le jugement qui suit : « Une jus-
» tice qu'il faut rendre à M. Le Blanc, c'est
» qu'il ne contribua point par les chanuLs
» de son style à répandre et à faire aimer
a le poison de cette doctrine scandaleuse
» et impie : sa poésie est un puissant an-
» tidote contre la séduction. » M. de Pon-
gerville a publié en 1825 une traduclioit
envers de Lucrèce, 2 vol. in-8" ; elle a eu
d'honorables suf.fr;>ges ; nous n'osoiis ra-
LUC
pcnJant croire qu'on ail voulu les donner
aux disseitalions dans lesqueiles le tra-
ducteur essaie vainement de laver Lu-
crèce du reproche d'athéisme. Voyez
MAROLLES, Michel, HÉNAULT Jean,
rOLIGNAC et MARCHETTI.
ruCRÈCE. Voyez OBIZZI.
LUCULLITS ( Lucius Licixics ), de fa-
mille consulaire, naquit vers l'an d 13 avant
J.-C. Il montra de bonne heure des dis-
positions pour la philosophie et pour l'é-
loquence. Après avoir paru avec éclat
dans le barreau, il fut fait questeur en
Asie et préteur en Afrique. Il gouverna
ces deux provinces avec beaucoup de jus-
tice et d'humanité. Ses premiers exploits
militaires furent contre Amilcar , sur le-
quel il remporta deux victoires navales.
Elevé au consulat et chargé de faire la
guerre à Mithridate, il dégagea son col-
lègue Cotta, que l'ennemi avait enfermé
dans Chalcédoine , et remporta une vic-
toire sur les bords du Granique , l'an 7i
avant J.-C. L'année d'après , il reprit la
Bilhynie, à l'exception de la ville de Ni-
comédie, où Mithridate s'était enfermé.
Il détruisit dans deux journées une floîle
que ce prince envoyait en Italie. Mithri-
date , désespéré de la perte de ses forces
maritimes, se relira dans son royaume, où
le vainqueur le poursuivit. Les progrès
de LucuUus fuient d'abord assez lents,
mais la fortune le seconda ensuite au-delà
de ses espérances , et le dédommagea bien
du danger qu'il avait couru d'être assas-
siné par un transfuge vendu à Mithridate.
Les troupes de ce prince , ayant attaqué
dans un lieu désavantageux un convoi
escorté par quelque nnillicrs de Romains,
furent entièrement défaites et dissipées.
L'alarme fut si vive dans le camp de Mi-
thridate , qu'il prit la fuite , et se réfugia
chez son gendre Tigrane , roi d'Arménie,
l'an 72 avant J.-C. LucuUus passa l'Eu-
phrate et vint fondre sur Tigrane, qui
lattcndait avec une armée formidable.
Ce lâche monarque fut des premiers à
tourner le dos, dès qu'il vit le général
romain s'avancer fièrement à pied et
l'cpée à la main. En fuyant , il perdit son
diadème, qui tomba entre les mains de
LucuUus; le consul, avec une poignée
dhommes , lui tua ou lui prit cent mille
fantassins, et presque toute sa cavalerie.
La prise de Tigranocerlc, capitale du
royaume, suivit de près celte victoire. Le
roi d'Arménie avait transporté une partie
de ses richesses dans cette ville ; elles de-
vinrent la proie du vainqueur. Ces succès
620 LUD
de LucuUus ne se soutinrent pas ; il n'es-
suya personnellement aucune défaite,
mais il aliéna l'esprit de ses soldats par
trop de sévérité et de hauteur. Cicéron
appuya , par sa belle oraison Pro legs Ma-
nilia, le vœu public, qui désignait Pom-
pée pour le remplacer, et ce général vin',
effectivement lui ôterle commandement
Cependant le vainqueur de Tigrane , de
retour à Rome, obtint les honneurs du
triomphe. Sa vie fut depuis moins bril-
lante, mais plus douce et plus tranquille.
Il reconnut, et il dit souvent à ses amis,
que la fortune avait des bornes qu'im
homme d'esprit devait connaître. Livré à
l'étude et au commerce des hommes les
plus ingénieux et les plus polis de son
siècle, il passait avec eux les jours entiers
dans une riche bibliothèque qu'il avait
remplie de livres précieux , et destinés à
l'usage de tous les savans. Il surpassa en
magnificence et en luxe les plus grand-;
rois de l'Asie, qu'il avait su vaincre. Il
avait plusieurs salons , à cFiacun desquels
il donna le nom d'une divinité ; et ce nom
était, pour son maitre-d'hôtel , le signal
de la dépense qu'il voulut faire. Pompée
et Cicéron l'ayant surpris un jour , il dit
seulement qu'il souperait dans le salon
d'Apollon, et on leur servit un rei)as (jui
coûta 23,000 livres. Tl se fâcha un jour
très sérieusement contre son maitre-
d'hôtel , qui , sachant qu'il devait souper
seul, avait fait préparer un repas moins
somptueux qu'à l'ordinaire : « Ne savais-tu
» pas, lui dit-il, qu'aujourd'hui Lucuilu':
» devait souper chez LucuUus ?» Ce fut
lui qui apporta du royaume de Pont les
premiers cerisiers que l'on ail vus en Eu-
rope. On lui attribue aussi l'importation
du parchemin. Il tomba en démence
dans ses derniers jours , et mourut à l'âge
de 67 à 68 ans, avec la réputation d'un
homme qui égalait Sylla pour le niérilc
militaire, et le surpassait pour les venus
civiles. Il fut fils tendre, bon frère, père
indulgent, ami sincère, maître généreux,
excellent citoyen, général habile. Il se pi-
quait de la plus grande droiture, et, malgré
ses profusions , il eût clé difficile^le tiou-
ver dans l'ancienne Rome un luimme
d'une probité plus sévère. Voy. l'Histoire
de LucuUus, dans Plularque et dans le
premier volume Lies Mélanges historiques
et critiques de M. le président d'Or-
bessan.
LlîDEWIG ( Jea^-Pierre de), en latin
LudovicuSt cônseiUer intime du roi de
Prusse, chancelier du duché de .Magde-
LUD
bourg, professeur en droit, naquit au
chitleau de Hehenhard , dans la Souabe ,
le l"i août 1668. Il étudia dans les univer-
silcs de Tubintjue, de Wittenberg et de
Halle, devint professeur de philosophie
en 1695 , et fut chargé quelque temps
aines des intérêts de l'électeur de Bran-
debourg au congres de Riswick. Après
avoir visité une partie de la Hollande et
différentes cours d'Allemagne, Il revint
UIalle,eu 1700, quitta la chaire de phi-
losophie pour celle d'histoire, prit en-
suite celle de droit public, et devint en
1722, chancelier de l'université de Halle
et du duché de Magdebourg; il était en
outre archiviste et historiographe depuis
i 7 0/t, lorsqu'il mourut le 7 septembre 1743,
à 75 ans. Ludewig a beaucoup écrit en
latin et en allemand. On a de lui : | Novum
vol amen Scriptorum rerum germanica-
7-:im . Francfort etLelpsick, 1718, 2 lom.
iîi-fol.; I Manuscrijyta omnis œvi . diplo-
inata ac monumenta ineditaj iTiO-HkO,
12 vol. In-8°; | la Fie de Juslimen et de
Tribonien, 1731; [ OEuvres diverses,
1720, 2 vol.; | Recueil des écrivains de
l'histoire de l'évéché de Wurtzhourg ,
Francfort, 1713 , in-fol. , en allemand ; la
plupart n'avaient pas encore été Impri-
més ; I Recueil des écrivains de l'évêché
<Is Bamberg, 1718, in-foi. Ces recueils
sont estimés et recherchés. On peut Hre
sou Eloge dans le t. U des Journaux de
Florence. On trouvera la liste de ses ou-
vrages dans la Gelehrte Europa, de Goet-
len, 1735; dans la Pinacotheca script.
nostra œtale litteris illustrium, de Bruc-
ker , et surtout dans l'ouvrage de Frédéric
^'•'ideburg intitulé : De vita et scriplis
J.-P. de Ludewig^ commentarius , Halle,
17,i7, in-8°.
fJJDGER (saint), né vers l'an 743,
rfune des premières maisons de Frise,
fut mis de bonne heure , selon ses désirs ,
sous la conduite de saint Grégoire , dis-
ciple et successeur de saint Bonifacc ,
qui, prenant un soin particulier de son
éducation, et charmé des progrès que
son élève faisait dans les sciences de la
vertu, lui donna la tonsxire cléricale.
Luilger, voulant se perfectionner de plus
eu plus dans les connaissances propres à
rormer son esprit et son cœur , passa en
; ;leterre et suivit pendant quatre ans
demi le célèbre Alculn , qui était à la
l te de l'école d'York. Avare de son
temps, il en partageait Ions les momcns
riitre les exercicesde la religion et l'étude
de l'Ecriture et des saints Pères. En 775 ,
621 LUD
il retourna dans sa patrie ; et saint Gré~
goire étant mort en 776, Albéric, son suc-
cesseur, éleva Ludger à la dignité sacer-
dotale , et l'employa plusieurs années à
prêcher TEvangile dans la Frise. Le suc-
cès répondit à son zèle. Il convertit un«
multitude innombrable d'infidèles et de
mauvais chrétiens, fonda plusieurs mo-
nastères, et bâtit des églises de toutes
parts sur les ruines du paganisme. Mais
les Saxons étant venus fondre sur la Frise,
il fut obligé d'Interrompre ses travaux
apostoliques et de quitter le pays. Peiv-
dant ce temps, il fit un voyage à Rome ,
afin de consulter le pape Adrien II sur le
parti qu'il avait à prendre pour exécuter
la volonté de Dieu. Il se retira au Mont-
Cassin pendant trois ans, et y pratiqua
toutes les austérités de cette maison , sans
y avoir fait néanmoins de vœux monas-
tiques. Charlemagne ayant vaincu les
Saxons, et s'élant rendu maître de la
Frise en 787, Ludger revintdansson pays
et y continua ses missions. Il annonçai
l'Evangile aux Saxons, et en convertit
un grand nombre II porta la lumière de
la foi dans la Weslphalie, et fonda le mo-
nastère de Werden dans le comté de la
Marck. En 802 , Hildebaud , archevêque
de Cologne, sacra Ludger^évêque de MI-
migardeford , malgré la résistance de ce
dernier. Ce fut alors que la ville de Mi-
migardeford prit le nom de Munster , du
monastère que Ludger y bâtit pour des
chanoines réguliers, destinés à faire l'of-
fice divin dans la cathédrale. Le nouvel
évéque joignit à son diocèse cinq cantons
de la Frise , qu'il avait gagnés à J.-C. On
lui est encore redevable de la fondation
du monastère de Hehustadt, dans le du-
ché de Brunswick , qui depuis fut appelé
de son nom. Doux et affable envers les
pauvres. Il était plein de fermeté et de
résolution à l'égard des riches enflés de
leurs trésors, et dune rigueur inflexible
envers les pécheurs impénitens. Une
dame de qualité , coupable d'inceste , en
fit l'expérience. Elle ne put rien gagner
sur l'esprit de l'évêque , et comme elle ne
se corrigeait pas , il la retrancha de la
communion des fidèles. Dans tous les
temps, la vertu eut des censeurs et des
calomniateurs. Aussi celle de Ludger n'en
fut pas à l'abri. On le décria auprès de
Charlemagne ; on lui reprocha qu'il rui-
nait son évéché, qu'il négligeait l'em-
bellissement des églises de sa juridic-
tion. Le prince donna dans le piège, et
ordonna à Ludger de se rendre à la cour.
LUD
622
LUG
Ladgor obéit. Le lendemain de son ar-
rivée, un officier le vint avertir quercm-
pereur l'attendait ; mais comme il était oc-
cupé à dire sou office, il répondit qu'il
irait trouver le prince aussitôt qu'il aurait
fini. L'empereur le fit chercher jusqu'à
trois fois, et dès qu'il fut arrivé, Char-
lemagrie lui demanda avec un peu d'émo-
tion pourquoi il le faisait attendre si long-
temps : « Je sais, sire, dit-il, tout ce que
■ je dois à votre majesté; mais j'ai cru
» que vous ne trouveriez pas mauvais que
» Dieu eût la préférence. Quand on est
» avec lui, il faut oublier toutes les autres
» choses. D'ailleurs , en agissant de la
• sorte, je me suis conformé aux inten-
• lions de votre majesté, puisque après
» m'avoir choisi pour évêque , elle m'a
» commandé de j)référer le service de
» Dieu à celui des hommes. » Cette ré-
ponse fit seule sa justification, et l'em-
pereur le traita avec distinction, et dis-
gracia ceux qui avaient voulu le perdre.
Ludger mourut en 809, aprèsavoir exercé
jusqu'au dernier moment les fonctions
de l'apostolat.
LUDOLPilE VAN CEULEN. Voyez
VAN CEULEN.
LUDOLPilE DE SAXE, d'abord do-
minicain, puis chartreux, était prieur de
Strasbourg en 1530. Outre une Traduction
du livre àQ V Imitation qu'il passe pour
avoir faite, on luidoitune Vie rfe JÉSUS-
CHRIST, in-fol. , en latin, imprimée à
ce qu'on croit, en i474, dans son mona-
stère; elle a été réimprimée avec une ver-
sion française en 2 vol. iii-fol. Ces deux
éditions sont peu communes.
LUDOLPilE ou LUDOLF ( Job ) , sa-
vant orientaliste, né en 1(124 à Èrfurl d'une
famille ancienne , s'appliqua à l'étude des
langues avec un travail infatigable. Il
voyagea beaucoup, visita les bibliothèques
des différens pays , en rechercha les curio-
•ités naturelles et les antiquités, et forma
des liaisons avec les savans. Ludolphc
avait été précepteur des enfans du duc de
Saxe-Gotha avec lesquels il voyagea en
Europe. Il vint à Paris, et l'ambassadeur
de Suède lui confia l'éducation de ses en-
fans. En 1649 , il fut envoyé à Rome pour
recueillir \e?> mémoires que J. Magnus,
évêque d'Upsal, devait y avoir laissés;
mais ses recherches furent inutiles. C'est
dans cette ville qu'il étudia la langue
éthiopienne, laquelle lui fut très iitiledans
l'iiistoire qu'il publia sur cette nation. Il
fut conseiller à Erfurt pendant près de 18
ans , et se relira à Francfort-sur-ie-Mein
avec sa famille L'électeur palatin le mit
à la tête de ses affaires , et lui confia le
soin de ses revenus. Ludolphe était aussi
propre aux affaires de l'état qu'aux re-
cherches pénibles des sciences. Son ardeur
pour le travail était si vive , que dans ses
repas mêmes il avait toujours un livre
devant les yeux. Il savait vingt -cinq
langues. Il mourut à Francfort en 1704 ,
à quatre-vingts ans. Ses principaux ou-
vrages sont : I Historia œthiopica, Franc-
fort, 16dl, in-fol. On en publia en 1084
un abrégé en français. | Un Commentaire
s^nr cette histoire , 1691 , in-fol. , en latin ;
I un Âppendix pour le même ouvrage ,
1693, in-4°, en latin. L'histoire des Ethio-
piens , leur religion , leurs coutuaios ,
sont développées dans ces différens éciils
avec beaucoup d'érudilon, mais avec peu
d'exactitude. L'abbé Renaudot en a relevé
plusieurs fautes dans son Histoire des
patriarches d'Alexandrie ^ et dans sa
Collection des liturgies orientales ; \ luie
Grammaire et un Dictionnaire abyssin .
1698, in-fol.; | Dissertatio de loc astis ,
Francfort , 1694 , in-fol. ; j Fasta Ecclesice
alexandrince ^ Francfort, 1691, in-fot.;
I un grand nombre d'autres Ouvrages ,
dont on peut voir la liste dans la Fie de
Ludolphe par Juncker ; mais il ne faut
pas s'en tenir à l'idéa exagérée que ce
biographe donne des qualités et des con-
naissances de son héros.
LUDOVIC SFORCE. Voxjez SFORCE.
LUGO (Jean de), cardinal, né à Ma-
drid en 1583 , se disait de Séville, parce
que son père y faisait sa résidence. Il se
fit jésuite en 1603; et lorsque son père
mourut , il partagea sa succession , qui
était fort considérable, entre les jésuites
de Séville et ceux de Salamanque. Après
avoir enseigné la philosophie et la théo-
logie en divers collèges, il fut envoyé à
Rome pour y professer cette dernière
science ; ce qu'il fit avec succès pendant
20 ans. Le pape Urbain VIII le nomma
cardinal en 1643, et se servit de lui en
plusieurs occasions. Cette dignité ne lu»
fil rien perdre de son humilité, de sa
modestie, ni de son amour pour la pau-
vreté et la simplicité religieuse; il ne
souffrit jamais dans son palais aucun meu-
ble brillant ou précieux. Lugo mourut à
Rome en 1660 , à 77 ans. On a de lui un
grand nombre d'ouvrages en latin, qu'on
a recueillis en 7 gros vol. in-foï. Lyon
1653-1660. Ils traitent tous de la théologie
scolastique et morale , et furent impri-
més successivement à Lyon , depuis 1633
LUI 65
jusqu'en 1660. Le volume qui a été le
plus lu par les théologiens, est le 3* De
virtute et sacramento jyœinteiitiœ . pu-
blié à Lyon en 1638, et réimprimé en
1644 et léol. Ceux qui ont prétendu voir
dans ses ouvrages le péché philosophi-
que ^onimis dans celte accusation une
animosité qui prouve mieux l'esprit de
parti dont ils étaient animés , que l'erreur
du cardinal, qui n'a jamais enseigné celte
doctrine. Le cardinal de Lugo était fort
diaritable. Ce fut lui qui donna le pre-
mier beaucoup de vogue au quinquina,
qu'on appela la /?ouc?/-et/e Lugo^ai que les
Anglais appellent encore aujourd'hui la
poudre des jésuites. Il la donnait gratuite-
ment aux pauvres, et multipliait par là
les occasions de s'assurer des propriétés
de ce fébrifuge . qui se vendait alors très
cher. — Son frère aîné (Fraxcois de
LUGO) , jésuite comme lui , mort en 1652
à 72 ans, est auteur d'un Coimyie^itaire
sur la première partie de la Somme Ae
saint Thomas, en 2 vol. in -fol. , d'un
Traiié des sacremens , et de plusieurs
Traités de théologie , 5 vol. in-4,"
LUILLÏER ou LHUILLIER (Jeax),
d'une famille ancienne de Paris , seigneur
d'Orville et maître des comptes, fut élu
prévôt des marchands en 1302. Il rendit
de grands services à Henri IV, et obtint
pour récompense une charge de prési-
dent à la chambre des comptes, que le
roi créa en sa faveur. — De la même fa-
mille était JeaxLUILLÏER, fils de l'a-
vocat général du parlement de Paris ,
qui fut recteur de l'université en 1447 ,
docteur et professeur en théologie quel-
que temps après , puis évêque de Meaux
en 1483, Il fut aussi confesseur de Louis
XI, et ne contribua pas peu à terminer
la guerre du Bien public. Il mourut le 11
septembre loOO , âgé d'environ soixante-
quinze ans.
IIÎTXIEÎI (Madeleiive) , fille du pré-
sident Jean Luillier, fut mariée à Claude
Le Roux de Sainte-Beuve , conseillei du
parlement de Paris. Ayant perdti son
époux , elle quitta les délices du siècle ,
dont les suites sont si amères, et s'atta-
cha à un bien plus solide , indépendant
des événemens humains. Api es avoir
fondé à Paris le monastère des religieuses
ursulines du faubourg Saint-Jacques, elle
les édifia par ses vertus, et y mourut en
odeur de sainteté l'an 1628.
LUILLIER CHAPELLE Foyez CHA-
PELLE
LUINES. roy^z ALBERT de LU YNES.
3 LUî
LUISINO, LUISINI , ou LUINO (Fran-
çois), célèbre humaniste d'Udine dans
le Frioul, recommandable par son amour
pour la littérature et par l'intégrité de
sa vie, enseigna quelque temps les lettres
grecques et latines à Reggio , et devint
secrétaire du duc de Parme. Il mourut
en 1368 , à 45 ans. On a de lui : | Parergôu
libri très , in quibus tani in grœcis quant
in latinis scriptoribus muUa obscura
lova declarantur. Cet ouvrage est inséré
dans le tome 3 du i ecueil de Jean Grutcr,
intitulé : Lampas seu fax artium^ hoc
est. Thésaurus criticus. | Un Commen-
taire latin sur l'Art poétique d'Horace,
Venise, 1334 , in-4". — Il ne faut pas le
confondre avec Lours LUISINO {Aloysu&
Luisinius), natif d'Udine , qui vivait dans
le même temps , a mis en vers hexamè-
tres lesAphorismes d'Hippocrale, Venise
1332 , in-8° , et a donné le Recueil des
auteurs qui ont traité de la maladie và~
nérienne , 2 vol. in-fol. imprimés à Ve-
nise , l'un en 1367, l'autre en 1599. Boei-
liaave a donné une nouvelle édition do
cet ouvrage à Leyde , 1728 , in-fol. On
connaît encore Louis Luisino par son
excellent traité De compescetidis animi
affectibus . Bàle , 1562 , in-S" , et Stras-
bourg , 1713.
LUITPRAND, roi des Lombards, suc-
céda en 715 à son père Ansprand. Toute
la famille d'Ansprand , tuteur de Luitbert.
était tombée en 702 entre les mains d'A-
ribert H , qui avait usurpé sa couronne.
Ce tyran fil mulLlerla famille d'Ansprand,
excepté le jeune Luitprand , qui rejoignit
son père en Bavière. Ansprand détrôna
Ariberl , s'empara de la couronne , à la-
quelle succéda Luitprand. Ce roi fit des
conquêtes dans la Grèce , secourut Char-
les-Martel contre les Sarrasins, fit alliance
avec les Grecs contre le pape Grégoire II;
mais il conclut la paix en 757 , et depuis
lors il se montra un zélé catholique. Il
fut toujours lié d'amitié avec Charles.
Martel , soumit Thrasimond , duc de Spc-
lettc, et mourut en 743. C'était un prince
pieux et télé pour la religion catholique.
Il acheta pour une somme considérable
le corps de saint Augustin , qui avait été
transporté d'Afrique en Sardaigne , et le
fit déposer à Pavie avec beaucoup de so-
lennité et de magnificence.
LUITPRAND, LIUTPRAND, ou LI-
TOBR AND , diacre de Pavie , puis évêque
de Crémone , fit deux voyages à Constan-
tinople en qualité d'ambassadeur , l'un
en 948 , au nom de Bcrenger II , marqui»
LUL
624
LUL
dTvrce, roi d'Italie, avec qui il se brouilla
à son retour; l'autre en 9(38, au nom de
l'empereur Othon, auprès duquel il s'é-
tait retiré, après avoir été disjjracié de
Bérenjjcr. Il fut l'interprète de cet em-
pereur au concile de Rome de l'an 963.
La meilleure édition des œuvres de Luit-
prand est celle d'vVnvers en 1640 , in-fol.
donnée par Jérôme de la Higuera et Lau-
rent Ramiresius. Le style en est dur ,
•erré et très véhément. Il affecte de faire
parade de grec , et de mêler des vers à
sa prose. On y trouve une Histoire de
ses légations à Constatitinople , et ime
Relation en 6 livres de ce qui s'était passé
en Europe de son temps. Le 6*" livre n'est
pas entièrement de lui : le 6" chapitre ,
inclus le li*^, sont d'une main étrangère.
V Histoire de sa légation auprès de Ni-
céphore Pliocas , Tan 063 , avait été pu-
bliée par Henri Canisius, Ingolstadt, l'an
IGOO. Ses réci-ts ne sont pas toujours fidV
les ; il est ou flatteur ou satirique. Le prési-
dent Cousins a traduit plusieurs morceaux
de Luitprand , qu'on trouve dans son His-
toire de l'empire d'Occident^ tom. 2. Le
livre des Vies des papes , depuis saint
Pierre jusqu'à Formose, elles Chroni-
ques des Goihs ^ qu'on lui attribue , ne
sont point de lui.
LL'LLE, en espagnol Lclio (le bien-
heureux 11ai.«o;«o ) , surnommé le Doc-
teur illuminée né à Pal ma dans l'ile de
Majorque en 1236, s'appliqua avec un
travail infatigable à l'étude de la philoso-
sophie des Arabes, de la chimie, de la
médecine et de la théologie. Il alla plu-
sieurs fois annoncer les vérités de l'Evan-
gile en Afrique , et fut assommé à coups
de pierres en Mauritanie, le 29 mars 131o ,
à soixante-dix-neuf ans. Il est honoré
comme martyr à Majorque, où son corps
fut transporté. On a publié plus de vingt
ouvrages de LuUe , parmi lesquels on
trouve la Cabale^ YArs generalis sive
nyagna. etc. Lulle a eu im grand nombre
d'abrévialeurs et de commentateurs. Son
Ars generalis est de tous ses ouvrages
celui qui a faille plus de bruit : il l'écrivit
d'après un songe qu'il eut au pied d'un
arbre où il s'était endormi. Il fit ensuite
I Art inventif de la vérité, V Art démons-
tratif et l'Arbre de la science. Il nous
reste de lui un grand nombre de Traités
sur diverses sciences , dans lesquels on
remarque beaucoup d'étude et de subti-
lité, mais peu de solidité et de jugement.
Quoiqu'il y ait encore aujourd'hui des
clef de Ses mystérieux écrits , on trouvi
des connaissances vraies et simples , ilesi
certain que cette voie d'y parvenir est
pénible et puérile, qu'elle suppose dans
celui qui la trace , un esprit tortueux et
faux, et fronde la première qualité de
l'enseignement, qui est la clarté. On a
donné à Mayence, en 171 /i-, le catalogue
des ouvrages de cet auteur , in-8°. On y
trouve des Traités sur la théologie, la
morale, la médecine, la chimie, la physi-
que , le droit , etc. : car les docteurs de ces
siècles embrassaient toutes les sciences ,
quoiqu'ils n'en possédassent parfaitement
aucune. Il n'est cependant pas certain
que les ouvrages énoncés dans co cata-
logue soient tous de lui; on peut croire
que plusieurs auteurs , pour donner de la
vogue à leurs ouvrages, les ont décorés
de ce nom célèbre alors; par là ou con-
cilie très simplement et sans efforts les
idées contradictoires qui résultent dca
écrits de cet homme si fameux. On a en
français deux Vies de Raimond Lulle :
l'une est de M. Perroquet , Vendôme, 1667,
in-S"; l'autre, du P. Jean-Marie de Ver-
non , Paris , 1668 , in-i2. Jordanus Bru-
nus a donné deux ouvrages qui ont rap-
port à l'histoire de Lulle : Liber de Lam-
pade combinatoria R. LullijVraii^ue, l;i88,
in-8"; De compendiosa archileclura et
complemento artis Lulli, Paris, 1582,
in-l6. iVIais cet apostat, fanatique forcené,
dont les organes étaient évidemment dé-
rangés, ne mérite aucune croyance dans
ce qu'il dit de Lulle. Les écrivains qui pro-
noncent diflicilement sur le caractère
des hommes extraordinaires, pour les-
quels le bien et le mal semblent plaider
avec une force à peu près égale, regai-
dent Raimond Lulle comme un person-
nage presque indéfinissable. Sa vie fut
d'abord dissipée cl même libertine; il se
montra ensuite frère très fervent da
tiers-ordre de saint-François, amateur de
la solitude' et solliciteur assidu des prin-
ces, qu'il vit tous et pressa jusqu'à l'impor-
tunité, pour les faire entrer dans les plans
de son zèle ; négociateur d'une activité
unique , auteur de plus de volumes qu'un
homme n'en pourrait transcrire et pres-
que lire durant la mesure ordinaire d^
la vie , accusé d'hérésie et martyrisé che»
les mahométans d'Afrique , homme enuii
mot si différent de lui-même etchargédd
tant de contrariétés inconciliables, que
si tout ce qu'on en raconte est vrai, lei
faits les plus romanesques ne sont plus
fêns qui prétendent qu'en «iiùsissant la 1 cliiméri«iucs. On lui a attribué jusqu'à la
LUL
625
LUL
découverte du grand œuvre ; et il se
l'attribue lui-môme , si le passage où il
dit qu'il l'a apprise par révélation est réel-
lement de lui. On a cru lui reconnaître
des traits de ressemblance avec Paracelse
et Corneille Agrippa ; mais il paraît qu'il
ne mérite pas celte comparaison. Le P.
Kircher , dans son 3Iundus subterra -
neus , prétend que si Lulle a eu des tra-
vers, il ne faut pas douter qu'il n'en ail
fait pénitence dans la vie austère et édi-
fiante qu'il a menée ensuite ; qu'il avait
résolu de brûler ses livres , mais que ses
disciples les ont dérobés à cet acte de sa-
gesse et de justice.
LULLE de TEURACA ( Raimond ), sur-
nommé le Néoplujte ^ de juif se fit domi-
nicain, et retourna ensuite au judaïsme.
Il soutint des erreurs monstrueuses , con-
damnées par le pape Grégoire XI, en
1576.
LULLI ( Jean-Baptistë ), musicien, né
à Florence en 1635 , quitta sa patrie de
bonne heure. Ce fut un oflicier français
qui engagea LuUi, encore jeune, à aller en
France. A peine y fut-il arrivé , qu'il se
fit rechercher pour le goût avec lequel il
jouait du violon. Mademoiselle de Mont-
peiisier l'attacha à son service ; et Louis
XIV lui marqua bientôt après le cas qu'il
faisait de son talent, en lui donnant l'in-
speclion sur ses violons. On en créa
même une nouvelle bande en sa faveur,
qu'on nomma les pctils-violons ^ par op-
position à la bande des vingt-quatre , la
plus célèbre alors de toute l'Europe. Les
soins de LuUi, et la musique qu'il fournit
à ses élèves, mirent en peu de temps les
petits-violons dans la plus haute réputa-
tion. LuUi afait dans la musique plusieurs
Innovations qui lui ont toutes réussi. Avant
lui la basse et les parties du milieu n'é-
taient qu'un simple accompagnement , et
l'on ne considérait que léchant du dessus
dans les pièces du violon; mais Lulli a fait
chanter les parties aussi agréablement
que les dessus. Il y a introduit des fugues
admirables", il a étendu l'empire de l'har-
monie ; il a trouvé des mouvemens jus-
qu'alors inconnus à tous les maîtres. Il a
fiait entrer dans les concerts jusqu'aux
tambours et jusqu'aux timbales , des
faux accords et des dissonances , écueil
ordinaire où les plus habiles échouaient.
liUlli a su composer les plus beaux en-
droits de ses ouvrages , par l'art qu'il a
eu de les préparer, de les placer et de les
sauver. Le caractère de la musique de
cet artiste est une variété merveilleuse ,
7.
une mélodie et tme harmonie qui enchan-
tent. Ses chants sont si naturels et si in-
sinuans , qu'on les retient , pour peu
qu'on ait de goût et de disposition pour
la musique. Il obtint la place de siirin-
tendantde la musique du Palais ( 1661 ).
Perrin ayant introduit l'opéra en France,
Lulli, qui en eut le privilège en 1672 , le
porta à un haut degré de perfection et
dans l'espace de quin/.e ans , il com-
posa les partitions de dix- neuf opC-
ras. Lulli mourut à Paris . le 22 mars
1687, à 34 ans , pour s'être frappé lude-
ment le bout du pied en battant la me-
sure avec sa canne. Le mauvais germe
que la débauche avait mis dans son sang
fit empirer le mal. Au premier danger,
Lulli consentit à livrer à son confesseur
un opéra nouveau, Achille et Polyxène ;
le confesseur le brûla. Quelques jours
après , Lulli se portant mieux , un prince
qui aimait ce musicien fut le voir : « Eh
» quoi ! Baptiste , lui dit-il, tu as jeté ton
» opéra au feu? Tu étais bien fou debrû-
» 1er une si belle musique ! — Paix , paix,
» monseigneur , lui répondit Lulli à l'o-
» rcille, je savais bien ce que je faisais :
«j'en avais une seconde copie. » Trait
qui , du premier abord , ne parait que
plaisant , mais qui dans le fond marque
une âme fausse et hypocrite. Une rechute
lui fit bientôt tenir un langage différent.
Il se fit mettre sur la cendre , la corde au
cou, fit amende honorable, et chanta les
larmes aux yeux : Jl faut mou?ir ^ j)é-
cheur^ etc. Lulli formait lui-même ses
musiciens et ses acteurs. Son oreille était
si fine, que d'un bout du théâtre à l'autre
il distinguait le violon qui jouait faux.
Dans son premier mouvement de colère ,
il brisait l'instrument sur le dos du musi-
cien : la répétition faite, il l'appelait, lui
payait son instrument plus qu'il ne valait,
et l'emmenait dîner avec lui. Lulli avait
l'enthousiasme du talent , sans lequel on
réussit toujours faiblement. Il savait cd
qu'il valait dans son genre, et le faisait
trop sentir aux autres. Malgré une ardeur
continuelle de caractère , personne n'ap-
portait dans la société plus de gaîté que
lui, mais une gaîté qui dégénérait en
polissonnerie. Il était violent et emporté,
et l'on a peine à croire tous les traits
qu'on cite de sa fureur. La grossesse de
mademoiselle le Rochois retardant la
représentation d'un de ses opéras, il
donna à cette actrice un coup de pied
dans le ventre , et hii fit faire une fausse
couche. Eoileau, dans YFpitre au ptiir-
LU>Ï
quis de Stgnelay, lo peli
626
LUIV
l par CCS six
En vain par îa grimace un bouffon odieux
A table nous fait rire et divertit nos yeux :
Ses bons mots ont besoin de farine et de plâtre.
Prenez-le lille-à-têle, ôtez-lui son the'àtre.
Ce n'est plus qu'un cœur bas, un coquin ténébreux.
Son visage essuyé n'a plus rien que d'affreux.
On a de lui des Opéras j des Traffédies^
des Pastorales ^ des Divertissemens. Ou-
tre ces pièces , LuUi a encore fait la mu-
sique d'environ 20 ballets, et de plusieurs
romédies de Molière : des Trio de vio-
lons et plusieurs Motets à grand chœur,
etc. La musique de LuUi n'a plus la ré-
putation qu'elle avait autrefois : à l'excep-
tion de quelques morceaux encore écou-
lés de nos jours, ses compositions musi-
cales, comme toutes celles de son siècle,
ne paraissent plus que froides, inanimées
et sans caractère.
MIMAGUE (la vénérable mère MARie
de), fondatrice et institutrice des filles de
la Providence , naquit à Paris, le 29 no-
vembre 1599 , d'une famille honorable.
Ses grâces naturelles étaient rehaussées
\vax une excellente éducation et par des
vertus précoces, qu'elle devait en grande
partie à son sage directeur, le P. Lebrun,
célèbre dominicain. Recherchée par plu-
sieurs personnes , qui demandaient sa
main , mademoiselle de Lumague pou-
vait faire un mariage sortable ; mais elle
préféra la vie solitaire du cloître, et entra
dans un couvent de capucines , dont la
faiblesse de sa santé ne lui permit pas de
suivre la règle austère. Sollicitée par ses
parens , et par pure obéissance , elle
épousa, en 1617 , François Poilalion, qui
fut nommé résident de France à Raguse.
MadaiTie de Lumague, étant devenue
enceinte, ne put suivre son époux ; et
après sa délivrance, lorsqu'elle se pré-
parait à le joindre , elle apprit la nou-
velle de sd mort. Elle se consacra entiè-
rement à l'éducation de sa fille , vivait
dans la retraite, et n'en sortit que sur
l'invitation de la duchesse d'Orléans, qui
l'avait nomiTiée dame d'honneur et gou-
vernante de ses filles. Au milieu de la
cour la plus brillante de l'Europe, madame
de Lumague menait une vie aussi régu-
lière que si elle eût deiTieuré dans un
cloître. Quand l'éducation des jeunes
princesses fut terminée , elle retourna
dans sa retraite, et eut le bonheur de con-
naître saint Vincent de Paul , dont elle
partagea les vues charitables, et tint, aus-
Bitôl qu'elle eut marié sa fille , la pro-
messe qu'elle avait faite à ce vénérable
religieux. Elle fonda en conséquence , en
1050, rinslilut des Filles de laProvidence,
chargées d'instruire les pauvres enfans
de la campagne, dont elle fixa le nom-
bre à trente-trois, distribuées dans les
villages aux environs de Paris. La for-
tune de la vertueuse fondatrice était pres-
que épuisée par cette sainte œuvre ; des
personnes cliaritables vinrent à son se-
cours, et la reine régente se déclarant en-
fin protectrice du nouvel institut , lui
donna en 1G51 xuie maison située au faa-
bourg Saint-Marceau. Madame de Luma-
gue, tranquille de ce côté, coopéra, avec
saint Vincent de Paul, à l'établissement
de la maison des Nouvelles catitoTiques,
que le maréchal de Turenne dota géné-
reusement. Tourmentée depuis dix-huit
ans d'une maladie douloureuse , et sen-
tant sa fin approcher , elle désira mourir
dans les bras de ses chères Filles de la
Providence. A peine arrivée à Paris et
dans leur maison , elle n'eut que le
temps de recevoir les secours de l'Eglise ,
et mourut le 4 septembre 1657, âgée de
58 ans. On a écrit plusieurs Fies de cette
dame : la meilleure est celle de l'abbé
Collin , Paris , 1741 , in-12 , avec un por-
trait gravé par Roy. C'était un tribut
de reconnaissance de l'auteur, qui, ayant
perdu la vue , attribua sa guéiison à sa
dévotion pour la vénérable Maiie de Lu-
mague.
LUMllN. ro)/ez LA MARCK.
LUi\A (don Alvaro de), gentil-
homme espagnol , s'empara de l'esprit de
Jean II, roi deCastille, maitre despotique.
Il abusa de son pouvoir, alluma la guerre
dans le royaume , persécuta les grands ,
s'enrichit du bien d'autrui, et reçut de
l'argent des Maures, pour etnpêcher la
prise de Grenade. Convaincu de ces cri-
tues, il fut condamné à Valladolid , l'an
1453, à avoir la tête coupée ; elle fut ex-
posée pendant plusieurs jours avec un
bassin, pour trouver de quoi faire ei>
terrer son corps. On assure que Luna
ayant voulu savoir d'un astiologie quelle
serait sa fin , celui-ci lui répondit qu'il
mourrait à Calahalso. C'était le nom
d'une de ses terres , et ce terme signifie
aussi échafaud en espagnol. Voyez,
pour de plus amples détails , sa Vie par
Anf. de Castellanos , Milan , 1546 , in-fol.
Elle a été traduite en français Paris ,
1720, et a reparu à Madrid, en espagnol,
1784, \n-h°.
LUx\DORPU S ou LUNDORP (Mk.upi^
LUIV
Ôâ7
LUN
r.ASPARD ) écrivain allemand du 17' siè-
cle , a continué V Histoire de Sleidan ^
mais d'une manière très imparfaite; cette
Continuation ^ (\\xi tsl en 3 volumes ,' va
jusqu'à l'an 1609. On a encore de lui :
Jeta publica ; des Notei sur Pétrone ,
sous le nom supposé de Georges Erhard;
elles sont peu recherchées.
LUNE ( Pierre de). Voyez BENOIT
XIII, antipape.
♦LUKEAU DEBOISGERMAIX (Pierre
Josepu-François ), savant instituteur,
mais écrivain médiocre , naquit à Issou-
dun , en iS32. Après avoir terminé ses
éludes à Bourges , cliez les jésuites , il fut
admis dans leur ordre , y régenta pen-
dant quelque temps les classes inférieu-
res, et abandonna ensuite cette société
pour venir s'établir à Paris, où il ouvrit
des cours de grammaire , d'histoire ël
de géographie. Quelques ouvrages élé-
mentaires qu'il publia furent favorable-
ment accueillis. 11 donna ensuite une édi-
tion des OEuvres de Racine ^Faris, 1768,
7 vol. in-S", avec une vie de ce grand
poète, et des Commentaires qui sont en-
core recherchés aujourd'hui , malgré la
critique qu'en a faite Laharpe; mais Lu-
neau ayant voulu débiter lui-même les
exemplaires de cette édition, les syndics
de la librairie lui intentèrent un procès
dans lequel il succomba. Pour se venger
il accusa les libraires-éditeurs de V Ency-
clopédie d'avoir frauduleusement mul-
tiplié le nombre des volumes , manqué à
la plupart de leurs engagemens envers
leurs souscripteurs, et demanda qu'ils
fussent condamnés à payer à chacun de
ceux-ci un dédommagement de 500 fr.
Cette cause qui était celle des gens de
lettres, fit beaucoup d'éclat ; Luneau
plaida lui-même devant le parlement;
mais après avoir passé par toutes les ju-
ridictions , après neuf ans d'attente et de
soucis, il fut condamné, en 1778 , à l'a-
mende et aux frais dans une affaire où
le seul objet d'intérêt pour lui avait été
de recouvrer 457 francs. Cette lutte opi-
niâtre, qui lit honneur à ses talens, épuisa
sa fortune. Alors, il imagina d'établir un
bureau .de correspondance, destiné à
fournir aux amateurs les articles de li-
brairie ancienne et moderne , aux prix
de Paris ; mais cette entreprise n'ayant
eu qu'un succès passager , il renonça
aux spéculations commerciales, et publia
des traductions interlinéaires , d'après
le plan de Dumarsais. Il mourut à Paris
le 25 décembre 1801. On a de lui : ] Les
vrais principes de la lecture^ de l'ortho-
graplie et de la prononciation . Puiis,
1759, in-8". Cet ouvrage, dont l'idée et le
plan appartiennent à Viard , £iit souvent
réimprimé. La huitième édition, 1792,
est perfectionnée et considérablement
augmentée. | Discours sur une nouvelle
manière d'enseigner et d'apprendre la
géographie :, d'après une suite d'opéra-
tions typographiques^ ibid., 1759, in-12 ;
I Cours d'Histoire universelle; Petits élé-
mens , 1768, 2 vol. hi-8° ; 5'= édit. , 1779 ;
I Recueil de Mémoires contre les libraires
associés de V Encyclopédie ^ 1771-1772
I Jlmanach musicale 1781-1783, 3 vol. iu-
12 ; I Cours de langue italienne. 1783 , 3
vol. in-8"*, et 1 vol. in-4^, version interli-
néaire de la Jérusalem délivrée et des
Lettres péruviennes, sur la traduction de
Deodati ; | Cours de langue anglaise .
il^l et 1800,2 vol. in-8°ct in-4"*, appli-
cation de la même méthode à la traduc-
tion anglaise de Télémaque et du Paradis
perdu de Milton ; | Cours de langue /a-
^m^. 1787-1789, 5 vol. in-8° ; c'est encore
l'application de la méthode de Dumar-
sais sur les Commentaires de César et
V Enéide de Virgile. Ces trois Cours . pu-
bliés d'abord chaque quinzaine , par ca-
hiers , sous le titre de Jownal d'éduca-
tion. eurent beaucoup de succès dans leur
nouveauté, et celui de langue latine . de-
venu fort rare, est encore très recherché
I Cours de Bibliographie ^ ou Nouvelle
pi-oduction des sciences de la littérature
et des artSj 1788, in-8° ; 0 cahiers , de jan-
vier à juillet 1788, contenant les litres des
ouvrages français annoncés dans les
journaux pendant le mois précédent ;
I Observatio7is sur l'amélioration du ser-
vice des postes j Paris, 1793, in-8° ; | De
l'éducation de s lapins^ i798, in-S"; \ Idées
et vues sur l'usage que le gouvernement
peut faire du château de Versailles,, 1798,
in-8"; | Descriptiondesaimans artificiels
de Lenoble , 1801 ; ] Mémoires pour les
imprimeurs et libi'aires de Paris, ibid.
On a encore de Lunean une brochure
in-12, intitulée ',\Zinzolin. jeu frivole et
morale 1769. Il est éditeur de ï Elite des
Poésies fugitives. Londres (Paris ) , 1769,
5 vol. in-12 , et il a eu part au Diction-
naire du vieux langage, de Lacombe.
* LIIXIER, né à Nantes, mort à Paris ,
en 1807, est auteur d'un Dict. estimé des
sciences et des arts. Paris, 1806 , 5 vol.
in-8°, contenant l'étymologie , la défini-
tion et les diverses acceptions des termes
techniques usités dans l'anatoaue, )a
LUP
628
LUP
physiologie , la médecine , la pharmacie ,
la chiiviic , la botanique , la minéralogie ,
la mécanique , l'hydraulique, l'astrono-
mie, la pcinlure.rarcliiteclure, la marine,
les arts et' métiers , récoriomie domesli-
q,ue, l'agriculture , l'économie politique ,
la numismatique, etc. ; on y a joint
le tableau historique de l'origine et des
progrès de chaque branche des connais-
sances humaines, et ime description abré-
gée des machines, des instrumens et des
j)rocédés anciens et modernes employés
dans les arts.
LUPI ( Axtoiîve-Marie ) , jésuite en
1693 , né à Florence , mort à Palerme en
1737 , a écrit beaucoup de dissertations
savantes, surtout pour éciaircir les anti-
quités sacrées et profanes. Le père Zac-
caria a donné une Edition des Œuvres
dupère. Lupi, son confrère , à Faenza,
^783 . 2 vol, in-4° , avec des notes. Le
père Laini a donné la vie d'A.-M. Lupi
dans ses Memorabilia Italorum erudit.
prœstant. 17i7. — • Il ne faut pas le con-
fondre avec Mario LUPI , camérier du
jiape Pie VI , et chanoine de Bergame ,
mort en 1789 , dont on a aussi d'excel-
lentes dissertations sur les antiquités;
entre autres : Codex diplomaticus civi-
tatis et Ecclesiœ bergamensis ; et De pa-
rochiis^ ante annuin Chîisti millesimum.
Dans ce dernier ouvrage, imprimé à Ber-
game en 1788 , 1 vol. in-4° , il ruine de
fond en comble les prétentions des curés
de Pisloie, qui voulurent s'ériger en évê-
ques dans le conventicule qu'ils tinrent
en 1786 , pour renverser la hiérarchie et
la discipline de l'Eglise. Il prouve que
les cures et les curés sont d'institution
moderne ; qu'il n'y avait anciennement
aucune paroisse dans les villes épiscopa-
les, si on excepte Rome et Alexandrie ;
expose les raisons pour lesquelles il y en
avait dans ces deux villes , et réfute ceux
qui, de là, ont conclu qu'il y en avait
uans les autres ; il réfute également quel-
ques écrivains qui ont parlé de grandes
paroisses qui , établies à la campagne ,
avaient sous elles plusieurs paroisses
moindres et dépendantes, et montre qu'a-
vant le 11' siècle , il n'y a point eu de
telles paroisses. Il prouve enfin que ce
qu'on a appelé le sénat de l'Eglise , que
les prêtres appelés cardinaux, que ceux
qui intervinrent avec voix consultative
dans les conciles généraux ou provin-
ciaux , n'étaient nullement curés ou rec-
teurs de paroisses , et que ces préroga-
tives apparlenaicnt dans leur plus an-
cienne origine au clergé supérieur on
bien aux chanoines des cathédrales, a II
» est à souhaiter, dit un critique , que les
» (?Urés qui voudraient imprudemment
» s'élever au-dessus de leur état , et du
» rang qu'ils tiennent dans l'Eglise, lisent
» cet ouvrage avec attention , pour se
» guérir d'une erreur dangereuse ; mais
» le nombre, grâce à ladivine Providence,
» qui veille sur l'ordre établi dans l'Eglise,
» n'en est pas grand. Si on excepte ceu.s
» que la nouvelle secte a su s'associer pour
» travailler de concert avec elle à lasub-
» version de la foi catholique , on ne
» trouve dans cette précieuse classe du
u sacerdoce chrétien aucun membre at-
» teint de la ridicule et ambitieuse envie
» de s'égaler aux premiers pasteurs. »
* LIJPOT ( François et Nicolas ) , ha-
biles luthiers, tous deux élèves de Joseph
Guarnérius , se sont fait une réputation
européenne par la perfection de leurs
instrumens. Nicolas , qui naquit à Slult-
gard en 1758 , et mourut à Paris dans lo
mois de juillet 1824, était établi en Fratice
dans l'année 1794 ; nous avons sous son
nom un petit ouvrage intitulé la Chélo-
nomie ou le parfait luthier ^ Paris , 1806,
in-12,dont la rédaction appartientàTabbô
Sibire. Nicolas Lupot mérita d'être sur-
nommé le Stradivarius de son siècle.
LUPUS ( CiiRÉTiEiV ) , ainsi nommé
parce que son nom de famille ff^olfs'iQïii-
fie loup, religieux auguslin , né à Ypres
en 1612 , enseigna la philosophie à Colo-
gne , puis la théologie à Louvain, avec un
succès distingué. Il exerça ensuite les
premières charges de son ordre dans
sa province. Le pape Clément IX voulut
lui donner un évôché , avec l'intendance
de sa sacristie ; mais le père Lupus pré-
férant l'étude et le repos à l'esclavage
brillant des dignités, refusa constamment
l'un et l'autre. Innocent XI et le grand-
duc de Toscane lui donnèrent aussi des
marques publiques de leur estime. Il înï
pendant quelque temps favorable au
jansénisme : mais il se détacha de ce
parti, cl mourut l)on catholique à Lou-
vain en 1681 , à 69 ans. Il s'était fait lui-
même une épitaphe dans laquelle il di-
sait modestement qu'il était dignus, no-
mine reçue. Lupus... indignus, non re,
sed solo nomine, doctor. On a de lui un
grand nombre d'ouvrages en latin. Los
principaux sont : | de savans Cominen-'
taires sur l'histoire et sur les canons des
conciles . 1665 , 1675 , 5 vol. in-4» ; | un
Traita des appels au saint Siège, in-Zi",
LUS
629
LUS
contre Quesnel. On y trouve une bonne
réfutation faite d'avance d'un fameux
compilateur de nos jours ( Honlheim ) ,
qui a étrangement défiguré cette matière
comme bien d'autres ; le droit d'appeler
au pape y est montré par la nature de sa
primauté, et par toute l'histoire ecclésias-
tique, {roy. ATHANASE , INNOCENT I",
ZOZIME. ) I Un Traité sur la contrition ,
Louvain , 1666 , in-4" , aussi savant que
solide , où il se déclare pour la néces-
sité de l'amour dans le sacrement de pé-
nitence. Voyez NEERCASSEL.) j Recueil
de lettres et de monumens^ concernant
les conciles d'Ephèse et de Ckalcédoinc ^
^uvain, 1682, 2 vol. in-4" , avec des no-
tes ; I un recueil des Lettres de saint
Thomas de Cantorbéry , précédées de sa
Fî5. Bruxelles, 1682, 2 vol. in-/t° ; | un
Commentaire sur les Prescriptions de
TertuUien, Bruxelles, 1675, in-i"; | Opus-
cula posthuma, publiés par le père Guil-
laume Wynants, du même ordre, Bruxel-
les, 1690, in-4.°. Ce recueil renferme plu-
sieurs dissertations, entre autres sur la
simonie des monastères , contre van Es-
pen ; sur \ ancienne discipline de la m,i-
lice chrétienne, sur l'exposition du saint
Sacrement, sur le droit des réguliers de
prêcher, contre Steyaert , etc.; | De l'ori-
gine des ermites, des clercs et des reli-
gieuses de l'ordre de Saint- Augustin ,
Douai, 16S1, in-8", etc. Ces ouvrages,
écrits en latin, sont remplis d'érudition.
Ils ont été réunis à Venise en h vol. in-
fol., 1724 , par le père Thomas Philippi-
rio de Ravenne, du même ordre. On les a
aussi en 12 vol. in-i".
LUPUS. Voyez LOUP.
LUSCINIUS ou NACHTGALL {Rossi-
gnol^ ( Othsiar), chanoine de Stras-
bourg, lieu de sa naissance, étudia dans
cette ville, à Paris , à Padoue , à Louvain
et à Vienne; revint à Strasbourg en 1514,
retourna en Italie en 1517 , visita la Hon-
grie, la Transylvanie, la Turquie, et par-
courut ainsi presque toute l'Europe. Il
professa la littérature grecque à Augs-
bourg, fut premier prédicateur de l'é-
glise de Bâle , et mourut vers 1555. Il a
laissé plusieurs écrits, entre autres : | des
Traductions latines des Symphosiaques
de Plutarque , et des Harangues d'Iso-
crate à Démonicus et à Nicoclès ; ù.' Epi-
grammes grecques , etc. Elles sont plus
tidèles qu'élégantes. | Des Commeîitait'es
sur l'Ecriture sainte. Voyez les Mémoires
de Nicéron, tom. 32.
LUSIGiMAN. Voyez LUZIGNAN.
LIJSSAIN' ( François d'Esparbès de ) ,
vicomte d'Aubeterre , servit sous Henri
IV et sous Louis XIII , et se distingua
dans différentes occasions. Il fut pourvu
par le premier, l'an 1590 , du gouverne-
ment de Blaye , sur la démission de son
père; et par le second, l'an 1620 , de la di-
gnité de maréchal de France, après avoir
remis songouvernement de Blaye àBran-
les, frère du connétable de Luynes. Il se
déclara pour la reine en 1620, fit le siège
de Nérac et de Caumont en 1621 , sous le
duc de Mayenne, et se retira ensuite à Au-
beterre , où il mourut en 1628. Son père,
Jean-Paul d'Esparbès, s'était maintenu
dans Blaye malgré le maréchal de Mati-
gnon , qui l'y assiégea pour l'en dépossé-
der. Il avait commencé à servir en Italie
sous Montluc, qui parle avec éloge de sa
bravoure naissante, au siège de Sienne ,
en 1554.
LUSSAN ( Marguerite de ), fille d'un
cocher et de la Fleury, célèbre diseuse de
bonne aventure, naquit à Paris vers 1682.
D'autres la font naître dn prince Thomas
de Savoie, frère du prince Eugène, et
d'une courtisane. Il est certain que ce
prince eut soin de son enfance , de son
éducation ; qu'il lui légua un traitement,
et lui fit même porter les armes de sa
maison. Le savant Huet, ayant eu occa-
tion de la connaître , goûta son esprit ,
et l'exhorta, dit on , à composer des ro-
mans moraux ; mais il est à croire qu'il
n'eût point approuvé tous ceux qui sor-
tirent de sa plume. On vit d'abord paraî-
tre l'Histoire de la comtesse de Gondès.
en 2 vol. Ignace-Louis de la Serre , sieur
de Langlade, auteur de quelques opéras,
dirigea ce premier ouvrage de mademoi-
selle de Lussan , et vécut toujours dans
la plus grande intimité avec son associée-
Elle commença par avoir pour lui de>
sentimens qui passaient les bornes de ia
reconnaissance. Elle fit croire ensuite .
par la continuité de ses attentions , qu'il
était sou mari ; on se trompait. On ai-
tribue à M. l'abbé de Boismorand les
Anecdotes de la cour de Ph ilippe- Auguste,
en 6 part, ou 2 vol. in-12 , qui virent le
jour à Paris en 1755 , et qui ont été sou-
vent réimpriinéesdcpuis. C'est sans con-
tredit le meilleur ouvra;;e qui ait paru
sous le nom de mademoiselle de Lussan.
La figure de cette romancière n'était
point agréable. Elle était louche et brune
à l'excès. Sa voix, son air, n'apparte-
naient pas à sou sexe ; mais cllesuppléisit
à ces défauts par son esprit et son am;^
53.
LUT 65
bililé ( Voyez GEOFFRIN , GRAFFI-
GNY, DESHOULÏÈRES» SUSK, TENCIN. )
Comme elle aimail la bonne table , un
excès dans le manger lui causa une indi-
gestion , dont elle mourut à Paris le 51
mai 1758, âgée de 76 ans. Outre les ou-
vrages dont nous avons parlé, on a d'elle :
\Les Veillées de Thessalie ^ k part, ou 2
vol. in-12. C'est un recueil de contes
agréables et de liclions ingénieuses.
/ Mémoires secrets et intrigues de la cour
de France sous Charles VIII ^ 1741, in-
42 ; I Anecdotes de la cour de François
l". 1748, 3 vol. in-12 ; | I/istoire de Ma-
rie d' Angleterre ^ 1749 , in-12 ; | Annales
de la cour de Henri II ^ 1749, 2 vol. in-i2 ;
j on a vu paraître aussi sous son nom
V Histoire de la vie et du règne de Char-
les VI, roi de France^ 1753, 9 vol. in-12 ;
} V Histoire du règne de Louis XI, 1756 ,
66 vol. in-12 ; et V Histoire de la dernière
révolution de Naples, 1757, 4 vol. in-12.
Mais ces trois derniers ouvrages sont de
Baudot de Juilli, le même qui , en 1696,
donna \ Histoire de Charles Vil . 2 vol.
in-12, réimprimée en 1755. | Vie du brave
Crillo7i, i7b7 , en. 2 vol. in-12: ouvrage
prolixe et mal écrit. Le défaut de préci-
sion est celui de presque tous les écrits
de mademoiselle de Lussan.
LUTATIUS CATULIIS (C.vics), con-
sul romain l'an 242 avant J.-C, comman-
.dait la flotte de la république dans le
tombât livré aux Carthaginois entre Dré-
pani et les îles JE^ates. Il leur coula à
fond 50 navires et en prit 70. Cette vic-
toire obligea les vaincus à demander la
paix , et mil fin à la première guerre pu-
nique.
LLIT.VTIUS CATULUS ( Qui:«tus ) ,
tonsul roiiiain l'an 102 avant J.-C, vain-
iuil les Cimbres de concert avec Ma-
rins son collègue. Après la mort de Sylla,
Catulus voulut maintenir les légions dans
la possession des terres que le dictateur
leur avait données. Lépidus prétendit
qu'il fallait les rendre aux premiers pro-
priétaires. Cette querelle excita de nou-
^eaux troubles . dans lesquel Lutatius
entra avec chaleur. L'impétuosité de son
caractère lui fit beaucoup d'ennemis, et
il périt misérablement dans les guerres
civiles. Ce magistrat fut du nombre des
orateurs illustres. Il avait fait de belles
Harangues et l'Histoire de son consulat, -
ces ouvrages ne sont point parvenus jus-
qu'à nous.
LUTIIEU (Martit«), né en 1484, à
ELslcLen, dans le comté de Mansfcid. d'un
0 LUT
père qui travaillait aux mines , fit à
nach ses études avec beaucoup de succè».
La foudre tua un de ses compagnons pen-
dant qu'il se pronîenait avec lui. Cette
mort le frappa tellement, qu'après avoir
été reçu maître en philosophie à l'uni-
versité d'Erfurt en 1505, il eml)rassa dans
cetîe ville la vie monastique chez les
ermites de Saint-Augustin. Ses talens en-
gagèrent ses supérieurs à l'envoyer pro-
fesser dans la nouvelle université de
Wittenberg , fondée depuis peu par Fré-
déric , électeur de Saxe. Il donna succes-
sivement des leçons de philosophie et de
théologie avec beaucoup de réputation;
on remarqua seulement en lui un pen-
chant extrême pour les nouveautés. En
1510 il fut chargé des affaires de son ordre
auprès de la cour de Rome ; 2 ans après,
on le voit de retour en Saxe , gagner la
protection de l'électeur Frédéric qui vou-
lut se charger des frais de son doctorat.
Luther était un de ces hommes ardens et
impétueux, qui , lorsqu'ils sont vivement
saisis par un objet, s'y livrent tout en-
tiers, n'examinent plus rien, et devien-
nent en quelque manière absolument in-
capables d'écouter la sagesse et la raison.
Une imagination forte , nourrie par l'é-
tude, le rendait naturellement éloquent,
et lui assurait les suffrages de ceux qui
l'entendaient tonner et déclamer. Il sen-
tait bien sa supériorité ; et ses succès , en
flattant son orgueil, le rendaient toujours
plus hardi et plus entreprenant. Lorsqu'il
donnait dans quelque écart , les remon-
trances , les objections , n'étaient pas ca-
pables de le faire rentrer en lui-même :
elles ne servaient qu'à l'irriter. Un homme
d'un tel caractère devait nécessairement
enfanter des erreurs. Le moine augustin,
s' étant rempli des livres de l'hérésiarque
Jean Huss, conçut une haine violente
contre les pratiques de l'Eglise romaine,
et surtout contre les théologiens scolas-
tiques. Dès l'an 1516, il lit soutenir des
thèses publiques, dans lesquelles los
hommes éclairés virent le germe des cr
reurs qu'il enseigna depuis. Ainsi il est
faux que Luther ait commencé à dogma-
tiser à l'occasion des disputes survenues
entre les dominicains et les auguslins
pour la distribution des indulgences plc-
nières, qui ne furent accordées par Léon X
qu'en 1517. Seckendorf, et depuis lui
Lenfant et Chais, ont démontré que,
1 long-temps avant l'éclat des indulg^snces ,
! Luther avait commencé à combattre di-
1 vers poinls de l'Eglise romaine. îl c.=t vrai
LUT 6
que les abus que commettaient les quê-
teurs (les aumônes qu'on donnait pour
les indulgences, et les propositions ou-
trées que les prédicateurs débitaient sur
leur pouvoir, lui fournirent l'occasion de
répandre avec plus de liberté sa bile et
Son poison. Le luthéranisme n'était qu'une
étincelle en 1517; en 1518 ce fut un in-
cendie. Frédéric, électeur de Saxe, et
l'université de Wittenberg, se déclarèrent
protecteurs de Luther. Cet hérésiarque se
découvrait peu à peu. D'abord il n'atta-
qua que l'abus des indulgences ; ensuite
il attaqua les indulgences iTièmes ; enfin
il examina le pouvoir de celui qui les
donnait. De la matière des indulgences il
passa à celle de la justification et de l'effi-
cace des sacremens , et avança des pro-
positions toutes plus erronées les unes
que les autres. Le pape Léon X , l'ayant
vainement fait citer à Rome, consentit
que cette querelle fût terminée en Alle-
magne par le cardinal Cajelan son légat.
Cajetan avait ordre de faire rétracter l'hé-
résiarque , ou de s'assurer de sa per-
sonne : il ne put exécuter ni l'une ni
l'autre de ces commissions. Luther lui
parla dans deux conférences avec beau-
coup d'orgueil et de morgue ; puis , crai-
gnant d'être arrêté , il prit secrètement
la fuite , après avoir fait afficher un acte
d'appel du pape mal informé au jyape
mieux infonné. Du fond de sa retraite
il donna carrière à toutes ses idées. Il
écrivit contre le purgatoire ^ le libre ar-
bitre^ les indulgences^ la confession au-
riculaire , la primauté du pape , les
vœux m,onasliques ^ la communion sous
une seule espèce^ les pèlerinages _, etc.
Il menaçait encore d'écrire ; mais le
pape, pour opposer une digue à ce tor-
rent d'erreurs, anafhémalisa tous ses
écrits dans une bulle du 20 juin 1320.
L'hérésianpie en appela au futur con-
cile ; et pour toute répoiise à la bulle
de Léon X, il la fit brûler publique-
ment à Wiltenberg, avec les décrétâtes
des autres papes ses prédécesseurs. Ce
fut alors qu'il publia son livre De la
captivité de Babijlone. Après avoir dé-
claré qu'il se repentait d'avoir été si mo-
déré, il expie celte faute par toutes les
injures que le délire le plus emporté peut
fournir à un frénétique. Il y exhorte les
princes à secouer le joug de la papauté ,
qui était , selon lui , le royaume de Ba-
byione. Il supprime tout d'un coup quatre
sacremens , ne rcconnaisr>ant plus que le
baptême, la péniicnce et le pain. C'est
U LUT
l'eucharistie qu'il désigne sous le nom de
pain. Il met, à la place de la transsubstan-
tiation qui s'opère dans cet adorable sa-
crement , une consubstantiation , qu'il
tirait de son cerveau échauffé. Le pain et
le vin demeurent dans l'eucharistie; rnaia
le vrai corps et le vrai sang y sont aussi,
comme le feu se mêle dans un fer chaud
avec le métal . ou comme le vin est dans
et sous le tonneau. Léon X opposa une
nouvelle bulle à ces extravagances : elle
fut lancée le 5 janvier 1521. L'empereur
Charles-Quint convoque en même temps
une diète à Worms , où Luther se rend
sous un sauf-conduit, et refuse de se ré-
tracter. A son retour, il se fit enlever par
Frédéric de Saxe, son protecteur, qui le
fil enfermer dans un château désert, pour
qu'il eût un prétexte de ne plus obéir.
Cependant la faculté de théologie de
Paris se joint au pape, et anathématise
le nouvel hérétique. Luther fut d'autant
plus sensible à ce coup, qu'il avait tou-
jours témoigné une grande estime pour
cette faculté, jusqu'à la prendre pour
juge. Henri VIII, roi d'Angleterre, pu-
blia dans le même temps contre lui un
écrit , qu'il dédia au pape Léon X. L'hé-
résiarque furieux eut recours à sa réponse
ordinaire , aux injures. « Je ne sais si la
D folie elle-même, disait-il à ce monarque,
» peut cire aussi insensée qu'est la tète du
» pauvre Henri. Oh! que je voudrais bien
« couvrir cette majesté anglaise de boue
» et d'ordure! j'en ai bien le droit Ve-
» nez, disait-il encore, monsieur Henri,
«je vous apprendrai : Veniatis , domine
» Henrice j ego docebo vos. » Sur quoi
Erasme n'a pu s'empêcher d'observer que
Luther aurait du moins dû parler latin,
puisque le roi d'Angleterre lui en donnait
l'exemple, et ne pas joinelre des solé-
cismes aux grossièretés : Qaid invitabat
Lutherum ut diceret : Venialis , domine
Henrice , ego docebo vos? Saltem regii
liber latine loquebatur. Ce fougueux
apôtre appelait le château où il était ei>-
fermé, son île de Pathmos. Sans doute
que , pour mieux ressembler à l'évangé-
liste saint Jean, dit M. Marquer, il crut
ne pouvoir se dispenser d'avoir des révé-
lations dans son île. Il eut une conférence
avec le Diable, qui lui révéla que s'il
voulait pourvoir à son salut, il fallait
qu'il s'abstint de célébrer des messes pri-
vées. Luther suivit exactement ce conseil
de l'ange des ténèbres. Il fit plus, il écri-
vit contre les messes basses et les fit abo-
lir à Wiltenbeig. Luther était trop res-
LUT 63
serré dans son île de Pathmos , pour qu'il
voulût y rester long-temps. Il se répandit
dans l'Allemagne, et, pour avoir plus
de sectateurs , il dispensa les prêtres et
les religieux de la vertu et du vœu de
continence, dans un ouvrage où la pu-
deur est offensée en mille endroits* Ce
fut celte même année 1525, qu'il écrivit
son Traité du fisc commun. Il le nommait
ainsi, parce qu'il y domiait l'idée d'un
fisc ou trésor public , dans lequel on fe-
rait entrer les revenus de tous les monas-
tères rentes , des évéchés , des abbayes ,
et en général de tous les bénéfices qu'il
voulait enlever à l'Eglise. L'espérance de
recueillir les dépouilles des ecclésiastiques
engagea beaucoup de princes dans sa
secte, et lui lit plus de prosélytes que
tous ses livres. « Il ne faut pas croire , dit
» un écrivain ingénieux , que Jean Huss ,
» Luther ou Calvin fussent des génies su-
» périeurs. Il eu est des chefs de sectes
» comme dfs ambassadeurs; souvent les
» esprits médiocres y réussissent le mieux,
» pourvu que les conditions qu'ils offrent
» soient avantageuses. » Frédéric II , roi
de Prusse , appelait Luther et Calvin de
pauvres gens. Si en effet on veut réduire
les causes des progrès de la réforme à des
principes simples, on verra qu'en Alle-
magne ce fut l'ouvrage de l'intérêt, en
Angleterre celui de l'amour, et en France
celui de la nouveauté. L'amorce des biens
ecclésiastiques fut le principal apôtre du
luthéranisme. Cependant Luther lui-même
eut le temps de voir que ces biens n'a-
vaient point enrichi les princes qui s'en
étaient emparés. Il trouva même que l'é-
lecteur de Saxe et ses favoris, qui avaient
partagé cette dépouille , n'en étaient pas
devenus plus riches. L'expérience, disait-
il, nous apprend que ceux qui s'appro-
prient les biens ecclésiastiques n'y trou-
vent qu'une source d'indigence et de dé-
tresse : Comprobat experientia , eos qui
ecclesiastica bona ad se iraxerunt, ob en
tandem depauperari et mendicos fieri. 11
rapporte à cette occasion les paroles de
Jean Hund, conseiller de l'électeur de
Saxe , auquel il paraissait que les biens de
l'Eglise envahis par les nobles avaient dé-
voré leur patrimoine : Nos nobiles cœno-
biorum, opes ad nos iraximus. Opes nos-
tras équestres comederunt et consumpse-
runt hœ cœnobiales ^ ut neque cœnobiales,
neque équestres amplius habeamus. Il li-
nit par l'apologue d'un aigle qui, empor-
tant de l'autel de Jupiter des viandes qui
lui étaient offertes, emporta en liiôme
2 LUf
temps un charbon qui mit l<i feu à son
nid. ( Symposiac., cap. 4. ) L'observation
n'était que trop vraie. Des courtisans
avides, des administrateurs infidèles, ont
dévoré les monastères, les abbayes, les
hôpitaux. Eux et le prince dont ils ser-
vaient la passion , semblables aux harpies
de la fable , paraissaient par leur dépréda-
tion augmenter leurs besoins : tout s'é-
vanouissait dans ces mains voraces ( T^oy.
HENRI VIII) Cependant le parti se
fortifiait de jour en jour dans le Nord , où
l'ignorance des peuples était plus grande,
et dès lors l'attachement à la religion plu*
faible, et la séduction plus facile. De la
haute Saxe il s'étendit dans les duchés de
Lunebourg , de Brunswick , de Meckel-
bourg et de Poméranie ; dans les archevê-
chés de Magdebourg et de Brème ; dans
les villes de Wismar et de Rostock , et tout
le long de la mer Baltique. Il passa même
dans la Livonie et dans la Prusse , où le
grand-maître de l'ordre Teutonique se fit
luthérien. Le fondateur du nouvel Evan-
gile quitta vers ce temps-là le froc d'au-
gustin, pour prendre l'habit de docteur.
Il renonça à la qualité de révérend père .
qu'on lui avait donnée jusqu'alors, et n'en
voulut point d'autre que celle de docteur
Martin Luther. L'année d'après, 1525 , il
épousa Catherine Bora ou de Bohren, jeune
religieuse d'une grande beauté, qu'il
avait fait sortir de son couvent deux ans
auparavant pour la catéchiser et la sé-
duire. Le réformateur Luther avait dé-
claré dans un de ses sermons , qu'î7 lui
était aussi impossible de vivre sans femme,
que de vivre saris manger. Biais il n'avait
pas osé en prendre une pendant la vie de
l'électeur Frédéric, son protecteur, qui
blâmait ces alliances. Dèsqu'i! le vit morl,
il voulut profiter d'une commodité que sa
doctrine accordait à tout le monde, et
dont il prétendait avoir plus de besoin
que personne. Cette conduite de Lulher
et des autres chefs des nouvelles sectes
faisait dire à Erasme que « les tragédies
» que jouaient les réformateurs étaient
» de vraies comédies , puisque le mariage
B en était le dénoùment. » Quelques an-
nées après, Luther donna au monde chrc-
tien un spectacle encore plus étrange.
Philippe, landgrave de Hesso, le second
protecteur du luthéranisme , voulut, du
vivant de sa femme Christine de Saxe,
épouser sa maîtresse. II crut pouvpir être
dispensé de la loi de n'avoir qu'une
femme : loi formelle de l'Evangile , et sur
laquelle est fondé le repos des étal^ et Ues
LUT g:
familles. Il s'adressa pour cela à Luther.
Le patriarche de la réforme «isscmble des
docteurs à Wittemberg en 1331?, et lui
dorme une i>ennis3ion pour épouser deux
femmes. Rien de plus ridicule que le long
discours que les docteurs du nouvcllisme
adressèrent au landgrave à cette occasion.
Après avoir avoué que le Fils de Dieu a
aboli la polygamie, ils prétendent que la
loi qui permettail aux Juifs la pluralité
des femmes à cause de la dureté de leur
cœur ri a pas été expressément i-évaquée.
lis se croient donc autorisés à user de la
même indulgence envers le landgrave, qui
avait besoin d'une femme de moindre
qualité que sa première épouse, afin de
la pouvoir mener avec lui aux diètes de
l'Empire , où la bonne chère lui rendait
la continence impossible. L'empereur
Charles-Quint , affligé de ces scènes scan-
daleuses, avait tâché dès le commencement
d'arrêter les progrès de l'hérésie. Il convo-
qua plusieurs diètes : à Spire en 1529 , ou
les luthériens acquirent le nom de protes-
tans^ pour avoir protesté contre le dé-
cret qui ordonnait de suivre la reli-
gion de l'Eglise romaine ; à Aiigsbourg
en 1530 , où les protestans présentèrent
leur confession de foi, et dans laquelle il
fut ordonné de suivre la croyance catho-
lique. Ces différens décrets produisirent
la ligue offensive et défensive do Smal-
calde entre les princes protestans. Char-
les-Quint, hors d'état de résister à la fois
aux princes confédérés et aux armes otto-
manes, leur accorda la liberté de con-
science à Nuremberg en 1552, jusqu'à la
convocation d'un concile général. Luther,
se voyant à la tête d'un parti redoutable,
n'en fut que plus fier et plus emporté.
C'était chaque année quelque nouvel écrit
contre le souverain pontife, ou contre les
princes et les théologiens catholiques,
home n'était plus selon lui, que la ra-
caille de Sodonie , la prostituée de Ba-
bylonc ;\q pape n'était qu'un scélérat qui
crachait des diables ; les cardinaux, i/g5
malheureux qu'il fallait exterminer. « Si
» j'étais le maître de l'Empire, écrivait-il,
je ferais un même paquet du pape et des
» cardinaux, pour les jeter tous ensemble
» dans la mer ; ce bain les guérirait, j'en
» donne ma parole, j'en donne J.-C. pour
garant. » L'impétueuse ardeur de son
imagination éclata surtout dans le dernier
ouvrage qu'il publia en 15/io , contre les
ihéologiens deLouvain et contre le pape.
Il y prétend que la papauté rotnaine a
été établie par Satan, et, faute d'autres
>D LUT
preuves, il mit à la léte de son livre one
estampe où le pontife de Rome était re-
présente entraîné en enfer par une légion
de diables. Quant aux théologiens de Lou-
\ ain, il leur parle avec la même douceur :
les injures les plus légères sont béte, pour-
ceau, épicurien , athée, etc. Il était avec
ses propres sectateurs aussi emporté qu'a-
vec les catJioliques ; il les menaçait , s'ils
continuaient aie contredire, de rétracter
tout ce qu'il avait enseigné : menace di-
gne d'un apôtre du mensonge. Ct|l iwmme
trop fameux mourut à Eisleben , en 1546,
à 62 ans , après avoir vaqué à son ordi-
naire à un bon repas. Un auteur moderne
en a fait le portrait suivant : « Moine
» apostat et corrupteur d'une religieuse
» apostate, ami de la table et de la taverne,
» insipide et grossier plaisant , ou plutôt
B impie et sale bouffon, qui n'épargna ni
» pape ni monarque ; d'un tempérament
» d'énergumène contre tous ceux qui
» osaient le contredire ; muni , pour tout
» avantage, d'une érudition et d'une litté-
» rature qui pouvaient imposer à son
» siècle ou à sa nation ; d'une voix fou-
» droyante , d'un air allier et tranchant :
» tel fut Luther, le nouvel évangéliste, ou,
» comme il se nommait , le nouvel ecclé-
» siaste, qui mit le premier l'Eglise en feu,
n sous prétexte de la réformer , et qui ,
» pour preuve de son étrange mission ,
» qui demandait certainement des mira-
0 clés du premier ordre, allégua les mira-
» clés dont se prévaut l'Alcoran , c'eat-à-
» dire, les succès du cimeterre et les pro-
» grès des armes, les excès delà discorde,
» de la révolte, de la cruauté, du sacrilège
» et du brigandage. » Sa secte se divisa
après sa mort, et de son vivant même,
en plusieurs branches. Il y eut loa luthé-
ro-pajnstes, c'est-à-dire ceux qui so ser-
vaient d'excommunication contre les sa-
cramentaires ; les lathero-zuingliens , les
lutliero-calvinistes , les luthero - osian-
driens, etc. , c'est-à-dire ceux qui mêlè-
rent les dogmes de Luther avec ceux do
Calvin, de Zuingle ou d'Osiander, etc.
Ces sectaires différaient tous entre eux
par quelque endroit, et ne s'accordaient
qu'en ce point , de combattre l'Eglise e'
de rejeter tout ce qui vierit du pape. C'eSi
cette haine qui leur fit prendre , durant
les guerres de religion du 16* siècle, cette
devise : plutôt turc que papiste ; devise
qui marque bien la fureur la plus extra-
vagante, mais qui est néanmoins parfai-
tement assortie à l'esprit de secte , à qui
rien n'est plus opposé que l'autorité d'uTi
LUT
654
LUX
chef et un centre d'unité. Cependant les
hommes les plus sensés parmi les protes-
tans, tels que Mélanchthon, Grotius , etc.,
ont toujours regretté l'autorité pontificale,
et l'ont regardée comme une chose sans
laquelle l'ensemble du christianisme ne
pouvait subsister. Luther laissa à ses dis-
ciples un grand nombre d'ouvrages , im-
primés à léna, en 1556, k vol. in-fol. ; et
à Wittenberg, en 7 vol. in-fol., 1572. On
préfère les éditions publiées de son vi-
vant, parce que dans celles qui ont vu le
jour après sa mort, ses sectateurs ont fait
des changemens très considérables. On
voit, par ses écrits , que Luther avait du
savoir et beaucoup de feu dans l'imagi-
nation; mais il n'avait ni douceur dans
le caractère , ni goût dans la manière de
penser et d'écrire. Il donnait dans les
grossièretés les plus impudentes et dans
les bouffonneries les plus basses. Jean
Aurifaber, disciple de Luther , a mis en
latin et publié en 1566, in-8°, les Discours
que cet hérésiarque tenait à table, sous ce
titre : Sefmones mensales ^ ou CoUoquia
tnensalia. C'est une espèce d'Jna ^ dont
la lecture prouve la véracité du portrait
que nous avons tracé du réformateur de
l'Allemagne. On conserve dans la biblio-
tlièque du Vatican un exemplaire de la
Bible, à la fin duquel on voit une prière en
vers allemands, écrite de la main de Lu-
ther, dont le sens est : « Mon Dieu, par
» votre bonté, pourvoyez-nous d'habits,
» de chapeaux, de capotes et de manteaux;
» de veaux bien gras, de cabris, de bœufs,
» de moutons et de génisses ; de beaucoup
» de femmes; et de peu d'eufans. Bien
» boire et bien manger est le vrai moyen
» de ne point s'ennuyer. » Cette prière,
où l'indécence , l'impiété , la luxure , la
gourmandise , disputent qui aura le des-
sus, est très certainement de la main de
Luther ; en vain Misson a-t-il voulu en
faire douter. Christian Juncker, son his-
torien, en convient et la rapporte mot à
mot ( Fila LiUhert^TpaQ. ^23 ) :
O Gott , durch deine Gîihle ,
Bctcher uns Kleider und Htite;
Hauch Mzntel uad Roecke,
Fette Kelber und Boecke ;
Ochsen, Schaffe und Kinder.
Vicie Weiber, wenig Kinder.
Schlechte Speise und Tranck
filachen einem dat Jahr lang.
M. Charles Walme^ley , évêque et vicaire
apostolique en Angleterre, a publié en
*777, sous le nom de Pasêormt, dans une
flisl. da l'Eglise chrétienne, une Histoire
il
abrégée de la Réforme de Luther, qui
été réimprimée séparément à Malines,!
en 1 vol. L'auteur , distingué par son zèle
et sa piété , fait très bien connaître l'es-
prit de la réformalion; il ne s'est pas
borné à l'Histoire du luthéranisme , il
retrace aussi les erreurs et les excès des
autres branches de la réforme.
LIJTHERBL'RG. f^oyez LOUTHER-
BOURG.
LL'TTI ou LUTI (Benoit), peintre, né &
Florence en 1666 , mort à Rome en 1726
s'attacha surtout au coloris. 11 avait un
graad nombre de tableaux de chevalet,
qui l'ont fait connaître dans presque tou-
tes les cours de l'Europe. L'empereur Id
fit chevalier, et l'électeur de Mayence ao
compagna ses lettres-patentes d'une croix
enrichie de diam^ns. Le pinceau de Lutti
est frais et vigoureux ; il mettait beaucoup
d'harmonie dans ses couleurs , et donnait
une belle expression à ses figures. On lui
reproche de n'être pas toujours correct.
Le miracle de saint Pierre , qu'il a peint
dans le palais Albani à Rome , passe pour
son chef-d'œuvre. Le Musée de Paris pos-
sède de ce maître deux tableaux : La
Madeleine visitée dans sa grotte par les
anges ^ et la m^me sainte considérant
une tête de mort.
tUT\VL\ (saint) , né de parens illus-
tres, fonda de ses biens l'abbaye de Melt-
loch, où il fit profession de la vie monas-
tique , dès que la mort de sa femme lui
permit de renoncer au siècle. La siège
archiépiscopal de Trêves étant devenu
vacant par la retraite de saint Basin , on-
cle de saint Lutwin, celui-ci fut tiré de
sa solitude pour le remplir. Il déploya ,
pendant 18 ans qu'il gouverna celte illus-
tre église , toutes les qualités d'un grand
évêque. L'abbaye de Meltloch , où il fut
enterré, possède encore aujourd'hui les
précieuses dépouilles de sa mortalité.
LUXEMBOURG, l'une des plus an-
ciennes et des plus illustres maisons de
l'Europe, a possédé plusieurs souveraine-
tés en France, en Allemagne et en Belgi-
que. Elle s'attacha à la maison de Bour-
gogne, et elle a produit cinq empereurs,
dont trois ont été rois de Bohème. Elle a
possédé les premières charges en France,
et a donné naissance à six reines et à plu-
sieurs princesses, dont l'alliance a relevé
l'éclat des familles les plus distinguées.
La branche aînée de la maison de J^uxem-
bourg fut fondue dans celle d'Autriche
par \z mariage d'Elizabeth, fille de l'em-
pereur Sigismond , morte en ikkl, avec
TXX 6
Albert I", archiduc d'Autriche cl empe-
reur. La branche cadette de Luxeinbourg-
Ligny, quoique moins illustrée que la pre-
mière a produit :
LUXEMBOURG LIGNY(WAT.EnAM de),
comte de Saint-Pol , naquit en 15o3. II
accompagna son père Gui dans l'expédition
du Ponthieu , et se trouva à la bataille de
Baeswider, en 1731, où Gui fut tué.
Prisonnier des Anglais, il parut à la cour
de Richard II , et épousa Mathilde de
Courtenai, sœur utérine de ce monarque.
Il obtint ensixitesa liberté, moyennant 120
raille francs de rançon dont la moitié lui
fut remise en faveur de ce mariage. Wa-
leran était entré au service de France.
On lui fit un crime de ce mariage ; mais
Charles VI lui accorda sa grâce : il ac-
compagna ce roi dans sa malheureuse ex-
pédition de Bretagne. Il fut nommé gou-
verneur de Gènes en 1596 , et grand-
maître des eaux et forcis de France en
1402. Il fit encore la guerre aux Anglais,
L'empereur Wenceslas ne lui ayant pas
rendu une somme d'argent qu'il lui devait,
il entra dans le Luxembourg, et brûla 120
villages. Il envoya ensuite un cartel à
Henri II, qui avait fait assassiner le Roi
Richard, son beau-frère. Nommé gouver-
neur de Paris, en lilO, ce fut lui qui créa
l'horrible milice composée de 500 bou-
chers ou écorcheurs , qui se livra à tous
les excès. En 1412, il battit les Armagnacs,
en NorvTiandie , et prit la place de Dom-
front. La disgrâce du duc de Bourgogne
attira la sienne; mais il ne voulut jamais
rendre l'épée de connétable , que le roi lui
avait fait demander. Il mourut gouver-
neur d'Ivoi, en 1417.
LUXEMBOURG LIGNY (Piekue de),
frère du précédent, né à Ligny en 1369 ,
se fit remarquer dès sa plus tendre jeu-
nesse par une ardeur extraordinaire pour
Ea pratique du bien , par son assiduité à
la prière , son goût pour la mortification ,
Bon amour pour l'humilité , et surtout par
sa charité pour les pauvres. Envoyé à
Paris à l'âge de 10 ans , il s'y appliqua
successivement aux belles-lettres , à la
philosophie et au droit canon. En 1583,
il devint chanoine de Notre-Dame de Pa-
ris, quelque temps après archidiacre de
Dreux, puis évoque de Metz en 1584 , et
mourut le 2 juillet 1387 , âge de 18 ans ,
à Avignon, où Clément VII, que la Fran-
ce reconnaissait pour pape légitime du-
rant le grand schisme, l'avait appelé.
Pierre avait été fait cardinal l'année pré-
cédente. Quoiqu'il eût le gouvernement
55 LUX
(le son diocèse , il n'était point prrtrc , sa
prudence et sa sainteté ayant été jugées
une raison suffisante pour le dispenser
du défaut d'âge. Il semble cependant qu'il
était diacre, et sa dalmatique se garde à
Avignon. Les miracles opérés par son in-
tercession portèrent les Avignonais à con-
struire une chapelle sur son tombeau. On
a depuis bâti un couvent de célestins au
même endroit. Il fut béatifié en 1527
par Clément VII (le vrai pontife de ce
nom). L'histoire de ses miracles a été pu-
bliée par les bollandistes. On a sous son
nom deux petits livres de piété : livre de
Clergie... translaté de latin en français,
Paris , sans date , gotliique , in-4° ; et la
Diète du salut. Paris, 1506, in-4°.
LUXEMBOURG - SAINT - POL ( LoLiS
de), de la même famille , fut élu évêque
de Térouane, en 1414. Henri VI, roi d'An-
gleterre, qui prenait le titre de roi de
France, le fit chancelier en 1425 , et ar-
chevêque de Rouen en 1436. Il s'était tel-
lement dévoué aux intérêts de ce prince,
qu'il conduisait lui-même du secours aux
places assiégées , et ne négligeait rien
pour rétablir ce parti chancelant. Il se jeta
dans la Bastille lorsque Paris se soumit à
Charles VII , en 1456 ; mais il fut obligé
d'en sortir par composition, et se retira
en Angleterre, où il fut évêque d'Ely, et
cardinal en 1456. Il mourut en 1449.
LUXEMBOURG (Louis de) , connéta-
ble, comte de Saint-Pol, neveu du précé-
dent, avait servi sous Charles Vil avec
succès dans divers sièges. Après sa mort,
il s'attacha au duc de Bourgogne, qui lui
donna le commandement de l'avant-garde
de son armée à la bataille de Montlhéri.
Louis XI, pour l'attirer à son service, lui
donna l'épée de connétable ; mais pour
se maintenir dans la ville de Saint-Quen-
tin, dont il s'était emparé , il trahit suc-
cessivement et le roi et le duc de Bour-
gogne. Ses perfidies furent découvertes.
Craignant la sévérité de Louis XI , il se
relira auprès du duc de Bourgogne , qui
le rendit au roi. Son procès lui fut fait,
et il eut la tête tranchée à Paris le 19 dé-
cembre 1475.
LUXEMBOURG (François-Henhi de
Montmorenci-Boule ville, duc de), maré-
chal de France , né posthume en 1628 ,
était fils de François de Montmorenci ,
comte de Bouteville et de Lusse, qui eut
la tête tranchée sous Louis XIII, pour
s'être battu en duel , dans un temps où
cette détestable manie était punie comme
elle doit l'être. La princesse de Condé
LUX
636
LUX
présenta à la cour le jeune Montnaorenci
resté orphelin ; elle eut soin de sa fortune
et le donna pour aide-de-camp à son fils,
déjà fameux par ses victoires de Rocroy,
de Fribourg et de Nortlingue. Il se trou-
va au siège de Lérida, sous le grand
Condé dont il fut l'élève , et qu'il suivit
dans sa bonne et dans sa mauvaise for-
tune. Le jeune guerrier avait dans le ca-
ractère plusieurs traits du héros qu'il
avait pris pour modèle : un génie ardent,
une exécution prompte, un coup d'oeil
juste , un esprit avide de connaissances.
On vit briller en lui ces différentes qua-
lités à la conquête de la Franche-Comté
en 1668, où il servit en qualité de lieute-
nant général. La guerre ayant recom-
mencé en 1072, il commanda en chef pen-
dant la fameuse campagne de Hollande ,
prit Grool, Deventer, Coeworden, Zwol,
Campen, etc., et repoussa les troupes des
états près de Bodegrave et de Voerden.
Les historiens hollandais prétendent que
Luxembourg , en partant pour cette der-
nière expédition , avait dit à ses troupes :
n Allez, mes enfans , pillez, tuez, violez,
» et s'il y a quelque chose de plus ef-
» frayant , ne manquez pas de le faire ;
» afin que je voie que je ne me suis pas
» trompé en vous choisissant comme les
j> plus braves des hommes et les plus
» propres à pousser les ennemis avec
» vigueur. » Il est impossible de croire
qu'un général français ait tenu un dis-
cours si barbare ; mais ce qu'il y a de sûr,
c'est que les soldats mirent le feu à Bo-
degrave , et se livrèrent , à la lueur des
flammes, à la débauche et à la cruauté;
que par des exploits de cette nature les
affaires des Français tournèrent mal , et
que le duc fut obligé de faire retraite , ce
qu'il exécuta avec plus de succès qu'on
n'en devait espérer. Louis XIV ayant fait
une nouvelle expédition dans la Franche-
Comté, Luxembourg l'y suivit. 11 se trouva
ensuite à la bataille de Senef , obligea le
prince d'Orange de lever le siège de Char-
leroi, et obtint en 1675 le bâton de maré-
chal de France. Il commanda une partie
de l'armée française après la mort de
Turenne , et ne lit pas des choses dignes
de sa réputation. Le grand Condé, quoi-
que son ami, ne put s'empêcher de dire :
Luxembourg fait mieux l'éloge de Tu-
renne que Mascaron et Fléchier. Il laissa
prendre Phiiipsbourg à sa vue par le duc
de Lorraine , et essaya en vain de le se-
ccurir avec une armée de 50,000 hommes.
11 fut plus heureux en combattant Guil-
laume d'Orange. Ce prince ayant attaqué
le général français , qui ne s'y attendait
point, à Saint-Denys près de Mons , cette
surprise n'empêcha pas le maréchal de
Luxembourg de disputer la victoire avec
beaucoup de valeur. Quelques-uns même
lui adjugent le champ de bataille, dont
les alliés se glorillèrent. Luxembourg,
quoique aimé de Louis XIV, eut à souf-
frir à la cour plusieurs désagrémens. Il
s'était brouillé avec Louvois ; celui-ci at-
tendit l'occasion de le perdre : elle s'of-
frit bientôt. Bonnard, clerc du procu-
reur du maréchal, s'adressa à Lesage,
intrigant et sorcier de son métier,
pour découvrir des papiers nécessaires
au maréchal dans un procès. Boimard
avait obtenu du maréchal une signature
dont on fit un usage perfide, en désignant
un simple pouvoir comme une espèce de
pacte diabolique. A cette époque on
avait créé ( le 7 avril 1679) la chambre
ardente^ à l'arsenal, pour les crimes
de sorcellerie et empoisonnemens. La
Voisin et la Vigoureux y avaient été ju-
gées. Le maréchal l'y fut aussi, étant ac-
cusé d'avoir voulu faire périr sa femme,
le maréclial de Créqui et d'autres ; on le
confronta avec les deux misérables ci-
dessus citées. Enfin , après quatorze mois
de captivité, il fut déclaré innocent.
Dans la seconde guerre que Louis XIV
soutint contre les puissances de l'Europe
réunies en 1690, Luxembourg, nommé
général de l'armée de Flandre , gagna la
bataille de Fleurus. Il eut encore l'avan-
tage au choc de Leuze en 1691, au com-
bat de Steinkerque en 1692 , et battit le
roi Guillaume à Nerwinde en 1693. Peu
de journées furent plus meurtrières : il y
eut environ 20,000 morts, dont au moins
la moitié de Français. C'est à cette occa-
sion qu'on dit qu'il fallait chanter plutôt
un De profiindis qu'un Te Deum. Les
Français avaient été repoussés plusieurfi
fois à la droite et à la gauche des alliés
fortement retranchés ; mais le curé de
Laer , indigné de ce que les troupes du
prince d'Orange avaient exercé quelque
pillage chez lui, indiqua au maréchal un
endroit oiî le retranchement n'était pas
achevé, et qui était masqué par des abat-
lis : une nouvelle attaque décida la vic-
toire. Après la victoire de Nerwinde , il
écrivit à Louis XIV... « Vos ennemis y ont
» fait des merveilles, vos troupes encore
I) mieux. Pour moi , sire, je n'ai d'autre
» mérite que d'avoir exécuté vos ordres.
» Vous m'avez dit de prendre une ville et
LU Y 03
» de donner bataille; je l'ai prise, et je
j» l'ai gagnée... » Le maréchal de Luxem-
bourg termina sa carrière par la longue
marche qu'il fit , en présence des enne-
mis , depuis Vignamont jusqu'à l'Escaut ,
près de Tournai. Il mourut l'année d'a-
près en 16D5, à 67 ans, regretté comme le
plus grand général qu'eut alors la France.
Sa vie n'avait pas toujours été édifiante ;
ses écarts allèrent jusqu'à donner deux fois
lieu comme on l'a vu à une accusation de
magie , fondée en partie sur des liaisons
et des sociétés peu dignes de lui , et cela
dans un siècle où ces sortes d'accusations
n'étaient pas légèrement reçues > surtout
à l'égard d'un homme tel que lui. Sa mort
(ut très chrétienne. Le père Bourdaloue ,
qui l'assista dans ses derniers niomens ,
dit : « Je n'ai pas vécu comme lui, mais
» je voudrais bien mourir comme lui. »
On imprima à Cologne , en 1695 , in-12 ,
une satire contre la France et contre lui,
intitulée : Le Maréchal de Luxembourg
au lit de la mort, tragi-comédie en 5 ac-
tes et en prose. Ce guerrier est bien plus
favorablement dépeint dans Vllistoire de
lamaison de Montmorenci par M. Desor-
meaux , et par le compilateur Manuel
dans son An^iée française ; mais il faut se
tenir en garde contre les panégyriques
et contre les satires : la vérité de l'his-
toire souffre également des uns et des
autres. Son Oraison funèbre^ prononcée
par le P. La Rue a été imprimée à Paris
en 1695, in-i".
LIJYCREIV(Jeaiv), graveur hollandais.
On remarque dans ses ouvrages un feu ,
une imagination et une facilité admira-
bles. Son œuvre est considérable et fort
estimé. Il était né à Amsterdam en 1G49 ,
et il mourut en 1712. On estime sa Bible
en figures j imprimée dans cette ville en
1732, in-fol. ; son Théâtre des martyrs, en
lis planches, m-.'i."', mériterait également
des éloges, si, par un fanatisme aussi ab-
surde que dégoûtant , l'auteur n'avait as-
socié aux vrais martyrs les enthousiastes
dogmatisans et séditieux , que le glaive
de la justice a immolés au repos des états,
plus encore qu'à la conservation de la
vraie foi. « Voilà , dit un auteur, où en
» sont réduites les sectes. Convaincues de
» la nouveauté de leur existence, elles
» compulsent les annales du délire et de
» la sédition , pour se donner une appa-
» rence de continuité et de succession. »
( Voxjez JURIEU. ) — Il y a eu un Gaspauu
LUYCKEN, dont ont voit de beaux dessins
dans la Bible de Weigel. Voy. ce nom.
7 LUZ
LU YNES ( Paul d'ALDERT de ) , cardi-
nal et archevêque de Sens, né à Versailles
en 1705 , est un des prélats qui , pendant
le 18' siècle , ont le plus honoré l'église
de France par leur zèle et leurs lumières.
Formé par les leçons et les exemples de
Fénélon , il a pendant toute sa vie fait
éclater les fruits d'une si avantageuse in-
stitution. Rien n'égalait le soin avec le-
quel il veillait sur la pureté de la doctrine,
et la promptitude avec laquelle il repous-
sait les erreurs qui menaçaient d infecter
son peuple. Assistant un jour à un ser-
mon où l'on avait glissé quelques opi-
nions favorites de la secte qui rougit de
son nom, il imposa silence au prédicateur,
le fit descendre de la chaire , y monta
lui-même , et réfuta l'erreur avec autant
d'éloquence que d'exactitude théologique.
Il mourut à Sens le 23 janvier 1788 , à
1 âge de 83 ans, regretté des pauvres dont
il était le père , et de son clergé , dont
il était le modèle. L'abbé Le Gris a fait sou
Eloge funèbre.
LUYIVES. Voxjez ALBERT.
LUYTS (Jean ) , philosophe et astro-
nome, né dans la Nord-Hollande en 16l)u ,
fut professeur de physique et de mathé-
matiques à Utrecht , depuis 1677 jusqu'à
sa mort, arrivée le 12 mars 1721. lia don-
né : I Astronomica inslitulio , Ulrechl,
1689, in-4°. Il y rejette le système de Co-
pernic. On y voit un grand nombre d'ob-
servations astronomiques , curieuses et
utiles , expliquées d'une manière laconi-
que, alliée à beaucoup de clarté. | Intro-
ductio ad geographiam novam etveterem.
avec beaucoup de cartes, 1692, in-i°, es-
timée.
LUZERNE (cardinal de la ). rayez LA-
LUZERNE.
LUZIGAAN (GoY de) , fils de Hugues
de Luzignan, d'une des plus ancieimcs
maisons de France, fit le voyage d'outre-
mer. Il épousa Sybille, fille ainée d'A-
mauri , roi d'3 Jérusalem. Par ce mariage,
il acquit le royaume en son nom, et le
reperdit en 1187, lorsque la ville se rendit
à Saladin. Luzignan ne conserva que le
litre de roi de Jérusalem, qu'il vendit
bientôt à Richard, roi d'Angleterre, pour
l'ile de Chypre. Il y prit la qualité de roi,
et y mourut en 1194. Sa maison conserva
cette ile jusqu'en 1475. Amauri de Luzi-
gnan , son frère , lui succéda. Au reste ,
celte famille tire son nom de la petite
ville de Luzignan en Poitou, dont le châ-
teau passait autrefois pour imprenable,
parce que le vulgaire croyait qu'il avait
54
LYC
638
LYC
été bâti par une fée moitié femme, moitié
serpent.
LYCAMBE. Voyez ARCHILOQUE.
LYCOPimON, lils de Périandre, roi de
Côrinthe, né vers l'an G28 avant J.-C, n'a-
vait que 17 ans lorsque son père tua Mé-
lisse sa mère. Proclus, son aïeul maternel,
roi d'Epidaure, le fit venir à sa cour avec
son frère nommé Cypsèle , âgé de 48 ans,
et les renvoya quelque temps après à leur
pèie , en leur disant : Souvenez-vous qui
a tué votre mère. Cette parole fit une telle
impression sur Lycophron, qu'étant de
retour à Côrinthe, il s'obstina à ne point
vouloir parler à son père. Périandre in-
digné l'envoya à Corcyre (aujourd'hui
Corfou) , et l'y laissa sans songer à lui.
Dans la suite , se sentant accablé des in-
lirmités de la vieillesse , et voyant son
autre fils incapable de régner, il envoya
offrir à Lycophron son sceptre et sa cou-
ronne ; mais le jeune prince dédaigna
même de parler au messager. Sa sœur ,
qui se rendit ensuite auprès de lui pour
♦àcher de le gagner , n'en obtint pas da-
vantage. Enfin , on lui envoya proposer
de venir régner à Côrinthe , et que son
père irait régner à Corfou. 11 accepta ces
conditions; mais les Corcyriens le tuè-
rent, pour prévenir cet échange qui ne
leur plaisait pas.
LYCOPHRON, fameux poêle et gram-
mairien grec, natif de Chalcide dans l'Ile
d'Eubée, vivait vers l'an 504 avant Jé-
sus-Christ, et fut tué d'xm coup de flèche,
selon Ovide. Suidas a conservé les titres
de 20 tragédies de ce poète. Il ne nous
reste de lui qu'un poème intitulé Cassan-
dre ; mais il est si obscur, qu'il fit donner
à son auteur le nom de Ténébreux. C'est
une suite de prédictions qu'il suppose
avoir été faites par Cassandre, fille de
Priam. La plupart ne méritent pas la
peine que les savans ont prise pour les
expliquer. Porter a donné une édition de
ce poème, avec une version et des notes,
Oxford , 1C97; et elle a été réimprimée en
1702, in-fol. Lycophron était un des poètes
de la Pléiade , imaginée sous Ptolémée
Philadelphe.
LYCOïUS, fameuse courtisane du temps
d'Auguste, est ainsi nommée par Virgile
dans sa dixième égiogue. Le poète y con
sole son ami Cornélius Gallus, de ce qu'elle
lui préférait Marc-Antoine. Cette courti-
sane suivait le général dans un équipage
magnifique, et ne le quittait jamais,
même au milieu des armées. Cléopâtre la
•upplanla.
LYCOSTnE\'ES, en allemand WOLP-
FHART ( Conrad) , né l'an iol8, à Ruf-
fach, dans la Haute- Alsace , se rendit ha-
bile dans les langues et dans les sciences,
II fut ministre , et professeur de logique
et des langues à Bàle, où il mourut en
loCl. n fut paralytique les sept dernières
années de sa vie. On a de lui : | Chroni^
con prodiffiorum ^Bèlc, 1557, in-fol. : | De
mtdierum prœclarè dictis et factis;
I Compendium bibliothecœ Gesnerij 1557,
in-/».° ; I des Commentaires sur Pline le
Jeune; | Jpophlhegmata^ 1614, in-8°. Ce
fut lui qui commença le Theatrum vifcB
humaîiœ^ publié et achevé par Théodore
Zwinger, son gendre. Cette compilation
forme 8 volumes in-fol. de l'édition de
Lyon, 1656.
'lYCURGUE, législateur des Lacédé-
moniens, était, dit on , lils d'Eunome,
roi de Sparte, et frère de Polydecte , qui
régna après son père. Après la mort de
Polydecte, sa veuve offrit la couronne à
Lycurgue, s'engageant de faire avorter
l'enfant dont elle était grosse, pourvu qu'il
voulût l'épouser ; mais Lycurgue refusa
ces offres abominables. Content delà qua-
lité de tuteur de son neveu Charilaiis , il
lui remit le gouvernement lorsqu'il eut
atteint l'âge de majorité, l'an 870 avant
Jésus-Christ. Soit qu'il se repentit de cette
générosité , soit qu'on lui attribuât une
inconstance qu'il n'eut pas, on l'accusa
de vouloir usurper la souveraineté. Il
quitta sa patrie et passa en Crète, renûih-
ince par ses lois dures et austères;* il voit
la magniticencc de l'Asie, et de là se rend
eu Egypte. De retour de ses voyages,
Lycurgue donna aux Lacédémonicns des
lois que les uns élèvent jusqu'aux nues ,
et que les autres traitent de barbares. Les
plus instruits doutent que ces lois soient
de Lycurgue, et ne sont point persuadés
de tout ce qu'on raconte de ce philoso-
phe. Plutarque , dans l'Introduction à la
vie de Lycurgue , où les historiens mo-
dernes ont pnisé presque tous les faits
qu'ils attribuent à ce législateur, dit (trad.
d'Amyot ) : « On ne sauroit du tout rien
» dire de Lycurgus, qui établit les lois des
» Lacédémonicns, en quoi il n'y ait quel-
» que diversité entre les historiens... mais
» moins encore que toute autre choseï
T> s'accordent-ils du temps auquel il a|
n vécu. » Il termine ce paragrapl;ie , qu'il
faut lire en entier, par ces termes : « Mais
n toutefois , encore qu'il y ait tant de di-
» versité entre les historiens, nous ne
T. laisserons pas pour cela de recueillir et
LYC fi:
» metlre par escript ce que l'on trouve de
» Wi es anciennes hisloires, en élisant les
» choses où il y a moins de contradiction. »
Par cette dernière phrase , il avoue de
bonne foi qu'il aime mieux risquer de
transcrire des faits peu certains que de
ne rien dire sur ce personnage. Si l'on
ajoute à ce témoignage de Plutarque, que
Lycuigue, qui a vécu dans des temps très
reculés (puisque Xénophon prétend qu'il
existait du temps desHéraclides), n'a rien
laissé par écrit chez une nation où l'igno-
rance était regardée comme une vertu
méritoire, où il ne s'est trouvé aucun
historien, où le séjour des étrangers était
fixé à uri temps très court par la loi ap-
pelée Xé7iélasie^ dès lors il sera évident
que , malgré l'apologie que Plutarque a
faite de ce personnage , il est fort incer-
tain qu'il soit seul l'auteur du système de
législation qu'on lui attribue. Mais en l'en
supposant l'auteur, comme on doit juger
de la bonté des causes de cette nature ,
1° par leurs effets nécessaires sur le coeur
humain , 2" par la confirmation de ces
effets d'après le rapport de l'histoire , on
trouvera, en suivant celte règle, que la
législation de Sparte n'a produit l'admi-
ration des anciens et des modernes , que
dans l'opinion encore barbare et sauvage
où ils étaient, que toute action forte, fùt-
elle contraire aux premières lois de l'é-
quité et de l'humanité , était une action
vertueuse. Il est reconnu généralement
u'il a eu l'intention formelle , 1° d'aug-
iCnler la force naturelle des Spartiates ,
r la force artilicicUe des institutions
iîitaires ; 2° de perpétuer l'ignorance la
lus profonde chez ce peuple, en proscri-
anl de l'éducation les sciences et les arts,
îcepté seulement la musique guerrière ;
:e sorte que dans ces temps prétendus
ureux, où ses lois étaient , dit-on , fidè-
lement observées, aucun Spartiate ne sa-
jvait lire; ce qui d'ailleurs leur était
nutile, puisque rien n'était écrit, pas
Ttiême les lois de la république; 5° d'en-
retenir par toute sorte de moyens la fé-
ocité et même la cruauté dans l'âme des
^partiales, entre autres par l'usage de ces
ombals entre les enfans , où ii*à se mas-
acraient les uns les autres ; par les fusti-
ations cruelles des enfans devant l'autel
le Diane Orthia , et surtout par les bar-
)arics qu'il leur permit d'exercer contre
es Hôtes : car Aristote et Platon assurent
ue , pour empêcher la trop grande mul-
iplication do ces malheureux esclaves ,
, clablil l'affreuse coutume que les jeunes
>9 LYC
Spartiates iraient se mettre la nuit en
embuscade pour en tuer un certain nom-
bre; ce qui était véritablement une bou-
cherie, puisqu'il était défendu aux Ilotes
d'avoir et encore moins de porter des
armes en temps de paix ; k° de se servir
du libertinage, pour empêcher la pudeur,
la chasteté , l'union conjugale , d'adoucir
les mœurs. D'après cet exposé, que même
les admirateurs de Lycurgue et des Spar-
tiates ne peuvent révoquer en doute , on
laisse à juger si une législation dont le
but est d'augmenter chez un peuple la
force , l'ignorance , la cruauté, le liberti-
nage, et, par une suite nécessaire, l'or-
gueil, l'avidité, l'injustice ; en un mot,
dont le but est de former une troupe de
soldats igtiorans , cruels et sans mœurs ,
pour la faire servir à la désolation des
laborieux cultivateurs et des peuples qui
l'avoisinent, peut être un ouvrage capa-
ble d'immortaliser son auteur , et si elle
mérite les éloges que lui prodiguent en-
core des hommes qui prétendent se con-
naître en législation, tels que Montes-
quieu , et l'abbé Gourcy dans un amphi-
gourique Eloge philosophique et politique
de Lycurgue^ et l'abbé Barthélémy dans
son Voyage d'Anachar&is. L'auteur de
la Félicité publique^ qxioique ennemi
forcené du christianisme, montre com-
bien les républiques chrétiennes les moins
bien constituées sont plus heureuses que
les Lacédémoniens, les Athéniens, et tous
ces anciens peuples crus libres au sein de
la tyrannie. Cependant Lycurgue, s'il faut
croire ce qu'on en raconte, regardait ses
lois comme le fruit de la plus sublime sa-
gesse. Pour engager les Lacédémoniens à
les observer inviolablemenl , il leur fit
promettre avec serment de n'y rien chan-
ger jusqu'à sonretour. Il s'en alla ensuite
dans rîle de Crète , où il se donna la mort,
après avoir ordonné que l'on jetât ses
cendres dans la mer. Il craignait que si
on rapportait son corps à Sparte, les La-
cédémoniens ne crussent être absous de
leur serment. On voit dans tous ces an-
ciens sages des traits éclatans de folie ,
presque toujours produits par la vanité
et l'égoïsme. Lycurgue distingua les Spar'
tiates^ ou nobles , du reste de la nation ,
qu'il fit appeler Lacédémoniens. 11 fit un
nouveau partage des terres dont 50 mille
lots furent pour ces derniers, et 9000 pour
les Spartiates. Ce changement causa des
émeutes dans l'une desquelles on lui creva
un œil d'un coup de bâton. On lui livra
le coupable ; mais Lycurgue ayant besoin
LYC C
de partisans , au lieu de lui faire aucun
mal, le reçut chez lui, l'instruisit dans les
sciences, et le prit sous sa protection.
f'oyez GOLLIUS, LUCIEN, ZENON, SO-
LON.
LYCIJRGUE , orateur athénien , con-
temporain de Démostliènes , eut l'inten-
dance du trésor public, fut chargé du
soin de la police , et l'exerça avec beau-
coup de sévérité. Il chassa de la ville
tous les malfaiteurs , cl tint un registre
exact de tout ce qu'il fit pendant son ad-
ministration. Lorsqu'il la quitta, il fit
attacher ce registre à une colonne , afin
que chacun eût la liberté d'en faire la
censure. Dans sa dernière maladie, il se
lit porter au sénat pour rendre compte
de ses actions ; et, après y avoir confondu
le seul accusateur qui se présenta , il se
fit reporter chez lui , où il expira bientôt
après, vers l'an 3S6 avant J.-C. Lycurgue
était du nombre des 30 orateurs que les
Athéniens refusèrent de donner à Alexan-
dre. Ce fut lui qui , voyant le philosophe
Xénocrate conduit en prison pour n'avoir
pas payé le tribut qu'on exigeait des
étrangers , le délivra, et y fit mettre à sa
place le fermier qui avait fait traiter si
durement un homme de lettres. Action
souvent louée, mais qui dans le fond était
une violence et une injustice , puisqu'il
n'y avait aucune loi qui exceptât de ce tri-
but les gens de lettres. Les Aides impri-
mèrent à Venise en 1513, en 2 volumes
in-folio, un recueil des UaraTigues de
jjlusieurs anciens orateurs grecs , parmi
lesquelles se trouvent celles de Lycurgue.
M. l'abbé Auger les a traduites en 1785 ,
Paris, 1 volume in-8°. On distingue celle
qui regarde un citoyen d'Athènes , nom-
mé LéocratCj qui avait abandonné sa
patrie dans le malheur , après la bataille
de Chéronée , et qui y rentra lorsque le
péril était passé. L'orateur demande qu'il
soit puni de mort comme un lâche et un
traître.
LYCUS, l'un des généraux de Lysi-
machus, célèbre parmi les successeurs
d'Alexandre le Grand , se rendit maître
d'Ephèse par le moyen d'Andron, chef de
corsaires , qu'il gagna à force d'argent.
Andron introduisit dans la ville quelques
soldats de Lycus, comme s'ils eussent été
des prisonniers, mais avec des armes
cachées. Dès qu'ils furent entrés dans la
place , ils tuèrent ceux qui faisaient la
garde aux portes, et donnèrent en même
temps le signal aux troupes de Lycus, les-
quelles s'emparèrent de la place, et firent
hO LYN
prisonnier Enète, qui en était gouver-
neur. Frontin a placé cette histoire dans
ses Stratagèmes.
* LYDGATE ( Jean ) , poète anglais ,
moine de Saint -Edmond's -Bury , né en
1580 , fiorissait sous le règne de Henri VL
Il fut ua des premiers qui, dans un siècle
encore barbare, commencèrent à intro-
duire le bon goût dans la poésie anglaise.
Il était contemporain et disciple du fa-
meux Chaucer, et fort versé dans la phi-^
losophie , les mathématiques et la théolo-
gie ; on cite de lui des Eglogues, des Odes
et des Satires, un poème intitulé la Chul6
des Princes , et quelques écrits en prose.
Il mourut en 1440 , à l'âge de 60 ans.
LYDI AT (Thomas), mathématicien an-
glais, né à Okerton, dans le comté d'Ox-
ford, en 1572, mort en 16/».6, eut le soit
de plusieurs savans. Il traîna une vie la-
borieuse dans l'indigence. Il fut long-
temps en prison pour dettes, et lorsqu'il
eut obtenu , sur la fin de ses jours , un
petit bénéfice, il fut persécuté par les
parlementaires, parce qu'il était attaché
au parti royal. Il a laissé plusieurs ou-
vrages en latin sur des matières de chro-
nologie , de physique et d'histoire. Les
principaux sont : | De variis annorum
formis , Londres , 1605, in-8°, contre Cla-
viusetScaliger. Ce dernier ayant répondu
avec beaucoup d'emportement, Lydiat lit
une Apologie à.Q son ouvrage, imprimée
en 1607 ; | De V origine des fontaines, 1605,
in-8° ; | plusieurs Traités astronomiques
et physiques, sur la nature du ciel et des
élémens , sur le mouvement des astres ,
sur le flux et le reflux , etc.
LYDIUS (Jacques), fils de Balthasar,
ministre protestant à Dordrecht, et auteur
de quelques mauvais ouvrages de contro-
verse , succéda à son père dans le minis-
tère , et se fît connaître au 17' siècle danî
la république des lettres par plusieurs li-
vres : I Sermonum connubialium libii
duo, in-4°, 1643. C'est un traité de diffé-
rens usages des nations dans la manière
de se marier. | De re militari, in-i", 1598,
publié par Van-Thil, qui l'enrichit de
plusieurs remarques; | Agonostica sa^
cra, etc. Rotterdam, 1657 , in-12 ; | BeU
gium g loriosu7n .Dordrecht, 1668, in-i2.
LYIVD ou LYNDE (Humpurey), cheva-
lier anglais, né à Londres, en 1578, mort
l'an 1656 , pubiia deux Traités de contro-
verse estimés, dit-on, de ses compatrio-
tes, et traduits en français par Jean de la
Montagne. L'un traite de la Foie sûre»
et l'autre de la Foie égarée.
LYO
641
LYS
LYNDSAY. VCjez LINDSAY.
LYNDWOODE (Guillaume de). Voy.
GUILLAUME.
LYOj\iVET (Pierre), naturalisle et
graveur, secrétaire des chiffres des états-
{jénéraux des Provinces-Unies , naquit à
I^îaestricht.le 21 juillet 1707 : il apprit très
l'eunehuit langues tant anciennes que mo-
dernes, les sciences exactes , la sculpture,
le dessin, et fil dans chacune de ces parties
des progrès remarquables. Il devint mem-
bre de la société royale de Londres , des
académies de Rouen et de Berlin, de l'a-
cadémie impériale de Pétersbourg , de la
«ociété des sciences à Harlem. Dans les
momens de loisir que lui offrait sa place
de traducteur-juré pour le latin et le fran-
çais, et de secrétaire des chiffres, il dessi-
nait des insectes , et devint en peu de
temps un des premiers entomologistes de
yEurcpe. Ami de Trembley , qui venait
de découvrir que le polype se reprodui-
sait par bouture ou par division, il l'aida
dans l'ouvrage où devait être exposée
cette découverte importante, et dessi-
nait les ligures que gravait ensuite le cé-
lèbre Vandelaar : mais cet artiste appor-
tant des délais fréquens à son opération,
Lyonnet essaya de la suppléer, et après
avoir reyu de lui une heure de leçon , il
grava les huit dernières planches avec un
succès qui tenait du prodige. Il mourut à
la Haye, le 10 janvier 1789, dans la quatre-
vingt-deuxième année de son âge. Ses
travaux sur les insectes lui ont mérrté
une place distinguée parmi les amateurs
de l'histoire naturelle. Son Traité anato-
■ mtque de la chenille qui 7-onge le bois de
saule {Phalœna cossus)^ la Haye, 1760 ,
un vol. in-4°, avec 18 planches , gravées
par l'auteur, suppose un observateur
aussi exact que patient. Quoique ce Traité
ne regarde directement que cette espèce
d'insectes, il est fait avec tant de soin,
l'auteur y a mis tant d'attention et de re-
cherches, qu'il peut diriger l'amateur qui
se livrerait à l'étude des chenilles en gé-
néral. On peut compter sur l'exactitude
des gravures, qui d'ailleurs sont très bel-
les ; l'auteur a gravé sur les corps mêmes,
la loupe à la main. Il a traduit en français
la Théologie des insectes ^j)a.r Lesser. Au
mérite des talens et de l'application il
joignait la sagesse des principes, qu'il
amenait et déduisait d'une manière par-
ticulièrement satisfaisante. On regrette
que la mort l'ait empêché de mettre au
jour un nouvel ouvrage qu'il se propo-
sait de publier sur les insectes. On espé-
rait que son parent, M. Croiset, secrétaire
des postes de Hollande , à qui il l'a légué ,
n'en priverait pas le public, et ferait gra-
ver le reste des planches qui y manquent
encore ; mais l'on s'est trompé dans cette
attente. M. Marron a donné une Notice
sur Lyonnet dans le Magasin encyclopé-
dique^ 1795. tom. 5, pag. 89.
LYRE (Nicolas de ). Foyez NICOLAS
de Lyre.
LYSrVNDRE , général des Lacédémo-
niens pendant la guerre contre Athènes,
détacha Ephèse du parti des Athéniens «
et fit alliance avec Cyrus le Jeune , rci
de Perse. Fort du secours de ce prince, il
livra à jïlgos-Potamos un combat naval
aux Athéniens, l'an 40o avant J.-C, défit
leur flotte , tua 5,000 hommes , se rendit
maître de diverses villes, et alla attaquer
Athènes. Cette ville, pressée par terre et
par mer , se vit contrainte de se rendre
l'année suivante. La paix ne lui fut accor-
dée qu'à condition qu'on démolirait les
fortifications du Pirée ; qu'on livrerait
toutes les galères, à la réserve de douze ;
que les villes qui lui payaient tribut , se-
raient affranchies ; que les bannis seraient
rappelés, et qu'elle ne ferait plus la
guerre que sous les ordres de Lacédé-
mone. La démocratie fut détruite, et toute
l'autorité remise entr e les mains de trente
archontes. C'est ainsi que finit la guerre
du Péloponèse, après avoir duré 27 ans.
Le vainqueur alla soumettre ensuite l'île
de Samos , alliée d'Athènes , et retourna
triomphant à Sparte avec des richesses
immenses, fruit de ses conquêtes. Son
ambition n'était pas satisfaite ; il cliercha
à s'emparer de la couronne , mais moins
en tyran qu'en politique. Il décria la cou-
tume d'hériter du trône, comme un usage
barbare , insinuant qu'il était plus avan-
tageux de ne déférer la royauté qu'au
mérite : ce qui serait bien vrai, si tout un
peuple pouvait s'entendre, sans trouble
et sans erreur , sur le choix. Après avoir
tenté en vain de faire parler en sa faveur
les oracles de Delphes , de Dodone et de
Jupiter Ammon, il fut obligé de renonce?
à ses prétentions. La guerre s'étant ral-
lumée entre les Lacédémoniens et les
Athéniens, Lysandre fut un des chefs
qu'on leur opposa. Il fut tué dans une ba-
taille l'an 395 avant J.-C. Les Spartiates
furent délivrés parsamorld'un ambitieux
pour qui l'amour de la patrie, la religion
du serment, les traités, l'honneur, n'é-
talent que de vains noms. Comme on lui
reprochait qu'il faisait des choses indignei
LYS
642
LYS
d'Hercule, de qui les Lacédémonlens le
firent descendre par flatterie : Il fautj
dit-il, coudre la peau du renai'd où man-
que celle du lion ^ faisant allusion au lion
d'Hercule : maxime digne d'un tyran
fourbe et hypocrite. Il disait qu'on amuse
des enfans avec des osselets , et les hom-
mes avec des paroles. Cela n'est que Irop
vrai ; mais si ceux qui sont amusés sont
des sols , ceux qui les amusent sont de
méprisables imposteurs. La vérités ajou-
tait-il, vaut assurément mieux que le
mensonge ; mais il faut se servir de l'un
et de Vautre dans l'occasion ; maxime que
Machiavel a adoptée pour une de ses plus
favorites.
LYSCH ANDEU ou LYSC ANDER ( Clau-
de-Cristophorsex ) , historiographe du
roi de Danemarck Chrisliern IV, né en
1557 et mort en i623, n'a guère mérité
cette place que par l'Abrégé des histoires
danoises^ depuis le commencement du
monde jusqu'à nos jours ^ Copenhague,
1662, in -fol., en danois. Le titre seul
montre que l'auteur était peu judicieux.
Toi'fœus a réfuté cet abrégé ; mais il n'en
valait pas la peine. On a encore du même
auteur [ une Chronique du Groenland en
vers danois, Copenhague, 1608, in -8°;
I Electionis Christiani Illhistoria^ ibid.
1623. On peut consulter poin- plus de dé-
tails le Dictionnaire des savans danois
par J, Worm , et les Monumenta inedita
de Westphalen , tom. 3.
LYSERUS ( PoLYCARPE ) naquit à Wi-
nendeen, dans le pays de Wittenberg ,
en 1S52. Le duc de Saxe, qui l'avait fait
élever à ses dépens dans le collège de
Tubingen, l'appela en 1577 pour être mi-
nistre de l'église de Wittenberg. Lyserus
signa, l'un des premiers, le livre delà
Concorde^ et fut député, avec Jacques-
André , pour le faire signer aux théolo-
giens et aux ministre de l'électorat de
Saxe. Il mourut à Dresde, où il était mi-
nistre, en 1610, à 58 ans. Beaucoup de
querelles , dont il parait avoir été ama-
teur, ne l'empêchèrent pas de composer
un grand nombre d'ouvrages en latin et
ea allemand. Les principaux sont : | Ex-
positio in Genesim, en six parties in-4°,
depuis 1604 jusqu'en 1609 ; | Schola ba-
bylonica^ 1609, in-i"; | Colossus babylo-
nicus^ 1608, in -4°. L'auteur y donne,
sous ces deux titres bizarres, un com-
mentaire sur \es deux premiers chapitres
de Daniel. | Un Commentaire sur les
douze petits prophètes , publié à Leipsick
en 1609, 1 vol. in -4°, par Polycaipc
Lyserus, son pclil-iils; | une foule de
livres de théologie et de controverso-,
remplis de préjugés de secte; | l'édition
de y Histoire des Jésuites^ de l'ex-jésuile
et apostat Hasenmuller , qu'il publia après
la mort de celui-ci sous ce titre : Historia
Ordinis Jesuiticij, de Societatis Jesu auc-
tore^ nomine^ gradibus^ incrementis ,
ab Elia Ilasenmullero^cum duplici prœ.-
fatione Polycarpi Lyseri^ Francfort, 1594
et 1606, in-4°. Le jésuite Gretscr réfuta
celle prétendue histoire, et Lyserus la
défendit dans son Strena ad Gretserum
pro honorario ejus^ in-S", 1607. Los deux
auteurs ne s'épargnent point les injures.
C'était le style ordinaire entre les savaus
de ce temps-là, et il n'est pas encore hors
de mode.
LYSEUUS ( Jean ) , docteur de la con-
fession d'Augsbourg , de la même famille
que le précédent, fut l'Apôtre do la
polygamie dans le 17*^ siècle. Sa manie
pour cette erreur alla si loin, qu'il con-
suma ses biens et sa vie pour prouver
que non seulement la pluralité des fem-
mes est permise , mais qu'elle est même
commandée en certains cas. Il voyagea
avec assez d'incommodité en Allemagne,
en Danemarck, en Suède, en Angleterre,
en Italie et en France , pour rechercher
dans les bibliothèques de quoi appuyer
son opinion, et pour lâcher de l'intro-
duire dans quelques pays. Son entête-
ment sur la pluralité des femmes surpre-
nait d'autant plus, qu'une seule l'aurail
fort embarrassé, suivant Bayle. Après
bien des courses inutiles , il crut pouvoir
se fixer en France , et alla demeurer chei
le docteur Masius, ministre de l'envoyé
de Danemarck. Il se flatta ensuite de ren-
dre sa fortune meilleure à la cour, par le
jeu des échecs qu'il entendait parfaite-
ment, et s'établit à Versailles; car tous
ces réformateurs de la morale chrétienno
savent mieux jouer que raisonner. Re-
poussé et méprisé par tous les gens sen-
sés, et étant tombé malade de dépit, il
voulut revenir à pied à Paris. Cette fa-
tigue augmenta tellement son mal , qu'il
mourut dans une maison sur la route , en
1684. On a de lui, sous des noms em-
pruntés, un grand nombre de livres en
faveur de la polygamie. Le plus considé-
rable est intitulé : Polygamia Trium-
phatrix^ in-4°, 1682 , à Amsterdam. Brun-
sinanus , ministre à Copenhague , a réfuté
cet ouvrage par un livre intitulé : Polyga-
mia triumphata . 1689 , in -8°. On a du
même auteur un autre livre contre Lyse-
LYS
645
LYS
rus intitulé : Monogamia Victrix , 1689 ,
in-8°. On trouva dans les manuscrits de
Lyserus une liste curieuse de tous les
polygames de son siècle. Il est à croire
que celte liste aurait été plus longue si
l'auteur y avait fait entrer tous ceux qui,
n'ayant qu'une femme, vivent avec plu-
sieurs. Les bons esprits n'ont vu dans son
égarement que l'effet naturel delà luxure,
qui , semblable à l'avarice^ dit Montes-
quieu, plus elle a, plus elle veut avoir.
11 est démontré d'ailleurs qu'elle détruit
la population , et que les pays où elle a
lieu (toutes choses étant d'ailleurs égales),
sont déserts , en comparaison des autres.
LYSIAS , célèbre orateur grec , naquit
à Syracuse l'an 459 avant J.-C, et fut
mené à Athènes par Cépbales son père ,
qui l'y fit élever avec soin. On le regarde
communément comme le plus élégant , le
plus gracieux et le plus simple des ora-
teurs grecs. Il s'est exercé sur des sujets
bien peu favorables à l'éloquence ; il ne
plaidait pas lui- même , mais composait
des plaidoyers pour les particuliers qui
avaient des procès , et ces plaidoyers rou-
lent presque tous sur de très petites
causes. La propriété et la clarté des ex-
pressions, un tour aisé et naturel, un
talent admirable pour la narration, une
prodigieuse sagacité, un tact exquis des
convenances, et par-dessus tout, la grâce
([u'on sent si bien et qu'on ne peut défi-
nir, forment le caractère distinctif de
Lysias. Un des principaux avantages
qu'on puisse retirer aujourd'hui de ses
discours , c'est la connaissance des mœurs
et des usages des Atliéniens. On rapporte
que Lysias, ayant donné un de ses plai-
doyers à lire à son adversaire dans l'Aréo-
page , cet homme lui dit : « La 1"^* fois que
«je l'ai lu, je l'ai trouvé bon; la 2*,
» moindre; la 5', mauvais. » Né bien.
répliqua Lysias, il est donc bon ; car on
ne le récite qu'une fois. Il mourut dans
un âge fort avancé, l'an 574 avant J.-C.
Nous avons de lui 32 Harangues et des
fragmens de quelques autres. Parmi les
diverses éditions qu'on en a données, on
dislingue celle de Taylor , in-4°, Londres,
liowyer , iT5^ , grœcè et latines et celle
de l'abbé Auger, en grec et en latin,
avec une nouvelle traduction française,
Paris, 1783,2 vol. in-8°. On les trouve
aussi dans le Recueil des orateurs grecs
d'Aide, in-fol. 1513, et de Henri Etienne,
in-fol. 1575.
LYSIAS (Claude ). F oyez CLAUDE.
LYSIMAClirS, disciple de Callisthè-
nes, l'un des capitaines d'Alexandre le
Grand, se rendit maître d'une partie de
la Thrace , après la mort de ce conqué-
rant, et y bâtit une ville de son nom l'an
509 avant J.-C. Il suivit le parti de Cas-
sandre et de Séleucus contre Antigone et
Démétrius ; et se trouva à la célèbre ba-
taille d'Ipsus l'an 301 avant J.-C. Lysi-
machus s'empara de la Macédoine , et y
régna dix ans; mais ayant fait mourir
son fils Agathocle et commis des cruautés
inouïes, les principaux de ses sujets l'a-
bandonnèrent. Il passa alors en Asie,
pour faire la guerre à Séleucus, qui leuf
avait donné retraite, et fut tué dans un
combat contre ce prince , l'an 282 avant
J.-C, à 74 ans. On ne reconnut son corps
sur le champ de bataille que par le moyen
d'un petit chien qui ne l'avait point aban-
donné.
LYSIMACnUS, Juif .parvint au sou-
verain pontificat de sa nation, l'an 204
avant J.-C, après avoir supplanté son
frère Ménélaiis, en payant une somme
d'argent que celui-ci n'avait pu fournir
au roi Antiochus Epiphanes. Les vio-
lences, les injustices et les sacrilèges sans
nombre qu'il commit pendant son gou-
vernement portèrent les Juifs , qui ne
pouvaient plus le souffrir, à s'en défaire
dès l'année suivante.
LYSIMACHUS, frère d'ApoUodore, en-
nemi déclaré des Juifs, eut le gouverne-
ment de Gaza. La grande jalousie qu'il
conçut contre son frère ( que le peuple et
les soldats aimaient et considéraient plus
que lui) le porta à le tuer en trahison , et
à livrer cette ville à Alexandre Jannée,
qui l'assiégeait.
LYSIPPE, très célèbre sculpteur grec,
natif de Sicyone , exerça en premier lieu
le métier de serrurier. 11 s'adonna en-
suite à la peinture , et la quitta pour se
livrer tout entier à la sculpture. Il avait
eu d'abord pour maître le Doryphore de
Polyclète ; mais dans la suite il étudia
uniquement la nature, qu'il rendit avec
tous ses charmes , et surtout avec beau-
coup de vérité. Il était contemporain d'A-
lexandre le Grand. C'était à lui et à Apet»
les seulement qu'il était permis de reprc^
senter ce conquérant. Lysippe a fait plu-
sieurs statues d'Alexandre, suivant ses
différens âges, une entre autres était
d'une beauté frappante, et l'empereur
Néron en faisait grand cas ; mais comme
elle n'était que de bronze , ce prince crut
que l'or en l'enrichissant la rendrait plus
belle. Cette nouvelle parure Hâta la statue
LYS
au lieu de l'orner ; on fut obligé de 1 oler,
ce qui dégrada sans douto beaucoup ce
chef-d'œuvre. Lysippe est celui de tous
les sculpteurs anciens qui a laissé le plus
d'ouvrages. On en comptait près de sLx
cents de son ciseau. Les plus connus sont
X Apollon de Tarente , de 40 coudées de
haut; la statue de Soc rate , celle d'un
tîomme sortant du bain, qu'Agrippa mit
à Rcme devant ses thermes •, Alexandre
encore enfant, et les vingt-cinq cavaliers
qui avaient perdu la vie au passage du
Granique. Il florissait vers l'an 364 avairt
Jésus-Christ.
LYS!S , philosophe pythagoricien , pré-
cepteur d'Epaminondas , est auteur , sui-
vant la plus comnr.une opinion , des Fcî's
dorés, que l'on attribue ordinairement à
Pythagore. Nous avons sous le nom de
LYT
Lysis une Lettre à Ilipparquc ^ dans
laquelle il lui reproche de divulguer les
secrets de Pythagore , leur maître com-
mun. Celle lettre est dans lés Opuscuhi
mythologica et philosophica de Thomas
Gale. On croit que Lysis vivait vers l'an
588 avant J.-C. Lysis était si fidèle à gar-
der sa parole, qu'un jour, dit-on, un de
ses amis , qui l'avait prié d'attendre à la
porte du temple de Junon tandis qu'il y
faisait sa prière , l'ayant oublié , et étant
sorti par une autre porte , Lysis demeura
à sa place jusqu'au lendemain, que son
ami se ressouvint de lui et vint le déga-
ger de sa parole. Il faut avouer que c'était
pousser un peu trop loin la délicatesse .
et que la vanité de se faire remarquer
y dut entrer pour quelque chose.
LYTTELTO\. rotjez. LITTLETON.
FI^ X)V SEPTI£JEE VOLUME.
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