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Full text of "Broye-lez-Pesmes, histoire - statistique - langage"

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in  2009  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/broyelezpesmeshiOOperruoft 


MEMOIRES 

■DU    LA 

SOCIÉTÉ  D'ÉMULATION 

D  U     DOUBS 
A 


^^° 

y   k 


BROYK-LEZ-PESMKS 


HISTOIRE  -  STATISTIQUE  -   LANGAGE 


M.  le  docteur  Ch.  PERRON. 


$éance  du   tS  décembre  1888. 


0        o 


VA  \ 


BROYE-LEZ-PESMES 


g  I.  -  VESTIGES  D'ANTIQUITÉ. 

Pays  d'avant-poste. 

Broye-lez-Pesmes,  en  Franche-Comté,  est  situé  au  con- 
Ûuenl  «le  deux  importantes  rivières,  la  Saône  et  l'Ognon, 
dans  un  angle  de  terrain  donl  les  côtés  extérieurs  conflnenl 
;i  droite  e1  à  gauche  le  duché  de  Bourgogne.  I>e  sorte  que  le 
territoire  de  cette  commune  pénètre  comme  un  coin  dans 
l'ancien  pays  des  Eduens  dont  il  est  séparéau  nord,  par  la 
Saône,  el  au  midi,  par  l'Ognon  (1). 

Comme  ces  deux  cours  d'eau  sonl  guéables  en  plusieurs 
endroits,  la  traversée  n'en  a  jamais  été  très  dangereuse. C'était 
comme  une  barrière  naturelle  pour  les  deux  pays.  En  ren- 
dant les  communications  difficiles,  cette  barrière  pouvait, 
jusqu'à  un  certain  point,  être  un  obstacle  pour  les  relations 
d'affaires,  mais  non  pour  des  in  airsion.  d'une  rive  à  l'au- 
tre, La  facilité  du  passage  des  deux  rivières  était  même  une 
invile  aux  agressions  entre  Eduens  et  Franc-Comtois. 

(1)  A  cet  égard,  la  plupart  de  nos  cartes  sonl  fautives.  Elles  indiquent 
mal  les  limites  de  la  Franche-Comté,  en  attribuant  à  cette  province  tes 
deux  rives  de  la  Saône  el  de  l'Ognon  Jusqu'au  confluenl  de  ces  deuj 
rivières. 


—  332  — 

Il  est  donc  à  présumer  (pie  les  champs  de  Broyé  mil  été 
le  théâtre  de  bien  des  luttes  sanglantes  el  de  plus  d'un 
exploit  guerrier  à  une  époque  où  l'esprit  de  conquête  e1  de 
rapine  prédominait  si  fort  sur  les  sentiments  d'humanité  el 
de  justice.  Car  c'est  par  ce  coin  de  terre  qu'on  pouvait  le  plus 
facilement  pénétrer  par  surprise  en  Séquanie. 

Je  ne  crois  pas  qu'avant  la  conquête  romaine,  on  ail  songé 
à  fortifier  les  gués  de  nos  rivières.  En  vertu  de  leur  caractère 
imprévoyant  et  de  leur  crânerie  traditionnelle,  les  Gaulois, 
dont  nous  sommes  les  fils,  étaient  plus  portés  à  conduire 
des  attaques  qu'à  se  garer  des  surprises.  Ils  estimaient 
qu'il  y  a  plus  de  gloire  à  surmonter  des  obstacles  qu'à  en 
accumuler  devant  ses  ennemis. 

La  stratégie  des  Romains  était  autre.  Ces  conquérants 
modèles  n'ont  donc  pas  manqué  d'établir  à  Broyé  un  double 
système  de  défense  sur  la  rive  droite  de  l'Ognon  el  sur  la 
rive  gauche  de  la  Saône. 

DÉFENSE    DES   PAS8AOE8  DE   L'OGNON. 

Il  y  a  trente  ou  quarante  ans,  le  ravage  do  eaux  courantes 
mit  a  découvert,  sur  la  rive  droite   de   l'Ognon,   presque  «'il 

face  de-  Chassey,  au  lieu  dit  redoute  <iu  Grand-Bruyant^  une 
doiii.ic  rangée  de  gros  pieux  espacés  d'un  mètne  environ  el 
planl  île  distance  les  uns  de-  autres,  suivant  le  court 

de  i.i  rivière,  il-  formaient  deux  lignes  droites  de  plus  de 
cent  pas  d'étendue  .  <•)  il-  avaient  dû  servir  a  soutenir  quel- 
que endiguemenl  destiné  a  fermer  le  passage  du  mie  en  cet 

e||   lloll. 

Aucune  trouvaille  archéologique  n'a  été  laite  jusqu'ici  qui 
■H-  indiquer  l'utilité  m  l'époque  de  «•«•  travail 
remarquable 

\  ,  eiie  époque  indi  terminée,  mais  déjà  lointaine,  puisque 

ol  de  i.,  vallée  <\<-  i  <  )g i  était  alors  de  trois  métros  plus 

que  le  nive  tu  du   ol  actuel,  les  belles  prairies, 


—  333  — 

qui  font  aujourd'hui  la  richasse  el  l'ornemenl  «lu  paj  -,  n'exis- 
taient pus.  A  la  place  d'un  pâturage  herbeux,  il  y  avait  une 
vaste  forêt  sillonnée  de  mortes..  Ces  mortes,  anciens  lits 
de  rivière,  formaient  de  nombreux  Uots  boisés,  désignés 
comme  îles  au  cadastre,  et  reconnaissantes  par  des  noues 
que  le  temps  n'a  pas  encore  comblées  0. 

Quand  les  eaux  de  l'Ognon  sont,  très  basses,  l<-  lit  «le  la 
rivière,  m  aval  de  l'endiguemenl  dont  nous  venons  «le  par- 
ler, paraît  établi  sur  un  fouillis  d'arbivs  de  toute  grosseur, 
couclit's  ou  renversés  les  ans  par  dessus  les  autres,  on  i<m^ 
ot  on  travers.  C'est  une  véritable  substructure  de  chênes  dix* 
huit  t'ois  séculaires,  à  demi  fossiles,  dont  quelques  rares 
tronçons  sont  encore  debout  (25, 

C'esl  la  constatation  de  ce  fait,  facile  à  vérifier,  qui  m'a 
permis  de  dire  tout  ;i  l'heure  que  le  niveau  du  sol  «'tait  de 
trois  mètres  au  moins  plus  bas  qu'il  n'est  à  présent. 

A  quoi  oo  bouleversement,  «pu  s'est  opéré  dans  un  temps 
(«ut  court,  doit-il  être  attribué? 

Est-il  lo  résultat  d'un  cataclysme  quelconque? 

A-t-il  été  produit  intentionnellement  ? 

do  dernier  sentiment  me  parait  préférable. 

On  peul  en  effet,  sans  invraisemblance,  rattacher  la 
destruction  de  cette  ancienne  forêt  a  des  mesures  de  sécurité 
pour  ceux  qui  occupaient  lo  pays.  \.r<  Romains  avaient  peur 
dos  forêts  profondes  :  Non  te  hoslem  vereri,  disaient-ils  à 
César,  sed  angustias  itineria  ei  magnitudinem  sylvarum, 
ils  no  craignaient  rien  tant  que  les  défilés  ot  le  silence  des 
grands  bois. 

Les  îlots  nombreux,  donl  .j'ai  parlé  plus  haut,  devaient  être, 
avant  cette  destruction,  dos  lieux  couverts  très  tacites  à 


(1)  Ou  connaît  trois  'le  cea  îles  en  amonl  de  Broyé,  au  dessus  'lu  gué 
'lii  le  Grand-Bruyant,  et  cinq  eu  aval,  à  l'embouchure  de  l'Ognon,  dans 

les  Imis  île  la  Vaine. 

(2)  11  serait  facile  d'en  extraire  île  belles  billes,  que  l'art  .le  nos  ébéniste 
pourrait  utiliser.  Mais  Broyé  est  un  paj  i  perdu  ! 


—  334  — 

défendre  ;  des  abris  où  un  ennemi  invisible  pouvait  attendre 
de  pied  ferme  les  assaillants,  et  se  rire  de  la  marche  serrée 
d'un  corps  de  troupe. 

Deux  de  ces  îlots  sont  appelés  îles  des  refeux  ;  n'est-ce  pas 
refeugs  qu'il  faudrait  écrire?  Car  il  est  à  présumer  que  plus 
d'une  fois  les  défenseurs  du  sol  ont  dû  y  chercher  un  abri  en 
s  y  réfugiant. 


Une  autre  fortification  paraît  avoir  été  établie  plus  bas  sur 
l'Ognon,  vers  l'emplacement  de  l'église  du  village.  C'est  ce 
que  les  anciens  noramaienl  la  forteresse  ou  le  château  du 
Fousset. 

Il  y  a  eu  là  certainement  des  constructions  h  l'embouchure 
delà  Régie  ft),  sur  une  roche  compacte  qui  dominait  les 
alentours,  gardant,  comme  un  poste  à  sentinelle,  I-'  passage 
de  la  rivière  guéable  eu  cri  endroit. 

Ou  a  retrouvé  des  dalles,  des  pilotis,  non  loin  du  lieu  dil 
i  c  de  la  tour. 

DÉFENSE    DBS    PASSAGES  DE   Uk   SAÔNE. 

Les  Romains  avaient  aussi  établi  sur  la  rive  gauche  de  la 
Saône,  au  port  Guerrin,  non  loin  du  port  Saint-Pierre,à  deux 
kilomètres  du  village,  un  cattettwm  ou  petil  fortin,  d'où  il 
était  facile  de  surveiller  au  loin,  en  aval  h  en  amont,  le  oours 
de  i.i  rh  ière  quiesl  peu  profonde  en  cet  endroit.  Ce  <-tixtfiiiin> 
pelé  .1  Broyé  le  Chatelot. 
une  ôminence  en  terre  d'environ  mille  pas  de  super- 
ficie ->  ;  ''il''  est  entourée  d'un  lai .  el  située 
en  '"Mit            i  onage  sablonneux  de  Sainl  Pierre  "ù  se 


.iiiu.nl  .i.'  l'Ognon. 

:  i..   .1  étendu  tutrtfoi  .  mai  i  II  i  onranl  en  •>  dé« 

h  ml  .1.  |  i  un.    (...)  Ii. 


—  335  — 

voyait  encore  au  siècle  dernier  une  petite  chapelle  attenante 
à  un  très  vaste  cimetière 

Ce  fortin  était  sans  doute  l'avancée  d'un  établissement 
militaire  plus  considérable  dont  nous  parlerons  plus  loin. 

A  la  vérité,  il  ne  reste  rien  des  constructions  ou  baraque- 
ments qui  auraient  abrité  un  corps  d'observation  ;  mais  à 
défaut  de  constructions,  il  y  a  des  vesiiges  évidents  du 
chemin  ou  de  la  voie  romaine  qui  y  aboutissait.  Un  chemin 
n'aurait  pas  eu  de  raison  d'être  s'il  n'avait  eu  un  groupe 
d'une  certaine  importance  ;i  desservir. 

Ce  chemin  est  connu  des  gens  du  village  sous  le  nom  de 
vie  de  Sauvigney.  Il  se  dirige  en  effet  de  l'emplacement  de 
Saint-Pierre  en  droite  ligne  sur  Sauvigney,  et  sans  doute 
bien  au-delà,  vers  Salins,  après  avoir  traversé  la  Rêsie  au 
gué  des  Laies.  La  chaussée  en  est  si  dure,  qu'elle  n'a  pu  être 
détruite  par  la  charrue,  et  qu'il  est  facile  encore  aujourd'hui 
d'en  suivre  la  direction  sur  une  distance  de  plusieurs  kilomè- 
tres. On  remarque  que,  sur  le  parcours  de  celle  voie  stra- 
tégique, dans  la  forêt  des  Chazeaux,  les  futaies  ne  seul  pas 
de  belle  venue,  et  le  taillis  y  reste  rabougri,  étouffé  par  les 
broussailles. 

Quoiqu'on  l'ait  dit,  ce  chemin  ne  figure  sur  aucune  des 
cartes  modernes  indiquant  le  réseau  des  voies  romaines  en 
Séquanie  (1).  C'est  certainement  une  lacune  imputable  à  ce 
que  nos  antiquaires  ont  négligé  d'explorer  l'intéressant  pays 
dont  nous  nous  occupons;  et  M.  Suchaux  fait  erreur  quand 
il  écrit  :  «  A  la  limite  orientale  du  territoire  de  Broyé,  entre 
»  cette  commune  et  celle  d'Aubigney,  vestiges  d'une  voie 


(1)  La  carte  dressée  et  donnée  comme  fragment  de  la  carte  théodosienne, 
par  Ed.  Clerc,  La  Franche-Comté  à  l'époque  romaine,  indique  fort  mal 
les  confins  de  la  Séquanie,  qui,  d'après  ce  document,  auraient  embrassé 
les  deux  rives  de  la  Saône  et  de  l'Ognon  jusqu'au  conlluent  de  ces  deux 
rivières.  En  réalité,  le  pays  Eduen  possédait  la  rive  droite  de  la  Saône  jus- 
qu'à l'embouchure  de  la  Vingeanne,  et  l'embouchure  de  l'Ognon  jusqu'à 
Chassey. 


—  336  — 

•mairie  qui  se  dirigeai!  du  Nord  au  Sud,  el  qui  paraîl 
»  avoir  été  La  ligne  Gallo-Romaine  de  Langres  à  Dammartin, 
i  laquelle  traversail  l'Ognon  entre  Pesmes  et  Broyé  M)  ». 

C'est  une  complète  erreur.  Au  lieu  d'aller  du  Nord  au  Sud, 
notre  voie  Romaine  allait  de  l'Est  à  l'Ouest  ;  prolongée  elle 
n'aurait  pu  traverser  l'Ognon  qu'à  Banne  ou  à  Marnay. 

Trouvaille  d'objets  antiques. 

Ce  n'est  pas  le  seul  indice  qui  semble  dénoter  qu'une 
station  militaire  importante  avait  été  établie  sur  l'emplace- 
ment de  Saint-Pierre.  Car  on  retrouve  de  nombreux  tuileaux 
caractéristiques  dans  les  champs  d'alentour,  des  fragments 
de  briques,  de  poterie,  etc. 

On  a  aussi  recueilli  dans  ces  parages  une  grande  quantité 
de  monnaies  à  l'effigie  des  Antonin,  et  surtout  de  nombreux 
Posthumes  bien  conservés  (-'.  «  Il  y  a  beaucoup  de  médailles 
»  de    llroye    au    médaillier    du     collège    (i\os    Jésuites)    de 

i  Besançon  :  on  y  conserve  une  petite  statue  en  bronze  de  la 
i  Fécondité,  qui  est  très  curieuse  et  très  rare  ;  el  qui  a  été 
i  trouvée  près  de  l'ancienne  église  de  Saint-Pierre  ('■')  ». 

.l'ai  entendu  dire  qu'un  aurait  encore  trouvé  à  Saint-Pierre 
beaucoup  d'autres  objets  curieux  qui  ont  été  perdus  ou  qui 
sont  enfouis  dans  des  collections  particulières.  «  En  1770, 
»  on  a  déterré  a  Broye-lez-Pesmes  un  superbe  vase  dans 
i  lequel  étaient  plus  de  quatre  mille  médailles  romaines  de 
»  différents  métaux.  On  dit  que  le  vase  est  au  Musée  de 
on  (•)  ». 

1 1)  Dictionnaire  hittoriquê,  topographiqui  et  siniisii  jue  dea  commu i 

du  départemonl  do  la  liaulc  s. e,  p 

i  il  hit  don  -"i  Ifoeée  di  Besançon  d'un  petit  Poithume  d'aï 
trouvé  à  SalnUPI  que  beaucoup  d'autn     médailles  dislribui 

mtro. 

BniOT,  notice  manui  1 1  Ite. 

/■,  tionnaire  de  ta  Uautê'8a6nêtpê\  ]    \    Marc  ,  Gray,  1815 ,  im- 
Barbisol 


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—  337 


A  Broyé,  on  n'attache  guère  d'importance  à  ces  choses  là. 

Vers  1835,  Joseph  Perron  faisait  creuser  les  fondations 
d'un  hangar  devant  sa  maison.  Enfants,  nous  sortions  de 
classe  comme  la  pioche   d'un  ouvrier  venait  dé  mettre  à 
découvert  une  grande  quantité  de  ferraille,  une  grosse  bra* 
«le  vieille  ferraille 

(  )n  exhume  cette  découverte  sous  nos  yeux  :  on  l'examine. 
C'était  des  l'aulx  en  assez  bon  état  de  conservation  ;  mais  des 
faulx  étranges  dont  L'emmanchure  étail  directe  su  moyen 
d'une  douille,  et  non  à  coude  avec  une  virole,  comme  celles 
d'aujourd'hui.  On  s'étonna  de  cette  particularité  dont  un 
assistant  fit  la  remarque,  ce  dont  je  me  souviens  très  bien. 
Puis,  la  ferraille  fut  remisée  par  les  soins  du  propriétaire. 
Ku  ce  temps-là,  le  fer  était  cher. 

Ayant  rencontré  par  hasard,  à  vingt  ans  ,1e  là,  Joseph 
Perron,  je  lui  demandai  s'il  avait  encore  quelques-unes  de 
ses  faulx.  Eh  !  non,  me  dit-il,  et  fm  ai  bien  regret.  J'en  ai 
conservé  longtemps  sur  le  cul  de  mon  four  ;  mais  <■<>,, 
cfmcun  m'en  demandait  pour  faire  des  pendants  de  charrue 
—  coutres,  —  ma  provision  a  fini  par  s'épuiser...  Ah  !  quel 
fameux  acier  c'était  !..<  Et  quel»  pétulants  on  faisait  avec 
un  licier  pareil  !.., 

Je  raconte  ce  souvenir  uniquement  pour  montrer  le  peu 
de  cas  qu'on  l'ail  au  village  de  toutes  les  vieilleries  qui  ne 
servent  plus. 

Un  exemple  encore.  On  a  retiré  du  vieux  cimetière  de 
Saint-Pierre  une  certaine  quantité  de  sarcophages  monoli- 
thiques. Si  des  cercueils  pareils  n'avaient  pas  pu  être  Utilisés 
comme  saloirs  ou  comme  auges  à  abreuver  le  bétail,  croyez 
bien  qu'on  en  aurait  t'ait  du  cassage  pour  servir  aux  presta- 
tions. «  Goquibus  et  son  fils  aîné  ont  mis  à  découvert, 
»  en  1872,  un  cercueil  en  pierre  paraissant  appartenir  à  une 

22 


—  338  — 

»  époque  antérieure  au  xn°  siècle.  Cette  tombe  a  la  forme 
»  d'une  auge  à  bestiaux,  plus  rétrécie  aux  pieds  qu'à  la  tête, 
»  véritable  grès  en    deux    morceaux     d'une    coïncidence 

»  parfaite Le  cercueil  dont  il  s'agit  sert  de  crèche  pour 

»  abreuver  les  canards  et  les  oies  du  fermier  (•)  ». 


§  II.  —  TRADITIONS  ET  LÉGENDES. 

Emplacement  d'Amagétobrie. 

Notre  vieux  Gollut  a  écrit  ceci  :  «  Besançon  n'haï  esté 
»  première  et  capitale,  ains  seulement  la  plus  .mande  et  la 
«plus  forte  au  temps  de  César,  comme  précédemment 
i  Broyé  l'estoit  ». 

El  plus  loin  :  i  Brennus  estoil  de  Praux,  comme  diel 
i  Strabon,  ville  do  laquelle  dous  n'avons  aucune  mémoire, 

i  ce  n'est  celle  que  les  auteurs  Allemands  appellent 
»  Broïa  - 

Praux,  e'esi  presque  Hroue  avec  la  prononciation  germa- 
nique. DU  l'esté  (in  se  redit  à  l'.n.ye  de  grand-père  à  petil-lils 
(|Ue    Broyé,  jadis    BrOlaC,   avait    été    une   Ville   laineuse,    une 

rille  capitale. 

Des  auteurs  sérieux,  comme  Di d  l'historien,  comme 

Amédée  Thierry)  ont  aussi  prétendu  que  Broyé  ôtail  Bitué 
sur  l'emplacement  de  l'ancienne  ville  d'Amagétobrie. 

Ce  serait  donc  à  Broyé  que  les  Eduens  auraienl  éprouvé 
une  défaite  Bandante  el  perdu  toute  leur  noblesse  leur 
i,  leur  cavalerie,  omnem  nobilitatem,  omnenuenatumi 
\cm  equitatw/n  ewiitiue. 

il  nr  r.iut  accepter  cette  opinion  que  roua  toute  réserve, 
malgré  l'affirmation  de  nos    lavants  historiens.  Commenl 


■   notii  •  ■  n 
Ci)  Mémoire*  de  lu  République  SéqutMoiêê,  pp.  0  ■•!  18. 


—  339  — 

admettre  en  effet  qu'une  grande  armée  ait  été  acculée  au 
confluent  de  deux  rivières  en  somme  peu  profondes  el  se  soit 
laissé  anéantir  quand  il  lui  était  si  simple  de  les  traverser? 

Il  est  vrai  que  suivant  certains  auteurs,  Axioviste  n'aurait 
pas  acculé  les  ennemis  ;  il  leur  aurait  tendu  un  piège,  cachant 
ses  troupes  dans  Amagétobrie,  la  Ville  des  Marais^  et,  sur- 
prenant leur  arrivée,  l'aurail  détruite  parjlétaiâRîments  isolés, 
G'esl  la  version  donnée  par  Ed.  Clerc  dans  son  essai  sur 
l'histoire  de  Franche  Comté. 

La  Ville  des  Marais,  c'est  Pieu  la  dénomination  qui  devait 
convenir  à  Broyé  dans  ce  temps-là.  Il  y  avait  bien  là  des 
marais;  mais  la  ville,  où  était-elle*/  Comment  n'a-t-on  pas 
jusqu'ici  retrouvé  les  monuments  de  terre  élevés  à  la 
mémoire  de  tanl  et  de  si  nobles  guerriers  tombés  au  champ 
d'honneur1?  Où  sont  les  armures,  les  lances,  les  boucliers 
perdus  dans  la  bataille?  Où,  les  tibias  el  les  fémurs?  Où,  tes 
brimborions  ei  les  colliers  de  bronze?.... 

Il  ne  nous  déplairait  pas  qu'à  notre  cher  village  se  ratta- 
chât quelque  souvenir  de  l'antiquité  ;  qu'un  tait  mémorable 
s'y  t'ùt  accompli.  Mais  nous  craignons  bien  que  nos  gra 
auteurs,  en  plaçant  Âmagétobrie  mter  Ararim  et  Lignonem 
êonfluentes,  n'aient  lu  et  rapporté  Bans  vérification  la  conjec- 
ture historique  d'un  chroniqueur  peu  scrupuleux. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  plupart  des  annotateurs  d  len- 

tairea  de  César  ont  répété,  l'un  suivant  l'autre,  cette  asser- 
tion dont  ils  se  sont  contentés  de  varier  la- formule. 


Peu  importe  le  nom  que  notre  localité  ait  porté  chez  les 
Celles  et  chez,  les  Romains,  il  est  constant,  il  est  évident 
même  qu'elle  avait  une  importance  stratégique  et  peut-être 
commerciale  assez  considérable. 

A  quoi  en  effet  aurait  répondu  un  cimetière  de  plus  de 
quinze  mille  mètres  de  superficie, situé  sur  un  plateau  sablon- 


—  340  — 

neux  dominant  la  Saône,  à  doux  kilomètres  du  village  actuel, 
s'il  n'y  avait  eu  sur  ce  point  un  groupe  populeux  de  quelque 
importance  ?  On  ne  consacre  pas  un  hectare  et  demi  de 
terrain  clos  pour  les  sépultures  d'une  petite  bourgade  de 
quatre  ou  cinq  cents  manants.  Sans  compter  qu'à  quelques 
pas  de  notre  cimetière  il  existe  un  emplacement  dit  le» 
Champs  de  feu,  où  les  milices  de  certaines  nationalités 
devaient  brider  leurs  morts... 

Il  existait  donc  à  Saint-Pierre  un  gros  centre  de  popula- 
tion. Car  c'est-là,  c'est  à  Saint-Pierre  et  non  au  village  actuel, 
que  la  voie  romaine,  que  la  rie  de  Sauvigney  aboutissait. 
Elle  ne  traversait  pas  la  Saône  où  il  n'existe  aucun  vestige 
de  pont.  C'était  un  chemin  spécial  se  rendant  au  port  Gnerrin 
et  qui  avait  pour  point  terminus  le  camp  de  Saint-Pierre. 

C'est  le  sentiment  de  l'auteur  anonyme  de  la  découverte 
de  la  ville  d'Antre. 

GASTRUM    KliRODUNENSE. 

i.« >s  notices  du  l».  Sirmond  et  de  J.  Scaliger  mentionnent 
dans  la  Séqnanie  cinq  grandes  cités  on  villes  de  premier 
rang,  sièges  d'évéché  os  d'administration  civile;  et  quatre 
camps,  ou  villes  moins  importantes,  mais  principales  cepen- 
dant, quoique  de  deuxième  rang,  qui  sont  : 

I"  GatttUMl   raaraci ffl 

2°  Cailrtim  ari/cntoritme, 

Cctêtrwn  ebrodwnemêf 
i»  Ccutrum  viriduntnit  0). 

Suivant  l'auteur  anonyme  mie  nous  venons  de  citer,  le 

ébroduntme  aurait  été  II  \  ille  de  Broyé  au  confluant 

de  la  Saône  et  de  l't  fgnon. 

/    /:,  i  ,1,1,1111,1,  iiune  ou  hauteur  do  table  près  de  Broye^ 

ou  Brohe,  ou  Broue  (vieille  orthographe),  L'étymologie  ici 

Découverte  t.  h,  ,.,//,•  ,i'.\,a,;-.  i    il.  p,  I 18  (\u, -i.  i  .Lu...  MDGCIX) 


—  341  — 

est  tout  à  fait  conforme  à  la  réalité  des  objets.  1,'emplace- 
ment  dont  il  s'agit  est  en  effet  un  plateau  sablonneux  qui  do- 
mine au  loin  l«'  cours  de  la  Saône. 

a  La  belle  situation  de  la  ville  de  Broyé,  les  débris  qu'on  y 
»  voit,  la  tradition  qui  s'en  esl  eonservée,  les  auteurs  qui  en 
»  parlent,  les  médailles  romaines  qu'on  y  trouve,  et  qu'on  y 
»  a  toujours  trouvées,  sont  les  arguments  convainquauls 
»  qu'il  y  eut  en  cet  endroit  une  ville  qui  n'était  pas  cité, 
y  mais  qui  était  assez  grande  et  considérable  à  cause  de  son 
i  commerce,  et  qui  servait  de  forteresse  sur  la  Saône  contre 

d  les  Eduens Le  nom  de  Broyé  qu'elle  a  conservé  est 

»  une  autre  preuve  que  c'est  castrum  ebrodunense  de  la 
»  notice (I)  ». 

El  plus  loin  :  «  ...  Au  milieu  du  port  de  la  Saône,  il  y  avait 
»  un  château  qui  dominait  sur  la  rivière  et  qui  servait  de 
»  forteresse.  On  en  voit  encore  les  fossés  où  la  Saône  entre 
»  quand  elle  grossit.  La  place  s'appelle  encore  le  Chatelot,  le 
<>  pori  Guerrin...  ».  Ce  qui  esl  exact. 


G'esl   par  là  qu'on  exportail  sur  Lyon  tes  froments  des 

plaines  de  la  Saône   et  de  l'OgOOO,  réputées  les  plus  fertiles 

de  toutes  la  Gaule,  ager  optimut  totiti»  Galliœ.  C'est  aussi 
par  là  qu'on  devait  en  importer  dans  les  temps  de  disette 
pour  le  ravitaillement  des  postes  militaires  dispersés  dans  la 
Séquanie. 

La  grande  affaire,  pour  une  expédition  si  lointaine,  c'étail 
de  comparare  rem  frumentariam,  de  se  procurer  des  vivres, 
d'avoir  du  pain  ;  et  les  approvisionnements  n'en  étaient  guère 
assurés  dans  des  contrées  couvertes  de  bois  et  semées  de 
mauvais  pas. 

G'esl   pourquoi  les    Romains,  jusqu'à  l'établissement  des 

(1)  lbid. 


—  342  — 

Burgondes  en  Séquanie,  ont  entretenu  an  grand  service  de 
navigation  organisé  sur  le  Rhône  et  sur  la  Saône.  Une  véri- 
table Hotte  de  bateaux  ravitaillait  leurs  places  de  guerre  ei  les 
troupes  campées  à  l'intérieur  de  la  province  sëquanaise.  il  y 
avait  un  commandant  spécial  chargé  de  présider  à  la  conduite 
de  cette  batellerie  impériale  remorquée  par  des  chevaux  : 
c'était  le  Ptœfectus  classis  araricœ  caballoduno. 

si  j'osais,  pour  résumer,  exprimer  mon  sentimenl  dans 
cette  affaire,  je  dirais  :  oui,  c'est  à  Broyé  qu'on  doit  chercher 
remplacement  «lu  castrum  ebrodùnense  .  à  Broyé  où  se 
trouvait  un  port  militaire,  an  port  de  guerre. 

D'ailleurs  ce  qui  vienl  corroborer  mon  opinion,  ce  sont  les 
nombreux  cadavres  qui  onl  été  exhumés  au  cimetièr<  de 
Saint-Pierre  dans  ces  temps  derniers  et  qui  sonl  à  peu  près 
tous  des  cadavres  d'adultes  à  la  mâchoire  bien  garnie  ' 

l.\   CONQUÊTE   FRANÇAISE. 

Nul  doute,  comme  nous  l'avons  dit,  que  le  territoire  de 
Broyé  n'ai!  été  exposé  à  bien  des  incursions,  n'ai!  été  ensan- 
glanté dans  bien  des  luttes.  Mais  il  ne  pouvait  guère,  à  cause 
des  nombreux  cours  d'eau  qui  l'arrosent,  servir  de  théâtre  à 
une  action  entre  deux  grandes  armées. 

Les  Romains  avaient  eu  la  précaution,  si  l'on  s'en  souvient, 


I  i    il  est  bien  re  n*ettable  que  ce  cimetière  n'ait  pas  été  Fouillé  méthodi- 
quement. On  h  ''H  b  exhumé  'i"  •<  cidontellomenl  doa  ossements  <'t  dos  ecr- 

uttochei  d'importance  qui  objets  de  bronze  ou  nux  fragments 
de  poloi  ie  '|n  on  trouvait. 

M.  Vacher,  le  propriétaire  actuel  du  terrain,  n'a  jamais  pu  retrouvoi  une 
liai  bette  en  bronxe  qui!  avait  mi  jours  nvaul  ma  vî  tilu, 

Il  la  I      -  '.  dit  il,  </<••-  tndroita  où  il  y  <>  do»  tnon* 

II  a  moment  la  démolition  dos  fondations  on  ciment  de  l'an« 

ipelle  i»'iii  ■..  ■  t . - 1  inui  de  ■  onsti  u<  lion   •■  |)an 

i  dirait  que  les  squelette   ont  été  scellé    dun    la  m. ne 

il  i i 1 1 ■  luirmiuhlu,  •  (Note  du  M    lîharpillot.) 


—  343  — 

de  l'aire  élever  quelques  travaux  de  défense  à  Saint-Pierre, 
sur  la  rive  gauche  de  la  Saône  ;  et,  sur  la  rive  droite  de 
l'Ognon,  en  face  de  Chassey,  une  redoute,  ainsi  qu'un 
château  mi  fortin  à  l'embouchure  de  la  Résie;  c'est-à-dire 
sur  les  points  où  nos  rivières  étaient  guéables.  C'est  préci- 
sément paires  irois  points  que  les  troupes  françaises  ont 
envahi  la  tranche-Comté  en  1674. 

Le  due  de  NavaUles,  chargé  de  conduire  les  premières 
opérations  de  la  guerre  Franco/ Espagnole,  après  avoir 
inspecté  nos  deux  rivières,  reconnut  que  le  passage  de 
l'Ognon  présentai!  moins  «le  difficultés  que  celui  de  la 
Saône. 

En  conséquence,  il  arriva  d'Auxonne  le  lwJ  février  1674  . 
ei  afin  de  distraire  la  petite  troupe  qui  était  venue  de  Gray 
pour  défendre  nos  rives,  il  lit  mine  de  jeter  un  pon1  volant 
sur  la  Saône,  juste  en  face  de  Saint-Pierre.  Ses  adversaires 
l'attendaient  là  en  force  et  bien  retranchés. 

Pour  n'avoir  pas  l'air  de  renoncer  à  cette  tentative,  il 
laissa  quelques  troupes  s'escarmoucher,  pendant  que  dans  la 
nuit,  à  la  tête  des  cuirassiers  du  li«»i,  des  gardes  de  Coudé  et 
du  régiment  de  Villeroi,il  se  portait  par  Cléry  sur  la  rive 
gauche  de  l'Ognon. 

Il  franchit  cette  rivière,  non  sans  peine,  par  un  temps 

pluvieux  et  froid,  en  face  de  l'endroit  OÙ  les  lî.nnains  avaient 

jadis  construit  l'endigUement  défensif  dont  nous  avons  pari/'. 

Aucune  précaution  n'avait  été  prise  par  le  capitaine  Espa- 
gnol qui  commandait  la  place  de  Pesmes,  pour  s'opposer  à  ce 
passage;  el  nos  défenseurs,  qui   s'escarmouchaient  sur  la 

Saône,  se  voyant  pris  eu  liane  et  débordés,  se  retirèrent  sans 

combattre.  Ce  qui  permit  au  reste  des  troupes  françaises  de 
passer  la  Saône  à  Saint-Pierre  ,  et  l'Ognon,  au  gué  de 
Broyé 


(I)  Deux  époques  militaires  à  Besançon  et  en  Franche-Comte,  101 'i, 
1815,  par  l n  Ordinaire  (Besançon,  1856). 


—  344  — 

Quelques  vieillards  ont  encore  entendu  parier  de  cette 

invasion  d'il  y  a  deux  siècles.  On  montre  encore  l'endroit  OU 
les  Français  ont  effectué  le  passage  de  la  rivière,  en  l'ace  de 
ChasseytU 

Un  mariage  celtique. 

Nous  avons  conservé  à  Broyé  une  tradition  druidique 
relative  à  une  fontaine  sacrée. 

La  source  sort  à  mi-côte  des  terrains  sur  lesquels  s, 'levait 
autrefois  l'ancien  ermitage  dé  Saint-Pierre  (2). 

Cette  fontaine  sacrée  était  encore,  il  y  a  moins  décent  ans, 
l'objet  d'une  très  grande  vénération,  c'est  là  que  les  jeunes 
gens  se  rendaient,  avant  la  révolution,  pour  s'y  fiancer;  on 
mieux,  pour  y  Contracter  un  véritable  mariage  à  la  mode  des 

Celtes,  l<i  confarréation. 

Les  futurs  choisissaient  pour  cette  cérémonie,  le  jour  de 
la  Chandeleur,  parce  «pie  le  matin  de  ce  jour-là  le  père  leur 

avait  dit  :  c'est  aujourd'hui  hl  CJutndeleur  :   bonjour,   bonne 

œuvre  \...  Ils  apportaient  donc  à  In  fontaine  de  Saint-Pierre 
des  gâteaux  do  pâte  cuits  dans  nue  tourtière,  el  qui  figuraient 
grosêo  modo  un  homme  et  une  femme  ayant  chacun  les 
attributs  extérieurs  do  sou  sexe,  connue  ces  petits  bons- 


\  propos  'le  Chassey,  une  autre  tradition  rapporte  que,  à  une  époque 
.  .  niée,  bien  avant  le  vieux  'lue  de  travailles,  bien  avant  les  quatre  lits 

Aviin.ii.  époque  historique  p les  ^<-ii^  .le-  campagnes,  il  j  avait  sur  le 

lien  «lit  Champ  Jean  Leblanc,  dans  la  forêt  'lis  Chazeaux,  une  petite  bour- 

■  j i i i  .un. ni  été  un  t.. mu  Jour  assaillie,  détruite  et  expulsée  par  nu.' 

troupe  d'envahi  débi  le  de  cette  bourgade  i  tuvésdans 

ils  s.-  sont  fixée,  D'où  le  nom  de  Chat 

il  ..i  vrai  que  la  nom  de  Chazeaux  donné  a  la  forêt  Indique  qu  il  j   i  eu 

habitations  dont  M  ne  reste  absolument  au- 

.  un.'  li 

"i.  .  ompte  ii "i  ■  "iii ,',  -mu  ,  .• ,  mi. h  1 1  - 
•  in  plateau  sablonnous  de  Saint  Pierre  i jota 

On  v.'ii  i|u  un  .  atnp  établi  dans  coa  i  onditioni  était  abondamment  i vu 


—  345  — 

hommes  de  pain  d'épices  qu'on  vend  sur  les  foires.  Puis, 
après  s'être  mutuellement  donné  leur  foi,  nos  amoureux 
trempaient  dans  l'eau  leurs  gâteaux  peur  les  purifier,  les 
échangeaient  ensuite  et  les  mangeaient.  Les  fiançailles 
étaient  consommées. 

Le  mariage  a  La  farine  fut  importé  en  Italie  parles  Gaulois. 
Il  était  encore  très  usité  à  latin  de  la  République  romaine 

dans  la  (jaule  Cisalpine  et  parmi  le  petit  peuple  du  Latin  m 
Mais  il  n'avait  pas  assez  de  solennité  pour  les  riches  Romains 
qui  le  laissaient  à  la  populace. 
La  gravité  touchante  et,  honnête  d'une  cérémonie  aussi 

simple  devait  répondre  au  sentiment  religieux    de>    pa\>an>, 

des  hommes  des  champs. 

Voilà  pourtant  ce  qui  se  faisait  encore  à  Broyé  il  y  a  moins 
de  quatre-vingts  ans  !  Quelle  race  opiniâtre  que  celle  des 
laboureurs!  Et  comme  elle  assure  la  continuité  des  temps! 

l'ue  autre  pratique  superstitieuse  dont   je  me  souviens 

encore,  paràil  s'être  conservée  jusqu'à  uns  jours «  il  y  a 

9  quelques  années,  écrit  M.  Charpillet,  la  personne  à  qui 
>  était  confit'  le  soin  d'ensevelir  les  morts  ne  manquait 
"  de  leur  mettre  dans  |a   main   une  pièce  de  monnaie,  sans 
»  doute  pour  qu'ils  puissent  payer  la  barque  à  Caron 

J'ai  vu  mettre  un  sou  dans  la  bouche  d'un  enfant  décédé. 
(Test  ee  qui  explique  sans  doute  qu'en  relevant  d'anciens 
cadavres  on  ait  trouvé  si  souvent  des  pièces  à  l'effigie  de 
Louis  XIII,  de  Louis  XIV  et  de  Louis  XV. 

LES   ORVALS   DE   SAINTE   A.NNE   Al'    PORT   SAINT-PIERRE. 

On  croit  que  la  chapelle  de  Saint-Lierre,  où  sainte  Anne 
lui  autrefois  vénérée,  aurait  été  construite  sur  l'emplacement 

d'un  ancien  sanctuaire  consacré  à  quelque  taux  Dieu. 

On  n'ignore  pas  qu'en  effet,  pour  détruire  peu  à  peu  le 

levain  des  superstitions  païennes,  saint  Grégoire-le-Grand 
avait  prescrit  de  substituer  partout  aux  noms  du  paganisme 


—  346  — 

les  noms  de  saints  vénérés  dans  la  catholicité.  Le  culte  de 
^aiiiio  Anne  aurait  ainsi  succédé  chez  nous  au  culte  de  Diane 
ou  d'Hélène  (la  lune),  que  les  Gaulois  adoraient.  Un  clou 
chasse  l'autre. 

Nous  ne  savons  ce  que  vaut  cette  opinion  fondée  sur  des 

altérations  étymologiques  assez,  vraisemblables.  Toujours 
est-il  que  sainte  Anne  était  en  grande  vénération  à  Saint- 
Pierre,  où  elle  avait  sa  statue  depuis  un  temps  immémorial. 
Un  beau  jour,  on  ne  sait  trop  pourquoi,  cette  sainte  prit  la 
résolution  d'abandonner  la  Franche-Comté  peur  la  Bour- 
ne.  Il  y  a  plusieurs  siècles  de  cela. 

In  matin  on  trouva  l'image  OU  la  statue  de  notre  sainte 
dans  les  champs  d'Œilley,  de  l'autre  côté  de  la  Saône. 

On  s'empressa  de  la  réintégrer  pieusement  dans  la  cha- 
pelle.   Mais   comme    Oïl    se   disposait    à    passer   la    Saône    en 

barque,  il  s'éleva  une  violente  tempête  qui  rendu?  la  traversée 
l"<»it  pénible. 
Le  lendemain  la  statue  fui  de  nouveau  transportée  comme 

par  miracle,  osons  le  dire,  par  un  vrai  miracle,  au  lieu  où 
on  l'avait  trouver  la  veille. 

Cette  l'ois  encore,  on  voulut  la  rapporter  à  Saint-Pierre. 
Mais  alors  il  se  lit  sur  la  Saône  un  ouragan  si  épouvantable 
qu'on  aurait  Juré  que  la  barque  allail  s'engloutir  avec  ceus 
qui  la  conduisaient. 

Comme  pour  la  troisième  Fois,  l'image  fui  encore  retrouvée 
illey,  il  devint  évident  que  c'était  là  ou--  la  sainte  enten- 

il.lll    rire   h.  MO 

Œilley,  à  quelques  pas  du  village  que  sainte 
Inné  a  maintenant  sa  chapelle  ;  o'esl  là  qu'elle  opère  de 
temps  en  temps  quelque  guérison,  si  l'on  en  juge  par  les 
béquilles  el  les  ex-voto  <pii  sont  appendus  aus  murs  de 
i  ini.i  leur  el  b  la  voûte  de  l'édifice, 

;uère  un  hou  y  ieillurd 
de  B  U\  mémo  tlpoquo,  au  moit  do 

juill  a  Saône  dtu  touvbiUonSf  dot  coup*  de 


—  347  — 

vent,  îles  orages,  ee  que  nous  appelons  ici  les  orcnls  de  sainte 
Aune....  Jeûnais  lei  orvala  de  sainte  Aune  n'ont  manqué  au 
port  Saint-Pierre,  soyez-en  mr(l)\ 

A.UTHES   CROYANCES   si  PERSTITIEUSES. 

Une  sorte  de  crainte  superstitieuse  s'attache  S  t<>ui  ce  qui 
louche  au  petit  territoire  de  Saint-Pierre. 

On  nous  racontait,  quand   nous  étions  enfants,  et   on 
raconte  encore,  je  crois,  qu'une  vouivre  gardant  ses  tr< 
se  tient  cachée  dans  les  souterrains  du  Cbâtelol  ;  que  l'enfant 
d'un  pâtre  âgé  de  sept  ans  la  surprendra  et  découvrira  ses 
trésors,  et  qu'alors 

Grande  défense  il  y  aura, 

(>u  l.i  vouivre  le  maie 

Je  me  souviens  qu'on  se  demandait,  quand  on  allait  jouer 
sur  les  prés  ilu  port  Guerrin  :  Quel  Cujeas-tn  9  Oublianl  que 
nous  n'étions  pas  les  enfants  d'un  pâtre. 

On  n'en  finirait  pas  si  l'on  voulait  rapporter  toute.-  les 
idées  superstitieuses  qui  avaient  cours  il  y  a  cinquante  ans 
dans  ce  beau  et  riche  village  de  Broyé  ;  village  perdu,  faute 
île  voies  de  conununicatiiin  ;  où  I  on  allait  ,  mais  où  Ton 
ne  passai!    pas, 

Grâce  à  leur  isolement,  nos  Broyons  oui  encore  conservé 
leur  physionomie  ;i  pari  ,  un  certain  air  d'antiquité.  Ils 
n'ont  guère  modifié  leur  caractère  un  peu  défiant  ,  ni 
perdu  leurs  croyances  et  leurs  habitudes,  ni  surtout  oublié 
les  traditions  de  leur  pays. 

(1)  Orvalia,  dans  Ducange,  est  une  expression  franc-comtoise  pour  dire 
orage,  ouragan,  cyclone,  etc.  (voir  ce  mot  au  Glossaire). 

On  rail  souvent  dans  les  vieux  baux  de  nos  pays  dès  réserves  stipulées 

en  cas  d'orvals «  11  n'y  auroit  qu'eu  cas  d'on  esles, 

ndies  qu'on  devrait  diminuer  les  chai  [rch, 

de  l'Intendance,  (.:.  114.) 


—  348  — 

Ils  sont  demeurés  simples,  comme  autrefois,  laborieux, 
peu  dépensiers.  Ils  ne  sont,  en  général,  ni  présomptueux,  ni 
sots  :  rVst-à-diiv  qu'ils  ne  se  croienl  pas  toul  de  suite  plus 
sages  ni  plus  éclairés  que  leurs  parents,  quoiqu'ils  sachent 
mieux  lire  dans  les  gazettes  ;  et  qu'ils  n'acceptent  pas  une 
innovation,  même  on  culture,  sans  un  sérieux  examen. 

Cette  réserve,  composée  de  défiance  et  «le  scepticisme, 
suivant  moi,  les  honore,  parce  qu'elle  donne  en  général 
beaucoup  plus  de  solidité  à  leur  jugement. 


§  III.  —  LE  VILLAGE. 

Emplacement  primitif  du  village. 

La  communauté  de  Brohe,  de  Broûe  ou  de  Broyc-dans  le 
principe  parail  avoir  été  formée  par  plusieurs  petits  centres 
de  population.  El  cela  se  conçoit.  Comme  il  n'y  avail  pas  de 
château  Féodal  S0U8  les  murs  duquel  les  manants  du  lieu 
pussent  abriter  leur  chaumière,  ils  la  construisaient  naturel- 
lement là  <»ii  les  commodités  de  la  vie  semblaient  peur  eux 

plus  faciles  :  dans   les    léréls   OU   SU   voisinage   des    prairies, 

s'ils  élevaienl  des  troupeaux;  auprès  de  la  rivière,  s'ils 
vivaient  de  pèche.  Ceal  ainsi  qu'un  petit  groupe  de  pécheurs 
ii  établi  autour  du  château  do  Fousset,  là  eu  est  l'église 
actuelle  du  village  '•• 

Le  hameau  de  Saint-Pierre,  au  dire  de  quelques  ancien  . 
aurait  été  le  noyau  principal  de  la  communauté. 


I  ni'  rue  i'  ill. mi  .m  paquin  •  lu 

.  i"'i  ic-  le i  ■!.•  i  (!-•  il'  i.i  Jus.  Kilo  est  ■<  droite  ai  a  gauchi 

unillu  i  orquot  ou  Pourquoi,  la  plu»  considérable  et  In  plus  |»ii si^.- 

■  iin,   pi  qu  du  n  m     l<  i  le    IN'    i  i  h    è    "M  nom  a 

niir  tonne  de  bateau  d<   i  •    qu'où  appelle  encore   i  Broyé 

ni"!  nu  ■  • 


—  349  — 

Il  esl  constant  qu'on  a  toujours  désigné  par  le  mol  de  bout 
<!<•  lai  velle,  côté  du  village,  le  groupe  de  maisons  qui  se 
rapproche  le  plus  du  finage  de  Saint-Pierre.  Du  reste,  comme 
le  cimetière  el  une  petite  chapelle  existaient  vers  le  pori 
Saint-Pierre  depuis  la  plus  haute  antiquité,  c'était  une  raison 
pour  que  l'habitanl  s'y  établit. 

Il  n'en  esl  pas  moins  sûr  que  depuis  mille  ans  peut-être 
le  centre  du  village  de  Broyé  occupait  son  assiette  actuelle. 

Hue  ou  Huon,  le  porte  troubadour  de  l'empereur  Barbe- 
rousse,  était  de  Broie-Selve»  (1)  sur  VOgnon,  el  non  de 
liroye  sur  la  Saône... 

Dans  une  requête  présentée  à  l'intendance  au  nom  du 
village,  en  1688,  il  y  a  juste  deux  cents  ans,  à  l'effet  d'obtenir 
que  la  maîtrise  des  Eaux  et  Forêts  les  autorise  à  vendre 
quelques  grands  bois,  il  est  dit  que  c'est  pour  enclore  leur 
cimetière  et  pour  réparer  l'église.  L'officier  du  baillage  de 
Gray,  P.  Balahu,  commissaire  à  l'enquête,  reconnaît  le  bien 
ronde  de  la  demande  :  «  L'église,  dit-il,  avait  besoin  d'être 
»  replanchéiée  dans  la  nef  du  milieu  et  reblanchie,  les  murs 
»  en  étant  tout  noirs  de  vétusté.  D'autre  part,  le  cimetière 
»  qui  était  à  Saint-Pierre,  distant  de  plus  de  deux  mille  pas 
d  du  village ,  et  où  il  existait  une  ancienne  chapelle,  était  un 
»  endos  désert  et  en  friche  où  les  bêtes  de  la  forêt  pouvaient 
»  entrer  librement  V)....  » 

Le  village,  il  y  a  plus  de  deux  cents  ans,  n'était  donc  plus 
sur  la  Saône  ;  et  depuis  bien  longtemps  la  chapelle  de  Saint- 
Pierre  n'était  plus  l'église  consacrée  au  culte  de  la  paroisse, 
si  jamais  elle    l'avait    été. 

Il  y  a  autre  chose  encore.  L'existence  d'un  villagi 
aécessité  des  rues,  des  trages,  des  chemins  latéraux  ;  et 

rien  de  cela  n'existe  à  Saint-Pierre,  qu'un  chemin  parallèle 


(1)  La  prairie  des  Sèves  se  trouve  à  présent  sur  la  rive  gauche  de  l'Ognot, 
par  suite  du  déplacement  du  lit  de  la  rivière. 

(2)  Archives  de  la  Haute-Saône,  B.  18G9. 


—  :m  — 

au  cours  de  la  Saône,  e1  deux  autres  chemins  qui  vont  de 
celui-là  vers  le  port  Guerrin. 

INSÉCURITÉ    DES    GUERRES. 

Quelle  a  été  l'importance  de  notre  village  pendant  la 
féodalité  et  jusqu'au  règne  de  Louis  XIV  ? 

Nos  renseignements  à  cet  égard  sont  très  incomplets.  Les 
registres  de  paroisse  antérieurs  à  1G84  ont  disparu  et  beau- 
coup d'autres  documents  tout  défaut. 

A  Saint-Pierre,  comme  nous  l'avons  dit,  un  centre  de 
population  considérable  a  dû  exister  avant  L'invasion  lies 
barbares,  puisqu'il  avait  nécessité  un  champ  de  sépulture  de 
plus  d'un  hectare  el  demi  ;  et  que  les  Romains  avaient  jugé 
utile  d'y  construire  une  voie  particulière  y  aboutissant.  Mais 
depuis,  ce  centre  <le  population  a  disparu. 

/Vprès  ta  guerre  de  trente  ans,  et  les  fléaux  de  peste  el  de 
(àmine  qui  l'ont  accompagnée  ou  suivie,  la  ruine  de  Broyé 
était  complète. 

En  1657,  notre  pauvre  village  n'avait  plus  que  cent  vingt- 
cinq  habitants  <l<>nt  voici  la  nomenclature 

Roolr  w.'s  ,n<tnan8  et  habitans  de  tout  aages  des  villes,  bourgs  et 
villages  du  rêêsori  de  Gray,  faici  par  ordre  du  Parlement,  en 
Van  l<>:,~,  pour  le  règlement  ordinaire  tin  tel  (i), 

Noël  BurUlard ,  sa  femme,  un  valet :t 

François  <  uidin,  sa  femme,  quatre  enfanta <i 

Claude  BurUlard,  sa  femme,  trois  enfanta,  nn  valel »'> 

Fourquet,  sa  femme i2 

iard  \  uiUemenol .  sa  femme,  deux  enfanta I 

•h.-  \ eme,  sa  femme,  un  enfant,  un  valet t 

mme,  un  enfant 3 

t  reporter.      36 

— ■ -  i  ii  ■  ■  ■■    i  ir 

An  h, „ihs,  ,  .ni, ,n  c 


—  351  — 

Report.  28 

Claude  Hugon,  sa  femme,  deux  enfants 4 

Claude  Vuillemenot,  sa  femme,  deux  enfants \ 

François  Verne 1 

Nicolas  Verne,  sa  femme,  trois  enfanta 5 

Jean  Blanc,  sa  fille 2 

Claude  Thomas,  trois  curants 4 

Jean  Lépagnol,  sa  femme,  un  enfant 3 

Jean  Guaymey,  sa  femme,  deux  enfants,  une  servante :> 

Claude  Perron,  sa  femme,  un  enfant,  une  servante î 

Antoine  Roussel,  sa  femme,  trois  cillants,  une  servante.. .  G 

Perrine  Gardol 1 

Barbe  Verne 1 

Nicolas  Gardot I 

Isabel-Blanc l 

Bénigne  Gin,  sa  femme,  deux  enfants \ 

Bénigne  Bipart,  sa  femme 2 

Jos.  Masson,  sa  femme,  <\rwx  enfants 4 

Jacques  Masson,  sa  femme,  six  enfants 8 

Claude  Thomas,  sa  femme 2 

Jean  Fidon,  sa  femme,  un  enfant 

Jacques,  dil  Cerne,  sa  femme,  un  enfant 3 

Claude  Fourquet,  sa  femme,  deux  enfants I 

Edme  Thopin,  sa  femme,  deux  enfants 4 

Jos.  Laloy,  sa  femme,  deux  enfants 4 

Jos.  Fidon-Verne,  sa  femme,  un  enfant 3 

Gérard  Clave,  sa  femme,  quatre  enfants 1; 

Jean   Lambert,  sa  femme,  un  enfant 3 

Edme  Charmay,  un  enfant 2 

IV.  Kollin,  sa  femme,  un  enfant 3 

125 

Le  présent  roole  faict  et  indiqué  par  Gaspard  Vuillemenot 
ci  Cl.  Hugon,  esehevins  dudict  Broyé,  lesquels  ont  attesté  (15  fé- 
vrier 1657.) 

Cent  vingt-cinq  habitants  !  Le  dénombrement  général  qui 
ne  fut  l'ait  au  comté  de  Bourgogne  que  trente  ans  après 
donne  déjà  une  population  trois  fois  plus  considérable. 


—  352  — 

On  peut  constater  cependant,  à  vue  des  reconnaissances 
des  terriers,  qu'une  paix  de  quelques  années,  ce  qui  était  rare 
autrefois,  rendait  la  vie  et  la  prospérité  à  notre  cher  pays:  cl 
que  chaque  nouvelle  guerre  qui  survenait  entre  la  France  et 
la  maison  d'Autriche  ou  d'Espagne  y  amenait  la  dépopula- 
tion. On  avait  peur  et  on  se  sauvait,  cherchant  un  abri 
derrière  les  murailles  de  quelque  place  fort i liée. 

Pendant  le  xvi"  siècle,  la  Franche-Comté  n'ayant  pas  eu  à 
craindre  d'invasion,  le  nombre  des  familles  résidant  à  Broyé 
s'élevait,  en  lôSô,  à  plus  de  cent  cinquante.  Vingt  ans  plus 
lard,  eu  1606,  à  eause  de  nos  prises  d'armes  en  laveur  de  la 

ligue,  le  Dombre  des  feux  tomba  à  quarante-cinq  :  puis  à 
trente-six  seul. 'ment  après  la  guerre  de  trente  ans. 

SOUS  LA   DOMINATION    FRANÇAISE. 

La  population  continua  donc  de  s'accroître  sous  la  domi- 
nation française  qui  assurai!  au  pays  la  sécurité. 

De  trente-six  feux  01 mages  mentionnés  en  1657,  à 

Broyé,  on  remonte  6  soixante,  en  1688;  puis  à  cent  dix,  en 
1780. 

En  l'an  h  (1803),  l'annuaire  de  la  Haute-Saône  portée  "Il 
le  nombre  des  habitants  de  Broye-lez-Pesmes.  Ce  chiffre 
depuis  n'a  cessé  de  décroître  à  chaque  recensement. 

Jusqu'à  la    Révolution  de    1 7S1  >,  sur    les   Cent    maisons   du 

village,  "ii  peut  assurer  que  quatre-vingt-dix-neuf,  c'est-à- 
dire  toutes,  sauf  le  presbytère,  étaient  de  pauvres  baraques 
on  des  huttes  bâties  en  bois,  en  torchis  ou  en  clayonnage,  et 
enduites  de  terre  glaise  intùi  ei  extra.  Cela  résulte  évidem- 
ment des  déclarât iu  bailliage  en  1750,  quand  il 

lut  question  d'établir  l'impôt  du  v  ingtième  (J  i 

habitations  rustiques  étaient  adossées  ou  appliquées 
mi,      ii  v    tvait    me  Imnn 

./.•  i,i  Haute  Saône 


—  :?53  - 

toiture  de  chaume,  formant  une  seule  maison,  pour  abriter 
cinq  ou  six  ménages  de  pauvres  gens  qui  se  tenaient  chaud 
pendant  l'hiver. 

Toutes  ces  chaumières  étaient  pouvues  d'un  auvent,  d'une 
rabattue,  d'une  avancée  de  toit  qui  descendait  très  bas. 
Outre  que  cetauvenl  servait  à  remiser  le  Lois  à  brûler  el  tes 
récoltes  d'automne,  comme  haricots,  inrqaîe,  etc.;  il  pré- 
servait encore  la  maison  des  venis  pluvieux  et  du  grand 
soleil. 

Du  soleil  el  de  l'air,  on  en  prenait  bien  .iss.'/.  tmis  les  jours 
dans  la  campagne  !  Il  faut,  pensait-on,  que  Voûtait  soit  chaud 
en  hiver  el  frais  en  été,  connue  une  taissonnière  !... 

Les  paysans  puisent  volontiers  des  leçons  d'hygiène  dans 
les  exemples  fournis  par  les  bêtes  du  bon  Dieu. 

Quoiqu'il  en  soit,  quand  le  feu  se  déclarait  dans  une  agglo- 
mération de  maisons  pareilles,  il  formait  en  un  clin  d'œil  un 
ardent  brasier.  Les  incendies  de  Broyé  de  1737  et  de  1768 
n'ont  pas  été  moins  terribles  que  ceux  de  -182ô  et  ,|t.  1854. 

On  s'en  souvient  encore  dans  la  Franche-Comté. 


§  IV.  —  COMMERCE  ET  INDUSTRIE. 

La  situation  économique. 

Os  grossières  maisons  de  chaume  ne  dénotaient  pourtant 
pas  la  misère  autant  qu'on  le  pourrait  croire.  Par  rapport 
aux  pays  voisins,  Broye-lez-Pesmea  était  un  bon  village  de 
culture. 

Le  dénombrement  de  1688  que  nous  avons  déjà  cité,  pièce 
très  curieuse,  relève  la  population  ^-  chaque  commune  de 
la  Franche-Comté  en  hommes,  femmes  et  enfants  ;  en  ser- 
viteurs et  servantes  ;  il  donne  le  comptage  des  bœufs,  des 
vaches,  des  chevaux,  des  chèvres,  des  cochons,  etc. 

Sur   les   354  habitants  du   village  de  Broyé  ,   il   y  avait 

23 


—  354  - 

quarante-six  valets  des  doux  sexes.  Cette  quantité  de  servi- 
teurs à  gage  dénote  que  la  population  de  ce  village  étail  en 
généra]  dans  une  aisance  relative,  el  que  l'ouvrage  ne  man- 
quait pas  à  qui  en  voulait  trouver. 

Pas  plus  alors  qu'aujourd'hui  Broyé  n'exportait  les  travail- 
leurs. 

Mais  celte  aisance  relative  des  anciens  ferait  la  misère 
grise  pour  nos  contemporains.  Qu'on  en  juge. 

A  peine  comptait-on  dans  ce  riche  pays  de  culture  trente 
hœufs  pour  labourer  la  terre  ci  quatre-vingts  petits  bidets  de 
tout  âge. 

Trois  cents  tètes  de  bétail,  ou  plus  exactement  297  vaches, 
veaux  el  génisses,  formaient  la  proie  rouge  de  la  commu- 
nauté (t). 

Toutefois  on  n'eu  était  plus  à  Broyé,  connue  à  IVsnies  ou 
a  Yalay,  à  compter  les  chèvres  au  demi  cent,  08  qui  montre 
bien  l'état  de  pauvreté  de  ces  localités.  Ou  ne  s'amuse  pas  à 
tenir  des  chèvres  quand  on  peut  avoir  une  vache  à  l'écu- 
rie !... 

Le  paysan  ne  se  livrait  pas  à  l'élève  du  bétail,  parce 
qu'autrefois  la  consommation  de  viande  n'était  pas  générale 
comme  aujourd'hui. 

De  toutes  les  communes  *\\\  bailliage  de  Gray,  celle  de 
Broyé,  avec  ses  297  tètes  de  bétail,  était  pourtant  la  plus 
riche  comme  productive  de  lait  et  de  chair  6  manger.  Le 
viiia^o  de  Baujeu,  qui  venait  après,  ne  comptait  que  268  tètes 
de  bétail  ;  Ghamplite,  208 ;  Chargey>  200  j  toutes  les  autres 
communes,  n u  de  180. 

On  élevait  à  Broyé  une  grande  quantité  de  porcs  qui  étaient 
livrés  vivants  au  commerce.  <>u  mettait  oee  animaux  à  la 
glandée  dans  les  belles  forets  de  la  Vaivre,  du  Fah)  et  «les 

Chazeaux,  qui  appartenaient  à  ta  c mune  usufruitière,  el 

qui  comprenaient  plus  <!<•  oinq  cent   arpents. 

\"i' 'm. i  iiin orapte  pot  >  Broyé  n ii  de  060  boirai  el  va<  lie 


—  :*55  — 

Chaque  Camille  avail  au  moins  une  laie  ou  truie  a  gorets  — 
goroille  (*)-—  donl  les  portées  étaienl  vendues  comme  hour- 
rhuou  petits  cochons  à  engraisser,  aux  foires  de  Pes sou 

do  Valay. 

Difficulté  des  relations  commercial] 

La  difficulté  des  communications,  ta  rareté  el  le  mauvais 
étal  des  chemins,  ne  permettaient  guère  que  les  gens  d'un 
pays  qui  était  séparé  du  mondé  par  ses  rivières  el  perdu 
dans  ses  forêts,  pussenl  se  livrer  à  un  commerce  un  peu 

suivi. 

Il  y  a  cinquante  ans,  la  commune  n'avait  .le  ponl  ni  sur  la 

Saône,  ni  sur  l'Ognon.  Il  n'v  avait  qu'un  seul  chemin  un  peu 

empierré  ci  praticable  aux  chariots  dans  la  bonne  saison: 
c'étail  le  chemin  foirei  ferré  «m  empierré,  où  de  temps 
en  temps  «m  déchargeait,  aux  mauvais  endroits,  quelques 
voiimvs  de  prestation.  Les  autres  chemins  existant  présen- 
tement comme  ceux  d'Aubigney  ci  de  Montseugny,  de  Perri- 

gny,  etc.,  OU  n'existaient  pas   du    (nul,    mi    n'étaient   .pi.'   i\r^ 

voies  de  défrichement,  «pic  des  chemins  sablonneux,  étroits, 
effondrés,  bordés  de  haies  vives  ci  de  buissons. 

ou  n'y  faisait  aucun  trais  d'entretien. 

Parfois  cependant  un  paysan  obligé  de  passer  avec  sa 
voiture  par  des  uécessités  d'exploitation  ,  jetait  sur  les 
creux  et  dans  les  ornières  des  fagots  d'épines  pour  servir 
comme  d'un  ponl  volant;  et  cette  réfection  ('tait  fade  pour 
plusieurs  aimé 

Il  n'existait  pas  même  de  sentiers  pratiqués  pour  se  rendre, 
soit  àClery  et  à  Perrigny,  soit  à  Œilley,  à  Maxillv  et  à  Tal- 
may,  localités  qui  sont  distantes  de  Broyé  de  deux,  trois  ou 
quatre  kilomètres, tout  au  plus. 

Dans  des  conditions  pareilles,  le  seul  commerce  possible, 
•  •'•'•lait  la  culture. 


(1  )  Voir  ce  mut  au  Glossaire. 


—  356  — 

Culture  dés  céréales. 

Comme  aujourd'hui,  nos  gens  de  Broyé  étaient,  par  la  force 
même  des  choses,  des  travailleurs  de  la  terre,  des  labou- 
reurs ou  des  manouvriers  de  cette  grande  famille  du 
labourage,  robuste  et  saine,  qui  assure  aux  races  la  durée  et 
la  stabilité. 

La  culture  principale  était  celle  des  céréales. 

D'après  un  état  fourni  à  l'Intendance  U)  en  1759,  et  établi 
en  vue  d'indiquer  les  possessions  en  terres  des  ecclésiastiques 
et  des  seigneurs  dans  chaque  communauté,  le  territoire  de 
Broyé  comprenait  1800  journaux  de  terres  Labourables,  5552 
faulx  de  prés  et  522  arpents  de  bois  dont  138  étaient  mis  en 
réserve. 

La  récolte  annuelle  s'éleva  il  en  moyenne  ;i  1,500  mesures 
de  froment,  1,500  mesures  de  seigle,  2,250  mesures  d'avoine 
el  autant  de  menus  grains. 

On  avait  toujours  soin,  dans  ces  sortes  de  déclarations,  de 
minore?  ses  recettes  et  de  s'appauvrir,  afin  de  ne  pas  exciter 
la  cupidité  des  agents  du  lise.  Mais  on  peut  ôtrè  sûr  que  le 
rende ni  des  terres  était  bien  loin  d'égaler  celui  d'au- 
jourd'hui. 

On  paratl  avoir  essayé  la  culture  de  la  vigne,  puisque 
nous  voyons  mentionné  dans  un  acte  de  partage  (ail  en  1707 
un  journal  '■"  nature  de  vigne  siim-  prêt  du  Breuil  <-).... 

Cette  culture  ni-  pareil  pas  avoir  donné  de  bons  résultats, 
puisqu'elle  •>  été  abandonnée  tout  à  faii.  Quoi  qu'il  en  soit, 
I.-  terrain  situé  prèi  du  Breuil  b  conservé  le  nom  de  /<"  uai- 
gnotte,  ta  petite  vigne. 

.1        \  r,  7imv.  ilriuirlrmriiliilr      du    llmilis,  i.iiIhii  Ci    III. 

têtnentalet  dé  '<«  Haut*  Saône,  n.  ih<w. 


357 


Cultures  industrielles. 

Après  la  culture  des  céréales,  celle  du  chanvre  était  certai- 
nement la  plus  intéressante  de  toutes.  On  consacrait  à  (aire 
venir  la  plante  textile  un  temps  considérable,  et  surtout  à 
préparer  et  à  utiliser  les  produits  de  eet£e  précieuse  denrée. 

on  semait  au  printemps  la  graine  récoltée  l'année  précé- 
dente, dans  une  terre  de  choix,  dans  l;i  terre  la  plu>  pl.mtu- 

reuse,  la  mieux  préparée,  la  mieux  fumée,  qu'on  appelait  la 
chenevière.  On  en  confiait  la  garde  a  la  vigilance  des  enfanta 
un  d'un  bon  chien  chargé  d'en  éloigner  la  volaille  et   les 

oiseaux  qui  sonl  très  friands  de  cbenevis,  comme  on  sad 

on  arrachait  te  chanvre  à  la  tin  d'août  pour  le  rouir. 

Pour  faire  l'opération  du  rouissage,  ou  a  employé  à  Broyé 
jusqu'après  1830  exclusivement  la  méthode  par  voie  humide. 
Trente  ou  quarante  gerbes  de    chanvre  étaient   empilées 
dans  la  rivière  entre  quatre  pieux  solidement  plantés,  et  I 
entre  elles  de  manière  à  résister  au  courant.  Dix  ou  douze 

joins  après,  on  relirait  le  chanvre  mïsi  et  on  le  taisait  sécher 
pour  ensuite  le  décortiquer  OU  le  teillcr. 

Ce  procédé  de  rouissage  était  répugnanl  à  cause  de  l'odeur 
infecte  ii1"'  répandait  la  plante  putréfiée. 

Le  teillage  se  taisait  dans  les  veillées  d'automne.  A  peine 
était-il  fini,  qu'on  voyait  arriver,  après  l.i  Toussaint,  des 
troupes  de  Bressands,  —  les  pignardt  ou  les  foirtoux,  — 
qui  savaient  peigner  le  chanvre  et  qui  avaient  l'art  de  pré- 
parer la  belle  œuvre  et  les  bonnes  étoupes.  On  les  payait 
bien  et  on  les  nourrissait  grassement,  dans  l'espoir  que 
l'ouvrage  Berail  soigné  et  l'œuvre  facile  à  hier. 

Dans  les  soirées  d'hiver  les  femmes  étaient  occupées  à 
faire  tourner  les  rouets,  à  hier  l'œuvre  et  les  étoupes.  ouede 

temps  consacré  à  cette  hesogne  ! 

Mois  c'était  si  bon  d'avoir  une  provision  de  beau  linge  de 
ménage  ' 


—  358  — 

La  tâche  des  ûleuses  achevée,  on  remettail  au  tisserand 
d'un  village  voisin  les  vicie*  —  paquets  de  (il,  —  qu'on  avail 
bien  sein  de  peser- 
Mais    on    avait    beau    peser  ;     les    tisserands    étaient    si 
voleurs  ! 

Etonnons-n<>us  après  cela  que  nos  vieux  parents  aient  été  si 

ûers  île  leur  beau  linge,  de  leur  lin  nappage,  de  leurs  ser- 
viettes ouvragées,  el  de  leurs  armoires  où  les  elieimses  en 
toile  d'œuvre  el  les  draps  étaient  empilés  et  bien  rangés. 

C'était   leur  luxe. 

Le  l'ait  est  qu'une  table  garnie  d'une  belle  nappe  blanche 

Halle  bien  ini«Mi\  les  sens  el  L'appétit,  que  si  elle  était  reeou- 

verle  d'une  affreuse  toile  goudronnée,  si  bien  peinturlurée 
soit-elle. 

On  tenait  à  l'oeuvre  et  aux    étoiipes  à    ce    point    que,   dans 

l'abandon  de  ses  bien-  par  donation,  on  réservait  tant  de  blé 
«■/  de  lard  pour  m  pitance,  et  tant  de  livres  d'œuvres  ei 
autant  cFétovpes  préparées,  prêtes  à  être  filées. 

El  dire  qu'aujourd'hui  la  culturedu  chanvre  esl  à  peu  près 
abandonnée  dans  nos  villages.... 


Une  autre  culture  qui  fui  jadis  très  répandue,  ei  qui  o  dis- 
paru depuis  longtemps  déjà,  c'esl  celle  «lu  millet. 

Chaque  petil  ménage  avait  sa  meillotère  —  son  champ  à 
millet,  •  dont  les  produits  étaieni  conson ïs  habituelle- 
ment a  la  maison,  comme  la  larme  de  mais  l'a  été  après. 

Le  millet  faisait  d'excellentes  bouillies.  Avant  de  le  ouire 
du  i  m,  on  le  pilait  rement  dans  un  mortier, 

le  nom  de  pilé  ou  de  plû  bous  lequel  il  était  connu. 

le  croi     |u  de  <  lomté  en  pilent  encore  dans 

leurs  [eux,  qu  mil  oulèvent  et    -<•  reuversenl  alterna 

iis.inriii.  .1"    ■'  d  .  '■!  qu'ils  chantent 


—  359  — 

/  n'en  peux  pu! 
Pilez  le  plâ  ! 
I  n'en  peutt  ma  I 

Les  nourrices  font  aussi  semblanl  d'en  piler  sur  le  fronl 
«les  bébés  quand  elles  disent,  pour  les  distraire  : 

Groue  œillot, 
P'tiot  œillot, 
Toqu'meillot  ! 

Le  dernier  marchand  de  raille!  parcourait  mélancolique- 
ment, après  ls;iu,  tes  nies  de  Besançon,  avec  sa  petite 
voiture,  ou  était  attelé  un  vieux  cheval  qui  avait  nom  Bavard, 
comme  celui  de  Renaud,  L'aîné  des  quatre  Ris  Aymon.  De 
temps  en  temps  l'attelage  s'arretail  à  on  carrefour  et  le  pau- 
vre marchand  glapissait  : 

Au  plâ!  au  plâ  .' 
Tro  sous!  tvo  Uut 
Quat'sous  moins  in  in  ' 

Et,  après  un  petil  temps  d'arrêt, 

Hue,  bu<i<<  ' 

La  veille  n'allait  déjà  plus.  La  mode  était  aux  fécules 
exotiques  qui  eut  un  nom  plus  distingué...  Le  millet,  c'était 
lien  pour  les  ,^ens  d'autrefois  ! 


§  V.  —  ADMINISTRATION. 

Pays  de  main-morte. 

La  féodalité  n'ayant  pas  jugé  à  propos  d'élever  un  caste!  à 
Broye-lez-Pesmes,  les  gens  du  pays  n'ont  jamais  eu  à  souf- 
frir du  voisinage  d'une  maison  seigneuriale  sous  aucun 
rapport.  De  sorte  que,  quand  ils  avaient  payé  l'impôt  aux 
décimateurs  et  aux  collecteurs  de  tailles,  ils  étaient  à  peu 
près  quittes. 


—  360  — 

La  plupart  dos  terres  et  des  maisons  du  village  n'avaient 
pas  été  affranchies.  Elles  sont  restées  biens  de  main-morte 
jusqu'en  1789. 

Mon  aïeule  paternelle,  Jeanne-Bapt.  Lefranc,  pour  sauve- 
garder ses  droits  dans  la  succession  de  ses  parents,  «lut 
mettre  en  œuvre  M"  Guillaume,  notaire  à  Pesmes,  le  26  jan- 
vier 1789,  à  l'effet  de  constater  par  acte  authentique  a  que 
t  comme  elle  était  obligée,  par  les  lois  divines  et  humaines, 
i  de  suivre  son  mari  en  sa  résidence,  el  par  là,  quitter  la 
►  communion  de  ses  père  et  mère,  voulant  user  et  profiter 
»  du  remède  et  de  la  laveur  accordés  par  la  coutume  génë- 
»  raie  de  la  province  aux  ailes  de  condition  main-mortable, 
••  elle  a,  à  cet  effet,  eu  présence  desdits  notaire  et  témoins, 
i  lui  et  mangé  en  ta  maison  résidentielle  desdits  Lefranc  et 
»  Gruyot,  pour  manifester  la  volonté  qu'elle  a  de  ne  point 
mpre  la  communion  d'avec  ses  père  et  mère,  e1  par  là, 
l  pouvoir  leur  succéder  de  la  même  manière  que  si  elle  était 
i  restée  en  leur  communion  jusqu'à  leur  mort,  laquelle  com- 
»  munion,  nonobstant  ledit  mariage,  elle  entend  et  prétend 
i  conserver,  de  tout  quoy  elle  a  eu  besoin  de  l'authorité  de 
i  Bon  1 1 1 . 1 1 ■  > ,  présent  et  l'authorisant,  etc....  » 

Contrôlé  à  Pesmes,  le  26  janvier  1189.  Reçu  l.~>  sous. 

Signé  :  Mu.i.ot,  et,  pins  bas,  Guillaume,  notaire. 

On  appelait  cela  un  acte  de  respect,  sans  doute  pour 
couvrir  un  peu  ce  que  des  exigences  pareilles  avaient  d'igno- 
minieux. 

SANS    \i  i  m  i  \  non. 

i  i       de  la  commune  consistaient  en  ce  que  chaque 

m.  h  ni  feu  devait  au  Beigneur  une  poule  en  temps 

■  i.-  carême  entrant  ;  et,  poui   chaque  moix  et  maison  de  la 
contenance  d'une  faulx  de  pré,  deua  gro  ■'  .  pour  chaque 

■ 

'.  ■  '■  m    li    i.  iii    en  t  raw  ho  i iointtf,  d  'i",p    Dotn  ' Il appin 


—  361  — 

faulx  de  pré  main-mortable,  aussi  deux  gros  ;  pour  chaque 
journal  do  terre,  trois  blancs  ;  le  tout  taille  à  eux,  payable 
audit  Broyé,  le  jour  de  feste  Saint-Michel. 

Les  fours  eti ilins  bannaux  étaient  de  partage  entre  le 

baron  de  Pesraes  el  le  commandeur  de  Montseugny.  Comme 
les  fours  étaient  acensés  annuellement  à  raison  de  :'><mi  li>  : 
chaque  ménage  ou  feu  était  imposé  &  :>  livreU  7  ious. 

Tous  ces  droits  en  somme  étaient  plus  avilissants,  plus 
blessants  ou  contrariants  que  lourdsa  supporter. 

L'intervention  de  l'autorité,  quelle  qu'elle  Boit,  pour  sur- 
veiller et  môme  pour  régler  les  agissements  «les  individus 
dans  la  société,  est  légitime,  ne  servit-elle  qu'à  établir  qu'il 
y  a  quelque  chose  de  supérieur  &  nos  intérêts  particuliers  ou 
corporatifs  :  la  justice  el  l'intérêl  de  tout  le  monde,  «  >n  com- 
prend donc  que  cette  autorité  coûte  à  ceux  &  qui  «'lie  profite  : 
c'est-à-dire  au  corps  social. 

Mais  si  les  charges  imposées  et  destinées  à  payer  des 
services  ne  répondent  plus  à  leur  lin  ;  si  les  services  ne  Boni 
plus  rendus ,  et  que  les  charges  subsistent  quand  même,  il 
\  .1  fraude.  C'est  drainer  une  terre  qu'on  n'arrose  pas.  Cesl 
par  conséquent  la  dessécher. 

\iirait-on  crié  autant  contre  les  tailles  el  les  redevani 
si  elles  avaient  été  employées  à  des  œuvres  d'utilité  géné- 
rale, comme  à  la  création  de  routes,  au  développement  de 
l'instruction,  etc. 

L'autorité  civile,  sous  ce  rapport,  négligeait  un  peu  ses 
devoirs.  On  aurait  dit  qu'elle  ne  tenait  qu'à  ses  droits  doma- 
niaux, qu'au  produit  pécuniaire  de  la  seigneurie!  Elle  n'in- 
tervenait pour  ainsi  dire  jamais  dans  les  affaires  de  la  com- 
munauté, si  ce  n'est  puni'  mettre  sou  veto  aux  changements 
et  aux  réformes  qu'on  aurait  eu  Bure. 

/.<■  franc  =  13  sous  el  î  deniers,  monnaie  de  France  ; 
Le  gros  5=  I  son,  l  denier  et  un  liera  de  denier  ; 
Le  blanc  =  3  deniers  et  un  tiers  de  denier; 
Le  sol  =  8  deniers. 


—  362  — 

De  temps  en  temps  pourtant,  après  la  conquête  française, 
le  sub-délégué  de  Gray  rendait  compte  à  l'intendant  de  !;i 
province  de  la  situation  matérielle  qui  était  faite  aux  manants 
de  rendroil  :  mais  en  réalité  il  se  bornai!  à  transmettre,  en 
les  annotant,  les  états  que  les  échevins  lui  fournissaient  sur 
des  questions  générales. 

L'étal  dressé  en  I7ô!)  par  ce  fonctionnaire  déclare  que  les 
charges  <\e<  habitants  «le  Broyé  sont  suffisantes.  Il  n'y  aurait 
qu'en  cas  d'orvales,  comme  gresles,  gelées  et  incendies  qu'il 
tiendrail  de  les  diminuer.  La  communauté  ne  serait  pu* 
suffisamment  imposée  pri  ;  égard  aux  autres,  qui  Vavoisinent, 
ei  à  l'étendue  et  bonté  de  son  territoire  ;  mais  f  estime  écrit 
le  sub-délégué,  qu'elle  l'est  suffisamment  par  la  généralité 
île  main-morte  dont,  elle  est  affectée,  ainsi  que  des  autres 
redevanet 

Libertés  communales. 

Kii  appaivmv  on  no  pouvait  guère  rêver  une  liberté  mu- 
Dicipale  plus  complète.  Ecoutez  ! 

Les  manants  el  habitants  de  Broyé  avaient  le  droil  de  s'as- 

bler   tout  lu'il  en  était  besoin  pour  la  résolution 

de.<  affaires  de  la  commune,  sans,  pour  ce,  demander  licence 

mir, me  d    gui  gue  ee  sidl. 

il-  avaient  le  droit  d'élire  pour  chaque  année  deux  prit- 

d'Iminmes  rehrri,r<  eliarges  de  négocier  ces   affaires   et    d'as- 
■■-,-  d,in  I  le  /""/'  Une  lionne  police. 

imme  ces  échevins  avaient  qualité  pour  relever  les 

.  assembl  'aie  < 

pour  punir  les  contrevenants  de  telle  peine  gue  bon  leur 

iblerait,  cettu  peine  devant  être  applicable  aux  besoin  i  de 

i,i  fabrique  el  au  profit  de  la  communauté,  aauf  les  trois 

p>i   ,-,  r,  ,,oir  il    ,)    la   seigneurie ,    il    ivslillo 


dnm  chaque  cora 
iiiiiit.'iiiii  ai h<  (ii  Ciiiton  C    1 1 'i 


—  363  — 

de  tout  cela,  qu'en  vertu  die  leur  constitution  communale,  les 
échevins  étaient  chargés  d'assurer  les  volontés  des  'j,ru>  du 
village,  comme  les  consuls  de  Rome  de  faire  exécuter  1rs 
décrets  du  Sénat  el  du  peuple  romain. 

La  communauté  avait  aussi  le  droit  de  présenter  chaque 
\e  mi  personnage  bien  qualifié  'eproche  à  Vagrê- 

meni  de  I"  prévôté  du  lieu  /iota-  être  -ter, 

c'est-à-dire  pour  faire  le  devoir  requis  <<  I"  conservation 
,  tant  du  finage  que  des  praiyi 

C'était,  comme  on  voit,  une  liberté  municipale  très  grande. 
C'étail  l'autonomie,  puisque  uos  manants  de  Broyé  pouvaient 
réglementer  leur  police,  se   prescrire  des  lois  el  nommer 

leurs  juges. 

Décidément,  ce  qui  paraissai)  leur  manquer,  ce  n'était  pas 
la  franchise  politique,  mais  bien  la  capacité  de  s'en  servir. 

D'abord  ils  n'étaient  guère  en  état  <le  saisir  toute  l'impor- 
tance des  améliorations  donl  nous  jouissons  aujourd'hui,  ni 
des  réformes  dont  ils  avaient  peur  :  ensuite  ils  n'étaient  pas 
non  plus  dans  (les  conditions  h  les  appliquer.  Ils  n'avaient,  en 
un  mot,  ni  l'esprit  d'initiative  qui  conçoit,  ni  la  force  maté- 
rielle qui  exécute. 

Autonomie    illusoire,  d'ailleurs,  puisque    nos    manants 
étaient  de  condition  mainmortable  comme  aussi  leur  m< 
maisons  et  héritages,  tant  envers  ledit  baron  que  d'autres 
particuliers  ayant  droit  de  seigneurie,  tailles,  cens  ou  rede- 
vances audit  Broyé,  chacun  d'eux  endroit  soy. 

Ce  charabia  «lu  Terrier  de  1660  prouve  que  Broyé  ne  s'ap- 
partenait pas  ;  chaque  habitant  n'y  était  que  le  tenancier  de 
sa  terre.  Il  ne  pouvait  disposer  de  rien. 

On  déclarail  que  le  paysan  étail  maître  dans  sa  commune  ; 
on  en  faisait  quasiment  un  petit  souverain....  Mais  ce  pauvre 
souverain  était  tenu  de  reconnaître  et  confesser,  pour  l<<i 
et  /  qu'il  restait  homme  origi  lel  et  juridique  de 

condition  servile,  taillable ,  corvoyable,  etc.:  el  tout  cela  à 
perpétuité. 

Sa  servitude  devait  être  éternelle. 


—  364 


Combien  nou&devons  bénira  Broyé  la  révolution  salutaire 
de  1 7S!  )  !  Elle  nous  a  débarrassés  de  toutes  ces  perpétuités 
qui  sont  une  image  de  la  mort. 

Monsieur  le  curé. 

En  fait,  l'autorité  des  échevins  étail  nulle,  parce  que  les 
manants  de  Broyé  ne  pouvaient  leur  en  conférer  que  ce 
qu'ils  en  avaient  eux-mêmes,  c'est-à-dire  zéro  ;  leur  autorité 
était  nulle,  dis-je,  parce  qu'ils  étaient  sans  prestige  ;  parce 
que,  n'étant  rien  par  eux-mêmes,  ils  n'étaient  pas  la  repré- 
sentation d'un  pouvoir  forl  et  conséquemment  respecté. 

Il  y  avait  une  seule  autorité    sérieuse    et  agissante  d.ins  la 

commune:  c'était  l'autorité  ecclésiastique.  1-e  seul  maître  et 
seigneur,  c'était  le  curé. 

Sans  lettres  patentes  et  sans  investiture,  en  vertu  de  sou 
caractère  sacerdotal,  le  prêtre  était  devenu  dans  sa  paroisse 
l'œil  et  l'oreille  du  pouvoir  séculier.  Il  suppléait  ce  pouvoir 
absent  ;  H  l<'  représentait  ;  et  il  avail  fini  par  en  exercer  les 
principales  attributions. 

c'est  bien  lui  qui  réglait  <•!  qui  surveillait  la  police  îles 
mœurs;  qui  maintenait  la  décence  dans  lea  fêtes  publiques 
et  privées  ;  qui  autorisait  ou  qui  faisait  prohiber  les  jeux  et 
le-  amusements  frivoles. 

:  luiencorequi  dirigeait  l'instruction  de  la  jeunesse  ; 

qui  stylait  et  qui  gourmandait  les  recteurs  d'école  ;  qui  pres- 

crivait  l'enseignement  qu'on  pouvait  donner  <'t  les  exercices 

auxquels  H  était  permis  de  ><•  h\  rer. 

lui  toujours  'i111  tenait  note,  dans  ses  registres  «le 

paro  le  la  vie  ch  lie,  h  m111  célébrai!  les  nais- 

m-  ôpultures,  s'associanl  ain  i  è 

i  unent     in.' able*  si  louchants  de  chaque 

famille  .  cho  e  ônormi 


—  365  — 

Son  domaine  étail  spirituel.  Mais  I»'  spirituel  esi  dans  tout, 
s'étend  à  tout  et  domino  tout. 

Auxiliaire  du  Christ  el  ministre  de  Dieu  sur  terre,  l'auto- 
rité d'un  prêtre  était  bien  autremen!  solide  et  inattaquable 
que  celle  d'un  haut  baron,  mortel  en  définitive  comme  les 
autres. 


L'importance  d'un  curé  dans   la  commune  étail  énorme. 

Il  esi  dans  la  nature  des  choses  dn  resté  que  si  un  membre 
prend  ^\r^  développements  excessifs,  o'esl  presque  toujours 
an  détrimenl  des  autres  parties  du  corps. 

L'autorité  du  prêtre  éclairée,  disciplinée  el  surtout  savam- 
ment organisée,  avait  Uni  par  s'imposer  absolument.  Elle 
avait  grandi  peu  à  peu,  absorbant  celle  des  autres  pouvoirs 
établis,  <\cr<    pouvoirs  élus  surtout   qui   n'étaient    que 
créatures  el  ses  très  humbles  serviteurs. 

Un  pasteur  avait  tant  de  petits  moyens  pour  diriger  la 
charrue  administrative,  Bans  avoir  Pair  d'y  mettre  la  main! 

Il  avail  donc  pris  sans  beaucoup  de  peine  la  direction 
absolue  de  l'ordre  politique  el  moral  qui,  croyait-on,  ne 
pouvail  exister  Bans  lui  ou  en  dehors  de  lui. 

Le  o<>  janvier  17!)0  avait  lieu  l'élection  des  officiers  niuni- 

eipaux  de  Broye-lez-Pesmes.  Sous  l'influence  de  l'esprit  de 
révolte  qui  souflail  partout,  des  éléments  hostiles  au  clergé 

flIIVIll  élus. 

Une  élection  aussi  insolite  bouleversait  toutes  les  tradi- 
tions. Aussi  l'abbé  Descourvières,  curé  du  lieu,  tonna-t-il  en 
chaire  contre  tes  gens  qu'on  avait  choisis  pour  administrer 
les  affaires  de  la  commune.  Ils  ne  sont  pas  faits  pour  rem- 
plir de  telles  placée,  dit-il,  ce  sont  (/es-  homme»  captieux  ei 
de  ^réputation  équivoque,  qui  ne  sachant  pas  te  conduite, 
étaient  incapables  de  conduire  lu  communauté.  Ceux  qui 
les  ont  nommés  ont  chargé  leur  conscience,  et  volé  la  veuve 
et  l'orphelin,  etc. 


—  366  — 

Bref,  le  bon  abbé  déclara  le  scrutin  nul  et  convoqua  tous 
les  électeurs  de  la  paroisse  pour  le  dimanche  7  février 
suivant,  à  l'effet-de  procéder  à  de  nouvelles  opérations  élec- 
toral 

Gelait  donna  lieu  aune  longue  procédure. 

Je  ne  sais  ce  que  l'affaire  devint  :  et  cela  importe  assez 
peu.  Elle  montre  seulement  combien  était  grjsmde  l'ingé- 
rance  du  curé  dans  l'administration  de  la  commune. 

Comme  nous  l'avons  dit,  l'intervention  de  l'Etal  étail 
nulle,  ou  peu  s'en  faut,  dans  les  choses  des  communautés  ; 
et  le  rôle  îles  échevins,  livrés  à  eux-mêmes,  se  bornait  à 
amodier  des  pâquis  :  l'intendance  se  chargeait  d'aménager 
leurs  forêts,  et  l'église  de  manger  leurs  revenus. 

u'esl  pas  que  la  cure  de  Broyé  fût  très  riche  [*),  ni  que 
les  titulaires  qui  l'occupaient  tussent  des  hommes  d'argent, 

non  ;  car  la  plupart  ont  été  de  bons  prêtres.  Mais    le  servieo 

(t)  La  'lire  .iv;iit  en  propriété  quinze  journaux  de  terres  labourables  et 
neuf  (aulx  il'1  pi  - 

Il  était  ilù  .-m  curé,  en  dehors  de  cela,  deux  gerbes  'le  blé  par  feu  et  par 
ménage,  >;m>  compter  la  gerbe  qui  étail  'lui-  comme  dime  par  journal  'le 
chaque  es|  ins. 

in  arrêt  da  Parlement  (30  mai  1785)  réglait  les  droits  curiaux  de  Broye- 
lez-Pesmes. 

Le  curé  devait  recevoir  pour  droîl  de  mariage  et  '!>•  lettres  de  recedo  par 
iches,  trois  livres,  par  les  médiocres,  deux  livres,  et  par  les  pauvres, 
une  livre  :  tant  qu'il  puiste  exiger  double  droU  lorsque  lot  <iri<.r  mariât 
su, ii  d 

Les  droits  mortuaires  sont  également  de  trois  livres   pour  lot  chefs 
deux  livres  pour  les  médiocres,  et  une  livre  pour  les 
pauvret.  Pta  chefs  d'hôtel  on  entendait  le  mari  et  la  femme,  et,  i  leur 
ut,  t.-  plus  ancien  de  la  famille. 

ii m   i..  m  [eux  document,  dont  je  dois  la  communication  à  mon  dévoué 
compatriol                iot,  nous  voyons  qu'il  osl  défendu  eu  curé  de 
propriei  l<  ■•!  <•!  d'argent  qu'on  faisait  bénii  par  lui  ■>  l'occi 

H  pour  tout,  poui  la  i  oui  I"  bon 

lion  puits  i  * ■  ■ — 

.  i  ni  tenu  'ii'  payci  une  ;;'■!  be  de  trois  pieds  de 
.,  do  la  i' •  nte  Cvoiw 

,<  failli  imptei  la  > 


—  367  — 

du  culte,  .ivre  toul  ce  qui  s'y  rattache,  a  besoin  d'apparat,  de 
décorum,  d'un  certain  luxe  extérieur.... 

Les  dépenses  faites  en  vue  d'une  amélioration  communale 
quelconque  sonl  simplement  utiles,  vous  dira  sérieusemenl 
un  théologien  ;  celles  qui  sonl  relatives  au  culte,  sonl  les 
seules  nécessaires  :  porta  unum  est  neeessarium. 

Des  nommée  imbus  d'idées  pareilles  seul  de  bien  mau- 
vais administrateurs. 

La  conquête  française  a  apporté  une  atténuation  sensible 
a  l'omnipotence  du  clergé  dans  im>  campagnes.  Mais  ce  ne 

fui    pas  sans  peine. 

Ainsi  ,  après  HiTi  ,  l'Administration  française  voulu! 
imposer  au  clergé  franc-comtois  la  tenue  des  livres  de  pa- 
roisse, de  registres  spéciaux  pour  les  baptêmes,  les  mariai 
et  les  sépultures,  comme  cela  bs  pratiquai!  dans  les  autres 
parties  «lu  royaume.  Or,  pour  exercer  sur  la  tenue  de 
registres  un  contrôle  presque  dérisoire,  l'Intendance  et  le 
Parlement,  el  même  l'Archevêché,  jurent  obligés  d'agir  avec 
énergie  el  persévérance. 

Les  membres  du  clergé  n'entendaienl  pas  Bubir  le  contrôle 
de  qui  que  ce  fût,  même  dans  un  sei  déminent  d'ordre 

public,  ils  tenaient  à  leur  Indépendance, 

A  cet  égard,  les  événements  de  I7S!)  la  leur  uni  donnée 
complète;  puisqu'aujourd'hui  ils  peuvent  tenir  leurs  livres 
de  pamisse  comme  ils  l'entendent  et  sans  visa  de  personne. 


;  VI.—  EDUCATION  ET  DRESSEMENT (i). 

Les  vieux  laboureurs. 

Bronzés  par  le  soleil  el  les  intempéries,  amaigris  par  suite 
d'un  travail  excessif,  d'excès  et  de  privations,  négligés  dans 

(1)  Tous  nos  renseignements  sonl  puisés  dans  '!<•-  souvenirs  ou  dans  les 


—  368  — 

leur  tenue,  flétris  avanl  l'âge,  les  paysans  d'autrefois  res- 
semblaient plus  à  des  êtres  demi-sauvages  qu'à  des  hommes 
civilises. 

Toutefois,  on  aurait  tort  de  les  juger  ton!  à  l'ait  d'après  leur 
accoutrement  et  sur  la  mine. 

Nos  vieux  parents  avaient  leurs  défauts  sans  doute,  et  des 
vices  dont,  nous  faisons  bien  de  nous  corriger;  mais  ils 
avaient  aussi  quelques  qualités  que  nous  devons  tâcher  de 
ne  pas  laisser  perdre. 

Leur  système  d'éducation  s'adaptait  très  bien  aux  condi- 
tions de  demi  servage  dans  lesquelles  ils  ôtaienl  maintenus. 

Leur  indifférence  n'était  qu'à  la  surface.  Sous  des  dehors 
d'apathie  se  dérobait  leur  sensibilité,  qu'il  aurait  été  peu 
convenable,  croyaient-ils,  et  quelquefois  dangereux  de  laisser 
paraître. 

Leur  bonhomie,  leur  air  en  dessous,  leur  aspect  sauvage, 
toul  cela  n'éi.-iit  l«>  plus  souvent  qu'un  masque  qui  servail 
à  cacher  une  àme  ordinairement  maîtresse  d'elle-même. 

Les  paysans  étaient  habitués  à  cotte  volonté  énergique 
le  jeune  âge,  se  gardanl  bien  de  foire  i itredes  sen- 
timents qu'ils  éprouvaient,  ils  avaient  doublement  ,  el 
comme  campagnards  el  comme  Comtois,  oette  timidité 
défiante  qui  rend  nos  compatriotes  en  général  gauches  et 
peu  adroits. 


ignaient  souvent  Bans  approuver  ;  car  résignation 

sentiment,  lis  réglaient  leur  conduite  sur  des 

toial  et  but  la  force  des  choses,  n  fallait 

hien.se  eourlier,  obéir  aux  prescriptions  de  la  loi  et  Bubir 

le    m  titutiona  au  moyen  desquelle    lea  castes  nobiliaire  el 


on)  '•!'''  i.ni    pai  |i     i i6    'i  Rvnnl  la  Révolu 

ii"ti  ;  dam  h  m  "M   ,iu  m, -ux  tâmpl  ;  011  an  mol  ilani 

•I.      'lui  uni'  ni     U  |.|u       uiiM'iil    un 


—  :36i»  — 

sacerdotale  avaient  espéré  éterniser  le  régime  féodal  à  leur 
profit, 

Ges  pauvres  gens  ne  craignaient  rien  tant  que  la  licence 
dans  le  gouvernement  de  leurs  affaires.  El  cette  crainte  les 
empêchait  de  rêver  plus  d'indépendance  qu'ils  n'en  possé- 
daient. 

Ils  no  couraient  dune  pas  après  les  Libertés  politiques, 
lesquelles  ne  vonl  pas  Bans  une  certaine  capacité  morale  qui 
leur  manquait.  Us  estimaient  avoir  assez  de  libertés  comme 
cola. 

Ils  étaienl  persuadés  du  reste,  et  cette  croyance  avait 
alors,  comme  elle  a  encore  à  présent,  beaucoup  d'appareno 
de  raison,  ils  étaient  persuadés  qu'un  régime  de  Licence, 
qui  est  la  liberté  des  inconscients,  engendre  plus  de  désordre 
e1  de  perturbations,  plus  de  misères  en  somme  qu'une  - 
vitude  administrative  appuyée  sur  des  règlements  de  bien 
public. 

Respect  de  l'autqbitê. 

L'éducation  qu'ils  donnaient  aux  enfanta  était  fondée  sur 
cette   maxime   morale  qu'une  crainte  reapectu  i   /,• 

principe  de  la  .  On  ne  discutait  pas  l'autorité  établie- 

on  n'osait  même  pas  raisonner  contre  elle. 

()"  morigénait  dès  le  jeune  ôge  en  Taisant  sentir  aux 
enfants  la  nécessité  d'obéir  à  leurs  parents,  et  .le  se  montrer 
soumis  et  respectueux  vis-à-vis  de  ceux  qui  avaient  qualité 
[inur  commander. 

Obedientia  fœlicitatU  mater,  on  se  trouve  bien  d'obéir. 
Tout  joug  est  plus  eu  moins  lourd  à  supporter;  et  nous 
sommes  naturellement  enclins  à  nous  y  soustraire. 

L'espril  d'obéissance  a  doue  besoin  d'être  Bac \é  par  une 

longue  discipline,  que  les  parents  [e  sachent  bien,  et  aussi 
par  l'exemple,  pour  qu'on  s'y  habitue;  tandis  que  l'esprit 
d'insubordination  pou  •/.  de   lui-même  chez    tout    |... 

monde,  eu  peu  s'en  tant 

24 


—  370  - 

De  ces  deux  habitudes  opposées,  l'une  est  bien  moins  que 
l'autre  compatible  avec  la  tranquillité  sociale  et  l'ordre 
public,  moins  favorable  même  au  bien-être  particulier. 

Aussi  les  gens  sages  de  tous  les  temps  se  sont-ils 
efforcés  de  prémunir  l'enfance  contre  cette  tendance  natu- 
relle de  l'esprit  à  l'insoumission. 

Esprit  de  corps. 

Une  autre  règle  de  conduite  chez  nos  aïeux,  c'était  de  ne 
pas  vilipender  leur  profession.  En  toute  circonstance,  au 
contraire,  on  tachail  d'inculquer  à  la  jeunesse  le  sentiment  de 
la  dignité  du  corps  d'état  auquel  on  se  faisait  gloire  d'appar- 
tenir. 

Mauvais  métier  qui  t'ait  honte  à  son  maître,  a  dit  un  vieux 
proverbe.  Et  bien  à  plaindre  celui  qui  a  honte  du  métier 
qu'il  t'ait,  ajouterons-nous;  car  il  travaille  sans  plaisir,  sans 
entrain,  sans  courage.  11  n'est  pas  soutenu  par  ce  qu'on 
appelle  le  feu  sacré  ;  et  comme  ces  soldats  qu'on  l'ail  marcher 

à  l'ei mi  avec  la  persuasion  d'une  défaite,  il  est  vaincu 

d'avance, 

Sous   d'  rapport,   nos   grand8-pôres   avaient   au   moins   I.' 

sentiment  de  la  convenance, 

Etaient-ils  sincères?  Ils  ne  voyaient  rien  de  plus  inmo- 
rable,  partant  rien  de  pins  beau,  que  l'étal  de  laboureur.  El 
Ils  élevaient,  comme  mais  le  disions  tout  a  l'heure,  leur 
monde  dans  ces  Idées-là;  bien  différents  de  ers  parents 
maladroite  qu  mdent  en  plaintes  contre  les  misères 

«le  leur  professi coin -i  toutes  i«'s  professions  n'en 

avaient  p 

d<  tu  d'éducation,  absoh ni  opposés, 

doivent  produire  dei  fruil    bien  différent     L'un  raffermit  le 
moral  <\>    enfanta,  pendanl  que  l'autre  jette  l'amertume el  le 
.  ment  au  cœur  de  jeune   citoyens,  et,  '-h..  <•  pins 
e  plaire  -m  monde. 


—  371   — 

Il  AlîITUDES   DE  TRAVAIL. 

Il  y  a  cinquante  ans  à  Broyé,  dès  les  minuit,  un  chef  de 
famille  était  debout.  Dans  la  belle  saison,  c'était  pour  BC 
rendre  au  labour  avec  son  petit  valet;  dans  la  mauvaise, 
c'était  pour  battre  à  la  grange.  On  battait  à  la  grange  et  on 
labourait  à  la  lanterne. 

A  sept  heures,  Yaplice  (!)  Unie,  on  naîtrait  à  la  maison 
pour  déjeuner  et  pour  envoyer  les  bêtes  aux  champs 

Gela  fait,  la  besogne  ne  manquait  pas.  Car  par  nécessité  ou 
par  économie,  c'est  le  laboureur  qui  réparait  ou  qui  fabri- 
quait tout  son  matériel  de  culture,  ses  chariots,  sa  charrue, 
sa  herse,  ses  râteaux,  etc.  Et  ce  matériel  primitif  et  grossier, 
comme  on  pense,  se  détraquait  bien  souvent. 

Le  bûcheron  de  la  commune  mettait  dans  chaque  moule 
de  l'affouage  des  bois  &  toutes  ans;  des  billes  d'orme  pour 
faire  des  essieux,  des  perches  pour  entretenir  la  toiture  ou 
pour  regarnir  les  chamarrù  I3). 

Après  cela,  vous  savez,  un  bon  chrétien  ne  se  (aisait  pas 
faute  d'aller  cueillir  en  forêt,  pendant  que  les  gardes  dor- 
maient, les  matériaux  dont  il  pouvait  avoir  faute.  Voler  la 
communauté,  c'est  ne  voler  personne. 

Pas  n'était  besoin  d'un  charron  pour  remettre  à  neuf  la 
queue  ou  les  oreilles  de  la  charrue,  pour  ajuster  des  bres- 
sots  (l)  de  voiture  ;  pas  plus  que  du  forgeron  pour  les  ferrer. 
Charron,  maréchal  et  forgeron,  tout  ce  monde  d'artisans 
coûtait  trop  cher  ! 

Le  maréchal  surtout  !...  C'est  à  cause  de  cela  que  dan.-  nos 
pays  de  sable,  on  ce  terrait  jamais  les  chevaux  qui  s'en 
allaient  nus-pieds,  comme  leurs  maîtres  du  reste. 

(1)  Aiplèie.  (Voir  ce  mot  au  Glossaire.) 

C2)  Champs,  Champoy.  (Voir  au  Glossaire.) 

(3)  Voir  ces  mois  au  Glossaire. 


—  372 


Lé  vieux  paysan,  vrai  Jean  Fait-Tout,  s'arrangeait  autant 
que  possible  pour  n'avoir  besoin  de  personne. 

Homme  de  rude  labeur,  il  suffisait  à  tout.  Et  il  savait 
utiliser  son  monde,  je  vous  en  réponds. 

Dur  pour  lui-même,  il  n'était  pas  tendre  non  plus  pour  ses 
compagnons  de  misère.  Sa  femme  L'appelait  notre  ntaitve, 
et  ses  enfants  n'osaient  lui  parier  qu'à  la  troisième  personne  : 
le  père  veut-il  qu'on  fasse  ceci  !...  Ou  simplement:  veut-il 
qu'on  aille  là  ".'....  h.,  c'était  lui. 

11  donnait  à  tous  l'exemple  d'Une  sobriété  phénoménale  et 
d'une  activité  infatigable. 

Chiche,  il  Pétait  même  pool*  ses  terres  auxquelles  il 
montrait  le  fumier  plutôt  qu'il  n'en  répandait. 

Pour  lui,  un  sou  était  un  sou.  Il  était  à  cheval  sur  ses 
droits,  et  il  se  serait  fait  étriper  pour  un  quart  de  gerbe  au 
partage  de  la  dime. 

Son  rêve,  nous  l'avons  dit,  c'était  de  pouvoir  se  passer 

d'aid.-s.  On  n'est  pas  toujours  sûr  d'en  avoir  à  l'heure  du 
beSÔifl,  iin'iiie  eu  payant. 

<:••  rôve  chimérique  avait  pourtant  été  réalisé  en  partie  par 
noir.'  laboureur  de  Broyé. 

Son  jardin  lin  donnait  th's  léonines  <|ue  le  lard  de  son  saloir 
a--ai-oiinail.   Sa  l'ein pétrissait  et   cilisai!    la   inonluiv.    Ses 

filles  façonnaient  son  linge  de  corps,  lui  tricotaient  des 
chautêêi  •■!  lui  confectionnaient  des  vêtements  avec  un 
net  dont  la  trame  avait  été  filée  a  la  maison. 

!»«•   \  m,  ou  §»en  pe  i  luanl   ù   la   \  lande  .  on  n'en 

mangeai!  chei  noi  geni  qu'aux  grand  jours  de  fête  et  pour 
les  réjou  de  famille. 

t  in  n'achetait  presque  rien 

i.  ,i genl  ■  lait    I  rare  t 


—  373 


On  peinait  beaucoup  et  on  ne  récoltait  guère. 

Les  champs  d'abord  rapportaient  peu,  parce  que  la  terre 
manquai!  d'engrais,  on  qu'elle  était  mal  préparée,  ou  que  la 
saison  avait  marché  de  travers....  Et  quand  un  laboureur 
avait  mis  de  côté  la  graine  nécessaire  pour  les  semailles 
prochaines  el  pour  la  consommation  de  son  ménage,  le 
produit  «lu  surplus  suffisait  à  peine  pour  payer  les  tailles,  le 

valet  et  une  petite  redevance  au  vieil  usurier  de  l'i'.-mo  àqui 
il  avait  emprunté  cent  écus  depuis  Tannée  où  tout  son  bétail 
avait  péri. 

Aussi  quand  le  pauvre  homme  passait  le  long  des  mares, 
il  entendait  les  crapauds  qui  lui  chantaient  ce  refrain 
monotone  et  bien  vrai  :  pour'houme  .'...  pour'houme  '.... 
pour'houme  !  !  !  pauvre  homme  ' 


Ces  mœurs  simples  et  nide>,  cette  existence  austère,  toute 

de  privations,  de  modestie  et  de  travail,  nous  avons  encore 
été  témoins  de  tout  cela. 

Et  ces  braves  gens  ne  récriminaient  pas  tout  haut  contre 
la  destinée;  ils  ne  maudissaient  p;is  la  vie;  ils  aimaient  au 
contraire  avec  une  passion  jalouse  leur  pauvre  toit  de 
chaume  et  leur  pays,  et  ils  bénissaient  Dieu  de  les  avoir  mis 
au  monde. 


§  VU.  —  CARACTÈRE  ET  MŒURS. 

Amour  du  clocher. 

Ils  aimaient  leur  pays. 

Amante*  beati  :  aimer,  c'est  être  heureux.  Leur  existence 


—  374  — 

se  passait  généralemenl  dans  ce  petit  coin  de  terre  et  dans 
cette  chaumière  paternelle  où  ils  étaient  nés.  Ils  y  avaient 
tout,  souvenirs,  affections,  habitudes.  Ils  y  étaient  connus  ; 
ils  y  étaient  à  l'aise  et  ils  s'y  trouvaient  bien.  Partout 
ailleurs,  on  aurait  dit  qu'ils  portaient  le  monde  sur  leurs 
épaules. 

Ce  manque  de  vie  extérieure,  L'habitude  do  se  confiner 
dans  les  limites  de  sa  communauté,  développait  chez  nos 
gens  de  labour  un  sentiment  tout  particulier,  ils  étaient 
jaloux  de   leur    village    comme  des  abeilles   le  sont  de  leur 

ruche. 

Chaque  étranger  qui  venait  y  prendre  résidence  était  ac- 
cueilli avec  une  méfiance  quasi  hostile.  Et  cela  se  comprend. 

Le  nouveau  venu  allait  avoir  sa  part  d'affouage,  sa  pari  ^\o> 
M. 'us  de  la  collectivité  et  taire  d'autant  plus  petite  celle  des 

autres.  Car  on  euinptail  pour  rien  OU  pour  peu  de  eliose   sou 

apport  en  force,  en  produits,  en  assistance. 

1,1  seigneurie  du  lieu  possédait  à  l'entrée  du  bois  de  la 
Vaivre,  près  du  port  Saint-Pierre,  un  vaste  terrain  sillonné 
de  noues  marécageuses  et  parsemé  de  broussailles  avec  des 
sentiers  herbeux  où  depuis  un  temps  immémorial  lebétail 
de  Broyé  allait  paître  el  se  gratter  aux  buissons  librement  et 
sans  rétribution. 

in  ancien  notaire  de  Ray,  nommé  Pyot,  se  rendit  acqué- 
reur de  cette  (riche. 

Pour  la  mettre  en  valeur,  en  exécution  de  la  déclaration 

du  Roy    dU    18  amil    1766,    el  au    mépris  du  droit  d'USage    des 

l'endroit,  il  se  rendit  •>  Broyé  le  22  octobre   1770, 
c  quelque                      munis  de  pelles  et  de  pioche     el 
ivoil  de  défrichement  fut  i ncé   !  ». 


ii me  du  Ui  oye  a  fuit  \ ;itei 

ition,  | i  mettre  du  rapport  In  C Loul  »i  luu  du 

ndu  à  l'yot,       qui  était  n   t<  •   |utque-là  uao  JVichi   couverte  de 
|ti  lia  laliu  "n    ii  ■  lo  i  -  .m  que 


—  375  — 

A  l'annonce  de  ce  que  les  gens  du  village  considéraient 
comme  un  attentai  frustratoire  de  leurs  droits  d'usage,  droits 
plus  que  séculaires,  on  fait  sonner  le  tocsin.  Une  foule 
armée  de  bâtons  h  môme  de  haches  se  porte  à  Saint-Pierre 
où  les  défricheurs  avaienl  déjà  commencé  leur  besogne. 

On  arrache  les  outils  des  mains  des  travailleurs  ;  on  jette 
à  l'eau  les  pioches  et  les  pelles  des  travailleurs;  et,  comme 
Pyot  veut  résister,  on  le  pousse  dans  une  mare  où  l'on 
s'amuse  à  le  rouler  dans  la  vase.  On  remplit  môme  de  boue 
son  bonnet  et  on  l'en  coiffe  après,  pour  lui  bien  barbouiller 
la  ligure,  en  lui  criant  par  dérision  :  ooilà  connue  oit 
arrange  le  général  Paoli  !.... 

Bref,  l'ex-notaire  de  Ray,  après  s'être  débarbouillé  dans  la 
Saône  et  avoir  changé  d'habits,  reprit  piteusement  le  chemin 
de  Gray. 

La  justice  fit  arrêter  cinq  des  habitants  les  plus  compromis 
qui  furent,  après  une  détention  de  quelques  mois,  condam- 
nés à  cent  livres  d'amende  et  la  commune  à  trois  cents  (P. 

Il  me  semble  que  si  l'achat  du  terrain  avait  été  lait  par 
un  habitant  du  village,  cette  opération  n'aurait  pas  donné 
lieu  à  un  pareil  tumulte. 

Si  une  fille  de  famille  aisée  se  mariait  avec  quelqu'un  d'un 
pays  voisin,  on  voyait  de  mauvais  œil  cet  enlèvement  qu'on 
considérait  comme  humiliant  pour  les  garçons  de  la  localité. 
Puis,  c'était  aussi  mie  question  de  soustraction  de  biens  et 
d'amoindrissement  pour  la  communauté,  on  avait  recours  à 
toutes  sortes  de  manœuvres,  et  même  à  la  violence,  pour 
empêcher  un  événement  aussi  fâcheux 

Economie  et  privations. 

Ils  vivaient  chichement  d'épargne  et  de  privations. 

Ils  avaient  un  idéal  à  cet  égard  :  c'est  qu'il  faut  être  assez 

(I)  Archives  départementales  de  la  Haute-Saône  (Bailliage  de  Gray\ 


—  376  — 

prévoyant  pour  se  suffire  à  soi-même  el  pouvoir  se  passer 
des  autri 

Ils  arrangeaient  leur  vie  en  conséquence,  butinant  et 
emmagasinant  tant  qu'ils  pouvaient,  ménageanl  leurs  res- 
sources  el  ne  dissipanl  pas,  comme  des  étourdis,  ce  qu'ils 
se  procuraient  par  leur  travail. 

Le  bon  Bens  leur  disait  que  les  doctrines  qui  l'ont  consister 
le  bonheur  dans  les  jouissances  et  les  plaisirs  coûteux 
riaient  une  erreur  et  une  folie. 

Ils  aimaient  mieux  se  passer  de  bonne  chair  el  de  beaux 
habits;  el  ne  pas  ensuite  être  obligés  de  recourir  à  l'assis- 
tance ir.uitrui.  C'est-à-dire  qu'ils  mettaient  leur  dignité, 
chose  durable,  au  dessus  d'une  satisfaction  d'estomac  ou  des 
joies  passagères  de  La  vanité. 

Aussi  bien  ils  obéissaient  à  un  besoin  de  parcimonie  qui 
leur  était  commandé  par  leur  situation  particulière.  Les 
temps  sont  parfois  Bi  difficiles  pour  le  pauvre  laboureur,  et 
si  irréguliers;  les  événements  sonl  si  incertains  que  celui 
qui  est  réduit  à  compter  sur  les  fruits  de  la  terre  doit  tou- 
jours avoir  peur  d'être  pris  au  dépourvu. 

Ces  braves  gens  par  fierté  ne  voulaient  pas  être  à  charge 
aux  autres.  Ce  n'est  pas  un  laboureur  de  Broyé  qui  aurait 
adopté  cette  cynique  formule,  que  V hôpital  n'est  pas  fait 
pour  les  chic 

PRIT   D'INTÉRÊT. 

ou  a  beaucoup  reproché  fi  ces  fourrais  laborieuses,  à  ces 

travailleurs  de  la  terre  leur  défiance  sordide,  et  un  esprit 

d'intérêt  qui  semblait  éteindre  eu  eux  les   entiments  affectifs 

lus  naturels. 

iiiuii     les  vieillards,  les  malades  étaient  une  charge 

poui  la  famille.  < )n  fai  ait  pour  eux  le  ins  de    acrilices 

•  pi  .ai  | rail    La  te i  n'était  plus  considérée  c •  une 

ci. m  ivublo,  niaise le  une  aide  utile    Personnes 

.  i  .  i  inii.nl  qu  au  produit   matériel  qu'eHes 

donnaient 


—  377  — 

Si  nos  campagnards  se  montraient  durs  à  l'égard  de  leui*s 
vieux  parents  devenus  infirmes,  c'est  une  trop  souvenl  ceux- 
ci  les  avaient  dresses  à  ne  pratiquer  que  l'épargne,  llsles 
avaienl  en  quelque  sorte  façonnés  aux  vertus  «lu  comptoir 
qui  ne  comportent  guère  la  philantrophie. 

On  n'élève  par  des  chats  pour  la  multiplication  des  souris. 
De  même,  on  ne  sème  pas  l'amour  du  lucre  dans  rame  des 
enfants  pour  y  faire  naître  t\r*  sentiments  dévoués  el  gé- 
néreux. 

Il  est  difficile  de  développer  chez  un  môme  individu  les 
différents  attributs  du  cœur  ou  de  l'esprit  qui  ont  t"ns 
pourtant  leur  utilité  ici-bas  ;  d'y  faire  germer  des  qualités 
souvent  opposées  les  unes  aux  autres  :  d'y  unir  par  exemple 
l'énergie  à  la  souplesse  el  a  la  douceur,  la  libéralit 
l'économie.  El  chaque  individu  n'a  de  propension  naturel- 
lement qu'à  avoir  les  défauts  de  ses  qualités. 

Une  race  nomade  ne  se  trouverait  pas  bien  d'avoir  les  dons 
d'une  peuplade  attachée  au   sol  :   un   homme    d'afiain 
d'apporter  dans  le  négoce  la  simplicité  et  le  désintéressement 
qu'un  homme  de  charité  mel  dans  ses  actes. 

A  la  campagne  il  faut  être  très  ménager  d< 
Autrement,  c'est  la  ruine. 

Il  n'y  a  pas  de  travailleur  honnête  dont  l'avoir  OU  le  profil 

soit  pins  aléatoire  et  plus  incertain  que  celui  du  paysan.  En 

quelques  heures  une  maladie  peut  vider  son  écurie,  comme 

il  dit,  en  détruisant  son  bétail,  le  plus  liquide  de  son  bien. 

t'n  ouragan,  en  anéantissant  ses  récoltes,  lui  (ait  perdre 

souvent    en    moins   d'une    heure   le   huit    de    son   travail   de 

toute  nue  année  '*.  Qu'une  aventure  de  ce  genre  se  pro- 
duise, et  ses  champs  seront  sa  3a  maison  détruite 
famille  dispersée.... 

il)  Le  15  mai  1813,  une  averse  mêlée  de  grêle  détruisit  presque  touti 
plantations.  Les  seigles  ci  les  blés  furent  réduits  à  néaul  cl  fauchés  de  suite. 

lui  l'an  V,  une  maladie  épizootique  lil  périr  en  quelques  semaines  400  bes- 
tiaux a  cornes. 


—  378  — 

Etonnez- vous  >  pie  l'expression  de  sa  figure  brûlée  par  le 
soleil  et  ridée  avant  l'âge,  ait  été  soucieuse  el  triste  ! 

Soucieux,  on  le  serait  à  moins. 

Et  on  ose  rire  quand  on  voit  cet  homme  si  dur,  si  impas- 
sible en  apparence,  pleurer  sur  sa  vache  qui  vient  de  périr! 
Est-ce  doue  plus  ridicule  ou  plus  risible  que  ces  prises 
d'armes  des  ouvriers  d'industrie  qui  s'insurgenj  contre  la 
société,  parce  qu'une  faillite  leur  aura  fait  perdre  quelques 
semaines  de  salaire. 

Comparez  l'attitude  des  uns  avec  celle  des  autres,  et 
voyez  sur  qui  il  convient  de  s'apitoyer. 


En  même  temps  qu'on  enseignait  aux  entants  du  village 
l'esprit  d'économie,  on  les  mettait  en  garde  contre  les  pièges 
<ln  jeu  commercial  el  contre  les  traquenards  des  entreprises 
industrielles.  Il  ne  faut  se  frotter  qu'à  l'herbe  qu'on  connail  ; 
or,  le  paysan  ne  peul  rien  savoir  ni  de  l'industrie  ni  «lu 
commerce. 

Tout  gain  réalisé  était  donc  mis  en  réserve  e1  bien  caché. 
On  rendait,  à  la  vérité,  son  épargne  improductive,  en  môme 

temps  qu'on  privait  la  société  d'un  élément  d'aisance 

'  vrai;  mais  au  moins,  on  n'aventurail  pas  ce  qu'on 
avait  acquis.  Un  peu  de  tranquillité  valait  bien,  ce  me  si  "ml  de, 
un  petit  profit  pécuniaire.  i>e  la  tranquillité,  on  en  avait  si 

peu. 

»re  h  présent,  au  village  de  Broyé,  on  n'esl  ni  épicier, 

m  boulanger,  ni  boucher   Les  bouchers  el  les  boulangers  y 

apportent  du  dehors  leurs  produits  ;  et  les  épiciers,  connue 

Le    de  l'endroit,  Boni  de    étrangers  qui    ont 

venus     j  ii\'  i 

IImium.   i  i  PION. 

\mu    venon    de  voir  quelle  otail  la  matérialité*  el  le  terre 


—  379  — 

à  terre  du  genre  de  vie  de  nos  laboureurs,  quelles  étaienl 
les  conditions  de  leur  dressement.  Il  sera  facile  d'en  déduire 
ce  que  pouvail  être  leur  moralité. 

l'n  régime  social  où  les  vieux  patriarches  avaient  legou- 
vernemenl  presque  absolu  des  affaires  domestiques  el  com- 
munales, un  régime  pareil  ne  pouvail  qu'imposer  silence 
aux  innovations,  en  accoutumanl  les  gênera  vivre  dans  cette 
paresse  d'espril  qu'on  appelle  la  routine. 

De  par  l'éducation  qui  leur  était  donnée,  nos  grands-pères 
étaienl  des  routiniers  Indécrottables.  Quand  ils  avaient  ob- 
jecté à  une  idée  de  changement  ou  de  réforme  que  cela  ne 
s*étaii  jamais  fait,  que  cela  ne  se  serait  jamais  »'<<,  ils  avaient 
toul  dit. 

Leurs  procèdes  de  culture,  par  exemple,  Boni  restés  à 
peu  près  les  mômes  qu'au  temps  de  Triptolème  ou  de  Cin- 
cinnatus. 

Leurs  sentiments  religieux  el  leur  morale  n'étaient  non 
plus  guère  supérieurs  à  ce  qu'ils  axaient  été  chez  1rs  Grecs 
et  les  Romains. 

Il  n'a  pas  fallu  moins  que  le  génie  diabolique  des  inven- 
tions modernes  pour  bouleverser  de  fond  en  comble  les  idées 
culturales  et  les  procédés  agricoles  des  laboureurs  «le  Broyé. 

Qu'est-ce  qu'il  faudra  encore?  (Miellé  révélation  nouvelle, 
quelle  doctrine  el  quels  enseignements  peur  affiner  leur 
sens  moral  el  hausser  leur  conscience?.... 

Un  régime  de  liberté,  le  temps  aidant. 


En  pratique  de  morale,  pas  plus  qu'en  procédés  de  cul- 
ture, nu  ne  cherchail  à  innover.  Toul  paraissait  avoir  été 
réglé  définitivement  par  les  usages  établis. 

La  franchise  du  bon  vieux  temps,  la  tempérance  ou  la 
sobriété,  la  gravité,  la  simplicité  naïve  et  bon  enfant  îles 
gens  d'autrefois,  toul  cela  étail  <le  la  pose  et  du  convenu" 
toul  eela  n' existait  qu'en  apparence. 


—  380  — 

La  était  avant  tout  une  affaire  de  bienséance  et  de 

bon  exemple,  un  hommage  rendu  à  des  qualités  ou  ados 
vertus  qu'on  n'avait  pas  le  plus  souvent. 

A  la  campagne,  je  le  répète,  une  étiquette  rigoureuse  ré- 
glait, comme  elle  règle  encore,  les  habitudes,  les  manières, 
toute  la  conduite  ;  el  l'ion  de  ce  qui  y  est  conforme  ne  blesse 
les  sentiments,  les  convenances. 

Ainsi,  pour  ne  citer  q»'un  l'ait  à  l'appui,  on  sait  bien  que 
le  chagrin  ne  nourrit  pas  ;  on  sait  bien  qu'après  avoir 
pleuré  ceux  qu'on  a  perdus,  on  éprouve  tout  de  même  le  be- 
soin de  manger.  La  veillée  des  morts  s'accompagnail  donc 
DÔcessairemenl  d'un  repas  de  nuit,  servi  aux  gardiens  du 
corp-  du  défunt.  Or,cel  usage  était  devenu  peu  à  peu  un  pré- 
texte à  «les  orgies  qui  'ne  scandalisaient   personne.    Une 

ripaille  de  voisins  et  d'amis  ne  détonnait  pas  sur  la  douleur 
Sincère  des  parents  du  mort  ;  elle  n'avait  pour  nos  villageois 
rien  de  choquant,  rien  d'inconvenant. 

Il   fallait    voir   aussi    avec  quelle  attention    minutieuse   nos 

honnêtes  campagnards  étaient  à  cheval  sur  l'étiquette  dans 
émonial  d'un  grand  diner. 

Chez   les   plus    pauvres   ,^ens,   on  était  tenu  de  mettre  ses 

plus  beaux  habits  pour  prendre  part  au  festin..  <>n  récitait 
del t  le  Benedicite,  comme  pour  demander  d'avance  par- 
don li  Dieu  du  gros  péché  de  goinfrerie  qu'on  allait   com- 
mettre, sans  préjudice  des  autres  petits  péchés  de  médi- 
sance et  de  propos  impies  ou  libertins.  Puis,  on  s'asseyait 
•lennité,  chacun  à  la  place  que  lui  assignait  son 
.ri  toul  devait    e  passer  comme  les  usages  le 
rivaient, 
Il  n'était  pas  convenable  de  boire  sans  élever  son  verre  et 
de  if  p i  dire,  quand  on  buvait  :  t  A  votre  santé,  com- 

i  !'■  pai  i  <im  .  .  ompcroa  ;  le 

lu  pore  'lu  parrnin,  pore»;  le  parrain  el  le  m. ni  de  la 

iinèra,  i  omp< 


—  381  — 

Il  n'était  pas  convenable  de   né  point  vider  boii  verre 
quand  on  buvait  I  la  santé  de  quelqu'un. 
Il  n'était  pas  convenable....  etc.,  etc. 
L'usage  réglail  tout  ;  et  l'usage  aussi  créait  tous  les  droits  : 

C'tu  qu'fd  quement  wwi  uoiatn 

Ne  fd  ni  niait  ni  bin! 


g  VIII.  -■-  HYGIÈNE  ET  SAM  I 

Instruction   publique. 

Dans  la  marche  en  avant  des  choses  on  aurait  tort  d'im- 
puter absolument  le  progrès  d'une  société  aux  institutions 
politiques  ou  économiques  qui  la  régissent  ;  de  môme  qu'on 
se  tromperait  en  attribuant  la  taille  et  le  volume  d'un  nour- 
risson au  système  d'alimentation  auquel  il  a  été  soumis. 

L'évolution  dans  les  doux  cas  est  fatale. 

Mais  il  ne  faudrait  pas  non  plus  i lit  i-  l'influence  d'une  sage 
administration   et  d'un  bon  régime  sur  le  développement 

îles  individus  et  des  SOCÎétl 

On  est  forcé,  en  effet,  de  reconnaître  qu'il  existe  une  cer- 
taine coïncidence  entre  l'adoucissement  des  maux  et  l'aug- 
mentation du  bien-être  général;  entre  les  progrès  sociolo- 
giques et  l'application  d'un  régime  de  liberté,  c'est-à-dire 
d'égalité  et  d'instruction. 

Ces  progrès  sont  évidemment  facilités  par  l'instruction, 
parce  que  l'ignorance  en  tout,  en  morale  comme  en  esthé- 
tique et  comme  en  science,  est  coupable  <lc  ta  plupart  de  nos 
erreurs  de  jugement. 

On  comprenait  peut-être  cette  vérité  dans  le  vieux  temps. 
Etpourtanl  on  méprisait  l'instruction  qui  est  une  des  fenê- 
tres de  la  conscience  humaine. 

Cette  fenêtre,  on  la  tenait  fermée  soigneusement,  parce 
qu'elle  aurait  pu  favoriser  les  idées  de  réforme  et  l'esprit  de 


—  382  — 

discussion,  c'est-à-dire,  livrer  passage  à  dos  malfaiteurs 

Oui,  mais  ces  prétendus  malfaiteurs  sont  des  accidents. 
tandis  que  le  jour  et  la  lumière  sont  les  conditions  essen- 
tielles de  la  vie. 


Le  recteur  de  la  paroisse  a  toujours  rempli  réellement  ou 
fait  remplir  à  sa  volonté  les  fonctions  d'instituteur  du  vil- 
lage. 

L'instruction  était  très  élémentaire.  Pourvu  qu'on  tût  à 
même  de  lire  dans  un  psautier  ou  dans  un  missel,  afin  de 
pouvoir  suivre  les  chantres  au  Lutrin  pendant  la  messe, 
pourvu  qu'on  fût  assez  lettré  pour  signer  son  nom,  c'était 
bien  tout  ce  qu'il  fallait. 

Sans  cette  nécessité  d'avoir  t\r<  chantres  pour  les  offices, 
le  prêtre  n'aurail  certainement  pas  songé  à  taire  apprendre 
aux  enfants  L'alphabet. 

En  définitive,  à  quoi  autrement  Leur  eût  servi  de  savoir 
lire?  Lire  quoi?  On  n'avait  point  de  livres  àépeler;  point 
de  correspondance  ô  déchiffrer....  Luis,  a-t-on  besoin  d'être 

.v.uil  pour  tenir  les  ipieues  de  la  eliarrue  '.'  Est-On  meil- 
leur Bujet,  meilleur  fila  ou  meilleur  père  de  famille,  quand 
mu  sait  que  quand  on  ne  Bail  pas  lire?  En  vaut- on  mieux? 

S'en  porte-t-On  mieux  ?... 

Fraîchement,  toul  cela  s'embrouillail  dans  la  cervelle  de 

laboureurs. 

<  >n  prenait  pour  raccorder      raieodai  <•)  —  les  enfants  du 

village  quiconque  se  présentait,  n'ayant  rien  de  mieux  à 

nelque  pauvre  Infirme,  capable  seulement  d'allumer 

de    en  ir  et  de  chanter  une  messe  de  requiem, 

onner  La  cloche....  Songez  donc?  Un  homme  valide  au- 

inde  honte  de  le  faire  un  fouette-eult  I 

t      fond    d   du  maître  étaient  de  BurveiUer  Les  enfanta 


—  383  — 

pendant  les  Offices,  et  de  faire  épeler  aux  heures  de  classe 
les  rares  écoliers  que  leurs  parents  lui  envoyaient. 

Depuis  1789,  nos  parlements  se  sonl  attachés  à  répandre 
L'instruction.  Mais  que  de  difficultés  pour  foire  un  peu  de 
bien  !  Comment  imposer  à  des  campagnards  récalcitrants  el 
têtus  les  frais  d'un  enseignement  donl  ils  ne  se  soucient  pas, 
qu'ils  méprisent, qu'ils considèrenl  quasi  comme  dégradant? 

Voici  le  taux  des  honoraires  fixés  en  l'an  II  par  la  munici- 
palité républicaine  de  Broyé  en  faveur  de  son  maître  d'école. 

Il  lui  était  dû  par  chaque  élève  : 

Pour  apprendre  ;'i   lire  û  fr.  25  c.  par  mois. 
Pour  apprendre  6  écrire  t»  ti\  30  c.    — 
Pour  apprendre  à  chiffrer  Ofir.  35  c.    — 

Il  lui  était  alloué  en  plus,  par  la  commune,  quatre  st.  i 
de  liois  et  deux  cents  fagots  ;  puis  150  francs  pour  se  procu- 
rer un  local  suffisant —  Car  il  n'y  avait  pas  de  maison  d'école. 

lui  l'an  Xlll,  cette  redevance  scolaire  si  minime  fut  élevée 
;i  35,  15  et  50  c.  Mais  l'année  suivante  on  trouva  que  c'était 
trop,  et  on  osa  revenir  au  taux  de  l'an  II. 

H  est  bien  difficile  de  reculer  dans  la  nuit.  Tout  pas  fait  eu 
avant  compte.  On  fui  donc  obligé,  en  1808,  d'en  revenir  au 

taux  supérieur  de  l'an  XIII. 

A  ce  taux  là,  le  pauvre  instituteur  pouvait  compter  BUT 
une  recette  moyenne  de  (>  à  7  livres  par  mois  ;  ce  qui  n'était 
p;is  ('nonne. 

Il  esl  juste  d'ajouter  qu'il  encaissait  deux  nu  trois  et  même 
quatre  sous  de  libéra  à  chaque  messe  de  requiem,  et  quel- 
ques  revenants-bons  Les  jours  d'enterrement! 

Cette  misère  des  maîtres  d'école  a  sans  doute  contribué  à 
les  rendre  féroces.  Que  la  jeunesse  était  à  plaindre  de  tom- 
ber sous  leur  férule  ! 

Superstitions. 
Les  progrès  économiques  étaient  entravés  non  seulement 


—  384  — 

par  la  routine,  mais  encore  par  quelque  chose  de  plus  tenace 
-•i  de  plus  insurmontable  :  par  les  idées  de  superstition. 

En  1789,  les  gens  de  Broyé  ne  croyaient  certes  plus  à  la 
baguette  «les  fées  ni  même  aux  apparitions  de  loups-garoux  : 
mais  ils  croyaienl  fermement  aux  esprits  de  L'air,  aux  reve- 
nants, aux  sorciers. 

Tous  les  grands  phénomènes  de  la  nature,  pestes  el  con- 
tagions, tonnerre,  météores,  arç-en-ciel,  ouragans  môme 
étaienl  considérés  par  ce  monde  ignorant  comme  jeux  des 
puissances  célestes,  ou  «les  démons,  agents  mystérieux  mal 
définis,  mais  à  la  merci  desquels  la  pauvre  humanité  était 
livrée  par  la  volonté  du  bon  Dieu.  Et  quand  on  était  affolé 
par  la  peur,  on  croyait  fermemenl  que  des  prières  pouvaient 
fléchir  ces  agents  redoutables,  comme  aussi  des  invocations 
bien  faites  les  mettre  en  œuvre. 

Tout  événement  qui  déroutait  leurs  petits  calculs.,  tout 
sinistre,  tout  mal  extraordinaire  qui  tombait  sur  les  gens  ou 
sur  le  bétail  d'une  maison  était  de  provenance  suspecte.  Ça, 
ne  s'expliquail  pas;  ça  n'était  pas  naturel;  il  «lovait  y  avoir 
quelque  influence  maligne  en  jeu  !... 

Une  maladie  tj  phoïdique  ou  charbonneuse  se  déclarait-elle 
dans  une  écurie  ?  <  m  n'imputail  pas  cette  calamité  au  manque 
d'hygiène,  ô  l'agglomération  des  botes  dans  un  local  mal 
.  obscur,  insuffisant;  ni  à  l'usage  d'aliments  avariés  el 
de  fourrages  mal  récoltés...  non  ;  on  se  souvenait  seulement 
qu'un  mendiant  de  mauvaise  mine  avait  passé  par  là,  qu'on 
ni  renvoyé  sans  l'assister,  qu'on  l'avait  entendu  proférer 

quelque  ChO  n    allant,    des    n.ico      lum    SÛT.    Nul 

dout  i  mendiant,  qu'on  n'avait  pas  revu,  n'eût  jeté  un 

on,   Et  ii  preuve,  c'est   que   l'aération  de 

■  touj la,  el  que  cependant 

i  mu  m  .  im    le    années  pn  ■  une  pareille  maladie 

On  attribuait  donc  aux  maléfices  les  influences  morbides 
•  pu   tombaient    m    le  bétail  ol  quelquefois  mémo  sur  les 


—  385  — 

gens;  ce  quiégarail  la  thérapeutique  du  temps  en  la  mettant 
sur  une  piste  padicalemenl  fausse. 
Nos  grands-pères,  bien  sûr,  n'auraieni  pas  fait  poursuivre 

en  justice  <•• ae  adonné  à  ces  pratiques  diaboliques  un 

voisin  dont  les  champs  auraient  été  drus,  pendant  que  les 
champs  <l<vs  autres  seraient  restés  maigres  et  clairsemés. 
Sous  ce  rapporl  ils  étaient  moins  enfoncés  dans  le  bourbier 
des  superstitions  que  les  romains  du  temps  «les  rois  ou  que 
les  paysans  duxvt  siècle  0.  Os  ne  l'auraient  pas  dénoncé 
à  la  justice;  mais  ils  ne  l'auraient  pas  vu  d'un  très  bon  œil, 
persuadés  qu'il  pourrail  bien  avoir  eu  avec  le  diable 
quelque  accointance  el  des  arrangements. 


Imbus  d'idées  pareilles,  uos  pauvres  gens  n'employaient 
que  des  médecins  et  des  artistes  vétérinaires  élevés  à  leur 
niveau  scientifique.  Un  pâtre  ou  un  bûcheron  illettré, 
chaut  charmer,  sachant  taire  comme  il  faut  des  signes  de 
croix  et  marmotter  des  prières  leur  suffisait 

Us   n'auraient    pas   compris,  ils  auraient  même   accueilli 
connue    un    mauvais   plaisant    celui    qui    leur  aurait     [tarie 


(1)  Un  vieux  paysan  du  Latium  avait  été  traduit  en  justice  par  ses  voi- 
sins, parce  que  sa  étaienl  de  belle  venue,  tandis  que  oellea  des 
autres  n'avaient  pas  réussi.  Il  expliqua  au  juge  que  par  son  mode  de  cul- 
ture il  avait  évité  que  la  semence  se  perdit,  ce  que  les  autres  n'avaient  pas 

t'ait.  El  comme  le  juge  était  [plus  :>ensé  (jue  superstitieux,  le  paysan  tut 
renvoyé  sans  dépens. 

«  tTn  païsan  de  la  Beausse  avoit  este  accusé  en  justice  d'astre  sorcier, 
-  pource  que  -es  brebis  ne  mouraient  point,  et  toutes  celles  de  ses  roysins 
»  périssoient.  Surquoy  estant  interrogé  devant  les  juges,  il  list  response 
»  que  jamais  il  ne  permeUoil  que  son  bestail  -ortist  lorsque  premièrement 
"le  soleil  n'oust  consommé  la  rosée,  el  que  plusieurs  petites  bestioles 

»  qu'estoienl  sur  les  herbes  ne  lussent  retirées  dedans  la  terre;  et  dict 
■•  que  quelquefois  il  t'avoil  déclaré  a  aucuns  de  ses  voysins  :  ce  qui  l'ut 
»  trouvé  vray,  et  fut  absouU  pour  les  raisons  SUSdictes,  etc.  »  (Amb.  I'akk. 
Œuvres,  Paris,  |i>07,  p.  S-J7. 

■20 


—  386  — 

d'hygiène,  de  miasmes,  de  ferments;  et  conseillé  plus  de 
ventilation  et  de  propreté.  Eh  !  lui  auraient-ils  crié  :  ètes^vous 
fou  ?  C'est  justement  uncourant  d'air  qui  a  fait  tousser  nos 
vaches  Vannée  dernière  :  ei  c'est  pour  avoir  été  lavés  que  les 
feux  du  petit  sont  rentrés  et  que  l'humeur  s'est  portée  sur 
les  yeux .'.... 

Les  paysans  de  Broyé  n'auraient  doue  accordé  aucune 
créance  au  médecin  <lcs  bêtes  et  des  gens  qui  leur  aurait 
fait  entendre  un  langage  vraiment  scientifique. 

Un  homme  qui  n'entre  pas  dans  nos  préjugés  ei  nos 
croyances,  quelquefois  môme  dans  nus  passions,  possède 
rarement  notre  confiance.  En  choquant  nos  idées,  il  déroule 
notre  conscience  <'t  nous  mel  toujours  mal  à  l'aise. 

Les  progrès  moraux,  quoique  nous  nous  en  vantions,  ont 
été  assez  incertains,  assez  contestables  môme,  pour  qu'on  ail 
pu,  sans  trop  d'invraisemblance,  soutenir  cette  thèse  que  les 
hommes  sont  toujours  et  partout  les  mêmes,  que  l'humanité 
.•-i  Btationnaire,  etc. 

si  les  anciens  Grecs  ei  Romains  croyaient  le  monde 
rempli  de  démons  ou  d'esprits  répandus  dans  l'air,  qui 
envoient  tes  Bouges,  qui  sèment  les  maladies,  cette,  croyance 
est  bien  encore  celle  du  peuple  dans  les  campagnes,  e1 
même  b  la  ville. 

il  n\  a  pas  bien  longtemps  qu'on  faisait  encore  dire  à  Broyé 
i.i  prière  du  loup,  quand  nur  bête  était  restée  égarée  dans  la 
brêt 

ii.ui-  toute  la  Franche-Comté  on  fait  encore  barrer  com- 
munément les  dartres,  les  brûlures,  les  entorses,  les 
ophthalmies,  les  maladies  aphtheuses,  etc. 

On  ne  croit  plus  aux  revenants  :  et  pourtant  <»n  obtiendrait 
difficilement  du  premier  venu  qu'il  B'aventuràl  la  nuit  but 
un  cimel  '  té,  ou  dans  un  tournant  obscur  où  quel- 

qu'un  erail  mort  quelque   (ours  auparavant. 

H  i  m  qur  I--     upei  titlôn    propres  au  génie  des 

iu'.i  la  condition  de  Be  modifier  en 


—  387  — 

^appropriant ail  génie  de  ceux  qui  les  acceptent.  Il  y  avait 
sûrement  une  fantaisie  moins  incorporelle,  quelque  chose  de 
plus  matériel  el  de  plus  grossier  dans  la  croyance  au  monde 
des  Faunes  el  des  Satyres,  que  dans  la  conception  idéale  de 
nos  fées,  de  nos  dames  blanches,  voire  de  nos  Klàs  (M  plain- 
tifs qui  symbolisent  le  remords. 

Nos  magiciens  el  nos  sorciers  n'étaient  pas  malfaisants 
comme  Médée  ;  parce  que  L'esprit  Gaulois  répugne  aux 
conceptions  tragiques,  ou  qu'il  n'y  croît  pas. 

L'église  catholique,  pénétrée  elle-même  de  cette  foi  aux 
esprits,  ne  pouvait  en  débarrasser  le  monde.  Elle  a  <at  le  tort 
cependant,  avec  ses  exorcismes  ridicules,  quelquefois  cruels 
et  malfaisants,  de  donner  un  corps  à  la  superstition. 

Après  cela,  elle  ne  pouvait  pas  Eure  autrement. 

Comme  le  soleil  dissipe  les  ténèbres,  de  même  l'instruction 
Qnira  par  avoir  raison  des  entités  chimériques  el  des  fan- 
tasmagories inventées  par  la  peur  <■(  transmises  de  siècle  en 
siècle  ,  en  s'accommodanl  à  l'ignorance  particulière  <!*' 
chaque  époque. 

RÉGIME  ALIMENTAIRE. 

Les  gens  de  Broyé  étaient  dans  des  conditions  d'hygiène 
exceptionnelle. 

Us  avaient  à  peu  près  tout  ce  qu'il  faut  pour  se  porter 
bien.  Les  travaux  de  culture,  qui  se  font  au  grand  air, 
exigenl  beaucoup  d'exercice  et  une  certaine  activité.  Mais 
leur  variété  récrée  l'esprit  en  môme  temps  qu'elle  tempère 
ce  que  la  fatigue  corporelle  pourrait  avoir  d'excessif. 


(i)  lu  Klâ,  en  Franche-Comté,  esl  la  réapparition  sur  terre  d'un  voisin 
ou  d'un  parent  défunt  retenu  loin  du  paradis  jusqu'au  jour  où  une  per- 
sonne amie  aura  réparé  sa  faute  d'ici-bas,  remis  en  place  une  borne,  par 
exemple.  Aussi,  pour  8e  débarrasser  de  ses  obsessions,  doit*on  crier  au 
revenant  :  Klù  !  mairque,  ;/  boûnera,  marque,  H  je  remettrai  la  borne  en 

place  ! 


—  388  — 

Si  avec  cela,  un  homme-  adonné  à  de  pareils  travaux  riait 
tempérant,  il  réaliserait  indubitablement  le  type  de  la  bonne 
santé. 

Mais  la  tempérance  leur  taisait  foute  assez  souvent. 

Leur  régime  ordinaire  était  misérable. 

Avant  1789,  et  longtemps  après,  on  ne  consommait  à 
Broyé  que  de  la  viande  fraîche  ou  salée,  niais  surtout  salée. 
Cette  viande  bouillie  servait  à  assaisonner  des  légumes  qui 
formaient  le  repas  principal  de  la  journée. 

On  n'usait  de  vin  et  dé  viande  de  bœuf  ou  de  mouton 
qu'aux  grandes  fêtes  et  dans  des  circonstances  excep- 
tionnelles. 

Le  pays  produisait  diverses  céréales,  du  froment,  du 
méteil,  du  seigle,  de  l'orge,  etc.  Le  paysan  ne  consommait 
pour  son  usage  à  la  maison  que  la  graine  de  seigle  el  d'orge, 
rarement  de  méteil,  —  cerné 0).  —  et,  de  préférence,  la 
graine  qui  n'aurait  pas  été  "le  vente. 

Le  pain  était  un  aliment  de  luxe.  <>n  n'eu  mangeait  pas  à 
tous  les  repas.  Kt  encore  voulait-on  qu'il  fui  bien  rassis  (2). 
On  le  remplaçait  par  des  substances  plus  grossières,  plus 
viles, ins  coûteuses. 

On  préparait  dans  de  grandes  chaudières  des  bouillies  do 

brins  de  mulet,  de  mais,  des  rceaui  de  potirons,  etc., 

délayés  avec  de  l'eau,  un  peu  de  sel  et  de  lait.  Onnusait 
cuire  des  pot  ros  légumes,  de  haricots,  de  fèves  ou 

de  pois  avec  un  peu  d<  et  du  Bel  :  et  on  mangeait  ces 

aliments  6  la  poignée  (•'*). 

Ou   m  n-'iii i isssit    encore  habituellement   de  crudités, 
li  iii\,  raves,  etc.,  plus  ou  moins  as 
de  \  inaigre  et  d'huile  d'oeillette  □ ipurée. 


(i  i  \..n  i  e  m"'  "• 

/.-  /  ftitc/ir  ConUéi  p 
t'.\)  \«>ii  la  i 


—  389  — 


Oui  ;  mais  on  a  beau  86  priver  par  raison  d'économie  et 
faire  de  nécessité  vertu,  le  goût  de  la  bonne  chère  n'en  est 
[•as  détruit  pour  autant.  Qu'une  occasion  se  présente  de  le 
satisfaire,  ce  goût,  sans  blesser  les  convenances,  on  s'y 
laissera  aller  outre  mesure. 

Quand  on  tuait  le  cochon  gras  pour  le  saler,  on  invitait  ses 
parents,  ses  amis  et  ses  bons  voisins  au  boudin,  c'est-à-dire 

aux  trois  ou  quatre  repas  obligés  qu'où  donnait  à  l'occasion 

de  cet  événement,  qui  était  une  vraie  fête  de  famille, 

On  taisait  à  ces  repas  nue  bombance  incroyable  de  viande 
de  porc  fraîche.  Les  plats  défilaient  sur  la  table,  nombreux, 
énormes  ;  et  ils  étaient  servis  assez  lentement  pour  permettre 
que  chaque  convive  pût  y  revenir  plusieurs  fois. 

0  sobriété  du  vieux  temps  !... 

Comment  la  vertu  de  nos  vieux  parents  s'arrangeait-elle 

de  ces  infractions  aux  lois  de  la  tempérance  '.'  On  peut  étr. 

sûr  en  tout  cas  que  leur  santé  s'en  arrangeait  fort  mal.  Après 
une  série  de  ripailles  successives,  après  ces  dîners  de 
boudin  ou  de  tue-ebien,  après  d'autres  excès  encore  commis 
au  carnaval,  il  n'était  pas  rare  qu'un  paysan  robuste  lut  pris 
de    froid  et    emporté   par    une   pblegmasie    eatarrbale   en 

quelques  jours. 

La  vertu,  la  tempérance  de  nos  gens  n'était  au  fond 
qu'une  affaire  de  convenance  et  une  question  d'économie. 


Leur  régime  de  vie,    misérable  en   somme,   n'était  p 
pour  affermir  la  santé  générale. 

La  capacité  à  digérer,  les  fonctions  stomacales  en  un  mot, 
ne  constituent  pas  à  elles  seules  la  santé.  Aussi  les  anciens, 
quoique  digérant  mieux  que  nous,  présentaient  une  résis- 


—  390  — 

tance  vitale  moindre  à  L'assaut  des  cuises  morbides.  En 
d'autres  termes,  nous  sommes  mieux  organisés  à  présenl 
pour  réagir  contre  Les  causes  de  destruction,  contre  les  in- 
fluences  morbides  quionl  sévi  dans  tous  les  temps. 

Quand  une  épidémie  se  déclarail  autrefois  dans  Le  village, 
elle  ne  manquait  pas  d'y  l'aire  ilVlTray;inls  ravages. 

Nous  avons  entendu  dire  souvenl  que  malgré  un  genre  de 
vie  -i  contraire  aux  règles  de  l'hygiène,  Le  peuple  des  cam- 
pagnes était  vigoureux  el  bien  portant.  C'est  invraisem- 
blable. 

-  pauvres  habitants  de  nos  campagnes,  dil  l'anno- 
i  tateur  de  Tourtelle,  mangenl  raremenl  delà  viande..  A  la 
»  vérité,  peu  jouissent  d'une  lionne  santé  et  atteignent  Le 
••  terme  ordinaire  de  la  vie.  Il  est  vrai  que  la  misère  el  la 
»  malpropreté  dans  lesquelles  ils  vivent,  contribuent  beau- 

»   coup    à     L'état    de     cachexie    dans    lequel    ils    languissent 

..  presque  toujours  '  .  ■• 

Soins  de  propreté. 

Mais  en  dehors  des   actes   d'intempérance  que  riOUS  avons 

rappelés,  et  qui  étaient  intermittents,  nos  paysans  commet- 
taient d'autres  écarts  d'hygiène  plus  funestes  encore, 
puisque  ces  écarts  étaient  de  tous  les  jours. 

On  croyait  à  la  campagne  que  ta  plupart  de  nos  maux, 

rhumes  ou  catarrhes,  fluxions,  pleurésies,  etc.,  proviennent 

du  froid  ;  et  on  avait   recours  6  d'étranges  pratiques  pour 

s'en  pi  i 

(in  voulait  que  le  logement  fût   bas,  peu  éclairé,  ù   l'abri 

!,  comme  un  terrier  :  el  od  se 
confinaient  i  dire  dans 

rmétiquemenl  cln 
m  n mi,  ,iu  heu  d'armer  l'écoi ■  vivante  contre  les 


>  i.  h  1 1 1    |i  20U  i  Nota  ilu  profo    oui  lliilli'  i 


—  391  — 

variations  de  la  température,  on  la  calfeutrait  dans  une 
atmosphère  viciée  el  on  la  débilitait.  Car  en  se  privant  d'air 
pur,  "ii  se  rend  frileux  et,  par  surcroit,  plus  accessible  à 
toutes  les  influences  morbides. 

Le  taudis  des  pauvres  gens,  qu'on  ne  lavait  jamais,  qu'on 
nepouvail  môme  pas  laver,  puisque  l'aire  en  était  faite  d'ar- 
gile battue,  ce  taudis  n'était  balayé  qu'une  fois  par  semaine 
tout  au  plus,  le  dimanche  matin. 

La  propreté  pour  qos  aïeux  était  une  superfluité  : 

l.ai  r'messe  et  le  torchon 

Ne  raipotant  ran  ai  lai  nuisait .' 

On  n'était  pas  plus  soigneux  de  bs  personne  que  de  son 

ouUui . 

[I  aurait  été  si  facile  eu  été  de  se  baigner  dans  l'Ognon 
mi  dans  la  Saône  dont  les  rives  sablonneuses  sont  partout 
ssibles. 

Oui....  mais  la  besogne  commande  ;  el  un  laboureur  n'a 
guère  le  temps  de  s'amuser  dans  la  belle  saison. 

Quant  à  se  livrer  chez  soi  à  des  ablutions  corporelles,  on 
ne  le  pouvait  pas.  il  aurait  fallu  [mur  cela  avoir  un  cabinet 
de  toilette,  nue  petite  pièce  où  l'on  put  se  retirer.  Kt  les 
pauvres  gens  n'avaient  qu'une  chambre  «m  toul  le  mondi 

tenait,   encombrée   de  lits,   de    l'armoire,   des   Sièges*    d'une 

table,   sans  compter  les  bahuts  et  fauteuil  du  grand'père. 

G'esl   à  peine  si  l'on  avait    la  latitude  de  S'y  faire   la   barbe    le 

dimanche  avant  la  messe. 

Voilà  pourquoi  la  propreté  était  un  luxe  que  nos  campa- 
gnards n'étaient  pas  en  situation  de  se  payer. 

D'ailleurs  mi  avait  peur  des  kiins. 

D'après  les  idées  du  temps,  les  lavages  n'étaient  pas  sans 
présenter  quelques  dangers.  Les  feux,  le>  dartres,  les 
boutons  u'ont-ils  pas  une  utilité  évidente*?  Ne  purifient-ils 
pas  le  sang  eu  donnant  issue  aux  buuieurs  mauvaises  '.'..... 

On  croyait  cela,  el  on  craignait  de  les  faire  passer  pard 


—  302  — 

lavages  intempestifs.  El  cette  crainte  chimérique  étail  cause 
que  les  pauvres  gens  entretenaient  soigneusement  les  affec- 
tions parasitaires  qui  ne  vont  pas  sans  altérer  la  santé  él 
sans  attrister  le  caractère. 

Il  n'esl  pas  douteux  du  reste  que  des  habitudes  de  mal- 
propreté et  de  suppuration  ne  soienl  de  nature  à 
eugendrer  certaines  formes  de  scrofule,  et  à  enlaidir  la 
race.  Voyez  comme  des  bêtes  proprement  tenues,  bien 
soignées,  bien  bouchonnées  et  bien  nourries  ont  meilleur 
aspect  que  les  autres  !  comme  elles  ont  plus  de  vivacité  e1 
de  gaieté!  Ceci  soit  dit  sans  comparaison;  mais  aux  gens 
comme  aux  bêtes  les  bons  soins  procurent  les  attributs  de 
La  santé. 


En  général,  nos  laboureurs  étaient  d'une  stature  au 
dessous  de  la  moyenne,  un  peu  trapus,  plutôt  maigres  ou 
bouffis  que  gras. 

Le  voisinage  des  prairies  un  peu  marécageuses  inondées 
souvent,  exposait  les  habitants  du  pays  à  des  engorgements 
de  viscères,  à  des  accès  intermittents  qui  aggravaient  cer- 
tainement chez  eux  les  maladies  courantes. 

Même  Bans  compter  les  victimes  de  la  variole,  contre 
laquelle  on  n'avait  pas  encore  de  spécifique,  il  mourait 
beaucoup  plus  d'enfants  qu'aujourd'hui,  attendu  que  les 
accidents    d'impaludisme    sont    funestes   surtout    dans    le 

jeune 

ni  d'aliment  les  paysans  étaient  lourds 

pecl  .  i  intelligence  ne  rayonnait   pas  but  leur  physio- 
nomie qui  in.iiKpi.nl  le  pin-  Bouvent  d'expression 


—  ?m  — 


§  IX.  —  CONSCIENCE. 
LA    KO  RALE    UTILITAIRE. 

Gomme  nous  l'avons  vu,  les  alimenl  lonl  nos 

villageois  se  nourrissaient,  leur  genre  3e  vie,  leurs  préoccu- 
pations matérielles,  etc.,  tout  cela  n'était  pas  Eût  pour  don- 
ner des  ailes  à  leur  pensée,  ni  pour  agrandir  leur  horizon 
moral. 

L'éducation  de  famille  les  avait  trop  habitués  à  ne  juger 
des  choses  que  d'après  leur  utilité;  à  ne  voir  dans  les  faits 
accomplis  que  le  résultai  et  non  la  lin. 

Le  terre  à  terre  absorbait  leur  existence.  Ils  ne  compre- 
naient îicn  à  l'apostolat  on  à  l'esprit  de  propagande  et  de 
prosélytisme,  rien  non  plus  à  la  pratique  de  l'art  pour  l'art. 

Ils    ne  supposaient    pas  qu'on    pût  ainsi  de  gaité   de   C03UT 

travailler  avec  désintéressement  el  sans  rétribution  ferme  à 

moraliser  les  autres,  à  eiirielur  les  auti. 

La  gymnastique  morale  à  laquelle  on  soumettait  les  enfants 
du  village  n'étail  pas  de  nature  à  développer  chez  eux  le 
goûl  des  distractions  artistiques,  ni  à  leur  affiner  les  sens,  à 
en  faire  des  dilettanti,  «les  jouisseurs. 

A  Broyé,  en  fait  d'instruments  de  musique,  on  en  est 
resté  aux  pipeaux  rustiques,  au  roseau  troué,  au  sifflet  taillé 
dans  une  branche  de  saule,  aux  trompettes  d'écorce  de  cou- 
drier, etc.,  à  l'enfance  de  l'art...  On  n'y  a  jamais  entendu 
que  le  violon  de  quelque  aveugle  de  p  >u  le  cornet  à 

piston  et  la  clarinette  des  musiciens  venus  pour  taire  danser 
aux  noces  et  aux  fêtes  du  village. 

Oui  bien  chante  et  qui  bien  danse 
Fait  an  métier  qui  peu  avance. 

dit-on  en  commun  proverbe. 


—  394  — 

L'art  y  esl   donc  considéré  comme  une  amusette  et  non 
comme  une  occupation  sérieuse.  On  s'y  contente  des  beaux 

clianls  d'éfflis 


Tout  chez  eus  était  servilemenl  conduit  e1  préparé,  parce 
que  tout  semble  avoir  été  combiné  pour  les  vouer  à  une  ser- 
vitude perpétuelle. 

l»rs  le  bas  âge,  on  élevait  les  enfants  avec  une  sévérité 
quasi  monacale;  et  leur  nature,  fmvelle  généreuse,  étail  bien 
obligée  de  prendre  l'empreinte  du  moule  où  on  la  coulait  : 
elle  ne  pouvait  manquer  d'être  refoulée  ou  dévoyée. 

Ainsi  dressée  l'obéissance  e1  forcé  même  de  reconnaître 
la  nécessité  et  les  avantages  pratiques  de  la  soumission, 
l'évidence  induisait  le  campagnard  à  conclure  que  la  vie  du 
terre  à  terre,  des  humiliations  et  des  aplatissements,  était 
encore  la  plus  sûre  el  partant  la  plus  sage. 

on  sentait  là  l'influence  directrice  des  pères  spirituels 
dans  l'éducation  des  enfants,  el  l'action  réfrigérante  du  cé- 
libat. 

Les  gens  sans  enfants  ont  beau  être  affectueux  el  bons,  Us 
ne  le  Boni  jamais  autant  qu'ils  l'auraient  été  s'ils  uvaienl 
eu  de  la  progéniture.  En  d'antre-  termes,  la  paternité  et  la 
maternité  surtout,  font  naître  une  sentimentalité  nouvelle, 
Inconnue  de  ceux  qui  n'ont  pas  d'entants. 

Dans  ces  sortes  de  questions,  je  nie  qu'un  célibataire, 
quelque  soit  le  caractère  dont  ij  est  revêtu,  puisse  en  par- 
faite connaissance  de  cause  contrôler  ce  que  je  dis. 

Moralemont,  H  n'est  pas  complet.  Il  lui  manque  toujours, 
pour  drosser  les  hommes,  quelque  chose,  comme  à  l'eu 

nuque  i ■  en  engendrer,  Kt  s'il  a  la  hante  main  sur  l'édu 

cation  des  enfants,  rarement  la  chose  tourne  a  bien. 

eronl  ôl<  cette  bonne  affection  ma- 

ternelle qui  réchauffe  le  uceur;  lia  manqueront  des  senti- 
ment   i''    plu    propn      >  leur  inculquer  l'esprit  de  sacrifice 


-  395  — 

qui  esl  le  fond  de  la  piété  filiale  el  de  toutes  les  vertus. 
ii,  célibataire  ne  peut  pas  donner  ee  qu'il  n'a  pas. 

Amour-propre. 

Les  pauvres  mainmortables  de  Broyé  étaienl  dans  des 
conditions  de  vie  trop  précaires  pour  avoir  ta  conscience 
IkuiI  placée. 

En  quoi  faisaient-ils  consister  le  sentiment  de  leur  dignité 
personnelle?  Garc'esl  là  le  premier  jet  de  la  conscience. 

Ils  se  faisaient  gloire  d'être  mieux  pourvus  physiquement 
que  les  autres;  de  paraître  plus  forts  ou  mieux  portants; 
mais  non  d'être  plus  justes  ou  meilleurs,  ni  même  plus 
riches....  Car  ils  avaient  des  raisons  particulières  pour  ne 
pas  se  targuer  d'être  riches.  Ils  en  avaient  même  d< 
déclarer  plus  pauvres  qu'ils  ne  l'étaient  véritablement,  La 
fiscalité  guettanl  sa  proie 

Ils  Déconsidéraient  comme  honorables  que  les  occupa- 
tions se  rapportant  au  labourage,  comme  !»'.>  travaux  des 
champs  et  les  soins  donnés  au  bétail,  où  une  certaine  I 
physique  et  quelque  adresse  sont  indispensabl 

Suivani  eux,  la  besogne  du  ménage,  aussi  bien  (pu-  la 
tenu.1  .l'un  magasin,  ne  pouvait  convenir  qu'à  un.-  femme  ou 
à  des  êtres  débil 

Un  vrai  laboureur  se  serait  exposé  aux  moqueries  de  ses 
voisins,  et  il  aurait  été  montré  au  doigt  s'il  avait  été  vu 
pétrissant  de  la  pâte,  chauffant  le  four,  tirant  les  vaches, 
surveillant  sa  marmite  et  son  fricot  :  tout  cola,  c'était  l'affaire 
des  ménagères.  Il  aurait  certes  mieux  aimé  ne  rien  faire  et 
se  chauffer  au  coin  du  feu  que  se  livrer  à  «1rs  travaux  pa- 
reils, réputés  avilissants  [tour  un  laboureur. 

aussi  méprisait-il  les  gens  à  vie  sédentaire,  les  artisans 
qui  travaillent  en  chambre,  comme  les  tailleurs,  les  cordon- 
niers, 1rs  tisserands,  et  même  ces  désœuvrés  de  maîtres 
d'école  qui  n'étaienl  bons  qu'à  taire  «les  paresseux. 


—  396  — 

Il  était  lier  aussi  d'avoir  une  bonne  fressure  (l),  c'est-à-dire 
de  bons  poumons,  et  un  estomac  à  digérer  des  cailloux.  Il 
était,  partant,  glorieux  de  mieux  boire  et  de  mieux  se  tenir 
à  table  que  les  autres.  Et  si  l'un  des  convives  vomissait 
après  avoir  trop  bu  :  ce  n'eei  pas  un  homme,  disait-on,  c'est 
un  estomac  de  papier  mâché  !  H  n'a  pas  de  cœur  (2)!  Dans 
leurs  légendes  et  dans  leurs  contes  de  veillées,  ils  se  com- 
plaisaient à  glorifier  la  force.  Ils  semblaient  n'avoir  d'admi- 
ration que  peur  les  personnages  rusés  et  adroits,  que  pour 
les  bercules  qui  tranchent  les  montagnes,  ou  les  magiciens 
qui  changent  les  ronds  de  carottes  en  louis  d'or.... 

Il  faut  reconnaître  qu'à  cet  égard  uns  villageois  d'aujour* 
d'iuii  ont  un  peu  changé  à  leur  avantage.  Leur  amour- 
propre  a  des  objectifs  plus  relevés. 

Justice. 

Les  sentiments  d'amour-propre  sont  les  premiers  degrés 
île  la  conscience  humaine  ;  les  idées  de  justice  en  seul  les 
seconds. 

laboureurs    avaient    du  juste   une  notion   assez,   rudi- 

mentaire. 

Il-  admettaient  encore  comme  règle  d'équité  et  de  justice 
l'application  du  talion. 

Que  i'"i  /ii.  fâ  li,  qu'meni  dit\Vauiéj  ce  qu'il  t'a  fait,  fais 

lui,  comme  dit  l'oiseau.  C'était  une  de  leurs  maximes.  Rends 

ennemis  la  pareille.  Et  cette  conception  busse  les  indui- 

nl  .i  Caire  comme  les  .-mires,  c'est-à-dire  &  s'arroger  les 

droits  dont  leurs  voisins  B'étaient  saisis  Indûment.   Us  se 

lient    uni  amment  autorisés  par  le  bou  comme  par  le 

mauvais  exemple        U     rtitn     fourrageaient  dan- les  Pois 


'I  M  tilt      A\ il    ni    ■  m  ni  .   •    •  ■    I    BVOil     l'UVIr 

11.11 


—  397  — 

de  la  commune  ?  On  aurait  été  bien  bète  de  n'en  pas  faire 
autant  ! 

Que  l'ai  fâ,  fâ  li En  1882,  le  conseil  municipal  de 

Broye-Jez-Pesmes,  appliquait  cette  singulière  règle  de  con- 
duiteaux  incendiés  de  Vaux  qui  demandaient  un  secours  à 
la  commune.  La  délibération  porte  que  la  commune  de  Vaux, 
n'ayant  rien  accorde  aux  incendiés  de  Broyé,  en  1825,  Broyé 
rejetait  la  demande  qu'on  lui  adressait  pour  ceux  de  Vaux. 

On  n'était  pas  juste  à  L'égard  aies  faibles  ë1  des  infirmes 
dans  la  communion  desquels  on  vivait.  On  invoquai!  contre 
eux  une  égalité  toute  judaïque,  mettant  sur  un  des  plateaux 
de  la  balance  tout  ce  qu'on  avait  donné  en  force,  en  pro- 
duits matériels,  en  activité  physique  ;  el  ue  mettant  pas  sur 
l'autre  l'apport  moral  des  êtres  chétife,  ce  qu'ils  avaient  pu 
donner  en  bien-être,  en  gaieté,  en  dôvouemenl  el  en  soins 
affectueux.  On  taisait  cela  et  On  aurait  voulu  que  la  balance 
ne  | Kiuliàt  ni  d'un  coté  ni  de  L'autre. 

Cette  manière  de  comprendre  et  d'appliquer  la  justice  est 
indigne. 

Ce  n'est  pas  de  la  justice,  ce  n'en  est  que  L'apparence. 

La  justice  consiste  quelquefois  à  donner  plus  à  celui  qui 
parait  rapporter  moins. 

Humanité. 

Lapins  hante  expression  de  la  conscience  humaine  est  la 
sentimentalité  qui  nous  apparaît  tout  juste  comme  le  oon* 
traire  de  l'égoïsme.  C'est  cette  sentimentalité  qui  nous  fait 
vivre  en  dehors  de  nous-mêmes,  qui  nous  fait  aimer  les 
autres  plus  que  nous-mêmes.  Faculté  morale  si  remarquable 
et  si  caractéristique  de  l'espèce  humaine,  qu'on  l'a  appelée 
humanité. 

La  conscience  de  nos  ancêtres  n'atteignait  pas  souvent  ce 
niveau  sentimental.  Nous  sommes  bien  forcés  de  convenir, 
en  effet,  que  cette  conscience  n'était  pas  souvent  inspirée 


—  :W8  — 

par  l'esprit  d'altruisme,  en  vertu  duquel  un  homme  supé- 
rieur, un  homme  digne  de  respect,  pense  aux  autres  avant 
que  de  penser  à  lui-même. 

Ils  riaient  charitables.  Mais  leur  charité  procédail  rare- 
ment d'un  élan  du  cœur  vers  le  sacrifice.  Elle  leur  était  le 
plus  souvent  inspirée  el  en  quelque  sorte  arrachée  à  la  vue 
d'une  misère  poignante,  à  l'audition  d'un  malheur  ou  d'une 
calamité  qui  les  impressionnait. 

Parfois  aussi,  elle  n'étail  qu'un  acte  de  superstition.  On 
faisait  l'aumône  pour  l'amour  de  Dieu,  en  vue  de  mériter  la 

réc pense  éternelle  et  d'éviter  parfois  les  châtiments  dent 

sonl  frappés  les  mauvais  cœurs. 

Leur  charité    n'allait  pas    tant    au    bien    public   qu'à  leur 

bien  propre. 


maux  physiques  du  reste  les  touchaient  beaucoup  plus 
que  les  peines  morale-.  Leur  commisération  ne  s'étendait 
pas  aux  douleurs  muettes;  et  si  un  infortuné  était  trop  dis- 
cret pour  se  plaindre,  on  ne  l'assistait  p 

Qtendaienl  que  le  malheureux  fui  un   men- 
diant et  qu'il  s'avilit.  Il  n'\  avait  ni  grandeur  ni  délicatesse 
dans  leurs  procédés  de  bienfaisance  ;  et  parfois  môme  leur 
ièreté  «'■tait  tout  à  Lut  ignoble. 

-,  les  aliénés,  le-  boiteux,  les  bossus, 
etc.,  ion-  lee  infirmes  étaient  pour  eux  un  objet  de  raillerie 
quand  ils  les  rencontraient, 

(  >n  Faisail  eenre  chaque  année  la 
hommes  du  village  qu'on  savail  trompés  par  leur 
femme;  et  cette  liste  leur  était  envoyée  a  tous,  individuel- 
lement,  le  jour  de  la  fête  de    uni  Joseph. 

o,  qui  florissail  encore  eu  1840,  dénote  un  manque 

i    moral  chez  les  pay  sans  du  bon  \  ioux  temps. 

\  '-,  i  égard  tnble  que  no    mœur     ni  eu 


-  399 


Disons,  pour  terminer,  que  le  système  de  sévérité  em- 
ployé autrefois  dans  l'éducation  des  jeunes  gens,  que  les 
principes  de  rigorisme  et  de  compression  mis  en  usage, 
n'étaient  guère  propresà  taire  des  hommes  indépendants, 
des  hommes  de  vraie  liberté ,  ni  à  lés  rendre  simplement 
bons  et  affectueux. 

Les  paysans  «ht  vieux  temps  étaienl  façonnés  &  la 
vertu  comme  un  chien  l'est  aux  exercices  de  la  parade. 


g  X.  -   PÉRIODE  MODERNE. 

Scepticisme  m: s  villageois. 

Il  y  a  juste  cent  ans  que  l'Assemblée  nationale  lit  table 
rase  des  droits  féodaux,  abolissant  dans  une  nuit  les  dîmes, 
redevances  el  servitudes  auxquelles  nos  pauvres  mainmor- 
tables  de  Broyé  étaienl  soumis. 

Une  révolution  aussi  bienfaisante  ne  pouvait  manquer 
d'être  accueillie  avec  satisfaction  el  reconnaissance  par  ceux 
qu'elle  intéressait  particulièrement. 

Kt  cependant  elle  leur  causa  peut-être  encore  plus  d'éton- 
nemenl  que  de  joie,  On  tut  longtemps  à  se  làire  à  l'idée  que 
c'en  était  fini  et  bien  fini  du  régime  des  seigneurs.  <>n  s'as- 
sociait, en  apparence,  aux  solennités  et  aux  fêtes  nationales 
que  le  gouvernement  prescrivait  à  l'occasion  de  chaque  évé- 
nement un  peu  mémorable  ;  niais  on  s'y  associait  avec  cette 
arrière-pensée  que  la  bourrasque  politique  du  moment  au- 
rait un  retour,  qu'une  réaction  inévitable  se  produirait,  etc. 

On  était  donc  assez  peu  enthousiaste,  on  voulait  voir 
venir,  comme  on  dit. 

D'ailleurs,  si  le  cens  avait  été  aboli,  si  les  droits  curiaux 
et  seigneuriaux  avaient  été  supprimés,  d'autres  charges  fis- 


—  400  — 

cales,  au  moins  aussi  Lourdes,  étaienl  imposées  aux  contri- 
buables. Payer  les  tailles  à  un  percepteur  de  L'Etal  ou  bien 
les  payer  à  un  intendant  de  seigneurie,  où  étail  la  diffé- 
rence  ? 

—  La  différence  était  en  ceci,  observerez-vous,  que  le 
produil  des  tailles  se  dépensait  pour  la  satisfaction  et  le 
plaisir  des  grands,  tandis  qu'à  présent  il  allait  être  employé 
à  faire  marcher  les  services  publics... 

—  Oui,  mais  ces  services  publie.-  peur  lesquels  ils  payaient, 
les  gens  de  Broyé  n'en  profitaient  guère.  Ils  manquaient  de 
pouls  :  leurs  chemins  vicinaux  étaient  mal  entretenus.  Puis, 
ils  avaient  toujours,  sous  le  nom  plus  moderne  d'agents 
forestiers,  des  officiers  de  Gruerie  pour  les  tracasser  et  les 
empêcher  d'exploiter  leur  bois,  d'y  faucher  l'herbe,  d'y 
conduire  leurs  bestiaux,  etc.  Ils  étaienl  donc  à  se  demander 
si  la  Révolution  avait  été  bonne  à  quelque  chose. 

Il  y  avait  des  sceptiques. 

Il  y  avait   aussi   des    impatients   ou   des    caractères   aigris, 

pour  qui  les  réformes  a'allaient  pas  assez,  vite. 

divergences  d'esprit  économique,  ou,  si  Ton  aune 
mieux,  de  sentiments  politiques,  ne  devaient  pas  tarder  ;'i  se 
Eure  jour. 

Quand  il  l'ut  question  de  célébrer  un  service  funèbre  à 

Broyé,  en  l'honneur  de  Mirabeau,  le  maire  refusa  de  donner 

.m  commandant  de  la  milice  nationale,  Jos.  Lefranc, 

abstint,  bu  et  ses  amis,  d'assister  ;i  la  cérémonie  qui  eul 

lieu  quand  môme.  Un  procès-verbal  <\r  cette  cérémonie  fui 

mais  il  n«'  put  être  Inséré  aux  actes  de  la  co une, 

du  mauvais  vouloir  du  secrétaire  greffier  qui  s'étaii 
ab  enté  ave<  le   mécontents  du  conseil. 

dh ■  intestines  ont  du  être  les  mé s  dans 

tout  ait  ''H  finalement  ce  résultat 

ux,  que  chaque  parti,  pour  agir  sur  l'opinion,  a  dû 

c pin.   du  moins  de  proposer  des 

amélioration    loi  il 


—  401  — 

Ce  serait  trop  long,  mais  forl  amusant  de  descendre  dans 
ions  les  détails  des  luttes  politiques  qui  se  sont  poursun 
sur  un  aussi  petil  théâtre. 

ÂHÉLI0RATI0N8   LOCALES. 

Les  choses  marchaient  quand  même  vers  le  mieux.  On 
voyait  peu  à  peu  circuler  plus  d'argent  qu'autrefois;  la 
consommation  des  vrilles  devenait  plus  active,  le  peuple  des 
campagnes  vendait  mieux  son  bétail  et  ses  denrô 

Le  village  de  Broyé,  qui  comptait  déjà  <»<><)  âmes  en  l'an  II, 
atteignit  lu  chiffre  de  700  dix  ans  après. 

Plus  tard  la  prospérité  du  paya  l'ut  encore  accrue  par  une 
source  assez   inattendue,  smis  i.t  Restauration,  le  Tn 
payait  la  somme  de  11  ,500  francs  à  23  militaires  pensionnés, 
mis  ;i  la  retraite  nu  à  la  réforme,  en  résidence  à  Broyi 
Les  M,r><>()  francs  encaissés  par  >ï.)  chefs  de  famille  ne  lais- 
saient pas  (le  profiter  au  pays;  ils  s'y  dépensaient  ou 

niellaient  à  l'épargne. 

Peu  à  peu  les  vastes  masures  de  chaume,  abritantquatre 
ou  cinq  ménages,  tirent  place  à  des  maisons  plus  confor- 
tables, couvertes  de  tuiles,  mieux  éclairées  et  séparées  les 

unes  des  autres  :  parce  que  chacun  voulut  avoir  sa  demeure 
exempte  de  servitudes  et  de  mitoyennet 

Les  pues  étaient  o  lanceuses  et  aquatiques  •>,  suivant  les 
termes  d'une  délibération  de  1826.  On  les  empierra  el  on  les 
élargit  en  les  bordant  de  rigoles  pavées.  On  en  lit,  en  un 
mot,  des  rues  vraiment  superbes. 

On  répara  et  on  rendit  praticable  aux  voitures  l'unique 
chemin  vicinal  qu'on  possédait  et  qui  menail  à  Pesmes, 
chef-lieu  du  canton. 

(1)  Ces  vingt-trois  pensionnés  comprenaient  un  cher  de  bataillon,  deux 
capitaines,  quatre  lieutenants  et  sous-lieutenants,  sept  Bous-officiers  el  uenf 

caporaux  ou  simples  soldats.  Actuellement  il  n'existe  pas  à  Broyé  un  seu 

pensionnaire  de  l'Etat. 

26 


—  -402  — 

Plus  tard  encore  on  fit  quelques  prestations  sur  un  autre 
chemin  de  défrichement  qui  allait  d'Aubigney  sur  Gray  e1 
V;ilay. 

Ces  améliorations  de  voirie  en  facilitant  les  relations  de 
voisinage,  favorisèrent  un  peu  le  commerce  local. 


Pendant  que  ces  changements  se  produisaient  l'un  après 
l'autre,  d'autres  progrès  s'opéraient  dans  les  esprits  e1  aussi 
tl;ms  les  procédés  économiques.  La  routine  était  battue  en 
brèche  par  des  observations  que  précisément  les  habitudes 
de  libre  discussion  favorisaient.  Et  il  s'en  suivit  une  émula- 
tion extraordinaire  pour  tout  ce  qui  a  rapport  à  la  culture. 
C'était  à  qui  aurait  les  plus  belles  récoltes  !  A  qui  1  écurie  la 
mieux  entretenue  ! 

Aujourd'hui,  Broyé  possède  une  proie  rouge  d'environ 
700  tètes  ^  gros  bétail,  81  bien  que  le  bo!  y  soit  en  général 
médiocre,  le  rendement  des  terres  est  considérable.  Le  vil- 
lage B  un  excédent  de  production  moyenne  en   blé,  de  plus 

de  's<x»  hectolitres. 

On  ne  cultive  plus  guère  de  méteil  :  pendanl  que  la  cul- 
ture du  seigle  est  conservée  à  cause  de  la  paille  qui  sert  à 
façonner  des  glus  donl  le  commerce  est  assez,  recherché. 

LAiioutKints  n'MJjomiD'HUI. 

Je  pro  ird  de  mes  compatriotes  une  estime 

trop  admirative  pour  ce  pas  suspecter  l'expression  d'un 

aliment.  C'est  pourquoi,  dans  l'examen  auquel  je 

m. •  livrer  sur  le  caractère  de  nos  gens,  j'emprunterai 

d'abord  le     appréciations  d'un  étranger,  d'un  I ime  né 

un  autre  village,  mais  'i111  ■'  vécu  b   Broyé,  qui  est  bien 
placé  pour  voir  b1  i r  compai  ippréciations  ne  sau 


-  409  — 

M.  Charpillet,  instituteur  communal,  a  fourni  l'année  der- 
nière à  l'inspection  Académique  de  la  Saute-Saône,  cm  tra- 
vail assez  étendu  sur  Broyé. 

Je  copie:  « La  population,  dit-il,  s'y  distingue  par  Hé 

9  tares  habitudes  de  travail.  L'agriculture  est  a  peu  i 
»  son  occupation  exclusive.  Elle  s'y  livre  av§c  ardeur  et 
»  n'économise  pas  ses  bras.  Sou-  ce  rapport  ''lie  peul  ser- 
»  vir  d'exemple.  Ce  qui  lui  fait  honneur  surtout,  c'est  son 
'•  attachement  au  pays  natal  et  à  la  rie  des  champs.  I.'éini- 
»  gration  que  l'on  combat  ailleurs  est  inconnue  à  Broyé.  La 
»  ville  et  les  emplois  publics  y  recrutent  peu.  Le  td>  y  suc- 
»  cède  à  son  père;  et  ses  occupations  lui  procurent  toujours 
»  le  nécessaire  et  souvent  l'aisance.  Cela,  avec  la  liberté, 
•>  snl'Ht  à  son  ambition 

Voilà  qui  esl  l'exacte  Vérité. 

Le  village  est  resté  ce  qu'il  était  jadis,  une  colonie  abso- 
lument agricole.  On  naît  où  l'on  devient  laboureur,  et  labou- 
ivur  on  reste. 

Gomme  il  n'existe  au  pays  ni  couvent,  m  château,  ni 
fabrique  ou  usine,  on  n'y  connaît  pas  la  mendicité  ni  la  domes- 
ticité servile,  ni  le  travail  débilitant  et  souvent  avilissant  de 
l'atelier. 

Chacun  y  cultive  ses  champs,  et,  par  esprit  de  fierté el 
d'indépendance,  personne  ne  voudrait  aliéner  sa  liberté  pour 

se  rendre  le  serviteur  ou  l'homme  lige  de  qui  que  ee  soit. 

Après  1880,  la  forge  de  Pesmes  expédiait  sur  la  Saône 
beaucoup  de  gueuses  et  de  1er  en  barre,  pour  de  là  ces  mar- 
chandises être  expédiées  par  bateaux  sur  différents  points. 
Les  transports  de  Pesmes  au  port  Saint-Pierre,  assez  bien 
rémunérés,  transitant  par  Broyé;  d  était  naturel  qu'ils  fus- 
sent effectués  par  les  voituriers  de  l'endroit.  Or,  nos  labou- 
reurs ont  toujours  préféré  laisser  l'aire  ce  VOiturage  par  ceux 
d'Aubigney  et  de  Sauvigney,  estimant  qu'il  ne  faut  pas  ré- 
pondre par  les  grands  chemins  un  fumier  dont  la  terre  a  si 
grand  besoin.   Puis,  d'ailleurs,  à  charrier  tout   n'est   pas 


—  404  — 

profit;  on  néglige  le  travail  des  champs  qui  n'admet  pas  les 
atermoiements;  et  quand  on  a  tout  bien  compté,  le  coût  du 
maréchal  et  du  charron,  on  s'aperçoit  que  le  train  mange  le 
train. 
Ils  se  livrent  donc  à  la  culture  sans  partage. 


Toutes  les  maisons  du  village  et  leurs  dépendances  sont 
appropriées  en  vue  des  aisances  agricoles.  C'est  dire  que 
l'agrément  en  est  exclu.  Ecurie,  remises,  grenier  occupent 
pins  des  trois  quarts  des  bâtiments. 

On  n'y  sacrifie  rien  au  luxe. 

Cependant,  depuis  quelques  années,  les  propriétaires  les 
plus  riches  ont  l'ait  (''lever  sur  rue  de  beaux  murs  surmontés 
d'une  grille  pour  enclore  leur  devanl  de  maison.  Espérons 
qu'on  en  viendra  prochainement  à  ties  clôtures  moins  coû- 
teuses et  plus  pittoresques  <le  charmille,  de  lilas  et  de  chè- 
vrefeuille. 


A  Broyé,  on  ne  connaît  pas  la  domesticité  Bervile.  Les 

i  .m  en  service,  domestiques,  valets,  Berviteurs 

srvantee,  qu'on  les  appelle  comme  on  voudra,  ne  rap- 

pellenl  en  rien  la  valetaille  qui  une  dans  Les  maisons 

boni  Os  sont  considérés  comme  des  membres  de  la 

famille,  comme  des  aides  el  des  compagnons,  et  ils  mangent 

table  commune ,  car 

Qui  m  n  t.i  table 

Mange  .1  i .i.iiitr. ...... 


ii     |  •  ,  Broyé,  dit  m.  Charpillet,  il 

on  toi!  et  quelques  sillon 


—  405  — 

»  qu'il  l'ait  produire   »>.  La  mendicité  n'y  est  pratiquée  que 
par  les  pauvres  des  paya  voisins. 

Presque  tous  les  épiciers,  meuniers,  marchands  el  auber- 
gistes du  village  sont  encore  des  étrangers  qui  sont  venus 
s'y  fixer  el  dont  les  descendants,  par  une  sorte  de  contagion, 
prendront  le  goût  du  Labourage,  goût  caractéristique  de 
notre  vaillante  population. 


Chez  nous,  comme  l'observait  M.  Charpillet,  on  ne 
s'expatrie  pas.  <>n  acquitte  pas  son  pays  pour  devenir  en 
ville  garde  de  police  ou  cocher  de  bonne  maison. 

Non  ;  un  attrail  irrésistible  nous  rappelle  au   villaj 
nous  avons  vécu  sainement  dans  une  sorte  de  familiarité 
générale,  indépendante,  avec  des   mœurs  simples  et  un 
profond  sentiment  du  droit  qu'on  a  d'être  maître  chez  soi  et 
d'y  vivre  à  sa  guise. 

C'esl  pourquoi  dos  jeunes  gens,  revenus  du  régiment, 
rentrenl  chez  eux  tous  pour  reprendre  la  queue  de  la 
charrue. 

Et  pourtant  je  ne  crois  pas  qu'à  l'armée  on  ait  des  recrues 
plus  intelligentes  el  taisant  un  meilleur  service  que  celles 
de  Broyé.  En  effet,  quand  on  a  été  tonné  aux  vertus 
champêtres  par  l'exemple  de  ses  parents  ;  quand  on  a  con- 
tracté   dès    le    bas    âge    des    habitudes    de  sobriété,    l'esprit 

d'économie  et  l'amour  du  travail,  on  ne  saurait  être  qu'un 

soldat  modèle  et  i|u'un  bon  citoyen. 


Sans    compter    qu'avec    ces    vertus-là,    on     n'est     jamais 

pauvre. 

La  crise  agricole  passe  presque   inaperçue  à  Broye-lez- 
Pesraes  >>....  Et  les  crises  politiques,  ajouterons  nous,  n'ont 

(1)  M.  GHABPILLET,  manuscrit  cité. 


—  400  - 

jamais  agité  te  pays  qu'à  la  surface.  Kilos  ont  servi  plus  ou 
moins  à  masquer  dos  jalousies  ou  des  animosités  person- 
nelles :  mais  elles  ont  laissé  la  masse  des  paysans  assez 
Indifférente  en  somme.  Car,  république  on  monarchie,  ne 
faut-il  pas  des  sacrifices  et  de  la  subordination  sous  n'im- 
porte quel  régime? 


On  cultive  peu,  on  ne  cultive  môme  pas  du  tout  les  beaux 
arts  à  Broye-lez-Pesmes.  A  cet  égard,  on  a  des  idées  fausses 
parce  qu'elles  Boni  exagéré 

On  croit  que  la  peinture  n'est  propre  qu'à  distraire  les 
riches  el  les  désœuvrés;  et  la  musique,  qu*à  faire  danser. 

En  dehors  dès  chants  d'église  el  de  quelques  chansons 
grivoises  on  patriotiques,  <»n  ne  connaît  que  les  airs  de 
bastringue  popularisés  à  l'occasion  d'uni'  noce  ou  de  là  fête 
patronale  par  les  ménétriers,  cornistes  et  joueurs  de  cla- 
rinette, artistes  venus  de  Pesmes....  Car  je  ne  sache  pas 
qu'à  Broyé  il  y  ail  un  seul  Instrumentiste. 

il  est  évident  qu'un  grand  musicien  ne  saurait  se  déve- 
lopper dans  un  pareil  milieu. 

Le  village  n'a  vu  naître  auci célébrité  artistique,  aucun 

nd  écrivain,  aucun  homme  de  guerre  fameux  ;  mais  une 
multitude  de  braves    gens  dont   quelques  personnes  fort 
mmandables. 

Qaude  Hubert  et  François  Goyot  (1712-1714),  deux  frères 
dont  l'un,  chanoine  de  Comines,  fut  professeur  de  rhétorique 
ollège  de  Lille  en  Flandre;  «'i  donl  l'autre,  cordelier, 
docteur  en  Sorbonne,  devint  procureur  général  de  son 
ordre  el  cordon-bleu  de  l'ordre  du  Saint-Esprit,  <'.<•  dernier 
mourut  •'  Sellière     Jura)  dans  le  eouvenl  des  Cordeliers. 

m    in  i,in(  filles  de  la  charité,  néei  dans  les 

dei  nièn  du  w  ur     ièele  ■<  Broyé  ;  i,  l'une 

iin.iii ni     1 1 1 ••  1 1. ■m.-   de   i  hôpital   de    Méziôre - .  l'autre,  de 

pital   cii  i  Iroi  iôme,  de  l'hôpital  de  Corbeil. 


—  407  — 

a  Devaal  la  grande  croix  centrale  du  cimetière  de  Corbeil, 
»  se  trouve  un  monument   où  es!   gravée   l'inscription  sui- 

»  vante  :  Cï  GIT  JEANNE  PIERRE  OUDIN,  FILLE  DE  LA 
»  charité  ,  NÉE  a  BR0YES-LEZ-PesMES  (Haute-Saône)  , 
p  DÉCEDÉE  SUPÉRIEURE  DE  L'HOPITAL  DE  CETTE  VILLE  LE 
»  6  AVRIL  1851,  ÂGÉE  DE  70  v.\s  DONT  40  DE  VOCATION 
»    CONSACRÉS  A.UX   MALADES. 

<>....  Qne  vie  entièrement  consacrée  à  l'humanité  souf- 
b  frante,  dont  chaque  jour  a  $té  employé  au  secours  <ln 
t  pauvre,  qui  a'esl  éteinte  calme  et  sereine,  comme  elle 
.)  avail  été  simple  et  modeste,  au  milieu  de  ceux  qu'elle 
9  avait  assistés  depuis  39  ans  a  Corbeil....  Une  pareille  vie 
»  a  droit  aux  respects,  aux  regrets  Bincères  de  toute  la 
»  population  à  quelque  classe  qu'elle  appartienne....  ileuil 
»  public...  La  s. nu-  Oudin  lit  ses  débuts  a  Corbeil  en  I8i  c 
p  au  moment  oc  la  bataille  de  liontereau  nous  envoyait  son 
»  déplorable  tribut.  <>n  la  vit  prodiguer,  etc  tt).  » 

Broyé  tut  aussi  la  patrie  de  François  Perron,  qui  fut  pro- 
fesseur au  collège  de  Nancy;  puis,  plus  tard,  professeur  de 
philosophie  à  la  Faculté  des  lettres  de  Besancon,  et  long- 
temps secrétaire  perpétuel  de  l'Académie,  où  il  faisait  des 
rapports  brillants  et  faciles,  el  pour  ainsi  dire  improvisés. 

Il  l'ut  sous  l'Empire  chef  de  division  au  ministère  d'Etat, 
directeur  du  journal  ['International,  créateur  des  assurances 
agricoles,  directeur  et  fondateur  du  Petit  Caporal,  etc.  Fran- 
çois Perron,  aé  en  1804,  mourut  à  Paris  en  1<s7ô. 


L'étude  plus  sociologique  qu'historique  que  nous  con- 
sacrons à  une  commune  absolument  livrée  au  travail  des 
champs  prouve   une  fois  de  plus  que   l'agriculture  est  la 

plus  saine  et   la  plus  murale  ile>  professions. 


(1)  Note  communiquée  pw  M.  Goyot-Briot 


—  408 


ï   XI.  —  LE  PATOIS  DE  BROYE-LEZ-1'KSMES. 

De  nos  patois  confus  procèdent  les  langues  écrites, 
comme  de  celles-ci  devra  procéder  la  langue  univer- 
SELLE. 

Dans  les  pays  voisins  on  taquine  volontiers  les  gens  de 
Broyé  au  sujet  de  leur  patois  qui  est  moins  mélodique  que 
celui  «1rs  villages  de  Bourgogne,  mais  aussi  moins  lourd  et 
moins  traînant,  moins  chargé  de  diphthongues  que  celui 
des  villages  de  'Franche  Comté  :  el  on  leur  jette  en  passant 
par  moquerie, [cette  phrase  de  leur  vocabulaire:  Aipotè 
Vtotot,  Vtrirot,  lai  coude  .'...  Le  totot,  le  viroi  el  la  corde  sont 
toutes  i,.s  pièces  de  l'appareil  nécessaire  pour  serrer  une 
voiture  de  foin. 

Je  me  figure  qu'à  Broyé,  localité  essentiellement  agricole, 
qui  s'esl  toujours  complu  dans  la  routine,  <  1  < >i 1 1  la  population 
n'a  jamais  été  exterminée  à  fond  ni  par  conséquent  renou- 
velée, dont  les  croyances,  les  coutumes,  les  usages  n'onl 
presque  pas  varié  depuis  deux  mille  ans  ;  je  me  figure,  dis-je, 
que  le  langage  n'a  dû  >  subir  que  peu  de  transformations,  el 
qu'il  j  a  conservé  son  originalité,  au  moins  dans  ladési- 
tion  nominale  des  choses  vulgaires  et  dos  objets  les  plus 
usuels  aussi  bien  que  dans  Bes  éléments  constitutifs  et  sa 
ixe. 


Quand    i'      Grammairiens,    exclusivement     préoccupés 
,|n  m    étaient  écrite     ont  daigné  examiner  d'un 

peu  |  •  ■  -     le    |)atol     il    ont  été  bien  \  ite  frappés  de  l'affinité 
,i  .i  ■  taienl  entre  les  mol    de  tous 

;  |    ,       pour  d       ner  li     même    objets  ;  el  ils 

n  ont    pa-    manqué  de    proclamer   que   ce     mol  ■   titaienl 


—  409  — 

d'origine  grecque  ou  latine;  que  nâ  par  exemple  venait  de 
nasus,  e1  que  /'/•"'  el  lenne  né  pouvaienl  qu'être  une 
variante  des  termes  latins  fructus  et  'ioc(.  El  cette  manière 
de  voir  êtail  d'autanl  plus  spécieuse  que  les  mots  luna, 
fructus  et  nastw  étaient  déjà  employés  chez  les  Romains  au 
temps  des  douze  tables.... 

—  Eh   bien  ;   el    nâf  el  frutt pourquoi    ces    mots 

n'auraient-ils  pas  été  employés  clvéz  les  Celtes  a  la  même 
époque  '.' 

—  Rien  ne  le  prouve,  puisque  aucun  texte  écril  n'en  Bail 
mention.... 

—  .l'en  conviens.   Mais  à,  défaut  de  textes  imprimi 
manuscrits,   le  bon  sens  nous  indique  que  bien  avant  l'in- 
vasion des  Romains  dans  la  Gaule,  on  y  récoltail  des  Bruits; 

eu    y   Voyait    la   lune  et     les    étoile-,  el   les   Celtes   eoiuiue    les 

Romains  devaienl  être  pourvus  d'un  appendice  nasal,  d'yeux 
et  d'oreilles  !..  El  sans  doute  qu'ils  avaient  aussi  des  vocables 
[tour  désigner  toul  cela  ! 

Or,  je  ne  vois  pas  bien  pourquoi  étant  en  possession  d'un 
langage  traditionnel,  adapté  à  ses  besoins  et  à  sa  civilisation, 
les  Gaulois  l'auraient  changé  pour  en  prendre  un  autre,  eux 
qui  étaient  par  nature  si  fortement  attachés  à  leurs  habitudes 
et  si  Qers  de  leurs  traditions. 

A  priori,  il  parait  donc  vraisemblable  que  la  population  de 
chaque  pays  a  dû  conserver  une  bonne  part  des  éléments 
et  «les  formes  primitives  de  son  langage,  à  moins  que  le  pays 
n'ait  été  saccagé  el  détruit  de  tond  en  comble. 


Une  horde  qui  s'installait  dans  une  contrée  veuve  de  ses 
habitants  devait  nécessairement  y  apporter  avec  elle  son 
idiome,  en  même  temps  que  ses  traditions  et  ses  mœurs; 
cela  va  de  soi.  Il  n'y  a  pas  de  doute  par  exemple,  comme  l'a 

dit    Fallut,   que  les  Celles,    en  envahissant    la   haute    Italie 


—  410  — 

plusieurs  siècles  avant  l'ère  chrétienne  el  en  refoulant  les 
colonies  d'Ibères  et  de  Ligures  vers  les  deux  Siciles,  n'aient 
importé  dans  la  Cisalpine  leur  jargon,  leur  patois,  qui  (Mail 
plus  ou  moins  celui  des  Arvernes,  des  Eduens  él  des 
Séquanais.  Cola  devait  être,  ou  la  vérité  historique  n'aurait 
aucune  vraisemblance. 

Et  cependant  l'élément  indigène  vaincu,  refoulé  et  dis- 
persé, était  resté  encore  si  vivace,  qu'il  a  fini  par  imposer 
son  ancien  idiome,  ses  tonnes,  ses  accents,  aux  enva- 
hisseurs. 

Gomment  admettre,  après  li1  tait  historique  que  nous 
citons,  que  des  conquérants  de  passage  dans  la  Gaule, 
comme  l'ont  été  les  Romains,  aient  imposé  si  facilement  leur 
langue  aux  peuple-  qu'ils  avaient  vaincus?...  Jamais  ces 
peuples  n'avaient  pu  uniformiser  les  différents  dialectes  de 
leurs  tribus,  qui  ne  se  comprenaient  pas  de  Tune  à  l'autre  : 
et  l'un  voudrait  qu'il  <'ùt  suffi  d'une  occupation  temporaire 
de-  citadelles  et  di^  bourgs  de  quelques  points  de  leur  vaste 
territoire,  pour  changer  radicalement  leur  Idiome  ?...  Est-ce 
admissible?... 

o  serait  en  toul  cas  un  miracle  qu'on  n'aurait  plus 
jamais  re\  u. 


Non  ,  ce  n'esl  pas  quand  un  peuple  occupe  simplement 

les  cités  principales  d'un  grand  pays  qu'il  peut  y  implanter 

ie,  changer  les  mots  techniques  en  usage  dans  ce 

pays,  ^   (aire  oublier  le  nom  des  choses  et  des  objets  qui  y 

lient  auparavant. 

\  m -  donc  qu'elle  n'ait  complètement  disparu  h  pour 

i  peu  qu'il  en  reste,  la  race  autochl ne  perdra  pas  faci- 
lement le  expi  e    ion   qui  lui    ont  familières  et  qu'elle  tient 
•  m  h  uctiona  spécj  inunaire. 

il  v  tinqueur  et  le  vaincu  ;  des 

m.  m.   c li  i  "ni  emprunté  i  de  l'un  6 


—  4M  — 

l'autre,  qui  nécessiteront  des  vocables  nouveaux.  Mais  les 
objets  dont  les  colons  anciens  continueront  à  se  servir; 
mais  les  vieux  procédés  retenus,  les  vieilles  croyances,  les 
produits  du  sol,  les  lieux  dits,  etc..  i «  .ut  cela  aura  chance  de 
conserver  s;i  dénomination  connue  et  de  garder  la  situation 
acquise.  Cela  même  ne  pourrait  pas  se  faire  autrement, 
l'étranger  ne  pouvant  dénommer  que  ce  qu'il  connaît. 

On  fait  observer  que  le  latin  (Haut  devenu  la  langue  reli- 
gieuse du  | >.i >  -,  a  dû  nécessairement  introduire  beaucoup  de 
mots  dans  nos  vocabulaires....  .Mais  les  pauvres  gens  qui 
l'ont  entendu  chanter  dans  nos  églises  pendant  des  siècles 
n'y  uni  jamais  rien  compris.  Ils  n'uni  pas  dû  par  conséquent 
v  foire  de  bien  larges  emprunts  pour  enrichir  leur  langue 
maternelle.  Le  clergé  a  certainement  plus  latinise''  de  vieux 
mots  patois  en  les  affublant  d'une  terminaison  en  us  on  en 
um  qu'il  n'a  procuré  de  mots  latins  au  langage  vulgaire. 
Nous  avons  moins  reçu  que  donné. 

Est-ce  que  nous  n'avons  [tas  imposé  à  l'Italie  l'article  qui 
simplifie  si  fort  les  déclinaisons  ?  ...  Est-ce  que  nous  n'avons 
pas  imposé  pareillement  nos  constructions  do  phrases,  si 
régulières,  si  méthodiques,  >i  opposées  aux  amphibologii 

Et  les  pronoms  \' 

Les  patois  ne  sont  donc  pas  des  dérives  du  latin.  Ils  sont 
bien  des  idiomes  primitifs,  et  dans  toute  la  force  du  terme 
des  langues  mères  dont  les  tangues  savantes  dérivent 
assurément. 


C'est  donc  avec  ce  qui  nous  reste  du  patois  que  nous 
pourrons  retrouver  l'étymologie  d'une  feule  de  mots  au 
sujet  desquels  la  philologie  est  dans  la  mut. 

La  recherche  des  origines  des  mots  devient  de  plus  eu 
plus  difficile  avec  la  disparition  des  patois. 

Quelquefois  un  phénomène  observé,  un  t'ait  physique 
quelconque  aura  été  le  point  de  départ  d'une  série  de  mots 


—  412  — 

composés  pour  désigner  des  actions  ou  des  choses  qui  s'y 
rapportant  de  près  ou  de  loin.  Or,  il  peut  se  l'aire  que  ce 
phénomène  ait  disparu  ou  soit  oublié,  et  que  les  composés 
qui  en  dérivent  soient  conservés.  Par  exemple,  le  mot  frein 

—  linge  de  corps  — n'a  plus  cours  depuis  longtemps  ; 
quoique  le  mol  enfretoilHe  qui  lui  doit  son  origine  soit 
encore  employé  assez  souvent. 

Ainsi  encore,  bretu  —  rapière  —  ne  se  dit  plus  ;  mais  le 
mol  breteUe  nous  est  resté  pour  désigner  ce  qui  soutenait  la 
rapière. 

C'e.-t  SOUVenl  dans  ces  radicaux  oubliés  ou  peu  connus 
qu'on  retrouvera  la  clef  de  plus  d'une  étymologie. 

Demandez  à  nos  lexicographes  d'où  provienl  le  oio1 
d'éblouissement*?  Ils  vous  répondront  qu'il  vient  d'éblouir. 

—  Et  éblouir?  — Ouvrons    Littré:   »....  8»,    préfixe,  et    un 

idical  qui  est  aussi  dans  le  provençal  eiit-hhinzir  , 
i  étonner,  d'origine  incertaine.  On  a  proposé  bleu  :  faire 
»  bleu  devanl  les  yeux,  il  est  certain  qu'au  \i\  siècle,  on  a 
»  dit  rx-hh'nir.  Mais  hic/,  objecte  que  bleu,  de  l'allemand 
i  hhui,  n'aurait  pas  pris  un  /.  en  provençal  pour  éviter  an 
■i  hiatus,  —  et  en  effet,  btaveuc}  bUweza,  etc.,  dérivés  de 
i  Mau,  et  non  pas  blauzeuc^  blauzeza,  etc.  Il  se  range  donc 

de  l'avis  de  Grandgagnage  qui  Indique  l'ancien  haut 
i  allemand  blôdi,  interdit,  incertain.  Y  aurait-il  deux 
i  thèmes,  sic?....  .. 

H  est  clair  que  Grandgagnage,  Diez,  Littré,  et  tutti  quanti 
u'\  ont  vu  que  du  bleu. 

i  h  paysan  de  Broyé  un  peu  avisé  vous  dira  :  ablouit  Mrfl 
tMoui,  bien  quand  on  s  les  abluottot  I       Abluottet 

que  jignifle*?  Ehl  oui;  avoir  les  abluottes,  c'esl  voir 
trente  ix  chandelles,  comme  l  des  apluet  vous  dansaient 
li  cea  apluea,  qu'est-ce  encore  ?  <>u 
appelle  apluet  chez  nou  le  particules  de  fer  incandescent, 
Lincelle   'i111  jailli    enl    ou    le  m. nie. m  du  forgeron. 

h. .plue-  i  aiplues,  comme  on  dll  È  Be  onçon,  sont 


—  413  — 
issues  les  aibluottes  ;  et  (V  aibluottes  ;i  éblouir  il  n'y  a  qu'un 
pas. 

Un  autre  exemple  encore  :  cherchez  dans  les  dictionnaires 
L'étymologie  «lu  mot  breloque,  vous  trouverez  que  i  breloque 
»  est  formé  par  une  particule  péjorative,  — bre  ou  bér,  — 
»  et  par  le  mot  loque,  qui  viendrai!  «lu  haut  allemand  loc, 
»  chose  pendante....  »  Mais  c'est  chercher  uinli  à  quatorze 
heures. 

Une  breloque  est  une  machine  dont  l'intérieur  esl  dé- 
traqué, dont  le  mouvement  ne  vit  plus,  qui  loque  ou  ber- 
loque  comme  un  œuf  dont  le  germe  .:i  demi  formé  est  morl 
dans  l.i  coquille.  (Voir  le  mot  loquai). 


Ce  qui  prouve  bien,  comme  l'a  «lit  notre  compatriote  Bullet 
dans  ses  éléments  primitifs  des  langues,  que  pour  faire 
Vanalyee  du  français  il  faut  attendre  </'"■  noue  ayons  de* 

dictionnaires  de  tous  les  patois  de  nos  provinces. 


-  \\\ 


GLOSSAIRE 


A. 

Abanaie,  adj.  fém.  Se  dit  d'une  porte  ouverte.  Littéralement 
elle  est  banale,  c'est  un  passage  public. 

Aboilli,  s'aboilli,  s'étonner,  être  étonné.  N'est  guère  employé 
qu'à  la  1"  personne  du  singulier.  I  m'aboilli  voue  si  ù  vinrant  : 
je  me  demande  vraiment  s'ils  useront  venir! 

On  l'ait  souvent  précéder  ce  mot  des  accentuations  bin  ou  pas 
mau.  I  seroue  bin  aboilli,  si...  i  ne  seu  pas  mau  aboilli  que. .A 

Abluottes,  s.  f.  pi.  Se  ilit  aussi  abrelues;  aivoi  las  abr élues, 
être  ébloui,  étourdi.  (Voir  Aplues.) 

Abroussures,  s.  f.  pi.  Menus  débris,  sommités  élaguées  des 
baies. 

Abrugnai,  ebarbonné.  i-e  brun  est  le  charbon  des  grains, 
l'ergot 

Acampourai,  v.  a.  Répandre  'in  t 1er,  étendre  des  herbes, 

■  in  foin,  etc. 

Acbeille,  s.    f.    Eclat    de   bois   piquant  ,  esquille,  épine  quel- 

oonque  qui   s'introduit   sons   la   peau     Eehaille  (Besançon), 
éeharde  (francs 

Achemé,  ^.  m.,  le  dessous  du  corps  d'essieu  «in  derrière  d'une 
voiture  mm  lequel  s'implante  les  ranci 

Achomé,  s.  m.,  bois  m  double  équerre  "ii  en  are  qui  soutien! 
t'  t.. uni.-  .i  une  barque  81  tes  empêche  de  se  rapprocher  ou  de 
lléchlr.  fc)tymologie  archt  ou  nirchot  h  tnê,  arc  ou  arçon  du 
milieu. 

âehtvboti       m   pi  Macre     Eoharbot,  di<  Littrô,  esl  le  nom 
de  la  chai  au  ou  trape  nageante,  C'esl  un  Iruil 

commun  dant  la  vieille  Saône,  On  le  mange  cuit  dans  l'eau 
Miinr  la  châtaigne  ordinaire 


-  415  - 

Achaulons,  s.  m.  pi.  Noix. 

Acofiai,  v.  a.,  écraser,  aplatir  dans  me  cofieu.  (Voir  ce  mot.) 

Acoure,  v.  a.,  battre  au  fléau.  D'où  le  français  écosser,  excu- 
tere.  L'acoussou,  c'esl  le  fléau;  un  acousserè,  c'est  un  batteur 
en  grange. 

Acressi,  s.  m.  Se  dit  d'un  enfant  ohétiï  et  malingre;  et  aussi 
d'une  personne  très  maigre,  petite  et  ratatinée. 

Acrigneule-aiguesse,  s.  f.,  pie-grièche.  Dans  le  patois  de  Be- 
sançon,  cet  oiseau  s'appelle  lai  creuilloure. 

Acrousai,  v.  a.,  écraser  dans  la  coquille;  de  ereute.  (Voir  ce 

mot.) 

Afiai,adj.,  éventé,  qui  a  été  laissé  à  l'air  H  qui  S'en  trouve 
altéré,  comme   le  vin  qu'on   laisse  dans   un   verre  OU   dans   un 

flacon  débouché el  qui  a  perdu  son  bouquet. 

on  veut  que  le  mot  afiai  dérive  de  flatus.  Ne  peut-il  pas  dé- 
river aussi  bien  de  fier,  aigre;  ou  de  fieu,  fleurs,  mycodermes 
ou  mucédinées  qui  viennent  sur  le  vin  d'un  tonneau  en  vidange? 

Afiai,  v.  a.,  cuver.  Vai-t'en  afiai  ton  vin  pu  loin,  dit-on  a 
l'ivrogne  qu'on  repousse. 

Agiquiai,  v.  n.,  éclabousser.  De  Ci<iuieu  (voir  ce  mot). 

A.gceutiau,  s.  ni  ,  ôcope,  sasse  ou  épuisette  d'une  barque; 
pelle  creuse  à  manche  très  court  servant  à  épuiser  l'eau.  Ety- 
mologie  :  gœute,  goutte,  égoutter  et  eau. 

Agrailli  (11  mouillés),  desséelié,  éliaioui.  Se  dit  d'une  futaille 
ou  d'une  seille  dont  les  douves  sont  disjointes  par  l'action  du 
soleil. 

Agueillotai,  v.  a.,  jeter  des  pierres  à 

Agueveilles,  s.  f.  pi.  balayures,  tâtots,  vieux  tessons,  etc.; 
en  un  mot,  tout  ce  qu'on  jette  dans  un  coin,  puis  à  la  voirie. 

Aiboucheton  ou  aibouchon.  Se  mettre  aiboueheton  pour 
I  h  lire,  c'est  boire  couebé  et  à  même  au  ruisseau. 

Aiboucheu.  (s'),  v.  n.,  c'est  s'endormir  sur  la  table  ou  sur  un 
lit  pour  sommeiller,  la  tête  appuyée  sur  l'avant-bras.  Vai  t'ai- 
boucheu  in  moment! 


—  416  — 

Aichetai  (s*)  ou  s'aissetai,  v.  n..  s'asseoir. 

Aicoeilleu,  v.  a.,  fouetter  Les  bœufs  à  la  charrue.  {Aicœure  à 
Besançon.) 

Aicreboton,  se  mettre  aiereboton  ou  s'aicrebotai ,  c'est  s'ac- 
croupir, se  baisser  en  repliant  ses  talons  sous  ses  fesses. 

Aifauti,  ailj.  Se  dit  d'une  créature  quelconque,  d'un  enfant 
surtout  qu'on  a  privé  de  nourriture,  qui  est  affaibli  par  un  ré- 
gime insuffisant. 

Aigrippai,  v.  a.,  prendre,  saisir.  L'aigrippesous  est  le  hap- 
pechard,  L'usurier,  l'avare. 

Aiguebi,  adv.  Même  sens  ^naicreboton. 

Aiguebi,  v.  a.  Assommer. 

Aiguesse,  s.  f.  Pie. 

Aijoulot ,  s.  m.,  trébuche!  ou  quatre-en-chiffre  destiné  à 
prendre  les  petits  oiseaux.  Panier  sur  Lequel  une  planchette 
retombe  par  son  propre  poids  quand  L'oiseau  s'est  posé  sur  la 
détente  du  piè 

Aille,  s.  f.  Aigle,  oiseau  de  proie  en  général.  Etrembitu  que- 
ment  enne  poule  qu'ai  vu  Vaille  ;  il  tremble  connue  une  poule 
qui  a  vu  L'aigle  ' 

Aimetti  (participe).  Affaibli,  Languissant.  De  mette  (voir  ce 
mot). 

Aimouilicu,  v.  n.  Quand  la  va.  in-  prend  son  premier  Lait  avant 
de  mettre  bas,  elle  aimouille, 

Aipléiou,  v.  a.  Mettre  les  bœufs  au  joug  pour  le  laboui 
un  pour  un  charroi.  L'aiplèie  est  La  quantité  >\>'  travail  fait  dans 

•  matinée  par  La  charrue  au  Labour. 

Aip'.n.  rattacher  bout  à  bout.  Raipondn  a  Le  môme 

pond  une  cordi 
Aiqueutai,  taiqutHtal,  caler,  s'appuyer.  De  oouto,  ôtai,  mot 
e  dd  enoo 

Air<-h«»M       n    petit  bol   c 'bé  en  arc  et  placé    ui  L<   ber 

i upporter  Le  filet  qui  les  met  b  t  abri  de 


—  4-17  - 
Aire,  s.  f.,  provenance,  race,  nid. 

Enfant  de  bonne  (tire 

Par  lui  sait  tout  faire  ; 

C'est-à-dire  qu'un  enfanl  bien  aé  —  débonnaire  —  se  fait  de  lui- 
même.  D'où  le  vieux  mol  roman  de  pute  aire,  mauvais  sujet, 

oiseau  d'Un  sale  nid. 

Airie,  s.  (.,  espi  poules  de  la  grande  ou  de  la  grosse 

airie  ne  valent  pas  celles  du  pays.  De  aire. 

Airie,  s.  f.  Gerbe  étendue  sur  l'aire  de  la  grange  pour  j  être 
battue  au  Qéau.  Se  coucher  sur  Voirie,  c'est  fouiner,  c'est  ne 
rien  faire  quand  l'ouvrage  commande. 

Aivan,  s.  m.  Osier.  C'est  l'osier  commun  Bervanl  a  fabriquer 
des  paniers  et  à  confectionner  des  objets  de  vannerie,  Osier- 
à-vans  et,  par  abréviation,  arans.  I»'où  aivanehé,  oseraie,  lieu 
planté  d'osiers. 

Aivau,  adj.,  profond.  Ce  mot  es(  Indéclinable.  On  dit  d'un 
puits,  d'un  précipice,  d'une  eau  dormante,  etc.,  qu'ils  sont 
aivau,  c'est-à-dire  qu'ils  ont  une  grande  profondeur.  Chez  tire 
aivau,  c'est  chez  un  prodigue,  tire  à  bas.  Vau  ou  val  est  un  ra- 
dical fournissant  d'innombrables  dérivés  :  aivolai,  avaler;  davo- 
lai,  descendre;  raivolai,  mettre  bas,  etc. 

Aivoidre,  v.  a.,  c'est  prendre  avec  effort  et  en  se  haussant 
un  objet  un  peu  élevé,  difficile  à  atteindre  ou  à  décrocher. 

Ajâfrai,  bouleversé.  Dne  poule  qui  a  perdu  sa  couver  est 
ajâ  fraie. 

Alude,  s.  f.,  éclair.  D'où  aludai,  faire  des  éclairs. 

Amboichot,  s.  m.,  gros  furoncle. 

Ambruai  (s'),  prendre  son  élan  ;  ambruai,  donner  l'impulsion 
à  un  objet  pour  le  mettre  en  mouvement.  On  amortie  le  pendule 
•  l'une  horloge. 

Anvai,  s.  m.,  petit  furoncle. 

Apanchai,  v.  a.,  étendre  du  fuinier  dans  les  champs, 

Apettie,  s    f.,  poupée  d'ceuvre.   Le  chanvre  peigné  donne 


—  448  — 

l'œuvre  el  les  étoupes  qui  sont  mises  en  paquets.  Le  paquet 
d'œuvre  esl  VapettiefeA  le  paquel  d'étoupes,  l'ateupon. 

Une  bonne  fileuse  pouvait  filer  dans  sa  soirée  une  apettie  et 
faire  ainsi  deux  bobines  de  til  d'œuvre. 

Apiettai,  avancer  à  la  besogne;  ce  qui  n'implique  pas  la  mal 
façon. 

Aplues  (ailleurs  éplues),  particules  de  fer  incandescent  qui 
jaillissent   sous  le   marteau  du  forgeron.    Petites   étincelles  qui 

jaillissent  du  feu,  surtout  quand  < >n  tisonne,  en  s'accompagnant 
<l'iin  pétillement. 

Aquot,  s.  m.  Vieux  cheval  maigre,  rosse.  Mâgre  quement 
enne  aquot.  D'equns,  diront  les  linguistes,  comme  si  le  cheval 
chez  les  Latins  eût  été  nécessairement  décharné. 

Arennesons,  s.  f.  pi.,  pour  ernaisons.  C'est  le  nom  vulgaire 
du  lumbago.  Renaie,  à,  Montbéliard. 

Argonnier,  mauvais  voiturier.  chicaneur,  marchand  de  rosses. 

in  argonnier,  dit-on  à  Broyé,  est  peu  comptable;  il  n'y  a  pas 

à  B€  lier  à  06  qu'il  dit. 

Arquai,  Marcher  péniblement.  É  ne  peut  p><  arguai,  Il  ne 

peut  plus  avancer. 

Arriet,  oonj.  Par  contre. 

Asement,  s.  m.  La  vaisselle,  vaisseau  ou  vase  de  cuisine, 
ustensile  quelconque,  tasse  ou  coquelle,  pot  ou  terrine.  Etym.  : 
immode. 

Asquintai,  éninter. 

Assanner,  as-. nnmer,  ennuyer.  Me  sonne,  sommeil. 

Assi     .  m  ,  essieu.  Evidemment  analogue  à  axi$. 

Aisourbi. ..  gommer,  étourdir. 

Pendit  u  forci a  noter  en  mer 

Ani u  fou  >m  Eetorbêf  (Roman  dn  renard  . 

■  iteur  du  glossaire  de  ce  roman  (ait  venir  suopoer  de 

ait  plu    rationel  de  lui  donner  le  sens 
ifa$$ourbit  le  gorpll  ayant  lait  plui  d'une  fol    h  sommer  son 
i  Brun,  Il  oui   ,  et  n  ,    on  compère, 


—  èiô  - 

Atonies,  s.  f.  pi.,  tiges  de  céréales  restant  sur  (Sied  après  la 
moisson. 

Atout,  mauvais  sujet,  homme  à  fout  (aire. 

Aulemelle,  s.  i'.,  lame  d'un  couteau.  Changer  Bon  bon  couteau 
contre  une  vieille  aulemelle,  c'esl  faire  un  marché  de  dupe. 

Atrots,  s.  m.  pi.  L'nc  fricadelle  à  Nancy.  Le  feie  du  porc  ar- 
rangé dans  des  morceaux  du  péritoin i  de  ta  coiffe  des  intes- 
tins. 

Avadai,  par!.,  égaré.  Xoues  poules  sont  aradaies,  perdues  de 

sens,  affolées,  comme  quand  elles  oui  été  vivemeni  pourchas- 
sées par  un  chien. 

Avillonne.  Aveline,  grosse  noisette. 

B 

Bachut,  s.  m.,  réservoir  à  poisson. 

Bailoyai,  v.  à.  L'opération  consiste  b  séparer  ce  qui  •!> >i t  être 
vanné,  i»1  bolà,  d'avec  ce  qui  est  rejeté  toul  d'abord,  comme  la 
pousse  et  les  épis  vides.  Le  râteau  qui  sert  à  baûoyer  s'appelle 

le  hailoyou. 

Le  bolà  aux  Fourgs  est  dit  las  ribolais;  ce  sont  les  impuretés 
mêlées  au  grain  qui  vient  d'être  séparé  de  la  paille  par  te  bat- 
tage ou  le  dépiquage  (Tissot,  p.  ±21). 

Baînon,  s.  ni.,  sonnerie  «les  morts,  sonnerie  triste.  Les  cloches 
semblent  dire  :  /•.'/  à  don  moue?  —  Nenni,  è  doue]... 

Bainotte,  s.  f.  Cadre  «le  bois  allongé  donl  le  vide  est  rempli 
par  un  tressage  d'osier  on  de  mancenne.  On  mettait  autrefois 
des  cadres  pareils  sur  le  chariol  en  guise  de  planches  ou  d'à/ie- 
es  —  planches  ;t  fumier. 

Bainotte,  s.  t.,  panier  ou  petite  baine  d'osier  destinée  à  laisser 
les  haricots,  pois  ou  fruits  cuits  pour  les  égOUtter.  D'où  bainai, 
passer  à  la  bainotte  d<><.  fruits  ou  des  légumes  assaisonnés  d'un 
peu  de  sel.  D'OÙ  encore  haiuons,  haricots  ou  puis  cuits  à  l'eau, 
avec  un  peu  de  sel  et  de  graisse,  puis  versés  tout  chauds  dans 
la  bainotte  où  on  les  mangeait  à  la  poignée.  C'était  dans  le  temps 
un  régal  très  recherché. 


—  ik20  — 

Radical  :  haînc  on  benne,  long-  panier  qui  sert  encore  à  voî- 
turer  le  charbon.  Cesl  l'ancien  char  celtique  servanl  ;i  trans- 
porter même  les  grands.  En  commençant  un  conte  à  la  veillée, 

on  ne  manquait  jamais  de  débuter  par  cette  tirade  prépara- 
toire : 

C'était  une  fois  un  roi  et  une  reine 

Oui  cli dans  une  benne; 

Pierre  ou  Jean  était  dessous 
Qui  ramassait  tout 

Baique,  expression  de  dégoût.  Pour  inspirer  du  dégoûl  ;iu\ 
«Mitants,  on  leur  erie  :  Pouih,  baiquel 

Baliste,  s.  f.,  petite  bille  à  jouer. 

Bâne,  adj.,  borgne. 

Barbe  ai  bœu,  s.  f.,  salsifix  sauvage. 

Bardai,  v.  n.  Une  voiture  bardr  quand  le  train  de  derrière 
glisse  sur  un  plan  incliné  latéralement,  de  manière  à  aller  plus 

vite  et  dans  une  autre  direction  que  le  train  on  les  roues  de 
devant. 

Beillâ,  beillâde,  adj.,  boiteux.  Abréviation,  pour  gambeillard 
on  gcunbiUard.  (Voir  gambi  et  ganibiUer.) 

Bé-mA,  interj.  Ce  n'est  pas  étonnant!...,  El  ai  bé-mà  !....  i  y 
ai  bii-nu'i  !...  Ce  qui  signifie  :  c'est  facile  dans  des  conditions  pa- 
rellli 

Berré,  s.  m.,  porte  à  claire-voie  placée  à   l'entrée  de  Vmilnu 

pour  empêcher  la  volaille  d'y  entrer.  Un  amoureux  Inconstant 
[.prie  toqu+btrri. 

Besilleu,  v.  n.,  exprime  l'action  d'un  .mimai  qui  s'enfuit  époti- 

vanté,  la  queue  en  trompette.  Lies  petits  bergers  imitent  le  sif- 
flement ou  le  bourdonnement  d'un  taon  pour  (aire  bottier  les 
de  leur  troupeau   Même  ions  que  taguai  (voir  ce  mot) 

Bét«- ,  -   in   Support  de  la  lampe;  sorte  de  grand  chandelier 

en  i pi    e  mettait  au  milieu  de  la  pièce  où  l'on  travaillai!  et 

on  i  mu  veillait 

Beunho,  s.  i  ,  bûche  ou  lige  On  dit  aussi  bien  une  bûche  de 
paille  qu'une  bûohi  U   jeu  de  la  bûohette     btsuhotu 


—  421  — 
—  se  pratique  en  prenant  deux  pailles  d'inégale  longueur  dont 
on  l'ail  tirer  l'une  h  Bon  adversaire. 

Betture,  s.  f.,  Liquide  obtenu  après  Le  battage  du  lait,  quand 
on  en  a  extrait  Le  beurre  et  Le  fromage  ou  caseum.  De  bet,  pre- 
mier lail  delà  vache  après  qu'elle  a  vêlé.  (Dana  le  Saugeais.) 
M.  Contejean  veut  que  baiture  vienne  du  mot  battre. 

Beuffe,  s.  ('.,  halle  d'avoine,  de  blé,  de  céréale  quelconque. 
On  la  répand  comme  engrais  sur  les  prés  au  printemps.  (Radi- 
cal de  bouffi.) 

Beuillai  ou  beuilleu,  v.  a.,  regarder  avec  convoitise  '■ 
qui  mangent. 

Beulai,  v.  a.,  rouler.  Se  brûlai  dans  lai  bot-bc,  se  rouler  dan8 

la  boue. 

Beuné,  s.  ni.,  DUage  pluvieux. 

Beurre,  s.  I".  Choc  P6ÇU  par  OOntre-COUp.  Be  beurrai,  c'est  se 

heurter  Le  corps  contre  un  objet  plus  ou  moins  volumineux.  8e 
heurter  le  pied  se  .lit  topai  (voyez  ce  mot). 

Beuson,  s.  m.  Celui  qui  se  tient  boudeur  dans  un  coin. 

Bigot.  Doigts  bigots,  c'est-à-dire  engourdis  par  le  froid. 

Biguenne,  s.  f.  Cire  ou  chassie  des  yux.  (Besançon,  bigàne.) 

Bigueu,  s.  m.  Croohel  en  ter  ;i  deux  branches  pour  sortir  le 
hunier  de  l'étahle. 

Biondenai,  v.  a.,  élaguer  un  arbre  ou  une  haie. 

Biosson,  s.  m.,  petite  poire  ou  pomme  des  bois  qui  n'est 
lionne  à  manger  que  si  elle  est  blesse  et  douce.  On  trappe  les 
pommes  pour  les  amollir,  les  talcr,  les  blettir  —  blesser. 

D'où  biossené,  poirier  sauvage  dont  les  fruits  sont  mis  dans 
le  loin  pour  se  faire,  pour  faiuousai  (voir  ce  mot). 

Boicheu.  Se  dit  d'un  œuf  qui  BSt  ouvert  en  un  point  et  prêt 
h  éciore.  Ci'  petit  poussin  a  déjà  Prisé  La  coquille. 

Boichot,  s.  m.  Heurt  du  gros  orteil  contre  une  pierre. 

Bola,  s.  m.  Ce  blé  H  les  crirntes  (voir  Ce  mot). 

Bolotte,  s.  f ,  belette.  D'où  bolottai,  manger  les  œufs  au  nid, 


—  422  — 

comme  fonl  les  belettes.  Les  enfants  crient  coucou  bolottou  au 
coucou  quand  ils  entendent  cet  oiseau  ou  qu'ils  l'aperçoivent. 

Borbe,  s.  f.,  bouc.  D'où  emborbai. 

Borli,  s.  m.,  agaric  desséché.  On  préparail  l'agaric  du  chêne 
en  le  mettant  dans  le  cuvier  ;'i  lessive;  et.  après  dessiccation, 
il  prenait  l'eu  au  briquet. 

Bossands,  bossandes,  jumeaux,  jumelles. 

Boubanceu.  Se  livrer  à  des  dépenses  folles  ri  superflues  dans 
un  ménage,  notamment  pour  la  .cuisine.  Une  boubancère  est  une 
femme  de  désordre  et  de  dissipation.  (Vieux  français  boban,  su- 
perfluité,  ih'-pcns^  qui  ne  profite  pas.) 

Bouge,  s.  f.,  vieux  nid. 

Boui-bian,  s.  ni.  .Mercuriale.  Celle  herPe  purgative  demie  la 
diarrhée  aux   porcs  et  l'ail  périr   proinpleinenl  les  lapins  qui  en 

mangent. 

Bouille,  s.  i'..  épis  de  turquie  mis  en  grappe  pour  être  sus- 
pendus. 

Bouliguai  (sei,  se  leiirmenter. 
Bourenfle,  atteint  de  QuxJOQ  dentaire. 
Bouron,  B.  in.,  gros  QUage  isolé. 

Bourrot,  s.  t.,  canard. 

Boussottes,  s.  f.  pi.  La  petite  vérole,  petites  bosses  en  petites 
tumeurs.  Autrefois  on  réservait  ce  nom  de  bosse»  aux  bubons 
de  ii  peste  h  en  dénommait  bosserands  ceux  qui  étaient  char- 
ainlr  les  maisons  en  lemps  <i  épidémie. 

Bout,  i,  m  .  moroeau.  in  bout  <\>-  pain;  un  bout  «le  lard, 

B<"  •  .  moyen  dune  r ■. 

Br.'iimai   \    n.,  beugler. 

Br  ' 'ner  le  devant  de  1.1  voiture  pour  faire  dé 

vier  le  train  on  faisant  marche  en  arrière  (Voj    broeheu.) 

i  |  |  ■  LU . 

m-.-       m    !•  de  la  voiture 


—  423  — 
Brechon,  s.  m.   Vannette  OÙ  se  met    la  pâte  [tour  lever  avant 

que  d'être  mise  au  four. 

Bredaque,  étourdi.  Bredaque,  brcdaule,  bredaulou,  bredouil- 
lait, bredi-breda,  etc.;  tous  ces  mois  sonl  les  dérivés  d'un  radi- 
cal qui  n'est  plus  employé  chez  nous,  brade,  divagation, 

Bregi,  s.  ni.,  étable  à  moulons. 
Breniquiai,  v.  n.,  loucher. 

Brenotte,  s.  ('.,  nuage  pluvieux. 

Brequeillons ,  s.  m.  pi.  Etre  dans  1rs  hrcjucillons,  c'e>t  être 
ivre. 

Bressot,  s.  m.,  partie  de  la  voiture  qui  sert  à  la  tourner,  à  la 
brùteler,  à  la  brocher. 

Breussot,  s.  m.,  lait  nouveau  d'une  vache  qui  vient  île  rôlef 
Ailleurs  :  bacoillot,  bet,  dans  le  Saugeais. 

Bretu.  Ce  mol  n'existe  plus  que  dans  ce  vieux  dicton  : 

11  n'a  ne  iivtu 
Ni'  bretu 

L-à-dire,  il  n'a  ni  haillons  ni  rapière,  Unité  ou  bretu  nous 
aurait  donné  bretelle,  iiil.aii  destiné  à  supporter  la  Invite. 

Breuilleu,    v.    n.,    beugler    avec    animation.    Quand    ranimai 

pousse  Ac^  cris,  parce  qu'il  est  en  proie  à  la  terreur,  il  breuille  ; 
quand  il  crie  pour  appeler  ses  compagnons  d'étable,  il  braime- 
quand  il  appelle  son  maître  avec  des  accents  plus  doux,  soit 
pour  lui  demander  des  caresses,  soit  pour  en  obtenir  ta  pâture 
accoutumée,  il  meûne  ou  il  miotte  (voir  tous  ces  mots). 

La  breuillade  est  la  mêlée  générale  d'un  troupeau  qui  est  plis 

d'une  fureur  soudaine.  Quelquefois  une  bête  rouge  renifle,  la 

tète  eu  bas  et  le  museau  contre  terre.  On  dit  qu'elle  llaire  du 
sang.  Son  œil  est  hagard,  irrité.  Mlle  breuille  avec  fureur,  et  les 
autres  bêtes  accourent,  comme  prises  de  vertige  par  imitation, 
eu  poussant  des  beuglements  épouvantables.  Puis  elles  se  ruent 
les  unes  contre  les  autres,  jusqu'à  ce  qu'un  bouvier  énergique 
intervienne  et  disperse  la  mêlée,  de  spectacle  vraiment  terrible 
s'appelle  une  breuillade. 


—  424  — 

Breule-fé,  s.  m.,  brûle-fer,  sobriquet  injurieux  donné  au  mau- 
vais forgeron. 

Brigneulai,  adj.,  tacheté. 

Bringue,  s.  I'.   Vache.   Vieille  bringue,  vieille  vache.  On  ap- 
plique aussi  ce  vocable  à  une  femme  âgée  qui  parle  à  lorl  et  à 

travers. 

Brique,  s.  f.  Morceau.  Brique  de  pain,  de  tuile-,  de  faïence. 
Brocheu,  v.  a.  Cesl  faire  tourner  la  voiture  sur  le  brcssot. 

Brôlai,  v.  11.  C'est   lier  et   serrer  sur  une  voiture  à   planches 

un  chargement'au  moyen  d'une  chaîne  et  d'un  pliant.  A  Besan- 
çon, "ii  dit  brélà. 
Brou,  s.  in.  Gui  des  arbres. 

Brousses,  s.  f.  pi.  Menu  foin  qui  tombe  du  râtelier  et  dent  le 
bétail  ne  se  Boucle  plus. 

Broussu,  hérissé. 

Brun,   s.    in.    BrgOl    OU    charbon    des    céréales.   On    dit    aussi 

abrun,  el  le  grain  malade  est  dit  abrugnai. 

Bue,  s.  f.,  lessive.  M'en  btto»,  faire  la  lessive.  Celui  qui  fait  la 
ve  à  la  Toussaint,  bue  son  suaire  (Prov.  franc-comtois). 

Bure,  s.  t.  Cruche  à  mettre  de  l'huile.  Diminutif,  bureton. 


i  part,  Faussé,  qui  a  reçu  un  renfoncement.  Se  dit 
dune  enveloppe  arrondie,  métallique autre,  qui  porte  l'em- 
preinte 'I  mi  ofaoo. 

Gft<l«   '  tl  'He. 

chien  i  llle-oy ,  oagne,  dit-on  à  un 

chien  '• he  en   le  repoussant  du  pied.   D'où  le  mol  cagnâ, 

lonm   a  d(     di  i aut  si  oagncl ,  Jeune 

chien 
Caidruie       i    bai  ique  élevée  en  arrière  des  bateaux  de  ma 

une    00    le      m. nie  loul    leur   cm    me     I DÛ 

m. d  coni  truite  el  peu  lollde 


-  425  — 

Gaifot,  s.  m.,  épi  de  maïs  ou  de  turquie  égrené  après  avoir 
été  séché  au  four.  On  s'en  chauffe  l'hiver  à  la  veillée.  Etymol.  : 
de  /'",  four;  qui  a  été  au  four. 

Gaimaie,  s.  1'.,  grande  quantité,  l'une  caimaie  d'enfants. 

Gairon,  s.  m.,  carreau,  brique,  l »  < » 1 1  eaironnait  daller  de  bri- 
ques. 

Cambouis,  s.  m.,  la  graisse  noire  '•!  sale  qui  a  servi  à  graisser 
les  voitures. 

Gancoire,  s.  I'.,  hanneton. 

On  connaît  cechanl  des  enfants  pour  exciter  le  hanneton  a 

S'envoler,  quant    ils  lui  ont   mis  un   lil   à  la  patte  :  cancoirolle, 
veille,  veulotte  ! 

Gaule,  s.  i'.,  bonnet  d'homme,  de  laine  ou  de  coton,  rarement 
un  bonnet  de  femme.  Crie  i>u  /"<>«<■  tu  aire  mai  eaule,  dit-on  à 
un  marmot  qui  s'égosille  à  crier.  D'où  cavlurot,  câline;  dacau- 
lai,  découvrir. 

Gautaine,  s.  t'.,  femme  curieuse  et  bavarde  qui  va  traîner 
nippes  fin'/,  les  voisins  pour  cautenai)  tuer  le  temps. 

Gauvaine,  s.  1'.,  trou  plus  on  moins  profond  Creusé  SOUS  I  eau 

dans  la  berge  d'une  rivière  et  où  se  logent  les  lottes,  le-  êcre- 

visses. 

on  dit  ailleurs,  à  l'.esaneon,  par  exemple,  caubeune  a  peu  pies 

dans  le  môme  sens.   Trou  eivusé  dans  un  vieux  trône  d'arbre. 

Gelésotte,  s.  f.,  peigne  fixe  à  dents  d'acier,  dont  les  peigneurs 
de  chanvre  font  usage. 

Gernô,  s.  m.,  noix  incomplètement  mûre  dont  la  partie  co- 
mestible est  mangée  après  avoir  macéré  dans  une  eau  acidulée. 

Chai.  s.  m.,  chariot  ordinaire,  voiture  à  planches  on  à  claies. 
D'ou  chairotte  ou  eliarretil  (v.  IV.). 

Ghaipiai,  v.  a.,  couper  par  quartiers,  des  fruits,  des  pommes 
de  terre. 

Ghaipusai,  v.  a.,  couper  le  Pois  en  menus  morceaux. 

Ghairère,  s.  f.,  clairière  dans  une  forêt.  N'a  pas  d'autre  sens 
à  Broyé. 


—  426  — 

Ghalé,  s.  ni.,  bois  de  lit  —  chas  ou  châssis  et  le,  lit. 

Ghamarri,  s.  ni.,  grenier  supérieur  à  l'aire  de  la  grange.  Ce 
grenier  est  perche  el  non  planchéié,  à  cause  des  souris.  On  y 
entasse  1rs  gerbes  d'orge  el  d'avoine. 

Ghambelère,  s.  l'.,  chevalet  sur  lequel  on  scie  le  bois  à  brûler. 

Ghambelère,  s.  t'..  appareil  de  lieis  destiné  à  soutenir  en  avant 
la  couverture  du  lit  et  à  L'empêcher  de  tomber.  Autrefois,  par 
vanité,  les  lits  étaient  très  hauts,  i-i  la  couverture  risquait  fort 
d'être  entraînée  en  luis  —  ai  lai  volaie  —  par  son  propre  poids. 

Champai,  v.  a.,  jeter. 

Ghampoi,  s.  in.,  terre  Livrée  à  la  pâture.  D'où  ehampoyai,  qui 

signifie  aUer  <>n  conduire  el  mettre  les  animaux  au  pâturage. 

Chanté,  s.  ni.  .Miche  entamée  à  Laquelle  ou  coupe. 

I.e  chanteau  esl    la  dernière   pièce  mise  à  une  futaille,  et  elle 

a  la  forme  semi-circulaire.  Une  miche  coupée  en  deux  forme 
deux  chanteaux. 

Chasal,  s.  ni.,  construction  en  ruines. 

Chat,  s.  m.,  prendre  ou  faire  le  chat,  c'est    terminer  une  l>e- 

-  importante. 

Ghâtelot,  s.  m.,  petit  château  formé  par  quatre  noix,  dont 
LrOÎS  -"lit  à  la  hase  et  la  quatrième  SUperpOSée  ferme  le  som- 
met. 

/   iw  il   ,  /i/ic   hcllc   >ttlii>r 

in.  pouill'  I  eourini  tjuçÀtrê  ni  quailre 
Et  in  pue'  l'a  chdttloi        (Vieille  chanson  . 

nu  appelle  aussi  ohàtelot  plusieurs  noisettes  réunies  sur  un 
seul  pédicule. 

llllr.  I         lie    .|||     Ohan\  l'e     l'nlll     C8JI  06    el     dedU'Il- 

,,rrr,,,lh  ;.  ,,lu   .ju'lillr,  <>||    Mil!    eellli  <|lll    Irasaille 

t  la  quantité  de  débri   qui  ront  devant  lui  (Vieux  prov.)  Etym.  : 
ohénovre,  ehanvn  ii,  voler,  veuloi  eu  voulût t  duvet,  brin 

il  il  les  qui  volenl 

île-  que  le  balai  fali 

voler    \\ h  i  il'-"'  dan    i  œil 


—  427  — 

Chairmouge,  s.  f.,  coryza,  rhume  de  cerveau. 

Cherra,  s.  f.  G'esl  le  bois  de  lurquie  fraîchement  coupé  el 
dépouillé  de  L'épi.  Les  vaches  en  sont  très  friandes.  On  va  à  la 
cherra  pour  la  distribuer  au  bétail. 

Chet,  s.  m.,  chat.  D'où  ohettenère,  trou  pratiqué  au  bas 
portes  pour  permettre  au  chai  d'aller  d'une  chambre  à  L'autre. 

Ghevé,  s.  m.,  tête  du  lit. 
Ghevêtre,  s.  ni.,  t'aiture  du  toit. 

Ghevris,  s.  m.  pi.,  grésil,  il  tombe  '1rs  chevris. 

3 aima  saivoyâ,  bise  de  ma,  chevria  d'aivri,  n'aim'nan  l'aibon- 

dancc  au  pays.  (Vieux  prov.) 

Ghie-nid,  s.  m.,  dernier  né  d'une  couvée,  ordinairement  le 

plus  faible.  <>n  prétend  qu'en  quittant  le  nid,  il  y  dépose  une 
ordure,  parce  qu'il  croit  ne  plus  avoir  besoin  d'j  revenir. 

on  appelle  aussi  ohie-nid  eu  queulot  (culot  alias)  le  plus  jeune 
îles  enfants  d'une  famille. 

Ghoucheu,  v.  a.  entasser,  presser  dans  un  sac  avec  la  main 
pour  l'aire  tasser  les  objets. 

Ghoue,  s.  f.  Chouette,  onomatopée.  Ce  mot  représente  le 
bruil  du  vol  de  cet  oiseau. 

Ghouignai,  v.  n.,  pleurnicher. 

Ghouillou,  aliàs  cheulai,  c'est  sucer  sa  langue.  D'OÙ  cliouil- 
tuii,  celui  qui  suce  sa  langue. 

Cimai,  v.  n.,  suinter,  suppurer. 

Gion,  s.  ni.,  rejet  d'arbre  (v.  IV.). 

Gocue,  s.  r.,  ciguë  ordinaire. 

Gœulou,  s.  ni.,  aliàs  coillot,  ustensile  à  passer  le  lait  :  Caillot 
bin  taira,  fwnie  frisé  bin  releva,  danotant  feille  ai  mairiù  (vieux 
Prov.). 

Cœure,  s.  f.,  coudrier,  ailleurs  coudre.  A  Broyé,  on  change 
Va  eu  e  et  on  supprime  volontiers  les  gutturales  et  les  den- 
tales. Exemple  :  cenre  pour  cendre,  penre  pour  prendre,  crainre 
pour  craindre,  etc.;  roiche  pour  croche,  renouille  pour  gre- 
nouille, etc. 


—  428  — 

Gœuquereille,  s.  f.,  coquillage,  moule  de  rivière  desséchée. 

Gœuquelle,  s.  t..  casserolle. 

Gofîeu,  s.  f.,  enveloppe  du  lïuit  des  légumineuses,  ou  cofle 
(en  mouillant  l). 

Goiseu  (se),  se  taire. 

Gollot,  s.  m.,  bol. 

Combe,  s.  f.,  d'où  combotti-,  petite  combe,  est  une  dépression 
>ir  terrain  de  forme  arrondie,  un  petit  valonnement  circulaire; 
pendant  que  la  noue  est  allongée,  comme  un  lit  d'ancien  cours 
d'eau. 

Consé,  s.  m.,  méteil.  Fromenl  el  seigle  mélangés. 

Goquefredouilie,  s.  m.  l'n  homme  qui  se  mêle  de  l'ouvrage 
■  1rs  Femmes,  qui  tate  1rs  poules  pour  savoir  si  elles  feront  un 
œuf,  un  Imbécile. 

Corgeon,  s.  m.  Cordon.  C'est  le  dédoublement  du  l;  italien, 
dont  nous  avons  conservé  la  prononciation  douce  à  Broyé. 

Corgie,  s.  t..   fouet   [ooorge,  fouet   du  charretier,  glossaire  du 

roman  du  renard). 

Cot  ou  coteré,  s.  ni.,  gros  vers  blanc,  larve  du  hanneton. 
D'où  cutioot,  ver  de  la  viande  ou  du  fromage. 

Gotto,  s.  !'.,  0OU1 

Coue,  s.  t.,  queue.  D'où  oouà,  croupion;  et  oouot,  privé  de 
queue. 

Couèche,  s.  t.,  pruneau, 

Couignai,  v.  n.,  crier  comme  nu  cochon  qu'on  saigne.  Par 
exten  ner. 

Coupe  l       tneSUn    qui   BSt    la    pari    du    meunier  | '   pn\ 

d'une  mouture. 

iujmHj  n..  in.  sens. 

Couvi.r       m    .  nu  de  bois  renfermant  un  peu  d  eau  et  où  le 
faucheur  trempe  ■•<  pli  rre  quand  il  aigui  e    .1  (aulx 
1     1  porte  attaché  a  la  ceinture. 

CrA.      1.  latopée.  Comme  coucou. 


—  439  — 

Graichie,  s.  f.,  matière,  résidu  qai  monte  à  la  surface  du 
beurre  quand  on  le  tond. 

Grampir  (se).  Se  raidir,  contracter  ses  muscles,  comme  si  la 
crampe  les  raidissait.  Un  homme  se  crampit  pour  soutenir  un 
fardeau  qui  tombe  ou  retenir  une  voilure  qui  dévale. 

Gressi,  v.  a.,  écraser.  I  te  creciroue,  je  te  briserais. 

Creu,  s.  ni.  Son.  Un  maquiller  a  toujours  du  sou  s'il  n'a  pas 
de  creu. 

A  Vadans,  ils  ont  toujours  du  creu,  s'il  n'ont  pas  de  farine. 
(Mauvais  jeux  de  mots  devenus  proverbes.) 

Creuilleu,  v.  a.,  creuser  avec  un  couteau  ou  un  outil  tran- 
chant. 

Creuse,  s.  f.  Coquille  d'œuf  ou  de  noix. 

Creusot,  s.  m.,  écuelle,  bol. 

Grientes,  s.  f.  pi.  C'est  le  petit  blé  et  la  zizanie  qui  sont  n- 
jetés  par  le  vanneur. 

Tissot  dit  creiantès  et  il  l'ail  venir  ce  mot  du  grec  xpeloc,  sorte 
de  pois  chiche.  (Patois  des  Fourf 

Grotot  ou  creux  de  lai  foussotte,  s.  m.  Fossette  de  la  nuque. 

Gude,  s.  f.  Mauvais  marché.  D'eu  euderie,  même  sens;  cudot, 
celui  qui  fait  des  cudes;  ciidai,  en  faire. 

D. 

Daboudreilleu  (se),  v.  n.  Cesser  de  s'allonger  pour  croître  eu 
largeur,  se  former,  se  développer.  Se  dit  des  jeunes  gens. 

Dacherqueilleu,  v.  a.  Démêler  les  cheveux  quand  ils  son! 
très  embrouillés. 

11  était,  d'usage  autrefois  de  s'empoigner  à  la  tignasse  et  de 
se  donner,  suivant  l'expression  consacrée,  une  bonne  peignée. 
Aussi  disait-on  de  deux  hommes  qui  s'étaient  battus,  «  se  sont 
Inu  dacherqueilleu l  (V.  encherqueilleu  !) 

Dacombrai,  v.  a.  Enlever  les  herbes  qui  s'entassent  devant 
le  pendant  de  la  charrue.  Le  laboureur  se  sert  à  cet  effet  d'urc 
bâton  fourchu  appelé  dacombrou. 


-  430  — 

Dafressureu,  déchiré,  déguenillé. 

La  freesure  est  un  organe  mal  défini.  Mais  quand  on  pèche 
par  l.i  fressure,  c'est  sans  remède  ni  rémission,  comme  on  dit 
en  Comté.  N'avoir  pas  de  fressure,  c'est  avoir  un  toul  petil  tem- 
pérament; c'est  être  affaibli,  essoufflé  el  mauriant;  c'est  ne 
pouvoir  supporter  ni  la  boisson  ni  1rs  excès  d'aucune  suite. 

Dagueilleu,  débraillé. 

Damoûlai,  v.  a.,  mélanger  avec  de  l'eau  une  farine  qui  prend 

une  consistance  semi  liquide.  Damoûlai  las  gaudes.  Etym.  :  de 
môles  ou  maules,  nom  donné  dans  bien  des  localités  à  ce  mets 
national. 

Danengeu  (se),  v.  n.,  se  démunir,  se  défaire  d'une  chose  en 
général  peu  avantageuse,  opposé  à  s*ennengeu  (voir  ce  mot). 

Davireu,  v.  a.,  écarter  les  botes  du  dommage.  Signifie  aussi 

mettre  'le  côté,  séparer  les  meilleurs  objets  pour  s'en  servir 
plus  tard. 

Deigne,  s.  I'.,  brin  de  chanvre  roui. 

pour  teiller,  on  casse  la  deigne,  le  Pois  cassé  formant  des 
chenevêuille»  et  ta  peau  ou  le  chanvre  étant  recueilli  sur  le  doigt 
médian  de  la  main  gauche  pour  taire  une  doiUii  (voir  ce  mot). 

Delère,  v.  a.,  inonder,  nettoyer,  trier  grain  à  grain,  en  pre- 
nant  le  bon  pour  laisser  le  mauvais. 

Derré,  d  lernier,  dernière. 

Devante,  s.  m.,  tablier,  vêtement  du  devant  du  corps. 

le  tablier  à  essuyer   l.i    vaisselle,   connue   le  jum 

(voir  ce  mot);  c'est  un  tablier  des  dimanches,  voire  un  vêtement 
babillé  et  d'un  certain  luxe,  dont  les  petites  Qlles  se  montraient 
lez,  vous  disaient-elles,  mon  M  <i>-r<uitr! 

(m  en  faisait  eu  indienne,  on  m.  i m i. •   ri  même  en  sole 

Diale-SoHHo  '    dtabf*M9M  '    itobt-M-dOfl  I    juron     familier    au 

contre  quelque  chose,  qui  ne  trouve  pa    ce 
qu  d  cherche 

Dogue    .ni)    Sensible,  qui  t. ut  mal    Se  dit  d'une  partie  du  corps 

OÙ    le    moindre    0OD  Munie    de    l.l    dolllelll 

Dodhe       i   Chanvre  'tout  le  doigt  médian  osl  eliargi   dam 


—  434  — 

l'opération  du  teillage.  Plusieurs  doMies  de  chanvre  forment  la 
roillie  ou  riête,  c'est-à-dire  un  paquel  roulé  e(  comme  ficelé. 

Une  (loillie  doit  ê,tre  alignée  à  sa  grosse  extrémité  pour  ôtrè 
propremenl  faite,  si  ta  doillie  n'a  pas  une  belle  tête,  dit-on  pro- 
verbialement, in  auras  une  femme  bavouse! 

Dôrbon,  s.  m.  Taupe-grillon,  courtilière. 

Drajon,  s.  m.,  rejet.  D'où  drajonnai,  pousser  < i« -^  rejets, 
comme  font  les  noisetiers. 

Drosseu,  v.  a.,  dresser.  l>  russe  lai  seupe!  trempe  la  soup 
la  mets  sur  la  table,  sur  le  dressoir  autrefois. 

Dreue,  s.  f.,  bardane. 

Dreule,  s.  m.,  garçon.  I!"ii  dreule ;  bon  garçon. 

Drouillou,  adj.  Coureur  de  tilles,  débauché. 

Dru,  adj.  Bien  venant.  «  m  dit  des  oiseaux  qui  ont  leurs  plumes 

qu'ils  sont  drus  comme  père  et  mère 

Druerie,  s.  ï.  Galanterie  obscène. 

Druillot,  adj.  G-ras,  en  bon  étal  et  bien  venant.  Se  dit  souvent 

dos  jeunes  pores. 

I 

Embaitre,  v.  a.,  c'est  battre  la  faulx  sur  une  petite  enclume 
plantée  en  terre  pour  dernier  du  lil  à  l'instrument  ou  l'amincir 
ei  le  rendre  tranchant.  On  dit  aussi  enehaipiai  dans  le  même 
sens.  L'enclume  et  le  marteau  constituent  les  emboîtera. 

Emboichot,  s.  m.  Clou,  furoncle. 

Empâtures,  s.  f.  pi.  Entraves.  Empatureu,  c'est  mettre  des 
entraves 

Enehaipiai  (voir  embaitre). 

Encherqueilleu,  se  dit  des  cheveux  mêlés  et  enchevêtrés. 

Encherbeutai ,  se  dit  du  lil  qui  est  embrouillé  et  difficile  à 

pelotonner. 

Encrotai,  v.  a.  Enfouir,  mettre  ou  terre  une  charogne  idrvrot). 

Endains,  s.  m.  pi.  Chenets.  On  dit   d'un  domestique  qui  t'ait 

ses  embarras  :  Vai!  vai!  tu  ne  veux  pas  emporter  les  andairul 


—  432  — 

Endévai,  v.  a.  Contrarier,  l'aire  enrager. 

Enfoncure,  s.  f.  Placard  fermé.  Il  existe  une  enfonçure  dans 
le  poêle  derrière  la  cheminée  de  chaque  outau. 

Enfretoilleu,  v.  a.,  envelopper,  entourer  d'un  linge.  Avoir  la 
main  enfretoillie.  Radical  :  fretu  (voir  ce  mot). 

Engiiai,  v.  a.,  propager.  .Merde  embue,  merde  engïic. 

Ennengeu  (s'),  ennengeu.  Ensemencer  de  mauvaise  graine. 
Se  pourvoir  Aiun-  manière  durable.  Ces!  pris  ordinairement 

dans  un  mauvais  sens. 

Ennoucheu  (s'),  s'étrangler  en  buvant. 

En  pour.  Eu  retour,  en  échange. 

Enrotai,  embourbé. 

Ensaigné,  ensanglanté. 

Entemeli,  engourdi,  .l'ai  la  main  entemelir, 

Entremé,  le  milieu,  l'entre  deux. 

Entrieulai,  v.  a.,  tromper  avec  linesse,  aveb  ruse. 

Entrouilleu ,  s'entvouiileu ,  s'endormir  trop   profondément, 
dormir  trop  longtemps.  (Voir  troutUot.) 

Envaî,  s.  m.  Furoncle. 

Enviré   Etre  tmrirê,  avoir  le  vei 

Erpions,  doigtfl  du  piôd. 

Erpiotte.s,  même  signification. 

F. 
Fnnno,     i   Femme, 

i'i"\ Ision  de  fruits,  pommes,  noix  ou  noi 
du  \  illage  amassenl  l'automne  el 
mettent  i  ■  pour  en  donner  l'hiver  à  leur  bonne  amie. 

«  m  ■  i .,     de  foin  "ù  les  fruits  se  00n 

■  ni  bion   i /-'"  m  quand  le    fruits  sont  à  polnl 

.1  onl  perdu  leur  orudti 
Faub-n-        f.,  feu  di 


—  433  — 

<»ii  allume  do  la  paille  el  des  matières  très  inflammables  avec 
îles  branchages  en  guise  de  réjouissance.  Quand,  par  exemple, 
on  avait  flni  de  teiller,  le  dernier  jour  on  mettail  en  tas  les  che- 
neveuilles  el  on  les  allumail  pour  faire  une  faulère. 

Il  y  avail  autrefois  dans  chaque  village  trois  faulèrei  banales 
auxquelles  tou(  le  monde  prenail  part,  une  a  la  Chandeleur,  une 
autre  aux  Rois  el  une  troisième  à  Carnaval.  C«sl  dans  celle-ci 
qu'on  brûlait  le  père  Mardi-Gens 

Fégnant,  altération  de  (oignant.  Injure  qu'on  adresse  a  un 
adversaire  qui  se  dérobe  el  qui  a  peur.  Viens  voire,  fégnant! 
Peneuilieu,  v.  n.  Fureter. 

Peunai,  v.  a.  Flairer,  sentir  dans  un  bul  d'excitemenl  sexuel. 
Le  taureau  el  l'étalon  feunent  leur  femelle  avani  là  BailUe. 

Fichecu,  s.  m.  Le  manche.  Le  fichent  de  M  rem*899,  le  manche 
à  balai. 

Fié,  adj.  Aigre,  vert,  acide.  N'a  pas  de  féminin. 

Fiemmeusse,  s.  f.  Pour  préparer  ce  mets,  on  étend  une  couche 
légère  de  pâte  faite  de  lait,  de  gaudes  el  de  farine  avec  un  peu 
de  sel,  sur  le  couvercle  d'une  marmite  qu'on  a  au  préalable  ren- 
versé, chauffé,  puis  graissé  chaud  au  moyen  d'une  plume  huilée. 
On  flambe  au  dessous,  el  (a  fiemmetuee  est  bientôl  cuiteà  point. 

Fieuré,  s.  m.  Charrier  pour  la  lessive. 

Alias  fleuré  (Besançon),  fleurie  (Saugeais),  etc. 

Flâche,  s.  ni.  Aubier,  bois  blanc. 

il  y  a  .lu  flâohe  dans  ce  bois;  c'est-à-dire  il  n'est  pas  de  re- 
cette. 

Fot,  s.  m.,  four.  D'OÙ  fonot,  petit  four  mie  les  entants  l'ont 
dans  la  terre  pour  cuire  .les  pommes  «le  terre. 

Foinre,  v.  n.  Lâcher,  abandonner  une  besogne  presque  ache- 
vée. Môme  sens  que  fouignai  (voir  ce  mot). 

Fondrère,  s.  f.  Planche  du  milieu  d'une  voiture,  planche  du 
fond  d'une  barque,  d'un  lit. 

Forgon,  s.  m.  Long  bois  donl  on  se  s.-rt  pour  opérer  une  be- 
sogne à  distance,  par  exemple  pour  remuer,  ranger  el  attiser  le 

28 


—  m  — 

bois  au  four.  Dans  ce  dernier  cas,  le  fourgon  est  dit  rouôlc.  (Y. 
ce  mot.) 

Forquette,  s.  f.  Barque  plus  légère  que  le  barquot,  parce 
qu'elle  n'est  pas  munie  d'un  bachut  ou  réservoir  à  poissons. 

Fosseu,  v.  a.  Ramener  de  la  couverture  sous  le  matelas,  afin 
qu'elle  ne  tombe  pas. 

Fouie,  s.  f.  Gâteau  à  la  fouie  fait  de  pâte  étendue  et  cuite  au 

four,  frotté  de  jaune  d'œuf,  avec  «le  la  crème  fraîche  e1  du  sel. 

ateau  excellent  doit  cuire  dans  un  four  qui  flambe  encore. 

Fouignai,  v.  n.  Céder,  faiblir,  se  décourager,  lâcher.  El  ai 
fouignai,  il  a  euponné. 

Signifie  quelquefois  diminuer  de  volume,  le  contraire  de  re- 
venir (voir  ce  mot). 

Foussou,  s.  m.  Houe  servant  à  creuser  des  trous  ou  à  Barder 
dis  pommes  de  terre. 

Fouillot,  s.  m.  Petite  scie  montée  sur  un  cadre 

Fouitot,  s.  m.  Esprit  follet,  petit  espiègle. 

Foûsenai,  v.  n.  Profiter,  cire  avantageux.  Se  dit  de  certains 
aliments  plus  substantiels  que  d'autres. 

Foussotte,  s.  f.  Nuque.  Le  creux  de  lai  fdtusottt,  le  derrière 
île  lai  fowêotte,  le  bas  do  lai  foussotte  même  sens. 

Foyotte,  s.  t.  Jeune  brebis  qui  n'a  pas  encore  porté. 
Fracheu,  v.  a.  c'est  détruire  en  luisant,  mettre  eu  désordre, 
défraîchir....  Ce  moi  n'a  pas  une  signification  précise  et  définie. 

Frandeule ,  s.   f.   h' ronde  dont    se   servent    les   bergers   pour 

lancer  des  pierres  ;i  de  très  distances. 

Fràsiiiot,  s.  m.  Troène. 
Frogueilleu,  v.  n.  S'agiter  vivement  et  eu  totalité.  Fregueille- 

•  lui  qui   l'agite  au  point   de  disparailre  dans  la   poiis- 

qu  n    ou 
Freleuge,  |,  f   Wli 

Fressure,  h.  i   Le    poumon    el  le  oœui  dire  les  vis- 

le  thorax,  il  a  p. min  flrtuure  ;  il  est  soli- 
dement  oc  il  ■>  un  bon  coffre 


—  435  — 

Pretu,  s.  m.  Haillon, chiffon.  Radical  de  quelques  mois, comme 
enfretoilleu,  mais  qui  ne  se  dit  plus  que  dans  ce  proverbe  :  // 

n'a  ne  fréta  ne  bretu  ! 

Fricot,  s.  m.  Mets  un  peu  recherché. 

Frilleu,  v.  a.  Brûler  superficiellement,  passer  à  la  flamme. 
frilleu  le  gouri,  c'esl  l'opération  qui  consiste  à  flajnber  avec  des 
poignées  de  paille  les  soies  du  porc  après  sa  mort.  On  aime 
mieux  flamber  un  porc  que  l'échauder;  le  lard  en  esl  meilleur 

el  plus  Tenue,  dil-on. 

On  appelle  au  village  frille-raites —  brûle-souris  —  celui  qui 

esl  supposé  avoir  mis  le  l'eu  à  sa  maison. 

nu  frille  ><-*  cheveux  à  la  chandelle. 

Le  froid  aussi  frille  les  piaule-,  les  bourgeons  tendres  au  prin- 
temps. 

Frimousse,  s.  c.  .Mine,  apparence  'le  santé,  lionne  frimout 

avoir  la  figure  pleine  el  le  teinl  clair. 

Fromaigeots,  s.  m.  pi.  Graine  d'althéa. 

Frouilleu,  v.  n  Tromper  au  jeu.  D'où  frouiUou,  celui  qui 
triche. 

Froutaie,  s.  f.  (  )u  froltail  une  brique  île  pain  avec  un  veau 

'le  laid,  el   on   la   donnait    aux  enfants  :  c'était    la   froutaie.  Ou 
disait  aussi  :  ennc  froillie, 

<i. 

Gaichon,  s.  m.  Garçon.  D'où  gaichenot,  petit  garçon;  gaXche- 
tWtte,  jeune  tille. 

Gaitoillot.  Cheville  en  Pois  servant  à  lever  le  hclel.  Ou  l'était 

après,  pour  que  la  porte  tùi  fermée. 
Galendure,  s.  f.  Cloison. 
Gambi,  adj.  boiteux,  (lambilleu,  boiter. 
Gaudes,  s.  m.  pi.,  potage  de  maïs  très  usité  autrefois. 
Gauger  (se),  se  mouiller  les  pieds  dans  la  chaussure,   par  ex- 

tention,  se  gauger,  c'est  s'enivrer  légèrement. 
Gaupe,  s.  f.,  salope.  D'où  se  gaupai,  se  salir. 


—  436  — 

Genne  ou  geine,  s.  ni.,  marc  de  raisins  après  le  pressurage. 

Gergé,  s.  m.,  vesces  sauvages. 

Gergillot,  s.  m.,  vesces  sauvages. 

Cette  plante  produit  une  graine  luisante  recherchée  par  les 
pigeons.  (Voir  Lusottes.) 

Gesses,  s.  f.  pi.  On  a  les  gesses,  quand  les  dents  sont  agacées 
par  le  contact  dès  fruits  acides.  Faire  les  gesses  à  quelqu'un, 
c'est  lui  donner  envie  d'une  chose  sans  le  satisfaire. 

Gigi,  s.  m.,  Jabot  des  volailles. 

Ginguai,  v.  n.,  s'amuser  à  jouer  des  pieds  étant  au  lit. 

Gipai,  v.  n.  Sauter  pour  s'amuser. 

Giquiai,  v.  Lancer  de  l'eau  avec  \ngiquieu,  tige  creuse  d'oni- 
bellifère  ou  de  sureau  dans  laquelle  on  met  un  pision  qui  Foule 
IVau  et  la  lance  à  travers  un  trou  plus  ou  moins  étroit..  D'où 
agiquiai,  éclabousser,  crotter. 

Au  village  on  donne  plaisamment  le  surnom  d'«;/n/ia(n  à  celui 

qui  est  maculé  de  lentilles. 

Goilie,  s.  t.,  morceau  de  vieille  toile,  chiffon.  La  goille  du  re- 
laivou  est  le  chiffon  qui  sert  à  relaver  la  vaisselle. 

Goille,  s.  t.,  Femme  âgée  et  qui  se  tient  mal. 

Goui,  s.  m.,  serpe.  i('"ù  gouillâ  ou  goyâ,  serpe  à  manche  long 
qui  sert  à  élaguer  les  arbres,  <"eSi  une  véritable  arme  de  guerre. 

D'OÙ  aussi  ÇfOUitOttt,  petite  serpe  appelée  à  lîesancoii  un  loitrrot. 

Le  nu  ii  aiguiser  ne  dériverait-il  pas  plus  naturellement  de  goui 

que  tldrittUt? 

GouifFon,  s.  m.  donjon. 

Gouiiiot,  s.  m.,  tiaque  d'eau. 

Gouine,  s.  t..  Femme  de  mauvaise  vie,  Femme  Impudique,  (de 
Gtoime,  \  tous  celtique,  prétend  Delacroix.) 

Goum.-au  i,  m.,  mélange  ucré  de  <-,,\iv-t,  9'œufs  el  de 
Farine,  quelquefol  de  rix  ou  de  semoule  qu'on  étend  sur  une 
fouille  de  pale,  et  qu'on  met  outre  au  Four, 

ht    Imilir  de    II, num 

I  .a.  ,  ./'rit/  m,  i  pi  -.»\ .  franc  comtoii). 


—  437  — 

Goûnai  (se),  se  salir.  Mail  gounai,  mal  arrangé. 

Gouri,  s.  m.,  cochon.  D'où  gourillot,  petit  cochon. 

Gouri  de  mer,  cobaye. 

Gouri  de  saint  Antoine,  cloporte. 

Graibeussons,  s.  m.  pi.  Morceaux  de  panne  ou  graisse  de 
i»mv  quand  elle  a  été  fondue.  On  en  exprime,  •••  l î< i u î< le  à  chaud 

autant  qu'on  peut,  et  on  mange  les  graibeussons  par  gourman- 
dise. (Dans  le  Saugeais,  Grebons.) 

Graillun,  s.  ni.  GrOÛl  de  graillun,  c'est  le  mauvais  goût  d'un 
fricot  cuit  dans  un  vase  malpropre,  où  il  y  a  eu  do  la  graisse 
brûlée, 

Graivolons,  s.  1'.  pi.,  frelons. 

Greilleu,  v.  D.,  faire  du  liruil  comme  avec  un  grelot. 

Gremé,  s.  m.,  noyau  dur  do  certains  fruits,  prunes,  cerj 
île  l'u  de  pêches,  pu  de  greméil  C'est-à-dire  les  ennuis  sont  on 
rapport  avec  les  honneurs. 

Gremissé,  s.  m.,  peloton  de  lil 

Grenaie,  s   I'.  Seigle  et  colza. 

Gresaule,  s.  t.,  cartilage.  On  dit  aussi  du  croquot. 

Gresé,  s.   m.  Morceau  de   pain   bénit   porto  après  l'office   au 

voisin  qui  doit  l'aire  l'offrande  du  pain  bénit  le  dimanche  suivant. 
D'où  ces  expressions  :  Aivoi  le  yresé,  passai  le  gresé. 

Greu,  s.  m.  Zizanie  du  blé, 

Greube,  s.  t.  Souche,  racine  d'un  vieux  tronc.  Grol/a,  dans 
\  ise-lon-lieu.  C'est  sons  une  greube  de  rerne  que  l'ÔoreVÎSSe 
attend  sa  proie. 

Greulai,  v.  a.  Secouer. 

Grèves,  s.  l'.  pi.,  les  tibias,  les  Jambes.  Ne  s'emploie  plus 
guère  que  dans  cette  locution  :  Se  Chauffer  les  grèves;  il  est  lion 
pour  se  chauffer  les  grèves  devant  le  l'eu.  D'où  grèvi  —  monter 
aux  arbres,  —  grèvissou,  celui  qui  grimpe  aux  arbres. 

Gri,  adj.  Gri  se  COUChe,  gri  se  lè\e:  celui   qui   se  couche  de 
mauvaise  humeur  se  lève  de  même. 
.M.  Contejean  pense  d1'1'  le  mot  gri  signifie  paresseusement 


—  438  — 

avec  difficulté.  Mais  une  autre  locution  populaire  donne  à  ce 

mol  le  sens  que  DOUS  indiqih >ns. 
On  «lit  d'un  entant  rebelle  qu'il  obéit  gri! 

Grignai,  v.  a.,  ne  s'applique  guère  qu'à  la  denture.  Celui  qui 
grigne  les  dents;  les  t'ait  grincer,  OU  les  montre  avec  une  ex- 
pression sardonique. 

On  appelle  grigne-denU  certaines  personnes  contrefaites  qui 
ont  les  dents  fort  longues  et  l'esprit  méchant. 

Grimon.  s.  m.,  Chiendent.  D'où  grinwnai,  extirper  le  chien- 
dent. 

Griveûlai,  adj.  Marqué  de  taches  qui  tranchent  sur  le  fond  de 
la  peau.  D'où  le  oom  de grweUe* donné  aux  vaches griveulaie». 

Gruilleu,  v.  u.,  trembler  de  peur  ou  «le  froid.  (V.  tï.,  Gruller.) 

Gueille.  S.  I'..  petite  crotte,  (iurillrs  de  mouton .  de  chè\  re ,  de 
lapin. 

Gueiliot.  b.  m.,  longue  quille  de  bois  qu'on  suspend  au  cou 
de>  beie<  rouges  pour  les  empêcher  de  courir. 

Guenne,  s.  f.  Morceau  de  bois  plus  ou  moins  arrondi,  ordinai- 
rement un  nœud,  avec  lequel  les  petits  patres  jouent  dans  la 
prairie.  Chaque  joueur  a  le  pied  dans  son   lion  qu'il  ne  doit   pas 

quitter,  excepté  celui  qui  jaugue  (voir  ce  mot)  et  qui  cherche  à 

lancer  l.i  guenne  dans  un   trou   du  milieu  que   tous   les  autres 

Joueurs  défendent  avec  leur  bâton. 

Gucrlot,  s.  m.  Cache-aiguille. 

Gucrroillc.  :  le  qualificatif  ajouté  à  la  truie  qui  porte 

(ui  .1  fait  des  petits.  Alias  gorùye.  S'applique  quelquefois  ft 

f<  mine  .te  mauvaise  v  le, 

Qtu  elure    Par  extension,  contusion,  coup, 

i 

<;  mu  m.-       i  .  i .  i.i  u.-  ou  gros  rizôme  de  nénuphar.  On  en  voit 

il  cil"  l  in  (         ,  I   un  (Ii.iiikI  I  (    du  0,20  A  lU      ni  I.h  e  de  .  e;ni\  i  lui  mailles 
•le     |  |\  Kl  , 

i    i  rente  on  quarante  mâ$»$t  «le  chan>  re  en 
lidcinunl  ;  '    une  cm  courante  pour  nfair. 

lidftUi       i  .  fruit  du  pi n  r|ul    uppelle  guidellè, 


—  430  - 


II. 


Houppai,  v.  n.  C'est  pousser  le  cri  de  iou-kou-kou  !  iou-kou- 
kiiI!  pou  mai  blonde! 

(in  pousse  ce  cri  en  l'honneur  de  son  amie...  C'est  le  chant  du 
coii.  C'est  un  cri  éclatant  qui,  lancé  dans  la  nuit  avec  une  voix 
de  tète  particulière,  retentit  fort  loin. 

J. 

Janfoutre,  s.  ni.,  grosse  injure.  Altération  An  mot  airoutre, 
qui  serait  encore  usité  dans  le  pays  de  MontbéHard.  Avoutrer 
quelqu'un,  c'est  le  traiter  de  misérable  et  d'adultère.  Ce  mot, 
ajoute  M.  Gontejean,  est  la  plus  grosse  injure  qu'on  puisse 
adresser  à  un  homme  de  la  campagne.   Le  sens  d'adultère  est 

aussi  le  sens  que  donnent  au  mot  iïavoutre  les  glossaires  des 

vieux  fabliaux  et  du  roman  du  renard. 

Je  crois  que  de  j'avoutre,  nous  avons  l'ait  à  Broyé  et  ailleurs 
j'envoutre,  puis  janfoutre. 

Jaspi,  s.  m.  Voix  perçante,  parole  vive  et  criarde.  Jeus!  que 
jaspi !  tu  nous  perces  les  oreilles... 

Jauguai,  v.  n.  C'est  attendre  son  tour  déjouer,  être  en  péni- 
tence, se  morfondre. 

Jetun,  s.  m.,  essaim.  Nos  mouchottes  ont  jetai ,  nos  abeilles 
ont  essaimé. 

Jume,  s.  t.,  écume.  Jumai,  éeuiner. 

Jû,  s.  m.,  jeu.  Ce  nuit  t'ait  jure,  jouer. 

L. 
Lcâchottes,  s.  f.  pi.,  chicoracées lactescentes. 

Lanciron.  s.  m.,  jeune  brochet. 

Las-moi  !  exclamation  de  pitié  et  de  condoléance,  équiva- 
lente au   pécaïre  îles  gens  du  midi. 

Lessus,  s.  m.,  eau  alcaline  ayant  servi  à  lessiver  du  linge. 


—  440  — 
Leu,  s.  m.,  ivraie.  LoUum. 

Levaie,  s.  t.,  fumier  fraîchement  retiré  de  l'écurie  el  étendu 
devant  la  porte  peur  rire  mis  en  tas  ultérieurement. 

On  'lit  :  levai  le  fmè  ou  l'aire  lai  levaie  pour  désigner  l'opéra- 
tion qui  consiste  à  renouveler  tous  les  huit  jours  la  litière  du 
bétail.  C'est  le  samedi  qu'on  se  livrait  à  cette  opération  autre- 
fois et  peut-être  encore  aujourd'hui. 

Quant  à  la  levaie,  elle  était  relevée  el  mise  en  tas  ou  au  gros 
fumier  tous  les  six  mois. 

Liette,  s.  t.,  tiroir. 

Ligoûneries,  s.  f.  p.,  propos  sales  et  orduriers.  Ce  mol  n'est 
guère  usité  qu'au  pluriel;  radical,  goûnai, 

Lingaîne,  s.  t.,  pièce  de  terre  beaucoup  plus  longue  que 
large,  très  pou  large. 

Liseû,  v.  m.,  glisser.  D'où  lisude,  sente  ou  sillon  que  les 
enfants  pratiquent  sur  la  glace  ou  le  verglas  en  s'amûsahl  à 
glisser.  D'où  encore  Usou,  pièce  de  l'avant-train  d'un  chariol 
qui  tourne  en  glissanl  sous  la  Ligne. 

Dans  tous  ces  mots  la  gutturale  disparaît  comme  dans  iaude 

pour  Claude;    miche,    |ioiir   crèche  ;  renouillc  pour  grenouille  ; 

etc. 

Loichet,  s.  m.,  boche. 

Loichcu.  s.  m.,  loichie,  s.  t.,  repas  particulier  donné  au  bétail 
qu'on  veul  en  ou  qui  est  malade  :  ee  sont  des  betteraves 

ou  des  pommes  de  terre  cuites  el  du  son  mêlés. 

Lodk  (le  ou  au).  Auprès  b  côté,  le  long  du  boue,  /<"'/  au  long 
•tu  boue,  auprès,  tout  auprès  du  Pois.  Cela  se  disait  en  France 
mi  encore  communément  au  \\  n 

Loquai,  \ .  n..  i.  ii  loquent,  eu  étant  secoués  d lenl 

m. un  t.i    entation  b  i  Intérieur  d'un  corps  mobll i   un 

bruit    tic  clapotement  «le  liquide  el    d'au-     Cela    indique    en 
I  i  H      oui 
<  m  dit  b  Kfontbéliard     berloquai 

Lou,      m  ,  louve,      i    loup  et  louve   D'où  louvèn  .  ropaire  à 

loup    \    ii     louvière,  l incoru  louvâche,  vor  vu  iculuirc  qui 


—  441  — 

s'attache  à  la  peau  «les  moutons  particulièrement.  D'où  a 
louvairou  ou  loup-garou,  (lou  el  vair)  loup  gris,  vieux  loup  qui 
mange  les  petits  enfants. 

Louvairrou  exclamation  el  Juron  familier  pour  exprimer  la 
surprise  et  un  étonnemenl  désagréable. 

Louches,  s.  1.,  morceau  de  pain  coupé  en  tranche  mince. 

Louches,  s.  i'.,  grand  el  petil  carex  :  plantes  de  marais. 

Loûne,  s.  f.,  femme  nigaude  el  paresseuse.  D'où  loûnariet, 
propos  sans  valeur,  de  désœuvré. 

Loûson,  s.  f.,  maladie  courante,  petite  épidémie  au  poinl  de 
vue  de  la  gravité,  mais  s'étendant  à  bien  du  monde,  comme  la 
grippe,  qui  est  le  type  des  loâsons. 

Lusâde,  s.  f.,  lézard. 

Lusottes,  s.  r.  r.  (I..  la  graine  du  gergillot  (voir  ce  mot). 


M 


Maquevin,  s.  m.,  vin  ouil  <m  mieux  jus  de  raisin  cuil  el  con- 
servé. 

Mailieu,  v.  a.,  tordre  avec  la  main.  Je  lui  ai  maillé  les  poignets. 
E'  faut  mailieu  lai  route  quand  clic  a  tenre.  11  Tant  tordre  le 
lien  quand  le  bois  esl  encore  jeune  ;  c'est-à-dire  corriger  les 
enfants. 

MailloD,  s.  m.,  manche  «lu  fouet. 

Maillon,  s.  m.  boucle  du  lien  «les  gerbes.  Cette  boucle  esl 
faite  en  tordant  les  extrémités  du  lien  qui  sont  repassées  par 

dessous  (de  mailieu). 

Mairichau,  s.  m.,  cocoinelle. 

Malassu,  goût  de  sec  que  prennent  les  futailles  vides. 

Malbrou  s.  f.,  grosse  voiture  à  fortes  roues  dont  la  bande  à 
une  largeur  et  une  épaisseur  doubles  de  celles  des  roues  ordi- 
naires. 

Mal  d'effet,  adverbe  qui  si-nitic  cela  n'est  pas  étonnant  ! 
Mal  d'effet,  cela  ne  pouvait  pas  se  l'aire  autrement  ! 


—  442  — 
Mangeotte,  s.  t..  petite  manche  d'étoffe  fermée  comme  un 

sac  et  OÙ  les  enfants  conservent  leurs  provisions  de  fruits.    Par 
extension,  c'est  la  provision  elle  même  qui  est  dite  mangeotte. 

Maon,  s.  ni.,  gésier  «le  la  volaille. 

Marouau,  s.  m.,  maton  ou   marmot,  chat  mâle,  onomatopée. 

Masheu.  nieshuy,  désormais. 

Masse,  s.  t.,  assemblage  de  plusieurs,  mennevéê  (voir  ce  mot) 
attachés  ensemble.  La  masse  a  le  volume  d'une  gerbe  ordinaire. 
Elle  esl  Formée  par  quinze  ou  vingl  paquets  de  chanvre  réunis 
par  un  lien. 

Matras,  s.  m.,  fumier,  d'où  matrasseu,  fumer. 

Menai,  v.  a.,  se  dit  de  la  vache  qui  est  en  chaleur;  elle  mène 

ou  mieux,  elle  meAne  (voir  ce  mot)  /a*  boeus;  elle  appelle  les 
boeufs. 

Mennevé,  s.  m.,  paquet  de  chanvre  qu'oïl  peut  embrasser 
dans  les  deux  mains.    C'est    à    qui    trillrru    le    plus   de    iiirinicrrs 

dans  sa  soirée. 

Messe,  s.  I'.,  grappe  de  tUrquie  avec  tontes  ses  enveloppes, 
épis  et  feuilles.  Oiiand  la  mrssr  esl  surchargée  de  feuilles,  dit- 
on.  i  ne  de  gros  hiver. 

Mette,  ad.,  alangul,   D'OÙ  nniirtli.  |]|  r«  •    mette,   c'est   se  sentir 

brisé,  faible,  sans  court 

Metton,  s.  in.,  gàteaU  de  COlza,  de  fhenevis  ou  de  navelle 
dont  l'huile  a  été  exprimée,  et  dont  le  résidu  pressé  est  moulé 
en  carrés  aplatis. 

Moule,  s.  t.,  tas  de  loin  on  de  -ciliés  faits  pour  en  faciliter  le 

chargement.  Les  mêûlotê  de  i -oui  de  petites  meules  faites  à 

la  h. ite.  par  crainte  de  la  pluie. 

Mcuii-u.  v.  n.  «  avec  douceur.  Le  paj  an 

comprend  jusqu'il  nu  certain  i i  les  cria  des  animaux  avec 

le  qui  i    i1  s  ii   n  interprète  pourd    tinguer  quand 

le  ii  fureur  ou  d  une  passion  douce,  el  il 

a  di  caractériser    ainsi .  la  jument 

qui  hennit,  quand  elle  appelle   ■>■-  comp  vouine,  quand 

on  Iti  chatouille 


—   443  — 

Meûrie,  s.  I'.,  bète  corrompue,  putréfiée,  charogne,  se  dit 
aussi  pour  putain.  Alias,  mûrie  (de  mûre,  pourri.  Sau-meâre,  sel 
corrompu.) 

Meusseu  (se),  se  cacher,  se  mucer  (v.  r.  n.),  d'où  meussot, 
boudeur,  dissimulé. 

Miâle,  s.  m.,  merle. 

Miguai,  v.  a.,  guetter,  ajuster. 

Miollot,  s.  m.,  moelle  nu  amande  'l'un  noyau  de  fruit,  de 
poche,  d'abricot,  'l'un  gremè  quelconque. 

Mirlique,  s.  !'.,  hydromel.  G'esl  l'eau  dans  laquelle  on  a 
lavé  les  '-.Hit. '.mis  ci  1rs  instruments  qui  ont  servi  à  retirer  le 
miel  des  m. 'h. 's  ci  à  l'approprier;  doux  comme  de  la  mirlique. 

Misot,  s.  m.,  petite  Scelle  à  nœuds  qui  se  met  au  boni  'lu 
fouel  pour  claquer.  A  Besançon,  mite. 

Misse,  s.  f.,  la  rate  on  dit  d'un  homme  qui  es1  bon  coureur 
qu'on  lui  a  enlevé  la  misse,  qu'il  es!  dératé. 

Mitou,  ad.,  plaigneux.  D'où  ruimitmtler,  ramener  quelqu'un 

en  le  plaignant,  par  des  caresses,  de  mette  (voir  06  mol 
Mondure,  s.  f.,  arrière  faix  «lie/.  1rs  animaux. 
Motrequeur,  s.  m.,  quantité  d'une  chose,   lard,    pommes  de 
terre,  farine  de   mais,  etc.,   à   mettre  en   une  fois  dans  la  mar- 
mite pour  un  repas. 

\ 

Nai,  s.  m.,  ne/.,  d'où  naque,  pour  désigner  l'humeur  qui 
s'écoule  des  narines;  d'où  encore  naiquâ  et  naiquâ  de,  morveux; 
naquet,  homme  de  peu  d'importance,  gamin,  qu'on  moucherait; 
d'où  aussi  renâré,  qui  a  du  Qair,  nui  est  lin  ;  etc. 

On  l'ail  peur  aux  petits  enfants  du  grand  nmiquâ,  du  père 
naiquâ,  du  reilte  naiquâ,  du  /"'•)•'■  dos  naiquas. 

Naidouilieu,  v.  n.,  agiter  l'eau  avec  les  mains  pour  s'amuser, 
comme  l'uni  les  enfants. 

Nâsir,  v.  a.,  rouir,  on  l'ait  nâair  le  chanvre  en  le  mettant  dans 
l'eau  ou  simplement  en  l'étendant  sur  la  terre. 


—  444  — 

Népié,  s.  m.,  néflier. 

Niau,  s.  m.,  l'œuf  qu'on  laisse  au  nid,  mot  composé  très 
simple  comme  on  voit. 

Nonotte,  s.  I'.,  petit  tubercule  et  surtout  bulbe  du  colchique 
d'automne.  Se  «lit  aussi  de  la  màcre,  de  l'annotte,  tic  la  rai- 
ponce, etc. 

Noue.  s.  t.,  ancien  lit   d'un  cours  d'eau.    D'où   nouotte,  petite 

nulle. 

NouriD,  s.  m.,  petit  cochon,  cochon  de  lait. 

Nouvô,  s.  in.,  avancée  du  toit,  toit  prolongé  pour  abri  et 
fort  bas  en  avant  des  maisons.  Il  servait  à  remiser  les  voitures, 
du  bois,  d'antres  <>lijets.  C'était  très  coiuinun  autrefois.  Ajouté 
à    la    construction    principale,    un    appendice  pareil  présentait 

quelques  avantages  ;  mais  il  avait  aussi  le  grave  inconvénient 
de  rendre  obscures  les  habitations,  d'y  empêcher  absolument 
l'entrée  des  rayons  solaires. 

<>  mot  nouvô  est  une  altération  grossière  par  interversion  du 

mot  auvent. 

Nun,  personne.  Il  n'y  a  mm,  il  n'y  ;i  personne.  Ne  /'«  tous  ai 
rtwti  poi  d'vant  quéquun,  ne  fais  t<»rt  à  personne  par  devant  les 

L'eus. 

0 

Orbcu,    terre    d'orbeu,    marin'   pour   servir   au   torchis.   Cette 

terre  était  emploj  lutiner  la  paille  des  rouleaux  qu'on 

appliquait  les  uns  contre  les  antres. 

Or  m     p  .    lentes   les    intempéries  ;    Ifs   btnirrasipies, 

:i-.   radical  iVintnijnn. 

Ouri  le  mâle  de  l'oie 

OUL\    Mille,    .Mil. 

mauvai    cheval 

'    ,  oli 

hotte  de    mi ervanl  &  porter  le 

un. n 


—  446  — 

Ouseraule,  s.  f.,  érable,  mauvais  b<>is  de  ohauûage  donl   un 
proverbe  a  dit  : 

(ja'il  laisse  mourir  de  froid 

Sa  mère  au  bais  ! 

Ouvai,  v.  n.,  pu  in  Ire. 


Pâ,  s.  t.,  lard,  chair  el  viande  quelconque  qu'un  distribuai! 
parcimonieusement  aux  convives  dans  chaque  famille.  l>'"û 
pari  ou  portion,  p&.  BeUlé-me  de  Un  mon  pain,  don- 

nez-moi du  lard  avec  mon  pain. 

Paipai,  s.  m.,  bouillie  composée  de  fartite  et  de  lait,  sucrée 
mi  salée,  qui  Bervail  de  nourriture  aux  enfants  en  lias 
(Saugeais  :  papet.) 

Paitrovdlleu,  v.  n.,  tremper  scs  pieds  dane  l'eau  ;  littérale- 
ment, mettre  ses  pattes  au  ruisseau. 

On  naidouille  avec  les  mains  :  on  poMrouUle  avec  les  pieds. 

Paittenailles,  s.  f.,  panais. 

I  ne  te  crains  pas  pu  que  las  paittenailles  ne  craignant  lai 
greûle.  <  \  ieux  proverbe.) 

Pattenaillo,  s.  i'.,  le  jeu  de  la  patteuaillc  consiste  à  s'asseoif 
lace   à    face,    pieds    centre    pieds,    el    à    s'eiile\er   à   la    force  d68 

poignets. 

Pan,  s.  ni.,  tablier  de  cuisine,  vêlement  servant  surtout  à 
essuyer  la  table  OU  la  vaisselle. 

On  dit  à  nue  femme  en  lui  jetant  un  objet  quelconque  :  tends 
ton  pan  !  ouvre  ton  pan  ! 

On  dit  encore  :  elle  en  a  plein  son  pan,  c'est-à-dire  une  pan- 
naie. 

La  punnaie  est  donc  ce  que  peut  contenir  le  tablier.  De  ce 
mot  sont  tonnés  :  1°  pannai,  essuyer,  torcher. 

Panne  Ion  wil  d'aivou  ne  mitaine 
l'aune  le  bas,  panne  le  haut 
Prends  bin  gâde  de  t'faire  du  mau 

(Vieille  sauteuse.) 

2°  panne-tnotna,  s.  m.,  ou  pan-de-main  ;  A0  pan-de-nâ ,  s.  m., 


—  446  — 

mouchoir  ;  4°  panmeur*»,  s.  f.,  tablier  (!»>  cuir  que  portent  les 
maçons  el  d'autres  artisans  ;  5°  pantot,  s.  m.,  derrière  de  la 
chemise  :  etc.,  etc. 

Pansurot,  s.  m.,  estomac.  A  la  lettre,  petite  panse. 

Les  anatomistes  ont  appelé  l'estomac  ventricule,  ou  le  petit 
ventre.  C'est  identique. 

Pas-moins,  adv.,  pourtant,  cependant,  néanmoins  qui  en 
donne  à  pou  près  le  sens  et  qui  a  le  môme  point  de  départ.  El 
û  moue?  OnVaivai  pas  moin»  bin  soigne.  Il  est  mort".'  on  l'avait 
pourtant  bien  soigné  !... 

Pâssot,  s.  m.,  drapeau  d'enfants.  A  Besançon pOB. 

In  brë,  das  pas,  das  chemisottes.  (Noéls  bisont.) 

Paule,  s.  f.,  pelle  à  long  manche  sur  laquelle  on  met  la  pâte 
pour  enfourner. 

Paulemelle ,  s.  f.  ,  ferrement  de  porte  pour  recevoir  les 
gonds. 

Pautenère,  s.  t.,  double  poche  que  les  femmes  portaient  atta- 
chées sous  leur  jupe  avec  <\>^  cordons. 

Pauvêne,  s.  t.,  bourdaine.  Espèce  d'aulne  (voir  le  mol  vêne), 

Pé,  s.  t.,  peau  écorce,  pé  de  chêneveuilles  au  lieu  «le  chanvre. 

Jean,  p'tit  Jean  Ii'uli.  mon  atml,  que  bel  liaibit 

Aicheteré  tn  ai  toi  fenne,  dis  moi  lu  dis?  — 

In  bel  haibit  d'pé  de  eheneveidlle,  mire,  i  vo  le  dis. 

l'un  rnn'  haibil  d'soie.  oit!  qU6  neniii .'.'. . . 

t  \  âpres  i  astiques.) 

Pégnots,  s.  m.  pi.,  chardons,  fruits  du  carde  a  foulons. 

Pcn.-i.  ptmâêêt  ■"ij. .  | sis.  Etymologie  simple  (pttri  el  nai). 

IImh 

Poneii.  ptmetuê,  ad.,  honteux  et  confus. 

Perré,  -    m.,  endiguemenl  Corme  en  talus  aveo  des  pierres. 

Pcrrèrc- 

Pervouillen  ■  aux  <■!  autres débi  ipportôs 

■us  les   an  e     par  le 
remo 
On  donne  ce  nom  nusi  i  aux  copeaux  de  menuisier, 


—  447  — 
Pesettes,  s.  f.  pi.,  vesces.  <>u  prononce  aussi  besettes. 
Peuche,  s.  f.,  ou  peûchon,  s.  m  ,  cuillère  à  polai 

Peut,  peute,  adj.,  vilain,  laid,  malpropre,  ai  pente  chaitte, 
bés  minons  ! 

Pé-vannoure,  s.  f.,  peau  de  mouton  que  1rs  batteurs  en 
grange  portent  en  guise  de  tablier  pour  appuyer  leur  van.  Litt  : 
peau  pour  vanner. 

Pidance,  s.  f.,  tout  ce  qui  se  mange  avec  Le  pain,  l'idance 
signifie  aussi  aliment  copieux  :  un  œuf,  c'est  bien  ;  deux,  i 
mieux;  trois,  c'est  pidance,  «lit  un  vieux  proverbe. 

Piépoux,  mauvaise  herbe. 

Pieute,  s.  f.,  à  Besançon  plot,  tronc  debout  haut  d'environ 
deux  pieds,  et  sur  lequel  on  aiguise  les  échalas,  des  manches 
d'outil,  etc.  Cest  à  proprement  parler  nue  enclume  de  bois 
servant  à  toutes  lins. 

La  pieute  est  un  meuble  indispensable  dans  loutau. 

Piteu,  s.  m.,  putois. 

Pléiant,  s.  m.,  levier  de  bois  flexible  long  et  fort,  servant  à 
serrer  et  à  fixer  à  l'aide  'l'une  chaîne  <>u  d'une  corde,  le  char- 
gement d'une  voiture. 

Poêle,  s.  m.,  chambre  à  coucher.  Elle  fait  suite  à  Voutau  qui 

est  pavé  nu  dallé,  où  st.-  l'ail  la  cuisine  et  où  l'on  travaille. 
Poidessus,  s.  m.,  crème  nouvelle,  la  crème  qui  s'est  formée 

sur  le  lait  de  la  veille. 
Mot  composé  devenu  simple  par  lu- 

Poi,  s.  m.,  poil,  brin.  Ne  s'applique  guère  dans  ce  dernier 
sens  qu'à  l'herbe.  On  dit  un  poi-d'herbe,  pour  un  brin  d'herbe. 

Nos  pères  autrefois  considéraient  l'herbe  comme  la  chevelure 
de  la  terre  ;  chaque  brin  d'herbe   était   un    poil  de  cette  CE 
lure. 

Poi-feu,  s.  ni.,  houx. 

Poi-foultot,  s.  m.,  duvet,  barbe  naissante. 

Poille,  (les  11  mouillées),  s.  f.,  écorce  des  plantes,  du  chan- 
vre. Il  faut  attendre  que  la  Saint-Laurent  ait  mis  lai  poille  au 
chanvre  pour  l'arracher,  dit  un  vieux  proverbe. 


—  448  — 

Porchot,  ou  pourchot,  s.  ni.,  porc   (Vais.  Ce  doit    être  un  mot 
nouveau  dont  l'étymologie  est  facile  à  deviner. 

Porgalai,  v.  a.,  poursuivre  à  fond  île  train. 
Pouchot  ou  p'chot,  adv.,  peu. 
Pouillots,  s.  m.  p.,  fruits  de  L'aubépine. 

Poulot.  s.  m.,  mâle  do  la   poule,   coq.   La   chanson   du   rico- 
chet est  appelée  à  Broyé  la  chanson  du  ronge  poulot. 

Poul'vaudai,  v.  n.,  aller  venir  sans  ohjet    déterminé;  perdre 
son  temps. 

Pouson.  s.  t.,    puanteur.    D'où   le  verbe   ampousenai.    sentir 
mauvais. 

Preugeu ,  v.    n.    l'n    aliment    accommodé    de    certaine    façon 

preuve  plus  que  s'il  était  accommodé  d'une  autre;  o'est-à-dire 
qu'il  profite  plus,  qu'on  eu  mange  moins  (v.,  fo&sentti  qui  a  le 
môme  sens). 

Prou,  adv.,  assez. 


Quart,  s.  m.,  coin,  se  chantier  au  quart  du  feu. 
Quechot,  s.  m.,  la  sommité.  Au  quechot  du  toit  ;  pour  an  plus 
haut  du  toit.   Le  qtieohot  d'un  chêne  est  le  sommet. 

Qucnou,  s.  m.,  bois  épineux  cl  fort  dur. 

Quenillou,  v.  n.,  perdre  son  temps  à  des  choses  futiles,  indi- 

d'occuper  quelqu'un.  Celui  qui  tue  le  temps  à  redresser 
de  vieux  clous  par  exemple  esl  dit  qumiilot. 

Qucrquolin,  --.  m.,  pancréas  du  porc. 

QuoHHi...  quand  ta  pâte  a  eu  froid,  le  pain  i  itineux  ci 

il  empâte  le  couteau     il  esl  du  qunti. 

Quottcrie    ou   queulerie,   >.  I.   Quantité  de  lit  mis  à  l'aicuille. 

•  mi  -/<•  grande*  qu9tt«riiê...  ■>   Besançon 

on  dit 

Qu  i    renflemenl  de  le  racine  au  point  où  la  l 

qu'elle    upfioru    émerge  du    ol.  in   batoa  fe   qtêêuohe  est  un 

m  n Tiniiié  |i.n    un   n  nlli'iui'iil    rilcillOUX   en  ■  * 1 1 1  -e  de   pomme 


-  449  — 

Il  est  d'usage  au  village  de  porter  la  queuche  en  bas,  comme 
;i  [a  ville  de  porter  la  pomme  en  haut. 

Queuquelle,  s.  ('.,  casserole  en  terre  ou  en  fonte. 

Queuquereilles,  s.  f.  p.,  coquilles  de  moules  de  rivière. 

Queutai,  v.  a.,  appuyer,  étayer.   E  foui  queutai  Uti  talv 
que  ché,  il  faut  étayer  le  unir  de  façade   qui    tombe.   (Voir 
aiqueutai.) 

Queuti,  s.  m.,  jardin,  ailleurs  :  oàuti,  V.  t'r.  courtil. 

Quiaquai,  v.  n.,  faire  claquer  bod  fouet. 

On  dil  pourtanl  abusivement  :  quiaque  las  bœufs,  pour  aieceiUe 
las... 

Quignieu,  s.  m.  Cadeau  qu'on  t'ait  à  son  filleul  à  Noël,  On  lui 
donnail  jadis  une  miche  de  deux  on  trois  livres  jusqu'à  i  âge  de 

dOUZe  ans. 

Quinson,  s.  in.,  pinson. 

Quioues,  s.  1'.  p.   Claies  «l'une  voiture 

Quiousseu,  v.  n.,  s'évanouir,  panier. 

Quivotte,  s.  1'.,  sorte  de  (amis  pour  Cribler  les  grains.  I 
une  peau  de  mouton  sans  poils,  garnie  de  trous  plus  on  moins 
grands  appropriés  à  la  graine  qu'ils  doivent  laisser  passer  et 
faits  à  l'emporte  pièce.  <>n  dit  quivai  pour  cribler.  On  appelle 
quivou,  celui  qui  crible,  el  quivures  la  petite  graine  et  la  Biga- 
me qui  passent  par  les  trous   de  la  quivolte. 

II 

Rache,  s.  f.,  teigne,    dartres  >\\i  cuir  chevelu.  <>n  appelle 

aussi  de  C6    nom    la    CUSCUte   îles   prairies.  D'OÙ     ràchrt,   enfant 

malingre,  chétif  et    rabougri,  comme   sont    en  généra]  ceux 

qui   ont   été    épuisés     par    de    [ongUOS  suppurations    à    la    tête, 
étant  jeunes. 

Raflai  (se),  v.  pr.,  compter  sur  quelqu'un  pour  l'aire  une 
besogne  qu'on  devrait   taire  soi-même.  /  m'étQHfi  rafiai  su  lu, 

j'avais  compté  sur  lui. 

Raibaisse,  s.  f.,  forte  averse,  grande  pluie. 

29 


—  450  — 

Raibaitue,  s.  f..  construction  pour  remiser  1rs  voitures  et  le 
bois  de  chauffage. 

Raicodai,  v.  a.,  instruire,  enseigner  la  grammaire,  faire  dire 
la  leçon. 

Raidrosseu,  v.  a.,  mettre  les  choses  en  place,  tenir  îles  objets 
avec  soin  et  précaution. 

Quand  on  met  ai  son  aipoint 
On  treuvc  ai  son  besoin, 

dit  on  ancien  ada 

Raigaucheu,  v.  a.,  attraper  au  vol  un  objet  lancé,  le  recevoir 
adroitement  comme  une  paume,  un  fruit,  etc. 

Raigonnai,  v.  a.  Sermonner  quelqu'un  en  maugréant. 

On  «lit  aussi  raivonnai. 

Raigreumi.  Etre  transi,  avoir  des  frissons. 

Raim,  s.  m.,  branche  de  bois  petite  et  menue,  destinée  à  être 
liée  avec  d'autres  en  ragots el  à  servira  divers  usages,  comme 
de  ramer  des  pois,  des  haricots,  etc.,  radical  de  remeste  (voir 

Ce  mot). 

[1  est  probable  que  primitivement,  i •  dirigerune  barque, 

00  9*681   Bervi  d'un    ratm;  d'OÙ    les    mots   de   rame,   de    ramer. 

Ramilles,  ramoner,  etc.,  sont  aussi  des  dérivés  du  même  élé- 
ment 

Raimaiget,  s.  m.,  un  étranger  qui  s' implante  au  villa 

Raimandons,  s.  m.  p.,  restes  d'un  repas. 

Raimitoulai,  v.    a,    consoler.    C'est    prendre    par    de  d0U< 

ses  un  enfant,  voire  une  personne  quelconque,  pourga- 
i  i  mttou,  peut  «être  amitié. 

Raintri,  adj  ,  ridé,  Qétri, 

Raipondro,  I    i  B<    rapprocher   el     unir    les    extrémités 

d'un.'  corde,  d'un  iii .  rattacher  el  réunir  des  choses  disjointes. 
Qq  t. ,  ni/Hunii-r  (Voir  m  mol  i 
i  m  laii  uni  nUpona  i  un  babil  déchiré. 

ippe  de  turquie,  de  mille!  ou  de  panis.  C'esl 

Ulie   imn.r  •  I  •  - 1  m  nillh  '■•■  dr   se  .  i  n  \  «  |.  >|  .(■■ 

,i. de  ici  'ii  parut)  comme  dans  rolohe,  renouillei,  etc. 


—  451  — 

Rampé.  Etre  manche  à  manche  an  jeu  dans  une  partie;  avoir 
parité  de  points.  <>n  dil  indifféremment  avoir,  être  el  faire 
rampé  :  j'ai  rampé  ;  je  suis  rampa  ;  j'ai  fait  rampé... 

Rancos,  s.  m.  pi.,  I.'  râle  de  l'agonie.   El  en  û  as  raneos,  il 
■  lise.  D'où  ràncoilleû,  râler,  respirer  comme  si  l'on  avait  des 
mucosités  dans  la  trachée. 

Raitroupai,  v.  a.,  ramasser,  faire  ses  provisions  de  réserve; 
faut  faire  qu'ment  le  coucou,  raitrpupai  pou  son  hivai  ! 

Rassotte,  s.  1'.,  abri.  Se  mettre  at  hn  nusotte,  pour  éviter  la 
pluie.  Dans  lr  Saugeais,  sota,  abri, 

Rassuai  (se)  v.  n.  s.>  mettre  au  beau,  eu  pariant  du  temps. 

En  été  >iaaiid  le  soleil  lu 

Las  chemin*  sont  toue  voêsus  l  (Ptot.  iv.-r.nnt.) 

Rasurc,  s.  f.  Gratin  qui  se  forme  au  fbad  delà  marmite  quand 
on  l'ait  cuire  des  gaudes,  du  riz  au  lait,  .-le. 

La  râaure des  gaudes  esl  uni'  friandise  très  recherchée  des 
enfants  en   Franche-Comté.  Qui  est-ce  qui   racle  lard*   r 
A  cette  demande  du  chef  de  famille,  tous  les  entants  répondent  : 
moi  !  moi  !  moi  ! 

Ratonaie,  s.  r.,  réplique,  répartie.  /><•  bonnet  ratonaiet,  benne 
riposte.  Ratonai,  écarter  les  bêles  du  dommage,  a  la  même 
racine. 

Ratouleux,  s.  in.  pi.  la  pie  des  seigles,  liatoalai  signifie 
refaire  des  atoales  (voir  ce  mot),  c'est-à-dire  faire  succéder  une 
réCOlte  de  céréales  à   l'autre. 

Ratrombi,  v.  n.,  résonner  dans  la  tête,  retentir...  Cèiài  w'aî 
rutrombi  <ia>is  las  oreilles,  ça  m'a  étourdi...  à  Besançon,  hm- 
sombi. 

Rebi,  adj.,  se  dit  du  pain   qui   n'est    pas  cuit,   quoiqu'il  soit 

resté  très  longtemps  au  four.  Le  four  n'était  pas  assez  chaud,  et 

le  pain  n'est  pas  recuit  ni  trop  cuit,  ce  qui  ne  le  rendrait  pas 

mauvais  ;  niais  il  est  rebi  et  détestable.  Ce  met,  je  émis  n'a  pas 

d'analogue  eu  français. 

On  dit  du  linge  qu'il  est  rebi  quand  il  a  été  séché  à  un  soleil 
trop  ardent,  séché  trop  vite. 


—  452  — 

Recarroilleu,  v.  n.,  c'est  avoir  une  certaine  ressemblance 
éloignée,  mais  frappante,  avec  certains  ascendants;  ê  rccarroille 
son  grand  père. 

Recerci,  v.  a.,  rapprocher  les  trous  ou  les  déchirures  d'une 
étoile  sans  mettre  cte  pièce.  Au  Bguré,  dédommager,  réparer. 

Redouilleu,  v.  a,  tromper. 

Rejannai,  v.  a.,  imiter  en  contrefaisant.  Copier,  singer  quel- 
qu'an. 

Relanguai,  v.  n.  Ce  n'est  pas  être  rapporteur;  c'est  relanguai, 
c'est  redire  par  légèreté  ou  par  ôtourderîe  ce  qui  a  été  confié 
dans  l'oreille.  D'où  relangarde,  personne  qui  s'en  va  raconter 
tout  ce  cpi'on  lui  dit. 

Remesse,  s.  I'.,  balai;  de  rwfofl  (voir  ce  mot.) 

Remettre,  v.  a.,  vomir. 

Renaidai,  v.  n.,  vomir. 

Renouille,  s.  t..  grei i 1 1  « • .  Hrnoi<iii<\  pécheur  de  grenouilles. 

Reseilieu,  v.  a.,  couper  l'herbe  ; itié,  mai  faucher. 

Ressannai,  v.  n.,  ressembler  à  quelqu'un. 

Reuiaie,  s.  f.  t  ot  rennes  des  bonnes  tètes.  Au  premier  janvier, 
cadeaux  divers  ;  à  Pâques,  œufs  colorés  ;  à  Noël,  le  quignieu... 
oie  Rêûle,  rouie,  contribution.) 

Routie,  s.  I'.,  rôtie. 

i*  itemie  étendu  but  du  pain  ; 

Pain  grillé,  trempé  dana  le  vin.  On  portail  autrefois  la 

rôtis  poivrée  aUX  jeunes  mariés. 

Ribouiai.  \  a  Ribeulai  Uu  auiUtê,  signifie  leur  donner  une 
expression  menaçante  on  lea  ouvrant  démesurément. 

ohanvre  roulé  et  mis  eu  paquet  de  moyen  volume 

i\«.n  i 

Roflou,  s.  r.,  pelUouléi  ôpldermlquea  'in  cuir  chevelu,  abon 
enfant)  et  ohea  lea  petits  oiseaux. 
Rogno-ii.urii.-.       m   i. ni. mi  qui  Burvient  dana  une  famille, 
m  lequel  on  ne  oomptail  po    et  qui  réduit   sensi- 
blement la  pari  de   auti 


—  453  — 
Roi-de-guille,  s.  m.,  roitelet. 

Roillie,  s.  m.,  même  sens  que  riéte.  Ces  deux  mots  s'emploient 
indifféremment  pour  exprimer  un  marne  objet. 

Roiche,  s.  1'.,  crèche  d'établi-,  où  les  brousses  du  râtelier  sont 
recueillies,  où  l'avoine  el  les  aliments  pâteux  sont  dépoe 

La  consonne  dure  tombe,  comme  dans  raippe,  iaude,  etc. 

Rondotte,  s.  t.,  lierre  terrestre. 

Rouailleu,  v.  a.,  grignoth-r.    Le    rouaillon  est   ce  qui    reste 

(l'un  irait  dont  la  chair  a  été  mangée  tout  autour. 
Roue,  s.  t.,  fossé  peu  profond,  roue,  rô,reue,  sillon  de  cbarrue. 

Rouegeu,  v.  a.,  remuer  doucement  et  en  rond  les  liquides 

plus  ou  moins  épais. 

Rouetotte,  s.f.,brioche  fil  (orme  de  couronne,  faite  de  beurre, 
de  farine  el  d'oeufs. 

Rouillot,  s.  m  ,  battoir  de  lessiveuse, 

Rouôle,  s.  t.,  outil  en  1er  à  Ion-    manotM   do    bois    servant  à 

retirer  la  braise  du  four,  a  Besançon  ri&U. 

Ru,  s.  m  ,  petit  cours  d'eau  ou,  plus  exactement,  eau  cou- 
rante :  tout  bon  soldat  a  deux  chemises,  une  au  cul,  une  au  ru  ; 
suivant    un  ancien  dicton. 

D'OÙ  russe,    ruisseau.    Le    ru    D'est    souvent    (prune   eau    ipu 

dévale  dan-  les  rigoles  d'un  chemin. 


Sairgot,    s.   in.,  cahot.   D'OÙ  sairyotai,  cahoter,  être   cahoté. 

Saivaie,  s.  i'.,  plaie  allongée,  comme  celle  résultant  d'un 
coup  de  corne  qui  laboure  la  peau  superficiellement.  A  Besan- 
çon, saivade. 

Saune,  s.  in.,  sommeil. 

Sauvoillot,  s.  ni.  Yehle,  sambucus  ebulus. 

Seillin,  s.  ni.,  saindoux. 

Sennai,  v.  a.,  semer.  D'où  le  mot  de  sonnons  qui  désigne  en 

Franche-Comté  ces  inombrablea  tils  qu'où  voit  au   temps  des 


—  454  — 

semailles,  chaque  feuille  et  chaque  brin  d'herbe  ayanl  sa  toile 
d'araigné 
On  appelle  aussi  cela  a  Broyé  des  petRtns.  (Voir  ce  mot.) 

Seu,  seule,  adj..  fatigué.  D'où  seûlai,  fatiguer,  être  fatigué. 

Seut,  s.  t.,  étable  ;'i  porcs. Quand  les  cochons  sont^trop  gras,di1 
un  vieil  adage,  é  cassant  lai  seul.. .*  Il  en  esl  ainsi  jle  bien  des 
serviteurs. 

Siésant,  siésante,  adj.,  s'applique  à  une  personne  gracieuse, 
liien  faite,  à  tournure  agréable. 

Cette  fille  est   liieu  siésttulr. 

Simot,  s.  m.,  lisière  du  drap. 

Soicherot,    s.    ni.,    ôpervier.    Chasserel,    oiseau    chasseur.    A 

Broyé  on  a  interverti  les  consonnes  :  ce  qui  arrive  assez  souvent . 
nu  dit  preti,  pour  pétrir;  bré,  peur  berceau;  fromai,  pourfer- 
mer  :  aprovier,  | répervier,  etc. 

Sombrai,  v.  a.,  c'est  donner  un  deuxième  coup  de  charrue 
après  la  récolte  «les  céréales. 
i.e  premier  coup,  on  ratoule,  cachant  eu  terre  les  atoules]  le 

deuxième  < p.  "ii  sombre. 

joie  eu  pie  des  sombres  est  celle  où  l'on  a  récolté  du  seigle 
l'année  précédente.  Autrefois,  elle  restait  en  friche;  en  laissait 
reposer  la  terre.  Aujourd'hui,  eu  y  fait  des  semailles  de  carême; 
du  turquie,  des  pommes  de  terre,  etc. 

Sopai  (se),   c'est  heurter  du   pied  une   uresse  pierre,  un   corps 

dur  quelconque  qui  dé]  u  sopai  t  Oh  !  qui  boi 

ri, ni     |   (Voir  ce   I j n  . f .  » 

!..  haie.  De  $sp$s,  dit  l'abbé  Dai : 
Son.  reniera  fourrage.  Le  solier  (vieux  français) 

Souiiu.-i-,      m.  me  .1  supporter  les  Immenses  che- 

min* Olir  donner  par   en   liant    du 

un,,-  ôtail   le  plui      i "     hoi    de  la 
il  en  reliai)  deux  autres  qui  étaient 
e  du  brenie, 
.  h.,    iiiii  i . 


—  455  — 

Quand  l'enfant  bat  l'écorce  du  saule  ou  du  coudrier  en  sôve 
pour  la  détacher  facilement  et  en  confectionner  un  sifflet  pri- 
mitif, un  (ieutot,  ou  une  trompette,  il  chante  sur  un  ton  mono- 
tone : 

Subicu,  subieu,  mon  ftoutot. 
Su  lai  coue  de  Jean  Jacijuot; 
Subieii,  subieu.  mai  trompette, 
Sn  lai  coue  de  Jean  Jaquette! . . . 

On  ne  comprend  pas  le  sens  dé  cette  Invocation;  mais  on 
croit  bien  que  sans  cela  \efieutot  ne  sifflerait  pas  et  que  la  trom- 
pette resterait  muette. 


Taivane,  s.  t.,  mur  de  façade. 

Tantoue,  mot  vague  et  sans  précision  qui  signifie  dans  un 
temps  indéterminé.  Ainsi  j'irai  tantoue,  c'est-à-dire  de  bonne 
beure  dans  l'après  midi.  Sur  le  tantoue,  c'est  sur  le  soir,  à  une 
beure  qu'on  oe  saurait  préciser. 

Taifourots,  s.  m.  p.,  cousins,  moucherons  dont  les  piqûres 
sont  si  désagréables.  Littéralement  :  petit  taivins.  On  devrait 
dire  taivourots. 

Taivin,  s.  m.  taon 

Quand  enne  mouche  le  pique  é  se  croit  qu'ça  in  taivin,  (l'rov. 

popul.),  par  moquerie  des  ^vn<  qui  se  croient  plus  malades 
qu'ils  ne  le  sont. 

Tasson.  s.  m.,  blaireau.  D'où  tassenère,  tanière  à  blaireaux. 

Tatots,  s.  m.  p.,  débris  «le  poterie  cassée,  Objets  et  usten- 
siles de  ménage  mis  au  rebut.  On  appelle  tatillon  celui  qui  perd 
son  temps  à  des  inimitiés,  à  ranger  des  tdtots ;  et  tatillonnaige, 
cette  occupation  habituelle. 

Taulai,  s.   v.,    contusionner.    Taulure,  meurtrissure,   contu- 
sion suivie  souvent  d'abcès. 
Taule,  s.  t.,  table. 
Tavillon.  s.  m.,  bardeau,  encolle.  Tovolion,  à  Montbéliard. 

Tésse,  s.  f.,  la  tésse  ou  tisse  est  un  arrangement  symétrique 
des  gerbes,  symétrique  comme  la  natte.  Faire  une  tésse  se  dit 


—  -450  — 

entésseii  las  gerbes.  Ce  n'est  pas  les  entasser  ;e'est  les  mettre 
en  piles  bien  ordonnées,  par  alternance,  celle-ci,  dans  un 
sens;  celle-là.  dans  un  autre. 

Le  tas  est  confus;  tandis  que  la  tisse  présente  la  symétrie» 
D'où  tisser,  tisserand,  taxonomie,  texus,  etc. 

Teuffe,   t|([.   f.    Touffe    (vieux    français)    touffeur,   air   pesant 
chargé  d'électricité,  qui  rend  mal  à  l'aise. 

Teumai.    v.   n.,   renverser,  répandre   du    liquide  qu'on  porte 

dans  un  vase  plein,  ou  qu'on  décanté.    'Fumer,  dans  le  sau- 

ÎS,    c'est     s'épancher  hors    du    vase,    en    bouillonnant.    Du 
lat,  tumere,  gonfler. 

Teurre,  s.  1'.,  faire  la  leurre,  c'est  bouder. 

Tine,  s.  i'.,  mesure  employée  pour  la  vendange,  évaluée  à 
50  lit] 

Tiquiot,  s.  m.,  loquet  d'une  porte. 

Tirvacheu,  v.  a.,  même  sens  que  tirvoipnii. 

Tirvognai,  v.  a.,  tirer  de   droite   et   de    gauche,   comme   on 

tirerait   une  chose  inerte. 

Tocons,  s.  m.  p.,  morceaux,  pièces  rapportées. 

Toillon,  s.   m.,  ou  Toueille,  s.  I..   nappe  qu'on    laissait    sur 

la  taiiie  en  permanence  et  dans   laquelle  on   enveloppoil   la 
miche    pour  empêcher  les  mouches  de   la  souiller.    Après 
chaque  repas  on  retroussai!  le  toillon. 
Le  vieul  français  dit  t<><"uii<-  en  toaitte. 

Topai,  \    a.,  frapper  pour  faire  du  bruit  •  S  tope  <i<ms  sus 
.le  sureau  donl  la  moelle  est  enle- 
\  l'aide  d'un   mandrin,  en    \    Introduit   successivement 
deux  balles  d'étoupe,  et  l'air  comprimé  par  la  seconde  chasse 
ec  bruit. 
ii.-u,  \  toque  /■- 

Tomhou  1er,  'i  "u  toMOVj  toseerotte,  etc 

ouffo  'i  herbes  ilrui 
Touillou         m  ,  n  mi 


—  457  — 

Tourie,  s.  1'.,  unisse. 

Trac,  s.  m.,  vertige,  maladie  du  bétail  et  particulièrement 
du  porc.  Avoir  le  trac  se  dil  quand  les  jambes  manquent. 

Traîne-Bousson,  à  Besançon,   trah  ■■   de   passereau. 

Tramuai,  v.  n.,  transmuer,  changer,  s'applique  au  temps 
qu'il  fera.  Le  ciel  tramue.  Ce  verbe  n'existe  plus  guère  que 
dans  notre  proverbe  franc- comtois:  quand  las  taie»  faisant  lai 
feue  Je  oteïiramue;  c'est-à-dire,  il  se  met  a  la  pluie.  Le  temps  va 
changer  :  donc  il  va  pleuvoir. 

Muance  esl  un  vieux  mol  français  <|ui  a  exactemenl  lemi 
sens  que  changemenl  de  temps. 

Tran,  s.  f.,  fourche  de  fer  à  trois  dents  courtes  el  solidef 
Iran  sert  à  jeter  le  fumier  par  mottes  6  travers  le  champ  on 
elles  sonl  ensuite  frâchées  avec  la  main. 

Trateiai,  v.  n.,  marcher  comme  un  homme  ivre. 

Travoi,  v.  n.,  voir  peu  distinctement.  /  travoi,  je  vois  comme 
a  travers  un  brouillard,  à  distance,  etc. 

Treige,  s.  m.,  trage,  passage  étroit,  petit  chemin  serré  entre 
lieux  haies. 

Trequet,  s.  m.,  mais  sur  pied. 

Trési,  v.  n.,  pousser,  paraître.  S'applique  plus  spécialement 
aux  céréales.  Les  tvêsies  sonl  les  blés  ou  les  seigles  en  herbe. 

Treuchie,  s.  I'.,  ensemble  de  branche  poussées  sur  une  même 
tige,  ou  seulement  rapprochées  les  unes  des  autr< 

Tricheu,  s.  a.,  corner.  Une  bique  l'ai  triche 
Tricheu,  v.  n.,  tromper  au  jeu. 

Tripai,  v.   a.,  fouler  aux  pied-. 

Trouillot,  s.  m.,  trèfle  des  prés.  Cette  berbea  la  réputation 
d'endormir.  On  dil  d'une  personne  qui  a  manqué  l'heure  d'un 
rendez-vous,  qu'elle  s'est  entrouilhû,  qu'elle  s'est  endormie 
sur  du  trouillot.  A  Besançon,  on  * I i t  ctrulu,  elle  s'ètrule. 

Tunai,  v.  n.  Quémander;  aller  chez  les  voisins  pour  ei 
obtenir  quelque  chose;  solliciter  d'une  manière  indirecte,  pa" 
des  insinuations,  «les  bassesses,  etc. 

La  tune  est  le  procédé  du  tuneur, 


—  458  — 


Vambe,  expression  adverviable  qui  signifie  en  plein  mouve- 
ment, sonner  en  vambe;  sonnera  grande  vambe. 

D'où  '•*iiti",ttlai ,  agiter  à  lour  de  bras.  Quand  on  voulait 
avoir  du  feu,  on  entourai!  le  borli  ou  l'amadou  allumé  avec 
des  herbes  et   des  feuilles  sèches;  puis  on  vambeulait. 

M.  l'abbé  Dartois  donne  bamboula;  el  à  Besançon,  on  <lii 
vandoulà. 

Vaine,  s.  t.,  aulne. 

Vaupoiraie,  s.  1'.,  une  vesprée.  G'esi  le  travail  de  l'après 
midi.  On  <lit  :  nous  en   avons  à  labourer  pour  une  vaupoiraie. 

Veillie.  s.  m.  Automne,  saison  des  semailles  ou  mieux  des 
veillées.  D'où  reveillins,  regain,  foin  récolté  ou  automne. 

Veillins,  s.  m.  pi.,  oc   sont  les    inombrables   toiles    d'arai- 
gnées, qui  couvrent  les  prés  ou  automne. 
Veillie.  s.  f.,  liseron. 
Vermeusselai,  participe   Mangé  des  vers,  troué  par  les  vers. 

Viau,  s.   m.,    I"   nu   veau. 

2"  larcin  de  denrée,  de  blé,  d'avoine  .  etc. .  commis  par  un 
fils  au  préjud  ii  père  : 

."."  moule  de  rivière. 

tfrand-père ,  s.    m.,   hisaioui.    El    revire-grand-père, 
anlébisaïeul. 

Vire-main*  s,  m.,  dans  nu  vire-main,  pour  dire  instantané- 
ment, le  temps  de  i ner  la  main. 

tourner.   VUn  toi  tète  I  la  tôte  lui  a  oit*6l 

..  du  radical  '•'»•<•  qui  n'existe  plus  ijue  dans 

le  i  précédent,  mal  donné  une  foule  de  composés, 

"'".  i ner  de  côté  et  d  amie. 

i    |,    .  haï  •  tricot  de  la  jambe  qui  «les 

ii. m. ni  |n  (|u  .i  la  >\i>\  llle,  '■. le  bu     i  ci  il  <  lonté 

I     i i  du  i  '•  le  plu      pui'  économie, 


—  459  — 

beaucoup  de  femmes  à  la  campagne  allaient  nu-pieds,  et  par 
décence  portaienl  des  virottes. 

Voillottes,  s.  f.,  colchique  d'automne. 

Vouig-nai,   v.  u.,  c'est   une   manière  de  hennir  particulière 
au  cheval  chatouilleux  ou  à  la  cavale  qui  est  en  rut. 

Vbuinner   dans    le    saugeais ,   signifie   çjôer,    pleurnicher! 
M.  Barthelel  fait  venir   ce   mol    de  L'Allemand    weinen.    < 
tout  simplement  une  onomatopée, 

Vourie,  s.  t.,  tapage  scandale, 


z. 

Zaguai,  \.  n.  Courir  d'une  façon  exfravqgante. 

On  fait  zaguai  les  vaches  en  imitant  derrière  elles  le  bour- 
donnement des  taons,  ou  !<•  sifflement  des  serpents.  A  ce 
bruit,  tout  le  troupeau  dresse  les  oreilles,  lève  la  queue  el 
■i  en   mesure  de  décamper. 


—  460 


TABLE 


g  1.  —  \i  stiges  d'antiquité p.  3.H 

Pays  d'avant-poste.   —  Défenses  de  l'Ognon.  —   Défenses  'le  la 
Saône.  —  Trouvailles  antiques. 

■;.  il.    -  Traditions  et  légendes p.  338 

Emplacement  d'Amagétobée.  l    Castrum  ebrodunenbe.    -  La  con- 
quête française.  —  Mariage  celtique.  —  Orvals  de  Sainte-Anne. 

—  Autre-  superstitions. 

.  m.  —  Le  village p.  348 

Emplacement  primitif.  —  Insécurité  îles  guêtres.  —  Sons  la  domi- 
nation française. 

i;  iv.  —  Commerce  ex  industrie p, 

Situation  économique.  —  Difficulté  îles  relations  commerciales.  — 
Culture  de-  céréales.  —  Cultures  diverses. 

-  -   AOkOMISTRATIOM |' 

Pays  'le  main-morte.  —  Impôts  sans  affectation.    -  Libertés  com- 
munales.   -  Monsieur  le  Curé. 

|  VI   —  Education  et  drbssemeni p.  367 

Les  vieux  laboureurs.       Respect  'le  l'autorité.       Esprjl  de  corps. 

—  Habitudes  de  travail. 

j  VII.      Caractère  ei  mœurs p, 

\ni du  cloch  nomie  et  privations,       Esprit  d'intérêt, 

Routine  '■'  convention. 

,    MM  IIm.iim    i  i   BAMT1 p.   881 

Instruction  publique,       Superstitions,        Régime  alimentaire 
Soins  >\<-  propi  i 

i  '    303 

La  morale  utiliti njnoui  propre.      Justice.       Humanité, 

IUOD1    MODI  I' 

un         \iin  ii.ii atioim  locali  Les  laboui oui  •  'l  tujour- 

.1 1 

p 
p livo, 


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