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l'imprihehie*de E. DU VERGE II,
L'i j I Zûd C ' GlH
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BoïWlrcîia
..Stccisliil^otiieî:
IflJBUtiKÎ
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PUBLIÉE PAR M. FÉTIS,
SEUR DE COMPOSITION A t'ÉcOLB ROYALE DE SWS1QHB,
■T B1BLIQIBBC11BB DE CM BIlBMSaBHIflT.
N" 25. — AOUT 1827.
EXAMEN DO TRAVAIL DE M. VLLLOTEAU
SUR LA MUSIQUE DES PEUPLES ORIENTAUX.
DES 1KSTRCKEN3.
L'examen de la première partie des recherches do
M. Villoteau sur la musique «les Orientauxa démontré que
le savoir, le soin, la conscience ont présidé à sou travail;
encore n'ai-je pu donner qu'une idée fort imparfaite du
mérite d'un ouvrage, qui ne peut être bien connu que par
une lecture attentive des mémoires dont il se compose.
Celui qui concerne les instrumens sera l'objet de cet ar-
ticle; il n'est pas moins intéressant que les premiers, mais
il est plus difficile de l'analyser, parce que les détails tech-
niques dont il est rempli ne peuvent s'abréger. Je serai
donc forcé de me renfermer dans la partie historique.
Le premier instrument qui se présente à nous est ce fa-
meux E'oud, qu'on trouve également chez les Arabes, les
Persans, les Turcs, les Égyptiens, eniui dans toutes les
contrées de l'Asie et de'J'Afriquc policées. M. Villotcau nous
apprend que le nom A'E'oud n'est point un nom propre ,
mais un mot qui , dans la langue arabe , signifie toute es-
pèce de buis, une machine, un instrument quelconque.
Comme nom d'un instrument de musique , il a passé dans
a* vol. 1
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plusieurs langues, cl y a été plus ou mains altéré. Les
Turcs , en confondant en un seul mot l'article et le nom
r l-c'oud (Vc'ond), en ont corrompu l'orthographe, el l'ont
écrit comme ils le prononçcnl, laoutah. Les Espagnols,
qui, selon toute apparence, reçurent lemOme mot directe-
ment îles Sarrasins, en ont moins altéré la prononciation
et l'orlliographc dans ùtoudo. Le même nom a été écrit
parles Italiens (cvto, et prononcé Uowto, puis ils onl écrit
iiuto, qu'ils prononcent (iouto. Dcluul cela nous avons fait
tuth. Il faut avouer (pie voilà une origine qui ressemble
un peu à celle Ai fana rte ce bon Ménage.
Quoi qu'il en soit, l'Eoutl est un instrument île l'espèce
des guitares, dont la forme ressemble à celle d'une poïte
lin peu aplatie par le bas; il est moulé de quatorze cordes
qui ne donnent à vide que sept sous, parce qu'il y en a
deux à l'unisson pour chaque note ; eiilin il se pince avec
un plcctre, comme la mandoline. Ce pleclre est lait en
écaille ou en plume d'aigle. La longueur lolalc de l'instru-
ment est de sepl cent vingt-six millimètres (environ vingt-
six pouces) ; ses cordes sont de boyau et diffèrent peu de
gni-wur; le dos , ou la partie convexe dtt c^rps sonore,
qu'on nomme ijaca'h, est composé de vingt-une rnles rte
bois d'érable, séparées par vingt petites bandes ou lilets en
bois rte Sainte-Lucie; c'est sur les deux dernières côtes ou
filets que pose la table. On voit que TEourt ressemble beau-
coup à notre mandoline pour la forme, mais non pour la
grandeur, ni pour la nature de ses cordes.
Tel est l'instrument qu'on peut regarder comme la base
des orebestres orientaux. Il arrivera sans doute a quel-
qu'un de mes lecteurs de sourira rte pitié en voyant ceci :
doucement, monsieur le rieur ! sachez que ce petit instru-
ment, avec ses cordes à l'unisson et son pleclre, a opéré
des merveilles aussi bien qu'un autre. Si vous eu douiez,
voici une petite histoire qui vous le prouvera autant qu'une
lustoirc peut prouver quelque chose. Sachez donc que le
fameux docteur FaraH ou Fariabi, ou Aboit-Ntissar-
Kohammed Turkhani, se trouvant un jour à la cour du
sultan rte Syrie, Seif-ed-Doutat, prit un E'oud, et joua
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une pièce de sa composition qui mil la cour du prince eu
si belle humeur que chacun éclata de rire; nue jouant en-
suite une autre pièce , ii fit pleurer rassemblée à chaudes
larmes, et qu'enfin ayant changé démode, il endormît
l'auditoire. La tradition de ce dernier effet n'est pas per-
due; maïs le fait n'est pas moins honorable pour l'ii'oudet
pour celui qui le jouait.
Il est un autre infiniment qui joue un grand rôle dans
la musique orientale; c'est celui qu'on nomme en général
tanùour, que Labordc écrit mal à propos tambour, et
qui n'a aucun rapport avec l'instrument barbare qui sert
à régler la marche des troupes européennes. Le tanùour
est un instrument de l'espèce des mandolines; il est monté
de cordes de métal; son manche est divisé en touches]
fixes, et on le jonc avec un plectrc en écaille ou une plume
d'aigle. Comme il y a plusieurs sortes de lanùours, on les
distingue nrdi n.i innjent par une épilhèle qui se joint au
nom générique : ainsi l'on dit tanùour k&byr tourkt/ f
grand lanbour turc, ou grande mandoline turque; tatl-
i/our cfiitrt];/, tatibour oriental ; tanùour ùouti/ari/ , tan-
bour bulgare; tanùour bouzourk , grand tanbaur persan,
et tanùour Imglamali, tanbour ou mandoline d'enfant.
Le tanùour kebyr tourky, ou grande mandoline turque,
est un instrument haut d'un mètre trois cent quarante
millimètres, c'csl-à-diie d'un peu plus de quatre pieds,
dont le manche et le chcvillct occupent 1 ™ 010; le corps
de l'instrument n'a pas lotit-à-fall un pied. La partie pos-
térieure de la caisse est bombée et plus qu'hémisphérique;
la partie plate, que nous nommons (atablc, est parl'aile-
ment ronde. Les cordes sont au nombre de huit , et hq
donnent que sept sous à vide, parée qu'il y en a deux pour
une noie ; les autres sont accordées à l'octave : mais comme
le manche , excessive nient long, est divisé en trente-sept
touches fixes , il en résulte que chaque corde peut produire
trente-huit sons enharmoniques renfermés dans l'espace
de deux octaves et un ton. L'étendue totale de l'instrument
est de deux octaves çt une quinte.
Je regrette de ne pouvoir rapporter ici la savante dis-
4
cussion par laquelle M. Villoleau entreprend de prouver
que cet instrument est le magadisdas anciens : les bornes
de cet article ne permettent pas d'entrer dans d'aussi grands
détails. Je me bornerai donc à dire que ces détails sonl
remplis d'intérêt et peiivent servir à éclaircir un point fort
obscur de l'histoire de la musique.
Le tanbQurcharqy , ou mandoline orientale , est moins
grand que le précédent. lia la forme d'une longue poire un
peu aplatie ,etson manche est divisé en vingt-une touches
fixes. Les cordes sont au nombre de cinq ; trois sont de lai-
ton, les autres sont d'acier. Elles ne rendent que trois sons à
cause des unissons de l'accord. Cet accord est singulier. Les
dcuxpreuiiercscordcs donnent à vide le su/ de notre clé or-
dinaire Bar la seconde ligne; la troisième rend le sou du ré,
une quarte au-dessous, cl 1cm deux antres celui du fa, en re-
montant d'une quinte. On trouve à Venise un instrument
du même genre, eu usage parmi le peuple , et accordé de la
même manière.
Le tanùour bouighary , ou mandoline asiatique, est In
plus petit des instrumens du même genre , car il n'a que
5j8 millimètres de hauteur totale. Il n'est monté que de
quatre cordes d'acier et de laiton , dont trois ont le son de
la à vide du violon , et la quatrième celui du ré du même
instrument. L'étendue totale de son échelle est de deux
octaves.
Les autres variétés des mandolines de l'Orient ne pré-
sentent rien d'assez intéressant pour mériter d'être détaillé.
Ce sont toujours des instrumens plus ou moins grands,
niontésde cordes métalliques, qu'on frappe avec un pleo-
tre , et dont le manche est divisé en touches fixes.
Les Arabes elles Persans se servent d'une espèce de violo
ou instrument à archet qu'on appelle Umâmgeh roumy,
viole grecque. C'est un instrument qui a beaucoup de rap-
port avec notre aucienne viole d'amour. Ses dimensions
tiennent le milieu entre le violon et la quinte ou allo. 11 est
monté de do uze cordes , six mobiles et six stables. Les cordes
mobiles sont faites de boyau et sont tendues sur le man-
che , en passant sur un chevalet. Les cordes stables sont
faites de laiton : mais an lieu d'être tendues sur le silet et
Bur la touche, comme les autres, elles passent en dessous,
au moyen du vide que l'on a conservé entre les parties et
la tige du manche, afin que ces cordes puissent y être in-
troduites et vibrer librement sans heurter le bois d'aucun
coté; ensuite elles traversent le chevalet par de petits trous
pratiqués dans son épaisseur vers la moitié de sa hauteur,
vont s'attacher par-dessous le lire-corde à l'extrémité op-
posée à celle oùsont attachées les cordes mobiles de boyau.
Ce qu'il y a de singulier dans cet instrument , c'est son
accord , qui est le même à peu près que celui d'une basse
de viole de Gaspard Dniifopriigcar , luthier tyrolien du
seizième siècle. MM. Choron et Fayolle ont donné dans
leur Dictionnaire des M nsidens l'accord de cette basse,
qui a appartenu à H. Roquefort.
Parmi les diverses autres espèces d'instrumens à archet
qui portent le nom de kemângeh, viole où vielle, il n'en est
pasde plus singulier que la tojiiînje/trtjjouî.Ellealaforme
d'une sphère dont on aurait retranché le tiers. Le corps
est composé d'une noix de coco , coupée un peu au-dessus
de la moitié de sa profondeur. Une peau tendue sur l'ori-
fice sert de table d'harmonie, lîn long manche y est atta-
ché ; une tige de fer qui traverse l'instrument lui sert do
pied ; deux cordes, formées de crins de cheval, et tendues
sur un chevalet, complètent ce mélodieux violon, qui se
joue avec un archet. Son étendue lotalcestde deux octaves
et demie.
La kemângeh fark ne diffère de la précédente que parce
que son accord est d'une quinte plus aiguë.
Le rebab , dont le nombre de cordes varie de deux à,
une, est encore un instrument à archet de l'espèce des
kemângeh. Il est plat, et n'a guère que deux pouces
d'épaisseur; il a la forme d'un trapèze, dont le sommet est
parallèle à la base, et dont les côtés sont égaux; les éclisscs
seules sont en bois, la table d'harmonie et le dessous do
l'instrument sont en parchemin tendu. Ii est traversé par
une tige en fer qui sert de pied pour le poser. On le joue
avec un archet, Le plus répandu est celui qui n'a qu'une
6
corde , laquelle est accordée au ré de la clé de sol , au-
dessous de la portée. L'étendue iotaie de son échelle est
d'une sixte mineure. Voilà sans doute un instrument bien
barbare; mais, comme le remarque M. Villoteau, il no
sert presque jamais qu'à régler l'intonation des voix on des
autres inslrumous ; c'est un véritable tonarion.
Les peuples qui habitent l'jjgyptc t'ont usage de deux
instruirions de l'espèce de uos lyinpanons. I.e premier est
le qdiwii, (jui est moulé de soixante-quinze cordes do
boyau; l'étendue totale de son échelle est de trois octaves
et une quarte , les noies sont au nombre de vingt-cinq;
en sorte qu'il y a trois cordes pour chaque son, Ou joue le
qinon avec un pleclre eu écaille qui a environ trois pouces
de longueur. L'autre instrument est le sanïii'j il est monté
de cordes métalliques, et se joue avec deux baguette». Les
chrétiens d'Orient et lesjuiïs seuls jouent du saillir. Les
Égyptiens et les Arabes le méprisent à cause de cela.
L'espèce de lyre éthiopienne qu'on appelle ieissur, et
dont le nom donne lieu à M. Villolcan de l'aire un rappro-
chement avec noire mot de guitare, n'a cependant point
d'analogie avec ecl instrument; c'est une véritable lyre à
la manière des anciens. Les lJarabras ou Berbères qui ha-
bitent près de la première cataracte du Nil , sont les seuls
qui s'en servent; M. Villoteau remarque qu'elle ressemble
exactement à celle de Mercure , décrite par Homère dans
son hymne à ce dieu. C'est une simple sébile de bois , sur
laquelle une peau est tendue par des nerfs de bocuï; on y
ajoute deux monlans , et ceux-ci sont joints par une tra-
verse. Les cordes sont au nombre de cinq; on les pince
avec un picot rc. La manière dont ces cordes sont accordées
donne lieu à M. Villoteau de faire des recherches curieuses
sur le priucipe harmonique des dispositions de ses sons et
sur l'analogie de ce principe avec celui de la musique des
anciens; ces recherches terminent ce qui concerne les in-
struirons à. cordes des peuples de l'Egypte.
La seconde partie du travail de M. Villoteau est relative
auicinstriimcnsàvent.
Le -premier qui se présente est une espèce de hautbois
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appelé zamr par les Égyptiens , et zournâ par les Persans.
Il y en a de trois sortes ; le grand , le moyen et le petit,
qui ne diffèrent que par leurs dimensions, â peu près
comme noire flâle, notre tierce et noire piccolo , et con-
séquemnient par la gravite de leurs sons. Je regrette de ne
pouvoir donner une idée de l'exactitude des détails dans
lesquels le savant auteur du mémoire que j'examine entre,
pour ce qui concerne les diverses parties de ces instru-
mens , sur leur tablature et leur usage. L'étendue du petit
zamr, ou zamr goura, est de deux octaves et une tierce,
à commencer du si sur la portée à la clef de sol; celle du
zamr moyeu est de près de trois octaves, dont le son le
plus grave est le mi; le zamr kebyr, ou grand zamr, est
d'une octave plus bas que le pfttit. La manière déjouer de
cet instrument est singulière ; ce n'est point l'anche qu'on
presse avec les lèvres, parce que celte anche trop molle ne
résisterait pas à la pression , c'est le bocal , en sorte qu'il
faut souffler avec force pour que l'air entre dans Tanche et
communique le son à l'Instrument. Ce son est dur et
rauque comme celui du hautbois de forêt qu'on voit entre
les mains des habitai» des Ardcnnes.
Les Egyptiens ont une antre espèce de hautbois, long
d'environ onze pouces, qu'ils nomment e'râgyeh, et dont
i'élendue est depuis le mi grave de notre clarinette jusqu'à
Tut Au médium du même instrument.
On ne trouve enEgypte qu'une seule espèce do trom-
pette, qu'on nomme nefyr; elle ressemble à. la notre par
la forme et par la matière, car c'est un tube mince en
cuivre, recourbé, et avec une embouchure très étroite.
Les Arabes ne savent en tirer que quelques sous aigus et
glapissans.
Il parait que les peuples qui habitent l'ancien royaume
des Ptolémées sont grands Auteurs, car ils ont trois espèces
principales de (lûtes, qui se divisent chacune eu plusieurs
autres. Les trois espèces principales sont r la souff'ârah, le
iiây et Vargltoul. Le souffllrah est une espèce do fla-
geolet, long de dix pouces environ , et percé du sept trous;
son étendue est d'un peu plus de deus octaves, à com-
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8
mencer du si au-dessous -de la portée, jusqu'à Y ut au-
dessus.
Le nûy parait être fort ancien ; il se pourrait que ce fût
de lui que Méuaudre a parlé _dans ce vers de sa Messé-
nienne :
« Assurément j'ai joué de la ilftte arabe. ■
Quoi qu'il en soit , cet instrument est très varié ; on en
trouve dans presque tons les Ions principaux de la musique
orientale. Les derviches ont leur îiay ; les mendians ont le
leur; las musiciens de profession en ont jusqu'à cinq ou
sis différons. Le principal, celui qu'on appelle le grand
naiff est long de plus de deux pieds ; il est percé de sept
trous, et a une étendue d'une octave et demie, à com-
mencer du rê grave de la flûte européenne. Le musicien
tient le nay de la main droite pour le jouer, contre l'usage
de nos instrumentistes. Le nay girtf, variété du premier,
est d'une quinte plus élevé. Celui-là est percé de huit trous.
Ces deux espèces de flûte sont faites avec une espèce de
grand roseau à nœuds dont on a ôlé la moelle.
Uarghout, ou flûte champêtre, se divise aussi en plu-
sieurs variétés; elle ne se trouve guère que dans les mains
des hommes du peuple. M. Yilloleau dit, en parlant de
cette flûte: « Certes, on ne peut, avec des moyens plus
• simples , ni avec un art mieux entendu , composer un
• instrument plus élégant , plus en harmonie dans son en-
i semble, que l'arghoul. Comparé aux autres instrumens
a de musique de ce genre, il ne le cède à aucun autre pour
«la grâce. Il n'est nullement vraisemblable ni possible que
«cette espèce d'instrument ait pris naissance chez un
• peuple absolument dépourvu de goût pour les arts d'agré-
f nient et dans des siècles d'ignorance. »
L'arghoul est une flûte double et à tuyaux inégaux comme
celle de l'antiquité ; il y en a de trois espèces : Yargfumt-
el-kebir, qui est la plus grave ; Yarghoul-et-sogayr, flûle
moyenne; et Yarghout-et-asgar, petite flûle. Le petit
corps donne sept sons diatoniques; le grand corps donne
quelques sons de basse.
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Outre ces divers instruniens, on trouve aussi en Éjypic
«ne espèce de cornemuse qu'on appelle xouggarah ; elle
ne peut produire que quatre sons : la, si, ut, ré. Les
instruirions de percussion delamèinecoiitréese composent
principalement de tambours, de cymbales et de crotales.
Ces instrument! étant à peu près les mêmes chez tous les
peuples , ne méritent pas des détails particuliers. M. Villo-
teau n'a cependant rien laissé à désirer sur l'orthographe
ou l'étymologie do leurs noms, ainsi que sur la matière
dont ils sont formés, leurs formes et leurs variétés.
En résumé , le travail de ce savant est ce qu'on a de plus
complet , de plus satisfaisant sous tous les rapports sur les
connaissances musicales positives d'un peuple; je u'cï-
cepte pas même la nôtre. Puisse cet hommage que je me
plais à rendre à un savant modeste contribuer à faire
connaître ses travaux et à leur assurer le succès qu'ils mé-
ritent !
NOTICE
D'UNE COLLECTION MANUSCRITE
D'ANCIENNE MB SI QUE FBiNÇAlSE ,
On chercherait en vain maintenant les traces de la mu-
sique vulgaire des Français sous les règnes de François I",
de Henri II , de François II , de Charles IX, de Henri III,
de Henri IV et de Louis XIII, si Philidor aîné, musicien
ordinaire de Louis XIV, et garde de ses livres de musique,
n'avait été chargé par ce monarque du soin de recueillir
tout ce qui restait de l'ancienne musique française , soit
dans les copies manuscrites, soit dans la tradition. Ces
traditions existaient encore, et l'on pouvait se procurer
des copies; aujourd'hui tout cela est perdu. On peut ilouo
considérer comme un événement heureux la conservation
du la collection (le Philidor. Celte collection, composée
originairement de cinquante-neuf volumes in-folio mai.,
a été transportée à la bibliothèque du Conservatoire , oit
elle se trouve encore.
Toute la musique qu'elle contient est en partition , avec
l'indication îles instrumens alors en usage. Le premier vo-
lume contient les airs les plus anciens des diverses pro-
vinces, et particulièrement ceux de la Bretagne, du Poi-
tou, de la Champagne et de la Lorraine, tels que les
branles, les courantes, les passepieds , les {/ouvrées, les
pavannes et les gaillardes ; les plus anciens remontent h
i54o. On y trouve aussi les airs qui ont été composés pour
des circonstances remarquables, telles que le retour de
Henri Ilï de la Pologne , le mariage de Henri IV en ifioo.
le sacre de Louis XIII le 17 octobre 1610, et le carouscl
Fait à la Place Royale pour le mariage du même roi. Toutes
ces pièces sont à deux, trois , quatre, cinq et six parties.
La suite la plus considérable est celle qui a pour titre :
Concert donné à Louis XIII, le jour de la Saint-Louis,
en 1627, par tes vingt-quatre violons et par tes douze
grands hautbois. Elle est à cinq parties pour violons,
violes, tailles de viole, basses de viole, hautbois, cromorne
et larigot ; ce concert, dont la partition forme vingt-trois
pages, est composé d'airs de caractère et d'airs de danse
des plus anciens ballets.
On croyait qu'il ne restait rien des compositions des an-
ciens rois des violons, tels que Constantin cl Dumanoir;
mais le premier volume de la collection de Philidor con-
tient quelques pièces de ces vieux musiciens. Celle de
Constantin qui a pour litre te Pacifique, à six parties,
annonce du talent; elle est dans le style fugué, et l'on y
trouve quelques cadences inattendues d'un bon effet. En-
fin , parmi les pièces les plus singulières , on remarque le
concert de grands hautbois et de cornets , pour la création
des chevaliers, par Henri III ; une branle et une gagliarde
eu faux bourdon pour les musettes, composées en i54°>
sont d'un chant fort agréable. On y trouve aussi l'air de
Dupont, mon ami, avec la date où il a été composé (1607).
Les deux volumes snîvans nu sont pas moins intéressaus;
ils contiennent la musique de tous les ballets qui ont été
dansés à" la cour depuis i58a jusqu'en 1649- Presque tous
ont des titres singuliers , tels que le ballet des éventés, le
ballet des folles , le ballot des coqs, le ballet des garçon»
île taverne, etc. Il s'en trouve qui n'ont pu être joués à
l.-i cour, car leurs titres seuls annoncent ces grossières
plaisanteries du temps de la Fronde qu'on trouve dans une
foule de pamphlets ; tel est celui-ci : Ballet ridicule des
nièces de Matarin , dansé devant le roi et ta reine ré-
gente sa mère, par le trio matarmique, pour dire adieu
à la France , en vers burlesques et à six entrées. En la
première, Matarin, vendeur de baume/ enta deuxième,
ses deux nièces danseuses de corde; en ta troisième, tes
pai-tisans, arracheurs de dents; en ta quatrième, Ma-
:arin,crieur d'oubliés ; en la cinquième... Je m'abstiens
de rapporter le reste du litre parce qu'il est d'une obscé-
nité révoltante. Ce qu'il y a de singulier, c'est que cette
collection est dédiée à Louis XIV par Philidor. Tous les
airs de danse des ballets sont à. deux parties.
Les volumes suivans, depuis le quatrième jusqu'au sei-
zième, renferment la musique des grands ballets qui ont
été donnés au commencement do règne de Louis XIV , et
antérieurement à l'établissement de l'Opéra, par C.imbert
et l'abbé Perrin. Les principaux sont : les Fêtes de Bac-
chus , en if>5i ; le Dérèglement des Passions , en i65a ;
tes Noces de Tftétys et Pétée, et le ballet des Plaisirs. Ces
deux derniers sont entremêlés de chants et de danses, fis
sont en partition et a plusieurs parties.
La musique originale des comédies de Molière, ta
Princesse d' Élide , te Mariage forcé, (es Fêtes de Ver-
sailles, le Médecin malgré lui, Pourceaugnac, le Matade
imaginaire et le Bourgeois Gentilhomme , est contenue
dans plusieurs volumes. LulH est l'auteur de quelques-uns
de ces morceaux; les autres sont anonymes.
Un des volumes les plus curieux est celui qui renferme
la musique des ballets qu'on dansait au collège des jésuites.
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Colle 'musique -esl de Beauchamps, de Dcsmatins et de
Colasse.
Un événement déplorable a privé la bibliothèque de
l'École royale de musique de quelques-uns des volumes les
plus intéressa us de celte collection , et notamment de cens
qui élaient cotés 17, a5, 26, 3o, 45, 5i et 54. Le sieur
H , employé subalterne delà biliothèque, les a détruits
en i8ao , ainsi qu'un grand nombre de partitions, pour en
vendre les cartons et le papier. Il fut cJiassé; mais cet acte
de justice, qui aurait pu être plus sévère, n'a point sauvé
d'une ruine complète des monumens qu'on chercherait
vainement aujourd'hui.
Le dis-septième et le vingl-sixièmevohimcs contenaient
les airs composés parles violonsdela grande bande des vingt-
quatre, sous Louis XIII et Louis XIV, Leurs noms étaient
Richamore., Belleville, Constantin, Lazarin , Branchu,
Prévost , maître à danser de Louis XIV, de la Harpe, Rr>-
bichon, Dumanoir, Boulard, Charpentier, Lapiis, Pé-
court, Converset, Cuillegaut, Le Peintre, Talon, Bo-
mestre, Clos, Faure, Forcroix, de la Chatennerayc ,
Huguenet, Bounard, Joncques, Baudy l'aîné, Plumet,
Bonucfons, Alaix, Legrand, Toulon, Queversin , Ardeletz,
Saliort, Carlier, Dubois, Farinellc et Duclos. Quelques
amateurs , d'une illustre naissance , avaient aussi composé
des airs qu'on trouvait dans ces volumes; tels étaient
Louis XIV, la maréchale d'Estrées, la marquise de Nan-
gis , le marquis de Chaleauueuf et le prince de Furstem-
berg. L'air connu sous le nom de la Furstemb&rg, et qui
est (le ce prince, s'y trouvait.
Le vingt-cinquième volume n'était pas moins précieux;
ilrenfermaitlesairs de ballets, les symphonies elles contre-
danses qui avaient été composés par lous les membres de la
famille I'hilidor, savoir Michel Danican, surnommé Phïli-
dor par Louis XIII, et chef de toute celle famille, son fils
aîné, nommé Michel comme lui, le cadel, Pierre Phili-
dor, Fanchon Philidor, François Pbilidor, et Anne I'hili-
dor , qui établit lesconcertsspirituelsen 1736. Les volumes
cotés 45, 5a ot 54conlenaientles ballets de l'Amour vain-
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.5
qucur, de Diane, et Endymion, et les opéras de la Prin-
cesse rfe Crète, et du Mariaije.de ta grosseCateau, dont la
musique avait élé composée par Philidor aîné.
On a heureusement conservé lo quarante-unième volume,
qui contient la partition d'Orphée, en italien, par L. Rossi,
premier opéra qui ail élé représenlé en France, en 1G47.
Le premieropéra français n'a élé écrit que vingt-deux ans
après.
Telle est cette collection importante pour l'histoire de la
musique , et qui n'a été connue jusqu'ici que des biblio-
thécaires qui'se sont succédés au Conservatoire et à l'École
royale de musique. J'en publierai quelque jour les mor-
ceaux les plus curieux.
FÉTIS.
BIOGRAPHIE.
Y11DA.NA ( Louis ) , musicien célèbre, naquit à Lodi, dans
le Milanais, vers i58o. Nommtf d'abord mallre dcchapellc
à la cathédrale de Fano, petite ville du duché d'L'rhain ,
il passa ensuite à celle de Mantoue , pour y exercer les mê-
mes fonctions, et il s'y trouvait encore en i64-'f* O" ignore
l'époque de sa mort. Jusqu'à Viadana , les compositions
des plus habiles musiciens n'avaient point eu d'autres par-
ties de basse que celles chaulées par les voix graves ; l'or-
gue doublait ces parties, et lorsqu'elles avaient des pauses
ou d'autres silences , ou lorsque les voix se croisaient, le
ténor, ou le coutr'atto servait de basse à sou tour, jus-
qu'à ce que la basse réelle rentrât dans l'harmonie. Blessé
de cette imperfection , Viadana imagina une basse indé-
peudaute de celle du chant, propre à être jouée parl'or-
gue ou tout autre instrument à clavier, et dont les nota*
sont surmontées de chiffres destinés à indiquer l'harmonie
qui leur appartient, afin que l'accompagnateur puisse gui-
der les chanteurs par cette harmonie plaquée sur les in-
sl rumens à clavier. Or, comme celle basse n'est point s..n-
DigitizGd t>y Google
mise aux interruptions des basses vocales, Viadana lui
'donna le nom de liasse continue. Les principes cl le mé-
canisme de CCltC belle invention , qui eut tant d'inlluence
sur les progrès de la musique, furent développés par lui,
dans une instruction écrite en latin, eu italien et en alle-
mand, et placée en lûte d'une collection de motets de sa
composition, intitulée : Opéra omnia sacrorum concen-
tuum , i , 2 , 5 et 4 vocum , cum tasso continua et ge-
nerati, orga.no appticato, novaaueinventione omni gé-
nère cantorum et organistarum accomodata , autiwrc
Ludovico Viadana, hujus nova) artis inventera primo.
Adjunctœ sunt insuper in vasso generali hujus novœ
inventionis instructtonesiatinœ, ItaUcœ et Germanicœ.
Venise, 1609, et Francfort-su r-ie-Mein, i6i3, in fol. ibid,
Emmelius, ifiao , in-4° maj. Le même Emmelius le réim-
prima encore en i6j6 , in-4°maj.
Il est juste de dire que. antérieurement à cette publica-
WffyAîon de Viadana, Richard Deering , musicien anglais.
'J avait fait paraître à Anvers un ouvrage de sa compositinn,
intitulé : Cantiones sacrai , guinque vocum, cdm basso
cohtihdo ad ohcaïuh; Anvers, 1597; et que Grégoire Ai-
chînger, organiste à Augsbourg en avait donné un autre
sou» ce litre : Cantiones ecctcsiasticœ 3 et 4 vocum, ohm
sisso geî<ebili et coBTiNco, in ttsum organis tarum ; Dil-
lingue, 1607, in-4'- Mais outre que ces deux musiciens
avaient fait leurs éludes musicales en Italie , et avaient pu
conséquemmenl avoir connaissance de l'invention de Via-
dana , il est remarquable qu'ils a'ont point donné cette
invention comme leur appartenant , et qu'ils n'ont point
réclamé contre les prétentions de ce musicien lors de la
publication de son ouvrage. D'ailleurs, l'instruction dou-
née par lui sur celte matière prouve évidemment qu'il en
était l'inventeur. On attribue aussi à Viadana l'invention
» du coucerto d'église. Se» autres ouvrages sont : 1° Madri-
gati à 6 voci op. 5. 3° Slissa pro defunctis 5 vocum, op.
1 5; 5° Comptetorium Romanum 8 vocibusdecanlandum,
iib. 3, Venise, 1008. op. 16 ; 4" V espertina omnium so-
iemnitaluin Psalmodia, cum duobus Magnificat et fat-
sis bordonis , cam 5 vocibus , Francfort-sur-lc-Mein ,
itiio, ïji-4° ; 5° Sinfonie musicali a 8. op. 18; 6 ' Con-
ccrti ecclesiastici av., 5,4 v oci. op. a4, tib. 3 ; 7° Fatsi
éordoni a 4e(8 voci, Home, 1612; 8° Salmi e Magni-
ficat 4 foci, Francfort, 16m, ii]-4° ; 9' Opus musicum sa-
crorum concentuum , yui e( wiico t>oce, née non clua-
bus , tribus et quatuor voeibus variatis eoncinentur ,
una cum éasso continuo adorganum appticato, ibitl,
iGia , in-4° ; 10° Concentuum ecctesiastieorwm 2 , 3 et 4
vucibus, opus complétant, cum sotemnitate omnium
vesperlinarum, ibïd, i6i5,in-4"; w- Salmi a 4 cori con-
certai*, op. a?.
ANECDOTE.
H y a quelquefois, dans la manière dont se manifeste
l'amour- propre d'un grand artiste, une certaine candeur
qui fait que , loin de blesser, l'expression de cet amour-
propre intéresse. Voici un exemple assez curieux de la
tendresse d'un auteur pour ses ouvrages. Traetta, célèbre
compositeur napolitain, avait l'habitude, lorsqu'il était au
clavecin , à la première représentation de ses productions,
de se tourner vers le public à l'approche de quelque pas-
sage remarquable , et de s'écrier : ■ Signori ! badate a
questal > (Messieurs, faites attention à ceci); le public
écoulait et applaudissait avec transport.
NOUVELLES DE PARIS.
La stagnation des travaux intérieurs des théâtres est
complète en ce moment. On sait que l'Opéra -Comique ne
possède pas assez de ressources pour essayer avec succès
démonter des ouvrages nouveaux. Quel que soit le zèle
des acteurs qui sont à leur poste , ceux-ci sont insiiffisaus
)G
pour un ouvrage musical ; car si l'on excepte quelques pe-
tites comédies sans importance, auxquelles il suffît de
joindre des couplets et des chansonnettes, il n'est plus
possible qu'une pièce attire maintenant sans musique et
sans chanteurs. Que faire sans Ponchard, Chollet, La-
feuillade, M" Uigaut , Boulanger, etc. ? Jouer le vaude-
ville et la comédie ! en revenir au Bûcheron , au Tonne-
lier, au Diable à quatrel Sous ne croyons pas qu 'on soit
tenté de l'essayer. Cependant on ne peut pas toujours don-
ner le Dètvrz, Camille , Les deux Jatoux et Gulistan.
On ne peut pas toujours faire des recettes de i5o francs.
Il faut des nouveautés pour se tirer de la ; mais où en trou-
ver ? quels seront les auteurs qui voudront se hasarder
arec la troupe actuelle ? Lemonnier et Vizentini ont du
talent , mais ce n'est pas comme chanteurs qu'ils brillent.
Ils ne peuvent d'ailleurs jouer les pièces a eux seuls. Tout
cela n'est pas consolant. Attendons; nous verrons bien.
— L'Opéra se borne pour le moment aux répétitions du
ballet de la Somnambute: après la représentation de cette
pièce , on reprendra les éludes de Pygmalion, opéra en
un acte de M. Halevy. Viendront ensuite les répétitions
de MazzanitUo. C'est surtout sur celte production d'au-
teurs d'un talent reconnu que se portent les regards et que
se fondent les espérauces. Les bruits qui ont couru sur les
obstacles qui se seraient rencontrés à sa représentation
paraissent dénués de fondement.
— L'un des bons ouvrages de Morlacchi, TébaUto ed Iso-
tina, a été joué mardi 3i juillet , au Théâtre Italien. A
l'attrait de curiosité qu'inspirait un opéra inconnu d'un
des musiciens les plus distingués de l'Italie, se joignit
celui de voir M"' Fisaroni dans un rôle nouveau. Quoiqu'il
soit difficile de porter un jugement sur la première repré-
sentation d'un ouvrage nouveau au théâtre , il paraît cer-
tain que celui-ci n'obtiendra que peu de succès. Le défaut
de basses, l'absence de morceaux d'ensemble développés,
et une tendance vers un style qui n'est plus de mode, ont
causé l'ennui des spectateurs. Or, on sait que l'ennui est
un mal sans remède , le pire de tous les maux. Mous
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, '7
donnerons l'analyse de celle pièce et do l'effet de la repré-
sentation dans le prochain numéro de la Revue musicale.
— A l'occasion delà fête communale de la Villette, H. le
maire de cette commune vient de faire jouir ses habita os
et ceux de la capitale d'une sorte de divertisse ment d'un
genre neuf pour ce pays-ci, mais qui est fort en usage
dans les Pays-Bas et dans les déparlemens du nord de la
France. 11 s'agît d'un concours entre les corps de musique
militaire des régimens d'infanterie et de cavalerie actuel-
lement en garnison à Paris ou dans les environs. Ce con-
cours , qui avait été annoncé par les journaux et par des
afïiches, a eu lieu le 5i juillet, à sept heures du soir , sur
le bassin du canal de la Villette , à l'endroit dit la gare
circulaire. Une assemblée nombreuse, parmi laquelle on
remarquait beaucoup de femmes élégantes, d'artistes et
d'amateurs distingués, s'était réunie sur les bords du ca-
nal, et dans des embarcations qui traversaient le bassin
en tout sens. Deux grands bateaux étaient destinés à rece-
voir alternativement les dïfférens corps de musique. Le
jury, composé de MM. Vogt, Dauprat , Guillou, Panseron
et Félis, était réuni , sous la présidence de M. le maire ■
dans uu batetet qui voguait d'un bateau à l'autre. Ce spec-
tacle animé par les suns de la musique, une soirée sereine
et un paysage charmant, faisaient de cette féte une réunion
de sensations délicieuses.
Le concours était divisé en deux parties : l'une avait
pour objet une lutte entre les corps de musique de cava-
lerie, qu'on appelle communément musique de cuivre;
l'autre était relatif aux corps de musique d'infanterie.
Ayant procédé à l'appel des concurrens, le jury trouva
que les cuirassiers de la. garde, les hussards du même
corps, le train d'artillerie et la gendarmerie de Paris
s'étaient présentés pour le premier concours; le second de-
vait avoir lieu entre le 14* régiment d'infanterie légère, le
18", le aj* et le 3?* de ligue. Trois médailles devaient être
distribuées : la première, qui était d'or, de la valeur de
3oo francs , était destinée à celui des corps d'infanterie qui
obtiendrait le premier prix; une autre médaille d'or, d'une
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valeur de 120 francs, devait être donnée au meilleur corps
de musique de cavalerie; enfin, une médaille d'argent de-
vait cire donnée au corps de musique, soit d'infanterie,
soi! de cavalerie, qui se distinguerait le plus après ceux qui
auraient obtenu le premier pris.
L'ordre du concours ayant été réglé par le sort comme
il suit : Premier concours, 1° la musique du train d'artit-
ierie; a° celle de ta gendarmerie, de Paris ; 5° celle des
cuirassiers de lagarde; 4° celle des hussards. Deoxièmk
concoi'bs : 1" le i4" régiment d'infanterie légère; a" le
ai* régiment d'infanterie de ligne ; 3* le 3j* idem; 4° le
18' idem. L'exécution commença immédiatement. Voici
les remarques que nous avons faites sur les qualités et les
défauts des coneurrens.
La musique du train s'est fait distinguer sinon par un,
fini parfait, au moins par son ensemble et sa précision. Un
hautbois, placé au milieu des instrumens de cuivre , nui'
sait malheureusement à l'effet général, parce qu'il n'avait
pas un volume de son capable de lutter contre ces instru-
mens formidables. Le corps de musique de la gendarmerie
est si faible que noi-.s ne pouvons rien en dire. Quant à ce-
lui des cuirassiers, on y a remarqué des parties estima-
bles; mais elle élait mal accordée. Une petite flûte de cui-
vre était surtout beaucoup trop élevée. 11 n'y a que des
éloges à donner à la musique des hussards, surtout sous le
rapport du style et du fini. Le choix des pièces qu'elle a
exécutées présentait d'ailleurs de grandes difficultés. Il est
vraiment singulier d'entendre les morceaux les plus diffi-
ciles de Moïse joués par ces instrumens de cuivre autrefois
si lourds.
La musique du i4' régiment d'infanterie légère néglige
son exécution , et n'a eu que peu d'efTet; celle du 21e, de
ligue s'est montrée fort supérieure dans la marche , mai
elle a été beaucoup moins satisfaisante dans le morceau
d'harmonie. Ce morceau, qui était tiré des œuvres de
Hossini, est d'ailleurs mal adapté aux: instrumens à vent.
Le corps du 57' de ligue n'est pas bien proportionné; il n'y
.1 pas assez de clarinettes pour le nombre d'inslrumens de
enivre ol de basse; aussi n'a-l-it produit que pe'j d'effet.
La itiiisi([ue du i8" de ligne esl si supérieure aux an-
Ires , qu'elle n'a pas laissa un instant le jury dans l'indé-
cision ; aussi remarquable dans le pas redoublé que dans
l'harmonie, cette musique réunit à la fois le fini, le mérite
des proportions et l'énergie. Les insl rumens solo y sont
fort bons , et le choix des pièces qu'elle exécute est excel-
lent; ces pièces sont arrangées par le chef de ce corps. Des
applaudissemensuiianimeslui ont témoigné la satisfaction
du public , el son dernier morceau a été redemandé, quoi-
La séance étant terminée, les embarcations se sont di-
rigées vers la barrière de la Villeite , où un très beau feu
d'artifice a terminé cette charmante soirée. Le jury, réuni
ensuite chez SI. le maire , a procédé à son jugement par la
voie du scrutin. Le dépouillement des votes a donné le ré-
sultat suivant : i" le premier prix du concours des musi-
ques d'infanterie est décerné à l'unanimité an 1 8" de ligne;
s° une mention honorable est votée par acclamation pour
le ai* idem; 3° le premier prix du concours des musiques
de cavalerie est décerné aux hussards de la garde, à La ma-
jorité de quatre voix contre une ; 4° 'e deuxième prix est
adjugé à la musique du train d'artillerie, à l'unanimité.
Procès- verbal a été dressé des opérations du jury; M. le
maire en adressera des copies certifiées aux chefs des dif-
férens corps en leur faisant parvenir les médailles.
— Les concours annuels de l'Ecole royale de musique
sont commencés depuis quelques jours. Ces concours sont
ordinairement un moment de crise pour les élèves, et
même pour les professeurs; car le talent du professeur n'a
pas moins d'influence sur les succès de son élève que l'ap-
plication de celui-ci. C'est une lutte d'amour-propre des
deux parts; malheureusement l'émulation qu'elle devrait
inspirer ne se manifeste guère dans les diverses écoles qu'à
l'approche des contours, àlors chacun s'aperçoit qu'il a
perdu du temps, et qu'il aurait pu mieux faire. On veut se
hâter, mais il est souvent trop tard. Eh bien ! cette leçon
de l'expèj-icnce , répétée chaque année , ne corrige point :
on l'orme à l'instant même tics résolutions pour l'avenir,
qu'on oublie à la rentrée des classes. Il semble que l'année
scholaire ne doit jamais finir; on travaille avec négligence,
et l'on suit la même route que par le passé. Ces réflexions
ne paraissent pas toutefois s'uppliquer cette année à l'école
royale de musique, car les concours des trois premiers
jours ont été assez forts : ce sont ceux de Contrepoint et
Fugue, d'Harmonie et d\^ ccompagnement pratique, de-
Solfège, A'Orgue, de Harpe et de Vocalisation.
Le 29 juillet , les concurrens pour le contrepoint et pour
l'harmonie sont entrés en loge à sept heures du malin ; ils
ont rendu leur travail le même jour, et le jury s'csl assem-
blé le lendemain, à huis-clos, pour prononcer son jugement.
Le concours de contrepoint consistait en une fugue à
quatre parties et à trois sujets, sur un thème donné. Ce
genre de travail offre de grandes difficultés ; néanmoins
deux des concurrens ont rempli les conditions d'une ma-
nière satisfaisante. Le premier prix a été décerné à M. Fran-
castel, élève de M. Fétis, et le second 3 M. Sausay, élève
de M. Heicha.
Le concours d'harmonie et d'accompagnement se com-
posait de l'obligation d'écrire de l'harmonie à quatre par-
ties sur une basse donnée , qu'il fallait chiffrer, de mettre
une basse et une harmonie régulière sur un chant donné,
d'accompagner à première vue une basse chiffrée et un
morceau pris au hasard dans une partition choisie par le
jury. Ce concours était double, parce que les femmes
étaient aussi admises à concourir entre elles. Il était d'au-
tant plus juste de les y admettre que leur travail a été fort
satisfaisant , et en général plus fort que celui des hommes.
Le premier pris du concours des femmes a été partagé en-
tre M"" Hotteaut et Cberonnet; le second à M1" Croisilles
jeune, et l'accessit à M"* CLivel , toutes élèves de M. Ha-
levy. MM. Alkan . âgé de douze ans , et Le Carpentier, ont
partagé le premier prix du concours dus hommes ; le second
a été décerné à M. Darle. Tous sont élèves de M. Dourlen.
Lecoiicours pour le solfègo , qui a eu lieu le 5i , a offert
trente-quatre concurrens réunis. Celui des hommes s'csl
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montré moins brillant que celui des femmes; néanmoins
il y a eu lieu à décerner un premier prix^ qui a été partagé
entre MM. Chollet et Lecorbellier ; M. Codiuc a eu le se-
cond, M. Tarïnt jeune a obtenu le premier accessit, et
M. Dcldevez le second. Quant au concours des femmes, il
a été si bj iljjjts t qu'il a mis le jury dans un embarras dont
il n'a pu s"irer qu'en partageant le premier prix entre
MM"" Grandidier, Gangey, André, Clara Eugène et Dezème,
et, en usant du même moyen à l'égard du second prix.
Celui-ci a été partagé eutre MM"" Leiellier, Journot,
Sleinemetz , Barbé et Charlet. Le premier accessit a été
décerné à M11* Rodolphe; le second, à M"' Laurent.
La troisième Béance a eu lieu dans la petite salle de
l'école, le premier août. Le public y a été admis. Cette
séance avait pour objet les concours d'orgue, de harpe et
de vocalisation. Le premier a donné lieu de partager le pre-
mier pris entre SIM"'" Rousseau et Lctourneur, élèves de
M. Benoist. Nous ne ferons qu'une remarque à l'occasion
de ce concours, c'est qu'il serait temps d'en changer le
mode; il faudrait qu'on entreprît de faire cesser l'usage
barbare d'accompagner le plain-cbant comme on le fait à
Paris, et seulement dans les églises de Paris. Partout le
plain-cbant se placeà la main droite et s'accompagne avec
les jeux de fonds, ce qui est dons, agréable à. l'oreille et re-
ligieux à la fois. A Paris, on le met à la basse , on le joue
avec les pédales et les jeux d'anches les plus durs . et ou
1'ar.conipngne d'une harmonie plus ou moins incorrecte.
Il en résulte l'effet le plus désagréable qui puisse déchirer
une oreille délicate. C'est une barbarie digne du moyeu
âge : tout organiste de talent doit employer ses effets à la
réforme .
M. Larivière a obtenu le premier prix du concours de
harpe, et M. Tariot jeune, le second ; tous deux sont élèves
de M. Nadermau.
La vocalisation ne s'est pas montrée sous un aspect aussi
avantageux que le solfège. Cette partie importante de l'art
musical appelle tonte l'attention du directeur et des pro-
fesseurs qui sont chargés de l'enseigner. M"1 Tuclle a ob-
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tenu le premier pris , et M1" Miller le second. Le premier
accessit a été décerné à H1" Emilie Barri! , et le second à
M. Béuéditt.
Nous donnerons dans le numéro prochain de la Revue,
le résultai des concours sm'vans, el nous présenterons en-
suite nos réflexions sur leur ensemble.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
FiuticroBT-scK-iE-MeiN, lojuUtet. On a donné le i6sur
notre lliéalre la i" représentation du Siège de- Corinthe de
Russini, traduit en allemand. Notre ville avait encore pris
l'initiative en celte occasion , de sorte qu'il s'agissal d'un
ouvrage presque entièrement nouveau pour les Allemands
qui ne l'avaient pas entendu à Paris, et quelque grand
qu'on en suppose le nombre, il était toujours très borné
relativement à notre population d'amateur*; aussi la foule
a-t-clle été des plus grandes, et l'on entendait répéter
du toutes parts le dicton classique : Non licet omnibus
adiré Corinthum.
L'ouverture, sauf la marche grecque , a paru une des
productions les plus ordinaires do Rosstni, avec les beau-
tés et surtout avec les défauts qui caractérisent sa ma-
nière. L'introduction , un trio, l'air de Païuira , celui de
Néucles au 5' acte, et tous les finales ont fait grand plaisir ■
mais l'enthousiasme était réservé pour l'allocution d'Hie-
ros. Cet admirable récitatif, qu'on place déjà ici â côté de
ceux de Gluck, a produit un grand effet, eu dépit de la
mauvaise exécution de Marrder chargé du rôle d'Hiéros.
La méthode de ce chanteur, qui a d'ailleurs une bonne
voix , trahit l'inexpérience la plus complète. On a eu lien
d'être satisfait des autres chanteurs et de l'orcheslre. Tout
semble promettre à oet ouvrage un succès de vogue.
HiNiu. Le professeur Mûller a fait entendre , il y a
quelques jours, un concerto] exécuté sur un instrument
nouvellement inventé par lui, lequel au lieu des cordes de
a3
laiton ordinaires, est garni de larges bandes de fer. Elles
soin levées pur les touches et pressées pat- nu cylindre .
probablement de métal, mis en mouvement an moyen
d'une pédale. Ce frottement produit le son. On no petit
comparer cet instrument avec aucun de ceux actuelle-
ment en usage, parce qu'il produit différeus sons appar-
tenant à des inslrumens de diverses espèces ; mais il est
susceptible de grandes améliorations.
— Un habitant de Venise, nommé l'abbé Vincenzo
Zenitr, véritable patriote, a fait placer sur la maison qui
fut habitée par le fameux Benoit Marcello, l'inscription
suivante :
HAHC. PflOPE. SïJHTiSI. Evtebpes. Cvltoh. Exijiivs
Benedicvs.SIàbcello. P. V. Lvcem. PeiMiM. Consfexit
Il est lilchcnxque l'usage de recommander ainsi à la vé-
nération publiijue les lieux où vécurent les hommes qui
honorent leur patrie ne soit pas plus commun parmi nous.
ANNONCES.
Iîomakces , mises en musique par M™* du Chambgc : —
Tune saurais m'oublîer , paroles de M'" Delphine Gay.
— Comment pourrais-je t' oublier ! paroles de M . le comte
Jules de Besstguier. — Lu Briijuntine, ou te Départ,
paroles de M. Casimir Delà vigne.— La Fiancée du Marin,
paroles de M™ Desbordes - Valmore. — La jeune Châte-
laine, paroles de M" Desbordes- Val more. — L'Ange et te
Rameau, paroles de M™ De s bordes -Val more. — LaSépara-
tion, paroles de M™ Des bord es- Valmore. — Le Réveil,
paroles de M. L. Ilraull. — Lido, stances de M. Casimir
Delà vigne. — C'est Me, paroles de M" Desbordes-Val-
more : i fr. 5o c. — Sur (a Montagne. — Le Pécheur,
barcaroleàune on deux voix , paroles de M. le comte Jules
de Bességuicr : à a fr. Cinq romances, une valse et une
écossaise, composées pour le piano-forlé par M" du
Chambgc. Prix: 9 francs.
Paris , chez J. Pleyelet fils aimé ,' boulevard Montmartre.
Ces romances se distinguent par un chant élégant, et
par une expression dramatique qu'il est rare de rencontrer
dans ces sortes de pièces.
— On trouve chez Pacini, éditeur des opéras de Hossini,
boulevard des Italiens , n* n, les airs et duos de Teèatdo
ed Isotina, opéra de Morlacchi , ainsi que le duo de celle-
ci qu'on y a ajouté.
— Regalo Lyrico, coleccion de boleras, seguidellas,
tiranas y demas cancioncs Espaàolas. Por los mejores au-
tores de esta nacion. Precio : 4 duros.
Se hallera en el Almacen de musica de Pacini , editor de
todas los opéras de Rossini , Mozart , etc. , boulevard des
Italiens , n" 1 1.
Cette charmante collection d'airs espagnols est choisie
dans les œuvres des meilleurs auteurs; sou exécution typo-
graphique en fait en outre un des plus jolis recueils de ce
genre. Nous ne doutons pas de son succès.
i5
EXPOSITION DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
VIOLONS, ALTOS ET BASSES,
<Perf«fifltTt!(s jpar <9ft, ©Ç»6ouf
La viole , on plutôt les diverses espèces de violes , sont
les seuls instrument à cordes qu'on trouve dans !es orches-
tres jusque vers le milieu du seizième siècle. DuifTo-
prugear, célèbre luthier tyrolien, qui s'était fixé en France
sons Je règne de François I", parait n'avoir f.lit que des
violes. Le erwth des Gallois et des Écossais n'était qu'une
viole. On trouve, à la vérité, parmi nous, dès le quin-
zième siècle, le violon rustique qu'on appelait rebtC; mais
il n'était monté que de trois cordes, re, ta, mi, et sa
forme était si grossière qu'il ressemblait plus à un battoir
échancré par les quatre angles qu'au violon de nos jours.
Nachtigatt, qui s'est caché sous le nom A'Oltomcirwt Lus-
cinius , a donné la description et la forme des geigen
{ violons) de son temps , dans sa Mttsurgic, imprimée en
1 53C ; mais ces geigen ne sont montés que de trois cordes,
n'ont point d'échancrure aux éclisses, et ressemblent plus
à la mandoline qu'au violon par leur partie inférieure.
Cependant le violon avait sa forme arrêtée avant la fin
du seizième siècle. On ne peut douter que les Français
fussent auteurs des perfectionnemens qu'il avait reçus à
cette époque; car, dans l'indication des instrument) qui
étaient entrés dans la composition de l'orchestre iVOrfeo.
par Claude Montcvcrde , en 1607, on trouve ttuoi violini
piccoli atlafrancese (deux petits violons français). Ces
mots piccoli violini n'étaient employés que par compa-
raison avec la viola da brano. Mais la supériorité des
Français pour la construction de ces instritmens n'avait
pas tardé à leur être enlevée par les luthiers italiens, et
surtout par ceux de Crémone. Nicolas et André Amali
sont en première ligne parmi ceux qui arrachèrent Lt
au'
palme aux successeurs de Duiffoprugcar ; ils éfaient frères,
s'étaient associés, et fabriquaient déjà îles instrumenta
d'une qualité parfaite sous le règne de Charles IX ; car ce
prince leur fit commander ceus de sa chambre, qu'ils en-
richirent de peintures et d'armoiries d'un travail exquis.
Quelques-uns de ces instrument se rencontrent encore
dans les cabinets des curieux.
Antoine et Jérôme Amati, qui succédèrent à la réputa-
tion d'André, leur père , adoptèrent ses formes, et en per-
fectionnèrent les détails. Leurs violons, d'une qualité de
son douce et moelleuse , n'ont pu être surpassés sous la
rapport de ces qualités. Malheureusement leur patron est
trop petit pour que ce son si doux ait un volume considé -
rable ; ils ont cherché à compenser l'exiguïté du patron et
lo peu d'élévation deséetisscs par la hauteur et l'étendue
des voûtes. Les épaisseurs de la table sont considérables
qu'aux bouts dans toute l'étendue de la circonférence.
La chanterelle et la seconde des instrumens de ces ar-
tistes donnent un son brillant et argentin; la troisième
est moelleuse et veloutée, mais la quatrième est faible.
On attribue généralement ce défaut au manque de pro-
portion entre les épaisseurs et la capacité. Pour y obvier
un peu, les luthiers sont obligés d'élever un peu plus le
chevalet vers la quatrième que pour les instrumens de
Stradivarius. Jérôme, qui a eu deux patrons, dont l'un
est plus grand que celui des violons d'André et d'An-
loinc, Jérôme, dis-je, a quelquefois approché de la
perfection dans ce dernier. Nicolas Amati, lils de Jé-
rôme, qui vivait en if)8o , et qu'il ne faut pas confondre
avec Nicolas, frère d'André , a changé peu de chose aux
formes et aux proportions adoptées dans sa famille; les
éclisses de ses violons sont seulement plus élevées. Les troi-
sième et quatrième cordes sont excellentes; la chanterelle
sonne bien , mais la seconde est souvent nasale, principa-
lement an si et à Vut naturels. On croit qne l'abaissement
précipi*é-*lç l'épaisseur de la table vers les ûancs est la
. Les Amati avaient adopté des propor-
»7
lions pour leur» basses et leurs altos qui paraissent être
mieux combinées; aussi ces instrument sont-ils très re-
cherchés , principalement ceux d'André Amati.
Jacques Sieiner, né à Absom, petit village près d'Ius-
pruck, dans le Tyrol , fut élève d'Antoine Amati, et vécut
conséquemment vers Je milieu du dix-septième siècle. Il a
travaillé dans la manière de son maître, mais son modèle
est encore plus petit ; le son de la chanterelle de ses vio-
lons se rapproche de celui du hautbois , mais dans sa qua-
lité clic est vraiment admirable ; malheureusement la troi-
sième et ta quatrième ont un son nasard qui n'a rien
d'agréable. La netteté, la grâce et la hardiesse de ses ouïes
les font considérer comme des modèles.
La beauté des instrumens à' Antoine Stradivari, célè-
bre luthier crémonais, qui brilla de i?o5 à 1754» les fit
rechercher comme te qu'il y a de plus parfait en leur
genre. Il fut élève de Nicolas Amati, mais il le surpassa ;
ses voûtes sont moins élevées, la capacité de ses iostru-
men» est plus grande , et les épaisseurs de leur table , qui
ue présentent rien de heurté , semblent mieux calculées
que tout ce qu'on avait fait auparavant, et que tout ce
qu'on a tenté depuis. Les luthiers les plus habiles de no»
jours ont adopté Siradivari comme leur modèle, et cher-
chent autant qu'ils le peuvent à se rapprocher de ses
formes. Pierre-André Guarneri, élève de Jérôme Amati,
et Joseph Guarneri, élève de ce même Siradivari, ne
peuvent lutter aveo cet habile artiste, malgré tout leur
mérite. Joseph , qui parait surtout avoir voulu être origi-
nal, a fait des cliangemeus dans les formes et dansles pro-
portions qui ne paraissent pas heureux. Sou modèle est,
plus petit que celui de son maître; ses voûtes sont apla-
ties, et ses épaisseurs plus fortes; ie son de ses instrumens
a de l'éclat, mais il manque un peu de rondeur.
J'ai dit que le modèle de Siradivari est considéré comme
le plus parfait; de là les imitations qu'en ont fait les lu*
Ihiers italiens et français. Parmi ceux-ci, MM. Lupot et.
Thiboutse sont distingués ; ce dernier no s'est point borné
cependant à une imitation sorvile. Par un procédé qui lui
38
est particulier pour la pose des é clisses , il donne plue de
capacité à ses mstrumens, et augmente par là le volume
du son, dont les vibrations sont plus faciles; son procédé
réunit d'ailleurs il cet avantage celui de rendre les bords
moins s ai lia ns, et conséquemment de les exposer moins a
se casser ou à se décoller. C'est une chose connue que les
ïnstrumeiis à archet ont besoin uon-seulement de vieillir,
mais aussi d'être joués pour se dépouiller d'une certaine
verdeur de son , qu'ils ne perdent pas sans cela. A force do
recherches, M. Thibout est parvenu à découvrir la com-
position d'un liquide dont il sature les parois, intérieures de
ses violons , altos et basses , et au moyen de quoi il leur
donne la qualité qui est ordinairement le résultat du temps
et du travail. Par le moyen de la combinaison des épais-
seurs , qui sont beaucoup plus fortes que celles des violons
ordinaires, H. Thibout est parvenu à faire disparaître les
mauvaises notes qu'on rencontre dans les violons neufs, et
même souvent dans les vieux. Ils sont vernis à l'huile sic-
cative, en sorle qu'ils n'ont pas l'inconvénient de se dé-
pouiller avant d'être secs, comme la plupart des vernis
modernes, et de laisser dans le bois un corrosif qui nuit
beaucoup à la qualité du son de l'instrument.
M. Thibout avait déjà présenté ses instrumens à l'exa-
men de la classe des beaux -arts de l'Institut, en 1820, et
la section de musique avait fait un rapport dans lequel
elle félicitait l'arliste de ce que, sans altérer la forme exté-
rieure , il avait pu donner à ses violons une qualité de son
supérieure à tout ce qu'on avait fait depuis Slradivari et
Guarneri. L'académie avait approuvé ce rapport dans sa
séance du aa avril de la même année; mais depuis lors,
M. Thibout n'a cessé de chercher à perfectionner ses in-
novations, et les résultats qu'il a obtenus sont tels qu'on a
lieu de croire qu'il n'est pas possible de faire mieux dans
les formes admises. 11 vient de présenter de nouveau ses
violons, altos et basses à l'examen de l'académie. Dans la
séance du 4 de ce mois, il. Lafont a joué un concerto sur
le nouveau violon', et M. Baudiot une fantaisie sur la
jl} Vayci les Nouvelles du Pari».
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>9
basse. Quoique le lieu ordinaire (les séances de l'académie
dc soit point favorable à rémission des sons , néanmoins
ceux des instrument de M. Thibaut on) paru d'une égalité,
d'un éclat admirable. L'académie fera un rapport sur cette
séance, à laquelle ont assisté MSI. Kreutzer, Habeneck,
et beaucoup d'autres artistes distingués, qui ont témoigné
leur satisfaction sur ee qu'ils venaient d'entendre.
Le succès qu'obtient SI. Thibout n'est pas d'une mé-
diocre importance pour les artistes et les amateurs qui ne
peuvent se procurer les anciens instrumens de Crémone
qu'à grands frais, et qui sont menacés de voir quelque jour
ces mêmes instrumens périr de vétusté sous l'iniluence de
plusieurs causes qu'il est bon d'examiner.
Il serait difficile, pour ne pas dire impossible, de fixer
le rapport exact du diapason actuel avec celui de l'époque
où travaillaient les Àmati, Stradivari et les autres luthiers
delà môme école; mais tout démontre qu'il existe entre
eux une différence énorme. De là l'obligation dc changer
le manche de tous les violons anciens, comme on l'a fait,
et de rendre l'angle d'inclinaison dc la touche beaucoup
plus obtus. Or, ces mêmes violons ont été fabriqués sui-
vant le calcul des résistances qu'ils pouvaient opposer à
la tension des cordes. Selon Mcrsenne (Harmonie univ-
des instrum. à cordes), celle tension était dc «on temps
j'en i636) égale à celle qu'on aurait obtenue par des poids
faisant ensemble une masse de quarante-sept livres. Qua-
rante-sept livres élaient donc le poids qui devait reposer
sur la table des violons anciens, lorsqu'ils ont eu' construits.
Peu à peu l'élévation du diapason a augmenté la tension
et le poids. Ce poids total était en 1806 de soixante-quatre
livres; la chanterelle s'accordait par la tension d'un poids
de dix-neuf livres; laseconde, par un autre de dix-sept;
le troisième, par un dc quinze, et la quatrième par un de
treize, en tout soixante-quatre livres. Depuis lors la pro-
gression ascendante du diapason a continué, et la grosseur
des cordes a augmenté, en sorte que la tension et le poids
ee sont encore accrus. M. Charles a trouvé qu'ils égalent
quatre-vingts livres. La table des violons anciens, qui a
3o
été construite pour supporter un poids de quarante-sept
livres, est surchargée maintenant par une masse beaucoup
pli» forte. On ne peut douter qu'une pareille surcharge
n'augmente beaucoup la faligue des inslrumens, et ne
finisse par amener leur destruction. Les violons nouveaux
n'auront pas le même inconvénient , parce qu'il* ont été
construits pour ics conditions actuelles, et qu'ils ne sont
point sujets à éprouver les variations de tension que les
autres ont subies. Ilssûntdonc de nature à résister beau-
coup plus long-temps , et cette considération est assez im-
portante pour leur assurer un succès durable.
Dans l'état satisfaisant où on les trouve maintenant, ils
offrent d'ailleurs une chance d'amélioration qui peut faire
présumer qu'ils seront un jour supérieurs aux meilleurs
inslrumens des anciens luthiers; la voici. Le sapin dont
on fait les tables sonores des inslrumens à archet est rési-
neux comme tout autre. La résine ne cesse d'opposer nne
résistance aux vibrations des fibres qu'avec le temps, et
en se détachant insensiblement sous l'action de l'archet.
Plus la table se dépouille de cette résine , plus l'instrument
gagne en sonorité. On a la preuve que des violons et des
basses de Stradivari avaient conservé jusqu'à nos jours
la verdeur de son des inslrumens nouveaux, parce qu'ils
étaient restés dans un étatd'inertic entre les mains de pos-
sesseurs inhabiles. Le temps et le travail ajoutent dune
beaucoup à la qualité de* inslrumens bien faits; d'où l'on
peut conclure que ceux de Bl. Thibout seront un jour re-
cherchés de préférence à ceux de Crémone'.
Après avoir considéré les inslrumens à archet dans les
principes de construction admis par les luthiers et les ar-
tistes exécutans, je crois devoir parler de quelques essais
de fabrications singulières qu'on a tentés . et des recher-
ches qui ont été faites pour découvrir les bases de leur
théorie.
On sait que le plus petit changement dans le placement
dupetit morceau de bois qu'on appcHel'an&des inslrumens
(i) M. Thibout, lot hier ile'> l'Académie royale de musique, rue Ra-
nieau^n' 8, a Paris.
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à archet, dans la forme du chevalet , ou dans tonte autre
partie de leur organisât ion , amène pour résultat des diffé-
rences considérables dans la qualité des sons. La barre sur-
tout exerce une telle influence sur l'effet général de l'instru-
ment, qu'un peu plus d'épaisseur on d'amincissement, un
simple changement de place de quelques fractions de li-
gnes, peuvent faire un sabot du meilleur Stradivari , ou
donner de l'éclat et du moelleux à l'instrument le plus
vulgaire. L'élévation du diapason , et les changemens sur-
venus dans la manière de monter les violons et les basses ,
ont rompu l'équilibre , commeje l'ai dit. Il a fallu songer
à parer à cet inconvénient, et l'on n'a rien trouvé de
mieux que de rebarrer la table pour l'aider à supporter
l'accroissement de poids. Mais la barre intercepte les vibra-
tions longitudinales, et nuit à la pureté des sons et à leur
éclat, tout en servant à conserver l'instrument. Cette con-
sidération a conduit un amateur., nommé M. Baud, de
Versailles, à essayer, il y a plusieurs années , de construire
un violon sans barre qu'il a soumis à l'examen de l'Institut.
Il avait laissé au bois toute l'épaisseur qu'on lui Aie ordi-
nairement pour la remplacer par la barre , et avait donné
des proportions nouvelles à la forme de son patron. La
section de musique déclara dans sou rapport que H. Baud
avait en effet obtenu du corps de l'instrument une plus
grande vibration que celle qui peut être fournie par les
autres violons, mais que la beauté du timbre ne répondait
pas à ce nouvel avantage. Mais comme M. Baud n'est
point luthier; comme il n'avait employé que le bois le plus
ordinaire dans la construction de son violon, on ne sait
point encore ce que son procédé pourrait produire si un
homme habile entreprenait d'en faire usage, avec des ma-
tériaux convenables.
Manpertuis , qui , le premier, s'est occupé des lois phy-
siques de la forme des instrumens à archet , suppose qu'il
est néccssaire.que la caisse ait diverses épaisseurs, parce
que , selon lui , il faut que le bois soit composé de fibres
longues et de libres courtes, les unes favorisant l'émis-
sion des sons graves, les autres celle des sons aigus;
3a
d'oii il suivrait que les fibres des labiés sonores vibrent sé-
parément. Celle hypothèse , démentie par l'expérience , a
de l'analogie avec celle qui paraît avoir guidé M. Chanot,
officier du génie maritime, qui, en 18 ]-, soumit à l'examen
de l'Institut de nouveau* inslrumens d'une fgrme très
différente de celle ijni avait élé adoptée jusqu'alors. Cet
officier prétendait que Vante, en interceptant la continuité
des cordes ligneuses , pour en l'aire un certain nombre de
fibres courtes, qu'il regarde comme propres à favoriser les
sons aigus, partage l'instrument en deux parties dont
l'une est en rapport avec les sons graves, et l'autre, avec
les sons élevés. Les expériences de Chladni prouvent au
contraire que les vibrations des surfaces, de quelque na-
ture qu'elles soient, sont uniformes , et démontrent consé-
quemment que la supposition de M. Cliauot ne peut être
admise. En effet, si son hypothèse était fondée, Ie3 sons
graves seraient proportionnellement plus forts que les sons
aigus, quand on ôte l'ame; mais, comme personne ne
l'ignore, c'est le contraire qui a lieu. Quelquefois , dans ce
cas, les sons aigus sont presque aussi forts que quand l'ame
esta sa place, tandis que les graves sont constamment
très faibles. C'est donc a tort que M. Chanot a jugé né-
cessaire de changer la place de l'ame.
Mais si cet officier s'est trompé sur ce point, il paraît
avoir eu raison dans quelques-unes des niodilicalions qu'il
a introduites dans la forme générale des instrumens à ar-
chet, et dans quelques-uns de leurs détails. Ses instru-
irions ont quelque ressemblance avec la forme des gui-
tares, et diffèrent essentiellement des formes anciennes
par la suppression des échancrures de la table et des
éclisses. Celles-ci sont remplacées par une courbe adoucie
semblable à celles des guitares; les ouïes sont aussi dis-
posées autrement que dans les violons ou les basses ordi-
naires ; enfin, M. Chanot a supprimé Je cordier, qu'on
appelle improprement la queue, et a fixé les extrémités des
cordes sur la table même, à trois ou quatre ponces derrière
le chevalet. - ■
liieu qu'une fabrique d'instrumens selon les procédés de
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53
91. Chauot ait été établie à Parte, ils ont eu peu de succès;
des pré yen lie tis se koiiI élevées contre eus; et, par cela seul
qu'ils sont autre chose que ce dont on a l'habitude, on les
a rejetés. 11 aurait mieux valu examiner le degré de recti-
tude des principes qui ont présidé à leur construction , ad-
mettre ce qu'ils ont du bon , et discuter ce qui est défec-
tueux; mais la routine aveugle a tant de puissance, que
toute innovation déplaît, outre que l'intérêt personnel
trouve toujours sa place en pareille circonstance et fausse
l'opinion, yuoi qu'il eu soit, M. Chauot n'a pas moins eu
le mérite d'attirer les regards des savaus sur la théorie de
la construction des instrumens à archet; cette théorie
avait été négligée jusqu'à lui, mais les recherches faites
postérieurement par Félix Sa van, docteur en médecine,
ont jeté un grand jour sur cette matière intéressante.
Chladui avait découvert que toutes les fois qu'un corps
rettd lin-sou , les parties qui le composent tendaient tou-
jours à vibrer symétriquement et régulièrement; par exem-
ple, si l'on prend une plaque ronde do cuivre, ou de verre,
dont ira deux surfaces soient bien parallèles, qu'on la
recouvre d'une couche légère de sable fin, et qu'après
l'avoir saisie fortement avec le pouce et l'index d'une
main, ou avec une machine appropriée à cela, on la mette
en vibration au moyen d'un archet appliqué sur le bord ,
on verra le sable s'arranger et former une figure régulièrft
qui ressemblera à une étoile à quatre, à six points, etc.
On voit le même effet se produire sur la surface de l'eau
contenue dans nu verre ou dans uuo cloche d'harmonica,
qu'on frotte avec un archet, parce que la circonférence du
vase se partage en nœuds et en veutres de vibrations; en-
fin il n'est. personne qui n'ait remarqué que les cordes se
divisent régulièrement en plusieurs parties lorsqu'elles
sont soumises à l'action de l'archet, phénomène qu'on
rend sensible en appuyant légèrement te doigt sur l'un des
nœuds de vibration, ce qui produit les sons harmoniques.
De tout cela L'on conclut que la régularité et la symé-
trie sont si nécessaires à la production du son, que ce n'est
que dans les corps dont les molécules approchent de l'ho-
4
r.4
mogénéilé, et dont la fbrmo est symétrique, qu'il faut
chercher les sons les ]>lus beaux et les plus agréables. C'est
en parlant de ces données , que U. Félix Savart a cherché
les conditions les plus avantageuses pour construire de
bons instrumens. Pour y parvenir, il a fait un grand nom-
bre d'expériences au moyen d'une corde fendue sur un
appareil composé d'une règle de bois, d'une plaque ds
verre , de cuivre , ou de bois mince , posée sur un suppnrl
ru liége qui repose sur la règle, et d'un chevalet sur lequel
la corde est tendue. Elles l'ont conduit à remarquer, i°que
les inégalités dans les épaisseur» des plaques de bois nui-
sent à la régularité des figures produites par l'arrangement
du sable , lorsqu'elles sont mises co vibration par l'archet ;
a* que les plaques, pui'l'aileuiuiil égales dans leur épais-
seur, donnent les figures les plus régulières, d'où l'on peut
conclure le meilleur mode de vibration ; 3" que deux pla-
ques égales eu épaisseur, cl dressées do la même manière,
donnent des figures semblables, et conséqueminent des
vibrations uniformes si on les met en contact au moyen
d'une tige mince eu bois . telle que l'ame du violon , et si
l'on frotte seulement la plaque supérieure avec l'archet.
théorie , il montre clairement que plusieurs circonstances
contribuent à rendre la transmission par l'ame beaucoup
plus efïicaoe : aussi les luthiers et les artistes savent-ils
tous combien le choix de l'endroit, ou plutôt du point où
pose cette petite pièce, est une affaire délicate, cl combien
le plus léger changement dans sa position a d'influence
sur la qualité d'un violon. Personne avant M. Savart n'eu
avait déterminé ni indiqué le véritable emploi ; on n'avait
là-dessus que les làlonncu.ens de la routine pour guide.
Toujours conduit par l'analogie , M. Savart a pressenti
:s tables de la caisse d'un instrument..
L les tasseaux, les éclisses, l'ame , la barre
Tt-diiT même , cl i.isim'.m iiiiuu'ho vibrent
35
par communication , chacun selon sa constitution et sa
nature, c'est- à- dire comme îles corps solides on comme de
simples plaques. Il a vérifié le fait en répandant du sable
fin sur toutes celles de ces parties qui pouvaient manifester
leurs mouvemens par leur division spontanée, et de cette
manière ït a vu que les choses se passaient comme il l'a-
vait prévu. Alors il s'est proposé de chercher dans la théo-
rie de ce genre de vibration quelle coupe et quelle forme
de surface devaient Être les plus convenables pour donner
au violon , avec dés dimensions rapprochées de l'usage
ordinaire , les qualités les plus précieuses , savoir la pureté
des sons, leur égalité et l'ampleur de leur volume. Or, se-
lon sa rigoureuse théorie, la courbure ondulée de nos tables
de violons, de basses, etc., n'aurait été dictée que parle
caprice, et serait dénuée de toute raison. Selon M. Savart,
les tables planes et non rabotées dans lesquelles les fibres
sont restées intactes , sont les plus favorables à la produc-
tion des vibrations régulières , et conséqaentmeutà l'émis-
sion, à la pureté et à l'égalité des sons. M. Savarl ne s'est
pas borné aux inductions de la théorie ; il a opéré d'après
ses principes, et a construit la caisse de plusieurs violons
avec des tables planes. La seule modification qu'il s'est
permis de faire à leur constitution naturelle, c'est de leur
donner une légère dégradation d'épaisseur, à partir de
l'axe où l'ébranlement est excité par le contact du cheva-
let; et afin do leur conserver autour do cet axe une symé-
trie d'élasticité parfaite, il a fait sa table de deux pièces
qu'il tire d'une môme planche , non pas en la sciant, mais,
en la fendant et la dédoublant dans le sens de ses fibres
longitudinales. M. Savart est si convaincu que ces prin-
cipes sont les seuls qu'on puisse admettre, qu'il affirme
que si les Amati , Stradivari et Steiner ont réussi par une
méthode contraire, c'est au moyeu d'une habileté qui est
parvenue, à force d'essais et de pratique , à en éluder on
en déguiser les iuconvéniens. v . y-yil.
Le violon de M. Savart a été essayé eu 1819 devant la
section de musique de l'Institut, à laquelle s'étaient réunis
tltll. Biot, Charles de Prony et Haûy de l'Académie des
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56
sciences. M. Lefebvre, habile violoniste et ancien chef
d'orchestre de l'Opéra- Comique , l'a compare aveu un ex-
cellent violon de Guurneri, donl il se sert habituellement,
et les a joués Ions deux, en se eaehaut aux regards de la
commission , sans que celle-ci put jamais distinguer l'un
de l'autre; et cependant le violon de M. Savart avait été
construit grossièrement et sans aucune de ces recherches
de fini que les luthiers seuls peuvent donner.
Malheureusement, obli»é d'obéir ans lois physiques
qu'il avait prises pour guide, M. Savart est obligé de don-
nera ses violons une forme incommode et même presque
inadmissible dans l'usage; car ne voulant poiul rompre la
régularité des vibrations, il a du se pt iver des éeliancrnres
qnï serrent à livrer un passage libre à l'archet. Son vio-
lon , qui a la longueur du violon ordinaire , a la forme d'un
trapèze dont le plus petit des côtés parallèles est situé près
du manche. Il suit de 11 que l'artiste habitué aux violons
ordinaires éprouverait beaucoup de géni; à jouit celui do
M. Savart, quoique l'élévation de sou chevalet soit calcu-
lée de manière que le plan qui passe par le bord de la table
supérieure et la dernière corde de chaque côté de l'axe,
fût plusinclinéesurlc plan de cette table que ne l'est le plan
mené par deux cordes voisines, en sorte que l'archet trou-
vant une place suffisante puur passer isolément sur chaque
corde, en trouve une plus grande pour passer ,i,r la der-
nière. Quoi qu'il en soit, l'inconvénient de n'être point en
rapport avec la pratique ordinaire est très grave, et c'est
sans doute à lni qu'il faut attribuer le peu de succès que
ces belles recherches ont eues. Il n'en est pas moins vrai
qu'en cherchant à en l'aire une application raisonnée , on
arriverait à porter les inslrumcus à archet au plus haut
pointde perfection dont ils sont susceptibles.
Il faut lire le mémoire que M. Savart a publié, en 1819,
sur celle matière intéressante, ainsi que le rapport des
commissaires, pour se Taire une idée de tons les détails do
perleclion nom ont qu'on peut introduire dans la construc-
tion des iuslrumens à archet.
DigmzBd Oy Google
3-7
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN. ."j
première rtfrhtntatm &e SSeGaf&e eï> <SîsoEimi,
( THÉOBALD ET ISOLINE)
OPÉBl SEB.IEEX EN IEDI ACItS,
MUSIQUE DE 1IORLACCHJ.
Aîbbs huit jours d'intervalle, c'est encore de la première
représentation de Te.ùatdo edltoiina quej'Di à parler, car
une maladie aiguë de M" Garcia n'a pas permis d'en
donner une seconde. II a donc fallu en revenir encore à
Sémîramide, à l'éternelle Gazza, et aux autres nou-
veautés de même espèce. La Donna det Logo ne peut plus
même varier le spectacle, à cause de l'état de souffrance
de M1" Ferlotli. IJn malin génie semble planer stir ce mal-
heureux théâtre. Réduit à M11' Blasis pour toute ressource;
comme prima donna ; n'ayant point d'antre choix à faire
que les cris de Dsttfelll ou la nullité de Bordogni; enfin",
placés entre la belle vois sans ame de Zuchelli et le talent
sans voix de Pellegrini , nons n'avons que M™* Pisarôni
pour nous consoler de tant d'infortunes; encore no peut-
elle se. faire entendre que dans deux ouvrages usés qtii^
pour le moment, se réduisent à un. Je le demande aux
dileltanti les plus intrépides , se flattent-ils de supporter
long-temps un pareil régime? Cependant que peuvent-ils
espérer, à moins que Barbaja ne soit chargé' d'une entre-
prise que nos administrations ne peuventplus diriger dans
l'état des ressources disponibles.. Il n'y a plus rien à at-
tendre du répertoire actuel; je dis plus, il n'y a rien à at.
tendre du réperloire futur, à moins qu'un homme do génie
ne naisse pour donner une physionomie nouvelle à la rinn-
sique dramatique. Je sais qu'on attend M''" Son tag ; mais
cela sera insuffisant, et l'on ne fera rien de bien à moins
3*5
qu'on n'ait Ruhini et Lablache , on au moins Tamburiui.
Mais laissons l'objet de nos douleurs, et venons a Teùatdo.
Le sujet do cet ouvrage a beaucoup d'analogie avec ce-
lui de Roméo et Giulietta, a cette différence prèsqne le
dénouement est heureux dans la pièce nouvelle, Isotine,
fille d'Hernland, véritable tyran de mélodrame, est aimée
de Théobald , fils de Boëmond d'AItembourg, dont Her-
mand a fait périr la femme et la fille. Boëmond passe pour
mort , et depuis quinze ans on n'eu a plus entendu parler.
Son fils, sous le nom de Sïgesle , a, dans un combat,
sauvé la vie du père d'Isoline, qui s'est emparé du château
d'AItembourg; Bermand est près d'unir sa fille à Théo-
bald, quand lout à coup Boëmond reparaît, et l'ail jurer
à son fils de servir sa vengeance. 11 le place à la lête des
troupes qu'il a rassemblées pour attaquer le château d'AI-
tembourg, maisHermand est vainqueur ; seulement Théo-
bald lue Gérold, frère d'Isoline, au momeut ou celui-ci
allait ôler la vie à Boëmond. Boëmond , poursuivi par les
soldats d'Hermand , se sauve dans la chapollc du château ;
il y est bientôt suivi par son ennemi et par son fds , qui
l'empêche de poignarder Hermand. Théobald prend en-
suite la défense de son père , qu'on veut punir de son en-
treprise. Pénélré de reconnaissance pour le fils. Hermand
pardonne au père, et la pièce finit a la satisfaction gé-
nérale.
- Il y a peu d'imagination dans ce triste ouvrage : tout
cela est usé, froid et décousu. Une musique supérieure
aurait peut-être triomphé des vices du sujet; mais quoi-
que celle de Morlaccbi ait des qualités fort estimables, elle
n'est point assez forte pour faire une puissante diversion à
l'ennui de la pièce. Sa couleur générale, qui participe
d'une teinte de l'ancienne école et de quelques-unes des
innovations à la mode , manque d'unité et de nouveauté ;
on y trouve des chants d'une élégance charmante , mais
courts et continuellement interrompus par un déluge de
points d'orgue ou accolés à des phrases peu analogues. Il
semble toujours que l'auteur va se livrer a quelque grand
élan ; mais tout a coup il s'arrête sans molli', et refroidit le
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30
spectateur prêt ù s'échauffer. Ce défaut est commun à
Mayr et à Morlaochi; mais il me semble que le dernier
l'emporte sur l'auteur <le Mêdéctous le rapport de la sua-
vité des canlilènes.
Il y a peu de morceaux d'ensemble dans Tebaldo; les
airs et les duos y dominent. Parmi ceux-ci on trouve deux
cuvalinesde Paccrni qu'on y a ajoutées, ainsi qu'un duo
tic Celli qui ne méritait pourtant guère d'Être conservé.
Un duo du premier acte, l'air de M" Pisaroni , qu'on ap-
pelle improprement une cavatîne, et le finale du premier
acte sont des morceaux dignes d'éloges. On les aurait
mieux goûtés si l'exécution eut été plus satisfaisante. Don-
zelliabien chanté le canlatitU de la scène des tomheaux;
mais dans presque tout le reste il a poussé des cris que
n'aurait point désavoués notre .fameux Laintz. Profeli et
M"' Garcia sont restés constamment dans une médiocrité
désespérante ; M" Pisaroni seule a mérité qu'on l'applau-
dit. Ses belles inspirations se sont manifestées dans pres-
que toutes les scènes; elle a phrasé admirablement sa
cavatine, plusieurs passages du premier duo et du finale du
premier acte; mais sa malheureuse voixfacticeaquelque-
l'ois g3lé les plus belles choses par les sons les plus grotes-
ques. 11 y a quelque chose d'inexplicable dans cette voix
qu'on retrouve tantôt dansle médium, tantôt dans le haut,
et qui est suivie de beaux sons naturels sur les mêmes cor-
des. Est-ce l'effet de quelques syllabes défavorables à la
voix de M™ Pisaroni, ou celui d'un système? Je l'ignore;
mais il faut convenir que de pareils sons donnés volontai-
rement seraient d'un goût bien bizarre.
La représentation avait attiré peu de monde. Le parterre
ne s'est rempli qu'après le lever du- rideau-, et les loges
n'ont présenté pendant toute lu soirée qu'un demi-audi-
toire. Le public a paru incertain du jugement qu'il devait
porter; pas un chul, mais des applaudisseniens fort rares.
Duusl'entr'acte, ou s'abordait dans les corridors et dans
le foyer en parlant d'autre chose que de la pièce. On aurait
dit qu'il était défendu de donner son avis. La réputation
méritée de Merlacchi arrêtait tes critiques; maison ne
n'était p oint amusé , et l'on n'osait l'avouer. Il était évi-
'deut qu'on attendait l'effet do la seconde représentation
1>our se prononcer; mais quand viendra-t-elle ? Cela est
main tenant fort inccrlain.
THÉÂTRE DE L'OPÉRA- COMIQUE.
Le régime affreux dont on sortait à l'époque où l'opéra
des Deux Journées fut joué pour la première fois, la res-
semblance des scènes dont ou avait été témoin avec le sujet
de l'ouvrage , et les souvenirs que révélait dans. Haute des
spectateurs le laljleau des proscriptions de Mazarin, furent
les causes principales du succès de cet ouvrage. La belle
musique de'M. Cherubini a perpétué ce succès, et pendant
vingt ans c'est elle qui aatliré les amateurs. Cette musique,
qui brille surtout par les morceaux d'ensemble et par les
chœurs, était exécutée supérieurement au théâtre Fcydeau
dans la nouveauté. L'excellent orchestre dirigé par La
lloussaic, des chœurs qui avaient alors plus de réputation
que ceux de^Opéra, et le talent admirable de H™* Scio,
donnaient au chef-d'œuvre de H. Cherubini un effet dont
on ne peut plus se faire d'idée. Jub'et était d'ailleurs excel-
lent dans le rôle du porteur d'eau, elles autres rôles
étaient remplis convenablement par Gaveauï, Jousserand
et Rosetle Gavaudan. Cent cinquante représentations suf-
firent à peine à l'empressement du publie, et répondirent
victorieusement à ceux qui prétendaient que M, Clierubini
ne pouvait obtenir de succès au théâtre. Il ne lui avait
fiillu qu'une pièce mieux faite ou du moins plus intéres-
sante que celles qu'il avait mises eu musique jusque là
pour obtenir ce succès et pour1 y contribuer puissamment.
: A la réunion des deux théâtres, en 1801 , l'ouvrage .fut
repris avec une nouvelle faveur : quelques changemens
avaient été faits dans la distribution. Gavaudau , jeune
alors, s'était chargé du rôle d'Antonio, et lui avait donné
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plus d'effet que ne le faisait Jousscrand. Lee autres rôle»
étaient remplis par les acteurs de la première mise eu scène.
L'espèce de lulte qui s'était établie entre les ouvrages des
deux théâtres réuuiseu un seul, faisait quelcsactcursappoi-
toienl le plus grand soin à l'exécution , et cette émulation
tournait au profit des ailleurs; l'opéra des Deux Jour nies
y gagna aussi. Tant que M"" Scio vécut, il fut bien exé-
cuté ; mais depuis sa mort les choses ont bien change. On
cherche en vain dans son rôle l'expression admirable
iju'ellc savait y mettre ; Ions les autres rôles ont été dou-
blés, triplés, abîmés; les chœurs n'ont plus rieu de com-
mun avec ceux de 1800; l'orchestre est aussi fort différent.
Enfin, l'un des plus beaux ouvrages de notre scène reçoit
tous les genres d'onlrages à la l'ois.- Le talent réel de Vizen-
tini ne convient point au rôle du porteur d'eau; Julict y
a laissé d'ineffaçables souvenirs. Le mou nier n'est pus dé-
placé dans le rôle du comte Armand; mais tout le reste
approche du grotesque. Si Al. le .directeur parvient à l'aire
de l'argent avec celte caricalure, son habileté sera dé-
montrée d'une manière incontestable. , „
— Il y a de la hardiesse à montrer au public la Dama
Blanche eu l'absence de Ponchard et de mesdames liigant
et Boulanger; maïs c'est par la hardiesse qu'on réussit dans
ce monde. Un jeune homme, nommé Thian, qui a italia-
nisé son nom en s'appeiaiil monsieur Thianni, s'est juté
bravement à travers la scène, dans le rôle de licorges, et y
amériléquelquesapplaudissemens. Ce jeune homme, qui
a été élève de Ponchard à l'École royale , a été renvoyé de
celte école pour quelques fredaines. Il est entré ensuite
dans les chœurs de l'Opéru-Comique, et s'est quelquefois
essayé dans quelques bouts de coryphées. Il demanda à
M. de Fixérécourt une augmentation de cinq ou six cents
francs, ne put l'obtenir, et s'engagea au théâtre de Ver-
sailles, où il s'est élevé jusqu'au grade d'ElUviou. Sa voix
est d'un volume peu cousidérable ; il saccade quelquefois
son chaut, et sou intonation est souvent trop haute; mais il
a de la; facilité, beaucoup d'assurance, .et copie Ponchard
assez exactement, ou du moins en fait La charge. Cesera un.e
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4a
bonne acquis i lion pour le théâtre , parce qu'il est jeune ,
et parce qu'il peut acquérir du talent, si on ne le gâte pas.
M" Casimir nvaît prêté sa taille rondelette nu rôle ingénu
île M" Rigaut ; quelques éclats de rire ont accueilli son en-
trée en scène; mais elle ne s'est pas mal tirée des difficulté»
du chaut, et a gagné la fin de la pièce sans autre accident
que les sifflets qui, ce soir-là , ont poursuivi les acteurs.
Quant àlM"' Otz, si l'on en juge parscs intonations fausses
ou hasardées, elle devait avoir bien peur. It est impossi-
ble de chanter plus mal et plus faux. Il est vraisemblable
que ce rôle lui l'era beaucoup de tort, si elle continue à le
jouer. Le formidable appui d'un parterre et de galeries
composés de ces hommes bienveillans qui protègent les
lalcns naïssans, moyennant le plus mince salaire ; le petit
nombre de ceux qui avaient acheté à la porte le droit de
jouer d'un petit instrument, dont le nom seul fait frémirles
auteurs et les acteurs malencontreux ; la précaution qu'on
avait prise de faire remettre à domicile des billets de loges,
afin qu'elles ne fussent pas vides, rien de tout cela n'a pu
sauver M"' Otz d'un concert dont son oreille a dû être
blessée. Quelques abonnés du balcon et de la première ga-
lerie, qui s'ennuient de s'ennuyer pour cent écus, ont
prolesté peudant toute la soirée contre l'ordre de choses
actuel. Il se peut qu'on n'écoute pas leurs réclamations,
mais les pauvres acteurs qui sont en scène sont bien forcés
de les entendre.
CONCOURS
DE L'ÉCOLE ROYALE DE MUSIQUE.
Les concours de l'École royale de musique continuent
et tirent à leur fin. Dans la séance du a de ce mois, ou a
entendu les instrument à veut et le chant. Un seul concur-
rent s'est présenté pour le pris de clarinette; il a obtenu
le second prix l'année dernière; mais ses progrès n'ont
point été jugés assez grands pour qu'on lui accordât le
Digitizod by Google
45
premier; le Jury a décidé qu'il n'y avait point lieu à le
donner.
■ Deux premiers et deux seconds cors se sont fait entendre ;
on n'.i ptjinl trouvé que leur jeu fut assez sûr pour qu'il fut
décerné un premier prix; le second a été partagé entre
MM. Nourry et Choulet, tous deux élèves de M. Dauprat.
Nous avouons qu'après la sévérilé qu'on avaii montrée
à l'égard des cornistes , nous n'avons pas élé peu surpris
de voir M. Caillet obtenir le prix du hautbois. Un son de
cornemuse, de nombreux accidens nommés vulgairement
des couacs, et l'absence de toute élégance dans le slyle, no
nous ont pas paru des litres suffisans pour cet honneur.
Le concours de basson avait été très brillant l'année der-
nière; il a été satisfaisant cette fois. Le premier prix a élé
décerné à M. Dyvoir, élève de M. Gebauer, cl le second a
été obtenu par M. M orvilliers , élève du même professeur.
Le premier prix de flûte a été donné à M. Scarzella ,
élève de M. Guillou; le seconda été partagé par MM. Olivier
et Fabre , élèves du même professeur.
■ Pour la troisième ou quatrième fois, depuis plusieurs
années , le chant a présenté le tableau déplorable de notre
pauvreté. Rien parmi les hommes et presque rien parmi les
femmes, voilà nos ressources pour les théâtres. Le jury a
décidé qu'il n'y avait pas lieu à décerner de premier prix ,
et n'a fait qu'un acte d'indulgence en partageant le second
entre M11"' Verteuil et Fin eaux. Une voix mal posée, un
phrasé défectueux, et une prononciation à peu près nulle,
voilà ce que le public a trouvé dans la première, tant à ce
concours qu'à ses débuts au théâtre de l'Onéra-Comique.
La seconde pourrait en travaillant acquérir peut-être du
talent ; maïs il y a bien des choses à faire pour cela. Sous
reviendrons sur ce sujet.
Le concours de piano, qui a eu lieu le 6 de ce mois, a
présenté vingt-deux enneurrens. Il nous semble qu'il y a
un vice essentiel dans cette facilité d'admettre au concours
des élèves qui auraient besoin de travailler encore long-
temps, et qui ne présentent que des médiocrités plus ou
moins prononcées. Il en résulte que le jur y éprouve beau-
coup d'embarras pour juger dans un si grand nombre de
concurreus.qui sont presque tous jetés dans le infime moule,
et que pour se débarrasser de l'embarras du choix, il par-
tage le prix entre un si grand nombre qu'il devient illu-
soire. Celte fuis le premier prix pour le» femmes a été
partagé entre M"" Baime, Bordes, et Vallet Saint-Fal,
élevés du M. Adam , et le second entre M"" l'alker, Heii-
man, Sarranlon, Carbeault et Darroux. Parmi les hum-
mes, un a remarqué un petit prodige, M. Wagner, enfant
étonnant qui a partagé le premier prixavoc M. Systerman.
Tous deux sont ('levés de H. Simmerman. MM. Piecini ,
Hosselen , Alerme, Claveau et Codiiine ont obtenu le se-
cond prix conjointement.
Le concours de violon , qui a eu lieu le ; , s'est d'abord
annoncé d'une manière assez faible"; mais JIM. Sauzai,
Mi Haut et Arlot ont ensuite relevé l'honneur de l'école.
M. Sauzai surtout a montré dans son jeu l'école de
M. liaîllot dans toute sa beauté; il a obtenu le premier
prix. M. Millaut, ayant en le siicond l'année dernière, et
n'ayant point été jugé digne du premier, n'a pu rien ob-
tenir celle année. Le second prix a été partagé entra
MM. Ailol, Clément et Dugelay, élèves de M. Kreutzer
Les concours de violoncelle , de déclamation lyrique et
de déclamation spéciale termineront l'année scolaire.
Nous en rendrons compte.
— La séance particulière de l'Académie des beaux-arts,
du 4 de ce mois, a élé fort intéressante à l'égard de la
musique. L'examen des inslrumens à arcliet de M. Tbi-
bout, dont nous rendons compte dans ce numéro, était à
l'ordre du jour, ainsi qu'un piano mécanique du plus
grand intérêt. Le célèbre violoniste, M. Lafont, a exécuté
un concerto sur un des nouveaux violons avec accompa-
gnement d'un quatuor, et a excilé le plus vif plaisir par
la pureté de ses sous et l'élégance de sa manière de chau-
ler sur l'instrument. M. Baudiot a fait aussi entendre la
basse dans une fantaisie dillicile , et de nature à faire ap-
précier l'égalité de l'inslrumenl sur ses différentes cordes.
45
De justes applaudissemens ont été donnés à ces deux vir-
tuoses, non-seulement par les membres île l'Académie,
maisanssi par plusieurs artistes que l'attrait do celle séance
avait attirés.
le piano qu'il s'agissait d'examiner est destiné à écrire
spontanément la musique qu'un pianiste, un composi-
teur , un improvisateur enfin exécute sur son clavier. De
nombreuses épreuves avaient été faites en divers pays et à
diverses époques pour arriver à ce résultat, mais toujours
infructueusement. L'essai fait dans la séance dont il est
ici question a complètement réussi. Kous rendrons compte
eu détail de celte singulière et importante découverte.
CORRESPONDANCE.
A Monsieur te rédacteur de ta Revue musicale.
Monsieur,
Vous avez annoncé que l'un des objets do la Rtvuemu-
ttcate, que vous publiez, serait de répondre aux questions
qui pourraient vous être adressées sur les différens points
de la musique ; je prends donc là liberté de vous prier de
vouloir bien résoudre une difficulté sur laquelle je n'ai rien
trouvé de satisCaisantjusqu'ici.
Vous savez qu'on désignait autrefois en France les
tons par C solut, Gré sol.Dtaré, A mita, Esi mi, etc.
maintenant on dit simplement le ton d'ut majeur eu mi-
neur, le ton de sot, de s» bémol, m» bémol, ctainsî du
Vous savez aussi que les: Italiens disent C sot fa ut,
Gsotre ut, D ta sol re , A la mire, etc., et cela se
conçoit, parce que ces nom» indiquent celui de la to-
nique, celui de la dominante, eteeluide la sous-domi-
nante , qui sont les cordes principales de chaque ton ; mais
je n'ai jamais pu savoir pourquoi , lorsqu'il s'agit des tons
bémols, comme mi *,<**, ™fc,etc'., ce- même» Italien»
. 46
.lisent E4afat A la fa, D la fa , G la fa , etc. Cela doit
être fondu sur quelque raison : c'est celte raison que je
désire savoir, et que j'espère que vous voudrez bien l'aire
connaître dans un de vos prochains numéros.
Agréez, etc.
B""*,
Professeur de musique.
Je me félicite de pouvoir éclaîrcir les doutes du profes-
seur anonyme; maiscomme il s'agit d'une des singularités
de l'histoire de la musique, je ne puis faire que ma réponse
ne soit longue. J'abrégerai autant que je le pourrai.
Lorsque fini d'Arczzo imagina , dans le onzième siècle ,
de tirer de l' hymne de Saint-Jean : Ut qucant taxis, Re-
sonare fibris, clc, les noms des notes de la gamme, il n'eut
besoin que de six syllabes , parce que sa gamme n'était que
de six sons, c'est-à-dire un hexacorde. Ces syllabes étaient
ut, ré, mi, fa, sot, ta. Le si, comme on voit, n'existait
pas. Hlais comme il arrivait que le chant dépassait souvent
l't tendue de l'hcxacorde, celui qui solfiait était oblige1 de
changer le nom'des notes; et de donner, par exempte,
celui d'ut à sol, celui de ré à ta, ainsi de suite , ayant,
toujours soin d'appeler mi et /«.les deux notes entre le*-i
quelles il n'y a qu'un demi-ton, afin de remplacer ce demi-,
ton qui, dans notre gamme moderne, se trouve entre si
et ut, ou plus généralement entre la note sensible et la.
tonique. Ce changement de notess'nppelait muance.
Une pareille. méthode de solmisalïon était incommode ,
même dans le temps où les tons étaient bien moins mul-
tipliés qu'ils ne le sont aujourd'hui ; aussi dès le seizième
siècle, plusieurs professeurs ou théoriciens sentirent la
nécessité d'ajouter aux six noies de Gui la septième,
dont l'absence causait tout le mal. Les Français attri-.
buent généralement cette invention à un musicien appelé
ternaire. 11 paraît, en effet, qu'il fut le premier, à lui
donner le nom de si, mais long-temps avant lui un Fla-
mand, nommé Anselme, Henri vau de Put te, Carnrauel
de Lobkowiiz, et plusieurs autres eu avaient proposé
47
l'usage , en lui donnant des noms qui n'avaient point été
adoptés. Quoi qu'il en soit, la méthode fut abandonnée
par tous les peuples de l'Europe, â l'exception des Italiens. ,
qui, par un entêtement inexplicable, se sont obstinés
à conserver celte méthode gothique, dont les incon'.
vériiens se sont augmentés à mesure que les tons se sont
charnus du dièses, de bémols et d'accidens de tousgenres,
qui étaient inconnus au temps de Gui., , ^ , -,. ■■,•.„ >;ril;.
Dans leur solmisatiou , si naturel , ou plutôt toute note
sensible d'un ton par bécare ou par dièse s'appelle B mi,
et si b , ou tout quatrième degré d'un Ion par bernoise
nomme B fa. Cela est fondé sur ce que B mi est toujours
la note inférieure du demi-ton , et 8 fais note supérieure.
Lorsque la leçon qu'il faut solfier est chargée de modula-,
lions , la difficulté de reconnaître à l'instant le nom qu'on
doit donnerà.la note est quelquefois si grande, que les
maîtres eux-mêmes sont dans l'incertitude à cet égard. En
voici une preuve : un élève du conservatoire de Saint-Ono-
frio , à Naples , demandait un jour à Durante, le plus sa-
vant musicien de l'Italie, comment il devait appeler une
note équivoque; ne sachant lui-même comment résoudre
la difficulté , ce maître fut obligé de répondre à son élève :
Jppelie- la comme luvoudras, pourvu que tu la chantes
juste. Mais revenons à la question.
Les tons par bécarre ou par dièse s'appellent C sol fa ut,
G sol ré ut, D ta sot ré, A la mi ré, etc. , parce que,
comme le remarque fort justement l'auteur delà lettre, il
est bon de faire connaître les noms de la tonique, de la
dominante et de la sous-dominante; mais les dénomina-
tions des tons par bémol E ta fa, A ta fa, D la fa, G la
fa, sont fondées sur les raisons suivantes : 1° le dernier
bémol de ces Ions étant un quatrième degré est toujours
fa, puisque c'est la note supérieure du demi-ton ; or, con-
naissant la Ionique par la lettre, on trouve a l'instant
quelle est la note bémolisée qui devient fa , et c'est pour
cela qu'on appelle l'attention sur celte noie en disant fa
pour chaque ton. Ainsi fa du ton de mi b est iah;
fa du ton do la b est ré. b; fa du ton de ré b est solb;
DigitizGd t>y Google
4»
enfin, fa ia ton de sot ti est ut i>. A l'égard du nom de
ta qui précède celui de fit daim la désignation des
Ions £ /H, A ta fa, D ta fa, je pense que c'est pour
indiquer que dans Ions ces tons ta est toujours ou la Ioni-
que, on le quatrième degré, on la dominante. Ainsi . dans
E ta fa, ta est la sons-dominante ; dans A ia fa, c'esl la
Ionique; dans Dtafa, c'est !a dominante. .l'avoue cepen-
dant que dans G ta. fa , il me parait inexplicable. Je pré-^
sume qu'il ne s'y est glissé que par un usage peu réfléchi ,
011 par une apparence d'analogie mal raîsonnée. Il est hait
de remarquer , au reste , que le Ion de sol h est le dernier
de tûuslcs tons bémols italiens, et qu'ils n'en ont point qui
correspondent à noire ut h; chez eus il estremplacé n;irB
miaiesis.
Voilà , ce me semble , la seule explication qu'on puisse
donner des dénominations italiennes des tous.
FÉTIS.
SUR UN MÉMOIRE QUI A POUR TITRE:
EXPOSÉ DE QUELQUES PB1ÏCIPES NOUVEAUX SUE l/ACOUSTIQUE ET 14
laÊOBIB DES VIBBATIONS, ET LE VU APPLICATION A PLTSIBCBS
PHÉNOMBMEB DE LA PHYSIQUE ,
PAR LE BARON BLEIH,
OTF1CIIB cist "IL DD CÉKIr '.
Cisq ou six mémoires ont été présentés et lus à l'Acadé-
mie des siences par l'auteur de celui-ci, dans les années
i8a5 , i8a4 et i8a5. Ces mémoires contenaient le dévelop-
pement d'une théorie nouvelle de l'harmonie; l'académie
nomma commissaires , pour leur. examen , MM. de Prony,
de Lacépède et Duloiig. M. Fresnel leur fut ensuite adjoint,
ainsi que MM. Chérubini, Lesueur et Baillot. Mais lamorf
de M. Lacépède , jointe à plusieurs circonstances , ont re-
tardé jusqu'ici le rapport écrit que M. Blcin espérait , e,t
ont déterminé ce savanlà publier, dans le Mémoire que je
me propose d'examiner ici , une analyse succ incte de ses
travaux. , ■
Dès 171.4 , le célèbre violoniste Tartini avait remarqué
que lorsqu'on fait résonner à la fois deux cordes ou deux
flûtes assez rapprochées, et produisant deux sons différeu»,
un troisième sou grave et faible d'intensité so fait entendre
en même temps. Ce phénomène devint la base d'un système
que ce musicien médita long-temps, et qu'il ne publia qu'en
i;54, à Padoue, dans un volume in-4° qui a pour titre: Trat-
tato di Musica secondo ia vera scicma deW Armonia.
Mais, dans rintervalle,Romieu, membre delà société royale
dessiencesde Montpellier, avait (en ]?45) à l'Académie,
sur cette découverte , un mémoire intitulé : NouvetU dé-
couverte des sons Harmoniques graves, dont Ut réson-
nance est très sensible dans {es accords des instrumens
à vent. Ce mémoire fut inséré dans le compte rendu de
(t) Parii, 1817, in-i" de 41 pages avec une planche. Se distribue chrr.
l'auleur, rue de[ Grands Augustin! , n" 19.
l'assemblée publique de la société royalu des sciences , le
16 décembre ij5i.
Serre, de Genève, qui était bon juge dans des questions
de cette nature, et qui avait eu occasion de connaître les
expériences de Tarlini avant qu'elles fussent publiées, eu
donna une analyse eu ijSS, dans son livre qui a pour tilre:
Essais sur tes principes de {'harmonie. Les principes
qu'il examine dans cet ouvrage sont celui de {a réson-
nance multiple, sur lequel est fondé le système de Ra-
meau , et celui du troisième son, d'où dépend celui de
Tartini. Il accumula les objections contre ce dernier, dnns
le deuxième chapitre de son livre, et le combattit par des
raisons solides que Tarlini essaya de détruire dans" sa Ri-
posta di Guiseppe Tarlini alla critica detdi tuiTrattato
diSIusica,diM.Serre,diGinevra, Venise, 1767, in-8*.
Hais, malgré l'étalage de chiffres, de calculs dont Tartini
avait essayé d'étayer son système, il n'était point assez géo-
mètre pour combattre sonadversaireavecavuntageiScheibe
assure même, dans son Traité de composition (Velier die
musiltuiische composition, Leipsick, 1773, in-4'), qu'il
n'entendait même pas l'arilhmélique élémentaire. II se
trouvait, à cet égard, dans le même cas que Rameau , qui
avait élé obligé d'avoir recours au père Caste! poqr ses cal-
culs; Tartini f ut contraint de se servir delà plume du père
Colombo, assez bon mathématicien, mais ignorant en musi-
que. Rousseau , qui a voulu donner une analyse de la théorie
de Tarlini, à Varl\c\esy stime de son Dictionnaire de mu-
sique, n'entendait guère 'mieux la question que ce grand
musicien ; aussi se trouve-l-il souvent en défaut dans son
exposé. Mercadier de Bêles ta a donné une bonne réfutation
algébrique dece système, dans te discours préliminaire de
son Nouveau Système de musique ( Paris, 1770, in-8*);
mais Lagrange est celui qui a donné les meilleures remar-
ques »ur ce troisième son, dansées Mémoires de V Aca-
démie de Turin, tom. I, p. 64. On peut aussi consulter
l'ouvrage de Matthieu Young, intitulé : Enquiry into tfie
principal phanomena of Sound» and musical slrings,
part. 11', sect. 6 (Of grave Uarmonîcat tones).
Du moment où l'on a commencé à se faire des notion*
justes de la théorie de l'harmonie , on a abandonné l'écha-
iaudage des calculs puérils entassés par Hameau et-Tor-
tinl, pour chercher les bases de cette théorie dans des
considérations d'affinité ou d'exclusion des sons et des
intervalles entro eux , et l'on en a tiré des conclusions do
convenance ou d'inconvenance dans leurs site-cessions, qui
jusqu'ici ne paraissent pas pouvoir se déduire de la ré-
sonnanec isolée d'un corps sonore, de quelque maniera
qu'on envisage les phénomènes auxquels clic donne nais-
sance. Néanmoins , voici qu'un savant entreprend de
faire un nouvel examen de ces phénomènes, et muni
des connaissances nécessaires, veut construire l'édifice
de la théorie de l'harmonie, non sur une seule donnée,
comme l'ont fait ïartiiii et Hameau , mais sur l'en-
semble de ces données, qu'il analyse avec bien plus
d'exactitude que lie l'ont l'ait ces auteurs , et surtout
sur des faits qui n'avaient point été observés jusqu'ici,
savoir l'existence du mode mineur dans le cylindre isolé,
et celle du triton et de la sixte majeure dans le plateau
carré. Comme il s'agit d'une théorie nouvelle qui csl sou-
mise à l'Académie des sciences , il eût été plus prudent
jieut-étre d'attendre la décision de ce corps savant, avant
que de se livrer à la discussion de ses principes, si M. le
baron l)leiu,eu publiant son résumé, n'avait manifesté
l'intention de prendre le puldie pour juge , et si , en l'a-
dressant au bureau de la Revue musicale,, il n'avait. in-
diqué le désir que cet écrit périodique en rendit compte.
Frappé de l'inexactitude îles détails donnés par Tartiuî
sur le phénomène du troisième sou, ou de la résul-
tante de deux sons donnés, M. le baron Blein a répété
les expériences, et en a complété la série, en les appliquant
à Ions les intervalles possibles , diasonaiu ou eonsonnaus,
entre l'unisson etl'oclave, au moyen de deux cordes, dont
l'une étant constamment montée à un Ion tel que Vut i ,
faisant a56 vibrations par seconde , l'autre est élevée suc-
cessivement aux divers sons ou intervalles chromatique*
et enharmoniques de la gamme. Après avoir donné la la-
DiginzM By Google
5a
lile des 'résultantes, exprimées en nombres de vibrations,
l'auteur du mémoire avoue que l'oreille a peine & saisir
les intervalles de seconde mineure et de seconde majeure;
maïs il affirme qu'elle distingue facilement toutes les au-
tres eapratiquant les doubles cordes sur le violon. Selon
lui , on découvrira mûme qu'il existe une seconde résul-
tante plus ou moins sensible, principalement dans le triton
et la seconde majeure, et il arrive à ce résultat , qui serait
bien remarquable, s'il était prouvé par des expérienecsin-
cou testa b les et sensibles à tout organe exercé.
Lorsqu'on fait le triton exact j ^ et j i, , on
entend les deux résultantes j'g^et ^ qui constituent,
avec les deux sons générateurs, l'accurddissonailt de qualre
tierces mineures, ou de septième diminuée.
s Ma'? voici quelque chose déplus singulier. Si l'on fait la
quarte superflue1 j ^ ^JL (1, on distingue les ré-
sultantes {"50 1 g^.?1u' constituent l'accord dissonant de
septième de dominante, sous les formes j^J^jf ^J(L J
J'avoue que je ne comprends pas ce que c'est que cette
quarté superflue, ut fa$, exprimée par a5tï 555 1, diffé-
rente du. triton exact ul fa$ (256 56a ( »î )■ Fa$né
peu( etre que ./a jf à l'égard de ut 1 : il n'y eu a. pas de
plusieurs espèces, dans la musique européenne. En sup-
posant que , dans une expérience bien faite, deux données
quelconques fournissent deux résultantes, qui forment
avec elles une harmonie analogue à notre accord de sep-
tième de dominante, j'admettrais plutôt que ces données
seraient urt ÎÉ ^ ■ mais au lieu d'élever le nombre de
vibrations, l'auteur du mémoire le réduit de 5Ga à 355 [J.
D'ailleurs les mêmes expériences lui fournissent le l'aif
■ (1) J<! me conforme ici an langage a* l'auteur, quoiqu'il n'y lit paa
plus d'intervalle» ou d'accord» superflus ci musique qnll a'f en de fan*.
53
guifant : si l'oa fait la fatute quinte1 gj*^ thiXh
on entend les résultantes j 112 % 1UÎ ' d!l M" Blein*
forment un accord dissonant. J'avoue que discordant nie
paraîtrait ici le mot propre; car, quel accord isolé peut
résulter de ut, ré, sot et laj$?
Tout cela me parait avoir clé légèrement expérimenté ,
et, dans tous les cas, est d'une moins grande utilité que
l'auteur ne paraît le penser; car, quoi qu'où eu dise, fa $
un peu moins élevé que fa§, ne peut Cire qu'un son
faux, duquel on ne peut rien conclure. En formant ses
séries de résultantes , M. Blein a été séduit par la simpli-
cité de celte loi : les deux sous donnés étant représentés
l'un par son nombre de vibration n, et l'autre par le
nombre n + m, les résultantes sont constamment n — m
elm. Mais celte loi, qu'il ne Irouve que par induction,
n'est pas même démontrée par lui,
La deuxième section de la première partie du mémoire
est relative aux harmoniques naturels. Après avoir cité le
phénomène connu d'une corde tendue qui, mise en vibra-
tion et abandonnée à elle-même, fait entendre , outre le
son principal j "(, par exemple, deux résonuances ai-
guës j so^ et "î*, dont l'ensemble constitue l'accord par-
fait majeur, dans le ton d'uf , M. Blein passe à l'examen
des fails résultans de la résonnance d'un cylindre isolé,
dans lequel il a observé qu'outre le son le plus distinct
on entend deux résonuances graves j ^ et quf
(i) M. le baron Illeîn dit dans une noie, à propos de celle cjprcs-
ilon, qu'il Eerail plu» convenable d'appeler cçl intervalle qmntodhht-
plui de vingt-cinq ans. L'auteur du mémoire parait être plus au courant
de la science du temps de Hameau qne.de celle de l'école modtrnc. Le
mCioe autear dit dam celle nule que le mot do dominante no convient
qu'à la tonique ; il n'a pas vu que ce nom vient de ce que la cinquième
noie de chaque Ion ae trouve dans tous les accords naturels, et eonié-
qoemiaent qu'elle ntèmnulis â l'égard des antre*, i l> ■:. ' i
54
constituent , non l'accord parfait mineur j comme il
le dit, mai» l'accord de sixte majeure *gK Voilà un fait
qui, s'il était prouvé, aurait épargné bien des embarras et
de mauvais raisonnement à Rameau, auquel il a fallu
tant d'efforts pour arriver, tant bien que mal, à ce mode
mineur, éaueil de tous les systèmes.
Examinant ensuite les sons produits par des plateaux
ronds, élémens des cylindres , M. Blcin a trouvé qu'il ne
s'en manifestait que deux, formant la consonnance de
sixte mineure ( i, §). Un fait curieux s'est montré dans
ses expériences , c'est que le plus grave de ces deux sons
se développe d'une manière plus sensible lorsque le pla-
teau est frappé vers sa circonférence , et le plus aigu , au
contraire , lorsqu'on frappe le cenlre du plateau.
Après plusieurs expériences sur des plateaux de différons
périmètres , mais de même surface et de même épaisseur,
H. Blein arrive à un phénomène très remarquable qui,
dit-il, se manifeste dans un plateau carré, ou trois sons
différens se font entendre. Le plus grave , obtenu en frap-
pant les angles du carré, étant supposé Ut, celui qu'on
,M
obtient en frappant le milieu d'un de ses côtés est I i
et le troisième au milieu du plateau est un j 'f; en sorte
que l'accord est celui de sixte majeure avec quarte nu-
jeure, qu'on considère en harmonie comme le renverse-
ment de l'accord de tierce et quinte mineure. . ;
Ce sont les résultats de plusieurs de ces expériences qui
ont paru à M. Blcin susceptibles , par leur analyse et leur
développement, de jeter quelques nouvelles lumières sur
la théorie de la mélodie et de l'harmonie. Il en a composé
un traité qu'il, a soumis a l'académie des sciences, et qui
n'attend pour voir le jour que l'approbation des principes
qui lui servent de base. Ces principes sont fondés , comme
on vient de le voir, 1° sur l'existence du mode mineur
DigilizGd by Google
55
dans le Cylindre isolé ; a' celle du triton et de la sixte ma*
je ure dans le plateau carré.; 5° et enfin celle des accords
dissonans dans les résultantes des intervalles dissouans.
J'ai fait voir ce qu'il faut penser de ce dernier fait; à l'é-
gard des deux autres , M. Blein a rendu un service réel en
faisant connaître leur existence. Avant d'en tirer des con-
clusions, il est nécessaire de les soumettre à de nombreuses
expériences bien faites; de s'isoler de tout instrument so-
nore en les faisant, afin de ne point prendre des résonnances
étrangères pour celles du cylindre isolé ou du plateau ; et
surtout, de consulter des sens très délicats et très exercés
pour apprécier cessortes de résonnances, qui sont toujours
très faibles et très incertaines.
Dans le cas où l'on parviendrait à s'assurer del'existence
des phénomènes précilés, il ne faudrait point encore en
conclure, comme le fait l'auteur du mémoire, que ces
découvertes pourraient influer sur l'étude de l'harmonie et
de la composition. Je l'ai déjà dit, la science de l'harmonie
repose bien moins sur desaccords isolés que sur des lois de
succession, sur des rapports d'affinité ou d'exclusion, dont
les causes seront peut-être à jamais ignorées, comme le
principe de nos sensations. Il y a une action et une réac-
tion continuelle de la mélodie sur l'harmonie , et de celle-ci
sur la mélodie, qui sont les bases réelles de l'art de la com-
position; les chercher ailleurs, c'est se fourvoyer. Toute-
fois, il est curieux d'observer les phénomènes des corps
sonores, d'en découvrir les lois et de déterminer en quoi
ils coïncident avec les rapports métaphysiques des sons.
Une théorie physico-mathématique de la musique, basée
sur des faits incontestables, qui seraient ramenés à des lois
simples et démontrées, serait intéressante pour quiconque
voudrait saisir l'ensemble du système musical, mais sera
toujours inutile à l'harmoniste et au compositeur.
Les troisième et quatrième sections du mémoire de
M. Bleiu ont pour objet les gammes sonores dans tes corps
réguliers de formes analogues, et les formes des vibra-
lions. 11 y développe quelques circonstances particulières
des phénomènes qu'il a examinés dans les premières sec-
DigiiizMBy Google
5G
lions , et y établit , en particulier , l'analogie des vibrations
colorantes avec celles des sons, sorte de théorie qui a de
de l'analogie avec une proposition quo Newton a avancée
dans son Optique (tib. i, p. a, prop. 5.), et qui a servi
de base àl'idée du clavecin oculaire du père Castel.
M. Blcïn va plus loin , dans la deuxième partie de son
mémoire; il y établit que les diverses propriétés des corps,
leur élasticité, leur transparence, leur état lumineux, leur
chaleur, etc. , ont de l'analogie avec la théorie des vibrations.
Ces matières n'ayant qu'un rapport fort indirect avec la
théorie dessous, je me dispenserai d'en parler. En ce qui
touche cette dernière, je me bornerai à remarquer qu'il est
fâcheux que ce savant n'ait pas employé, dans l'exposé de
ses recherches, les formes rigoureuses de l'analyse, et des
'démonslralions sans lesquelles les expériences les mieux
constatées, et même les lois qui en découlent, restent
improductives.
FÉTIS.
EXPOSITION DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
NOTICE SUR L'HEPTÀCORDE,
BASSE DE VIOLE PERFECTIONNÉE,
- -' ■ . PARJ.-M. RAOUL*. .
L'rssTivuM eut auquel j'ai donné le nom â'Heptacorde7
tient de la basse (le viole (viola cii gamba) , par le nom-
bre de cordes dont il eat monté; mais il en diffère par les
proportions, retendue du manche, et parla qualité du son.
(i) L'ïdslrnmcnt dont il est question dans celte notice est an nombre
de ccuï qu'cujiose ncitfi annet, an Irtiiivre, M, fui/tourne, luthier ■
Paris, rue Croii-des-Petis-Chanips.
Diaiiizcd b/ Google
ï>7
C'est "d'après une basse' de viole, chef-d'œuvre de l'an-
cienne lutherie, <|iie j'ai conçu l'Idée des change m en s dont
je viens soumettre les résultats aux nombreux amis d'un art
porté chez les Français, et par les Français , au plus haut
degré de perfection.
Feançois 1", élan t à Bologne, eu i5i 5, entendit des vio-
les à la chapelle de Léon X. Ces inslrumens étaient à
peine connus en France, et l'on y manquait d'ouvriers
propres à les confectionner. Des offre a avantageuses déter-
minèrent uu luthier, alors célèbre, nommé Gaspard
Duiffbprugcar , à suivre le monarque dans ses états, et
à s'y fixer.
lin Ire antres inslrumens, ce luthier lit une basse de viole
dont la table inférieure représente le plan de Paris et ses
environs au seizième siecliï1, en bois rapportés de diffé-
rentes couleurs. Au-dessus- est un saint Luc, imité de
Rafibait, aussi en marqueterie. La téte du manche offre
tes attributs de ia musique; élégamment sculptés. On voit
surla queue, ou cordier, une femme jouant du luth.
Devenu possesseur de cet instrument, qu'on croit avoir
appartenir à François 1" lui-même, je fis des recherches
sur la manière de l'accorder: il en existait plusieurs ; après
les avoir successivement essayées, je marrelaià celle qui,
par la combinaison des intervalles, rendait le doigté fa-
cile dans tous les tons et dans toutes les positions.
Quoique le son de la basse de viole fut agréable, la caisse
trop mince et trop plaie , le chevalet trop bas , la touche
trop courte, trop rapprochée de la table, surchargée
d'ailleurs de cases inutiles, obligeaient d'employer des
cordes trop fines pour le volume de son qu'elles auraient
dû provoquer, et qui cédaient trop facilement à la pres-
sion de l'archet.
Un instrument calculé sur une échelle plus grande ,
exempt de ces défauts, et monté de cordes choisies dans
(i) Ce plan es! absulument conforme à celui qui eiiile en lapiiierie a
l'Hùtel-dc- Ville de l'sria, et an plan donne par Vuhwrc à la mile de
llÙMutK de celle ville.
a" VOL. 6
58
des proportions convenables, me parut devoir produire
un tout nuire, effet.
Encouragé par un premier essai , j'ai voulu , par un se-
cond, obtenir mieux encore , et l'instrument , qui est l'ob-
jet de celle notice, établi par M. V uUtaume., que ses con-
naissances et le fini du son travail mettent au rang de nos
meilleurs luthiers; cet instrument, dis-je, a réalisé mes
espérances.
L'hcptacordc est donc la basse de viole perfectionnée.
Si l'on me demande pourquoi j'ai changé le nom de celle-
ci , je répondrai que les violes n'entrent plus dans notre
système instrumental ' ; que celte dénomination n'a
d'ailleurs rien de caractéristique , tandis qu'il est conslan t
que les Grecs connurent l'hcptacordc , auquel ils donnè-
rent la préférence sur tous les autres instrumens. Beau-
coup d'auteurs prétendent qu'Orphée s'en servait , et Phi-
iostrate décrit ainsi la position de ce prince de i'harmo-
nie (c'est ainsi qu'on le nomme) jouaut delà cythare1.
Orpfteus sinister pes adnixus ierrœ , sustinet cytha-
ram super femore posilam; dexter autem gestum et
rfiythmum proludit , sotum calceo ferieni. Manus au-
tem dextra guidera ptectrum flrmiter tenens extenditur
ad phtongos et tonos , cubilo insidens , et vola manus
intus spectante, lava autem (ides redis digitis ferit.
« Orphée ayant le pied gauche contre terre, soutient la
■ cythare de la cuisse , et , frappant en même temps du
« pied droit, il inarque le mouvement de ce qu'il joue.
■ Quant aux mains, la droite, tenant l'archet fortement,
b l'avance sur les cordes.... le poignet , plié vers le dedans
« delà main, elles doigts étendus de la main gauche, frap-
• pent les cordes.
Celle description , qui convient à peu près à la manière
de tenir la basse de viole et le violoncelle , prouve qu'il
(i) Ce qu'on appelait 1p. ainecrt de viola élail compose do quatre jn-
strumens: le dessus , la liaulc-conlre , la taille et la basse.
(i) Cyltiarc, lire, chci les anciens; viole, dam le moyen âge, sont des
trrmes génériques sous lesquels on comprenait ics instrumens a cordes,
-ne etpéce atait ensuite un m™ particulier.
=9
existait, dans ces temps reculés , des instrumens surmon-
tés d'un manche ; .que ce manche était destiné à recevoir
la pression des doigts de la main gauche sur les cordes, et
que le plectre ou archet, en usage dans ce cas, différent
de celui dont on se servait pour les instrumens de percus-
sion, était le plectre crépu, formé de crim de queue de
cheval fortement bandés..-. ( cum arcu compacte ex pi-
lis caudœ eqninœ forliler astrictis. )
Le mut heptacorde exprime doue en grec francisé que
l'instrument auquel je l'applique est armé de sept cordes.
Leur ordre de résonnance procède ainsi :
7* 6« 5' 4* S' a* i" corde
u rl sol ci m ii ré
Un musicien aperçoit au premier coup d'oeil qu'une telle
disposition d'intervalles préseule des ressources, puisque la
distance de la corde la plus grave à la chanterelle est d'une
dix-huitième.
La septième corde donne la tierce mineure au-dessous de
l'wf du violoncelle, et le ré pris du quatrième doigt sur
la chanterelle de ce dernier, et à l'unisson de ta chante-
relle de l'heptacorde.
Les proportions du corps sonore, celles observées dans
la grosseur des cardes, déterminent un volume de son
qu'on ne trouve dans aucun autre instrument, tandis que
la construction du manche, de la touche et du chevalet
rend facile l'attaque des cordes sans gêner l'action de
l'archet.
L'échelle diatonique contient cinq octaves , sans comp-
ter les sons harmoniques, qui en forment une sixième.
Dans le premier manche, c'est-à-dire de la septième
corde à l'octave du ré de la chanterelle , le doigté est très
simple et ne varie presque jamais.
Oo
Dans le manche inférieur, commence art rf., octave
di lli chanterelle, le pouce s'emploie comme an violon-
celle. On peut s'en servir également dans tous les cas oit'
ori l'empl oierail sW l'autre înslrlimeiil.
Maïs des attribuf* particuliers distinguent l'heptacorde ,"
qui, seul des instrument à archet, peut rendre les effets
île l'harmonie, e( c'est principalement sous ce rapport
qu'il faut ie considérer. Pr'u* on se sera rendu familières
ics régies de ce bel-art, plus l'iuslriimcnl développera de
ressources et de charmes.
Traité comme instrument récitant, l'héplacordc , par
les diffère »s caraelères de sn voix, par l'étendue de son
clavier, offre des moyens inépuisables. L'avantage de la
tierce mineure qu'il a au grave sur le violoncelle permet
souvent de descendre d'une octave la bisse proprement
dite; ce qui ajoute à l'effet, principalement dans la musi-
que, oit deux violoncelles sont employés, lorsque l'un ou
l'autre, n'étant pas obligés, Ions deux sont écrits à l'u-
nisson.
Enfin-, il est une circonstance où l'Iieptacorde a sur le
violoncelle uu avanlageet un degré d'utilité incontestable,
l'accompagnement du récitât- j\ pour lequel -, eu Italie,
par exemple, ou ne se sert que du piano-forte oit du
violoncelle. Or, quel que soit lu talent du violoncelliste, il
lui esl impossible de faire entendra tomes les notes d'un
accord; il est le pins souvent obligé d'en supprimer, de
changer l'ordredes intervalles, de mettre à l'aigu tel son qui
devrai) résonner au grave, et vice versà. Ces îiiconvéniens,
je dirai même ces défauts, qui blessent une oreille exercée,
disparaissent avec l'heplacorde , en ce que tous les accords
possibles, majeurs, mineurs, eonsonnans ou dissonans,
s'y présentent complets ut dons leur ordre naturel.
Ainsi le complément direct des accords même rédoublés
du grave à l'aigu et, de l'aigu au grave, soutenus par la
force de l'archet et répétés suivant le besoin, relativement
à la nature des localités, ne laisseront jamais de doute aux
chanteurs surlcsinlonnation» qu'ils auront à prendre pour
suivre le.recituUT, ou pour rentrer dans les mélodies qui
doivent former la chaîne du discours musical ; on pressent
déjà que l'ulililé et tes nombreux avantages de l'hepta-
corde seront de jour en jour plus appréciés par les ama-
teurs des heureuses découvertes.
Ce bel instrument offre tantôt ln voixdc la nature du
violoncelle ou de l'alto , tantôt celle de l'harmonica même.
Bien loin, au surplus, que l'étude de cet instrument nuise
à celle du violoncelle, elle lui est favorable. Quand ou
iaailri.se sept cordes, ou en dompte plus aisément quatre.
Ensuite, le doigté de chaque corde isolément prise, la pose
delamaiu gauche, la tenue de l'instrument, sont les mêmes.
Il en est ainsi de la conduite de l'archet , dont l'action sur
l'heptacorde, étant susceptible de plus de variété, donne
nécessairement à la main droite plus de légèreté.
J'ai rassemblé daus un ouvrage qui paraîtra incessam-
ment des notions suffisantes pour qu'un musicien, et
surtout un violoncelliste , contracte l'habitude d'un instru-
ment digne de l'adoption que je viens solliciter pour lui.
Ce travail, dans lequel je n'ai eu d'autre guide que mes
propres observaliotis , traite:
i' Des gammes diatoniques et cltroma tiques dans tous les
tons et dans toutes les positions ;
a" De l'élude de la double corde, également dans tous
les loris;
5" Desaccordsconsonnans, dissouaus, complets, ou in-
complets, majeurs ou mineurs, avec ou sans répétition de
quelques intervalles ; manière de doigter ces accords;
4° lie la direction et conduite de l'archet, des ar-
pèges, etc., etc.
A la suite de chacune de ces divisions, j'ai placé des
exercices d'une difficulté progressive.
M. PAER ,
EK-DJEECTLUn DO TBB1TBE ROYAL iriLIES ,
À MM. LES DUETTANTI '.
ïxi été attaqué plusieurs fois dans. tes journaux sur .ma
gestion du théâtre. .le n'ai pu répondre à ces trait» mal-
(i) Monsieur Paer nom prie d'iméier diru la Rei ut muùwle la lettie
62
veillans, attendu que j'étais moi-même sous les ordres de
l'administration de l'Opéra. Maintenant que, malheureu-
sement , je suis libre , et qu'il n'est que trop vrai que M. le
vicomte de La Rocliefoucault a prononcé ma destitution
pour raison d'économie ( dit-il ) , je crois qu'il est de mon
honneur do repousser ces attaques, ce qui ne sera pas
difficile : il suffira de rappeler ce que i'ai fait dans des
temps prospères, et le zèle que j'ai mis depuis huit mois
pour faire marcher un théâtre qui m'a été remis dans la
plus grande pénurie et le désordre le plus complet.
Il est nécessaire d'abord de rappeler que ma première
gestion date de 1818 à i8a3, avant l'arrivée de M. Rossini
à Paris. J'avais porté CC t dédire à l'état le plus florissant,
puisque j'avais monté douze opéras de cet auteur, savoir:
Oietto, Barviere, Ètisatotlh, ia Gazza Ladra , Pitlra
det Paragone, Inganno Fetice, l'Italiana, Mosc, Ric-
cîardo e Zoraîde, Torwaldo e Dortiska, Tancrcdi,
Turco in Itaiia; en outre j'ai fait faire douze répétitions
de ia Donna dit Lago, cl j'ai monté en même temps des
opéras de Mozart, Cimarosa, Maytr, Mercadante. J'ai
donné trois seuls opéras de moi, Camitia, Agnese, et
/ Fuor'uscili; voilà pour ma première gestion; maïs alors
j'avais une troupe complète qui coûtait, tout compris,
chœurs, acteurs et orchestre, quatre cent mille francs;
celle d'aujourd'hui eu coûte presque six cent mille : alors
la foule était immense , et jamais les ouvrages de M. Ros-
sini n'ont été mieux exécutés*.
suivante, adressée par lui aux dileltonli, comme une apologie de sa
tommes faite de rendre à ebacun la justice qui lui est due, nous fait un
devoir d'accueillir la demande d'un artiste dont te talent honore cl sa
patrie et le pays oit il s'est filé. ,
(1) On ne peut méconnaître cette vérité : jamais le Théâtre Italien
ne fut dans une situation plus florissante que sous la première adminis-
tration de M. Paiir. C'est alors que les ouvrages de M. Rossini ont été
présentés au public pour la première fois, et qu'ils ont obtenu des succès
qui tenaient du prodige ; c'est alors qu'on n vu Don Juan et les Kocet de
Figaro exécutés supérieurement; c'est alors enfin que nous avons en
une troupe, sinon parfaite, ou moins tri» satisfaisante, et que mes-
dames Fudur et I'asta ont charmé le public avec des laites d'un genre
65
A celte époque, M. Rossini passant par Pari», l'autorité
crut faire une très bonne affaire en lui donnant la direc-
tion de ce thédfre. Tous les dileltanlt savent comment les
choses se sont passées à cette époque. Voyant que je ne
pouvais plus avoir aucune influence pour la prospérité du
théâtre, je voulus donner ma démission ; cite me fut re-
fusée, et jefus nommé directeur adjoint. C'est alors que,
ne pouvant rien empêcher, j'ai vu partir, presque toutes
à fa fois, mesdames Pa&ta, Momùeiti, Sçhiassetti et
Schutz. Apres cette déconfiture, en octobre 1826, M. Ros-
sini se relira, mais en gardant le titre d'inspecteur général
du chant. Alors M. de La Roche fou cai il L me nomma direc-
teur du théâtre. Mon premier mot fut de lui dire : Mon-
sieur te vicomte , vous me faites générai, maintenant
qu'il n'y a plus d'armée. Séaumoins je pris sur moi une
responsabilité dont je n'aurais pas dû me charger par
ainour-propre ; mais quelquefois les pères de famille doi-
vent faire des sacrifices.
Il n'y avait en novembre que M"* Cantarclli, arrivée
d'Italie, et MUc Cintï pour faire le service; cette dernière
tomba malade pendant deux mois. Aussi! <H qu'elle fut
guérie, on la garda pour toujours à l'Opéra , et clic ne me
fut plus reudue. Dans cette triste situation, je fus obligé
défaire plusieurs relâches. Lesautrcs cantatrices, Ctinzi,
différent. Nous ne prétendons point attaquer l'a dm in islr.nl ion qui a suc-
cédé à celle-là ; mais il serait injuste d'attribuer à M. l'aerdcs fautes qui
ne sont point les siennes. Quand il est rentré, il n'y ivait plus ni per-
sonnel, ni répertoire : il n'y avait plus de succès possible. Nous ajoute,
rons que , dans notre opinion, aucune administration n'en obtiendra dé-
sormais. On ne peut donner les anciens ouvrages, qui paraîtraient pairs
après les orchestres formidables auxquels on es! arcoutuiné ; les produc-
tions de Hcssini sont usées; i! ne tr;.v::ille plus, et ce qui se compose
maintenant en Italie ne vaut pas la peine d'être- entendu. On en a pu
juger par la l'astoretfa Fcurlalaria , qui est nu de* meilleurs opéra s. TJiie
leul pourra varier le personnel de. manière ;i piquer la cminsilé quelque
temps. Nous disons pour quelque temps seulement, parce que les sucée,
ne deviendront durables que loisqu'un nouvel homme de génie aura
saisi le sceptre de la scène italienne. -
[{fait du rédacteur. )
Diojtized by Google
64
Albini, Cesari, Marinoiii, Ferlotli el Garcia arrivèrent
après. Il fallait en hâte former un répertoire : il n'y en
avait aucun ; il fallait faire répéter les opéras que le public
avait déjà accueillis, cl renoncer pour le moment aux
nouveautés; d'ailleurs j'étais forcé par le temps , puisque
trois chanteuses, Marinoni, Canzi, Aibini, n'étaient
engagées que pour six ou douze représentât ions. J'ai donc
mis la plus grande activité : nous avons fait deux répéti-
tions par jour; orchestre , acteurs, chœurs, tous y ont
mis le plus grand zèle.* Malgré tous ces embarras , en huit
mois (comptant du jour de ma nomination à celui de ma
destitution ), j'ai monté quatorze opéras, savoir : Adetina,
UTurcoin Italia, la Donna del Lago , Sem iramide
(aveo mesdames Cesari et Blasis) , Zeltnira, Matrimo-
nioSegrelo , Elisae Claudio, laPastoretlaFeudataria,
Barbiere, Ricciardo e Zoraide, ta Gazza Ladra, Tor~
watdo e Doriisfca ,-ta Cenerentoia, el dix répétitions de
Tebatdo e Isolina , opéra nouveau de Mortacchi , pour
la continuation des débuts de M" Pisaroni-
Je demande maintenant à tout homme de bonne foi
s'il était possible, en huit mois île temps et avec tant d'en-
1 raves , de mettre plus d'activité? Si le public s'est montré
un peu trop sévère pour la Paslorella, Tonvatdo, Misa,
on ne peut me le reprocher; je n'ai pu lui faire entendre
que les sujets que l'on avait mis à. mu disposition.
D'après cet exposé , messieurs tes dilettanti peuvent
apprécier l'injuslice et la mauvaise foi des journaux qui
m'accusent de négligence. Le Courrier Français, dans
>in article sur l'Académie royale de musique, s'exprime
ainsi : Quant au Thêdtre Italien, on croit que il/. Paër
n'en resterapas directeur, à ta grande joie des dilettanti,
qui se plaignent, avec raison, de ta triste monotonie du
répertoire.
Assurément les dilettanti dont parle ce journaliste ne
sont pas au courant de tout ce qui est arrivé à ce malheu-
reux théâtre. Ils n'out pas été insiruits de l'état dans le-
quel il m'a été remis, et de ma triste position. Les vrais
ditetlantime connaissent par nies. compositions ; ilssavenl
Digitizcd t>y Google
(in
les peines que je me suis données pour relever ce théâtre,
et ils ne peuvent se réjouir du coup qui mu trappe. Un
autre journal [ta Pandore) , parodiant, ef (n'appliquant
un mut de Bonaparte, me demande ce que f ai fait de
mon armée ? Je serais bien plus fondé à faire celle ques-
tion à mou prédécesseur , et à lui dire : Je vous ai laissé
une armée florissante, et vous me Pavez remise déia-
L'arrivée de M"™ Pisaroni ct son beau talent ont un peu
changé la face du théâtre. C'est à présent que les nou-
veautés désirées par lés dilcltanti' allaient se succéder;
j'avais déjà commencé par Tebatdo e Isoliua, et par un
opéra nouveau que je composais exprès pour le retour de
M"' Sonlag ; mais , par économie, et pour récompenser
le ïèie que j'ai mis dans ma direction , on m'a destitué....
J'espère maintenant que 1rs diletlanti, au lieu de se
réjouir de mou malheur, me plaindront. Ils n'oublieront
pas que je n'ai pu agir, dans ma direction, que sous les
ordres du l'administration de l'Opéra, qui, sans égard
pour ma position, m'avait ôlé les partitions de Mosè , de
Mahomet II ( que l'on aurait pu donner chez nous), du
Crociato que l'on veut traduire pour sou théâtre, et sur-
tout M11" Cinti et H. Levasseur, deux sujets indispensa-
bles au partage des rôles et au charme de l'exécution d'O-
tcUo, Tancredi, et autres opéras.
Toujours soumisàma destinée, fier d'appartenir encore
au service du roi, naturalisé Français depuis la restaura-
tion, j'espère, être encore de quelque utilité à l'art que je
professe, par ma réputation et nies ouvrages; et surtout
conserver l'es lime des bons diletlanti, qui peuvent juger
maintenant si j'ai mérité la persécution à laquelle je suis
en butte depuis trois ans, et le coup qui vient de m'ètre
porté.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN.
DÉBUTS DE M. FOGGI.
La prolongation delà maladie de M"1 Garcia a contraint
l'administration de ce théâtre à revenir encore à son an-
cien répertoire , et a ajourner indéfiniment la seconde re-
présentation do Tebaldo e Isolina. La Donna del Lago
est l'ouvrage qui a paru le moins usé; il offrait d'ailleurs
une occasion de faire débuter un jeune homme nomme
M. Poggi, qui avait di'jàdûse montrer dans le rôle d'Otello>
mais qu'on avait trouvé trop faillie pour une pareille en-
treprise. L'essai qu'on vient d'en faire a prouvé qu'il n'é-
tait pas meilleur pour le rôle de Rodrigo de la Donna det
Lago. H est impossible d'avoir moins d'expérience des pro-
portions du chant et de la scène. La voix de ce prétendu
chanteur, quoique d'un timbre assez doux, est d'ailleurs
insuffisante pour les rftles auxquels il se destine. Il pour-
rait prétendre tout au plus aux seconds ténors , et sou am-
bition va jusqu'aux premiers rôles. Nous ignorons ce qui a
pu déterminer l'administration à faire l'acquisition de cette
inutilité,- mais nous lui conseillons de s'en défaire, dût-
elle faire des sacrifices pour s'en débarrasser.
La représentation de la Donna a été au-dessous du mé-
diocre. H"' Pisaroni était mal disposée, H1" Blasïs parais-
sait gênée et peu sûre de son rôle , Zuchelli avait l'air do
chanter par grâce, les choeurs chantaient faux et l'orches-
tre allait de travers. Cependant il y avait du monde, et
l'on ne peut prendre pour excuse la froideur du public.
Ces pauvres dilettanti semblaient prendre leur mal en pa-
tience, et n'ont marqué de mauvaise humeur que quand
M. Poggi leur en adonné de trop justes sujets. Encore une
Digilized by Google
87
représentation semblable, et c'est fait du reste du réper-
toire. Nous ne voyons plus de ressource que dans Semira-
mide ; mais cette pièce ne peut pas toujours durer 1 Pau-
vre Théâtre Italien , que vas-tu devenir?
CONCOURS
DE L'ECOLE ROYALE DE MUSIQUE.
La séance de mercredi, 8 de ce mois , a terminé ce qui
concernait spécialement la musique dans les concours de
l'école royale. Cette séance était destinée nu violoncelle et
à la déclamation lyrique. Un élève de M. Norblin , H. Che-
yillard , dont les dispositions promettent un artiste distin-
gué , a obtenu le premier prix. Le jury n'a point jugé qu'il y
eût lieu d'en accorder un second.
Les amateurs du dix-neuvième siècle, et surtout les
étrangers , ne savent gnèrece qu'on entend par déclama-
tion fyrique: c'est tout simplement ce chant grotesque
qui a été si long-temps en usage à l'Opéra, et dont les Lai-
nez, les Adrien , etc. , ont laissé de si belles traditions:
c'est enfin l'art de diriger sa vois avec toute la grâce de
Dérivis. M. Bénéditt et M"' Hyrthé ont été jugés dignes
du premier prix; ce qui n'empêche pas qu'ils ne soient
des chanteurs déplorables.
Ainsi se sont aclievés ces concours , épreuves redouta-
bles non-seulement des progrès annuels des élèves , mais
des espérances qu'ils peuvent donner pour l'avenir, et
de la direction qu'on imprime à leurs études. Examinons
quel résultat ont donné ceux de cette année.
Le contrepoint et lu fugue, parties matérielles de l'art
de lu composition , ren ferme ni de grandes difficultés que
le travail le plus obstiné nu peut pas toujours vaincre. Il
faut, pour y faire des progrès réels, une certaine organisa-
tion musicale qui n'est pas même toujours le partage du
génie. C'est une qualité particulière, sans laquelle on ne
peut apprendre cette science. Quelques grands muskiens,
fia
tels q ua Hcndel, Scarlatti, Haydn , Mozarl , etc., l'ont
possédée et se sont fait des réputations durables; d'autres,
quoique heureusement nés sous d'autres rapports, en ont
été entièrement dépourvus. Une faut donc pas être étonné
si le nombre des élèves qui parviennent à s'y distinguer
est borné. Cette année a oÛert des résultais satisfaisait*,
lant pour ce qui coneerne cette science que pour l'har-
monie écrite et l'accompagnement pratique. Un premier
et un second pris de fugue , des premiers et des seconds
prix d'harmonie et d'accompagnement ont été accordés
après des examens sévèreset sans indulgence tant ponr
les classes d'hommes que pour celles de femmes.
Ou sait l'importance de l'étude des principes de la mu-
sique et du solfège. Les avantages de cette élude bien faite
se font sentir dans tonte la carrière du musicien, quel que
suit son genre de talent : les concours de celte année ont
fait voir des améliorations sensibles dans celte partie essen-
tielle de l'art musical. Les femmes surtout se sont mon-
trées habiles dans la lecture à première vue, et leur supé-
riorité a été telle que le jury s'est trouvé dans un assez
grand embarras lorsqu'il a du décerner les prix. Ces pro-
grès sont d'un bon augure pour l'avenir. Nous avions déjà
fait remarqucL-que nos jeunes artistes sont peu musiciens;
quelques-uns des concours d'inslrnmeiis en ont offert la
preuve. Par exemple , il est impossible de lire plus mal
que ne l'ont fait les pianistes, et cependant qu'est-ce qu'un
pianiste dont l'œil n'est pas assez exercé pour saisir au
premier aspect l'ensemble d'une partition , et dont le sen-
timent musical n'est point assez perfectionné pour ne pas
manquer il la mesure? Nos orchcslres souffrent aussi beau-
coup du peu d'expérience des jeunes gens dans la lecture
â livre ouvert.
Le talent de M"" Rousseau et Le tourneur fait honneur
ù SI. Bcnotst, leur maître. Dans les remarques que nous
avons faites sur la manière de toucher le plain-chant à
Paris, nous n'avons pas prétendu improuvcrla méthode
de ce professeur; il enseigne selon l'usage reçu dans les
églises de celte capitale, avec celle différence que son con-
69
Irepoînt csl dans des formes pures. Nos observations ont
pour objet de solliciter le changement d'usage dans ces'
mêmes enlise*, et pour cela, il faut plus que le lalcnt du
professeur. Le consentement de l'archevêque de Paris,
cl la participai ion des conseils de fit brique sont indipensa-
liies, car la routine est difficile à détruire. Il serait digue
de SI. Denoistde joindre à soir talent le courage nécessaire
pour en Ire prendre une pareille réforme : voila ce que nous-
avons voulu dire dans notre article sur le concours d'orgue.
Mous avons peu de cliose à dire sur celui de harpe,
parce que le progrès des élèves n'est que d'un intérêt se-
condaire, cet instrument Étant plutôt d'agrément que'
classique.
Quoique nous possédions plusieurs virtuoses sur les in-
slrumeus à vent, ce genre d'instrument n'est cependant
point parmi nous dans le même état de prospérité que ce-
lui des inslrumensà arcliel. Les compositems et le public
même savent qu'ils sont la partie faible du nos orchestres,
et que presque toujours c'est d'eux que dépendent les fau-
tes d'exécution. Parmi ceux q*i sont en France dans un
état tTinférioriié, la clarinette se présente en première li-
gne. No» artistes les plus célèbres sur cet instrument ont-
toujours attaché plus d'importance à la puissance du son
qu'à sa douceur et à son égalité. Les artistes français ont
trois instrumens distincts dans un seul : le chalumeau,
le médium et le clairon, où la partie aiguë de l'instru-
ment a une nature de sou différente, peu analogue, et
le passage de l'jin a l'autre se fait toujours d'une. manière
désagréable. Le style n'est pas inoins défectueux que ie
système du son : on y trouve un certain air bourgeois qui
n'est que trop en harmonie avec le genre de musique des
solos. Il est fâcheux que ]»>s artistes n'aient point songé à
réformer leur manière après avoir entendu Itaërmann. Ces
réflexions nous ont été suggérées par le jeu de la plupart
des jeunes gens que nous avons entendus dans les concours
depuis plusieurs années , et notamment celle-ci.
Le professeur habile ( M. Dauprat ) qui enseigne le cor
à l'École royale de musique connaît toutes les ressources-
pi les défauts île son instrument. Il a formé d'excelleus élè-
ves, qui sont devenus des artistes distingués; mais la plu-
part des jeunes gens qui se livrent à l'étude du cor sont
altachés aux musiques militaires des régimens, et contrac-
tent dans ccscorpsdcsdéf'auts qu'ils apportent ensuite dans
les orchestres. Le plus fâcheux est le manque de sûreté ,
qu'ils ont tous plus ou moins. Certes, l'instrument est dif-
ficile, mais la difficulté n'est jamais une excuse valable
dans les arts. C'est par des soins continuels et un travail as-
sidu qu'on parvient à la vaincre , et l'art n'est quelque
chose que parce qu'il est difficile. Ces accîdens si multi-
pliés se sont fait remarquer d'une manière affligeante dans
le jeu des trois premiers et des deux seconds cors qu'on a
entendus au concours du a de ce mois. La sévérité du jury
me parait Être le seul moyen de rendre les jeunes artistes
plus soigneux.
Nous avons déjà dit que le seul concurrent qui s'est pré-
senté pourle haulbnisue nous paraissait pas digne du pre-
mier prix qu'il a obtenu. Nous répétons ici que l'indul-
gence dont on a usé à sonjégard nous paraît contraire à
la prospérité de la musique en général , et de l'École royale
Le basson est un instrument mal fait, et dont toutes les
dispositions acoustiques ont besoin d'être réformées: ce
n'est donc point aux élèves que nous voulons adresser des
reproches sur des défauts de justesse qui sont inhérens à
l'instrument, et que les professeurs même n'évitent pas.
Mais ce qu'il faudrait exiger des jeunes artistes, c'est un
meilleur syslèim; di' respiration, un meilleur phrasé, et
plus de goûl. MM. Dyvoiret Morvilliers , qu'on a entendus
celle année, ont un son assez joli, mais un style déplorable.
L'école restera dans la médiocrité tant qu'on ne sera pas
plus exigeant pour accorder des premiers et des seconds
prix.
Parmi les instrumens à vent, la flûte est celui qui , en
général, laisse le moins à désirer en France. S'il n'y a pas
moins de difficulté à acquérir un grand talent sur la Uûlc
que sur tout autre instrument, il est cependant vrai que
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7"
c'est celui sur lequel il eat le plus facile d'éviter de blesser
l'oreille. Nos orchestres renferment des flûtistes assez re-
marquables pour que nous n'ayons rien à envier à nos voi-
sins. M. Scarzilla, qui a obtenu le premier prix, annonce
le germe du talent.
A l'aspect de vingt-deux pianistes réunis pour le con-
cours, on aurait pu croire que l'École royale n'était peu-
plée que de virtuoses: mais ^'exécution de tous ces Cte-
mtnti en berbo n'a pas laissé long-temps l'assemblée
dans l'erreur; non qu'il n'y ait des dispositions, du talent
même, chez quelques-uns des concurrens; mais il s'en
fallait de beaucoup que les autres fussent dignes de se mon-
trer dans une lutte publique. Nous l'avons déjà dit, et
nous croyons devoir le répéter, c'est un tort que d'ad-
mettre au concours des élèves dont le jeu n'offre qu'un
mécanisme incorrect, et qui dans len traits laissent devi-
ner une parlie des notes plutôt qu'ils ne les font entendre,
outre qu'ils sont absolument dépourvus de slyle. Il eu
résulte que leur égaillé de médiocrité fait qu'on est forcé
de leur partager le prix entre cinq ou six, attendu que
l'un n'a pas fait mieux que l'autre. Parmi tous ces con-
curreus , uu seul s'est présenté avec un talent précoce qui
fait espérer un grand artiste pour l'avenir: ce pianiste,
encore enfant, nommé W agner, est élève de M. Zim--
mermann, qui parait destiné à multiplier parmi nous les
merveilles de ce genre. Encore uue observation : ces pia-
nistes, qui font tant dénotes, ne sont pasmusiciens. Aucun
d'eux n'a lu d'une manière satisfaisante la leçon qu'il fal-
lait déchiffrer, quoique cette leçon fût facile. Cependant
puisque c'est une condition du concours, il faudrait
qu'elle fût remplie.
Il n'y a que des éloges à donner à notre école de violon ;
les étrangers les plus prévenusen faveur de leur pays recon-
naissent notre supériorité en ce genre. Les élèves peuvent
être plus ou moins heureux au concours, mais on recon-
naît toujours dans leur Jeu une perfection de méthode
qui prouve que la réputation des violoniste* français n'est
point usurpée. M. Sauzai, qui a obtenu le premier pris, est
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71
déjà digne (te figurer parmi tes premiers artiste?: le jeune
' Arlot sera certainement un jour en première ligne.
Pourquoi faut- il qu'ayant ù parler maintenant du chant,
nous n'ayons qtt'â déplorer l'état de toutes ses branche»
dans l'École royale? Dans les concours de vocalisation,
lie chant et de déclamation lyrique, ce ne sont plus ces
Coule» de concurrens dont nous nous plaignions tout à
l'heorev Quelques élèves seulement se présentent, et parmi
eu» pas une voix, pas t'ombre d'un, talent. Des sons mal
posés, des intoon, liions douteuses, une articulation lourde
ou molle , voilà ee q u'a fait au tendre le concours de vc-ca-
liwtiau. Dans le chant, M11* Verteuil n'a eu qu'un style
lâche, utiO prononciation mille et une monotonie désespé-
rante. M. IténédUt et M1" Hyrlhé- n'ont pas été beaueoup
meilleurs dans la déclamation , sauf leur prononciation ,
qnj est assez nette. Voilà donc toutes les ressources de
l'Écolert-yale I Voilà l'espoir des théâtres ! El c'est quand
' il faudrait songer à sortir enfin de cet état de choses in-
tolérable, quand il faudrait à tout prix, taire arriver de
force les voix qui existent, mais qui ne se présentent pas,
que M. le vicomte de La llochel'oucault se voit, dit-on,
contraint de faire des économies sur un médiocre budget
de cent cinquante mille francs, et de préparer des rétor-
ques et des suppressions dans les professeurs! Il est peu t-
^%tre encore temps d'apporter uu remède au mal; mais
dans trois ans, ii sera trop tard. Les théùlres périssent
faute de renouvellement du personnel. Il n'y a rien dan»
ceux de province; il ne peut plus rien y avoir, et
l' licol e royale seule peut former quelques sujets. Mats il
loi faut des moyens ; il lui faut de l'argent, et non desécOT
nomics. Sera-l-il dit qu'au moment où le goût de la mu-
sique s'étend et se popularise en France, cet art perd la
protection du gouvernement? Espérons qu'il n'en sera
pas ainsi, et que la France florissante ne lui sera pas
moins favorable que la Franco agitée : espérons qu'on ne
tardera point à appliquer à des maux pressaus des re-
mèdes elBcacci.
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BU CHANT ET DES CHANTEURS.
Que de choses différentes exprime le verbe chanter I
Les Grecs , dont la langue était si accentuée , chantaient
leur poésie au lieu de la réciter, comme le font les peuples
modernes. De là, un grand poète, tel qu'Homère, était
appelé chantre divin. Chez nous, un chantre est un
ivrogne vêtu d'une espèce de chemise sale , qui tourne la
bouche et fait des grimaces horribles en braillant dans une
langue qu'il n'entend pas. Les poètes modernes disent en-
core je chante; mais ce n'est que par fiction , et pour imi-
ter ceux de l'antiquité. Le chant est à la fois un besoin
pour l'homme le plus grossier, et un art difficile chez les
nations civilisées. Les chants d'un peuple sont une partie
caractéristique de sa physionomie , de ses mœurs , de son
caractère, etc.; le chant d'une école est la mesure cer-
taine des progrès que la musique y a faits.
En Fxance , on n'a commencé à s'occuper du chant que
vers la lin du dix-septième siècle. Louis XIV, qui voulait
avoir des chanteurs , crut avoir trouvé un moyen infail-
lible J'en former, en accordant à ceux de l'Opéra, par
leltrcs-patentcs du a8 juin iCfig et du mois de mars 1671,
le privilège de ne point déroger lorsqu'ils étaient nobles.
Quand il donnait des fêtes sur l'eau, dans la crainte que
ses chanteurs s'enrhumassent, il disait avant qu'on com-
mençât le concert ; Je permets à mes musiciens de se
couvrir, mais seulement à ceux qui chantent. Il est
fâcheux qu'avec de si beaux privilèges , notre école de
chaut ait été si ridicule jusqu'en 1770. Jusqu'à Garât,
chanter avait éié synonyme de crier; il nous reste en-
core quelque cliose de cela. Quant a nos agrémens du
chant, ils étaient ce qu'on peut enLeodre de plus bizarre ;
les ports de voix, les coûtés, les flattés, les marteiie-
mens de Dumesnil , de Maupin, de Rochois, de Chassé,
feraient aujourd'hui pouffer de rire l'auditoire le plus sé-
vol. 7
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M
L'Italie a toujours eu t'avantage sur les an 1res nations
pour le chant; tuais c'est surtout au comme ticement du
dix-huitième siècle que sa supériorité s'est établie d'une
manière incontestable. Ce fut alors que les principales
villes d'Italie ouvrirent des écoles, devenues fameuses par
les chanteurs exiraordinaires qui eu sortirent. Modène eut
colle de François Peli; Jean Paita en fonda une à Gènes ;
Venise en eut deux qui étaient dirigées par Gasparini et
Lotit; celles de Fedi et A'Amadori brillèrent à Rome;
enfin, dans le mfnic lemps, on compte celle (le François
Brivio à Milan, celle de François Redi à Florence, et sur-
tout celle de Pistocuhi à Bologne , dont le fameux Ber-
■nacchi devint ensuite le chef.
: Naples,'si "justement renommée dans les fastes de la
musique moderne, eut nue foule d'écoles qu'il serait
trop long de compter. Les plus distinguées furent celles
d'Alexandre Scartatti, de Dominique Egizio, de Fran-
çois Fto , et de Nicolas Porpnra. La méthode de ces illus-
tres professeurs ne ressemblait point a celle qu'on emploie
dd'nos jours pour former des chanteurs. Si l'on veut con-
naître quelle était cette méthode . eu voici un exemple :
l'orpora, l'un ries plus illustres maîtres de l'Italie, prend
en amitié un jeune castrato, son élève. Il lui demande
va lui tracer, quelque ennuyeuse qu'elle puisse lui pa-
ratlre. Sur sa réponse affirmative , il noie sur une page de
papier réglé les gammes diatoniques et chromatiques, as-
cendantes et descendantes , les sauls de tierce, de quarte,
de quinte, etc., pour apprendre à franchir les intervalles
et à porter le son ; des trilles , des groupes , des appogia-
turcs et des traits de vocalisation de différentes espèces.
Cette feuille occupe seule pendant un an l'écolier et le
maître ; l'année suivante y est encore consacrée. A la troi-
sième , on ne parle pas de la changer ; l'élève commence à
s le maître lui rappelle sa promesse. La
e s'écoule , la cinquième la suit , et tou-
ç feuille. A la sixième année, on ne la quitta
fcjjraais 011 y joignît des leçons d'articulation,
?5
de prononciation, et cntïii de déclamation; à la tin de
celte année l'élève , qui ne croyait encore en être qu'aux
élémens , fut bien surprix quand le maître lui dit : V a ,
mon /ils, tu n'as plus rien à apprendre: tu e-s ie pre-
mier chanteur de l'Italie et du monde. Il disait vrai, car
ce chanteur était Caffarelti.
Il n'y a plus maintenant dans toute l'Europe une seule
école ou. l'on emploie six ans à enseigner le mécanisme du
chant. Il est vrai que, pour y consacrer un temps si con-
sidérable, il faut prendre les élèves dans une extrême jeu-
nesse , et que les chances désavantageuses de la mue peu-
vent rendre inutile tout d'un coup le travail de plusieurs
années. Les voix des castrats ne présentaient point les
mêmes inconvéniens , et avaient en outre l'avantage d'une
mise de voix naturelle ; aussi ont-ils été les chanteurs les
plus parfaits qu'il y ait eus, lorsque l'opération n'a point
été suivie d'accidens. Si c'est un triomphe pour la morale
que l'humanité ne soit plus soumise à une honteuse muti-
lation , c'est une calamité pour l'art que d'être privé de
ces voix admirables. On ne peut se faire d'idée maintenant
de ce que furent des chanteurs tels que Ballhasar Ferri
et Farinelli.
Le premier, né à Pérouse , au commencement du siècle
dernier, est le même dont J.-J. Rousseau parle avec tant
d'éloges à l'article voix de son Dictionnaire de musique,
et dont il cite le talent singulier de monter et de descendre
deux octaves par tous les degrés chromatiques , avec un
trille continuel , parfaitement articulé , et sans reprendre
haleine, en conservant une justesse si parfaite, que n'étant
point accompagné par l'orchestre, à quelque note que les
instruirions voulussent l'arrêter, ils se trouvaient d'accord
avec lui. Il avait été élevé à Kaples et à Rome , et mourut
fort jeune. On a encore des recueils entiers de vers dictés
par l'euthousiasme qu'excitait ce chanteur divin. Cet en-
thousiasme était général , et se manifesta souvent par des
démonstrations qui tenaient du délire. Quelquefois on fai-
sait pleuvoir sur sa voiture un nuage de roses , lorsqu'il
avait seulement chanté une cantate. A Florence^ où il a,vait
76
été appelé, une troupe nombreuse de personnes de dis-
tfnclion alla le recevoir à trois milles de la ville et lui ser-
vit de cortège. Un jour, qu'il avait chanté à Londres avec
tant d'expression qu'il avait fait répandre des larmes à
tonte l'assemblée, un masque lui offrit en sortant du spec-
tacle une cmeraude d'un grand prix. On a son poitrait
gravé, avec ces mois pour légende : Qui fecit mirahitia
invita, et une médaille frappée pour lui, portant d'un
coté sa tête couronnée de laurier, et de l'autre un cygne
mourant sur les bords du Méandre, avec une lyre qui des-
cend du ciel. Où sont aujourd'hui les chanteurs qui pour-
raient exciter un pareil enthousiasme? On donne, il est
vrai, beaucoup d'argent aux chanteurs; souveut même
beaucoup trop pour ce qu'ils valent; mais voilà tout. Le
prix élevé que nous mêlions à leur talent prouve seule-
ment que ce talent est très rare; d'ailleurs, il n'est que
relatif. Chez le plus habile, tant d'imperfections se trou-
vent à côté de quelques qualités, qu'on n'aurait point
daigné l'écouter au temps où brillaient les grands chan-
teurs dont je parle.
Eh ! qui peut mieux prouver la puissance de ceux-ci que
la fortune protligieuse de ce fameux Carlo Broschi , si
connu sous le nom de FarineUi. Né à Naples, le af| jan-
vier 1706, il fit, dit-on, dans sa jeunesse une chute qui
obligea de Je soumettre à la castration. Ses maîtres furent
Scartatti et Porpora, Aucun chanteur n'a possédé une
voix plus flexible, plus sonore et plus étendue; une ima-
gination créatrice, jointe à nue souplesse d'organe à toute
épreuve, le mettait en état d'inventer mille formes de
chant inconnues et ravissantes. L'intonation la plus par-
faite, une agilité incomparable, une adresse inouie dans
les trilles; la richesse et la sobriété des fioritures; une ex-
cellence égale dnns ie style léger et dans le pathétique;
l'art de graduer l'intensité du son selon le caractère qu'il
avait à exprimer; telles furent les qualités qu'on reconnut
généralement en lui. Après s'être fuit admirer en Italie, en
Allemagne , en Angleterre, et même en Franco, malgré
«préjugés qu'on y avait alors contre la musique italienne,
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77
il fut appelé en Espagne , non pour les plaisirs du public,
mais pour cens du monarque.
On sait que Philippe V fut attaqué d'un affaiblissement
et même d'une sorte d'aliénation d'esprit qui le rendit to-
talement incapable d'affaires. La reine, après avoir en vain
fait employer tous les moyens pour le guérir, résolut d'es-
sayer sur lui le pouvoir et les effets de la musique, auxquels
leroiélait fort sensible. Farinelli venait d'arriver à Madrid:
la reine le fit appelerpour chauler dans un concerl, qui
était placé près delà chambre du roi. Aux premiers accent: ,
Philippe parut surpris, ensuite ému. A la fin du second
aïr, il ordonna qu'on fit entrer le virtuose , qu'il combla
d'éloges et de caresses. Il lui demanda comment il pouvait
récompenser tant de talens, et l'assura qu'il ne lui refuse-
rait rien. Farinelli , qui était prévenu , pria seulement le
roi de se faire raser et habiller, ce qu'il n'avait pas fait
depuis long -temps, et de tâcher de paratireau conseil. De-
puis ce temps, la maladie diminua sensiblement, et le chan-
teur eut tout l'honneur de cette cure.
Dès lors le roi ne put plus se passer de lui ; il lui accorda
une pension de quatre vingt-mille livres , et le fit chevalier
de l'ordre de Saint- Jacques. HT éleva enfin à un tel degré
de faveur, que Farinelli était regardé comme son premier
ministre. Le crédit de ce chanteur prodigieux fut à peu
près le môme sous Ferdinand VI , successeur de Philippe;
ce prince ajouta l'ordre de Calatrava a celui de Saint-
Jacques, dont Farinelli était déjàdécoré. On connaît l'aven-
ture du tailleur, qui, lui ayant fait un habit magnifique et
du plusgrand prix, demanda en tremblant, pour tout paie-
ment, la faveur de lui entendre chanter un air. Retiré il
Bologne en 1761 , Farinelli fit bâtir dans ses environs un
palais superbe, où il passa le reste de sa vie, chéri des ha-
bitans de Bologne , visité par les plus illustres voyageurs .
CI toujours aussi simple, aussi modeste dans son opulence,
qu'il l'avait été dans la faveur de la cour. Il y est mort en
1782, âgé de près de quatre-vingts ans.
On peut juger d'après ce qui vient d'être dit, de ce que
devaient être des chanteurs qui excitaient un pareil eu-
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lliousiasmc, dans un temps ofi l'école était si belle et si
pure qu'elle ne produisait que d'habiles artistes. Ce temps
était l'âge d'or du chant. Caffarelli, Élisi, Gizicllo, Mau-
zoli, Victoire Tesi, Fausliue Bordoni , el ensuite Guaria^ui,
Guardncci, Pacchiarolli , Harchesi , Gabrielli , Miiigutti,
de Amicis, etc., ou contemporains ou successeurs de ces
chanteurs admirables, ont eux-mêmes donné l'idée de la
perfection, chacun en leur genre. Les personnes qui ont
entendu (kescentini peuvent seules concevoir ce que c'était
que cette école dont je parle. On se rappelle que , dans la
cour de Napoléon , qui ne passait pas pour être sensible à
l'excès, ce virtuose fit couler les larmes du prince, des
courtisans et de toute l'assemblée dans le rôle de Romeo.
Il n'y a point de termes pour exprimer un tel degré de ta-
lent. Veluli est le dernier chanteur de cetle école , mais il
ne parait pas qu'il ait jamais égalé ses devanciers.
La chute des écoles et l'absence des castrats ont com-
mencé la perte du chant en Italie; les fioritures écrites
l'ont achevée. Outre que ia mise de voix n'est plus guère
connue que de nom, outre que les études propres à assu-
rer l'intonation ne sont plus pratiquées, outre que les
chanteurs ne jbni plus de distinction entre les différent
caractères des morceaux, pour y approprier les ornemens ,
ces ornemens sont empreints de tant d'uniformité que le
charme de la variété a disparu complètement. Quoiqu'on
entende, il semble presque toujours que ce soit le même
airelle même chanteur. La prodigalité des points d'orijue-
contribue encore à affaiblir la physionomie des cantitènes,
et les points d'orgue sont placés avec tant de symétrie
qu'on sait d'avance où ils arriveront et ce qu'ils seront.
D'ailleurs, l'exécution de tout cela est toujours plus ou
moins incorrecte ; nos meilleurs chanteurs ne sont bous
que relativement. M™ Fodor , par exemple , avait naguère
un charme extrême dans le timbre de la voix; il lui suffi-
sait d'ouvrir la bouche pour satisfaire l'auditoire; mais
sous le rapport de la vocalisation , de la prononciation , de
l'articulation el îles proportions du phrasé, combien ne
laissait-elle pas à désirer? SI"* Fauta, susceptible d'cxal-
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talion et d'ïnspiralions heureuses, douée même de la l'a-
cuité d'inventer dans les ornemens , montre à chaque in-
stant quale défaut d'études préliminaires trahitsa pensée,
et qu'elle sent mieux qu'elle ne peut exécuter. Sa voix est
inégale, souvent dure, et presque tous ses Iraits laissent
a désirer pins de perfection. M*' Mombelli a beaucoup de
verve; elle domine la scène dans les morceaux d'ensemble;
elle entraîne par sa chaleur : mais elle hasarde ses traits
plutôt qu'elle ne les fait; sa manière est Irop uniforme,
et son organe manque de sensibilité. M" Pisaroni connaît
l 'art du chant beaucoup mieux que les cantatrices que je
viens de nommer; on retrouve en elle les dernières traces
delà helle école italienne ; elle dit fort bien le récitatif;
mais elle s'estfailunc voix factice excessivement désagréa-
ble , et ses fioritures sont quelquefois de mauvais goût.
Les hommes ne sont pas plus exempts de reproches.
Sfitli, avec une puissance d'organes rare , avec de la cha-
leur et du sentiment dramatique, n'a malheureusement
point égalisé les cordes de sa voix , et n'a point appris à lui
donner de souplesse dans les traits. Zucclielli , que la na-
ture a pourvu d'une voix douce, sonore, et d'une certaine
facilité de vocalisation , manque de verve, de scaliment
et de slylc. Garcia réunit loutcs les qualités d'un grand
chanteur; 'mais l'éducation première lui a manqué. Un-
bini connaît les élémens du chant ; il est pur et gracieux,
mais il manque de force. Je ne connais ni David ni La-
hlache , et ne puis conséquemment en parler que par tia-
dilion. Il parait que le premier joint de grands défauls à
de grandes qualités, condition ordinaire des meilleurs
(hauteurs de nos jours; le second est, dit-on , parfait en
son genre ; je le désire plus que je ne le crois. Il faut tant
de choses pour faire un chanteur parfait, et si peu de
liment me dit que nous ne verrous plus de ces merveilles
de l'ancienne école, rien enfin qui approche de Crescen-
tini. Les circonstances sont trop défavorables; il n'y a
plus do modèles, plus d'enthousiasme , plus de goût, plus
de conscience surfont, et c'est là ce qu'il y a de pis. Jl n'y
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a plus de chanteur qui chante pour lui ; il n'y a plus de
compositeur qui compose pour se plaire. L'argent, tou-
jours l'argent! voilà le but de tous dos artistes : jamais
celle pensée dominante n'a rien produit degranw.
Les conditions du chant français diffèrent a certains
égards de celles du chant italien. Une voix pure et sonore,
une prononciation nette et régulière, et de l'expression
dramatique, est à peu près tout ce qu'on a désiré en
France daus un chanteur pendant long-temps. Un préjugé
peu raisonnable avait fait considérer les traits et les orne-
l'opéra comique s'est affranchi des entraves qu'on lui op-
posait sous ce rapport; mais l'opéra avait résisté jusqu'ici :
il vient de céder enfin à l'empire de la mode, et il a bien
fait.
Cependant il faut se garder de tomber d'un excès dans
un autre : il est bon de conserver à la musique d'un pays
sa physionomie particulière. Une imitation servile n'est ja-
mais une conquête. L'usage raisonnable des ornemens est
utile : l'excès serait nuisible. Il y a dans nos habitudes
théâtrales un penchant ii la raison qui exclut ces morceaux
de placage qui n'ont d'autre but que de montrer la flexi-
bilité d'un gosier. Admettons les traits et toute espèce
d'ornemeus, mais ne bannissons pas nos formes dramati-
ques , auxquelles il ne manque souvent que des chants plus
faciles et plusolégans. Ne multiplions pas trop le récitatif,
mais n'oublions pas qu'il y a telle phrase de Gluck qui est
plus susceptible d'effet que cent points d'orgue. Ën un
mot n'ayons point de système.
Ou sent combien le domaine du chanteur français s'a-
grandit parla fusion dus formes italiennes avec les nôtres,
et combien son art devient plus difficile. Nous avons eu
un modèle de la perfection de ces genres réunis : ce fut
Garai. Mon dessein n'est point de m'élendre ici sur le mé-
rite de ce chanteur étonnant ; trop d'artistes cl d'amateurs
l'ont connu pour que je nesois pas compris en me bornant
à le citer. Un grand chanteur français sera celui qui aura
la mise de voix do Garai, sa flexibilité, sa justesse; qui
6i
phrasera comme lui, qui respirera comme tut, qui pronon-
cera comme lui , qui aura son goût, sa fécondité dans le?
ornemens , et Surtout qui sera doué d'un sentiment aussi
Quand l'Ecole royale possédera des Voix, il faudra s'at-
tacher de préférence aux sujets chez qui la mue se sera
opérée de bonne heure , car il est rare qu'un homme pris
à vingt ans devienne un chanteur habile. La mise de voix
est alors à peu près impossible; les organes ont acquis trop
de roideur. Il faudra surtout s'attacher à former de bonne
heure l'élève à une justesse rigoureuse, car c'est un des-
moyens d'effet les plus puissans* Combien y a-t-il de
chanteurs à la mode qui pourraient subir l'examen de
l'intonation parfaite sur tous les degrés chromatiques de
l'étendue de sa voix? On se contente presque toujours
d'une intonation a peu près juste ; de là, l'espèce de gêne
que l'auditeur éprouve à son insu. M" Barbier-Vatbonne
ne possédait qu'un beau timbre et une justesse naturelle
admirable; aussi a-t-elle toujours fait une grande impres-
sion Sur le public, quoiqu'elle fût d'ailleurs une cantatrice
médiocre ; M"" Duret a possédé les mêmes avantages avec
plus d'art; malheureusement sa respiration était courte et
vicieuse.
Le moment est critique potlr la France : il faut se hâter,
car il reste encore quelques traditions ; dans quelques an-
nées, il n'y aura plus rien. Professeurs I sentez toute l'im-
portance de vos fonctionsl l'art du chaut est ce qu'il y a
de plus difficile ; ce n'est pas trop de tous vos soins unis à
d'heureuses dispositions. Agens principaux de l'autorité !
ne négligez rien pour trouver promptement des voix : dans
dix ans il serait trop tard. Sortez tous de l'apathie où vous
êtes plongés , si vous ne voulez enfin que le mal soit sans
remède!
FÉTIS.
a* vol. . . 8
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89
. EXPOSITION DES PRODUITS DE I/IKDUSTRIE.
PIANOS
- DE MM. "PFEIFFER, ROLLER ET BLAKCHET» PLEYEL ,.
. . DlIiTZ, KLEPFER, btc.
■ la Revw musicale a di'jà donné un résumé de l'état
actuel de la fabrication des pianos en France ' ; mais telle
est l'aclivilé de nos facteurs , telle est la progression rapide
.iksiperEsoUonuemeus qu'Us introduisent dans la fabri-
cation de ces instrumens, qu'en moins de six mois, ibj
m'obligent à revenir sur cette matière par la richesse des
produits qu'ils ont mis à l'exposition. Celte richesse est si
gfaijdet que pour rendre à chacun la part de justice qui
lut est'due, mop embarras est à peu près semblable à ce-
lui de la commission chargée de distribuer des prix ; car il
y a dans ce genre de fabrication des qualités positives et
relatives; outre les questions de sonorité et de mécanisme,
il y a des considérations d'économie, de facilité ou de diffi-
«uJ«é»l'ompl9eemeDt(résultantduvolumedesmstrumen8],
ife solidité et d'avantage ou de désavantage pour l'exporta-
tion, considérations qui méritent d'Être examinées, et qui
m'obligent à entrer dans des détails fort circonstanciés. Je
«ummencerai par les pianos dont la forme est lu plus
utweli*, et qui ne présentent pas d'abord d'innovations
♦ojHiibles 4 1,'ceil-
Damai ceux-là, les pianos cadrés, à deux et à trois cordes
se font d'abord remarquer, car ce sont ceux dont l'usage
«M le plus répandu, au moins en France. C'est à les per-
£iotionner que la plupart de nos bons facteurs se sont alta-
cht's.On a vu dans la île- vue musicale ce que cet instrument
f ut dans son origine ( voyez le n° i, page 3a ) , et quels furent
ses progrès. t)n a vu aussi que la sonorité de l'instrument
a changé complètement par l'abandon des tables d'har-
monie courtes, auxquelles on substitua les tables longues,
du marteau à échappement, qui attaque
In note avec une énergie que l'ancien petit marteau ne pou-
Ce fut en iSoU que MM. PfeifTer etPelzold mirent à l'ex-
position des produits de l'industrie des piano» de forme
verticale à longue table d'harmonie, avec un nouveau mé-
canisme qui, par un mode particulier d'échappement, dou-
blait la puissance du marteau. Le nouvel instrument réu-
nit les suffrages des professeurs du Conservatoire, et valut
à ses auteurs un encouragement du gouvernement.
Ce résultat les conduisit à une découverte beaucoup plus
importante , qui consistait à appliquer au piano carré ta
tottguetahted'harmonicellemécani&me à échappement,
qui parait devoir en être inséparable. Dès co moment, on put
prévoir que les conditions principales de sonorité étaient
fixées à l'égard du piano carré. Ce nouveau genre de fabri-
cation, qui, depuis, a été adopté dans toute l'Europe, doit
être considéré, non comme un perfectionnement de l'an-
cien , mais comme une 'invention; car, à cela près de la
forme du meuble et île l'emploi du clavier, la, construction
intérieure était absolument différente de celle des pianos
préexistans.
Pour mettre en rapport les dimensions du corps sonore
avec l'effet qu'on pouvait en tirer, il fallait augmenter le
volume des cordes ; dès lors la force de traction de celle-ci
l'augmentant, il fallait songer à assurer la solidité de l'ins-
trument; car, l'action opérée par la tension sur un piano
à trois cordes égale celle qui résulterait d'un tirage dd
sept mille livres de poids. Néanmoins il fallait éviter d'al-
lourdir considérablement la charpente du fond et des som-
miers, parce que cet alourdissement aurait pour e(Tct
d'éteindre en partie les vibrations, et, d'autre part, ajoute-
railAun appareil déjà volumineux un poids fort incommode.
C'est à éviter tous les inconvéniens et à atteindre le maxi-
mum de sonorité , de solidité et d'élégance possibles que
M. Pfeiffer s'est attaché constamment depuis. Une foule
d'essais ont été tentés par lui , et chaque année a été mar-
quée par quelque perfection nement nouveau. Dès l'expo-
sition de 1819, lerapporldujury s'exprimait en ces termes
à l'égard de ce facteur:
«M. Pleîffer a perfeclionné le piano carré, qui jusqu'à
olui élait demeuré inférieur .iu piano à queue. Par sa
'construction, le piano carré élait borné aune courte table
a d'liarmoiiïe, 'Jlf. Pfeiffer, le premier, l'a fait à longue
«table, avec une mécanique qui règne sur une seule ligne
«d'un bout à l'autre du clavier; il a aussi introduit, dans
■ les détails de la mécanique, des améliorations qui rendent
« le son plus net. Les pianos carrés de M. Pleiffer sont re-
i cherchés dansles pays où, jusqu'à ce jour, on ne seser-
«vait que de pianos à queue. ■
Depuis l'époque où ce rapport a été fait, des améliora-
tions partielles ont été faites, et les instrumens de celle
fabrique semblent avoir atteint le point de perfection de
leur forme, tant par leurs qualités positives que par celles
qui ne sont que relatives. J'appelle qualités positives celles
qui concernent la sonorité, l'égalité, la légèreté, et la soli-
dité du mécanisme ou de la masse de l'instrument ; les qua-
lités relatives sont celles qui résultent de la modicité du
prix et des avantages que les instrumens présentent pour
l'exportation. Sous le premier rapport, si l'on examine le
piano à deux cordes, petit modèle, celui à deux cordes,
grand patron, celui à trois cordes et celui à queue, on voit
que chacun d'eux remplit toutes les conditions désirables.
Les pianos à deux cordes ont même un volume de son qui
tient du prodige, attendu l'exiguité de leurs proportions.
4 l'égard du prix et des avantages pour l'exportation , ces
instrumens ne sont pas moins satisfaisans. Les pianos de
M. Pfeiucr sont à peu près les seuls instrumens français
de cette espèce qui soient admis en concurrence avec les
produilsjies fabriques de Vienne et de Londres, dans les
Pays-Bas, la Hollande et l'Amérique.
Je trouve parmi les pianos ordinaires des facteurs expo-
sant cette année, ceux de MM. Pape, Roller et Blanche t ,
Philipp, Caidon, Klein et de plusieurs autres; ceux de
MM. Pape, Roller et Blanchet me paraissent mériter une
attention particulière. M. Pape n'a rien qui lui soit propre
dans la facture de ses pianos; ce ne sont en général que
des imitations du système de M M. Pelzoldet Pfeifter;mais
la qualité de son est agréable, quoiqu'elle soil un peu lour-
de et empalée. M. Itoller n'est pas un simple ouvrier, com-
me tant d'autres facteurs ; c'est un artiste qui connaît et
qui raisonne les principes qui le guident dans sa fabrica-
tion. L'addition du mécanisme (le la transposition infé-
rieure ou supérieure aux pianos ordinaires, es! ce qui dis-
surlout à L'instrument qu'il nomme piano droit qu'il pa-
raît avoir attaché Ions ses soins. Cet instrument rnérile que
nous en analysions los délails.
C'est une espèce de piano vertical dont la hauteur n'ex-
cède pas celle des pianos carrés; elle est de 98 cenlimètres
(3 pieds moins a pouces environ ).
Sa base est un parallélogramme rectangle de 1, 78 sur
aa centimètres; le dessus est de la mémo forme, maïs
moins long;' le parallélogramme est de 1 , 5G sur 22.
Le clavier en avant-corps, porté sur deux consoles, ne fait
saillie sur l'une des grandes faces que de aa autres cen-
timètres, en sorte que l'épaisseur totale est de 44 centi-
mètres ou îG.pouees.
La forme de ce piano du reste est entièrement symétri-
que ; un vide circulaire ménagé dans le bas de la caisse
eu allège l'aspect géométral , et laisse plaee aux pieds de
l'exécutant, qui s'assied sur une chaise ordinaire.
Un piano de concert a communément pour dimensions
1, 88 sur 84, ce qui donne eu surface 1,5^ ,99.
Le piano droit n'occupe réellement qu'une sur-
face de 1, 78 sur o , sa ( puisque le clavier étant
isolé ne géne en aucune manière ), ou o,5g, tlj.
Cet instrument ne tient donc que le quart environ de la
place d'un piano carré, avantage qui n'est pas à dédai-
gner, maintenant que les salons sont si petits. Examinons,
quels sont ceux de l'instrument eu lui-même.
Les cordes sont diagonales , elles s'accrochent au côté
droit de la caisse, et les chevilles trois par trois, ou deux
par deux, suivant que lu piano esta trois ovfà deux cordes,
sont placées près du bord supérieur au-dessus du clavier.
La courbure du sillel près de ces chevilles , et celle du
86
chevalet sur la table d'harmonie ont été calculées do sorte
que les marleaux, frappant au point voulu , puissent être
à peu près égaux en hauteur. Les touches sont égales en-
tre elles comme dans, les pianos à queue; le tact peut cou-
séqiiemmeiit être égalisé avec facilité. (.-
L 'échappe ment est aussi simple, que celui d'un piano
ordinaire ; il n'y a de différence qu'un petit ressort place
devant le marteau pour le reebasser sur sa barre de
repos, parce qu'étant presque vertical, ton propre poids
ne l'y ramènerait que d'une manière lente et indécise.
L'attrape-marteau est fort ingénieux ; au lieu de le pla-
cer ku lalon du marteau, comme cela se pratique ordinaire-
ment, on a placé l'attrape en avant du chevalet et de
l'échappement sur la touche, et un autre est fiohé de
manière à iie pas cogner sur l'échappement derrière le
manche du marteau. Quand celgUoi retombe , la touche
n'est pas encore, revenue à «on repos et les deux attrapes
vienuentsc prendre mutuellement. . ■
L'étquffoir m ou té sur un pivot , comme le matteau, a
la formed'une équerre oblique, qui est enlevée à l'angle
par un pilot qni descend sur l'extrémité de la touche; en
sorte que ta partie qui porte le molleton s'éloigne des cor-
des et les laisse vibrer aussi long-temps qu'on a le doigt aur
la note.
Pour régler le frappement des marteaux , l'échappe-
ment porte un petit laiton taraudé que l'on tourne ou
détourne. L'opinion de M. Roller est que le timbre des
pianos verticaux est plus agréable que celui des antres
pianos; que les vibrations en sont plus pures et plus
nombreuses, parce que, selon lui, le chevalet n'est pas
écrasé sous le poids des cordes ; que l'action de la pesan-
teur est nulle sur la table d'harmonie elle-même , et que
c'est la cause de la supérlorîtédu son du piano vertical
sur celui du piano horizontal'.
{•t) Je pense q^acet Égard M. Boiter est dans l'erreur. Que l'action
soit moindre, cela peut se conceroir; mais qu'elle soîl nulle, cela es!
impossible, car le clicvalel êleïanl nécessairement la corde pour lui
donner l'inlonalion et la sonoiite, celle-ci fuit un angle avec le point
Si d'un autre ootë, dit M. RoUer, on remarque; V qu'il
n'est pas nécessaire de pratiquer une ouverture entre le
sommier et la lable pour laisser frapper le» marteaux ;
V Que les chevilles très voisines delà partie sonore des
cordes son t bien plus faciles à fixer que dans le piano
carré ordinaire sans fatiguer les Cordes ; ■;■'>■
o° Que lô choo le plus violent du marteau ne peut, comme
dans celui-ci, couper la-corde à la pointe qui sert de uœuil
acoustique sur le sillet, im ne balance pas à donner encore
la. préférence au piano ïeriîcal sous le rapport de l'accord
et de la solidité. .•tmî-.'îi- ■
Cependant on regrette qu'un instrument aussi parfait
ait le grand inconvénient de ne pouvoir se placer que
contre les murs des appartenons, d'obliger par censé"
quent le pianiste de tourner le dos à l'auditoire, -et rie
refouler la voix dans lespoumons des personnes qui chau-
lent en «'accompagnant:' 1 * ■* ■
On regrette aussi que le poids et la longueur des triangles,
qui transmettent le mouvement de la touche au marteau ,
nuisent à l'énergie de l'échappement, et par suite à Tin tén-
uité comme aux nuances délicates du's'oti.
Le piano droit réunit tous les avantages que l'on vient
d'énumérersans avoir les défauts qui avaient Uni par rebu-
ter les plus grands partisans des pianos verticaux. Il peut
se mettre dans an salon, tourné vers les auditeurs, en
sorte que les exêcutans ne seront pas pins masqués qu'à!
un piano horizontal. Le prix de ce piano n'est pas "plus
élevé que celui du piano ordinaire.
Il tient très peu de plaoe, sans que la force de son har-i
monîeën soudre; car un piano droit à deux cordihs rivalise
d'attache, et opère une action qui cat d'autant plus grande t|iii! l'angle
est .plus aigu, que le diapason est plu» élevé, et que le volume île la
curde est plu s considérable. La position droite ou verticale dé l'instru-
ment ne peut détrniro cette action ; je dis même plus ; c'est qit 'il faut
qu'elle extae , «l que c'est d'elle que résulte la sonorité. D'ailWra , le
marteau opérant , dam le piano rerticsil, un refoulement sur la corde,
■u lieu de la pousser en 'haut, comme dans les piauos ordinaire, il y a
nrcrssairciiienl une action mniiirnlanée, faible a la Térilé , muis qui est
réelle, tandis qu'elle est à peu pies nulle dans U forme lioriioutsle.
avec uu bon piano à queue à trois cordes. Cet essai a été
fait, par plusieurs artistes distingués, dans le magasin de
MM.Rotleret Blanchet.
■ Il doit donc être recommandé à l'attention des artistes
et des amateurs qui visiteront les produits de l'industrie ,
comme un instrument sinon absolument digne de leurs
suffrages, au moins comme un heureux essai qui mérite
leurs conseils, pour arriver au but que les auteurs se pro-
posent, savoir: l'aire le meilleur piano possible, en rédui-
sant autant que cola se peut le volume du meuble qui le
renferme.
( La suite au prochain numéro. )
FÉTIS.
NOUVELLES DE PARIS,
ODÉON.
OUVERTURE DU THÉÂTRE.
& #(tri«t. — &t SfrrGwr U Sktàt.
Après beaucoup d'incertitudes sur le sort du tbéàtre du
l'Odéon , on vient de le rendre à son ancienne destination.
Ce n'est point qu'il n'ait été fait des efforts pour substituer
le mélodrame à la comédie et à l'opéra sur ce théâtre ; il
paraît que beaucoup d'intrigues ont été mises eu œuvre
pour y placer le spectacle de la Porte- Saint- Martin. On
attribue à la persévérance de deux gens de lettres distin-
gués l'abandon de ce projet,
. Il y a dans la position du Ibéâlre de l'Odéon un vice
essentiel que tout le talent ou tout le bonlieur d'un direc-
teur ne vaincra que difficilement. Des sucres comme celui
de Robin des Bois^ont des événemens fort rares au théâ-
tre : une bonne entreprise en profite quand elle les trouve,
maie doit savoir marcher sans eux. Si elle se repose sur..
□igifeed t>y Google
ses lauriers, elle esl perdue : il lui faut des lendemains nu
succès (lu jour. Quand l'Odéon rencontre des jours heu-
reux, ses lendemains sont nuls. L'ancien dircclcur, Ber-
nard, l'a senti, et, après quelques chutes , s'est déridé
sans peine à céder son privilège, se contentant de garder
les bénéfices du chef-d'œuvre de Weber. 'Son premiersuc-
censeur n'a point été heureux; le second le sera-t-il ? nous
le désirons plus que nous ne l'espérons.
D'abord , nous lui demanderons s'il a fait tout ce qu'il
devait faire pour donner à l'ouverture de son théâtre tout
l'éclat nécessaire ! Il aurait pu employer le long loisir
d'une clôture de plus de deux mois à préparer des non-
l'insouciance de la population du faubourg Saint-Germain.
Au lieu de cela, il choisit, pour attirer le public à la pre-
mière représentation , une tragédie {ie Paria), qui, mal-
gré ses beautés de stylo, n'est point de nature à piquer la
curiosité du public, et le plus usé de ses opéras, te. Bar-
bier de, S êvitle. Outre cela, pas un acteur nouveau, pas
l'ombre d'un talent. La môme faiblesse ; la morne nullité
d'exécution.
M. Caslil-Blaze a en portefeuille plusieurs traductions
prêles; pourquoi ne pas les donner? On a répété long-
temps les Deux Figaro de M. Carafa; pourquoi u'a-t-on
pas joué cet ouvrage ? On parle de plusieurs opéras en trois
actes; qu'attend-ou pour les monter? Est-ce qu'on garde
tout cela pour une meilleure occasion qu'une ouverture
solennelle? Que M. Sauvage y prenne garde! tout dé-
pend du début dans ce pays ; on se dépêche de juger , et
quand l'opinion est faite, il n'est pas facile de la réformer.
Dans la reprise du Paria, on a supprimé les choeurs
qui avaient été composés par M. Aimon. Ces choeurs
étaient faibles à la vérité; mais il nous semble que le théâ-
tre de l'Odéon étant le seul où l'on trouve la tragédie et
l'opéra réunis, c'est renoncer à une partie de ses avanta-
ges, que de ne pas réunir dans un même ouvrage des
moyens d'exécution qu'on chercherait vainement ailleurs.
On pouvait retoucher ces chœurs; on pouvait en faire
d'autres, et du moins on aurait offert au public m qu'il
ne peut entendre ni au Théâtre- Français, ni à Feydcau. Il
nefautjamaisdéuaignerlesspécialités. . , t
Quoique déjà l'orchestre de l'Odéon ait perdu une partie
de sa verve et de son brillant, c'est cependant ce qu'il
y a de mieux dans l'opéra qu'on représente à ce théâtre.
M™* Schutza du sentiment musical , et peut être fort utile
dans certains ouvrages, quoique sou chaut soit plein d'in-
corrections; main son extérieur, le caractère de sa vois,
et la singularité de sa prononciation , la rendent peu pro-
pre au rôle de Rosine qui demande tant d'élégance et de
légèreté; Péronnet est faible dans le comte, et Mondon-
ville est lourd dans Figaro. En définitive, le personnel
u'est pas satisfaisant. Il n'y a donc de moyens de succès
que par les nouveautés; il faut les multiplier, ou renoncer
an dessein de soutenir ce théâtre. L'affiche promet bçaur
coup de choses. Mous verronsbien. ■ ■ ■
,'. , THEATRE DES NOUVEAUTES.
FIGARO,
.','.[[■.''■ QU LE JOUR DES MOCES. "' " '.
Que («.proposaient les gens de lettres qui ont arrangé
la spirituelle comédie de Beaumarchais, telle qu'on la voit
maintenant au théâtre des Nouveautés? Voilà une ques-
tion qu'il n'est pas facile de résoudre. La pièce originale
ne peut pas être jouée sur nos théâtres français ; MM. Dar-
win ont essayé, dit-on, de lever Vemiàrgo qui s'oppose
à su représentation > en la purgeant de sa partie politique
et philosophique-; mais ce qu'ils en ont été est précisé-
ment ce qu'on veut entendre : le reste n'intéresse pas,
parce qu'on le sait par cœur. Il y a long-temps qu'on a dit
que les déclamations et les épigramuies du Mariage de
Figaro sont souvent da mauvais goût : le public était à
peu près de cette opinion en 1818; il ne pense plus de
mèmo eo i8a?. Quoi qu'il en soit, MM. Darlois ontréduit
91
la pièce en trois actes, cl ont été obligés d'intervertir soii-
venl Pordre des scènes. D'après les conditions qu'ils s'é-
taient imposées , ils ont fait à peu près tout ce qu'ils pou-
vaient faire. La pièce n'est point amusante ; mais ce n'est
point leur faute : quoi qu'ils eussent fait, elle n'aurait pu
l'êlre.
Si ce n'est pas la comédie de Beaumarchais, ce n'est
pas non plus l'opéra de Mozart. M. Blangini, qui s'est
chargé d'arranger la musique, a bien vu que l'inexpérience
et l'insuffisance des prétendus chanteurs , qu'on mettait à
sa disposition, ne permettaient point de leur confier l'exé-
cution d'un chef-d'œuvre tel que les Nocês de Figaro. 11
a pris le seul parti qu'il y eût à prendre , en évitant une
profanation inutile, et en substituant à (a musique de
Mozart de petits morceaux proportionnés aux petit*
moyens de ses acteurs. En un mot, il a fait une espèce de'
vaudeville, trop long à la vérité, mais où le génie est dit
moins respecté. • ■ 1
Il faut excepter toutefois l'air Non piu andrai, qui sert
de finale au premier acte, au moyen de quelques arrange-
ai ens, l'air délicieux Mon cœur soupire , et le petit chœur
de femmes du troisième acte. L'air de ia calomnie , du
Barbier de Séville, et un chœur tiré dt» finale du second
acte de Léocadie sont aussi intercalés dans la pièce ; le
reste est composé , comme nous l'avons dit , de petits airs ,
de couplets , de duos , et même de morceaux d'ensemble
composés par M. Blangini, pour ses chanteurs, si ckanA
leurs il y a. Ce sont de terribles gens que Messieurs et Da-
mes des Nouveautés! A l'exception de la petite .Miller,
pas un d'eux ne parait avoir les plus légères notions de
musique. M™ Albert, la Sontag du lieu, n'est passablé
que par comparaison avec ce qui l'entoure. Elle ne sedonie
pas de l'art de diriger sa voix , car c'est toujours par éclats
qu'elle la jette, et ses intonations son trouvent douteuses.
M"" Miller, qui malheureusement n'a point de voir, con-
naît un peu plus le mécanisme du e liant; mais nous ne
pouvons lui pardonner de dénaturer comme elle le fait
par ses variations de mouvemens l'air M oh cœur soupira,
DigiiizMBy Google
9a
dout le ravissant orchestre est anéanti par son défaut de
mesure. Il y a aussi dans cette pièce une voix qu'on ap-
pelle Camille et qui est fort drôle. Nous disons une voix
et non un acteur , car celui qui en est pourvu nous a pa-
ru être privé totalement d'intelligence et de la faculté de
se mouvoir. C'est cette voix qui entreprend de chanter
l'air de lu calomnie, et qui s'en tire d'uue manière fort
amusante*
Vous avez vu peut-être de ces plaisans de société, dont
l'un déclame pendant qu'un autre fait les gestes : la voix
dont nous venons de parler donne lieu à une scène gro-
tesque du même genre. Tandis qu'elle chante-J'air Non
piu andrai (dont nous ne rappelons point les paroles
françaises), Bouffé, qui n'a point de voix, mais qui sait
se remuer, gesticule pour son camarade. Ce pauvre Bouf-
fé se trouve lui-même dans un grand embarras au troisiè-
me acte: il y doit chauLer une sorte de petit nocturne al-
ternativement à la tierce et à la sixte de la partie de fem-
me; mais sitôt qu'il entend la voix de M" Albert, il lui
est impossible de garder ses intonations et il se met à
chauler à l'octave où à l'unisson.
- Il y a de jolis motifs et une instrumentation suffisam-
ment fournie dans la musique de H. Blangini; mais l'exé-
cution est si effroyable qu'il est impossible que le public
s'en doute. s
—Les troubles du théâtre de l'Opéra- Comique se perpé-
tuent : l'état de choses est même tel qu'il y a peu d'espoir
d'arriver à un arrangement amiable. L'autorité continue
à prendre envers les sociétaires des mesures chaque jour
plus violentes; et ceux-ci ne cessent d'opposer une résis-
tance vigoureuse aux persécutions dont ils sont l'objet.
Deux pièces importantes viennent d'êlre publiées pac
eux: l'une est un mémoire rédige par H. Dupin jeune;
l'autre est uue consultation délibérée et signée parles célè-
bres avocats MM. Petit-Dautrivc , lierrycr, Parqnin,
Mcriliiou, et F. Nicod, avocat aux conseils du roi et à
la cour de cassation.
La puissance des faits et des rai son ne meus est [elle, dans
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93
ces ilenx pièces, qu'à moins d'être aveuglé par des consi-
dérations d'intérêt personnel, on est forcé de se rendre à
l'évidence, et de reconnaître que toutes les règles de la
justice et du droit ont été brisées à l'égard de ces malheu-
reux artistes, et qu'ils sont victimes d'un arbitraire dont
il n'y a point en d'exemple depuis la restauration.
Ce ne sont pas seulement les intérêts des acteurs qUj
sont compromis dans l'état actuel des choses; ceux des
auteurs qui travaillent pour le théâtre de l'Opéra-Comique
ne sont pas moins aventurés. Ces auteurs avaient conclu,
le 13 vendémiaire an X, avec la société de l'Opéra-Comi-
que, telle qu'elle venait d'être constituée par acte notarié
du 8 thermidor an IX , une convention qui avait pour but
de régler les intérêts de chacun. Par l'effet de l'ordon-
nance du 17 juillet dernier, la société, n'existant plus que
du nom , les auteurs ont senti que leur convention n'avait
plus de base, et que leurs droits ne reposaient plus sur
rien. Ils ont en conséquence nommé en assemblée géné-
rale, en date du 14 de ce mois, une commission, qui est
qui est composée de MM. Etienne, Dupaty, PJanard,
Delricu , Boieldicu , Calcl et Fétis, s'est empressée d'écrire
à M. le duc d'Aumont, premier gentilhomme de la
chambre du roi, chargé de la haute surveillance du théâtre
del'Opéra-Comiquc, et à H. le baronde la Bouillerie, mi-
nistre d'état, intendant général de la maison du roi, à l'effet
d'obtenir des audiences pour exposer £ ces hauts person-
nages les dangers de l'état des choses. Nous ferons con-
naître à nos lecteurs les résultats de ces démarches, qui
intéressent si éminemment la situation de la musique dra-
matique en France.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Bebuh , te 8 août. M11* Sontag a chanté pour la dernière
fois au théâtre de Kcenigstadt dans [■ Italienne à A tger. Le
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94
public boudait an commencement de la représentation ,
et se montrait bien plus prodigue d'applauditisemens pour
lo chanteur Spilzeder, qui rentrait à la suite d'uo voyage
de deux mois, que pour la jeune cantatrice qui préférait
iléiinitivement Paris à Berlin. Cependant elle mit tant de
grâce et de coquetterie dans son jeu et dans son chant ,
qu'elle finit par enlever tous les suffrages.
Le corps de musique du deuxième régiment de chasseurs
bavarois* actuellement en garnison a Landau, à obtenu
la permission de voyager en masse , et s'est mis en roule
à travers l'Allemagne méridionale, en donnant des concerte
dans tous les endroits un peu considérables. On vante gé-
néralement l'ensemble , la précision d'exécution et le pro-
fond sentiment musical des quatorze artistes qui compo-
sent celte troupe. Presque tous font entendre alternative-
ment des solos sur leurs instrumens; mais on remarque
principalement ceux de leur chef, M. Kresz, sur le cor à
clefs ( Klappcnhom ). Les morceaux qu'ils exécutent sont
bien arrangés, bien choisis, etse distinguent souvent par
une grande originalité. Ces artistes militaires, après avoir
parcouru l'Allemagne méridionale, reviendront par Franc-
fort, et comptent se rendre au mois d'octobre à Paris.
Bologne. A la Semiramide de Ilossini , l'entrepreneur
du théâtre de celle ville a fait succéder Ponvpeo in Siria ,
musique du marquis Français Sampteri, dans l'espérance
que les] Bojonaifi entendraient avéa plaisir l'œuvre de leur
compatriote: cependaut il n'en fut point ainsi. L'ouverture
a été d'abord fort applaudie, mais dès les premiers mor-
ceaux, le mécontentement du public s'est manifesté d'une
manière non équivoque, et , malgré les efforts de M""Boc-
cabadali et Mariant , deux des meilleures chanteuses de
l'Italie , avant la fin du premier acte , il n'y avait plus de
doute sur la chute de la pièce. . ,
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LITTÉRATURE MUSICALE,
La littérature musicale étrangère est si peu connue en
France, que nous croyons qu'on ne verra pas avec indif-
férence quelques détails sur les principaux ouvrages qui
ont été publiés en Allemagne, en Italie et en Angleterre,
sur cette matière, depuis quelques années. Nous nous
attacherons de préférence à ceux qui présenteront un in-
térêt historique.
Bet Chorai-Geaang sur Zeit der lie formation, etc — Le
plain-cliant du temps de la réformation de Luther, ou
réponse à la question : d'nù vient que l'on trouve quel-
que chose dans les chœurs des anciens, que l'on ne peut
pas atteindre aujourd'hui 3 Pur P. Momimgb , in-4* avec
musique et le portrait de Luther. Berlin, Reimer.
5 rxâ. 13 gravures.
Les causes de la décadence de la musique d'église, en
Allemagne, sont attribuées par l'auteur à la guerre de
trente ans, à la prédilection pour la -musique théâtrale,
et au mauvais goût qui s'était introduit en Saxe. M. Mor-
tùnor fait l'éloge du plaiu-chant des anciens frères Mora-
Ycs^^p|^HflHtoM4^ ]'r supplément
trente-un exemples de chants d'église.
GrundzUge der GescfUchlc der modernen Musîk. — Élé-
mens de l'histoire de la musique moderne. Par Fr.
Stopcl, avec une préface de G. IVchtr, in-Zj". Berlin,
Dunker. 1 rxd.
La première partie de cet ouvrage contient un précis de
l'histoire de la musique depuis Pyllingnre jusqu'à Cuidu
d'Arczzo, et jusqu'à la fui du dix-huitième siècle. ï,,t
seconde renferme, en trois colonnes, une liste des compo-
siteurs célèbres, avec l'indication de leurs ouvrages et des
remarques sur leur mérite.
DiginzMBy Google
Dos Leben der Kùnstterin Mara, c'est-à-dire: vie de
madame. Muu ( célèbre- cantatrice ) ; par C. Gbosheim.
i vol. iu'8°. Cassel, chez Leukuabdt.
Gertrude Elisabeth ScnuiiiLiNG était née à Cassel en i?4ffi
à l'âge de six ans, elle montrait déjà de grandes disposi-
tions pour la magique , et jouait fort bien du violon. En
1755, elle se rendit en Angleterre, quitta le violon et se
voua au chant, dans lequel elle fit des progrès si rapides,
qu'elle s'attira bientôt l'admiration des connaisseurs. En
i7?3, elle épousa un Italien nommé Maua. Peu de temps
après, elle visita les principales cours de l'Europe, celles
de Vienne, de Berlin, de Paris, et, après avoir passé quel-
que temps en Italie, principalement à Turin et à Venise,
où elle luttait avec les plus célèbres chanteurs, elle se ren-
dit de nouveau eu Angleterre. Le dernier concert qu'elle
donna à Londres lui valut a8,ooofr. Retournant ensuite
dans sa patrie, elle y fut accueillie avec enthousiasme, et
partout dans ses voyages à Francfort, Vienne, Berlin,
Saint-Pétersbourg, Moscou, les plus grands éloges luïfu-
rentprodigués. A l'incendie de celte dernière ville , elle per-
dilenun seul jour toutle fruit de ses épargnes. En i8i5,elle
se retira à ftéval où elle se proposait de passer le reste de
ses jours; mais des motifs pécuniaires lui firent, en 1819,
entreprendre de nouveau le voyage d'Angleterre. Enfin en
183 1, elle revint dans sa ville natale , à Cassel , où elle ter-
mina sa glorieuse carrière. (
DigitizGd t>y Google
EXPOSITION DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
DE MM. PFEI F FF. H , ROLLER ET RLANCOET, PLEYEL ,
D1ETZ, KLEPFEIt, htc.
Apbès avoir parlé du piano droit de MM. Roller et Blan-
chel, j'aurai» dû dire un mot, dans le dernier numéro
dû la Revue musicale, du piano oblique, exposé par
MM. Bumler et Froning, qui a également pour objet de
diminuer le volume du meuble en le renversant. Cet in-
strument est un piano à queue , de petite dimension, posé
sur un dos côtés , et le clavier se détache en avant-corps,
mais de telle sorle (pic l'on a dû avoir recours aux tringles
pour porter obliquement les marteaux sur les cordes , in-
convénient grave pour le toucher, et qui rend lea répara-
tions difficiles pour les personnes qui ne seraient point à
portée d'un facteur intelligent. D'ailleurs , le volume du
son est faible à l'excès , en sorte qu'on ne peut considérer
le piano oblique que comme un de ces essais infructueux
que chaque année voit éclore.
MM, Pleyel et compagnie ont exposé deux inelrumons
différens ; l'un est le piano unicordp-, l'autre est le piano
à queuC'barré en fer, et dé barrasse, jle son fond massif.
J'ai fait ressortir les avantages du premier dans mon
article sur les pianos (n° i de la Revue, p. 34); ees avan-
tages résultent, 1° de ce qu'il dispense du soin de cher-
cher dans l'accord du piano des unissons parfaits entre
les diverses cordes d'une même note, unit sont qu'on n'ob-
tient jamais et qu'on ne pourrait conserver long-temps,
y fût-on arrivé; a° de Vfiomog&iiéilé du son qui, n'étant
produit que par un seul corps élastique d'une forte di-
mension , n'est point soumis aux accidens vibratoires de
cordes accolées qui peuvent n'être pas du même volume ,
du même poids, de la même tensiou, ou qui peuvent étro
attaquées inégalement ; 5° et enfin du volume du son,
BoyerlfTha
Statut I.k.^lc
9»
comparativement plus fort que relui des pianos à trois
cordes» conséquence de l'isolement des cordes et de la
liberté de leurs vibrations.
Le piano unicorde offre un phénomène qui prouve
quelle est l'importance des perfectionuemeus qu'on a in-
troduits dans la courbe du chevalet. Four obtenir un sou
très volumineux d'une seule corde, il fallait qu'elle fût
d'unegrosseurbeaucouppius considérable que celles qu'on
emploie dans les pianos ordinaires; maïs ou sait qu'une
corde très grosse ne monte ordinairement qu'avee beau-
coup de difficulté, et qu'on en diminue le volume à me-
sure que l'intonation s'élève. Néanmoins M. Pleycl fait
usage pour les notes les plus élevées du numéro cinq zéro,
et ces cardes énormes montent sans difficulté. Il n'en faut
pas douter, c'est là une des conquêtes les plus importantes
delà facture moderne; car on ne peut obtenir de beaux sons
avec des cordes grêles comme celles dont on faisait usage
dans les anciens pianos. Mais dans les pianos à deux el a
trois cordes, la difficulté se complique , parce que le ti-
rage ou l'action des cordes sur la caisse augmente en rai-
son de leur volume. Pour résister à cette action, il faudrait
augmenter la solidité. Or, on ne le peut qu'en fortifiant
la charpente , el Ton sait qu'ont ru l'allourdissement qui
résulterait d'une charpente trop massive, la sonoréité per-
drait par là une partie de ce qu'elle gagnerait par l'aug-
mentation du diamètre des cordes. Pour porter le piano à
son plus haut point de perfection, sous le rapport de la
sonoréité , le problème à résoudre serait celui-ci : trouver
le moyen de faire usage de cordes excessivement volumi-
neuses, sans augmenter les dimensions du piano ordi-
naire, eu trouvant des combinaisons simples et légères
capables de résister à l'action de ces cordes. Si l'on arrive
jamais à la solution de ce problème , et si l'on parvient à
donner en même temps de la solidité et de la légèreté au
mécanisme, il n'y aura plus rien à désirer; le piano sera
un instrument parfait.
Cependant il est une considération qu'il ne faudrait pas
négliger, la voici : la corde étant très grosse, cinq zOros,
99
par exemple, dans le haut de l' instrument, est-il bien cer-
tain que l'excessive raideur résultant de la tension per-
mette à celte corde, si courte et si grosse, d'enlrer complè-
tement en vibration, et de fournir des sons aussi purs que
s'il y avait une proportion élahlïe en raison des longueurs,
et qu'au lieu de cinq zéros les notes aiguës ne fussent mon-
tées qu'en deux zéros?
Le son du piano unieorde est puissant, pompeux, et égal
en volume a des plus grandes dimensions; mais
ce son flatteur et pénétrant me parait plus convenable à
un harmoniste, àun accompagnateur, à un improvisateur,
qu'à l'exécution des pièces de piano, pour lesquelles il
manquerait peut-être de brillant. Appliqué à l'exécution
de la musique de Mozart, de Beethoven , ou de Haydn, il
e(t excellent; mais les traits brillansdo l'école actuelle ont
besoin d'un son qui se résolve plus promptement.
On peut considérer le piano à queue de MM. Pleyel et
compagnie comme une des meilleurs importations faite»
dans ces derniers temps. Le patron adopté par ces fabricans
e3t celui du fameux Broadwood, de Londres; c'est exacte-
ment le même système, ce sont les mêmes, proportions
et c'est le même aspect : cette importation est une conquête,
car ou sait que les pianos à queue anglais jouissent d'une
réputation d'excellence justement méritée. Au moyeu d'un
barrage en fer qui assure leur solidité, ces pianos n'ont
point de fond, en sorte que les vibrations de la table souore
se propagent en-dessous comme au- dessus. Le son est plein,
volumineux, onctueux, parfait, enfin, pour qui ne préfère
pas l'éclat de la sécheresse à la rondeur et au velouté.
Les pianos de M. Dietz fils sont de deux. sortes; l'un est
un piano à queue, à quatre cordes; l'autre, qui rappelle un
peu le piano triangulaire de MM. Pfeiffcr et Petzold par sa
forme, en diffère cependant essentiellement, comme on
le verra tout à l'heure.
On sait par expérience que l'Intensité du son d'un piano
n'augmente pas en raison du nombre de ses cordes; ainsi
il s'en fant de beaucoup que deux cordes produisent un
volume de son double d'une seule; la proportion s'affaiblit
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bien davantage flans les pianos a trois cordes ; enfui il est
permis de croire qu'une quatrième corde n'augmente lé
volume de sou que d'une manière insensible; |)eut-ètrc
même plusieurs causes rendent-elles l'augmentation nulle,
et l'addition nuisible sous de certains rapports. Je m'ex-
plique.
Quelque soin qu'où ait apporté à régler la course du
marteau de manière à lut faire frapper les cordes avec
égalité et sur un même plan, les froltemena inévitables ,
les variations de l'atmosphère (qui influent si puissam-
ment sur les dimensions des matériaux), et une foule d'ac-
cidens qu'il est impossible de prévoir et de prévenir, dé-
vangent communément assez le mécanisme pour que le
marteau ne frappe qu'inégalement les diverses cordes sou-
mises à son action. 11 résulte de là que toutes les cordes ne
résonnent point avec un égal degré de forée. D'ailleurs,
quoique du même numéro, toules les cordes d'une même
note ne vibrent pas de la même manière , car elles n'ont
pas lotîtes le même poids, le même volume , la même ho-
mogénéité, ni par conséquent la même tension.
Ce n'est pas tout. On sait que le son n'est que l'ébranle-
ment de l'air produit par le choc des corps. Les ondes so-
nores ou les couches d'air réagissent de proche en proche
sur le corps qui les a mises en mouvement, et éprouvent à
leur tour de nouvelles impulsions; ces alternatives se ré-
pètent en s'afl'aiblissant jusqu'à ce que tout rentre dans
l'état de repos, et que la résonnance cesse. Or, une question
ne présente : les ondes sonores, mises en mouvement par
chaque corde en particulier, se prêtent-elles un secours
mutuel, ou s'affaiblissent-elles en s'entrechoquant et en
se pénétrant réciproquement? et dans le cas où elles s'af-
faibliraient, quelle compensation d'intensité le son tire-t-îl
de l'augmentation d'ébranlement de la lable sonore pro-
duite par un plus grand nombre de cordes? Voilà des con-
sidérations délicates qu'on éclaircira pcut-clre par des ex-
périences analogues à celles de Chladni et de M. Savart,
pour vérifier la régularité des mouveinens vibratoires de lu
abie,en augmentantsuccessivemcutlc nombre dés cordes
à l'unisson.
C'est précisément cet unisson qui est difficile à obtenir
en multipliant les cordes, et c'est là un lie pins grands ïn-
convéniens de leur multiplicité. L'oreille peut saisir le
rapport exact de deux cordes à l'unisson ; elle éprouve beau-
coup plus de difficulté «'il s'agît de trois, et il parait à peu
près impossible déjuger de qualre, parce une la corde
qu'on vient d'accorder, et qui doit servir de point de com-
paraison avec les'autres, n'a fait quelquefois que s'étendre,
et reprend sa première position parla percussion du mar-
teau pendant qu'on en accorde une autre.
Ce sont ces difficultés que M. Dîelz fils a voulu résoudre
par l'expérience : voici ses résultats. Son piano à queue n'a
point en effet un volume de son proportionné a l'emploi
de ses moyens de production, du moins autant q*ic j'en ai
pu juger dans l'emplacement extrêmement défavorable où
il se trouve à l'exposition. A l'égard de l'accord, M. Dietz
croit que la difficulté de l'obtenir est moindre qu'on ne le
croit communément; d'ailleurs il pense que celte difliculté,
si elle existait, serait compensée avantageusement par la
solidité de cet accord une fois obtenu, attendu que le mar-
teau frappant sur une surface considérable, fatigue moins
les cordes que dans le piano ordinaire.
Mais le piano de M. Dietz est surtout remarquable par
l'heureuse application d'un principe incontestable. Consi-
dérant que les vibrations de la table sonore et des cordes
sont d'autant plus franches que toutes les autres parties de
l'instrument eu sont dépourvues , il s'est attaché principa-
lement à rendre inerte , autant que cela se peut , le som-
mier de chevilles , et pour cela , il fuit ce sommier en fer
fondu, doublé en bois. Dans le même dessein, il faut aussi
le sillet en cuivre, afin que les cordes soient appuyées sur
un corps beaucoup plus dur que le bois. Il résulte de là
que le coup de marteau ne se fait pas entendre avant le
son, ou conjointement avec lui , comme cela arrive dans
lesaulres pianos, et que les siens se prêtent à jouer parfaite-
ment doux, sans qu'aucun bruit étranger se mêle au son. Le
mécanisme du marteau présente aussi une simplification
bien entendue de la mécanique anglaise, el son échappe-
mciitext combiné de manière à obtenir lu plus grande pré-
cision.pos5iblc. Si M. Dietz parvient à donner à ses pianos
un volume de sou plus considérable , nul doule (jue ses.
îastramens n'acquièrent une brillante réputation parmi le»,
amateurs et les artistes.
L'autre piano de ce fadeur, auquel il n'a point encore
été donné de nom, parce que sa forme ne présente aucun
rapport précis avec une figure quelconque de géométrie,
offre, dans sa partie opposée au clavier, une ligue droite
de sixpieds de longueur. Ses côtés sont une courbe alterna-
tivement concentrique et excentrique, et son clavier est eu
avant-corps. La surface totale de l'instrument n'est pas
beaucoup plus considérable que celle d'un piano carré à
six octave^ et demie et à trois cordes. C'est à remplacer ce
dernier que M. Dielz le destine, mais la disposition de ses
diverses parties est telle que ce n'est en effet qu'un piauo a
queue d'un moindre volume, car le sommier des chevilles
tage de celte disposition consiste à permettre de coller la
table sur ses divers côtés, et conséqucmmeul à lui donner
une grande solidité, au lieu délaisser un de ses côtés libres
et appuyé sur une légère traverse, comme on est obligé rie
le faire dans le piano carré ordinaire , à cause du passage
qu'il faut livrer au marteau pour qu'il attaque les cordes.
Les antres principes de SI. Dieta ont leur application dans
ce piano, comme dans le piano à queue. La médiocrité du
volume de son est encore le reproche que j'adresserai à co
facteur à l'égard de ce piano; tontes les parties en sont
évidemment bien combinées, mais ce son n'a pas l'ampleur
qu'on désirerait.
Les pianos harmonicordes <te MM. Klepferet compa-
gnie méritent une attention particulière, parce qu'ils sont
eu quelqucsorte le renversement du piano carré ordinaire.
Ces pianos sont d'origine suisse. M. Kohi, leur inventeur,
considérant le désavantage qu'il y a à laisser un côté de la
table libre, comme dans le piano carré, et de frapper la
corde eu la soulevant de son point d'appui , a imaginé de
(lier les cordes dessous la table et de la frapper consé-
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io5
q nomment conlre la tableau lien de les pousser en liant.
De celte manière , la table est collée et appuyée avec une
égale solidité sur tous ses cùlés.
Slais des inconvéniens bien graves entraient en balance
avec les avantages dans le piano (le M. Kobl, qui depuis
s'est établi à Vienne , car lorsqu'une corde cassait , on ne
pouvait la remettre qu'en ouvrant les [râpes qui se trou-
vaient sur les différent cùlés de l'instrument , et en ôtant
le clavier. Cette opération embarrassante, même pour un
facteur, était à peu près impossible pour un amateur, et
même pour un accordeur ordinaire.
M. Klcpfer, qui avait d'abord établi ses ateliers à Lyon,
et qui a fondé nu établissement à Paris depuis plusieurs
années, a senti la nécessité de peiTect ion ner l'invention de
M. Kohi , et de la débarrasser d'une partie de ses défauts.
Le point important était de pouvoir mettre facilement à.
découvert les cordes et leurs points d'allaclie an* pointes et
aux chevilles; c'est ce qu'il a obtenu en établissant une
charpente rendue mobile au moyen d'une charnière, et
sur laquelle la table est assnjélie et collée sur tous ses
côtés. Cet appareil, qui s'isole entièrement de la caisse en
se soulevant sur la charnière, présente la l'orme d'une
harpe couchée; le mécanisme du clavier et des marteaux
pose au fond de la caisse. En plaçant le châssis sur lequel
la table est assnjélie dans une position verticale , on met à
découvert les cordes, qui sont fixées par un bout à des
chevilles semblables à celles de la harpe.
Ces chevilles traversent le sommier d'outre en outre , et
s'accordent sans qu'on puisse voir les cordes, lorsque le.
châssis et la table sont placésdans leur position horizontale
ordinaire. Hais on sent que la difficulté consiste à distin-
guer entre plusieurs cordes , qu'on ne peut pincer à vo-
lonté, celle qu'il faut monter ou descendre. M. Kohi avait
imaginé de rendre le clavier mobile, alin qu'on pût à vo-
lonté ne loucher qu'une corde à la fois; mais les variations
de l'atmosphère pouvaient empêcher quelquefois le cla-
vier d'avancer ou de reculer; M. Klepfer a préféré d'em-
ployer un procédé imaginé il y a environ vingt ans par
•°4
H. Smith, facteur lie Paris, lequel cor si aie à étouffer «ne
ou deux cordes au moyen d'une pédale.
On voit qu'une idée dominante (celle de faire frapper
les cordes eu dessus par les marteaux ) a' préoccupé plu-
sieurs facteurs exposant celte année , et notamment
MM. Klepfer, Roller et Bumler. M. Streicher, facteur à
Vienne , a tenté de la réaliser dans les pianos à queue, il
y a plusieurs années, et l'on dit que M. Pape doit exposer
aussi un piano de même espèce. L'application de celte
idée présente plusieurs avantages incontestables; mais on
ne peut disconvenir qu'elle a aussi des inconvénieus Irès
graves. Le plus réel est celui de forcer à interrompre l'exé-
cution d'un morceau de musique lorsqu'une corde casse,
car cette corde restant flottante sur les autres rendrait
celle exécution insupportable. Lorsqu'un accident de cette
espèce arrive aux pianos carrés ou à queue, on peu! facile-
ment enlever la corde pendant que le morceau continue ;
mais dans les pianos de MM. Klepfer, Roller et Bumler, il
faut séparer momentanément les cordes des marteaux, ou
les marteaux des cordes , en sorte que l'exécution devient
impossible. Quel que soit d'ailleurs le mérite de ces instru-
meus , je pense que ce défaut est si considérable qu'il suf-
fira pour s'opposer à ce qu'ils obtiennent un succès popu-
II me reste à parler du doyen de la fabrication française
des pianos, c'est-à-dire, de M. Erard. On serapelle qu'eu
rendant compte d'un concert où M. Hcrz jeune avait tou-
ché un piano à queue sorti des ateliers de cet habile fac-
teur, j'ai exprimé une opinion sévère sur la qualité de son
de cet instrument. J'ai obéi alors franchement à l'impres-
sion que j'avais éprouvée, et à nia conviction intime : c'est
.avec la même franchise que je déclare aujourd'hui que le
piano à queue exposé par M. Erard, celle année, me parait
un instrument excellent, dans toute l'acception du mol. Je
sais que la place qui a élé accordée a M. Erard pour l'ex-
position de ses instrumeus est très favorable à la propaga-
tion du sou, mais à part celte circonstance, le sou m'a paru
volumineux, pénétrant, égal et brillant. C'est bien la qua-
_.i i i.:u"j Uv L
i05
lité éclatante et brîllanle îles pianos français, dont H. Erard
aconservé le type; mais ici le son est dans tonte la perfec-
tion désirable , et bien supérieur, selon moi, à ce qui était
goût particulier ine fait préférer le son concentré, mais
puissant, des pianos anglais; mais cela n'ote rien au mé-
rite de l'instrument dont je viens de parler.
J'aurai occasion d'examiner dans d'autres articles le
^ranii orgue et les harpes exposées par M. Erard; ces in-
strumens méritent une attention particulière.
J'ai dû me borner, dans la revue que je viens défaire, aux
perfcctiouncmcns et aux inventions les plus remarquables;
il est plusieurs facteurs qui ont exposé des pianos esti-
mables, mais ijul ne se recommandent point par des quali-
tés assez sensibles pour mériter d'être détaillés. Je crains
^ 1 8 FETIS.
QUEi-QUES DÉTAILS
SDH LA MUSIQUE EN RUSSIE.
Pakhi les peuples qui s'occupent de la musique, et qui
abondent en chanta nationaux, on doit sans aucun
doute placer la Russie. Là , l'artisan , le marinier, le sol-
dat dans la marclie, l'agriculteur; le postillon, le voitu-
rier, enfui toute la population chante en se livrant à ses
divers travaux.
L'origine de la musique d'église en Russie remonte au
pape Grégoire-Ie-Grand, eo 58o; elle consiste en quatre
parties chantantes, lesquelles sont souvent doublées. Les
signes représentant les notes sont écrits en partie sur des
lignes , et en partie sans lignes , sous les paroles; celles-ci
sont en prose, tirées de S. J. Damascène et autres pères
de l'Église. Dans la chapelle de la cour, on se sert de notes
modernes. Le culte divin est célébré ordinairement par
deux ou trois fljalschid (chanteurs d'église J à la chapelle
a* vol. io
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toG
impériale ; cependant il y a des chœurs réguliers de dix à
viugt chanteurs, lesquels, principalement sous le règne
de l'impératrice Elisabeth , exécutaient les motets les plus
difficiles avec la plus grande précision. Ils se perfection-
nèrent encore sous Catherine II, qui préférait le style mo-
derne. En 1768, la chapelle impériale comptait quinze
soprani, treize contraÀti , treize ténors et douze basses.
La chapelle fut dirigée successivement par Maufredini et
Galuppi , compositeurs italiens ; on y exécuta toutes leurs
compositions, ainsi que celles de Beresosky, natif de
l'Ukraine. Lorsque Galuppi entendit pour la première l'ois
■la musique d'église exécutée dans la chapelle de la cour à
Saint-Pétersbourg, il avoua qu'il n'avait jamais entendu
de chœurs aussi parfaits en Italie. En 1 j68, il fit exécuter
sur la scène impériale son opéra tflflgenîa in Tauride ,
dans lequel on entendit dix chœurs diiïerens.
Outre leurs chants populaires , les Russes ont divers in-
.strumens nationaux , dont plusieurs paraissent Cire d'une
origine très reculée ; parmi ceux-ci sont la pandora ' , le
gusti*, le gudok', la patalaika1', le dutka ou tchweran'1 ,
et la walinka ou walnUta'.
Pendant que Pierre-le-Grand fut sur le trône , ses ré-
formes s'étendirent jusque sur la musique; il fit venir
d'Allemagne toutes sortes d'inslrumens, institua une
compagnie de jeunes Eusses destinés a apprendre la mu-
sique, encourageant principalement ta musique militaire.
En i?ao, le duc Charles-Ulric de Holslein Gottorp
(i) Espèce de luth, qui a moins de cordes que le lulli urdioaire. On
le croit uriginairc de l'Ukraine, où il est en usage, soit pour l'accompa-
gnement du cLaul , soit pour l'exécution des danses naliunales et polo-
(î) Harpe russe, qui a la forme du psalteriiim allemand.
fi) Violon à trois cordes dont se servent les paysans russes.
(4) Guitare à deux cordes , en usage parmi le Las peuple de la Russie:.
(5) Instrument à vent, russe, très ancien ; il est furmé de deux tuyaux
unis, ilt gr.nulmr tlill'iiLiîiiii; , (lui uni -(■"!(■ i!iiib- mcliui-c el tri'ii
trous.
(6) Chalumeau en usape cbei les paysans russes, fait avec une vessie
de bœof et deux ou trois roseaux qui y sont attachés.
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10J
amena à Saint-Péteisbourg sa chapelle cl sa musique do
chambre allemande; Pierre-le-Grand assistait souvent i\
ses concerts , et faisait jouer les musiciens à sa cour pres-
que toutes les semaines. En ijaj, ce même orchestre se fit
entendre publiquement dans lesfetes données à l'occasion
de la paix (le Moscou. Beaucoup de jeunes Husses prirent
des leçons de ces artistes allemands , et lorsque le duc re-
tourna chez lui , les meilleurs sujets de sa chapelle furent
engages au service de Catherine P'. Pierre-le-Graud ap-
prit d'eux à jouer du violoncelle, comme il apprit l'escrime
du fameux ltiedel le Saxon.
L'impératrice Anne porta sur le trône le goût de la mu-
sique. Dans les premières années de son règne, en î^Sj,
Araja , compositeur napolitain, mit en scène le premier
opéra italien qui ait été exécuté en Russie, intitulé : Abï-
jazarc , et l'année suivante , Scmiramidc.
Après la mort de l'impératrice Anne, en 174°. lorsque
,1. Alb. Ristori de Bologne était maître de chapelle à la
cour de Russie, Piantanida et Beligradoki ( de l'Ukraine)
se rendirent à Dresde. Araja partit pour l'Italie, d'où, il ra-
mena, en 174*1 Par ordre de la nouvelle impératrice Éli-
sabetli , le soprano Salclli , qui avait chanté avec Farinelli
eu Espagne, le hautbois Slazzi , les violonistes Telo, Pas-
narïnï, Vocari , etc. On exécuta pour le couronnement la
Ciemmza di Tito, de liasse, avec un dialogue en musique
composé par Do m. Dall'-Oglïo, et qui avait pour titre : La
Russia ajjliUti r, viconoscente. Le nouveau théâtre de
Moscou contenait 5ooo speclaleurs; les chœurs étaient
composés de 5o individus.
Sous le règne d'Élisabeth, dans vingt années qui forment
une brillante époque pour la musique russe, Araja compo-
sa uu opéra presque chaque année. Pour les féles données
lors de la paix avec la Suède en 1764 , on exécuta le nouvel
opéra de Bcttero fonte. Dans le mémo temps , le maître de
concert Madonis publia a Saint-Pétersbourg six nouveaux
concertos de violon, et Dominique d'Ail' Oglio six sympho-
nies. H parut ensuite plusieurs airs cl chansons russes de
SamarkofT Telagin cl autres poètes nationaux, qui avaient
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j«8
été mises en musique parle conseiller Grégoire Tépinv. Le
romle Uasuniowsky forma dans soi) pilais une chapelle tio
cinquante musiciens russes, qui se firent entendre pour la
première fois, en i p55 , à Moscou.
Ce fut dans cette -innée qu'on fil, en présence de la
cour, l'épreuve du fameux cor russe.LechanleurGawrilase
lit aussi alors une brillante réputation. L'impératrice ayant
conçu l'idée de faire exécuter un opéra en langue russe,
Sumartow fit les paroles de CëphaU et Procris, A raja
les mit eu musique, et cet opéra fut exécuté avec un
grand succès, dans le carnaval rie t;55, par les chanteurs
russes Belgradiski , Cawrila, Marzcutowitz , Guarituska,
et la. cour en fut extrêmement satisfaite.
Après Saletli, qui retourna dans sa patrie comblé de
biens , on eut en russie le fameux Carestiui , qui ne quitta
laltussie qu'emj58. Saint-Pétersbourg eut ensuite Luini de
Milan, Joseph Millico, la Durant! de Rome, lè ténor Com-
passi de Florence , Nunziata Garana de Bologne , etc., etc.
Araja, après vingt-quatre années de service, retourna en
Italie, en ij5o, avec Stazzi le hautbois. Il fut remplacé,
comme maître de chapelle, par Raupach, compositeur
allemand.
Le grand-duc, depnis empereur Pierre Fedérowîtz, était
passionné pour la musique; il contribua puissamment à
ses progrès.Il avait chez lui deux concerts hebdomadaires,
dans lesquels il jouait du violon ; dans sa maison de cam-
pagne, il faisait exécuter des intermèdes italiens, et, en
175G, Rinaldi lui éleva un nouveau théâtre.
En 1756, le directeur Jean Locatelli amena à Saint-Pé-
tersbourg une nouvelle troupe de chanteurs et de danseurs,
et l'année suivante ils y exécutèrent le premier opéra bouffe,
qui eut un grand succès; mais la mort d'Elisabeth, et di-
verses circonstance», firent que celte troupe ne put se
soutenir ; elle ne tarda guère à se disperser , et plus tard ,
die fut remplacée par l' opéra-comique français.
Sous Catherine II , la musique acquit une nouvelle
splendeur; ou représenta , en îjGa , VOlimpiade de Man-
l'rcritni , et la salle était toujours remplie par plus de trois
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mille spectateurs. Des intermèdes italiens et des comédies
russes et françaises alternaient avec l'opéra. Statzcr, de
Vienne, était maître de concert. Ou exécutait les sym-
phonies et les œuvres de Holzcbauer, de Wagetiseil, de
Bcnda.de Gluck, dcGasmann et autres. Dans le carême de
i;ti-l. on organisa des concerts spirituels.
Dans l'automne de 1765 Galuppi fut nommé premier
maître de chapelle , avec 4,000 roubles par an ; le loge-'
ment et un équipage. Tous les mercredis, il faisait exécuter
de la musique à la cour , et ses ouvrages lui acquirent la
faveur de l'impératrice qui le combla de biens. Par ses or-
dres , il composa la musique de la Didone abbandonata
de iUe ta stase , qui fut représentée et fort applaudie, en
1766. Cet opéra fut ebanté par Colonna, Schadborca, les
soprani Luini et Pultini, et le ténor Sandale- de Venise.
Après la seconde représentation , Galuppi reçut «ne bague
de diamant de 1,000 roubles. En la lui faisant remettre,
l'impératrice lui fit dire 1 que Pm fortunée Didon, enmou-
• raitt, lui avaitlaissé ce legs.» En 1768, il fit représenter
17 figcnia in Tauride dont on a déjà parlé, et dans l'été il
retourna à Venise.
A Galuppi succéda Traetta, qui resta attaché à la cour
jusqu'en 1775. Il y composa sept opéras.
Après Traeiia,Paisiello entra au service do Catherine II,
avec des appointemens de 4,000 roubles, plus 900 roubles
comme maître de la grande duchesse Marie Federowna,et
plusieurs autres émolumeus relatifs à sa charge. Pendant
un séjour de neuf années en Russie, Pafsfetlb a composé les
opéras suivait» : ta Serva padrona , itMatrimonîo inas-
pettato, il BarHerede Seviglia, ÎFilosofî immaginarii,
la Finta amante, il Monda delta luna, ta Nitteti, Lu-
cinda- e Armidoro , Aloide, al Bivio, Achille in S ciro ;
île plus, une cantate pour le prince Potcnikin, une t'arco
pour le prince Orloff, et plusieurs morceaux de musique
instrumentale.
Sarti fut maître de chapelle de la cnur depuis 1 785 jus-
qu'en 180 1. L'impératrice le combla d'honneurs et île biens,
el le nomma directeur d'un nouveau conservatoire de mu-
1 10
siquc, avec une augmentation d'appo internent assezeonsi-
dérable.
En 1788, Vjncenzo Martini, l'espagnol, écrivit aussi
pour l'opéra.
En 180a, on exécuta sur le théâtre de Saint-Pétersbourg
ia Création d'Haydn.
Parmi les célèbres virtuoses qui ont, à une époque plus
récente, visité la Russie, on remarque Clementi avec son
élève Field , Rode ( qui entra au service de l'empereur
Alexandre en 1804), Caillot, Klengel, Hummel et M. Boiel-
Les Russes ont une musique de cor d'un effet étonnant;
vingt , trente , quarante musiciens ont chacun une espèce
de cor qui ne donne qu'une seule note; ces cors sont ac-
cordés de telle manière qu'ils fournissent , comme les tuyaux
de l'orgue, toutes les notes nécessaires pour exécuter un
morceau demusiqueavec les accompagnemens. Par exem-
ple , un des exécutans l'ait tous les ut, de quelque octave
que ce soit , qui se trouve dans un morceau; un autre fait
tous les ré, etc. , et la précision de leur exécution est telle
que ces différons sons semblent provenir du même in-
strument. Comme il y -a des notes qui sont d'un usage
peu fréquent , un musicien se charge quelquefois de deux
ou trois cors pour diminuer le nombre des exécutans.
Cette espèce .d'orchestre rend un son plus fort, plus
nourri que nos tnstrumeos à vent. Par un temps calme , on
entend cette musique d'une lieue et demie, et même de
deux lieues, lorsqu'on l'exécute pendant la nuit et sur un
lieu élevé. De prés, ces cors produisent l'effet d'un grand
orgue, sur lequel ils ont l'avantage de pouvoir augmenter
ou diminuer le son. De loin , an croît entendre un harmo-
nica. Un habile orchestre russe peut exécuter des quatuors,
des. symphonies, des concertos, des fugues, etc. , et faire
les traits cl les trilles avec la plus grande netteté. Il existe
à Saint-Pétersbourg et a Moscou plusieurs chapelles dans
lesquelles se trouvent des orchestres de ce genre. Pendant
le séjour de Sarli dans la capitale de la Russie, on y exé-
cuta une messe iertquiem , un oratorio et plusieurs antres
morceaux de musique sacrée avec ces instrumens.
Eu 1817 , eu genre de musique s'introduisit en Allema-
gne. On exécuta dans celle année, à Maiiheim, sur la place
publique, un Te D&um, qui fut accompagné du haut
d'une tour par un orchestre composé de cors- de- chasse et
de seize trompettes ; cela produisit un effet difficile à ex-*
primer.
L'inventeur de celte musique de cors russes se nom-
mait I. A. Maresch ; il était né en Bohème , en 1719; il s'en
occupa en t?5i, de concert avec le maréchal Ftarischkin ,
intendant suprême des forets, Les chasseurs russes deectte
époque avaient un cor de cuivre jaune, d'une forme à peu
près semblable à un cône parabolique ; ce cor n'avait
qu'un seul son. Maresch, joueur de cor- de-chasse au ser-
vice impérial, fil fabriquer trente-sept cors de différentes
graudeurs, lesquels donnaient entre eux une étendue de
irols octaves. Les plus graves avaient environ sept pieds-de
longueur, et les plus aigus, un pied. Il les ^distribua à un
nombre égal de chasseurs, et les fit répéter long-temps avec
cette sévérité qu'où peut se permettre dans ce pays-là. Enfin,
en i?53, il put pour la première fois les taire entendre en
présence de la cour impériale, réunie à la maison de chasse
Ismaïlow , à peu de distance de Moscou.
NOUVELLES DE SARIS.
THEATRE ROYAL DE L'ODÉON.
OPÉBi EN 3 ACTES ,
MUSIQUE DE M. CÀUAFA.,
Ries ne prouve mieux que le succès de la comédie des
Dettœ Figaro combien l'esprit de' parti peut induire en
erreur sur le mérite ou les défauts d'un ouvrage ; l'inten-
tion de Martelly, en écrivant cette comédie, fut de faire
une critique du spirituel Barbier, et des autres caractères
si originaux inventés par Beaumarchais. Il voulait se ven-
111
gcr des sujets (le plainte qu'il avait conlre l'auteur des
Mémoires , et trouva dans les nombreux; ennemis de ce-
lui-ci des principes de sa faible pièce. Rien ne fut négligé
pour en assurer le sucées , et l'on parvint à l'établir au ré-
pertoire. Aujourd'hui le mérite littéraire des ouvrages de
Beaumarchais occupe seul les spectateurs, et l'on con-
vient généralement que, malgré leurs défauts , les carac-
tères de Figaro, deBarlholo, de Basile, d'Almaviva, de
Suzanne, de Chérubin , sont des créations du génie; ces
noms sont devenus proverbes, cl resteront éternellement.
Marlelly a voulu en faire une contre- épreuve; mais qu'il
est loin de son modèle ! Son Figaro est un lourdcau qui ne
connaît qu'un moyen d'iutrigue, savoir, de se cacher pour
écouler; son Almaviva est un imbécille qui ne ressemble
point à l'amant de Rosine ; Chérubin a perdu sa grâce et
son enjouement pour prendre le ton d'un valet de co-
médie; Suzanne n'est qu'une suivante acariâtre; plus de
Basile , plus de Bartholo , plus rien de ce feu roulant de
bons mots et d'ù-propos si plaisans; une intrigue froide ,
longue et pénible; quelques épigrammes dont on ne sent
plus le sel , voilà tout ce qui reste de cette pièce tant
vantée.
Elle semble au premier coup d'oeil peu favorable à la
musique; cependant l'opposition des deux Figaro, la pé-
ripétie du second acte, les disputes de Suzanne et de
Figaro, sont des motifs qu'un musicien habile pouvait
développer d'une manière heureuse; c'est ce qu'a fait
M. Carafa. Il y avait quelque danger à se mettre en com-
paraison avec Mozart et avec Rossini, en faisant chanter les
mêmes personnages auxquels ils ont prêté des accens si
séduisans. M. Carafa s'est tiré de cette difficulté d'une ma-
nière honorable; non que je veuille établir de parallèle
entre son ouvrage et la merveilleuse production du pre-
mier de ces grands musiciens, ni môme avec la composi-
tion si éminemment spirituelle du second; mais il faut
avouer que le duo de Suzanne et de Figaro , l'air de celui-
ci , le trio du troisième acte, et quelques parties des divers
morceaux d'ensemble sont digues d'éloges sous plusieurs
rapports.
n8
Iï y a déjà euvirnu huit ans que Al. Cdraia a écrit (es
deux Figaro pour le théâtre de la- Scala; à Milan. Si on
nous en eût offert alors une traduction , elle eût eu beau-
coup de succès ; mais la forme des chants, celle del'insln;-
mentatiou, le système enfin de l'école liossimenne sont
main tenait t si usées parmi nous que. quel que soit le mérite
qui brille dans une composition établie sur ce système ,
l'auteur ne peut plus espérer d'intéresser vivement le pu-
blic. Donnez-nous autre chose! Voilà le cri qui s'échappe
de toutes paris. Je sais que ce bon public en parle fort à
sou aise, ct_qu'il n'est pas facile de le satisfaire sur ce
point ; mais jusqu'à ce qu'il se trouve un homme né pour
le conleuter, il ne montrera que de l'indifférence pour ce
qu'il connaît, et ne cessera de répéter : Donne:- nous au-
tre chose !
L'exécution des deux Figaro est bien faible à l'Odéou.
Les chœurs crient plutôt qu'ils ne chantent , et détonnent
presque tous le temps de la représentation. I.ecnnite chante
faux d'unemanière intolérable! Mondonville elianteetjouc
assez bien , mais sa voix parait s'affaiblir et ne produit point
d'effet dans les morceaux d'ensemble. Sa femme ne se tire
pas mal de ses Iraits; mais elle ne sait pas phraser, et
se rhume si peu de peine pour prononcer qu'on n'entend
pas un mot de ce qu'elle chante. Léon ltuzot a de l'aplomb
et du métier; mais il l'aul avouer que sa manière , le son
de sa voix, son style ont un certain air commun qui ne
convient guère au personnage si élégant de Chérubin.
L'orchoslre a de la vigueur, de la jeunesse et une élégance
qu'il serait a désirer qu'on trouvât dans celui du théâtre
de l'Opéra-Couiique ; mais j'y ai reniai qué plusieurs inex-
actitudes qui produisent un mauvais ctfd . surtout dans
les parties de cor. J'ai déjà eu occasion de signaler plu-
sieurs fois les négligences des artistes qui sont chargés de
celle partie.
Les deux Figaro n'enrichiront pas beaucoup le caissier
du théâtre de l'Odéon ; mais cet ouvrage variera agréable-
ment le répertoire.
— L'honorable intervention de MM. les auteurs eteom-
Uigittiod by Google
I
pusiteuvs dans les différons qui compromettaient l'exis-
tence de l'Opera-Comique, vient enlin démettre un terme
au scandale dont gémissaient tous les amis de l'art drama-
tique. Dans une audience que MM. les membres de la
commission des auteurs ont obtenue de Monsieur le pre-
mier gentilhomme de la chambre du roi, chargé de la haute
surveillance du théâtre de l'Opéra - Comique , ils ont
aplani les difficulté* qui', jusqu'ici , s'étaient opposées à la
rentrée des sociétaires dissidens et de M. Lemctheycr, ré-
gisseur général. L'acte social sera respecté ainsi que les
conventions de MM. les auteurs avec la société, et la com-
mission nommée par M. de la Bouilleric, ministre d'état,
directeur général de la maison du roi , pour examiner la
situation des théâtres royaux, sera chargée du l'apurement
des comptes qui avaient été refusés aux sociétaires. Laren-
Irée de MM. Ponchard, Huet, Lafcuillade, Valcrc, Féréol,
Chollct, et de M M'"' Boulanger, Prévost , Itigaut et Pon-
cliard aura lieu samedi, i" septembre.
NOUVELLES DES DÉPARTEMENS.
Nous l'avons dit : il y a péril en la demeure si l'on ne
prend des mesures pour faire cesser le plus tôt possible la
disette de chanteurs qui se fait sentir chaque jour davan-
tage en France. Si une circonstance particulière nous fait
revenir aujourd'hui sur ce sujet , c'est moins pour nous
occuper de la qualité des chanteurs que de la quantité
qui est aussi fort importante. On ne peut disconvenir que
depuis Gorat, et par suite de ses leçons ou de son influence,
la France n'ait produit quelques chanteurs remarquables ;
mais outre que le nombre en diminue tous les jours, nous
n'en avons jamais possédé assez pour satisfaire la popula-
tion des amateurs sur tous les points de la France, et pour
y propager le bon et le véritable goût musical. Pour parler
k: langue de l'économie politique qui doit être en cette
occasion delà plus grande exactitude, nous n'avons fourni
en ce genre que des produits de luxe, en petit nombre et
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fort chers , et nou (le ceux que réclamaient les besoins du
plus grand nombre. Ayons, si nous ie pouvons, îles chan-
teurfi aussi habiles que Garât, Marti., el l'onchard, mai»
attachons-nous provisoirement à former des chanteurs
musiciens, qui soient tous eu état de chanter passablement .
et surtout d'exécuter avec aplomb nus bons ouvrages,
même dans les moindres sous-préfectures.
Il n'y a pas de doute qu'un opéra exécuté par des chan-
teurs médiocres, mais Ions bons musiciens, ne produisît
un meilleureffct.àcause de l'ensemble et delà réussit» de
l'cllcl général, que le même ouvrage dans lequel deux on
Irois virtuoses feraient disparate à côté des nombreuses
nullités qui les entoureraient, comme cela arrive presque
toujours chez nous. 11 nous semble du moins qu'un véri-
table amateur ne balancerait pas s'il avait à opter. D'ail-
leurs, il ne s'agit pas ici d'une Lhéorie; des faits sont là pour
appuyer notre opinion.
Interrogez les véritables connaisseur* qui ont parcouru
l'Allemagne. Ils vous diront qu'ils y ont rarement entendu
des chanteurs distingués; et pourtant, il n'est pas de petite
résidence où l'on ne puisse entendre presque tous les opé-
ras italiens , français et allemands, exécutés avee un en-
semble très satisfaisant. Quel est l'amateur le plus forte-
ment prévenu contre le chaut allemand, qui, dès le premier
jour de son arrivée de l'autre côté du Rhin, entré par dés-
œuvrement au théâtre de Francfort, n'ait pas été agréable-
ment surpris par l'ensemble de l'exécution, et surtout par
l'excellence du sentiment musical. On ne connaît pas à
Vienne un seul chanteur digue d'être cité à coté des Ita-
liens, et cependant on y exécutait naguère Jean de Paris
et le Cfiaperoii rouge deBoieldieu beaucoup mieux qu'on
ne le fait la plupart du temps à Paris.
Enfin un fait récent, qui a donné lieu à cet article, vient
parler fortement en faveur des chanteurs dont le principal
mérite est d'être musicien. Une troupe ambulante qui a
débuté le a/j. juillet à Mulhauscn . département du Haut-
Rhin, ville qui compte plus dans l'industrie des cotons ,
filés et des teintures rouge il' Andrinopie . que dans le
DignizM by Google
nG
domaine des beaux-arts, a exécuté depuis celte époque
jusqu'au u août, les opéras delà Dame blanche, de Boiel-
dîail, la démence de Titus de Mozart, Tancrèdc et VI tâ-
tonne à Atyer de Rossîni, le Freysch&ts de Wcber, les
Cantatrice viMunelte de Fioravauti, Soliman 11 de
Sùssmayer, le Maçon d'Auber, et plusieurs autres opérait
renommés. L'exécution a fait le plus grand plaisir : les
rôles de Tancrède et d'Aménaïde, ont été chantés par deux
soeurs à la satisfaction générale. L'acteur chargé de repré-
senter D. Juan , a été obligé de répéter le fameux rondo ;
l'orchestre, dans lequel ou comptait un bon nombre d'ama-
teurs distingués, a laissé peu à désirer; les chœurs étaient
fort bons, ce qu'on peut facilement croire dans un dépar-
tement dont la population est toute musicale. Quelle était
donc cette merveilleuse troupe qui a procuré aux heureux
filateurs de Mulhauscn un ensemble de jouissances qu'au-
cun théâtre de noire capitale ne pourrait garantir au pu-
blic? C'était la troupe allemande de Fribourg en Brisgau,
dans le grand duché de Bade, qui est venue faire une
tournée dans les départemens de la France où l'on parle
la langue allemande. Sans doute M. Mayer { Don Juan )
n'est pas uu Garcia, ni mademoiselle Stehle (Tancrède)
une Pasta, mais tons ces gens-là devaient plaire par l'en-
semble de leur exécution vraiment musicale, et malgré
leur médiocrité dans l'art du chant, considéré d'une ma-
nière abstraite.
Nous le demandons maintenant, quelle troupe des dé-
partemens de la France serait capable de faire ce qu'a fait
en Alsace celle d'une petite ville d'Allemagne? La réponse
est malheureusement trop facile.
Si l'on n'y prend garde, la France, qui naguère a fourni
des chanteurs aux pays étrangers, ressemblera bientôt,
sous ce rapport , à ces régions qui s'enorgueillissaient au-
trefois d'une culture florissante, et dont le sol, maintenant
négligé et envahi par les sables, force les habitans à de-
mander aujourd'hui desalimens aux peuples qu'ils nour-
rissaient dans les siccles passés..
Ces considérations sont plus dignes qu'on ne peusc d'oc-
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ouper les hommes d'état qui veillent chez nous à la pros-
périté des beaux-arts; on a, dans tous les temps et chez
tous les peuples civilisés, considéré les jouissances desuris
comme un puissant moyen de gouverner en paix.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Nous recevons les nouvelles suivantes du théâtre de Ma-
drid. Nous les donnons textuellement, afin que l'on puisse
juger, à part les éloges exagérés, des succès qu'obtient dans
ce pays M11* Albini, que nous avons tant dédaignée.
Madrid, S août. Le second opéra dans lequel M1" Albini
s'est montrée ne pouvait lui procurer les mêmes succès
que Seiniramide ; c'était le Barbier de Sèville de Rossini,
que les habilans de cette ville ont vu jouer plus de cent fois,
tantôt cri espagnol, tantôt eu italien, opéra trop usé et trop
connu pour produire beaucoup d'effet sur de tels specta-
teurs; car ce ne sont pas les seuls Parisiens qui aiment la
nouveauté; on l'exige ici, surtout dans les spectacles. Ce-
pendant M"' Albini a été assez applaudie dans la cavatine
Vna voce poco fa, dans le duo du billet, Dunque it> son, tu
non m'ingani, comme aussi dans la cavatine qu'on a In-
tercalée dans le second acte. M1" Albini, pour satisfaire an
public en donnant quelque nouveauté, a chanté dans
l'entre-acte l'air de l'opéra à'Andronîco de Mer codante.
Elle s'est montrée habillée en guerrier, et a paru char-
mante sous ce costume; c'était |e plus beau guerrier qu'on
eût vu sur la scène de Madrid. Les souvenirs qui restaient
encore de M1" Sala, lorsqu'elle jouait si bien le rôle delac-
crède, ont été effacés par la beauté de M"* Albini, revêt ut)
de la cuirasse et du casque d'un jeune guerrier; on ne
s'attendait pas à la voir si séduisante, et la surprise a été
générale. C'était absolument la fidèle image du beau R:~
naldo, tel que nous le représente le Tasse dans ces vers : .
Se "I miri tulmioar nelf arme airolto
Marte lu llirai ; Amur, se«copreil volto.
ai1" Albini a reçu du public dcsapplauilissomens réitérés
qui se sont prolongés bien long-tenip après que la toile fut
baissée. Ceui qui ont connu Velluti à Londres et en Italie
disent qu'elle a chanté cet air de même que ce célèbre ar-
tiste : ce sont ces mêmes traits et cette même originalité
qui le distingue. C'est un genre tout-à-fait nouveau pour
nous et dont nous n'avions pas d'idée. Nous souhaitons que
M11" Albini puisse rester long-temps chez nous; car en
vérité nous n'avons pas eu jusqu'ici un talent pour l'opéra
italien qui puisse rivaliser avec le sien.
On nous a donné aussi la première représentation
A'Eiena e Costantino, opéra de m. Carnicer. M1" Albini,
qui remplissait le rôle d'Elena, a été heureuse, comme
d'habitude, dans son chaut et dans son jeu. C'est une vir-
tuose qui sait tirer tout le parti possible d'un râle qui, pour
un autre, serait tout-à-fait insignifiant; elle a été vivement
applaudie par ie public toutes les fois qu'elle a chaulé, soit
la cavatine, le duo, le rondeau ou les morceaux d'ensemble.
On l'aurait dû charger du rôle de Costantino, qui se trou-
vait plus daus ses moyens; mais l'administration jugeant
M11* Cortesi insuffisante pour le rôle à'Elena, eu chargea
M"' Albini, confiant celui de Costantino à M11" Spontoni,
Espagnole qui est un excellent second contralto ; mais il s'en
faut beaucoup qu'elle puisse remplir les rôles de pre-
mier, dont nous sommes privés depuis le départ de W
Fabbrica. Le public qui connaît depuis long-temps W
Spontoni, lui ayant toujours vu remplir des seconds rôles,
n'était pas trop prévenu en sa faveur , voyant qu'elle s'était
chargée de celui-là. Cependant pour l'encourager après
sa cavatine, qui est assez bonne , on l'applaudit beaucoup;
mais tous ces applaudisscmens n'eurent plus lieu à la se-
conde représentation. Enfin si ce n'était pas pour SI1" Al-
bini, qui seule a soutenu cet opéra, on l'aurait vu tomber
tout-â-faitdÈslc premier soir. M. MaggiorotU n'a pu mon-
trer son talent, n'ayant pas un rôle dans ses moyens. Le
ténor, qui était un Espagnol, n'est point eu état déjouer un
rôle principal; ou eu al tend incessamment un d'Ilalie, et
nous en avons le plus grand besoin . W Llcdo , Espagnole
qui a une très belle voix de soprano et une assez bonne
méthode, n'avait dans cet opéra qu'une simple cavatine,
où elle a été fort applaudie : notre administration ne con-
suite pas ses intérêts, un négligeant H"' Lledô ou en ne lui
confiant que des rôles secondaires.
Il estdillicilo déjuger du mérite d'un opér i , qui n'avait
d'autre appui que le talent de M11' Albini ; nous n'en par-
lerons que par ses effets. A la première représentation , le
public lui a donné beaucoup d'applaudissemens , pour en-
courager plutôt l'auteur, qui est Espagnol,, que parle plai-
sir qu'il en ressentait: mais a la seconde représentation
les applaudisscmcns ont diminué considérablement. Cet
opéra a eu aussi le malbeur de succéder à Scmiramidc .
qui ravissait le public. H y a d'assez bonnes choses , tom-
me disent les connaisseurs, dans cette musique, et même
des traits originaux. On a donné la préférence au second
acte , et en clfet il est mieux que le premier. Le finale sur-
tout a de l'originalité.
linlin l'on vient de nous donner l'opéra de Morlaechi .
Tcùatdo c I satina, sans retranchemens, ni suppression de
morceaux. Nous dcVons cet avantage à la lionne volonté
de ill"" Albini , qui ne se refuse jamais de se rendre agréa-
ble au public, par le zèle et l'activité qu'elle montre
pour son art. C'est une cantatrice infatigable, et la res-
source de noire administration. M. Maggiorotti s'est prêté
de bonne grâce à faire le rôle de Boemondo , faute de té-
bon gré, car il lui a procuré le plaisir d'entendre M"* Al-
bini dans le rôle de Tabatdo, qui l'a rendu d'une manière
extrêmement pathétique. C'est le célèbre Vclluti qui a
créé ce rôle; ceux qui ont entendu ce grand chanteur dans
ce même rôle, assurent que M"* Albini en a saisi toutes les
beautés. Slais c'est surtout dans la romance, Cura xm/nn
llisinghiero qu'elle a déployé tout son talent. Quoique
M11' Albini eût à lutter contre l'opinion de ceux qui conser-
vaient encore des souvenirs trop favorables de M'1* Fabbri-
ca , qui avait joué ce rôl#, elle en a triomphé complète-
ment. Celte romance a été chantée par il"' Alhïm avec le
sentiment d'une douleur profonde, et d'une, passipu dé-
sespérée: ses accens passionnés perçaient et déchiraient
le cœur des spectateurs. L'on est sûr de plaire au public
lorsqu'on sait chanter avec l'accent de la passion : mais
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ce talent n'est pas commun. M11* Âlbïni a été très heureuse
à cet égard ;les applaudissement ont élé si prolongés après
la romance, qu'un n'a pu entendre une partie du chœur
qui ouvrai! la scène suivante. A la seconde représentation
les applaudissscmens ont redoublé après la romance, et
avec justice , car M"* Albini l'a chantée à ravir. On attend
sous peu de jours le lénor Basil! , qui débutera par Olhcllo.
ANNONCE.
Souscription pour la grande partition du Cristo suit' Oli~
veto (Jésus au jardin des Olives), oratorio avec teste
italien , musique de L. Van Beethoven.
Un des caractères du génie est la flexibilité; Moiart a tait fait arec
une égale supérinrité l'opéra, la musique sacrée , ia symphonie , le qua-
tuor el le quinlelli, la musique de piano, etc. Dec tho vert, sans l'imiter,
a mardi» sur ses traces et a produit aussi des c lie fs-d 'œuvre eu musique
de piano, en trios, quatuors, quinteltis, symphonies, messes, etc. L'un
de ses plus beaux ouvrages est sans contredit sou oratorio du Christ au
jardin des Olives. On en connaît a Paris des morecoux qui ont été exé-
cutés avec succès dans nos concerts spirituels; mais jusqu'ici aucune
édiliun de celte belle production n'avait élé publiée éo France ; c'esl
donc un sertice réel que M. Farrenc rend aux amateurs de musique et
aux artistes en leur procurant le plaisir de l'étudier cl de se familiariser
avec ses beautés. îtous ne doutons pas du succès de son. entreprise.
La grande partition du Cristo suit Oliitto paraîtra le i5 septembre
1&17; elle sera gravée avec le plus grand soin, et imprimée sur beau pa-
pier; les exemplaires seront brochés avec une couverture imprimée sur
vélin de couleur, et ornée d'une jolie vignette.
Les personnes qui prendront l'ouvrage d'ici au 1" décembre le paie-
ront iS Francs; passé cette époque, il sera marqué 36 francs, et suivra,
le cours du coinmcice de musique.
On souscrit à Paris ,
Cbex l'éditeur, n. F*ahsxc , rue des Petit s- Augustin s, n° i3.
Chez MM. J. Fssr.placu des Victoires, n°S;
Jibet et CovKLUi, rue Saint-Honoré^i0 i aô, et rue de Richelieu, n. oïl
IIbk«ï LsnorM! , ru., de l'Échelle ,0.9;
Pleïel et compagnie, boulevard Montmartre ;
Sinon Ricntui-T, boulevard Poiuonnièrê, ti. 16.
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DES CHANTS POPULAIRES
U (Eric* wbemt.
l)n grand peuple tombé dans l'esclavage et l'abjection
Inspire pins de dégoût que de pitié ; un grand peuple qui
se relève, qui l'orge des armes avec ses l'ers , et qui meurt
en combattant pour sa liberté, est le plus beau spectacle
que puisse offrir la nature humaine. C'est celui que pré-
sente la Grèce en ce moment. Quel que soit le sort des
armes, quelque avenir que la fortune leur prépare, les
Grecs serout immortels dans l'histoire: ils vivront libres ou
ne vivront pas! honneur à la Grèce, dont l'exemple en-
fantera quelque jour la liberté du monde entierl
Qui doue a pu réveiller ce peuple endormi depuis près
de quatre siècles P Ce ne sont point des orateurs. Les Dé-
mosthènes, les Isocrates, ne naissent point sur un sol souillé
par le despotisme! Ce ne sont point les bienfaits de la
presse, bieufaits inconnus sous la domination du Musul-
man! Qui le croirait? des chants, de simples chants popu-
laires ont fait le miracle, et l'ont préparé dès long- temps. Ce
sont ces chants, expression directe et vraie du caractère et
de l'esprit national, que tout grec comprend et sent avec
amour, par cela seul qu'il est grec , qu'il habite le sol et
respire l'air de la Grèce ; chants dont la poésie vît , non
dans les livres d'une vie factice et apparente, mais dans le
peuple lui-même, et de toute la vie du peuple.
Ces chants , seuls monumens historiques de la Grèce
moderne, peuvent se diviser en trois classes principales,
c'est-à-dire en chansons domestiques, en chansons hé-
roïques, et en chansons idéales ou romanesques.
Sous la dénomination de chansons domestiques, on peut
comprendre celles qui sont composées exprès pour être
chantées dans les circonstances les plus solennelles de la
vie de famille, à certaines fêtes déterminées , a propos de
\
certains usages de société consacrés par une habitude im-
mémoriale. Pour en donner une idée , il suffira de dire ce
qui se passe h deux époques principales , la Saint-Basile et
le premier de mars.
L'Église grec (pie f'éte la Saint- Basile le i" de janvier, et
ce jour est en Grèce un jour solennel. Des troupes déjeunes
gens se réunissent pour aller dans les maisons de leur con-
naissance faire les complimens et quêter les étrennes d'u-
sage. Or. ces complimens et cette quëtc sont, dans chaque
canton, le sujet d'une série de chansons, qui toutes y sont
exclusivement appropriées. Tarmi ces chansons, il y en a
en l'honneur du maître et de la dame de la maison , des
eulans et de chacun des membres de la famille. Tout ce
qui l'intéresse, tout ce qui peut fournir l'occasion de lui
exprimer des sentimens de bienveillance et de tendresse,
est le thème d'une chanson particulière.
Le i"de mars est , en Grèce, un jour aussi poétique
que celui de Saint-Basile. Des troupes de jeunes gens et
■tl'cnfans se forment pour aller de porte en porte chanter
le retour du printemps, et quêter de menues étrennes qui
consistent ordinairement en œufs, eu fromage, ou eu tout
i^utre produit des champs. Entre plusieurs chansons des-
tinées à cette Féte, il en est une populaire et qui y est plus
spécialement adaptée que les autres. Connue de toute la
Grèce sous le nom de Chanson de €hirondeilé , elle est
une effusion naïve de l'indéfinissable charme du premier
souffle du printemps , dans un beau climat. Les etifans la
chantent portant à la main une figure d'hirondelle gros-
sièrement taillée eu bois, et ajustée à une espèce de mou-
linctoù elle tourne rapidement à l'aided'ane ficelle, qui se
roule et se déroule autour, d'un petit cylindre à L'un des
bouts duquel elle est fixée.
Les autres chansons domestiques des Grecs sont desti-
nées à célébrer les époques principales de la vie : la joie ,
la douleur, le départ de quelqu'un pour les pays étrangers,
les mariages et les funérailles. Avant même que des mal-
heurs inouïs eussent pesé sur les Grecs et les eussent ré-
unis dans un intérêt commun, les relations de famille
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avaient, chez eux , quelque chose Je plus vif, de plu»
profond, île plus tendre qu'ailleurs. L'oppression sous la-
quelle ils vivaient semblait leur faire sentir plus vivement
le besoin de se serrer les uns contre les autres. Quelque
affreux que lût leur sort , l'amour des proches, du sol, du
tombeau des ancêtres , de la patrie enfin était si puissant,
qu'un départ était toujours considéré comme un malheur,
quelle qu'eu lût la cause. Pour un Grec, la terru étrangère
est une terre d'exil qu'il ne nomme jamais sans y joindre
uneépithètc (ff^a) qui exprime à la fois le regret de ce
qu'il y a de plus doux, cl la prévoyance ou le sentiment de
ce qu'il y a de plus terrible. D'ailleurs, en quittant le lieu
natal, un Grec ignorait si le sort lui gardait le bonheur de
le revoir; si les Turcs le lui permettraient; s'ils Épargne-
raient le patrimoine, l'honneur cl la vie de ceux qu'il lais-
sait en leur pouvoir. Sa famille n'était pas moins à plaindre
craignait, elle le craignait; de !à , la tristesse des chansons
de départ, et l'énergie de leurs images. Aujourd'hui les
Grecs ne voyagent plus ; ils existent sur les débris de leur
patrie, sans autre espoir que de donner la. mort à des
Turcs : ils combattent encore; mais bientôt, hélas! ce qui
reste de ce peuple admirable aura vécu peut-être.
Le chaut et la poésie interviennent dans tous les détails
du. mariage. A chaque partie lies cérémonies nuptiales
correspond une chanson composée exprès. Il y en a pour
rauymphe rase le futur; d'au très encore sont pour celui où
les compagnes de la fiancée la parent et la voilent. Les
adieux de celle-ci à la maison paternelle sont aussi le
sujet de chansons fort touchantes; c'est en chantant que
marche le cortège qui accompagne lus épuux a l'église , et
ce qu'il chante est exactement approprié à celte partie de
la féle. Un a de même des chansons faites pour le mo-
ment où l'on oie à la mariée le voile sous lequel elle est
entrée dans sa nouvelle demeure ; il en est d'autres enfin
pour les danses du lendemain de la noce , et de [dus spé-
ciales encore pour les danses du troisième jour, à reup
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!ït4
tour de la fontaine. Quoique semblables partout pour le
fond des idées, ces chansons différent cependant d'un lieu
à il n autre par les termes , et partout elles' sont fort nom-
breuses; de sorte que les pièces de cette espèce forme-
raient a elles seules une portion considérable des chan-
sons nationales de la Grèce moderne.
Les chants funèbres par lesquels on déplore la mort de
ses proches, prennentle nom de myriotoguas, c'est-à-dire
discours de tamentatùm , complaintes. Ces chants of-
frent des particularités par lesquelles ils tiennent à quel-
ques-uns des traits les plus saillans du caractère national.
Presque toujours ils sont improvisés sur un chant traînant
et lugubre, et (elle est la force d'imagination de ce -peuple
singulier, que le paysan le plus grossier trouve souvent
dans sa douleur des «pressions et des images dignes de la
plus haute poésie.
Cette richesse d'imagination sefaît aussi remarquer dans
les chansons romanesques ; maïs l'oppression soiis laquelle
gémirent les Grecs pendant plusieurs siècles leur a donné
un fond de tristesse ou de mélancolie qui perce jusque
dans leurs jeux d'esprit. On en peut juger par la chanson
suivanle :
LE VOYAGE NOCTURNE.
« O ma chère mère, mère de neuf fils et d'une seule fille
■ ( d'une fille )qne tu baignes en lieu obscur, que tu pei->
* gues a la lumière , et que tu laces serrée dehors art clair
« de la lune; puisqu'on te la demande de Bagdad, puis-
o qu'on te la demande en mariage, (celte fille) ton Arété,
* accorde-la, ma mère, envoie-la dans le pays étranger ,
«pour que je trouve quelque agrément en chemin,
* qnandje voyage.» — "Tues sensé , Constantin , tu es
x sensé , mon fils; mais (celte fois) tu raisonnes follement :
« qui m'amènera ma fîlle(de si loin), pour me dire la joie
» ou te chagrin qu'elle aura?» — Et Conslan tin donne alors
à sa mère Dieu cl les saints Marlyrs pour garans de lui
amener sa fille, joie ou chagrin qu'elle ait. — Un an se
passe; le second vient; les neuf frères meurent, et, sur le
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corps île Constantin , la mère «'arracha les cheveux : « OU !
«lève-loi, Constantin ! mon fils, lève-toi! je veux voir
« mon Arété; tu m'as donné Dieu et les saint! martyrs pour
.garans de me l'amener, joie ou chagrin qu'elle eût. 1 —
Et sur le minuit Constantin va chercher sa sœur. Il la
trouve dehors, se peignant au clair de la lune : — s Vile !
• viens, Arété , notre mère te demande. • — a Ah I mon
• frère! qùty a-t-il donc? Est-ce l'heure de se mettre en
« bits dorés : y esZ-on triste? j'irai comme je suis. - Ni
. joyeux, ni triste , ma soeur , viens comme tu es. . — Et
dansia route, tandis qu'ils vont , dans la route, tandis qu'il»
cheminent, ils entendent les oiseaux dire : « Voyez donc
i cette belle fille qui conduit un mort! > — ■ Oh ! entends-
• tu, Constantin, les oiseaux, ce qu'ilsdisent? — Ccsontdes
« oiseaux, laisse-les chanter ; ce sont des oiselets, laisse-les
« dire.— Ohl j'ai peur de toi, mon frère; tu sens l'encens. —
i C'est que nous avons été hier soir à l'église de Saint-Jean,
• et que le papas nous a encensés. — Ouvre , ma mère,
■ ouvre, voilà ton Arété! — Si tues bien intentionné, passe
i ton chemin; si tues bien intentionné, éloigne-toi : mon
• Arété est absente ; elle est bien loin d'ici , dans la terre
«étrangère. — Ouvre, ouvre, ma mère, je suis ton fils
«Constantin, qui l'ai donné Dieu et les saints Martyrs
« pour garans de t'a mener Arété, chagrin ou joie qu'elle
tcùt. ■ — -La mère ouvre la porte, et l'âme lui sort ilu
corps. '
Dans presque toutes les parties de la Grèce, tout événe-
ment public, pour peu qu'il ait d'importance et qu'il fasse
du bruit, devient aussitôt le sujet d'une ou do plusieurs
chansons. Ce sont ces chansons historiques qui composent
en quelque sorte toutes les annales des Grecs; elles ser-
vent à la fois à conserver la mémoire des faits et à échauf-
fer l'amour de la patrie ; elles entretiennent dans les cœurs
la haine des tyrans et la reconnaissance pour les défen-
seurs du pays et les martyrs de la liberté. On en compte de
plusieurs espèces; les unes, ouvrages des habita ns des
villes et des bourgs, se distinguent par une poésie soignée
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et un langage poli; lus autres, incorrectes, dures, sau-
vages même, mais brillantes d'idées et d'images, sont
composées par les habitans des montagnes qu'on nomme
Ktephtes , et prennent , à cause de cela , le nom de chan-
sons hlephtiques. Je parlerai d'abord de celles-ci.
En grec moderne, comme en grec ancien, le mot
telcphta (kIs'ow;) signifie voleur; mais on jugerait mal ici
de la chose par le nom : rien au fond ne ressemble moins
aux bandits vulgaires des grands chemins de l'Europe que
les kl e pli les grecs. Leur institution remonte à des temps
anciens. Ils composèrent d'abord une milice armée qu'on
désignait sous le nom d'Armatoie, qui était soldée aux
frais de la population grecque , et qui ne comptait que de»
Grecs dans ses rangs. Elle était chargée de veiller au main-
tien du bon ordre, se divisait en plusieurs troupes, qui
avaient chacune un chef qu'on appelait capitaine(™«rcinî).
Les soldats se désignaient par le nom de PaUikares, qui
siguifio un homme dans la force de l'âge et dans l'inté-
grité de ses forces. Leur costume et leur armure étaientles
mêmes que ceux des soldats albanais. Le fusil, le sabre ,
un couteau ou poignard composaient toutes leurs armes
offensives. Ce furent ces PaUikares ou Armatoles qui com-
mencèrent, et qui soutinrent long-temps seuls, cette guerre
de la liberté à laquelle la Grèce entière prend part depuis
plusieurs années-
L'invasion successive desprovinces grecquespar les Turcs
commença parla Thessalic. Les habïtaus des vastesel fer-
tiles plaines de ce pays avaient subi sans résistance le sort
plus ou moins dur que leur avaient fait les conquéraos.
Mais les montagnards de l'Olympe, du. Pélion , des Bran-
ches thessalienues, du Pinde et des monts Agrapha résis-
tèrent au vainqueur. Ils faisaient fréquemment des des-
centes àmain armée sur les terres cultivées etsur les villes.
Ils y pillaient le vainqueur, et dans l'occasion, ceux des vain-
cus qu'ils accusaient de s'Être soumis à lui ; delà ils reçu-
rent le nom defc(epA(w.Lasde guerroyer contre des hommes
intrépides et pauvres, les Turcs traitèrent avec eux à des
comblions douces, et leur, reconnurent le droit de se régir
117
selon leurs propres lais, de vivre in dépéri dans dans les dis-
tricts montucus qu'ils occupaient , de porter les armes
pour leur défense ; et tout cela, sous la condition de payer
un faible tribut. Quelques peuplades qui s'étaient canton-
nées dans la partie la plus âpre des montagnes, dans des
lieux presque inaccessibles, rct'usère u I lonlc espèce de pacte
avec les conquérons, et se sont maintenus , jusqu'à nos
jours, dans une indépendance absolue. Ces cantons plus
sauvages et plus escarpés des montagnes, où les Crées se
crurent plus à l'abri des Turcs . prirent le nom de pays ou
de villages des KUphtes, qu'ils ont encore aujourd'hui.
C'est dans ces peuplades indépendantes et fières que s'est
conservé l'ancien esprit de la Grèce antique. Continuelle-
ment en gnerrc.avec les pachas, tantôt vainqueurs, tantôt
vaincus, mais monlranl dans toutes les circonstances un
courage inébranlable* ces Klephtcs célébraient dans leurs
chants les hauts faits de leurs héros , ou leur fermeté dans
les tournions inouïs que leur faisaient endurer les bour-
celte poésie étaient sauvages et durs comme leurs moeurs,
mais empreints d'une couleur héroïque qui , de proche en
proche , venait réchauffer le coeur des esclaves des Turcs.
On peut juger du caractère de ces chansons par les sui-
vantes. La première se rapporte à un chef fameux, nom-
mé Bonktwatias , qui fut long-temps la terreur des Turcs.
BoDKOYALBiS.'
" Quel est le bruit qui se fait? Quel est ce grand fracas?
fcÉgorge-i-on des bœufs':1 des bêles féroces se battent-elles?
• — On n'égorge point de bœufs; des bétes féroces ne se
t battent pas; mais lioukovallas combat ; il combat contre
« quinze cents Turcs entre Rénouriaet le Kcrassovon. Les
■ coups de fusils tombent comme pluie , les balles comme
«■grêle. Mais tout à coup une fille blonde crie de la
• fenêtre : "Fais cesser le combat, ô lioukovallas! fais
"cesser lu fusillade; la poussière tombera, le brouillard
« s'élèvera et nous compterons Ion armée , pour voir com-
« bien d'hommes manquent, n — « Les Turcs se sont conip-
« tés trois fois , il en manque cinq cents; les euf.tns des
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. 138
« Klephtcs se comptent : il leur manque trois braves. L'un
« est allé chercher de l'eau, l'autre du pain ; mais le troi-
■ sièmc, le plus brave, est étendu mort sur son fusil. ■
La chanson suivante est relative à un chef klephte ,
nommé Liakos, qui résista long-temps à Ali Pacha, et
que celui-ci ne put avoir eu sa puissance, soit par force,
soit par ruse.
Liikos.
( « Soumets-toi au pacha, Liakos, soumets loi au visir,
■ pour être premier Armalolc, pour devenir Dervenagas. »
— Et Liakos répond au visir, il lui envoie à son tour des
nouvelles : — (Tant qu'il est vivant, Liakos ne se soumet
■ point aux pachas; pour pacha, Liakos a son nabre;
» pour visir, son fusil, n — AH Pacha , comme il entend
cela, se courrouce grièvement; il écrit, il expédie des let-
tres, il envoie des ordres : — " A toi, Véli Guékas, à mes
■ terres et à mes villes; je veux Liakos vivant ou mort, a
Vélï Guékas part aveo la milice et donne la chasse aux
Klephtcs. Il va, les surprend dans la forêt, dans leur quar-
tier, et là commence le combat, la tonnante fusillade.
Konloghiakoupis crie de son poste : ■ Du courage, mes
■ enfans I mes enfans , combattez ! • — Et Liakos court en
avant, le sabre à la bouche. Ils combattent tout le jour et
toute la nuit : trois jours et trois nuits. les Albanaises
vont pleurer et se vêtir do noir; Véli Guékas*a roulé, bai-
gné dans sou sang ; et Mouslapha a été blessé au genou et
à la main. ■
FETIS.
( La suite au numéro prochain. )
EXPOSITION DES FltODUITS DE L'INDUSTRIE.
ORGUE EXPRESSIF PERFECTIONNÉ,
DE M. LU A ED.
Les opinions sont très diverses sur l'origine de cet in-
slrumeiil, ou pin tôt de celte machine immense à laquelle
120
on donne le nom d'orgue. Les uns en ont cherché la pre-
mière idée dans ce passage de Virgile :
Pan primui ealamos cera conjungero plurpfl
Inslitnit....
Vno. églog. a, p. 3 a.
D'autres ont vule premier germe de son invention dans la
cornemuse, connue dans l'antiquité sous le nom de tibia
utricuiaris, comme on le voit par quelques monumens. Le
mot organum se trouve employé par un grand nombre
d'auteurs anciens ; mais tout porte à croire que ce mot
élait générique et signifiait un instrument quelconque.
Nous avons mèmeàcet égard le témoignage de saint Au-
gustin, qui dit {in psat. 56. n" s6): Organa dicuntur
omnia instrumenta musioorum. Nonsottim illud orga-
num dicitur quod grande est , et injlalur foitibus ,
sud quidquid aptatur ad cantitenam , et corporeum est ,
guo instrumenta utitur, qui cantat, organum dicitur.
Isidore , evéque de Séville, dit à peu près la même chose
{inElymot. tib. 5, c. ai).
L'existence du nom de l'orgue chez les écrivains de l'an-
tiquité n'est donc pas une preuve invincible de celle de
l'instrument dont il s'agit, dans des temps très reculés.
Les vers de Virgile
Adjanxere etiam molli conllala métallo
ne se rapportent même point à un instrument de cette es-
pèce ; les tubes de métal , dont il s'agit, ne pouvaient être
que, des espèces de trompettes.
Les orgues dont il estfait mention dans une épigramme
grecque de Julien , dans saint Augustin , dans Isidore de
Séville, et dans Cassiodore, sont les orgues hydrauliques,
dont Ctésibius ou Hiéron d'Alexandrie furent les inven-
teurs, et non l'orgue pneumatique dont on fait usage
depuis le huitième siècle. Tout porte à croire nue celui-
ci est originaire d'Orient. Eu j5^, l'empereur Constantin
Gopronyme en envoya un à Pépin , père de Charlemagne :
ce fut le premier qui parut en France. On le' plaça dans
l'église de Saint-Corneille à Conipiègne. Cet orgue était
iSfl
excessivement pétil et portai if, comme celui qui fut con-
Blruil par un arabe nommé Giafar, et que le calife île Bag-
dad envoya à Cbarierongne.
Un prêtre vénitien, nommé Grégoire, paraît être le pre-
mier qui ait essayé de construire îles orgues en Europe;
En 82C, il l ut chargé par Lotiis-le-Pieuxd'en Taire un pour
IV^lise d'Aix-la-Chapelle. Walafrid Strabqj fait on éloge
pompeux de cet instrument, qui, selon cet auteur, jo-
uit en extase ceux qui l'entendaient. Les monumens et
les vignettes des manuscrits font présumer cependant que
l i construction de l'orgue ne fit pas beaucoup de pro-
grès jusqu'au douzième ou treizième siècle, car cet instru-
ment n'y est représenté que comme un petit appareil pro-
pre à fitre mis sur les genoux ou sur une table, et auquel
fin fournissait le vent par un soufflet semblable à ceux de
nos cuisines. Il est vrai que Wolstan, moine bénédictin de
Winchester fait la description d'un orgue beaucoup pins
considérable dans un poème adressé à un évâque nommé
Elseg. Selon lui , cet évèque l'aurait fait construire pour
l'église île Winchester, en o5 1. Il avait, dit- il, quatre ccDts
tuyaux de cuivre, auxquels te vent était fourni par vingt-
sis sou filets qui ne pouvaient être mis en mouvement que
par soixante-dix hommes robustes , et rendait des sons
fi forts qu'ils ressemblaient au bruit du tonnerre et qu'ils
faisaient avorter les femmes de frayeur.
11 jiarait que l'orgue ne commença à se perfectionner
que dans le quatorzième siècle. François Landino, sur-
nommé Francesco d'egti organi, à cause de son habileté
sur cet instrument, y fil beaucoup d'améliorations vers
l55o. En i.'ijo , un Allemand, nommé Bernard, organiste
à Venise, inventa les pédales. Ce fut aussi dans le quin-
zième siècle qu'on ajouta au registre de rcoatVccux deCro-
morne, de voit humaine, de trompette, etde flûtes ouvertes
ou bouchées de 16, de8, et de 4 pieds.
Dans le siècle suivant Barthotoméo Anteguali et son fils
Oa/iadio enrichirent l'Italie de cent quarante orgues
beaucoup plus parfaites que ce qu'on avait vu jusque là,
Erard Smid, Frédéric. Krcbs, Nicolas Mûlluer, Rodolphe
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Agricolase distinguèrent en Allemagne par la construction
du ces instruirions. L'invention de la balance pneuma-
tiquepar Chrétien F cerner, organiste a Wetlîn, dans le
dix-septième sitcle . fournit les moyens de régler In force
du vent nécessaire à chaque tuyau, et de donne* aux diffé-
rent registres leur véritable harmonie.
Enfin dans le cours du dix-huitième siècle l'art de la
facture d'orgue parut atteindre la perfection entre les mains
de Azzolino délia Ciaja, de Sienne, de la famille Tronci,
de Pistoie, d'Eugène Biroldi, de Jean-Baptiste lîamai, et
des Scrasai, de Bergame . Nanchini, prèlre dalmate et son
élève Callido sont considérés comme lis chefs de l'école
vénitienne. Ce dernier avait construit, en i-()5, trois
cent dix-huit orgues, dont plusieurs étaient de la plus
grande dimension. En France, les Dallery et Ciicquot ; en
Allemagne Jean Scheibe, Godcfroi Silbermann, Jean-
Jacques et Michel Wagner, Clirétien-Amédée Schrœtker,
Ernest Marx, Gabier de Ravensbourg , J.-G. Tauscher et
l'abbé Vogler ont successivement amélioré le mécanisme
et l'harmonie de l'orgue. Ce dernier s'est surtout distingué
par l'invention de son système de simplification, que les
bornes de cet article ne me permettent pas de détailler.
L'Espagne et l'Angleterre ont eu aussi de très habiles fac-
teurs d'orgues; c'est dans ce dernier pays que les premiers
essais ont été faits pour enfler ou pour diminuer les sons. 11
existait déjà en i-Go des orgues oùl'on obtenait ces effets ';
niais comme ou ne les obtenait qu'au moyen de trappes
et de portes qu'on ouvrait ou qu'on refermait par des pé-
dales , ils ressemblaient plutôt a des bâillcmens qu'à une
expression véritable.
RI. lirardcst, je crois, le premier qui ait imaginé le
moyen de donner a l'orgue cette expression au moyeu de
la pression plus ou moins forte du doigt sur la touche.
Voici ce que Grélry écrivait, vers 1793 (voyczses Essais sur
lamusique, t. 5, p. 435) : • J'ai louché cinq ou six notes
• d'un buffet d'orgue que Erard avait rendues suscep-
ji) Voycl le» «oyaRts muairaui de Bumey cil France, en Allcmagna
Et en Italie.
.. liblcs île nuances; et sans doute lesecrel est découvert
i par ad tuyau comme par mille. Plus ou enfonçait la
• touche , plus le son augmentait ; il diminuait en rcle-
u vaut doucement le doigt : c'est la pierre philosophais en
• musique que cette trouvaille. La nation devrait faire
• établir un grand orgue de ce genre, et récompenser
i Erard, l'homme du monde le moins intéressé. >
ni. Érard semblait n'avoir plus donné suite à son in-
vention, quoiqu'elle fût si importante; le long séjour
qu'il fit en Angleterre pendant les troubles de la révolution
l'avait forcé de se diriger uniquement vers la facture des
pianos et des harpes. Dans cet intervalle , M. Grenié,
amateur, fit des essais pour découvrir les moyens de ren-
dre l'orgue expressif, et parvint , après des recherches in-
finies et des dépenses considérables, à faire des instrumen»
dignes des éloges des connaisseurs.
Les premières orgues dont la construction a été dirigée
par M. Grenié ne contenaient que des jeux d'anclies et de
liâtes ouvertes ou bouchées, sans aucun registre de ces
jeun qu'on appelle de mutation, tels que les nazards,
fournitures, cymbales, etc. ; les jeux d'anches seuls étaient
expressifs. Pour les rendre tels, M. Grenié a supprimé les
biseaux contre lesquels l'anche frappe dans les orgues or-
dinaires, et a laissé l'anche libre dans ses vibrations.
Celle-ci et la rasette qui la fixe sont beaucoup plus fermes
qu'on ne les fait communément. Celte fermeté est même
telle que la languette des jeux de seize pieds est une règle
de cuivre dont la longueur est de Hi\o millimètres, la lar-
geur de o°,o35 , et l'épaisseur o",oo5. Les vibrations d'une
auche semblable sont si énergiques, qu'elles font frémir
le tuyau qui leur sert de prolongement , le porte-vent sur
lequel elle est moulée , le plancher même cl tous les corps
élastiques qui sont dans le voisinage.
Pour mettre en vibration ces anches rigides , avec fu-
irai fé de renflement et de diminution d'intensité, une pé-
dale, sur laquelle le pied de l'organiste est appuyé, ouvre,
plus considérable à l'air qui se précipite avec pins de force
□igifeed by Google
i-53
sur l'anche, cl augmente la violence de ses batlemens
sans les précipiter davantage. Les pédales sont expressives
ilans les orgues tle M. Grenié comme dans les jeux du cla-
vier à la main,.
Depuis plusieurs années, M. Grenié est parvenu, à
rendre les sons de flûte également expressifs , au moyeu
d'un procédé fort ingénieux. On sait que ia difficulté con-
siste en ce que l'intonation de ee genre de tuyau s'élève
lorsqu'on augmente la force du veut. Ou sait aussi qu'où
les accorde au moyen d'une plaque de plomb qu'on élfcvc
ou qu'on abaisse au-dessus de leur orilice. M. Grenié a
établi dans ses tuyaux de bois une rainure par laquelle s'é-
chappe une partie du vent. Cette rainure est recouverte
par un petit soufflet qui s'élève poussé par le souffle. La
partie supérieure du soufflet est une lame de plomb qui ,
soulevée en même temps que le soufflet par un de ses cô-
tés, s'abaisse de l'autre sur l'ouverture supérieure du tuyau,
et établit un compensateur qui maintient la justesse de
l'intonation. .. ,
M. Érard a mis celte année à l'exposition un orgue ex-
pressif qui présente un ensemble de qualités parfaites,
li'ayant point vu l'intérieur de cet instrument, je no puis
donner fies détails sur les procédés du mécanisme, cl je
dois me bornera parler de ses eirets el de son aspect ex-
térieur, qui ne laissent rien à désirer.
La caisse, qui est en bois d'acajou, est un parallélogram-
me percé d'ouvertures sur lesquelles des châssis garnis de
tentures de soie sont posés afin de laisse!- une libre eircu-
Dcnx claviers élégans, qui peuvent se réunir par un re-
gistre, présentent pour la première fois une étendue de six
octaves et demie. Le clavier supérieur est celui d'expres-
sion ; l'inférieur est destiné à remplacer celui du grand
chœur dans les orgues ordinaires. Ces claviers présentent
un avantage bien rare , ou plutôt qu'on ne trouve nulle
part , celui d'être aussi faciles à jouer que ceux d'un
piano. Le clavier de pédale est une tirasse.
Au-dessus du clavier des pédales se trouvent d'autres
□igifeed t>y Google
.34
pédalesenfcr, destinées à ouvrir ou à refermer les registres.
L'une lire les jeux d'anches : l'autre ceux de mutation ; la
troisième les repousse, pour ne laisser parler que les fonds.
La quatrième, la cinquième et la sixième produisent îles
effets analogues pour le clavier d'expression, et les derniers
agissent sur des registres séparés. Au moyen de ces res-
sources, el en y joignant la pédale qui est; placée de coté ,
pour produire les renflemens et les decrescendo, on a un
système complet de modifications du son , et le génie de
l'organiste peut se livrer à toutes ses inspirations sans
éprouver de difficultés à les produire et à les exprimer.
Les fonds se composent d'un bourdon de 8, sonnant
de ifî pieds , et, autant que j'ai pu en juger, d'une flûte
ouverte de huit, d'une autre de quatre, et d'un jtrestant,
Le bourdon est le plus beau jeu de cette nature que j'aie
entendu. Sa qualilédcson est si belle, si pleine, si ronde,
qu'on le prendrait pour un jeu ouvert de 16 pieds. Les
autres flûtes ne sont pas moins remarquables.
Je dois les mêmes éloges au registre du jeu d'anche.
Sonore, pur, parlant avec netteté et promptitude, il nu
participe point de ces jeux bâtards qu'on multiplie mal a
propos dans les orgues ordinaires; sa qualité est celle du
registre qu'on appelle improprement trompette. Peut-être
serait-il à désirer qu'il fût redoublé à l'octave aiguG par
1111 clairon, sorte dè jeu qui donne du brillant. On trouvé
au clavier d'expression un hautbois très joli : le registre de
la voix humaine, dont la place est marquée, n'est pas
encore placé.
Rien de plus beau, de mieux combiné ni d'un meilleur
effet que les divers registres des jeux de mutation, dont
l'ensemble forme le plein jeu. Quoique le volume clé
l'instrument n'ait pas permis à M. Érard de multiplier les
tuyaux sur chaque note, la combinaison de ces jeux sin-
guliers est si heureuse que l'ensemble en est parfait lors-
qu'ils sont joints aux jeux defonds. La grande étendue du
clavier dans le haut a obligé à faire plusieurs reprises,
mais elles ne nuisent point à l'effet, et ne se font point
sentir.
I.C soin que j'ai apporté «latin l 'examen «le I unies 1rs
parlics qui peuvent être jugées par l'elfe I ut par l'extérieur,
m'a convaincu que l'instrument dont il s'agit est ce qu'on
peut désirer de plus parfait. La péilale expressive, les
tira-tutto, et les autres moyens de modification sont Ici*
(jue les nuances les plus délicates peuvent èire rendues
comme par un |>on orchestre ; l'ampleur du sou. le gran-
diose de l'instrument, remportent d'à illeurs sur la réunion
d'inst rumens la meilleure qu'on puisse imaginer. Ces qua-
lités bout telles qu'on peut présumer que te travail inlérîeu r
a la même perfection , soit sous le rapport du jeu du mica-;
nisuie, soit sous celui de la solidité.
. . ■ FÉTIS.
CORRESPONDANCE.
Furis.le^uoùt 1837.
Monsieur,
Je suis extrêmement flatté et reconnaissant du compte
que vous avez bien voulu rendre de mou opuscule .dans
le ir 27 de votre intéressante Revue musicale. Comme il
n'est que ie résumé des mémoires que j'ai présentés à.
l'académie, j'ai trop négligé peut-être d'y insérer «les dc-
veloppemens et des preuves dont vous avez signalé le «lé-
faut, et votre critique très importante pour moi, à cause
de votre connaissance profonde de l'art musical, me déter-
mine à vous adresser les documens suivans , que je désire
que vous veuilliez bien communiquer de la même manière
a vos lecteurs.
Vous n'ignorez pas , monsieur, que lorsque deux Bons
rapprochés de l'unisson et produits par deux liâtes ou deux
cordes voisines l'une de l'autre se font entendre. à la fois, on
entend encore en même temps des battemens qui semblent
quelquefois répéter une octave do l'un des «leux premiers'
sons.
M le baron Caignard de la Tour et inoi , nous avons
soumis à celte expérience deux polîtes plaques de verre
i36
([iiî donnaient des sons déterminés par son palarytlmie ,
l'un à a56 l'autre à a58 vibrations par seconde . et nous
avons remarqué que deux de ces battemens avaient lieu
dans une seconde, les deux plaques résonnant à la fois.
Mous avons essayé ensuite deux plaques dont les sons
étaient formés par, '356 et 266 vibrations, et nous avons
compté 10 de ces battemens par seconde.
Or les deux nombres a et 10 sont précisément les dif-
férences des nombres de vibrations des deux plateaux
dans les deux cas cités. Ces battemens représentent donc
exactement les résonnances graves qui ne se manifestent
comme sons à notre oreille , que lorsque leur nombre s'é-
lève au moins à 5o ou 5a par seconde-
Lorsque l'on accorde les cordes d'un piano, on remarque
avec iine extrême facilité ces battemens, qui sont très pré-
cipités lorsque l'intervalle des deux sons générateurs est
d'une seconde mineure nu majeure , comme ceux de >a8
à i53 g et à 144 vibrations; mais si l'on abaisse successive-
ment la corde qui donnait le son le plus aigu, on recon-
naîtra que le nombre des battemens diminue progressive-
ment. Lorsque les cordes seront presque d'accord , elles
11e feront plus entendre de battemens que de loin e» loin,
et toujours en des temps égaux. Lorsque l'on n'entendra
plus de battemens, on pourra être certain que les deux
cordes sont parfaitement d'accord.
Telle est, monsieur, la preuve matérielle, expérimen-
tale, de la loi des résonnances graves, que l'oreille confirme
dans les intervalles moyens depuis la seconde majeure jus-
qu'à la septième mineure, et même au-delà; cardes bat-
temens semblables ont lieu pour deux cordes dont les sons
se rapprochent de l'octave. ;i
Quant au fa # a 355 | vibrations par seconde , qui ne
saurait être mathématiquement le même que le triton
exact j~ , représenté par environ 56a vibrations , il pro-
cède précisément de la sixte majeure la, faf, de la pre-
mière sixte majeure J *'* '°; car représentée en chiffres
par !x|, clic devient , dont l'o cl ave grave ~j csl le fa jf
que j'ai porté dans mon tableau comme quarte superflue' .
ha sol [>i 368 jf vibrations estait contraire produit parla
tierce mineure mi [j , sot \>, de la première tierce mineure
j «(, mi [>. ca|. représen[ee en chiffres par 5X5, elle
devient f| , expression que j'ai portée dan» mon tableau
comme quinte diminuée.
C'est cette différence dans les rapports exacts de la
quarte superflue et de la quinte diminuée, qui rend si
dures, si désagréables, les modulations où l'on est obligé
de lc3 substituer l'une à l'autre , et qui détermine l'artiste1
qui manie l'instrument à archet et celui qui divise une
flrttc, ou accorde un piano, à employer de préférence le
triton exact , et moyen proportionnel géométrique , repré-
senté par ~.
Je ne puis m'étendre beaucoup ici sur la définition
exacte des consonnances et des dissonances', que je donne
dans mon traité d'harmonie. J'y propose une manière de
désigner les accords, fondée sur les principes naturels que
j'ai fait connaître. L'accord j **' ff' , qui constitue
dans le cylindre isolé l'harmonie du mode mineur, n'est
pas en effet l'accord parfait mineur proprement dit; mais
(i) C'eat celle différence que l'on ne peut concevoir sans supposer
que la sixte majeure |"'' 'j' n'a pas été prise dans un rapport exact, el
que quelque circonstance inaperçue a dérange la justesse de cet inter-
valle, d'où l'on tire la resonnance de fa 555 | , antre que fa # 56a ;
différence qui esta peu près dans le rapport de 5i : 5a, et qui serait bien
plus désagréable à l'oreille que (felle de fa $ 36a (triton eiact] avec sot \p
368 i'ï car celle-ci n'est gufcrc que comme 80 : 81. Je n'affirme point
que M. le baron Bloin se soit trompé dans ses expériences; mais je serais
curieux de les répéter au moyeu du palarythme de M. le haron Caignard
Je la Tour. Il s'agit d'un fait qui doit changer en partie la lliéorio du
tempérament s'il est reconnu réel, et d'où l'on pourrait tirer des con-
séquences étendues que j'aperçois, mais qu'il serait trop long de déve-
lopper kl.
(iVolfl du rédacteur. )
il en est le lype dans une de ses inversions, « dérive im-
médiatement des rapports ., 3, 5 , des troissous entre eux
leurs vibrations étant dans les rapports inverses i i i
J'appelle : cantonnante de tonùjue ce que l'on nymme
accord parfit , j'appelle cvnsonmmcc de quinte ce que
ion nomme sixte majeure, et consonnance de tierce ce
que 1 un nomme quarte et sixte. En général, c'est la note
grave d'un aeeurd qui régit sa dénomination.
Eu employant l'expression accord dissonant pour un
ensemble de notes qui ont entre elles au moins Un rapport
dissonant (que cet accord soit usité ou non), je n'ai fait
usage que du mot propre, et opposé à cantonnant; je n'ai
pu dire accord discordant, parce que l'on ne dit pas ac-
cord eoncordant. r
Veuille agréer, monsieur, l'expression de mes senti-
menstrès distingués.
Le Bàeon BLEIN.
NOUVELLES DE PAKIS.
THÉÂTRE ROYAL DE L'OPERA-COMIQUE.
Nous avons annoncé, dans le dernier numéro dé la
Revue musicale que l'intervention de MM. les auteurs
dans les différens qui s'étaient élevés à l'Opéra-Comitjne
a eu le plus heureux résultat ; que les droits des sociétaires
avaient été reconnus, et qu'ils devaient rentrer dans l'exer-
cice de leurs taléns. Depuis lors, de nouvelles dispositions
ont été faites par l'autorité; l'ancien directeur, M. Guil-
berlde Pixérécourt, a été révoqué; M. Bernard, ancien
directeur de l'Odéon , lui a succédé, et M. Durais , ancien
administrateur du matériel à l'Académie royale de musi-
que, a élé nommé administrateur du contentieux et delà,
comptabilité.
La rentrée des sociétaires a en lieu lundi , 5 de ce mois,
par Michel Ange, Marie, et tes Rentlez-vous Bourgeois.
Cette rentrée fut une véritable fêle pour tous ces estimables
i59
ariïsles ; les applaudissemens qu'un public immense s'est
plu à leur donner a dû leur prouver que la justice de leur
cause était généralement sentie, et a du les indemniser
avec usure de ce qu'ils ont souffert. Dès le malin , la foule
environnai! les bureaux, et peu de temps après l'ouverture
de la salle il était impossible de trouver à se placer, en quel-
que endroit que ce l'ût, Des salves d'applaudissemcns , aux-
quelles les dames les plus élégantes prenaient part, partirent
de tous les points de la salle , au lever du rideau , lorsque
■M™ Ponchard parut en scène, et se prolongèrent long-
temps. Elle en fut si émue qu'elle fut obligée de s'asseoir,
et qu'elle ne put qu'avec peine achever son morceau. Les
mêmes applaudissement se répétèrent à l'entrée de chacun
des sociétaires; l'enthousiasme élaitàsoo comble. Le pu-
blic saisissait toutes les allusions; mais lorque Chollet dit
dans Marie: Enfin, nous voici de retour, ce fut comme
wn délire.
Un pareil accueil a laissé dans l'amc des sociétaires une
profonde émotion , une vive reconnaissance pour le public
et le désir de la lui prouver par un Iravail constant et par
de nouveaux efforls. L'harmonie est rentrée dans son do-
maine, et des jours de prospérité vont succéder aux trislcs
jours qui viennent de s'écouler. Celte prospérité est si fa-
cile à obtenir à ce théâtre ! Le public a voulu le prouver
dès le premier jour; car, malgré le nombre considérable
de personnes qui jouissent de leurs entrées, et qui étaient
accourues, la recette s'est élevée à h,oûo francs ; beaucoup
de personnes n'ont pu entrer.
La représentation du lendemain se composait de ta
Vieille et de (a Dame Manche; l'élite des acteurs s'y
montrait , et le public s'y est encore porté en foule. La re-
cette a été de près de 4'"00 francs. Jamais peut-être ces
deux piècesn'onl été jouées avec autant de verve et de soin.
MM. Iluet et Lemonnier, ainsi que M1™ Pradhcr ont joué
avec un ensemble, un fini , dignes des beaux jours de
l'Opéra Comique. Ponchard , Féréol , Boulanger et
Kigautont rivalisé de talent dans ta Dame Manche; enfui
celle représentation n'a laissé rien à désirer.
, Des ouvrages no»yeawx viennent d'élrc mis à l'èliidc,
et ceux de H M. les auteurs qui avaient des pièces. rtfÇflp»
ont élé invilés à se tenir prêts: tout annonce un automne
et mi hiver fructueux. Le premier opéra en trois actes
qui doit être représenté est, dit-on, de MM- Pluuardet
Onslow. Ces noms sont de bon augure,- r;,_n ..;[,., . , -,
Ikstititi. Académie-Royale des i>caux~arts. Les con-
cours pour les grauds prix de musique sont terminés.
Le sujet de la scène était Orphée déchiré par tes bac-
chantes- Les diverses sections de l'académie s'étant réunies
samedi, 1" do ce mois, pour entendre les travaux des
conçnrrens, ont décerné le premier grandprixa M. Guiraud,
elève de M. Lesucur , le premier second pris à M. Des-
préaux,élèvcdeH!U.Berton clFétis,el le deuxième second
a M. Alphonse Gilbert, élève des mêmes professeurs. La
Mène de M. Guiraud sera exécutée à la séance publique
de l'Académie, le premier samedi d'octobre prochain.
— Qn annonce deschangemens prochains dans le mode
d'administration de l'Opéra et du théâtre Italien; mais au
milieu (les bruits contradictoires qui circulent à ce sujet,
il est difficile de saisir la vérité. Nous sommes donc forcés
de nous abstenir de toute conjecture, et d'ajourner les
détails que nous voudrions donner à nos abonnés.
— Lp- célèbre compositeur H. fioieldieu vient de se
casser le tendon d' Achille dans une ebute qu'il a faite à sa
maison de campagne, près do Paris. Tous les admirateurs
et les amis de ce musicien distingué, non moins recom-
maudable par son amabilité et ses qualités soeiales que
par ses talena, ressentent vivement cet accident. Nous
espérons néanmoins qu'il n'aura point de suites fâcheuses.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Féte musicale des bords de VElbc. — Nous avons déjà
donné dans le 1" volume la Revue musicale, page 555,
iiuprécissuffisammentcîrconstanciédo ce qui s'est passé à
cette solennité; et bien que nous ayons reçu un grand nom-
»4*
bre do détails nouveaux, nous ne serions pas revenussur ce
sujet, si l'examen de toutes ces circonstances ne nous avait
paru digne d'une attention particulière. Il s'agit en effet
moins du récit de deux jours de concert, qui pourraient se
ressembler à peu prés dans tous les pays oii l'on fait do la
musique, que de la contemplation d'une existence toute
musicale , fortement liée à la vie sociale, et peut-être
même à la vie politique. Rien, en effet, chez ces peuples
si graves et si réfléchis, oii tous les goûts, tous les attache-
meus ont la solidité de la foi , et deviennent presque une
religion, ne se fait sans musique, que, chez nous, bien des
esprits graves ou frivoles regardent encore aujourd'hui
comme un art à peine digne d'attention. Si nous passons
nos frontières d'est et de nord-est, en deçà et au-delà
du Hliin, nous trouvons, ou contraire, que rien de publie
ne peut se passer de l'assistance de la musique. Un sou-
verain voyage-l-il, il est reçu dans toutes les localités avec
le chant d'un chœur; c'est encore un chœur qui accom-
pagne le Facfcelzug (cortège aux flambeaux) qui va rap-
peler h un prince une époque heureuse pour ses états ou
pour sa famille. Les éludians se réjouissent en chœur , les
journaliers des villages se délassent le soir des travaux du
jour en chantant sous le; tilleul de la place; c'est aussi
sous le tilleul que vont chanter en chœur ces ouvriers
que les lois de leur corporation obligent à voyager, et qui
-s'y réunissent le soir après avoir fait leur étape, en parlant
a la main les outils de leur profession. Naguère encore,
ils en étaient récompensés par l'hospitalité qui leur était
offerte. La fondation et la consécration des temples catho-
liques ou protestant et de presque tous les édifices publics
ne peut se passer du chant de plusieurs chœurs. Enfin , si
l'on voulait recueillir tous les faits de ce genre , on trouve-
rail, qu'indépendamment des amusemeus quotidiens, il
n'estaucune solennité civile ou politique, particulière ou
générale, dont la musique ne fasse partie intégrante.
Revenons à la féte des bords de l'Elbe , dont les circon-
stances extérieures doivent seules nous occuper aujour-
d'hui, puisque dans l'article susmentionné nous avons
parlé des morceaux qu'on y a entendus, et de leur exécu-
tion.
Un comité avait été formé des autorités de la ville de
Zerbstetdes habitons les plus considérables pour veiller a
tout ce qui pouvait avoir rapporta laféte. Presque tous les
habitons s'offrirent à loger chez eux tous ceux qui devaient
y prendre une part active. Le maître de chapelle Schneider,
directeur de lafetc, était arrivé à' Zerbst dès le tojuin.
Il y fut suivi le i3 par l'académie de chant et le chœur
de l'école principale de Dessau. Le 14 arriva la chapelle
du duc d'Anhalt-Dessau , et la société musicale de Magde-
bourg. Lesexécutansse trouvèrent au nombre de3io, dont
jg3 chanteurs , savoir : 6a supra ni , 38 contralti , Ifi té-
nors et 4? basses. On n'oublie pas de mentionner, dans les
rapports publiés à cette occasion , que 107 appartenaient
à l'académie de chant et au chœur de l'école , 53 à la so-
ciété de Magdebourg et 5a à la société de chant de Zerbst;
un bassiste était venu de Leipzick. Ces instrumentistes
étaient au nombre de 116, dont £\5 violons, i5 alto, 1a
violoncelles , 8 contre- basses, 5 flûtes, 4 hautbois , 5 cla-
rinettes, C bassons, G cors, i contre-basson, 3 trombones,
4 trompettes, 1 lymbate. Sur ce nombre , la ville de Des-
sau avait fourni 44 individus , Magdebourg 35 , Zerbst i5 ,
Korwi'g 6, Leipsicl. 4, Nordhausen 3, Berlin a, Cœthcn 3,
Eaguhn a, Dresde 1, Frankenberg 1, Wœrtz 1 , Acken 1.
L'Eglisede Nicolaï avait été préparée aux frais du Prince
souverain , de manière à ce que tout tendit à favoriser la
beauté et les libres vibrations du sou. On avait fait de
grands changemens dans l'intérieur de l'édifice. Bous
avons parlé de l'exécution de l'oratorio de Samson d'Haen-
del, dont presque tous les solos furent chantés par des ama-
teurs, dont plusieurs sont fonctionnaires publics. Le 'soir
de la première journée , tous les musiciens sujets du Duc
de Dessau, auxquels s'étaient joints les étrangers , se ren-
dirent au château, à la clarté des flambeaux, et chaulèrent
un chœur composé pour cette occasion , par le maître de
chapelle Schneider. Le prince vint remercier en personne.
Le second jour on exécuta comme nous l'avons diti'ouver-
DiginzMBy Google
■47
turc rî'Iphigénieen Tauride de Gluck, à laquelle Schnei-
der avait ajouté des clarinettes et des trombones. Parmi
les autres morceaux, on n'en comptait que deux desti-
nés à faire entendre des solos d'instrument ; on a princi-
palement remarqué le psaume 34 , de la composition de
Schneider, qui parait avoir été traité dans de grandes pro-
portions.
Le soir de cette dernière journée, les membres présens
des sociétés des chansons de table de Dessan , Magde-
bourg et Leipsick.se réunirent encore avant de se séparer
pour exécuter des chants à un grand nombre de voix.
ANNONCES.
Souscription pour la publication d'une nouvelle Mcsso
solennelle à grand orchestre, avecsolosel grands chœurs,
de la composition de M. Lenteur, surintendant de la
musique du roi ( M. Frey, éditeur).
Cette meise, composée d'un Kyrie, Gloria, Credo, Offertoire, Sane-
fui, O Salularii et Agnai, n'a encore élé exécutée qu'à la Chapelle du
Itni et a Nuire-Dame. Elle sera sans doute recberchée par tous les ama-
Ll'i cathédrales auront la Facilïlé île Taire ciécutcr celle messe , soit
m entier, soit par fragmens, avec accompagne ni en I d'orchestre ou d'or-
instrument au bas de chaque accolade de la partition
Le prii marqué de cette messe sera de 5o l>. ; mai* tontel les per-
sonnes qui souscriront avant le 1" novembre 1837, jour de la publi-
cation , ne paieront que ao fr. en la recevant. Les souscripteurs qui
n'auraient pas d'occasion pour faire retirer leurs eurmplaircs à Paris, les
recevront en ajoutant, pour le port, ifr. 5o c. pour les dép^rtemens.
Les lettres de demandes doivent être adressées allrancbies à I. Faar,
édilcur de musique, place des Victoires, n 8, a l'ari».
Un drjii se Féliciter que M. Lesucur ait entrepris la publication de ses
enivre* sacrées, qui prouveront, coujuinlement avec celles de M. Che-
rnbinî, que la France n'esl point arriérée suus ce rapport, et qu'elle
peut lulter avec l'étranger. Déji sa belle messie de >"m-l avait vu le jour;
â celle que nous annonçon. .nijuu nl'hui , mh < ciicra l'oratorio de Dùtnira,
cl plusieurs aulrcs ouvrages iiuportans.
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■44
Souscription pour la grande partition de Macbeth, tra-
gédie lyrique eu trois actes, représentée à l'Académie
royale de musique le ap, juin 1827, paroles de M.***,
musique de A. Chetard.
La partition de Macbeth , précédée d'une notice historique fur cet
ouvrage, et de considéra lion s générales sur l'état de la musique en
France , sera publiée dans le courant île mars 1S18.
Le pri* de la souscription est de 4o fr. net.
On souscrit a Paris, jusqu'au 3i décembre 1857, chei Hïïiby Lemoub,
professeur de piano, éditeur et marchand de musique, rue de l 'Échelle,
»" 9-
Cette partition sera pour les non-souscripteurs: prii marque îao fr.
Les morceau* séparés, avec accompagnement de piano, sont en
vente.
— 5' air varié pour le violon , avec accompagne-
ment d'orchestre, par de Beriot, 10 *
Idem, avec accompagnement de piano. 7 5o
— 3 airs du ballet de Moïse, arrangés en rondeaux
pour le piano, par H. Herz; chaque 5 »
— Fantaisie pour harpe cl violon, sur les motifs de
Moïse, par Labarre et de Beriot. 7 5o
— Fantaisie pour la harpe, sur les motifs de Moïse,
par Labarre. G •
Chez E. Troupcnas, rue do Menars, n"3.
Digitizod b/ Google
DES CHANTS POPULAIRES
Ç$t f<t <&ri<t mofcnw.
DEUXIEUE ET DERNIER 1RTICLE '.
Presque toujours les auteurs des C liants populaires res-
tent inconnus, soit qu'ils négligent de se nommer, soit
qu'ils se cachent à dessein. Ce qui est vrai à ectégard pour
les diverses nations , l'est sans exception en Grèce. 11 serait
impossible d'indiquer avec précision l'auteur d'aucune des
nombreuses chansons qu'on y entend. Sauf quelques ex-
ceptions, elles sont le fruit d'un talent poétique naturel,
spontané, indépendant de toute culture. Tel de ces chants
dont l'idée est un trait de génie, l'éclair d'une imagination
originale , et dont l'exécution et les détails sont en harmo-
nie avec cette idée peut être l'ouvrage d'uu paire , d'un
laboureur, d'un artisan, d'une vieille femme ou d'une
jeune fille. L'unique chose dont on puisse être à peu près
sûr, concernant l'auteur d'une chanson prise au hasard
entre les médiocres ou parmi les plus belles, c'est que cet
auteur n'avait appris ni à lire ni à écrire, ne savait point
par théorie ce que c'est que vers ou poésie, et qu'il ne
songea en composant qu'à satisfaire un besoin de son ima-
gination, qu'a rendre une émotion de sou cœur, mais non
à faire preuve de talent poétique.
Ces chansons ont des physionomies particulières qui font
reconnaître leur origine; celles des villesse distinguent aisé-
ment de cellesdeschamps, desmoutagues, ou de l'Archipel.
Il y a des villes où te talent et le goût de la poésie et de la
musique semblent être plus particulièrement le partage de
certaines professions. A Jannina , par exemple, ce souties
tanneurs qui composent la plupart des chansons qui, de
cette ville se répandent ensuite en Épire et au-delà. Dans les
(ij Viitce la Revue nmneo/e, a' Sn, p. lai.
a* vol. i3
Digitized by Google
*46
poètes et de musiciens. Les matelots semblent être les ati-
Iciirsdcla plupart des chansons (jni se chantent en mer par
les équipages de navires. Enfui , il y a dans tonle la Grèce,
des femmes qui, indépendamment des myriologues, compo-
sent aussi ries chansons souvent l'orl belles sur toutes sorte»
de sujets, mais de piélerence sur les plus pathétiques.
Quant aux chansons klephliques, elles sont en partie
composées par les acteurs ou les témoins des aventures
sur lesquelles elles roulent , et en partie par des aveugles
mendians , répandus dans toute la Grèce , et dont la res-
semblance avec les anciens rhapsodes est frappante.
II n'y a point à proprement parler de mendians dans la
Grèce. Tout homme en état de travailler n'y cherche point
a vivre d'aumônes. Les aveugles seuls sont réduits à user de
celte ressource; encore sont-ils censés exercer une profes-
sion utile par leurs chants ; car ces chants sont un liesoin
pour les Grecs. Ils sont dans l'usage , tant sur le continent
que danslcsllesdelaGrece. d'apprendre le plus grand nom-
bre possible de chansons populaires de tout genre. Conti-
nuellement en marche, ils traversaient naguère le pays en
tout sens, du fond delà M orée à Constanlinople. des côtes
de la mer Ëgée à celles de la côte d'Ion Le. Allant de ville eu
ville, de village en village, chantant à l'auditoire qui se for-
Mail an tour d'eux partout «ft ilsse montraient, les chansons
qu'ils jugeaient convenir le mieux à la localité , aux cir-
constances, et recevant une petite rétribution qui compo-
sait leur revenu. C'était surtout aux réunions nombreuses,
aux fêles de village , connues sous le nom de panegflyris,
que ces chanteurs ambnlans accouraient le plus volontiers,
cl qu'on était sûr d'en trouver un grand nombre.
Composant également les airs et la poésie de leurs
chansons, la plupart des Grecs ne connaissent pas mieux
les principes de la musique que les régies de la versilica-
tion; ils n'ont, pour se diriger dans l'une comme dans
l'autre, qu'une routine plus ou moins sûre et délicate. Le
■ aracière de leur chant ne diffère guère de celui qui est en
usage dans leurs églises et dans celles d'Orient; il est eu
'47
gémirai chargé d'ornemcns et de petit» tremble mens de
vois qu'on ne trouve dans aucune autre musique. L'es airs
des citants klephliques sont simples, traînans , et tenant
plus du plain-chanl que les autres; ces airs ont toujours
quelque chose de plaintif, lors même qu'ils célèbrent les
victoires des Klephtes , ou qu'ils doivent être I expression
de leurs sentimeus tes plus fiers. Les airs des chansons de
montagnes ne prennent quelquefois qu'un seul vers, plus
ordinairement deux, mais jamais davantage. Ce n'est eu
quelque sorte qu'une phrase qui se répète pendant toute
la durée de la chanson.
Quant a la musique des chansons rimées , composées
dans les grandes villes ou dans les îles , elfe a plus de dou-
ceur et de régularité. Ce sont pour la plupart d'anciens
airs italiens importés de Venise.
Les aveugles rhapsode* chantent en s'aceompagnant
d'uu instrument à cordes qui a la forme de l'ancien ne
lyre , mais qui se joue avec un archet. Cette lyre doit avoir
cinq cordes, souvent elle n'en »<qoe deux ou trois dont
l'effet u'a rien de bien harmonieux; mais telle qu'elle est,
cette musique suffit pour délecter l'oreille d'un auditoire
peu exigeant.
Il est rare que le chant de ces airs ne soit pas accom-
pagné d'une action mimique qui ajoute à l'expression des
paroles , ou d'une sorte de danse de caractère, particulière
aux Grecs. Il y a toujours dans les danses grecques uue
intention mimique plus ou moins expresse , plus ou moins
déguisée. Chaque province a sa danse particulière qui pa-
rait n'être que la tradition d'une ancienne pantomime,
destinée dans l'origine à représenter uue action quelcon-
que, historique ou feinte. Chacune de ces danses a sa
chanson qui lui est exclusivement appropriée, et qui re-
monte comme elle à une époque immémoriale.
Tout porte à croire que les divers caractères de la chan-
son grecque s'affaibliront successivement pour ne laisser
subsister que les chants historiques , car toute l'existence
delà Grèce est maintenant renfermée dans l'issue des évé-
uemens dont elle est le théâtre depuis quelques années.
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■46
La plupart des anciennes chansons seront oubliées en
Grèce , parce que la tradition ne conservera que celles nui
rappelleront Je grands événemens. Une collection de ces
anciennes chansons sera donc un jour fort intéressante ;
sous ce rapport, celle qui a été publiée par M. C. Fauriel,
avec une traduction française', ne saurait être trop re-
commandée, et l'on a lien de s'étonner que les journaux en
aient si peu parlé quaud elle a paru. C'est de cette utile
collection que j'ai tiré tous les renseigne meus que j'ai
donnés sur une matière neuve et peu connue. De l'aveu
même de M. Fauriel, sa collection est loin d'être com-
plète; mai* telle qu'elle est, elle mérile l'attention des
hommes de goût et des amis du peuple courageux qui,
quels que soient ses défauts, effaoe maintenant les autres
nations.
FÉTIS.
DEUX MOTS SUR LES THÉÂTRES DE.PARIS,
PAU M. AMÉDÉE DE TISSOTi.
El» vain on se pique d'impartialité lorsqu'il s'agit d'un
ouvrage nouveau ; en vain on veut se dépouiller de toute
prévention favorable ou défavorable ; le nom de l'auteur agit
sur le lecteur à son insu. Ce nom, s'il est connu par des
succès, nous dispose à trouverbience qui n'est quelquefois
que médiocre ou faible ; mais l'écrivain ignoré ne doit at-
tendre qu'une justice rigoureuse ou même quelque chose de
pire. La critique prend le ton de la politesse et de la défé-
rence quand elle s'adresse à celui dont le nom est devenu
respectable ; mais elle est souvent dédaigneuse à l'égard de
ceux dont les litres ne consistent qu'en espérances. Ces pré-
(i) Chaula populaires de ta Grtcc moderne, recueillis et publiés avec
une traduction fran\ïise et des nutes, a vol. in-S° ; Pari», Firmin
Didot, i8ai(.
(a) Brochure in-8» de (o pages; Paria, Delaforot, rue des Fille»-
Saint-Tbonitu , n° 7.
■ 49
ventious sont très condamnables sans doute; mais qu'y
faire ? elles sont inséparables des faiblesses humaines : il
faut bien s'y soumettre , et faire à ses dépens un premier
pas qui décide souvent de l'avenir.
Si j'en juge par la liste des productions imprimées de
M. Amédée de Tîssot (qu'il a placée à la fin de sa bro-
chure), il n'est point de ceux qui ont à redouter leur ob-
scurité; car ces productions sont nombreuses. J'avoue
qu'elles m'étaient inconnues; maïs cela ne prouve rien
contre leur célébrité; je suis tout simplement un ignorant
comme ceux de mes lecteurs qui n'auraient point entendu
parler de Darius, tragédie en cinq actes; du Massacre
de lu Saint-Barthétemi, autre tragédie en cinq actes ;
à'Eudaanc, troisième tragédie en cinq actes ; d'Jrric,
quatrième tragédie en cinq actes; du Médecin libérât,
comédie en un acte et en vers; du Minutieux, comédie
en un acte et en vers; de la Décoromanie , de i'Aibio-
nade, ni de beaucoup d'autres comédies, poèmes et
opéras. Avec un pareil bagage, on doit être fameux;
je ne doute point que M. Amédée de Tîssot ne le soit. C'est
donc avec des dispositions toutes favorables au nouvel ou-
vrage de cet écrivain, que j'entreprends d'en entretenir le
public, et je n'ai a me défendre que d'une admiration
anticipée.
La supériorité de Al. Amédée de Tissot se manifeste par
le Ion superbe qu'il prend dès le commencement de sa
brochure. 11 y dédaigne les formes de la politesse, et traite
durement ceux auxquels il adresse des réprimandes. L'O-
péra, autrement l'Académie royale de musique , est le pre-
mier objet de ses critiques. La salle, sa position, son as-
pect extérieur, ses dispositions et ses moindres détails, tout
y blesse l'œil de notre célèbre écrivain. Ce ne sont point
deux mots qu'il dit sur cette matière; mais de longues
phrases où je n'ai vu que les critiques qui onl Irniné dans
tous les journaux, et qu'on répète chaque jour.
Si M. Amédée de Tissot traite durement les hommes ,
il rachète son défaut d'urbanité par sa galanterie pour les.
dames. On en peut juger par ce passage.
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■5b
f Le maçon . car on ne peut pas dire l'architecte , rmï ,t
• Ole vi* ce bâtiment, n'étant pas fort sur la mythologie, n'y
«a placé que liuil muses! Cela n'est ni galant ni classique.
■ Si M. l'entrepreneur aime la symétrie, au lieu d'exclure
• du temple des beaux-arts «ne de ses chastes protectrices,
• que ne nous tn donnait-il une diadème ? avons-nous
%pas ta muse de la patrie? N'est-ce qu'après ta mort de
• mademoisetle D. G. qu'il sera permis do tuir élever
< une statue? »
L'enthousiasme de M. Amédée de Tissot est sans doute
très fondé, mais il lui fait, commettre uu petit anachro-
nisme. Wm D. G. était née lorsqu'on a bâti la salle de-
l'Opéra, mais elle ne s'était point fait connaître; et, a tout
prendre , ce pauvre M. Debret est excusable de n'avoir pas
prévu qu'elle serait un jour ta muse de ta patrie.
Parmi les nombreuses observations qui se trouvent dans
le» Deux mois de SI. Amédée de Tisgot, on remarque celle-
ci : * Le meilleur moyen d'éviter le mauvais air qu'on y res-
• pire ( au théâtre ) , est de ne jamais rester dans la salle
• quand le rideau est baissé , et d'éviter constamment les
« premières représentions, les représentations à béué-
« fiée , cl toutes celles où l'on prévoit que doit se trouver
• la foule. ■ En résumé , le meilleur moyen d'éviter la
foule, c'est qu'il n'y ait point de foule : vérité incontes-
table !
C'est surtout aux directeurs (Je nos théâtres que M- de
'L'issot déclare la guerre; MM. Lubbert et de Taylor sont
tour à tour frappés par sa férule, il faut avouer qu'il abuse
un peu de sa supériorilé dans celte occasion , et qu'il dé-
passe les bornes de la critique. L'administrât ion d'un di-
recteur est soumise de droit â la censure du public cl dus
journaux ; mois sa personne doit être respectée, et nul n'a
Je droii de s'immiscer dans ses affaires particulières. M. de
'l'issot insiste fortement sur ce que l'un de ces messieurs
élait employé à l'administration de la loterie et l'autre
peintre de décorations, avant d'être appelés à leurs nou-
velles fonctions; mais qu'importe! il fallait bien qu'ils
fussent quelque chose avant d'être directeurs. Des jeux
i5i
île mots île mauvais goût ne sont d'ailleurs point des rai-
mim, et l'on est condamnable quand on se permet d'im-
primer contre un honnête liomme des phrase* comme
celle-ci : « Cependant le nom de M. Lubberl, ({ni jusqu'ici
t n'a hrillé que d'un éclat an peu terne, n'offre pas à
. l'Opéra de grandes chances de sucées. On dirait , au ru-
■ pide avancement qu'il vient d'obtenir, qu'il est poussé;
m par quelque haute et puissante dame : cependant l'objet
• rie sa prédilection n'est , à ce qu'un assure à l'Opéra ,
o qu'un extrait de femme. » Ah ! M. de Tissot! vous qui
parlez sans cesse de bon ton et d'éducation soignée, vous
oubliez ici vos principes.
. En cherchant avec soin dans la brochure des Deux
mots [en qtiaranle pages) les fjriefs de M. de Tissot contre
M. Lubberl , je n'y ai trouvé que le tort d'avoir employé
dans Moïse un mauvais nrc-cn-cicl, et de ne point met Ire
au lustre des verres dépolis. Si j'en crois le bruit puhlic ,
l'expulsion des coulisses de l'Opéra prononcée contre......
Mais n'imitons pas M. de Tissot, et disons seulement qu'il
est trop sévère, à propos d'un morceau de loile peinte et
de verres de quinquets.
Les reproches adressés à Itossini sont plus positifs; on
peut en juger par ce passage. « La place n'est pas lenahle
• quand on donne des pièces de Itossini. La nature, qui
■ nous a pourvus de paupières pour nous donner les
t moyens de nous délivrer d'une vue ou d'une lumière qui
■ nous blesse, aurait bien dû nous accorder une niem-
i hrane avec laquelle nous eussions pu fermer l'oreille et
« ne point entendre des sons criards et assnnrdissans.
• L'homme qui inventerait un instrument capable d'opé-
«rcr cet effet aurait bien vite lait sa forlune, s'il se plaçait
t à la porte de l'Académie royale de niusiqtio.
* J'avoue que je n'ai pas lu la Vie de Ronrini; mais
■ quand on entend sa musique do caserne , et l'iinuppor*
■ Isble charivari que produit le jeu Continuel de la grosse
• caisse, des timbales, des eimbalcs, etu.. on doit supposer
' que cet homme »*•' a reçu qu'une triste Muèatia», qu'il
. n'a étudié- ni les lettres ni t'anliquilc; qu'il n'a j'ré-
Digitizod by Google
i5a
t quentè que des gens de ta lasse classe du peuple. C'est
■ seulement depuis que sa position sociale s'est améliorée,
■ depuis qu'il habite Paris , que son goût commence à se
■ former, comme le prouve le troisième acte du Siège de
■ Corinthe, qui, sans tapage, est bien supérieur aux deux
■ premiers. Comment peut-on n'être pas choqué des
t contresens qui abondent dans sa musique? Par exemple,
« dans son opéra de Sêmiramis, c'est au moment terrible
■ de l'apparition de l'ombre de son époux qui la menace ,
< et lorsque la terreur est à son comble, qu'on entend un
t allegretto de la galté la plus bouffonne, un morceau
• indigne de Polichinelle , etc. » On voit que M. de Tissot
n'est pas de ces gens qui composent avec les réputations;
en vain le monde enlier salue tes œuvres du chantre de
Pcsaro par des applaudissement unanimes, M. de Tissot
déclare que ce n'est que de ta musique de caserne. Passe
pour cela; le mot n'est pas poli, mais chacun est libre dans
ses goûts. 11 est seulement fâcheux qu'à l'expression de
son opinion, l'auteur des Deux mois ait joint des assertiods
audacieuses sur la personne d'un grand artiste, et des
termes de dédain qui sont plus que déplacés.
Jusqu'ici nous n'avons considéré M. île Tissot que
comme critique; nous allonslcvoirmatntenautinventeur.
La musique de caserne lui déplaît à l'Opéra; mais il ne
se borne point à bannir de l'orchestre les instrument
bruyans qu'on y a introduits; il veut éteindre le son autant
que cela se peut; et, pour cela, il propose de descendre le
plancher de l'orchestre de deux pieds, et de mettre sous
les planches du lliéûlre tous les instrumens de cuivre et de
percussion , ce qui, comme on voit, contribuerait singu-
lièrement a mettre de l'ensemble parmi les symphonistes.
< J'ai inventé une nouvelle forme do violons , dit M. de
< Tissot, qui permet de démancher sans peine, et par con-
• séq lient de jouer plus juste; elle offre aussi la facilité do
■ jouer sur la touche et de produire des sons mités extrê-
mement flatteurs. On devrait l'adopter dans les or-
» cbestres, où, dès qu'on monte à l'ut, les exécutans sont
< ordinairement a cûlé du ton. Je me sers aussi avec succès
■igitizod t>y Google
iS3
< d'un archet garni de cheveux de femme , qui produisent
«des sons plus doux que lecriu : en douter serait unbla-,
« sphème! »
, Vivent les esprits inventifs ! l'orchestre sous 1b théâtre;,
des archets de cheveux ; voila du nouveau. On cherchait
uu homme de génie qui pût faire autre chose que Rosaini:
le voilà tout trouvé. C'en est fait du rossinisme; nous al-
lons avoir le tissotisme. Honneur à la France, qui a pro-
duit cette merveille] ... ...
On pense bien qu'un génie si universel et si fécond en
ressources que .M, Amédée de Tissot ne. s'arrête pas à ces
découvertes : mille autres jolies choses de sa composition,
sont proposées par lui, comme, par. exemple, un nouveau
genre de peinture sali* ombras, basé sur les tableaux
qu'offrent les danseuses vues de la rampe: idée sublime
qui a manqué à. nos David, Gïrodet, Gérard, Gros, In-
gres , «te. , que M. de Tissot représente comme des routi-
niers sans génie. Heureux siècle qui as produit AL de
Tissot 1 tu n'auras bientôt plus rien à désirer!
Les autres théâtres de Paris sont aussi l'objet des inves-
tigations de M: de Tissot ; mais elles sont moins étendues
que celles qui se rapportent à l'Opéra. Tout est sacrifié à
celui-ci; on voit que c'est l'objet des prédilections de l'au-
teur de la brochure. Ou ne peut douter que ce spectacle
n'obtienne des succès d'un genre tout nouveau , si les in-
ventions dont nous avons parlé sont adoptées.
EXPOSITION DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
1HST1UMENS DE COIVBË.
CORS A PISTONS.
Inventer des chants simples et naturels devient chaque
jour plus difficile et plus rare , soit que les idées radicales
soient bornées à un nombre déterminé, au-delà duquel il n'y
a'vot. 14
1 54
ait que des modifications de goût, des arrangement, des
déguisémens de phrases connues, soit que l'oreille des di-
tettanti ressemble au palais des gourmands, qu'elle se blase
et finisse par se dégoûter des émanations les pins sublimes
du génie. A mesure qu'on avance dans l'art, la musique sim-
ple s'affaiblit et laisse envahir son domaine parla musique
d'effet, par le bruit même. Tel qui supportait à peine quel-
ques ootéi de cor autrefois, a besoin aujourd'hui de tout
l'attirail des trompe! les, des trombones etàesophicléides;
tel autre, que le bruit des timbales assourdissait, n'est point
Satisfait s'il n'entend la grosse caisse, les cimbclea , les
crotales , etc. Les effets , le bruit sont devenus la ressource
du compositeur, et le goût dominant du public ; c'est donc
à la recherche des effets que chacun applique ses facultés,
èt l'on doit Convenir qu'on s'y est rendu fort habile depuis
trente ails.-
Mais si le génie du musicien est indispensable pour les
découvrir , l'art des luthiers n'est pas moins utile; car les
découvertes d'instrumens nouveaux, et les perfectionne-
ttietis dés anciens, ont fourni des ressources sans lesquelles
l'écoierriodernen'aUraitpu produire desefieissisurpredans.
le* instruirions de cuivré ont particulièrement éprouvé deB
améliorations Considérables. Je me propose de les exami-
ner en détail, èt je Commencera* pat le cor, instrument
Important dans l'état actuel de nos orchestres.
On a vu dans un article de la Rewe, musicale, (n° n ,
p-.2;o), qu'il n'y avait autrefois d'autres cors dans l'or-
chestreque le carnet àl/ouquin, qui était percé de sept Irons
dont l'un se bouchait avec une clef, et qui n'avait d'autre
embouchure que celle de la trompette. Le cor-de-chasse
fut inventé en France vers 1680 ; mais il ne commença à
s'introduire dans l'orchestré qu'en 1.750, du moins pour
l'usage de l'Opéra. Ce n'est même qu'en 1757 que cet in-
strument y fut employé d'une manière avantageuse par
■ M. Gossec, dans dooxair* qu'il composa pour les début» de
M11* Artlould , et où l'on trouvait deus clarinettes et deu«
'Cers oblifïés. ■
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i55
Borné d'abord aux noies naturelles,
le cor était de peu de ressource. Mais une découverte do
Hampi, célèbre corniste de lacourde Dresde, vers 1760,
changea tout à coup son échelle et agrandit son domaine.
Dans la vuedefaireuneïFet de sourdine, il imagina de bou-
cher en partiele pavillon avec un tampon do coton; mais sa
surprise fut extrême de s'apercevoir que boti instrument était
haussé d'un demi-ton. Ce fut pour lui un traitdelumière,et
sur-le-champ il essaya de présenter et de retirer son tam-
pon sur toutes les posilîous des lèvres, et il obtint les demi-
tons de toutes les gammes diatoniques et chromatiques.
Les sons qu'il obtenait avec le tampon étaient à ta vériié
plus sourds que ceux que lui fournissait la colonne entiè-
rement libre; mais ils n'étaient pas moins précieux. Il leur
donna, à cause de cela, le nom de sons-iouofuSs. Dans la
suite , il s'aperçut que la main pouvait remplacer le tam-
pon avec avantage , et adopta ce dernier procédé. Rodolphe
est le premier qui ait fait connaître en France ces notes
bouchées.
La découverte de Hampi fut suivie de plusieurs 'autres
non moins importantes, qui, successivement, ont porté le
cor à un point où il semble qu'il reste peu de choses à faire.
Par exemple, on sait que tous les instrumens s'élèvent
avec la température; mais la matière dont le cor est formé
est plus impressionabie qu'aucune autre; aussi cet instru-
ment monte-t-il rapidement. Pour l'accorder avec l'or-
chestre , on n'avait point trouvé d'abord de meilleur expé-
dient que d'ajouter un certain nombre d'allonges auprès
de l'embouchure ; mais ces allonges avaien t l'inconvénient
d'éloigner le pavillon du corps, et conséquemmeot de
priver l'instrument de son point d'appui. Un facteur de
Hannu , près de Franefort-sur-le-Mein , nommé I/alten-
ftoff, appliquant au cor le principe de la construction du
trombonne, imagina la coulisse qui permet d'allonger à
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>Sfl
volonté In colonne d'air, et sur laquelle on a fini par poser
les différens tons de l'instrument.
Tel était naguère Vélaï où le cor avait été amené suc-
cessivement. Divers essai» avaient été faits pour donner
aux sons bondit1» une sonorité analogue à celle des sons
ouverts, maislonjours infructueusement. Charles Claggel,
compositeur anglais, avuit inventé, à la fin du siècle dernier,
un cor double composé des deux tons de ré et demi p, et
qui n'avait qu'une seule embouchure. An moyen d'une clef
ipii ouvrait la coin ni uni cal ion de l'air avec l'un ou l'autre
cor, on pouvait donnerà Volonté, en sons ouverts, à peu près
toutes les notes de la gamme chromatique ; mais l'insliu-
meut était lourd et difficile à jouer à cause du calcul que
l'exécutant était continuellement obligé de faire. Cette dé-
couverte n'eut donc point de suite. ' ■ ; •'
On regrettait cependant qu'un instrument doué d'une
voix aussi Uatteuse quele cor eût si peu de notes naturelles,
et tant de sous factices, quand, tout à coup, un musicien
allemand, inconnu jusque-là, inventa le cor à pistons,
en i8i5oui8i6. Ce musicien, uoinmé Stœlztt, fatigué
d'être obligé du porter partout les diversions du cor, lors-
qu'il allait accompagner les danses du pays, dans les or-
chestres de campagne, conçut le dessein de se débarrasser
de cette obligation, et de faire un cor avec lequel il put
jouer dans tous les tons. A force de recherches et de per-
sévérance, il vint à bout de ce qu'il avait entrepris, et porta
son invention encore informe à Berlin , oh M. âchlot , fa-
briquant d'iuslrumeus de cuivre, chercha à la perfec-
tionner; . '
Celle invention consistait à placer sur la coulisse deux
boites qui contenaient chacune une pièce de cuivre percée
de trous et posée sur nu ressort à spirale. Lorsque le res-
s/irt était dilaté, il poussait en haut la pièce de cuivre,
dont les trous ne rencontraient pas alors ceux des tuyaux
additionnels qui étaient destinés à baisser l'intrument d'm
demi-ton , d'un ton , ou d'un ton et demi. Mais lorsque lu
doigt était appuyé sur le piston, les trous se reucontraieni,
'air circulait et l'effet était produit.
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A celle époque, M. Christophe Schuncke , musicien du
prince de Bade , se trouvant à Berlin , conçtrt , au premier
exameu du cor de Slœlzel , tout le parti qu'on pouvait en
tirer, et, de retour à CaHsrube, il invita M. Schuster. f.ic-
teur fort habile, a travailler an perfectionnement de l'ingé-
nieux instrument. Mais le mécanisme ayant été appliqué
par lui àla coulisse d'un cor soin, cemme l'avait fait Sticl-
jtcl, divers inconvéniensassezgraves en résultaient. D'abord
on ne pouvait obtenir que quatre tous . savoir : 1° celui du
eor sans piston fa; a' celui de mi Èj, donné par le piston
qui baissait l'instrumeul d'un <lemi-ton; 3" celui de mi\>,
produit parle piston du ton; et enfin 4°, celui der<!, qu'on
obtenait en réunissant les deux pistons.
I «second inconvénient consistaiten ce que n'ayao' point
de corps de rechange, on pouvait être conduit dans des
modulations difficiles, qui obligeaient à tenir constam-
ment les doigts appuyés sur les pistons, ce qui causait de
la fatigue. En outre , cette obligation d'employer constam-
ment les pistons, privait l'instrument des sons aigus dans
les tons élevés tels que sol, fit et si é, sorte de sons dont les
timbres sontbrillans dans les cors ordinaires, ouïes rendait
très difficiles à obtenir. Far exemple, si, dans le Ion de
fi b, on doit faire fa à l'unisson de celui-ci
au lieu de jouer dans ce ton la note sot
correspond, est obligé de prendre ut aigu du ton de
fa ^ =jj cette note sera [infiniment moins aisée à
faire.
Le troisième inconvénient du corà pistons de M. Sofa aster
est d'obliger a transposer presque continuellement , et de
changer dans chaque ton le jeu des pistons.
Enfin, ce continuel emploi des pistons changeait la so-
norité naturelle de l'instrument et l'altérait; outre cela, la
place des pistons changeait à mesure qu'on était obligé de
tirer la pompe, ce qui occasionnait un déplacement de la
main qui tenait l'instrument. Cet allongeincntde la pompe
ne se trouvant plus proportionné avec l'étendue des ions
produits par les pistons, nuisait d'ailleurs considérable-
ment à la justesse1.
Néanmoins les avantages qu'offre cet instrument sont
tels, que les artistes les plus distingués désiraient qu'on
pût corriger ses défauts, afin de l'adopter. L'un d'eux,
M. Meifred, artiste de l'Opéra et de la chapelle du roi,
ancien élève de l'école des arts et métiers de Chàlous,
imagina d'adapter au cor le mécanisme de la trompette
perfectionnée, et d'ajouter de petites pompes particulières
aux tubes qui baissent l'instrument d'un ton ou d'un itemir
ton ; au moyen de quoi il est facile de suivre la proportion
géométrique que commande l'augmentation générale du
cor, soit qu'elle résulte du changement de corps de re-
change , soit que l'on tire ou baisse la pompe d'accord.
M. Meifred , au lieu de placer les pistons sur la pompe ,
les a appliqués aux branches; en sorte que la pompe étant
devenue libre, il a pu conserver à l'instrument ses corps
de rechange. De cette manière, le jeu des pistons est de-
venu plus facile , ne variant point de place, et ne servant
plus qu'à éviter les sons bouchés ou à des, modulations in-
cidentes. Le compositeur trouve ainsi des ressources iné-
puisables dans ce bel instrument. Veut-il des sons vigou-
reux sur toutes les notes? les pistons les lui fournissent.
A-l-il besoin d'énergie dans ses modulations éloignées du
ton primitif? il n'est plus obligé de faire taire ses cors ,
comme par le passé. Dans d'autres cas, les sons bouchés
lui sont-ils nécessaires pour Obtenir des effets mélancoli-
ques? le cor de M. Meifred les lui fournit également, et c'est
encore un de ses avantages sur celui de Carlsrhue. Enfin ,
(i) Je dois I. MM. Dauprat cl Meifred tout ces détails et ceux qui
(oiyenl. M. Dauprat, qui a compose im traité de cur à pistons pour faire
suite à son excellente .VclhadeiU cer-alio el de cor bassc, a bien voulu
me communiquer son travail, d'où j'ai citrait la plupart de» remeigne-
iricm que contient cet article.
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• 59
le oor à pistons, tel que l'a conçu M. Heifred, conserve les
qualités de l'ancien instrument, et lui ajoute toutes celles
c|iii lui manquaient. ,,,..„ .
M. Labhaye , facteur d'instrumens de cuivre S connu
par diverses inventions, l'a exécuté d'après ses dessins et
ses instructions, et l'a mis à l'exposition des produits de
l'industrie. Nous en donnons la représentation dans la
planche ci-jointe, et l'on pourra facilement le comparer
avec celui de Carlsrhue , dont on voit la pompe accompa-
gnée de ses pistons, fig. 1.
Des fondions des pùtons.
En appuyant le doigt sur le piston n" i {fig. 2), on baisse
le cor d'un ton , c'est-à-dire qu'on livre les passages 0.0' à
l'air, qui parcourt alors un espace plus grand de la quan-
tité opo'.
Far le pistou n" 3 , le cor est baissé d'un demi-Ion ; les
passages s s' sont ouverts, et l'air circule dans un espace
plus long de la quantité si s\
Enfin, en appuyant sur les pistons 1 et a à la fois, le cor
se trouve baissé d'un ton et demi; les passages 00% ss',
étant ouverts , l'air circule dans toutes les parties du cor.
Pour la perce des pistons, voyez la ilg. 5 de la planche.
De ta pompe ou coulisse L Q.
C'est sur celte pompe que se placent les corps de re-
change ; elle sert , sans toucher aux pistons , à prendre le
la; mais l'instrument ne peut s'accorder que par le moyen
des petites coulisses A et fi (Kg. 4).
Des fonctions des coulisses A B.
Ces deux coulisses servent à assurer la justesse de Vit -
strument, en établissant celle des sons correspondais dans
chaque changement de ton, par l'effet des pistons. Lorsque
le cor est arec la pompe de soi (fig. 5) , elles sont entière-
ment enfoncées.
(1) M. Labbaye demeure lue de Cbutres , 0* i4.
■6o
Mais, par exemple, si l'instrument est avec les corps de
rechange mi h (fig. 0) , le piston n* i le baissant d'un ton,
le met en re.La note ut [mi fcj) est donc à l'unisson de re,
et l'on accorde cet unisson avec la coulisse A, en la tirant
ou en la poussant , suivant que la note est trop haute ou
trop basse. ••■ ■
Le cor étant en mi si l'on se sert du piston n° a , la
; note si sera à l'unisson de mi .),, et la coulisse B offrira le»
moyens d'accorder parfaitement l'instrument. On voit par
ces exemples que ces petites coulisses adaptées aux tubes
des pistons donnent les moyens d'obtenir la plus grande
justesse possible.
Les vis C et D, ainsi que la fig. -, serve» l de point d'ap-
pui au ressort à spirale qui est contenu dans, chacun des
tabès i et a, ainsi qu'il est figuré au piston F, et dont les
fonctions sont de renvoyer promptement le piston à son
état primitif. ... .)<■•■«:,.'
■ Chaque piston est revêtu d'un couvercle ou chapeau
(f . A. au piston F). Ce chapeau est à mollette et a Vis,
afin de faciliter le nettoiement du mécanisme.
Le tenon H sert de point d'appui pour le pouce de la
main qui tient le cor.
L'antre tenon K m soutient les deux branches L Q de la
pompe sur laquelle se pincent les corps de rechange.
En général les pistons adaptés au cor ne changent rien
à son étendue, à ses ressources, ni à la manière de le jouer,
leur usage est facultatif, et les artistes qui voudront ne s'y
accoutumer que par degrés , pourront, jusqu'à ce qu'ils
aient acquis l'habitude de s'en servir, continuer à jouer
Tinstrument par l'ancienne méthode. Insensiblement , la
tacilité d'obtenir des sons pleins et justes au lieu de sou*
bouchés et douteux , déterminera à s'en servir ceux qui y
teront d'abord le moins disposés, soit par paresse ou par
préjugé. La nouvelle méthode de cor à pistons que M. Dau-
prat va publier, et dans laquelle on trouvera toutes les
gammes, facilitera l'usage d'un instrument si utile. On
doit donc tout attendre du temps, et ne pas se presser à.
écrire les parties de cor d'orchestre avec toutes les inodifi-
iOi
calions îles pistons , comme si elles étaient généralement
adoptées. Il est présumable que dans dix ans on ne se ser-
vira plus des anciens cors.
Il serait fâcheux que les compositeurs considérassent
les perfection nemens dont je viens de parler comme des
moyens de faire jouer sans cesse les cors dans leur or-
chestre. Outre qu'uu instrument si fatigant exige qu'on
laisse des repos aux exécutans, on perdrait, par son usapie
trop fréquent, tes ressources des oppositions d'effets, si
nécessaires en musique, et l'on tomberait dans. la mono-
tonie. Les ressources multipliées du cor à pistons ne dis-
pensent donc pas de l'employer avec discrétion. J'insiste
sur ce point, parce que la nouvelle école n'est que trop
portée à abuser des instruirions bruyans.
On remarque à l'exposition des produits de l'industrie
deux sortes de cors à pistons; l'une, construite par M. Lab-
baye , sur les dessins de M, Meifred, et dont nous venons
de parler; l'autre, fabriquée par M. Antoine, successeur
de M. Halary. Ce dernier instrument a trois pistons, à
l'imitation des trompettes dites de Berlin, quioutétéjouées
avec beaucoup d'effet dans l'opéra de Macbeth de M. Che-
lard, par MAI. Dauverné, Legros et Bénard.
.Mais ce qui est très bon sur la trompette, qu'on tient
d'une main pendant que l'autre fait jouer les pistons, cesse
de l'être sur le cor, où les deux mains sont employées à
tenir l'instrument; car l'obligation de consacrer trois doigts
au jeu des pistons , fait qu'il ne reste plus que le pouce et
le .premier doigt pour soutenir le cor, ce qui est très fati-
gant. D'ailleurs le troisième piston est absolument inutile ,
puisqu'on peut tout faire avec deux.
, M. Labbaye s'est rendu recommanda ble par plusieurs
inventions et perfectionnemens importans dans la con-
struction des instrument de cuivre. C'est à lui qu'est dû le
procédé pour courber les tubes des cors, trompettes, etc.,
sans y employer le coulage du plomb, dont l'adhérence est
nuisible au son. On lui doit aussi la basse d'harmonie. La
société d'encouragement pour l'industrie nationale a fait
sur ces deux innovations un rapport avantageux eu i8u,
par l'organe de M. F rancœur. Parmi les inslruraens qu'il
a exposés cette année, on remarque une timùate méca-
nique qui s'accorde d'un seul coup par le moyen d'un
commandeur ou régulateur, qui indique le degré de ten-
sion nécessaire. Cette découverte très intéressante ne peut
manquer d'obtenir beaucoup de succès, et je ne doute pas
que les timbales de M. L abbaye ne soient bientôt substi-
tuées aux autres, à cause de la facilité qu'on aura démo-
duler à volonté sur cet instrument : ces timhales sont
d'ailleurs d'un très petit volume, sonores et faciles à
manier.
FKTIS.
IVOUVETXES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN.
■g?rfmiîrï rtfrhtnMm U (StttC'wft* % Som«.
Ce que nous avons dit à plusieurs reprises se vérifie
chaque jour; il n'y aura plus de succès possible, jusqu'à
ce qu'un nouvel homme de génie entre dans la carrière
théâtrale. L'Italie , réduite aux ouvrages de Vaccai , de
Paccini, de Mercadante, de Donizetli, se soumet à son
sort. Faute de mieux, elle se contente des faibles copies du
style de Rossini; mais nous sommes plus difficiles; et,
comme nous avons le choix, nous fuyons ce qui nous
ennuie pour aller où nous pouvons trouver du plaisir. On
peut le prédire avec assurance, aucune des productions
que l'Italie voit éclore ne réussira à Paris; il n'y a point de
vie là-dedans , point d'invention , point de charme : c'est
de la musique faite par des procédés et non avec l'inspi-
ration. Quel que soit le délai qu'on accorde à l'un des
musiciens qui viennent d'être nommés, pour écrire un
ouvrage, ils peuvent toujours assurer qu'ils auront fini leur
■igitizod t>y Google
i63
tâche, car, comme ils ne mettent point d'idées dans ce
qu'ils écrivent, ils ne sont jamais arrêtés dans leurs tra-
vaux. Ce sont des ouvriers eu musique, mais ce ne sont
pas des compositeurs.
Le public semblait avoir prévu que le Romeo e Giulîetta
de Va ccai, qu'on lui a offert le 11 de ce mois, pour la pre-
mière fois, serait de même étoffe que la Pastoreila Feu-
dataria du même auteur, car le plus grand nombre des
diteltanli s'était dispensé d'assister à cette représentation.
Les loges étaient vides, et le parterre présentait de nom-
breuses solutions de continuité. L'événement a bien
prouvé que les absens étaient les mien* avisés. Rien de
plus pauvre, de plus nul, de plus soporifique que ce drame:
et cependant le musicien ne peut accuser l'auteur du ii-
tretto, car, à l'exception de la (in , qui est ridicule, il y a
peu d'opéras italiens conçus avec plus de raison que ce-
lui-ci. La marche de la pièce est sensée, les scènes se suc-
cèdent dans un ordre naturel , et la catastrophe est bien
amenée. Juliette, qui se relève pour chanter un aria eon
cori après la mort de Roméo , et quand on la croit morte
elle-même, est la seule inconvenance qu'où ait remarquée
dans cette pièce. Ii est vrai qu'elle est bien forte; aussi les
spectateurs ont-ils éclaté de rire ; les uns sont sortis en
haussant les épaules , et les autres ont achevé leur soirée
comme ils l'avaient passée, c'est-à-dire en bâillant.
Nous u'avons dit qu'un mot de la musique , et l'on ne
peut guère en dire plus. Le peu d'étendue des morceaux
est ce qu'on y a trouvé de plus louable ; mais leur unifor-
mité de couleur, leur dénuement de phrases neuves, leur
instrumentation usée combattaient cet avantage et l'annu-
laient. La cavatine : Se Romeo t'uccise un figlio, et la
scène : Ah! se tu dormi svegliati, sont un peu moins
faibles que les autres , mais ne sont pas lions. Nous avons
beau chercher, nous ne trouvons rien qui mérite d'être
distingué.
L'exécution n'a pas été satisfaisante ; soit que cette mu-
sique nauséabonde ait influé sur les chanteurs , soit qu'ils
fussent mal disposés ou peu surs de leur mémoire , ils ont
eu souvent de l'hésitation et ont chanté faux. H"* Ceiari
va de mal en pis , et ne peut plus vocaliser une gamme ;
Bordogui, qui pourrait le croire, a perdu sa vois , et Levas-
se ur, qui n'a qu'un mauvais rôle , semblait s'en occuper
fort peu. M11-Blasis a eu quelques bons momens, mais elle
a quelquefois chanté trop haut. En somme , l'exécution a
élé à peu prèsà la hauteur de la musique.
Nous ignorons ce que L'administration prépare; mais
puisqu'elle est réduite à douter de tous les succès, pourquoi
n'essayeraît-elle pas de quelque ouvrage ancien de Cima-
rosa ou de Paisiello, par exemple, du Roi Tltéodors? Quel
que soit le caprice de la mode, il est difficile de croire que la
fraîcheur ravissante des chants qui sont répandus avec pro-
fusion dans ce bol ouvrage ne charmerait pas les auditeurs,
s'ils étaient exécutés avec soin. On pourrait resserrer l'ac-
tion où elle languit ; jeter quelques morceaux d'ensemble
au milieu des airs, et couper le récitatif où il y en a
trop ; l'on aurait du nouveau avec du vieux , et ce serait
une trouvaille. Nous livrons cette idée à M. Lubbert; et,
dans l'intérêt du public , nous désirons qu'il la goûte.
THÉÂTRE ROYAL DE L'ODE ON.
StfUttS*.
L'activité de l'administration ds ce théâtre combat contre
les chances défavorables de sa position et du genre auquel il
est condamné. Elle obtient des succès; mais ce sont de ces
succès qu'on est convenu d'appeler d'estime, et qui sont
la terreur des caissiers dramatiques. Point de théâtres sans
argent; mais point d'argent sans nouveautés. Ce qu'on prèle
au public , il le rend avec usure; mais il faut lui prêter
qitelnue chose. Or, ce serait compter un peu trop sur ses
intentions bénévoles que de prétendre lui prouver qu'on
lui donne du nouveau, quand ce nouveau se compose de
vieilleries qui traînent depuis si long-temps sur le Théâtre-
Digitizod b/ Google
i65
Italien, S?il y avait en Allemagne et en Italie beaucoup
d'opéras qui valussent Robin des Bois ou te Barbier de Sé-
vitle , le privilège des traductions serait nue mine d'or;
mais il n'est une trop prouvé qu'il n'y a plus rien au-delà
des Alpes ou du Rliin qui mérite d'Être traduit; Weber,
n'est plus, Weigl et Conrad Kreutzer sont vieux; Rossini a
abandonné la scène italienne; Mayerbeer écrit peu, et
tout le reste est médiocre ou mauvais.
La plupart des canevas italiens ou allemands sont si dé-
pourvus de raison et d'art, que pour les faire réussir il faut
le secours d'une bonne musique. Si celle-ci est faible, il
n'y a plus rien. En France, nous avons aussi de mauvais
opéras; mais l'esprit qui brille dans le dialogue sauve quel-
quefois l'œuvre du musicien. Il y a deux chances pour les
opéras français ; il n'y eu a qu'une pour les traductions.
Pourquoi donc borner les ressources de ce malheureux
théâtre, qui succombe bous le poids de son privilège ex-
clusif? Pourquoi fermer la porte à nos compositeurs , pen-
dant qu'on l'ouvre inutilement aux étrangers ? Pourquoi
surtout décourager nos jeunes artistes sans béuéiice pour
d'autres? Vous voilà , dira-t-on , revenu à vos anciennes
idées , que vous répétez sans cesse ! Eh ! sans doute , et j'y
reviendrai encore, mes cris dussent-ils n'être point enten-
dus. Mais pourquoi ne le seraient-ils pas? Pourquoi l'au-
torité, enfin éclairée sur les véritables intérêts de l'art,
s'obstinerait-elle à maintenir un état de choses également
funeste à l'entreprise du théâtre de l'Odëon, aux jeunes
compositeurs et à la musique en général? Je ne me pique pas
d'être prophète; mais jesuis persuadé que l'administration
actuelle sera ruinée avant un au, si le droit déjouer de nou-
veaux opéras français ne lui est accordé. Je sais que parmi
ces opéras il y aura des chutes; mais il pourra se rencontrer
des succès productifs, et j'alEmie, qu'il n'y en a plus île
pussibles avec les traductions. Venons à Tancrède.
Certes , ce ne sont pas les beautés musicales qui man-
quent dans cet ouvrage ; ou y trouve une fraîcheur d'idées,
une grâce, une jeunesse qui ne brillent pas toujours du
même éclat dans les dernières productions de son auteur.
□igifeed t>y Google
t66
Mais deux cents représentations donnéesau Théâtre- lia lié il
ont fatigué L'attention des plus intrépides (Mettait ti; mais
les airs et les duos chantés bien ou mal dans toute la
France, et par toutes les voix, ont usé les sensations de
plaisir que ces morceaux peuvent procurer ; mais tous les
motifs transformés en fantaisies, variations, quatuors,
<juin tettis, contredanses et valses, pour tous les instrumens,
depuis le piano jusqu'au ûageolet, n'ont pas même laissé
la faculté de prêter attention à ces motifs dont ou est
saturé.
D'ailleurs, une comparaison trop défavorable s'établît
naturellement entre l'ancienne exécution du Théâtre-Ita-
lien et celle de i'Odéon. M"' Pasla, M"' Naldi, ne sont point
encore oubliées . et leur souvenir n'est pas favorable à la
nouvelle distribution. Non que M^Schutz ne fasse preuve
de talent dans le râle de Tancrède ; M*" Pouilley même
ne s'est pas mal tirée de celui d'Aménaïde. Mais le bien
n'est ici que relatif ; c'est bien pour I'Odéon, mais seule-
ment pour I'Odéon. Ajoutez a ce.a que la difficulté est
plus grande. La langue frauçaise se prête mal à porter la
musique qui n'a point été faite pour elle; à talent égal, un
chanteur a du désavantage en chantant la musique ita-
lienne traduite en cette langue. Aussi ceux qui s'y distin-
guent ont-ils un double mérite.
La traduction de Tancrède avait encore contre elle de
renfermer plusieurs morceau* qui ont été employés par
M. Castil-BIazedans d'autres ouvrages, et notamment dans
les Folies amoureuses et Olello. Depuis long-temps ce
mucisien littérateur avaitjugé que le libr&tlo de Tancrède
n'était pas de nature à être traduit ; il y avait renoncé , et
s'était borné a dépecer l'ouvrage, de manière à ce qu'on
ne pût plus en tirer parti. Il ne parait pas s'être trompé
sur le meilleur parti qu'il y avait à prendre.
J'ai dit que M"r Schulz a fait preuve de talent : elle a en
effet chanté la plupart des morceaux avec expression et
chaleur, mais laissant beaucoup à désirer sous le rapport
de la correction île ses traits et de la vocalisation. On sait
quel charme, quelle vapeur mystérieuse environnaient
Digiiizcd by Google
lojiti; la personne de M"* Pasla dans la première scène et
dans l'air di tanti paipiii , si improprement appelé cava-
line. Il ne faut rien chercher de tout cela dànsM—Schutz;
mais elle chante avec énergie le finale et les deux duos si
connus du second acte de Tancredi. La voix de Leclerc
fait bien dans les morceaux d'ensemble; il est fâcheux
qu'elle manque de souplesse. L'orchestre est toujours la
partie brillante de l'exécution dé l'Odéon. Tancrède a
obtenu du succès à la première représentation; mais la
recette a été très faible à la seconde.
— Le sort définitif des théâtres royaux parait toujours
incertain. La commission instituée jour régler ce qui les
concerne continue ses travaux, mais lentement, et ne pa-
rait s'occuper que de ce qui a rapport aux considérations
financières. C'est sans doute un point fort important; mais
il en est d'autres qui ne méritent pas moins d'attention.
Ce qui fait vivre les théâtres, c'est le zèle des administra-
teurs et des administrés ; c'est un amour de la chose qui
est trop rare, et sans lequel on ne peut rien. Ce zèle, cet
amour ont besoin d'être excités par l'autorité supérieure.
M. le vicomte de Larochefoucault a élé souvent attaqué
sur son administration par des motifs qu'il ne nous est pas
donné d'approfondir ; mais il est une vérilé qu'on ne peut
contester, c'est que jamais administrateur n'a eu plus que
lui de bienveillance pour les artistes , ni plus de zèle pour
le progrès des arts. Ses intentions sont pures; et si le suc-
cès n'a pas toujours répondu à sou attente, c'est qu'il n'a
point trouvé dans ce qui l'entourait los secours qu'il avait
droit d'espérer. On ne doit point oublier d'ailleurs que c'est
sous son administration que l'Opéra s'est replacé , sous le
rapport de l'art, dans une situation florissante. Nous avons
démontré plusieurs fois que le théâtre italien souffre par
des causes qu'il n'est donné â personne de prévenir on
d'empècher. On sait que le théâtre de l'Opéra-Comiqtie n'a
couru dans ces derniers temps de grands dangers, que
parce que M. de Larochefoucault n'avait aucune autorité
directe sur lui. Les autres établissemens sont susceptibles
de recevoir des améliorations qu'il fera sans doute, s'il ne
Digiiizefl by Google
i68
se trouve entravé dans ses opérations par quelque came
étrangère. Mous faisons des vœux pour qu'il puisse encore
long-temps tenir les rênes de l'administration des arts , et
conserver avee les artistes des relations dont ils savent
apprécier le charme.
ANNONCES.
Dix napolitaines en mesures mixtes pour piano, dédiées
aux Lazzaroni, par T. d'Outrepont. Prix : 4 fr. 5o o.
A Paris , chez À. Petilbuu , éditeur de musique , rue du
Bac, 11" 5).
— Grande fantaisie brillante sur des thèmes égyptiens et
français, composée pour pïauo et violon , par M" Hé-
rault et P. Lafonl. Pris : 9 fr.
A Paris , chez Maurice Schlesingcr, marchand de mu-
sique du Roi , rue de Richelieu , n° 97.
L'originalité des thèmei véritablement Égyptiens , et la manière heu-
reuse dont iii ont été traités par les auteurs, doivent procurer a cet
ouvrage un succès de vogue dans les salons.
— Muterpe vosgîemne; collection de scènes, hymnes,
chœurs, chants, nocturnes, romances, etc., souvent à a,
3 et 4 parties , sur des paroles françaises , allemandes et
quelquefois italiennes, avec accompagnement de piano,
et, suivant le sujet, de plusieurs autres instrument, ré-
digée par J.-B.-M. Braun, maître honoraire de l'Aca-
démie philharmonique de Bologne , et D. Jeleusperger,
professeur de composition au Conservatoire de Paris;
u" 1 et a. Prix : 6 fr. chaque. L'abonnement pour six
numéros est de iî fr., et de ao fr. pour douze.
A Paris , chez Zelter et compagnie , rue du Faubourg-
Poissonnière , n* 5.
Aucun ouvrage périodique de ce genre n'existait , et cependant rien
de plus utile pour les départe mens avoisinant les frontières de l' Alle-
magne, où l'on parle également le français et l'allemand. Les airs
d'opéras même ne peuvent remplacer les morceaux qu'on y truuve, car
ces morceaux se composant de parties d'une exécuiiun facile, perniet-
Icnt aux amateurs les plus faibles de te familiariser avec la musique
d'ensemble, cl de ae préparer a de plus grandes difficultés.
DigitizGd t>y Google
ESQUISSE DE L'ÉTAT ACTUEL DE LA MUSIQUE
Lorsqu'il est question de musique en Angleterre, c'est
presque toujours de musique étrangère; car, à l'exception
de quelques parties dcl'exécutiou dans lesquelles les Anglais
se distinguent, tout ce qui a rapport à cet art leuresl fourni
par l'Allemagne ou par l'Italie. Dans les quinzième et sei-
zième siècles, leurs compositeurs étaient à peu près égaux
en mérite à ceux du reste de l'Europe , et les noms de Tye,
de Tatiis, de Bird, de Bull, de Mortey et de Farnaùy
étaient à peu près aussi distingués que ceux de Porta,
d'Auimuccia, de Nanino, d'Anerio et de Marcnzio. Mais
alors la composition n'était guère que le fruit de la patience.
Depuis , il a fallu du génie et de la potion : l'Angleterre
n'a plus ricu produit. Elle se lait honneur de Handel ; mais
on sait qu'il était Allemand, et déjà célèbre quand il arriva
à Londres. Arnc et Arnold ont eu quelque célébrité , mais
seulement eu Angleterre : c'était des hommes sans génie,
et d'un savoir médiocre. Ou peut en dire à peu près autant
de llishop que les Anglais admirent aujourd'hui.
A l'exception de M™ Billington et de Braham, les îles
britanniques n'ont pas fourni plus do chanteurs que de
compositeurs. Depuis Ilaudel et Purpura, les Italiens ont
été presque les seuls chanteurs de l'Angleterre. Nous allons
passer en revue ceux qui s'y sont montrés dans la saison
dernière. Ce que nous en dirons est extrait du dernier nu-
méro de l'écrit périodique intitulé : The Quarlerly musi-
cal magazine and Revient.
La direction du théâtre Italien a été confiée cette année
à SI. liochsa, ella circulaire annonçait l'engagement do
divers exécutans dont les noms étaient inconnus, non-seu-
lement en Angleterre mais aussi sur la scène italienne. II
est inutile de récapituler les promesses qui u'ont pointété
remplies; si les souscripteurs et le public ont été satisfaits,
a' VOL. i5
Digitizod by Google
le directeur n'est bien acquitté de sa tache, et un fait
qu'un ne peut nier, c'est cgite la saison a été extrêmement
heureuse.
Le théâtre a ouvert, ie 5 décembre iSafi, avec la Vct-
talù île Spoulini; les rôles principaux étaient remplis par
M"" Caradori AUan, et Curioni. Cette pièce avait probable-
ment été choisie plutôt par rapport au nombre exigu de la
troupe , que par tout autre motif. Puzzî avait été envoyé
sur le continent pour y engager des chanteurs, et l'arrivée
de Zucliclli vînt bientôt renforcer le personnel. On a re-
présenté successivement les opéras suivans :
5 décembre. La Veslale.
3o La Sehiava in Bagdad.
3 février. La Gazza Ladra.
5 mars. Il Turco in Ilalia.
îS I'ietro l'Iiremita.
^4 Ricciardo e Zoraide.
5 mai. Le premier acte de Tancredï et le dernier
de Romeo e Giuliella.
io Semiramide.
ai Hedea.
7 Maria Stuart.
Zuchelli a débuté pour la seconde fois en Angleterre (il
y était déjà venu en 1822) , dans la Sehiava in Bagdad.
On a trouvé qu'il avait fait depuis ses premiers débuts ,'e
très grands progrès ; sa voix est plus étendue, ses sons sont
plus pleins et plus égaux ; sa facilité est encore augmentée;
enlin peu de basses ont joui d'autant de faveur que Zu-
chelli auprès des ditttttanti anglais.
La Gazza Ladra fut donnée pour les débuts de miss
Fauny Aylon. Cette jeune Anglaise a été pendant quelques
années l'élève de Liveiaii; elle a été ensuite en Italie, où
elle a reçu des leçons de Maniclli de Florence, et, ce qui
est peut-être plus avantageux encore, où elle a exercé sou
talent sur quelques théâtres. Sa voix est douce et flexible ;
clic s'est fort bien lirée d'une multitude d'ornemens dans
lesquels elle semble se complaire, Comme actrice ■ elle est
aussi foit habile. 11 existe cependant nu milieu de tout
DigitizGd t>y Google
cela un obstacle à ce qu'elle puisse jamais acquérir une
grande réputation ; cel obstacle consiste dans l'inégalité,
de non chant. Ainsi, par exemple, elle commence un air
avec la nullité et l'insouciance d'une élève apprenant sa'
leçon ; lotit à coup , elle exécute un passade avec netteté ,
t'ait à merveille des oriicmuns difficiles et remplis de goût,
et retombe l'instant d'après au-dessous de la médiocrité.
Ce défaut doit peut-être s'attribuer en partie au peu
d'étendue et de force de sa voix; mais avec de l'énergie elle
pourrait sans doute remédier à cet inconvénient. Cette
jeune cantatrice a bien senti toutefois qu'elle ne pouvait
remplir les rftles de prima donna au théâtre Italien , et
elle a acceplé un engagement pour Drury-Lane.
Vers le milieu de mars, M11' Toso, jeune élevé du Con-
servatoire de Milan, que Puzzi avait engagé-: à venir en
Angleterre, et qu'il a épousée depuis, a paru pour la pre-
mière fois sur la scène dans Piclro t'Erenûtn ; elle n'avait
jamais chanté sur aucun théâtre. Elle est grande et bien
fuite, kcs traits sont agréables cl expressifs ; mais elle man-
que d'habitude de la scène, ce qui lui donne un air gauche
et embarrassé ; sa voix est un soprano brillant et égal, si co
n'est dans les notes hautes , qui sont un peu dures. La pre-
mière impression avait été très favorable à M"' Toso ; on
croyait qu'avec ses moyens naturels et du travail elle
pourrait devenir une habile cantatrice; malheureusement,
pendant toute la saison, on a retrouvé chez ellu les mûnlcs
défauts, c'est-à-dire une mauvaise émission de voix, une
entière ignorance de» transitions, et une absence totale
de cette dignité qui seule conduit an grand dans les arts.
On a enfin acquis la certitude que M"" Toso ne sera jamais
une grande cantatrice. Guibilei a aussi débuté dans Pietro
l'Jiramita, par le rôle de l'ermite ; sa voix est agréable ,
ses manières sont décentes; il peut devenir un chanteur
utile , mais la nature ne lui a pas donné ce qu'il faut pour
être au premier rang.
Au mois d'avril , la Gazza Ladra a été représentée , et
Galli a joué le rôle de Fernando. La réputation de cet ar-
tiste est établie, sa voix est étendue, et quand les sons no
sont pas assez élevés pour devenir nasards, ce qui arrive
quelquefois , ils sonl pleins et dous. II est très bon musi-
cien, et son style sérieux indique un sentiment profond.
On n'a point eu occasion déjuger de son talent dans le
genre bouffe , où , dit-on, il ne réussit pas moins bien que
dans l'opéra séria.
M™" Pasta, dont la renommée a toujours élé croissant
depuis son dernier séjour en Angleterre , en 1824 , est ar-
rivée à Londres au commencement de mai. On a si souvent
analysé le mérite de celte inimitable actrice, qu'il ne resle
plus qu'à s'étonner qu'elle ne succombe point sous le poids
de l'admiration qu'elle excite. Depuis la dernière saison ,
M"* Pasla a traversé l'Europe, depuis Londres jusqu'à Na-
ples. On sait l'enthousiasme qu'elle a excité à Paris ; peut-
être a-t-elle eu moins de succès en Italie. Il est bien ex-
traordinaire, et cependant il est vrai qu'à JN'aples , danslc
rôle de Medéc, elle n'a point été appréciée comme elle
l'avait été parles froids habilans des capitales de la France
et de l'Angleterre. On fut bientôt obligé de substituer à
l'opéra de Moycr, ISiobé* , opéra nouveau de Paccini ,
qui réussit beaucoup mieux. Les forces de H" Pasta sont
en harmonie avec sou talent. Elle est douée d'une énergie
peu commune. Depuis son arrivée en Angleterre, à peine
a-t-ellc passé un seul jour sans chanter dans un , deux et
trois concerts, nonobstant son service au théâtre. Cepen-
dant sa santé, sa fraîcheur , ne s'altèrent nullement, lille
supporte la faligue avec tant de facilité, qu'elle est venue
de Naples à Londres eu 1; jours , et qu'elle a joué le qua-
trième après son arrivée.
La seule nouveauté de la saison a été l'opéra de Mari.:;
Stuart, Rci/inatleScoiia, composé par Coccia, et repré-
senté pour lu première fois pour le bénéfice de M"' Pasta.
La musique est savante et forte ; niais il y règne peut-être
trop d'uniformité. On n'y trouve point assez de variété,
source unique d'effet. "Le morceau qui se trouve dans la
scène où Marie s'échappe du château de Fotheriug.iy est
(i) M»' Paul» 1 cliantft nnc scène de cet opéra in concert Je l'aca-
démie roj»le ; il b produit na pantl ttTct.
Digitizod b/ Google
le plus estimé de l'ouvrage, sans doute parce qu'il est d'un
genre moins sombre que le reste.
Le caractère do Marie Stuart est historique. On sait
qu'elle était douce , spirituelle et infime un peu caustique,
plutôt que majestueuse et imposante. La figure et les qiiair
lités théâtrales de 11"* l'iisia ct.dcnl-cllesbien d'accord avec
ce personnage ? 11 semble que dans cette pièce le poète et
le musicien se soient plus attachés à proportionner leurs
rôles aux moyens de leurs chanteurs qu'à dépeindre , d'une
manière fidèle , le louchant original qu'ils devaient nous
représenter. Ce drame fait briller les acteurs plutôt que
les chanteurs. Dans la dernière scène, où Marie prend
congé de sa suite, M°" Pasta a déployé tout son talent.
Pendant la durée de l'air du comte de Leicesterf chanté par
Curioni ), Marie est agenouillée, et demeure plongée dans
une. religieuse méditation : il est impossible d'imaginer
rien de plus parfaitement beau que M"' l'as ta dans cette
attitude. Gallî, Curioni et M" Puzzi se sont montrés avec
avantage dans cet opéra. Un air chanté par Calli est l'un
des meilleurs riinrcoaux de l'ouvrage
M'1* Brambilla a paru dans le rôle iVJrsace de Sémira-
Diide. Elle possède un fort beau contralto, est très jeune ,
et donne les plus grandes espérances. Elle a été entendue
avec plaisir, même par ceux qui avaient vu ce rôle joué
par M"' Pisaroni, l'une des plus grandes cantatrices de
l'Italie.
M"' Brizzi a si complètement échoué dans Rtcciardo e
Zoraide, qu'après avoirdit qu'elle a une voix de contralto
il ne reste plus rien à ajouter.
Les chanteurs qui ont fixé leur séjour en Angleterre sont
sous silence. Le talent naturel de M™ Caradori Allan s'est
développé par le travail et l'exercice. Sa voix a gagné en
volume et en qualité , jamais peut-être aucune cantatrice
n'a été plus aimée du publie. Des prodiges tels que M"** Ca-
lalauicl l'asia sont écoutés avec admiration; SI™ Caradori
se recommande par des qualités moins brillantes, mais
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elle (>1à1t. A l'Opéra, dans les concerts, dans la capital,
et ilaiiH les proviuce», but le théâtre et dans l'église, 01»
l'écoute avec plaisir, et pendant <|ue ses talens charment
le public, ses vertus privées la rendent chère à sa famille
et à ses amis. Curioni jouit également de l'estime due à
son talent cl à su bonne conduite. De Bcgnis, qui dans
celte saison a été fort peu employé, à cause du séjour de
Galli et de Zuchelli , doit néanmoins être considéré comme
le meilleur chanteur bouffe qu'il y ait eu en Angleterre.
Dans un concert où il a chanté avec Galli, on a été surpris
du volume de voix qu'il a déployé. Il est vrai qu'on s'aper-
cevait qu'il faisait beaucoup d'efforts pour sou tenir la com-
paraison d'une manière avantageuse.
Fendant la Raison dernière, lorsque le théâtre Italien
élait sous la direction de Velluti, on a représenté douze
opéras dont sept étaient de liossini; cette année on eu a
donné dix, au nombre desquels il y en a six du célèbre
maestro. Les quatre autres ont été choisis plutôt pour la
convenance des chanteurs qu'en raison de la beauté de la
musique. Aucun nouveau compositeur habile ne se mon-
trant, liossini occupe touiourslu premierrang. Ilestsou-
lemcnlfàciieuxqiiesoii indolenceTem péchant de travailler,
oblige à représenter toujours les mêmes ouvrages. On re-
marque toutefois dans cette saison ce qu'on n'a point vu
dans beaucoup d'autres, un opéra composé dans ce pays
et exprès pour ce théâtre. Autrefois il y avait une condition-
essentielle qui obligeait le directeur à engager un Maestro
pour écrire exprès pour les chanteurs attachés au théiltre ;
mais depuis Biauchi, ou ue se rappelle point que cette
règle ait été observée. Liverati écrivit, il est vrai, il y a quel-
ques années, un opéra intitulé Gastoiie. e Baynnlo , et
ïtossini s'engagea a composer Ugo re d'Itatia; mais il ne
tint pas sa parole. Ou ne saurait cependant trop insister
sur l'avantage d'à voir un compositeur distingué attaché ai»
théâtre ; cela encourage les talens, excite l'émulation et
inllue sur les chanteurs qui ont quelquefois besoin d'être
guidés dans leurs travaux. On pourrait quelquefois les ra-
mener à la simple et belle expression des anciens maîtres,
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dont M— Pauls, etsnrtout Velluti, ont fait goùterle charme.
II faut maintenant s'occuper un peu de l'opéra anglais .
( Ihe english opera-housc ). H. Arnold , qui porte ml nom
bien connu parmi les coin pus il cuis anglais, et qui lui-même
est un liabilc musicien , dirige avec soin cet établissement
qui lui nppàflienK On a représenté sur ce théâtre le Freys-
/:/tiï(;de\Ycbcr, Tarare, et VOracte de Wintc.r, chantés
par MM. Sapio, Phillips et MissFalon. L'Oracte a obtenu
un grand succès musical.
■Les théâtres d'hiver ont aussi redoublé de zèle. A Caveiu-
Gardcn, sir Georges Smart s'est attaché plutôt à une amé-
lioration générale, qu'à la représentation d'un grand nombre
d'ouvrages nouveaux. Ou a remarqué plus d'ensemble, plus
d'énergie et d'expression il ans l'exécution générale de la
musique ; les principaux ouv rages joués sonf : la reprise de
the Cmtteof Sorrenle (le Château ileSorrenle); inietra-
iluctiimile (a Darne blanche, musique de lloicldieu, et
te Sacrifice interrompu de Win ter. Les meilleurs chan-
teurs étaient M. Sapio cl Miss l'alun . niais celte dernière
à la lin de la saison abandonna Covent-Ganlcu pour
passer à Drary-Lanc. On a donné souvent aussi l'Obcroii
de ll'ihcr, ouvrage qui gagneàùtre entendu. L'ouverture
a élé plusieurs l'ois redemandée, ce qui prouve eu faveur
Le théâtre de Drury-Cane a passé sons la direction de M.
Priée, américain. M. Braham est demeur» chargé delà
partie musicale. M. Horn , Miss Slephens et Miss Uraddon
sont restés attachés au théâtre. Mistrcss W. Geesiu , qui
avait paru sur les théâtres d'élé . il y a quelques années ,
a été engagée a Drtiry-Lauc ; elle a débulé^au oummenei -
jncntdu mois de novembre dans un opéra composé) par
M. Wade, intitulé : The iivo housts ^Omi.^ ( lesdeus
Mislress Gccsin possède une jolie voit de soprano, douce
et juste. Lors de ses premiers débuts, elle avait de la faci-
lité et chantait avec une grande simplicité . elle a reçu de-
puis celte époque des leçons de Crivelli, et elle eu a profité.
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La musique de l'opéra de M. Wade art simple et agréable.
Vers la fii) de la saison , on a représenté un nouvel opéra
île Bishop intitulé : thcEnrjlhhman in Lontton, (l'Anglais
à Londres), mais il n'a réussi que médiocrement. Le grand
succès de L'année a été obtenu par il Turro in It/Hia de
Itossini arrangé pour la scène anglaise par tii Ileqihino
Lacy. Le rôle de Turc était rempli par M. liraham , et celui
de A^/v7/<'p:ir miss FaiiiiyAylou. Celle pièce toute italienne,
celte musique vive, brillante el toute Itossinicnne, trans-
portée et reçue sur le vieux Drury-Lane, prouve mieux que
de vains discours les progrès du bon goût en Angleterre.
M. Jîishop a eu celte année l'entreprise des oratorios;
il a loué deux maisons dans lesquelles on donnait des re-
présentations alternativement. Par ce moyen il a évité
toute concurrence. Les oratorios étaient exécutés parles
principaux chanteurs des théâtres anglais, auxquels s'é-
taient réunis miss FaiTàr, madame Cornega , M. llorn-
caslle et M. E. Taylor. Madame Toso et Z/ucbelti ont aussi
chaulé à quelques représentations. On a exécuté dans ces
soirées plusieurs morceaux nouveaux, entre autres un
offertoire d'Kybler, compositeur de Vienne, une cantate
sacrée do AVebcr, plusieurs morceaux choisis dufVej/i-
chillz et de Fidelio de Beelhovcn. A ces nouveautés ou a
joint le Messie, et plusieurs autres morceaux de Handel,
de Monart, d'Haydn et de Beethoven. Cette musique sé-
rieuse était entremêlée do quelques ballades nouvelles,
en moins grande quantité toutefois que les années précé-
dentes. Il esta désirer que ces soirées soient toujours aussi
bien dirigées, elles propagent le goût de la musique en
Angleterre, on y entend les meilleurs artistes nationaux
et étrangers el même quelques amateurs , tels par exemple
que .M. Taylor, qui possède une très belle voix de basse et
une fort bonne méthode.
Les concerts connus s jus le nom de tkr. initient concerts,
se sont donnés avec le même soin que les années précé-
dentes. Il y a en a en douze , dirigés chacun par un grand
seigneur. Le premier l'était par l'archevêque d'York pour
son allasse royale le duc de Cumbcrland; le second par
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le même, pour le duc de Cambridge; le troisième, par le
comte de Darnley, etc. La musique qu'on y a exécutée était
de Mozart, de Haudel, de Gluck, de Cimarosa et autres
grands compositeurs doot le nom seul est un éloge.
Les concerts piiilarmoiiiqucs on! commencé le i3 fé-
vrier. Tout le monde connaît la supériorité de ces réunions,
satist'aisans ; les chefs-d'œuvre des grands maîtres ont été
exécutés par /.uehelli, Galli , M. Braham, M"" Caradorï,
Corncga, MissStepheus. M" Slockhausen, M"Mosclielès,
Cramer, Lindley, llegrez, de lleriot, etc., etc. Les concerts
étaientconduitsaltcrnativcnienlpar H M. Cramer, Dishop,
Spagnoltcli , Atlwood , Mori et Kiescivcttcr. Il est impossi-
ble d'imaginer une exécution plus parfaite, et un enthou-
siasme plus vrai, que celui <lu Ions les élus qui assistèrent à
ces assemblées musicales. Dans le premier concert la sym-
phonie héroïque de llecllniven a été exécutée en l'honneur
du duc d'York. Peut-être aurait-il mieux valu choisir la
marche funèbre du même compositeur. M. Schlesin^er.
élève de Ries , a joué un concerto de piano avec beaucoup
de talent; dans le cinquième , M. Moschelès s'est fait en-
tendre dans un concerlo de sa composition. Ce morceau
a paru aussi bien fait que parfaitement exécuté; plus/m
entend ce grand pianiste, plus on est frappé de la supério-
rité de son talent. Jamais l'oreille la moins sensible à la-
musique n'aurait pu dire après avoir entendu M. Mosche-
été entendus dans le sixième concert. Le premier paraît
réaliser 1rs espérances qu'il avait fait concevoir; quant au
second, il mérite tous les éloges, son jeu es; doux , expres-
sif, pur et brillant. Lue légère blessure à la main l'avait
empêché déjouer le concerlo qu'il avait préparé, et le
morceau plus aisé qu'il a exécuté a cependant paru être
encore d'une extrême difficulté. L'ouverture de rte Ruhr
oflhexpirits coin position extraordinaire de l'auteur du
Frri/srf) iUz et d'Obcron, a été entendu avec un grand in-
térêt. Depuis l'ouverture du Frcyscluïtz. aucun morceau
de musique instrumentale. n'avait fait autant de plaisir.
Les concerts du l'académie royale dirigés par sir Georges
Smart onl dû satisfaire les auditeurs; ainsi que les précé-
dens, ils ontétébien exécutés. Il est cependantàregrelter
<]tic la liste des souscripteurs ait été moins nombreuse
qu'elle ne l'était la saison dernière. Cet établissement qui
fuit le plus grand Iionnciirà l'Angleterre, a besoin de fonds
considérables pour se soutenir; il faut espérer que les ama-
teurs ne L'abandonneront pas. The antient concert s'at-
tache à la conservation d'un stylo particulier ; les concerts
philarmouiques recherchent le perfectionnement de la
musique in si rumen ta le ; ceux de l'académie royale em-
brassent toutes les parties , et n'en négligent aucune.
Les concerts particuliers ont été très fréquens, trop fré-
quens; ils se nuisent les uns aux autres. Les chanteurs ne
peuvent y suffire, comment ponrraicnt-ils trouver la force
de chanter dans une même journée à deux ou Irois con-
certs? et cela tous les jours. Il en résulte souvent une dé-
ception pour le public. Craignant de désobliger leurs ca-
marades, les artistes promettent déjouer ou de chanter,
quelquefois sans en avoir l'intention bien déterminée ; et
le public, attiré par des noms bien connus, ne trouve rie»
de eu qu'il est venu chercher. Dans l'intérêt même des
"sles , les concerts à bénéfice devraient être moins
iibreux. Ils en deviendraient plus altrayans et plus pru-
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'79
DIZIONARIO E BIBLIOGRAPHE
DELLA MUSICA,
( ©icficnnmrc et graphe &c fd jSîlisiqW) ,
PAR LE DOCTEUR L IC HT ENTH AL *.
Chaque art , chaque science , ont leur vocabulaire ; ce-
lui de la musique est le plus étendu, parce qu'il est à la
fois une science et un an ; parce que ses formes et son lan-
gage ont varié à l'infini depuis l'antiquité jusqu'à nos
jours, et parce qu'elle embrasse une prodigieuse quanlilé
d'éléinens , tan! dans sa théorie que dans sa pratique.
La multiplicité des objets, et la difficulté d'établir
entre eux l'enchaînement nécessaire, sont vraisemblable-
ment les causes de l'état d'imperfection dans lequel les
dictionnaires de cet art sont restés, quoique de nom-
breuses teutatives aient été faites en divers pays et à di-
verses époques pour en rédiger selon toutes les condition».
Eh ! comment eu serait-il autrement ? les meilleurs musi-
ciens ne sont même point d'aecord sur le but, la forme et
l'utilité^i'un dictionnaire de musique. Les uns, assez in-
struits pour n'avoir pas besoin de chercher la science dans
des articles détachés qui manquent toujours de liaison,
veulent qu'un ouvrage de ce genre ne contienne que des
définitions de mois, et de courtes explications des objets ;
les autres, et c'est le plus grand nombre, désirent qu'un
dictionnaire puisse suppléer à leur défaut de savoir, et leur
donne , dans des traités par ordre alphabétique, des con-
naissances qu'ils sont certains île retrouver à volouté, et
qu'ils ne sont point obligés de graver dans leur mémoire.
Mais tous veulent que l'ouvrage soit peu volumineux, et
c'est la le difficile. Je crois que la sécheresse d'une simple
nomenclature et l'excès des développemens sont des dé-
(i) Milan, Antoine Fontana, i8>6, i vol. in-8*.
fauts qu'on doit éviler avec un soin égal, car ce qu'où doit
chercher en toute chose , c'est l'utilité ; or, de simples dé-
finitions ou des explications trop succinctes ne peuvent
instruire le lecteur, et des articles, quelque étendus qu'ils
soient, ne peuvent remplacer un livre méthodique, parce
que le défaut d'ordre logique est le vice radical de tout
La rédaction du plus ancien vocabulaire de musique
date de iiijo; il est intitulé : Terminorum musical difft-
nilûiium, titre qui indique clairement sa forme et son
but. Jean Tinclor ou Tinctoris, chapelain et chanteur du
roi de Sicile, né à Nivelle, dans le Brabant , eu est l'au-
teur. On en a plusieurs manuscrits, et une édition du quin-
zième siècle, que Burncy croit avoir été imprimée à Na-
ples en i4?4- Forkel et Lichtcnthal l'ont réimprimée dans
leurs bibliographies musicales.
Plus de deux siècles s'étaient écoulés depuis la publica-
tion de ce dictionnaire, lorsqu'il en parut deux à la fois,
l'un en Allemagne, l'autre en France. Janowka, orga-
niste à l 'rague , né à Ruttemberg eu Bohême , fut l'auteur
du premier, qui a pour titre : C lavis et thesaurum magnee
artis musicœ, seu eiucùlarium omnium ferc rerwn ae
verborum, etc. Prague, 1701, in-8° de 3a4 pages. L'autre
est l'ouvrage de Sébastien de Brossard, maître de chapelle
à la cathédrale de Aleaux. Quoique bien imparfait, il mé-
ritait l'estime des artistes parce que c'était le premier ou-
vrage de ce genre , et parce qu'on y trouvait une foule de
choses utiles. La première édition parut en 1701, sous le
litre de Dictionnaire de musique, contenant une. expli-
cation des termes grecs, latins , italiens et français, tes
plus usités dans ta musique, etc. Paris, Ballard, iu:fol*.
Plusieurs éditions publiées jusqu'en i;>3o, attestent l'uti-
lité de ce livre.
Mais enfin les progrès de la musique idéale et la publi-
cation de plusieurs systèmes d'harmonie avaient successi-
vement étendu le vocabulaire, et finirent par rendre le
dictionnaire de Brossard insuffisant. En 1768, parut celui
de Rousseau. Ce grand écrivain était bien moins bon mu-
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i8i
sicie» que Brassard; mais il avait l'avantage de venir après
lui, et, quoiqu'il fût dépourvu des qualités nécessaires
pour bien faire un pareil travail, tout en profitant de ce-
lui de son devancier, il fit mieux que lui.
l'ont ce qui est historique ou moral bien dans le
Div-tioiinaî re tic musique de Rousseau; mais l'ignorance
manifeste à chaque page; aussi peu d'années s'écoulèrent-
clles avant qu'où s'aperçût de la nécessité d'améliorer son
travail. Ginguené, Framery, l'abbé Feytou , et quelques
autres, entreprirent cette tâche au commencement de la
révolution pour \*Eiwi/clopédîs méthodique ; mais bientôt
leur travail fut interrompu par suite des troubles politi-
ques. Continué depuis par AI. de Momïgny, il a paru en
1818. a vol. in-/|°. Quoique très étendu , ce dictionnaire
ne mérite aucune estime; par une singularité qui n'a
point d'exemple, chacun des auteurs qui ont travaillé à sa
que ses collaborateurs ne savent ce qu'ils disent. Le der-
nier en date n'a eu d'antre Uni qui' de développer un sys -
tème dont il est l'inventeur, mais qui n'a point été adopté.
Un prétendu dictionnaire de musique , qui a pai n en
1 788 , sous le nom de Meude-Monpas, ne mérite pas qu'on
en parle. Celui de M. Caslil-Blaze est trop connu pour que
j'aie besoin de l'analyser, je dirai seulement que dans sa
tonne', il est le pins utile de ceux qui ont élé écrits eu
l'rauce. M. Caslil-lllaze n'a voulu l'aire que le dictionnaire
de la musique moderne ; c'est donc à tort qu'on lui a re-
proché de n'avoir point complété son vocabulaire.
Il reste à taire un Dictionnaire universel do la mu-
sique, pour la France ; depuis long-temps je rassemble des
matériaux pour cet objet, mais j'ignore si j'aurai jamais le
temps d'exécuter mon projet.
L'Allemagne, si riche en littérature musicale, si abon-
dietioiniains de musique . Outre celui de Jaiiowka . dont
j'ai parlé, elle a, 1" celui de Walt lier ( À lté und nette mu-
sîtititisrkt' BibUothi-h, oder musikalischts Lexicon, etr.
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Leipsick, , iri-S') , ouvrage excellent pour le temps
0(1 il a paru, mais dont la suile n'a malheureusement point
élé publiée; 20 celui qui a été imprimé à Chcmnilz, chez
Stcessel, sous le tilre de Kurzgcfasstcs musHcatlsehcs
Leadcon, etc., en 1757, et nue' Mathoson appelle un extrait
mutilé 'le celui de Wall lier; 5' le dictionnaire abréyé Hs
Weimar (MasHcali.sc//es Hnnduwterbuch, etc. ), i78G,
in-8"; (\" celui de Vo\f{Kui':ifcffissles musikatisches Lemi-
etm). Halle, 17S7, ijfja et i8o5, in-S°; 5° le pelit diction-
naire de Kneclit (Kttines aiphabetisches Jf'œrtertiuih
der vornehmsten und intcrcsstintcsten JrtiicH ans der
nivsibatischeiiThcorîe), Ulm, ipgSy in-8°; b' 'cl enfin ceiiti
de Koch , le meilleur de tous et le plus utile { Musikali-
sclies Lexicon, jrtlrhts dit thtorcllxclit. 11111/ prar.lischv.
Tohkunst cnci/eto/itdixc/t ii:i'.rl/i:i!ct, clc.) l'inucforl-Kur-
le-Hein , 1802 , grand in-8". Le même autour en a publié
un moins étendu , sous le litre de Kurzgefasstes Hamtr
watrlerbuch der Musik, etc. Leipsick, 1807, Titft in-K",
qu'il ne faut pas prendre pour un abrégé du premier ; car
c'est un ouvrage absolument clifTérent. M. Godfroi Weber,
l'un des plus savans musiciens de l'Allemagne . est main-
tenant occupé de la rédaction d'un grand dictionnaire de
musique, dans lequel il se propose d'éviter les dél'auls
qu'on peut reprocher a celui de Koch. On doil tout atten-
dre d'un artiste aussi distingué que M. Weber.
Les Anglais ont trois dicliunnaircs de musique; le pre-
mier, publié sous le nom de Grassîneau, n'est qu'une tra-
duction de celui de Erussard {A musical dictionary, etc.
Londres, 1 7/|0 , în-8°) ; le second, sous le nom àvliolc.,
est une iinilation du mauvais ouvrage de .llonpas ; le troi-
sième, composé par liusby, n'est qu'un livre médiocre.
Un prospectus avait annoncé il y a quelques années un
dictionnaire complet de cet ail, en deux volumes in-4%
auquel H. Clcincnli et d'anlrcs musiciens instruits de-
vaient prendre pari ; mais il ne parait pas que celte entre-
prise ait été suivie.
La Hollande a le dictionnaire de musique de Reynvaan
{Mvtykaal Kunst-woordenboek , etc. .\mslcrdam, 179a,
DlH I ZOd D, Cl)
s vol. ïd-8'), et la Suéde a celui d'Envalson ( Stvenskt
musikaiisH Lexikon efter grekiska , {alinska, imtienska
och franska Sprœchcn.; Stuckolm, 1803 , in -8"); mais il
ne paraît pas qu'un livre de ce genre ait jamais clé publié
(Lins les auLres pays du nord , eu Espagne, ni en Portugal.
L'Italie ne fut pas plus riche eu ce genre jusqu'au coin-
musicien de Venise, nommé Gianctli, fit paraître 1111 dic-
tionnaire en trois petits volumes in-ia, sous ce litre : Di~
iionario delta musica sacra cprofiitia, r.fie contient In
tpiegazione délie voci, c quanto di teoria, di crtuli.-
zione, etc. ; è spettanie aita Musica , cou atcunc dcgli
ilromcnti antichi c modurni, e dMe personne die si
dïstinstro in Ha.lia, e nti paesi stranieri in quest' arte.
Quoique île peu de valeur, cet ouvrage a clé réimprimé
en 1820, à Venise, chez .Santiui.
M. Lichtenthal , docteur en médecine, et amalenr de
milftiqtie distingué, né à Presbourg, eu Hongrie (en 1.780).
el fixé en Italie depuis long-temps, vient d'enricliir lit
littérature italienne d'un nouveau, dictionnaire, qu'on
peut considérer comme un des meilleurs livres sur cetle
matière ; il est intitulé : Dizlonario c bibliographia delta
musica; Milan, Fontana , 1826 , f\ vol. iu-8" Une érn-
diliou rare ■ nue connaissance profonde de la théorie et de
la pratique de la musique , un sljle simple et convenable
(1) Le docteur Lichtenthal était déjà connu dans le monde musira!
par un traité de l'inHuence de la musique sur le corps humain , et de
■on influence dam tes maladies, publié eu allemand sous ce titre : Der
murikatitetut Artt , oder : Abhandlung von dem Einpnucdcr Mmihauf don
menschlichcn Korrper ; Vienne , 1807, in ■S" de 107 page!. On en a donné
une traduction italienne a Milan, eu 1811. On a auisi du même au-
lenr : I" Cenni tiografà intorno ai cetebrt maexlro W. A. Mozart, ei-
tralti an datli aatenliei. Milan, Sllvr-slrî , 184. \n pages in-8'i 1" JBir-
numik f.ir Damen , oder : Kune Ânweaung die Bc.^iln d.-s (',rnn;ill.,^srs
au f eine Icicht fatsliche Art lu erttrnen (Harmonie pour les dames, on iu-
utruction ahréjtée sur les régies de l'accompagnement, etc. ) ; Vienne ,
iS"6, m pages in-ful. ohl ; 3" Orpheik, oder : Ann-cixung dit Beçeln dcr
Composition auf cine leieltlc und faisticlie Art iu trhraen ( Orphée , on
instruction sur Jei règles de la composition, etc.; Vitrine , 1807, ij pag.
in-ful. obi. et 4" pages d'ciemplei. , ■
>8i
à un livre de cette espèce , et une proportion bien établis
entre les articles du dictionnaire de musique, en raison
de leur importance, sont tus qualités principales qui re-
commandent cette production à l'attention publique.
L'ouvrage se divise en deux portions distinctes et indé-
pendantes l'une de l'autre , bien qu'elles concourent foules
deux à complu t « ■ ■ ■ le sj slimc des nui naissances musicales.
La première partie , qui est renfermée dans les deux pre-
miers volumes, contient le dictionnaire de musique; la
seconde est relative à la bibliographie de cet art.
Le dictionnaire de musique de M. Lichtenthal me paraît
tenir précisément le juste milieu, dont j'ai parlé, entre
les reeueils de traités par ordre alphabétique et les nomen-
clatures sèches et arides. Quoique pourvu d'un savoir très
étendu , l'autour n'affecte pas de le montrer dans des dé-
veloppemens trop étendus; il se home à expliquer claire-
ment la nature de chaque terme , son usage et ce qui s'y
rapporte. Son but est d'être utile; il remplit sa mission.
Comme la plupart dus auteurs Allemands qui ont écrit sur
la musique , M. Lichtenthal s'attache avec soin à la partie
philosophique de l'art qu'on appelle Esthétique, c'est-à-
dire aux rapports de la musique avec les affections mora-
les, avec les ïiisliluliriiis sociales, et avec le jeu des passions.
Celle espèce de science particulière , d'autant plus étendue
qu'elle repose moins sur des idées positives et finies , n'en-
traîne cependant point l'auteur du nouveau diction-
naire bors des bornes de son sujet : les articles qui s'y rap-
portent sont travaillés avec soin, mais ne s'écartent point
de la concision nécessaire dans un dictionnaire.
Pour les articles historiques, M. Lichtenthal a suivi à
peu prés la méthode de Ginguené, consistant à placer sous
le nom d'un peuple quelconque tout ce qui a rapport à sa
musique. Ainsi , au mot Italia (brevi cenni stonci mu-
sicale suit' ) il donne une histoire abrégée de toutes 'les
tintes et ses éerivaius. Le même système est suivi pour tous
les peuples. Les détails qui n'ont pu trouver place dans
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ces articles généraux, sont donnés dans les articles parti-
culiers tels que ceux des instrument!, du chant , des systè-
mes, etc.
La théorie de la composition et celle do l'harmonie, sur
lesquelles reposent les articles qui s'y rapportent, sont
conformes aux principes des anciennes écoles d'Italie.
Quoique peu étendus , ces articles donnent une connais-
sance suffisante de l'art et de ses procédés; je dis suffisante,
parce que l'auteur d'un dictionnaire doit moins s'occuper
d'enseigner les procédés de l'art que d'en donner une idée
claire et précise.
Une autre partie du travail de M. Lichtenthal qui ne me
parait pas moins louable , c'est l'exposé de la doctriue du
rapport des sons, de l'acoustique et de toute la partie phy-
sique et mathématique de la théorie musicale. Sous ce
rapport, il me semble qu'aucun autre ouvrage nu l'em-
porte pour la clarté unie à la concision.
Sauf quelques erreurs de date peu importantes, je crois
donc que le dictionnaire de M. l.ichtenthalest le plus com-
plet et le meilleur qui ait été publié jusqu'à ce jour, et je
ne doute pas qu'il n'obtienne un grand succès. .Depuis long-
temps il n'avait point paru en It-iie de livre aussi bien
fait et aussi utile , et jamais peut-être il n'en fut publié de
plus à propos, pour y ranimer le goût de la musique, car
l'art musical ne vit plus guère que de souvenir dans son
ancienne patrie. Sous devons en croire à cet égard M.
Lichtenthal lui-même lorsqu'il dit:
* Coiiviene perô confessa re che in oggi l'Italia non è piit
«quclla de' secoli passati rispetto ai compositori, ai can-
itanti cd agli autori didattici e la buona musica di chiesa
" è or mai quasi dcl tutto scomparsa. t
L'immensité d'écrits quia été publiée sur la musique est
telle , que la connaissance et la classilieatîon des livres de
cette nature forment une science Iris étendue. Ou pourra
le concevoir quand on saura que le nombre des auteurs
qui ont écrit sur cet art s'élève à près de dis mille. Le sa-
vant Forkei a composé sur cette science un ouvrage excel-
lent qui a pour titre : Atlgtmeine Litteratur tter Mmih,
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«itc, {littérature générale de la nmsiqu c), Leifisict, Schwic-
kert, 1790, in-B". M. Lichtenlhal dans la seconde parlie de
l'ouvrage qui est l'objet de cet article, et qui a pour titre-
Bibiiogkàphia delta musica, a non-seulement traduit le
livre de l'oskel, mais il l'a considérablement augmenté ,
l'a continué jusqu'aujourd'hui, en a corrigé les erreurs,
et a mieux coordonné quelques parties accessoires. En un
mot , il en a fait un des livres les plus utiles et les mieux
rédigés qu'on ait sur celle matière intéressante.
Déjà ce livre jouit d'une réputation bonorablc eu Alle-
magne; il ne peut larder d'en acquérir une semblable en
France dès qu'il s'y ssra répandu. Les ai'Usles el les ama-
teurs apprendront sans doute avec plaisir qu'on peut s'en
procurer des exemplaires chez M. Mongie, libraire , bou-
levard des Italiens.
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BIOGRAPHIE.
DALAYRAC (Nicotis), compositeur dramatique, naquit
à Muret en Languedoc, le i5 juin ij55. Dès son enfance,
un goût passionné pour la musique se manifesta en lui;
mais son père, subdélégué delà province, qui n'aimait
point cet art, et qui destinait le jeune Dalayrac au bar-
reau, ne consentit qu'avec peine à lui donner un maître
de violon , qui lui fit bientôt négliger le digeste et ses com-
mentateurs. Le père s'en aperçut , supprima le maître , et
notre musicien n'eut d'autre ressource que de monter tous
les soirs sur le toit de la maison, pour étudier sans être
entendu. Les religieuses d'un.couveut voisin trahirent son
secret; alors ses parens, vaincus par laut de persévérance,
et craignant que colle manière d'étudier n'exposât les
jours de leur fils, lui laissèrent la liberté de suivre sou
penchant. Désespérant d'en faire un jurisconsulte, on
l'envoya à Paris, en 1774» VoaT Élre placé à"al18 les gardes
du comte d'Artois. Arrivé dans cette ville, Dalayrac ne
larda point à se lier avec plusieurs artistes, et particu-
lièrement avec Langlé, élève de Calïaro, qui lui enseigna
l'harmonie. Ses premiers essais forent des quatuors de
violon , qu'il puhlia sous le nom d'un compositeur italien.
Poussé parun goût irrésistible vers la carrière du théâtre,
il écrivit, en 1781, la musique de deux opéras comiques,
intitulés le Petit souper et le Chevalier à ta mode, qui
furent représentés à la cour, et qui obtinrent du succès.
Enhardi par cet heureux essai, il se hasarda sur le théâtre
do l'Opéra-Comique, et débuta, en 178a, parVÉclipse
totale, qui fut suivie du Corsaire , en i;83. Dès lors, il
se livra entièrement à la scène française; et dans l'espace
de vingt-six ans , ses travaux, presque tous couronnés par
le succès , s'élevèrent au nombre de cinquante-six opéras.
En voici la liste avec les dates : I,' Éclipse totale, 178a ; te
Corsaire, 178!) ; les Deux tuteurs, 1 jS'i; la Dot ; l'Amant
statue, i;85; Nina, 1786; Azémia; Renaud d'Ast,
1787; Sargines, ip88; Raoul de Crèqui; tes deux Petits
Savoyards,- Faiichcttu, 1789; la Soirée orageuse; Vert-
Vert, 1-^90; PhUippe\et Georgette ; CamiUe , ou te Sou-
terrain; Agnes et Olivier, 1791; ÉUse-Bortense; f Ac-
trice chez Me, 179a; Amiiroise, ou Voilà ma journée,
Roméo et Juliette; Vrgande et Merlin; ta prise de
Toulon, i;r)5; Adèle et Dorsan , 1794; Arnitl; Ma-
rianne; la Pauvre Femme , 1 79 5 y ta Famille améri-
caine, 1796; Gulnare, ta Maison isolée, 1797; Prime-
rose ,- Alexis, ou l'Erreur d'un ton Père; le Château
de Monténéro; tes Deummots, 1798; Adolphe et Clara,-
Laura; la Leçon, ou la Tasse de glace, 1799 ; Catinot;
(c Rocher de Leucadv; Maison à vendre, 1800; ta Boucle
de cheveux; la Tour de Neustadt, 1801; Picaros et
Diego, i8oâ : Une Heure de nxiriaqc; la Jeune Prude,
1804; Gutislan, i8o5; Lina, ou te Mystère, 1807; Kou-
touf, ou les Chinois, 1808; le Poète et te Musicien,
1811. lin ]8o4< il vivait donné à l'Opéra un ouvrage inti-
tulé : Le Pavillon du Calife, en un aclc; depuis su mort,
ou a arrangé celte pièce pour le théâtre Feydcau, où elle
a été représentée en 181a, sous le litre Pavillon de
Fleurs.
Dalayrac avait le mérite de bien sentir l'effet drama-
tique, et d'arranger sa musique convenablement pour la
scène. Son chant est gracieux et facile , surtout dans ses
premiers ouvrages; malheureusement ce Ion naturel dé-
génère quelquefois en trivialité. Nul n'a fait autant que lui
de jolies romances et de petits airs devenus populaires ,
genre de talent nécessaire pour réussir auprès des Fran-
çais , plus chansonniers que musiciens. Son orchestre a le
défaut de manquer souvent d'élégance ; cependant il don-
nait quelquefois à ses aeeompagnemens une couleur assez
heureuse : lels sont ceux de presque tout l'opéra do Ca-
mille, de celui de Nina, du chœur desmalclots i\'A:émia.
et de quelques autres. Ou peut lui reprocher d'avoir donné
souvent à sa musique des proportions mesquines ; mais ce
défaut était la conséquence du choix de la plupart des
pièces sur lesquelles il écrivait, pièces plus convenables
pour faire des comédies ou des vaudevilles que des opéras.
Que faire, en effet, sur des ouvrages lels que Ut Deux
tuteurs, Philippe et Georgette, Ambroise, Marianne,
Câlinât, ia Boude de çlieoeux, Une Heure de mariage,
ta Jeune Prude, et tant d'autres ? Dalayrac (Huit lié avec
quelques gens de lettres qui ne manquaient pus de lui
dire, en lui remettant leur ouvrage : Voici ma pièce, elle
pourrait se passer de musique; ayez (loue, soiu.de ne
point en ralentir ta marche. Partout ailleurs, uu pareil
langage eût révolté le musicien; mais, en l'rance, le pu-
blic se connaissait en musique comme les poêles, et
pourvu qu'il y eût des cliausous, le succès n'était pas dou-
teux. C'est à ces circonstances qu'il faut attribuer le peu
d'estime qu'ont les étrangers pour le talent de ce compo-
siteur, et l'espèce de dédain avec lequel ils ont repoussé ses
ceauï dignes d'éloges. Presque lout Camille est excellent;
rien de plus dramatique que le trio de la cloclic au pre-
mier acte , le duo de Camille et d'Alberti , cl les deux pre-
miers finales, La couleur de Nina est sentimentale et vraie;
enfin l'on trouve dans Jzcmia, dans Ilomt'o et Juliette,
et dans quelques attires opéras . des inspirations très heu-
reuses.
Deux pièces de Dalayrac, Nina cl Camille , ont été tra-
duites en italien, et mises en musique, la première par
Paisiello, et la seconde par M. Paër: et comme on ne
peut se défendre de comparer des choses faites dans des
systèmes très différens , et qui n'ont point d'analogie dans
l'objet qu'on s'est proposé, les journalistes n'ont pas man-
qué d'immoler Paislello à Dalayrac, et d'exalter l'oeuvre
du musicien français aux dépens de celle du grand-maltrc
italien. Sans doute la Nina française est excellente pour
le pays où elle a éié faite; mais le cheour Dormi o cara,
l'air de Nina au premier acte , l'admirable quatuor ComeX
partir 1 et le duo de Nina et de Lindoro , sont des choses
d'un ordre si supérieur, que Dalayrac, entraîné par ses
habitudes , et peut-être ses préjugés , n'eût pu même eu
concevoir le plan. Il est vrai que le public parisien a pensé
long-temps comme ses journalistes; mais ce n'est pas la
faute de Paisiello.
Le lalent estimable de Dalayrac était rehaussé parla no-
blesse de son caractère. En îjgo, au moment où la faillite
du banquier Savalelte de Lange venait de lui enlever le
fruit de dix ans de travaux et d'économie, il annula le tes-
tament de son père, qui l'instituait son héritier, au pré-
judice d'un frère cadet. Il reçut en 1798 , sans l'avoir sol-
licité, le diplôme de membre de l'académie de Stockholm,
et quelques années après, fut fait chevalier de la Légion
d'honneur lors de l'institution de cet ordre. Il- venait de
finir son opéra du Poète et du Musicien, qu'il affection-
nait, lorsqu'il mourut à Paris, le 27 novembre 1809, sans
avoir pu metlre en scène ce dernier ouvrage. Il fut in-
humé dans son jardin , à Fontenay-sous-Bois. Son buste,
exécuté par Cartellier, a'élé placé dans le foyer de i'Opéra-
Comique, et sa vie, écrite par R. G. G. P. {René-Charles
Guilbert Pixérécourt ), a été publiée à Paris, 1810, un vol.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
La première représentation du Sièga de Corinthe a eu
lieu au théâtre royaj de Bruxelles le ai août; cet ouvrage
a obtenu le plus brillant succès. L'exécution en a été par-
faite, et la mise en scène fait le plus grand honneur à.
M. Langle, directeur du théâtre. On y représentera Moïse,
avant le départ de la cour.
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ANNONCES.
Duo à quatre mains pour le forté-pîano sur la romance
de Wallace ( Loin du tumuite de ta guerre), musique de
M. Calcl , dédié à mesdemoiselles Mary et Emma Sullivan
par C. L. Rhein, op. a5. Pris 7 fr. 5o c. , à Paris, chez
A. Petit, successeur de II. Ch. LaOillé, éditeur de musique,
rue Vivienne, n° 6, au coin delà galerie.
Nocturne et variations concertantes pour piano et violon,
sur la prière de Moïse de Rossiui, dédiées à madame la
marquise Ducrest, par L. Rhein , op. 26. Prix 7 fr. 5o c. ,
à Paris, chez E. Troupenas, successeur de madame veuve
Nicolo , éditeur du répertoire des opéras français, avec ac-
compagnement de piano, rue de Uénars, n" 3.
Nous donnerons dans un prochain numéro l'analyse de
ces deux ouvrages.
— Musique religieuse. Cent cantiques chrétiens à deux
et à trois voix; paroles et musique de M. Maluri. Prix:
5o fr. brochés.
Ave regina, musique de M. Drocurt. . . . a fr. 5o c.
Almaredemptoris a fr.
Beati qui habitant ' a fr.
Stabaimaur 6 fr.
Veni, sancte spiritus a fr.
Tous ces morceaux avec accompagnement de piano ou
d'orgue : tous faciles à exécuter dans les églises et dans les
pensionnats, se vendent au magasin de musique de Pacini,
boulevard des Italiens, n' 11.
— L' Echo lyrique , nouveau journal de chaut, rédigé
par MM. Pacini et F. Grast. Le prix de l'abonnement est
du a5 francs par an.
Les envois seront faits franco par la poste.
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l92
La ciii quième livraison de ce journal vient de paraître ,
elle contient les morceaux suivans :
Seconde-moi, ma Lyre, romance, musique de G rast.
Le Rendez -v ous , musique <le Brugnière.
Nolturno per soprano e contralto neW Andronico ,
musica di Mercadante.
On s'abonne h Paris chez Pacînî, éditeur désœuvrés de
Beethoven , Cimarosa, Mozart et Rossini , boulevard des
Italiens, n» 1 1 .
A Genève, au magasin de musique de Grast, grande
rue, n° 207.
— Les airs, duos et trios de Giuliettae Romeo, musique
de Vaceai, sont gravés au magasin de Pacini, éditeur des
opéras de Rossini, boulevard des Italiens, 11° 11.
-ajournai 4' Euterpe et des amateurs, nouveau jour-
nal de chant, dédié à S. A. R. Madame la duchesse d'An-
gouléme. Quinzième année, neuvième livraison, n*33à36.
A Paris, au bureau du Jourat d'Euterpe, chez?. Vail-
lant, rue Montmartre, n° 158, près le boulevard.
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MUSICAL REMINISCENCES
OF AIT OLD AMATEUR,
cnrefLY bespechnc the itixuh opéra in englard ,
For arij JW1 , frbm 1773 la 1823 ,
(Réminiscences musicales d'un vieil amateur, concernant principale-
ment l'opéra italien en Angleterre pendant cinquante annéea, depuis
l^pî jusqu'en i8a3 ; seconde édition , continuée jusqu'à ce jour') .
Ce pelit volume a été écrit par le comte de Mou nt
Edgecumbe. Il a été imprimé il y a trois ou quatre ans;
mais a vient seulement d'être publié avec quelques addi-
tions. Il renferme des jugemens, fruits d'utie longue ex-
périence et des comparaisons entre les divers grands chan-
teurs qui ont charmé l'Italie et l'Angleterre pendant une
période de cinquante années.
Lord Edgecumbe est , comme on s'y attend bien , lau-
datur temporis aeti. Il exprime ouvertement son mépris
jiour la musique moderne , et son admiration pour la mé-
thode des PacchiaroUi , des Farinelli , etc. Ce dernier sen-
timent est certainement partagé par tous ceux qui ont
entendu les chanteurs de cette école.
« En écrivant ces réminiscences , dit le comte Edge-
cumbe, le souvenir du passé me procure plus de jouis-
sances que ne peut m'en ofTrir le présent. Aimant la
musique avec passion, j'ai vécu dans un temps que je
considère comme une de ses plus Hérissantes périodes.
Aujourd'hui le goût est changé; quelques amateurs an-
glais seulement , d'accord avec moi, aiment encore le bon
vieux style, et les compositions de ces excellens maîtres ,
<jue le caprice a jetées de côté , mais que les juges éclairés
doivent toujours considérer comme supérieures au clin-
quant de l'école moderne. Mes remarques paraîtront peut-
(t) Londres, W.CIarkc.
2* VOL.
>9Î
être ottt-fashitnied (surannées); mais s'il ai-rive qu'elles
noient lues (Uns cinquante ans,. on en reconnaîtra sans
doute la vérité. Les formes brillante!) qui sont à la mode
aujourd'hui passeront, et l'on en reviendra à un stylo plus
naturel.! Cette espérance du noble lord est-elle fondée?
on aura peine à se le persuader en suivant les progrès de
l'art musiealjusqu'à nos jours. Oq*«lt 'quedu temps rtePale-
slrina, la musique en parties fut au moment d'être exclue
ilo l'église, sous prétcNlc qu'elle était trop vive et trop légère
pour célébrer dignement le service divin. Plus tard, Méta-
stase censuralc genre adopté de sou temps, il exprime ainsi
son mécontentement. «Les chanteurs du temps présent
oublient complètement que leur but doit être d'imiter les
accens humains, avec le nombre et l'harmonie. Au con-
traire, plus ils s'éloignent de la nature et plus ils so croient
parfaits. Ils prennent pour modèles les rus-J^iiols, les ci-
gales, et ils oublient les personnages qu'ils doivent repré-
senter, et les passions qu'ils ont à exprimer. Quand ils ont
joué une symphonie avec la gorge ils croient que l'art ne
peut aller plus loin. Aussi le cœur des auditeurs resle-l-il
toujours parfaitement tranquille. • Dans un autre passage
le poète lyrique dit encore : «Les airs qu'on nomme de
ûrautntrii, et dont vous blâmez le trop fréquent usage
constituent maintenant toute la force de notre musique,
qui essaie de se séparer de lu poésie. On ne cherche plus
dans ces airs à exprimer la situation, les passions, le ca-
ractère du personnage, on se borne à imiter les violons et
le gazouillement des oiseaux. Ou recueille alors les mêmes
appiaudissempus qu'un danseur de cordes, un bateleur,
qui excite notre surprise par sa dextérité. La musique mo-
derne, fièrede ses succès, veut se révolter contre la poésie.
Qu'elle y prenne garde néanmoins, ies plaisirs qui ne tou-
chent ni le cœur ni l'esprit sont de courte durée. » Ces pas-
sages furent écrits l'un en i j55 et l'autre en ij65. En i$eâ
le D. Burney, éditeur des œuvres de Métastase, y joignit la
note suivante:. Si Métastase, il y a trente ans, était fatigué
et ennuyé de l'abus des ornemens, que dirait-il mainte-
nant? le mal a certainement l'ait de rapides progrès, depuis
Digilized b/Go^gJjj
i95
le moment oiiil écrivait cea réflexion.* Le poète italien dans
une lettre adressée à L. Mattci, fait le* remarques suivan-
tes, sur ia musique des anciens. «Les sens sont soumis à
de fréquentes variations, motivées par le changement
d'habitudes, de lieux, etc.; la musique, qui agit si puissam-
ment sur eux, doit subir nécessairement do nombreuses
modifications, reut-étrelessplcndides banquels tVd/>ù-i>a,
seraient-ils repoussés aujourd'hui par nos plus robustes
estomacs, peut-être leBacchi cura, leFaiernus agir, ces
vins si recherchés jadis, seraient È peine jugés bons pour des
esclaves. Le café, celte amère boisson, pire que le poison,
selon tiédi, est devenu un délicieux breuvage, en usage
parmi presque tous les liabitans du globe. De même, les
airs qui oui charmé nos pères nous paraissent aujour-
d'hui grossiers et insupportables; commentalors détermi-
ner la perfection de la musique ? cet art, en hutte à tous
les caprices de la mode, ne peut être soumis i des règles
fixes et invariables. »
Nous avons pensé que nos lecteurs ne seraient pas fâ-
chés de connaître l'opinion de Métastase et celle du
D. Burney sur le goût musical de leur époque. Revenons
maintenant aux réminiscences du comte Edgccumbc.
* Depuis vingt ans (dit le noble lord) j'ai cessé de preudre
un vif intérêt à la musique , j'ai même passé plusieurs sai-
sons sans entrer au théâtre. Les bons chanteurs disparais-
saient et n'étaient point remplacés. Le s!ylc des composi-
tions s'altérait ; enfui, t'Ctifn it'ot' di-s théâtres lyriques
s'évanouissait. Depuis quelques années ma curiosité s'est
réveillée, j'ai encore éprouvé quelque plaisir, jo l'avoue;,
cependant je necrois pas que jamais la musique nouvelle,
ni les chanteurs modernes , puissent valoir ce que j'ai en-
tendu autrefois, i Parmi les chanteurs qui ont excité son
admiration se trouve Pacchîarotti. Il existe aujourd'hui
peu de personnes qui aient entendu ce célèbre soprano ;
mais elles s'accordent toules pour reconnaître que c'est ,
après Farinelli, le premier chanteur de l'Italie. Lord
Edgccumbe s'exprime ainsi surson compte : « La voix de
Pacchiarutli était aussi douce qu'étendue. Sa facilité était
• *
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içWÎ
extrême; maïs il avait trop bon goût pour en abuser. It se
contentait île placer dans chaque opéra un air tic bravoure;
ariadi agilità, dans lequel il pouvait déployer tous ses-
moyens. Il chantait ensuite le reste de son rôle avec une-
grande simplicité, car il éluit persuadé que le triomphe de-
l'art du chaut consiste dans une grande expression. Il était
excellent musicien, savaitse ployer à tous les styles et pouvait
chanter à- première vue, non-seulement avec exactitude,
mais en saisissant avec un art admirable tontes les in-
tentions du compositeur. Les traits dont il ornait son chant
étaient variés à l'infini. Jamais il ne chantait deux fois le
même air de la même manière , et cependant, ses orne-
meus étaient toujours parfaitement appropriés au caractère
de chaque morceau. Le trille, qui était alors considéré
comme indispensable et sans lequel on ne peut être consi-
déré coin me un chanteur parfait, était exécuté par lui avec
une netteté, une pureté incroyables. Malgré le désavantage
d'une taille trop haute et d'un embonpoint trop considé-
rable pour la scène, il était néanmoins fort bou acteur, car
il sentait vivement et était enthousiaste de son art. Son ré-
ci tali l'était tellement admirable, que même sans entendre
»>a langue , on comprenait tout ce qu'il voulait exprimer.
Comme chanteur de concert , il brillait peut-être encore
davantage. Il chantait avec plus de passion dans un petit
cercle d'amis, et il était plus flatté de leurs éloges que des
upplaudissemens d'une foule parfois ignorante. Je l'ai sou-
vent entendu en petit comité, il s'abandonnait alors a ses
inspirations, et plus d'une fois il fit fondre en larmes tout
son auditoire. Je lui ai quelquefois entendu chauler une
cantate de Haydn, intitulé Ariane, à Naxos, écrite pour
une voix , avec un simple accompagnement de piano , qui
était joué par Haydn lui-même. Iles! inutile d'ajouterque
l'exécution était parfaite. Sa modestie égalait son mérite,
et ses bonnes qualités le rendaient cher à ses amis. » Ses
remarques sur M™ Mara ne s'accordent point entièrement
avec l'opinion générale. «Le talent de Mara comme can-
tatrice (car elle n'était pas actrice et convenait peu ou
théâtre) élait du premier ordre. Sa voix douce, pure,
t •
DiïtiJOd by Cl
'07
flexible et étendue, liait propre à. clin nier les airs de bra-
voure. Dans ce genre elle n'avait point de rivale. Elle
réussissait également bien en chaulant la musique solen-
nelle et pathétique de Haudcl;on ne pouvait lui reprocher
aucune faute, et néanmoins on voyait qu'elle manquait de
ce sentiment profond qu'elle savait cependant inspirur a.
En parlant de IUibinclli, il dit: « Ce ciiantcur posséda il
une voix de contre-alto d'un belle qualité» mais do peu d'é-
tendue. Il excellait surtout daus le cantabile, qu'il chaulait
avec aine. Il avait peu de légèreté dans la voix, mais il ne
risquait jamais que ce qu'il pouvait exécuter. I! peut êtro
classé parmi les meilleurs chanteurs. » Mus loin , il parle
avccélogcdcMarchcsi: * Ce chanteur (dit-il) dont le nom
était depuis long-temps connu en Angleterre , y était at-
tendu avec la plus \ j\ ■.: impatience. La première fuis qu'il se
(il entendre, la l'unie ratu plissait mm-.*e uliiiiic n L Iti IIu-elIic,
mais au lever de la tuile la scène était tellement encombrée
qu'il s'écoula un certain temps a va ut que l'ordre et le silence
pussent être rétablis. Marches! était alors dans la fleur de
l'âge; il était bien lait, d'une ligure agréable et rempli de
grâce. Sou jeu était spirituel, et sa voix étendue et bril-
lante; daus les récitatifs, dans les situations fortes cl éner-
giques, il était inimitable ; et s'il avait été moins prodigue
d'ornemens, qui n'étaient pas toujours d'un goût bien pur,
il aurait été à l'abri de tous reproches. Il avait choisi
pour ses débuts le bel opéra du Giul.it) .Sabino de Sarti.
J'avoue que jti fus peu satisfait de la manière dont Marches i
chantait ces lieaux airs que j'avais souvent entendu chan-
ter si admirablement par Paccliiarolti. Je me rappelais sa
touchante simplicité, et je souffrais d'entendre Marches!
défigurer cette belle musique par des omemeus déplacés.
Ilubinclli, Marchcsi et l'aceliiarolti, les trois premiers so-
prani de l'Italie, plaisaient chacun par des qualités dillé-
reh'tes ; le premier charmait par sa simplicité , le second
par une verve extraordinaire, et le troisième touchait les
coeurs par une profonde expression '. »
(0 .De ces Lui* tu lubies cliuiitwji.- . Murclitsi seul e.\islc eneort. l'.j
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La Ranti parait avoir été la favorite de lord Edgectimbe.
11 parle d'elle en ces termes : « Elle avait commencé la
carrière comme une contante di Piazza; mais ayant at-
tiré l'attention parla beauté de sa vois, elle fut enlevée à
son humble situation, et bientôt en l'entendit chaîner
dans les concerts, d'abord à Paris, et ensuite à Londres,
où elle chanta au Panthéon sous le nom de Georgi. Quoi-
qu'elle eût les meilleurs maîtres , elle était une très mau-
vaise écolière ; sa paresse était excessive , et jamais elle ne
voulut s'astreindre à des éludes sérieuses. Heureusement
son génie suppléait à la science ; une voix parfaitement
juste, et un goût exquis, la mettaient à même de chanter
avec plus d'expression, et de produire plus d'effet que
d'autres cantatrices bien plus habiles qu'elle. Elle ne fut
jamais bonne musicienne, jamais elle ne put chanter un
morceau à première vue ; mais lorsqu'une fois elle avait
appris un air, elle le chantait avec une expression incom-
parable. Sa voix étaitdoucc, étendue, et d'une égalité par-
faite. Dans sajeunesse elle atteignait facilement les cordes
les plus hautes , et la légèreté de sa voix lui permettait de
chanter les airs les plus brillans. Plus tard, ayant perdu
quelques notes supérieures, elle s'attacha particulière-
ment au catitabile dans lequel elle n'avait point d'égaler
Daus la section vi de son livre, le comte Edgecumbe
s'occupe de M"'* Billington, Grassini, Catalan! et de Lra-
ham. ■ La voix de M" Billington (dit-il) quoique douce
et flexible, n'avait pas le charme de celle de la llanti ; elle
était excellente musicienne, et possédait une facilité qui
lui permettait (le Caire beaucoup d'orncmetis , qui étaient
toujours d'un très bon goût. Malgré tous ces avantages, il
lui manquait cependant quelque chose; elle n'était point
iictrice; se» traits, quoique beaux, étaient sans expression.
Pendant la première saison , je l'avoue, je ne partageai
point l'enthousiasme du public pour M™* Billington ; etpar
nue bizarrerie assez étrange , l'instant où elle perdit la fa-
bim-lli r-sl imu'l (t,ms la i'.irci; :1c cl P.icciiUrilli a Inrmiiiï sa car-
litre il j a peu li'annccs, .i Fiidouc, oit il s'ilaït relire et où il joiiiuaii
d'une grauiie aisance. Il était for! igé.
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veur publique fut celui 0E1 je commençai à l'apprécier. Jo
veux parler de l'arrivée de M°° Grassini, <[iii était, en-
gagée |iour chanter les prime donne conjointement avec
M™ BilliEigton. M" Grassini était eu tout point opposée à
sa rivale; à une beauté parfaite clic unissait une grâce
tonte particulière, et clic élait excellente actrice. Son
genre exclusif était le cantabilc, ce qui, à la longue, de-
venait un peu monotone; sa voix, <|ui autrefois était un
soprano 1res élevé , avait été transformée par quelque ac-
cident en un conlre-alto très bas. Elle débuta dans la V er-
yinii tiel sole, opéra de Mayer; mais sou succès comme
cantatrice ne fut pas décisif, quoique son jeu et sa beauté
excitassent l'admiration. Déconcertée de la froideur qu'on
lui témoignait , elle n'osa pas paraître seule dans sa repré-
sentation à bénéfice , et elle appela M™ lîillington à son
aide. W'inter composa exprès, pour celle circonstance, un
opéra intitulé : /( ralto di Proscrpina. M" lîillington
remplissait le rôle de Cércs, et la Grassini celui de Pro-
serpino. Ce fut alors que la fortune changea subitement.
La gracieuse Usure de M™" Grassini , son jeu, l'expression
avec laquelle elle chanta des airs simples et faciles, tout
cet ensemble ravit le public. Les sous graves de sa voix
produisaient un effet admirable lorsqu'ils se joignaient à la
voix brillante de W Billington. Cet opéra fut donné sou-
vent; mais, rliose extraordinaire, on ne les entendit jamais
chanter ensemble dans aucun autre ouvrage. La Grassinij
reçue dans toutes les assemblées fu-shiima'ilM. Quant à'
moi, la comparaison entre ces deux rivales m'avait fait
découvrir la supériorité de M™" Billington, comme canta-
trice et comme musicienne. Mais un le sait, tout le monda
u des yeux , et il est si peu d'oreilles mnsicnli's ! Les sourds
auraient été charmés de H"" Grassini; mais les aveugles
auraient donné la préférence à M*" liillinglon. Apres trois
années d'un règne partagé, M" Billington se retira entière-
ment de la scène, quoique ses moyens ne fussent nulle-
ment alicrés, et M"" Grassini «'apercevant que sa faveur
commençait à diminuer, prit le sage parti île rcloiirner cri
Italie. Je lie veux pas passersous silence Un chanteur aussi
renommé que Brahani; je dois lui adresser quelques
observations. Il est reconnu nue sa voix est très étendue
et très pure, qu'il est excellent musicien, et qu'il peut
chanter parfaitement bien. Pourquoi donc ne le fait-il pas
toujours? pourquoi quitte-t-il le registre naturel de sa
voix, pour prendre un désagréable fausset? pourquoi
abandaniie-l-il un siyle élégant et pur, pour tomber tantôt
dans les charges italiennes, tantôt dans la rudesse anglaise?
Il change de manière selon l'auditoire qui l'écoute; ses
compositions offrent la même variété, et le chaut le plus
vulgaire peut sortir de sa plume aussi facilement que la
beau duo qu'il a intercalé dans l'opéra tics Horaccs, et
qu'il chantait avec M» Grassini '. .
Lord Edgecumbe a consacré plusieurs pages de «es ré-
miniscences à M™ Catalani. Mais on a déjà tant écrit sur
celte célèbre cantatrice, que les remarques de notre vieil
amateur offriraient peu rt'inlérèt; il serait diiScilc main-
tenant de dire quelque chose de nouveau sur une femme
qui a occupé l'Europe pendant si long-temps. Après avoir
parlé de ces malheureuses variations qu'elle a fait entendre
si souvent, je rapporte le mol attribué au D* Johnson, qui
après avoir entendu exécuter des passages d'une difficulté
extraordinaire, s'écria : Je voudrais que cela fût impossible)
Cette saillie appartient non au U[ Joli 11 son, mais à un
homme d'état, plus célèbre par son esprit que par son
amour pour la musique. C'est à lui qu'on demandait un
jour, pourquoi il ne souscrivait pas à the ancient coneei-t,
ainsi que l'avait fait son frère, l'évéquc dc\Y. : aOh ! ré-
pliqna-t-il, si j'étais aussi sourd que mon frère, j'aurais
certainement souscrit, n
(1) Braham .1 fait grand tort an chant anglais en produisant un grand
nombre d'imitateurs. Un grand talent peut Faire admettre de! choses
mauvaises en clles-m ."■mes, et qui deviennent insupportables chel de plata
imitateurs. M<" Catalani pourrait mériter le même reproche ; elle a ce-
pendant fait muins de mal , parce que f es moyens d'ciecution sont in-
comparables. Beaucoup d'hommes peuvent rivaliser arec lirabam', au-
cune femme no peut prétendre à ttre une Catalani.
Le comte Iïdgccumbc établit un parallèle entre lus cinq
cantatrices dont il a parle. 11 place M"" Mara cl Bulînglon
sur la même ligne. Il compare ensuite M"* Grassini, Ca-
lalani et Rantt, à Rubinelli , Marchcsi et Pacciuarolli. 11
trouve une grande analogie dans leurs talcns comme
chanteurs et comme acteurs.
Il parle avec éloge de M™" Roti/i et Camporese, mais II
ne rend pas justice à M™ Fodor. Les détails qu'il donne
sur les débuts de Vclliili en Angleterre sont vrais cl inlé-
ressans. * Je vais parler maintenant , dit-il , de l'arrivée
d'un soprano, le seul existant aujourd'hui en Europe. Il
vint ici avec de fortes recommandations, mais sans en-
gagement pour l'opéra, et il se passa quelque temps avant
«mêle directeur osât présenter au public un chanteursi ex-
traordinaire. Presque toute la généra lion qui avait entendu
Pacchiarolli, .Marchesi, etc., élail t'-lcirtlo depuis vingt-cinq
ans. Aucun soprano n'avait parti en Angleterre, et un fort
préjugé s'élevait contre ce genre de vols. Sa première ap-
parition dans les concerts fui loin d'être brillante, et ce ne
fut qu'en tremblant que le directeur loi (il un engage meut
pour le reste de la saison. Un cri général .s'élevait contre
ce chanteur, et ou fut obligé de prendre des précautions
extraordinaires pou t jle soustraire aux violences qu'on pro-
jetait contre lui à sou entrée eu scène. Enfin son pre-
mier début est annoncé; il doit paraître dans le Cro-
cialo, représenté à son bénéfice, indemnité qui lui était
cet opéra. Le théâtre se remplit; il paraît, et le plus pro-
fond silence régne parmi tout l'auditoire. Les premières
notes qu'il fit entendre excitèrent la surprise et même le
dégoût chez, les spectateurs peu expérimentés. Mais peu
à peu, il se lit écouter et applaudir. Ce chanteur n'est plus
jeune, sa voix qui a été fort étendue est altérée , et ce qui
est fort singulier , c'est que les sons du médium sont ceux
qui ont le plus souffert. Ses notes supérieures ont encore
une douceur ravissante , et dans It^ lus il possède fies sous
graves d'un grand effet II sait avec beaucoup d'art esqui-
ver ses mauvaises notes. À l'aide d'uru émeus exécutés avec
18
beaucoup de talent, son style est gracieux, mais ne s'élève
jamais à lu hauteur du cantabîta de la vieille école. S;t
manière est un peu uniforme; cependant malgré la mono-
tonie «m en résulte, il obtint un grand succès; il rappelait
aux vieillards les souvenirs de leur jeunesse; pour les jeune»
gens il avait l'a tirait de la nouveauté. Quelques personnes
cependant ne purent jamais s'habituer au senliment pé-
nible qu'excita en elles ce genre de voix. Madame Caradori
jouait la prima donna dans le Crociato. le jeune Garcia a
paru aussi dans cet opéra dont la musique a fait grand
plaisir. M. Mayerhec]' a déployé dans cet ouvrage un véri-
table talent. Le lecteur sera sans doute curieux de con-
naître l'opinion de notre critique sur M™ Pasla: voici
comment il s'exprime sur cette célèbre actrice. « J'enten-
dis M" Pasta pour la première fuis dans nu concert, et
elle me fit alors beaucoup moins de plaisir que je ne m'y
attendais. Dans une petite salle, sa voix est lourde, et
même dure, et ses manières trop véhémentes. Mais lors-
que je la vis ensuite à sa représentation à bénéfice, dans
Medca de Maycr, j'appréciai son beau talent : comme can-
rang. Elle mérite d'autant plus d'éloges qu'elle doit plus à
l'art qu'à la nature. Le rôle de Médée est on ne peut plus
favorable à son jeu expressif; elle m'a charmé et surpris ,
je le dis Ira ne lie ment; depuis la Banli je n'avais rien en-
tendu d'aussi parfait, peut-être même la surpassc-t-elle
comme actrice , quoiqu'elle lui soit fort inférieure sousle
rapport de la voix. ■
Lord MounlEdgecumbc parle longuement du change-
ment qui s'est opéré dans la forme des opéras. Il exprime
sa surprise que Mozart ait écrit deux de ses opéras pour
une liasse, tandis qu'on produit toujours plus d'effet en
confiant les parties chantantes à des voix élevées. 11 gémit
aussi sur l'abus des morceaux d'ensemble , et paraît re-
gretter tant soit peu l'ancienne manière. Nous ne citerons
(dus maintenant de cet intéressant ouvrage qu'un léger
fragment sur son voyage en Italie. « Je fus vraiment éton-
né du peu de bonnes choses dans cette contrée. Dans Us
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so5
petites villes, (elles que Nice, Trieste, etc., on trouve un
théâtre d'opéra, si on veut bien lui donner ce nom, car les
chanteurs ne valent guère mieui que les musiciens am-
bulansel ils ne seraient pas soufferts un moment à Londres,
mais la passion pour la musique est bien moindre dans celte
terre du chant qu'on ne le suppose en Angleterre. Lors-
que j'arrivais dans une ville, et que je demandais si l'opé-
ra était bon , on nie répondait : Si si êcttissimi itaUL Je
voyais en effet qu'on prêtait plus d'attention aux danses
qu'à la musique. On met les tragédies en pantomimes et
j'ai vu damer Romeo et Juliette.
VARIÉTÉS.
Le mot de diapason a , dans la musique , plusieurs si-
gnifications qui ont peu de rapport entre elles. Ce mot,
d'origine grecque , était dans la musique ancienne syno-
nyme d'octave. 11 se forme de par, et de irian, toutes,
parce que l'octave renferme toutes les notes de l'échelle,
t'est dans ce sens qu'un ancien registre d'orgue était ap-
pelé diapason; il était composé de deux jeux de flûtes de
8 et de 4 pieds jouant ensemble, et sonnant l'octave l'un
de l'autre.
Les Français emploient ce mot dans diverses acceptions.
Les facteurs d'instrumens nomment diapasons certaines
tables ou patrons sur lesquels sont marquées les propor-
tions de ces ïnstrumeus et de toutes leurs parties. On ap-
pelle aussi diapason, dans les instrumens à cordes,
l'étendue qui se trouve entre le chevalet et le sillet, et se-
lon que cette étendue est plus ou moins grande, on dit
que le diapason est grand ou petit. Un grand diapason
donne des sons plus intenses qu'un diapason court. C'est
à cause de cela que les luthiers de nos jours changent
presque tous les manches des anciens violons, et que les
facteurs de pianos se sont attachés à perfectionner la
courbe des chevalets.
Enfin on donne le nom de diapason à un pelit instru-
ment monotone, ayant à peu près la forme d'une pelile
fourche, et qui est fait d'acier trempé. Le son unique de
cet instrument sert de régulateur pour accorder les voix
et les inslrumcus entre eux. En Italie et dans quelques au-
tres pays, ce son est celui qui correspond à ut; en France,
il est à l'iuiisfion du la, et selon que cet ut ou ce ia sont
plus ou moins élevés , on dit que le diapason est haut ou
ïos. On met eu vibration le diapason eu frappant l'une
de ses branches, ou en les écartant l'une de l'autre avec
violence, et l'on donne de l'intensité au son qu'il produit
en appuyant son manche sur un corps dur.
Les Italiens donnent le nom de corîsta a cet instrument
Hawkins dit , dans son Histoire de la musique , qu'il fut
inventé, en i;n, parut) Anglais nommé John Shore.
Paolucci affirme (Artepratica. det Contraji., tom. 3,
p. que vers le même temps il existait en Italie trois
sortes de diapasons; le Lombard était le pins haut, le
Romain était plus bas d'une tierce mineure, de telle sorte
que le re de Milan correspondait au fa de Home. Le dia-
pason vénitien tenait le milieu entre les deux autres ; de-
puis lors, il s'est insensiblement élevé au ton de celui de
Milan.
Autrefois le diapason de l'Opéra de Paris était très bas;
il s'est ensuite élevé considérablement, car si je suis bien
informé, celui de 1820 était d'uu ton plus haut que celui
de 1770. Depuis lors, on a cru devoir le baisser pour éviter
la fatigue des chanleurs; mais dans un temps où l'on veut
surtout que la musique soit brillante, les îneonvéniens
d'un pareil changement surpassent de beaucoup ses avan-
tages; c'est ce que le spirituel auteur de la Chronique
musicale du Journal des Débats ' a établi d'une manière
fort piquante. Ou parait l'avoir senti depuis, car déjà le
diapason de l'Opéra se rapproche de celui de l'Opéra?
Comique , qui est d'ailleurs un peu plus bas que celui du
théâtre Italien.
Autrefois il y avait en Allemagne deux sortes de diapa-
(1) M. CMiil-Blwe.
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io5
sous: i* celui de chœur ou d'orgue- ( chorton ), qui était
d'un Ion plus haut que celui des orgues modernes; a* ce-
lui de chambre (fcammerton), qui était à l'unisson de ce-
lai de ces mûmes orgues. Ou trouve aussi dans les plus
anciennes orgues allemandes un autre diapason qu'on ap-
pelait diapason de cornet; il est encore plus haut que
celui du chœur i Aujourd'hui tous les constructeurs d'or-
gues règlent leurs instruinens sur le diapason de chambre.
Grande est la confusion entre les diapasons actuels de»
divers pays de l'Europe , en ce qui concerne les orchestres
de théâtres. Non-seulement presquechaque ville a le sien ;
mais dans diverses villes il en existe plusieurs. Par exem-
ple, la capitale de l'Autriche en possède trois, savoir:
celui de la cour, semblable à celui de Pélersbourg, le-
quel est plus haut que celui de l'Opéra de Paris , mais qui
est moins élevé d'un quart de ton que celui de Milan ; le
diapason le plus bas de Vienne est d'un demi-ton plus
haut que celui de Leipsick. Le diapason de Home est tou-
jours beaucoup plus bas que ceux de Milan , de Pavie , de
Parme, de Plaisance, et de toutes les autres villes de la
Lombardie.
On remarque que le diapason de chambre s'est sensible-
ment élevé dans toute l'Europe depuis un siècle environ.
Eu 1er, dans son Tentamen novœ thtoriœ musicas, eloi
(Pélersbourg, i?3q), calculait que Put de la clef de fa,
au-dessous de la portée, donné par le tuyau ouvert de
huit pieds, faisait 118 vibrations dans une seconde. Eu
1 771, il le trouva faisant ia5 vibrations ; les expériences de
Sarti, eu 1796, lui tirent voir qu'il en faisait i3i, et le doc-
teur Chladni l'a trouvé dans ces derniers temps variant
entre i56 et 1 58 vibrations. La différence, depuis 17^9,
est donc de près d'un demi-ton.
Ou a souvent mauifesté le désir qu'il n'y eût qu'un seul
diapason pour toute l'Europe, et eelu serait en elfet néces-
saire pour conserver à la musique le caractère que chaque
compositeur a voulu donner à ses ouvrages; car les effets
de lu musique sont aussi sensibles aux variations du tint,
qu'à celles du mouvement; mais pour arriver a celte unité
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désirée, Une snflirpas d'assembler des compositeurs, quel-
que- mérite qu'ils aient d'ailleurs, pour leur proposer de
décider à la pluralité des voix si le diapason sera haut ou
6aa, il faut, pour faire une opération semblable, user de plus,
de précautions qu'on n'a l'habitude dele frire en pareil cas.
11 ne suffit poinl en elfetde se bornera considérer certaines-
voix qui éprouvent plus de difficultés à chanter dans des
cordes élevées que dans des cordes basses; car si le ténor
et le soprano craignent les notes trop élevées, la basse et
le contre-alto souffrent d'un diapason trop bas; si les inslru-
menu de cuivre s'accommodent mieux dans certains tons,
d'uncélévalion modérée, le relâchement descordes dans 1m
instrumens à archets est un obstacle à la sonorité. Toutes,
ces considérations doivent être pesées, et une moyenne
doit être prise.
Cette moyenne trouvée, il s'agirait de la fixer invaria-
blement par le nombre de ses vibrations, et le Pataritkme
de M. le baron Caignard de la Tour serait d'un merveilleux
secours pour le faireavec une exactitude rigoureuse. Si l'un
prenait pour étalon le tuyau ouvert de I'ii( grave, pareiem-
ple, il faudrait déterminer aussi avec beaucoup de soin ses
dimensions; car, quoique ce tuyau soit désigné communé-
ment comme un 8 pieds, ou sent bien que ce n'est làqu'uue
longueur approximative, puisqu'elle doit varier en raison
de l'élévation du diapason. L'énoncé du nombre des vibra-
tions, et de la longueur du tuyau calculée à l'échelle mé-
trique est donc le meilleur moyen de fixer invariablement
le diapason pour toute l'Europe; et remarquez qu'il ne se-
rait peut-être pas inutile d'observer l'état de la pression
atmosphérique au moment de l'opération, ainsi que le»
autres circonstances météorologiques; car une question se
présente : Est-it bien certain que deux tuyaux de même
dimension, ] et absolument identiques, donneront te
■même nombre de vibrations sous des latitudes très diffé-
rentes? Il est peut-être permis d'en douter. Au reste, on
sent bien qu'une pareille exactitude ne serait guère que de
curiosité; car la différence, dans tous les cas, serait imper-,
ccptible dans la pratique.
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Quanta la question qu'on a fait souvent, s'il est plus utile
que le diapason soit au ton d'ut qu'à celui de la, j'affirme
que cela est 1res indifférent en soi, et qu'on fera bien de
suivre l'usage reçu. Un musicien français aurait beau jouer
ut, il croirait toujours donner te la.
SUR LE COSCEETO.
Concerto, sonate et toceate sont des mots dont tout le
inonde se sert sans en connaître la signification. Nés en
Italie , ils ont passé dans la langue française par l'usage ;
on sait quels objets ils désignent; mais on ignore leur ori-
gine et leur acception primitive.
Sonata ou suonata vient de suonare, rendre des sous :
îl se disait d'abord d'une pièce de musique destinée à Être
jouée par des instrnmens à TCnt ou à archet; quant aux
pièces d'orgue ou de clavecin , on les appelait toceate, mot
qui dérive de loccare , toucher. Plus tard , on a étendu le
mol sonala aux pièces destinées à ces deux inslrumens, et
celui de toccata n'a plus été donné qu'à certains morceaux
d'un mouvement vif et brillant. De nos jours, la sonate est
ordinairement composée d'un allegro, à.' adagio oa d'un
andante, et d'un morceau final. Quelquefois même ou y
joint un scherzo ou menuet viCavec un trio ; lu toccata n'a
jamais qu'un seul mouvement.
Concerto, concert, se dit en italien d'une assemblée de
musiciens qui exécutent divers morceaux de musique.
On disait autrefois concento, du verbe latin concinere.
Dans le dix-septième siècle on commença à donner le nom
de concerto à des morceaux composés pour faire briller un
instrument principal que les autres accompagnaient; mais
ce ne fut que vers le temps de Corelli que ce genre de
pièce devint à la mode. On croit généralement que To-
relli, qui ne le précéda que de quelques années, donna
au concerto la forme qu'il a conservée jusque vers 1760;
il en a laissé un recueil qui a été publié après sa mort, en
1 709 , sons le litre de Concerli grossi con una pastorale
e fer il santissimo natale. Ces concertas sont à huit parties ,
c'est-à-dire àviolon principal, deux violons, viole et basse
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3(1$
obligés , "et deux violons et violant, ou contre-basse de-
viole, di ripie.no.
On distinguait alors le concerto en concerto grosso et en
concr-rtodu. caméra; le premier avait des espèces de tutti
où tous les instrnmcns étaient employés; le second n'avait
qu'une partie principale avec de simples accompagne-
iiicns. Le violon principal s'apelait violino di concertino ;
et les violons d'accompagnemens se nommaient viotini
di grosso. Il n'y.a plus maintenant qu'une sorte de concer-
to ; c'est celui qui est accompagné par tout l'or e lies tre.
Les admirables compositions de Corelli ont long-temps
servi de modèle pour ce genre de pièce; il restera probable-
ment toujours indécis s'il ne fit que suivre la route tracée
parTorelli, ou si l'invention doit lui être attribuée. Il ne
les publia qu'a, la fin de sa vie 1 ; mais ils étaient composés
depuis longtemps quand ils parurent, et ce fut ceux de
île ses ouvrages qu'il travailla avec le plus de soin, et qu'il
revît le plus souvent avant de les mettre au jour. Quoi
qu'il en soit de l'invention , il s'en est attribué l'honneur
par la supériorité de sa composition sur celle de son rival.
Le style instrumental a trop changé peut-être pour qu'on
put essayer avec quelques succès aujourd'hui de faire en-
tendre les concertos de Corelli en public ; mais ils resteront
toujours comme des modèles que les artistes pourront étu-
dier avec fruit.
Vivaldi, qui vint ensuite , rechercha moins dans les
sïens le chant et l'harmonie que des traits brillans, diffi-
ciles et quelquefois bizarres; ce fut lui qui mit à la mode
les concertos imitalifsj tels que ceux qui sont connus sous le
litre des saisons. Son concerto du coucou fut long-temps
entendu avec admiration dans les concerts. Ily a aussi par-
mi ses œuvres des pièces intitulées stravaganze (extrava-
gances), qui ont fait les délices de quelques amateurs. I.o-
catelli, violoniste fameux par ses caprices, a suivi le pin h
de V ivatdi, et s'est plus occupé du soin d'étonner l'oreille
que de celui de la charmer.
{1} .L'èpBre dédieatoire csl daKe du ô décembre i;as, et il qiphu(
1e 18 janvier suivant.
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a<!!>
Tartitti, compositeur aussi original qne virtuose t-lort-
nant,a l'ait une révolution dans le style du concerto commo
dans le jeu du violon , et a préparé la forme actuelle de
celle espèce de pièce. Ses presto oui une légèreté, un bril-
lant dont il n'y avait point eu d'exemple avant lui, et ses
allegro d'introduction sont remarquables parle grandiose.
Le nombre de concertos qu'il a composés est immense ; on
en a gravé plus de deux cents, mais il en avait laissé un
plus grand nombre, dont le gouvernement français a ac-
quis les manuscrits originaux. Ceux-ci se trouvent main-
tenant à la bibliothèque du Conservatoire de musique de
Paris, avec quelques autres ouvrages inédits du même au-
teur.
Les concertos de Leclerect ceux de quelques autres vio-
lonistes de son lemps, ne sont guère que des imitations de
ceux de l'école italienne, et pendant plus de vingt ans co.
genre de pièces fit peu de progrès. Les accompagnemens
avaient toujours élé bornés aux iyilrumeus à cordes, deux
violons et une basse étaient toujours les seuls soutiens de lu
partie concertante. Stamitz fut le premier qui mit des in-,
slrumens à vent dans' le* tutti. De tous les compositeurs
allemands de son époque , il fut celui qui , sans se régler
entièrement sur le slylc de Tartini, sut donner le plus do
grandeur et de noblesse au style de concerto. Ses chant r
u'étaient pas toujours naturels et gracieux , mais ses soins
avaient du feu , de l'originalité, étaient remplis do traits
piquans et étaient modulés avec assez de variété pour le
temps où il écrivit. ,
La forme du grand concerto (concerto grosso) était
(îïéc. Un graniln(îe^tt>d'un mouvement noble et modéré,
composé pour l'ordinaire de trois solos, séparés par des,
tutti, et précédés d'une assez longue introduction qui an-
nonce le motif principal , le caractère général de la pièce,
et môme quelques traits de mélodie qui doivent se faire
entendre dans les solos; ensuite un adagio ou largo,
composé d'un ou de deux solos au plus; enfin un morceau
tinal d'un mouvement vif, impétueux et rempli du traits do
Untaisic ; voilà le plan qui se trouva irrévocablement ai-
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rftédès l'époque de Slainitz, et qui n'a fait qu'élre modifié
depuis dans quelques détails. Par exemple. Lolli et Jarno-
tvick, qui n'excellaient pas à jouer Vadagio, l'ont beau-
coup raccourci, ou l'ont même supprimé tout-à-faït dans
leurs concertos. Ce dernier a acquis une grande célébrité
par ses rondeaux, sorte de morceau qui ne s'était intro-
duit que peu de temps avant lui dans l'opéra , et qu'il fît
passer dans la musique concertante. Plusieurs écrivains
lui refusent le mérite de la priorité; mais on convient gé-
néralement que les rondeaux de Jarnowick étaient du
moins plus agréables et d'un chant plus suave que ceux
qu'on fasait de son temps.
Enfui Viotti parut, et sans rien inventer, quant à la
forme de concerto, se montra tellement inventeur dans le
chant, dans les traits, dans la forme des accompagnemens,
dans l'harmonie et dans la modulation, qu'il fit bientôt
oublier ses devanciers, et qu'il laissa ses rivaux sans espoir
de soutenir la comparaison. Quel feu, quelle élégance,
quelle fécondité, quelle ame, se révèlent dans ses admi-<
rablcs compositions! On a surnommé Viotti le Haydn du
violon; celte comparaison me semble manquer de jus-
tesse, à moins qu'on n'ait pris la supériorité de ces grands
musiciens dans un sens abstrait. Haydn fut inventeur, il est
vrai, mais sans profusion d'idées; à peine a-t-il trouvé un
motif heureux, qu'il appelle l'art à son secours pour en tirer
tout le parti possible; on dirait toujours qu'il veut épar-
gner pour l'avenir. Viotti ne brille point par le savoir : ses
éludes avaient élé médiocres ; mais sa richesse d'imagina-
tion était telle qu'il n'avait pas besoin de songer a écono-
miser ses pensées. D'ailleurs il composait bien plus par
gentiment et par instinct que par réflexion. S'il y a quelque
analogie entre le créateur de la véritable symphonie et ce-
lui du concerto , c'est dans le développement de leur ta-
lent. Tous deux ont commencé par être au-dessus de leurs
contemporains; mais leurs succès n'ont point borné l'es-
sor de leur génie , comme cela arrive trop souvent. Gran-
dissant avec leur renommée, ils l'ont justifiée chaque jour
davantage, cl leurs derniers ouvrages ont été les plus beaux.
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On n'a essayé de faire des concertos do clavecin que
long-temps après les premières co mp osition s du même
genre pour le violon , et plus tard encore on en a eu pour
les inslrumcns à vent; mais les unes et les antres n'ont
été qno des imitations des formes arrêtées du concerto h
ta Slamitz. Cependant ce sont précisément ces formes
l'ennui de l'auditoire. Comment se fait-il' qu'on soit reslé.
jusqu'aujourd'hui attaché à une coupe aussi défectueuse
que celle de ces concertos où le premier lulli fait en-
tendre exactement les mêmes phrases que le premier
solo? où il suit la même modulation de la tonique à la
dominante pour revenir ensuite à la tonique et recom-
mencer la même marche? oit trois solos, qui ne sont que
le développement di:s mêmes idées, les reproduisent sans
cesse en variant seulement le Ion ? oii les cadences de re-
pos, multipliées à dessein pour avertir le publie qu'il doit
applaudir l'exécutant, contribuent à rendre le morceau
plus monotone ? cnlin, où le morceau final reproduit à peu
près le même système, et tous les défauts du premier
tttlegro? Quelque languissante que soit la coupe delà so-
nale-, divisée eu deux parties symétriques , elle serait bien
préférable, appliquée au concerto, à celle qui est restée
en usage jusqu'à ce jour. Non queje veuille dire qu'on de-
vrait adopter celle-là ; la fantaisie, le caprice, l'irrégularité
me semblent bien mieux appropriés à ce genre de mor-
ceau , qui n'est dans son objet qu'une débauche de musi-
que, que ces éternels cadres de même l'orme. Le premier
qui joindra l'audace de l'innovation au génie de la canli-
lène et au talent de l'exécution, relèvera le concerto dans
l'opinion publique, et lui rendra son premier lustre, main-
tenant effacé. II nous débarasserait d'ailleurs des airs va-
riés qui ont si peu de variété, et des fantaisies froidement
compassées donl nous sommes accablés. Ainsi soit-il !
FilTIS.
NOUVELLES DE PARIS.
ACADÉMIE R.OYALI! DE MUSIQUE.
«StJrtuuiw «fwsenfrttioit h C<t S#mnam6ti(<^
BALLET ES T1SOIS ACTES , DE MM. SGI»! El ADMEh,
MUSIQUE DE H. HED.OLD.
Décidément noire vieuxOpéra veut se rajeunir; il avai*
déjà montré de la grâce et de la fraîcheur dans ses chanta,
voilà qu'il devient gaillard, et si le frein de la morale ne
le relient pas, la fougue de la jeunesse l'emportera plus
loin qu'on ne le pense. Titon et l'Aurore, Thêlis et Fêlée,
Alys et Cyhèle ne chantaient plus depuis long-leinps à
l'Académie royale de musique ; ils pouvaient du moins y
danser encore. Ces dieuxet ces héros infortunés prenaient
patience; ils ue pouvaient plus, j'en conviens, conter leur
martyre en vers doucereux et filer en roades leur parfait
amour; mais le flic-ilnc et la pirouette, le langage muet
des yeux et des bras , offraient d'agréables compensations
a leur divinité déchue. D'imprudens novateurs veulent
priver l'Olympe de la souveraineté qu'il avait conservée
dans les ballets; ces nouveaux Titans l'attaquent dans ses
derniers rctranchemens , cl leurs armes , quoique légères,
n'en sont pas moins redoutables. Le galoubet provençal
veut imposer silence a la lyre du blond Piiébus , et la lan-
terne de la somnambule Thérèse fait déjà pâlir la lampe
de Psyché. Le l'inde en a frémi, le Xanlhe a reflué vers
«a source , la fiére Junon s'est écriée , J ttpitcr, fanée ta
foudre, en sol mineur, et Neptune, qui venait de sortir
tout frisé delà mer, a redit le fameux quosego sur les bords
du ruisseau limpide qui fait tourner les moulins des envi-
rons de Tiirascon.
On ne s'ûLIciiliait gniie
A voir Ncplune eu celte affaire.
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ai3
Son redoutable lia capo aurait frappé de (erreur et les ac-
teurs et l'auditoire , c'en était fait des amours de Thérèse
et des galanteries du mousquetaire, si le triple trombone
de AI. Hérold n'avait pas assuré la victoire en voilant de
ses robustes accords les cris impuissnus de l'époux d'Am-
pliilrile. Le brave Neptune a fait iilie retraite précipitée ,
et quelques vieux habitués l'ont vu s'enfoncer a l'iiislanl
«lans les ondes.
Le ballet de ia Somnam&ule n'est point une Innova-*
lion; les bergers étaient admis à danser à l'Opéra depuis
deux siècles environ ; mais c'est une transition pour arriver
à un autre genre, et pour donner du nouveau au pubiic
qui en est si avide. On vent arracher enfin le ballet à l'es-
pèce de servitude que l'Opéra lui imposait en lui faisant
répéter en gestes ce que ses chanteurs avaient déjà décrit
et exprimé en cavatincs, en duos, en récitatifs. Il n'y a
plus maintenant de chances d'un succès brillant et dura-
ble qu'avec des choses nouvelles , et l'on ne se soucie pas
plus d'aller voir Cendrilltm et {'Épreuve villageoise eu
ballet, que d'aller entendre à l'Odéon un opéra dont les
Italiens nous ont déjà donné deux cents représenta-
Le sujet de la nouvelle somnambule est simple et inté-
ressant. Le rideau se lève sur un divertissement villageois,
tout le b-allct est en mouvement, on célèbre In noce de
Thérèse et d'Edmond, jeunes paysans. Le comte de Sainl-
Ba m bert arrive accompagné du trompette de son régiment ;
il vient prendre possession d'un château et d'une seigneu-
rie situés à peu de distance du lieu de la scène. Sainl-
Itambert est inconnu ; il adresse quelques propos gala us à
la mariée et à Gertrude; il se plaît à assister aux jeux de la
noce. Le jeune trompette, que le vin a mis en gaité, trahit
l'incognito de son colonel. 11 doit passer la nuit à l'auberpe
de M" Gertrude, qui est éprise d'Edmond ; mais faute de
mieux, celle appétissante veuve rabat ses prétentions sur
le tabellion de l'endroit. Ou danse , nu signe le contrai ;
Edmondremet à Thérèse l'anneau nuptial , et l'acte fmil.
Une scène de rivalité entre Thérèse et Gertrude a donné à
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31 4
H. Hérolil le moyen d'introduire le joli duo du troisième
acte du Maçon*
Au second acle, la scène se passe dans la chambre une
Saint-ltambcrt occupe dans l'auberge; il y est introduit
par la servante, et M"'Gerlrude ne tarde pas à venir dou-
»er ses soins à un hôte aussi recomniandablc. Le seigneur
connaît trop bien les lois de la civilité pour lia pas adresser
nue déclaration vive et tendre à l'aimable aubergiste; il
devient pressant, Ccrlrude se trouble , se laisse enlever un
mouchoir qui flotte sur ses épaules ; lorsqu'on entend du
bruit, ellese sauvedans la pièce voisine. La fenêtre s'ouvre,
et Thérèse, endormie et dans le simple appareil d'une
beauté qui vient de se mettre au lit, parait sur une échelle
avec une lanterne à la main. Saint-Rambert, surpris d'a-
hord de l'arrivée de la jeune fille, est pénétré de respect
quand il la voit se mettre à genoux pour prier et recevoir
la bénédiction nuptiale, lîu lit est dans la chambre , elle
s'y repose :
La faim , l'occasion , l'herbe tendre, cl je pente
Quelque diable aussi ic poussant.
Ne craignez rien, ce diable est combattu parles nobles
sentimeus du colonel; la générosité l'emporte , et le mous*
que la ire fuit pour la première fois le danger; il s'échappe
par la même fenêtre et descend l'échelle que Thérèse a
montée. Un sait que le nouveau seigneur a couché dans
l'auberge ; tout le inonde arrive pour le complimenter, et
l'on trouve , au lieu du colonel , la jeune mariée couchée
sur le lit et dormant du sommeil de l'innocence. Désespoir
du marié et des parens; Thérèse reste confondue; elle
veut se justifier; Edmond, furieux, refuse de l'entendre,
il renonce à sa main et revient àGertrudc. La mère emmène
sa fdle et la couvre d'un fichu qu'elle trouve sur le Ht. Ce
finale est très animé.
An troisième acte , Edmond se prépare à épouser Ger-
trude, quand on lui montre le mouchoir de sa nouvelle
fiancée; celle-ci est forcée de le reconnaître. Mais Edmond
lie se rend pas davantage aux protestations du colonel, aux
prières de la mère de Thérèse; il croit toujours à l'infidé-
□igilized by Google
ai5
lilé prouvée d'une manière si convaincante', lorsque tout
à coup on aperçoit la Somnambule à l'une des mansardes
du moulin; elle arrive sur le toit, sa lampe à la main et
marche sur le bord : tout le monde frémit; clic avance jus-
un instant et se détourne pour aller ik-sccnih-e de l'autre
côté , en suivant les sinuosités d'un vieux mur en ruine.
Elle arrive sur la scène, sa mire lui tend les bras, elle s'y
repose. Edmond reconuait son innocence, lui remet au
dotgt l'anneau nuptial qu'il lui avait enlevé; on la revêt de
ses habita de noce , on la coiffe do sa couronne et de son
voile. Thérèse s'éveille, son désespoir recommence; mais
il est bientôt calmé par les tendres soins de son fiancé ;
la noce s'achève gâtaient, et Gertrude épouse le notaire.
Ce petit drame intéresse constamment, et la perfection
des danses qui composent le divertissement du premier
acte en abrège en quelque sorte la durée. Il"' Moatessu et
Ferdinand, chargés des rôles de Thérèse et d'Edmond, les
on! joues admirablement. M11' lïrocard est charmante sons
le costume du petit trompette. W Légal lois est trop jolie
pour être dédaignée, c'est un inconvénient dont personne
ne se lâchera. Monljoic a du la grâce cl de la noblesse dan*
le rôle du colonel. M.*" Notilct, Athalic se sont distinguées
dans les pas du premier acte; Albert et Paul ont fait assaut
de talent. La scène du toit a produit un eue! qu'il serait
dillicile de décrire; elle aurait assuré le succès de la pièce
s'il avait été un instant douteux. Le plan de M. Scribe, les
danses de M. Aumer, la musique de M. Ilérotd, les décors
de M, Ciccri,tous ces attraits réunis forment un ensemble
délicieux et promettent cent représentations à la Sont-
M. Ilérold a composé la plus grande partie de la mu-
sique de ce ballet. On distingue, parmi les morceaux qu'il
a empruntés à divers musiciens, le duo du Maçon, chanté
par H—Rîgaut et Boulanger; un fragment du grand <!m>
'V Avniida de Ilussîui , quelques jolies phrases d'Elïm e
l,'laitdiii,\e nocturne si coumiDoi'incz, mes cIici-l's aiiioui:-:,
traité avec beaucoup d'adresse et de talent, et qui d'abord
3)6
commencé par les cors à [vois temps , tel qu'il est écrit t
continue à marcher sur le deux-quatre attaqué par tout
l'orchestré pour l'a eli ou deRosapibert. Quelques mesures
dusextuordo CeïicreiKofoannotieent les entrées dclaSom-
nnmlmlc; j'attendais que cemotif si iiien placé en situation
fût développé dans le courant du ballet; j'ai été trompé
dans mon attente. Peut-être les exigences du maître de
ballets ont-elles restreint les projets du musicien ? Quel-
ques personnes trouvent que les clfets d'orchestre sont
irop broyons ; cela peut être vrai, mais aujourd'hui il faut
donner aux ouvrages la couleur prononcée que l'on re-
marque daus les partitions modernes. La partie drama-
tique est bien traitée; les airs île danse reproduisent Irop
souvent la mesure de sis-huit , et les jeux d'orclieslre ros-
siuiens. On aurait pu introduire dans ce ballet plusieurs
airs provençaux d'un elle! original et d'une é t range lé pi-
quante , ils auraient servi à préciser le caractère d'une
musique agréable , mais qui n'appartient pas plus à. lu
Provence qu'à lu Bretagne, ou à la Suisse.
V C. F.
ANNONCES.
Gorghe.ggi e Solfeggi, Vocalises et Solfèges, pour ren-
dre la voix agile et apprendre à chanter selon le goût mo-
derne , par Hossini 6 »
— Trois duos pour deux clarinettes, par Beuder,
op. 5 , . . 9 »
— Trois quintetli pour flûte, hautbois, clarinette,
cor et basson , par Brod, i" , 2' et 3* livr., chaque. . 7 5o
— Mélange facile sur les airs de ta Dame du Lac,
par Adam '. . 4 Co
— Le Lac, stances de Lamartine, mises en mu-
sique par Riedermayer 3 1
Au magasin de Puciui , éditeur des œuvres de Rossiui ,
Mozart, Beethoven, etc. , boulevard Italien, n" 11.
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EXI'OSITIO\ DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
CLARINETTE DE M. JANSSEN,
BASSON A QUINZE CLEFS DE M. Al) 1,1", II.
Parmi les instrumens à anche, la clarinette est un des
plus modernes. Jean-Christophe Dernier, célèbre lui hier
de Nuremberg, en fut l'inventeur, en ifigo. Elle n'eut d'a-
bord qu'une seule clef et ne fut que d'un usage fort rare, à
cause tic ses nombreuses imperfections. Mais la beauté de
ses sons détermina quelques arlistes à chercher des amé-
liorations dans sa construction. Insensiblement le nombre
de ses clefs s'accrut jusqu'à cinq; mais arrivée même à ce
■point, elle offrait encore peu île ressources. On peut voir
dans le Diapason des instrumens à ve-itt, publié par
F rancœur, en 177a, l'état auquel la clarinette était réduite,
elles difficultés que rencontrait le musicien qui voulait
écrire pour cet instrument.
C'est cependant sur ce même instrument que Sliuhet
Yost, plus connu sous son prénom de- Michel, acquit une
grande réputation, et parvint au plus haut degré d'habileté,
vers 1780. Son élevé, M. Xavier Lcfebvre, qui a formé
tous les clarinettistes que la France, possède aujourd'hui,
ajouta la sixième clef île soi dièze à la clarinette, ce qui
lui donnait quatorze trous, dont sis se bouchaient avec
des clefs. La beauté des sons que cet artiste lirait de son
instrument, et les difficultés qu'il parvenait à exécuter,
ont fait croire long-temps que ce même instrument avait
atteint la perfection ; mais M. Lcfebvre ne se faisait point
illusion ; car, dans la méthode qu'il a composée pour l'u-
sage du Conservatoire, il a été forcé de donner une longue
liste des trilles qui sont inexécutables sur la clarinette à six
clefs, -la seule qu'on connût en France. Néanmoins, telle
est la force do l'habitude, que jamais il ne voulut adopter
2' VOL. .0
!tl8
lus innovations on améliorations qui avaient jn is naîssanc
à l'étranger, et qui lui semblaient changer la nature de
l'instrument.
Ses élèves avaiont hérité de ses préjugés; car lorsque
M.IwanMullersonmitàre:iamendiiConservatoire[eni8i4)
une nouvelle clarinette à treize clefs, dans laquelle ilavait
réuni des améliorations déjà connues en Allemagne^ d'au-
tres qui lui étaient propres, plusieurs d'entre eux ayant élé
adjoints à leur maître, et à d'autres membres du Conser-
vatoire, ces messieurs décidèrent : 1 1' Qu'avec cet inslru-
t ment on peu! jouer dans tous les tons, tant qu'on neren-
■ contre pas île pansages dont l'exécution soit diflîcullueuse;
■ mais que quand onvenl faire des gammes diatoniques ,
«soit en montant, soit en descendant, elles ne peuvent
« s'exécuter ni avec justesse, ni avec vitesse ; a ' que ladiffé-
« rence de timbre des clarinettes en différons tons offre des
• moyens d'effet, dont les compositeurs seraient privés, si la
«nouvelle clarinette tic M. Mullcr était adoptée, etc., etc.»
Après lousceft>eauxraisou.nemcns, qui n'étaient dictés que
par la paresse et le préjugé, il a fallu adopter cette même
clarinette, qu'on dédaignait parce qu'il fallait l'étudier. Dans
le fait, au moyen <les nouvelles dispositions de M. Iwan
Millier, de ses clefs et de la position de ses Irons, la clari-
nette était devenue juste dans toute sou étendue, et avait
acquis une égalité cle son qu'elle n'avait point auparavant.
Ces prétendues difficultés d'exécution qu'on lui-opposait
n'étaient autrechoseqiicl'incxpértence'de ceux qui s'y es-
sayaienl. Avec le temps, on s'est familiarisé avec le nouveau
mécanisme, cause innocente de tant d'effroi, a rougi
des juyemens précipités qu'on avait portés. Cette marche est
Néanmoins, malgré' ces améliorations incontestables, tout
n'était |),is t'ait, car la clarinette restait coupée en trois en ■
droits, c'est-à-dire que le passage de la partie qu'on nomme
chalumeau à celle qu'on appelle clarinette était partagé
parles clefs de la à si, de si but dièse, etdewf à mi h. 11 en
résulte que certains passades ne peuvent se faire, parce qu'il
faut •pic le même doigt débouche à la fois un trnu et en
H- 1
bouche mi autre, ce qui est à peu près impossible. SI. Jans-
stn, arlislc do l'Opéra-Coniiquc, imagina, pour obvier à cet
inconvénient, de garnir ces clefs de rouleaux mobiles, au
moyen (le quoi l'on peut glisser facilement le doigt d'une
clef à l'autre, et lui éviter le saul qu'il était obligé de faire :
par là, tout devient facile, elle jeu de la clarinette peut être
lié dans toutes les parties. 11 est vrai que ces rouleaux pré-
sentent un inconvénient au premier abord, celui d'uue
trop grande mobilité qui , dans une tenue, peut exposer le
doigt à glisser, cl il laisser échapper la noie ; mais la prati-
que enseigne à donner à ces rouleaux la fixité convenable.
Lesavantages de cette innovation sont si généralement re-
connus maintenant, que les meilleurs artistes en font
usage, et que les rouleaux s'adaptent aux clefs du basson,
et même à celles de la llûte.
Il nie reste Line objection ;i fairu à M. Jausseu. Il insiste
sur la nécessité de pouvoir couler partout des clefs au*
clefs, et des trous aux clef», .le ne puis partager sou avis sur
ce dernier point ; car, si l'on coule il' nue clef à l'autre, les
trous se bouchent et se débouchent avec rapidité comme
si l'on coule des trous aux clefs, le doigt, en glissant sur le
li on, débouche inégalement, et peut nuire à la netteté du
son. Au reste, ceci n'est qu'une conjecture que je livre à
Le basson , qui fut inventé eu 1 53$ par un chanoine du
Pavie, nommé Aframo, peut être considéré comme lit
basse du hautbois. On a vu dans la Reçue musicale ( 1. 1 ,
ii* 1 1, p. a?5 ) quelles lurent , dansle dit-septième siècle ,
les variétés de cet instrument : depuis long-temps, on ne
se sert plus que du basson à sept clefs, particulièrement
en France. En Allemagne, ou avait adopté neuf et dix clefs
depuis plusieurs années.
Dans l'état ordinaire de sa construction, le basson est
un instrument fort imparfait; plusieurs de ses notes sont
sourdes et d'une mauvaise qualité de son ; il manque gé-
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aao
néralemenl de justesse, et les embarras de sou doigté
s'opposent à l'exécution d'une foule de traits qu'il est
difficile d'éviter. Par exemple , le passage de fa $ à sot§,
dans tin mouvement rapide, est à peu près impossible, parce
que le même doigt sert pour les deux notes. La méthode
de basson d'Ozi contient une liste de ces passages impra-
ticables, qui remplit deux pages in-folio. Depuis long-
temps on sentait la nécessité d'obvier a ecs nombreux in-
convéniens, en reconstruisant l'instrument sur de meil-
leurs principes acoustiques; les compositeurs désiraient
surtuul vivement ces améliorations; niais la paresse des
luthiers, d'accord peut-être avec celle des exéctilaus, avait
trompé des vieux si légitimes , quand , en M. Almcil-
raeder, virtuose allemand sur le basson, entreprit de ré-
former complètement son instrument, et de !e reconstruire
sur de meilleurs principes. Déjà MM. Grenzer, luthiers
renommés de Dresde, avaient lait des améliorations sen-
sibles dans quelques parties ; mais i!s n'avaient point at-
teint complètement le but. H. Almonracder fit de nom-
breux essais dans les ateliers de MM. Scholt, à Mayenee.
et, à force de persévérance, parvint enfin à combiner
toutes les pai lies du basson, de manière à obtenir la plus
grande justesse possible, et à faciliter l'exécution des pas-
sages qu'on avait regardé jusqu'ici connue impossibles
Afin de rendre son invention plus utile, il a fait imprimer,
en 1824 ,ln Iictii ouvrage qui a pour titre : Traité sur le
■perfectionnement dit basson*, et dans lequel il a donné,
outre la figure de sou instrument, et le tableau de sou
étendue en tablature, des détails précieux sur lu doigté
■ li s passages il iilieilrs . lesquels, ont. cessé d'opposer îles
obstacles aux exéeulaus. depuis ces peri'ectionncmcns.
Le basson de M. Àlmenraeder est armé de quinze clefs.
Celle qui sert à donner Ies^<(# et les re }> avait déjà été #
imaginée par MM. Grenzer; mais elle était défectueuse
par la place qu'elle occupait . attendu qu'on était obligé
de la jouer avec le petit doigt. M. Almenraeder, eu la pla-
çant de manière qu'elle pût être dirigée par le pouce, l'a
rendue beaucoup plus utile et plus facile à jouer.
(1) Mavcncu, ScfaoltEl*.
«
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Le déplacement du troisième trou delà pièce inférieure:
et fiit combinaison a vécues clefs, a donné le moyen défaire,
en sons purs, le passage du ta inférieur à son octave. De
nouvelles clefs placées sur telle pièce facilitent le trille
de ta avec si]), et le passage de fa ff à sot ft, ou de sol $
Une autre clef, placée sur la pièce longue du milieu ,
donne Vut $ en bas, qui n'existe point dans les bassons
ordinaires. Lie nouvelles combinaisons donnent également
le si ^ en bas , qui manque aussi dans les anciens bassons.
Enfin la sonorité et la justesse sont devenues, par ces
changemens, et par d'autres améliorations, lé partage d'un
instrument naguère inégal, sourd et faux.
A l'égard du doigté de tous les traits difficiles, M. Almen-
raeder l'a indiqué avec tant de soin, que les artistes ne
tarderont pas à se familiariser avec le nouvel instrument.
La complication des moyens d'exécution pourra intimider
d'abord les exécutans, qu'une longue pratique aura ac-
coutumés aux anciens bassons ; mais un travail de six
mois les familiarisera avec les innovations de M. Almen-
raeder, et, lorsqu'ils auront vaincu les premières difficul-
tés, ils en sentiront, si bien les avantages, qu'ils abandon-
neront leurs mauvais instruirons, pour adopter celui qu'on
leur présente.
H. Adler, luthier très reçommaudabledeParis, a reconnu
les avantages de celui-ci, cl en a fabriqué, d'après son
modèle, qui ont été essayés par quelques-uns de nos artistes
les plus habiles , et approuvés par eux. Les instrumens de
M. Adler se distinguent ordinairement par un fini précieux
dans toutes leurs parties. Le basson à quinze clefs, qu'il a
mis à l'exposition des produits de l'industrie, peut être
considéré comme un chef-d'œuvre sous ce rapport.
Si la difficulté de changer presque entièrement le doigté
du basson peut empêcher les artistes qui ont une longue
pratique d'adopter d'abord celui de M. Adler, on doit
espérer du moins qu'ils le mettront entre les mains de
leurs élèves , qui n'ont pas à vaincre une habitude acquise.
Déjà M. Gebauer. professeur <k> basson à l'Ecole royale de
musique, s'est prononcé à cet egani, et a reconnu 1j né-
cessité de se servir du nouvel instrument dan» «a classe;
on peut donc espérer que, dans peud'années,un instrument
si supérieur à l'ancien basson lui sera substitué dans les
orchestres, et qu'^n atteindra dans l'exécution une justesse
et une égalité de sou désirée depuis si long- temps.
Les autre» instrumens à vent dont je n'ai point parlé,
et qu'on remarque à l'exposition des produits de l'indus-
trie , m'ont paru avoir reçu aussi des améliorations et des
perfectionnemens.
Il y a loin de la flûte à une seule clef, dont se servaient
Uugot et ses contemporains, à ces belles flûtes armées d'un
grand nombre de ces utiles auxiliaires, qui sortent main-
tenant des mains de uos luthiers. Ce nombre fut d'abord
porté à trois , et l'on crut avoir atteint la perfection ; mais,
plus tard, M. Tromlitz, de Lcipsick', enrichit la flûte du
plusieurs clefs, dont l 'effet était de donner des sous plus
purs, et un trille meilleur sur plusieurs notes. M. Droucl .
habile flûtiste de l'école française, adopta en partie ces
clefs, fit quelques changemens dans leurs dispositions , et
en fit fabriquer, d'après ses principes, a Caris et à Londres.
L'étendue ordinaire de la' flûte a été long-temps renfer-
mée entre le re, au-dessus de la portée , à la clef de sol ,
jusqu'au si \f sur-aigu. Insensiblement ou a voulu àvuir
des notes plus graves; il a dou^f'alhi augmenter la lon-
gueur du tube , et dès lors avoir recours aux clefs pour
ouvrir des trous auxquels les doigts ne pouvaient atteindre.
En général, on se borne en France aux flûtes qui descen-
dent à ut ; mais, a Vienne , ou en a qui vont jusqu'au la
grave, et M. Treiler, luthier de cette capitale, en a même
l'ait qui descendent au soi, et qui sont armées de dix-sept
clefs. Mais comme la longueur d'un pareil instrument au-
rait été incommode, il en a recourbé là partie inférieure.
Il donne le nom de panauton à cette espèce de flûte.
Dans l'usage ordinaire, il me semble à peu près inutile
d'avoir des flûtes qui descendent a dessous si graves ; mais
peut-être qu'eu cherchant à perfectionner cette idée, ou
parviendrait à avoir un. système complet de ilûles doul ou
pourrait tirer des effets nouveaux dans la musique. Alors,
au lieu de s'arrêter au sot, comme (tans le r.uiauloii, on
descendrait à X'ut du tuyau do quatre pieds, au moyen de
la courbure; on débarrasserait cet instrument grave des
rlefs qui n'ont pour objet q ne de faire iilre avec justesse
et nettelé certaines notes, et certains trilles dans la partie
aiguë, et l'on aurait un quatuor complet de flûte, ou même
un quintetto, en y joignant le piccoto flauto.
,1e n'ai point remarque à l'exposition qu'aucun luthier
eût adopté un perfectionnement inventé par M. Petersen,
de Hanovre, qui me paraît 1res utile ; on sait que l'intona-
tion de la flûte est 1res variable par les impressions de
l'air ; c'est ce qui a fait imaginer (a pompe d'allongement
qui est placée dans la partie supérieure de l'instrument.
Mais outre celte impression générale, l'intonation de la
flûte varie encore par les effets du crescendo et du decres-
cendo; quelle que suit l'habileté de l'exécutant, il ne peut
empêcher une légère perturbation dans la justesse. Pour
obvier à cet inconvénient, M. Petersen a imaginé une es-
pèce de, petite manivelle, ou pluté-1 une mollette, qui peut
i lie mise facilement en mouvement par le pouce de la
main gauche, et qui élève ou abaisse à volonté l'intonation
de la note d'un huitième de ton.
On remarque à l'exposition un instrument nouveau de
ta famille du hautbois, lequel a été construit par les conseils
et sons la direction de 31. limd, l'un de nus artistes les plus
distingués. Cet instrument est le tenore du hautbois. On
sait que le cor anglais eu est l'alto, puisqu'il sonne précisé-
ment une quinte au-dessous des notes de la elef dc.taf or-
dinaire. Le tenore de hautbois complète le système, et l'on
pourra avoir désormais, avec le basson et le contre- basson,
des quiutetlis, et même des sextuors de ces iiistrumens du'
même genre. Je n'ai point entendu le tenore de hautbois ;
mais je suis persuadé qu'il ne laisse rien à désirer, puisque
M. lirod y a donné ses soins.
Ce que j'ai dit clans celte Revue des divers perfection-
nenieus apportés dans le système général des insl rumens ù
vent, sullit pour faire voir que celle partie essentielle de la
musique est près d'atteindre la perfection, cl que désor-
mais l'on n'aura plus à craindre, dans les beaux effets qu'on
peut tirer de ces instrumens, les taches qui les déparaient
toujours. Avec plus de facilité d'exécution, l'art de produire
ces effets étendra sou domaine, et cette considération n'est
pas à dédaigner dans un temps où les idées simples et na-
turelles sont si difficiles à produire, qu'il ne reste guère
que la ressource des effets et des arrangemens.
FETIS.
■" GÉNÉRATION MÉLODIQUE,
FORMATION NATURELLE DE LA GAMME CHROMATIQUE,
1,'hartuoiiic du mode majeur trouvée dans la corde cy-
lindrique tendue est constituée par trois sons, dont les
vibrations sont , en un temps donné - dans les rapports l -
nombres i, S, 5. Lo son 1 (ou à uoe vibration ) ayant pour
octave aiguë le son a, on voit que [iuur placer entre cps
deux sons les sons 3 et 5, il faut en prendre les oclaves
graves | et J , en sorte que le type du mode majeur devient
i, i, en répétant le son i à l'aigu, et en plaçant les
sons dans l'ordre de leurs rapports.
Do même l'harmonie du mode mineur, trouvée dans
ic cylindre isole, est constituée par trois sons dont les vi-
brations sont, eu un temps donné, dans les rapports in-
verses 1, 3, et on voit que pour placer les sons j cl j
entre les deux octaves i et a , il faut en prendre les octaves
aiguës § et Le type du mode mineur devient donc alors
■•*.§.«■-
(ij Les diinomi
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32 3
lies deux types réunis forment une première gamme i ,
|, |, 2, dont ton» les termes sont consonnans rela-
tivement au son fondamental 1.
Si l'on observe que les sons I, i, dtftypc mnjoitr
peuvent être intervertis sans (uni le caractère de l'har-
monie soit changé , on pourra les placer dans Tordre s ,
3, a et l, a, £, et on pourra supposer aussi que le son £ de
la première inversion, et celui 4 de la deuxième, devien-
nent tour à tour le son i; alors.cn cITet, en multipliant
■chacun des lermes du second type majeur * , § , a , par la
fraction g , il se change en i, | , § , et en multipliant les
termes f , a, £ ifn troisième type par f . il se change en j,
*, :'. >"ous aurons donc acquis des sous nouveaux , savoir :
ï et 2 qui, intercalés dans notre) première gamme, pro-
duiront au deuxième type, sous la forme 1,3, £, |,| ,
|', 2 , où tous les termes sont consonuans avec le son fon-
damental 1.
Nous n'avons pas besoin de faire ta même opération sur
le. type mineur qui a aussi ses deux autres inversions , elle
nous donnerait les mêmes résultats ; nous nous bornerons
à f:iire observer que les sons 5, ~ .... i, 5, ^. , . . et leurs
octaves sent des consonuances du premier ordre relative-
ment au son fondamental 1; que les sons 5, |, 5, *,
g .... et leurs octaves sont des conson minces du second
ordre; et qu'enfin les consonnances du troisième ordre
sont celles que forment les sons !j, f. . .. et leurs
octaves.
Si l'on examine la série, gamme, où le type i, S, jj, *,
1, f , 3, a, on trouvera que les intervalles | et ^ , de même
que ceux f et jj, diffèrent entre eux du facteur commun ^:
que les intervalles 2 et * , de même que cens ; et | , dif-
fèrent aussi d'un facteur commun ; que par conséquent;
les intervalles de jj à £ et de § à jj diffèrent entre eux du
même facteur -£=J| X ±$; que les intervalles f et | dif-
méme lun donné. Il ciU élù a désirer que le» Italien», noi premiers
mailles, leur cmsonl donné des noms plus caractéristiques, tels ijiik
allegro et meito, Allegro , appliqué au niouicmeril, est une yiul.liii^iiuu
iusuflieanlc tt inciactc.
a* vox. 20
ligitizGdùy Google
21i6
fèrent du facteur §, plus grand quo du y^. On remar-
quera enfin que les sons 1 et | diffèrent ainsi que ceux %
et a du même facleur 5 , qui est presque égal à f| x -rf
+ îT = î^l^ï7> car7T ne diffère de | que de
On voit, par suite de ces observations, que le plus grand
facteur de chacun des ternies consécutifs de la série des
sons est , et le plus petit que , par conséquent, il
faudra intercaler entre f et 4 un sou moyen proportionnel
géométrique égal à -^r , un peu plus grand cependant que
■> x 4| = jji mais de très peu de chose ; qu'entre i et 5 ,
faudra intercaler deux sons, l'un S, qui est la consou-
nance du premier ordre |, de la première eonsonnance l,
du sou fondamental 1; et l'autre 7-5, qui est la coiisonnance
du premier ordre |, de la consonuanee du deuxième or-
dre du môme sou 1 ; que de méinc, enfin, entre ^ et 2,
il faudra intercaler deux sons, l'un X et l'autre
* ^ = ; x 4! et par conséquent résultant des combinaisons
de deux consonnanecs.
La gamme chromatique se trouvera donc composée des
t reize sonssuivans, en répétant le son fondamental à l'aigu
Savoir : 1, |, 5, £, f , l, g , }£\ V' a>
dont les intervalles sont sensiblement égaux entre eus, et
où les seuls termes jf, h "T1' ~T> xi sonl'<ussona!ls relative-
ment au son fondamental.
On sent que la dissonance la moins dure est l'inter-
valle jj-, ou son inverse parce qu'il est le produit de
deux coiisonnances du premier ordre, et que la plus forte
est celle exprimée par le rapport incommensurable -p.
On sait que l'on a donné des noms particuliers à plu-
sieurs des sous de cette gamme , savoir a ceux
1, s, ï, h 3, |, Vs =>•
ci ut, ré, mi, fa, sol, ia, si, ut,
qui forment ce qu'on appelle la gamme diatonique du
mode majeur, malheureusement les autres n'ont reçu que
des noms dérivés des précédons, et qui sont alternative-
ment affectés d'un dièse ou d'un bémol , suivant qu'on les
a considérés comme immédiatement pins aigus ou plus
DigitizGd t>y Google
graves que celui don! ils conservent le nom . C'est donc ainsi
qu'on désigne les intervalles. . . 44» i* r» |i ^>
par les nom» des notes j M( f ' ref > fa% Ht H>
I «j,, nw|* sol\,, tafc si},.
Il eût été bien plus simple et préférable de désigner tons
ces sons par le rang qu'ils occupent dans l'ordre de numé-
ration , en donnant à la note de départ ou fondamentale ,
le nom o , ou i s. Ainsi l'on aurait écrit et dit pour chacun
des sons de la gamme :
ci. . . o, 3,3,4,5,6, 7,8,9,10,-11, |
en substituant â volonté o à n,et isào, comme octaves
l'un de l'autre'.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL DE L'OPÉRA -COMIQUE.
®ttxà\ttt rc^mcnfdtion b'unc ffîmt ht (SitsfitM £ffris<t,
OPÉHi- COMIQUE EN DEUX *CTI8,
PAROLES DE M"", MUSIQUE DE M. G AS SE.
Si je ne me trompe, la France est le seul pays où une
pièce de théâtre n'est quelquefois représentée que douze ,
quinze ou vingt aus après qu'elle a été composée et reçue.
Partout un iibretto d'opéra est mis en musique dès qu'il
est écrit, et joué aussitôt que le musicien a terminé sou
travail. Cette méthode est fort bonne ; car le goût du pu-
blic est variable ; c'est dans ce sens qu'on peut dire que ce
qui est bon un jour cesse de l'être dix ans après.
(i) Nous croyom deioir saisir cette occasion de déclarer qu'ayant ci a-
miné avec soin les calcula de M. Blein sur let rêsonnances graves , pro-
duites par deux sons donné», nous ca atons reconnu l'exactitude, et que
Ions nos doutes ont etc dissipes.
i Note do ridacttur. )
aî8
En effet, que ferait un musicien de la nouvelle école
d'un poème de Métastase, quel qu'en soil le mériie, n'y
trouvant ni finali, ni morceaux d'ensemble , ui Trios , ni
airs coupés pour trois mouvemens? que deviendrait au-
jourd'hui un de ces imbroglio mis en musique par Cima-
rosa, Pàisiello ou Guglielmi? Assurément personne ne
songerait en Italie â les exhumer pour les mettre à là
scène , y en cùt-il par milliers d'inédite.
Le peuple français, qu'on accuse d'être le plus incon-
stant de tous les peuples, est celui qui tient le plus a ses
habitudes, à ses goûts, et qui se monlre le moins avide
d'innovations. Son premier mouvement est de rejeter ce
qu'il ne connaît pas; mais enfin, il finit par suivre la roule
qu'on lui a tracée, et par trouver beau ce qui lui déplai-
sait d'abord; en sorte que tôt ou lard il modifie plus ou
moins ses opinions, et quelquefois finit pareil changer
complètement.
Ajoutez à cela que souvent un ouvrage est écrit pour
telle ou telle circonstance dont l'influence doit lui être
plus ou moins avantageuse. Si on laisse échapper le mo-
ment favorable, il n'y a plus de chances de succès. Par
exemple, l'opéra- comique qui a pour litre ; Vne- Nuit dû
Gustave JVasa, et qui , comme on l'a dit assoit plaisam-
ment, a passé une. mauvaise nuit samedi ag septembre;
cet opéra , dis-je, fut écrit en i8 1 5 pour une des circon-
stances de l'époqtie. Au lieu de Gustave Wasa , le héros de
la pièce était Henri IV. L'enthousiasme que les Français
montraient alors pour ce roi du peuple aurait peul-èlre
sauvé la pièce, qui n'est pas bonne, sans doute, mais qui
aurait trouvé son excuse dans son motif. Il n'est pas donné
à tout le monde de faire des pièces de circonstance telle que
Itî Héritiers Michaut (de M.. Planard], et le public se
monlre d'ordinaire assez indulgent pour ces sortes de
bludles. Par quelque circonstance, qu'on ne dit pas, ta
Nuit d'Henri IV ne fut pas jouée; une foule d'autres
pièces sur le même personnage se produisit sur la scène,
cl force fut de transformer le Béarnais en libérateur de l;i
Suède. Celle métamorphose n'a point été heureuse. Lepu-
Digitizod b/ Google
blic. qui n'avait point à l'aire preuve do patriotisme, a
nilllé le héros du Nord et ses acolytes. Examinons si c'est-
U tort.
On connaît l'histoire de Gustave , qui , s'echappant des
mains de Christiern, qui le retenait dans les fers, se retira
dans la Dalécarlie, dont il souleva les hahilans, finit par
.ilTranchir son pays du joug îles Danois, et fut placé sur le.
trône parses compatriotes. Dans la pièce nouvelle, Gustave
est déjà roi de Suède. La scène se passe non loin des camps
suédois et danois, sur les bords d'une rivière,' et près de
l'endroit où se trouve un bac, qui sert à passer d'une rive
à l'autre. Au lever du rideau; des pécheurs sont assis et oc-
cupés à raccommoder leurs filets. L'approche d'un orage
les force à chercher un abri ; un seul reste, retenu par l'a-
mour et le devoir : c'est Éric, le passeur, amant de Marie
Miller, dont il est aimé , mais que la mère de Marie lui
refuse, parce qu'il n'a rien, et qu'elle lui préfère le maître
d'école du village, M. Soltmann. Le temps où Eric peut
voireamailresse est ordinairement celui où il lui fait passser
l'eau. Il sait qu'elle est allée au marché de la ville voisine,
vendre des Heurs et du lait ; il l'attend , et l'orage Je plus
violent tic peut lui faire quitter sou posle. Marie arrive;
elle est effrayée de la rencontre qu'elle a faite de soldats
danois, qui lui ont pris ses fleurs. et son lait. Elle veut
passer la rivière, niais l'orage la force de s'arrêter. Enfin
lo calme reparait, et le bac transporte sur l'autre rive Eric
et sa compagne.
Un soldat parait , c'est Gustave, Il est poursuivi par les
Danois qui l'ont reconnu. 11 voudrait traverser la rivière,
mais le batcaù est de l'autre côté. Il sonne du cor, Eric re-
vient! Au moment où Gustave va monter sur le bateau, lo
batelier lui demande' un scheling pour prix du passage ; lo
roi s'aperçoit, en voulant le payer, qu'il a oublié sa bourse
en changeant d'habit ; il propose au jeuue homme de lui
faire un billet payable au camp de Gustave. Éric refuse
d'abord et finit par céder ; il reçoit le billet et son garçon
conduit le bateau sur l'autre bord. Éric voudrait savoir ce
qui est écrit sur le billet du soldat; mais il ne sait pas lire.
a3o
l'ti officier et îles soldais danois se présentent. Ils pour-
suivent Gustave, et interrogent Éric, qui répond n'avoir
vu qu'un soldat suédois, lequel est maintenant sur l'autre
rive. Il ajoute que ce soldat, ne pouvant le payer, lui a
donné un billet dont il ne sait pas le contenu. L'ollîcier
prend le papier, qui est Un bon de cent rixdales d'or, signé
Gustave. A ce nom, les Danois veulent passer à Tâutre
bord ; mais Éric, dévoué à ta cause des Suédois et de Gus-
tave, leur résiste et tâche , par ses signes, d'empêcher son
compagnon de ramener la barque. Les Danois le font pri-
sonnier, et vont passer ailleurs la rivière.
Cette scène, qui termine le premier acte, produit quel-
que effet, mais ne porte pas moins à faux. Tout ce qui
l'amène est déraisonnable. Comment supposer qu'Éric re-
fuse le passage à un soldat, dont il peut craindre la colère;
que ce soldat veuille récompenser sa cupidité par un don
magnifique, et surtout que ce soldat, qui n'est autre que
Gustave, et qui a tant d'intérêt à cacher son nom, le révèle
indiscrètement au premier venu dans un billet, qui peut
tomber entre les mains de ses ennemis. Tous ces ressorts
sont bien forcés. Il est vrai qu'on voit beaucoup de choses
semblables dans les opéras-comiques; mais ceux qui se
soutiennent rachètent ces défauts par l'amusement qu'ils
procurent au public , ce qui n'a pas lieu dans uneNuitde
Gustave JVasa.
Le second acte est plus faible que le premier. Use passe
au moulin de Miller. Les premières scènes, qui ont lieu entre
Marie, Catherine sa mère, et Miller son frère, sont insigni-
fiantes. Gustave, toujours déguisé en soldat, arrive conduit
par Sotmann, le maître d'école. Il est bien reçu pat Mil-
ler, sa mère et sa sœur. Gustave, qui se dit porteur d'ordres
du roi, demande un guide ; Miller se dispose à aller chercher
Éric, lorsque celui-ci, qui s'est échappé des mains des Da-
nois, arrive, reconnaît Gustave et le presse de partir. Il n'est
plus temps; les Danois arrivent; le roi n'a que le temps de
se cacher dans une chambre voisine, et Éric saute par une
fenêtre pour aller chercher les Suédois, qu'il a rencontré
près du village. L'officier danois demande à souper, et dé-
Di-gitizod by Google
*3l
signe pour su chambre celle où Gustave est enfermé. Miller
cherché à gagner du temps; mais Solmann, dont la maison
-vient d'être envahie par les Danois, vient (on rt Osait pour-
quoi) demander où est le soldat qui l'a amené; Miller lui
fait des signes qu'il ne comprend pus ; l'ollitier veut sa-
voir de quoi il est question, et ce qu'il y a dans la chambre
voisine ; .11 i lier prend s un mousquet pour en défendre l'en-
trée ; Gustave vient se ranger près de lui. l'épée à la main,
prêta vendre chèrement sa vie; mais Éric survient accom-
pagné des soldats suédois. Les Danois sont faits prison-
niers, et le roi uni! Éric et Marie.
Celle lin n'est pas ce qu'il y a de plus mauvais dans la
pièce: niais le publie s'y est veillé de l'ennui qu'il avait
éprouvé en écoutant la pièce jusqu'au boni, et le rideau
s'est baissé au bruit discordant de nombreux sifflets. Les
À l'exception d'un pelit nombre île situations, cette
pièce n'est point favorable à la musique. Nicolo Isouard,
qui eu avait élé chargé primitivement, avait jeté sur le
papier quelques idées, cl avait écrit tout le ebecur de la
fin du premier aclc. Ce chœur est bien, quoique un peu
trop bruyant. Le reste de la musique a été composé par
M. Casse. Plusieurs morceaux se ressentent de la fafblesso
du poème. Cependant on trouve au premier aclc un duo
entre Eric et Marie qui a de la grâce, et surtout nu quhi-
tÊtle, au second acte, qui est le meilleur morceau de la
pièce. Lu rûle de .Miller avait élé écrit pour un bariton, et
Tïlly s'en était chargé ; mais cet acteur étant tombé ma-
lade. Féréol a en la complaisance de le remplacer. Sa voix
étant un ténore, il n'a pu chanter un air qui avait été écrit
pour Tilljr, et il a fallu remplacer cet air par dcs'conplets.
Cela est fâcheux, car on assure que l'air supprimé était
fort bien.
En résumé, cet ouvrage ne peut aller loin; mais comme
stances qu'aux auteurs. Ceux-ci n'ont eu d'autre tort que
île vouloir faire un ouvrage de répertoire de ce qui ne
devait être considéré que comme une bluette du moment.
Digitizcd by Google
La- première représentation d'Une Nuit de Gustave-
Waaa a élë précédée de VOpèra ctrmiq-ue, petit ouvrage
dont lit musique est assez faible et inférieure à celle du
Vrisonnier, opéra du même auteur1. Mais que ne peut hs
talent de chanteurs tels que Po richard et 51" Rigaut ! Les
chansons, les romances, les petits riens de cet opèra-vau-
devitle ont été exécutés avec tant de perfection par ces
deux artistes distingués, qu'ils ont fait quelque chose de
1res agréable de ce qui n'est rien en lui-même, et qu'ils,
«lit arraché des applaudissement réitérés à des spectateurs
impatiens d'entendre lu nouveauté qui les avaient attirés.
On a beau dire, ce siècle est celui de la musique, même
au théâtre Feydeau. Du chant avant tout.
...... FÉTIS.
— On parle d'un projet de réunion entre le Théâtre-
Italien et le Théâtre-Anglais, sous la direction de M. Lau-
rent. Ce projet parait être la suite de la conviction que
l'autorité supérieure a acquise de l'impossibilité de sou-
tenir seul ce théâtre italien , qui naguère était si florissant.
Et qu'on ne croie pas que l'administration suit coupable
de l'état de langueur où se trouve maintenant le spectacle
qui éNjit jadis l'objet des prédilections delà bonne société :
la force des choses a amené cette langueur. Le génie de
Rossini pouvait seul le soutenir; m:iîs il se repose, ou se
consacre à une autre scène. Ce qui a fait sa gloire et sa
rénommée européenne semble lui être devenu indifférent,
et le dolec far niente est maintenant sa passion domi-
nante. Quant aux compositeurs qui fournissent aujoui-
d'hut les théâtres de l'Italie, ce sont eu général des hommes
si médiocres qu'on ne peut rien espérer d'eux pour le
Théâtre-Italien de Pavis, car nous sommes plus difficiles
en fait de plaisir que les hahitans des principales villes
d'Italie. Ils sunt contraints de se contenter de ce qu'ils ont;
mais noiis avons le choix, et nous prenons ce qui nous-
amuse. Nous l'avons répété plusieurs fois, et cette vérité
parait étrj sentie , c'en est fait du répertuire italien , jus-
L' : J I :l'"J 111:
qii'à ce qu'un homme de génie, encore inconnu, vienne
lui rendre sou lustre.
Renie le personnel ; mais pour le renouveler, il faudrait
•urifior des sommes énormes, dont la rentrée serait forl
incertaine; et même quelque effort qu'on voulût faire, il
n'est pas bien certain qu'on pût obtenir du grand entre-
preneur Barùaja la facilité de présenter successivement
quelques-uns des sujets qu'il tient à ses gages. David , La-
biache, Tambiirini, Rubini; M"" Méric-Lalande , Bram-
billa el quelques aulres pourraient exciter la curiosité , un
moins pendant quelque temps ; mais comment les avoir ?
Barbaja, qui exploite l'entreprise de plusieurs théâtres
d'Italie et d'Allemagne, a besoin de ses acteurs, et ne lés
aurait probablement cédés pour des termes fort courts ,
qu'à des conditions fort onéreuses. Par ces motifs, nous
avions pensé que c'était avec cet entrepreneur qu'il serait
veuliou : L'autorité supérieure n'a pas cru devoir Le faire,
l'eut élrc a-t-elle pensé qu'il serait dangereux pour les
théâtres français d'accorder à. un entrepreneur étranger
des avantages qui lut auraient donné les moyens de faire
pencher la balance en sa faveur pendant deux ou trois ans.
Le directeur actuel de l'Opéra, M. Lubbcrl, régit en
mcnric temps le Théâtre-Italien. Il sent tous les désavan-
tages de celui-ci ; et, à cause de cela, il veut en débarras-
bcaux-arts; mais, avant tout, il veut la prospérité de l'Opéra
français, cl s'opposera toujours à ce que sou rival prenne
trop d'extension. Par une singularité remarquable, on as-
sure qu'il est secondé dans ses vues par M. Rossini lui-
même. Transfuge redoutable, Rossini ne se contente point
de cesser de combattre eu faveur de ses anciens alliés, il
passe dans le camp ennemi, et leur porte au grand jour et
dans l'ombre des coups sous lesquels ils doivent suc-
comber.
L'appui du Théâtre- Anglais scra-t-il suffisant pour main-
tenir les chanteurs ultra m on tains dans une position ho-
norable? On peut eu douter. De deux choses l'Une : ou les
Digitizcd by Google
a34
deux troupes se réuniront pour ne donner que trois repré-
sentations par semaine, composées d'une tragédie oh d'une
comédie anglaise, suivie d'un opéra italien ; ou elles joue-
ront alternativement, en donnant une représentation cha-
que jour. Dans le premier cas, le spectacle sera trop long, et
les dépenses seront trop considérables pour être couvertes
par la recette et la subvention; dans le second, si les acteurs
anglais ont la vogue, ils nuiront aux italiens, qui, loin de
leur porter secours, leur seront à charge. Les événement
feront voir si nous nous sommes trompés.
On ne dit point encore si le nouvel arrangement dont
nous venons de parler est signé ; mais on assure qu'il est
irrévocablement arrêté. M. Laurent s'est charge d'une en-
treprise bien difficile à gérer; mais un habile homme tire
parti de tout. Nous verrons s'il mérite ce titre.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
OBSERVATIONS FUGITIVES
D'UN VOYAGEUR ALLEMAND,
siih l'état de tk musique * dbesde pendant l'été de 1837
Dresde jouit depuis long-temps de la réputation de faire
beaucoup pour la musique d'église. La protection que les
souverains du beau pays de Saxe , et principalement le roi
Frédéric-Auguste, mort cette année, accordaient anr
beaux-arts, avait enchaîné à cette cour des hommes tels
que Hasse et Naumann, et donné un grand éclat aux
pompes religieuses, ainsi qu'à l'opéra italien. Cependant,
depuis la mort de ces maîtres , le véritable genre de la mu-
sique d'église paraît s'être perdu peu à peu, et il ne reste
plus à louer que l'exécution si distinguée de la Chapelle
royale, et la sonorité de l'église catholique de la cour. Les
cloches argentines appellent encore, les dimanches et
jours de Tètes, aux vêpres et à la messe en musique; mais
ou y trouve rarement un bon choix de compositions clas-
[1) Exlrail du n* 3j de la Ca:cltc muiieak de Berlin.
a35
niques, et l'on n'y entend le plus souvent que des messes
surannées ou triviales, à inouvemens vifs et pressés, de
telle sorte qu'on croirait qu'il s'agit d'avoir terminé le plus
promptement possible. J'y ai entendu celle année, à son
retour des eaux deTœplilz, Sassaroli, qui est maladif cet
été. Sa voix m'a paru affaiblie. Un enfant de chœur avec
une voix pure, mais faible, chantait les parties de soprano
pendant son absence. Le contrallo beaucoup trop pro-
noncé d'un mvsico ( Muschictti ) couvrait souvent le
soprano. Le ténor est trop faible; mais l'effet produit par
la basse de Zezi est proportionnellement Irès fort. Le chœur
est faible, et les répons desenfans delà chapelle manquent
souvent de celle pureté d'intonation pour laquelle les
élèves de Rreutz étaient si renommés. J'entendis Irès bien
exécuter deux messes solennelles de Naumann (en ut et en
ia jj majeur ) , el le bel orgue de Silbermann , dont tout.es
les ressources étaient mises à profit par l'excellent orga-
niste Klengel, me fit un grand plaisir. J'ai regretté que.
la disposition ne permît pas que l'orgue accompagnât la
musse d'un bout à l'autre. Le placage de l'accord final qui
fait explosion à la fin de chaque morceau produit un effet
peu agréable.
Dresde possède, dans la personne de Jean Schneider,
frère du compositeur Frédéric Schneider, et organiste de la
cour à l'église protestante, le premier des organistes vi-
vans. Je n'ai jamais entendu depuis Vogler, un maniement
plus parfait de ce plus puissant des i mit rumens, réunis à la
connaissance la plus profonde de la modulation et du con-
trepoint double, à la richesse des idées et au goût le plus
exquis. M. Schneider utilise le bel orgue de Silbermann,
tant sous le rapport du choix et de la liaison des registres,
que pour la manière d'entier les sous depuis le soufflele plus
faible jusqu'à fortissimo qui ébranle tout le temple avec
l'art le plus rare, cl un grand talent d'exécution, particuliè-
rement dans la main gauche et dans les pédales. Cet artiste,
aussi complaisant et aussi modeste qu'habile, épuisa dans
un prélude et la fugue qui suivait, .toutes les nuances du
slyle sévère dans l'improvisation d'une composition de la
DigitizGd t>y Google
plus grande richesse. L'orgue tout entier fut employé de
la manière Ja plus imposante. A la fin de celle séance, qui
data plus de deux heures, et qu'il avait consacrée» par
une rare complaisance, à un petit nombre d'auditeurs,
M. Schneider nousfitentendre, demain de maître, lafugue
ùe Sébastien Bach en ta mineur avec le prélude, et dans
le feit, ce véritable artiste ne pouvait choisir rien de plus
élevé , pour compléter l'impression que sou jeu avait pro-
duits sur moi.
Je ne sais si les oratorios d'usage sont encore exécutés
dans la Semaine-Sain le. Pendant la durée du deuil, la
cour ne se rendait point à l'église publique.
L'opéra italien jouit depuis long-temps de la protection
particulière de la cour et de la faveur du public. Les eban-
leurs de cet établissement sont encore des plus distingués,
quoiqu'ils ne lesoient plus au métne degré qa'aulrefois. La
siguora Pallazzesi possède une vois de soprano agréable,
<font lamezza voce fait particulièrement de l'effet. Cette vois
fraîche et délicate semble ne pouvoir supporter de longs
roulades ne sont pas très nettement exécutées. En revan-
che, la légèreté de son chant plaît beaucoup, ainsi que son
jeu qui est fort naturel. M" Schiassetli, arrivée de Paris
depuis im an, convient par son bel organe de mezzo-con-
tralto aux rôles de primo uomo; sa manière est noble et
île bonne école, mais sa voix a peu de séduction, et le chant
orné loi est encore moins favorable qu'à la siguora Pallaz-
zesi. Ces deux chanteuses brillent clas la Donna det Logo
dcRbssini. La lièvrcrossiuienne s'est acclimatée ici comme
à Paris et à Vienne, et à l'exception du Crociato de Meycr-
becr, ou n*a vu réussir ici que des opéras de Itossini. On
doit à ta vérité donner Don Juan et {es Noces de Figaro,
en italien ; mais de tels ouvrages disparaîtront bientôt du
répertoire, parce que les chanteurs n'y trouvent pas l'oc-
casion de prodiguer les cadences cl les fîorituri. Les ténors
Ittihini, Pcsadori cl Bonliglisontd'hahileschanteurs; mais
leurs voix sont faibles. Pcsadori, dont le ténorest trèsagréa-
blc, laisse à désirer sous ce rapport delà force. Je cousidèro
Digitizod by Google
a3j
îlnbin i comme un des premiers chanteurs ; mats son exécu-
tion est un peu affectée et doucereuse. Bcnincaga est connu
comme un excellent bouffe. Sa netteté d'articulation, sa
voix de basse sonore, et son jeu Vtf et aisé lui ont assuré
depuis longtemps une honorable réputation, Z,ezi, comme
imtSQ canlanle, est dislingué sous le double rapport de la
vois et de l'exécution ; son extérieur imposant le reud
propre aux rùles noWes. [.-■-'■. 1 ! 1
J^xéctilion, l'ennuyeuse et monotone Pastorctlii Fcuda-
taria de Vacoai, l'un des imitateurs sans génie de Kossini.
Le Crociato de Meyerbccr est exécuté, par les mûmes
chanteurs italiens, avec un grand ensemble. Quuicjiic cet
ouvrage ail été donné sauvant depuis un an, la salle était
encore entièrement pleine aux jours les plus chauds de cet
été. ill"' Scbiasselti cl l'allazzesi y recueillent de grands
apphiudiiisunieiis. L'i nslruinentalion de cet opéra est très
à la Bosstni, ne peut être bien exécuté que par des chan-
teurs italiens aussi l'ouvrage est-il accueilli partout où il
y a opéra italien.
Le chœur eut assez faible; mais l'orchestre, composé des
premiers virtuoses (principalement à l'égard des insti'ii-
mens à veut ) est Tort dislingué. En l'absence du maître de
chapelle Uorlacchi, le directeur de mnsiepte Ileissiger di-
rige l'opéra italien et allemand avec beaucoup de talent.
On pourrait peut-être désirer quelquefois un peu plus de
chaleur; mais le nouveau directeur craint probablement
de se mettre niai avec les chanteur», et se voit obligé dj
leur céder.
L'opéra allemand, qui commençait à peine à fleurir. .1
éprouvé une perte irréparable par la mort prématurée de
Ch. M. de 'VYebcr. Cette blessure est incurable, et. ce-
pendant la mémoire de ce grand génie est déjà presque
oubliée ici. Son Obcron doit cependant, par ordre du mi,
Cire donné avec beaucoup Je ma^nilicencc au commence-
ment d'octobre; malheureusement le local est trop petit,
cl indigne d'une résidence telle que Dresde. Il manque
aussi de sonorité. A l'ouverture de l'opéra allemand, qui
avait été fermé depuis le 1" mai, j'y ai entendu la Dame
Manche de Boicldieu, qu'on exécutait pour la première
fois à Dresde. M" Devrient, qui remplissait le roIed'Anna,
nous a rappelé M1" Sontag, quoiqu'elle lui soit inférieure
sous le rapport du chant. Tous les chanteurs se montrèrent
d'une manière très satisfaisante; mais on distingua surtout
M™ Sandrini qui a fort bien fait ressortir le petit rôle de
Marguerite- Jcn'ai jamais entendu chanter la romance du
deuxième acte avec autant d'expression. L'ensemble de
l'opéra, qui avait été bieu étudié par les soins du directey
Reissiger, était tout-à- fait satisfaisant, ainsi que la mise en
scène. L'orchestre, qui aurait besoin d'être renforcé de
quelques basses, est très remarquable sous le rapport des
instrument à vent et de l'égalité des violons. On aurait pu
désirer un peu plus de vivacité dans la manière dont on a
pris quelques mou vemens de cet ouvrage, qui ne trouve
ici que des applaudissemens. -■;
On attendait des eaux de Tceplitz , Waechler, qui devait
débuter dans le Figaro du Barbier de Sévitte de Rossini,
traduit en allemand. On a engagé pour le inémsaopéra le
ténor Babnig, qui doit venir de Peslh , et dont la belle
voix et la méthode sont très réputées.
Je ne dois point passer sous silence les concerts d'été
qui ont été chaque soir alternativement donnés au Lin-
kïsch-Bad, dans le grand jardin et sur la terrasse de Brûhl.
Les musiciens de la ville ont exécuté des symphonies et
ouvertures de Mozart, Haydn et Beethoven , étudiées avec
soin , ainsi que des opéras ou parties d'opéras arrangés en
symphonie, tels que le final de Don Juan, la Daine du
Lac, etc. Quoiqu'on puisse leur reprocher un peu de len-
teur et quelques autres défauts d'exécution, on leur doit
toujours d'entendre de bonne musique, et de n'être pas
continuellement assourdi par la grosse caisse.
— L'Oberon de Weber a été donné , pour la première
fois, à Francfort-sur-le-lttein . le 16 septembre. Cet opéra
n';t pas réussi. On y a trouvé un travail pénible et pou de
mélodie : il est vrai que l'exécution et la mise en scène
étaient également mauvaises.
Milan. Le second acte de l'opéra de l'acini, l'Uttimo
25g
Giorno di Poinpei, attire la foule au théâtre de ta Scafa
depuis près île dent mois. L'air de Itubini, le duo chante
par Tamburini et M™" Mérlc-Lalande , la grande scène de
celle dernière, cl l'explosion du Vésuve, merveilleux effet
dont on n'avait pas d'idée auparavant, satisfont à la fois
l'oreille, le cœur et les yeux. On assure que, dans le duo
qui vient d'être cilé, la cantatrice arrive au plus haut
ile^ié d'expression à ces paroles : Vivi di me sicuro. —
Sono innocent?, il giuro. — Ai Numi, ai jîglio, a te.
Après la chuta du rideau, Rubini, Tamburiuï et M^Méric-
.Sainpiirico iï! tm eiiei-d'œuvreï une véritable création,
où l'illusion est portée aussi loin que possible.
Le Mosô in Ëgitto do Rossinî est joué concurremment
avec l'opéra de l'acini, et obtient aussi un grand succès,
dont le compositeur et les chanteurs peuvent réclamer
chacun une pari.
CLASSE DE CHANT ET DE VOCALISATION,
SOLFÈGE, ET ACCOMPAGNEMENT DE LA PARTITION,
moussa un « d'écoh hoïalb db mlbkjui.
La classe de chant et de vocalisation du matin , pour
les dames, aura lieu les lundi et jeudi , de 9 à 11 heures.
La classe de chant et de vocalisation du soir, pour les
dames, aura lieu les mardi et vendredi , de 7 à y heures.
La classe de solfège pour les dames, aura lieu les mer-
credi et samedi, de 9 a 11 heures du malin. Il ne sera ad-
mis que six personnes \ cette classe.
La classe de chant et de vocalisation du matin, pour
les hommes, aura lieu lus mardi et vendredi, de 9 à
1 1 heures.
La classe de chant et de vocalisaHon du soir; pour les
hommes, aura lieu les lundi et jeudi, de 7 à 9 heures.
La classe d'ensemble, pour les dames et les hommes,
aura lieu les mercredi el samedi , à - heures du soir on
n'y chantera que des duos , trios , morceaux d'ensemble el
chœurs. Il n'y sera admis que six personne».
La classe d'accompagnement de ta partition, pour les
dames, aura lieu les lundi et jeudi matin , de 11 heures et
demie à 1 heure et demie, '
La durée de chaque classe de chant et de vocalisation
sera de deux heures.
Ces classes auront lieu deux fois par semaine. Il n'y
sera admis que quatre élèves.
Les classes ouvriront le jeudi i" novembre, jour de la
Toussaint.
S'adresser, pour se faire inscrire, chei H. Vanseron,
houlevard des Italiens, n'n, tons les matins avant midi.
Au moment où la bonne société va quitter les plaisirs
de la campagne pour retrouver ceux de la ville, et pour
reprendre les travaux de l'Iiiver, nous croyons qu'on ne
verra pas sans intérêt l'annonce de ces cours. Al. Panseron,
qui est classé depuis long-temps parmi nos plus habiles
professeurs, a fait , sur le mécanisme du chant , des études
approfondies qui datent de son séjour en Italie, comme
pensionnaire du gouvernement , et qui sont un garant de»
progrès rapides qu'il doit faire faire à ses élevés.
Parmi les avantages que nous remarquons dans l'an-
nonce île ces cours , ceux des classes d'ensemble nous pa-
raissent mériter l'attention des amateurs. Combien il en
est parmi eux qui, doués d'une voix agréable et de quelque
facilité pour la vocalisation , manquent cependant d'habi-
tude dans l'exécution, et ne peuvent faire valoir leurs
avantages naturels, faute d'avoir appris à les régler.
Écoutez un duo, un trio, chanté par des amateurs, cha-
cun s'occupe de sa partie sans s'inquiéter de l'effet gé-
néral du morceau, effet qui est presque toujours manqué,
parce qu'il n'a point été réglé d'avance. Il est vrai que les
occasions manquent pour faire des études semblables;
c'est ce qui ajoute encore à l'intérêt des cours de M. Pan-
seron. A l'avantage d'y trouver à coup sûr des chanteurs
avec lesquels on puisse s'exercer, se joindra celui d'être
dirigé par un bon professeur, qui donnera à la fois le pré-
cepte et l'exemple.
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DISCORSO
SCLU OBICIKE, PBOCÏESS1 E STATO iTrUllB
DI ANDREA MAJER, VENEZ IANO.
( Discours snr l'origine , Ie« progrès cl l'état actuel de l* mmiqiis
italienne, par Andrù Majcr, Vénitien
La lî Itéra turc musicale étrangerccst si peu connue par-
mi noua , que l'on y sait à peine les noms tien uiivrages les
plus recommandables. Ce n'est que par hasard, et long-
temps après que ces ouvrages ont été publiés, qu'ils par-
viennent en France, où ils ne sont lus que d'un putit nom-
bre d'érudits. L'indifférence des musiciens à cet égard est
complète. L'Italie, l'Allemagne, l'Angleterre même, voient
éclorc chaque année des livres intérêt sa 11 S sur quelque
partie de la musique, dont les auteurs ou les éditeurs trou-
vent sans doutelc débit, puisque le nombre s'en augmente
tons les jours. Chez nous , le défaut de lecteurs rendrait
de pareilles publications ruineuses. Toutefois, je crois
qu'en attaquant sans relâche notre paresse sur ce poiut,
je parviendrai à la vaincre; c'est ce qui me détermine *
donner une analyse des meilleurs livres qui traitent de cet
Qf{ : si je ne parviens pas an but que je me suis proposé,
j'aurai fait du moins ce qui était en mon pouvoir.
Quoique peu volumineux, celui dont il s'agit ici mérita
l'ai lenthm de tonsles hommes de goût par les choses neuves
et excellentes qu'il renferme. L'auteur en jeta les pre-
mières idées dans une brochure qu'il publia à Rome, en
iRiç), sous le litre de Discorso înlorno aile, vicende dhlUt
tnution italiana*. Les faits intéressai» qu'il a recueillis
depuis lors, l'ont conduit à dévcloppcrson plan, et à lui don-
ner sa forme; ce plan très simple, contient les quatre divi-
(i) Pailoue, dclla ttpograjihia e fondetia délia Mincrrï , iSai, in S*
tin ij3 pages.
()) Rome, Cido Mordacbiiii.
a' vot. a i
i4a
sions suivantes : i* Considération!) sur la musique des an-
ciens; a" Naissante et enfance de la musique italienne',
5" Adolescence et maturité de la musique italienne; If Étal
présent de la musique italienne.
Parmi les recherches pleines d'érudition de l'auteur sur
le premier point, celles qui ont rapport à la connaissance
quo les anciens ont eue de la composition à plusieurs par-
ties l'ont conduit à croire qu'ils ont usé de ce genre de mu-
sique. M. Majer a remanié cette question dans un petit
écrit quia pour titre : Sutta conoscenza che aveano gti
antichï del contrapunto, iettera di Andréa Majer, Ve-
neziano1, et qui est un commentaire excellent sur un pas-
sage de Cicéron, dans le Songe de Scipion.
Rien de plus instructif, Je mieux élaboré, que la seconde
partie, qui a pour objet la naissance et l'enfance de la mu-
sique en Italie. Apres avoir examiné avec soin les diverses
transformations du chant ecclésiastique, delà notation,
des chansons vulgaires , les révolutions de la composition
à plusieurs parties, l'influence des compositeurs flamands
sur la musique eu général, et les écoles, M. Majer arrive à
celte époque si importante de la naissance du drame mu-
sical , qui changea l'objet et !a forme de toute espèce de
musique. Je crois ne pouvoir mieux faire que de donner la
traduction d'un passage 1res curieux de son livre , où il
éclaircit quelques points obscurs ou mal connus de celte
époque intéressante. —
On sait que les assemblées qui se tenaient dans la mai-
son de Jacques Corsi, à Florence, donnèrent à l'art musical
une vie nouvelle, et le tirèrent des entraves des formes
scolastiques. Les hommes les plus remarquables, qui as-
sistaient à ces assemblées étaient Jacques Feri, Jules Cac-
cini, Vincent Galilée, père du célèbre physicien et astro-
nome, Doui, Mci, le comte de Vernio, etc. Voici comment
M. Majer parle de leurs travaux.
(i) llrncliure de liG pagel ÏD-11, »ani date , ai nom de lien, mais im-
primée à Venise. Le mi ne tcrii a été iaiéré dans le lome lit delà Nueva
Haeeotta di scelle cptre iiaUttnee ilrcmien di icicxie, tellm ed artl. V*-
niK, i8na , i; Pictro Milesi.
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*45
«Le premier ouvrage qu'ils mirent nu jour fut celui tfitt
a pour titre : Diatogo. sutia mttsica antica e modem»
(Dialogue sur la musique ancienne et moderne ) 'le Viu-
cctuo, digne père du grand Galilée, publié à Florence
en i58i. Il fut suivi de II Fronimo, autre dialogue du
même auteur; du Traité des ffenrrs it dis modes, de Doni,
d'un excellent discours du même , suila perfetioM dette
mélodie ( sur la perfection des mélodies ) , et du Traité
desmodes, de Mei. Dansées divers ouvrages, les principes,
théoriques de l'art musical étaient, pour la première fois,
démontrés dans un langage clair, noble et élégant. Mais
ils sont surtout reeommandables par lea réflexions qu'ils
renferment sur l'imitation musicale.
« Les écrits de Dubos, Condillac, Le Batteux, d'Alcm-
bert, Diderot, Rousseau, Algarotti , Artéaga , et autres
philosophes des temps modernes, n'offrent rien de plus
vrai ni de mieux exprimé que ce que l'on trouve dans ces
écrivains du seizième siècle, dont les ouvrages sont au-
jourd'hui presque entièrement ignorés.
• Du exemple de l'application des sages principes con-
tenus dans les écrits dont nous venons de parler, fut
bientôt offert au public dans l'opéra de Dafne, écrit par
Riaueciiii, et mis en musique par Péri, qui fut exécuté
dans la maison de Corsi, à Florence, en i5ç)7. Nous n'eu
parlerons point , parce qu'il nous a été impossible de nous
le procurer, quoique Quadrio assure qu'il a été imprimé
avec la musique, eu itioo. On peut présumer toutefois que
cet opéra était fort inférieur ù VEuridûe, écrit aussi par
Hinuccini, puisque tous les écrivains se sont accordés,
pour désigner ce dernier opéra comme le type du mélo-
drame moderne.
« Euridicti fut représenté à Florence , en 1G00 , à l'oc-
casion du mariage de Marie de Hédicis. En voici le titre,
fidèlement copié sur un exemplaire existant dans la bi-
bliothèque Saint-Marc , de Venise :
• L'Euridici-, runipostn in musica in stile, rappresen-
tulivo , daGiutio Cactini, lionunw, Florence, 1600,
pdf, U Marcscotli [ Eurydice , mis en musique , eu style
théâtral, par .Iules Caccini , Romain.)
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* Ici s'élève une question assez curieuse. Ataccî, Qua~
drio, Tira(/Oschi , Signoretli, et beaucoup d'autres,
siiribuent la musique de VEuridice à Péri, et le seul Ar-
téaga assure, sans dire néanmoins d'où il tire celle con-
naissance, que Péri et Caccini la composèrent en -société.
Hi par un principe inébranlable, le fuit doit l'emporter
Mtr toute autre autorité, on restera convaincu que ton»
tes savans historiens ont parlé de la musique A'Euridicc
«ans l'avoir vue. Il est cerlain que quand on voudrait pré-
tendre que le nom de Giuiio Caccini, Romano, se trouve
imprimé sur le frontispice par erreur, celte absurde sup-
position serait détruite par les premiers mots de l'Épîlre-
tlédicaloirc, adressée par Caccini au comte do Vernio;;
■ A vendu io poslo in musica ( dit-il) in slile rappresenta-
< tivo la favola fEuridîce, el fattala stanipare, mi è parsc
• parte de! rilo debito dcdicarla a V. S. illustrissima. Ha
« usato in ouesia. composizione io stesso stiie corne nelV
«egioga dtt Sannazzaro, itene ail' ombra degli ameni
• faggi , ed in atcuni miei Madrigati composti netla
« stesso tempo, etc. 1 •
« Celte églogue et ces madrigaux se trouvent dans un
recueil de musique de Caccini, imprimé en 1601, el
dédié au même comle de Vernio. Mais , quelque soit l'au-
teur à'Euridicc, a-t-il réussi daus son entreprise, cl
mérite-t-il d'èlre proclamé le créateur du slyle draina-i
tique? Cette seconde question est plus importante que-
ls première. Si on s'en rapportait à tous les écrivains ci-
dessus mentionnés, elle serait résolue en faveur de/*eW,-
mais comment accorder sa confiance à des écrivains res-
pectables, sans doulc, mais si mal informés? Et quand
on devrait me considérer comme un Zoïle attaché à dé-
truire des réputations consacrées par le temps, l'amour de
la vérité me porte à démontrer le peu de fondement do
(1) Ayant mis «a musique, un sryle tliéMral, la fable à.*Eurydîcc, ut
■ l'ayant lait iuinrimur, j'airiu qu'il t tait Je mon devoir de lï dédier a,
« V. S. J'ai employé dans cetlc cuinpoiilion le mime tlyle dont j'arais
< fait usage dam l'eglogin de Sannaiar, Jtcnc ail' ombra degli ameni,
• fvgS'i ct t'lina quelques -uns de mci madrijam composés dam le niSmc
, teo.ns, etc. k
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leur opinion. Je commencerai pur le récitatif, qui put
précisément la partie en quoi ils font consister le mérite
principal de Péri. ,
«Caccini nous apprend loi-mémo, en parlant an comte
de lernio, quels furent les principes qui lui servirent de
guide : *E questa ta maniera, la quale ncr/ti anni cite
» ftorivata camerala sua in Firenze, discorrendo etta,
• dicea con molli altri noUli personiujui , essere Mata
« m ■usata, dagti antichi nelta rapprew.u/ti zio ne ile.llc.
. loro tragédie, ed alla favolo adoperando il canto1. »
Dans l'avant-propos do son œuvre de Madri^aus, il dit
encore : « Vedcnda dunque cfie tali musicltc non da-
va.no altro ditetlo, jïiori di qiiïlfo clic polea dare
i'armonia ait' udito solo, viriclie non potevano essi
muovere V intetlciio smzat' inittUyenza dette parole,
mi vr.ime inpensicro d' intradurremtasortedi ntusica,
per vui altri pousse quasi chc in armonia j'ave-tlarc,
u&awio-in essu (corne altro voltc ho detto)una certa no-
lite spreszalara, di canto, passando per alcune fatze,
ttnando pero ta corda dcl basso ferma, etc. !.
Caeeini ne pouvait assurément pas expliquer avec plus
de clarté les principes du gtyle du récitatif; mais ii faut
convenir eu mémo temps qu'il était difficile de les mettre
qu'il ne l'a faU dans le récitatif VEuridice. Los Caniilenes
60iit composées avec des espèces de plirases et de ca-
dences, qui, loin d'imiter les accens et la prosodie du lan-
gage, suivent les motifs des airs, tellement qu'on ne peut
(i). Telle est la manifci-e rfnnt les îinriens en «salent dans la rr|irésen-
■ latiun de leurs tragédies el de leurs autres pièces ornées de musique ,
■ selnn l'uni ni oui] ne vous avez manifestée avec d'aulres nobles peisonna-
»gïi, dans le iemps ou-florissaii l'assemblée que tous teniei a Florence^.
(1) «Voyant donc qu'une semblable musique ne donnait point d'aulre
plaiiir que celui que l'harmonie peut proeurer a l'oreille, puisque l'in-
telligence des paroles peut seule paiera l'esprit, j'imaginai d'inlroduire
une espèce de chaut par lequel on pût, en quelque sorte , parler en mil -
tique , y employant , cnmmc je l'ai déjà dit , une marche plus libre que
eHIn du clnnl ordinale. Formée de notca de passage sur une note de
distinguer la moi mire différence entre cette mélodie rte*
prétendus airs, et celle du récitatif. Les notes de la basse,
an lieu de rester ferme, comme il le promet, marchent
toujours avec le chant, passant à chaque temps à la a4" , à
la 4", à. la 5", à la 6" pour retomber continuellement,
avec la cadence parfaite ou imparfaite sur la corde fon-
damentale. Le prétendu mépris du chant est si mal ob-
servé, qu'il l'enfreint quelquefois dans des passages de deux
mesures. Mais en voilà assez sur le récitatif A'Euridice.
t La première esquisse du véritable récitatif se trouve
dans les motets et les cantates de Carissimî. Il fut ensuite
porté à la perfection par Vinci, Porpora et Marcello. Le
fameux monologue de la Didon, de Vinci, a été le premier
modèle d'un récitatif parfait.
• J'ai dit que le slyle des airs à'Euridice (etla première
cause doit en être attribuée au maître choisi par Rinuccini)
ne se distingue point de celui du récitatif. Artéaga est d'un
avis contraire, et combat une opinion très juste dePIanelli,
qui dit, dans sou traité Dett' Operainmusica: »Chesoto
verso la metà det secoto xvh cominciarono a introdursi
te arie ne' melodrammi L'introduzione dette arie
e attribuita al Cieognini, itqualc net suo Giasone, pu-
dticato net 1640, comincio a inlerrempere it reeitativo
con quelle anucreonliche stanze. Artéagarépond que l'on
trouve des stances anacréonliques dans VEuridice, et
pour le prouver, il cito deux quarline, chantées parTÏMÏ,
formées de vers ertdécasy liâtes; ajoutant que ces vers sont
un air parfait : i°parce qu'ils sont précédés par la sympho-
nie; a" parce que la basse suit toutes les notes du chanteur;
3" parce qu'ils sont accompagnés avec tous les instrumens;
4° parce que le mètre n'est pas le même que celui du ré-
citatif. Ces raisons ne prouveut rien, sinon qu'Artéaga
n'avait jamais vu la musique A'Euridice. Quand il serait
vrai (et cela ne l'est pas), que la symphonie, ou ritour-
nelle, forme une partie inséparable de l'air, le fait est
que les vers ci-dessus désignés ne sont précédés d'aucune
ritournelle. Il est vrai que ta fiasse suiL toutes tes notes
du chanteur ; mais clic fait absolument de même sur tous
247
les vers du récitatif ; ies divers instrument qui accom-
■/Httiiteut ces vers n'existent que dans L'iiu^^ÏLialioii d'Ar-
téaga. Dans roule la partition de VEuridice, on ne dé-
couvre d'autre instrument que le simple basso continue,
et les chiffres nombreux qui s'y trouvent, indiquent qu'il
s'agit d'un oigne ou d'un autre instrument à clavier. Moud
laisserons décider ans lecteurs si le quartine., en vers en-
déeàsyiiaôes, chanté l'ar Tirsi, peut être la munie chose
<(uc les sdmfi'i anac.vcoiitiques dont parle Planelli. Dans
la l'ulile A'Euridice,, la scène la plus intéressante et la plus
dramatique, est, sans aucun doute, celle où Orphée s'ef-
force par son chant d'apaiser le courrons des dieux infer-
naux. j:h bien ! dans le drame de Rimiccinj, celle scène se
compose de récitatifs, et contient un dialogue loiigct en-
nuyeux entre Orphée, l'Iuton, Minos, Rhadaniante et Ca-
ron. Les chœurs de VEuridice ne méritent pas qu'on eu
parle; il suffit de dire qu'ilssont composés à quatre et cinq
parties réelles. Les professeurs jugeront de l 'effet que devait
produire sur le théâtre un concours de voisuussi compli-
qué. Ce genre de composition est abandon né depuis long-
temps à la seule musique d'église.
« On pent penser avec raison que la musique do VEurî-
dicc n'obtint p;:s. même dans son temps, la célébrité qu'il
a plu ans écrivains de lui accorder, lorsque l'on voit (pie le
cardinal M ozarin, ayani appelé a Paris une troupe de chan-
teurs italiens, afin de faire jouir pour la première fois
Louis XIV du spectacle d'un opéra, on choisit une autre
pièce sur le même sujet; c'csl-à-dire VOrjeo, mis en mu-
sique, en 1 5()7, par Xarlino, qui avait obtenu en Italie un
t Mais, indépendamment de toutes ces raisons, et ne
considérant la question que sous le rapport de la chrono-
logie, comment peut-on soutenir que VEuridicà de Ri-
nuccini a été le premier drame en musique qui ait été
représenté en Italie? laissant de côté VO rjVo, de Poliziano,
celui de Zarlino, la Disptrazionc di Sileno, et il Salira,
de Laura Guidiccioni , femme noble de Lucques, repré-
sentés à Rome, en i iigo, avoc de la musique d'Emilio dei
Cavalière, f Egte, de. Giraldi , représctilé à Ferrare, à la
fin de 1 545, et mis en musique par Antonio del Cornetto,
les deux plus célèbres pastorales italiennes, t'Aminta du
Tasse, mise en musique par Mardtta, Sicilien, el le Pastor
fido, deGuarini,ne sont-elles pus antérieures de beaucoup
à YEuridice.? Jl sacrifitio. de Iteccari, VAretusti, d'Al-
berto LoUiO et lo SfOrtunatû, d'Argenii, ne furent-ils pas
également représentés à Ferrarc, en 1 55ij et eu 1567, avec la
musique d'Alfoiwc délia Viola ? tous ces drames sont écrits
dans le même mètre que la Daphne, i'Euridice et YArian-
na, de Rînucctni, auxquelles ou voit évidemment qu'ils
ont servis de modèles. 11 est également certain qu'on y fît
usage de l'accompagnement des instrument car on lit dans
les premières éditions des Pastorales de Bcccari, de I.ollio
et d'Argenti, que le frère d'Alfonsn délia Viola, qui repré-
sentait le personnage principal, faisait précéder le eliant
d'une ritournelle qu'il exécutait sur le luth, dont il jouait
parfaitement bien. Signorelli et Arléaga ne font point men-
tion d'un o/wivi-frw^ii représenté à Venise eu ' '07 4) lequel
se eiim posait d'airs e t de réçila tifs. Toutefois, les personnes
pas'de ces anaebronismes, fondés sur des traditions vul-
gaires Un écrivain contemporain ayant avancé un fait
comme certain, ceux qui écrivent après lui trouvent plus
simple et plus commode de s'en rapporter à sa parole que
de prendre la peine d'examiner soigneusement, et voilà
justement comme on écrit f histoire, n
( La suite 11 l'un des numéros prochains. )
(1) Kous m devons pas dissimuler que Signorelli, dans ton Histoire
du Théâtres [Storta do' Teatri) , prétend que seulement les cbiEOn des
pastorales ci-dessus mentionnées furent mis en musique. Il nous semble
que cetle opinion 11e s'accorde point avec les faits, puisque sur mus les
titres on lit simplement : La musique fui composée par Emitia dot Cm»,
lliro, Anto»i<>deICorncilo, Atfeiuo dellu l'iota, et un auriit do dire alors:
La niHsi'/i'e d.s rfinitn. Ile plus , Caceini, dans sa clcdiraee tir Yliuridiec,
et dans la |>réface des ilWri -aa.f , ue se vante pas d'aiilre chose que
d'avoir invente nu nouveau genre de «nfifenc, autre que celui en iisa-fe
parmi les ninitres de son temps, c'est-à-dire un interméi iaire entre la
parole (impie et le chant soutenu. S'il avait fié le premier qui eût ima-
pno de noter le récitatif, ]■•>< MUoi l'eût -il US»lé ignorer!
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=49
EXPOSITION DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE.
DISTRIBUTION DES MÉDAILLES
AUX FACTEURS DE PIANOS, LUTHIERS,
ET FiBMClNS D'IKSTBEMEHS DE TOUTE BSÏÈCB.
Le jury de l'exposition , sur le rapport de la Commis-
sion des instruirions de musique, a décerné les prix ac-
cordés à ce genre de fabrication , ainsi qu'il suit :
Pianos : Médaille d'or, à MM. Pleyel et compagnie;
médaille d'argenfy à MU. Dictz et compagnie ; médaille,
de, bronze, à MM. Confirmation dû
la médaille d'or des années 1H19 et i8a3, à M. Sébastien
Erard; idem, de la médaille d'argent, à M. Pfeiffer et à
MM. Roller et Blanchet.
Hibpes. Confirmation de la médaille d'or des années
précédentes, à 51. Sébastien Érard; confirmation de la
médaille d'argent, à M. Nadcrmari,
Violobs et autres instrumens à archet. Médaille d'ar-
gent, à 51. Thibaut, rue Rameau, n* 8; idem, a M. Vuil-
laume, rue Croix- des -Petits- Champ s, n" 56.
Isstrvmess de cm vie. Médaille d'argent, h M. De Lab-
bnye, rue de Chartres, n" i4> pour ses cors à pistons, ses
timbales mécaniques, dé-
pendant la durée de l'exposition, nous avons présenté
nos observations sur la nature des instrumens qu'on y
trouvait; maintenant, quelle que puisse £ Ire notre opinion,
nous croyons devoir garder le silence, et respecter les tra-
vaux de la Commission et du Jury.
Toutefois, des réclamations nous sont adressées; ce
journal étant ouvert à toutes celles qui intéressent l'art
musical, ou ceux qui en cultivent quelque partie, nous
ne croyons pas pouvoir nous refuser a les insérer, laissant
a ceux qui les font la responsabilité qu'elles entraînent.
Telles sont et la lettre et la note suivantes.
a* vol. 2a
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a5o
A IL FÉTis , rédacteur de la Revue Musicale.
Parii, le 9o.:tolirc iSjj.
Monsieur,
J'ai l'honneur «le vous adresser quelques réflexions sur
l'cxamcu des pianos qui onl été exposes au, Louvre, et vous
aurai la plus fraude obligation si vous voulez bien avoir la
bonté de le* insérer dans le premier numéro de votre
Revue musicale,.
Veuillez agréer, Monsieur, l'assuranee de ma considé-
ration distinguée.
Ddowsbu.
NOTE.
'a
Il faut bien reconnaître que, dans les arts, le public est
le régulateur suprême, et ce juge souverain casse souvent
les arrêts portés par quelques prétendus connaisseurs.
L'exposition des produits de l'industrie française de 1837,
et lu distribution des récompenses auxquelles elle a donné
lieu, viennent d'en fournir un nouvel exemple.
Un jury a été nommé ponr examiner les différons pro-
duits de celte exposition , plusieurs commissions, prises
dans son sein, se sont partagées cette honorable tâche, et
chacune d'elles , après avoir examiné une branche parti-
culière de la fabrication , a émis un avis qui a déterminé
l'obtention des médailles; ainsi donc, il est bien reconnu
que blâmer quelques-uns des choix qui ont été faits, c'est
attaquer seulement une de ces Commissions; mais non le
jury en masse, et encore moins l'autorité royale , dont
les intentions paternelles ont été si mal suivies. Ce prin-
cipe bien établi, je me décide a vous faire part des ré-
flexions qui m'ont été suggérées par l'étrange distribution
des médailles accordées aux exposans, pour la fabrication
des pianos.
J'ai acquis, par delongues éludes, le droit de parler d'un
art charmant que je cultive depuis vingt ans, et qui fait
le charme de ma vie. On sait que dans les salons de Taris
e( de la provùlcc on trouve, soit un piano carre pour ac-
DigitizGd t>y Google
compagner la partition, §oit un piano à queue pour exé-
cuter des morceaux à grand orchestre ; ceux de H. Papo
m'ont paru mériter la préférence que le public leur ac-
corde. La rondeur du son, leur force, leur éclat sont éga-
lement appréciés desmaitres et des amateurs. Et moi aussi
j'ai visilé, examiné les produits de l'industrie française
exposés au Louvre; je n'ai pas la prétention de donner
je ne parlerai que de ce que je connais, et plût à Dieu quo
chacun en eût fait autant! nous n'entendrions pas aujour-
d'hui tant de récriminations; il ne serait pas maintenant
prouvé, par l'évétiemcnl, que dans celle bi/.arre distribu-
tion les copistes ont été préférés aux inventeurs, les élèves
aux maîtres, et les jugeurs, enfin, ne seraient pas jugés à
leur tour, par le public, auquel on ne refusera certainc-
dc SI. Pape parmi ceux que la Commission particulière
de musique avait juyés dignes d'uni: médaille d'or; cepen-
dant l'examen que j'avais fait des instrumens présentés
par ce facteur célèbre à l'exposition, m'avait mis à portée
de constater que M. Pape ne s'est pas contenté do se
montrer digne de sa réputation méritée, mais qu'H a su
l'augmenter encore par l'utilité incontestable dés perfeo-
tionnemens qu'il a apportés à la fabrication des pianos à
queue, et des pianos carrés.
C'est ici que j'ai encore eu l'occasion de le reconnaître
pour un mécanicien habile, puisque, par un procède nou-
veau et à l'aide de machines inventées par lui, il est par-
venu à. débiler l'ivoire en feuilles de douze pieds de long
sur quinze pouces de largeur, ce qui avait élé regardé
jusqu'à présent comme impossible, puisque l'on n'avait
jamais obtenu que des laides d'ivoire de cinq à six pouces
de large.
Les rcnscigiicmens que j'ai pris sur l'importance do
la fabrique de M. Pape, rendent encore l'oubli de la Com-
Digitizod by Google
a5a
mission plus inexplicable ; en effet, ce facteur occupe
plu» de quatre-vingts ouvriers , et il s'en faut de beaucoup
qu'aucun de ses confrères eu emploie un nombre aussi
considérable, pour les pianos seulement.
Ce qui doit faire croire enfin que les jugemeris de la
Commission avaient été rendus à l'avance, et dans la
ferme résolution de n'y apporter aucune des modifications
exigées par une toniiaissiitice plus approfondie de l'état
des choses, c'est le refus obstiné de la Commission de
procéder à un nouvel examen, qui aurait très certaine-
ment remis chacun à sa place. Ce refus est d'autant plus
singulier, que le second examen était réclamé par la
presque totalité des facteurs exposans. La Commission n'a
donc pas cru qu'il lui fut nécessaire de s'entourer do
nouvelles lumières : cette circonstance a décidé M. Pape
à se retirer du concours.
Il a, au reste, par devers lui de quoi se consoler faci-
lement de cette partialité: la faveur dont le public l'ho-
nore, la prédilection marquée que ses pianos obiienuent,
lui feront aisément oublier une injustice, qui fait plus
do tort à ceux qui l'ont commise qu'a celui qui eu est
l'objet.
M. Pape, j'ose le prédire, continuera de se montrer,
par ses efforts, digne d'occuper le rang distingué que le
public lui a assigné parmi les facteurs de pianos, long-
temps après que l'on aura oublié et les noms des membres
de la Commission , et les instrumens qu'elle a osé mettre
en parallèle avec ceux qui sortent de la fabrique de
M. Pape.
I
DialiZû'J Cv GOO
NOUVELLES DE PARIS.
3nstUut ïrc Statut,
SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE
DE L'ACADÉMIE ROYALE DES BEAUX-ARTS,
(««iïDi6oerOBW.)
la foule qui so presse toujours aux séances des diverses
académies dont se compose l'Institut, est surtout immense
lorsqu'il s'agit d'en tendre les essais desjeunes compositeurs,
sur qui repose l'espoir de la France. Un local vaste et
commodément disposé ne peut contenir les femmes élé-
gantes, les hommes distingués et la brillante jeunesse qui
encombrent toutes ses avenues; car jusqu'aux bancs des
académiciens, tout est envahi. Ce n'est pas seulement une
curiosité avide d'un spectacle, quel qu'il soit, qui rassemble
tant de monde dans le sanctuaire des sciences et des arts ;
c'est quelque chose de plus pur, de plus digne d'une nation
éclairée, de plus analogue & la solennité de la séance : c'est la
manifestation d'un sentiment de bienveillance qui veut en-
courager les premiers pas de jeunes artistes dans la carrière,
et qui s'empresse d'applaudir à leurs premiers succès. L'es-
poir quechacun y conçoit n'est pas toujours justifié par la
suite ; disons plus, il l'est même rarement ; mais si les ap-
plaudissemens qui éclatent de toutes parts s'adressent plus
souvent à l'apparence du talent qu'à sa réalité, ils ont pour
effet d'élever l'ame de celui qui les reçoit, de lui faire com-
prendre la dignité de son art, et de développer les dons qu'il a
reçus de la nature. Ces séances, et le prestige qui les entoure,
sont donc une bienfaisante institution, dont les railleries de
quelques esprits frondeurs ne parviendront pas, j'espère,
à détruire l'influence. L'artiste, dans le cours de sa car-
rière, n'est que trop isolé du public, et ce même public no
se montre que trop égoïste envers celui qui lui procure dea
254
jouissances; nu privons pas la jeunesse de brillantes illu-
sions, si favorables au développement du talent, et dont
ello ne sera désabusée que trop tôt.
Suivant le programme, la séance a commencé par la
lecture d'une notice historique sur la vie et les ouvrages de
M. Dupaty, sculpteur, par M. Quatremcre de Quincy, se-
crétaire perpétuel de l'Académie. Cet écrit, dans lequel on
a remarqué des aperçus fins et spirituels, a été accueilli par
des applaudïsscmens unanimes, lin, rapport sur les ou-
vrages des pensionnaires du roi, à l'Académie de France, à
Borne, a été lu par M. Raoul-Rochette. 11 a été suivi de la
distribution des grands prix de peinture, de sculpture, d'ar-
chitecture ci de composition musicale.
Les sujets de ce dernier concours avaient été: i" une
fugue à quatre voix et à trois sujets ; -l'Orphée, canialcà
voiïseule età grand orchestre, composée de deux récitatifs
libres, d unrécilatifmMur-ï d une cavaluic il de :b.ix air.-
de mouvement. Le premier grand prix a été décerné à
M.Jcan-KaptisteGuirand, né à Bordeaux, dgé de vingt-trois
ans et demi, élève de M. Le Sueur, membre de l'Institut,
et de M. iteicha, pour le couliepoiut. Le second grand prix
a été remporté par Ross- Despréaux, âgé de vingt-cinq ans,
né à Cleinaont, département du l'uy- dc-Dôme , élèvQ de
M. Bcrton, membre de l'Institut et de M. FjJfisj Un deu-
xième second grand prix a été accordé à M. Alphonse Gil-
bert, de Taris, âgé do vingt -deux ans et demi, élève de
M. Eerton et de M. Félis.
. Après la distribution des prix, le concert, composé seu-
lement d'une ouverture de AI. Iteicha et de la cantate
couronnée, a commencé. L'orchestre, qui était formé de
la réunion des mcilleins Lirtislcs îles divers théâtre s. et dirigé
par M. Kreutzer, a exécuté avec un Uni et une énergie qui
luifontle plus grand honneur. W Dabadie qui était chargée
de la partie vocale de la cantate, a fort bien chanté, quoique
sa voix parût éprouver quelque embarras dans les sons
aigus.
Ce n'est point parmi leseorrectes, maïs froides composi-
tions que l'Académie couronne quelquefois, qu'il faut ranger
355
le travail de M.Guiraud; la correction existe dans sa cantate;
mais elle y est compagne de l'imagination et du talent na-
turel. Une bonne déclamation dans le récitatif ; des chants
naturels, clégans cl qui prouvent qu'il a le sentiment deee
qui convient aux voix; une harmonie bien modulée, sans
excès de transition ; enfin, un orchestre brillant sans bruit,
voilages qualités qui ont valu 1 M. Guiraiid les su Orages de
?es juges cl le* ;iii|)Lmili*se!iietisd» public. Il y avait cepen-
dant dans le choix du sujet delà cantate, et surtout dans la
manière dont le poète l'avait conçue, des diilicullés assez
grandes pour embarrasser, non-sculcmcntuu élevé, mais un
maître consommé dans la pratique de son art.
LaMort d'Orphée, tel est le sujet. Quel est, je ne dirai
pas le musicien, mais le poète, mais l' homme du monde
qui n'aperçoit, au premier coup d'œil, tout le parli qu'on
pourra tirer dans le morceau final delà cantate, d#cliœui
des bacchantes, dont les mains déchireront le chantre de
la Thrace. Kh bien! ce eheeur n'existe pas! cl néanmoins,
comme s'il ne sullisail pas du sujet pour en 'dénion lier la
nécessité, le poète a pris soin de l'annoncer dans ces
Quel bruit iiitVi in se l'ait entendu!
D'une secrète horreur ju ne puis me défendre...
O ciel!... en cniirai-jc mes yeux?..:
Ce «ont elles!... les bacehontes!...
Des cymbales bru yanles ,
De leurs cris nicnaçaus , du leurs elisnts furieux,
Retentissent déjii les éebos de ces lieux.. .
Je le demande à qui n'est pas entièrement dépourvu de
goût et de raison ; n'estr-ce pas cruellement se moquer et de
l'art et de l'artiste que de les obliger à prêter leur secours
à de pareilles conceptions? Quoi ! ces cris menaçons, ces
chants furieuxi , ne parviennent pas jusqu'à, moi, taudis
que j'entends à merveillela faible vois d'Orphée expirant?
Je puig me fermer sur-le-champ une idée de cette scène
terrible par l'opposition des cris et des supplications d'Or-
phée; quelques mots suturaient, mais non ; les furies su
taisent, et leur victime, qui, raisonnablement, ne peut que
laisser échapper quelque accent douloureux, oie débite ce
a56
long discours, que je suis obligé de suivre péniblement
pour savoir de quoi il est question.
O Dieu puissant, fils de Latonc,
Toi qui fus mon maître , entends-moi J
Apollon , lin liant de ton troue,
Lance le fiait, je n'ai d'espoir qn'en toi.
Itarljares, arrêtai; pardonnei a mes pleurs,
Çu'ai'-jc fait? qu'aï-je dit î ces pleura sont tout mon crime ;
Épargnez en cejviir Ll ibeuduhtb victihi
Que le sort livre a roi fureurs-1
Mais rien no peut toucher leurs infletiblea cœurs I
O Dieu puissant, Gis do Latono,
Toi qui fus mon maUrc, enteods-moi;
Apollon, du haut de ton trône,
Lance tes feux, je n'ai d'espoir qu'en toi.
Tu m'as abandonné, grand dieu,
Aui horreur!, d'un nflVciix supplice! /
flfcydicc, altcnds-moi... je vais mourir... adieu...
Jo meurs... je Le rejoins... Euryilii ^!... Eurydice!...
Sans m'arrêtera faire remarquer dans ces vers l'absence
de lout rhyllimcct de toute césure musicale; sans demander
compte à Tailleur de ses- expressions impropres, de ses
chevilles et desa tremttantù victime, je dirai que le pauvre
faiseur (le Ubrelti, Tottola, qui n'afûciic point de préten-
tions académiques, aurait bien mieux servi son musicien,
soil sous le rapport de la coupe générale du morceau, soit
sons celui de la forme des vers; quoique la raison ne soit
pas ce qui brille le plus dans ses ouvrages, il n'aurait ja-
mais rien imaginé de la force de ce qu'on vient de voir.
On pourrait demander à la seclion de musique de
l'académie des beaux-arts, si elle a fait lout ce qu'elle de-
vait dans cette circonstance; et si ce n'est point à elle qu'il
:i]i[>.]|'ticii[ île f.iiri; di;> ni >j ce I iuns sur les su jei s qu'on donne
au concours. Certes, ce n'est pas le talent qui manque
dans celle section, et cependant MM. Bertoo, lloieldieu,
Catel, Cherubini et Lesueur auraient frémi à l'idée de
mettre en musique un pareil morceau. On dit que ces
messieurs en avaient si bien senti les difficultés, qu'en re-
mettanl le manuscrit du poème auiconcurrens, ils leur ont
dit (à propos du dernier air): tirez-vousde {ii comme vous.
a5?
pourrez ! Conseil fort lion à suivra, mais peu secourable.
Il est temps enfla que les gens de lettres qui travaillent en
France pour la musique, apprennent à parler la langue qui
lui convient, et c'est au* musiciensdont les noms sont une
autorité qu'est dévolu le droit de les guider.
C'est sous le poids îles conditions désavaiil agences qu'on
vient dédire, que M. Cuiraud a écrit son ouvrage; en avoir
triomphé, comme il l'a fait, prouve qu'il est né pour l'art
qu'il cultive, et qu'on peut tout attendre dé lui. Une cha-
leur peu commune règne dans tout l'air final. N'ayant pu
rbylhmcr le chant de cet air, il a placé habilement le
mouvement cadencé dans l'orchestre, et a disimulé par là
un défaut considérble, qui n'était pafle sien. Le désordre de
la bacchanale qu'il fait entendre sur les derniers vcrs{Eury-
dice, attends-moi'.... ) fait aussi beaucoup d'effet.
Il est un autre pointeur lequel je dois fc féliciter; c'est de
ne s'être point fait le copiste des formes à la mode, et d'être
resté dans le sentiment qui lui est propre. L'imitation du
style de son maître (M. Lcsueur) était un autre écueil au-
quel on pouvait craindre qu'il ue pût sa soustraire; car
c'est le défaut commun à tons les élèves, au moment où ils
sortent de l'école : il n'y est point tombé; en cela, le profes-
seur n'est pas moins louable. Il eu est si peu qui consentent
à laisser luire aux jeunes gens qui leur sont confiés ce que
la nature leur dicte, à ne pas substituer leurs idées à celles
qu'on leur soumet, et à ne pas considérer leur manière
comme la seule admissible. me soit permis de présen-
ter quelques réflexions à cet égard.
Tout homme doit savoir l'orthographe de la langue qu'il
parle. Celle de la musique présente de grandes difficultés,
et son étude est longue et difficile. Il faut donc qu'un jeune
homme qui se sent tourmenté par le besoin de produire
ses idées, apprenne d'abord cette langue, ses formes, ses
procédés, ses ressources ; ou plutôt ii faut qu'il sache tout
cela d'avance ; car, le moyen de faire taire son génie pen-
dant le cours d'éludesarides auxquelles il faut se soumettre?
C'est dans la jeunesse, ou plutôt dans l'enfance, qu'il faut
apprendre tout cela, et c'est ainsi qu'on eu usait autrefois
a&8
dans les conservatoires d'Italie. A quoi se bornent donc les
fonctions d'un professeur de eomposilit'n? A l'aire apprendre
d'abord à son élève le mécamsnuTdc l'art du clianl, sans
lequel il ne saurait jamais écrire convenablement pour les
voix' ; à lui enseigner la théorie de l'harmonie, et surtout
l'accompagnement du clavier, dont l'étude est ai favorable
au développement du sentiment deia modulation; à faire
connaître foules les règles, tous les procédés du contrepoint
et de la fugue, ou de l'art d'écrire à deux, trois, quatre, et
jusqu'à huit parties réelles ; à indiquer les dispositions et
la coupe en usage pour les morceaux de différens carac-
tères, sans les prescrire comme d'inévitables patrons; en-
fin, à faire connaître Tes ressources et les burnes des iustru-
mens. Du reste, il doit bien se garder de dire à son élève,
après lui avoir communiqué tout son savoir, ne faites que
cela ou comme cela ! Loin de le retenir dans des borncB,
qu'il n'est jamais permis de fixer à un art, il doit l'exhorter,
au contraire, à faire tout ce que la nature lui enseignera,
à tout oser, tout entreprendre; car, enfin, il n'y a d'espoir
que pour celui qui iuvente, qui fait autre chose que ce
qu'ont lait ses devanciers. Malheur à l'artiste qui, s'en-
thonaiasmant pour la manière d'un mailre, fût-ce même
du plus parlait, se le propose comme modèle, et ne voit
rien au-delà; celui-là ne parcourra jamaîsla carrière ré-
trécie qu'il se sera prescrite. La perfection est un réve de
l'humanité : nul ne peut y-ai teindre. Les plusgrauds géuies
n'en ont qu'une relative. Il n'y a donc pas de terme qu'on
puisse regarder comme le dernier. L'imagination, la fan-
taisie, sont les qualités essentielles : pourvu qu'on les pos-
sède, peu importe les défauts. lih ! quel est l'ouvrage où il
u'y en a pas? Quel est d'ailleurs celui qui réunit tous les
goûts, ton les les opinions? Mozart, le divin Mozart, n'a-t-il
pas ses détracteurs? D'ailleurs, cette diversité dans la ma-
nière d'enTisager et de sentir les arls, loin d'être un mal,
agrandit leur domaine, et tourne a leur profit. Sans clic,
ou n'aurait qu'une manière, dont l'uniformité ferail naître
(i) Celle rlude s C'it trop négligée Jusqu'ici par les cumposilcuit,
fiançais.
a5a
infailliblement le dégoût. L'artiste ne petit donc avoir trop
de liberté dans ses travaux, ni trop d'indépendance dans sa
pcnsée,ct lui prescrire une route, s'est s'exposer à l'égarer.
De tout ce qui vient d'être dit, je crois qu'on peut con-
clure que l'enseignement de ta composition, tel qu'on le
pratique généralement en France, est une des^auses qui
s'opposent! ce que l'école présente les résultats sali sfaisane
qu'on aurait le droit d'attendre des sacrifices du Gouverne-
ment. Une leçon dans Icquellc le professeur discute la
qualité des idées de son élève, n'est point une leçon ; c'est
une question d'opinion, oii les droits sont égaux; car, si
le maître a l'avantage de l'expérience, il est, par compen-
sation, soumis aux préjugés qui naissent de l'iiabitudo.
Tour lui, la régie est dans le passé; l'élève ne vit que dans
l'avenir. Or, de deux choses l'une : ou l'élève se soumettra
à l'autorité du maître, dans ces discussions de goût, ou il
lui résistera. Dans le premier cas, les leçonsserout dange-
reuses; dans le second, elles seront inutiles. L'harmonie,
le contrepoint, renferment l'art d'écrire; le géuieseul donne
celui de composer ; tout le reste est illusoire.
men pour la réception des ouvrages dramatiques. Le savoir
donne certainement les moyens de juger des qualités du
Style d'une composition ; mais qui oserait allinuer qu'une
simple audition suffit pour se former une opinion do sou
effet ? et cependant, c'est toujours sur une simple audition
qu'on prononce l'admission ou le rejet de la musique d'une
pièce.
Supposczun comité composé de Rameau, de Rebel et de
Francccur, et chargé de prononcer sur Vlphigtinit c«
Autùle de Gluck, ou Don Juan de Mozart, soumis à l'exa-
men de JonielU, de Traclla et de Fenaroli ; que pensez-
vous qui serait arrivé? Si vous voulez le savoir, examinez
ce qui s'est passé dans l'école, lors de l'apparition du Bar-
bier de Sévitte et des autres productions du maître de
Pesaro. De quelle réprobation n'out-elies pas été frappées ?
Qu'a-t-ou vu, si ce n'est leurs défauts? Que disaient alors
leurs admirateurs d'aujourd'hui? Le souvenir en est trop
a6o
récent pour que j'aie besoin de le rappeler. Cette histoire
est celle de tous les temps.
D'ailleurs, à des préjugés excusables, combien de motifs
moins purs viennent se joindre dans l'âme des juges d'un
ouvrage nouveau, même à leur insçu. Eh! comment se
défendre de préventions favorables pour un parent, un
ami, un élève de prédilection, ou d'éloignement pour un
inconnu, pour un rival peut-être, dont on prévoit les suc-
cès, Je ne dis pas que cela se voie; mais, enfin, cela peut
arriver. Ces faiblesses sont celles de l'humanité ! Et ce qui
prouve qu'an moins l'on se trompe, c'est que chaque jour
on voit le public réformer les jugemens de nos aréopages.
Tel ouvrago est prôné d'avance, et ne marque son entrée
dans le monde que par une lourde chute. Tel autre est
d'abord l'objet du dédain des habiles, et parcourt ensuite
une brillante carrière. A quoi servent donc les comités? Je
le dis franchement et selon ma conviction, à rien, si ce
n'est à nuire.
Mais cependant, on ne peut s'exposer à faire, à l'Opéra,
par exemple, les frais qu'entraînent la mise en scène d'un
ouvrage, qui peut n'être qu'un fatras ridicule ! D'accord :
que l'Opéra ne soit point un théâtre d'essai. Mais, me voilà
revenu à mon dire habituel, ayez donc un théâtre d'essai,
qui soit ouvert à tout le monde, qui dispense des artistes
estimables des fonctions pénibles de jugeurs , et qui
donne des résultats plus concluans que des décisions
de jury ou de comités. Chacun y gagnera : le public, en
plaisir; les déhulans, en facilité; leurs maîtres, en consi-
dération.
FÉTIS.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Beriin, j" octobre'. S'il existe, disait un journal alle-
mand, cette année à Berlin un dilettante- qui ne se croie
pas de bon ton, c'est qu'il ne l'aura pas voulu. Ancuno
(i) Eïlrail de la Gazette musicale de Berlin.
a8i
ville d'Allemagne n'a été visitée par un si grand nombre
d'artistes étrangers qui soient venus y donner des repré-
sentations et des concerts. Indépendamment de madame
Catalani et des dernières représentations de mademoiselle
Sontag, le Théâtre-Royal et celui de Kœuigstadt ont pu
offrir à leurs abonnés une suite de chanteurs et de canta-
trices telle, qu'on en oublie déjà les noms. La rivalité qui
existe entre ces deux théâtres profite plus au publie sous ce
rapport que sous celui du répertoire. Le Théâtre-Royal qui
a le privilège de jouer depuis le grand-opéra et la tragédie
jusqu'aux plus mauvaises farces, et aux singeries de jocko,
n'en profile pourtant pas assez, quoiqu'il possède d'ailleurs
un personnel remarquable, on l'on complu dus arlislus
tels que M— Milder et Seidler. Les grands opéras y sont
en général mal montés et mal exécutés, à l'exception des
seuls ouvrages de M. Spontini. On a même été jusqu'à se
permettre d'y faire entendre tes Noces de Figaro de Mo-
zart, arrangées et corrigées!!! On a remarqué que la plu-
part des opéras traduits de l'italien, et surtout ceux de
Rossini, n'y ont pas eu de succès, tandis que les mûmes ou-
vragesréussissaionlsurlc théâtre de Kœuigstadt. Quoiqu'il
en soit, le Théâtre- Royal a en aussi cet été un grand nombre
et une expression forte, qui la rendent particulièrement
propre au genre du grand opéra : elle est déjà repartie pour
Munich. Au nombre dus artistes qui lut on t. succédé, on cite
M^Rraiis-W i anit/ky. à laquelle on reconnaît beaucoup de
talent, et M. ttabiiigg., qui était arrivé du Hongrie, et qui
vient do terminer mis représentations. Ce chanteur, qui pos-
sède une jolie voix de ténor, et beau coup de facilité, pèche par
l'excès des roulades et des ornemens. Il a chante ces jours
derniers avec un grand succès les rôles de Georges de la
Dame i/lanchc, cl de Jean de Paris dans l'opéra de ce
Le théâtre de Kœnigsladt, qui est limité au genre de
l' opéra-comique et auquel il a été, pour celte raison, in-
terdit de donner le Faust de Spobr et VOteron deWeber,
36a
que le Théâtre-Royal n'a pas encore montés, tâche de lut-
ter ainsi bien que possible contre le désavantage de sa po-
sition. Le îrèle et l'activité se font plus sentir dans cette
entreprise que chez son rival privilégié. Il est vrai que
dans les deux dernières années, M"*Sonlag al tirait la Coule
à Kœnigslailt. Il est difficile de prévoir ce qui doit arriver
maintenant qu'elle est partie, d'autant plus que le public
demande du nouveau avec instance, cl qu'on ne sait trop
où en trouver, pu attendant, pour remplir une partie du
vide laissé par le départ de M"* Sonlag, ee théâtre vient
d'engager M"' Eva Bambcrgcr, jeune personne de seize ans,
quia débuté le 21) septembre, dans la Cendritlon de Itos-
sini. On lui a trouvé une jolie voix, de la facilité, même
du talent; mais peu de force physique, ce qui n'a rien
d'étonnant, vu son extrême jeunesse.
M11" Son ta g est allée recueillir des thalers et des adora-
tions à Breslaa; elle se rendra, dit-on, à Hambourg et à
Dresde, d'où elle reviendra n licrlin, pour y donner dix
représentations au Théâtre-Royal avant de partir pour
Paris.
Mumcn, 1" octobre. M. Spontiui avait été invité, par
l'intendance des théâtres royaux, à venir présider à la mise
en scène et aux répétitions de son opéra de te Vestale,
dont on voulait rendre l'exécution digue du mérite de
l'ouvrage. La représentation, si remarquants sous plus
d'un rapport, a eu lieu hier. M. Spontini dirigeait l'or-
chestre. Il avait à peine pris place, que le public le salua
par les acclamations les plus flatteuses. On n'a eu qu'à
louer l'ensemble de l'exécution de la part de l'orchestre
et des chanteurs'. On doit citer parmi ceux-ci M**Sigl,
aujourd'hui M"' Sigl-Wespermaun , qui remplissait le rôle
delà Vestale, et M. Loehle, qui chantait celui de Licinius.
R aisées LACTES!! , 3; septembre. La première fête musi-
cale de la Bavière rhénane a en lieu dans nos murs le
23 septembre. Plusieurs jours auparavant, la ville reten-
tissait de tous cotés des exercices des voix et des înstru-
mens, et, le jour de la tête, plus de quatre mille auditeurs,
dont la plus grande partie était venue des pays voisins par
a63
tous les moyens Je transport usités dans les provinces du
Rhin , se réunirent dans l'église protestante, oîi l'on exé-
cuta en entier ia Création d'Haydn, qui avait été spécia-
lement choisie pour la circonstance. On fut surpris de la
quantité de bonnes voiï et du bons chanteurs qui avaient
pu être rassemblés, et l'ou entendit surtout avec le plus
grand plaisir les voix de femmes qui chantaient la partie
d'Ève et les solos d'anges. Un bal termina la journée.
Fbancfobt, 4 octolre. On a entendu de nouveau et
avec plus d'altention l'Oberon de Weber, sur lequel les
idées sont maintenant changées. Grâce à une meilleure
exécution et à plusieurs nouvelles représentations, on re-
connaît dans cet ouvrage un grand charme et des beautés
fort originales.
Flobewcb. Trois opéras sont maintenant en activité dans
celte ville. La MatUdede Shabran, de Rossini, se joue
au théâtre de ia. Pergola. Les feuilles italiennes donnent
beaucoup d'éloges au chant d'Amélie Brambilla, qui joue
le rôle principal, quoiqu'ils avouent que ce théâtre est
un peu trop vaste pour le timbre de sa voix. Les autres
acteurs, à l'exception de Frezailini, ne plaisent pas.
Au théâtre Cocomero, Genlili et les cantatrices Grisi et
Alberti exécutent la Donna Caritea de Mercadante avec
succès. Enfin , la Seniiramide de Rossini , chantée par la
Boninî, et la jeune Veutùri, contralto, attire la foule au
théâtre di B&rgognissanti. Une semblable réunion ne-
s'était pas vue à Florence depuis long-lemps.
Rome. Un nouvel opéra, intitulé VInnocenza in peri-
gtio, vient d'être représenté avec le plus grand succès
au théâtre Faite. La musique est d'un jeune compositeur
napolitain, nommé Conti, qui s'est déjà fait connaître
avantageusement par quelques autres ouvrages dans sa
patrie. Les principaux chanteurs de sa dernière produc-
tion sont Zuccoli, Verger, Giordani et la Boccabadati.
— Les Vénitiens ont accueilli avec beaucoup de froi-
deur la Ginevra di Scotia de Mayer, qui a élé représentée
pour la première fois sur le théâtre Saint-Luc, le 1 5 sep-
tembre. L'entrepreneur a élé obligé de substituer Tan-
Digitizod by Google
s64
crali a la Ginevra, et l'ouvrage de Rossini a été accueilli
avec transport. La cantatrice Manfredini s'est fait ap-
plaudir dans le rôle d'Aménaide; mais on reproche a
M"' Caroline-Casimir Nay l'excès des fioritures dont elle
a accablé celui de Tancrede.
ANNONCES.
F. Ktoliu. Trois grands duos concertais pour deux
Ilotes, œuvre 87. Prix : 1a fr.
Idem. Grande sonate concertante pour piano et flûte,
œuvre 85. Prix : 9 fr.
F. Ries. Trio pour piano, violon et violoncelle, œuvre
143. Prix:9fr.
Paris, les fils de B. Schott, place des Italiens, n° 1.
— 1° Premier quadrille de contredanses sur le Ballet
delà Somnamtoute, arrangé pour le piano , avec accom-
pagnement de violon ou Ûûte, ad libitum, par Henri
Lcmoine. Prix : 3 fr. j5 cent.
a° La Brigantine, caprice sur la romance de M™ Du-
chambgc, composé par J.-B. Duvernoy. Pris: 5fr.
A Paris, au magasin de musique et d'iustrumens do
Henri Lemoine, rue de l'iiche Ile-Saint- Honoré, a' g.
— Le trio de Giulettaet Romeo, chanté avec succès au
théâtre royal Italien, musique de Vnccai, vient de paraître
au magasin de musique de Pacïni, boulevard des Italiens,
n° 11; prix: 4 fr. Go c. M. Pacïni publie ce trio tel qu'il a
été indiqué par H. Rossini, et tel qu'il a été chanté par
M11" Blasis , MM. Bordogni et Levasseur.
On trouve à la même adresse tous les autres morceaux
du même opéra , et toute la musique de Rossini , Pacini ,
Mcrcadante, etc.
Digitizod t>y Google
QUELQUES NOTIONS
SUR JOSQTJÏN DESPRÉS,
ILiiTBE DE linSHJCfi DE LOUIS XII.
Si noire but était d'entreprendre de donner, sur le plu*
célèbre des compositeurs du quinzième siècle, une uolice
par laquelle on pût se convaincre des immenses progrès
que Josquin Després fit faire à l'art musical , tant par ses
excellentes compositions que par le nombre des maîtres
fameux qui se formèrent à son école , nous ne pourrions
mieux faire que de traduire textuellement ce que Forkel
en a publié, eu soixante-quatorze pages in-quarto, dans sa
précieuse Histoire universelle de la musique et de rcu-
voyer à l'article Josquin dans le Dictionnaire des musi-
ciens1, article traduit et abrégé d'après le texte de Forkel;
mais nous Mous bornerons à relever quelques détails
inexacts, à préciser quelques époques de la vie de cet an-
cien compositeur, dont plusieurs ouvrages existent oncore
dansjesbïbliotlièques publiques de France et de l'étranger.
Forkel dit expressément que le lieu de la naissance de
Josquin n'est point connu, mais qu'on le croit natif des
Pays-Bas. Cet historien voudrait ensuite insinuer qu'en
raison du mérite de ses compositions, Josquiu pourrait
itre considéré comme Allemand, puisque Vitus-Ortel de
Wiadsheim le metau nombre des meilleurs compositeurs de
cette nation, tels que Seufel, Ucnry-Isaac et autres. Foui'
appuyer encore plus ses présomptions , Forkel dit qu'un
peut d'ailleurs considérer Josquin comme compositeur al-
lemand, puisque les Pays-Bas font partie de l'Allemagne.
Les Italiens ont aussi la prétention de le considérer cuinnm
■originaire d'Italie. Us ne l'appellent que JacopoPralnua
ou Jusquin DclPrato, le con»idéra*it comme étant né à.
Pralo eu Toscane-
(1) Aligtmcine Geichicbta der Uuïik , vof. 1, p. SSo.
(i) Article Jwtjuin Duprés, tu™, i", p. 337.
a* vor.. a 5
Pour noua attire* Français, dont l'école de mnsïque
Gallo-Batavc élait, sans contredit, la plus répandue et la
plus estimée en Europe, an quinzième siècle, tant pour le
chant que pour la composition, nous nous en tien droits
au nom de Josquin Després qui est Français. De plus,
nous ajouterons, pour preuve que ce compositeur est né
en France, ce qu'en dit Cl. Hémeré dans ses Tablettes
chronologiques des doyens de Saint-Quenlin, pape 161.
' Josquimis à Pratis, magister sj/mphonim rcgùe suù
«Francisco, eanonicus Simcli-Quinliiti. Huic. Fràn-
• eisco rege potlicito sape prïmam prœbcndam vacatu-
• ram, elc. Josquin Després, matlre de la musique du
« roi sous FrançoisI, chanoine de Saint-Quenlin, ayant
> demandé plusieurs fois au rot la première prébende va-
■ cante, elc, elc.'o Claude Hémeré rapporle ici l'anecdote
du motet : Memor esto verbi tui, composé par Jnsquin ,
à l'occasion de celle prébende, puis il ajoute : » Fuit itte
« cantandi arte cfarîssimtis.infantuius cantor in choro
• Sancti - Quintini , tvm ibid musical prœfeetus , pos-
• tremo magister sijmpkoniœ regia;. Cet homme célèbre
t dans l'arl du chanl, encore enfant fut chanteur dans le
c chœur de l'église de Saint-Quentin, ensuite il en devint
«le maître de musique, et enfin matlre de chapelle du
Il paraît donc évident que les parens de Josquin , s'ils
eussent élé Allemands ou Italiens, ne l'eussent pas amené
de leur pays pour le placer enfant de choeur chantant à
la collégiale de Saint-Quentin. La-Croii-du-Maine et Du-
verdier, lom. a, p. 7, parlent ainsi de Josquin. 1 Josquin
• Des jP-rc;, natif du pays d'Haynaultcn la Gaule-Belgique,
« l'un des premiers et des plus exccllcnset renommés mu-
« sicîens de son siècle. Il a mis plusieurs chansons en mu-
« sique, imprimées a Paris, à Lyon, à Anvers et autres licuï
« par une infinité de fois. » M. De la Monnoye fait au su- .
jet do celte citation les remarques suivantes. 1 II fallait
■ écrire Desprez. Simler, qui dans son Abrégé de Gesntr
(1) Op pfut voir tlnns le Tlielionnaire det Muiiàtni, à l'article cili
ci dessus, ries dtlûils rp.i noiis croîtras pouvoir omettre ici.
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» a ilit Jodocus à Prato, ilevail dire à Prat'is. Drrvo.it que
■ Josquin, comme si l'un écrit-ail Jossequin est un dimi-
« nuliï de Josse. La musique do Josquin était fameuse
■ même en Italie. Le Doui, dans sa Libraria, au chapitre
« intitulé la Musica stumpata , n'oublie par <e Messe 'le
« Josquino, cinquciibri. » .».
Mais nous avons trouvé dans les sMppWmeiis manus-
crits à l'ouvrage de T.acroix-du-Maine, parl'abbéMereicr
dit l'abbé de Saint-Léger, des renseignement, qui, éloi-
gnant toutes conjectures, nous donnent le lieu de la nais-
sance de Josquin. Dans ces supplémens manuscrits, dont
nous devons la communication à l'obligeance de M. Van-
l'ract, conservateur des ouvrages imprimés de la Biblio-
thèque du lioi,nous trouvons ce qui suit, t Jodocus de
« Pratis, Josquin Desprez, musicien célèbre estoit de Garn-
it bray. Voicy ce qu'en dit Lcduchat dans la note 48> sur le
■ nouveau prologue du 4' livre du Pantagruel de Rabelais,
« qui en parle, aussi bien que de plusieurs disciples de ce
« Josquin1, tom. 4, pag. 4-'l ■ P> i& d'entre ceux que Ralio-
« lais nomme icy , dit Leduchat, furent tes disciples de
a cet ex cellent musicienquï estoil de Cambray, et duquel
ait y a plusieurs chansons imprimées avec la note , à
"Paris, à Lyon, à Envers et en d'autres lieux: V oyez La
«Croix-du-Mainc et la préface' d' un recueit de cliun
« sons, imprimé chez [ïaliard. Van 1672 '. Jl ètoit con-
(1) Les disciples de Josquin, nommés dans le mCmc prologue, sont :
Moula, Jean Mouton, itiebafort, Bcrcbem, Adrien Wnillaert , Clément
Jannequïn (do qui noua avons la fameuse ebanson de la déTaili: dr~
Suisses à la bataille de Marignan), Claudin (le jenne) de Valcnciennes,
Bourgogne , Certon et Maillait.
(1) Ronsard, dans sa Préface au roi Charles IX, mise a la télé du re-
cueil dont parle ici l'abbé de Sainl-I-i-p-Ri -, s'c\i>rirue aimi: ■ Et pour
■ ce, Sire, quand il se manifeste quelque eircîlpnt ouvrier en ce! arl .
• tous le devez soagn en sèment garder comme chose d'autant eicul-
■ lente que rarement elle «pparoist. Entre lesquels se sont, depuis sït
«ou sept ringli anseslevet Josquin Desprei, Hennjer de nation, cl se*
.disciples Mouton , Yuillard , Richafort , Jancquin, Maillard. Cltodin,
• Moulu, Jaque), Certon, Arcadct, et de présent le plus que divin Or-
■ lande, qui, comme une muucbe a miel, a eueilly toutes les plus belles
• Heur» des anliens, et outre semble avoir seul dérobé l' harmonie. ri i.~
ï68
. temp0rui1v.de Jean Lemaire des lietyes, et de mémeiett
• nommés LogSct et Compère, témoins cm vers du mêmt
• Jean ternaire, dans son poème du temple de Venus.-
An fin milieu du chreur ouir pouTcs
Enlrnhriscr musique ilcianiltine ,
Et de Joaquin Ic3*verbea coulourer.
Puis d'Ockeghem l'arnioole trèl fine ,
Les termes dum de LujSL'l et Cnmp*ïc f ,
l'uni mùludii: i-jx cii-uï mime confine.
• Lamasique de Josquin estoit simple, et s'il arrivait
« à quelqu'un de eeuat qui chantaient Us mottts au
« chœur de vouloir les broder, il se faschoil et te que-
■ rettoit, très dispose d'ailleurs à se corriger iui-mème
« sur-le-champ, comme il lui arrivait quelquefois lors-
« que certains endroits de ses compositions venaient à
% choquer son oreiltedans les répétitions. Voyezaucha-
tpitre de sioDns, les lieux communs de Metanclhon,
a cotUgés par J. Manluis. »
]1 parait donc constant que Josq\t[ti élait .le Cambrai et
que ses parens le placèrent comme cnfantde chœur chan-
tant à Saint-Quentin. Parvenu à l'âge de puberté, il de-
vait chanteur et ensuite mallre de chapelle et chanoine
de la collégiale; mais Cl. Hcmeré se trompe lorsqu'il dh
que Josquin fut maître lie musique de François I"; il eut
dû dire Louis XII, ainsi que l'assurent Pierre Opmeer, dans
sa Chronographio imprimée in-8", à Cologne, en i6a5, cl
Glareau, dans sou Dodecachordon , page François
cette époque, comme nous le verrons par la suilc.
II n'est pas facile de préciser l'année de la naissance de
ce fameux musicien. Cependant, si l'on considère que le
maître sous lequel il fit se» études de composition, Oken-
beinion Okcghem, vivait encore eu 14 jG, puisque Tinctor,
lie , sept et huict partiel. A Paru , par Adrian le Hoy et Robctl finïW,
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i«0
celte même année, lui dddia son ouvrage. De fa nature
m de fa propriété des tous , ou peut présumer que , né
vers i44°i époque à laquelle florissuit Juan Okcghem, .los-
quin aurait fait ses éludes musicales au sortir de la maî-
trise de la collégiale de Saint-Quentin, vers i/|55 ou 1460,
et que, devenu chanteur de cette église, après la mue de
sa voix, ses talens acquis l'auraient fait recevoir comme
inaitre de musique, place à laquelle était attaché un
canonicat, ■» ria .9U3*:i.0iii
Après avoir obtenu une réputation méritée, Josquin
passa en Italie, où ses ouvrages le faisaient déjà considérer
comme l'un dus premiers compositeurs modernes de sou
temps. Appelé àêtre le premier chanteur du pape Sixte IV1,
il parait qu'il composa et fit exécuter à Rome une
partie de ses messes et de ses motels; mais ou peut assu-
rer que la grande réputation de Josquin en Italie n'était
pas encore A sou apogée lorsque Tinclor écrivit nés divers
traités de musique et de contrepoint, car cet auteur n'eût
certainement pas oublié de citer Josquin parmi les grands
maîtres à imiter, si les années 1476, 77 et 78 n'eussent pas
été précisément celles où, tandis que Tiuctor composait
ses ouvrages didactiques, Josquin faisait exécuter ses ouvra-
ges pratiques à la chapelle du pape. Ce ne fut doue que
sous les dernières années du pontificat de Sixte IV que sa
réputation était tellement répandue qu'on regardait, alors
Josquin comme le prince de la musique, et que les auteurs
didactiques ne donnaient pour modèles des règles nou-
velles A suivre que des exemples presque tous tirés des
oeuvres de Josquin.
Il importe peu de savoir précisément si , après la mort
de Sixte IV, Josquin resta encore en Italie ou revint en
Franccy occuper unematlrise de musique, et un canonicat,
soit A Saint-Quentin, soit A Cambrai; mais il n'est pas in-
différent de fixer l'époque A laquelle il a pu être attaché
A Louis XII, comme son maître de musique, ou comme
le dit judicieusement Glareun, le premier de ses chan-
(0 SUte IV occnpa lu saint-siÉge depuis l'année ' îiji jusqu'en
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leurs'. Ce prince moula sur le tronc en 1/198; Josqnin n'a
donc pu être le maître do musique de sa chapelle quo
très peu de temps, et l'anecdote des motels : Mentor eslo
ve.rbi lui : Portia mca non est in terrà viventium: Bo~
nitatem feeisti aum servo tuo, vient confirmer ce que
nous avançons. Ce compositeur pouvait avoir alors près
de soiïante ans. Dans la seconde année de son règne,
Louis XII épousa, à l'âge de trcnle-sept ans, Anne de
Bretagne, et, celle même année (1499)1 'fi ro' quilla la
France pour s'emparer du Milanais. Il entra en personne
à Milan, le 6 octobre. Louis XII n'est donc resté sans
voyager hors de France, depuis son avènement au trône
jusqu'à la première invasion dans le Milanais, qu'environ
dix-huit mois. Le sacre et le mariage du roi auront été
cause que la musique qui était déjà en grande faveur dans
lescours des souverains, n'aura pas été dédaignée de celle
de France, lors de ces évéuemens, et soit que Josquin y
ait été appelé lors du sacre ou du mariage , il est constant
que ce grand inailre a composé les motels que nous venons
de citer, à l'occasion de la promesse que le roi lui avait
faite de lui donner un canonicat. Un sait aussi qu'il tut
asseis habile pour faire exécuter, par le roi, une partie de
tùior, dans un canon composé ctprès pour prouver à ce
prince qu'il pouvait participer aux concerts de la cour,
quoique la faiblesse de sa voix ne lui permit pas de l'es-
pérer.
Il est probable que Josquin, quoique peu favorisé de la
fortune, ne se serait jamais proposé de demander un ca-
nonicat au roi, s'il y eût eu un grand avantage d'être at-
taché à la cour, comme maître dé chapelle; mais cet
emploi honorable et lucratif n'existait pas encore à cette
époque, elle plus habile musicien n'était encoreconsidéré,
dans les cours souveraines, que comme primusinter pa-
res. C'est donc pour cette raison que Josqnin, dont la
carrière était déjà avancée, et les moyens d'existence peu
assurés, profita de son séjour à la cour pour obtenir du roi
un canonicat qui, sur la fin de ses jours, le mît à l'abri do
(1) (ilarean, P«g,4G8, %. 17.
'rindigcuce; car il avait déjà éprouvé en Italie» en diffé-
rentes occasions, que les talens ne sorti pas toujours ac-
compagnies «le l'aisance1. Prenant soin de ne perdre au-
cune occasion pour arriver à san but, il s'était adressé
aussi à un seigneur de la cour, pour le prier d'appuyer sa
demande auprès du roi; mais ce seigneur qui, comme tant
d'autres, craignait d'employer son crédit si ce n'était pour
lui-même, éludait toujours Josquin en ne répondant à
ses instances réitérées, <]uc ce peu de mots : Laissa faire
moi, laisse' faire moi.1 Josquin, dont le caractère était
à la fois profond', sérieux et plaisant, composa à ee sujet
une messe, dont le llième obligé était les mots : ia, sot, fa,
re, mi, sur lesquels il badina tant de fois les mêmes redites,
que le seigneur s'aperçut enfin qu'il était l'objet d'une
plaisanterie dont la cour se diverlissait. Ce trait l'aida de
même à faire entendre an roi que sa majesté avait oublié
de lui tenir parole, plusieurs eanonicals ayant été donnés,
sans que Josquin eût participé aux grâces du monarque.
Le motel, Mcmor eslo verti fut, fixa sur son compositeur
les yeux de la cour; mais le roi n'entendit pas ou ne voulut
pas entendre le sirns des paroles de ce molet exécuté pen-
dant la messe. Il n'y avait donc plus que la plainte indi-
recte qui fût permise au peu fortuné Josquin. Enfin son
autre motet : l'ortio mea non est in terrd viventium, l'ut
composé dans un stjle si touchant, que le roi accorda à
sou premier musicien le canonical qu'il lui avait demandé
avec tant d'instances et d'une manière si ingénieuse. Soit
que le motet : ISonitateni fec.hti cum servo tuo, que Jos-
quin compo-a p'jur témoigner au rui ses rcmerciuieus.
était loin de valoir le précédent; quoi qu'il en soit, Josquin
obtint un cauonieat qui fut le doyenne de Coudé , comme
le prouve Aubert Mirants, ( Lemire ) dans son ouvrage
(i) Zarlïn rapporte, jis^r. ~ni\ (le sus Si,pp!rm.-:n musicaux, un ïunjirt
Sli;. |>hici Aquilanu avait un jour composé et cnvovi'i il soa ami J re-
quin , pour le consoler de ce que la fortune ne lui souriait pa> , nialgrù
»on grand génit.
(a) En italien, Lascia fan mi.
in-fr intitulé : de canonicorum cottsgiit, capi iC, pi 4a1
de b. Maria; et Sancti-Waguulpliii Collegîo Coudateusi iii
Hannonïà.
zEstautem. Condatum[vu(gà Condé)Hannoniai op-
• pidum (dit cet auteur) in quo moniatium insigne
• canonicorum cotlegiutn, à muUisjam sœoutis resedit.
» Hvjus cottegii Decanus patrum memoria fuit Josqui-
«hcb l'ikTWfmusicusexcetlentissimtts, quiprimus ferè
« arlem musicam in ordintm rtdegit, muilitque eam
*vartiùus attxit. Obiit anno Chritti l5oi. Condati
« Il existe à Condé , ville du Hainault, un célèbre cha-
«pitre de chanoines réguliers, fondé depuis plusieurs siè-
■ cles. Josquin Jlcsprés, excellent musicien, le premier
• presque qui mit de l'ordre dans l'art de la composition
«musicale et l'augmenta de beaucoup de parties, fut,
« d'après le témoignage des anciens, doyen de cette collé-
.giale. Il mourut l'année de J.-C. i5oi, et ilaélé inhumé
o sous le jubé de Coudé, devant le maître-autel. *
D'après un pareil lémoignage, il ne peut plus y avoir ds
doute sur les dernières années de l'existence de cet homme
célèbre, que les auteurs, tant nationaux qu'étrangers, re-
gardent tous comme le musicien et le compositeur le
plus étonnant de son siècle.
PERSE,
Correspondant de l'Institut.
Le savant auteur de la notice qu'on vient de lire, const*
dère le passage d'Aubert le Mire, qui fixera 'la'le dela'mort
de Josquin Després à 1 5o i , comme sans réplique : j'avoue
que je ne parlage pas sa conviction, et qu'il me reste des
doutes, dont je vais expliquer les motifi. J'espère qu'on
me pardonnera les détails fastidieux dans lesquels je
suis forcé d'entrer, en faveur du grand musicien dont il
On avu dans la notice de M. Pcrne que Josquin avait en
pour maître de composition Okegtiem, chapelain de
Louis XI, et trésorier de Saint-Martin Je Tours. Après la
mort de celui-ci, Josquin composa tin chant funèbre à
273
-cinq vois, sous le nom de Déptoralion , sur ces pa-
-roles :
Kymphes des-bois.
Déesses des fontaine»,
Chantrei eipcrts de tantes nations.
Changes f os voi*,
Fort clairet et hautaines ,
Fn cris-tranohanli. et lamentations;
C>r-d'Atropos,lestnoieitatioo«
Vostre Oheghtm pat sa rigueur atrappe , etc. *
Il est donc prouvé par là que Josquin Després survécut
à son maïlre. Or, si nous découvrons que celui-ci Vivait
encore après l'époque fixée par Le Mire comme celle de la
mort de l'élève, fl me semble que l'autorité de cet écrivain
perdra beaucoup de sa valeur. C'est précisément ce qui a
Jean Le Blaire , poète etliistorien, surnommé de Beiges,
parce qu'il était né à Bavai (en l4;5), petite ville du liai-
riant, qui portait alors ce nom, dans son éptlre à maître
François Le Rouge *, datée -de Blois, iSia, parle d'Okeg-
liem en ces ternies : •
« En la fin de mon troisième livre des illustrations dé,
•.France, j'àî bien voulu, à la requesle et persuasion
• d'aucuns mes bonsamys,adiouter les œuvres dessus es-
«criples, et mesmement les communiquer à la chose pu-
• bliquede France et de Bretagne, afin de leur monstre r
«par especiaulte comment la langue gallicane est enrl-
. chie et exaltée par les œuvres de monsieur le tlirésoricr
« du boys de Vinceunes, maistre Guillaume Crétid, tout
■« ainsi comme ta musique fut ennoblie par monsieur tb
% thrisoritr de Saint-Martin de Tours, Okegkem, ores
• mon voisin et de nostre nation, etc. 1
{0 Voyee 1> mtrtîfnie de ce morceau singulier dans l'HïiWre gêmrëtt
He la musique, de Forkel, f. i , p. S\ttis«iv.
[%) À la mite de ifs Ulmtratuau rfe Franc*, Paris, iStj,in-8°, ri
1548, in-8-, Jean Le Maire fut secrétaire d'Anne de Hrclague, et Vivait
à Tours lorsque ceci fol ecrtt.
(3) D-uprè.™ passage, on voit qu-Oacghem était ne dans té Hainant,
«t peut-être » Bavai. A l'ég.tddct* date do si naissance, il est v,hU
semblable qu'elle tit antérieure t \Uo , car Jean Tïncloris lui I rKHié
a'toL. , a4
Ainsi donc Okeghem vivait encore en i5ia, et, à moins
de supposer que la déplora lion attribuée à Josquin n'a
point fié composée par lui, on est forcé d'avouer qu'Au-
bert Le Mire a parlé de la date de sa mort un peu légère-
ment. Mais, dans celle supposition même, il resterait en-
core quelques autres difficultés qui ne sont pas moindres.
D'abord , une autre dèpioration sur la mort d'Okegliem ,
composée par Guillaume Crespel , prouve que Josquin a
survécu à son maître, car les paroles le disent positive-
ment :
;■ . Agricola, Verbonnct, Priori»,
Jotquin du Prés, Gaspard , Brumel, Compère,
Ncparlctplusdejuyeu.chants.neris,
Main compose! un ne rtcortkrîi ,
' Pour lamenter noslre laaiatre et bon pire.
Un autre luit, non moins remarquable, est celui-ci :
Jean-Georges Schilen cîle dans sa Bibliothèque choisie
(Biblioth. enucieata, p. ?>î?) , un traité de musique com-
posé par Josquin, sous le titre de Carnpeiulium musicale,
qui, selon lui, portait la date de i5o;. Ou ne peut croire
que l'existence de ce Irailé soit supposée; car llcrurdi en
parle positivement, et comme l'ayant vu, dans sa Staffetta
miisicaU (p. ia.)'.
Enfin, cl ceci est encore plus concluant : Adrien Pclit,
surnommé Coclius ou Cocticus, musicien français, qui
était maître de musique à Nuremberg, vers le milieu du
16" siècle, et qui éiait né en i5oo, a publié un traité de
son Irailè de Ntttttràtt proprkt .le lonorum, daté du G nOï'mbrn 1(76,
et il le qualifie de premier chapelain du roi de France, Louis XI , et de
tri» excellent et très ecjfcbrc professeur de musique; d'oui! suit qu'il ne
pouvait avoir alors beaucoup moins de quarante ans, puiaqu'il jouissait
premier chapelain de Louis XI n'eiolut pas celui de trésorier de Saint-
Martin de Tours, puisque ce prince tenait sa cour au Pkssh-kt-Tcuts ,
prèa de cette ville.
(i) Voici ce qu'il cd dit: • Mena pan» c un tospiro non aakanu due
■ consoname perfette d'una medeaima «petic, qnando non vi nia il moto
■ contrario, perche 00a sono liameiiatc da allie comou au lu, esentendo
■ si ignude, non generano variaiione alcuna nell' armonia corne ben
. nalo Attfifina.' jtCHta umibneit inlegram imparti mauunm obitnat. ■
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ï75
musique, oïl il expose la doctrine <le Josquin dont il était
élève. Voici le titre de ce livre : Compendiummusicw des-
cription ab Adriano Petit Coclio, disciputo Josquini
desPres.inquaprœur cœtera tractanturhœc: 1° demodo
ornate caneiidi; a° de regutâ contrapuncti ; 3' de com-
positions-; Nuremberg, i55a, in-4°. On y trouve dans la
seconde partie un chapitre sur le contrepoint intitulé : De
■ reguiâ contrapuncti tccundùm doctrinam Josquini de
Pratis. On voit qu'il est impossible qu'un homme né en
i5oo ait eu pour maître un autre homme mort en i5oi.
Voilà bien du fatras pour une date ; mais j'ai cru devoir
livrer ces objections ans réflexions et à la sagacité de
M. Perue.
FÉTIS.
NOUVELLES DE PAKIS.
THÉÂTRE ROYAL DE L'OPÉRA-COMIQl*.
. $ttmùrt ttyrfonfarf»» U V&tff$.n et U &ngni>i«-,
OPÉBA-COMIQUB ES DEUX 1CTES ,
MUSIQUE DE M. PROSPER DE GIWKSTET,
Samedi i3 octobre. Quoles esprits forts se moquent tant
qu'ils voudront des frayeurs qu'inspire le nombre treize!
décidément il porte malheur. Je n'en veox poinl d'autre
preuve que le funeste treize octobre dernier. Ou donnait
ce jour-là quatre pièces nouvelles sur trois théâtres do
Paris, et pas une n'a échappé à sa maligne influence.
Opéras comiques, vaudevilles, musique française, musi-
que allemande, (oui s'en est ressenti, et se porte plus ou
moins mal. liais aussi quelle imprudence aux acteurs, aux
comédiens, aux directeurs de tliûâtrcs, d'aller se jeter à
l'étourdie à travers ce jour malencontreux! Un écrivain,
dont le nota m'échappe, a publié naguère un livre qui cou -
tient, scion lui, douze cents vérités dramatiques: je ne
gais si l'on y trouve ce conseil : dépex-vous du treize, mais
celui-là en vaut bien un autre. Mais laissons les réflexion»
philosophiques où cabalistiques , et voyons si le quan-
tième est seul coupable de tant de désastres.
Les histoires d'eufans qui ne commissent pas leurs pires
0V1 de pires qui Sont à la recherche de leurs enfans ne
dont pas rares; elles servent depuis longtemps de fond à
des rom;uis. à des coules, à des nièces de ilu'-ùiie. Ces évé-
père s'informe peu d'à résultait de certaines passades. Ce-
pendant, comme celle insouciance n'est pas dramatique,
les auteurs se gardent bien de la mettre en scène. Les hé-
ros de leurs diurnes sont presque tous d'une sensibilité ex-
quise. II y a toujours une voix secrète, un cœur qnî
parle, et qui porte les parens vers leurs enfans, ou ceux-ci
vers lenrs parons inconnus. Malheureusement , le publie
saisît plus vile le côté ridicule que le côté moral de ces
sortes «o reconnaissances, et le moment critique est tou-
jours celui où on les voit venir.
Dans t'Orpheiin et te Brigadier il y a aussi de la sen-
sibilité, des voix secrètes, et une reconnaissance: et rien
de tout cela n'a paru plaire aux spectateurs, qui, peut-
être, se sont montrés trop sévères. Voici le sujet de cet
une jeune femme, mère d'un enfant do quatre on cinq
ans. Cet enfant est le fruit d'un amour malheureux. Sa
mère, qui, je crois, se nomme Amélie, et dont les cha-
grins ont détruit la santé-, meurt en recommandant son
fils aux soins du brave Francœur, et en lui confiant sa
faute , mais sans lui apprendre le nom de son séducteur.
Le hussard remplit sa promesse, et par ses soins, l'enfant
se développe et devient un brave soldat. Elevé de grade en
grade jusqu'à celui d'adjudant sous-officier, il a été couvert
de blessures dans la dernière affaire v en défendant les
jour» deso u colonel qu'il n'a pu sauver. Atj lever du ri-
*77
deau, la scène se passe dans la maison de campagne d'uni
original nommé Monsieur de Belle chas te, qui a la prè-
le n lion d'è Ire noble, et qui appelle sa maison un château.
Le nouveau colonel du régiment de Francœur est arrivé
la veille dans cet endroit , où se trouve cantonné le régi-
ment. C'est nu homme peu communicalil", peu aqii dus
plaisirs, et qui a voulu avoir un logement isolé dan» un
pavillon du jardin.
Le jeune Victor, fils adoplif de Francoeur, a été soigné
de ses blessures dans la maison de M. do Bel léchasse; il
est devenu amoureux de sa fille, en est aimé, mais il a un
rival d'autant plus redoutable dans sou capitaine, que
oelui-ci a l'aveu du gentilhomme campagnard, et que lui,
inconnu, simple sous-officier, ne peut prétendre à la m.iiu
de sa fille. Francœur s'est aperçu de son amour, el veut
l'arracher à ce danger en obtenant du nouveau colonel un
congé de quelques mois. Ils vont partir tous deux, lorsque
le capitaine amoureux de M"* de Bcllechassc surprend
Victor à ses pieds. Furieux, il ordonne à son jeune rival
de se trouver le lendemain à la pointe du jour au même
endroit. Fidèle a son devoir, celui-ci se trouve au rendez-
vous. Son capitaine lui parle avec hauteur, l'insulte; Vic-
tor ne se contient plus , et propose à sou rival de se mesu-
rer avec lui. Celui-ci accepte et lui promet le secret. Tous
deux s'enfoncent dans les bosquets; on entend le cliquetis
des épées ; un cri s'échappe , tout est en rumeur, le capi-
taine est tombé baigné dans son sang. On découvre que
Victor s'est batluavec son supérieur : il va être jugé par nu
conseil deguerre. Francccur au ilrsei[nm', kli[i<iIïu le colo-
nel de sauver son jeune ami, et, par ses révélations, finît par
faire découvrir à celui-ci que Victor est son fils. Cepen-
dant telle est la rigueur des lois militaires, qu'il reste pe^i
d'espoir de le sauver, quand une dépêche du, maréchal
arrive , et fait connaître la nomination de Victor au grade
d'officier. Dès lors il est sauvé. Le capitaine a repris ses
sens et ne mourra pas , et Victor, dans le môme moment,
retrouve un père et obtient la main de celle qu'il aime.
Ce sujet, bien qu'il n'ait rien de bien neuf, ne parait oc-
37S
pendant pas assez défectueux pour avoir mérité la rigueur
du public. Mais la longueur de» scènes qui précèdent le
moment où l'action se noue; les discours du .colonel, qui
font prévoir dès le commencement du premier acte le dé-
Doùment du second, un malheureux portefeuille, moyen
usé pour les reconnaissances; quelques négligence* dans
les détails et un trop grand nombre de morceaux de mu-
sique au premier acte, dont l'effet a été de ralentir la
marche déjà trop lente de cet acte, ont amassé insensible-
ment un orage qui a éclaté à la fin de manière à ne per-
mettre de nommer les auteurs qu'au milieu d'un bruit
affreux. Débarrassé des scènes inutiles et réduit à un acte,
je pense que l'ouvrage pourrait obtenir quelques repré-
sentations et serait agréable- On dit que les auteurs ont
reconnu les défauts de leur pièce et ont fait des coupures
utiles pour la secundo représentation.
La musique de M. deGinestcta été jugée sévèrement par
les journalistes. Elle n'est sans doute pas exempte de re-
proche; son défaut le plus remarquable est, selon moi,
l'uniformité de couleur. Mais en la comparant avec celle
du Maréchal Fabert, première production du même au-
teur, j'y trouve des progrès sensibles. Elle renferme des
réminiscences; niais les chants ne sont pas dépourvus de
grâce. L'orchestre annonce del'babitude, quoiqu'on puisse
y désirer plus d'effet. Il est un morceau dont personne n'a
parlé, quoiqu'il mérite des éloges : c'est le sextuor avec
choeur du second acte. Lo caractère est convenable à la
scène; la disposition des voix est bonne, et l'effet général
est très satisfaisant. La musique de l'Orpketintlie Briga~
dier n'est sans doute pas celle d'un maître; maisclle classe
M. deGenislel parmi les unniteurs distingués.
Il y a eu beaucoup d'incertitude dans l'exécution de cet
ouvrage. Les acteurs paraissaient craindre le résultat de la
représentation, et cette circonstance n'a pas peu contribué
au peu de succès qu'elle a eu. Chollcl qui, depuis prés
d'un mois, éprouve une sorte d'extinction de voix, a voulu
faire preuve de zèle, cl parait avoir repris trop lût les fati-
gues du théâtre. Il se voit forcé de nouveau de reprendre
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a?
du repos, cl le jeune Thianni s'est chargé de sou rôle pour
la seconde représentation. Vnlèrc, qui jouait le rôle di»co-
leiiel, el qui a éprouvé aussiune longue indisposition, n'en
est pas encore rétabli ; 6a vol* n'a pas repris son timbre et
réclame encore îles ménagemeus. Viienlhri a tiré du rôle
de Monsieur de Bellechasse luutle parti possible ; Huct est
bien placé dans celui du vieux hussard, el Loin on trier s'est
bien acquitté de celui de Victor. On doit des éloges a Mes-
dames Pradher et Prévost. Plus d'ensemble, plus d'assu-
rance, voilàeo qu'on pouvait désirer.
L'orchestre de l'Opéra-Comi<pie vient d'être considéra-
blement augmenté et mis au compte). On y trouve main-
tenant vingt violons, si* violes, huit violoncelles, six con-
trebasses, deux flûtes, deux clarinettes, deux' hautbois,
deux bassons, quatre cors, deux trompettes, trois trom-
bones et des timbales. Ce sont là les moyens matériels de
l'exécution; le directeur mérite des éloges pour n'avoir
pas craiul d'augmenter ce chapitre des. dépenses, cl pour
avoir senti ijue celle augmentation est devenue nécessaire.
Le talent des exécutans fera le reste. On doit espérer que
l'émulation, le désir de bien faire, l'amoùr de l'art enfin,
mettront bientôt cet orchestre au rang des meilleurs de
Paris, el le rendront digne de lutter avec ceux de l'Opéra
et du Théâtre-Italien pour la perfection d'exécution.
THÉÂTRE ROYAL DE L'ODIÏON.
tytttd'àrt ttyxismtatm fa ï'âeatt fa ÂmWrm,
OFÉBi-COHIQUE EN ON ÀCTB ,
MUSIQUE DE M. CONRADIN KREUTZER.
Il devient chaque jour plus évident que ks théâtres
étrangers n'offrent pas un assez grand nombre de pièces
susceptibles d'être traduites en français, pour alimenter
un théâtre musical tel que l'Odéon. Déjà l'administrai! 0n
de ce théâtre, convaincue de celle vérité, cherche à démon-
sSo
Irer à l'autorité l'impossibilité où elio se trouve d'exploiter
smi fvivitige, et, dans l'attente des concessions qu'elle
demande, est réduite à faire venir de l'Allemagne et de
l'Italie des <:imi Lit'.-Ltcni's dniit In qualité dYrIr.'m:;<T-< sert
de passeport aux ouvrages nouveaux [jn'ellc fait l'aire. Sin-
gulière condition, que les musiciens français soient les
seuls auxquels il n'es! pas permis de composer, en franco,
punr certains théâtres! Je consentirais volontiers à me
taire sur ce point si l'on pouvait alléguer quelque avan-
tage résultant d'un pareil ordre de choses. Ce qu'il jade
on reconnaît même tout le poids; mais les choses restent
ainsi parc«; qu'elles existent, el par la difficulté qu'on,
éprouve 4 faire le bien, lors même que rien ne s'y oppose.
jr. Quoi qu'il en soit, une innovation vient d'avoir lieu â
ÏÎJ'Odéou; un opéra français, écrit en France, et nue mu -
■Bique allemande, composée 4 Paris, ont apparu, pour ta
première fois, sur ce théâtre, le i3 octobre dernier. Le
succès n'a pas répondu' à l'attente de l'administration ;
mais le succès est uucohosc fort rare qu'on n'achète qu'au
prix de beaucoup de chutes. Au reste, le» auteurs se sont
montrés un peu trop téméraires dans lo défi qu'ils ont
porté à la fortune qui protège les mauvais ouvrages.
Uti jeuue homme aime sa cousine; il eu est aimé. Au
momeu tofi l'hymen va combler ses vœux, il reçoit une
leltrcqui lui annonce la maladie d'un oncle fort riche, et
qui l'appelle près de lui, 4 Lisbonne. Quoiqu'il en coûte à
son cteur, il part après avoir prévenu sa cousine, par une
lettre, des causes de son cloiguoment. li arrive à Lisbonne,
el trouve son oncle bien portant. Cet oncle ne lui a point
écrit. Il soupçonne quelque intrigue; mais bientôt il ap-
prend que sa belle en épouse un autre. Il iuro de l'oublier.
Cependant l'oncle meurt. Son neveu recueille sa succes-
sion, et revient en France, liu vieux domestique lui ap-
prend que sa taule el certain cousin Bastifiuaav^huji-
guais de iVoulauhau sont dans la maison , et y attendent
l'oudc, do«t ou veut le conseil tcmcul pour le mariage, du
Constance aveo Rastignao. Le jeone homme prend lu parti
de se déguiser, de passer pour son oncle ot de sonder les
dispositions de sa cousine. Constance a l'ait donner l'hos-
pitalité à un charlatan pendant un orage. Ce charlatan
vient pour remercier sa bienfailriee, et l.i prie d'accepter
une bouteille de son eau de Jouvence. Elle pose le flacon
sur une table. Rastignac snrvient, et croit reconnaître le
charlatan, oui n'est en effet qu'un matelot donl il s'est
servi pour faire remettre à son cousin la lettre supposée
qui l'a envoyé à Lisbonne , et qui lui a remis celle qui était
reçu par sa cousine et par Ilastiguac. Dans une scciii: qu'il
a avec celui-ci, il feint de vouloir le faire son héritier. Il
allecle une toux qu'il n'a point, afin de paraître plus vieux,
Rastignao le force à boire quelque chose; c'est un verre
de l'eau de Jouvence. Constance apprend enfin à son cou-
sin, qui passe toujours pour l'oncle, qu'elle n'a cessé de
l'aimer et qu'elle déteste Rastiguac. Transporté de joie, il
vacité, le charlatan ne sait comment l'expliquer quand il
s'aperçoit que la bouteille d'eau de Jouvence est débou-
chée; il ne doute pas que cette eau n'ait fait la cure mer-
veilleuse dont il est Le témoin. Tout se découvre; les
amans s'unissent , et Rastiguac su cun tente de sa part dans
la succession de l'oncle.
Il était difficile de rien imaginer de plus mauvais et de
moins musical que ec triste canevas. On ne doit doue pas
être étonné que M. C.onradin Kreutzer ait eu peu d'inspi-
rations pour un pareil sujet. Ce compositeur, qui jouit en
Alk'iiiiiguc d'une réputation méritée, n'a point trouvé dans
le faible vaudeville qu'il avait à traiter une seule situaliou
vraiment dramatique. Aussi la musique s'esl-elic ressentie
du ton glacial de ton poème. L'orchestre est élégamment
disposé, mais le chant est généralement commun et peu
soigné. 11 estlàcheux que l'auteur du CordUia n'ait pas en
pour son début eu France quelque chose qui lui eut foui ni
l'occasion de montrer sou talent.
Je ne dirai rieu de l'exécution, parce qu'elle esl à peu
a8a
pris aussi nulle que l'ouvrage. Uuprez a chanté avec goût
quelques phrases; mais su vois est bien faible. Quant à
M™ Mondonville, son chant est toujours incertain et d'une
mollesse cxlrPme. On croit quelquefois qu'elle va chanter
avec amc, mais ce qu'on attend n'arrive jamais.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
REVUE DES THÉÂTRES DE VIENNE.
Théâtre Karnthncrtlior. La troupe italienne .1 rempli
les promesses qu'elle avait (ailes au commencement de la
saison , en représentant déni nouveaux ouvrages, de Pac-
cini. La Getosia corretta, mélodrame semi-seria en deux
actes, est une bien faible production ; elle n'a obtenu que
quatre représentations. Cette pièce a élé donnée pour les
débuts de M" Dardanelli, qui, il y a deux ans, avait déjà
débuté à Vienne sans aucun succès. Pourquoi a-t-elle
voulu renouveler un malheureux essai? En vérité, on
l'ignore; sa voix est encore affaiblie, et elle n'a fait aucun
progrès, si ce n'est dans l'art de chanter faux. C'est aux
efforts de David que cet opéra fut redevable de sa courte
existence, malgré son défaut de chanter du nez, défaut
qui augmente tous les jours , l'ensemble de l'exécution de
cet artiste qffre un attrait irrésistible, et il a réussi à donner
du charme aux trois derniers morceaux, lesquels sont, en
y joignant un duo, tout ce qu'on peut remarquer dans cet
ouvrage. Le sujet de la pièce est la Framisca von Foitn
(Françoise de Foix)de Welgl , refaite et gâtée. Le second
opéra a été annoncé sous le titre pompeux de Gli Arabi
nette Gattie, ossia, it Trionfo delta fede (les Maures en
France, ou le Triomphe de la foi }, mélodrame sérieux en
deux actes, musique detsig. cavalière Giovanni Pacini,
maestro di capetla alla carte di S. A. R- l'Infante di
Spagna, duea di Lueca, e socio correspondante dct'Aca-
demiadi scienze ed arti di S a poli. L'introduction avait
fait concevoir un peu d'espérance; mais elle a été bientôt
détruite. Le premier finale est d'une faiblesse excessive.
M- Lalandc, pour le bénéfice ,1c qui col opéra était .Ion-
né, n'a rien négligé P°ur lc raire f*»"**** el «« a fW
habilement secondée par David; ils ont obtenu le plus
lirill.-ml succès dans le duo qu'ils chantent an second aclc.
Il i été redemandé unanimement. La Dardanetli a joué
' un rôle de musivo dans cet ouvrage; mais elle a paru bien
mal sous son costume masculin, el elle a chaulé hornble-
mwlhta.GUArahinMU Gattîe ont été su.v.s de i Ajo
nett'imbarrazzo (le Gouverneur dans l'embarras opéra-
bouffe en deux actes, musique de Domzctt.. Ensuite on a
«mlslechef-d'œiiïTOdûCImanwa.i^Vatrn.w-u.js^Mo.
monté par les meilleurs acteurs de la troupe. Il a été reçu par
lepuljlicavceleplusvifenlhousiL.smuiaprr.sccli.iU.uvr.iye,
£ représent : ~n grand ballet :rlil.:lé iie Frai- -:. i .
und der Raja {Vx Française et lc Raja), par Baptiste Pe-
tit- la mnsiquecsldoGyrowelz, si renommé pour les com-
pc «tirr.c .la » getrî. Calle-cî est pleine de r^ritc • "jUs
abonde en cbantslieureux, qui seraient dignesd être plac s
dans un autre lien.
Le personnel de l'Opéra allemand s'est augmenté 1res
avantageusement par l'acquisition de H™ Finke, qui a dé-
buté dans la Dame Manche, où elle a reçu des applau-
dissemens très mérités. Elle a jouéensuite IcrûlcdUf/atfce
dans le Freischillz, et n'y a pas obtenu moins de sucées.
C'est dans ce même ouvrage que M. Forli a fait sa rentrée
à son retour de flapies, où il avait eu nu engagement. Ou
n'avait peint oublié la manière distinguée dont il avait
joué Gaspard, et il a reçu l'accueil le plus flatteur.
Parmi les concerts qui ont été donnés, un des plus inlé-
ressans a été celui du chef de musique Soliindler, artiste
très estimé à Vienne, cl ami intime de Beethoven , dont il
a reçu les derniers soupirs. On y a donné un inlcrmèdo
comique de Holbcin, intitulé der Vorsnt: (la Indétermi-
nation ). précédé de l'ouverture en ut de Beethoven.
Les compositions sacrées qui ont été exécutées son! (es
Sept. Parâtes de Haydn, un gra'id Te Deum duméme au-
teur, un Miserere u r.apeUa,da Léonard Léo. le Stabat de
Pergolèse, avec le nouvel accompagnement dcSalieri, le
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Regina cœti de Seyfried, la Grande Messe en ré de Ché-
rubin!, et nue nouvelle Musse, avec graduel et offertoire par
Hummel, que les amateurs considèrent comme son meil-
leur ouvrage dans ce genre,
SrBTGABD.La saison d'été a commencé par lu grandopéra
de Faust, de Spohr, représenté pour la première foi»
dans cette ville ; le mérite de celte production est trop con-
nu pour avoir besoin d*un nouveau commentaire. Elle a
été montée avec le plus grand soin par les meilleurs ac-
teurs de la troupe. Les costumes et les décorations ont
surpassé de beaucoup l'attente du public. AI. Bœser, dans
le rôle de Méphistophélés, et M. Pezold, dans celui de
Faust, ont obtenu le plus grand succès ; ils ont été rede-
mandés tous deux après la représentation.
On a joué aussi deux petites nouveautés : dos W erths-
haus zum goiden Lcewen (l'Enseigne du Lion d'or),
dont la musique, qui est du chevalier Seyfried, est fort
agréable; et Schutermutkwitlen { les Tours d'écoliers ),
vaudeville, qui a du. son succès au jeu de M. Rohde. Pen-
dant la saison , on a remis Fcrnand Corlùz de Spontiui,
et le Tréior supposé de Méhul. L'ouverture A'Oberon de
Weber a été exécutée pour la première fois sous la direc-
tion du maître de chapelle Lindpaintner : elle a fait le
plus grand plaisir.
L'anniversaire de la naissance de Schiller a été célébré
avec une grande pompe. Après la représentation de son
Guillaume TeU, on a donné sou superbe poème de die
Glocks, mis en musique par Romberg ; le tout terminé par.
un épilogue arrangé exprès pour l'occasion, et qui se com-
posait en partie de diverses scènes prises dausscs meilleurs
ouvrages.
Wbuub. Les directeurs de l'opéra méritent des éloges
pour le zèle qu'ils ont déployé dans la saison. Ils ont re-
présenté pour la première fuis l'opéra de Wolfram : die,
betauberteRosc,{\& rose enchantée); les Tours a" écoliers,
très joli vaudeville, sitben Mwdchcn in Unifbrm, ( les
sept filles en uniforme), cl die Hasen au f der Ifa&cnfècidc ,
(leslièvi'os dans les bruyères), opérette français, miscu mu-
slque pàrlsouard1 . La pièce est bien misérable ; mais on y
trouve de très jolis chants. Quant à ta Rose enchanté*,
elle a été montée avec une splendeur vraiment remar-
quable. Quelques airs, et même quelques morceaux d'en-
semble font honneur à leur auteur; mais on remarque
beaucoup de faiblesse dans les accompagnemens, et il
règne généralement dans l'ensemble de l'ouvrage une
sorte de négligence, qui indique qu'il. a élé écrit par un
amateur, et non par un artiste.
M™ Eberwein cl Heygendorf ont obtenu les honneurs
de la saison, comme chanteuses et comme actiiees. Par-
mi les chanteurs, on a remarqué M. Slomeier, qui possède
une excellente école, et qui est 1res gracieux ; M. Molllie,
qui, avec peu de voix, sait à force d'art produire un effet
agréable, et qui l'emporte mémo sur M. Laroche, qui pos-
sède cependant une plus belle voix, mais qui veut souvent
faire plus qu'il ne peut.
Les concerts ont été nombreux et généralement intéres-
sans. On peut citer celui donné par M. Horak, membre
de la chapelle du roi de Saxe, qui a charmé tous les con-
naisseurs. ( a la 10 te desquels on a remarqué avec plaisir
le vénérable Gcelhc), par son admirable exécution sur
l'alto. Dans un autre concert on a entendu M. Uomberg,
fils du célèbre André Rnmbcrg. Il a joué un concerto et
un rondo de sa composition sur le violon , avec un talent
très distingué. Lue réunion musicale a eu lieu aussi, pour
célébrer l'anniversaire du Grand-Duc. On y a exécuté l'ou-
verture d'Oberon , suivie d'une nouvelle grande cantate,
composée par le professeur Riemcr, mise eu musique par
Iluminel, ei qui a été fort applaudie. Vu nouvel air italien
composé parle chef de musique Gœtzc, et parfaitement
chanté par M. Mollke a fait aussi beaucoup de plaisir.
KoESir.sBEnc. La saison a été productive ; elle a offert
boaiteoup de nouveautés aux habitans de Kosuigsboig ;
Je premier ouvrage représenté a élé le grand opéra dcJes-
(i) Nicolo 'Isounrd n'a jamai» donné d'opéra de ce tiireen France; il
Bit iraiseroblobl* qu'il csl qncution d'un paiticcto.
sonda, de Spohr; der aite Fetdherr, (le vieux général),
petit ouvrage tiré d'une anecdote de la vie de Kosciusko,
mis en musique par flollei ; das Ehepaar ans der alten
Zeit (les époux de la vieille roche), jolie petite pièce
mise en musique par Augely, et enfin VItaiianii in At-
gteri, de Rossiui.
On a exécuté Cosi fan tut ta à l'occasion de l'anniversaire
de la mort de Mozart, d'une manière qui n'était point in-
digne d'une si belle composition. Dans la même soirée
on a entendu plusieurs morceaux de musique instrumen-
tale de ce grand maître.
Plusieurs concerts ont été donnés : un entre autres mé-
rite d'èlre cité ; il a commencé par l'ouverture de Precio-
sa, suivie d'une grande symphonie- bataille , accompa-
gnée de chants et de choeurs, composée par le chef de
musique Wurst. Les chœurs furent chantés par plus de
deux cent cinquante personnes, avec une précision rare.
On a remarqué aussi un autre concert, donné par le
fameux violoniste Edmond Maurcr. Après l'ouverture
d'Oberon, exécutée pour la première fois à Kœnigsberg,
et qui à excité l'enthousiasme, M. Ed. Maurcr a joué un
nouveau concerto de sa composition. Ce morceau a fait
■grand plaisir, ainsi qu'une concertante pour deuxviolons,
exécutée par liti et M.Hutzier, chef de musique. Une fan-
taisie pour la clarinette , admirablement jouée par M. H.
Brermann, H été fort applaudie, ainsi que la bulle scène de
Beethoven, Ah! per/ido, qui a été très hieu chantée par
M" Carlellari. La séance s'est terminée par le quatuor
A'Oberon : over tkt Dark Blue WaUrs (sur les sombres
Eaux). Ce morceau, parfaitement chanté, a charmé tout
l'auditoire. .■•*'■ '
Dans une assemblée musicale , donné par le chef de
musique Saemann, on a fait entendre pour la première fois
à Kccnigsbcrg tes fêtes a" Alexandre de Handel. Ce ma-
gnifique morceau a excité l'enthousiasme de tous les amis
de la bonne musique, et l'exécution en a été 'satisfaisante,
surtout si l'on considère et la difficulté , et le peu de répé-
titions qu'il avait été possible de faire.
a87
Daaïf efyejncAtfio JugcmeDt dernier), oratorio de Fr-
Schneider, a été exécuté sous la direction du chef de mu-
sique fiiel, au profit des établis se m en a de charité de La
ville.
Piï.iuue. Le répertoire du théâtre de celte ville a été
augmenté par trois nouveaux opéras ; If Corradino de
Itossini, LaDame blanche de Doïeldieu et XaMaçon d'Au-
ber. Ce? deux derniers ont fait le plus grand plaisir.
Quant au Corradino, il a paru devoir élre rangé parmi les
plusf.ublcs ouvrages de Rossiui. A l'exception d'un ou deux
'morceaux , on n'y trouve que des passages tirés de ses autres
opéras, et défigurés par dos accoinpagncmens qui. ne sont
pas trop bons; pour s'éviter la peine de composer line
nouvelle ouverture, il a adapté celle de la Centrenlota h
Corradino. Au nombre des nouveautés , on compte aussi
un vaudeville orné d'une musique très spirituelle ,
composée par Cari lïlum ; cet ouvrage a pour titre : (1er
Bœr undder Bassa (l'Ours et le Pacha). Les autres opéras
représentés pendant le cours de la saison sont : Tancredi,
deux fois; la Gazza ladra, quatre fois; die Prinzessin
von Navarre, (la princesse de Navarre) ; Sargine, deux
fois; Don Juan, deux fois; die Zaïeberflotle ('la flûte
enchantée), quatre fois ; le Freischûlz, quatre fois ; et la
.Neige, -deux fois.- • ■ .......
On a exécuté, pour l'anniversaire <lela naissance de l'em -
pereur, une nouvelle cantate mise en- musique par WurfcJ.
Cette composition, un peu faible dans l'ensemble, présente
cependant quelques mou vemens d'une grande beauté d'ex-
pression.
F. W. Pixïs a donné dernièrement un concert dans le-
quel il a déployé son double talent di: compositeur et
d'exécutant, dans un concerto de violon, qu'il a joué avec
un rare talent. La manière expressive dont il a joué un
adagios transporté tout l'auditoire, Dans lu cours de la
soirée on a joué .l'ouverture de tfer Zaubtrspruch (la Ba-
guette enchantée, opéra de J. P. Pixis. Celte belle composi-
tion est d'un grand effet; elle est écrite un peu dans le style
de Cherubiui. Un air tiré du même opéra a été aussi fort
applaudi. M.Trlcbensée, maître de chapelle, a donné line
séance musicale, composée de trois morceaux : l'ouverture
d'Overon, Léonore, ballade de Zumstecg, composée pour
quatre voix, avec accompagnement d'orchestre, par
51. Triebenséc, ctun nouveau Requiem de W. Tomaschek .
■ ••»•■«• >■ ■ ANNONCES.
Sigismosdo, opéra séria, musica di Rotsini, ridotta per
piano- forte : presto 3fj fr. ; faisant partie de la collection
d'opéras italiens des plus célèbres compositeurs, avec ac-
compagnement deipiano-forté; dédiée <mx amateurs du
chant, publiée par Carli,
— Grande Messe à quatre voix, do Niccolo Porpora avec
accompag. d'orchestre ou d'orgue, à volonté : prix 24 fr.
— Collection de musique sacrée; Ave verum, chant
seul ou motet, propre à toutes les voix et à tous les temps
de l'aimée, avec orchestre ou orgue; par W. A. Mozart,
nouvelle édition : prix. , ... r 7 fr, 5o c.
— Ave verumeorpus, chant sacré, à quatre ou à deux
voix, ad (ibilum, aveo accompagnement d'orchestre ou
d'orgue ; par W. A. Mozart : prix 6 fr.
A Paris, chez Carli, éditeur, marchand de musique et
de cordes de Napies, boulevard Montmartre, n* 14, en face
le jardin Frascati. i.r ■
Parmi ces publications, nous recommandons particu-
lièrement aux amateurs la belle messe de Porpora, de ce
.compositeur de l'ancienne école si peu connue parmi
nous, et qui mérite de l'être à tant de tilres.
Los héritiers Carli préparent en ce moment divers ou-
vrages importais, qui feront suite à ceux qui oui été déjà
publiés par celle maison.
msconso
SDLH ORIGINE, PBOGRESS1 E STATO SÏTOME
^ff.v iïïitsic.i "Sïfatiiituî,
Dl ANDIiliA MAJEIl, VBNEZIANO.
( Discours sur l'origine , Ici propres et l'état actuel de la musique
italienne, par ândro Major, Vénitien'. )
DErsihlE iBTlCLE.
Une érudition rare cl des connaissances positives dam
la théorie do la musique, sont les qualités par lesquelles
M. Majer se distingue dans cet écrit. On a vu dans notre
premierarliclc qu'il ne se borne point, datif ses nxlierdief .
a copier des autorités, quelque respectantes qu'elles soient,
et qu'il vérifie sur les nionumcns mûmes les laits qu'il
rapporte. Ses investigations sur les instruirions en Usage
en Italie , dans les seizième et dix-sep [iètne siècles , sont
Il est un reproche qu'on peut cependant faire S M. Major,
c'est son penchautàaccorilcr aux anciens desconnaissances
très étendues dans la musique, et de leur attribuer, sur
l'autorité do quelques textes obscurs, l'invention d'une
foule de choses qui appartiennent évidemment au moyen
âge ou à la renaissance dos arts. Tels sont le contrepoint cl
les divers instrutnens dont l'origine est généralement cou-
sidérée comme moderne.- Pur exemple, le beau travail que
M. Cartier a fait sur l'Histoire du violon démontre que cet
instrumenta pris naissance dans les Gaules, dans des temps
assez rapprochés de nous1; eh bien! M. Majer le trouve ;tit
(i) Padoue, 1S11, in-H" de i;3 pages. VojW la Jlci>*« mimen/e, n" 55.
p. 3-1 1.
(a) Co travail île M. Carlin1 iU: aiinruicé pnm parai Ire par snusrri|i -
lion , ilans la Hume mu «mit- : ninis reAU: tu .'■uni i n il illV- ronce , dont je
me suis plaint plusieurs fols, s'csl encore manifestée dam celte DèrirW
sion, et M. Cartiei n'u ti'uui'é ipi'un lu lit nombre r!o siiii»rii|ilc[iii,
3" VOL. 3 5
temps d'Horace, chez les Romains. Il se fonde sur un pas-
sage iln Traité (les Hiéroglyphes de Jcan-I'icrre Valériane,
qui se rapporte il une médaille d'argent <|ue Scribonius Li-
brmus avait fait frapper, en mémoire d'un puits qu'il avait
fait dans le Forum, à Rome. Cette médaille , dont Valc-
riano rapporte la figure , porle l'emprcinle d'un violon à
l'une de nés faces. M. Majcr trouve ce violon parfaitement
semblable aux nôtres, et en conclut que nous nous attri-
buons à tort l'iiivciilioii du cet instrument. Mais, outre qu'il
est difficile de disliuguer sur le dessin d'une 1res peltle
médaille si un instrument à manche est un violon, qui
oserait affirmer que le dessinateur, dans l'impossibililé de
reconnaître ce qui se trouvait exactement sur la médaille,
n'a pas suppléé par sou crayon à ce qui manquait au mo-
nument ? Ces sortes d'embellissetuens ne sont pas rares :
j'ai eu occasion de voir quelque chose de semblable sur
une médaille de Néron (médaille restituée), citée par
lllanchini, dans sou traité De tribus gemeriùus instru-
mentorum musical veterum organisai, et qui, selon lui,
portait l'empreinte d'un orgue dont il donne le dessin. J'ai
vérifié la médaille, et je n'y ai trouvé qu'un objet peu sen-
sible , qui a quelque ressemblance avec un buffet d'orgue
portatif, mais auquel le dessinateur n'a pas laissé manquer
un tuyau.
Que sont d'ailleurs de pareils inonumens, quand on les
oppose à des preuves historiques invincibles? La médaille
de Néron, dont je viens de parler, est, comme je l'ai dit,
n.sùluCc, c'est-à-dire, frappée plusieurs siècles après la
mort de cet empereur, ce quisercenunaitau style; il se peut
que celle de Seribonius Lil/onus soit dans le infime cas,
et même qu'elle ne soit qu'une de ces fraudes innombra-
bles des graveurs du seizième siècle.
La reproche de partialité en faveur des anciens est le
seul qu'on puisse adressera M. Uajer, car, sous tout autre
rapport, son travail ne mérite que des éloges. C'est surtout
dans la troisième partie, qui a pour titre : Adolescence et
maturité de ia munit] ue italienne, qu'il se montre à la
homme degoûl. Le tableau rapide qu'il tract
des progrès tic cet ait, depuis je, milieu du dix-septième
siècle jusqu'à la fin du dix- huitième, renferme u on -seule-
ment des i'ails curieux et des vues fines, mais des pages
entières empreintes d'un sentiment profond des véritables
beautés de style, sentiment qui a toujours manqué a ceux
de nos littérateurs qui ont écrit sur la musique. Après y
la canlilène, et sur ie draine; après avoir donné des détails
intéressans sur les théâtres, sur la castration .les chanteurs,
et sur una foule d'objets qui se rattachent plus ou moins di-
rectement aux diverses branches de l'art musical, M . Major
passe à l'examen des chanteurs prodigieux sortis des di-
verses écoles de Home, de Naples, de Bologne et de Flo-
rence, et à celui des productions de Sçarlatti et de tous les
illustres maîtres sortis des conservatoires de Naples et do
Venise, jusqu'au temps de l'.iisiello et de Cimarosa. Il faut
l'avouer, celte époque est le siècle d'or de la musique ita-
lienne. M. Major en parle avec un enthousiasme, qui lu
rend peut-être injuste pour ce qui a suivi ces temps de
prospérité.
Il est un fait remarquable , c'est que tandis que la mu-
sique à la mode obtieni un succès général en Italie, parmi
les gens du monde , beaucoup d'artistes italiens et d'écri-
vains de cette nation s'attachent à la déprécier, cl à rabais-
ser le mérite de celui qui en est le promoteur. Le docteur
LÎchlenthal , dunl l'excellent ouvrage a clé analysé dans
celle revue, ne manque pas de se joindre à eux, et de déplo-
rer la .décadence de l'art du chaut et du goût; mais il paraît
très modéré sur ce sujet, quand on compare ce qu'il en dit
avec la diatribe violente sorlic de la plume de M. Majcr.
Celui-ci ne garde aucun ménagement, et se livre à toute
sa colère contre ce qu'il appelle les Vandales de la musique.
Peut-être ne scra-l-on pas fâché de connaître l'opinion d'un
Italien sur ce sujet. Nous croyons devoir satisfaire celle
curiosité, en donnant la traduction de quelques pages de
l'écrit que nous analysons. Voici comment s'exprime
M. Majcr. B
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•< Anivé à ce point, je devrais par prudence terminer
mon ouvrage et prendre congé de mes lecteurs. Il en est
pourtant quelques-uns qui pourraient avoir la fantaisie
de me demander quelle est mou opinion sur l'état actuel
île la musique en Italie ? si je crois qu'elle ait continué S
décliner, ou bien, si quelque génie puissant a su l'arrêter
sur le bord du précipice , et lui rendre sa splendeur pre-
mière. Connaissant l'intempérance des jugemens du pu-
blic sur les beaux-arts, et la tyrannie de la mode et du
goût régnant, j'éprouve une juste l'rayeur d'avoir à remuer
collé question. Cependant, quand ma franchise devrait
armer contre moi tout le genus irritaMie rnusieorum,
l'amour de la vérité , et de ce bel art qui a fait les délices
île mes jeunes années, mo donne du courage; et, puisque
je trouve l'occasion do faire connaître ma manière de
penser, je la saisirai sans hésiter.
« Je crois donc (et j'espère u'CIrc pas en Italie le seul
do celte opinion) que la musique a éprouvé le sort inévi-
table de tous les arts d'imitation, lesquels parvenus au
plus haut degré do perfection, ne tardent point à se cor-
rompre et a décliner rapidement. One horrible tempête
•boréale a éclaté sur notre belle pairie, et l'a presque en-
gloutie sous la neige et les frimas de la musique du nord,
ftous avons élé transportés bien rapidement du siècle des
Jrioste, des Tasse, à celui des Marini, des Cianipali
et des AchUlini; mais comme il serait inutile de s'élever
contre les imperfections de la musique moderne, sans
indiquer la cause de ces imperfections , et eu quoi elles
consistent, je vais essayer d'cxprimerclairemcnt ma pensée.
■11 mo parait que les extravagances les plus notables de
la musique d'aujourd'hui sont : ta confusion des genres,
lo défaut de proportion et la trivialité des cantiiinies;
l'assemblage de cent molij's opposés, l'abus d'un style /«-
rioso, ditiramùico, destiné seulement à étourdir les
oreilles, sans jamais arriver au cœur; les cbangcmeris ir-
l'é^ulicrs et fréquons do mesures cl de tons, sans aucune
harmonie avec les paroles; l'ennuyeuse uniformité des
cadences, variées seulement dans la ligure des noies; la,
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»S|3
t'aligne que font éprouver ces chœurs oùtigôs qui se re-
produisent sans cesse; le charlatanisme de l'aire exécuter
par les instrumens à vent Ja partie do violon , pour cher-
cher à couvrir, par l'habileté des exécuiaus; la pauvreté
des caiilil fines; l'artifice encore plus ridicule dû déchique-
ter les plu-anus niiioil'tqiics , pimr len disl nbuer à divers
prononcés par plusieurs inturluiinteurt- : la pédanterie de
miti-'i- jusqu'au )in)j mire appogiutiivi! . t r;i i ■ s I < > rrn a n L ainsi
les ornemeus spontanés du chant en un solfège scolastiqne
et puéril; le défaut d'originalité et d'expression caracté-
ristw/iic dans les chants, composés le plus souvent comme
des variations sur les mômes thèmes, auxquels on adapte
indifféremment toute espèce de paroles; les merveilleuses
sonates de gosier des chanteurs modernes, auxquelles il ne
manque rien , si ce n'est la mise de voix , l'art de respirer,
ia mesure et l'intonation; la profusion des gorgheggi Iil-
Kignilians et maniérés, qui détruisent toute idée de rhythme
musical ■ cl divisent les mesures en autant de parties qu'il
plaît au chanteur; le mépris de la prosodie, qui fait qu'un
plaoc à volonté les longues et les brèves, et qu'on s'arrête
à Gorghcggiare sur i et w, voyelles sourdes el ingrates
(choses que n'auraient point faites, il y a trente ans, les
moindres élèves); l'introduction d'une nouvelle pronon-
ciation qui coupe les mots en deux parties, frappant la
dernière syllabe avec une espèce de mouvement de gorge ,
semblable à un coup de marteau. ( Par exempte , V mulet-
tàaaa, amo-rùsca., cam-pàooo); le nouvel usage de se
mettre à chanter sans avoir commencé par apprendre a
parler, ce qui l'ait qu'il est jiupussî l.ile de deviner en quelle
langue s'expriment les aclcurs, et convertit le théâtre en
un hôpital de sourds et muets; la confusion des instrumens
auxquels on l'ail abandonner ce qui leur est prupre pour les
contraindre à jouer ce qui n'est point dans leur nature ; le
ftifRëmeûi des ootavins, le bruit de la grosse caisse, des trian-
gles, des timbales, des cymbales el de toute la bande turque;
enliuj'aeeonipjgiicnienl obligé des arpèges d'accords par-
faits el de quarto et sixte sur tous les degrés chromatiques de
904
la gamme, (|iiellc que soit la cacophonie qui en résulle; lotit
cela, dis-jc, forme un lintamare semblable à celui de
fa place Saint-Marc, dans la dernière nuit du carnaval.
Voilà les causes qui, joinlcs à beaucoup d'autres, qu'il
serait trop long d'éuuuiércr, oui fait subir à la musique
italienne la même décadence qu'éprouva la poésie dans
le dis-seplicme siècle, par l'introduction dés frai dure,
des trustait, des aittilcxi , ipcrliolL des fuaeki sudanii,
du Soleil, iunlcrna dut cicto , des étoiles , det celesto cri-
vcliuc/ii lucenti, (du crible céleste, les Irons brillans),
cl autres absurdités du parnasse italien ', atteint de folie.
Une des plus funestes conséquences de ces révolutions
llié.i traies est la ruine des panvrrs;iji^JY,«(fW (directeurs),
qui, victimes des novateurs, peuvent s'écrier en masse,
sur le seuil des lliéillres déserts : qvomoda isedel solo, citii-
tas quoiidam piena populo 2.
« Dans aucun lieu de mou discours, je n'ai plus regretté
do ne pouvoir appuyer mes observations d'exemples de
musique, d'après la manière de P. Paotucvi, dans son
jtrtepTiiticadelcoiitrcipttnto. Je sais que c'est la meilleure
réponse que j'aurais pu faire à cens qui me reprocheront
probablement de m'ûlrc montré trop sévère, et qui m'ac-
cuseront d'élre. un critique passionné. Ceci csl une dis-
grâce à laquelle doivent s'attendre tous ceux qui tenteront
(i) Le Mariai de la musique moderne, semblable à l'ancien Mariai
ment oii sa musique plût, il a atteint son but. A dire h: vrai, l'argument
est UH concluant, et je du uto que l'ancien Marinioiït pu en trouver un
meilleur.
Lopez da Ve$a su sert d'une semblable justificatiur! dans ce passage :
• Puisque c'est le vulgaire aveugle qui paye, il est juste de composer
• aveuglement comme il le délire. •
(a) Les relierions que j'exprime sur lu majorité du compositeurs eL
des chanteurs, n 'ei élue nt point la possibilité de quelques «copiions.
Si l'on m'oppoee les noms illustres de CAemKjii, Pair, Sponliti', de
mesdames Calalani, Fnifor, etc. , je repundrai que dans les pestes Ica
plus all'rcuBCSlOlIlIc miulili: ii'i -1 [.ninl .illrml itc la eouluj'irin ; mais que
ceui qui ont le bnobeur de s'en préserver ne sont pas une prouve que
le pojs soit généralement saiu.
de s'opposer aux progrès iln mauvais goilt , qui prouveront
l'existence il» mal, et qui, avec un zèle imprudent et
souvent inutile, chercheront ù désabuser des milliers d'in-
firmes qui se croient en parfaite sanlé. Dans le cas présent,
la faute est commune a. tous : les auteurs, avec leurs Toiles
compositions, le public, avec ses applaudissemeus non
moins insensés, se corrompent mutuellement ; il y a doue
lieu de redouter qu'on n'accueille pas trop favorablement
nies représentation!), et qu'on ne se nioqtic du médecin
et de la médecine. Hais au-dessus du public se trouve en-
core un tribunal, celui du temps, qui ne laisse pénétrer
ses secrets qu'à un petit nombre d'esprits justes. C'est h
eus seuls de prononcer sur la question présente.
i Après avoir parlé de 1 opéra sérieux, je devrais pousser
mon examen jusques sur l'opéra hou Ile ; mais comment
rendre compte de l'état actuel d'une chose qui n'exïstu
plus? il y a déjà plusieurs années que l'opéra 6uffa et la
gailé ont disparu de nos',lbéâtres. Une lièvre maligne sen-
timentale a saisi tous les esprits; le public ne va plus
maintenant à t'opéra ùuffa que pour calmer avec de»
farces larmoyantes et des drames semi-sérieux les trop
vifs transports de sa joie. La distinction entre la musique
sérieuse el !.i musique boull'e est donc lout-i-fait évanouie,
cl il faudrait être fort habile pour découvrir la pins légère
différence entre une partition d'opéra série met celle d'un
opéra bouffe. En lisant aujourd'hui sur les affichés des
spectacles, qu'un des premiers emplois est cidui de liujfo
si ce n'est de faire l'oraison funèbre de l'opéra fat/fa, et
du pauvre sens commun. L'excessive délicatesse du publie
est choquée maintenant du seul mot de l/ufjb cariealo,
et cependant les bons bouffon* d'autrefois n'avaient de
charge que le nom. Nous appellerons en témoignage tous
ceux qui ont entendu Caribtildi, Poggi, Bassi, Morelti,
et l'inimitable Casaccielto. L'art de faire rire les specta-
teurs est encore plus difficile que celui de les faire pleurer.
L'école des actrices bouffes est aussi tout à-fait perdue en
Italie. La dernière qui ait rappelé les l'ami, Zampierini.
ag6
Cottcitini, Manscruisi, Moric/ictti, elo.j a été la Marco-
Uni. Il en est Je mime des faiseurs rte libretti : Casti et
Anelli sont les derniers qui aient soutenu l'honneur do
l'opéra bouffe italien.
« Ces tristes réflexions peuvent également s'appliquer 1
la musique d'église. Il y a déjà plusieurs années que la gra-
vité rte la musique sacrée commence à s'altérer par le
mélange du style dramatique. Paisidto, Zingarciii, Fur-
lanello, Brizti et Mattci, dans leurs messes et leurs
psaumes, tout en accordant quelques concessions au goût
moderne, dans la partie instrumentale, ont su conserver
la simplicité majestueuse qui convient au chant sacré; mais
peu à peu le torrent a renversé toutes les digues. Ces im-
pures cantilènes, ces mêmes airs de ballet, qu'on entend
répéter tous les jours sur les lbé;itrcs, ont osé s'introduire
dans l'église; et, comme si ce n'était pas encore assez, on a
ose y transporter les accompagiiemcns do la Baïutc turque,
et de toute espèce d'inslrumens militaires. I.orsqu'en en-
trant dans le temple, on entend un semblable fracas , on
croirait qu'au lieu de prier, on fait nue déclaration de
guerre au Tout-Puissant '.
• Il me resterait à parler de quelques points qui se rat-
tachent à la musique dramatique, savoir : la composition
des mélodrames sérierne d'aujourd'hui, dans lesquels ou
a supprimé peu à peu le récitatif, comme si, dans une ac-
tion dramatique, tous les personnages pouvaient, depuis
le commencement jusqu'à la fin, se trouver dans une si-
tuai ion passionnée; la substitution des femmes aux So-
pruni, lesquels avaient au moins l'apparence d'hommes;
car rien n'est plus ridicule que de voir de jeunes femme»
représenter Jason, Pyrrhus, Horace, Tancrctlc, etc.;
maïs je n'en ai déjà que trop dît pour mon repos. >
(1) Dieu aie pltifi de celui qui introduis! ! le premier la bande tun/ai
dans nos o relie itrei. Peut -on imaginer une plus grande brutalité que de
gner oui jeunes coin po si leurs les règles de l'harmonie, le tic tac lies
niDi ili us, tt le bruit des inorteoui , deviendrunt bientôt la meilleure
école de c:)utrej-ujnl.
i{>7
Les plaintes de M. Majer ne sont pas dépourvues de mo-
tifs; ce qu'il «lit de la confusion des genres , de l'excès du
bruit des orchestres, des défauts des chanteurs, etc., eH
fondé sur la raison ; quiconque n'est pus dominé par d'a-
ve us le s préventions doit 1:11 sentir l,i justesse, Mais il règne
dans sa manière de s'exprimer nu Ion d'aigreur, qui peut
faire soupçonner qu'il n'est plus jeune, e( qu'il regrette les
plaisirs de sa jeunesse. A quoi servent d'ailleurs les décla-
mations contre le gnfii géniTaU les adversaires de ceux qui
les fout ne manquent jamais de les traiter de pédant; ré-
ponse qu'ils croient excellente et sans réplique, et qui
d'ailleurs dispense de donner des raisons.
Quoi qu'il en soit, le livre de M. Majer, bien que peu
volumineux, n'en est pas moins fort instructif, rempli de
vues solides r'I i\a reelin-rlies intéressantes. I[ est iln nombre
de ceux dont la traduction serait un service rendu à la lit-
térature musicale française. On en peut dire autant de la
lettre du même auteur sur ia connaissance que tes anciens
ont eue (ht contrepoint. De tous ceux qui ont agité celle
question, et qui se sont prononcés en faveur de l'antiquité,
aucun n'a soutenu son o[)inion par des faits si plausibles, et
ne l'a discutée avec autant de sagacité. La brièveté de cet
écrit et sa rareté me fait croire qu'on n'en verra pan la
traduction sans intérêt dans cette revue.
Fiins.
NOUVELLES DE PARIS.
ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE.
Le succès constant du ballet de la Somnambule a ramené
sur la scène des opéras qui étaient un peu négligés depuis
l'apparition du Siège de Corinthe et de Moïse. Le direc-
teur, profitant des chances favorables que lui présentait la
jolie composition de MM. Scribe et Aumer, a rendu aux
vieux amateurs de ce spectacle les anciens objets de leurs
prédilection». Orphée, Iphigénie en Taurûlr, Fernanit-
■2- vol. afi
Corttz, et même te Rossignol, que la voix délicieuse de
M"' Chili a le tort de faire trouver bon.
La manière dont Adolphe Nourrit chante le beau rôle
d'Orphie lui fait beaucoup d'honneur. Il est difficile d'a-
' voir un style plus pur, une mise de voix plus soignée, une
expression plus touchante que lui, dans son air du premier
acte, dans la scène des enfers, et dans l'air : J'ai perdu
mon Euridice; il dit aussi avec beaucoup de chaleur l'air
Écho et Narcisse, qu'on a in troduiladans cet ouvrage; en-
lin il se montre digne du personnage qu'il représente et de
la musique de Gluck, ce qui n'est pas un petit mérite. Ce
riilc a été composé pour une voix de contralto dans l'Or-
phée italien, dont celui-ci n'est qu'une traduction. Gluck
avait besoin d'uue voix extraordinaire; un castratto pouvait
seul la lui fournir; aussi ce fut Gnadagui qui fut chargé de
le chanter, et qui y déploya un talent dont on n'a plus
d'idée aujourd'hui. Gluck fut obligé de transposer la plu-
part de ses morceaux en arrangeant son ouvrage pour la
scène française, afin que Legros, dont la vois était un ténor
élevé, pût le chanter. Ces eh ange mens n'ont pas été heu-
Plusietirs morceaux de la musique d'Orphée ont vieilli;
on n'imaginerait point aujourd'hui de faire un troisième
acle avec une seule scène, comme est celui de cet opéra,
et surtout de le prolonger jusqu'à le rendre aussi fatigant;
mais qui oserait se flatter d'inventer l'admirable scène des
enfers, qui seule vaut un opéra? Quelles proportions colos-
sales! quel e£fel! Dès les premières mesures de la ritour-
nelle, on se sent dominé par une puissance irrésistible.
Depuis le premier chœur : Quel est € audacieux etc., jus-
qu'au Smorzcndo de la fin , une gradation merveilleuse
est observée. Les trois cavatiues d'Orphée présentent une
variété de ton qui était bien difficile à trouver dans une
sefcne aussi longue. Peu de compositeurs consentiraient à
terminer nue scencsi importante parmi smorzando comme
l'a fait Giuek; On voudrait aujourd'hui couronner cette
par un grand fracas, et obtenir ic tonnerre d'apptau-
ens qui ne peut être excilé que par le bruit; mais
a9!)
qu'il y a loin de ces moyens mécaniques à la profonde pen-
sée de la stupéfaction des démons, vaincus par un charme
inconnu. Gluck négligeait peut-être trop la forme; mais
on lui donne maintenant une trop haute importance en
lui sacrifiant la vérité et le sentiment des convenances.
Les défauts qu'on peut reprocher h quelques parties
d'Orphée n'existent point dans Iplrigénie en Tauride. De
toutes les compositions de Gluck, celle-ci me semble ëlre
la plus parfaite. Il n'y a rien au-dessus du premier acte de
cet opéra; rien de plus beau que le rôle d'Oreste; si quel-
ques longueurs se fout remarquer à la fin, ou doit les at-
tribuer plutôt au changement des idées sur la conduite du
drame musical qu'au génie de l'auleur. Il se peut aussi que
la force de conception du premier acte et d'une partie du
second nuise à ce qui vient ensuite; car il était impossible
de se maintenir à la même hauteur pendant loute la durée
d'nn opéra.
L'exécution de la dernière représentation A'Iphigênic en
Tauride a été bien faible; un air de négligence se faisait
remarquer depuis les rôles principaux jusqu'aux chœurs,
et, à l'exception de Nourrit, personne n'a semblé se douter
qu'un pareil ouvrage valut la peine d'être chanté juste.
J'en lais la remarque avec d'autant plus d'étounemeut
que, peu de temps auparavant, ce même opéra avait été
joué avec ensemble par les mêmes acteurs.
Fernand Cortez a été joué plusieurs fois avec le nou-
veau ballet, et avec celui des Filets de Vvicain. Massol
est bien faible pour le rôle de Cortez; toutes les fois qu'il
chante à mezza vocef il est au-dessous du ton , il ne re-
trouve la justesse que dans les choses de force. Cela est
d'autant plus étonnant, que ces défauts sont ordinaire-
ment ceux d'une voix usée, et que Massol est jeune.
Dabadîe est fort bien dans son rôle de Tetasco ; mais la
palme du chant est due à M11" Cinli. Les progrès de celte
charmante cantatrice sont très remarquables , particuliè-
rement dans le style expressif. Il est impossible de chanter
mieux qu'elle ne fait dans le duo du premier acte , dans
l'air .- Arbitre de ma destinée, et dans celui du troisième
acte. Les inflexions les plus heureuses, jointes à une voca-
lisation pu rf ai te se sont lait remarquer danssamanièrede
phrascr cesdïvcrs morceaux. Depuis long- temps, la pureté
delà voix de 51"° Cînti était connue, ainsi que son habi-
leté dans la vocalisation; mais on pouvait quelquefois
désirer un peu plus d'ame el d'expression ; félicitons-la de
ce qu'elle ne veut point d'un triomphe incomplet, et de
ce qu'elle travaille si efficacement à acquérir des qualités
auxquelles son doux organe est si propre.
Malheureusement une indisposition subite assez grave
éloigne H11' Ci ni i de lu scène depuis quelques jours. Cet
accident , joint à l'interruption du ballet de ia Somnam-
bule, oecasionée parla grossesse deM™ Uontessu, a causé
quelque embarras a la direction de l'Opéra, car on ne
pourrait donner Moïse convenablement. 11 a fallu avoir
recours à ta Lampe merveilleuse, autrefois lu Providence
de ce, spectacle, mais dont le règne est fini. On craint
que cet état de choses ne se prolonge ; car la maladie de
H"' Cinti a été assez grave pour ne pas lui permettre de
rentrer d'ici à quelques temps.
On se prépare aux répétitions de. Ma;:anietto qui doit
prendre le titre de ta Muette; cette pièce sera suivie do
Guittaume Tell, opéra de MM. de Joui et Uossini.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN.
. A défaut de nouveautés , l'administration de ce théâtre
essaie de reprendre des ouvrages ipti avaient eu peu de
succès d'abord , mais qu'une nouvelle distribution lui a
paru devoir rendre plus heureux. C'est ainsi que Giutietta
e Romeo a reparu il y a peu de jours. On se rappelle que le
rôle de Romeo fut joué d'abord par M1" Cesari ; depuis le
départ de cette jeune cantatrice, M" Pisaroui a consenti
à prêter uu faible ouvrage de Vaccai l'appui de son beau
fuient. •
Celte nouvelle disposition avait fait concevoir de grandes
espérances; j'avoue que je ne les purlugeais pas, quelle
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que [fil la baille opinion que i'eûsfe du mérite de SI— l'i-
surnni. Ilomeo est un pri son u.igr qu'un représente jeune,
gracieux, élégant ; M™ Fauta nous a du moins accoutumés
à le considérer ainsi dans l'opéra de Zangarelli. H"* Cosari
estime cantatrice médiocre, mais elle a du moins les qua-
lité* extérieures du rôle, et lorsqu'elle ne chaulait pas, elle
y était fort bien. Mal heureusement aucun des morceaux
île Giutictta e Roms.o ne demande la vigueur de talent
dont M™ Pisnroni a fait preuve dans Scmiràmùlù et dans
la Donna dût Logo. La scène des tombeaux, scène si lou-
chante et si terrible à la fois dans le Romeo de /.ingarolli.
est gâtée dans l'opéra nouveau, et ne prèle pas aux déve-
loppcmens de passion que 51™* Pîsaroùi serait propre à
exprimer. Celte scène, qui se prolonge Irop . est froide h
l'exeès, et ta musique n'esl pas de nature à la réchauffer.
Ko définitive, l'habile cantatrice j a produit peu d'effet,
ainsi que dans le reste du rôle , soit que les canlilènes in-
signifiantes de Vaecai n'aient pas eu le pouvoir de lui pro-
curer ces émotions qui provoquent le talent , soit qu'elle
se fût aperçue qu'elle-même n'avait pas son ascendant ac-
coutumé sur le public, et (pie cette conviction ail influé
défavorablement sus ses [acuités, suit enfin qu'elle lui mal
disposée le jour de la reprise de GiutieUa u Romeo, il ciî
certain qu'elle ni: s'est jamais élevée au-dessus du mé-
diocre. Les sons désagréables de sa voix nazfllo se firent
entendre souvent pendant le coin s de la rcpréseulalion. et
ne lurent point rachetés par ces élans sublimes, qui. dans
Stmiramïdc et dans ta Donna, dut Laijo . font si facile-
ment oublier le défaut dont je viens de parler.
Plus on entend la musique rie ee prétendu chef-d'œuvre
de Vaecai, moins on comprend le succès qu'il a obtenu en
Halle. Cependant, à en croire les journalistes ultranion-
tains, il ne s'agissait pas moins que d'une de ces produi-
rions qui l'ont époque il ans l'histoire d'un art. On vantail
beaucoup l'în traduction . cl ee n'est qu'un morceau sa ns
couleur, où l'on ne trouve rien de choquant, il est vrai,
mais où rien ne suri des idées les plus vulgaires. Les
autres morceaux du premier acte sont luus plus bu' moins
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3oa
décolorés. On se sent atteint d'une sorte de défaillance en
écoutant celle musique, dont on n'a même pas la force de
critiquer les défauts. Le Irio chanté par Bordogni, Levas-
seur et M"* Illasis, et l'air de Bordogni, à la fin du second
acte, sont uu peu meilleurs que les autres morceaux; ce
dernier cependant est trop long.
Quoique Bordogni eût lait réclamer l'indulgence du
public pour une indisposition, il ne s'est pas mal tiré de ce
qu'il avait à chanter. Levasseur a peu de chose à faire dans
cet ouvrage; mais le peu qu'il chante fait regretter que
son rôle ne soit pas plus considérable. Quant ù Profcli , il
est, comme de coutume, au-dessous du sien dans le per-
sonnage du médecin. Depuis le commandeur de Don
Juan , ce pauvre homme a toujours été déclinant. Il est
cependant nécessaire qu'il s'arrête, s'il veut être encore
Loti à quelque chose.
Le rétablissement de la santé de M" Garcia a fait repa-
raître aussi Tebatdo ed liolina , ouvrage de Morlacchi
qui avait été interrompu immédiatement après la pre-
mière représentation. Cette reprise n'a pas été plus heu-
reuse que celle de Giuiie.Ua e Romeo , quoique M°" Pisa-
roni y ait déployé uu talent très supérieur. L'appui d'une
farce anglaise, mal jouée, n'était pas de nature à piquer ht
curiosité; aussi y avait-il fort peu de monde. Il y a pour
chaque chose qu'on voit à Paris nu public différent: le
nombre de ceux que la comédie anglaise peut amuser est
fort borné dans ce pays , et n'a rien de commun avec les
dilettauli, dont les oreilles délicates ne peuvent s'accomo-
der des sons grotesques qui sortent des gosiers venus des
bords de la Tamise. La tragédie bien jouée peut intéres-
ser sans doute; mais elle ne peut marcher concurremment
avec la musique; il faut que celle-ci domine ou succombe.
Eu résumé, ce mélange ne sera point productif.
Il y a une très grande différence entre la musique de
Yaçcai et celle de Morlacchi. Quoique celte dernière ne
soit pas exempte de défauts, on y reconnaît le maître, tan-
dis que l'autre ne montre qu'un écolier. On trouve dans
Tebaldo un mélange de l'ancienne et de la nouvelle écolo
qui n'est pas sans charme. Il y a rte la grâce dans li! chaut; '
il es! fâcheux. seulement mie les mot ils soient généralement
si courts, et si souvent interrompus. La multiplicité des
points d'orgues est un des plus grands llé.iux de l'expres-
sion et de l'effet musical ; c'est à la décadence de Part du
chant qu'il faut attribuer l'abus qu'on eu fait aujourd'hui,
et c'est cet abus qu'il faut surtout accuser du peu d'effet
que produit la musique de Morlacchi. La monotonie qui
résulte du trop grand nombre d'airs et de duos est aussi
une des causes de ce manque d'effet. Ou est maintenant
si bien accoutumé aux morceaux d'ensemble , qu'ils sont
devenus nécessaires. Un duo du premier acte, l'air de
M""Pisaroni, et le finale sont des morceaux distingués , et
qui méritent plus d'applaudisscmcns que le public ne leur
en accorde. M"" Pisaroni s'est montrée digne de sa réputa-
tion , mais tous les autres acleurs ont été d'une médiocrité
désespérante. Il est douteux que col ouvrage se soutienne.
— Il régne en ce moment une grande activité dans les
études de njpéra-Comiquc. Acteurs et directeur, chacun
sent qu'il faut redoubler d'ellbrts pour combler les pertes
qu'ont occasionnées les crises de cet été. Un ouvrag-- de
circonstance, destiné pour la fêle du Itoi, et qui je crois a
pour titre te Roi et te Batelier, sera joue le 5 nov. prochain .
La musique a été composée par MM. Iliiaut et Halevy.
Cet opéra ne tardera pas à être suivi du Colporteur., drame
qui est dù a la plume féconde de M. Planard, et qu'on dit
cire rempli d'intérêt. M. Onslow, dont lenom est un éloge,
a prêté les acecus de sa lyre a celte pièce, sur laquelle de
grandes espérances se fondent. M. Carafa viendra ensuite
avec son Mazzanielto; M. Boicldieu, qu'un accident dou-
i sou opéra de* Deux Nuits. Nommer ce compositeur
élégant et gracieux, c'est annoncer un succès d'enthou-
siasme. Enfin, un drame, intitulé ia Muette, vient d'èlre
reçu par acclamations, et confié à la plume spirituelte'de
M. Herold. Avec de pareilles ressources, l'Opéra-Comi que-
ue peut manquer de retrouver ses beaux jours et d'ou-
blier bienlolles calamité* auxquelles il vient d'êireeu proie.
FÉT1S.
3o
. NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Cusel. La saison a commencé par Die Prinzessin von
Provence (la Princesse de Provence), opéra-féerie, mis en
musique par le baron de Poisl. L'opinion est partagée sur
cet ouvrage; cependant l'on convient généralement que
les chants sont expressifs, et que les accompagnemens sont
bien faits. Il aété donné pour l'anniversaire du prince, et
l'on n'a rien épargné pour les costume* et les décorations.
M'" Schweiaer et M. Fceppel ont joué el chanté de ma-
nière à recevoir des applaudissement unanimes. Cet ou-
vrage a été suivi de la Dame Blanchi, qui n'avait point
encore été représentée à Cassel, etqui a parfaitementréussi.
La ballade du premier acte, le second et le dernier finales
ont été très applaudis. Après la Dame Blanche, on a donné
Joconde, de Nicolo, qui a obtenu aussi beaucoup de suc-
cès. On a remis ensuite la Zétnire de Spohr, et puis on a
profité d'une occasion favorable pour faire entendre de très
beaux chœurs de Seyfreid, el la musique des entre-actes du
Moite de Klûigemann, qui étaient inconnus à Casse! .
ainsi que l'incomparable musique que Beethoven a com-
posée poiirle comte d'Egmont, de Goethe. Les autres opéras
donnés dans la saison sont : la Ctemenza di Tito, (deux
fois); ta Flûte enchantée, (quatre fois) ; Fernand Cortis,
(deux fois); Joseph, de Méhul , (trois t'ois); le. Freischatz,
(quatre fois); Don Juan, (quatre fois); le Mariage de
Figaro, ( deux fois) ; Otetlo, ( deux fois ) ; il Barbicre di
Seviglia, ( troid fois), et Jestonda, (deux fois).
Les deux cantatrices qui ont brillé dans le cours de lu
saison sont : HB* Scbulz, du Théâtre-Royal de Berlin, et
AV'Heîneifetler.du théâtre de Francfort. La première s'est
distinguée dans les rôles àeJessonda, doDonnaJnna, et
de Detdemona. La seconde, dans ceux de Pu mina . de
Suzanna, et de Sexlus. M. Rase, membre de la chapelle
royale de Hanovre, a donné un concert en passant par
Casse). Il est connu comme uu excellent hautboïste. 11 a
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3o5
exécuté un concerto de Maurer, et un nocturne de Hum-
me), avec une mélhode et un sou qui ne laissaient rien à
désirer.
LiMtEBg. Le Requiem de Mozart a été exécuté à Limberg
pour célébrer l'anniversaire de la mort du grand composi-
teur. Le fils cadet de cet homme célèbre conduisait l'or-
chestre, et cette circonstance n'a pas peu contribué à jeter
de l'intérêt sur celte cérémonie. Les solos étaient chantés
par les membres d'une société musicale établie depuis peu
sous le nom de Cœcitienchors. Deux dames d'un très haut
rang en faisaient partie ; la foule remplissait la cathédrale,
et une émotion profonde s'était emparée de tous les cœurs.
— M. Bayr,' professeur de flûte à Vienne, vient de trou-
ver le moyen de produire sur cet instrument des sons
doubles effeclifs et simultanés. Jusqu'ici, les recherches
nombreuses qii'on avait faites pour résoudre ce problème
avaient été infructueuses; car le résultat s'était borné à
trouver le moyen de chanter une partie , tandis qu'on eu
jouait une autre; ce qui n'était qu'une sorte d'escamotage;
mais les sons doubles que M. Bayr obtient par le moyen
de certaines combinaisons de trous ouverts et bouchés,
sont réels , et sortent par la séparation de la colonne d'air
en lames distinctes. Le merveilleux de cette découverte
est, que tessons obtenus sont permanens àvolqnlé, de
telle sorte que l'on peut tenir un son dans le haut de l'ins-
trument pendant qu'on exécute des passages rapides dans
le lias, suit par degrés conjoints, soit par sauts, et les sons
peuvent être en outre forts ou doux, coulés ou détachés.
Une semblable découverte a paru si importante pour la
théorie de l'acoustique, que des commissaires ont été
nommés pour en faire un rapport, lequel a constaté les
fails qui viennent d'être rapportés.
— Trieste. On a représenté dernièrement sur le théâtre
de cette ville un opéra nouveau qui est intitulé : Âlman-
zor. La musique est de Tadolini, compositeur peu rc~
nommé. Le succès eu a été douteux. On cite cependant
avec éloge quelques morceaux, et particulièrement l'ou-
verture, deux duos et un cation d'un travail singulier. Les
3o6 '
chanteurs principaux étaient M"" Bettoc , Favcili, cl le
lénore Blanchi.
PUBLICATIONS
DE MUSIQUE RELIGIEUSE CLASSIQUE'.
Dans la tâche imposée à la période actuelle de l'art, de
sortir d'une existence mécanique et aveugle, et du rêve
d'une vie abstraite de sensations , pour s'élever à la con-
science et à la clarté de l'existence intellectuelle, se trouve
aussi compris le devoir de remettre en lumière les trésors
des grands maîtres long-temps enfouis dans l'obscurité.
L'orgueil qui jugerait le monde indigne d'en jouir, ne re-
cueillerait certainement que le blâme et le mépris des con-
temporains et de la postérité , tandis que la gratitude et la
considération sont assurées à ceux qui reconnaissent par
le fait le besoin et les droits de leur siècle.
On doit certainement ranger parmi les derniers M. Foel-
chau, qui, dès l'année 1818, commença une cotUction
des chefs-d'œuvre de musique religieuse classique des
Allemands anciens et modernes, par la publication de
deux ouvrages précieux: 1° Chœur, Guide-moi selon ton
désir, à quatre voix et orchestre, par Charles- Philippe-
Emmanuel Bach ; a" Hissa canonica, Kyrie et Gloria ,
pour treize voix réelles, par Godefroi-Hcnri StoelLzel ,
qui ont paru chez Hasliuger à Vienne.
1 M. P6elcb.au, dit alors la Gazette musicale de Vienne,
invesligaleur infatigable, penseur, connaisseur en litté-
rature musicale, tant nouvelle qu'ancienne , de celle que
les nombreuses apparitions éphémères des dernières épo-
ques ont fait oublier trop long-temps , publiera une col-
lection de chefs-d'œuvre classiques, principalement d'Al-
lemagne, qui ne peut être que bien accueillie par tous les
amis de l'histoire de l'art, de l'étude de l'harmonie, ainsi
|i) Extrait de la Oautlé mmieaiidt Berlin.
3o;
que du chant noble çt plein de vérilé, et particulièrement
par les membres des sociétés et académies de chant qui
.se forment mainfenantei) si grand nombre.
M. Poclchau possède pour une pareille entreprise des
ressources que personne eu Allemagne ne pourrait avoir
comme lui. Au moyen de grands voyages uniquement
entrepris dans ce but , et de profondes et iufatigubles re-
cherches , il s'est procuré une précieuse bibliothèque
d'écrits théorétiques et historiques sur la musique, et
sous le rapport pratique, do manuscrits originaux ou
de copies exactes des maîtres renommés. Plus sont rares
les ouvrages d'art vraiment authentiques, plus il est diffi-
cile de les déchiffrer el de les traduire de l'ancienne nota-
tion en nouvelle, plus les véritables amis de l'art, doivent
se réjouir de voir arrachés à l'oubli, les travaux des anciens
maîtres, et surtout de nos ancêtre». Le sentiment pieux,
la sensible naïveté, le calme religieux, eulin pour tout
exprimer en un mot, le pur germanisme ( Dcutscheit ),
d'un Louis Seuil, (l'ami de Luther), do Jean Waller,
d'Orlaudu Lasso, à Munich, d'Henri Schùlz, à Dresde,
et de ses deux illustres contemporains Samuel Schcidt et
Hcrmau Scbein , de Sébjslicn Kniipfer,de lloscumùller,
ùLeipzick, Jean-Christophe et Michael llacli, (ancêtres du
grand Sébastien Bach), Jérôme Schultz, Thomas Selle et
lleiiibard, Kaiser, à Hambourg, Fuxet Gaspard do Kerl,
à Vienne, et beaucoup d'autres, ainsi qu'à une époque
plus rapprochée, les excellons travaux des Bach de Londres,
liùekebourg llalie de Hambourg, de Stoelzel et de Geor-
ges Bcnda^de Joseph et Michel Haydn , de Mozart et de
son (u:ru, méritent fiirtaiiteiricnl qu'on veille à leur con-
trop lard, et ce moment né tarderait pus à arriver.'
Comme pendant de cette collection, suivra la publica-
tion d'une galerie des maîtres italiens qui ne doit pas être
moins attrayante, puisqu'elle contiendra les ouvrages
d'Animuccia, l'ah'sti iua, Asola de Vérone, Corso, Canni-
cianni, Leonardo de Vinci, Franocsco Gasparini, Lco,
Vco, Durante, Scarlatti, Caldara, Lolti, Valolli, Sabba-
I .
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tini, Sala et autres noms célèbres qui restent immortels
dans l'histoire de l'art.
Les deux morceaux que nous avons cilés ci-dessus tien-
nent là preuve de ce qu'on peut attendre du gout de l'édi-
teur dans le choix, et des soins apportés à l'exécution.
Ou peut regarder comme plus beaux encore deux ouvra-
ges dontle premier surtout trouverait peu d'égaux dans
la littérature musicale. Nous vou'ous parler : j' d'un Matj-
nificat à 5 voix avec orchestre, et a° d'une messe ert la
majeur, à quatre. voix, avec orchestre, tous deux de Jean
Sebastien Bach, que M. Poelchau a fait publier chez Sim-
rock. à Bonn. Nous attendons avec le plus vif désir le mo-
ment où nous pourrons parler plus en détail de ces deux
ouvrages, d'un des plus grands hommes qui aient jamais
paru sur la terre, :• :.'.s'. j'.l --i:f,l
Comme preuve que tout arrive en tenips utfleyoïi poùr-
raità peine trouver dans le domaine de l'art, d'exemple
plus frappant que le sort des grands ouvrages de Bach .
qui furent oubliés par ses successeurs- immédiats, aux-
quels ils s'auraient pu être que désavantageux', et qur
reparaissent maintenant , qu'est arrivé le temps où ils
peuvent être appréciés et produire un effet salutaire. L'art ;
incommensurable qui préside aux créations de ce maître,
n'aurait pas été compris par l'intelligence encore cirdor1"
mie et trop peu avancée de ses successeurs , et -de tonte
leur époque, ilsl'auraicnt même choisi pour modèle, qu'ils
n'auraient produit que de l'affectation de métier ( Kans- '
telei), et des êtres de raison abstraits. Tel est, tout bien
considéré, le portrait manqué- qu!a' voulu noua^aisscr tic
ce chantre divin Forkcl, qui était regardé comme le plus
grand -connaisseur des travaux de Bach, et qui a indiqué
à peine dans la biographie le nom do ses plus beaux oû-!l
vrages. Maintenant que l'on a passé l'époque du règne ex-
clusif du sentiment, de la fantaisie sans limites, de l'arbi-1
traire même; maintenant s'offre à nous une époque de re-
na issau oc pour les belles productions du génie musical.
Des éditions des Geuvrcs de Hanulcl su préparent et se pli- ;
blient partout, clin collection que nous annonçons, nous -
3o9
offrira les moyens de remonter à des temps d'inspiration
ail lu génie produisait par amour de l'art, et ne sciait
point encore l'ait spéculateur.
Deux autres collections, qui semblent devoir compiler
l'iioijornble entreprise de M. Poelchau, sont aussi mainte-
nant en activité ; l'une , uni a pour litre : Kircftengesœngc
der berilhmiesten œileslen itaiiœnischen Meister (mu-
sique d'église des plus célèbres maîtres de l'Italie), est pu-
bliée à Vienne, chez Artaria, par le chevalier Théophile
de Tucher. La première livraison, qui a paru, contient
cinq motets lie Patestrina, trois de Felice- Anerio, cl
ilevtK de Vitlotia. Ces morceaux sont en partition.
La seconde collection est intitulée : Bibliothèque de
musique d'église. Ulle paraît par livraisons chez les fils de
J.-ll. Schotl à Mayence, et h Paris, place des Italiens. Les
premières livraisons contiennent quatre livres de Bespoii-
noria de Valotti, et deux antiennes d'Orlandc Lassos, Nnus
l'aison.i des vécus pour que ces en treprïsessoient assez avan-
tageuses pour qu'elles soient continuées.
ANNONCES.
M. leMiere de Corvey, qui vient d'arranger pour la scène
française l'opéra du Tancrede, voulant en faire jouir les
nombreux amateurs de la musique de Ilossïni , et faciliter
la mise en scène de cet ouvrage en province, a eu l'heu-
reuse idée, en faisant graver sa partition, du transposer
le rôle de Tancrede pour un ténor. D'après ce travail, les
directeurs de tons les théâtres de France pourront monter
aisément cet opéra, dans lequel il n'y a que quatre ac-
teurs principaux. Tous les airs, duos et morceaux d'en-
semble sont déjà publiés avec accompagnement de piano
et de guitare, et se trouvent chez M. A. Sleissonnier, édi-
teur de musique, boulevard Montmartre, n"u5. La par-
tition et les parties séparées paraîtront à la fin do ce mois,
avec une nouvelle ouverture de Rossini , qui n'a encore
3io
été exécutée sor aucun théâtre de France; on les trouvera
à la même adresse, et chez M. E. Troupenas éditeur de
musique, rue de BIcnar.i, n't.
Le septième cahier de i' Écho lyrique vient de paraître,
Use compose de deux jolies romances : (fe Lacde Genève,
et qui htesse peut guérir), et d'un duo italien de Ctari.
Le succès qu'obtient eu journal a décidé H. Garaudé à
céder la propriété de son Journatd'Euterpe, au rédacteur
de l'Écho lyrique; ainsi MM. les abonnés du journal
d'Eulerpe recevront les cahiers des mois de novembre et
de décembre de CÉcho lyrique , et s'adresseront pour re-
nouveler leur abonnement, à Paris, au magasin de musi-
que de Pacini, éditeur des opéras de Rossini , boulevard
des Italiens, n" 1 1, et à Genève, chez M. Grast, Grande-
Le prîco de faionnement est de a5 fr. par an.
— Vingt-quatre préludes pour le piano-forte, dans
tous les tons majeurs et mineurs , pouvant servir d'exem-
ples pour apprendre à préluder, dédiés à mademoiselle Clo-
tilde de Courbonne, par F. Kalkbrenner, op. 88. Prix:
i5francs.
Paris , I. Pleyel et fils ainé, boulevard Montmartre.
Voici un ouvrage qui sort de la foule des publications
éphémères dont le commerce de musique est inondé.
Son succès ne sera pas seulement fondé sur le nom de son
auteur; mais sur son mérite, qui est très considérable.
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on entreprend d'écrire
des préludes pour un instrument quelconque; mais tel
virtuose qui, lorsqu'il improvise trouve d'heureuses in-
spirations, et cette fantaisie qui fait le charme de ce genre
de compositions, ne trouve plus, quand il écrit que des
phrases trop cadencées, trop symétriques pour le prélude,
auquel on demande surtout un air de liberté et d'indépen-
dance. Tel était Meslrino, dont les préludes improvisés
étaient ravissans, et qui n'a jamais rien écrit qui ne fut
médiocre. Un autre genre de difficulté consiste à varier le
style d'une collection semblable a celle que nous aruion-
Digitizod b/ Google
Su
çons. Un artiste habile n'est point exposé a se répéter lors-
qu'il prélude, parce qu'il se fait rarement entendre plu-
sieurs fois dans la même séance ; mais dans un cahier, les
morceaux se touchent, et il faut bien que leur caractère
soit varié pour plaire.
Ces difficultés, M. Kalkbrcnuer nous parait les avoir
vaincues avec un rare bonheur. Sans parler des qualités
classiques de ses préludes , qualités qui sont inséparables
de sou talent , et dont le moindre mérite est d'offrir un
doigté parfaitement régulier, on y trouve des motifs pleins
de chaleur, de l'élégance, de la variété, et l'abandon qui
convient à ce genre de musique. Nous ne croyous pas nous
tromper en affirmant que cette nouvelle production de
H. Kalkbrenncr mettra le sceau à sa réputation, déjà
établie à tant de litres.
— Grande sonate concertante pour piano et flûte, com-
posée par F. Kuklau , op. 85; Paris, chez B. Schott fils,
place des Italiens, a' i,Mayeuce, même maison, et Anvers,
chez A. Scott.
— Trois grands duos concertons pour deux flûtes, par
F. Kuklau, op. 87, aux mêmes adresses.
Le nom de Kuklau est peu connu en France ; mais il
jouit en Allemagne de quelque considération. L'examen
que nous annonçons nous a prouvé que celte considéra-
tion est méritée. La musique de M. Kuklau sort de l'es-
pèce de routine où les inslrumens à vent restés Irop long-
temps , malgré les efforts de Tulou et de quelques autres
artistes du premier ordre. »
— Nouveau choix des Cantiques de Saint-Sulpice, pu-
bliés pour l'usage des collèges royaux, communautés et
maisons religieuses, mis en musique pour une ou deux
voix avec accompagnement d'orgue ou de piano , par
T. A. Moreau, op. 35; h Parisftchez Carli, boulevard Mont-
martre, 11° 14, et chez l'auteur, à Douai ( département du
Mord.)
— Fantaisie avec variations pour le violon, composées
3ia
par H. Désiré Lemire, memhre correspondant de Ja société
des Enfans d'Apollon, sur l'air de H. Panscron, intitulé :
Le petit Manc.
A Paris, chez Atilagnicr, marchand de musique, rue île
la Paix.
—Coilcctiondes Œuvres composées pour le piano-forté,
par J. N. Hummel; Paria, cliez Maurice Schlcsingcr,
marchand de musique du Roi, rue de Richelieu, n° 97.
Hummel est dans la force de l'âge et du talent : c'est un
des auteurs dont les pianiste» affectionnent le plus les
compositions, qui réunissent la science à la mélodie, l'é-
nergie à la grâce. Sa réputation l'avait précédé long-temps
d'avance à Paris, et le séjour qu'il a tait parmi nous l'a
portée à son plus haut terme.
C'est en étudiant, et sans interruption, les ouvrages d'un
tel maître , qu'on parvient à se former une méthode , uu
style, et qu'on peut espérer enfin de lui dérober sou secret.
C'est donc rendre un service immense à tous les pia-
nistes, que de publier la collection complète des œuvres
de Hummel avec toute l'exactitude et l'élégance typogra-
phiques, qui rendent les études plus agréables et plus fa-
ciles.
La collection se compose de vingt-une livraisons qui
sont gravées par MM. Slarquerie etRichommc, et corrigées
par M. Pixis. Chaque livraison contient de i5 à 3o francs
de musique, suivant leurs prix de vente comme œuvres
s'éparés. Le prix de souscription n'est que de sept francs,
tirée sur beau papier et brochée avec couverture. 11 parait
une livraison tous les quinze jours.
La souscription close , le prix de chaque livraison sera
de i5 francs.
On peut livrer de suite, aux personnes qui le désireraient,
la collection complète des œuvres de Hummel, l'ouvrage
étant tout gravé.
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REVUE DES JOURNAUX DE MUSIQUE
PUBLIÉS DANS LES DIVERS PAYS DE L'EUROPE.
Si tous ceux qui cultivent une science ou un art s'inté-
ressaient à ce qui concerne ses progrès, ses vicissitudes et
les découvertes qu'on y fait, les écrits périodiques, cri-
tiques et historiques d'un olijet spécial auraient des succès
faciles et durables; maïs il n'en est point ainsi. On aime
les arts pour les délassemeus qu'ils procurent, et non pour
l'étude qu'il faut en faire. Un besoin de ces écrits se fait
sentir, il est vrai , chez quelques adeptes; mais ils sont en
petit nombre : tout le reslc est indifférent. La musique,
par exemple, est de tous les arts, celui dont ou parle le
plus, et qui occupe le plus l'oisiveté des gens du monde ;
mais ceux-ci sont bien plus avides des légers articles de
journaux quotidiens, des criliques banales, et de certaines
phrases de convention qui, si elles ne leur présentent point
d'idées positives sont du moins familières à leur oreille,
que des discussions approfondies d'un professeur, qu'il faut
se donner la peine de comprendre. Telles sont les habi-
tudes île la plupart des lecteurs que, pour peu qu'un homme
ail l'air de savoir ce qu'il dit, on ne se soucie point de l'en-
tendre.
Cependant, à diverses époques, il s'est trouvé des
hommes dévoués ' qui, séduits par leur amour pour
cet art ont voulu affronter l'i «différence publique par des
entreprises de journaux ou d'écrits périodiques qu'ils
lui consacraient. Leurs vains efforts , et le nombre de ces
écrits, qui n'ont eu qu'une courte existence, prouve assez
qu'ils s'étaient trompés, et qu'ils avaient pris leurs dé-
sirs pour les besoins de la société. Cependant plusieurs do
ces écrits renferment des morceaux excellons eu tout
genre : ce ne sont donc point leurs auteurs qu'il faut aecu-
(i) Je supjxi.i ijuVn in' ;i>r:i [>oiul tenté du les [ircudiu puiv des spf-
□igiiized by Google
ser de leur peu de succès. Il m'a paru curieux d'en faire
la récapitulation.
Le premier qui essaya 'le publier une espèce de journal
sur la musique fut Scheibe , maîlre de chapelle du roi de
Danncmarek. Ce journal parul à Hambourg, en 1^3?.
sous le titre de Crhisi-liei- Musicun, (le Musicien Cri-
tique). Il fut ensuile réimprimé à Leipsick (en 17^5), en
un volume in-8" de io5g pages. C'était plutôt une suite de
dissertations scientifiques qu'un véritable journal. On le
consulte encore avec fruit.
Laurent Milzlcr, qui fut successivement libraire à Leip-
sick. conseiller et médecin à Kouskin, en Pologne, publia
ensuite un journal intitulé Musikatischcr Slaitrstechcr
(l'Oculiste Musical); il en parut nu numéro chaque se-
maine dans le cours de l'année i^a, à Leipsick. On y
trouve quelques détails inlércssans ; mais le style en est
lourd, pédanl, et rempli île critiques amères, à la manière
de Maltheson. Il n'eut qu'environ une année d'existence.
Il fut suivi d'un écrit anonyme, également hebdoma-
daire, qui parul à UruuswicL, eu et et qui avait
pour titre lier Musikalische Patriol(\e Musicien Patriote .
Il renferme de bonnes choses; mats il n'en a été publié
jjne trente numéros.
Alnrpurg, homme supérieur, qui a marque d'un cachet
de perfection tout ce qu'il a entrepris, a montré sa profon-
deur accoutumée, sou érudition, et son goût dans son Mu-
sicien Critique de lu Spréc (der Crïstische Musi'cus an der
Spree) 1 , clans ses Essais Historiques et Critiques sur
tes progrès de la musique ( Histoi isch li ritischt] llcylricge
zur Aut'nahme der Musik) et dans ses Lettres criti-
ques sur (a musique (Kritischc Bricfe ûber die T011-
kunsl) 5. lie pareils écrits sont peut-être trop sérieux pour
la masse du public; mais ce sont des recueils précieux
pour les artistes, et pour quiconque cherche une instruc-
tion solide.
(1) Berlin, I7S0 , cinquante numéro! ta-i°-
(a) Berlin , 1754-1760, trente numéros en cinq volume! in-ia.
( ) Berlin, 1760- 1763 , huit numéro! in-4° , formant ioiu pogït.
SiS
L'Allemagne vil encore éclore mic l'oulc d'autres feuilles
I it-r ir iil i 1 1 nos sur I '■ musique, dans la seconde moitié, du siècle
dernier. Telles sont les Notices ftctidonurdiiii-cs concer-
nant ia muiiijue, lle Hiller ( Wœchculliehe Nachrichlcn
und Anmcrknngeu die Musik Iletreuend ) , dont il parut
quatre années à Leipsick, de 17G6 i 1770; le journal de
l'école de musique de Maulieim (Helrar.fatMyer der M<m-
iieimcr Tomchute), donl l'abbé Voglerfit paraître un ca-
hier chaque mois pendant les années 1778— 1781; leJHa-
yasin musical ( Musikalischcs Kunslmagazin ) de Hei-
chardi, Berlin, 1783 — 1791, in-fol"; le Magasin de musique
de Cramer, Hambourg, i785 — 178O, iu-8-, la lliùliotkèijue
■musicale (Musikalische Bibliolhckliir Kunstler und Lieb-
haber) d'Ksclitrulh, Warbourg et Giesscn, 178/,— et 1785;
La Gazette Musicn ie de Spire [ Musiealischc llealzeituug)
publiée par Dossier. 1788 — 1791; La Gazette Musicale de.
Berlin ( Berlin ischc Musikalische Zcitung), rédigée par
Spazicr, mais qui ne se soulinl que depuis le 9 lévrier 1793
jusqu'au 4 janvier 179^; et le Journal de Musique de Cock,
dont il ne parul que huit numéros eu 170.5.
Tous ces journaux ont élé remplacés avantage use ment
par l'excellente Gazette de musique de Leipsick ( AUgc-
meinc Musikalische Zcitung ). Ce journal , entrepris en
1798, se continue encore, et sa collection forme 29 vol.
in-4"; mais, malgré son mérite, qui est certainement 1res
considérable, il n'a dû sa longue existence qu'aux sacrifices
laits par la maison lireilkopf cl li;crlel puur sa continua-
tion. Les vingt premières années, qui ont élé rédigées par
Frédéric lîodilitz, cl auxquelles beaucoup d'écrivains dis-
tingués ont coopéré, sont les pins remarquables. On en a
publié une table en deux volumes in-8'. Une foule d'articles
inlerrussans el instructifs, sur tous les points de la théorie
de la musique, sur sou histoire, et sur les inventions ou
perfection 11 émeus d'instrument; des analyses excellentes
des livres qui concernent cet art, et dus compositions en
tout genre ; cent soixante-cinq notices bien faites des mu-
siciens ou des théoriciens les plus célèbres ; des nouvelles
musicales de tous les lltéàlres cl de tous les concerts de
l'Europe ; enfin des revues sur l'état de lu musique dans
les principales villes du monde s'y trouvant.
Tous les journaux oui ont paru depuis, sur le môme ob-
jet, ont été formés sur le modèle de cette gazette. Parmi
les imitations qu'on en a faites, celles qui méritent le plus
d'estime sont : r La Gazelle musicale de Berlin ( Berii-
niicher Musikalische Zeitung), que Iteichardt a rédigée,
en i8o5, avec son talent ordinaire; mais la mort de Frœli-
lich, qui en était l'éditeur, et le départ de Rctchardt pour
la Russie en interrompirent la publication dans l'été de
1806; a" La Gazette musicale tics Etats de t' Autriche ,
( AUgemeinc musikalhchc Zeititng, mit besondercr
Ruecksicht auf den OEstreichischen Kaiserstaal), dont
Steiner, mareband de musique à Vienne, était éditeur. 11
est radieux que cette entreprise n'ait pas été assez avan-
tageuse pour être continuée, car la plupart des articles
fournis par les rédacteurs étaient faits avec talent et sa-
voir, Son origine date de 1817, et sa fin de 1S20; ensorte
que la collection des numéros forme sept volumes in-4";
5° La Gazette musicale de llerlin, { lin-tinische allge-
meine musikalische Zeitung ), publiée par Schclesinger
pfcre, libraire et marchand de musique. Ce journal, qui a
paru pour la première fois au commencement de i8a4> au
continue avec succès. Son principal rédacteur, H. Marx ,
s'attache principalement à la partie .-esthétique de l'art, et
se distingue autant parl'indépendance de ses jugemensque
par le talent qu'il déploie dans son style, et parla solidité
de ses observations. M. Marx est Allemand, dans toute l'ac-
ception du mot, et parait n'estimer que la musique alle-
mande. Son patriotisme est respectable; mais je pense qu'il
montre trop de sévérité à l'égard de nos compositeurs et
de quelques-uns des plus célèhres musiciens de nos jours.
Mozart, Beethowen, sont, sans doute, des géans en musi-
que; personne, pins que moi, n'est l'admirateur de leur
génie ; mais il reste après eux des places honorables aux-
quelles Méhul, Boieldieu ut Aubcr peuvent prétendre.
A l'exception de ce penchant un peu trop prononcé à
déprécier la musique française et italienne, le rédacteur
Oc la Gazette Musicale de Berlin se montre critique ins-
truit, et sait donner à son journal beaucoup d'intérêt. Je
le louerais davantage, s'il rie m'avait donne beaucoup
d'éloges dans les articles qu'il a consacras ;i la Revue Mu-
sicale, et si je en craignais de sembler vouloir le payer en
L'Allemagne a possédé c.\ possède encore d'autres éc rits
périodiques sur la musique; mais ce sont plutôt des Revues
mensuelles, ou paraissant à des époques indéterminées, que
de véritables journaux. Tels sont l'Apollon, que les frères
Werdcn et Vf. Schneider ont publié a l'euig, en i8o5; le
Musikaiicke Manattchrifl , qui parut à Lin/., dans la
même année, et dont le maitre de chapelle 1'. X. Glu'ggl
était le rédacteur; et la Ctecitia, excellent ouvrage publié
par les frères Schott, de Maycnce, -depuis i8a/j, et dont le
septième volume paraît en ce moment, par cahiers de Go à
80 pages. L'un des principaux rédacteurs de cetle intéres-
sante collection est M. Godcfroi Wcber, compositeur et
théoricien distingué, auquel ou doit beaucoup de travail*
importons sur l'art musical.
lin :7?5. le premier journal anglais, sur la musique,
parut sous le titre de Thencw musical and uni versai
Matjaziite: il lui continué jusques vers le milieu de 1776,
où il cessa de paraître, faute de souscripteurs. Ce journal
était composé de dissertations sur divers points de théorie
et d'histoire de la musique, et accompagné de pièces de
chant. Quelques articles de Burncy sont ce qu'on y trouve
de meilleur, lin intervalle de quarante-trois an» s'est écoulé
ensuite, avanl qu'aucune antre entreprise du même genre
ait élé tentée; enfin, la Gazette .Musicale anglaise ( The
English Musical Gazelle) parut au commencement de
1818; mais ee journal était si mal rédigé qu'il ne put se
soutenir) et qu'il cessa de paraître au mois de juin de la
même année.
Sur ses ruines s'éleva, presque aussitôt, la Revue intitulée
The Quarterly Musicul Magazine and Review. qui,
ainsi que l'indique son litre, paraît tons les trois mois',
(1) Londres, Balihviu, Cradock and Joy, et maintenant Tli. ltu>t et
rompait nie ■ 1818.1817, "n*8"-
3i8
pur cahiers de 1 5o pages environ. M. Bacon, de Norwich,
qui rédige cet écrit, eu a fait un des meilleurs recueils pé-
riodiques qui aient paru sur cette matière. On y trouve peu
de chose sur les pays étrangers ; mais tout ce qui concerne
l'Angleterre y est traité avec beaucoup de soin et île savoir;
Deux autres journaux anglais ont été essayés en i8a5 :
l'un avait pour titre The Montfitg Magazine of Music
{ illagagiu mensuel de illusique ) ; son premier numéro fut
le dernier, et il ne méritait pas une plus longue exislence.
l'autre était intitulé The Journal of_ Music and The
Drama; il n'était pas meilleur que ic précèdent, et ne
vécut pas pins long-temps.
Il n'en est pas île même du The lïarmonicon, qui pa-
raît le premier de chaque mois, par cahiers de trois à
quatre feuilles de texte, et de deux feuilles de musique
in-4*. On trouve peu d'articles originaux dans ce recueil;
presque tous les journaux étrangers y sont mis à contribu-
tion, et la Revue Musicale remplit maintenant une partie
de ses pages; mais si sa rétlactiou ne peut apprendre que
peu de chose aux érudits, elle est assez convenable pour les
gens du monde. De là, sans doute, le succès de celte revue,
qui compte déjà cinq ans d'existence.
Le prospectus d'un autre journal de musique a paru 4
Londres, en i8a4, sous le titre de La Bilancia, orajour-
nutofthealricat music ( La llalance, journal de musique
dramatique) *. Celte feuille périodique, imprimée à deux
colonnes, l'une en anglais, l'autre en italien, devait pa-
raître tous les samedis, et former deux volumes par an.
J'ignore si celte entreprise a été continuée.
Quel que soitle goût des Italiens pour la musique, ils
lisent peu sur cet art, parce que chez eux toutes les
jouissances sont d'instinct plutôt que de raisonnement. Il
n'est donc point étonnant qu'ils aient eu peu de journaux
sur la musique , et que ceux qu'où a voulu l'aire pour eux
n'aient pu se soutenir. La première publication de ce
genre fui faite par Marlorefii, marchand de musique, à
Home , sons le titre de Fogtio perwdico e ragguagtio de
(i) LoQiirti , J. F. Dore St. JqW» square.
5,0
spettacoii musicaii. Les premiers numéros parurent un
1H08 , in- 12 , et les derniers nu mois de septembre 180g.
C'était un recueil assez ma! fait, et qui ne pouvait être
que de peu d'ulilité, à cause des éloges exagérés qui y
étaient donnés sans discernement.
La Potinnia Europea , ossia BibUoteca universaie di
nntsîea, qui fut ensuite publiée à Bologne, * méritait une
plus longue existence. C'était un bon journal, rédigé avec
Soin et connaissance de l'art. Une nouvelle entreprise du
même genre s'est formée dans le cours de celte année;
c'est celle du journal dramatique , musical et corégraphi-
que qui est intitulé : / Theatri. Les rédacteurs propriétai-
res sont : MM. Gaelano Barbieri et Giacînto BattagHa. Le
prospectus promettait que MM. Simon Mayr, G. Taccini,
AH. liolia. G. Piautaiiida, P. Bonficlù, le docteur Licb-
t en I h:d e( D. Bnnderoli fourniraient des articles à ce jour-
nal ; mais, jusqu'à ce moment, ces promesses n'ont point
été remplies. On peut reprocher a ceux qui dirigent la ré-
daction de ne donner, sur ce qui concerne l'art musical,'
que des articles superficiels; c'est sans doute à ce défaut
qu'il faut attribuer le peu d'empressement qoe les artistes
qui viennent d'Être nommés ont montré à fournir des
articles. Quelques morceaux extraits de la Revue musi-
cale sont tout ec qu'on y trouve sur la théorie et l'histoire
de l'art.
J'ai déjà dit , dans un autre endroit , que la France n'a
pu posséder jusqu'ici aucun journal de musique , quoique
plusieurs fois on ait essayé d'en établir. En 1 -?3 , il en pa-
rut un sous le litre de Journal de musique par une so-
ciété d'amateurs, t'ramery était un des principaux rédac-
teurs; mais quoique ce journal ne manquât pas d'intérêt,
il ne trouva pas d'abonnés, et quatre numéros seulement
furent publiés.
Un amateur, nommé M. Cocatrix, de La llochelle, fil
paraître, de 1800 à 1804 , une Correspondance des ama-
teurs musiciens, qui contenait principalement des articles
;<] Uolog.11;, Dilta Ciprionl et compagnie , in-8".
Dipzed by Google
321)
de critique sur les morceaux de musique qu'on exécutait
dans les concerts. Ce cadre était trop resserré pour qu'il
put intéresser les savarin ni les gens du monde ; il est donc
étonnant que la Correspondance se soit *oulenuc pendant
près de quatre ans.
Après sept ans d'intervalle, M. de Garaudé, aidé de
Cambiui, et de quelques autres artistes, entreprit, en 1810,
de ranimer le goût des amateurs pour la littérature musi-
cale, par la publication des Tablettes de Polymnie, jour-
nal hebdomadaire de musique; mais, soit que I" moment
ne fût pas venu, soit que l'on y trouvât trop d'articles sur
des concerts et des représentations do peu d'importance ,
cette feuille ne trouva jamais d'abonnés en assez grand
nombre pour couvrir ses frais, et, à la fin deiSi 1, elle cessa
de paraître.
Depuis cette époque , jusqu'en i8aj, c'est-à-dire, pen-
dant l'espace de seize ans, il n'y eu! plus d'ouvrages pério-
diques en France consacrés à la musique. Dans l'espoir
d'être utile , j'ai entrepris la publication de la Revue mu-
sicale. Je suppose qu'on me dispensera de dire ce que j'en
pense; mais je puis affirmer que les encouragemens que
je reçois de toutes parts et des hommes les plus éclairés
de l'Europe, suffiraient pourm'engager à la continuer long-
temps, lors même que je n'y serais pas déterminé par d'au-
tres motifs.
FÉTIS.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE DES NOUVEAUTÉS.
rtftfs(nt.ttton U &nusf ,
UÈLODIUHE m TROIS ACTES, FiBOLES DE M. THEICLOR.
Gucthc, eu écrivant son célèbre drame de Faust, pa-
raît avoir cédé au désir d'imprimer le cachet de son talent
à une action dialogucc plutôt qu'à celui de faire une pièce
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5a.
qui pût être représentée. Il n'a point obéi aux règles ordi-
naires de la scène Les larges c un cession s de la poétique
théâtrale germanique lui ont mémo semble des entraves
trop rudes. Sa fantaisie, sou imagination , si bizarres
qu'elles pussent paraître, voilà ce qu'il a pris pour guide,
et l'on voit qu'il n\i cherché qu'à se plaire.
Sou sujet no lui appartient pas. D'anciens écrivains alle-
mands l'avaient traité avant lui, et ceux-là même n'avaient
t'ait que recueillir une tradition populaire. Jean Faust ou
Fust, l'uu do( ceux auxquels on attribue l'invention de
l'imprimerie, a paru à quelques criliques le type de ce
personnage singulier. On sait eu effet que les premiers
produits de la presse furent considérés comme apparie-
nant il la magie. Cependant d'autres criliques assurent
que ce Faust est différent du magicien {Sciuvarzk&iutiar)
qui est le sujet de la tradition et des drames dont il s-'agit,
Selon eux, ce dernier Faust serait né au commencement
<Iu seizième siècle , à Maulluonn en Souabe , et aurait fait
ses éludes à Willonbcrg. De la il serait passé à Ingolstadt ,
où il aurait étudié la théologie, qu'il y aurait ensuite pro-
fessée pendant trois ans. 11 aurait quitté cette science pour
la médecine, l'astrologie, la magie, et se serait livré à la
recherche île la pierre philosophait! avec un de ses com-
pagnons, nommé Jean Wagner, Gis d'un prédicateur â
Wasserhourg. Voilà, comme on voit, îles détails fort cir-
consianciés. Ou va même jusqu'à désigner le jour où , en
il fit un pacte avec le diable, eg>v minuit et une
heure du malin. Toute cette histoire à^lé publiée, avec
tous les faits qui s'y rapportent , par Georges-Rodolphe
Wiedemann, à Hambourg, en 1599, sous ce titre: His-
torien von tlcnen Grevticken (Urundtickcn) Siinden
I). Johann Faut Un.
La première pièce qui ail été faite sur Faust est une
farce pour les marionnettes, rilée par Gœrr.es, dans sou
ouvrage sur les livres populaires allemands. Elle esl fort
ancienne. Plusieurs imitations en ont été faites dans le
dit-septième siècle. Long temps après Leasing a traité en
dialogue l'épiso lc iic l'évocaliuii dit diable par Faust: mais
a' vol.. 'jS
Lessing, Allemand francisé, n'était pas né pour de pa-
reilles conceptions. Enfin Gœthe, l'une des plus grandes
illustrations de l'Allemagne; Cœlhc, dont le génie semble
avoir été forme pour un pareil sujet, Gœlhcen a fait un des
plus beaux titres de sa gloire littéraire. Ce n'est point
comme pièce de théâtre qu'il faut juger son œuvre, mais
comme une des; plus belles créations de caractères origi-
naux qu'il y ait au monde; comme un tableau passionné
des progrès de l'amour dans une ame ardente, et comme
le développement de celle pensée, que nul ne peut se
soustraire à la fatalité qui le dirige : croyance dès long-
temps établie chez les rêveuses populations du nord. Quel-
ques-unes des scènes de cet ouvrage, considérées isolé-
ment, sont des morceaux parfaits en leur geure , qui n'ont
pu «r« imaginés que par un génie vigoureux qui s'élève
jusqu'au sublime, même daus ses écarls.
La popidarité que les chefs-d'œuvre des théâtres étran-
gers ont acquis en France depuis quelques années, a fixé
les regards de nos faiseurs d'opéras , de drames , de vau-
devilles et de mélodrames, sur l'ouvrage de Gœthe, comme
sur une mine a exploiter ; mais la difficulté d'arranger ce
sujet pour la scène frnçaise avait retenu jusqu'ici les plus
intrépides. M. Théaulon vient d'être plus hardi , et le sue-
cès a justifie sou audace. Convaincu que pour réussir parmi
nous, il faut qu'une pièce se termine heureusement,
M. Tbéaulon aéléforcéde suivre un plan entièrement op-
posé à celui dt^Ujustre littérateur allemand, et de ne
prendre que lu fonds du sujet. Voici comme il a arrauge
sa fable.
Conrad, dernier rejelon de la famille d'Ernestadt, est
un vieux soldat qui n'a recueilli de la succession de ses
ancêtres que les ruines d'un vieux château où il demeure
avec sa fille Marguerite. Faust, amoureux de celle-ci, s'est
présenté à elle sous le nom d'un neveu supposé nommé
Frédéric. Il est aimé de Marguerite; mais Conrad ne veut
lui donner sa fille qu'après qu'il aura obtenu le consente-
ment de son oncle , et assez de bien pour assurer le sort
<!e celle qu'il aime; car lui, Conrad, ne vit que des of-
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fiandes que l'on fail à la Madone révérée des ruines d'Er-
iiestadl. Au premier acle, Faust, sous le nom de Frédéric,
vient annoncer à Conrad qu'il a ohtenri le consentement
île son oncle pour son mariage . mais que cet oncle , aussi
pauvre que lui, ne peut rien lui donner. Conrad refuse
d'unir les amans, el leur assigne le terme de Irois ans pour
<[ue Frédéric ail le lemps de songer à sa fbrlune. Jusque-
la , Marguerite vivra an m on a itère des orphelines de llo-
senthal. Resté seul . Faust déplore (ton sorl el la pauvreté
évoquer 1rs esprits infernaux. Dans ce moment le li-
e désiré tombe, a (cs pieds ; il le prend et y lit qu'il
a qu'à se rcudre la nuit près du vieux chêne de Ro-
Dthal s'il veut faire l'essai de non pouvoir. Son vieux
rviteur, Wagner, vient lui annoncer que ses livres et ses
s de physique et d'astronomie sont saisis par ses
. Faust se décide, et part pour se reudre au
diéne de Rosenlhaf.
La scène change, et représente la forêt de Hosenthal
avec le monastère. Faust y arrive; il est prêt de faire la
conjuration, quand les chants des urplielines parviennent
jusqu'à lui et ébranlent sa résolution. Cependant ces chants
cessent, et l'idée de Marguerite qu'il ne peut posséder se
présente à lui; il se décide et faitTévocation. Mépbislo-
phélès parait , et dit Fausl <|ii'jtfH^t a le servir en
esclave pendant >. nus . [imm^^^^U .
l'engagement d'èlre à lui pour l'étffl^^Faust demande
vlugt-qnalre heures: elles lui sont accordées, maïs à la
condition que si l'engagement n'est pas signé an bout de
ce lem|is, Méphislophélès reprendra tons lies dons. Aus-
silél des esprits infernaux apportent les litres d'une baronio
el de l'or. Fausl soi t jiuur chercher Marguerite . mais elle
arrive avec son père par des chemins détournés pour se
rendre au couvent. Elle est au désespoir, mais les reli-
gieuses viennent la chercher; elle va quilter son père,
lof«que Faust arrive, se fait connaître, et annonce à
5s4
Conrad qu'il n'a voulu que l'éprouver, que §es travaux
l'ont enrichi, et qu'il mot sa fortune aux pieds de celle
qu'il aime. Conrad consent à son union avec sa fille. On
va faire les apprêts de la noce , et l'acte finit.
Au second acte , la scène se passe dans le nouveau ciiâ-
.leau de. Faust. Tout y est magnifique. Wagner ne revient
.pas dej'étonnqment que lui cause laforlune de son maître,
lui qui n'avait vu que de la cendre au fond des creusets,
ue conçoit pas que cette cendre fût de l'or. Tous les ap-
prêts d'une grande fêle se font par le pouvoir diabolique
de. Méplu'slophélès. Cependant il, craint que l'amour de
Çausl pour Marguerite ne finisse par le ramener à la
vertu , et il veut tout faire pour le rendre infidèle. Dans ce
dessein , il fai^ sorlir du tombeau CJéopdlre, Aspasic, Sa-
pho, etc. , et leur rend l'éclat etia fraîcheur dont elles bril-
laient autre lois. A la vue de ces femmes, Faust est séduit ;
niais bientôt Marguerite le rappelle à lui-même. Elle con-
sidère avec effroi ces femmes qu'un pouvoir surnaturel
rend témoins de ses noces, cl se sent avertie par une vois
intérieure que ce ne sont que des ombres. Mais sa terreur
no connaît plus de bornes quand elle a jeté les yeui sur
Méphistophélès , et surtout quand elle a vu son bouquet et
fia couronne changer de couleur et devenir noirs. Elle de-
vine alors le pacte fait entre Faust et les puissances infer-
nales, et s'enfuit en poussaut des cris. Faust et Conrad la
suivent. Des soldats se présentent pourarrêler le premier,
mais Mé[)hlFi[ophJÉ|^^r fascine la vue , et descend aux
enfers avec U s^^^^Bn'il a fait sorlir du tombeau.
Av. troisicme^^^^e théâtre représente l'entrée des
ruines d'EruestnuT. Marguerite implore, aux genoux de
son père , le pardon de Faust. Elle veut le voir pour le ra-
mènera la vertu. Mais Conrad demeure inflexible, et force
sa fille à rentrer pour prendre du repos. Faust vient aux
ruines dans l'espoir de voir Marguerite II reproche à Mé-
phistophélès d'être la cause de son malheur; mais celui-ci
lui promet la possession de sa maîtresse pourvu qu'il signe
l'engagement d'Otre à lui. Faust se décide et accepte la
proposition. La décoration change, et représente la cham-
3a5
brc de Marguerite. Elle entre suivie de sa jeune compagne
Miuu. C'est dans cette chambre que se trouve ta statue de
bronze de !a Madone révérée d'Ernesladt. Marguerite et
Mina la prient de changer le cœur de Faust. Un bruit sou-
terrain les effraie ; pour chasser la peur elles chantent une
ballade , et s'endorment au refrain. Faust et Méphistophé-
lës sortent des entrailles de la terre. Faust pressé de tenir
sa promesse signe le pacte , et Mépliistophélès lui apprend
que ta verlu de^llarguerite est attachée h la couronne qui
est placée sur la tête de la Madone; et que celui qui s'em- '
parera de la couronne triomphera de la jeune fille. Resté
seul avec Marguerite et Mina , il prend celle qu'il aime
dans ses bras; elle s'éveille, pousse des cris; Faust, ne"
pouvant vaincre sa résistance, veut s'emparer de la cou-
ronne : mais elle a disparu. Faust tombe évanoui. Conrad
survient et tire son épée pour punir Faust de l'outrage qu'il
a voulu faire à sa fille. On entend des cris: ce sont ceux de
Méphistophélès, qui a voulu saisir la couronne , et que la
Madone relient avec ses mains de bronze. Faust seul peut
le dégager. Celui-ci , revenu a lui , exige que le démon lui
rende le pacte qu'il a signé. Après l'avoir rendu, Méphis-
lophélès s'abîme dans les enfers. Conrad pardonna à'
Faust, et lui accorde la main de Marguerite.
Je ne sais si je me trompe; mais il me semble que
M. Théaulon , en ôtanl du sujet de Faust la fatalité qui le
oonduit de crime en crime jusqu'aux enfers, et qui cause
les fautes et la mort de Marguerite, l'a privé de tout l'in-
térêt dont il est susceptible. Du moment où l'on s'aperçoit
qu'il y a un pouvoir qui combat celui de Méphistophélès,
et qui protège l'innocence , ce n'est plus qu'un conte des
MiiU et une Nuits dont on prévoit le dénouement. Quel'
intérêt peut inspirer la vertu d'une jeune fille qui dépend
de la possession d'une couronne de (leurs? C'est l'hisloire
du Petit Chaperon. Je regrette aussi, je l'avoue, les ca- ■
ractères si bien tracés par Gœlhe , et dont il n'y a pas de
trace, dans la pièce du théâtre des Nouveautés. Telle
qu'elle est, il faut bien cependant qu'elle ait un charme
que je n'ai point aperçu , car elle a réussi complètement ,
3aS
et la foule s'y porte chaque soir. H est vrai qu'on y trouve
des décorations dont l'effet est fort beau, et qu'on est étonné
de voir sur un théâtre secondaire.
La musique de Faust est ce qu'on appelle un Pastic-
CÎO..A l'exception d'un chœur, d'une ballade, 'et de quel-
ques autres morceaux de peu d'importance, qui ont été
composés par M. Béancourt , chef d'orchestre du théâtre ,
tout le reste est tiré de divers opéras français ou étran-
gers. On y trouve l'ouverture A'Euryantke, de Weber ;
un air des Rosières de M. ilérold , un chœur de Joseph,
de Méliul ; un fragment de trio du Chaperon Rouge, de
M. Boieldieu; une marche du même ouvrage, une prière de
Robin des Bois; la bacchanale des Danaïdes, de M. Spon-
tiul , et beaucoup d'autres morceaux connus qu'il serait
trop long de détailler. L 'exécution de tout cela est bien
défectueuse. L'orchestre, trop peu nombreux pour rendre
d'une manière convenable des compositions telles que
l'ouverture d'Euryanlhe, ne peut y produire d'effet. Les
basses et les violons surtout sont trop faibles. Aussi cetie
ouverture, qui d'ailleurs n'est pas bonue, fait-elle éprou-
ver un sentiment pénible. H y a cependant quelques hom-
mes de talent dans cet orchestr. ; mais on ne peut rien
sans le nombre nécessaire. Quant aux acteurs, ils chan-
tent d'une manière curieuse , sans excepter même H™ Al-
bert, la Posta du lieu. Cette actrice a de la chaleur, il
même de la voix; mais cette voix n'est point posée. Les
sons, sans être précisément faux, ne sont pas justes non
plus : ils sont dans ce mezzo termine presque aussi cruels
pour l'oreille d'un musicien qu'un délonnement complet.
Du reste , pas la moindre connaissance de la vocalisation
, nî du phrasé. Rien ne m'a paru plus comique que l'air du
troisième acte, air prétentieux, dont tous les traits ont
été manqué*, W MiUcr aime aussi beaucoup les points.
les taire. 11 serait trop dur de parler du chaut de Casa-
neuve et d'Armand, et je- me tairai à leur égard. 11 m'a
semblé que Bouffé ouvrait la bouche daus les moçONMtix
d'euieuible, mais je ne suis pus certain que ce fut pour.
chanter. En somme, toitle cotte exécution m'a rappelé
certains petits linéaires île province, nii je me suis trouvé
quelquefois, pour mes péchés. Il y a cependant dans la salle
grand nombre de gens qui applaudissent : je ne puis ex-
pliquer cela qu'en pensant que ces messieurs sont du
nombre de ces Dilettanlts , si plaisamment signalés par
le spirituel rédacteur de la Chronique musicale du jour-
nal des Débats, dans un de ses articles sur l'Opéra- Co-
mique. Ce qu'il y a de singulier, c'est que le véritable
public a l'air d'être le compère de tes messieurs, au moins
par son silence ! à cela je n'ai rien à dire : Chacun prend
son plaisir où il te trouve.
FÉTJS.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Beuin. Mademoiselle Nanelte Scheckner, première
chanteuse de la cour de Bavière, a passé par celle ville en
se rendant de Vienne à Munich. Pendant son séjour ici,
elle a donné, à l'Opéra une suite de représentations qui ont
procuré au public des jouissances qu'il n'oubliera de long-
temps. Les rôles principaux dans lesquels elle a paru sont
ceux d'Emmetine, dans la Famille Suisse, de Weigbl,
A' Anna, dans la Came Blanche, de Boyeldieu, do Léo-
nore, dans Fidetïo, de Bcetliowcn, du Ninctla, dans
la Gazza Ladra, de Rossini, d'Agathe et Annette, dans
le Freischûtz, de Weber, de Julia, dans la f estaie, île
Sponlini, de Cordelia, dans l'ouvrage de ce nom, de
Kreutzer, d' I phi génie, dans t'Iphigénie en Tauride, de
Gluck, et de Dona Elvira, dauala Don Juan de Mozart.
Le cours dcscsrcprésenlationss'est terminé, le 16 septem-
bre, par la Vestale, qui a été jouée pour son bénéfice. J.u
nom de cette jeune cantatrice nous était presque inconnu :
nous savions seulement qu'elle avait reçu de vifs appluii-
dissemens àl'Opéra-ïtalien de Vienne, conjointement avec
M" Lalande. Elle s'est acquis parmi nous une réputation
qui doit avoir une heureuse influence sur sa carrière. U
5a8
n'y a peut-être pas d'exemple dans les annales dramatiques,
d'une réputation si distinguée acquise en si peu de temps.
En quelques jours, elle Était devenue la favorite du public;
elle avait excité dans son ame un sentiment d'admiration
difficile à décrire. Il est inutile de l'examiner en détail
dans les divers rôles qu'elle a joués ; elle a été parfaite dans
tous. Les chants doux et purs d'Emmeline, et les accens
passionnés d'Iphiginieel de Jutia ont été rendus par elle
avec tant de talent, que l'auteur de ta V estais a déclaré,
que c'était la première fois que ses intentions avaient été
saisies et exprimées. Enfin, à la seconde représentation son
Mitlumsi.-isme l'emporta, il laissa tomber le bâton de me-
sure, en s'écriant : « M"M Sehechner est taptus grande
cantatrice du monde! i
Nous croyons devoir copier ici la relation de la dernière
représentation de taVe&tate; car l'impression qu'elle a
produite sur le public ne peut être mieux décrite qu'elle
ne l'a été par l'habile critique chargé de la partie musi-
cale du journal de Vosx. •
Hier soir, dit-il, mademoiselle Sehechner a terminé
ses représentations à notre théâtre , avec un éclat qui n'a
peut-être jamais couronné les efforts d'aucune des actri-
ces qui ont paru ici. L'enthousiasme du public était
croissant à chaque représentation; mais il faut avouer
qu'en cela il était d'accord avec le talent de cette canta-
trice, qui semblait se surpasser sans cesse. N'est-ce pas
une chose merveilleuse qu'une femme dont on connaissait
à peine le nom, il y a dix-huit mois, se soit tout à
coup élevée au premier rang et soit aujourd'hui la pre-
mière chanteuse dramatique de l'époque? Elle n'a été
avec nous que quatre mois , mais cette période, quoique
bien eourle, a suffi pour produire une grande sensation.
Elle est douée par la nature des facultés les plus précieu-
ses, elle a eu ici l'occasion ( qu'elle n'avait point trouvée
sur d'autres théâtres ) de s'essayer daus les plus beaux
rôles des meilleurs opéras; ici, elle a chaulé la musique
de Gluck , le premier des compositeurs ; enfin ici , elle a
trouvé un public juste apréciateur du talent, cl dont le
3*9
goût n'est point gâté par l'insipidité des obéras italiens
modernes.
Avec quels regrels on a vu arriver le départ de cette
admirable actrice I La multitude se pressait pour la voir
dans la dernière représentation à'Emmtline; et les ap-
plaudisscmens qu'on lui prodigua prouvaient que le prix j-*^»
d'un tel trésor était encore augmenté par l'idée qu'on
allait bientôt en 'être privé : mais tout cela n'était rien
auprès des transports qu'elle a excités la dernière fois
qu'elle a joué dans l'opéra de la V atate , représenté pour
son bénéfice. A son entrée , elle a été accueillie par un ,
tonnerre d'applaudissemens, qui a recommencé après le
premier grand air. Maïs c'est surtout au second acte que
spn triomphe a été complet. Quand elle eut chanté son
air avec une expression sans égale, et pendant qu'on '
l'applaudissait à tout rompre, des vers en son honneur
lui ont été jetés du haut de la salle. A la lin de l'acte,
elle a été redemandée , des vers lui ont été jetés de nou-
veau , et, hors d'état de parler, elle montrait seulement
par >es gestes la reconnaissance que son émotion l'empê-
chait d'exprimer. A la fin du troisième acte, le rideau
commençait déjà à tomber, lorsque l'auditoire, frappé de
l'idée qu'il allait la perdre , a voulu revoir encore celle
qui lui avait fait éprouver des plaisirs si vifs. Tremblante
agitée, elle a reparu, accompagnée de tous les acteurs,
qui prenaient un vif intérêt à son triomphe. Lorsqu'on la
vit, on lui jeta une troisième fois des vers de toutes les
loges, et des fleurs couvrirent le théâtre. Une couronna,
tomba à ses pieds et les spectateurs voulurent absolument
qu'elle lui fût posée sur la téta. Sou émotion était au
comble, cependant après être parvenu à la maîtriser,,
elle a remercié le public de ses bontés, et s'est engagée à ,
revenir à Berlin. Cette promesse a fait éclater les plus
vifs transports de joie. Après le spectacle, de nouveaux
témoignages de l'admiration publique lui ont encore été
prodigués. On lui a donné une sérénade composée des
morceaux des opéras dans lesquels elle avait joué, et de
nombreuses acclamations l'accueillirent lorsqu'elle se
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33o
présenta à sa fenêtre pour témoigner sa reconnaissance
par ses salutations.
On a donné le 18, au théâtre dcKœnigstadl,la première
représentation des V oitures versées, de] Boîeldieu , qui
ont obtenu beaucoup de succès, quoique les amateurs ne
mettent pas cette musique sur la même ligne que celle de
Jean de Paris et de la Dame Blanche, du même auteur.
On y avait intercalé deux morceaux étrangers. Vn fait
assez curieux est que le principal rôle de ténor y a été
chanté par un contralto italien (M11* Tibaldi] . Un journa-
liste trouve la substitution d'autant plus heureuse, que le
traducteur allemand a fait de ce rûle un florentin, nommé
Fiorillo, ce qui justifie la prononciation italienne de ma-
demoiselle Tibaldi : on pourrait peut-être croire que la
prononciation de la cantatrice justifie la substitution.
Cassei, 18 octobre. On a donné, te i5, un nouvel opéra
de Spohr, Pietro d'Albano, dont le poème, romantique
«'il en fût, est emprunté à un roman de TiecL. Autant
qu'on en a pu juger à une première audition, on a trouvé
la musique trop fréquemment coupée par le dialogue,
mais on y a reconnu de grandes beautés harmoniques et
beaucoup de vérité d'expression.
Dresde. On devait donner le iS octobre, la première re-
présentation A'Oberon, au bénéfice de la veuve et des en-
fans de AYcber, mais le ténor Babnigg, qui devait chanter
le rôle de Huou, a été frappé d'apoplexie en enlraut dans
une chaise à porteur : on craint pour lui une inflamma-
tion cérébrale.
Le SUge de Corînhte a été représenté le 3 octobre pour
la première fois, sur le théâtre de Mayence, avec un succès
qui paraissait devoir être confirmé aux représentations
suivantes.
FÊTES MUSICALES ANGLAISES.
Deiu de ces grandes fêtes musicales, qui ont lieu, à de
certaines époques en Allemagne et eu Angleterre , vien-
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lient il'êlre célébrées avec beaucoup d'éclat daim ce der-
nier pays. Un tait quel développement colossal ces sortes île
solennités j'ont ordinairement. La fêle d'York, a offert ily
a quelques années, un spectacle qu'où ne reverra peut-être
plus. Un orchestre composé de plus de six cents musi-
ciens, et un auditoire si nombreux que la recetle s'est
élevée à a4,ooo livres sterling ( six cent mille francs).
La première fête de celle année a élé celle île Norwicb;
elle a eu lieu les 18, 19 et 20 septembre. L'orchestre et les
chanteurs étaient au nombre d'environ trois cent cin-
quante. On y a exécuté le Messie de llajodel , et plusieurs
morceaux choisis dans les oeuvres de ce grand musicien,
et dans les ouvrages de Haydn, de Mozart , de Craun et
de Méhul, Les principaux chanteurs étaient H™ l'as la ,
Miss Stcpheus, Miss Bacon, MisslI. Cawse, M*" Caradori-
Allan, et MM. Brabara, Vaughan, Terrai! , Taylor et Zuc-
chelli. Les chefs d'orchestre étaient MM. F. Cramer et
Kcïswelter, el l'organiste sir Georges Smart. Le prix était
d'une guinée par billet, et la recetle s'est élevée à dix mille
livres sterling (deux cent cinquante mille francs). L'exé-
cution a été généralement satisfaisante. Dans ces sortes do
concerts, les chefs de pupitres seulement son t choisis parmi
les artistes de Londres; les autres exécutans sont pris dans
les provinces.
Le charlatanisme anglais se montre dans les moindres
choses. Nous avons sous les yeux l'affiche de la fête musi-
cale qui s'est donnée à Liverpool les a , 3 , !\ et 5 octobre
derniers. Les dimensions de cette affiche sont de dix pieds
de hauteur sur trente pouces de large. La liste des patrons
de la fête, au nombre desquels se trouvait le roi, occupe
une partie de l'affiche. On y voit ensuite les noms des prin-
paux chanteurs en lettres de deux pouces : c'étaient
M" Pasta, M" Knyvclt, Hliss Wilkinson , Miss Farrar,
Miss Slephens, et MM. Braham, Vaughan, Phillips, Ter-
rail, Taylor, et de Bcgnis. Parmi les exécutai» de foi -
cheslre on remarque MM. F. Cramer, Mori, Dan ce et
White pour le violon; MM. Uime et Daniels pour l'alto;
Lindlcy aîné et Lindley jeune pour le violoncelle; Dragu-
35i
nctti etïaylor pour la cou Ire basse ; Nieholson et Weiss
pour la flûte ; Lïng et Hughes pour le hautbois ; Witman
et Powel pour la clarinette ; Mac tint ose h et Tully pour le
basson ; Platt et Rue pour le cor ; Harper et Hyde pour la
trompette; Smilhies et Woodham pour le trombone.
La fête a ■commencé par un bal suivi d'un sermon. Le
mercredi, 3 octobre, on a exécuté à l'église de Saint-Pierre
l'oratorio de la Création de Haydn, et plusieurs morceaux
extraits des oratorios deHœndel, et de la Palestine, ora-
torio du docteur Crotch. Le jeudi matin, 4 octobre, fut
employé à l'exécution du Meute de Haendel, Là fête se
termina le vendredi par l'oratorio d'Israël en Egypte
du même compositeur. Le* mardi et jeudi soir, il y eut
deux grands concert» au nouvel amphithéâtre de la grande
rue Charlotte.
H" Pasta avait un engagement pour les quatre jours de
de la fête, à raison de six cents livreB sterling. Elle a pro-
duit peu d'effet, ce qui lui arrive presque toujours quand
elle ne peut déployer son talent dramatique. Sous 1 d'autres
rapports, la fêle a été satisfaisante.
ÉCOLE DE LA LYRE HARMONIQUE,
FONDÉE PAR B. PASTOU,
Ancien artiste du TheSIre rdjal Italien, professeur d'harmonie , de
violuo , de guitare et d'accompagnement; rue de ta Vrillière,
L'École de la Lyre harmonique reprendra ses cours le
samedi 27 novembre i8aj,
M. Pastou étant forcé de consacrer les autres jours de la
semaine, soit aux leçons qu'il donne dans les iuslitutions ,
soit aux soirées musicales dans lesquelles il sefait entendre,
ne pourra tenir ses séanceschez lui que deux fois par se-
maine , les mardi et samedi, de sept heures et demie à neuf
heures du soir pour les hommes, et les mêmes jours de deux
heures et demie A quatre heures pour les dames.
L'expérience et une étude toujours plus constante do
335
l'art musical oui mis M. Pastou à même d'introduire dans
la méthode qu'il vient <lc publier des perfection nemens qui
tourneront au profit des élèves.
Les cours dureront sept mois, à compter du l5 novembre
au iS juin suivant.
D'après la disposition de l'ouvrage nouvellement im-
primé, il en résultera pour les élèves, que des circonstances
particulières obligeraient à des absences plut ou moins
fréquentes, l'avantage de ue point perdre le fruit des le-
çons déjà suivies, puisqu'ils auront la facilité de les étudier
dans la Méthode, où ils les trouveront écriles, à peu de
chose prés, telles que M. Pastou les donne dans ses cours.
Ils pourront aussi être admis à quelque époque que ce
L'abonnement est fixé a ao francs par mois, ou 100 fr.
pour le cours entier, qui est de sept mois. Tontes ces sommes
On pourra donc suivre le cours auquel on aura souscrit
aussi peu et aussi long-temps qu'on le voudra. On conçoit
pourtant que ta rapidité de l'instruction dépendra aussi de
l'exactitude à suivre les leçons, qui seront en grande par-
lie de musique pratique, puisqu'on aura toute la théorie
dans le livre de M. l'astou. Pour répondre airï réclamations
qui lui ont élé faites, M. Pastou s'engage a ne plus se faire
remplacer dans ces cours par aucun sous-professeur.
Trois ou quatre mois mettront les élèves assidus à même
de lire sur toutes le clefs, de transposer el par conséquent
défaire une partie dans un morceau d'ensemble,' ou de
chanter la romancesi on a assez de voix. Ces connaissance*
ne sont pas moins utiles àccux qui, n'étant pas doués dlirnc
voix propre à l'exécution, jouent déjà ou voudraient jouer
L'appel el les amendes auxquels les élèves des années
précédentes étaient assujettis, devenant sans objet, n'rais^
terout plus. , *■ « il
Les élèves n'ont d'autre dépense à faire pour les cours
que a.'i francs pour la Méthode, qui leur est indispensable
par les raisons données ci-dessus. Hi Pastou s'oblige à
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554
composer ou à fournir toule la musique nécessaire pour
l'instruction des Élèves qui se confient à ses soins, pendant
les cours.
On souscrit tous les jours depuis huit heures du matin
jusqu'à quatre heures après midi, rue de la Vrillière, n° 8,
Nota. A cause du changement de domicile les cours se-
ront affichés.
JOURNAUX DE MUSIQUE
M OS ILE ET UUG110».
Les éditeurs du Journal de musique religieuse, qui a
commencé au i" janvier 1837, ont l'honneur d'informer
le* personnes que cet objet peut intéresser, que d'après
les observations et les demandes qui leur ou tété faites par
un grand nombre d'abonnés , ce Journal sera , à compter
du 1" janvier prochain , partagé en deux autres, savoir :
■ ImnNAI DE CHANT ET HUSFQOE D'ÉGLISE,
JoUKNiL MUSICAL D'ÉDDCATION.
Ces Journaux continueront d'offrir un choix de textes
ou de poésies morales ou sacrées, mises en musique à
une ou plusieurs voix, avec ou sans accompagnement
d'orgue ou de forté-piauo , par les meilleurs auteurs :
mais ils différeront quant au nombre, au genre et au ca-
ractère des pièces, ainsi que nous allons l'expliquer eu
peu de mots.
Journal de chant et de musique d'église.
Ce Journal de musique d'église contiendra uniquement
nés compositions propres aux usages de l'Église , placées
principalement sur des textes latins, telles que Messes,
Psaumes, Motets, Offertoires, Hymnes, Litanies, La-
mentations , Te Deum et autres du même genre.
Il sera composé de vingt-quatre numéros, formés
chacun de trois à quatre pages d'impression , qui paraî-
tront le 1" et le i5 de chaque mois; le prix sera de l5
francs par an, ou <j francs pour six mois, franc de port
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355
pour Paris et les déparlemens ; il faut ajouter 5 centimes
par numéro pour l'étranger.
!f. I>. Quoique essentiellement propres aux usa^s de l"Egliie , toui
jus iilijr^ts compris en ce recueil conviendront également pour l'enbei-
gnement et lei réunions musicales.
Journal musical d'Éducation.
Ce Journal, spécialement destiné aux jeunes person-
nes qui apprennent à chanter , offrira un choix de poésies
morales ou sacrées, soit françaises, soit italiennes : telles
que cantates, odes, romances, scènes ou fragmens
d'oratorio et même d'opéra, tant anciens que modernes ,
toutes les fois que les paroles seront de nature à pouvoir
être mises entre leurs mains.
Il sera composé de trente-six numéros, qui paraîtront
les io , ao et 3o de chaque mois. Le prix de l'abonnement
sera de aa francs 5o centimes par an, et de i3 francs
5o centimes pour six mois, franc de port pour toute la
France ; il faut ajouter 5 centimes par numéro pour
l'étranger.
Le prix de l'abonnement, pour les deux journaux réu-
nis, sera de 3o francs franc de port pour toute la France;
et de 53 francs pour l'étranger.
Les lettres de demande et l'argent devront être adressés,
franc de port, à mademoiselle Alexandrine Choron,
à l'Institution royale de Musique religieuse, à Paris , rue
de Vangirard, n* 69.
On s'abonne également chez Ions les libraires, mar-
chands de musique et d'estampes, et chez tous les direc-
teurs des postes de France et de l'étranger.
ANNONCES.
1° Premier recueil de contredanses et valses pour piano
et guitare, oeuvre 35, par P. L. Àubéry du Boullcy. Prix :
3 fr. So c.
a' Deuxième recueil de contredanses et valses pour piano
et guitare , œuvre 56, par le même, Prix : 6 fr.
556
5° Troisième fantaisie avec des sous harmoniques pour
guitare seule, œuvre 37, parie même. Prix : 3 fr. 5oc.
4° Duo facile pour piano et guitare, œuvre 58, parle
même. Prix-: 5 fr.
5° Troisième quadrille de contredanses et valses suivi
d'un thème varié pour guitare seule, œuvre 5g, par le
même. Prix : 5 fr. 5o c.
A Paris, chez ltichault, boulevard Poissonnière, n' 16.
— Af oîse, opéra en quatre actes, représenté pour la pre-
mière fois sur le théâtre de l'Académie Royale de musique
le 26 mars iSaj. Prix: i5o fr.
Paris, E. Trou p en as, rue de Hénars, n° 3.
Les amateurs attendaient avec impatience la publication
de cet important ouvrage; chacun pouvait Être curieux eu
effet de voir par quels moyens l'auteur avait pu préparer
les grands effets qui; produit l'exécution de ce chef-
d'œuvre. Nous croyons leur rendre service en leur annon-
çant qu'il vient Uo paraître, et que l'éditeur n'a rien né-
gligé pour que la beauté et la correction de l'édition ré-
pondissent au mérite de l'ouvrage.
— Fantaisie pour piano et violon, sur le. motifs de l'o-
péra français de Moïse, par T. Labarre et C. de Beriol.
7.fr^.5oc.. , .-. . , . _
— Variai ions de concert sur la marche des Grecs, du siège
de.Corinlhe pour piano-forlé, avec accompagnement
de quatuor ad libitum, par Charles Czeruy op. i56. 7 fr.
5o c.
—Fantaisie pour piano et violon,sur les motifs de Moïse
et du siège de Corinthe, par Snel, premier violon du
théâtre royal de Bruxelles, 7 Ti. 5o c.
Paris, E. Troupenas, rue de Menars, 11* 5.
Lu li:0"J I3y
SUR LA HARPE A DOUBLE MOUVEMENT
DE M. SÉBASTIEN EIIAIID;
»», PIB OCCllIOn , BOB (.'OBICISB HT LES PBOQBBI DI CEI I1IITBUIIBMT.
La harpe parait avoir atteint la perfection dont elle eut
susceptible. Mais avant d'y arriver, elle a passé par des va-
riations de formes qui sembleraient indiquer des origines
différentes, ou du moins que des instrument analogues
ont été inventés, à diverses époques, chez diffère ne peuples,
et que c'est de la réunion de ce qu'ils avaient déplus avan-
tageux qu'on a formé celui que nous connaissons aujour-
d'hui sous son nom.
L'inspeetiondes plus anciens monumens de l'Egypte y a
fait découvrir aux voyageurs des harpes do diverses formes,
et a fait voir que l'invention de ces instrumens remonte
aux temps les plus reculés. Celui de tous ces instrumens
qui a le plus d'analogie aveo la harpe moderne a été dé-
crit pour la première fois par le voyageur Bruce, d'abord
dans une lettre qu'il a adressée à Burney, et ensuite dans
la relation de son voyage en Abyssinie ; mais la ligure qu'il
en a donnée est fort inexacte. Elle a été reproduite de-
puis, avec les rectifications nécessaires, dans la belle Desr
cription de l'Egypte, publiée par les ordres et aux frais du
gouvernement français. Cette harpe, et le musicien qui en
joue, sont peints à fresque dans un des Hyppo'gées qui con-
tiennent les tombeaux des rois de l'Egypte, à Thèbes. La
conservation en est parfaite. Le corps de l'instrument , sa
base, et sa partie supérieure, ou console, ont une grande
ressemblance avec ces parties de nos harpes ; mais on n'y
trouve pus comme dans celles-ci le montant qui lie la teto
à la base. J'ajouterai qu'en cela il ressemble parfaitement
au e/iaf, ou harpe du Martaban , dont la description se
trouve dans la Revue Musicale ( tom. I, pag. 140 et i/ji),
ce qui pourrait faire croire qu'il tire son origine de l'Inde.
Le nombre de ses cordes ne s'élève pat au-dessus de treize ;
a* vol. ag
Digilizod by Google
338
mais il ne faut pas en conclure que les harpes égyptienne*
n'en avaient jamais davantage , car sur un bas-relief des
ruines 'de Ptolémaïs, on voit une' harpe à trois côtes
( trigone) qui est montée de quinze cordes.
L'usage de la harpe chez les anciens peuples de Ilntle
et de i'Égypte doit faire présumer que les Grecs et les
Romains eu ont eu connaissance , et qu'ils s'en servaient ;
mais le nom que nous lui donnons ne se rencontre chez
aucun des écrivains de l'antiquité. On croit généralement
que le trigone on la sambuque des Grecs n'était que cet in-
strument; et l'on se fonde en cela sur ce que Sophocle,
dans un fragment cité par Athénée1 , donne l'épithÈle de
phrygien au trigone; et sur ce que Porphyre, dans son
commentaire sur les" harmoniques de Ptolémêe, dît positi-
vement que la sambuque était un instrument à trois côtés ,
dont les cordes étaient différentes en langueur et en grosseur.
Turiièbe a dit aussi, sur l'autorité de ce philosophe (inLcct.
il)) : Sambuca triangulum instrumentant est, i/uod ce inut/aa-
tibia Itmgitudine, skul et crossitudine nercis efftcitur''.\ l'égard
des Romains, on présume que chez eux la harpe est fin-
(i)Deip. Lil>. i. Cap. .3.
(?) Le «avant Spanbeim, dsns son eicellent Commentaire sur I»
Hjmnis lit C*lliniaquc, a prouve( tum. a, p. i?4 el4j5), sur l'autorité
de Slraliou cl il'Ai islDiène , rilé par Ailiénri:, que tous les inslnimens il
cordes obliques, teb que le natlum,U b,.rlillas, U magarte, Upsatlerium
et \t'tanbique, K>nt (l'urigîNp 1.|,<>nivimnef chaldaîqut ou syrienne. Le
passage eatcurieu» el mérite d'itre mppoité; leioicl ;
a ïil nomïnfLil m, uliqea Je nabla, barbîto, magnttî, ohierycl Strnho, I, i, p. 471,
. . el qnon prirlcre. do piattcrie , iamt*Ka , ipluqn» ct'nunw nonine ib bibriToD
. ciiuar, cl .1 I ir r i i .1,1 ;, i ni % 1 ti ikIeu poMu,
i mïïidi Hifli'ni a ikiIil-. inl'r- iilLui' .U.'itliv. I mlo l'Ij.lm uii A ri>l im:nn peregrina
■ intrrumma rec*nseiï, phaRiciait peelittat T ma^aïU'lus , ïamhnrai , triffwui ,
r icrrJ.tf.jf.i.j*, KM i .l.-iik iiii.: nl.i ttmi Ji in-i nulle ma , i l'Icrl Alhcnicilf , t. IV, p. 1B1^
. imu i|uuiL iKiLi.li.i, ,1^ iryjjr:,.. u. a Svfii reperio; el do lamimn, taoqnaoi Syrn*
■ lui iq
. Altepmu , I. rtfcpJÇjS , il Ht. *Vfpi 637. Aul tero , qood do erlfam. , ipiw,
• .inHotitf, linquam in Asia reperla fnoiil, dicla,jaiuinlocilanol>ii oliservalum..
Il paraît que l'usage de la birpe, autrement dite trigone ou wnitti'/no
DigiiizGd ti/ Google
33g-. .
slfiment nommé cinnira, mut qui parai! Être ta traduction
de celui de kinnor ou lùnnar, qui , dans te texte hébreu de
l'Écriture sainte, désigne la harpe de David. On trouve
plusieurs trigones dans les peintures à fresque d'Hercula-
num (voyez Mus. Ercol, Pitture, toui. i , p, 16g).
Quoi qu:il en soit de cette origine antique de la harpe,
il paraît certain que plusieurs peuples, qui n'avaient dû
avoir que de» rapports fort indirects entre eux,. l'un t con-
nue dans des temps très reculés, ce qui peut taire croire
que le même instrument a été inventé chez, plusieurs
peuples, à des époques différentes.. On a vu, dans le pre-
mier volume de la Revue Musicale { p. le passage de
Papias' qui attribue à un ancien peuple d'Italie, nommé
Arpes, l'invention de cet instrument: Harpa dicta d genU
Arporum qui hoc instrumentant muticum invencrunt. D'autres
auteurs, avec plus de fondement peut-être, alteibuent
cette invention aux barbares du nord. Ménage1 assure que
harpe vient du vieux mot allemand harpon, qui se trouve
employé dans une très ancienne traduction saxonne de ces
mots du Psaume 146: Psattite Dea nottro in cythara. For-
tunatus est aussi de cette opinion lorsqu'il dit1 :
Rornaniisque lyra plaudct libi , barbants harpa
Gracuj achillinca croit a britanna canet.
Les Saxons et les Danois ont purlé la harpe dans lus îles
britanniques dans le moyen age ; les formes variées sous
«'Était introduite à Rome, long temps ayant [a conquête île la Syrie par
Ici Romains , car le mime auteur dit ensuite :
■ Imo nec obliquai ehordas , de lali inaLrumiinlo , e tyriaco luïil in urbain ad.
< içliii ili: ! .1 S.iu : riiiijlii'.hji; m i] i i '.'rrnj.jjtrmr , a quo jflrrttrrcirlrrV vel mmbw
1 cùut, qutf illud pulsare; aoque Romanoruni ludo» cl epula* ut d. I. Livûis, oblec-
■ Tare eraiit docile , Uigoaale ce cum ina quaiibu* nervia jeu ebordi* exuliïM; aul
i obliqua tsueroquin yulgo luiue, ipu lyrœ aeu cv liions, aUflruioque id geain
< Ij/âfSurt inammenlorum lilera al tarnai., Polluci p. Ifiî. m.yiïn, «para
. pool oola al obiia eoruni in monnmsnlù aaliquis, cl da quibui moi, scbcmala id
• abuude DMf nilunt. •
(1) Ohiiar. Mannicril de la Bibliothèque du Boi, fondi de l'tglÎM d*
Patin, cite par Dncangc.
(j) Diction, etymol. an mol harpe.
(3) Lit. j. Carm. S.
lesquelles tel instrument se présente à, nous, sur les mo-
nument rapportés par Strult, dans son Angleterre ancienne,
prouvent évidemment combien l'usage s'en était répandu.
Je ne répéterai point ici ce que j'ai dît ailleurs sur la
Harpe irlandaise * ; il me suffit d'y renvoyer.
Ce n'était pas seulement dans les pays du nord que la
harpe était cultivée; les invasions de toutes les hordes
barbares qui en étaient sorties en avaient répandu l'usage
dans toute l'Europe. On sait qu'elle fut l'instrument de
prédilection des troubadours, des trouvères et des ménes-
trels. Les miniatures des manuscrits et d'autres monu-
mens ne nous laissent point de doute sur sa forme, et
plusieurs passages des poètes du douzième et du treizième
siècles prouvent que sou nom était semblable à celui que
nous lui donnons. En voici quelques exemples. Dans une
version française du livre des Unix, faite au douzième
siècle , on trouve : « David e tuz ces de Israël juerent de-
avant nostre Seigneur od multes menïeres d'estrumens ,
■ od lutrpe» è lires, è tympans et frestels et cymbals. • L'au-
teur du roman de ta Rose a dit aussi :
. Car Dieu merci, bien forgier ht
• Si voua de bien que plut ebier »y
• Met deu* martelé» et m'eicbarpc
■ Que ma citqle et ma harpe. »
Enfin on trouve dans le Lucidairt, espèce de roman du
même temps :
• En eitrumeai uïr , soner,
. Pial'èrc , harpei et lielea
• Et gigei er ehifonie belei. •
On pourrait multiplier les citations de ce genre, mais
celles-là suffisent.
Depuis le dixième siècle jusqu'au quinzième, la harpe
fut l'instrument le plus estimé. On croyait alors qu'il avait
le pouvoir de calmer la fureur, d'apaiser les souffrances,
de dissiper le chagrine! la mélancolie. Tristan, se croyant
trahi par sa maîtresse, la belle ï seuil, est dans une Iris-
(i) Itttue Muiicalc , loin. i. p. 5oj
Digitizcd by Google
fente profonde; il entend les sons d'une harpe, et son cha-
grin se dissipe. « Tout incontinent que Tristan oit la da-
■ moiselc (pu atrempoit la harpe, si lessa son deul et priât
* à regarder la damoisele. Si 11 dist : Damoisele, se Dieu
• vous garl, dites un lai. » Le» vers suivans de Guillaume
de Macliault prouvent que la harpe était considérée com-
me le premier des instrumens.
■ Mais la harpe qui tout instrument pane ,
• Quant sagement bien en joue et compassé.
Et ceux-ci ;
• A la harpe partout telle renommée
• Qu'autre douceur à li a'ctt comparée.
On voit par deus vers du Dante, que, de son lemps, le»
Italiens n'avaient pas moins de goût pour la harpe que les
ri meure français des douzième et treizième siècles.
• E corne Ijra, et harpa in ttmpra te»
• Di moite curde Si dolcu linlinno.
Parodia, V.
Les progrès que lit la musique dans les siècles suivans,
l'invention de plusieurs instrumens, et les perfectionne-
ment de quelques autres, diminuèrent peu à peuU faveur
dont celui-lùavaitjoui; car il parait qu'il resta long-temps
dans l'état d'imperfection où il s'était trouvé lors de la
renaissance des arts. Les ligures de harpes que Mersenne,
Kirclicr, et quelques autres auteurs ont données, nous font
voir cel instrument avec un assez grand nombre de cordes,
mais sans aucun moyen de modulation, puisqu'elles n'ont
ni pédales ni crochets. Ces crochets, destinés à élever les
cordes d'un demi-ton, ne furent imaginés que vers 1090,
dans le Tyrol. N'y ayant point de pédales, on était obligé
de s'en servir avec lu main, comme font encore les musi-
ciens ambulaus. Quoique cette manière de moduler fût
fort incommode et fort bornée, la harpe resta dans cet
état pendant plus de trente ans. Ce ne fut qu'en 1700
qu'un luthier de Donawerth , nommé Hochhructer, in-
venta les pédales, nu moyen desquelles on pouvait éle-
ver les cordes d'un demi-ton, sans interrompre l'exécution
Mais la difficulté de mouvoir les pieds en même temps que
les mains, difficulté à laquelle on n'était point habitué, fit
rencontrer beaucoup d'obstacles à l'inventeur. En 17^0,
la harpe à pédales n'était point encore connue en France.
Ce fut un musicien allemand, nommé Stecht, qui l'y in-
troduisit. Bochbrucker, neveu du luthier, et bon harpiste,
pour le temps, en perfectionna l'usage vers 1770. Mais ce
fut surtout Krumpholz, dont la femme avait un talent ad-
mirable sur la harpe, qui, conjointement avec Naderman ,
luthier de Paris, donna au mécanisme de la harpe à cro-
chets toute la perfection dont il était susceptible.
Cependant, malgré tant d'efforts, ce mécanisme était
bien imparfait. Ses plus graves inconvéniens consistaient
à tirer les cordes hors de la position perpendiculaire lors-
que les crochets agissaient sur elles pour les élever d'un
demi-ton, et à ne pouvoir assurer la position de la pédale,
qui, n'étant acerochée qu' à-une cheville de fer, s'échappait
quelquefois. Ces inconvéniens parurent si graves à M. Sé-
bastien Érard, célèbre l'acteur de pianos, qu'il se mit à la
recherche des moyens de changer ce mécanisme, et d'y
substituer un autre qui fonctionnât dans un plan parallèle
a celui des cordes. Sesrecherches le conduisirent à l'inven-
tion de la- fourchette, don 11' effet est deraccourcir la corde
de la quantité voulue, pour l'élever d'un demi-Ion, et de
lui donner la même fermeté et conséquent ment la même
sonorité que lorsqu'elle est appuyée en liberté sur le sillet,
et cela, sans la déplacer de la verticale. Outre ces innova-
tions importantes, M. Érard perfectionna aussi la courbe
de la console, de manière à donner une meilleure propor-
tion au diapason, et à faire disparaître en partie l'incon-
vénient du peu de solidité des cordes; inconvénient si
grave autrefois, qu'il était rare qu'on pût jouer un mor-
ceau, sans élre interrompu par la rupture d'une corde. La
première harpe construite sur ce» principes parut eu 1794,
à Londres, où M. Érard venait d'établir une maison. Après
Jes résistances d'usage pour tout ce qui est nouveau, tons
les facteurs de harpes ont adopté les procédés de cet habito
artiste, et l'ancien mécanisme à sabot a disparu.
545
Dans le même temps que M. Érard s'occupait de ses re-
cherches pour substituer un meilleur mécanisme à l'an-
cien, un amaleur, nammé M. lluellc , voulait arriver an
même résultat, mais par des moyens différons et dans un
autre bul. Persuadé que l'expression dépend du renflement
des sons dans le passage d'une note a la note voisine bé-
mollc ou dièze, M. Ruelle n'imagina par de meilleur
moyen que de rendre les chevilles mobiles, de manière à
élever les noies d'un demi- ton , en sorte qu'on put rendre
te passage sensible à l'oreille. Ce procédé présentait de
grandes difficulté*, à cause de l'isolement où il fallait
laisser les chevilles dans l'érat de repos, pour pouvoir ac-
corder l'instrument. A force de persévérance, M. Ruelle
parvint a exécuter ce qu'il voulait. Il céda ensuite la pro-
priété de son mécanisme a M. Cousineau , qui y fit quel-
ques chnngemcns et des améliorations, mais qui ne put
jamais lait e adopter les iiistrumens auxquels il l'avait ap-
pliqué , parce que le principe en était vicieux. Rie» en ef-
fet n'est moins expressif que cette espèce de bâillement
continuel qui se l'ail entendu1 dans le passade des notes
naturelles aux noies diésées ou bémolisées.
Quelle que fût l'importance des amélioralions intro-
duites par M. Erard dans la construction de la harpe, tout
n'était pas fait. Des dîllicullés insurmontables se rencon-
traient lorsqu'on voulait moduler dans certains Ions, et lu
seul expédient qu'on connut était de s'interdire l'usage de
ces tons. Ceci demande mie explication. On sait que la
harpe s'accordait en mi J,, en sorte qu'on obtenait le si § ,
le un' t] el le la § par les pédales qui élevaient d'un demi-
Ion les mêmes noies alfeelées d'un \>. Mais le r<! f> ne pou-
vait s'obtenir qu'en élevant l'ut § à l'état A'ut le sot
que par le fa et ainsi de suite, il en résultait que dans
le ton (le la }), par exemple, on ne pouvait l'aire une gamme,
parce que la même corde devait servir pour ai et pour
re [>. Cependant, on sait que les deux systèmes de modu-
lation les pins usilés el les meilleurs sont ceux par les-
quels on passe à la dominante et au quatrième degré d'un
Ion quelconque. Dans le ton de mi [> , par exemple , il fout
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pouvoir passer en si ou en la [> , sans compter le relatif
mineur ut. On voit par là que la harpe était privée de l'une
des modulations naturelle» du ton qui lui était le plus fa-
vorable. La musique de harpe était donc bornée, étroite,
et, en quelque sorte, hors du domaine de l'art.
Ces considérations avaient frappé Consineau père, dès
i j8a. Ilessaya d'y rémédier par un double rang de pédales.
L'abbé Houssier fit paraître à celte occasion un mémoire*
dans lequel il développait les avantages de cette harpe,
sous le rapport de la considération du tempéramcul.
Mais l'embarras que causait ce grand nombre de pédales;
la difficulté de saisir avec promptitude celle dont ou avait
besoin, et les dérangemens auxquels le mécanisme était
«posé empêchèrent que cette invention fût bien accueillie
des artistes. Cependant des essais de divers genres furent
faits pour procurer à la harpe des moyens de modulations
illimités. Vers 179g, un médecin saxon, nommé Pfanger,
imagine un instrument de cette espèce, qu'il appela H arpe
Chromatique, et à laquelle il donnait autant de cordes
qu'il y a de demi-tons dans l'étendue de cinq octaves. Les
cordes de l'échelle diatonique étaient Imites blanches;
toutes les autres étaient rouges, en sorte que l'instrument
représentait le clavier du piano. Cette multiplicité dp
cordes, qui obligeait à changer la manière de jouer de la
harpe, empêcha le succès de celte invention. Depuis lors,
Lighl, musicien anglais, fit fabriquer un instrument, qu'il
nommait Ditat-Harp, sur lequel tes demi-tous se faisaient
sans pédales, par le moyeu des doigts. Ne sachant précisé-
ment eu quoi consistait son procédé, je ne puis eu parler;
je dirai seulement qu'il est reslé au nombre de ces inven-
tions que chaque jour voit éclore, et qui tombent daus
l'oubli.
Enfin, M. Sébastien Érard, qui était destiné à porter la
harpe à son plus haut point de perfection, imagina de faire
faire à chaque pédale une double fonction qui pût élever
à volonté chaque corde d'un demi -ton ou d'un ton. La
(i) Mémoire lat li nouvelle barpe de M. CuUiineau, luthier de U
teine. P»ri» , I.amy, i;8i. - ,
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545
combinaison d'un semblable mécanisme offrait des diffi-
cultés considérables , à cause de la courbe de la console et
de plusieurs autres problèmes non moins embarrassans
qu'H fallait résoudre; aussi H. Érard fut-il obligé d'y em-
ployer plusieurs années d'un travail constant, et des
sommes considérables en essais. Enfin le succès cou-
ronna ses travaux, et, le 16 juin 1801, il prit à Londres
une patente pour une harpe à double mouvement. Cet instru-
ment est accordé eu ut : le premier accroehement des pé-
dales le met en ut f|, cl le second en ut On conçoit que,
par cette combinaison, toutes les modulations possibles
peinent s'exécuter; que les appogïatures de notes natu-
relles contre les notes bémolles, ou des notes dièzes contre
les naturelles peuvent se faire à volonté, et que, d'un in-
strument borné à de certaines combinaisons, la harpe est
devenue, comme le piano, propre à toute musique.
Quant au mécanisme, il présente a l'œil des connais-
seurs une des plus ingénieuses conceptions de l'esprit hu-
main , cl, en même temps, l'une des plus simples, quant à
son objet. J'ai parlé de la fourchette qui, dans la première
harpe de M. Érard remplace si avantageusement le cro-
chet ou sabot ancien. Dans la harpe à double mouvement,
il y a doux de ces fourchettes. Au premier mouvement de
la pédale, la première fourchette saisit la corde et l'élève
d'un Html ton; au second mouvement, la seconde fourchrtte
agit , et porte l'élévation à un ton. Le relâchement de la
corde peut s'opérér ou successivement, ou d'un seul coup.
Au mois d'avril 181 5, M. Érard soumit sa nouvelle harpe
à l'examen de l'Académie des Sciences et de l'Académie
des Beaux- Arts réunies ; une commission fut nommée , Ct
celle-ci, parl'organc de M. de l'rony, son rapporteur, pro"-
posa aux académies d'approuver les découvertes de l'ha-
hili: artiste, ce <|iiï fut adopté. Je crois qu'on ne verra pifs
sans intérêt comment s'exprimait H. de Pronysur ces Im-
portantes améliorations.
• Le mécanisme de la crosse ou console de la nouvelle
• harpe de M. Sébastien Erard, ( disait le savant rappor-
teur ) est absolument lu même que celui qu'il avait
a* vol. 5o
34G
«adapté eniSoo.àsa précédente harpe; ainW, l'auteur
i s'est procuré le grand avantage de doubler le nombre des
• changemens île ton des cordes , sans doubler le nombre
■ de systèmes de renvoi qui opèrent tous changemens.
■ Il a ainsi conservé la facilité de leur construction et
i de leur réparation-, il a de plus ûlé de la crosse les res-
■ sorts destinés a rappeler la pédale, quand elle est dé-
■ croebée, pour les placer à la base de l'instrument , où
0 leur poids favorise la stabilité, à laquelle elle nuisait lors-
t que ces ressorts étaient attachés à sa partie supérieure.
> Ce changement a de plus l'avantage, favorable à l'exé-
• cutiou, d'évider ou alléger la partie de la console qui
■ répond aux cordes aiguës .
■ Pour rendre chaque corde représentative de trois sons
. diffère™, au lieu de deux, SI. Sébastien Erard n'a fait
' • qu'augmenter l'étendue du mouvement de va-et-vient
ides tringles intérieures, de manière à faire faire suc-
a cessivemen tune portion de révolution à deux disques mu-
t nis déboulons polis : l'un de ces disques sert à raccourcir
• la corde d'un premier demi-loti ; l'autre d'un second.
< Le disque inférieur est celui qui est mis immédiate -
■ ment en mouvement par le mécanisme intérieur de la
• crosse'. Ce disque inférieur détermine ensuite par de«
, renvois intérieurs le mouvement du disque supérieur ;
tet voilà comment l'auteur a pu se dispenser do rien
■ changer au mécanisme renfermé dans la console.
■ Pour que chaque pédale produise successivement le»
■ deux effets dont on vient de parler, elle a deux crans
«d'arrêt ou de repos; elle s'accroche au premier cran
• pour le premier demi-ton , ce qui fait faire un premier
• mouvement à la tringle de renvoi; et la continuation du
• ce mouvement, qui a lieu quand on accroche la pédale
4 an deuxième cran, donne le second demi-ton.
a Sept pédales suffisent ainsi pour rendre chaque corde
■ représentative de trois cordes différentes, ■
(i) Ceci «t une erreur échappée il M. de Frony : ii est éTKlen! que le
(.ui'inirr mouvement doit Cire fih par k r(it r( n suptrii'iir, rar ii ne pour-
rail faire le tecond.
La suite du rapport de H. de Prony était relative aù'r
conditions du tcmpéramment. II y fait ressorlir l'avan-
tage de n'être pas obligé de se servir, sur la harpe à double
mouvement, que de la mêmecorde pour une notcquclcon-
quc diérée et la note supérieure bémolisée, et conséquem-
ment de donner à l'échelle générale autant de justesse que
cela est possiblcdans la constitution de notretonalilé. iVéau-
moins, M. Henri Naderman, harpiste de la Chapelle et de la
chambre du roi,e1c.,aessayé de démontrer dans un opuscule
qu'il a publié sur la harpe à double mouvement que cet
avantage est illusoire, parce que la précision du mécanisme
oblige à faire tous les demi-tons égaux, et que fùt-il réel
ilu'en résulterait aucun bien pour l'accord dç l'instru-
ment, et cela par dcs.raisons qu'il déduit longuement
Hais, sans entrer dans des détails de théorie qui me mène-
raient fort loin dans cet article déjà ftrt étenduje dirai que
depuisle i» avril i8i5, époque où le rapport de M. de Fro-
ny a été fait, la question de supériorité de la harpe à double
mouvement a été résoluesans réplique parle succès qu'elle
a obtenu, et par l'adoption qu'en ont fait les harpiste, les
plus renommés, tels que MM. Dizi, I.abarre et Bochsa. Ce
succès confirme la conclusion du rapport de M. de Pronv
laquelle était ainsi conçue : ■
• La nouvelle harpe de M. Érard nous paraît réunir au
.mérite d'un mécanisme _ fort ingénieux , et qui rempli.
■ très bien son objet, «lu, d'augmenter considérablement
. les propriétés musicales de cet instrument, puisque, sans
-double emploi, elle renferme vingt - sept gannin'v ',,,,
■ échelles diatoniques complètes, tandis que l'ancienne
« n'en contient que treize.
.Nous pensons que celte invention, par laquelle l'au-
.tcur acquiert de nouveaux droits à la reconnaissance de,
.hommes qui s'intéressent aux progrès des mérite
■ les éloges et l'approbation des deux clas
H nie reste a parler d'
(i) Otservalinni de MM. iïi
parler d'une invention qui a do l'analogie.
frères, mr la harpe à
' "/llplJi <:><ri.r « ariil.tt
'""«•""•.•«•.p.™, v.»,d,„„„,,s,s,u,,,ii,„i„.M,„splMr;ti
DigitizGd t>y Google
348
avec celle de M. Erard et qui , pendant quelque temps, a
été mise en parallèle avec elle; il s'agit de la harpe d bascule
de M. Dizi, laquelle parut en 1808, et qui, ayant subi quel-
ques modifications, a été appelée depuis ta harpe perpendicu-
laire (ihe perptndicutar harp). M. Dizi, harpiste distingué,
dont le talent jouit d'une estime méritée en Angleterre,
avait senti dès long-temps la nécessité d'enrichir la harpe '
de moyens de modulation plus étendus que ceux qu'elle
possédait autrefois, lorsqu'un Polonais, dont le nom n'est
pas présent à ma mémoire, lui proposa de construire un
instrument qui réunirait toutes les qualités qu'il désirait,
Des essais qui demeurèrent long- temps infructueux furent
faits ; mais enfin , vers la fin do 1807, Al. Dizi prit un brevet
d'invention pour la nouvelle harpe, résultat de ses re- '
cherches et de ses dépenses. Dans celte harpe, la console
était séparée en deux^arlics à son extrémité inférieure;
les cordes étaient attachées au* chevilles dans la partie
creuse, perpendiculairement au centre du la tahle. L'élé-
vation du son avait lieu au moyeu d'une bascule <jui sor-
tait en poussantla corde hors de la parallèle, et qui tenait
lieu d'un nouveau sillet.
M. Dizi soumit cette harpe à l'examen de l'institut de
France, vers 18 iG ; le rapport de la Commission qui fut
chargée de l'analyse des qualités et des défauts du nouvel
instrument, tout en rendant justice au zèle qui avait di-
rigé les efforts de l'auteur, mentionne le regret qu'éprou-
vait la Commission de ce que, pour obtenir les effets qu'il
voulait produire, il avait été obligé de tirer les cordes hors
de la parallèle, cl de ce que la position de ces cordes les
rendait difficiles à mettre aux chevilles. M. Dizi parait
avoir scnli la force d'une partie de ces objections; car peu
de temps après il renonça à sa bascule, et adopta lu double
fourchette de M. Erard, mais en conservant son ancienne
séparation de la console en deux parties, et le placement
des cordes dans l'intérieur de celte séparation. J'ignore si
parmi les artistes, quelques-uns ont adopté cette innova-
tion.
Telle est l'histoire des variations de forme et de méca-
liisme du la harpe. Il est vraisemblable que les améliora-
tions qu'on (entera d'y faire désormais n'auront plus pour
objet que des détails de peu d'importance.
FÉTIS.
BIOGRAPHIE.
Delu-Mibii (Domenieo), né à Marseille, de parens ita-
liens, vers ij61, se livra de bannne heure à l'élude de la
musique, et manifesta, dès sa plus tendre jeunesse, d'heu-
reuses dispositions pour cet art. A dix-huit ans, il fit re-
présenter, au théâtre de Marseille, un grand opéra dans
lequel on reconnut parmi les défauts inséparables d'un
premier essai, les traces du talent. Peu de temps après, il
partit peur l'Italie, persu nié qu'il lui restait peu de chose
à apprendre, quoique ses études musicales, fuites dans
une ville de province, eussent été très faibles. Il ne tarda
point à reconnaître son erreur, et, pendant un séjour de
dix ans en Italie, il étudia sous plusieurs maîtres. Le der-
nier fut Paisiello, qui avait conçu pour lui beaucoup d'a-
mitié. Sorti de l'école de ce grand compositeur, it écrivit
pour quelques théâtres secondaires de l'Italie six opéras
bondes, dont trois ont eu du succès. Dans la suite, il se
pl;iis;iil à redire des morceaux de l'un d'eux, intitulé : it
Maestro di Capella.
Il arriva à Paris vers 1796, absolument inconnu; mais
le hasard se plut à lui aplanir les difficultés que rencon-
trent presque toujours a leur début le3 artistes ou les gens
de lettres. Voici ce que dit à cet égard M. Duval, dans une
notice sur Della-Maria, insérée dans la Déeaiie philoso-
phique (10 germinal an vm) : • Un de mes amis, auquel
■ il avait été recommandé, me pria de lui donner quelque
* poème. Sa physionomie spirituelle, ses manières sim-
• pies, vives et originales, m'inspirèrent de la confiance :
■ elle fut justifiée. Je linissiiis alors !;i petite pièce du Pri-
4 sonnicr, que je deslinais au Théàlrc-r'rançais. Le désir
35n
■ île l'obliger m'eut bientôt décidé à en Èijrfl un opéra.
« Quelques coupures, quelques airs l'eurent aussi toi nit'r-
« la m or p h osée cd comédie lyrique. Il ne mit que liuit
• jours à en faire la musique; et les artistes de l'Opéra-
<• Comique, qui, séduits comme moi, l'avaient accueilli
« avec intérêt, mirent aussi peu de temps à l'apprendre et
* à la jouer. Cette pièce commença sa réputation. ■
Le Buccèfl, qui fut prodigieux, tint à deux causes. La
première fui la diversion opérée par le style chantant,
brillant et léger de Della-Maria au milieu de celte musi-
que, forte d'harmonie, mais trop souvent dénuée de chant,
que nos habiles compositeurs avaient adoptée depuis la
révolution. La seconde est la perfection du jeu des acteurs
chargés des rAles principaux. On se rappellera long-temps
l'ensemble délicieux que formaient les talens d'Elleviou,
de Jl"" Saint-Aubin et Dugazon, comédiens excellens, qui
trouvant dans la musique du Prisonnier des proportions
en rapport avec leurs moyens, brillaient sans effort. Dans
cet ouvrage, Délia- M aria ne s'élève pas à de forles concep-
tions; mais sa manière est à lui, .et c'est, comme on sait,
la condition importante pour obtenir des succès de vogue.
Malheureusement celte manière s'affaiblit dans les opéras
qui suivirent le Prisonnier; on en trouve encore quelques
traces dans l'Opéra-Comique (en un acte), dans l'Onde
valet (en un acte), et dans te View château (en trois
actes); mais dans ta Fausse duègne (en trois actes), il n'y
a plus rien. Tous ces ouvrages furent donnés en quatre
ans : ainsi, dans ce court espace, Della-Maria semble avoir
épuisé tout ce que la nature lui avait donné d'idées musi-
cales.
Doué d'un caractère doux et facile, ce jeune artiste s'é-
tait fait de nombreux amis : M. Duval, l'un d'eux, se dis-
posait à se rendre à la campagne avec lui, dans l'intention
de travailler à un nouvel ouvrage, lorsque Délia Maria,
revenant seul un soir vers sou logis, dans l'automne de
1800, tomba sans connaissance dans la rue Saint-Iîonoré.
Il fut recueilli par une personne charitable, chez laquelle
il expira au bout de quelques heures, sans pouvoir profé-
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indication (le son nu m ou <le sa demeure, les ageus de
police Curent plusieurs JOUM sans pouvoir découvrir qui
ii était. Ainsi péril, à trente-six aus, uq artiste dont lu
nom brillait encore d'un viféclal.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL DU L'OPÉRA-COMIQUE.
$wtnii« ttfristuiaùw foi SEot et U ïfetffetW,
Opiira -Comique en un au le , paroles de M. de Siikt-Giusgis ,
musique de MIL IIaleïï et Rliriur.
La fête du roi est chaque année l'occasion de quelque
pclil opéra qui n'a souvent que le mérite de la circon-
stance. Cette fois les auteurs ont été assez heureux pour
iiue leur ouvrage puisse survivre à l'époque qui l'a fait
nattre. En voici le sujet.
Henri IV assiège Paris, et celte ville éprouve toutes les
horreurs de la famine. Touché de pitié pour les maux que
souffrent ses sujets, le bon roi a résolu de faire entrer de*
vivres dans la ville, mais à l'insu de ses troupes, qu'il
craint de voir se débander. L'exécution de son dessein
l'appelle souvent sur l'autre rive de la Seine. Le batelier
qui le passe, sans le connaître, est un ligueur nouinié
Claude , dont la femme ni la sœur ne partagent l'opinion.
Un envoyé de .Mayenne , chargé d'approvisionner la ville
est tombé depuis peu de jours dans les mains du duc de
Bellegarde. Le roi a découvert que cet émissaire avait
ordre de se glisser sous les murs de l'aris , et de donner le
mot qui devait faire ouvrir les portes au convoi de vivres
que Mayenne l'avait chargé de f«ire préparer. Henri IV,
profilant des dispositions de son batelier ligueur, le dé-
termine a se rendre dans son bateau sous les murs Uc
Paris, et à chanter Fivt Henri-Qaatrc, qui est le mot
DigitizGd t>y Google
35a
d'ordre. Il est prêt à partir lorsque sa femme lui apprend
que le soldat auquel il vient de parler n'est autre que
Henri IV ; touché de la bonté du roi , Claude devient un
de ses partisans, et part pour exécuter ses ordres. Cepen-
dant le duc de Bellegarde, voulant déjouer les projets de
Mayenne, et hâter la reddition de Paris, a répandu ses
troupes sur les rives de la Heine , avec ordre de tirer sur
tous les bateliers qu'on apercevra. André, beau-frère de
Claude , espèce de niais poltron , est l'une des sentinelles
qu'on a chargées d'exécuter cet ordre. Malgré sa frayeur,
il veut faire le brave, et lâche son coup de mousquet sur la
nacelle de son beau-frère; l'alarme est au camp; André
vient raconter sa prouesse; mais un instant après Claude
arrive et rend compte au roi du succès de sa mission. Cha-
cun bénit le prince; les ligueurs prisonniers jurent de
suivre le roi ; pendant ce temps on aperçoit le convoi qui
se dirige sur Paris , et la pièce finit.
Les détails agréables semés sur ce fond léger rendent In
représentation de la pièce fort amusante. La musique de
MM. Halevy et Riffaui , anciens pensionnaires du roi à
l'académie de Rome, est fort supérieure à ce qu'on attend
de ces sortes d'ouvrages. On y dislingue surtout l'intro-
duction, un quatuor qui se termine en trio , le chœur des
ligueurs prisonniers, et un charmant duo chanté par Fer-
réol et madame Fradher. L'instrumentation est soignée,
élégante, et l'ensemble de la composition est de nature à
donner des espérances pour les travaux futurs des jeunes
musiciens à qui ou ia doit. La pièce a été fort bien jouée
par MM. Vizentini, Ferréol, Lemonnier, Lafeuillade,
mesdames Boulanger et Pradher.
— Deux représentations de» Voiture* versées, opéra de
MM. Dupaty et Boïeldien , viennent d'être données au
théâtre de l'Opéra- Comique. Par suite de la relraite de
madame Lemonnier, madame Boulanger y a rempli hi
rôle de madame de Hotval de manière à mériter les ap-
plaudissmiens du public, comme actrice et comniccanta-
Irice.
555
THÉÂTRE ROYAL DE I/O DÉON.
PREMIÈRE REPRÉSENTATION DE CHARLES V
ET DUGUESCLIN ,
Opéra -Comique en acte, paroles de MM. Vm el Gishodchb,
musique de MM. Gileist cl Gdihiod.
' Duguesclin est prisonnier des Anglais dans un château
forl. Profitant d'une trêve, Charles V, accompagné du
sire de Bcaujeu, vient incognito traiter de la rançon du
brave capitaine , et obtient sa liberté sur parole, jus qu'à ce
<jue l'argent nécessaire soit rassemblé. Les habita»» du
village où se passe la scène veulent célébrer la fête du roi,
et , suivant l'usage, se disposent à nommer un notable de
l'endroit pour représenter le souverain. Ils ont jeté les
yeux sur Dugucsclin, mais celui-ci parvient à se faire
remplacer par Charles V lui-même. Pendant ce temps, le
général anglais Chaudos, par une de ces trahisons fort
communes alors, a rompu la trêve et recommencé les
hostilités. Il n'a laissé pour la garde du fort que son lieu-
tenant Felton et cent soldats. Les Français surviennent:
Dugucsclin, dont la rançon vient d'être payée, se met à
leur tête , s'empare du château , et fait les Anglais prison-
niers. Le roi est reconnu, et tous ses sujets tombent à ses
pieds.
Cette pièce a été fort mal accueillie à la seconde repré-
sentation par les spectateurs payans. Dès l'ouverture, ils
se sont montrés peu favorables au genre de l'ouvrage.
Malheureusement les défaulsde la pièce ne leur ont fourni
que trop d'occasions de montrer leurs dispositions hos-
tiles. Il faut l'avouer, cette pièce est d'une faiblesse ex-
trême, et l'on aurait peine à croire qu'elle est l'ouvrage de
deux hommes d'esprit, qui comptent plus d'un succès. Une
scène où toutes les filles du canton apportent leur rouet ,
et filent pour payer la rançon de Duguescliu, a excité l'hi-
larité générale; les huées, les sifflets ont pris le dessus,
Dinitizcd by Google
554
et dès ce moment il est de vu un fort difficile d'entendre les
aclcuw.
Les jeunes musiciens sortis de l'école royale semblent
avoir voulu saisir l'occasion de la fête du roi pour se faire
connaître. Mil. Guiraud et Gilbert sont les auteurs de la
musique de Charles V et Dugueidin. L'un a obtenu cette
année le premier grand prix de composition au concours
de l'institut; l'autre a partagé le second. Tous deux mé-
ritent des éloges pour le petit opéra qu'ils viennent de pro-
duire. Leur musique est remplie de choses charmantes.
Malheureusement les poètes ne leur avaient pas fourni
l'occasion de faire le plus petit morceau d'ensemble. Des
chœurs et des couplets sont tout ce qu'ils ont eu à mettre
en musique; mais ces couplets sont fort jolis. Ccui que
chante Léon, avec accompagnement de chœur, et ceux
dont les paroles sont : Si j'étais roi, ont été surtout remar-
ques. L'inslrumcntalion est de la nouvelle école, c'csl-à-
dire, brillante et légère. Il est fâcheux que ce premier essai
de la muse des jeunes lauréats n'ait pas été fait pour nue
meilleure pièce.
L'exécution devient chaque jour plus mauvaise à L'O-
déon. A l'exception de l'orchestre, on aurait peine à se
croire à Paris, quand on entend de pareilles choses. Si-
rant, qu'on avait vanté à ses débuis, chante presque tou-
jours de la gorge, et n'a qu'une vocalisation factice. Quant
à Théuanl, on peut dire que c'est un rude chanteur. Mal-
gré ses nombreux défauts, Léon est le meilleur de tous ceux
qui paraissent dans l'opéra nouveau. Qu'on juge du reste.
— Damoreau , ténor qui faisait autrefois partie de la
troupe du théâtre de l'Opéra-Comique, et qui, depuis, s'est
fait une réputation en province, et s'est fixé à Bruxelles,
a débuté à l'opéra par quelques râles de l'ancien réper-
toire, cl notamment ]>ar ceux de Corlez, de Licinius
dans la Vestale, et de Polinicc dans Œdipe. Nous n'avons
pas voulu juger cet acteur sur ses premiers débuts , parce
que nous avons du faire la part de l'émotion et de l'em-
barras qu'on doit éprouver la premier c t'ois qu'on parait
sur une scène et dans une salle aussi vastes. Nous oxoyone
Digitizod by Google
555
pouvoir émeltrc maintenant notre Ojiinion , cl nous le fo-
rons avec franchise.
Damoreau est doué d'un physique avantageux, propre:
l'intelligence; mais il nous parait manquer des qualités
d'un chanteur destiné à dire la musique moderne. Dès
qu'il veut chanter avec douceur, sa voix baisse au-dessous
du ton, et il ne reprend la justesse que lorsqu'il crie,
Quoique Damoreati soit jeune, un pareil défaut semble
indiquer une voix usée. L'habitude de chanter en pro-
vince, et d'obtenir des succès par des éclats de voix, lui
a vraisemblablement forcé le timbre. Il y a du remède à
cela ; mais il faut du temps, du repos , et un régime de
vocalisation tout particulier. Si Damoreau continue a
chanter comme il Ta fait jusqu'ici , il n'y aura bientôt plus
de ressource.
CONCERTS.
Tiiéatbe de Mabamk. Concert de M, Lalonl. — Théami Italie* .
Conreri votai et instrumental.
I.n fête delà Toussaint, qui fait fermer les théâtres, nous
a procuré deux concerts le même jour, l'un donné par
SI. Lafont, l'autre par l'administration du théâtre Italien.
Il y avait lieu de croire que le besoin de distraction, si ce
n'était l'amour de la musique, aurait porté la foule aux
deux asiles ouverts aux amateurs et aux oisifs; il n'en a
point été ainsi. Il y avait du monde au concert de M. La-
font; mais Li salle des Italiens était presque vide. Les
dilktt&nti qui devaient Être curieux de comparer le talent
de madame Pisaroni dans un concert avec celui qu'elle dé-
ploie dans les situations dramatiques, avaient, on ne sait
pourquoi , déserté leur poste. Il faut qu'ils eu soient punis
en apprenant qu'elle a été admirable, sublime quelque-
fois: mais n'anticipons pas, cl suivons l'ordre que nous
nous sommes tracé.
556
On connaît le fini , le précieux du jeu de M. Lafont, Que
dirons-nous sur la manière dont il a joué son concerto que
loul le monde ne sache d'avance. C'esl toujours la même
justesse, la même pureté, la même perfection. Ce virtuose
semble avoir défié les migraines, les mauvaises digestions,
les distractions, tout ce qui peut enfin troubler le calme
nécessaire pour être maître de soi. Il ne hasarde rien dont
il ne soit sûr, elje suis certain qu'il ne lui est jamais arrivé
de pousser par mégarde son archet sur une note qui de-
vait être tirée,
La lutherie moderne a obtenu dang ses mains un triom-
phe dont elle doit s'enorgueillir, car il n'a pas été possible
de distinguer de différence entre le violon de M. Thibout,
dont il s'est servi dans son concerto et celui de Guarnc-
rius sur lequel il a joué ses autres morceaux.
Les autres solos d'instrumcns se composaient d'un nou-
veau duo avec variations sur ta marche de Moïse, composé par
M. Henri Herz, et exécuté par lui et M. Lafont, d'une fan-
taisie pour le trombone, jouée par M. Vobaron , du varia-
tions pour le violon , composées par M. Lafont , et exécu-
tées sur le violoncelle par*M. Lolli,'d'un solo de clarinette
joué par M. LandcllE , et d'une grande fantaisie composée
et exécutée par M. Lafont. Le morceau du M. Herz est
brillant, rempli de traits originaux, et nous semble des-
tiné à avoir un de ces succès de vogue auquel l'auteur est
accoutumé. Son exécution prodigieuse en a fait ressortir
tout le piquant et doit servir de modèle aux amateurs qui
voudront jouer celte pièce. De bruyans applaudïssemeus
ont témoigné à M. Herz tout le plaisir qu'il avait fait au
public. SI. Lolli sait jouer de la basse, mais sou talent est
au nombre de ceux qu'on rencontre partout, et dont on
ne parle pas. On peut en dire à peu près anlant de M. Lan-
delli; mais il n'en est pas de même de M. Vobaron. Ce
qu'il fait sur son trombone est vraiment étonnant. Les
difficultés les plus grandes, les sons coulés et doux, toutes
les choses enfin auxquelles cet instrument semble se re-
fuser sont faites par lui avec une facilité remarquable. Il
oit fâcheux que taut de dextérité, d'intelligence et do pa-
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35?
liencc aient été employées à triompher d'un instrument
rebelle qui semble toujours faire de mauvaise grâce ce
«jue l'exécutant exige de lui; mais M. Vobaron n'en est
pas moins un artiste fort recommaudable.
La partie vocale du concert de M. Lafont n'était pas la
pllis brillante: on sa» qu'il en est souvent ainsi. M-Scbutz
et M11" Marinoni faisaient les honneurs de cette partie.
L'air de Bossinï, clianlé par la première, n'a produit que
peu d'effet : on sait que ce n'est pas la musique qu'il faut
eu accuser. H y a dans celle seène et dans cet air des pro-
portions que M™" Schutz semble n'avoir point comprises,
et qui ne paraissent pas appartenir au caractère de sa voix.
Le duo qu'elle a chanté ensuite avec M"* Marinoni a été
mieux dit. La voix de celle jeune cantatrice me parait
avoir gagné en volume et en étendue; mais elle a besoin
d'être exercée.
Si le chant était la partie la plus faible au concert de
M. Lafont, c'était le contraire à celui du Théâtre-Italien.
La symphonie d'Haydn a été fort bien exécutée par l'or-
chestre; mais les morceaux île harpe el de flûte ne sont
pas sortis d'une honnête médiocrité. M. A. Schott, ancien
musicien de la chapelle du roi de Bavière, a mérité les
honneurs de la soirée comme instrumentiste, par le talent
qu'il a déployé sur la clarinette, dans un airvarié de Ba;r-
inann. Jeunes gens qui vous livrez a l'élude de cet instru-
ment, allez entendre souvent H. Schott, lorsque vous en
trouverez l'occasion, car il a la véritable école, l'école al-
lemande, l'école de Behrel (leBsennann. Dans cette éeole,
velouté, égal dans toute l'étendue de l'Instrument, elune
exécution nuancée.
Bordogni et Galli ont été excellons dans le duo de l'itu-
liana in Atgieri, qu'ils ont chanté d'une part avec un fini
délicieux, et de l'autre avec une verve entraînante. On ne
peut pas en dire autant du duo de M osé, chanté par Don-
zelli et Zuchelli. Le premier a pris une habitude de pous-
ser des cris qui a 6té le velouté à sa voix, et qui le rend
iuhabtle à nuancer son chant. M"* Blasis a été faible dans
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358
l'air du Siège de Corinilie ; mais le trio de Ricciardo et Zo-
raide, chaulé par Donzelli et M"" Pisaroui et Blasis, a pro-
duit le pins grand effet. Le duo de Coccia, chanté parGalIi
et Zuchelli, manque d'originalité; mois on y trouve l'an-
cienne coupe italienne, excellente pour les morceaux
bouffes; ces virtuoses l'ont d'ailleurs chanté avec une
verve et un comique parfait. Mais ce qui mérite surlout
d'être cité, c'est le talent admirable de M™ Pisaroni dans
l'air de l'iiaiiana in AtgUri. On peut affirmer que cet air
a élé entendu pour la première fois au concert du i" no-
vembre, car la musique est si dépendante de l'exécution,
que le même morceau peut paraître ou médiocre ou par-
fait selon qu'il est bien ou mal exécuté. C'est une véritable
création que celle d'un chant qui fait jaillir lout à coup
des beautés du premier ordre de ce qui parait être fort
ordinaire au premier coup d'œil. Quel dommage qu'un
talent tel que celui de M" Pisaroni soit retenu dans l'inac-
tivité par les bornes d'un répertoire Irop resserré. Ce beau
talent, dernière émanation de la grande école italienne,
quittera Paris sans y avoir été en quelque sorle connu.
Pendez-vous, diletlanti; vous n'étiez pas au concert du
i" novembre.
PRÉCIS
L'institution royale de musique religieuse, créée dans
la vue de régénérer la musique d'église , a adopté à cet
effet deux moyens qui concourent au même but.
Le premier est d'exécuter et de faire entendre publi-
quement les chefs- d'oeuvre de musique sacrée et classi-
que, ainsi que les ouvrages les plus propres au service
de l'Église.
Le second est déformer des professeurs capables de
propager son enseignement cl ses procédés.
Elle est composée de deux pensionnats séparés, l'un
d'hommes , l'autre de femmes , élevés et instruits graluU
359
(Binent aux frais du Roi. A chacun de ces pensionnais
est attaché un externat, oii les élèves de l'un et de l'autre
sexe, doués d'une belle voix et de disposions pour le
chant) sont admis à recevoir gratuitement toutes ks
connaissances qui composent une bonne éducation.
Outre la lecture, récriture et le calcul, l'instruction
y comprend encore les objets suivans :
L'enseignement spécial et principal de la musique vo-
cale, ce qui renferme le solfège ou art de lire et noter,
la musique, et l'art du chaut proprement dit;
Celui de la musique instrumentale, notamment le
forté-piauo ou l'orgue , le violon et le violoncelle ;
Celui de l'harmonie pratique et de la composition
musicale.
Celui des langues française, latine et italienne, des
belles-lettres , de la géographie , de l'histoire ; en un mot ,
l'éducation religieuse , morale et grammaticale, en usage
dans les établisscmens désignés sous la dénomination de
pensionnat, au titre 1", art. 10, n° 5, de la loi du 17
mars 1808 , portant organisation de l'Université.
Ceux des élèves qui se distinguent par leur talent et
leur bonne conduite , reçoivent des enconragemens de
tout genre ; ils reçoivent en tout ou en partie la nourriture
et l'habillement ; ils sont chargés de fonctions lucratives ,
et peuvent même obtenir la faveur d'être reçus à demeure
dans riitablis.iement, et d'être entièrement élevés et entre-
tenus aux frais du roi , ou d'être placés avantageusement.
Tous les élèves, tant internes qu'externes, sont soignés
gratuitement dans leurs maladies, au moyen des cartes
dedispensaires fournies par l'établissement.
Les classes commencent en été à six heures du malin ,
et Unissent à six heures du soir; en hiver, elles suivent le
progrès du jour.
Lts personnes qui auraient connaissance de jeunes su-
jets ayant une belle voix et du goût pour la musique et le
chant, sont invitées à les présenter ou à en donner avis.
L'institution reçoit à titre de pensionnaires les jeunes
gens cpii veulent se perfectionner dans l'étude de la mu-
5ft>
siqwe; elle fournit aux cathédrales, paroisses el chapelles,
sur la demande de MM. lès éveques, les curés et aumô-
niers , des maîtres de chaut, chantres, enfans de chœur,
des musiciens, des organistes, etc. Elle fournit des pro-
fesseurs pour les maisons d'éducation de l'un et de l'autre
sexe; elle procure des œuvres de musique d'église en tout
genre, soit française, soit étrangère , des instrument d'é-
glise, tels qu'orgues, serpens , etc. ; et entreprend de gre
a gré la composition de toute sorte de musique d'église ,
plain-chaut, contre-point , messes, motets, etc.
S'adresser, de vive voix ou par écrit, franc de port, à
M.Chohon, directeur de l'institution, à l'adresse ci-dessus.
Il est visible à l'établissement , tjus les jours , depuis dix
heures du malin jusqu'à deux heures après midi.
ANNONCES.
SOUSCRIPTION.
Trois grands quatuors pour deux violons, alto et vio-
loncelle, dédies à S. M. le roi de Prusse, par L. Jabik,
chevalier de la Légion-d'Houneur, gouverneur des pages
de la musique du Itoi.
Ces quatuors paraîtront du ao au 3o novembre prochain;
on souscrit chez M. Frey, marchand de musique, place
des Victoires, n' 8, et chez l'Auteur, rue Bergère, n* a; le
prix de la souscription est de 5 francs : l'œuvre est marqué
Nota. On ne paiera qu'en recevant l'ouvrage. Les lettres
de demandes et envois de fonds devront Être adressés
franc de port.
— Sonate pour violoncelle et piano. Concertais, op. io,
par A. de Sayvc. Chez Zctler, rue du Faiibour-l'oissou-
— Quatuor pour a violon, alto et basse , œuvre i3, par
A. de Sayve. Chez Rie haut, Boulevard Poissonnière, 11° 16.
SUR LE MÉTRONOME DE MAELZEL.
Li nécessité 'le mesurer le temps en musique par des
règles fixes et in variables a été reconnue de tout temps, et
les efforts de beaucoup de musiciens et de mécaniciens
pour atteindre à ce but datent de loin. Loutié, dans ses Élé-
ment ou Principes de Musique, publiés en 1698, proposa une
machine nommée chronomètre dont il donne la description.
Sauveur, dans ses Principes d'acoustique, en cite une autre
qui avait été imaginée par l'Affilant. Plus tard, Harrison,
fameux mécanicien anglais, qui s'est illustré parsesmontres
marines, inventa une machine qui parait avoir été par-
faite, maïs dont le prix élevé ne permettait pas d'en
rendre l'usage populaire. 11 en a donné la description dans
un écrit qui a pour titre : Description concerneng such a me-
cmùtm as nilt a/fard a nice and true mensuration of time, etc.
(Description d'un mécanisme propre à donner une mesure
exacte et vraie du temps, etc.) Londres, 1775, in-8".
En 1782, Duelos, horloger à Paris, fit une machine qu'il
appelait R hytmomètre, dont le but était à la fois de donner
la mesure exacte des temps de la musique', et de trans-
mettre aux exécutans les internions des compositeurs. Les
professeurs de l'École royale de chant, à la tète desquels
était M.'Gossec, approuvèrent cette machine, et firent un
rapport dans lequel on trouvait le piissagc suivant \ 1 ,
h précision la plus exacte , celle machine joint la faculté
' de donner toutes les modifications de mouvement, et
-tons les degrés de vitesse que l'on peut désirer, sans
■ qu'elle fasse éprouver, dans les < haugeuicos de mesure,
» comme dans les siens propres, le moindre retard. Cette
a qualité est d'autant plus précieuse, que dans le cours
• de l'exécution d'un morceau de musique, ■
« peut, à volonté, par des moyens simples et aisés , presser
» et ralentir le mouvement, eu suivre avec facilité toutes Ici
2" VOL. 5l
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« diverses variations auxquelles l'expression du chanteur ou
« d'un exécutant peut donner lieu, d'au il résulte qu'à ces
« diverses variations , il peut aussi sans peine soumettre
« toujours les accompaguemens. s
Dans le même temps, un autre mécanicien, nommé
Pelletier, proposa aussi un nouveau chronomètre, dont
ou Ignore aujourd'hui la forme et le mécanisme. Eu 1784 ,
Davaux, amateur connu pur ses concertos et ses quatuors,
lit insérer dans le Journal Encyclopédique (juin, p. 534) une
Lettre sur un instrument ou pendule nouveau , gui a pour but de
déterminer avec la plus grande exactitude les diffèrent degrés de
rilcsse depuis te prestissimo jusqu'au largo, avec les nuances im-
perceptibles d'un degré à l'autre. Le pendule avait été con-
struit par Rencaudin , horloger de Paris. Lo fameux Bre-
guet en a fait un qui avait, comme celui de Harrisou,
l'inconvénient d'Être d'un prix trop élevé.
Despréaux, ancien professeur au Conservatoire, pro-
posa, en i8ia, de substituer à toutes ces machines un
poids quelconque , ayant une forme lenticulaire ou sphé-
rïque , suspendu par un fil ayant une longueur déterminée
pour un mouvement donné, par exemple, celui du pen-
dule astronomique , avec une échelle graduée pour varier
ces longueurs, selon le mouvement qu'on veut obtenir.
Les avantages de ce chronomètre consistent dans la sim-
plicité de sa construction , et dans la loi physique qui rend
les vibrations isochrones* quelle que soit la diminution de
l'are décrit par te pendule , à mesure qu'il tend à l'état de
repos. Ses in con vente a s sont de ne point rendre sensibles
à i'oreitlu les temps de la mesure, et de ne point donner
d'unité de mouvement pour tous les pays, les vibrations
du pendule variant selon les latitudes.
Plusieurs autres professeurs ou théoriciens ont aussi
proposé des moyens différons pour arriver à des mouve-
mens déterminés. Je citerai parmi ceux-là Burja, profes-
seur de mathématiques à Berlin,' qui a publié une brochure
de a4 pages in-8* sous ce titre : Beschreibung cincs musikalis-
clien zeitmessers, ( Description d'un Chronomètre musical),
(1) Ci si-» -dire d'un temps «gai.
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363
Berlin; i jg». Wenk, claveciniste, mécanicien et fabricant
ifinstrumens, auteur d'un livre intitulé : Beachreibung eines
Chronometers, oder musikolischen zeitmtssers, (Description
d'un Chronomèlrc ou régulateur de la mesure musicale),
Ma gde bourg, 169S, in-8°; Thiémé , professeur de musique
à Rouen, à qui l'on doit une brochure intéressante qui a
pour titre : Nouvelle théorie sur les différais mouvemens des airs,
fondée sur ta pratique de la. musique moderne, avec le projet d'un
nouveau chronomètre, destiné à perpétuer- d jamais, pour tous
les temps, comme pour tous tes lieux, te mouvement et la mesure
des airs de toutes tes compositions, Rouen et Paris, 1801, 70 p.
111-8°; enfin, Stcekel , chanteur à Burg, M. Gudefroy We-
ber, célèbre théoricien et compositeur, Sparrovogens et
Zumeskal , qui , dans les Omettes Musicales de Leipsick. et
de Vienne, ont inséré des dissertations plus ou moins in-
structives sur cette matière.
Malgré tant d'efforts, l'usage d'un chronomèlrc quelcon-
que ne s'était point introduit dans le monde, soit que les
machines fussent trop compliquées, trop dispendieuses,
ou trop incommodes , soit que leur effet ne répondit pas
à ce qu'on en attendait. Enfin, en r8i5, l'habile méca-
nicien Maelzel soumit à l'examen de l'Institut de France
une petite machine, à laquelle il donnait lo nom de Mé-
tronome, et qui était destinée à remplir les mêmes fonc-
tions que tous los autres chronomètres. Cette machine,
dont l'enveloppe a la forme d'un obélisque, et dont l'un des
côtés s'enlève pour laisser osciller un balancier, qui est
appuyé sur un point vers son extrémité inférieure, et libre
vers le haut. Un mécanisme à engrainage, mû par un
ressort, agit sur le balancier, et le met en mouvement. Un
poids mobile, qui glisse à volonté sur la tige du balancier,
détermine la vitesse ou la lenteur en déplaçant le centre
de gravité, et remplace avec avantage, par le moyen d'une
merveilleuse simplicité, le pendule le plus long dont on
puisse .avoir besoin pour mesurer tes mouvemens lents.
Une échelle graduée, et portant des nombres qui correspon-
dent à chacune des nuances de vitesse ou de lenteur ad-
missibles dans la musique, indique les points du balancier
364
où le poids doit être fixé, Plu*, ce poids s'éloigne du point
d'appui du balancier, plus le mouvement est lent, et
conaéquemment plus il s'en rapproche, plus le mouve-
ment est vif.
M. Maclzel a pris pour unité de temps la niinute, ou la
soixantième partie do. l'heure. Le mouvement le plus lent
est celui qui est marqué du nombre 5o, c'est-à-dire, celui
où cinquante oscillations du balancier se font dans l'in-
tervalle d'une minute. Le plus vif est celui où le même
balancier fait 160 oscillations dans le même temps. Cha-
que oscillation exprime la durée d'un temps musical d'une
mesure à quatre ou à, trois temps, simple ou composée.
Toutes les nuances de lenteur ou de vitesse sont comprises
entre .ces deux termes 5o et 160.
..On conçoit, d'après ce qui vient d'être dit, que pour
indiquer le mouvement exact d'un morceau , le compo-
siteur n'a qu'à .marquer le nombre du métronome auquel
il répond , et que ce moyen est bion plus sûr que d'em-
ployer les mots si vagues dp largo, d'adagio, de lento,
aadanff, aiidantînv, allegretto, allegro , tivace , presto , etc.
Aussi l'Institut a-t-il hautement approuvé cette invention ;
les avantages du métronome ont même été si généralement
sentis que, malgré la puissance de la routine, cette machine
s'est assez rapidement popularisée. Au reste, il est bon de
remarquer que c'est principalement pour la transmission
des mouvemens qu'elle est utile; car, si l'on en faisait
usage comme régulateur de la mesure, on détruirait toute
idée d'expression et de verve dans l'exécution.
Un habile coustructeur d'orgues d'Amsterdam, nommé
Winkcl, a réclamé l'invention du métronome, dans une
lettre insérée au n" a5 de la Gazette Musicale de Leipsick,
eu iti it>. 11 déclare que M. Maelzel ayant vu chez lui le
mécanisme de cet ingénieux instrument, s'est emparé de
sa découverte, et l'a donnée frauduleusement comme la
sienne. J'ignore jusqu'à quel point celte réclamation est
l'ondée, M. MaeUel n'y ayant p oint répondu.
., . ., fÉTlS.
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DISL'ACCOUD DES INSTRLMEHS
ET DE LA DÉTERMINATION D'UN DIAPASON ,
Pab M. le Bako» Bieik.
La gamme chromatique ayant été formée d'après les
principe* constitutifs des hurmonies des deux modes, sous
le type des rapport» de Vibrations :
On trouvera qu'à partir du son i, les premières con son-
na nces ascendantes } et]f où $, et les premières conson-
nances inverses j et sont parfaitement justes ; mais le
son f n'est pas la première oonsonnance de ^ , qui devrait
erre rk ; car f| est plus grand que £ de^,; de même g n'est
pas en descendant la première consonnance de , qui se-
rait %j pins petit que devis-
Comme les premières consonnanecs sont celles dont la
justesse est mieux sentie par l'oreille, il faut, en prenant
Je son i comme régulateur fondamental, accorder dans un
instrument,'
■ 'r Tons les son* i, a, 4 , 6.... ^ , \ , £ ,' et antres octaves;
ar»Ta série ascendante des premières coiisonnances
et fontes leurs octaves; et la série inverse des antres pre-
mières consonnaiices i et 4f , et leurs octaves.
5" Former l'accord eon sonnant 1, £,'4 , qui donneia,
par le moyen de Poieille', la facilité de déterminer le
son ? , et ses octaves ;
■ 4" Prendre ensuite le son jj , comme première conson-
nance de | ou \; et le son comme première oonsonnance
du précédent. Les accords consonnans i)Jiï>et|,J,^
leur serviront de preuves. 1
(i) Ceci s':i]>] iriijiiuiMrLiL-tLliritmeiit :i l'accord des clavecins, pianos,
ïrautteHnsUtlmons semblables, la géométrie donuant les moyens pré-
ei» de déterminer le* cliviiioii! des troua de la «nlo et instrument d"
raCme genre , «t.lçn la^gtftuia dei tuyau», d'orfiue.
366
5° L'accord conaonnant i, $, servira à déterminer,
par l'oreille , le son $ et ses octaves.
6" Le son | sera déterminé comme première conson-
nance de • ou de J, et l'accord consonnanc i, |, lui
servira de preuve.
7° Le son ^ sera déterminé comme première conson-
nauce inverse du son {, et l'accord consonnant {*, |,
lui servira de preuve.
8" Enfin , le son ^ devra seul être déterminé comme
première consonnance relativement à f| et à sans pou-
voir satisfaire parfaitement l'oreille, parce que, d'après
son expression , sa valeur mathématique, il présente un
rapport incommensurable, et par conséquent nécessaire-
ment faux à l'oreille. En effet, la première consonnance
inverse de y| est ou fj, et la première consonnance de
est 4| ou Or, le sou ~ est précisément le moyen
proportionnel géométrique entre et , la fraction qui
le représente étant plus grande que la dernière et plus pe-
tite que la première , ce qui indique que les intervalles de
14 à et de ^ à sont plus petits qu'ils ne devraient
être.
En d'autres termes , le son 1 élant représenté par l'ut
de la gamme diatonique en usage , il faut accorder les
quintes sot et re en montant , et fa, ji [j en descendant,
avec précision; faire les tierces fa, la et fa, la |> justes à
l'oreille, et les vérifier par les accords ut, fa, ta et ut, faf
la J,; faire ensuite les quintes justes du la au mi et au si,
et les vérifier par les accords ut, mi, sol, ut, mi, ta, et
net, sol, si; faire la quinte la \f, mi \> juste ; la vérifier pan
les accords ut, mi \f,sol, et ut, mi\,, la\^; faire en descen-
dant la quintejuste la [>. re [>, et la vérifier par l'accord re|j,
fa, /»[, ; et enfin faire le fa g ou sot \, comme quarte in-
termédiaire et faible, entre j ^ jj et ifc
Mais si les clavecins, orgues, pianos, etc., sont ac-
cordés d'après ce procédé, il est nécessaire que tous les
autres instrument, s'ils sont dans le cas d'être joués en-
semble, aient leurs sons distribués de la même manière,
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36?
s;iiis i|uoi ils seront nécessairement forcés de produire dans
beaucoup de cas des sons autres que ceux des premiers , et
leur ensemble produira un très mauvais effet.
Les basses et les altos , par exemple , auront un son ( le
la de leur chanterelle ) qui ne sera pas celui de l'orgue ,
dont l'ut est le régulateur, et dont il est la sixte majeure.
Dans les violons , le la et le mi ne seront point non plus les
mêmes, par l'habitude où l'on est d'accorder ces instru-
ment par quintes justes, que ceux qui résulteraient d'un
ut commun à tous les instrumens. Les clarinettes con-
struites en fa, eu si les hautbois et les flûtes, ayant un
re pour son fondamental, pourront bien moins encore
donner les mêmes sons.
Il faudrait donc, en prenant l'ut pour régulateur com-
mun, construire les instrumens avec un ut pour son grave
et générateur; et dans les instrumens à archet, accorder
les ut , les sol et les re par quintes justes , mais déterminer
les la comme sixtes majeures d'uf, et non pas comme
quintes de re; et ensuite les mi, comme quintes justes de
ces mi.
On sait que le son ut, le plus grave de l'orgue, est celui
donné par un tube de 3s pieds de roi, que l'on a trouvé
résulter d'un nombre de 3a vibrations par seconde Le
nombre des vibrations doublant à chaque octave , il en ré-
sulte qu'un lubc d'un pied donne la cinquième octave ai-
gué du premier ut , provenant de 1034 vibrations par se-
conde. Nous ferons remarquer que, si au lieu d'un tube
d'un pied de roi de longueur, on avait pris un tube d'un
tiers de inctre, ou d'un pied métrique, mesure mainte-
nant en usage, le son qui eu serait résulté aurait été pro-
duit par 1000 vibrations en une seconde, car le pied de
roi est au pied métrique, très approximativement, comme
inoo est à ioa5 ° , et la différence d'environ un millième
peut être négligée- Ce son , à 1000 vibrations par seconde,
{■) Je crois que le palaritbmc de M. le baron Coignard-de-lni'our
indique que ce son est produit par 64 vibration) au lieu lie 5a ; mais
peu importe, quant aux couac que ni: es , puisque ce sun isl alors repré-
senté par son octave.
368
pourrait être pris pour diapason ou régulateur; main
comme- il est plus grave d'un quart de Ion que l'ut dé
l'orgue, et que celui-ci est d'environ trois quarts de ton
plus grave que celui en usage dans les temps modernes ,
on voit qu'il se rapporterait assez au de nos instrument
actuels.
Or, puisque le si \> est le son le plus grave de la série des
quintes justes ascendantes do noire gamme chromatique,
rien n'empêche de le prendre pour régulateur. La coïnci-
dence d'un nombre millénaire , d'une mesure métrique,
et d'une unilé de temps usuelle , concourront à le rendre
désormais inaltérable. Le sou mi (j, s'il était considéré
comme la quinte renversée de ce si serait un son à 666 '
vibrations, produit par un tube d'un demi-mètre de lon-
gueur, et son octave grave donnée par le tube d'un mètre,
serait un son à 333 j vibrations par seconde.
Notre gamme chromatique serait donc composée des
sons suivans, représentés en nombres de vibrations, sa-
voir:
o, i, a, 5, 4, 5, 6,
56a fioo, 65i-^, 675, ?o3^, 760, 798 è,
7- «. 9> la-
«45 ï» 900, 739;, '«on, ioS44s. "*5.
On voit que la formation de notre gamme chromatique
nous couilnil naturellement à une dénomination particu-
lière pour chacun des intervalles, soit consonnans , soit
dissonani des sons qui la composent, tirée du raug qu'y
occupent ces mêmes sons. Comment, en effet, ne pas
donner un nom absolument indépendant, 1" À tous les
sous consonnans avec la note fondamentale ou tonique
j £ , savoir les intervalles 3,4.5,7,8,9, que d'après la
division diatonique il faut nommer j ™^ ,
se/,|™'^, ta, suivant les circonstances; a" Aux inter-
valles dissonnns 1,2,6,10,11, qu'il faut nommer dans
ce système j "'jj, y. ^^'rif' : cc qui entraîne la
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36a
distinction entre des tierces, des six les, des secondes, des,
septièmes , majeures on mineures , des quartes , des
quintes, diminuées ou superflues, el jusqu'à des secondes,
des sixtes et des septièmes superflues, qui n'auraient pas
dû exister, puisqu'elles se confondent nécessairement avec
les tierces mineures, les septièmes mineures et les octaves.
Nous oserons donc proposer de revenir à cette réforme
générale, jadis indiquée dans la manière de noter la mu-
sique, et qui ia rendrait d une lecture et d'une étude in-
comparablement plus faeiles par la suppression absolue
des dièses et des bémols. Ou sait qu'elle consiste à établir
des portées à six lignes, où chacun des douze intervalles
chroma licj nés trouve sa place alternativement sur les li-
gnes et sur les espaces qui les séparent, ainsi qu'il suit.
lia fallu créer les nouveaux noms dé, lié, da, ta, di ,
pour les notes qui eu manquaient.
RÉPONSE .
k une QuranOR qui Boni i été fiite par quelques-uns
DE NOS ABONKÉS.
Nous nous sommes servi quelquefois* d'un mot généra-
lement adopté en Allemagne, mais peu connu en France ;
ce mot est celui d' /Esthétique. Quelques-uns de nos ahon-
nés nous ont fait observer qu'il serait utile de définir les
mots peu usités dont nous avons occasion de nous scrv.îrî
ét lioùs ont demandé ce que signifie exactement celui
(1) Notamment dam notre article mr les journaux de inoiique
( Vny. la Raue Ibnnft, n- 38).
l' vot. 3a
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5;o
d' /Esthétique. Nous nous faisons un devoir de les satis-
faire.
UJEstliêlique est exactement la philosophie des arts.
Cette science ébauchée vers le milieu du dix-huilième
siècle par l'idéologue allemand A. G. Baumgarteu , a pour
objet la doctrine du beau, du sublime, du goût et du
jugement dans les arts. Elle se divise , comme la logique et
la métaphysique, en pure et appliquée. V /Esthétique pure
est celle qui considère abstractivemeirt les idées de beau,
de sublime, de goût, etc. ; on la nomme Crimalologie ccslhè-
tique. L'esthétique appliquée,, qu'on désigne par le nom de
Calléothecnie , embrasse les beaux-arts en général , et leurs
diverses espèces, quise divisent en arts toniques (la musique,
la poétique et la rhétorique), eu arts plastiques (la peinture,
l'architecture, la calligraphie, etc.), et eu arts mimiques
(la danse, la chorégraphie, la gymnastique, etc. )
L'idéologie aestliétiqne se divise aussi en doctrine du
beau (Calléologie), du sublime (Hypsicologie), et des affini-
tés eesthétiques {Syngenciotogic), comme, par exemple, l'a-
gréable, le gracieux, l'élégant, le magnitique, le colossal,
le majestueux, l'étonnant, le pathétique, le sentimen-
tal, etc. 1
Telles sont les branches étendues de cette science plus
on moins cultivée par les théoriciens allemands, mais qui
est peu connue parmi nous.
ANECDOTE.
Tous les peuples du nord, et particulièrement les Scan-
dinaves, ont cultivé la musique dans- les temps les plus
reculés. Les Finlandais ont conservé diverses mélodies qui
leur ont été transmises d'dge en âge depuis, le siècle de
Fingal et d'Ossian. Telle est la chanson appelée Huna,
qu'on joue encore sur l'instrument nommé Harpa, lequel
[i) Voyei le dictioDMire de musique de H. Lichtenthal , tom. i ,
p. a63 et 364.
Digitizod b/ Google
3,.
n'est qu'une imitation grossière de la cithare ancienne
Mais, par suite d'ovénemons inconnus, cet art était tombé
en Suè'le dans un tel discrédit, que les lois en défendaient
l'usage, et que les musiciens étaient considérés comme
infâmes. Il était même permis de les tuer partout où l'on
en rencontrait; le meurtrier était seulement tenu de don-
ner auï héritiers du mort mu; paire de souliers neufs, une
paire de ganls, et nu veau île trois ans. A l'égard de cette
dernière parlie de l'indemnité, l'héritier n'y avait droit
qu'après s'être soumis à une épreuve humiliante, digne
de ces temps barbares. Ou enduisait de graisse la queue
du veau, qu'on menait sur le haut d'une colline; l'héritier
prenait celte queue dans ses mains, le meurtrier frappait
ensuite le veau avec un fouet et le forçait a s'enfuir. Si
l'hérititr pouvait le reteuir, l'animal lui appartenait; mais
si la queue glissait entre ses mains, il perdait ses droits et
restait exposé aux railleries des assistans.
Toutes ces horreurs se perpétuèrent .jusqu'au règne de
Gustave Wasa (élu en i5a5) ; ce prince abolit des lois et
des usages si ridiculement féroces, appela à sa cour des
musiciens étrangers, eL introduisit en Suède l'art de la
danse, qui y était inconnu auparavant. [ Voyez l'Histoire
de Gustave Wasa, par Archenhnlz. Tubinge, 1801, tome i,
page il 3, et tome h, page agft. )' i •■ •-
NOUVELLES DE PARIS:
Vendredi 9 novembre,- on. a, repris à l'Opéra le» repré-
sentations AeMoise, qui avaient été interrompues. ]icudant
quelque temps; l'eiécutiou a été trps. salisfaijçante. Adol-
phe Nourrit, Dabadiç(Levassuijr etiW" Cï»ti ,sb .sont diou:
très digues de ce bel ouvrage, .v , _ Sm./; A ,_. .. (
cinq rortfes de métal, quirfonr accordées en la mineur, tùn que les peu-
ples du nord »flectionoeol. Onle joue d'une-. seule maia coqirne la lyre
uliqnc.
5;.
Les répétitions de la Muette de Portici (Marzaniello) ont
commcucÉ; on parle Je la musique de M. Auhcr avec
beaucoup d'éloges. Espérons que nousjouirons bientôt do
— Les répétitions du Colporteur se poursuivent avec ac-
tivité au théâtre de l'Opéra-Comique. Cet ouvrage sera
vraisemblablement joué vers le a5 de ce mois. Ce qu'en a
entendu de la pièce et de la musique l'ait espérer un suc-
cès éclatatit. ' ■ '
— V Amant et le Mari, opéra -comique en deux actes, pa-
roles de MM. de Jouy etllogcr, musique de ill. Fétis, sera
repris samedi prochain. Cette pièce, qui a eu plus de cent
représentations dans la nouveauté, n'avait pas été jouée
depuis pris de trois ans.>
. — SI. Sabasliani,. virtuose sur la clarinette, solo au
théâtre de Saint-Charles et de la musique particulière du
roi de Ha pies, est arrivé à l'aris. lise propose de donner
un concert et de se faire enleudre en public plusieurs fuis.
On assure qu'il est d'une habileté remarquable sur son
instrument. ;
— Le fameux Pagauini, qu'on attendait à Paris cet hi-
ver,, ne viendra pas dans celte ville. Il est maintenant à
Milan, et so dispose à partir pour la Russie, en passant par
l'Allemagne, cl s'arrélant à Vienne. On assure qu'il craint
le séjour de Paris; il a tort. Les réputations usurpées s'é-
vanouissent devant le publie parisien; mais les grands ta-
lens y mettent le sceau à leur gloire. ■
— Le jeudi 22 de ce mois, jour de la Sainte-Cécile, les
élèves de l'Institution royale de musique religieuse donne-
ront un premier exercice, où , indépendamment de; plu-
sieurs morceaux non encôre exécuté*, m'i entendra la
belle ode de Dryden, le -Pouvoir de V Harmonie, dédiée à
Sainle-Cécile, et l'un des chefs-d'œuvre de Haendel. Cet
exercice aura lieu à deux heures très précices après midi ,
en la salle de l'Institution, rue de Vaugirard, n" 6y. Les
prix des places sont les mêmes que Cannée dernière.
— Le au de ce mois, les principaux acteurs des divers
théâtres de la capitale se réuniront pour donner, au théâtre
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S?3
Feydeau, une représentation au bénéfice de H net, a la-
quelle cet acleur estimable a droit, après Vingt-cinq ans
de service. Elle se composera du Colporteur, op.!ra nou-
veau en trois actes , des deux derniers actes de Roméo et
Juliette, tragédie de Shakespeare, dans laquelle les ac-
teurs anglais, et notamment mademoiselle Smilhson et
Abbott joueront à Paris pour la dernière foi», et d'un in-
termède qui ne peut manquer de piquer la curiosité pu-
blique. Quarante un acteurs y auront un rôle. Dans ce
nombre, on compte mademoiselle Mars, Monrose et Fir-
min du théâtre Français; mademoiselle Chili, Adolphe
Nourrit et Dabadie de POpéra; Chollet, Ponchard, Va-
lère, Vizentinî, Lemonnicr, Lafcuillade, Huet, Féréol,
Mesdames Rigaut, Pradher, Prévost, Ponchard, et tous
les autres sociétaires et pensionnaires de t'Opéra-Comique ;
Chenard, Lesage et tous les acteurs retirés du même
théâtre; le célèbre violoniste Lafont, qui parlera, chan-
tera et jouera du violon , etc. , etc. On y entendra , dans
un concert mû en action, tous les premiers chanteurs.
MM. Vogt, Dacosla et d'autres célèbres artistes. Enfin les
danseurs de l'Opéra termineront la fête par un ballet où
madame Monlessu jouera la dernière scène du ta Som-
nambule. Peu de représentations à bénéfice ont offert un
ensemble plus attrayant. Tout Paris voudra assister a
celle-ci.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Hil»h. On vient de représenter au théâtre Alla Satin
un opéra nouveau qui a pour titre: It Pirata (le Pi-
rate). Le sujet est tiré du roman de W aller Scott qui
porte ce nom. La musique est l'ouvrage d'un jeune com-
positeur napolitain nommé Beitini, dont nous avons déjà
parlé dans la Revue Musicale. Ce jeune homme parait être
né pour se faire un nom, remarquable. Sou chant se rap-
3?4
proche de la simplicité de l'ancienne école , et sa manière
n'est point une imitation de celle de Ross i ni : ces deux
points sont déjà de favorable augure. Toutefois ils ne suf-
fisent point. Pour se faire un nom, il faut avoir un style
particulier, de l'invention , de la chaleur, de l'effet enfin.
On ne dit pas si l'on trouve ces qualités dans les produc-
tions de M. Bellini : mais il est peu vraisemblable qu'elles
y soient , ce compositeur étant encore dans une extrême
jeunesse. De quelque talent naturel qu'on soit doué, on
commence par être imitateur. Mozart, Bcethowen , Ros-
siui l'ont été dans leurs premiers ouvrages. Le premier ne
se montre que le copiste de Basse dans ses partitions de
Mitridate, de Lucio Sitlaet d'il lté pastore ; il est évident que
Beethowcn se proposait Mozart pour modèle dans ses pre-
miers quatuors et dans ses promières sonates, et l'auda-
cieux Rossini lui-même ne sortait pas de la manière de
ses prédécesseurs dans sa Cambiale, di Malrimonio, et dans
sa Scata di sela. Il faut essayer ses forces d'abord,. acqué-
rir l'habitude des procédés de l'art, et surtout pressentir
l'opinion publique. Peu à peu la confiance vient; avejc
elle nait l'audace, et celle-ci crée les innovations. Au
reste ce qu'on dit de la musique d'il Pirata doit nous en
donner une bonne opinion : on y trouve, dit-on , simpli-
cité, grâce, énergie et passion. C'est beaucoup. Ainsi
L'ouvrage a obtenu le plus grand succès. Tous les soirs
l'auteur et les acteurs principaux sont redemandés par le
public. Madame Méric-Lalande et Rubini s'y sont distin-
gués, et ont reçu beaucoup d'applaudissemens.
— On annonce, comme devant paraître sous peu de
temps, le livre posthume du célèbre compositeur G. M. de
Weber qui a pour titre Kiinsterleben (la Vie d'Artiste).
Quelques biographes ont indiqué cet ouvrage comme un
roman musical; mais il paraît certain que c'est une bio-
graphie de l'auteur, avec des notes très étendues sur la
musique, sur les artistes les plus célèbres et sur leurs
compositions. Un pareil livre ne peut manquer d'exciter
la ciiriosilé publique. La naïveté qui faisait le fonds du ca-
Diaitizcd by Google
- 5;5
tactère île ce grand musicien , ses idées pittoresques et sa
mélancolie habituelle, doivent préler du charme à son
style et rendre piquant le récit des événemens de sa vie.
Ses opinions en musique, exprimées par lui-même, pré-
sentent aussi beaucoup d'intérêt. Nous nous empresserons
de nous procurer ce livre après sa publication, et d'en
donner des extraits dans ta Revue musicale.
GALERIE
ïScs ffinîtewns ctîifires,
COMPOSITEURS , en ASWrjlS El IN STUC ME BUSTE 8 ,
Contenant leur» portraits lilhographiés par tes meilleurs artiste ,
des. /oc limite , et leurs biographies,
Par F. S. Fini.
Nous ne craignons pas d'être démentis en déclarant que
l'ouvrage que nous annonçons est le plus beau monument
qui ait été élevé à la gloire des grands artistes qui ont il'
(t) A Paris, du-/, les Éditais, quai Voltaire, n° ai, diei l'.tisoa,
rue Bleue , n" 4, Gamum Ponuu, rue Sainl.IIonnrè , n- i(o, S*ew,
lut et Cie, place de la Bourse , et Lakolob* , imprimeur lithographe ,
roe de l'Abbaye n' 4- A Bruiellcs , S«b. Avmioet Cie. , rue de U Mag-
delcine, n° 397. .
La Galerie des Musiciens célèbres esl publiée par livraisons qui con-
tiennent quatre portraits, format grand in-fplin ïfom-de Jésus, avec un
ou deui fac-similé, et trois feuilles de teile imprime en caractères de
Didot.
L'ouvrage entier le composera de trente livraisons. 11 erj paraîtra au
moins huit par an, et au plui doua.
La première livraison a paru le 1er novembre 1837.
Le prii de chaque livraison est rué à îafr. Les eiemplaires sur papier
de Cliinc se paieront 10 fr.
On ne paie tien d'avance.
Il suffit, pour être compté comme souscripteur, de se faire inscrire a
l'une des adresses ci-dessus, ou chez les principaux libraires, marchands
d'estampes et de musique des principales villes de France et de
l'étranger.
lvjslrù l'ar\ musical, ou plutôt qu'il n'existe rien qu'on
puisse lui comparer. Son plan , comme loules les parties
de son exécution , nous semblent le remire digne de son
objet. Nous croyons devoir entrer daua quelques détails à
cet égard. /
Plusieurs recueils de portraits d'artistes, et particuliè-
rement de musiciens , existent ; maïs ceux qui les ont pu-
bliés se sont bornés a une nation, ou à une époque. Tels
sont te Parnasse Français, de Tilon du Tillct, où l'on
trouve les portraits et les notices abrégées Ue quelques
musiciens de l'école française. Le volume qui contient les
portraits et les biographies des compositeurs et dus chan-
teurs napolitains, dans l'ouvrage qui a pour titre: Biogra-
phie degti aomini ittusirt det régna di Nàpoli, ernata deî toro
rtspettivi riiratti {Naples, 1819, in-41), et la collection de
portraits de musiciens italiens publiés à Milan. Mais le
premier de ces recueils 3 le défaut de ne contenir qu'un
petit nombre de portraits et des notices inexates; le se-
cond, borné aux musiciens du -royaume de Naplcs , n'of-
fre que des portraits d'une exécution pire que médiocre,
et des notices incomplètes ou fautives; enfin le troisième,
dépourvu de texte, ne renferme que des portraits d'une
petile dimention qui n'offrent à-peu-près que le trait.
La Gâterie des Musiciens célèbres est conçue sur un plan
plus étendu. Elle embrasse toutes les époques, toutes lus
nations et tous les genres. Là , Rameau , Lullï . Searlalti ,
Carissimi, Bach, Mozart, Haydn, Méhul, Grétry. Gluck,
Rossîiii, Palestrina, Handel, Somclli , l'ergolesc , Gheru-
bioi, Jioïckticu, Beethoven, Weber, Mayerbecr, Clemcnti,
Dusset, "Crâmer, Steibell, Kalkbrcnner, Uerz, Laillot,
Viotti, Rode, Pagauîni, Corelli, Tartini, Pugnani, Benrla,
Spohr, Garât, Guadagni, Marchesi, Gresceulini, Itaff, Vj-
ganoni, Braham, Fuusliua, Gabricll! , Saînt-Huhcrti , le
père Martini, Matlci, Marpurg, Kiruberger, Fortcl, et une
foule d'autres compositeurs, chanteurs, instrumentistes
et théoriciens célèbres se trouveront réunis et jugés avec
impartialité, quelque soit l'école, le temps et la nation
auxquels ils appartiennent. Dans le but de soutenir l'in-
3j?
térét que celte publication doit inspirer à Ions les profes-
scurs et amateurs de musique, on placera dans chaque
livraison un compositeur allemand ou italien cl nn com-
positeur français, nu chanteur et un instrumentiste , ou
deux instrumentiste! appartenant à des genres différents.
Des tables, qui seront publiées à la fin de l'ouvrage, coor-
donneront la collection sous trois aspeots différents : i° par
ordre de genre; a° par ordre chronologique; 51 par ordre
de nations. Une préface générale, et des litres pour la
division des volumes, seront fournis, et compléteront
l'ensemble de celle belle iconographie.
Le talent de MM. Maurin, Mauzaise et Grève-don est
assez connu pour n'avoir pas besoin d'éloges; c'est à leurs
soins que .sont confiés les portraits de la Galerie des Mu-
siciens célèbres. Les portraits de la première livraison peu-
vent donner une idée de ce qu'on doit attendre d'eux
pour la suite. Cette livraison qui contient Gluck, Viotli ,
Méhul et Garât a excité l'admiration générale. Jamais la
lithographie, si supérieure à la gravure pour le porlrait,
ne s'est élevée plus haut. Au mérite d'une ressemblance
parfaite se joint celui d'un crayon spirituel et plein d'effet.
La dimcnlion est grande, et telle qu'il convenait qu'elle
fut pour le papier qu'on a choisi, c'est-à-dire la demi-
feuille de grand papier vélin N om-de~ Jésus.
11 ne nous appartient pas de parler du mérite des no-
tices biographiques qui accompagnent les portraits ; mais
il est un point sur lequel nous croyons pouvoir insister :
c'est l'exactitude des faits, et l'impartialité des jugemens.
Ondoit des égards aux vivans; ou ne doit aux -morts que
ia vérité, a dit Voltaire : l'auteur de la Galerie des Musi-
ciens célèliresa cru qu'on devait la vérité à tout le monde,
et il l'a dit avec des formes qui conviennent en parlant
d'hommes du premier ordre , chacun dans leur genre.
Les fac-similé ajoutent à l'intérêt de celte collection.
Pour les gens du monde , cet intérêt n'est que celui de la
curiosilé salisfaile : pour les artistes , il va plus loin. La
vue d'une page du parlilion autographe (l'un grand com-
positeur enseigne plus de choses sur son savoir, sur sa cc'r-
titude des combinaisons harmoniques et <Ies effets, queue
pourrait le fai^e beaucoup de détails historiques. On sera
fort étonné de voir dans ceux des musiciens qu'on croit
avoir travaillé facilement, parce qu'ils ont un style incor-
rect et lâche , des talonnemens et une timidité puérile ,
tandis que d'autres, qu'on appelle des calculateurs et
des musiciens savans , jettent leurs idées au premier
coup, avec tout l'orchestre, librement et rapidement.
La beauté de l'exécution typographique complète tout
ce qu'on pouvait désirer du perfection dans la Galerie des
Musiciens célèbres ; les soins qu'ya apporté M. Duverger,
jeune imprimeur d'un grand mérite, en ont fait un ou-
vrage digne des presses de Didot et des autres eélèbres ty-
pographes. Enfin il nous semble que rien n'a été négligé
pour faire de celte intéressante collection un ouvrage de
luxe, en même temps qu'un ouvrage utile.
PUBLICATIONS D'OUVRAGES CLASSIQUES.
Le Messie, oratorio eu grande partition avec paroles fran-
çaises et anglaises, musique de Hâïndel, accompagne-
ment de piano, et harmonie en petites notes, par V,
Gasse.i" et a* parties in-folio.
Paris, F. Gasse, rue des Fi Iles-Sain l-Th ornas, vis-à-vis
celle des Colonnes, et Slarquerie frères, rue Saint-Ho-
boré, n" .'i'i.
Un siècle s'est écoulé depuis que Hœudcl a composé
ses oratorios; néanmoins, à l'exception de quelques ar-
tistes et d'un pelit nombre d'amateurs, personne ne con-
naissait en France ces admirables productions d'un talent
colossal. Le nom de l'auteur du Messie, des Machabèes,
d'Athalie, des Fêtes d'Alexandre, et de tant d'antres chefs-
d'œuvre, n'était parvenu jusqu'au public français que par
tradition, et comme un de ces noms historiques qu'on
connaît, mais sans avoir sur les personnages auxquels ils
appartenaient aucune idée précise, sans savoir dans quel
temps ils vécurent, ni quels fureul leurs travaux. 1,'Alle-
379
magne même n'était pas sans reproche à cet égard ; au-
cune édition de ses œuvres immortelles n'y avait été pu-
bliée; le Messie seul avait été tiré de l'oubli par le' soin que
Mozart avait pris d'ajouter des parties d'instrumcns à vent
dans la partition- originale.
La patrie de Hscndcl abjure enfin une indifférence
coupable : les éditions des ouvrages de ce grand artiste s'y
multiplient depuis quelques années, et les grandes réu-
nions musicales qui s'y font ont souvent pour objet de les
exécuter avec une pompe digne d'eux. Les exercices de
l'Institution de musique religieuse, dirigée par M. Choron,
ont commencé à les naturaliser parmi nous; une émula-
tion louable s'empare de quelques vrais amis de l'art, et
nous a von 9 la satisfaction d'annoncer des publications qui
promettent aux vrais amateurs de Paris et des départe-
mens des jouissances qui leur sont inconnues.
Un grand obstacle s'opposait à ce que les oratorios de
Hœndel fussent connus en France, savoir, la langue an-
glaise dans laquelle ils sont tous écrits. La difficulté de tra-
duire pour la musique; le peu d'avantage qu'il y a pour
les traducteurs dans un travail ingrat, et l'incertitude du
succès étaient plus qu'il ne fallait pour arrêter le zele des
plus ardens admirateurs de celte belle musique. Les pa-
roles latines du Messie qui a été chanté chez M. Choron
sont une paraphrase plu tôt qu'une traduction. Un les doit
à la persévérance de MM. Pernc et Adrien qui, s'ils n'ont
pas triomphé complètement de tous les obstacles, ont du
moins réussi en quelques parités, et ont mis l'ouvrage en
état d'être entendu. Cette traduction est manuscrite.
Les difficultés dont nous venons de parler sont bien plus
considérables encore s'il s'agit d'une traduction en fran-
çais, langue qui, comme on sait, est bien loin de posséder
la concision latine. Ces difficultés sont telles, qu'il parait
à peu près impossible de les vaincre entièrement. Il faut
donc se contenter de ce qui n'est bon que relativement,
en faveur du plaisir que la musique doit procurer, il faut
bien l'avouer, plusieurs endroits de la traduction publiée
par M. Casse sont loin d'être irréprochables; mais était-
DigitizGd t>y Google
5Sg
il possible de faire mieux? Il est permis d'en douter. Ac-
cueillons donc le résultai des efforts d'un professeur zélé,
et sachons-lui gré de son courage.
Sous le rapport de l'exécution typographique, il n'y a
que des éloges à donner à l'édition de M. Gasse, et l'on
n'en sera pas surpris, quand on saura qu'elle est due aux
soins de MM. Marquerie frères. Déjà nous avons-annoncé1
que celle partition serait digue de tout ce qui sort des
mains de ces graveurs habiles; les deux parties, qui ont
paru à quelques mois de distance, ont vérifié nos prédic-
tions. L'ouvrage est maintenant complet. Nous désirons
qu'il obtienne assez de succès dans le monde pour que
les éditeurs soient encouragés à suivre leur entreprise, en
publiant les autres oratorios de Hœndel, de la même ma-
nière.
La partition du Messie esl telle qu'elle est sortie des
mains de Hœndel. L'accompagnement de piano que
M. Gasse a ajouté pour faciliter l'exécution aux amateurs
qui n'ont pas l'habitude de lire beaucoup de portées à la
fois, se détache du resls de l'instrumentation. Les avis se-
ront partagés sur le parti qu'a pris l'éditeur de ne donner
que l'orchestre primitif, sans y ajouter les parties d'inslru-
mens à vent que Moaart y a ajustées avec un goût parfait.
Nous pensons que, sous le rapport de l'exécution, ces par-
ties seraient indispensables de nos jours, parce que l'habi-
tude que nous avons des orchestres bruyans ne nous per-
mettrait pas de goûter un simple accompagnement de
violons, de violes et de basses ; mais nous croyons qu'il est
bon ds respecter le faire d'un grand artiste, et de présenter
comme études ses ouvrages dépouillés d'ornemens étran-
gers, quel que soit d'ailleurs le mérite qui brille dans ces
ornemens.
Nous invitons tous ceux qui aiment le vrai beau, le
grand, le sublime, à faire l'acquisition de la partition du
Messie. Les amateurs qui se réunissent pour exécuter les
productions des anciennes écoles, et pour les soustraire à
l'oubli, les directeurs de concerts, les sociétés philliarmo-
[i) Yojenla Revue Musicak , !. i , p. liifi.
DigitizGd by Google
niques, y trouveront des airs c! des chœurs d'un effet ad-
mirable. Ces morceaux ne ressemblent guère à ce qu'on
entend aujourd'hui, et nos gens à la mode ne manqueront
pas de leur trouver un air gothique; mais ce golbïque
durera plus long-temps que le nouveau que nous voyons
éclorc.
Il Convito d'Alessasdbo, o sia l» Fouza dell' ahnobià (les.
Fûtes d'Alexandre, ou le Triomphe de l'harmonie), oda
di Dryden, trailolla in tersi ilatiani da S. Pazzaclia, nutsica
ili Hsudel, con accompagnamenio di pian-forle. Prix : 3lifr.
Paris, Carli, boulevard Montmartre, n° 14, et PÎcyel,
boulevard Montmartre, au coin de ln rue Grange-Ba-
telière. •
Tout le inonde connaît la belle ode de Dryden sur le
pouvoir de la musique ; ce morceau, qui est célèbre dan»
la poésie anglaise, a été traduit plusieurs fois dans toutes
les langues de l'Europe. Les images en sont vives, animées,
variées et pleines d'élévation. Jamais sujet ne fut plus fa-
vorable aux accens de la musique. Tiinothée, assistant au
banquet du vainqueur de Darius, cl faisant naître à sou
gré dans l'âme du héros des émotions de tout genre par
ses chants et par les sons de sa lyre, ne pouvait manquer
d'inspirer aux musiciens de génie des morceaux d'un ordre
supérieur. Plusieurs compositeurs ont en effet produit de
beaux ouvrages sur les vers de Dryden; mais aucun n'a
été inspiré si heureusement que Hœndel, et jamais peut-
être lui-même ne s'est élevé à ce degré de sublime. Que
ceux qui prétendent que ce grand homme ne connaissait
que le style fugué, ouvrent cette merveilleuse partition,
et qu'ils voient s'ils trouveront dans aucun ouvrage mo-
derne autant de variété de style, autant de nouveauté;
d'élévation, et même de dramatique. Dans ce chef-d'oeu-
vre, point de phrase de convention; point de cabalette qui
se reproduit à chaque instant ppur laisser reposer le génie
fatigué de l'auteur. Le génie de celui-ci est du petit nom- -
bre de ceux qui ne se fatiguent pas. Après avoir illustré
38a
sa carrière par cent productions admirables, après avoir
traité avec un égal succès l'opéra, le slyle d'église, l'ora-
torio et la musique instrumentale, llaendel jouissait dans
sa vieillesse d'une force de tête, d'une richesse d'inven-
tion qui faisait trembler ses rivaux.
Dans Us Fêtes d' Alexandre, il a réuni tant de beautés,
qu'en cherchant a désigner quelque morceau de préfé-
rence à l'admiration des amateurs, nous éprouvons le plus
grand embarras. Où tout est beau, l'on ne peut choisir.
Le morceau qu'on préfère dans un ouvrage tel que celui-
là est toujours celui qu'on entend. Les exercices de
M. Choron feront juger si les éloges que nous donnons à
celte'produclion de Rxndcl sont exagérés. Espérons que
l'exemple du directeur de l'Institution de musique reli-
gieuse sera imité par l'administration de l'Opéra dans les
conccrls spirituels, et qu'à des ouvrages usés et sans effet
succéderont ceux de oc génie colossal. Nous savons que
l'exécution en est fort difficile. Ce n'est pas avec une ou
deux répétitions qu'on peut comprendre ce qui est néces-
saire pour qu'ils produisent leur effet. Il fauten saisir l'es-
prit, l'intention, et cela demande des études sérieuses.
Les chanteurs qui veulent rendre cette musique n'y peu-
vent apporter le mezza, voce de la musique moderne; elle
exige une véritable mise de voix, une véritable vocalisa-
tion, une exécution large , cl non les jolies petites choses
qu'on nous donne habituellement. Peut-être se tirera-t-
on de la difficulté eu déclarant que celte vieille musique
ne vaut pas la peine d'être étudiée, comme un l'a fait cette
année à, propos des chœurs du Messie.-
On ne saurait trop louer le zélé et le goût de l'amateur
distingué auquel on doil l'édition des Files d'Alexandre
que nous annonçons. Ce digne élève de Cresceutini, qu'il
ne nous est pas permis de nommer, mais que les initiés
reconnaîtront sans peine à ces indications, n'a rien 1167
gligé pour que cette édition fût aussi parfaite, qu'il était
possible. Au texle anglais, il a substitué une bonne iny?
ductioo italienne,, qu'Hit adaptée à la wHisjjjue ayee
sfliu extrême et de la manière la plus heureuse, L'indica-
DigiiizGd by Google
383
lion des mouvemcDS par le métronome de Maelzel donne
les moyens d'exécuter les morceaux dans leur tradition
exacte. L'accompagnement de piano est fait avec soin, et
rend autant qu'il est possible l'effet de l'orchestre. Nous
y avons trouvé quelques passages difficiles pour des ac-
compagnateurs ordinaires, mais ils étaient inévitables
pour l'effet de l'harmonie.
ANNONCES.
Galopade hongroise, dansée au théâtre de la Porle-Saint-
Martin dans le ballet de la Neige, par M. Mazurier et
M"* Minii-Dupuis, arrangée pour le piano par Henri Blan-
chard. Prix : a fr. Paris, A. Petibon, rue du Bac, n' 5t.
— Le Départ de Jeannette, rondo dédié à M™ Angelica
Calalani, par J. 11. Woets, prix : 3 fr. ?5 c. Même adresse.
Ce morceau, dont la coupe est originale, est avec ac-
compagnement de piano et violoncelle ad libitum. Quoique
la partie de violoncelle ne soit pas obligée, elle produit
cependant un bon effet.
— Trois grands quatuors pour cor obligé, violon, alto et
basse, par SI. Corret jeune, premier cor du théâtre de
Rouen. Paris, Corret aine, marchand de musique, rue de
POdéon, n" 33.
Les artistes qui ont exécuté ou entendu ces quatuors en
font beaucoup d'éloges.
— Duo d quatre mains pour le forté-piano sur la romance
de Wallâce : Loin du tumulte de la guerre, musique/de'
H. Catel, dédié à M1"- Mary et Emma Sullivan par G. L.
ïthein, op. q5, prix : 7 fr. 5o c. Chez A. Petit, successeur
de M. Ch. Laffillé, rue Vivienne, 11° 6.
': — Nocturne et variations concertantes pour piano et
Violon sur la prière de M aise An Uossini, dédié à SH la
marquise Ducrest par L. Ilhein; op. a6, priî : 7 fr. 5o c.;
Paris, Troupcuas, rue de Ménars, n" 3.' ' '
Les composition* de M. Mie in se distinguent ordinaire-
584
ment par l'énergie et «ne certaine élégance (l'harmonie;
ce sont aussi ces qualités qu'on remarque dans le duo à
quatre mains que nous annonçons; mais nous ferons ob-
server à l'auteur que le thème qu'il avait choisi aurait
peut-être demandé plus de simplicité et d'abandon. Nous
ne pouvons rien dire du nocturne avec variations sur la
prière de Moise, n'ayant point eu l'occasion de l'entendre
avec l'accompagnement de violon, 'qui est obligé.
— M. G. Carulli, cédant aux vœux de plusieurs de ses
élèves, se propose d'ouvrir un cours de musique vocale
dans son domicile, rue du Helder, n° 1 1, où il enseignera
l'art difficile d'exécuter les morceaux d'ensemble, depuis
les duos, trios, quatuors, etc., jusqu'aux chœurs.
S'élanl appliqué pendant plusieurs années à perfec-
tionner son art en Italie, véritable pairie du chant, il s'ef-
forcera de transmettre à ses élèves les bons principes qu'il
a puisés dans le pays qui l'a vu naître.
Le nombre borné d'élèves qu'il admeltra dans ses cours
lui permettra d'y démontrer à chacun, comme dans une
leçon particulière, l'art de respirer à propos, de phrascr
le chant et de prononcer l'italien.
Les amateurs qui n'ont pas encore l'habitude de lire
facilement la musique peuvent néanmoins suivre ces
cours, parce que le professeur aura soin do placer tou-
jours à côté d'un élève faible un autre plus avancé poul-
ie guider.
— La huitième livraison de l'Echo lyrique , nouveau
journal de chant faisant suite au Journal d Etitcrpc, vient
de paraître chez Pacini , boulevard des Italiens , n° 1 1 . Le
cahier se compose d'un nocturne de Field à deux voix,
^'linc romance de M. Gassc , et d'un air de la Didone ab-
batidonataAe Mercadanle {Addio fe/iti sponde^.
— Danse hongroise. Nocturne concertant pour flûte et
piano, composé par A Petibon. Prix (avec une jolie li-
thographie) : 6 fr. „
(La partie de piano a été arrangée par M. Karr). Paris,
Petibon, rue du Bac, n' Si. , ' , _
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SLR LA SOLHISATION ET LE SOLFÈGE.
La nécessité d'exercer les voix à entonner Jes sons avec
justesse, avant <le leur enseigner à joindre le chant à la pa-
role, a été reconnue par tous les peuples, et même par ceux
de l'antiquité. Mais les sons acquérant de la netteté par
l'articulation de la langue et des lèvres, on a senti en même
temps le besoin de se servir île certaines syllabes dont cha-
cune est adaptée à uu son déterminé. Les Grées, qui divi-
saient leur échelle musicale en Tètraeordes, c'est-à-dire en
suites de quatre sons, affectaient au premier son de chaque
tétracorde la syllabe ta, au second the, au troisième lo et au
quatrième lé; mais si celui-ci devenait eu même temps le
premier son du tétracorde suivant, ils'appelait ta*.
Il parait que chez les Romains ces exercices de la voix
se faisaient par les premières lettres de l'alphabet. Saint
Grégoire, en établissant sur les ruines de la musique an-
tique les règles du chant ecclésiastique, dans le sixième
siècle, conserva les lettres romaines comme signes dessons,
et l'usage de ces lettres se conserva jusqu'au milieu du
neuvième siècle, ou Hubald de Saint-Aniand en proposa
d'autres qui paraissent avoir été adoptés dans une partie
de la Gaule. Mais, en 1032, Gui d'Arezzo, moine de l'ab-
baye de Pompose, enlreprit de réformer le système musi-
cal, et particulièrement le citant ecclésiastique, Son but
était principalement de faciliter l'étude de l'autiphonairc;
il crut en trouver les moyens en substituant, aat tètraeor-
des anejens, une suite de six sons renfermés dans un
intervalle de sixte mineure qu'il appela du nom i'heracarde.
11 tira le nom de ces six sons des premières syllabes des
(1) Ce changement de tétracorde a beaucoup d'analogie aTcc les
muanan du plain-chant ; car quoique Uni d'Arciin ait baie son sys-
tème sur Vh&cacardc, il a élé obligé de rentier par ses inuancis dans la
totalisation par ttlracorde», toutes les fois que le chant sort des borne» Je
l'hexacoide.
a' vol. 55
586
vf.r< du l'hymne île saint Jean , qu'on attribue au diacre
Paul d'Aimitëe, el dont voici le commencement :
VT quant Iaxis,
REsanare jibrU ,
Mira gtttoram
FAmulituorum,
SOLve poltuli
LAbil rcatum.
Les sons de l'hexacorde s'appelèrent donc ut, re, mi, fa,
soi, la. Le chant par ces syllabes prit le nom de salmisatio,
mot que nous avons traduit littéralement par celui de sai-
misation. Tout le secret de la méthode de Gui consistait à
se servir de la mémoire de ceux auxquels on enseignait la
musique par cette méthode, en leur faisant trouver l'into-
nation de chaque syllabe par le souvenir qu'ils avaient des
sons de l'hymne qui y correspondaient. Pour comprendre
ceci il est bon de savoir que le chant de cette hymne monte
d'un degré à chacune deH syllabes ut, re, mi, etc, et que
tout le monde connaissait ce chant parce qu'il éiait alors
considéré comme un remède efficace contre l'enrouement.
Les inconvénient de cette échelle musicale bornée ans
six sous de l'hcxacorde sont considérables; je lésai exposés
dans une explication de la désignation des tons en Italie'.
Quelques auteurs se fondent sur ce que le mot d'hexacorde
ne se trouve point dans les écrits de Gui, et sur ce que ses
successeurs, tels que Beruon, abbé de Saint-Gall, Her-
mamt, surnommé Contractas parce qu'il était contrefait, et
Guillaume, abbé du monastère d'Hirschau, ne parlent
point des syllabes ut, re, mi, etc. Jean Cotton, dont on
ignore le véritable nom, la patrie, et même l'époque ou il
vécut, est, après Gui, le plus ancien auteur qui en ail
parté. Mais, si on l'en croit, les Anglais, Ifis Allemands et les
Français étaient les seuls qui s'en servissent. Il prétend
que les Italiens avaient adopté d'autres syllabes, ce qui
serait d'autant plus singulier que celles-là avaient pris
naissance en Italie', cl que c'est dans ce pays que la mé-
(i) Voyez ta Revue musicale , loin, a, p. 4&
Voici le pajsagi: du Imité de Jean Cutton, qui se rapporte à cette
lingnlarilÉ : • Sri sunt syllabe , quas ad opi» nmiica; asiumiinii», iti-
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08;
lliodu de solmisaiioQ par les muances s'est conservée,
taudis qu'elle a élé abandon née dans tous les autres.
Quoi qu'il en soit, lasolmisatiou par les six syllabes de
Gui avait introduit dans la musique de grandes difficultés,
et avait constitué la tonalité du plain-chant , par le soin
que prenaient les compositeurs d'an tien» es, d'hymnes ou
de graduels, d'éviter, autant que cela se pouvait, de sortir
des bornes de l'hexacorde.
Lorsque les formes du chant obligeaient à s'étendre au-
delà de ses bornes, il fallait avoirrecours à un changement
de nom des notes qu'on appelait muances. Pour comprendre
ce mécanisme des muances, il faut savoir que l'extension
totale de toutes les voix, et de tous tes instrument était
originairement comprise dans deux octaves et cinq notes,
depuis £)' ^ jusqu'à ^=3= et tpie celte extension
était divisée en sept hexacordes, comme dans la table
i, Ut, rè, mil», «ol, ta.
T,. Fa, .01, ta, tep, «t, r..
«<, re, mi, fa, toi, la.
«(,'«,' mi, fa! sol', la.
5. Ut, ig, mi, fa. sol, la.
6. Fa, H)t, laT'i 1>. ™-
ut, re, mi, fa, tôt, la.
ut, re, mi, fa, tel, la.
Ces hexacordes étaient divisés en durs, mois et naturels.
Celui qui s'étendait de sol à nu s'appelait hexacorde dur parce
qu'il contenait le t] à la troisième note; celui de fa-re se
nommait hexaconle moi, parce qu'il avait le jj an si; enfin
• Feras cjuidem apud diiersos ; verum Angli , Franeigenx , Alemauni
« utunlur ut, re, mi , fa, toi, la. Itali lutcm alias lialuml ; tjuas qui
• nosse desideraot slipulcDlur ab ïpsis. • ( loin. Cottonli , Tract, da
nuuien, c. î, apud Gerberto , t. i, p. i3a. ;
588
i'hexncorde tY'd-ln s'appelait ln\incoi-di: naturel , parce qu'il
n'avait aucun de ces signes. De ià 1rs expressions en usage
lorsqu'on employait cette méthode , chanter par bécarre , par
bémol ou par -nature, selon qu'on se servait de l'hexacordc
sol-mi, de celui fa-re on de celui Ut-la. ' ' '"
Si l'on ne sortait pas des bornes de l'hexacorde dans le-
quel le chant se trouvait , le nom des notes tic changeait
paa. ■ ; * •'■ • ■' * ■■
EXEMPLE IlXSS L'HEÏACC<RDE SÀrUKEL: '
i7T^— — — .
sol .ut ri- mi fa mi la sut ni fa mi re ut
niiiis sî le chant avait une extension plus grande que celle
<Ic l'hexacorde, on était obligé de changer le nom des noies,
el ce changement n'appelait niucnce ou mutation.
-■y -, v * * " * '- " " '■ ■
On conçoit que ce genre de difficultés s'est excessive-
ment compliqué à mesure que l'art s'est perfectionné , et
que les accidens de modulations se sont multipliés. Des
musiciens habiles sentirent lit nécessité d'apporter un re-
mède à une méthode si vicieuse; mais il est difficile de
vaincre l'habilude et la routine des maîtres, même lors-
qu'il s'agit des améliorations les plus importantes; aussi
fallut-il beaucoup de temps pour faire adopter uu meil-
leur système de sol misa lion.
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56y
Eu l547i "il musicien Belge , nommé Huberl W a ci-
rant*, tenta de réformer l'échelle musicale et la solmisa-
lion , en ajoutant une septième note aux sis premières , et
en leur donnant les noms suivans : bo , ce , di , ga, lo,ma,
ni. Cette nouvelle méthode , qu'on appela habitation, ou
bocedisation, fut adoptée dans quelques écoles des Pays-Bas,
et prit , à cause de cela , le nom de sotmisation beige. Au
moyen de cette méthode, le nom des notes ne changeait
jamais, et la musique devenait beaucoup moins difficile à
enseigner et à apprendre. Néanmoins, il parait que l'u-
sage s'en était peu répandu, car plusieurs musiciens furent
obligés de tenter à différentes reprises la réforme du
système des heiacordes.
Le premier qui essaya cette réforme en Italie fut encore
un Belge; il se nommait Henri Van de Putte (en latin
Ericius Puteanus)'*. Hubert Waelraiit n'avait introduit sa
méthode dans le s. écoles des Pays-Bas que par ses leçons
et par la pratique ; mais de Putte développa son système
dans un ouvrage qu'il publia sous ce titre : Modulata Pat-
las, sive septem discrimina vocum, ad harmonica tection'ts usum
aptata philoiogo qaodam filo (Milan, îSyo,, in-8*)1. De
(i) Hubert Waelrant, □'«dons les PflJS-Bta, en iSi;, passa en Italie
dans sa jeunesse , e( y appiit la musique dans l'école d'Adrien Willaerl,
■on compatriote. De retour dans su patrie, il j publia des chansons, des
madrigaux et des napolitaines , à 5, 6 et 8 mil, en iS58, et dam le»
années suivantes. Plusieurs éditions da ses ouvrages ont été faites en
Italie. Il est mort le ig novembre i505, a l'âge de 78 ans. '
(a) Henri Van de Pulle, que les biographes français appellent Dupais,
naquit a Venloo, dans la Gueldrc, le 4 novembre liji- Apres avoir Tait
set études à Dordrecht, a Cologne et a Louvain , tons Juste Lipse, Use
rendit en Italie, et fut nommé professenr d'éloquence latine k l'uni-
versité de Padoul, en 1G01. La cliaire de belles-lettres à l'université de
Louvain lui ayant tté offerte , il saisit cette occasion Je se rapprocher
de sa famille cl de son povs. L'archiduc Albert le nomma l'un de ses
conseillers , et lui confia le gouvernement du château de Louvain , où il
[3] Cet ouvrage est divisé en vingt chapitres: Do Putte le réduisit à
dii-sept dans lu ..(-cLindc ûiliiion qu'il pnblia snus le titré de Mamtbena,
«u notarumhcptas, ail liarnwnkm leclioait novum et faciltm ujum. Franc-
fort, 160s, iu-ia. C'est dans cette forme et sous ce titre qu'il fut inséré
dans le deuxième volume des œuvres de De Putte (pag. 109 — 107), inli-
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l'ulte y propose l'addition d'une septième note aux six
premières, et lui donne le nom de bi. Ce qu'il y n de sin-
gulier , c'est que le vers de Virgile , dont il donne un frag-
ment dans le titre de son livre, lui semble la meilleure
raison pour composer la gamme de sept notes : de pareilles
puérilités snnt dans l'esprit du siècle où il écrivait.
Zacconi, dans sa Praiica di masica (part. II , lib. i, c, 10),
donila seconde partie a été imprimée en t6aa, assure
qu'un Flamand, nommé Anselme , musicien du duc de
Bavière , avait aussi entrepris de compléter la gamme, eu
nommant si ta soplième notent * et frôla même note affectée
d'un bémol. D'un autre côté, Mersenne [Quest. inGenesim,
p. i6a3) cite Pierre Maillard, lequel affirme qu'un Fla-
mand anonyme avait proposé l'addition de pareilles syl-
labes vers i54j. Il est impossible de savoir maintenant s'il
s'agit d'Anselme ou d'Hubert Waelrant.
La bocédisalion de celui-ci fut introduite en Allemague
au commencement du dix- septième siècle par Sethus
Calwitz, qui publia sur ce sujet un livre intitulé : Musicie
artis prtscepta nota et faciiiisima, per aeptem voces 'musicales,
quibus ornnis difficullas , i/am ex ditersh clavibus, et ex
dhersis mntilenarum generibus , et *tx vocum musicalium
mutatione oriri potest, tollitur. Pro incipienUbus conscripta,
Jena. 1612, in-801. Calwitz y proposait l'admission des
lulé Amanitatum hamanarum diatriba XII, operiim omnium , lamut tc-
rundtix, Francfort, ifilS, in-ia.
De Puttc avait donné précédemment no abrégé de suo livre , Bons le
titre de Pteint-muiita, Veuille, iGon, in-ia, dont il j a une seconde édi-
hendil , ade/ariuimum, V. Ltât. Septaticam. Pair, et medicum mediol.
Francfort, 1601, in- 13. (H paraît mit d'après ce titre qu'il y avait eu uni:
édition de la M uaatbcna antérieure a celle de 1601). Ou trouve cet
abrégé danales amanit. humanar. p. 198 — 309. C'eat ito entretien de
l'auteur avec Aruold-Catliius , l'un de lei amis. TWa/mrn eut le nom
d'une maison de campagne qu'ils allaient voir, et qui aïait apparlcou a
(1) CalïiU, astroouiue, astrologue, poète et chanteur a l'école de
Saim-'Fliumaadc Leipsick, néa Grosehleben en,Tluitingue, le ai Février
i5at>, était liU d'un simple paysan. Il est mort a LeipticL, le a3 no-
vembre 1 (i 1 7.
DigitizGd t>y Google
59i
syllabes bo, ce, di, ga, lo, *na. ni ; mais en donnant comme
line méthode nouvelle ce qui datait de plus de cinquante
ans , il cachait le nom du véritable auteur de celte mé-
thode, qui fut attaquée par Daniel HiUler 1 dans un livre
intitulé : Muska Nova. Il ; n'est pas facile de comprendre
l'avantage que cet auteur trouvai! à substituer à la booé-
disation , ce qu'il appelle la bèbisation de la, M, ce, 4e, me,
fe,ge; car ce n'est pas le nom de la note qui importe, main
la noie elle-même. ...... ■ -. .
Les efforts qui avaient été faits eu Belgique, en Italie et
en Allemagne pour améliorer la sol misât ion «furent imités
en Espagne, en i6ao, par un moine nommé Pedro de
Vrena. Ce musicien conserva les noms des six premières
notes, tels que Gui d'Arezzo les avait établis, et se contenta
d'y ajouter la septième qu'il nomma ni. Le fameux évéque
de Vigcvauo, Carjmuel de Lobkowi[z, qui fut successi-
vement moine , .professeur de théologie à Alcaja, ingé-
nieur, abbé de Dissembourg, ambassadeur du roi d'Es-
pagne à la cour de l'empereur Ferdinand III, capitaine de
moines enrégimentés au siège de Prague, et évèque de
Campagna, dans le royaume de Naplcs, adonné un exposé
de la méthode de Pierre d'Ureoa dans un livre qui a pour
titre : Arle nuevade Mttsica inventoria a>mo de fioo por S. Gre-
goriano, iktconasriado anno de loaôpor Guidon Arelino, res-
tituida à i« primera perfection, anno 1620, por Fr. Pedro de
Vrena, redaeiila a este brève compendio, anno iC44, etc., Rome,
1669, iu-4*. - ■ i .
Enfin , vers le milieu du dix-septième siècle, un maître
de musique français, appelé Jean Lemairc, essaya d'in-
troduire dans son pays, la solmisatïon par la^gamme com-
plète, et nomma si la septième note fc . et sa, la même
note bémoliséc. Son système fut développé par lui dans
une Méthode facile pour apprendre d chanter la musique, Paris,
1666, in-8°'. C'est cette méthode qui a prévalu en France,
(1) Daniel Hitler , prevot de Sluttgard , né a lleidenheim dans lu
Wurtemberg en 1576,011 mort a S liai bourg en l63S.
(a) Celte édition Ht cilée par Brassard ; s'il ne te trompe point, elle
doit Être la seconde , coi Mcracnno rite l'ouvrage de Lemaire dam le
39*
quant à la syllabe «J on a aussi appelé in le si [j pendant
deux siècles1. On nommait communément la sol misât ion
de Lcmaire, lagamme dusi. •■ '< . -V '>'■ r: '' >■ • '■ .-■<
Si la soimisation par lu sepl"syllabes trouva des par-
tisans en grand nombre, elle eut aussi d'intrépides adver-
saires; le plus ardent fut Bnltfttedt , organiste, à Erfurt1.
Il défendit avec violence le système des hexacordes ; dans
un écrit singulier qui a pour titre: Ut, re, mi, fd,
sot, la, tola Musica et liarmonia œterna, etc.- (toute la musi-
que et l'harmonie éternelle contenue dans àt, re, mi,
fa, sol, la, etc.), Erfurt, a3 feuilles in-4', sans date. Se-
lon lui, la soimisation de Gui était parfaite , et devait
survivre aux innovations qu'on voulait lui faire subir.
Mattheson répondit à Buttstedl aveé sa grossièreté ordi-
naire dans son livre intitulé Dos berckiltzte Orchestre, etc.
(l'Orchestre protégé, etc.), Hambourg, 1717, in-8".
De leur côté, les Italiens ont toujours résisté aux tenta-
tives qu'on a faites pour leur faire abandonner un système
de soimisation qui de tout temps a été défectueux, niais qui
est devenu intolérable dans l'état actuel de la musique- Telle
est la force de l'habitude , que , bien que les inconvéniens
de cette méthode aient été reconnus et avoués par tous les
grands musiciens de l'Italie: aucun n'a eu assez de pou-
voir ou d'influence pour la l'aire abandonner. Le seul
changement qui ait été fait dans ce pays à la syliabatiori
de Gui d'Arezzo , est la substitution de do à at , substitu-
tion dont Doni est l'auteur1, et qui date de 1640* r ■ ' ■■
sixième livre de ton .Harmonie universelle, p. 54' ; or, le litre de Mce-
»enoe a été public tu i636.
(>| L'bistuirc de la soimisation a été donnée arec des détails inté-
ressons dans un livre d'Otbon Gibelins qui a pour-litre i /tuner, jahch
grfmdlleher Btricht non den Fueïbut mui'iealibui, darinn gclianiiclt ivird
von der mmikatîicken Syttabation, oder SolmimUon, nann, l'on item, und
irai End*dieMelhe tr[undii,,. clc. [Notice courte , niais exacie , des syL
label niulicales, uii l'on (route les éjini|iii's tli: l'invriiliini cli- ia iuluiisn-
tion, les noms des inventeur» , etc.) Brème, iGigjinS".
(!) Jean Henri ttuitstedl, né à Biudenleben, prés d'Erfurt, en 1666,
est murt dans cette ville en 1737.
(S) Voyez la Renne matieale , luni. 1, p. 43o.
5o3
Les Allemands et les Anglais ont abandonné toute espèce
de sjllabation , ei solfient par les lettres de l'alphabet. Ih
seretrouventàpcu près, sous ce rapport , dans la situation
des musiciens du moyen âge , après la réforme do Saint-
Grégoire. Leur nomenclature est : G (ut), D {r«), E (mi),
F(/fc),G(«0»MHB(WlO,etH(«-t|).
Quelques auteurs ont proposé de substituer de nouvelles
syllabes à celles ({ui sont maintenant en usage ; le célèbre
composileur Graun, entre autres , a essayé de faire adop-
ter ce qu'il appelait la Daménisation , c'est-à-dire , la suite
des syllabes da, me, ni, po, tu, ta, lie, sous prétexte
qu'ellessont plus harmonieuses que les ancien nés; mais une
pareille réforme serait maintenant sans objet , car co n'est
pas le nom de la note qu'il importe, mais l'existence dp
sept syllabes représentatives des sept sons qui constituent
notre tonalité.
Je dois à. uu des abonnés de cette Revue , l'article suivant
sur les diverses méthodes d'enseignement du solfège et du
citant, qui me semble être une suite naturelle de celui-
ci. Nul n'était plus compétent que lui pour traiter cet ob-
jet, sur lequel il possède, outre des connaissances théo-
riques très profondes, une expérience consommée.
FETIS.
DE L'ENSEIGNEMENT DE LA. MUSIQUE,
f.T ês FjaVncr/MEH de celui dd solfège et du chant;
Réflexion! sur les diverse» méthodes qui ont été proposées
pour cet objet.
Le solfège ou art de lire la musique et celui de la notation
musicale ou art de l'écrire, qui est l'inverse du premier,
sont avec raison regardés comme des parties très essen-
tielles de l'art; car, premièrement, elles servent d'introduc-
tion et forment un préliminaire indispensable à l'étude de
toutes les autres, et en outre elles offrent des difficultés
a* vol. 34
^94
très dignes de iixer l'attention des professeurs. C'est donc
également avec beaucoup île raison que depuis plusieurs
année!), on s'est beaucoup occupé de l'améliora liou des
méthodes propres à leur enseignement ; et l'on doit re-
gardé» comme un véritable service les. perfection ne m en a
qui ont pu être introduits en cette partie, puisqu'ils ten-
dent à faciliter l'accès de ia science et à propager la con-
Si l'on on croit les inventeurs des nouvelles méthodes,
ils- ont la plupart obtenu des succès très brillons, très su-
périeurs, et surtout beaucoup plus prompts que ceux que
l'on obtenait par les anciennes méthodes; cependant ils
né sont point parvenus à détruire l'estime et le crédit dont
jouissaient plusieurs de ces dernières, que leurs partisans
assurent être demeurées très supérieures aux nouvelles,
et dans la comparaison que l'on a même faite de celles-ci
entre elles, on est encore demeuré incertain sur le mérite
de chacune d'elles et sur le choix de celle à laquelle on
devait accorder la préférence.
Cette incertitude et ces contradictions n'ont rien qui
nous é:onne; elles nous paraissent une conséquence iné-
vitable de l'état de la question qui nous semble posée d'une
manière beaucoup trop générale, aucune méthode ne
pouvant, selon nous, quel qu'en soit le mérite, convenir
en toute circonstance , et chacune d'elles devant être ap-
propriée à la nature et au but do l'enseignement.
En effet, relativement à l'objet dont il s'agit, l'enseigne-
ment doit être considéré sous deux points de vue, savoir :
quant à lu quantité et quant à la qualité des élèves.
Quant à la quantité ou au nombre des élèves, il est col-
lectif ou individuel ; collectif, quand il est appliqué simul-
tanément à un nombre indéfini d'élèves le plus souvent
d'un degré d'avancement inégal ; individuel, quand il s'a-
dresse à un seul ou a un nombre limité d'élèves d'un même
degré d'avancement.
Quant à la qualité, c'est-à-dire quant à la capacité**bu à
la portée des élèves, il est transcendant ou élémentaire;
transcendant, lorsqu'il tend il faire franchir auxélèves les
395
plus haules difficultés ; élémentaire, quand il se borne à
leur comniuniijiter les notions cl le degré d'habileté suffi -
sans pour l'usage ordinaire, distinction qui est lu plus sou-
vent inolivée par les circonstances, notamment par la
condition et les facultés des élèves et l'emploi qu'ils se
proposent défaire de leur talent musical. Ainsi, l'enseigne-
ment transcendant convient généralement aux artistes de
profession et à ceux des amateurs en qui l'on reconnaît
une organisation supérieure ;■ renseignement élémen-
taire, au contraire, suffit au plus grand nombre des ama-
teurs, aux individus qui ne sont point destinés à faire leur
profession de la musique, ou à cette classe d'artistes des-
tinés par la faiblesse de leurs moyens a occuper les der-
niers rangs de la profession musicale.
On voit d'après cela que l'on doit admettre quatre gen-
res ou sortes d'enseignement musical.
L'enseignement collectif transcendant qui convient aux
écoles spéciales, telles que conservatoires, maîtrises de
cathédrales, écoles communales, s'il en est, des plus hauts
L'enseignement collectif élémentaire, suffisant généra-
lement pour les pensionnats et maisons d'éducation de
l'un et l'autre sexe, pour les écoles primaires et autres éla-
blissemens du même genre.
L'eijseigncment individuel transcendant cl l'enseigne-
ment individuel élémentaire, dont nous avons fait connaî-
tre précédemment l'application et la destination.
Il est en quelque sorte évident, -d'après celte division,
que les mêmes procédés et les mêmes méthodes ne peu-
vent convenir pour les quatre genres d'enseignement. En
effet la méthode destinée à l'enseignement élémentaire
ne doit avoir ni la même étendue ni la même profondeur
que celle qui est destinée à l'enseignement transcendant;
elle doit omettre un grand nombre d'objets qui excèdent
la portée et les besoins de ceux à qui elle est destinée, et
doit présenterions ceux qu'elle renferme avec une gradua-
tion et dos dévcloppcmens qui paraissent trop minutieux
am sujets doués d'une organisation supérieure. La nié-
596
thode destinée à ces derniers doit, au contraire, ne rien
laisser à désirer pour la profondeur et l'étendue ; elle ne
doit rien omettre, et, tout en les graduant et les disposant
d'une manière régulière, elle doit accumuler les difficul-
tés, de sorte que l'élève qui les aura franchies et s'y sera
familiarisé ne puisse plus rien rencontrer qui l'étonné.
Elle ne peut donc, convenir aux élèves destinés à recevoir
l'enseignement élémentaire.
Ces réflexions s'appliquent à l'enseignement collectif
aussi bien qu'à l'enseignement individuel, et nous remar-
querons en outre qu'à raison de la différence du nombre
des élèves, il doit exister dans la forme des ouvrages des-
tinés à chacun de ces deux genres d'enseignement des dif-
férences de disposition telles que celui qui est approprié
à l'an d'eux doit nécessairement Cire tout-à-fait incom-
mode pour l'autre.
En résumé, iousies ouvrages et méthodes composées pour
renseignement doivent donc difTérer autant pour le fond
que pourla forme, selon qu'ils sont relatifs à l'un ou à l'autre
des quatre genres d'enseignement que nous avons précé-
demment énumérés. Le sentiment de celte vérité a do
intérieurement diriger les auteurs des divers travaux qui
ont été entrepris dans celle vue. On a donc lieu de s'élon-
ner que, dans les jugemens que l'on a portés, et dans ceux
que l'on porte encore tous les jours de leurs ouvrages, on
ait perdu de vue cette première considération. La plupart
des méthodes modernes ont eu évidemment en vue l'en-
seignement collectif; il ne fallait donc pas tes comparer
aux méthodes anciennes qui, a leur tour, n'ont eu la plu-
part évidemment pour but que l'enseignement individuel.
Parmi les premières comme parmi les autres, quelques-unes
oui eu en vue l'enseignement transcendant, d'autres l'en-
seignement élémentaire : il fallait observer cette distinc-
tion.
En un mot, avant de porter un jugement, il fallait
d'abord reconnaître et établir la distinction que uous avons
exposée des dïversgenres d'enseignement; puisaprèsavoir
déterminé auquel de ces genres chaque ouvrage était des-
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397
tiué, examiner s'il possédait les qualités, s'il remplissait les
conditions propres à leurfaire atteindre le but proposé. Par
là, on eût évité uu rapprochement absurde entre des objets
qui n'étaient point susceptibles de comparaison, et les ju-
ge mens ridicules qui devaient être la conséquence de ces
rapprochemens. On n'eût pas vu des personnes et des
sociétés même, d'ailleurs fort respectables, mais tota-
lement étrangères à notre art, placer au-dessus des plus
grands maîtres quelque professeur inconnu, préférer à
leurs savantes leçons le barbouillage d'un écolier, et pro-
clamer des productions ténébreuses comme des titres de
célébrité.
Les méthodes anciennes ont, comme nous l'avons déjà
dit, la plupart pour objet l'enseignement individuel : dans
ce genre, le recueil connu sous le nom de solfège d'Italie,
est et sera à perpétuité l'ouvrage le plus convenable que
l'on puisse employer pour l'enseignement transcendant
c'est le plus propre à être mis entre les mains d'un élevé
destiné à devenir artiste et doué d'une organisation supé-
rieurs. Le reproche que l'on fait à cet ouvrage de manquer
d'ordre dans la disposition des leçons, et de ne point offrir
assez de développement pour les parties élémentaires*, eBl
ici sans objet; des élèves tels que ceux auxquels il confient,
n'ayant pas besoin de toutes ces sortes de ménagement; en
revanche, la beauté de ses compositions, lu style noble **
sévère, et cependant gracieux de ses mélodies , leur beU°
conduite, la riche et savante harmonie dont elles sont poa"^
tenues, sout des avantages que rien ne peut coinpc«seC' g
qui placent à jamais cet admirable recueil au premief raW°
des classiques en ce genre. On peut y joindre avec aV*n.
tage les solfèges plus modernes d'Aptile, de Cwâeen*"^
de Danzi surtout, et quelques autres que j'omet» P
DaSns l'enseignement individuel élémentaire, le ■S°t^^[
de Rodolphe a acquis et conserve jusqu'à ce jour une »a
méritée à plusieurs égards; mais la hauteur à laqueUe
écrites ses leçons les rend très fatigantes pour le pUtB SrU cfl
nombre des élèves; ou doit donc approuver lu propre»
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396
que commencent à donner plusieurs professeurs aux sol-
fèges île M. Félis et de M- Garandé, qui, avec les mêmes
avantages, portés à un plus haut degré, n'offrent pas le
môme inconvénient.
Les ouvrages que nous venons de citer seront toujours
précieux pour renseignement individuel de l'un ou de
l'autre genre ; mais il ne faut pas beaucoup d'expérience
pour reconnaître qu'ils nu sont nullement propres à ren-
seignement collectif. C'est ce dernier genre que semblent
avoir eu en vue la plupart des m él h odes modernes, qui,
nous devons l'ajouter, se rapportent presque toutes à l'en-
seignement collectif élémentaire. C'est en ce sens que ri-
valisent entre elles la méthode d'enseignement mutuel de
M. Wilhelm, celle de AI. Massimino, celle du méloplaste,
proposée par RI. Galin et développée par ses élèves, MM.
Jue, Le Moine et de Geslin, et celle de la lyre harmonique
de M. Pastou. Notre objet n'est point ici de comparer ces
méthodes entre elles, mais seulement de faire connaître
la cathégorie à laquelle elles appartiennent; nous la h son
aux personnes intéressées à faire un choix le soin d'eu
faire l'examen et la comparaison.
Une seule méthode, la première eu date parmi les mé-
thodes modernes, paraît avoir eu pour but exclusif rensei-
gnement collectif transcendant : c'est celle que M. Choron
a publiée sous le titre de Méthode concertante transcendante,
et qui sert de base a renseignement dans l'établissement
qu'il dirige. Cette méthode destinée à former des artistes
offre en effet une graduation remarquable dans ses exer-
cices, depuis les traits les plus simples jusqu'aux difficultés
les plus extraordinaires, et par cela même elle serait tout-
à-fait déplacée dans un enseignement ordinaire, ainsi que
M. Choron déclare l'avoir reconnu lui-même d'après le
raisonnement et d'après sa propre expérience ; comme
nous croyons aussi que les méthodes dont nous avons
parlé précédemment, d'ailleurs très bien appropriées à
leur objet, seraient trop lentes et Irop peu efficaces pour
uu enseigne meut spécial.
Noua terminons ici ces réflexions dans lesquelles nous
DigitizGd t>y Google
^99
n'avons pas eu, comme on le voit, pour objet d'établir
aucune comparaison, de former par conséquent an héuè-
fice d'un seul des jugemcns également injustes et ofTeu-
sans pour les autres, pendant qu'il est possible d'accorder
satisfaction à Ions ou du moins à plusieurs. Mais ici noire
intention a, au contraire, été de faire remarquer; comme
«lit Montaigne, en quoi différent les choses qui se ressemblent,
d'indiquer l'ordre qui règne entre elles, et de mettre cha-
cun à portée de faire, à l'occasion de chacun de eus objets,
un choix et un usage analogue à ses besoins.
Article, communiqué.
BIOGRAPHIE.
Cerone ( Dominique-Pierre ) . prêtre, lié à Bergamc eu
i366, lit ses études dans cette ville et y apprit la musique.
En i5ga il se rendit eu Espague, où il devint chapelain de
Philippe II etdeson successeiir.il nous apprend que ce fut
dans ce pays qu'il conçut le plan de son grand ouvrage mu-
ta musique , intitulé Et Meiopco , qu'il écrivit en espagnol ,
mais qui ne fut publié que quelques aimées après son re-
tour en Italie. Il ne quitta l' Espagne que pour se rendre
à Naples, où il fut nommé musicien de la chapelle royale.
On ignore l'époque de sa mort. On a de lui : I. 'Rrgole pet-
it canto ferma, Naples, 1G09. II. E/Mclopcoy Maestro, trac-
tado deMusica theorïca y pratica , Naples, ifii3, iu-fol. , ou-
vrage important, dans lequel on trouve d'excellentes
choses, surtout dans les livres 5*, 4'. et 5', qui traitent
ilu plain-chant, u'jia* i4"eti5', relatifs au contrepoint,
a la fugue et aux canons , cl enfin dans le 17', qui
explique les temps , les modes et les prolatious. Tout ce
qui concerne les intervalles y est clair et beaucoup plus
satisfaisant que ce qu'on en avait écrit auparavant. Il est
vrai que pour découvrir ce qui est estimable dans ce livre,
il faut le chercher dans un fatras d'inutilités, écrites d'un
style prolixe et fastidieux; mais, je le répèle, si l'on a ce
Digitizod b/ Google
courage, on en est récompensé par l'instruction solide
qu'on peut y puiser. Au mérite réel qui le distingue, ce
livre ajoute malheureusement celui de la rareté; il est
si difficile (le s'en procurer des exemplaires, que le P.
Martini en avait payé un 100 sequius, à Naples, où il fut
publié. Walther (Musik. lexic.) dit qu'il fut réimpriméà
Anvers, en i5io. Cette édition me parait supposée; si elle
existe , elle est encore plus rare que la première. Cerone
a écrit aussi de la musique d'église, qui n'a point été pu-
bliée. Il dit (Metopeo, p. 197), que plusieurs de ses com-
positions ont été chantées à la chapelle royale de Madrid
en i5g6. 11 n'est peut-être pas inutile de rapporter ici des
faits qui peuvent faire douter que Cerone soit le véritable
auteur du Metopto. D'abord , il parait peu croyable qu'un
homme qui aurait possédé la somme de connaissances
musicales répandues dans ce livre , 'n'eût été qu'un simple
musicien h Naples, dans un temps où l'école napolitaine
ne comptait que des maîtres d'un ordre inférieur. En se-
cond lieu , te traité de plain-chant publié par Cerone cinq
ans avant le Metopeo n'est qu'une œuvre vulgaire , où l'on
ne trouve que des lieux communs répandus dans une foule
délivres publiés sur la même matière, plus d'un siècle
auparavant; ; enfin, et ceci parait presque décisif, Zarlin
nous apprend , en divers endroits de ses écrits, qu'il avait
composé un traité général sur la musique intitulé Melopeo
0 Musico Perfcllo; voici ce qu'il en dit à la fin des Soppti-
menli Musicali ( page 35o ) : « Havendo parlato hora à
« sofficienza deli' ultima parte délie cose che considéra in
• universaleet in particolare la musica, e délia ftlelopiea,
11 un altra fiata vederemo quelle cose che app a r ta 1150110 al
0 Mtlopeo, 0 Masico Perfelto. Laonde rendendo gratie im-
1 mortati a quelle che habita col suo Figliulo nostro re-
■1 dentore et cou loSpirito santo céleste Regno; di h ave r mi
" concesso lantagracia, ch' io habbiaposto inluce queste
«mie fatiche, oltra gli altri doni ricevuti da sua Maes-
«tà, spero che di nuovo mi sarà da lei concesso ch'
« ïo potro satisfarc al debito , che già molto tempo hô
« contralto coi: cliiascheiluuo slndioso, poil eu do in luce
Digitized by Google
4oi
«hormai i promess i venticinque libri De tU Muiica ,
<• fatti in lingua latina ; con quello ch'io nomioo
tMelopeo, 6 Masico perfetlo. • (Ayant parlé maintenant
suffisamment de la dernière partie des choses qui concer-
nent la musique et la mélopée , tant en particulier qu'en
général, une autre fois nous considérerons ce qui appar-
tient au mélopéisle, ou musicien parfait. Il ne me reste plus
qu'à rendre des actions de grâces à celui qui habite dans
le royaume céleste avec son fils, notre rédempteur, et le
Saint-Esprit, pour m'avoir permis de mettre au jour le
fruit de mes travaux, outre les autres dons que j'ai reçus
de lui. J'espère qu'il m'accordera de nouveau de satisfaire
à l'engagement que j'ai pris depuis long-temps envers les
hommes studieux, en publiant les vingt-cinq livres que
j'ai promis du traité de Re musica, faits eu langue latine,
avec celui que je nomme Mttopeo o Musico perfetto.) Or, ce
grand travail de Zarlin n'a point été publié pendant sa vie,
et le manuscrit ne s'est pas retrouvé depuis. N'y a-t-il pas
quelque vraisemblance qu'il a passé dans les mains de
Ccrone, qui l'aura traduit en espagnol, parce qu'il lui
était plus facile de passer pour en être l'auteur en Espagne
qu'en Italie? et ce qui semble confirmer cette conjecture,
c'est l'excessive rarelé du Metopeo dans ce dernier pays,
qui prouve que toute l'édition avait été envoyée dans la
Péninsule.
NOUVELLES DE PARIS.
THEATRE ROYAL ITALIEN.
T»nc>«Di. — Débuts de M-< Itaoïn.
Dans l'état désespéré du Théâtre-Italien, un début sans
importance n'est pas propre à ramener la foule, à moins
qu'il ne soit accompagné de quelque nouveauté ; mais ces
nouveautés n'existcnl pan : car on ne peut donner ee nom
Di-gitizod by Google
403
aux nauséabondes compositions ries imitateurs de Rossini.
Quel intérêt peut exciter un opéra qui porte le nom de
Paccini, de Vaccai, de Sapienza, de Donizclti, et autres ?
Ne sait-on pas d'avance tout ce qu'on y trouvera ? Encore
si cette musique dépourvue d'idées se recommandait par
des formes correctes et élégantes, ou par une certaine
force d'harmonie, on pourrait trouver quelque plaisir à
l'entendre. Anfossi n'était point un homme de génie; mais
sa musique était bien faite, et il a mérité les succès qu'il
a obtenus. Dans l'école allemande, Z.umsteeg et Winler
ne brillent point parles idées; Mais leur harmonie réveille,
leur instrumentation est piquante, et cause du moins une
sorte de plaisir qui fait oublier le peu d'originalité des
mélodies. Mais les Mercadante, les Paccini, les Vaccai, etc.,
qui ne vivent que de réminiscences, ont toute la négli-
gence de l'homme de génie qu'ils imitent, et ne savent
point comme lui racheter ce défaut par des cantiiènes
charmantes et des effets inattendus.
Cependant faut-il donc entendre toujours Tancrcdt, la
Donna del Lago, Otelto, 4a Gazia, il Barbiere et Semiramidt,
dont nous sommes saturés ? Nous savons tous ces ouvrages
au point que de nouveaux chanteurs ne peuvent mémo
plus les rajeunir. Quel est donc l'avenir à l'une adminis-
tration du Théâtre-Italien à Paris? Je n'ose le dire, mais
on me devine. Il est des maux contre lesquels il n'y a point
de remède connu. L'inconnu, le nouveau musicien créa-
teur qui pourrait raviver notre goût, se cache encore, si
toutefois il est né.
& son défaut, la privation d'un Opéra-Italien pendant
quelque temps serait peut-être le seul moyen de retremper
notre fantaisie pour ce genre de spectacle. Ou assure que
le nouveau directeur, M. Laurent, y a songé, et qu'il vient
de se rendre à Londres, dans l'intention d'y traiter de
l'administration vacante du Théâtre-Italien. Il y condui-
rait toute la troupe actuelle de Paris, au mois d'avril pro-
chain, el Levasseur seul nous resterait pour rentrer à
l'Opéra. On assure que M. Ilossini doit être du voyage, et
qu'il s'est engagé à écrire un ouvruge nouveau, moyen-
Digitizcd by Google
4o3
nanl une somme considérable qui lui sera payée par l'ad-
ministration. D'après ce projet, les mêmes chanteurs fe-
raient alternativement le service des théâtres de Paris et
de Londres. Ce mode est peut-être le plus convenable
pour entretenir à Paris le goût de la musique italienne et
pour indemniser l'administration de ses dépenses. Reve-
nons au début de M"" Rob ni.
Cette dame est douée d'une vuix de contralto assez belle :
mais elle paraît fort Inexpérimentée dans l'art du chant ,
et assez peu musicienne. Elle a produit peu d'effet dans le
rôle de Tancrède,ses intonations peu sûres., sa vocalisât! ou
molle et incorrecte , jointes à une émotion excessive n'é-
taient pas propres à faire oublier le charme que M"Pasta
répandait sur ce rôle. M™ Robert n'est pas d'un âge à don-
ner des espérances pour l'avenir. Elle est ce qu'elle sera
toujours, c'est-à-dire quelque chose de moins que mé-
diocre. Cependant, il est juste de dire qu'elle a montré
quelque énergie dans le duo // vivo lampo, et que le public
l'a applaudie dans ce morceau.
Uonzelli jouait pour la première fois le râle à'Argirio
que nous avons toujours vu représenter par Bordogni. Il y
met plus de chaleur que son prédécesseur; il le joue
mieux, mais il fait quelquefois regretter sa pureté par su
manie de pousser des cris. Je sais que ces cris sont les signes
certains d'une voix usée, qui ne peut plus chanter avec
douceur; mais s'ils sont la conséquence d'un mal réel , ils
l'augmentent chaque jour. Douze 11 i est jeune encore; le
repos pendant quelques mois lui rendrait sans doute le
velouté que sa voix a perdu.
Je ne puis rien dire de M1" Garcia, dont l'état de santé
parait être déplorable, et dont le chant est en raison de la
santé; mais je dois des éloges à Lcvasseur pour la manière
dont il a chanté le rôle d'Orbassan. La belle voix de ce
chanteur , son aplomb et son goût font un fort bon effet'
dans tous les morceaux : il ne lui manquait que de la
confiance; ses succès cl les applandissemcns des connais-
seurs doivent lui en donner. Il parvient même souvent à
4o4
vaincre les préventions injustes de certains dilettantis
contre tout ce qui n'est pas italien.
FÊTIS.
THÉÂTRE ROYAL DE L'OPÉRA-COMIQUE.
M"" Hirié, élève de l'École royale, et de la classe de
M. Ponchard, vient de débuter à ce théâtre avec quelque
succès. Le premier rôle dans lequel elle a paru est celui de
Rose-d' Amour dans le Petit Chaperon : l'émotion insépara-
ble d'un premier début l'a privée d'une partie de ses
moyens dansle premier acte de cette pièce; mais lorsqu'elle
eut reprit un peu de confiance, on a du s'apercevoir
qu'elle chante juste et avec goût, quoique le timbre de sa
vois soit un peu faible. Son second début, dans le rôle du
page de Jean de Paris, lui a été plus favorable. Elle a par-
ticulièrement bien chanté le duo Rester à la gloire fidèle.
Enfin, dans le Nouveau Seigneur, elle s'est fait remarquer
dans tous les morceaux et surtout dans les couplets : Oh !
vous axez des droits superhes. M"' Hirté n'est pas une canta-
trice du premier ordre ; mais elle chante convenablement
pour l'emploi qu'elle a adopté. Je lui conseillerai seule-
ment de se défaire d'un grasseyement assez prononcé qui
gâte soncliant. Cette jeune personne est engagée au théâtre
des Nouveautés.
— La reprise de l'Amant et le Mari, opéra-comique en
deux actes, musique de M. Fétis, a eu lieu le ao de ce
mois. Ponchard, Huet, Cavé, Henri, et Mesdames Bou-
langer, Ponchard et Paul ont fort bien joué et chanté.
Néanmoins, cette pièce qui avait eu du succès dans la
nouveauté, et qui avait eu ceut trente représentations, a
été sifllée lorsque le riieau s'est baissé. L'Auteur s'attendait
" à expier ainsi l'indépendance qu'il a prise pour règle dans
la rédaction de la Revue Musicale.
— L'administration de l'Opéra va éprouver quelque
embarras dans son répertoire par le départ imprévu de
■igitizod t>y Google
4o5
M'" Cinli. Celte dame, qui vient d'épouser Damoreau,
l'un des premiers acteurs du théâtre de Bruxelles, dont
les débuis à l'Opéra ont été annoncés dans la Renie musi-
cale , avait depuis quelque temps des discussions avec le
directeur pour ses intérêts et pour ceux de son mari; elle
parait avoir voulu mettre l'administration dans la néces-
sité de lui céder en celte circonstance. Une lettre adressée
par elle, avant son départ, à un journaliste, pour lui ex-
poser ses griefs , a été publiée. Il n'entre pas dans notre
plan de nu us occuper de ces sortes de discussions; mais
nous regrettons qu'une cantatrice si distinguée, et qui
contribue tant à l'amélioration du système de chant à
l'Opéra, se soit crue dans la nécessité de recourir a la fuite
pour obtenir justice. H"* Cinti avait un rôle dans l'opéra
de ta Muette de Portici, qu'on répète en ce moment; nous
iguorons quelle sera la nouvelle distribution.
Ou dit que M"* Démery est engagée à ce théâtre; mais
plusieurs mois se passèrent avant qu'elle puisse débuter.
On sait d'ailleurs que la vocalisation très lourde de cette
actrice ne la rend pas propre à chanter les rôles qui ont
été écrits pour M1" Cinti. Un malin génie semble planer
sur nos théâtres.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Behun, m novembre. Le célèbre violoncelliste Bernard
Kombcrg donne maintenant ici des soirées de quatuors et
de quintettis.
Marie vient d'être traduite en allemand et exécutée sur'
le ihéâlre de Kœnigstadl sour le titre de l'amour secret
(die rerbogene tiebe\ Cet opéra a obtenu un grand succès.
Un journal de Berlin, en parlant de la parlilion, dit qu'elle
a été écrite par Hérold, jeune compositeur allemand qui
rit d Paris. Nous pouvons assurer le journaliste de Berlin
qu'ilérold, en dépit de son nom germanique, est Français
et des plus Français.
4°6
Un autre journal de Berlin, a propos de la représenta tion
dos Fvitttrès versées sur le théâtre de Krcnigstadt, dit que
Buïcldieu est devenu le compositeur favori (Uebling c-om-
panist) des Allemands, comme il l'est depuis long-temps
des Français. • Boïeldieu, ajoute ce journaliste, ne s'est
■ jamais écarté du véritable genre de l'Opéra-Comique :
■ c'est ce qui fait la base de l'édifice de gloire qu'il s'est
* élevé pour la postérité, et le piédestal de la statue que
i ses contemporains lui ont érigée, n
— On écrit de Francfort : H"* Sontag, qui a terminé
ses représentation* sur le théâtre royal do Berlin, vient
d'arriver ici. Nous croyons qu'avant de continuer son
voyage À Paris, elle va donner quelques représentations
dans notre ville.
— Nous recevons deux jugemens différons sur le Pielro
d'Âlbano , nouvel opéra de M. Spohr. L'un des deux cor-
respondana, Allemand du nord, se montre enthousiaste
du poème, principalement à cause dos contrastes et des
situations fortes qu'il a fournis au musicien. Le sujet de
cet ouvrage appartient au même ordre d'idées que le
Faust de Goethe, à part le talent du poète. Pietro est un
magicien qui, par son art diabolique, rappelle à la vie
une jèunc fille, dont l'enterrement entre comme élément
principal dans l'introduction du premier acte. Ou vante
beaucoup la musique de ce morceau, où un joyeux chœur
d'éludians contraste avec les chants funèbres du convoi.
On cite aussi particulièrement une situation du deuxième
acte, oii la jeune fille qui vient d'être ressuscitée se plaint
à son amant d'avoir été arrachée au bonheur des deux :
la terre, même avec l'amotir, lui parait insupporlable. Le
.désespoir du jeune homme, en entendant ces tristes aveu*,
est a son comble, et le musicien appelle à son secours,
pour l'exprimer, loules les puissances des instrumeus à
vent de l'orchestre. Les instrument i> archet armésde sour-
dines accompagnent seuls le chant de la morte ressuscité^.
On louo aussi un quatuor avec chœurs. Un Allemand du
midi dit que cet ouvrage n'a pas eu beaucoup de succès à
cause du sujet devant leqnelles Allemands même reculent.
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I
407
11 s'accorde en générai avec le premier correspondant sur
le mérite île la musique, mais îl ne va pas comme cclui-
ci jusqu'à assurer que cette partition est le plus beau litre
île gloire de Spolir.
ANNONCES.
Variations brillantes pour le piano-foj-ié sur le choeur
favori du Crociato in Egitto de Meyebeer, dédiés à M. Alex.
Aguado, cl composées par P- Albeniz. Prix : 4 fi"- So c. A
l'aris , au magasin de musique de Paccini , boulevard lia -
Cet ouvrage a été composé pour des élèves d'une force
médiocre, et n'offre conséquemmenl que des difficultés
faciles à vaincre; mais il est agréable. M. Albenitz s'est fait
connaître avantageusement par d'autres compositions.
— Deuxième qaartttto da Caméra , composé par Itossini
et dédié par lui à M. Aguado. Prix: 4 fr. 5o cent. Paris,
i'acini, éditeur des opéras (le Rossini, boulevard des Ita-
— Troisième qaartttto da Caméra, composé par Itossini
et dédié par lui à madame Carmen Aguado. Prix: 4 fr.
5o cent, chez le même éditeur.
On se rappelle le succès qu'a obtenu dans le monde le
premier Quartette du célèbre Maestro : Bidiamo, Cantiamo,
Ceux-ci sont destinés à y faire suite, et à former un ré-
pertoire pour les amateurs que le défaut de nouveautés
dramatiques oblige à redire les mômes morceaux depuis
long -temps. Les premières paroles du second quartetto
sont : in Giorno si bctlo, et celles du troisième, O giorno sereno.
Tout ce qui sort de la plume d'un compositeur tel que
Itossini a droit de fixer l'attention; nous analyserons ces
morceaux dans le prochain numéro.
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4<>8
— Solfèges progressifs, avec accompagnement de piano ,
précédés des principes élémentaires de la musique, dis-
posés dans l'ordre le plus naturel et le moins compliqué,
par F. Fétis, professeur de composition à l'Ecole royale de
musique , bibliothécaire de cet établissement , et rédac-
teur de la Revue musicale. Pris : i!\ francs.
A Paris, chez l'auteur, rue Bleue, u° 3; Janet et Cotelle,
éditeurs de musique , rue de Richelieu , n°ga , près la rue
Feydeau, et rue Saint-Honoré, près l'hôtel d'Àllgre ; et
chezPh. Petit, rue Vivienne, n- 18.
DU CHARLATANISME DES MUSICIENS.
On je me trompe fort, ou le titre de cet article a déjà
l'ait frémir quelques-uns de mes lecteurs. A quoi pense ce
fou, ou plutôt ce méchant homme, diront-ils ? Quel démon
le pousse à révéler nos secrets? Pourquoi veut-il mettre
le public dans la cou fi J en ce de nos faiblesses, et qu'espère -
t-il en tirer pour lui-même? £h! Messieurs, rassurez-
vous : H ne s'agit point ici d'une satire personnelle, maïs
d'un tableau de quelques ridicules, où vous serez libres
de ne point vous reconnaître. Aucun do vous n'est préci-
sément l'homme dont je veux parler, et si, par hasard,
vous découvrez quelque trait de ressemblance, ce n'est
pas moi qu'il faut en accuser. Si je nomme quelqu'un,
j'aurai soin de le prendre dans des temps assez éloignés
pour qu'il ne puisse se plaindra. Quant au reste, supposez
que je vous montre des portraits de fantaisie, dont les
originaux n'existent point.
Far un penchant naturel pour le merveilleux et l'extra-
ordinaire, les hommes ont toujours dédaigné ce qui n'est
que raisonnable, simple et vrai. Telle est leur disposition
à cet égard que, même avec la certitude d'Être trompés,
ils courent au-devant des illusions. L'existence de ce pen-
chant funeste dans la multitude a fait jusqu'ici la fortune
des fourbes de toute espèce. L'histoire est remplie des
tours de passe-passe des charlatans de politique, de reli-
gion, de môrale, et des maux affreux qu'ils ont causés. Le
charlatanisme des gens de lettres et des artistes a du moins
cet avantage qu'il n'est que ridicule, et que, s'il procure
quelques triomphes à la médiocrité sur le vrai mérite, la
postérité rétablit les choses en leur place, et venge les in-
justices des contemporains.
A l'égard de la musique, son histoire nous montre des
charlatans dans les temps les plus reculés. Les fictions
d'Orphée apprivoisant les animaux féroces, et d'Amphion
a* vol. 35
Digitized by Google
4io
bâtissant tes murs de Thèbes au son de la lyre, ont pris
naissance dans la vanité d'an peuple jaloux de donner une
origine divine à tout ce qui se rapportait à lui. David chas-
sant le Diable avec sa harpe, et Timothée excitant ou cal-
mant h son gré la colère du vainqueur de Darius, sont
des contes de nourrices, sur lesquels des hommes graves
ont cependant disserté longuement. Il s'est aussi trouvé
des écrivains qui ont répété sérieusement pendant plu-
sieurs siècles l'histoire du charlatanisme de Pythagore qui,
après avoir écouté les sons produits sur l'enclume par les
marteaux de plusieurs forgerons, fit peser ces marteaux
pour calculer les rapports des sons; histoire qui montre
une ignorance grossière des lois de la physique.
Le charlatanisme qni consiste à s'attrilffier le mérite
d'autrui n'est pas plus nouveau. Néron, qui mettait sa
gloire à passer pour un habile musicien, en usait soutint,
soit en s'emparant des ouvrages dès musicïens de'Çfbfes-
sion, qui n'osaient se plaindre, soit en se mêlant à leurs
concerts et prenant pour lui les a p p la u di^fémenV "ÇU'on
leur donnait. Il fut aussi le 'premier qui fit usage" de ces
upplau disse urs à gages qua nous nommons des claque an ;
la seule différence entre lui et nos artlftcs, c*eff que ceux-
ci paient les applaudissëmeiis, et qu'il faisait mourir qui-
conque gardait le silence. 'A " ■' J ^.•*.fc*WlI'
Le seizième siècle, si fertile en grands hommes dëTbut
genre, vit naître beaucoup d'habiles musiciens. C'est dans
ce siècle que la théorie de l'art musical se perfectionna,
et que les bases de celle qu'on suit gériëValemenrr' aujour-
d'hui furent posées. C'est dans ce même siècle que t'opéra
fut inventé; -c'est enfin dans ce siècle que Palestrinâ, tti-
renzio, Monteverde, Zarlin, et1 tant d'autres quIfrTsff&it
trop long de nommer, ont donné à la musique une impul-
sion dont elle se ressent encore. Mais s'il s'est trouvé alors
des hommes de génie, des inventeurs qui suivaient par
instinct leurs heureuses inspirations/ il y eut aussi bon
nombre de gens qui, dans l'impossibilité de rien imaginer,
égayèrent de déprécier les cn'efe-d'œuvre qu'ils voyaient
éclorc, affectèrent de leur préférer l'ancienne musique
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* 4'*
des Grecs, dont ils ne pouvaient avoir d'idée, et prétendi-
rent la tirer de l'oubli pour la substituer à celle de leurs
contemporains. Les écrits de ce temps sont remplis de
rêveries, sur cette matière, et d'us échafaudage de fausse
science, qui trouvait alors beaucoup de partisans et qui
nuisait aux progrès de l'art. Des hommes recommanda -
bles, tels que Vincent Galilée et Zarlin même, n'étaient
pas étrangers à ce charlatanisme qui gâte souvent leurs
ouvrages, si utiles d'ailleurs. Dgni, qui possédait un savoir
réel, fut le plus ardent champion de cettëTSiuslque pré-
tendue antique, dont El n'aurait p\t citer une phrase, et
passa une partie de sa vie à la louer aux dépens de celle
des grands artistes qui brillaient alors en Italie.
A peine était-on devenu raisonnable sur ce point, qu'un
autre genre de charlatanisme. 'prit naissance, et fit encore,
des réputation» usurpées. Dés long-temps les principes
de l'harmonie avaient été réduits dans les écoles à des
considéra lions fort simples. Les mouvemens des inter-
valles avaient surtout attiré l'attention des professeurs; et
comme eeynouvemeus se bornent à un petit nombre, on
eu avait conclu des règles de pratique qui avaient l'avan-
tage, d'être faciles à apprendre, et de donner aux composi-
teurs un style pur et élégant. Tout à coup Rameau, qui
lui-m&u,e ,ét>iit devenu bon musicien par cette méthode,
imagina de baser la théorie de la musique sur des phéno;
menés de physique; et, quoiqu'il sût à peine l'arithméti-
que , appela à son secours le calcul et les procédés de la
géométrie pour bâtir un système qui a failli perdre la mu-
sique en France. Des chiffres furent entassés par lui , dans
des livres obscurs, pour élablir entre les intervalles des
proporlions arithmétiques et géométriques , et pour dé-
duire ces proportions de la résoouance d'un corps sonore
grave.
Dès qu'il fut question d'appeler les mathématiques au
secours de la musique s\\o us les mathématiciens se crurent
musiciens nés , et se mirent à discourir hardiment sur un
art dont ils n'avaient pas les premières notions. D'Alcra-
bert, qui ne pouvait distinguer une tierce majeure d'une
4>a : •
mineure , écrivit des élémeus de musique d'après le? prin-
cipes de Rameau ; La Baillière, Jamard, Serre de Genève,
qui étaient à peu près dans le même cas, entrèrent aussi
en lice. Ce qu'il y eut de singulier, c'est que Rameau, mé-
; content de ce que ses commentateurs n'adoptaient pas
toutes ses idées , les tança d'avoir voulu corriger son ou-
vrage, et que d'Alembert, qui avait fait un livre pour dé-
montrer l'évidence du système de Rameau, finit par écrire
que ce système est erroné, et que le corps sonore ne
donne par lui-même aucune idée de proportion.
Ce n'oit pas tout; J.-J. Rousseau, qui n'était guère plus
géomètre que musicien, mais qui avait un goût naturel
assez pur, prit pour base de sou Dictionnaire de Musique.
les folies du système de la basse fondamentale, tout en lui
préférant, dit-il, le système deTartïni, qu'il ne comprenait
pas plus, et qui ne vaut pas miens. Un pédant qui n'était
ni musicien, ni calculateur, ni homme de goût; mais qui.
ayant feuilleté les livres de Rameau, se persuada qu'il était
devenu grand harmoniste-, quoique , de son aveu, il ne
connût pas une note a quarante ans; ce pédant, nommé
l'abbé Roussier , enchérit encore sur les autres charlatans
de science, et entassa chiffres sur chiffres pour démontrer
que Durante, Léo, Pergolèse et Jomellt, étalent. dr pauvres
gens qui n'entendaient rien à l'art qu'ils cultivaient, et
que s'ils trouvaient des chants heureux et de bonne har-
monie, c'étaitpar un instinct aveugle et irréflichi. Le bon abbé
méritait d'être mis aux Petites-Maisons, et cependant il se
fit de chauds partisans, devint l'oracle d'une secte, et acheva
de tourner la tete aux musiciens français.
Lu musique est à la fois un art par ses résultats et une
science par ses procédés. Comme science, elle exige, outre
les' qualités naturelles, une élude, asses longue, non parce
qu'elle est difficile à comprendre; mais parce qu'il faut quo
les connaissances qu'on y acquiert tournent en habitude
pour être utiles. De là, la nécessité d'entreprendre cette
étude de bonne heure, afin de n'avoir plus à s'en occuper
lorsque l'imagination commence àse développer. Lo de-
voir d'un professeur est de cacher à ses élèves les dégoûts
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4-5
qui naissent quelquefois deadiffloullés qu'on éprouve; mois'
loin d'en user ainsi, il semble que la plupart des harmo-
nistes prennent plaisir à présenter la science comme un
dédale inextricable, soit qu'ils veulent se faire un mérite
de leur savoir; soit qn'îls craignent de voir s'augmenter le
nombre des initiés. Bien de plus curieux que l'air de mys-
tère dont ils s'enveloppent lorsqu'ils sont interrogés sur
cette matière. Oti: dirait qu'il s'agit de quelque science
occulte, où toutes les ressources de l'esprit humain sont à
peine suffisantes.- Écoutons le langage que Fus met danw
la bouche de Félève et du maître dans son Gradus'adPitr-
titxssam.
, .. .. .■ : l'itidfffc
■ .le viens auprès de vous, monsieur, dans le dessein
• d'apprendre la composition de la musique, i : " " '
-., .. ... , .... . . J^'H^frtj/.
■ Tu ne sais pas, mon ami, à quoi tu t'exposes t tu ne
» connais pas, sans doute, l'étendue immense de cet océan
« qneto veux parcourir. Quand *u parviendrais dfdge de Net-
vtor, la- aurais encore beaucoup d travailler. Je sais que tous
• les étatsont leurs difficultés; personne ici bas «'est exempt
« de peines; mais je crois que Téta t de compositeur en
« offre plus que tout autre. » 1
Le vieux Fux, malgré sa bonhomie allemande, n'était
pas, comme on voit, exempt du charlatanisme dont jevîeris
lie parler. <■-■'■" ■ »iu
S'il est des charlatans de savoir, il en est aussi d'igne^-
rance. Bien que ceci ail l'air d'un paradoxe. H suffit de je-
ter un regard sur ce qui se passe maintenant pour .être
convaincu que je n'avanceWeu qui ne soit vrai. Louis Kl V
appelait le duc d'Orléans un fanfaron de vices; ce genre de
fanfaronnade qui, S bus la régence, donna le ton à la cour,
était alors de bon genre; aujourd'ui il est de bon goiît qu'un
musicien ne sacherieu de ce qu'avaient appris f (rende! ,
Haydn et Mozart; et l'on ne peut giière passer pour homme
de génie, à moins qu'on ne se moque ouvertement des
entraves auxquelles ces bonnes gens avaient la simplicité
de se soumettre. Hais comme il n'est pas possible qu'un
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4'4
homme de génie n'acquière par lui-même des connais-
sances positives un ticrivaut beaucoup, on affecte de mettre
dans ses ouvrages de grossiers solécismes, afin de conserver
l'air d'indépendance .qui sied à un beau talent naturel.
Qu'est-ce que cela, si ce n'est du charlatanisme?
It est une autre espèce de charlatans, qui, sans nier l'uti-
lité du savoir, affirment que rien n'est plus facile à acqué-
rir, et s'engagent i le communiquer en un tour de main,
comme s'il ne s'agissait que de la marche du jeu d'échecs
ou des règles du domino. Que de livres remplis de ces pro-
messes trompeuses et vides de oe qu'on y cherche 1 Que
d'écoles ouvertes avec éclat, et bientôt désertées par les
. dupes que le charlatanisme avaient faites! Et qu'on ne croie
pas que, séduits par une apparence d'amélioration de mé-
thode, les professeurs se sont fait illusion sur leurs préten-
dues découvertes ; il n'en est pas un qui nie sache qu'un
long usage peut seul donner la sorrpltsse d'organes qu'exige
la pratique d'un art difficile; maison veut se faire un nom,
bien qu'on soit né pour rester dans l'obscurité; on veut
faire sa fortune, et les progrès du l'art et l'intérêt des élèves
sont les dernières choses dont o» s'occupe. ,
II est possible, sans doute, de perfectionner les méthodes
d'enseignement; car de toutes les sciences, la musique est
celle dont la langue est ta" plue défectueuse. C'est à cet
usage que devraient servir les académies; mais les acadé-
miciens, qui aiment le repos, assurent qu'elles sont in-
stituées pour ne riendaire. Cependant l'assentiment d'une
réunion d'artistes distingués, -serait un motif de sécurité
pour le public, lorsqu'il s'agit d'innovations quelconques :
on ne doit donc pas être surpris de voir que les auteurs de
méthodes nouvelles les soumettent à l'examen des sociétés
savantes. Malheureusement il y a dans les sociétés de cette
espèce une. sorte de charlatanisme qu'on appelle l'esprit
de corps, l'our peu qu'un des académiciens se soit occupé
de l'objet dont il s'agit: pour pou qu'il ait écrit ou publié
quelque chose de semblable, ses confrères croient qu'il est
de leur humeur de (.'opposer à la publicité de ce qui pour-
rait être meilleur, et toutes les mesures sont prises pour
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4i5
étouffer la vérité. Voici, à ce sujet, une anecdote dont je
garantis l'authenticité. -
Dans un pays, dont je ne me rappelle pas le nom, un
professeur, retiré dans une ville de province, avait remar-
qué les imperfections du système d'harmonie générale-
ment adoplé, et s'était attaché à les faire disparaître dans
qn ouvrage élémentaire dont la composition était le fruit
de plusieurs années de travail et de ré flexions. Convaincu
de l'importance de ses découvertes, mais incertain de la
manière dont elles seraient reçues dans le monde, il crut
devoir adresser son manuscrit à la première académie du
pays, et lui demander de l'examiner et d'en faire un rap-
port. Une lettre fort polie du secrétaire perpétuel vint lui
apprendre qu'il s'était trompé dans la marche qu'il avait
suivie; que les réglemensde l'Académie ne lui permettaient
pas d'examiner un ouvrage nouveau , a moins qu'elle ue
fût invitée 'à le faire par .le ministre, et qu'on l'invitait à
faire retirer son manuscrit. Notre professeur est entêté ; il
écrivit au ministre pour lui rendre compte des farts, et,
quelques mois après, il en reçut cette réponse: D
■ D'aprèê'TOtre désir, monsieur, j'ai demandé à l'Acadé-
« mie un rapport sur -votre- ouvrage; il résulte do. ce qu'on
. m'écrit rm'e cet ouvrage a été examiné,, alqu'on n'y a rien
• trouvé qui ne fit déjà connu' ou- ifui méritât un rapport détaillé.
• Je ne -puis , oit -conséquence , que vous inviter à faire re-
« tirer «îrfrnnoWWBt. » fiai tu i •■ ■ »■' • .• .»
Dans lé-ràlîmeât oftste ministre signait la lettre qu'on
vient de lire, le courrier en apportait une autre du secré-
taire perpétriez conçue eu «es termes : ■
Momie™, ■"«*»»•■." ; ,.
. Sur l'invitation de S. Éxc. le ministre de l'intérieur,
t l'Académie a examiné votre ouvrage; mats la doctrine que
■ vous y développez différant tssentietlement de cette qui est gêné-
oralement admise dans f École l'Académie n'a pas or u de-
« voirémettre d'opinion, eta pensé qu'il n'appartient qu'au
■ public de prononcer sur cette matière. Je vous invite
« donc à faire retirer votre mamiscrit, eto. •
Ou je me trompe fort , on l'Académie1 fi t voir, dans ces
4>6
deux versions si différentes, le charlatanisme de l'esprit <U
corps dans tout son développement. Depuis lors le profes-
seur s'est fixé dans la capitale du pays dont il s'agit, il s'y
est tait quelque réputation , et sa doctrine est devenue celle
de l'Ecole. Mais ee n'est pas de cela qu'il est question.
L'amour de l'art, Iesoiu de ses progrès, la bienveillance
pour les commençans, rien de tout cela ne se trouve com-
munément dans l'ame des musiciens, ou plutôt dans celle
des artistes co général. La conservation d'une réputation
sans cesse attaquée par les succès d'autrui est ce qui les
occupe exclusivement. L'amour- propre, premier principe
d'émulation, dégénère chez eux en égoïsme. Pourvu qu'ils
obtiennent des places, de l'argent, déshonneurs, tout leur
semble bien et dans l'ordre; mais les succès des autres, lors
mèmequ'ils ne leur portent point préjudice, leur donnent
la lièvre, et c'est d'eux surtout qu'on peut dire qu'ifs mai-
grissent de l'embonpoint d'autrui. Un inconnu s'unnonce-
i-il par quelque apparence de talent; aussitôt tout s'émeut,
tout frémit! Un ignore sou nom, ses dispositions, son ca-
ractère; c'est peut-être un fort honnête homme; n'importe,
c'est un ennemi, puisqu'il ose sortir de l'obscurité. Dés
lors, toutes les manoeuvres sont employées pour lui nuire,
pour retarder au moins ses triomphes, et les mêmes jour-
naux qu'on assiège pour obtenir quelque éloge bannal,
sont entourés de préventions défavorables au nouveau
venu, ce qui est d'autant plus facile qu'il est inconnu, ce
qui est toujours un grand tort auprès des journalistes, qui
aiment fort les opinions toutes faites. Le même soin qui a
|irij[iLiré les ;ip|il.iiLiliss(:i]ii!iis qu'où reçoit est mis en œuvre
pour causer la chute de son rival. Mais comme le véritable
talent finit par triompher, l'inconnu devient célèbre à son
lotir; alors, ne pouvant plus le repousser, on l'enrégimente,
et lui-même devient pour les autres ce qu'on a été pour
lui. , ' .
0 vous! qui vous donnez tant de mal en pure perte, com-
ment ne voyez-vous pas que le temps se joue de vos petites
manœuvres. Lui seul met chaque chose à sa place, et
l.i critique juste et l'éloge peu mérité disparaissent de-
4.? .
vaul sa justice. Ne vous privez donc pas du plaisir si doux
de la bienveillance et de l'appui que vous devez à cent qui
suivent vos traces dans la carrière, et si quelque talent
doi.t l'emporter sur te vôtre, qu'il vous reste du moins la
gloire de l'avoir protégé 1
NOUVELLES DE PARIS. ' . '
THÉÂTRE ROYAL DE L'O PÉRA- C O M IQ 0 E.
<5V<mi<« nptimUtiW ô» Sfptyorfdttr, '
Drame lyrique en trois acte», paroles de M, Fuiui, , ,
' ' musique de M. Obsidvi;.
Us répertoire fatigué, quelques pièces tombée?, et la
suspension des études, occasionnée, par les troubles de
Tété dernier, rendaient la situation de l'Opéra- Comique
fort pénible. Chargé de frais énormes auxquels ne pou-
vaient suffire les recettes journalières, ce théâtre avait
benoin de nouveautés productives qui vinssent combler son
déficit et lui préparer un avenir heureux; plusieurs ou-
vrages importans étaient à l'étude, ou prêts à y Être mis;
mais quelles' que soient les espérances qu'une pièce fait
naître avant la représentation , le succès est incertain jus-
qu'à ce qu'il ait été soumis au jugement du puhlic. Le ta-
lent connu des auteurs les plus renommés n'est pas une
garantie suffisante , car les plus habiles se trompent quel-
quefois. Sedaine, après avoir produit le Philosophe sans te
savoir, Richard et te Déserteur, a fait de lourdes chutes , et
le nom de Rossini n'a pu sauver Torvatdo e Dortiska, Er-
mione ou Corradino. Il ne suffisait donc pas qu'on sût que le
drame du Colporteur était dû à la plume féconde et sou-
vent heureuse de M. Planard, ni que la curiosité des mu-
siciens fût excitée par une œuvre nouvelle de IH. Onslow;
a* vol. 36
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4iS
il /allait réussir; il fallait plaire au public, qui ne lien!
compte du mérite que lorsqu'on l'amuse, et qui a parfois
des caprices. Heureusement , ce qu'il fallait faire), les au-
teurs de la pièce nouvelle l'ont fait , et le succès a cou-
ronné leur entreprise.
Que de fois on a agité cette question : Quel est te, meilleur
genre d'opéra comique? Question oiseuse et insoluble; car,
ce ne serait pas-répondré que de dire que le meilleur est
celui qui plaît , attendu que ce qui plail dans un temps
cesse de plaire dans un "autre. Au temps de Grétry, la co-
médie que ce compositeur savait embellir d'une musique
spirituelle et gaie, était un fort bon. genre d'opéra comi-
que ; aujourd'hui , je ne sais si tout le talent de Boïeldieu
ferait réussir une pièce du genre de f/imi de ta Maison ou
des Evénement imprévus. Plus tard, le goût de la musique
ayant changé, on fit des opéras sérieux qui n'étaient guère
composés que pour donner aux musiciens l'occasion de
faire da la musique sombre et forte «l'harmonie , mais dé-
nuée de chap,( , et cela eut beaucoup de succès. La mode a
changé/On n'aime plus, la comédie,, parce qu'elle n'est
pas musicale , et parce que le goût de la musique est plus
répanduel plus perfectionné qu'autrefois ; ou n'aime point
l'opéra purement sérieux, parce que le besoin de rire est
impératif chez les Français. Que faut-il donc? Un heureux
mélange d'intérêt et de gatlé qui se prêle iiux oppositions
de scène et de musique. Si j'avais besoin d'appuyer mon
opinion par des exemples, je n'en manquerais pas , puis-
que tous les succès obtenus depuis quelques années Tout
été par des pièces de ce genre. C'est celte conviction qui a
guidé M. Planard dans la composition do ses opéras de la
Bergère Châtelaine, d'Emma, de Marie, et en dernier lieu du
Colporteur. Examinons la con texture de ce dernier ouvrage.
Le sujet , pris , comme le dit l'affiche , dans de vieilles
chroniques russes, nous représente une de ces époques, si
communes dans l'histoire de tous les peuples, où-un usur-
pateur s'est emparé du trône de la Russie en faisant périr
les princes légitimes. Un seul rejeton de cette famille infor-
tunée, enfant encore aubcrccau.a été sauvé par un officier
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4«9
lîdèle, nommé Igor, qui transporta son précieux fardeau
dans une forêt , et qui , après avoir fait une marque pro-
fonde avec un fer rouge au bras du jeune Alexis, ie laUsu
dans la cabane d'un bûcheron , avec une bourse d'or.
Ce bûcherou , homme dur et grossier, s'est servi de cet or
pour acheter la place de geôlier d'une forteresse où sont
détenus les prisonniers d'état.
Vingt ans se sont écoulés depuis ces évènemens lors-
qu'au lever du rideau la scène représente l'intérieur de La
forteresse. Alexis y a été élevé coinme fils du geôlier et
comme frère de Koli. 11 aime Mina, jeune batelière des
environs, et obtient la consentement du geôlier pour l'é-
pouser. Son' édSur généreux lie peut s'accoutumer aux
crimes dont ibest^chkque joôr le témoin dans celte forte-
resse, auxetnpoisdnjiçmens et aux meurtres qui sont pres-
critspar le- tyran -qui gouverne la Russie; son indignation
éclate à chaque inSiant-et amène des scènes viole ni es avec
le geôlier, qui est dévoue au pouvoir qui le paie.
Le brave officier Igor qui sauva Alexis est devenu com-
mandant de la forteresse. Il a fait long-temps de vaines
recherches, pour découvrir les traces du bûcheron-ct du
jeune prince qu'il lui avait confié; mais enfin ila découvert
que le geôlier n'est autre que ce bûcheron, et que sons
le nom d'un de ses fils doit être cache l'iiériliet; du trône.
Mais quel est-il? ifèst ce qu'il ignore. Il u'ose confier
son secret à personne, parce qu'il sait qu'il est entouré de
satellites du lynm, ci'ses craintes sont d'autant mieux fon-
dées, qu'un espion vient de s'introduire dans la forteresse
sous t'haliil d'un colporleur. Cet agent est d'autant plus
dangereux qUo, muni d'un ordre signé du prince qui doit
lui soumettre tous les agens du gouvernement, il peut
employer le fer et le poison pour se défaire de tout homme
suspect. Cependant , des conspirateurs sont répandus
dans toute la Russie . et jusqu'au milieu du palais de l'u-
surpateur. Igor leuf a révélé le secret de l'existence d'un
prince légitime; il ne lui reste .plus qu'à le reconnaître sous
l'habit grossier qui le cache; ses yeux se sont portés sur
\lexis; mais au moment oii il se dispose i édairoir ses
doutes, un nouveau commandant du lit forteresse arrive ;
et Igor est envoyé dans un autre poste. Désespéré de ce
contretemps, il ne sait quel parti prendre, lorsqu'il recon-
naît, dans le nouveau commandant,1 Oscar son ancien ami.
Il n'a point un moment a perdre; il lui eonfie son secret,
le charge de découvrir le prince légitime au milieu de ceux
qui habitent la forteresse, lui parle de la trace profonde du
fer rouge, qu'il lui a faite au bras, laquelle pourra lui
servir à le reconnaître , le met dans la confidence de la
conspiration, 'et lui donne lemot de reconnaissance, qui est
l'enfant du bûcheron. Il part, et se rend dans le château d'un
boyard, à quelque distance de la forteresse, et sur la roirté
de la capitale, où it attendra des nouvelles d'Oscar. " '
Le colporteur, caché dans une chambre voisine, a tout
entendu. Il forme aussitôt son plan pour découvrir le prince
et pour lui donner la mort. Une noce qu'on célèbre au second
acte lui en fournit les moyens. Il fait une loterie de ses mar-
chandises; chacun lui apporte son argent. Mina veut aussi
courir les chances de la loterie; mais comme les hommes
seuls sont admis à ce jeu, Alexis tente la fortune pour elle.
Une croix d'or avec sa chaîne doit elrc le gros lot. Le col-
porteur, qui feint d'être oreier, déclare qu'il doit appar-
tenir à celui qui porte nue marque au bras près dit poi-
gnet. Alexis montre son bras , il gagne ; mais il est re-
connu par Oscar et par l'espion. Celui-ci propose aux gens
delà noce de leur faire boire d'une liqueur excellente qu'il
-porte avec lui; il en verse à chacun, et remplit de poison
le verre d'Alexis,. Au moment où il va porter le vase à ses
lèvres, le geôlier l'arrête pour boire à la santé du roi; mais,
à ce nom, Alexis jette son verre. Furieux, les soldats et le
geôlier vont lui donner la mort, lorsque Oscar, pour le
sauver, le fait arrêter et conduire dans une tour délabrée,
dont les spectateurs voient une partie de l'intérieur.'
Le colporteur, qui veut la mort d'Alexis", s'approche
d'Oscar, et se présente à lui comme un des conjurés, en
lui disant le mot de ralliement, l'enfant du bûcheron. II lui
représente l'impossibilité d'enlever le prince, environnés
de soldats comme ils le sont ; mais il lui conseille de se
L' : J I-:l'-J 111:
4»!
rendre au château du boyard, de rassembler les conjurés,
et de venir délivrer Alexis avec eux, tandis qu'il restera
dans la forteresse à veiller sur les jours du prisonnier.
Oscar saisit celte idée, mais c'est pour faire évader Alexis.
Il monte dans la tour; révèle au prince le secret de sa
naissance, change avec lui de manteau, et l'envoie au
bateau de la jeune Mina, qui doit le conduire auprès de
ses amis. Après son départ, le colporteur saisit un poi-
gnard et s'élance dans la tour; mais, au lieu d'Alexis, il
y trouve Oscar qui lui donne la mort. Ainsi linitle second
acte..
Ou sent que l'intérêt principal finit aussi après cet évé-
nement, et que le troisième acte ne peut être qu'un dé-
uoûment. Le théâtre représente une serre d'un château
voisin du palais do l'usurpateur. Les conjurés s'y rassem-
ble^. Igor y amène Mina; et bientôt arrive Alexis, con-
duit par Oscar. Le signal est donné, et les conjurés mar-
chent au palais; Mina ne comprend rien à ce qui se passe,
mais elle s'inquiète sur Alexis, Bientôt on entend le beffroi
du palais qui annonce la victoire du prince légitime. Les
conjurés reviennent. Alexis veut recevoir sa couronne des
mains de Mina, et lui pose à son tour le diadème sur la
tête.
Le personnage comique de Koli, véritable fils du geô-
lier, tempère le genre sérieux de cet ouvrage, et y jette de
la galté dans quelques scènes. Considéré comme cadre
musical, il était ditficile dé faire une pièce qui fût plus
favorable aux inspirations du musicien. M. Planardale
bon esprit de sentir que ce genre de mérite est le plus im-
portant dans un opéra, éL lui sacrifie tout ce qui n'est
qu'accessoire. Personne uc connaît mieux que lui la coupe
des morceaux d'ensemble et les rhythmes favorables à la
musique; aussi compte-t-il de nombreux succès. C'est le
poète des musiciens.
Une grande réputation justement acquise par de nom-
breux et beaux ouvrages de musique instrumentale était
d'un heureux présage pour les triomphes qui attendaient
M. Onslow sur la scène. Déjà-il avait préludé à celte nou-
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4m
vclle carrière par Bon opéra de C Alcade de ta Viga. Mais
tout en admirant dan» celte production dea morceaux d'uni:
facture remarquable. les connaisseurs y avaient aperçu la
gêne inséparable d'un premier essai dramatique, et de
l'incertitude dans les effets scéniques. L'orchestre, supé-
rieurement écrit, contenait trop de ces détails qui font un
exccllenteffel dans un quatuor ou dans un quintetto, mais
qui compliquent inutilement dans la musique théâtrale.
On conçoit que pour un homme doué du talent de
M. Onslow un pareil essaies! une leçon profitable-, aussi
tous ces défauts out-ils disparu dans le Colporteur. Dans cet
ouvrage, le sentiment dramatique brille au même degré que
le sentiment musical. Une rare énergie se manifeste dans
la couleur des situations fortes, et notamment dans le final
du premier acte, et daoB le morceau de la lolerte, morceau
capital, et qui seul vaut un opéra. Je citerai aussi l'air du
geôlier, qui ne demanderait, pour produire plus d'effet,
qu'un peu plus de timbre dans les sons graves de la voix
de Henri. ■' - ■ ■— - —t' • «-■'
Ce n'est pas seulement à de l'énergie et à de grands ef-
fets que M. Onslow s'est borné; il n'a point hégngé le
chant et la grâce. Le chant du colporteur dans le final du
premier acte, le trio chanté par Lafeuillade, Féréol'et
M" Pradher, l'air de Lemonnier, et le duo chanté par le
même acleur et M" Pradher, que les exigences de la scène
française ont malheureusement forcé à supprimer depuis
la première représentation, le petit air de M" Desbrosses,
et, les charmamt complets de la fin du troisième acte, ont
-fait la part des mélodistes, et ont montré que la muse de
M. Onslow sait prendre plus d'un ton.
Il n'a pu échapper cependant au reproche si grave parmi
nous d'être un musicien sortant, reproche qui est le cheval
de bataille de nos journalistes, quand il s'agit d'un musi-
cien qui ne se borne point à faire dos ponts-neufs. Naguère
un compositeur était à peu près déshonoré quand on lui
appliquait cette qualification ; mais elle est devenue moins
< iojurieuse depuis que le public a appris à entendre la mu-
sique. M. Onslow fera donc bien de ne pas s'en effrayer,
cl de n'écouter que ses inspirations et son expérience.
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4*5
La conviction où je suis que H. Onslow est un digne
artiste qui cherche non -seule m eut le bien, mais le mieux,
dans ses ouvrages, m'enhardit à lui faire part de deux ob-
servations que j'ai faites en Écoutant sa musique du Col-
porteur. II m'a paru que ses modulations incidentes se font
souvent dans le mode mineur, et que celte régularité pro-
duit quelque monotonie dans le milieu des morceaux;
c'est un petit défaut très facile à éviter. Quoique l'instru-
mentation soit en général celle d'un maître du premier
ordre, j'ai cru m'apercevoir aussi que les violons n'ont
.pas tout lo brillant qu'on pourrait désirer parce qu'ils1 sont
tenus un peu trop dans le médium. Il en résulte que l'or-
chestre manque quelquefois d'éclat : ce défaut n'en est
un que relativement à la musique a la mode, qui nous a
accoutumés à des effets brlllan*.
En résumé, te Colporteur; soutenu de sa belle musique,
d'une mise en scène soignée, du jeu des acteurs et'du luxe
des décorations et des costumes, a obtenu un succès bril-
lant qui s'est consolidé aux représentations' qui ont suivi
la première. La foute s'y porte, et l'on est obligé chaque
soir de refuser l'entrée à beaucoup de spectateurs.
— L'Italiana 'jri dtgitri sera reprise ce soir au Théâtre-
Italien pour M*' Pisaroni. Les amateurs qui ont entendu
cette habile cantatrice cliaulerl'airdecet opéra au concert
de la Toussaint se réjouissent du cetle bonne fortune.
— Vendredi 5o de ce mois, la distribution des prix de
l'École royale de Musique aura Heu dans la grande salle
de cet établissement ; elle sera suivie d'un concert exécuté
par les élèves, dont voici le programme :
1° Ouverture de Beethoven; a* air dé ta Dame blanche,
de M. Boïeldleu, chanté par M"* Hirté (pensionnaire);
3° concerto de violoncelle, par SI. Platel, exécuté par
M. Chevillard;'4° air de Moïse, par M. Rossini, chanté par
M"* Verle,uil; Mu"'Graudidier, Çlara, Eugène, et MM. Ri-
chelme-Dclsarte et Hurteanx, donneront les répliques;
5* thème varié, par MSI. Vogt et Guillou, exécuté par
M. Scarzella (flûte). M. Caille! (hautbois), M. Divoir
4*4
(basson) ; 6° quinletto de Cimarosa, chanté par M"" Hirté
et Rigal, MM. Rrcliclmc, Bénédil cl Hurteaus; 7" concerto
de violon, .par M. Rode , exécuté par M. Sauzai.j— Décla-
mation spéciale ; 8° fragment du cinquième acte d'Épic/iarig
et Néron (tragédie), M. Mayer (Néron), M. Horion donnera
la réplique; pause musicale ; 9° le premier acte des Folies
amoureuses (comédie) : M. Marin (Crispin), M. Alvarez
(Valére), M. Prost (Albert), M1" No blet (Agathe), M"'Laïné
(Lisette).— Pause musicale. — Déclamatian lyrique; io' frag-
ment des Voitures versées, par M. Boïeldieu (opéra-comi-
que) : M. Bénédit (Dormeuil), M. Blés (Armand).
— C'est par erreur que nous avons dit que H11' Hirté,
qui a débuté au théâtre de POpéra-Comique, est élève de
M. Ponchard; celle jeune personne a reçu son instruction
musicale dana la classe de M. Plantade, l'un de nos plus
habiles professeurs.
— Les exercices de l'institution royale de musique reli-
gieuse qui devaient commencer le as de ce mois, sont re-
mis au ao décembre prochain. Son altesse royale Madame
a fait savoir a M. Choron , directeur de cet établissement,
qu'elle honorerait ces exercices de sa présence.
— Lorsqu'on considère le petit nombre d'ouvrages que
les diverses administrations de l'Opéra ont données pen-
dant les vingt dernières années , on est étonné de l'activité
qui régnait autrefois à ce théâtre , ou du moins dans cer-
taines années. Voici ce qu'on lit dans le calendrier musical
t Jamais peut-être année dramatique n'a offert un plus
1 grand nombre de nouveautés. L'Académie a donné six
• grands ouvrages neufs à Paris, et deux à la Cour. Ceux
« qui savent combien la mise d'un opéra exige de temps, de
• soins, de peines et de dépenses , concevront difficilement
« comment les sujets de tous les genres ont pu tenir à un
« si prodigieux travail, et applaudiront aux efforts del'ad-
« minisliation actuelle, qui n'épargne rien pour donner,
ta ce spectacle plus d'éclat qu'il n'en a jamais eu.
< Les ouvrages sont : Ttiémistocte, musique de M. Phi-
" lidor; Rosine, musique de M. Gosscc ; la Toison d'or, mu-
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4»5
«siquedeM. Vogel; Phèdre, musique de M. Lcmoiue; les
*Roraces, musique de M. Saliéri; et enfin Œdipe dCotonne,
« musique de Saccfaini.
s Outre ces sis ouvrages, on a appris pour la Cour Stra-
* tonice, tragédie, etdlcindor, comédie héroïque, musique
« de Dézède. On a de plus répété Artire et Evétina, musi-
«que de Saccbini.
• Le répertoire habituel, composé des deux Iphigénies,
« de Didon, d'Armide , de Panurge, de la Carananne, a été
t enrichi A'Àicestt, de Roland, du Devin du village et dii
<■ Seigneur bienfaisant. » ' <
Il faut convenir qu'une pareille activité vaut bien les
profondes combinaisons de nos directeur» modernes.-
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Lisbonne. L'inganno fetice a été représenté sur le théâtre
royal de Saint-Charles , dans la soirée du 16 octobre. Les
chanteurs, qui avaient obtenu des applaudissemens dans
plusieurs autres ouvrages, n'ont point été heureux dans
celui-ci. Ils ont été tous en butte au mécontentement du
public ; on a même été jusqu'à jeter des gros sous â la tête
de la priina Donna.'
Houe, ta Bûccabadati , Giordani et Vergé, qui, parleur
excellente exécution, ont soutenu la gloire) du Jlfoj^sur le
théâtre Vallt, et conjointement avec %uccoli, ont fait
ressortir le mérite de X'InnocenzainPtrigtio , opéra de Conti,
viennent de procurer à la Cenerentala un nouveau succès.
Cet opéra a été représenté le 3; du courant sur le théâtre
Valte, et y a produit un effet que d'habiles artiste s -n'ont
pu lui procurer cette aunéesur les autres théâtres de l'Italie.
PiDons. Si les acteurs de Inganno ftlice à Lisbonne, ont
eu à gémir sur leur peu de succès, ceux qui ont repré-
senté Topaldo eDorlhca à Padoue, le 38 octobre dernier,
n'ont pas eu à se réjouir de l'accueil qu'on leur a- fait. Les
seuls rieurs étaient les spectateurs, qui chantaient, en
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4x6
même temps que la signora Cressotti , prima Donna, l'air
si connu : un bel Giorno di contenta, inséré à, propos de botta
dans une partition de Rossini. Celte cantatrice était-elle
indisposée avant de monter sur la scène, ou l'aocueîl dé-
favorable du publie a-t-il produit un fâcheux effet sur sa
santé? c'est ce qu'on. ignore ; mais le fait est qu'il a fallu
que le directeur engageât en loute hâte une autre prima
Donna, la signora Lugnani, qui a, dit-on, chanté à Na-
ples, mais sans désigner sur quel théâtre. FÎUppo Spada,
premier buffa comité, et Giustppe Lombardi, premier ténor,
n'ont pas beaucoup mieux réussi que la prima Donna.
Antonio Colla, premier buffo cantanU, a obtenu quelque suc-
cès dans plusieurs morceaux. . j
Gëhes. On travaille avec le plus grand soin pour que rien
lie manque à la magnificence du nouveau Grand-Théâtre
qui s'ouvrira pendant le cours du printemps de 1838. On y
représentera pour l'ouverture deux opéras nouveaux, l'uu
séria, l'autre buffa, un grand ballet et un'ballet de mtzio
carattere (de demi-caractère ). La musique de l'opéra sé-
ria doit être écrite par Morlacchi.
• Les chanteurs engagés pour l'opéra séria sont : la signora
Adélaïde Toti , prima, donna ; la signora Brigida Lorenza-
ni, primo inusico; David, ténor; et Taml'ttrini , basse
chantante. ■ :n , ■■' ■* ■
Pour l'opéra buffa : la signora Letizia Corleii, prima
Donna; Tamburfai, premier bouffe chantant, et Frtzzotini,
premier bouffe comique.
. MiiiN. Sa Majesté la reine douairière de Bavière a en-
voyé une médaille d'or, à l'effigie de l'auguste donatrice,
accompagnée d'une lettre très flatteuse , au docteur Licb-
tenthal , qui réside à Milan. Ce célèbre littérateur avait
envoyé à Sa Majosté un exemplaire de son ouvrage inti-
tulé : Dicionario e Bibtiografia délia Musita, .■
Ècossb. Pendant le cours du mois d'octobre , M™ Pasla
a fait jouir du charme de sa présence et de son chant le»
habilans du Glascow» et en quittant cette ville pour se
rendre dans la capitale de récosse , elle a fait la promesse
de leur oonsaorer encore trois soirées à son retour d'Édira-
'4i7
bourg. Il est superflu de répéter lès éloges qui lui sont
prodigués dans les diverses feuilles de l'Angleterre; on sait
que partout od cette célèbre actrice porte son talent, elle
reçoit un juste tribut d'admiration.
On avait dit qu'elle gérait peut-être engagée au Théâtre-
Impérial deVienrie pour lé carnaval prochain; on disailaussi
que le Grand impressario lui avait envoyé un engagement
en blanc, Il comptait, à ce que l'on assure, sur le désir mani-
festé parM°"Pasta de profiter dé son voyage à Vienne pour
traverser l'Italie et revoir ses parens et ses compatriotes.
Il paraît cependant que l'espérance que les Italiens avaient
conçue de la! revoir est évanouie , et que les offres magni-
fiques faites parlés îiabitaus de la Grande-Bretagne à cette
célèbre actrice /éloignent un moment si justement désiré.
. ■■ ■ ■ . O . .31 .
PUBLICATIONS CLASSIQUES.
Collection coinplcle.de Trios, Quatuors et Quinte "i scom-
pesés pour instrumens à cordes par. L- Vàh Bbëïhoven.
Prix : apo francs. Paris, Maurice Sch le singer, mar-
chand de musique durai, rue de Richelieu, a" 97.
Qu'elle fut grande et belle l'imagination de celui qui ,
.après Haydn et Mozart sut s'ouvrir une route nouvelle
dans le champ de la musique instrumentale, et qui, lors-
que toutes les formes semblaient être épuisées, sut en
créer- d'iuconnues! Comme tous les hommes de génie,
Beethoven révolta par ses innovations tous ceux qui, ad- .
mirateursenclusifsdece qu'ils connaissaient, ne voulaient
pas admettre d'innovations; mais, comme inus les hommes
de génie , il triompha de ses adversaires , et s'en fît des
partisans. . ' 1 .■:»■'
On ne trouve pas dans les œuvres de ce compositeur lu
majesté, le calme et l'admirable simplicité d'Haydn; on
n'y voit pas non plus Pâme passionnée et la prodigieuse
variété dcMotart. Bien moins oorrect que ces deux 6ra,1UB
4a8 -
maîtres, il hasarde beaucoup ; mais il réussit souvent et
montre dans toutes ses productions une originalité pi-
quante. Ne prenant jamais que lui pour modèle et pour
guide , il ne ressemble à personne, et marque d'un cachet
d'individualité tous ses ouvrages. En un mot, Beethoven,
malgré quelques défauts, figure parmi les plus grands mu-
siciens dont l'Allemagne s'honore.
Deux époques très distinctes se remarquent dans les
œuvres de ce compositeur célèbre : dans la première, ses
idées originales l'emportent quelquefois dans un système
démodulations singulières, mais les chants sont suivis
avec simplicité et clarté; dans la seconde, il semble dé-
daigner cette simplicité qui fait le charme de ses six pre-
miers quatuors, de ses trios de violon et de piano , et de
ses quintettis. A dater de son œuvre cinquante- neuvième,
qui contient ses quatuors dédiés au prince de Lobkowîtz.
cette seconde manière fut celle qu'il adopta. Il parait que
des lectures qu'il fit ù cette époque changèrent la nature
de ses idées sur le beau dans les arts. Les idées positives
lui parurent dès lors absolument opposées aux grands ef-
fets qu'il cherchait. Son admiration profonde pour Goethe
lui fit considérer le vague et la rêverie comme des moyens
puissants pour émouvoir; il dédaigna ses premières pro-
ductions, et considéra celles qui naissaient de son nouveau
système comme leur étant fort supérieures.
Un accident affreux pour un musicien vint ajouter à
ses dispositions mélancoliques : il devint sourd au point de
n'avoir plus qu'une sensation faible et vague des sous de
son piano. Pur l'inertie de l'organe auditif, le sentiment
des relations mélodiques parait s'être affaibli en lui : de là
les duretés et les incohérences qu'on remarque dans ses
dernières compositions, duretés auxquelles il paraît avoir
été insensible. Toutefois la supériorité de son génie brille
encore , même dans ces ouvrages, et des éclairs d'une ri-
che imagination s'y font encore apercevoir.
Plusieurs éditions des œuvres de Beethoven ont été
faites , tant on Allemagne qu'en France. MM. Janetet Co-
tcllecn ont publié une fort belle de ses quatuors, quintette
4»9
et trios, destinée à faire suite aux collections de Haydn,
de Boucher in ï et de Mozart , qui ont paru chez les mômes
éditeurs*. L'exécution typographique de leur édilïon de
Beethoven ne laisse rien à désirer ; mais clic a l'inconvé-
nient de ne point contenir les six derniers quatuors de ce
maître, formant les œuvres 137, i5o, i3i, i3a, i55 et
» 34- Ce sont , si l'on veut , des œuvres choisies , mais non
des œuvres complètes. ■ •;
Ces six derniers quatuors sont la propriété de M. Schlc-
siuger, en sorte que s on édition est la seule où Von peut
rouver réunies toutes les compositions de Beethoven pour
les in st rumens à cordes. Elle renferme dix-sept quatuors,
six trios et trois quiotettis , et forme cinq volumes carton-
nés avec élégance, et ornés du portrait de Beethoven et
du facsimile de sa notation et de son écriture. ■ 'lOfciH 1
On ne peut douter du succès qu'obtiendra cette intéres-
sante collection parmi les vrais amateurs. Il sera à désirer
que quelque éditeur entreprit de publier les : mêmes ou-
vrages en partition, pour faire suite à la collet-lion que
MM. Pleyel ont donnée des quatuors et symphonies de
Haydn et de Mozart. yi.iuiih
ANNONCES.
Le Souvenir îles Ménestrels, recueil de poésies et d'œuvres
musicales composées par les meilleurs auteurs, et orné
de jolies gravures en taille-douce. Le nombre des roman-
ces insérées dans les quinze volumes s'élève à 848, et
celui des gravures à 1 1 1. M. Chaules Lai-fille, auteur et
éditeur, à Paris, galerie Vivieune, 11*70. " 1 IL,':)
Tel est le titre d'un charmant recueil entièrement con-
sacré au cube de la romance, et dans lequel nos hommes
de lettres, nos compositeurs et nos peintres les plus renom-
més n'ont pas dédaigné d'associer leurs taléns.
C'est sous leurs auspices que l'éditeur, M. Charles Laf-
fillé, a commencé cel ouvrage qui a paru chaque année
43o
depuis jSiij. Idée heureuse, tendante il perpétuer le son-
venir d'un genre de chant tout français- et dont la nais-
sance remonte a l'époque des premiers troubadours. Ce
sera donc pour l'avenir un répertoire d'autant plus inté-
ressant que plusieurs romances de nos grands maître.*
n'onl jamais éfé publiées ailleurs; et nos dames trouveront
un délassement fort agréable a feuilleter cette collection,
qui déjà se compose de romances, avec la musique
gravée, et les aceompagnCmcns en très grande partie, cl
de ni gravures eu taille-douce. Nous ajouterons que.
comme poète et comme compositeur, M. Laflîllé a con-
tribué à sa formation d'une manière distinguée.
No.us nous faisons un plaisir de recommander cet ou-
vrage dont le succès est reconnu en France comme dans
l'étranger, cl d'annoncer que le quinzième volume paraî-
tra le i" décembre prochain. Pris : C francs, broché.
S'adresser, franco, à. M, Charles Lafiïlié, galerie Vi-
Lc Trauiadour des Salons , journal de chaut, rédigé par
MM. Romaines) et Meisonnicr , avec accompagnement de
piano ou de guitare. 4
Ce journal qui , depuis dix-sept ans / s'est fait remar-
quer par l'heureux choit des morceaux qu'il renferme est
orné de lithographies dont les sujets sont tirés des ro-
mances auxquelles elles sont adaptée!:. Ces lîthograhics
sont exécutées par MM. Thomas , Cliarlet; Schcfifer , Scr-
rur, Btrrdet, Wallier, etc.
Le prix de l'abonnement est de fr.. par an , à dater du
i" janvier, avec accompagnement de piano) 18 fr. avec
accompagnement de guitare, avec des pièces, et 10 fr. pour
le chant seulement...
On s'abonne toujours au magasin de musique de
A. Meissonnier , boulevard Montmartre , n» a5.
Il vient de paraître à la même adresse : 1 ,.. .
i* L'Écho de Nazarin, romance avec chnpnr, ad libitum,
mise en musique par M. Kubri , ornée d'une belle lilho-
graphie, prix r a fr.
M0bMty Google
43 1
a* Bonbonnière Musicale, ou Repos de l'Étude, font guitare
Berne, composée d'air» ■variés, rondos, valses et autres,
pièces récréatives, d'unefacililé progressive, par'fe;'Pàu-
lian.prix: 6 fr. ■ '
— Cinquième solo polir cor-alto, avec accompagnement
de grand orchestre ou de forté-piano, dédié à M. Dominer! .
pensionnaire de la Chapelle du Roi et du Conservatoire,
par Gallay, op. i a. Prix : 9 fn
Paris, Zetlcr et comp., rue du Faubourg -Poissonnière,
n"3. ->■. ■■ ■-■
Le nom de M. Gàltay est d'itn bon augure pour le succès
de ce morceau; car, outré son talent comme exécutant,
ii a le mérite d'avoir, à l'exemple de M, Dauprat, dont il
est élève, tiré la musique de cor'des borne» étroites dans
lesquelles on la tenait autrefois. Il fait moduler cet instru-
ment qu'on atfrfit l'habitude dé tenir constamment dans
les tous de fa, de mi majeur. 011 de mi bémol; ses chants ont
de l'élégance, et ses traits de la hardiesse. Le morceau
dont H Vagit a été exécuté par M. Gallois dans plusieurs
concerts à Paris, élà toujours fait plaisir.
— Cinquante partis français, mis en musique, pat .Rouget
deXilie, volume.de zog pages, prix : 5o.fr. A Parrç,, che^
l'auteur, passage Saithiier, 11° ai. 1 . .*, , yl..
Les inspirations de toute la vie de l'auteur. d,e l'Hymne,
des Marseillais se trouvent réunies dans ce recueil : c'est
dire assez qu'on, doit y trouver de la verve. et tlo l'origina-
lité. Cet hymne fameux s'y trouve, avec -cette note qu'on
o Je fis les paroles et l'air, de ce chant à Strasbourg, dan»
• la nuit qui suivit la proclamation de la guerre, lin d'a-
« vril 1793. Intitulé d'abord le Chant de l'armée du Rhin, il
■ parvint à Marseille par la voie d'un journal constitution-
• ucl, rédigé sous le» auspices de l'illustre et malheureux
u Diétrick. Lorsqu'il fit son explosion quelques mois après,
«j'étais errant en Alsace sous le poids d'une destitution
« encourue à Hùningue pour avoir refusé d'adhérer à la
43a
t catastrophe du 10 août, et poursuivi par la proscription
• immédiate qui, l'aimée suivante, dès le commencement
i de.fa -.terreur, me jeta dans les prisons de Robespierre,
• d'où je ne sortis qu'après le 9 thermidori j>
Le recueil que nous annonçons se distingue aussi par le
luxe et l'élégance de l'exécution typographique.
— Trois romances d'Édouard Bruguière viennent de
paraître chez J. Meissounier jeune, rue Dauphine, et chez
tous les marchands de musique. Ces romances sont :
Sois paisibtes, paroles de Saint-Elme-Champ ; Les adieux
(flsaure à ia Brigantine, du même ; Jeune btrgérc espère, à
deux voix, paroles de M. Poisson.
— Thème et variations pour le violon avec accompagne-
mentd'un second violon, alloet basse, ou depiano, dédiés
à son ami M. Daix Deshayes, amateur, et composés par
3. Luce, chef d'orchestre et président de la société phil-
harmonique de Douai. Œuvre 2. Prix : 7 fr. 5o cent., à
Paris, chez Bichault, éditeur des œuvres de Cxernis, bou-
levard Poissonnière, n* 16, au premier.
— Méthode pratique de piano, composée pour les en-
fans par Zimmerman , professeur à l'École royale. Trois
parties réunies, a5 francs. La première partie renferme les
gammes et les exercices, prix : 7 fr. 5o c. La seconde con-
tient douze préludes et vingt-cinq thèmes favoris, prix :
7 fr. 5o c. ; et la troisième partie se compose d'airs variés,
rondeaux, morceaux à quatre mains, elle final de la Créa-
lion d'Haydn, arrangé à six mains pour un seul piano,
prix : 10 francs. Chez l'auteur, rue Sain [-Lazare, 11° 58, et
cheE tous les marchands de musique.
BIOGRAPHIE.
CiNAROS* ( Dominique ) , génie fécond , original , et l'un
des plus grands musiciens qu'ait produits l'Italie, naquit
à Aversa, dans le royaume de Naples, en de pareils
pauvres et obscurs. Son père, qui avait été se fixer à Naples
en i j57, mourut en i j6i , laissant une veuve et sou fils,
âgé de sept ans , dans un état voisin de la misère. La mère
de Cimarosa , dépourvue de moyens pour élever ce fils ,
le recommanda à la pitié de son confesseur, le père Porzio,
moine anlonin. Celui-ci commença à lui donner quelques
leçons de latinité : mais bientôt frappé de l'esprit et des
heureuses dispositions de son élève, il offrit à sa mère
de se charger, non-seulement de son instruction, mais
aussi de son entrelieu.
Par un heureus hasard, le père Porzk» était organiste
de son couvent , et s'amusait souvent dans sa cellule a
jouer du clavecin et à chanter en s 'accompagnant. Le
jeune Cimarosa ne le quittait pas ; les occasions qu'il eut
ainsi d'entendre de la musique éveillèrent son génie, et
révêlèrent sa vocation. Le bon moine ne tarda point à
s'apercevoir de la passion de son pupille pour l'art qu'il
cultivait : il lui en enseigna les premiers élémens, lui fit
ensuite donner des leçons de chant par Aprïle, et le fit
enfiu entrer au conservatoire de Lorettc. Là , il puisa les
principes de l'école de Durante dans les leçons de Feua-
roli, et acquît ce style pur et élégant qu'ont -ou tous les
maîtres sortis des conservatoires de Naples, dans le <lix-
huitième siècle.
Ses premières compositions annonçaient ce qu'il devait
être un jour ; on y trouvait déjà l'imagination brillante et
les chants heureux qui abondent dans tous ses ouvrages.
Outre les talens qu'il manifestait comme compositeur, il
jouait bien du violon et du clavecin , et chantait parfai-
tement, surtout dans le genre bouffe. On rapporte que
a' vol. 37
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434
Sacchini, ayant composé un intermède intitulé FraDonato,
le fit exécuter au conservatoire, et que Cimarosa, qui
n'était alors âgé que de douze ans , joua le personnage de
Protagoniste, avec un talent, une verve, qui furent
admirés de tnus les spectateurs.
A peine sorti du conservatoire, en ipj3, il reçut un
engagement pour écrire la musique d'une farce intitulée:
La Baronessa Stromba. Celte première production fut cou-
sidérée comme un prodige, à cause de son âge ( il avait
o. peine dix-neuf ans ). L'année suivante , il alla à Rome ,
où il composa Vltaliana in Londra. Après le carnaval , il
retourna à Naples, et donna au Tetttro-Ntiovo , ta Finis
Frascatana , et la Finta Par'tgina. En 1 j;5 , il écrivit /( Fa-
•natico per gti antkhi romani, pour le théâtre des Florentins.
Déjà Piccini avait donné l'idée des finati; mais c'est dans
l'opéra qui vient d'être cité que Cimarosa fit entendre,
pour la première fois, des trios et des quatuors dans le
cours de l'action . En 1 776 , il retourna à Rome, où il com-
posa // Pittor partgino , et / dite Baroni.
Chaque ouvrage nouveau de Cimarosa lui valait un
succès, et le goût capricieux des Romains semblait se
fixer en sa faveur. A son retour à N a pies , il trouva les
liabitans dans l'enthousiasme des dernières compositions
de Paisiello , et il eut à lutter contre la réputation formi-
dable de ce grand musicien ; mais déjà le talent de Cima-
rosa était dans toute sa force : il ne craignit point de se
mesurer avec son redoutable émule. A peine fui-il arrivé
( en I777 ) , qu'il écrivit pour le théâtre des Florentins f
Finit Nobili , l'Armida ïmmagïnaria, et Gti Amant i Comici.
Tous ces ouvrages réussirent, et l'on ne savait ce qu'on
devait admirer le plus, nu d'une fécondité presque sans
exemple, ou de l'invention qui brillait dans tout ce qui
sortait de la plume de ce jeune musicien. Cimarosa re-
tourna à Rome en 1779 : il y mit en musique // Ritorno di
don Calandrino, et son fameux Cajo Mario, l'une de ses
plus belles productions. Dans la même année , II Mtrrato
diMatmantiU, V Assaionte et laGiuditta obtinrent beaucoup
de succès i Florence.
435
De retour à Naples, en 1780, il écrivit pour l'ouverture
«lu théâtre Del Fonda, l'Infidella fedek , II Fategname , et
l'Amante combatutto dalle donne di punto , pour le théâtre des
Florentins. En 1781, il donna à Rome YAtlessandro netf-
Indie , et à Turin VArtaserse. L'année suivante, il alla à
Venise, où il écrivit II Convito di Pietra. Cet ouvrage excita
un tel enthousiasme, qu'à la lin delà première représen-
tation il fut ramené chez lui en triomphe, à la lueur des
flambeaux. Revenu a Naples, il y composa son délicieux
opéra de La Balkrina Amante, et Nina e Mariuflb , pour le
théâtre des Florentins , La F~Ulana riconosciula pour celui
Del Fendo , YOreste et VEroe Cincse pour le grand théâtre.
En 1784, on le trouve à Viceucc , composant son OUmpiade
pour l'ouverture du nouveau théâtre delà foire, et en-
suite à Milan , où il fait représenter / due supjiosti Contù
Enfin l'année suivante, il revint à FJaples pour y faire re-
présenter son opéra de Giannina e Bcrnadone, qu'il avait
composé précédemment à Venise, et auquel il ajouta
plusieurs morceaux. Il donna ensuite II Màrito disperato ,
au théâtre des Florentins , la fameuse farce d'il Crédule ,!
la Donna al peggior si appigll, le Trame delta* , et Vtmpres-
tar'to in angustia, au Teatro-Nuovo , il Fanatka Burlcto et it
Sacrifiùo d'Abramo, au théâtre Del Fonda.
Tant de productions étincelantes de beautés du premier
ordre, portaient la réputation de Cimarosa dans toute
l'Europe. L'Impératrice de Russie, Catherine II, lui Gt
offrir un engagement pour se rendre a su cour, avec le
titre de compositeur de sa chambre et du théâtre Impé-
rial; les avantages pécuniaires dont on accompagnait
cette offre déterminèrent Cimarosa a l'accepter, et il
partit de Naples au commencement de 1787. Forcé de
s'arrêter à Turin , il y écrivit 1 1 V aldomiro , composition
admirable qui fut applaudie avec transport. Arrivé à la
cour de Catherine, il se mil à travailler aussitôt; La V er-
gine del Soie, La Félicita Inaspetata , La Cléopatre et VAtene
Edificata sortirent en peu de temps de sa plume; mais ce
qu'on peut à peine croire , c'est que près de cinq cents
morceaux détachés furent composés par lui , pourlcser-
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436
vice (le la cour, dans l'espace de quatre ans. Il écrivit
aussi pour ie prince Polemkim , une grande cantate hiti--
lulée : La Seraia non Pretedutai Les principaux seigneurs-
russes l'accablèrent de présens et de caresses, et Paul I"
lui fit l'honneur d'Être parrain d'un de ses enfans. . il
Cependant la santé de Cimarosa commençait à souffrir
de la rigueur d'un climat si différent de celui qui l'avait
vu naître':. ce mot i fie détermina à quitter la Russie , polir
aller à lie une : il :y arriva tiers la lin de 179a. L'Iim-
pereur;d*iUfriohe, Léopbld, qui désirait l'attacher a, sa
cour, lui assura un itraitemenl de ia,ood florins ; lui
assignd 'lin logement et lui donna le titre de maître de sa
chapelles Ce l'ut là qu'il écrivit son opéra ItMatrimenio
Segreto, , qu'on regarde géoéralcmcnt comme son chef'
d'oelivre ; il: avait alors :|rcntc-huit ans, el en avait em-
ployé irioiiit do dix-sept à écrire. près de soixante-dix ou-
vrages dramatiques, outre une prodigieuse quantité de
musique de tout genre. Ainsi c'est lorsque tant de pro^
duclions semblaient avoir dû épuiser son génie mi'H cri-
fafltàTè'cnef-d'œuvre; a*"1' ,OIls morceaux peuvent
être c ftés comme des ■ modèles de l'orme , d'élégance et
d'originalité. L'effet de la première représentation fut
tel, que l'empereur, -après avoir donné à souper aut
acteurs et aux musiciens de l'orchestre, les renvoya stir-
lu-champ au théâtre pour lui donner une deuxième re-
présentation, à laquelle il ne prit pas moins de plaisir
qu'à la première. Jamais ouvrage dramatique n'avait pro-
duit un pareil effet à Vienne, car Mozart, qui venait do
mourir , n'avait point vu le succès des siens; succès qui
ne commença que plusieurs années après sa mort. Avant
de quitter Vienne, Cimarosa composa encore pour l'em-
pereur La Catamita de Caori, et Amor Tende tagace.
Après six ans d'absence, il arriva à Naples uu i?g5; la
renommée de son Matrimonto Segreto l'y avait précédé, et
ce fut cet ouvrage qu'un lui demanda d'abord : il y ajouta
plusieurs morceaux, entre autres le duo D«h Signore.
jamais opéra n'excita un plus vif enthousiasme ; soixante-
sept représentations suffirent à peine à l'empressement
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437
du public; et,- ce qui était sans exemple, l'illustre com-
positeur fut obligé de tenir le clavecin aux sept premières,
pour y recevoir les témoignages de l'admiration générale :
/ Traci Amanli succédèrent à cette belle composition , et
furent suivis de la Astazie Femminill, de Pénélope et de Vlm-
pegno Stiperalo , que Cimaros a écrivit pour le théâtre Del
Fonda. En 1796, il alla à Rome et y composa I Nemici Ge-
nerosi ; de là, il se rendit à Venise pour y écrire Gli O.rau
e Curiazi. Retourné" a Home - en 1798, il y fit représenter
pendant le carnaval , Achille. AU' A ssedio di Troia, et t'Inù-.
prudenlt Fortitnato. Dansla même année, il donna à Haplëi,
au théâtre des Florentins X'Apprensivo Ragg'trato, qui fut
suivi d'une grande cantate intitulée : La Félicita Compita.
Une maladie grave le conduisit aux partes du tombeau
dans l'été de la même aimée : à peine rétabli , il pari it pour
Venise , où il avait un engagement pouryéerire l'Arte-
misia ; mais il n'eut point le temps d'achever cet ouvrage ,
car il mourut après en avoir composé le premier acte, lu
11 janvier 1801 ,■ à l'âge de quarante-sept ans- ..■
Des bruits singuliers ont couru sur la mort de ce grand
musicien. Il avait embrassé vivement le parti de la révo-
lution napolitaine, lors de l'invasion du royaume de Na-
ples par l'armée française. Après la réaction, il fut, dit-on,
emprisonné par ordre de la reine Caroline, et les journaux
du temps ont annoncé qu'il avait succombé aux mauvais
traitemens qu'on lui lit éprouver dans sa prison. Il parait
que l'opinion publique en Italie accusait hautement le
gouvernement de cet attentat. Le lieu de son décès n'était
pas bien connu ; les uns assuraient qu'il avait été étranglé,
d'autres qu'il était mort empoisonné a l'a donc. Enfin la
cour, qui voulait détruire celte fâcheuse impression, fi)
publier l'avis suivant : 1 II fu signore Domiuico CEma-
« rosa, maestro di capclla, 6 passalo qui in Vcnezia agli
>eterui riposi, il giorno undici di gciiiiajo delf' auno
«corrente, in consequenza di un tumorii I' ché avéa al
" basso ventre , in quale dalla stato scirroso ù passatu ailo
1 stato cancrenoso. Tanto altesto sul niio onorc. ut per la
" pura veritil , cd in fede etc. Vcnezia , il 5. Apr. 1801.
438
. Signe D. Giovanni Piccioli, red. deleg. e medico ono -
.rario di sua santiia di H. S. Pio VII'..
Cimarosa était excessivement gros; mais sa figure était
belle et son aspect agréable. Il avait beaucoup d'esprit, et
faisait fort bien des vers. Il avait été marié deux fois. Sa
première femme, M"* Ballante, mourut en lui donnant un
fils ; la seconde perdit aussi le jour après lui avoir donné
deux enf ans. ■ i.
Trois grands compositeurs, Cimarosa, G uglielmi et Pai-
siello, ont illustré l'Italie à la même époque. La manie
qu'on a de comparer des choses qui ont entre elles peu
d'analogie a fait souvent établir des parallèles entre les
productions de ces musiciens ; mais personne n'a songé à
distinguer les qualités qui sont propres à chacun. Des
hommes doués d'un génie égal diffèrent nécessairement
par quelque endroit ; ce qui fait la gloire de l'un ne brille
souvent d'un vif éclat qu'aux dépens de quelque autre
chose par ou son rival s'est illustré. C'est ainsi que Cima-
rosa se distingue par sa verve comique et sa piquante ori-
ginalité, tandis que Paisiello, moins bouffe et moins bril-
lant, charme par la suavité de ses chants, et surtout par
une expression dramatique supérieure à celle de son émule.
Paisiello semble n'abandonner ses idées qu'a regret; il
répète souvent les mêmes phrases jusqu'à l'affectation,
sans varier l'harmonie ni les ornemens ; cependant il lire
les plusbeauxeffetsdeces redites. Cimarosa, au contraire,
comme s'il se fatiguait de ses propres idées, les fait se suc-
céder avec une abondance qui tient du prodige, et nous
entretient ainsi dans une sorte de délire continuel. Qu'en
peut-on conclure? Que tous deux sont de grands musi-
ciens d'une manière différente. Eh! qu'importe, après
(i) ■ Feu Dominique Cimarosa , maître de cbapelle , est décédé en
. celle .ville de Venise , le ome janvier de celte année , par mile d'une
■ tumeur qu'il avait dans le bas-ventre , laquelle de l'étal squirreui est
• passée à l'clal gangréneux; ce que j'alteste sur mon honneur, clc. .
Celle déclaration du médecin Piccioli ne parait pas avoir alteint le bul
qu'on te proposait, celui île dissiper les soupçons, car l'opinion publique
est toujours resiée la mémo s»r le fait delà moi t violente de Cimarosa.
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439
tout, cette prééminence qu'on veut donner à l'un aux
dépens de l'autre? Ce qui importe, c'est que tous deux
nous procurent des jouissances, et nous n'avons rien à
désirer sous ce rapport. Qui songe à autre chose qu'à Nina
et à Negacle lorsqu'on entend leurs accens? Qui a jamais
désiré que Carotina, Paotino et Bernadone eussent un autre
langage? Le duo de VOlimpiade est le chef-d'œuvre des
duos dramatiques, comme Pria che spunti est le modèle
des airs de demi- caractère, et Set Moretli celui des airs
bouffes.
Ces éloges paraîtront sans doute quelque jour un rado-
tage aux gens du monde, qui n'ont de sensations que celles
permises par la mode. Cette musique que je vante semble
aujourd'hui trop simple d'harmonie. Déjà morte pour le
théâtre, elle ne vit pins qu'au salon, et bientôt, peut-être,
elle sera complètement oubliée. Mais à quelle époque que
ce soit, lorsqu'un véritable connaisseur, dépouillé des pré-
jugés d'école et des habitudes de l'éducation, jetera les
yeux sur les partitions de Cimarosa, il reconnaîtra que
mil n'a reçu de la nature, dans un plus haut degré, les
qualités qui font le grand musicien, et que nul u'a mieux
rempli sa destinée.
Nous croyons devoir finir cette notice par la liste com-
plète, et chronologique des ouvrages de ce maître : i° La
Baronessa Stramba, i?;5; a" L'Italiana in Londra, 1774;
3* La F inta Frascatana, 1774; La Finta Parig'ma, ip?4;
5° // Fanat'ico per gti antichi romani, 1775; 6" La Contessina,
1775; 7° ItGiorno felice, cantate, i7?5; 8° Un Te Deum,
1776; 9°// Pillor parigino, 1J75; 10° Due Bar ont, 1776;
11° Amor costante, 1776; ia° Il Matrimonio per industrie,
1776; i5° / Finti nob'tli, 1777; i4' L'Ârmida immaginaria,
1 777; i5" Gti Amanti eomici, 1777 ; 16° llDiieilo per com-
piimento, 1778; 17° II Matrimonio per raggiro, 1778; 18* La
Circe, 1778; 19* ItRitornodidonCalandrino, 1779; 10° Des
litanies, 1779; 21" Cajo Maris 1779; aa" Il Mercato di Mal-
mantite, 1779; a3° L'Assalonte, 1779; a4° La Giuditta, ora-
torio, 1779; a5° L'Infedetta fedete, 1780; a6° Il Falegname,
1780 ; ap" L'Amante combattit lo dalle donne d't pttnto, 1 780 ;
44o
28° L'Avvisoaimaritati, 1780 ; ag* il Tritmfo délia retigione,
oratorio, 1780; 3o° Alessandrô netl'Indie, 1 781 ; 3i° L'Ar-
tasersc, 1781 ; 3î* fi Caprido dramatico, 1781; 55° //Marïi-
rftf Gennaro, 1782; 34" L'Amer contrastât», 1783;
35° IlConvhodïPietra, 178a; 36° La Batterina amante, 1783;
'ôj'NinaeMartujfo, 178a; 38° La Viltana ricortosciuta, 1783;
39° L'OresIe, 1785; 4°° L'Eroe Cinese, 1783; 4'° Gitinio
Bruto, 1 p83; 4s° Chi ifAltrai si veste presto si spoglia, 1783;
43° L'Otimpiade, 1784; 44° / Due saposii conti, 1784; 45°Le
Statue parlanti, 1784; 46" L>eitE messes, dont une de Requiem,
1784; 47° Gi'annina e Bernadone, 1785; 48' fi Marito dispe-
ratff, i785;49°fi Crediito, 1785; 5o° La Donna al peggior
slappigti, 1785; 5i° LaScitfliara, 1785; 5t- Gti Amanti alla
prora, 1786; 55°iU;V«lc<fa delDeifîno, cantate, 1786; 54°Le
Trame delusé, 1786; 55° L'Impressario in angustie, 1786;
56' IlFanalico barlato, 1786; 67° fi Sacri/izïo d'Abramo,
1786; 58° fi Vatdomiro, 1787; 5çf L,e Feste d'Apotto, 1787;
fio* La Vcrgine del sole, 1787; 61° La Félicita inaspettata,
1788 ; 6a° La Cteopatra, 1788 ; 63* Messe de Requiem pour les
funérailles de la duchesse de Serra Caprioia, morte à Pé-
tersbourg, 1788 ; 64° L'Alêne edijicata, 1789; 65° La Serata
non prevettuta, cantate, 1789; 66" Cinq cents morceaux dé-
tachés pour le service de la cour de Russie, de 1787 à 1791;
67° Il Matrimonio segreto, 1793 ; 68* La Calamita de Cuori,
1792; 69° Amor rende sagace, 1793; 70° Deux Dixit, I'ud
pour l'empereur d'Autriche, l'autre pour le prince Ester-
nazi, 179a ; 71° / Traci amanti, 1793; 73° Le Astuzie femi-
niti, 1793; 73" Pénélope, 1794; 74° L'Impegnosuperalo, 1795;
75° / Nemiei generosi, 1796; 76° Gli Orati e Curiazi, 1797;
77° Achille nelt' assediodiTroja, 1798; 78' L'Imprudente for-
tunato, 1798; 79" L' Apprsnsivo raggiralo, 1798; 80° La Fé-
licita compîta, 1798; 81* Semiramide, 1799; 82° Artemisia,
1801.
FÉTIS.
VARIÉTÉS.
Tout ce qui a quelque rapport à la vie ou aux produc-
tions d'un homme célèbre adroit dépiquer noire curiosité,
ï.es ouvrages des artistes et des gens de lettres sont cousi-
dérésien général comme ce qu'ilya de plus important dans
leur histoire , et cela doit être ainsi , puisque c'est par eux
qu'ils se mettent eu communication avec le public : aussi
O-t-on dit souvent que leur histoire n'eut autre que celle
de leurs ouvrages. Nous avons donc pensé qu'on ne verrait
pas sans intérêt un tableau fidèle de toutes les productions
de Rossini , avec l'indication des lieux et des époques oii
elles ont été représentées pour la première fois, et la com-
position des troupes chantantes qui les ont exécutées. Nous
tenons ces renseignemens de bonne source, et nous pou-
vons garantir leur authenticité.
Carême.
Rosa Morandi, Luigi Raflant!
cola! de Grecis , Xommaso
Mariette Marcolini, Domcoicc
cani, Paolo Rosicfi.
Mmnbclli le père, ses fîllei e
Oii-
Tcresa Uelloc, Rafacle Monelli ,
Luigi RaHanellï, Filippo Ualli.
:»ii!'iu Marciiliiij.riisaljettaMaii.
fredini, Eliodoro Blanchi,
iaria Cantarelli, Rafaël.! Monelli,
Tacoi, de Grrcis.
larictta Marcolini, Claudio Bo-
noldi, Filippo Galli.
Grai-i;il;t , Liiid l'aciui, Tommajo
Berti.
TewJolinda Ponligf;la, Toramî
Bcrli.Luigi HalTanrUi, <]•■ Grec
Adélaïde Mainnotli, Elisabella Mi
Argent:
a Hon
Algeri.
AuidiiK
n Palmira
Barbie rc di
Siriglia.
LaGanetta.
Oielln.
Cenerentola.
Gimeppe Kabris, El
cbi.ïilippo Galli.
Maffei Fe.ta , David, Galli, et Luigi
Elisabetta Culbran , (a Dardanelli,
Nom ri el Garcia.
AuVlaide Sala, Douselli, Galli, Ri-
Ciurji liij;ltetti , Garcia , Bolticelli,
Luigi Zaniboni.
Margbcrila Cbambrand , Pelice Pel-
kgrini, Carlo Casaccia.
Elieabetb Colbran , Notxari, David,
Gellrurft Righetti , Calterina Rosti,
Automne.
8 Carnaval.
. Carême.
Automne.
. Prinleroi.
,î. Cath,
a ISaplej.
Stala,
c Zoralde.
Brmioue.
dcl Lago.
-, ['alliti.-i.
Tertsa Belluc, Savina Mouelli,
Bolticelli, Galli, Antonio Am-
brai et Mit' Galian».
Eliaabetla Colbran , Noixari et Be-
i Elisabetta Pinotti,
fredin;
Savino Mouelli, Gio>-
chino Sciarpelletti.
Elisabetta Colbran, Nouari, Mil-
ieu Porta, Bcnedetti.
E. Colbran, ffoiiari, David, Bt-
E. Culbran , R. Pisaroni , Rouan t
David.
Rosa Moraodi, Carolina Cor lui ,
Eliodoro Biancbi , Luciano Bian-
cbl
E. Colbran , H. Piiuroni , [ïouari ,
David, Benedetti.
arolina BaȔ , Violante Campa-
re.si, Claudio Bonoldi , Gimeppe
arc on do.
Matilde
de Shabran.
lamagni , P£iu«eppe Fusconi ,
El. Colnran.Koiiari, David, Ad-
brosi, Heuedelti, et M"« Crccuiii.
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«3
0P»B1.
i8i3
<8>5
■SiG
1S17
Carnaval.
Été.
Automne.
Printems.
Ftnict,
à Venue.
Opéra Italien,
à Pari».
Grand Opéra,
à Pari!.
Idem.
Semiramidc.
■ Reims.
La Siège de
Corimhe,
El. Colbran Rossini , Rosa Mariant,
Sinclair, ténor anglais, Galli,
Pasla , Momhelli , Schiasetli, Cînli,
Amigo, Zucchelli, Lenuenr,
Pellegrin'i, M11" Dotll'
M"" Cinti, Frémoot, Dérivis,
Nourrit père el fila, ProToat.
M"" Ginti, Mori, Ad. Nourrit, Al.
Dupant, Levasseur, Dabadie ,
HM Dabadie, P. Prevot.
CANTATES.
, Il P
.. R. la ducLise
. erri, au théâtre dti
Fonda, à Napk*.
„ Pour le roi de Piaplcs.
Pour l'empereur d'Au-
triche, au théâtre» .St.
Charles.
1 Pour le bénéfice de
. DidoDe abbando-
Egle c Irène.
Thetis et Pelée.
La Rieonoaceni
, Jl.croOmaggi.
ri point été eiècutéc publi-
quement.
Ëlisabetla Col bran , Gerola-
ma Durdanelli, Merghcrila
Cbambraud, Noiiarï, Darid.
Elis ab et ta Cnlbran.
Eiisabclta Colbran, David, et
Gio. Bottieta Itubioi.
. Gerolama Dardanelli , M««
Chaumel , Rubini et Benc-
delli, : . 1
H" Tosi, Velhili, CriielU,
Galli a Campileffi.
s fuite
1 noire der-
— Dans la critique que n<
nier numéro du la lenteur des administrations qui .se sont
succédées à l'Opéra depuis vingt ans, nous n'avons point
prétendu comprendre celle de M. Choron, quia pu trouver
des censeurs sous d'autres rapporta, mais qui. quant à
Digitizod by Google
444
l'activité, a fait une exception digne de remarque. En effet,
dniis le cours d'une administra lion qui n'a duré que dix-
sept moi» (du ao novembre i8i5auaomars 1817), M. Cho-
ron a mis en scène sept ouvrages nouveaux et remis qua-
torze anciens, dont plusieurs en trois actes, avec des
flécorations nouvelles. Lu voici la note détaillée :
i* Ouvrages nouveaux. Opéras : te Rossignol, composé
et monté en six semaines; tes Dieux rivaux; Nathalie, trois
actes; Roger de Sicile. Ballets ; Flore et Zcpkyre, que H. Cho-
ron a établi et soutenu contre toutes les intrigues de cou-
lisses; le Cainarat de Venise, composé et monté en trois
semaines; les Sauvages de la mer du Sud, ballet sur lequel
l'administration des Menus lui fit, malgré lui, perdre trois
mois en essais infructueux, pour trouver un lever du soleil,
dont l'effet ridicule lit donner au machiniste-opticien le
sobriquet de Grippe-Soleil.
2° Ouvrages remis. Opéras : tes Myetèrcs (CIsis, réduits
en trois actes; les Abencèrages, réduits en deux; Panwge,
en trois actes (décorations nouvelles) ; Astyanam, les Pom-
miers et le Moulin, Castor et Pollux, Sait! et Us Bardes. Bal-
lets : ta Chercheuse d'esprit, Pâris, le Déserteur, la Dansa-
manie, Psyché, Paul et Virginie ; ces deux derniers avec des
décorations en partie nouvelles.
M. Choron avait préparé la mise de ta Lampe merveilleuse,
composée à son invitation, et la remise des Danaldes et de
Fernand-Cortez, et nous l'avons entendu assurer que s'il
n'a pas offert un nombre encore plus considérable d'ou-
vrages, c'est 1° grâce aux entraves de tout genre qui em-
barrassaient sa marche, a" à raison de la disette d'ouvra-
ges prêts à être mis en scène, disette qui était telle que
l'on était obligé de faire composer et d'apprendre scène
par scène.
Il est un fait reconnu par les anciens administrateurs
de la Maison du Roi; c'est que de toutes les directions de
l'Opéra, c'est celle de M. Choron qui a coûté le moins
et qui a produit le plus.
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NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN.
&'maùm in %tqtri
Le véritable style bouffe, supérieurement traité par Ci-
marofia, était négligé depuis plusieurs années en Italie,
quand Rossini commença à le faire renaître dans Vln-
ganno Ftfice et dans la Pielra del Paragom. Mais ce fut sur-
tout dans l'/tetâtna inAlgeri que ce style, création de l'é-
«>li: italienne, brilla de l'éclat le plus vif. Avec autant de
verve que sou admirable modèle, Rossini avait reçu de la
nature le don précieux d'un sentiment d'harmonie plus
riche , et celui d'inventer avec facilité des cnntilèucs char-
mantes. Moins abondant peut-être en motifs heureux,
moins propre à produire de grands effets par dus- moyen*
simples, il remplaçait ces avantages par ceux d'une grande
habileté a présenter des phrases analogues avec un air du
nouveauté, d'une harmonie vigoureuse et d'un système
d'instrumentation rempli d'élégance et de charme. Enfin ,
sa musique, vive, gaie, bouffe au plus haut degré, était
nouvelle et de forme inconnue, lillu devait donc plaire:
aussi plut-elle généralement. Que dis-je P elle mit en dé-
lire presque toute l'Europe, et son succès surpassa tout ce
qu'on avait vu jusqu'alors. (
Quoiqu'il y ail moi us d'invention dans Vltaliamin Algert
que dans le Barbier de SéeiiU et dans la C/merattota , on ne
peut disconvenir que le style bouffe y est plus franc, plus
décidé, plus indigène que dans ces belles compositions.
Toute la folie italienne ne peut avoir d'accens plus vrais ,
plus libres, que le finale du premier acte, depuis le chœur.
Viva, vira il flagel iUIU donne , jusqu'au dernier ensemble
V ù sossapra il mio ctrvetlo, ou que le triu Papataci. Le der-
44»
nier finale, bien qu'il ne soit pas un morceau du premier
ordre, est aussi une de ce débauches de musique bouffe
qui ne peuvent naître que dans le cerveau d'un musicien
né dans le midi de l'Italie. Itie» de plus élégant que le due
de Mustapha ef de Lindoro : Se melitmii a prender nwgtie;
rien de plus gracieux que l'air Languir per una bella,
qu'on appelle improprement une cavatine. La délicieuse
phrase de cet air Contenta i/uiuf' aima est une de ces heu-
reuses inspirations qui sont si familières à Kossini. Enfin ,
presque tous les morceaux de cet opéra ont , sur ceux des
derniers ouvrages de ce maître, l'avantage de n'être pas
trop longs, et de faire marcher l'action.
Tout n'est pas de la même force dans VItaliana; on y
remarque beaucoup d'inégalités, et Il osai ni n'y semble pas
encore bien affermi dans sa manière nouvelle. Le duo Ai
caprici délia sort* est taillé sur le patron de quelques duos
de Guglieltni et même de Mosca. Les accompagnemens
de plusieurs phrases rappellent des traits de Cimarosa : tel
est celui du chœur Quanta robba, qui semble calqué sur
l'allégro du premier finale de la Baltertna amante. Un em-
ploi trop fréquent des roialies s'y fait apercevoir ebgdte les
plus jolies phrases. Par exemple, dans le charmant duo
Se inciinassi a premier moglie, le trait un appena in cento sposo
se répèle eu descendant d'un degré sans aucun change-
ment d'harmonie, et choque l'oreille par deux accords
parfaits complets, qui se suivent en descendant d'un
degré, et cette phrase se répète plus loin dans un autre
ton , en reproduisant le même défaut.
Ccl ouvrage n'eut point desuccès à Paris lorsqu'il y fut
représenté en 1816, et ne s'est jamais relevé complète-
ment de ce premier échec. Soit qu'un ne fût point accou-
tumé au nouveau genre de musique qu'il annonçait, soit
qu'on fût plus choqué des endroits raihtcs que satisfait des
beautésqu'onylrouve.il c*t certain qu'il n'eut alors qu'un
très pelit nombre de représentations, qui ne laissèrent 'que
des impressions défavorables dans l'esprit des amateurs.
VInganna Ftlict qui succéda à Vltatiann au théâtre de
Paris ne fut guère plus heureux : c'est sans doute à ces
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44;
deux essais infructueux qu'il font attribuer le peu d'em-
pressement des hnbilans de celte ville pour la musique de
Bosxini jusqu'à l'apparition du Barbier, qui changea l'in-
différence en enthousiasme1.
Ou pouvait croire que le beau talent de Al" Pisaroni
serait suffisant pour ramener la foule à VItaliana; mais le
même air de solitude qui règne depuis si long- temps au
théâtre Italien s'est encore montré dans cette occasion.
Quelques amateurs épars dans la salle cherchent en vain à
ranimer l'ancien enthousiasme: le froid d'uuc représenr-
talion délaissée les gagne malgré eux, et arrive jusque dans
l'orcheslre. On a cependant recherché des spectacles ou
l'exécution était moins salifaisante que dans celte reprise de
VItaliana. M°" Pisaroni, un peu trop sérieuse peut-être
pour le rôle d'Isabella, n'en a pas moins montré le plus
beau talent dans tous les morceaux, particulièrement dans
son air Pensa a'ia patria. Je l'ai déjà dit, les proportions
qu'elle sait donnera son chant sonl les derniers témoignages
delà supériorité d'une école qui se perd, et dont il ne res-
tera bientôt plus de trace. Le caractère de sa voix est plus
propre au genre dramatique qu'au genre bouffe; mais
partout Où la phrase se prête à l'expression du grandiose,
cette cantatrice est admirable , malgré les défauts qu'on
lui connaît , ei que j'ai signalés plusieurs fois.
Galli est, comme on sait, un bouffe excellent qui sait
animer la scène comme il le faut dans une composition
du genre de VItaliana. Parmi les acteurs qui vienent de
jouer cet ouvrage , il est le seul qui l'ait chanté d'origine,
car ce fut pour lui et la Marco] ini que l'ouvrage fut écrit.
Il est fâcheux que sa vocalisation soit devenue lourde au
(i) Ce fait, bien connu des amateurs qui ont suivi le< représent al ions
du théâtre Italien depuis long-temps, démontre l'injustice de l'accu-
sation qu'on a portée contre M. Faer, d'avoir retardé le succès da Ros-
sini A Paris. J'ajouterai une le Parbitr ds SèviUt rnémp avait manqué
tout son effet aui deux premières représentations, qu'il n'obtint son
triomphe qu'après que madame Rouzi Debcgois eut cédé son rôle a
madame Mainviellc-Fodor, et que ce fut M. Paer qui, par une négo-
ciation entre cet deui cantatrices , •aurai ce bel oavrage de l'outra}»
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44»
point de ne pouvoir exécuter les traits en mesure. C'est
surtout dans les morceaux d'ensemble qu'il produit du
l'effet : on y sent la supériorité d'un talent qui mène Ions
les autres , et qui eut certain de l'effet qu'il doit produire.
fiordogni, toujours pur dans sa vocalisation , mais dé-
coloré dans son style , a chanté fort proprement son aie
Languir per itna bella , mais n'a pas aussi bien réussi dans
le duo que lorsqu'il l'a exécuté an concert de la Toussaint.
Quant à Graziani, ma;gr£ sa mauvaise voix., il n'y a que
des éloges à lui donner, car il est impossible d'être pins
divertissant qu'il ne l'est dans tout son rôle , et particu-
lièrement dans le trait dufînaledu premier acte : Sono corne
una cornaxchia cke spennata. fa crâ , irà.
En résumé, l'exécution de VItaliana a éTé très satisfai-
sante, surtout dans les morceaux d'ensemble. ï.cs musi-
ciens français ne sont point assez persuadés de ta supé-
rïorilé des Italiens en ce genre , et ne les prennent pan
assez pour modèles. L'unité de sentiment des Italiens lient
du prodige , et ressemble à l'effet d'une commotion élec-
trique , tandis que chez nous les chanteurs ne s'occupent
jamais de ceux qui doivent concourir avec eux à l'effet
général. Quatre Italiens d'un talent médiocre produisent
toujours de l'effet dan un quatuor ; quatre bons chanteurs
français ne pourraient réussir aussi bien qiCaprcs de
nombreuses répétitions : je doute même qu'ils pussent
parvenir à ne faire qu'un seul instrument, comme les
Italiens. Cela tient-Il à la différence d'organisation, ou
au peu d'importance que nos chanteurs attachent aux
morceaux d'ensemble? c'est ce que j'ignore.
ÉCOLE ROYALE DE MUSIQUE.
Dïstribntlon lien Prix.— Cuncert des élèves.
Dans tous les établissemen s d'instruction publique, le
triomphe des élevés suit d'ordinaire leur victoire, et les
Digitizcd t>y Google
prix qu'ils obtiennent leur sont distribués aussitôt que dé-
cernés. Il n'en est pas de même à l'École royale de Mu-
sique; c'est à la fin de l'année scolaire que les concouru
ont lieu; mais ce n'est qu'après la rentrée des classes que
les prix sont distribués. Peut-être a-t-ou cru qu'il est né-
cessaire de multiplier les occasions solennelles qui peuvent
exciter l'émulation ; mais peut-être aussi attache-t-on
moins d'importance à des prix qu'on ne reçoit que long'
temps après qu'on les a mérités. Au reste, je n'insiste pas
Hur celle objection qui peut Cire cou traversée, et je me
hâte d'arriver a la distribution mémo.
La solennité dont il s'agit se partage depuis plusieurs
années en deux parties dont l'effet est bien différent sur
une assemblée désintéressée. Le premiiir spectacle qui
s'offre à ses yeux est une réunion imposante déjuges et
de professeurs d'un talent plus ou moins distingué, et
dont la réputation a plus ou moins d'éclat. Des prix ■
breux sont décernés; des salves d'applaudissemen t accueil-
lent les lauréats; ou est donc fonde à croire que les tjlcus
pullulent dans l'école, et que le jury n'a eu que l'embarras
du choir; car comment croire que des hommes dont to
goût doit être sûr et sévère, aient usé d'une indulgence
funeste. Tout se passe donc a merveille pendant la distri-
bution. Mais enfin arrive le concert qui doit soumetl'-0
non-seulement les triomphateurs, mais le jury lui-nie«»e,
au jugement du public. Là, plus d'illusions possibles ; pl,lfi
de lalens métaphoriques; des réalités bonnes ou mauvais68
sont tout ce qui reste devant un juge incorruptible. -
H faut bien le dire, depuis la dissolution de l'ancien
Conservatoire, l'effet de celte seconde partie de la séance
ne ressemble guère 4 celui de la première- *>« i"»trU~
men listes habiles ont, il est vrai, recueilli les suffrage s"**"
public; mais léchant, sauf un petit nombre d*«cèpUtA»»»
n'a pas même offert d'espérances pour l'avenir; et l'art
dramatique n'y a rien trouvé pour réparer ses pertes. J
l'aspect de ces exercices mesquins, le public demande où
«ont ces jeunes artistes qui ont mérité tunt de récompenses*
cl ne les trouve pas. Les mûmes choses se répétant pl »*-
45o
sieurs, années de suite, les murmure» se font entendre, et
le discrédit arrive. On n'accuse pas seulement l'École
royale de Musique de ne pas produire de talent, on affirme
qu'il l'empêche de naître. Autrefois un élève du Conser-
vatoire marchait la tête haute et tout fier de sa qualité
d'élève, comme on l'est en d'autres lieux de celle de pro-
fesseur. Aujourd'hui, à peine ose-t-on avouer l'école dont
on sort.
Disons-le, si les reproches du public et des journalistes
sont mérités en partie, il y a de l'injustice dans leur sévé-
rité, et quelquefois de la légèreté dans les juge mens qu'on
porte. Il y a, dans l'examen des produits d'une école sem-
blable à celle dont il s'agit, deux choses distinctes : la pre-
mière est l'effet absolu qui résulte de l'exécution bonne
ou mauvaise: c'est de celle-là que le publîo est juge-né;
la seconde est l'effet relatif, c'est-à-dire la comparaison
des produits d'une année avec ceux d'une autre. Ici le pu-
blic , et même les gens qui font profession de juger, peu-
vent se trouver en défaut, parce que leur mémoire est fu-
gitive, et parce qu'Us manquent de documens pour décider
s'il y a progrès ou décadence ; c'est ce qui est arrivé cette
année. Tous les journaux se sont accordés à présenter le
concert qui a suivi la distribution des prix comme le der-
nier terme de la nullité, et comme une décadence arrivée
au plus bas degré. J'affirme que ce jugement est erroné.
Considéré en lui-même, cet exercice était peu satisfaisant;
mais comparé à ceux des années précédentes, il a présenté
des améliorations notables, même dans le chant. Eu sup-
posant même qu'on ue voulût poiut m'accorder qu'on y
trouvât des chanteurs, il faudrait bien convenir qu'il of-
frait des voix; c'est du moins la matière première. Le
temps fera le reste. . ,
D'ailleurs, à quoi servent tant de déclamations contre
l'École royale de Musique? de ce qu'elle produit peu.
faut-il en conclure qu'elle empêche de produire? et s'il eu
est ainsi, d'où vient que rien ne se présente ailleurs? Paris
et les départemeus regorgent de professeurs de chaut,
d'harmonie, de composition : où sont cependauL les ar-
Digitizcd b/Coogl
45.
listes qu'ils ont formés? Quels sont le grand chanteur on
le compositeur qui, préservés des entraves prétendues de
l'éducation de l'École royale , ont. charmé le public? Les
produits de V École royale ne sont pas ce qu'il pourraient
être; mais enfin ce sont des produits , et ce qu'elle donne,
est tout uo qu'on possède. Laissons donc les déclamations,
oiseuses, et si nous regrettons que les sacrifices du gouver-
nement n'aient pas de plus heureux résultais , n'arrivons
pas jusqu'à celte conclusion absurde qu'on n'a point de
chanteurs , parce qu'il y a dos maîtres de chant, cl qu'on
manque de compositeurs, parce qu'il y a des gens qui
enseignent l'art d'écrire la musique. Quoi qu'en disent les .
Arislarques, ce n'est point en détruisant qu'on édifie. Ve-
nons à l'examen du concert du 5o novembre dernier.
Due ouverture de Beethoven servait d'introduction ; elle
fui exécutée avec chaleur; mais les iiislrumens à veut
avaient négligé de s'accorder, et en plusieurs endroits
cette partie essentielle de l'orchestre Kl un mauvais effet;
les mêmes défauts se sont représentés pendant toute la
séance, et particulièrement dans l'accompagnement des
morceaux de chant. Dans un concerto de violoncelle,
M. Chevillard, très jeune encore, a donné les plus belles
espérances. A un joli son et k la justesse la plus rigou-
reuse, il unit une manière de chanter fort agréable sur sou
instrument. On ne peut lui reprocher qu'un peu de timi-
dité dans l'exécution des traits; mais la hardiesse et l'é-
nergie sont des qualités qui ne s'acquièrent qu'avec le
temps. MU. S carie 11 a (flûte), Caillet (hautbois), et Divoir
(basson) se sont fait entendre dans un thème varié par
KM. Vogt et Guillou. Ce morceau n'a pas produit l'effet
qu'il aurait pu faire, à cause du défaut d'accord qui ré-
gnait entre les instrument; le hautbois était au ton do
l'orchestre, mais la flûte ot le basson étaient trop bas.
M. Caillet promet un digne successeur de M. Vogt, son
maître. Le concerto de violon qu'on avait conservé comme
le bouquet de la partio instrumentale n'a pu être entendu;
il devait cire exécuté par M. Saurai, élève distingué do
M. Baillot; mais ce jeune artiste, atteint d'une douleur
4 fer
rhumatismale a» bras, s'est trouvé hors d'état de jouer
son morceau.
Dans la partie vocale du concert. M11* ïlirlé, élève dé
M. Plan tjilc, qui a débuté à l'Opéra- Comique pour passer
ensuite au théâtre des Nouveautés, a chaulé l'air du troi-
sième acte de la Dame blanche. La voix de cette jeune per-
sonne n'est pas d'un volume considérable; mats elle est
agréable. Dans l'air qu'elle avait choisi, la justesse de ses
intonations n'a pas toujours été parfaite, et sa vocalisation
a laissé beaucoup à désirer. En se présentant pour jouer
l'emploi de M"' Gavaudau, an théâtre de l'Opéra- Comique,
emploi qu'on appellerait de seconda donna au Théâtre-Ita-
lien, M1" Hirté me parait avoir mieux calculé ses forces
que dans te- choix de l'air de la Dame btanohe. Cet air est
difficile, et ne demande pas moins que le talent de M™ Ri-
gant pour produire son effet. Au reste, ce n'est ni dans
l'âge de Al"' Hirlé, ni après aussi peu d'exercice, qu'oit
peut prononcer sur ce qu'elle sera un jour. "'
Quel dommage que M"° Yerteuil ne soit point musi-
cienne : avec une si jolie voix, une vocalisation facile et
un assez bon sentiment d'expression, elle pourrait devenir
une cantatrice distinguée; mais chez elle l'instinct de la
mesure est nul au point qu'elle est obligée, pour ne pas
la perdre lout-à-fail, de marquer les temps par des nioii-
vemens du corps. Il y a eu de fort bonnes choses dans le
bel air de M oise qu'elle a chanté; seulement je l'engagerai
à ne pas pousser sa voix à des cris , comme elle le fait de
temps en temps, et à soigner davantage sa prononciation.
M"* Verteuil est élève de M- Blangini.
Le qninlcllo de Cimarosa qui a été exécuté par Mu"
Hirlé et Rigal, et MM. Hichelmc, Bénédit et Burteanx,
est délicieux. Mais il demande un ensemble, une unité,
un piquant, qu'on ne pouvait guère espérer de la part
d'élèves inexpérimentés. On remarquait dans l'exécution
de ce morceau une timidité qui en détruisait tout l'effet.
Jeunes gens, allez étudier cette partie de voire art au
Thédlre-Italicn ; n'y eût-il aucun chanteur remarquable,
vous y apprendrez ce que c'est que l'ensemble dont je
DigilizGd Google
455
parle, et quelle est sa puissance. J'ai remarqué dans ce
morceau mie assez belle voix île basse, qui est, je crois,
celle de M. Uurlcanx.
Un air des Voitures versées, chanté par M. Bénédit, fait
concevoir quelques espérances sur ce jeune homme, dont
la voix est un peu sourde, mais qui ne manque ni de cha-
leur ni d'intelligence.
Je le répète, si cette épreuve des progrès faits dans l'an-
née écoulée n'est pas sans reproche, elle est plus satisfai-
sante que celle des années précédentes.
FÉTIS.
— Les soirées de salon que la mode a substituées aux
concerts d'apparat ont commencé leur cours jeudi 29.
M. Panseron, l'un de nos professeurs de cliant les pin»
renommés, a montré l'exemple aux virtuoses de la capi-
tale par une charmante réunion d'artistes distingués.
MM. Habeneck aîné, Tulou, Payer, Petit , Rigel, Baudiot,
Vogt, Gallay, Panseron et M™ Dabadie feraient les hon-
neurs de la soirée. Les morceaux les plus remarquables
ont été un air varié, joué par M. Habencck avec une rare
perfection ; une fantaisie pour la flûte où M. Tulou a mon-
tré son talent prodigieux; une romance suisse supérieure-
ment chantée par Lcvasseur, etfortbien accompagnée par
M. Vogt, sur le cor anglais. Les ranz de vaches qui forment
les ritournelles de cette romance et qui l'accompagnent
font un cifet charmant sur cet instrument. On a aussi
beaucoup applaudi un quatuor pastoral, chanté par
M"* Dabadie, Ad. Nourrit, Levasseur et Panseron, et ac-
compagné sur le hautbois par M. Vogt. La partie vocale
était composée principalement de romances et de noctur-
nés composés par H. Panseron , parmi lesquels on a sur-
tout remarqué la romance avec accompagnement de cor
obligé que ce professeur a publiée l'année dernière, el qui
a eu tant de succès. M . Gallay a joué supérieurement la
partie de cor obligé. En somme cette soirée a été remar-
quable par le fini d'exécution de la plupart des morceaux,
et a fait le plus grand plaisir à l'assemblée.
— Itarcment une affiche paraîtassczremplie, quand il
454
s'agit d'une représenta lion à bénéfice, dont le» prix sont
fort élevés; mais presque toujours le spectacle est fatigant
par sa loDgueur. A la lecture du programme , il semble
qu'on ne peut avoir assez de choses pour son argent ; mais
une fois entré dans la salle , les spectateurs feraient volon-
tiers la remise de la moitié de leur plaisir, et ce plaisir dé-
génère souvent en ennui par sa longueur. Il n'en a point
été ainsi de la représentation an bénéfice de Ruet qui a eu
lieu le 5 de ce mois: car bien qu'elle ait duré depuis sept
heures du soir jusqu'à une heure du matin, l'ennui n'a pu
trouver place un instant dans la soirée. Une réunion im-
posante des acteurs, chanteurs et danseurs les plus renom-
més des divers théâtres de la capitale, et de plusieurs mu-
siciens distingués, a si bien varié les plaisirs du public,
qu'il n'a point eu le temps de s'apercevoir de l'heure avan-
cée ou finissait le spectacle, et que l'on n'a point vu,
comme d'ordinaire, abandonner les places avant que tout
fût But.
Le spectacle se composait de Picaros etDiègo, où Chollel
paraissait pour la première fois; des deux derniers actes
de la tragédie de Romeo et Juliette, joués parles principaux
acteurs du théâtre anglais; de Valérie, comédie du
Théâtre Français; et enfin d'unintermède piquant où tous
lesacteurs des divers théâtres ont paru, et qui s'est ter-
miné par un divertissement dansé par les premiers sujets
de l'Opéra, et par un concert exécuté par MM. Yogi, La-
font, Ponchard, Chollel el M" Schutz. Nous rendrons
compte de cette représenliou intéressante.
ANNONCES.
— Trois grands quatuors pour deux violons, alto et violon-
celle, dédiés à Sa Majesté le roi de Prusse, par L. Jadis,
chevalier de la Légion-d'Honnetir, gouverneur des pages
de la musique du Roi . Prix : 11 fr.
Paris, l'auteur, rue Bergère, n° a, etFrey, place des Vic-
toires, n- 8.
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455
Cet ouvrage, dont nous avons annoncé la souscription,
a été exécute avec le plus grand succès par M. Baillot et
autres artistes distingués, dans unematinée musicale. Ces
quatuors tiennent le milieu entre les compositions intri-
guées de l'école allemande, et lessolos accompagnés dans
le style de Viotli, de Rode et de Fracnzel. La partie de
premier violon est brillante, mais n'exclut pas l'intérêt des
autres parties. On a remarqué surtout le second quatuor,
en fa mineur, qui est d'un caractère à la fois uoble et pas-
sionné. Le menuet de ce quatuor, alternativement à trois
etàdeux temps, est original. Quoique le genre du quatuor
instrumental soit maintenant peu cultivé en France, nous
ne doutons pas que les artistes et les amateurs s'empresse-
ront à faire l'acquisition de l'ouvrage de M. Jadin. qui
variera agréablement leur répertoire,
— Journal de musique religieuse, offrant un choix de textes
et de poésies morales ou sacrées, soit françaises, soit latines,
mises en musique à uue ou plusieurs voix, avec accompa-
gnement d'orgue ou de forté-piauo, par les meilleurs com-
positeurs, et également susceptibles d'être employées pour
l'étude de la musique, pour le service de l'église, et les
réunions ou sociétés de musique; publié pour l'usage des
communautés et des maisons d'éducation de l'un et de
l'autre sexe, par M. Choron, directeur de l'Institution
royale de musique religieuse.
Première année, u" 4?> 48 et 4ç).
Paris, rue de Vaugirard, n"6g.
Parmi ces derniers numéros, se trouve un Rorate à quatre
voix, par l'abbé Vogler. Cette composition, peu remarqua-
ble sous le rapport de l'invention, est cependant d'un effet
charmant par l'heureuse disposition de l'harmonie et des
voix. Le chant est d'ailleurs gracieux et se rapproche du
style moderne plutôt que celui des compositions scolasli-
ques. Nous ne pouvons qu'engager M. Choron à multi-
plier en France les ouvrages de cette espèce, qui y sont
fort rares, à cause du défaut d'encouragement que les mu-
siciens y trouvent à traiter le style religieux.
— Le Goiït du jour, album musical, ou choix de roman-
Digitizcd by Google
456
ces nouvelles, composées par divers auteurs, avec accom-
pagnement de pian». Un volume orné de lithographies
et cartonné avec élégance. Prix : lafr.
L'époque du jour de l'an fait écloreune foule de recueils
de romances et de chansons destinés à Ctrc donnés eu pré-
sent ; celui-ci est un des plus agréables qu'on puisse offrir.
On y trouve trois romances nouvelles de M. Paer, trois de
M. Edouard Brugicre, un nocturne de madame Martin-
ville, etc., etc.
— Fantaisie pour la flûte sur l'air Portrait charmant,
avec accompagnement de piano ou d'orchestre, composée
par A. Pctibon. Prix : 6 francs, avec accompagnement de
piano, et 7 francs 5o cent, avec orchestre.
— Le Berger tt Appen-.el, nocturne à deux voix égales,
paroles de H. Scribe, musique de A. Audrade. Prix, avec
accompagnement de piano, etlilhographie,ja francs. Paris,
Pelihon, rue du Bac, n° 5t.
— Air varié et rondo , pour deux violoncelles , avec ac-
compagnement d'orclieslre ou de piano, par C. Baiidiut,
premier violoncelle delà chapelle du Roi, œuvre 26.
N.\ La partîo de premier violoncelle est arrangée pour
le violon.
— Air varié |el rondo, pour violon et violoncelle, avec
accompagnement d'orchestre ou de piano, par le même,
œuvre 27.
j Piano 6 fr.
Prix de chaque, avec air : Orchestre 9
( Orchcst. et piano ia
A Paris, chez Pleyel, boulevard Montmartre, n" 1.
Ces m'orecaux, qui sont a la l'ois hrillans et remplis de
de mélodie, jouissent dans le monde du plus grand succès.
L'air varié pour deux violoncelles présente de l'intérêt aux
amateurs, par le petit nombre de compositions de celte
espèce , et par la manière dont l'auteur a traité les deux
parues principales.
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WOTICE
donne les principes pour accorder ei jouer la vielle et la mbcblie,
déni des princïpaui instruirions a cordes cl à archet de «ou tempi.
Nous avons vu avec regret , dans la Revue musicale
qu'un travail précieux surl'tustoirè ilu violon, commencé,
il y a nombre d'années par H. Cartier, et enfin terminé par
cet estimable et laborieux professeur, n'a pu encore pa-
raître faute d'un nombre suffisant de souscripteurs pour
couvrir les frais de publication.
Cependant nous pensons qu'un ensemble de notions liia-
toriquessurle violon devient d'autant plus intéressant que,
jusqu'ici , le violon est peut-Être, de tous les instrumens ,
celui dont les auteurs se sont le moins occupés, faute do
matériaux certains pour trailcr de l'origine, de la forme
et de la manière d'accorcler et de jouer cet instrument ;
car tout musicien, ou tout amateur qui s'occupe de son art,
n'ignore pas quels sont ces auteurs, qui ont tenté du faire
connaître les principales sortes d'instrumens de musique,
tant anciens que modernes. Parmi les diverses espèces d'in-
strumens, il eu est sur lesquelles nous avons des détails
intéressans , en raison de l'importance que nous pouvons
y mettre : tels que les instrumens à vent des anciens et
des modernes, les instrumens de percussion, et quelques
instrumens à cordes de laiton ou de boyau ; mais ni Bar-
tholini, ni Blanchini, ni Labordc n'ont fait autant île
recherches sur les instrumens à cordes et à archet que sur
toutes les autres espèces d'instrumens. Ce dernier auteur
dans sou Estai tur ta Musique1, avoue que les renseigne-
mens sur le violon lui manquent , parce qu'ils ne lui ont
pas été fournis ( comme la plupart de tous cou* qu'il
donne sur les autres instrumens).
(0 Tome II, n° 3;, page s8q.
[)) Tome I, pige 3Sfl.
a* vol. 5g
456
On peut donc croire que, quand même l'Essai hit-
torique sur le violon de M. Cartier n'atteindrait pas la per-
l'eclion qu'un premier ouvrage, dans lel genre et aur telle
malien: <|uc ce soit1, ne peut avoir , cet lissai historique
étant le premier mis au jour en Europe, devient par cela
même d'une importance réelle pour l'histoire de l'art, et de
l'exécution musicale. Nous ignorons el nous ne connaissons
nullement quels son! les matériaux dont M. Cartier a pu tirer
parti pour son ouvrage; mais, d'après le preris qu'en donne
l'auteur de l'article inséré dans la Ko vue musicale1, on
peut croire qu'ils sont d'un grand intérêt . et nous sai-
sissons l'occasion de la publication de cet ouvrage , qui,
lot ou tard, ne peut manquer d'avoir lieu , pour donner
ici la traduction d'un manuscrit de la ISibliuthèque du roi,
iuconuu jusqu'ici; el seulement mentionné dans la Littéra-
turemusicale de Forkfil *, d'après l'abbé I.cbœuf, qui en parle
dans sa Dissertation sur l'Histoire ecclésiastique J. ,11. Cartier,
n'ayant pas eu connaissance de cet important manuscrit ,
comme il y a lieu de le présumur . ne parle probablement
de l'usage du violon moderne que depuis le siècle de la
fllcneslrandic (en i3âo) (ou- en pouvant croire ccpcxi-
(i) Tome I, n„ g, page ajà.
(a) Atlgemcmc LittcraUr der Wu,!k , page 49l .
(5) Tome II , page 1 16; le maouicrit de Jérôme de Moravie sur la
miuiqnc (dit l'abbé Lebanf) fut trouvé «boa, que Pierre de Limoge*,
docteur, le légua à lu chapelle du collège de Sorbonne pour j renier en-
chaîné.
(4) Lu chapitra XXI de VEitai air ta Madqut, par iaborde , tome I ,
moyen !ige était un instrument dont la forme ressemblait a. peu près i
celle de notre violon aciucl , comme le prouve le manuscrit donl nom
vielle, cl qui n'a toujours été qu'un instrument de mendia» , s'appelait
alors rôle ou rotite. C'est ici l'occasion de prévenir le lecteur qu'il n'eil
peul-PIre pas d'ouvrage «tir la musique doul il doit plut se délier que
l'Ewai de Laborde, ouvrage rempli de beaucoup de recherches, mais
et Bornent infidèle; cet historien donnant eomille occasions uo sent force
a ici citations , et cela selon les connaissances et l'opinion qu'il avait de
U matière. Nous trouvons encore deui autres preuves de ce que nous
DigiiLrefl by Google
459
daut qu'à celte époque le violon de ces temps-là devait
être déjà très ancien. Le manuscrit de Jérôme de Moravie
ne peut donc que compléter ce que l'auteur de l'Essai his-
torique, du violon est dans le cas de donner sur l'élut de cet
instrument, pendant les XII, XIII, XIV, ei XV siècles.
En parlant des violons, ailes ut basses perfectionnés par
(U. TÏiiboust, l'érudil rédaclcur de la llcvtic musicale'
donne un aperçu de la structure du violon, telle qu'elle
était au XV" siècle, cl, d'après Luscinius, dit que cet instru-
ment n'avait pas d'éclisses et ressemblait plutôt à une
mandoline qu'au violon, quant à sa partie inférieure. Celte
assertion est parfaitement exacte, comme nous allons 1<;
démontrer ; mais l'accord du rebec ou violon rustique ,
moulé de trois cordes la, mi) était-il celui des vielles
(ou violons ) , entièrement consacrées à la musique et joués
parles ménestrels connue dans les siècles antérieurs5? (/est
une question qu'il sera facile de résoudre, du moins nous
le pensons, au moyeu des docuineus certains i[ue nous
avançons dans ce même, chapitre ; car Labotde dit , paga 4 '6, ligne la ,.
que le rebec succéda i la vielle, tandis que la vielle , le rebec, U nulle.
au d'une roue Faisant la Fonctionlle l'orchef, estaient tons ensemble
dans le temps ou lei troubadours, les ménestrels, les jongleurs, Ici viel-
laurs , loua gens qui faisaient leur occupation de poésie uu de musique ,.
ou de l'un et l'autre de cei deux art* ensemble , en liraient parli pour
subvenir a leurs moyens d'eiisLence. Cet auteur dit encurc , page 4 17,
lignes 8 et 9 , qu'il y avait en 1 33o des basses et dea dessus de rehec , 'rt
qu'alors les mènes trie rs s'intitulèrent joueurs d'ins (rumens tant Août ific
ha*. Iticn cependant ne prouve que le rebec, instrument rustique, dftt
ittt ainsi distingué ; car certainement les villageois ne savaient pas ciér
cuter une partie plus grave que celle de la mélodie, cjuc ne li^ s:ivcni ac-
tuellement nus joueurs de violon de campagne. Il est plutôt probable
raison de son étendue, et sur la rnbebbe, des mélodies tantes et basses
pour Former plusieurs partiel simultanées, qui auront pris In dénomina
vent les trois manières d'accorder la vielle, doonées par Jérôme de Mu-
(i)Tome 1, n" a6, page :'>.
(1) Il aoiinait dut le XIII* ' sitolo. Son oianusiri* est le l'an-
46o
fournît l'auteur du manuscrit, Jérôme de Moravie, qui dans
son ouvrage, parle très clairement des deux principaux
instrumens à cordes et archet de sou temps.
Ce manuscrit, comme le dit Forte!, était effectivement
dans la bibliothèque de la'Sorbonne, sous le n* 1 244. H
est heureusement passé à la Bibliothèque du Uni , et il fait
présentement partie du Fonds-Sorbuune, sous le rr 1817,
des manuscrits latins. Nous avons fait un extrait de cet
unique et précieux manuscrit. Laissant à part ce qui cou-
cerne tei proportions , les interxattes, et tes règles données
pour le plain-éhant, nous avoiiB renfermé dans notre extrait
des principes de notation, de mesure musicale du temps, les
règles du déchant , rémunération des différentes manières
de former l'harmonie simultanée, que l'auteur distingue en
discantus (déchant), organum, duplex organum, conduc-
tus et Mothetus divisé en six modes ou manières. L'au-
teur traite ensuite des ctnsoimances et des dissonances-. 11
examine et discute le plus ou moins de concordance et derfis-
cordance qu'elles ont de leur nature. Tous ces articles sont
très intéressant pour l'histoire de l'harmonie en général :
maïs le chapitre a8 , qui est le dernier de l'ouvrage , nous
parait être le plus curieux et le plus utile , en ce que les
données que l'auteur met sous nos yeux sont uniques et ne
se trouvent dans aucun des manuscrits des siècles anté-
rieurs et postérieurs à celui dans lequel ce Traité de Musi-
que a été composé.
Mous pensons que ce chapitre est trop important pour
l'histoire du système , de l'accord et de la manière de jouer
les instrumens à cordes et à archet de ces temps reculés,
pour ne pas fin donner la traduction. Quant au texte latin,
où il existe plusieurs mots forgés par l'auteur en raison de
la matière qu'il traite , nous renvoyons au manuscrit que
l'on peut voir à la Bibliothèque du roi.
< Chàpitïk xviii. Nous avons démontré ci-dessus [dit
1 l'auteur du manuscrit) de quelle manière ou peut trouver
• théoriquement les progressions harmoniques par le
€ moyen des nombres, des. poids et des mesures ; ilnenous
* reste donc présentement , dans ce dernier chapitre, qu'à
4«.
€ parler de la pratique , et de quelle manière on trouve les
■ proportions harmoniques dans ses [tnstramens d) cordes '.
« Or comme, selon le philosophe 1 , tin peut tirer grand
« parti de peu de chose, nous parlerons d'abord de la ru-
• bebbe et ensuite des vielles. 1 i' -,' :
■ la ru bebbe est tin instrument de musique qui n'a que
d deux cordes qui sont à la quinte l'une de l'autre, et cet
« instrument se joue ; ainsi que la vielle, avec un archet.
« Ces deux cordes, tant par elles-mêmes qu'au moyen de
« l'appKcation des doigts (sur le manche de l'instrument) ,
« donnent dis olefs {dix sons) savoir, depuis C, fa, tit
« ( UT grave), jusqu'à d, la, sot, re (RE d ta neuvième d'UT
• grave) *, et cela de la manière suivante. Celui qui joue,
o la rubebbe doit tenir cet instrument dé la maiu gauche ,
« entre le pouce et l'index , près de la léte { de l'instrument )
■ et dans le milieu [de la main), de la même manière que
■ l'on lient la vielle. S'il touche avec l'archet la première
■ corde en ne posant sur elle aucun doigt , la cerde donne
- loson C,fa,ut (UT grave d vide); si l'on applique l'index
• en le tournant, comme nous l'entendons dans l'appli-
i..1 -i> . . - ■ . J'Jîl! i |*t* . I,"ji(j|i jili 'u tiirnji
(l) Toui les mots qaî , dans celle traduction , eiisttnt entre deux pa-
renthèse! ne sont point dans le manuscrit, mais nous les irons ajoutés
pour servie à l'intelligence du teite traduit fidèlement.
(a) Quoniam atitem seeuodum pbilosopUum in paucioribus «ia ma-
gna, ideo, primo de rnbeba, pustea de viellis, dicemus. Est autem ru-
beba niusiciim inatrumtntum habens lolum duos chordas , iono distan-
tes a se perdiapente, quod quidem sicut et vieJla et cum arca tangitur.
(3) Dans le système de la Main harmonique et mélodique, de Gui d'A-
rciio, chaque lettre désignait une corde (ou son) appelée clef, d'où cet
Tenu le nom de elef donné au G, qui primitivement était la clef de sol,
et de même au C, qui était la ciel' -l'ut, et enCu h 1'*' qui était la clef
de fa.
□içjtized t>y Google
46a
• c.iiioo (les, autre» doigt», soil sur la rubebbe ou nur la
• vielle, et qu'il tombe ainsi nature llemc ut sur cette même
■ corde, on obtient le iati D, soi , re (CE gravi). Si l'on ap-
i pligue le doigt du milieu près de l'index, dans le mi-
■ lieu *, ce que l'on doit Taire sur In rubebbe pour tous les
■ autres doigts, on forme le son E, ta, mi (Ml grave). Si l'on
■ applique l'annulaire ou quatrième doigt \ ou obtient le
«spn F, /*, ut (FA grâce). Or il est nécessaire que,
• pour passer outre, ce soit la corde suivante qui forme
■ les .autres sons 1 : savoir, G ,■ sot, re, ut (SOL), qu'elle
• donne sans application de doigt {d vide), et par l'appli-
" cation de l'index A , la, ml, re (LA). De même par l'ap-
> pli g «lion du doigt du milieu tombant naturellement sur
■ la corde, mois tourné et tiré en dessus près de la Le. le de
• la rubebbe., on obticot le son 0, fa (SI bémol). Au
» moyen de l'application de ce même doigt, mail non
• tourné et tombant naturellement , on l'orme le fc) mi (SI
" naturel), ce qui démontre clairement quo du même
< dofgt ou forme deux. sons diBérens, c'esl-à-dïrc |> fa et
. t] mi ( SI bémol d SI naturel). Enfin , par l'applioa^qp du
» quatrième doigt, on obtient C , soi, fa, at (ut octave rf'UT
• içrave), et, par l'application de l'auriculaire, on oblicul
• pour complément le son d, la, sol, re (re ociace de RE
» gravi), et la rubebbe ne peut monter davantage.
• Pour ce qui est de la vielle, quoiqu'elle monte plu*
> haut que la rubebbe, elle ne monte, plus ou moins .
( i) la medietate, dit l'auteur. Nous croyons .qu'il veut dira le dorgl
appuyant par U phalange du milieu , ce qui pourrait faire croire que ce-
lui qui jouait île la rubebbe et de la Tielte devait tenir l'inalra ment sur
ou entre ses genoui, puisque, s'il l'eut tenu sur la clavicule près île ri-
pante gauche, comme nui violonistes modernes, il n'aurait pu former Ici
"Om qu'en appuyant les doigU par lu milieu de leur eilrémilé. C'est
décider la question, n'ayant pas de données certaines sur la grandeur,
ni sur la longueur et le volume de ces deux instrument:.
(l) L'auteur appelle le quatrième doigt le médecin , mais celle deno-
quatrième doigt. ^ ""^
(1) Ce qui prouve qu'une fub la main posée on ne lu dii angtait ja-
mais pour prendre une autre posiliuu.
Uigilized t>y Cooglp
46»
« qu'en raison de» diverses manières dent on t'accorde :
■ car la vielle petit être accordée de trois manières.
* Cet instrument n'a que cinq cordes et ne doit pas en
« avoir davantage. La première manière dont on l'accorde
« est comme il suit : Première corde , D (HE grave) ; se-
»conde,F (gamma ut; SOL, corde la plus grave de tout le sys-
■ terne) ; troisième, G . dans les graves , (SOL grave , octave
0 de gamma ut. Ce sol octate est préstntement la quatrième du
• violon.) La quatrième et la cinquième cordes, toutes
« deux a l'unisson, donnent le son d dans l'aigu (re aigu).
« et alors elle (la vielle) peut monter depuis le gamma UT
1 (SOL le plus grave) jusqu'à aa double ('a aigu' à la
u quinte de RE aigu ), de la manière suivante *. i w n «
■ Or, nous disons que la seconde corde Tonne par elle-
■ même le son r (SOL le plus grave). Par l'application dé
• l'index, elle donne A (LA grave); parle médiaire, B
« (Sienne); par l'annulaire, C, dans le grave (UT grave).
• La seconde corde, qui est la première dans la vlèllc
« (c'est-à-dire placée ta première), et qui est le bourdon des
« autres ne donne qn'nn seul son qui est D ( RE grave).
» Cette corde, étant en dehors dit corps de là vielle et at-
o tachée sur le côté de l'instrument, se dérobe à l'applica-
(i) Étendue de ll vielle,
Ici cordes a vide* sont désignée! par lv> rondes.
(3) Celle qui bourdonne ou forme harmonie simultanée me les anitei
son» de rimtrumenl , comme nous le Terrons par la tuile.
464
• tion des doigls; mais les deux sons qu'elle ne peut don-
ci ne r, savoir E et F (MI et FA graves) , sont donnés à
a l'octave par les quatrième et cinquième cordes qui y
a suppléent, La troisième (corde) donne par elle-même
« (avide) G (SOL octane de SOL grave); par l'application de
• l'index. A (LA octave de LA grave) ; par le doigt du milieu
■ recourbé, b (SI [> ), et le ultime doigt , tombant naturel'
• leinent sur la corde, donne {'î SI naturel octace de SI
« grave). L'annulaire donne c aigu (UT aigu). La qua-
a trlème et la cinquième (cordes) donnent par elles-mêmes
■ (àride) d aigu (RE aigu). En appliquant l'index, on ou-
« tient e (MI aigu). Par le médiaire , f (FA aigu) ; par l'an-
« nulaire, g ( SOL aigu), et par l'application de Fauricu-
" luire, on obtient aa double (LA aigu). Et telle est la
« vielle, qu'elle renferme la faculté de ( rendre) tous les
« modes, ainsi qu'on vient de le voir clairement *. Or,
« c'est cette manière d'accorder les vielles qui est la pre-
■ La seconde manière est nécessaire aux laïcs \ surtout
Ȉ ceux qui veulent parcourir tous les autres chauts,
t principalement les irréguliers par toute la main '. Alors
(i) Il est bien évident , par ce que dit ici J.de Moravie, que la vielle
était alors L'instrument a cordes et a archet le plus parfait , puisqu'on y
pouvait exécuter tous les modes du système qui , en musique ecclésias-
tique, étaient an nombre de huit; mais en musique de chambre ou pro-
fane, ces mêmes modes étaient au nombre de douze. On en peut voir
la constitution dans le Dodtcachorde de Glaréan , ouvrage publié a Basle
en 1S47, et que l'on trouve i la Bibliothèque du roi, sous le n" V, in-fol.
61S.
(1) L'auteur veut dire , aux musiciens et autres personnes qui ne sont
pas dans les ordres sacrés et qui décident U musique profane. Il faut
remarquer que celte autre manière d'accorder la vielle prouve que , de
tout temps, l'exécution de la musique de chambre on d'orchestre a tou-
jours été plus avancée et plus fleurie que la musique ecclésiastique;
on y employait probablement des notes de passage, de fioriturci, dei
notesaltéréeiparla dièse, surtontdans lescadences finales pour donner
de la douceur et de la grâce à la mélodie , ce dunt la musique d'église
n'était pas susceptible. C'est ainsi qu'il faut entendre ce que dit ici J
de Moravie des chants irrégulieri.
(4) Dans toute l'étendue du «jstème.
DigitizGd b/ Google
4«5
■ il est nécessaire que toutes le» cordes de la vielle soient
• attachées an corps solide {de l'instrument) , et qu'il n'y en
• ait aucune de ce cillé, afin qu'étant ainsi disposées, elles
* puissent recevoir l'application des doigls selon le son
« (que l'on veut obtenir). Or, dans cette manière d'accorder,
» la première corde, c'est-à-dire le bourdon (le RE grave)
■ donne E et F ( MI et FA graves) au moyen de l'index et
* dumédiaire, afin qu'ils forment ces mêmes clefs [sont )
« de la même inauière que la première corde (de l'autrt
« accord cite ci-dessus). Les seconde, troisième et quatrième
« cordes sont comme dans la première manière [il' accorder
t ta vielle), mais non la cinquième qui doit être à. la quarte
• de d (re) ( c'est-à-dire) placée dans l'aigu à la quarte en
* dessus g [sol aigu), et alors celte cinquième corde, au
- moyen de l'application de l'index, donne aa (ta doublé
" aigu). Par le doigt du milieu recourbé (si \, double
« aigu). Par le même doigt tombant naturellement [sur ta
« corde) (si naturel double aigu). Par l'application de i'au-
« nulaire ce (ut double aigu), et enfin par celle de l'aurïcu-
« laire dd (re double aigu) *.
(i) Étendue de li vielle,
proinLLi p corde qui se jiriMcnic ;i l'ardu:! èlre re. Cl la seconde! cOrdciol
à la quinle en dessous de ce même re; mais en voici la raison. Comme
le» cordes graves de la vielle m:i vaii'iii non -seulement à rendre les mé-
lodies graves, mais aussi les sous qui luisaient harmonie sous les mélodies
forints de sons miiios graves, il éiaii uéeessaiic de laiic cette Irans-
4o
466
t ta troisième manière (</' 'accorder la vielle) est oppo-
i sée à lu première en rc tm<: la première , rude donne r
• ni { SOI, le plus «rave). G ( UT grave) est donne par la sc-
- conde corde ; G ( SOL ocluredr SOI, griire ) est donné par
■ la troisième ( corde) ; D ('RE aigu ) par la quatrième et la
■ cini|uiéme cordes. Et dans cette troisième manière {d'ac-
• corder ta vielle) excepté le |> aigu (SI [, aigu), que l'on ne
■ peut former sur la cinquième corde , toutes les autres
o voix médiaircs ( tet sons obtenus par l'application des doigts )
v se trouvent comme dans la première manière (a"accor-
■ der) ci-dessus désignée '.
[nation (hn.s !.i disposition île l'accord de l'instrument, pour que chaque
corde grave du système col sa quarte, sa quinlect son octave; et comme
le quatrième doigt formant l'ai grave sur ta corde sot efit été obligé de
faire Bonncren même temps le sol â sa quinte en dessus, si l'accord dr
l'instrument cnl été 1" corde soi grave, a' «à la qniute en dessus, ô'sol
j l'or la vi' de ml grave, etc. Le* vielleurs auront trouvé plus commode de
placer ce rc comme première corde, pour que Val donné sur la seconde
corde toi, par le quatrième doigt eût pour quinte sol troisième corde a
vide. Ce qui prouve que lins trament avait un manclie plus grand et plu'
large que celui de notre violon actuel, puisque dcui sons formés simul-
tanément par le même doigt auraient géné l'exécutant, qui puur plus di
facilité ne se servait même Je l'auriculaire que sur !c dernier son de la
cinquième corde {Voyez la note i, page 463.)
[i] Étendue de La vielle
Il faut remarquer que, dans cette troisième manière, les deux cordes
i vide les pins graves sont la quarte l'une de l'autre, pour donner plus
(!<■ iai'ilité de jouer le cinquième et te sixième modes rrrlèpiastiques .
modes que réunit dans son échelle relui de fa majeur de! modernes.
i tjiii que ce soil pourra donc posséder entièrement
«l'art du vîéller, ayant présent à la mémoire et niellant
« en pratique par l'usage te que l'on vient du voir.
• Enfin il n'y n plus à remarquer que le plus difficile; Is
plus estimé et le meilleur de cette science est de savoir
• répondre avec les premières consonnanecs que forment
« les bourdons à chacun des sons dont se compose chaque
« mélodie , [et que le bourdon ne doit être touché avec le
« ponce' o'u avec l'archet, comme le sont les autres cordes,
■ quclorsqu'il forme, avec les sons donnés par elles, l'une
il des snsdîtes consonnanecs, c'est-à-dire la quinte , l'oc-
«tave, la quarte, etc.; car la première corde, c'est-à-
i dire la plus inférieure ( quant d la place qu'elle occupe ) , et
• la plus forte, que l'on appelle bourdon, selon la première
■ manière d'accorder la vielle, donne I) grave ( Itlî grave ),
• et selon la troisième manière, elle donne r grave (SOI, le
aptui grave). Or, en suivant la main ces deux cordes for-
■ ment consonuanec avec ces mêmes lettres',] ce qui de-
■ vient facile à une main habile qui n'ajoute ces moyens
• secondaires qu'en raison de ses progrès et de la con-
• naissance d; la main qui est a la fin de cet ouvrage. «
Apres une espèce de péroraison en l'honneur de Notre
Seigneur J.-C, dclasaintc Vierge, de saint Dominique. etc.,
l'auteur dit qu'il a écrit sou ouvrage pour la plus grande
utilité des étudiana, et le termine ainsi ;
■ Functo libro, sït laus et gloiia Clnislo. r'xplicîi Trac-
o talus de Musica , fratris Jeronimi du Moravia, nrrtini'
t Fratrnm Fraîdicalorum. ■
t Ce livreétant terminé , louange et gloire soient à J.-C.
.Ici finit le Traité do Musique de frère Jérôme de Mora-
< vie , de l'ordre des Frères Prêche urs.
PebsE, Correspondant ik l'Iiisliini .
(Latuite au numiro prochain.)
(i) Pincé avec le pouce on Pizzicato.
()) I.amainiletiuicl'Arciio, qui servait d'ecbclle mélodique.
(S) Tout ce qui es! liucrc ii i mire le* ileun crochet! (. ]eiiite ito
même ilans le leMe.
CORRESPONDANCE.
A M. h rédacteur de la Revue Musicale.
i'cnnctlez-moi, monsieur, de vous adresser quelques
observations sur le premier article du numéro l\t de votre
Revue, et veuillez bien les considérer comme des preuves
île l'intérêt que j'allache à l'utile entreprise que vous di-
rigez avec un zèle si honorable , un savoir si étendu , et uu
gOÛt si délicat.
D'abord un trait mal à propos lancé contre le philosophe
renommé qui, le premier, en découvrant L'influence do
certains nombres, a su eu appliquer quelques résultats à
l'élude des sons cl à la mélodie qui en dérive, dépare vé-
ritablement cet article de votre recueil'. •
Pythagore, un charlatau ! et qui, plus est, précisément
(i) A Diei
c plaise quej
ands boi
/iian.eUnîtne Je pluadéoo
rapojBÎble du nier. M. lu ba
c; main quêtait -ce donc qi
a miM.riiijnyL'osK, se vanta;
«ait habité avant que d'tl
Qu'.
iqut
ini.de plus, U lltrair««o;»d»ip[e
Abaris, prêtre d'Apollon, pour lui prouver qu'il était lui-o.fn.cce dieu.
ilu> fiii.iii^ ;iu dît- cr ïu i - lii : il est v i ;i i ^i.r: mai- ni: ^nuililts pas si cré-
dules que lus Grcca ou les Hurnoius.
(.lofs </" ndaclcur.)
Digiiized by Google
4*>9
à l'occasion d'un fait qui honorait i
eilé ! Oui , monsieur, l'ylliagore avait entrevu un dut alors
ignoré, et qui n'est devenu certain que par des décou-
vertes, des expériences récentes. Ce fait, le voici : deux
corps sonores étant donnés de formes absolument sem-
blables, maïs de dimensions doubles , celui de la petite
dimension donnera l'octave aigùe du son produit par ce-
lui de la dimension double. C'est ce principe qui préside
h la fabrication des cloches; car deux cloches du même
métal, dont les dimensions seront comme les nombres
8 et 9, ou dont les poids seront comme leurs cubes U12
et ^at), donneront deux sons à l'intervalle de seconde ma-
jeure, dît (on majeur, el représentés jiar les rapporls de
leurs nomhres de vibrations 8 et 9, en un même lemps
donné'.
Une conséquence de te principe est que des marteaux
mis en élat de vibration par leurs chocs sur une enclume,
fcro.it entendre des sons qui seront entre eux dans le rap-
port des racines cubes de leurs poids, si toutefois ils sont
de formes absolument semblables.
Vous voyez donc bien , monsieur, que loin de trouver
du charlatanisme dans celle expérience de Pythagore, il
fallait y admirer la perspicacité du philosophe qui avait la
prévision d'un principe physique, base de la science des
sons et de In mélodie.
En second lieu , Hameau , dans des lemps assez rappro-
(1) Jesuts étonné mie le M. baron Blein me mette dans la nécessité ci,,
c|iii le frappe. Si l'un veut enfin une preuve que les vibration* il<
team ne itonnc nl |mi„l ,!c :;.jhs ;t | j [Jj Ljf i jti li-s . iju'uii les frappe
grè4,'uuVaura plus .pi « i!u [irait,
[iïtttc du ràl,!c:<iir. )
cités de nous, avait découvert, ainsi que Tartiui, une partie
des influences de certains nombres sur la succession des
sons ; mais ils se sont trompés , suit en ne considérant les
corps sonores que sous la forme d'une corde tendue, tandis
qu'il eu existe d'une infinité d'autres espèces, soit en don-
nant une extension fausse à leurs bases fondamentales et
à leurs progressions harmoniques, qui n'ont rien d'harmo-
nieux. Ce n'est que depuis quelques années que l'on a dé-
couvert que l'influence des nombres sur la mélodie ne
s'étendait pas au-delà des trots premiers nombres impairs,
1, 3, 5, qui, dans cet ordre, ont donné naissance au
mode majeur, et dans l'ordre inverse; 7, \, \, au mode
mineur, eu attribuant à un et à plusieurs son s des vibrations
dans les rapports de ces nombres ; de sorte que lout inter-
valle exprimé dans d'autres rapports est nécessairement
plus ou moins dissonant et choquant pour l'oreille '.
D'Alembert, à qui Rameau confia la parlie scientifique
de sou système, n'était pas musicien, et cela le fit tomber
malheureusement dans des fautes graves en harmonie.
L'abbé Roussier ne fut pas plus heureux que J.-J. Rous-
seau, dont la mélodie avait tant de pureté. Il faut en
convenir toutefois, la plupart des musiciens compositeurs,
même les plus célèbres, n'ont eu malheureusement que
les connaissances les plus bornées en mathématiques , et
c'est une bien grande fatalité pouri'art charmant de l'har-
monie, qu'il se soit constamment trouvé entre l'alterna-
tive filcheusc de géomètres non musiciens ou do musiciens
non géomètres. De nos jours pourtant on aurait pu voir
cesser un inconvénient aussi grave. L'un de nos premiers
mathématiciens est en même temps un amateur très dis-
tingué, qui s'est amusé parfois à écrire des romances
charmantes et des choeurs d'un très bon effet; mais des
(i) Eiemple : l'intervalle de liite mineure ut, la |j, est représenté
par les rapports de vibration , 1 et ~ , ce dernier, troisième octave aigu
de et il est consonnant. L'intervalle de quinte superflue ut , 10/ jj doit
être représente comme formé par la tierce majeure de mi , par lei rap-
ports i et ij; ce dernier égal au carré rie > , qui est mi, et cet intervalle,
forme une dissonance réelle , quoique tris Faible.
4;>
occupations d'un genre plus élevé l'ont presque toujours
détourne (l'un objet <|ui ti\iur;iii été pour lui qu'un délas-
sement agréable. Peut-être aussi a-l-il été rebuté par les
élude* préliminaires des principes obscurs île ce >|uc l'on
appelle le eontre-poitit , ilonl l'arbitraire. el le non-sens ré-
voltent nécessairement tous les esprits justes et surtout les
géomètres*. Maïs alors il aurait Uù lui-même chercher ,
découvrir, et publier les vrais principes d'une nouvelle
science harmonique.
Je désire beaucoup, monsieur, que,, rendant justice à
l'exactitude comme à la bienveillance de mes observations,
vous veuillez bien les insérer dans le numéro le plus pro-
chain de voire Bévue,
J'ai l'honneur de vous saluer,
Le Baron Bum.
Choiiy-le-Riri , le 4 décembre 1817.
P. S. J'ai eu occasion d'exposer dans l'opuscule dont
bien remarquable des trois mêmes premiers nombres im-
pairs, 1, 5 et 5. Après avoir expliqué la transparence des
corps par ma théorie des vibrations ; après avoir démontré
l'impossibilité de l'existence île la lumière comme matière.
(1) Des phénomènes ]iliisn]uu> tuicieiueul jvrr nm sensations; gn les
soumet au calcul, et l'un en lire des règles de prupurtious et des for-
mules pour h gêné™ lion cl lu eUssilicalion des intervalles. Jusque U
[nul est bien dans le domaine des mathématiques ; mais <;cttc partie de
la science m! peut s'appliquer qu'A des faits isoles. Quant sut affinités
de succession, elles dépendent uniquement de nos sensations , et iiir-
ment la partie la plus esse miellé de l'art, partie qui est purement méta-
physique. Toute la science du contrepoint a pour objet d'expliquer les
raisons de ces affinités, et d'en donner les règles, règles qui sont dictées
par l'oreille à laquelle il faut plaire. Ces règles ne sont dune point arbi-
traires, puisqu'elles sont sanctionnées pat le seul juge qu'un puisse rc-
d'Alemberl, de lloussier cl de tous 1rs miituéiii.'iliciuis , es! de croire
que la science de l'harmonie soit contenue dam des accords isolés ; c'est
leur succession qui est l'objet essentiel , le point de la difficulté, cl c'est
là que le secours des mathématique? devient inutile M. lllcin pnrlnp
l'erreur de tous ses devancier! A cet égard.
4?s
l'établis qu'elle est un produit de vibrations , dont on peut
supposer le nombre de 1 comme de plusieurs millions par
seconde, et dont la vivacité diminue par octaves, lorsque
ces vibrations diminuent en raison des nombres i , £, j, £,
Mais en intercalant entre deux octaves de lumière , i
etj, un nombre quelconque de moyens proportionnels,
et en observant que le spectre coloré, formé par la dis-
persion lumineuse des vibrations, distribue toutes les cou-
leurs par nuances rapprochées entre le rouge vif d'un
côté, et la limite du violet ou rouge pale de l'autre, je fais
remarquer que l'on trouve le bleu et le jaune purs, cou-
leurs primitives, placés précisément ans rangs assignés
auxsons qui forment l'harmonie du mode majeur, c'est-à-
dire dans l'ordre suivant, en descendant de l'aigu au
grave:
> l î h
ut sol mi ut.
rouge. jaune. bleue. rouge,
en sorte que | étant une octave de 5, et | une octave rie 5,
il est évident que si dans un temps donné î vibration lu-
mineuse donne la couleur rouge, 5 donnent la couleur
jaune, el 5 la couleur bleue.
L'harmonie des nombres de Pylhagore n'était donc pas
une vaine chimère.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉATBE DE L'OPÉRA- COMIQUE.
Eepréscn talion an Lt office de Hum.- Ficjios et Diïco. - Coiicett en
«ction.- Chollct, fWliard , M"' Schuli, .VM. V'ugt, I.afuut , il
Ebner.
Pans les derniers jours de la carrière théâtrale île Mar-
tin,la voix étonnante de ce dianleur avait subi les outrages
4?3
du temps. En vain cherchait-il non-seulement à cacher aux
autres , mais à se dissimuler à lui-même l'altération prog-
ressive d'un organe aulrcfois prodigieux par son Étendue
et sa pureté , l'âge de la décadence était arrivé , et toute
l'adresse du chauteur ne pouvait en imposer a cet égard
aux connaisseurs. Cependant le rôle de : Pù-aros était un
de ceux où Martin avait conservé tu plus de jeunesse et
d'eflet; sa verve et quelques sons enchanteurs luttaient
encore dans ce rôle contre le goût parfait de Ponchard ,
lorsqu'il n'était plus que l'ombre de lui-même dans les
autres. Aussi élait-ce celui qui paraissait le plus difficile ù
aborder par ceux qui se partagent sa succession. Chullet
même, malgré les succès qu'il a obtenus dans son emploi,
n'y semblait pas destiné ; car, bien que tout le chant île
Picarossoit écrit en clef d'ui sur la quatrième ligne , il
a été composé pour la voix grave de Martin : or, on sait
que les sons de Chollct sont faibles dans le bas. En homme
habile, il a senti la nécessité d'arranger le réle pour ses
bonnes cordes, cl il en a fait un ténore élevé. On ne
peut que louer son intelligence à cet égard , et je pense
que les critiques qu'on a faites de celto transposition sunt
peu raisonnables.
Le succès a couronné l'entreprise de ce chanteur dans
le duo qui , comme on sait , forme a peu près toute la par-
tie chantante du rôle de Picaros. Il a très bien phrasé le
début,, dont le chant posé est dans la nature de sa voix et
do sa méthode ; mais je l'engagerai ù être plus avare d'or-
ne mens saccadés que le bon goût réprouve, quoiqu'ils
ajoutent peut-être du comique au personnage. Les Italiens
ne font jamais une charge de la musique , à moins que ce
ne soit dans un rôle de bouffe non chantant, et l'on ne
peut que les approuver en cela. Martin est le premier qui
ait donné parmi nous l'exemple de la vocalisation par sac-
cades; mais quoique le public ait été souvent dupe de ce
charlatanisme, les connaisseurs l'ont toujours ïmprouvé ,
et ce n'est point a un chanteur qui fait souvent preuve de
goût à l'imiter.
Je n'examinerai pas le motif qui , depuis quelque temps.
m
fait déchaîner plusieurs journaux de spectacles contre
Ponchard , et qui dévoue son talent à des sarcasmes quoti-
diens plus ou moins amers , plus nu moins injustes ; mais
j'affirme qua quoiqu'on disent de sévères aristarques, cet
acteur n'enest pas moins l'honneur de notre école actuelle
de chaut. Je sais que sa voit a peu de volume , et qu'on
s'aperçoit quelquefois de la fatigue qu'il éprouve ; mais je
sais aussi que jamais on n'eut un goût plus pur, une vo-
calisation plus libre , plus facile , ni une prononciation
plus parfaite. Dans le duo de Pkaros et Diego , il ne cher-
chait point à lutter avec Martin par des tours de force :
il ne faisait que quelques traits; mais ces traits étaient
de si bon goût, et si bien exécutés, qu'un murmure
flatteur annonçait de (outes les parties de la salle le
plaisir qu'il avait fait éprouver au vulgaire comme au con-
naisseur. 11 n'a rien perdu de son ancienne supériorité
dans ce morceau; aussi, quoiqu'il eut affaire aupublic exi-
geant des représentations à bénéfice, n'a-t-il pas été moins
goûté qu'autrefois.
Le reste de la pièce s'est un peu ressenti de la précipilu-
tion avec laquelle on l'avait remontée, surtout dans le
niorceau d'introduction , où plusieurs entrées musicales
ont été manqué es. Le petit duo del'onchard et de M" Pra-
dlier a élé cependant bien chanté.
Quoiqu'il ue soit point dans mes attribution» de parler
do comédie, de tragédie et surtout do tragédie anglaise, je
ne puis me refuser au plaisir de payera l'admirable talent
de M1" Mars et à celui de M"- Smilhson le tribut d'éloges
qu'ils méritent à tant de titres. Notre grande comédienne ,
malgré la fatigue qu'elle devait éprouver après avoir joué
dans la même soirée au Théâtre- Français une comédie
nouvelle en cinq actes, s'est montrée parfaite dans Va-
lérie , et a été fort bien secondée par Armand , r-'irmiu .
M on rose et M"" Du puis. Quant il M"- .Smithson . clic a joué
supérieurement quelques seines des deux derniers actes
Je Roméo et Juliette , et surtout la dernière, oii elle a re-
cueilli îles ajqilau disscnie n.s unanimes.
J.'iulerinfcde qui ;i terminé la représentât ion de Huct,
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et qui a pour titre la Réunion d'Artistes , est un vaudeville
dans lequel ou avait intercallé un concert , et un dïverlis-
sement dansé par quelques danseurs de l'Opéra. La dans.'
semble toujours dépaysée sur le théâtre Feydeau; la scène
est trop petite pour les pas des danseurs, et ceux-ci ont
toujours un air de gène qu'ils communiquent au publir.
Dans cette circonstance on a cependant applaudi un pas de
deux dansé par Gossch'n el M"' Julia sur un solo de violon,
qu'un jeune artiste allemand nommé M. Ebner a fort bien
exécuté. Une justesse parfaite, un beau son et une grande
netteté d'exécution assurent à ce violoniste une place dis-
tinguée ; mais je lui reprocherai d'avoir, comme la plupart
des violonistes allemands, quelque chose de sec et de
pointu dans .son jeu. Il a besoin d'élargir son style pour
le mettre en harmonie avec ses autres qualités.
J'ai donné des éloges, que je crois mérités, à Choilct et
à I'ouchard, pour la manière dont ils ont chanté dans Pi-
dans ces éloges m'oblige à déclarer qu'ils n'ont eu qu'une
exécution défectueuse dans l'air du Barbier de Sévillc
(Fuie largo) , el dans le duo (atl' ideadiqual métallo) qu'ils
ont chanté en français. Le long intervalle qui s'était écoulé
depuis le commencement do la représentation, cl l'heure
avancée (minuit) où le concert a commencé avaient dis-
sipé l'heureuse disposition où ils s'étaient trouvés au com-
mencement de la soirée. D'un autre côté, l'orchestre
n'avait pas eu le temps de répéter ces morceaux, et les a
accompagnés avec mollesse.
Une triple salve d'applaudisseinens a témoigné à ma-
dame Schutz le plaisir qu'elle avait fait au public dans la
scène de Tancrède; ces applaudissemcns étaient mérités à
certains égards; cependant, au risque de troubler un in-
stant la satisfaction qu'en a dû éprouver la cantatrice , je
lui dirai qu'il y a une grande différence entre la vocalisa-
tion des traits et le chevrottement ; or, c'est ce dernier
effet qu'elle fait souvent entendre. Je sais que le public
ne s'y connaît guère , et qu'il prend souvent la charge du
bien pour le bien lui-même; mais un véritable artiste.
4?6
plaire aux gens de goût, dont le suffrage lait tes succès
du rntiles.
MM. Vogt et Lafont composaient à eus seuls là parti.;
instrumentale du concert; c'est dire que celle partie avait
toute la perfection désirable, line circonstance inattendue
y a cependant jeté quelque monotonie : la voici. M. Lafont
était sur la route de la bourgogne à Paris la veille du con-
cert et n'avait pu répéter, en sorte qu'il ignorait que
M. Vogt dut jouer des variations et une fantaisie sur des
thèmes de l'opéra de Léocadie ; lui-même avait choisi pour
sb faire entendre une fantaisie sur les mêmes motifs , et ce
n'esl qu'au moment de jouer qu'il s'est aperçu de celte
circonstance défavorable. Néanmoins son talent a triom-
phé et lui a procuré de nombreux applaudissemens.
Adolphe Nourrit et Dahadie devaient chanter le duo de
Moïse; mais il était line heure du matin , et malgré les ré-
clamations d'une partie du public, ils ont cru devoir lu
supprimer. \
En résumé , celte soirée a été fort amusante par sa va-
riété, et pour la première fois , les spectateurs sont sortis
satisfaits d'une représentation à bénéfice.
— Les deux j)/fl;;unie//o, attendus depuis long-temps, se-
ront représentés dans le cours de cemois, le premier au théâ-
tre Feydeau, lesecond, sous le litre de la Muette de Purtici,
il l'Opéra. On croit que celui de l'Opéra-Comique sera re-
présenté le jeudi 20, et que l'Opéra do n liera le sien ven-
dredi 28. L'administration de ce théâtre a grand besoin de
celte nouveauté pour ranimer son répertoire , qui est foi l
languissant depuis le départ de H11* Ginli. Elle doil s'aper-
cevoir maintenant qu'il eut mieux valu se préparer à
tout événement, en moulant quelque ouvrage moins
important pendant l'été , que de rester dans un repos im-
productif. En fait d'administration théâtrale , c'est tou-
jours une faute que de se mettre dans la nécessité d'obte-
nir un grand succès ; car tout succès est incertain avant
la représentation; si l'ouvrage sur lequel on comptait ne
l'obtient pas, on se trouve dans une position critique.
DigitizGd t>y Google
4:7
Heureusement , les noms et (s [aïeul connu des auteurs île
la Nucltc de l'ortici sont d'un bOD augure.
— Quelques journaux ont annoncé que SI"' Méric-La-
lan.de est engagée au théâtre de l'Opéra; nous pouvons as-
surer qu'il u'en est rien , à moins que ce ue soit pour un
temps éloigné , car cette cantatrice a uu engagement avec
llarbaja qui ne unira <|uc dans deux ans. Nous savons
d'ailleurs qu'elle a peu Ue penchant à venir à Paris.
— M"*Sontag a terminé )e i ours de ses représentations
en Allemagne et a quitti: Francfort. Ses débuts au théâtre
Italien auront lien sous peu de jouis.
— Des chaugemens dansTorganisaliou de l'Ecole royale
de musique et dans le personnel des professeurs se pré-
parent pour le mois de janvier prochain : nous en dirons
notre opinion en les faisant cpnnaltrc.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Un amateur distingué de Vienne, M.-J. A. Schlosser,
prépare pu ce moment une biographie très étendue de
Mozart , laquelle sera ornée d'un portrait et d'un foc simih
de la notation île ce grand musicien , ainsi qu'une biogra-
phie de Beethoven , avec l'analyse de ses couvres, sou por-
trait cl le foc simite d'une lettre de sa inaiu.
— Deux nouvelles gazettes musicales paraissent en Al-
lemagne, l'une à Slunich, l'autre à Offenbaçhsur IcJklein.
Le rédacteur c» chef dç la première est le docteur Slœpel.
Le pasteur Spiess dirige la seconde.
— Une traduction hollandaise du livre excellent de
M. Godefroy Webersurla théorie de la musique (Théorie
<ler Tonsetîkunst) est maintenant sous presse à Leyde.
Ou en prépare aussi'une traduction française à liruxelles.
— On vient de mettre en venlc chezTobic llasliugcr, à
Vienne , quatre morceaux nouveaux, savoir : i" un Libéra
qui fut exécuté en choeur aux obsèques de Beethoven , le
ao, mars, 18a;, composé par le cheyaljer deScyfricd; a" J|/i-
47»
wcre pour quatre voix d'hommes, avec accompagnement
de q u aire trombones ou de piano-forté, tiré des manus-
crits de Beethoven , avec le texte arrangé par le chevalier
de Seyfricd. Ce morceau a été exécuté à la même cérémo-
nie funèbre ; 5° le Tombeau de Beethoven ( Beethoven'» b«-
graebnïs), poème arrangé sur la composition de cet homme
célèbre qui [a pour titre : Marica funèbre sutla morte tfun
eroa , à quatre voix, avec accompagnement de piano, par
le chevalier de Seyfried; 4* Chant ètigiaque (Elegischer
gesang) à quatre voix, avec accompagnement de deux vio-
lons , alto et violoncelle , ou de piano-forté, de Louis van
Beethoven , œuvre 1 18.
— La saison d'automne vient de finir pour les théâtres
d'Italie; elle n'a été signalée nulle part par l'apparition
d'aucun opéra digne d'être cité, ou par le début de quel-
que chanteur de marque. On voit cependant de loin en
loin , dans les journaux italiens , l'éloge de quelques chan-
teurs dont le nom était jusqu'alors resté inconnu. Par
exemple on parle avec faveur du basso Cianni, qui était
pendant cette dernière saison à Venise. C'est encore une
basse que M. l'altoni , mari de M" Corry-Paltoni , qui a
débuté dernièrement à Naples dans le rôle de Magnifico de
la Ccncrcntota, et s'y est fait applaudir à côté de la Blachc.
On n'entend parler d'aucun ténor nouveau. Nous venons
de parler de M" Corry-Paltony; elle a eu beaucoup de
succès à Naples à son retour de Vienne. On loue beaucoup
à Turin la voix et le talent de M"" Otto, soprano.
— Le jour de la Toussaint , on a donné à Berlin un con-
cert spirituel qui se composait d'une marche funèbre de
Heichardt, du Requiem de Mozart, et d'une messe de Ch.
H. de Wcber.
Grand Album pour le piano-forté, composé par
MM. Charles Cltanlicu cl Antoine Moeker, joli volante
in -fol. ; à Paris chez II. Lemoinc , tue de l'Échelle Saiuf-
Uonorc , et à Lyon, chez Arnaud , place de fa Fromagerie
cl rue Gentil, n" 1.
— Le jiune Aveugle, romance, paroles de M. Jules
Delacour, miac en musique et dédiée a son ami Augusle
Panscron, par Ch. Chaulicu, prix i fr. 5o C. et a fr. avec
accompagnement de violon ou violoncelle.
Paris, Jean Mcissonnier, me Dauphine, u° 28.
— Thème de Prêciosa variée pour le violon , avec accom-
pagnement des deux violons, alto et violoncelle ou de
piano , dédié a M. Urhan par V. Itlagnien. Op. a, prix
5 francs.
Paris , S. Itichaùll , boulevard Poissonnière, n" 16.
Ce qui prouve que la musique fait des progrès dans les
départemens, c'est qu'on y rencontre des professeurs dis-
tingués, soit par leur talent d'exécution, soit comme
compositeur. M. Victor Magnien , professeur à Mulhauscn,
tient une place honorable parmi les meilleurs par son dou-
ble talent comme violoniste et comme guittarisle. Ses
compositions sont à la fois gracieuses et brillantes; on y
retrouve le cachet de la manière de Mayscder et de Sor.
— L'Album , intitulé le Goût du Jour, que nous avons
annoncé dans notre dernier numéro, se trouve chez A. Pe-
tit, marchand de musique, rue Viviennc, au coin du pas-
sage Vivieune.
— M. Paccini, boulevard des Italiens, n" 11, éditeur
des opéras de Rossini, vient de publier une nouvelle et
belle édition de l'Italienne d Alger. On trouve aussi chez
lui les airs, duos et trios de Thcmistocle, de /' Ultima giorno
di Pompei, Au Gianni di Pariggi, et tous les ouvrages nou-
veaux que l'on représente sur les théâtres d'Italie.
— Parmi les romances qui obtiennent le plus de succès
dans les salons, il faut distinguer Theresina, bar car oie à
deux voix de M. Pauseron; ou la trouve aussi chez M. Pac-
cini, boulevard des Italiens, n' 11, ainsi que trois noctur-
nes pour piano et basson, par lïochsa et Gucbaucr, prix ;
0 francs chaque.
— Les trois parties réunies de la mélhode de piano que
48o
M. Zimmcrman vient tic composer pour ses enfann sont
du prix de 20 francs, au Heu de a5, que nous avions an-
noncés.
— Atome tt Cora, scène dramatique pour forté-piano
et hauibois solo, ou violon, ou violoncelle, suivie de pro-
téines ou variations sur un llieme de M. F. Paer, compo-
sées et dédiées à son ami Vogl, premier hautbois de l'Aca-
démie royale de Musique, par J. B. Y/oels, op. 3?. Pris :
l'a ris. hauteur, rue des Martyrs, t)° 42, et chez tes mar-
chands de musique.
— Rondo élégant, composé pour le piano par J. B.
Woets, op. C?. Pris : G fr.
Paris, Meissonnier, marchand de musique, rue Dau-
pliinc, □* a3.
— . Le Colporteur, opéra- comique en 5 actes, paroles de
M. Planard musique de M. G. On slow, arrangé pour le
piauo.
N* 3. Air chanté par H. Henry. Prix ; 3 fr. j5 o.
— Duo et trio chantés pas MM. Lafeuillade, Féréul et
M- Pradher. Prix : 5 f r. . . .
—'p. Romanre chaulée par M— Pradher. Pris: 1 fr. 5oc.
Le mémo morceau à deux voix, chanté par M0" Pradher til
M. Lemonuier.
— 8. Ronde 1 hantée par M. Féréul. Prix : 3 fr. ?5 c.
— »o. Couplets chaulés par M"* Dcsbrosacs. Pris: 2 fr.
— 11. Ronde chantée par M. Féréolct M" -Pradher.
Prix : 3 fr.
— 11 bis. Mémo morceau arrangé à voix seule. *Hx 1
1 fr. 5oc. :
Paris, Ignace Plcycict lils aîné, boulevard Montmartre.
Nous rendrons coin pic avec détails de la musique remar-
quable de let ouvrage, dont les morceaux nous onk été
remis1 trop lard pour que nous ayons pu les analyser dans
ce numéro.
48)
NOTICE
donuc lei principes pour aci-ordur cl jouer la vkllc cl lu rùbobb* ,
deux ilts principaux inslrurucns à cardes cl à arcbul de son tonipi.
Noos devons main tenant examiner quel pouvait être l'em-
ploi de la rubebbe et de la vielle, el l'influence que ces deux
iustrumens ont pu avoir sur les progrès de la mélodie et de
l'harmonie. Nous remarquerons d'abord que la rubebbe est
un instrument a cordes el à areliet appartenant au système
grave puisque , par son accord, il n'a qu'une octave et
un ton d'étendue, à partir de notre UT, au-dessous de la
clef de FA, jusqu'au rc, neuvième de ce même ut. L'échelle
mélodique du temps n'admettant aucun dièze constitutif
et seulement le si bémol cousidéré tantôt comme tel el tan-
tôt comme accidentel, on ne voit figurer dans la rubebbe
que le J< bémol et si naturel dans rémunération queJ. de
Moravie donne des cordes formées par les sons à vide et
par l'application des doigts; cependant nous pouvons croire
que si quelquefois il arrivait que l'exécutant voulût faire
le fa dièze que l'on trouve dans quelques-unes des compo-
sitions des XIII' et XIV' siècles, il lui était facile de le doig-
ter avec le petit doigt ; mais le silence de l'auteur sur cette
faculté que donne l'accord de l'instrument , dont l'étendue
est déjà si bornée , nous prouve que la rubebbe n'était pro-
pre qu'a rendre des mélodies graves , et à accompagner les
mélodies médiaires ou aiguës, renfermées dans le système
général des voix et des inslrumens. La rubebbe pouvait
donc Être considérée , dans son temps, comme une espèce
de petite basse, qui servait à rendre la partie grave de
toutes les compositions. Or, nous savons que celte partie
grave n'était aulrc qu'une courte antienne , ou , comme on
l'appelait dans le temps, un pclil mot (mollet ou molhct)
r vol. ' qi
4«3
en plaiu-< liant, qui servait de basse et de base à la compo-
sition placée dans une partie supérieure, ou aux deux par-
ties supérieures , média ire et aiguë , lorsque la pièce de
musique était à trois parties. Il est évident que c'est cet
emploi de la rubebbe, emploi bicu moins répandu que
celui de la vielle, sur laquelle on pouvait exécuter toute
sorte de musique, qui aura été cause que peu d'aulcurs en
out parlé.
Dans sa ballade, pour déplorer la mort de Mâchant,
ISustache Deschamps 1 fait'une éuuméralion des instru-
ment, et il cite la rubebbe parmi ceux eu usage ». Or,
comme J. de Moravie écrivait plus d'un siècle avant Des-
champs, et qu'il donne l'accord et le doigté de cet instru-
ment, il est à croire que la rubebbe existait bien avant lui
et qu'elle aura été inventée pour être jouée conjointement
avec la vielle. Gerson, cliancelier de l'Université de Paris,
en iSgS , fait aussi mention de la rubebbe, en parlant du
rcbtc, espèce do viole que l'on jouait avec un archet ique
l'on tire et que l'on pousse , dil-il , pour obtenir le son de
l'instrument !, comme dans la vielle et la rubebbe. «
L'Anglais John Gunn , professeur de violoncelle , qui a
publié à Londres, dans le dernier siècle, au moyen d'une
souscription , une méthode de violoncelle, dans laquelle il
a inséré une dissertation savante et curieuse sur l'origine
du violon et du violoncelle, n'ayant pas eu connaissance
du manuscrit de J. de Moravie, n'a pu voir dans la ru-
bebbe l'origine des inslrumens graves à archet , présente-
(1) Drivait khi sCharlca VI, qui monta mrlfl trône en i38o et mourut
Trnveriaints, et vont nymphei des bals
Tympans bhiiÏ, niella en itiwrt dois
El le Chère : n'y ail nul qui réplique.
Faictes devoir, picores geulila Galois
La mort Machiiu, le noble rbclotiquc.
(3)^k( Iraelu aut ritractà liait h< Ficlla et Hubclta, Cerjon, op. t. III,
p. 618.
485
menl en usage. Il n'en parle qu'en citant le passage tiré
des œuvres de Gerson, que nous venons de rapporter'.
Les savans historiens, Burney et Forkcl, n'ont pu même
donner le véritable nom de cet instrument, parce que M. de
la Ravallièrc, dans son ouvrage iu\ïlv\è Ancienneté dts chan-
tons 1 ( dont ces auteurs ont tiré parti , en parlant des in-
Strumensdu moyen âge), n'a pas toujours rendu fidèlement
l'ortbograplic du manuscrit de Guillaume de Macliaut; car
M. de la Ravallièrc écrit nubctle1, et Forkel d'après lui, ce
qui doit être écrit fluicie. Kalkbrenner 1 donne aussi ce pas-
sage dans sou Histoire de la Musique , si toutefois on peut
considérer un ouvrage si coort comme l'histoire d'un art
qui embrasse tant départies, et plus de trois mille ans d'exi-
stence connue. Cet auteur a copié lui-même sur les manu-'
scrils de G. de Macliaut , celte tirade intéressante, où tous
les iustmmeos du temps sont passés en revue; et il écrit
fidèlement rubebe et non nubelle*.
Mais cet instrument , appelé aussi par quelques auteurs
rubetW, nous étant maintenant bien connu, nous allons
examiner la structure de ta vielle ou violon dont J. de Ho-
(i) Ce professeur de violoncelle a été plus bcureui que M. Cartier,
car s™ ouvrage, imprimé in-fulio avec (ont le line Je ta grature en
cuivre pour les planches et en étain ponr la musique, a du #trc tiré à
cinq cents, puisque , paria liale des souscripteurs mi je en lélede i'eium-
pUiw que nous possédun-, l'an leur avait déjà deur.cml vingt-neuf exem'
l'iaircs au m uni uni (Si; In ]iulj liralii.ui. L'immunïc érnditiuu rcpnn-
due dans ecl uuïiogc ternit cou.- ii! Lue en t'i-ancir comme un pédanlismc
ridicule; mais les arlislcs et les amateurs parmi les peuples dont nous
sommes entourés sont loin de n'apprécier que ta brillante superficie des
Ulena.
(a) Cet opuscule est inséré dans le tome I des Poésies du rai de Na-
varre, publiées en deui volume) io-i», Paria , cbei Guérin, ijja.
(3) Tome I, page >4j.
(.() Allgenu ■inr! ii ■])(<■ drr Mu-.il., tnme ■>, p. 7 {7.
(5) Kalkbrenner. Hjst. de la Musique. Tome I, p. ioj,
(6) • Car , en dançant, tint me lassa ,
■ Que ma musc a bruiant cassa ,
• Et nies nacaircs pourfendi
■ Onques puis corde ne lendi
■ Sur labourin , ne sur rebelle.
Jehan Midinel , pnf:te du XV' siècle , cité pur M. Roquefort dans
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484
avie donne des détails assez circonstanciés, quant ans
trois manières de l'accorder et à celle de la jouer, pour que
nous considérions celte partie de son ouvrage comme la
première méthode de violon qui a pu exister depuis l'ori-
gine de cet instrument.
La vielle se tenait de la main gauche . le manche placé
entre le pouce et l'index , près de la tfilc de l'instrument;
et il n'est pas indifférent de foiré remarquer que cet instru-
ment ayant une corde appelée bourdon, placée en dehors
du corps, celte corde devait nécessairement forcer l'in-
strumentiste qui voulait atteindre les quatre autres cordes,
à tenirl'instrument moins près de l'épaule que maintenant
l'on tient le violon et l'alto; car. s'il en eût été autrement,
le joueur de vielle n'aurait jamais pu atteindre les qua-
trième et cinquième cordes, à moins que de lever très haut
le bras qui tenait l'archet, ou que l'instrument, au lieu
d'Être tenu dans un plan à peu près horizontal, comme le
tiennent nos violonistes , eût été un peu tourné sur la gau-
che de celui qui le jouait. On sait que quand on tient le
violon de celle manière , ce qui arrive lorsque l'on exécute
négligemment, celui qui le joue est loin d'obtenir la même
facilité et la même qualité de son que lorsque cet instru-
ment est bien élevé et bien fixé, selon les règles de la bonne
école, surla clavicule, près de l'épaule gauche; mais dans
la vielle il devait en élre. autrement, par la nécessité où
celui qui la jouait était d'exécuter la double corde pour for-
mer harmonie et accompagnement , mérite et talent qui
étaient considérés comme le plus haut et le plus parfait de-
gré d'exécution sur cet instrument. La vielle, ainsi tenue1,
n'avait donc pas besoin de ces espèces d'échancrures que
l'on nomme éclïsses, puisque du côlé du vielleur, le bour-
don , placé en dehors de l'instrument, empêchait d'atta-
quer la seconde corde , ou pour mieux dire la première ,
placée sur la louche de l'instrument en baissant un peu le
son mémoire sur l'ilalrlclo poésie française dans les Xll' et XII [< liéelcs.
Paris, Foamicr , j8iS, p. 108.
(1) Et quanti rnêmt elle efit cl* tenue sur le genon gauche, ou entre
les deui genoux.
485
poignet. Quant au coté gauche de l'instrument, l'éclisse
était de même inutile , parce que les deux dernières cordes
(les deux plus aiguës dans l'accord général de l'instrument)
pouvaient être facilement atteintes par l'archet qui , rare-
ment quittant les cordes, était promené par l'exécutant,
en tirant ou en poussant sur l'une ou l'autre des cinq cor-
des, et même sur deux cordes ensemble , sans être dérangé
du plan incliné qu'il avait , en raison de la manière aussi
inclinée dont l'instrumentiste devait tenir la vielle. On peut
donc être fondé à croire que la vielle et la rubebbene pou-
vaient être tenues aussi élevées près de l'épaule gauche que
maintenant nos violonistes tiennent leur instrument; car,
outre le peu de facilité que cette position eût donnéà l'in-
strumentiste, la tension du bras droit, pour soutenir l'ar-
chet à la hauteur de l'instrument et le faire marcher libre-
ment sur une ou deux cordes à la fois, eût été très fatigante
et nuisible à la dextérité de l'instrumentiste, toute faible
que pouvait être l'exécution musicale sur ces instrumens,
dans ces temps reculés.
Il est généralement reconnu que la monture des instru-
mens à cordes ou à archets est présentement bien plus
forte qu'il y a trente ou quarante ans ; le ton d'orchestre
est aussi conséquemment beaucoup plus élevé; ce qui
prouve que , dans les beaux jours des vielleurs des XII*,
XIII" et XIV siècles, la tension des cordes était au moins
aussi lâche que l'était autrefois celle des basses et contre-
basses de nos cathédrales, dont les montures étaient si
faibles, en comparaison de celles de nos jours, et si près de
la touche, qu'un enfant de chœur de treize à quatorze ans
jouait cesinstrumens sans beaucoup de peine, tandis qn 'ac-
tuellement il faut toute la vigueur et la dextérité du poignet
d'un homme fait pour attaquer convenablement les cordes
graves du violoncelle et de la contrebasse, dans les pas-
sages d'exécution qui exigent de la force jointe à la netteté1.
Préciser l'époque à laquelle on a commencé à donner
des éclisses a la vielle ou au violon serait assez difficile :
(i) Vojei à la fin de ce! orliclc une note sur la f untrïbosst , telle
qu'elle est montée du nos jours.
mais il est probable que , dès le moment où l'harmonie
aura obtenu' plus d'extension , et que les vielles auront
été classées comme les vois en aiguës , en média ires ou
tenon , et en basses ou graves, selon l'étendue du système,
on aura senti l'inconvénient du bourdon; celte corde
étant supprimée ou reportée sur le corps de l'instrument ,
les édisses auront été inventées pour donner plus de fa-
cilité à l'archet, et l'on aura arrondi davantage le cheva-
let pour que les quatre ou cinq cordes dont l'instrument
était monté fussent placées assez prés l'une de l'autre et
sur un plan plus ou moins circulaire, ce que l'on peut
voir sur les planches qui donnent la représentation des
anciens instriunens , tels que vielles, violons, luths , etc.,
dans les ouvrages cités dans celle notice *.
Quant à la position des doigts sur la rubebbe et sur la
vielle, on voit par le manuscrit de 3. de Moravie que,
pour obtenir les différons sons, l'instrumentiste laissait
tomber nalurellement les doigts sur les cordes, excepté
dans le cas où il n'avait qu'un demi-ton à faire, car alors
il recourbait un peu le doigt qui devait former lofa, soit
le fa naturel ou le fa feint [si p-)
Maintenant, passant à l'emploi que l'on pouvait faire
de la vielle et de la rubebbe, et au parti que l'on lirait de
ces deux instrumens dans l'exécution , nous sommes per-
suadés qu'au moyen des trois manières d'accorder la
vielle que donne notre auteur, et en y joignant l'accord
et l'étendue de la rubebbe, il était possible d'exéculer
toutes les pièces de musique du temps, eussent-elles été
composées à trois el à quatre parties.
Ou sait que le système général représenté par la Main
(ij Estai sur la Musique par Labordo, lum. I , p. aSfi, sS;, — 8 ;, — 6g
- go, 5uj et Juj; A Senerat Ilistary ofMusic par lidiwj, lonn: J, p. lG$.
Iho IVcory and Practicc of ftngering Ihc vïohnetlla amlaiuing rates and
progressives Lestons for aUninirig Ihe KnoitwMge and commmtd oj (*<
aholc eèmfntê of Ihe instrument , by John G «un. Tanna of tlanaùm-
citlu. Landon. [ Lj lliiiui ii: (■[ l.i pl-jUiquc ]>iinr \ fw:t le l'iuluDCnlIc , con-
tenant de» rî-f-tc» i-l <!i -s Im;ull- piEigrc.-^ivrs piuir parvenir à connaître et
ii posséder l'étendue rntièie de cet instrument ; par Julio Gunn, pro-
fesseur de violoncelle. Londrw.
Digitizcd t>y Coogle
48?
harmonique de Gui d'Arezzo, en usage depuis le XI* siè-
cle jusqu'au XVII', comprenait vingt cordes ou sons , de-
puis le m/ grave (appelé gamma UT) de noire clef de FA,
jusqu'au mi chanterelle de notre violon actuel, appelé E
la. Ce système, établi en raison de ta tonalité du chant
grégorien pour les voix d'homme . de femme et d'enfant ,
devait avoir la m Orne extension pour les inslromens réu-
ni». Ed effet, nous voyons par la réunion des trois ma-
nières d'accorder la vielle, citées par J. de Moravie, quo
l'ensemble de toutes les cordes du système instrumental
était de dix-neuf cordes, E la étant la seule corde aiguë
que la vielle ne pouvait rendre, et le si ou te si jj n'étant
considérés que comme une seule et même corde, parce
que ces deux sons étaient formés par le même doigt, l'un
excluant nécessairement l'autre On voit que ce système
vocal et instrumental comprenait toutes les cordes néces-
saires à l'exécution musicale du temps, parce que les voix
et les iuslrumens ne devaient pas, à ce que l'on croyait,
descendre plus bas ni monter plus haut, sans forcer la na-
ture de chaque voix *■ Le ton du chœur qui servait de iona-
(■) ETES DP E GÉlfAltAlE 11E Ll VIELLE,
opulent tempt , et que ai nous elitnlom infiniment mieux , comme ou
ll'no peut douter, nom pouvons croire jns-i 'jiu; sinivrnt nous crinni
Lieu ii m. ml agi' ; u.nis lout n Vit-il paj |uiur II mieux eu musiqur, svI'j"
[e temps où l'on existe.
488
riam pour l'accord de tous les instruirions , était aussi
beaucoup plus bas qu'aujourd'hui. Les musiciens aetuels
qui ont entendu tes orgues de France il y a quarante ou
cinquante ans, doivent se rappeler que, lorsqu'on exécu-
tait des messes et des vêpres en musique à grand choeur
et à symphonie dans la cathédrale et les collégiales de
Paris, où il y avait musique fondée , les symphonistes de
l'Académie royale de musique ( l'Opéra ) qui concou-
raient à l'exécution trouvaient leur ion d'orchestre plus
élevé d'un demi- ton au-dessus des nouvelles orgues con-
struites, et un ton plein au-dessus de celles qui avaient
près d'un siècle d'existence. S'il en était ainsi vers la se-
conde moitié du dernier siècle , on peut présumer que le
ion général était encore plus bas dans les XII*, XIII', XIV* et
XV* siècles ; et la preuve en est que les cordes graves du
système ne descendaient pas alors plus bas que le sol au-
dessous de notre clef de FA, et ne montaient qu'au mi au-
dessus de notre clef de SOL.
Les trois manières d'accorder la vielle prouvent aussi
que l'emploi de cet instrument pouvait être divisé comme
les voix l'étaient du temps de G. de .Mâchant , au com-
mencement du XIV" siècle, en triptum, qui tenait lieu de
notre soprano ou superius; motetas que notre alto ou ait us
contra a remplacé; ténor, qui tenait le plain-chant ou le
sujet sur lequel l'harmonie simultanée était formée par
les autres parties, et dont la dénomination s'est conser-
vée jusqu'à nos jours ; et enfin conlra-tenor, qui tenait lieu
de notre basso ou basse chantante ou instrumentale.
Mous ferons connaître par la suite que, dans les X', XI'
et XII' siècles , les compositions de musique vocale n'é-
taient le plus souvent qu'à une seule partie, mais qu'il y
avait cependant des occasions dans les cérémonies reli-
gieuses où de certaines pièces étaient à deux parties ; et
nous pouvons croire que la rubebbe a été inventée pour
servir à exécuter, soit en accompagnant le chanteur, soit
eu jouant séparément, la partie la plus grave, qui était
toujours le plain-chant; H parait donc constant que , dès
le moment où le système de la Maiu de Guy d'Arczzo aura
□ igilizedby Google
I
489
été adopté (en ioao ou îoaa ), tes instrumentistes auront
du employer des inslrumens qui pussent donner toutes
les cordes de ce système, comme orgues déjà existantes
mais non complètes, vielles , luths et autres.
Quoique J. de Moravie cite et donne l'accord de la ru-
bebbe, comme si cet instrument eût été d'un usage assez
général de son temps , ou peut présumer que , d'après son
peu d'étendue , il n'y avait que les joueurs de plain-chant
ou les harmonistes qui s'en servaient; et que le bourdon
de la vielle aura élé inventé et mis en dehors ds l'instru-
ment par les vielleurs les plus habiles pour former har-
monie sons la mélodie, et se passer d'un second exécu-
tant. Car si, de nos jours, les harmonistes et les accom-
pagnateurs à première vue au piano ne sont pas com-
muns en France, à plus forte raison peut-on croire que
les harmonistes, capables de mettre quelques notes de
basse formant octave ou quinte ou quarte en-dessous de la
mélodie, dans ces anciens temps, devaient être très rares.
Le vielleur habile et doué d'une imagination vive, que
l'on ne peut pas plus refuser à certains hommes dans un
siècle que dans un autre, aura cherché il suppléer à
l'absence d'un exécutant ou d'un harmoniste sur la ru-
behbe , en plaçant en dehors de son instrument une corde
qui pût remplacer en quelque sorte les sons donnés par
la rubebbe. Or, cette hypothèse nous parait probable et
même démontrée par les deux manières d'accorder ce
bourdon qui , dans le premier accord de la vielle , donne
la note RE au-dessous de notre clef de FA, et dans le troi-
sième accord donne SOL au-dessous de ce même FA; et
cela, dit notre auteur, ■ pour pouvoir donner ta quinte , l'oc-
tant, la quarts, etc. * »
Il ne nous reste plus qu'à remarquer que cesinstrumens
(i) Par l'et cotera de l'auteur, on ne doit pal entendre lei tierces ci
les sillet, et a plut forte raison les dissonances, mais les consonnances
doublées ; car si l'exécutant ne pouvait faire la dixième , la douzième et
la double oelave avec l'archet , il lui était facile de former le» conson-
nances simples ou doublées au moyeu du pUzicalo. Quant aux notes de
passage , on n'y avait pas plus d'égard qu'actuellement.
9, VOL. l\t
;i conleselà arcliet étaient susceptibles aussi d'être joués par
le lad autarcuauttactu, dit l'auteur, ce qui nous prouve que
l'on iouait aussi ces instruniensen pinçant les cordes, piwi-
cato, elméme eti double pinicato, lorsque le bourdon pouvait
Être pincé conjointement avec l'une des autres cordes , ou '
que l'exécutant pinçait plusieurs cordes à la fois pour for-
mer harmonie.
Nous concluions de tout ce que nous venons de dire,
que le violon, l'alto, le violoncelle et la contrebasse, qui
forment ac tu elle meut le système complet de notre mu-
sique instrumentale , quant au* inslrumens à cordes et à
archet, ne sont parvenus à l'élat de perfection où nous
les voyons présentement qu'après un laps de temps consi-
dérable, et que l'on peut estimer être de plus de huit
ceuts ans. Nous voyons de plus, dans les diverses périodes
d'amélioration que ces divers instrumens oui pu subir',
l'exécution suivre les progrès que l'art leud continuelle-
ment à faire en raison des cou naissances acquises succes-
sivement dans la théorie-pratique par les plus habiles
instrumentistes , et cette exécution enfin est arrivée au
point où nous la voyons de nos jours. Nous la considé-
rons comme étonnante; mais elle sera probablement en-
core surpassée par celle de nos successeurs. , la musique
étant de tous les arts le pb» fugitif et le moins stable,
mais aussi peut:-eire le plus aimable et le plus influant
sur les mœurs publiques ai privées des nattons.
Peine,
Corrcgprm riant de t'Inititiit.
Ci) t^L'«^.Mki«MUiM« r<MM», f« M. F*ti.,t. 1
lit la Revue muticalc, n. 1 1, p. ajo.
Digitizod by Google
CORRESPONDANCE.
A M. le Ridactcar de la Revue musicale.
Monsieur,
Un article inséré dans le 4'' numéro, vol. n , p, 3n3, de
voire estimable journal, m'a suggère quelques réflexions
que je soumets à vos lumières et à celles (ie votre savant
collaborateur. L'importance des études de solfège, que
l'auteur de l'article sait si bien faire ressortir, appelle na-
turellement la réflexion de tous ceux qui, un peu versés
dans la connaissance de la musique, s'intéressent ù la
perfection de ses méthodes , c'est-à-dire , en dernière ana-
lyse, à sa propagation, lis doivent être an courant de
toutes les tentatives qui en concernent l'enseignement.
Qu'elles soient faites par un amour désintéressé de l'art et
dans des vues d'utilité générale, ou qu'elles soient l'œuvre
des spéculations d'un fort médiocre savoir, ce mobile leur
est indiffèrent, l'estime ou la défaveur publique rendront
L'auteur de l'article sur l'enseignement de la musique
est très accommodant. Toutes les méthodes semblent avoir
droit, à ses yeux, à une égale approbation; elles répon-
dent toutes à des besoins, et remplissent pareillement
leur but. Voulez-vous une instruction élémentaire ? ceci
vous convient; une instruction transcendante ? cela sera
plus etBcace; une instruction collective? vuicî ce qu'il
vous faut; une instruction individuelle? voilà ce qu'il y a
de meilleur. Mais, malgré la justesse de ers'aperçus, n'y
a-t-il entre ces différentes catégories aucun point de rap-
prochement. De quoi s'agil-il ici ? de montrer le solfège.
Ce ne sont pas dei virtuoses que nous voulons instruire,
ce sont des écoliers qui commencent fa gamme. Il n'est
donc question ici que d'enseignement élémentaire. Le pro-
blème vraiment intéressant qui occupe maintenant la
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pensée des amis de l'art , cl que l'auteur de l'article élude
avec tant de soin, est de choisir entre les divers modes
d'enseignement; ut la question me semble se réduire à
ceci : l'instruction élémentaire de la musique étant donnée
comme but. quel moyen peut opérer les progrès les plus
rapides, de renseignement individuel ou de l'enseigne-
ment collectif? Bien entendu qu'il y aura plus tard un
enseignement transcendant pour ceux qui se destinent à
être artistes; il ne contrariera pas le précédent , mais il y
ajoutera. Il est clair encore qu'on ne pourra pas toujours
faire usage de renseignement collectif; alors le maître
procédera d'après ses lumières, et son expérience. Mais à
quoi bon nous arrêter à des exceptions? Ce qu'il importe
de rechercher et d'établir, ce sont les caractères de la mé-
thode la plus utile et la plus généralement applicable.
Encore une fois, il n'y a ici qu'une seule catégorie, toute
composée de gens qui, ne sachant rien, veulent apprendre,
et demandent la voie la plus courte.
Les méthodes anciennes, dites-vous, ont pour objet
]\:iisi.'ij;injmciil individuel: celle observation m'avance
peu. Je veux commencer la musique ; il m'est Indifférent
de prendre ma leçon seul ou avec d'autres élèves : dites-
moi le procédé qui promet le plus de progrès , je l'adopte
à l'instant? En dépit de l'auteur, qui ne se prononce pour
aucune méthode, je tirerai de ses paroles une inductiou
légitime. Être fidèle aux anciens solfèges, qui ont pour ob-
jet l'enseignement individuel , dans les conservatoires où ,
pins qu'ailleurs , l'enseignement collectif est facile à in-
troduire , c'est se décider en faveur du premier système.
Adoptant Icsélogcs que l'auteur donne au solfigt d'Italie,
et la justification qu'il l'ait de cet ouvrage , accusé de man-
quer d'ordre et de développement pour les parties élémen-
taires, j'abandonne celle méthode transcendante, et j'ar-
rive à Rodolphe, que l'auteur me parait traiter avec bien
de l'indulgence. Il y a autre chose à lui reprocher que le
Ion élevé de ses leçons: il faut, avant tout, se plaindre de
l'insuffisance de ses éludes élémentaires, i" sous le rap-
port de l'intonation. Elles se réduisent à luire parcourir
193
un certain nombre de degrés conjoints, pour enjamber
immédiatement après un intervalle de quarte on de
quinte, lorsque l'écho du dernier son dlire encore pour
ainsi dire. L'élève qui saisira bien l'intonation dans ce cas,
la manquera quand il n'aura plus le secours de ce voisi-
nage. Je ne dis pas qu'il ne faille commencer ainsi ; mais
ensuite il faut isoler ces intervalles dans des leçons faites
ad hoc. i" Sous le rapport de la mesure. Très peu de com-
binaisons y sont passées eu revue. La méthode du Conser-
vatoire me paraît bien supérieure ; je me plaindrai seule-
ment de ce nombre infini de gammes en rondes qui ne
font point avancer l'élevé, et dont les acconipagnemens
variés semblent la leçon de quelque élève d'harmonie. Les
tableaux de M. Williem me paraissent plus méthodiques ,
résoudre un plus grand nombre de difficultés, et, en
somme , plus profitables à l'instruction élémentaire. Us
conviendraient à l'enseignement individuel comme à l'en-
seignement collectif. Ici encore les divisions si tranchées
de l'auteur de l'article me paraissent illusoires.
En résumé, cherchons une bonne méthode élémeu-
commandahlcs par leur date même. Quand l'esprit d'ana-
lyse , s'appliquant à toutes les branches des connaissances
humaines, simplifie toutes les théories, et facilite la trans-
mission de toutes les sciences, il serait bien téméraire de
prétendre que la musique seule ne peut rien gagner à
cette heureuse disposition. Je suis loin de croire aux pro-
messes emphatiques des novateurs, et, dans leur intérêt
même, je conseillerais à quelques-uns de rabattre un peu
de leurs fastueuses prétentions qui les déconsidèrent aux
yeux de ceux qui sont pénétrés des difficultés réelles de la
musique. Mais les véritables amis de l'art doivent suivre
toutes les améliorations et y applaudir, de quelque source
qu'elles viennent. Une fois ces améliorations constatées
par les juges désintéressés, le Hoeplre de la routine est bien
aventuré M elle refuse do transiger avec elles. Elle pourra
bien fermer les yeux pour ne pas voir des progrès dont elle
4g4
s'indigne; mais quand elle les rouvrira; elle sera bien
étonnée de se trouver seule.
Agréez, monsieur, l'assurance de la parfaite considé-
ration avec laquelle j'ai l'honneur d'être '.'*'.
Voire très humble et très obéissant serviteur ,
Undsves abonnés.
NOUVELLES DE PARIS.
Depuis la première représentation du Colporteur, qui
jouit toujours du même succès , aucune nouveauté musi-
cale n'a paru sur les théâtres royaux. Nous avons annoncé
qu'on s'occupe activement au théâtre FeyiLeau de Mazza-
niello, et à l'Opéra de ta Muette de Portici. A ces ouvrages
il faut joindre l'Exil de Roc/tester, ancien vaudeville de
M. Moreau, joué avec succès, dont ou vient de. faire un
opéra-comique qu'on répète depuis plusieurs jours, et
Don Juan de Mozart, traduit et arrangé pour la scène fran-
çaise par M. Castil-Dlaze. Les répétitions générales s'en
font à l'Odéon, et la représentation aura lieu incessam-
ment.
— La manière dont l'Ilatiana inÀlgeri est montée, et le
talent de AL** Pi*aroni commencent à triompher des pré-
ventions du public, et attirent du monde nu théâtre Ita-
lien. Tel est l'effet d'une exécution soignée ; elle rend tou-
jours de la fraîcheur aux ouvrages les plus dédaignés.
Celui-là mérite d'ailleurs par lui-même l'attention des
amateurs. :«l ■
— Des matinées, des soirées do musique , des concerts
de toute espèce s'annoncent de toutes parts. Nous avons
le concert de M. et de M™ Slocltausen pour le 19 de ce
mois, à la salle de la rue de Clêry, le 20, un exercice des
élèves de l'Institution royale de musique religieuse nous
fera entendre la Fête 0? Aiemamlrt, de Hœndel , et plusieurs
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495
autres beaux morceaux; le a5, M. Henri Hcrz donnera an
théâtre île Madame an concert composé de manière à pi-
quer la curiosité des amateurs; el le même jour, MM.Boh-
rer frères en donneront un autre à la salle de l'Opéra.
Pourquoi faut-il qu'il y ait disette de musique dans un
temps et profusion dam un autre? Il vaudrait mieux par-
tager ces sortes de solennités que de le» mettre en concur-
rence, car, dans roliligation .de choisir, le public perd
d'un côté ce qu'il gagne de l'autre.
— Une nouvelle clarinette à dix-neuf clefs, construite
par M. Sîmioht, facteur d'instrumens à vent , à Lyon, a
clé essayée ;i l'Institut, samedi, 8 de ce mois, par
M. Beer, artiste distingué dn théâtre Italien , et a été gé-
néralement approuvée. SI. Beer assure que cette clarine! le
n'offre pas plus de difficultés que celle à quatorze clefs ,
qu'elle est plus juste, et qu'elle facilite l'exécution d'une
foule de passages. Nous donnerons le rapport de l'Institut
sur cet instrument.
VARIÉTÉS.
NOTE SOJl LA CONTREBASSE. .. ;
La contrebasse est tellement montée , en France , avec
des cordes si fortes et tellement élevées sur la touche , que
cet instrument est vraiment fatigant a jouer dans les
passées de force, et difficile dans les piano et pianissimo,
surtout par la manière dont l'archet es! généralement con'-.
struit et celle dont il est tenu par l'instrumentiste ; car la
longueur de l'archet , en raison de la forme île sa baguette,
nuit à sa flexibilité par le trop de raideur q'tc celle fijrnic
donne à lit tension du crin. La forme de l'archet' fiançais
nuit donc à l'attaque vigoureuse des cordes, «ans rendre'
l'exécution plus facile dans les metzo forte et les piano.'
Nous avons vu dans la Revue mnsicale (t. I, p. 4G8,) un
article ou plutôt une dissertation lumineuse et 1res exacte
496
dans tous les points de discussion ou de comparaison que
l'auteur établit entre l'archet français et l'archet italien,
et H suffirait de nommer M. Dragonetti pour trancher la
difficulté sur le choix à faire entre les deux archets, en
s'appuyant d'une autorité si généralement reconnue, si les
raisons que l'auteur de l'article donne de la préférence qu'il
accorde à l'archet italien n'étaient pas concluantes. Nous
ne sommes cependant pas étonnés que MM. Sorne , Lamy,
Chenier et quelques autres contrebassistes ne se soient pas
rendus à l'évidence, te talent et le mérite réels sont tels, que
peu doi t le ur i mporter ac tuel I emen l l'u n e ou l'a u I re ni an i ère
dont l'archet de la contrebasse est construit et tenu par
l'instrumentiste. L'habileté qu'ils ont sur leur instrument
est d'ailleurs toute différente de celle des contrebassistes
étrangers. Ceux-ci exécutent avec force, netteté et exacti-
tude toutes les notes écrites dans la partie de basse ou de
contrebasse, et cela au moyen de leur archet dont la
forme et le degré de tension du crin leur permet aussi
d'exécuter pianissimo, legalo, etc. A ces mêmes qualités
d'exécution , pour lesquelles la formel de l'archet n'est point
un obstacle, les bons contrebassistes français', dont nous
venons de parler, joignent un autre talent , qui nous
semble mettre le comble à l'excellence de la manière dont
on doit jouer la contrebasse, celui de ne faire , dans cer-
tains cas, que les notes qui font ressortir davantage la
masse de l'ensemble harmonique. Ces contrebassistes
harmonistes et même compositeurs connaissent mieux
l'effet de leur instrument que beaucoup d'auteurs et com-
positeurs d'opéras, et cela par l'habitude et le talent qu'ils
ont de juger de l'effet total de l'orchestre dont ils font par-
lie ; ils savent que, si dans un mouvement assez vif ils fai-
saient toutes les notes qui font partie d'un même accord,
cette multitude de notes graves ne formerait qu'un bruit
sourd et un effet peu distinct dans l'ensemble. Mais , d'un
autre côté, il ne s'ensuit pas que leur manière de tenir l'ar-
chet soit préférable à la manière italienne , parce que leur
talent réel d'exécution, acquis par l'habitude, parleur con-
naissance et encore plus par l'observatiou continuelle des
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497
effets, les met au-dessus de pareilles considérations; car,
supposons qu'il y ait eu France cinquante ou soixante
contrebassistes , en trouve-t-on beaucoup , parmi ce nom-
bre, qui soient à la fois habiles instrumentistes et harmo-
nistes exccllcus , comme les artistes que nous venons de
nommer? A.' part ce noyau d'hommes de mérite qui com-
mence à n'Être plus dans laforec de l'âge, où trouverait-on
leur remplacement ';' L'exécution musicale a marché à pas
de géant depuis un demi-siècle. Les parties de violoncelle et
de cou u-ebasse sont presque aussi difficiles à cxécnlcrquc les
concertos de basse de la première moitié du siècle dernier. Il
faut donc prendre les moyens de former des instrumentistes
qui puissent exécuter la musique de nos jouis. M. le direc-
teur actuel de l'Kculc roy.ilo, le célèbre C brnilm'.i, a donc
agi avec une grande prévoyance en instituant dans l'École
une classe de contrebasse, et surtout eu y faisant donner
les leçons selon la manière dont on joue cet instrument en
Italie et en Allemagne. C'est ici le cas de féliciter M. Gc-
lincek, l'un des plus habiles contrebassistes de Taris, de
n'avoir voulu prononcer sur une question importante
pour son instrument qu'avec connaissance de cause ; et
nous ne doutons pas que la propre expérience de cet ar-
tiste n'ait influé , avec raison , sur la décision de M. le
directeur de l'École royale de musique.
Correspondant de l'Inititul.
On lit dans le Voyage a la Chine du conseiller russe Tim-
kowski que les genres n'étant pas distingués sur le théâtre
chinois, la même jn'èce est presque toujours tout à la fois
tragédie, comédie et opéra. On'y fait en général peu d'u-
sage de la musique pour elle-même. Mais c'est surtout
quand l'auteur est arrivé au paroxysme de la passion, qu'il
appelle la musique au secours des paroles, qui, acides,
eussent été in suffisantes. Il est remarquable quece peu-
ple, si arriéré par rapport à nous dans les arts , ait natu-
rellement découvert le véritable emploi de la musique dra-
matiqtie, sur lequel on ne paraît pas toujours bien fixé chez
nous, et qu'il ait senti que la musique, qui ne peint pas
dans le sens que beaucoup de littérateurs musiciens don-
nent ace mot, exprime d'une autre manière, el mieux que
les paroles, un sentiment unique et tellement fort, qu'il
occupe seul l'ame du personnage. Ceei une fois bien com-
pris, les épîlugueurs à propos 4e musique devraient bien
aussi reconnaître que la répétition des paroles, poussée
même à l'excès dans une situation passionnée, loin d'a-
voir besoin d'être tolérée par égard pour la musique , loin
d'être nu coulrc-seiis, est au contraire une exactitude ; car
il n'est aucun homme, habitué à réfléchir el observer en
lui la nature humaine, qui ne se soit aperçu que, dans les
momens de grande émotion, il nous serait le plus souvent
impossible de sortir pendant un temps plus ou moins long
du même cercle d'idées , et de trouver d'autres mots pour
traduire la préoccupation qui nous maîtrise. C'est de celte
observation, que nous croyons d'une justesse rigoureuse,
que devraient partir les poètes d'opéra pour la charpente
de leurs ouvrages. Qu'ils lassent une large part à la mu-
sique dans les momens où la passion subjugue, elle ne pa-
raîtra jamais longue. Qu'ils veuillent l'introduire sans dis-
cernement dans les inslans où faction doit marcher avec
rapidité, ils obligent le compositeur à l'aire des bors-
d'œuvre ou de la musique sèche. Il est sans doute des si-
tuations où celle règle peut être modifiée, mais c'est une
appréciation de circonstances qui ne peut guère être laite
que par le poêle qui s'est donné lu peine de réfléchir iur
la nature de l'art musical.
-,rèi Le numéro iïVj du Breton , journal de littérature , de
sciences et d'arts qui se publie à Nantes , contient les dé-
tails suivaiis sur un instrument nouvellement inventé par
M. Gaina., facteur de pianos, à Nantes; instrument qni ,
d'après ce qu'on en. dit, nous paraît être du même genre
que le piano à archets cylindriques, que Schmidt, fac-
leui- de pianos à Paris, avait mis à l'exposition des pro-
$99
duits de l'industrie, en 1806. Au reste, ceci n'est qu'une
conjecture qu'il est impossible de vérifier sans avoir en-
tendu le pleçtrofupkon de M. Ganta.
il PLEciaoEi;pnos.
« L'orgue, le plus ancien des inlrumens à touclies, a
donné lieu à la découverte du clavecin, et celui-ci à Vin*
veution du piano , qu'on trouve aujourd'liui partout. De-
puis, on a constamment essayé , sans succès durable, de
donner au piano ce charme d'exécution auquel s'oppose
l'impossibilité où il se trouve de prolonger les sons , seule
chose qui manque à son organisation. Dans ce but, des
tentatives multipliées ont été faites. Ou a surtout tenté de
suppléer au défaut d'expression parla variété des effets. C'est
probablement] dans cel teintention qu'eu 1810, un amateur,
M. de Saiut-Pern , a inventé sous lenom d'organon-lyrtcon ,
un instrument réunissant aulour du piano ordinaire une
douzaine d'instrumens à veut, toujours pretsà converser
avec lui. Par un mécanisme très ingénieux, mais un peu
embarrassant , l'exécutant peut , à l'aide d'un double clar-
vier, faire entendre isolément, ou le piano, ou tel jeu de;
flùlc ou hautbois, ou mêler ensemble leurs voix réunies.
«Plus tard, M. Dielz a fait paraître sou claxi-harpe. Il
a mis en vibration des cordes de harpe , au moyen de pe-
tites pinces agissant à. peu près comme les doigts sur ces
cordes, à l'aide d'un clavier ordinaire. M. Dietz est par-
venu ainsi à résoudre une grande difficulté, celle de mo-
dilier et de graduer à volonté les sons , mais non de lys,
soutenir.
o Le même facteur a livré au public le troeâleon, instru-
ment de forme ronde, garni de touclies métalliques mist s
en vibration par un archet circulaire qu'une pédale fait
mouvoir. -,
» Beaucoup d'amateurs connaissent Vorc/iesirim, confec-
tionné à Moscou par M. Poulleau, et que son inventeur
a fait entendre à Nantes. Cet instrument, qui a précédé le
troehtim, se jouait comme un clavecin : il imitait le vio-
5oo
Ion , la basse, le violoncelle, lu viole d'amour cl les orgues.
M. l'oulleau en a emporté le secret dans la tombe.
■Sans doute , la vielle , à laquelle on accorde plus d'an-
cienneté qu'au violon même , a fourni la première idée de
Vorchestrino ; car on sait qu'on joue de la vielle au moyen
de touches et d'une roue-archet bien polie et frottée de
colophane. Les touches étant pressées en-dessous du cla-
vier par les doigts de la main gauche, pressent à leur tour
l'une des cordes de la vielle et la portent sur la roue-ar-
chet, qui la fait résonner au grave ou à l'aigu, selon que Tac-
lion des touches lui enlève plus ou moins de sa longueur.
L'autre corde, n'étant passoumise à cette action, donne
toujours la même note , qui est, pour l'ordinaire, la domi-
nante, et forme ainsi une espèce d'accompagnement. On
voit des joueurs de vielle gouverner leur manivelle avec
tant d'art, qu'elle imite souvent la pureté de l'archet du
violon de manière à exciter l'élonnemcnt des musiciens
exercés.
■ Récemment, M. Eschcmbach , dans son Eolodicon,
a imaginé, eu trouvant le principe de sa découverte dans
la harpe d'Eole et la guimbarde , de produire à volonté
les vibrations sonores par un soufflet employé à faire vi-
brer, non des cordes tendues , mais des ressorts métalli-
ques fixés par uneextrémité et libres de l'autre.
> M. Léonard Maélzel, frère du célèbre inventeur du
Métronome , a trouvé à Vienne l'harmonie a? Orphée. Cet ins-
trument produit des sons flùtés, qui se prolongent aussi
long-temps que le doigt ne quitte pas la touche, et qui
peuvent être renforcés ou affaiblis à volonté.
« H. Mott, de Brighlon , a fait connaître un instrument
oii les notes sont soutenues et qu'il appelé Sostenantc
piano -forte.
« En novembre 1831, M. Hackela fait entendre à Vienne
un î nstrumenlqu'il nomme Phys-harmonica : il a huit oc-
taves, imite les instrumeos à vent, et est susceptible de
toutes les modulations musicales *.
{1) Nous peinons qu'il y a ici cruur de cljiffr es, cl que M. DacLul n'a
pai fait de Phys -harmonica qui eût plu» ilï 6 octaves.
DigitizGd by Google
5o»
■ Enfin, en 1823,. M. l'abbé Grégoire Trentin a donné
un instrument de son invention : le moticimbalo. II 3 ia
forme d'un grand piano à queue , et est monté en cordes
de boyau, lesquelles, accrochées tour à tour ou simulta-
nément par les touches du clavier, sont mises eu contact
avec uu archet cylindrique que le pied de l'exécutant fait
tourner. Cet archet est garni de crins comme celui du
Violon; ces crins sont retenus, par leurs extrémités, dans
un tissu de laine. Ce nooveau piano est de sis octaves ■ il
est peut-être le plus perfectionné parmi ceux du même
genre; cependant il pèche par la composition de l'archet
qui lui donne des sons criards : il ne possède point l'archet
sans suture de M. Poulleau, d'une composition dent ce
dernier n'a pas révélé le secret avant de mourir, mais qui
si nous en jugeons par les effets , est remplacé , avec beau!
coup de supériorité, par l'instrument que vient d'inventer
M. Gama , facteur de pianos à Nantes.
c Toutes les découvertes que nous venons d'indiquer
étaient connues de H. Gama ; mais il n'en redoute pas la
concurrence, parce qu'il eu sait les iuconvéniens. Dans
quelques-unes, les cordes se rompent avec facilité ou se
montent difficilement; les autres tiennent beaucoup trop
de place ou causent une grande fatigue à l'exécutant. Il
s'est donc bien gardé de les copier; toutefois , en homme
instruit dans son art, il a profité des fautes de ses prédé-
cesseurs pour les éviter. '
« M. Gama donne à cet instrument le nom de pltctroeu-
fkii,^™,^*,,, archet harmonieux. Aussi facile à toucher
que le piano , il offre le précieux avantage de filer les sous,
de les renforcer, et de les affaiblir à volonté et par grada-
tion. En remplaçant à l'occasion uu quatuor d'instru-
mens à cordes, il offrira bien autrement de ressources que
le piano pour reproduire les partitions qu'il est impossible
d'arranger, pour ce dernier, sans de nombreux change-
mens; au point que les intentions de l'auteur en devien-
nent méconnaissables. En outre, nous croyons que les
chanteurs ne balanceront pas un instant à choisir le plec-
Irotuphon pour accompagnateur : il soutien !ra mieux la
502
voix que le piano , sans cependant la couvrir. Nous avons
dit qu'il pouvait remplacer un quatuor d'instrutneris à
cordes ; nous ajouterons qu'il rappèle les sons si agréa-
bles du médium du violoncelle et les sons graves de la
basse , de manière à faire. une illusion complète. On con-
çoit alors quelle < xpression ravissante il peut offrir dans
les mouvemens lents , qu'il ne faut pas songer à obtenir
du piano ordinaire. Mais il sera surlout reciierclié par les
musiciens qui, privés d'orchestre et fatigués de ne pou-
voir demander au piano que des notes frappées , l'aban-
donnaient la plupart du temps avec dépit , dans l'impossi-
bilité de produire les effets des compositions dramati-
ques dans leurs accompagnemens. Avec l'instrument de
M. Gama , Il n'est plus besoin de ces trémolo et de ces bat-
teries monotones pour remplacer les noies soutenues ; car
ces dernières noies sont rendues avec le même sentiment
que sur les instrumens à cordes.
n M. Gama a fait beaucoup d'essais , et par conséquent
beaucoup de dépenses pour parvenir aux résultats heureux
qu'il présente aujourd'hui; mais, n'en doutons pas, il
en trouvera le juste dédommagement dans les suffrages
du public, et ses compatriotes ne seront sans doute pas les
derniers a apprécier le mérite de son invention. Elle lui
fait honneur, ainsi qu'àson fils'; car ils j ont seuls travaillé
à l'exclusion de tous ouvriers.
n M. Lupperger, que nous avons entendu sur le plec-
iroeuphon, le touche avec uu véritable talent. Nous savons
qu'il l'étudié avec assiduité et avec tout le désir de prou-
ver combien , sous des doigts habiles , cet instrument peut
avoir de charmes et offrir de ressources. C'est ce que les
amateurs seront bientôt a même (l'apprécier.
«Nous n'avons pas parlé de sa construction : c'est un
de ses moindres mérites ; cependant , comme H. Gama est
facteur à Nantes, et que l'exécution extérieure n'est pas a
dédaigner dans uu instrument destiné à orner nos salons',
nousdirons que c'est un petit chef-d'œuvre d' ébéniste rie. •
5o3
ANNONCES.
AVIS.
La place d'organiste de la paroisse de Gray (Haule-
Saonc), étant vacanle, le maire de cette ville fait savoir
qu'il sera ouvert a l'Hôtel- de-YiUe , le i" mai i8a8, nu
concours pour déterminer le choix parmi les concurrens,
qui devront justifier d'ailleurs de bonne vie et mœurs. Un
traitement de 800 fr. est affecté à cette place , indépen-
damment d'un bon casnel. La ville offre beaucoup de res-
sources à un musicien qui pourrait professer plusieurs
îuslrumcns, et il y trouverait un grand nombre d'élèves.
— On demande , pour une ville agréable et qui a dos
communications faciles avec la capitale , un professeur de
musique qui puisse enseigner Je violon et la clarinette; on
lui assurerait la place de chef de musique de la garde na-
tionale.
S'adresser h HT. Charles Laffillé, galerie Vivicnne, u° 70,
le matin de S à 9 heures , et le soir de 4 à 6 heures.
Trois romances détachées, mises en musique avec
accompagnement de piano ou guitare , par Ch. LafGlIé.
i° Le Petit malheureux, romance religieuse, avec une
jolie gravure en taille-douce.
2* Si lu m'aimais 1 romance, avec gravure idem.
3° L'Amour et l'Amitié, romance avec lithographie.
A Paris, chez l'auteur, galerie Viviennc, n" po, et au
magasin de la Lyre moderne , rue Vïviemie , n" 6.
— Album lyrique composé de douze ^romances et noc-
turnes avec vignettes, dédié à S. A. R. Madame, duchesse
de Berry, par MM. Bruguièrc et Panser on. Paris, Aula-
gnicr, rue de la Paix, n' 9, 1 vol. in-4" oblong.
5o4
Faire des romances et s'appeler ou Bruguière, ou Panse-
ron, ou Amédée de Beauplan, ou Romagnesi, c'est com-
mander au succès. Si tout ce qui sort de la plume de ces
aimables troubadours n'est pas également bon, il y a
toujours quelque chose de gracieux qui fait pardonner
le reste. Dans l'album que nous annonçons, MM. Bru-
guière et Panseron n'ont pas abusé de la puissance de leur
nom, et, comme on pourrait dire, n'ont pas escompté
leur réputation : tout y est fait en conscience. L'Orpheline,
romance, Soyez heureux et Jeunes Bergerettes, nocturnes de
M. Panseron; la Rose de Bagdad, romance, et Quandtient
la nuit, nocturne de M. Bruguière, sont des bagatelles
charmantes qui survivront au moment qui les a fait
naître.
— Les Animaux chantons, quatre canons a quatre voix
égales, avec accompagnement de piano , suivis d'un qua-
tuor. Prix ; 8 francs , a Paris, chez tous les marchands de
musique et de nouveautés.
Ces morceaux ne sont que des plaisanteries; mais ils
remplissent bien leur but, qui est de faire rire. Rien de
plus de bouffon que les canons du canard, du chat, de
la poule et de l'âne. Ces morceaux sont tirés séparément
sur un carton mince, et contenus dans un joli porte-
feuille.
Digitizod by Google
HISTOIRE DE LA MUSIQUE.
Cb n'est pas toujours dans des traités ex-profcsso qu'on
rencontre les meilleures observations ou les faits les plus
curieux sur l'histoire des arts ou des sciences : les livres
les plus étrangers en apparence à ces matières nous
révèlent quelquefois l'existence de documens qu'on cher-
cherait vainement ailleurs , ou qui ne se présenteraient
pas sous des formes aussi piquantes. D'ailleurs , quoiqu'il
en puisse coûter à notre orgueil de faire cet aveu, l'esprit
humain n'est point encyclopédique; il s'accommode mal de
ces grands tableaux qui embrassent toutes les parties d'un
art, et surtout d'un art si compliqué que la musique, d'un
art susceptible de prendre tant do formes , et qui a été
si différent de lui-même à différentes époques, non-seu-
lement sous les rapports de la théorie et de la pratique,
mais de son effet moral, et delà considération dont il a joui.
Les livres qui traitent d'une époque, d'un pays, d'une
ville , d'un ordre religieux, tous ceux enfin dont l'objet est
spécial, circonscrit, et qui sont l'ouvrage d'hommes
consciencieux , savans , ou doués d'un esprit original ijui
leur fail considérer les faits sous un aspect nouveau , sont
donc des sources où l'on peut puiser des renseignemens
précieux qui , rattachés ensuite à un plan général, passent
dans l'histoire de l'art pour n'eu plus sortir.
Ces réflexions me déterminent à parler ici, mais uni-
quement sous le rapport de l'histoire de la musique, d'un
livret qui vient d'élre publié, et qui se rapporte a des
Les journaux n'ont point assez parlé de cet ouvrage, qui
a pour titre : Histoire des Français de* divers étais aamem-j der-
niers siècles, par M. Amans- Alexis Monteil *, ouvrage d'une
érudition immense , écrit aiec une bonhomie spirituelle,
(>} XlV'iiècle, a vol. in S". Paria, Janct El C «telle ,'libr.lii., tue
Sainl-AndrÉ-des-Arcj, n* 55.
»• vol. , Zj3
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5oC
lui-même. Vingt années de la vie de M. Montcit ont ilé em-
ployées ù recueillir les matériaux de ce grand travail. Ce
qu'il a fallu de savoir, de patience et de sagacité, pour dé-
couvrir, dans la fange du moyen age , lout ce que ce livre
renferme d'instructif , est incroyable. Ce n'est point la
forme sèche d'un récit historique que M. Monteil a adoptée;
H a senti que pour peindre les mœurs de chaque siècle, il
fallait qu'il employât les couleurs du temps, et rien ne lui
a semblé plus propre à remplir cet objet que de mettre en
cène des personnages de chaque époque. Au quatorzième
iècle, les moines tenaient la première place dans la société
en Kin iipe , et surtout eu France ; c'est parmi eux que
M. Moulcil a choisi ses principaux personnages, lin
commerce épistolaire entre un cnrdelier de Tours et
un cordelier de Toulouse , amène d'une manière natu-
relle et piquante tout à la fois l'occasiou de parler de tout
ce qui concerne les mœurs, les usages, les sciences, les arts
et la politique de ce siècle , où l'on voit déjà se préparer
les révolutions qui, dans la suite, ont tant amélioré la
condition des homme*.
Eu ce qui concerne la musique , je ne puis donner trop
d'élogesà l'auteur deVHistvirctles divers états, pour l'exacti-
tude de ses recherches. Il a consigné le résultat dans deux
épttres, dont l'une est intitulée : l'Enfant de chœur, et
l'autre , YOrganislc. Je ne puis me refuser au plaisir de
citer eu entier Je premier, qui révèle des faits curieux,
ignorés eu partie, même parles érudits en musique. C'est
frère Jehan , de Tours, qui écrit a frère André de Tou-
louse* ."
a Sauf l'honneur de l'ordre de Saint-François, j'ai .nu
«cousin sergent'. C'est d'ailleurs un bon père de famille,
* nui a douné uu état à tous ses enfans , excepté au plu*
.jeune. Ce matin j'ai appris qu'il allait lui donner. celui
■ de ménétrier, .l'ai aussitôt co'.iru chez lui et me suis
(i) ilajîiicr. ■ 1 1
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5or
* expliqué assez vertement sur sou projet. Il m'a répondu,
. la tète baissée, qu'il était fort pauvre, qu'il comptait sur
«les profits considérables qui ne pourraient manquer à
«son fils; et il me. les a énuniérés. Mais, lui ai-jc. dit, faite*
« donc entrer dans vos calculs le déshonneur; sachez que
tles joueurs d'inslrumens ne témoignent point un Justine' :
« les avez vous vus jamais en robe, en fourrure, en cliape-
i. ron ? jamais1. Les avcz-vons jamais vus le bonnet, sur la
k tête quand ils sont en fonctions ? jamais1. Faites entrer
« encore dans vos calculs les pertes : si les joueurs vont
j aux l'êtes eu plus grand nombre qu'on ne les a demandés.
" ils perdent leurs gages '; t'aites-y entrer les dangers : qui
1 ne vous dira qne les instruments à vent, surtout les liants
c. inst rumens 6, les hautbois, affectent la poitrine ? .Faites-y
« entrer les difficultés: il n'y a aucun instrumenta eorde dont
■ l'apprentissage ne soit fort long; la trompette marine
cr mémo, cette longue caisse on bierre, montée d'une seule
".corde, n'est pas aisée à manier. Quant au rebee e, les
< sons doujt.et'purs , qu'à force d'art les rnéjiétriers tirent
» aujourd'hui de leur archet .vous étonnent, vous jra-
■ vissent; la harpe, la guitare veulent la plus grande deit-
« térilé de tous les doigts. Il n'y a pas jusqu'au lympmion à
uleux baguettes, jusqu'au tambourin frappé desdeux côtés
(1) -Ccult sont vilains natres de quclronquc liguapr qu'ils sufeiii...
■Vilimencjtr;crs...ne sont digne* dp su entremettre de droitfl....Chî|>.
i3; d'une Tifiilln- coutume de Bretagne manuscrite.
(>) Aux miniatures des manuscrit* de la Bibliothèque du Roi fit de:
l' Arsenal, les ménétriers et joueurs d'insi rumens snni tous iv|iiésentéi ru
longues eliausscs et eu teste courte, a pli de eorpi,
(S) "A la vûrile quelques-uns uni, dans ces miniatures , le bonnel et
même une plume sur le bonne!; mais ce n'en jjmais lorsqu'ils font dan-
ser, on qu'ils jouent de leurs insirumeiis dans les salles des paiai» >im des
ehatcnui.
(4) Traité de la police, par Del a m arc, liv.3, tit. 3, cLap. a.
L'Ordonnance de Charles VI, de janvier 1ÔS6, ra[.pnrti> .ho- rhUniie
de Juvénaldb Ursim,, porte qu'il ynura sii fat «fa menetlrlers et trOurE»
mcncslrïcri.
(5) Le reliée était, comme on l'a la dans la Rem* musicale, !<■ violon
Ko8
s qui n'oblige à un lang exercice. Ne vous le dissimulez pas,
* il faudra à votre fils encore bien des années avant qu'il
t puisse devenir un joueur médiocre. Ne vous laissez pas
mon plus éblouir par la fortune des ménétriers de la cour.
« H y en a fort peu, et ce son t tous gensdu plus grand talent,
« qui n'en sont pas moins , je me trompe , qui sont plus
« immédiatement soumis k l'autorité du roi des ménétriers
«de France'.
« Vous dites que votre fils Ci un goût invincible pour la
«musique. Eh bien 1 que nele faites-vous enfant dechœur?
« Vous parlez de profits ; c'est alors qu'il en aurait. Il re-
* viendrait tous les jours à la maison les mains pleines de
« pièces de monnaie . de chandelles , et d'autres distribu-
tions il serait houssé, fourré et aurait un joli chaperon
■ d'agneau blanc les fondations obituaircs, les testament
< necessenl de mentionner les jeunes clercs *, qui forment
* les trois quarts de la musique de France ■■; et quant à l'au-
■ tre quart, composé de musiciens laïques , voulez-vous
«m'en croire? presque tous sont pauvres, mourant de
«faim6; et cela est juste, car ils ne chantent que les
■ louanges du Diable.
e Enfin, j'ai pris congé de lui en ces termes: sergent,
(1) Lettres-patentes du M avril 1407, contenant tes statuts des me-
ta) Anciens statuts des chapitre! au paragraphe Ditlribuliimtt «M-
rfmmr, entre outres ceux de Saint-ScTerin de Bordeaux.
(3) Constitutions des trésorier, chanoines et collège de la Sainte-
Chapelle du Palais. Paris, 1779, chap. Mal triie du enfant de durur.
(4) ■ft«m. A chacun enfant de cuer 11 soi».,. . Compte des lais et
ordonnances contenues au testament de feu bonne mémoire mesure
Jehan le seneschal , jadis chanoine de Laon , de l'année i38j. Ce ma-
nuscrit est en rua possession ; j'ai aussi l'obïtuaire de Saint-Hippolyte,
de Paris , et celui de Saïnte-Croii , de Bordeaux , qui mentionnent des
fondations en faveur des enfans de chœur.
(5) On ne peut éialucr a moins de mille le nombre des Église» de
France qui, au quatorzième siècle, avaient une musique, et à moins da
dix le nombre des musiciens qu'entretenait chaque église. Les maîtrises
(G) Ordonnance de Saint- Louis, citée par Delamarre, Traité (fa la.
5°9
■ suffit pour aujourd'hui ! à la première place v acan te, allez
< présenter votre fils ; mette/ votre belle épée à poignée de
« cuivre , et dites que vous êtes cousin du frère gardien. »
L'épi tre qui a pour titre YOrgaaitU, contient des notions
fort exactes de l'élat des connaissances musicales ii la fin du
quatorzième siècle, quoique présentées d'une manière abré-
gée , comme il convenait au cadre choisi par M. Monteil.
Elle est terminée par un paragraphe qui fera sourire nos
diletlanti; mais qui rappelle le langage qu'on a tenu dans
tous les temps sur la musique à la mode. Le voici :
■ Vous trouvez des personnes qui osent bien vous
«demander si la musique des anciens était meilleure que
«la nôtre? Ah ! frère André ! qu'il est des hommes ma I-
" heureusement nés ! Pour eus la magnificence du déchant
■ n'existe pas. Pour eux n'existent pas les mélodieuses com-
■ positions d'àdam de la Halle et de Guillaume de Ma-
li cheau, qu'on entendra encore avec transport dans mille
■ ans d'ici; car nos plus fameux c h antre b ne cessent de
» vous dire qu'il on sera de la musique actuelle comme
« du vin dont ils boivent : plus cite vieillira, plus on ta trou*
• vera bonne. »
On voit que M. Monteil fait parier nés personnages
comme ils auraient pu le faire réellement à l'époque qu'il
a choisie . Le reste de son livre est rempli de détails inté-
ressans sur l'usage de la musique dans toutes les circon-
stances de la vie civile. C'est ainsi que nous y voyons qu'il
y avait au quatorzième siècle , à Paris, une rue d*s Méné-
triers t où demeuraient tous les musiciens de profes-
sion, et qu'on y entendait de la musique en plein air, tous
les joursà certaines heures marquées ; nous y apprenons
aussi que le flutet et le tambourin étaient les instrument*
dont on se servait pour les petites danses, que l'orgue
était réservé pour les grandes danses, que l'heure des re-
pas était annoncéedanslcs châteaux par le son des trom-
pettes , etc. On y trouve aussi des renseignenieua sur les
cloches les plus renommées.
Les deux premiers volumes de l'Histoire des Fran~
fais ne sont relatifs qu'au quatorzième siècle ; les siè-
des suîvans nous promettent une moisson, de faits dont
l'intérêt ne peut que s'accroître à mesure que l'art se
perfectionne. Les quinzième et seizième . qu'on peut ap-
peler les grands siècles de la musique , parce que cet art
y a reçu toutes les formes scientifiques, ne peuvent man-
quer de fournir à M. Montcil l'occasion d'une foule do
révélations curieuses. J'en rendrai compte , à mesure que
les volumes paraîtront.
FÈTIS.
CORRESPONDANCE.
A M. F£ns, rédacteur de la Revue musicatr.
J'ai lu dans votre journal deux articles de M. Bleui sur
la génération mélodique de la gamme chromatique et
l'accord des instrumens, dans lesquels il prétend exprimer
par des nombres rationnels les douze sons compris dans
l'intervalle d'une octave, ce qui est I ou t~à -l'ait contraire
aux principes de la comparaison des sons; aussi les résul-
tai présentés par M. Blein sont-ils absolument faux, et
lié pourraient, même avec quelques modifications, servir
que dans lèsent Ion d'ut. En effet les douze sons chroma-
tiques étant calculés d'après les nombres
' » H f S • 5 S ''a ï § â -¥'t? »
al «/# rt reft mi fa fa% sol sotft la ta# si ut
l'intervalle de la ù u($ sera exprimé par le rapport ^, qui
diffère de j, valeur de la tierce majeure exacte de-f$f,
c'est-à-dire de près d'un quart de ton.
L'intervalle de u(# à la . exprimé par le rapport j£, 'li
fère en sens contraire de la tierce mineure exacte Ç.di*
même intervalle -Hr"; ''y aurait donc près d'un ton de
différence entre la tierce majeure la titft, et la tierce mi-
neure «(# mi, ce qui serait toul-à-lail intolérable-
Il pouvait paraître étrange de voir figurer dans la série
des douze sons chromatiques de la gamme exprimés eu
nombres rationnels, la quantité /--s, lorsqu'on pouvait
Digitized û/ Google
5n
prendre pour expression du faft soit la tierce de re $r soit
la sixte de la fjj , soit la sixte mineure de si|> soit enfin
la tierce mineure du hu[> 4ç- M- lltfciri se fonde , pour
l'emploi de cette expression, sur une expérience décrite
dans un Mémoire sur l'acoustique et la théorie des vi-
brations, et sur lequel l'académie des sciences a été invitée
par l'auteur a faire un rapport , qu'il attend depuis quatre
ans. Voici en quoi consiste celle expérience:
Si l'on fait résonner un plateau de verre on de métal t
et dont la forme soit celle d'un polygone régulier, il se
manifeste deux sons dont le plus grave se développe d'une
manière plus sensible lorsque le plateau est frappé vers sa
ciiruiif'ércnce , et le plus aigu lorsqu'on frappe le centre
du plateau; l'intervalle de ces deux sons varie suivant le
nombre de côtés du plateau. Dans le plateau octogone
c'est une sixte mineure un peu forte; dans l'hexagone cette
sixte est encore plus forte; dans le pentagone elle devient
une sis le majeure ; enfin dans le carré le son le plus grave
étant représenté par i, l'antre est exprimé par Kl,
t'est -à -dire qu'il existe entre ces deux sons un intervalle
de triton moyen; or, je demande à M. Bleui, qui a jugé à
propos d'introduire dans la génération, de la gamme l'in-
tervalle produit par le plateau carré, pourquoi il a négligé
cette sixte mineure un peu forte, et cette autre sixte un peu
plus forte, que donnent l'bcxagone et l'octugoue ; je pense
qu'il serait embarrassé de répondre à cette question, 11
résulte de cet examen que les expériences de M. Blcin
sont purement géométriques et dépendent du rapport qui
existe entre les rayons des cercles inscrits et circonscrits
aux plateaux, et ne peuvent avoir aucune influence sur
la génération de la gamme et la théorie des accords.
Je terminerai celte lettre pur l'exposé de la génération
de la gamme enharmonique, dans laquelle les résultats
de M. Bleio se reproduiront sous leur véritable point de
faire apprécier l'inexactitude.
Les huit sons dont se compose ta gamme diatonique
étant donnés par la réunion des trois accords parfaits ut
5l3
mi sot , sol si re , fa la ut , ont pour expression les quantité*
suivantes, indiquant leurs nombres de vibrations dans un
temps donné , pendant lequel le son ut ne rendrait qu'une
seule vibration.
' î ï ! ■ 5 T 1
ut re mi fa sol ta si ut
En comparant ensemble les divers sons dont se com-
pose cette gamme construite au moyen des trois cou son -
nances de l'accord parfait, savoir, la quinte, la tierce ma-
jeure et la tierce mineure, on s'aperçoit que la quinte et
la tierce mineure sont susceptibles de deux expressions
différentes , tandis que celle de la tierce majeure est tou-
jours la même. En effet,
Les quintes ut sol, sol re, la mi, mi si, fa ut, ont pour
expression le rapport ?.
La quinte re la est exprimée par le rapport fÇ, qui dif-
fère du rapport £ do f^.
Les tierces mineures mi sot, la ut, sire, ont pour ex-
pression f.
La tierce mineure re fa est exprimée par le rapport r' ,
qui diffère du rapport jj de -|J .
Toutes les tierces majeures ut mi, fa la, sot si, sont
exprimées par le rapport .
Ce rapport indiquant l'intervalle de deux sons dont
l'un produirait 81 vibrations pendant que l'autre en ren-
drait 80 , s'appelle en musique un coma majeur ; c'est l'ex-
pression de la tolérance accordée pour la justesse des in-
tervalles. Si l'on veut modifier les différens sons de la
gamme diatonique de manière à obtenir pour tous les sons
dont elle se compose une gamme semblable à celle du ton
d'ut, le moyen le plus naturel qui se présente est de cal-
culer ces nouveaux sons sur l'intervalle de tierce majeure,
le seul des trois intervalles consonnans qui ne soit suscep-
tible que d'une seule expression , on aura par ce moyen :
fafy tierce majeure de re = S x | _.4S
«t# tierce majeure de la ^ S ^ S M'jJ
soiff tierce majeure de mi ^= J x J = tj!
re # tierce majeure de si x | = $
Digitized û/ Google
r. 5,3
tierce majeure de /il g — ii^ | = «J|
tierce majeure de 'if# = X | = nnr
*if| tierce majeure desûijf ^ tI X l
«j, lieree majeure de re ^ * : |
mip tierce majeure dejci =• ■} : j= f
/a|) tierce majeure de ut = a : J = £
^ tierce majeure de fa = $ : ^ = *-§
îo/ [j tierce majeure de si [, = | ; 5 _ |£
uf £ tierce majeure de mi \f = ^ : jj = £|
/îi [> tierce majeure dc/n |> f : ; = -§3
Ces expressions, rangées dans l'ordre d'élévalion des
sons qu'elles représentent, donneront la gamme enhar-
monique.
Tels sont les nombres qui indiquent exactement les
rapports des sons composant la gamine enharmonique ;
ou pourrait, en continuant ces calculs, trouver une infi-
uilé d'autres valeurs qui correspondraient aux doubles
dièzes, aux doubles bémols, etc. ; mais cela serait lout-à-
fait inutile pour la pratique de la musique, dans laquelle
on ne fait usage que des sons ci-dessus auxquels on peut
toujours revenir par l'emploi des transitions enharmo-
niques.
On remarquera que les intervalles ut$rc\}, rejf mi|»,
mi # fa, etc. sont tous exprimés par le même rapport -'r~ï .
ces intervalles équivalent environ à un cinquième de ton
et s'appelle coma enharmonique.
On conçoit de quelle utilité serait pour l'étude de l'har-
monie et de la composition un piano qui donnerait tous
ces intervalles; un seul exemple suffira pour en con-
vaincre. On enseigne dans tous'lcs traités que l'intervalle
de sixte mineure ni la\, est consonuant, et que celui de
quinte augmentée m soif, est dissonant, ce qui résulte
3. VOL. 44
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évidemment de U comparaison des nombres ï et V; qui
les expriment, el cependant , sur les pianos ordinaires,
ces deux intervalles «Haut confondus en un seul, il est im-
possible de se rendre raison do l'effet différent qu'ils pro-
duisent.
Le piano enharmonique .serait beaucoup plus facile h
accorder que le piano ordinaire, puisque les tierces ma-
jeures étant rigoureusement justes dans tous les tons, tous
les intervalles ci-dessus seraient donnés par la suite des
quintes et des tierces :
ut fa, ut sot, sot re, fa ta, la mi, mi si, si fa$, la
«g, «g »it|, .ois "S. "8 '««- «'» Ht* Ht »#,
re sl\j, si\, mil,, mi\l H> fab r4> 5'!> w<[>> '°' 1»
«,|, r.y
Toules les gammes diatoniques de la gamme enharmo-
nique sont justes, mais elles ne sont pas toutes sembla-
bles, el se divisent en quatre classes correspondant aux
intervalles ci-après:
Tons de /à 1,, H' ut> mi ' 8 î i l T "»
•tfc «i],, Ml, « i ? ) | 1 } •
«>, ™, Ajf ! U U '
/Si» <«, uCtf i I ! w 5 ft ¥ 3
Lorsqu'on veut remplacer la gamme enharmonique par
la gammochromaliquc, c'est-à-dire exprimer par le même
son les diezes et les bémols correspondans , dopt l'inter-
valle est exprimé par le rapport y|4, le moyen le plus
simple consiste à accorder la série des douze intervalles
de la gamme par demi-Ions égaux : cette répartition d'er-
reur se nomme le tempérament, Ilya diverses manières
de l'opérer, qui lotîtes ont leurs partisans, mais celle-ci
offre l'avantage inconteslable de moduler dans tous les
tons, avec le même degré de justesse. Dans la gamme
chromatique moyenne, les tierces majeures sont plus
fortes, et les tierces mineures et les quintes plus faibles
que dans la gamme enharmonique exacte. Les difTércns
sons de celte gamme correspondent aux longueurs gui-
vantes d'une corde tendue divisée en 200
t parties égales
et donnant l'ut naturel.
5d(
■ 355
u(Jf ou rej» 1888
jcifl ou
/n|> 1260
re — 178a
/a
.189
rejf ou mi\f 1682
(«if ou
usa
mi i58j
io5g
f« .498
oi
1000
/àfl ou îo(i> 1414
La répartition des erreurs de cette gamme est telle, que
quoique tous les intervalles soient altérés, à l'exception de
l'octave, la différence avec un intervalle juste n'est jamais
plus grande que le coma majeur fj.
La manière la plus simple d'accorder une gamme
moyenne consiste à partager l'octave de ta à la en trois
tierces majeures un peu fortes, mais parfaitement sem-
blables entre elles , savoir :
ta «(((, ut$ mi# ou faty, fa la,
après quoi l'on accorde toutes les autres notes par quintes
un peu faibles.
la mi, mi si, si fa#, faQ at#
Ut$ «./#, ,01$ ««, Kg kg. '*# «•'« O» W
fa ul, ut sol, sol r», re la.
Les Irois sons «f jf faty et /a serviront de preuve, chacun
à leur tour, de l'exactitude de l'accord.
J*ai l'honneur d'être, Monsieur, votre très humble
serviteur,
E. TnODFENIS.
INVENTIONS ET PERFECTIONNEMENS D'INSTBUUENS.
CLARINETTE DE M. S1HIOT.
Nous avons dit, dans notre dernier numéro, que H. Si-
miot, fadeur d'inslrumens à vent, de Lyon, avait soumis
a l'examen de l'académie tics beaux-arts une nouvelle cla-
5.6
rineltc à dix-neuf clefs; il résulta des renseigncmcnssque
nous avons pris, que cet instrument présente les perfec-
i* Transposition du trou de si [> par une clef mécanique
qui ouvre dessus, et qui présente l'avantage de faire dis-
paraître un tuyau saillant dans l'intérieur de l'intrument,
lequel divisait la colonne d'air insuuluée; l'écoulement
d'eau qui avait lieu par ce Irou a disparu, et le si [> fixé des-
sus est devenu plus sonore qu'avant ce nouveau procédé.
2° Transposition du trou de sol, remplacé par une clef
mécanique plus facile a l'aire mouvoir que le ponce des-
tiné à bouclier ce trou, d'après l'ancienne manière.
5' Clef mécanique pour faire le trille du la avec si jj.
4* Charnière mécanique qui donne avec facilité le moyen
de couler le si tj avec ut et, au grave , le mi fc| avec fa
ou même de faire le trille entre ces notes.
5° Charnière mécauique pour couler le re -, avec mi j>,
et au grave, fa $ avec sol (j , ou même de faire le trille entre
ces notes.
6° Autre disposition de la clef de si au grave , on fa Jf au
clairon , au moyen de quoi les trilles de mi ^ avec fa
dans le ton de Te majeur , et celui de la jj avec si b , dans le
ton de sol majeur , sont devenus parfaitement justes, de
faux ou même iin pratiqua b les qu'ils étaient par l'ancienne
manière.
7" Clef de si i\ au chalumeau , indispensable pour faire
la trille avec ta fc|.
6' Clef d'ul ? on si fc| , pour faire le trille avec si \, ou ta ff .
Au nom de la .section de composition musicale , M. Ber-
ton a fait, sur ces améliorations, le rapport suivant, dans
la séance du samedi i" décembre.
« Messieurs,
< fil. Simiot, enhardi par l'honorable encouragement
« que vous lui avez donné, lorsqu'cn 1817 il vous fit en-
« tendreson nouveau basson, vient de soumettre à l'exa-
«men de votre section de musique le procédé imaginé
« et exécuté par lui , tendant à corriger les imperfections
Digitized b/ Google
.signalées depuis long-temps par tous les proWuw,
- dans la facture dcsclarir.ciics. Plusieurs faetcurs de mé-
■ rite sont parvenus A faire quelque» améliora lion s par-
« belles; ma s M. Simiot noua parait être le seul qui ait
» vér.tablcmcnt le plus approché du bol. Les améliora
* "ons annoncées et détaillées dans Je mémoire d-iolnl
* *o"t¥a7e"eS ',e'1 i'exam|clJ 1ue «on» O" avons fait ..oua a
. De plus. M, Simiot a fait une clarinette-alto; depun
« long-temps, Ja symphonie exécutée par des instrumens a
«vent, et- que l'on nomme vulgairement nwiqtu d' har-
« monte, réclamait celte nature d'ïnslrumcns; car toute
" pièce de musique composée de plusieurs voix ,'a toujours
« besoin d'un intermédiaire entre les parties graves et les
■ parties aiguës. La clarinette alto de M. Simiot nous a
« semblé être liés propre à remplir cette l'onction.
« Mous avons l'honneur de proposer à- l'académie de
. vouloir bien accorder son approbation, à noire rapport,
« nori-scuIcment: comme une chose juste et hunorahlc
T S'nlio1,ln;lîs al,S!iisou;j les apports de l'intérêt
Signé BoiELDrEU, CiTEL, Cbebebisi , Lescebb.
H. Bestoï, rapporteur,
rapport est fuis aux voix et adop|é:par l'académie. ,
Nous avons , parlé, dans notre numéro, du 9 août der-
iiJcr, d'une expérience faite par M. Caieyrc,' devant l'a-
cadémie, dans sa séance du 4 du même mois, d'un piano
mètograplie , destiné à écrire la musique ù mesure qtl'on
l'exécute, cl nous nous somme* -e;ii;;i-Os j l'aire connaître
le rapport qui serait fait à cette société savante sur ccll'
invention; mais, jusqu'à ec jour, le rapport n'a point été
fait.
Depuis lors , le j 5 septembre, H. Bandouiu a lu à l'aca-
démieun mémoire, accompagné de dessins, sur un autre
piano «télégraphe, dont il est inventeur. Sur l'observation
que le jugement de ce procédé exigerait le concours de
quelques membres de l'académie, des sciences avec ceux
de la section de musique , la discussion est ajornoÉe,
VARIÉTÉS.
Nous tirons d'un almanach de spectacles italien les dé-
tails suivans sur les chanteurs Lablache et Davide. Ou sait
que tous les suffrages se réunissent en faveur du premier;
il n'en est pas de mémo du second; sî son talent trouve
des admirateurs, il a été aussi l'objet de critiques amères.
Tous les deux parcourent une brillante carrière.
Louis Lablache est né à Naples, en 1795. On a dît qu'il
était originaire de Marseille; mais il parait certain que
ses parens étaient fixés en Italie depuis long-temps. Il fut
des sou enfance destiné a la musique , et entra au eonser-
valoire de Naples. U se fit surtout remarquer par une
merveilleuse facilité pour apprendre , et il eh donna une
preuve trop curieuse pour ne pas être rapportée.
Il était question de faire exécuter une grande sympho-
nie par les élèves du conservatoire de Naples; mais on
n'avait pas un nombre suffisant de joueurs de contre-
basses. On pensa, non à en faire venir un du dehors,
mais à le remplacer, seulement pour la symé trie, à laquelle
il paraissait qu'on tenait beaucoup, parmi élève qui, se
tenant derrière une contrebasse, ferait semblant déjouer,
tandis qu'il lui serait réellement interdit de pousser une
seule fois l'arc li et. On jeta A cet effet les yeux sur La-
blache, élève des classes de chant, dont la grande taille
pouvait produire plus d'illusion. Le jour de l'exécntio"
définitive arrivé, quels sont et l'étonncmcnt de tous les
symphonistes qui étaient dans le secret de l'école , et l'ef-
froi du pauvre compositeur en voyant que Lablache ne
faisait pas semblant de jouer de la contrebasse, mais qu'il
poussait cl tirait l'archet en conscience. La surprise re-
doubla quand on s'aperçut que tout allait au mieux, et
que le symphoniste improvisé s'acquittait de sa partie
tout aussi bien que les autres. Depuis le moment 0(1 il
avait été désigné pour l'emploi de mannequin , il avait
DigitizGd t>y Google
5,9
travaillé jour el nuit en sécréta se familiariser avec le
doigté de la contrebasse et le maniement de l'archet, et'
était ainsi parvenu en fort peu de temps à se rendre utile.
La fatigue que lui avait occasionné cet exercice violent ,
et les efforts qu'il avait faits , lui causèrent une maladie
longue et douloureuse, qui , heureusement, le dégoûla de
la musique instrumentale, et le décida à s'adonner aux
éludes de chant.
Son premier début, comme chanteur dramatique, eut
lieu au petit théâtre San-Cartino, à N a pies, dans quelques '
farces oh il jouait toujours le personnage appcléflu//a Na*
poletano. De là, il passa au théâtre de Messine oii il jeta les
fondent eus de sa réputation dans Lt Trame de/use, et dans
gtiSposi in Cimenta. Ce fut dans cette ville qu'il épousa
Thèrise Pinotli, cantatrice hahile , dont il a eu plusieurs
eufans. Apiès avoir quitté Messine, il passa à Païenne, où
il chanta alternativement aux théâtres S. Ferdinnndo et
Carolino. Dans l'automne do iSai, le succès qu'il a ob-
tenu à la Scala , à Milan , dans les opéras de la Scioeca ptr
astuzia et daus Elisa e Claudio, l'a sigualé à l'Italie comme
sa meilleure basse chantante. Rome, Naples, Milan et
Vienne ont entendu Lablncshc à diverses Époques, et ont
payé un juste tribut d'éloges et d'applaudissemcns à son
talent. L'empereur d'Autriche t'a nommé l'un des mem-
bres de la chapelle Palatine, et le» habitans de Vienne ont
fait frapper une médaille eu son honneur.
Lablache, qui est dans la plénitude de ses moyens, pos-
sède une voix de basse grave, étendue et souple. Comme
chanteur et comme acleur, il excelle également dans le
genre bouffe et dans le sérieux. Il chante presque toujours
la musique de Itossini et de ses imitateurs , quoique son
goût le porto vers celle de Cimarosa , de Paisiello et des
anciens compositeurs napolitains. Il est excellent musi-
cien, et compose même avec facilité, lia donné une preuve
de sa facilité h écrire , lorsque le marquis don Gregorio,
de la famille des princes de Squilaee , s'étant charge de
mettre eu musique l'opéra Casa da Vendere, et étant tombé
malade avaut d'avoir écrit sa partition ; fut nhligé de i*~
m élire les brouillons informes (le ses idées à Lablachc, qui
écrivit l'ouvrage eu quelques jours.
Les rôles qui ont fait le plus d'honneur à ce chanteur
sont ceux de Figaro, dans le Barbier de Sé ville, Acdon Ma-
gni(îcot-, dans la Cencrenlola . île Maomtllo /, A'Auur, etc.
Il joue et chante aussi supérieurement dans // Matrimo-
nio segreto , dans II Sowalc Lmniaginario , de Paisiello , et
dans la Serra Padrima du même auteur.
Aux qualités d'artiste distingué, Lablache joint celles
d'honnête homme, de bon père et de bon époux; il jouit
de l'estime de tous ceux qui l'ont connu et qui ont des
relations particulières avec lui.
— Jean Davide est né à Bergame , en 1790. Son père ,
dont le nom est justement célèbre en Italie, etnièmedan»
toute l'Europe, le destinait ainsi que lui à la carrière théâ-
trale, et semblait lui avoir transmis avec l'existence les
plus heureuses dispositions pour l'art du clianl. Il parait
toutefois que des folies de Jeunesse le forcèrent à l'envoyer
dans le Levant; là, Jean Davide se livra à l'élude, et le suc-
cès couronna ses efforts. C'est à Venise, sur le grand théâ-
tre de la Feuice, qu'il chanta pour la première fois. 11 fut
ensuite engagé par le directeur Barbaja pour le théâtre de
Vienne, 11 demeura long-temps dans cette capitale , oii il
se Gt une brillante réputation dans Mosé , la Zeliflira et
dans plusieurs autres beaux ouvrages. La fatigue d'un ser-
vice pénihle et la rigueur d'un climat si différent de celui
d'Italie, altérèrent sa santé et l'obligèrent à quitter
Vienne. Il revint à Venise avec Crivelli , auquel Barbaja
le céda, moyennant une somme de 7,000 fr. , l'engagement
de Davide avec lui n'étant pas entièicnient terminé.
Ce chanteur, doué parla nature de beaucoup de moyens,
te contente d'étourdir la foule par des tours de force. 11
abuse d'uuc facilité qui, mieux dirigée, aurait pu lui assu-
rer un beau nom dans les fastes du théâtre. Les difficultés
qu'il exécute appartiennent plutôt à un inslrument qu'à
la voix. Sans doute ce qu'il l'ait est prodigieux ; aucun au-
tre que lui, peut-être, ne pourrait même le tenicr; mais
jamais il ne touche le coeur, jamais il n'excite la moindre
Digitizcd b/ Google
émotion. Il est impossible (l'être moins acteur que lui ,
dans les momens les plus passionnés , il demeure immo-
bile, il n'est sur la scène que pour chanter. On le voit se
balancer, battre la mesure avec les épaules et les bras,
remuer la lète, etc., etc. On pourrait encore l'accuser
des erreurs les plus grossières dans les paroles , erreurs
qui semblent dénoter une profonde ignorance , si ce n'é-
tait une bien légère faute , aujourd'hui que la poésie dra-
matique n'est plus considérée que comme une chose in-
signifiante par elle-même , destinée seulement à recevoir'
les noies du compositeur. Quoique disent les enthousiastes
de Davide, il ne pourra jamais compter au nombre de
ses admirateurs ceux qui vont au théâtre , non-seulement
pour entendre chanter, mais aussi pourvoir, pour sen-
tir, pour Être émus.
NOUVELLES DE PARIS.
INSTITUTION ROYALE DE MUSIQUE RELIGIEUSE.
PREMIER BKEn CI CE.
L'ode de Drydcn, ou le Banquet d' Alexandre , musique
d'IIxndcl, vient d'être exécutée par les élèves de M. Cho-
ron, avec un ensemble qui fait donneur aux principes éta-
blis par cet babile professeur. Ce magnifique ouvrage a
été entendu et écouté dit commencement à la fin dans un
religieux silence , et universellement applaudi par tout ce
que l'art offre de plus distingué, soit en professeurs, soit
en amateurs. Les suffrages ont été unanimes et énergiques
tout à la fois. Qui pénétrera les secrets d'une si vaste com-
position ? qui osera s'introduire dans l'arche sainte pour
en expliquer les mystères ? Pwu/ esteprofani! Pour juger
■.m, tel monument, dix séances ne seraient pas suffisantes.
Ce ne serait même pas assez qu'une grande instruction et
53'i
l'habitude do J'analyse pour remplir une si haulc tâche
avec quelque utilité. Il OB faut dune pas recourir à un es-
prit étranger; c'est l'œuvre m 6 me qu'il faut d'ahord bien
consulter; il faut bien comprendre comment l'an leur l'a
fondé, ne jamais lui prêter un autre langage que celui
qu'il préfère. Alors de cet œuvre étonnant jailliront des
flots de lumière dont l'art s'éclairera pour jamais. C'est
par cet unique moyen que l'observateur obtiendra le fruit
de ses méditations et le prix de son amour pour un art que
le eiel a mis sur la terre comme un lénitif consolateur
des humaines misères.
Quoiqu'il amdel écrive, c'est toujours 1c gcantdcB musi-
ciens, c'est toujours Homère. Ses œuvres sont innombra-
bles, et presque tous ont triomphé du temps. lia, jusqu'à
plus de quatre-vingts ans, conservé intact son génie et son
talent; il n'a jamais dévié de la noble route qu'il s'était
tracée; des concetti, des mignardises , de la mode, jamais. Il
semble que Haydn, Mozart, Chérubin!, Beethoven et
quelques autres privilégiés se soient donné le mot d'ordre
avec lui ù ce sujet. Gaudeant henc nali!
Je termine ce petit article par les trois morceaux qui
ont préludé à la cantate; savoir, le Splenditc, de Mozart,
mêlé de solos bien exécutés et bien nuancés ; ensuite le
beau duo Lauda Sîon , de Cherubiui., chanté par deux voix
angéliques; et enfin le Laudate, de llolle. II est également
juste de proclamer hautement les brillantes voix de ténor
et de basse ', de distinguer encore les soprani *, et enfin
le riche et magique ensemble que produisent les masses
d'harmonie dans leurs développemens et dans leurs effets.
Par les applaudissement généraux et sincères qui ont cou-
ronné cette première séance, M. Choron a du juger que
la reconnaissance publique sait apprécier le vrai mérite.
P. PORRO.
(i) MM. Varlel ti de Villen.
(s) SI11" Tardicu cl Krambé.
DigrtiroO ai Google
535
CONCERTS
Ut M"" SîWihAUSEK , ue M. Mesbal, IIE M. Heiu,
ET DE MM. BOHEEE FRFRE».
On peut considérer les concerts multipliés qu'on entend
à Paris chaque hiver sous deux rapports principaux : d'a-
bord sous celui du talent des exécutans ; ensuite sous celui
du choix de la musique. Si la critique et l'éloge se balan-
cent en ce qui concerne le premier objet, il [n'en est pas
de même du second. Le système des peliles dimensions se
développe chaque jour davantage : a la majestueuse sym-
phonie a succédé, dans beaucoup de soirées , le modeste
quatuor; le piano lient souvent lieu d'orchestre; le con-
certo a disparu devant la fantaisie ou le rondo, et l'insi-
pide air varié se reproduit plusieurs fois dans la même
soirée. Plus de Gluck, plus de Mozart, plus de Païsiello,
plus Je Cimarosa , plus du Chérubini parmi les-auteurs de
morceaux de chant qu'on nous donne; un seul homme eu
fait tous les frais. Cet homme se distingue à la vérité par
son génie; mais toujours le même ton, toujours les mêmes
formes , toujours les mêmes chants qu'on reproduit encore
comme thèmes de morceaux de musique instrumentale 1
Encore si l'on cherchait à varier un peu cette uniformité
en puisant dans toutes les compositions de ce maître;
mais non : l'intrépide amateur qui ose affronter toutes les
soirées de musique est exposé à entendre trente ou qua-
rante fois dans l'hiver le même air, le même duo, la même
romance ou le même nocturne. Aussi, malgré la bonne
contenance affectée de la plupart de nos ditettanti, l'ennui
se peint-il sur leur visage. Eu vain s'en prennent-ils aux
exécutans (qui ne sont pas toujours irréprochables, j'en
conviens); en vain cherchent-ils i\ dissimuler le mal qui
les oppresse; ce mal réel, la satiété, les poursuit sans
cesse, et ne leur laisse pas même l'espoir de changer de
5a(i
condition. Chez eux les ressorts île la sensation sont re-
lâchés; l'excessif usage (le celte musique, naguère leur
idole, en les dégoûtant de toute autre musique, a é moussé
leurs sens, et les a rendus tout à la fois inhabiles à en
apprécier d'autre, et incapables de continuer à n'entendre
que celle-là. C'est une génération morte pour la musique.
M aïs nous! nousqui sommes leurs victimes, que nous est-il
réservé? Fontenelle s'écriait : Sonate, que me veux-tu? Nous
dirions volontiers: Sonale, oàcs-tu? Je l'ai dit quelque
part, l'art ne périra pas ; mais je crains que nous ne soyons
à l'entrée d'une période de langueur dont il est difficile
d'assigner latin. Hais laissons ces tristes réflexion*, et ve-
nons à ces concerts qui les ont fait naître.
Le joli talent de madame Slockhauscn. soutenu de ce-
lui de tous les artistes qui l'environnaient, n'avait pas cL;
suffisamment prôné pour attirer une nombreuse assemblée
à la soirée quelle a donnée à la salle Cléry. Cependant
cette aimable cantatrice a déployé assez de talent dans
celte soirée pour inspirer des regrets à ceux qui n'y ont
] oint assisté. Dans le duo de la Donna de! I.ngo, qu'elle a
chanté avec M . Dommange, elle a approché de la perf ection;
elle a aussi fort bien chanté un' air insignifiant de Soltia,
et surtout des airs suisses dont elle possède dieu la tradi -
tion. Moins heureuse dans le grand air de Moïse, el e a
été inférieure à mademoiselle Cintî, qui cependant n'y
était pas irréprochable. Il est remarquable que ce beau
morceau n'a pas été compris jusqu'ici par les cantatrices
qui s'y sont hasardées. A l'égard de madame Slockllauscn,
je crois qu'il demande une énergie que ses moyens ne lui
permettent pas de donner.
La partie instrumentale du concert de M™ Slockhauscn
se composait d'un solo de cor , qui a été fort bien exécuté
par M. Mengal , d'un rondo pour le piano, dans lequel
M- Hérault, qui s'est déjà l'ait connaître par quelques
compositions agréables, a montré un talent réel de la plus
belle école, et d'une fantaisie pour piano, hautbois et vio-
loncelle , sur des thèmes de Moïse , exécutée par la même
dame et MM: Vogt et Baudiot. Ce morceau a été fort ap-
Dijitizod by Google
5aS
plaudi. M. Stockhauscu ajoué aussi deux morceaux sur la
harpe; pourquoi faut- il que j'aie ù parler de M. Slockhau-
sen ? C'est , dit-on , un bon professeur, et c'est de plus un
honnête homme ; mais il a grand tort déjouer de la harpe
eu public, car il n'en joue pas bien.
— La soirée musicale de M. Mental, qui a suivi celle
de M™ Slockhausen, et qui s'est donnée dans les salons de
M. Dietz ' , avait réuni la plus brillante soi iété. Le bé-
néficiaire s'est distingué, dans une fantaisie pour le cor,
de la plus grande difficulté, dans un duo pour harpe et
cor, qu'il a joué avec M. Jacqmaiu, et dans l'accompa-
gnement de la jolie romance d". M. Panserou, qui a pour
tilre : te Cor. M. Guebauer a joué, avec une grande netteté
et le plus beau son, une fantaisie sur des thèmes du Freîs-
ehutz. M. Camille Pclit, qui s'est fait entendre dans un
rondo et dans une fantaisie , est un très habile pianiste.
Son jeu est d'une grande précision; ses grandes mains
lui permettent d'embrasser unje partie du clavier et de lier
son jeu. Je crois qu'il a eu tort déjouer deux morceaux
de suite sans intermédiaire; il en est résulté de la moiïo-
Les débuts do M. Tilmant avaient promis un violoniste
habile; il ne justifie pas aujourd'hui les espérances qu'il
avait données. 11 n'a été que médiocre dans le rondo qu'il
a joué dans cette soirée. A propos de violons , à quoi pen-
saient donc les artistes qui composaient le quatuor d'ac-
compagnement du solo de cor, et de celui de violon. Il est
impossible déjouer avec plus de négligence : disons le mot;
il est impossible de jouer plus mal. Ces messieurs devraient
se souvenir que s'il n'y a pas de gloire à acquérir dans un
accompagnement soigné , il y a du plaisir à donner et à
recevoir.
On a entendu avec un nouveau plaisir M" Slockhausen
dans cette soirée: elle y a redit avec H. Douimange le duo
de la Donna det Lago, et un air avec accompagnement de
harpe. Des romances de M. Romagnesi ont terminé le
concert, dont l'exécution générale a été plus satisfaisante
(i) Rue N cuve- Saiul- A ugmlin , à. a3.
5a6
qu'elle nt l'est ordinairement dans ces sortes de réunions
hétérogènes. —La fêle de Noël, en faisant fermer tous les
théâtres, ne laissait que deux concerts pour dédommage-
ment; l'un donné par M. Herz jeune nu théâtre de Ma-
dame , l'autre par MM. Bolirer frères à l'Opéra.
Comme il arrive fort souvent, le programme du pre-
mier a été peu respecté quant à l'ordre des morceaux.
Mais pourvu qu'on entende des artistes comme MM. Herz,
Lafont, Pixis, Lût et Schot, peu importe l'ordre dans
lequel ils se présentent. M. Henri Herz a fait des prodiges
d'adresse et de légèreté dans son concerto et dans ses au-
tres morceaux. Ses variations pour piano et violon obligé
sur la marche de Moïse ont eu un succès d'enthousiasme.
11 est impossible d'avoir un jeu plus fini et plus brillant
que celui de MM. Lafont et Herz dans ces variations.
Le morceau pour piano à huit mains est d'un bel effet :
en nommant MM. Herz frères, Pixis et Lizt, je n'ai pas
besoin de dire qu'il a été bien exécuté. Quant au solo de
clarinette joué par M. Schot, j'ai déjà eu occasion de
vanter le beau talent de cet artiste, dont le jeu rappelle
celui de son maître llacrmann.
Le trio de Rkciardo était destiné à être chanté médio-
crement deux fois dans la même soirée , l'une à l'Opéra ,
l'autre au théâtre de Madame, par M"' Schulx, Marinooi
et M. Dommango. La suppression du chœur de femmes,
si joli, qui interrompt ce trio, a beaucoup nui à son effet
aux deux concerts. En général, le chant a été faible au
concert de M. Herz. N'étant arrivé dans la salle qu'après
l'ouverture d'Obéron , je ne puis en parler ; elle paraissait
n'avoir fait sur quelques amateurs que l'effet d'uu mor-
ceau bizarre. Quant à celle du jeune Henri, il semble qu'on
soit décidé ù en dégoûter le public, car on la joue partout :
la veille encore elle avait été exécutée a l'Odéon.
La fatigue d'un service accablant , tant a l'Opéra qu'à
la chapelle, sous lequel succombent la plupart des ar-
tistes, ne permet pas d'être sévère, ni d'insister sur la
médiocrité de l'exécution dans le concort de M. liohrer.
Je ne parlerai donc que de ces deux artistes étrangers. Tout
Digitized û/ Google
S27
en rendant justice à leur (aient comme exécutaiis, je ne
puis m'empécher de leur faire remarquer que s'ils man-
quent souvent l'effet sur lequel ils comptent, ils ne doi-
vent s'en prendre qu'au choix de leur musique. Le con-
certo de MM. A. Bolirer est un labyrinthe de traits dans
lequel on n'aperçoit qu'un plan défectueux, que des idées
communes déparentencore. Mais qu'a-t-on prétendu faire
dans cette prière de Moïse à cinq basses? Avec un sem-
blable appareil de moyens, il faut produire une augmen-
tation d'effet ; cependant il n'est personne qui n'ait désiré
d'entendre ce beau chant seul et avec son accompagne-
ment accoutumé , au lieu d'un morceau prétentieux.
Maïs ce n'eut rien encore que cela en comparaison du duo
de violon et basse. Ah! messieurs Bohrcrï vous qui êtes
Allemands ! vous qui aimez la musique de Beethoven, et
qui la jouez bien , pouvez-vous descendre à de pareilles
choses? J'avoue que j'ai été la dupe du charlatanisme de ce
morceau, et que j'ai cru qu'à la suite de ces phrases incohé-
rentes le morceau commencerait; mais il n'eu a rien été,
et le tout s'est terminé par une mystification. Quand on a
un talent réel, il faut se respecter davantage.
M" Pisaroni était dans un mauvais jour, et n'a pas
aussi bien chanté l'air de Vltatlana que de coutume.
— Don Jaa<t, opéra de Mozart, arrangé pour la scène
française par M. Castil-Blazc, a obtenu beaucoup de suc-
cès à l'Odéon , le a4 de ce mois , quoique les acteurs eus-
sent peu d'assurance, et que l'exécution ait été bien faible.
J'attendrai que deux ou trois représentations aient donné
h chacun plus d'habitude de son rôle pour rendre compte
de l'effet de cette pièce. Je ne puis cependant me décider
à retarder les élnges qu'on doit à Duprez pour la manière
distinguée dont il a chanté son air. J'engage M™ Schutz à
chanter plus vite le rondo batli, batti; du mouvement
dont elle le prend, cet air est dénaturé. Me trompé-jé? Je
crois être certain qu'il y a des contrebasses sons les traits
du violoncelle dans l'allégro de cet air , et cependant elles
n'ont pas joué.
528
— M. Boïeldieu , que le Boin de sa santé oblige à passer
la plus grande partie de l'année à la campagne , sollicitait
depuis long-temps sa relraite de la place de professeur de
composition à l'École royale de musique; II. le vicomte de
larochefoucault vient de la lui accorder, avec la pension
à laquelle il a droit après trente ans de service.
— M11* Sbntag est arrivée à Paris; elle débutera le pre-
mier janvier prochain par le rôle de Desdemona dans Otctlo;
les ouvrages qu'elle jouera ensuite sont : i" le Barbier; a* la
Donna del Lago; 3' taCcnerentola.
ANNONCES.
— Album musical de M. Amédée de Bcauplan , un joli
volume cartonné, doré sur tranche, huit romances ,
chansonnettes ou nocturnes , avec huit lithographies.
Piano, la. — Guitare 8 fr. Chez Frère, passage des
Panoramas, n" iG.
— Six grands duos pour violon et violoncelle , compo-
sés et dédiés à S. A. It. monseigneur le duc de Cambridge,
par les frères Bobrer, œuvre 4»3 liv. î et a. Pris la fr.
chaque.
Paris, les fils B. Schott, place des Italiens, n* î.
Mayencc , chez les mêmes. — Anvers, chez A. Schott.
Ces duos ne sont point dans le genre de ceux que
MM. Bohrer ont jouéàleurs divers concerts, c'est-à-dire,
des espèces de fantaisies sur des thèmes choisis ; maïs des
morceaux dans la manière classique.
5*9
BIOGRAPHIE.
Bvun (Charles ), docteur en musique, est né à Shrews-
bury, dans lo mois d'avril 1736. Les premiers élémens de
son art lui furent enseignés par un organiste de la cathé-
drale de Chester, nommé Baker. Son beau-frère, maître
de musique à Shrewsbury, lui donna ensuite des leçons de
basse chiffrée. A. l'âge de dix-huit ans, il fut envoyé à Lon-
dres, et placé sous la direction do docteur Ame. A peine
avait-il achevé ses études près de ce oélebre compositeur,
qu'il fut nommé organiste de l'église de Saint-Denis iti
Fenchwch-Street. Il entra aussi, commo instrumentiste, au
théâtre de Drury-Lane, pour lequel il écrivit, en ij5i, un
petit opéra-comique intitulé Robln-Hood qui n'obtint pas
de succès. Dans l'année suivante, il composa pour le même
théâtre la pantomime de la Reine Mab (QueenMai ) , qui
fut mieux accueillie; mais Burney ne retirait de tout cola
que peu d'argent, et ses moyens d'existence étaient si peu
assurés qu'il fut obligé de quitter Londres, et d'acccptcr
une place d'organiste à Lynn, dans le comté do Norfolk.
Il passa neuf années dans ce lieu, et y conçut le plan
d'une Histoire générale de In musique, pour laquelle il lit
des éludes, et rassembla desmatériaux. Sesdevoirs, comme
organiste, ue l'empêchaient pas défaire quelquefois a Lon-
dres des voyages pour y faire graver ses ouvrages. Enfin les
sollicitations de ses amis le ramenèrent dans cette ville, où
il se fixa. Il y fit imprimer en 1766 plusieurs concertos
pour le piano, et composa pour le théâtre de Drury-Lanc
un divertissement intitulé: The cwming mon (l'Homme
adroit), qu'il avait traduit du Devin du village de J.J. Rous-
seau. Cet ouvrage ne réussit pas, quoique la musique fut,
dit-on, fort jolie. Ce fut vers le même temps que l'univer-
sité d'Oxford lui conféra le grade de docteur en musique.
En 1770, il fit un voyage en France et en Italie, dams le
but de recueillir des matériaux pour son Histoire ne ta mu-
1, vol.. 45
58b
sique. Du retour en Angleterre, il y publia, en ijji, le
journal de son voyage. L'aimée suivante il parcourut l'Al-
lemagne, les Pays-Bas et la Hollande, sous le même point
de vue, et il fit également paraître, en I7j3, le résultat
des observations faites dans ce second voyage.
Dès l'arrivée de Burney sur le continent, le plan de l'ou-
vrage qu'il projelait était an-été, et s'il y fit quelques légers
changement, ils lui furent suggérés plutôt par des circon-
stances particulière» que par des observations profondes
oui auraient motivé ces modifications: C'est sans doute à
cette cause qu'il faut attribuer la marche un peu super-
ficielle qu'on remarque dans le Journal du docteur Burney.
Il s'était fait un cadre, et ne cherchait que ce qui pouvait
y entrer, au lieu de s'être proposé de l'agrandir, si quel-
que découverte inattendue venait lui révéler des faits dont
ses lectures précédentes n'avaient pu lui donner l'idée.
Aussi le voit-on passer à côté de monumens curieux exis-
tant dans nos bibliothèques, sans les apercevoir. Je cite-
rai à cet égard ta musique du moyen âge et antérieure an
quinzième siècle, qu'il n'a fait qu'entrevoir. L'avantagele
plus réel qu'il lira de ses voyages, fut de rassembler une
belle collection de livres anciens et de manuscrits relatifs
à son art, lesquels deviennent chaque jour plus rares.
Quoi qu'il en soit, le moment do mettre sou projet à exé-
cution était arrivé, et il se livra à la rédaction de son livre,
qui l'occupa pendant quatorze années. Le premier volume,
intitulé : A général Hïstory of Music , parut en 1-76. Il
contient l'histoire de la musique chez les peuples de l'an-
tiquité, jusqu'à la naissance de Jésus-Christ. Le second,
publié en ij8a, traite de la musique, depuis le commen-
cement de l'ère chrétienne jusqu'au milieu du seizième
siècle. Le troisième, qui fut imprimé cinq ans après,
contient l'histoire delà musique en Angleterre, en Italie,
en France , en Allemagne, en Espagne et dans les Pays-
Bati. Enfin, le quatrième volume, sorti de la presse en
i;8(S , comprend l'histoire de la musique dramatique de-
puis sa naissance jusqu'à la fin du dix-huitième siècle.
Da ns le temps oii paraissait le livre de Burney, HawLins,
e«J by Google
.-i il Ire toriv&io anglais, en publiait uD sur le même
sujet, en cinq volumes in-4'; mais cos. deux ouvrage?-
curent un sort bien différent. Celui de Hawkms, dé-
précié à son apparition par tous lesjouruaux littéraires,
n'eut aucun succès. Celui de Burney, au contraire, pour
lequel lesprinces, les grands.lessavansetlesarlislcs avaient
souscrit, fut prdné dans loute l'Europe ; et tellofutla faveur
qui l'accueillit, que la lenteur de sa publication ne nuisit
point a son succès. Convenons-eu, il y eut, dans cette dif-
férence de destinée des deux livres , tin nouvel exemple des
caprices de la fortune et de l'injustice qui préside souvent
aux jugemens humains. Bien supérieur à l'histoire deHaw-
kins, sous le rapport du plan , l'ouvragede Burney lui cÈdc
quelquefois pour les détails, et n'est pas exempt de re-
proches ù d'autres égards. J'ai dit la cause do ses défauts en
parlant des voyages de l'auteur. Toutefois, les choses esti-
mables qu'on y trouve ont consolidé sa réputation. Plu-
sieurs ouvrages, qu'on a publiés depuis sur le mémo sujet,
ne sont guère que des copies de celui do Burney, en tout
ou en partie. (F oyez Busby, Forkel et la Nouvelle Ency-
clopédie anglaise. )
Après les grandes fêtes musicales données à l'abbaye de
Westminster , en )j84 et ij85, en commémoration d<:
liaendel, le docteur Burney fut chargé d'en publier la des-
cription , accompagnée d'une notice sur ce musicien cé-
lèbre ; elle parut a Londres, en un vol. in-folio. Il est aussi
l'auteur d'une vie de Métastase et de quelques autres ou-
vrages littéraires.
Lc docteur Burney habita pendant plusieurs années la
maison de Newton , St. - Martiu'i strect , Lciccster-fieUU ;
mais ayant été nommé organiste de l'hôpital do Cheisea
eu 1790, il eut dans cet hôpital un logement qu'il occupa
pendant les vingt-quatre dernières années de sa vie. Il est
mort en i8i4,àgédequatre-viugt-huitans. Les hommes les
jilus distingués de l'Angleterre assistèrent à ses funérailles.
Recommauduble pur ses talens et son savoir, Burney
ne l'était pas moins par l'amabilité de son caractère et ses
vertus sociales ; aussi était-il généralement aimé de cchjl
55a
qui avaient eu (les relations avec lui. Il avail été marié
deux fois, et avait eu huit enfiins, parmi lesquels or re-
marque, i° Charles Burney de Grecnwich, l'un des plus
savuns hellénistes de l'Angleterre; 3° le capitaine Burney,
qui a faille tour du monde avec le capitaine Cook, et qui
a publié une Histoire des découvertes maritimes , ouvrage
fort estimé; 3° Miss Burney; depuis, madame d'Arblay,
auteur des romans i'Évetina, de Céeitia, de Camilta, et de
quelques autres , qui ont eu beaucoup de succès. La riche
bibliothèque du docteur Burney a été vendue k l'encan en
i8i5, et le catalogue, qui présente des objets d'un haut
ïnlérGt , a été imprimé.
Il ne me reste plus qu'à donnerquelques détails sur ses
écrits et ses composions. On lui doit : I. Plan of a publie
music Schoel. (Plan d'une école publique de musique ) ,
Londres, ij6j. II. Translation of sign. Tartini's Lettir ta
sign. Lombardini published as an important Lésion to performers
on the viotin. ( Traduction d'une lettre de Tartini a Lom-
bardini, publiée comme un avis import an t à ceux qui jouent
du violon), Londres 1771, in-4°. III. The présent state of
Blusic in France and Jtaty, or the Journal of a toart hrough
tkose countries , underiaken to eotlect materiaU fora générât
history of music ( L'état actuel de la musique en France et
eu Italie , ou Journal d'un voyage entrepris dans ces con-
trées pour rassembler les matériaux d'une histoire générale
delamusique), Londres, 1771» in-8". Il parut une deuxième
édition de ce voyage en 1773, Londres, in-8". IV. Thepre-
sent state of music in Germany, the Netherland, undUnited-Pro-
vinces, or the Journal, etc. Londres, 1773, a vol. in-8".
deuxième édition, Londres, 1775, a vol. in-8". Ce jour-
nal du Voyage en Allemagne, en Hollande et dans les Pays-
Bas , est fait sur le même plan que celui du Voyage en
France. Ebeliug a traduit en allemand le premier Voyage
de Burney sous ce titre : Tagebuch elner Mu&ikal'tschen reise
durch Frankreich und Italien, etc.. Hambourg, 177a, in-8".
Les deuxième et troisième volumes, contenant les Voyages
en Allemagne et en Hollande, ont été traduits par Bode ,
et publiés à Hambourg, en 1773. J. W. Lustîg, organiste à
533 '
Groniugue, eu a donné une excellente traduction hollan-
daise avec des notes intéressantes : elle est intitulée: Ryt
Gestoffeerd Geschiedverhaat van der clgenlicken StaatdeHeden-
daagsche toonkunst of str Karet Burney's, Dagboek van Zyne on-
langs Gedaane Reizen door Franhryk en Ditetschtand> etc. Gro-
niiigue , 1786, in-8° maj. Enfin, M. Bract a publié une
traduction française fort médiocre de ces mêmes voyages ,
Gènes, 1809 et 1810, 3 vol. in-8*. V. A gênerai HUtory of
Music , front the tarliett âges to the présent period to which
is prefixed a Dissertation on the Music of the ancîents { Histoire
générale de la Musique , depuis les temps le» plus reculé»
jusqu'à nos jours , précédée d'une Dissertation sur la mu-
sique des anciens), Londres, 1776 — 1788, 4 vol. iu-4°<
J. J. Esclienburg a traduit en allemand la Dissertation sur
la musique des anciens, sous ce titre : UeherdicMwsikder
alten, Leipsick, 1781, in-4". VI. Account of the Musical per-
formances in Westminster abbey, in commémoration of Hœndet,
Londres, 1785, in-4°. maj. Le même Eschenburg a donné
une traduction allemande de cette notice, intitulée: Na-
chrichtvanGeorg.Friedrkh Haendet's Lebensumstœnden undder
ihmZu. Londonin mai undjun. i?84j AngestelltenGedtechtnis-
sftyer, Berlin, 1785, gr. in-4s. VII. Paper on Crotch, theinfant
Musician, presented to the royal society, dans les transactions
pliilosophiqucsde 1779, t. 69, p. i83. C'est «ne noticesur
le musicien Crotch , qui n'a pas justifié les espérances qu'il
avait données dans son enfance. VIII. Striking Vhœs of
Lamia , the cttebrated Athénien flute player (Anecdotes re-
marquables sur Lamia, célèbre joueur de flûte athénien),
dans le Massachusetts Magazine, y, 1789, novembre p. 684.
IX. Memolrs oftke LiftaruiWritings of the abbot Mctastasio,
in wich are incorporated translations of his principal tetters , vol.
3, in-8", Londres, 1796. On est redevable au docteur Ilurney
de la publication des morceaux qui se chantent à la Cha-
pelle Pontificale pendant la Semaine-Sainte, tels que le
i'ameux miserere d'Allegri, celui de Bay, les Lameutations
de Jérémie, par Palcstrnia, etc. Ce recueil paruten 1784,
sous ce titre : 1" LaMusica che si rantaannualmcnte nellc fun-
zitmi délia Seltimana-Santa , netla Capclla l'onteficia , com~
534
posta Uett' Palestrina, Altegri e Bai raccolla. M. Choron ci) a
donné une nouvelle édition à Paris, on 1818, in-8* maj.
Lee compositions do fiuruey les plus connues sont : i° Sis
sonates pour le clavecin seul, Londres, in-l'ol. ; a° deux
sonates pour la harpe ou le piano, avec accompagne m eut
de violon et violoncelle; 3° sonates pour deux violons et
basse, Londres, i?G5; 4° six laçons pour clavecin , iÈirfj
5° hiï duos pour deux flûtes allemandes, ibid; 6° trois con-
certos pour clavecin, ibid ; -° Six cornet puce», mith an in-
troduction and fugue for the organ ; 8° six concertos pour le
violon, à huit parties; g" cantateset chansons anglaises;
10° antiennes, etc. , etc.
MÉTRONOME PERFECTIONNÉ
DE M. lilli.li AlMïi '.
Lorsque nous avons donné une notice sur le métronome
de Mnclzel , nous ignorions qu'un artiste habile travaillait
à perfectionner cette intéressante invention , ou plutôt
qu'il avait déjà trouvé la perfection qu'il cherchait.
Al. Bieuaimé fils, horloger à Amiens, vient île nous com-
muniquer le résultat de ses recherches à cet égard, en
mettant sous nos yeux le nouvel instrument qu'il a con-
fectionné.
Considérant que l'usage du métronome de Maelzcl offre
trois inconvéuicns, savoir : 1° De ne pouvoir donner des
vibrations égales que lorsqu'il est placé sur un plan par-
faitement horizontal ; îi" de nu permettre de changer le
degré de vitesse on de lenteur qu'en interrompant le mou-
vement du balancier; 3" de ne rendre scueiblcs que des
temps isolés , que les amateurs ne peuvent décomposer
(i) Ën itcrpût chei MM Jauut m Cutcllï , mardi an ils dt tnu»ii]<i^ Ji.
Koi, rue de Rirtielieii , pria la rue Fcyitcau , n. et mu Sninl-Ilo-
norr, n. "S; rh*i M. HcnliJntivr , l'a lois- Royal , galarfe tlv pierrrt,
rôle du perron. l'ti\ , iou fr.
535
qu'avec peine en mesures à deux, à trois, on à quatre
temps, M. Bicnaimé s'er.t attaché à faire disparaître tous
ces défauts, cl y a réussi complètement. L'extérieur de hou
métronome estime boite en acajou, offrant l'aspect d'un
parallélogramme rectangle , et ornée d'un cadran qui
porte à sa circonférence tous les numéros de mouvemens
correspondons à ceux du métronome de Màelzel. Une ai-
guille mobile, qu'on fixe à volonté sur chacun de1 ces
nombres , ralentit ou accélère le mouvement , sans inter-
rompre les vibrations du balancier. Comme son prédéces-
seur, M. Dienaimé a pris la minute pour unité de temps.
Quelle que soit la position de l'instrument, les vibrations
du balancier sont parfaitement égales; enfin, un échap-
pement ingénieux, qu'on règle par le moyen d'un rogistro,
décompose à volonté chaque nuance de mouvement en
mesures h deux, à trois ou à quatre temps, à six-huit, etc.
Peut-être sera-t-on tenté de croire que, pour obtenir île
pareils résultats , il a fallu faire une machine fort com-
pliquée , et con séquem ment susceptible de se déranger
souvent; mais on serait dans l'erreur. Rien de plus simple
que le mécanisme imaginé par M. Bicnaimé. Un eu peut
juger par l'analyse suivante.
Un ressort, enfermé dans un barillet, met en mouve-
ment une roue qui engraioc avec un pignon , dont la tige
porte la roue à échappement qui règle immédiatement le
balancier. Celui-ci se termine à sa partie inférieure par
un arc-de-cercle-denté qui engraine avec le pignon d'un
volant de va-et-vient. A la tige de ce volant est attachée une
chaîne qui est retenue à l'autre bout par un ressort droit.
Un arrêt qui glisse sur une tige, lorsqu'on tourne l'aiguille,
raccourcit ou allonge la partie libre du ressort. Lorsque
celui-ci est dans toute sa longueur, son action est faible,
et laisse agir en liberté le va-et-vient , qui, dès lors, fait
décrire au balancier un angle considérable, d'où il suit
qu'on a le mouvement le plus lent possible. On conçoit
qu'à mesure que le ressort se raccourcit, sa force s'uc-
croit , qu'il ramène plus promptement le volant du vâ-et-
Eienf , et couséqucmmcnl que le mouvement est plus ra-
pide. Le même effet se reproduit jusqu'au mouvement le
plus accéléré.
A l'égard du temps fort de chaque mesure, que M. Bicn-
aimé est parvenu à rendre sensible , le moyen est aussi
facile qu'ingénieux. Quatre roues dentées à dents de loup,
portées sur la lige de celle qui règle le balancier, rencon-
trent un arrêt qui est rendu mobile au moyen d'un re-
gistre, et qui se place à volonté devant chacune d'elles.
Le bruit que font les dents de loup en s'écbappant de l'ar-
rêt marque sensiblement le temps fort de chaque mesure.
Un conçoit que les divisions de ces roues sont calculées
pour donner l'une la mesure à deux temps , une autre
celle à trais, et ainsi de suite. Lorsqu'on ne veut que des
vibrations simples, on repousse l'arrêt avec le registre.
Il nous semble qu'arrivé a ce point, le métronome rem-
plit toutes tes conditions désirables, et nous ne croyons
pas nous tromper en assurant qu'il est ce qu'il sera désor-
mais. Nul doute que la vogue ne récompense M. Bienaimé
de ses efforts et des dépenses qu'il a laites pour obtenir ce
résultat.
FÉTIS.
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL DE L'O DÉON.
. Bon Juan,
OpÉra CD i actes , de MouD, arrangé pour U sciât française ,
par M. Cutii-BLir.s.
C'est une question délicate et difficile à résoudre que
celle-ci : lorsque lo goûl d'un peuple est vicié, est-il avan-
tageux do tirer de l'oubli certains chefs-d'œuvre des arls
qu'une ancienne réputation défend contre les folles préven-
tions de l'époque , et n'est-ce pas les exposer inutilement
55;
auxoutrages d'une multitude incapable: de les comprendre?
De bonnes raisons peuvent être données pour el contre;
car Ni le meilleur moyen de bannir le mauvais goût est de
présenter souvent aux regards de bous modfclcs. it est cer-
tain que pour apercevoir les qualités de ceux-ci , il faut
que nous soyons placés dans des circonstances favorables ;
il faut que, dépouillas de préjugés et renonçant à des ha-
bitudes que nous sommes toujours portés à croire les
meilleures possibles, nous conseillions à voir ou à tu tendre
ces chefs-d'œuvre dans l'esprit où ils out été faits : or, c'est
ce qui n'arrive jamais. Lorsque Lebrun et Mignard com-
mençaient la décadence de la peinture , et surtout lorsque
l'école détestable des Bouclier el des Vanloo jouissait de
toute la faveur publique, on avait fort peu d'estime pour
les tableaux de Raphaël. Les ailleurs des galettes qui cou-
vrent maintenant les murs du salon, ne manquent pas
rodet ctabnl dans une mauvaise route.
Il en est de même en musique. Façonnés que nous
sommes au style de l'époque, nous croyons que tout ce
qui s'en éloigne est ou médiocre ou mauvais. Nous
nous gardons bien de croire que le tort soit de notre
coté quand nous nous ennuyons a l'audition d'un ancien
ouvrage: il est plus satisfaisant de dire que c'est la musique
qui est ennuyeuse. Je sais qu'on peut réunir un certain
nombre d'amateurs éclairés, dignes d'culendre, de goû-
ter et d'applaudir les belles productions de tous les temps ;
l'enthousiasme qu'excitent aux séances de M. Choron les
admirables compositions de Hamdc! , les applaudisse mens
qu'on y donne même à Paleitrina en sont une preuve évi-
dente, à laquelle je pourrais ajouter celle du succès de
la belle musique instrumentale dans les soirées de M. Bail-
lai ; mais ces exemples ne sont que desexceptions presque
inaperçues dans la masse du public.
D'ailleurs , les traditions d'exécution , celle des mouve-
mens, l'expression propre à chaque ouvrage, sont des
choses qui se perdeul si facilement, ci dont l'influence est
si grande sur la musique, que presque loutcs les compo-
ailions ancien uns manqueulleur effet par celle cause, sur-
tout au théâtre. Le public qui ne juge que par les résul-
tais, et qui est incapable de discerner si un mouvement
est trop vif ou Irop lent , si une transposition maladroite a
été l'aile , si l'expression convenable a été donnée, el mille
autres choses semblables, ne décide que de ses sensations,
et ne revient guère sur son premier ingénient.
Telsétaicntles molifs qui pouvaient faire douter du suc-
cès du chef-d'œuvre de Mozart à l'Odéon. Déjà les admi-
rateurs exclusifs de Rossini avaient fait des comparaisons
on l'auteur de Doit Juan, le plus beau génie de la musique,
n'avait point l'avantage; déjà l'on avait dit et répété que
sa manière était bonne pour son temps, mais que Joui
avait changé. Il ne suffisait pas qu'on eût comparé cè qui
est incomparable , il fallait insulter à d'anciennes admira-
tions. Le souvenir du succès de Don Juan au Théâtre
Italien était importun : ou cherchai! à l'affaiblir par des
attaques journalières. J'ai dit ce que je pensais (lu dessein
que l'on a eu de donner cet ouvrage à l'Opéra , cl les rai-
sons que je croyais bonnes pour qu'on y renonçât. Ces
raisons me paraissaient plus fortes encore à l'Odéon, à
cause de la faiblesse de la troupe chantante; néanmoins
cette merveilleuse musique a rési ,.é à toutes les chances
défavorables, cl M. Castil-Blare est parvenu à sauver du
naufrage l'honneur du génie de Mozart, ou plutôt celui
du goût français.
Sa traduction me parait être une des plus soiguées qu'il
ait faites : les paroles sont arrangées avec goût , el de ma-
nière à ne point altérer les rhythmes primitifs ; genre de
mérite dont le public tient peu de compte, mais qui n'en
est pas moins fort rare ; car les difficultés qu'offre un pa-
reil travail sont innombrables. On doit aussi savoir gré
à M- Castil-Blaze d'avoir conservé l'œuvre de Mozart dans
son intégrité, sans mélange de choses étrangères et dis-
parates; la symphonie du tableau de l'enfer qui termine
la pièce est le seul morceau qui ne soit point de la par-
tition originale. L'obligation que le traducteur s'était im-
posée de reproduire dans le dialogue une partie de la pièce
S5„
Je Molière, l'a obligé de couper l'opéra en quatre actes, en
finissant le premier après l'air : Fin clie dal tino (dont je ne
nie rappelle pas les paroles françaises ) , et le troisième,
après le duo de la statue. Cette coupe me paraît conve-
nable pour la scène française. L'idée de rétablir la scène,
si plaisante de M. Dimanche, me paraît aussi fort bonne;
la gatré de cetle scène coupe agréablement le (ou un peu
sévère de l'ouvrage.
L'exécution générale de cet opéra a élé très faible à la
première représentation ; elle s'est améliorée aux suivantes,
quoi que plusieurs rôles laissent encore beaucoup à désirer.
Il y a loin de Garcia à Lecomtc dans le rôle de Don Juan ;
mais néanmoins ce dernier s'est liré avec honneur de ce
rôle difficile. Contre sou habitude, il n'a point chanté faux;
et s'il ne s'esl pas montré comédien fort habile, il a joué
du moins avec une chaleur convenable. Le seul morceau
où ses moyens sont insulïisans est le fameux finale du
premier acte, qui est devenu celui du second dans la pièce
li ,mi:;iisL'. Garcia nous avait accoutumés, dans cet admi-
rable morceau, à des effets prodigieux que I.ecomle ne
peut reproduire. Puisque j'en suis sur ce finale, je ferai
remarquer que la mise en scène du dernier mouvement ne
me paraît pas motivée j>ar les paroles originales. Il n'y a
rien dans ce que dit Don Juan qui sente le défi, ni qui
indique le mouvement de théâtre où il sort l'épéc à la main
poursuivi parle chœur, mouvement qui nuit à l'ensemble
el affaiblit l'effet musical.
Mondonvillc montre de L'intelligence dans le rôle de
Sganarelle ( Lcuorello ) ; malheureusement sa voix est in-
suffisante dans les morceaux d'ensemble. Je lui ferai ob-
server qu'il chante trop vile le premier mouvement de l'in
traduction. I.c morceau qu'il dil le mieux est l'air où it
fait le dénombrement îles maîtresses de Don Juan ( Mni/a-
mim'i! catalogo i qittsto }. Dilpreï u la voix bien faible dans
les morceaux d'ensemble; mais la manière dont il a chante
son air ( M h ttsoro ) lui fait le plus grand honneur, cl n'a
pas peu contribué an succès de l'ouvrage : un «lylepur, une
vuc.'ilisaiion légère et des ornemeus de bon goût lui ont
S4«
procuré, dans cet air, tic» applaudissemens unanimes cl
bien mérités. Quant à Léon Bizot, malgré sa mauvaise voix,
il ne se serait pas mal lîré du rote de Lacas, ni une basse,
franche et prononcée n'était nécessaire dans ce rote , sur-
tout depuis que Don Juan est 'devenu un tenorc. La seule
voix dé ba»»e réelle qu'on trouve dans l'ouvrage , est celle
de Leclerc, (lui jonc le commandeur. Cette vois fait un
bel effet en plusieurs endroits. Je conseille à Leclere de se
tenir plus immobile dans la scène du quatrième acte , et
de marquer d'une manière plus effrayante le miracle d'Un
marbre qui se meut. Peut-être n'a-t-il jamais vu Profeli
dans ce rôle; il y était parfait , sauf lu voix; sons ce rap-
port, Leclere n'a rien 'à désirer.
Par une singularité qu'on a peine a expliquer, M" Main-
vielle-Fodor avait choisi le rftle de Z.orli'nu (Jeannette dans la
pièce française), au lieu de celui de Donna Anna (Lêonort) ,
qui semblait lui appartenir; depuis lors, ce rôle est con-
sidéré comme le premier de la pièce. C'est ce qui a déter-
miné, sans douie, M"' Schtilz a le prendre de préférence,
quoique celui d'Elvireeût été bien plus dans ses moyens et
plus convenable a won extérieur. Le rfile de Jeannette de-
mande presque toujours de la légèretéct de la finesse ; 'or
ces qualités ne sont pas dans le caractére du talent de
H" Scliuti!. Ce n'est que dans le dernier mouvement du
finale qu'elle reprend ne» avantages. Kl Je chaule beaucoup
trop lentement le premier mouvement de l'air délicieux
Batti, Batti; aussi cet air ne produil-il point d'effet. J'ai
déjà dil que l'allégro de cet air manque de cuntrebasscs :
il est certain que Mozart leur a écrit une partie séparée
des violoncelles ; pourquoi donc ne jouent - elles pas à
l'Odéou ?
M™ Mondonvtlle est faible dans le rôle de Léonore, et
M"" 'Buffardiu est écrasée par celui d'Klvire. Depuis
M" llunzi-Debcgnis, a qui Garai avait enseigné le premier,
et qui ne s'en tirait pas mal , ces deux rôles , qui sont si
beaux et si im portails, oui toujours été fort mal chaulés.
IlesL vrai qu'ils soûl très difficiles. M" Pareil! et même
M-'Pastay on! échoué complètement.
54 L
Le» chœurs n'avaient point d'ensemble et chantaient
faux à la première représentation ; ils vou( maiuleuaut
anse* bien. QuJWt à l'orchestre, on sait que c'est la partie
brillante île l'Odéon : les violons surtout y sont excelleng.
L'idée de teriuincr la pièce par le spectacle de Don Juaii
aux enfers est assez heureuse ; bien que celte scène ne soit
qu'une copie de l'enfer des Danaïdes, elle produit beau-
coup d'effet. Les décorations en sont fort belles. Ko résumé,
Don Juan paraît devoir procurer de bonnes recettes au
théâtre del'Odéon, et lui douner le temps de monter des
nouveautés.
ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE.
Mous. — Débuta de M" Oi»m.
Le départ subit et imprévu de M"" Cinti a laissé l'admi-
nistration de l'Opéra dans un grand embarras; car plu-
sieurs pièces de l'ancien répertoire et l'espoir du nouveau
reposaient sur celte cantatrice dïslinguée. A-t-on pu pré-
voir et empêcher celle défection ? C'est ce que je ne veux
pas examiner. Des bruits circulent à ce sujet; mais des
bruits de coulisses sont toujours plus ou moins menson-
gers. Pour prononcer à cet égard , il faudrait Cire instruit
de tous les détails et entendre tous les intéressés. D'ail-
leurs, de quoi servirait de connaître aujourd'hui les causes
d'un mal qui est fait? l'important c'est d'y porter remède,
ut, si l'on a fait des fautes , de les réparer.
Malheureusement cela n'est pas facile; lés cantatrices
de l'ordre de M1" Cinti sont fort rares. 11 s'en présente une:
c'est M™ Millihrau, fille de Garcia, arrivée récemment a
Paris. Son talent est remarquable, et le long séjour qu'elle
a fait à Paris dans son enfance lui rem! la langue fran-
çaise familière; niais les conditions qu'elle impose parais-
sent, dit-on, fort dures à ('administration (ou parle de
cinquante mille francs d'apnointeinens et de quatre mois
.v(2
de congé ) . On assure qu'on lui a offert trente-cinq mille
francs et un congé (le trois mois. Si l'on ne peut réussir à
conclure cet engagement, je serais tenté de conseiller
d'accorder à M"' Garcia tout ce qu'elle demande , afin
d'avoir quelqu'un qui assure l'avenir de l'établissement et
qui Casse recette , si je ne savais que ces sortes d'exemples
sont dangereux; car après les talens indispensables vien-
nent les talens utiles, qui ont aussi leurs prétentions. C'est
un grand mal que celte augmentation progressive du
traitement des acteurs; c'est par là que périssent toute»
les entreprises théâtrales; mais ce mal, qui est la consé-
quence de la rarelé des sujet* , ne cessera que lorsqu'on
aura pris des mesures utiles pour former beaucoup de
chanteurs.
J'ignore si les rapports que l'administration de l'Opéra
a reçus de l'Italie sur M™ Démeri lui ont fait concevoir
l'espoir de remplacer M11' Cinli par elle; mais si cela est,
elle a du âtre cruellement détrompée par l'essai qu'elle
vient d'eu faire. J'avais prévu cet échec, et l'avais annoncé
dans un des numéros précédent» de la Revue musicale,
M™" Démeri, qu'on a entendue pendant quelque temps au
Théâtre-Italien, possède une belle vois; je me trompe, elle
a de beaux sons; mais ces sons n'ont point de liaison en-
tre eux. M. Pacr, qui avait pris soin de faire travailler sa
vocalisation , a trouvé en elle un organe si lourd, si peu
flexible , qu'il a été forcé de renoncer à l'espoir d'en faire
une cantatrice; et ce qui prouve qu'il ne s'était point
trompé dans le jugement qu'il en avait porté, c'est qu'elle
vient de passer infructueusement deux ou trois ans en
Italie. Il n'y a point de ressource, M." Démeri chante
comme elle chantera toujours.
Elle aurait pu être utile à l'Opéra il y a quinze ou vingt
ans ; car son défaut principal , qui est de uc pouvoir voca-
liser les traits et les ilori turcs, aurait été inaperçu, le genre
de musique de l'ancien répertoire n'admettant aucun de
cesomemeus. Anligone, les Iphigénies, Alceste,et même
Hypeimncstrc et Armide auraient pu lui convenir. Ses
beaux sons y auraient fait merveille, et peut-être s'y se-
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543
rait-elle fait une grande réputation. C'est donc une faute
que de l'avoir obligée a chanter le rôle d'Anaï dans Moïse,
pour lequel elle n'est point laite. On n'a pu se faire illu-
sion à cet égard; car les répétitions ont démontré son in-
capacité. Dans ce début funeste pour son avenir, 51°" Dé-
ineri a été forcée de ralentir tous les mouvemens pour
avoir le temps d'arriver à la fin des traits, et de ces ra-
lentissunicns est résulté un défaut d'ensemble qui s'est
fait sentir pendant toute la représentation. Sun duo du
premier acte avec Adolphe Nourrit, le finale du troisième,
et le bel air du dernier, ont été surtout très pénibles. Ce
n'est pas tout : les efforts qu'elle était obligée de faire
pour chanter eelto musique ont déplacé son intonation,
qui était juste autrefois; et de tous ces défauts est ré-
sulté un ensemble déplorable. La politesse habituelle du
public de l'Opéra a sauvé à 31" Démeri l'expression éner-
gique du mécontentement; mais un silence , qui n'était
troublé que par quelques gyclamutions involontaires, a
dû lui faire comprendre qu'elle s'est trompée sur sa voca-
tion, cl qu'elle n'a rien à espérer dans la route où on l'a
jetée maladroitement.
THÉÂTRE ROYAL DE L'OPÉRA- COMIQUE.
$Mm»r< rtfvwntatm t» 'SHtiMttttt,
Opiira comique en i actes, paroles de MM. HoillD CI Lihuthilk .
musique i!c M, Chafl
Il n'y eut peut-être jamais de sujet plus favorable à une
action dramatique que celui de Masaniello. lin simple pé-
cheur napolitain dirigeant une émeute populaire, s'en fait
le chef, et affranchit en quelques heures ses compatriotes
du joui; des Espagnols. Devenu nii, el se montrant d'abord
digue de sa fortune, autant par la force de son génie que
par sa sagesse et son humanité,, il est ensuite sanguinaire
cl furieux. Des vins i mpoisonni's que le vkr-i'oi-lm a fait
544
servir, allèrent sa raison, et le portent à des actes de folie
et de cruauté qui le rendent odieux au peuple auquel il doit .
son élévation, et bientôt il trouve la mort dans une émeute
semblable à celle qui le porta sur le trône. Tant d'événe-
mens renfermés en huit jours, permettent au poêle de ne
pas enfreindre la vérité historique dans la disposition de
sa pièce ; car c'est avec un sujet pareil qu'il est facile de
s'affranchir de l'unité de temps sans choquer la raison.
Frappés de ces considérations, MM. Moreau et Laf or telle
ont entrepris de mettre sur la scène de l'Opéra-Comique,
toute cettq histoire, en montrant d'abord Masanicllo dans
sa condition de pêcheur, elle conduisant jusqu'au mo-
ment de sa mort. Voyons comment ils ont conçu leur
Au premier acte, la scène représente la place du marché
de Naplcsr des marchands de fruits et de poissons, an
nombre dcsquelsse trouve Ltwio.femme de Masanicllo, éla-
lenl leurs denrées et sont en vMnnés d'acheteurs. Plus loin,
Polichinelle attire un groupe de curieux. Des employés du
fisc, suivis de soldats, viennent faire la perception d'un
nouvel impôt qui vient d'être mis sur les fruits, et qui ex-
cite le mécontentement du peuple napolitain. C'est a la
femme de Masanicllo qu'ils s'adresseut d'abord; celle-ci
refuse de payer, en déclarant qu'elle ne vend point ses
fruits, mais qu'elle les donne : ce qu'elle prouve en renver-
sant son panier sur la place. Le collecteur la condamne à
payer une amende de eent ducats ou à allcrcn prison. Elle
appelle le peuple ù son secours; l'indignation éclate de
toutes parts, des groupes se forment, ou repousse les sol-
dats, niais ceux-ci sont les plus forts, el Leona est conduite
eu prison.
Masanicllo qui ignore cet événement, arrive portant ses
filets el se disposant à aller a la pêche ; mais bientôt il
apprend son malheur par la bouche de Itufîno, intrigant
qui fomente la révolfn parmi le peuple, tandis qu'il semble
être dévoué au duc d'Arcos, gouverneur de Naples. C'est
le même homme qui informe Masanicllo que le comte île
TonUas, auquel sa femme a autrefois sauvé la vie, et dont
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545
la reconnaissance s'est changée en amour, est de retour il
Naples. Au désespoir de ce qu'il vient d'apprendre, Masa-
iiiello ne sait comment tirer sa femme de prison, car tout
ce qu'il possède ne vaut pas le quart de la somme qu'on
exige d'elle ; mais tout à coup son beau-frère Matlèo, qui
est le personnage comique de ia pièce, vient lui apprendre
que le peuple s'est soulevé , qu'il demande l'abolition de»
nouveaux impôts et la liberté de Leona, et que le duc
d'Arcos a été forcé de faire jeter de l'argentpour se sous-
traire à la foule qui environnait sa voiture. Les Napolitains
paraissent portant des armes et des llambeaux;. Masaniello
se met à leur tête, et le peuple, sui t en incendiant plusieurs
bâlimens.
An second acte, la scène représente la cabane de Ma-
saniello ; ît est assis et abattu par le chagrin. Par un de
ees caprices communs dans les émeutes populaires, les
Napolitains se sont bientôt dispersés et l'ont abandonné
avant qu'il ait pu rendre Leona à la liber^f- Un bruit se
fait entendre , et des femmes paraissent conduisant lu
femme de Masaniello, qu'elles ont délivrée en cachant
des armes sous leurs habits. La fureurdu peuple s'est ral-
lumée ; Masaniello se mut ;'i sa tète et sort, laissant Leona
dans sa cabane. Tout a coup parait le comte de Torellas.
qui n'a échappé à la poursuite des Napolitains qu'à la fa-
veur d'un déguisement. Il reconnaît Leona , et lui parle
du danger auquel il est exposé et de l'amour qu'il ressent
pour elle. Quoique offensée de cet aveu , Leona ne songe
qu'à le faire échapper; mais il n'est plus temps : Ruffino
parait conduisant Giacomo, chef des révoltés delà cam-
pagne. 11 reconnaît le comte, et recommande à Giacomo
de veiller sur lui pendant qu'il va chercher Masaniello.
Giacomo, espèce d'imbécillc et d'ivrogne , montre sa no-
mination de commandant des révoltés de la campagne au
comte de Torellas, qui la lui enlève. Leona l'envoie à la
cave pour y chercher du vin ; ou l'y enferme , et le comte
se dispose à quitter la cabane quand Masaniello parait.
Étonné de trouver un étranger chez lui , Masaniello in-
terroge le comte de Torellas , qui se présente à lui sous le
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546
nom de Giacomo, et qui sort sous le prétexte Je réunir
les hommes soumis à son commandement aux révolta de
flapies. Peu de temps après arrive iUatleo, qui déclare
que l'homme qu'on vient de laisser échapper n'est point
Giacomo; liuflîiio apprend à Masaniello que c'était le
comte, et éveille la jalousie du pécheur. Cette passion et
l'amour de sa patrie l'agitent tour à tour ; mais , cédaut à
ce dernier sentiment, il ne s'occupe plus que du soin de
régulariser l'insurrection et sort avec les conjnrés. Matleo,
resté seul avec Lcona, entend frapper à la porte do la
cave; il ouvre, et Giacomo en sort ivre. Peu de temps
après , on les vient ions arrêter par ordre du gouverueur.
C'est RuQîno qui, pour dissiper les soupçons, a fait ce
coup d'autorité.
Au troisième acte, le spectateur est transporté dans lu
palais du gouverneur. Celui-ci commence à comprendre
toute l'importance de la révolte, et eu est fort inquiet.
Ilufiino se présente et annonce l'arrestation de la famille
de HJasamcllo. Le duc lui reproche le peu de franchise de
sa conduite, et lui ordonne d'amener au palais le pêcheur,
avec qui il veut traiter. On amène Leona , Matteo et Gia-
como, qui sont reçus par le duc d'Arcos avec des démon-
strations de bienveillance. Leona retrouve le comte de
Tore lias dans ce palais. Bientôt on annonce Masaniellu,
qui vient seul et qui, dans sou entrevue avec le duc
montre autant do fermeté pour les intérêts de son pays
que de désintéressement pour lui-même. Le peuple, in-
quiet sur sa personne, pousse des cris sous les fenêtres
du palais; il se montre, et ordonne qu'on se relire, ce
qui est exécuté à l'instant. Connaissant par là quelle
est l'étendue de son pouvoir, le duc d'Arcos prend le
parti de feindre; il lui montre les titres des anciens
privilèges que Charles-Quint avait donnés, et annonce
qu'il veut rendre ces privilèges aux Napolitains; mais Ma-
saniello, qui sait par tradition que ces titres sont écrits en
lettres d'or, reconnaît que ceux qu'on lui présente sont
faux; il veut rompre l'entrevue; mais le gouverneur lui
déclare qu'il le gardera comme otage ainsi que sa famille.
54;
Alors du entend un grand bruit ; le peuple a forcé les por-
tes du palais; il entre en foule , et lu duc d'Arcos est forcé
de fuir avec sa cour.
Au quatrième acte, Masaniello, vèlu d'Iialiils magni-
fiques , est dans un palais, entouré par le peuple, qui lui
témoigne sa reconnaissance. Des concessions ont été faites
par les Espagnols; un traité a été conclu, et les privilèges
donnés par Charles-Quint ont été rendus aux liabilans de
Naplcs. Mais, dans un repas donné à Masaniello par le
due d'Arcos, des vins empoisonnés lui ont été versés et out
troublé sa raison. Sa folie se déclare dans un conseil qui
s'est assemblé pour délibérer sur le débarquement que
les troupes espagnoles veulent opérer ; il propose d'abord
de marcher pour s'opposer à elles ; mais bientôt il devient
furieux et s'enfuit en poussant des cris. La scène change ,
et représente une campagne an pied du Vésuve. Masa-
niello paraît poursuivi par le peuple. Leona implore le
secours du comte de Torellas et du duc d'Arcos, mais le
libérateur des Napolitains tombe sous leurs coups.
Je n'entreprendrai pjs d'analyser cet ouvrage sous ie
rapport du mérite littéraire, parce que tel n'est pas l'objet
de la Reçue musicale; mais je ne puis m'empôcher de re-
marquer qu'il offre une foule de situations musicales , et
d'heureuses oppositions de couleur entre les mœurs du
peuple et celles des gens du monde, oppositions dont un
musicien délaient tire toujours parti.
La musique de Masaniello nous montre un changement
remarquable dans la manière de M. Carafa ; renonçant à
la plupart des effets du style rossinieii , il se rapproche
beaucoup de la coupe française , quoiqu'il ait employé en
plusieurs endroits des airs napolitains pour motifs de ses
morceaux. L'introduction et parliculièrémcnt l'entrée
des collecteurs sont d'un bon effet. J'aime moins l'air de
Valère et le duo chanté par le même acteur et Lcmonnier,
et leur trouve une couleur monotone. Il y a de la mélodie
dans l'air de Poncbard , au second acte , mais je le crois
trop long. Les couplets sur Notre-Dame de Mont-Carmel
sont d'un chant populaire; le refrain eu Irio es! bien
5A8
arrangé pour les voix. Le morceau d'ensemble <lu troi-
sième acte , où Masaniello invite le peuple à se retirer , est
l'un des meilleurs de l'ouvrage ; les détails en sont jolis,
et l'ensemble du trio est. bien ramené. On doit aussi des
éloges au duo chanté par Pouchard et Valère, an qua-
trième acte; la phrase principale de chant est remar-
quable, et la partie de basse fait un bon effet, quoique les
paroles en soient répétées trop souvent. En général, la
musique de Masaniello est bien écrite , quoiqu'on n'y
trouve pas une invention très remarquable. Elle a obtenu
beaucoup de succès ainsi que la pièce.
A l'exception des rôles de Masaniello et de Ruffino,
qui sont joués par Pouchard et Valère, ceux de cet ou-
vrage sont généralemcntpeu importai)*. A l'égard de celui
de Masaniello , je dois dire franchement à Pouchard mon
opinion sur l'effet qu'il a produit. Il n'ignore pas combien
j'estime son talent; mais ce talent est par sa nature propre
aux choses gracieuses, légères et élégantes. Ce qui de-
mande une grande force physique ne lui convient pas , et
le rôle de Masaniello est de ce genre. J'avoue que l'im-
pression que Pouchard m'y a faite a été pénible; on y
seul la fatigue qu'il éprouve, et l'on prévoit que cette fa-
tigue peut avoir de funestes résultats. Valère chante hien
son rôle , et les autres acteurs sont convenablement placés
dans les leurs.
THEATRE ROYAL ITALIEN.
Otiixo. — Début» de M»' Sonne.
Les souvenirs qu'avait laissés H,u Sontag après les
brillantes représentations qu'elle a données à Paris, il y
a deux ans, ne pouvaient manquer de procurer a sa
nouvelle apparition un air de fête et de triomphe; ses suc-
cès en Allemagne, depuis cetle époque, ajoutaient encore
au désir qu'on avait de la revoir. On était curieux de la
comparer à elle-même, cl de juger si sa voix avait gagné
ou peritu, si sa méthode s'était perfectionnée, eL même,
disons-le, s'il n'y avait pas eu quelque exagération dans les
éloges qu'on lui avait donnés: aussi chacun était à son
poste. DileUantis italiens, musiciens allemands, flâneurs
français, tous étaient venus, tes un» pour juger, les autres
pour applaudir, qtuind mime, les derniers pour prendre dit
plaisir s'il y avait lieu. C'est déjà une belle position que
eello où l'on a acquis tant d'impur tance, et c'est toujours
une preuve détalent.
M"' Son tag n'avait chanté que dans des ouvrages bouffes,
ou semi-sérieux, lors de son premier voyage à l'aris ; dans
celui-ci, elle a voulu se faire entendre dans le genre sérions.
Le rùle de Desdeiuona, rôle d'autant plus difficile à abor-
der que M" l'asla le jouait admirablement, est celui
que ftl1" Sontag a ohoisi. Sou triomphe y a été complet, si
j'en juge par les applaudisscmens qu'elle a reçus: mais
ces Hpplandissemens ont-ils été tous mérités? A celajo
répondrai: souvent, mais pas toujours. Je m'explique.
Une voix pure, sonore, Ikxiblo. .su^i'rpiibh' de se modi-
fier depuis le plus haut degré d'intensité jusqu'uladouceur
la plus suave, sont les avantages dont la nature a pourvu
M1" Sontag, Elle y joint ceux d'une intonation toujours
juste et d'un goût souvent heureux. Voilà, sans doute, bien
des qualités ; il est certain cependant qu'elles ne suffisent
pas toujours, surtout lorsqu'il s'agit de: lu musique sérieuse.
Je n'eu veux pour preuve que le finale du second acte
A'Otello, dans lequel se trouve la phrase : Se il padre m'aban-
donna! phrase de la plus grande élévation, et que 51"' Pasta
rendait avec l'accent le [dus pathétique. AI "* Sontag en a
fait une phrase d'eifet calculé ; elle détache toutes les notes
ascendantes et les dit dans un meiza-voce presque imper-
ceptible, afin de réserver ses moyens pour le trait suivant;
cela produit de l'effet ; mais dramatiquement parlant, cela
est petit, mesquin, smis passion et sans douleur.
Soit qu'elle fût fatiguée, suit qu'elle n'eût pas bien conçu
le troisième aclc, M11' Sontnj; y a clé faible dans la romance
et dans le duo ; ses amis n'ont pas même osé l'applaudir.
55o
A tes défaut* près, elle a montré beaucoup de taleul dans
le reste de l'ouvrage, et a mérité lesapplaudissemeus una-
nimes qu'elle a reçus dans le finale du premier, dans le
trio et dans la première partie du finale du second. Je suis
convaincu que le rôle de Desdemona est un de ceux qui
lui conviennent le moins, ci qu'elle reprendra tousses
avantages dans le Barbierc, dans la Cenerentola, dans ta
Gana ladra et dans la Donna itcl lago. Il me tarde de l'en-
tendre, dans ce dernier ouvrage, unir sou talent avec
celui de M" Pisaroni.
— Une soirée musicale du plus haut intérêt a eu lien
dans les salons de MM. Pleyel et compagnie, le 27 du mois
dernier. Cette soirée était consacrée à la grande musique
instrumentale qu'on entend trop rarement, cl le talent
des virtuoses était digne de celui des compositeurs. Jamais,
peut-être , l'admirable septuor de Beethoven pour violon ,
alto , violoncelle , contrebasse , clarinette, cor et basson,
n'a élé rendu avec autant de perfection qu'il l'a été dans
cette séance par MM. liaillot, Lrhan , Norblin , Lamy, Pé-
chinier, Dauprat et Barizel. Un auditoire, composé de tout
ce qu'il y a de plus distingué parmi les amateurs et les ar-
tistes, ne savait ce qu'il devait le plus admirer ou du génie
qui a enfanté ce chef-d'œuvre, ou de l'ensemble délicieux
de cette belle réunion de talens.
Un trio pour piano, violon et violoncelle, exécuté d'une
manière au-dessus de tout éloge par MM. Kalkbrcnncr,
Baillot et Sorblin, et un morceau très original pour si\
pianos, composé par M. Kalkbrenner et exécuté par lui ,
MM. Camille Plcyel, Pixis, Bertini, Camille Petit et Iti-
gcl , complétaient toute la partie inslrnmcnlalc de ce con-
cert. Ou paraissait craindre que l'effet de ce dernier mor-
ceau ne répondît pas à l'appareil qu'il exigea il ; mais 011
lut agréablement trompé. On peut affirmer que, sous le
rapport de la composition, il est au rang de ce qu'on
connaît de plus beau dans le genre instrumental. Un ex-
cellent piano a queue, joué par M. Kalkhrenncr. dialogua il
avec un piano mùeorde qui élait louché par M. Pleyel, ci
do ni la voix pénétrante se mariait parfaitement avec celle
du grand piano. Quatre pianos carrés à trois cordes ac-
compagnaient. H est bien regrettable que la difficulté de
réunir tant de moyens d'exécution prive le public de ce
bel ouvrage.
Adolphe Nourrit, dans un air de» Abencirages et dans un
duo de Moïse chanté avec Al. Dabadie jeune, el madame
StocLhausen, dans un air de Sap'tenza et dans des airs suis-
ses, ont mérité les applaudissemeus unanimes de ras-
semblée.
— M, Adam fils, jeune compositeur, élève deM. Boïel-
dieu , connu déjà par de la musique instrumentale et de
jolis airs intercalés dan» quelques vaudevilles , vient de
donner un échantillon de ses talens dans la musique
qu'il a arrangée et composée pour ta, Batelière, opéra-
vaudeville de MU. Scribe et Mêles ville , dont la première
représentation a été donnée au théâtre de Madame , le
uo, décembre. Celte musique est peu prétentieuse parce
qu'il fallait l'approprier au petit cadre pour lequel elle
était composée ; mais on y trouve de l'élégance, de la
fraîcheur et un bon système d'instrumentation. L'ouver-
ture est jolie , cl l'on remarque un chœur et un petit air
agitato, qui sont d'un bon style. M. Adam travaille à-deux
opéras pour le théâtre Feydeau ; il sentira sans doute
qu'en composant pour un grand théâtre , il faut chercher
à agrandir su manière plutôt qu'à la rapetisser.
— Uu grand événement vient d'avoir lieu à l'École
royale de Musique. Par arrêlé de M. le vicomte de La Uo-
chcfoucault, les classes de déclamation spéciale et lyrique
viennent d'être supprimées , ainsi que celles de plusieurs
professeurs de chaut, de vocalisation et de piano. Treize
professeurs sont compris dans cette réforme, ce sont
MM. St. Pris, Lafou , Cossard, Provosl, Lebrun , Gérard,
Plaulade, Blangini, lierton fils, Baptiste aîné , Pradhcrct
M1" Michu. L'économie résultant de ces suppressions est
de a3,aoo francs, de quoi il faut déduire les pensions qu'il
faut accorder à ceux qui y ont droit , et le traitement de
M. Banderali, qu'on a fait venir d'Italie pour professer le
chant français. On présume que l'économie sera d'envï-
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55a
roi) ia,ooo fr. ! Cet événement es! trop important pour que.
je n'en parle pas sérieusement. Ce sera l'objet d'un article
dans le prochain numéro. FEUS.
— Le jeune Aikan donnera uit concert dans les salons
de M. Pape, facteur de piano, rue de Valois , n° 10 , et rue
des lions-Enfans , n" 19, le i5 janvier prochain , à 7 heures
du soir. On y entendra H' et SI™" Moudonvillc, SI"* Mari-
noui, M"" Alkau, MM. Camus , Ch. Tolbecq , etc.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
HIilmi. La troupe chantante du théâtre de la <Scata, au
prochain coruaval, sera coniposéo de M"' Mcric-Lalande .
prima donna, de N"" Unpher et Dubertuu, et de M'11' Adé-
laïde Cesari , primo mitsim. Les ténors seront David et Louis
Ravaglia ; les basses chantantes, Biondini et Lalande , et
le primo buffb , Philippe llicci. Le premier ouvrage sé-
rieux qui sera représenté est VElisabetla; de Kossïui, et le
premier opéra bonde J. Due Pietri , .de BoniEctti.
Vej;isb. Deux opéras nouveaux «ont annoncés comme
devant être représentés sur le théâtre délia Feiùce , à la
saison prochaine; l'un est Gaston de Faix , musique de
Persiani , l'autre, Mnfemio di Mutina , de Morlacchi.
Les principaux eiiantcurs engage» sont Stéphanie Favelli.
primo, donna , Caroline Franchini, autre prima donna,
M'"' Bassi Manua. primo mtiiko, Tacdùnardi , premier
ténor, et André Spagni, première basse. ..1. .,
Nice. La composition de la troupe du tkeatra nuoie,
pour le carnaval prochain est comme il suit : 1' M?"*Sed-
laeek , élève du conservatoire de Milan , et eu particulier
de M. Bandcrali, que M. le vicomte de Larocbefoucault
vient d'engager, comme professeur au conservatoire de
Paris; a" Giovanni Lainer, premier bouffe comique; j" Gin-
seppe Loïra, premier ténor; 5° Raphaël Scalési, premier
bouffe chantant. /( barotte di Doteheim , opéra de Pacfni.
ouvrira la saison.
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CONSIDÉRATIONS SUR LES RÉFORMES NOUVELLES
OUftilS Djm L'(COL« BOYAU DI KUS1QDI.
Pénétbé «les devoirs ijuc m'imposent mes fonctions de
journaliste; résolu do les accomplir, nonobstant la posi-
tion délicate ou je me trouve; fort du témoignage de ma
conscience, je n'hésite pas à aborder l'examen d'une me-
sure que vient de prendre l'autorité à l'égard de l'École
royale de musique; mesure qui doit avoir do graves résul-
tats, non-seulement à l'instant même, mais dans l'avenir.
Il s'agit des intérêts d'un art que j'aime avec passion : il
s'agit de la position morale des artistes et des relations
du pouvoir avec eux ; il s'agit enfin de montrer comment
l'action do ce pouvoir peut être ou salutaire ou funeste:
de pareils objets sont trop important! pour que je n'en
dise pas franchement ma pensée, quoiqu'il doive en
11 est rare que le chef d'une grande administration v
apporte, en y entrant, des lumières suffisantes pour eu
embrasser tous les détails d'un coup d'œil ; quelle que soit
sa capacité, il a besoin d'appeler à son aide des hommes
expérimenté! , capable» de l'éclairer sur une foule d'ob-
jets , et de lui présenter des vues utiles. C'est par celle
défiance de soi-même qu'un esprit juste parvient , avec le
iemps, à connaître les hommes et les choses. Mais si une
pareille sagesse est nécessaire lorsqu'il s'agit de finances,
d'administration civile, de police, etc., elle est bien plus
indispensable en ce qui concerne les arts , où tout est de
sentiment , de convenance et d'expérience locale.
Bonaparte, qui jugeait sainement de toutes les choses
uù son despotisme n'était pas intéressé , sentait si bien
le peu» d'analogie des formes administratives ordinaires
avec ces objets, qu'il avait, en quelque sorte, borné les
a 11 ri binions du minisire de l'intérieur sur. le musée, le
conservatoire et l'opéra , à régler leur bu d jet ; mais il avait
?• voi. 4r
554
mis Ions ses soins à choisir «les hommes pourvu» de teilles
les qualités nécessaires potir diriger ces élablissemens.
Ainsi, Deuon était devenu le directeur du musée, et
Sitrrctte celui du conservatoire; tous deux avaient une
action indépendante sur rétablissement qui leur était
coolié ; tous deux savaient exciter l'émulation, et connais-
saient les ressources qu'il y a dans l'amour- propre des
artistes; ce temps fut celui de la gloire de la peinture et de
là musique française.
C'est celfe action morale qu'on ignore dans les bureaux.
L'erreur commune de ceux qui les habitent est de croire
que tout se fait avec des règlement, desordonnances et des
arrêtés, tandis qu'il rie peut y avoir pour un bon adminis-
trateur de Uu'atre ou d'IScole de musique d'autre règlement
queTes 'bésoiris,"d'a'utre ôrdoniiarice que sa volonté. Les
hit réunie se persuadent que tout le bien vient d'eux : c'est
exacteihent' le contraire. Ils ne sont pas en position de
ermria'ître le fond des choses. "Quand vous verrez, dit lord
a Cliristerlield à son fils, une assemblée d'administrateurs
eiï donnera . et vous verrez tonjours que le motif qui
.'i'nûr'àiÈ du v ilt-irnuiiier est précisément celui auquel on
"'.n'aura pas pensé: » ■"
Eés'înlet.tionsde SI. le vicomte de La Ilocbefoucaultsont
-p'ûres'fS «siricerement le bien ; ' mais dans l'impossi-
bitiïé'dc connaître par lui-même une foule de détails , il
serit 'le besoin1 de s'éntonrer dé conseils; ce n'est pas sa
faute si la v'é rite ri 'arrive pas jusqu'à lui; on ceux qu'il
consulte l'ignorent eux-mêmes, ou ils n'osent la dire , ou
ils noie veulent pas. D'ailleurs, M. de Lu Rochefoucault ne
jo'.'.it pas dtiu'e action libre : son département n'est qu'une
section' de' Vin t erni ance générale de la Maison du roi. Son
budjél sé'trotive'rédriit en masse d'une somme considéra-
ble; il e st 'forc'é'dcl^ure dé son cflté des' réductions partie fies
sur les1 diverses' brahehes de son administration * de là
celles que vïétiï d'éprouver l'École royale Se musique.
/ Celles-ci seront-elles profitables'? C'est ce que je me pro-
pusc d'examiner. ' " '■
OiQllizMOyCoOglî
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Depuis long-temps les classes (le déclamation . dépen-
dantes de l'École royale île musique , sont frappées tic ré-
probation. Les journaux, les écrits de tout genre sont
remplis du critiques et de sarcasmes contre ce mode d'en-,
seigiiemeut théâtral. Il se peut , en effet , qu'il ue soit pas
le meilleur possible; peut-être l'art du comédien ne com-
porte-l-il pas une tbéurie assez compliquée pour avoir
besoin d'Être enseigné méthodiquement; peut-être , à
défaut de science positive du beau , les professeurs sont-
ils réduits à ne donner à leurs élèves que des traditions .
\ érïtahles fléaux du talent naturel ; peut-être , enfin , les
professeurs de déclamation ont-ils trop compté sur leur
art, et n'ont-ils point été assez sévères sur te choix dé
leurs élèves. Trop souvent ., ils ont entrepris i]e faire des
acteurs tragiques avec des nains dépourvus d'organe cl
de sentiment. Les qualités physiques, sont à l'acteur ce
que la voix est au cbauleur, c'est-à-dire la condition pre-
mière. Cependant il s'en faut de beaucoup qu'il n'y ail
rien à apprendre dans l'art de Molé ou de l'aima. Sup-
posez l'homme le mieux organisé , mais n'ayant appris ni
à se faire une bonne prononciation, ui à respirer à propos,
nia tirer parti du volume de sa voix, ni entiu à marcher
et à se tenir sur la scène : sou débit et son jeu seront le
comble du ridicule. Combien de fois n'avoos-nous pas en-
tendu notre, lioscius parler de la difficulté de fixer une
intonation heureuse, et d'cnipéehcr la voix de monter
dans la passion ? Il avouait que ircuie ans d'études lui
avaient été nécessaires pour triompher complètement de
cet obtlaclt^
Autrefois ou jouait lahaule comédie et lu, tragédie sut
tous les, théâtres des villes de province, ("était la qui: se
formaient Ions ceux qu'une vocation décidée jetait dans la
carrière du théâtre; c'est du là que, soul venus tous. nos
grands acteurs. Mais parla protection insensée qu'on a ac-
. cordée depuis au vaudeville et au mélodrame, et par toutes
les entraves qu'on a mises à la propagation delà bonne co-
médie, tout a péri. La, comédie, la tragédie sont des choses
à peu près inconnues dans les départemens. Je ne sais si
Dlgifcod 0/ Google
l'on pourrait y trouver deux acteurs supportables. 11 ne
restait donc qu'un seul refuge pour ceux qu'un goût pro-
noncé portait vers le théâtre , et qu'une ressource pour le
théâtre français : c'était l'École de déclamation. On pou-
vait modifier le mode d'enseignement si ou le reconnais-
sait vicieux; on pouvait convertir la classe en théâtre,
faire jouer aux élèves des actes ou des pièces entières, et,
au lieu de leur donner la manière du professeur, se borner
à les avertir de leurs défauts, en leur laissant tout ce que
leurs intentions auraient d'original. La dépense était peu
considérable, et l'on avait du moins une chance favorable
qui n'existe' plus]1 On était fondé à reprocher à l'École de
déclamation de n4avoir rîeri produit; mais affirmer qu'elle
était un obstacle a l'a production du talent est une propo-
sition qui iVa'pu être articulée que dans un temps où l'on
ose dire qùej pour^èt^e un musicien de génie, il ne faut pas
a pprendré'là1 musique.
Il est un autre point de vue sous lequel on peut consi-
dérer la suppression dé l'École de déclamation. Malgré les
progrès du siècle, on convient assez généralement que le
chant est un' art dont il faut apprendre le mécanisme.
Mais en France cet art ne suffit pas pour faire un chan-
teur dramatique; car on exige aussi qu'il soit, sinon co-
médien distingué, au moins acteur supportable. Celui qui
se destinera à la scène n'aura désormais d'autre ressource
qué: d'aller dans les ' déparlemehs pour y apprendre ce
qu'on appelle le mUièr tl< .< planches ; mais ce qu'il y gagnera
sous ce rapport,' ii le perdra cmutn!e,lchanteur; car ou sait
ce que c'est que le goût de la province: Je doute qu'on ait
pensé à relie difficulté. 0 VOus! >ii g cïrtî testez- chaque jour
sur réuractuèï'dc nos'tliéafrés\:(ét qWi WmS 'êtes tantale.
vés contre fÈcol^'dc déclamation ,- je vbuJ afté'imVu' dix
ans. Ce que Vous'blamiik àvec'rànl d'aimaVhfenïentVous
semblcra,,un état' dé' prospérité eti'ctinrp,a«aisBh flé <Jè"*p*é
YousaUr&'alor'sï' aU -"'l»'"" '< «''«!*»»' •
On'parle,' ÏVékt Vrai, de la ïébrga irisât ion d'une classe
de déclamation attachée au théâtre Fraiteafe ; mais une
pareille institution, devenue en quelque sorte un établis-
sèment particulier, n'aura qu'une existence précaire,
parce qu'il dépendra tôt ou tard d'une décision des socié-
taires pour le supprimer; d'ailleurs, une pareille école
serait aussi nécessaire auprès du théâtre Feydean , et
même de tous les grands théâtres ; ou sent que cela est
impraticable.
Il y a long-temps que j'ai démontré au ministère la né-
cessité de retrancher de l'école royale de musique celte
classe qu'où appelle de déclamation lyrique; car ce n'est pas
d'aujourd'hui que la situation de nos théâtres et le soin
de leur recrutement m'occupent. Laine», de tragique et
de criarde mémoire, venait de mourir ; le temps me parut
opportun pour faire cette suppression. A la manière do ni
il donnait ses leçons, j'avais jugé qu'il n'y avait point de
voix, si bien constituée qu'elle lut, qui pût résislcr au
travail qu'il faisait faire à ses élèves. Son système était
celui de l'ancieune école ; c'était celui de l'opéra d'alors :
on avait donc la certitude que ceux qui lui succéderaient
n'en changeraient pas. Tout en parlant sans cesse de vues
d'améliorations , les administrateurs n'écoutent guère
ceux qui sont animés d'un zèle véritable et qui leur don-
nent de bons avis. La place de Laincz fut donnée à Adrien,
et l'on continua à détruire toutes los voix qui se présen-
taient ; la plupart n'arrivaient pas.' jusqti'à ia porlc de l'A-
cadémie royale de musique. .. . j? (.j ^ r/,.((('j,. | ^a
A la mort d'Adrien, je renouvelai mes instances pour
qu'on examinât sérieusement le vite que je signalais;
pour toute réponse on nomma M. Baptiste aine professeur
de déclamation lyrique. J'estime fort la personne et les
talens de M.. Baptiste; mais l'idée, de lu* confier rensei-
gnement du chant me parut si grotesque que je désespérai
du salut de l'École, et que, je. pris le, parti de, garder (e si-
lence. Les engage me us que j'ai pris depuis lors, envers le
public ne .ine, permettent Kius de. me taire . quoique je
sois convaincu de l'inutilité de mes avis. Én. ôlau'l à
M. Baptiste alué. l'ens^suemejit dR Ja Réclamation spé-
ciale pour lui cppûer celu^tie la déclamation, lyrique, on
avait fait une laute. Maintenant ou veut la réparer; mais
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il est faeheu-x que , pour prix de sou zèle . on n'ait a offrir
à un homme estimable qu'une destitution. Les faute» mi-
nistérielles sont toujours graves. Adolphe Nourrit est, dit-
on, désigné pour occuper la place devenue vacante parla
retraite de M. Baptiste; on ajoute que, par égard pour
son ancien professeur, il n'a point accepté. Ce refus l'ho-
Quatre professeurs de chant et de vocalisation ont reçu
leur démission ; ce sont MM . Plantade, Gérard , Blangini
et Berton fils. On les rend ainsi responsables du petit
nombre de chanteurs qui sont sortis de l'École; mai» sans
parler de il" Albert, de, M"' Gintv, de M™ fiabadie, et
d'autres qui se sont formés dans leurs classes, a-t-on bien
examiné loutes les causes oui les ont empêchés d'en pro-
duire davantage? Ont-ils eu des voix à. leur disposition?
Et s'ils en ont eu,, la condition qu'on leur imposait de
fournir promptement des sujets à des théâtres en déca-
dence ne les a-t-elle pas contraints. à ne, leur donner
qu'une éducation trop hâtive ? Il y a tant de choses à con-
sidérer dans les causes de cette rareté, de chanteurs qu'on
remarque maintenant dan» U>«U; llBurope , qu'il ne faut
pas se hâter Je conclure , au risque de se tromper lourde-
ment. D'ailleurs, lorsque ce» professeurs omt é#ér flhoisU
pour remplir les places qu'ils occupaient , ou h sans doute
reconnu leur «apacjté , , et leurs juges s'y connaissaient au-
tant que ceux d'aujourd'hui, .l'examinerai tout à l'heure
l'effet m9ral.de, celte instabilité dans le sort /des, artistes >
et me borne maintenant à considérer ce qui est substitut
M* -Banderali, professeur distingué du Cuiiwr-
v^uffi,,dq,-r^||BpH,iary W»trti4lg<Mrj|PBMT1 IWtffléfW*
Jonctions à .cçtuL.dei l'aris. .Son «*rww1çto*WWrWr*,.«0
mois d'avril prochain. M. JBamicraJi, qu'on dit otro âgé de
cinquante et qunlqucs années, n'est point familier avec .la
langue française; et comme on no pourra le borner am
o:*wl eeL qu'il sait taire-. rou*^u^'^,,l«i*>UBui«e.des
sujets pourvus d'une belle vois et d'un bon sentiment de
musique, je suis persuadé qu'il formera d'exccllens chan-
teurs; mais quel avantage en retireront no» théâtres ? C'est
d'eux cependant qu'il s'agit ; car que nous importe que
nos chanteurs brillent ailleurs qu'en France?
On m'objectera sans doute qu'un Français, sachant
bien chanter eu italien , peut appliquer «ans peine oe
qu'il sait à la langue française ; mais, outre que l'articu-
lation de cette langue offre de grandes difficulté* dans le
chant, outre qu'il est plus facile, de bien chanter l'italien
que le français, les avantages d'un chanteur italien sont
tels qu'aucun élevé de M. Banderai! ne consentira à les
échanger contre le dur noviciat qu'il faii! fairé au théâtre
de l'Opera-Comiquc ou à l'Académie royale de musique.
Les moyens de recrutement étaient boritésnàguercsMlK
seront nuls désormais, à moins qu'oii'iie'eonsmile à entrer
en concurrence avec les théâtres étrangers' et à, disputer
au poid de l'or des acteurs devenus indispensables.
J'ai déploré souvent l'état de décadence du 'se trouvent
nos théâtres lyriques et l'art du chant à Ptëéole royale de
musique ; j'ai dit que le péril était imminent ; que des
améliorations promptes étaient nécessaires, qu-H fallait
se procurer de» voix , etsurlont ranimer l'émulation prèle
à s'éteindre; à Dieu ne plaise que j'aie voulu insinuer qu'il
fallait faire venir des professeurs de chaut d'Italie et ren-
voyer les nôtres. Eli ! comment aurtii&vjeeu celte pensée ?
L'Italie trouve à peine en elle-même des ressources pour
ses propres besoins, ce qui prouve que ses écoles ne sont
point dans un étatllorissaut.OnsaitquéleS'Uantntrîccsquiy
ont brillé le plilB, depuiw quelques aniiées.'SOiilfrançaiscs.
Telles sont mesdames' 'Mainvielle-Fodor, Mérie-Lalande .
Coloiribelle ^CorMÏ) et Favellî. Jê ^répète, je suis foin
de contester h; mérite «te 'Ml' Sanaefâii; mais ce mérite
ne petit ê^atiIt?<qti(<pO«r frtrnrer des Oliaulcurs1 (teslmée
a ftiier'brniev mnmêfl w » ; MiffM 9 mm
Il est vtn autre pttMttte-vtie sons! [^«el W font envisage v
la réforme réeente-des profcMffars de l'KcttleroyaJc dc-musi-
rjue : il mérite l'attention d'un administrateur, car il s'agit
56o
tin moral des artistes qu'on ne blesse point en vain. La plus
grande sévérité doit présider an choix des professeurs dans
une école importante comme l'École royale de musique;
mais ce choix ayant été fait doit élre respecté, à moins que
par une négligence coupable à remplir leurs devoirs ces
professeurs n'aient provoqué leur destitution. Un artiste,
pour Être quelque chose , a besoin d'avenir et de sécurité.
Les réformes , les réorganisations, que j'ai toujours vues
suivies d'un état de choses pire qu'auparavant, enfantent
le découragement au lieu de l'émulaliou qu'on veut faire
naître. Ceux qui échappent au naufrage ne sont guère plus
heureux que ceux qu'il engloutit; on s'habitue à considé-
rer sa situation comme un état précaire, et comme le
ïèle est compté pour peu de chose, chacun n'en a que ce
qu'il faut pour n'être point répréltensible. Il est une vérité
incontestable, c'est qu'un état de malaise et d'inquiétude
existe parmi tous les musiciens.
Parlerai-je de l'économie qui parait avoir été la pre-
mière cause de la réforme actuelle P Mais cette économie
même est une illusion ; car s'il est vrai , comme on le dit ,
que le traitement ostensible ou secret de M. Banderali ex-
cède dix mille francs, ce traitement:, joint aux pensions de
retraite auxquelles plusieurs professeurs ont droit, absor-
bera la plus grande partie de celte misérable épargne.
D'ailleurs, qu'est-ce qu'une dépense de cent eiuquanie
ou de cent soixante mille francs pour l'entretien d'une
école sans laquelle il n'y aurait point de musique en
France ? d'une école â laquelle on doit au moins do la re-
connaissance , puisqu'elle a fait à peu près tout ce qui
brille sur nos théâtres, dans nus orchestres, et qui a im-
primé l'essor que l'art musical a pris dans toute l'étendue
du royaume P Eh 1 sans la passion qui domine les artistes
dignes de ce nom, croit-on qu'il se trouverait un seul pro-
fesseur qui voulût livrer son talent pour les faibles ap-
pointerons qu'on accorde? Quoi! un grand violoniste,
un habile chanteur, un professeur de composition , un
homme qui a consacré tonte sa vie à pénétrer les secrets
d'une théorie obscure et à en aplanir les difficultés , bor-
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nentlcur cspqirà la somme annuelle de deux mille franc»;
sur cette somme une retenue de trois pour cent est faite
au bénéfice de la caisse des pensions, et après dix-sept ou
dix-huit ans ils sont exposés à être réformés sans obtenir
celle pension, parce que les réglemens ne l'accordent qu'au
bout de vingt ans de survice, et sans qu'on leur restitue
les retenues qui leur ont été faite.*! Ce n"cst pas tout : ceux
qui font un double service à l'Opéra et à l'École royale
subissent une double retenue sur leurs appointemens de
l'un et de l'autre emploi; néanmoins, par de nouveaux
réglemens, ils ne sont point admis a cumuler deux pen-
sions qu'ils auraient légalement gagnées, parce qu'on a
jugé à propos de réunir les deux caisses on une seule.
Je sais qu'il est diflicile qu'un administrateur connaisse ,
tous les détails et saisisse tontes les conséquences de ses
décisions ; mais c'est à' ceux qui l'entourent qu'il appar-
tient de l'éclairer, surtout quand on est certain de ren-
contrer en lui l'amour du bien. Je me garderai bien tou-
tefois d'imputer à M. Cbérubini les réformes qui viennent
d'Aire faites à l'École- royale de musique ■. je ,,.i, certain
qu'il, a été le premier à les désapprouver, ^et qu'il n'est
point dans son goût d'administrer des débris ; mais il s'est
soumis. Je sais à quels conseils on doit imputer ces cuan-
gemeusj.mais je ne le dirai pas, parco que Ics.ariistcs me
comprendront sans que, je m'explique , et parce qu'il est
inutile que d^autres sachent ce que je tais. 1
.J'aÂ*cjnpli un devoir pénible ; mais par cela même que
c'est .un, devoir, j'ai d» leiremplirJ Mes paroles1 pourront
èu-e envuuiinée», et l'on pourra me faire un crime do ma
hardiesse; mais, quoi qu'il en soit, j'aurais témoignage
deinu, conscience. e H !ns sentîmes des gens de bien.
imJàM «ol afrkMé top ■flfaiqPftMoj î*» 'fjWtf01 ,,(
-uii| iiint MÎ ihWniWlf* !i'up(i«-tini!> ,murt » arî èur%V
.([i. MlliUn) KM -wioq l<i«l". in^'- . rjlt iOIiiov r»|» ww»»1
, ttltlIMItUIf l"lfli;t II» !wu^ 'JîlTii T, ttu'llf ttWllMMKf
■ H , uDilinoqm >3 oh WSWitnW| nu ,nmh»il'» >'iiii 'l
MnlM* sol iSilW.q c air M ./«loi i- .i.hii.v. », mti ..«nminl
• 'ml . nHntStife <"•) »'fr*Vir n • / i" ■.-u >"J» t ■■>..':•< tun'l'-
2, vol. 48
, r— .- ■ CORRESPONDANCE.
■i ' Choitj-le-Roi , le ijinTiei i8a8.
Les lecteurs de la Rnua itusteale ayant pu croire que le*
critiques de M. Troupeuas sur ma gamine chromatique
sont fondée», je me trouve dans l'obligation de les réfuter.
Toutefois je rendrai justice au* intentions de cet amateur
éclairé, qui n'a évidemment pour but que d'être utile à
l'art musical, de même que ja ne soutiendrai mes prin-
cipes que par amour pour le vrai. J'ai établi ainsi les rap-
ports des sons de la gamme chromatique . savoir:
ai, re\» re, mt j» mi, fa, faf,, toi, ia\,, la, siL si, ut.
( i, fa h i> i* u % h h h Y. «•
M. Troupenas improuve seulement l'expression -r* , de
la seconde mineure, celle ^, du triton, et celle de
la septième mineure. Il n'a point reconnu le principe
constitutif, de eelle gamma, *rai la rend la pius-*égulièr©
qu'il soit possible de l'être, lés intervalles de Put grave
au V*L. à r«, à mi},, à mi, à fa et au triton, étant
égaux, deux par deux, à ceux de Vul aigu, au si, à lify,
a la, à fa[>, à sol et au triton. \\ s'est refusé à reconnaître
que , destinée à t'accerd des nutrunena à douze demû-tons
invariables , i\ est impossible d'y admettre dea rapporte plu*
rapprochés des moyens proportionnels géométriques OU
demi-tons égaux, que l'on. a voulu introduire jadis, et
que leur fiuisselé universelle a dû faire rejeter à jamais.
Eu elfet, le rapport -if, qui exprime le re\,, a dû être
admis an lieu de celui qui représente fVjf, parce
que le moyen proportionnel géométrique entre i et g est
ivf égal à 4-?- h peu de chose près , et par conséquent plus
rapproche de f| que de De même le moyen propor-
tionnel entre 'J, qui exprime le lael^, qui représente le
si, t»t;-$*r qui ne diffère de ^ que de «Jft,. ou environ
5bS
■fc, tandis qu'il diffère de -, ti\f de AI. Troupeuas, de
^777, ou environ ^; eu sorte que, quelle que soit la dif-
férence entre ma tierce majeure te, uf# , et ma tierce mi-
neure «ffl, mi (et elle est do ou un peu moins de
expression du (on mineur), il est indispensable d'admettre
celte anomalie apparente; car si l'on emploie l'ut g de ~ ,
on aura la tierce majeure re\, fa, de la valeur de jf, et la
tierce mineure j ** P, n ^, de la valeur |£S , qui différe-
ront de , à peu près égal à \i, de sorte que l'incon-
vénient est presque le même, Si l'oit emploie le si J> de "
de M. Troupenas , il sera plus grave, car lu tierce mineure
sera exprimée par y°-j} , et sa différence avec la tierce ma- '
jenre sera de iff^, <l»i »R diffère de que de 7^;'.
Il ne reste plus à justifier que l'expression f 1 du IHton ;
mais l'impossibilité absolue d'admettre le fit$, a l'exclu-
sion dus»ip,ou ce dernier à la place de l'autre, suffit à
cet égard.
S'est-il pas injuste de m'accuser de négligence relati-
vement anx sixtes uni varient du mineur au majeur dans
les plateaux dont les cotés diminuent en nombre du cercle
au carré et au triangle , quand c'est moi rj ni , le premier,
ai fuit celte observation ?.j"en ai fait nsage autant que je
l'ai dû uaas mun, tableau de* résonna nées graves /en y in-
sérant parmi les sons générateurs le tot§ et le tu (,. Je
n'ai pas ern devoir (aire.meDlion des sixtes intermédiaires,
et entre autres d'un ia[>, de 41 3 vibrations, qui eût été ex-
primé jfAV |f) (apport eHse.utielJcmciit faux et qui au-
rait donné^puur, résonances graves un mi de 160 vibry-
lions, et uu toldft 9G, vibrations. « . -1
Lu plié nomùne.qua j'ai, constate, la présence de l'accord
de triton et rte sixte majeure- dans le plateau carré, ne me
parait peint purement géométrique, puisque cet accord
est le lype naturel de l'harmonie dissonante, et fait né-
cessairement partie îles dissonances dites de seconde et de
(il M. TréupcnM y«l trompé <1ini fet Titeuri comparée de htlils
utiaeirrcn'^, la , 1 t de la titre» mu jour,. la , </(§, La prcmiir intervalle
en npfiiné par il , «(.non pat J|,
564
septième diminuée, distinctes l'une de l'autre par la
tierce, qui est ou mineure ou majeure, comme dans uf,
lin article adressé à M. Fétts , et qui traite des diverses
expressions des modulations dérivées de ma gamme , eût
répondu à une autre critique de M. Troupenas; en atten-
dant sa publication, je dois faire observer ici qu'il s'est
lort mépris sur les résultats de mes rapports , en les accu-
sant absolument trjus de fausseté.
Par la construction de tua gamme , les accords couson-
nans qui suivent y sont exprimés avec la plus grande
justesse, quelles que soii
ut, fa, ta.
reif,fa, ta\,.
re, fa, si.
Je ne crois pas qu'aucune autre gamme chromatique
puisse présenter des résultats aussi satisfaisais.
Je désire que ces éclaircisscmens m'épargnent de la
part des musiciens le reproche de n'être qu'un géomètre
harbare , et de la part des géomètres celui de n'être qu'un
musicien ignorant.
Le baron Bleui.
NOUVELLES DE PARIS.
Les répétitions générales de la Muette de Portici ont
commencé à l'Académie royale de musique' samedi 5 jan-
vier. On s'accorde à donner les plus grands éloges à cette
nouvelle composition de M. Auber. L'administration ne
néglige rien pour hâter la représentation de cet ouvrage,
sa seule ressource, depuis le malheureux essai de M"* Dé-
ut, mi\» sot.
al, fa, ta \>.
Mb,/*, si-
mi, sol, si.
Lu I :'j"J Uv
565
A propos de M" Dénier! , on assure qu'elle a demandé
à tenter une nouvelle épreuve dans le Siège de Corinthe,
consentant à rompre son engagement si elle ne réussît
pas. Nous craignous bien que le proverbe, Tout te monde
ne peut aller d Corinthe, ne se trouve encore vérifié dans
cette cîrcoustance.
— Le succès de M"* Soutag s'est soutenu à la seconde
représentation à'Otelto : mêmes qualités , mêmes défauts
sont tout ce qu'on y a remarqué. Cette cantatrice devait
jouer, le 8 de ce mois , le rôle d'Elena dans la Donna det
Lago, rôle dans lequel elle a recueilli les plus vil's applau-
dissemens en 1826; mais une indisposition subite ne lui
a pas permis de paraître au jour indiqué. On espère que
cette indisposition ne sera pas de longue durée , el qu'elle
ne privera pas les amateurs d'un spectacle qui doit réunir
le grand talent de M*" Pisaroni à celui de M"' Sontag.
— On annonce une représentation au bénéfice de Galli
qui ne peut manquer de piquer la curiosité, On y en-
tendra , dans la Semîramide, M'* Mallibran { M"' Garcia) ,
qui jouera le rôle de Sëmiraniis pour celte fois seulement ,
avant son départ pour Londres. La voix de cette cantatrice
étant un mezzo soprano du plus beau timbre, il est fâ-
cheux qu'elle n'ait pu chanter le rùle d'Arsace, tandis
que celui de Sémiramis aurait été confié à M11* Soutag;
mais M™ Pisaroni n'a point voulu consentir à céder son
rôle , même pour une fois, Certes, personne ne peut le
chanter mieux qu'elle; mais il y aurait eu, dans l'ensemble
projeté, un attrait de curiosité très puissant pour le pu-
blic. Cette représentation, au bénéfice de Galli, est, dit-
on, très prochaine; on assure même qu'elle précédera la
première 'représentation de ta Muette de Portiei à l'Opéra.
— Les représentations de Masanielto et du Colporteur
ont été interrompues par l'indisposition de M"° Prévost .et
de 11"" Pradber, qui y jouent les principaux rôles. Ces in-
terruptions ont toujours un fâcheux effet lorsqu'elles ont
lieu dans la nouveauté des pièces, parce qu'elle* l'ont
perdre au public l'habitude de se rendre au théâtre où on
les joue. Heureusement les iudisposilions dont nous ve-
nous de parler ont cessé, ét l'on a repris Maianielto le 8 de
ce moi» , et le Colporteur le ç.
L'administration du théâtre de l'Opéra-COmiquc a be-
soin Je redoubler d'efforts pour se préparer & la saison dé-
favorable de l'été. Malheureusement il Mous parait que
ses ressources sont en core dans l'atenir*. On prépare en ce
moment l'Exil de Racketter et l'Officier casaque; mais (les
pièces en un acte ne soiit pas' propres* à faire des recettes
productives; d'ailleurs, VExll de Racketter a été joué au-
trefois au théâtre du Vaudeville, et n'aura pas conséquem-
meut l'attrait de la nouveauté. Quant à V Officier casaque,
nous ignorons si c'est le même opéra-comique qui a été
joué autrefois sous ce tiirW au théâtre de la Porte-Saînt-
Martin, et dont un compositeur peu connu, nommé Du-
monchau, avait fait la miisique.' " ' '
Il ne parait pas que la Sablé de M. Boieldieu lut ait per-
mis dé finir', perur cette année, son opéra des Oeux Nuit*;
l'ouvrage de M. Scribe, intitulé Robert-le-Diaèlc , dont
M. Meyérbéer feit la musique', n'est pas prêt; M. Chéru-
bin i>ïratt hésiter a bonner son Ail-Baba, ou les Quarante
V oleiirs ; il ne reste douÇ.que la Htuette qui puisse offrir la
chance d'un grand succes. M. Hérold y travaille, dit-on,
L'un des plus habiles instrumentistes de l'époque ac-
tuelle, M. Thomas Delcambre, est mort à Paris le 7 jan-
vier dernier. Né à Douai (Nord), en ij6G, il entra d'abord,
en qualité de musicien dans un régiment qui était en gar-
nison dans cette ville. A l'âge de dix-huit ans, il se rendit
à Paris, et y devint l'élève d'Ozy, pour le basson , instru-
ment sur lequel 11 acquit un talent très remarquable.
En 1790 il entra à l'orchestre du théâtre de Monsieur, Cl y
partagea l'emploi de premier basson avec Devienne. C'é-
tait l'époque des fameux bouffons italiens ; l'orchestre, di-
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56,
rige par Puppo, était excellent, et Delcambre y forma NUI
goût. Les concerts du théâtre Feydeau , en i 794, lui don-
nèrent l'occasion de faire connaîtra son talent au public
dans il n concerto de «a composition , et dans les sympho-
nies concertantes de Devienne pour hautbois, flûte, cor
et basson, qu'il joua de création avecHugot, Salentin et
Frédéric Duvernois.
Admis comme professeur au Conservatoire de musique,
lors de sa formation, il en remplit les fonctions jusqu'à
la fin de i8a5, oii il prit sa retraite après trente ans de
service. Ce fut aussi ver» le même temps qu'il se retira de
l'orchestre de l'Opéra, où il était entré après avoir obtenu
la pension de retraite au théâtre Feydeau. De tous ses
emplois il n'avait conservé, dans ses dernières années,
que celui de premier basson k la Chapelle du Kol. Lors de
la promotion des chevaliers de la Légion- d'Honneur, à la
fête du Roi, en 1834, il avait obtenu la décoration de cet
Un beau sou , une exécution uetle et pure, étaient Ees
qualités par lesquelles Delcambre se distinguait; mais «on
jeu laissait à désirer sous les rapports de l'élégance du
style et de l'expression. Il a publié pour son instrument :
i* Six sonattsavic accompagnement débatte, oeuvre i";
duos pour deax bassons, œuvre s*, Paris , 1 796 ; S* Six duos
idem, œuvrB 3* , Paris , 1 798 ; 4- Goitoato fxW èaston prin-
cipal, avtc accompagnement d'orchestre, œuvre 4' . Ces mor-
ceaux sont peu remarquables.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
Mut*. ConttrtdePaganini. Le cour» de* représeaUtiouï
de la saison, au grand théâtre, s'est terminé dimanche,
a décembre, par le Pirate de M. Bellini. La foule était
immense, presque Ions les morceaux ont été redeman-
dé»; les cavalines de M- Lalande et cellr de Bubini ,
leur duo et l'air de. 1tubiui,l« chetur d» premier aotq. i«Wt>
568
out été de ce nombre. Le public aurait bien voulu l'aire ré-
péter celui de Al" Lalande,mais son intérêt pour la santé
de cotte charmante cantatrice l'a emporté , et la crainte
de la fatiguer a prévalu sur se» désirs. Itubini , M— La-
landc, Tamburini elleaompositcurontétôappeîés après
le premier et le second acte , pour recevoir le témoignage
de la satisfaction générale.
Le lendemain de cette représenta lion de clôture, les
amateurs se sont rendus au même théâtre; on allait y en-
tendre , après du an d'absence , te célèbre violoniste , la
gloire de l'Italie. Deux chanteurs qui devaient jeter de la
variété dans le concert, manquèrent au rendez-vous;
mais le public ne s'en inquiéta nullement : toute sou atten-
tion était concentrée sur le héros de ta fête. En effet, Pa-
ganini l'a complètement dédommage, de cette légère pri-
vation. Il est impossible d'imaginer les difficultés exécutées
par cet homme étonnant. Il passe, avec la même perfec-
tion , du genre grave au gracieux ; du boudé au pathé-
tique. Entre les divers morceaux exécutés par Paganini,
0.9,3 çnteodu M'11* Biauchi , jeune cantatrice, qui possède
une voix légère et bien timbrée; elle a reçu du public des
applaudissemens d'autant plus mérités qu'elle parait ex-
trêmement modeste. *.it
Paganini a donné trois autres soirées qui ont encore
attiré les nombreux amateurs de musique.
Dans le mouvement des autres théâtres d'Italie, on
remarque à Bologna, la signora Lugaui , prima donna,
et Colla, première basse chantante; à Trévise, Caroline
Graziosi , prima donna contralto, élève do'M. Banderali; à
Turin, au théâtre royal, Violente Camporcsi , prima donna;
Rose Mariani, primo musico, Joseph Binaghi , premier
lén or, Jean Bot ta ri et Lucien Mariant , premières basses;
dans la même ville , au théâtre Su ter a , lilena Alessaudri ,
contralto , etc. . 1 .
— Le rédacteur du journal de Milan, intitulé : / Teatri,
nous reproche d'avoir élevé des doutes sur les qualités re-
marquables qu'on accorde dans les journaux italiens à la
musique du PintteAc M. Bellini;mais a près île i éloges que
n#us avons vu faire des partitions décolorées de Vaccai,
de Paccini, de Donizelli , et autres compositeurs de
même force , il est permis de se défier de l'enthousiasme
ultramontain. D'ailleurs , eD formant des vœux pour que
la musique de M. Bellini fût digne des louanges qu'on lui
accorde.il nous semble que nous ne portons point de juge-
ment défavorable , puisque nous ne pouvons juger de ce
que nous ne connaissons pas.
Berlin, 28 novembre. On donne depuis quelque temps
au théâtre de Kccnigstadt une traduction allemande de
l'opéra de Weigl , intitulé Amor marinaro. Cet ouvrage,
qui n'est pas dépourvu de charme, n'a cependant au-
cune influence sur les recetles. On y a intercalé beaucoup
de morceaux de musique plus on moins modernes , qui
tranchent beaucoup trop avec la partition originale, dont
la date est déjà un peu ancienne.
Le deuil de la cour de Saxe a amené ici le basso ïezi et
Bl"* Palazzezi , tous deux attachés au théâtre de Dresde.
Ils ont donné plusieurs de ces concerts qu'on appelle re-
présentations scëniques en costume.' Ces sortes de soirées,
auxquelles on ne saurait donner un nom bien exact, car
celui sous lequel 011 a essayé de les meltre à la mode ne leur
convient guère, ont été introduites par M"* Catalani , et
ne font pas fortune depuis son départ. Ces deux artistes,
assistés par plusieurs autres, attachés aux théâtres lyriques
de Berlin, ont fait' entendre un assez grand nombre de
morceaux de musique moderne qui n'ont pas tous été
également goûtés, particulièrement quelques-uns de la
Pastoreiladd Vaccai, qu'on ne se soucie pas d'entendre plus
souvent.
On annonce, comme devant donner prochainement un
concert , M™ Paravicini , violoniste , élève de M. Kreutzer,
de Paris, qui vient de parcourir l'Italie et la Sicile.
M. Bacrmann a fait applaudir récemment, dans un
concert, son talent sur la clarinette.
Fbàhcfoht-sch-Mein. Le maître de chapelle Guhr, chef
d'orchestre du grand théâtre, avait organisé pour le jour
de Noël un concert fort remarquable pour le choix des
5,„
morceaux, presque tous inconnue jui amateurs de framv
fort, ou inédits. Voici la composition du programme.
Première partie, i" Ouverture de PUtro d'Jtbano, opéra
nouveau de Spohr. m'. àirde basse du même opéra, chanté
par M.... 3" Concerto de pi a do composé et exécuté par
Hiller, élève de Hummel. 4' Quartette arec chœur de
Pietro d'Atbano. Deuxième partie, i*. Ouverture de Don
Carlos, de Ferdinand Ries, a" Trio de ta F'tancU du Brigand,
opéra inédit du même auteur. 3* Concerto de Boehm pour
la flûtei exécuté par l'aveugle Grùuberg. 4* Chant des
brigands, à quatre voix». par P. Ries. 5' Improvisation
sur le piano, par Hiller. 6* Chant du matin de Jauger.
7* Finale de S'ugmar, opéra de Guhr. Les journaux de
Francfort ne parlent pas de l'effet produit par tous le*
morceaux , mais ils mentionnent particulièrement la bulle
ouverture de Don Carlos, le trio brillant de la Fiancée du. Bri-
gand, la brillante exécution et l'improvisation de M. Hil-
ler, et l'instrumentation fort remarquable de l'air de basse
de Pietro d'Albano.
— On a exécuté le jour delà Toussaint, dans l'oratoire des
RR. PP. l'hilippini, à Rome, un nouvel oratorio II Para-
dao perduto , musique du maestro Boufichi. Ce morceau ,
auquel ou doune beaucoup d'éloges, a été exécuté deux
autres fois depuis cette époque, . ,
— On donne depuis quelques jours à la Fenice , à Ve-
nise, Gastoue di Foi$ , opéra sur lequel uous n'avons aucun
renseignement ; la musique est de M. Persiani , jeune mu-
sicien que uous ne connaissons encore que par les grands
éloges que lui ont prodigués les journaux italiens, qui
malheureusement, n'eu refusent à personne. ... , ..
PUBLICATIONS ÉTRANGÈRES.
Mutaovmpotiia, et êrrenitiime ac tminentUaimo domino Ru-
dolpho Joanni Casareo Prineipi et Archiducl Auttriœ S, R.
E. TU. S. Pétri in monte Aurto Cardmati et Ardùepucopo
Oiomuceiui, profundieeima cum vénération* dedicata a Ludo-
vico non Beethoven, Opus 1*5, (Messe solennelle eu re
majeur par Louis van Beethoven, œuvre 133). Blayetlce,
cliee les filii de 11. ScliOU ; Paris , même maison , place
des Italiens, d" i ; Anvers, A. Schotl. Partition et par-
tics séparées.
L'infirmité qui isola en quelque sorte Beethoven du
reste du monde dans ses dernières années, celle surdité
complète qui , en le privant pour toujours du plaisir d'en-
tendre de la musique, ne lui avait point ôté le besoin d'eu
composer, avait développé en lui un sentiment de mélan-
colie profonde dont tous ses derniers ouvrages sont em-
preints. Celui-ci n'en est point exempt; niais , moin*
chargé de modulations élr.ingtïs que quelques-unes de ses
compositions instrumentales, il frappe d'abord1 par «m
caractère de grandeur et par sa couleur religieuse et lo-
cale. Conçue BUr la plus grande échelle , cette messe peut
être considérée comme une des productions les plus im-
portantes de ces derniers temps. Toutes les ressources des
voix et des iostrumens y sont mises a contribution pour
produire les plus-beaux effets. Un chœur à quatre parties
dialogue avec quatre voix de solo, et se marie aveo un
orchestre formidable et avec l'orgue. Le système d'instru-
mentation y est riche, mais analogue au style sévère, de
la musique sacrée. Quelque» incorrections d'haro»*» nie s'y
font a la vérité remarquer; mais, comme elles ne ** Uou-
veut que dans de grandes masses, elles sont de nature à
choquer plutôt l'œil que l'oreille.
Le Kyrie n'est presque qu'un travail d'harmonie dans
un mouvement sestenuto ; mais ce travail est du plus bel
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573
effet, et préparc à merveille, par son Ion majestueux,
l'espèce de fantaisie du Ckriste après laquelle le molif du
Kyrie est ramené, mais enrichi de modulations nouvelles
et d'un travail exquis de voix et d'iustrumens où l'on re-
connaît le génie original de Beethoven.
Le début du Gloria est extrêmement brillant : quoique
traité de manière à ne pas répéter les paroles à rexeeh et
d'une manière courante, ce morceau n'a pas la sécheresse
de ce qu'on appelle une messe brève ou courante. Les plus
beaux effets s'y trouvent réunis malgré cette marche ra-
pide; le Qui toltis, d'un mouvement lent, est le seul mor-
ceau oii le développement du sujet musical ait obligé Bee-
thoven de répéter les mots. Le Qtamiam ramené le système
de l'introduction du Gloria jusqu'à la fugue In gloria Dd
pétris. Gétle fugue est traitée en réponse réelle; son sujet
est riche'; mais c'est dans ce genre qu'on aperçoit ce qui
a manqué aux éludes premières de Beethoven, non que
cette fugue ne soil assez régulière; mais on y remarque
■une certaine raideur qui prouve que ce genre de musique
n'était pas familier à ce grand mnsfeien. Plusieurs des
marches d'harmonie qu'on y rencontre portent à faux,
notamment une succession d'accords de neuvième, où la
dissonance ne peut avoir de résolution qu'en montant.
Combien cette fugue est inférieure à celles qu'on trouve
dans toutes les messes de M. Chérubin!) Dans celles-ci
l'art est porlé si haut qu'il s'évanouit, en quelque sorte,
pour ne donner que des résultats qui ressemblent à des in-
spirations libres.
Conçu sur les plus grandes proportions, le Credo ren-
ferme une prodigieuse quantité de motifs originaux et
d'effets piquans ; mais autant qu'on peut en juger à l'as-
pect d'une partition, il manque peut-être d'unité. Le
mouvement final, et ùiSH'ttnturi, est de la plus grande
beauté. On peut en dire autant du Sanctus, du Benedtclus,
et de VJgnas D«", véritables créations qui sont dignes
d'être rangées parmi ce qui existe de plus heau cl do plus
original eu musique. Jamais, peut-être, Beethoven ne
s'est élevé si haut que dans ces morceaux , dont les cora-
5;5
binaisons i m me uses sont de nature à frapper d'étonne-
meut les artistes les plu? habiles et les plus instruits. Mal-
heureusement le grand nombre de voix et il'instrumens
nécessaires pour l'entendre, et les difficultés d'exécution,
ne laissent que peu d'espoir d'en jouir souvent. Il serait ce-
pendant digne des artistes de la capitale de se réunir pour
exécuter ce bel ouvrage avec tout le soiu et tout le luxe
qu'il exige.
Vottstœndige Singschuie in vier Jbtheilungcn mit fatschen,
italicnischen and franzœs'tscken V orbemerkungen urtd Er-
tœuterungen [ Méthode de chant, divisée en quatre par-
ties, avec un avant-propos et- des explications en alle-
mand, en italien et en français, par Pierre de Win ter },
Mayence, chez les fils de 11. Scliott, et à Paris, même
maison , 'place des Italiens ,n'i.
Il serait difficile de dénombrer tous les traites élémen-
taires qui ont été écrits sur l'art du chant et sur le solfège ;
mais malgré cette quantité prodigieuse de méthodes, le
nombre des bous ouvrages est fort borné. Les uns ne sont
que les erreurs de la médiocrité qui essaie inutilement
de sortir de l'obscurité a laquelle elle est condamnée; dans
d'autres, on ne trouve que des systèmes plus ou moins
obscurs, plus ou moins exlravagans; d'autres, enfin, ne
sont que des spéculations de marchands de musique. Il
n'appartient qu'à des hommes supérieurs d'écrire avec
utilité sur les élémens des sciences et des arts. Ils sont
aussi, je le sais, sujets à l'erreur; mais dans les fausses
routes où ils s'engagent quelquefois, ils ne manquent ja-
mais de faire des découvertes. D'ailleurs, qui ne connaît
qu'une méthode n'a qu'une inslruclion bornée; il est donc
nécessaire qu'il y en ail plusieurs , afin d'en comparer les
résultats et de pouvoir choisir.
La méthode de chant de Winler diffère essentiellement
en plusieurs points de quelques autres qui jouissent
d'une réputation justement méritée; néanmoins c'est
un fort hon ouvrage. La première partie, destinée à
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5?4
former «atonal ion de» élève» , n'est guère, qu'un solfège ;
malheureusement ee solfia est peu développé et ne oon-
lietit qu'un petit nombre rte combinaisons mélodiques.
Cette partie (te termine , je ne sois pourquoi, pur quatre
morceaux de musique sacrée a quatre parties.
C'est dans la seconde par lié que commence, à propre-
ment parler, la méthode de chant. Les première* leçons
ont pour objet la manière de porter la voix et d'unir les
sons , d'abord sur de simples voyelles, ensuite sur des pa-
roles. Viennent après ces exercices ceux qui doivent former
la vocalisation, eu commença»! pllr le» traits les plus ahn.
pics el Unissant par les plus difficile* Winler me parait
cire le premier qui ait placides paroles sous les traits, en
les disposant dans un ordre méthodique, pour accou-
tumer à vocaliser sur toutes sortes de syllabes; c'est une
fort bonne mélhode, préférable à ceUeïde n'employer
pour les exercices que des voyelles isolées. ■ ■ ■ ■
Après les exercices partiels contenus dans la seconde
partie 4c 'ta méthode. Wioter a réuni toutes les espèces
de Iraits, MWtfWJM, les »wrf«nftt , les a ppog Salures, dans
les vocalises qoi composent la troisième partie.. Dan» la
quatrième, toute» le» espèces de broderie» dont oh peut
oraer lea phrases les plus simples; les terminaisons et les
Cadesca», s» lrouvei.il réunies cl complètent un système
généra;! d'enseignement q«i; ne me para» laisser rie« à
iésirer, «'autres ouvrages peuvent wuierruer des chose»
qui sont peut-être pl«s eu rapport avec nos habitudes ac-
mellesi mai» aucun ne we parait plus psopre que celui-ci
à former de grands chanteur» à la manière de Marchesi
gudaCrescwtini. En écrivant sur l'art du chant, Winler
n'était pas seulement un théoricien , Il dévoilait la mé-
thode qu'il avait suivie dans l'éducation de» habile» dou-
leurs dont il avait enrichi l'Allemagne: rien m remplace
l'expérieuee.
FKTiS.
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575
— Mayr e la Musica , Alnanneeo ptr fanno bitutil* i8»8.
Milan , Fr. Ep. Artarfa. ■
On petit volume élégamment imprimé a été publié à la
fin de 1896 par le même éditeur, imu le litre de Rouini c
lamusiea. Outre une notice asseï étendue sur la vie et le*
ouvrages du célèbre maître de Pesaro, il contenait quel-
que» détails concernant plusieurs artistes distingués, tels
que Philippe Gallï , M" Pasta, etc. Celui qui parait cette
année sous le titre de Mayr » la Musica est destiné à taire
suite à ce premier essai; outre la vie dn mai Ire dont il
porte le nom , il renferme des notices sur H"' Méric-L.i-
lande, Nicolas Zingarelli, Remorini , Jean-Baptiste Ru-
bini , Antoine Tamburinî , Jean David et Nicolas Pagaulni.
Les portraits dont ces notices sont accompagnées ne man-
quent pas de ressemblance, et ne sont pas mal gravés.
— BreviNotitie intorno ad alcunipid ceUbri compositori aï ma-
tiea, ecennitalto stato presentedttcanto UaHano. Roverelo, Mar-
ehesani , 1897, in-8" de 87 pages. L'auteur de cet opus-
cule, M. Joseph Bridi, a fiit preuve d'une impartialité bien
rare dans son pays, en plaçant quatre Allemands au nom-
bre des plus célèbres compositeurs. Les musiciens dont il
a écrit ta vie sont sacohetii , Hœndel, Gluck, Jomelli,
Haydn, Palestr ina et Mozart .Noos avouons que son célèbre
Saccbetlf nous est toul-à-fcil Inconnu, et comme nous
ne connaissons l'ouvrage de M. Bridi que par un article
de la Gazette de Milan, nom présumons que le rédaetcnr
de cet srtioie s'est trompé , et qu'il a éerit Sateketti au lieu
deJwwww.
ANNONCES. ' -
ellLl
PniHlUE MESSE SOLENSELLE i CB1ND OftCHKSTEI, eOmpOsée
et dédiée à M. le duo de G raniment par M. Lesueur, sur-
intendant de lu musique du Roi, chevalier des ordres
royaux de Saint - Michel et de la Légion - d'Honneur,
membre de l'Institut, etc., avec accompagnement d'orgue
5?G
un de piano, par Ennui, pension nuire du Roi a Rome,
rrix, 5o fr. Paris, chez ïrey, place des Victoires, n* 8.
Celle messe est l'une de celles que M. Lcsueur a com-
posées pour le service de la chapelle du Roi; la publication
de la belle messe de Noël du même auteur avait fait naître
chez les amateurs le désir que d'aulres compositions du
même auteur fussent mises au jour. C'est pour satisfaire
aux demandes qui lui ont été adressées à ce sujet que
M. Lesueur s'est décidé à faire paraître la messe que nous
annonçons, laquelle sera suivie de plusieurs autres ou-
vrages de musique sacrée. Ces productions d'un des chefs
de l'école française offrent l'avantage d'être d'une exécu-
tion facile, et de convenir aux villes des départemens oii
l'on ne peut rassembler des orchestres nombreux.
— E. et M. (elle et moi) , duo romantique à quatre
mains, pour le piano-forté, composé par Chrétien
Urhan, de la chapelle du Roi et de l'Académie royale de
musique, et dédié à L. Van Beethoven , œuvra 1", prix
7 fr. 5o c.
Paris , Richault, boulevard Poissonnière, n° 16, au 1".
Voici une production originale, s'il en fut jamais : l'au-
teur n'a consulté évidemment que ses propres sensations
en la composant , sans s'inquiéter des formes convenues ,
et probablement sans autre but que de se plaire. Ce qu'on
y trouve surtout , c'est de la passion , do l'abandon , du
délire même ; les effets d'harmonie sont souvent neufs et
piquans ; malheureusement la mélodie est rare dans ce
morceau , et quelquefois on la désire pour se reposer des
modulations multipliées. Nonobstant ce défaut, qui est
moins sensible que s'il s'agissait d'un autre genre de piè-
ces, la composition de H. Urhan est d'uu ordre fort dis-
tingué.
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DE L'EXÉCUTION MUSICALE.
Poui un musicien vulgaire la musique n'est qu'un amas
de noies, rie dièses , de bémols, do pause», tic soupirs;
jouer juste el en mesure lui paraît le comble de la perfec-
tion ; et comme ce genre de mérite est assez rare, on est
forée de convenir qu'il n'a pas lort de L'estimer. Mais qu'il
y a loin de cetie exécution mécanique, qui laisse l'amc de
l'auditeur dans l'étal d'inertie OÙ se trouve celle du sym-
phonislc , à l'accord de sentiment qui , de proche eu pro-
che , se communique des exécutai) s au public; à ces
nuances délicates qui colorent ta pensée du compositeur,
en montrent le sublime, et souvent lui prêtent de* beau-
tés ; à celle expre ssiiin , en lin . sans laquelle la musique
fîffel remarquable et qui prouve la puissance du vrai
médiocres, qui. daus leur exécution terne, laissent nos sen-
sations eu repos; qu'un chef ardent . un musicien doué
d'une organisation furie arrive au milieu d'eux, tout à
coup le feu sacré embrasera ces êtres inanimés ; la méta-
morphose opérée dans un instant pourra même élre telle
qu'on aura peine à se persuader qu'où entend les mêmes
symphonistes, les mêmes chanteurs. Le net plus nllra de
l'cIFet musical ne peut avoir lieu que lorsque ions les exé-
cutans possèdent non-seulement une égale habileté, mais
une même flexibilité d'organe», un pareil degré de cha-
leur et d'enthousiasme. De semblables réunions ont tou-
jours été rares et ne sont que des exceptions. La fameuse
troupe des bouffons de 1789 en a offert un exemple ; depuis
lors Violli, accompagné par M™ de Mongeroult ; Caillot ,
dans un Irio joué par lui; ilode et Lamarre, au Conser-
vatoire . ont donné l'idée d'une perfection qu'on petit re-
trouver dans des réunions peu nombreuses, mais à laquelle
il est bien difficile d'allcindrc avec (les chtcurs ou des or-
5j8
chcstrcs complets. A défunt de ce beau idéal, un secoutcnle
du beau relatif, parce qu'on n'en connaît point d'autre.
C'est, comme je l'ai dit, celui qui réduite de la réunion
de quelques artistes du premier ordre à d'autres moins
heureusement organisés. Tel, qui n'a pas été dolé par la
nature assez libéralement pour communiquer de vives
sensations à cens qui l'entourent, est du moi us suscep-
tible d'en recevoir; c'est ce qui explique les transforma-
tions subites qu'on remarque quelquefois dans les mêmes
individus, selon qu'ils sont bien ou niai dirigés.
L'habileté dans le mécanisme du chant ou dans le jeu
des instrumens est sans doute nécessaire pour atteindre à
une bonne exécution; mais elle ne suffit pas. C'est dans
sa sensibilité, dans son enthousiasme, qu'un arllsle trouve
le plus de ressources pour émouvoir ceux qui l 'écoulent.
J(a dextérité peut quelquefois étonner par ses prodiges;
mais l'expression véritable a seule le privilège de toucher.
Ce que j'appelle expression n'eat pas ce jeu grimacier qui
cousistc à se tordre les bras, à se pencher avec affectation,
à agiter le corps et la tête, sorte de pantomime dont quel-
ques musiciens font usage et dont eux seuls sont dupes;
l'expression vérilahlc se manifeste sans effort par les ac-
eens de la voix ou des instrumens. I.e musicien qui en h
le Ken liment la transmet comme par enchantement de
L'âme an gosier, an bout des doigts, à l'archet, à la corde,
au clavier. Le timbre de sa voix, sa respiration, son tou-
cher en soûl empreints ; pour lui , il n'y a pas de mauvais
instrument, parce qu'il améliore tout; j'oserais presque
dire qu'il n'y a pas de mauvaise musique, quoiqu'il soit
pins sensible qu'un autre aux beautés de la composition.
On serait dans l'erreur si l'on croyait qu'il n'y a d'ex-
pression possible que celle de là tristesse ou de la mélan-
colie : chaque genre a des a c cens qui lui sont propres ; le
talent consiste à s'identifier au style du morceau qu'on
exécute, a être simple dans la simplicité, véhément dans
la passion, avare d'ornemeus dans' la musique sévère,
brillant de finritures dans les élégantes fol les à la mode , et
toujours grand , même dans les petites couses. Il n'est pas
579
besoin de beaucoup d'efforts on de grands dévcloppcmcns
pour nous procurer des émotions de diverses espèces : mie
phrase Avcantabile, un motif de rondo, suffisent. Que dis-jc?
une simple noie, un appogiature bien senti, un accent,
lirent quelquefois des cris d'admiration de tout un audi-
toire. Dût-on m'accuser d'exagération , je dirai même que
j'ai souvent pressenti le grand artiste à la manière dont
l'archet attaquait la corde, ou dont le doigt frappait la
louche pour s'aceorder. Je ne sais quelle émanation se ré-
pandait alors dans l'atmosphère pour annoncer la pré-
sence du talent; mais je m'y suis rarement trompé. Je me
persuade que je serai compris par quelques-uns de me»
lecteurs.
La nature a placé dans tous les pays des êtres heureu-
sement organisés pour les arts; mais leur nombre diffère
selon que les circonstances , le climat , ou d'antres causes
difficiles a apprécier sont plus ou moins favorables. Ainsi,
parmi les exécutans, la France a produit Garât, itode,
Baillot, Kreutzer, Duport, Tulou , et beaucoup d'autres
que je pourrais citer, et qui rivalisent avec les plus grands
artistes de l'Italie ou de l'Allemagne ; cependant tes dispo-
sitions naturelles de la nation française ne sont pas favo-
rables à la musique; l'état florissant dans lequel ou y
trouve certaines parties de cet art est plutôt le fruit de
l'éducation que celui d'un goût inné. Les Français con-
naissent la perfection cl la cherchent ; mais quoique leur
goût soit exigeant, ils obtiennent rarement de bons résul-
tats dans leur musique d'ensemble, parce qu'il n'y a point
d'unité dans leur manière de sentir. Les Italiens, au con-
traire , s'accommodent assez facilement de la médiocrité ;
ou les voit assister patiemment, pendant toute une saison,
à un mauvais opéra , pourvu qu'il y ait dans le cours de la
représentation une cavaline, un air, un duo, assez bien
chantés pour les indemniser du resto. Mais ce même peu-
ple, indifférent en apparence sur le mérite de l'exécution,
est susceptible d'atteindre aux pins beaux effets d'ensemble
par l'unanimité de sentiment qui dirige les chanteurs;»
les instrumentistes. L'expérience prouve que quatre ou
cinq chan leurs médiocre,* , pris au hasard parmi les lia-
liens, et soutenus par un accompagnateur qui pourrait
jouer a peine nue sonate de Nicolaï, ont nue verve, un
brio qu'on ne trouverait pas dans le mémo morceau exé-
cuté par d'excellens chanteurs français , et accompagné
par un virtuose, quoique aucun des Italiens ne pût sou-
tenir la comparaison avec les Français pris individuelle-
ment. 11 y a chez nous je ne sais quelle distraction qui
s'oppose au concours d'intentions nécessaire pour obtenir
de grands effets d'ensemble, tandis que les Italiens sont
évidemment captivés par la puissance de la musique.
L'absence de dispositions naturelles dans la masse de la
nation rend nécessaires les institutions pour propager dans
nos provinces le goût d'un art si nécessaire à noire bon-
heur, et qui, dans quelques-unes, est fort négligé, A Paris
les maîtres abondent ; dans un grand nombre de villes ils
sont rares, et dans d'autres ils manquent tout-à-fail. Je
crois que, concurremment avec l'École royale de musique
et les autres écoles établies à Lille , à Douai, à Toulouse,
etc., le i établissement des maîtrises serait le meilleur
moyen pour répandre et perfectionner le goût de la mu-
sique ; car c'est par l'église que le sentiment de cet art
s'introduit dans le peuple. L'Italie elle-même n'a point
perdu impunément ses institutions de musique sacrée;
car c'est de leur suppression que date la décadence de
toutes les autres parties de l'art dans ce beau pays. On
comprend qu'eu indiquant le rétablissement des maîtrises
comme un moyen pour développer dès l'enfance les légères
dispositions que le peuple peut avoir pour la musique, je
ue prétends pas qu'on doit faire entendre dans les églises
la mauvaise musique qu'on y chantait avant la révolution;
l'Allemagne, l'Italie et nos compositeurs fourniraient au-
jourd'hui les moyens de remplacer avantageusement ces
ouvrages gothiques. .
11 faut l'avouer, bien que nous ne soyons pas arrivés
au point de perfection désirable, nous avons fait do grands
pv^res depuis l'établissement du Conservatoire ; non qu'il
y ait aujourd'hui de plus grands talcns qu'il u'y eu avait
58 1
avant celle époque, car Rode, Kreutzer, Maillot , Diiport,
Ozy, etc. , sont restée les modèles de tous nos jeunes ar-
tistes ; mais le nombre de gens habiles s'est beaucoup
augmenté ; plusieurs se sont dispersés dans les provinces,
et y ont excité une émulation inconnue auparavant. L'é-
tude de l'harmonie, devenue générale, commence à fa-
miliariser les amateurs avec des combinaisons qu'on au-
rait a peine supportées autrefois. L'organe auditif des
exécutans, rendu plus sensible par celle étude, saisit beau-
coup plus promptement les intentions du compositeur, et
par cela seul ils s'y prêtent davantage et les rendent mieux.
Si, nonobstant ces améliorations , l'on remarque souvent
un défaut d'ensemble dans l'exécution des masses; si,
même, des artistes distingués laissent quelquefois beau-
cou p à désirer dans l'ensemble, c'est, ce me semble, parce
qu'on n'apporte pas assez d'attention à des dispositions
préliminaires d'une grande importance , et parce que cer-
tains préjugés ont retenu dans un état d'infériorité des
parties essentielles qu'il serait facile de perfectionner. Je
crois devoir présenter quelques idées à cet égard. Les ob-
jets qui, dans l'état actuel des choses, me paraissent mé-
riter le plus d'attention sont :
1° La disposition des orchestres.
a' Les proportions de ces mêmes orchestres , soit à
l'égard des voix , soit par rapport aux instrumeus entre
3° Les instrumensà vent.
4° Les contrebasses.
5 L'exécution vocale dans les chœurs et dans les mor-
ceaux d'ensemble.
ti* L'accompagnement.
•}'• L'ensemble.
Les orchestres ne se disposent pas de la même manière
pour les concerts et pour les représentations théâtrales,
quoiqu'on n'aperçoive pas trop la cause de cette différence.
La place du chef y est surtout choisie d'une manière toute
opposée, à l'exedpliondeceluidu Théâtre- Italien. Tout le
monde avoue qu'il faut qu'un chef d'orchestre ait sous ses
58a
yeux les musiciens' qu'il dirige, et néanmoins l'on n'obstine
à le placer près de la rampe, de manière que tous les ins-
trumentistes sont derrière lui, et qu'il doit se tourner pour
les voir. C'est ainsi qu'on en use à l'Opéra , à l'Opéra-Co-
wique, à l'Odéon , et dans toutes les villes de France. Ce-
pendant, oulre l'avantage qu'il y a pour le chef de voir
ses subordonnés, pour les surveiller, exciter leur attention,
et les ramener promptement au mouvement qui a subi
quelque altération , il est aussi fort important que les mu-
sicienspuissentrenconirer quelquefois les yeux de celui qui
les dirige; carie moindre signe de tète, est souvent siguifica-
tif, et détermine avec promptitude l'intention d'un effet qui
est comprise à l'instant par tout le monde. D'ailleurs, il
est presque impossible qu'un orchestre reste indifférent ou
froid lorsqu'il voit son chef attentif et plein d'ardeur. La
disposition de l'orchestre du Théâtre-Italien , et la place
occupée par M. Grasset rappellent à peu près l'arrange-
ment de l'orchestre du théâtre Feydeau , à l'époque où il
était dirigé par La Houssaye- Cette disposition , qui place
le chef vers l'un des côtés de la scène , et qui range tous
les musiciens devant lui, est excellente , quant à la partie
instrumentale; mais elle me parait moins heureuse en ce
qui concerne le théâtre, parce qu'elle isole le {jhef des
acteurs et des chœurs, et qu'elle oblige celui-ci à tourner
la Tête pour voir la scène. Cet inconvénient est moins ^rave
au Théâtre-Italien qu'ailleurs, parce que tous les acteurs y
sont bons musiciens, et parce que le chœur, rangé en
' espalier des deux côtés du théâtre , y prend peu de part à
l'action , cl n'est occupé que de l'exécution musicale ; mais
à l'Opéra , au théâtre Feydeau , à l'Odéon, et dans tous
les théâtres de France, il n'eu est point ainsi. Par un reste
de notre ancienne barbarie, ceux de nos acteurs qui savent
bien la musique sont en petit nombre; les autres sont obli-
gés d'avoirsouvent recours au chef d'orchestre , et le cher-
chent des yeux. Les chœurs y marchent souvent ci) chan-
tant , et sont enclins à perdre la mesure s'ils ne sont
soutenus. [lu répertoire immense et dans lequel il se trouve
des opéras qu'on joue quelquefois sans répétitions, après
583
une interruption Je six mois, ajoute encore aux difficultés
de l'ensemble. II est donc nécessaire que le chef d'orchestre
ysoit placé eu face de la scène et au centre; mais au lieu
d'avoir son pupitre attaché à la rampe, je pense qu'il doit
être près de la séparation de l'orchestre du public ou du
parterre , afin de voir d'un coup d'œil toute la scène et tous
les musiciens. On sent que cette disposition obligerait à
avoir un souffleur à l'Opéra. Il est ridicule que ce soit le
directeur d'orchestre qui fasse cet office.
line autre question se présente parmi nous : est-il plus
avantageux de diriger avec le bâton de mesure qu'avec le
violon ? Je pense que l'usage gothique de se servir d'un
bâton pour indiquer la mesure, usage qui a pris naissauce
dans les églises, n'est point applicable à l'exécution du
thédtre. Quand il s'agit do déterminer prompte m eut un
changement de mouvement , ou de ramener â la mesure
un orchestre en désordre, ce bâton n'est presque d'aucune
utilité, À moins qu'on ne prenne le parti de frapper à
grands coups les temps sur le pupitre, ce qui produit tou-
jours un fort mauvais effet. Le chef d'orchestre qui joue
bien du violon , et qui a de l'énergie, imprime bien mieux
le mouvement avec son instrument, et donne mieux
l'exemple de la chaleur : c'est une chose dont on peut se
convaincre au Théâtre-Italien et dans nos bons concerts.
Quelques-uns de nos directeurs d'orchestre ont imaginé
une méthode qui me paraît plus vicieuse que celle du
bâton de mesure ; elle consiste a tenir à la main un vio-
lon dont on ne se sert pas , et à battre la mesurcavec l'ar-
chet : cette frèle baguette, qui n'a pas même l'énergie
du bâton , ne sert qu'à marquer des temps vagues en l'air.
Je ne comprends pas comment un homme, doué do quel-
que chaleur , ne pulvérise pas plusieurs archets dans une
soirée en suivant cette méthode. Sans parler de ce qui se
fait dans les pays étrangers , Mcslrino, Bruni, La Houssuyc,
lllasius et Grasset ont toujours conduit avec le violon , et
ce sont les" meilleurs chefs qu'on puisse citer parmi nous.
Film
( l.a .tuile au prochain numéro. )
5&j
NOUVELLES DE PARIS.
THÉÂTRE ROYAL ITALIEN.
La Dont» dkl L.eo. — M11' Sdstac ; ;
M— PiHïom.
Depuis l'époque des riva li Les de Ha? miel et de Porpora .
od a vu souvent le public se diviser et former des partis en
faveur d'un compositeur ou d'un chanteur contre un aulre,
qui avait aussi ses admirateurs et ses partisans. Ainsi Lon-
dres a long-temps retenti du bruit des querelles des Fari-
nellistes et des Senéùnhtes ; la guerre d'opinion s'est cusuite
rallumée à l'occasion de la fameuse Faustina Bord uni et
de la Cuzzoni. En France, on se rappellera longtemps
des disputes des Gluckisles et des Ptccinistes , qui ont été
suivies de celles des partisans de M"" Mara et Todî. Plus
lard, M"" Barilii et Festa ont partagé l'opinion des ditet-
tanti. Si nous n'avons pas vu se rallumer ces discussions
entre les partisans de M" Mainviellc-Fodor et ceux de
M" Pasta, cela tient à ce que la première, qui ne voulait
pas admettre de partage dans ses succès, préféra d'aller
recueillir en Italie des applaudissemeus saus conteste.
- Si je ne me trompe, voici venir des Pharanistes et des
Stintaghtes , qui s'élancent dans l'arène, et qui vont com-
battre a outrance. Déjà des défis ont été portés; déjà l'en-
thousiasme et l'injustice se sont signalés dans les deux
camps, el les virtuoses ont été averties par des signes non
équivoques qu'elles avaient à la fois à satisfaire leurs admi-
rateurs et à combattre leurs ennemis. De paisibles ama-
teurs, qui ne décident point entre Parme et Berlin , assistent,
il est vrai, aux représentations qui réunissent les deux
cantatrices sur la scène , dans le seul but de prendre du
plaisir , de quelque coté qu'il vienne ; mais ils ne pourront
pas garder long-temps cette neutralité. Malgré eux , ils se-
585
font entraînés, subjugués, et, tét ou lard, forcés de
prendre parli pour le Nord ou i>our l'Élrurie.
L'amour- propre des.artistes s'alarme ordinairement de
ces sortes de rivalités où le publie les jette en dépit d'eus;
eJ cependant rien n'est plus favorable à leur réputation ,
quand leur t. lient est réel. Il es! doux , j'en conviens , de
trïompbor sjiis obstacle ; mais les succès faciles qu'on ob-
tient à côté de ta médiocrité conduisent quelquefois à la
négligence, et l'on décroît sans cri être averti. La rivalité,
au contraire, qui met toujours en péril celui qui s'y trouve ,
oblige à faire des efforts continuels, qui tournent au pro-
fit du talent et du public. C'est la vie enfin; vie agitée,
si l'on veut; mais les artistes ne sont ooint faits pour le
repos , car le repos, c'est la mort.
Les entrepreneurs sont cem qui se plaignent le moins
de ces petites guerres, car, tant qu'elles durent, elles
alimentent la caisse en remplissant la salle. Dans le fait ,
chacun y trouve son profit. Les indifférons même eu re-
tireut avantage; car les petites scènes qui ont lieu dans
la salle varient le spectacle et rompent la monotonie.
Quant aux journalistes , eu recueillant les opinions, ils
sont dispensés d'eu avoir une , et leurs articles se trouvent
tout faits , sans qu'ils y aient mis du leur , car ils vivent
aussi de rapine. Cela posé , voyous quel a été le résultat
de la lutte qui s'est engagée entre M"* Sonlag et M"' Pis :-
roni , dans la Donna ilel Lago. ,
Cet ouvrage, comme on sait, est l'un de ceux ou
M"* Sonlag avait eu le plus de succès en 182(1. Les pl aces
de sa personne, la douceur de sa voix, et la flexibilité de
son gosier, la rendent éminemment propre à douner au
rôle d'Etoia le charme nécessaire. Les plus vifs applaudis-
semens l'ont accueillie à son entrée en scène. Quelques
traits heureusement jetés dans la cavatine O/i .' maiutini al~
bori , ont justifié les dispositions favorables du public. Je
ferai cependant observer à M"* Soutag, qu'eu voulant don-
ner de la légèreté à la phrase oh agombra ornai, elle en ré-
trécit les proportions ; j'aimerais mieux qu'elle chaulât
la valeur des notes comme elle est écrite. Il n'y a rien eu
586
île remarquable- dans lu duo Set- g'ta sposa; on pourrait
même, sans trop de rigueur , dire qu'il a été mal chanté;
Vendante et le dernier mouvement de ce morceau sont
charmans ; mais le premier allegro me paraît faire un con-
tre-sens complet avec les paroles. Il n'ya rien dans le chant
d'Etena qui exprime ces mots : le mie barbare vicende, etc. ;
et , quoique la phrase soit jolie, on en désirerait une qui
fût moins bien et qui exprimât mieux la situation.
Cesl à l'entrée de M" Pisaroni dans le récitatif Ma ra
felici que la représenta lion a commencé à prendre un éclat
qu'elle a conservé jusqu'à la fui. Celle grande cantatrice
a senti tout ce qu'elle avait à faire pour lutter contre les
plus heureux dons naturels ', elle a appelé à son secours
lotîtes les ressources de son ame et de son beau talent ;
elle a &é admirable dans le récitatif, dans Vandantino
et dans Vattegrc- de son air. Le soin qu'elle mettait k évi-
ter les sons gutturaux que je lui ai quelquefois reprochés ,
élait remarquable; elle en a donné fort peu ; aussi son
succès a-l-il été complet. C'est dans celte scène que les
premiers symptômes des divisions dont j'ai parlé se sont
manifestés dans le parterre.
L'air de Duglas fait ordinairement peu d'effet : Zucchellt
avait renoncé à le chanter; il n*a point élé favorable à Le-
vasseur. Celui deRodrigo est aussi peu remarquable. Don-
ïclli , qui le crie d'un bout à l'autre plutôt qu'il ne le
chante, y fait éprouver nue sensation pénible. lise tire mieux
de Vandatttino qui sert d'introduction au finale. M" Pisa-
roni produit toujours beaucoup d'effet dans la phrase la mia
tpadaë ta phi fida, etc. Cette phrase , qui fournit le motif
tin dernier ensemble , eut d'un fort beau caractère.
C'est surtout dans le deuxième acte que M™" Pisàroniet
Snntag ont fait éprouver aux amateurs un plaisir sans
mùlaiige. Jamais peut-être lu duo de Bianca e Faliero n'a
élé chanté avec autant de fini et d'ensemble. C'est là que
j'ai retrouvé un exemple excessivement rare d'une justesse
sans reproche , et d'une telle union dans les voix qu'elles
ne semblaient en former qu'une seule. Inflexions, apogia-
tures, orntmens de tous -cures semblaient être inspirés
S87
ans deux virtuoses par l'effet d'une étincelle électrique.
L«s exemples d'une pareille perfection sont devenus .si
iWs qu'on- ne peut trop y donner d'éloges, ni Irop cn-
cotn4ger les artistes à les chercher; c'est le beau idéal du
chant d'ensemble.
Le quatuor de Bianca, qui vient immédiatement après
ce duo, ne laisse pas le temps de respirer aux de lis can-
tatrices : néanmoins, H™ Pisaroni et Sontag y ont re-
trouvé ce feu sacré dont elles venaient d'être animées;
mémo verve, même fini, même perfection , et enlïn même
imité , quoiqu'elle soit bien plus difficile à obtenir dans un
quatuor que dans un duo. Lcvasseur et Donzelli s'y sont
montrés dignes de seconder les virtuoses qui, dans tout
cet acte , se «ont montrées vraiment inspirées.
On pouvait craindre que, fatiguée par les deux morceaux
qu'elle venait de chanter avec tant de feu , M™ Pisaroni ne
put retrouver tous ses moyens pour sort fameux air. qui
vient immédiatement après; mais il n'y a point de lassi-
tude qui tienne contre l'ardeur et la volonté d'un grand
talent. Supérieure à elle-même, évitant avec soin les dé-
fauts qu'on lui a reprochés , et «'observant sans nuire à
rin.jpii-.ïlion , l'habile cantatrice est arrivée dans cet air
au plus liant degré de perfection. Depuis la retraite de
Crcsccutioi , j'avoue que je n'avais pas entendu chanter
avec cette supériorité. Aussi le triomphe a-l-il été com-
plet. Il semblait que les spectateurs n'avaient plus rien à
désirer lorsque H"' Snulag a déployé, dans trois variations
du couplet final, toutes les ressources du chant le plus
léger, le plus suave, le plus brillant qu'on puisse imaginer.
Les plu* grandes difficultés, exécutées avec la voix la plus
douce et une facilité prodigieuse , ont l'ait passer quelques
minutes au public dans une sorte d'extase. On a remarqué
avec plaisir que pendant que ta charmante cantatrice éta-
lait ainsi tontes les merveilles de sa délicieuse voix,
M™ Pisaroni regardait jvoc bienveillance sa jeune rivale,
et souriait com plaisamment a ses tours de force.
Celle représentation était décisive pour l'opinion qu'on
peut se faire du talent de M1" Sontag : voici celle que je
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588
m'en su» faite .'La nature l'a pourvue de l'organe le plus
heureux pour le geurc brillant, léger et gracieux. Sa vpix
égale, pure et sonore dans toute non étendue, se prèle
merveilleusement à toutes les formes de fioritures, et exé-
cute les traits tes plus difficiles avec un fini précieux qu'au-
cune autre cantatrice ne me paratl avoir au même degré.
Le choix qu'elle fait des fioritures est souvent original :
personne ne sait mieux qu'elle modifier sa voix de la force
à la douceur; enfin, elle ne manque pas d'une certaine
expression mélancolique qui a beaucoup de charme. Hais
M11' Sontag ne me paraît nullement destinée à aborder les
choses larges et dramatiques. Sa manière, quelque par-
faite qu'elle soit ,'a quelque chose d'étroit dans ses propor-
tions, et ne peut se prêter à de grands dèveloppemens de
passion. Un moyen lui est offert pour obtenir toujours des
succès non contestés; c'est de ne chanter que des rôles
analogues aux facultés que la nature lui a données , et de
ne point se hasarder dans le style séricui, pour lequel elle
n'est point organisée.
ACADÉMIE ROÏALE DE MUSIQUE.
Représentation au bénéfice de Gitu.— SuuuHiDk.— M— bTiixinui
et Puiiiwi, — Lr premier aeie du BtiBni du Suvh.lb. — M11* Soim.
On a parlé souvent de l'intérêt du public pour certains
acteurs , comme un motif su fusant pour rendre fructueuses
leurs roprésentations à béuéiice; mais le public est ingrat
par nature, et ne va qu'où il espère s'amuser. Il s'agit
donc moins , en pareille circonstance , d'émouvoir sa sen-
sibilité que de piquer sa curiosité. C'est ce dernier moyeu
qu'a employé Galli, et ce moyen lui a réussi complètement,
car la foule s'était rendue à son appel. La crainte que
M" Mallibran-Garcïa ne chantât que cette fois à Paris,
M"' Smithson dans les deux derniers actes de Roméo et
Juliette, et M11- Sontag dans le .premier acte du Barbier,
DigitizGd t>y Google
5Bg
étaient plus qu'il ne fallait pour rassembler à l'Opéra Mile
de la bonne société; el Galli n'est pas en reste avec le
public, car s'il en a reçu beaucoup d'argent, il lui a me-
suré largement le plaisir.
Une grande réputation , faite par les journaux étrangers
et deB succès de société, avait précédé le début de
M** Mallibrati ; cew sortes d'avant-coureurs sont quelque-
fois funestes au succès, car le public n'aime pas qu'on
prévienne ses jugemens : dans cette circonstance ils n'ont
pas nui. Des apf.luudisscmeus vigoureux ont accueilli la
uantalrice à son entrée eu scène. Sa taille élevée et la ré-
gularité de ses traits ivnient prévenu eu sa faveur. Lu ma-
nière noble et ferme dont elle a dit sa première phrase,
fra tanti régi e papoii, a justifié d'Abord l'accueil qu'on lui
avait fait; mais la phrase si difficile tréma il lempio a été
pour elle un écucil qu'elle n'a pu surmonter. Cette phrase
est ingrate et n'est pas faite pour les voix; toutes les can-
tatrices qui ont joué le Me de Sémiramis à Paris y ont
échoué. M" Mallibrau, effrayée par cet échec , n'a pas
même tenté de vaincre la difficulté à la seconde reprise ;
elle a laissé tomber sa voix, a terminé le morceau sans
effet, el a fait sa snrtiu , laissant le public dans l'Indécision
cl le mécontentement.
Le talent prodigieux déployé par M™ l'isaroui dans les
scènes suivantes est venu ensuite faire établir des compa-
raisons d'autant plus fâcheuses pour M™ Mailibran , qu'il
paraissait certain qu'elle ne chanterait que cette seule
fois à Paris, et qu'elle n'aurait pas le temps de prendre
sa revanche. Sa rentrée fut très froide; mais les disposi-
tions du public ne tardèrent point à changer, car, dans
l'amiante de l'air Bel raggio Lusinghicr , la jeune cantatrice
mit une (elle énergie , déploya une voix si étendue et si
sonore en quelques parties , enfin fit entendre des traits
d'une telle hardiesse, que le public fut vaincu, et passa
de la froideur la plus dédaigneuse à l'enthousiasmé le plus
immodéré.
A mesure que la confiance revenait à H" Mailibran,
elle hasardait de plus grandes difficultés, el bientôt son
5oo
courage se changea en témérité. Des applaudissement
tels que je un me rappelle pas d'en avoir entendu de sem-
blables la récompensèrent de ses efforts, et l'hidemnf*
sèrent avec usure de son premier début. Il fout le dire , lé1
public, dans cette circonstance, a fait preuve d'un défaut
de goût égal à celui que.; M™ Mallibran avait montré
dans cette profusion de traits."Lors même que mes fonc-
tions de journaliste ne m'obligeraient pas à dire ce que
je crois être" la vérité, l'amitié qui me lie an père de
M" Mallibran me ferait un devoir de lui parler avec .fran-
chise. Je lui dirai donc que la nature l'a dotée des qualités
les plus précieuses; d'une voix rare qui réunit les sons vigou-
reux du plus beau contralto à ceux du soprano le plus aigu
(car cette voix embrasse toute l'étendue comprise cuire 1ère
grave du contralto et le contre- re); que sa facilité à faire les
traits les plus difficiles est prodigieuse; que sa riche imagi-
nation lui fournit des fioritures neuves et élégantes; enfin,
qu'elle a de l'ame et de la verve ; mais , malgré tous ces
avantages, son chant est absolument dépourvu de gouïet
de méthode. Ses ornemens qui seraient bons , pris isolé-
ment , sont incohérens &t ne se lient point ensemble. Sa
respiration n'est point assez ménagée , et souvent elle lui
manque quand elle serait nécessaire, ce qui l'oblige à
altérer continuellement les mouvemens. Par exemple,
dans le duo Serbami ogner , elle n'a pas dit deux mesures
de suite dans le mouvement indiqué de Vendante; eteela
pour placer une abondance de traits inutiles ; mais quand
M™ Pisaroni a repris le même chant il la dominante , elle
a fait voir que, saus altérer la mesure , ou peut chanter
avec a me et de la maniéré1 la plus brillante.
M™ Mallibran n'a que dix-neuf ans ; clic arrive de
l'Amérique du nord , où les modèles lui ont manqué;
elle n'a donc besoin que d'entendre, et de ne pas dédai-
gner les conseils de l'expérience, pour arriver an plus
haut degré dans son art. Ce qui m'en donne l'assurance,
te sont les passages nombreux qu'elle a exécutés dans un
bon sentiment. J'avoue que la sévérité de mes remarque*
pourra paraître au moins singulière à celte cantatrice „
5g,
après le succès éclatant qu'elle a obtenu dans la repré-
sentation du 14 ; mais c'est précisément pour lu prému-
nir contre l'opinion que ce succès pourrai! lui douoer
d'elle-même, que je crois devoir lui tenir ce langage.
J'ai parlé de SI™ Pisaroni, et j'ai dit combien elles'esl
distinguée dans les premières scènes; (G puis ajouter
qu'elle a été sublime dans celle de l'épée , et qu'elle n'a
pas été faible un seul instant. Levasseur a eu plusieurs
beaux momens dans sou rôle, qui n'est malheureusement
pas assez important : il a chanté dans ta plus belle ma-
nière sa phrase tlilantiregicpopali,ety a été fort applaudi.
La voix de Galli s'altère chaque jour davantage ; elle a
perdu toute légèreté et presque toute justesse ; il a été
constamment au-dessous du ton dans son rnle d'Assur.
Peut-être le climat de l'Italie lui rendrait-il les qualités
qu'il a perdues.
La tragédie anglaise qui a fait peu d'effet, et dans la-
quelle M"' Smilhson a été moins heureusement inspirée
que précédemment , a été suivie du premier acte du Bnr-
UerdeSëtilU, qui n'a commencé qu'à onze heures et demie.
Bien qu'il y eût eu un intermédiaire entre les deux opéras,
le passage de la musique bruyante de Scmiramulc à l'élé-
gante conception du Barbier, a été très sensible. Les con-
naisseurs ont pu remarquer que celte délicieuse musique .
si spirituelle , si fraîche, si originale, semblait avoir perdu
la moitié de sou instrumentation. Tel est le danger des
proportions exaRérécs; elles font paraître maigres des com-
positions qui naguère étaient renommées pour, le brillant
de leur orchestre. . . i-s . tll .
M1" Sontag a senti qu'elle venait fort ta.nl se, faire en-
tendre d'un public fatigué , .et qu'il fallait des merveilles
pour l'intéresser. Ce qu'il fallait faire, elle l'a fait. Toutes
les coquetterie» du chaut le plus miguard, tous les pres-
tiges delà voix la plus douce et lu plus flexible, ont clé mis
en œuvre par elle dans son charmant air. Parmi les traits
qu'elle a misa foison dans. cet air, et qu'elle a parfaite-
ment vocalisés, on a remarqué une gamme détachée,
sorte d'exercice qui n'est guère connu que dans les écoles
5ga
de citant, cl tlonl M"* Sonlag a l'ait un ornement du meil-
leur goût, par la manière dont elle l'a exécuté. Le duo
avccGalli, quoique bien chanté aussi, a été cependant
moins remarquable que l'air. Il est vrai que Galli est bien
lourd dans cette musique légère, et n'est pas propre à
mettre du fini dans un morceau. Bonlogni a Tort bien
chanté le duo Alt'idea di quai mttallo. La représentation a
fini àune heure du malin.
— Deux soirées musicales ont eu lieu dimanche et lundi
dernier. Lu première, qui était donnée par le jeune Àlkau ,
a eu lieu dans les salons de M. Pape , l'un de nos premiers
fabricans de pianos. On y a remarqué particulièrement nu
rondo de concerto pour le piano, avec orchestre , composé
etexécuté par le jeune bénéficiaire avec une énergie et un
fini qui liennenl du prodige, si Ton considère son âge. Il y a
du fort jolies choses dans son rondo, et l'on ne se doute-
rait nullement que c'est l'ouvrage d'un enfant. M. Toi bec
jeune a joué passablement un air varié de BériiH : c'est un
tort, quand on joue en public, de n'être que passable dans
une chose qui a été si bien jouée par l'auteur. La partie
vocale était remplie par M"" Marinoni etTuelle. La pre-
mière est connue; la seconde est élève de H. Garaudé;
elle promet de devenir une cantatrice.
Le concert de lundi était au bénéfice de MM. Benaxet
et Andrade. Un concerto et un air varié pour le violoncelle
y ont été exécutés avec un très grand succès par M. Bena-
zbL; M. Woets, l'un de nos pl;w habiles pianistes, s'y est
l'ait remarquer dans des variations très brillantes pour le
piano , et M. et M" Andrade y ont chanté des romances et
des nocturnes qui ont été fort goûtés. PËTIS.
— Les vrais amateurs de musique Rapprendront pas
sans une vive satisfaction que quatre soirées de quatuors
et de quinietli seront données par M. Baillol, les mardis
ai , ut) jauvïer, 5 et ta février prochain , rue Saint-Lazare ,
ii* 59, chaussée d'Aiilin. Ou s'abonne pour ces quatre soi-
rées audit local; chez M. Baillof, place des Messageries,
ii" o; ou au magasin de musique de M. Pleycl, boulevard
Montmattre.
5g3
'■ NOUVELLES DES DÉPARTKMENS.
On lit dans le Breton, journal de Nantes, l'article suivant
sur lu l'iectroeuphon , et sur le concert de MM. Gaina et
Luppcrger :
«C'est avant-hier, daus la grande salle de la mairie,
qui: le public a été admis à entendre le nouvel instru-
ment de Al. Gama. Celle épreuve, comme nous t'avions
prévu , a été tout-à-fait favurable , ci H. Lupperger a tiré
un excellent parti de cet instrument dans plusieurs mor-
ceaux qu'il a exécutés. Les notes busses sont parfaites;
l'archet attaque bien les cordes: elles donnent un son
plein et pur, qui reproduit avec vérité ceux de la contre-
basse , du violoncelle et parfois de l'alto ; le violoncelle ,
principalement, semble, suivant nous, laisser peu de
chose à désirer. M. Lupperger est parvenu à nuancer son
jeu , et à rendre l'effet de ces légers coups d'archet qui
font vibrer les cordes de ce bel 'instrument il la manière
de Kohrer. L'alto est pur el assez vrai dans les notes bas-
ses ; les tons hauts ne nous paraissent pas aussi pleins,
aussi nourris : c'eut le reproche que l'on peut faire a uns i
au violon , dont les sons quelquefois sont assez agréables,
maïs qui . par leur faiblesse, forment un peu disparate
avec les cordes basses. Nuus savons que MM. Gama ont
déjà avisé au moyen de remédier d cet inconvénient en
donnant une table plus légère à leurs cordes hautes.
S'ils parviennent, comme nous n'en doutons pas, au même
résultai qu'ils ont déjà obtenu pour leurs basses, nous
pouvons prédire d'avance que cet instrument si^ra adopté
avec empressement par les amateurs, auxquels il peut
révéler de nouvelles jouissances et «le grandes ressources.
L'exécution demande une élude sérieuse: M. Lupperger
(ils parait bien comprendre la méthode à suivre) en tra-
vaillant assidûment, il doit obtenir des effets plus variés
el plus vrais eucore. Les spectateurs se sont plu à rendre
594
une justice méritée à cet instrument , et les divers mor-
ceaux exécutés par M. Lupperger (ils o nt été vivement
applaudis.
■ Apres avoir loué l'invention de MM. Gama il est junte
de rendre hommage aux artistes distingués qui ont em-
belli cette soirée musicale. L'orchestre dirigé par M. De-
lanoue, a. exécuté une ouverture et accompagné plusieurs
morceaux. M. Lucas fils, dans un concerto de violon, s'est
fait remarquer par un jeu franc et pur. M. Peligry a très
bien exécuté des variations sur la flûte , avec accompa-
gnement duPlectroeuphon. Une jeune dame%qui se des-
tine , dit-on , à l'enseignement, a chanté plusieurs mor-
ceaux ; le timbre de sa voix est agréable et sonore. Enfin
M. Welsch, qu'on aime à entendre dansuoscoucerts comme
sur la seèue , a fait beaucoup de plaisir dans un morceau
de» Noces de Figaro. •
NOUVELLES ÉTRANGÈRES.
. Dàhtzick. Décembre. 1897. La société des amateurs de
chant de cette ville, accompagnée d'un orchestre uoiu-
breux dirigé par M. Urban, a exécuté, le 1a de ce mois,
dans l'église de S.iiol- Pierre, le Heqaiem d'Eybler. au bé-
néfice do quelques familles indigentes. Cette réunion . qui
c\i*lc tli-ja di'pms ]>lu*ii:iir* années, sous l.i direction de
M. le D' Kniewel . m<-t tieaucoup de soin a exécuter li -
< ompotj lions Im *. ■ 1 . ■ -~ ballot M. Knicwel. runn.iisseur très
distingué, qui a f.til preuve déjà bien souvent d'un goul
exqula en fait de musique, a fondé celle société et l'a di-
rigée jusqu'ici avec succès. Les premières familles de la
ville en font presque toutes partie et contribuent de leur
mieux à sa conservation. Elle est organisée de manière à ce
que les fonds versés par les sociétaires 11e soient employés
qu'au soutien de rétablissement, sans que personne puisse
en tirer aucun avantage personnel. Tonte l'administration
Sç5
est bien conduite, aussi est-il probable que celte société
lté maintiendra, s'étendra, et exécutera encore plus d'un
chef-d'œuvre. Les sulos sont tous très bien chantes par les
amateurs qui s'en sont chargés. M™ H. dont la voix est
pleine et sonore exécute, d'une manière brillante, les
soles de soprano; H. Y. s'est chargé de ceux de lenore ;
M. Sch. , de ceux de basse-taille. Tous se sont distingués ,
mais surtout M. F. M. Urban est venu d'Klbing , pour diri-
ger l'exécution du Requiem. On s'occupe maintonantl fon-
der une Académie do musique qui ne saurait qu'exercer
une influence très favorable sur toute la Prusse. Nous en
parlerons dès que ce projet aura eu un commencement
d'exécution.
Vikksb. Novembre. M. Naurer, directeur de musique
d'Hanovre, a donné six concerts au théâtre de la Porie
de Cdrinthie, dans lesquels il n'a exécuté que des morceaux
de sa composition ; des concertos, des variations, des polo-
naises, des rondeaux, etc. , dont le mérite est singulière-
ment réhaussè par l'expression de sou jeu qui est moins
éclatant et brillant, que tranquille, large et vigoureux.
H. Muurcr manie parfaitement bien son archet ; son accent,
surtout dans le piano , est délicieux. Dédaignant tous tes
tour* île force qui sont à l'ordre du jour pour éblouir
l'auditeur, il se borne à augmenter la jouissance par son
goût éprouvé , sa finesse et sa délicatesse ; pendant qu'un
si grand nombre de ses collègues s'efforce de surprendre
les applaudissemens de la foule, il n'aspire qu'à ceux des
produisit le plus de sensation parmi nous par un duo,
charmante pour quatre violons obligés, ou il fut très bien
secondé par MM. les professeurs lloehm 11 ell mes berger
et Saint- Lubin; celle composition a produit un enthou-
siasme général et fut redemandée à quatre 'reprises. Il
nous reste encore à parler d'un accident qui aurait pu
avoir des suites fâcheuses1: H. Maurer a été blessé parla
chute d'une lampe pendant la répétition ; mais les secours
du médecin et les remèdes employés à temps, l'ont rétabli
□igilized by Google
5»6
au bout de buit jours. 11 est retourné dans sa pairie, em-
portant l'estime et l'admiration de tous ceux qui l'ont
entendu.
— On écrit de Fribotirg eu Brisgau : * On a donné , le
a4 décembre , sur le théâtre de cette ville , un opéra nou-
veau intitulé : Le Siège de Miisolonghi. La musique est de
Frei et révèle du talent.*
— Dans les derniers jours du mois de décembre, ou a
exécuté à Rome, dans l'Oratoire de» RR. PP. Filippini ,
deux œuvres do musique sacrée du maestro Bonfichi , in-
titulées : La Notte di Natale et il Trcuparto deW Aveu.
Venise. Le théâtre de la Fenice, comme tous ceux d'Ita-
lie , a fait son uuveriure le 36 décembre dernier. Ce jour
a été particulièrement un jour de féte pour les habita u«
de Venise, parce que le théâtre de la Fenice était fermé
depuis près d'un an. L'ouvrage qui avait été écrit pour
cette circonstance est intitulé Gattom di Foia : le Hbrelto
est de Felice Romani , et la musique d'un jeune composi-
teur nommé Ciuseppe Persiani. D'après les renseigne-
mens qui nous sont parvenus , la contexture do la pièce
est une des plus grandes absurdités qu'on ait jamais ima-
giuécs , et malheureusement elle ne rachète point ses dé-
fauts par des situations musicales.
11 ne parait pas que l'œuvre du musicien soit branconp
pluit estimable que celui dopoite : on assure que le mu-
sicien est précisément dans cette honnête médiocrité , qui
peut faire le bonheur de la vie d ms le sens d'Horace,
mais qui est le pire de tous les maux , lorsqu'il n'agît de
musique dramatique. Le public vénitien a cependant ap-
plaudi l'ouverture, un choeur, le tirello du finale du pre-
mier acte, et une prière du seoond. M"" Favelli a eu beau-
coup de succès dans cet ouvrage : on s'accorde à louer
l'étendue, la sonorité de sa voix, sa méthode de chant,
et l'énergie de son jeu. La Bassi, très bonne prima donna in
contralto, s'est aussi distinguée dans celte pièce , et a re-
cueilli d'unanimes applaudîssemcns. Le vieux Tacchi-
nardi, qui chaule toujours bien , malgré la perte de sa
voix, était chargé du rô4a de premier ténor.
$97
— L'Elisabetta de Rossini ayant été choisie pour l'ouver-
ture du théâtre Alla Scata de Milan , a été jouée, le 36 dé-
cembre, par M"" Méric-Lahmle, Ungher, et par David.
Le rôle de la reine d'Angleterre a fourni à M™ Lalande
l'occasion de déployer un talent réel ; Mu" Ungher a chanté
celui de Mathilde avec beaucoup de grâce; mais David n'a
eu aucun succès dans le personnage de Leicester.
— Les plus vifs applaudissement ont accueilli XcCrocïato
in Egitto de Hayerbeer, au théâtre Filarmonlco de Vérone ;
les principaux chanteurs étaient M"' Belloc , Rubini , et le
le 11 or Bianchi.
Le Tancredi de Rossini n'a pas été si heureux à Gènes :
il est tombé à plat. Est-ce à quelque caprice du public
qu'il faut attribuer cette chute, ou à l'insuffisance do
M'" Passe ri ni et Ekerlin pour jouer les rôles de Tancrède
et A'Amcnaidc* c'est ce qu'il n'est pas facile de décider.
Pour comble de malheur, le nouveau ballet de Genstr'uo
in Roma a eu le même sort que l'opéra , et les danseurs ont
été sifllés à outrance.
ANNONCES.
MUSIQUE.
Méthode de chant, ou Études du solfège et de la vocalisa-
tion, par M. GÉBiBD," ex-professeur de chant à l'école
royale de musique , et membre de la société d'émula-
tion de Liège. Ouvrage divisé en deux parties, dont la
première se vend 10 fr. , et la deuxième 3o fr. Paris, chez
l'Auteur, rue de la Tour-d' Auvergne, n. 3o, et cheu
MM. Carli, Plcycj,, Frey, Petit, et autres marchands
de musique.
D'après tes additions et changemeos laits à cette mé-
thode depuis sa publication , la première partie se trouve
être augmentée d'un plus grand nombre de leçons avec la
clef de toi; de quelques tableaux instructifs et d'aperçus
5g8
également propres à faciliter la lecture de la musique
\ par les intervalles. Cette première partie, comme sol-
fègé, contient, r, des petites leçons, dont la grada-
tion est presque insensible, à l'usage des commençans
et à la portée des voix les moins étendues; i' des le-
çons progressives , avec la basse chiffrée , écrites d'abord
en majeur et ensuite en mineur, pour apprendre à bien
distinguer le mode où l'on chante; 3° des duos et des trios
composés pour Être chantés sans accompagnement , dans
le but de s'exercer à lire avec la même facilité un second
comme un premier dessus, ou la partie basse d'un en-
La seconde partie , qui traite spécialement de la voca-
lisation , renferme des gammes diversement, combinées .
pour la pose et le développe menthe la voix : des exercice»
pour apprendre à faire et à placer convenablement les
petites notes et les autres ornemens du chant ; et des leçons
de vocalisation pour toutes les voix, avec accompagne-
ment de fortê-piano. Les petites leçons de la première
partie, ainsi que les divers exercices de la seconde , sont
précédées d'explications pour en faciliter l'intelligence et
l'exécution.
Un critique du Journal des Débats n dit, en parlant de
cet ouvrage (20 novembre 1816}: Un musicien distingué ,
M. Gérard, dont le goût naturel se perfectionna dès sa
première jeunesse par nu long séjour en Italie , qui a
composé une foule de morceaux r barmans , et qu'on cite
comme un des plus savans et des meilleurs professeurs du
Conservatoire, vient de publier un ouvrage vraiment
classique , où il développe un talent particulier pour ren-
seignement de la musique vocale.
Le plan de cet ouvrage est simple et ingénieusement
combiné : chaque article se trouve a la place qu'il doit
convenablement occuper dans l'ordre de* éludes que l'on
doit faire et suivre , pour bien connaître l'art du chant ,
te pratiquer et le transmettre.
— Méthode complète et extrêmement simplifiée pour
la guitare, par P.-L. Aubéry du Boulley, œuvre 4>i P*0-
599
priété de l'éditeur. Prix, i5 fr. A Paris, chez Richault,
éditeur des œuvres de Booltsa, Hummel et Mayseder, bou-
levard Poissonnière, n° 16, au i"'.
La guitare est , de -tons les instrument», celui qui a
éprouvé le plus de révolutions depuis vingt ans, et consé-
quemmenl celui pour lequel les ouvrages élémentaires
ont dù se multiplier le plus. Après les dévcloppemens qu'il
avait acquis entre les mains de Carulli sont venues les
difficultés imaginées par Sor; d'autres viendront proba-
blement qui agrandiront encore son domaine. M. Aubéry
du Boulley n'a point eu cette prétention ; mais il a donné,
dans un cadre assez resserré, tout ce qu'il est à peu près
nécessaire de savoir pour bien jouer de l'instrument qu'il
prufesse.
— Variations brillantes pour le pi a no-for ié sur l'air fa-
vori de la Dame Blanc lie de Boieldieu :, Viens, gentille
dame ; dédiées à madame la duchesse de Reggio, par Jac-
ques Herz, œuvre 17. A Paris, chez Janctet Colelle, édi-
teurs marchands de musique du Soi, rue Saint-Honoré,
n* ia3, et rue de Richelieu, 11° 9a , près celle Feydean.
Ces variations, d'un genre neuf, jouissent de l'estime
des professeurs et la méritent. On les trouve maintenant
sur tous les pianos. (
— Grand quatuor pour deux violons, allo et violoncelle,
composé et dédié à S. A. M. le prince Nicolas de Galilzin,
par Louis van Beethoven, op. 127. Prix, g fr.
— Grand quatuor en ut mineur, pour deux violons, allo
et violoncelle, composé et dédié à S. E. H. le baron de
Stutterbeim, par L. van Beethoven, op. i3i. Prix, 10 fr.
Paris, chez les fils de li. Schott, place des Italiens, n" 1 ;
Maycncc, même maison , et Anvers, chez A. Schott.
Ces quatuors sont les derniers que Beethoven ait écrits.
— Douze adagios ou andante , douze menuets et douze
trios tirés des symphonies d'Haydn, arrangés pour piano
et violon par Mcsplet. Prix , 5fi fr. A l'École royale de mu-
sique.
— Bien que le prix marque de la Mme solennelle de
M. Lcsueur, que nous avons annoncé dans notre dernier
6oo
numéro, soit de 5o francs, le prix rte souscription n'est
que rte ao francs.
— C'est samedi, a février prochain, que le cours du
chant d'ensemble s'ouvrira ohez M. Panieron. Il n'y sera
étudié que des duos, trios, quatuors, morceaux d'ensem-
ble et chœurs. Les dames et les messieurs seront admis à
celte classe deux fois la semaine, les mercredis et les sa-
medis rte 7 heures du soir à 9 heures. Ou peut se faire
inscrire d'avance chez M. Panseron , boulevard des Ita-
liens, n" 11, Le prix est de a5 francs: les autres classes
ont toujours lieu matin et soir.
— Rondo brillant, précédé d'une introduction pour le
piano-iorté, composé et dédié à M"* la Maréchale, prin-
cesse d'Kckmiihl , par Joseph Pohl , œuvre 6. Prix : 6 fr.
Paris, H. Lemoine, professeur de Piano, éditeur rte
musique, rue de l'Échelle, n" 9.
AVIS.
M. Schlcsingera inséré, de notre consentement, dans
sa collection complète des quatuors et quinletli de L. van
Beethoven, les deux quatuors œuv. 137, en mi [> majeur,
et œuv. i3i en al £ mineur. Nous nous sommes réservé
ta vente séparée desdits deux quatuors.
MM. les possesseurs des collections des quatuors et
quititelti de Beethoven, publiées chez MM. Janet et Co-
letle etchez Pleyelel fils, qui désireraient rte les complé-
ter par ces deux quatuors, correctement imprimés sm
beau papier, voudront bien s'adresser aux éditeurs légi-
times.
Pmris, !e ta janvier iSafl.
Les fils de B. Smart,
Flirt- des Mitai, a. 1.
□igitized b/ Google
VARIÉTÉS.
Les opinions d'un grand arlisic sur l'objet de nés travaux
et de ses éludes sont toujours intéressantes a connaître ,
ne fussenl-elles point inattaquables. Nous croyons donc
qu'on verra avec plaisir la lettre suivante, qu'un journal
anglais, Ihe Sun, a publiée, et que nous nous empressons
de faire connallre k nos lecteurs ; elle a été adressée par
CI) a ries- M a rie Weber au directeur de musique du théâtre
do Lcipsick-, en réponse à quelques questions sur le chant
dramatique, que celui-ci avait soumises au célèbre auteur
du Freyschûlz.
« Tout chanteur, dit Wcbcr, prèle, sans le vouloir, la
couleur de son individualité au caractère lyrique qu'il re-
préscnle. Ainsi deux sujets, dont le premier serait doué
d'une voix douce et flexible, et le second d'un organe
puissant et étendu, rendraient la même composiliuii d'une
manière bien différente. L'un , sans doute, produira plus
d'effet que l'autre, et tous deux néanmoins se conforme-
ront également à la pensée du compositeur, s'ils expriment
avec fidélité foules les nuances de la passion, d'après la
nature et le degré de leurs moyens respectifs. Mais le di-
rceleur de musique aura soin d'empêcher qu'ils ne se li-
vrent trop exclusivement à une routine qui souvent est en
opposition directe avec le caractère du morceau. L'allen-
tion qu'on exige de lui à cet égard est surlout nécessaire
quand l'effet général d'une pièce de musique risque d'être
sacrifié à quelque roulade favorite qu'on voudrait y intro-
duire à tout prix. Si, par exemple, Tunisie est incapable
de meitre dans les derniers passages de l'air d'Eglantine
la chaleur et l'énergie d'expression qu'ils exigent, il fera
beaucoup mieux de le simplifier que d'y ajouter des orne-
mens hétérogènes qui détruiraient le caractère passionné
de cette composilipn. De même, lorsque les moyens d'une
cantatrice no lui permettent- puftit d'exécuter avec l'ex-
vol. 5i
Dipzed ûy Google
6oî
pression convenable le grand air tl'Elviro ', dont le senti-
ment de vengeance qui anime le personnage doit préci-
piter tous les mouvemens, l'omission du morceau serait
encore préférable au déplaisir de l'entendre chanter comme
un solfège.
■ Un des problèmes les plus difficiles en musique, c'est
d'accorder le chant avec la partie instrumentale , dans te
mouvement rhythmjque d'une composition, de manière
qu'il en résulte un amalgame parfait, ou en d'.intres ter-
mes , de foire servir l'orchestre à appuyer,' à corroborer et
à exalter les accent) de la passion ; caria voix elles tu rit ru-
men s se contrarient mutuellement de leur nature.
n Au moyen de l'emphase et de l'articulation verbale ,
te chant imprime à la mesure un mouvement que l'on
pourrait comparer peut-être au brisement uniforme des
vagues contre te rivage. Les instrument, au contraire, et
surtout ceux à cordes, divisent le temps en intervalles
précis qui ont la justesse mathématique des oscillations
du pendule. Or, la vérité d'expression exige t'accord de
ces propriétés si difficilement conciliâmes. Le mouvement
ne doit donc pas être un frein lyrannique ou une impul-
sion machinale et irrésistible ; il est ù l'œuvre du musicien
ce que la pulsation est à l'économie animale. Il n'y a point
de mouvement lent où il ne se trouve quelques passages
qui demandent une légère accélération, comme d'antre
part, il n'est pas de mouvement rapide qui ne puisse être
ralenti en certains endroits. L'expression le veut ainsi dans
-quelques cas particuliers.
"i"À Dieu ne plaise que ces remarques deviennent un
encouragement pour les chanteurs qui , adoptant le mode
d'exécution le plus déréglé , se permettent de rompre et
de défigurer le rhylhmc pendant un nombre1 ta défini de
mesures; cette déplorable licence ne manque jamais de.
produire sur l'homme de goût un efTet analogue a celui
qu'on éprouve en voyant un jongleur disloquer ses mem-
bres pour plaire à la populace. L'accélération et le rclar-
(i| D«n« le Satri fia interrompu , de Win ter.
6o5
dément ne sauraient èlrc motivés que dans les cas où l'au-
diteur lui-même en sentirait lu besoin. Jamais non plus
de pareilles modifications, soit qu'on les considère sous
le point de vue musical, ou qu'on les prenne dans leur
signification poétique, ne devraient avoir lieu qu'autant
qu'elles seraient en harmonie avec le ton et le caractère
de la passion qu'il s'agit d'exprimer. Ainsi, dans un
duo, deux caractères divers emploient un mode d' expres-
sion différent. Prenons pour exemple le duo entre Lici-
nlusei le grand-prêtre, dans la Vestale. Plus on meltra
de véhémence passionnée dans le premier de ces rôles et
de dignité calme dans le second, plus l'effet du morceau
y gagnera. Cependant la musique n'a point de signes pour
indiquer ces nuances, qu'il est si important d'observer.
• C'est uniquement dans son ame que l'artiste exécu-
tant ou le directeur de musique doit puiser les indications
que le compositeur n'a pu lui fournir; et s'ils n'y trouvent
rien ni l'un ni l'autre, le métronome ne saurait suppléer
à un tel secours. Tout ce qu'on obtiendra, à défaut de tact
individuel, sera d'éviter les contre-sens les plus grossiers ;
quanl 1 dénoter par des Niques visibles les nuances les plus
délicates du senliment et cette foule de modifications cor-
respondantes , de l'exacte observance desquelles l'exécu-
tion d'un ouvrage de musique reçoit tout l'effet dont il est
susceptible, j'ai dû renoncer à un tel but, tous mes efforts
pour l'atteindre ayant été infructueux.
i Je vous adresse ce peu de remarques, non dans l'es-
poir qu'elles auront de quoi vous satisfaire, mais seule-
ment pour répondre, autant qu'il est en moi, à la demande
d'un ami. » C. M. W»M.
— H. Henri Nadcrmann, harpislede la Chapelle et de la
Chambre du Roi , et professeur adjoint de son frère à la
classe de harpe de l'École royale de musique, vient de pu-
blier un écrit qui a pour titre : Réfutation de ce qui a été
dit en faveur des différent mécanismes de la harpe d double
moitummitj au Lettre d M. Fétis , professeur de comp'>?îtîoi\
dCÊaiû royaU de musique et bibliothécaire de cet établissement, 1
en réponse à son article intitulé. Sur la liarpe à double mou-
vaillent de M. Sébastien Erard, cl, par occasion, sur l'orï-
giue cl les progrès rie cet instrument, inséré dans la
Revue [musicale du 8 novembre j8î;. Brochure ïn-8 ' de
kl pages.
Paris, i8a8, chez les marchands de nouveautés , et chez
Kadermann, fat leur de harpe du Roi et de 5. A. R. Madame,
rue Richelieu, h" 47-
Après avoir lu cetlc brochure , qui a paru le :G de ce
mois, 31. Fétis s'est empressé d'écrire sa réponse ; mais
J'i.<]>li;;a(ittn de faire lilhographier une planche nécessaire
pour l'intelligence de la question , n'a pas permis de faire
paraître celte réponse dans lu Reçue musicale de cejour;
clic sera insérée dans le numéro prochain.
— On se rappelle l'article que nous avons donné sur les
discussions qui se sont élevées à propos du nouvel archet
de contrebasse adopté pour renseignement dans l'École
royale de musique , ainsi que lu note du 31. I'ernc , juge
compétent eu cette matière. Le digne professeur qui en-
seigne le maniement de cet archet dans l'école (M.Cno-
nié), convaincu que ie temps est venu où il faut joindre
l'exemple ou précepte .vient d'abandonner l'ancien archet
français et d'adopter le nouveau pour son service de l'O-
péra et de la Chapelle du Roi. Nous ne doutons pas qu'il
ne soit bientôt imité parles autres contrebassistes de la
capitale , et que nus orchestres n'en reçoivent. une amé-
lioration sensible. . . .
NOUVELLES DE PARIS.
La situation de l'Opéra est très critique depuis le départ
de M"' Ciuli-Damoreau. Diverses négociations ont été en-
tamées sans succès : M** Mallibran , ù qui l'on a fait des
offres d'appoinlemcus considérables et de congés, se re-
fuse à tout arrangement et ne veut pas chanter l'opéra
français. Quelques personnes assurent que les difficultés
qui s'étaient élevées pour l'engagement de K~ Cinti au
Digitizod by Google
(io5
théâtre île Bruxelles sont levées, et que celle cantatrice se
fixe définitivement dans le royaume des Pays-Bas. L'état
de grossesse avancée de M™ Dabadie ne lui permet pas de
chanter, et surtout de se charger d'un rôle nouveau, en
sorte (pie le répertoire n'a d'autre soutien que M11* Jawu-
ret , et que les auteurs de la Muette de Porlki n'ont point
d'autre ressource pour faire représenter leur ouvrage.
Bercée d'espérance et d'illusion, l'administration re-
larde l'apparition de la pièce nouvelle, qui, seule, peut la
tirer des recettes déplorables qu'elle fait depuis long-temps;
cependant, les chances de succès sont si belles pour l'opéra
de hl H. Scribe , Delavigne et Auber, qu'il vaudrait mieux
le donner promptement, avec une actrice médiocre, que
de rester dans une inaction funeste sur l'espoir d'un re-
crutement fort incertain. On nous promenait plus de
ressources au commencement de 1827; mais les promesses
sont faciles.
Quel que soit l'événement, il paraît certain que H. Ros-
sini n'écrira pas Guillaume Tell pour celte année, parce
que la saison sera tro.p avancée après la représentation de
la Muette. D'après les promesses qui ont été faites à
M. Zimmerman, il est vraisemblable que l'opéra de ce
compositeur sera mis en répétition au commencement du
mois de mars.
— Divers ouvrages nouveaux sont à l'élude à l'Opéra-
Comique: On cite particulièrement l'Exil de Rochester , le
Prisonnier d'état et le Camp du drap d'or. Ces opéras ont
obtenu des tours de faveur. On dit que les auteurs d'un
opéra en trois actes îulilulé tes Rencontres, se fondant
sur les conventions stipulées avec M. le duc d'Aumont,
réclament le tour de droit qu'ils ont acquis, et sont réso-
lus de s'opposer à la mise en scène des deux derniers ou-
vrages qui viennent d'Être nommés.
I.e succès de Musanietlo se soutient d'une manière très
brillante, ainsi que celui du Colporteur; l'opéra comique
est décidément le genre de spectacle que les habitans de
Taris affection tient.
— M. Schulz et ses deux lils , artistes très distingués de
6o6
Vienne, sont arrivés à Paris depuis peu de jours , et gc
proposent d'y l'aire entendre un genre de musique d'un
effet neuf et original. L'aillé lies fils de M. Schulz est
pianiste et louche d'un instrument appelé Eol-Hannonica,
ijiii est le Pftys-HarmQnica perfectionné. Le plus Jeune est
un guilarisle d'une force prodigieuse, quoiqu'il ue soit
âgé que de treize ans, et M. Schulz, qui a été te maître
dq ses enfans, est à la fois guitariste et compositeur. Les
morceaux d'ensemble qu'ils exécutent avec YEol-Harmo-
niça et deux guitares , et que nous avons entendus, sont
d'un effet charmant et lout-à-fait inconnu. Nous ne
cloutons pas du succès qu'ils obtiendront dans les concerU
où ils se proposent de .se faire entendre cet hiver.
Nous engageons MU. les luthiers a examiner avec soin
la guitare dont se sert M. Schulz fils : elle nous parait
tire un instrument très perfectionné. La louche se déta-
che du manche comme celle du violon , et peut s'élever
ou se baisser à volonté , selon qu'on veut obtenir un sou
plus ou moins fort; elle avance aussi beaucoup sur la
taille, et permet de monter beaucoup plus haut que sur
les autres guitares; enfin la disposition de la tête , et la
manière dont les cordes sont attachées , nous semblent
elro des améliorations qu'on ne doit pas négliger.
SOIRÉES DE QUATUORS ET DE QUINTETT1S,
Ue M. BliLLUt '.
La perfection, le beau idéal de la musique, qu'on cher-
che partout et qu'on ne rencontre, dans les meilleure!!
répréscutatious théâtrales, qu'à de courts inslans, s'est
jrjéfugiée dans un salon de la rue Saint-Lazare. Là, Caillot,
excitant la verve de MU. Vidal , lirhan , Norbliu, HialU-
et Vaslin, en donne l'idée la plus exacte qu'on puisse, s'en
(ij Rue Sainl-L.imTi , 11° 59.
DigitizGd by Google
6o;
former. Si les gens du inonde, ei avides de plaisirs, savaient
quel est celui qu'on peut goûter pendant trois heures à
entendre les chefs-d'œuvre de Mozart, de Haydn, de Bee-
thoven et de Boccherini, exécutés comme ils le sont par
ces artistes, au lieu d'un simple salon , ce serait une salle
immense qu'il faudrait , et la foule eu assiégerait les portes.
Mais les gens du monde ne connaissent et ne comprennent
que la musique de théâtre ; le reste, si parfait qu'il soil ,
leur semble à peine en mériter le nom. Pour eux, il n'y a
que des uoles dans la musique instrumentale; leurs orga-
nes n'y sont point accoutumés ; ils n'en aperçoivent point
le plan, n'en goûtent pas les accciis, et ne se doutent même
pas qu'elle renferme du chant. Ils ne savent pas qu'au
mérite dramatique près, qui est sans doute fort considé-
rable, il y a beaucoup plus d'idées, d'inspiratious et du
chant dans un quïntctto de Mozart, que dans certains opé-
ras qui ont joui de la faveur publique. Ils ne savent pas
qu'au milieu des petits riens dont nous sommes accablés,
c'est seulement en écoulant cette musique qu'on s'aperçoit
qu'il y a quelque chose de durable dans an art qui paraît
si fugitif. ,
Le vieux Itcinken , le nestor des organistes allemands .
après avoir entendu , à l'iige de près de cent ans, Jean
Sébastien Bach sur l'orgue de Sainte-Catherine, à Ham-
bourg, lui dit avec attendrissement : "Je croyais notre art
« perdu : vous le faites revivre. Tanl que vous vivrez, la
(musique aura un interprète.! On peut en dire aillant à
Uaillut. La musique instrumentale, jadis si cultivée, a
presque disparu de la France. À peine deux ou trois
réunions peu nombreuses existent-elles encore à Paris.
Mais Baillot suffit pour perpétuer , parmi les vrais ama-
teurs, le goût des belles choses. On peut être aussi habile
que lui sur son instrument; on peut même, si ce qu'on
dit de Paganinï est vrai, faire plus de tours de force qu'il
n'en fait : mais personne n'a celle ame, ce feu, cet accent,
cette variété qui tiennent du prodige. Personne ne sait
comme lui donner à chaque auteur une physionomie par-
ticulière, et créer des beautés dans des choses- qui , jouées
6o8
par un aulr.e, paraîtraient communes. Et quand on songe
que pendant près de trois heures le même enthousiasme,
le même fini, ie même entraînement se soutiennent, sans
apparence de fatigue ou de distraction; lorsqu'on songe
que son influence s'étend non-seulement sur ses accom-
pagnateurs, dont il agrandit le talent, mais sur tout son
auditoire, dont il excite la sensibilité au plus haut degré,
on doit convenir que ce sont là des facultés bien rares,
ou plutôt uniques.
Les morceaux qui ont été exécutés dans la soirée du as
sont un charmant quinletto de Boccherini, un quatuor
en sot de Haydn, tiré de l'ancien oeuvre 20, le quintetto
en la de Mozart, un quatuor de Hummel, et un rondo de
Rode. Le quatuor de Hummel, seul morceau qui ne fût
pas généralement connu, renferme un menuet, un trio
et un morceau final dans lesquels on trouve de belles
choses; mais le premier morceau et l'an dan le m'ont paru
peu remarquables. Il y a de la grâce dans le rondo de
Rode; mais il est un peu froid, et le motif revient trop sou-
vent sous la même forme.
La seconde soirée doit avoir b'eu mardi a&
FÉTIS.
NOUVELLES ÉTRANGÈRES. al
Nafibs. La destinée de la Nargherita it Anglo { Margue-
rite d'Anjou) , de Pacini, a été fort singulière. Cet opéra,
sifflé à outrance, au théâtre Saint-Charles, aux deux pre-
mières représentations, mit l'entrepreneur dans la nrecs-
\ ';é de lui substituer U Donna dtt Lago; mais une indispo-
sition passagère de M™ Tosi, prima donna, et de Win ter,
rtnortf ainsi que l'étal du faiblesse de Lablactte, à ta suite
d'une maladie assez longue, n'ayant pas permis de leur
confier des rôles dans cette production de Rossiui , elle
ne fui pas beaucoup mieux reçue du public que la Marghe-
rita d'Angio; il fallut en revenir à oelle-ci. Adélaïde T*":
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et Lablaeiie, rendus à la sanlé, y reparurent avec Ions
leurs avantages : alors la fortuite de la pari i lion de P.tcini
changea complèlcment, cl le succès devint aussi éclatant
que la chute avait été honteuse. Un duo'chanlé parées deux
arlistes, la stretta du finale du premier acte , un air avec
chœur, par Lablaclie, un duo entre M" Tosi et Winter,
et une cavalinc de ce dernier, sont maintenant applaudis
avec fureur, et l'on assure que jamais Pacirii n'a rien écrit
de meilleur.
SoiBLH DE a6 DÉCEMBRE A QUELQUES THG1TKBS Ii'ItILTE '.
Nice. L'ouverture du nouveau théâtre a i'ié brillante;
une nombreuse assemblée s'était réunie, autant pour juger
des dispositions de la salle et de sou architecture, que pour
enieudre la musique. Nous avons déjà dit que l'opéra qu'on
avait choisi était IIBarone di Dolsheim, suivi du ballet sé-
rieux de Gabriella di Vergy, sujet qui paraît être peu propre
à la danse. Parmi les chanteurs, le publie a particulière-
ment distingué Elisa Sidlacek et Giovanni Lainer. Les prin-
cipaux danseurs ont eu aussi beaucoup de succès.
Novabb. M™ Lamlini-Bionili a été fort applaudie dans
Elisa e Cta<ulio;ïc premier tenore Lcga, Keniorini, fils du
Bariola, premier bouffe comique, ont éié aussi bien ac-
cueillis par le public.
Pàhhe. Théâtre-Ducal. L'opéra de Caritea, par Merca-
daute, qui avait eu quelque succès à Venise, à Viccncc, a
Trîestc , à Bologne et à Florence , n'a pas été fort goûté
dans cette ville. Les chanteurs étaient Reina. Genero,
M— GHsi cl Otlo. Le ballet de Paolo e Virginia n'a pas été
plus heureux. Pour réparer cet échec, l'administration
prépare la mise en scène de VAssedio di Corinto . et un
nouveau ballet.
Pi»is»Nce. La salle de spectacle, restaurée par le fameux
Sanquirico, était un attrait pour attirer le public, auquel
(1) Ou lait que c'est dans relie soirée que tous les théâtres foui l'ou-
verture do la saison , après quelques jmirs de repos.
6io
on n'avait pas d'opéra nouveau à donner. Otello, chanté
par M1" Émilie Bonini, Bonoldi, lenort, Domenico Winter,
Biscottini, et Berini, basse cantante, a obtenu du succès.
Celle troupe est composée en partie de chanteurs qui n'ont
pas réussi à Paris.
Florence. Théâtre delta Pergola. Un jeune compositeur
avait écrit l'opéra nouveau qui avait pour titre Monten-
ciel. Nous disons qui atait, car le pauvre opéra est défunt,
malgré l'exécution des chanteurs Amalie Brambïlla, An-
gelo Hanfagna, premier bouffe comique , Fasciotti , pre-
mier bouffe chantant, et Harchionni, premier tenore,
auxquels on donne des éloges.
Bologne. Quelques lignes du journal I Tkeatri nous ap-
prennent que l'opéra et le ballet sont tombés à plat, mais
sans en indiquer les tilres. Nous serons mieux instruits
dans quelques jours.
Fehrahe. L'opéra qu'on avait choisi était Tebatdo ed Iso-
lina. Crivelli s'y est fait applaudir en plusieurs endroits ;
la signora Fanti, prima donna, y a eu du succès dans la ca-
vatine du premier acte, ainsi que M™ Casimir Ney, mu-
sico, dans la romance du second, et Orlandi, basso vantante,
dans l'introduction ; néanmoins l'ouvrage a fait peu de
plaisir.
Ta i este. Ametiae Patmer, opéra bouffe de Celli, d'une
extrême faiblesse, n'a pu être soutenu par le chant de
Frezzolini, de Coselli, basso cantante, du lenore Centili,
ni de M" Ferlotti. On ignore quel doit être l'ouvrage qui
sera substitué à cette triste production.
Beeecu. Teairo grande. La partition de Rossitu , Matitde
dl Shabran, qui a rarement été heureuse, a eu cette Ibis
un succès complet. On s'accorde à donner des éloges à
M" Valesi et au primo basso cantante, César Bndiali. Les an-
tres chanteurs étaient Joséphine Mcrola , primo musiro,
Boccacini, premier tenore, et Valesi, premier bouffe co-
mique.
.Mas ion:. VOtetlo, exécuté par La Uardanclli, Mari, lc>
ténors Mosca et Bonola, cl le basso vantante Cugliclmu G<i-
gliulmi, n'a plu que médiocrement. La réputation de ce
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Su
bol ouvrage est maintenant trop bien établie pour qu'on
puisse attiibueràla musique le défaul de succès; les chan-
teurs seuls sont coupables.
C tt m une. Malgré la faible troupe des chanteurs de cette
saison, la Scmiramidc. a eu du succès. Quant au ballet,
dont le sujet était un Irait historique de la vie de Frédé-
ric-le-Grand, il a paru si ridicule que les Éclats de rire et
les huées se sont mêlées aux sifflets , et que le public est
sorti sans attendre la fin de la pièce.
Chêmr. Ttbaldoc Isolina, qui n'a point réussi à Fcrrarc,
a eu- ici le succès le plus heureux. Parmi les chanteurs ,
on cite avec éloges Sirletti et sa femme.
Loin. Les ouvrages préparés pour la saison étaient II
Posto abbandonato, opéra de Mercadanlc, el Le Notzesa-
voiarde, ballet : lous deux ont réussi. La troupe chantante
se compose de Vasoli . Sirletti , De-Sïmoni , et de M™" Co-
s:i1i et Massari.
A llcrgamc, le public indigné qu'on ne lui eût point
dunné d'opéra pendant le carnaval, a sifflé la troupe co-
mique de Bonmartini.
La récapitulation que nous venons de faire prouve la
trisle Vérité que nous avons énoncée plusieurs fois , savoir
que la musique est dans un élat de décadence complète
en Italie. Ce qu'il peut y avoir encore de compositeurs
estimables a quitté la carrière du théâtre, et le reste est
an-dessous de la critique. 11 y a plus , c'est qu'il ne reste
pas même de quoi 'composer de mauvais opéras, puisque
tous les entrepreneurs sont réduits à donner d'anciens
ouvrages qui traînent depuis dix ou douze ans sur lous les
théâtres, el cela à l'ouverture de la saison du carnaval,
saison qui était autrefois U plus brillante de l'année , el
qui voyait éclorc des chefs-d'ocuvre aux lempsde Jonicllï,
de fllajo, de Galuppi, de Tractla, de Paisiello, de Cima-
rosact de Giiglielml.
La partie du chant n'est guère plus satisfaisante, puis-
que des ouvrages éprouvés comme ceux de Hossini, ont
manqué leur effet dans une foule de villes. Les Italiens
de nos jours ^'indignent quand on leur tient ce langage
6is
sévère; maie les faits sont là qui prouvent d'une manière
incontestable combien il est fondé.
— Itcnicr lie m or mi, l'un des meilleurs chanteurs de l'Ita-
lie, pour les rôles de basse, est mort à Bologne dans la
nuil du a8 au 29 décembre, d'une maladie de consomp-
tion, à l'âge de quarante-quatre ans.
PUBLICATIONS CLASSIQUES.
Sfhèbe hahmothquBi . pn r Léopold Aimoii , une feuille
grand-raisin, prix, j fr. 5o cent. A Paris, chez Collinct,
place du Louvre, n* 4, près la rue du Coq, et clici l'au-
teur, rue Sainte-Aune, 11° 29.
On a souvent essayé de présenter les élémens do l'har-
monie dans un seul tableau; celle méthode a quelque
chose de séduisant par l'avantage de présenter aux yeux
tous les groupes de sons dont ou fait usage dans la com-
position ou dans l'accompagnemcut ; mais son défaut ra-
dical est de faire évanouir les circonstances qui précèdent
ou qui environnent ces groupes ou accords , celles qui les
font naître ou qui eu résultent, en un mot, les lois de leurs
successions. Par ce genre de méthode, on reulre ilaus
l'ancien enseignement de l'harmonie dans l'école fran-
çaise, et dausla théorie des harmonies isolées de Hameau.
Le point essentiel, l'a rt.de l'aire usage de ces harmonies,
ne peut être montré daus des espaces si rétrécis ; c'est ce
qui s'est toujours opposé au succès de ces sortes de ta-
bleaux.
Celui de M. Aimon , sans renfermer toutes les harmo-
nies possibles, contient les plus usuelles. Un grand cercle,
qui occupe le centre du tableau, offre aux yeux les accords
primitifs parfait et de septième dominante, avec leurs
dérivés , classés sous les nombres 1 et 1. Jusque là , tout
est bien; mais ceux de neuvième majeure et mineure de la
dominante, ceux de septième do sensible, de septième di-
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6i3
minute ; tous ceux enfin qui s'attaquent sans préparation,
et qui proviennent de substitution, auraient dû suivre im-
médiatement , et être rangés sous les numéros 5 , 4 et 5.
Au lieu de cela, Il-s neuvièmes se trouvent au n" g, la
septième île sensible au 11° (%, et ta septième diminuée au
r" 5, tandis que l'accord do septième du second degré,
provenant de prolongation el de substitution réunies, se
trouve un n" 3, cl précède les retardemens simples ds
quarte dans l'accord parlait , qu'on ne rencontre que sous
i'armi ces retardemens simples, ou du moins parmi
leurs résultais , car on ne voit , dans la sphère harmonique
de H. Aimon, ni prolongations , ni rien de ce qui produit
les harmonies composées, on cherche en vain l'accord de
septième, retardement de celui de si&tc simple, cl l'accord
de septième et quarte , relardement de celui de quarte cl
sixte. Je ne parle pas de toutes les harmonies qui peuvent
provenir de la prolongation des intervalles altérés dans
les résolutions de cadences, et qui ne se trouvent pas non
plus dans le tableau de M. Aimon, Ces harmonies, qui
sont des acquisitions toutes récentes faites par l'art, n'é-
tant pas d'une nécessité absolue pour écrire ou pour ac-
compagner. Mais je reprochent î à l'auteur de la sphère har-
monique d'avoir présenté quelquefois des successions vi-
cieuses, telles, par exemple, que la résolution de la quinte
diminuée en montant, qui produit entre les parties des
extrémités deux quintes successives plates et dures.
Je ferai aussi remarquer à SI. Aimon qu'en présentant
lout autour de son grand cercle les accords parfaits et de
septième dominante dans tous, les Ions, il peut faire croire
aux élèves qu'il s'agit d'harmonies différentes , ce qui est
un mal; en outre, au lieu de faire précéder l'accord de
septième par l'accord parfait, il aurait mieux valu prendre
l'ordre inverse, qui aurait du moins fait voir la résolu-
lion de la dissonance.
Il m'en coùle d'affliger un homme estimable; mais je
dois lai déclarer qu'eu admettant l'idée première de 6ou
tableau, l'exécution aurait besoin de grandes améliora-
le 11° 7.
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Oi4
lions, dont mes critiques lie peuvent même lui donner
que les indications principales.
ANNONCES.
Vous qui priez, priez pour moi, romance avec accompa-
gnement de piano, par Endrès. Pris : a fr.
— Variations concertantes pour piano et violon , sur un
thème d'Armide de Gluck, par Chaulieu et Fontaine.
Prix: 7 fr. 5o cent.
— Romance chantée par M. Derval , dans Galcb , mu-
sique d'A. Adam. Prix : 1 fr. 5o cent.
~~-t.es Canards, couplets chantés par M"* Albert , dans
Caleb, musique d'A. Adam. Prix : i fr. 5o cent.
A Paris, à l'adresse ci-dessus.
Variations brillantes pour piano seul , dédiées à Made-
moiselle Ëlisa de llegnon, et composées par C.-L. H hein.
Op. 37. Prix: G fr. A Paris, chez Zetter et Comp*, rue du
Faubourg-Poissonnière, d* 3.
— Fantaisie pour piano et harpe sur des motifs du siège
de Coriiithe, dédiée à Madame, duchesse de Bcrry. par
M"* Desargues. Prix : g fr.
•—Souvenir de Moïse pour piano et violon, dédié a
Madame la princesse de Chimay, par G. -A. Osborne et
A.-J. Oury. Prix, 7 fr. 5o c. A Paris, chex K. Troupenas,
rue de Heurts, n° 3.
Les auteurs de coite légère production n'ont eu qu'un
but, celui de reproduire dans un arrangement agréable
les motifs brillansetélégans de l'opéra do Moïse; ils se sont
fort bien acquittés de la tache qu'ils avaient entreprise.
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TABLE
DES MATIÈRES PRINCIPALES
CO FI TENUES DANS LE SECOND VOLUME.
(Opérai, V- 16, m-, S71 et i,\
— Première re pré «11 talion dt
t. Début» de M-< Dé-
Conci.ra (.urle). 307-111
Couciit de M. L»fonl ; voyez
théâtre de Madame.) 35S— 3S8
de M™' Stnciiiucn , de
M. Mcngal, rte M. et
dcMH.TlolirerrWn^. 5S:>— S,-
BlInitT ( Charlc* ) ; m;r: Biu-
■ob. (Domioiijue-Pier
tgyfj lllORrapliie.
Cwkmt (du ) «t du ohiutt»
— f Diiiribuiian 3m [>■ Jx i
cinecrt rte* .■[;.■■,.■„ <L ~
- fflnr le. rifarmu opère.
EnflKCimm (le r^nTÏTi M,,,,»!)
ealet.
ExummjiTile In miuiniu.
— (Objections contre cette For-
mation de la); par M. Trou-
penas. £
— ( Réponse de M. Illein oui
Objection! ïtmlrc la). a
Oiniumn mélodique, a
H. art (Sur la) à double mou-
vement. 3Î7-5
U»FNBOiM(I<0lk>enu'l']- *G
iMiiin D' F."». Séance
publique aunudlc de l'ara-
ritaiM(l) ■ . . '
ubie do la ) , pat le docteur
Lichtcnthal. 1 70 —
Mosioui (Observation» fugi-
tif es d'un voyageur alFe-
mand sur l'État de la ) à
Dresde pendant l'été do
- ( Dise
i, la
de) religieuse.
3c-6 — 3 on
(Revue des joornaui de 1
|-..,!,li, H ,l;ms lei di
■ (Del
dignement delà).
rJela). ^ j5oà~-l?o
pliie de la musique. I
ils , '79- îaî. ïil> ï3D-
3?5, Sui
Mu» (Andréa); son discours
sur l'origine, les progrès ,
Mtii (Vie de M'«
AUisonoua ( Sur le) de Mael-
■tl 36.-3G4
— perfectionné de M. Bicn-
aimé. SM
Manges (Eiamcn du travail
de M. Villote.u sur la) des
peuples orientaui. 1—9
— (Quelques détails sur la ) en
Hussic. 10S— lu
fÊ lai; ifê IzL
Koantim ÉraisCKnus, îSj
<p, MJj lie î'io,
■177, 5.1 a. 557r
Ooiov [théâtre rojol de i"J ; le
Paria, IcRarliir-r lie Séville.
— Les Deui Figaro. 1
— Ta.icri-de. 1
— Première représentation lie
l'Eau de Jouvence. 5
— Première représentation de
Cliarlea V et Duguesclin. 3
— Don Juan. J
OutBi-Comur» (théâtre royal
de). Les Deui Journées; la
Dame Ulanelie.
— ".entrée des Sociétaires. —
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O PS a 4 Cri H TOUS (théâtre rut al
de). Première rcpréscnta-
liun du Roi El le Batelier. S5i
-- Débuts de M"' Hirté. Re-
prise de l'Amant et le Mari. 4t>4
— Première représentation du
Colporteur. 417
— Hiipr.Mrnt.iliiin au bénéfice
de tluet. 47>
— Première représentation de
Masaniello. 543
Oiflui. eipreuif perfectionné
de M. Erard.
l'.r.n (Lettre de M.Jaui di-
IciUntl*.
r.isos de MM. Pfeiflcr, Roi
1er, Plejel , Dfctl, Klepfcr,
de. 8a,
Pubo mélcgraphc de M. Ca-
""cli ■ M. Baudouin.
«(le).
Iiiuln de Bologne, ge}
— de Madrid. 117-iao
— royal de Rrtiïelles. igo
— de Francfort-sur-le-Mcin. aîS
— de la Scala , a Milan. a38-a3r,
— royal et de Kosoigstadt, à
Berlin. a6o— aSa
— de Munich, a6i
— de Francfort. a63
— - (^irnriieriijCt dï Borgognis-
santi a Florence. »G3
— Valle , a. Rome. s63
— Saint-Luc , a Venitc. J.63— 1S4
— Karntbnerthor, 4 Vienne.
a8a-aS4
— de Stutlgard. s84
— de Weimar. a84-s85
— de Ktcnigsberg. 186—387
— di* Piamie. ïBj
3o4-3o5
— dcTricste. 3o5— 5o6
— royal , de Kcenigstatd , a
Berlin. 317— 3!o
— de Casse], 5So
— de Dresde. 33o
— de Mayence. 33o
""0.S7S-574
4S , 517 — de Cassel.
5o3
balilu ed Iiulina. 3;
— La Donna delLago. Dèbuti
du M. Puggi. 6i
— Première représentation d<
Ciulclta c Romeo. i6j-[G4
— Concert vocal et imtrt
— Tanctedi. Déb. de M" Ru
-40
— delà Scala, a Milan
— délia Fenice, à Venise.
— Nuovo , à Nice.
— de Milan
S5i
55a
S67
— L'itaiiana in Algeri. 415—448
— Olellu. Dcb. de M"« Son-
tag. 548-55o
ThSiiss dus Nouïbuit*!. Fi-
garo , ou le Jour des Noce*, go
— Première représentation de
Faust. 3au
Thsities de Francfort sur- le.
Mcin. a a
— deKoinigstadtàBcrlin. o3-o4
igstadt , a Berlin.
4o5 5%
— de La Fenice, a Venise. 570
-3o3 TH»nass ( dcui mots sur les)
de Paris. 148— lSS
355 Tous (désignation des) en Ita-
lie ; sur quoi fondée. 4S
-Jo4 VAitïTts. io3,4Ai,4g5. 5iB
uoisi (Louis) ; wyes Bio-
graphie.
V,«tLi, instrument du moyen
âge; manière de l'accorder. 40:
— Son étendue générale. 48:
1 étendue généi
Y 1 ilôt* m. Son Ira Ta il
instrumens des Orientaui.
Violobs, altiu et basses per-
fectionnés, par M. Thibaut
487
E Dr SECOSD VOLUME.
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ERRATA
DES DEUX PREMIERS VOLUMES DE LA REVUE MUSICALE.
TOME 1".
l'ugc 55 , ligne i, au lieu ,lc Ztumpl , lias Zumpf.
4>
a, du /<eu de hfargtni , rfinK Marginc.
74.
39, an d'eu ife 57,a5o l'ranos, (iic; 67,060.
95
170118, nu lieu rf<™i 3TrYia piû>, 'ùk.iSv inguouftûv.
iî3
36,.au h'cu de Fraentil, litet Fraeml.
i53
3, au /icu de Federici , fini Farinelli.
■65
3 1, au lieu de il, Guiflon , /iie: M. Guillou.
i7S
118
S, au lieu de rappelé, liiez rappelée.
Idem.
8, au lieu de engagé , lise- engagée.
56o
7', oprei les mots clef de Jol , effaeL el n'étend.
385
36, ou lieu de M. Pésaroni, /i*«î M™ Pisarunï.
5i3
ag, au /ieu de Creamllilne cruit , d'ici Crcamthine 1
ISS9
au /(eu de musicales , liiez instrumentales.
545
dans la note, ligne dernière, au lieu de sic* ta ,
S78
18, au lieu de Frawlini , liées Frciiolioi.
TOME II,
35
16, nu (ieu de lii pointa, lisez lii pointes.
36
g, au lieu de obligé , lisez forcé.
44
■ 1, au lieu de Simmcrnian , (iiei Zimmerman.
65 6, au (ieu de prédécesseur, liiez successeur.
68 1, au (ieu de Ilentkl, lisez Hœndel.
101 16, au (ieu de ces mots croit que la difficulté, liiez pense
que la difficulté.
104 avant-dernière ligne , au lieu de le son, lisez ce 100.
109 3o, au Heu de intinaginarii , (iiei imnginari.
i35 avant-dernière ligne , au lieu de Caignard de la Tour,
(ire: Cagnard de la Tour.
16g 13 et 31, nu lieu de Handel, (iie; llj:nde].
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âge 171 i
et So, ou d'eu de Toso, «m* Tosi.
S, dont celle phrase : tou
t en profitant de celui, etc.,
34;
4, an lieu de que de la 1
nOme corde, lue: de la même
4fi'i
a, au lieu de dans ses (i
astrumenji) corde), liiez dani
noie 1, quatrième ligue
496
10, aux Mil le taieat El
■ tels , que peu doit importer actuellement à cei »r-
• tiilea l'une ou l'autre manière, etc. •
5io i5, au lieu de l'intervalle deut jf a la, lisez l'intervalle de
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wBÊBË