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Full text of "Bulletin de la Société liégeoise de littérature wallonne"

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BULLETIN 

DB LA 

SOCIÉTÉ LIÉGEOISE 

DE LITTÉRATURB WALLONNE 

DEUXIÈME SÉRIE. — TOME 11. 



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BULLETIN 



DE I.A 



SOCIÉTK LIRGEOISK 



DE 



LITTÉRATURE WALLONNE. 
DEUXIEME SÉRIE 



TOME II. 




LIÈGE 

IMPRIMERIE H. VAILLANT-CARMANNE, 
Rae SaiDt-Adalbert, S. 

1877. 



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Philol 42.10 



Harvard Oolleffe UlMVf 

J.J.LOweU fond 



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SOGI16t£ L.I1Ê4S^B01SB 



DB 



LITTÉRATURE WALLONNE. 



CHÂPITRE PRÉLIMINAIRE. 

Art. !<"'. Il est constitué à Liège une Société dans le but 
d*encourager les productions en Wallon Liégeois; de propager 
les bons chants populaires; de conserver sa pureté à notre 
antique idiome, d'en fixer autant que possible Torthographe et 
les règles, et d'en montrer les rapports avec les autres branches 
de la Langue romane. 

CHAPITRE II. 

Titre et tra'vau:^ de la Aoolété* 

Art. 2. La Société prend le titre de Société liégeoise de 
littérature ivallofine. 

Art. 3. Elle institue un concours annuel de poésie wallonne 
entre les poètes du pays de Liège. 



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— VI — 

Un concours pourra égalem^^nt être établi sur les questions 
historiques ou philologiques relatives au wallon. 

Art. 4. [i) Le sujet du concours, ses conditions, les récom- 
penses k donner aux lauréats, (2) sont déterminés chaque 
année par la Société dans le courant du mois de novembre. 

La distribution des prix pourra avoir lieu en séance 
publique. (3) 

Art. 5. La Société réunit les matériaux du dictionnaire et de 
la grammaire du wallon liégeois. Elle détermine, autant que 
faire se peut, les règles de la versification. 

Art. 6. La Société s'assemble de droit au local ordinaire de 
ses séances, à six heures du soir, les 15 des mois de janvier, 
février, mars, avril, mui, juin, juillet, novembre et décembre. 

Dans le cas où ces dates tombent un jour férié, la réunion a 
lieu le lendemain. L'assemblée générale est celle du mois de 
janvier. 

Art 7. La Société s'assemble aussi sur toute convocation du 
secrétaire ordonnée par le président. La convocation contient 
l'ordre Ju jour. 

A la demande de trois membres titulaires, le président doit 
faire convoquer la Société. 

Art. 8. L'assemblée délibère sur les projets à l'ordre du jour 
lorsque cinq membres titulaires sont présents. 

(^) Cet arUcle a été modifié comme suit dans la séance du 45 novembre 1870. 

Abt. 4. Le sujet du concours, ses conditions, les récompenses qui y sont ii donner 
aux lauréats sont déterminés chaque année par la Société dans la séance du 1 8 janvier. 

Le dépouillement des pièces envoyées, ainsi que la nomination des jurys, se fera 
dans la séance du 15 décembre de la même année. 

Enfin les jurys déposeront leurs rapports et feront connaître leurs décisions au 
plus tard, autant que possible, dans la séance du iS novembre de l'année suivante. 

(*) Toute mention honorable donne droit h une médaille en bronze (Séance du 
45 mars 4858).' 

Toute personne ayant obtenu une médaille dans un concours de la Société recevra 
le Bulletin de l'année correspondante (Séance du 45 février 4859). 

(') Cet article a été ainsi modifié, le 15 février 4858, par une décision de la 
Société. 



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— vil — 

En cas d'urgence reconnue par rassemblée, il peut être stalué 
sur tout autre objet non prévu à Tordre du jour. 

Art. 9. Sur demande de trois membres, le vole a lieu au 
scrutin secret. 

Toute élection a lieu au scrutin secret. 

Art. 10. Toute discussion politique ou religieuse est interdite. * 

CHAPITRE III. 
Des fbnetlonnalreft et du IBurean. 

Art. 11. Les travaux de la Société sont dirigés par un 
bureau composé d'un président, d'un vice-président, d'un 
secrétaire, d'un bibliothécaire-archiviste et d'un trésorier ('). 

Art. 13. En cas d'absence du président ou du vice-président, 
le membre le plus âgé en remplit provisoirement les fonctions. 

Si le secrétaire est absent, le président choisit un des 
membres pour le suppléer. 

Art. 13. Le président, le vice-président, le secrétaire, le 
bibliothécaire-archiviste et le trésorier sont nommés tous les 
ans dans la séance du 15 décembre ; ils entrent en fonctions 
dans la séance du 15 janvier. 

Art. 14. Le président règle l'ordre du jour et dirige les dis- 
cussions ; il veille à l'exécution du règlement ; il rend compte 
des travaux de l'année écoulée à l'assemblée générale du 15 
janvier. 

Art.15. Le secrétaire tient le procès-verbal des séances et la 
correspondance ; il exécute les décisions de la Société. Il est 
dépositaire du sceau. 

{*)Les articles il, i 3, i 5 et 16 ont été aiosi modifiés par la Société, le 15 mars 
4S66. 

Ed outre dans la séance da 1S décembre 1870, il y a été ajouté ceci : Le trésorier 
remplit les fonctions de secrétaire-adjoint (décision du i5 avril 1870). 11 est chargé 
de la perception des annates, de la dislribution des Bulletins e( autres imprimés de 
la Société. Il peut lui être alloué de ce chef une indemnité. 



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— VIII — 

Art. 16. Le bibliolhécaire-arcbiviste conserve et classe la 
bibliothèque et les archives. — Le trésorier opère les recettes, 
fait les payements, et en rend compte à la fin de Tannée, le tout 
sous la surveillance du président. Chaque année, il sera dressé 
un projet de budget pour le nouvel exercice. 

CHAPITRE IV. 

Des membres de la tt€»ctété. 

Art. 17. La Société se compose de membres honoraires, de 
titulaires, d'adjoints et de correspondants. 

Art. 18. Les membres honoraires sont : A. le bourgmestre 
dé la ville de Liège ; B. le président du Conseil provincial ; C. 
les personnes qui ont rendu des services éminents à la Société 
et à qui cet honneur est décerné par les votes des trois quarts 
des membres titulaires présents. 

Art. 19. Les membres titulaires de la Société sont au nombre 
de trente. 

Ils ont seuls voix délibérative et consultative. 

Art. 20. Les personnes présentées par trois membres titu- 
laires sont inscrites comme membres adjoints. Les présentants 
sont responsables du paiement de la cotisation de la première 
année due par le membre adjoint qu'ils ont présenté. 

Art. 21. Les membres correspondants sont nommés à la 
majorité des membres titulaires présents ; ils se tiennent en 
relation avec la Société. (*) 

Les membres honoraires, adjoints et correspondants ont le 
droit d'assister anx séances fixées par le règlement. 

Art. 22. Les membres titulaires sont choisis parmi les 
membres adjoints à la majorité des votes des membres pré- 
sents. 

(i) Les membres correspondants ne figureront au tableau que lorsqu'ils auront 
accepté ce titre. Ils sont invités à foire don à la Société de leurs publications. 
(Séance du 45 février i861.) 



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— IX — 

Art. 23. Les membres titulaires signent les Statuts avant 
d*entrer en fonctions. 

ART. 24. La démission donnée par un membre titulaire ou 
adjoint ne le libère pas du paiement de la cotisation de l'année 
dans le courant de laquelle la démission est donnée. 

CHAPITRE V. 

Des publication». 

Art. 25. La Société fait imprimer : 

A. Les pièces couronnées dans les concours et celles non 
couronnées qui méritent cette distinction (M. 

Ces pièces deviennent sa propriété tant sous le rapport de 
l'impression que sous celui de la représentation (*). Tout 
manuscrit envoyé au concours est déposé aux archives. 

B. Les pièces anciennes dont la rareté et le mérite nécessitent 
la conservation. 

C. Les pièces adressées à la Société lorsqu'elles en sont 
jugées dignes. 

Dans toutes ces pièces, le» convenances devront être respec- 
tées tant dans le fond que dans la forme. 

Art. 26. Le Secrétaire est chargé de remplir les formalités 
voulues par la loi pour assurer à la Société la propriété de ses 
publications. 

Art. 27. Un exemplaire numéroté de toute publication est 
de droit remis sans rétribution à chaque membre honoraire, 
titulaire et adjoint. 



('] L'insertion an Bulletin d'une œuvre quelconque est accompagnée du tirage à 
part de 50 exemplaires destinés à Tautenr. (Séance du 1K février i86i.) 

(*) Cet article a été ainsi modifié , le if juin 1875, par une décision de la 
Société. 



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— X — 

La Société peut décider l'envoi d'un exemplaire aux corres- 
pondants. 

Un exemplaire est adressé aux Sociétés qui accordent la 
réciprocité, à la bibliothèque royale de Bruxelles et à celle de 
rUniversîlé de iiége. 

CHAPITRE VI. 
Des recettes et de« dépenses. 

Art. 28. Les recettes consistent : en cotisations ordinaires 
payées par les membres titulaires, fixées à dix francs ; en cotisa- 
tions payées par les membres adjoinis, fixées à cinq francs; en 
cotisations extraordinaires que la Société s'impose; en dons 
volontaires; en subsides éventuels de la Commune, de la Pro- 
vince, de l'Etat, et en produit de la vente des exemplaires des 
publications livrées au commerce. 

Art. 29. Les dépenses ordinaires sont celles pour frais d'ins- 
tallation et de bureau; elles sont ordonnées par le bureau. 

Art. 30. Les dépenses extraordinaires sont celles qui sont 
occasionnées par les publications de la Société et les prix à 
décerner aux lauréats des concours. Elles ne peuvent être vo- 
tées qu'à la majorité des trois quarts des membres titulaires 
présents. 

CHAPITRE VIL 

De la révision du règlement et de la dissolution de la 

Société. 

Art. 31. En cas de nécessité reconnue par la majorité des 
membres titulaires présents et absents, les Statuts peuvent être 
modifiés. 

Aucune résolution ne peut être prise à ce sujet qu'après avoir 
été discutée dans deux des réunions de droit. 



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— XI — 

Eq cas de dissolution, laquelle ne peut être décidée qu*à la 
majorité des trois quarts des membres titulaires présents et 
absents, la bibliothèque, les archives et le sceau de la Société 
Sont déposés à la bibliothèque de l'Université de Liège et 
deviennent la propriété de la ville ; le solde restant en caisse 
est acquis eu tous cas au Bureau de bienraisance de la ville de 
Liège. 
Liège, le 27 décembre 1856. 



Pour copie conforme: 



Le Secréiair€y 
F. BAILLEUX. 



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TABLEAU 

DES 

MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 

ARRÊTÉ LE M DÉCEMBRE 4876. 



BUREAU. 

OiuxDGAGifAGB (Charles), Président ; 
Dbjardin (Joseph), Vice-Présidem ; 
iiOUARRÉ (Nicolas), Secrétaire-Trésorier ; 
Grandjeah (Mathieu;, Bibliothécaire- Archiviste. 

Membres* titulaire». 

CoLLiiTB (Viclop), fahricani d'aimes. 

Bejabdin (Joseph), notaire. 

GfiARDGAGifAGB (Charles), sénateur. 

HoGK(Angost6), rentier. 

KnscH (Hyacinthe), avocat. 

Massbt (Costa ve), ^fiQer. 

PiCABB (Adolphe), conseiUer à la Conr d'appel. 

Stbchbb (Jean), professeur à rUniversité et à l'Ecole normale. 

Thuy (Michel), inspecteur du service des transports au chemin de fer de l'Etat. 

Dbsokr (Auguste), avocat. 

BuBT (Auguste), avocat. 

Bs TmiB (Charles), conseiller à la Cour d'appel. 

Delboeuf (Joseph), professeur à l'Université et k l'Ecole normale. 

Gbanuban (Mathieu^, bibliothécaire à rUniversité. 

DM.A««(Jean-6uiUaaiBe), instituteur communal. 



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— XIV — 

Gremsom (Camille), àvoc&t. 

BfiACOMNtER-DE MACiR (Charles), induatriel. 

Falloisb (Alphonse), conseiller ^ la Gonr d'appel. 

Lequarré (Nicolas), professeur à l'Athénée royal et à l'Ecole normale. 

BoDT (Albin), homme de lettres, à Spa. 

Matthieu (Jules), instituteur, à Olne. 

DoRY (Isidore), professeur à l'Athénée royal. 

NiHON (Adolphe), juge au tribunal de première instance. 

Alyui (Auguste), préfet des études honoraire. 

RoDMA (Antoine), compositeur-typographe. 

Membres honoraires. 

Le Gouverneur de la Protirce. 

Le Président du Conseil provincial. 

Le Bourgmestre de Liège. 

BORHANS (J.-H.), professeur émérite k l'Université, membre de l'Académie royale. 

Grandgagnage Joseph), premier président honoraire de la Gour d'appel. 

Lamate (Joseph), conseiller à la Cour d'appel. 

Littré (Emile), membre de l'Institut de France. 

Membres correspond^Ants (*)• 

Alexandre (A.-J.), professeur à l'Ecole moyenne de Gosselies. 
BovY 1 Félix), peintre et homme de lettres, k Bruxelles. 
Breden, professeur au Gymnase d'Arnsberg. 

Chalon (Renier), membre de l'Académie royale de Belgique, à BraXeHes. 
Gravée (H.), homme de lettres, à Paris. 
Clbsse (Antoine), homme de lettres, i Mons. 

Damoiseau, professeur à l'Athénée royal de Mons. 

De Backer (Louis), homme de lettres, à Noord-Peene (France). 

De Cbristé (L.), imprimeur, k Douai. 

De Coussemaker (E.), président du Comité flamand de France, à Dankerque. 

Delgotalle (François), pharmacien, à Visé. 

De Noce f Arsène), docteur en droit, à Maimedy. 

(*; On croit devoir appeler Tattention de Messieurs les membres correspondiants 
sur la noie de l'art. 21 du règlcmonl. 



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— XV — 

Desbousseacz (A.), chef de bureau à la mairie, à Lille. 

GoMzÉ (Coraeil), homme de lettres, à Ver viers. 

flYMAHs (Louis*, homme de lettres, à Bruxelles. ' et 

Lagrange (Philippe), négociant, k Namur. 

Le Pas (Auguste), professeur au Conservatoire royal de Liège, à Jupille. 

Lerat (Eugène), teinturier, k Tournai. 

MiCHELAiTT (H.), vice -président de la Société des antiquaires de France^ à Paris. 
Magnée (Gustave), vérificateur des douanes, à Theux. 
Mamsion (Paul), professeur à TUniversité de Gand. 
Morel (A.), homme de lettres, à Paris. 

Poulet (Nicolas), peintre, à Verviers. 

Rehard (M. G.), vicaire, à l'église du Sablon, à Bruxelles. 

Renard (Jules), à Paris. 

Renier (J.-S.), peintre, ii Verviers. 

Scheler (Aug.) bibliothécaire du Roi, à Bruxelles. 
ScHUERMANs (H.), conseiller à la Cour d'appel de Liège. 

Vam Bbmmel (Eugène), professf^ar à TUniversité de Bruxelles. 
Van dbr Elst, président de 1 ôociélé archéologique de Charleroi. 
Vermer (Aug.^, docteur en médecine, à Bauraing. 
VoN Keller (Âdalbert), professeur à l'Université de Tubingo. 

Biembre» ac^olnto. 

Aerts (Auguste), notaire. 

Albert (Léon), avocat. 

Ansiaux, professeur de musique, è Charleville. 

Ancion (Dieudonné), fabricant d'armes. 

Antoine (P.), peintre, à Herstal. 

Antoine (Edouard), comptable. 

Attout-Frans, négociant. 

Balat (Alphonse), architecte, à Bruxelles^ 
Batet (Emile), ingénieur, à Bruxelles. 
BateT'Mottard Jules), fabricant. 



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— XVI — 

.AUFORT (Cëlestin), greffier. 

EADJE4N (Eugène), négociant. 
Bealjean (François), négociant. 
Bf.duwë (César), industriel. 
Behr (Frédéric), attaché à la fab. de fer, à Oogrée. 
Bellefontàuie (François), négociant, 
Beixefroid (Victor), directeur de la Banque liégeoise. 
Beltjens (Gustave), conseiller à la Cour d'appel. 

RÉRARD (Charles), ancien directeur au département des finances, i Bruxelles. 
Bëhahd-Leurquin, négociant. 
Bernard (Félix), notaire, à Montegnée. 
Bernus (Louise, propriétaire, à Charleroi. 
Bebtrand (Francoisj, avocat. 
BERTRàND (Oscar), notaire. 
Beuret (4uguste), fabricant. 
Bu (Lambert-L.), ingénieur. 
BiAR (Nicolasj, notaire. 
BiDAUT (Georges), à Bruxelles. 
BiKA, rentier, à Bruxelles. 
Billon-Hartog, négociant. 
BiRCK-GoLLETTE, fabricant. 

Blomden, ingénieur-directeur des travaux publics de la ville de Liège. 
BoDSOif (Mathieu], vicaire. 
Boland (Henri), libraire, à Verviers. 
Bonhomme (Henri), à Verviers. 
BoRGUET (Joseph), entrepreneur. 
BoRGUET f Louis), avocat. 
BoRGUET (Louis), docteur en médecine. 
BoRMANs (AUard), docteur en droit, ingénieur civil. 
BoRMANS (Théophile), substitut du Procureur du Roi, à Arlon. 
BosERET (Charles), avocat. 
BouGARD (Charles), avocat- général. 
BuuHY (Jules), industriel. 
Bouille (Nicolas), industriel, à Verviers. 
Bouille (Olivier), à Verviers. 
Bourdon (Jules), échevin. 
Bourgeois (Nestor), ingénieur. 
BouvT (Alexandre), tanneur. 
Braconier (Frédéric, représentant. 
Braconier (Léon), industriel. 



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— XVII — 

Bmaiy, oëgociant. 

Breuer (J.-B.), négociant. 

Brorne vGeorgGs), avocat. 

Brorne (Gustave), fabricant d'armes. 

BucKERS (Gérard), industriel. 

BosTiR (Oscar , direciearde charbonnage. 

Calificb (Pascal), fabricant d'armes. 

Caxbresy (Alph.), ingénieur. 

Cafitaire (Edouard), président de la Coar du Limbourg, à Maastricht. 

Capitaine (Félix , conseiller coromanal. 

Carlibr (Cb.-Jos. , tannAor, à Buy. 

Carlier ^Florent), rentier, à Visé. 

Carmarre iS.), professeur au Conservatoire, à Chaudfontaine. 

Carpat (François;, instituteur. 

Carez-Ziegler, négociant. 

Catalah(E. G.j, professeur à l'Université. 

Charofxon J.-T.-P.), professeur k l'Université, membre de l'Académie. 

Charles (Prosper), avocat. 

Charlier (Eugène), docteur en médecine. 

Cbaudoir-Van Melle, fabricant. 

Chèvremokt (Henri), ingénieur civil, à Herslal. 

Clochereux (Henri), avocat. 

Closor (Joseph^ avoca». 

Colle (Jos.), avocat, à Fosse. 

Collette (Léopold), fabricant d*armes. 

Comhaire (Charles), avocat. 

CORSTAHT (Erasme), marchand de fer. 

CoBBESiER (Henri), ancien vériQcateur dd l'enregistrement. 

CoRBUsiBB, industriel. 

CoRiR, professeur de musique, it Uerstal. 

CORRESSE (Edouard;, négociant, k Aywaille. 

CORRESSB (Prosper), avocat. 

CoccHR (i.-B.), directeur de la prison cellul'*ire. 

ConcLET-llouTOR (F.), rentier. 

CouRARO .Emile), directeur de foors à coke. 

CRALLE(iLdmond). 

Cdoell (Adolphe), avocat. 

Damby (Walthèro), photographe. 

Dardelir (Camille), inspecteur au chemin de fer de l'Etat, k Embourg. 



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• Wlll 

D'Andrimont- DEMET, industriel. 

D'AifORiuoKT-DE MÉLOTTE, représenlan*. 

D'ANDRiHoiiT(Lëoa\ administratear de la Banque nalioDalc. 

Dardcnnb (Hyac), avocat. 

Daubrbsse (Emile), général-major pensionné, à Mons. 

Dadw (Ë/, conseiller k la Cour. 

David (Edouard), comptable, à Verviers. 

Dawans-Closset (Adrien), fabricant et conseiller provincial. 

Dawans-Okban (Jules), fabricant. 

Dat£NEUx (Charles), rentier. 

Debcfve (P.-A.}, négociant. 

De Borman (chev. Cam.), docteur en droit, âSchalkoven. 

De Boubers (Adolphe), greffier du canton de Louveignc. 

De Bronckart (Emile), ancien représentant, à Bra 

De BuGGfiNOVs, rentier. 

DcFRECHEux (Charles^, à Ilerstal. 

Defuisseau, médecin principal de l'armée. 

De Glïhes (comte-, procureur du Roi, à Charleroi. 

Dehasse (Auguste), fabricant. 

DcHASSE (Félix), fabricant. 

Deresëlle (Victor), fabricant, à Thimistcr. 

Debin (Ils. 

DEJARDi.*t (Adolphe), capitaine du génie. 

De la rousselière ^baroo Arthur), secrétaire do légation. 

DeLaveleye (Emile), professeur à l'Université. 

Delaveux (Eugène), rentier. 

Delbooille .IiOuis\ notaire. 

Deleval (Edouard), vicaire, à Olne. 

DELP.XHY (M.-B.-J.), docteur en médecine, k Gr&ce-Berieur. 

Di^LFOSSE (Eugène) ingénieur civil. 

Delhassg (Félix , homme do lettres, à Bruxelles. 

Delue d (Jules), docteur en médecine. 

Deliége-Requilé (Jacques), fabricant. 

De LiMBOCRG(Ph.)« propriétaire, k Theux. 

De LoozCorswarem (comte Hyp.), sénateur. 

De Luesemaks (Charlesl, gouverneur de la Province. 

Del vaux, agrégea TUniversilé. 

Delvaitx (Louis), avocat. 

De Macar (Charles), colonel pensionné. 

De Macar (Augustin^ rentier. 



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— XIX — 

De Macar (Charles), avocat et conseiller proviociaL 

De Macar (b^roD Ferdinand), représentant. 

De Macar (Julien), directeur de houillère. 

Dehany ; Laurent), architecte et conseiller communal. 

Dexakï (Kerd.), commissaire de police en cher. 

Demant (Perd.), architecte. 

De Mélotte (Armand), rentier. 

Deneuse, bourgmestre, à Wandre. 

Demeuse (Bertrand), secrétaire du bureuu de Bienfaisance. 

De Moffaerts 'baron Léonce), rentier. 

De Moor (Henri), directeur de la Socidl<5 linière. 

Demouluï (Joseph), professeur au collège communal de Uuy. 

Denis (Alexandre , fabricant. 

De RASQinNET (Ldon), médecin. 

D'Erckertel ^Eugène}, juge de paix, a Nandrin. 

De Rossius (Charles), industriel. 

De Rossius(Fernand), avocat et représentant. 

Desart, directeur de houillère, à Herstal. 

Desart (Camille), lieutenant d'infanterie. 

De Savoie (T.-J), professeur à l'Université. 

Deschahps (Arsène^ professeur à l'AIhénée royal. 

De Sélys-Longchamps (baron), sénateur. 

De Sélts-Fanson (baron Ferd.), rentier, à Beaufays. 

De Sélys-Fanson (baron Robert;, consul à Pretoria Jransvaal). 

Desoer Oscar), rentier. 

Desoer (Emmanuel), substitut du procureur du Roi. 

Dessart Jos.), propriétaire, à Herstal. 

De Tbedx (Xavier), rentier, à Bruxelles, 

De Trier (Léon), homme de lettres. 

Detrooz (Auguste^ Juge au tribunal civil. 

De Vadx (Adolphe), ingénieur. 

De Vaux (Emile), ingénirur, k Bruxelles. 

Dewalqdb (Gustave), professeur à TUniversité. 

Dewez-Cdaudoir, négociant. 

DiGNEFFE (Léonce], rentier. 

DiGREFFE (Victor), agent de change. 

DisTEXHE (Hubert), graveur. 

DoGNÉE Joseph, aîné), avocat. 

D'Omalius (Frédéric), juge au tribunal de i^ instance. 

DoMMARTi.v (Léon), homme de Icllrcs. à Paris. 



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— XX — 

DONCKtia-JAMMB (Ch.), membre de la Dëpatation permanente. 

DORET (V.), conseiller provincial, à Verviers. 

DossiN (Henri), fabricant, à Huy. 

DossiN (Jules), négociant. 

DODHARD (Charles), conducteur des travaux publics. 

Dresse (Jules), rentier, à Chatneux. 

Dresse- iNCiON (Olivier), fabricant d'armes. 

DaiON (Prosper), professeur k l'Académie. 

Drion (Jules), commis greffier à la justice de paii. 

Dubois ^François), rentier. 

Dubois (François), vicaire, à Verviers. 

Dubois (Ernest), conseiller à la Cour. 

Dubois (Jean), vicaire, à Verviers. 

DuMOiiT (Fëlix), ingénieur. 

DuHONT (Eugène), conseiller communal. 

Ddmont-Magis, négociant. 

Dumoulin (Auguste), fabricant d'armes. 

Dupont (Alexandre), employé. 

Dupont (Edouard), notaire, à Liège. 

Dupont (Emile), avocat et représentant. 

Dupont (Ernest), chef de division au Ministère des travaux publics, à Bruxelles 

Dupont (Evrard), professeur émérite à rOniversilé. 

Dupont (François), ingénieur. 

Du VivieR'Sterpin (Louis), libraire. 

Elias (Robert), rentier. 

ÉLOiN (Félix', ingénieur, à Bruxelles. 

Etienne (Etienne), rentier, à Bellaire. 

Fabrt (Arnold), conseiller provincial, à Dison. 

Falisse-Debqeub, négociant. 

Falisse (Victor , professeur à l'Âthénée royal. 

Fassin (Victor^ peintre. 

Fatn (Joseph), direiue^ir de la Société pour la fabrication du gaz. 

Fayn- Receveur, négociant. 

Fbstraerts (Auguste ', docteur en médecine. 

FETU-DBriZE (J.-F.-A.), industriel. 

Fincqeur Ed.), curé de St-Lambert, à Herslal. 

FiLOT (H. J.), instituteur. 

Flamache, ingénieur principal des mines. 

Flechet (Guillaume), sénateur, k Warsage. 



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XXI 



Flékon (Joachim), bourgmestre, à Bellaire. 

Fleurt Joies), professeur à l'Athénde royal de Namur. 

Flkussu (Xavier), docteur en médecine. 

Flobenville (A.-B.), major honoraire de la garde civique. 

FocBOULLE (Joseph), directeur d'école communale. 

FONSKT, bourgmestre de St-GiUes, lez Bruxelles. 

F0B4SB0R (Georges), secrétaire de légation. 

F0S8IOH (N.-J.), docteur en médecine. 

FouQUET (Guil.), sous-directeur k TEoole agricole de Gembloux. 

FooRY, lieutenant-général honoraire. 

Fraigkeux (Louis), industriel. 

Frarck (Mathieu), ingénieur civil. 

Frahçojs (Hubert), notaire. 

Fràrcotte (Victor), industriel. 

Frahcotte-Dbprez (Clém.), industriel. 

Frakcottb (Victor), étudiant. 

Frarkignoulle, greffier, à Liège. 

Frédérix (Edmond), industriel. 

Frère-Orban (Walthëre), représentant, à Bruxelles. 

Frère (Georges), président du tribunal de première instance. 

Frère (Walthëre), fils, administrateur de la Banque nationale, h Verviers. 

Galard (Georges), négociant. 

Galard tLamb.), notaire et conseiller provincial, à Glons. 

Gautbt, directeur du musée de l'industrie, à Bruxelles. 

GiRARD (Eugène), préfet des études à TAthénée royal. 

Geameau (F.^, membre de la Députation permanente. 

Gbrraert (Jules), inspecteur honoraire des mines. 

Gbvaert, Paul. 

Ghate (Lambert), fabricant d'armes. 

Gillet (Emile), juge au tribunal de première instance. 

GiLLON (A.), professeur à l'Université. 

GiLMAN (Alpb.), président du tribunal. 

GorriKT, ingénieur. 

Gomrâe-Waltbért, industriel. 

GoKDA (Henri), entrepreneur. 

GoHME directeur de Velaines, près de Uuy. 

GoossBNS (Gustave), agent de change, à Bruxelles. 

Goret (Léopold), ingénieur. 

GoTBiBR J), libraire. 



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— XXII ~ 

Grandfils (Charles-Joseph), comptable. 

GfiANDJEAN, Dëgociant. 

Graindorge, répétiteur à l'école des mines. 

Grégoire (Hyacinthe), président au tribunal de première instance de Huy. 

Grégoire (Alph.), notaire, à Dalhem. 

Grégoire Mich.), secrétaire communal, à Wandre. 

Grosjkan (Henri^, rentier. 

Grumsel, tanneur. 

Guerrier (Camille), inspecteur des eaux et forêts. 

Harets (Alfred), répétiteur à l'Ecole des mines. 

Halkin (Aimé), lieutenant colonel d'artillerie. 

Halkin (Emile) , major d'artillerie. 

Halkin (Jules), sculpteur. 

Hahal-Domont (Victor), ingénieur des mines. 

Hamal (Benj.), ingénieur des mines. 

Hamal (P.-J.), avocat et conseiller provincial. 

Hannay (Charles), cordier, à Ans-ei-Glain. 

Hanrez (Joseph , ingénieur- mécanicien, à Mirchienne-au-Pont. 

Manssens [L,\ avocat et conseiller provincial. 

Harzé (Emile), ingénieur. 

Hayemal (Henri >, banquier, à Spa. 

Henon (Louis), maître de carrière, à Sprimont. 

IlER&iANS (L.-J.) juge pensionné. 

Heuse (H.-J.), docteur en médecine. 

Heuse Lahaye (G.), fabricant, à Olne. 

HoCK (Adolphe , fabricant. 

HocK (Gér.-Aug.), fils. 

HORTMANS, industriel. 

HocGET (Adrien), industriel, à Verviers. 

Hubert de Pondrome (R.), à Chènée. 

Hdberty (Léon), à Malmedy. 

Ilias (Henri), professeur pensionné. 

Jamar (Léonard), notaire. 

Jahar (Emile), représentant. 

Jamar (Gustave), fabricant. 

Jahar (Armand), Ingénieur. 

^^MME • Emile), commissaire d'arrondissement. 



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— XXlil — 

Jamoullb (Aogaste), notaire à Faime. 

Jarsimont, major pensionné, ^ Martinrive (Sprimont}. 

Jbnicot (Mbilippe), pharmacien, à Jemeppe. 

KcppENRE (F.), ancien président du tribunal de première insianco. 

Keppenme (Ch.), notaire. 

Kerster-Magis (P.), fabricant. 

KUPPER (Ch. Tbéod.>. directeur de fabrique, à Dalhem. 

KoPFFERSCBLAEGER (Isidorc), profcsseur à rUnivereiti^. 

Labete (Félix), négo ;iant. 

Lagardb (Marcelin), professeur à l'Athénée royal de Hasselt. 

Lahate (Joseph), directeur de eharbonnago, à Thimister. 

LALonx (Adolphe), propriétaire. 

Lamarcbc-de Rossids (0.), administrateur de la Banque nationale. 

Lamarche-Jamar (Alf.), industriel. 

Lambbrct (Charles), géomètre du cadastre, à Aywaille. 

Laubbrt, notaire, à Si-Georges. 

Lambert (Jot eph), brasseur. 

Lambotte (Armand), fabricant-bijoutier. 

Lambottb (Jean- Baptiste), à Cologne. 

Laoureux, sénateur, ^ Verviers. 

Laport (Guil.), fabricant. 

Laporte (Léopold), directeur de charbonnage aux Produits (llainaui). 

Leboulle (Albert), professeur à l'Athénée royal. 

Lecoq (A.) 

Leerabrts (J.-M.), fabricant. 

Lejeune GoRDiMiiE. négociant. 

LejeureStappers, directeur de l'école moycr.no do N;«m(ir. 

Lejeure- Vincent, industriel, à Dison. 

Lelotte, négociant, à Verviers. 

Lemaire, avocat, à Natnur. 

Lemille (Joseph), fabricant d'armes. 

Lemgnnier (Emile), négociant. 

Lequarré (Alphonse), professeur au collège communal, à l.onv.iin. 

Leroux (Charles), juge au tribunal. 

Le Rot (Alphonse), professeur à l'Université. 

Leurquin (Camille), notaire. 

LÉvÊQUE (L.), comptable, à Verviers. 

Lhoest (Paul), fabricant de papiers peints. 



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— XXIV — 

Lboist (Emile), conseiller commnaal. 

LiBEN (Charités), contrôleur des contributions, à Dînant. 

LiBEN (J.-J.-Jos.), intendant militaire pensionné. 

LiBE il (Louis), membre de la dëpotation permanente. 

LiBOTTE-DossiN, négociant. 

LisON (Félix), ingénieur. 

LoNAT, directeur des écoles communales, à Dison. 

LoviRFOssE (Michel), chef de bureau au bureau de bienfaisance. 

Macors (Félix), professeur k l'Université. 

Macors (Joseph), professeur à l'Université. 

Magis (Max.), fabricant. 

Magnery (Em.), meunier, à Seraing. 

Malaise, directeur de charbonnage, à Wandre. 

Malherbe (Edouard), fabricant d'armes. 

Mansion (Émi'e), professeur au collège communal de Huy. 

Marcellis (François), fabricant. 

Marchot (Emile), négociant. 

Maréchal (R.), ingénieur. 

Marhal (Epiph.), avocat. 

Martirt (Jules). 

Martint (Martin), fabricant, à Herstal. 

Masset-Hamal, négociant. 

Masset (L.), bourgmestre de Herstal et conseiller provincial. 

Masset (Oscar) , avocat, à Vielsalm. 

Massin (Gust.), sous-directeur de la Société linièrc. 

Matelot (Prosper), rentier, à Bruxelles. 

Mathelot-Debruge, ingénieur civil. 

Méan (Charles), fabricant. 

MiCHA (Léonard), ingénieur, ii Maries (Pas-deCalai.s). 

HiCHA (Alfred), avocat. 

M»ettb-Orban (Victor), rentier. 

MissoN (Anatole), négociant. 

Mohisse (L.), artiste peintre. 

MoNNOTER (Aug.-Jos.), lieutcnant-colouel d'état- major. 

MoNMOYER, directeur de charbonnage. 

MoREAU, ingénieur, à Louvain. 

MoRREN (Edouard), professeur à l'Université. 

MoTTARD (Albert), ingénieur civil. 

MoTTARD (Gustave), avocat et échevin. 



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— XXV ~ 

MoTTAaD (Jules), oégociant. 

MoTTARD (Philippe), brasseur. 

MoinoM (Louis), notaire, à Hervé. 

Mouron (Dleudonné), avocat et rpprrisêiitant. 

MoxHON (Emile), avocat. 

MoiHOK (Ernest), notaire. 

MuLLER (Clément)» avocat et ancien repr<fsentao(. 

Nagsliiagurs (Armand), coosui d'Espagne. 

Nagelmaceebs (Albert), banquier. 

Nacblmaceers (Edmond), banquier. 

Nagelmaceers (Ernesi), banquier. 

Nagelmackers (Carlos), ingénieur civil. 

NEEf (Jules), bourgmestre de Tilff et conseiller provincial. 

Neuville (Joseph), ancien bourgmestre de Liège. 

KicoLAi (Léon), industriel à Vervicrs. 

NoË (Adolphe), fabricant. 

NoiRFALisE (Jules), négociant. 

Ntpels (J.-S.-C), professeur ti riniversilé. 

Olivier (Henri), négociant, à Verviers. 
Orbar (Eugène), industriel. 
Orban (Ernest), industriel. 
Orbak (Marcel), juge k Verviers. 
Orbam (Jules), industriel. 
Obbar (Léon), industriel. 
Ortmaks-Hauseur, bourgmestre de Verviers. 
Ortmars (J.-B.), brasseur. 

Pâques (Eugène), artiste vétérinaire, à Verviers. 

PAQUES (Érasme), pharmacien. 

PAQUES, conducteur des ponts et chaussées» à Aywallle. 

Paquot, directeur-gérant de la société du Bleyberg. 

Pasquet (Emmanuel), professeur. 

Paulis (Adelin), capitaine d'artillerie. 

Pece (Léonard), ingénieur. 

Peclers (Alexis), comptable. 

Pett DE Roses (Jules), représentant à Grunc. 

Petv (Léon), avocat et conseiller provincial. 



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— XXVI - 

Philippet (Léon), artiste-peintre. 

Pbilippi (Cbarlos). 

Phillips (Justin), négociant. 

Phillips-Obbah, rentier. 

PiKDBCBUF (Théodore), avocat et représenlant, k Jupille. 

PiERCOT (Ferdinand), bourgmestre. 

PiNSABT (H.-J), ingénieur en chef de la province. 

Piblot-Tebwahgnb (Ferdinand), fabricant. 

PiRLOT (Léon), fabricant. 

Piblot (Edouard), fabricant. 

P1BI.0T (Gustave), fabricant. 

Piblot (Eugène), rentier. 

Piblot (Eugène), fils, rentier. 

PiBOTTE, rdceveor de l'Etat, k Uerstal. 

PiBsuN HoGGE négociant. 

Plumât (Jean-Bapt.), propriétaire. 

Plumieb (Alphonse), photographe à Spa. 

Polain (Léon), avocat. 

PoswiCK (Eugène), rentier. 

PoDLET, négociant. 

Pbbcdbomiie-Pbbiidhommb, Industriel, k Huy. 

Pbost (Henri). 

QuotLiic (J.-H.), secrétaire -général du ministère des finances, à Bruxelles. 

Raikem (A.-J.), greflQer au tribunal. 

Kaskin (Jos.), fabricant. 

RASStNFOSse (Armand), négociant. 

Raze (A.), ingénieur, k Ougrée. 

Rkgnieb, major pensionné. 

Remacle, secrétaire communal, à Oinant. . 

Remacle (Jacques), fabricant à Saubeid. 

REMI (Victor), négociant à Herstal. 

Remont (Denis), juge de paix à Esneux. 

RÉMONT (J.-E.), architecte consultant de la ville de Liège. 

RÉMONT (Joseph), architecte. 

RÉMONT (Lucien), ingénieur à Tbeux. 

Remt, notaire. 

Rbnieb (A.), architecte. 



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XWIl — 

Rexiea (Henri;, rentier. 

RcxETTE (Ldopold), négociant. 

Rensos (Antoine), jogo de paix, à Holiogne-aux- Pierres. 

Requilé (Franc.), rentier. 

Richabd-Laiiarcbe (H.', rentier. 

RiGO (H.), chef de bureau au gouvernement provincial. 

Rissack-Lahbbbt. marchand- brasseur, il Hcrstal. 

Robert-Gbisard, rentier. 

ROBEBTI (E.), rentier. 

Roberti (D.), rentier. 

Roland (Jules), négociant. 

Romsdehne-Fbaipont (J.-F.), banquier. 

Rose (John), fondeor. 



Sache (Gérard}, secrétaire de la Société do gaz. 

Sagbhomme, commissaire de Tarrondissement de Verviers. 

Salmom (rabbé), vicaire à Slavelot. 

Schoorbroodt (J.-G.), conservateur des Archives de l'Etat. 

Sbrburieb (Léopold). 

Servais, photographe. 

Sevbrbyns (L.), imprimeur. 

Simoris-Orban (Eugène), statuaire à Bruxelles. 

Smits (Alphonse), propriétaire. 

Sroeck (Eug.), professeur à l'Athénée royal. 

SoETKKANs (Gust.), directeur, à Niederfischbach. 

Sopers (Théodore), négociant. 

Soubre-Flecbet (Léopold), industriel. 

Spiertz (Henri), rentier. 



Tabt (Alph.), négociant. 

Tabt(0.-J.), banquier. 

Taskin (Léopold.), ingénieur, à Jemeppe 

Tassbt (Emile), graveur. 

Terrt (L.), professeur au Conservatoire. 

Thiriard-Sodbre, industriel. 

Thirv (V.), professeur à l'Université. 

Thornard (André), colonel d'artillerie. 

Thorrard, lieutenant-colonel en retraite. 



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- XWIIl — 

Thomox (Aiiga9te), notaire, à Sprimont. 

TiLMAN (Gostave^, rentier, à Bernalmont. 

TiMMRRHAifs (Louis), ingëoiour. 

ToMBKDB, notaire et conseiller provincial,à Verlaine. 

Toussaint (Joseph), vériflcatear des poids et mesures, à àlons. 

Tbasenster (Louis), professeur k l'Université. 

TfiOisroNTAiNBs (Amold), professeur à l'Uni versitcj. 

Tbotllbt (Félix), négociant. 

Tbuillet (Franc.;, docteur en médecine. 

Vacssen (Hubert), directeur de la Société St- Léonard. 

Van dbb Maeseh (Servais), avoué k Verviers. 

Vandebstbaeten-Clossbt (Victor), fabricant à Verviers. 

Van Schebpenzeel-Tbim (Adolphe), directeur de Valentin Coq, à Hollogne. 

Van Zotlen (Léon), ingénieur, à Oogrée. 

Vapabt (Léopold), directeur des usines d'Angleur. 

Vadst (Théodore), docteur en médecine et professeur à TUoiversité. 

Vadst (Jules), docteur en médecine. 

Verken (Théophile), professeur au Conservatoire. 

ViebseT'Godin, architecte à Huy. 

ViNCBE, éditeur, à Verviers. 

VioT (Léon), rentier, château de Verdenne, près Marche. 

Vivario-Plomdeur (Nicolas), rentier, à Embourg. 

VivABio (Nie), fabricant d'armes. 

Wanxenne (Pieri'e), négociant, à Verviers. 
Warnant (Julien), avocat et représentant. 
Wasseige (Adolphe), professeur k rUniversit*^. 
Wautebs (Edouard), père, rentier. 
Wauters (Edouard), flis, rentier. 
WautebsCloes (Hyacinthe), rentier. 
Wellens BiAB (E.-F ), ingénieur. 
WiLMOTTE, propriétaire, il Anvers. 
WiLMABT (Julien), à Verlaine. 
WiTTBRT (Andrien, baron), rentier. 
Woos, notaire, k Rocour. 

Xbibitte-de Befvb, industriel, k Flémalle. 
Xboffeb (Léop.), négociant à Verviers. 

ZiANE (Emile), avocat. 



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— XXIX — 

SOCIÉTAIRES liÉCÉDÉS. 

Membres titulaires. 

Defrccbelx, Nicolas, appariteur à l'Universiti^. 
Lesoi!inr, Charles, ancien représentant. 

Membres correspondants* 

COCNE, Joseph, préfet des études, à Anvers. 

LouMTEi, N., chef de division au département des affaires étrangères, à Bruxelles. 

IBOFFES, Jean- François, rentier, il Verviers. 

Membres adjoints. 

issiAUX-RiTTTtN, Emile, banquier. 

Banheitx, Léon, propriétaire à Huy. 

BUB, Grégoire, ancien notaire. 

BfiORRB, Louis, inspecteur général des postas, à Bruxelles. 

Capitâinb, Félii, ancien président de la chambre de commerce. 

Cablier-Dehet, rentier. 

CARMAhRE, J.-G, ancien imprimeur. 

Chaumort, Léopold, fabricant d'armes, k Herstal. 

Gloes, conseiller honoraire k la Cour d*appel. 

Glosset, Mathieu, banquier. 

COBEUB, Gustave, mojor d'artillerie de la garde civique. 

CoucLET, capitaine pensionné. 

Gbemebs, Léopold, à Sclessin. 

Dabdespire, fabricant. 

Decbamps, major pensionné, à Stembert. 

De Kabbibbckers, conseiller provincial. 

Defats-Duhorcbau, ancien conseiller p<H>vincial. 

Delbouillb, Joseph, banquier. 

Delbkid, Louis, docteur en médecine. 

De Stocxem, baroa, Léopold, propriétaire à Amay. 

D'Otbeppb de bouvette, Albert, conseiller honoraire des mines. 

Elias, Nicolas, représentant. 

Fbarxicrodllb, Lambert, agent industriel. 

Gaede, h., docteur en médecine. 

GBARD'Ry, Michel, docteur en médecine. 

LAGAS&E,Laurent, fabricmt. 

Laloux, Ifieolas, greffier provincial. 



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— XXX — 

Lambinon, Gustave, ingénieur. 

L'boest, Auguste, lienteoaot-coloael d'artillerie. 

HissoN, Jules, notaire. 

NAGELMACKER8, Jules, agent de la Banque nationale. 

PiEDBOBDF, Théodore, industriel à JupiUe. 

PROST, Victor, capitaine en retraite. 

RcGRiER-PoRCBLET, industriel. 

Renier, M., greffier an tribunal de commercr. 

Robert-Brabant, L., avocat. 

StassE; Alexis, notaire à Esneux. 

Umé, Godefroid, architecte. 

Wala, François, conseiller k la Gour d'appel. 



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CONCOURS SPÉCIAL 



insliloé par M. GRANDGA6NAGE . président de la Société liégeoise de liltératare 
wallonne, snr les BDVEIRS DE GENIÈVRE (Les Peqaeteax). 



RAPPORT DU JURY. 



Messieurs, 

Chacun connaît les ravages qu'exerce Tabus des 
liqueurs alcooliques, surtout dans les classes popu- 
laires. Qui de nous n'a été attristé, le dimanche et 
surtout le lundi, par la vue de ces hommes ivres, à 
Fair hébété, ne sachant plus môme se tenir debout, 
abaissés au-dessous de la brute au point que Ton 
se demande en les voyant si le naturaliste qui nous 
fait descendre du singe ne nous fait pas encore trop 
d'honneur? Encore, si cet état n'était que passager; 
mais en se répétant il devient l'état habituel. 

L'ivrogne commence par devenir &ôm^/, pour nous 
servir de l'expression populaire qu'il serait diflficile 
de rendre en français ; ensuite, l'appétit se perd, 
l'estomac refuse les aliments, et pour soutenir ses 
forces, l'ivrogne est obligé d'augmenter la dose de 
spiritueux ; il devient pom^ stotimak, injure popu- 



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laire qui n'a pas besoin d'explication ; la surexcita- 
tion continuelle amène un tremblement nerveux qui 
Tempêche souvent de se livrer au travail,quaiid elle 
ne le conduit pas jusqu'à la folie appelée delirium 
tremenSy et par suite, à une mort prématurée. 

Dans rétat d'ivresse la volonté perd l'énergie 
nécessaire pour résister aux entraînements des pas- 
sions. On a dit que l'oisiveté est la mère de tous les 
vices ; on peut dire que l'ivresse est la mère de la plu- 
part des crimes et délits qui ont leur dénouement en 
Cour d'assises ou au Tribunal correctionnel. Par- 
lerons-nous de l'argent dépensé dans les orgies 
connues sous le nom de toumêieSy des pertes de jour- 
nées qu'elles entraînent alors que la famille meurt 
souvent de faim ? Il faudrait un volume pour décrire 
les maux de toute nature que l'ivrognerie engendre. 
Aussi, partout les amis de l'humanité recherchent- 
ils les moyens d'arrêter les progrès de l'ivrognerie. 
Les uns préconisent les mesures législatives frappant 
d'une peine ceux qui se livrent à ce vice ; les autres 
vantent les sociétés de tempérance ; tous sont d'ac- 
cord pour reconnaître que le moyen le plus efficace 
réside dans l'éducation. 

Mais quelle est la meilleure manière de faire 
pénétrer dans l'esprit du peuple l'horreur de l'ivro- 
gnerie et des suites déplorables qu'elle traîne après 
elle ? N'est-ce pas de lui en faire un tableau fidèle, 
dans le langage qui lui est familier, en empruntant 
la forme du vers qui parle bien plus à l'imagination 



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— 3 - 

et se grave bien plus facilement dans la mémoire que 
la prose ? En un mot, en s'inspirant de ces vers de 
Laibntaine : 

Je tâche d*y tourner le vice en ridicule 

Ne pouvant Tattaquer avec des bras d'Hercule. 

C'est cette pensée qui a guidé notre honorable pré- 
sident lorsqu'il a institué un concours pour une 
satire, une chanson, un dialogue même, enfin une 
pièce quelconque pouvant être lue, déclamée ou même 
chantée, sur les pèqueteux (buveurs de genièvre), 
et nous sommes heureux de constater que cette pen- 
sée a été bien comprise par la plupart des concur- 
rents. Nous aurons du reste, dans la suite de ce rap- 
port, plus d'une occasion de signaler la portée 
morale des œuvres soumises à notre appréciation. 

Six pièces ont été adressées à la Société. 

La pièce n^ 1 est intitulée li Pèqueteu, satire: elle a 
pour devise : les liqueurs alcooliques ont plus détruit 
le genre humain que le canon. Elle est écrite en 
wallon de Verviers ; elle se compose de quinze 
strophes de six vers et d'une dernière strophe de 
neuf vers. L'intention de l'auteur est excellente ; il 
cherche à dégoûter du genièvre en taisant une pein- 
ture fort repoussante de l'ivrogne; malheureusement 
l'exécution n'a pas répondu à l'intention ; le portrait 
est pâle, monotone ; il n'y pas assez de suite dans 
les idées ; deux strophes font exception, ce sont les 
X1I« et \\\V : 



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— 4 — 

Outf les chagrins et pônes, a co les nialadeies 

Qui sorvinet â ci q'est eût par lu l)oisson ; 

Il d'vint sot ( * ), i lanwih', il sow' comm* on crelon ; 

D*asticott* et d'mehins, totf su veic est rêplaie ; 

Si (luvan Ttimp è va, pôv* a stu sMkauraie : 

Lu pequet a fait dUaiw' de s'bai rog' bollanl song ; 

Les efants sont cbaipiou, maubaiti, miseraube, 

Sais foiss et maulardûle; is paîaient po Fcoupaube ! 

Les pècbis des parents so les fils ruspiitaienl ; 

Leu tournècbe à brébaude, c'esst' au père qu*eir divaient ; 

Is n* valaient rin tôt jônes, et vis rin d'bln valaube : 

S, RailLem, au lolau, c'est là qui finihaienl! 

A la suite de cette satire, l'auteur nous a donné 
une petite rawette de 18 vers qui vaut à elle seule 
plus que la pièce principale; elle est intitulée les 
deux planquets (compagnons d'atelier); elle est 
délicatement traitée, très-morale,et nous ne pouvons 
résister au plaisir de la citer en entier. 

LES DEUX PLANQUETS. 

Le temps est de l'argent. 
(L'avieacr.) 

CONTE. 

Deux planquets après leu journaie^ 
Es n*ès ralli d*on pas vigreux ; 
Onk respoirtev' à su c^pagnaie, 

( * ; Le dcliriuro tremenft. 



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L'prix d'ses souweurs, d'on air Joyeux. 
L'auf alla beur es n'onn* tavienne, 
Çou qu'aveut mcssaub' è s*mahon ; 
Enn* es ralla la (axb* foirt tenne. 
Et su d\it passer di magnhon. 
I k'tappa, spla su manège, 
l/aut* doirma comm' on binhureux (*). 
Noss' famussette rouvia Fovrège, 
Lî suti s'waurda n'pomm po Tseu. 
Burter seret todi sottraie, 
C'est' allouer s'timps à maul vau : 
Ji vickreu même Tâge d*on coirbau. 
Qui ji repeltreu toit mu vaie : 
Spargni deux censs' minet à meie. 
C'est Tdi'eut* v6ie po divni richaud. 

La pièce n** 2 a été écartée comme ne remplissant 
pas le but du concours. 
Le n^ 3, Ine copène so les pekteus, avec la devise : 

Un cabaret est un lieu où Ton vend la folie par bouteille, 

est aussi une satire contre les ivrognes, mais beau- 
coup mieux réussie que la première ; l'auteur fait 
une peinture saisissante de Tivrogne et des suites de 
l'ivrognerie; le langage est du bon wallon ; les rimes 
sont assez soignées. 

Le jury propose de décerner une récompense à 
l'auteur de ce travail et d'ordonner l'insertion de la 
pièce au Bulletin de la Société liégeoise de littérature 
tvallonne. C'est pourquoi nous n'en donnerons pas 
des extraits. 

( * ) Varia te : s'plaoquet magna comme od sôieu. 



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— 6 — 



La perle du concours esl sans contredit la pièce 
n"» 4 avec la devise : 

Rin des feumes avou raison d'hel 
Qui n*pout-on co remonter Vpeke\. 

Elle a pour titre : Les buveus d'pèket. 
L'entrée en matière est heureuse. La peinture des 
jeunes apprentis d'aujourd'hui 

qui n'ont nin tos leus dints 

QuMs y béret l'broule-gueuie et qu'ont Tmèseure es Tmain, 

n'est malheureusement que trop vraie ; elle est de 
nature à faire réfléchir les parents et à les engager à 
exercer une surveillance incessante sur leurs enfants 
afin qu'ils ne prennent pas dès leur jeune âge des 
habitudes qui nuisent à leur développement physique 
et intellectuel. Une telle éducation ne peut produire 
que des ivrognes et par suite des mauvais maris : 

A l'âge wiss' qui s'mariel, li pieu n'est qu'trop bin pris, 
Li pauv' feum d'ine solêie n'est wère est paradis. 

Suit une peinture très-énergique des tourments 
qu'endure la femme de l'ouvrier adonné à l'ivrogne- 
rie. La vie de l'ivrogne décrite par l'auteur est un 
tableau pris sur le vif. Il faudrait en citer presque 
tous les vers. 

La fibre sensible que l'on fait si rarement vibrer 
dans notre wallon n'y est pas négligée, témoin les 
vers que l'auteur met dans la bouche de la femme de 
rivrogne : 



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— 7 -- 

Qoi rattind totf péneuse ei comptant so ses deugts, 
Li cour gros de veyi ses èfanis tronner dïreud. 
Is sont loi d'hâs turtos, leus hârds sont rapèceteies, 
Li chamb' est disgârneie. ifest Tmisére âtou d'ieie : 
Eir ritûs' à s*j6nes8e, à timps qu*elle aveut bon, 
Eir si rVeut bin flocbtaie, avou sVoslant visège, 
Kwand i li prometlév* li bonheur es manège. 
Queir diffërince asleur ! Vocial pôr in èfant 
Qa*afaim, qui demande in' tâie, es n'a-t-elie nia dé pan ! 
Eile luuk di Fèdoirmi, toi fant qu'eir piett' li liesse, 
Et s'difène à plorer lot Tbapant d'vin ses bresses ?... 

Que deviendront les enfants de Tivrogne ? 

Ils tournel sovint ma qwan i div'net pus grands, 

Et comnae on ne récolte que ce que l'on a semé : 

I n'ont d'keur di leu père, qui vAie âx incurâbes, 
Ou bin qui vâie bruber, lot halcross, toi minâbe ; 
S*i mourt on dit co d1u kwand on Trimette à pont : 
Li pëkel rabah'ret, c'est' in'soleiedi mon !... 

Vous le voyez ; la description de la vie du buveur 
est complète, il ny manque pas même Toraison 
funèbre. Mais Fauteur n'a pas voulu nous laisser sous 
cette impression désagréable. Il a ajouté un petit 
épilogue plein de fraîcheur qui couronne dignement 
cette pièce II va dormir, mais 

D'avance air copetl' d'ell' monlaie 
C'est mi p'titl Tonelt' qui j'irouvret, 
Ëir mi va bâhi, Fbinamaie, 
Paç' qui ]i n'odret nin l'pèlcet. 

Le jury propose de donner le prix à cette œuvre. 
La moisson est maintenant terminée, il ne nous 



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-- 8 - 

reste plus qu'à glaner dans les autres pièces où nous 
trouverons encore quelques bons grains à recueillir. 
La pièce n'^ o, écrite en wallon de Hervé, est une 
chanson, forme extrêmement favorable à la propa- 
gation des idées saines dans le peuple; malheureuse- 
ment la pièce est assez faible : l'auteur ne connaît 
pas les règles de la versification ; l'esprit qui règne 
dans cette composition est excellent, mais la rime ne 
s'accorde pas toujours avec la raison, défaut capital 
surtout lorsqu'on le rencontre dans le refrain, ce 
qui est trop souvent le cas ici. Ce qu'il y a de meil- 
leur dans cette chanson ce sont les quatre premiers 
vers qui contiennent une grande vérité : 

Maudit pèquel ! ku les femmes sont à plainte 
Avou des hommes qui n'ont nin rferroeté 
Dl beurre on verre, sinjustumin è printe 
Jusqu'à dzeu riiess« divan d'ennès ralié. 

Prendre un petit verre pour se réconforter n'a en 
eflPet rien de bien répréhensible en soi ; mais là est 
le danger de l'usage des boissons alcooliques; on 
prend un petit verre, par occasion ; on en prend un 
second, puis un troisième, souvent sans y faire trop 
attention, et de potit verre en petit verre on arrive à 
l'état d'ivresse, sans s'en douter ; puis on recherche 
l'occasion ; de là, à l'habitude, il n'y a qu'un pas : 
c'est ce qui a fait dire à un hygiéniste célèbre, 
que la modération même n'est pas toujours sans 
danger ; elle est la pente qui entraîne de la satisfac- 



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- 9 - 

tien du besoin dans l'abus et de l'abus dans l'excès. 
Aussi, disait un sage, il m'a toujours paru plus facile 
de renoncer tout à fait que de se modérer C'est le 
parti vigoureux que doit prendre tout homme qui 
ne se sent pas capable de résister à ce fatal entraî- 
nement. 

Mais assez de morale, passons à l'examen de la 
dernière pièce. C'est encore une satire de 38o vers 
contre le genièvre, avec la devise : Ab uno disce 
amnes. Tout n'est pas à rejeter dans cette pièce qui 
a le défaut d'être trop longue. L'auteur décrit les 
anciens cafés où l'on buvait le vieux genièvre qui 
perlait dans le verre, où il n'était pas permis de 
demeurer plus tard que l'heure réglementaire ; il 
les compare aux cafés brillants de nos jours où l'on 
ne vend que des liqueurs frelatées. Il s'élève contre 
la falsification du genièvre qu'il attribue aux nom- 
breux impôts qui le frappent, ce qui n'empêche 
pas les cabaretiers de s'enrichir. Il rencontre 
quelquefois une bonne observation, par exemple 
celle-ci : 

Pauv' peup ! ah qui fes biesse ! 

Ti t'oûveur à souwé po chaqu' chivet di i*tiesse, 

Ma couki, ma logi, respouné dMn des (rôs ; 

Li frûf di tes souweurs ti sieve a Tfé don sô ! 

Et celle-ci contre l'absence de toute vérification 
de cette boisson : 

Li leçai on V visite 
Et si gnia d' laiw*i avou, ell' corotte on l' sipitte, 
Mais visiter I* peliel ci serue fé n*riraie. 



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~ iO ~ 

Nous disions plus haut qu'il est plus facile de 
s'abstenir tout à fait que de se modérer : l'auteur 
nous le prouve dans les vers suivants : 

Eximp* cila qui passe et qu' m*a disfait s'calotte ; 

Jamâie, à grand jainâie, il n*avait bu n* seul* gotte; 

s* manège estent cité comm* onk des pus hureux, 

Si feume et ses èfants avi l'air lot vigreux. 

Mais dvîns les ateliers on gâte si vite in* homme I 

J*les pou r*fflett* au banstai wiss* qui gn*a n* fauVak* pomme; 

Tôt* les autr* pourihaient. On Jou on V fat goster 

Li liqueur de pays. V1a qui k*mince à pekter. 

Li semdi comme in* trute è s' mohonne i riv*néve, 

Li dlmëgne est moirt-tve et V londi rattaquéve. 

Coula continua pindant on grand longiimps; 

Li joie et li bonheur, Tovrèg* et 1* conlint*min, 

Tôt s*sauva de manège; accora V maladeie, 

Qui t* plaqua so s* paiasse et li iH surmint veie 

Les pechis qu*aveu fait, ka qwand fonri r*weri, 

I leia là 1* pequet ; main s* pôv* coir a soffri. 

Ci rrest pu 11 même homme, il est todi halcrosse, 

A pône i wagne assez po poleur magni n*crosse. 

L'auteur nous conduit ensuite au tribunal correc- 
tionnel où il nous montre que les trois quarts des 
prévenus sont amenés là par le genièvre. 

A r chamb* correctionnelle 
Nos iran veie in* case et c*est to d* maim* ii quelle, 
Tôt* eir si ravisaient; il y fait todi plein, 
On bout*, on veut Feximp* et on n* si corrège nin : 

Loin de là, on sort condamné du tribunal 

Et po rompi 1* chagrin, il irèt V long der voie, 
Avou tôt les temons riprind* on po deF Joie. 
Toi buvant çou qu' lu même il a traiti d* poison. 



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- n -- 

Et c'est bin.oa poison... |âsez à «os méilViBs 
I ▼'racontront^mm ml qui i*peiiet «'est nin sain. 
Qui cVst k cas* di lu qai l*liospita d' Barire 
Si troav* eco trop p*tlt, avou i*ci d*el Volire. 
Reckhelm plein Jasqu*à mak, et les trôs d^RoMoniont 
Qol r'dohet des paav* coirs broutés Juaqi^ax pouaioiis. 



Lauteur finit par l'énumération redoutable de 
tontes les occasions dans lesquelles l'homme est 
entraîné à boire et qui lui font prendre petit à petit 
la funeste habitude de s'enivrer. 



Li tentatiOD est là, on rveui, main on y tomme : 

Li feum* et les ef^nts buvaient tos corom* In* borome. 

LI mode el Thabltude ont meltou leu cachet. 

Doleur, plaisir ou iàle, il faut beur* de pequet. 

Allév* à Tmaison d*veie annoncer qui vos ieume 

Vint du V* dîner n*éian( qu*on inscrit d*on cô d'plenme, 

liaie ! il faut beure on dmeie ; on est fir d*ess* papa, 

Po r*çur les compliments on rott à tos p tits pas, 

On home in* meseur cial, ko pu Ion on r*paie eune, 

Et on r*vint es mohonne avou Tmitan d*in* prenne. 

L*baptëtne est Toccasion de régaler rpârain^ 

llalhoonêie on sereu di n* li présinter rin ; 

Li bottele est so Ttâve ; après qu*on a bu n*lasse, 

On r*bom k pequet tantqu*on ridvin co makasse. 

il se bin qu* 11 p'tit.peupe à s*mariège ni.s^reo 

Fé rôler Tvin d*champagne et fé comm* 11 borgeu. 

Mais çou qui m' fait del pône, et çou qui m*po1(e à Tâme, 

C*est qu*on beu.dè peket telmint qu*on s*ènn ô partie. 

Puis 9près Tmess* di moirt, après les eter*mints, 

C*est par seyai qu*i court po noî les tourmints. 

Ni rouvian nin, non plus, les processions, les fiesses. 

Qui, sin savu Traison, fet tourner toi* les tiesses. 



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- 12 - 

On s'afflôie on jou d*van po bien (lester Tbon Diu ; 

1 j semdi c*e.st n'musique à bouhi tôt l'inond' ju ; 

1 fàt aller oi, puis to-z-oïant fôt beurre. 

Li dimègn' on fait pé ; tant qui Tprocession deure, 

On court les cabarets, tos les bacs ridohaient. 

Que plaisir ! queir beir liesse ! et c'est çou qui s'di hâtent 

Les cis qu* veiaient coula. Vès Tarnutte on rikmince ; 

Londi, mardi, judi, tant qu'on a de Psimince, 

On s* sole à crâs pequet. V'veyez des crâmignons 

Qui fait honte à Tpatreie et leuz hisdeux k'pagnons 

Dibraillés, kissechi, souwant Tpequet, font Tmowe, 

Pinsèt s*diner del Joie avou Tboisson qui towe. 



Malgré les beaux passages que nous venons de 
signaler, le jury n'a pas cru devoir accorder une 
distinction pour cette pièce. Le sujet est trop délayé ; 
la lecture en est fatigante. Les vers sont assez cou- 
lants ; la rime généralement bonne ; mais on peut y 
reprendre des tournures de phrases peu liégeoises et 
beaucoup de mots français wallonnisés. 



CONCLUSIONS. 

Le jury propose de décerner le premier prix à la 
pièce n** 4 intitulée : le^s Buveiix d'pèket. 

11 exprime le désir d'être autorisé à accorder un 
second prix à la pièce n" 3 : Ine copène contre les 
pèkteux, et une mention honorable à la pièce inti- 
tulée Ine Rawette que nous avons citée dans le cours 
de ce rapport. 



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— ^:^ - 

La Société ayant entendu la lecture du présent 
rapport dans la séance du 15 avril 1875, M. le Prési- 
dent a déclaré acquiescer au vœu du jury en accor- 
dant deux prix supplémentaires. 

Les billets cachetés ayant alors été ouverts, le pre- 
mier prix, une médaille en or de cent francs, a été 
décerné à M. Alexis Péclers ; le second prix, une 
médaille en vermeil de cinquante francs, à M. 
Delarge ; et une médaille en bronze avec mention 
honorable a été accordée à M. Poulet. 

Ces pièces seront insérées au Bulletin de la 
Société. 

Le Jury : 

Dejardin, 

NlHON, 

Falloise, rapporteur. 
Liège, 15 avril 1875. 



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LES BUVEUS DTEKET. 

fktL 



Biû des feones avon raison d'het 
Qoi n'poui-OQ co r'monler Tpèkel { 

Ji n'aime niii de ramier ni de fer des râchâs, 

Ji hés même les glawëne odtaùt qui les mouriâ3, 

Les précheûs 'm'ëdoirmet, j*ë même pus di corège 

Po fer quéke lonke euraîe qui p6 liouter Tmessège 

D'on bablam* di bftrbi, qui v'kimah so Tmoumint 

Li jalaie, li ch!r timps, Tosté, rgouvernëmint, 

Li galant da Maianne et Tbastà da Bajène 

Avou les côps-fôî*és qui k'nohret dèl wèsène, 

Et qui v*diret li r'mède qui tki po voss dognon, 

Toi faiu qui foll* dissus tôt v*koibant so Tminton. 

Mais po ramter mi-mêtne, ji m'sins crèhe ine èhowe 

Et ji n'pous clore mi jaîve, kwand j'veus toi fêr' noss row^ ^^ . 

Trop streute po les solaie, di pëket qui r*dohel 

Et qui bouh'rit lot jus par lés madame qui fet !... 

In* apprindisse, di m'timps, qu'âreut commettou hâte ^ 

De voleur beure H gotte, aveut Taffroni d*ine t&te ; 

Po rjou d'oûie, es leùs jaive is n'ont nin tos leus dints 

Qu'is y hèret Tbroule-gueuie et qu'ont l'mèseure es rôiiain, 

Et po fer l'homme tot-oute, es leus mâssis messège 

Li nom de bon Diu craque avou l'diale qui vs'ai ège ! 

C'est ainsi qui tôt j^i^Aa^sôlaie is tournet; 

Ax scole, âx conféfince. on n'donne nin de pèket, 



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- 16 -- 

C'est bin sûr po coula qu'ine pârteie del jônnesse 

Dimeure bin' en èri, po n*nin dire qui d'meure blesse ! 

Vos les r'irovez pus lard â jeu d'beie qui jowet, 

Ou bin de colèber 11 gosse els y vairel, 

Adon li pèket rôle à clapantès tournâtes, 

Mode, qu'es noss pays d'Lfge a fait tant des sôlaies ; 

A Tàge wiss qui s'mariet, li pieu n'est qu'lrop bin pris, 

Li pauve feume d'ine sôlaie n'est wère es paradis: 

Ax jamas, comme à rfiesse et comme tos les dimëgnes 

Qu'elle ratiuse es l'couleie les côps d'gueuie et les hègnes; 

S'elle moiihe on pô trop' c'est les bielle qui danset 

Et l'amour h côps d'pogne qui vint Toû de pèket, 

Kwand s'bai mâie est moirt-îve, i fat, sins r'mette si cotte, 

Avou l'cour quihaussih, qu'elle li sèche co ses bottes. 

L'â-matin de loiidi, noss-t-homme qu'a ma ses ch'vets, 

Sins gosse et d'mâle houmeur vès l'ovrège si rindret, 

Et so i'sôrt di Tovrî lot s'mâgrîant limpesse, 

I fôt qu'i home èco sakwants poïèche del biesse; 

Ascoh'reut-i bin ouïe d'on bâche sins y moussî? 

I trouve Jâcque et Jeaunesse, on houk Pierre et Mathi, 

On k'jâse si maisse ou s'feume tôt vudant des mèseùres 

Et tôt rouviant l'ovrège on lait gotterjles heures; 

Comme on a bon d'ès naw,^on d'vairet pus joïeux, 

Fré Jâcque ou Tré Jeannesse chante on mâssi respleu, 

I fât heure à s'santé, todi tôt s'fant del fiesse, 

Mais s'i s'trouve es hopai qu'onk ou Faute seule cagnesse, 

Çou qui li graw es l'âme vint foû lot divnant sô, 

I prétind qu'on Tcouyonne, qu'on l'a traitî d'bâbô 

Ou qu'il a pâyi trop'; c'est' adon qu'on s'apogne 

Toi s'traiianl d'halcotis, di fax chins, di charogne, 

El les chérs camèrâdes finihet par rôler 

A milan del corotte quèrant à s'sitronner; 

Si court sâro, qui l'feume a r'bouwé l'jou di d'vant 

Esta brébâde, Il reste, on Tcomprind, n'est nin blanc; 



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— 17 — 

Is estit turtos nets, baitis, bin camërâdes, 
Is s'quitet toi mâssis, di brogne et bin malades; 
Tôt pierdant leu journeie en ont câsi bu deux ; 
Onk en erva doirmi, c'est co Fpus aoureux ; 
In aute tôt halbouyant qulre après quék baraque 
Wiss qu'il âret mitoi Tastëme de beure à plaque, 
Et po fini rjourneie qu'il a si bin k'minci, 
Kwan s'calotte est pierdowe et qu'il est plein d'broulis, 
 l'nute i s'sitârrêt so l'banc d'ine pormin&de 
Ou bin so quék* tap-cou, comme on pounjai malade, 
Là, si d'en bon lavasse i n'est nin ramouyi, 
De restant d'ses clicotte i sèret dispouyi !... 
Li ci qu'estent cagnesse, lu divairet sâvage, 
A l'nute es quék bazar il iret fer carnage ; 
Tii pëketl'mette es rfîve, i vont bouht tôt jus, 
I quirreut bin quarelle, si polév, à bon Diu; 
I fât qu'i s'batte, qu'i bouhe, qu'i speie, qu'il ahoraie. 
Et qu'i fasse on malheur, s'i n'a nin s'gueuie cassaie, 
I finih par doirmi, mâgré lu l'pus sovint. 
Tôt s'dihant qui l'violon n'est nin fait po les chins !... 
Kwan is strumet Tsamaine tôt comme ji vins del dire, 
I n'a des cix qui fet lote ine octave étire ; 
Li fin, c'est qu'à lombard leu manège est pindou 
Et qu'i n'ont foû d'ieu maisse qui leus quatoize foioux ! 
Li ci qu'a stu doirmi ritrouve on pô d'corège; 
Et l'mârdi ves nouv heure, i s'rimette à l'ovrège ; 
Ax euraie on beut l'gotte â cabaret jondant, 
On a co quéke nahe à l'nute tôt n'nèrallant. 
Tôt s'dihant l'onk à l'aute qui l'ci qu'a fait journaie 
Al'dreutdi s'dilaht sins passer po sôlaie, 
Et qui c'est' on bâbo li ci qui s'iait miner 
D'ine feume qui n'a tôt fér' qui l'misére à chanter ! 
Çou qu'on s'rafeie lipus c'est de lever s'quinzaine, 
Mâgré qu'elle n'est mâie pleinte, ni pinsez nin qu'on s'gêne 

9 



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- 18 - 

Po n'n'ès w&rder n'bonne part, ci hftrd-là siëv so Tcôp 

Divin pus d*ine mouss'rotte, à ristoper les trôs; 

On fait riâge, côp so côp c'est ine novelle tournais ; 

Il est si bon Tpëket tôt foumant n*pipe passaie ! 

On copinaie timpesse, on ramtaie, on s*lomme fré, 

Nouk ni pout dire après di quoi qu'il a d*visé, 

On s'promette des ouhais,des colons, totes les biesses, 

Mais del foumire des pipes si r'sintet les promesses ; 

Si n'advint nolle quarelle, s'i n'a rin di spyi. 

On a pônne di s'quitter, téirmint qu'on s'veut volti. 

On n'erva hink et plink, gare à meur, à l'corotte ! 

Ji k'noh onk qu'a suvou d'on caroche li loum'rotte. 

To pinsant vëy! l'cisse del potale di l'ârvau 

Wis qu'i s'a fait co traze boursais tôt riv'nant sô ; 

C'çst cila conte in àbe qu'aveut saiyi ses foice, 

Pinsant veie on voleur qui li bârrév si poisse ; 

On pareie dièrein'mint passa l'nute so Tmarcht, 

Di çou qu'il aveut bu, crèyant bin s'dilaht, 

Es n'oïez-v-ti cori qui l'douce aiw del fontaine, 

Pas ! sins l'vix gârd di nute en aveu po n'samaine !. 

Les feumes des buveus, zelles, ricraindet les sèm'dis 

Sêpant qu'elle n'âront wére po pâyi leus crédits ; 

Eune court âd-divant d'iu, divant qu'in' batt carasse. 

Et risquaie es pleinte rowe de r'çur si ragognasse ; 

L'aute ratind tote peineuse, tôt comptant so ses deugts, 

Li cour gros de vèyi ses èfants trônner d'freud ; 

Is sont tôt d'hâs turtos, leus hârds sont rapèç'teies, 

Li chambe est disgârneie, c'est l'misére âtou d'ieie ; 

Elle ritûse à s'jônnesse, â timps qu'elle aveut bon, 

Kwand tôt n'esteu d'vant leie qui rose et vert boton ; 

Elle si r'veut bin floch'taie, avou s'roslant visège, 

Kwand i li promettév' li bonheur es manège ! 

Quéll diffèriace asteur ! vocial pôr in èfant 

Qu'a faim, qui d'mande ine tâte, es' n'a-t-elle pus de pan ! 



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— 19 - 

Elle louk di Tëdoirmi, tôt fant qu*ell* piètt* li tiess, 
Et s'difène à plorer tôt Thapant d'vin ses bress ! 
Berdi-berdah ! on ôt so Tmontaie on disdu. 

— Habeie, poïon, taihiv, voss père est tôt foû d'iu ! 

— Nom d'un ci ! nom d'un la ! rote cial avou Floumire? 
A-je del cbftre po soper : qui disse ? qu'elle est trop chire? 
Si ti vins co gëmi, ti veuret qui j'sos saive, 

Kwand ti r'çuret torate mes cinq clikotte so t'jaive!... 

Les èfants trônnet tôt, li feume fait tôt douç'mint 

Po loaki d'agrawi les aidants Toû di s'main, 

Et corant vès Tbotique, elle si diret so rvôie : 

Si rbon Diu nos r'prindév, i nos freut nïameuse joie ! 

Li corège et l'honneur on les nêie es pèket ; 

Les voleurs, les moudreus, c'est par lu qui kmincet ; 

I v'kimahe li cei^ai, c'est case di lu qn'on s'balte 

Et qu'on rote so Raikem, châssi d'ionkès savatte, 

C'est por lu qu'on rouveie d'aklèver ses èfants, 

Is tournet sovint m&, kwand is div'net pus grands. 

Is n'ont d'keur di leu père, qu'i vâie &x incurâbes 

Ou bin qui vâie briber, tôt halcrosse, tôt minâbe ; 

S'i mourt, on dit co d'iu, kwand on l'rimette à pont : 

Li pèket rabahret, c'est ine sôlaie di mon !... 

P. S. A foice de d'iahi m'cour, i m'sônne 
Qui ji v'freus bin turtos bâyi, 
Por mi ji sins qui comme on mônne, 
Ji vas doirmi sins m'fer hossi: 
D'avance, à l'copette del moniêie. 
C'est mi p'tite Tonnett qui j'irouvret, 
Elle mi va bâhi, l'binaméie, 
Paç' qui ji n'odret nin l'pèket î 



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INE GOPÈNE CONTE LES PEKTEUS. 



(3n cabariil eâl un lieu uù I ou vend 
1h folie par bouteille. 



Vèïez-v' ci halozî qui creuhelle li pavée, 

Qui les ëfans sùvet to brè'iant: laide solêe! 

Qui jeure, qui timpeslëe, et baboie inte ses dins, 

Des mâssttès paroles qui personne ni comprind. 

Il qwitte li p'tite lavienne wiss' qu'on beut à Trokèie, 

Si dièrainne dimëe cens' y a d'manou plakèie, 

Et, s'on-z-aveut volou lî siervi de pèket. 

On marquéf à Tlongue crôïe jusqu'à d'main drî rvolet. 

On Ta tapé à Touhe comme on freut d'ine mâle biesse, 

Il est plaki d'broult des talons jusqu'à l'tiesse ; 

Il n'tint pu so ses skè'ies, il piède si pantalon ; 

Il n'y a pu nolle bol'nîre attèlèie âx botons, 

Si visège est d'gretté, si narène tote frèzêe. 

A foice d'avu pèkté ses deux chifT sont hoùzêes, 

Si alène flaire li bouc, il s'trëbouhe tôt costé. 

Es n'èva hinc et plinc comme onc qui n'sét roter, 

Hâsplant di stoc et d'teïe tant qu'il tome es l'corotte 

Gomme on hopat d'irëgus, comme ine màssëïe clikotte. 

Aç'theure vos l'vëïez rire et torale il choûl'rë, 

Si vos n'es l'plaindez nin, vos ôrez qu'il s'plaindrè ; 



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il v'dimdodi'è cinq cens' po n'role di foUe toùbak. 

Il v'dirè qu'il n'ma^ne pus, qu'il n*a pus nou stoumak, 

Qu'il est plein d'Iais-m'ès-pâie, qu'il s'tourmelte nute et joû, 

Qu'il a n'feumme qui s'fait gâ'ie et qui n'magne qui des oùs, 

Qu'il est ma d'ses ëfans, kichess! d'si k'pagnèus 

Et qui ç'n'est qui l'chagrin, qui 1! fait beure on d'mèie; 

Qu'il est in' honnête homme, qu'il vint d'gins comme il fài 

Et qu'il n'y a qu'lu d'vin l's autes qui seuie tourné si ma. 

Enfin, si vos ITioûtez et si vos Tvolez creure, 

Vos f rez n'tèïe inte vos autes et vlî donrez po beure, 

Il est si malhureux, si pauve et si k'tapé ! 

Il n'vout nin fer l'voleur pace qu'il n'a mâie hapé ! 

Main» comme il s'trouve aç'theurejl aim'reut mtx d'esse moirt!. 

Lu qu'a si bin viké, qui n'a màïe fait nou toirt ! 

Kimint est-il possibe ! il mourt di faim et d'seù ! 

— S'il rinteur es s' mohone, il n'y a ni feu ni leu ; 
On l'riçû comme on chin qui passe èn'on jeu d'bèïe , 
On l'kihagne, on l'kiboute, il n'a ni creux, ni pèïe, 
Tôt l'manëge a magnt, main lu deurè juner, 
N'est-ç'nin là des affaires assez po l'tourmèter ? 

S'il esteut foirt assez il s'mettreut à l'ovrège, 
Main tos ses imbarras 1! fet piède li corè^^e, 
Ca, l'ci qu'est ma vèïou di s'feumme et d'sès èfans 
Si tape vile à l'dibrink, vos n'es frîz tôt ottant. 

— Riloukans ciss-t-homme là divins l'fleur di s'jonesse 
Et r'passans s'vikarèîe, po vèie,s'il mérite d'esse 

Pris comme on grand chinisse ou bin comme ine brave gins, 
Comme in' homme di mâle vè'ie qu'a quërou ses tourmins, 
Ou comme on malhureux qu'est k'chess! de l'misëre 
Case di mëchans ëfans qui khusquinet leu père, 
Et nos trouv'rans jourmâie qui tos les vîx pëkteus 
Ont zel mêmme fôrgî l'chainne qui les rind malhureux. 
One aveut de l'fôrteune, et les mâles k'pagnëïes 
Ont fait voler si argint. Ses affaires négligëtes 



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gie ^ 



— 22 — 

L'ont ffiiiié foû de rvôie ; il falléf èpronter; 

On n*tinéf pus nou compte à foice d'esse touroiëté, 

On n'alléf à Tavlre ; après quéquès années 

Capital et riv*nowe passtt comme ine blâmée, 

On buvéf davantège, et deus, treus meus après 

On div'néf ine vraie rogne, on pilé d'câbaret ; 

G'esteut lot fèr' karelle, pace qui tote li journée 

On n'aveut po k'pagiièïe qui des vèïès solèes, 

One aveut stu log! co traze nutes â violon, 

In aute aveu po vol, fait noûf dih' ans d*prlhon ; 

Cicial aveut violé, cila d'mandéf si crosse, 

L'aute, riv'nou d'à Lolâ, aveu pierdou l'cabosse; 

Il jâsît d'politik, voltt sut'ni leu dreut. 

Et pleins comme des kokâs, prélindtt fer les streut. 

In aute, honnête ovrî qu'naveut mâïe bu di s'vèïe 

Qui d'timps-in-timps l'dimègne on verre di bîre ou d'mèïe, 

Vat avou Pierre et Paul, hâre et hole, cial et là, 

Si k'pagn'té to buvant noûf ou dix p'tits hènas, 

Et po fer comme les autes, finihe par aller beure 

A grand bac, à TcangUette deus, treus grandes mèseures. 

Ine fèïe meltou so Tptd de n'es prinde deus ou treus. 

Vol là déjà so rvôïe de prinde on mâva pieu ; 

Ine gotte, ni pus, ni mons, on n'es beut treus ou qwate, 

In aute joû cinq ou sîh' ; pus tard, il fàreut n'jatte ; 

El d'fligotte à migotte, on s'mette si bin so l'ton 

Qu'es l'plèce de prinde on verre on l'beureut â posson. 

On rôle po tôt costé, on quîre, on batte karasse. 

Il fàt des p'titès soùrs, li pèket donne li basse. 

On s'vat èpufkiner, et sovint, plein d'boisson 

Divin n'famille haitèïe, on rèpoite li poison. 

— Kibin d'mâx, kibin d'crimes, kibin d'pauvès affaires 

Case di ç'mâdit brouwet, on vèlou l'joû so Tterre ! 

Si on r'passéf les Itves des procès de vtx timps, 

Ji wage qu'on ^'ès trouv'reut po l'mons septante so l'cin 



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- Î3 - 

Qu'ont poûht leu principe inte li verre et Tbotèie 

Et fait mette leus auwteurs es rprihon po ieu vèîe. 

G*est triss' à raconter, main s*il falléf dire tôt, 

On a*ès complreut cint ièies pus qui je n'es dis co. 

Parlez à n*jône solêe, c'ess-t-on tourmint d*nmour, 

Si vos l'trovez k'pagn'té, ci n'est qu'po d'iaht s'cour ; 

Divantdè k'nohe Marële, il n'si féf co m&ie sô, 

Boule, paç'qu'elle n'es l'vout pus, il beut co pé qu'on irô. 

Estant qui l'pauve bàcelle l'a d'vout taper foû renne 

Paç'qu'elle l'es Tlrovéf plein, deus, treus feïes so l'samainne. 

Les mariés, c'est aut'choi, s'il buvet d'timps in timps 

C'est qu'les feummes foirsolèes ni sont contênnes di rin. 

Qui l's èrans sont mal&des, qu'ils n'ont pu nou plaisir, 

El qui pus rin so l'terre ni les sâreut fer riro 

S'ils n'avîz ieu gotte po s'plaire et s'dilrit, 

Avou des afldés qui r'quèret l'mémme mestl. 

— Qu'il riniresse timpe ou tard, il ont Tcour plein d'arège 

Ine fèïe qu'il ont Tpogne ju, li dial est es manège ; 

Ils spïèt, ils cassel, il n'trovet pus rin d'bon , 

Li feumme est ine mâssèïe, ine cânôie, on troufion ; 

Elle n'a nou bai cosié, c'est ine nawe, ine bouflresse. 

Qui cropihe so ses cindes et n'a mâle ses abesses ; 

Si elle deut fer l'café, elle coûret à voisin ; 

Elle èpronte to costé des cens' qu'elle ni rind nin. 

Elle barbotlo nute et joû , s'il beut, c'est case di lèïe, 

Elle mérite d'esse battowe po totes ses calin'rèies ; 

Ga si s'tape ft pëket, s'il est div'nou pourçal, 

C'est l'pauve ënocênne feumme qu'es n'es poite li f&rda!. 

S'ils sont vèfs, c'est Tmâlbeur, s'ils sont joïeux, c'est l'jôie; 

Ils s'y prindet d'manîre à mette on hame es rvôie. 

Dihezl'z-yçou qui ç'seûïe, il ont rclâpol'hazi, 

Et s'trovet raâlbureux d'aveur on sort ainsi. 

Ils n'ont pu nol honneur; mais d'wiss' vint tote li f3te ? 

Il nos fât po coula rid'hinde à n'pus longue date 



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— 24 — 

Et r'iouki ces gins là» vès dihùt* ou vingt ans, 

Qwan leu brîhe lèzî d'het qu'ils n*sont pus des èfans. 

— S'ils avît concoisté des pâhûlès jônesse, 

Eploï leu samainne sins meskeur leus foirts bresses 

El bouter les r*ijQOstrances des vîx qu'ont stu gintis 

Qu'ont ovré leu six joùs sins m&ïe piède nou londi ; 

Apprinde à 1ère, à scrire divin les scoles d'à l'nute, 

Quèri les bravés gins, si r'sèchî des disputes, 

Ils sèrîl hoùïe des hommes bin vëïous tôt costé. 

Des bons pères di famille, honnêtes et respectés; 

Mutoi des bons borgeus qu'àrit avou leus spâgnes, 

Prové qu'avou leus oùs, n'avît nin fait tos bagnes. 

On n'veureut nin so rvôïe tant d'èfants si chaipious 

Tôt mâssîs, tôt k'hiîs, pleins d'misére et pleins d'pioux, 

Dimander po de pan, po leu mère ritrôclée 

Divin n'chambe èfoumèie, so n'chëlre es l'coulôe, 

Sins feu, sins pan, sin ch'mîhe, raitindant l'doux moumint 

Qui l'moirt es Tvinsse quèri, po fini ses tourmints. 

Main tos ces mâheulés onttofër' situ iiawes, 

Rimplis d'tours di Cartouche, di displis d'màlès clawes, 

Et n'ont m&ïe riquèrou po s'plaire ou s'porminer 

Qui des pareils à zel, qu'aimmét de balziner. 

Louktz-les po l'moumint, ci n'esi qu'des vraies tape-foû, 

To l'monde lèzî fait Tmowe, rin qui d'ies vèie so l'soû, 

Et, si vos n'es jasé âx gins wiss' qui s'vont mette 

On v'dtrè qu'on z'aimme mîx leus talons qu'leus bèchettes. 

Es n'es vont lot mâssîs comme les cis qui grognet, 

Leus visêges et leus coirps sont neurs comme des hochets. 

On dit qu'ils flairet l'chin ; leus hàres sont à brimbâtes, 

Divin quéquès années, ils tindront l'main po n't&te; 

Ils d'vèront courts d'halène et pleins d'tote sort di màx 

Kihustinés, haïous, irakés pè qu'des vîx r'nâs ; 

Et leus èfans, leus feummes, è l'misère jusqu'à l'tiesse, 

Lanwih'rons malhureux, case des ci qui d'vrit esse 



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25 



Li rikfoirt de Tfamille, li pilé de mastai, 
Li bonheur de Tmohone et Tjôîe di leus carpat». 
Por zel, diVnous bômels, màhattls, pleins d'mèhins, 
Ils mourront conte ine hâte, ou Reickem les rattind ( ' ). 

I ' On dit proverbialement d'un ivrogne : Il moûrrèt conO' ine lâit* . 



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mM UÉdEÛKE DS iitTTÉRATmiE WALLONNE. 



CONCOURS DE 1873. 



HARPORT SUR LE CONCOURS N* le DU PROGRAMME. 



Messieurs , 

Le dixième concours avait pour objet une pièce de 
thé&tre en vers. Il n'a donné lieu qu'à un seul envoi : 
une comédie intitulée : Li mohonne à deux faces. 

Le sujet en est des plus simples. 

Une jeune coquette est recherchée à la fois par 
deux amoureux, Gilles et Matoufet. Au lieu de suivre 
les sages conseils de ses deux voisines, NelleeiBaure, 
qui lui disent qu'elle ne doit pas jouer avec le feu, 
Liia veut tenir ses deux poursuivants dans l'incerti- 
tude, en ajournant la réponse décisive. Liza habite 
une maison à deux façades, qui forme le coin d'une 
rue et d'une place, et qui a une porte de chaque côté. 
Grâce à celte disposition locale, les deux amoureux 



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— !^8 — 

ont pu attacher en m^me temps, à Tinsu Tun de 
Fautre, un magnifique bouquet, le premier à la porte 
de droite, le second à la porte de gauche; ils y ont 
joint un billet doux^ et ils demandent une fleur en 
retour, comme signe que leurs hommages ont été 
acceptés. La jeune coquette échange adroitement les 
bouquets. 

Les deux soupirants sont d'abord au comble de la 
joie en croyant leurs vœux exaucés, et ils s'en retour- 
nent en tenant à la main, chacun le bouquet de son 
rival. Le hasard fait qu'ils se rencontrent sur la place. 
Surprise bien légitime, en voyant leurs propres fleurs 
dans des mains étrangères : ils se soupçonnent 
mutuellement de s'être introduits dans la maison de 
Li%a pour la voler. Aussitôt ils réclament main-forte. 
Arrivent un pompier et un agent de police, qui, ne 
pouvant débrouiller ce quiproquo, veulent les em- 
mener tous deux. 

Li%a^ effrayée de la tournure que prennent les 
choses, apparaît, et explique aux agents de la force 
publique la ruse qui avait amené la méprise des 
jeunes gens. 

Ceux-ci, en apprenant la manière dont la coquette 
s'est moquée d'eux, se retirent, et, au lieu de se que- 
reller à propos de leur déconvenue, ils prennent le 
bon parti d'en rire. 

Puis voyant Nelle et Baure s'intéresser à leur mé- 
saventure, ils se rapprochent d'elles, et remarquent 
leur air avenant et leur langage convenable. Gilles 



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l>9 - 

fait une déclaration à Nelle, et Matoufet présente ses 
homniages à Baure. Dès lors, la coquette peut 
méditer à loisir sur la vérité du proverbe : Qui chasse 
deux lièvres, n'en prend aucun. 

Comme on le voit, le sujet est heureusement choisi, 
et nous ne pensons pas qu'il soit emprunté. C'est une 
petite comédie d'intrigue en un acte. Il y a de l'unité 
dans l'action; de plus, cette action est vraisemblable, 
et se développe sans longueur et avec simplicité 
pour former un tout complet. 

Les situations y sont franchement comiques ; nous 
citerons particulièrement la première rencontre des 
amoureux, où ils se défient l'un de l'autre, la scène 
des bouquets, et la seconde rencontre des amoureux. 

Nous avons dit que l'action est vraisemblable. Il 
faut faire une restriction pour le dénouement : l'au- 
teur l'a pour ainsi dire escamoté, ou du moins trop 
brusqué. En effet les deux amoureux, abandonnant 
leurs poursuites auprès de Liza^ s'éprennent tout-à- 
coup des deux voisines, qu'ils ne connaissaient 
même pas auparavant. On dira : c'est un coup de 
tête qui peut se concevoir dans la circonstance. Tou- 
jours est-il qu'au lieu de les montrer s'amourachant 
subitement de deux inconnues, il eût été plus naturel 
de préparer la chose, de la faire simplement pres- 
sentir; car l'essentiel est que Liza reste seule, et soit 
dupe de ses propres ruses. 

Le caractère de la jeune coquette sans cœur et sans 
réflexion est bien tracé; il contraste avec celui des 



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— 80 — 

deux voisines, déjà un peu sur le retour, et que 
Texpérience a rendues prudentes. Ce qui donne du 
piquant à cette opposition, c'est Fespèce de rivalité 
sourde qui s'établit dès Fabord entre ces trois femmes, 
Liza faisant valoir malicieusement les avantages que 
lui donne sa jeunesse, les deux autres laissant percer, 
jusque dans leurs bons conseils, la jalousie qu'elles 
ressentent, peut-être à leur insu. 

Le rôle des deux soupirants est également fort bien 
conçu. 

Mais ici nous avons une observation capitale à 
faire. En thèse générale, dans une pièce, deux per- 
sonnages ne peuvent avoir deux caractères identiques. 
Si Molière introduit, dans l'un de ses chefs-d'œuvre, 
trois précieuses ridicules et deux beaux esprits, il a 
grand soin de les varier, et de présenter en quelque 
sorte dans chacun de ces rôles des nuances différentes 
du même travers ou du môme ridicule. 

Or ce devrait être ici le cas, d'une part pour Ndle 
et Baure, d'autre part pour Gilles et Matoufet. Mal- 
heureusement ce sont, dans notre auteur, deux 
couples de personnages absolument semblables; 
semblables, non-seulement par les allures et les 
actions, mais encore par le langage et la tournure de 
l'esprit. C'est là pécher contre la règle essentielle de 
la variété. 

Le dialogue est généralement vif, quoiqu'il abonde 
en maximes et en dictons populaires. Outre que ces 
spots sont parfaitement dans les allures du v^allon,et 



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- 31 — 

constituent un des caractères distinctifs de notre 
patois, l'auteur en a su tirer le meilleur parti et les a 
toujours placés à propos. 

Le style est clair et naturel. 

La facture du vers est bonne. L'auteur s'est astreint 
aux r^les de Falexandrin français : Talternance des 
rimes masculines et féminines et la césure de rigueur 
(il y a quelques rares exceptions). Ajoutons que 
l'auteur a pris soin de varier la coupe de l'hexamètre 
pour éviter la monotonie. 

Quant aux élisions, qui offrent tant de ressources 
pour levers wallon, on pourrait en signaler un cer^ 
tain nombre qui sont un peu dures. Ex. K'mènt 
s' plaît'On d'%0 c'naû teût? — Vosse wèùnech mi dû. 
J'CREû Qu'ji m'plairet ver ci. — Cest Vmôde dès jdnes 
di creure ou' maie li ban temps n' passret. 

Nous noterons deux hiatus dans les troisième et 
huitième scènes. 

Avon ci froiignou-lâ i 'if rèussiret inauïe. 
Vlfl ine rose qu'eir ravisse. 

Les hiatus doivent être absolument interdits. Il ne 
s'agit pas ici d'une règle arbitraire imposée à la 
poésie wallonne ; nos meilleurs poètes s'y sont 
astreints tout naturellement : elle est fondée sur une 
tendance de notre patois. Antipathique à toute ren- 
contre de voyelles, il insère constamment des «, des 
t et des st entre detfx mots, dont Tun finit, et dont 
Tautre commence par une voyelle. Si c'est là une loi 



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- :« ~ 

invariable de la prose wallonne, elle est à plus forte 
raison de rigueur en poésie. 

On a bl&mé quelques-uns de nos écrivains de ne 
pas écrire dans un wallon pur et franc : leur langage 
ressemble parfois à une traduction littérale du fran- 
çais. Ce reproche ne saurait atteindre l'auteur de 
cette pièce : son wallon, qui appartient au dialecte 
de Verviers, est de bon aloi. Faisons toutefois nos 
réserves relativement à l'emploi du relatif dont y et 
du vélsiif quoi précédé d'une préposition. 

Ex. Tunant on plumeau avou quoi elle dispouselle 
(se. 1). — Inecoine dirowe dont li streûte façâude 
si dresse a moitëie délie rowe (id. ). — Les fleurs dont 
i m*avint fiesti (se. X). C'est les deux piels dont 
torateji v' paurla (se. I). 

Ces deux tournures sont étrangères au vrai patois 
du pays de Liège. Les seules conformes au génie de 
notre wallon sont les suivantes : Tunant on plumeau 
qu'elle dispouselle avou ou bien tunant on plumeau^ 
et dispouslant avou. Les fleurs qu'i m'avint fiesti 
avou. Inecoine ai rowe qui si dreûte façâude si dresse 
â moitëie délie rowe y etc. 

Il semble inadmissible que ces façons de parler, 
inusitées à Liège, appartiennentau patois de Verviers. 
Le dialecte verviétois diffère très-peu du nôtre. 
On y rencontre un certain nombre de mots propres 
à cette partie de la province, et dont le contexte ici 
ne donne guère la signification ; nous signalerons, 
dans la première scène, les termes suivants : droum- 



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- 33 - 

quenne (vieille femme?) : Cest dès viles droum- 
quennes; — ramoirdi (amortir?) : Surtout qu' vos 
estez là po no ramoirdi ; — wihet : Les wihet vont 
fruffi ; — plévihant : feuris ine fraie di plévihants. 

Il serait à désirer que Fauteur mit à la fin de la 
pièce un commentaire explicatif de ces expressions 
particulières. 

Telles sont, Messieurs, les observations que nous 
a suggérées Texamen de la comédie Li mohonne à 
deux faces. En conséquence, le jury estime que cette 
œuvre a droit à une récompense, et il vous propose 
à l'unanimité d'accorder à Tauteur le second prix, 
c'est-à-dire la médaille d'argent. 



Faità Liège, le 15 juin 1874. 



Le jury : 
Delboeuf, 
Picard, 
et DoRY, rapporteur. 



Dans sa séance du 15 juin 1874, la Société a donné 
au jury acte de ses conclusions. 



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LI MOHONNE A DEUX FACES 

GomidèTe en on a^te 

PAR 

J.-S. RENIER. 

Paul hèù sVa^ai 

( Sujet tuzë par Tiiuieur.) 



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PERSONNÈGES : 

Liza, jône feie d'inné vingtaine (Tannèies^ abillèie avou gosse, 

Nelle et BkunE Jônès feies di vingt cinq à trente ans. 

Matoufet, d^abord amoreux d' Liza, puis d' Baure. 

Gilles àimon, prumiremènt amoreux d'iÀza, après d' Nelle; li 
prumir est gros et V deuzême maigre. 

On Agent d' polîce. 

On Pompier. 



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LI MOHONNE A DEUX FACES 



Li £cène si pa«se en on vinàve inte pièce et rowe, et l' tbèiaule riprézinle inné 
coioe di rowe, dont U streftte façâade si dresse k moitcie délie scèoe avou in' oube 
à venilre. A d'zeur du cissl intrèie esst ione pilite plaie forme ètoûrète di treille», 
âovrowes di qudquës fouilles et fleurs di printemps. A dreute, èsst înne rowe poir< 
tant Tnom rowe délie Raubos&e; à V hlèocbe main» si slënd li pièce de Persicot. 
L'mohonne, qui plante inte deux, a èco in oohe so chaque di ces costés, pièce et 
rowe. 

A l'avânt scène, di chaque costé èco, èsst'on poirtau; è ci d' dreute, Baure heuve 
li sou ; è Tôtre, Nellc terre les volets so Ttèmps qui d' louhe de moitèie mousse foû 
Liza ben altloteie, lunant on plumeau avou quoi elle dispousèiie Toube et r meur di 
s' mohonne. 

SCÈNE PRX7MIRE. 

Liza. 

Uué pôve mèhiii po'une feame di tûzér à V bagrèie, 
Enfin è m' noûve mohonne vo mlà don astafleie, 
Tôt est rmètout k pon (elle examène si tôt va beu), 

Po crainçi m' prumî jour, 
Lûgnanz' on pô les gens qu' jâret cial lot atour, 
L' pièce m'î<hauie, V rowe avou (apperçuhant ses wèzennes) ; 

len v1a mes deux wèzennes. 
Qu'ont l'iiir di m'awaiiî (nanl), cVst des vîles droumquènes, 
D'zèiles ji n'âret nolie pawe quand passront les haïUeux, 
Elles aprèpièt {les wèzennes vont vè Liza). 



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- 38 - 

Baure. 

Dièwaiule, cmin s*plail-on d'zo s'noû tftur 

Liza. 

On poireut è$se pus mau. 

Nelle. 

Bon aweur à Tbèn viiowe, 

Bauke. 

J'espère qui les amours vont aploare è nosse rowe. 

Ijza. 

Ji compte ben po mu strëme en aveur oùie on bai ; 
I coret foir sovènt après V nézet novai. 

Baure. 

Nosse quart! ne blâme wère. 

Liza. 

Si v*z avez Y fleur ju d' loûie, 
Nos 1' vènrant réfréner lo fant l' toi au gosse d'oûie. 

BkVHEivèxèeà Nelle), 
Elle nos acsu de cô, avez've oiou V pètion? 



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- 39 - 
Liza {veiant F maûle humeur di Baure). 

Là, qu'elle prend Tair maûle graw, dank pos*chéiv prélëiision, 
No it frant règuiner quand n' sërant so s* pavéie. 

Nrlle (à Baure), 
V Wèrihel vent il* s'acrèhe hen sûr d*inne avignéie. 

•J2A (s'raprèpiantj. 
y la dit comme j'èl lûza, ni v'z èwèréz de mot. 

Baurr. 
Avou délie boigne loquënce on s'trebouhe et contre tôt. 

Nblle (à llaure). 

Faut prènde li monde tel q'iest, mais n jugeant so rdëgaine, 
Elle riret todiben Tcisse qui riret rdièraine. 

Liza (avou in air prétèfiti'iux). 
Vosse wëzinèch mi dû, jcreu q'ji m'plaiiei ver ci. 

Bauhr [avou malice). 
Surtout (|Vos estez là po nos vni raraoirdi. 

Liza (avou mnepitiie mowe). 
J'y compte bail. 



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- 40 — 

Badre. 

lant m! vaut, d*après. çu q*on peut veie, 
On va ben ralo chanter q*inne nouve cope si mareie, 
Les wihets vont frugi. 

Liza (s* animant). 

Dihez don les mariants, 
Ca dëja ir j'eurit inné tVôie di plèvihants 
Q'intrint même, onque por ci [ellemosteure Vouhe so i'rowe), 

dmanrhini quéq fausse adresse, 
L*ôtre, por là {elle acsèyne l'intrèie de costé (Telle pièce), 

vna ramier et des quèsse et des messe. 
Soula comme ji rentrôv mi tôt dierain paquet ; 
J1es rèvoïa to d'hani, j'a hausse, on s'rivièret. 
L' snri qui n*a q'on Irô, dissi' on, est ben rate prise. 
J'a Tchance d'aveur intreie so deux rowes è m'noûve gîse. 
Et cissf ouhe po Trawette (elle louke H poite délie façaûde). 

Bai RE. 

Coula c'n'est nèn francs jeux, 

Nelle. 

En fait d*galnnts vaut mi n*èn aveur noue qui deux, 

Liza. 

Ghaq si gosse, vo vièréz q'cest autrument q*ji tope, 
Por mi j'auret l'systême d*èn aveur inné belle cope ; 
STonq è va Fôtre est prête, on s'mareie sèn waisler, 
Po z aprènde au volage, de mon, çu q* c'est d'viquer. 



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- 41 - 
Nbllb. 

Qui lûgne deux lives à Ffeie, co sovènt n'abat nouque. 

Baure. 

Quand qui vout trope, trèbouhe, on It keu comme de souque. 

Liza {les louquant totes les deux). 

Sainte Breuse ! vos n'nè rvendrtz à tots les Frés Précheux^ 
Cial elle pièce d'inné leçon j'en auret todi deux. 

Nelle. 

Ci n'est rèn de l'ruçur, fout l'sùre, H bon consèie. 

Liza (à paurt). 

Pc quoi n*ën a-t-elle nèn on pô waurdé por lèieî 

Baure. 

C'est Tmôde des jônes di creure q' màïe li bon tèmp n'passret. 

Nelle (à Lûa). 

I n'faut compter po bai qui l'bai tèmp qui durret. 

Liza. 

Li menne sèrët ainsi, s'jî met deux deugts d'flnesse. 

Nelle. 

Inné feume deut duvanl tôt esse prudente et môdësse. 



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~ 4^ ■- 
Liza {a»au humeur). 
Jan vHûzez «u vt style et j*sû Tz idëies de jou. 

Nellb. 
Po z èsse par trop aibti co pus d*onque s'a piërdou. 

Baure. 

Toi qut vicret vièret. 

Liza (louquant au fond). 

Louquiz don, v1à des prouves, 
Vo zë ci dëjà deux qui vnet sûre mes esproûves. 
Âpon, c*est les deux piels dont torate ji v*paurla, 
rrecours,v'veyez q'iëst tëmp d'aller tende mu herna(d//d reuteure). 

Nelle. 
To risquant so té jeu, sûr, nos Tviërant laurdeie. 

Baure. 
Jan r'zë (chaque è rva). 

SCÈNE II. 

Aa fond ipptrètaieat da chaqn« costé in homme, vestis on pôqne à l'eitra, 
i'ivtneet tvou précawsion, Matoufet v'oant po 1* pièce, Gilles po 1* rowe, cliaqad 
•zamène la face deUe mohonne da Lita to fant dès gèssee exaltés. 

Matoufet. 
Po r ruiouqui m' cour ë vat à boleie. 



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- 4:5 - 

Gilles. 

J'a stu lot essbaré V momèn qui j* la vèïou. 

Matoufet (avou sèntumènt). 

D'pôîe Ir à rnulte ji cours les voies comme on pièrdou, 
Tant s'sovni mu porsu. 

Gilles {to s' frottant les mains et riant), 

I m' sonle aller k V fîèsse. 

Matoufet (mostrant V ouhe). 

C'est ben là quelle dimeure. 

Gilles (di même). 

Âwè vola ben s* poèsse. 

Matoufet. 

Là qui s' belle pitite boc mi d'iahtve : au rvèï. 

Gilles. 

Vola bèn Y ouhe là q'îr on s' duhéve au rwatti. 

Matoufet. 

Cher amour, po m* bonheur, vinez don à V veulire. 

Gilles (s'arrestant avou extause), 

ï creu qui V gordenne si rmowe. 



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- 44 - 
Hatoufbt. 

Finihez don m' maurtyre. 
Gilles {su rengorgeant to fant des ^ambèies). 
Bèn sûr elle m'a vèiou; prëndant in air guerdin! 

Matoufet ((T même). 
Po z èsse aimé d* cisse belle, j*a t*avu Thouvirette. 

Gilles. 

Cisse fèie ci mes amours ni vont nën fer bërwètte. 

SCÈNE III. 

(Liza est montëie so V plate-forme et lottqae les amoreux.) 

LlZA. 

Si'è tôt tèmp, tôt pays, V z'amoreux s' ravizet, 

Ces cials onl Tair d'aveur on bai p'tit cop d* maiet. 

(avou surprise) Y avancet ! Diè s'i 'allint bouhî to deux essonle, 

L* quèn fauret i bouter? Li pawe mi prend, ji ironie. 

Matoufet (après s'aveurparminé), 

Houtanz on poque à 1* poite si ren ni rmowe è gon. 

Gilles (louquant sH est tôt seu). 

Ji poireu benlûgnî dVin l'serre, comme distraction. 

(// y touque temp 9* lotre y plaque s' i oreie^ puis tots deux 
quittet por louqui vè les fignèsses di d*zeur, prëndant des poses 
à p6 près parties.) 



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- 48 ~ 

Liza {sûhant leu gesses). 

Qaé bonheur i* en ë vont, ji va rhaper aleine ! 

{les vèyant s'arrester) 
Vies là par astaflés comme deux chëns d' porçulaine. 

M ATOUFBT {après avu èco houti s* nou hru ri s'a). 

S' peut qu'elle n'est nen rentrèie. 

Gilles {fant parèie mouvement ). 

Elle sèrèt moussèie four. 

Matoufbt (su rsovnant et s' bouhant r front). 

Au propos, de meu d' Maïe, c'est ouie li prumi jour. 
Wisse trouvrèg on bouquet ? 

Gilles {de même). 

C'est l'heure q'on plante lu maie. 
Onne idèie, j' va sèï d' 1! flochler quéque tramaïe, 

Matoupet {après avu tûzé). 

J'iatrové! 

Gilles. 

^ ., ^ . :<»H 

Rate j y cours et racours tôt flon. 

(F d^hiènd vè V scène po alltiv.vA.t,plèce, Matoufet fant parèie 

po cori vè F rowe i s* creuhelet et quand i s' sont dipassés^ i 

s' rutournet roque ver Vote et «' louquet âvou\(SufQfuz%té.) 



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- 46 - 

Matocfet. 

Q'esl-ce là p' on' invidu? Tèn, q' vin ti fér vér ci ? 

Gilles. 

Q' va ti rauwtér vèr là (t conti7Wwe m vSievè rplèce)! 

Matoufet (èmu). 

Quéq rival, i' èso sûr! 
Si v'néve so m' champihège, nahter.... bon je T va sûre. 

(/ su Gilles qui passe divant Totihe dunant so T pièce sens 
r louqui^ Matoufet q' el louque riprend,) 
1 passe Touhe, tôt va ben (i i" prend s* voie s* raviieèco). 

Portant lûgnanfle on pô. 
(// vent s* lèguiner lu long délie pitite façaude de moitète, so 
c" tèmp là, Gilles su ravize avou, ) 

Gilles. 

Cisse rèsconte là m* chipoiie, wafliant s* i passe de cô. 

(/ longe lu meut délie mohonne d'à Liza et lois deux arrivet 
à r coine nei à nez,) 

Matoufet (avou surprise et rèscoulant ). 

Hein! 

Gilles. 
Ho! 

Matoufet. 

Q'vouti? 



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— 47 - 
Gilles. 

Q* fait i (i s' toizet)1 

Matoufbt (àpaurt). 

C'est bon, uzant d' malice. 

Gilles. 

Pa j* pensév toi bonnement q* volii, vo sûht m' pisse. 

Matoufet. 

Ji V* zavowret francment qui c*esteQt tôt ainsi, 

Mu d' bant : ci gaillard là, j*el crèyéve aquati (i tuze)... 

Dire wisse, c'est maulauhi. 

Gilles {àpaurt). 

Voçi n' pierdant nen I* qu&te, 
Po 11 tirer les dents, i' est tëmp di s* mette è quatte. 
{à Matoufet) Soulà m' faitben plaizi, cher ami, dai, s'pout ben. 
ià paurt) Di leie ni motihaut. 

Matoufet (diméme). 

Di leie nipaurlantnen. 
(fixant Gilles) V mavez l'air amoreux. 

Gilles {surpris). 

Mais, on tôt pôque, et vos? 



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- 48 — 
Hatoufet {àpauri). 

I m' vout tirer les dents, waurdaut n* saqwët por nos. 

{à Gilks) Hé... mi, c*est tôt pareie et wisse dimeure li vosse? 

Gilles. 
Hi rèspondréz-ve? 

Matoufet. 

Awèt c'est sûr. 

Gilles. 

fiowe délie Raubosse. 

Matoufet {avou jffie). 

Vo m* là sauvé ! Li meune so l' pièce de Persicot. 

Gilles {du même). 

Ji m' trompév ! Ci pove dial, jèl lai là po li scot. 

Matoufet. 

Bon, ji m* lëguëne èvôie, ci valet mau m'ahauie. 

GiLL&s {riant et mostrant Matoufet). 

Avou ci frougnou là, n* rëussirët jamaûie. 

Matoufet. 

Vocial on pierd su tëmp, haie vë V pus bai bouquet (i court vè 

Frowe). 



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-- 49 - 

Gilles. 

Rate, èvôïe po les waides et plantant là 1* planquet (t court vè 

V pièce). 

SCÈNE IV. 

( Pendant q' Maloafet et Gilles 6 vont, les trens feones mousset four, Nelle vt vè 
Baure, Liza les rjond to corant et riant.) 

Liza. 

Là, vo r vèyez don ben, po réussi F jone feie 

Deut ouie on po larder s' totte pitite marchandeie. 

(avou entrain) Po m'paurt, ji n'iézènnepus et vout tôt au pus bai, 

J'aiuoe tôt çu q* iest d' pus chir, lu rluhant, V pus novai ; 

Ji vout q*on deie tofer, et soula cosse qui cosse : 

(Test leie qui Ta 1' prumtr, c*est leie q' i' a V meieu gosse. 

Aux botiques là qui j' vas, on m* dit prendez, prendez. 

Bauae. 

A qui s'achtèie sën quaur, on jour on dit : dôcez. 

Liza {avou prétènsion). 

Tôt r monde mu fait crédit, i parait q* ja bonne mène. 

Nelle. 

To z* achtant sen compter, on z' afinereut inné mène. 

Liza (bonnement). 

Quand m' baron sèrèt là, c* sèrèt lu qui comptret. 



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— 80 — 

Baurë (ëuiTtrise). 

Si j'esteul è vosse pièce, j'è dtnandreut on brevet. 

Liza. 

C'est r mon qui pôret 1er, si por lu ji m* fait gauie, 
Sèmpl gèn, quand lïeume dépense, c'est compte fait qui l'homme 

pauie. 

Baure. 

Divin dès s* faits manèges, si 1' bonheur est assiou. 
C'est q' onz i waude po sûr on pt d' coide di pèndou. 

Liza [ètonnèie). 

Pardic, vos m' badinez, abèn nos sèrint belles 
S' ion n* intréve è manèg qui po rlaver les hièlles. 
N' fér qui 1* gosse d'à Moiisieu, bèn houter, nèn moti ; 
Si v' dû tôt comme çoulà, j' veut d'ôte oûie, Diè merci. 

Nelle. 

Faut s' marier po s'aimer, viquer d'accoird et d' pauie, 
Nen po geairi^ ramter jour et nute di gaugauie. 

Liza (à paurt, to faut on pas et haussant les spalles), 

G n'est nèn po rèn q' l'amour les riai là po li scot. 

Nelle (à Liza). 

Tôt vèn à pon à qui vont roter dreu d' vin tôt. 



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I 



~ 51 — 

Liza (à paurt). 

To baubitant baico des s* faites madrombeiles, 

J'ireut, di Sainte Gatrënne, fer les croies avou z elles. 

(à Nelle) A v' bouter, po s* marieg on rawaud des longs joùs. 

Nelle. 

Rawaurdez V réussi divant d' fer des crizoùs. 

Liza. 

Nos n* nos ravizant wèr, vos n' estez nen haustèïe. 

Nelle. 

Li bai songe d*au matin pout esse bourde à Y vèsprë'ie. 

Liza (s' moquatit). 

Bravau ! c'est todi péz, avou cisst* esprit là 

Dai, m* sonle q' on su les voies des bordons d' canada. 

Baure {à Nelle). 
Waïe, waïe, elle nos acsû, v' la qui n' zavant Tpètèie. 

Nelle (à Liza), 

Sovent on regrette à Y nulte li lawe délie matinèie. 

Liza. 

Ni tuaant nen si Ion, ci jour ni cmince nèn mau. 

(Elle louque vè s* mohonne, fait mène (V è raller et veut v' ni 
Voque après Vole Matoufet po V pièce et Gilles po r rowe, chaque 
poirtant on bouquet extra et parètaut, sens esse trop fahî.) 



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— S2 ~- 

SCÈNE V. 

Liza. 

Tèn, vorcial onque q* apoite p' oune bresseie di caucaû {riante 

elle si cache dri ses wèzènnes). 

Baure (louquant Gilles). 

Saint Brudienne, que bouquet ! 

Nelle {mostrant Matoufet), 

Waitiz par lu deuxême, 
Faut avower q' on pierd li cabosse quand on z' aime. 

(Les galants aprèpièt, chaque vè F ouhe di leu gosse^ avou 
précawtionj les feumes si rtiret vè r sou da Baure po louqut çu 
qui s' va passer; Nelle keuse et Baure tricotte.) 

Liza (to z' èsclamant). 

A m' cliché i les pendet ! {à ses wèzèmes) dri vos ji m'va cachi 
Tant qui seuièhent ëvoie, po ben les awaiti. 

Baure. 

S* i sont tant généreux, boutant p&r leu ramage. 

Gilles (avou jôîe). 

Quéle tdéie m*a hloiou ! 

Matoufet (di même). 

r var étaili juwage! 



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— 0.3 — 
Gilles (9u carrant et admirant s' bouquet). 
Sûr q' elle sèrèt contène, j*èspére qui fait d* Teffet? 
Matoufbt (mostrant V naule di «* bouquet). 

Aveu rbai rouban s*crit! vola i'pus craune bilet (t è tliavou gesse)\ 
G*est ben sûr ë vos ouies qui 1* Dië d'amour si meure ! 

Gilles (léhant on bilet qui met è bouquet). 

T zèstéz gravëie ë m' cour comme inné pire en on meur ! 

Hatoufet (avou fîrti). 

Avou des s* faits canetias, m' bonheur est assuré. 

Gilles. 

L* papi It diret cbin m* servai fou cultivé ! 

Si n* dimande po rësponse q* inné tote pitite cohèlte. 

Hatoufet. 

Jèl prèie di rmelle elle plëce li pus chaipawe fleurette (t met 

/' bouquet à V cliché), 
y vas fér treus tours volà,puis ji rvèn au galop (t è va vè Vplèce). 

Gilles {après avu atèlés* bouquet), 

ï compte jusqu'à deux cents pas et rvin coiri I' gros lot {ièva 

po r roive). 



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-^ 54 "- 
SCÈNE VI. 

( Les feames vont admirer les maies.) 

Baure (à Liza). 

Aben on 1* wèsse bèn dire, vos v'ià Arment flochteie. 

Liza. 

Vraie, i m*ont là planté chaque inné fanneuse bogèie, 
Mais nën contents d' çoula tots les deux i d'mandët 
Q*è r pièce di leu gros fa ji rmèlte on ptit cohèt. 

Nelle. 
Wattiz bèn aux cadeaux di jône fëie à jône homme. 

Baure. 
Po m' paurt ji n' rendreu ren, rçure est déjà tôt comme. 

Liza, 
On dit q' les ptits cadeaux intrutnel T^miiié. 

Nelle. 
Çu qui rlive çu q* on donne, est i* manîre d*esse dune. 

Liza. 
Mais faut bèn s* cusèï di toile sôre è s' jônesse. 

Nelle. 
Uèlle manîre d'èsse chèrî, r tiraoni prend doppe foèsse. 



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- 5n - 

Liza. 

V'Ià qui m' boute inné idèie, j* creu q' elle va réussi : 
Duscangèant les bouquets, j* les siève h bon marchi. 

Nelle. 
D'vin té cas V bon marchi pout ben coster Toir chtre. 

Liza. 
J'auret se! de mon cisse lotte novelle mantre. 

Bacre. 

Divin ces affaires là, qui vout totte novaité, 
Créiez, li pu sovent, s* en a véiou hôdé. 

Liza. 

Ji vout risquer Y paquet; vos vièrez leu visége, 
Staumuz, di s* creure siérvous tôt comme é plein gâgnège. 

Baurb. 

Mu feie, louquiz à vos. 

Liza. 

r est témp di s' dihombrer, 
I m* sonle déjà les ôr, Iraflant po rasspiter. 



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— o6 - 
SCÈNE VII. 

(Liza rentrèie è V poite di face, discange, d'audvin, les bouqaets, risérre les oohes 
et on rveu les fleurs.) 

Baure. 
Hureux qui rëussihe avou s' tote seule idèie. 

Nelle. 
Jônesse qui jowe gros jeu, sovèiit a slu paneie. 

Baure. 
J*creu qui n' mousret ren d' bon de tour délie pôve Liza. 

Nelle. 

Lèianz à chaq si gosse, on V beut comme on V bressa. 

SCÈNE VIII. 

^Les amoreax rivoet, waitianl d'abord, puis faut des gesses d*admiraatioD, to 
vèyaut les bouquets q' examioet, puis prendèt. ) 

Matoufet. 

Sainte Bablenne, faut q* ji v* plante oûie inné fameuse chandelle 
Po z aveur fait q* ji rçu si bai cadeau di m' belle. 

Gilles (s'exaltant). 

Qués triomphes! mauie nolu n'a rèpoirté des s' faits, 
I faut q' on z' illumène, j' cour ter les potiquets. 



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- 57 — 

Matoupet ifani pareit). 

Mëssiréz, jowez 1* z ôbaudes po dire à lotte li veie 
Qui c*edt mi qui V ëpoite et, sèn walster, s' marèie. 
Quéle feume j' âret! Di s' faites li moule a siu pièrdou ! 

Gilles. 

To pensant à m* bonheur, j* so tournisse el bablou ! 

Matoupet (louquant les fleurs), 

Dai m' sonle q' elle vique là d'vin, v'ia-i-inne rose q* è l' ravisse, 
Veia-t-on ren d* pus bai, di mt fahi, d* pusfrisse ? 

Gilles {(ant pareie). 

J*admëre là tôt s* bon gosse, et dire qu'on si bai fa 
C*est por mi, to tusant. . (i s'fiesteie) à mi, q'ell èl flochta! 
Cher cœur ! ! 

Matou F ET (di mhne). 

Trèzor d'amour, vèr li V bonheur m' amène. 

Gilles (èvoianl on choufla vè f mohonne), 

Ji Tabresse à picettes, ai vî creton d' a mène! 
Filans vè les lampions. (/ s' met a cori vè /' pièce.) 

Matoupet. 

Abeie les musiciens (il court foir vile vè 
f rowe et lots deux vnet asîoc a moitèie del scène, s'arrèstei lot 
èwarés). 



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- 58 — 
Gilles. 
Astoc! 

Matqufet (H (nant V visège). 
Quéle bouffe! 

Gilles. 
È pou-je? 
Matodfet (avou colère). 
Ëscuzèz ! 
Gilles. 

Festbèntèmp! 
Matoufet. 

Po flahi par si foir, i faut ësse inné angaïe. 

Gilles {to s' frottant). 

Nos avaiis rçu toi Y même onne fire et hiltante daïe. 

/ s' observât tèmp q' Liza ven à r plate forme, les louque et 
les wèzènnes sont so leu soû. 

SCÈNE IX. 

Liza. 

S' i s* alint acoïr, on rireut on pti cô. 



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— 59 — 

Nelle (èl mostrant à Baure). 

Que cour q' elle a por z*elles. 

iMatoufet (mostrant Gilles). 

C'est co Tméme, èss li sô ? 

Gilles {mostrant Mataufet, puis T bouquet qui çiçi poite). 

C*est r coreu di torate... mais, sos-je troublé, qui veus-je? 

Matoufet (d' mèmey avou èwèraution). 

I a m* bouquet ! 

Gilles {pareie). 

Via m*bai Maie! c*ess* ton malfaiteur, creus-je 

Matoufet {mostrant les fleurs qui Gilles tèn). 

Wisse as* ce ouiou coula ? 

Gilles (du même avou colère). 

Wisse r as* ce sutu liaper? 
Matoufet. 

Coquin, c'est ti q'à Tmeune. 

Gilles. 
Du quoiï 



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- 60 - 

Matoufet. 

J* tè r vas prover. 
(/ i'iance po rprinde les fleurs da Gilles qui s'garèie, è continowe). 
Vos n' bojrez nèn d' voci. 

Gilles {mostrant V poite dunant so V rowe), 

Ji vas fér foncer Y ouhe. 
Matoufet. 
Au scours, à mi, main fôrt ! 

Gilles {rilouquant V mokannevèT rowe). 

Diè comme li cour mi bouhe ! 
Q' sèret divnowe cisse chère ? 

Matoufet (di même vè r pièce). 

D' lèie quesst*i st'arrivé ? 

Gilles ifant m pogne à Matoufet). 

Rapaie, ti mèl paurèt, 

Matoufet (faut on deugt à Gilles). 

Ju t* fret disquailuler. 
(/ louque si bouquet avou émotion.) 
Et dir qui c'est mëtez tôt çu qui j'aret d*resse 
Délie cisse qui j*aiméve tant (t r'sowe inné laume) ! 

Gilles {fantpareie qui Matoufet et avou C bouquet). 
Cher cadeau, qui j* l' ^brosse. 



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- 61 - 

Matocfbt {tôt èwaré^. 

Cesi qui ël baube li brigand, i* est tnaqué, c*est ben 1* mot. 

Gilles {louquant les gesses di Matoufet). 

I babeule, mais i a 1* bois, vën t* i d* Ghél, essti' sot ? 

Matoufet {carant vè F pièce). 

Et iiolu n* vèn, (t crèie) à V gaure! 

Gilles {corant èl rowé\. 

Pompiers, vinez tèmpesse ! 

Matoufet (rvèn et veut cari Gilles). 

I s'auve ! jël rucnohret, rcanjahe-t-on à quattepësse. 

(/ voléveporsûre Gilles^ mais i rvèn co vè V pièce au fMment 
(fon agent passive è fond et q'on pompier arrivéve a corofi dèUe 
rowe et chaque s'arresteie à Fouhe qui It va.) 

SCÈNE X. 

Matoufet. 
Bonheur, volii Tagent; abeie don, accorez. 

Gilles. 
Voçi r pompier à pon; sën faute vinez, vinez. 

L*AGENT {à Matoulet). 
Mais q'a t*i, quéq hèrnauie, rëspondez, qui d*maiidéve? 



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- 6-2 - 

L' POMPIER (à Gilles). 

A ti r feu, faut' i V porape, q' ave veïou, qui voléve? 

L'agent. 

Pàreuiréve ou j'è va. 

Matoufet {toi (T soflé, séiant di rprhide alêne). 

Voleur ou assazin. 

Gilles (avou même expression), 

Ji vèn d' veie H brigand, bizant, avou s' butin! 

Matoufet. 

J' la rescontré voçi corant avou Y bresseie, 

Q' on moment d'vant j'aveut vinou mette è V allèie. 

Gilles. 

Adon j'avnou watti, nolu n*a respondou. 

Matoufet (to fant des clameurs). 

C'est po r flgnesse q' auret entré puis moussi foû. 

(So P tèmp q' chaque cope sauie di dravi Vintreie, chaque di 
s' costé, Liza court fou (C louhe di face, allant vè mon Baure, 
Nelle les vèn rjonde.) 

SCÈNE XI. 

Liza {èstousmaquèie). 

Ji tronle toi, comme inné fouie, ji creu q* Tafïaire si gaute, 
Louqui don, v'Ia Tpolice qui foircihe l'ouhe .sèn faute. 



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- 63 - 

Mariau, vola q' intret ! 

(Des deux castes^ les poites ont stu drovàwes èssonUy toU quatte 
etitret, an les veut délie poite di devant dimonawe au lauge.) 

Matocfet {mostrant Gilles à t agent). 

Arrestéz r, c'est cilà ! 

Gilles {aupompief\ mostrant Matoufet), 

Nu li fez nou quarti, ci qui n* coirant voilà. 

Matoufet. 

Louqui ben qui n* sëchappe. 

Gilles. 

Âpougniz-le, cloïez V oulie, 

Matoufet. 

Di t' sauver, franc tigneu, c'est ti qui cnohe li i*douhe. 

Gilles. 



Qui? Mi? 

Hais ti. 



Matoufet. 

Gilles. 

C'est lu ! 

L'agent (à Matoufet). 

Comme noiu n* sëtend ci, 
En attendant q' on sépe, è tro v' vènrez todi. 



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-. 64 — 

V POMPIER {à Gilles), 
Vo, pareie. 

Gilles. 

Cumin mi? 

Matoufet {mostrant Gilles). 

Diiez cila, jamauie. 

L'agent (i /' èfnéne po /* poite di face). 

Arche, èvôie au violon, soula sen fer noile bauie. 

Matoufet. 

Lèiz don v* z espliquer. 
(Li pompiei- su avou Gilles et lots è vont vè V pièce, quand 
Liza accourt ver zelles.) 

Liza (à ses wèzènnes, tèmp qui sôrtet). 

Ji n' pout portant les veie tôt les deux èminer. 

(à rayent.) Ni ramassez nen toi, lèiz m'èdè mon onque. 

Matoufet (surpris d* veie Liza et honteux). 

])' vant ieie! È té cpagnèie! 

Gilles. 

L'veie; quand è V polte on m* chonque ! 

L'agent (à Liza). 

D' que dreut n' z interrompéve? 

Liza. 

Passqui Tcoupaube c'est mi. 



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— 65 — 
iMatoufet (avou admirauiion). 
L'ange vèn po ro'dulfvrer. 

Gilles {du même). 

S'dëvouemënt, lu voci. 

L*A<ÎENT. 

Ji rfy comprend pu ren {à Liza). Quî d'raan è cisse mohonne? 

Liza. 

Mi. 

L'agent. 
Q'y a-t-on hapé ? 

Liza (sutT^tise), 
lien du tout. 

L' POMPIER. 

Lïarce est bonne. 
L'agent. 
Qui fetlà ces bouquets? 

MATOUFET (mostrant ci (TGiUes), 
Vlà l'meune. 



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- 66 — 
Gilles {surpris). 

Elle roi l'a dné! 
Matoufet {staumtise). 
Que bourdeu ! 

Gilles (mostraiit F bouquet d' Matou fft\ 
Et cila? 

Matoufet. 
C'est leïe qui m'ia sinqué, 
Gilles {furieua), 
Gredin ! 

L'agent (à Liza). 
Vo, q'ènèd'héve? 

Liza. 

To les deux duliet veure. 
N'auïant ren a leu d'né, j'a discangi les fleurs 
Donti m* avint fiesti. 

Uatoufbt {suiT^ris, à Uza). 

Cmin, v' zè voU don deux ? 



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— 67 - 

Gilles (pareie). 

Abën, on n' z èlahive è mé di hiltans pleus ! 

L'agent (à Liza). 

Dai, DOS n* nos mèlans pus des affaires du bantreie. 

L* POMPIER (aux (T livrés). 

Vos deux, avou Mamzelle, ducmèlez vosse lizèie. 
(Lu police è va ; Liza rmteure et serre li poite,) 

SGJBNE XI. 

(Ntlourel el Gilles so looquei sens sava trope si décider a s' mauvler, 
mais s' loDqoant d' triviè.) 

Gilles (râlant les ouies). 
Fér on maie, et p' on s' iait ! 

Matoufet. 

D* fér m* jaurdin p*ô té gas. 
Gilles. 
Qui r aureut par creiou? 

Matoufet. 

Cmin s' mette el tiesse té cas ? 

Gilles (louquant Matoufet to riant), 
Âben W z avant causi tots deux stu pris è lèsse. 



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- 68 — 

Matoufet (s' moquant). 

Mi j*ë va, to v* leiant lu d* zirëie et belle pièce. 

Gilles. 

Dank, waurdez tots vos crus, i a quéq maxon là d'zo. 

Matoufet (s'moquant). 

Au rwaiii, ji v*sohaite de bonheur à gogo. 

Gilles (vaut n' naller, mais s'ravise et va vè Nelle q' iest à 
s'pdte; Matoufet va vers Baure). 

Chère Dame, vos avez stu tèmon d* nost' avèntâre. 

Matoufet {s' arrêtant et louquant Bawe). 

Mais c'est q'elle est gënteie (t èF salowe etjauze). 

Nelle (à Gilles). 

D*vin tôt rparfaite est rare. 

Baure (à Matoufet). 

Elle est jône et sën misse, sai di rëscuzer. 

Matoufet. 

Vos avez bèn bon cour. 

Baure. 

Po quoi m*complimëi)(er? 



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Hatoupet. 

J'm'a sûr trompé d'èseigne quand j'a stu-t-adiez lëie. 

Nelle (à Gilles). 

Trop vite ni y*zènovréz, Tmarièg essf inné lotreie. 

Gilles. 

Essonle prendant Tbilet, 
Fez m'eune caque, là, so Tpouf. (t tind s'main). 

Ëvoie, risquez Tpaquet. 

Nelle (sèn rèspofide au gesse). 

Si c'est vraie à m' wèzènne poirtant rprumt novelle. 

{Gilles It donne li bresse, i volet aller vè Vote cope qui fève 
pareie po sWescontrer cauzi è moiteie délie scètie), 

Gilles. 

Jans li conter Tquaqua (à Baure et Siatoufet). 

Ji v'prézènte mi chère Nelle. 

Matoufet (à Nelle et Gilles to leu présentant Baure^. 

Voci m'clioix, (les feumes su d'net Fmain et s*jauset, Matoufet 
cor^inowe). 

Âvou rôte on zesieu deux po eune. 
Gial tôt iret au m!, chaque onque àret s*chasceune. 

Gilles (à lurtots et d'nant s'bresse à Nelle). 

A cabasse aux parents alans don Tannoncî. 



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— 70 — 

Matoufet. 

Puis Tmayeur et Tcuré seront nos ahëssf . 

Gilles (à Nelle, avau affection). 

Nèlle, fez m'on ptit rizlèt, puss qu'on dit q'inne jône fëie 
Dilahe todi rhiahia quand on jauze di hantrèie. 

Matoufet {à Baure to li offrant s'bresse). 

Baurc acceptév rau brèsse? (elle è Vprend, lu est joïeux). 

Gilles, hèïèttemèn jan zè ! 

Gilles (t (ait on pas d* danse). 

Ji v'sû, lègtr so X jambe et Y pas s'accélèrrèl. 

Matoufet. 

Pusse qui l'bonheur nous houque, n*eslaurjihan nosse couse. 
[Matoufet rote èti avant vè V pièce, Gilles et Nelle suhet.) 

SCÈNE XII. 

(Liza paret à 1' plaie forme et fait on gesse di surprise to vèyant les deux cbpes.) 

Mais, c'est qui s' ètèndet toi comme des côpeux d* boûse. 
[elle creie) Turtots v' mavez trahis, allez don affrontés. 

Matoufet {s' an estant, les êtes avou). 

Di wisse vènrint cisse voix et ces mots esbarés? 



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-- 71 - 
Gilles (louquant autond* lu, ptUs V treiUe), 

T\ n' mi trompe, c'est Liza qui gromeule k s* beuquette. 

Màtoupet {à Liza). 

Est-ce nosse faute, s' adiez vos nos avant fait bèrwette? 

Liza {sdrement). 

Ingrautes, è mé i* sanguisse tots deux m' lèlet d' morer. 

Gilles. 

Todi qui fait Y froumage, est I* pnimir à V oder. 

Matoufet. 

Ni rouvt mauie surtout q* les v!x honnêtes ûsëges 
Sont todi les mèleus po c' cherrt les manèges. 



Droumkenne, boagonnease; cette expression ne s'applique pourtant 
qu'à une femme âgée : vtle droumkenne. 

Plèvir, PIM, soupirer, aspirer, se plaindre, gémir. S'est dit d'abord, 
selon toute probabilité pour aspirer à la main d'une femme. Â Verviers il 
était synonyme de fiançaille. Et aussi « une fille plevie était une fille pro- 
mise en mariage et plevir une fille c'était la promettre, » dit l'historien 
verviétois Detrooz. De là, le même suppose que le mot main-plevie du 



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.^ 



— 72 - 

droit civil liégeois, traduit par manmplicata ou main pîiée, doit signifier 
main promise, main cautionnée, main engagée, Plèvihant est devenu syno- 
nyme de gémisseur, grand ou petit-G«^ plèvihau! i n' hixinènianlplèvïr. 
Wihety wihette. Jeune garçon ou Jeune fille sur le point d*entrer dans 
le monde. Ne s*emploie guère qu'accompagné de Tadjectif Jeune; onjàne 
wihet, onnejàne mhetie. Pris toujours dans le sens honnête et gai, et bien 
différent, pour les garçons, du mot lebrai qui s'emploie parfois aussi dans 
la même ville. 

J.-J. Renier. 



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SOCIÉTÉ LIÉ&BOISE DE LITTÉRÂTUBE f ÂLLOM. 



CONCOURS DE 1874. 



RAPPORT DU JURY SUR LE 4"»* CONCOURS. 



Messieurs, 

La Société demandait : Un recueil des wallonismes 
du pays de Liège, embrassant tous les dialectes 
wallons de la Belgique. 

Un seul concurrent nous a envoyé un ouvrage 
d'une assez longue étendue et d'une importance 
très-réelle. Il porte cette devise, extraite de Montaigne : 

Une mauvaise façon de langage réforme mieux la 
mienne que ne fait la bonne. Ce qui poinct, touche et 
éveille mieux que ce qui plaît. 

L'auteur du travail qui nons est soumis, possède 
incontestablement une connaissance très- approfondie 
du dialecte liégeois en même temps que de la langue 
française. Il a beaucoup étudié aussi les langues 
d'origine germanique. 



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— 74 — 

Nous avons remarqué qu'il se complaît à nous bien 
persuader des études très-sérieuses qu'il a dû faire 
de la langue et de la littérature de nos voisins du 
midi. Nous ne nous en plaignons pas, puisque cela 
lui donne l'occasion de rectifier un nombre très- 
considérable de locutions fautives, qui, tous les 
jours et à chaque instant, offensent à tout propos 
les oreilles délicates. 

A ce point de vue, le travail qui a occupé votre 
jury mérite toute notre approbation. Il sera pour le 
pays de Liège le meilleur omnibus du langage. 

Seulement, il a tort de se lancer avec trop de 
complaisance dans des discussions grammaticales 
qui n'avaient que faire en ce sujet. Pourquoi se 
méfier à ce point de l'intelligence ou de l'instruction 
de son lecteur ? 

Cette réserve faite, répétons que l'auteur du mé- 
moire aura rendu un très-grand service à ses compa- 
triotes liégeois. 

Arrivons à la seconde partie du programme. 

lia question posée en 1873 ne comportait que cette 
seule exigence : tin recueil des wallonismes du pays 
de Liège. 

Ainsi posée, la question demeura sans réponse. 
Mais un homme généreux doubla la valeur du prix, 
en ajoutant au libellé ces mots : pour un travail 
embrassant tous les dialectes wallons de la Belgique. 

Votre jury s'est posé cette question : l'auteur a-t-il, 
avec le même bonheur, satisfait à cette seconde 



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— 75 - 

partie? Nous remarquons avec plaisir, dans le travail 
qui nous est soumis, des comparaisons très*justes et 
souvent très-heureuses du patois de Liège avec les 
patois de Namur (cousin germain du liégeois), de 
Charleroi (cousin sous-germain), de Mons, de Tournai 
et parfois de Nivelles. 

Nous faisons remarquer sa prédilection pour les 
chefs-lieux du Hainaut et du Brabant wallon. Mais, 
dans ce travail de comparaison, nous regrettons de 
ne pas voir figurer les dialectes de Binche,de Thuin, 
de Beaumont, d'Ath, de Soignies, de Braine-le-Comte, 
de Gosselies, etc., etc., en un mot de dix-neuf villes 
toutes chefs-lieux de canton. 

Il nous souvient, à ce propos, qu'il y a douze ou 
treize ans, la Société avait demandé, dans tous les 
patois du pays, une traduction de la parabole de 
Tenfant prodigue, et que vingt-trois traductions nous 
arrivèrent, tant du Hainaut que du Brabant wallon. 
L'auteur, il est vrai, nous cite souvent Huy,Verviers, 
Namur et Dinant. Mais nous croyons être justes en 
remarquant que ce sont là de simples modifications 
du liégeois. 

Cependant, le jury s'est demandé si la Société, en 
présence de ces lacunes, du reste faciles à combler, 
pouvait méconnaître les hautes qualités d'un travail 
très-consciencieux et très-savant? 

La réponse de votre jury ne pouvait être douteuse: 
nous avons décidé à Tunanimité que le prix proposé 
a été légitimement gagné. 



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- 76 - 

Nous vous proposons de décerner à Fauteur du 
travail la médaille d'or de deux cents francs. 

Quelques observations de détail ont été faites dans 
le cours de la discussion. Il serait long et fastidieux 
de les énumérer ici. 

Votre jury vous propose de décider que, lors de 
l'impression au Bulletin^ l'auteur sera prié de s'en- 
tendre à ce sujet avec le jury, et de faire disparaître 
de son mémoire les longueurs grammaticales, plus un 
certain nombre d'exemples et surtout d'anecdotes 
trop connues. Le travail de l'auteur devait avant tout 
constater plus que corriger. 

Le jury : 

J. DËJÂRDIN; 

J. Stecher 
et A. Alvin, rapporteur. 



La Société, dans sa séance du 15 juin 1875, a donné 
au Jury acte de ses conclusions. 

L'ouverture du billet cacheté a fait connaître que 
l'auteur du Mémoire couronné est M. Isidore Dory, 
professeur à l'Athénée royal de Liège. 



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PRÉFACE. 



Un magistral qui possède admirablement notre patois, me 
disait un jour : « Toute locution vicieuse employée dans le 
français parlé en Belgique, doit se retrouver dans le wallon ; 
si elle n'existe pas à Liège, vous la retrouverez à Namur, à 
Mons, ou ailleurs. » Cette assertion me parut d'abord un peu 
hasardée, je l'avoue ; mais la vérité m'en a été depuis démon- 
trée par les recherches auxquelles je me suis livré en vue de 
ce mémoire : elles m'ont prouvé de plus que les expressions 
incorrectes signalées par les grammairiens ou les lexicographes 
français, s'expliquent, à peu près toutes, par des tournures 
propres à l'un ou à l'autre patois de notre pays. Ce sont, dans 
le plus grand nombre des cas, des archaïsmes qui se perpétuent 
dans le langage populaire. 

Gomme on l'a très-bien dit, les patois ne sont, au fond, que 
des dialectes cristallisés ; de là, la facilité relative avec laquelle 
un liégeois qui connait bien son patois, lit Rabelais, Froissard 
et autres vieux auteurs. La plupart de ces constructions sont 
propres aux idiomes germaniques, mais elles appartiennent 
presque toutes au fond wallon; bien peu paraissent être d'intro- 
duction récente. 

Si le patois de Liège a conservé une couleur teutonique plus 
prononcée, c'est qu'il a subi constamment, et d'une manière 
plus directe, l'influence de l'idiome thiois, dans le domaine 
duquel la langue latine avait fait cette trouée vers le nord-est. 



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- 78 - 

Quant aux barbarismes provenant de la corruption du langage 
dans la bouche du peuple, ils sont exlrémcment rares. 

On peut même trouver la raison de certains d'entre eux 
dans des confusions dont la langue littéraire elle-même nous 
offre des exemples ; il suffira de citer bure, qui devrait être 
masculin ; de par le roi, qu'il faudrait écrire de part le roi, 
c'est-à-dire de la part du roi ; et champ, dans mettre une brique 
de champ (liég. can, holl. kant) ; ceci, dit M. Grandgagnage, 
est un bel exemple de corruption dans une langue acadé- 
mique ! 

J'ai signalé un certain nombre d'expressions à peu près 
inconnues oulre-Quiévrain, qui ont une facture française du 
meilleur aloi, et qu'il serait peut-être pédant de condamner 
d'une manière absolue. Telles sont les suivantes : paire (t. de 
houillère), béguinette, ctnt (deux centimes), flan (traduction 
conventionnelle de notre ftoyon, qui n'a pas le même sens). 
J'ajouterai les mots suivants, qui sont d'un usage général : 
cumulet, quartier (loger en garni), vigilante, verdurière, pistolet 
{peiïipsiin), botteresse, devifhette (moi tournais.; liég. arfvma/)* 
escabelle (double échelle), et balette (v. ce mot). 

Qui donnera un équivalent exact des expressions: fa bon, 
ji m'rafèïe, spiter, stmchi, spater, sprâchi, sirachi et de tant 
d'autres ? Il n'est pas un liégeois de la vieille roche, se piquant 
d^ailleurs de parler un français correct, qui hésite à les employer 
dans toute leur verdeur native, au profit de la couleur et de la 
force du langage. La pensée perdrait parfois toute son énergie 
et le mot tout son pittoresque, si on les remplaçait par leurs 
équivalents français. 

J'ai fait voir, dans le iMémoire, qu'un certain nombre d'expres- 
sions étaient condamnées à tort par les recueils diOmnibus en 
usage dans notre pays. A force d'entendre répéter qu'ils doivent 
se défier des locutions du terroir, les wallons en arrivent, 
comme le chat échaudé qui craignait l'eau froide, à regarder 



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— 79 — 

coinine suspecte, toule expression qui ne leur paraît pas bien 
régulière {*). 

(*) CombieD de Belges se feraient scrupule de se servir des eipressions sui- 
vaotes, qui sont parfaitemenl françaises : de la drâche ou de la drague [de tdrdxhe); 
I ne faire ui une ni deux, Litt,; | rien que de le voir, id. v. A/«n, 42 ; | sauter 
jusqu'au plancher (au plafond), Acad.; | faire une chambre, m.; | oui-d&; | pomme 
d'amour (tomate\ Litt.; | mettre une charrette k cul, Acad.; | la matière (le pu6\ 
ID.; I tikchez de gagner cela sur vous, id.; | autre part, id.; | vers les quatre 
heures, id.; | je me suis coupé, Litt.« v. Couper, 2i ; | un sarrau, un casaquin, 
un caraco (m. sign., en tournais.), ID.; | la devanture d'une maison, id.; | aller k 
la tenderie, Litt.; | un fer de cheval (au sens prop.\ Acad.; | c'est une bonnp, une 
mauvaise paye, id.; | foncer sur quelqu'un, Litt.; | le pistolet lui a peté dans la 
main, Acad.; | une quarte, Litt. {ine gwâte^ deux pintes); | cela ne vaut pas un 
paiard, Acad.; | mise-bas, Lirr.; | k qui le dites-vous? «je le sais par expérience) 
ID.; I faire enrager, Acad.; || il était pour partir, Litt. (sur le point de...); | il n'était 
pas dans le cas de se tenir debout (capable...), id.; | l'année qui vient, Acad.; | an 

drtMe de corps, iD.; | ce diable d'enfant, id.; | qui le rend si hardi do troubler ? 

La Font.; | une escourgée {ine corUhe)^ acad.; | il est plus que le temps de... 
M">« d*Epinay, J/ém., I, ch. 6, p. 304; | la mariée demeurait sur la paroisse 
Sainte-Sulpice, ibid., p. 110, noie de P. Boiteau; | la gloire (la vanité) le perdra* 
Acad.; | être hors d'âge (se dit d'un cheval), id.; | être hors de condition, id.; | 
un homme d'âge, id.; | faire, un effort sur soi-même, id.; | dire son sentiment haut 
et clair, id.; | claquer des mains, id.; | aller au bois, k l'eau, au pain, etc. (aller 
faire provision de...), id.; | prendre du pain à la taille [à ttète), k la coche {hoche) 
chez le boulanger, id.; {hoche est également français et se trouve dans le Diction- 
naire de l'Académie) | les mouches à miel, id.; | c'est un balai neuf {on novai 
ramon, fig.), ID.; | il y a ici pour contenter tous les goûts, Litt. v. Pour, SO ; | 
mettre la table (servir), Litt. Bcsch.; | l'eau que j'ai bue ne tourne autour du 
cœur, Acad.; | il en a mal au cœur (il ne voit cela qu'avec déplaisir), id.; | cela 
va sans dire (d'après Micheels, wallonisme), id.; | nous n'avons jamais eu ensemble 
une parole plus haute que l'autre, id.; | il est approchant de huit heures, id.; 

I il n'y avait pas mal de curieux à ce spectacle, Litt.; | il n'y aurait pas de mal 
qu'on se dépêchât, id., v. Mal ; | un homme comme lui (blâmé par un recueil 
^'omnibus), AcAD.; | il accourt tout de son plus fort, La Font.; | être porté pour 
quelqu'un, SÉv.; | du beurre fort, Acad.: | nous avons du temps devant nous, w ; 

I ce serait faire tort à vos connaissances (être injuste) ; | c'est à savoir (marquant 
le doute), Litt.; | et puis ma sœur par ci, ma sœur par là, Marivaux ; | au plus 
vite (très-vite), La Font., Ruuss.; | â votre commandement (t. de civilité), Litt.; | 
qu'avez-vous ? j'ai... que je suis malheureux comme les pierres, Besch.; | cela est 
plus fort que moi, Litt.; | c'e.st co qui vous trompe, id.; | faire le mauvais, Acad.; 

j quand il sera sur ses vieux jours, lo.; | faire tant de, ou tant que de... (aller 
jusqu'à, se décider à...), Lirr.; | ah çà, répondez donc, Besch.; | je n'allumerai 
pas de lumière, Th. Gauthier, Gemin, Stendhal ; i attendre quelqu'un sur la 
porte, Stendhal ; | en manches do chemise, M^^^ de Sêgur, Dict. anal, (ou en 
bras de chemise, Sardou ; | à moitié chemin, Acad.; | chercher, trouver son 



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— 80 — 

Plusieurs grammairiens, puristes à Texcës, oui condamné des 
locutions employées par les meilleurs écrivains ; tel est le cas 
pour àcause que,Qimonter en haut (AcAD.).Onest enfin revenu de 
cette exagération qui ne tendait à rien moins qu'à transformer 
la grammaire en un code roide et tyrannique, en une sorte de 
lit de Procruste, où l'on mutilait la vraie langue française. 

mieux, Lirr.; | Uissez-Ie pour ce qu'il est. Acàd.; | perdre fond, id.; | mettons 
que le fait soit vrai, id.; | chasser un clou dans la muraille, id.; | meUre des vases 
sur la cheminée, id.; | taches de naissance, Dict. anal.; | s'en aller sans deman- 
der son reste, Acad.; | se tenir entre deux airs, id.; | un rousseau {on rossai) ^ id.; 
I mauvaise graisse (embonpoint factice), Litt.; | Je ne suis pas fait pour tromper 
(pas capable...), id.; | dire un service sur le corps, iD.; | dans le temps (autrefois), 
Litt.; | ce n*est pas pour rien que (même dans le sens liégeois : je ne m'étonne 
plus que...\ PoNSAHD ; | à celte heure (à présent), Lirr.; | pas seulement (pas 
même), Acad.; | s'en donner. Mol., Rac, Bérang., Scribe ; | donner à connaître 
que..., Acad.; | ils vous demandent des cinq ou six cents pistoles. Mol.; | prendre 
une bonne purge, Litt.; | scier les blés (xoî), Acad.; | c'est un homme vert [on 
vird chin)y ID.; | donner attention (blftmé par un recueil d'omnibus), Acad.; | le 
onze d'octobre, AcAo. (vieux, Lrrr.); | battre les cartes, Litt.; | il cherche son 
malheur, Acad.; | il a été des années sitns le \o\v, ID.; | à une lieue loin, d'une 
lieue loin, une lieue loin, Litt.; | il est fort pour parler, Acad.; pour jouer, Litt.; 
Il est fort pour le spectacle, le vin, Litt., v. Fort^ 19 ; | dans nos vieux jours, 
sur nos vieux jours, Acad.; | prendre des leçons, id.; | une tète de chou, id.; | 
vous avez bien fait de venir, Litt., v. Faire, 55 ; | être en pet-eu l'air, Acad.; | 
si je suis fftché, ce n'est pas pour des prunes, Hol.. Sgati,\ \ prôtez-moi votre 
aUention, Litt.; | une levée (ine lèvété), Litt., v. Chaussée; j commis en titre, 
Acad.; | cela me casse bras et jambes, Courier, Chateaubr. (on dit plus souvent 
coupe); I il n'a que de mauvaises paroles en bouche, Litt.; | Texcès de la boisson 
donne mauvaise bouche, id.; | mon estomac travaille, Acad.; | comme la bière 
travaille !id. | du bois qui travaille, id.; | on a beau prêcher qui n'a cure (ou cœur) 
de bien faire, id.; | il n'a point goût au travail qu'on lui impose, id.; | il y a 
longtemps qu'on attend après vous; Acad.; | la noix de galle resserre, id.; | j'achète 
un chftteau sur mes économies ; | se trouver vis-à-vis de rien, Acad.; | proficiat 
(je vous félicite), Litt., Bescb.; | vivre sur sa graisse (ou de sa graisse), Litt.; | 
vivre sur son bien, id.; | nommer un enfant au baptême, Acad.; | cela ne se 
demande pas,*LiTT ; | il n'y a pas à dire, Acad.; | être bien venu partout, id.; | 
être bien venu de quelqu'un, Litt.; | le feu prend, Dict. anal.; | c'est du guignon 
numéro un, Oct. Feuillet, tHermitage; \ comme ci comme ça, Bescb. et Gtiaii; | 
fort des bras, des reins, Litt.; | être manche à manche, id.; | jouer en deux ou 
trois manches, id.; | je \ous ai dit cela mille fois pour une ! Acad.; | il vous fait 
mille et mille compliments, M™« d'Epinat, Mém,, n, 224; | ces livres coûtent Uni, 
l'un dans l'autre, Acad.; | être à l'aumône de la paroisse, id.; | cette écuelle est 
toute bosselée, Acad. (condumné par Hennequin)? 



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— 81 — 

On trouve dans le dictionnaire de Littré nombre de remarques 
grammaticales fondées sur Tétymologie, la grande loi de l'ana- 
logie, et principalement sur Tétude des modèles. La grammaire 
n'est et ne doit être que la constatation des règles suivies par 
les grands écrivains. 

Sans parler de l'énergie, de la naïveté et du pittoresque de 
l'expression (4), le wallon, et spécialement notre patois, présente 
dans son organisme des avantages qui ont frappé plus d*un 
linguiste étranger. La conjugaison y est plus complète que 
dans la langue française ; les temps surcomposés (j'ai eu fini, 
etc.) y sont de plein usage. Le liégeois, grâce à son patois, a 
un sentiment délicat de la signification du passé défini, bien 
que, chose étonnante ! il craigne souvent de passer pour pédant 
en l'employant quand il parle français. Plusieurs verbes, qui 
sont défectifs en français, ont, en liégeois, une conjugaison 
complète, ou peu s'en faut : ravu, ravoir ; lûre^ luire (seul, Littré 
dit qu'il n'est pas défectif); àrcj ouïr; soleûre, souloir (dial. 
verviét.); braire; clore, clore \itoûde, sourdre; teake,{\sire;fèi'i, 
férir; qwèri, quérir. — La langue romane avait hérité du latin 
la faculté de former des composés présentant, d'une manière 
laconique et énergique, plusieurs idées réunies; les différents 
dialectes issus de cette fille aînée du latin ont transmis cette 
précieuse faculté aux patois actuels, qui n'en sont que la conti- 
nuation. On peut dire que, à ce point de vue du moins, les patois 
sont restés synthétiques. (V. les articles re et dé); aussi la langue 
littéraire pourra-t-elle ici, comme elle l'a fait plus d'une fois, 
s'enrichir encore par des emprunts discrets et judicieux. 

Certes, il faut blâmer la reproduction servile du parler popu- 
laire, telle que l'entend l'école réaliste exagérée ; mais ne le 
traitons pas avec ce dédain superbe qu'afTectent pour lui ceux 

(*) Il est vite aduzé, il «si susceptible; elle est brave, main èV fât dire vite; H 
baité^ la lune ; (/ est todis sofflé comme foû dCine bûie, d'une grande propreté ; il est 
plein d^lais-m" è paie; c'est ji vous ji n*pous; elle fait H s' trente (c'est une 
mijaurée). 



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— 82 — 

qui l'ignorent. Il n*a pas ses entrées dans la langue cultivée qui 
vise à Taiticisme ; mais de temps en temps, grâce à Tusage — 
plus fort que toutes les académies— gr&ce à un écrivain de génie, 
qui, comme Virgile Ta fait pour Ennius, déterre une perle dans 
le tas, gemmas e stercore, il se glisse dans des œuvres litté- 
raires ; alors, en dépit des criailleries des puristes, les gram- 
mairiens sensés s'inclinent, et le corps qui a mission pour 
enregistrer les acquisitions nouvelles, se voit forcé d'adorer 
aujourd'hui ce qu'il brûlait hier. 

Bref, si nous voulons en écrivant ou en parlant réunir 
élégance et pureté, traitons le langage populaire en ennemi, 
mais, suivant le précepte du sage, en ennemi qui peut devenir 
un ami. La langue française est une gueuse fièrel il faut lui venir 
en aide, malgré qu'elle en ait. 

Le grand réformateur Malherbe aspirait sans cesse à cette 
pompe, à cette dignité de formes qui constitue aujourd'hui un 
des caractères distinctifs de la langue française, ei que les cri- 
tiques étrangers et les romantiques « à tous crins » lui ont 
souvent reprochée. Et cependant, que fesait-il pour réagir contre 
l'école de Ronsard, qui professait pour la vieille littérature du 
moyen-âge et pour l'idiome populaire le dédain le plus injuste, 
et qui, prétendant créer une belle langue, n'avait produit qu'un 
pastiche maladroit, bourré de grec et de latin? Il disait : « Allez 
écouler les crocheieurs du Port au foin ; c'est là que vous trou- 
verez le vrai français. » 

Examiner à la loupe tous les walionismes (â) signalés par les 
recueils d^Omnibus^ et d'autres encore, tracer d'une manière 
sûre et précise les bornes du domaine des locutions purement 

(0 Voir dans le Dictionnaire de l'Académie au mol cuir, et au mot œil : entre 
quatre yeux ; et dans l'ouvrage de M. âgnel : de l'influence du langage populaire, 
etc. p. 3, ce qui est dit des anciens termes populaires remercier, répandre^ dérober\ 
vieux français mercier^ épandrcy rober^ montois, reuber ; voir enfin dans le 
Mémoire aux mois chose et embrener. 

(*) J'ai écrit wallonisme avec un seul n, par analogie avec gasconisme. 



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wallonnes, est une entreprise difficile, qui demande beaucoup 
de temps et des éludes irës-minutieuses. J'aurais reculé devant 
cette tâche, si je n*avais obtenu le concours bienveillant et 
efficace de mes anciens professeurs et de mes collègues 
dans renseignement, et je leur en exprime ici tonte ma recon- 
naissance. 

J'aime aussi à reconnaître tout ce que je dois aux recueils de 
Poyart, de Benoit, de Hennequin et de M. l'abbé Carpentier, 
ainsi qu'aux glossaires wallons de Desrousseaux, Vermesse, 
Hécart, Sigart, Cambresier, Remacle, Duvivier.Forir, Simonon, 
Hubert, Dasnoy, et spécialement au Dictionnaire étymologique 
de la langue wallonne, de M. Grandgagnage, qui fait autorité 
dans la science. 

Je termine en remerciant bien vivement la Société liégeoise 
de littérature wallonne de l'accueil favorable qu'elle a fait à mon 
Mémoire. Un pareil suffrage est un puissant encouragement à 
bien faire 

I. DOHY. 



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A. l"" Couper à morceaux, câper à hoquet. (\) Dites : couper 
en morceaux, couper par morceaux, couper en pièces, Acad. 
Ex. Couper un aloyau par morceaux, Acad. Ainsi Forir traduit 
mal casser à petits hoquet, casser à petits morceaux. Il fallait 
dire : casser en petits morceaux, brésiller, ou rompre par petits 
morceaux, Acad. 

2» Les nuages se changent à pluie, lès nùliie canget à plaire. 
Dites : se changent en pluie. 

La tournure changer à, dans le sens de transformer, ne fait 
pas loi dans le langage commun, mais elle est consacrée dans 
cette phrase : Dans le sacrement de Feucbaristie, le pain est 
changé au corps de Notre-Seigneur. On la rencontre dans la 
poésie et dans le style soutenu. Ex. Cependant Thumble toit 
devient temple, et ses murs Changent leur frêle enduit aux 
marbres les plus durs, La Font. Phil. et Bau. 

S*" Mon petit commence à lire et écrire, mip*tit k'mince à 1ère 
et serire. Dites : à lire et à écrire. 

4'' La maison (Fà Pierre, li mohonne d'à Piére. La fille fTà 
Nicolas, li fèie (fà Colas, liég. et namur. En France, le peuple 
emploie la tournure la maison à Pierre, la fille à Nicolas. 
Dites : la maison de Pierre, la fille de Nicolas. L* Académie dit 
que Texpression la barque à Caron est populaire. Tout le 
monde dit aussi : la roche à Bayard, li roche à Bayaud, pat. de 
Dînant. Hais on dira très-bien : cette maison est à moi, c'est 
un ami à moi ; il a un style à lui, Acad. 

(>) Tout texte wallon dont le patois n'est pas spécifié, appartient au parler lié- 
geois. 



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5<* Aller au médecin, au commissaire, aller â médecin (dans 
nos campagnes, â méde), â commissaire. Diles : aller chez le 
médecin, chez le commissaire. 

Aller à quelqu'un signifie simplement se diriger vers quelqu'un, 
aller au-devant de lui. Ex. Aller à l'ennemi. 

Toutefois l'Académie admet aller au devin 

&" Il a mis son fils aux Jésuites, il a mettou s*/i âx Jézuite. 
Dites : chez les Jésuites, au collège des Jésuites. Ex. Il étudie 
chez les Jésuites, Litt. 

7» .4 terre. Cet arbre est tombé à terre, cisf âbe-là a totimé à 
Flére. Il faut dire : par terre. 

Le wallon n'a qu'une seule tournure, à ttêre; le français en a 
deux : à terre ei par teire; elles ne peuvent être confondues. Ce 
qui touche à la terre, tombe par terre; ce qui n'y louche pas, 
tombe d teire. Un arbre tombe par terre, et ses fruils tombent à 
terre. On dit de même : jeter une pomme à terre, et jeter une 
maison par terre, ou jeter bas ; cette dernière expression traduit 
littéralement le wallon taper jus {deorsum; CiH) parez le français 
jusant, marée basse). 

8*» A l'honneur de Dieu, à Vhoneûr di Diu, 11. ter eere Gods. 
Dites plutôt : en l'honneur de Dieu. Ex. Faire quelque chose 
en l'honneur de quelqu'un, Acad. Hymne en l'honneur d'Apol- 
lon, Id. Cependant à riioiineur de s'emploie quelquefois. Il 
avait composé des hymnes à l'honneur des enfants de Latone, 
Fén. dans Litt. Vous me demandez les pièces de vers qu'on 
a faites à mon honneur et gloire. Volt. Ibid. Dans la tournure 
suivante, à est de rigueur : On doit dire, à l'honneur de ce 
prince, que..., Acad. 

9^ Nous étions à huit à table, nos estîs à ûit à Vlàve, Dites : 
nous étions huit à table. Nous avons soui)é à huit, nos avans 
sopéàûtt. Dites : nou.^ étions huit à ce souper, V. (eux, 4*". 

10» C'est h moi à jouer, c*est à mi àjower, c'est-à-dire, c'est 
à mon tour; mais on dit aussi, en français, c'est à moi de jouer 



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pour faire entendre qu*on en a le droit. Le wallon traduit de la 
même manière ces deux façons de parler. 

11"* II est parti à la campagne, il est èvôïe à Vcampagne, 
Dites : pour la campagne. Mais avec a//^on emploiera à : aller 
à la campagne. 

12*» Un habit percé au coude. V. Coude^ 1\ 

13° Les jeunes gens d'à cette heure, lesjônès gint d'asteûr. 
Cela s'est dit. Ex. Un même soinn*a garde d'animer les nymphes 
d'à cette heure, Bbi^serade, dans Litt. Nous pensons cependant 
qu'on dirait mieux maintenant : les jeunes gens d^ aujourd'hui. 

14<' Au feu. Venez au feu, vinez d feu, tï, kom aan hei vuer. 
Dites : approchez du feu. Aller au feu a, en français, un autre 
sens. 

15» Une femme habillée à homme, ine feumme mousséie à 
homme. Dites : habillée en homme, àcad. Bbsch.— Masqué à 
pierrot, masqué à pierrot, Les deux neveu, I, 5. Dites : masqué 
en pierrot. Ex. Habillée en fille, en arlequin, Besch. On le 
masqua en arlequin, Acad. — Dites de même : une femme tra- 
vestie en homme, ine feumme diguiséïe à homme; un espion 
déguisé en ermite. 

A, verbe, pour est, V. Sonner, Réfléchi, Tomber, Venir, Sur- 
venir, 

Abaisser. Abaissez-\ous un peu, abahiz-v* on pô, ou ine 
gotte. Dites : baissez-vous un peu. 

Abattage. Conduire un porc à r abattage, miner on pourçai à 
rabattage. Dites : à l'abattoir. 

Abattage, en français, veut dire l'action d'abattre les bois qui 
sont sur pied, ou de tuer les chevaux, les bestiaux. 

iV. B. Les lexicographes n'ont pas admis l'orthographe de 
TAcadéujie : abatage; elle n'est nullement fondée en raison. 

Abtmer. Ce mot signifie gâter, endommager, et non pas 
salir, souiller, comme en wallon. Ainsi on dira très-bien : Ces 
étoffes s'abiment au soleil ; mon chapeau a été abîmé par la 



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pluie. Mais on ne dira pas : Mon pantalon est abtmé, mi pdtalott 
est abtmé, pour faire entendre qu*ii est crotté, couvert de 
boue. 

Aboutonner. Aboutofinez votre frac, aboitnez vosse fraque. 
Dites : boulonnez. V. Fraque, 

Aoalandé. Cette boutique est bien acalandée, cisse botique- 
la est Mn acalandéte. Dites : achalandée. 

Acoonduire.Je vais \o\xs Vacconduire^ej va vos raecotiduire, 
se dit, dans le patois du Hainaut, pour, je vais vous ramener. 
C'est un arcbaisme signalé par Barré, comp. ÂcAo.,avec le sens 
de escorter, accompagner, amener. On dit aussi à Liège : Vos 
ak* durez (ad-con-ducere) vosse soûrjusqui dal. For. Tournez : 
Vous accompagnerez votre sœur jusqu'ici. 

Accoucher (s'). Elle s'est accouchée cette nuit, elle s'a-t- 
accouki ouïe de V uutte. Dites : elle a accouché cette nuit. 

Elle s*est accouchée signifierait qu'elle se serait délivrée 
elle-même, sans le secours de la sage-femme. 

Accoutumé. Accoutumé de faire sa méridienne, accoustumé 
de fer s'prangtre. On dit plus souvent : accoutumé à, Ex. Je l'ai 
accoutumé d faire telle chose, Acad. Il avait peine à travailler, 
mais on Yy a accoutumé, In. Il est accoutumé à se lever de 
bonne heure, Id. 

Accoutumé de est un tour qui était de plein usage au XVII^ 
siècle, et dont se servent encore quelques auteurs modernes. 
La tournure avec à correspond aux deux tournures ordinaires 
en latin asmetus dwmiendo ou ad doimiendum; la tournure de 
s'explique par l'ablatif, qui, d'après Freund, se joint souvent au 
verbe assuesco : Hommes labore quotidiano assueti, Cic. Or 
accoustumer représente les mots latins ad-consuetudinem. 

Accoutumer s'employait autrefois intransitivement dans le sens 
de avoir coutume. Dans ce cas, il régissait toujours de. Il avait 
accoutumé de faire, Acad 



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- 89 — 

Acheter. 1° On m'a acheté une montre, on nCa actCté ine 
monte. II y a amphibologie : on a acheté pour moi, ou de moi une 
montre. « Le danger de l'amphibologie augmente dans une 
phrase comme celle-ci, qu'on entend tous les jours, et qui est 
en effet dans le Dictionnaire de l'Académie : j'ai acheté une 
montre à mon fils, avec le sens de pour mon fils, mais qui peut 
aussi signifier : j'ai acheté de mon fils une montre, il m'a vendu 
une montre. On prendra donc bien garde, en s'en servant, à 
l'amphibologie; et, en tous cas , on remarquera qu'ici l'emploi 
de à au lieu de pour est du parler vulgaire et négligé. » Litt. 

2** J'ai acheté ce livre pour six francs , fa-st-ackHé c'iive-là po 
srix franc; fl. tk heb dat boek voor zes franken gekocht;Qll. ich habe 
dièses Bueh fuer sechs Franken gekauft. J'ai vendu mon cheval 
pour huit cents francs, fa vindoù mi cKvâ po ûl cints franc. 

D'après M. Carpentier (Dict. du bon lang.J^ il y aurait là un 
wallonisme, et le génie de la langue française exigerait la sup- 
pression de pour. Voici des exemples à l'appui. Dieu est acheté 
trente dentiers de son peuple ingrat, Boss. dans Besch. Il m'a 
vendu ce cheval cinq cents francs, Acad. Il acheta notre Phrygien 
trois oboles, La Font. Vie d'És. Socrate est vendu deux talents^ 
Chateaub., Études hist. p. 476. Dans ces phrases, les complé- 
ments trente deniers, cinq cents francs, trois oboles, etc. sont 
des compléments de prix; ils correspondent à l'ablatif des 
Latins, qui se plaçait sans préposition après les verbes emere et 
vendere, pour indiquer le prix ; et Ton sait que le français tra- 
duit souvent les difTérents cas de la langue latine, sans rempla- 
cer par des prépositions les désinences casuelles : id constat 
viginti assibus, cela coûte vingt as. 

Cependant la tournure avec pour, qui paraît être ici d'origine 
germanique, s'emploie aussi en français. Ex. Il vend pour trente 
deniers celui qui devait être la rédemption du monde, Bourd. 
dans Litt. Judas vendit Notre-Seigneur pour trente deniers, 
Acad. Les Péruviens rachetèrent leur roi, que cependant on ne 
leur rendit pas, pour plusieurs milliers pesant d'or, Buff. dans 



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- 90 — 

LiTT. Je m'adressai à un marchand arménien, je lui vendis ma 
fille et me vendis aussi pour Irente-cinq tomans, Volt, dans 
Lttt. Acheter un château pour deux cent mille francs, Bbsch. 
Le Mohatra est quand un homme, qui a affaire de vingt pistoles, 
achète d*un marchand des étofles pour trente pistoles, payables 
dans un an, et les lui revend à Theure même j^our vingt pistoles 
comptant, Pasc. 8* lett. 

Nous concluons de là qu'on peut employer ou omettre pour 
devant les compléments de prix, après les verbes acheter^ 
vendre, racheter, revendre. Mais on dira avec la préposition 
pour: il m'a vendu pour mille francs de marchandises, Acad. 
Ici pour n'annonce pas un complément de prix proprement dit; 
il indique le montant de la somme dépensée ou perçue. On dira 
aussi avec la préposition à : Acheter du drap à vingt francs 
l'aune, Acad. 

Acolète. Etre choral, éire acolète à Saint-Paul, esse corâl, 
esicûcolète à Saint Pô. Dites: être enfant de chœur à Saint- 
Paul. 

Acolète est une corruption du mot français acolyte (le clerc 
qui a reçu Tun des quatre ordres mineurs, nommé l'ordre des 
acolytes). 

Acte. La première acte, H prumire ake. Il faut dire: le premier 
acte. 

Adjectif (Place de Y). Dans le wallon, l'adjectif servant de 
d'épilhète se place devant le substantif. C'est un des résultats 
de l'influence latine combinée avec l'influence germanique. On 
sait qu'en latin l'épithëte se place le plus souvent devant le nom; 
et la règle est absolue, ou peu s'en faut, en allemand et en néer- 
landais. Du noir fil, dènéur fi; la blanche maison, H btanke 
mohonne; un bleu habit, on bleu abit; une propre chemise, 
ine prôpe chimixhe; un rond chapeau, on rond chapai; le neuf 
pont (prononciation vulgaire, le neu pont), H noû pont; une 
carrée tête, ine qwârêie tiesse. Dites : Du fli noir, la maison 



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- 91 ^ 

blanche, un habit bleu, une chemise propre, un chapeau rond, 
le pont neuf, une tête carrée Les adjectifs qui expriment la 
forme ou la couleur se placent en français après le nom. Les 
grammaires donnent à ce sujet quelques autres règles ; mais 
ici le meilleur guide sera Tusage. Il est essentiel de chercher 
à le bien connaître. 

Adverbes (Ck)mplément des). Cela fait tant du mal, çoulà 
fait tant dèmd;Y. Tant. Il a bu beaucoup du vin, U a bu àaicô 
de vin. Tout plein des gens, tôt plin dès gin. U y a eu autrefois 
tout plein des possédés, gna-st-aou devint ttimps tôt plin dès pos- 
sédés; V. Plein. Un peu du pain, on p6 de pan. Je Tai vu tant des 
fois, ji Va vèiau tant dès fête. Je n*ai guère de fargent, ji n"a 
wère dès aidan; V. Guère, Dites : Tant de mal, beaucoup de vin, 
tout plein de gens,HALH. dans LiTT.,il y a eu autrefois tout plein 
de possédés. Volt, dans Litt., un peu de pain, tant de fois, guère 
d'argent, (i). 

Envfallon, le complément des adverbes de quantité est sou- 
vent précédé des articles contractés de ou dès, qui équivalent à 
du et à des. Ex. Des Tawes esteût vesîî d^haicô dès bin, Ann. 
6^ a. p. 88, Tôt costé gna brammint dès capon, ForIr. Hrammint 
de Vrosie. Tvraie Ervue d*Mons, a. 69, p. 14. Vonlà déjà tant dès 
ans que je v'siers, pat. de Weismes Bull. a. 70, 2 I., p. 247. Ine 
petite ville {Antoing) dusse quH a brammint dès fiette à boire 
tout s'séau, Àrménaque de Tourn. a. 81, p. 16. 

Toutefois la tournure avec la simple préposition équivalant 
à de est également en usage; voici quelques exemples. Veyans, 
Dupuis, assez d*sottréie ! Bull. a. 63, 1*" 1. p. 59. Ni fez nin tant 
d^anchous (façons?), Bull. a. 58, p. 106. Ji m'y vas prinde 
iabôrd avou baicô d'douceûr, Bull. a. 58, p. 42. U paresse è 



(*) Fayart (dans LiU.) a dit : Prends ma montre dV fin et de l'argent tout plein; 
ceci ne contredit pas la règle . de l*aigent est complément direct partitif de prends, 
et tout plein, location adverbiale, n'a pas de complément. 



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— 92 - 

prind bin davantage (do timps) à biacô d'nos ôtes, Aartnonaque 
di Nameur, a. 66, p. 26. Brammint pus d'finit , Tvraie Ervue 
d*Hons, a. 69, p. 15. Avou bin wère di mot, Aurmonaque di 
Nameur, a. 66, p. 3S. / faudrot beauquéop d'iécéon d*giéographie 
aifiBi pou devenir cras et faire doubel mintéon^ Àrménaque de 
Tourn. a. 61, p. 81. Via d'jà tant d'an que fvos sers, pat. de 
Quevaucamps, Bull. a. 70, 2» I. p. 139. 

AiUgé. Donner rautnône à une pauvre affligée, diner Va- 
mône à 'n'pauve affligêie. Le terme français ne correspond pas au 
terme wallon. Forir traduit : à une pauvre infirme (ou estro- 
piée). Remacle dit qu'il est Téquivalent de bossu; le rouchi et 
le patois de Tournai lui donnent le sens d'estropié. Le mot 
affligé s'emploie substantivement en français, mais dans un 
autre sens. Il est bon de consoler les affligés, Bourd., c'est-à- 
dire les personnes à qui un mal considérable est arrivé. 

Afbreuz. Il y avait un monde a/freux, gn'aveut n'a/freux 
monde. Dites : il y avait un monde fou , Acad., il y avait foule, 
il y avait beaucoup de monde. 

Agresse. J*ai mal mes aguesses, fa ma mes aguesse. Dites : 
mes cors me font mal. V. Mal. 
Le mot agasse, ou agace est français et signifie pie, Acad. 

Aider. Aidez-le à soulever son fardeau, aidiz Vsus. C'est 
ainsi que Forir traduit la phrase wallonne. Le verbe aidi est 
toujours transitif en wallon; en français, aider est transitif ou 
intransitif. On dirait également bien ici : Aidez-lui à soulever... 
Nous mentionnons la tournure, uniquement parce que certains 
grammairiens ont prétendu (à tort, suivant Litt.) que aider à 
quelqu'un, c'est partagei' personnellement le travail , la peine de 
quelqu'un. Ajoutons toutefois que ceci va à rencontre de la 
décision de l'Académie : Aidez-lui à soulever ce fardeau , Acad. 

Aigle. Crier comme une aigle, braire comme ine aiguë. 
Dites: comme un aigle, et mieux, comme un sourd, comme un 



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- 93 ~ 

désespéré. Aiguë est toujours féminin en wallon ; c*est ie genre 
de rétymologie : lat. aquila. En français aigle n'est féminin que 
dans des cas spéciaux indiqués dans tous les manuels de gram- 
maire. 

Aimer. Taime de, j'aime mieux d^. V. Infinitif, n<* 1. 

Ainsi, adv. l"" Ne dites pas des choses ainsi y ni (Thez nin 
dès sakoi ainsi, liég. Qui a jamais vu un homme ainsi? qu*est'Ce 
qu'a mâîe vèiou 'n'homme ainsi f liég. Beaucoup de leçons de 
géographie ainsi, beauquéop dHécéon (fgiéographie tiinsi, tournai- 
sien (ex. cité à Fart. Adverbe), Ce sont de grossiers barbarismes, 
où ainsi doit être remplacé par tel ou semblable: un tel homme 
(ou un homme comme lui) des choses semblables, de semblables 
leçons de géographie. 

9" Non, dit-elle ainsi, nènni dit-st-eUe ainsi, liég., il. popu- 
laire : neen, zegt zij zoo. Il lui dit ainsi : mon père..., t li a dit 
ainsin : mo père... tournais. Bull. a. 70. 2< 1. p. 118. Cet ainsi 
est une véritable superfétation. Dites simplement : Non, dit- 
elle; il lui dit... 

3« Est-ce bien vrai? — Oui, c'est ainsi. Est-ce bin vraie? i4î(;è 
c'est ainsi (on ajoute quelquefois : et nin autrumint)û. 't is zoo. 
D*aprës Benoit, on dit plutôt: C'est comme cela, ou, dans la 
conversation, c'est comme ça. — Ex. Monsieur Brutus achète 
des bottes ! — Ce n'est pas possible ! — C'est comme cela, 
Fréd. Soûl, dans Benoit. 

Ainsi, conj. Vous voilà ainsi, vous partez ainsi, vous refu- 
sez aitisi, vos vHa ainsi, vos 'nn" allez ainsi, vos r'fuse:^ ainsi. 

Ainsi s'emploie très-bien en français et en wallon dans le 
sens de donc, par conséquent; mais la construction de la phrase 
diffère ; la seule bonne en français est celle-ci: Ainsi vous voilà, 
ainsi vous partez, ainsi vous refusez. 

Air. 1" Une belle air, ine belle air. Dites: Un bel air. Voilà 
une joyeuse air, vola 'n' jineuse air. Dites : Voilà un air joyeux, 



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- 94 - 

un air gai. De même, dans un autre sens, respirer une bonne 
air, respirer 'w* bonne air. Dites : Un bon air. 

D'après Littré, « le provençal et Fespagnol emploient aire 
(subst. fém.) dans le double sens de manière et d*air atmosphé- 
rique » ; il est donc probable que la langue romane a confondu 
aire, place, nid, manière (latin area, f.), avec air atmosphérique 
(Intin aèr, m.). Ne peut-on pas conjecturer que le patois de 
Liège se ressent encore de cette ancienne confusion ? Le sens 
particulier de air (chant, mélodie) provient évidemment de air, 
manière, comme le prouve l'allemand Wei$e, guise, manière, 
qui s'emploie dans le sens de l'autre mot allemand Arie, chant, 
mélodie. 

Airer. Airer une pièce, aairt 'ri pièce. Dites : Aérer une 
pièce. V. Place. Un grenier bien aire, on grini bin aairî. Dites : 
bien aéré. 

Airer, en français, veut dire faire son nid, en parlant des oi- 
seaux de proie. 

Aises. Connaître les aises, ou les aides d'une maison, Ki- 
noxhe les ahesse (Tine mohonne. Dites : les êtres, pour signifier 
la distribution de la maison. 

Ce mot d'ahesse (fém. plur.) est évidemment de la même fa- 
mille que ihéie, facile, aisé. C'est ce qui a donné lieu à ce 
léodisme. On dit aussi les èhain d'ine mohonne. D'après M. 
Grandgagnage, ce mot a la même étymologie que être. 

Aisse. Balayer Vaisse, hover Vaisse. Dites : balayer Tâtre. 

Alargir. Alargir des gants, alârgi des want, liég., alar- 
guir, ou ralarguir des gants, rouchi. Dites : Elargir des gants. 

C'est un ai*chaïsme : le complément du Dictionnaire de l'Aca- 
démie cite les vieux mots allarger et allargi^sement. 

Aller. 1» Je vais, ji vas, Rem. C'est un terme de jeu. Dites : 
je joue, je tiens la main. 



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Je vais est également un terme de jeu en français; mais il a 
un autre sens : J*y vais de vingt francs, c'est-à-dire mon ei^eu 
est de vingt francs*. 

S« Ha fille va sur dix ans, mi fëie va so dixh am. C'est mal 
dire, selon Hennequin. Mais d'après l'Académie et Littré cela 
est français. — Elle va so vingt ans ; Forir traduit à tort : Elle 
court sa vingtième année; en effet courir, c'est être en irain 
d'accomplir une certaine année de son âge, tandis que sur 
marque acheminement vers. 

Hais il va sur quatre heures, t vat so qwatre heure, ail. es geht 
aufvier Uhr^ est incorrect; servez-vous du gallicisme : il s'en va 
quatre heures, Âcad. Ou dit plus souvent : il est bientôt quatre 
heures. 

3** Gomment vous va-t-il ? Kimint v' vat-i ? (*) Il faut dire : 
Comment cela va-t-il? Litt.; comment allez-vous? id.; comment 
vous portez-vous? L'Académie admet la tournure : comment 
vous en va? Elle est dans Mol. Am. Méd. I, I. Elle ne paraît 
guère usitée. Au surplus, le léodisme Kimint v'vat-i ? a une 
saveur germanique qu'explique très-bien le voisinage des deux 
idiomes. Wie gehts ? Hoe gaat het ? S'il faut en croire M. Tnbbé 
Carpentier, qui note le flandricisme comment va-t-il avec vous ? 
nos frères de TOuest auraient même essayé de rendre à 
l'expression sa forme purement flamande. 

4<> Je me suis en allé, fenn' a 'nn'allé, liég. Dites : Je m'en suis 
allé.— Il s'est eti allé, i s'a inallé, pat. de Tournai, Bull, a 70, 3« 
1. p. 117, i s'a in-nallé, pat. de Lille, id. Dites : il s'en est allé. 
— L'adverbe en (lat. inde) doit précéder l'auxiliaire. 

Micheels, dans sa Grammaire du patois de Liège, prétend que 
la tournure wallonne est elle-même fautive; il faudrait dire: 



(*) Noos ëcrivons vat-i et non pas va-t-i; te i n'est pas euphonique ; c'est la 
terminaison même de vat ; ancien franc, il vat, tatin vadit, V. Braciiet, Nouvelte 
gram. fr., page i50. Il faut bien maintenir le fr. va-t-il. L'usage est un tyran 
bizarre, mais inflexible ! 



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~ 96 - 

enn*a allé; le pronon il est sans doute combiné avec la particule 
adverbiale è (fir. en, lat. inde), de sorte que enn* est pour il è. Il 
serait très-possible, d'après cela, que la construction vicieuse 
eût passé du français dans le liégeois. En tout cas, le barba- 
risme existant dans le parler wallon, il est utile de le signaler. 

S"" Le feu va s'en aller, H feu va 'nn'aller, il. het vuer zal 
uitgaan. Dites : va s*éteindre. On dit cependant : le feu va, Agad. 

6° Je m'en vais revenir. V. Futur péripkrastique. 

Allonger. Les jours allongent, ou rallongent, les jours rai- 
longente, Arménaque de Tournai, a. 51, p. 11: Dites : les jours 
s'allongent, Litt., les jours croissent, Acad. 

Cette tournure fautive (les jours allongent) est également usi- 
tée en France. Benoit blâme à tort la locution : les jours s'al- 
longent. 

Allumer. l^^Il allume, il allome, c*est-à-direil fait des éclairs ; 
cela ne se dit pas. L'expression française est : il éclaire. 

3° Allumez l^i lumière, alloumez, ou esprindez Vloumîre. Dites : 
Allumez la bougie, la lampe, etc. Mais on peut dire allumer le 
feu, ou du feu, Acad., alloumei' ou esprinde H feu. On dit aussi : 
faire le feu, faire du feu. 

Génin défend avec ténacité l'expression allumer la lumière, 
qui, à vrai dire, devrait être admise, tout comme l'Académie 
admet allumer une allumette. J'ai trouvé dans Th. Gauthier 
rallumer la lumière. 

Ami. Je ne suis pas ami avec ces gens-là, ji risos nin camé- 
fade avou ces gint-la, fi. ik ben niet vriend met die lieden. Il est 
préférable de dire : je ne suis pas ami de ces gens-là. 

Suivant Laveaux et Nodier (Examen critique des diction- 
naires), on dit ami de quelqu'un, et non pas ami avec quelqu'un, 
et il ne faut pas imiter Voltaire dans cette phrase : Glaveret, 
avec qui il était ami, avait été celui qui avait fait courir cette 
pièce. « Gomme ce nom est une grande autorité, à fort juste 



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- 97 — 

titre, et que peu de personnes ont écrit plus purement que 
l'auteur de cette phrase, il n'est pas inutile de dire aux jeunes 
gens et aux étrangers qu'elle est extrêmement mauvaise. » 
Nodier. Toutefois Littré l'approuve. 

Il est camarade avoumi; tournez, il est mon ami, il est de mes 
amis, c'est un mien ami, c'est un ami à moi. Des gint qui sont 
camarade avou nos autes. Dites : Des personnes qui sont de nos 
amis, ou bien qui nous sont amies. Mais ce genre de complé- 
ment (ami à quelqu'un) n'est de mise qu'avec des pronoms qui 
se mettent avant la verbe (Lirr.). Ex. Quelque ami que vous lui 
soyez, Mol. La neutralité entre des femmes qui nous sont 
également amies, La Bruy. dans Littré. 

Amltieiix. Il a des façons ivës-amitieuses, il a des amitieuzès 
mantre, liég. Dites : des façons très-aimables, des manières 
affectueuses. Un enfant amitieux, ine amitieux èfant, liég. eune 
infant amiteux^ lillois, eune amitieux enfant, rouchi. Dites : un 
enfant caressant. Il est si amitieux, il est si amicieux, pat. de 
Hons. Dites : il est si caressant, si affectueux. 

Evitez de même l'adverbe amitieusement. Il m'a répondu d^une 
façon très-aimable, et non pas amitieusement. 

Amour. Il fait Vamour à, ou avec mademoiselle une telle, i 
fait r amour avou mamzelleine télé. Hennequin a raison de blâmer 
faire Famour à, qui n'est pas français en ce sens ; il faut dire : 
Fait la cour à, ou courtise mademoiselle une telle. 

Faire l'amour signifie se livrer à la galanterie. Ex. Il fait 
l'amour à toutes les femmes, àcad. Ah ! lâche, fais l'amour, et 
renonce à l'empire, Rag. Bà^inice. 

Amphibologie. 1» Je lui ai entendu dire cela, ji li a ètindou 
dire coula. Cette phrase est amphibologique ; elle peut signifier: 
J'ai entendu qu'il disait cela, ou qu'on lui disait cela. Il faudra, 
ou bien changer la tournure, ou bien, si l'on en use, s'assurer 
que le sens est suffisamment déterminé par le contexte. 

2« Faites-lui faire un lit, fez4i fér on lét, présente également 



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— 98 - 

un double sens : Ayez soin qu'on lui fasse un lit, et chargez-le 
de faire un lit. 

An. A la nouvelle an, â navel an, â Pnovelle annëie. Dites : au 
nouvel an, ou au jour de Tan. 

La première locution wallonne est d'importation française ; 
en efTet le masculin novel n'existe pas dans notre patois, où l'on 
dit : on novai habit, un nouvel habit. On aura ensuite retraduit 
en français sans tenir compte de l'article contracté â, qui est 
masculin. Hennequin traduit également par à la nouvelle 
année ; mais cela est-il bien français f 

Anis. 1*^ Ne faites pas ce mot féminin comme dans le 
patois : Tanis étoile, li vette anisse. 

C'est le nom d'une plante odoriférante, dont on fait des dra- 
gées (n« 2) et l'anisette (n» 3). 

S. Manger des anis^magni des anisse. Dhes: manger de Tanis, 
Besgh. 

3. Servez-moi un verre d'anw, tapez-m* on ven^e cCanisse. 
Dites: un verre d'anisette. 

Anoblir. Vos belles qualités peuvent vous anoblir, vos 
belles qualités polet v's anobli. Dites : ennoblir. 

Le wallon n'a qu'un terme pour traduire anoblir, donner des 
titres de noblesse (li roi poui v*s anobli), et ennoblir, rendre 
plus éclatant, plus illustre. Cette distinction ne date que du 
XIX^ siècle, comme le prouve l'exemple suivant. Des passions 
qui anoblissaient tous les objets, Fléch. 

Août. Faire l'août, fer Vaousse, liég., faire Vaoui, lillois, 
rouchi, montois. On dit plus souvent faire la moisson. Cette 
locution, fort usitée dans nos patois, se perd en France, où elle 
était autrefois de plein usage. Ex. Remuez votre champ dès 
qu'on aura fait l'août, La Font. 



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- 99 — 

Apoplexie. Tomber d'apoplexie, chair ttapoplexie, p. de 
Beaum. tourner dapâplizèiie, Forir, tomber Sapopléxie, Arm. dé 
Mons, a. 62, p. 52. 

Cette locution est vicieuse (Lirr.). Dites : tomber en apo- 
plexie, AcAD., ou dans une apoplexie, ou être frappé d'apo- 
plexie.— Ex. Cette nuit M"* la princesse de Conti est tombée 
en apoplexie, Sêv. 116. Enfin il tomba dans une apoplexie dont 
il mourut le lendemain 2 février, âgé de 43 ans, Fonten. UHâ- 
pitaL Mais on dira très-bien : tomber d*épilepsie,Acad., tomber 
du haut mal, id., tomber du mal caduc, tourner de ma d^saint. 
Forir traduit à tort : tomber du mal de saint. On dit , mais 
rarement : mal de Saint-Jean , ou mal sacré. 

Apothicaire. Ce vocable doit son origine au grec apothèkè, 
mise eu réserve, qui a aussi formé notre mot boutique^ par 
aphérèse de l'a. Il a été détrôné, sauf dans le style badin, par le 
terme de pharmacieriy lequel vient également d*un mot grec , 
qui signifie remède et poison. Les Wallons et les Flamands 
comme leurs voisins d'outre-Rhin, sont restés fidèles à Tan- 
tique apothicarius, qu'ils tenaient de la basse latinité. — Je 
vais chez l'apothicaire, ji vas èmon Fapothiedre. Dites : chez le 
pharmacien. -^ On dit cependant des mémoires (et non pas 
des comptes) d'apothicaires, et Dieu nous garde d'un quiproquo 
d'apothicaire, et d'un et caetera de notaire. Ce sont des ex- 
piassions consacrées, où l'on ne peut rien changer, de même 
qu'on ne pourrait, à peine d'un ridicule achevé, toucher aux 
locutions, faire un pied de nez, un homme de six pieds six 
pouces, etc. 

Appamtlon. Apparution d'une comète, apparucion Une 
siteûle à cowe^ Forir. Dites : apparition. On dit cependant com» 
parution. 

Apprendre. 1**. Je n'ai besoin de personne pour apprendi*e 
mon ils, ji n'a mesâxhe di personne po-z^pprinde mi fi, liég. 



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- 100 - 

Dites : pour enseigner mon fils. — Je Pai apptis comme ça ( ce 
chien), mont. Dites: je Tai dressé h cela, je Tai mis sur ce 
pied-lk. 

C*est un archaïsme : apprendre, avec le complément direct 
de la personne, se trouve dans les auteurs du XVII* siècle, et 
c'est de cet emploi que viennent les locutions bien appris, mal 
appris, mdl appris. Oiseaux qu'ils ont appris à chanter toutes 
sortes de ramages, Vaugbl. dans Litt. Il apprit des singes à dan- 
ser, D'Ablang, dans Nodier, Ex. criL — A bien examiner cette 
dernière phrase, il est clair que singes est complément de pro- 
venance, et que le maître à danser est un singe. C'est le 
contraire que l'auteur veut faire entendre. Il y a équivoque : 
raison de plus pour rejeter cette construction. — La tournure 
apprinde ine saki tend aussi à disparaître du wallon. 

^ Nous lisons dans le Dictionnaire du bon langage : « On dit 
très-bien : j'apprends la musique à cet enfant, (Wall, \apprinds 
[musique d c't èfant-là). M. Carpentier veut faire entendre que 
apprendre peut s'employer dans le sens d'enseigner. Cette 
observation a son importance : plusieurs grammairiens, mal- 
gré l'usage et l'autorité de l'Académie, prétendent que cet em- 
ploi est incorrect. » C'est une erreur, dit Littré, car apprendre, 
en cet emploi, est dans l'ancien français, dans Corneille, » dans 
Pascal, la Bruyère, J.-J. Rousseau, B. de Saint-Pierre, Boileau, 
Racine, etc. Quelle envie prend donc aux grammairiens, dit de 
son côté Bescherelle, de contredire ainsi l'usage? 

4* Apprendre le peintre, l'armurier, le maçon, le menuisier, 
appiinde H pondeur Vdrmuri^ li maçon, li scrinî, fl. schilder^ 
leereti. Dîtes: Apprendre le métier, l'état de peintre, de maçon, 
d'armurier, de menuisier, ou être en apprentissage chez un 
peintre, chez un armurier, etc., ou être apprenti-menuisier, etc. 

S"* On dira bien: Nous nous apprenons mutuellement ce que 
nous savons, nos nos apprindans onk à taule çou qu'nos savofis. 
Ici s'apprendre est verbe réciproque. Mais ma sœur s'est ap- 
pris elle-même à broder, mi soûr s'at appris di Vite-même à 



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- 101 - 

brosder, est blâmé par M. Garpentier; il faudrait dire: a appris 
d'elle-même à broder. Cependant Littré Viàmei s'apprendre oomme 
verbe réfléchi, pour enseigner à soi. Ex. Cette dame s*est 
appris à filer, Litt. Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'ils méditent 
ce dessein, ils se sont appris à tourmenter les gens sur la bulle 
et sur les brefs dlnnocent X , Pasg. 

Apprentlsse. Elle est apprentisse-moniense, eUe est ap- 
prindisse-monteuse^ liég. elle est appurdisse-môdisse , namur. 
Dites: apprentie-modiste. On peut dire également monteuse; ce 
mot est dans Poitevin et dans Bescherelle. 

Apprentisse est une forme archaïque, aujourd'hui inusitée. 
Littré cite cet exemple d'un auteur du XIII* siècle : Nulle 
fillaresse de soie à grands fuisseaus ne peut ne doit avoir que 
trois aprentices tant seulement. 

Après. 1». Il faut dire, comme en wallon, un jour après, 
AcAD. on joû après, et le jour d'après, Agad. li joû diaprés. 
Dites de même, la semaine d'après, le mois d'après, l'année 
d'après, Acad. Le wallon est ici un excellent guide. Il est éton- 
nant que beaucoup de personnes disent le jour après. Il suit de 
ce qui précède qu'on dira très-bien : Un jour après que j'eus 
reçu votre lettre ; mais on ne pourra substituer le à un : Le 
jour après que j'eus reçu votre lettre, li joû après qu'feuris 
fçu vosse lette. Il faut prendre un autre tour. Le lendemain du 
jour où j'eus reçu... M"'^' de Sévigné a dit le lendemain que j'eus 
reçu votre lettre. Notons qu'on peut se servir également de la 
tournure : le jour ensuivant, et mieux le jour suivant, Acad. 

2<» Demander après quelqu'un, demander après 'n' saki, pat. 
de Mons, naar iemand vragen, fl. On demande après vous, on 
demande après vos, liég. Dites : On s'informe où vous êtes, on 
désire que vous veniez, ou (dans certain cas) on vous demande. 

A en croire Littré, cette manière de parler, condamnée par 
des grammairiens, est usitée, et d'ailleurs elle est ancienne, et 
se trouve dans Froissart. Ne pourrait-on faire observer, après 



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- 102 — 

réminent lexicographe, que Froissart était Belge ; cela expli- 
querai!, jusqu'à un certain point, l'emploi de cette locution, oii 
l'on retrouve probablement un vestige de l'influence germa- 
nique. Voici un exemple de Dumas, père, qui, toutefois, n'est 
pas une autorité pour la pureté du style : Il a demandé après 
moi ? Angèle, I, 3. Autre exemple de Dumas, fils : II n'a pas 
demandé après moi ? la Femme de Claude^ III, 4. 

3<> Après qui cherchez-vous ? après qui cachée ? mont. Après 
qui qwèrez-v' ? liég. naar wien zoekt gy ? fl.Il faut supprimer après : 
Qui cherchez-vous ? 

4<> Il crie après un de ses serviteurs, i crie après un duchés 
domestiques, p. de Douai, Bull. a. 70. i^ 1. p. 115, c'est-à-dire, 
il l'appelle à haute voix, il le hèle; t crie après in dses auvériers, 
Toum. ... après un des ouveriers, Leuze, ... après un des dames- 
tiques, Lessines, ... après un des varlets, Gossel .. après onk 
desvaurlets, Fosses. 

D'après le Dictionnaire du bon langage, crier après quelqu'un 
est fautif. Cependant M. le professeur Gilles {Revue de VInstr. 
pub., 1858, t. 1«% p. 386) fait remarquer qu'on lit dans Besche- 
relle : Crier après quelqu'un, l'appeler, le désirer. A ce compte- 
là, la phrase suivante nous semble correcte. Le malade crie 
continuellement après le médecin, li malade brait ta fer après 
t médecin» 

Examinons maintenant cette même tournure, crier après 
quelqu'un, braire après 'rt' sdki, au sens de le huer, le bafouer, 
Vinsulter. Dans cette acception particulière, le wallonisme ne 
peut se traduire, comme Forir le fait, par crier après quelqu'un. 
Il faut dire, avec Bescherelle. crier sur quelqu'un. Ex. Dans les 
rues, les petits enfants crient sur lui, Sév. ^ C'est donc à tort 
que les Omnibus wallons et le Dictionnaire du bon langage blâ- 
ment sans restriction la manière de parler crier sur quelqu'un. 
V. Sur, n* 20. 

Mais crier après quelqu'un est excellent dans le sens de gron- 
der, pour traduire le wallonisme braire so 'n' saki, (V. Sur iv* iO), 



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- 103 - 

ei dans le sens de faire entendre hautement le blâme, la plainte. 
Ex. Faire crier après soi, Acad. ... Qui criaient après les vices 
de leur siècle, Mol. Préf. du Tart. On dit plus souvent crier 
cotètre. Tout le monde crie contre ce ministre, Litt. 

5<» Attendre après quelqu'un, courir après quelqu'un, rattinde 
après V saki, cori après 'h'saki. Ce sont d'excellents gallicismes. 
On ne les mentionne qu'en raison de Fanathème prononcé 
contre eux par certains grammairiens. Nous puisons dans le 
Dictionnaire de TAcadémie. «Faire attendre après soi. J'attends 
après le médecin. Courir après quelqu'un pour s'emparer de lui, 
pour lui parler. Il est parti, courez après. » Qui ne court après 
la Fortune ? La Font. 

6"" Par après il s'est repenti, par après i s'est repentu, rouchi, 
par après i s"a r'pintou^ liég. Dites : Il s'est ensuite repenti. — 
Déjeunons vite par après nous sortirons, dgunans rademint, par 
après nos sôrtrans, liég. Dites : Déjeunons, nous sortirons après, 
ou ensuite nous sortirons. — Par après i r'tioïa si Kfession^ 
Ann. a 71, p. 86; tournez : Il rétrs^cta ensuite sa confession. — 
Ex. Nous en parlerons après, Acad. Partez et revenez après, id. 

Par après se disait autrefois. Les en ôter afin d'y en remettre 
par après d'autres meilleurs, Desc. Cette façon de parler est 
tombée en désuétude. 

Arboré. Un closeau bien arboré, oncoiihai Un ârhoré. Dites : 
bien garni d'arbres. Les dictionnaires français ne donnent pas 
cette signification à arbora, qui ne s'emploie que comme parti- 
cipe passé du verbe arborer, élever droit comme un arbre: le 
drapeau arboré. 

Arcba. Du fil d'arcfta, ou A'arca,dèfid:ârca, liég. du fi d'arca, 
rouchi. Dites : du fil d'archal. — Ce mot est une corruption de 
orichalcuniy airain de montagne, et est synonyme de laiton. 

Ardoisier. Un ardoisier, on hauieû. Dites : un couvreur en 
ardoises, ou simplement un couvreur, lorsque le contexte suffit 



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pour préciser le sens, comoid dans la phrase suivante. La tête 
ne tourne point aux couvreurs sur les toits, J.-J.Kouss.,£m., II. 
' Le mot ardaisier a été formé du verbe ardoiw\ couvrir d'ar- 
doises, qui se trouve dans Littré, comme haïeteû a été formé du 
verbe haieter, même signification. ( Haïe, ardoise. ) On voit ici 
les dangers de l'analogie. Muren, miroir, disait un jour un qui- 
dam qui hachait le français, mureû, miroir; donc crameû; 
cramoir (terrine). Ardoisier, dit Forir, n'est pas français. Il faut 
s'entendre. Littré le donne avec la définition : Celui qui exploite 
une ardoisière, celui qui y travaille. 

Ici le parler liégeois dame le pion au français : outre le terme 
générique cavreû, il a encore le terme spécifique haïeteû. 

Armanaque, almanaque^ armana. Une petite armanaque, 
une petite almanaque, ine pitite armanaque, liég., eune petite 
armonaque, mont., arménaque, tournais., rouchi, one pitite 
aurmonaque, namur. Dites : un petit almanach. — Le patois de 
Lille dit atmatia. Le barbarisme almanaque est le résultat d'une 
combinaison de la forme française avec le genre du mot 
wallon. 

Armoire. Un vieil armoire, on vî ârmâ. On dit : une vieille 
armoire. Cette faute est assez commune. On peut présumer que 
le genre masculin est le genre primitif; en effet Tétymologie est 
le latin armarium, de arma, qui ne signifie pas seulement armes, 
mais ustensiles. Bien qu'il ne s'agisse ici que d'un détail, cons- 
tatons une fois de plus que notre bon vieux wallon a conservé 
l'empreinte originelle. On sait que le genre masculin correspond, 
dans les langues néo-latines, aussi bien au genre neutre qu'au 
genre masculin du latin. Au surplus le genre féminin du français 
armoire s'explique : dans le dialecte de l'Ile-de-France, on aura 
fait, du pluriel armaria, un nom féminin de la 1'- déclinaison. 
V. au mot Louche. 

Arrière. 1« Prononcez arrière et non pas errière, faute qui 
se fait aussi en France. 



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— 105 — 

2« Mettez cela arrière de la table, mettez coula hi dèC ttâve; 
liég. Diies : ôtez» enlevez cela de la table. — Ote cela arrière 
de ta poebe, iitais cha arrière de Cpoche^ lillois. Dites : ôte cela 
de ta poche. — Cette femme $e tient arrière de son mari, 
cUse feumme-là s'tint èridi si omme^ liég. Dites : est séparée, 
vit séparée de son mari. — Ne voilà pas (v. Littré, à Voila), 
que Nicodëme veut se mettre arrière de sa femme, vHà-t-i pas 
que Nicodème veut s'mette arrih'e de s* femme, chanson lilloise. 
Dites : veut se séparer de sa femme. 

L'adverbe arrive signifie. loin, mais, comme Tindique Téty- 
mologie (ad., vers, rétro, en arrière), il répond toujours à la 
question vers oii t (question quo). « Il n'est guère usité que dans 
certaines phrases par lesquelles on enjoint .de se retirer, de 
s'éloigner, et qui marquent l'horreur ou le mépris.» Acad. Ex. 
Arrière de moi, Satan. Arrière les médisants. Arrière ceux dont 
la bouche souffle le chaud et le froid, La Font. 

Plusieurs traduisent .à tort èri par en arrière ,de. Il cherche 
toujours à être en arrière de moi, t quire todis à esse èrid'mi. 
Dites : à être loin de moi, et mieux, il cherche à ne pas me 
rencontrer, il m'évite, il me fuit. 

»£n airière de est une locution prépositive qui a trois signi- 
flcations : A) sur un plan plus reculé : la cavalerie fut placée en 
arrière d'un bouquet de bois; B) en retard : cet écolier ne fait 
aucun progrès, il est fort en arrière de ses camarades : G) la S""* 
est indiquée au n"* suivant. 

di^ On lit dans HenneqUin : « C'est une faute de dire : Ne faites 
pas, en arrière de lui, ce que vous n'oseriez pas faire devant 
lui, » ni fez nin, èri d>lu, çou qu*vos n'wèz"rix> fér devant lu. Or, 
dans les deux exemples suivant, en arrière est employé en ce 
sens : Il me loue en présence, et me déchire en ahîère. Agad. ; 
souvent on parle en arrière des gens autrement qu'en leur pré- 
sence, LiTT. En arrière de s'emploie donc très-bien avec le sens , 
de hors de la présence de. 



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~ 106 - 



Arplvep. Il a arrivé, p. de Tournai. V. Tombbr. 



B. Il :a de Targent assez, il a des aidant assez, — J'ai 
mangé assez^ fa magni assez. — Je suis malheureux assez, ji sos 
mdlhureux assez. Dites : il a assez d'argent, j*ai assez mangé, je 
suis assez malheureux. Il est content a^s^:^ d'en être quitte. (Y. 
Quitte). Bin aise assez rCain ette quitte, pat. de Hons. Dites : Il est 
assez content d*en être quitte. 

L*adverbe assez précède le mot qu'il modifie. Il est probable 
que l'influence germanique n'est pas étrangère à celte construc- 
tion wallonne : gross genug, alL grand assez^vfM. ; goed genoeg, 
fl. bon assez, wàll. Dans le vieux français, assez se plaçait aussi 
quelquefois après l'adjectif et le substantif. Ex. Il leur sembla 
qu'ils seraient forts et puissants assez pour la conquerre,FROiss. 
dans Litl. Quelques auteurs modernes ont imité cette tournure : 
Riche assez pour repousser avec de l'or ce qu'elle [la vie] a de 
mauvais, Dumas, père, Angèle, I, 4. Vou$ avez les plus jolis 
enfants de tou( le pays. — Ah ! voisin, répondit-elle, ils sont 
ce que le ciel les a faits, beaux assez s'ils sont assez bons : car 
est beau qui fait bien, Nodier, le Vie. de Wakefield, ch. I. Il me 
semble que l'inversion donne une force, une énergie singulière 
à la pensée. 

^siller. Assiller tout son argent, ossiller tout s*n arge^U, 
pat. du Hainaut. Dites : dépenser tout son argent. 

Atteler. Atteler quelque chose avec un bout de fil, atteler 
risakoiavou on coron d^fi. Dites : attacher quelque chose.... 
Atteler le chien, atteler tchin. Dites : attacher le chien. — Atte- 
ler, c'est attacher des animaux de trait : atteler des chevaux à 
un carrosse, atteler des bœufs à la charrue. 

Attendre, 1*» Attendre après quelqu'un. V. Après, n« 5. 
3"* Vous attendiez-vous à ce qu'il viendrait ? vis attindiz-v" à 
c'qu'i vêreût ? Dites : vous atiendiez-vous qu'il viendrait? 
On dit s'attendre que, Vivec un mode personnel, et s'attendre à, 



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— i07 — 

avec rinfinitif. La faute signalée provient de la contusion et de 
la réunion des deux tournures Ex. L'erreur la plus pernicieuse 
est de nous attendra que Dieu nous attendra, Bourd.Tous s'atten- 
daient h retourner dans leur patrie,' Lin. — Y. à l'art, infinitif. 

Attendu. En payant^ bien attendu^ in payant, bin attindu, 
Arménaque de Tournai, a. 51. Il faut dire : bien entendu, ou 
s'entend, Agad. 

Ai^Jourd'hui. Plusieurs ont condamné absolument la tour- 
nure : Le jour d'aujourd'hui, li jou d'ouïe. Ce pléonasme, qui 
se dii aussi en France, serait d'autant plus vicieux que le mot 
aujourd'hui en renferme déjà un à lui seul ; en effet aujourd'hui 
équivaut à au jour de ce jour (Aui, de hodie, et hodie, de hoc die). 
Lîttré cite cependant ce vers de Lamartine, où il produit bon 
effet : L'univers est à lui [Dieu], et nous n'avons à nous que 
le jour d'aujourd'hui. Citons encore cette phrase de l'Aca- 
démie : La journée d'aujourd'hui est plus belle que celle d'hier. 
Ce pléonasme n'est donc pas toujours vicieux. 

Aussi, l^" Aussi vile que vous aurez reçu la lettre, ossi vite que 
v's ârezi^çû Flelte. Dites : aussitôt que, sitôt que, dès que vous 
aurez reçu la lettre, ou, elliptiquement, aussitôt la lettre reçue, 
ou une fois la lettre reçue. V. Vitb, n*» 2. — Aussi vite que se 
dit, mais a un autre sens : vous y arriverez aussi vite que moi, 
c'est à-dire aussi promptement que moi. 

2<* On lit dans Hennequin : v C'est une faute de dire : Je n'es- 
pérais pas un aussi grand succès. Dites': Un si grand succès. 
Aussi exprime la comparaison ; si marque l'extension. » 

Cela paraît bien absolu. Le wallon dit également bien : ji 
ii'm' attindéve nin à ine si beUe réussite, eiji n'nC attindéve nin à 
ine ossi belle réiifsite. Si belle signifie belle à ce point, tellement 
belle; si marque une idée d'extension; ossi belle veut dire belle 
ainsi, belle comme elle est; ossi marque une idée de compa- 
raison. Mais évidemment l'idée estau fond la même, et si, dans 



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- 108 — 

la seconde phrase, ossi ne marque point, par lui-même, l'ex- 
tension, le contexte amène naturellement celte idée. Au sur- 
plus, TAcadémie, Bescherelle et Liltré disent positivement que 
aussi s'emploie dans le sens* de tellement. Exemple: Gomment 
un homme aussi sage a-t-il fait une pareille faute? Acad. Dans 
une patrie aussi glorieuse, Litt. La voyant dans une situation 
aussi brillante, je Tai suppliée de vous envoyer quelques 
secours, Bern. de S'-P. — On peut, ce semble, conclure de là, 
que la phrase incriminée : je n'espérais pas un au'&si grand suc- 
cès, est aussi correcte que l'autre,,., un si grand succès, et ne 
constitue pas un wallonismc. 

Autant. I** A autant la pièce, à ottant l'pèce. Dites : à tant la 
pièce. — Cette pièce de drap a autant d'aunes, cisse pèce ii drap 
a ottant (Faune, Dites : à tant d'aunes. — Tant est ici un subs- 
tantif abstrait qui exprime une quantité indéfinie, indéterminée ; 
autant d" aunes aurait un autre sens; il marquerait égalité : celte 
pièce-ci a autant d'aunes de long que celle-là. Ex. : Nous par^ 
lagerons : il y aura tant pour vous et tant pour moi. Acxd. Il 
me demanda combien j'avais de revenu, je lui dis que j'en 
avais tant, id. Dans l'indépendance où je voulais vivre, il fallait 
cependant subsister; j'en imaginai un moyen très-simple : ce 
fut de copier la musique à tant la page, J.-J. Rouss. dans Litt. 

8« Il y a déjà autant d'années que je vous sers! 

Il a (f;d autant ^[années que f vos serve l pat. de Nivelles. 

V*là d^jà ostant d'annèïes quèfvos sieis! WalCQurt. 

Vola d*jà ostant d'années quiji vos siès ! Namur. 

Vola déjà ostant d^annêfes quiji v'siève ! Otton. 

V'ià d^jà ostant d'années qui ji v'siève ! Marche. 

Vola déjà ottant d'annexés quju v'siéve ! Limbourg. 

Vola ottant d'années qu ju v'siéve ! Stavelot. 

Dites : Voilà déjà tant d'années que je vous sers ! — On voit 
que la distinction établie en français entre tant et autant n'existe 
pas pour beaucoup de nos patois. Le premier marque l!exten- 



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— 109 - 

sioû, le second, la comparaison. TatU de signifie une si grande 
quantité de, et autant de marque égalité de nombre, de quan- 
tité, d*élendue, etc. E\. Il a tant d'amis, qu'il ne manquera de 
rien, Acad. Il a tant de bonté! id. — Il boit autant de vin que 
d'eau. 

Autour, l^" Votre mère a autour de soixante-dix ans, vosse 
mire a âtou cFseptante an, fl. omtrent ou rondom de zeventig. 
Dites: a environ soixante-dix ans, a bien soixante-dix ans, a 
près de soixante-dix ans. 

« Bien s'emploie dans la signification d'à peu près, environ. 
Il y a bien trois ans que je ne l'ai vu, Acad. > 

Autour, dans le sens à*environ, est signalé dans le diction- 
naire de Littré. Le baron de Bresse avait du roi autour de 
20,600 livres de rente, St Sinon. Le peuple s'en sert encore en 
France. H»'* Guizot introduit dans YEcolier un villageois qui 
s'exprime de la sorte : Il y a autour de quatre ans qu'ils sont 
dans le village. 

2^ Il travaille autour de sa maison, il fmveûre âtou di s'mo- 
honne. Dites: il travaille à sa maison. — N'allez pas autour du 
feu, n'aUez nin âtou de feû. Dites : n'allez pas trop près du feu, 
ou ne touchez pas au feu. 

Autour signifie quelquefois auprès, mais alors il marque 
une idée d'attachement, d'assiduité. Ex. C'est une personne si 
charitable, qu'elle est continuellement autour des malades, Acad. 

Autre. 1» Rien d^ autre. V. Rien et Personne. 

2<> Les autres cinq, les autres six, les autes chonq, lesautes six, 
Tourn. Il faut dire les cinq autres, les six autres. Le flamand 
admet les deux tournures. Il est probable que c'est une vieille 
locution française. Du moins, Littré cite les exemples suivants : 
Les autres neuf, Gomm. Il en publia, un jour après, autres deux 
cent et vingt, Amyot. (Pour .cet et, actuellement fautif, voir Et.) 

Cette façon de parler s'est maintenue dans le Tournaisis et 
dans le Midi de la France, où, d'après Littré, ont dit aussi : les 
autres six. 



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^ 



- no - 

Avec. 1"* Montrer quelqu'un avec son doigt, mosirer n'saki 
avou s'deUy fl. iemani met defi vingei* wijzen. Dites : montrer 
quelqu'un du doigt. Ex. Il n'est pas poli de montrer quelqu'un 
du doigt. LtTT. Montrer quelqu'un au doigt est une expression 
figurée, qui veut dire s'en moquer publiquement. 

2« Veux-tu venir avec f vetuç-tu v*nir aveuque? rouchi, fl. Wilt 
gij mee komen. Dites : veux-tu venir avec moi, ou avec nous? -^ 
Viens avec, vies avec^ pat. de Mons. Dites : viens avec moi, avec 
nous. 

« Avec étant une préposition ne peut s'employer sans régime. 
C'est donc une faute de dire : Venez avec ; il faut : Venez avec 
nous. Hennequin. L'exemple est certainement fautif, mais la 
décision parait bien sévère Voici plusieurs exemples où cet 
emploi particulier de avec n'est pas sans quelque grâce; ils 
montreront, ce me semble, que, dans certains cas, on pourra 
déroger à cette règle un peu absolue. Nous habillera-t-on avec 
du papier [papier-monnaie] mainienant? Nous cbaussera-t-on 
avec^ ou nous en fera-t-on manger T Sand, les MississipietiSy III, i. 
Il rêvait qu'un de ses oncles lui léguait par testament .toute une 
province, les Péruviennes avec; Murger,5c. de'la vie de Boh.\. 
Est-ce pour dire à l'enfant que le monstre croquera ses mitaines 
et ses doigts avec ? Litt. (Il s'agit de l'élymologie de Groquemi- 
taine.) Il a pris son manteau et s'en est allé avecy Litt. Il prit 
son manteau et partit avec, Agad. M. Carpentier dit avec beau- 
coup de justesse : « C'est surtout quand avec se rapporte à une 
chose, qu'on supprime les pronoms {ut, elUt eux, elles, dont 
l'emploi serait vicieux dans ces sortes de phrases. On ne peut 
pas dire en efTet, il a pris son manteau, et il est parti avec lui. » 

Il est bon de remarquer que, dans quatre de ces exemples, le 
nom sous-entendu après avec se trouve exprimé dans la même 
proposition ou dans la proposition précédente. Quoi qu'il en soit, 
cet emploi de avec est du style familier, et il n'est guère admis- 
sible que dans le cas particulier qui vient d'être signalé. Ainsi 
l'on ne dira pas: je vais avec, ;i va avou, ik §a mee ; mais Ton 



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- m - 

dit très-bien : il prit son manteau et partit avec. Il y a ellipse, 
ou, si l'on veut, avec est employé adverbialement, ce qui justifie 
parfaitement Tétymologie de avec : apud hoc, en cela, avee cela 
(LiTT). Ce serait quelque chose d'analogue à l'emploi de après 
dans cette ghrase de Littré : Il a couru après d'une course pré- 
cipitée, et dans cette autre phrase assez curieuse, qui se trouve 
dans l'ouvrage du grave lexicographe: Pet de maçon, ainsi 
nommé, parce qu'il y a du mortier après, \u surplus, comme 
l'établit très-bien H. Burggraff dans sa Grammaire générale, la 
plupart des prépositions ont été primitivement des adverbes. 
Dans les langues à flexion, les rapports, à l'origine, n'étaient 
marqués que par les désinences casuelles ; l'adverbe n'était là 
que pour préciser davantage le rapport. Rien d'étonnant si les 
langues dérivées du lafin, qui expriment presque toujours les 
rapports au moyen des pré'positions, ont conservé en maintes 
circonstances, à plusieurs de celles-ci, la valeur adverbiale, que 
beaucoup d'entre elles avaient dans la langue-mère. Ainsi après 
vient de ad et de prope, comme le prouve le wallon aprèpi, h 
peu près supplanté par approcher. Or on sait que prope était 
plutôt adverbe que préposition. V. âpres, n<* 61 

3« Hais on fait un grossier wallonisme en donnant à avec le 
sens de aussi. Ma sœur s'est bien amusée, et moi avec, mi 
maseûr s'a bin amuié et fni avou, liég. Dites : et moi aussi. Il 
en a avec, i ia avec, mont. Dites : il en a aussi. Mettez-lui avec 
un anneau, metiez It avec in anniau, p. d'Ath, Bull. a. 70, 2« I. 
p. 136. Dites : mettez-lui également un anneau. 

i^ Que puis-je taire avec ces livres? qui pous'-je fér avou ces 
/to«-/à? Dites: rf^ ces livres-là. — Ce wallonisme est un flan- 
dricisme : wat kan ik doen met die bœken ? 

&"" Avec qui parliez-vous ? avou qui pârliZ'V\ Cette tournure 
est blâmée à tort par M. Carpenti^r ; elle se trouve dans le 
Dictionnaire de l'Académie au mot parler : parler avec quel- 
qu'un. Toutefois, il me semble qu'une nuance la sépare de la 
tournure à qui parliez-vous? Avec qui parliez-vous parait impli- 



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-. 112 — . 

quer l'idée d'entretien, que ne comporte pas nécessairement 
Tautre tournure. 

6"* Avec tout cela, j'ai perdu mon argent, avou toi coula, fa 
pietdou mes aidant Dites: grâce à cela, à cause de cela. Avec 
a aussi ce sens dans le patois de Tournai. Un jeune Tournai- 
sien, qui venait de. dénicher un nid de corbeaux, arrive au 
catéchisme, ayant les petits corbeaux cachés sous sa blouse, 
au-dessus de la ceinture. Le curé lui ordonne de se frapper la 
poitrine, comme on fait à la messe au mea culpa. Après une 
longue résistance, le jeûne gars se fâche et se frappe violem- 
ment la poitrine ; puis il s*écrie : Avec tout cha. Monsieur le 
curé, fax tué mes cola. Tournez: grâce à cela, à cause de cela, 
j'ai tué mes corbillats. 

Avec cela se dit, mais signifie : l*" par le mo^en de cela : avec 
cela, vous êtes sûr de réussir, Agad.; 2<> malgré cela: avec tout 
cela, vous n'en êtes pas moins sa dupe, Agad. 

7° Êtes-vous ami avec lui ? V. Ami, Parent et Camarade. 

8<> J'ai ri comme un fou avec cette histoire, ji ria comme m 
sot avou c't histoire-là. Dites: J'ai ri... de cette histoire. G est 
un flandricisme. Ik heb met die geschiedenis als een gek 
gelachen. 

'9^ Il vit avec le produit de sa ferme, f Pique avou lès riv'niowe 
di s'einse. Dites : il vit du produit de sa ferme. 

Avec marque ici le moyen, comme dans les exemples sui- 
vants: Avec le secours du ciel; avec de la réflexion, nous 
comprenons, Litt. Et tu crois m'éblouir avec cet artifice, Gorn. 
Mais vivre de^ixyec un nom de chose, est une locution toute faite. 
V. toutefois Sur, n*» 1. 

La phrase : vous vous ferez des ennemis avec vos médisances, 
vos v'feiez des inn^mi avou vosse mdle linwe, condamnée par un 
recueil d'Omnibus, est, ce mé semble, correcte et parfaitement 
admissible dans le style familier. 

10« Déjeuner avec du boudin, dijuner avou de l'tr^e. 

On dit déjeuner, dîner, souper avec, en parlant de personnes, 



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— 113 - 

et déjeuner... de, en parlant de choses. Ne dites donc pas : 
J*ai déjeuné avec une douzaine dliutcres, à moins que vous ne 
vouliez faire une mauvaise plaisanterie. La règle n'est cepen- 
dant pas absolue: on s*en écarte dans la pratique, surtout 
quand il n'y a pas d'équivoque possible. Déjeuner atw une tasse 
de café au lait, Litt. Souper avec un poulet, Acad. Déjeuner 
avec des œufs frais. Mol. Fich. II. 7. 

li« Pariir avec le premier train , mn'aller avou Cptwni 
eofivoi^ fl. met den eersten trein vertrekken. Dites : partir par le 
premier train. 

IS*" Avec cela fti'elle est laide et vieille, avé ça qu*elle est 
laide et vieille^ pat. de Mons. Le sens est: outre qu'elle est... 
ajoutez à cela qu'elle est... Tai entendu blâmer cette tournure, 
qui semble admissible dans le style familier. Y. un ex. dans 
Fabrb, le Calvaire de la baronm Fuêter^ page 303. 

Avoir. 1* Il faut qu'il aie fini à quatre heures, i fût quHl 
aie fhu à qwatr* heure. Dites: qu'il ait. — C'est une faute que 
Vaugelas relevait déjà au XVIP siècle, et que l'on entend encore 
très souvent, même en France. 

?• fai cet en&nt-là cAer, fai c'-n-infant-là hier, pat. borain, 
fai eU infant-là quer, pat. de Lille, ik heb dat kind lief^ fl., ich 
habe dièses Kind tieb, ail. Dites: J'aime cet enfant, ou cet enfant 
m'est cher. 

Cet idiotisme, qui nous est venu d'outre-Rhin, est usité dans 
le Hainaut et la Flandre française ; il était de plein usage dans 
la vieille langue française ; il est du reste d'ancienne date. Les 
douze pairs que Charles a tant chers, CA. de Rolatid^ X* siècle. 
Guenelon sire, je vous ai forment chier, Ronc, XII'' s. Covei* 
tise a f autrui trop cher, La Rose^ XIII* s. fai aussi cher de 
n'en rien faire, Louis XI, XV^ siècle, dans Litt. A ce compte, 
un homme n'aurait cher ny Thonneur ny la science, Avyot. 
Actuellement, l'emploi en est restreint: cher doit toujours être 
modifié par un adverbe d'intensité. Ex. Après les dieux, ce 



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— 114 - 

que les Romains avaient de plus cher, c'est la patrie. Roll., 
HUt. rom., Préf, Un bien que j'ai si cher, Malh. dans Lîlt. 

3"* Un recueil d*omnibus condamne remploi de il y a avec 
un verbe unipersonnel : il n*y aqu*à pleuvoir, qu*à neiger, nous 
serons dans de beaux draps, igna qu'à ploûre, quà uîver, nos 
sèrans prôpe. Il faudrait dire : s'il vient à pleuvoir, à neiger. 
(V. le moi Propre.) C'esi trop de rigueur. Linré dit positivement : 
Il n'y a qu'à pleuvoir, c'est-à-dire la pluie peut survenir. 

¥ Il y a la laitière qui sonne, ^na i'Ieumme â lessai qui sonne. 
— Dit3S simplement : la laitière sonne.— Hais on dira très-bien : 
il y a /à un homme qui vous demande. 

6*> Avoir bon. V. le mot Bon. — Lavoir belle. V. Beau. 



B 



Bao. Un bac de maçon, nn bach di maçon.Diies : une auge de 
maçon. — Mettez de Tavoine dans le bac des chevaux, mettez 
(Tl'avonne è bacii dès ch'vâ. Dites: dans la mangeoire des che- 
vaux.— Le tace»t vide depuis longtemps, les \aches beuglent, 
li bach est vu dispôie longtimps^ les vache braièt. Dites : la crèche 
est vide.— Le 6ac du chardonneret,// bach d'à cherdin. Dites 
l'auge du chardoimeret. — Le bac aux cendres, li bach d cinde. 
Dites: le baquet aux cendres.— Un bac au charbon, on bach â 
châfège, liég. un bac à charbon, rouchi. Dites : un baquet à 
charbon.— On dit à Tournai une charbonnière ^ mol qu| n'est 
pas français, en ce sens. 

Littré admet le mot bac dans le sens de cuve de pierre pour 
recevoir l'eau de pluie. Il désigne aussi un grand bateau plat 
glissant le long d'un câble,et destiné à faire passer les hommes, 
les. animaux, les voitures, etc., d'un bord d'une rivière à l'autre. 
Ex. Passer la Meuse dans un bac. Passer le bac à Ghokier. 



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— 115 — 

Bacon. Un bacon de lard, on bacon (Tldrd, liég. in bacon 
cTlard, pal. de Mons : Dites : une flèche de lard. 

Bacon est un vieux mot français, qui veut dire : chair de 
cochon salée, Comp. du D. dt VAcad. Il a passé dans la langue 
anglaise, où il signifie lard. 

Baguer. Débagager, Débaguer, Il bague demain, i bague 
dimain, liég. 1 débagage, ou, f débague edmain, mont, rouchi. 
Dites : il déménage demain. 

La racine est bagues, en français, bagage, Acad., en liég. 
hardes. Le franc, bagues n'est plus usité que dans cette phrase : 
sortir vie et bagues sauves 

Baguette. On dit très-bien mener à la baguette, miner à 
rbaguette, commander à la baguette, kimander à Vbaguette; on 
ne dit pas faire aller à la baguelte, fér aller à Cbaguette. Dites : 
gouverner à la baguette, mener tambour battant On ne dit pas 
tetiir la 'baguette, Uni rbagneile, ni jeter la baguette, taper 
fvège; on dit: faire tourner la baguette (la baguette de coudrier, 
la baguette divinatoire). Enfin yandre à la baguette, vinde à 
(baguette, doit être remplacé par vendre à l'encan. V. Hausse, 

Baigner. Nous irons baigner, nos irans bagni, nous irons 
promener au frais, jws irans pormiuer à rfriskâte; allez cou- 
cher, alleZ'S'couki, Dites: nous irons nous baigner, nous pro- 
mener au frais, allez vous coucher. 

Dans le sens de prendre un bain, marcher, se mettre au lit, 
ces verbes sont réfléchis, et Ton ne peut supprimer les pré- 
noms réfléchis que dans des cas tout spéciaux. Ainsi TAcadémie 
admet la locution familière : envoyer promener, phrase peu 
polie qui correspond à Tidiotisme wallon: fér bdhi brézète (les 
mains, expression ironique). Cette faute a été commise par 
J.-J. Roussseau. J'ai toutes les peines du monde à obtenir... 
qu'elle veuille bien venir promener avec moi. Littré a constaté 
qu'au XVP siècle ce verbe était intransitif. C'était contraire k 



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- 116 — 

l*éiymologie {pro^minare^ mener eu avaut).— Avec faire, on 
supprime ordinairement le pronom personnel d'un verbe ré- 
fléchi. Faire baigner un chien barbet, fir bagni on chin canard. 
Le wallon est ici un bon guide. fiOtte suppression a lieu après 
faire avec tout autre verbe: l'aire fôcher quelqu'un , fér mâvler'- 
n*9aki. Enfin coucher, verbe intransitif, signifie passer la nuit, 
le temps du sommeil. On dira donc très-bien : il est allé coucher 
dans la rue, pour faire entendre qu'il y est allé passer la nuit. 

Bftllle. Faire une bâille, fér 'n* bâïe. Dites : faire un bâille- 
ment. Prononcez â long ; c'est ce qui distingue bâiller {bdï^ de 
bailler (diner). 

Cette faute est analogue à celle de donner une baise, donner 
V baise, pat. de Mons et de Tournai, et rouchi. Dites : donner 
un baiser. Baije, ou, baisse à pinchette, pat. de Mons. Dites : 
baiser à pincette, en pincettes, Litt., à la pincette, Acad., c'est- 
à-dire en prenant doucement les deux joues avec le bout des 
doigts; en liégeois, bâhi à picette. Ils se donnaient des baises, 
i s^dinit de bèch, pat. de Liège et de Verv. Dites : ils se don- 
naient des baisers. Il lui a donné un baiser, i li-z-a d^né du bêche, 
pat. de Nivelles, Bull. a. 70, 2« 1. page 16S. Dites : il lui a 
donné un baiser. 

Baletto, namur. Fôke, liég. ; planchette dont se servent les 
jardiniers pour fouler la terre. Forir traduit par batte, qui n'a 
pas la même signification. Il m'a été impossible de trouver le 
mot français correspondant. 

Baise. V. Bâille. 

Baiser. Baisez-le, bâh^z-V. Dites : embrassez*le. 

Le plus souvent on substitue en français embrasser â baiser; 
mais il ne faut pas abuser. Ainsi Littré blâme la tournure, il 
lui embrasse la main, dont on use parfois ; dites, comme dans 
le patois de Mons, il lui baise la main, i li baise el mahk. En 
effet, embrasser, c'est non appliquer la bouche, mais serrer 
dans ses bras. 



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- 117 - 

Balziner. Vous balxinez toujoura, vo» balzinet iodis^ liég. 
Dites : vous lambinez toujours. Vous baUinez toujours, vos bal- 
sinez tondis^ mont. Dites : vous hésitez toujours. 

Barboter. La vieille Marguerite ne fait que barboter, li vèïe 
Margot ni fait qu" de barbotter. Dites : ne fait que gpronder, 
bougonner, grommeler. On le barbote quand il rentre trop tard, 
OH tbarbote quand i rinteûretrop tard. Dites : on le gronde, on 
le bougonne... Litt. 

Barboter, en français, sert à exprimer le mouvement et le 
bruit que certains oiseaux aquatiques, particulièrement les 
canards, font avec leur bec, quand ils cherchent leur nourri- 
ture dans Feau ou dans la bourbe. Ex. Des canards qui bar- 
botent dans une mare, Acad. 

Barboteur, teuse. Vous êtes un vieux barboteur, vos estez 
on vt barboteû. Dites : un vieux grondeur, un vieux grognon. — 
Vieille barboteuse^ vèie barboteuse^ ou barbotresse. Dites : 
vieille grondeuse, vieille grognon. 

Barboteur et barboteuse sont français, mais le premier mot 
désigne le canard domestique, et le second est un terme bas pour , 
désigner une femme de mauvaise vie. 

Barrette. Faire barrette, fir barrète, liég. A Mons, on dit 
faire Fbartiau. A Lille, on dit faire queuette, et faire bis^ à 
Tournai, faire queuette. — La tournure française est : faire 
l'école buissonnière, ou manquer l'école. — Il a fait deux bar- 
relies, il a fait deux barrète, liég. Dites : il s'est absenté deux 
fois de la classe, il a fait deux absences. — On se rappelle le 
mot qu'un loustic écrivit un jour sur la porte de M. Barett, 
ancien grand-vicaire à Liège : Dieu créa le monde en six jours, 
et le septième, il fit barrette. 

Barrette est français, mais sert à désigner un petit bonnet 
plat, et, spécialement, le bonnet rouge des cardinaux. Recevoir 
la barrette. « 



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- 118 - 

Bas. I*" Sauter bas de son lit, en bas de son lit, pochi jus di 
8* lit. Il est tombé bas, en bas de son cheval, il a tourné jus di 
s'ehivâ. Dites : sauter à bas de son lit, il est tombé à bas de son 
cheval. ~- Il est en bas de Téchelle (ou il est au bas de l'échelle) 
pourrait se dire, mais ferait entendre qu*il est sur les échelons 
inférieurs. Comparez la phrase de rAcadémie : il est en bas de 
Tescalier, c*est-à-dire, il est au bas de Tescalier. 

2® Mettre bas (renverser). Capable de mettre bas un homme 
robuste, faite à bouhi on foirt homme jus, Chalmont, chanson. 
L'Académie, en ce sens-là, n*a que mettre à bas; ainsi il faudrait 
dire: mettre à bas un homme robuste, c'est-à-dire, le ren- 
verser, le terrasser. Mettre bas est un archaïsme.V. un exemple 
de Corneille, dans Littré. 

S"" Mettre bas, en bas, jeter bas, en bas (démolir, abattre . Nous 
mettrions la maison en bas dans l'espace de huit jours, nos met- 
UHs Vmohonnejus so hût jou, liég. Dites : nous mettrions la maison 
à bas... — Jette un peu cette grosse branche là en bas, tape ein 
pau c'grosse branke-là jus, mont. Dites : abats un peu cette grosse 
branche. (V. les mots Peu ei Sur, 12.) — Ex. Cette maisonn'est 
bonne qu'à mettre à bas, Agad. 

Au figuré, le français mettre jus, vf^W. mette jus, est un archa- 
ïsme qui se trouve dans Bescherelle et dans le complément du 
Dictionnaire de l* Académie, Ex. L'octroi a stu mettou jus par 
Frère-Orban, en vieux français, a été mis jus. Dites : a été mis 
à bas. Ex. Ils mirent tous les privilèges à bas, Acad. 

4« Descendre en bas. V. Haut. 

5« Cet enfant n'est jamais bas de mes bras, cisV èfant-là n'est 
mâîe jus d'mès bresse. Dites: n'est jamais hors de mes bras, 
est toujours dans mes bras, sur mes bras, ou entre mes bras. 

6* Couper la tête fra«, côper Vtiessejus. Dites simplement: 
couper la tète, ou abattre la tète. Il a la tête bas, il a t liesse jus. 
Dites : il a la tête à bas. - J'ai tiré l'oiseau bas ou en bas, fa 
tiré Vouhaijus. Dites : j'ai abattu l'oiseau. 

TirA" en bas est français et signifie tirer vers le bas. On dit 
aussi, en ce sens, tirer par en bas. 



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- n» — 

T** Tirer la clef bas, ou en bas de la serrure, sècht l'eU jus dé 
Fsére. Dites : tirer, retirer, ou ôter la clef de la serrure. 

Beau. 1« J'aurais belle à faire, fâreûs belle à fér. Dites : j'au- 
rais beau faire. 

2"* Lavoir belle, patois de Mons et de Tournai. Dites : avoir 
l>on temps, se donner du bon temps, prendre du bon temps, 
ÂCAD Lavoir belle signifie avoir une occasion favorable de faire 
quelque chose, Acad. 

Bégasse. Accommoder une bégasse, accommôdtr 'n'bégasse. 
Dites : une bécasse. 

Béguer. On dit dans les patois de Mous et de Tournai : 
i bègue, pour il bégaye, et cette faute se commet aussi à 
Liège. 

Bégayer, tout de même que le liégeois bech'ter et bek'ter, est 
un allongement du primitif, béguer, qui existe encore dans le 
roucbi, le lillois, le picard, Vhennuyer et le genevois. 

Béguinette, fl. du Limbourg, begijntje. On dit, en français, 
farlouse des prés o\} pipit, mais il serait pédant de condamner 
absolument cette expression, qui est d'un usage général dans 
le pays de Liège. 

Berce. Une berce, eune berche, rouchi, lillois, enne berche, 
ou berce, mont. Dites : un berceau. 

Ces patois ont conservé le genre et la force du bas-latin 
bevsa, claie d'osier. Berceau est le diminutif d'une ancienne 
forme masculine bers : ung bers, Chastblain, XV"" siècle. Le mot 
de berce est très-usité à Liège, bien que le patois dise banse 
(fèfani (msiùiie d'enfant, Ljtt.). 

Berrlques. Mettez vos berriques, mêliez vos berrique. Dites: 
vos besicles. 

Le liégeois berrique est une prononciation locale pour bericle, 
qui est la forme primitive. Littré cite plusieurs exemples du 



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— IM - 

XIV* et du XV« siècle, ob le mot est écrit bericle, et il ajoote : 
€( Besicle est dit pour beriele, par un vice de prononciation des 
Parisiens, qui substituaient volontiers des x aux r , substitution 
dont chaise pour chaire [cheire, anglais chair] est un autre 
exemple. » 

Besoin. V Ifaves-vous rien besoin ? n'avez-v" rin mesâxhe f 
û. hebt gij niett noodig î Dites ; n'avez-vous besoin de rien ? 

t" Faut-il vous aider ? Il n*y a pas besoin. FAt-i v"s aidî î gna 
nin mesâxhe. Dites : il n'en est pas besoin. — Ex. Léandre. 
Souffrez ici sans peine Qu*à votre appartement, madame, je 
vous mène. — Le chevalier. Vous ôtes trop honnôte, il n*en est 
pas besoin. Regnard, le Distrait, II, 10. 

S"" Il n*y a pas besoin que vous Tassiez cela, il n*y a pas besoin 
de faire cela, gna nin mesdxhe qui vos fahiz coula, gna nin me- 
sâzhe de fér coula. Dites : il n*est pas besoin que vous Tassiez 
cela, il n'est pas besoin de faire cela. Ex. Il n*est pas besoin 
de... Il n*est pas besoin que... Acad. On dira de même : est-il 
besoin de ... ? qu'est-il besoin de... ? et dans le style badin : 
pas n*est besoin de... 

Blscuite. Une biscuite, ine buscûte. Dites : un biscuit. 

Biser. Il bise, i bixhe. Dites : il fait de la bise, nous avons 
de la bise. Biser n'est pas Trançais en ce sens. Ex. Nous avons 
une bise qui tue nos mains. Sév. dans Litt. Il bit une bise qui 
coupe la figure, Acad. 

Bisquer. Quand je n'ai pas d'argent, je bisque, qwandfn'a 
nin des aidant, ji bisquéie. Dites : j'enrage, j'éprouve du dépit. 
Faire bisquer quelqu'un, fét bisquer 'n'saki. Dites : faire endéver 
quelqu'un. 

Bitumer. Il bitume ici, t boûtenne, ou boût'nête daL BoUte- 
ner ou poûtefier signifie proprement exhaler une odeur de 
bitume ou de souffire, comme le fait le cbarbon de terre lors- 
qu'on le brftle, Granim;. Dites : on sent le bitume, le bitume 



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refoule ici, il y a ici une odeur de bitume. — Riboûtener est le 
composé debaûtener. Beaucoup de wallons disent abusivement 
i taboulé au lieu de i t'boûtenéïe, en français, on sent de nouveau 
le bitume. V. Rabattre. 

Blague, Blagraer, Blagueur. C'est un blagueur, c'est-m 
blagueû, liég., ch*€st in blagueur, tournais. Dites: c'est un hâ- 
bleur, c'est un gascon. — /{ blague, i blague, liég. mont. Dites : 
il hâble, il gasconne, il se vante; quelquefois simplement : il 
bavarde : ârez-v* bin vite fini d'blaguer ? aurez-vous bientôt 
fini de bavarder? — Avoir une bonne blague, avu n'bonne 
blague, liég... avoi ribonne blague, mont. Dites: avoir la langue 
déliée, bien pendue. — C'est une blague, c'esi-ine blague, liég. 
(une h&blerie, une gasconnade, ou un mensonge) pourrait se 
dire dans une conversation très-familière, et par forme de plai- 
santerie (Bescherelle). 

A part blague, toutes ces expressions, aussi bien que craque- 
rie. Claquerai craqueur (wall. craque, crakèche, craquer, crakeû), 
appartiennent au langage populaire, et sont également usitées 
en France. Forir donne le mot craque (conter de craque), comme 
l'équivalent du wallon craque, Bescherelle et Littré disent que 
ce terme est populaire. 

Blanc, l*" Il était blanc-mort, il esteût blank-tnoirt. Dites : il 
était pâle, très-pâle, blême, il était pâle comme un mort. 

2^ Il est habillé blanc, t7 est moum blank, ou il est blank 
mouàoi, ail. er ist weiss gekleidet. — Dites : il est habillé de 
blanc, il est vêtu de blanc, Acad. 

S*" Laisser quelqu'un en blanc, leyer n'saki ein blanc, pat. 
de Mons. Dites: laisser quelqu'un en plant, Litt. (à Plant, â*"). 

Blouque. Une blouque, ine blouque, liég., enne blouque, 
mont., euneblouque, rouchi, lillois. Dites: une boucle. 

Littré signale le mot blouque comme une ancienne métathèse 
(V. Litt. à Métathèse). 



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_ 122 _ 

Bofte. !• On lui a mis deux bottes au genou, an li a mettou 
deux buttes à g'nio. Dites : deux ventouses. 

Le français butte sert à traduire le wallon champe : tirer des 
bottes, tirer des champe. 

Bon. 1« Comme on avait ban au coin du feu, comme on aveût 
bon è Vcoulêxe, Hocx, Bull. a. 60, 2« l. p. 86. 

Gela se dit très-souvent, parce que cet idiotisme énergique 
n*a pas de correspondant adéquat en français. Essayez de dire : 
je suis à mon aise, j'éprouve du plaisir, du bien-être, je me 
divertis, je suis bien, etc. Gomme tout cela est faible aux yeux 
â*un liégeois de la vieille roche ! 

Les cane ont bon è Vaiwe^ les canards s'aiment dans Teau, dit 
Forir. Gela est-il français en ce sens? 

Imitons les exemples de TAcadémie: le gibier se platt dans 
les taillis ; les truites se plaisent dans Teau vive. Les canards se 
plaisent dans Peau. Get équivalent est bien pâle! N'est-ce pas le 
cas de dire avec les Italiens : traduttore, traditore î 

â*" Qu'on aurait bon de vivre ici! qu'on dreût bon de viquer 
cial ! Dites avec J. Sandeau : qu'il ferait bon de vivre ici ! La 
Roche aux mouettes (*). — Il a bon de me tourmenter, il a bon 
di m' fer tourmetter. Dites : il a du plaisir à me tourmenter. 
V. Tourmenter. 

3"* Cette fleur sent bonne, cisse fleur- là ode bonne. Dites : sent 
bon. 

4* Vous aurez encore bon quelques florins, ou vous aurez 
encore quelques florins de bon, vos ârez co sakwant cdrluss di 
bon. Dites : il vous reviendra encore quelques florins. — J'ai 
encore tant de bon, fa co otetant d^bon, fl. ik heb nog zoo veel te 
goed. Dites: il me revient encore tant, ou vous me redevez 
encore tant. 

g« Il fait bon, dans le sens de il fait beau, il fait beau temps ; 

(«) On pourrait supprimer de. 



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en wali., t fait bon. G*est un excellent gallicisme, qui figure 
dans le dictionnaire de l'Académie. Il Tait bon marcher, courir, 
se promener, Besch., t fait bon roter, cori, s'porminer, Forir 
traduit : le temps est bon pour marcher ; c'est trop de scru- 
pule. — Absolument: N'est-ce pas, Terville, qu'il Tait bon ici? 
M»« Guîzot. 

La tournure analogue, il fait beau se promener, n'est pas 
admissible au sens propre. Dites: il fait beau pour se prome- 
ner, ou il fait bon se promener. Mais, employée ironiquement, 
elle est marquée au meilleur coin. Il vous fait beau voir être 
vêtu de la sorte^ à votre âge, Acad., c'est-à-dii'e, c'est une chose 
ridicule. 

6* C'est bon pour vous. V. Pour, 41". 

T^" On s'y marie plus à botine heure, ou de plus bonne heure, 
ou plus de bonne heure, on s'y marêle pus à bonne heure, ou 
pus dCbonne heure. Dites : on s'y marie de meilleure heure. — 
C'est également une faute que de dire : il est venu trop de 
bonne heure, il est v'hou trop d'bonne heure. Il faut dire : de trf>p 
bonne heure. 

Cette faute se commet aussi en France, car Littré la signale 
(au mot Heure, n"" 12). La locution à bonne heure^ qui s'est 
maintenue dans le patois de Mons, se trouve dans Hamilton, 
Gramm. 3 : Couchez-vous à bonne heure. Toutefois, elle est 
actuellement passée de mode. 

Botteresse. C'est un de ces termes locaux que les plus 
lettrés n'hésitent pas à employer. Il y aurait de la pédanterie à 
le remplacer par le mot français hoiteuse. 

Bosseler. Mon écuelle est toute bosselée, mi hielle qu'est 
tote bosseleie. Hennequin prétend qu'il faut dire bossuée, parce 
que bosseler signifie travailler en bosse. Cela est contraire à 
l'usage général, et l'Académie, dit Littré, fidèle gardienne de 
l'usage, reconnaît ii bosseler le sens dé bossuer. Est-ce aux 



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124 - 

grammairiens à réformer l'usage, quand il ne présente rien de 
barbare ni d'illogique? Ex. Cette écuelle s'est bosselée en tom- 
bant, AcvD. Cette écuelle esi toute bosselée, id. Toutefois, 
bossuer est également correct. Le wallon dit aussi boci ou 
ktboui. 

Bouohon. Un bouchon de cheminée, on bouchon di ch'miniie. 
Dites: un devani de cheminée. 

Bouger, bouge-toi, boge-tu, liég. Dites: ôte-toi de là. — Ne 
vous bougez pas, ni v'bogiz nm, liég. Dites : ne bougez pas. — Je 
ne me bouge pas d'ici, je nCbouge nié <ttci, mont. Dites : Je ne 
bouge pas d'ici. — Il faut remarquer qu'on ne dit pas bougt*, 
bougeons, bougez.— Ne se bougeant pas, ni ibogeani nin. Dîtes, 
avec Florian, ne bougeant non plus qu'une souche. — En bou- 
geant le flacon, tôt bogeant Fflacon, Li MéSe mur (Ta Colas, I, 2. 
Dites: en ôtant ie flacon. 

Se bouger est un archaïsme, comme le fait observer Littré, 
à propos de cet exemple de Molière : Et' personne, Monsieur, 
qui se veuille bouger Pour retenir des gens qui se vont égorger. 
Dépit. Am. 

Bouilli, l^' Le bouli, li boli. Dites et prononcez ; le bouilli' 
U mouillés. 

V Servir le bouilli, mette li boli so Vtàve. 

Nous lisons dans Benoit. « A table, la pièce de bœuf bouillie 
se nomme toujours bceuf. » On connaît l'histoire du dtner de 
l'abbé Cosson. Cependant l'Académie dit : couper, seinrir le 
bouilli, et H*"* de Sévigné : Nous avons mangé du potage et du 
bouilli tout chaud. Bœuf, selon l'Académie, se dit absolument 
pour une pièce de bœuf bouillie. Ex. le bœuf se mange après 
le potage. Mais, au mot Bouilli, nous lisons que ce mot se dit 
ordinairement du bœuf. 

Bouquetto« Je t'invite au réveillon, mon cher (ou simple- 



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- 125 - 

méat cher, ou cher bon, ou très-eber, dans le style très-fami- 
lier (LiTT.) ; nous mangerons d'excellentes bmqiêeiteê. Ji fhatUûe 
à matame^ fré; hm âranis des bannes banquette. Dîtes : d'excel- 
lenies erépes. 

Banquette, au sens de crêpe est purement wallon. Mais il 
figure dans plusieurs dictionnaires français, ainsi que beaueuit, 
comme synonyme de sarrasin ou blé noir, Ge mot est flamand 
d*origine {baekweit, angl. buck-wheat, fromeut-falne, à cause de 
la forme de la graine), et il est également usité dans le Nord 
de la France. Partant Texpression farine de bouquette, farène, 
ou fleur di banquette, ne semble pas plus barbare que louche; 
mais il est évident que farine de sarrasin est préférable. 

Bourrer. Bourrer des chaises, bourrer dis chiïre. On dit 
embaurrer, et plus communément rembourrer des chaises. 

Bouteille. Le médecin m'a prescrit une bouteille, li docteur 
m'at ordonné 'n'botèie, fl. eene flesch. Dites : une potion, une 
médecine, une drogue. 

Boutique. i<> Mon cousin fait boutique, mi cuzin fait ba- 
nque, liég. Dites : tient boutique. Dans le HaiQaut,on dit vendre 
boutique, vinte boutique. 

2« A la boutique ! à boutique! liég. au boutique, mont. Forir 
traduit : holà ! quelqu'un. Cela parait bien cavalier, et, faute de 
mieux, on préférera la tournure wallonne. 

S'' Un beau boutique, on bai batique, liég. ein biau boutique, 
mont, un biau boutique, lillois. Dites : une belle boutique. 

4" J'ai une domestique qui fait de temps en temps à la bou- 
tique, fa 'n^mesketme qui fait d'timps in timps à rbotique. Dites : 
qui sert à la boutique, qui s'occupe de la boutique. 

Il est à remarquer que le genre de bou/t^u^ *est flottant à 
Liège. 

Brader. Vous bradez votre pain, vos bradez (Forir) vossepan. 
Dites : vous perdez, vous prodiguez votre pain. — Vous avez 



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- 126 - 

bradé cet ouvrage, vos avez brôdi (Grandg.) c'tovrèçe-là. Dites : 
vous avez gâché, bousillé cet ouvrage. — Brader ^ aussi le sens 
de vendre à vil prix. Brader le métier, brader rmestt, (Grandg.) 
brader rmétier^ roucbi, lillois. Dites : g&ter le métier (en ven- 
dant la marchandise à vil prix). 

Bras, l*" On dit les bras d'une civière, d'un brancard, lès 
brèss d^ine dvîre, d^on bird ; mais les bras d'une charrette, les 
bress d'ine chèrette, ne se dit pas ; l'expression française est : 
les limons d'une charrette. 

2« Voilà un bras d'eflfacé, vola on bress (ou ine rate) jus. Dites: 
voilà une ligne effacée (lignes de craie qui figurent les pai^ties 
sur une ardoise). 

Brassine. Une brassine, ine bressène, liég. eune brassine, 
rouchi. Dites : une brasserie. 

Brave, l*» Il est brav^, liég., rouchi et lillois. Dites: il est 
probe, c'est un honnête homme. 

Le liégeois brave est synonyme de probe; le français brave n'a 
guère ce sens que dans les expressions un brave homme, une 
brave femme, de braves gens, et autres semblables. Il est bon de 
remarquer que, dans ces phrases, le français implique en même 
temps l'idée de (on, d'obligeant, qui ne me semble pas être con- 
tenue nécessairement dans le wallon brave. 

2® Allez faire ma commission comme un brave, allez-s' fér 
m* commission comme on brave, liég... als een braaf manneke, fl. 
Faites-moi cela comme un brave, faites-mé cha comme ein brave, 
mont. Le montois dit aussi comme eune belle fiye, comme ein 
biau fieu. — Ces tournures s'expliquent de la façon suivante : 
Vous serez un aimable enfant, si vous allez faire, .... si vous 
faites cela. — Ou usera d'un autre tour : Allez faire ma com- 
mission, faites cela, vous' serez bien aimable, s'il vous plaît, je 
vous en prie. 

En français, on se sert, dans le style très-familier et dans un 



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- 187 -^ 

sens analogue, de Texpression : vous êtes un brave hamme^ mais 
seulement en parlant de faits accomplis. Ex. Vous êtes un brave 
bomme d'être venu me voir, Litt. 

3* Il éi^ii brave, il était brave^ mont., il état brave, roucbi et 
lillois. Ce wallonisme équivaut à : il était propre (V. Propre), 
bien habillé, endimanché, vôtu, paré avec soin. Benott prétend 
que brave, en ce sens, est du français de village. L'Académie 
l'admet cependant dans le style familier : Vous voilà bien brave 
aujourd'hui, Acad.; il s'est fait brave pour aller à la noce. 

Bravoure. Il n'a pas son pareil pour la bravoure, gna nin 
onk comme lu po (bravisti, liég. On ne peut employer le mot 
bravoure, en français, dans le sens de probité. Le flamand 
braafheid s'emploie de la même manière. 

Brette. Il a eu une brette avec lui, il a st-aou *ribrette avou 
lu, Viég., il a eu 'n'bretteavé H, mont Dites: il a eu une que- 
relle, un différend, un démêlé, une dispute, une altercation 
avec lui. 

Cette acception est inconnue en France, ou brette désigne 
une longue épée. « Les premières armes de cette espèce furent 
fabriquées en Bretagne. » Besch. Hais on voit le rapport de 
signification. 

Brichauder, brisoader. Quand il a eu biiscadé ou bri- 
chaude entièrement son argent, quand il a eu tout biiscadé 
s*n argint, p. de Lille, BulL, a. 70, S'' I., p. IIL, quand il a eHu 
briscadé tout abiè, Péruwelz, quand il a iu btichaudé tout s'bié, 
Quevaucamps, -après avoir brigcandé, ou brichaudé tout s'bié, 
Mons, lorsqu'il a ieu bruchaudé tout s'ben, Nivelles. — Dites : 
quand il eut dissipé, gaspillé tout son argent, tout son bien. 

Il est à remarqner que certains patois, privés du passé anté- 
rieur, parce qu'ils n'ont pas le passé défini, y substituent le 
passé surcomposé: il a eu bt*ichaudé; il existe aussi en français, 
mais il est peu usité. 



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— 1«8 — 

Brosse. Cela lui fait brosse, ça li fait btvusse, pat. de Mond. 
On dit aussi Brosse, tout court, expression par laquelle on 
exprime que l'espérance de quelqu'un est déçue ; dans le fran- 
çais populaire bernique ! On dira : il a un pied de nez, ce n'est 
pas pour son nez, etc. Bbscher. 

Brosser, brosseter. l"* Brosser la poussière, hofler FpousHre^ 
liég. Dites : ôler,'enlever la poussière, ou, simplement, épousse- 
ter. 

9" Brosseter un habit, broucheter n*habit, pat. de Hons, hofler 
rihabii, liég. Dites : brosser un habit. 

Brouette. Faire brouette, fér berwette. — Au jeu de quilles, 
on dit faire chou blanc, pour, ne rien abattre du tout. 

Brouillasser. Il a brouillassé toute la matinée, il a broul- 
lassé tout tmateinnée, pat. de Lille. Ce mol se dit aussi à Hons. 
Dites : il a bruiné. 

Brûler. 1« Il brûle, i broûle. Se dit à certains jeux d'enfants, 
lorsque celui qui cherche l'objet qu'on a caché, vient à s'en 
approcher. On doit, en français, employer la forme personnelle. 
Ex. Vous n'y êtes pas encore, mais vous bi*ûlez, Agad. Au jeu de 
Colin-Maillard (jower à kâkâ, liég., jouer à cafouma, tournais.), 
on se sert de ce terme t broûle, pour avertir de quelque danger 
la personne qui a les yeux bandés. On dit aussi gare Vattèche, 
Il brûle, et gare [épingle, en ce sens, sont des walionismes. 
Dites : Casse-cou ! On disait autrefois : Gare le pot au noir ! 

2» Bigler du café, brouter de café ; brûler le café, broûler 
tcafè, fl. kof^j branden. 

Plusieurs ont condamné à tort cet empld! du verbe brûler. 

c( En français on ne dit pas, comme en flamand, brûler du 
café; hormis qu'on ne veuille dire : le consumer par le feu » 
PoYART. « Quoiqu'ils admettent le mot dans leur dictionnaire, 
MM. les académiciens renverraient certainement un domestique 



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— 129 - 

qui brûlerait habituellement leur café. » Henmbquin. Le mot 
est bon» mais il n*y a que les puristes qui préfèrent torréfier 
du café à brûler du café. Tout le monde dit brûler partout ob 
Ton parle la langue de Racine, et 1* Académie, qui s*est donné la 
mission de constater les changements, les accroissements que 
le besoin et l'usage ont consacrés dans la langue, a eu soin de 
l'enregistrer dans sa. dernière édition. Cependant elle a aussi 
rôtir du café, et torréfier des grains de café. Dites de même, par 
analogie, brûler de la chicorée, du grain, des glands, du son, 
brouter dèV sékoréte, de grin, dès gland, de taton. Mais évidem- 
ment la Philaminte de Molière voterait pour rissoler, torréfier 
de la chicorée, etc. 

Bruzellalre. Un Bruxellaire, on BiMcelaire, liég, ein Bt^u- 
cellaire^ pat. du Hainaut. 

Ce gentilé wallon, venu du flamand, doit être remplacé par 
Bruxellois. Les gentilés français ont des terminaisons très- 
variées ; il faudra consulter l'usage. On ne dit pas un Campi- 
naire, on Camptnaire, un Sainttronnaire, on Saiutlronnaire ; on 
dit un habitant de la Gampine, un Trudinaire. 

Bu. Il é(ait bu , il estent bu, liég., il estent èbu, verv., il étoit 
bu, mont., hij was dronken, fl. Cest un barbarisme. Dites: il 
était ivre, il était gris, il était en pointe de vin, il avait une 
petite pointe de vin, Besgh. 

Bu, pour ivre, est un latinisme : spectator bene potus, Hor., 
domum benepotus redieram, Cic. —Le patois deMons dit es boire, 
se boire, pour s'enivrer fréquemment ; c*est un emploi ana- 
logue. 

Buée, BuER. Faire la buée, fer Fbouwéie, liég., faire Tbuée, 
mont., lill. Le mot figure dans le dictionnaire de TAcadémie, 
qui déclare que btiée est vieux. On dit mieux faire la lessive. — 
Zola, dans VAssommoir, donne à ce mot le sens de vapeur 
humide. C'est une extension du sens primitif, dont Littré cite 



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— 130 — 

un exemple, qui remonte au xyi"" siècle. — Buei\ pat. de Lille 
et de Mons» bouwer, liég. Dites : lessiver. 

Bure. De par l'Académie, il faut dire une bure, et non pas 
un bure, liég. on beûr. Pourtant ce mot est essentiellement belge 
(d'origine germanique, bohren, percer). Mais en passant outre 
Quiévrain , il a changé de genre; on l'aura pris pour le cousin 
germain de bure, étoffe, avec lequel il n'a de commun que la 
forme extérieure. 

Buse. Buse de poêle, buiche dpoèle, lillois, buie, mont., bUae 
di sloûve, liég. Il figure avec cette acception dans le diction* 
naire de Besghbrelle, mais l'Académie ne l'a pas admis. Il faut 
dire : tuyau de poêle. 

Buse, en français, désigne un oiseau de proie qui passe pour 
être fort stupide : de là l'expression : c'est une buse, pour une 
personne ignorante. Serait-ce de là que viendrait le terme de 
buse, usité dans l'argot des écoliers pour désigner l'échec qu'un 
étudiant subit à un examen ? Attraper une buse, attraper n'bûse. 
Dites : échouer, ne pas réussir, subir un échec. 



c 



Calotte, l*' On a dit autrefois calotte d'un cardinal ; on dit 
niaintenant barrette (V. ce mot) ou chapeau, — On dit calotte 
d'un prêtre. Mais on ne dit pas : cet enfant a perdu sa calotte, 
cisV èfant-là a pierdou s'canotte (sic, Forir). Dites : son bonnet, 
sa casquette, son couvre-chef. 

^ On dit figurément et populairement donner, recevoir une 
calotte, LiTT., diner, attraper ricanotte. For. ou ine calotte, liég. 
eune calotte^ rouchi , enne calotte, mont. Les expressions con- 
venables sont donner, recevoir une taloche, une claque, un 
soufflet. Tape et giffte sont également populaires. — Remplacez 



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~ 131 - 

de même calotter. Rem., Sigart, et canoUer^ FoRiR,par souffleter, 
goormer, donner des taloches, détacher, appliquer un soufflet. 

Calville. On dit à Liège : blanke calvenne, et Forir traduit 
calviife blanche. Quelques lexicographes font en effet ce mot du 
féminin. Mais TAcadémie le fait du masculin. Ex. Calville blanc. 
Voilà de beau calville ( sic) Acad. - Ne dites pas, comme à 
Verviers et h Valenciennes : un calvi rouge, on roge calvi, in 
calvi rouche. Dites : un calville rouge. -*- Ne dites pas non plus 
calmie comme à Genève, en imitant trop servilement la forme 
liégeoise. 

Camarade. Je ne suis plus camarade avec Jacques le grêlé 
ou le crotu, (J.-J. Rouss.) Ji n'sos pu camèrdde avou Jacques li 
frésé. Dites: Je ne suis plus ami de Jacques... — iVo^es/ans 
eamèi'âde èssonle. Traduisez : nous sommes amis, nous sommes 
liés d'amitié; et non pas, nous sommes camarades ensemble. 

Le mot camarade se dit populairement, même en France, 
pour ami. Ex. Ils se sont remis camarades, Litt. — Pour avec, 
V. Ami. 

Camper. La carafe va camper y elle garafe elle va camper. 
Cela se dit dans le Hainaut pour... va éclater, se fendre. V. 
Péter. 

Canicule. On est encore aux canicules, on esl co à lés cani- 
cules, mont. Dites : à la canicule ; nous sommes dans les cani- 
cules, nos e^tans d'vint lès canicule, liég. Dites : nous sommes à 
la canicule, Acad., ou dans la canicule. Ex. Je tremble il présent 
dedans la canicule, Mol. V. Dedans. 

Capot. !<" Il esl capot , liég. il est capoutt, mont. Dites : il 
est moit, ou c'en est fait. Acad. 

Le wallon n'emploie guère ce mot que dans le sens de tué 
ou mort. Je ne parle pas ici du sens indiqué au n*" 2, qui paraît 
distinct de celui-ci. Mais les Allemands et les Flamands qui , 



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d'après Sigart, nous l'ont emprunté, en font un abus extraor- 
dinaire (cassé, brisé, morte, en parlant d*une plante, ruiné, 
dissipé, etc.)- En terme de marine, le français dit faire capot, 
pour chavirer, sombrer ; il ne se dit que d*un petit bâtiment : 
la chaloupe fit capot à une lieue du rivage. Serait-ce de là que 
AienJrail le sens du mot wallon ? 

i^> Mais on dira très-bien : cette nouvelle me rend tout capol, 
cisse novelle-là irCrind lot capot, —Ex. Etre, demeurer capot, 
demeurer confus, interdit, Acad. Lut. -Capot est invariable; 
ne dites pas : elle est demeurée capote, elle a stu tote capote. 
Dites : elle est demeurée capot. Acad. 

Caramel. De bonnes caramels, dès bonnes caramelle. Dites : 
de bons caramels. 

Ce nom a conservé en français le genre de l'espagnol cara- 
melo, d'où il vient, d'après Littré. A en croire Benoit, ce nom 
n'aurait pas de pluriel. Ceci est contredit par l'usage général en 
Belgique et en France, et Littré dit positivement : Des caramels, 
petits bonbons faits parles confiseurs pour les enfants. 

Carpette. Ou dit à Tournai une carpette, pour une des- 
cente de lit. Bescherelle le donne dans le sens de tapis à 
emballer, ou tapis d'emballage ; il a conservé ce sens dans le 
patois de Liège. D'après Benoit, carpette, dans le sens de tapis 
de pied, est un mot anglais (carpet) dont notre langue n'a que 
faire. Toutefois il est consacré par l'usage, même en Francis, 
et Littré le définit': Tapis de l'^SO à S mètres de long sur 
|m4o à 1™30 de large. 

Carreau. Un carreau de papier, on cwârai d^papî. Dites : 
un carré de papier. 

Carrosse. Le marche-pied d'une carrosse, li passet dine 
caiTOche, Dites: d'un carrosse.— Prinde li carroche di saint 
FrançoUf; traduisez : prendre la mule des cordeliers (aller 
pédestremeni). 



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— 133 — 

Ce mot vient, disent les étymologistes, de Titalien carrozza 
et appartient à la même famille de mots que char^ charrette, etc. 
Le wallon a conservé le genre primitif; de plus, il a pris la 
forme du masculin carracio, qui existe aussi. Carroche s'est dit 
également en français. De plus, Litlré cite cet exemple de 
Régnier : Toujours d*un valet ta carrosse est suivies G*est, dit- 
on, Louis XIV qui a masculinisé le mot carrosse. Les courtisans 
se sont empressés d*adopter le changement ; car on ne pouvait 
admettre qu'il eût fait une faute de français. » Sigart. les 
flagorneurs ! les plakeû ! comme nous dirions daus notre éner- 
gique patois ; dignes émules des courtisans d'Alexandre, qui 
affectaient de relever Tune des épaules, parce que le monarque 
macédonien avait cette habitude ! 

Casser. !<> Qui casse paye, qui casse pâte, liég.; vite cassé, 
vite payé, tournais.; on ajoute, par plaisanterie, c'est le profit 
du vitrier. Le français dit : Qui casse les verres, les paye. 

Cause. X"" C'est cause de vous que je suis tombé, c'est case 
di vos qui fa tourné. Dites : c'est à cause de vous que je suis 
tombé, ou vous êtes cause que je suis tombé.— C'est cause de 
vous, c'est case di vos. Dites : vous en êtes la cause, ou c'est à 
cause de vous, 

8® Je suis tombé, c'est vous la cause, fa tourné, c'est vos Vcàse. 
Dites : c'est vous qui en êtes la cause, c'eàt à cause de vous, ou 
c'est votre faute. 

S*" Vous aurez de la peine à arracher ce clou, à cause qu'W est 
rivé, vos ânz dèVpône di râi c' cld-là, à cdse qu'il est hazi. 

A en croire plusieurs grammairiens, à cause que a vieilli et 
doit être remplacé par parce que. Si je ne me trompe, c'est 
Chapsal qui a formulé cette sentence de proscription, et, vu la 
vogue dont sa grammaire a joui pendant un demi-siècle et en 
France et dans noire pays, où on l'apprenait autrefois par cœur, 
cette règle erronée s'est établie avec plusieurs autres paradoxes 
grammaticaux et a fini par y acquérir force de loi. Litlré trouve 



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- 134 - 

que c'est à tort qu'on veut bannir la locution à cause que ; elle 
doit être conservée, étant appuyée par de bons auteurs, et 
étant, dans certains cas, d'un usage préférable k parce que. Ex. 
Ils ne découvrent pas la lumière, à cause qu'ils détournent les 
yeux, Boss. Une fille sera heureuse d'ignorer les fables païennes 
toute sa vie, à cause qu'elles sont impures et pleines d'ab- 
surdités impies, Fén. Notons que l'Académie Tenreglstre deux 
fois, au mot cause, et au mot par. Plusieurs écrivains de notre 
siècle l'ont reprise : Courier et A. Musset s'en servent souvent. 
Bescherelle fait cette remarque qu'Alphonse Rarr en abuse 
singulièrement. 

Causer. 1« Cet avocat cause bien, i case bin € t avocat-là, 
i cause bin c' t avocat-là, pat. hesbignon et namurois. Dites : 
parle bien. Causer a en français des acceptions particulières 
que l'usage fera connaître. 

2"* Je lui ai causé de cela ce matin, ji li ajdsé d'çoula ôuie d 
matin, liég. ji li a causé d*ça..., namur. Dites : J'en ai causé avec 
lui ce matin. 

« Causer h quelqu'un, dit Littré, est une locution qui est très 
en usage. On necausepas à quelqu'un, on cause avec quelqu'un. » 
Il cite un exemple de J. J. Rousseau : La première fois que je la 
vis, elle était à la veille de son mariage; elle me causa long- 
temps avec cette familiarité charmante qui lui est si naturelle ; 
mais « Rousseau ji'est pas toujours très-pur.» 

Causeï* à quelqu'un se dit, mais s^lors causer signifie être cause: 
Vous m'avez causé du chagrin. 

Cela, ça. l"" Oui ça ! non ça ! awè coula ! nenni coula ! Dites: 
oh ! pour cela, oui ; oh ! pour cela, non, ou bien : oui certes, 
non certes. Le flamand a aussi ;a^{ (/a het). 

i"" Baptiste viendra-t-il à la fête?— Ça! — Bâtisse viendra-t-il 
à l'ducasse? — Cha ! patois de la Flandre française. 

Il faut dire : certainement. Ce seul mot ça équivaut à : cela 



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' — 13B — 

est certain, il n'y manquera pas, pourquoi y manquerait-il ? Il 
se dit à Lille, à Douai et dans le Tournaisis. 

3<> Si nous n'avons pas beaucoup mangé, nous avons cela (ou 
ça) mieux bu, si no$ n'avans nin baicô magni, nos avans coula mi 
bu. Remplacez cela par d'autant : nous avons d'autant mieux 
bu. ~ C'est un latinisme : eo melius bibimus. 

Celui. La celle que vous voyez, li cisse qui vos vtïez. Dites : 
celle que vous voyez. — Les ceux qui n'ont rien à faire, les cia 
qui n'onîrin à fér, Aurmon. di Nam. a. 70, p. 17. Dites: Ceux 
qui, elc. 

2^ Il y en a de ceux qui disent, gna dès cis qui d^het^ liég. Il 
y en a qui disent, ou, en employant un archaïsme que plusieurs 
cherchent à rajeunir : d'aucuns disent. — J'ai vu de ceux qui 
n'en avaient pas (des lits), f ai vu dès ceux qui n' d'avotente pont, 
Arménaq. de Tourn. a. SI, p. 34. Dites : J'en ai vu qui n'avaient 
point de lit. 

C^est. Cesî des fameuses bêtises, c'est dès fameuses bies- 
trête, liég. Dites : ce sont de fières bélises (V. Des et Fameux). 
— Cest des copeaux, ch'est dès crolles, tournais. Dites : ce sont 
des copeaux. — Cest des écrevisses, c'est des gravasse, namur. 
Dites : ce sont des écrevisses. — C'est tous contes, c>st tos 
conte, liég. Dites : ce sonide purs contes, des contes en l'air. 

Cette faute est assez commune, même en France, dans le 
peuple, s'entend. Ainsi Georges Sand la met dans la bouche du 
groom Créjusse. Voilà ce qu'on dit; c'est des fameuses bêtises, 
Mont Revêche, IX. Balzac fait un abus extraordinaire de cette 
façon de parler. 

En français, le verbe être, précédé de ce, se met au pluriel 
quand il est suivi d'une troisième personne du pluriel. C'est en 
vertu d'une règle à laquelle les grammairiens ont donné le nom 
d'attraction. Nous disons en français, c'est un homme, en em- 
ployant le pronom neutre ce ; le latin dit : hic est vir ; c'est une 
femme, hœc est mulier ; ce sont des hommes, hi sunt viri, etc. 



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— 186 ~ 

L^accord a lieu, non pas avec le mot ce, mais avec l'attribut 
homme, femme, hommes ; au surplus cette règle d'accord est 
fondée en raison ; le sujet est bien du singulier, dans la phrase, 
ce sont des hommes, mais en réalité ce^ qui équivaut à ceto,est 
un collectif qui représente ceux-là ; quoi d'étonnant si le verbe 
s'accorde avec l'attribut pluriel, qui précise le sens collectif du 
sujet ce ? Il y a là une syllepse, qui sert à expliquer bien d'autres 
constructions réputées vicieuses par les grammairiens. V. à ce 
sujet au mot Qui, l'exemple de Racine : Je ne vois à son sort 
que moi qui «'intéresse. 

Chacun. Un chacun aura sa part, ein chacun ara s'parî, pat. 
de Mons; fl. eenieder zal zijn deel hebben; ail. ein jeder wird 
sein Theil kriegen ; lat. unusquisque suam habebit partem. Dites 
simplement chacun. 

C'est une vieille tournure qui a disparu, non-seulement du 
français, mais de notre patois. Ex. Un chacun doit mourir, 
Garnier. Un chacun de ces dieux faisait un Christ à sa mode, 
Boss. dans Litt. Tôt on chakun nos toûne cazake, Hanson. Li 
Hinriade, p. 7, manuscrit du XVIII^ siècle. — « Certains au- 
teurs, comme P.-L. Courier, ne se font pas scrupule de l'em- 
ployer dans le style familier ; sans vouloir condamner Courier, 
nous ajouterons qu'il poussait assez loin l'amour des ar- 
chaïsmes. » M. Carpentier. 

hampdtre. Prends-garde à toi, voilà le champêtre, waiie 
à tiy v'ià Vchampète, pat. du Hainaut. Dites : voilà le garde- 
champêtre. A Verviers, on dit aussi le champêtre pour le garde- 
champétre. 

Changer. Pendant mon sommeil, ne voilà pas (Y. Voilà) le 
chat qui change en moine, et le bon Dieu qui devient meunier ! 
èdoirmou, ni veûs-f nin Vchèt qui cange à mône, et l'bon Diè 
div'nou mounî! Ann. 63, l*^» 1., p. 103. Dites: qui se change. — 
Changer en statue, cangi à postcure, Martial, li savHi dès Rêc, 
Dites : se changer en statue. 



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— 137 — 

Le verbe changer, dans le sens matériel de transformer, mé- 
tamorphoser, ne peut s'employer iniransivement. 

Chaque, l"* Mes ouvriers sont payés à trois Trancs chaque^ 
mi$ ovri sont pais à treûs franc chaque^ liég. Dites : à trois 
firancs chacun. — Ils auront chaque un liard, t7 aront chaque in 
yard, ou il aront chaquénun in yard, mont. Dites: ils auront 
chacun un liard. 

2<» Nous jouerons chaque à tour, nos jowrans chaque à tour, 
iiég. Dites : nous jouerons tour à tour, alternativement, ou, si 
le contexte le permet, nous alternerons. Ils chantent chaque à 
tour, i cantenCté chaque à tour, mont. Dites : Us chantent, cha- 
cun, à leur tour. 

Gbarrée. Une charrie de houille de bois, ine clierréîe di 
tune, pat. de Liège, enne kèrêe ed bos,Ch9iv\eTO\, eune karée,ro\X'' 
chi. Dites : une charretée. Charrée a un autre sens en français. 

Charron* Il jurait comme un charron embourbé, i juréve 
comme on chèrron qu'est stanchî. Dites : il jurait comme un char- 
retier. 

Charron parait être la forme syncopée du vieux français, 
charreton, cAar/on; mon tois, kerlon, fcaWon; picard, rouchi et 
lillois carton. Ex. Le charton n'avait pas dessein de les mener 
voir Tabarni, La Font, dans Lilt. Celte syncope n*a pu s'impa- 
troniser dans le français, où le mot charron désigne celui qui 
&it des chariots, des charrettes, des trains de voitures, et par- 
ticulièrement des roues; c'est le wallon chdrlt;paX. de Lille, 
carlièr; pat. du Hainaut, carlier, carli, carrier, de là les noms 
de famille Charlier, Carlier, si communs dans la Wallonie. 

Chasse-café. Chèsse-cafè, Forir. On trouve dans Littré : 
pousse-café, petit verre d'eau-de-vie pris après le café. 

Chasse>chien. La . hallebarde d'un chasse-chien, li halàâre 
d^on chèsse-chin, liég. d'in cache-kié, mont, d'un cache-quieu, lil- 



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— 138 — 

lois. Les mots français sont suisse^ bedeau. Le flamand dit hon- 
(lenslager^ batteur de chien. — Ce terme populaire s'emploie 
aussi en France, comme chasse-coquin, Bescherelle le donne 
comme synonyme de portier, et Littré. comme équivalent de 
portier et de bedeau. 

Cîhasser. 1<» Le vin blanc chasse^ H blank vin chèsse. Dites : 
est diurétique. — Un remède qui chasse^ ou r'méde qui chèsse. 
Dites : un remède laxatif. 

2® Il chasse par la fente de la porte, i chèsse po Vcrèveûre di 
Touxhe. Dites : il vient de l'air, Acad., il vient un vent coulis 
par la fente de la porte. — Je sens chasser sur mes épaules, ji 
sins chessî so mes spale. Dites : je sens un vent coulis qui me 
donne sur les épaules. 

Plusieurs, voulant éviter ce léodisme, emploient la tournure 
germanique, tl tire, M. es zieht^ fl. het togt ou het trekt, pat. d'Aix 
et trôkt\ c'est tomber d'un mal dans un autre, c'est tourner d'on 
boigne so "n'aveûle. Dites : il y a un courant d'air. Dans les 
Flandres et dans la partie de la Wallonie qui y tient, on se sert 
du substantif tirant dans le même sens ; ceci me remet en mé- 
moire le trait suivant. Un roi qui s'obstinait à conserver son 
premier ministre, malgré la chambre, qui avait refusé plusieurs 
fois de voter le budget de la guerre, se trouvait un jour au 
Kursaal d'Ostende. Un monsieur appelle à haute voix le garçon: 
Garçon, il y a un tirant dans la salle. Il voulait dire : Il y a un 
courant d'air. Mais le roi étranger, peu initié à nos belgicismes, 
prend le mot pour une insulte à son adresse, et il rougit prodi- 
gieusement. Sur une plainte du monarque offensé, une enquête 
eut lieu, et on lui expliqua la tournure insolite ; et comme il est 
homme d'esprit, il rit de bon cœur de son singulier quiproquo. 

Chaud. J'ai chaud mes pieds, mes mains, j'ai froid mes pieds, 
mes mains, fa chaud mes pîd, mes main, fa freûd mes pid, mes 
main. Dites : j'ai chaud aux pieds, aux mains, j'ai froid aux 



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- 139 - 

pieds, aux mains, ou j'ai les pieds chauds, les mains chaudes, 
j*ai les pieds froids, les mains Troides. V. Mal. 

Cbauffette. C'est le terme chaufferette qui correspond au 
liégeois châfette. Ne dites pas ehauffette. Quant à covet, il doit 
être traduit par couvet, et non par covet. Ou se sert aussi, dans 
le Tournaisis, du mot chaufferette pour désigner un ustensile 
contenant des cendres avec des braises ardentes, et dont les 
fumeurs se servent dans les cafés pour allumer leurs pipes ; 
c'est une acception particulière du mot chaufferette^ nécessitée 
par un usage local. 

Cher. 1* C'est une chère marchandise, c*est ine chtre tnar- 
ehandèie. Dites : cette marchandise est chère. — C'est une 
chère marchande. Rem. c'est-ine chtre marchande. Dites : cette 
marchande est chère. Dans ce sens, l'adjectif cher se met 
après le substantif. Il n'y a d'exception que pour chère année, 
ine chtre annexe, ou on chîr timps, et c'est chère épice. 

On ne pourrait, je crois, traduire on chtr timps par un temps 
cher. On dit le temps est cher, mais au figuré, pour : le temps 
est précieux. Ex. Partons, le temps est cher, ou les moments 
sont précieux, âcad. 

2» Avoir cher. Voyez Avoir. 

Chez. 1<> Servir chez les gens, ciervi èmont les gint. Dites : 
servir; être en service. Ex. Les malheurs l'ont obligé de servir, 
il est las de servir, Besch. 

Ce wallonisme ofTre de l'analogie avec l'hébraisme de la 
Vulgate : gentes, les nations, qui servait à désigner les autres 
nations, les païens, les ^^ft/^; dans le style biblique, on dit 
encore les nations, pour les peuples infidèles et idolâtres. 

S"» Chez Legrand vendent leur maison, èmon Lègrand vindet 
leû mohonne, tournure grossière dans les deux idiomes. Dites : 
les Legrand vendent leur maison, ou la famille Legrand vend 
sa roaiFon. — En France, le peuple emploie de la même ma- 



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- 140 - 

niëre Texpressioa chez nous. A preuve cet exemple de Veuillot, 
où rauteur imite le langage populaire : Voilà une haie qui res- 
semble àmhez nous, Les Français en Algérie. 

S"* C*est un élève de chez les jésuites. Y. Prépositions compo- 
sées. 

Choquer. On dit en wallon t vont choquer (prononcé à la 
française), pour : il veut trinquer. Nous avons entendu blâmer 
cette tournure : il veut choquer, absolument, sans ajouter le 
complément les veires. L'Académie dit : Choquer les verres à 
table l'un contre l'autre, ou simplement, choquer le verre. Mais 
Littré admet cet emploi, et il donne les exemples suivants : 
Choquons, voulez-vous choquer avec moi ? 

Choral. V. Acolète. 

Chose, l"* Je n'aime pas à me trouver avec lui, il est si 
chose, ji n'aimme nin di m'trover avou lu, il est si chose. Dites : 
il est si fdU, si bizarre. 

Dans ce wallonisme, être chose exprime un état habituel, 
tandis que les locutions populaires signalées par Lorédan 
Larchey (Excentricités du langage) devenir tout chose, rester* tout 
chose, être tout chose, indiquent qu'on est accidentellement mal 
disposé, soit pour la santé, soit pour l'humeur. Ex. Ce pauvre 
Alfred a sa crampe au pylore, ça le rend tout chose, E. Sue. 

S» Qui a fait cela ? c'est chose. Qu'est-ce qu'a fait coula ? c'est 
chose (on ajoute quelquefois boion d'heûve). — Je demeure chez 
M. Chose, ji d'meûre èmon chose. 

Le mot chose, « se dit familièrement en place (sic) d'un terme, 
d'un nom qui ne revient pas à l'esprit. » Liit. Il est des deux 
genres. Figurez-vous que le petit Chose écrivait un journal, 
Balzac. La petite Chose est malade. Ce petit chose avec lequel 
on attise le feu. — La coutume, dit Lorédan Larchey, est an- 
cienne. Il cite à ce sujet Tallemand des Réaux, qui conte que 
K M le Mage, conseiller à la Cour des Aides, dit toujours chose 



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— 141 - 

au lieu du nom. » Et nous trouvons dans Littré cet exemple de 
Régnier : Aussi bien ne peut-on changer chose en Virgile, ou 
bien l'autre en Platon ?— Le flamand dit aussi mynheer Dinge, 
et Tallemand Eerr Dings; mais je ne pourrais dire si, dans ces 
langues, remploi de ce mot est d'importation étrangère. 
Ce terme est trivial, et, lorsqu'on en abuse, il produit le plus 
mauvais effet dans la conversation. Les personnes qui se 
piquent de bien parler, Téviteront avec soin ; toutefois il est 
commode dans la bouche de certaines gens qui ne retrouvent 
pas facilement les noms propres des personnes. Il est du reste 
d'un usage si général dans tous les pays où Ton parle français, 
qu'il a fini par se glisser dans la langue littéraire. Ex. Vous 
voudriez voir la haute société et ne point restituer ? garder 
l'hôtel de chose, et y recevoir le marquis? Courier, dans Litt. 
C'est la fortune qui est parfois réservée à plus d'un mot, plus 
d'une tournure populaires. L'Académie n'a-t-elle pas consacré 
les locutions vers les une heure, entre quatre-z-yeux (*), ne voilà- 
i'U pas ? (*) et ne consacrera-t-elle pas un jour notre verbe em- 
bétery dont tout le monde se sert, et qui exprime si énergique- 
ment le superlatif de l'ennui pu de Tinportunité ? (en wallon, 
fér tourner à bourrique). — Notons qu'il est des cas où chose 
constitue, non-seulement un barbarisme, mais un manquement 
des plus graves aux convenances. M"*'' de Sévigné l'a fait res- 
sortir dans une de ses lettres en disant : Chose... ce Romain... 
Régulus. C'est une allusion plaisante au trait d'un iM. Sauvebœuf, 
qui, rendant compte h M. le Prince d'une négociation ponr 
laquelle il était allé en Espagne, disait : Chose... chose... le roi 
d'Espagne m'a dit. (Besch.) 
On prendra un autre tour; ou bien, si les mots Monsieur ou 



(') L'Académie écrit entre quatre yeux, mais elle «joale : * On prononce ordi- 
nairement, par euphonie : Entre quatre- z-yeux. » 

{*) iVe voUàt-il pas^ pour ne voilà pas^ est un barbarisme introduit par l'usage. 
(LlTf.) 



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- 142 - 

Madame sont lâchés, on pourra s'arréier, el ajouter ensuite : le 
nom m*écbappe, je ne me souviens pas du nom. 

Choser. Qu'est-ce que vous chosez là ? qu'est-ce qui vos 
chdsez là ? On se sert de ce terme populaire pour exprimer une 
action dont la dénomination nous échappe. Dites : que faites- 
vous là ? ou bien précisez le genre d'opération. 

Cinq. Il a fait un cinq à son pantalon, il a fait in chinque à 
s*maronne, Armonaque dé MonSj a. 67, p. 73. Dites : il a fait un 
accroc à son pantalon, il a déchiré son pantalon. — lly aun 
vilain dn^ à votre manteau, gna on laid cinq à vosse mantai^ 
Forir. Dites :. il y a un vilain accroc à votre manteau. 

Cinq, dans nos patois, est proprement une déchirure en forme 
du chiffre romain cinq (V). Ce terme est inconnu en France. 

Ciseau V. Mouchettes. 

Colidor. L'entrée de ma chambre est sur le colidor, rintréie 
di nCchamhe est so tcolidôr^ iiég. Dites : est sur le corridor. — 
Colidor est également montois, rouehi et lillois. 

La forme colidor, qui se relrouve aussi dans le patois de 
Genève (Litt.), et à Marseille (Hécart), est tout à fait barbare et 
contraire à Tétymologie. Le corridor est l'endroit où Ton court, 
où l'on passe. 

Combien, l" Le combien du mois sommes-nous aujourd'hui ? 
li qwanlt de meû estans-gn' ouïe ? — Le combien es-tu dans ta 
classe? li qwantt estez-v* è vosse classel Phrases barbares, qui se 
disent souvent en France etenBelgique. Liilré si^cnale également 
les barbarismes : le combien du mois tenons-nous? le combien 
est-ce aujourd'hui ? Il faut dire : Quel jour du mois avons-nous? 
quel est le quantième du mois? quelle place as-lu dans la classe? 
le quantième de ta classe es-lu ? Cette dernière tournure corres- 
pond au wallonisme : li qwantrainme estez-v' è vosse classe? — 
Le combien est français dans un autre sens : il veut me vendre 
sa terre, mais le combien (le prix) fait difficulté, Litt. 



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- 443 - 

f Qmbieti esl-^e que vous avez donné? Kiàin ent-ee qui 
v'savex tTuét Dites simplement: combien avez-vous donné? 
Toutefois la tournure ne peut être condamnée absolument. 
Dans certains cas, elle peut donner du relief à la pensée. 

S^" J'ai su pour combien îfa sawou (au village sèpou) po fc'frm, 
liég. failli poucombin^ p. de Niv., fai su poucombi^ p. de 
Mons. Expression figurée et proverbiale, qu'il faut remplacer 
par celles-ci : Je Fai payé cher, il m'en a cuit, je Tai appris h 
mes dépens, je m'en mordis les doigts (ou les pouces). 

4* Combien est-ce que vous demandez pour cela ? Kibin est-ce 
qui vos demandez po coula î Ce wallonisme, signalé par Poyart, 
doit être remplacé par cette phrase plus naturelle : combien 
vendez-vous cela ? On pourrait dire également bien : combien 
faites-vous cela? Dans ce cas, le verbe faire constitue un 
gallicisme. Ex. Combien faites-vous le mètre de velours ? 

Commander. i<> Il faut savoir commander ses ouvriers, 
fût sûvu Kmander ses ovri. Dites : commandera ses ouvriers.— 
Commander tout le monde à la baguette, kimander lès gint à 
rbaguette, ou comme dès chin. Dites : Commander à tout le 
monde à la baguette, Acad. 

Commander, v. trans., est proTprement un terme de guerre : 
Commander une armée, une flotte, l'ariillerie, Tinfanterie. 
Commander à, ou sur signifie exercer Tautorité supérieure. Sur 
cent peuples nouveaux Bérénice commande, Rac. Le prince 
commande à ses sujets, le père à ses enfants, le maître à ses 
domestiques, Acad. 

2^ La citadelle commande sur la ville, li stadelle kimande 
so Vvëie, Dites : commande la ville, ou plonge sur la ville. 

Commodités. Ce mot est français dans le sens de lieux 
daisance ; mais il faut dire les commodités, et non pas la com- 
modité, liég. li commodité. On se sert plus généralement du mot 
privé. 



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- 144 - 

Conditionnel (le — pour le subjonctif). 

1® Je voudrais que vous viendriez demain Jt voréus qu*va$ viriz 
d'mam. J'aurais voulu que vous auriez fait cela, /ar^u^ votou 
gu'vos âriz fait coula. Dites : que vous vinssiez^ que vous 
eussiez fait cela. Le wallon dit aussi : qui vos viiiahiz, qui vos 
avahiz fait coula. 

i'' Je ne croyais pas qu'il payerait, ji n*crèiève nin quH pâUreut. 
V. Croire, n» 2. 

3"" Je ne savais pas qu'il viendrait avec vous, ji n'savius nin 
quH vêrêut avou vos. Dites : qu'il dût venir avec vous. — Saviez- 
vous bien qu'il viendrait avec moi ? Saviz-v^bin quH vêrêut avou 
mi? Diles : qu'il dût venir avec moi ? 

4'' Il serait plus juste que vous payeriez pour vos bétes, i 
sèrêut pu jusse qui v'pdïeriz so vos biesse (les colëbéu), Bull. 
a. 67, p. 80. Dites : que vous payassiez. 

Le Conditionnel pour l'indicatif. V. la conj. Si. 

Consulte. Faire une consulte, faire enne consulte, montois. 
Dites : faire une consultation, Acad. — Il y a eu deux consultes, 
igna-st-awou deux conzule, liég. Diles : deux consultations. 

Consulte, du latin consultus, a, um, est très-bien formé en ce 
sens, d'après le génie de la langue française, ou quantité de 
noms abstraits féminins ne sont autre cbose que d'anciens 
participes passés. Vendita, vente ; defensa, défense ; data (dies), 
date ; redicta, redite ; responsa, réponse ; la prise, la saillie, la 
tenue, la venue, la vue, etc. — Et de fait, le peuple, même en 
France, n'emploie que consulte, dont tout le monde se servait 
autrefois. Mais l'Académie ne l'a pas enregistré. Toutefois on le 
trouve dans plusieurs auteurs : Qui passait au Mans pour faire 
une consulte de médecins, Scarr. On trouve dans les consultes 
de Wepfer l'histoire d'un jeune homme... Tissot, dans Litt. 

Contenter (se). Je me contente avec du pain et des Hruits 
pour mon déjeuner, ji nicontinte avou de pan et dès frûtt po 



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- 145 — 

nCdijunér, ik haud tnij met brood en vruchten tevreden, û.,ich 
begnuege mich mit Brod und Ftniechten, ail. Dites : je me contente 
de pain et de fruits. 

Contraire. Bien du contraire, bin di contraire, liég. — Que 
du contraire, qui de contraire, Baill! Fâve,. p. 15, que du con- 
traire^ Aurmonaq. de ttons, a. 67. p. 86. Plusieurs combinent la 
tournure française avec la tournure wallonne : au du contraire. 
Le français a les expressions : bien au contraire, au contraire, 
tout au contraire, Acad. Les deux dernières sont également 
liégeoises : d contraire, tôt à contraire. 

CSonvenlr, Nous avotis convenu de nous trouver ici, nos 
avans conv'nou d'nos trover eial. Dites : nous sommes convenus 
de... 

Converser. V. Fréquenter. 

Corvée. J*ai été chez quelqu'un pour ravoir Targent qu*il me 
devait, mais /ai fait conée^fa stu adulez *n'saki po^z-avu lès 
aidant quH m'divéve, mais fa fait corwêie. Dites : mais j'ai trouvé 
buisson creux, ou j'ai eu l'aller pour le venir, Acad., ou j'y suis 
allé i faux, id. Trouver buisson creux, ne pas trouver la per- 
sonne ou la chose qu'on était allé chercher, Acad. —Cet homme 
a eu l'aller pour le venir, il a fait un voyage inutile, Acad. Je 
vais tous les jours chez lui pour lui parler, et chaque fois 
ie tais corvée, ji vas tos lesjou è s*mohonne po lijàser^ et chaque 
fèieji fais corwêie. Dites : et chaque fois je trouve visage de 
bois (et non pas porte de bois, comme traduit Forir) ou porte 
close, Acad. 

Corwite, dans notre patois, signifie fréquemment démarche 
inutile; ce sens dérive parfaitement du sens primitif, tout comme 
le sens figuré que le français donne à corvée : toute action 
qu'on fait i regret, avec peine. M. de Goulanges m'envoya pro- 
poser de le prendre pour aller dîner à Versailles, chez M. de 
Louvois, je vais donc faire cette petite corvée, Sév. 



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- 146 -- 

Cdtô. !<" Mettez-vous de Poutre de côté, ou à Vautre de côté, 
mettezV di Faute de costé. Dites : mettez-vous de l'autre 
côté. 

S*" Il se platt bien tous côtés, i s'platt bin tos costé, het staat 
hem aile kantetiaany fl. Dites : il se platt partout. 

De tout côté (ou de tous côtés; se dit, mais pour exprimer la 
direction vers, ou le point de départ. Ex. Cette ville est assiégée 
de tous les côtés. L'effroi se répandit de tout côté, de tous côtés, 
Besch. 

Coude. 1». Son babit est tout percé à la coude, si habit est 
tôt kHrawéà rcoûde^ Forir, s*n habit est tout trouwé à rcoudc^ 
tournais. Coude est masculin ; de plus, on dit percé par le coude, 
et non pas au coude, fl., aan den elleboog. — Ex. Une veste per- 
cée par le coude, Bbsch. Un babit percé par le coude, âcad. 

Le genre féminin des patois de Tournai et de Liège est 
un archaïsme, provenant du pluriel neutre eubita, oi^m^ de 
cubitum, qui se disait pour cubitus, t. V. Outil. 

Coudre. Je causrai, ji keusWai. Formez régulièrement ce 
futur : je coudrai. 

Coup. Il a son coup, ilas'cô (îlas'daie). Dites: c'est fait 
de lui, c'est un homme perdu, il est perdu (Acad. L 449, 8« col. 
Lhtré, à Perdu, lO""), son affaire est faite, familièrement, il est 
flambé.— Cet homme est flambé, Acad. C'est un homme flambé. 
LiTT. Il était flambé, Scarr. Virg. V. 

Couper. On dit très-bien couper les blés, câper les grin ; 
mais on ferait des wallonismes en traduisant eôper 'n' fleur, par 
couper une fleur, câper on bouquet, par couper un bouquet, câper 
des frût, par couper des fruits, câper des heupon, par couper des 
gratte-culs (*), Il faut dire : cueillir une fleur, un bouquet, etc. 

(1) Comment l'Académie n'a-t-elle pas rejeté ce vilain mot f>onr adopter le pro- 
vincialisme heupon, qui, à ce qu*il paraît, se reti*Ottve aussi dans les Vosges ? On 
se sert aussi du terme scientifique eynorrhodon : conserve de cynorrhodon. Litt. 



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- 147 — 

On dit aussi code dès frût ; d'après M. Grandgagnage, c'est la 
tradaction exacte du latin colUgere fructus, cueillir des Truits. 

Couple. C'est une belle couple, c'est ine belle cape. Dites : 
c'est un beau couple. Ce mot est toujours féminin en wallon. 
Aussi bien couple a été primitivement du féminin ; il vient en 
effet du latin eopula^ lien, copule, et il a quelquefois ce sens en 
français ; on dit une couple pour trois ou quatre chevaux. On con- 
naît la règle actuelle, en français. 

Courroie, Mon courroie pat. tournais, pour ma courroie. 
D'après Littré, ce nom est également masculin dans le proven- 
çal et dans le catalan. Le liégeois corrôte (sUnnde lis corroie. 
For. serrer les courroies) a conservé le genre du latin corrigia, 
fouet pour corriger. 

Court. !<" Ce 2not s'emploie à Tournai dans un sens très- 
fort, et comme synonyme de trop court. Cette planche est 
courte, il en faut une plus longue. Dites : est trop courte. C'est 
un terme consacré au jeu de balles : elle est courte, c'est-à-dire 
la balle n'a pas été lancée assez loin. 

i"* En passant par là, vous aurez plus court, si vos passez por 
la, vos ârezpus court, ...ge zult het korter hebben, û. Dites : vous 
prendrez le plus court, Litt. - Prenez ce sentier, vous aurez 
plus court, prindez po c^pazai-là, vos ârez pus court. Dites : vous 
raccourcirez votre chemin. 

3<> Couper au court, côpér â court. Dites : couper par le plus 
court, AcAD. 

A^ On doit traduire mot à mot le wallonisme esse court d'ai- 
dant, être court d'argent. Beaucoup disent : être à court d'ar- 
gent, mais, selon Littré, c'est une locution fautive, puisque rien 
n'y justifie la préposition. Dites de même au féminin : elle est 
courte d'argent, Acad., et non pas à court, ni simplement court, 
au masculin ; en effet, court, ici, est adjectif. 

Court-pendu. J'ai uu pommier de corpendus, ou de court- 



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— 148 - 

pendues, fa 'fCmèliie di cârpindou. Dites : un pommier de court- 
pendus, ou de capendus. L'Académie ne donne que capendu^ 
mais la plupart des dictionnaires ont aussi court-pendu. 

Couvert. Il est étonnant qu'on rende souvent le wallon eoviek 
par couvert, puisque le mot correspondant pour la forme et pour 
le sens est évidemment couvercle. Ainsi couvercle de tabatière, 
de cafetière, de marmite. Le patois de Mons emploie à tort 
couverte, fém. pour couvercle. Ex. / n"a si laid pot qui n'treuve 
s'couverte. Tournez : qui ne trouve son couvercle, et non pas, 
sa couverte. V. l'art, suivant. 

Couverte, l*» La couverte d'un lit, el couverte (Pin lit, roucbi, 
picard, montois. Ce mot français s'emploie également à Liège, 
quoique le mot wallon soit 0o/)dl, lequel correspond bien mieux 
à couverture, le vrai terme français. Faire sauter quelqu'un à la 
couverte, pat. lill. pour berner quelqu'un. 

C'est un archaïsme. Les nappes, les couvertes de lict, il ven- 
dait tout cela, BoNAv. Des Periers, le Cymbalummundi. Il désigne 
encore aujourd'hui en France la couverture de laine employée 
par les militaires. Ex. Tandis que les camarades de tente s'en- 
dorment entre leurs deux couvertes (le mot y est en italiques), 
Ducd'Aumale, Les Zouaves. 

S*" Li cofeteûre d'on scoU. Nos petits Liégeois traduisent à tort 
par : la couverte d'un écolier. Il faut dire : la malle, la mallette, 
le sac, ou le portefeuille d'un écolier. Quant à cofeteûre Son live, 
il fôut le rendre par couverture, et non par couverte, comme on 
le fait bien souvent. Plusieurs disent aussi très-mal couverter 
un livre, couverter on tîve. Dites : mettre une couverture à un 
livre. 

Crabe. Paresseux comme une crabe, paresseux comme enfie 
crabe, pat. de Charler. Dites : comme tin crabe. Le terme flamand 
. krabbe est du féminin. 

Crevasse, Crevure. !<" Regarder par la crevasse de la 
vorte, huH po Fcrèveûre di Vouxhe. Dites, suivant le sens : par 



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149 - 

la fente de la porte, oa par la porte entrebâillée. V. Chasser, 
n"" i. Le patois de Mons dit : waiti po Cerin de rpor te. Tournez 
de la même manière. 

2" Avoir des crevures à ses mains; cela se dit à Mons : avoi 
des crevures ou kervures à ses mains. Généralement on traduit 
bien à Liège : avoir des crevasses (ou des gerçures) aux mains. 
Sigart voit dans ce vocable wallon une combinaison de crevasse 
et de gerçure. N'est-ce pas un archaïsme ? il signale ailleurs le 
vieux mot français creveure. 

Crever. !• J'ai ri à erevei^y fa ri à criver^ ik heb mij te bersten 
gelachen^ û. (i). Dites : j*ai crevé de rire, ou j'ai ri comme un 
crevé» Litt. On dit aussi se crever de rire. Ex. Tout le monde 
se crevait de rire de voir cet homme lire cela sérieusement, 
Tallemant, Mém. éd. Monmerqué, VI. p. 241. 

Crier. V J'ai un enfant qui crie nuit et jour, fa 'n'èfant qui 
erèîenutle etjou. On dit très-bien l'enfant crie, mais pas dans le 
sens du verbe wallon criei\ û. krijteu, qui signifie pleurer, pleur- 
nichet\ Dites : j'ai un enfant qui pleure, qui pleurniche nuit et 
jour. Remarquez de plus que le français préfère nuit et jour au 
jour et nuit des langues germaniques, qui parait plus naturel. 
Résultat de l'influence latine : noctu diuque, noctes atque dieSy 
et de l'influence gauloise ; on sait que nos aieux de race cel- 
tique, se r^ardant comme fils du terrible Dis, comptaient les 
espaces du temps, non par les jours, mais par les nuits : de là 
la préséance accordée à la nuit sur le jour. 

2'^ Crier après quelqu'un, sur quelqu'un. V. Après et sur. 

3« Crier quelqu'un, avec la même signification que crier sur 
quelqu'un (v. Sur, n*» 20), c'est-à-dire gronder, gourmander 
quelqu'un. C'est un archaïsme qui, d'après Littré, est encore 
usité en plusieurs endroits, particulièrement en Normandie. Ex. 
Toi qui toujours me cries, Mol. Il en reste quelques traces 
dans notre patois. 

(*) Littéralement :;e me 9ui$ ri à crever, idiotisme dont il sera parlé k rart.MÔRT. 



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- 480 — 

i*» 11 oriede mal, i brait (Tmd. Dites: le mal lui fait pousser 
des cris. 

Croire. !• Je crois bien ! je le crois bien ! je Vcreûs bin ! Ce 
sont des wallonismes, dit Porir. Cependant je le crois bien est 
dans le Dictionnaire de l'Académie, et;e crois bien, d'après Lit- 
tré oc signifie en certaines circonstances déterminées par le con- 
texte: cela n'est pas étonnant.» Ex. Il n'aime plus celle personne, 
je crois bien, elle n'est plus la même, Pasg. V. Deux exem- 
ples dans E. Augier, le fils de Gib. l, 4, et dans Georges Sand, 
les nq^t cordes de la lyre, II, 4. 

S*" Je ne crois pas qu'il viendra demain, ji ricreûs nin qui verdi 
demain. Dites : qu'il vienne demain. — Je ne croyais pas qu'il 
payerait, ji n'crHéve nin quH pitereûi. La grammaire exige: qu'il 
payât ; mais le sens devient louche: il faut dire: Je croyais qu'il 
ne paierait pas. 

Lorsque le verbe croire suivi de que est accompagné d'une 
négation, le verbe de la subordonnée doit se mettre au subjonc- 
tif. Le wallon, dans ce cas, remplace le présent du subjonctif 
par le futur de l'tndicatif et l'imparfait du subjonctif par le con- 
ditionnel présent. Il procède de môme quand le verbre croire 
est employé inteiTOgativement. £«/^€ çttî t;o« créiez qu'i vêreit 
d'maint est-ce qui v*s aviz crètou qui pdlereut ses dette? Ici le 
français a plus de latitude : on peut dire également bien : 
Croyez-vous qu'il viendra demain? ou, qu'il vienne demain ? 
avez-vous cru qu'il payerait, ou qu'il payât ses dettes. « Les 
grammairiens, dit Littré, se sont efforcés d'établir une diffé- 
rence de sens entre ces deux constructions ; mais toutes les dif- 
férences paraissent arbitraires. » 

Grolle. 1* Des crolles, dès crolle, liég. mont, lillois, rouclii. 
Dites : des boucles de cheveux, des anneaux, et, dans le langage 
familier, des frisons. On disait autrefois mairon : elle avait des 
maiTons sur les oreilles. — Faire ses croUes, fir ses crolle^ liég. 
Dites : boucler, friser, anneler ses cheveux, ou se boucler, Acad.^ 



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- 181 — 

ou se rriser, Besch. — Faire des eroUes à un enfant, fér dès 
crolle à in' èfant, liég. Dites: boucler un enfant, Acad. — De 
môme ne dites pas : des cheveux ct'ollés.dès crolléê ch'vet, liég. , des 
ch*feuœ croI/^«, lillois, montois; mais, des cheveux bouclés ou 
frisés. — Le petit crolU, H pHit crollé, liég. Dites : le petit jeune 
homme tout bouclé. Un jeune frisé ne se dit qu'au figuré dans 
le sens de muscadin. — Ses cheveux crolleiit^ ses cKfeux croU 
lettVe^ tournais, rouchi, ses cVvet crollèt, liég. Dites: ses cheveux 
frisent, bouclent. 

i"" Brûler des crolles, biûler des crolles, mont. (liég. cresse) . 
Dites: des copeaux. 

Ce mot cfvlle, dans les deux sens, a été emprunté au fla- 
mand. 

II ne fout pas confondre copeau avec plamire; ce dernier 
vocable sert à traduire le liégeois estalle (qui est aussi lorrain, 
LiTT.). Ne dites pas, comme à Tournai et à Lille, des éplènures. 
On ne saurait équarrir un bois sans faire des éplanures,.... faire 
des éplènures, tournais. Dites : des planures, ou des éclats. 

Gron. Son enfant est tout cron, si èfant est tôt kronk, liég. 
s*n infant est tout cron, tournais, mont. Dites : son enfant est 
tout contrefait. — Il marche cron^ i rote cron. Dites: il est ban- 
cal, il est bancroche, ou il a les jambes tortues. — El bâton est 
tout cron, tournais. Tournez: est tortu, de travers. — T'ascopé 
cha tout cron, id. tu as coupé cela de travers. 

Ce terme, d'origine germanique (fl. krom, ail. krumm) n*est 

guère usité à Liège que dans kron-bresse ( coude ) et krons-os 

(vertèbres); mais il est d'un usage général dans le Hainautet 

le nord de la France. Les vrais termes wallons sont chalé^ 

,pat. henuyer, halé, houle et tnestounié, liég., suivant le sens. 

Groque-nolz, croque-noisette. Ces noms, d'après Lit- 
tré, désignent une espèce de loir appelée aussi muscardin. Les 
Namurois l'emploient ik tort dans le sens de croque-gate^ et de 
croque neuje; les Mon tois, dans le sens de croque-gaye et de 



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-• 48Î - 

croque-noujette; et les Liégeois, dans le sens de croxhe-gèie et 
de croxhe-neuxhe. Le nom français de cet instrument est casse- 
noix, easse-noisette. 

Croquer. Croquer des noix, erohi dès gèïe, liég. croquer des 
gaie, mont. Dites: casser des noix, Acad. 

Croquer signifie manger des choses croquantes : croquer des 
pralines. 

Cru. Il fait citt, i fait crou (ou hrou, Grandg.), liég., i fait 
crueuy namur., i fait cru, mont, tournais, lili. rouchi. Ce terme 
n'a pas d'équivalent en français. Le sens est : le temps esl froid et 
humide.Crottu;/», crowistéei crouweûre, dans ce sens particulier 
(humidité accompagnée de froidure), ne peuvent se traduire par 
crudité. Dites: il fait humide (Besch.) et froid. — On timpê crou^ 
pièce qu^est crowe. Forir traduit: un temps ct^, chambre cme. 
Aucun dictionnaire français n'autorise cette traduction. Dites : 
un temps froid et humide, une pièce froide et humitte. 

M. Grandgagnage cite cet exemple de Froissart, qui était 
Belge d'origine : Avecques tout ce, étoit le temps si cru et si 
pluvieux .... 

Cuire. L'eau est cuite Jaiwe est cûle, û. het water is gekooki. 
Dites: l'eau est bouillante, ou Teau a bouilli. -- Cuire de l'eau, 
cure di Faiwe. Dites: faire bouillir, ou mettre bouillir de 
l'eau. — L'eau cuit, Faiwe eût. Dites : l'eau bout. il. het water 
kookt. 

Cuire ne peut se dire que des aliments; de plus il faut remar- 
quer que bouillir est intransitif, sauf dans l'expression figurée : 
bouillir du lait à quelqu'un. 

Cumulet. Faire un cumulet, fér on cumulet, liég., in cumulé, 
mont. On dit aussi on coupèrou, ou coutibèt, liég. Dites: Taire la 
culbutte. Notre patois est, comme on le voit, riche en termes 
qui désignent ce tour d'adresse; il plait en effet particulièrement 
au gamin de Liège. Le mot cumu/^^ dont beaucoup de personnes 
se servent n'est nullement français. M. Grandgagnage le rattache 



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- 1S3 -^ 

ao même radical germanique qui aou9 a doané tourna iiomber), 
par on changement de t en k, si commun dans le langage enfan- 
tin, et dont les langues littéraires offrent elles-mêmes des 
exemples : ail. Kartoffel, pomme de terre, du vénitien lartufola^ 
truffe. (Litt. et Schel.) 

Curer, curage, ooroir. V. Verger. 



D. 



I>*alK>rd l^^Il reviendra d'abord.i fvirèt d'abord, lot d'abârd. 
Dites : toui de suite, sur-le-champ, incessamment. 

Les locutions d*abord, tout d*abord, au premier abord, de 
prime abord, dès Tabord, signifient en premier lieu, au premier 
instant, avant tout. Ex. : Dieu n*a qu*à vouloir, et les choses 
sont d'abord fiiites, Fên. Si quelqu'une de vous touche à la qua- 
trième, je Tétranglerai tout d*abord, La Font, dans Litt. — Ces 
deux exemples montrent combien la pente a été facile du sens 
français au sens wallon. 

2* D'abord qu*il sera revenu, d abord quH sèrèt riv'nou. Dites: 
dès que, sitôt que, aussitôt qu'il sera revenu. 

Cest un archaïsme ; cela se disait encore au XVII* siècle. 
Ex. Voyant que la conversation tombait d'abord qu'on ne buvait 
plus... Hamilton. 

S*" D'abord que vous le souhaitez, dCabôrd qui vos IsohaitU. 
Dites : puisque, dè.s que, du moment que vous le souhaitez. -^ 
Dès là que est moins usité, mais il se rencontre (Bossuet, 
MassiUon, Voltaire, dans Littré, à D&s). 

Du moment que et dès que se prennent quelquefois pour 
puisque^ AcAD. Ex. : Dès que vous en tombez d'accord ; du 
momeut que votre père y cousent, je n'ai plus rien à dire. Ceci 
montre comment la conjonction d'abord qui, marquant dans le 
principe le temps, a pu devenir une conjonction causatwe. C'est 
une application, parfaitement juste cette fois, du célèbre cum 
hoe, ergopropter hoc. 



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- 164 - 

Danger. V. Mal. 

Dangereux. Vous reviendrez aujourdlioi, n'est-ce pas? — 
C'est dangereux. Vos révérez ôûie, èdon f — Cest danjVeus, liég. 

— Viendrez- vous? — Diingeveux. Verrée? -- Dandjereux^ p^i. 
des environs de Hons.— Dites: c'est probable, ou. simplement, 
probablement. On peut comparer la tournure : il ny pas de 
dangei que faille là. 

Dans.l" Je vnis demeurer dam les Flamands, ;îm'va« dl'mani 
dvini lès Flamind. Dites : chex les Flamands, ou dans le pays 
flamand. — Cest un latinisme : In Petsas proficisciy C. Nêp., 
partir pour la Perse. 

2"* Ne restez pas dans la pluie, ni damerez nin è Pplaive; Ù. Nijft 
in den regen nini. Dites : ne restez pas exposé à la pluie. Se 
promener dans le soleil, si pormintr è solo. Dites : se promener 
au soleil. — Ex. Ne vous tenez pas au soleil, Acad. 

3"* / n'aveût nin dès sole devint ses pid. Foiir, au mot divini^ 
prétend qu'on ne peut traduire: il n'avait point de souliers dans 
ses pieds. C'est une erreur. Nous lisons dans Dictionnaire de 
l'Académie qu'on dit par hypallage : il n'avait point de souliers 
danssespieds.il faut remarquer l'expression proverbiale: il 
n'a pas de souliers à ses pieds, (il est fort pauvre). 

4<* Quelle belle cravate vous avez dans voire cou! que bai 
noret qui v's avez è vosse haïrai, liég. Dites : à votre cou. — La 
bague que vous avez daif« votre doigt, li bague qui v's avez è 
vossedeûgl^ Delch. les deux Nèveu^ II, 4. Dites : à votre doigt. 

— Uetloz-li one bague dihs s'dwoi, p. de Wavre, Annuaire, Si. 70, 
2« 1. p. 165; meltoz-li one bague è s*deugl, Spontin, id. ; meUez-U 
one bague è'deûgt^ Hotton ; passez4i one ennai è d^u^^Famenne; 
melleuz-li eun ènia è s'dûgt^ Uuy , mettez-li one bague è s'deugt, 
Limbourg. On voit que Thypallage est du goût de nos patois. 11 
faut dire : mettez-lui un anneau au doigt. 

Citons toutefois ce proverbe, qui est dans Bescherelle : ne 
fais pas entrer de force un anneau daîis ton doigt, c*est-à-dire» 
il faut laisser mûrir l'affaire» sans recourir à la violence. 



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- 156 - 

5<» bans la phrase suivante, ji dis (tvint mûmimme, dUrint 
ne peut se rendre par dans : je dis dans moi-même. Il Faut : en 
moi-même. Mais les wallonismes : divint treûsjoû d*cial^ divint 
k'bin d^timps? divint pô, doivent élre traduits littéralement: 
dans trois jours d*ici, dans combien de temps ? dans peu. 

Divint et dans marquent ici Tintervalle de temps au bout 
duquel on se mettra à Touvrage : nos attalrans ivint deuxjoûs^ 
nous nous mettrons à l'œuvre dans deux jours. Mignet s'est donc, 
je crois, exprimé incorrectement en disant: Dans peu d'instants 
la ville fut dans la plus grande agitation, Révol. fr. 1, 1, p. 61 ; 
il faut : en peu d'instants. 

Ce dernier gallicisme, où eti équivaut à dans Tespaee de^ Agad., 
ou en [espace de^ Litt., correspond au wallonism? so po d^timps, 
qu'il faut bien se garder de rendre mot pour mot. V. Sur. ïv* IS. 
e** Dans les soldats. V. Engager. 

7"" Il s'est jeté dans l'eau, i s'a lapé è Taiwe. Dites : il s'est jeté 
à Teau, c'est-à-dire, il s'est noyé exprès. Hais si le sens est : 
entrer dans l'eau pour quelque dessein, on traduira littéralement 
il s'est jeté dans l'eau. 
8*" Connaisseur dans (pour en) Y. Db, n* 7. 
9« Il me doit dans les trois cents francs, t nCdeûl devint les . 
treus cinls franc. Dites : il me doit envii*on ti*ois cents Trancs. 
La tournure dlou ttreus dnls franc est plus correcte. Y. Autour. 
Ky* Il est toujours dans les livres, il est todis devint les live. 
Dites : il est toujours sur les livres, Besch., Litt., ou il sèche, 
il pâlit sur les livres, Acad., il est toujours cloué sur ses livres, 
Besch. La tournure française, que nous devons au latin (pa/- 
leseere super libris) est bien supérieure à la tournure wallonne : 
elle fait image. 

11® Porter de l'eau dans la Meuse, poirier SCaiwe èMouse; 
tournure toute locale, qui doit être remplacée parcelle-ci ; por- 
ter de l'eau à la rivière, à la mer, ou porter l'eau à la mer. 
On pourra toutefois imiter le proverbe français en disant : por- 
ter de Teau à la Meuse. 



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- 156 ~ 

De. 1» De ce temps-là, di c'timps-là. La tournure en ce temps 
là semble consacrée. Ex. En ce temps-là il n'y avait point de 
roi dans Israël, Sacy, dans Litt. Mais on dira: du temps des 
patriarches; nous n'avons pas vu cela de notre temps, Acad., du 
temps du roi Guillemot (de timps de vî bon Diu) du temps, (ou au 
temps, Acad.) que les bétes parlaient, La Font. V. Que, relatif. S*. 

i^ Fy ai pensé de la nuit,;*y a tûzé deP nutte. Dites : la nuit, 
pendant la nuit. On dit aussi quelquefois de nuit. Ex. La 
cbouette se cache dans les trous, et de nuit elle va chercher sa 
pâture, LiTT. Partir, voyager de nuit, Besch. — Le latin disait 
quelquefois de uoete pour ie simple ablatif nocte, noctu, Ex. Ut 
jugulent homines, surgent de nocte latroneê, lior. — Maison dira 
très-bien : je n'ai pas dormi de la nuit, Dumas, H. Alphonse^ 1, 8, 
en appuyant sur l'idée de la durée : pendant toute la nuit. Ex. 
Je ne le reverrai pas de huit jours, Acad. 

3"* Tirer, tomber d^la milice, de la consoription. Y. Tirer, 3 
et Tomber, 4. 

4<' Faire de sa tété, fér di s'tiesse, Dites ; en faire à sa tète, 
n'en faire qu'à sa tête. Littré signale la locution basse et popu- 
laire faire m tête, pour se montrer récalcitrant. 

S"" De bonheur que je n'étais pas là, de bonheur qui friezleùt 
nin là. Dites : heureusement que je n'étais pas là, ou p^r bon- 
heur je n'étais pas là. 

De bonheur est un tour suranné : De bonheur pour ce loup, 
qui ne pouvait crier, Près de la passe une cigogne, La Font. 

&" Les amis ont toujours du plaisir de se réunir, lis amis otit 
toudis du pletsi dé s'réuni; mont. Dites : à se réunir. Tai eu du 
plaisir de les entendre rire aux éclats, fa-st-aivou bon (Clés ot 
haxhlir. J'ai eu du plaisir h les entendre. II y a plaisir de le voir 
manger, on-z-a bon deC vèïe magni. Dites : 11 y a plaisir à le 
voir manger. 

Mais avoir le plaisir, faire plaisir, c'est un plaisir, sont suivis 
de la préposition de. Vous me feriez plaisir de parler ainsi. 
Quand aurons-nous le plaisir de vous voir? C'est un plaisir de 



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- 157 - 

le voir travailler. Tette est la règle actuelle en fhiDcais; maie il 
8*en faut qu*elle fôt bien éuiblie même au XVIII* siècle, du 
moins en ce qui concerne les deux premières tournures. Ex. Il 
y a plaisir d*étre dans un vaisseau battu de Torage, lorsqu^on 
est assuré qu'il ne périra pas, Pasc. dans Litt. 

7* Vous passez pour un connaisseur de tableaux, vos passez 
po an k*noheû d'tâolai^ fl. eenen kenner vanscUlderijen. Dites : 
connaisseur en tableaux, ou en fait de tableaux : Ex. II est bon 
connaisseur en chevaux, elle est connaisseuse en fait de toilette, 
AcAD. Ne dites pas non plus : Elle veut être grande connaisseuse 
dans les étoffes et les dentelles : elle voût esse ine grande kino- 
heûse divint lès stoffèet lès dintelle. Dites : elle prétend être une 
bonne connaisseuse en étoffes et en dentelles. 

8* J'irai de pied à Verviers, j'tm d^ptd à Vervt^ Micheels. 
Gr. lUg. Dites : J'irai à pied. On dit plus souvent à pid. 

9" Une queue de balai, ine cowe di ramon. Dites : un manche 
à balai. 

10* Gela fait dresser les cheveux de la tête, çaula fait dressi 
lis fvet deV liesse Dites : à la tête DeV txesse équivaut à l'ablatif 
latin de capite; c'est la question unde? dCoii? Le français se met 
à un autre point de vue; c*est la question ubiJ où? 

A la tête est ici la seule tournure que mentionne l'Académie. 
Levy, dans ses Omnibus, et Poitevin, dans sa Grammaire fran- 
çaise, préiendeiit qu'on ne dit pas faire dresser les cheveux 
sur la tète. Bescherelle et Littré admettent la tournure, et ils 
ont pour eux l'usage : Je vis ses cheveux se dresser sur sa 
tète, Barth. dans Bbsch. Les cheveux dressent encore sur la 
tète, au souvenir de ces jours de meurtre, Chateaub. dans Litt. 
— Autres ex. : Fén. TéUm. I, au mil.; G. Delavignb, Don Juan 

d^Autr. V, 3. 

» 
Dé, dés. Ce préfixe français, qui correspond aux deux par- 
ticules latines de et di ou dis, a conservé généralement, dans 
l'est de la Wallonie, la seconde forme, di ou dis, tandis que dans 



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le Hainaut, il affecte le plus souvent la forme firancaise. Les 
paiois wallons renrerment un grand nombre de verbes et même 
de substantifâ où entre celte particule dé ou dis ; mais notre 
sujet est circonscrit : nous ne nous occuperons que de ceux de 
ces mots qui se sont introduits dans le parler français du pays 
wallon. 

En composition, ce préfixe a la valeur qu'il avait dans la 
langue-mère. Il marque : 

!<" Ëloignement, négation ou suppression de Tidée exprimée 
par le mot simple ; c'est le cas pour décommander^ défanfUer^ 
dégobiller, dégueuler, délurer, dépourer^ déuspecter^ dessoûler; 
parfois il se prépose à d'autres composés qui renferment déjà 
Tune des particules é^ mé, etc. : se déméfier ^ démépriser ^ dé- 
teindre. / 

V II est augmentatif, comme le latin de : débagager, débaguer y 
débout, démitan^ dérompure, dégriffer, délibéré, desseuler, 

S"" Il exprime, comme le latin dis, la division d'un tout en 
plusieurs pairies : déietei\ 

i*" Il marque, comme le wall. ki, lat. cum, ail. be, que Faction 
ne répand entièrement sur un objet, et il sert à transformer 
des verbes intransitifs en verbes transitifs : débiser, décauser, 
déchirer, dégoter, despiter. Ni de, ni dis n'avaient cette signifi- 
cation en latin; mais elle découle naturellement de l'acception 
signalée au n<^ 3 : division, dispersion d'un tout en plusieurs 
objets isolés. Le préfixe dé a, je crois, le même sens dans les 
verbes français (f^^ri^r quelqu'un, (f^^o/^r quelqu'un (v. ce mot), 
et se débattre, que le liégeois traduit par s'kibatte. 

Reprenons chaque composé à part. 

lo Décommander. L'officier avait commandé des pa- 
trouilles, mais il les a décommandées, VoffitA aveut Vmandé des 
patrole,maiH elz a diVmandé, liég. Dites : mais il les a contreman • 
dées. A Paris, le peuple emploie aussi ce mot, Agnel, p. 16. 

DéflBiufller les manches d'une robe, difâfUer les manche 



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^ i59 - 

(Fine robe. Dites : éfaufller. II existe aussi dans le montois et 
le rouehi. 

Déffoblller. dégueuler. // a dégauvié, mont. — Il a d^- 
gueulé^ il a dégueulé. Rem. Dites : il a rendu. — Absolument, 
rendre, vomir, Litt. 

Ce sont des termes ignobles qui doivent se sentir mal à l'aise 
dans le Dictionnaire de rAcadémie, si imprégné d'atticisme. Il 
en est de même de rendre ses comptes, rinde ses compte, Forir {*), 
renarder, mont. (liég. riuârder, en parlant des animaux), piquer 
un renard, piquer in renard, p. de Hons. Vomir, dii Benoit, est 
ignoble au propre, et énergique au figuré : contemplateurs 
stoiques des maux incalculables que cette catastrophe vomira 
sur la France, Mir. On peut trouver des tournures préférables 
même à rendre, qui de fait n'est pas élégant : garder une méde- 
cine, ne pas la rendre » Acad. Au surplus, quoiqu'on fasse, 
l'idée, ici, gâtera toujours même le meilleur euphémisme. 

Délurer un béjaune, dileurrer on boubièt. Rem. Dites : dé- 
gourdir un béjaune. — Déleurrer (de leurre) est un vieux mot 
français synonyme de détromper. On emploie surtout le parti* 
cipe déluré, qui est dans Liilré. Ex. Gens plus actifs, plus gais, 
plus délurés, suivant l'expression locale dans les pays de 
vignoble et de navigation, Ratnal. Dites : dégourdi, déniaisé. 

Déméfler (Se), montois, s*dimèfiï, liég. Dites : se défier, 
ou se méfier, selon la nuance. ^ 

Démépriser, lill. mont. II faut dire : mépriser ou dépriser, 
selon ridée qu'on veut exprimer. 

Ces deux wallonismes présentent la combinaison bizarre des 
deux particules qui entrent dans la composition des verbes se 
méfier et se défier, mépriser et dépriser. Or ces deux préfixes 
mé et dé ont des sens bien distiticts ; ils ne peuvent être con- 

«0 A Parit, U peupla emploie cette loeoUon dans le seoi de mourir. (Lm.) 



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fondus m se renforcer mutuellement. La différence est mieux 
marquée encore dans se mécompteret décompter, médire et 
se dédire, méfaire, et défaire, mécroire et décroire. V. Lapatb. 
Dict. des $yn* p. iSS. 

Dépoorer se dit dans le Hainaut et la Flandre française 
pour épousseter, vet^geter. Il correspond au li^eois dipoûssler. 
fie là le vocable hennuyer, lillois et rouchi dépouroir^ patois 
dépourôj liégeois boubou, pour lequel je n'ai pu trouver d'autre 
terme français que tête de moine, qui se dit à Maubeuge, selon 
Hécart. Houssoir n'a pas la même signification. 

Désespeoter ses vieux parents, désespecter ses vU parùU. 
Cest une corruption de diepecler, lat. dUpectare. Dites : n*avoir 
nul respect pour ses vieux parents. Il existe un vieux mot 
français despect, rouchi despect, du laiin despevtus^ mépris, qui 
a donné d^uutre part le franc, dépit; montois, deepUer, dépiter. 

DessoulM". Dormir pour se destouler, doirmi po s'dissôlér. 
Dites : pour se dégriser, pour se désenivrer. I/Académie dit 
que dessoûler est populaire. 

Déteindre la chandelle, datinde el candeye, mont, déiinde 
elcandèle, rouchi, distinde li chandelle, liég. -- Dite) : éteindre. 
Pas n^est besoin de prémunir contre Taffreux barbarisme : le 
feu est déteindu ou éteindu, li feu est dislindou, liég. pour le feu 
est éteint. — Déteindre signifie faire perdre la couleur : le 
soleil déteint toutes les couleurs, Acad. 

2* Débagayer, mont. , débaguer , rouchi, mont. Dites : 
déménager. Il en été parlé au mot baguer. Ce terme liégeots, 
qui a la mémo signification, montre à suffisance que la particule 
dé est ici purement intensive ; elle ne sert qu'à rendre la signi- 
fication du mot plus précise, plus déterminée. 

Debout, ou d'bout (Un) de chandelle, in debout d'candelle, 
rouchi, lilL, tourQ|iis., un debout d'candeye, montois. Dites : un 
bout. Li debout se rencontre aussi dans des textes liégeois. 



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— 161 — 

Dégrllfer. Le chat m*a dégtiifé, el cat m* a dégriffé, moot., 
lill., roucbi. Dites : m'a griffé; plus souvent, m'a égratigné. Le 
patois de Liège a digrettér, que nous traduisons à tort par 
graiter, il a aussi dégrimonnér (Grandg.), qui est également 
montoi$. 

Délibéré. Je suis délibéré du service, ji sos délibéré de sier- 
vice. Dites : je suis libéré du service. 

Li'déinitan dHn gambon^ rouchi, lill. Fdémitan d^cnne gaie 
(on gauque) mont. Dites : la moitié d'un jambon, d'une noix 
(un cerneau). On entend souvent dire à Liège, vous n'en aurez 
qu'une demaitié. A première vue, on serait tenté d'y voir une 
combinaison de demi et de moitié. Ne serait-ce pas plutôt le 
mot moitié renforcé par la particule en question? Nous lisons 
dans Hécait, Fdémotié d^unpain. Le montois a aussi démointié. 

Dérompure, mont, (et picard ; lill. dWompure), Dites : rup- 
ture (Littré dit qu'il vieillit), hernie, descente. £j«d rom/;ou, liég. 
ète dérompu, rouchi, ète d'rompu, IWL, ne peut se rendre par 
être rompu. L'expression correcte est avoir une hernie. 

Desseuler, lill. rouchi. Son père et sa mère sont morts et 
la pauvre fille est toute desseulée, si père et s'mère sont moirts^ 
et Vpauve âme est lote disseûléie, liég. Dites : esseulée. (Familier 
et peu usité, Acad.) 

3** D^eter. Les livres étaient déjetés, lès live esttt Vtapés. 
11 faut : bouleversés. — Le ménage déjeté, H k'tapé matUge. 
Dites : le ménage en désordre. — Une pièce déjetée, ine pièce 
iitapéïe. Dites : une pièce en désordre, où tout est bouleversé. 
—Se déjeter, si K taper. Dites: se démener, se débattre, se tour- 
menter. — Ex. Le perroquet se tourmenta (s'agita) si fort dans 
sa cage... Vts. Fables. — Le français se déjeter signifie se 
courber, gauchir, se contourner : Le bois de celte porte n'était 
pas sec : il s'est déjeté. C'est le liégeois s'kitoumér, s^kitoursi. 



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— 162 — 

4* Déblser. J*ai les lèvres entièrement débiséesj'a lèi Icppe 

totes dibihêies. Dites : selon le sens^ entièrement gercées, ou les 
lèvres irritées par la bise. Le montois a aussi débisér ou débisi, 
et le numurois, disbijL 

Décauser. Quiconque décause les honnêtes gens, est un 
maraud, fof qui dicâze (pat. de Verv.) lès bravés giniicst on câlin. 
Dites : quiconque médit des boQûêtes gens... — Les Liégeois 
rendent aussi leur kijdsér par le même barbarisme. Le mot est 
bien formé d'après l'analogie : décrier, dénigrer, détracter, 
décréditer, etc. ; mais il n'a pour lui ni Taulorité des diction- 
naires, ni celle du bon usage. 

Remarquons cet instinct du peuple : il ne connaît plus l'an- 
cienne particule française équivalant au suffixe h; il y substitue 
le suffixe dé correspondant à di ou dis, qui a souvent, dans son 
patois, la même signification (dibihiy si d^glettér, etc.). La syl- 
labe Jri a en effet, dans kijdséfy la valeur du latin cum, dans 
conspuo, couvrir de crachats, c'est-à-dire que l'action exprimée 
par le verbe simple se transmet directement sur un objet : 
hagni, mordre; Ai/ja^ni n'^aii, déchirer quelqu'un à belles dents; 
hinér, jeter; kihinir n'sakt\ lancer des projectiles sur quelqu'un 
(acception omise par les dictionnaires); jèlér, jeter; kijètér 
n'saki avou des caiwaiy lapider quelqu'un, l^e français a long- 
temps procédé de môme; l'épopée populaire de Rabelais et 
autres écrits du XVI« siècle renferment encore quelques com- 
posés semblables, qui semblent formés directement, et non 
tirés du latin : Gomparti, Rab.; complaindre quelqu'un. Mon- 
taigne; compisser, Ronsard (liég. dipihi). Si notre bon vieux 
patois a conservé pleine et entière cette faculté composante, il 
ne faut pas s'en étonner, l'idiome teutonique, qui l'étreint de 
tous côtés de Malmédy à Raccourt, y est pour une bonne part; 
il présente en effet, entre autres, toute une classe de composés 
du même genre : ail. bewerfen, beschmeissen^ fl. bewerpen, ^tAî- 
nér; fl. bespuwen, bespugen, ail. bespeien, bespucken^ kirèchi; 
Û, bespuiten, ail. bespritzen, kisprichi: ù. M. bepissen^ kipihi; 
ail. benagen, kimagni ; fl. beklappen^ ail. beklatschen^ kijdsér. 



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DéeUrcr. Vous m'tves tout déchiré^ voê m'wêz toi tfUi. 
Dites: vous avez déchiré tous mes vôtements. -^ Les Ghiooisse 
déshabillent avaot de se battre, de crainte de se déchirer, lèê 
ChUurif s'dimaussèt amâ di ê'batte^ sogne di s'kihii. Dites : de 
crainte (ou sans de^ crainte ) de déchirer, de lacérer leurs vête- 
ments. 

Eu français, se déchirer, c'est s*offenser l'un Fautre par des 
médisances : ils se déchirent l'un Tautre, Acao. Quant à déchirer 
ptdqu'un, il signifie, oa bien, le mettre en lambeaux : mon fils 
déchiré, Rac, ou bien, le diffamer: déchirer son prochain. 
Notons cependant que l'on dit : être déchii-é, être tout déchiré, 
AcAD., pour, avoir ses vêtements déchirés, en lambeaux. 

Dégûter. Vous travaillez bien, mais votre Trère vous dégoU^ 
wo$ cvrez Mn, mais vossefré v'digotle^ Rem. Dites : vous surpasse. 
Lorédan Larchey lui donne aussi ce sens, qui est conforme à 
rétymologie: digautUr sur quelqu'un, donc être placé au-dessus 
de lui. L'Académie admet dégoter comme terme très-familier, 
mais avec la signification de supplanter: On Ta dégoté. 

Despiter. Il m'a despité, mont. Dites: il m'a éclaboussé. Ce 
despiter est différent du despiter dont il a été question à l'article 
Dêsbspbctbr. Il vient du verbe simple spiter^ néerl. spuiten, ail. 
spritzen, trois mots dont jaillir, saillir et éclabousser ne sont 
que des traductions par k peu près. 

Nous terminons ici l'article relatif à Dé ou Dés. 

Dedans. 1" Mettre dedans, iomher dedans, v. ces verbes. 

2* n est dedatiSy il est devint, c*est-à-dire il est dans les vignes, 
il est ivre, il est pris de vin. Le complément du Dictionnaire de 
l'Académie et Bescherelle disent que cette locution est popu- 
laire. Littré l'admet sans observation; elle semble en tous cas 
prétérsiblehil est soûl. Il est devint signifie aussi il est dans 
l'embarras, il est dans la nasse, il est dans le pétrin. Il est dedans 
ne s'emploie pas dans ce sens. 

3^ Dessous le Pont-des- Arches, dî4(>« Cpont d's âehe.liég. Dites 



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-^ 164 •- 

souA le Pont-des-Arches.— DfMtis \\i\^deêsouê M^deéani le trou» 
désur Hy déxeur H, dédins Ctro, pat. de Mons. Dîtes: sur lui, 
sous lui, dans le trou. — Dessous l'arbre, dessus la terre, dedans 
une flaque, dizo Vaube, dissus Vterre^ didins on potia, namur. 
Dites: sous Târbre, sur la terre, dans une flaque. — Dedans la 
misère, divint Fdangi, pat. de Dinant. —Il est arrivé une grande 
famine dedans ce pays-là, il est arrivé ine grande famine d^daê 
ç*paîs4à, p. de Plorenville. Dites: dans la misère, dans ce pays- 
là. — Dessus le dos, d'sus tdos, p. de Niv. Dites: sur le dos. 

Jusque dans la première partie du XVII* siècle, ces mots ont 
été considérés comme prépositions; ce sont les puristes de 
l'époque, qui, sans rime ni raison, ont décidé qu'ils ne pouvaient 
être qu'adverbes. Racine lui-même, qui les a employés comme 
prépositions dans ses deux premières tragédies, s'en est abstenu 
absolument dans toutes les autres. Littré trouve qu'il est extrê- 
mement fâcheux que cette règle se soit établie: il en résulte que 
des passages de nos classiques, d'ailleurs parfaitement corrects 
et élégants, sont ainsi, pour le lecteur actuel, frappé d'incorrec- 
tion. Ex. C'est tomber d'un mal dedans un pire, Mol. Le sultan 
' dormait lors, et dedans son domaine Chacun dormait aussi, La 
Font. Mais dessus quel endroit tombera ton tonnerre, Qui ne 
soit tout couvert du sang de Jésus-Christ, Desbarreaux, ou 
l'abbé De Lavau. Cependant plusieurs poètes on essayé de faire 
revivre l'ancien usage. Mettez le pied dessus le cou des rois. 
Volt. (Ils) poursuivent un œil noir dessous la jalousie, A travers 
Téventail, Hugo, F. d'Aui. 28. Mais aujourd'hui la règle est de 
rigueur; elle ne soufire qu'une seule exception. Ces mots jouent 
encore le rôle de prépositions « quand ils sont employés en 
opposition et que le complément est placé après le dernier. » 
Van Hollebeke, Gramm« franc. § 788. Ex. Ce n'est ni dessus ni 
dessous de la table, Acad. — D'après cela, les exemples sui- 
vants, queLittré cite comme archaïques, sont encore aujourd'hui 
Dès-corrects: A parler dignement de Dieu, il n'est ni dedans ni 
dehors le monde, Fén. J'en voyais et dehors et dedans nos mu- 
railles, Rac. 



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— lôB - 

Déftkire. 1» Défaire son chapeau» fion habit, ses bas, ses 
souliers, sa redingote» dùfér s'chapai, si abit^ ses ehdsêe, ses 
9olér, si fraque, fl. zijne êchoenen^ zijne kleederen uiidom. Dites : 
ôter, quitter son chapeau, etc. — A Tournai et à Nivelles, on 
dit : je tire ma casquette, ftire enC casquetie, Lerat, les cheonq 
dotiers^ il ipi tire sa casquette, i lu tire esse casquette^ Us Avent. 
di Jean df Nivelles, v, 3^ vers. Cette tournure est aussi correcte 
que tirer son chapeau à quelqu'un, qui se dit en France. Nous 
lisons dans Littré : a Tirer son chapeau, l'ôter pour saluer. » 
Ex. Il ne m'a pas tiré son chapeau, Litt. Louis XIV s'endette et 
nous nous endettons, il flatte la finance et nous tirons le cha- 
peau, 6. Sand, les Mississipiens, Prol. se. III. 

Défaire, c'est changer l'état d'une chose, de manière qu'elle 
ne soit plus ce qu'elle était : défaire un paquet, défaire un mau- 
vais ouvrage. 

2^ Les milôrds (espèce de pommes de terre) se défont, quand 
on les laisse cuire trop longtemps, les milôrd si disfèt, qwand 
on lès latl eûre trop longtimps. Dites : se décomposent, s'en vont 
par morceaux. 

Défriser. Ça me défrise, ça m* défrise. Ge mot appartient à 
ce que Lorédan Larchey appelle Vargot social. En attendant qu'il 
ait reçu ses lettres de naiuralité, tenons-nous en à déconcerter^ 
contrarier : cela me contrarie. — Ici défriser est pris flgurément ; 
au sens propre, il est français : défriser une perruque. 

Déguiser. Aller voir les déguisés du carnaval, aller vH les 
d'guisé d'à carnaval. Bescherelle et Poitevin admettent le mot 
déguisé pris substantivement, mais aller voir les masques est 
préférable. 

Demander, lo On m'a demandé nne question, on m'a demandé 
W question^ liég., on m* a demandé enne question, mont , they 
asked me a question, angl. Dites : on m'a fait une question, on 
m'a adressé une question. — On ne dira pas non plus poser une 
question, du moins dans ce sens. Poser une question, c'est la fixer, 
la préciser. Ex. Il faut d'abord bien poser la question, âgad. 



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~ i«6 - 

S- Je demande à ee qu'on me laisse en paix, ji érmamde à çau 
qu'on mléîe è pale. Construction vicieuse, même en wallon, et 
qui provient de la confusion des deux tournures françaises 
demander à et demander que. La seule correcte est : je demande 
qu'on me laisse en paix, ji demande qu'on lUe è pâte. 

3« Demander excuse, — après quelqu'un. V. Bzcuse et 
Après. 

Dent.l* Un dent, on dint, liég., namur., m dinty mont. Dites : 
une dent. — Cette faute est assez fréquente. Ce wallonisme est 
un archaïsme : dent^ du lat. dcntem, m., a été masculin en fran- 
çais jusqu'au XV« siècle. 

2"* Avoir de longues dents, avu long iès dint, For., avu lès dini 
long^ Dict des Spot. Dites : avoir les dents longues. Mais, môme 
sous cette forme, cette locution constitue un wallonisme, si l'on 
veut faire entendre que les dents sont agacées par quelque sub- 
stance, par exemple par du firuit vert. C'est le sens de la phrase 
wallonne. Dans ce cas, on dit en français: avoir les dents molles^ 
LiTT. L'expression avoir les dents longues, Acad., outre l'ac- 
ception propre, n'a au figuré que le sens de avoir grande f^im^ 
après être resté longtemps sans manger. En ce sens, la tournure 
athoise avoir des longs dents, avoi des longs dets est fautive. Y. 
Bal/. A.70,2H.,p.l3B. 

Au sens propre, on pourrait dire, comme en wallon avoir de 
longues dents ; mais la tournure avec l'article défini est plus 
ordinaire et plus élégante. La Reine disait de lui [le cardinal de 
ReizJ qu'on n'était jamais laid quand on avait les denta belles^ 
Diderot. V. le mot Des, S*. 

S* Servir pour ses dents^ siervi po sès'dint, Foa. Dites ; pour 
sa nourriture. Ex. Prendre un domestique, un ouvr^^ pour sa 
nourriture, Acad. 

Depuis. !• Depuis làége jusqu'à Huy, il y a six lieues, dis- 
pâte Lige disqu'à Bu^ gna sixhe eure. Hennequin dit simplement : 
il faut : de Liège à Huy, il y a six lieues. Gela peut induire le 



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— 167 — 

lecteur h croire que depuis... jusqu^à ne peut marquer un rap- 
port de lieu. Or, comme le fait très-bien remarquer Benoit, on 
se sert de depuis,, jusqu'à, lorsqu'on veut insister : La France 
s'étend, de l'est à Touest, depuis le Rhin jusqu'à fOcéan, Agad. 
Boudha parcourait l'Inde centrale et orientale, depuis Uggajini, 
au nord-ouest du Vindbia, jusqu'au royaume d'Anga, à Test du 
Magadha, P. Devaux, Etudes polit., p. 82. 

2* Du depuis notre fête, il a été malade, du depuis no dueasse, 
ilasté malade, m'ont. Supprimez du : depuis notre fête.*. 

Derrière. Fermez la porte derrière vous, serrez touxke dri 
vos, machen Sie die Thuer hinier sich zu. J'ai entendu blâmer 
cette tournure. Les dictionnaires ne donnent en effet que les 
expressions : fermer la porte sur quelqu'un, tirer la porte sur 
soi ou après soi. Mais fermer la porte derrière soi, derrière 
quelqu'un se dit également. V. G. Sand, Af"« de la Zuiniinie, 
3- éd., Lévy, p. 223. 

DeSyDu, De, Un, Une. i"On demande des bons ouvriers, 
on imande dès bons ovn, liég. - On y boit de la bonne bière, on- 
z-y beût dèFbonne bîre^ liég.— -Voilà ce qu' on iii; c'est des fameuses 
bêtises (V. Fameux et C'est), voilà çou qu'on dit ; c'est dès fameuses 
biestréie, liég. — Ces gens-là ne nous ont point fait du mal, 
ces gint'là ni v's ont nin fait de md. — L'histoère dé pais d'Lige a 
dès bais boket^ Remacle traduit mal : a des belles pages. Dites : 
de bons ouvriers, de bonne bière, ce so7it de fières bêtises, 
de mal, de belles pages. — Des bonnes pommes de terre, dès 
bons canada, Namur. — Dites : de bonnes pommes de terre. — 
Des autres fautes, des autès féaute, tournais. Dites : d'autres 
fautes. 

La syntaxe française substitue la particule partitive de à 
l'article indéfini du, de la, de 1', des, dans des cas spéciaux, qui 
sont indiqués dans tous les manuels. 

2« II 2Lde longs bras, il a dès long bress'. Dites plutôt: il a les 
bras longs (au prop. et au fig.). — Avoir un nez On, avu 'n' tenue. 



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— 168 — 

ou V fetme narenne. Dites : avoir le nez fin. — Il a un menton 
pointu, il a an bèchou minton. On dit mieux : il a le menton 
pointu. — Il a une télé pelée, il a 'ri pèlêîe liesse. Dites : il a 
la tête pelée, — Vous avez une grosse tète, vos zavex 'rigrosse 
tiesse. Mieux : vous avez la téie grosse.— Autant de wallonismes 
que le liégeois doit à Tidiome teutonique. On dit en allemand : 
dieser Mann hat eine lange Nase, einen hleinen Muni. 

Cependant on dit aussi, en français : cet homme a un long 
nez, une petite bouche, mais la tournure n*a pas la même 
élégance, et, en tout cas, elle est peu usitée. Ex. Julien avait 
les cheveux doux, les sourcils charmants, le nez tout à fait 
grec, Ghatbàubr. Il [Alexandre] a les traits réguliers, le teint 
beau et vermeil, le nez aquilin, les yeux grands, pleins de feu, 
les cheveux blonds et bouclés, Barth. V. dAnach. Les Arabes 
ont le teint basané, les yeux noirs et vifs, Ratnal. Elle a le 
teint beau, Acad. 

4* Un bon verre de vin de Rhin, de Moselle, on bon verre di 
vin d'Rhin, d^Mozelle. Dites : un bon verre de vin du Rhin, de la 
Moselle. 

Forir traduit vin dopais par vin de pays. M. Carpentier, 
d'accord avec plusieurs grammairiens, condamne à tort cette 
façon de parler ; elle est consacrée par l'usage en France et en 
Belgique, et l'Académie l'a admise en lui donnant le sens de mit 
recueilli dans le canton Jorsque le canton ria pas un an renommé: 
Voilà d'assez bon vin pour du vin de pays. Acad. D'après Littré, 
on dit aussi le vin du pays, mais pour faire entendre le vin du 
pays dans lequel je suis : Vous allez à Tokay, rapportez-moi 
quelques bouteilles du vin du pays. 

8» Il y en a cent et des, i enri a cint et dès. Dites * U y en ^ 
cent et plus, il y en a cent et haïe au bout, ou il y en a plus de 
cent, il y en a cent et quelques. Ex. Nous étions à ce concert 
quarante et quelques, Litt. On dit aussi : Je lui ai donné 
soixante et tant de francs, Acad. 

Désobéir. Désobéir ses parents, ses maîtres, disobèi ses 
parint, ses maisse, Fou. Dites : h ses parents, à ses maîtres. 



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Obéir et désobéir sont intransitifs. Toutefois on peut les 
employer à la voix passive : Quand vous commanderez, vous 
serez obéi, Rag. Je suis désobéi. Volt. Peut-être bien qu'an- 
cieunement ou faisait de désobéir un verbe transitif. Dans ce 
cas, notre patois présenterait un vestige de la vieille construc- 
tion. 

Dessus, l*' Un dessus de tasse, ou i%mr {ine harboie ou 
ine eopette) di tasse. La périphrase est inutile en français, vu 
que la tasse est proprement le gobelet à anse dans lequel on 
prend le café, le thé, etc. Par imitation de cette tournure, on 
dit dessous de tasse pour traduire platai datasse. Le mot français 
est soucoupe. 

Deux l"* deux trois fois, deux trois co, Àurmonaq. di Nameur, 
a. 70, p. â5, fl, twee drie keeren. Dites : deux ou trois fois. — 
deux trois jours après, pat. de Mons, Bull. a. 71, p. 150, deuss* 
treus joû après^ p. de Liège, deux trois jiou après, p. de Pâtu- 
rages, deux trois jou après, Gosselies. Dites : deux ou trois 
jours après. 

i"" C'est nous deux monsieur N. qui ont fait cela, c*est nos deux 
Jf. iV. qu*oni fait coula. Dites: c'est M. N. et moi qui avons fait 
cela. V. Qui. 

3* Noua étions nous deux, nos estts nos deux, fl. wij waren 
ons getweeën ; vous étiez vous deux, vos estis vos deux ; ils 
étaient leur deux, tT estis leu deux, ou if estts zel deux. Dites : 
nous étions deux, vous étiez deux, ils étaient deux. — Ces 
enfants se querellent constamment, je n'aime pas à les laisser 
leur deux; dites : à les laisser ensemble, ou à deux. 

¥ MM«. Benoit et Carpentier condamnent la tournure : nous 
dtnons à deux tous les jours^ nos dinans à deux tos lès joû. 
Cependant on lit dans Bescherelle : « A deux, loc. adv., deux 
ensemble ; travailler à deux Jouer à deux, un voyage fait à 
deux. » /{ faut le tenir à quatre est une locution qui a cours. 
El la Fontaine a dit: sur le pauvre arbre ils se mettent à quatre. 



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ilO - 

— D'autre part , on trouve dans Corneille : Nous partîmes cinq 
cents ; mais^ par un prompt renfort^ Nous nous vîmes trois miUe 
en arrivant au port ; et dans Littré : fious étions sept cents 
hommeSf et nous ne sommes revenus que trois cents. — A bien 
examiner ces deux catégories d*exempies, nous croyons pou- 
voir établir comme règle que Ton supprime à quand on ne 
considère que l'idée de nombre, et que Ton met à lorsque Ton 
appuie sur Tidée de simultanéité, de concomitance, de société, 
d'accord. Nous pensons donc qu'on pourra dire nous dînons à 
deux tous les jours^ pour, nous dtnons ensemble tous les jours, 
et qu'on doit dire nous sommes deux à table tous les jours^ pour 
marquer le nombre de personnes qui dînent tous les jours. 

Devant. Faites cela devant de venir, fez coula divant de v'ni. 
Dites: avant devenir. — Ayez fait votre devoir avant que je 
revienne du marché, âtx fait vosse divoir divant quiji n'rivinsst 
de marcht. Dites : avant que je revienne... V. Ne, S"». 

Devant de, devant que et devant que de sont des archaïsmes 
qui ont été du meilleur usage jusqu'au XYII^ siècle, et qui se 
sont maintenus dans plusieurs patois, l/vunt de Kmincher^ lillois, 
avant de commencer. Divant do caressi f Champagne, riwaitiz 
vos boûsse, namur., avant de caresser le Champagne, examinez 
votre bourse. Devant d' choisi, *nia d^quoé avoè peu, p. -carolor. , 
Bernds, p. 37, avant de choisir, il y a de quoi avoir peur. — 
Ex. Il lui demanda, devant qjue de Tacheter, à quoi il serait 
propre, La Font. Vie d'Esope. — Devant que mourir, Rac. dans 
BfiscH. —Devant qu'il expire, Rac, dans Landais. 

Devinette. Une devinette, enne devinette, tournais., ineadvi- 
nat, liég. Dites: une énigme. Le mol est très-joli et mériterait 
d'ôtre admis. H. Charles Rozan Ta pris comme titre d*un cha- 
pitre de son ouvrage: A travers les mots (Paris, 1876). Notons 
toutefois qu'il lui donne un sens plus large, qui est indiqué dans 
le supplément de Littré. 

Devenir. 1<> Qu'est-ce qu'il a devenu? qu'est-ce qu'il adév'nuf 
Arménaq, dé Mons, 67. Dites: qu'est-ce qu'il est devenu? 



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- Î71 - 

f^ Le yinaigre fait devenir le lait à grumeaui, U vinaiguefait 
dWni Flessai à maton. Dites: fait tourner le lait, le change en 
grumeaux. 

Devenir à est un germanisme: die MUeh wird zu Klumpen^ le 
lait se change en grumeaux, devient grumeleux. (V. Maton.) Il 
n'est admis en français qu^avec le mot rien. Ex. Valère. Sous ses 
heureuses mains [du joueur], le cuivre devient or. - ■■ Hector. 
El For devient à rien. Regn., le joueur^ III, 6. 

Devoir. !• J'ai dû rire, ji (Pva rire. Dites : je n'ai pu m*em- 
pécher de rire. Le rire est spontané, or cette tournure française, 
faidûrire impliquerait le contraire.Mais on dira très-bien avec 
Dumas fils : Vous avez dû bien rire quand vous avez vu tout 
cela. Le Fils naturel, IV, 7. Ici vous avez dû signifie: Il est pro- 
bable que, on peut présumer que... 

2« 11 me le doit, î mè tdeûi, c'est-à-dire, il m'a offensé, il m*a 
joué un tour, je m*en vengerai. Le français dit: il m'en doit, ou 
je lui en dois, ou je lui revaudrai cela. 

3« Il doit h tout le monde, i deût à tôt Fmonde, I/Académie 
donne les tournures suivantes: il doit de tous côtés, à Dieu et à 
diable, à Dieu et au monde, au tiers et au quart. 

Diflérer. Je n'en diffère pas, ji ridiftire nin. Dites: je n'en 
disconviens pas, je ne dis pas non. 

Différer^ qui signifie proprement Ar^autr^, n'étrepaslemême^ 
peut s'employer dans le sens de n'être pas du même avis; on 
exprime, ou bien l'on sous-entend quelquefois les mois d^ avis, 
de sentiment, de manière de voir. Les philosophes diffèrent entre 
eux sur bien des choses, Besch. Les historiens dififôrent sur les 
points les plus importants, id. On remarquera la construction, 
qui est tout autre que dans la phrase en question. 

Dire, l"» Que dUez-yous î qui d*hM ? No le redisez pas, ne F 
rid^hez nin. Grossiers barbarismes au lieu de : Que dites-vous T 
ne le redites pas. 

2* Ce n'est pas pour dire, mais cette jeune personne n'est 
pas polie, d n^estnin po dire, mais eisse jon^ie fèie-là ri est nin 



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— 172 — 

honéte. Il faut : ce n*est pas pour médire. . . — Mais ce n'est pas pour 
dire est français dans le sens de sans se vanter.En. Ce n*est pas 
pour dire, mais je saurais en faire autant, Litt. Y. un ex. dans 
Sardou, Séraphine^ II, 6, au commencement. 

3<» Il a si peur, que ce n'est pas à dire^ il a si pawou {il a *n* 
têle crimeùre)^ qui c' n'est nin à dire^ il. dat het niet te zeggen is. 
Dites : il a une peur épouvantable. — Je le hais si fort, que ce 
n'est pas à dire^ je l'hés si télemint qui c' n'est nin à dire. Dites : 
je le hais plus que je ne puis dire. —Le texte suivant de Besche- 
relie présente une tournure qui se rapproche assez de ce 
wallonisme : J*ai un besoin de manger qui ne peut se dire. 

La tournure ce n'est pas à dire s'emploie, mais avec un autre 
sens : ce n'est pas à dire que.,, ou, ce n'est pas à dire pour cela 
que.,., ce qui signifie : n'allez pas croire que... 

i'* Se laisser d dire, s' Uî à dire^ liég. s' leyér à dire, mont. 
zich gezeggen laten, tl. Dites : se laisser persuader, sâ laisser 
faire, ne pas défendre, ne pas opposer de résistance, se rendre, 
céder, se laisser aller. Ex. Peut-être vous seriez-vous laissé 
aller en faveur de la musique, M*»* n'EpiNAv, Mém., II, p. 31. 
Son tuteur Ta marié, il s'est laissé faire, Acad. Il s'en défendit, 
[d'être élu roi] sans s'émouvoir, Fén. Quand même, dit Saint- 
Ghrysostome, tout le monde vous appellerait [à une dignité]... 
examinez les qualités de votre âme, et ne vous rendez point, si 
vous vous trouvez indigne de cet honneur, Mass. 

8» Vous avez beaucoup souffert à cause de cet homme-là. — 
Vous pouvez le dire. Vos 'nn'avez vèiou des grise avou c't homme-là. 

— Vos polez Vdire, ou vos polez bin Vdire, fl. ge moogt het teggen. 
Il faut se servir d'une autre tournure : Oh ! cela est vrai ! Je 
vous en réponds ! soyez-en convaincu! Oh! ne m'en parlez pas! 

— Il est de même de qu'est-ilvrai ! qu'est-i vraie ! qui s'emploie 
de la même manière. 

6*» Vous êtes un sot, je vous le dis, moi ! vos este-^ on sot, ji v's 
el dis, mi ! Cest moi qui votM le dis est la vraie tournure fran- 
çaise. Ex. Et laisse venir demain, tu verras comme il sera fait, 
c'est moi qui te le dis, Mariv. 



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— 173 — 

7* Ecoutez-moi, d%Uil\ n'allez pas le, dit-il\ car vous pour- 
riez bien vous en repentir, dU-U; hautez-m', diMM; n allez nm 
là, dU-st'i^ ea vos paiiz bin v's è r'ptnti, dU^sUi. Les deux der- 
niers dit-U sont de trop. Ces dis-je, qui dit, dit-il, qu'il dit, 
répétés à satiété sont insupportables dans le discours; et 
cependant que de Wallons vous en assomment sans pitié après 
chaque membre de phrase, et ce, jusqu'à la fin du récit : non 
mmuraeutem... 

Disparution, For. Dites : disparition 

Disputer (Se). Il s'est disputé avec Pierre, i s'a disputé avou 
Piére. Dites : il a eu une querelle avec Pierre. — Ils s'étaient 
disputés, i s'avi disputé. Dites : ils avaient disputé, et mieux, 
ils s'étaient querellés. — I a*ont disputé onk conte di faute ; 
Forir traduit : ils se sont disputés entre eux ; il vaut mieux 
dii*e : ils se sont querellés ensemble. 

Se disputer est un verbe réfléchi formé d*un verbe intransitif. 
V. Encourir. Cette façon de parler se rencontre même dans des 
ouvrages fi ançais : Te rappelles-tu comme nous nous sommes 
disputés sur la peine de mort, Montalenbert, lettres; éd. Lecoffre, 
p. 183. Je ne croyais pas raisonner en faisant des citations d'au- 
teurs; ils se sont disputés de leur temps, Jacotot, langue mater- 
nelle. Littrédonne lesdeuxphrases : ils se sont longtemps disputés 
ensemble, il se disputa avec son portier, comme apparienant 
au langage tout à fait familier. Toutefois il semble être de l'avis 
des grammairiens qui condamnent cette locution. Au surplus 
disputer s'emploie rarement dans le sens de se quereUer, et il 
signifie plutôt avoir sur une chose quelconque une vive dis- 
cussion avec quelqu'un. La différence est bien marquée dans ce 
passage d'une lettre de Racine à Boileau: Il y eut contentement: 
non-seulement on disputa, mais on se querella, et on se sépara 
sans avoir trop envie de se revoir de plus de huit jours. Hais 
on dira très-bien, avec Florian : Un bœuf, un baudet, un cheval 
se disputaient la préséance; se disputer une chose se dit de plu- 



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- 174 - 

sieurs personnes qui luttent entre elles pour la possession d'une 
chose. 

Dlvoroer. Quand il faut se divoveer, c*est une chose déplo- 
rable, For., qwandii^fdi tvôreer^ c^est on Und meêsège, — Il 
veut se divorcer, i vaut s'divârcer. U vaut mieux dire : quand il 
ÙMi divorcer..., il veut divorcer. 

yAcadëmie et Littré ne donnent ce verbe que comme in- 
transiiif. Ils ont divorcé, elle a divorcé avec lui, Agad. On 
divorçait très-facilement à Rome, Litt. Toutefois on trouve 
dans Bescherelle les tournures suivantes : Il a divorcé sa 
femme (sic!); ces époux sd sont divorcés; se divorcer d*avoc sa 
femme. — Il est étonnant que Littré, toujours si complet, ne 
fasse aucune observation à propos de ces deux manières de 
parler, d*autant plus qu'à rbistorique il cite ce texte du XYI* 
siècle : Gomme s*il était à louer de s'estre diverse d*avec sa 
femme Terentia. Se divorcer est, comme se bouger, et se dis- 
puter, un verbe réfléchi formé d*un verbe intransitif, c'est le 
bas latin divortiare (verbe inir.) v. Encourir. 

Donner. 1* Il lui a donné tous les noms, i U a d*ni tos lès 
no. Dites : il lui a dit mille injures, il lui a dit mille pouilles, il 
lui a lancé toutes sortes d'épithètes. Quelques personnes tra- 
duisent à tort par : il lui a donné des épithètes. On dit donner 
des épithètes à quelqu'un, mais dans un sens plus général. 
Ex. C'est en partie de la liberté que nos pères prenaient de 
donner des épithètes aux personnes, qu*est venu Tusage des 
noms propres de famille, Ddnarsais. C'est attribuer à quelqu'un 
telle ou telle qualification : U grand Chdlc, U gros Pxére^ MaH 
Pcrollé (en liégeois» sorloumer Us gint). 

2* Il m'a donné des sottises, t m'a d^né dès sottise, p. de Mons. 
Dites : il m'a dit des souises.--- Sottises, pour injures, est admis 
par l'Académie. 

«3« Je me suis donné à connaître, ji m'a Sné à knoxhe,é{\. ieh 
habe mich m erkennen gegebeti. Il fïiut dire : Je me suis &it con- 



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naître. Mais les auteurs d*Omnîbus oot tort de condamner 
absolument la tournure donner à connaître^ qui pourrait s'em- 
ployer avec un sens moins précis: Ne lui donnez pas à connaître 
que... Cet exemple est tiré du Dictionnaire de l'Académie. — 
y. un autre exemple dans Sainte-Beuve, notice sur Toeppfer, 
p. 17, et un plus ancien dans la Font, les Amours de Psyché, éd. 
Walck, p. 434. On peut comparer l'anglais : give me to know. 
4'' Donner leçon en ville, diner lèçoti è Tvèie, fl. les in de stad 
geven. Dites: donner des leçons en ville. Il s'agit ici de leçons 
particulières. On disait plaisamment d'un ancien professeur 
assez médiocre, dont la femme faisait le commerce de farine, 
qu'il vendait la farine chez lui, et donnait leçon au collège. 
Supprimez le wallonisme, le jeu de mot disparaît. ^ Dans cet 
exemple, leçon s'entend de l'instruction donnée du haut d'une 
chaire, et, en ce cas, on ne dit pas bien donner leçon, donner sa 
leçon, donner cours, donner son cours, bien que ces locutions 
soient généralement employées en Belgique. Il faut dire: fiiire 
une leçon, faire sa leçon, faire des leçons, faire son cours, faire 
un cours. 

Dommage. C'est damage^ c'est damage, liég., mont. Dites : 
c'est dommage. Celte forme vicieuse se retrouve dans toute la 
Wallonie, jusqu'à Lille et Valenciennes. Elle provient de Téty- 
mologie : damnaticum, de damnum, dommage. 

Doré (Pain). Manger des pains dorés, magnt dès pan dorés, 
liég. ; le roucbi, le douaisien et le montois disent des paitis 
crottés. Le patois de Lille a pains perdus. C'est le terme admis 
par Bescherelle et Littré. Il désigne des tranches de pain 
trempées dans du lait,ensuitedans des œufs battus, et qu'on fait 
frire dans la poêle. On pourra, pour l'éiymologie, comparer à 
gdteau, qui vient de gâter (tourmenter la pâte). 

Dormir. Il a dormi dehors, il a doirmou foû (ou il a doirmou 
a pice) fl. hij heeft buitm geslapen. Dites : il a couché hors de 
chez lui, il a découché. — Il est si malheureux, qu'il dort sur la 



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— i7« — 

terre» il ett H mdlureux, quH daimme à Vtêre (ou <o lèi ptre). 
Dites : qu'il couche sur la terre, sur la dure, sur des planches, 
ou sur le plancher, Acad. 

Dormir ne peut s'employer dans le sens de coucher^ passer la 
nuit. Quant à découcher^ il faut se garder de lui donner la 
signification qu'il a dans les patois de la Flandre française 
s'décùuquer, se lever, sortir de son lit. Beaucoup de personnes 
font cette faute, même à Liège: il n'est pas encore découché^ 
pour il n'est pas encore levé. C'est un archaïsme. 

Dose. Les Wallons appellent ainsi « Fenflure qui résulte 
d'une piqûre de puce ou de cousin, ou d'un coup d'une étendue 
restreinte, ou d'un bouton produit par la chaleur. » Delboeup, 
H Mate neûr^ p. 88. Il signifie aussi pinçon. Ex. Il a des doses 
partout sur le bra$, il a dès dôce tôt avâ s'bress\ Dites, suivant 
le cas, il a des pinçons, des élevures, des ampoules. 

Douoearâ. Les enfants aiment les douceurs, lès èfani 
ainmet lès douceur. Je lis dans un recueil d'Omnibus : « Dites : 
les friandises, les sucreries, les chatteries. » — L'Académie ne 
parle pas en effet de ce sens concret du mot douceur ; mais à 
côté, et parfois au-dessus de l'Académie, il y a l'autorité des 
grands écrivains. Corneille a dit : Acceptez cependant quelque 
peu de douceurs. Fort propres en ces lieux à conforter les 
cœurs; Les sèches sont dessous, celles-ci sont liquides, Sui^^ 
du Ment. II, 6 ; et Gresset : Mille bonbons, mille exquises 
douceurs Chargeaient toujours les poches de nos sœurs, Vert- 
Vert. — Le mot est français en ce sens. 

Dozal. Monter sur le doxal, monter so Vdoxàl. Dites: monter 
dans l'orgue, ou aux orgues, Besch. On se sert de ce mot daos 
tout le pays wallon, de Verviers à Lille. Encore un emprunt fait 
à nos frères les Tixhons, C'est le flamand dexaal, qui vient, dit 
Ilécarl, du grec doxa, la gloire ; Yermesse, renchérissant sur 
son prédécesseur, dérive directement le lillois doxal du même 
mot grec. On ne s'attendait guère à voir le grec dans cette 



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— 177 -^ 

affaire. Cest bel et bien une étymologie à la Vaugelas. Le fi. 
doxaal est composé de dok^ bassin (dock)^ et de zaal, salle : 
salle en forme de bassin (Liit.). — On traduit généralement 
doxal par jubé ; autre erreur manifeste. Notre doxâl est la tri- 
bune où sont les orgues ; le jubé est une espèce de tribune, un 
lieu élevé dans une église en (orme de galerie, et qui est ordi- 
nairement entre la nef et le chœur ; ex. chanter Tévangile au 
jubé; TAcAD. Bbsgh. et Litt. Peu d'églises ont conservé Fusage 
du jubé, Bsscfti. — Il faut traduire d&ital par orgue. « Orgue se 
dit aussi du lieu élevé où les orgues sont placées dans une 
église : ex. il était dans l'orgue, aux orgues, pour chanter un 
motet. » AcAO. 

Drap. 1* Un drap demain, V. Essui. 

2« Un drap de maison, on drap d^mohonne. Dites : un torchon. 

3<* Un drap de tasses, on drap datasse, ou on drap d^hielle. On 
emploie en France les mots torchon ou lavette ; ce dernier rend 
littéralement le wallon lavrai, qui a la même signification. 

4<» Des draps sales à buer, dès mdssis drap à bouwir. On dit : 
du linge sale à blanchir. 

S<» Mettre sécher les draps de l'enfant, mette souwér lès drap 
(f Vèfant. Le vrai terme est couches, pièces de toile dont on 
enveloppe l'enfant, Acad. On dit aussi abusivement les langes. 
Notons que le rouchi, le picard, le lillois et plusieurs autres 
patois français emploient le diminutif drapiau dans le même 
sens. 

6« Un drap de pied, on drap iptd. Dites : une descente de Ut. 
y. Carpette. 

Drève. Prenez par la drive de tilleuls, vous irez droit au 
cb&ieau, prindex po Fdrève di tfiou, vos irez dreût à ehestai. 
Dites: prenez par l'allée, l'avenue de tilleuls... 

Ce terme, emprunté au néerlandais {dreef, de drijven,meneT, 
conduire), est usité dans toute la Wallonie et dans la Flandre 
française. H. Poyart regrette vivement qu'il ne soit pas admis 



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- 178 — 

par les dictionnaires Trançais ; il faut convenir qu'il y ferait 
meilleure figure que maints vocables disgracieux; n»ais il y 
ferait double emploi avec allée ei at;f9tue;j*uiinerais autant expri- 
mer le même vœu pour nos mots liégeois machine (Texhaure 
(LiTT. SuppL), botletessey dorée y avoir bon, horkai {gorge des auver^ 
gnaisî Dict. analog.), eseabelle ( double échelle ), fôke ou balette, 
boubou, qui n*ont guère de correspondants dans les dictionnaires 
français. 

Dringuelle. Donner la dringuelle aux ouvriers, dinér Fdrin- 
guelle^ au Fdnnhelle ûx ovri, liég., bâyér n'dringueîe aux ouvé- 
riers^ mont. Dites : donner le pourboire aux ouvriers. Il fout 
remarquer l'emploi de Tarticle défini, conforme à Téiymologie : 
{tf sou pour boire. 

Le wallon perd de vue Tétymologie du mot {drink-geld.dLVgeni 
pour boire), et remploie même en parlant de la femme. Il n'en 
est pas de même de pottr6ofr^,qui, dans ^e dernier cas, doit être 
remplacé par épingles: Rattindez, feume,vola n^drinhelle^Meudez, 
brave femme, voilà pour des épingles, a Pourquoi la langue 
française rougirait-elle de nous emprunter ce mot- là, surtout 
n'en ayant pas un meilleur , ni même un seul (?), pour rendre 
la même idée? » Le vœu de H. Poyart est exaucé , en 
partie du moins, pour ce qui concerne notre pays; les per- 
sonnes les plus instruites ne se font pas scrupule de se servir 
du mot dringuelle. Reste l'approbation de la docte Compagnie. 

Droit. Il a reçu tous ses droils, il a r'çu tous ses droits, mont. 
hy heefl al zijne rechten gekregen. Dites : tous les sacrements, 
LiTT. Le curé lui a donné tous ses droits, li curé li a (tné tôt sis 
dreût. Dites : le curé lui a donné tous ses sacrements, ou les 
derniers sacrements, Aan. 

DroUedement. Il s'est tiré drolledement d'affaire,... drolle- 
dimint, liég., drolledémint, mont. Dues : drôlement, ô long. 

Drôle (ô long). 1* Vous êtes un di6le, vos estez on diolle. Il 



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479 — 

&ui dire: vous ôtes un drôle d*horome, un drôle de corps; on 
veut exprimer par là qu'il y a en lui quelque chose de singulier 
et de plaisant. Vous êtes un drôle, est un terme injurieux équi- 
valent à un polisson, un mauvais sujet, un maraud; en wallon, 
vos estez on câlin. Il est bon de remarquer que câlin (ft long), en 
français, signiQe flatteur, cajoleur. Ex. CTest un petit câlin, une 
petite câline. 

S"" Voilà une drôley vola n*drolle. Dites : voilà une drôle de 
chose. Drôle, dans le sens de plaisant, peut se prendre substan- 
tivement, mais doit se construire avec la préposition de et un 
nom. Ex. Une drôle de femme. Lin. Une drôle de tournure, 
AcAO. Une drôle de chose, Volt. Une drôle d'aventure, Gouribr. 
— C'est de là que provient l'adverbe wallon drolledimint. 

4^ Se seniïr drôle, s'sinti droite, p. de Mons. Dites : Se sentir 
indisposé. Gela se dit surtout lorsqu'on éprouve un malaise 
qu'on ne saurait définir. Le français populaire a l'expression se 
sentir tout chose, Littré admet la tournure : je suis toiU je ne sais 
comment, V. Chose, !<" et Faiblir. 

Duoaoe l"* Aller à la ducace, aller à Vducace^ tourn. mont. 
On vous invite à la ducace, on vos invite à Vducaee^ mont. Dîtes : 
à la fête, à la kermesse. — Un jour de ducace^ on jou ddUsauce^ 
namur. Dites : un jour de fête, de kermesse. 

On emploie aussi quelquefois ce mot dans le pays de Liège 
(Rbh.), où il a, mieux que dans le Hainaut, conservé sa forme 
primitive : dicdce, par aphérèse, pour dédicace. C'est en effet 
proprement la fête annuelle qui a lieu en mémoire de la consé- 
cration d'une église. L'Académie recotinatt ce sens particulier 
au mot dédicace. L'exemple suivant est de Du Gange : Une fête 
que l'on appelleau pays [Boulogne] dédicace ou quermesse (sic). 

Le flamand kermis, kermesse, est une abréviation de kerkmis^ 
dédicace. Cbose étrange ! le mot d'origine française ne se trouve 
que dans de rares dictionnaires français, et le mot kermesse a 
éié admis par l'Académie; mais aussi l^s kermesses flamandes 
ont été immortalisées par Teniers et par Rubens ! 



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— 180 ^ 

2* Faire dueace^ expression flgurée que Ton emploie à Tournai 
pour faire bombance, eà vieux liégeois /i^r bonne dre (Caire bonne 
chère). On dit familièrement faire ripaille. 

Durant. Sa y\e durante, si vikaréie durante, ou, duran/, For. 
Dites: sa vie durant. 

Dtiran/, placé après le substantif, n*en reste pas moins invaria- 
ble; c'est du reste après le nom qu*on a dû placer primitivement 
le mot durant, qui était, dans le principe, participe présent, et 
n'avait qu'une seule forme pour le masculin et le féminin. 

Durer. Depuis qu'on Ta demandée en mariage, elle ne dure 
plus, dispue qu'on Va demandé à marier, elle ne dure pus, p. de 
Hons. Dites: le temps lui dure, Acad. 



B. (prothèse de V). On entend souvent dire dans le Hainaut : 
une épincetle, une ètnaile, une étricoise, un éciseau, (in écisiau)^ 
des éciiquettes, ( dis icliquoites, liég. cliquette, sorte de casta- 
gnettes du gamin de Liège), mont, des émouehettes, tournais. 
A^séplènures, id. 

Supprimez IV et mettez les noms au pluriel : des pincettes (on 
dit parfois une pinceite), des tenailles, des tricoises (tenailles à 
ferrer), des ciseaux, des claquettes, des mouchettes, des pla- 
nures. 

Eau. 1* Avoir Teau, avu Faiwelenne, liég. het water hebben. La 
traduction avoir Veau a subi l'influence de la tournure flamande, 
le mot à mot serait avotV /Vau /«/t/e. Il faut dire: être hydro- 
pique, ou avoir une hydropisie. 

2* Nous avons de grandes eaux, nos avans dès grantès aiwe^ 
Dites : les eaux sont grandes, ou grosses, ou hautes, Acad. 

S*" Mes souliers font eau^ mes sole fèt aiwe (For.), ou pmhèt. 
Dites : mes souliers percent. Forir traduit : /o»/ eau. Faire eau 



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- 181 — 

est on terme de marine ; il se dit en parlant d*un vaisseau 
qui a une fente par où Teau s'introduit. 

Ecaille. Eoale. Le^( Liégeois traduisent généralement 
hâgne et haïe par écaille. Etymologiquement, haïe et écaille 
représentent la racine germanique schale, qui a toutes les signi- 
fii*.ations de hdgne et de hale^ sauf celle d'ardoise. Huie n*a con- 
servé que deux acceptions de schale, écaille de poisson, carapace 
d'écrevisse; hdgne Si pris d'autres signiûeations. Mais le français 
a deux formes venant directement de schale: écaille et écale. Ce 
sont deux prononciations dialectales, qui furent à la longue 
admises conjointement dans le parler de rile-de-France, ou, si 
l'on veut, dans la langue commuue, et dont on profita pour 
séparer des significations différentes du même thème primitif. 
Il s'est produit, à propos de ce mot, le même pliénomène que 
l'on rencontre à propos des mots labeur et labour^ eheneau^ 
chetiûl et canal ; escale et échelle, œuvrer et ouvrer ; chefti cap; 
plier et ployer; chdleau et caslel, le Calelet et Chdlelet; camp 
(prononciation picarde) et champ; cause et chose^ effroi (dial. pic.) 
et effrayer (dial. norm.); attaquer et attacher. 

Dites : des écailles de poissons, dès.haie di pèhon, liég., et 
non pas des écates ; dites : des écailles d'huttres, Litt. de 
moules, dès hâgne di mosse^ dCuitte^ liég., dès ècale ihuite, 
dCmourmoulellCy rouclii, tournais., et non pas des écales. — 
Mais dites : des écales de noix, dès vettès hâgne di gète, et non 
pas des écailles de noix. 

Il importe de noter que, dans ce dernier exemple, lemot écale 
désigne le brou ou Tenveloppe verte de la noix; lorsque, par 
hâgne di gèie, on entend l'enveloppe ligneuse de la noix, il faut 
traduire par coque ou coquille, et non pas par écale. Cette 
dernière faute est presque générale dans notre pays. Rendez de 
même hâgne di neujrhe, d^ amande (l'enveloppe ligneuse) par 
coques, ou coquilles de noisettes, d'amandes. £ca/^« de noisettes, 
Samandes, en ce sens, est un barbarisme qui fleurit dans toute 



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la Belgique. — Ne dites pas des écailles d*œufs, dès hdgne d^oû, 
mais des écales, des coques, ou des coquilles d*œuf ; il y a des 
nuances ; ainsi on dii manger un œuf à la coque, grand tout au 
plus comme une coquille d*œuf, jeter des écales d*œufs. - Ne 
dites pas des écailles de poix, de fèves, dès hdgne di peu^ di 
/St;^. Dites : des gousses, des cosses de pois, de fèves; le liégeois 
a aussi hoche dipeu. Le français écales depois^ Acad., désigne, 
non pas l'enveloppe bivalve qui renferme les pois, mais la peau 
des pois, qui se lève quand ils cuisent. 

Il suit de là que dihâgnetér dès gèïe se rendra par écaler des 
noix, c'est-à-dire enlever le brou ; et dihdgneter dès où par écaler 
des œufs; dihdgneter dès peu, dès fève, se rendra par écosser ou 
éplucher des pois, des fèves ; on dit aussi dérober des fèves, Litt.; 
mais on dira : les pois s'écalent quand ils ont bouilli. Enfin 
dihaîter on pèhon se traduira par écailler un poisson. 

Bchôt. Un éehèt de fil, ine èchèt ffi, liég., eune èquet d'fU, 
rouchl, enneèquet dCfU, mont. Dites: un écheveau de fil. Le 
vieux français disait eschet. Un échei de laine, ine èki dHainne, 
liég. Dites : un écheveau de laine. Le liégeois a aussi le mot 
hâspléte. 

Eorltolre. Un bel écritoire en verre., on bai seriflùr di veule. 
Dites : un bel encrier en verre, ou de verre, car l'un et l'autre 
se disent, d'après Litt. 

Ecritoire est le nom d'un petit meuble portatif, où Ton met 
tout ce qu'il faut pour écrire ; mais, à en croire l'Académie, on 
l'emploie abusivement, même en France, pour encrier. Dans 
tous les cas, il est féminin. Le liégeois et l'ancien français lui 
conservent le genre correspondant à Tétymologie {scrîptorium). 
Ex. Et portait ung gros escriptoire pesant plus de 7,000 quin- 
taulx, Rab. 

Bduquer. Un enfant h\en éduqué, ine èfant bin éduqui. On 
dit mieux un enfant bien élevé. 
Littré dit que c'est un néologisme. Cependant le peuple en 



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- 183 - 

fait partout un grand usage dès la fin du XVIII" si^^cle. Chose 
étrange ! (^e mot est parfaitement formé sur le latin educare^ 
qui a la même signification ; il est arrivé escorté d'une famille 
de mots marqués au meilleur coin : éducation, éducateur, édu- 
catrice, et il n*est entré dans la langue que par la bouche du 
peuple. Il fleurit dans tous les patois, et en France et en 
Belgique ; il est enregistré dans la plupart des glossaires locaux, 
Vermesse, Sigart, Hécart, Forir, Remacle, etc. De ^lékr, iHos 
auteurs en usent: Vos jdnes homme $i prévenons (suflBsants, 
présomptueux, signification omise par les dictionnaires), tCsont 
ntn bin éduqués, HocK, Ann. A. 62, 4'' 1. p. 46.— Hais sitôt que 
Ton a essayé de Fintrodulre dans la langue littéraire, il y a excité 
la répugnance la plus vive, et, il faut le dire, la plus imméritée. 
Qu'y faire? l'usage s'est montré capricieux; mais il faut se. 
soumettre à l'usage. 

Bffort. l"" Avoir un effort^ avu 'n' effâr^ Rbm. Dites : avoir 
une hernie (produite par quelque effort violent). L'Académie dit 
que, dans ce sens, le mot effort est vulgaire. 

2* Notre cavale a un effort des reins, nosse cavale a Veffârt di 
rein, Rbm. Heiinequin biftme à tort ce mot, qui, d'après TAca- 
demie, désigne un tiraillement douloureux de quelque muscle, 
produit par quelque effbrt violent (particulièrement à la région 
lombaire, Besch.). 

Embarras. Faire de ses embarras, fér dsès embarras, 
Dblchef. les deux Nev. III, 6. En français, d^est de trop: Faire 
ses embarras, Litt. On dit aussi, faire des embarras, Litt., faire 
de l'embarras, Acad. Besgb., et faire beaucoup d'embarras, 
Bbsch. 

C'est à tort que Benoit condamne toutes ces locutions et 
engage à y substituer celles-ci : faire Fimportant, l'homme d'im- 
por lance, être suffisant, prétentieux. Il en^ est de même de 
faiseur d'embarras, feseux dHmbarras, tournais., qui se trouve 
dans Beschereile et dans Littré. 



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- 184- 

Emplâtre. Mettre une empifttre, mette ine èpldse^ liég. ane 
èplause^ namur., enne implâte^ mont. Dites: mettre, appliquer 
un emplâtre. Le genre d'emplâtre a été longtemps flottant ; 
venant du latin emplasirum^ il devuit ôtre du masculin, mais la 
désinence féminine fa souvent emporté. Ex. Il en fit une 
emplâtre, texte du XI^ s., dans Litt. t//i^ pf(ife emplâtre en 
losange, Hamilton. 

Bmployé. Les voilà tous trois dans le trou, c'a été bien 
employé, ou c'est bien employé, Dim Vtrô lèzè v'ià, tous lis taës^ 
c^astibon aployi, p. de Gbarl. Beknus, p. 41, 't is wel besleed^ 
fl. Cette tournure correspond au wallonisme liégeois : c'est par 
lu. H faut dire : c'est bien fait, c'est pour leur compte, ils Tont 
bien mérité, ils ont ce qu'ils méritent, ils l'ont bien gagné. 
V. Pour, !•. 

En. 1» En préfixe correspondant au lai. m (tn, dans, ou in 
privati'f.)— La vieille langue française avait transformé le préfixe 
latin tn en en : insigne^ enseigne ; intenderet entendre ; invidiat 
envie; in odio^ ennui. Les mots de formation nouvelle conservent 
mieux l'empreinte latine ; un insigtie voleur, intendant^ intact ; 
au XIV* et au XV* siècle, les savants ont même refait quantité 
de vieux mots français : intention^ enteucion; instinment^ estru- 
mfitl. C'est ce qui explique la présence simultanée de tn et de en 
dans des mois de même famille : enjoindre, injonction; ennemi, 
inimitié; entier, intègre. La langue a même profité de la circons- 
tance pour séparer des significations de la racine ; c'est le cas 
pour entier et intègre. 

Le langage populaire introduit encore de temps en temps 
l'antique particule en dans certains mots où la langue gramma- 
ticalea repris la particule latine m /ainsi on entend souvent dire: 
enflammation^ enflammable, inutile^ énutilité, inutilement^ et le 
peuple, en traduisant de la sorte des mots wallons qui pro* 
viennent de mots latins renfermant le préfixe tn, montre comme 
il tient à ses anciennes formes de langage. 



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"• 185 — 

Enfièreté, dont tout le inonde se sert en Belgique, n'est pas 
du tout un barbarisme ; c'est un vieux moi fiançais, fait dHnte- 
giitatem^ comme mtier est fait d'inleger, Cesi ce que prouvent 
deux vocabulaires latins-francais, Tun de Gaen, 1529, et Tautre 
de Paris, 1622; on y lit : integritas^ entièreté (Agnbl, p. 49). 
Hais actuellement ce mot est inconnu en France. Un morceau 
ne me suffit pas, dit le lion, je prétends Tentlèreté, m baquet 
fi' m'ahesse nin, ditst-i Flion, ji vaux Cétîrié. Dites : je prétends 
le tout, la totalité. 

Intégrité^ mot qui a été refait par les savants, correspond 
parfois au wallon èttrU. Ex. Il a remis le dépôt dans toute son 
intégrité ; conserver Tintégrité du territoire, Litt. En certains 
cas, on pourra le rendre par entier^ pris substantivement. Le 
Parthénon subsista dans son entier jusqu'en 1687, Ghateaubr. 

2» X!n, particule servant à former des verbes composés. — 
En vertu du privilège que le langage populaire a conservé, et 
sur lequel nous nous sommes étendu à Tarticle dé^ le peuple 
continue à forger des verbes composés avec la particule en et 
d'autres mots pris dans son propre fonds. Nous passerons en 
revue quelques-uns de ces verbes qui tentent de s'impatronîser 
dans le parler français de notre pays. Aucun de ces mots, hors 
emblaver, embrener et engraisser^ n'a reçu l'estampille obligée 
de PAcadémie. 

A) Bmbarboulller, èbarboul, Rem. Il s'embarbouille aisé- 
ment, t s'èbarbome dhèiemint. L'Académie dit : il s'embrouille 
aisément, c'est-à-dire, il perd le fil de ses idées, il se perd dans 
ce qu'il dit. Le mot est déjà ancien: Ex. Les conférences conti- 
nuaient à Rastadt, Viilars s'y embarbouilla si bien, qu'il fiillut le 
désavouer, St-Sim. 

Ebarboui veut encore dire au village, enjôler^ Rem. Dans ce 
cas, l'Académie dit : il s'est laissé embabauiner. 

B) S'emberlificoter dans une corde, dans ses explications, 



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— 186 — 

s'imberlificotér ding *n' corde, dins ses esplieationSf mont. Terme 
populaire, selon Liitré; il équivaut à 8*embarrasser. 

G) Embêter. Tu m*embètes,<t m'emhétesMé^;. Dites: tu m'en- 
nuies. Le mont, imbéter V saki signifie de plus tromper quel^ 
qu'un. Embêter ne peut être employé dans aucune de ces deux 
acceptions. Embêter^ embêtant et embêtement sont très-triviaux, 
LiTT. « Ces trois mots, il est pénible de le dire, sont générale- 
ment répandus parmi nous. » Note de notre bon vieux Forir, 
dans son Dictionnaire. 

D) Emblaver. Les voilà bien emblavés, vo-les-là bin èblavês^ 
liég., lèzè v'ia bin imblavês, mont. Dites : les voilà bien embar- 
rassés. Vieux fr. emblaer, même sign. — Pour Littré, c'est le 
même mol que le français emblaver une terre, Acad., èblaver'n' 
têre, liég., ensemencer une terre en blé, parce que la récolte 
sur pied encombre le champ. 

E) Embrener, mont, imbernêr, par métaihèse. Ce verbe est 
compobé d'un mot mon lois et français synonyme de celui auquel 
V. Hugo a consacré tout un long chapitre dans ses Misérables. 
Et cependant il a eu les honneurs de l'admission dans le Dic- 
tionnaire de la docte Compagnie. Il est de fait qu'au figuré il est 
assez énergique. Ex. On l'eût admiré [à un bal royaliste] à cause 
de moi, qui suis la pureté même ; car j'ai été pur dans un temps 
où tout a été embrené, Couhier, dans Litt. L'étymologie de ce 
mot est moins apparente pour nous Liégeois, qu'elle ne Test 
pour ceux qui habitent les bords de la Haine; mais s'il nous 
paraît déjà grossier, que dire du verbe liégeois correspondant, 
dont la racine est le fameux mot qui, selon la lé:.ende, retentit 
un jour si énergiquement dans les plaines de Waterloo ? Tout 
homme qui a tant soit peu d'entregent se gardera de le tirer des 
bas-fonds du langage populaire ; il ne peut appai tenir qu'à un 
genre de littérature que Lamartine, dans son cours familier, a 
fort bien qualifié, la littérature de sentine \ 



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- 187 - 

F) Embroulllaaniiii, mont, itnbrouïe. Il est btàmé à tort par 
Benoit et par Chapsal. Littré ciie cet exemple de Voltaire : Il y a- 
au troisième acte un embrouillamini qui me déplaît; et il ajoute : 
ce mot est fait d'embrouiller ^ sur le modèle de brouillamini. 

G) Emmuralller, emmurer. Un closeau emmuraillé, on 
eotehai èmuraillé. Diies : emmuré^ Litt. , c'est-à-dire entouré de 
murailles. Le liégeois a aussi on eotehai èmuré. En ce sens, 
TAcadémie dit murer. On a muré cette ville depuis peu de 
temps. 

Emmurailler signiûe enfermer dans une muraille. Ex. Puisque 
l'on avait tant fait que de Temmuralller [le corps de Vendôme à 
TEscurial], il y pourrait demeurer, St-Sim. 

H) s^Encatharrer, sHncatharrér, mont. En français: s'en- 
rhumer. 

I) Enfiler, infUér, mont. Dites : tromper, enjôler. Ex. Le 
Comte à part: Il veut rester; j'entends... Suzanne m'a trahi. — 
Figaro: Je l'enfile, et le paye en sa monnaie, Mar. de Fig. III, 5. 
Malgré l'autorité de Beaumarchais, je pense qu'il faut éviter de 
se servir de ce terme populaire. 

J) Engeler. Avoir les pieds engelis, avu lès ptd égalés^ Aies 
(Billets sont engelés, mes jalofrenne sont èjalètes. On dit plutôt : 
les pieds gelés, sont gelés. Engeler^ c'est geler tout à fait. C'est 
un vieux mot français qui se trouve encore dans Descartes. 
Littré admet aussi : c*est un engelé^ pour c'est un homme qui ne 
se dégourdit pas; cette tournure ne peut rendre le wallon c*est 
ine èjalé, qui signifie il est frileux. 

K) Engraisser les bottes, incrachér les bottes, mont, (au fig. 
administrer rextréme-onction). Dites : graisser les bottes. — 
Engraisser des souliers, ècrâhi dès sole, liég. Dites: graisser des 
souliers. 

Graisser, c'est enduire d'un corps gras: graisser les roues 
d'une charrette. — Engraisser, c'est 1« faire devenir gras: en- 



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— 188 -. 

graisser des bœufs, des cochons, etc. ; 2* amender, améliorer : 
engraisser des terres avec du Tumier. — Toutefois ei}gramer 
signifie encore souiller de graisse, rendre sale et crasseux : en- 
graisser ses habits, son linge, âgad. On ne saurait manier du 
beurre qu'on ne s*engraisse un peu les doigis, prov., Littré.— 
Mais, en ce sens, il est peu usité; on dit mieux graisser. 

L) Engueuser, ingueusér, mont. Dites : tromper, séduire 
par de belles paroles. Terme populaire^t bas, dit Littré. 

En, préposition. 1* Je le vois toujours en rue^ je rveûstodis è 
Frowe^ Forir (plus souvent, sol'rowe, fl. op straat). Dites: je le 
vois toujours dam la rue. Y. Sur., n« 3. — II se promène en 
T\xe,is'pormôneèVrowe. Dites: par la rue, Agad. ou dans la 
rue. 

2« Nous demeurons en Neuvice, en Puits-en-Sock, en Ferons* 
trée. Nos (Tmanans è Nauvice, è Pus-èSock^ è Fèronstriie. — 
D'après Hennequin, il faut dans la rue Neuvice, etc., ou, en sup- 
primant la préposition: nous demeurons rue Neuvice.... — M. 
Garpontier admet en Féronstrée, en Vinâve-dlle, etc. Nous 
avouons que ces façons de parler nous plaisent singulièrement, 
et il est fâcheux qu'elles ne soient plus en usage. Il y a lieu de 
croître que cette tournure appartient à la vieille langue, qui fai- 
sait de la préposition en un usage bien plus fréquent que de la 
préposition dans. Au surplus, elle n'est pas inconnue en France: 
Ex. Je loge en Belle-Gour, environ au milieu, Dans un grand 
pavillon. Corn. Suite du Ment. III, 3. «Godefroid, Lex. de Com.^ 
remarque qu*à Lyon on dit encore en Belle-Cour pour à la 
place Belle- Cour. » Litt. 

Plusieurs disent à la rue Neuvice, etc. Le peuple, à Tournai 
et à Mons ne parle pas autrement. Quand nous demeurions à la 
rue Duwez, quand nous restimes à Vrue Duwez, Arm. de Toum. 
a. 81, p. 33. ; chez Tintin à la rue Neuve, chez Tintin à hue 
Neuve, Vvraie ErvueiMom, a. 69, p. 107. — Supprimez à la: 
rue Neuvice, rue Duwez, rue Neuve.— V. Rester. 



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— 189 -^ 

3"* Il demeure en Saubeid, î demeure è Sawhi. Je demeurais 
en Rognac, ji d*morèveè Rognae ( partie du quai de Longdoz« où 
est maintenant la propriété Collard).-- On allait danser en Lai- 
resse, on-z alléve danser è Lairesse. — Je vais en Bois-de-Breux, 
ji vas è Bovi-d'Breux. — On Ta attendu en Trou-Louette, t{ a stu 
rattindou è Trô-Louette. — Il y a une école en Beinai, gn'a n^si- 
eole è Belnai. — Je demeure en Argenteau, en Vaux, ji (Fmeûre 
enn* Argétai (Forir), è VAx. — II faut remplacer ^n par à; à Sau- 
beid, à Bois-de-Breux, à Vaux, au Trou-Louette, et quelquefois 
ajouter le mot lieu, au lieu dit Rognae, au lieu dit Lairesse, au 
lieu dit Belnai. 

Nous retrouvons encore ici un vestige delà vieille langue, qui 
se maintient dans notre patois. Jusqu'en plein XVII* siècle, on 
a dit communément en avec un nom de ville, et bien que 
la tournure ne soit de mode à Liège qu'avec des noms de 
petites agglomérations, nous croyons que Tanalogie est assez 
flrappante, pour que le rapprochement ne paraisse par forcé. 
Ex. En Sarragosse il fait sonner graille et cor, Aoitc, XIP 
siècle. Envoier trois cents cbevaliers à Constantinople, Joinv., 
XIV*. Messire Thomas de Felleton, qui se tenait en Bordeaux. 
Froiss., XV*. Il alla jusqu'en Jérusalem pour.... Mont., XVI*. Il 
me prit envie d'aller en Babylone, d'âbuocoiirt. Il va vous 
emmener votre fils en Alger, Mol. Irène se transporte en Epi- 
daure, La Brut. Ce grand Dieu n'avait de culte qu'en Jérusalem, 
Boss. En Aulis ; en Argos, Rag. — Au XVII* siècle, on affec- 
tionnait particulièrement cet emploi de en devant les noms 
commençant par une voyelle ; c'était une question d'euphonie. 
Janin a dit, par le même motif : Gresset naquit dans Amiens 
en 1709, Préface du méchant\ eW. Saintine : Isidore [Robes- 
pierre] était revenu dans Arras pour y exercer sa profession 
d'avocat, Ricils dans la Tourelle, 3* série, p. 10. -- Il est bon 
de noter que le flamand et l'allemand ont les deux constructions, 
du moins quand il n'y a pas passage d*un lieu dans un autre : 
ich wohne in (ou zu) Luetlig^ ik woon in (ou te) Luik, m. à m., 
fe demeure en^ ou à Liège. 



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— 490 — 

4« Mettez-vous en ma place ; qu*auri6z-vous fait ? mettez V è 
m' pièce, qtCariZ'V* fait ? liég. stel u in mijne plaats,... û. Dites : 
mettez-vous à ma place. — On serait désolé, en votre place, on 
sereuve disbauchi, è voue pièce, namur. Dites : à votre place. 

Encore un tour suranné. Mettez-vous en ma place, Mol. Si 
j'avais été en votre place, id. — Les poêles s'en servent très- 
commodément. Ex. En place de son choix, vous imposez le 
vôtre, Pons., FUonn. et PArg. III, 2. 

S* J*ai ce papier en poche, fa c'papt-là è nCpoche. Plusieurs 
prétendent qu'il faut dire dmis ma poche. L'Académie et Besche- 
relie donnent la phrase : avoir de l'argent en poche. V. un ex. 
dans Piron, Métrom. 1, 4, à la Qn. La tournure est donc correcte, 
mais on dit plus souvent dans ma poche. 

Quant à la distinction établie entre mettre dans sa poche 
(sens propre), et mettre en poche (sens figuré), elle est, je crois, 
arbitraire. L'Académie dit bien que mettre en poche signifie au 
figuré mettre en réserve et employer à son profit un argent 
qu'on a reçu pour une autre destination; mais ailleurs elle 
définit empocher, mettre en poche. On dira donc : mettez ces 
gâteaux, ces fruits en poche^ tout aussi bien que dans votre 
poche. 

6« Il a toujours la pipe en bouche, il a todis Vpipe è s'boque. 
La tournure actuelle est à la bouche. Ex. Il a toujours la pipe à 
la bouche, avoir un cigare à la bouche, Agad. V. Main., 2«. 

En, pronom. J'ai fait un vœu, afin de me débarrasser des 
moucherons, que yen suis lourmeiitée, fa fait on vœu, afîsse di 
m'àihaler dès mohelte, qui fennè sos affligfie, Magnée, Ann, 71. 
Dites : des moucherons par lesquels je suis tourmentée, et 
mieux des moucherons qui me tourmentent. — On sait que le 
français préfère en maints cas la voix active à la voix passive; 
c'est affaire de goût. — Le patois de Liège ne connaissant pas 
l'emploi du reblif complément d'une préposition, y a substitué 
ici les pronoms qui et è (que et en). La locution est des plus bar- 
bares en français. V. Que, pronom, n* 2. 



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- 191 - 

Encore. !• Je l'ai encore vu, ji Fa co vèiou. Ce co peut avoir 
ici deux sens, suivant le contexte; il peut signifier : Je Vai vu 
de nouveau, une seconde fois^ et je Fai déjà vu. Il faudra prendre 
garde en traduisant. L'adverbe encore ne peut s'employer dans 
le sens de déjà. Dans le premier cas, dites : Je Tai revu, ou je 
l'ai encore vu, et, dans le second : Je l'ai déjà vu. 

2o II y avait encore mille gens sur la place, gnaveu co mèie 
gint so l'plèce. Dites : il y avait bien mille personnes sur la 
place, ou mille gens (pour mille accolé à getis^ V. le mot Gtons, 
n"^ 3, ou un milier de gens. — Cé^ a ici le sens de environ, à peu 
près. L'adverbe bien s'emploie en français de la même façon. 
Da ço ieu mille co d^baslon^ namur. Tournez : elle a bien eu mille 
coups... 

S"" Il est encore toujours au lit, il est co todis è s'iét, liég. er ist 
fioch immer zu BettCy ail. On prend encore toujours un autre 
chemin, on pHnd co toudis in autequéminj Vvraie Ervue dé 
Afo})«,a.69y p. 84.— Ou bien supprimez toujours : il est encore au 
lit, on prend encore un autre chemin; ou bien supprimez ^ncor^ : 
Il est toujours au lit, on prend toujours un autre chemin. — 
Liltré reconnaît ce sens à toujours^ et il donne les trois 
exemples suivants : Il est toujours absent. Votre petit frère est 
toujours parti, et j'en suis toujours fâché, Sév. Je l'ai voulu sans 
doute, et je le veux toujours, quelque prix qu'il m*en coûte, Rac. 
— Cet emploi de toujours demande beaucoup de prudence ; on 
n'y aura recours que dans le cas où ce qui précède ou ce qui 
suit prouve que toujours est pris dans le sens de encore. Par 
exemple : Est-il revenu de son voyage? Non, il est toujours 
absent. L'équivoque existe d'ailleurs moins quand on parle que 
quand on écrit; l'accent oratoire rend le sens clair : il est 
toujoui*s ABSENT (constamment); il est toujours absent (encore). 
Quand la proposition est négative, il faudra prendre garde à la 
place de toujours : Nous ne recevons pas toujours des nouvelles 
(nous en recevons quelquefois); nous ne recevons toujours pas 
de nouvelles (nous continuons à n'en pas recevoir). 



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— 192 - 

4* Nous partirons encore bien demain, nos pâtrans eo bin 
demain. Diies : nous partirons peut-être (ou probablement) 
demain. Ce serait encore bien vrai, ci sereûl co bin viiie. Peut- 
être bien est-il vrai, c'est probablement vrai. 

5* Je ne l'ai encore jamais vu, ji nTa co mâle vèiou^ fl. ik heb 
hem nég nooit gczien. Plusieurs condamnent cette mnniëre de 
parler et prétendent qu'il fiul dire : Je ne l'ai jamais vu, ou je ne 
l'ai pas encore vu. Voici trois textes qui prouvent qu'avec un 
temps passé elle est parfaitement de mise : Il commença à se 
déchausser, ce que peut-être il n*avait encore jamais fait. Ràc. 
Fragments traduits d'Eusèbe. Le Teu d'artiflce ne fait de mal à 
personne, et l'on n'a encore jamais vu de si belles fusées. 
M"« d'Aulnot, la Chatte blanche. Je n'ai jamais encore vu le 
sieur le-Jay au moment où j'écris ce mémoire, Beaumarchais, 
Mém. éd. Garnier, p. 10. Avec un temps présent, encore est tout 
à fait parasite : Il ne regarde encore jamais, i nTouke co mâîe. 
Dites : Il ne regarde jamais. 

6<> Gomment vous portez-vous? Hais cela va encore. Bé, i va 
acor, p. de Tournai. Dites : ça va passablement, ou assez bien, 
ou couci-couci, ou cahin cahin {talmi talmaxh^ liég.). On dit 
aussi coula vaàd^mète, liég., cela va à demi, et halofMhalof^ 
corruption du flamand halfen half. Il y a une nuance entre le 
wallon cela va encore et le français comme çà : quand on répond 
cela va encore^ on veut dire : ni bien ni mal, mais plutôt bien 
que mal ; mais quand on dit comme ça^ on veut faire entendre, 
dit Littré, que c'est plutôt mal que bien.— Mais cela va encore est 
correct, si encore conserve son véritable sens. Ex. Le marquis. 
J'étais justement en train d*admirer votre éloquence, à part 
moi. Maréchal. Entre quatre yeux, ça va encore... mais en 
public, je n'oserai jamais. Augibr, le fils de Gib, I, 6. 

7« Y étes-vous allé souvent? Pas encore une fois. F avez-v^ 
situsovinti Nin co ine fêle. Ditt'S : pas même une fois, ou pas 
seulement une fois. En cliangi>ant la tournure, on pourra main- 
tenir encore^ je n'y ai pas encore été une seule fois. 



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— 193 - 

8« Encore bien qu'il était là, èco bin qu'il e^eut là. Dites : 
heureusement qu'il était \k. 

Pour ne pas mulii plier les citations Je me bornerai k dire 
que le flamand nog (encore) peut être employé à peu près dans 
toutes les acceptions signalées ici. 

S'encourir. Il s'encourt, i s'mcourt, p. de Mons et de 
Nivelles, pour il se sauve, il s*enruit. C'est un archaïsme qui 
s*est maintenu dans quelques patois. Il était encore de plein 
usage dans le XVI 1« .siècle. A la fin le pauvre homme s'encourut 
cnez celui qu'il ne réveillait pluo, La Font. Remarquons seule- 
ment qu'en français il signifie simplement se mettre à courir^ 

Le verbe était très bien formé : il est analogue à s'enfuir, s'en 
aller, inde jugere, inde ambulare, inde currere. La vieille langue 
affectionnait particulièrement les verbes réfléchis formés de 
verbes intiansitifs ; outre se bouger, se disputer eise divorcer, 
dont il a été question plus haut, en voici quelques-uns qui ont 
été conservés : se laii e, se Jouer, se mourir, s'en venir, (il s'en 
vient lourdement, la Font., CAne et te petit Chien), s'écrier, 
s'exclumer (St. Sim.), s'évader, s'ensuivre. Puifois le sens 
réfléchi attiibué à ces verbes inlransitifs ne manque pus de 
grâce ; on peut en ju^er pur l'exemple de la Fontaine citj plus 
haut. Autre ex. Elle [M*"*" de Genli>]u pu be croire une puissance 
dans le siècle, du niOinent qu'elle s'en est venue accomplir, vers 
Tan de gtâce 1800, je ne sais quelle mission préde:>tlnée, 
Sainte Beuve, Pr. Lundis, l, p. ii6. 

Endroit. Le petit endroit, Vpetit indrot, p. de Tourn. et de 
Lilli^. Dues : le privé, les lieux d'uisance. V. Goh)ioditê et 
Lieu. 

Enfant. La petite Marie est un bel enfant, U ptite Mareie est 
on bai ifant. Diieé: est une befie enfant. Ce mot est toujours 
masculin en wallon. 

Enfin. Certains Liégeois, lorsqu'ils vous font un récit quel- 



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-. 194 - 

conque, ont Thabitude de larder leurs phrases de plusieurs 
fii/S/i, qui ii*ont aucun sens, et qui rendent le siyle fort traînant; 
ils s'en servent surtout lorsqu'ils sont embarrassés, et qu*ils 
cherchent une formule pour achever une phrase commencée ; 
c'est une espèce de note prolongée, une sorte de cheville dont 
on use pour ne pas avoir Tair d*éire à quia. Cela est purement 
wallon, et ne peut se justifier dans le parler français. 

Engager. Je me suis engn^çé dans les soldats, f m'ai ingagé 
dins les sodaeri^ mont. Ann. 72, p. 170, ji m'a-t ègngi devint lès 
sôddit. Dites : Je me suis engiigé duns le service militaire, ou je 
me suis (ail soldat.— Il sVst engagé dans les fantassins, i s'a-t^ 
ègagi iCvins lès piton. Dites : il s*est engagé dans rinfanterie. — 
Saintine a dit : Ensemble ils s'étaient engagés soldats au 
service de la ri^publique, Picciola, VI 

Entre. 1« Inte lès deux doit se traduire de deux manièi*es 
suivani les cas. Entre les deux, se dit d'une chose dont je ne 
peux parler ni en bien, ni en mal, qui ne me platt ni ne me 
déplaît absolument. Etes-vous Siitisfait, mécontent de cette 
affaire ? — Entre les deux. — Muis enire-deux est une simple 
affirmation qui exprime un terme moyen. Esi-il grand? — 
Entre-deux. 

2** Je disais eii/re moi-même Ji iCliéve inte mi-minme. Dites: 
Je disais en moi-même. — Mais raskoï inte ses bress\ Bull. a. 
67, p. 64, se traduira : recurillir entre ses bras, parce qu'ici il 
h'a^ii d^ deux objets. Ex. Tenir un enfant enti*e ses bras, 

ACAD. 

Envier. Nous n'envions personne, nos n'èvians personne. 
Dites : Nous ne portons envie à personne. — Mais on dira très 
bien : Je n'envie pas le son d'un ministre, ji n^èvèïe nia Csôrt 
d'un minisse. 

Les grammairiens modernes, d'accord avec Bouhours, ont 
établi comme règle que envier se dit des choses, et potier envie^ 



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- 19S ^ 

des personnes. Mais les grands écrivains des XYII* et XVIII* 
siècles ont souvent fait us:i(i:e du verbe eiwur en pnilani des 
personnes. Ils euvient tous ceux à qui Ton donne, la Buuy., VIII. 
Je n*envierai personne, et personne ne m enviera, Volt., 
Memnon^ dans Litt. Toutefois malgré l'autorité respect nble de 
Littré, on peut dire que fusage actuel est contraire à cette 
manière de parler. 

Brrhes. Errière. Ce sont des formes populaires pour 
arrhes et arrière. Le français originaire changeait souvent Va 
du primitif latin en è ou en ai : sarpa^ serpe; ala, aile. Errhes 
est fait de arrka^ et errière de adretro. Le peuple dit de même 
belsamine au lieu de balsamine. Agnel signale ce genre de fauies 
dans le langage du peuple h Paris. — Donner des errh(*s, dîner 
dès èfrhe liég., il est en errière, il est hièri, iiég. ; une b Isa- 
mine, enne belsamine, mont. Dites : des arrhes, en arrière, une 
balsamine. — Littré dit que la prononciation errhes^ a duié 
jusque dans le XV11« siècle. 

Escalier. 1* Une grande escalier, une grande eseaîer^ tournais. 
Dites : un grand escalier. Ce genre s'explique par le bas-laiin 
scalarium^ pi. scalaria. V. Outil. 

2* Monter les escaliers, monter lès gré de planchi, liég. monter 
les escaier, tournais, mont. 

Escalier désigne une suite de degrés ; celte faute est très 
commune, même en France, et elle est contraire à Télymologie: 
escalier, de «ca/ar/um, est collectif, comme scminarium, pépi- 
nière, granafinm, grenier. Dites : monter les dej;rés, les 
marches, ou monter Tescalier. — Mais si je dis : les différents 
escaliers d'une maison, courir dans leS escaliers, le tjluriel est 
correct: il s'agit d'escali» rs partiels. 

îi* La montée est djflîc le. // monlê'ie est mnlâhéie. Monter la 
montée, monter Cmontéie. Dites pUrôt : rescalier. Montée est 
français en ce sens, mais ne se dit, d'après l'Académie, que d'un 
petit escalier dans uue maison de pauvres gens. I( faut convenir 
que cette distinction est assez dédaigneuse. 



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— 196 - 

Escroquear. C'est un escroqueur, méfiez-vous de lui, 
cVa( ine escroquêux^ dimèfiïz-v' di lu. Dites ; c'est un escroc. 

Ce n*est pus que la première forme ne soit rrânçaLse,mais elle 
ne s'emploie guère qu'uvec un complément. C'est un escroqueur 
de livres, Acao., — d'argent, Bksgu. 

Essayer. !<" Snyer un habit, des souliers, saï n^habit, des 
soie. Dites : essayer uu habit, des souliers. 

Le wallon xàte (essai), du lai. exagium^ du grec exagimi^ 
pesage, comme l'anglais s y (^owv essoy) est une aphéièse. Liitré 
cite fitiilien saggio; et Roqutfiirt, Je roman soyer {fiour essayer). 
Ce genre de retranchement, ainsi que les autres, est tellement 
naturel dans les langues, qu'un écrivain a pu diie : « Toute la 
linguistique peut se réduire à l'élude d'une seule question, celle 
de l'apocope et de l'aphérèse. » Voici quelques exemples 
d* phérèses, en fiançais : las, pour héias, lors^ pour alors, 
Guyenue, de Aquitaine, Nalolie^ .de Ânalolie, mie pour amie, 
Pouiile, de Apulia; en wallon : Mislerdam, pour Am(i)sterdam, 
mdgiuer. pour imngmer. 

2® Essayer ce vin, saie vin-là. Cela n'est pas français dans le • 
sens de : goûter ce vin. Mais on dira très bien, dans un sens 
plus large : Puisque le vin de Bordeaux ne vous convient pas, 
voulons-nous essayer d'un autre vin? 

Essui. On dit h Tourn.ii tin essui^ pour un essaie-mains. 
Mais i'usuge général n'a pas consacré ceue «ibréviaiion quoi- 
qu'elle bOit analofciue à et lie de meil pour révfitle-tnaîUi, 

Le mot essui est français, muis désigne le lieu oii Ton étend 
une chobO pour la faire sécher. Ex. : mettre quelque chose à 
l'essui, LiTT. Cette deinière tournure correspond au (grossier 
wallonisme, mettre sner^ (aire suer du linge, mette sovwér^ fér 
souivér dès drap. On dit encore simplement, mettre sécher du 
linge, AcAï)., fa.re sécher le linge, Erck. Ch\t. llist. d'un h. du 
j9., ch. Il, et plus rarement essorer {exaurare^ de aura^ souffle, 
air) du linge. M'imitez pas, disait notre bon vieux Forir, cette 



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-- 197 - 

dame qui se plaignait de son hibitation, parce qn*il n*y avait 
pas de place pour mettre suer les draps, Forir traduit mette 
eurér dès diap par essorer du linge^ le mettre à l'essui. C*e<t une 
erreur manifeste. Mette curer si;çnifie herber du linge^ c'est-à- 
dire retendre sur Therbe. V. Verger. 

Estomaqué. Il s*est estomaqué de ce que je lui ai dir, il a 
stu stoumaqué di çou qvC ji li a dit. Cette traduction de Forir est 
inexacte. Le français s*estomaquer, qui est un terme du langage 
familier, sigfiiiie se formaliser, se clioquer de quelque chose; 
latin stomachari^ se fâcher. Il fallait traduire : il a été surpris, 
interdit, ahuri de ce que je lui ai dit. 

Et. l"" Le château de Ghèvremont fut détruit Fan neuf cent 
et qu4itre-vingt, li chestai d^Chtvrimont fourit distrût Pan noûf 
cint et quatre-vingt. Supprimez et : l'an neuf cent quatre-vingt. 
En français Fadjt'Ctif numéral cent et tous ses multiples ne sont 
jamais suivis de ^^ Ex. L*an dix-huit cent soixante quatorze; 
cent un coups de canon; le son parcourt trois cent trente-sept 
mètres par seconde. — Ce wallonisme est une tournure latine 
conservée par notre patois. Le latin disait également bien 
centum novem et centum et novem (Ganthellb, § 40). Notre 
dialecte avait choisi la seconde tournure, celui de Flle-de- 
France, la première. 

3<* Ne dites pas non plus, comme en wallon, vingt-un, trente- 
un, vingt'4>nque, trinte-onque ; mais vingt et un, trente et un, et 
ainsi de suite, jusqu'à nouante et un. Partout ailleurs supprimez 
et : vingt-deux, vingt-trois, etc. Dans ce dernier cas, le wallon 
est un bon guide. — Notons cependant que Littré, au mot 
quarante, a quara^ite et un et quarante-un. Je n*ai rencontré 
quarante-un nulle part ailleurs. Cette tournure est d*un aloi 
douteux. 

Etouffant. Il fait étouffant, t faitsitofant,VoK., plus souvent, 
i fait stof. Plusieurs traduisent par les barbarismes : il fait 



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^ 198 - 

étouffe, et il fiiît touffe, pat. flam. 'li* duf{u prononcé k Talle- 
mancic)- I^ '^^^"^ ^'^^ • il ^^'^ u>^® chaleur étouffante, la chaleur 
est étoufTantd, l'air est étouffant, ou on étouffe de chaleur. 

M. Garpentier risque Tuniper^onnel : // fait éiouffant, qui ne 
se trouve pas dans les dictionnaires, mais qui est analogue h : 
il fait chaud, il fait froid, il fait sec, Acad., il fait frais, id., il fait 
doux, id., il (ait beau, id., il fait humide, Bi-sch., il fait glacé. 
Volt., il Tait clair, Litt., il fait mauvais, id. 

Le belgicisme H fait touffe existe aussi dans le patois lorrain. 
A ce radical, que Diez rattache au grec tuphos, vapeur, s*ajoute, 
d^ns stof, le préfixe es, du latin ex. 

Être. 1"» Gela m'en est, çoula nCenn* est. Dites : le cœur me 
saigne, c'est-à-dire j'en suis sensiblement touché. — Quand je 
vois qu'il a l'air si besoigneux, le cœur m*en saigne, qwandfvtûs 
qu'il a Vair si minâbe, çoula nCenu' est. — On peut y voir un 
germanisme: Ach ! die gute Graefiun ! wie wird es erst ihr sein, 
weun sie dos hoert ! Schnid, Heinrich von Eichenfels. 

S*" J^ai été voir un vieux camarade, fa stu vête on vt camarade. 
Plusieurs prétendent qu'il est mieux de dire : Je suis allé voir 
un vieux camarade. 

Landais et Nodier (Examen critique des Dict.) condamnent cet 
emploi de être pour aller avec un infinitif suivant. Mais Ses- 
cherclle et Girard le trouvent li ès-correct, et ce dernier va 
même jusqu'à s'emporter contre les gens qui n'adoptent pas 
cette façon de parler. Elle est en effet d'un usage commun en 
France aussi bien qu'en Belgique, et Littré en cite un grand 
nombre d'exemples, tirés des meilleurs écrivains. Il fut recevoir 
le corps de son frère jusqu'à Paris, D'Ablanc. A peine ai-je été 
les voir trois ou quatre fois, Mol. Je fus retrouver mon jansé- 
niste, Pasc. Ils les ont été chercher [des exemples] parmi les 
Juifs, Boss. Tu fus demander récompense ou justice au Dieu qui 
l'avait envoyé, Lanart. 

S"" Deux et deux sont quatre, imifttion de la tournure 



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-- 199 • 

wallonne : deux et deux^ c'est qwate ; fl. twee en twee i$ vier. 
Dites : font quatre. 

Etuve. Une étuve, one situve^ Namur, ine êitouve, liég. Dites: 
un poéie (ou poile). On donne à tort le sens de poêle à ce mot 
dans louie la Wallonie^ dans la Flandre française et même en 
Picardie ; éiuve désigne un lieu clos dont on échauffe plus ou 
moins la température, pour faire transpirer. Ex. San salon est 
chaud comme une étuve, Acad.— Ajoutons que Tallemand S/u6e, 
dans son acception figurée (salle commune où est le poélc)» se 
traduit par poêle : Se tenir dans le poêle (Agad.) 

Etuver. De l'endive étuvéây di Fandive sitouvêïe^ fl. gestoofde 
andyvie, angl. stewed endive. Dites : de Tendive à Tétuvée, ou 
une étuvée d'endive. -— Les pois étuvés sont fort bons, les peu 
sont foirt botis stouvés. Dites : les pois à Tétuvée sont fort 
bons. 

Eluver est tout autre chose en français : étuver une plaies la 
laver en appuyant doucement. 

Evangile. La messe en est à la première évangile, It messe 
est à Fprumire évangile, Diies : au premier évangile. 

Le genre à*évangile a été longtemps flottant : On apporte une 
évangile, Ass. de Jérus. XIII" siècle. L'Evangile au chrétien ne 
dit en aucun lieu : sois dévot; elle dit : sois doux, simple, équi- 
tatle, BoiL. Une vieille évangile, Sév.— Il était surtout féminin 
dans le sens de la partie de l'Evangile qui se dit à Ja messe. 
Actuellement, il est toujours masculin. 

Eviter. Je vous éviterai celte peine, j« v'éviCrei cisse pône-là, 
For. Dites : je vous épargnerai cette peine. On trouve cette 
locution dans de bons auteurs du XVin« siècle ; mais elle 
est fautive (Litt.) Ex. Cela ne vous l'évite pas (ce tracas), J.-J. 
Rouss., dans M°'<' d'Epinay, Mém. Il, p. 148. 

Excuse. 1« Je vous demande excuse, ji v* dimande eseusse, 



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- 200 - 

ou simplement, demande escusse^ lié((. locution qui a paspé dans 
les paiois flam;inds : ik vraag u excuus. Dites : Je vous fais 
excuse, je vous fais mes excuses, je vous prie de m'excuser, 
excu?ez-moi, veuillez m'excuser. — Ce w«llonisme est tout à 
fait contraire au bon usage et à la raison. En effet, demander 
deseuu8e$(z2iT la tournure ne serait française que sous cette 
forme) signifie qu'on demande à son interlocuteur de faire des 
excuses ; c'est le contraire qu'on veut faire entendre. Celte 
locution se rencontre dans plusieurs écrivîiius français : Je suis 
confuse De ce que vous voy< z ! Je vous demande excuse, 
DuFHESxY, la Coquette de Village^ I, 8. Je vous demande excuse, 
a-t-il dit, et j'ai tort, La Font., Bagotin^ II, H. Voici le livide que 
vous m'avez prêté, et je vît-ns vous demander excuse de l'avoir 
gardé si longtemps, Maiiiv. Pièces détachées. — Mais Fureiière, 
Ménage, Bouhours, Domergue, Waitly et Laveauxoot été una- 
nimes pour la condamner. 

Exemple. Donner de belles exemples, donner dès belles 
eximple^ namur., Cuavée, Français et WalL^ p. 159. — Suivre 
de mauvaises exemples, sûre dès mâles eximpey Rem. — Dites : 
de beaux exemples^ de mauvais exemples. 

Le genre de ce nom a été longtemps incertain. Littré cite 
deux textes où il est féminin. Mauvaise exemple nen serat ja de 
mei, Ch, de RoL XI« siècle. Dire que cette exemple est fort mal 
assortie, Regmer.— Actuellement le genre de ce mot est établi. 
Toutefois le féminin s'est maintenu longtemps pour le sens de 
modèle d'écriture, ine belle eximpe d'ècriteûre. Rien ne motive 
cette exception, que Nodier trouve ridicule. 

Exprès. Je ne l'ai pas fait par en exprès, ;e tiTaî gnié fait 
pa in espréSy mont. Dites : Je ne l'ai pas fait exprès. — L'a-t-îl 
fait par exprès, en exprès ? Vat-i-fait par esprès^ en esprèsl liég. 
Dites : l'a-t-il fait exprès, à dessein, de propos délibéré ? 

Expressément. Je l'ai dit expressément, ji Va dit expresse- 
miwL Idiotismç liégeois jponr exprès, avec intefition. 



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- 201 - 

Exprfggément signifie en termes exprès, clairs, positifs : Il 
me ra i*ecommandé expressément. 



F. 



Facile. 1*» Vous auriez bien facile, vos âriz bin ahile, ge zoudl 
het heel gemakkelijk hebbtn. Dites : cela vouï^ serait bien facile, 
bien aisé, ou vous auriez bien de la facilité. — Nous aurons plus 
facile de monter la colline par ici, tio^ âmns pus âhèie démonter 
Vihiér por ciaL Dites : il nous sera plus hicile de gravir la 
coliine par ici. ^ J'eus facile d'apprendre mes leçons, j'euris 
âhite d^apprinde mes lèç^m. Diies : J'appris fficilement mes 
leçons. — La locuiion : vous aurii z eu difficile dé nombrer..., 
vos âriz awou mâlâhèie de compter, est également un wallo- 
nisme; il faut prendre un autre tour : vous auriez eu peine, ou 
de la peine à nombrer. 

2» Autres idioiismes. // fait facile marcher, il fait difficile 
marcher, i fait âhèie, malâhète roter, pal. fl. het is gemakkelijk^ 
moeielijkgaah. Qiïàiva : On marche facilement, difficilement, 
on a de la peine à marcher. 

Faible. Forir traduit ioumer flâw (Û. flauwvallen) par tomber 
faible. Il fallait : tomber en faiblesse (liég. tourner enn'blesse) en 
défaillance, en pâmoison, en syncope, s*évanouir, pâmer et se 
pâmer (liég. pâmer). Remarquons aussi les tournures : 11 lui 
prit une faiblesse; .avoir deux ou trois faiblesses par jour, et se 
trouver mal. — Cette dernière expression signifie également 
éprouver du malaise et répond alors au yvMom&me ijim'sins 
toi droite, il. ik voel mij heel aardig. V. Drôle. 

Faiblir. Elle faiblit, nivellois. Dites : elle s'évanouit. — 
// a faibli, il a flâwi, liég. Dites : il s*est évanoui. — Faiblir ne 
veut pas dire tomber en syticope. Il a faibli dans cette circOQS- 



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tance, c'esl à savoir, il a perdu de sa force, de son courage, de 
sa persévérance. II sentit son courage faiblir. Ce vin faiblit, le 
vent faiblit, c*est-à-dire devient faible. 

Faire, l"» Ne faire que de : Elle ne fait que de croître en 
beauté, elle ni fait qui (Tcrexheè baité, Forir. Dites : elle ne fait 
que crolire en beauté. — Je n*ai fait que de chanter, ;t n'a 
fait qui d'chanter. Aurmonaq. di Namur. a. 67, p. 40. Dites : je 
n'ai fait que chanter. 

// ne fait que sortir signifie il sort incessamment, à tout bout 
de champ ; et il ne fait que de sortir équivaut à il est sorti tout 
à rheure. On dit aussi en français il vient de sortir et en wallon, 
t n'fait qui tvôie de nri aller. — Ne faire que équivaut aussi à seu- 
lement. Ces beaux lieux ne faisaient que lui rappeler le triste 
souvenir d*Ulysse. 

i^ Faire des quartiers. V. Quartier. 

3« Voulez-vous faire avec î volez-v* fér avou? fl. wilt gij mee 
doen ? Terme de jeu. Les tournures françaises sont : voulez- 
vous jouer avec nous? — faire la partie avec nous ? 

4^" Il fait dans les meubles, i fait devint lès meube^ fl. hij doet 
in de meuhels. Dites: il fait le commerce de meubles, il vend 
des meubles. — Mais on dira très bien : ce jardinier fait les 
primeurs ; ce négociant fait les eaux-de-vie, Littré ; faire la 
médecine, le commerce, la banque, la commission, Acad. 

S"» i'at bien fait^fa bin fait^ pat. fl. ik heb goed gedaan, au lieu 
de: J*ai assez mangé, est purement wallon. Les équivalents ne 
manquent pas: je n'ai plus besoin de rien, j'ai mangé mon soûl, 
etc. — Dans cette acception, soûl est familier, mais du bon 
style; dans le sens de ivre, il est bas. V. Soûl. Ex. Au bout de la 
semaine, ayant dtné son soOI... La Font. 

Le wallonisme j'ai si bien fait est devenu à Liège un mot his- 
torique. On sait que Madame Goffin, à la suite de Théroïque 
dévouement de son mari, qui sauva la vie à un grand nombre 
de bouilleurs, avait été invitée ii un banquet à rHôtel-de-Ville. 



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- 203 - 

Le préfet la pressait continuellement de manfcer : Nenni, mon- 
sieur Vmaire, dit à la fia la brave femme, /a si bin faii^ i mfàreùt 
distellér m'cotte. Tournez : j'ai si bien mangé, qu*il faudrait dé- 
grader ma robe, ou il faudrait me délacer. — D'aucuns racon- 
tent cette anecdote d'une autre manière. V. Renaquer. 

6"* Il s'est fait malade à travailler, i s'a fait malade à ovrer, fl. 
hij heefl zich ziek met wevken gemankt. Il est préférable de dire : 
il s'est rendu malade à travailler, ou à force de travailler. — Il 
s'est fait soûl i boire du Champagne, t s'a fait sô à heure de 
Champagne. Dites : il s'est enivré... 

Faire s'emploie très bien dans le sens de rendre^ avec un ad- 
jectif, comme le prouvent ces exemples de l'Académie : cela le 
fera bien aise ; cela l'a fait beaucoup plus malade qu'il n'était. -- 
Il est même probable que cette tournure était assez fréquente à 
l'origine; ce qui ne doit pas étonner, le latin facere, en ce sens, 
se disant bien plus souvent que reddere. Mais son emploi exige 
beaucoup de prudence, parce que !e verbe faire, avec un adjec- 
tif, a encore plusieurs autres significations. Ex. Ce peintre fait 
en général les visages trop pâles; ici faire^ c'est donner avec 
intention à une personne ou à une chose une qualité quelconque. 
— On le fait riche, mais il ne l'est pas; faire signifie dire, pré- 
tendre. Il en est de même dans l'exemple suivant : Il se fait 
beaucoup plus malade qu'il ne l'est. — V. Hugo fait un abus 
singulier de faire, dans le sens de rendre. 

7« Il a fait les cent coups, il a fait tous les dnt coup, patois de 
Gharleroi, il a fait lès dnt eôp, liég. On doit s'abstenir de celte 
expression populaire, que L. Larchey explique ainsi : commettre 
des actes de folie désespéiée. Ex. Tu peux faire les quatre cents 
coups dans la cité, E. Sue. On dit familièrement en français: il 
en a fait de belles (Acad.). 

8« Faire tourmenter, v. Tourmenter. 

Fait. !• Au fait de voleurs, je vais vous conter une histoire, 
à faitt' di voleur Ji v'vas raconter n'histoére. Dites : à propos de 
voleurs,... 



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•8^^ ._ 



- 204 ~ 

î* CTest au fait de rire, e*esl d faite de rire. Dites : c'est pour 
rire, ou je ne dis cela que pour rire. — Ici rire sigaifle badiner; 
plaisanter. 

3« Fait'à'fait que mes fraises mûrissent, on vient me les 
gober, fait'à-fait qui mes fréve mawerihet, on nClès vint bozer. 
Dites: à mesure que, ou au Tur et h mesure que mes fraises mûr 
rissent... Fait-à-fait 911^ est également monlois. 

Fameux, fameusement. Suivant Littré, fameux et fier se 
disent dans le style familier pour désigner un excès: un fameux 
ivrogne, ine fameuse sdèîe ; Samson est repi'é.^enié comme un 
fameux pnillard. Volt. Un fameux imbécile, on fameux boubiè; 
un lier hérifage; une fière étourderie, Littré. — M.iis TAcadémie 
prétend que cet emploi de fameux et de fier est populaire. — - 
Quoi qu'il en soit, ou fera un véritable wjHonisme en donnant 
à fameux le sens de gfraiid, énorme: Une fameuse armée, ine 
fameuse ârméie. Dites : une armée considérable. Une fameuse 
grande camp'igne, ine fameuse grande campagne. Dites : une 
vaste campagne. — Voilà un fameux poisson, wlà on fameux 
pèhon. Dites : un furieux poisson, Besch. 

Qaant à fameusement, qui flgure dans Littré, les Liégeois en 
abusent tout autant. Il appartient ainsi que fièrement (dans le 
sens de extrêmement, fortemeni) au langage populaire, et il faut 
y substituer les adverbes infiniment, dablement, furieusement, 
joliment (Âcad ), qui, dans cette acception, sont du style fami* 
lier. A-t-il de IVspnt? Il en a fameusement, ou fameusedement. 
A't'i d'Cesprit f Enn'a fameusedimint. Dites : il en a terrible- 
ment, mot deBossuet, à qui Ton demandait si Fénelon avait do 
l'esprit.— Il mange et boit fameusement, i magne et beût fameus*- 
mint. Dites : terriblement. — Il est fameusement grand, il est 
fameusedimint grand. Dites avec l'Académie, il est furieusement 
grand. — Ce garçon est fameusemttU bête, ci valèt-là est 
fameusemint biesie. Dîtes : est diablement bôie. 

Littré n'admet pas que ces adverbes puissent avoir un corn- 



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-- 805 -^ 

plément : il a famexi^'dmint (Treêprit; il approuve naturelle- 
ment les deux tournures:!/ a de Cespril iufinitHent.ei il a 
infiniment de Fespnt ; dans ces deux cas, de Cenprit est complé- 
ment partitif de i/ a, et infiniment, employé absolument, mo- 
difie le même verbe il a; pour ce qui est de la tournure il a 
infiniment d'esprit, il la lient pour complèiement incorrecre, 
d*auiant qu'on y construit la phrase comme si iuflnimefit était 
réquivalent exact de beaucoup. — Mais cette f^çun de parler 
a pour elle TÂcadémie et rusitge général : M. le marquis a 
furieusement d'impatience, Dancocrt. H. de firissac avait in- 
finiment d'esjtrit, a\ec une figure de plat d'aiiotliiçaiiv, S*-Sim. 
Il a répandu infinimeitt dVsprit et de clarté sur cette belle 
partie de la physique, Volt. • 

Fate ou Fade. Comme il fiât fade aujourd'hui, comme i 
fait fat C tûie! Comme il fait étouQaiit aujourd'hui ! ou comme 
le temps c st lourd ! quelle chaleur aceablanie! ^Ca walloni>me 
ne doit pas être confondu avec le llaiidricisme : temps lade^ 
lafweder, pour temps mou, lâche. 

Faute, ("est d'vosse fâte. Foi ir traduit : tfesi de votre fiiute. 
Le de est de trop. Les seuhs locutions correctes sont : C'est 
votre faute, ou la faute en est à vous, ou c*est à vogs qu*en est 
la faute, ex. : ce n'e^t pas à lui qu'en e>i la faute, Acad. Si la 
vie est mauvaise, c'est votre faute h tous, J. Sanueac. La faute 
en est à cet homme-là; si Tent reprise a échoué, ce n*est pas 
mi f.iute, Acad. V. au moi Polvoih, j€ n'en puis rien. 

Cette loui nure incorrecte n*e2^t pas inconnue en France; à 
preuve cet exemple de Jules Claiétie : Cesl de ma faute, après 
tout, dans Madeleine Berlin. 

Fautif. J'ai reçu une réprimande, et pourtant je n*éiais pas 
fautif, fal rçu 'ii' saboule, et pourtant f n'étos pont lautif, tour- 
nais.^... djé n'astès né fautif, pat. de Gtvet, dans le joui Qui Echo 
de Giveir 8 novembre 1874, 



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- Î06 - 

Le français populaire et les patois de Tournai, de Givet (et 
de Genève) emploient fautif dans le sens de coupable ; mais cela 
n'est pas du bon style. Fautif signifie 1" sujet à faillir : la 
mémoire des vieillards est ordinairement fautive, Acad., 2" plein 
de fautes : la table du livre est fautive, Acad. 

Femme. 1* La femme au beurre, H feumme d boûre. Dites : 
beurrière, Acao., ou marchande de beuri-e.— cc Beurrière, vase 
desiiné à mettre du beurre » Lin., n*est pas admis par TAca- 
démie. 

2* Voilà la femme au lait qui sonne, gna C feumme â^lessai qui 
sonne. Diies : voilà la laitière qui sonne. 

Feu. Il y a eu un feu de la nuit, gnast-awou on feu de rnutte, 
fl. er 18 dezen nacht vuur geweest. Dites : il y a eu un incendie 
pendant la nuit. 

Ficher, Flanquer, et les équivalents. 1* Je m*en fiehe 
commode l'an quarante,/ m* i/i/ic/ie comme dé Van quarante^ 
mont. Dites : je m'en moque comme de Tan quarante. On dit 
aussi ironiquement : je m'en soucie comme de l'an quarante.— 
Quand il n'y a pas d*antiphrase, je mV/i soucie pouvjene m'en 
soucie guère, est une faute ; elle se commet assez fréquem- 
ment. 

2« Ficlier, flanquer un soufflet, ficher *n* clique^ mont. Dites : 
donner, appliquer, détacher un soufflet, Acad. — Ficher une 
assiette à la tète de quelqu'un, ficher 'n' assiette à Ctiette d^enne 
saki, mont. Dites : jeter, lancer une assiette... 

3* Il est fichu, il est fichou, liég., c'est-à-dire il est perdu, 
c'est fait de lui, son afiaire est fuite. L'Académie admet en ce 
sens reX|jres>ion familière il est flambé. — Du fichu tabac, de 
r fichowe toubak. li iigure dans le Dictionnaire de l'Académie, 
qui toutefois déclare qu'il est bas. — Il faut s'abstenir avec soia 
de tous ces mots, dont quelques-uns même sont orduriers. 



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Fièvre. Il a le« fUvrei, Ualèi five, Uéjr.« il a U$ fiéve$, 
mont. Dites : il a la fièvre. — Bescherclle admet la tournure 
avoir les fièvres, dans le sens de : avoir habituellement la fièvre, 
une fièvre difficile à Taire passer. Toutefois, d'après TAcadémie 
et Litlré, Texpression est populaire. Quoi qu'il en soit, voici un 
exemple d^Alexandre Dumas fils : Tai pris les fièvres dans la 
dernière épidémie, idées de .tf"" Aubroy, III, 1. 

Fixer. Elle m*a fixé, liég. D'après TAcadémie et Littré, il 
faudi ait dire elle m'a regardé fixement, ou elle a fixé ses regards 
sur moi. -— Fixant Gilles, p. de Verviers, ReiNier, H Molionne 
à deux face. Il faudrait tourner, regardant fixement Gilles. 

Be^chirelle est d'avis que fixei\ en ce sens, ofi're une des 
figures les plusénei*giques de la langue française. En efiet fixer 
quelqu'un ou quelque chose, c'est en quelque sorie l'arrêter, le 
rendre immobile, nous l'approprier par le seul effet de nos 
regards. Beseherelle ajoute qu'il est dans la bouche de tous les 
Français, et Nodier, dans son Examen critique des diction- 
naires, dit qu'il a été employé en ce sens par J. J. Rousseau, 
Diderot, Delille, Rivarol et cent autres; il fait obsener que 
Chateaubriand le condamne, mais en use, et foit bien. Ex. Ce 
fruit lui reste dans les doigts ; elle le fixe, elle le sent avei; une 
attention plus vive, Condhx. — Boiste, qui ne cite pas le mot 
datis son Dictionnaire k son rang alphabétique, explique le 
patois mirauder (liég. si muter, se mirer, se regarder) par 
regarder avec attention, fixer. — Voltaire se moque, je ne sais 
où, de quelques Gascons qui hasardèrent de dire: j'ai fixé cette 
dame, pour je t'ai regardée fixement, et il a dit lui-même dans 
la Henriade : D'un regard paternel il fixait tour à tour Le peuple 
de héros qui devait naître un jour. — Malheureusement l'Aca- 
démie a ratifié l'anathème de Voltaire, et la plupart des gram- 
mairiens ont (ait chorus. 

Mais fixer quelqu'un est excellent dans le sens de le rendre 
constant et fidèle. Ex. Quel honneur o'est-ce pas pour une femme 
que de fixer un pareil homme ? Uariv. 



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— «)8 - 

Fin. Vraiment, il est fin sot; pas, il est fin soU li^g* Dites : 
il est arcliifou, fou à lier. Ce^l fin pareil, c'eut tôt ft pavHe^ V. 
Sot. 

Ce wallonisme ne se rencontre à Liège que dans certaines 
locutions; mais, dans les provinces de Hainaut et dç Namur il 
est fort en usage. Si staurer fin long, Namur, s*élendre tout de 
son long. J'étos fin contint, tournais, j*étais fort coulent. Fin 
premier, tout /!u seul, tourni»is, (et benichon Litt.). Dites: le 
premier de tous. Quatii à tout fin seul, nous allons voir qu*on 
pourrait l'employer. — li est fin brave, mont, il est ti es propre, 
il est très bien mis. Ctst fin biau, mont. Tournez: c'est fort 
beau. 

Cet emploi de fin n'est pas étranger à la langue française; il 
se joint d.uis le siyle familier à quelques adjectifs. Ex. Je surs 
ici toute fine seule, Sév. Quant à l'expression le fin premier, 
pour le premier de tous, elle est populaire. Ex. D*un village ici 
près, je suis le fin premier, Bours. Fabl. dEs. — On dit irès- 
bien, en fin fond de forêt, Mol., pour dans l'endroit d'une forêt 
le plus écai*té ; le fin fond de la mer ; il vient du fin fond de la 
Russie. 

D*aprës Diez, fin est une abréviation de finilus, fini, achevé, 
parfait. De sorte que fin seul serait autant que parfaitement seul. 
Eifectivement en français et dans le patois de Liège, il conserve 
sa forme adjeciive : toute fine seule, (cité plus haut) ; iue fenne 
avtgneïe caucarette, une coquette trësadioite, Magnée, Ann., 
71, p. 85. Mais, dans le p.itois du Hainau'., il est toujours in\ra- 
riable, ce qui rendrait probable letymologic donnée parSigart : 
fein arlig, familièrement pour sehr artig, Dict. ail. de Schusler. 
Le flamand dit aussi : het is fijn koud, proprement il fait Un 
froid. 

Flegrnie. Il est flegme, il est flemme (ou il a Vflemme)^ liég. 
Dites : il est flegmatique, ou il a du flegme, c*est un flegma- 
tique. 



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Floche. Uq rideau neuf avec des floches» ine nouve brâie 
avou dès floche. Dites: un rideau (de cheminée) garni de glands, 
ou, d'après Bescherelie, un rideau houppe. — Il a une floche à 
son bonnet, t/ a V floche à if bonnette. Dites : il a un gland à son 
bonnet. — La floche d*une ceinture, li floche (Fine ànteû^e. 
Dites : la houppe... Toutefois floche se trouve, en ce sens, 
dans Poitevin, et dans le complément du Dictionnaire de l'Aca- 
démie. 

Floquet, patois lorrain, /loi. Nos Liégeoises appellent ainsi 
les nœuds de ruban qu'elles portent sur leur coiiTure. Le mot 
français est fonlange : cornette à floquets, cornette (ou gdmette) 
à floquet. Dites: une cornette (Agad.), une coiffe ou une coiffure 
garnie de fonianges. On se servait autrefois du mot galant, qui 
se trouve dans le dictionnaire de Furetière. 

Flot. Le flot est à sec, li flot (o breO est à sèch. Au village, 
on donne ce nom à un petit amas d'eau dormante qu'on se pro- 
cure artificiellement, pour des usages communs ou domesti- 
ques. Dites: la mare est à sec. 

Flot a en français un autre sens : les flots de la mer, d'une 
rivière. 

Flotte, fl. vlotf féminin. J'ai vu descendre plusieurs floltes, 
fa vHou (thinde saqwadès flotte. Dites : plusieu]*s radeaux, ou 
trains de bois. Flotte sl aussi ce sens en Lorraine (Litt.). L'Aca- 
démie donne aussi ce sens à flot ; il est peu usité. 

Fois. !<" Je suis des fols obligé de me fâcher, dès fiîe qu'igna 
;i sos't-obligi de nCmàvler, ou gna dès fèïe qui fsos... 

a Le substantif /m ne peut jamais être employé avec l'article 
sans qu'il y ait un adjectif entre les deux mots. L'adjectif /oui 
est le seul qui ne se mette pas à cette place ; an le met devant 
l'article. » Litt. Il faut prendre un autre tour : je suiâ parfois 
obligé de me fôcher. 

2« Vient-il souvent vous voir? — Des fois qu'il y a, il y a des 



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- MO - 

fois, dès fête qu'igna, ou gna dès fête. Dites : de fois à autre, de 
temps à autre, de temps en temps. 

Foroe. Il s*est engoué à force qu*il a crié, mangé, i s'at 
èkrouki à (oieequHl a bi^ai, magni^ liég. Dites : à force de crier, 
de manger. — Il ne pouvait plus tenir sur ses jambes, & force 
qu'il avait bu^ i n*polévepus Vni sos ses jambe, à foice qu'il aveût 
bu. Dites: tant il avait bu. — La grenouille creva, force qu'elle 
s'étendit et qu'elle s'enfla, Vguernouïe a fait skelter s'pia, fauee 
qu'elle s'a s'tindu et qu'elle s'a infU, pat. de Cbarleroi. Dites : à 
force de s'étendre... 

Frao. Etrenner une belle neuve fraque, sitrimer n'belle neuve 
fraque. Diies: etrenner un beau frac neuf. Le montois fait aussi 
ce mot masculin. 

Ce mot vient de Tallemand frack ou du flamand frak, qui est 
masculin, et il a conservé ce genre en français. Il désigne en 
France un habit d'homme qui se boutonne sur la poitrine et se 
termine en deux longues basques. En wallon, il a uu sens plus 
étendu, et désigne, comme en flamand, même la redingoUe. 

Frayeux. Ce sont des corvées trop fiayeuseSy c'est dès 
coiwéîe trop frayeuses. Dites : trop dîspendi»»uses. 

On a dit autrefois en France frayant : Tun alléguait que Théri- 
tage était frayant et rude, et l'autre un autre si, La Fontaine. 
Fabl. VI, 4. 

Frais, subst. Vous ne ferez pas vos frais, vos n'frez nin vas 
frais. Dites : vous ne couvrirez pas vos frais. 

Faire les frais d'une chose ne peut signifier que fournir l'ar- 
gent qu'elle exige. Je m'offre à vous mener dans toutes ces pro- 
vinces, et nos guitares en feront les frais, Lesage. 

Frais, adjectif. 1" Un temps frais, on frexh /im/?<, liégeois; in 
tempj Irèche, mont. Dites: un temps humide, ou moite.— Temps 
frais se dit, mais signifie température intermédiaire entre le 
chaud et le froid. 



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— 211 — 

2* Il fait trais, i fait frexh. Dites: il fait mouillé, Litt., ou il 
fait humide, Besch. — Ex. Quand il fait mouillé, quand il fait 
brouillard, je ne sors point, Sév. — // fait frais, en français, 
veut dire: la température est intermédiaire entre le cliaud et le 
froid; et même quelquefois: la température est très-rapprochée 
du froid ; en wallon, i fait f risse. — De même avoir les mains 
fraîches^ c'est avoir les mains un peu froides, et non pas avoir 
les mains mouillées, avu ses main frexh. — Elle est fraîche ne 
veut pas dire elle est mouillée, elle est frexh. Parler ainsi ce 
serait dénaturer singulièrement ce compliment qu'on adresse à 
une jeune personne. Mademoiselle, vous êtes fratcbe comme 
une rose, à savoir vous avez de la fi ;itcheur, vous avez bon 
visage, de vives couleurs; c*est l'équivalent du joli mot liégeois: 
vos estez tote rosselante. — // est frais, autre compliment à l'a* 
dresse d*un vieillard ; il est vigoureux, encore vert ; wallon il 
est co bin va t. On ne peut Tentendre dans le sens : il est frexh ; 
il est mouillé, trempé. 

Franc. On traduira très-bien;^ rvêus volti, if est ine homme 
frank^ liég. Je Taime beaucoup, c*est un homme franc (loyal, 
sincère). Mais on ne dira pas : Tais-loi, tu es trop franc, taiss*- 
tu, (es trop frank. Dites : trop hardi, trop effronté. — Je suis le 
plus franc, ej sue Vpus frank, p. de Charler. Bernus, p. 17; pat. 
flam. ik ben de vrankste. Dites : le plus hardi. — Il en est de 
même du substantif /ra7icAi«€. On peut rendre mot pour mot 
parler, agi ùvou baicô d*frankisié, parler, agir avec beaucoup de 
franchise (sincérité, candeur) ; mais il y a un wallonisme dans 
cette phrase : si Ton ne prenait sa patience à deux muins, on 
tancerait cette fille d'importance, à cause de sa franchise,... on 
batt*rêut cisse crapiude-là po sirankisté. Dites : à cause de son 
impertinence. — Enfin on fait encore un walloni.^me en tradui- 
sant s'affranki par s'alfrancliir, dans le sens de s'enhardir. 

Le mot franc signifie primitivement libre, c*est un dérivé 
germanique, que les étymologistes rapprochent de la racine 



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-^ m — 

frei^ libre, à laquelle !on rapporte aussi rallemand frech, hardi, 
effronté. Quoi d'étonnant si celte dernière signiticaiion se 
retrouve dans notre wallon ? Au surplus^ les deux idées mar- 
quées par libre et hardi se touchent de très-près : celui qui parle 
et agit librement, parle et agit sans peur ; aussi le mot français 
lui-même a parfois une tendance vers cette acception ; ainsi on 
dit: Je vous pat le un peu franc, pour ouvertement, résolument ; 
un mouvemeut exécuté vivement et franchement^ d*une manière 
résolue et précise. 

Frauder. Vous avez fraudé, vos avez frawtiné, ou froûtelé. 
Rem. Dites : vous avez triché. — On dira très-bien : il a fraudé 
ses créanciers, Acad., dans le sens général de frustrer par 
quelque fraude; et, dans un sens restreint: l'élévation des 
droits excite à frauder, c'est-à-dire à soustraire des marchan- 
dises au payement des droits. Mais ni frauder, ni fraudeur, ni 
fraude, frawlineux^ fvoûteleux, fraw, frawlinège, frawtineréïef 
frawlréïe ou froûlelège, ne peuvent s'employer dans le sens 
particulier de tricher au jeu, iriiJieur, tricherie. 

Fréquenter. Il fréquente ma sœur, i fréquente em' sœur, 
tournais., pour: il couriise ma sœur; et absolument: Il fréquente^ 
tournais., pour il couiHise. 

Ce tornacisme répond aux termes wallons c>viverSi'r et hanter. 
IJonter, en français a le s.êns général de fréquenter et se dit 
surtout d;ins le proverbe: dis-moi qui tu hantes, et je te dirai qui 
tu es. Ne diies pas: Ernesl hante sa cousine, Esnesse hante si 
cuzenne. Dites: fait la cour à sa cousine. — Ne dites pas non 
plus: je hante avec votre neveu, ;i hante avou vose neveu, Delchef, 
lès deux Nèveu^ III, 3. Dites : votre neveu me courtise.— Autre 
walloitisme: Mon fils veut converser la fille du fermier, For. mi 
fi vont converser Vfèie de cinsî. C'est un archaïsme. Converser n'a 
dans l'ancienne lani;ue que le sens de fréquenter, vivre avec; 
c'fst le sens étymologique: cony^r^arî, se trouver avec. Ex. Nous 
ne conversons plus qu'avec des ours afii*eux, La Font. Actuelle* 
ment il signifie avoir conversation avec. 



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— Î13 — 

Frlcadelle. Dites : boulette. Ce mot est d*un usage commua 
dans toute la Belgique; il ne se trouve pas dans les dictionnaires 
et fricandeau a un autre sens. 

Futur pérlplirastique. Nous appelons ainsi^ par analogie, 
la tournure ;e vain expliquer^ ji vas expliquer ^ pour je suis sur le 
point d*expliquer, j'expliquerai à Tinstant. Mais, outre cette 
tournure parfaitement correcte, le wallon a parfois, à la pre- 
mière personne, une tournure réfléchie qui se traduit souvent 
par le verbe s'en aller,. Ex. ji m' vas riv'ni^ je m'en vais revenir, 
pour je vais revenir. Nous retnarquons dans ce texte wallon, 
l'absence de l'adverbe è, français en, latin inde, qui est dans 
s'en aller. Peut-être ne faut-il voir dans cette tournure prono- 
minale ;t m'vas qu'un résultat de la tendance de Pancien français 
à tran.sformer les verbes inlransiiifs en verbes réflJcliis : inde 
fugere, s'enfuir, inde volare^ s'envoler. (V. :iu mot s'encourir.) 
Mais le fait est là, on traduit fréquemment la tournure wallonne 
par le verbe s'en aller. C'est parfait, lorsque le verbe s'en aller 
est pris au sens propre. Ex. ji m'vas qwèri d'Faiwe, je m'en vais 
chercher de l'eau. Mais en est*il de même quand s'en aller ost 
un simple auxiliaire équivalent à aller^ et servant à former un 
futur prochain ? c Le verbe s'en aller, dit Dessiaux, dans son 
Traité de versifit^ation françase, employé pour exprimer une 
idée de futurition, est une expression poétique, nécessairement 
interdite à la prose. » Ex. Et ce triomphe heureux qui s'en va 
devenir l'éternel entretien des siècles à venir. Rag. Iping. I, S. 
Avec Ih liberté Rome s'en va renaîire. Corn. Cinn, I, 3. L'Aca- 
démie dit au mot en que je m'en vais partir s'emploie pour je 
vais partir. Bescherelle et Littré donnent les phrases usuelles 
qui suivent. Je m'en vais faire une promenade. Je m'en vais 
lire un sermon de Bossuet. Ce malade s'en va mourir. Littré 
cite en outre cet exemple de M»* de Sévigné. Je m'en vais vous 
mander un petit secret. Nous ajouterons ces trois exemples : Je 
m'en vais gager qu'ils n'ont jamais vu la carte de Tendre, Mol. 



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_ 2U - 

Précieuses Rid, se. 8. Oh ! que neanî, il n'est pas mort, dit le 
vieux moine ; je le vois qui grouille; mais je m'en vais lui don- 
ner rexlréine-onction, P. Mériméb, Cnronique de Charles IX , 
éd. Char p., p. 204. 

Sans s'arrêter à la critique de Landais, qui va, dans son Dic- 
tionnaire, jusqu'à prétendre que Racine aurait du dire va devetiir 
et non pas s'en va devenir^ on peut établir en principe que ien 
aller, marquant un futur prochain, appartient surtout à la poésie, 
mais pourrait être admis en prose dans le haut style. Hors ces 
cas, il est préférable de dire : je vais faire une promenade, je 
vais lire,... etc. 



Oager. Je gage de vous rattraper, ji wage di v'ra^kure, ou à 
Liège raksûre. On dira mieux : Je parie de vous rattraper. Gager 
de a été blàmé. On dit gager que^ ou pariei* de. Quand les deux 
verbes ne peuvent avoir le même sujet, la tournure gager que 
est de rigueur. Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez 
point si tôt que moi ce but, La Font. Citons toutefois cet exemple 
de Marivaux: si j'étais noble, diable emporte si je voudrais gager 
d'être toujours brave honime^ la double Inconst. III, 4. ( V. si 
conjonction.) 

Gagner. Je suis gagné, ji sos wâgni, liég. t. de jeu, ich bin 
gewonnenf ail. ti ben gewonnen, fl, et je suisperdu^ji sospierdou, 
ich bin verloren, ik ben verloren, fl. Dites : j'ai gagné, ou, 
absolument, gagné! j'ai perdu. — Les deux tournures en ques- 
tion sont française^, mais n'ont pas ce sens : sa femme de 
chambre était gagnée (lié^'. stokêîe, il. bestoken, ail. besiochen), 
Hamilt. Gram. 4. Quand il sut [Lauzun] qu'on le menait à 
Pignerol, il soupira et dit : Je suis perdu, Sév. 106. Silvestre : 
Voilà votre père qui vient. — Octave : ciel ! je suis perdu ! 
Mol. Faurb, I, 4. 



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- ils - 

Galet. Manger des galets.magni dès galet. Dites : des gaufFireSt 
Le wallon a aussi le terme correspondant waffe^ ail. wa/fel. Oa 
féminise le nom dans le proverbe vos piîeiez lès galette, c'est-à- 
dire vous serez la victime; ne traduisez pas vous payerez les ga- 
lettes'^ on dit en français : vous serez la gaufire dans cette af- 
faire, vous serez le dindon de la Tarée. 

GaUt et galette sont français, mais le premier se dit des cail- 
loux polis et arrondis aux angles qui se trouvent sur le bord de 
la mer, le second désigne une espèce de gâteau rond et plat de 
pâte feuilletée. 

Garçon. Mon garçon était mort, win garchon itot mof7,p. de 
Lille, Biill. a. 70, 2" I. p. il8, m'garcheoni èteuot mort^ Tourn., 
rvL garchon étoit mort y Leuze, Ath , Péruwelz, Frasne, ni garchon 
astoué mort, Lessines, ni garçon stet mort, Pâturages, tm' gar- 
çon estait mort, Gosselies, m* garçon astout mort, Nivelles, 
m*gaclion atout moue, Virton. —Dites : mon fils était mort. 

Ce mot de garçon^ dans le sens de fils par rapport 5 son père 
et à sa mère, est, comme on le voit, très-répandu dans le Hai- 
naut. Ainsi on dit : Fgarcheon Dugnolle, Vgarcheon Dusaûssoy, 
pour le fils Dugnolle, le fils Dusaûssoy, formes archaïques en 
lournaisicn et en français, pour Vgarcheon d' Dugnolle Je fils de 
de Dugnolle, etc. Nous disons de même : les fils Collard, les 
quatre fils Aymon, à moitié chemin. Pour ce vestige du génitif 
latin, V. le mot Place. — Jadis le français faisait l'inverse de 
ce que font certains patois; il employait fils dans le sens de 
garçon, jeune homme : Filles et fils en la fieur de fâge, Marot. 
Ajoutons que, dans le style familier, garçon peut quelquefois se 
prendre pour fils. Mon garçon est au collège, Litt. 

Garde. Ne dites pas garde d'enfant, gir d*èfant, garde-de- 
nuit, gâr^i-nutte; mais bonne d'enfants, ou simplement bonne, 
et veilleur de nuit. 

Garenne. Le lapin Je garenne du patois de Mons est le lapin 



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— 216 ~ 

privé ou lapin de clapier ; en français, le lapin de garenne est le 
lapin sauvage, sauvage lapin, mont. 

Oasse Nous ferons une gasse, non frans rigaêse^\\é%. ; nous 
ferons une guinse^ nous façons 'riguinse^ mont, tournais. Dites : 
nous ferons un repas extraordinaire, nous ferons un banquel, 
ou il y aura gala. 

Gent. l*" Une méchante gent, eune méchante gint^ p. de 
Nivei. entie michante gint, mont. Dites : une personne mé- 
chante. — C'est une brave gent, c'est one brave gint^ namur. 
Dites : c*est un honnête, un brave homme, ou une honnête, une 
brave femme. 

i!^ Ces gens -là sont soupçonneuses^ ces gint-là sont dimè- 
fiantes. Toutes les gens comme il faut, totes lès gint comme i fâl. 
Dites : ..... soupçonneux, touslesgens... —Le mot gint est 
toujours féminin en wallon ; on connaît la syntaxe compliquée 
du mot français. 

3<* Ces deux gensAk s'aiment h\eiï,cès deux gint-là s'vè'iet volti. 
Dites : ces deux personnes^là s'aiment bien. — Gens ne s'em- 
ploie pas avec un nom de nombre déterminé. C'est un ar- 
chaïsme que plusieurs écrivains français ont voulu ressusciter 
au KVIP et au XVIII« siècle. Ex. Deux gens qui auraient le 
malheur d'être sourds, aveugles et muets, Dio. Lettre sur les 
aveugles. — Cela ne vaut rien, parce que gens est un nom col- 
lectif ; c'est même ce qui le distingue de son synonyme per-- 
sonnes^ qui est un nom individuel. On dit vingt personnes, mais 
non vingt gens ; et, réciproquement, on dit les gens de guerre, 
et non les personnes de guerre. — - Cela étant, on ne dira pas 
mille gens^ mèîe gint, pour indiquer un nombre précis, déter- 
miné; mais on dira très-bien, comme en wallon: j'ai bien vu 
mille gens sur la place, Litt. ,;'at?éiou camètegint so Cplèce, en 
donnant au mot mille un sens indéfini.— Cette règle n'est pas 
applicable à gens précédé d'un adjectif. Ainsi rien n'empêche 
de rendre mot pour mot l'expression suivante : treûs vèiès gint, 
trois vieilles gens. 



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_ 217 - 

Gtentil. Cet ouvrier est fort gentil, eisfavri-là est foirt gintU 
Dites : est trés-aciif. -^ C'est une gentille femme de ménage, 
e'est'ine gentèie feumme di manège. Dites: c'est une femme de 
ménage fort laborieuse. Mes enfants , soyez bien gentils^ mes 
èfanl^ seyiz bin gintis. Dites : soyez bien sages. — L*adverbe 
gentiment forme également un wallonisme dans la phrase sui- 
vante : Les terrassiers travaillent gentiment, Us terrassi ovrèt 
gintètemint, Dites : travaillent activement. 

Gentil signifie joli, agréable, gracieux: un gentil enfant; 
une chanson fort gentille. Gentiment veut dire joliment : cet 
enfant est gentiment habillé. 

Olflle. Donner une giffle, ficher 'n^giffe, mont. Dites : donner, 
appliquer, détacher un soufflet, âcad. 

Olorlette. Eune ghriette, mont. Dites : un cabinet de ver- 
dure, un berceau, une tonnelle. Ce mot est très-usité dans le 
Hainaut et dans le Limbourg belge. Littré le mentionne avec la 
signification de pavillon, petit bâtiment, dans un parc ou un 
jardin. 

Gourmer du vin , mont., goûrmér de vin, iiég. Diies : dé- 
guster du vin. Gourmeur est de même puremeut wallon : c'est 
an fameux bon goûrmeû, Iiég. c'est in fin gourmeu, mont. Dites : 
c'est un fin gourmet, Acad., ou un excellent dégustateur. 

GrOût. Ce vin a un goût de pays, d vin-là a on gosse di pats. 
Dites : a un goût de terroir.-— Forir semble eraindre de faire un 
wallonisme en rendant mot pour mot nasse bîre a on gosse di 
tonnai, fi. ans bier heeft enne tonuesmaak; il traduit : noire bière 
sent le fût. Celte dernière expression est en effet celle de l'Aca- 
démie, mais il yaurait du rigorisme à condamner la tournure a 
un goût de tonneau ; elle est analogue à avoir un goût de reti- 
fermé, de pourri, Acad. 

Goûter. Cela me goûte, ça m'goutte, mont.— Est-ce que cela 
vous goûte ? coula v^gostéle-t-i? Cela se dit très-souvent, mais 



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— ^218 - 

ce n*en est pas moins mauvais. Encore un wallonisme qui a subi 
rinfluence combintle du latin et du teutonique. Smaakt u dat? 
il., smeckt Ihnen dast ail. Dites: cela vous semble-t-îl boii?GeIa 
est-il de votre goût ? Le trouvez-vous bon ? Cela vous plalt-il ? 

Cet idiotisme pi-ésente un sens métaphorique du verbe goster: 
en etTet goster se dit primilivement, comme le latin gustare, de 
la personne qui perçoit la saveur d*un objet; il est ici transporté 
de la personne qui pergoit à la chose elle-même, et il signifle 
avoir telle ou telle saveur, particulièrement une saveur a^^réable; 
le latin guslus, primitivement, l'action de goûter, s'employait de 
la même manière dans le sens figuré de saveur: fructus gustu 
suaves, mot à mot des fruits agréables quant au goût, des fruits 
d*un goût agréable ; ainsi le latin gustus et le français goût sont 
pris ici dans le sens de sapor, saveur. Le latin gustare n'admet- 
tait pas cette acception figurée ; mais le wallon gosier a pu la 
prendre grâce à gosse {gustus^ sapor), et grâce au teuloni* 
que smaken, schmecken, qui est très-classique dans cet emploi 
métaphorique. L'anglais lo laste se prend également danj les 
dtux acceptions. 

Goutte. 1<> Elle ressemble à sa mère comme deux gouites 
d'eau, elle ravisse si mère comme deux gotte d'aiwe, V. Ressem- 
bler. 

La locution est fausse, parce que ie sujet du verbe est du sin- 
gulier. C'est du moins l'avis de plusieurs grammairiens. Ainsi, 
d'après eux, 6n dirait d'une façon plus correcte: sa mère et elle 
se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Cependant cette 
faute, si réellement faute il y a, a été faite même en France. 
M"** de Sl-Pars trouve que M, d'Auxerre vous ressemble comme 
deux gouttes d'eau, Maintenon, Lett. Il disait que je ressemblais 
â Gengis-Khan comme deux gouttes d'eau, Volt. Lett. « On a 
fait ressortir plaisamment ce vice de cette façon de parler en 
disant de la rivière artificielle de Trianon, qu'elle ressemble à 
une vraie rivièi^e.... comme deux gouttes d'eau. » LrrTRfi. Mais 
pourquoi ne pas admettre : elle ressemble à sa mère, comme 



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— 219 — 

deux gouttes d'eau (sous-enr. se ressemblent)'! Il n'y a dans 
cette ellipse, rien de choquant, et le sens est parfoitemenl clair. 
2» Je n'y vois goutte, ji n'y veus gotte, ou ji n'veus gotte. 
D'après un recueil d^OmnibuSy il faudrait traduire je ne vois 
goutte, à moins que le mot y ne marque une relation avec ce qui 
précède. Ex. Ce raisonnement est si obscur, qu'on n'y voit 
goutte, c'est-à-dire qu'on ne comprend rien à ce raisonnement. 
Tel n'est pas l'avis de l'Académie qui cite les deux expressions 
côte h côte sans faire aucune observation, et de Li(tré, qui les 
donne également comme équivalentes. De plus k, Lemaire, ap- 
prouvé par iMarty-Laveaux, dans son Dictionnaire des difficultés^ 
prétend que dans les deux locuiions, je n'y vois goutte, je n'y 
entends goutte, l'adverbe y s'emploie d'une manière absolue et 
explétive, et que ce sont des idiotismes que l'usage défend contre 
la grammaire. Il cite à l'appui ces exemples de l'Académie. 
Avant de m'eugager, je veux y voir clair ; il n'y voit pas. 

Groutter. 1" Ne dites pas : Ce coquemar goutte, cisse coque- 
mâr-là gotte; pour exprimer que l'eau s'en échappe par une fente. 
Dites : ce (et non pas cette) coquemar fuit. — Forir condamne 
aussi : ta hotte goutte, ti bot gotte, les murs de la cave gouttent, 
lès meur dèV câvc gottèt; il prétend qu'il faut se servir du verbe 
dégoutter. Nous lisons dans Littré : les toits gouttent {lès teût 
gottèt), c'est-à-dire laissent tomber l'eau goutte à goutte ; ce qui 
prouve que cet emploi de goutter n'est pas inconnu en France. 
Mais l'Académie ne l'ayant pas admis» on dira mieux : les toits 
dégouttent, ta botte dégoutte. 

i? Ne traduisez pas non plus i gotle, v. unipersonnel, par il 
goutte, fl. popul. het drupt^ ou druppelt, fl. litt. het druipt. Dites: 
il tombe des gbulles d'eau, il commence à pleuvoir. 

Gouttière. Un seau d'eau de gouttière, ou un seau de gout- 
tière, on sèïai d'aiwe di gottîre, ou on sèîai d'gotttre. Dites : un 
seau d'eau pluviale, et mieux un seau d'eau de pluie. 

La gouttière est le canal demi-cylindrique attaché au bord 



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- MO - 

inférieur des toits, pour recevoir Peau de la pluie et la déverser 
soit dans le ruisseau soit dans la citerne. L*eau de pluie est donc 
de reau de citerne et de Teau de gouttière, ce qui explique le 
^allonisme. 

Grozette. Le terme français est chausson. Le wallon a aussi 
gozd. La gozette est plus délicate que le gozâ, Grandg. 

Grand, Grandiveuz, pour fier, vaniteux, hautain. Gran- 
diveux est purement wallon. Quelques personnes traduisent ce 
mot par grand : il est trop grand pour nous saluer, il est trop 
grandiveux pos nos dire bonjou^ fl. A/; is te grootsch^ ou mieux 
te groot... Dites : il est trop fier... Evitez de même le mot ^ran- 
dewr dans le sens ùq fierté. C'est la grandeur qui Ta perdu, c'est 
Fgrandeûr qui Va pierdou^ û. het is de groostsheid die hem verlo- 
ren heeft, c'est la vanité qui Ta peidu, c'est la gloire qui l'a 
perdu (gloire peu usité en ce sens, Acad.). 

Le mot de grandeur doit au contraire se prendre dans un bon 
sens : Magnanimité, élévation et noblesse morales. Ex. La vraie 
grandeur se courbe par bonté vers ses inférieurs et revient 
san^s effort dans son naturel, La Bruy., II. Il n'y a pas moins de 
grandeur à supporter de grandes injustices qu'à faire degrandes 
actions. Volt. Lett. — Il en est de môme de grand. Et fût-il 
sous ta rage ix tes pieds abattu, il t^st plus grand (magnanime, 
noble) que toi, s'il a plus de vertu, Corn. Attila. 

Guère. Ce mot, d'après Diez, est d'origine germanique : an- 
cien haut-ail. Dtiweiger^ pas beaucoup ; il sii^nifie beaucoup^ et 
non pas peu, comme le dit l'Académie. C'est la négation ne qui, 
accompagnant toujours ce mot, lui donne le sens de peu. Ne 
dites donc pas: Avez-vous encore du vin dans votre verre ? — 
Guère. AveZ'V^co de vin é vosse verre? — Wère. Tout au plus 
cet emploi fort elliptique de guère appartient-il au langage très- 
familier. Cela ne pourrait jamais s'écrire. (Litt.) — Noiis ver- 
rons à propos du mot rien un autre exemple où la négation s'est 
perdue. C'est également le cas de pourtant ; non pour tant. 



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— 131 - 

H. 

Habile. !• Ouvrier habile, habèie ovri, c'est-à-dire expéditif, 
apte à agir, dispos. L'Académie dit qix'habiU est populaire 
en ce sens. Tel n'est pas l'avis de Besciiereile. Ex. un copiste 
habile, à bavoir diligent, expéditif. Litiré dit que c'est là le sens 
propre: du latin habilis, sens primitif ^otip/^, dispos; et il cite 
cet exemple de Molière : Hais demain, du matin, il vous faut 
être habile à vider de céant jusqu'au moindre ustensile, Tart. 

i^ Littré va mâme jusqu'à admettre l'emploi adverbial de 
habile! habile! (liég. habèïe! habèîe! mont, habïel habie! rouchi 
avite habile !) qu'il explique par : dépéchez-vous. Cela jure avec 
Favis de tous les auteurs d'Omnibus wallons, et il sera prudent 
de s'abstenir de celte expression. 

3"» Mais les phrases suivantes sont essentiellement wallonnes: 
Nous voulons l'assommer tout de suite, habile,nous voulons 
rtassoumer toute suite, habie, les Avent, de J. d'Mveltes. Dites : 
tout de suite, à t instant. --Habile, allons, habèie, jans, liég. Dites: 
ça allons, Agad. sus, id. allons, vite. — J'y courus au plus Aa- 
bile, fy coras â pu^ habèie, liég. Dites : j'y courus au plus vite. 
— Au plus vile, pour le plus promptetneut qu'il est possible, se 
trouve dans lu Foniaine, fable VII, 11, dans Voltaire et passim. 
Al couvez habile, tournais. Dites: accourez, vite. — Il décampe 
habile, i s'incourt habile, id. Dites : il décampe lestement. 

Hanter. V. Fréqlbnter. 

Hausse. Vendre en hausse publique, vinde à l'hausse. Dites : 
vendre à l'encan, aux enchères, à renchëre, Agad., mettre à 
l'encan, Litt., à l'enchère, aux enchères. —Mettre une hausse, 
mette ine hausse. Dites : mettre une enchère, couvrir une en- 
chère, mettre enclière, Agad. 

Uausse, en ce sens, est un archaïsme. Ex. Je mettrai ma 
hausse tout d'un coup quand il s'agira d'adjudication, Ricbelet. 



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— 222 — 

Actuellement ce mot à un autre sens facile à saisir : Les fonds 
sont en hausse. Les banquiers spéculent sur la hausse et la 
baisse. 

Haut. Monter en liaut^ en liégeois, monter là-haut. Cette 
locution, très-usitée dant notre pays aussi bien qu'en France, 
est condamnée sans restriction par Forir, qui la taxe de vul- 
gaire, par Hennequin et par M. Tabbé Carpentier, qui prétend 
que cela ne se dit plus. Cette décision est trop absolue. L*Aca- 
démie a enregistré cette locution dans son Dictionnaire. Litlré 
l'admet dans le langage familier comme Féquivaient de monter 
chez quelqu'unyqix^il explique ainsi : aller dans son logis^silnéau 
premier étage, ou plus haut. Il cite cet exemple de La Fontaine : 
Il monte en haut. La tournure se trouve également dans Racine, 
Remarques sur VOdyss. L. II, à la tin. — Le wallon ne donne 
pas nécessairement à Texpression ce sens restreint, mais toutes 
et quantes fois qu'elle Taura, on ne doit pas faire difficulté de la 
traduire par monter* en haut. Autrement, on dira simplement 
monter. 

Observons encore que la traduction littérale monter là-haut 
n'est pas du tout un grossier wallonisme. L'académie l'admet 
comme synonyme de monter en haut et elle donne cet exemple: 
Ne laissez monter personne là-haut, ni lèi monter nolu f*) M- 
haut; et Littré cite cet exemple du Distrait de Regnard : Je vous 
quitte un moment et je monte là-haut, III, 14. Autre exemple 
dans le Méchant de Gresset, III, 9. 

Quant à la tournure, descendre en bas^ dihinde Vavâ, elle 
peut être admise dans le langage familier avec le sens de des- 
cendre au rez-de-chaussée. Elle se trouve dans le dictionnaire 
de Trévoux, ei l'exemple suivant de Racine paniît concluant : 
Etant arrivés la nuit [ les persécuteurs de saint Polycarpe ] à la 
maison où il était, ils le trouvèrent couché dans une des ctiam- 

(^) Forir regrettait que ce mot verviélois fût presque tombé en dé«uélode à 
Liège. 



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^ 8J3 — 

bres d*en haut... . Ayant donc su que ces gens l'attendaient, il 
descendit en bas. Œuvres complètes, édition Hachette, tome Ui, 
page 284. 

Héritance. Il a fait une grande héritance, il a fait n'grande 
héritance, p. de Liège. Dites: il a fait un grand héritage. Perdre 
une héiitance, pierle in" hériîince, p. de Nivelles. Dites: être 
privé d*un héritage, d'une succession. 

Heure.l^' Il y a cinq bonnes heures de Liège à Huy, gna cinq 
bonnes heure di Lige à Hu. Dites : il y a cinq bonnes (ou fortes 
lieu'Sàe Liège à Huy. 

Le wallon n*a qu'un mot pour traduire heure et lieue. On 
prendra garde en traduisant : Fér heure par heure, faire une 
lieue par heure, ou à Iheure. Nos avans roté treus teûre â long^ 
nous avons marché pendant trois heures ; et comme nos nos 
avans pierdou^ nos n*estîs qu'à ine heure di Ltge, fl., ...wij waren 
maar op een uur van Luiky et comme nous nous sommes four- 
voyés, nous n'éiions qu'à une lieue de Liège. — On dira: «Vous 
avez encore pour une heure de chemin, ou simplement, vous 
avez encore une heure de chemin » Acad., et cette dernière 
locution une heure de chemin^ ou plus brièvement, une heure^ 
s'emploie même quelquefois pour désigner l'espace que l'on 
parcourt eu utie heure de marche. Exemple : Nous étions à huit 
heures de Paris, Sév — Toutefois il faut préférer, en ce cas, la 
tournure heure de chemin. 

i" Le quart avant trois heures, le quart pour midi, H qwârt 
divant treus heure, H qwârt po doze, fl. kwart voor drie, kwart 
voor twaaif. Dites : trois heures moins un quart, Acao., midi 
moins un quart. G*esl une faute où nous tombons assez souvent, 
et messieurs Us Français ne cessent de nous la reprocher, et 
avec raison. Plusiiuis en voulant éviter cette laute, tombent de 
Chai ybde en Sylla, et ils disent le quart de trois heures, le quart 
de midi. Cette dernière tournure provient du patois de Mons, 
qui dit par exemple : el quaert dé minuit^ pour minuit moins un 



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— 2S4 - 

quart. — Il est probable que la tournure léqtoâri po doxe est 
une fausse traduction du flamand, voor signifiant & la fois avant 
et pour. On rend aussi la tournure H qwdrt po doze par onze 
heures trois quarts, onze heures quarante-cinq minutes, ott 
onze heures quarante-cinq ; mais ce sont des expressions tech- 
niques qui s'emploient dans les tableaux officiels des heures, et 
qui ne sont guère de mise dans le langage usuel. 

3« A douze heures, à doze heure, fl. om twaalfure. Dites : à 
midi.— i4 doze heure à méte-nute; tournez : à minuit.— Cepen- 
dant on trouve dans M°*« de Sévigné: nous n'arrivâmes ici 
qu'après douze heures du soir. Cela n'est pas à imiter. 

4® Toutes les demies-heures, totes lès d^mêiès-heure. Dites : 
toutes les demt-houres. 

il" Ne dites pas : il est le quart après deux heures, il est 
Vqwdrt après deux heure, û. het is kwart na twee. Dites : deux 
heures et un quart, Acad. Dites de même : trois heures et un 
quart ; ce qui est également bon en wallon : ireus heure et on 
qwdrt. — On peut encore dire : deux heures un quart, Acad. 

Plusieurs condamnent la tournure deux heures et quart. Elle 
n'est pas seulement appuyée sur l'Académie, mais sur le bon 
usage : Ex. Il faut être en vérité bien aveugle pour attacher 
tant d'importance à ce que les leçons soient récitées de huit à 
neuf heures, la page d'écriture commencée à neufheui^s seule- 
ment et finie à neul heurts et quart, J. Sin. LEcole, éd. Lacr. 
p. 104. Au surplus neuf heures et quart a pour lui Tanalogie; 
- ne dit-on pas : neuf heures et demie ? 

6» Ne dites pas : une heure de temps, ine heure di timps, fl. 
een uur tijds, si vous regardez cette manière de parler comme 
complètement synonyme de une heure. Ex. J'ai fait une lieue et 
demie en une heure de temps, fa fait ine heure et d^méie di voie 
so ine heure di timps. Dites simplement : eti une heure. Mais 
une heure de tempi est très-français, comme équivalent de une 
heure d'horloge, c'est-à-dire pour signifier une heure que l'at- 
tente ou une raison quelconque fait paraître longue. Je vous ai 



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- MB - 

attendu trois heures d'horloge. Ji v's a rattindau treus grozis 
hiréiis heure. Ceux qui amusent une conversation pendant 
deux heures de temps, sans qu'il soit possible de retenir un mot 
de ce qu'ils ont dit,MoNT. LetLpers., 20. On dit aussi trois grosses 
heures, trois heures entières, trois mortelles heures, Besch. 

7* Vers les une heure, vès lès ine heure. Dites : vers une heure. 
Cependant l'Académie admet sur les une heure, tournure qui, 
sans une autorité aussi respecuble, aurait tout à fait l'air d'un 
wallonisme renforcé. 

Hochet. Une faiseuse de hochets, ine fresse di hochet. Dites: 
une faiseuse de briquettes. — Cependant ce mot est français, 
mais sert à désigner un jouet qu'on donne aux petits enfants et 
qu'ils prennent entre leurs gencives pendant le travail de la 
dentition. 

Homme. Son homme est d'un caractère diflBcile, si homme 
est haïâve, fl. haarman is moeiliik. Dites: son mari est... — 
Oui-da, mon homme, mon cher homme, awè de, mi homme. 
Dites: oui-da, mon mari. — L'Académie signale cet emploi 
populaire du mot homme, et donne cet exemple : j'irai avec mon 
homme souper chez vous. 

Hors. !• La messe est hors, ou dehors, l'école est hors, ou 
dehors, li messe est foû, li scole est foû ; prenez un autre tour : 
La messe est dite, Agad., la classe est finie, la leçon est ter- 
minée. — Cette faute assez grossière se commet rarement, mais 
Forir la signale dans son Dictionnaire, et il est bon que tout le 
monde soit prévenu.— On reconnaîtra aisément, dans ce wallo- 
nisme, l'influence de l'idiome germanique : de school is uit, die 
schule isl ans. 

2« Hors des yeux, hors du cœur, foû d^Voûîe, foû de cour, uit 
hei oog, uit het hart. Ce spot est souvent cité pour montrer les 
effets désastreux de l'absence sur les affections les plus 
tendres. La sagesse des nations dit en bon firançais : Unn des 
yeuX; /otndu cœur. 



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- «6 - 

• 

3* Ne dites pas : hors saison, foû saizon^ mais hors de saison; 
hors chemiOy foû voie, mais bors de chemin, il est hors place, 
il est foû pièce ; mais hors de place, Acad., ou en parlant de 
domestiques, hors de condition, Acad. — D'autre part, tra- 
duisez fidèlement /bû dèV vèîe, hors dr^ la ville.— Ne dites donc 
pas : Monsieur est-il chez lui?— Non, il est hors ville. Li matsse 
esUi dalf^ Nenni, il est foû dèV vête. Dites : il est hors de la 
ville, il esl absent, à la campagne, en voyage. 

Les grammairiens ont posé comme principe que la préposi- 
tion hors, sauf dans le sens de hormis, excepté, régit de. 
Ils permettent cependant d'omettre de dans certaines fa(^ns de 
parler du st>le familier. Cet homme est logé hors la porte Saint- 
Antoine, AcAo.; il y avait hors la porte de la cour une terrasse, 
J.-J. Rouss. Conf. I. — D*après cela, la phrase il demeure Hors* 
Château, t demeure foû Cfiestai, doit être tenue pour bonne. 

4* Prenez-en deux ou trois dehors, sèchizè, ou prindez-è 
deux ou treus foû. On dira, suivant le sens : Prenez -en deux ou 
trois, choisissez-en deux ou trois, ou déduisez-en, défalquez- 
en deux ou trois. 

Je tire mon mouchoir hors de ma poche, ji sèche mi norèt 
foû di fripoche, fl. %k trek mijn zakdoek uit mijn zak. Dites : je 
tire mon mouchoir de ma poche, comme on dit, tirer de l'ar- 
gent de son coffre, de sa bourse, de sa poche, M. Carpbxtier. 

— Tirer le sabre, Fépée du fourreau, sèehi esâbe (fém.) l*èpèie 
foû dé forai. Dites : tirer le sabre (masc), l'épée du fourreau. 

— Sortir hors de sa mmon,sôrti foû di s'tnohonne. Dites : sortir 
de sa maison, de chez soi. — Sortir hors de la ville, sorti foû 
dèV vêle. Dites sortir de la ville. 

5« Rentrer hors heure, rintrir foû heure, fi. buiten uur naar 
huis komen. Dites : rentrer à heure indue, Acad. 

6* Mettez vos meubles hors, mettez vos meûbe foû. D'après 
un recueil d'Omnibus, il faudrait dire : mettez vos meubles 
dehors. « Lorsque hors n'a pas de complément et qu'il devrait 
itre placé isolément, il fkut le remplacer par Tadverbe dehors. » 



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- 847 - 

— Il est de fait que dehot-s, dans Texemple précédent, est plas 
conforme à Tusage général, mais nous doutons si hors est 
fautif. — Lattre, à Tarticle hors, parle de l'emploi adverbial de 
ce vocable, en ajoutant que c'est l'emploi étymologique : foris, 
ou foras, dehors ; [vieux franc, fors ; on connaît le fameux mot 
soi-disant historique (*): tout est perdu, fors Thonneur]. Il cite, 
entre autres exemples, ce vers du Tartufe : Mettre vos meubles 
hors et faire place à d'autres. 

Humidité. !<" Ne marchez pas dans les humidités^ ni waiz 
nm d'vint lès frèhisse. Dites: ne marchez pas (m. à m. guéez) 
où il fait humide, ou bien, où il fait mouillé. — Il fait mouillé 
est dans »!■• de Sévigné. 

Humidité est un nom abstrait ; c'est l'état de moiteur de Tair 
ou du lieu , et il aurait, dans cette phrase, un seos concret. 
Je dirais pluiôt dans le mouillé, en imitant cette phrase de la 
Fontaine : Qu'il eût du chaud, du froid, du beau temps, de la 
bise, enfin du sec et du mouillé, FabL VI, 4. 

3« Le vent d'ouest nous amène des humidités, H vint d'Lo- 
vagne (de Louvain) nos amonne dès frèhisse. Dites : de l'Immi- 
dité. Les noms abstraits ne peuvent guère se mettre au pluriel. 
Ainsi on dira, en parlant de soi et d'une ou plusieurs Mtres 
personnes : à notre ftge, et non pas à nos âges, notre santé, et 
non pas nos santés (excepté dans le sens de toasts, brindes), — 
L'Académie dit cependant : un lieu bas, sujet aux humidités 
de l'air et de la terre. Il est fort douteux que cet exemple puisse 
justifier le wallonisme en question. 

Ici. Cet homme-fc», cist* homme-dal, liég.; ce monde-»ci, ei 
monde-cid, id.; cette fois-ici, celle (*) fois-ichi, Arménaq. de 
Tournai, a. 81, p. 8. Dites : Cet homme-ci, ce monde-ci, celte 
fois-ci. 

(*) V. FooftRlBH. Vesprit dam thiitoire, XXI. 

("i On remarquera celle forme de radjectif celle (cel/e), qui, 4'tprèa LtmÉ, â 
donné lieu à la locuUon à celle fin de (pour k celle fin de), que le people^^ igaonal 
de rdtymologie, a iranalbraide eft à uuh /In d$. 



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— Î28 — 

Autrefois, on employait id comme nous employons ci, c'est- 
à-dire qu'on le joignait à un nom. Le long temps qu'il y a que 
vous n'avez reçu des nouvelles de ces quartiers-tci, Pasc. 

2« D'ici à là on compte deux lieues, di cial à là on compte deux 
heure^ fl. van hier toi daar... La suppression de à est de rigueur: 
D'ici là. — Mais di cial à d'main se rend par d^ici à demain, et 
di cial à Tongue, par d^iei à Tongres, 

Idée. Vous ferez mon habit une idée plus grand, vos frez 
mi liabit ine idéte pus grand. — D'après un recueil d'Omnibus, 
il y aurait là un wallonisme. Il est vrai que l'Académie ne signale 
pas cet emploi du mot idée dans le sens de petite quantité, mais 
Littré l'admet, et il cite cet exemple : Je ne veux qu'y goûter,ne 
m'en donner qu'une idée. Au reste, les équivalents abondent : 
Vous ferez mon habit un peu plus grand, tant soit peu plus 
grand. Donnez- m'en une miette. On a remis à la mode les 
archaïsmes un tantet, un tantinet^ qui ne manquent pas de 
grâce. 

Cette acception familière du mot idée provient sans doute de 
ce que Yidée, opposée à la réalité^ est peu de chose. 

Dans la Prusse Rhénane, le peuple emploie de la même 
manière le mot GedankCf pensée. Wollen Sie^ dass ich Ihmn 
welehen einschenke? la^ einen Gedanken. Vôlez-v* quijiv*sennè 
vûdeî Awè, ine idéîe^ fl. /a, een gedaehlje. 

IL l*" Qui est galeux quHl se gratte, qui est rogneux qu'% 
8*grette. Si l'on traduisait un spot, il faudrait dire : Que celui 
qui est galeux, se gratte. 

Lorsque le pronom qui équivaut à celui qui, il ne peut être 
suivi de U dans le second membre de phrase. Ex. Qui chasse 
deux lièvres n'en prend aucun. Au surplus le proverbe français 
est : Qui se sent galeux se gratte. 

2* Celui qui l'attrape, qu'il le garde, li d qu" rattrape qu'el 
wâde (on ajoute pour la rime, li d qu* ne Ivout nin qu'el donne à 
9*camardde). Cri des enfknts lorsqu'ils lancent au loin leur sabot 



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- 2Î9 - 

{tournai, bizawe ou boubentie). Cet il forme un pléonasme vi- 
cieux. Dites : que celui qui l'attrape, le garde, et mieux, attrape 
qui peut. 

S"" Ha sœur elle est venue hier, mi masoûr elle a v'nou Mr, 
iiég. Dites : ma sœur est venue hier. Le plus jeune il a dit à son 
père, li pu jeonne iadit {*) à s'pére, tournais. Bull, a . 70, !• I. 
p. 117. Dites : le plus jeune dit à son père. 

Notons qu'on dira très-bien en français, en reprenant un mot 
qui vient d'être prononcé par un interlocuteur : Ha sœur! elle 
est venue hier. Il y a là une nuance qui n'est pas dans les textes 
wallons cités plus haut, mais qui pourrait cependant y être, tel 
contexte étant donné : Vos n'avez nin vèïou m^goûr? — Vosse 
soûr^ellea v'nou Aîr. Vous n'avez pas vu ma sœur? — Votre 
sœur! elle est venue hier. En français on emploie quelquefois 
la tournure en question pour donner plus de force à l'affirma- 
tion : II fut bien leste ce voyage, Ste^Becve, P. Lundis, I, p. 45. 
Elle lui ressemble pourtant beaucoup à M. de la Harpe, id. id. 
p. 47. 

Indicatif (1*— pour le subjonctif). Les patois sont parfois de 
mauvais guides en ce qui concerne l'emploi du mode subjonctif; 
nous avons déjà touché ce point à l'article Conditionnel, et à 
l'article Croire. 

l'* Je suis tort aise que vous êtes venu, ji sos bin bindxhe qui 
v's estez v'nou. Dites : que vous soyez venu. — Quel bonheur 
qu'il ne nous a pas reconnus ! on bonheur quH rinos a nin rik- 
nohou ! Dites avec l'Académie : Quel bonheur qu'il ne nous ait 
pas reconnus ! 

2« Il n'y avait personne qui lui en donnait, i n'aveuoi perseonne 
qui li in donneuot, pat. de Tourn. Bull. a. 70, i* 1. p. 117 ; 
t n*avoit peersonne qui It in dounoit, Ghièvres ; il n'avait per* 



O Le contexte devrait amener le paseé dëSni, mais ce temps n'existe guère 
dans les patois du Hainaot. 



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— 230 -- 

êonne qui li in (Fnait, Gosselie^j; il n'y n'aveut personne qui li in 
doneut, Beaumont. Il faut : qui lui en donnât. 

V Quoique je suis petit, je n*ai pas peur de vous, mâgriqu'ji 
SOS p*tit, ji n'a mn pawou d'vos, liég. — Il a ose le dire, quoique 
nous étions tous là, il a wasu Fdire, quoiqu* nos estaines tortos 
là, namur. — Quoique tous les hommes sont frères, quoèque 
tous Us homme sont frère^ p. de Charler. Bernus, 34. — Dites : 
quoique je 5(rfs..., quoique nous fussions,..^ soient frères. 

En français, les conjonctions quoique, bien que, encore que, 
combien que veulent être construites avec le subjonctif. Les 
conjonctions wallonnes mâgré qui, quoiqui, bin qui, toi qui, 
liég. (Ann. li, p. 79, ligne i et p. 83, 1. 24), maugré qui, bin 
qui, ècor qui, namur,, admettent, comme les conjonctions 
latines correspondantes etiamsi, etsi, tamesti, le mode indicatif 
et le mode subjonctif. Dans ce dernier cas, la correspondance 
est complète : à preuve ce texte namur. Bin qui f seule pus 
grand qu*vos, ji n* saureuve mougni one rdàosse (une rabote ou 
un gomichon) à mi r^ ciner (liég. à m' quatr'heure : re cœnare, 
remanger). Gravée, et ce texte liégeois de Forir, mdgré quH 
seûtemècontint... 

Littré cite des exemples tirés des meilleurs écrivains, où 
quoique est suivi de Tindicatif Quoique nous devenons Anglais, 
Froiss. La mienne, quoique aux yeux elle n'est pas si forte. 
Mol. Quoique, devenue arienne et persécutrice des catholiques, 
elle n'avait pas mérité d'être flattée, Boss. Vaugelas a même 
empiloyé quoique avec le conditionnel. Quoique quelques-uns 
seraient d'avis.... — Actuellement la règle française indiquée en 
tête de l'article est absolue. 

4« Quel domiftage que mon père n'est pas ici ! comme il serait 
content ! que dammage qui m' papa n'eH nin ^ci I comme i 
sereuve binaugel namujr. Dites : quel dommage que mon père 
ne soit pas ici ! — Les trois formules quel dommage, il est 
dommage, c'est dommage, Agad. se construisent avec le sub- 
jonctif. 



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- 831 - 

Toas ces wallonismes correspondent à des flandricismes, 
qu*il serait trop long d'énumérer. 

Infinitif. A. — Complément ou sujet réel d*un autre verbe. 
II peut être précédé de la préposition à ou de la préposition 
de; il peut aussi n'être précéJé d^aucune préposition. La 
syntaxe des deux idiomes concorde généralement. Nous ne don- 
nerons que les différences. 

1* Aimer. Il aime d*étre prévenu, il ainme tTesse prév*noUt 
iiég., il aime (tète prévenu, mont. Dites : il aime à être prévenu, 
ou qu'on le prévienne. 

Cette tournure wallonne n'est pas absolument incorrecte en 
français ; c'est un archaïsme, dont on trouve quelques exemples 
au XVI* et au XVII* siècle. Une religion qui n'aimerait pas d'être 
approfondie et qui craindrait l'examen serait suspecte, Mass. 
Elles aiment d'avoir quelque chose qui donne plus de lustre à 
leur beauté, Langue, XVI* siècle. — II est probable que cette 
vieille tournure n'est pas encore la plus ancienne, et qu'on a dit 
d'abord sans préposition : il aime être prévenu. On disait en 
latin, du moins au temps de Pline : amat bibere^ littéralement, 
il aime boire. Cette dernière construction est encore de plein 
usage, et d'après Marty-Laveaux (Dicl. des difficultés), elle n'a 
pas le même sens que il aime à. a Aimer, suivi d'un verbe k 
rinfinitir, prend la préposition à lorsqu'il s'agit d'une action à 
faire : Aimer à jouer, à boire, à chasser. Lorsqu'il s'agit d'une 
impression reçue ou d'un état, il se met sans préposition: J*aime 
entendre une bonne musique. Il n'aime point ramper dans les 
courSy J.-J. Rouss. Ici rain;>^r exprime un étal. » Nous ajoute- 
rons l'exemple suivant : J'aime assez causer, Courier, Leltr. 

2<* Aimer mieux. J'aimerais mieux de mourir que de faire une si 
mauvaise action, fainmWeûs ml de mûri qui d^fér ine si faite. 
Dites : Taimerais mieux mourir que de... 

Le second de, qui est de rigueur en wallon, se supprime très* 
bien en français, suivant Littré, surtout quand la première 



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— 232 - 

alteroaUve est une longue propositioQ. Ainsi on dirait plutôt : 
saint Loui» aimait mieux mourir que pécher, qu'on ne dirait : 
saint Louis aimait mieux mourir que de pécher. Mais le pre- 
mier de (j'aimerais mieux de mourir) est tout à fait incorrect. 
Aimer mieux, devant un infinitif, rejette toute préposition. 

3» s'Attendre. Je m'attendais bien de le voir venir, ji nCat- 
tindéve bin de VvHe vini. Il faut : Je m'attendais bien à le voir 
venir. On dit aussi, s^at tendre que. Je m'attendais bien qu'il 
viendrait, ji m'atlindéve biti qu'i vêreût. 

S*aUendre de est un tour suranné, qui se retrouve également 
dans le montois. On ri s'in attindoit nié. Armon. a. 64, p. 20, 
on ne s*en attendait pas, et dans le liég. : Ji rriènri attindive, 
FoRiR, je m'en attendais , pour on ne s'y attendait pas , je 
m'y attendais. Ex. Cassius s'était bien attendu de trouver une 
opposition générale à sa proposition, Vertot. On ne s'attendait 
guère De voir Ulysse en cette affaire, La Font, Mes trans- 
ports aujourd'hui s'attendaient d'éclater, Rag. — Présentement 
on ne dit plus guère que s'attendre à. 

40 Demander. Il demande pour entrer, i d'mande po intrér 
liég. î d'mande pou UifUrer.ioïxvn. Mj vraagt 6m binnen te komeny 
fl. Dites : il demande à entrer, à sortir. 

Demander pour a d'autres sens: Qu'avions-nous à demander à 
Dieu pour cette princesse? Boss. dans Besch. — Je servais 
comme maréchal-de-camp employé dans l'armée de M. de Bro- 
glie. M. de Gastries me demanda pour aller avec lui ( c'est-ù- 
dire exprima à mon chef le désir de m'avoir pour aller avec lui), 
BesENVAL, Mém, I, 83. — Lorsque l'action exprimée par Vinfi- 
nitif est faite par la personne à qui Ton demande^ la cons- 
truction est la même dans les deux idiomes ; il m'a demandé 
cfavouer ma faute, i m'a demandé (tavouwir m'fdte, liég. 

5» Se dépêcher. On se dépêche à ouvrir la porte, on s'des- 
paiche à drouvu Vpourie, Avent. de Jean éTNivel. p. 43. Dites : 
d'ouvrir. On doit se dépêcher à labourer, on doit s'dépéeher à 
labourer, i'vraie Ervue d*Mons, a. 69, p. 30. Dites: de labourer. 



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— 233 — 

— Il s'est dépêché à faire cela, i «'a ihombri h fér coula; on dit 
aussi î $'a Shombridè fir coula. Dites: défaire cela. Remarquons 
que ii éPhombfér, dans le premier texte, est employé absolument 
et à fér équivaut à toi faut, en faisant. A suivi de l'infinitif est 
employé de la même manière dans ce vers de Ck)rneille : A ra- 
conter ses maux souvent on les soulage. — Mais se dépécher de 
est de rigueur, à serait fautif. 

6« S'enhardir. Notre jeune vicaire s'est enhardi de prêcher 
nossejonne vicaire t'ai ahardi dèpréchiy For. Dites: s'est enhardi 
à prêcher. 

Encore un tour obsolète : Un de nos écrivains, s'est enhardi 
d'en user [de ce terme], Vaugelas. 

T" Oublier. Vous oubliez de chanter, vos rouvi* de chanter. 
Cest parfoit, si l'on veut faire entendre que vous avez omis de 
chanter par défaut de mémoire ; mais quand rouvi de chanter 
signifie en perdre l'habitude, la faculté, il faut tourner : vous 
oubliez à chanter. — Toutefois oublier à vieillit; c'est une nuance 
qui se perd. La phrase : si, chaque jour, vous oubliez de chan- 
ter, vous finirez par oublier à chanter, ne pourrait se traduire 
mot à mot en vyallon. — Quelques auteurs ont dit oublier à dans 
le sens de oublier de. J'oubliais à vous dire que.... Volt. J'ou- 
bliais à remarquer que... Corn. 

8*» Préférer. Vos volez qui fpdte? ji préfère de d'tnani. On 
peut traduire mot à mot : Vous vouiez que je parte ? je préfère 
de rester. — Hennequin prétend à tort que préférer^ suivi d'un 
autre verbe, ne prend ni à ni de. On dira très-bien : Je préfère 
rester, mais ^ préfère de rester est justifié par l'autorité de 
r Académie et des meilleurs écrivains. Je préfère de me retirer, 
AcAD. J'ai préféré de payer mes dettes, Sév. La Bruyère et 
Voltaire ont aussi employé de. 

9* Prendre garde. Prenez garde d'être prêt pour dix 
heures, louki d'esse prètte po dixh heure. Dites : prenez garde à 
être prêt, ou voyez à être prêt. V. Regarder, n^* 5. 

Prendre garde à, avec un infinitif, c'est avoir soin de ; prendre 



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garde de^ avec un infinitif, signifie s'efforcer tMter. Ex. PreAes 
garde à sanctifier Textérieur par l'intérieur, Boss. Prenez garde 
de tomber, Acad. Si l*infinitif est accompagné d*une négation, 
on peut, dans le premier cas, {avoir soin de\ tout comme en 
wallon, mettre la préposition de. Louki de n'nin rouri Fjou^ 
prenez garde de ne pas oublier, ou à ne pas oublier le jour. — 
Ex. Prenez garde à ne pas trop vous engager, Acad. Prends 
garde de ne pas t*enfler, Boss. 

10« Se rappeler. Je me rappelle d'ayoir vu, AcAD.,;i m'nq»- 
pelle cTartt vèiou. 

Cette tournure est correcte ; nous la donnons ici, parce que 
nous disons plus loin à Tarticle Rappei.br (se) que ce verbe doit 
être suivi d'un complément direct. Aussi bien, malgré ce de^ 
avoir vu, est complément direct. On dirait également bien : je 
me rappelle avoir vu ; mais de est plus usité. 

il« Tarder. Vos tdfgi de v'itt, vos târgi à v'ni. Le wallon 
emploie indifléremment les deux tournures. Il en est de même 
en français : vous tai'dez à venir, et vous tardez de venir, mais 
l'usage préfère de beaucoup tarder à, Acad. Besch. — Marty- 
Laveaux et Lafaye veulent établir entre ces deux Taçons de 
parler une distinction qui aurait fait pâmer d'aise le docteur 
subtil lui-même. Employé unipersonnellement, tarder exige 
toujours de devant l'infinitif. Il me tarde de partir, fa hâsse 
tenn'allér. 

1!2« Valoir mieux. Il vaut mieux de se taire que de parler 
mal à propos, vâl mt di salaire qui de md pdrlér. 

On a prétendu que cette tournure était incorrecte : il faudrait 
supprimer de devant «^ taire; de plus on ne pourrait omettre le 
de devant parler : Il vaut mieux se taire que de mal parler. Il 
est certain qu'après il vaut mieux^ ou mieux vaut^ on supprime 
généralement la préposition devant le premier infinitif, et on 
l'exprime devant le second. Ex. Mieux vaut s'accommoder que 
de plaider, Acad. Plusieurs écrivains ont pourtant employé de 
devant le premier infinitif. Ex. Il leur vaudrait bieo mieux, les 



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- 28B -• 

pauvres animaux [les chevaux], de travailler beaucoup, de 
manger de même, Mol. Mieux vaut encore de penser que de 
lire. Thom. — Quant au de devant le second infinitif, Besche- 
relle et Liitré pensent qu*il peut se supprimer. Ex. Il vaut 
mieux déplaire à son ami que lui dissimuler ce qu'on a sur le 
cœur, Marmont. 

B. Infinitif complément d'une préposition. On place des 
bornes (à côté des portes), pour ne pas écorner les montants, 
on mette dès hurtai po nin d'grogn'tér lès postai. 

On peut, d'après Bescherelle et Littré, employer rinfinitif 
complément d'une préposition lors même qu'il ne se rapporte 
à aucun mot exprimé dans la phrase. Mnis il faut que cet emploi 
ne donne pas lieu à la plus légère équivoque. Ex. Il faut voir le 
monde pour se former, Acad. Or le wallon n'y regarde pas 
de si près ; il s'ensuit que la traduction de la phrase wallonne 
en question me semble avoir un sens un peu louche. Il faudra 
changer la tournure : afin que les montants ne soient pas 
écornés. 

G. Infinitif pour un autre mode. J'irai à Aix-la-Chapelle par 
Hervé et revenir par Vervîers, jHrei à Axh[*)po Béve et rinCni 
po Verti, liég. Dites : et je reviendrai par Verviers: — Nous 
sommes des enfants bien sages qui ne se cognent jamais, ni f^f 
quereller^ nos ètans dès èfant bin sages qui n'si gougrinu jamais 
ni s* disputer, namur. Aurmonaq. a 66, p. 34. Dites : qui ne se 
querellent ni ne se battent jamais. — C'est là un procédé fort 
commode des patois, qui emploient l'infinitif au lieu d'un autre 
mode, pourvu que le sens soit clair. Il est inadmissible dans 
une langue cultivée. Aussi bien, on en viendrait à parler nègre 
en français et à dire : moi acheter hier des plumes, toi venir 
demain. 

(<) On prononce ftxh, c'est-à-dire que r<i sonne comme dans rangisis to walk. 
C'est la transcription exacte da nom allemand Aachen, en patois d'Aïs Ocht, 



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— 536 — 

I. 

Jalouser. Les ouvriers jalousent souvent l'un contre Tautre, 
ou l'un sur l'autre, lès ovrtjalozèt sovint onkso Faute. Dites : les 
ouvriers se jalousent... entre eux. —On dit en eftei jalouser 
quelqu'un^ et non p^s jalouser sur quelqu'un, 

Jalouserie, jaloz'rêie. Dites : jalousie. 

Jambon. Mn jambon de noix, ingambon d^gàie^ moxxi., tour- 
nais., on jambon d'jèïe, liég. Dites : une cuisse de noix. Une 
double cuisse s'appelle cemeau. 

Jeune. 1"* Un vieux ;>u/e homme, on vî jonne homme, ou on 
vi jouai, û, een oude jongman. Jeune homme ne peut s'employer 
dans le sens de célibataire. Il faut dire : un vieux célibataire, 
ou, dans le style familier, un vieux garçon. — Une vieille jeune 
fille, ine vîle jonne fèïe, fl. eene oude jonge doehter, n'est pas 
moins incorrect. Dites : une vieille fille, une vieille demoiselle. 
Forir traduit : vieille célibataire. L'Académie n'admet pas ce 
féminin, mais Littré donne les exemples suivants: est-elle 
mariée ou célibataire ? Quelques femmes consacrées aux dieux 
avaient seules le droit de rester sans honte célibataires, 
Ségur. 

2"* La chienne a fait quatre jeunes, li lexhe (lice) a fait qwate 
jônne. Dites : a fait quatre petits. Les jeunes d'un chat, les 
djaune dHn cal, mont. Dites : les petits d'un chat. Les jeunes 
d'une chèvre, lésjeonne d'ennegatte, p. de Tournai. Bull. a. 70, 
2* 1. p. 118. Dites : les petits d'une chèvre, ou les chevreaux.— 
Mais on dira très-bien : les jeunes et les vieux, lès jonne et lès 
v( ; et, en parlant de grives, n'accommodez que les jeunes ; 
elles sont plus tendres. Ici jeune est opposé à vieux. 

Cet emploi de jeunes pour petits est germanique : ail. die 
jungen elner Katze, fl. dejongenvan eene kat ; il est complète- 
ment étranger mémo au langage populaire de Paris. 



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— 237 — 

3*" Boire de \9i jeune Uète.beûre de Pjâfine Mre, junges Bier 
trinken, ail., iong hier drinken, fl. Dîtes : de la bière nouvelle, 
00 fraîche. - Du \ïn jeune, junger Wein. Dites : du vin nou- 
veau, ou vert. 

Jouer. !• II joue le violon en perfection, ijowe li violon en 
perfekehon, fl. hij speelt de viool volmaalt goed. Dites : il joue du 
violon en perfection, ou dans la perfection (ne dites pas à la 
perfection). — Jowér Fpiano, lès platenne, li liesse di eh'vâ, les 6re, 
li flûte, etc. Tournez : jouer du piano, des cymbales, de la 
vielle, de l'orgue, de la flûte, elc— On dit aussi toucher l'orgue, 
le piano, abusivement toucher de l'orgue, du piano. 

2« Jouer le tambour, jowér Ftabéur. On dira suivant le sens : 
battre le tambour^ ou battre du tambour. — Battre le tambour, 
c'est donner le signal avec le tambour, Acad. : On battit le 
tambour pour rassembler les troupes, id. — Battre du tambour, 
c'est en général tirer des sons du tambour, Acad. : Il apprit à 
battre du tambour, id. 

Jusque. !<> Jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ouïe, Féraud, et, 
après lui Littré, prétendent que cela est fautif, et que jusqu'au- 
jourd'hui est seul correct. Mais plusieurs grammairiens veulent 
que l'on dise jusqu'à aujourd'hui, en vertu du principe que jusque 
doit toujours être suivi d'une préposition avec son complément. 
La raison n'est pas péremptoire : à preuve les locutions yti^^u'tci, 
jusque-là, jusqu'oii ? où l'emploi de à serait fautif ; ajoutons à 
cela qu'aujourd'hui renferme déjà la préposition à, — Au reste 
il n'y a plus matière à discussion : l'Académie a mis les gram- 
mairiens dissidents dos à dos en admettant les deux locutions, 
et cela est conforme à Tusage général. 

Hais les tournures : jusqu'à d'matn, jusqu'd htr, jusqu'à doze 
heure, jusqwà méte-nutte, jusqu'à Lige, jusqu'à qwand ? jusqu'à 
Pdque, doivent se rendre mot à mot: jusqu'à demain, jusqu'à 
hier, jusqu'à midi, jusqu*à minuit, jusqu'à Liège, jusqu'à quand? 
(ou jusques à quand ?), jusqu'à Pâques. 



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n (but bieo remarquer que le wallon jusqu^d ou disqu'à est 
com{>osé dejusqui ou disqui, et de d ; c*est ce que pi\)uve la 
tournure liégeoise disqui eta/, qui se dit très-bien pour jusqu^à 
ciaL G*est donc faire un véritable wallonisine que de dire 
jusqu'à dans la rue, jusqu'à d'vint Crowe ; il faut supprimera, 
à cause de la préposition dans qui suit : jusque dans la rue. 

i* Jusqu'à tant que vous vous en alliez» jusqu'à tant qui vos 
'mi'aUésse. Cette façon de parier se rencontre chez d'excellents 
écrivains, mais, à l'heure qu*il est, jusqu'à ce que est bien plus 
usité. Ex. Il la faut prendre avec réserve, jusqu'à tant que nous 
soyons prêts, Boss. Médit, dans Litt.--On peut aussi supprimer 
jusqu'à au lieu de tant. Ex. Enivrez-vous de ce vin, tant que ses 
fumées vous fassent perdre... Boss. Suppliez, gémissez.... tant 
qu'elle vous admette enfin en sa présence, A. Ghên. Cette 
dernière tournure est montoise : Est-ce qu*il n'y a pas quelqu'un 
auprès d'elle, pour lui tenir compagnie tant que tu arrives ? tant 
qu't'arriv'ras ? 

Juste. 1» Comme de juste, Arménaq. de Tournai, 61, p. 25, 
comme di jusse (on ajoute souvent et d' raison), liég. comme 
de jusse, p. de Nivelles. Littré dit que cette tournure n'est pas 
admise dans le bon langage. Il faudrait dire : comme de raison, 
comme il est juste, ou, simplement, comme juste. Du moins 
J. J. Rousseau a dit : Vous me ferez plaisir de m'envoyer de tout 
cela dans Toccasion, en me passant en compte le tout, comme 
juste, surtout ce qui ne viendra pas de vous, Lettre à Guy. 
L' Académie et Bescherelle l'ont enregistrée sans observation à 
l'art. DB, !• p. 292, 3« col. au mil. ; 2*» p. 879, 1^ col. en bas. 
Elle se trouve dans George Sand, Mouny-Robin, ch. H, 4* 
page. Il ne semble pas qu'on puisse écarter une locution appuyée 
sur de telles autorités. 

2** Ha montre va ;a«/f, mi monte vat jusse, fl. mijnuurw^k 
gaat juist. Cette tournure ne me semble pas correcte, bien que 
;u«(^ puisse s'employer adverbialement : tirer juste, cela entre 



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juste, mesurer juste, Aqad. Dites avec l'Académie : cette 
montre est juste, ou va bien. 

3« Il rentre toujours à midi juste^ i rinte touduàmidijusê^^ 
mont, kij komml ten twaalven juist thuis. Dites : à midi précis, 
ou bien, en employant jtt«fe adverbialement, il rentre toujours 
juste à midi. 



L. 



La. 1* Je ne sais pas là que vous avez été, ji n'sés là wUse 
qui v\s avez stu. Là et que sont inutiles, et Ton a supprimé à 
tort l'adverbe relatif oU (wisse gui, franc, vulgaire ousque, où 
est-ce que) : Je ne sais pas oii vous avez été. On dira de 
même : Sait-il bien où vous étiez hier ? sét-i bin là wUse qui 
v*8 estiz Mr 9 

Dans ces deux phrases, ab annonce ce qu'on appelle dans la 
terminologie latine une interrogation indirecte, c'est-à-dire por- 
tant sur une subordonnée : l'interrogation directe serait : Où 
étiez-vous hier? je n'en sais rien;— ,1e sait-il?— L'adverbe là est 
parfaitement inutile. -<• Il n'en est pas de même dans l'exemple : 
elle est «encore là où elle était hier; la pensée ici est affirmative 
et l'adverbe là peut très-bien précéder oàpour modifier le verbe 
de la première proposition. — On ferait un wallonisme en 
disant : elle est encore là qu'elle était hier, elle est co là qu*eUe 
esteut Mr. Le pronon relatif que peut très-bien s'employer au 
lieu de oU dans les questions de temps : au moment qu'elle rit 
(u Font., le Lièvre et la Perd.), pour, au momentoii elle rit ; mais 
ici il s'agit de lieu. — Il est à peu près superflu de noter que la 
locution là ousse fie vouê avez été hier^ calquée sur le wallon 
là wiise qui v's avez stu htr, est des plus barbares ; il n'y a guère 
que ceux qui parlent français comme ...en Espagne, qui se 
permettront d'écorcber d'aussi étrange sorte la belle langue de 
Racine. Ciette tournure eusse que, corruption de aU est-ce que, 



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— Î40 - 

est aussi dans la bouche du peuple en France. Ex : Et je sais 
ous-ce qu*est toute Tenragëe boutique à procès, Beaum. Mot. 
de Fig. II, 12. 

Labourés. Il ne faut pas aller sur les labourés, i n' faut nié 
taîlér su les labourés, mont. Dites : sur les terres labourées (4). 

Lancer. Ça me lance dans mon orteil, ça lance dins m'nar- 
toile, mont.; het schiet in mijn grooten teen, tl. Dites : mon orteil 
m*élance. — Mon doigt me lance, mi deugt mHancéte. Dites : le 
doigt m*élance, ou j'éprouve des élancements au doigt. Cette 
iïiute est assez commune, même en France. Le mot lancement, 
en ce sens, est également un barbarisme : Je sens dans la tête 
des lancements qui m'étourdissent, /a dès lanc'mint è Ttiesse qui 
m^èt sot. Dites : des élancements: Lancement est dans Littré, 
mais signifie l'action de lancer un navire il l'eau. 

Lapette. Boire de la tapette, beure dèV lapette di ckin, liég. 
{boire du r' lavache ed'tien, rouohi). Le liégeois a aussi lapisse, 
et lapotisse. 

Pour désigner un breuvage oii l'on a mêlé plus d'eau qu'il ne 
fallait, le français se sert du mot lavage, et, en parlant spécia- 
lement d'un bouillon, d'une soupe ou d'un potage trop clair, 
des mots lavure et lavasse. Ci cafèt-ld, c'est dèV /ape//a.Tournez : 
ce café ne vaut rien, ce n'est que du lavage, ce n'est qu'un 
lavage. — Ex. Vous avez mis trop d'eau dans ce vin, ce n'est 
que du lavage, Acad. Cette soupe ne vaut rien du tout, ce n'est 
qu'une lavas.se, ce n'est que de la lavasse, id. (Ce bouillon ne 
vaut rien); c'est de la vraie lavure de vaisselle, Besch. 

Laqae. De la laque, dèV laque, fl. lak. j)iles : de la cire. Ex. 
cacheter une lettre avec de la cire d'Espagne. On dit aussi cire 
à cacheter. 

(*) Notons loolefois qae ce terme est gëoëralement en usage parmi nos chaa- 
aeurs ; il eat analogne an latin aratti de Colamelle, et je l'ai renconU*é, je eroif , 
dane un aatenr français. 



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— Î44 - 

En français la laque désigne» non pas la cire d'Espagne, mais 
la résine appelée improprement gomme laque^qui entre dans la 
composition des vernis et de la cire d'Espagne, et le laque ou le 
vernis laque est le beau vernis de la Chine, rouge ou noir. 

Loquet' une armoire, laquer ine âijnâ (ine pour on^ devant 
une voyelle, v. ârmoirk), il. pop. eene kas lakeren. On dit mieux 
vernir. Laquer n'a pas été admis par l'Académie, mais il est 
usité en France et figure dans Littré. — De là le participe laqué: 
de$ soulieri laqués^ ou en cuir laqué ^ die eoUee laqués, mont., 
dès sole laqués, liég., gelakeerde schoenen, fl. Dites: des souliers 
en cuir verni. — Laqueter un paquet, laq'tér an paquet. Dites : 
cacbeter avec de la cire, sceller. — Laqueter des bouteilles, 
laqv^tér dès botèie. Dites : cacheter, coiffer des bouteilles avec 
de la cire. 

Large. 1' Le patois de Mous dit cet homme est large, pour 
est libéral ; le latin largus avait ce sens : duo gênera sunt lar- 
gorum, alteri prodigi, alteri libérales, Gic. Ojf. S,16 ; il signifiait: 
qui aime à donner, il faire des largesses. « Large s'employait 
autrefois pour libéral, » Acad., et Ton dit encore ironiquement, 
en parlant d'un homme qui n'est pas généreux : il est large... 
des épaules. Il s'emploie encore quelquefois en ce sens dans la 
négative : il n'est pas large, Litt. Le patois de Liège dit aussi : 
il est lâche avou lès aidant dès aute, 

S"" Il y a à grand large assez, gnat a grand lâche assez, liég. 
C'est une locution toute wallonne, qui veut dire largement, 
amplement : Il y a largement ce qu'il faut. 

3^ Je regardais tout large, ji loukive tôt lâche. Cette façon de 
parler, barbare en français, fait image en wallon : lâche est pris 
adverbialement et indique que la surprise me fait ouvrir de 
grands yeux. V. Estomaqué. Dites : j'ouvrais de grands yeux, 
j'ouvrais des yeux grands comme une salière, mes yeux s'ou 
vraienl tout grands, Fbval, Fontaine aux perles, II, 17. Ex. Il 
ouvrait de grands yeux à mesure qu'on lui contait chaque cir- 
constance, Hamilt.» Gramm. 8. 



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— Î42 - 

4" Le corbeau ouvrit son bec tout au large, li coirbâ dovra 
s'bèch toi â lâche. Dites avec La Fontaine : il ouvrit un lar^e 
bec. — Il restait avec sa bouche au large, i d^manéve avau s'bake 
â lâche. Dites > il demeurait bouche béante, c'est-à-dire il était 
frappé de stupeur. —On tape Vouxhe de catrinet toi â lâche. Forir 
traduit : on ouvre violemment la porte. Je pense que la tournure 
n'implique pas nécessairement ridée de violence. Je dirais avec 
F. Fabre (la Paroisse du Jugement deinier, p. 284) on ouvre toute 
grande la porte du cabinet; on ferait un wallonisme en disant : 
on ouvre la porte tout au large. Au figuré, Montesquieu a dit : 
c'était ouvrir une large porte à la calomnie, Esp. XII, 16. — La 
porte est restée tout au large^ Vouxhe dimana tôt â lâche. Dites 
avec Littré : la porto est restée toute grande ouverte. — Les 
portes sont tout au large, lès ouxhe sont tôt â lâche. Dites avec 
M-** de Genlis : ....sont toutes grandes ouvertes, Th. d*ià., la 
Curieuse, 5, 8. Ici grand, quoique adverbe, varie par raison 
d'euphoDie, ou, si on Taime mieux, Tadverbe est transformé en 
épithëte, comme dans Texemple de La Fontaine, cité au com- 
mencement de l'alinéa, ou comme dans ce vers de Lamartine : 
On voyait sur son front passer sa main rapide, Ode à Bonep. — 
Notons la tournure suivante, qui se trouve dans Daudet, Fromont 
jeune et Risler atné, p. 2 : la porte de l'église large ouverte. 

Au large s'emploie en français dans de tout autres significa- 
tions; ainsi on dit : il est logé bien au large, à savoir spacieuse- 
ment ; vivre au large, c'est-à-dire dans l'opulence, eto. 

Lavasse. Il pleut à lavasse, i plout à lavasse. Dites : il pleut 
à verse. Mais lavasse est correct dans l'exemple suivant : il vint 
tout à coup une grande lavasse, Acad., i v'na tôt d'on cùp on 
fameux lavasse. On dit aussi guilie (liég. walai ou waléîe). 
Toutefois ondée et averse sont plus usités. 

Le, la, les, art. 1^ Je vais vous souhaiter la bonne nuit, ;t 
v' vasprii rbonne[nutte. Cette traduction française de Forir ren- 
ferme un léodisme : Il faut r titi^ bonne nuit. Ex. Je vous sou- 



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- ^243 - 

balte une bonne nuit, Acad. On dit aussi elliptiquement : bon- 
soir et bonne nuit, Agad. ou simplement banne nuity Saintinr, 
Piedolay U, 2. La banne nuit serait incorrect. Le flamand dit 
indifféremment de gaede nacht et eene gaeden naehl wensehen. 

V Lâcher Teau, lachà* Vaiwe (a est long en frang.), bet water 
lossen. D'après l'Académie et Littré» la tournure française est 
lâcher de Veau ; elle est très-familière. On dit aussi faire de Veau, 
locution qui s'emploie encore dans un autre sens, faire provision 
d'eau douce, pour la navigation. Notons encore que le li^eois 
laehér est du français wallonisé, le vrai terme wallon est lâkei\ • 

Le, la, les, pron. 1"* je lui avais bien dit, ji li aveus bin dit. 
— Donnez-lui, allez, dinez-li, allez. L'omission des pronoms, 
le, la ou les est toute wallonne, il faut dire : je le lui avais bien 
dit, donnez-fe (ou la, ou les, suivant le cas) lui, allez. ^ Il en 
est de même de la suppression du pronom en dans les pbrases 
suivantes : c'est lui, soyez bien sûr, qui a médit de vous^ c'est 
lUy sèiiz bin sûr, qui v's a Vjàzi, liég. : des serviteurs \k gages 
qui ont plus de pain qu'il ne leur faut, dès vaurlet à gage qu'ont 
pus d'pain quH leu faut, pat. de Namur. Bull. a. 70, p. 176 ; 
des vaurUt qui ont di pus di pain quH n'ieu faut, Gembloux,id. p. 
170. —Dites : soyez-^n bien sûr, qu'il ne leur en faut. —Pour la 
suppression de ne après plus, qui est particulière au namurois, 
V. l'art. Ne. 

2» Parfois aussi les Liégeois commettent la faute inverse et 
insèrent dans la phrase un / tout à fait parasite : Elle Taide sa 
mère à descendre, elle Faide si mère d d'hinde^ Bull. a. S9, 
p. 333. Est-ce qu'elle V a été à la messe? est-ce qu'elle Va stu à 
messe ? Dites : Elle aide, elle a été. — Cette faute provient de 
la prononciation du pronopi personnel wallon elle^ où fréquem- 
ment les deux l se font entendre. 

3"* Enfin le patois de Tournai articule souvent le pron. V 
(pour le ou la) comme s'il était écrit II: je vais n'agiter, fvas 
VVochiner (fr. hocher un arbre, Acad., liég. hossi 'n' dbe), Armén. 



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— 244 — 

de Tourn. a. 51, p. 38.— Quand vous V Taurez rongé (VossUau, 
U^. Yohai), ibid. p. 47. — Tu V l'auras, te rtaras, tournais. - 
Tu V ras vu, te Ftas mi, id. — Dites : Je vais Tagiter, ou le 
secouer ; quand vous l'aurez rongé ; tu l'auras; tu Tas vu. 

L6gume. Une excellente légume^ ins fameuse banne légume. 
Dites : un excellent légume. 
Légume^ du latin légumen^ neutre, est du genre masculin. 

Légumier. Uu jardin légumier, on jardin légumier^ Forie. 
Cette locution ne figure pas dans le Dictionnaire de l'Académie; 
elle se trouve dans Littré. Elle est synonyme de jardin potager. 
On dit aussi le potager. Ex. Voilà Monseigneur qui traversée 
cheval le grand potager, Beaum. Mar. de Fig. II, 1. 

Lettre. 1* Des lettres de mort, dès lette d% moirt, fl. doods- 
brieven. Les termes français sont billets d*enterrement, ou 
d'obsèques, billets de faire part, billets de part, Acad. Ces deux 
dernières tournures se disent aussi en parlant d'un mariage, 
d'une naissance ; c'est le contexte qui précise le sens. Le wallon 
dit aussi papi d'moirt ; Forir traduit lettre mortuaire. Cette façon 
de parler est très en vogue k Tournai, et elle est, ce semble, 
admissible. 

2* Mettre une lettre^ mette ine lette. Dites : mettre écriteau 
sur sa porte. Ex. Il a mis écriteau sur sa porte, pour annoncer 
que sa maison est à louer, esta vendre, Agad. 

3« Le porteur de lettres, H poirtéu ilette, fl. brievendrager, 
ail. Brieftraeger, angl. letter-carrier. Dites: le facteur de la 
poste, ou, simplement, le focteur, si le déterminatif est 
superflu. 

Leur. V. Deux, 3: 

Lever. !• J'ai levé cet enfant, j'a levé cisf èfant-là, ail. ich 
habe dièses Kind aus der Taufe gehoben, fl. ikhebdit kind ten 
doop geheven. Dites : J'ai tenu cet enfant sur les fonts, ou sim- 



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- 246 ~ 

piement, j'ai tenu cet enfant, âcàd., c'est-à-dire, je suis son 
parrain, ou sa marraine. 

Lever un enfant se dit en parlant d'un enfant exposé que Tau- 
toritë fait emporter à l'hôpital : fl. opnemen. 

2« Cet ouvrier lèvera demain sa semaine, dst ovri-là Uvrei 
g^samainne dimain. Dites avec l'Académie : recevra demain sa 
semaine. ^ Lever de l'argent^ liver dès aidant. Dites : toucher 
de Targent. 

Lever, en français, signifie percevoir, recueillir : lever des 
impôts ; on lève un droit sur cette denrée. 

Lieu. Le lieu, li lieu, liég. et lieu, tournais. Dites : les lieux. 
Ce mot lieux dans le sens de latrines est français, mais il est 
vulgaire. Il faut préférer les mots privé, cabinet, oa la locution 
lieux d'aisances, v. C!ommod]té et Endroit. 

Linceul. Mettez des linceuls au lit de Monsieur, mettez dès 
linçau d lét <fa Moeheu. Dites : mettez des draps... Dans les 
patois du Berry, de la Picardie, du Hainaut (mont, lincheu. Un- 
sué) et du pays de Liège, ce mot signifie drap de lit, et plusieurs 
auteure français l'ont employé dans ce sens: Et les linceuls trop 
courts par les pieds tirassait, Régn. Avec rien on montait un 
ménage: Il ne fallait matelas ni linceul, La Font. —C'est le sens 
ancien et étymologique : lat. Unteolum, petit linge, morceau de 
linge. On sait que quantité de mots latins ont perdu en firancais 
leur valeur diminutive : porcellus, pourceau, carvellus, corbeau, 
vascellum, vaisseau, apicula, abeille, etc. — Actuellement lin- 
ceul est synonyme de suaire, et ne se dit que du drap de toile 
dont on se sert pour ensevelir un mort. 

Livranoe. Faire une livranee de douze charretées de houille 
fér 'n' livranee di doze cherrëie di châffège. Dites : faire livraison 
de, ou faire une fourniture de douze charretées... — Traduisez 
de même Uvrèmint d^marchandëie. 

lAvrancier, que nous avons formé sur livranee est dans Bes- 



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cherelle et dans Littré ; cest uu terme de coounerce désignant 
celui qui livre des marchandises après les avoir vendues. U est 
donc en usage chez nos voisins du sud, et il faut convenir qu'il 
mérite d'être adopté : il exprime une nuance particulière qui 
n'est pas dans le terme de fournisseur^ que Littré définit : Celui 
qui entrepi^end la fourniture de marchandises ou de certaines 
denrées. 

Logé. Etes-vous logée y voisine? estéz-v' logêie.wèzentie? 
Dites : avez-vous des soldats à loger ? 

Long. 1** — pour lent. Nous lisons dans Hennequin : « C'est 
une fkute d'employer ce mot dans le sens de leni. » L'Académie 
n'est pas de cet avis. Le wallon longin est un allongement de 
Ion, et il se traduit très-bien par le français long. Dépêchez; que 
vous êtes long ! Agad. ÊHhombrez-v' ; qui ifs estez longin ! — Il 
est long à tout ce qu'il fait, id. Ces arbres sont longs à croître, 
Agad. 

%^ pour agacé. V. Dbnt. 2. 

3» pour loin. Il y a long d'ici à Rome, gna Ion (Ccial à Borne. 
Dites : il y a loin. Ici Ion est adverbe et correspond à loin. 

i" N'allez pas par là, vous aurez plus long, ri allez ninpor là, 
vos ârézpus Ion, Û. gij zult het langer hebben. Dites : vous pren- 
drez le plus long, vous prendrez votre plus long, c'est votre plus 
long, c'est le plus long. Ex. Mon philosophe... est parti et a pris 
son plus long pour aller voir un ami. Volt, dans Littré. Il a pris 
le plus long pour ikire sa visite, RecN. le Distrait, I, 6. Simon 
était revenu à Guéret par la grande route. C'était le plus long, 
mais il y avait moins de dangers, 6. Sand, Simon, KII. 

5* Tomber tout long étendu, tourner tôt Ion stindou. Dites : 
tomber, s'étendre de son long, tout de son long. — Dites de 
même : un homme étendu de son long, Sgarr. dans Littré. Je 
veux abattre cette idole tout de son long, Boss. On dit aussi 
étendu tout au long. Ex. Etendu tout au long dans un grand fiiu- 
teuil, Dumas fils, Sophie Printemps. V. également Saintb-Bbuve, 
notice sur Toepffer, p. 32. 



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&" Au lotig pour pendant. Ces deux Mlles ont babillé (en fla- 
ouiDd) plus d'une heure au long, ces deux Vmire ont flanCtépuê 
(fune heure à Ion. Dîtes : pendant plus d'une beore. Le flamand 
dit : meer dan een uur Umg. — Au long de la semaine» au long 
de l'année, d Ion dèV Fsamainne^ à Um d* fann^l^. Dites : tout le 
long de la semaine, tout du long de l'année, ou le long de la 
semaine, le long de l'année. Ex. Il travaille tout le long de la 
semaine* il s'est diverti tout du long de l'année, Agad. Couché 
dans le duvet, il dort le long du jour A côté des serins, dont il 
se croit le frère, Ftoa. 

Hais au Umg et Umt au long, comme locutions adverbiales, 
sont corrects et signifient amplement, avec détail, Ex. Il en a 
discouru tout au long, cet auteur en parle au long dans son 
ouvrage, Acad. — V. au n** 5 un autre emploi de tout au long. 

> A la longue du temps, à Flonle de timps. Dites simplement : 
à la lofigue, ou bien avec le temps. 

S"" Marcher du long de l'eau, rotér dé Ion Vlaiwe, fl. langs het 
water gaan. Dites : tout du long de l'eau, le long de l'eau, tout 
le long deTeau, au long de long, Agad. 

Ijoquet. Mettre un loquet, mette on loquet, liég., mette in 
loquet, mont. Dites : un cadenas. — Le loquet d'un coffre, li 
loquet d^on coffre. Dites : le cadenas. 

Le français loquet est une sorte de fermeture très-simple, 
que Ton met aux portes qui n'ont point de serrure; il désigne 
aussi plus particulièrement la clenehette, (ou clenche, ou clinche, 
liég. cliché, ou clichette)^ c'estrà-dire la pièce principale du 
loquet, laquelle, reçue par le mentonnet, tient la porte fermée. 
Clenehette, clenche et clinche, sont dans Littrô. Ils viennent de 
l'allemand klinie, fl. klink, loquet. 

liOnelieou lousse, mont, louche, liég. lasse. Dans le para- 
dis, on mange du sucre à la louche, è paradis, on magne de souke 
à riosse, expression populaire à Liège, in paradis, on minge dès 
bobons à Vlouche, mont. On dit à Paris cuUler à pot, ou grofuie 



^ 



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— 248 - 

miller . On se sert aussi du mot louche dans le nord de la France. 
Grandgagnage fait venir ce mot du bas latin lochta transforma- 
tion du latin coehUCy coquille; c'est ainsi que de coMear vient 
le liégeois ctiî, et du pluriel eochlearia, le français cuiller. 

Lundi. Nous sommes aujourd'hui lundi, nos estans ouïe 
tond», û. wij zijn vandaag maandag. Dites : c'est aujourd'hui 
lundi, tournure qui est également flamande. Nous ne sommes 
encore que lundi, nos riesians co qu*londi. Dites : nous ne 
sommes encore qu'à lundi, Litt., ou il n'est que lundi. Ex. J'y 
reçus une de vos lettres ; et quoiqu'il ne soit que lundi et que 
celle-ci ne parte que mercredi, je commence à causer avec 
vous, Sêv. dans Littré, à Etre, n* 13. 



M. 



Un maea, on maca. Le terme français est martUiei. 
Le martinet est proprement un marteau mû par un moulin; nous 
avons déjà constaté la tendance du français à donner aux dimi- 
nutifs un sens augmentatif : vaisseau, de vascellum^ petit vase, 
etc. Le martinet désigne également l'usine dont cette espèce de 
marteau est le principal agent. 

Maille et Marbre. Jouer aux mailles, jowér dx mâie. Le 
mot français est bille, Acad. Littré signale aussi Texpression 
gobille (pour glohillCy Sghêl.), usitée en certains endroits. Forir 
prétend qu'on ne peut traduire : jouer aux chiques. En effet 
chique ne figure pas dans le dictionnaire de l'Académie ; mais il 
est dans Trévoux, dans le complément de l'Académie, dans 
Bescherelle et dans Littré, qui le donnent comme étant en usage 
dans quelques contrées. — A Tournai, les enfants disent: jV^ti^ 
aux marbres, ce qui n'est pas français. Peut-être bien marbre 
est-il ici la traduction du flamand marmer, marmel, marbel, qui 
a la même signification dans le patois ; et Grandgagnage con- 



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— 249 ~ 

jeciure que le moi liégeois est une corruption de ce mot fla- 
mand. 

Main. V II achète les vins de première main, ic acKiêit lès 
vin di primire mam. Il faut employer Tarticle : de la première 
main. Ex. Les Carthaginois voulurent recevoir les métaux de la 
première main. Mont, dans Litt. On dit de même, de la seconde» 
de la troisième main. — Cependant de première main se dit au 
figuré; c'est alors une expression adjective, qui équivaut à 
oiiginaL Ex. Ayez les choses de première main, puisez à la 
source, la Bru y. — Ouvrage de première main, par opposition à 
compilation. — On dit de même : érudition de seconde main. 

2^ II a toujours la canne en main, il a tôt fér si bordon {*) è 
s' main. Dites : à la main, M. Carpëntibr. - Que tenez- vous en 
main? qui fniz-v' là è vosse main f Dites : dans votre main, ou à 
la main, Benoit.— C*e$t en effet ainsi que Ton s'exprime actuel- 
lement. Hais il est nécessaire d'ajouter que, dans le XVI« et 
dans le XVII'' siècle, on a souvent employé en pour à moderne. 
Faute de quoi, on condamnera à tort les exemples suivants : 
Qui le fer en la main le viennent offenser» Malh. I, 4. Prenant 
en main un arc, Boss. Hist. III, 4. Lorsqu'il prenait en main sa 
lyre d*ivoire» Fén. Tt^L II. Je n'avais en main que ma houlette, 
id. ibid. — Le wallon est donc resté ici encore fidèle à In vieille 
tournure française, sauf toutefois en ce qui concerne l'emploi 
du possessif, dont il abuse singulièrement. V. Mon. Ajoutons 
que la locution s'emploie encore très-bien en poésie et dans le 
style soutenu : Le verre en main, Bêrangbr ; la coupe en main, 
Sainte-Beuve, Premiers Lundis, 1, 189. De plus, on dit très-bien, 
au sens figuré : Avoir quelque chose, ou quelqu'un en main, 
pour l'avoir à sa disposition : J*avais alors en main un valet 
fort intelligent, Agad. Avoir preuve en main, id. 

Matfcre-ouvrler, maisV-ovii, tl. meesterknecht. Je doute 

i') Le français Surdon ne se dit plus goère qu'en parlant d'un pèlerin. 



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— 280 — 

que ce composé, employé par Forir, soit français. Dites : chef 
d'atelier. Littré donne également les expressions maître (Tœtwre 
et îMUre compagnon . 

Mal. 1® Je ne peux malj ji ripous ma, liég., je n'peua mou, 
mont. Ce wallonisme a deux significations distinctes : a. Je n*ai 
rien à craindre, je ne risque rien, il n*y a nul danger ; il a ce 
sens dans les proverbes souvent cités : Poumâ est tourné tcou è 
Vaiwe. Poumâabroûlés'mohonneyhég.^ Véglkhe ni petU mau 
(TU chair su s*dos, namur. Dict. des spot., 305.^6. Je n*en ferai 
rien, je n'ai garde, je m'en garderai bien. — Il a cette dernière 
signification dans Tanecdote suivante : Entre deux disputeurs, 
k la suite de paroles très-vives : Monsieur, je vous défie de me 
mettre au pied du mur ! — Parbleu, monsieur, je ne peux mal, 
ji rCpous ma ; c'est défendu sous peine d'amende. •— Dites : je 
m'en garderai bien. — Dans ces deux acceptions, la tournure 
est complètement inconnue en France. Dans le sens de je n'ai 
garde, plusieurs remplacent ce walionisme par un autre: Il riy 
a pas de danger ^ gna mu dangi, fi. er is geen nood^ en patois, er 
isgeen danger. Gela se dit même en France. D'après Littré, cette 
expression est ironique et populaire. Cependant elle se trouve 
dans G. Sand, Jacques, I, 7. Il n'y a pas de danger que Jacques 
en demande jamais un seul (un service). 

2<> Se faire mal de quelqu'un, si fér md Une saki, liég. On dit 
en flamand en parlant de choses; zeer van iets hebben. Dites : 
avoir pitié, compassion de quelqu'un, prendre part à sa peine. 
Elle se faisait du mal, elle se fièt du mau, pat. carolor. Berrus, 
SO. Dites : elle était touchée^ émue de compassion. 

S"» On pourrait traduire mot h mot le liégeois si fér de ma 
(sauf l'art.) : se faire mal : c'est-à-dire se blesser ; mais on ne 
dira pas il s'est fait mal son bras en tombant, î s'a fait md s'bresse 
toi tournant, liég. Il faut dire : il s'est fait mal au bras. De même 
j'ai mal à la tête, /a md m'tiesse, liég., /ai mau m'tiettey mont., 
ik heb pijn mijn koofd, fl. popul. ; il avait mal qu dos, U avait mau 



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jr'rfair,pâl. de Gbarieroi.— On m'a extrait la dent que j'avais mal, 
on ffCa r4l ïéini qui f avens ma, lié^. Dites : la dent à laquelle 
j'avais mal, et mieux, la dent qui me faisait mal. V. Mon. 

Cette tournure est probablement un latinisme : nuda pedesy 
ViRG. nu-pieds. Qui sait s'il ne faut pas expliquer par le même 
latinisme l'invariabilité de nu? Il était nu-pieds : il était nu 
quant aux pieds. Tremit artus, il tremble (de) tous ses membres; 
feminae nudae brachia^ les bras nus, nu-bras. 

d^ Il est plein de maux, il a des mauXy il est plein dCmây liég. » 
(7 a dès mau\ mont., hij is vol zeeren, (1. Dites : il est plein d'ul- 
cères. 

MaUn, maline. Dans le parler liégeois, on adoucit beau- 
coup, en bien des cas, le sens de ce mol; il signifie en français 
qui a de l'inclinaison à faire, à penser, à dire du mal. Ex. Nous 
qui sommes si indiscrets et si malins dans nos paroles, Fén. 
dans LiTTRÉ. L'esprit malin, ou le malin esprit, c'est-à-dire le 
diable. Interprétation maligne. Maligne joie. Malin vouloir.' In- 
tention maligne. — Ce n'est que dans des cas tout particuliers 
qu*il signifie simplement rusé, adroit. On dira très-bien : il est 
trop malin pour se laisser attraper, il esi trop malin qui po s'ièï 
attrappir, liég., et substantivement : c'est un malin, on ne l'at- 
trapera pas facilement, c*est on malin, on àrei mdlâhéte di rat- 
traper. — Mais dans les textes suivants, où il veut dire spiri- 
tuel, intelligent, sagace, industrieux, on ne peut rendre le terme 
wallon par maliniCi jône homme-là n'est nin maim,ce jeune bomme 
là n'est pas intelligent, (et non pas malin). Qui v*8 estez malenne 
jône fête! que vous avez d'esprit, jeune fille! ou, que vous 
êtes malicieuse! (et non pas maligne, ce qui serait une injure). 

Dans l'exemple suivant malin équivaut au mot wallon : Si 
esprit est ossi malin qui s' cour est bon. Il a l'esprit aussi malin 
que son cœur est bon. En efi'et malin a aussi cette acception: 
qui aime à dire du mal pour se divertir, Ex. Le français, né 
malin, créa le vaudeville. 



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— 252 — 

Malhonndte. Vous êtes un malhonnête ^ voê estéz-t-on mal- 
honnête ; taisez-vous, malhonnête^ taihiz-v' malhonnête. « Cela se 
dit populairement, mais cela ne se dit pas autrement. » Littré. 
Exemple tiré de Beaum. Mar. de Fig. II, 22. Marceline à Figaro. 
Ouije m'expliquerai, malhonnête. 

Mande. Dans le Hainaut, on dit mande au lieu de manne, La 
manne est un panier d'osier plus long que large, où l'on met du 
linge, de la vaisselle et d'autres objets. C'est notre banse. Littré 
a même manne d'efifanty banse d'èfant (berceau en osier). Les 
Liégeois traduisent à tort leur mot bodet, qui est purement 
wallon, par le français manne ; c'est le mot panier* qui corres- 
pond à bodet ; il correspond aussi à bans*tai. — Dans le Hai- 
naut, on conserve au mot français la forme qu*il a dans le 
flamand, d'où il est tiré (mand), 

Mange-tout. Saler des mange-tout, saUr dès mange-tout, 
liég. Dites : des haricots verts. ~ Toutefois le terme n'est pas 
inconnu en France. Littré le donne avec la définition suivante, 
qui renferme l'étymologie : Pois et haricots cultivés dont on 
mange les cosses vertes avec le grain tout formé. Mange-tout est 
très-français dans le sens de prodigue. 

Génin assure que haricot n'a commencé à être usité en ce 
sens que dans le XVII* siècle. Litt. On disait jusque-là fève^ et 
encore aujourd'hui on dit dans notre pays fève pour haricot. 
Le mot fève désigne surtout la grosse fève, ou fève de marais et 
la féverole. Dans le Hainaut, on se sert du mot princesses pour 
désigner les haricots verts; à Tournai, le peuple dit même 
princeresses. C'est un abus. Les princesses ou haricots prin-^ 
cesses (nains flageolets, ou nains d'Amérique) ne sont qu'une 
variété des haricots dont la cosse est fort allongée (Litt. 
Besgh.). 

Manière. 1» D'une manière ou d'unie autre, j'y parviendrai, 
dHne manîre ou dHne autre, fy avêrei. Dites : de manière ou 



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d'autre, Agao. Ex. Vous verrez que de manière ou d'autre vous 
ne me louerez plus, lorsque nous nous connaîtrons, J.- J. Rouss. 
Dites de même : de façon ou d'autre, Acad. 

^ Faites les choses de manière à ce que tout le monde soit 
content, fiz tôt çoulà di montre à c'qui tôt l'monde seule contint. 
Dites : de manière que tout le monde soit content, ou de manière 
à contenter tout le monde. 

On dit de manière que avec Tindicatif ou le subjonctif, et de 
manière à avec l'infinitif, et la locution vicieuse, dont on se sert 
même en France et que j'ai rencontrée dans Louis Blanc, dans 
Ampère et dans quantité d'écrivains nuançais, provient de ce 
que Ton a réuni les deux tournures en une seule. —De façon à 
ce que est également mauvais. Pierre s'arrangea de façon à ce 
qu'il fut nommé. Dites : de façon qu'il fut nommé. 

S"" Elle est assez d sa manière^ elle est assez à s'mantre. Dites : 
elle est assez volontaire. Mais chasconque vique à s'mantre^ peut 
se rendre par chacun vit à sa manière, ou à sa guise, ou à sa 
fantaisie. Ici manière signifie façon d'agir habituelle. 

4* Ainsi, à votre manière^ je ne dois pas faire cela? ainsi^ à 
vosse mantre^ ji n' deus nin fér coulai Dites : ainsi, d'après vous, 
selon vous, à votre sens, d'après votre manière de voir.... Dans 
le Hainaut, on emploie de la même façon le substantif mod^. 
V. ce mot. 

5' Ce chapeau est-il à votre manière^ ci ehapaùlà est-i à vosse 
mantre î Dites : est-il à votre goût, de votre goût, ou à votre 
fantaisie. — Ex. Cet ouvrage est au goût de tout le monde, 
Acad. Gela n'est pas de mon goût, id. Gela est tout à fait & ma 
fentaisie, id. 

Marcbé. Ge sont deux fort bonnes auberges, et la dernière 
est très-bon marché, Texte extrait d^un Guide. Il fallait: à 
très-bon marcbé. — Acheter, vendre bon marché, acKtér^ 
vinde bon marchi^ fl. goedkoop koopen, verkoopen. Dites : à bon 
marcbé. 



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— «54 - 

Cette duppression de la préposition à n'est pas autorisée ; ii 
faut dire à boa marché, comoie on dit à bon compte, à vil prix, 
LiTT. Cette faute est tellement fréquente dans les deux pays, que 
Littré lui-même, après Tavoir signalée à l'article marché, i, 
rem, 2, y est tombé à l'article pain : On l'a donné pour un mor- 
ceau de pain, se dit de quelque chose de valeur, vendu trèt-bom 
marché. V. Pièce. 

Marier. Est-ce cet Adonis qu'elle va marier ? ^st-ce ci bai 
jojchlà qu'elle va marier ? Dites : qu'elle va épouser ? ou bien, à 
qui (ou avec qui) elle va se marier? D*après Balzac, marier, pour 
épouier, est un archaïsme, c On disait alors [à l'époque de Fran- 
çois I*^] en France comme en Italie : Un tel a marié la une telle, 
pour Ta épousée. » Balzac, le Martyr calviniste. Il a conservé 
cette acception dans la langue anglaise : to mart^, v. trans. 
(épouser). — Mais on rendra littéralement li maïeûr, li curé lès 
a mariéy le maire (le maïeur, Agad.), le curé les a mariés, Litt. 
Ici marier signifie unir un homme et une femme par le mariage. 
Ex. Qui nous empêche de les marier demain ?Sév. On traduira 
de même : li cinci a bin marié totes ses bâcelle, le fermier (le 
censier, Acad.) a bien marié toutes ses filles. Ici marier veut 
dire faire ou procurer mariage. Ex. Je crois, si je me refais mis 
en tête, que je marierais le Grand Turc avec la république de 
Venise, Mol. dans Litt. 

D'après un recueil d'Omnibus, ce serait une faute grossière 
de traduire comme nous l'avons fait : avec qui elle va marier. 
Cependant nous lisons dans Benoit, Compl. des Gramm. et des 
Dict. « Ce jeune homme a marié une femme charmante. Dites : 
« a épousé, ou s'est marié avec; i» etLittré fait cette remarque : 
« On a essayé d'établir une différence entre marier à et marier 
avec; mais il n'y en a aucune. » Enfin l'Académie dit : son père 
l'a marié à la fille, avec la fille d'un de ses amis. 

Masqué. Aller voir les masqués du carnaval, aller vête lès 
masqués d'à carnaval. Dites : les masques. 



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- 885 7- 

Masqué, participe passé du verbe masquer, signifie couvert 
d*un masque, mais ne peut s'employer substaniivement. On dira 
très-bien une femme masquée, des voleurs masqués, mais quand 
on veut désigner une personne qui porte un masque pour se 
déguiser en temps de carnaval, on doit se servir du mot masque. 
Les enfïints courent ap.rës les masques, Acad. Cori après lès 
masqués peut aussi se traduire courir les masques, âcad. V. 
Déguisé. 

Mastic. De la frotme maslic, dé Vbanne maslique. Dites : de 
ban mastic. Mastic est masculin en français, à cause du latin 
masUchum. Il a conservé dans notre patois le genre du latin 
mastiche^ es (grec mastiehè). Les patois flamands font également 
masiick in fémmin. 

Maton. C'est ainsi qu'on nomme à Liège, à Tournai, à Lille 
et à Yalenciennes, les grumeaux qui se forment lorsque le lait 
se caille. Voilà le lait qui tourne à matons, vola Vlèçai qui toûne à 
maton^ liég. Dites : qui se convertit en grumeaux, qui se gru- 
melle, qui se met en grumeaux. — U se dit aussi du sang : Du 
sang à matons, dé songue à maton, liég. Dites : du sang qui s'est 
mis en grumeaux, qui est plein de grumeaux, du sang grume- 
leux. — Ex. Le lait se convertit quelquefois en grumeaux dans 
l'estomac; ce lait est tourné, il s'est mis en grumeaux; le lait 
tourné se grumelle, Acad. 

Mauvais. 1<^ Il est si mauvais, il est si mdva, liég. Dites : 
il est si f&cbé. Il ne vous faut pas être mauvais si vite, i n'vô 
faut né iesse m'wai si rade, p. de Gharler. Bernus, S2. Dites : il 
ne faut pas vous fâcher..,. Il est mauvais contre moi, il est mon- 
vais conte demi, p. de Mons. Dites : il est fâché contre moi. Il 
esta remarquer qu'en fl. kwaad, et en ail. boese, signifient à la 
fois méchant, mauvais et fdché. 

il' J*ai un mauvais doigt, fa on mdva deugt, fl. ik heb eenen 
kwaden vinger. Dites, suivant le cas, j'ai mal au doigt, ou j'ai 



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- 266 - 

un panaris; dans ce dernier sens le liégeois dit aussi on blan 
deûgt et on pair fi. Un blanc doigt est un double wallonisme en 
français. — Un mauvais feu, on mâva feu, pour éruption, inflam- 
mation (fl. een kwaad vuur) est également incorrect. — Un 
mauvais sein, on màva sein, fl. een kwade borst. Dites : un cancer. 
Avu 'fl* mâle jambe, fl. eenzeer been hebben, Forir traduit, avoir 
une mauvaise jambe. Il faut dire, suivant le sens, avoir mal à 
la jambe, ou avoir une jambe ulcérée, ou un ulcère à la jambe. 
Avoir de mauvaises jambes signifie n'être pas en état de bien 
marcher, de marcher longtemps. 

Cet emploi de mauvais est germanique : Boese Augen haben, 
fl. kwade oogen hebben, avoir mal aux yeux. 

Mazette. Les patois de Hons e|t de Liège emploient ce mot 
en parlant d'une personne jeune, sans expérience : C'est une 
mazette, c*est enne mazette, mont., c'est ine mazette, liég. 11 faut 
dire : c'est un jeune freluquet; le français populaire se sert du 
mot galopin en ce sens. 

Le français mazette a différentes significations : il se dit 
surtout d'un joueur peu habile. 

Me. Place des pronoms me, te, se, nous, vous, le, la. Us, lui, 
leur, en, y. Il me veut attendre ici, i m* vout ratlinde ciaL Qui 
est-ce qui vous oserait refuser cela? qui est-ce qui v* wèz^reût 
r' fuser coula f 

Quand deux verbes sont ainsi subordonnés l'un à l'autre, et 
qu'il se trouve un pronom personnel, complément du second, 
on place ordinairement ce pronom près du verbe qui le régit : 
il veut m'attendre ici; qui est-ce qui oserait vous refuser cela? 
Les écrivains du grand siècle placent le pronom devant le 
premier ou le second verbe, ad libitum. Je prends la scène 5 
des Précieuses ridicules ; j'y trouve un exemple de la première 
construction : Son maître vous veut venir voir, et un exemple 
de la seconde : Il faut le recevoir dans celte salle basse. — 
J'ouvre Bossuet k la page 46, Orais. fun.y éd. Didot, j'y Irouve 



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- 257 — 

également deux exemples, Tun de la première construction : 
Que lui peut-OD reprocher? et l'autre de la seconde construction: 
Je ne suis pas ici un historien qui doive vous développer le 
secret des cabinets. Enfin la première page des Dialogues 
sur réloqueiicej de Fénelon, me fournil encore deux exemples 
qui présentent les deux tournures : Le sermon où vous vouliez 
me mener tantôt.... Je me garderai bien de Taller entendre [ce 
pi'édicateur]. Voici un vers de La Fontaine qui réunit les 
deux constructions : L'un voulait le garder, l'autre le voulait 
vendre. 

La vraie tournure wallonne consiste à mettre le pronom 
devant le premier verbe. Ouvrons au hasard l'Annuaire de 7i. 
Ji v'vas raconter sins braire on p*tU boquet fait sans façon^ 
Delarge, p. 135. Ji n'mt sûreus maie rapâxhtérj Dehin, p. 195. 
On moumintj binatné, nos v*s allans fér vosse compte^ Toussaint, 
p. itë.Ellerespondaqu'elle dishavéve (bravait) tôt lès cisqu^ervoirit 
fér d*werpi (déguerpir). Magnée, p. 60. — Cette construction, 
ditDessiau^ (Versifi^cation française) a Tinconvénient de réunir 
parfois deux accents toniques; ex. : puisqu'enfin vous vous 
voulez marier...; « mais elle a l'avantage de rapprocher, d'allier 
deux idées verbales en dépendance Tune de l'autre, et dont 
l'expression simultanée est souvent d'un bel effet. » La poésie, 
qui recherche les effets de style, aime à employer cette façon 
de parler ; il faut en user très-sobrement dans la prose, et la 
bannir complètement du langage de la conversation. En tous 
cas, on peut établir en principe que c'est l'euphonie qui 
guide ordinairement l'écrivain pour la place l^ donner au 
pronom. 

Méchant. Êtes-vous méchant contre moi? étée michant 
conte dé mil pat. de Hons. Dites: êtes- vous fâclié contre moi ? 
V. Mauvais. 

Mégard. Il s'est blessé par mégard, i s'a kwahi par mégârd. 
Dites : par mégarde. — Ce terme n'est usité, en français et en 



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— 258 — 

wallon, que dans cette locution, et il a conservé chez nous 
le genre d'autrefois. Ex. Il a obtenu miséricorde, en tant que 
par mesgard et ignorance il avait esté incrédule, Galv. 

Meilleur. Tai meilleur que vous, /a m&eû qu'vos. Dites : je 
suis mieux que vous. — Nous avons meilleur chez nous, tws 
avatis mèïèu è nosse mohonne. Dites : nous sommes mieux, on 
est mieux chez nous, ou, avec La Fontaine : il fait meilleur chez 
nous, Fabl. lY, 13. Ici meilleur est employé adverbialement 
avec Tunipersonnel U fait, V. fai bon, à l'art. Bon. 

Mdme. 1» Vous redites toujours le même, vos r'dihéz todis 
Fminme. Il vaut mieux se servir de la tournure : la même chose. 
Le même est un latinisme : idem, ou eadem semper dictitai ; ou 
un flandricisme : gij herzegt altijd hetzelfde. — Cependant 
Littré cite plusieurs exemples de le même employé de cette 
manière : Bien que mon bon démon souvent me dit le même, 
Régnier. — Il les range [les troupes] en bataille au milieu de la 
plaine ; L'ennemi fait le même, Corn. — Il faut convenir que 
cette tournure manque actuellement â*élégance. L'Académie 
ne cite qu'une seule locution où l'on trouve même employé 
substantivement : cela revient au même. Elle est en effet très- 
usitée. 

â^" C'est tout le même drôle, c'est tôt Vminme droite. Dites : 
c'est tout de même drôle ; et mieux : Néanmoins c'est étrange ; 
ou bien : ce n'en est pas moins étrange. — Tout de même, dans 
le sens de néanmoins est populaire, Litt. Ex. On m'a défendu 
d'aller, mais j'irai tout de même, id. Dans le bon style, on 
l'emploie comme synonyme de de même. Ex. Vous m'avez vue 
me repentir, m'agiter et m'inquiéter tout de même qu'une 
autre, Sév. — Mais on dira très-bien : Il est tout le même qu'il 
y a dix ans, M. Carpentier ; il est tôt à fait tminme qui gna 
dixh an. Tout le même ne forme pas ici une locution adverbiale; 
le même (sous-ent. homme) est attribut du sujet il, et tout, 
adverbe^ modifie même. 



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^ 289 ..- 

3« Esi*ce tout le même de le faire demain ? est-ce toi l^minme 
de Vfér demain ? £1. is het al hetzelfde dat ik het morgeii doel 
Dites : puis-je le faire demaiD ? me permeltez-vous de le faire 
demain ? 

4* C'est le même pour moi^ c'est Vmime pour mt, mont. C'est 
tout le même pour moij ou, simplement, c'est tout le même, c'est 
tôt rminme por mi^ ou c'est tôt rminme, liég. dat is hetzelfde voor 
mij, fl. Dites : cela m'est égal, indifférent, ce m'est tout un {dat is 
mij eender)^ peu m*importe, il m'importe peu, cela ne me fait 
rien. 

8» Si vous voulez quelque chose, c'est tout le même ç«oi,dilcs- 
le-moi, si vos volez 'n'sakoi, c'est tôt Iminme qwè, dikez-mè-f^ 
Delchef, lès deux Nèveu^lU^S, fi, zoo gijietswilty het is hetzelfde 
wat, zeg het mij. Il faut : si vous désirez quelque chose, quoi 
que ce soit, dites-le moi, ou peu importe quoi, dites-le 
moi. 

6« C'est tout le m^me, j'aimerais mieux partir, c'est tôt rminme 
j'ainm'reus mi de parti. Dites : c'est égal, j'aimerais mieux 
partir. 

Messe. A 1* Basse messe, liég. lage mis, il. low mass, angl. 
Dites : messe basse, ou petite messe, Litt. V. l'art. Adjectif. 

^ Messe d^ année y messe d'annexé, û.jaarmis. Les expressions 
françaises sont : anniversaire, service anniversaire, et bout de 
l'an. Ex. On vous prie d'assister au service anniversaire d'un 
tel» on v'fait prit à l'messe iannèïe d^on té. On fit à St-Deni$ le 
bout de l'an du Dauphin et de la Dauphine, Sév. Il a constitué 
une rente pour qu'on lui fit un anniversaire, Litt. — On se sert 
à Tournai du mot obit (lat. obitus, mort, fl. omkomst^ expression 
très-imagée : action de parcourir tout le cercle de la vie, de 
terminer sa carrière). Obit est parfaitement français. Ex. Fonder, 
dire, chanter un obit, Acad. 

S*" Où a-t-il dit messe ? wisse at-i dit messe ? waar heeft hij mis 
gelezen ? fl. where did he say mass? angl. Forir traduit mal en 
omettant l'article. Il faut : où a-t-il dit la messe ? 



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— 260 — 

¥ Aller à messe, liég. lo go to mass, angl. Dites : à la messe, 
AcAD. Il faut excepter Texpression proverbiale, il ne va ni à 
messe, ni à prêche, c*est-à-dire, il n*a pas de religion. Hais le 
wallonisme aller à vèpe se traduit littéralement : aller à vêpres, 
AcAD. De même le wallonisme aller à grancTtnesse se traduit par 
aller à la grand'messe. On dit aussi aller à la messe haute, à la 
messe de paroisse, Litt. 

8» Le wallonisme siervi messe, fl. mis dienen, se rend ordi- 
nairement par servir à la messe. Il faut traduire plus littérale- 
ment : servir la messe, Acad. 

6*" Il en est de même de la locution mâkér messe, manquer la 
messe, Agad. et non pas manquer à la messe. 

B. Manger des messes, mùgni dès misse, fi, mispels eten. Dites : 
des nèfles. Le liégeois tne^^e et son dérivé m^^pH, néflier, viennent 
du latin mespilum, mespilus ; ils ont conservé Vm étymologique; 
il en est de même dans plusieurs autres patois : namur. mespe; 
norm. et berrich. mêle; picard, mesle. Littré cite un exemple 
de Voltaire où Ton trouve une des formes archaïques. Les 
bourgeois des villes de Flandre jouissaient du droit de prouver 
leurs prétentions avec la massue de mesplier, Mosurs, 100. 

Mesure (Complément de la). Vous êtes deux doigts plus 
haut que moi, vos estez deux deugt pus haut qu'mi, liég. Dites : 
vous êtes plus haut(mieux,plus grand) que moi de deux doigts. 
— Quatre pieds large, qwate ptd lâge, liég., dix pouces long, 
dix pôce long, liég,; vingt ans vieux, mont; six pieds grand, id., 
vingt pieds profond, vingt pieds perfond, id. Dites: large de 
quatre pieds, ou ayant quatre pieds de largeur, long de dix 
pouces, âgé de vingt ans, haut de six pieds, profond de vingt 
pieds. — Deux pouces plus grand que moi, deux pôce pus grand 
qu'mé, p'dL de Hannut; quatre ans plus vieille, qwatr anpus vîle, 
id. Dites: plus grand que moi de deux pouces, de quatre ans 
plus âgée. V. Vieux, i\ 



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- 261 - 

Sigart oe voit là que des ilaDdricismes: il est de fait qu'on dit 
eu néerlandais : twee vinger hooger dan ik, vier voet breed, 
tien duim long iwintig jaar oud, zes voet groot, twintig voet diepy 
twee duim grooter dan ik. Mais le latin ne s*exprime pas autre- 
ment : triginta annos natus, sex pedes alttu, sex pedes latus, etc. 
Ce qui suffit amplement pour expliquer les idiotismes dont nous 
parlons. Lorsqu'on trouve dans la langue-mère les éléments 
nécessaires pour rendre compte d*un phénomène grammatical 
dans un rameau des langues novo-latines, on doit se garder de 
recourir aux autres langues qui ont concouru à sa formation. 
C'est un point sur lequel appuie avec beaucoup de force 
M. Litlré dans ses savantes études sur la vieille langue fran- 
çaise. {Histoire de la langue française, I, 94 seq.) Que, dans 
l'espèce, l'influeiice teuionique soit pour quelque chose dans la 
persistance de ces tournures en Wallonie, c'est ce qu'il serait 
téméraire de nier. Mais on doit y voir tout d'abord des lati- 
nismes. Le wallon^ comme le français, a de l'allemand et du 
flamand, mais il est avant tout du latin.-— La plupart des tour- 
nures françaises dont nous venons de parler, s'expliquent par 
l'ablatif^ que le latin employait également dans ce oats^sexpedibu^ 
altvs, haut de six pieds. 

Mettre, l"^ Mettons que ce soit vrai, mettons qui cséuïe 
vraie. Dites : admettons, supposons que ce soit vrai, posons le 
cas que cela soit, ou posons que cela soit. 

S"" Mettez-vous^ meiléz-vos, û. zet-u, très-usité dans leHainaut 
au sens de asseyez-vous (moins souvent assoyez-vous). Ce wallo- 
nisme est également employé eu Hesbaye. A en juger par 
l'exemple suivant de Molière, c'est une vieille tournure française. 
Je veux un homme qui m'ait obligation de ma fllle et à qui je 
puisse dire : mettez-vous là, mon gendre, et dînez avec moj, 
Bourg, g. Courier^ si habile à rajeunir les tournures obsolètes , 
l'a employée également : On se lève... Le héros [Bonaparte] 
nous fit rasseoir. Il n'était pas de ces camarades à qui l'on peut 



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- 262 - 

dire, raets-toi, et mange avec nous, Pamph. des pampk, — On 
remarquera que Courier n'ajoute pas l'adverbe là, comme 
Molière l'a fait. 

3° On dira très-bien se mettre en deuil. ( Marivaux, le specta- 
leur franc,, II, p. 5.) si mette è doû. On dit aussi s'habiller, se 
vêtir de deuil, prendre le deuil , Acad. ^ Mais si mette foû 'doû 
fl. zlch uit de rouw zetten, ne peut se traduire se mettre hors 
de deuil Dites avec l'Académie : quitter le deuil. 

4" Mettre de l'argent à finlérêt, mette dès aidant à Vintirét. 
Dites: mettre, placer de l'argent à intérêt , Acad., Besch., Litt. 

8' Mettre dedans, m^Wre dédans, mont., c'est-à-dire duper, 
tromper. Un gradin d'usurier m'a mis dedans , on colin d^uzwi 
m'a mettou devint, liég. ~ L'Académie taxe cette locution de 
populaire, et Benoit, de triviale. Littré dit simplement qu'elle 
est familière. Elle paraît en effet de bon aloi. Ce sont les termes 
flouer y fourrer, ficher dedans , qui sont triviaux. Gardez-vous 
donc de traduire mot à mot les expressions wallonnes : % m*a 
flouwé, i m'a fichu d'vint. — Il s'est mis dedans, t s*a mettou 
d'vint. Dites : il a donné dedans, populaire, selon l'Académie, 
familier, d'après Littré. Il a donné dans le piège^ dans le pan- 
neau, est du meilleur style. 

6"" Si mâva vin m'a mettou d'vint. Forir traduit : son mauvais 
vin m'a grisé. C'est du rigorisme. Mettre dedans, dans le sens 
d'enivrer, que n'enregistrent ni l'Académie ni Bescherelle, est 
admis sans observation par Littré. Ex.: Une bouteille de Cham- 
pagne l'a mis dedans. 

Minable. Qu'il a l'air minable! quHl a Vair minàve, liég. 
Dites : misérable, dépenaillé, déplumé. — Là vous êtes tous 
minablesy drolàvos stès iertous minabes,ip. deCharler. , Bernus, 15. 
Dites : vous êtes tous besoigneux. 

Liitré cite un texte du W" siècle : il fut prouvé que le chastel 
était minable, où minable signifie susceptible Sétre détruit ou 
attaqué par une mine; de là le sens qu'on lui donne par exten- 



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\ 



^^ 



~ 263 - 

sioQ dans le langage populaire : Air minable, vêtements mi- 
nables. 

Mode. A votre mode f à vo mode ? se dit dans le Haînaut 
pour à votre sens? ou que vom en semble î Gela n*est pas fran- 
çais. ^ A ma mode qu'il ne viendra pas demain, d m*m6de 
qu'in'vèro nié demain. Dites : d'après moi, il ne viendra pas 
demain. 

Mol. Moi et vous y nous y perdrons notre latin, mi et vos nos 
yjrierdrans nosse lalm, liég. Dites: vous et moi.... — Moi et 
mon ami, nous le menons par le bout du nez, mi et m'eamarâde, 
nos Fminans po Vnarenne^ liég. Dites : mon camarade et moi... 
— Moi et elle, nous lisons bien, mi et léïe nos lisans bin, namu- 
rois. Dites : elle et moi... 

Ici moi est joint à un substantif du à un autre pronom ; il ne 
doit être placé qu'en second ; c'est une règle de l'urbanité fran- 
çaise, qui n'existe pas, que je sache, dans les autres langues, et 
qui est naturellement inconnue aux patois. « La politesse 
n'exige pas du Wallon qu'il se nomme le dernier. » Gravée, 
Français et Wallons, p. 191. Voilà une règle qui n'ira pas à cer- 
tains caractères. « J'ai remarqué que Ghateaubriand se met 
toujours en chef de file. » Gelte piquante remarque de Remacle 
fait penser au mot de Sixte-Quint : Il n'y a que trois têtes en 
Europe capables de porter dignement la couronne : Moi, 
Henri IV et Elisabeth. 

Moindre. Mon étoffe est d'une p{u« moindre qualité que la 
vôtre, mi stoffe est dCine pus moinde qualité qui fvosse. Plus con- 
stitue ici une périssologie ridicule, moindre renfermant déjà 
ridée exprimée par plus. Mon étoffe est d'une qualité moindre 
que la vôtre, ou mieux, d'une qualité inférieure à la vôtre. — 
Gette étoffe est si moindre ! cisse sitoffe-là est si moinde ! Dites : 
est si mauvaise, d'une si mauvaise qualité. 

Moindre, dix latin minor, prend parfois tout naturellement dans 
notre patois le sens du positif ; on dit de même : ces étoffes 



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— 464 -- 

sout d*uue qualité inférieure (inferiorem, plus bas), et cela 
signiHe proprement qu'elles valent moins que d'autres ; d*où 
''idée de mauvaise ; le patois messin dit de même manre pour 
mauvais. Mais le français ne perdant pas de vue Tidée primitive, 
n'admet ni plus, ni «i, ni très devant cette sorte d'adjectifs. 
Toutefois on pourrait citer des exemples où des écrivains ont 
imité la tournure populaire ; nouvelle preuve de l'influence des 
patois sur la langue littéraire : Gomment est-ce donc que Pierre, 
qui est beaucoup plus inférieur..., Calvin. Votre corps a donc 
bien grandi depuis ce temps-là, car je vous ai trouvé beaucoup 
plus moindre et plus'fluet, Beaum. Mar. de Fig., II, 11. 

Moins. La moitié moins, Fokir, U miian mom, fl. d€ helft 
minder. Dites : la moitié de moins. — Gela coûte trois francs, 
pas un liard moins, coula cosse treâs franc, nin ine aidan mons. 
Dites : pas un liard (ou une obole) de moins. 

G'est un tour suranné en français : U eût mieux valu danser 
une courante moins, et m'envoyer une lettre, Voit., 402. — Le 
wallon emploie aussi di. fa ine inn'mi d'mons, j'ai un ennemi 
de moins. Gorneille a renversé la place de la préposition : J'ai 
moins d'un ennemi (Litt.). 

Monpère, monfrère, masœur, matante, mononcle. — Ma 
vieille matante boit toujours un petit verre avant d'aller se 
coucher, mi vèie matante beût todis on liûfion divant d'aller 
doirmi, liég. — Votre masœur est une aimable personne, vosse 
maseur est ine binaméïe gint, liég. — Le cadeau de mon mon* 
oncle, U cadeau di m'mononcle; namur. Votre monfrère est 
revenu, vo mofrére i est ervenu, tournaisien, Bull. a. 70, 2*1., 
p. 118. Vo monfrère est rév'nu,p. de Mons, id. p. 151,... est 
r arrivé, Walcourt, 168. Vosse monfrère est riv'nu, Beauraing, 
p. 184. Il faut dire: ma vieille tanie, votre sœur, ou mademoi- 
selle voire sœur, le cadeau de mon oncle, votre frère. 

Ges form'es agglutinées sont des termes de politesse dans nos 
patois ; elles constituent, en français, de grossiers barbarismes. 



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— 265 -~ 

Elles existent aussi en flamand : mijne matante, mifn mononkelj . 
mijjie tnaseur, mijn monfrere (belle-sœur, beau-frère), mais ici 
elles sont d'importation wallonne ; ce qui le prouve, c'est l'exis- 
tence des termes usuels, moei^ oom, zustei\ qui n'admettent pas 
ragglutination du possessif. Littré, à propos du mot tante, 
invoque ces formes wallonnes, empruntées au langage enfantin 
et domestique, à l'appui de Tétymologie qu'il propose de ce 
vocable français : pour lui, tante équivaut à ta ante, tua amita 
{ante, vieux fr., Villon, strophe 136, normand, rouchi.et picard ; 
liég. antin (grand-oncle); anglais, aunt); et tante a fini par 
supplanter ante. Il faut convenir que l'analogie, à laquelle M. 
Burggraff, dans sa Grammaite ^r^n^ra/^, accorde une importance 
(capitale, est ici réellement frappante. 

Moquer. 1« Pourquoi le moquez-vous toujours ? poqwè 
VmoquéZ'V' todis ? Dites : pourquoi vous moquez-vous toujours 
de lui ? C'est un archaïsme qui s'est également maintenu dans la 
langue anglaise : We 'Il mock him to home, Shakspbâre, nous le 
reconduirons à la maison en nous moquant de lui. On emploie 
encore très-bien la forme passive ; ainsi on rendrait mot pour 
root le wallonisme : i fourit moqué, il fut moqué, La Font., le 
Geai.,.. 

i"" Hennequin condamne la tournure vous vous moquez, vos 
v'moquéz ; ici le verbe se moquer est employé absolument dans 
le sens de ne pas parler, ne pas agir sérieusement. C'est trop 
de rigueur. Ex. On crut qu'il se moquait ; où sourit, mais à tort, 
La Font. Fabl. IV, 18. V. aussi Mol. Tart. II, 4, et Beaum. ilar. 
de Fig,, l, 10. 

Mort. Il fa battu mort, i Va battou moirt, liég. Il s*est tra- 
vaillé mort, i sat ovré moirt, liég. Il s'est cherché mort, i s'a 
qwèrou moirt, liég. En nous écrasant avec ses pieds aussi plates 
qu'une feuille de papier, in nos spochant avè ses pîd V f aussi 
plates que n' faute dé papi, p. de Charler., Bernus, 34. 

Ces manières de parler sont inadmissibles en français ; mais 



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— 2TO — 

les équivalents seront parfois bien faibles : il l'a roué de coups, 
il Ta assommé, il s'est épuisé à travailler, j'ai beaucoup cherché, 
en nous aplatissant, etc. Nous avons ici une tournure wallonne 
très-remarquable par son énergique précision. Elle parait à peu 
près étrangère à la langue française. Mais elle existe en grec et 
dans les langues germaniques ; oikôn m'exapataxas, Euatp. Héc. 
176, mot à mot, tu m'as effrayée hors de la maison, c'est-à-dire 
tu m'as fait sortir en m'effrayant. Einen herauschresien, mot à 
mot effrayer quelqu'un dehors, faire sortir quelqu'un en l'ef- 
flrayant. — Einen todi schlagen, il. iemanddood slaan, assommer 
quelqu'un. — Er hat sieh todt gequaelt^ i s'a tourmetlé moirt, le 
chagrin l'a tué, ou simplement, il s'est beaucoup tourmenté. — 
Er hat sein Pferd todt geritten, i Fa fait eori moirt, il a crevé son 
cheval. — She will smg the savageness ont ofa bear, mot à mot 
elle chantera la férocité hors d'un ours, elle pourrait par ses 
chants enlever à un ours sa férocité. V. un exemple de Shaks- 
peare k l'article précédent. — Dans cette tournure wallonne, 
l'adjectif moirt exprime le résultat, l'effet de l'action exprimée 
par le verbe. Il est regrettable que la langue française, cette 
gueuse fière,' comme dit Voltaire, n'ait pas admis cette façon de 
parler. Toutefois, en y regardant de près, il me semble voir 
quelque chose d'analogue dans les tournures suivantes : dîner 
tout son soûl (*), La Font., la Belette.,.; il ouvre un large bec, 
id. le Renard et le Carb. ; c'était ouvrir une porte bien large à la 
calomnie, Montesq. Esprit ^ XII, 16. 

Mote. J'ai trouvé une mote sur mon habit, fa trové 'rimote 
so mi habit. Motte est français, mais répond à un autre mot 
wallon motte {di terre). Mote, larve qui ronge les étoffes doit se 
traduire par teigne et non par mite. La définition de l'Académie 
(petit insecte sans aile et à huit pattes, par exemple mite du 
fromage, mite de la farine, ciron domestique, etc.) ne s'applique 
pas à la mote des Liégeois, c'est-à-dire à la larve d'un papillon 

(') Wall, dintr s'binàxhe, fl. zi/fie bekomsi eten, fl. pop. zijnen buik vOL eten. 



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- 267 - 

noeturne du genre teigne^ laquelle a trais paires de pattes et 
ronge les étoffes. Toutefois le terme de miiCy au sens du wallon 
mote^ est connu en France, car il figure dans Littré, qui donne 
cet exemple : j'ai trouvé une mite sur mon habit. Ici mite est 
évidemment synonyme de teigfie; mais, d'après M. Van Beneden, 
cet emploi est abusif ; il n'est nullement conforme à la termi- 
nologie scientifique. — Mote vient du néerlandais mot, ail. 
motte, angl. moth, même signification. 

Mouchettes. Gribouille prit la manchette d'une main, 
moucha la chandelle de l'autre, et mit ensuite la mouchure dans 
la manchette, Gfibanîe prinda Cmonchette divint 'n^main, moncKta 
rchandelle di Vante, et adon metta VmoncKteure è Vmanchette. 
(Anecdote connue.) Dites : prit les manchettes, et mit la mou- 
chure, ou le moucheron, dans les manchettes. 

Le mot manchettes est essentiellement pluriel en français. Il 
en est de même de ciseaux, instrument de couturière à deux 
branches. On fait un wallonisme en disant : Prêtez-moi votre 
ciseau, pmstiz-m^ vosse çuzette. Dites : vas ciseanx.^Un ciseau 
de jardinier, ine cuzette di hdïe. Dites : des ciseaux de jardinier. 
Toutefois, même dans ce sens, on le trouve quelquefois au 
singulier. On n'a point encore mis le ciseau dans cette étoffe, 
ÂaD. Je ne me console pas qu'un si beau génie [Diderot], à qui 
la nature a donné de si grandes ailes, les voie rognées par le 
ciseau des cafards, Volt. (Allusion à l'expression le ciseau, ou 
les ciseaux de la censure.) Le ciseau de la Parque, Fén. Tél. 
III. Dans le langage usuel, on ne pourrait guère s'autoriser de 
ces exemples. -- Ciseau, au singulier, est un instrument tran- 
chant par un bout, dont se servent les sculpteurs, les menui- 
siers, les maçons, etc. Le menuisier a fait repasser un ciseau, 
li scrini a fait r'sinmi an herpai (ou an cizai, Gâmbrésy). 

On ne fait pas un wallonisme en traduisant eknèîe par 
pincette, au sing. Attiser, arranger, secouer le feu avec la pin- 
cette, grawi è feu avau Veknèïe, Mais on dit plus souvent avec 



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— 268 — 

les pincettes. Inutile d'ajouter que le mot à mol grattei- dans le 
feu serait vulgaire et insupportable. — D'après M. Delbœuf 
(li Mâïe neur, page 18, noie 7), le moï eknèïe représenterait le 
latin tenacula, plur. neutre, liens, attaches ; nouvel exemple 
d'un pluriel neutre pris en forme de nom féminin. V. Outil. Ce 
qui appuie singulièrement cette étymologie> c'est la forme 
wallonne des environs de Mons elnailes. — Pincette est un 
diminutif de pince, et signifie proprement Taciion de pincer 
doucement, wallon picette ; dans ce sens, il sert à traduire le 
wallon bàhi 'n'saki à picette. V. Baiser. 

Moyen. 1" Il a bien le moyen, il a bin Vmoyain, er hai 
Mittel, ail. hij heeft middels ou' de middels. Dites : il est riche, il 
a de la fortune, et, familièrement, il a du foin dans ses bottes 
(c'est-à-dire se^ bottes de foin sont bien garnies). Notons que 
moyefis, au pluriel, se dit très*bien dans le sens de richesses, 
facultés pécuniaires. Ex. (\ Rome) c'étaient les moyens et les 
richesses qui donnaient le suffrage, Montesq. Espr. II, 3. Je ne 
connais pas ses moyens, ses moyens ne sont pas considérables, 
ÀGAD. Cependant la tournure c^est un homme qui a des moyens 
serait triviale. — Mais on dira très-bien, même au singulier, 
avec un complément : tu as bien le moyen de faire cette 
dépense, Va bin Vmoyain d'dispante coula. C'est à tort qu'on a 
condamné cette tournure ; elle est admise par Littré, qui cite 
l'exemple suivant : Elle n'avait pas le moyen de la mener à Paris 
pour la faire voir à des chirurgiens, Genus. — On dit très-bien, 
dans un sens général : avez-vous le moyen de faire cela? pour 
le pouvoir, la faculté de faire cela, et cette même tournure, le 
moyen de faire cela, peut prendre tout naturellement, grâce au 
contexte, le sens particulier de facultés pécuniaires. 

2° Tâcher moyen de se sauver, tachi moyain di s"sàvà\ Dites : 
tâcher de trouver le moyen de s'évader, ou, simplement, 
chercher à s'évader. 

Moyenne. Le père était moyenne, et le fils est un pauvre 



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hère, lipéi-e estent moyainné (fl. bemiddeld), et VfU est onpauve 
chin. Dites : le père était riche, opulent, à son aise. Plusieurs 
traduisent à tort ce mot par fortuné, qui signifie, non pas 
riche, mais bien traité de la fortune, ou du sort, à qui tout 
réussit. Ne plaignons plus des disgrâces qui font sa félicité ; si 
elle avait été plus fortunée, son histoire serait plus pompeuse, 
mais ses œuvres seraient moins pleines, Boss. Reine i'Angl, — 
Siècles fortunés, région fortunée, Iles fortunées, Litt.— « Dans 
la logique du peuple, un homme fortuné est nécessairement un 
homme riche; c'est un barbarisme très-commun dans la langue, 
et qui provient d'une erreur très-commune dans la nforale. » 
Nodier, Examen critique des Dict, 

Muret. Un muret, on muret. Ce mot s'emploie, je crois, 
dans toute la Wallonie. Dites un murer, et prononcez muré 
(Littré). Murer est français, bien qu*il ne figure pas dans le 
Dictionnaire de FAcadémie. Mais on dit mieux giroflée de 
muraille, ou giroflée jaune. Autres noms: violine, violier jaune, 
ravenelle. 

N 

Ne. lo Prenez garde de ne pas tomber, loukiz à vos qu^vos 
n'toumésse. C'est une fausse traduction ; ne se met en français 
lorsqu'on emploie la construction wallonne, ce qui n*a lieu que 
quand le sujet des deux verbes est difl^érent : Prenez garde que 
l'enfant ne tombe. — Il faut dire : prenez garde de tomber. — 
Cependant ne serait de rigueur si l'on se servait de la tournure 
pins rare, prenez garde à . Prenez garde à ne pas tomber. 

2" Ils ont plus de pain qu'il leur en faut, il ont pus d'poin quH 
leu faut, namurois, Bull. a. 70, p. 176. Dites: plus de pain qu'il ne 
leur (en) faut. - On fait toujours le loup plus gros qu'il est, on 
fait todis Vleûp pus gros qu'il est, prov. namur., Aurmonaq di 
Nam. a. 70, p. 18. Dites : plus gros qu'il n'est. Plus souvent 
qu'on pense, pus souvint qu'on pinse, Arm. de Mons, a. 72. p. 32. 
Dites : qu'on ne pense. 



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— 870 — 

Cet emploi de tie est syllepUque, si l'oti peut dire; il modifie 
la pensée présentée d'une autre façon : le loup n*est pas aussi 
gros qu'on le fait. Le patois de Namur et peut-être celui de 
Mons, emploient la tournure latine. 

3"* Avant que je ne Taie fait, avant que je n'iaine fait^ p. de 
Mons (SiGART« au mot marone).— Il était là avant que je n'y fusse 
il eâteût là amà qui fni fouxhe^ ou md qui j'ni fourche, liég. 
(Grandg., au mot amà). — Allez le voir avant qu'il ne parte, 
allez el vHe divant quH n' pâte. 

Ghapsal a mis à la mode ce principe par trop absolu (i) : Avant 
que n'est jamais suivi de ne. Il est de fait que l'Académie ne 
donne pas un seul exemple de la négative après avant que^ et 
c'est en effet ainsi qu'on s^exprime le plus souvent. Hais Littré» 
d'accord avec le grammairien Lemaire, admet l'emploi de ne 
après avant que, sans tenir compte de la distinction établie par 
Girault-Duvivier entre avant que sans ne, et avant que avec ne. 
Il cite cet exemple de Buffon : Lorsque le tigre leur fend et leur 
déchire le corps, c'est pour y plonger la tête et pour sucer à 
longs traits le sang dont il vient d'ouvrir la source, qui tarit 
presque toujours avant que sa soif ne s'éteigne, lïgre. Voici 
d'autres exemples : II ne vaut pas la peine de rien faire avant 
que les volontés de M. Fouquet se soient fixées, Monteso. 
Lettres fam., 1. Avant que Dieu n*en arrête le progrès [des 
maux dont l'Eglise gémit], ils peuvent la conduire au bord de la 
ruine, Lamennais, Affaires de Rome, p. 228. 

4» Sans qu'il ne se doute de rien, j'essayerai de revenir, sins 
quH n'si dote di rin, ji sâïerei de riVni, liég. Ann. 63, 3« 1., p. 70. 
Dites: sans qu'il se doute... Sans que cela ne paraisse, sans 
qu'ça n'paraisse, mont. Dites : sans que cela paraisse. 

Après sins qui, la particule ni peut s'employer, mais elle n'est 
pas de rigueur. / lèïa donc aller tôt à Vwâde di Diew, sins qui 



(<) M. VaD HoUebeke dit simplement qa^après avant que le verbe aubordonjoé 
ne prend paa généralement la négation nel Gram. fr., 9e dd., § SSO. 



Digitizgd^ 



r.r^r^q^ 



- S71 - 

s'meskenne si k'dûhaxhe di taper iodis èvôie tes aime è saiweû, 
Macnée, Aon. 71, p. 75. Mais la syntaxe Ihincaise n^dmet pas 
remploi de ne après sans que. Littré cite un exemple de M. de 
Sévigné qui n'est pas à imiter. Il est bon d'ajouter que, quand 
on supprime sans ou avants l'emploi de ne est de rigueur : Il 
ne &it point de voyage qu'il ne lui arrive quelque accident ; je 
n'irai point là que tout ne soit prêt, Agad. 

S» J'avais eu peur que les jambons restassent sur mon compte, 
f avais eu peur que lés gambons nCrestié dessus lés reins, Fvraie 
Ervue dé Mons^ a. 69^ p. 83. Dites : ne restassent sur mon 
compte. — Je tremblais de peur que votre oncle arrivât, ji 
troniiéve lès balzin qu'vosse mononke arrivaxhe, Delchef, les 
deux Neveu, 1, 3. Dites : Je tremblais de peur que votre oncle 
n'arrivât. 

On connaît la règle relative à l'emploi de ne après les verbes 
qui signifient craindre; elle existe aussi dans les patois, mais 
elle n'y est pas absolue comme en français, ainsi que le 
prouvent les deux exemples cités plus haut. 

Né natif. Je suis 7ié natif de Mons, y sue né natif dé Mon, 
mont. Dites simplement : Je suis natif de Mons. 

Cette locution est commune et basse. Littré paraît disposé 
à radmettre dans la poésie badine. On peut douter que les 
poètes s'en servent jamais quand ils parlent en leur nom. Cette 
expression vicieuse ne se rencontre que chez les écrivains qui 
tiennent à conserver à leurs personnages pris dans le peuple, 
un langage conforme à leurs habitudes. 

Neveuse, pat. de Liège. Dites : nièce. 

NI. Ni l'un ni l'autre n*est content, ni onke ni Vaule n'est con- 
tint. For. Le pluriel est plus correct : ni l'un ni l'autre ne sont 
contents. Tout sujet dont les parties sont unies par ni, exige le 
verbe au pluriel. Hais quand l'une des deux personnes que dési- 
gnent les mots unis par ni, fait seule l'action exprimée par le 
verbe^ celui-ci se met au singulier. Cette règle a pour elle l'au- 



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— 272 - 

torilé do Wailly, de Marmontel el de GirauU-Duvivier. Elle 
parait fondée en raison. La Grammaire des Grammaires cite 
bon nombre d'exemples de grands écrivains qui ne l*ont pas 
observée; mais que de règles ne pourrait-on pas renverser en 
invoquant des textes empruntés aux meilleurs auteurs ? Un 
eritique n*a-t-il pas cherché, par ce moyen, à prouver queeour^ 
les règles posées par Gbapsaldans sa Grammaire étaient Tausses. 
De tout cela concluons que ce n*est pas précisément une faute 
que de dire : ni l'un ni l'autre n'est content; mais il est préféi^ble 
de dire : ne sont contents. 

Noblesse, l"* Il a épousé une noblesse, il a sposé n'nôblesse. 
Dites : il a épousé une personne noble. 

Noir. Il est habillé noir, il est neûr moussi, er ist sehwarz 
gekleidet, ail. Dites : il est habillé, ou vêtu de noir, âcâd. Bes- 
cherelle blâme la locution habillé en noir, qui se trouve dans 
Boiste ; il faut convenir que bien des gens s'expriment ainsi. 
Comparez le flamand zich in'l zwart kleedeti, zich in het wit klee- 
dén. Mais on dira très-bien, en supprimant habillé : Il est en 
noir, ÂGAD. 

2'' Je bois mon café notr, ji beû m'cafè neùr. Je bois du café 
noir, ji beûs de neûr café, ik drink zwarte ko/fîj. En France, 
on se sert habituellement de la tournure : je bois mon café sans 
lait, du café sans lait. On dit aussi café à Veau (Trévoux) : on 
sert ordinairement du café à l'eau dans une demi-tasse, Lirr. 
au mot tasse. Toutefois j'ai trouvé café noir dans M"« de Ségur : 
Il fit apporter du café noir,Di% le Chemineau.WVUl. Prendre 
du café noir, ibid. 

Nonante, septante. Ces termes sont usités en Belgique, 
dans le midi de la France et en Suisse. Il sont aussi inconnus à 
un Parisien que l'ancien mot octante (quatre-vingts) l'est même à 
un habitant du pays de Liège. Les Liégeois de la vieille roche 
ont cependant dans leur patois le mot hûtante que j'ai entendu 
souvent dans la bouche des bateliers {naiveu) qui déchargeaient 



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— 273 ~ 

leurs pavés au bord de FOurthe, outre-Meuse. « L'emploi des 
mots soixante-dix et quatre-vingt-dix, au lieu de septante ei 
nonante, m'a valu plus d'une fois l'épithète de fransquilloo (Gai- 
lomane, Litt.).» FoRn, préface de son Diet.— Ces dénominations 
proviennent d'une ancienne coutume de compter par vingtaines, 
laquelle s'est conservée invariablement en France, pour ces trois 
mots et pour quinze-vingts. Au dire deSigart, c'était une manière 
de compter particulière à nos ancêtres les Celtes ; elle fleurit 
encore dans le pays de Galles. Il n'est pas rare d'entendre nos 
campagnards en user dans la vente de leurs bestiaux; ils disent, 
par exemple, qu'un veau, qu'un porc pèse huit-vingts, neuf- 
vingts, etc.^ en sous-entendant le mot livres. (Forir.) Toutefois, 
malgré la respectable antiquité attribuée à ces noms de 
nombre (4), nous connaissons plusieurs professeurs de mathé- 
matiques, parlant d'ailleurs très-élégamment, qui continuent à 
ne pas vouloir interrompre la série uniforme des adjectifs nu- 
méraux, et se servent quand même de septante et de nonante. 
Pourquoi pas aussi d*octante? Ce dernier mot, ainsi que septante 
et nonante, figure dans le Dictionnaire de l'Académie comme 
termes vieillis. 

Non fttlt. Je comprends.— iVon fait.^Ji eompritids.^Non 
fait (ou non firet.onnoûna, FomR).pat. ardennais.— £;' comprinds. 

— Non fait, ou non fra, pat. de Hons. — Dites : Je comprends. 

— Non pas, ou au contraire, vous ne comprenez pas, ou, plus 
poliment, excusez-moi, veuillez m'excuser, je me suis sans 
doute mal expliqué. 

Non fait signifie au contraire, et s'emploie quand on nie ce 
qu'un autre affirme. Cela se disait autrefois en France : si fait, 
non fait termes durs et mal polis. De Caillières, 1690, dans 
LiTT. — Si fait, pour affirmer ce qu'un autre nie, est, d'après 

(*) Oiuttre-vingt-dix Sê rencontre souvent dans le Livre des chartes et privi- 
lèges des bons métiers de Liège, et dans d'autres documenU liégeois très- 
anciens. 



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~ 274 — 

TAcadémie, une façon de parler familière, et, d'après Littré, 
populaire. Ex. Je crois qu'il n*y a pas été. Si fait, il y a été. 
Académie. Ji creva quH n'y a nin stu. Si fait (Forir), ou sia. 
— L'affirmation si est familière. « Le mot si étant destiné à 
détruire une opinion exprimée par notre interlocuteur, n'est 
pas une tournure polie quand on parle à ses supérieurs. » 
JuLLiEN. Or si fait renforce encore cette espèce d'affirmation. 
Les patois ne s'inquiètent guère de ces nuances. On rendra 
donc dans certains cas le wallon si fait, et sia par d'autres for- 
mules, comme, je vous demande pardon, ou simplement pardon, 
excusez-moi, etc. Ex. Vos n'avez nin fait vosse divoir. — Sia 
monsieu, ou si fait, monsieu. — Vous n'avez pas fait votre 
devoir.— Pardon, monsieur.-— Si, »iow««ir, pourrait encore se 
risquer, pourvu qu'il fût accentué convenablement; mais si fait^ 
serait impoli, par exemple dans la bouche d'un fils parlant à 
son père. 

NotarieL Acte notariel, ake nôtâriéle. Dites : acte notarié, 
AcAD. Au féminin, l'adjectif wallon reprend la forme française : 
qwittance nôtâriêîe, quittance notariée, Acad. — Le masculin 
nôtâriél représente l'adjectif français notarial (Besch. Litt.), 
qui ne pourrait être remplacé par notaiié dans les locutions 
suivantes : fonctions notariales, jurisprudence notariale, Besch., 
un enseignement notarial, Bonjean dans Litt. Notons que Littré 
a aussi actes notariaux. 

Nuit. 1» Il était neuf heures de la nuit, ou à la nuit, il esteût 
noûf heure à Vnutte, hég. Dites : neuf heures du soir. 

2*^ A la nuit, au nulte, mont. Dites : vers le soir, ou sur le 
soir, Acad. Le patois de Liège a conservé pour exprimer la 
même idée, une vieille locution française : à Vvespréîe, à la 
vesprée; c'est un très-joli mot, que Bescherelle a inséré dans 
son Dictionnaire, et qui mériterait d'être rajeuni par nos 
poètes. 

Nul. L'eau n'a nulle couleur, n'a aucune couleur, Vaiwe n'a 
mile coleûr, liég. Dites : n'a pas de couleur, est incolore. 



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— 275 - 

Cet emploi de nul et de aucun pour pas de, point de, est tout 
germanique ; il est assez fréquent dans les patois wallons : / n'a 
nu $ée à V soupe, ei* is geen wut in de soep, fl. es gibt kein Salz in 
derSuppeyM. La tournure existait aussi en lâtin : hœc arbor 
nullos fer et fructus, cet arbre ne portera pas de fruits. 



o. 



Où. Est-ce là où vous demeurez? est-ce là misse qui vos 
d^moréz ? Dites : est-ce là que vous demeurez 1 Làoù forme ici 
un pléonasme dont Littré cite un exemple, mais qui, aujour- 
d'hui, est considéré comme une faute : G*est là oii visent ceux 
qui en font une profession publique, Mass. Injustice. On a vu au 
mot là dans quel cas là oU est correct. 

Cette phrase : est-ce là où vous demeurez ? ne renferme en 
réalité que renonciation d*un jugement : Vous demeurez là ? La 
tournure c*est... que est le seul moyen que le français actuel, si 
timide, si sévère dans sa construction, ait de faire ressortir 
Tadverbe là. Le latin disait Ibine habitas'tyoilk la vraie construc- 
tion logique, c'est-à-dire celle qui est conforme aux idées et au 
rang qu'elles doivent occuper dans la proposition ; on voit que 
la construction logique comme l'entendent certains grammai- 
riens, Ghapsal entre autres, (sujet, verbe, attribut, etc.) est 
souvent fort peu logique. Je ne sais si la vieille langue française 
eût pu imiter la tournure ibine habitas ? Mais ce qui est certain, 
c*est que ce bel idiome, en se constituant sous la plume de 
Malherbe et de Balzac, a perdu de la naïveté et de la franchise 
d'allures qui distinguait la langue d'Amyot et de Montaigne. 

Oublier. Tu oublies ce que tu as été, ti rouvètes çou qu' t'as 
stu, liég., ete robeyes (ou roblies) çu qu^ tas sté, p. du Hainaut, 
fl. gij vergeet wut gij geweest zijt. L'expression consacrée est : 
tu oublies qui tu es, à savoir, tu te méconnais, tu veux, par 
orgueil, l'élever au-dessus de ta condition. 



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— 276 — 

Outil. i)e bonnes outils, dès bonnes ustète. Dites : de bons 
outils. Le français a conservé le genre correspondant au genre 
neutre du latin fictif usitUia. Pour expliquer le genre féminin du 
wallon, il faut se rappeler que le bas-latin avait changé en noms 
féminins singuliers beaucoup de pluriels neutres en a ou ta. 
Brachet cite (i) un texte mérovingien renfermant pecoras, et il 
ajoute que le latin populaire présentait déjà ce genre de fautes, 
même à Rome. Le français a usé largement de cette faculté que 
la basse latinité s'était arrogée : animalia, fr. aumailles, fém. 
bêtes à cornes , wall. âmate , fém. génisse ; cochlearia^ 
cuiller (s) ; maria, mer; mirabilia, merveille ; fra^tuah'a, bataille; 
pecora, pécore; altaria^ wall. âté, fém. 

Outre, l"* On ne voit pas outre, on rivent nin oute. Dites : on 
ne voit pas à travers. Outre est ordinairement préposition : 
outre-mer, outre-Rhin, outre-Meuse, outre-Moerdyk, outre- 
Quiévrain. Employé comme adverbe, il signifie plus loin, plus 
avant, et ne s'emploie qu*avec certains verbes, comme aller ^ 
passer, etc. Ex. Il n*alla pas plus outre, Acad. La nuit qui sur- 
vint l'empêcha de passer outre, id. 

S*" Outre de cela> son mari était soldat, oute di coula, si homme 
esteût sôdârt, Bull. a. 60, p. 79. Dites: outre cela, son mari..., 
ou bien, en outre, son mari... — En outre de cela est une locu- 
tion tout aussi barbare, qui se dit également en France. 



Paf. Quand il m'aperçut, il fut tout paf, qwand i m^aperçuva, 
i fourit tôt paf, liég. il a sté tout paf, mont, he was geheel paf. fl. 
Dites : il fut stupéfait, il fut tout saisi. 

L'interjection p//, paf indique un coup donné: Pif, paf, en 



(*) Grammaire historique, p. '157 et passim. 

("j A l'inverse de o»ri7, le wallon cui, est resté masculin. 



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- 277 — 

veux-tu, en voilà, Litt. — Tous les patois de la Wallonie, de la 
Flandre française (Yermesse, rester paf ou épaf) et même du 
pays flamand emploient le mot pa/" adjectivement ; cette onoma- 
topée, prise ainsi au figuré, donne à la phrase une énergie 
singulière ; malheureusement cela n*est pas français.— A Paris, 
le peuple entend paf dans le sens de pris de vin (Lorédan 
Larchey). Vous avez été joliment paf hier, Balzac, dans Litt. 

Paire. La paire est, selon le Vocabulaire des houilleurs 
liégeois de H. Stanislas Bormans, un terrain entouré de palis- 
sades ou de murs, où l'on remise la houille en attendant qu'elle 
soit vendue. G*est probablement Tancien français pare (mur), 
qui est dans Roquefort, et qui vient du latin paries, même 
signification. Le mot paire se dit aussi du chantier d'un mar- 
chand de bois. Hais dans le sens spécial indiqué plus haut, il 
n'a pas d'équivalent en français. 

Pakusse. Le pakusse, el pakusse (masc.) lill., tournais., 
mont. — La pakusse, li pakhûsse, (fém.) liég. C'est un mot 
flamand : pakhuis, pak, paquet, huis, maison. Tous les patois 
l'emploient, de Verviers à Lille, mais il n'est pas français. Poirtà' 
dès sèch è Vpakhûsse ; tournez : porter des sacs au magasin. 

Panais. Une panais qui monte en graines, inepandxhe qui 
monte. Dites : tin panais. 

Panâxhe a conservé le genre du latin po^/ina^^a, d'où il dérive. 
Je n'ai pu découvrir comment Littré le fait venir de panax, 
acis, masculin, qui signifie panacée, c'est-à-dire plante imagi- 
naire qui guérissait toute espèce de maladie. Si cette dernière 
dérivation était exacte, le genre du français panais s'expli- 
querait. 

Pantomime. Il joue bien la pantomine (n), ijowe bin Ppan- 
iomenne^ patois fl. pantomine. Dites : la pantomime (avec m). 
Cette faute est presque générale. 



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- 278 - 

Pape. Dormir comme un pape, {a bref) dormir comme uh 
paquety doirmi comme on pape, comme on paquet. Gela ne se dit 
pas en français. Les tournures employées sont: dormir comme 
un loir, comme une souche, comme un sabot {comme on 
tournai. Renâcle), comme une marmotte. 

Pftque. Le sacristain a apporté de la pdque, li sacristain a 
st-appoirté dèV pâque. Dites du buis bénit. — Une bordure de 
pâque, ine boirdeure di pâque. Dites : de buis. — A Tournai et à 
Mons, on dit également du pâque, pour du buis bénit. 

On bénit le buis le jour des Rameaux, qui s'appelle aussi 
Pâques fleuries, floréîe Pâque. De là le sens figuré du wallon 
pâque. 

Paraît. Je me fais obéir^paraf^ moi,;ï méfait ïioûtir, parait, 
mi. — Le coquin, c'est vous, paraît, li câlin, c'est vos, parait.-- 
Vous n'en avez cure, eh bien moi, je le veux, paraît, vos nVaviz 
d^keure, éh bin, ji vous, mi, parait. 

Cette particule, qui équivaut pai^fois à de et à savez, se dit 
sans ajouter au sens, et seulement pour attirer l'attention ou 
pour affirmer avec plus de force. Le français emploie en ce sens 
voyez-vous et vois-tu. Seulement parait se met à la fin, ou vers 
la fin de la proposition, tandis que la locution française n'a pas 
de place déterminée. Ex. Vois-tu bien, tu ne me persuaderas 
pas, LiTT. Voyez-bien, madame, le silence m'est mortel, Baron. 
Vous ne partez pas ? — Non, c'est impossible, vois-tu, A. Mus- 
set, André del Sarto. Corrigeons donc les phrases précédentes: 
Voyez- vous, je me fais obéir, moi. Le coquin, voyez-vous, c'est 
vous. Vous ne vous en souciez pas ; eh bien, moi, je veux que 
cela soit, voyez-vous. 

Le wallon dit aussi veus*s ( s pour t' par assimilation ) et vèie 
(pouv vèyeZ'V") Quivoux-s' dire'( qui voux-s' férJ ti vous qu*ti 
n'voux rin, veus-s\ Rem. Se dit à un capricieux qui change con- 
tinuellement d'avis. — Vo tlà, vête, le voilà, voyez-vous. 

ParafTe. Quelle vilaine parafe! quéle laite parafe. Ce mot est 



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- 279 - 

masculin en français. Quel vilain paraphe ! Les deux orthogra- 
phes sont admises parTAcadémie. 

Pareil. !<" Si nous avons volé, on nous a fait pareil, si nos 
avans happé, on nos a fait parère, Bull. a. 67, p. S4. Dites: on a 
agi de même à notre égard. — N. B. On ne dit pas en agir, mais 
on dit en user. — Ils sont habillés tout pareil, i sont moussi toi fi 
parHe. Dites : ils sont habillés de même, ou tout de même. 

V Mon chapeau est pareil du vôtre, mi chapai est parèie del 
vosse. Dites : est pareil au vôtre. — Pareil peut s'employer 
substantivement et alors il prend de; mais il faut prendre garde 
à la tournure : C'est un homme qui n'a pas son pareil ; il a un 
beau cheval de caresse, mais il ne peut trouver son pareil. Acad. 
Je lui ai promis le pareil de celui qu'il avait reçu, Dumas, Kean, 
III, 4. 

Parent. 1* On entend parfois dire : un parent est venu parler 
au professeur, on parint a v'nou jàsér avou Vmatse, pat. tl. eeii 
ouder... un de mes parents, onke di mes parint, pour signifier le 
père ou la mère. C'est un latinisme qui s'est maintenu dans la 
langue anglaise. Dans ce sens le français parents ne s'emploie 
qu'au pluriel. Il faut dire : un père ou une mère...; mon père ou 
ma mère. 

i^ Je suis parent avec lui, ji sos parint avou lu^ ik ben met hem 
verwant, en patois, ik ben familie met hem, fl. ich bin mit ihm ver- 
wandt, ail. Dites ; il est mon parent, il est de mes parents. 

y. Ami et Camarade. Cette construction serait admise avec a/tî^, 
car l'Académie dit s'allier à, et s'allier avec une bonne famille. 

Pardonner. On Ta pardonné en considération de sa jeu- 
nesse, on Va pardonné â respect di s'jônesse. Dites : on lui a 
pardonné. 

On pardonne quelque chose, et on pardonne à quelqu'un 
Toutefois l'usage admet quelquefois le passif être pardo^ 
même avec un nom de personnes. Corinne, s'écria-t-ii 



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^ 280 - 

jetant à ses genoux, je suis pardonné, Staël. Vous êtes tout 
pardonné, se dit à celui qui, par civilité, demande pardon d'une 
liberté qu'il a prise, d'une inconvenance qu'il a commise ; en 
wallon, ci n'est rin éCçoula. V. Ribw, !•. 

Parmi. Ces livres m'ont coûté deux francs un parmi l'autre, 
ces Hvc-Ul m'ont costé deux franc onke parmi Paute. Dites : l'un 
portant l'autre, ou l'un dans l'autre, Acad., au mot Dans. On 
peut encore traduire de diverses autres manières. Ifie annexe 
parmi Faute, igna à pône treus d'mariège à Li^^, année commune» 
il y a à peine trois divorces à Liège, ou, en moyenne, il y a 
annuellement... Lès terre di cisse cinse4à valet ottant Vvège eune 
parmi Faute, les terres de cette ferme valent tant (v. Autant) 
la verge, le fort portant le faible, ou, du fort au iiaible. — 
Ji wangne treus mëie franc ine annêïe parmi Faute, je gagne, bon 
an, mal an, trois mille francs. 

Part. Part à nous deux, part à nos deux, liég. part à nous 
aute deux, mont. Nous est de trop. Part à deux, Litt. On dit 
aussi : J'y retiens part, Acad., Besch., Litt., et j'en retiens part, 
Acad. 

Participe passé. Les trois lettres que j'ai écrit, lès treus 
lette qui fa serit, liég., les femmes que j*ai vu, lès feumme 
quifavèïou, liég., les belles ablettes que j'ai pfis, lès belles 
ablette qui fa pris, liég. ( ou les beaux ables que j'ai pris ) ; les 
dames que j'ai rencontré, lès madame qui fa rescontré, nam. 

Le participe passé, conjugué avec avoir, reste toujours inva- 
riable en wallon ; on connaît la règle française : les trois lettres 
que j'ai écrites, les femmes que j'ai vues, les belles ablettes que 
j*ai prises, les dames que j'ai rencontrées. De même on dira, en 
parlant d'une comète: je Tai vue, et non pas je l'ai vu, ji Va vètou, 
liég.; en parlant de noisettes : je les ai cassées (V. Croquer), et 
non pas je les ai cassé, ji lès a crohi ; on dira : quelle robe avez- 
vous mise ? et non pas mis ? qvéle robe av" mettou ? 



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— 281 - 

M. Ghavée, dans son Parallèle linguistique {Français et Wal- 
lons), trouve que le wallon a manqué de logique en tenant son 
participe invariable. Il part du principe que la langue romane a 
reçu directement du latin ses types de conjugaisons composées: 
Veetigalia parvo pretio redempta habet, il a racheté le tribut à 
bas prix ; De Cmare satis dictum habeo, j*en ai assez dit sur 
César. A ce compte, les cantatrices que j'ai entendues traduit 
cantrices quas haheoauditaSj tandis que lenamurois /es chanteuse 
qui fa oiiu équivaut à cette monstruosité quas habeo auditum. 

Mais cette acception particulière que le verbe avoir a prise 
dans les langues novo-latines est très-rare dans le latin« au lieu 
qu'elle constitue un des éléments essentiels de la conjugaison 
des langues germaniques ; quelle que soit l'étymologie primor- 
diale de notre passé indéfini, une chose ne peut être révoquée 
en doute : « l'usage auxiliaire que haben avait plus souvent dans 
la langue teutonique a prédominé dans la formation de nos 
idiomes modernes. » Villemain, Tableau du moyen-âge, 3« 
leçon. Or, dans les langues germaniques, le participe passé, 
employé avec un auxiliaire, reste toujours invariable ; ne 
serait-ce point là la cause de l'invariabilité des participes 
conjugués avec avoir, dans les rameaux de la langue romane, 
qui, resserrés de toutes parts à l'extrémité septentrionale, entre 
le néerlandais et l'allemand, depuis Arlon jusqu'à Dunkerque, 
ont subi, d'une façon plus immédiate, plus permanente, l'in- 
fluence de rélément germanique ? 

Au reste, cette invariabilité peut se justifier. Procédons par 
voie de comparaison : le français^ après avoir dit, dans le 
principe, fai à aimer, a dit ensuite, faimer-ai, et en est venu 
enfin à la Torme simple f aimerai, Brachet {Nouvelle Gramm. 
franc,, § 270) cite ce texte de Cicéron : habeo ad te scribere, j'ai 
à t'écrire, et ce texte plus caractéristique de Saint-Augustin : 
venire habet, pour il vietidra. De même, les langues germaniques, 
tout en conservant dans ces formes composées ich habe geliebt, 
ich halte geliebt, les éléments complètement séparés, les consi- 



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dërent néanmoins comme des toute indivisibles, quand il s'agit 
d'y accoler des compléments ; et, lorsque je dis diejenige, welche 
ieh gelidft habe, ceux que j'ai aimés, welche est complément, 
non pas de habCy mais de geliebt habe ; précisément comme dans 
le français ceux que faimeraij que est complément, non pas de 
aimer, ce qui pouvait se dire dans la construction j'aimer-aU 
mais de la forme agglutinée aimerai. On fkit donc abstraction 
delà valeur adjective du participe geliebt^ que le participe 
redempta conserve dans le texte latin, vectigalia redempta habet. 

Nous appliquons ce raisonnement à nos patois wallons, et 
nous croyons pouvoir conclure que ce qu'on pourrait de prime- 
abord considérer comme une anomalie monstrueuse, a au 
contraire sa raison d'être, et se justifie par l'analogie des 
idiomes qui, à Tépoque de la formation, ont pesé dans la 
balance. 

Le français lui-même, si fidèle soit-il resté, sous ce rapport, 
à la syntaxe de la langue latine, n'en a pns moins fini par 
adopter, en partie du moins, la règle que nous appliquons cons- 
tamment en wallon. Jusqu'au XVI* siècle, le participe passé, 
employé avec avoir, était considéré comme adjectif et variable, 
le complément direct fût-il même placé devant le participe. 
Jacques Dubois, dans sa grammaire imprimée en 1531, dit : Par 
la même raison que Ton dit : la vertu est admirée, on doit dire: 
nous avons admirée la vertu. Mais en 1562, un autre gram- 
mairien, La Ramée, posa le principe de l'invariabilité du 
participe suivi du complément direct, principe qui commençait 
déjà à être consacré par l'usage, et qui a prévalu depuis, grâce 
à la sanction que l'Académie lui accorda dès la première édition 
de son dictionnaire. 

La doctrine actuelle, qui fait le désespoir des étrangers et de 
nos collégiens, à cause de ses complications infinies, ne laisse 
pas d'avoir ses avantages. Prenons pour exemple cette phrase 
liégeoise : ji Va vHou ponde (je parle d'une femme) ; cette phrase 
a un double sens : j'ai vu la femme qui peignait, et j'ai vu qu'on 



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- 283 - 

peignait la femme ; l'amphibologie disparaît en français ; dans 
le premier cas, je dis je l'ai vue peindre, et dans le second, je 
rai vu peindre. Toutefois la règle wallonne est parfois précieuse 
également. Je dis en parlant d'armes : les avez-vous changées ? 
et la phrase a un double sens : cela signifie ou bien : les armes 
que vous tenez ii la main sont-elles chargées ? ou bien simple- 
ment, avez-vous accompli l'acte exprimé par le verbe charger f 
Le wallon dit, dans le premier cas : lès avéz-v' chergéies ? et 
dans le second : lès avéz-v" chergi ? Dans la première phrase, le 
participe conserve sa valeur adjective, dans la seconde, il fait 
corps avec l'auxiliaire. 

Partir. J'at parti pour Huy, /a parti po Eu, Dites : Je suis 
parti. 

Passement. Lire et fumer sont des passements de temps 
agréables pour les gens casaniers, lire et fourni sont dès passe- 
mint ilimps agrèiâbes po l'ciqui (Pmeùre todis è rcoulèïe di s' feû. 
Dites : sont des passe-temps agréables. — Tous ces passements 
de temps vous font du tort, tos ces passemint dHimps vi fèt dès 
toirt. Dites : toutes ces pertes de temps... 

Passer. 1<^ Il a passé serment, il a passé sermint. Dites : il a 
prêté serment. — fè passereus sèrmint. Tournez : j'en ferais 
serment. 

2r Passer les baguettes, passer lès vège, liég. passer Us rouffe, 
Remaglb, de wissen passeereti^ pat. flam. Dites : passer par les 
baguettes, ou par les verges, Agad. 

3^' Il y a passé trois mille ans, il a passé trois mille ans^ mont. 
Dites : il y a plus de trois mille ans. — Il doit passé trois cents 
francs, i deût passé treus cints franc. Dites : il doit plus de trois 
cents francs. — Passée employé comme préposition, signifie 
après : Passé trois heures, vous ne me trouverez plus chez 
moi. 

4® La nuit avant celle qui est passée, H nulle divant Fcisse 



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— 284 — 

qu'est pasiéiCy fl. de nacht voor de verleden, en patois de gepas- 
seerd. Diles : ravantrdernière nuit. 

S® Papier qui passe, papt qui passe. Dites : qui boit. Plusieurs 
disent à tort papier buvard. Buvard est un substantif qui sert à 
désigner une sorte d'album où toutes les feuilles sont de ce 
papier, et dont on se sert pour faire sécher Tencre d'une écri- 
ture fraîche. 

Patin. Aller à patins, aller à patiriy liég. Dites : aller sur 
des patins, ou en patins, Acad. Ici c'est le français qui est 
conforme au flamand ; la chose est assez rare pour qu*on la 
remarque une fois en passant : op sehaatsen rijdefi. 

Pavée. Allez balayer la pavée, aUéz-s" hover Tpaviie, Diles : 
allez balayer la chaussée, la rue, ou le pavé. 

Pavé se dit en français de la voie publique, en tant que garnie 
de pavés : Ne quittez pas le pavé, Acad. Pavêïe a un sens moins 
précis que pavé ; ces deux termes ne sont pas toujours équiva- 
lents : I juréve à milliard so totrmonde è Ppavéte, Li mâïe neur^ 
I, 2. Il jurait comme un païen après (voir Sur, n^» i) tout le 
monde dans la rue, et non pas sur le pavé. 

Pêche. J*ai acheté une pèche, j'ai acaté enne pèque, expres- 
sion tournaisienne pour, j'ai acheté une ligne. Ce mot est évi- 
demment le même que le français pèche, et le liégeois pèxhe, 
qui ont conservé le sens abstrait, Ex. La pèche à la ligne, li 
pèxhe à riignoiUe, ou d Fvège, 

Peine. 1» Avoir de la peine de marcher, avu de Vpône de 
rotér. Dites : Avoir de la peine à marcher Ce gallicisme sert à 
traduire un autre wallonisme : avu mâldhéie de roter. V. à 
Tart. Facile. On supprime parfois l'article : J'ai peine à voir 
clair dans tout ceci, Acad. 

^ Cela ne vaut pas les peines d'en parler, ou ce n'est pas les 
peines d'en parler, çoulà rivât nin lès pône de *nnè parler. Dites : 
cela ne vaut pas la peine, ou ce n'est pas la peine d'en parler. 



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— Employé absolument (çoulà n'véU nin lès pêne, liég., e'n'est nié 
lés peines, mont.), ce wallonisme se rendra en très-bon style 
par : il n'y a pas de quoi. V. Quoi. 

3* A peine est-ce que yen peux croire mes yem^^àpeine est-ce 
que fpus coire mes iSj Avent. deJ.de NiveUeSy p. 14. Dites : A 
peine puis-je en croire mes yeux. 

Peindre. Peindre un mur jaune, ponde on meur jenne, een 
muur geel schUdereny fil. eine Mauer gelb bemaleny ail. Dites : 
peindre un mur en jaune, ou le peindre de jaune, Agad. 

Pelneuz. Il s*en retourna ioni peineux, enri è râla tôt pèneux. 
Dites : tout penaud. Peineux ne peut s'employer dans le sens 
de embarrassé, honteux, interdit. Mais H pèneusse samainne 
pourrait se rendre par la semaine peineuse (la semaine sainte, 
la semaine de la passion), que Litlré cite cependant comme 
tombé en désuétude. 

Pelle et Palette. Frire des œufs dans la pèle, fricassér dès 
où è l'péle. Dites : Frire (et non pas fiicasser) des œufs dans la 
poêle (pr. poale). Dans le Hainaut on iii patelle, 

P^2/^ est français, mais correspond aux expressions wallonnes : 
palette baisse, pelle à feu, et truvelle ou houppe. Ne dites donc 
pas : enlevez les cendres avec la palette, westéz lès cinde avou 
VpaUtte ; charger une charrette à Taide d*une truelle. Dites : 
avec la pelle, à l'aide d'une pelle. Les mots français palette et 
truelle ont une autre signification ; une palette de peintre, une 
truelle de maçon. 

Perdu. V. Gagner. 

Perle. Des perles fins y dès fins pièl. Dites : Des perles 
fines. 

Péter. 1» On entendit péter la larme de verre, on-z-ota pètér 
Vbalotte (larme de verre creuse fulminante). — Le laurier et le 
se\ pètent dans le feu, li latori et Vsé pètèt è feu. 



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Péter se dit figurément en français de certaines choses qoi 
font un bruit subit et éclatant. Le bois de cbéne pète dans le 
feu ; le laurier et le sel, jetés dans le feu, pètent ; cette botte 
(wall. chambe), ce pistolet pètent bien ; cette bouteille de vin 
mousseux a bien peté, Acad. 

^'^ La chaudière péta^ li chôdire pèta. Dites : éclata, se brisa. 
Icipâ^ est encore employé figurément, mais dans le sens de 
se fendre^ se fêler ^ crever. Je doute fort qu'il puisse prendre en 
français cette signification ailleurs que dans les locutions : son 
fusil, son pistolet lui a peté dans la main, Acad. Dans tous les 
cas, on fera bien d'éviter ce mot, qui n'est rien moins qu'éié- 
gant. 

3^ Mais les tournures : le poêlon de terre est pété, un carreau 
pétéy li pêlette di terre qu'est pètéte^ on quârai pèté, sont pure- 
ment wallonnes. Dites : le poêlon est fendu, le carreau de vitre 
est fêlé, ou étoile (suivant le cas). 

4> Péter des pommes de terre, des marrons, pètér dès crom" 
pircy dès marroUy liég. péter des canada, Nam. pètér dés marrons, 
mont. — Des pommes de terre pétées j dès pètêïès ci^ompire, liég. 
Dites, suivant le cas : griller, cuire des pommes de teiTC 
sur le gril (et non pas la grille), sous la cendre, au four ; des 
pommes de terre grillées ; rôtir des marrons. 

S° Faire péter la gueule à (\\xB\(\\x'\iXï,férpètérVgueii%eh'n'saU. 
Expression aussi plate et aussi vulgaire que le français : donner 
sur la gueule à quelqu'un, paumer la gueule à quelqu'un. Il 
faut dire : Donner un coup de poing sur le visage, ou donner un 
soufilet. 

Peu. l** Un tout peu, on tôt pd, ou on tôt pôke. Dites : un 
peu, quelque peu ; au superlatif, très-peu, tant soit peu (adv.) un 
tant soit peu (subst.) : attendez tant soit peu ; donnez-m'en un 
tant soit peu (Besch., Littré). 

Plusieurs grammairiens condamnent les tournures : un petit 
peu, un tout petit peu. Génin soutient que un petit peu est par- 



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— 287 - 

faitement flrançais, et il semble en effet que cette façon de parler 
ne présente rien de choquant. 

y Hennequin blftme remploi de un peu accolé à l'impératif et 
servant à l'adoucir, c'est-à-dire dans le sens où les Flamands se 
servent abusivement de une fois, ou de seulement : regarde une 
fois, t^k een keer, een maal, louk on pô, videz seulement votre 
verre, drink maar uw glas uity boutez on pô (ou ine goite) vosse 
verre fou. On ne pourrait donc pas dire : regardez un peu, videz 
un peu votre verre. — C'est du purisme. L'Académie et Littré 
disent expressément que un peu s'emploie explétivement. 
Ex. Voyons un peu comment vous vous y prenez, Acad. Donnez- 
moi un peu le pot de chambre (4), dit la Rancune, Scarr. Rom. 
eom. Nous traduirons donc sans scrupule les phrases sui- 
vantes : mneZ'S un p6 dal, qui ji v* divise, venez ici un peu, que 
je vous parle, Agad., dikéz-m' on p6, dites-moi un peu, id. On 
remarquera la place de un peu dans la première phrase. 

P6ut*6tre. Cela pourrait peut-être bien se faire, coula por- 
reût mutoit bin s'téi\ Dites : cela pourrait bien se faire, ou cela 
se fera peut-être. 

Le rapprochement de pouvoir et de peut-être forme le plus 
souvent en français une battologie ridicule ; les patois, moins 
délicats, n'y regardent pas de si près ; d'ailleurs mutoit (de 
moulty pat. de Virton, lat. multum, et tott, vieux wallon pour 
tôt), ne renferme pas le verbe pouvoir. 

Pièce, i*" Frotter le pommeau de cuivre avec une pièce, 
frotter Vpoumai d^keuve avou n'pêce. Dites : avec un morceau de 
drap. — Pièce a bien le sens de morceau ; mais pièce de drap 
a en français un sens particulier : cette pièce de drap a tant 
d'aunes. 

(') Le wallon pot d'chambe doit se traduire aciuellemcDl par vase de nuit ; nous 
omettons les périphrases ; en voici toutefois une qui a dû bien s'étonner de 
sortir de la plume d'un des chefs de Técole réaliste : Au bas étaient des souliers, 
plus un meuble que Thonnète M. Lanceloi a défini dans ses Racine» grecques ; 
Ghampflbdbt, Chien Caillou, dans les Contes choisis. 



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i"* Il a eu cette maison pour une pièce de pain, il ast-aou 
dsse mohonne-là po tCpèce di pan. Cette locution française se 
rencontre dans quelques auteurs. Mais on dit beaucoup mieux : 
pour un morceau de pain, c'est-à-dire à très-bon marché. 

df" Je gagne trois pièces par semaine, ;t wâgne treûs pèee U 
samainne. Dites : trois pièces de cinq francs, ou, comme on dit 
en France, trois pièces de cent sous. 

4'' Une belle pièce d'homme, ine belle pèce Shomnie ; une belle 
pièce de femme (Remacle), ine belle pèce di feummey ail. ein 
schoenes Wdbsstueck. Dites : un beau brin d'homme, un beau 
brin de femme, Acad. — Le mot pQce s'emploie familièrement 
pour personne, mais dans un sens défavorable. Une bonne pièce, 
une fine pièce, une méchante pièce, signifient, dit l'Académie, 
une personne rusée, dissimulée, malicieuse. Taisez-vous, bonne 
pièce, vous faites la sournoise, mais je vous connais, Mol. 

Pile. 1° Prendre des piles, prinde dès pile, liég. dès pèle, 
verviét. pilUn nemen, fi. Dites : des pilules. Le wallon pHe est 
le latin pila, balle à jouer. Le ihmçais pilule vient du diminutir 
pilula. 

2* Ils attraperont une pile, tournais. Leray, Jésus passant par 
Tournai, il attraperont 'ripUe, liég. Dites : ils recevront une 
volée de coups. — Pile désigne proprement une grosse pierre 
qui sert à broyer, à écraser. Chacun saisit la métaphore. 

Pilot. Battre pitol, batte pHot, p. de Verv., batte pilote, p. de 
Liège. Dites : enfoncer des pilotis, Acad., ou simplement 
piloter, wall. piloter, — Si mohonne est batêïeso pilote, tournez, 
dit Forir, sur pilotis, et non pas sixvpilots. Le mot pilot est le 
diminutif de pUé, latin piZa, colonne, ce qui justifie parfaitement 
le genre du liégeois pilote. Les patois du Hainaut et de la 
Flandre française donnent simplement k pilot le sens de pieu; il 
n'a pas été admis par TAcadémie, mais Bescherelle et Littré lui 
donnent le sens qu'a le mot pilotis dans enfoncer des pilotis. De 
plus Legoarant et Littré appellent pilotis l'ensemble des pilots ; 



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ce serait un eoUectif analogue à ramassis, fouillis, etc. Ce n'est 
donc qu'abusivement qu'on donne à pilotis le nom de pilot. — 
Ex. Un pilotis bien fait, peu solide, Litt. Un pilotis dans la 
composition duquel il fut employé 1,156,6S7 pilots de dix, douze 
et quatorze pieds de longueur, Ratmond, dans Litt. 

Piquante, plquanterie. Il m'impatiente par ses piquante- 
teries^ i m* fait assoti avou ses piquaneréie. Dites : il m'impatiente 
par ses picoteries. — Ils se sont dit des piquantes, i s'ont dit dis 
piquante, Remacle, i s*ont iné dèspiquâte, For. Dites: ils se sont 
dit des mots piquants, des paroles piquantes, ils se sont lancé 
des traits piquants. 

Pique, l*" Il a une pique contre lui, il a n'pique conte di lu, 
liég.; il a n'pique conte dé li, mont, hij heeft eenpik op hem, fl. 
Dites : il a une dent contre lui. — Dans les patois du pays de 
Liège et de la Flandre française ( Vermesse ), pique s'emploie 
dans le sens de rancune. Il signifie en français brouillerie, ai- 
greur entre deux personnes. Ex. Les piques des amants renou- 
vellent l'amour, Baron. Encores y avait une autre pique entre 
le duc et le connestable, Gomm. dans Litt. 

2* Ils se donnaient des piques, i s'dintt dis pique (on syoute par 
plaisanterie it dès make). Dites: ils se disaient des mots piquants, 
de piquantes paroles. Ex. Mon père leur a dit de piquantes 
paroles, Dufresnt. 

3® Gela est salé comme une pique^ coula est salé comme ine 
pique. Dites: cela est salé comme mer, àcad. 

4' Les Liégeois de la vieille roche donnent encore à ce mot 
wallon le sens de carreau : li has$* di pique, l'as de carreau. 
Mais actuellement on le remplace presque toujours par carreau: 
li hass' di carreau; i toûne de carreau, il tourne du carreau, il 
tourne de carreau, plus souvent il tourne carreau. Y. Tourner. 
Le français pique se traduit en wallon par pâle ( propr. bêche ; 
comp. le fl. schoppen, de schop, bêche). Ex. Ji n'a nolle pâle, je 
n'ai pas de pique. 



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- i90 - 

Pire. Gomment va le malade? — C'est toujours pire, ùm- 
ment va tmalade? — Cest todès pire, pat. besbignon. Dites : 
c*est toujours pis. — Le patois de Namur emploie aussi pire 
comme adverbe. Vo$ sintiz monais haïr, c*eêt co pire aujaunthu 
Aurmon. di Nam., a. 70, p. 28. On ferait un wallonisme en 
traduisant: c'est encore pire aujourd'hui, liites : c'est encore 
pis. 

Voici une excellente recette pour distinguer Tadjectif pire de 
radverbe;>f5 : t servez-vous de pire, lorsque, en renversant le 
sens de la phrase, vous diriez meilleur, eipis, si c*est mieux que 
vous emploieriez. » M. Carpeniier. Elle est d'autant plus néces- 
saire à beaucoup de Liégeois que leur patois n'a qu'un seul mot 
pour rendre pii*e et pis ; c'est pés. Vos ttidiliéz tos lès joû qui 
j serti mi traili, etfveûs quYest todis pés, vous me dites chaque 
jour que je serai mieux traité, et je vois que c'est toujours pis, 
et non pas pire (comme a traduit Remacle).Ici l'opposition entre 
miVux et ;)!« est marquée dans la phrase même.— Lir'm^(/e estpés 
qm Vmà, le remède est pue que le mal, et non pas pis', l'inverse 
est meilleur. Mi belle-mère est mdlesor mi, tant pés vât; elle drei 
Vpôime di sWimetie, ma belle-mère est fâchée contre moi ; tant 
pis ; elle aura la peine de se dérâcher ; l'inverse est tant mieux. 

— Ex. Il se portait mieux, mais aujourd'hui il est pis que 
jamais. Ils sont pis que jamais ensemble, Acad. Cest en vain 
que j'ai cherché à corriger cet enfant-là ; il est pire que jamais. 

- Cetie distinction entre pire et pis n'était pas si bien établie au 
XY1I« siècle, que M»'' de Sévigné n'ait pu dire : Je ne suis pas 
pire que j'étais, c'est-à-dire, je ne suis pas en moins bon état 
de santé. Présentement il faudrait dire : je ne suis pas pis. 

Cependant pis, venant du latin pejus, neutre de pejor, peut 
quelquefois s'employer comme adjectif, mais en certains cas 
particuliers. Ex. Qui pis est il pleuvait dune telle manière.... 
Régnier. Que ni'oflVirait de pi» la fortune ennemie? Corn. Celte 
aversion sourde pour les lumières, triste preuve de roédiociité, 
ou quelque chose de pis, d'Albmb. -* Dans ce cas, pis ne se 



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fM 



joint jamais à un substantit. Il n'est frire eau... et non pas il n*eàt 
pis eau... On dit aussi le p», pour, ce qu'il y a de plus mauvais, 
de pire. Le pis qui puisse arriver, Acad. 

2^ C'est le plus pire, c'est l'pus pire, tournais. Dites : c'est le 
pire, ou, qui pis est, c'est-à-dire, c'est ce qu'il y a de plus désa- 
gréable, de plus fSicbeux. — C'est encore plus pire, tfesi co pus 
pire, Armon. de Mons, a. 58. Dites : c'est encore pis. 

Pissenlit. Il y a tout plein de pissenlits dans cette prairie, 
gna lot plein dès pihàte^-^él è eisse waide-là. Dites : tout plein 
de renoncules. — Le patois de Liège donne ce nom à la renon- 
cule simple, ou renoncule des prés. Le français pissenlit, fil. pis- 
stbedy désigne la plante connue en wallon sous le nom de 
sânage sécoréie, et appartenant à la famille des chicoracées 
(laitues, endives, cbicorées). Ex. Le pissenlit est une chicoracée, 
Acad. On le nomme aussi dent-de-lion, Acad. 

Place. Un appartement de quatre places, on quârti d'quate 
pièce. Dites: unappartement de quatre pièces. — Le moi place, 
du latin platea, place publique, se dit d'un espace découvert et 
ne peut jamais désigner une chambre. Cette faute est très-fré- 
quente en Belgique. Peut-être l'influence teutonique n'est-elle 
pas étrangère à cet idiotisme. Du moins peut-on constater que 
l'anglais roomy salle, salou, n'est qu'une transformation de l'alle- 
mand Raum, place. — D'aucuns donnent à ce mot place, le sens 
de salon. Faites entrer tout ce monde dans la place, fiz intrér 
tôt &monde4à è Fplèce. Dites: dans le salon, la grande salle, la 
grande pièce. — A la campagne, on se sert en ce sens particu- 
lier de la tournure è rmohonne, à la maison. V. Hogk, Bull. a. 68, 
p. 27. Maison a aussi ce sens dans les villages des environs de 
Mons (Sigart). 

f^ Il joue en place, ou à 2a place d'étudier, i jowe è Vplèce di 
studi , liég., fl. hij speelt indeplaats van te studeeren. Dites : au 
lieu d'étudier, il joue. — On les empoisonne à la place de les 



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saisir, on ts èpoUanne i tplèce di lis apaugni [lis ekm]^ namar. 
Dites : au lieu de les saisir. 

Quand au lieu de marque opposition^ différence» il ne peut 
se remplacer par à la place de. Prenons deux exeaiples : Les 
grands noms abaissent au lieu d'élever ceux qui ne les savent 
pas soutenir, La Rochef. J'ai trouvé dans cette cour L'intrigue 
au lieu de l'art de plaire, L'intérêt au lieu du désir, La débauche 
au lieu du plaisir, Le scandale au lieu du mystère, Desmahis. 
Ici il y a opposition, différence : on ne pourrait substituer à la 
place de à au lieu de. Mais dans l'exemple suivant : La Garde 
veut toujours que, si Mousieur de Grignan ne vient pas, vous 
veniez à sa place, Sév. Au lieu de ne marque pas opposition, 
différence : on pourrait rejaplacer à sa place par au lieu de lui. 

Plaire. 1"^ Si vous platt, sH v'platt. C'est une fausse traduc- 
tion. 6*i équivaut il si il. Dites : S'il vous plaît. 

2» S'il vous platlî monsieur. 5'î v' plail ? monsieu. Cette façon 
de parler s'emploie en wallon, aussi bien que platt-st-i? et 
di quoi î pour (aire répéter ce qu'on n'a pas bien entendu. 
Le i'raiiçais s'il vous plaît ? ne peut avoir ce sens-là ; on dit 
plattil î et cette tournure éiant familière, il faudra, en ceitains 
cas, la remplacer par d'autres, indiquées à l'article Quoi^ u^ 3. 

3« Cnacuu fait ce qui lui platt, chasconque fait çou qu" U platt. 
Dites : ce qu'il lui plaît, c'est-à-dire ce qu'il lui plaît de faire, 
ce qu'il veut. Mais si un marchand dit en parlant d'une pratique: 
qu*i chusixhe çou qu'il platl^ je pourrai traduire : qu'il choisisse 
ce qui lui plait, c'est-à-dire les objets qui lui plaisent.— 
Cette disiinciion n'éiait pas admise autrefois. — La phrase 
suivante est donc mal traduite: si fis fait çou qui li plait ^ son 
fils fait ce qui lui plaît (Forir). il fallait : ce qu'il lui plait. 

Plant. Laisser enp/an/, leiér in blan, mont. Cette tournure 
populaiie figure dans le Dictionnaire de Litiré; elle a la même 
origine que planter là, qui est admis par l'Académie comme 
locution familière. Si vous ne voulez pas faire ce que je vous 



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- J9S — 

dis, je vous planterai là (et non pas je vous hiêserai en plant)^ 
et ne me mêlerai plus de vos affaires, Acao. 

Plaquer. Ce papier est plaqué sur du carton, d papi-là est 
plaqui so de cârion, fl. dit papier is op karton geplakt. Plaquer 
un emplâtre sur le tibia d*un blessé, ji/a^ui rièplàct so rmuatai 
d^on bltm. La poix plaque très-fort sur le drap, li hàrpique 
plaque vilainnemint so tdrap. — Mes doigts pla^ufitl, mes deugt 
piaquit.-' Plaquerne peut s'employer dans le sens de coller 
(fl. plakken), adhérer fortement, ou être gluant. Ce papier est 
collé sur du carton, coller un emplâtre sur le tibia d'un blessé, 
la poix adhère très- fortement au drap, mes doigts sont gluants. 
— Dans plaqut on meur^ fl. eenen muur plakken^ ou beplakketi 
(crépir, hourder un mur) plaqut peut se traduire par plaquer^ 
mais la construction difiëre : plaquer du mortier pour crépir 
ou bourder un mur. 

Platine. Elle a une bonne platine, c'est une bonne platine, 
c'est ine fameuse plaîenne. — Platine est un terme d'argot» 
que le peuple emploie partout oti Ton parle françiis. On dit 
en français : c'est un traquet de moulin (on comparera le wallon 
quéle clapette l), ou c'est un moulin à paroles. 

Plein. 1« Avoir de l'argent pleines ses poches, avou dès 
aidant plaintes ses poche^ For. Dites : avoir de l'argent pleines 
ses poches, AcAD., ou bien, avoir plein ses poches d'argent, 
id. Dans ce dernier exemple, plein ses poches équivaut à un 
adverbe de quantité, et l'on supprime l'article en vertu de 
la règle indiquée au mot Adverbe. —Plein, séparé de son 
substantif par un possessif, devient préposition, et partant 
doit rester invariable. 

2^ Il est plein, mont. Dites : il est ivre : ou bien ajoutez un 
déterminatif : il est plein de vin, de genièvre, etc.; en pat. de 
Liège, il est plein d'pequèL L'Académie donne la locution popu- 
laire il est plein comme synonyme de, il est repu abondamment, 
il est rassasié. 



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-- »4 - 

Pins. !• Ji rilm pu$ veiau: Cette phrase a deux sens soivaot 
le contexte : Je ne l'ai plus vu, et Je ne l'ai pas encore to. 
On ferait un wallonisme en traduisant littéralement dans le 
second cas. La locution ne... plus ne doit pas s'employer dans 
le sens de ne... pas encore. — Mais plus^ sans négation, peut 
s'employer dans le sens de encore : si j'y retombe plus, je veux 
bien qu'on m'affronte. Mol. dans Litt. 

2^" Plus riche est-on, plus est-ce qu*on doit être charitable, 
pus riche est-on, pus est-ce qu'on deut esse charitâve. Dites : plus 
riche est-on, plus doit-on être charitable, ou plus on est riche, 
plus on doit être charitable. 

S"" Plus 9u*il est trompé, plus qu'il se donne du galon, pusse 
qu'il est gouré, pusse quH s^baîe du galon, pat. fl. hoe meer dot 
hij bedrogen is, hœ meer dat,.. Dans cette tournure montoise, le 
que est redondant. Le sens est : plus il se fait duper, plus il 
vante son adresse et sa pénétration. 

Plus-que-parfolt. Tai entendu dire que vous aviez fait 
un voyage, j'a-t-oiou dire qui v's aviz fait on voyège. On consi- 
dère l'action de faire un voyage comme simplement passée, 
abstraction faite de tout rapport avec l'idée exprimée par le 
premier verbe ; il faut employer le passé indéfini et non pas 
le plus-que-parfait : j'ai entendu dire que vous avez fait un 
voyage. 

Pluviner. Il pluvincy i pluvine, mont., t plovinéte, liég. 
Dites : il bruine ; liég. t brouhenne. 

Pointe. J*ai une pointe de côté, fa "n'pointe di costé. 11 faut: 
un point, Forir traduit : J'ai un point de côté, et j'ai un point 
au côié. D'après Liltré, au côté est incorrect. La tournure se 
trouve pourtant dans le Dictionnaire de l'Académie, et Littré 
donne lui-même les locutions avoir un point au dos, à 
l'épaule. 

Poques, poquettes. Il a eu les poques, ou les poquettes. il 



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a-st-offu lès poque, ou lèspoquetlcMég., il a iu lés poquettes, 
mont. Dites : il a eu la petite vérole, ou la vpriole. — Il a eu 
les poques volantes, il a -sl-aou lès poque volantes, liég. dé 
vliegende pokken, fl. On dit : il a eu la petite vérole volante, la 
fausse variole, la variole bâtarde, ou la varicelle. Quant à 
variolide, que donne un recueil d'Omnibus, il n*est pas dans 
les dictionnaires. 

Poques est un mot germanique, ail. Poche, Ù. pok, angl. 
poch, pustule. 

Possessif. Mon doigt m*élance, mi deugt mHancéie] mon nez 
coule, mi narenne court; ils ont mal à leurs pieds, ils ont md 
lêus pîd ; marcher sur la pointe de ses pieds, rotér so lès bèchette 
di ses pîd ; ma tète bourdonne, mi liesse houle ; il restait là son 
poing appuyé sur sa hanche, i d^moréve là, si pogne aspoi so 
s* hanche ; il a son bras en écharpe, t poite si brèsse; as-tu mal à 
tes dents ? as-s* ma tes dint ? fl. hebt gij zeer aan uwe tanden ? — 
Le sens indique clairement quel est l'objet possesseur; le génie 
de la langue française exige qu'on remplace le possessif par 
Tarticle. Le doigt m*élance, le nez me coule, ils ont mal aux 
pieds, marcher sur la pointe des pieds, la tète me fend (fendre 
est ici le terme consacré en français), il restait là le poing 
appuyé sur la hanche, il a le bras en écharpe, as-tu mal aux 
dents?— Toutefois la règle n'est pas absolue. Les meilleurs 
écrivains font parfois usage du possessif lors même que le sens 
indique clairement quel est l'objet possesseur. Baissez vos 
yeux vers la terre, chétifs vers que vous êtes, et regardez les 
bêtes dont vous êtes le compagnon, Pascal. Le commandant 
phénicien, arrêtant ses yeux sur Télémaque, croyait se souvenir 
de l'avoir vu, Fén. Il semble que la présence du possessif donne 
ici plus d'énergie à la pensée, ajoutons que l'emploi du pos- 
sessif est de rigueur chaque fois qu'on veut exprimer quelque 
chose d'habituel et de périodique. Ainsi mi rhômatisse mi fail 
souffri moirt et passion se rendra littéralement si Ton veut parler 



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- i96 - 

d*un mal auquel ou est sujet : mon rhumatisme me fait souffirir 
mort et passion. 

Possible. Il viendra ce matin possible^ pour il viendra ce 
matin peut-être. Cette tournure est en usage dans le Berry, la 
Bourgogne et le Tournaisis. Cet emploi adverbial de possible a 
vieilli, mais il mériterait d*étre rajeuni (Litt.). Ex. Pour aller au- 
devant d'un mal qui n'arrivera possible jamais^ Guèz de Balzac. 
Notre mort ne tardera possible guère, La Font. 

Poste. 1" Une feuille de papier de poste^ ine foie di papi 
(Tposse, il. een blad postpapier. Dites : une feuille de papier à 
lettres, Acad., — à lettre, Litt. — Toutefois, dit H. Carpenlier, 
la première locution parait consacrée par Tusage. 

V Poste est souvent synonyme de emploi, fonction. Etre dans 
un poste, un joli poste* Acad., Besch. Etre dans un poste désa- 
gréable, Acad. Mais il ne peut, selon MH. Hennequin et Car- 
pentier, se dire d'un domestique ; il at on bon posse. Tournez 
il est dans une bonne condition, Acad. 

Postposer. Le mauvais temps fil postposer la vente, H mâva 
timps fat postpôzer rvindicion. Dites : fit remettre la vente à un 
autre jour, fit surseoira la vente, fit différer la vente. 

Postposer est un terme suranné qui n'a jamais eu le sens 
qu'on lui donne à Liège; il signifiait mettre après (le contraire 
de préférer). Ex. M»« du Maine... ne connaissait que la passion 
présente et y postposant tout. St. Simon. 

Posture. Pour son métier, il fait des postures, po s'mesti, î 
fait dès poîteûre, fi. t;oor zijn ambacht maakt hij posturen, 
Dites : c'est un statuaire de profession. — La belle petite pos- 
ture! quéle belle pitite po^^^re/ Dites : la belle statuette! ou 
quelle belle statuette ! -Vous connaissez-vous bien en postures? 
Vis k'nohéz-v' bin à posteûre? Dites : en statues. On dit aussi 
se connaître à, mais seulement avec un mot vague : se connaître 



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~ 297 — 

à quelque chose, Acad. ; je m'y connais, id.; vous connaissez- 
Yous à cela, id. 

Posteûre a aussi le sens abstrait du latin positura, position, 
mais il s'emploie dans un sens restreint, en parlant de la posi- 
tion du corps : Quéle laide posteûfe qui tifais! Le latin donnait 
souvent aux noms abstraits un sens concret; natio, regio^ legio, 
venatio, misturaj ont d*abord signifié Faction de nalire, de régir, 
de lever (des troupes)^ de chasser, de mélanger. Quoi d*éionnant 
si Tun des rameaux de la langue d*oil, fille du latin, a conservé 
cette tendance? 

Pot aux fleurs, pot au beurre, pot dx fleur ^ pot â bourre. Il 
feut supprimer Tarlicle : pot à fleurs, pot à beurre. Mais on dit, 
avec l'article, pot à l'eau, pot au lait, pot au noir, pot d Vaiwe, 
pot â lèçai, pot â neûr. 

Poteau. Patauger dans les poteaux, flachUér d'vint lès potai. 
Dites : dans les flaques d'eau. — Quels poteaux! bon Dieu! 
quelle Meuse! qués potai! binamé bon Diul q\éMousel Dites: 
quelles flaques d'eau ! bon Dieu ! c'est un vrai lac. — Ce trope 
liégeois que Mouse ! est très-pittoresque, mais il est intradui- 
sible en français. 

Le français poteau^ entre autres significations, a celle du 
wallon postai^ diminutif du latin postii, jambagede porte. Ex. on 
postai qui hosse^ un montant, un poteau qui branle. 

Potée. Mettre les potées dans une serre, mette lès potéte 
divint 'risêrre. Dites : mettre les pots de fleurs dans une serre, 
ou mieux, rentrer, enserrer les pots de fleurs. Forir traduit ce 
mot par potée, bien qu'au mot potête il prévienne contre ce 
barbarisme. Le français potée signifie pim un pot : inepoté'ie di 
mâsisté, une potée d'ordures. 

Pour. 1** Il est tombé de l'arbre et s'est cassé le bras, c'est 
pour lui, il l'a bien mérité, il a tourné jus dTdbe, et s'a cassé 
rbtessey c'est por lu, i Va bin mérité, tl,"tis voor hem. Dites : 



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— zvo — 

c'est tant pis pour lui, ou c'est pour son compte, il Ta bien 
mérité, c'est bien fait, c'est pain bénit. V. Employé. 

2^ Qui est-ce celuîrlà pour un ? qui est-ce ei-là po anke. Dites : 
quel est cet homme? — Qu* est-ce que c^est pour une fleur ? 
qu'est-ce qui c'est po n'tleur ? Dites: quelle est cette fleur ? Le 
flamand dit wat is dat voor een man, et l'allemand, was ist da$ 
flûr ein Manni cette tournure germanique, qui a passé dans le 
wallon, est inadmissible en français. 

Z"* On se fâcherait pour moins, on s*mâvulreut po mons^ fl. 
men zou voor minder kwaad worden. Dites : à moins. 

4° Pour oh ? po wisse ? C'est une locution dont on use pour 
s'enquérir de la destination d'un voyageur. La tournure pour 
quel endroit est plus élégante. - Pour où est-cet po wisse est-ce J 
serait mauvais. 

5« Le dites-vous pour de bon ? est-ce pour le bon ? el dihéz-v 
po {bon f est-ce po Vbon ? fl. zegt gij dat voor goed ? Dites : le 
dites-vous tout de bon ? ou sérieusement ? est-ce tout de bon ? 
On peut dire aussi pour tout de bon ; cette tournure n'est pas 
dans les dictionnaires, mais les auteurs français en usent. QuH 
fouxhe po tôt d'Ion man'ci d'piède H vèie^ i n'poléve si rézaude à 
Vcreûrc, Ann. 71, p. 87. Qu'il fût pour tout de bon menacé de 
perdre la tête, il ne pouvait se résoudre à le croire. — Ex. II 
faisait semblant de rire, mais nos volontaires riaient pour tout 
de bon, Assolant, dans Staafi", III, p» 58. Mais, voyez-vous, il 
faut qu'il parte aujourd*hui, et pour tout de bon, G. Sand, les 
MississipienSy Prol. VI. — A en croire Litti*é, le peuple, en 
France, dit aussi pour de bon, mais tout de bon, est seul consa- 
cré par le bon usage. Ex. Se quereller tout de bon, Litt., pleu- 
rer tout de bon, id. ; elle dit en montant sur Téchafaud : C'est 
donc tout de bon, Sév. Parlez-vous tout de bon? Mol. 

6« / n'est nin si biesse qui po s'ièi bouter Vdeugt è l'oûie. La 
traduction de Remacle renferme un wallonisme : il n'est pas si 
bête que pour se laisser tromper. Pour doit être remplacé par 
de: il n'est pas si béteque de se laisser..; on peut aussi suppri- 



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4AÛ 

«99 



mer que; il n*e6t pas si béte de se laisser... Eofin on pourrait 
prendre un autre tour : il D*est pas assee béte pour se laisser... 
Dans ce dernier cas la présence de que constituerait un wallo- 
nisme (assez béte que pour... atséz blesse qui po sHèi... ), du 
moins lorsque le verbe qui suit assez est à Finfinitif. — L'Aca* 
demie ne mentionne pas remploi de si avec 9tteetrinflnitif,dans 
le sens de au point de. Littré en fournit quantité d'exemples : 
1"* avec le que. Je ne croyais pas que ma fille f&t si habile que de 
chanter ainsi à livre ouvert, Mol.; 2^ sans le que. Qui te rend si 
hardi de troubler mon breuvage ? La Font. 

7* Il porte le deuil pour son père, i poite li doû po s'pére^ liég. 
i par el déuîepou s'pérey pat. de Flobecq. fl. Ai; draagt den rouw 
voor xijnen vader. Dites : il porte le deuil de son père, 

ACAD. 

8^ Je parierais pour dix plaquettes (Acad.) qu'il y a mille et mille 
personnes qui l'entendent ainsi, ji wag'reûs po di plaquette quH 
gna co mète et mèîe qu*el prindet ainsi^ Copenne so VfUsse de 
Pioiéy p. 43 ; fl. ïk zou voor tien plaket wedden,.. Dites : je parie- 
rais dix plaquettes... £;>an> pou dix franc, mont. Tournez: je 
parie dix francs. Le français parier pour a un autre sens : Pour 
qui pariez-vous ? 

9"» Il est fort pour les églises, il est foirt po Vz èglize, pat. de 
la Flandre, hij is stijfvoor de kerh. Dites : il aime à fréquenter 
les églises, ou il est dévot. — Je ne suis pas pour le poisson, 
ji n'sos nin po Vpèhon. Ici pour marque une idée de préférence; 
M. Garpentier condamne cette phrase, mais il me semble que 
c'est trop de rigueur. En effet nous lisons dans Littré : a Pour 
se dit des choses qu'on préfère. Ex. Je vous avoue que je suis 
furieusement pour les portraits, Vloi.Préc. 10. Ceux qui étaient 
près de la mer étaient pour un gouvernement mêlé des deux 
[démocratie et aristocratie], Montesq. Esp. XVIII,!. » — La 
tournure en question paraît donc irréprochable. 

lO"" Se tenir les côtés i>^r rire, Forir, ^t fni lès eosté po rire. 
On dit : se tenir les côtés (ou les côtes) de rire. 



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~ 300 - 

il"* Je n'oserai jamais entreprendre cela, c'est bon pour vous, 
liég., c'est bon par vos^ û. 't is goed voor u. Dites : c'est bon à 
vous, AcAD., c'est-à-dire, c'est à vous qu'il appartient, qu'il 
convient d'entreprendre cela, c'est à faire à vous d'entre- 
prendre cela(LiTT. à Faire^ OS"").— Ex. C'est bon à vous d'agir et 
de parler ainsi, Litt. Quand il n'y a pas d'infinitif sujet réel, 
exprimé ou sous-entendu, la tournure est française. Ex. Gela 
est bon pour les petites gens, Acad. 

Pousser. On rend ordinairement le wallonisme : Us âbe 
jètèt par les arbres poussent. On peut traduire mot à mot, les 
arbres jettent, c'est-à dire produisent des bourgeons, des 
scions. 

La tournure les arbres poussent provient sans doute de ce que 
l'on traduit jeton par pousse. Ce n'est pas que pousser soit 
mauvais ; mais la construction diffère dans les deux idiomes : 
les arbres commencent à pousser des boutons; les petites 
branches que les arbres poussent au printemps sont ordinai- 
rement rougeâtres, AcAn. — Dites donc : les arbres poussent 
des bourgeons, pour traduire lès âbejetèt ; car les arbres pous ^ 
sent a une autre signification ; les arbres, les fleurs, les blés, 
grandissent, s'accroissent. Quant au français ;e(^r, correspon- 
dant au wallon jé/^, l'Académie dit: cet arbre a jeté des scions, 
et, absolument, les arbres commencent à jeter; la vigne ne 
jette pas encore. 

Poussière. J'ai une poussière ians l'œil, /a 'n' poussireè 
route. Dites : j'ai un grain de poussière dans l'œil, ou j'ai de la 
poussière dans l'œil. 

Pouvoir. i« Je n'^^i puis rien, ji n'é pous rin, pat. de Liège 
et de Marche (Dict. des spot, 881) ; je n'en peux pas, ej n'en peux 
pas, tournais. Dites : je n'y suis pour rien, ce n'est pas ma 
faute, je n'en suis pas cause, ou dans le style badin, je n'en 
peux mais. On dit aussi : je n'y puis rien. Cette dernière tour- 



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- 301 - 

nare s'emploie plus souvent dans le sens de : je ne puM qu'y 
faire» je n'ai aucun moyen d'empécber la chose dont il s'agit. 
i"* En puis-je quelqw chose ? è pous-je ine saM ? Dites : est-ce 
ma faute, ou, dans le sfyle badin, en puis-je mais? Est-ce que 
ïen puis 1 est-ce qui fennè pans f ennè pcus-jef ou è pous-jet 
liég. est-ce 9tt//é pousl è pous-je^ mit namur. Dites: est-ce 
que j'en suis cause? 

Prétendument, Litt. Prétenduement, Bescu. Voici, 
comme dit Nodier à propos de présumable, un mot que tout le 
monde croit français, excepté l'Académie {i ). Les Liégeois le 
détournent quelquefois de son véritable sens. Ainsi on ne dirait 
pas en France : elle va se faire religieuse prétendument y elle va 
s*fér bèguenne prétindow'mint. Le sens est : on prétend, on 
suppose qu'elle va se faire religieuse. Voici des textes ob il a la 
signification qu'on lui donne en France. Ce domestique a été 
remercié parce que prétendument il avait volé. Proposition 
prétendument démontrée, Litt. On a vérifié la pièce prétendu- 
ment fausse, Hennequin. -- On pourra, si Ton veut, remplacer, 
tantôt [iSiV soi*disanty tantôt par Tadjectif prétendu. Ex. Je sais 
fort bien que sur moi l'on babille, Que, soi -disait, j'ai le ton 
trop plaisant. Déranger, Bonne Fille. — - On remarquera cet 
emploi absolu de soi-disant, que Littré explique par prétendu- 
ment. On connaît l'expression consacrée dans le style de l'église 
catholique : la religion ptétendue réformée. 

Préférer. Je préfère sortir que rester à la maison, ji pré- 
fire^ ou fainme mi d'sôrti qui de imani è tmohonne. Littré est 
d'avis qu'il ne faut pas traiter préférer comme un comparatif. On 
dira : j*aime mieux sortir que rester à la maison, ou je préfère 
sortir p/u^(?/ que de rester... Malgré tout le respect qu'on doit 
avoir pour le savant lexicographe, on admettra difficilement 
cette opinion : en effet préférer ne peut se comprendre sans une 
idée de comparaison. 

<«>Avaiiiréditiondê483lS. 



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9St 



L!idée lui a pris de sortir, Fiééieli a pris dêùrti. 
A en croire M. Garpentîer, c'est mal dire ; il faudrait : Tidée lui 
est venue de sortir. On lit dans Bescherelle : c Prendre^ venir, 
survenir, en parlant des mouvements de TAme, des passions, 
du caprice, de la fentaisie, du désir, etc. L'envie lui prit.... 
Demander des conseils est une envie qui prend rarement aux 
barbes grises, Henri IV. » La tournure incriminée semble donc 
correcte, et nous pensons qu*on peut traduire mot à mot (pUU 
hUiéte It a pris t quelle boutade lui a pris ? Ex. L*idée lui a pris 
d'aller à la campagne, Lirr. Cette délicatesse lui prit un matin, 
comme il venait de faire la cour à une prude, Marmont. Il lui 
prit une fantaisie, Acad. 

2* Je pris ma main et je lui donnai un soufflet, ji prinda 
m^main^ et fli d*na 'n'pètéïe, fl. ik nam mijne hand, en gaf hem 
een kaaksmeet. Il y a là une superfétation des plus ridicules. Il 
suffit de dire : je lui donnai un soufflet. — ji prinds m'ptd et je 
Vfais rôlér à Pvaléie dès gré. Traduisez : d'un coup de pied, je 
l'envoyai au bas de Tescalier, et non pas, j« pris mon pied^ et je 
le fis... 

Z^ Vous m'avez fait prendre une peur, vos m'avez fait happer 
ine sogne (ou ine vette sogne). Diles : vous m'avez fait peur, vous 
m'avez effrayé. 

4* Vous me prenez la parole hors de la bouche, vos m'prindéz 
Vparole foû de Fboque, fi. gij neemt mij het woord uit den mond. 
Dites : j'allais le dire. 

H^ Prenez bien attention, prindéz Un attineion, liég., prindéz 
attintion^ mont. Les Wallons emploient quelquefois ce flandri- 
cisme ; (aeht nemen), il faut le remplacer par l'autre tournure 
wallonne: féz bin attinciony faites bien attention. 

Prépositions composées. Les rues de sur la Batte, lis 
rowe di so l'Batte. Les maisons de sur le Marché, lès mohonne 
di so FMarchi. Passons par sur le Marché, passans po so VMarchi. 
Ce livre est d'à moi, est d'à toi , d'à lui, d live-là est ta 



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SOS 



meunne^ d^a tanke, tFa lu. C'est la Idte é'au roi, c'est l'fime iâ 
roi. Un ouvrier de chez le maieur épouse une ouvrière de chez 
la marquise, Forir, ine ovri (Vmon l'maiéur qui s*peu$e ine otnire 
di mon Fmarquise. Prés situés derrière chez la veuve Renier» 
waite sitouwéies dWi mon Vvife Régnier. Je demeure à côté de 
chez Pierre, ji demeure à cosié a'mon Piére. En face de chez 
Durand, âddivant dCmon Durand. 

Toutes ces prépositions composées sont purement wallonnes. 
Il faut dire : les rues de la Batte, les maisons du Marché, 
passons par le Marché, ce livre est à moi, etc., un ouvrier du 
maîeur (Acad.) épouse une ouvrière de la marquise, prés situés 
derrière la maison de la veuve..., je demeure près de la maison 
de Pierre, ou près de la maison Pierre, en face de la maison 
Durand, vis-à-vis de la maison Durand (ou vis-à-vis la maison 
Durand, Litt.). 

Le wallon a conservé cette tendance de l'ancienne langue 
romane à agglutiner plusieurs mots pour en faire une préposi- 
tion : âb hoc^ avec (Grandg.), de ex, dès; de intusj dans; de... 
puis; de retrOj derrière; per médium^ parmi, par dessus, au- 
dessus, etc. De là également les anciennes prépositions dessous, 
dedans, dehors. V. Dbdans. — Chez^ en vertu de son étymo- 
logie {casa, cabane; comparez mon, contraction de l'ardennais 
mokon pour mohonne), peut être régi par une préposition, mais 
cela ne se fait qu'avec de (sauf quand de vient après un nom), 
par, près de, loin de. Je viens de chez mon juge. La liberté, 
pour faire le tour du monde, n'a pas besoin de passer par chez 
nous. — Toui bon patriote belge connaît l'auteur de ce beau 
mot. — Il demeure près de chez nous. Loin de chez lui. Il 
travaille hors de chez lui, J. Sim. VOuvrière. 

Presse-papiers. Un —, on presse-papi. Dites : Un serre- 
papiers, pour désigner un petit meuble de marbre, de plomb, 
de zinc , etc., qu'on pose sur des papiers pour les empêcher de 
se disperser. 



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- sa* ^ 

Prêter, l"» Jacot demande un livre à prêter à Colas, Jacoi 
d'mande in live à prêter à Colosse^ Armétiaque de Mons, a. 67, 
p. 64.— Je lui ai demandé trois francs à prêter, ji li a (Ttnandé 
treus franc à prustêr^ liég. 

Le montois prêter, et le liégeois prustêr signifient ici, non pas 
prêter, mais emprunter ; les patois wallons, à l'exemple du néer> 
landais et de Tallemand, entendent dans les deux sens le mot 
qui correspond au français prêter; de même Tallemand leihen 
(pop. lehnen), et le flamand leenen signiQent à la fois prêter et 
emprunter. Cependant si Ton substituait emprunter à prêter 
dans les textes français, il serait impossible d'arriver à une 
tournure présentable en maintenant le verbe demander. Il 
faut dire: Jacot demande à Colas de lui prêter un livre, je lui 
ai demandé de me prêter trois francs, ou bien je l'ai prié de me 
prêter trois francs. — Nous avons vu à l'article Demander (Infi- 
nitif, l"") la difiérence entre demander* à et demander de: Ex. 
Elle demanda à entrer dans le corps d'un perroquet. Fên., le 
Singe. Ils demandaient au ciel de terminer leur vie, Flor. 
VAveug. et Le Par. A ce compte là, demander à prêter, dans les 
textes qui se trouvent au commencement de cet article, 
exprime précisément le contraire de ce que Ton veut dire. 

2'' Du cuir qui se prête, de cûr qui 8*prusiêïe ; des bas qui se 
prêtent, dès châsse qui s'prustèt. Ici prêter doit être intransitif: 
du cuir qui prête, des bas qui prêtent, Acad. 

Prévenir. 1« Je lui ai prévenu, ;t U a prêv'nau. Dites : Je 
l'ai prévenu. — On dit, en wallon, prév'ni 'n'sakoi à ine saki^ et, 
en français, prévenir quelqu'un de quelque chose. Ex. Quand 
vos v'sintiz broûlêr, vos m'et diviz prêv'ni, Li Maie ntûr, L 

2° Je l'ai prévenu d'avance, ji Va prêv'nou d'avance. C'est un 
pléonasme vicieux. Supprimez d*avance : Je l'ai prévenu ; ou 
dites : je l'ai averti d'avance, par avance. Toutefois on pourrait 
dire : je l'ai prévenu longtemps, quinze jours d'avance. 

3<> Il est si prévenu, ou il est si prévenu de lui-même, ou il 



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- 306 — 

est si prévenu de sa personne, il est H prév'nauy ou il est si 
prév*nau tTlu minme, fl. hij es voorengenon^en met xich zelven. 
Dites : il est si plein de lui-même, si rempli de lui-même, âcad., 
il est si suffisant, si présomptueux, si outrecuidant. 

Les dictionnaires ne signalent pas cette acception du mot 
prév'nou ; elle n'en existe pas moins, comme le prouve ce pas- 
sage délie Grand mère à VYihenne, Hock. Bull. 62. 4« l.,p. 46 : 
Vos fdris homme si prMnous^ risont nin hin èduqués, Isavèt tôt. 
Le français prévenu signifie qui a des préventions bonnes ou 
mauvaises : L*bomme prévenu ne vous écoule pas, il est sourd; 
la place est remplie, et la vérité n'en trouve plus, Boss. Polit, 
VIII, V, 8. 

Prier. On vous fait prier le bonjour, on v'fait prit Fbonjoû. 
Dites : on vous souhaite le bonjour. Dites de même : souhaiter 
le bonsoir. Ex. M"*" de Berville souhaita le bonsoir à son fils, 
A. Musset, le secret deJavotte, I. 

Il est probable que c'est un archaïsme : le latin precari signi- 
fiait aussi bien prier que souhaitei\ Reditum tibt precor, je vous 
souhaite un bon retour. Littré cite cet exemple d'un auteur du 
XYI* siècle : Elle lui pria le repos et se retira. 

Profit. 1* Il saura mettre ses talents auprofU de sa famille, 
t sâret mette ses talent âprofU di s'famUe. M. Garpentier prétend 
qu'il faut dire : mettre ses talents à profit pour sa fômille. Cela 
parait bien sévère. La tournure est, ce semble, bonne avec un 
petit changement : Il saura appliquer, ou employer ses talents 
au profit de sa famille. — Ex. Une amende applicable au profit 
des pauvres ; celte obligation est passée au profit d'un tel, Acad. 
^ Donner un concert au /yro/l/ des pauvres; dinér on concert â 
profil dès pauve. Ici, on dira plus élégamment : au bénéfice des 
pauvres. 

2* Un profit^ on profit^ fi. een profijter. Ce mot, purement 
wallon, désigne un petit morceau de laiton muni d'une pointe 
de fer, où Ton fiche le bout des chandelles qui reste à brûler. 



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— 306 — 

Le terme français est binet (de binus, double). — D'aucuns le 
rendent par brûle-toul, que Hennequin déclare n'être pas fran- 
çais. Il est dans le dictionnaire de TÂcadémie, et Liitré donne 
aussi le mot brûle-bout. — J'ai mis le profit au chandelier, fa 
mettou Vprofit â chandli. Dites : j*ai mis le brûle-tout au chan- 
delier, ou, simplement, j'ai fait binet. 

Pronoms personnels. 1» (Place des). Donnez-mm-/^,dtif^:s- 
m'el. Le pronom le doit ici se placer près du verbe : donnez- 
le moi. Hennequin formule ainsi la règle : « Lorsque les deux 
régimes sont de même longueur, le régime direct doit être mis le 
plus près du verbe. » Il suffit de citer les exemples suivants, on 
le lui donne^ on le leur a dit, ne vous y fiez pas , ne vous en dis- 
pensez pas, pour montrer combien la formule est inexacte. Les 
recueils d'Omnibus ne peuvent, à propos de chaque tournure 
vicieuse, donner des règles complètes; il faut du moins que celle 
que l'on invoque à l'occasion de tel ou tel cas particulier, ne 
blesse en rien la règle générale à laquelle il se rattache. Mieux 
vaudrait mille fois se borner à condamner simplement la mau- 
vaise locution et à la rectifier, sans ajouter aucune explication. 
— Il fallait dire : Lorsqu'un verbe a deux pronoms personnels 
pour compléments, l'un direct et l'autre indirect, le pronom 
complément direct s'énonce le premier. Ex. Je le lui donne, 
donnez-le lui, je le leur donne, donnez-le-leur, fîez-vous-y ; ne 
vous y fiez p&s ; je vous en dispense. Exception : lorsque le 
vei be n'est pas à l'impératif, me, te, nousy vous et se occupent 
toujours la première place, s'ils sont compléments indirects : Je 
vous l'ai montré ; vous l'ai-je montré ? il nous l'a répété ; ils se 
le sont dit; je me la rappelle; je te les montrerai. — Plusieurs 
imitent plus grossièrement encore la tournure wallonne, et 
disent : donnez-mèl, prêtez-mèl. Après cha, comme dit le 
Tournaisien, i faut tirer ïélielle. 

2" — sujets d'un infinitif. Montre un peu pour moi voir^ 
moutte in pau pou mi dr, mont. Je demande poiir moi sortir^ ej 



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— 307 — 

demande pou mi sortir ^ tournais. Je viens vous demander du 
grain pour moi vivre, ji v'vins demander do grain por mi viquér, 
Aurmonaq. di Nam., a. 67, p. 40. Dites : pour vivre, ou pour me 
sustenter. — Dans l'exemple suivant, le sujet de Tinfinitif est 
un substantif. N'avez-vous pas une vieille paire de souliers 
pour mon mari mettre ? n'avéz-v'nin n'vtU paire di sole po mi 
homme mette ? Dites simplement : pour mon mari. 

Cette tournure wallonne est absolument mauvaise en fran- 
çais. Sigard n'y voit qu'un procédé pour éviter la difficulté de la 
conjugaison. Cela peut être vrai pour le premier texte, qui 
semble équivaloir à : montre un peu pour que je voie, et encore, 
la vraie tournure française serait plutôt : laisse-moi voir, ou, 
simplement montre-moi cela. Mais la seconde tournure, très-usi- 
tée à Tournai, équivaut à ; je demande à sortir : nous avons, des 
deux côtés, l'infinitif; le tournaisien ajoute seulement le sujet 
de l'infinitif. Ne pourrait-on trouver là un vestige de la proposi- 
tion infinitive ? On sait qu'elle n'est admissible en français que 
dans certains cas : Je l'ai laissé partir, faites-le sortir, je Tni vue 
peindre, je l'ai entendue chanter. 

Propre. !• Vous êtes si propre avec cette robe, vos estez si 
prôpe avou cisse rôbe-là. MH. Hennequin et Carpentier préten- 
dent qu'il faut dire : Vous êtes si bien avec cette robo-là. Je 
doute fort qu'il en soit ainsi. Etre bien s'emploie en trois sens : 
l*" Cette personne est bien^ elle est distinguée, d'une figure agi^éa- 
ble ; '!• Il est bien, il est en bonne santé ; 3° // est bien dans ses 
affaires, ou simplement, il est bien, il a de la fortune. Dans le 
sens du wallon : vos estez prôpe^ on dit : il est bien mis, il est 
bien vêtu ; on dit quelquefois : elle est gentille ; on dit encore, 
populairement, selon l'Académie, familièrement, suivant Littré : 
il est beau. — Pour ce qui est de propre, on ne peut le condam- 
ner dans le sens du wallon : l'Académie et Littré lui donnent 
positivement le sens de bien arrangé, bien soigné ; et cette 
acception est plus voisine du sens étymologique (propre à, con- 



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- 308 — 

venable à), que celle de net. Ex. Gomment, monsieur Jourdain, 
vous voilà le plus propre du monde. Mol. Toutefois, si la tour- 
nure ne platt pas, les équivalents ne manqueront point : Vous 
êtes si beau avec cette robe, cette robe vous sied si bien, vous 
va si bien ; on p'tit vî homme qu'eêt todisprôpe^ un petit vieillard 
toujours propret. 

2"* C'est du propre, cKest du propre, fl. 7 iê netjes. Exclama- 
tion populaire usitée dans le Tournaisis et en France. Dites, 
suivant le sens : c'est un mauvais tour, une laide affaire, une 
équipée, un pas de clerc, c'est mal, ou, ironiquement, c'est une 
belle affaire, une jolie équipée. En ce sens, le peuple dit aussi 
en France, c'est du soigné, Lin. 

3* La tournure liégeoise : me yo\lhpropre,vo8-m'làprôpe,DEL- 
CHEF, les 2 Nèv. III, 1, ou vos-m'là gâte, ibid I, 8, doit être rem- 
placée par celles-ci : je suis dans de mauvais draps, dans de 
mauvaises affaires, et, ironiquement, je suis dans de beaux 
draps. Ex. La compagnie de Jésus est dans de mauvais draps, 
o'ÂLEMB. dans Liit.Ont dit aussi ironiquement: nous voilà bien, 
vous voilà bien, âcad. 

Q. 

Quadrille. Dansons une quadrille, dansans n'quadriUe. 
Dites : un quadrille. 

Quadrille^ t. de danse, est féminin en wallon ; c'est le genre 
ancien et étymologique (ital. quadriglia, fém.). On le fait encore 
quelquefois féminin, quand il désigne une troupe de cavaliers 
pour un carrousel ou pour un tournois. — <c Ce mot est féminin 
dans les dictionnaires, et masculin dans l'usage, a Litt. C'est 
l'inverse pour lozange, et, parfois, pour steppe. 

Quand, l"" Quand c'est que vous aurez fini, qwand c'est qu'vos 
âréz fini. Supprimez c'est que : Quand vous aurez fini. 
S"" Marchez, quand je vous le dis, roté», qwand ji v*s el dis, 



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- 309 - 

pat fl. ga, aU ik *t u zeg. Dites : marchez , vous dis-je, et, 
dans la conversation familière, marchez, je vous dis. Y. un ex. 
dans 6. Sand, le Drac, 1, 1. 

3"* Le quand du mois sommes-nous? li qwanV de meus 
esiamgnef Dites: quel jour du mois avons-nous ? quel est le 
quantième du mois ? V. Combien. 

Quant. Quant au reste, tant qu'à reste. C'est une fausse tra- 
duction. Le français dit simplement: au reste. Mais, dans 
certains cas, quant au reste est parfaitement français : Vous me 
restituez ceci, quant au reste, je vous en fais grâce, je vous le 
donne. 

Quarantln. Pour les Wallons, c'est le nom générique de la 
giroflée. Littré nous apprend que c'est le nom vulgaire d'une 
espèce de giroflée, qu'il dit être la mathiole annuelle. Il ajoute 
les autres noms : quarantaine, giroflée d'été. 

Quarelle. Dites : querelle. Prononcez kerèl ou krèl. La pro- 
nonciation wallonne est archaïque. Littré cite un exemple du 
XIII* siècle où ce mot est écrit carelle. 

Quartier. Faire un quartier, fér on quârti. Dites : faire un 
appariement. Ce mot est en usage dans toute la Belgique ; les 
Flamands disent kwartier. Ex. Faire une chambre, Besch., la 
disposer, l'arranger, la mettre dans l'état convenable. — Cet 
étudiant est en quartier, ci studiant-là est è quârtL Dites : en 
appartement garni. •— Ex. Il n'a point de meubles, il est obligé 
de loger en chambre garnie, ou, substantivement, en garni, 

ÂCAD. 

Quatre heures. Faire quatre lieures, fér qwatr'heure; 
donnez-lui son quatre heures, dinéz-li s^qwatr^ heure. Dites : 
goûter ; donnez-lui son goûter.— On se sert aussi du substantif 
collation et du verbe collationner (on ne prononce qu'une l ; on 
distingue ainsi ce mot de collation, l'action de conférer, où les 
deux / se font sentir). 



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— 310 - 

Que, conjoQction. 1<> C'est pourquoi qiLc vous êtes malade, 
c'est pokoi qui v's estez malade, fi. 'lis daarom dat gij ziek xijt 
Il faut faire disparaître le que. Voilà pourquoi vous êtes malade. 

— Cette faute se retrouve dans le langage du peuple à Paris : 
Pourquoi donc qu'on nous aurait si bien nourri pendant plus de 
cinq mois et engraissé à si grands frais? J. Sandeau, la roche 
aux M., XI. C'est sans doute uue imitation du parler popu- 
laire. 

â"" Je ne sais à quoi que j'en suis,;t n'sés à quoi quifennè sos. 
Encore un que redondant. Je ne sais à quoi j'en suis. 

S*" Quant à son nom, et d'où qu'il vient, je n'en sais rien, tant 
qu'à s'no et d'wisse quH vint^ ji n'è ses rin. Le que est également 
inutile: et d'oiiil vient... 

4"* Il est assez riche que pour se donner une voiture, il est assez 
riche qui po s'dinér 'n' voiture. Dites simplement : assez riche 
pour... — Il est trop doux que pour se fôcher, il est bin trop 
pâhûle qui po s'mâvlér. C'est toujours le même 411^ parasite : Il 
est trop doux pour.. .. 

5® Voilà où que nous demeurons, vola wisse qui nos d^manans. 
Dites simplement : voilà où nous, demeurons. Quant aux tour- 
nures : voilà ousque^ voilà où est-ce que nous demeurons, elles 
sont des plus barbares. 

Que, relatif. 1"^ — redondant. Quelle vilaine posture que 
tu as, quéle laite posteûre qui ti fais ! Dites : quelle vilaine 
altitude tu prends ! — Quel nez qu'il a ! quéle narenne qu'il a ! 

— Quel beau temps qu'il fait ! que bai timps qu'i fait ! Dites : 
quel nez il a ! quel beau temps il fait ! {i) 

Pour moi, qu'il dit (ou qui dit), je n'en veux pas, tant qu'à mi^ 
qu'i dèrit, j'enné voux nin. Dites : pour moi, dit-il, je n'en 
veux pas. 

â«Pour dont, ou pour lequel précédé d'une préposition. Voilà 



dat. 



(*) Les paloîs flamands oroploieal de môme facoo la conjonclion et le relatif 



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- 311 - 

ce que vous êtes cause, vola çau qui v's estez cdse. Dites : voil!) 
ce dont vous êtes cause. — C'est un mot qu'on ne se sert plus 
guère, c'est on mot qu'on n'si ciève pus wère. Dites : dont on ne 
se sert plus guère, ou qui est tombé en désuétude.— Voyez-vous 
cette maison que sa façade se dresse au milieu de la place ? 
vèyéz-v' bin cisse mohonne-li qui si streûte façade si dresse â 
moitéïe délie pièce? Dites : cette maison dont l'étroite façade ... 

— Donnez-lui ce qu'il a besoin, dinéz-li çou qu'il a dangt. Dites: 
ce doni il a besoin. — Voilà le bâion qu'il m'a frappé avec, vola 
l'baston qu'i m'a ferou avou. Dites : le bâton dont il m'a frappé. 

— L'affaire que je vous parlai hier, Caffaire qui ji v' parla hîr. 
Dites : l'affaire dont je vous parlai hier. 

Pourquoi ne mettez-vous pas la robe que vous êtes si belle 
avec ? poquoi n'mettéZ'V'nin l'rôbe qui v's estez si prôpe avou? Un 
outil 9ti(? je ne peux pas travailler sans^ ine ustêie quiji n'poux 
nin ovrér sins. Prenez la caisse que les cigares sont dedans^ 
prindéz l'caisse qui lès cigare sont d'vint. L'homme que je tra- 
vaille pourlui^ l'homme quifouveûre por lu. L'arbre qu'il est 
monté dessus, Vâbe qu'il est monté à Vcopette. 

Les wallonismes du premier alinéa proviennent de ce que le 
relatif fifont n'exisie pas en wallon ; les autres s'expliquent par 
cette circonstance que le wallon n'admet guère l'emploi du 
relatif précédé d'une préposition. Tel est l'avis de Simonon (Dis- 
sei^taiion grammaticale sur le patois wallon, p. 23) et de M. Del- 
bœuf (Li mâie neûr, II, l, note 2). Micheels, dans sa grammaire 
liégeoise, page 30, a beau se gmdarmer contre les écrivains 
wallons qui ont employé celte manière de parler; elle appar- 
tient au plus pur wallon, et ceux d'entre nous qui parlent 
encore le vieux langage de nos pères sans aucun mélange de 
français — rari nantes — ne s'expriment pas autrement. Elle ne 
semble au reste pas si incorrecte ; les langues les plus litté- 
raires en ont usé à l'origine; témoin Homère, qui dit, comme 
un Liégeois de la vieille roche : Minerve se dirigea vers la 
couche que la jeune fille dormait dedans, Odyssée, VI, 18. Le 



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- 312 - 

grec a le seul avantage de mettre le relatir au datif, et le datif, 
en grec, servait de locaiif; à part cela, l'analogie est frappante. 
Le flamand et surtout l'anglais pourraient également donner 
lieu à des comparaisons intéressantes. Mais cette tournure, si 
légitime soit-elle en wallon, est tout à fait barbare dans la 
langue si perfectionnée de Voltaire; aussi bien elle ne se ren- 
contre que dans le parler des personnes peu instruites. Gorri- 
rigeons donc les phrases précédentes : Pourquoi ne mettez- 
vous pas la robe avec laquelle vous êtes si belle? Un outil sans 
lequel je ne puis travailler. Prenez la caisse dans laquelle (et 
mieux où) sont les cigares. L*homme pour lequel je travaille. 
L'arbre sur lequel il est monté. 

3* Au moment qu'i\ arrivera, â mautnint qû'arriv'reifi. op het 
oogenblik dai hij zal aankomen, au moment que je le verrai 
(Forir), â moumint qui fel veureî. — Du temps que les écoles 
étaient rares, de timps qui lès scole estît rares. — La saison 
gu'on brasse la meilleure bière, li saizon qu*(m bresse li mHeû 
btre. 

Le latin, langue synthétique, employait le relatif à Fablatif 
comme complément de temps. Le français est une langue analy- 
tique ; il marque le plus souvent le rapport de temps par une 
préposition : durant lequel, pendant lequel, dans lequel. Mais ces 
tournures sont souvent lourdes et disgracieuses, mémeen prose, 
et l'on y substitue fréquemment l'adverbe oU. L'instant où nous 
naissons est un pas vers la mort. Volt. Le moment où je parle 
est déjà loin de moi. Le latinisme (relatif sans préposition) est 
resté intact dans notre patois, qui emploie rarement wisse 
comme adverbe de temps, et qui ne connaît guère l'emploi du 
relatif précédé d'une préposition. Il s'est maintenu longtemps 
dans la langue française, en prose comme en vers, et les 
exemples foisonnent chez les meilleurs écrivains. Au moment 
qu'elle rit, son tour vient, La Font. Le Lièvre et la Perdrix, Je 
ne m'ennuyais point cet hiver que je vous avais, Sév. Une nuit 
que j'étais dans cet état tranquille où l'âme... Montesq. ce Que, 



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— 313 - 

avec un nom de temps^ signifie durant lequel. » Lin. « Laveaux 
dit avec raison que cette tournure a vieilli; mais il devrait 
ajouter que la poésie l'a conservée. » Dbssuux, Traité de Versif. 
franc. — On dira donc : au moment où je la verrai ; au temps 
où les écoles étaient rares ; la saison où l'on brasse la meil- 
leure bière; au moment où il arrivera. — Ajoutons toutefois 
que le relatif après le mot moment paraît encore assez usité, et 
qu'il est seul admis dans la locution du moment que (dès que, 
depuis que, puisque). De plus, asleûrqui, oûie qui, se traduisent 
par maintenant que, à présent que, aujourd'hui que, et ne peuvent 
se traduire autrement. On dit aussi à Vheure qu'il est, et un jour 
que, plus rarement, un jour où. 

4» De la manière qu'il agit, dette mantre quHl agixhe; delà 
manière qu'il parle, délie mantre qu'l jdse. M. Garpentier me 
semble bien sévère en condamnant ces tournures. Littré dit 
qu'on foit avec toutes sortes de substantifs et que, des composés 
où que signifie selon lequel, laquelle, lesquels, lesquelles. Ex. 
De la façon enfin qu'avec toi j'ai vécu, Les vainqueurs sont 
jaloux du bonheur du vaincu. Corn. Elle vous remercie tendre- 
ment de la manière que vous comprenez sa douleur, Sév. 

Quelle. La procession quelle vient de passer était fort belle, 
el procinssion quelle vient d'passér elle étot fin beUe, tournais. 
Dites: la procession qui vient... La maison gu^I^e fait le coin, 
'{ maséon quette fait Vcoin, id. Dites : la maison qui fait le 
coin. * 

Cette faute se commet à Tournai, où le patois a deux relatifs 
sujets, qui, masc. et quelle, fém. Ce quelle existe aussi dans le 
liégeois : Cest ine bâcelle quelle est comme on vrai houzâr, c'est- 
à-dire, cette fille est forte et courageuse. Mais on peut douter 
si ce quelle n'équivaut pas à qui elle, et dans tous les cas la faute 
en question ne se fait pas chez nous. 

Quelquefois. On est venu manger ma provision de pom- 
mes ; ne serait-ce pas vous quelquefois ? On-z-a v'nou maçnt 



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- 314 - 

m'pomû»on (Tpomme; ni sereut-ce nin vos quéquefèie^, Wég. 
Dites : ne serait-ce pas vous par hasard ? — Si quelquefois je 
n'étais pas à la maison... si téle(Heji n'esteus nin è Tmohmne. 
liég. Dites : si par hasard, si d'aventure je n'étais pas au logis. 
— Ne touchez pas à cela, quelquefois^ n'allez nin dtou (Tçou'a, 
saviZy quéquffèîe^ liég. Dans celte dernière phrase, quéquefèie 
est intraduisible; il faut le remplacer par un équivalent: ne 
vous avisez pas de.... — Jean n'est pas venu à l'école: il est 
quelquefois malade, Jihan riest nin v'nou è s'cole ; il est télefèie 
malade, liég. Dites: il est peut-être malade, ou peut-être est-il 
malade, ou peut-être qu'il est malade. — Nous écrirons au gou- 
verneur, au ministre et au Roi, qiielquePo's à Monseigneur, 
nos serirans au gouverneur, au minisse, et au Roi, quéquefle à 
Monseigneur, Âurmonaq di Nameur, a. 69, p. 32. Dites : peut- 
être à Monseigneur. 

C'est un flandricisme : Wie weet^ wat ersomtijds nog gebeuren 
kan? Qui sait ce qui peut arriver? 

Qui. 1» Vos milords (sorte de pommes de terre) qui ont 
d'énormes tiges, vos milôrd qu'ont dès fameux balo. — Son 
ongle qui est tombé, si onke qu'est toumêie. Dites simplement : 
vos milords ont d'énormes tiges, son ongle est tonibé. 

2'' C'est moi qui a fait cela, c'est mi qu'a fait coula. Dites : c'est 
moi qui ai fait cela. — C'est moi qui se trompe, c'est mi qui 
s'trompe. Dites : c'est moi qui me trompe. - C'est moi qui s'a 
trompé, c'est mi qui s'a mam. Dites : c'est moi qui me suis 
trompé. -> C'est moi qui est le maître, c'est mi qu'est l'maisse. 
Dites : c'est moi qui suis le maître. 

Le verbe doit s'accorder avec le pronom relatif sujet comme 
il s'accorderait avec l'antécédent du pronom relatif. Telle est la 
règle actuelle de la syntaxe française; mais les écrivains du 
grand siècle ne la connaissaient pas, et l'on se tromperait 
étrangement en disant que les exemples suivants renferment de 
grossiers solécismes. Ce n'est pas moi qui se ferait prier, Mol. 
Sgan, se. 2. Je ne vois \x son sort que moi qui s'intéresse, Rac. 



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- 348 - 

En allemand, c'est la construcUoD ordinaire : Glaube mir^ der 
iieh besser kennt^ als du êelbsty Sghillbr. Il est donc probable 
que le wallon^ ici encore, a conservé la vieille construction. Ce 
serait une injustice flagrante que de la taxer de tournure bar- 
bai*e. On peut du reste en rendre raison. Il y a ici un accord 
sylleptique. Ainsi, dans le vers de Racine, je ne vois à son sort 
que moi... équivaut à, je suis la seule personne qui..., et dans 
le premier exemple, c'est moi qui... vaut autant que, je suis 
celui qui... De là la règle d'accord appliquée par le XVII* 
siècle et par la langue allemande. — Quant à la faute, c'est nous 
qui Vont dit, ou qui Ya dit, c'est vous qui l'a dtl, c*est nos aute^ 
c'eit vos aute qui Font dit, elle est tellement grossière, qu'il est 
superflu d'y insister. 

3<* J'ai des élancements dans la léte qui m'étourdissent,j'a dés 
lancemint è Vtiesse qui nifet sot. Dites : J'éprouve dans la tôle 
des élancements qui m'étourdissent. — - J'ai une envie à un doigt 
qui me tourmente, fa 'n'èvèie d deugt qui méfait bisquer. Dites : 
J'ai à un doigt une envie qui me tourmente. — Il faut autant que 
possible rapprocher le pronom relatif de son antécédent. Le 
wallon ne tient pas compte de cette règle, ou du moins y déroge 
chaque fois qu'il n'y a pas d'équivoque à éviter. Il faut bien 
reconnaître que, dans la converbation familièie, nous imitons 
très-souvent en français, à ce point de vue là, la liberté de la 
syntaxe wallonne, et nous tombons souvent, sans le savoir, 
dans le jeannotisme. 

4'' Qui qui siffle, qu'il dise, qui qui huffel, qu'èl dèie. Dites : 
que celui qui siffle le dise, ou se déclare. Ce grossier wallo- 
nisme fut, dit-on, prononcé un jour dans un théâtre par un 
agent de police, et cela en pleine représentation. Un loustic du 
parterre répondit : « Monsieur, c'est un droit qu'à la porte on 
achète en entrant. » Qu'est-ce qu'a dit cela'! s'écrie l'agent de 
police. — C'est Boileau, monsieur.— Qu'on le tape à la porte (i). 

(') Deux antres wallonismes pour: qui est-ce qui a dit cela? qu'on le jette. 
V. le n« 6, et Tart, Taper, 



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- 316 - 

— Je ne sais pas qui qui a fait cela, ji n'sés nin qui qu*a fait 
coula. Supprimez un qui. Je ne sais pas qui a Tait cela. 

S^" Je veux avoir cela, coûte qui coûte, ji voux aim coula, 
cosse qui cosse, liég. (cosse qui cosse est également namurois). 
Dites : coûte que coûte, ou quoi qu'il en coûte, ou à quelque prix 
que ce soit, ou à tout prix. 

6^ On frappe à la porte. Qu*est-ce qu'est là lOnfireà Fouxhe. 
Qu'est-ce qu'est là ? Bull. a. 58, p. 80. Dites : qui est-ce qui est 
là ? et mieux, qui est là ? ou, qui va là ? — Le français distingue 
qui est-ce qui, lequel se dit des personnes, de qu'est-ce qui, lequel 
se dit des choses. Le wallon n'a qu'une forme. 

Quine. La quine est bien rare maintenant, on ne la joue plus 
guère, H quine est bin rare asteûr, on u'èljowe pus wère. Dites : 
le loto est bien rare maintenant, on ne joue plus guère à ce jeu. 

— Le français quine (masc.) se dit, au loto, de cinq numéros 
gagnant ensemble sur la même ligne horizontale, ou de la même 
couleur. 

Quitte. Mi wèzenne est qwitte di s^fis, qu'est èvôie. Elle est 
qwitte di itenne, qu'on li a d'rôbé. Forir traduit à tort : Ma 
voisine est quitte de son fils qui est parti. Elle est quitte de son 
cuvier, qu'on lui a volé. Dites : Ma voisine a perdu son fils... ; 
on lui a volé son cuvier. 

Quitte vient du latin quietus, tranquille, qui a donné égale- 
ment le wallon keû, keûte, et le français coi, coite ; il signifie 
proprement qui ne doit plus rien, qui s'est libéré de sa dette 
(c'est de la même façon que le latin pacare, apaiser, est devenu 
pat, payer) ; puis le sens s'étendant encore, il a signifié délivré, 
débarrassé de quelque chose. « Il suit de là, dit M. Carpentier, 
qu'on est quitte de quelque chose de mauvais, de gênant, de 
fâcheux, comme d'une fièvre, d'un procès, etc. ; mais on ne peut 
pas dire que l'on est quitte de quelque chose auquel on est 
attaché ou que l'on regardait comme un bien. » Il faut prendre 
un autre tour. Ji sos qwitte di m' norèi,tl. ik befi mijneti neusdoek 



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— 317 - 

kwgi;ïu\ perdu mon mouchoir. Il est qwitf di s'pUce^ il 2i 
perdu sa place. Mais les phrases suivantes sont correctes. Me 
voilà quitte de la corvée, du compliment^ de la visite que j'avais 
à taire, il est quitte de sa fièvre, àgad. Te voilà donc bientôt 
quitte d'un grand souci, Gom. le Metu. 

i"" Je suis quitte avec vous, ji sos qwUte avou vos. Dites : je 
suis quitte envers vous. Ex. Soyez heureui, mes enfants, vous 
serez quittes envers nous, Gbnlis. 

Quitter. Ji v'qwitte çau qu* vos m' divéz. Forir traduit : Je 
vous quitte de ce que vous me devez, et il s'exprime correcte- 
ment, quoi qu'en dise Hennequin. Inutile de remplacer ;e vous 
quitte du reste par je vous tiens quitte du reste. Littré, dans son 
dictionnaire, part toujours du sens étymologique, et il donne 
pour première acception à quitter : tenir quitte, exempter, 
affranchir. Ex. Quitter quelqu'un d'une amende, d'une peine, 
LiTTRÊ. Réponds-moi seulement de l'avenir ; jeté quitte du reste, 
Batnal. 

Quoi. Il a dd quoi, il a d^ quoi. Dites : il est dans l'aisance, 
il est riche, il a de l'argent. Cette locution populaire se dit 
aussi en France. Ex. C^est un homme qui a de quoi, Acad. — Y. 
Fortune et Moyen. — Mais avoir de quai, avec un complément, 
est du meilleur style, pour signifier ce qui est nécessaire, ce 
qu'il faut pour... C'est un garçon de quarante ans qui a de quoi 
vivre, Lesage; et, sans complément, ils trouvaient aux champs 
trop de quoi, c'est-à-dire ce qui suffisait, La Font. Vhirond. et 
Us petits ois. 

On dit absolument : Ne vous inquiétez pas ; en vérité, il riy 
a pas de quoi, Genlis. C'est la traduction du wallonisme : coula 
ri vât nin lès pêne. Y. Peine. Il riy a pas de quai s'emploie 
encore, dans le style familier, pour traduire le wallonisme, ci 
riest rin découla. Ex. Merci co cint fêle, savez, m*binamé. — Ci 
riest rin dçaula^ brave feumme. Tournez : Mille remerctments, 
mon cher Monsieur. Il riy a pas de quai, ma bonne. — Gardez- 
vous de traduire, comme plusieurs le font: ça riest rien de cela. 



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-318 - 

2* lis ne savaient quai dire, i n'savint né quoi dire, pat. de 
Charler., Gh. Bernus, 48. Dites : ils ne savaient que dire. —Je 
ne sais quai dire, quoi faire, quai répondre, quai penser, ji n*tés 
quaidire^ quai fir, quoi responde^ quoi tusét^ liég. Dites : je ne 
sais que dire, que faire, que répondre, que penser. — Nous 
avons remarqué qu'A. Musset affectionne particulièrement cette 
façon de parler. Margot ne savait trop quoi faire, Margot, VI, et 
Les deuxmattreêses, III. Mais on dira avec une préposition : Ne 
sachant plus à quoi s'en prendre de sa disgrâce, J.-J. Rouss. 

3"* De quoi? di quoil Cela se dit pour faire répéter ce que Ton 
n'a pas entendu, mais cela se dit très-mal. Il faut supprimer de. 
Ex. Quoi? que dit-il? Litt. On pourra aussi employer une autre 
tournure. Que dites-vous?— Hein? —Vous d i tes î— Monsieur? 
ou plus poliment, pardon, monsieur, veuiller répéter. — Mais 
ce quoi elliptique, de même que l'inierjection hein, et la locution 
platt'il ? appartiennent au style familier, et, si Ton ne veut être 
impoli, il faut, en parlant à un supérieur, s'exprimer d'une 
autre manière : Pardon, je n'ai pas entendu. Veuillez répéter. 

4<' Vous me demandez ce que je veux boire ; c'est tout le 
mime de quoi, vos m*dimandéz çou qu' ji vaux heure; c*est tôt 
Vminme di quoi. Dites : Gela m'est égal. — Voliz-v* di coud au 
d'çoulà? Cest toi tminme. Tournez : c'est tout un, ou, ce m'est 
tout un. 

B"» Sâvez-vous bien quoil il faut partir, savéz*v Mn quoiJ i fût 
'nn* aller, û. weet gij wel wat, gij moet vertrekken. Dites : savez- 
vous ce qu'il faut faire?. . —La iouTnuvesavez-vous une chose ^. 
aurait un autre sens qui apparaît clairement dans le texte sui- 
vant : Vous le demandez? Savez -vous une chose? Cest que, 
quand il parle de Phédria... Bêtoland, trad. de Térenee, III, 1. 

Voici une tournure d'A. Dumas qui me paraît équivaloir il 
notre wallonisme. Mais écoutez donc, voulez-vous faire une 
c/kose? ma voiture contient quatre personnes,... acceptez une 
place, Angéle, II, 8. 

Quoique ça, wall. quaiq\a, dans Forir. C'est une locution 



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— 819 - 

populaire vicieuse relevée par Littré, qui donne cet exemple : 
Il me trompe; quoique ca, je l'aime. — Il faut employer Tautre 
tournure, malgré cela, mâgrè coula. Dans cette dernière tour- 
nure, cela représente l'ancien génitif latin et équivaut à décela : 
avec le mauvais gré de cela. On dit de même : l'hôtel-Dieu, 
pour l'hôtel de Dieu, Téglise Saint-Paul, pour l'église de Saint- 
Paul, le parvis Notre-Dame, pour le parvis de Notre-Dame. Ce 
sont tout autant de précieux archaïsmes qui se sont maintenus 
dans la langue, lorsque les flexions casuelles ayant complète- 
ment disparu, on les remplaça par des prépositions. 



R. 



Rabattre. // rabat (c'est-à^lire il fume, la fumée refoule), 
i rabatte. Dites : le vent rabat la fumée, ou, la fumée se rabat, 

ÂCAD. 

Rabosse. Les Wallons appellent râbosse (nam. rauboae^ 
mont, nbotse) ou bùudnki, une pomme entourée de pâte et cuite 
au tour. Les termes français sont gomichon (Dici. analog.) et 
même rabote (Litt.). Ce dernier terme est usité à Genève et dans 
les Ardennes françaises, ("est un vieux mot français synonyme 
de ballon ou soûle (boule), et qui désigne un jeu encore usité en 
Bretagne. 

Raooudre. Il faudrait faire racoudre votre manche, fâreut 
fér rakeuse vosse manche, liég. Dites : recoudre, — Racoudre son 
habit, racoude es' n habit, mont. Dites : recoudre son habit.— Je 
ne sors pas aujourd'hui, je dois me racoudre^ ji n'sôrte nin 
ouïe, ji deui m'rakeuse, liég. Dites: Je dois raccommoder mes 
bardes, raccoutrer mes vêtements. —Il est coûteux de racoudre 
six enfants, i coûte gros pou racoude six infant^ mont. Dites: il 
est coûteux d'entretenir les bardes de six enfants. 



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— 3Î0 — 

Rail. Beaucoup de Liégeois font ce mot du féminin, comme 
les Flamands (réel) : une raiUe^ liég. ine roAe. Il est masculin : 
un rail. Plusieurs le prennent pour un collectif désignant les 
deux bandes de fer sur lesquelles roulent les wagons ; c'est un 
abus ; il faut dire, dans ce cas : te» deux rail$^ ou la voie. 

Raison. Il ne savait plus que faire pour chercher des 
raisons, i ri saveût pus quai fir po nos quèri raizon^ U mâie ntur^ 
p. 28. Dites : pour nous chercher querelle. - Vous aurez des 
raisons avec lui, vos âréz dès raizon avou lu. For. Dites : des 
diflérends, des querelles, des altercations. — Il cherche des 
raisons, i cache dès rmon, pat. de Gharler. Bbrnus, p. 24. Dites: 
il cherche querelle. — Avoir des raisons avec quelqu'un, pour 
contester avec lui est populaire, dit Littré. — Ne dites pas non 
plus: c'est lui qui me cherche iou\ouTSy c*est lu qui friquire M 
fir, liég. On dit en wallon :9ttéri'n'MJi;t, d'une manière absolue, 
pour chercher querelle à quelqriun. Les enftints traduisent 
souvent la locution mot à mot, mais cela ne se dit pas en 
français. 

Ramonasse. Déjeuner de ramonasses, difunér a»ou dès 
ramonasse. Dites: de radis. — J'aime les grosses ramonasses, 
ji magne volti lès grosses ramonasse. Dites : les raiforts. 

La ravCf qui n'est guère cultivée chez nous, est une racine 
violette et allongée; le radis a une racine arrondie, rouge, 
blanche ou violette ; le raifort {raiz fort, racine forte) cultivé, ou 
radis noir, est plus gros et noir. --Ramonasse vient du flamand 
rammenas, qui ne désigne, sauf dans les patois, que le raifort 
cultivé. Radtjs est le nom flamand du radis. Les patois de Mons 
et de la Flandre française {raimolasse, rémola) ont conservé à 
ce mot flamand sa signification. 

Ramponean. Rincer un ramponeau, rispdmér on rampo-- 
neau, liég. respaumér in ramponeau, mont. Dites : un filtre à 
café. Ramponeau, d'après le Complément du Dictionnaire de 



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rAcadémie, se dit du jouet d'enfaot appelé en liégeois makralle, 
et en montois sorcière (fl. tooveraar). On le nomme aussi 
prussien ; mais le vrai terme français est bilboquet. — Cer- 
taines ménagères, pour éviter le wallonisme ramponeau^ se 
servent du mot marabout. Ce mot est français, mais désigne 
une espèce de cafetière. 

Ranoe. Les militaires portent la rance au bras, lès sôdàr 
poirtèt France à leûbress*. — Dites: portent le crêpe.— Le 
français rance est un adjectif et signifie : qui commence à se 
corrompre, à sentir : du lard rance. 

Ranouneux. C'est un esprit rancuneux, c'est ine esprit 
rancuwux. Dites : rancunier. — Rancuneux n'a pas éié consigné 
dans le Dictionnaire de l'Académie, bien qu'il ait été employé 
par plusieurs écrivains. Ex. Je ne suis pas rancuneux, Mariv. 
Nourrir contre vous une pensée rancuneuse, Ch. de Bernard. 

Rapécher un cadavre, rapèhi on coirps moirt. Dites : repé- 
cher, c'est-à-dire retirer de l'eau. — On dit à Mons : où a-t-il 
été rapécher une pareille femme ? ousse qu'il a sté rapichenér 
'n' feimme ainsi, et, dans la Flandre française, ou as- tu rapéché 
ça? dusse Vas rapèké cha'! — Repécher ne peut prendre cette 
acception figurée. Il faut dire : où a-t-il ramassé (ou déterré^ ou 
déniché) pareille femme ? où a-t-il déterré cela ? 

Rappeler (se). Je me rappelle de cela, je m'en rappelle, ji 
m' rappelle di coula, ji m'ennè rappelle, liég., ;* mHn rappelle, 
mont. Dites : je me rappelle cela, je me le rappelle. — Cette 
faute, si fréquente dans toute la Belgique, doit l'être également 
en France; car la plupart des grammairiens français l'ont 
relevée. Hais plusieurs ont poussé le scrupule beaucoup trop 
loin en condamnant «e rappeler de avec un infinitif. Y. Infinitif 
COMPLÉMENT, n<» 10. La tournure se rappeler une chose est 
la seule naturelle : éiymologiquement, cela veut dire rappeler 
une chose à soi ou dans sa mémoire. C'est sans doute par 
analogie avec se souvenir d'une chose, sisov'ni d'inesaquoi, se 



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ressouvenir d'une chose, si risêov'm (Tine saquoi, que le barba-> 
risme se rappeler de quelque chose, si rappeler d'ine saquoi, 
se sera introduit dans la langue. 

Rapport, l"" Il m'en veut à rapport de vous, i m'ennè vont à 
rapport di vos. Je n'ai pu sortir à rapport du mauvais temps, ji 
lia polou sorti à rapport de mdva temps. Dites : il m'en veut à 
cause de vous, je n'ai pu sortir à cause du mauvais temps. — 
En France, le peuple emploie de la même manière la locution 
rapport à. À preuve ces deux exemples, où l'on fait parler des 
gens du peuple. Pourquoi donc? demandai-je. Pardi, rapport 
à sa maison, reprit le garde champêtre, Em. So\}\bstre, Mémorial 
de famille. C'est que ma mémoire se brouille, rapport à cet 
autre, Mariv. le Préj. vaincu, sc.VIlI.— Littré admet par rapport 
à, pour marquer, non la cause, mais le but. Ex. Je suis las des 
histoires où il n'est question que des aventures d'un roi, comme 
s'il existait seul, ou que rien n'existât que par rapport à lui 
(c'est-à dire en vue de lui). Volt. Cet homme ne fait rien que 
par rapport à ses intérêts, c'est-à-dire dans la vue de ses propres 
intérêts, Litt. Il a fait cela par rapport à vous, c'est-à-dire, 
dans la vue de vous obliger. 

2« Il m'en voulait à rapport que j'étais riche, i vrCenné voléve à 
rapport quij'aveus bin rtimps, liég., au rapport quéfavois V temps, 
mont. Dites : il m'en voulait parce que j'étais riche. — A Paris, 
le peuple dit également : par rapport que y étais riche (Biscar- 
rat). 

Ras. 1« Cette sorte de chien a le poil rasse, cisse sort di 
chin a l'poïège rasse. Dites : a le poil ras; prononcez ra. Voyez 
la même faute aux mots Las et Sec. 

2** A rasse de l'eau, à rasse di Vaiwe. Dites : au ras de l'eau , 
ou, à ras l'eau, Acàd. Ex. Cette embarcation est à ras l'eau, 
AcAD.,c*est-à-dire presque au niveau de l'eau. Madame d'Hendi- 
court était auprès du roi sur un petit siège tout bas et presque 
au ras de l'eau, St. Sim. 



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A rase de terre, à rosse di thre. De est de trop. D'après Bes- 
cherelle, la locution à rase terre est fort usitée, quoiqu'elle ne 
figure dans aucun dictionnaire. Elle signifie à fleur de terre, de 
niveau avec la terre environnante. Ex. Dans la cour est un 
puits dont la margelle est à rase terre, Besgh. C'est un énallage 
analogue à de guerre lasse, une rue passante, etc. — On dit 
aussi à ras terre, Litt. (à Rasé, ^) rez pied rez terre, Agad., ou, 
simplement, rez terre, id., à rez de terre, Litt. — Verser du 
vin à rase du bord, vudi de vin à rase de boird. Dites : verser 
du vin à ras de bord, c'est-à-dire, emplir le verre jusqu'au 
bord. 

Rasibus. Au rasïbus de Teau, au rasibus de l'iau, montois. 
Dites au ras de l'eau, ou à ras l'eau. Si l'on tient à rasibus, qui, 
bien que populaire et bas, a été admis par l'Académie, il faut 
supprimer au : rasibus de Teau. Rasibus n'est autre chose que 
ras avec une désinence latine. Ex. Le coup lui passa rasibus du 
nez, Agad., c'est-à-dire tout contre, tout près. Il a démoli son 
château rasibus de terre, Palsgr., XVP siècle. — Le général 
Jardon, aussi connu par ses hardiesses grammaticales que par 
son audace guerrière, fit un jour un singulier emploi de ce mot. 
C'était pendant la guerre de la Péninsule ; il se dirigeait vers un 
couvent auquel il voulait imposer une forte contribution de 
guerre. Le prieur étant venu à sa rencontre avec ses moines, 
lui adressa une harangue en latin. Ne vois-tu pas bien, lui dit 
son aide-de-camp Rensonnet, ne vois-tu pas bien quHls se 
moquent de toi. — Attends un peu, lui répond le général ; je 
vais leur parler latin : Monsieu Vpriesse, si vos non payatibus, 
vestrum mo7iasterium rrrasibus. Le prieur comprit de reste : il 
s'empressa de payer une forte rançon. 

Rassercir, rassarcir, rassercer ou rassercier, en montois 
rassarci ou rassarcér, du latin resarcire, raccommoder. Dites : 
rentraire. Nos Liégeoises l'emploient aussi dans le sens de 
ravauder (en liég. rinawi). V. Rentrer et Remailler. 



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Rauque. Je suis tout rauque, ji sos lot rauque. Dites : j*ai la 
voix toute rauque, ou je suis tout enroué. — Le wallon rauque 
et le berrichon rauche (Litt.) se disent des personnes, comme 
le latin raucus. Ainsi le raucus factus mm de Plante, se traduit 
littéralement : ji div^na rauque. Je devins rauque ne vaut rien ; 
on dit: Je m*enrouai. Par une de ces bizarreries dont le français 
offre tant d'exemples, le français rauque se dit surtout de la 
voix, et ne peut se dire de la personne. 

R6. A Mons et à Nivelles re, à Liège et à Namur ri. Au moyen 
de ce préfixe inséparable, nos patois forment un grand nombre 
de composés qui marquent répétition ou réitération ; ils forgent 
ainsi quantité de composés dont les correspondants ne sont pas 
admis dans la langue régulière et grammaticale. Tels sont les 
composés liégeois ramidonnér, rigostér, rihufflir^ rissainî. Ils 
sont tolérés dans le style familier, lorsque le verbe simple est 
exprimé dans la même phrase : Avant d'acheter ce vin, il Ta 
goûté et regoûté, il a été saigné et resaigné (dans ce cas, on ne 
double pas Vs), cet auteur a été sifflé et resifflé (Litt.). Mais, dans 
la bouche du peuple, cette particule s'ajoute à un grand nombre 
de mots sans valeur sensible; ainsi se forment des composés 
qui ont le même sens que la forme simple. S'il faut en croire 
Agnel (page 3), cet emploi du préfixe re est très-ancien dans la 
langue. Et il est arrivé plus d'une fois que la forme populaire a 
fini par supplanter la forme grammaticale. C'est le cas pour 
remercier, rencontrer, rassembler, dont la forme ancienne était 
mei'ciei\ encontrer, sembtei\ D'autres fois, la forme populaire a 
pris rang à côté de la forme simple, qui, auparavant, était seule 
littéraire, et a conservé le même sens; les exemples foisonnent; 
nous nous en tiendrons aux suivants, qui rentrent particulière- 
ment dans notre sujet: rallonge, récurer, redire, régaler, 
remonter et retenir. L'Académie leur a accordé droit de bour- 
geoisie, en leur conservant la signification des mots simples 
{simples relativement), allonge, écurer, dire, monter ; il va de 
soi que, pour quelques-uns de ces termes, il s'agit d'acceptions 



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toutes spéciales qui seront indiquées plus loin. Nous n'en dirons 
pas autant des suivants, qui sont très-usités en Belgique: rac- 
cuser, racheter, racquitter, raflstoler, rahausse, raiguiser« 
ramincir, rappeler, rattaquer, rattendre, recouper, récrire, 
régaliser, reguérir, relaver, remailler, rentrer, renforcir, 
rétamer. Presque tous ces mots sont également des paiisia- 
nisnus. V. Agnel, pages 2 et suivantes. Le bon usage les 
réprouve, et si quelques-uns d*entre eux sont consignés dans 
le Dictionnaire de TAcadémie, ce n'est jamais avec le seus du 
mot simple. 

Nous reprenons tous ces mots en détail. 

A. Mots admis par l'Académie. Nous en parlons, parce que 
plusieurs se font paiiois scrupule d'en user. 

1« Rallonge. Mettre une rallonge à une table, Agad. mette 
ine rallonge à ine tâve, liég. On dit plus souvent une allonge. 
— C'est du bois de rallonge, c'est du bos d'rallonge, mont. Dites: 
ce sont des allongements, c'est-à-dire, c'est un moyen de 
gagner du temps. On dit aussi allonger la courroie. ^ Mais 
rallonger ne vaut absolument rien. Les jours rallongent ^ les jours 
ralléongenVe, tournaisien. Dites : les jours s'allongent, LiTT.,les 
jours croissent, Agad. 

2*» Récurer. J'ai donné toute ma vaisselle à récurer, /a d*né 
totes mes hielle à r'hurir, liég. ; en mont. rescurer.On dit ordi- 
nairement icurer ; ce mot n'est pas un composé de curer ; 
c'est une abréviation de escurer, du hollandais schuren, même 
signification (Grandg.). 

3» Redire. Un auteur d'omnibus qualifie de wallonisme la 
locution trouver à redire à quelque chose, trovér à r'dire 
à 'n' saquoi, pour trouver à reprendre, à blâmer. Voici des 
exemples qui apaiseront ses scrupules. Il trouve à redire à tout 
ce qu'on fait, Agad. Il n'y a rien à redire à sa conduite, id. 
Trouver à redire aux choses les plusi innocentes. Mol. 

4« Remonter une montre, rimontér 'n' monte. On dit plus 
rarement : monter une montre. 



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5° Retenir quelqu'un de faire une chose, rit'ni V saqui dé 
fér nsaquoi. Benoit tient celte locution pour vicieuse. L'Aca- 
démie donne cet exemple : je ne sais qui me retient que je ne... 
Et Littré cite, entre autres exemples, les suivants, qui sont 
concluants : Bien des raisons doivent me retenir de parler, 
Maintenon. Cette considération ne m'a jamais retenu de faire ce 
que j'ai cru bon et utile, J. J. Rouss. — On dit aussi tenir que^ 
dans le même sens : Je ne sais qui me tient que je ne me fSiche 
contre lui, Acad. 

B. Mots non admis par l'Académie, du moins avec l'acception 
wallonne. 

l"" Raoouser. Méfiez-vous de lui, il est capable de vous 
raccuser, dimèfUz'V' di /u, U est eapâbe di vWaccusér^ liég. Dites : 
de vous dénoncer. — C'est lui qui nous a raccusis, c'est lu 
qu'nos a raccusé^ liég. Dites : c'est lui qui a rapporté contre nous 
(et non pas qui nous a rapportés, comme dit un recueil d'om- 
nibus; c'est probablement un lapsus calami). —\\ raccuse, i 
raocuse, mont. Dites : c'est un rapporteur, ou, il rapporte tout.— 
Ex. Mademoiselle, je ne veux point aller rapporter contre vous, 
Genlis. — Ne dites pas non plus raccusette; dites rapporteur. 
Lès raccusette attrapèt sovint 'n' raclêie^ ou ine volèïe. Tournez 
les rapporteurs attrapent souvent une volée de coups. 

2' Racheter ses bans, racheté ses ban. Dites : acheter des 
bans, c'est-à-dire obtenir k prix d'argent la dispense de faire 
publier des bans de mariage à l'église. 

S^" Racqultter une vieille dette, raequittér n'véte dette. 
Dites : acquitter une vieille dette (la payer, Acad.).— Aa^utl^^r 
quelqu'un, c'est lui faire regagner ce qu'il avait perdu : ce gain 
m'a racquitté. — 5^ racqultter est également fautif dans le sens 
du liégeois si raequittér, qui veut dire se libérer. Se raequittér 
ne peut signifier que regagner ce qu'on avait perdu, 

4« Rafistoler, mont. Dites : raccommoder, rétablir, réparer. 
Il est composé du verbe populaire afistolcr, qwi est dans Besche- 



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relie avec le sens de parer, accoutrer. Ex. Qui vous a afistolé 
de la sorle ? 

S*» Rahausse. Mettre une rahausse à une table, mette ine 
rihausse à 'n'tâve. Dites : mettre une hausse à une table, Agad. 

6* Raig^ser un couteau, rawhi on coûtai, liég. raiguisér 
in coutiau, mont, réwisiér in coutiau, rouchi, rewigiér un cou- 
/tau, lillois. Dites : aiguiser ; prononcez ni comme dans huile. 
Raiguisér se trouve dans quelques dictionnaires français avec 
le sens de aiguiser de nouveau ; il faut dire rimoudre, Acad. 

7« Raminoir une planche, raminchir enne planque, tour- 
nais. Dites : amincir. 

S"" Rappeler. S*il est condamné, qu*il rappelle, sHl est 
condamné, quH rappelky liég. Dites : qu*il en appelle, qu*il aille 
en appel, qu'il interjette appel.— Il faut également éviter de 
traduire mot à mot Tancienne locution : ji rattakrei jusqu*à 
Wetzlaer, je ra^éiçaerai jusqu'à Wetzlaer. Dites: j'irai en appel 
jusqu'à Weizlaer. Littré cite ce mot avec le sens de attaquer de 
nouveau, mais il ne donne pas d'exemple tiré d'un écrivain 
classique. 

9^ Rattendre. — Rattendéz ! rattindéz / liég. Espèce de 
menace. Dites : attendez ! Acad.— Après qui rattetidez-\om ? 
après qui rattindév' ? Dites: après qui attendez-vous? Acad. 
ou, qui attendez-vous ? — Je vous rattends tous, je vos rattinds 
ftertous, p. de Niv. Dites : je vous attends tous. - Rattendre 
quelqu'un dans un bois, rattinde ine saqui devint on bois, liég. 
rattinde eune saqui dins in bos, rouchi, ratinde eune saqui dins 
in bos, lillois, rattinde enne saqui dins in bos, mont. Dites : 
attendre quelqu'un dans un bois. M. Garpentier traduit par 
attaquer, assaillir. Pourquoi pas par attendre ? Nous lisons dans 
Bescherelle : attendre au coin d'un bois, et dans le Dictionnaire 
de l'Académie : des brigands m'ont attendu au coin d'un bois. 
De là vient le terme carolorégien et lillois in rattindeux, un 
malfaiteur. Il a été ratlendu, il a stu rattindou. Dites: des mal- 
faiteurs l'ont attendu au coin d'un bois. 



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^ 328 — 

10^ Recouper. Il faut recouper ce b&ton, il est trop long, 
i fàt fcôpir c^baston-là, il est trop long, liég. Dites : il faut rogner 
cebàtOQ-là, il est trop long, Agad. Se recouper les ongles, 
si r'côpér lès onke^ id. Dites : rogner ou couper ses ongles.— 
Recouper^c'esi couper de nouveau. Cet habit avait été mal coupé, 
il afollu le recouper; aux jeux de cartes, lorsqu'on n'a pas 
coupé net, il faut recouper, Acad. 

11« Récrire. Il récrit dans un bureau, i récrit su nHn 
bureau, mont, tournais. Dites : il écrit dans un bureau. — 
Récfire signifie, 1* écrire une seconde fois ce qu'on a déjà écrit, 
i"" écrire une seconde fois à quelqu'un, S*» faire réponse à une 
lettre, Agad. 

li"" Rôgaliser un chemin, régalisér in kémin, ou régaler in 
kémin, mont, rèwalér ine vôie^ liég. Dites : égaliser, égaler, 
aplanir, niveler un chemin. Régaler est admis par l'Académie 
en ce sens ; mais il est peu usité. 

13° Reguôrir. Il se reguérira bientôt, i s'riwèrihret bin rate, 
liég. Dites : il guérira, ou se guérira bientôt.— Il est reguéri, 
il est fguéri, mont. Dites : il est guéri.— Reguérir, s'il est 
français (il est dans Littré), ne peut signifier que guérir de 
nouveau. 

14» Relavures. Jeter les rHavures, mont., lill. taper les 
r'iaveûre, liég. Dites : Jeter la lavure, ou la rinçure d'assiettes. 
—Relaver la vaisselle, rt/at;^ lès hielle. Dites: laver la vaisselle. 
— Pierre à relaver, Pire a r' laver, liég. Dites : évier, ^ Relaver 
signifie laver une seconde fois : Après avoir longtemps lavé 
et relavé son œil crevé, Scarr. 

15*» Rentrer. On ne peut pas rentrer, on ripeutpont rintrér, 
tournais. On n'peut nié rintrér, mont. Dites : on ne peut pas 
entrer. Benoit signale ce belgicisme, qui est particulier au 
Hainaut. V. Tart. Rentrer, à son rang alphabétique. 

16" Renforcir un mur, rèfoïrci on meûr. Dites enforcii' 



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un mur. Mais on pourra se servir du composé renforcer: 
renforcer un mur. 

IT^" Répanoher de Teucre, répanchér cT F inke, iourmis., 
rapanchér (T V inke, mont. Dites : épancher de Fencre. Hais le 
liégeois rispâde di IHnche correspond au français répandre de 
Fencre. 

18* Rétamer une marmite de cuivre, ristainnér V marmite 
di keuve. Dites : étamer. Ici se termine l'article relatif à la parti- 
cule Re. 

Réfléchi. 1<» (Auxiliaire du verbe). Il s'a caché dans une 
pièce de blé, is*a cachi devint ine plaque di grain. Dites : il s'est 
caché dans une pièce de blé, ou dans un blé (Acad.). Je m'ai 
trompé, ji m'a marri. Dites : je me suis trompé. Il s'a Ikit mal, 
i s'a fait ma. Dites : Il s'est fait mal. Je m'avais engoué, ji 
m^aveus t-èkrouki (ou èlohij. Dites : je m'étais engoué. — Cette 
faute se commet dans toute la Wallonie ; aussi bien l'idiotisme 
est commun à tous les patois wallons. Voici quelques extraits du 
Bull. a. 70, i* livr. : Il s'a mis in service j pat. de Tournai. // s'a 
ttigagié au service d'en habitant (foupaû, Pâturages. Is'a ègagi- 
n'a un (Cl'èdrout-ny Bassilly [Enghien]./ s'aftéàsin cou, Lille. 
I s'a rueu à s'eou, Ghièvres. / s'a rué à s'cou, Leuze, Péruwelz, 
Pâturages, Bassilly. / s'a rué à s'goïé, Dour. / s'a r'wote à s'cou, 
Soignies. / s'a pindu à s'cou, Beaumont. / s'aj'té à s'co, Gosse- 
lies. / s'a ftéà s'cou, Nivelles. Is'a tapéàs'câ, Wavre. Isa tapé 
à «'(^u, Spontin. —Autres textes : Elle s'a rinvié (elle s'est 
réveillée), Armon. de Hons, a. 67, p. 19. Poquoi v'z avoz léï 
/recftt ? (pourquoi vous-étes vous laissé mouiller?) Aurmon. di 
Nameur, a. 70, p. 44.— J' m'ai sauvé, p. de Marche, Bull. a. 89, 
p. 169. 

Dans les langues germaniques, le verbe réfléchi se conjugue 
avec l'auxiliaire aroir : ail. ich habe mich betrogen, fi. ik heb 
mij/'eetrojfen; c'est littéralement le wallon ji m'a marn; angl. 
he has wounded himself, wall. t s'a quahi. G'est probablement là 



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l'origine de ce wallonisme. La substitution de être à avoir dans 
les verbes réfléchis en français est aussi ancienne que la langue. 
(Littré, au mot Se, rem. 7.) « Cet emploi de l'auxiliaire être 
s'explique par la nature passive des verbes réfléchis ou le 
pronom est le complément direct. Quand j'at blessé ma propre 
personne j iesuis blessé; voilà pourquoi on dit je me suis blessé. 
Cet usage a passé par analogie aux verbes pronominaux dont 
le pronom réfléchi est le régime indirect. » Plobtz, Gramm. 
franc, page 37. Quand l'usage se fut bien établi de dire je me 
suis coupé, la tournure je m'ai coupé le doigt, la seule qui puisse 
s'expliquer grammaticalement, parut choquante, et le solécisme 
je me suis coupé le doigt s'introduisit à l'aide de l'analogie. 

On a vu à l'article Me, ce qui concerne la place du pronom 
complément du verbe réfléchi, quand celui-ci dépend d'un 
autre verbe : Il se va mettre en colère. Une particularité de 
cette tournure est d'imposer au premier verbe Tauxiliaire être 
au lieu de avoir dans les temps composés, tout comme si ce 
premier verbe était réfléchi. Ainsi je dirai : il a voulu se noyer, 
et il s'est voulu noyer, et non pas, t7 s'a voulu noyer, i s'a volou 
nèï. Ex. Je m'imagine que tu ne t'es pu empêcher de rire, 
D'Ablancourt (Litt., au mot Pouvoir, 9). Un embarras qui a con- 
tinué et qui ne s'est pu débrouiller, Pascal. Ceci montre à sufli- 
sance combien l'auxiliaire avoir a<^colé au pronom réfléchi est 
antipathique à une oreille française. L'harmonie avant tout ! 
la grammaire est une esclave, et ne doit qu'obéir ! 

Regarder. Beaucoup de Liégeois et de Moniois substituent 
garder h regarder. Garde un peu. Dites : Regarde un peu. Peut- 
être cela provient-il de la tournure ardennaise waite one miette, 
ou montoise weite in pau. Agnel (page 5) dit que regarder a été 
autrefois la forme populaire, composée de re et de la forme 
ancienne esgarder, qui se disait seule. Cette forme esgarder se 
serait-elle conservée chez nous en s'abrégeant encore ? 

2*» Marie regarde après le chat, Marète louke aprè.s Vchèt. Diies: 
cherche le chat. L'allemand nach ehiei- sache sehn a un sens 



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analogue : s'informer de quelque chose, et le flamand naar iets 
zieiiy signifie chercher quelque chose, s'informer. 

"à"" Regarder à la maison, louU à l'mohonne, liég., tvaiti à 
ïmaujonm^ nam. Regardez à l'enfant, loukiz à l'èfant^ liég. 
Dites : Garder la maison, veillez sur Tenfant. 

Notons les tournures anglaises ta look to, chercher, et to look 
after, veiller à, prendre soin de. 

it"" Je regardais large^ v. Large, 3®. 

S» Regardez de prendre vos précautions, UmU de prinde vos 
précaution. Dites : Voyez à prendre vos précautions, Â Musset, 
le Fils du Titieii, IV. — Regardez d'être prêt pour dix heures, 
loukiz dresse prêlV po dixh heure. Dites : voyez à être prêt à dix 
heures. — Allez*s louki âxovri. Dites : allez voir aux ouvriers, 
AcAD. — Regarde à toi, louke à H, look to thyself^ angl.; regardez 
à vous, loukiz à vos. Dites : prends garde à toi, prenez garde à 
vous, ou, elliptiquement, garde à toi, garde à vous. 

6" Un recueil d'Omnibus prétend qu'on fait un wallonisme 
en disant : il i*egarde à un franc, i louke à on franc. Cependant 
regarder, d'après l'Académie, s'emploie intransitivement dans 
le sens de prendre garde, faire attention à. Ex. Avec lui, je ne 
regarde point à mes intérêts, Agad. Entre amis, je ne regarde 
point aux petites choses, id. Ne pas regarder à la dépense, 
Baron. Il ne regarde pas au peu que vous lui offrez, et il vous 
donne plus qu'il ne reçoit de vous, Mass. La phrase il ne regarde 
pas à un franc paraît donc correcte. 

7*» Je me ferais regarder pour un sot, ju rrifreûs louki p'on 
sol, verviélois. Dites : Je me ferais regarder comme un sot, ou 
je me ferais prendre pour un sot. Littré cite cependant cet 
exemple de J. J. Rousseau : Malgré les tristes assurances que 
vous m'avez données que vous ne me regardiez plus pour votre 
fils. Mais ailleurs Littré fait remarquer, à tort ou à raison, que 
cet écrivain, qui était de Genève, n'est pas toujours très-pur. 
V. LiTT. au mot Causer, rem. — Louki po est probablement un 
flandricisme : iemand voor zijnen vriend aanzien, regarder quel- 
qu'un comme son ami, le prendre pour son ami. 



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~ 338 - 

Remailler ses bas, remailler ou ermaïér ses cauches^ mont., 
Dites : faire des reprises à ses bas, les raccommoder. 

Remettre. 1* Ils se sont remis camarades, i s'ont fmettau 
camarade. Cette tournure populaire est signalée dans Littré. Il 
faut dire : ils se sont remis bien ensemble, c'est-à-dire ils se 
sont réconciliés. Ex. Je vous prie enfin de vous remettre bien 
ensemble, Mol. Sicilien^ 16. 

S* Ma sœur n*est pas à remettre à la vôtre, mi sokr n'est nin à 
remette à Vvosse, liég. Remettre ne peut signifier comparer, et il 
faut renverser les termes de la comparaison : Votre sœur ne 
peut se comparer à la mienne. — Il ne faut pas remettre bête à 
gens, t n'faut nié remette biette à gint, mont. Dites : il ne faut 
pas comparer une personne à une bête. 

Remoudou. Le terme français est fromage gras, que Littré 
définit : fromage qui est fait avec tout le lait non écrémé. J'en 
appelle aux fromagers hèvurlins, n'est-ce pas là leur fromage 
si... délicat? 

Ren&oler. Non, monsieur le Maire, je renâcle, nenni, mon- 
sien rmaieûr, ji r'nakel mot attribué à M»* Goffin. V. le wallo- 
nisme, j'ai si bieti fait, à l'art. Faire. Dites : Je suis rassasiée, 
j'ai mangé mon soûl. On dit aussi se rendre : Ex. Je ne puis 
plus boire ni manger, je me rends. Quoi! vous vous rendez 
déjà, AcAD. — On dit familièrement en français renâcler à une 
besogne, dans le sens de témoigner de la répugnance pour cette 
besogne. 

Rendage de compte, rindège di compte. Dites : reddition de 
compte. 

Rendement de maison, tindège di molwnne. Dites : arren- 
tement d'une maison. 

Rendre. Maison à vendre, à rendre ou à louer, mohone à 
vinde, à rinde ou à louer. Dites : à vendre, à arrenter ou à 
louer. 

Renon. l^' Son remn est valable, si r*non est valdbe. Dites : 
sa renonciation (acte par lequel on renonce). 



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- 333 - 

rai envoyé an renon à mon locataire, fa-l-èuai an r'nan à 
mHôcataire. Dites : J*ai donné congé à mon locataire. 

2« Je me suis fait un renon en cœur, ;t m'a fait on r'nofi â 
cour. Dites : je me suis fait une renonce en cœur, ou à 
cœur. 

Renoncer. 1® J'ai renoncé mon locataire, fa r'noncî m'iôca- 
taire. Dites : j'ai donné congé à mon locataire. — J'ai renoncé 
mon propriétaire, j'a r'nonct m'prôpriéiaire. Dites : j'ai envoyé 
une renonciation ù mon propriétaire. 

V II est renoncé de tous les médecins, il est r'nond d'tot lès 
docteur. Dites : il est condamné par tous les médecins, il est 
désespéré des médecins, il est abandonné des médecins, les 
médecins ne répondent plus de lui, on n'en attend plus rien, on 
désespère de sa guérison. 

Rentrer. 1» Bentrer en enfance, rintrèr enn* èfance. Forir 
a, je crois, fait un wallonisme en traduisant de la sorte. 
L'Académie ne donne que être en enfance, tomber en enfance, et 
Liitré y ajoute, retomber en enfance. Ex. On n'a pas encore dit 
que je fusse tombé en enfance, Volt. La crainte de retomber 
en enfance, Ghateaub. — On dira également bien : retomber 
dans l'enfance. Ex. Es-tu retombé dans l'enfance? X. Harm., 
dans Besch. Hais être dans Venfance n'est pas l'équivalent de 
être en enfance ; il signifie qu'on est encore enfant. 

â^" Rentrer un manteau, rintrér on mantai. Dites : ren- 
traire... 

Rentraire, c'est coudre, rejoindre deux morceaux d'étofTe, de 
sorte que la couture ne paraisse pas {Re—en^traire^ trahere, 
tirer). Les couturières liégeoises, en confondant rentraire avec 
rentrer, ne font que suivre l'exemple des couturières pari- 
siennes, et Littré cite un texte du Moniteur universel où le bar- 
barisme s'est glissé : A part les pièces de couleur qui sont 
rentrées avec un goût admirable. — Dites de même : un habit 
rentrait, c'est une belle rentraiture, Agao., quel beau ren- 



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- 334 - 

trayage ! Litt., que bai rintrège ! Ne dites pas un habit rentré, 
un habit rentrailé. V. Rassbrgir et Remailler, et l'art. Ré, 
B.18. 

Respect, l"" On lui a pardonné au respect de sa jeunesse, 
on Va pardonné à respect di s'jônnessey liég. Dites : eu égard à 
sa jeunesse, en considération de sa jeunesse. — Je l'ai fait à 
votre respect, ji Va fait à vosse respect, liég. Dites : par égard 
pour vous, à cause de vous. — A Mons, les beaux parleurs 
disent : à quoi resse, ou à quoi reste que vous n'êtes pas venu? 
à que respect que vos n'estez gnié v'nu ? Sigart (Resse et reste sont 
des formes corrompues pour respect). Dites : pourquoi n'étes- 
vous pas venu ? — A que respect avée sté à Mon ? — Au respect 
que dfavou nCrindage à payer. Tournez. Pourquoi avez-vous été 
à Mons. — Parce que j'avais mon fermage à payer. 

Respect, dans nos patois, a conservé le sens du latin res- 
pectus. Ex. Respectupaucitatis suae, iusT, y eu égard au petit 
nombre de ses soldais. Respecta mei, Ov. â respect d'mi, liég. en 
ma considération. Le sens primitif de respectas est action de se 
retourner pour regarder; et le patois de Tournai emploie le verbe 
se retoumei^ dans un sens tout à fait analogue : je ne m'en 
retourne pas, je n'm*in retourne pont, c'est-à-dire, je ne m'en 
inquiète pas, je ne m'en soucie pas (on ne peut dire, en ce sens, 
je ne m'en soucie ; on peut dire ironiquement : je m'en soucie 
bien ! ). Le français a conservé longtemps cette signification. 
Il avait plusieurs capitaines catholiques qui, haïssant le parti, 
n'y estoient qu'à son respect, D'âubigné. Il me suffira de vous 
dire que plusieurs respects me rendent chère votre personne^ 
Balz., dans Litt. 

2^ Sur respect, ou sous respect, ou sur votre respect, ou sous 
votre respect, locutions populaires traduites du liégeois su 
respect et du montois sous vote respect. Parlant par respect, 
autre locution populaire usitée dans le Hainaut (et en France, 
AcAD.). On s'en sert pour s'excuser de quelque parole qui pour- 
rait choquer ou paraître trop libre. 



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- 338 « 

Dans su respect, su est probablement une corruption de sauf: 
e respect (que je vous dois) étant sauf. Su respect, Monsieur, 
vos v*s avez marri. Traduisez : sauf le respect que je vous dois, 
ou, simplement, sauf le respect, sauf votre respect, sauf respect, 
avec le respect que je vous dois (Acad.), vous faites erreur, 
Monsieur. Ex. Je ne pouvais, sauf respect, faire mon grand 
tour sans l'assistance de ces deux messieurs [gendarmes]. 
Courrier. Sauf votre respect, il est assez difficile d'attraper ce 
qui peut vous plaire, M"»« Dud. 

Ressembler, l"" Vraiment, tu ressembles un fou, pas (\), ti 
ravise on sot, liég. Dites : tu ressembles à un fou. — A mesure 
qu'elle grandit, elle ressemble davantage sa mère, a fait qu'elle 
crexhe, elle airèïe si mère, liég. Dites: elle ressemble... à sa 
mère.- Il ressemble fort son père,i r'sônne fameûsdimint s'pére. 
Dites : il ressemble fort, il ressemble beaucoup à son père. — 
Il ressemble notre chat, il retombe toujours sur ses pieds, 
i r'chonne nosse chèt, i fchait todis su ses pidy prov. namur. 
Dites : il ressemble à notre chat... Gambresier, dans son Dic- 
tionnaire wallon, a commis cette faute, qui est assez fréquente : 
11 ressemble les anguilles de Melun, il crie avant qu'on l'écorche, 
i brait comme lès chin devant d'avu Vcôp, Il faut dire : il res- 
semble aux anguilles de Melun... 

L'étymologie de ressembler et de rissônner (re— sembler ; 
ri— sonner) montre à toute évidence que la construction wal- 
lonne est très-naturelle : elle ressemble sa mère, elle semble 
être sa mère de nouveau, c'est la reproduction, l'image de sa 
mère ; le mot mère est attribut. Par analogie, on a supprimé 
la préposition après airi et raviser. Au surplus ressembler 
quelqu'un s'est dit autrefois en France, comme il se dit en 
\\'allonie. Littré cite les exemples suivants : Ses pleurs... 
ressemblent un torrent, Malh. Cette majesté infinie... qui ne 

(<) D'après M. Delbœaf (note du Màîe Neur), pas est UDe corruption du français 
n* est-ce pas ? 



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~ 386 - 

ressemblent pas les grandeurs humaines, où il y a toujours 
quelque faible, Boss. La tournure actuelle n*a commencé à être 
employée qu*au XVI* siècle. L'autre, qui est restée populaire, 
même en France, est aujourd'hui bannie du bon style. 

2* Nous avons cinq doigts à chaque main; aucun ne teres- 
semble^ nos avons cinq deugt è Vmain^ et nouke ni s'ravise (prov. : 
tous les enfants d'une même famille ne sont pas de même carac- 
tère, de même mérite). Remacle a mal traduit, en supposant 
qu'on traduise un proverbe ; il fallait dire : et aucun de ces 
doigts ne ressemble aux autres. Le proverbe français est : Tous 
les doigts de la main ne se ressemblent pas, Litt. Aucun de ces 
enfants ne se ressemble, nouk di ces èfant ni s'risônne. Dites : 
aucun de ces enfants ne ressemble aux autres. 

Rester. Quand nous restiatis rue des Groisiers, quand nous 
resilmes à True des Croisiers, Arménaque de Tournai, a. 51, 
p. 33. Dites : quand nous demeurions... C'est une faute de se 
servir de rester au lieu de loger ou demeurer, Litt. 

Retomber. !<" Je ne puis retomber sur son nom, ji n'pous 
ratoumér so s'no^ Forir, fl. ik kan op zijn naam niet valleti. Il 
faut revenir, et la construction change. Son nom ne me revient 
pas, c'est-à-dire m'échappe, je ne m'en ressouviens pas. V. 
Revenir. 

2« Il a retombé. V. Tomber. 

Réussir, i^ Vous n'y réussirez pas, vos n'y riiussirez nin. 
Poyart prétend qu'on ne dit pas réussir à une chose, mais dans 
une chose. Il a réussi dans son dessein, dans ce qu'il a entrepris, 
AcAD. Réussir dans une carrière, Besgh. L'Académie dit cepen- 
dant : il est étourdi, il ne réussira à rien ; et Lamennais : vous 
ne réussirez à rien sans Dieu. — Ainsi avec une expression 
vague comme rien, y, etc., on dit très-bien réussira. 

2» Les vignes sont réussies cette année, lès vègne sont bin 
réïûssèïe ciste annexe. Un travail réussi, ine ovrège réiûssi. Une 
statue réussie, ine posteûre qu'est rèîûssèie. D'après Benoit, il 



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- 337 - 

faudrait dire : les vignes ont réussi, un travail qui a réussi, une 
statue qui a réussi. Nous croyons cependant que ces tournures 
sont employées par beaucoup de personnes qui parlent bien. 

Le verbe réussir recevait autrefois Tauxiliaire être : Qu'est-il 
réussi (sens étym. : re... exire, sortir) de tout cela autre chose, 
sinon un embrasement de convoitise en général? Langue (XVI« 
siècle). « Âu commencement du XVIP siècle, on disputait pour 
savoir si réunrir se conjuguait aussi avec l'auxiliaire être. C'est 
l'auxiliaire avoir qui l'a emporté. » Litt. 

Revenir. 1® Je ne retnens pas sur son nom^ ji n'rivins nin so 
s'no^ MiGHEBLS, Gram. liég.^ fl. ik iom op zijn naam niet. Le 
terme de revenir est bon, mais la construction est wallonne. Il 
faut dire: Son nom ne me revient pas. Ex. Son nom ne me revient 
plus, je ne m'en ressouviens plus, Acad. Ji r'vèrei so c'tnot-là. 
Tournez : ce mot me reviendra, Litt. V. Retomber. 

S"" On dit en wallon : ji revins (Tmesse sans faire entendre 
nécessairement qu'on vient de nouveau au lieu qu'on avait 
quitté. Dites simplement alors : je viens de la messe. 

3« Faire revenir des provisions de la eampagne, fér rim'iit dès 
porvûzion cFà V campagne. Dites, avec l'Académie, faire venir... 

4^* L'ail que j'ai mangé m'a revenu toute l'après-midi, îé« a 
qui jfa magni m'ont riv'nou lots Vaprès-dlné, liég. Dites : m'est 
revenu. V. Tomber. 

Revoir. A revoir, à ravoir ^ pat. de Mons, à r'veûîe, pat. de 
Dinant; à r'voir, Avant, de Jean de Niv., page 25; à ravoir, pat. 
de Tournai. Il faut dire : au revoir. Ici revoir est pris substan- 
tivement comme dans l'expression allemande mm Wiedersehn. 
U s'ensuit que la tournure a vous revoir est également fautive. 
A revoir en ce sens (adieu), est une faute qui se commet égale- 
ment en France. Ex. A revoir, dans Angèle^l, 5, À. Dumas père, 
et Montalembert, Lettres^ éd. Lecoffres, p. 8t. A Liège, où elie 
est si fréquente, elle ne constitue pas un walionisme; carie 
patois de Liège dit : â r'vèï, ou d fvèie^ ce qui rend exactement 



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- S38 " 

ott revoir. On dit aussi jnsqu*â f^vèi, jusqu'au revoir. À rewir 
est français, mais on se sert de cette locution pour dire qu*il 
faut foire un nouvel examen d'un compte, d'une citation» d'un 
écrit, etc. 

Rien. 1«I1 ne restait plus rien grand'chose, i rC restait put 
rii gratuTchose, mont. Rien est inutile : Il ne restait plus grand' 
chose. 

S^ Ce n'est rien de eela^ ci n'est rin découla. Formule dont on 
se sert pour se défendre d'un remerctment qu'on trouve trop 
grand. V. un autre emploi à l'art. Pardonner. 

La vraie tournure française est il n'y a pas de quoi. L'Aca- 
démie et Bescherelle donnent la locution complète : il n'y a pas 
de quoi me remercier, mais Littré donne la locution abrégée, et 
cite cet exemple de d'Alembert : Il n'en ordonne pas moins des 
prières pour remercier Dieu de ce que.... ; je m'imagine que 
Dieu répondra qu'il n'y a pas de quoi. — A Tournai (et en 
France, d'après Littré), on emploie également de rieti dans le 
sens de : il n'y a pas de quoi, ou ce n*en vaut pas la peine. 

3* On ne sait, on ne dit, on ne fait rien d^autre, on n*sét, on 
n*dit, on n* fait rin d^aute^ liég. on ri fait rii d^auie^ mont, 
il. niets andtrs. Je n'ai rien d^autre à vous donner, ji ria rin 
d^auteàv*dinér, liég. Il faut : on ne sait, on ne dit, on ne fait 
rien autre chose, et, plus souvent, on ne sait pas autre chose. 
Je n'ai rien autre chose, ou je n*ai pas autre chose à vous 
•donner. — Ex. Si vous n*avez rien autre chose à m*apprendi^, 
E. ScR. On ne fit autre chose cette nuit-là que de veiller, Lm. 
Il ne fait autre chose que... Acad. On ne pouvait attendre autre 
chose de lui, Litt. N'avez-vous, Nicomède, à lui dire autre 
chose? Corn. Maintenant Eve, attachée au fruit tout entière, ne 
regardait rien autre chose, Chateaubr. Par. perdu; 1. 9. 

4'' Un morceau de rien du tout, on l/oquet d^rin du tout, pat. 
fl. etwat van niets. Dites ; un tout petit morceau, ou moins que 
rien. 



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- 339 - 

Rom. La rose est souvent doutoureose, U rô$e (11. de roos) ^i 
siwint doloreuse. Dites : Térysipële est souvent douloureux. 

Ruse. 1* Pour peine, embarras. Il a eu bien des ruses, il a eu 
bin dès ruses, p. de Mons et de Tournai. Dites: il a eu beaucoup 
de mal à faire telle chose, il a eu beaucoup d^embarras, cette 
affaire lui a donné beaucoup d*ennui, Lirr. Cette locution est 
très-usitée dans le Hainaut. — Ruse, en ce sens, existe aussi 
dans le patois de Liège. Ex. Vos âre% délie ruse dé v*ni à bout 
découla. Forir traduit mal : vous aurez du mal de venir à bout 
de cela. — On lit dans Besch. : Avoir du mal (travail, peine) à 
gagner sa vie, à faire une chose. 

2» Pour dispute, tracasserie, réprimande. Faire des ruses à 
quelqu'un, fit dès ruse à V saki, liég. iemand ruu aandoen, 
pat. fl. Dites : faire une tracasserie à quelqu^un, le chicaner, lui 
susciter des difficultés, chercher chicane à quelqu'un. — J'aurai 
des ruses, si je n'étudie pas, j'arei dès ruse, si f n' étudie 
pont, tournais. Dites : je serai grondé. — Le français fuse 
signifie moyen qu'on emploie pour tromper. Le renard est 
fameux par ses ruses. 



Sabonle. Tu auras une saboule, foras 'risabouU, p. de Mons 
et de Tourn., vos ârez 'ri saboulUe, ine saboulâde, p. de Liège, 
ine saboulâde, p. de Marche. Dites : une verte réprimande. Ce 
mot correspond aux termes populaires cités p2iTL\i\xésaboulage, 
saboulement, savon. Il faut éviter avec soin ces expressions. Le 
patois de Liège entend aussi saboule dans le sens de voUe de 
coups. 

Saigner. Il saigne par le nez, ou au nez,i sonne po Fnarenne, 
fl. Mj bloedt door de neus. Cela ne se dit pas. La seule tournure 
correcte est : Il saigne du nez, au sens propre, et au sens figuré 
de manquer de courage dans l'occasion. En ce dernier cas, on 
dit aussi : le nez lui saigne. 



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— 340 — 

Salade, l"" Salade aux pommes de terre, salade àx crompke, 
salade à la chicorée, zalâde à rsécoréie, salade aux navets, 
salade âx navai. Dites : salade de pommes de terre, de chicorée, 
de navets. On dit aussi salade de laitue. D'après Littré, cette 
faute se commet aussi dans quelques provinces de France. 

2* Semer de la salade, sèm& delk salade. Planter des salades, 
planter dès salade, Kepiquev {Un. , non admis par TAcad.) des 
salades, ripiquéi* dès salade. Il vaut mieux dire semer, planter, 
repiquer des laitues. Le mot salade désigne abusivement, dans 
le langage des jardiniers, la plante même qui fournit la salade ; 
étymologiquement, c*est un mets composé de divers ingrédients 
assaisonnés avec du sel, etc. (lat. sal, le sel). 

Saunier. Le saunier pendu à la cheminée, li sânî pindau à 
Vchiminéie. Dites : la sauniëre pendue... Saunier, en français, 
désigne non pas le vaisseau, le coffre qui contient le sel, mais 
l'ouvrier qui fait le sel. 

Savez, saveZ'Vous, sais-tu. Je ne suis pas méchant, savez- 
vous^ ji n'sos nin méchant^ savéz^ liég. Il n*est pas avare, gavez- 
vous, i nest nin pisctosse, savez, liég. Vous viendrez, savez, vos 
véréz, savez, mont. Tu viendras demain, «ai^-lu, H vêreis demain, 
sés's, liég. te viendras demain sès'V (prononcez sette), tournai- 
sien. Savez est tout à fait barbare, et n'est en usage que parmi 
le peuple, qui l'emploie d'un bout à l'autre de la Wallonie ; en 
effet, il figure jusque dans le Dictionnaire du patois de Lille 
(Vermesse) : savez, prononcez savaye. Quant à savez-vous et à 
saiS'tUy ils se glissent Jusque dans le parler des gens instruits, 
tant le Wallon aime à se servir de ces locutions ! nos frères de 
la partie flamande nous les ont empruntées et en font un aussi 
prodigieux abus que nous ; les Maroliens notamment accen- 
tuent le savez d'une façon toute particulière : savèye. Nos spiri- 
tuels voisins d'Outre-Quiévrain aiment à faire leurs gorges 
chaudes de cette manie que nous avons d'ajouter ces mots à la 
queue de certaines phrases. Il n'est pas un Parisien qui ne 



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- 341 - 

• 

croie singer la langue des Belges en saupoudrant quelques bouts 
de phrases de notre éternel savez-vous. De grâce, messieurs les 
Français, soyez indulgents pour notre savez-vous; vous émail- 
lez votre conversation de vous savez, tu sais, qui me semblent 
tout aussi contestables, et nous ne nous sommes jamais 
gaussés de votre dis donc ; nous le supportons plus patiemment 
que vos voisins du sud, qui vous ont surnommés los didones. 
Passez-nous la casse, nous vous passerons le séné. Il est de 
fait que beaucoup de Belges ne peuvent pas dire deux mots sans 
recourir à ce simpiternel savez-vous, cousin germain de paraît 
et de de. Mais de là à le bannir complètement, il y a loin, et 
nous pensons qu*on pourrait citer plus d*un passage d*auteurs 
français où la locution n*a pas d*autre signification que le savez 
des Wallons. Voici un texte qui ferait certainement rire un 
Parisien, si on le lui donnait comme étant d'un Belge : Elle est 
jeune, elle est jolie, Angële, et je suis, sinon jalouse, du moins 
inquiète ; c'est terrible, savez-vous, pour une femme de trente- 
un (^ ) ans, d*avoir près d'elle une jeune et blonde tête comme 
celle-là ! Dumas père, Angèle. Etymologiquement, cette locution 
s'explique : c'est un appel que l'on fait à son interlocuteur, pour 
s'assurer s'il sait la chose dont on parle, et l'emploi nous en 
parait parfaitement légitime chaque fois qu'on peut le trans- 
former en le savez-vous bien î Ainsi je prends cet autre exemple 
de VAfigèle de Dumas : Mais vous pouviez vous perdre avec moi, 
le savez-vous bien?- Il s'agit d'un personnage qui s'est 
exposé en sauvant la vie de celle qui parle. Je substitue savez- 
vous ? à te savez-vous bien ? Mais vous pouviez vous perdre avec 
moi, savez-vous ? Et dans ce cas savez-vous est tout à fait con- 
forme à l'usage qu'en font les romantiques modernes. Quelque- 
fois on peut le remplacer par vois -tu, voyez-vous. 

Savoir. Il ne sait pas être payé, i n'sait né iesse pal, 
Bbrnus, 24. Diles : il ne peut être payé. Mais on dira avec 

(*) Trente-un est fautif. V. Et. 



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— 342 - 

l'Académie : il ne sait pas ouvrir celte porte, ayant la clef dans 
sa main. Dans le premier cas, on veut marquer rimpossibilité 
de la chose en elle-même, dans le second, l'impuissance morale 
oii Ton est de faire une chose. — Hais au conditionnel et au 
plus-que-parfait du subjonctif, savoir s'emploie pour pouvoir 
(Littré). Ex. Elle avait ouï dire que M. de Grignan était le plus 
beau garçon qu'on eût su voir, Sêv. 

2** Si on savait d'être un ménage comme celui-là ! on se 
marierait, si on sâveût dresse on manège comme ci-là! on s^ma- 
rHereut. Dites : si l'on savait que son intérieur ressemblerait à 
celui-là ! on se marierait. — Si on savait de pouvoir Tapaiser ! 
ri on saveût de poleûr el rapdxhter ! Dites : si je savais qu'on pût 
Tapaiser ! Savoir signifiant connaître^ avoir connaissance de 
ne peut régir un infinitif; il faut remplacer Tinfinitif par une 
subordonnée commençant par que, sauf le cas où Ton peut em- 
ployer la proposition infinitive : Rebecca prépara le mets qu'elle 
savait être agréable au palais du vieillard. Au sens de avoir le 
pouvoir, la force, l'habileté de faii*e quelque chose, il se cons- 
truit avec rinfinitif, mais sans de : je saurai bien me défendre. 

Seau. Il pleut à seaux, i plout à sèiai. Dites : il pleut à 
seaux ; prononcez sa (une syllabe), et non pas sé-au (deux 
syll.). Le peuple dit encore sid à Paris ; sé-au est l'ancienne pro- 
nonciation française, et c'était la bonne, vu que ce mot repré- 
sente le latin silellus, mais l'usage actuel contracte eau en au, 
et l'usage est un tyran auquel il faut se soumettre quand 
môme* 

Seo. Des objets sèches^ se dit à Tournai, pour des objets 
secs. Cette faute se commet quelquefois à Liège, grâce à la 
forme virallonne sèch. On sèch drap, un drap sèche. Dites : un 
drap sec. D'autres font parfois la faute inverse: Avoir la bouche 
sec, les mains secs ; elle provient de ce que l'adjectif virallon 
n'a qu'une forme pour le masculin et le féminin. Dites : la 
bouche sèche, les mains sèches. 



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- 34S - 

Séché. Oa ne dira pas des prunes séchées, tout court, dès 
souwéiès prenne. Il fsiut dire des prunes séchées au four, ou 
mieux des ptunes sèches^ Acad. ; on dit aussi des pruneaux, 
flennequin prétend que prunes ne peut se dire que du firuit frais; 
l'exemple de TAcadémie contredit cette assertion. 

Selle. Aller à selle, liég. zu Stuhl gehen,M. Dites : aller ii la 
selle, ou à la garde-robe. Ex. Cette médecine Ta fait aller deux 
ou trois fois à la selle. On dit aussi pousser une selle. Ex. Il est 
très-vrai qu'un homme qui n*a pu venir à bout de pousser sa 
selle, sera plus sujet à la colère qu'un autre, Volt, dans Litt. Le 
mot selle^ du latin sella, petit siège, désigne en vieux firancaia 
un petit siège de bois à trois ou quatre pieds sans dossier (m 
ham*) ; de là la tournure avec Tarticle : aller à la selle. 

Semaine, l"" J'irai vous voir à la semaine, ji v*s irei viîe à 
Csamainne. Dites : la semaine prochaine. 

2* La semaine qui vient, li samainne qui vint. Cette tournure, 
blâmée par H. Carpentier (i) et Forir, est admise par l'Aca- 
démie, Bescherelle et Littré. Ex. L'année, le mois, la semaine 
qui vient, Acad. Bbsch. Je crois toujours partir la semaine qui 
vient, Sêv. Je n'aurai que trente ans à Noël qui vient, 

SCARR. 

Sembler. Dites ce qui vous en semble, Dihez çau qu*i v's è 
fônne. Il faut : ce quHl vous en semble. — Le mieux de tout, 
à ce qui mo semble, c'est de lui adresser la parole, li mèieiw 
(TM, à çou quH m^sônne, c'est d^Varâini. Dites : à ce qu'il me 
semble. 

Serre. 1* Le pëoe d'une serre, U pielle d'ine sire. Dites : 
d'une serrure ; prononcez sè-rur' et non pas s'rttr".— Une serre 
de fusil , ine sére di fizik. Dites : une batterie de fusil. 

Le wallon est, je pense, le seul rameau des langues romanes 

(*) Ao moi Semaine^ mais U l'admet au moi Venir; c*eai un lapsut. 



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- 344 - 

où se retrouve, avec le sens de serrure, le mot latin sera, qui, 
comme Ta prouvé Rich dans son Dictionnaire des antiquités, 
désignait un cadenas mobile, et non pas une serrure fixe. 
Ailleurs les formes doivent être dérivées du bas-latin fictif 
serratura (avec deux r) et non seratura (avec une r), les langues 
romanes ayant confondu sera cadenas, avec serra la scie. 
Toutefois le mot serre s*est maintenu dans la langue française 
avec le sens de pieds des oiseaux de proie, ou de galerie close 
de vitrages , oU Von serre les plantes, 

3<* Laisser une porte sur la serre, ou , sur la serrure, IH 
'riouxhe so sire. D*aprës Forir, le sens est : laisser une porte 
entre-bâillée, entr'ouverte, ne pas la fermer entièrement. Je 
crois que la tournure a aussi le sens de l'expression montoise 
tëUr Vporte su serre, qui signifie la fermer sans tirer les verroux 
ou sans tourner la clef. A Lille, on dit qu'une porte est sur 
ierre, lorsqu'elle n'est fermée qu'à la clancbe (clinque). 

Serrer. Serrer la porte, sèrér Vouxhe ; serrer le tiroir, 
l'armoire, sèrér Fridant, Vârmà. Dites : fermer... On dit aussi à 
Tournai serrer Vuche, à Mons serrer Ffemiette, serrer Cporte, et 
à. Lille serrer Fporte, 

Il est assez étonnant que dans les dialectes septentrionaux de 
la langue d'Oi/ aussi bien que dans les dialectes méridionaux de 
la langue d'Oc, le vieux mot cWre, du latin claudere, fermer, ait 
été presque entièrement détrôné par le même mot serrer, du 
latin serare, fermer avec un cadenas (Litt. étym. de setrer). 
Dans le centre de la France, le mot serrer, dans ce sens, est 
complètement inconnu, et Ton emploie presque toujours fermer, 
du latin firmare, rendre ferme, rendre fixe, et rarement clore.— 
Serrer, en français, signifie : 1* étreindre, presser : serrer la 
main à quelqu'un ; ir mettre en sûreté : serrez votre argent, 
serrer quelque chose sous la clef, Acad. 

Si, adverbe. I** Si longtemps qu'il aura de l'argent, 11 fera 
bombance, si longtimps qu'il âret dès aidant, i gasCreit, Dites ; 



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- 346 - 

aussi longtemps qu'il aura de l'argent, ou tant qu'il aura, ou 
tandis qu'il aura... 

MM. Benoit et Garpentier disent que si lotigtemps que doit 
être remplacé par tant que» Est-ce à dire que la locution tout 
entière soit mauvaise? Nous lisons dans les Dictionnaires de 
TÀcadémie et de Bescherelle que tant que est Téquivalent de 
aussi longtemps que. - Aussi longtemps que vient du latin ou 
des langues germaniques : ail. sa lange aïs ich leben werde, fl. 
zoo lang (als) ik zal leven^ si hngtimps qu^ji vicrei; latin quandiu 
vivet. Tant que paraît plus usité que aussi longtemps que^ et il 
me semble plus élégant. Tandis que^ dit Ploetz, [Gram. franc, 
1871, p. 340) correspond à l'allemand so lange als; cette signi- 
fication n'est pas signalée par l'Académie. En voici des 
exemples tirés des meilleurs auteurs : Tandis que les Cretois 
conserveront ces passages«nouscroirons toujours qu'ils veulent 
usurper nos terres, Fén. Le sénat avait refusé à Pyrrhus de 
faire aucun accommodement tandis qu'il serait en Italie, Mon- 
TESQ. Tandis que vous vivrez, le sort, qui toujours change, Ne 
vous a point promis un bonheur sans mélange, Rag. 

Revenons à si employé pour aussi. Voilà ce qui constitue en 
réalité le wallonisme de la phrase citée en tête de l'article. Il 
y a entre si et aussi la même différence qu'entre tant et autant 
V. Autant. Si marque extension ; aussi marque comparaison. Il 
a déjà été question de cela à l'article Aussi, où nous avons vu 
que ce dernier mot peut quelquefois s'employer dans le sens de 
si, c'est-à-dire pour marquer l'extension. De même si peut se 
mettre parfois pour au^^i, dans certains cas particuliers, indiqués 
dans tous les manuels. 

S*" Il a si tant bu, qu'il est ivre, il a si tèlemint bu qu'il est sa. 
Le si constitue ici un pléonasme vicieux qui est admis en 
wallon (mont, si tant si fort), mais iqui est insupportable en 
français. Dites : il a tant bu que... 

Si, conjonction. S'il m'aurait écouté, il ne serait pas si mal- 



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heureux, si nCàriut hoûtéy i n*sèreûî nin si mdlhûreux, liég. Si 
j'aurais le temps, sifdreûs Ftimps, liég. Dites: s*il in*avait écoulé, 
si j'avais le temps... S'il /^ai( aulrement, si i ferait autrémint^ 
mont. Dites : s'il fesait... H. Garpentier dit : « Si ne doit jamais 
être suivi du conditionnel. » Il faut distinguer. Il y a le si con- 
ditionnel ou suppositif, et il y a le si dubitatif ou interrogatif. 
La règle que je viens de citer ne se rapporte qu'à si marquant 
une condition ou une supposition. Ainsi l'on dira très-bien : Je 
doutais si vous viendriez à bout de cetie affaire. Je vous deman- 
dais si vous viendriez avec moi dans le cas où j'entreprendrais 
ce voyage. Demandez-lui s'il serait venu avec nous, supposé 
qu'il n'eût pas eu affaire ; le dernier exemple est tiré de Girault- 
Duvivier. — Si conditionnel ou suppositif se construisait autre- 
fois en français avec le conditionnel. Littré cite plusieurs 
exemples de cette construction, empruntés même aux écrivains 
du grand siècle. V. un exemple à l'article Gager. Le wallon a 
donc conservé ici encore l'empreinte de la vieille langue. Nous 
nous hâtons d'ajouter que, dans le wallon, la construction fran- 
çaise tend à supplanter la construction wallonne^ et il n'est pas 
rare d'entendre dire : si l'èfant aveut polou lére^ For., Bu//., a. 
60, p. 68, 2« livr.; sifaveûs FlimpSy sHl aveât fait mèïeû; s'an 
aveût dit Vpriire, Hock, Bull. a. 60, p. 81, ï« 1. — On peut encore 
dire : s'il m'avait eu écouté, et s'il m'eût écouté, si m'aveût-st-aou 
hoûté, si m'avaxhp. hoûté, c'est-à-dire qu'on peut substituer au 
plus-que-parfait de l'indicatif, le plus-que-parfait surcomposé, 
et le plus-que-parfait du subjonctif; les deux tournures 
wallonnes appartiennent au langage courant, mais les deux 
tournures françaises correspondantes sont peu usitées, et la 
dernière, si l'on en abusait, rendrait le style apprêté. 

Plusieurs patois wallons emploient aussi le conditionnel après 
comme si : C'est comme si vous chanteriez, c'est comme si vos 
chontroz, p. de Hannut. Dites : c'est comme si vous chantiez. 
— La bière ressemble à du purin (partie liquide du fumier, Litt.); 
cela n'empêche pas qu'on en boive tout comme s'il en pleairait^ 



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- 347 - 

d bUre^ eh'est comme du puriéau (*) ; cha nHmpiche pont qu'on en 
héot tout comme si in pleuvreot, Arménaq. de Tournai, a. 81 , p. 
16. Dites : tout comme s'il en pleuvait. — G*est comme s'il n'au- 
rait rien fait, c'est tôt comme sH n'dreût rin fait, liég. Dites : 
c'est comme s'il n'avait rien fait. M. Carpeniier est d'avis que ce 
sont des flandricismes; je doute que cela soit. On dit en flamand, 
avec l'imparfait du subjonctif : als ofhij niet wist ; le wallon dit 
aussi comme si n'savaxhe nin (ailleurs, (^otnrn^ si n'seppixhe nin) ; 
et l'allemand emploie même le présent du subjonctif : er sprach 
alsob ailes gelungen sei, i pârléve comme si tôt fourixhe rèîûssi, 
il parlait comme si tout avait réussi. Il semble plus probable 
que ces conditionnels wallons après comme si sont des formes 
obsolètes. 

Sirop, l^" De la sirope^ de Vsirôpe, fl. sf'roop, fém. Grossier 
wallonisme pour du sirop. 

S^" Sirop aux groseilles, aux mûre&, sirôpe dx gruzalle, dx 
âmône. Dites : sirop de groseilles, de mûres, ou rob de mûres. 

Soldat. Il a parti soldat du temps de Napoléon, il a parti 
saudar du timps d'Napoléon, p. carolor. Beknus, 24. Dites : il se 
fit soidat. 

Songer. Une jeune fille qui ne songe autre chose que de 
plaire, itie bdcelle qui n'songe aute choi qu'dè plaire. Dites : qui 
ne songe à rien autre chose qu'à plaire, ou qui sons:e qu'à plaire. 

Généralement songer, au sens de penser, considérer, est 
intransitif. Songer quelque chosCy c'est rêver quelque chose. Ex. 
rai songé telle et telle chose. Qu'avez-vous songé cette nuit ? 
ÂGAD. Toutefois on dit quelquefois activement et fkmilièrement, 
même au sens de penser, considérer : J'ai songé une chose, 
pour j'ai songé à une chose, Acad. 

Sonner à mort, sonner à moirt. Dites : sonner pour un mort. 

(M A la ducasse d'Ere, dans la banlieae do Toarnai. 



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Ex. Sonner pour les morts, âcad., Besgh., Litt. J*ai trouvé 
sonner aux morts, dans M. Lubin et C'« (XV), ouvrage du roman- 
cier français Constant Guéroult. II est probable que c'est là 
aussi une locution populaire. V. Transe. A mort est une locution 
populaire qui s'emploie en France dans le sens de excessive- 
ment. Ex. Boire à mort. 

Sortir. Sortez votre verre, boutez vosse verre fou. Les beaux 
parleurs traduisent quelquefois ainsi le wallonisme dans cer- 
taines parties du pays de Liège, par exemple dans le canton de 
Fléron ; il faut dire videz votre verre. 

Sot. l"» De la sotte forine, farine sotte, pat. de Mons; dette sotte 
faretine, liég. Dites : de la folle farine. 

2<* Il est devenu sot, i est div'nou sot, liég. il a dév'nu sot^ 
mont, hij is zot geworden, fl. Dites : il est devenu fou, c'est-à- 
dire, il est tombé en démence. 

3"* Elle est sotte après lui, elle est sotte après lu, liég. elle est 
sotte di li, namur. zij is zotachter hem, fl. Dites : elle est folle 
de lui. 

Soûlée. Une —, ine sôléie. Dites : un ivrogne, ou une 
ivrognesse. — Soûlée figure dans Litlré comme synonyme 
populaire de partie de table où l'on s'enivre. — Soùlard, arde 
{sôlêïe) est également populaire (Littré). 

Soûler. On Ta soûlé, on Fa sôU. Dites : on l'a enivré. — 
Soûler dans le sens particulier de enivrer, est un terme bas. 
Mais on dira très-bien : il aime le gibier, on l'en a soûlé, c'est- 
à-dire gorgé, AcAD. Evitez de même le mot soûl dans le sens 
restreint de ivre. 

Sul\|onctif. Le — pour l'indicatif, l*» Il y a quelque chose 
comme huit jours (Litt.) qu'on ne vous ait vu, igna âtou d'haï 
jou qu'onn'vis aie vèïou. Dites : qu'on ne vous a vu. — Il y a 
assez longtemps que je n'aie vu votre frère, gna n^hapBe qui 
i' nâte vèiou vosse fré. Dites : que je n'ai vu votre frère.— Après 



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un verbe unipersonnel qui exprime quelque chose de positif, 
on emploie Tindicatif et non pas le subjonctif. 

S"" A le voir se requinquer de la sorte, il faut croire qu'il ait 
des mille et des cents, d Vveie fignoler ainsi^ fât creure quHl aïe 
des cint et des rinte.. Dites : qu'il a. 

3^ Il s'est bien passé des années depuis que je ne vous aie 
vu, i s'a bin passé dès annêie dispôïe quiji n'vis âïe vèîou. Dites : 
il s'est bien passé des années depuis que je vous ai vu pour la 
dernière fois. 

4'' Tout riche qu'il soit^ tôt riche qu'i seule. Dites : tout riche 
qu'il est. -— Après tout... que, on emploie l'indicatif; toutefois 
il y a actuellement tendance à employer le subjonctif. 

5* Savez vous ce que vous fassiez, savez-v* bin ç<m qtC vos 
fisse. Dites : savez-vous ce qu'il faut faire, ce que vous devez 
faire. 

Sucre. Du sucre de pot, de souk di pot, potsuiker^ pat. fl, 
Dites : de la cassonnade. Gardez -vous de dire castonnade, 
comme dans le Hainaut et dans certaines parties de la France. 

S*" Du sucre andi, de souk andi, For. Dites : du sucre candi. 

Suer, pour sécher. V. Essui. 

Sui. Il a marché le premier, et je l'ai sui^ il a roté Vprumi, 
et mif ta su, hég., ;" Vai sui, mont. Dites : je l'ai suivi. Dites de 
même poursuivi et non pas poursui. — S'il faut en croire 
Micheels, su et porsû seraient des barbarismes, car il ne donne 
que les formes suvou et porsuvou. 

Sujet. Ghai:ger souvent de sujets, cangi sovint d'sujet, dikwijls 
van sujekten veranderen, pat. £1. Dites : de domestiques. — Mes 
sujets, mes sujet. Dites : mes gens. 

Sur. l** Il vit sur ses rentes, i vique so ses rinte; fl. hij leeft 
op zijne renten. 

Nous avons dit, au mot avec, qu'on dit vivre de; cependant 
on dit quelquefois vivie sur ; et si l'Académie a l'expression 
vivre de ses épargnes, Bescherelle donne la tournure vivre sur 



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ses économies; il cite ce texte de la Fontaine : Il était de ceut- 
là qui vivent sur le public ; et nous lisons dans J. Simon : Le 
ménage du maître vit quelques jours sur ses épargnes, L^Ou- 
vrièrêy p. 46. — Quoi qu'il en soit, vivre de est beaucoup plus 
employé, et il vaut mieux dire : Il vit de ses rentes. 

2* Se retourner sur quelqu'un, ri r' tourner so n'saki, liég., 
i*artoumér su *n* saki, mont. Dites : vers quelqu'un. Ex. Quand 
je l'appelai, il se retourna vers moi, Agad. 

3* Il est sur la cour, il est su Vcour, tournais., er ist aufdem 
Hof, ail. Dites : il est à la cour. —J'ai rencontré trois fois votre 
frère sur la rue, fa rescontré treûs fêle vosse fré so Frowe. Dites: 
dans la rue. — Toutes les femmes se retournaient quand il 
passait sur la rue, totes lès feumme si rHoumt qwand i passive so 
Vvôiej HocK, Bull., a. 60, p. 84, 2* p. Dites : dans la rue. — 
AIL auf der Strasse^ fl. op de straat. — Je le vois toujours en 
rue, fel veûs todis è Frowe. Dites : je le vois constamment dans 
la rue. — Il se promène en rue, i s'pormône è Frowe. Dites : 
avec l'Académie : il se promène par la rue. 

Cependant il y a des cas où so l'rowe doit se rendre mot pour 
mot. Ine mohonnne qui donne so Crowe^ une maison qui donne 
sur la rue, Litt., ou une maison qui regarde sur la rue, Besgh. 
— • EstéZ'V'bin logi f Awèji sos logi so Vrowe. Étes-vous bien 
logé ? Oui, je loge sur la rue (Litt.), c'est-à-dire j'ai un logement 
qui a vue sur la rue. Hais wisse logiz-v'î au sens de dans quel rue 
habitez-vous ? se traduirait par : dans quel rue logez-vous ? 
— D'après cela,«i t'ni so Frowe, couki so Frowe^ qudrti so IWowe^ 
logiso Frowe, pourraient se traduire par se tenir (c'est-à-dire 
être habituellement) sur la rue, coucher sur la rue, appartement 
sur la rue, coucher sur la rue. Toutefois il semble préférable 
de dire : se tenir sur le devant, coucher sur le devant, appar- 
tement sur le devant, Acad., loger sur le devant, id. — Ex. 
Pour dormir dans la rue, on n'offense personne, Bac. Je ne suis 
pas à jeter dans la rue, La Font. Je loge dans la rue Saint-Bo- 
noré, Litt. Les croisées donnent sur le jardin, Litt. Cette mai- 



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- 851 - 

son, cette fenêtre, cette galerie regarde sur la rivière, sur le 
jardin^ Acad. Et, avec ellipse : Une grande chambre blanchie à 
la chaux, avec deux fenêtres en guérite sur la rue, Erckmàn^Ch. 
UUt. (tun homme du peuple. 

4* J'ai été sur le grenier, fa stu so rgrini, (fl. op den zolder 
gaan) monter «tir le grenier, monter so rgrini; mettre sur le gre- 
nier, mette so rgriniy liég. mette su Fguemier, mont. Dites : 
au grenier. On dit aussi : mettre dans le grenier, Acad. 

S® Il écrit sur un bureau, t serit so on bureau, liég. t récrit 
su nHn bureau ^ moni.; fl. hij schrijft op een kantoor. Dites : il 
écrit dans un bureau, ou il est dans un bureau. Dites de même: 
travailler, être, mettre dans un bureau. -^ Ex. Tu es dans un 
bureau, c'est modeste, mais c'est honorable et suffisant, Dcmas 
fils, M. Alphonse. 

Bureau, diminutif de bure, signifie d'abord grosse étoffe de 
laine ; ex. vêtu de simple bureau. Bon. ; puis le tapis qu'on 
met sur une table, et de là la table même sur laquelle on écrit, 
on compte de l'argent, etc. Dans ce dernier sens, on dira très- 
bien, comme en wallon, j'ai mis mes papiers sur son bureau, 
fa meltou mes papî so s'bureau. Enfin il se dit par extension de 
tout endroit où travaillent habituellement des employés, des 
commis, etc. 

6® On a dressé l'acte sur son nom, on-z^a fait Vake so s'no, 
fi. op zijnen naam. Dites : sous son nom. 

7« J'ai accepté sur condition, fa-t-accepté so condicioUy fl. op 
voorwaarde. Dites : sous condition. 

S"* On le mit sur la gazette, on Vmetta so Vgazette. Dites : on 
l'inséra dans le journal. Cette nouvelle est «ur la gazette, cisse 
novelle-là est so i'gazette. Dites : dans le journal. — Je l'ai lu «tir 
le journal, ji Fa léhou so Fgazette. Dites : dans le journal. — 
Gela est écrit sur votre cahier, coula est scrtt so vosse caièt. 
Dites : dans votre cahier. Lire sur signifie lire ce qui est écrit 
sur une surface : lire sur une affiche, sur un placard. 

9^ Demeurer sur une chambre, dimani so 'n' ehambe, ouf 



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- 36« - 

einem Zimmer ivoh$ien. Dites : dans une chambre. Il &ut 
remarquer l'expression : travailler en chambre. 

10<> Il mange toute la semaine sur un pain, i magne tote li 
samainne so on pan ; il boit toute la semaine sur une bouteille, 
i beût tote li samainne so 'ne botHe. Dites : il fait durer un pain, 
une bouteille toute la semaine, ou un pain, une bouteille lui 
suffit pour une semaine. 

ll^" Acheter un porc sur la foire, acVtér on pourçai so l'fôre. 
fl. een verken op de foore koopen. Dites : à la foire, ou sur le 
champ de foire. 

12<» Sur combien de temps ? su combien d'temps f mont. Dites: 
en combien de temps. Faire sur quatorze jours quinze lieues, 
fér qwinze heure so quatwazejoû. Dites : faire en quatorze jours 
quinze Ueues, Litt., c'est-à-dire marcher ou agir lentement. — 
J'ai fait le chemin sur trois heures, fa fait Fvôïe so treus heure. 
Dites : en trois heures. V. au mot Dans, n» 4. 

IS*» Il est jaloux sur moi, il estjalo sor mi, fl. hij is jaloersch 
op mij. Dites : il est jaloux de moi. — On dira de même avec 
un nom de chose : Ne soyez point jaloux du succès des autres, 
Fén. Tél. XII. On dit aussi jaloux sur une chose, pour faire 
entendre qu'on la dispute par jalousie. De tels princes ne 
savent que se défier de tout le monde également ; ils sont jaloux 
sur les moindres choses. Mais sur signifie ici touchant, con- 
cernant, et cet exemple ne contredit pas les deux premiers. — 
Il est fâché sur vous, il est mâva sot* vos. Dites : il est fâché 
cont7*e vous. C'est un double germanisme (sur et mauvais) : ail. 
er is boese auf mich, fl. hij is kwaad (ou boos) op mij ; on dit 
aussi tegen mij, comme en français. ^ Se fâcher, se mettre en 
colère sur quelqu'un, si mâvlér so 'risaki^ ail. auf Einen boese 
werden. Dites : contre quelqu'un. — Hais ^t m&vlér so tôt se 
rendra par se fâcher de tout ; on dit aussi avec le mot rien: Il 
se fâche pour rien, Agad. Comparez l'allemand : uebet^ etwas boese 
werden. Nous trouvons dans Molière, Mis^ II, 3. Votre esprit se 
gendarme toujours contre tout ce qu'on dit, et dans Régnier, Sat. 



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- 383 — 

XV. Contre sa fureur ma raison se dépite. Ici Tobjet est 
personnifié. — Il en a toujours sur moi, enn'a todis sor mi. 
Dites: il en veut toujours contre moi, ou, il m'en veut toujours, 
c'est-à-dire il est fâché, en colère contre moi. On dit aussi: 
C'est à moi qu'il en a. — Ex. Contre qui en a-t-il ? Acad. A qui 
en a-t-il ? id. Je ne sais à qui il en avait, Sév. 

14* La clef est sur la porte, li clé est so VpoitCy fl. de sluttel zit 
op de deur. Cette tournure s'emploie même en France, mais, 
d'après Littré, elle est populaire. Il vaut mieux dire : la clef 
est dans la serrure. On dit aussi: la clef est à la porte, 
A. Musset, Frédéric et Bernerette, VIII, et A. Dumas, Angèle. 
I, VIII. 

IS*" Sur le temps qu'ils se faisaient la cour, su Vtimps qu'i 
s'féyint Vcmir, Bernus, S6 (p. de Charler.). Dites : pendant qu'ils 
se faisaient la cour. — - Sur le même temps^ ou sur le temps que 
vous irez en ville, j'écrirai ma lettre, so rminme trévin qu'vos 
irez è ruèïe, plus souvent so Vlimps qu'vos irez è Vvèîeji scrirei 

m'ielte. Dites : pendant que vous irez en ville Les locutions 

dans le temps que.au temps que, dans le temps où, au même temps 
que, à même temps que (Litt. à Temps, 42, 43) approchent 
beaucoup de ces deux tournures wallonnes, mais elles pré- 
sentent des nuances de signification que l'usage apprendra. — 
Ecrivez votre lettre; sur ce temps-15, j'irai en ville, sicriéz 
vosse leite; so Vminme trèvin, firei-st-è Vvèîe (on dit plus souvent 
so c'timps'là). Dites : entre-temps (Litt.), dans l'entre-temps, 
pendant ce temps-là, j'irai en ville. 

16'» Coula fait v'ni Taiwe so Vmolln, fl. dat brengt water op den 
mokn, Remacle traduit mal : cela fait venir l'eau sur le 
moulin. Forir traduit :... au moulin. Tel est en clfet le proverbe 

firancaî**^- 

17» Si feumme trouve à r'dire so tôt; fl. zijne vrouw heeft op 
ailes te spreken. Forir traduit mal : sa femme trouve à redire 
sur tout. Il faut : à tout. On dit trouver à redire dans, trouver à 
redire à, trouver à redire qw ; mais je doute fort si trouver à 



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- 354 - 

redire sur est français. Ex. Je n'ai rien trouvé à redire dans cet 
ouvrage, Agad. Celui qui trouve à redire à tout est d'un mauvais 
esprit ou d'une mauvaise santé, Boiste. On trouve à redire que 
vous soyez sorti, Bbsgh. 

IS*" C'est sur vous que je me fie, &e8t sor ws qu^ji m' fête. 
Dites, selon le sens : c'est à vous que je me fie, ou c'est sur 
vous que je compte. Ali. Aufihn (Gott) vertrane, Sghmid, Weih- 
nachtsabmd, ch. I. FI. Op de Voorzienigheid vertrouwen^ se fier 
à la Providence. 

19® Sauter d'une branche sur l'autre, pocht dine coxhe sa 
Faute, Bull. a. 67, p. 50, fi. van den eenen tak op den anderen 
springeti. Le proverbe français est: sauter de branche en 
branche, Agad., c'est-à-dire, passer brusquement d'un sujet è 
un autre. 

20* Crier sur quelqu'un, braire so 'n^saki, fl. op iemand schreeu-- 
wen, c'est-à-dire le gourmander d'une manière aigre et 
bruyante. On dit : crier après quelqu'un. Ex. Elle a bien crié 
aprës lui, Agad. Nous avons vu à l'article Crier, que crier mr 
quelqu'un a un autre sens : poursuivre en criant. 

21* Aboyer sur quelqu'un, hawér so *n'saki, Dites : aboyer 
aprës quelqu'un, ou à quelqu'un. Ex. Vosse chin hawe so tôt 
Vmondey on chin qui hawe so lès voleur. Tournez : Votre chien 
aboie aprës tout le monde, un chien qui aboie aux voleurs. 

22® Jurer sur quelqu'un, jurer so ^n'aaki^ fl. op iemand vloeken. 
Dites : jurer aprës quelqu'un, Bêrangbr, dans Litt. 

23<' Mettre l'adresse sur une lettre, mette l'adresse so 'riUtte^ 
fl. het adres op eenen brief zetten. Dites : mettre l'adresse, la 
suscription à une lettre, Agad. — On disait autrefois : mettre le 
dessus à une lettre, Agad. 

24* Votre chaise est sur moi, vosse chètre est sor mi* Dites : est 
sur ma robe. 

25« Il est sur la paroisse de Ste- Véronique, il est so Vporoche 
di Ste-Vérone. On dit mieux : il est de la paroisse de... La tour- 
nure existe aussi à Tournai : il est sur Saint-Quentin, pour 



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- 386 - 

il est de la paroisse de Saint-Quentin. Demeurer sur telle 
paroisse est une expression consacrée, même en France, dans 
les registres paroissiaux. Ajoutons toutefois qu'elle est bl&mée 
par Littré. 

26"» Je suis mr vos dettes, ji ses so vos dette. Dites : je suis 
votre débiteur. Il est probable que cet idiotisme a également 
subi rinfluence germanique; l'allemand dit : in Jemandes schulden 
stehen. 

27* Ce domestique est sur les intérêts de son maître, ci 
dômestique-là est so lès intérêt di s'maisse. Il est mieux de dire : 
prend à cœur les intérêts, est soucieux des intérêts de son 
maître. Littré donne cet exemple de M""* de Sévigné : M. de 
Grignan n'est pas sur ses intérêts comme sur ceux du roi son 
maître. J'ignore si cet exemple suffit pour autoriser actuelle- 
ment la tournure en question. 

28<» Je suis arrivé sur la vapeur, fa-t-arrivé so Vwapêur^ pat. 
fl. ik ben op (ou met) de vapeur aangekomen. Dites : par le 
chemin de fer. — Il est revenu sur l'eau, il est riv'nou so Vaiwe. 
Dites : par eau. — // est revenu sur Veau, se dit d'un liomme 
qui, tombant dans l'eau, reparaît à la surface. V. Vapeur. 

29** Aller sur des béquilles, daller su dès aossette, Bernus, 
p. 13. fl. op krukken gaan. Dites : marcher avec des béquilles, 
ou avec des potences, Acad. La tournure liégeoise est marcher 
à béquilles, rotér à crosse. Littré signale le provincialisme: 
marcher aux crosses ; il donne l'exemple suivant : les malades 
cheminent quelque temps sur des crosses. Paré, XVI" siècle. 

30« On dit très-bien monter «ur une échelle, Acad., monter so 
'rihûle, bien que monter à une échelle (Acad. Litt.) soit égale- 
ment correct. Mais il faudra prendre garde à la tournure monter 
so ine âbe. On ne fera pas de wallonisme en traduisant littéra- 
lement, si l'on veut faire entendre qu'on se place parmi les 
branches à dessein soit de cueillir des fruits, soit de se cacher, 
soit de mieux voir. Hais on ne pourrait rendre mot à mot cette 
phrase: Vèfant monte so Vâbe po rascoi dès niêie^ l'enflant 



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— 386 — 

monte sur Tarbre pour dénicher des oiseaux. Dites : monte à 
V arbre. Il est en effet inutile de s*y installer. 

SI"" La mère était assise avec le plus jeune de ses enfants sur 
son giron, U mire esteût assiowe avou Ppus jônne di ses èfant sô 
s'hô, ail. die Mutler sass mit dem kleinsien Kinde aufdem Schosse. 
La tournure ordinaire, en français, est : dans son giron. Ex. Cet 
enfant dormait dans le giron de sa mère, Acad. Elle tenait son 
enfant dans son giron, Besch. Les filles de Darius prisonnières 
étaient couchées dans le giron de leur grand'mère, Vaugblas, 
2. G. in. Mais un recueil d*Omnibus a tort de condamner 
absolument sur son giron. Une paysanne sur le giron de laquelle 
une petite fille est endormie, Diderot, dans Liit. 

SS*" 5ttr le coup de minuit, sô Vcôp d'mèienutte^ Û. opslag van 
twaalf. La tournure sera correcte, si Ton substitue à à sur : Au 
coup de minuit... 

Sûr. Il viendra sûr, i virèt sûr. Dites : Pour sûr il viendra, 
Acad. L'adverbe sûrement s'emploie de même façon : Cela est 
sûrement arrivé comme on le dit.« Les Tournaisiens font un 
usage analogue du participe assuré: il viendra assuré. Ces deux 
qualificatifs sont pris ici adverbialement. 

Survenir. Il a survenu une grande famine, i a survenu eune 
grande famène, pat. de Lille, Bull. a. 60, 2* 1. p. III; il a sorvunu 
one grande famine, pat. de Wavre. Dites : il est survenu une 
grande famine. V. Tomber. 



Table. Oter la table, westér Vtâve, fl. de tafel opnemen, pat. 
wegdoen. Dites : ôter le couvert, Acad. ; desservir le couvert, 
LiTT., ou, simplement, desservir. — Mais si westér Vtdve signifie 
la tirer de la place où elle est, on traduira : ôter la table. 

Mettre la table {mette li tdve) est dans Bescherelle et dans 
Littré. 



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- 387 — 

Tant, l'' N'avoir pas chez soi pour lui donner tant seulement 
un malheureux dîner, La Font. dans Litt. \...po li iTnér tantsctt- 
lemiiit on malhureux dinér. Supprimez tant. Celle locution, qui 
est restée dans le peuple en France et en Belgique, était autre- 
fois du bon usage (Litt.)- C'était un pléonasme, carlarU, du latin 
tantumi signifiait ici seulement. 

2« Tant il y a. On ne connaît pas le sujet de leur querelle, 
tant il y a qu'ils se sont colletés, on n'kinoxhe leû quarelle^ tant 
igna quH s'ont apougni. — On lit dans Hennequin c tant il y a, 
dans le sens de quoi qu'il en soit, n'est pas correct. Il faut dire 
tant y a. » 11 est de fait que l'Académie n'a que tant y a; Liltré 
met les deux locutions sur le même rang, mais il ne donne 
aucun exemple renfermant tant il y a. 

S"* Tant qu* à moi, je suis content, tant qu'à mi, ji sos contint, 
liég., tans qu'à mi, fsue contint, mont. Dites : quant à moi, pour 
moi, de mon côté, ou pour mon compte, je suis content.-- Tant 
qu'à mi se dit aussi à Nivelles (Avent. de J. d^Niv. p. 38), et à 
Namur {Aurmon. di Nameur, a. 69, p. 46). La tournure est 
également berrichonne. V. G. Sand, Le Drac, III, 14. 

Tapecul. Un tapecul de cave, on tapecou d^câve. Dites : une 
trappe de cave. Ici trappe désigne cette porte de cave placée 
horizontalement, et si chère aux fainéants qui jouent aux cartes 
en plein vent. De là l'expression jeu itapecou, jeu mesquin. 
Le français tapecu (ou plutôt tapecul, Litt.) est le nom l"» d'une 
sorte de bascule qui s'abaisse par un contrepoids ou autre- 
ment, pour fermer l'entrée d'une barrière, Acad.; 2^ d'une 
balançoire en bascule, jouer à tapecul, Litt. 

Taper. On aurait tapé une pomme en Pair (ne pas dire en 
air, comme à Tournai), qu'elle ne serait pas retombée sur le 
pavé, on âreû tapé 'n'pomme è l'air, qu'elle n'âreût nin r'toumé 
so rpavête, Ann. a. 71, p. 89. Dites, on aurait jeté... — Taper 
est français, mais signifie l*" donner des tapes (ine tape, ine 
calotte, ine bouffe) : Tapez ce petit drôle, Litt.; 2* porter à la 
tète : Ce vin m'a tapé ; ce vin tape à la tôte. 



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- 858 - 

Taque. Si vous avez froid aux pieds, mettez-les sur la toque, 
si v's avez freùd (Tvospli (i), mettez-lès sa V taque. Dites : sur la 
plaque. Taque est également montois. On appelle plaque de feu, 
ou de cheminie^ une plaque de fer ou de fonte appliquée au 
fond d'une cheminée. Toutefois taque est dans Bescberelle, 
dans Littré et dans le Complément du Dictionnaire de FAca- 
demie. 

Tarame. G*est une vraie tarame, c'est ine vraie tarame. 
Dites : c'est une vraie caillette, une caquette, une mauvaise 
langue. 

Tard. Cette horloge va trop tard, ciste hôrloge-là va trop 
tard (ou rastâge). Dites : va trop lentement, Litt., ou retarde. 
On dit très-bien : va trop vite, Acad. (ou avance). 

Tellement. Nous n'osons quasi le cvoite, tellement cela 
nous semble injuste, nos riwasans quausumint tcroire, téUemint 
ça nos chotmeinjusse, aurmon. di Nameur, a. 69, p. 31. Dites : 
tant cela nous semble injuste.— Il court avertir le curé, qui 
tombe à la renverse, tellement qu'il est embarrassé, i court 
adverti Veuri, qui chait au daviers, tèllemint qu*U est imbarrassé, 
Avent. de J. d'Nivelles, p. 62. Dites : tant il est embarrassé. 
—Il n'a pas d'habit pour se couvrir, tellement il est malheureux, 
i n'a non habit po mette so s'coirps, télemint qu*ii est mdlhûreux. 
Dites : tant il est malheureux. 

Tant s'emploie en forme d'exclamation et signifie à tel point : 
Tant le monde est crédule, Acad. — Tellemetit que signifie 
de telle façon de. Ex.: Quand la fortune eut abandonné la reine, 
elle s'enrichit plus que jamais elle-même de vertus, tellement 
qu'elle a perdu pour son propre bien cette puissance royale 
qu'elle avait pour le bien des autres, Boss. Reine d^Angl. 
Deux recueils d'Omnibus prétendent qu'on peut dire : D n'a 



(0 C'est là U vraie toorniire wtUonne. A Liège on dît, maie à tort, ce semble : 
«i v*« avez freûd vo» pld. 



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- 889 - 

pas d'habits pour se couvrir, tellement il est malheureux. 
Cet emploi de tellement par forme d'épiphonème pour signifier 
à tel point, tant, n*est pas signalé dans les dictionnaires. 
Mais on dira très-bien en changeant la tournure : Il est telle- 
ment malheureux, qu'il n'a pas d'habit pour se couvrir; ou 
bien : il est malheureux, tellement qu'il n'a pas d'habit pour 
se couvrir. 

Tempe. Les tempes de la tête, lès timpe de ïtiesse. Il y a là 
une superfétation ridicule. Il suffit de dire : les tempes. 

Temps. // a bien le temps^ il a bin Vtimps, liég. il a bé 
Vtemps, p. de Hons (au village, il a bé Vtimps). Dites : il est 
dans l'aisance, il est cossu, il a du foin dans ses bottes (i), il 
a des ressources, il a de la fortune. — On saisit la liaison 
des sens : il est riche, il n'a pas besoin de travailler, il a des 
loisirs. 

Tenir. 1* Jm^;];, vous voilà! VoRm, tinéz'n*gotte, qui volàl 
Dites : tiens, te voilà ! On emploie mieux tiens que tenez, pour 
marquer Tétonnement. 

îr II faut tenir de soi, i fât fni d*lu. Dites : il faut avoir de la 
dignité, il faut garder son quant-à-soi, tenir sa gravité. 

3» Tenir voiture, teiùr équipage, Uni voiture, Uni èquipège. 
Dites : avoir équipage, ou avoir un équipage. 

4^ Il tient des pigeons, des lapins, t tint dès colon, dès robette. 
Dites : il nourrit, il élève des pigeons, des lapins. On dit en 
français : tenir des écoliers en pension, tenir quelqu'un chez 
soi, c'est-à-dire le loger chez soi, lui donner sa table. 

5® Si je tie^is bien, il viendra dimanche, si j tins bin, i vêreit 
dimègne. Dites : si je ne me trompe, il viendra.... 

6» Il vaut mieux tenir que courir, i vâtmi tunt qui d^cort. 
Remacle traduit ainsi ce spot. Littré signale également ce pro- 

(*) Ao sens du hollandais bot, botte, paqoet, et non pas du hollandais boot, 
botte, chaassure ; comme qoi dirait, ses boUes de foin sont bien fournies. 



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- 360 - 

verbe, qui est une altération de : il vaut mieux tenir que quérir: 
le vrai texte wallon devrait donc être : t vât mi tuni qui d^qwèri^ 
c'est-à-dire la possession actuelle vaut mieux que la peine 
d'aller chercher. 

TérouUe. Une voie de terre houille, ine vâte di tèroûh. 
Dites : de téroulle. On se sert de Texpression terre houille dans 
tout notre bassin houiller, pour désigner une terre légère, noire, 
indice du charbon de terre ; on en fait des boulets qui brûlent 
lentement sans répandre de flamme. Les expressions françaises 
sont téroulle^ Litt. Besgh., et terre de houille, Besch. 

Tette. Donnez-lui une telle, ou la telle, dinéz-li Vlette^ on 
ine tette, On dit : donnez-lui à téter, âgad., ou, donnez-lui le 
sein. Cette locution, qui a passé dans les patois flamands {het 
lUnd een tel geven), est usitée dans toute la Wallonie, et elle se 
retrouve même dans les patois lillois, à preuve ce texte d*un 
poète de Lille. 

Je regrette, 
Quand J*iatinds m*s infant crier, 
D* n^avolr point eun* petit* tette 
A leu donner à chucher. Desrousseaux. 

11 est probable que c'est une vieille tournure française. (De 
leur présenter la tette. Paré, XVI' siècle, ubera admovere) ; 
mais la langue du grand siècle a trouvé le terme trop cru. Toute 
pruderie à part, avouons qu'elle a eu raison d'y substituer le 
mot sein, qui seul peut convenir dans le langage élégant, et 
qui ne dépare pas même le style soutenu. 

Thé. Boire du thé de tilleul, beûre de thé d'tiîou. Dites : 
boire du tilleul, Litt., comme on dit : prendre son orge mondé, 
son orge perlé, Acad., c'est-à-dire sa tisane d'orge, etc. On 
peut risquer de même boire du sureau, beûre de thé d'sawou. — 
Thé des quatre fleurs, thé dès qwate fleur, Dites : infusion des 
quatre fleurs. 



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- 361 -^ 

Thé ne peut s'employer en français pour désigner les diffé- 
rentes infusions faites avec d'autres substances que le thé des 
Chinois ; mais le wallon se sert abusivement de ce mot à la 
façon des Allemands et des Flamands : ail. Hellunderthee, fl. 
Vlierdenthee, thé âx fleur di sawou, Û. ail. LindenViee, thé âx fleur 
di titou. 

Thler. Gravir un thier, gripper on thiér. Dites : une colline, 
une montagne, une côte. Thier, dit Hennequin, est un mot 
wallon quMl faut remplacer par côte, mont, montagne. Oui, mais 
non pas dans les dénominations locales consacrées par Fusage : 
Thier à Liège ^ Thiei^ sur la Fontaine, Thier des Crikions. Toutefois 
on dit généralement le mont Cornillon. 

Tingler une corde, tinglér 'n'coide. Dites: tendre une 
corde. 

Tique. Voilà une belle paire de tiques blanches, vola ^n'belle 
paire di blanUs tique. Dites : de taies d'oreiller blanches. — 
Plusieurs disent téies d^oreiller ; cela ne vaut pas mieux. Celte 
faute provient d'une tendance du peuple à remplacer un mot 
moins connu par un mot plus connu, qui ne lui ressemble que 
par le son ou la forme extérieure. C'est ainsi que le peuple en 
Allemagne substitue correctirisiren à caracterisiren. Tique 
représente le bas-latin theca, grec thèkè, caisse, enveloppe ; 
tique est donc la seconde partie du mol botique, lequel vient de 
apothèkè, par aphérèse. 

Tirer. !• Faire tirer son portrait, fér tirer s'puortrait, 
Aurmon. di Namur, a. 70, p. 29, fl. zijn portret doen trekken. 
Dites : faire faire son portrait. — Gallait a tiré le portrait du 
général Renard, Gallait a tiré Vportrait d^â général Renard, liég. 
Dites : a (ait le portrait... Il a fait tirer son portrait, il a fait 
tirer ibinette, p. carolor. Bernus, p. 18. Dites : il a fait faire 
son portrait. — Binette, tête ridicule, très-fam. Litt. 

C'est un archaïsme, l'Académie donne les exemples suivants: 



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-. 362 - 

Oo Ta tiré en cire. Il s*est fait tirer en piètre. — Il est à 
regretter que ce terme se soit perdu, car il n*y en a pas d'autre 
qui lui correspoitde dans tous les cas. 

2« On dit très-bien tirer sur le rouge, tirer so Froge, naar ou 
op het roode trekkm;ici tirer, c'est avoir quelque rapport, quelque 
ressemblance ; mais on ne peut donner pour sujet à ce verbe 
un nom de personne : elle tire après sa mère, elle tère après 
s'mame, fl. zij trekt op hare moeder. Il faut dire : elle ressemble 
à sa mère, ou elle tient de sa mère, elle en a des traits, Acad. 
/ tiret Vonk après Faute; tournez : ils ont de la ressemblance 
Tun à Tautre, ou Tun avec Tautre, ou, simplement, ils ont de la 
ressemblance, ils se ressemblent. Le montois dit aussi tirer d^sus 
quéqu'un. — En tous cas on ne dit pas tirer après. On dit tirer 
sur et tirer à. Ex. Son teint tirant au noir. Cousin, dans Litt. Le 
monument a une pesanteur tirant au gothique, Boil. 

3» Tirer quelqu'un par les oreilles, sèchi *n*saki po lès orèU, 
iemand bij de ooren trekken, flam. Jemand bei den Ohren zupfen, 
ail. Dites : tirer les oreilles à quelqu'un^ Acad. — Se faire tirer 
par les oreilles avant de payer, si fér sèchi po lès orèU ivant de 
pai. Dites : se faire tirer Toreille (au sing.)... Acad. 

4* Tirer de la milice, de la conscription^ (tr^r délie milice^ 
délie conscription (on dit aussi tirer Tmilice). Dites : tirer à la 
milice, Acad., à la conscription, Litt., ou tirer au 5ort pour la 
milice, Acad., tirer au sort pour la consciiption. — Quant à 
/tr^rd^ /a réquisition, tiràr délie réquisition, il est absolument 
mauvais en français aussi bien qu*en wallon. V. Tomber, n"* 2. 

8® Le cœur me tire, li cour mi tère, liég. em cœur tire, mont. fl. 
mijne maag trekt. Dites : mon estomac me demande quelque 
chose, et, en terme didactique, mon estomac appète des aliments. 
— Demander s'emploie très-bien dans le sens de avoir besoin. 
Ex. Les terres demandent de Teau. — Le wallon a encore mi 
cour gèrêîe, littéralement désire (ail. begehren). — Cœur se dit 
abusivement pour estomac, mais dans des cas tout particuliers. 
Il a mal au cœur, le cœur lui soulève, j*ai encore mon dtner sur 



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- ses- 

le cœur, ce vin va au cœur, s*ea donner au cœur joie, ou à 
cœur joie, etc. âgad. 

6"" Tirer une dent, tirer on dint^ cela se dit à Verviers, comme 
le prouve le proverbe verviétois tirer lès dint à 'n' saki^ Renier, 
li Mohonne à deux face (tirer les vers du nez à quelqu'un). Tirer 
une detit est une tournure germanique, eenen tand trekhen^ fl. 
to draw a tooth^ angl. Dites : arracher, ou extraire une dent. 

7^ Tirer sa révérence à quelqu'un, tirer s^révérince à 'n'saki. 
L'Académie et Bescherelle tiennent cette locution pour popu- 
laire. M. Garpentier prétend que cela se dit très-bien; il a pour 
lui l'avis de Littré, qui admet la tournure comme synonyme 
familier de saluer quelqu'un. Ex. Quand il passa, je lui tirai 
ma révérence, Litt. 

S"" Je ^ire ma casquette. V. Défaire, n*» 1. 

9* // tirey pour il y a un courant d'air. V. Chasser, S. 

l(h Tiri^ pour allongé^ amaigri. Elles ont Vair toutes tirées^ 
elles ont Vair totes tiréies, fl. zij zien getrokken uit. Dites : elles 
ont le visage tiré, c'est-à-dire, amaigri, abattu. 

Tomber. J'ai tombé, /a tourné. Dites : je suis tombé. Les 
verbes tomber, aller, arriver, mourir, venir, devenir, parvenir, 
survenir prennent l'auxilaire être dans leurs temps composés, 
lors même qu'ils marquent une action d'une manière très-pré- 
cise. Dites donc : Il était venu trop tard à Técole, il est mort, 
il est arrivé, il est survenu, et non pas, il avait venu..., il a 
mouru (!!), il a arrivé, il a survenu, il aveùt v'nou trop tard è 
scole, Bull. a. 69, p. 69, part. 2* part., il a marou, il a-t-arrivi^ 
V. Survenir. 

Telle est la règle généralement suivie pour tomber. Plusieurs, 
se fondant sur des exemples empruntés à l'Académie et à de 
grands écrivains, admettent que tomber peut recevoir l'auxiliaire 
avoir lorsqu'il marque l'action. Dessiaux (Traité de versifie, 
franc.) estime qu'on ne peut contester à la poésie le droit de 
s'en servir ; mais en prose, il est préférable d'employer toujours 



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-.364 - 

Tauxiliaire être, sauf dans le cas où avoir esi absolument 
nécessaire pour rendre la nuance de la pensée. Ex. Vous voyez 
une mère tout en larmes, vous lui dites : Pourquoi pleurez-vous? 
Elle répond : Mon enfant a tombé. Si elle disait est tombée vous 
seriez tenté de repartir : Mais relevez-le donc. 

2» On entend souvent dire d*un milicien, il est tombé dedans, 
il est tourné devint, il. hij is erin gevallen, et Forir traduit tourner 
de sort par tomber du sort. Ce sont deux wallonismes. Il faut 
dire avec Bescherelle et Liltré : tomber au sorî. — Tomber 
dehors, tourner foû, fl. eruit valleu, n'est pas meilleur. Dites : 
tirer un bon numéro.— Tomber d« la conscription, tourner délie 
conscription. Dites : tomber à la conscription, Litt. — Tomber 
de la milice, tourner délie milice. Dites : tomber à la milice, 
ÂGAD. Plusieurs disent encore plus mal : tomber de la réquisi- 
tion^ tourner délie réquisition. C'est un abus : le mot tomber^ qui 
veut dire être désigné par le sort, jure avec réquisition, qui 
désigne un enrôlement /brc^. V.Tirer, n^" 4. 

Torcher, i" Se torcher le pied, si toirchi Ppid. Dites : se 
fouler le pied, se démettre un pied, se donner une entorse 
{détorse, vieux). — Il s'est torché le bras, i s*a toirchi Vbress\ 
Dites : il s'est luxé le bras.— TorcAer signifie /"roffer, comme on 
foit avec un torchon, pour nettoyer, pour essuyer. 

f^ Torcher ne s'emploie pas non plus dans le sens de tordre : 
torcher une lavette, toirchi on drap d'hielle. Dites : tordre une 
lavette. 

Toi:^ours. 1» Blâmé à tort par un recueil d'Omnibus dans 
le sens de encore, par exemple dans celte phrase : Il n'est pas 
guéri, il est toujours malade.V. Encore, 2.— Il est entendu que 
encore toujours est fautif : 11 tire ses grègues et court encore 
toujours, i prind ses clique et ses claque, i keurt co toudis, mont. 
Dites : et court encore. 

S"* Je n'y ai pas été toujours moi, ;i n'y a nin stu todis mi, liég. 
Dites : en tous cas, moi, je n'y ai pas été. Je n'irai pas aujour- 



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— 365 — 

d*hui toujours, ji nHrei nin oûie todis, id. Dites : en tous cas, je 
n*irâi pas aujourd*hui.— Voilà toujours quelque chose que les 
Belges d'aujourd'hui n'ont garde de chanter, v*là todis 'n'saquèt 
que lès Belge iVavjourd'hu èti peufnèt meau d' chanter. Les avent. 
de Jean d' Nivelles, p. 65. Dites : voilà en tous cas une chose.— 
Qu'en pensez-vous ? c'est toujours quelque chose d'extraordi- 
naire, qu'est-ce que vos è pinséz? c'est toudis 'n'saqué d^drôle, pat. 
de Gharleroi, Bernus, p. 185. Dites : c'est en tous cas. 

S*» La censière dit au boucher : Vous n'aurez pas notre vache, 
pour sûr; de mon consentement toujours, Vdnsière dit au 
boucher : Vos n'aréz nié no vaque, assuré; dé m'consint'mint toudis, 
mont. Bull. a. 61, 4* I. p. S79. Dites : du moins de mon consen- 
tement. — Il n'est pas venu voir son père, cette semaine 
toujours, i n'a nin v'nou vèîe si père, cisse samainne todis, liég. 
Dites : du moins cette semaine. 

Tourmenter. Ne me faites pas tourmenter, ni m'féz nin 
tourmètér. Dites : ne me tourmentez pas. Mais dans la phrase 
suivante de Fontenelle : Jeta dans les prisons, ou envoya dans 
l'exil, on fit tourmenter (sens étymol. : torturer) cruellement un 
assez grand nombre de personnes, faire tourmenter signiQc 
charger quelqu'un de tourmenter. 

Toumeaa. Faire aller un toumeau, fér aller on tournai. 
Dites : fouetter un sabot (jouet d'enfant que Ton fait pirouetter 
avec un fouet), ou simplement sabota*. — Fouetter un sabot est 
dans J.-J. Rousseau (L.). — Forir fait remarquer avec justesse 
que quelques personnes s'obstinent sans raison à rendre tournai 
par le mot toupie^ qui désigne un autre jouet (li campinaire, ou 
peure). 

Tourner. 1^ « C'est une faute de dire : que tourne-t-il ? » 
Litt., qui toûne-t'i? Dites : de quoi tourne-t*il? ou, de quoi 
retourne-t-ilî 

i' Vos laitues commencent à tourner, vos salade Hmincèt à 



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- 366 - 

tourner. Cet emploi du verbe toumery que le Dictionnaire de 
rAcadémie ne mentionne pas, n*est pas inconnu en France. Ex. 
Lorsque les laitues commencent à tourner, c'est-à-dire à pommer^ 
on doit retrancher les feuilles basses qui sont jaunes, Gbnus 
(L.). On voit par cet exemple que pommer est bien plus usité que 
tourner. — De la laitue tournée, de Vtoumiie salade. Dites : 
de la laitue pommée ; 

3"» Tai moti cœur qui tourne, fai m*cosur qui tourne, mont., 
fl. mijn hart draait, ou keert. Dites : j'ai le cœur barbouillé, le 
cœur me fait mal, me bondit, me soulève, ou bien, en précisant, 
l'eau, etc., que j'ai bue me tourne autour du cœur, Agad. 

4"» Le lait tourne quelquefois à matons dans l'estomac, U 
lessai toûne télefèïe à maton so U stoumal. Dites : se met, se 
convertit en grumeaux. — Le tait tourne se dit absolument, 
dans un sens moins précis, pour s'altère, change en mal. 
Ex. Quand le lait est vieux, il tourne sur le feu, Aciio. 
V. Maton. Voilà pourquoi il faut éviter la tournure : se tourne 
en grumeaux, bien que se tourner en se dise très-bien au sens 
de se changer en. Ex. Leur phlegme s'est tourné en bile, 
Balz. Lettr. (L.). L'admiration se changea en envie, Volt. — 
Il s'ensuit que fér tourner n'saki à bourrique, prov. liégeois et 
carolorég., doit se rendre par faire tourner quelqu'un en bour- 
rique, Lirr., et non par... à bourrique. Le pat. de Marche dit 
aussi fér tourner à borique, Bull. a. 59, p. 179. — Tourner à ou 
se tourner à a un autre sens : avoir une certaine issue. La mala- 
die tourne à la mort, Litt. Bientôt le combat tourne à son avan- 
tage, Rac. (L.) 

S« La paresse ressemble au fer qui s'enrouille, car il se ronge 
et tourne à rien, U paresse richonne au fièi* qui s'èrunit, car i 
s*dismougne et toune à rin, Aurmon. di Nameur, a. 67, p. 43. 
Dites : il devient à rien, ou il vient à rien. Ex. Cette entreprise 
devient à rien, Sév. A force de maigrir, cet homme vient à rien, 
Agad. 

Tout. V Une fois pour tout, ine fèïe po tôt; fl. een keer voor 



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- 367 — 

al. Dites : une fois pour toutes, une bonne fois. Ji v's el dit ine 
fèîe po tôt ; tournez : je vous le dis une fois pour toutes, Acad. — 
On dit aussi simplement une fois. Il faut pourtant que nous 
sachions une fois à quoi nous en tenir, Acad. 

2^ Marcher tout parmi les terres ensemencées, rotér toi 
avâ tsèmé. Dites: marcher partout sur les terres ensemencées, 
traverser en tous sens les terres ensemencées. — Il y a des 
taches tout parmi ma cornette, igna dès tèche tôt avâ m'gdmette. 
Dites : ma cornette (Acad.) est toute couverte de taches. — 
Parmi tout le jardin, patauvau Vgardin carolorég. Dites : dans 
tout le jardin. -— Parmi ne peut traduire avaUy mont, patauvau^ 
carolorég., avâj liég. que devant un collectif ou un nom 
pluriel. 

3» J'ai voyagé tout partout, ja voyègi tôt costé, liég. faî 
woéagi tout costè, p. carolorég. Dites : J'ai voyagé partout.— 
11 fait enrager le monde tout partout, i fait inragér les gint 
tout partout, arménaq. de Tournai^ a. 81, p. 5. supprimez tout :. 
Partout il &it endôver le monde. 

4<> Tout qui viendra de votre part, sera bien venu, tôt qui 
vêreit dkvosse part, sereit bin t^'nou, liég. al wie zal van 
uwentwege komen,.. fl. Dites : quiconque viendra... — Dites-le 
à tout qui vous voudrez , Dihéz-V à tôt qui vos varéz, liég. 
Supprimez tout : Dites-le à qui vous voudrez. — Il rechigne à 
tout qui qui vient chez nous, i r'chègne à tôt qui qui vint à 
Fmaujon, p. de Marche, Bull. a. B9, p. 20SS. : Dites : il rechigne 
à quiconque vient... 

5® Vous m*éclaboussez toute, vo m' sipitéz tote, liég. Dites : 
vous m'éclaboussez entièrement, des pieds à la tète. — 
Ce cocher avec sa voiture nous a tout salis, et cochéz-là avou 
s'voiture nos a tôt abtmé, Dites : nous a salis des pieds à la tôte. 
— Je tremblais toute, ji tronléve tote. liég. Dites : J'étais toute 
tremblante^ je tremblais de tous mes membres. ~ Je tremble 
tout^ ju trôle totj p. de Marche, Bull. a. 59, p. 257. Dites : Je 
suis tout tremblant.— Il m'a fait tout peur, i m'a fait tôt sogne^ 



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- 368 - 

liég. Dites : il m'a fait grand' peur. — Il a tout mangé sa soupe» 
il a tout maingi s'soupe^ mont. Dites : il a mangé toute sa soupe. 
— La bise a tout refroidi le temps, li bige a tôt r'froidi rtimps, 
namur. Dites : a complètement refroidi... 

Tout, dans le sens de entièrementy tout à fait, ne modifie que 
les adjectifs et les adverbes. 

6* On vous procurera bon souper, bon glle et tout, on 
v'procurWHt bon sopèr, bon gtsse et tôt, liég. en ails, fl. Dites : 
et le reste, ou bien, et cetera. L'emploi de et jure avec tout, 
puisque le souper et le gtte sont compris dans ce mol tout. 

7* Il est malheureux comme tout, pauvre comme tout, t7 est 
mâlhureux comme tôt, pauve comme tôt. Dites : il est très- 
malheureux, très-pauvre. — Marg. Buffet disait déjà en 1668 : 
<c Voici un terme des plus barbares où bien des provinciaux 
tombent : ils diront : cet homme est riche comme tout ; il faut 
dire est très-riche. » Cette locution est très-usitée en France 
et en Belgique: Ex. Cela n'empêche pas qu'il ne soit fier 
comme tout, G. Sand, André, IV. — Les deux mots y sont en 
italiques. 

8» Tout à fait est nettoyé, tôt à fait est r'netti, liég. namur. 
Dites : tout est nettoyé. — Tout à fait , en français, est une 
locution adverbiale, et ne peut s'employer comme pronom 
indéfini. 

9» Il faut que les enfants écoutent toute de suite, fût qu' lès 
èfant houtessent tote di suite. Dites : tout de suite. On prononce 
généralement toute suite, ce qui est fautif. Le wallon a aussi 
tôt d*suite (prononcez to d'suite). Dans ce cas, il y a correspon- 
dance exacte, et il faut se garder de traduire en supprimant 
tout; en effet de suite veut dire Vun après Poutre, el ne doit 
jamais s'employer pour tout de suite, qui veut dire sans délai, 
sur le champ. 

iO*" Le temps était calme, tout d'un coup, voilà une tempête 
qui commence, H timps estent pàhûle, tôt d'on c6p, vola on tim- 
pesse qui Kmince^ liég. Il faut dire : tout à coup.— Mais voilà, 



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— 369 — 

tout duH eoupy que le maître a un rapport (*), mains v'ià 
tout d'un coup^ que VmaUse reupie. Avent. de J. de Nivelles, 
p. 86. Dites : mais voilà que, tout à coup, le maître.... 

Teut d'un coup veut dire tout en une fois, à la fois, du 
premier coup, et tout à coup veut dire soudain et sans qu*on s'y 
attende. Telle est la distinction établie par l'Académie et 
admise par les grammairiens. Littré prétend que tout iun coup 
peut s'employer pour tout à coup. Ex. Tout d'un coup son visage 
a pâli, Mol. La mort a tout d'un coup arrêté le cours de la plus 
belle vie du monde, Boss. Le roi fit un grand ha! comme un 
homme oppressé qui tout d'un coup respire, St. Sim. — Mais 
tous les exemples que Littré cite sont du XVII* siècle. Actuel- 
lement on ne confond point ces deux locutions. — Le wallon, 
qui n'a conservé à lot £on côp que le sens de tout à coup^ a aussi 
la tournure tôt en on côp^ liég., tout à n'in kéau, tournais., 
lés chonq clotiers, 4* couplet, laquelle me semble correspondre 
à Tarchaïsme tout à un coup. Ex. le bon grain de mort qui 
nous délivre tout à un coup de tribulaiiou, Marot, dans Litt. 

11'' Je sens ce mal tous les vingt-quatre heures, ji sins 
c' mâ4à tos lés Hngt-qwatre heure. Dites : toutes les vingt-quatre 
heures. 

Toux. J'ai tin toux sec, fa on sèeh tasse, liég., foi enne sèke 
tousse, mont. Dites : j'ai une toux sèche. Les Liégeois et les 
Hontois sont portés à prononcer tousse; les Liégeois ont de plus 
la tendance à faire ce nom du masculin, contrairement à l'éty- 
mologie : lat. tussis, fém. 

Traîneau. Aller à splaion. Forir traduit : aller à tratneau. 
Il fallait : en traîneau, Acad. — Ex. Aller, se promener, voyager 
en traîneau, Acad. 

Transe. On sonne une trafise, on sonne ine trame, liég. 



(*) Oo dit aussi un renvoi (Acab.), terme blftmé à tort par Hennequin ; /aire un 
rôl est bas. 



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— 370 — 

Dites : un glas, ou le glas, ou le glas funèbre. V. Sonner. A 
Tournai, on dit : sonner un trépas, mais le terme est poétique 
et ne peut s'employer dans le langage usuel. — Â Bouillon, on 
dit sotmer enne 1ère. Ce mot paraît d'origine germanique : ail. 
lekhe, fl. lijk, cadavre. Le français transe, grande appréhension 
d*un mal qu'on croit prochain (ex. il est dans des transes mor- 
telles), doit être rattaché à transi, pénétré par le froid; étymo- 
logiquement le terme français et le terme wallon bont iden- 
tiques : ils représentent le latin transitus, action de passer, de 
pénétrer, passage; d'où trépas. 

Trappe. J'ai mis une trappe pour prendre des ra(s, des 
souris, des taupes, etc., fa mettou 'n' trappe po prinde dès rat, 
des soris, des fuïan, angl. trap. Dites : j*ai tendu un piège pour 
prendre, etc., ou simplement j'ai tendu une ratière, une souri- 
cière, unetaupière, etc. — Le français trappe désigne un piège 
pour prendre des béies, formé d'un trou pratiqué en terre et 
recouvert de branchages ou d'une bascule. Ex. Tendre, dresser 
une trappe, Acad. Le mot français trappe sert aussi à traduire 
le wallon tapecou. V. Tapecul. 

Trébucher. Il ne peut faire un pas sans se trébucher, 
i n'pout fér on pas sins s' trèbouhù Dites avec l'Académie : Il ne 
peut faire un pas sans trébucher. Le verbe est intransitif en 
IVançais, réfléchi en wallon. 

Trique. Il a eu de la trique, il a-st-aou deUe trique, liég. 
Dites : il a été battu.— Donner 'n' trique à 'n' saki, mont., donner 
'n' trique à 'n' sèki, p. de Lille. Dites : administrer une cor- 
rection à quelqu'un. — Trique, d'après Scheler^ est pour 
estnque et vient du néerlandais stnjken, battre, frapper, il s'en- 
suit que le sens abstrait du wallon trique (action de battre) 
a dû être le sens primitif. — Le wallon trique signifie aussi 
gros bâton ; en ce sens, il est français, mais appartient au 
langage populaire (Acad.). Ex. On lui a donné des coups 
de trique, Acad., ou une volée de coups de trique, Litt. — 



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- 371 - 

Triquer quelqu'un, iriquér *u* saki, liég., iriquér ou tricoter 
V sèki, p. de Lille. Dites : rosser quelqu*un, Acad. (famil.). 
— - Triquer et tricoter^ en ce sens, sont des termes populaires 
signalés par Littré. 

Trop. !• Trop riche que pour.... V. Que, conj. n** 4. 

2» Trop c'est trop, trop c'est trop, liég. (les p se prononcent 
dans le texte wallon, sont nuls dans le texte français). Le pro- 
verbe français est trop est trop, Acau., Bbsch, Litt., ou, rien de 
trop, c'est-à-dire tout excès est blâoiable. C'est le ne quiduimis 
des Latins. Si les proverbes sont la sagesse des nations, voilà 
un spot qui montre que les Wallons aiment à garder de la 
mesure en tout. Puisse-t-il ne pas être invoqué contre Tauteur 
du présent glossaire, qui avoue humblement avu on p6 jdsé 
d^trazeètquatwaze! 

Trotte. Le terme populaire est également usité en France 
pour désigner un espace de chemin. Ex. Il y a une bonne trotte 
d'ici là, Acad. Gna V bonne trotte di dal àlà. — l\ vaut mieux 
se servir du mot traite. Ex. J'ai une grande traite à faire, 
ScARR. (L.). — Si le contexte le permet, on dit simplement : 
c'est une traite, il y a une traite. (Litt.) 

Trou. Il est tout à trous, il est tôt à trô, liég. il est tout à trOj 
mont. Dites : il est couvert de vêtements tout troués. 

Tunnel. La grande tunnel de Nessonvaux, It grande tunnel 
di Nessonvâ. Ce substantif est masculin en français : le grand 
tunnel. — D'après Littré, ce mot anglais n'est autre chose que 
l'ancien français tonnelle. Serait-ce là le motif pour lequel le 
peuple l'a refait du féminin? 

u 

Un. i'* Nous avons fait une bonne chasse, nos avans fait 
n*bonne chèsse. Dites : nous avons fait bonne chasse. 
S"" Votre voisin est un Hollandais, vosse wèzin est ine Hollan- 



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— 372 - 

Uai$. Dites : est Hollandais. Ce wallonisme est encore un héri- 
tage de l'idiome germanique ; en effet, on dit en allemand : Ihr 
Nachbar ist Hn Uollaender ; toiitefois la construction n*est pas 
toujours de rigueur en allemand, non plus qu'en wallon, et l'on 
dira très-bien Ihr Hen* Bruder ist Professor, voêse monfré est 
professeur, La tournure, je suis Belge^ motisieur est protestànt^esi 
de rigueur en français. Avec le pronom ce pour sujet, on doit se 
servir de t/n. V. au n» 6. 

Pour la tournure il a une tête frisée, il a une crolêie tiesse, 
V. Des, n* 3. 

3* Je suis comme une morte, ji sos comme ine moite. Dites : 
je suis comme morte. 

4* En voilà une! De vlà iune! Cette tournure est en usage à 
Gharleroi et ailleurs, et se dit d'une chose qui étonne désa- 
gréablement, qui paraît extraordinaire, difficile à croire. Ex. 
Elle appartint [l'huttre des plaideurs] au cin qui VVa vu cFlauvau. 
Et çastimi! — De v*là iune! dit-st-i l'aute, Bernus, p. 140. 
Tournez : elle appartient à celui qui l'a vue de là-bas. Et c'a été 
moi! — Voilà qui est fort, ou cela est fort (Acad.). — Ne dites 
pas non plus, comme les Liégeois: elle est bonne celle-là! 
elle est bonne cisse-lal ! Dites : Voilà qui est fort ! 

S*" Voici deux lettres: une d'ici, l'autre de Bruxelles, voci deux 
telle , one di vociy Vaute di Bmxelles, pat. de Marche, Bull. a. 59, 
p. 195. Dites : Vune d'ici, Tautre de Bruxelles. Mais s'il s'agis- 
sait de plus de deux objets, on pourrait dire : une d'ici, une 
autre de Bruxelles. — Il n'y a que deux bonnes femmes sur la 
lerre, une est perdue, et l'on ne peut pas retrouver l'autre, gnia 
qu'deux bonnes feumme dissus l' terre, one est pierdeue, et on n'sit 
r'trovir faute (cette méchante boutade namuroise fait penser à 
la bonne /ifnim^ proverbiale, qui pourrait bien être une trans- 
formation du flamand in de goede faam, à la bonne renommée). 
Il faut dire : l'une est perdue, et l'on ne peut pas... 

6» C'est un de Herstal, de Huy, de Verviers, c'est onk di Hesta, 
di Hu, di Vent, 't is een van Herstal, fl. Dites : c'est un habitant 



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— 373 - 

de Herstal, de Huy, de Verviers, ou bien c*est une personne 
de Herstal, etc. Mais on dira très-bien sans le mot un : Il est de 
Herstal, etc. On dira également : c*est un Hutois, un Verviétois, 
ou il est Hutois, il est Verviétois. Il n'y a pas en français de 
gentilé correspondant à Hestati, La formation de cette espèce 
de noms est du reste soumise en français à des règles très 
capricieuses : Liégeois, Trudinaire, Garolorégien, Arlonnais, 
Madrilène, Monégasque, etc. 

7° Voilà un que je connais, vola onk qui fkinoxhe. Dites : en 
voilà un que je connais (quand on veut représenter un être dont 
il vient d*être parlé). J'ai vu un qui était original, fa veiou onk 
qu'esteût droite. Dites : jVw ai vu un qui... — Mais s'il n'y avait 
pas de substantif exprimé précédemment, on dirait très-bien, à 
en croire Littré, j'ai vu un qui...,;'a veiou onk qui, liég.; d'un 
qui ne dit jamais rien, il faut toujours se méfier, dlun qui n'dit 
jamais nn^ i faut toudis s'méfiîj pat. de Charleroi, Bernus, p. 
435. — ■ Littré cite ces exemples à l'appui de la tournure. Une 
avait pris un peintre en mariage, La Font. Ma fantaisie me fait 
haïr un qui souffle en mangeant, Pascal.— Cette façon de parler 
manque, ce semble, actuellement d'élégance, et un doit être 
remplacé par quelqu'un ou par celui : J'ai vu quelqu'un qui...; 
il faut toujours se méfier de celui qui ne dit jamais rien. 

8"" Un pour quelque. Il me faudrait un trente francs, cela 
ferait mon affaire, im'fâreût on trinte franc po m'ahessi, ikzou 
een dertig frank moeten hebben, fl. Dites : il me faudrait quelque 
trente francs, environ trente francs. 

9^ Ils se tourmentent l'un et l'autre, i s^fèi tourmèiei' tonk et 
faute, FoRiR. Dites : ils se tourmentent, se taquinent l'un 
l'autre. -- Vun Vautre marque réciprocité, l'un et l'autre 
désigne simplement le nombre deux. Le wallon ne tient pas 
compte de la nuance ; mais eu français la règle est stricte, et 
d'après Bescherelle, Voltaire n'est pas à imiter quand il dit : 
4idons-nous l'un et Tautre à porter nos fardeaux. 

lO'' Elles pensent toutes être plus belles l'une que l'autre, 



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- 374 - 

elle pinsèt totes esse pus belles cane qui Vauie, La grammaire 
exige : les unes que les autres. — Quand il y a plus de trois 
objeis, la réciprocité doit s'exprimer par les uns les autres, 
et non pâs par Vun Vautre, sauf le cas où il s'agirait d'une suite 
d'objets qui vont un à un, comme les anneaux d'une chaîne. 
Ainsi on pourra traduire liltéralement (hors le et, dont il a été 
question au n® 9) les treu eârpai s" fit tourmèter fonk et Vaute, les 
trois gamins se taquinaient Tun l'autre (ou les uns les autres); 
il esttt grippés onk so Vauie (pour faire la courte échelle) 
ils étaient grimpés sur les épaules l'un de l'autre. 

11° Il a une épaule plus haute wve que l'autre, il a n'stpale 
pus haute eune qui Vaute. Supprimez le second une: Il a une 
épaule plus haute que Tautre. On remarquera qu'ici une oppose 
à Vautre ne prend pas Tariicle^ parce qu'il précède lesubstantif, 
ce qui n'est pas le cas pour les textes cités au n*" S. 

12<» Une vierge qui a fait miracle, lue avierge qu*a fait mirâke, 
expression consacrée par le peuple, pour, a fait un miracle. — 
Faire^ miracle, sans article, est une expression figurée qui 
signifie, l"" réussir merveilleusement : Pour moi les Huguenots 
pourraient faire miracle, Régnier (L.) ; i"" ironiquement^ com- 
mettre quelque maladresse. Ex. Il a fait miracle, Litt. 

IS"» En voilà une de plaisanterie ! in v'ià ine dès carabistouye ! 
Arménaq. de Tournai, a. 51, p. 27. — En voilà une de craque! 
vo 'nnè là eune di craque! pat. de Liège. Cette tournure n'est pas 
française. Il faut prendre un autre tour. Voilà une plaisanterie 
un peu forte! la plaisanterie est un peu forte! Voilà une bourde 
par trop forte ! cette hâblerie passe les bornes ! 

Usage. Ce drap est d'un bon usage, ci drap-là est d^one 
bonne uzance, Remacle, ou d^on bon mège, liég., Dites : est d'un 
bon user.— Drap, toile d'un bon usage, drap, toile d^enne bonne 
usance, mont. Dites : d'un bon user. — Bescherelle dit que 
usage, en ce sens, est depuis longtemps inusité; Littré, il est 
vrai, prétend que l'on dit familièrement : Ce drap fera beau- 
coup d'usage, pour il durera beaucoup; mais l'Académie ne 



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— 378 — 

fait pas mention de cet emploi du mot usage, qu'elle exprime 
par le mot user. Ex. Cette étoffe, ce drap est d'un bon user; il y 
a des étoffes qui deviennent plus belles à l'user. 



Vapeur. La vapeur est partie, H wapeur est èvôïe. Dites : le 
train, te convoi est parti. — Il est venu par la vapeur, il a v^nou 
so r wapeur. Dites : il est venu par chemin de fer. ~ La vapeur 
part vers huit heures, el vapeur part invers huit heures, mont. 
Dites : le convoi part vers huit heures. — A en croire le 
docteur Stacquez (Voyage en Egypte), les Egyptiens disent aussi 
el babour, corruption du mot français pour le chemin de fer. 
(yest en effet une image toute naturelle. Elle n*est admise en 
français que pour désigner les bateaux h vapeur. — Quoi qu^en 
pense Bescherelle, Tusage fait ce mot masculin en ce sens 
spécial, avec raison, de la même façon qu'on dit un remise, pour 
une voiture de remise. Les Liégeois disent de même tin saison 
pour un verre de saison. 

Vendre. Il m'a vendu ce cheval pour cinq cents francs, 
i m'a vindou ci cKvâ-là po cinq cints francs. V. Acheter, 3. 

Venir, t*» Il va m'nir, i va m'nt, liég. Vous deviez m'en 
prémenir, vos m'el divlz prém'ni. Dites : venir, prévenir. Les 
Liégeois ont une tendance à substituer m kv dans venir et ses 
composés, parce que le patois dit aussi bien m'nt, pi^ém'ni, etc. 
que v'nt , prév'ni, 

2* Il a venu apprendre l'armurier à la maison, il a m'nou 
apprinde Vârmuri e l'mohonne. Dites : Il est venu apprendre le 
métier d'armurier chez nous. Il a venu trouver son père, t7 a 
v'nu trouver s'pére, p. de Tournai et de Walcourt, Bull., a. 70, 
2* livr. Dites : il est venu trouver son père. — Il a venu, U a 
v'nu, p. de Giney et de Mons. Dites : il est venu. Y. Tomber. 



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d^" L'hiver qui vient, Arménaq. de Tournai, a. 51, p. 26. On 
a blâmé cette tournure, qui est correcte. V. Semaine. 

4" Venir à rien (diminuer beaucoup, se réduire presque à 
rien) est blâmé à tort par Hennequin. Ex. A force de bouillir, 
cette sauce est venue à rien, Acad., à foice diboûre^ ci$se sdce- 
là est nCnowe à riny est distoumUe. — Il maigrit, il vient à rien, 
Littré, t distome, ivint à rin. — On dii z\isa\ devenir à rien. 
V. Devenir. 

8* Vous aurez ce qui vous vient, vos âréz çou qui v'vint. 
Dites : ce qui vous est dû. — Mais on peut dire : après la mort 
du père, les biens viennent aux enfants, Litt. J'ai mis à la 
loterie, et il m'est venu un bon billet, Litt. Ici venir signifie 
échoir. 

Verger. Mettre du linge au verger, sur le verger, mettre du 
linge sur le vert, mettre curer le linge, mettre du linge au curoir, 
au curage. Mette dès drap â vert, mette curer dès drap, mette dès 
drap â curège, liég. Le montois a le verbe curer, et les subs- 
tantifs curage et curoir. Ce sont tout autant de wallonismes, 
qu'il faut remplacer par : étendre du linge sur l'herbe, herber 
du linge, rétendre sur le gazon, faire blanchir de la toile sur 
l'herbe. Dites aussi étendre sur le gazon, sitinde so Vvért et non 
pas étendre sur le vert. •— Curer, curage, curoir et verger n'ont 
pas ce sens en français. On cure un puits, un fossé, un port; 
on se cure les dents. On dit le curage d'un puits, d'un fossé, 
etc. Le curoir est un bâton qui sert à nettoyer la charrue, 
Besgh. Let^er^^rest un lieu planté d'arbres fruitiers; c'est le 
latin viridarium (de viridis, vert), qui a la même signification ; 
le français verger doit donc servir à traduire le wallon assize, 
qui n'est pas dans Forir. 

Vider. 1° Ne dites pas vuider, mont. widiéi\ liég. vudt. C'est 
du vieux français. La seule forme usitée actuellement est vider. 

2* Je vais vous vider un verre de vin, ji v'va vudi on verre di 
vin, liég. Dites : Je vais vous vei*ser un verre de vin. — En lui 



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- 377 - 

vidant à boire, en lui wuidant à boire^ p. de Beauraing, Bull, 
a. 67, 2* livr., p. 56. Dites : en lui versant à boire. -* Vidsr un 
verre se dit, mais signifie boire la liqueur qui y est contenue. 
Ainsi videz votre verre sert à traduire le wallonisme : boutez vosse 
vère fou. 

Vie. l*" Mener la vie, miner Fvèie. Dites : mener une vie 
déréglée, vivre dans le désordre, rôtir le balai. 

2" Ils ont mené une vie ! il ont miné V vête ! liég. Dites : ils 
ont mené beau bruit ! Acad. — Écoute, quelle vie! houte, quéle 
vicdréîel Remagle> Dites : quel bruit! — Le peuple, à Paris, 
emploie vie dans un sens analogue : crierie qui se &it en 
querellant quelqu*un. Ex. Quand votre femme sera venue, elle 
vous fera une belle vie, Acad. 

Vieux, l"" Si l'on disait à un enfant : vous êtes plus vieux 
que moi, vos estez pus vî qu'mi, liég., gij zijt ouder dan ik, fl., on 
s'exprimerait mal. - Vieux signifie avancé en âge, et ne peut se 
dire pour âgé. Dites : vous êtes plus âgé que moi, ou vous êtes 
mon aine. ~ Mais, en parlant à un vieillard, on dira très-bien : 
Vous êtes pius vieux que moi, vos estez pus vt qu'mi. Lorsqu'il 
s*agit d'une dame même âgée, la politesse exige qu'on emploie 
toujours le mot âgé : Vous êtes moins âgée que ma mère, vos 
n'estez nin H vîle qui m*mére. 

2<» Le plus vieux de ses fils, pour Caîné de ses fils, ou son fils 
aine, de oudste vaii zijne zonen, fl. Voilà une locution vicieuse 
qui est en vogue dans toute retendue du pays wallon, de 
Malmédy à Douai, comme le prouvent les extrait suivants du 
Bull., a. 70, 2Mivr, 

Malmédy : S'pus vt des fis. 

Hannut : Lé pus vidés fis. 

Bouillon : S'pusvtfis, 

Wavre : Li pus vî di ses fus, 

Leuze : Vpus vieux d'ses garchons, 

Liège : Si pus vî fis. 



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- 378 - 

Famenne : Upus vt (t sè$ lis. 
Dînant : Li pus vi des fis. 
Âtb : Lpus vie dès gardions. 
Douai : Ch' pus viu fiu. 
S^" Eh bien, f>ieux, viens-tu avec moi? èh Mn, vi stocks vifUz- 
V* avou? \\ég. {pai. de Gharler. vf sto). On dit aussi simplement 
vt. Ex. ji v'vas fér louki, vî, ti Mâie neur, I, i. — Bonjour, 
vieux, bonjou, vi, p. de Marche, Bull., a. 59, p. 197. — Le 
terme de vieux, si affectueux dans une bouche liégeoise, et dont 
les dames aiment tant à se servir en parlant à leurs maris, 
n*est malheureusement pas français en ce sens, ou du moins 
n'appartient pas au bon style. Mon vieux ne s'emploie que dans 
le langage' populaire (Litt.). Qn dit aussi vietix tout court, 
comme le prouve cette citation de Lorédan Larchey : Tu me 
crois émue, vieux? allons donc, Frëmy, dans Us Excentricités 
du langage, 
i"" Vingt ans vieux. V. le mot Mesure. 

Vis. !• L'ouvrier est à sa vis, l'ovri est à s* viss\ Bull., a. 68, 
p. 109. Dites ; à son étau. 

i"" Un vis, on viss\ Dites : une vis. Le genre masculin, qui est 
celui du liégeois et du genevois, n'est pas le genre étymologique. 
Ce mot vient du lat. t^^t«, fém., m^fn^, dont les enroulements 
ont donné le nom à cette espèce de clou. 

Vite. Si vite que j'eus goûté, je m'en allai, si vite qui feuris 
fait qwatr' heure, feun' alla, Viég., zoo gauw (dat) iHr, elc.,pat. 
il. Dites : aussitôt que, sitôt que, dès que, du moment que, 
du moment où j'eus goûté, ou bien, une fois que, dès qu'une 
fois, lorsqu'une fois j*eu8 goûté... Cette tournure est aussi en 
usage dans la Famenne : Si vite qui vosf aute fis est riv'nou^ 
Bull., a. 70, â^" liv., p. 30S; à Sp2i:sifèite qu vosse fis est 
ruv*nou; à Limbourg : si vite qu vosV aute fis est ruv'nou; et à 
Weisme : si vite que vost aute fi a stu rev'nu. 

Si vite que est mauvais dans le sens de dès que ; mais il peut 



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-^ 379 — 

s'employer pour marquer l'extension : Le renne court si (c'est-à- 
dire tellement) y'iie, que..., H renne court si vite qui..., liég., ou, 
avec une négation, pour marquer la comparaison : Vous n'y 
arriverez pas si vite que moi (c'est-à-dire sitôt que moi), vos n'y 
avérez nin si vite ./«t mi, liég. Dans ce dernier cas, si équivaut 
à aussi . aussi vite que moi, ossi vite qui mi. Y. Aussi. 

Vitrine. Ce mot, que TAcadémie n'a pas admis, figure dans 
Bescherelle et dans Litlré : Mettre à la vitrine, mette à r vitrine; 
le liégeois dit aussi : mette à Cglace. La vitrine d'un marchand, 
H vitrine d'on marchand. L'Académie dit en ce sens : Mettre à 
rétalage; l'étalage d'un marchand. 

Voie. Jetez en voie toutes ces balayures, tapez tos ces chinisse 
è voie, liég. Supprimez en voie. Jeter son argent en voie, ruer 
ses yards in vote, mont. Dites : jeter son argent par les fenêtres. 

Les wallonismes formés avec en voie sont tellement grossiers, 
qu'il est superflu d'insister. 

Voilà, Voici. 1*^ Ne voilà-t-t7 pas que... ni vHà-t-i nin qui... 
d'après Litlré, celte tournure est un barbarisme introduit par 
l'usage. La seule correcte est : Ne voilà pas que... ou, voilà pas 
que... 

2» Le voici qu'il vient, voV cial quH vitit; là voilà qu'elle 
revient, voF là qu'elle rivint. Dites : le voici qui vient, là voilà 
qui revient, ou voici qu'il vient, voilà qu'elle revient. Littré 
signale cette cacologie à l'article Voila. 

3* le ! qui voilà ! ie ! qui vola ! fl. o ! wie daar! Dites : Ah ! 
vous voilà ! ou bien, tiens, le voilà. 

Voir. 1° Je voirai, je voirais, ji veûrei^jiveûreûs. Dites : je 
verrai, je verrais. La voyelle composée eu représente ici la 
diphtongue oi, comme le prouve l'analogie: miroir, mureûl 
roide, reûd; pois, peus, Sainte-Foi, Sainte-Feu. De là le wal- 
lonisme, j^ voirai, qui existe aussi à Tournai et à Mons, et qui 
n'est qu'un archaïsme. Ex. Et ne la voiroit-on si fière ni si 



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- 380 - 

belle, Régnier, Elég. III. Cette forme s'est maintenue dans deux 
composés : je prévoirai, je pourvoirai. 

2* Il faut faire voir après le médeein, t fât fér vèie apiès 
Vmide, fl. gij moei naar den geneesheer doen zien. Dites : il 
faut faire chercher le médecin, il faut mander le médecin. 

3« Il ne se voit plus avec ses parents, t rCsi veut pus avou ses 
parint. — La tournure est des plus barbares dans les deux 
idiomes. On dit très-bien; je ne le vois pas, je ne le vois plus, 
Lirr., pour, je ne le fréquente plus, j*ai rompu avec lui; mais 
se voir, au sens de se fréquenter, est un verbe réciproque, qui 
exige un sujet pluriel. Ex. Ces deux amis se voient tous les 
jours, Bbsch. Ces deux personnes ne se voient plus, id., c'est-à- 
dire elles sont en mauvaise intelligence. Dites donc : Il ne voit 
plus ses parents, ou bien, ses parents et lui ne se voient plus. 

4"* Voyons voir si vous serez assez hardi, vèyons vir si vos 
sWéz franc assez, mont. Dites simplement : Voyons si vous 
serez... «Selon Raynouard, pareil pléonasme existait dans 
le verbe portugais vejor veer/ie vois; levo levar, je porte.» 
SiGART. Il fait penser au damans clamavi de la Bible. C'est une 
façon de parler fort ancienne et fort ordinaire parmi les gens 
du peuple, non-seulement en Belgique, mais encore en France. 

5» L'honnête femme qui a épousé un coquin, envoit de grises, 
li brave feume qu'a spozé on capon, etmè veut dès grize. C'est une 
expression populaire (Litt.). Dites : souffre le martyre. Il en est 
de même de : il m'en fait voir de grises, i rneunè fait vHe dès 
grize. Dites : il me fait éprouver de grandes contrariétés, il me 
donne bien du tourment. 

()* On dit par abréviation : Il en a beaucoup vu au service de 
M"«» N., ènn' a baicôp vèïou d siervice di Af"» iV., fl. hij heeft veel 
uitgezien in de9i dienst tan,etc.II faut dire : il a beaucoup souffert. 

Il en a bien vu pour passer son examen, ènn" a bin vèiou po 
passer si exâmèn*. Dites : il s'est donné bien du mal pour... 

7° Il se fait bien voir de tout le monde, i s' fait bin vête di tôt 
rmonde. Les tournures françaises sont : il se fait bien vouloir 



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— 381 - 

de tout le inonde, âcad.; il est bien venu partout, Litt. Mais on 
dira très-bien à la voix passive : Il est bien vu de tout le monde, 
Besch., Litt. — On dira de même : il est mal vu de tout le 
monde, il se fait mal vouloir de tout le monde (Âcad.). Ex. 
Parmi les gens de lui les mieux venus, La Font, dans Litt. Il 
est bien vu de ses chefs, Litt. Mon amour, quand je Tai fait 
paraître, n'a point été mal vu des yeux qui Tont fait naître. 
Corn, dans Litt. — On pourra aussi changer la tournure : Tout 
le monde le voit de bon œil, Acad., d'un bon œil, Litt., de 
mauvais œil, d'un mauvais œil. 

8*» Un peut voir ! on pô vête, Bull., a. 58, p, 107, een keer zien, 
tï. fam. Dites : laissez-moi voir cela. 

Vol66. Il a reçu une volée, il a attrapé *n* volêie. Le wallon 
entend ce mot de volêie au sens de soufflet. En français, une 
volée de coups de bâton, ou simplement une volée, ne peut 
signifier qu'un grand nombre de coups de bâton donnés de 
suite. 

Volontaire. 1^^ Cet enfant est ivès-volontaire, cisV èfant-là 
est foirt volontaire, liég. dit kind is gewillig, fl. Dites : est fort 
soumis, fort docile. -- En français, un enfant volontaire est^un 
enfant qui ne veut faire que sa volonté. Ex. Il est trop 
volontaire, il n'apprendra rien, âcad. 

2» Il y a dans votre jardin beaucoup d'arbres qui sont très- 
volontaireSy il a dins vo gardin brammint dès dbe qui .sont bé 
volontaires, mont. Dites : qui sont très-productifs. 

Volontiers. Je le vois volontiers, fel voès voltt, p. de 
Cliarler., Bernus, p. 178, j'è/ vois voltin, p. de Nivelles, fl. ik zie 
hem gaarne. Dites : Je l'aime beaucoup.— Je vous vois volontiers, 
ji vos woies voltî, namur. Dites : Je vous aime bien.— Vous êtes 
volontiers élégante, bien mise, vos estez vollt gâte, liég. Dites : 
vous aimez à être bien mise, à vous attifer. — Les lapins 
mangent volontiers le laiteron, lès robeUe magnèt voltî Flapson. 
Dites : les lapins aiment à se nourrir de laiteron.— Les perro- 



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quels grimpent volontiers, lés paroquèt gripèt voltî, liég. Dites : 
aiment à grimper.— On dit en flamand gaarne eeten^ gaamc 
drinken^ en allemand gern essen, gern trinkm^ aimer à manger, 
aimer à boire.— Au passif, on pourra rendre plus littéralement 
le wallon : vos estez veu voltt d'tot Vmoiuk, Namur, Ghavée, 
p. 200, vous êtes bien vu de tout le monde. Nous renvoyons à 
Voir, n. 7. 

L'adverbe volontiers exprime qu*on fait une chose de bon gré, 
de bon cœur ; il ne peut s'employer pour marquer qu'on a de 
l'affection, de Testime pour quelqu'un, ou un goût particulier 
pour quelque chose. 

Vos. Fi ! vos brigand ! ai ! vos brigand ! Dites : Fi ! brigands 
que vous êtes ! — Ah ! vos bavards ! ah ! vos menteurs ! Ai ! vos 
jâzeu; ai! vos boûrdeu / — Ah ! vos folles ! ai ! vos sotte! angl.aA 
you foolsl fl. foei^ gij zottinnen. Dites : Ah ! bavards que vous 
êtes, menteurs que vous êtes ! folles que vous êtes ! — Ce vos 
est une fausse traduction du wallon vosy qui n'est ici autre 
chose que le pronom personnel correspondant à vous. 

Vouloir, l"" Voulons-nous faire une promenade? volans-gne 
férine poi^nade? wollen wir einen spaziergang machen? Dites : 
faisons-nous une promenade? ou allons-nous faire une prome- 
nade? (Fesons-nous est pour ferons-nous.) — L'auxiliaire alle- 
mand wollen s'emploie dans le sens de werden, et se traduit par 
le futur ou le verbe aller : wir wollen sehen, nous verrons, nous 
allons voir; il en est de même de voleur en liégeois. Cet emploi 
de vouloir est étranger à la langue française. 

S* Wallonisme analogue : veux-je vous aider? voux-f vis 
aidt? fl. wil ik u helpen. Dites : vous aiderai-je? ou faut-il que je 
vous aide? 

3« Ce mur veut tomber, ci meur-là vout tourner, dièse Mauer 
will einfallen, ail., deze muur wil omvallefi, fl. Dites : ce mur 
va tomber, est sur le point de tomber. — Il veut dormir, t vont 
doirmù Dites : il va s'endormir, il sommeille. 



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- 383 — 

4'* // peut dire tout ce qu'il veut, j*âgirai à ma gaise, t pout 
dire tôt çou qui vout, ji frèi a m* mode, er mag sagen was er will, 
ail. Dites : quoi qu*il en dise, ou quoi qu'il en puisse dire... 

5** Arrive ce qui veut, arrive çou qui vout, liég , venue quoi 
c'vout, p. de Gharler., Bernus, p. 160, arrive c'qui veut, mont., 
ail. es geschehe was da wolle, fl. geschiede wat wil. Dites : 
advienne que pourra, quoi qu'il advienne. Le liégeois dit aussi : 
anive qui plante, Bull., a. 60, S*" livr., p. 248. L'Académie donne 
cette dernière tournure comme populaire. 

6* Allez-vous en, je ne vous veux p2LS, allez-è^ ji n'vis vous 
nin. Dites : je ne veux pas de vous. — Vouloir de, avec un 
substantif pour complément, signifie rechercher, accepter. £x. 
je ne veux point d'un trône où je sois leur captive, Corn, dans 
Lilt. 

l"" Faites comme vous voulez, féz comme vos volez, doe zoo 
als gij wilt. D'après M. Benoit, il faudrait employer le futur : 
Faites comme vous voudrez. Cela paraît bien sévère. Cet 
emploi du présent ne présente rien d'incorrect. 



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LISTE DES OUVRAGES CONSULTÉS. 



Outre les Dictionnaires français de rAcadémie (^), avec le 
Gomplémentyde Roquefort, de Furelière, de Trévoux, '^liandais, 
de Poitevin, de Bescherelle et de Littré, et les Dictionnaires 
wallons de Grandgagnage, de Cambresier, de Remacle (patois 
de Verviers), de Duvivier (manuscrit), de Hubert, de Dasnoy 
(pat. ardennais), l'auteur a consulté les ouvrages suivants : 

1* Flandricismes et Walionismes, par Poyart, Bruxelles, 
Rampelbergh, 1811. 

2* Les Omnibus wallons, par Hennequin, Namur, Wesmael, 
1864. 

S*' Dictionnaire du bon langage, par Tabbé Garpentier, i" 
édition, Bruxelles, V* Parent, 1865. 

4'' Le Complément des «grammaires et des dictionnaires 
français, par Benoit, 2" édition, Bruxelles, Decq, 1860. 

ô** Les Omnibus du langage, par Lévy, iS^ édition, Bruxelles, 
1843. 

6* Nouveau manuel de la pureté du langage, par Biscarrat, 
Paris, Borel, 1838. 

V Grammaire liégeoise, par Micheels, Liège, Renard, i863. 

8'' Poésies en patois de Liège, précédées d'une dissertation 
grammaticale sur ce patois, par Simonon, Liège, Oudart, 184S. 

9^" Dictionnaire rouchi-français, par Hécart, 3* édition, 
Valenciennes, Lemaitre, 1834. 



{^) L'impression du Mémoire avait été commencée avant 4877; je n'ai pn tenir 
compte de la dernière édition. On pourra suppléer à cette lacune en consultant le 
livret intitulé : Changements orthographiquet introduiis dans le Dictionnaire de 
rAcadémie. Paris, Boyer, 4879 



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- 388 — 

10'' Dictionnaire du patois de la Flandre française ou wal- 
lonne, par Vermesse, Douay, Crépin, 1867. 

ll^» Dictionnaire du wallon de Mons , par Sigart, 3* édition, 
Bruxelles, Glaassen, 1870. 

12* Glossaire du centre de la France, par le comte Jaubert. 

IS*" Français et Wallon, parallèles linguistiques, par Chavée, 
Bruxelles, Decq, 1857. 

14» Nouveau Dictionnaire des dictionnaires portatifs, extrait 
de Landois, précédé d*un traité des participes, par Vanier, 
Br nivelles, Rozez, 1853. 

15* Examen critique des dictionnaires de la langue française, 
par Nodier, Bruxelles, Librairie romantique, 1829. 

16"* Dictionnaire analogique de la langue française, par Bois- 
sière, Paris, Larousse. 

17* Dictionnaire des synonymes de la langue française, par 
La&ye, Paris, Hachette, 18§8. 

IS"" De l'influence du langage populaire sur la forme de cer- 
tains mots de la langue française, par E. Âgnel, Paris, Dumou- 
lin, 1870. 

19^ Grammaire historique de la langue française, par Bra- 
chet, Paris, Hetzel. 

20*» Nouvelle grammaire franc^aise, par Brachet, 2« édition, 
Paris, Hachette, 1874. 

21° Grammaire nationale, par Bescherelle, 14* édition, Paris, 
Garnier. 

22* Cours de Grammaire française (syntaxe), par Gollard, 
Mons, Manceaux, 1867. 

23<' Nouvelle grammaire française, par Ploetz, Berlin, 1866. 

24° Grammaire française par Van Hollebeke et Merten, 2" 
édition, Namur, Wesmael, 1870. 

26» Récréations philologiques, par Genin, 2« édition, Paris, 
Cbamerol, 1858. 

26^ Des variations du langage français depuis le XI1« siècle, 
par Génin, Firmin Didot, 1845, 



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— 386 — 

27" Dictionnaire raisonné des difficultés grammatii^ales et 
littéraires de la langue française, par Mary-Laveaux, 4^ édi- 
tion, Paris, Hachette, 1873. 

28<> Les excentricités du langage, par Lorédan Larcbey, 4* 
édition, Paris, Dentu, 1862. 

29<' Dictionnaire français-allemand et allemand^français, par 
Schusler, Paris, Hingray-Fourand, 1845. 

30'' Dictionnaire français-flamand et flamand-français, par 
Vandevelde et Sieeckx, Bruxelles, Greuze, 1864. 

31** Traité de versification française, par Dessiaux. 

Quant aux textes wallons, outre les publications de la Société 
qui renferment des spécimens de tous nos patois, nous avons 
consulté surtout : 

1^ Vvraie ervue d'Motis, Mons, A. Thieman. 

2* VArtnonaque dé Mon$, par Letellièr, curé de Bernissart, 
Mons, Dequesne-Hasquillier. 

3' Les fauves dé J. fjifontaine in patoés d^Chaleroèt, pa Lien 
Bernus, Gharleroi, A. Piette, 1873. 

4® Chansons populaires tournaisiennes. Tournai, 1868. 

5<» Artnénaque de Tournai pour Vannée 1851^ Tournai, Robert. 
(Il n'a paru qu'une seule fois.) 

6"* Les aventures de Jean d'Nivellesy Bruxelles, Froment, 
1867. 

T Les textes wallons de TAlmanach Mathieu Laensberg et 
de i'Almanach Franklin. 

8® Armonaque di Nameur^ Namur, Godenne. 

9« VEcho de Givet, journal hebdomadaire, publiant de temps 
en temps un article intitulé échos patois. 



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LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS. 



A. 


Année. 


Inf. 


Infinitif. 


Âcad. 


Académie., 


L. Lit. 


Littré, L. après un 


Adj. 


Adjectif. 




nom d'auteur, 


Adv. 


Adverbe. 




indique que 


AlU 


Allemand. 




l'exemple est 


Ann. 


Annuaire de la 




dans Littré. 




Société liégeoise 


Lat. 


Latin. 




de littérature 


Loc. 


Locution. 




wallonne. 


Liég. 


Liégeois. 


Art. déf.indéf. Article défini, in-^ 


Masc. 


Masculin. 




défini. 


N. 


Numéro. 


Besch. 


Bescherelle. 


P. 


Patois ou page. 


Bull. 


Bulletin de la So- 


Part. pas. 
Pas. déf. ind 


Participe passé. 
Passé défini, in- 




ciété liégeoise 




de littérature 




défini. 




wallonne. 


Pat. 


Patois. 


C-à-d. 


G'est-à-dire. 


Pop. 


Populaire. 


Charler. 


Gharleroi. 


Pos. 


Possessif. 


Gompl. 


Goinplémenl. 


Prép. 


Préposition. 


Gond. 


Gonditionnel. 


Pr. pers.ind 


. Pronom person- 


Dict. 


Dictionnaire. 




nel, indéfini. 


Dial. 


Dialecte. 


Propos. 


Proposition. 


Dir. 


Direct. 


Prov. . 


Proverbe. 


Ex. 


Exemple. 


Relat. 


Relatif. 


Fam. 


Familier. 


Réfi. 


Réfléchi. 


Fém. 


Féminin. 


Rem. 


RemacU, 


Fig. 


Figuré, 


Sing. 


Singulier. 


FI. 


Flamand. 


Subj. 


Subjonctif. 


For. 


Forir. 


Subst. 


Substantif. 


Fr. 


Français. 


Tourn. 


Tournai ouTour- 


Grand. 


Grandgagnage. 




naisien. 


Gratn. 


Grammaire. 


V. 


Voir. 


Indir. 


Indirect. 


Wall. 


Wallon, 



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SCENE POPULAIRE 

ON SPOT 

ACCESSIT (médaille d'argent) 

Par J.-G. DBLARGE. 

L'Affaire si passe es l'chassèîe St-LtoA, à Lige. 

personnëges ! 

NâNESSE. 

MAREIE. 

CHANCHET, homme da Nanesse. 

NANESSE. So Vsaû di s'mohone quijont Vci da MarHe. 

Quel bai timps, hein Marèïe, quel plaisir po Fjônesse 
De poleur s'amuser les treus bat joû de Tiièsse; 
Qwan nos-auie, ëlahèïe» sins qu'on sèpe çou qu'nos fans, 
Nos d*vans d'mani r*trôclèe avou nos p'tits èfans ! 

MARÉIE. 

Awoi, Nanesse, awoi; main qui vouss' fér, bâcelle? 
Nos n'divans nin roûvt qui n's avans slu com'zelle. 
Toi timps vint, toi timps passe, il s'ës fàt fer n'raison 
Et comprinde qui l'plaisir n'a jamais qu'ine saison. 
S'il faliéf calculer et prinde & ptd de l'iette, 
Nos chagrin, nos misère, to çou qui nos tourmette, 
Nos arts bel à fer. 



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— 389 



NANBSSB. 



C'est vraie, main bin sovint 
Qwan ji r*pass' inte mi-meim* les plaisir di m'jône timps, 
Ji SOS si tourmettèe, si plainte di l'ais-m'ë paie, 
Qui j'sohatte 11 mariège èvole à dial qui Taie. 

MARËIB. 

Vas-ès, c'est ine sott'rëie, le jône qui s'gaïUottët, 

Qui bizèt nute et joû, qui corèt, qui s'pitèt, 

Fët comme nos avons fait. Totes ces pHilës wihette 

Ni metiët leu perrique, leus flokët, leu cornette, 

Qui po sa'i d'aveur in homme ou on galant 

Et di s'mette es Tmisére tôt comme nos y estans. 

NANESSE. 

G*est vraïe^ je Tsés, Marëie, on-z-est sotte tour à tour, 
On pinse qui d'vins l'mariëge tot-à-fait seûïe amour; 
On n*comprind nin Fwastâd! On-z-areut bin meïeu 
S'en poléf à nost* âge rimahi les qwargeus ! 

MARËiE. A mitant bas. 

Ifess' nin conteinne di ti homme ? 

NANESSE. 

Tôt comme li chin qui s'tronne. 
Il fit bin qu*on-z-y,d*meure et qu'on sëffok ses ponne. 
Vos les k*nohez comme mi, on pout bin fer n*creu d'sus. 
Ga, si ji touméf vèv, maie nouk' ni m'&reut pus. 
C'est des vraies ëhall, on freut foirt bin sins zelle, 
Ga rctss', po dire ii vraie, ni vât wëre li chandelle ; 
Et vos estez mariée , dihez-m' on pau bon'mint, 
Si v's estez à vost âhe ? ^ 



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— 390 



MARÈIE. 



Quel drôle di complumint ! 
Pa, ti deus bin savu, qu'il n*y a noir mohinette 
Qui n'aie ses imbarras, qui n'poite si p*tite creuhette ! 

NANESSE. 

Awoi main, binamèe, tôt Tmonde ni s'raviss'nin.... 

C'est qui mi, avou mi homm C'est bon qu'ji n'dit mftie rin ; 

Main si vos k'nohiz bin totes ses latdès mantre !... 

Je l'voléf co qwitté, nin pus Ion qui d'vans-hir... 

Houtez !... vos sarez tôt, main qui s'seuie po nos deux, 

Ca si vs es motihiz Chanchet mi d'zawoureut 

C'est on traite, on Judas, on fât, on frotteu d'manche, 

Qui dispoïe bin longiimps kwire à m'mett inte qwate planche. 

Il grôule tote li journée, et v'ià po Tmons treus meus 

Qu'il brogne et fait les mowe. Il d'vint todis pu freud. 

Qwan c'est l'moumint d'I'heurèe, s'il vint s'âchtr à l'tâve, 

Il baie et il mouftèe, il beu s'tasse et il s'sâve. 

Si onc di mes gérin si r'mowe on tôt p'tit pau 

Il jeure, il timpestée tôt comm' s'il esteut sau. 

(To choulanL)Et qwan il vint doirmi,il s'toune li tiëss vès Tmeurl 

Vos d*vez pinser, Hareie, qui c'est iue sakoi d'deur ! 

S'il n'aveut nin des autt ! 

MÀRÊlE. 

Priùds paciince, il cangerè. 

NANESSE. 

Ci n'est nin çou qu'j'y tinss' ; main c'est de vèïe paré 
Qu'il piette li cour à mi!... Sia, après n'qwinzeinne, 
Il m'voreut v'ni choufter.... Mi prind-il po n'dôrleinne ? 
Pinse-t'il qui jâïe roûvi qui d'vins Tlimps, tos les joû, 
Il It falléf... awoi !.... Il esteut bin pus doux 
Di c'timps là, ai! l'brigand ! 



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- 391 - 

MARËIE. 

Taiss-tu, c'est todi ti hoiime 

NÀNESSE 

Tatbtz-v\ c'est on rabisse qui Q*vât nin çou qu'on Homme 

Il a tos les mëhin, il est nawe et jalot, 

Il n'rëie mâle qui Pdlmëgne qwan il mett' si paitot 

PO'Z aller beure ses verre, et s'amuser drf l'batte, 

Es riv'ni tôt k'boûi et plein com tne patate. 

Si coula continowe, il fât qui mïaiss peler : 

Ji n'magne pusji n'doime pus, ji n'fais qu'di mUourmetter, 

(On-z-ètind Morgue' di barbafie.) 

MARÉIE. 

Séss-bin quoi, console-lu, ni Cfâis niii dès ma d'tiesse; 
On prind Ttimps comme'il vint, qui Tbon Diù faiss'li rosse. 
Hoûte ! vocial ine musique ! Habeïe ! il fât danser ; 
{Elle apogne Nanesse,) 

NANESSE. (To riant avou Us Idmes ax ouiU.) 

Lais-m'ës pâîe, sotte micole, ji n'sos pus foite assez ! 
Ta vëiou l'timps, Marëîe, qui c'esteut tôt m'plaisir ; 
Main houïe, ji so sins gosse !... Binamé' Diu de cir ! 
Ji veut Gbanchet qui r'vins ; il est plein comme in où : 
Il va co v'ni gueuï, s'il m'a vëiou so l*soù. 

MARÉIB. 

Vas-ës b&h' mi saquoi ! tos les bomm' sont pareil. 
Ti brais d'vant d'avu l'côp ! 

CHANGMET. {Arrivant.) 

Vive li verre et Tboteille ! {Il chante.) 
Vive li verre li boieille 



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J 



— 392 - - 

Es l'vin, 
Ji chante, ji danse, ji rëie 

Sovint. 
Et qwan m*feumme mi tourmette 

Tôt d'bon 
Ji beus n'gott' po Trimette 

So i'ton : 
Contint tôt comm'on prince 

Ji vous 
Beure et dire çou qu'ji pinse 

Avou. 
Tôt immonde vik à s*mariire 

Et mi, 
Ji vik po beure et rire 

Ossi. 
Merde po Toi qui s'anoie ; 

Pauve sot 
Qui n*rikuire maïc li joïe 

Es pot. 
Il passe si vikârëie 

Tôt seu 
Et lanwih'tote si veïe 

Di seu. 

NÀNEssE. {Haut.) 

Vèez-v\ il est co sau ! je rkwittrè, je Tkwittrè ! 

CHANCHET. (To balançant). 

Ti pou fer cou qu*ti voux, ji frëcomm il m'platrè. 
Qwan ti beus t*crâs cafë avou tes michotrèïe, 
Ji n*ti d'mande nin poquoi t'a jourmâïe des bouftrëîe; 
Ainsi, qwan j'beus-t-on verre qu'ass'mës&h de gueu!, 
Et de droviér ine bok ossi lâge qu'on sàn!. 



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— 393 — 

Louk, es rplëce de chapter si testeus-t-ès t'coulëe 

A rakeuse, k r'nawi tes chàss* qui sont trawëe, 

A r'bouwé' tes clikotf, à r'nôtl les èfiins, 

A fer nHass' di café po Pci qui t'gangne de pan, 

Ti Areus çou qu'ti deus fer, main ta n'iinwe à clapette. 

(Mostrant IUarèïe.)Ei t'woisène qui vola, avou ti fait trokette. 

MARÈiE. {E$ colère.) 

Est-ce di mi quVos jasé, laid bômèl, plein d'pëquet? 
Si j'aveus t-on s'fait qu'vos, ji It freu fer Tplonquet, 
Ca ji n'sos qu'ine simpe feum', main ji creus s'ji v'tinéf 
Qui jYaïereus voss' tignass' et voss' narënne à fréve. 

NANESSE. (A Marèïe,) 

Féz tôt doux, féz tôt doux; vos v'm&vléz po dès rin. 
Qui volez-v'braire ainsi ? Ghanchet ni vVaraigne nin ! 

MARÈiE. {Co ptLS mâle.) 

Tathiz-v\ vos, grande c&noie» vos n'estez qu'ine épiasse : 
Vos Vkitiaclii po drt et devant lu vos fer l'i&sse. 
Il gn'y a nin dix minute qui vos m'es Tkijasi ; 
Qui vos lUroviz ingrâtt, macro, flairant, mâssi ; 
Es, pace qu'il est riv'nou po bouter vos messëge. 
Vos Tvolez fastriî.... allez-ës, f&x visège ! 

GHANCHET. {A Marète.) 
On fax visège, c'est Ttonck ! 

NANESSE. {A Marète.) 

Chinisse ! linwe di serpint ! 
Ti freus mîx di f murer. 

MARËIE. 

Tathiz-v' toune à lot vint ; 
Jûs'resse, tigneuss', macralle ! allez pais vos dette ; 



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— 394 -^ 

CHANCHET. 

Si j*aveus dès tèmons ! 

NANBSSE. (il si homm.) 

Fér li b&ht brésette. 
Elle ni vàt nin les pônne, (à MarHe) allez-ès laid warbeau ! 

MARÊIE. 

Bouftresse ! 

NANBSSE. 

Pouieuse ! 

MARËlE. 

LânVesse ! 
NANESSE. {hfostrans s^pogne,) 
Répète lu co on pau ? 

CHANCHET. {HaUt.) 

Awoi, répète lu co, ji l'va triplé so t'panse. 

MARÊIB. 

Taihtz-v\ Jihan batbaî ! 

CHANCHET. (Mostrafis s'pogne,) 

Cûrèïe ! 

MARËiE. ( A Chancheî,) 

Corège ; avance ! 

NANESSE. (Prindant Chanehet po VbresseJ 

Jan ! binamé, riv'nez, lèls-l'po çou qu'elle est, 
Tôt Tmonde es rkinoh' bin : c'est on mâsst boquet. 

CHANCHET. fSûvant Naneue.J 

Ji n'sés qui m'tini, Nanesse ! 



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— 395 — 

NANESSB. 

Jan! riv'aez, c'est ine sotte» 
Elle Ireut dire ax pns qui v's avez co bu Tgotte. {Il rintrèt.) 

NANESSB. (il Fintrèe di lauhe.) 

Elle est pés qu'ine qwatte-pëce, elle chaptèe tôt costé ! 

MARÊiB. (A louhe da Nanesse.) 

Mon Diû, est-il possibe, tôt çou qui in*fât bouter ! 
Mi qui n*jâse co jam&ie. Jubet ! laid rowe ! potince ! 
Ji n'wës'reus jamais dire di vos tôt çou qu*ji pinse. 

NANESSB. (À Fintrèe di si ouhe.) 

Ti n'a qu'à l'dire, warmaïe ! Pinse-tu qui j'seuîe com ti ? 
Ji n*a mftie fait poirter des coine à mi homme, séss'mi ? 

MARÊiE. (To t'hapani po IHiesse.) 

Po c'côp là, ji trëfèle ! maheulèe ! fax pilftte ! 

Qui n'touméf tos les deux à rvallëe de Fcoufite 

Qwan vos k*minç'rez journée mèrkidi â matin ! 

Des pus brave qui vos-autt'y toumèt d'timps in timps. 

Il vâx co mtx qu*ji m'taiss', vos varins, vos chinisse ! 

Ji m'va beure ine bonne tass' es Pplèce de fer dès d'visses , 

Je nn'areus trop à dire, main ji v'rarè todi. 

Il sèrè pus Ion qu'hôuïe, qwan çou qu'vos m'avez dit 

Sèrè rouvt, allez. Ji m'sovairè jourmftie 

Qu'il est todi bin vraie qui po viker es pftie, 

On deut bin clore si bêche et bouter tôt à fait 

Sins jamais chôki s'deugt inte li poite et rpostâi. 



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LES POIETRESSE 

1'^ PRIX (médaille en VERMEIL) 

Par J.-G. DELARGE. 



Toi Ltgeois deut bin k'nohe li halle, wiss' qu'on vind Tcbâr. 

C'est on vtx batumint qu'est fait d'ine cogne foir rare. 

Vos dtriz, tôt rioukant, qui c'est co Tmonumint 

Là wiss' qui Saint Lambiet priïf di timps-in-timps ; 

Main, si vos Tapprèplz, so l'côp l'odeur des biësse 

Vis happrët po l'narenne, et v's ârez ma voss' tiesse. 

Ga, ji m'es sovint co, vola bin quarante ans, 

Qwand les plancbi siervtt di s'cole po les ëfant 

J'y alléf comme les aute, et ji m'sintéf malade 

D'ine odeur qui n'aveut nin l'gosse di lémoscâde. 

C'est todi hoûie pareil, à d'vins tôt comme à d'foû : 

Les mangons sont d'vins ouve et les poïetresse àtoù. 

C'est d'ciss' sort di gins là, qui vindèt de l'volaille, 

Des Itve et des piëtri, des coq, des poïe, des kwaille, 

Qui ji v'vous-t-inslrit'ni, si vos volez bouter 

Li p'tit râvlai wallon qui ji v'vas raconter. 

A pônne âx air de joû, vos les vèïez assiowe 

Conte li meur de l'veïUe halle, qui fait boirdeure à l'rowe: 

Li prumt d'ieus ovrège et d'apprester l'jublî 

Qu'est prêt' à div'ni vert et qui k' mince à flairl. 

C'est po les cuisinière qui sont âx grands bôtél : 

Les riche aimmèt l'haut gosse divint les biesse a-z-èle ,s 

Divins l'itve et l'iapin, et d'vins baîcôp d'boquet 

Passés po les mèïeux, so l'tâve di leu banquet. 



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- 397 — 



I 



Si sont trop-z-avanci, on les vind po des resse. 

Et c*est on bénéfice po Tvindeuse et rach'tresse. 

lue fête cès-la ëvoïe, on rattind l'vlx poîett 

Qu'appoite, sorlon Fsaison, tote ses biesse i marchl. 

À prétimps des puvion, des polet, des robette ; 

L'osté des crftssës pôle et des jônës poïette ; 

Qwand c'est Tarrire saison, des châpeinne, des mâvi 

Des canard et des s'prèwe, des vert, des coqlivi, 

Des pinson, des kalkeu, des belles bèguinette, 

Et des bonnes dozainne di crasses allouwette. 

£s Thiviér, totes les sort di jubli des Anneu 

Qui n'passet pus leu timps qu'à beure et fer Tbrakneu, 

Et d'timps-in-timps les frut d'on vol di quéqu* manège 

Àppoirté d'vant qu'l'aireure n*âïe lu so lès viège. 

Biesse à plome, à poiëge, li poïetresse ach'tèie tôt : 

Qwand Tvîx poïeti arrive, il n*a qu'à vûdi s'bot. 

Les ouhai sont pindous à paquet d'zeus Tbotique 

Et barloquet lurtos comme des ve'iès erlique. 

Des autes sont tôt ploumés ; qwand rpoîetrese ni vind hin 

Elle mette ses p'tit paquet à pont po V Tëddimain. 

Louktz près di s'chè'ir, totes les chatves sont rimplèîes, 

Vos n'vèïez qu'cîr et biesse sitârèie atoû d'ièïe. 

Là c'est on gros coq d'Ine qui passe li gosse de pan ; 

Tôt près, c'est ine crasse âwe qui s'kitape to morant ; 

Ine pote qui drouve si bêche to sintant parti s'cour, 

On colon, qui i aukèïe comme po braire & secours; 

On polet qui s'kihenne tôt sintant l'grand coûtât 

Passer comme on rèzeu po It côper l'buzai. 

Tôt coula, po l'poietresse n'est pus qu'ine habitude, 

Elle es n'es fait on jeu d'à matin jusqu'à l'nute, 

Etto fant spricht l'sonk de l'martyre di ses main, 

Elle kij&se si woisenne et rèie di ses tourmint ; 

Ou, lot vêlant passer li p'tite chèrette chergè'ie 

Di pomme, di peurre, di preune, di bulok ou bin d'gèle, 



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- 398 - 

Elle va plainde di tôt s*cour li chin qui deut sècbt 

Ou paquet comme coula, so l'Goffe ou so l'IIarchl, 

Sins songt qu*ës s'banstat, lanwih et dWint tôt flAwe 

On gros coq, îne crasse pôle, on dindon, ou ine âwe 

Avou les patte loièles divint si s*treute prthon 

Tôt rattindant l'moumint de Pmoirt, qui n'est nia Ion, 

Si quéqu' 'bonne gouvernante qui réguelle les affaire 

D'on bon vtx rapign'teu, div'nou propriétaire. 

Si présinte dilez zelles, les poche rimplèies d'argint, 

Elles diront tour à tour qui c'est ine honnête gins. 

Qui considère li monde, qui calcule et qui tuze 

Po nVin fer piette à s*maisse, et fer gangnt n'blanmuze 

A ciss' qui s'vinet mette à l'plaive, à tos les timps, 

Po-z-avu quéqu' patAr et rinde li monde contint. 

Main si n'pèlôe madame, ou quéqu' souwée mam'zelle 

Vint k'pautt Tmarchandëie et n'faisse nin des handelle, 

Vos ètindrez l'poietresse It taper, sins façon, 

Des côp d'Iawe à fer taire li pirou des wallon. 

Elle le rtraitrè d'cAnôie^ di bizawe, di hosse-cowe, ' 

D'èpl&sse, di tape-tu là, d'iâge vantrin, d'intrit*nowe, 

Di bribeuse, di macralle, di vindeuse di paquet, 

Di bastftde, di Iftn'resse, di beuresse di pëquet, 

Di tapresse di kwftrgeu, di m&le linwe et d'chaffette ; 

Sins compter les sohait qu'elle are po Trawette. 

S'il fait chaud, li poïetresse est lègtre et tote frisse. 

S'il fait freud, c'est l'covet, qu'elle mette.... ji ses bin wisse. 

Et n'feiâ vès deux treus heure, vos les vèiez sopter 

Gomme des gins qu'ont veûi deux nute sins s'èpak'ter. 

Giss' lai est aspoièie dizos l'teut di s'baraque; 

Ine aute lait pinde si tiesse jusqu'à so si s'toumak. 

Giss-cial creuhelle ses bresse et ronfelle comme on chet, 

Ine pus jône clëgne ses ouie et mosteure çou qu'elle est, 

Ga, d'vant de fer sprongt, elle a r'mettou es pièce 

Ses ch'vet, s'norret, s'vantrin, ristindous comme dès glèce. 



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- 399 - 

On n'compte pus de riii fer, c'est fini po ç*joû 1&, 
On s'dispiète vës cinq heure, on dHelle et on n'n*erva, 
Et rJèddimain, lot timpe, vos les r'vëiez co n' feïe 
Âvou les meimmes air et totes leus marchandëïe, 
Vini r*prinde leu vlx posse et s'achtre so leu hame, 
Tôt brëiant tôt long Tjoû : ni v'fôt-il nnd madame ? 



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TABLE DES MATIERES. 



Pages. 

Statuts V 

Tableau des membres de la Société xiii 

Concours spécial : Les buveurs de genièvre y rapport du Jury. 4 

Les bttveus d'pèket, par A- Peclers \:î 

fne copètie contre Us pekleus, par G. Delarge ^0 

Concours de 1873. Rapport sur le concours n^ 10. . . . 27 

Li mohonneàdeuxfaceSy comédie en un acte, par J. S. Kenier. 35 

Concours de 1874. Rapport sur le 4« concours 75 

Recueil de wallonismes, par I. Dory 77 

On spot, scène populaire, par <î. Delarge 588 

Les poïetresse, par G. Delarge 596 



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