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Full text of "Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin"

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BULLETIN 

DE  LAi  SOCIÉTÉ 

iVRCHËOLOGlQUE 


ET  HISTORIQUE 
DU    LIMOUSINj 

TOME   XL.   —   i"  LIVRAISON 

(tome   XVllI   DE   LA   DEUXIÈME  SÉRIE) 


'^-i^fc.^^-  's^iûj»^ 


LIMOGES 

IMPBIMEBIE       ET    LIBRAIRIE     LIMOUSINH 

V   H.  DUCOORTIEDX 

Llbrsire  de  1»  S'"'  ï  e  an:  co  ogiq 

7  ,     RUE    DES    ARLN  ts.    - 

1802 


SOMMAIRE 


de  la  !'•  livraison  du  tome  XL 


Un  visite  au  tombeau  d'Achmet-Pacha  (Claude-Alexandre  de 
Bonneval),  par  M.  Joseph  Brunet 

Zizim  ta  Bourganeuf  et  à  Rome,  par  M.  le  chanoine  Arbellol.         1  \ 

Les  gravures  originales  de  Léonard  Limosin  à  la  Bibliothè- 
que nationale,  par  M.  Camille  Leymarie 4<> 

Les  Assemblées  des  habitants  d'Aubusson  et  la  Baille  de 
Masvoudier,  par  M.  Cyprien  Pérathon 4() 

Aymeric  Guerrut,  archevêque  de  Lyon,  par  M.  le  chanoine 
Arbellot " al) 

Essai  de  classification  des  anciennes  porcelaines  de  Limoges, 
Saint-Yrieix,  Solignac,  etc.,  conservées  au  Musée  national 
Adrien  Duboucbé  (suite),  par  M.  Camille  Leymarie 7  ! 

Le  Chapelet  à  Limoges,  du  xv*'  au  xvm"  siècle,  par  M^"*  Bar- 
bier de  MontauU ^ î)i> 

Anciens  statuts  du  diocèse  de  Limoges,  par  M.  l'abbé  Lecler       1^2:2 

Documents  pour  servir  à  l'histoire  de  l'industrie  et  des  ma- 
nufactures en  Limousin,  publiés  par  M.  A.  Fray-Fournier.       ir>  i 

Etude  historique  sur  l'ancienne  vie  de  saint  Martial,  par 
M.  le  chanoine  Arbellot 21  :i 

Les  Frères  Prêcheurs  de  Limoges  (1220-1693),  documents 
publiés  par  M.  l'abbé  Douais 2(>  I 

Discours  à  la  louange  des  Limousins,  publié  par  M.  J.-B. 
Champeval 8(î  4 

Soutenance  d'une  thèse  de  philosophie  au  collège  de  Li- 
moges^ publiée  par  M.  Emile  Du  Boys 37  î. 

Notes  et  communications  diverses  : 
Vierge  d'Azérables,  par  M.  G.  Berthomier.  —  Rôle  de  la 
taille  de  Limoges  en  1633,  par  M.  Louis  Guibert.  — 
Prise  de  possession  de  Mg-*  de  Canisy,  communication  de 
M.  l'abbé  Granet.  —  Inslitution  de  foires  et  marchés  à 
Mortemarl,  communication  de  M.  G.  Touyéras.  —  DiflTi- 
cultes  entre  l'intendant  de  Limoges  et  le  bureau  des 
finances  au  sujet  d'une  fontaine,  communication  de 
M.  l'abbé  Granet SHi  > 


DE    LA 


SOaÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE 


DU    LIMOUSIN 


BULLETIN 


DE  LA  SOCIÉTÉ 

ARCHÉOLOGIQUE 

ET  HISTORIQUE 
DU  LIMOUSIN 

TOME  XL 

(tOUB  XVIII    DE   LA   DSUMËMB   SÉRIE) 


LIMOGES 

lUPRIUERlS     CT     LtBRÀlRIB    LIMOUSINE 

V  H.  DUOOURTIEUX 

LIbrain  de  li  Soeièlt  arcbécloglq!»  cl  bitlarique  du  LiDiouain 
;,   RUE    DES   ARÈNES,   ^ 

1603 


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UNE  VISITE 


E  1      "  y^  / 


AU    TOMBEAU    D'ACHMET-PAGHA 

(CLAUDE-ALEXANDRE  DE  BONNEVAL)  (1)  l)  t^      I     // 

—  i5  juin  1888  —  i  ,    r. 


Dans  la  parlie  de  la  ville  de  Constantinople  qui  s*étend  à  TEst 
de  la  Corne  d'Or,  et  qui  constitue  le  quartier  de  Péra,  on  remarque, 
vers  rextrémité  de  la  rue  dite  de  Péra,  un  groupe  de  constructions  en 
bois,  d'apparence  assez  modeste,  au  milieu  desquelles  se  distingue 
une  mosquée  octogonale.  C'est  le  r^A:t^(couvent)  des  derviches  tour- 
neurs, auquel  plusieurs  relations  de  voyage  accordent  une  mention 
particulière.  Ce  Tekké  ne  doit  l'attention  des  voyageurs  ni  à  l'im- 
portance de  ses  bâtiments,  ni  aux  exercices,  curieux  pourtant,  des 
derviches  qui  les  occupent;  outre  son  site  magnifique,  il  possède 
un  curieux  monument  qui  le  signale  à  l'intérêt  des  Européens  :  le 
tombeau  du  comte  Claude-Alexandre  de  Bonneval,  né  au  château 
de  ce  nom  en  Limousin,  le  14  juillet  1675,  mort  pacha  et  chef  des 
bombardiers  à  Constantinople,  le  23  mars  1747. 

Bizarre  destinée  que  celle  de  cet  homme  d'esprit  qui  passa  toute 
sa  vie  à  commettre  des  sottises  et  les  paya  cruellement  I  II  entre 
dans  la  marine  à  douze  ans,  se  bat  en  duel  à  vingt,  passe  dans 
l'armée  de  terre,  sert  à  la  tôted'un  régiment  sous  Catinat,  Villeroy 
et  le  duc  de  Vendôme,  sauve  à  Luzzara  l'armée  française  tombée 
dans  une  embuscade,  se  distingue  en  plusieurs  rencontres,  puis,  à 
la  suite  d'une  discussion  avec  Chamillart,  quitte  l'armée,  se  réfugie 
à  Venise,  et  en  1706  accepte  du  service  dans  l'armée  autrichienne 
avec  le  grade  de  général-major.  Il  combat  en  cette  qualité  les 

(i)  Nous  devons  à  une  obligeanle  communicalion  de  la  famille  da  Ir^s 
regretté  Joseph  Brunet,  les  pages  qui  suivent.  Les  membres  de  la  Société 
archéologique  du  Limousin  liront  avec  un  intérêt  tout  particulier  ces 
notes,  prises  spécialement  à  leur  intention  par  un  confrère  qui  s'est  tou- 
jours montré  zélé  pour  l'histoire  de  sa  province  uatale  et  qui  a  pris,  h 
Tépoque  de  son  séjour  à  Limoges,  une  part  active  et  distinguée  aux  tra- 
vaux de  la  Société. 

T.  xxxix.  \ 


V.  i-ho 


I 


341 


r>  SOCIKIK  ARCIIÉOLOGIOUË  ET  IIISTORIOUR  DU  LIMOliHIN. 

armées  françaises,  et  se  concilie  la  haute  faveur  du  prince 
Eugène,  qui  sait  apprécier  ses  talents  militaires.  Après  sa  déser- 
tion, le  Parlement  de  Paris  lui  avait  fait  son  procès  et  Tavait  con- 
damné à  être  pendu  en  effigie  :  11  réussit  à  obtenir  des  lettres 
d'abolition,  revint  en  France  et  épousa  une  parente,  M'**  de  Biron  ; 
mais  quelques  jours  après  ce  mariage  il  reparlait  pour  Vienne.  A 
la  suite  de  mille  folies,  il  encourut  la  disgrâce  de  TEmpereur, 
envoya  un  cartel  au  prince  Eugène,  en  lama  des  correspondances 
avec  divers  diplomates  et  finalement  se  réfugia  en  Turquie  où  il  prit 
Je  turban.  Il  fut  chargé  de  discipliner  et  d'instruire  à  l'européenne  les 
Iroupes  ottomanes.  Très  influent,  puis  disgracié,  il  fut  relégué  dans 
une  province  lointaine,  reconquit  plus  tard  son  crédit  et  revint  à 
Gonstantinople.  Il  ne  garda  d'autre  dignité  que  celle  de  toplgibacfn, 
chef  de  rartillerie.Une  attaque  de  goulte  l'emporlaau  moment  même 
où  il  projetait  de  quitter  Gonstantinople  et  où  il  négociait  secrèle- 
mentaveclaCour  deRome  et  la  Cour  de  France  en  vue  de  son 
absolution,  et  d-e  sau  rapatriement  (1). 

La  mosquée  des  derviches  de  Péra  mérite  d'être  visitée;  l'édilice 
ne  manque  pas  d'élégance  et  son  plafond  est  peint  avec  goût.  Des 
tribunes,  dont  deux  sont  spécialement  réservées  aux  femmes,  ont 
été  ménagées  dans  les  bas-côtés.  Dans  ces  tribunes  se  placent  les 
personnes  désireuses  d'assister  au  curieux  spectacle  de  la  danse 
dos  derviches. 

Bien  que  ce  spectacle  ne  fût  pas  le  principal  attrait  de  notre 
visite  au  Tekké  de  Péra  et  qu'un  autre  but  nous  y  eût  conduit,  nous 
n'eûmes  garde  de  ne  pas  profiter  d'une  telle  occasion.  On  nous 
plaça  dans  la  tribune  faisaMface  au  cheik  Ata-Efl'endi,  supérieur 
de  la  maison.  CeliH-ci  présidait  aux  exercices,  assisté  de  deux  vieux 
derviches  ayant  comme  lui,  autour  de  leur  fez  gris,  le  turban  verl, 
insigne  xHstinctif  des  pèlerins  de  la  Mecque. 

Les  exercices  des  derviches  s'exécutent  au  son  d'une  musique  à 
la  fois  criarde  et  monotone.  L'orchestre  est  composé  de  tambours 
et  de  flûtes.  Après  quelques  prières  psalmodiées  par  toute  l'assis- 
tance, la  danse  commença  :  vingt-neuf  derviches  y  prirent  pari. 
Ils  étaient  vêtus  d'une  robe  blanche,  coiffés  d'un  fez  très  élevc^, 
couleur  marron  clair,  sans  turban  {i),  et  éparpillés  pour  ainsi  dire 

(1)  On  trouvera,  dans  le  tome  VII  du  Bull,  delà  Soc.  œ'ch.  et  hist.  du 
Limousin,  une  remarquable  noiioe  biographique  consacrée  «^  Aclimel-Pachn 
par  M.  le  baron  Gay  de  Vcrnon.—  Z  nkeisen,  dans  son  Histoire  de  V Empire 
ottoman^  l.V,  donne  d'intéressants  drUils  sur  rôle  de  Bonncval  en  Turquie. 

(2)  Les  derviches  hurleurs  de  Scuiari,  porlcnt  le  lez  avec  le  lurban  blanc 
ou  vcrl. 


Tombeau  d'Achmet  Pacha  dans  le  cimetière  du'  Tekké  de  Përa 


N 


UKE   VISITE   AU  tOMDKAL'   D  ACIIMKT-PACITA.  7 

dans  la  mosquée  comme  nos  gymnastes  pour  certains  exercices  et 
nos  fantassins  pour  l'escrime  à  la  baïonnette.  Chacun  s'agitait,  se 
balançait  et  tournait  sur  place,  avec  une  vitesse  de  plus  en  plus 
grande,  jusqu'à  ce  qu'exténués,  tous  se  laissassent  tomber  sur  le 
soi. 

Ils  exécutent  ce  pénible  exercice  en  récitant  des  invocations  et 
des  versets  du  Coran,  et  avec  un  sérieux,  un  air  grave,  une  exprès-      ^ 
sion  pénétrée  qui  éloigne  toute  envie  de  rire  avet;  les  spectateurs,  cd^^ 

La  cérémonie  se  termina  par  des  prières  :  elle  avait  duré  environ  ) 

deux  heures.  ^ 

Malgré  la  curiosité  d'un  tel  spectacle,  il  nous  avait  paru  un  peu 
long  :  nous  avions  hâte  de  voir  le  tombeau  dont  nous  avions  promis 
à  nos  collègues  de  la  Société  archéologique  de  leur  rapporter  une 
exacte  description.  Âta-EfTendi  voulut  bien  nous  guider  lui-même. 

Le  mausolée  d'Achmet-Pacha  s'élève  dans  un  enclos  solitaire  qui 
dépend  du  couvent  et  qui  sentait  autrefois  de  lieu  de  sépulture.  Les 
cimetières  sont  nombreux  à  Conslantinople,  sur  les  deux  rives  du 
Bosphore.  Toutefois  beaucoup  de  musulmans  tiennent  à  être  en- 
terrés sur  le  rivage  d'Asie  :  une  prophétie  bien  connue  annonce 
que  les  Turcs  doivent  être  chassés  de  la  terre  d'Europe  et  repasser 
le  Bosphore.  Nombre  de  fidèles  croyants  ne  veulent  pas  que  leurs 
restes  soient  à  jamais  profanés  par  le  contact  des  chrétiens  vain- 
queurs. 

Le  cimetière  a  une  contenance  d'un  demi-hectare  environ;  il 
renferme  quelques  tombes  assez  belles  et  on  y  voit  plusieurs  turbés 
grillagés  ;  mais  la  plupart  des  sépultures  sont  d'aspect  banal  et 
n'ont  rien  de  remarquable. 

I^  vue  admirable  qu'on  découvre  de  ce  point  ajoute  à  la  poésie 
du  lieu  lui-môme.  Nous  apercevions  la  Corne  d'Or,  les  terrasses  du 
Vieux-Sérail  à  demi  cachées  par  le  feuillage  des  cyprès,  Scutari  et 
ses  mosquées;  à  l'horizon  apparaissaient  les  îles  des  Princes, 
noyées  dans  une  brume  lumineuse  et  chaude  qui  semblait  les  enve- 
lopper dune  poussière  d'or. 

Après  nous  avoir  fait  errer  un  instant  parmi  les  lombes,  Ala- 
EfTendi  s'arrêta  dans  un  coin  de  Tenclos,  devant  une  grille. —  «C'est 
îcî,  nous  dit-il,  que  repose  le  Pacha  français,  » 

Le  tombeau  d'Achmet  Pacha  se  compose  d'un  soubassement 
en  pierre  blanche,  mesurant  3  mètres  de  longueur  sur  i'",50 
de  large  et  0'",80  de  haut  et  supportant  une  grille  moderne 
en  fonte,  haute  de  1",50  environ,  et  d'une  tombe  formée  de 
quatre  pierres  blanches.  La  plate-forme  du  soubassement  forme  h* 
fond  de  la  tombe,  qui  n'a  pas  de  couvercle  et  est  à  ciel  ouvert  : 


8  SOCIRTÉ  ARCUÉOLOGIQUR   RT   BISTORIQUK   DU   LIMOUSIN. 

dans  iâ  terre  qui  la  remplit,  on  a  planté  deux  troènes  et  un  rosier. 
Celte  tombe  mesure  2",14  sur  O'^JS  et  a  0°*,68de  hauteur.  L'orne- 
mentation de  ses  quatre  côtés  est  simple,  mais  sculptée  avec  soin 
et  d*un  relief  assez  délicat.  Elle  se  compose  de  rosaces  alternant 
avec  des  vases  à  fleurs  :  trois  rosaces  et  deux  vases  sur  chacun  des 
côtés  ;  une  rosace  et  deux  vases  à  chaque  extrémité.  Tout  autour, 
au-dessus,  une  guirlande  sculptée  formant  frise. 

Du  côté  de  TÉst,  la  pierre  du  cippe  avait  été  cassée;  on  a  rejoint 
les  deux  morceaux  avec  du  ciment. 

Les  deux  pierres  qui  forment  les  extrémités  de  la  tombe  se  pro- 
longent en  colonnes  ou  plutôt  en  cippes.  Celle  du  pied,  qui  s*élève 
de  1™,37  au-dessus  de  l'auge,  n'offre  aucune  décoration  ni  inscrip- 
tion et  se  termine  en  pointe  aiguë.  Celle  qui  est  à  la  této,  haute  de 
4",47,  supporte,  selon  Tusage,  une  boule  à  turban,  avec  une 
ornementation  consistant  en  une  sorte  de  croix  et  des  crochets. 

Cette  télé  a  été  détachée  de  la  colonne,  puis  remise  en  place. 

Le  cippe  présente,  sur  le  côté  Ouest,  une  inscription  en  lettres 
turques,  qui  a  du  être  redorée  il  y  a  une  quinzaine  d'années.  Je  la 
reproduis  ci-après  : 


J^'  ^^ji^^  ^  9^  ^y  ^û^  j,/ 


'4^ 


Iluel  hallakcoûb  baki 

Aksoupan-Jié  hou  irtallah  haziretleri 

Mahminin  muhminata 

Merkhoum  Koumharadjiaiidan 

Ahmet  pacha  Rahmet  eWi 

1160,12  Rebiulaghir. 


UNE   VISITE   AU   TOMBBAU   d'aCD MET-PACHA.  0 

Traduction  : 

En  dehors  de  Dieu,  tout  est  mortel.  Que  le  Tout-Puissant,  omni- 
potent Seigneur,  de  même  qu'à  tous  ses  mahométans,  accorde  le 
repos  au  Coumbaràdji  Ahmet  pacha,  décédé  le  12  décembre  1160 
de  rhégire. 

Ici  se  présente  une  petite  difficulté  qui  nous  avait,  nous 
l'avouons,  fort  embarrassé  au  premier  abord  :  la  date  donnée  par 
l'inscription  funéraire  que  nous  venons  de  reproduire  est  incon- 
testablement 1160;  or,  plusieurs  des  biographes  de  Bonneval-Pacha 
énoncent  qu'il  mourut  Tan  1128  de  Thégire.  Celle  différence  de 
trente-cinq  ans  nous  avait  d'abord  fait  craindre  que  le  tombeau 
attribué  au  pacha  limousin  ne  fût  la  sépulture  de  quelque  autre 
personnage.  Heureusement  la  diversité  des  systèmes  de  computa- 
lion  du  temps  en  usage  en  France  et  en  Turquie  fournit  la  clé 
de  cette  petite  énigme.  Ceux  qui  ne  savent  pas  que  Tannée  maho- 
métane  a  seulement  trois  cent-cinquante-quatre  ou  trois  cent- 
cinquante-cinq  jours,  c'est-à-dire  onze  de  moins  que  l'année  grégo- 
rienne, se  contentent  d'une  soustraction  pour  établir  la  correspon- 
dance entre  l'ère  chrétienne  et  l'hégire,  et  il  est  certain  qu'avec 
ce  procédé,  Bonncval  étant  mort  en  1747,  on  trouve  qu'il  est  mort 
l'an  1125  de  l'hégire  (1747  —  622  =  1125).  Mais  les  choses  ne  vont 
pas  aussi  simplement,  et  en  raison  de  l'écart  signalé  plus  haut,  il 
faut  compter  que  trente-trois  de  nos  années  équivalent  à  peu  près  à 
trente-quatre  années  turques;  d'où  cette  conséquence: — En  comp- 
tant à  la  turque,  on  trouve  qu'il  s'est  écoulé  environ  trente-cinq 
années  de  plus  entre  622  et  1747  qu'on  n'en  trouve  en  comptant 
à  la  française.  Voilà  le  problème  résolu  et  la  différence  expliquée  : 
1125  et  35  donnent  exactement  1160,  la  date  même  qu'on  trouve 
sculptée  sur  le  monument. 

Ce  qu'il  y  a  de  piquant,  c'est  que  cette  date  erronée  de  1125  a 
été  indiquée  comme  figurant  sur  Tépitaphe  même  et  on  peut  la 
relever  dans  plusieurs  ouvrages,  notamment  dans  l'intéressante  et 
remarquable  notice  de  M.  le  baron  Gay  de  Vernon. 

D'après  Ata-Effendi,  Achmet-Pacha  fut  enseveli  dans  le  petit 
cimetière  du  Tekké  de  Péra  parce  qu'il  était  un  bienfaiteur  du 
couvent;  il  aurait  même  reçu  le  titre,  tout  honoraire  bien  entendu, 
de  derviche.  Il  habitait  à  Constantinople  la  rue  qui  porte  le  nom 
de  Coumbaradjiy  nom  qu'elle  tenait  peut-être  de  lui-même  ou  plutôt 
de  ses  fonctions;  car  en  sa  qualité  de  chef  de  l'artillerie,  il  avait  le 
commandement  spécial  des  bombardiers  {Coumbaradjis),  La  mai- 
son où  il  vivait  a  été  démolie,  il  y  a  vingt-cinq  ou  trente  ans  à  peine. 


lO  SOCIÉTÉ  ARCUÊOLOGIQUE  KT  HISTORIQUE  DU  LIUOUSIN. 

AU  surplus,  rattribution  de  ce  monument  ne  saurait  être  dou- 
teuse :  c'esl  bien  au  pacha  limousin  qu'appartient  celte  sépulture. 
Ata-E(Tendi  sait  que  ce  tombeau  est  celui  d'un  Français  du  nom  de 
«  Bonnival  »,  devenu  mahométan,  d'un  personnage  considérable 
qui  fut  chef  des  Bombardiers,  ministre  et  grand  diplomate  :  C'est 
la  tradition  de  la  maison.  Lecheik  nous  promit  môme  de  chercher 
dans  la  bibliothèque  du  Tekké  et  de  nous  signaler  ce  qu'il  pourrait 
y  trouver  concernant  Bonneval. 

Il  nous  raconta  qu'il  y  a  une  douzaine  ou  une  quinzaine  d'années, 
un  membre  de  la  famille  du  pacha,  étant  venu  à  Constanlinoplc,fut 
adressé  au  couvent  avec  une  recommandation  spéciale  de  l'ambas- 
sade. Il  visita  la  tombe,  y  lit  faire  quelques  réparations  et  oblint 
que  les  derviches  fussent  officiellement  invites  à  en  prendre  soin. 
Aussi  le  petit  monument  est-il  en  bon  état.  On  en  trouvera,  jointe 
à  cette  notice,  une  exacte  reproduction. 

Joseph  JBrunet. 


ZIZIM 


A   BOURGANEUF    ET   A    ROME 


\jo  prince  Uirc  Djera  ou  Zizim,  par  sa  caplivilô  de  ciiu|  ans 
(1483-1488)  dans  divers  cluUcaux  de  la  Marche,  occupe  une  cer- 
lainc  place  dans  rhisloire  du  Limousin,  dont  la  Marche  faisait  par- 
iie.  Nous  avons  pour  but,  dans  ce  Mémoire,  d'entrer  dans  certains 
détails  sur  le  séjour  de  Zizim  dans  notre  province,  sur  son  départ 
pour  rilalie,  son  entrée  h  Rome  et  sur  sa  mort.  Nous  aurons  1  oc- 
casion de  signaler  quelques  erreurs  commises  par  divers  histo- 
riens relativement  à  ce  sujet.  Nous  avons,  pour  cela,  consulte  les 
sources  et  étudié,  en  les  comparant,  les  témoignages  contempo- 
rains. 

Ayant  passé  plusieurs  années  de  notre  enfanec  à  Bourganeuf, 
auprès  de  la  tour  de  Zizim,  nous  nous  sommes  toujours  intéressé  à 
ce  personnage  historique  dont  le  souvenir  est  resté  légendaire  dans 
la  contrée  et  que  sa  captivité  et  ses  malheurs  ont  couronné,  pour 
ainsi  dire,  d'une  auréole  de  poésie. 

I. 

Zizim,  dont  le  nom  turc  était  Djem  ou  Djim,  était  le  fils  puîné 
de  Mahomet  II,  conquérant  de  Constantinople  et  de  IVmpire  grec. 
Il  était  frère  deTempereurBajazet  II.  Après  la  mort  de  Mahomet  II, 
Zizim  et  Bajazet  se  disputèrent  Tempire.  «  Bajazet  soutenait  que 
la  couronne  lui  appartenait,  parce  qu'il  était  l'aîné;  Zizim  préten- 
dait monter  sur  le  trône,  parce  qu'il  était  né  depuis  que  Mahomet  II 
avait  été  empereur,  tandis  que  Bajazet  était  venu  au  monde  alors 
que  son  père  n'était  pas  encore  souverain  (1).  »  Cependant  Bajazet 
fut  le  plus  fort,  et  Zizim,  vaincu  les  armes  à  la  main,  par  son 
frère,  prit  le  parti,  dans  la  frayeur  d'une  fuite  précipitée,  de  se 
jeter  dans  les  bras  des  chevaliers  de  Rhodes,  qui,  deux  ans  aupa- 
ravant, avaient  fait  reculer  la  puissance  ollomane. 

f,l)  MunÉni.  Dictionnaire,  arl.  7.i<lni. 


12  SOClftlé  ARCHÉOLOGIQUB   RT  II1ST01IIQUE   DU  LIHOUSIX. 

D'après  Jaligny,  historien  contemporain,  Zizim  «  tellement  fut 
pressé  et  poursuivi,  qu'il  luy  conveint  de  se  jecter  dedans  le  port 
de  Rhodes,  laquelle  chose  venue  à  la  cognoissance  du  grand  mais- 
tre  et  des  chevaliers,  incontinent  ils  se  saisirent  de  sa  personne 
et  furent  moult  joyeux  de  Tadvenlure  qui  leur  estoit  advenue,  et 
espéroient  bien  en  faire  leur  profict.  Ils  donnèrent  provision  à  la 
garde  de  sa  personne,  bonne  et  seure  (4).  » 

Le  30  juillet  1482,  Pierre  d'Aubusson,  grand  maître  de  Tordre, 
fit  au  prince  turc  une  réception  solennelle  et  magnifique. 

Les  chevaliers  virent  dans  l'arrivée  de  Zizim  une  bonne  fortune 
pour  eux  et  une  solide  garantie  contre  les  attaques  de  Bajazel; 
et,  croyant  que  les  avantages  qu'ils  pouvaient  en  retirer  pour  le 
bien  de  leur  ordre  et  de  toute  la  chrétienté  les  autorisaient  à  exploi- 
ter la  position  du  prince  musulman,  ils  regardèrent  comme  leur 
prisonnier  celui  qui  n'était  qu'an  réfugié  malheureux.  Au  reste 
Pierre  d'Aubusson  ordonna  qu'il  fût  traité  avec  tous  les  honneurs 
dus  à  son  rang;  et  on  eut  pour  lui  tellement  d'égards,  que  le  prince 
put  d'abord  se  faire  illusion,  se  considérer  comme  le  protégé  de 
l'ordre  de  Saint-Jean  plutôt  que  comme  son  prisonnier,  et  penser 
que  les  chevaliers  préposés  à  sa  garde  ne  formaient  près  de  lui 
qu'une  garde  d'honneur. 

<(  Dès  que  Bajazet  apprit  que  Zizim  était  à  Rhodes,  il  se  hâta  de 
conclure  avec  Pierre  d'Aubusson  la  paix  qu'il  avoit  demandée  dès 
son  avènement  à  la  couronne.  Plus  tard,  il  s'engagea,  par  un  traité 
passé  avec  le  grand  maître,  à  lui  payer  annuellement  la  somme  de 
trente-cinq  mille  ducats  pour  l'entretien  de  son  frère,  et  de  plus, 
dix  mille  ducats  chaque  année,  pour  le  dédommager  des  pertes 
occasionnées  parla  dernière  guerre  (2).  »  Zizim,  s'imaginant  que 
son  frère  ne  voulait  la  paix  que  pour  avoir  une  occasion  favorable 
de  le  perdre,  pressa  le  grand  maître  de  lui  donner  son  congé  pour 
aller  trouver  le  roi  de  France.  Pierre  d'Aubusson  entra  d'autant 
plus  volontiers  dans  les  vues  du  prince  musulman,  qu'il  voyait 
beaucoup  d'inconvénients  à  le  garder  à  Rhodes.  Dans  le  voi- 
sinage de  l'empire  turc,  il  craignait  que  les  émissaires  de  Bajazet 
ne  fissent  périr  Zizim  par  le  poignard  ou  par  le  poison.  C'est  pour- 
quoi il  eut  l'idée  de  l'envoyer  en  France,  dans  ce  pays,  dit  un 
écrivain  peu  suspect,  qui  ne  produit  pas  de  monstres,  et  où  l'usage 
du  poison  est  inconnu  (3).  Zizim  partit  de  Rhodes  le  1"  septem- 

(0  jALiGNY,  Histoire  de  Charles  VIIL  édit.  do  «617,  in-i«,  p.  111. 
(S)  BouHOURs,  Histoire  de  Pierre  d'Aubusson,  édition  de  1806,  p.  180. 
(3)  Prudenlissimus  Rhodiorum  magister  arbilratus  principem  Zizimum 
tutios  apud  Gallias  defendi,  custodiri,  atque   prolegi,  ubi  monslrii  non 


ZiZIM   A   BOURGANEUP   ET   A    ROMB.  1.1 

bre  1482,  accompagné  du  chevalier  Guy  de  Blanchefort,  du  cheva- 
lier de  Rochechouarl,  et  de  plusieurs  autres  qui  lui  servaient 
d'escopte.  Le  grand  maître  «  ordonna  que  le  chevalier  de  Blanche- 
fort,  qu'on  nommait  aussi  le  commandeur  de  Morterolles,  pourroit 
prendre  autant  de  chevaliers  qu'il  lui  plairoit  pour  la  garde  de 
Zizim,  avec  ordre  à  ceux  qui  seroient  nommés  par  le  comman- 
deur de  lui  obéir  aveuglément;  mais  il  déclara  aussi  que  les  che- 
valiers qui  seroient  attachés  auprès  du  sultan  jouiroient  des  pré- 
rogatives de  la  résidence  et  de  Tanciennelé  comme  s'il  demeuroient 
à  Rhodes  (1).  » 

Jaligny,  dans  son  Histoire  de  Charles  VIII^  après  avoir  parlé  des 
inconvénients  qu'il  y  avait  à  garder  Zizim  à  Rhodes,  ajoute  : 
«  pour  éviter  à  toutes  ces  occasions,  il  (le  grand  maître)  délibéra 
de  le  mectre  en  lieu  seur;  et  pour  ce  qu'il  esloit  natif  de  France, 
de  la  Comté  de  la  Marche  et  de  la  maison  d'Aubusson,  il  délibéra 
de  l'envoyer  en  France.  Considérant  que  le  roy  esloit  loing  de  la 
seigneurie  du  dict  turc,  et  qu'il  n'a  voit  gueres  d'interest  au  faict  de 
la  seigneurie,  à  qui  elle  demeurast  des  deux  frères.  Toutesfois  avant 
que  l'envoyer  en  France,  il  envoya  sçavoir  devers  le  Roy  Louys 
onziesme  de  ce  nom,  si  son  plaisir  seroit  de  le  souiïrir  en  son 
royaume.  Laquelle  chose  le  roy  accorda  volontiers.  Après  que  le 
dict  maistre  de  Rhodes  eust  eu  le  congé  du  roy,  il  prépara  le 
voyage  de  son  prisonnier  et  l'envoya  descendre  au  pays  de  Lan- 
guedoc (3).  Et  de  là  il  le  feit  mener  en  la  dicte  Comté  de  la  Marche, 
en  la  maison  du  seigneur  de  Bocalamy  (lisez  :  Boislamy),  qui 
estoit  parent  du  dict  grand  maistre  (3).  Et  là  se  tenoil  et  avoit  pour 
sa  garde  aucuns  chevaliers  de  Rhodes,  qui  estoietit  pour  la  plus- 
part  parensdu  dict  grand  maistre;  il  estoit  fort  bien  entretenu 
de  sa  personne  et  de  ses  nécessités.  Aussi  son  frère  payoit  bien 
sa  despence  (4).  » 

D'après  le  même  historien,  Zizim,  dès  son  arrivée  en  France, 
voulut  se  mettre  en  rapport  avec  Louis  XI  :  «  Le  dict  prisonnier 

gigDuntar  et  ubi  toxici  tabès  ignoratur.  {Guillelm,  Caour»,  Rhod.  olce- 
cancel,  de  admis,  régis  ZUimlln  Gallias),  ap.  Bouhours,  p.  174. 

{I)  BouHOURS,  Hiêt,  de  Pierre  d'Aubusson^  livre  iv,  édit.  1806,  p.  187. 

(9)  Ce  n*eal  ni  sur  les  côtes  du  Languedoc,  comme  le  dit  Jaligny,  ni  sur 
les  côtes  de  la  Provence,  comme  le  dit  Yertot,  que  débarqua  Zizim,  mais 
sur  les  côtes  de  la  Savoie,  près  de  Nice,  comme  le  dit  Thistorien  turc 
Saad-Eddyn. 

(3)  Le  seigneur  de  Boislamy  était  alors  Antoine  de  Blanchefort,  frère 
atné  du  chevalier  Guy  de  Blancfaefort,  et,  comme  lui,  neveu  de  Pierre 
d'Aubusson,  par  leur  mère,  Souveraine  d*Aubusson. 

(4)  Histoire  de  Charles  VJII^  édition  de  1617,  in-4«,  p.  Mi-H3, 


Il  SOCIÉTÉ   ARCIIKOLOGIQUK    KT    UlSTOr.lQl'K   Dt'    LIUOLSIN. 

avoil  ouy  parler  du  roy  Louis,  et  dd  la  granJcur  do  son  royaumi,», 
cl  de  sa  seigneurie,  et  aussi  de  ses  faits  :  par  quoi  il  desiroil  fort 
de  le  voir  et  de  parler  à  lui.  Les  chevaliers  qui  lavoienl  en  garde 
le  firent  sçavoir  au  Roy,  lequel  fit  réponse  que  pour  la  grande 
renommée  que  son  père  avoit  eue,  qui  en  son  temps  eloit  jus- 
qu'alors le  plus  grand  prince  de  la  loi  de  Mahomet,  et  lequel  avoit 
le  plus  fait  de  belles  conquêtes  qu'aucun  autre,  il  le  verroit  volon- 
tiers et  communiqueroit  de  très  bon  ccBur  avec  lui,  mais  que  bon- 
nement il  ne  le  pouvoit  faire,  attendu  qu'il  n^etoit  pas  de  sa  loi  ;  cl 
ordonna  de  plus  qu'on  lui  dit  que  s'il  vouloit  embrasser  la  religion 
chrétienne,  il  lui  promettoit  d'employer  toute  sa  puissance  afin  dd 
lui  aider  à  recouvrer  les  seigneuries  de  son  empire;  et  de  plus  il 
lui  donneroit  de  quoi  entretenir  son  état;  et  si  d'aventure  il  vouloit 
cependant  demeurer  en  son  royaume,  qu'il  lui  donneroit  des  héri- 
tages et  seigneuries  avec  la  jouissance  desquelles  il  pourroit  vivre 
comme  un  prince.  Les  chevaliers  firent  sçavoir  tout  cela  à  leur  pri- 
sonnier; mais,  pour  quoi  que  ce  fût,  il  ne  voulut  délaisser  sa  loi,  et 
demeura  encore  en  la  dite  comté  de  la  Marche  en  la  maison  du 
susdit  Bocalami  jusqu'au  dit  mois  de  janvier  mil  quatre  cens  quatre 
vingt  et  huit  (1)  ». 

Quelques  historiens,  tels  que  Beaudoin,  dans  son  Histoire  de 
l'Ordre  de  Malte  (2),  le  P.  Bouhours,  dans  son  Histoire  d4i 
Pierre  d'Aubussofi  (3),  Moréri,  dans  son  Dictionnaire  historique, 
M.  Vayssière  (4),  etc.,  ont  avancé  que  Zizim  avait  été  présenté  au 
roi  Louis  XL  C'est  inexact  ;  jamais  Zizim  ne  fut  reçu  par  Louis  XI, 
qui  mourut  le  44  août  4483,  alors  que  le  prince  turc  était  en  route 
pour  se  rendre  dans  le  comté  de  la  Marche. 

II. 

Un  historien  turc,  Saad-Eddyn,  a  composé  un  ouvrage  qui  a  pour 
titre  :  Les  aventures  du  prijice  Gem.  Dans  cet  ouvrage,  (fui  a  été 
analysé  par  M.  de  Hammer  (5)  et  traduit  en  français  par  M.  Garcin 
de  Tracy  (6),  nous  trouvons  sur  le  voyage  de  Zizim  en  France  cl 
sur  sa  captivité  dans  la  Marche  des  détails  que  nous  chercherions 

(1)  Jaligwy,  Histoire  M  Charles  VIII,  édil.  de  <G17,  in-4o,  p.  113,  11». 

(3)  «  CepcndaiU  Zinmi  fut  conduit  en  France  cl  salua  le  roy,  qui  se 
nionira  asse7. réservé  aux  affaires  de'Zizimi  v  (ôdiiion  de  \(\od,  ]).  15 1). 

(3)  «  Zizimc  élanl  arrivé  en  France,  fut  reçu  du  Koi  assez  froidemcnl  •. 
{HLstoiv^  de  Pierre  d'Aubusson,  édit.  1806,  p.  181). 

(*)  L* Ordre  de  Salat-Jean  de  Jérusalem  en  Limousin^  <884,  p.  23. 

(S)  Journal  asiatique^  i^°  série,  l.  VI. 

(G)  Journal  asiatique,  !'•' sôrie,  l.  IX,  juillcldcccnibrc  1820. 


ZIZiU   A    BOURGANEUF   ET   A    ItOME.  I.ï 

vaiQement  ailleurs.  Nous  y  avons  puisé  les  renseignements  qui  sui- 
vent. 

Djem  s'était  embarque  à  Rhodes  le  \^'  septembre  1482  (1).  Après 
une  traversée  de  trois  semaines  (14  octobre  1482),  il  aborda  à  un 
port  du  pays  de  Savoie,  voisin  de  la  ville  de  Nice,  i^e  lendemain  il 
fut  conduit  dans  celte  ville,  où  il  fut  forcé  de  séjourner.  Pendant 
son  séjour  à  Nice,  il  composa  un  distique  que  M.  de  Hanimer  tra- 
duit ainsi  : 

Oh  I  quelle  ville  admirable  que  Mec  ! 
On  y  demeure  en  dépit  du  caprice!  ' 

M.  Alfred  de  Bougy  a  traduit  ce  couplet  d'une  manière  plus  élé- 
gante à  notre  avis  : 

Nice  délicieuse!  6  séjour  tout  charmanll 

On  te  quitte  à  regret  :  peut-on  faire  autrement?  (2). 

Comme  la  peste  commençait  ses  ravages  à  Nice,  on  en  lit  sorlir 
Djem,  le  24  janvier  1483  (3)  pour  le  faire  séjourner  dans  un  en- 
droit voisin.  De  là,  il  fut  amené  à  Saint-Jean  de  Maurienne  (San- 
Jovian),  puis  à  Chambéry.  Le  gouverneur  de  cette  ville  (selon  l'ex- 
pression de  Thistorien  turc,  c'est-à-dire  le  duc  de  Savoie),  un  jeune 
prince  âgé  de  quinze  ans,  était  absent  pour  une  visite  auprès  de 
son  oncle  le  roi  de  France  (Louis  XI). 

Après  quelques  jours  passés  à  Chambéry,  Djem  continua  sa  route 
pour  le  château  de  Rumilly  (4),  où  il  arriva  le  jeudi  20  février  1483. 
Le  jeune  duc  de  Savoie  étant  de  retour  de  Paris,  s'intéressa  au  sort 
du  frère  de  Bajazet,  et  il  y  eut  entre  eux  échange  de  présents. 

Le  26  juin  1483,  Zizim  fut  embarqué  sur  la  rivière  qui  passe  à 
Grenoble  (l'Isère);  puis,  entrant  dans  le  Rhône  {Rouneh),  il  fut  dé- 
barqué sur  la  rive  et  fut  mené  à  Pouiat  en  Dauphiiié,  Quelques 
écrivains  ont  cru  que  ce  nom  de  Pouiat  désignait  le  Puy-en-Velai  : 


(I)  C*csl  par  suite  d*une  erreur  typographique  que  M.  de  llammcr  le 
fait  embarquer  le  1°^  septembre  1181  [Journal  asiatiquCy  t.  Yl). 

{%)  Biographie  générale,  article  Djem. 

(3)  M.  DB  Hammer,  Journal  asiatique^  t.  VI.  —  C'est  à  tort  que  M.  do 
Bougy  ^}^e  ce  départ  au  6  février  148^  {Un  Prétendant  turc  au  xv®  siècle, 
Reoue  contemporaine,  3®  série,  t.  XXVll  (186î),  p.  77(îj. 

(i)  RedjUia  dans  Saad-Eddyn.  C'est  à  tort  que  quelques  ôcrirains,  à  la 
suile  do  M.  de  Hammer,  ont  traduit  ce  mol  par  Roussillon  ;  M.  Garoin  de 
Tracy  Ta  traduit  par  niimilly,  et  cette  opinion  paraît  très  probable  {Journal 
asiatique^  t.  V(  et  t.  IX,  p.  158). 


16  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUK  ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

(le  récentes  découvertes  ont  démontré  que  ce  lieu  est  le  Poët,  près 
du  Rhône  (1). 

C'est  là  que  les  chevaliers  qui  escortaient  Zizim  apprirent  la 
mort  de  Louis  XI  (21  août  1483).  Par  mesure  de  prudence  ou  par 
calcul  d'économie,  on  enleva  au  prince  vingt-neuf  musulmans  de  sa 
suite»  qui  furent  conduits  à  Aigues-Mortes,  puis  embarqués  à  Nice 
pour  Rhodes. 

Du  château  de  Pouial  {Le  Poët),  Zizim  fut  conduit  à  un  autre 
château  situé  sur  un  rocher,  que  Saad-Eddyn  appelle  Douchénoùl, 
dont  M.  de  Hammer  n'a  pu  découvrir  le  nom  français,  et  qui  est, 
parait-il,  le  donjon  de  Rochechinard,  à  quelques  lieues  de  Gre- 
noble. 

C'était  non  pas  au  commencement  du  mois  de  juillet  1483, 
comme  Ta  dit  M.  Alfred  de  Bougy  (2),  mais  quelques  jours  après 
la  mort  de  Louis  XI,  c'est-à-dire  au  commencement  de  septembre. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  des  incidents  qui  signalèrent 
le  séjour  de  Zizim  au  château  de  Rochechinard  et  dans  le  château 
voisin  du  baron  de  Sassenage,  incidents  qui  ont  fourni  matière  à 
quelques  romans  (3). 

Après  deux  mois  passés  dans  ces  châteaux  du  Dauphiné,  Zizim, 
par  ordre  du  grand  maître,  se  mit  en  route  pour  se  rendre  dans  la 
Marche  limousine.  Il  était  sous  la  conduite  du  chevalier  Guy  de 
Blanchefort,  commandeur  de  Morlerolles,  et  neveu,  par  sa  mère, 
de  Pierre  d'Aubusson.  Parmi  les  chevaliers  qui  faisaient  partie  de 
son  escorte,  nos  annalistes  limousins  citent  le  chevalier  de  Rochc- 
choaart  (4).  C'est  apparemment  vers  le  mois  de  décembre  1483 
qu'il  arriva  dans  un  château  que  Saad-Eddyn,  l'historien  turc, 
appelle  Borgolou,  et  qui  n'est  autre  que  Bourganeuf  (5).  Nous 
avons  vu  qu'on  avait  congédié  environ  trente  personnes  de  la  suite 
de  Zizim;  il  arriva  à  Bourganeuf,  disent  les  chroniques  limousines, 
avec  dix-huit  ou  vingt  serviteurs  (6). 

Bourganeuf  était  le  chef-lieu  de  la  langue  d'Auvergne;  c'est  là 
que  les  grands  prieurs  résidaient  ou  devaient  résider.  Parmi  ceux 

(\)  Alfred  DE  Bougy,  Un  Prétendant  turc  au  xv*  siècle^  Reoue  contem- 
poraine^ S'  série,  l,  XXVli,  p.  777. 

(2)  /d.,  ibid. 

(3)  Voir  Alfred  de  Bougy,  ibid.,  p.  778-784. 

(4)  Bonavcnlure  de  Saint-Ahable,  t.  lll,  p.  7â7. 

(5)  Journal  asiatiquey  I"  série,  t.  VI,  p.  136,  l.  IX,  p.  <60.  —  Au  xiii* 
siècle,  Bourganeuf  s'appelait  Borguet-nou  (Louis  Duval,  Esquissée  tnar- 
choisesy  p.  95  i). 

(6)  Annales  mant^scrites  de  Limoges^  édit.  1873,  p.  313. 


ZIZIH   A  BOURGAPfRUr    RT   A    ROUR.  17 

qui  se  sont  fait  un  nom  et  qui  ont  été  élus  grands  maîtres  de  Tor- 
dre, nous  pouvons  citer  Jean  de  Lastic,  Jacques  de  Milly,  Pierre 
d'Aubusson,  Guy  de  Blanchefort.  Une  lour  de  cette  commanderie 
porte  le  nom  de  tour  de  Lastic. 

Faut-il  croire  que,  à  Tarrivée  du  prince  turc  dans  la  commande- 
rie de  Bourganeuf,  «  on  n'avait  rien  préparé  pour  sa  réception,  ou 
plutôt  pour  sa  garde»?M.  Alfred  de  Bougy  rasupposé(l);  quoi  qu'il 
en  soit,  après  deux  mois  passés  à  Bourganeuf,  on  conduisit  Zizim 
dans  un  château  que  Saad-Eddyn  appelle  Montele,  que  M.  de  Ham- 
mer  traduit  par  Montuel  (2),  et  qui  n'est  autre  que  le  château  du 
Monteil-le-Vicomte,  silué  à  deux  lieues  à  Test  de  Bourganeuf.  Ce 
château,  qui  avait  vu  naître  Pierre  d'Aubusson,  appartenait  à  son 
frère  aîné,  Antoine  d'Aubusson,  bailli  d'Anjou,  de  Tou raine  (1431), 
puis  du  Pays  de  Caux  en  Normandie,  de  1454  à  1474.  Ce  même 
Antoine  d'Aubusson,  en  1480,  avait  mené  à  ses  dépens,  à  Bhodes, 
plus  de  3,000  hommes,  pour  secourir  son  frère,  le  grand-maîlre, 
qui  le  lit  général  de  ses  troupes,  honneur  dont  il  se  rendit  digne 
par  sa  valeur  (3).  Le  château  du  Monteil,  assis  sur  un  mamelon 
dominant  la  campagne,  et  flanqué  de  quatre  tours  principales  qui 
regardent  aux  quatre  vents,  est  aujourd'hui  en  ruines  (4).  Zizim  y 
séjourna  pendant  deux  mois  (février-mars  1484). 

Du  château  de  Monteil,  Djem  fut  conduit  dans  un  autre  lieu  que 
Saad-Eddyn  appelle  Mouretel,  nom  que  MM.  de  Hammer,  Garcin 
de  Tracy  (5)  et  d'autres  savants  à  leur  suite  ont  traduit  par 
Moretel  (6)  et  qui  est  aujourd'hui  Morterolles.  11  ne  s'agit  pas, 
comme  Ta  supposé  M.  de  Bougy,  «  de  Morlerol  ou  de  Mortroux, 
châteaux  ou  villages  marchois,  près  de  Bourganeuf  et  de  Bon- 
nal{7)  »,  mais  de  Morterolles,  canton  de  Bessines  (Haute- Vienne). 

Les  chevaliers  de  Saint-Jean  avaient  à  Morterolles  une  comman- 


(1)  Un  Prétendant  turc  au  xw^  siècle,  Reoue  contemporaine ,  î«  série, 
t.  XVII,  p.  783. 

(2)  Journal  asiatique^  i^^  série,  t.  VI,  p.  i36. 

(3)  Nadaud,  Nobiliaire  Limousin,  édilioD  Roy-Pierrefitle,  t  I,  p.  72.  Une 
fille  d^Anloine  d*Aubusson,  Loaisc,  avait  épousé,  vers  1473,  Jacques.de  Ro- 
chechouart,  seigneur  du  Bourdet  et  de  Charroux,  qui  se  trouvait  par  ceUe 
alliance  neveu  du  grand  maître  de  Rhodes. 

(4)  Voir  dans  V Album  de  la  Creuse,  p.  1 29,  une  vue  des  ruines  du  châ- 

leau  du  Monteil. 

(5)  Journal  asiatique,  f  série,  t.  VI,  p.  136,  l.  IX,  p.  160. 

(6)  M.  AuDiPFRBT  (Biographie  unioerselle  de  Michaud),  art.  Zizim.  — 
H.  H.-L.  B.  (Henri  Bordikr),  Bibliothèque  de  V Ecole  des  Chartes,  t.  ill, 
(1841-43),  p.  386. 

(7)  Alfred  DE  Bougy,  Reoue  contemporaine.  S*  série,  t.  XXVII,  p.  783. 


18  SOCIÉTÉ  ARCIIÉOLOGIQI'E   ET   lIISTORIQt'E   OU    LIMOUSIN. 

cleric  cîonl  le  chevalier  Guy  Je  Blancliefort,  neveu  du  grand  maîlrc. 
élail  alors  commandeur.  On  voyait  h  Morlerolles,  au  wii®  siècle, 
un  château  «  consistant  en  une  maison-forte  quarrée,  flanquée  de 
trois  tours,  entourée  de  fossés  remplis  d'eau,  à  fond  de  cuve,  et 
d'une  palissade  tout  autour  dudit  chiîteau,  un  pont  dormant,  et  un 
pont-levis  à  l'entrée  d'iceluy,  garni  de  ses  chaisnes,  etc.  »  (i). 

Zizim  séjourna  deux  mois  dans  ce  château,  dont  il  ne  reste  plus 
rien  aujourd'hui. 

C'était  vers  le  mois  de  juin  1484.  Zizim  quitta  la  commanderie 
de  Morterolles  et  fut  conduit  dans  un  château  que  Saad-Eddyn 
appelle  Bocalamik,  nom  que  M.  ,de  Hammer  a  traduit  inexactement 
par  Bocalimini  (i2).  Jaligny,  dans  son  Histoire  de  Charles  VII!, 
l'appelle  aussi  Bocalamy  (3).  C'est  aujourd'hui  le  château  de  Bois- 
lamy,  commune  de  SiM^tter-OIalcard,  canton  de  Bonnat  (Creuse). 
Ce  chàteati  appartenait  à  Antoine  de  Blanchefort,  frère  aîné  du 
chevalier  Guy  de  Blanchefort,  qui  était  chargé  de  la  conduite  de 
Zizim  :  leur  mère,  Souveraine  d'Aubusson,  était  la  sœur  du  grand- 
maître  de  Rhodes  (4).  D'après  Thistorien  turc,  le  château  de  Boca- 
lamik  était  situé  au  milieu  d*un  grand  lac,  pour  mieux  dire,  d'un 
étimg  (aujourd'hui  desséché).  «  Le  prince  Gem,  ajoute  Saad-Eddyn, 
y  fut  tenu  environ  deux  ans  dans  une  grande  contraincte  (5j  », 
c'est-à-dire  probablement  du  mois  de  juin  1484  au  mois  de  juin  1486. 

III. 

Pendant  le  séjour  de  Zizim  au  château  de  Boislamy,  le  chevalier 
Guy  de  Blanchefort,  neveu  du  grand  maître,  lit  construire  à  Bour- 
ganeuf,  par  ordre  de  son  oncle,  la  tour  où  Zizim  devait  être  trans- 
féré, et  qui  porte  encore  aujourd'hui  le  nom  de  ce  prince. 

Cette  tour  fut  construite  en  1484,  comme  le  prouve  l'inscription 
suivante  que  nous  avons  publiée  dans  la  biographie  de  Guy  do 
Blanchefort,  en  18S4,  d'après  les  manuscrits  de  Nadaud  : 

En  Tan  mil  cccc  lxxx  nii  fui 
foie  la  grosse  tour  de  Bourgnc 
neuf  cl  tout  le  balimcn  les 


(I)  Procos-vcrbal   de  visile   de  10  7;    ap.  A.    Vay.ssiêiik,    L'Ordre  de 
SfUnt-Jean  de  Jérusalem  en  Limoudn,  1884,  p.  125. 
(5)  Journal  asiatique,  4"  série,  l.  VI,  p.  13C. 

(3)  D\inciens  liircs  nomment  ce  chAleau  BosU'i-Lamy.  (Abbé  LtcLF.n, 
Grand  Annuaire  Almanachiie ia  Creuse^  1887,  p.  i4G. 

(4)  Nadald,  Nobiliaire  du  Limoasm,t.  I,  édilion  Roy-Picrrclillc,  p.  214. 

(5)  Journal  asiatique t  f'"  sôrio,  l.  IX.  p.  \G0. 


ZIZIW    A    nOLRGANF.UF    KT   A    nOMF.  li) 

vcrrincs  tic  celle  église         le  Ireil 
ops  defel  cl  fondées  une  messe  chun 
jour  vespres  et  coinplies  aux  pb 
res  de  la  communauUé  de  la  dicle 
église  par  Révérend  Keligicux 
frerc  Guy  de  Blancheforl  grnnl  pr 
icur  dauvergnc  commandeur 

de  Chypre,  de  BougnejieuF,  de 
Morlols.  seneschal  de  Uliodcs 
ol  nepveu  de  1res  révérend  et 
mon  1res  douplé  seigneur  monss 
frère  Pierre  d*Aubusson         1res 
digne  grand  mailre  de  Rhodes 
de  Tordre  sainl  Jehan  de  Jhrlm  (1). 

Celle  inscription  étail  placée,  dans  réglisc  de  Bourgancuf,  au- 
dessus  de  la  porte  du  cliœup,  au-dessous  des  armes  de  Guy  de 
Blanchcfart,  qui  sont  :  d'or  à  deux  lions  léopardés  de  gveules,  posés 
rnn  sur  l'autre^  avec  la  croix  des  chevaliers  de  Saint-JeaJi  de  Jéru- 
salem en  chef. 

La  tour  de  Zizim,  qu'on  appelait  la  grosse  tour,  est  une  énorme 
construction  de  forme  ronde,  comprenant  quatre  étages  voûtés, 
surmontant  un  rez-de-chaussée  et  une  cave,  et  couronnés  par  une 
plaie-forme  entourée  de  mâchicoulis  et  de  créneaux. 

Beaucoup  d'écrivains  ont  parle  de  cette  tour  sans  l'avoir  vue; 
d'après  Thislorien  turc  Saad-Eddyn,  celte  tour  a  sept  étages  (2)  ; 
d'autres  écrivains  lui  en  donnent  six  :  tels  sont  Piganiol  de  la 
Force  (3),  Jouilletton  (4),  Alfred  de  Bougy  (5),  A.  Vayssière  (6),  etc. 

En  réalité,  il  n'y  a  que  quatre  étages,  outre  la  cave,  le  rez-de- 
chaussée,  et  la  plate-forme  que  couvre  la  charpente. 

Peut-être  les  écrivains  qui  donnent  six  étages  à  la  tour  ont-ils 
coinpris  dans  ce  nombre  le  rez-de-chaussée  et  la  plate-forme  qui 

(1)  Nadaud,  Nobiliaire  ms.,  t.  Il,  p.  1015;  —  Table  alphabétique 
des  Mémoires^  p  30.  — Nobiliaire  imprimé,  1. 1,  édilion  Uoy-Pikrrkfittk, 
l>.  2U. 

l/abbé  Tcxier,  dans  ses  Inscriptions  limousines  (p.  SC5],  a  lu  a  le 
trcillons  de  fer  »,  au  lieu  de  a  le  Ireil-ops  defet  ». 

(2)  Journal  asiatique^  t*""  série,  l.  VI,  p.  I3G. 

(3)  Noubelle  description  de  la  France^  art.  Limousin  et  Marche, 

(4)  Histoire  de  la  Marche^  t.  Il,  p.  207. 

(5)  Un  Prétendant  turc  au  xv''  siècle,  Reoue  contemporaine^  S*"  stMio, 
I.  XXVIl,  p.  788. 

(fi)  V Ordre  de  Saint  -Jean  de  Jérusalem  ou  de  Malte  en  Limousin^ 
I88i,  p.  :M. 

I 


50  SOCléTÈ   ARCHÊOLOGIQUB   ET   BISTORIQUB  DU  LIMOUSIN. 

couronne  la  tour;  et  Saad-Eddyn,  en  donnant  sept  étages  à  cet 
édifice,  a  compris  la  cave  qui  est  sous  la  pièce  du  rez-de-chaussée. 

Afin  de  protéger  cette  plate-forme  contre  Tinfiltralion  des  eaux 
pluviales,  on  Ta  couverte  d'une  belle  charpente  au  toit  conique  : 
nous  supposons  que  celte  charpente  est  de  la  même  époque  que  la 
tour. 

Un  bel  escalier  en  colimaçon,,  pratiqué  dans  Tépaisseur  de  la 
muraille,  conduit  à  tous  les  étages  jusqu'à  la  plate-forme. 

«  Les  moulures  de  quelques  cheminées,  la  disposition  des  conso- 
les qui  forment  les  mâchicoulis,  les  arcs  figurés  en  accolade 'qui  les 
unissent,  appartiennent  bien  à  la  fin  du  xv*  siècle.  L'archéologie 
confirme  »  (1)  la  date  donnée  par  Tinscription  rapportée  plus 
haut. 

Du  temps  de  Zizim,  on  pénétrait  dans  celte  tour  par  une  galerie 
couverte  qui,  partant  de  la  tour  appelée  de  Lastic,  était  établie 
sur  la  crête  d'un  mur  épais  de  clôture  s'élevant  à  plus  de  dix 
mètres  du  sol.  Celte  galerie,  destinée  à  unir  la  tour  de  Lastic  à 
celle  de  Zizim,  a  été  démolie,  de  sorte  que  ce  beau  monument, 
ainsi  dégagé,  a  grandi  dans  la  perspeclive,  et  domine  la  vaste 
plaine  où  coule  la  rivière  du  Taurion. 

Le  baron  deHammer,  orientaliste  distingué,  nous  a  donné,  pro- 
bablement d'après  rhistorien  turc  Saad-Eddyn,  une  description  de 
cette  tour  qui  ne  manque  pas  d'intérêt  : 

«  Au  premier,  au-dessus  de  la  cave,  étaient  les  cuisines,  au 
deuxième,  les  chambres  des  serviteurs;  au  troisième  et  au  qua- 
trième, les  appartements  du  prince,  et  aux  deux  derniers,  les  loge- 
ments des  chevaliers  préposés  à  sa  garde.  L'édifice  était  couronné 
par  une  plate-forme  entourée  de  mâchicoulis  et  de  créneaux  »  (2). 

D'après  l'historien  turc  Saad-Eddyn,  la  grosse  tour  à  sept  étages 
que  le  grand  maître  avait  fait  construire  pour  la  prison  de  Gem 
avait  coûté  3,500  ducats  (3). 

Le  P.  Bouhours,  dans  son  Histoire  de  Pierre  d'Aubussoriy  a  pré- 
tendu que  cette  tour  avait  été  construite  par  le  prince  lui-même  : 
«  Le  chevalier  de  Blanchefort,  dit-il,  auquel  le  grand  maître  avait 
confié  particulièrement  la  personne  de  Zizim,  eut  soin  que  le 
prince  ne  s'ennuyât  pas  d'abord  ;  il  lui  rendoit  tous  les  honneurs 
que  méritoit  sa  naissance,  et  lui  procuroit  même  tous  les  plaisirs 

(1)  Abbé  Trxieb,  Album  de  la  Creuse^  1847,  article  Bourganeuf,  p.  5. 

(2)  Gilô  par  Alfred  de  Bougy  dansTarlicle  intitulé  :  Un  Prétendant  turc 
au  XV®  siècley  publié  dans  la  Reoue  contemporaine,  2''  série,  t.  XXYII, 
p.  784. 

(3J  M.  J.  DE  Hammer,  Journal  asiatique^  V^  série,  t.  VI,  p.  136. 


ZtZfM   A   BOURGANEUF   RT    A    ROMR.  21 

que  la  campagne  peut  fournir;  jusque-là  que  lui  ayant  mis  en  tête 
les  bâtiments  pour  l'amuser,  Zizime  fit  faire  des  bains  et  une  tour 
qui  se  voit  encore  aujourd'hui  »  (1). 

Le  P.  Bonavenlure  Saint-Amable,  dans  ses  Annales  du  Limousiny 
a  reproduit  cette  assertion  du  P.  Bouhours  :  «  Les  chevaliers  de 
Blanchefort  et  de  Rochechouart,  dit-il,  le  menèrent  à  Bourga- 
neuf...,  à  neuf  lieues  de  Limoges,  où  il  fit  faire  des  bains  et  une 
tour  qui  s'y  volt  encore  »  (2). 

Piganiol  de  la  Force  raconte  de  même  qu'on  voit  à  Bourganeuf 
«  une  grosse  tour  fort  élevée,  toute  revêtue  de  pierres  taillées  en 
forme  de  diamant.  C'est  l'ouvrage  de  Zizim,  qui  ayant  été  conduit 
dans  le  grand  prieuré  de  Bourganeuf,  y  demeura  assez  longtemps 
pour  y  faire  bâtir  cette  tour,  qui  est  une  véritable  prison.  Les 
murailles  en  sont  assez  épaisses  pour  qu'on  ait  pratiqué  dans  leur 
largeur  un  bel  escalier  en  coquille  de  limaçon,  par  lequel  on  monte 
sur  la  plate-forme,  qui  est  au  haut.  L'intérieur  est  composé  de  six 
étages,  dont  le  plus  bas  contient  les  bains  que  ce  prince  s'étoit  fait 
faire  à  la  manière  des  Turcs  »  (3). 

Jouilletton,  dans  son  Histoire  de  laMarche^  a  reproduit  les  asser- 
tions de  Piganiol  de  la  Force.  Il  dit,  en  parlant  de  Bourganeuf,  que 
cette  ville,  «  autrefois  chef-lieu  de  la  langue  d'Auvergne,  est  célè- 
bre par  le  séjour  qu'y  fit  Zizim.  C'est  à  ce  prince,  ajoute-t-il, 
qu'on  attribue  la  construction  d'une  grosse  tour  fort  élevée,  qui 
porte  son  nom...  L'intérieur  de  cette  tour  est  divisé  en  six  éta- 
ges, dans  le  plus  bas  desquels  sont  les  bains  que  le  prince  Zizim 
s'était  fait  construire  à  la  manière  des  Turcs;  on  voit  aussi,  dans 
l'une  des  pièces  du  rez-de-chaussée,  un  moulin  à  bras,  qui  servait 
probablement  à  la  mouture  du  blé  nécessaire  à  la  consommation  {sic) 
de  cet  illustre  prisonnier  »  (4). 

Malgré  les  témoignages  qui  précèdent,  nous  avons  de  la  peine  à 
croire  que  des  bains  orientaux  se  trouvassent  au  bas  de  cette  tour. 
Le  procès-verbal  de  visite  de  l'an  1617  dit  simplement  «  qu'il  y  avait 
au  rez-de-chaussée  de  la  tour  une  cave  renfermant  un  puits  (8)  »  ; 
il  n'est  pas  question  de  vestiges  de  bains.  Il  nous  semble  d'ailleurs 
que  des  bains  à  la  manière  des  Turcs  eussent  été  fort  mal  placés 


(4)  Histoire  de  Pierre  d'Aubusson,  livre  IV,  édition  de  1677,  p.  184. 

(5)  P.  BoNAVRNTURE,  Annales  du  Limotisin^  t.  III,  p.  l'ai, 

(3)  Nouoelle  Description  de  la  France^  1753,  arl.  Limousin  et  Marche  \ 
Louis  DuvAL,  Esquisses  Marchoises,  p.  359. 

(4)  Histoire  de  la  Marche  et  du  pays  de  Combraille,  18i5,  t.  U,  p.  207. 

(5)  A.  Vayssière,  l'Ordre  de  Saint- Jean  de  Jérusalem  en  Limousin, 
1884,  p.  33. 

T.  XXIX.  i 


2â  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE  DU  LÎMOUSm. 

dans  une  cave.  Que  le  prince  Zizim  ait  fait  construire  des  bains  à 
Bourganeuf,  comme  Taffirme  le  P.  Bouhours,  la  chose  est  possible; 
mais  ces  bains  ont  dû  être  placés  ailleurs  que  dans  une  cave. 

Il  y  a  plus  d*un  demi-siècle,  nous  avons  vu  à  Bourganeuf  un  gla- 
cis qui,  partant  du  pied  de  la  tour,  du  c^té  nord,  descendait  à  un 
étang  qui  servait  comme  de  fossé  et  de  barrière  au  château.  Depuis 
un  demi-siècle,  ce  glacis  a  été  remplacé  par  une  large  terrasse 
plantée  d'arbres  qui  sert  de  promenade  à  la  ville,  et  d'où  Ton  des- 
cend, par  un  double  escalier,  sur  remplacement  de  Tétang  dessé- 
ché, aujourd'hui  champ  de  foire. 

La  tour  de  Zizim  a  reçu  une  destination  assez  orientale  et  assez 
conforme  à  son  origine  :  c'est  aujourd'hui  la  prison  de  l'arrondis- 
sement. 

IV. 

Vers  le  mois  de  juin  1486,  on  fit  sortir  Zizim  du  château  de  Bois- 
lamy,  pour  le  conduire  à  Bourganeuf,  où  il  séjourna  environ  deux 
ans,  comme  le  rapporte  Thislorien  Saad-Eddyn. 

D'après  M.  A.  de  Bougy,  «  Zizim  demeura  à  Boislamy  jusqu'au 
mois  de  janvier  1486  »(1),  La  date  que  nous  donnons,  avec  M.  Louis 
Duval  (2),  c'est-à-dire  le  mois  de  juin,  nous  paraît  plus  probable; 
car,  si  Zizim  fût  arrivé  à  Bourganeuf  au  mois  de  janvier,  son  sé- 
jour dans  ce  château  eût  été  de  près  de  trois  ans,  ce  qui  serait  con- 
traire au  récit  de  l'historien  turc. 

Signalons  quelques  incidents  du  séjour  de  Zizim  à  Bourganeuf. 
Hussein-Bey,  un  des  agents  que  le  prince  turc  avait  envoyés  au 
duc  de  Bourbon,  revint  quelque  temps  après,  avec  l'intention  de 
délivrer  le  prince.  Laissons  parler  l'hislorien  Saad-Eddyn  :  «  Hus- 
sein-bey  s'introduisit  dans  le  château.  Il  fut  convenu  qu'à  un  jour 
fixé  le  prince  et  les  musulmans  de  sa  suite  sortiraient  pour  aller  à 
la  promenade,  comme  de  coutume,  et  qu'ensuite,  tout  en  jouant 
avec  les  douze  gardes,  qui  ne  les  quittaient  jamais,  ils  leur  pren- 
draient leurs  arbalètes,  les  tueraient,  et  se  rendraient  dans  un  lieu 
désigné  où  ils  trouveraient  des  chevaux  et  les  choses  qui  leur  se- 
raient nécessaires,  ce  qu'Hussein-bey  avait  eu  par  le  moyen  du 
prince  de  Bourbon,  qui  avait  avancé  à  cet  effet  vingt  mille  pièces  de 
monnaie.  Toutefois,  un  officier  de  Gem  révéla  le  secret  à  un  soldat 

(1)  Un  Prétendant  turc  au  xv«  siècle ^  Reoue  contemporaine^  î"  série, 
t.  XVH,  p.  784. 

(%)  Eaquiases  Marchoiaes,  1879,  p.  258.  —  Celle  date  a  été  adoptée  par 
|ft.  Léopold  NiEPCB,  Le  grand  Prieuré  d' Auvergne,  1883,  p.  988. 


Z1Z1M   A   BOURGANEUF   RT   A    ROME.  23 

avec  qui  il  avait  coutume  de  boire.  Le  capitaine  des  gardes  ayant 
eu,  par  ce  moyen,  connaissance  du  complot,  voulait  faire  passer  au 
fil  de  répée  tous  les  gens  du  prince;  mais  un  des  gardes,  qui  sa- 
vait le  turc,  lui  représenta  que,  jusqu'alors,  le  roi  de  France  avait 
cru  que  le  frère  de  Bajazet  demeurait  volontairement  dans  cette 
retraite;  que  la  fourberie  ne  manquerait  pas  d'être  découverte,  si 
Ton  faisait  mourir  tous  ses  gens  à  la  fois;  qu'il  valait  donc  mieux 
s'en  défaire  successivement.  Le  malheureux  prince  ne  parvint  qu'à 
force  de  supplications  à  sauver  la  vie  à  Siman-bey,  chef  présumé 
de  la  conspiration.  Depuis  lors  on  les  surveilla  tous  de  si  près  que 
pas  un  d'eux  n'avait  la  liberté  de  s'écarter  seul.  Le  fils  de  Mahomet 
fut  encore  retenu  environ  deux  ans  dans  cet  endroit  (Bourganeuf)  ; 
pendant  ce  temps,  il  fît  en  vers  le  récit  de  ses  misères,  car  il  était 
bon  poète  »  (1). 

Saad-Eddyn  dit  autre  part  que  Gem  a  laissé  un  recueil  de  poé- 
sies estimé  et  la  traduction  en  turc  du  roman  persan  de  Selmar, 
intitulé  Gemschid  et  Korschid,  qu'il  avait  dédié  à  son  père,  Maho- 
met II  (2). 

M.  de  Hammer,  savant  orientaliste,  a  pubhé,  dans  le  Journal 
asiatique j  le  texte  et  la  traduction  en  vers  d'une  Gazèle  de  Gem;  la 
voici  : 

Prends  ta  coupe,  ô  Djem  de  DJemchide  ! 
Nous  nous  trouvons  ici  dans  Franguistan  {la  France). 

II  faut  que  le  sort  en  décide, 
Aucun  ne  fuit  le  destin  qui  Fattend. 

Pèlerin  de  la  maison  sainte, 
Tai  parcouru  les  champs  de  Caraman  ; 

Un  tour  de  la  sacrée  enceinte 
Vaut  mille  fois  tout  l'empire  ottoman. 

Dieu  merci  qu'ayant  bonne  mine, 
Et  bien  portant  je  suis  en  Franguistan  ; 

Car  qui  se  porte  bien  domine 
Les  régions  de  la  terre  en  sultan. 

Dix-buit  garçons  d'une  taille  charmante, 
Dix-huit  garçons,  dont  chacun  fils  d'un  ban, 

Tiennent  dans  leur  main  ravissante 
Le  verre  d'or  plein  d'un  vin  pétillant. 

(1)  Saad-Eodtr,  traduit  par  m.  Garcin  db  Tbacy,  Journal  asiatique,  \'* 
série,  t.  IXJuillet-^écembre  4826,  p.  16M63. 
^2)  Journal  asiatique,  1"  série,  t.  VI,  p.  i33. 


3i  SOCli^Ti  ARCHÉOLOGIQUE  ET  BIST0R1QUR  DO  LIMODSIN. 

Ah!  demandez  si  la  couronne 
Peut  rendre  heureux  Bayasid  le  sultan; 

L'empire  ne  reste  à  personne, 
Et  s'il  vous  dit  que  cela  dure,  il  ment  (I). 

M.  Alfred  de  Bougy  cite  un  fragment  d'une  autre  pièce  de 
Zizim,  qui  «  lui  a  paru  d'un  sentiment  vrai  et  touchant  »,  et  qu'il 
suppose  avoir  été  composée  à  Rhodes;  voici  ce  fragment  : 

Regarde  la  vague  qui  bat  le  rocher,  regarde. 

Elle  fuit  en  gémissant  sur  mol,  regarde. 
Au  sommet  des  montagnes,  les  nuages  répandent  des  pleurs, 
Et,  en  môme  temps,  le  tonnerre  gronde,  regarde. 
Le  voile  gris  du  crépuscule  s'est  déchiré  de  douleur, 

Et  l'aube  se  teint  de  sang,  regarde  (2). 

Un  autre  incident  de  la  captivité  de  Zizim  à  Bourganeuf  nous  a 
été  révélé  par  un  article  qui  a  été  publié  dans  la  Bibliothèque  de 
l'Ecole  des  Chartes,  Cet  article  est  signé  H.-L.  B.  :  une  lettre  de 
M.  Henri  Forgeot,  élève  de  l'Ecole  des  Charles,  nous  a  appris  que 
ces  initiales  indiquent  M.  Henri  Bordier  (3).  Voici  cet  article  : 

«  Au  commencement  de  l'année  1487,  René  II,  duc  de  Lorraine, 
fit  une  tentative  pour  enlever  le  prince  Djim  de  la  prison  où  il 
était  alors  détenu.  Ce  fait  qui  paraît  avoir  été  inconnu  aux  histo- 
riens et  avoir  échappé  môme  au  chroniqueurs  du  xv*'  siècle,  est 
révélé  par  une  pièce  conservée  à  la  Bibliothèque  nationale,  parmi 
les  mss.  de  Gaignières  (n°  373,  fol.  70). 

((  Le  vij*  jour  de  may  mil  iiij*=  iiij"  et  sept,  messire  Geffroy  Bas- 
sompierre,  chevalier,  a  cogneu  et  confessé,  après  son  serment 
prins  de  dire  vérité,  que  le  second  samedi  de  carcsme  derrenier 
passé  ou  environ  celui  jour,  monseigneur  de  Lorraine,  luy  estant  à 
Nancy,  commanda  audit  Bassompierre  et  à  Jacob  de  Germiny  de  se 
transporter  et  venir  en  ce  royaume  au  lieu  où  le  Teurc  est  de  pré- 
sent. Et  dit  que  le  dit  monseigneur  de  Lorraine  leur  donna  charge 
expresse  de  luy  mener  ledit  Teurc;  dont  de  la  forme  de  le  prendre 

(1)  Journal  asiatique j  4'"«  série,  t.  VI,  p.  137,  438.  — ^  Le  Dioariy  c'est- 
à-dire  la  collection  des  poésies  lyriques  de  Djcm,  se  trouve,  dit  M.  de 
Hammer,  à  la  Bibliothèque  royale  de  Berlin,  parmi  les  manuscrits  de  feu 
M.  Diez. 

(2)  Un  Prétendant  turc  au  xv®  siècle ^  Revue  contemporaine,  3«  série, 
t.  XXVH,  p.  78f). 

(3)  Nous  avons  trouvé  la  même  indication  dans  M.  de  Bougy  (loc.  cit., 
p.  786). 


ZIZIH   A   BOURG ANEUF   ET   A    ROME.  25 

el  avoir,  et  de  le  tirer  du  chastcl  ouquel  il  est,  ne  de  Tintelli- 
gence  qu'ilz  y  avoient  n'en  a  rens  voulu  déclarer,  parce  qu'il  dit 
avoir  tout  révélé  et  déclaré  au  roy  en  présence  de  Monseigneur  de 
Beaujeu  et  du  capitaine  Partenay.  El  dit  que  pour  fere  et  accomplir 
ladite  entreprise,  ledit  monseigneur  de  Lorraine  bailla  ausdits 
Bassompierre  et  Germyny  xxviij  hommes  de  guerre  ou  environ;  dit 
que  en  voulant  accomplir  la  charge  à  eulx  baillée  se  partirent  de 
Nancy,  et  pour  tyrer  au  lieu  où  est  ledit  Teurc  vindrent  en  Bour- 
gongne  au  lieu  appelé  Lucilleboys,  où  illec  trouvèrent  des  gens  du 
roy  soubz  la  charge  de  Bernard  Ordoux,  qui  le  prindrent  luy  et 
ceulx  de  sa  compagnie;  et  depuis  a  esté  amené  devers  le  roy, 
lequel  Ta  envoyé  en  ce  chastel  d'Angers. 

»  Interrogé  pour  quelle  cause  ledit  monseigneur  de  Lorraine 
voulloit  fere  la  prinse  dudit  Teurc,  dit  que  riens  n'en  scet.  Inter- 
rogé quel  proufïit  ledit  de  Bassompierre  devoit  avoir  pour  le  cas 
dessus  dit,  dit  que  jamais  ne  lui  en  fut  riens  promis,  mais  le  faisoit 
seullemenl  pour  fere  service  a  son  dit  maistre. 

»  Interrogé  si  luy  et  autres  de  sa  compagnie  avoient  autre  charge 
ne  autre  intelligence  en  ce  royaume  fors  d'emmener  ledit  Teurc, 
dit  que  non.  —  Signé  :  de  Bassompierre.  Et  plus  bas  :  P.  Davy, 
Lemaczo?).  )> 

»  Ainsi  cette  tentative  n'eut  aucune  suite  sérieuse.  Le  10  novem- 
bre de  la  môme  année  (1),  Charles  VIll  fit  sortir  de  France  le 
prince  musulman;  et  Temprisonnement  de  Bassompierre  ne  fut  pas 
de  longue  durée,  puisqu'on  le  retrouve  en  1489,  à  la  tête  d'une 
compagnie  de  Gascons,  guerroyant  pour  le  duc  de  Lorraine  dans 
le  pays  Messin  (2).  »  H.-L  B. 

V. 

Plusieurs  souverains,  Mathias  de  Hongrie,  Ferdinand  de  Castille 
et  Ferdinand  de  Naples  firent  tous  trois  d'instantes  prières 
auprès  du  grand-maître  pour  avoir  à  leur  disposition  le  prince 
Zizim.  Le  soudan  d'Egypte  lé  demandait  en  môme  temps  pour  le 
mettre  à  la  tôte  de  son  armée  contre  Bajazei.  Pierre  d'Aubusson 
n'accueillit  point  leur  demande,  mais  il  n'osa  pas  opposer  un  refus 
aux  instances  du  souverain  pontife,  qui  était  son  supérieur  immé- 
diat, et  qui  voulait  faire  servir  Zizim  au  succès  d'une  croisade 
contre  les  Turcs.  Innocent  VIII  avait  envoyé  un  nonce  au  grand 

(I)  Erreur.  C'est  en  novembre  1488  cl  non  en  N87  que  Zizim  partit 
de  Bourganeuf. 

(9}  Bibliothèque  de  VEcole  des  Chartes,  t.  III,  p.  988, 28U. 


12C  SOCIÉTÉ  ARCHÉ0L06IQUK  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIH. 

maître  pour  lui  dire  que  la  présence  de  Zizim  à  Rome  ou  dans 
quelque  au  Ire  place  de  Tltalie  tiendrait  les  Ottomans  en  respect. 
Charles  VIII  consentit  à  ce  que  le  prisonnier  de  Bourganeuf  fut 
conduit  en  Italie.  «  Les  lettres-pattentes  du  roi,  adressées  à 
Antoine  de  Blanchefort,  son  chambellan,  et  Antoine,  seigneur  de 
Gimel,  maréchal  de  ses  logis,  en  date  du  mois  de  janvier  1488, 
attestent  que  la  remise  se  fit  à  certaines  conditions.  Les  ambassa- 
deurs «  commis  et  députés  •>  par  le  Saint-Père  et  les  chevaliers 
ne  remettront  Zizim  «  directement  ou  indirectement  en  manière 
quelconque  en  main  d'aucuns  nos  ennemis  ou  haeneux  et  malveil- 
lants ».  Le  roi  ordonne  que  Zizim  soit  conduit  aux  terres  de  TEglise 
«  seurement  sans  deslourbier  »  (1).  Il  ordonne  «  que  Zizim  elceux 
de  sa  compagnie  et  nation,  et  autres  qui  le  conduiront,  au  nom- 
bre de  quatre  cents  personnes  et  autant  de  chevaux  »  soient  bien 
reçus  partout  où  ils  passeront  (2).  D'après  Thistorien  turc  Saad- 
Eddjn,  «  le  roi  de  France  tint  la  parole  qu'il  avait  donnée  aupara- 
vant. Il  envoya  un  des  seigneurs  de  sa  cour  avec  environ  200  hom- 
mes pour  tirer  le  prince  de  la  prison  où  il  avait  gémi  si  longtemps, 
ce  qui  fut  exécuté,  dit-il,  le  10  novembre  1487  (3).  » 

Ce  n'est  point  le  10  novembre  1487,  comme  le  rapporte  Saad- 
Eddyn,  et  comme  Font  répété  M.  Audiffret  (4)  et  M.  Henri  Bor- 
dier  (5),  mais  bien  le  10  novembre  1488,  que  Zizim  partit  de  Bour- 
ganeuf, après  avoir  passé  cinq  ans  dans  le  comté  de  la  Marche. 

Quelques  jours  après  son  dépai  t  (16  novembre  1488),  un  des 
musulmans  de  sa  suite  abjura  le  mahométisme  et  reçut  le  baptême 
dans  la  cathédrale  de  Limoges.  Nous  lisqns,  en  effet,  dans  le 
P.  Bonaventure  :  «  L'an  1488  fut  baptisé  à  Limoges  dans  l'église 
cathédrale  un  Turc  appartenant  à  Zizim  ou  Zaliab,  dimanche 
seizième  de  novembre,  à  qui  Jean  Barton,  évoque  de  Limoges, 
imposa  le  nom  de  Jean  :  son  parrain  fut  Antoine  de  La  Chassaigne, 
marchand  de  Limoges,  et  sa  marraine  Marguerite  Lascure,  vefve 
de  feu  Guillaume  Dubois.  Ce  Turc  était  âgé  de  cinquante  ans  (6).  » 

Guy  de  Blanchefort,  élu  maréchal  de  Tordre  et  grand-prieur 
d'Auvergne,  conduisit  le  prince,  d'abord  à  Marseille,  puis  à  Toulon, 

(I)  A.  DB  BouGY,  Un  Prétendant  turc  au  xv*  siècle.  Reçue  contempo- 
raine^ 2«  série,  t.  XXYil,  p.  787. 

(8)  Ordonnances  des  rois  de  France  de  la  troisième  race,  recueillies  par 
le  marquis  de  Pastoret,  t.  XX. 

(3)  Journal  asiatique,  T'  série  t.  IX,  (juillet-décembre  1826),  p.  «61. 

(4)  Biographie  unioerselle,  arl.  Zizim. 

(5)  Bibliothèque  de  VEcole  des  Chartes,  t.  IH,  p.  289. 

(6)  P.  Bonaventure  Saikt-Amable,  t.  Jli,  p.  731. 


ZIZIM  A   BOURGANEUF   ET   A   ROME.  il 

d'où  il  fut  embarqué  pour  Civita-Veechia  (i)  où  il  arriva  le  6  mars 
1489.  D  après  Saad-Eddyn,  «Zizim  traversa  Marseille,  l'un  des  ports 
les  plus  considérables  du  royaume  de  France,  il  s'embarqua  à  Toulon 
le  12  février  1488  (lisez  1489)  et  aborda  à  Civita-Vecchia,  qui  est 
à  quatre-vingts  milles  de  Rome  (2). 

Arrivé  à  Civita-Vecchia  le  6  mars,  Zizim  fut  reçu  par  Léonard 
Gibo,  parent  du  pape,  qui  remit  entre  les  mains  de  Guy  de  Blan- 
cheforl,  grand  prieur  d'Auvergne,  le  château  et  la  ville  qu'on  avait 
destinés  au  logement  du  prince. 

Trois  jours  après  (9  mars  1489),  le  pape  Innocent  VIII,  pour 
témoigner  au  grand  maître  d'Aubusson  toute  sa  reconnaissance, 
l'honora  du  chapeau  de  cardinal  du  titre  de  Saint-Adrien,  et  pour 
rendre  son  cardinalat  plus  illustre,  il  y  ajouta,  par  des  bulles 
expresses,  le  titre  de  légat  général  du  Saint-Siège  dans  l'Asie. 
Innocent  VIII,  qui  avait  déjà  donné  au  grand  maître  le  nom  de 
bouclier  de  VEglise  et  de  libérateur  de  la  chrétienté^  renonça  en  sa 
faveur  au  droit  qu'avait  le  Saint-Siège  de  conférer  certains  béné- 
Uces  de  l'Ordre,  et  il  lui  accorda  les  revenus  des  ordres  militaires 
du  Saint-Sépulcre  et  de  Saint-Lazare,  qu'il  réunit  à  celui  de  Saint- 
Jean. 

Le  13  mars  suivant,  Zizim  fit  son  entrée  solennelle  dans  la  ville 
de  Rome.  Le  cardinal  d'Angers  (Jean  Balue)  et  le  prince  François 
Cibo  étaient  venus  au-devant  de  lui  à  douze  milles  de  Rome  (3j. 
Douze  mille  cavaliers,  richement  vêtus,  marchaient  à  sa  suite  :  le 
cortège,  où  figuraient  les  cardinaux  et  les  prélats,  se  composait  de 
l'escorte  du  prince,  de  la  garde  pontificale  et  de  la  noblesse  ro- 
maine. Le  lendemain,  le  pape  Innocent  VIII  reçut  Zizim  en  plein 
consistoire.  Laissons  la  parole  à  un  témoin  oculaire,  Burchard  : 

«  Le  vendredi  13  mars  (1489),  le  grand  sultan,  frère  de  l'empe- 
reur des  Turcs,  fit  son  entrée  dans  la  ville,  à  cheval.  Il  avait,  selon 
sa  coutume,  la  tête  couverte  d'un  grand  voile  blanc.  Il  ne  la 
découvrait  devant  personne,  mais  seulement  il  Tinclinait  un  peu. 
Il  chevauchait  entre  François  Cibo,  le  fils  du  pape  (4),  à  droite,  et  le 


(4)  M.  Alfred  de  Bougy  se  trompe  quand  il  dit  :  Zizim  a  s*embarqua 
avec  sa  suite,  sur  deux  galères  rhodieoncs,  le  9  novembre  1488  »  {loc,  cit.  y 
p.  788).  Le  prince  était  parti  de  Bourganeuf,  comme  nous  Tavons  vu  plus 
haut,  le  10  novembre  i488. 

(2)  Journal  asiatique,  V^  série,  t.  IX,  p.  164. 

(a)  Le  P.  BouHOURs,  Histoire  de  Pierre  d'Aubusson,  édition  de  1806, 
p.  Sid-923.  —  Vkrtot,  Histoire  des  ckeo allers  de  Malte,  édit.  in~13,  t.  lit, 
p.  170. 

(4)  innocent  Vlll  avait  été  marié  avant  d'entrer  dans  les  Ordres. 


28  SOClélé  ARCaiOLOGlQUR   ET    BISTORIQUB   DU   LlMOUSm. 

grand  prieur  d'Auvergne,  neveu  du  cardinal  grand  maître,  à  gau- 
che. Le  susdit  grand  prieur  d'Auvergne  alléguant  qu'il  était  l'ora- 
teur {le  représentant)  du  roi  des  Français  et  que  le  soin  du  dit  Turc 
lui  avait  été  contié,  ne  voulut  céder  sa  place  ni  au  sénateur  ni  aux 
autres  embassadeurs.  —  {Et  plus  loinf.  Il  entra  au  Consistoire  de- 
vant le  pape,  et  quoi  qu'on  dit  que  le  susdit  Turc  ferait  sa  révé- 
rence au  pontife  à  la  manière  des  Turcs,  c'est-à-dire  en  touchant 
la  terre,  puis  en  embrassant  sa  main,  il  refusa  cependant  de  le 
faire  ;  mais  en  entrant  au  consistoire  où  Ton  a  coutume  de  faire  la 
génuflexion,  il  ne  voulut  pas  faire  la  génuflexion,  et  même  c'est  à 
peine  s'il  inclina  tant  soit  peu  sa  tête  couverte  devant  le  pontife,  de 
sorte  que  cette  inclinaison  de  tête  put  diflîcilement  être  connue  ou 
être  vue.  Il  monta  vers  le  pontife  qu'il  embrassa  en  se  tenant  de- 
bout, et  en  baisant  un  peu  le  bras  droit,  ayant  toujours  la  tête 
couverte;  puis  se  tenant  debout  devant  le  pontife,  il  lui  fit  expli- 
quer par  son  interprète  qu'il  se  réjouissait  d'être  en  présence  du 
pape,  et  qu'il  le  priait  de  vouloir  bien  s'en  souvenir;  qu'il  se  recom- 
mandait à  lui,  et  qu'en  temps  et  lieu,  il  lui  expliquerait  en  secret 
d'autres  choses. 

»  Le  pontife  répondit  qu'il  avait  été  question,  depuis  longtemps, 
que  Sa  Noblesse  fut  conduite  à  Rome  pour  son  état  et  pour  son 
bien,  et  que  Sa  Noblesse  ne  devait  avoir  aucune  crainte,  mais 
vivre  en  paix,  parce  que  toutes  choses  avaient  été  ordonnées  à 
bonne  fin.  Pour  tout  cela,  le  Turc  affirmant  qu'il  avait  confiance, 
rendit  grâces  à  Sa  Sainteté.  Alors  le  Turc  s'éloigna  du  pontife,  et 
embrassa  tous  les  cardinaux  qui  se  tenaient  à  leurs  places,  et  il 
baisa  chacun  d'eux  au  bras  droit  vers  l'épaule. 

Cependant  les  autres  serviteurs  du  susdit  Turc  vinrent  devant  le 
pontife,  et  chacun  d'eux,  l'un  après  l'autre,  faisant  la  génuflexion 
en  touchant  la  terre  de  la  main  droite,  puis  embrassant  les  pieds 
du  pontife  avec  la  chape  et  les  vêtements,  firent  de  nouveau  la 
génuflexion  après  avoir  baisé,  et  suivirent  le  Turc,  leur  maître, 
qui  après  avoir  embrassé  tous  les  cardinaux,  excepté  les  deux 
qui  assistaient  le  souverain  pontife,  sans  s'arrêter  autrement,  ou 
sans  faire  autrement  la  révérence  au  pontife,  se  retira  dans  ses 
appartements  (1).  » 

11  est  curieux  de  rapprocher  le  récit  de  Burchard  de  celui  de 
l'historien  turc  Saad-Eddyn  : 

«  Le  pape  ayant  appris  que  [Zizim]  était  arrivé  sur  ses  terres, 
envoya  au-devant  de  lui  son  fils,  suivi  de  quelques  seigneurs  avec 

(I)  BuRCBARo,  Archipea  du  Vatican,  —  Voir  le  texte  latin  ^  Tappendice, 
no  I, 


ZIZISi    A    DOURGANBlfP    ET   A   ROUR.  29 

des  chevaux  pour  le  conduire  jusqu'à  Rome.  Il  fit  ensuite  le  len- 
demain son  entrée  dans  cette  cité,  où  on  le  reçut  avec  de  grands 
honneurs.  Il  fut  logé  dans  le  palais  du  pape  qui  lui  donna  le  jour 
suivant  une  audience  extraordinaire,  où  se  trouvaient  tous  les 
seigneurs  de  sa  cour,  et  les  ambassadeurs  de  France,  d'Espagne, 
de  Portugal,  de  Gènes,  de  Venise,  d'Allemagne,  de  Hongrie,  de 
Pologne,  de  Bohême  et  de  Russie.  Le  pape  était  assis  sur  son  trône, 
sa  couronne,  ornée  de  pierreries,  sur  sa  tôte,  et  plusieurs  bagues 
d'un  grand  prix  aux  doigts.  Gem  étant  entré,  suivi  de  ses  gens,  et 
accompagné  du  seigneur  français  qui  l'avait  amené,  et  des  cheva- 
liers de  Rhodes,  s'avança  jusqu'au  trône  du  pape,  qui  l'embrassa, 
le  baisa  au  cou  des  deux  côtés,  et  lui  fit  beaucoup  d'amitiés  ;  il  le 
fit  ensuite  conduire  chez  lui  et  lui  donna  de  grands  festins  pen- 
dant trois  jours.  Le  troisième  jour  il  le  reçut  en  particulier,  assis 
sur  un  fauteuil,  et  le  prince  sur  un  autre.  Dans  l'entretien,  le  pape 
lui  demanda  pour  quel  motif  il  était  venu  dans  un  pays  d'une 
religion  contraire  à  la  sienne  :  —  Mon  intention,  répondit  Gem, 
n'avait  jamais  été  devenir  dans  les  contrées  de  France,  mais  de 
me  rendre  en  Romélie  ;  ayant  demandé  à  cet  effet  passage  aux 
Rhodiens,  j'avais  abordé  dans  leur  île,  me  confiant  au  traité  que 
j'avais  préalablement  conclu  avec  eux  ;  mais  ils  y  ont  manqué  et 
ils  me  retiennent  prisonnier  depuis  sept  ans.  Procurez-moi,  je  vous 
en  supplie,  les  moyens  d'aller  trouver  en  Egypte  ma  mère  et  mes 
enfants,  dont  je  suis  séparé  depuis  si  longtemps.  —  Le  pape  s'étant 
aperçu  que  le  prince  avait  les  larmes  aux  yeux,  en  achevant  de 
parler,  ne  put  retenir  les  siennes.  Néanmoins,  après  être  resté 
quelque  temps  en  silence,  comme  s'il  eût  réfléchi  à  ce  qu'il  devait 
répondre  :  —  Si  vous  ne  songez  plus  à  l'empire,  lui  dit-il,  vous  pou- 
vez vous  retirer  en  Egypte  ;  mais  il  vous  convient  mieux  d'aller  au 
royaume  de  Hongrie,  où  l'on  désire  votre  présence,  et  où  vous 
pourrez  mettre  à  exécution  votre  premier  dessein  (1).  » 

Il  pardtrait,  d'après  la  suite  de  ce  récit,  que  le  pape  Innocent  VIII 
aurait  engagé  Zizim  à  se  convertir  au  christianisme,  et  que  le 
prince  turc  aurait  repoussé  cette  proposition  ;  il  aurait  également 
refusé  de  s'allier  aux  infidèles  pour  combattre  les  vrais  croyants, 
disant  qu'il  tenait  plus  à  la  religion  de  ses  pères  qu*à  l'empire 
ottoman  ou  à  celui  du  monde  entier. 

Un  chanoine  de  Vérone,  Mathieu  Bosso,  qui  se  trouvait  à  Rome 
lors  de  l'entrée  de  Zizim,  raconte  que  le  prince  turc  fut  reçu  avec 
grande  pompe,  s'avançant  à  cheval  entre  François  [Cibo],  le  fils  du 
pape,  et  le  frère  du  grand  maître  des  chevaliers  de  Rhodes  (c'est-à- 

(1)  Journal  a$iatique^\^^  série,  t.  IX,  p.  <64,  165, 


30  SOCliTÉ  ARCnÉOLOGIQUE  ET  DISTORIQUK  DU  LIMOUSIN. 

dire,  Antoine  d'Aubusson,  seigneur  du  Honteil).  Il  ajoute  que 
Zizim  fut  reçu  quelques  jours  après,  en  plein  consistoire,  en  pré- 
sence du  pape  assis  sur  son  trône,  qu'il  ne  voulut  pas  fléchir  le 
"genou  devant  lui  ni  lui  embrasser  le  pied,  comme  c'est  Tusage, 
malgré  les  observations  des  maîtres  de  cérémonies  qui  Tavertis- 
saient,  au  grand  scandale  de  quelques  assistants  qui  «  écumaient 
de  rage  »,  voyant  que  les  gardes  pontificaux  ne  le  forçaient  pas  à 
se  courber,  et  ne  le  prenaient  pas  par  la  barbe  pour  le  faire  tom- 
ber à  genoux  aux  pieds  du  pontife  ;  puis  cet  écrivain  fait  de  Tizim 
le  portrait  suivant  :  «  L'aspect  du  barbare  est  cruel  et  féroce;  il  a 
le  corps  ramassé  et  fort;  le  cou  {cervix)  large,  la  poitrine  vaste  et 
proéminente;  la  stature  au-dessus  de  la  médiocre;  un  œil  louche 
et  regardant  de  travers,  le  nez  aquilin,  la  tête  inquiète  et  toujours 
en  mouvement,  regardant  sans  cesse  aulour  de  lui  d'un  air  mena- 
çant; pour  ce  qui  est  de  son  âge,  il  approche  (à  ce  qu'il  me  semble] 
de  quarante  ans;  véritable  portrait  de  son  père  Mahomet,  dont  j'ai 
vu  souvent  l'image  gravée  sur  les  médailles;  et  quant  à  son  carac- 
tère et  à  ses  mœurs  —  très  mauvaises  —  égalant  son  père  en  atro- 
cité et  en  cruauté  (1)  ». 

Comparons  ce  portrait,  fait  en  1489,  avec  celui  que  Guillaume 
Caoursin,  vice-chancelier  de  Rhodes,  traçait  de  lui  sept  ans  aupara- 
vant (1482)  : 

«  Le  prince  Zizim  a  vingt-huit  ans;  la  stature  haute,  une  santé 
robuste,  un  visage  fier;  des  yeux  bleus  un  peu  obliques  sous  des 
sourcils  épais,  se  joignant  presque  à  la  racine  du  nez;  la  bouche 
petite,  les  lèvres  charnues,  le  nez  aquilin  déviant  un  peu  à  gauche, 
le  menton  pointu.  Son  teint  est  brun  comme  la  peau  d'une  châtai- 
gne; il  a  la  tête  grosse,  les  oreilles  petites;  son  corps  est  chargé 
d'embonpoint  (2).  » 

VL 

Après  la  mort  d'Innocent  VIII  (1492),  son  successeur,  Alexan- 
dre VI  «  fit  enfermer  Zizim  dans  le  château  Saint-Ange,  et  ôtant 
d'auprès  de  lui  Blanchefort  et  les  autres  chevaliers  qui  le  gar- 
daient, il  en  confia  la  garde  à  un  de  ses  neveux,  dont  Tun  était 
chevalier  de  Rhodes  (3)  ». 

Cependant  Charles  VIII,  roi  de  France,  se  rendant  dans  le 
royaume  de  Naples  pour  en  faire  la  conquête,  passa  à  Rome,  se 

(I)  Voir  à  Tappendice,  n^S,  le  texte  de  Mathieu  Bosso. 

(î)  Cité  par  M.  A.  de  Bougy,  loc.  cit,y  p.  779. 

(3)  P.  BouuouRS,  Vie  de  Pierre  d'Aubusson,  édit.  4806,  p.  239. 


ZIZIM   A   BOUROANEIIF   RT  A    ROHR.  31 

rendit  maître  du  château  Saint-Ange,  el  exigea  que  le  sultan  Gem 
lui  fût  livré.  Le  pape,  ayant  la  main  forcée,  ne  put  le  lui  refuser,  et 
le  lui  rendit  par  un  acte  solennel.  Un  traité,  passé  entre  le  pape  et 
le  roi,  fut  rédigé  par  le  président  du  Parlement  de  Paris  ;  il  renferme 
trenle-et-un  articles.  Voici  ceux  qui  ont  trait  à  Zizim  : 

«  Le  pape  remettra  entre  les  mains  du  Roy  le  Turc,  et  le  Roy 
tiendra  celui-ci  à  Terracine. 

»  Iteni.  Le  Roy,  à  son  retour  de  Naples,  restituera  le  Turc  au 
pontife. 

»  Item.  Le  Roy  promet  de  soutenir  et  défendre  le  pontife,  si  le 
Turc  lui  fait  quelque  tort. 

»  Item.  Le  Roy  promet  au  pontife  quil  se  fera  donner  le  con- 
sentement de  rOrdre  de  Rhodes  dans  le  délai  de  six  mois. 

»  Item,  Le  Roy  donnera  au  souverain  pontife  des  otages  pour  la 
sûreté  de  la  restitution. 

»  Item.  Le  pontife  continuera  de  recevoir  le  tribut  de  40,000  du- 
cats que  le  Grand-Turc  a  coutume  d'acquitter...  (1)  » 

Ce  document  est  daté  de  Rome,  le  14  janvier  1498. 

D'après  Thistorien  turc  Saad  Eddyn,  «  le  28  janvier  1494  (lisez 
1495),  le  roi  de  France  alla  de  nouveau  chez  le  pape  le  sommer  de 
lui  rendre  Gem.  Le  pape  fut  alors  forcé  de  le  lui  livrer.  Le  roi  le 
confia  de  suite  à  un  de  ses  seigneurs  nommé  Maréchal  (lisez  :  le 
Maréchal  de  Gié),  et  partit  de  Rome  le  lendemain  qui  était  un 
mercredi  (2).  » 

Zizim  partit  de  Rome  avec  Charles  VIII  pour  se  readre  dans  le 
royaume  de  Naples;  mais  vingt-six  jours  après  son  départ,  il  mou- 
rut de  la  dyssenterie  (3)  à  Capoue,  comme  l'indique  Burchard,  dans 
son  Diarium  dont  voici  les  paroles  : 

«  Le  mercredi  25  février  (1498),  le  susdit  Gem,  autrement  dit 
Zizim,  frère  du  Grand-Turc,  qui  récemment  avait  été  consigné  au 
roi  de  France  par  notre  très  Saint  Père,  selon  le  pacte  et  les  condi- 
tions faites  entre  eux,  mourut  dans  la  cité  de  Naples  et  dans  le  châ- 
teau de  Capoue,  par  suite  d'aliments  ou  de  boisson  contraires  à  son 
tempérament.  Son  corps ,  à  la  prière  et  sur  les  instances  du  Grand- 
Turc,  fut  livré  à  ce  même  Grand-Turc  avec  tous  les  serviteurs 
(Jamilia)  du  défunt,  et  c'est  pourquoi  l'on  dit  qu'il  paya  ou  donna 

(1)  Ordonnances  des  rois  de  France  publiées  par  le  marquis  de  Pas- 
toret,  t.  XX,  p.  460. 

(2)  Journal  asiatique^  r<  série,  t.  IX,  p.  473. 

(3)  Alfred  de  Bougy,  loc,  cU„  p.  791.  —  «  Mori  egli  di  flusso.  »  (Bosio, 
t.  il«  p.  472).  11  mourut  à  Capoue,  a  d*an  flux  de  veaire»).  (Bbauooin,  Hist. 
de  VOrdre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem, 


32  SOCIÉTÉ   ARCBR0L0GIQ(1E   ET   HISTORIQUE  DO   LIMOUSIN. 

une  grande  somme  d'argent,  el  qu'il  reçut  en  grâce  tous  les  servi- 
teurs de  Zizim  (1).» 

D'après  Saad-Eddyn,  Zizim  mourut  dans  la  nuit  du  mardi  24  fé- 
vrier 1494  (lisez  1498)  (2). 

Les  historiens  qui  se  sont  occupés  de  Zizim  ne  s'accordent  pas  sur 
le  lieu  où  ce  prince  est  mort,  et  on  peut  dire  que  cette  question  est 
restée  jusqu'à  ce  jour  à  l'état  de  problème  historique. 

Les  uns  le  font  mourir  à  Terracine,  et  ils  ont  en  leur  faveur  cet 
article  du  traité  passé  entre  Alexandre  VI  et  Charles  VIII  :  «  Le 
roi  tiendra  celui-ci  (le  Turc)  à  Terracine.  » 

Celte  opinion  a  été  adoptée  par  Vertot  (3),  par  Henri  Bordier(4) 
et  par  M.  Alfred  de  Bougy,  dans  son  article  sur  Djem  publié  dans 
la  Biographie  générale  du  docteur  Hoefer. 

D'autres  le  font  mourir  à  Gaëte  :  cette  opinion  est  suivie  par 
Mézerai,  dans  son  Histoire  de  France  (5). 

D'autres  le  font  mourir  à  Napies  :  c'est  ce  que  rapportent  les  his- 
toriens ottomans  et  en  particulier  Saad-Eddyn  (6). 

Un  savant  français,  contemporain  de  Zizim,  Siraplicien  Champier, 
dans  son  ouvrage  intitulé  :  Trophœum  Gaîloi-um,  publié  à  Lyon  en 
1807,  le  fait  également  mourir  à  Napies  (7V 

Cette  opinion  a  été  adoptée  par  M.  Audiffret,  dans  la  Biographie 
universelle  de  Michaud,  art.  Zizim,  et  par  M.  Alfred  de  Bougy, 
dans  son  article  sur  le  prince  Djem,  publié  en  1862  (8)  ;  plus  tard, 
en  1868,  le  même  écrivain  le  fait  mourir  à  Terracine  {Biographie 
générale,  art.  Djem). 


(t)  BoRCHARD,  ms,  Archio.  Vatic,,  n'  404,  lib.  2. —  Voir  à  l'Appendice, 
n<^  1,1e  texte  latin  de  Burchard^ 

(3)  Journal  asiatique^  i'°  série,  t.  IX,  p.  173. 

(o)  Histoire  de  l'Ordre  de  Malte,  in-«î,  1773,  L  III,  p.  180. 

(4)  Bibliothèque  de  V Ecole  des  Chartes,  l,  Ili,  I84t-42,  p.  287. 

(5)  a  Zizim  étant  mort  à  Gaicllc  ».  {Histoire  de  France,  in-folio,  1685, 
t.  II,  p.  787). 

(6)  Journal  asiatique,  4"  série,  t.  IX,  p.  473.  a  Les  historiens  ollo- 
mans  s'accordent  à  dire  qu'il  esl  mort  à  Napies  ».  (M.  de  Uahmer,  Journal 
asiatique,  t.  VI,  mars  1825,  p.  130). 

(7)  «  Venil  Romam  Carolus,  favcnle  populo  :  in  ea  stationem  fccit.  El 
quas  ab  Alexandro  urbes  habuerat,  libère  dimitlil,  praeter  Ostiam  et  Zezi- 
mum  Turcum,  qui  apud  Neapolim  vita  dccesseral.  »  (Ap.  Jaligny,  Histoire 
de  Charles  VIJJ,  édit.  <617,  p.  311). 

(8)  Reoue  contemporaine,  9^  série,  1862,  t.  XXVil,  p.  793. 


ZlZm   A    BOURG\NKUF  ET   A   ROME  33 

D'autres,  en  petil  nombre,  le  font  mourir  à  Velletri  (1)  ou  à 
Bulrinto  (2). 

Enfin  Burchard,  dans  son  Diarium,  dont  nous  avons  rapporté  le 
texte,  le  fait  mourir  à  Capoue  ;  et  il  est  d'accord  en  cela  avec  d'au- 
tres historiens  romains  ou  italiens,  Bembo,  Panvino,  etc.  (3). 

Cette  opinion  aétéadoptéeparBeaudoin(4),A.Vayssière(8),etc. 

C'est  à  cette  dernière  opinion  que  nous  donnons  la  préférence. 
Burchard,  dans  son  journal  {Diarium)  n'a  pas  précisé  la  ville  de 
Capoue  sans  avoir  des  données  certaines  sur  ce  point;  et  les  écri- 
vains ottomans  ou  étrangers,  qui  ont  indiqué  Naples,  moins  au 
courant  de  la  géographie  de  la  péninsule  que  les  écrivains  du  pays, 
ont  indiqué  le  chef-lieu  de  la  province,  sans  préciser  la  localité  de 
cette  province  où  Zizim  était  mort. 

Diverses  versions  ont  circulé  au  sujet  de  la  mort  du  prince 
Zizim.  Les  historiens  romains,  placés  près  du  théâtre  des  événe- 
ments, attribuent  celte  mort  à  l'intempérance  du  prince.  Burchard, 
dans  son  Diarium^  où  il  ne  ménage  pas  Alexandre  VI,  dit  simple- 
ment ;  «  Zizim  mourut  par  suite  d'une  nourriture  ou  d'une  boisson 
contraire  à  son  tempérament  :  Ex  esu  sive  potti  naturœ  suœ  non 
convmienti  »  (6). 

Voici  comment  s'exprime  Rainaldi,  qui  a  continué,  au  xvii«  siè- 
cle (f  1670),  les  Annales  de  Baronius  :  «  Quelques-uns  disent  que 
les  Vénitiens,  corrompus  par  l'argent  des  Turcs,  avaient  fait  empoi- 
sonner Zizim;  d'autres  accusent  le  pape  Alexandre  de  l'avoir  livré 
tout  empoisonné  au  roi  de  France  »  (7).  Vertot,  s'appuyant  sur 

{{)  Bosio,  DelVIstoria  délia  sacra  religione  et  illust,  AfUicia  di  S,  Gto- 
vani  Giero8olom,  Roma,  1639,  t.  Il,  p.  472. 

(2)  €  Rovcre,  après  avoir  elle  les  différentes  autorités,  n'ose  point  déci- 
der si  Djcm  est  mort  à  Capoue,  à  Butrinto,  à  Terracine  ou  à  iNaples.  » 
(M.  DE  Haumer,  Journal  asiatique,  \^  série,  t.  VI,  mars  1825,  p.  130). 

(3]  a  Resta  mollo  in  dubbio  dove  seguisse  la  morte  dj  questo  povero 
principe.  Porcioche  aicuni  vogliono,ch*in  Yeiletri,  altrich'in  Terracina,  et 
altrî  ch*in  GaoUa  se  ne  morisse  :  non  mancandovi  aicuni  ancora,  fra'  quali 
il  Bembo,  il  Coiro,  il  Panvino,  cb'affermano  ch'in  Capoa  la  sua  morte 
seguisse.  v  (Bosio,  DeW  Istorla  délia  sacra  religione  et  illust,  MiU^ 
cia  di  S,  Giooani  Gierosolom,  in-folîo,  t.  H,  p.  479). 

(4)  BsAUDOiN,  Histoire  de  V Ordre  de  Saint- Jean  de  Jérusalem, 

(5)  L'Ordre  de  Saint' Jean  de  Jérusalem  en  Limousin ^  1884,   p.  24. 

(6)  Voir  à  Fappendice,  n^  3,  le  texte  de  Burchard. 

(7)  Pçrstringunt  prœterea  nonnuUi  Yenelos  turcico  auro  corruptos  ope- 
ram  dédisse,  ut  veneno  Zizimus  necaretur;  alii  autem  Âlcxandrum  ponti- 
fieem  carpunt  (Perron,  lib.  1,  in  Car.  viii),  qui  Zizimum  lento  tabo  infec- 
lum  Gallo  régi   tradiderit.  Verum   ipsum  ex    intemperantia    lethalem 


3i  SOCIÊTF.   ABCRÉOLOGIQUE   RT   HISTOBIQUR   DU   LIMOUSIN. 

cette  citation  tronquée  de  Rainaldi,  qui  rapporte,  sans  Tadopter, 
l'opinion  de  quelques  écrivains,  regarde  la  chose  comme  incontes- 
table et  fait  une  charge  à  fond  contre  Alexandre  VI  (1). 

Si  nous  remontons  plus  haut,  Philippe  de  Commines  prétend  que 
Zizim  fut  empoisonné,  et  rejette  sur  les  Vénitiens  Thorreur  de  ce 
crime  (2).  Plus  d'un  siècle  et  demi  après  Tévénement,  Mézerai  met 
cette  action  au  nombre  de  celles  dont  quelques  historiens  ont 
accusé  ces  républicains,  et  il  Timpute  en  même  temps  au  pape 
Alexandre  VI  :  «  La  jalousie  des  Vénitiens  et  du  pape,  dit-il,  Ot 
avorter  ces  belles  espérances;  ils  avaient  empoisonné  ce  prince 
avant  de  le  remettre  entre  les  mains  des  Français  »  (3).  Et  il 
dit  ailleurs  :  «  Zizim  étant  mort  à  Caielte  du  poison  qu'Alexandre 
lui  avoit  fait  donner  avant  de  le  délivrer  »  (4). 

Ces  imputations  sont  sans  preuve,  c'est  ce  qu'on  est  forcé  de  re- 
connaître aujourd'hui.  «  La  mort  du  prince  ottoman,  dit  M.  Alfred 
de  Bougy,  est  généralement,  mais  sans  preuve,  attribuée  à  Alexan- 
dre VI.  »  Et  il  ajoute  :  «  On  a  prétendu,  d'autre  part,  que  Djem  fut 
empoisonné  par  les  Vénitiens...  C'est  encore  une  supposition  toute 
gratuite  »  (5). 

Les  historiens  turcs  ont  une  autre  version  sur  la  mort  de  Zizim. 
Cantimir,  dans  son  Histoire  de  lEmpire  ottoman,  attribue  la  mort 
de  Zizim  à  un  italien  renégat,  nommé  Mustapha,  barbier  de  son 
métier,  qui,  envoyé  à  Naples  par  Bajazel,  parvint  à  s'introduire 
auprès  du  prince,  se  fil  accepter  comme  son  barbier,  et  lui  coupa 
la  gorge  pendant  son  sommeil.  Ce  Mustapha  fut  élevé  plus  tard 
au  poste  éminent  de  grand  vizir  en  récompense  de  ce  crime  (6). 

L'historien  turc  Saad-Eddyn  prétend  que  ce  fut  Alexandre  VI 
<c  qui  envoya  à  la  suite  de  l'armée  du  roi  de  France  un  barbier 
muni  d'un  rasoir  empoisonné  »  (7). 

Ce  sont  là  des  légendes  orientales  qui  ne  reposent  sur  aucun 

morbum  contraxisse  refert  Burchardus.(0DORic.  Rainaldi,  Annal,  Baronii^ 
t.  XXX.  ad  ann.  U95,  Lucae,  1754,  p.  247. 

(i)  Ybrtot,  Histoire  des  chevaliers  de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  édit. 
in-iî.  1772,  t.  m,  p.  180. 

(2)  Cilé  par  de  Billy,  Histoire  de  Pierre  d'Aubusson  (os  BouhOurs), 
édit.  de  1806,  p.  ^96. 

(3)  Jd..  ibid. 

(4)  Histoire  de  France,  <68o,  in-folio,  t.  II,  p.  787. 

(5)  Un  Prétendant  turc  au  xv«  siècle^  Reçue  contemporaine,  2®  série, 
t.  XXVH,  «862,  p.  793. 

(6)  Cantimir,  Histoire  de  V Empire  ottoman,  t.  II,  p.  86-90. 

(7)  Journal  asiatique^  <'•  série,  t.  IX,  p.  173. 


ZIZIH   A   BODRGANRCP  ET  A   ROME.  35 

fondement.  «  Nous  le  répétons,  dit  M.  Alfred  de  Bougy,  les  preu- 
ves manquent  (1).  » 

La  mémoire  d'Alexandre  VI  est  assez  chargée  sans  qu'on  lui 
impute  gratuitement  des  crimes  qu'il  n'a  pas  commis.  Zizim  n'était 
plus  au  pouvoir  du  pape  quand  il  mourut;  il  accompagnait  Char- 
les Vin  dans  son  expédition  du  royaume  de  Naples.  Il  est  mort  ra- 
pidement, c'est  vrai  ;  mais  il  a  pu  mourir  aussi  bien  des  suites  de 
son  intempérance  que  par  une  dose  de  poison,  ou  des  suites  d'une 
blessure  faite  par  une  lame  empoisonnée.  On  a  cru  qu'Alexandre  VI 
était  coupable  de  ce  méfait,  uniquement  parce  qu'on  l'en  croyait 
capable.  Or,  un  document  diplomatique  important,  et  qui  n'a  pas 
été  assez  remarqué  jusqu'ici,  parait  justifier  le  pontife  de  cette 
accusation.  Six  mois  après  la  mort  de  Zizim,  Alexandre  VI,  écri- 
vant à  Leonel,  évéque  de  Concorde,  son  légat  en  Allemagne  au- 
près de  l'empereur  Maximilien,  se  plaint  en  termes  amers  des  pro- 
cédés de  Charles  VIII,  auquel  il  reproche  d'être  entré  violemment 
dans  la  ville  de  Rome  et  de  s'être  emparé  de  la  personne  du  sultan 
Zizim,  «  qui  est  mort,  ajoute-t-il,  entre  ses  mains  ».  Voici  un  pas- 
sage de  cette  lettre  : 

«  Il  est  entré  dans  cette  ville  vénérable,  qui  a  été  dédiée  par  le 
sang  sacré  des  apôtres,  dans  cette  ville  qui  souffrait  de  la  plus 
grande  disette,  —  il  y  est  entré  avec  toute  son  armée,  non  sans 
causer  de  grands  dommages  et  de  grands  périls  à  Nous,  à  toute 
TEglise  catholique  et  à  notre  Cour  romaine;  et,  ayant  séjourné 
dans  cette  ville  pendant  quelques  jours,  avant  d'en  sortir,  il  s'est 
emparé  de  la  personne  du  sultan  Zizim,  frère  de  l'empereur  des 
Turco,  qui  était  gardé  près  de  nous  et  dans  ce  Saint-Siège,  comme 
il  était  convenable,  pour  le  secours  le  plus  assuré  des  chrétiens  ;  il 
s'est  emparé  de  nos  deux  meilleures  et  des  plus  excellentes  forte- 
resses de  cette  Eglise  (2);  et  enfin,  se  transportant  dans  le  royaume 
de  Sicile,  il  l'a  occupé  par  la  force,  chassant  de  là  son  légitime  pos- 
sesseur, qui  reconnaissait  tenir  ce  royaume  de  l'Eglise  romaine,  à 
laquelle  nous  présidons  par  l'autorité  de  Dieu;  et  c'est  alors  que 
périt  entre  ses  mains  le  susdit  sultan  ;  et,  par  suite  de  cette  mort, 
la  Religion  chrétienne  a  perdu  un  remède  opportun  contre  la  rage 
effrénée  que  les  Turcs  ont  à  l'égard  des  chrétiens.  » 

Cette  lettre  d'Alexandre  VI  est  datée  du  7  des  calendes  de  no- 
vembre (26  octobre)  1495. 

Voir  à  l'appendice,  n*»  4,  le  texte  latin  de  cette  lettre. 

Assurément  Alexandre  VI  n'aurait  pas  tenu  ce  langage  si  on  eût 

(1)  Un  Prétendant  turc^  etc.,  loc.  cU,^  p.  793. 

(2)  Le  château  Saint-Ange  et  Civita-Vecchia. 


36  SOCIKTÉ   ARCIi^.OLOGTQUB  ET   HISTORTQUR  DU   LIMOUSIN. 

pu  lui  donner  la  moindre  preuve  qpae,  d'accord  avec  les  Vénitiens 
ou  Tempereur  Bajazet,  il  avait  fait,  en  secret,  donner  un  poison 
lent  au  prince  Zizim. 

«  Suivant  un  historien  grec  cité  par  d'Herbelot,  un  fils  deDjem  se 
sauva  d'Egypte  à  Rhodes,  où  il  se  fît  chrétien,  se  maria  et  eut  deux 
fils  et  deux  filles.  Après  la  prise  de  Rhodes  en  1522,  Soliman  le 
Grand  ayant  trouvé  ce  prince  et  ses  deux  fils,  les  fit  mourir  parce 
qu'ils  refusèrent  de  retourner  à  la  religion  de  leurs  pères,  et  il 
amena  ses  deux  filles  à  Constantinople.  Ainsi  la  maison  ottomane 
aurait  donné  trois  martyrs  à  TEglise  (1).  » 

L'abbé  Arbellot. 

(I)  Ai'DiFFRET,  Biographie  unioerselle  de  Michaud,  ari.  Zisim. 


APPENDICE 


I.  —  BuRCHARD,  ms.  arch.  Vatican,  p.  885. 


«  Feria  sexta  xiii  martii,  gran  sultan  frater  turci  intravit  urbcm  cquos. 
Capul  suum  more  suo  magDO  vclo  albo  tcclum  habcns,  ncmini  discoopo- 
riebat,  scd  lantum  parum  inclinabat.  EquitavitinlcrFranciscum  Cibo,  filium 
papae,  a  dexlris,  et  priorcm  Alvernise  ncpotem  magislri  novi  cardinalis  a 
sinislris.  Prsedictus  prior  Alvcrniae  asserens  se  oratorcm  rcgis  Francorum 
et  curam  dicti  lurci  sibi  commissam  esse,  senatori  et  aliis  oratoribiis 
locum  dare  noluit  ».  Et  paulo  inferius  :  «  Venit  per  consislorium  coram 
pontifice,  et  licel  diceretur  ipsum  Turcum  rcvcrcntiam  pontifici  faclurum 
Turcorum  more,  terram  manu  langendo,  deinde  manum  osculando,  lamcn 
illud  faccre  rccusavit;  sed  in  introitu  consislorii,  ubi  genuflccti  solel,  gc- 
nuflcelerc  noluit,  immo  vix  et  valdc  parum  caput  coopcrtum  poniifici  incli- 
navit,  adeo  quod  difiiculicr  hujusmodi  inclinatio  cognosci  poluil,  vel 
videri.  Asccndit  ad  pontificem,  qucm  slans  ercclus  amplcxus  est,  cl  super 
brachium  dexlrum  parum  deosculans,  capul  suum  scmpcr  tenons  cooper- 
lum;  qui  stans  coram  pontifice  illi  explicari  fecit  per  suum  intcrpretem  et 
gaudere  se  praesenliam  ponlificis  alligisso,  ipsumquerogare  quod  facli  me- 
mor  esse  velil,  et  eum  habere  commcndalum,  et  cum  tempus  dabilur  et 
locus,  in  secreto  aliaexplicaturum.  Rcspondilponlif'exjamdiu  acUim  fuisse, 
quod  nobilitas  sua  pro  suo  stalu  et  bono  Romam  ducercluP)  el  quod  sua 
nobilitas  in  nullo  dubitare  debeat,  sed  laelo  vivere,  quia  omnia  in  bonum 
fînem  sunt  ordinata  :  proquibus  turcusila  se  confidere  asserens,  sanclilali 
suse  gratias  agit;  tune  recessit  a  ponlifice  Turcus,  et  omnes  (Cardinales  in 
suis  locis  slanles  esl  amplexus,  et  super  sive  circa  scapulam  dexleram 
sîngulos  osculatus. 

IV.  Intérim  alii  lurci  prasdicti  familiares  coram  ponlifice  vencrunl,  et 
singuli  unus  videlicet  post  alium,  genuflectentes,  terram  manu  dexiera  tan- 
génies,  deinde  pontificis  pedes  cum  pluviali  et  veslibus  amplexanles,  ge- 
nuÛexi  sunt  osculali,  et  turcum  palronum  suum  soculi,  qui  amplcxalis  om- 
nibus cardinalibus,  demptis  illisduobus,  qui  apud  ponlificem  in  assisleutia 
permanserunt,  absque  eo  quod  aliter  se  firmarel,  aul  aliler  pontitici  reve- 
rentiam  faceret,  rediit  ad  caméras  suas.  (Ap.  Annal.  Baronii,  t.  XXX, 
Odoric.  Ratnaldi,  l.  XI.  p.  163,  édit.  Lucae,  1754]. 

T.  xxxii;.  3 


38  SOCIÉTÉ  ABCIIÊOLOGIQOK   BT   BISTORIUUK   DO   LIMOUSIK. 

II.  —  Lettre  de  Mathieu  Bosso,  chanoine  de  Vérone. 

Scd  ne  modo  cliam  le  lalcal  quse  in  urbc  geruntiir,  hoc  vol  nnum  vidclur 
mihi  cogniiu  dignum,  fralris  imperaloris  magni  turconim  accessus,  qui  so 
Icmni  pompa  acceptas  est,  tola  urbe  spnclante.  Inccssit  enim  par  speciosiores 
vias  insigni  insidcns  cquo,  mediusque  inler  Franccschelum  papœ  filium, 
et  grandis  magistri  Khodiorum  equilum  fratrem.  ftcnique  in  sacrum  pala- 
tium  invecius  est,  ibique  honorifice  habilus.  Non  multis  posi  dics  publi- 
cum  in  consistorium  deductus,  ad  Pontificis  M«imi  conspcclum  conspicuo 
in  ihrono  scdenlis,  neque  flccli  antc  cum,  ncqac  deosculan  ex  more  vcs- 
tigium.  ut  qui  pnesunl  sacris  rilibas  cl  cœrcmoniis  illum  cdocebant,  u  lo 
nassas  est  modo;  ut  dolorc  et  indignalione  perraoti  chnsliani,  qui  specla- 
cnio  adorant,  rabidam  omnes  bilcm  dcspumarent,  et  in  alteruirum  freme- 
renl  uuod  non  vi  incurvaretur  a  slipatoribus  armalis,  aut  barba  rapiaretur 
ad  s'acpos  pontilicis  pedes,  ne  impune  Christianam  d.gnitalcm  et  div.nam 
rem  nosiram  contemneret.  is  qui  sub  paire  Mahumeto  tanlum  beau  san- 
Sis  noslri  «Bvus  et  impius,  quanlus  quas.  lacum  efficerel,  aut  quantum 
•^  !;v-^;  èwrerct  Ue  illius  advcntûs  causa,  mulla  vanaque  fabulaotur 
Uios  S  d  Lnium  vulgarissima  h«c  opinio  est,  ut  Iradalur  sullano  (So«- 
dZd-Eaupte)  armandus  in  fratrem  rcgnanlem,  qu.  Icgatos  Romam  nu- 
nmimè  mi«l  »»«"•  deposccntes:  pro  quo  sultanum  a.unl  magnam  v.m 
^uri  sanctamque  Hlerosolymam  pap«  pollicen.  Et  oer  fra.rem  s.  imperato- 
îem  Wrum  vicerit,  imperio  regnisque  illius  dev.cU  pot.lus  fuent  se 
imnia  chriétianis  ercpla  prsstinis  bellis  resliluturum.  Aspec  us  barbar. 
Îu-us  et  truculcntus,  corpus  compressum  ei  vahdum  cerv.x  lata,  pectus 
vistSm  et  prominens,  stalura  uUra  quam  med.ocr.s,  iiabons  et  oculorum 
àlierum  luscum  ac  lorvum.  nasum  aquilinum,  capul  .nqu.e  um  semper 
omn?a  collnslran.  et  tanquam  minans  inspectans.  Jîtas  .11.  (ut  m.h.  v.de- 
lurl  anno  quadragcsimo  proxima,  patrem  cujus  cœlatam  «re  sœp.us  ima- 
gincmvidi,  ad  ungucm  refcrcns;  et  ut  indole,  sic  et  mor.bus  pess.m.s. 
insigni  atrocitale  atque  siBvitiaœquans.{Ap.  Papib.uh  Mass.,  p.  368). 


.ns.gn. 

m 


Voici  oc  que  dit  Burchard  dans  son  Dlariam  'Ms.  archiv.  Vatican,  sign. 

N.,  104.  lib.  2)  :  ,  , 

«  Fcria  quarta  xxv  mcnsis  fcbrunrii.  prœdiclus  Gcm,  alias  Ziz.mus,  fra- 
tPr  magni  lurcie,  qui  nupcr  Régi  Francorum  per  sanctissimura  Dora.nam 
ioslrumlx  paclo  et  convenlione  inler  eos  stipulatis  fueral  cons.gnatus,  .a 
civilalc  Ncapolitana  et  Castro  Capuano  ex  esu  sive  polu  natura  suœ  non 
convcnicnli,  viia  est  functus.  Cujus  cadavcr  deinde  ad  inslant.am  et  pre- 
ccs  maeniTurcse  eidem  magno  Turc»  cura  tolo  dcfunct.  fam.l.a  m.ssum 
est  oui  nroplcrea  dicilur  magnam  pecuniarum  summam  persolv.sse,  scu 

douasse,  et  lamiliam  ipsam  in  graliam  ^«î^«Pl^„\%"  J^.^'^^'^.-J;'',';^- 
Baho.n.1,  auctorc  Ra.kaldo,  cum  nolis  Mansi,  l.  XXV,  p.  217,  an.  I4»5,xii, 

édit.  Loc«,  4754). 


ZIZIX    A    BOURGANKUF    ET   A    RO«R.  39 

IV 

Alexandre  VI,  dans  une  lollre  à  Léonel,  évoque  de  Concorde,  son  légat 
CD  Allemagne  auprès  de  Tempereur  Maximilicn,  se  plaint  de  Charles  VIII 
en  ces  termes  : 

a  Almam  urbcm  sacro  apostolorum  sanguine  dcdicatam,  summa  annonœ 
penuria  laborantem,  cum  toto  suo  exercitu,  non  sine  gravissimo  nostro«  et 
lotius  Romanae  CathoUcse,  ac  curiae  nostrse  dispendio  et  periculo  ingressus, 
et  per  aliquot  dies  in  dicta  urbe  permanens,  anlequam  diciam  urbem 
exiret,  Zizimum  sultauum  turcorum  tyranni  fratrem,  qui  apud  nos  et  hanc 
sanctam  scdem,proutconveniebat.  in  tutissimum  christianornm  praf^sidium 
servabalur,  ac  duas  ex  potioribus  noslris  et  ejusdem  Ecclesise  arcibus  exlor- 
quens,  et  dcmum  ad  ipsum  SicilicB  regnum  se  transfcrens,  illud  vi  occu- 
pavit,  expulse  inde  légitime  posscssore,  regnumque  ipsum  ab  ipsa 
Roniana  Ecclesia,  cui  aucihore  Domino  prsesidemus,  rècognoscenle;periit- 
que  tune  in  manibus  suis  priediclus  sultanus,  ex  cujus  obitu  perdidit  chris- 
tiana  Religio  opportunum  contra  Turcorum  in  christianos  effrenalam 
rabieni  remedium  ». 

1495,  7  des  calendes  de  novembre. 

(Oooaic  Raksaldi,  t.  XI,  p.  249,  an.  4495,  XVI). 


LES 


GRAVURES  ORIGINALES  DE  LÉONARD  LIMOSIN 


A  LA  BIBLIOTHÈQUE  NATIONALE 


Les  éraailleurs  limousins  ont  été  Tobjel  de  nombreux  travaux, 
grâce  auxquels  l'histoire  de  ces  maîtres  d'un  de  nos  arts  industriels 
les  plus  intéressants  commence  à  être  connue;  d'autre  part  la 
technique  de  l'ancienne  émaillerie  n'a  plus  aujourd'hui  aucune 
obscurité.  Mais  jusqu'ici  on  s'est  peut-être  très  peu  préoccupé  de 
l'esthétique  de  l'art  de  nos  émailleurs;  cependant  il  convient  de 
dire  que,  dans  cet  ordre  d"idées,  nous  avons  d'intéressantes  consi- 
dérations, dues  surtout  à  l'abbé  Texier  et  à  M.  Darcel. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  études  dans  le  sens  que  j'indique  ont  été  à 
peine  ébauchées,  en  sorte  que  nous  ne  sommes  même  pas  en  me- 
sure de  dire  quelle  est  la  place  qui  doit  être  assignée  dans  la  série 
des  grands  artistes  dits  industriels  à  tel  ou  tel  de  nos  émailleurs, 
choisis  parmi  les  plus  illustres.  Par  exemple,  Léonard  Limosin  peut- 
il  être  mis  en  paralèlle  avec  un  Bernard  Palissy  ou  un  Lucca  délia 
Rubia.  C'est  là  une  question. que  Ton  ne  s'est  même  pas  posée. 

Un  des  éléments  à  dégager  tout  d'abord  serait  la  notion.de  la 
part  qui  revient  à  l'invention  personnelle  dans  les  compositions 
reproduites  par  nos  maîtres.  En  art  industriel  il  est  parfaitement 
légitime  de  se  servir  de  carions  dont  la  composition  n'appartient 
pas  à  rexéculant,  ou  même  de  gravures  déjà  souvent  reproduites. 
La  grande  affaire  de  Témailleur,  du  céramiste,  etc.,  est  avant  tout 
de  vaincre  les  difficultés  de  technique  qui  viennent  trop  souvent 
s'opposer  à  sa  libre  marche  et  peut-être  pourrait-on  soutenir 
qu'il  en  est  ainsi,  dans  une  certaine  mesure,  tout  au  moins  pour 
les  arts  supérieurs,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi.  En  effet,  combien 
sont  nombreuses  les  œuvres  de  peinture  ou  de  sculpture  dans  les- 
quelles l'invention,  la  composition,  n'a  qu'une  importance  bien 
atténuée  ou  même  n'intervient  pas,  et  qui  cependant  n'en  sont  pas 
moins  admirables.  Ces  œuvres,  le  plus  souvent  ne  valent  que  par 


Fig.  1. 


Fig.  S. 


Flg.  3. 


i51^ 


Fig.  4. 


Flg.  5. 


Ci 


f(i/  lE  O/VA^D/* 


j)fôe:> 


Fig.  6. 


I  5<?  ^ 


\^ 


Dans  les  marques  qui  se  trouvent  sur  les  eaux  fortes  de 
Léonard  Liniosin  que  possède  la  Bibliothèque  nationale,  certains 
détails  sont  peu  distincts  (les  marques  comme  les  planches 
elles-mêmes  ont  été  exécutées  très  rapidement)  ;  c'est  ainsi  qu'il 
paraît  diflicile  de  déterminer,  d'une  manière  absolument  exacte, 
la  signiticaiion  des  petits  traits  qui  accom;)agnent  le  monogramme 

Il  en  est  de  môme  pour  les  ligures  qui  se  trouvent  en  tôle  des 
blasons  2  et  4.  On  connaît  les  armes  de  Léonard  et  on  sait  qu'il  n'y 
ligure  pas  de  Heurs  de  lys,  du  moins  sur  les  pièces  connues  jusqu'à 
ce  jour. 

Robert  Duménil  a  reproduit  les  marques  que  nous  figurons  sous 
les  no*  \  et  6.  De  plus,  il  donne  une  marque  que  nous  n^avons  pas 
eu  à  reproduire,  puisque  la  pièce  où  elle  figure  n'appartient  pas  à 
la  Bibliothèque  nationale. 


Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  kintorigue  du  Limousin,  t.  XL,  p.  41, 


LES   GRAVURES  ORlGlNALKS   DE   LEONARD   LIUOSIN.  41 

la  facture,  le  sens  de  ce  mot  n'étant  pas  ici  restreint,  cela  va  de  soi  ; 
c'est  par  la  seule  facture  que  l'artiste  est  arrivé  à  rendre  la  nature 
en  rinterprétant  selon  la  constitution  de  son  tempérament  par- 
ticulier. 

Sans  vouloir  aller  jusqu'à  dire  que,  dans  l'œuvre  d'un  artiste 
industriel,  où  la  représentation  delà  ligure  intervient,  la  composi- 
tion, l'invention,  la  création  enfin  n'est  que  secondaire,  on  peut 
admettre  cependant  que  ce  côté  de  son  travail  n'a  pas  la  môme 
importance  que  pour  un  peintre  ou  un  sculpteur;  toutefois,  il  est 
évidemment  fort  intéressant  de  se  rendre  compte  de  la  part  per- 
sonnelle qui  revient  à  Tartiste  dans  la  composition  de  scènes  qu'il 
a  reproduites;  par  là,  entre  autres  constatations,  on  peut  acquérir 
une  notion  exacte  de  son  habileté  dans  l'art  du  dessin  ;  car,  et  la 
chose  est  évidente,  il  est  bien  plus  facile  de  reproduire  avec  exac- 
titude une  gravure  que  de  donner  quelques  corrections  aux  for- 
mes des  personnages  qui  figurent  dans  un  sujet  original. 

Pour  faire  le  départ  de  ce  qui  appartient  à  la  composition,  à  Tin- 
vention  personnelle  dans  l'œuvre  de  nos  émailleurs,  on  possède 
déjà  quelques  données.  11  a  été,  par  exemple,  relativement  facile 
de  reconnailre  que  nos  émailleurs  avaient  souvent  copié  des  gra- 
vures, et  cela  avec  plus  ou  moins  de  liberté;  mais  quelques-unes  de 
ces  gravures  peuvent  n'être  pas  parvenues  jusqu'à  nous  :  il  n'est 
donc  pas  certain  que  toutes  les  compositions  dont  nous  ne  con- 
naissons pas  les  prototypes  gravés  puissent  être  considérées 
comme  dues  à  nos  émailleurs. 

Une  autre  difficulté  (1),  c'est  que  les  émailleurs  n'ont  presque 
jamais  pris  la  réalité  locale  pour  point  de  départ,  les  détails  limou- 
sins qui  ont  pu  leur  servir  ont  été  si  profondément  transformés  par 
eux  qu'ils  ont  perdu  leur  individualité  personnelle,  s'il  est  permis 
d'ainsi  dire. 

En  somme,  la  question  si  intéressante  dont  je  viens  de  parler  est 
sans  doute  insoluble  aujourd'hui,  mais  il  n'est  pas  interdit  d'espé- 
rer qu'en  réunissant  tous  les  indices  qui  pourront  être  découverts 
on  arrivera,  en  l'espèce,  sinon  à  établir  des  faits  bien  positifs,  du 
moins  à  proposer  des  hypothèses  plausibles. 

Il  convient  de  ne  pas  se  trop  vite  décourager  :  le  champ  à  explo- 
rer paraît  bien  ravagé,  cependant  il  y  a  quelque  peu  à  glaner;  il 
importe,  avant  tout,  de  rechercher  avec  le  plus  grand  soin  pour 
les  recueillir   pieusement  toutes   les  manifestations  artistiques, 

(I)  CcUedifHculté,  je  l'ai  déjà  signalée  dans  une  élude  sur  les  Compost-" 
lions  originales  des  anciens  émailleurs,  parue  dans  le  volume  Jes  travaux 
de  la  réunion  des  Sociétés  des  Beaux-Arls  des  départements  (<888). 


4î  SOCIÉTÉ   ARCHKOLOGlQUe    KT    IIISTOBIQUB   DU  LIMOUSIN. 

même  les  moindres,  qai  pourraient  porter  la  lumière  sur  un  sujet 
encore  entouré  de  bien  des  obscurités. 

J'apporte,  aujourd'hui,  une  simple  contribution  à  une  étude  qui, 
sans  doute  ne  saurait  être  entreprise  dès  maintenant,  mais  qu^il 
convient  de  préparer. 

Plusieurs  auteurs  ont  déjà  signalé  les  quatre  gravures  de  Léo- 
nard Limosin  qui  se  trouvent  au  Cabinet  des  estampes,  mais  je  ne 
crois  pas  que  ces  gravures  aient  jamais  été  décrites;  je  vais  essayer 
aujourd'hui  de  combler  cette  lacune,  après  quoi  je  présenterai  au 
lecteur  quelques  courtes  réflexions. 

1°  Entrée  de  Jésus-Christ  à  Jérusalem  (désignation  manuscrite 
moderne  sur  l'exemplaire  de  la  Bibliothèque),  estampe  en  hauteur, 
présentant  les  dimensions  suivantes,  qui  sont  les  mêmes  pour  les 
quatre  pièces  :  hauteur,  260"";  largeur,  190"";  date  et  mono- 
gramme à  gauche  (voir  notre  reproduction,  fig.  1).  Le  papier 
porte  un  filigrane  qu'il  est  assez  difficile  de  déterminer  ;  j'ai  cru  y 
reconnaître  un  grand  D  (1). 

Jésus  est  monté  sur  un  âne,  dont  une  de  ses  mains  tient  la  bride, 
tandis  que  l'autre  est  à  la  hauteur  de  la  poitrine;  sur  la  tête,  tour- 
née à  gauche,  on  remarque  une  auréole  pleine;  un  personnage,  de 


(1)  Il  esta  peine  besoin  de  dire  que  la  question  du  filigrane  est  ici 
fort  importante.  En  effet,  combien  serail-il  intéressant  de  déterminer  si  le 
papier  dont  s*est  servi  le  grand  arlisle  a  ^^té  habituellement  employé  par 
les  imprimeurs  limousins.  S*il  en  était  ainsi,  il  serait  établi  que  les  gravu- 
res auxquelles  ces  lignes  sont  consacrées  ont  été  exécutées  à  Limoges,  cir- 
constance qui  n*cst  pas  indifféronic.  11  est  bon  de  rappeler  ici  une  remar- 
que de  M.  Alfred  Darcel  dans  sa  belle  notice  des  émaux  du  Louvre. 
D'après  ce  savant  critique,  le  travail  de  la  gravure  devait  être  facile  à 
Léonard,  car  il  se  rapprochait  beaucoup  du  procédé  employé  par  les 
émailleurs  limousins  pour  les  grisailles;  il  paraît  donc  possible  d'admettre 
que  Léonard  a  pu,  sans  inilialion  préalable,  se  livrer  à  la  gravure,  d'au- 
tant plus  que  sa  manière  comme  graveur  est  des  plus  sommaires. 

Une  question  se  pose  tout  naturellement.  Comment  nos  émailleurs  n'onl- 
ils  pour  ainsi  dire  pas  gravé,  lorsque,  comme  on  le  pressent,  tout  sem- 
blait les  y  inviter? 

Peut-être,  en  étudiant  de  très  près  les  anciens  monuments  de  la  typo- 
graphie limousine,  pourrai l-on  trouver  quelques  gravures  ducs  aux 
émailleurs.  Je  connais  plusieurs  pièces  auxquelles  je  serais  tenté  d'attribuer 
celle  origine  ;  on  s'en  est  peu  occupé  jusqu'ici,  parce  qu'elles  sont  exécu- 
tées très  sommairement  et  par  des  procédés  rapides.  Mais,  ainsi  que  nous 
le  montrent  les  quatre  planches  de  la  Bibliothèque  Nationale,  c'était  pré- 
cisément là  la  manière  de  Léonard  et  probablement  aussi  des  autres 
émailleurs  qui  ont  gravé  —  s'il  y  en  a  en  dehors  du  Limosin. 


LES  GRAVURES  ORIGINALES   DE   LÉONARD   LIMOSIN.  43 

formes  herculéennes,  jette  à  terre  un  lapis  sur  lequel  Tâne,  qui 
s'avance  vers  la  gauche,  a  placé  les  pieds  de  devant. 

Jésus  est  entouré  de  nombreux  personnages  formant  trois  quarts 
de  cercle  ;  la  partie  laissée  libre  permet  de  voir  entièrement  la  Bgure 
principale.  Au  second  plan,  à  gauche,  on  aperçoit  un  édifice  élevé  sur 
un  plan  rectangulaire  et  de  style  pseudo-classique;  il  est  percé 
d'une  arcade  au-dessus  de  laquelle  se  trouve  une  frise  où  Ion 
remarque,  à  côté  d'un  masque  ornemental,  les  armes  de  Léonard 
(Bg.  2).  Deux  arbres  se  trouvent  sur  le  môme  plan  que  Tédifice. 
Sur  celui  de  gauche,  un  enfant  tenant  un  rameau  se  penche  vers  le 
Christ;  surTarbre  de  droite,  deux  enfants  dans  la  même  attitude. 
Plus  loin,  une  tour  carrée  et  crénelée  à  plusieurs  étages,  dont  le 
plus  élevé  est  en  retraite,  de  façon  à  former  terrasse  sur  Tétage  im- 
médiatement inférieur.  Des  groupes  de  personnages  semblant  cau- 
ser entre  eux  se  trouvent  disposés  à  diiïérenls  plans.  Au  fond,  une 
ville  pseudo-orientale,  murailles  formant  portiques,  édifices  à  cou- 
poles, grande  pyramide  surmontée  d'une  sphère. 

2**  Jésus-Christ  au  Jardin  des  Oliviers  (désignation  manuscrite 
moderne),  estampe  en  hauteur. 

Trois  soldats  endormis  occupent  le  devant  de  l'estampe.  Au 
second  plan,  Jésus,  le  corps  tourné  à  droite  (de  la  gravure),  est  à 
genoux,  les  mains  jointes  et  tendues  devant  lui;  il  est  vôtu  d'une 
lunique  lalaire  presque  sans  pli;  un  pied,  qui  dépasse  le  bord  de  ce 
vêlement,  est  nu.  Devant  Jésus,  un  rocher  au-dessus  duquel  un 
ange,  environné  de  nuages,  le  corps  incliné,  la  tête  baissée,  tend  un 
calice  au-dessus  duquel  se  trouve  une  ostie.  Une  auréole  rayon- 
nante surmonte  la  tête  de  Jésus. 

A  gauche,  un  arbre  au  tronc  fort  et  droit,  tout  à  fait  analogue  à 
ceux  qui  se  trouvent  dans  la  gravure  précédente.  Sur  un  plan  plus 
éloigné,  divers  personnages,  dont  le  premier  porte  une  torche,  en- 
ireal  dans  Tenclos  où  se  passe  la  scène.  Us  passent  devant  une 
sorte  de  hangar  auquel  tient  une  palissade  de  planches  appointées 
par  le  boul  comme  la  chose  se  pratique  encore  de  nos  jours.  A 
l'horizon,  silhouettes  sommaires  de  collines,  au  miheu  desquelles 
se  trouve  un  château  fort. 

A  terre,  entre  les  soldats,  on  remarque  une  plaque  sur  laquelle 
se  trouve  inscrit  le  nom  de  Léonard  Limosin,  avec  la  dale  1544. 
En  dehors  du  cartel,  à  gauche,  et  également  en  dehors  du  cartel, 
une  aiguière  (fig.  3).  Le  papier  ne  semble  porter  aucun  filigrane. 

S*»  (Non  désigné  à  la  Bibliothèque)  Jésus  devant  le  grand-prêtre. 
Au  premier  plan,  à  gauche,  des  soldats  presque  nus  et  coiffés  de 
hauts  bonnets  emmènent  Jésus;  l'un  d'eux  est  armé  dune  halle- 
barde dont  la  pique  estfourchée;  à  droite,  deux  personnages  sem- 


4i  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   BT    HISTORIQUE    DU   LISIOUSIN. 

blant  compatissants  se  tiennent  par  le  cou  ;  on  n'aperçoit  que  la 
tête,  une  main  et  un  bras  de  celui  qui  se  trouve  au  second  plan; 
l'autre,  que  Ton  voit  complètement,  est  revêtu  d'une  tunique  dou- 
ble descendant  au-dessous  du  genou  et  dont  le  bas  est  garni  de 
fourrure.  Les  jambes  sont  chaussées  de  bas  drapés. 

Le  grand-prélre  est  assis  sur  un  trône  dont  les  bras  s'appuient 
sur  des  termes  barbus.  Ce  siège  est  élevé  sur  deux  marches  arron- 
dies. Le  pontife  est  vêtu  d'une  tunique  courte  laissant  nus  les  bras 
et  les  jambes,  qu'il  a  croisées  et  autour  desquelles  se  trouvent  des 
jarretières,  dont  chacune  porte  un  masque  sur  le  devanl.  Ses  épau- 
les sont  couvertes  d'un  manteau  drapé  largement;  il  est  coiffé 
d'un  turban.  Son  visage  exprime  l'indignation,  une  main  est  étendue 
vers  le  Christ  dans  un  geste  de  menace.  L'autre  tient  une  baguette. 
Sur  un  plan  plus  éloigné,  trois  personnages  vêtus  de  longues  robes 
et  coiffés  de  hauts  bonnets,  semblent  partager  les  sentiments  du 
grand-prêtre. 

La  scène  se  passe  dans  un  édifice  de  style  pseudo-antique;  par 
une  arcade  ouverte,  on  aperçoit  la  campagne  —  fond  de  collines  et 
de  châteaux.  —  Sur  le  mur,  des  niches;  une  colonne  d'ordre  co- 
rinthien soutient  le  plafond.  Au-dessus  de  la  tête  du  grand-prêtre, 
on  remarque  une  draperie  formant  baldaquin  :  elle  est  accompa- 
gnée de  guirlandes  et  de  chutes  de  fruits.  Au-dessous  d'une  chute, 
terminée  par  un  masque  de  femme  à  draperie,  on  voit  les  armes  de 
Léonard  dans  un  cartel  (fig.  4).  Au  bas  de  la  gauche,  le  nom  de 
Léonard  Limosin  (fig.  8)  (sans  date)»  Cette  estampe  ayant  été  col- 
lée en  plein  sur  un  papier  moderne,  le  filigrane  ne  peut  plus  être 
distingué. 

4*  Résurrection  (désignation  manuscrite  moderne),  estampe  en 
hauteur.  On  croit  distinguer  un  filigrane  formé  par  les  lettres  1  P. 
Date  et  signature  à  gauche  (fig.  6). 

Le  premier  plan  est  occupé  par  cinq  personnages  à  demi  couchés, 
—  des  soldats  et  des  disciples  —  l'un  d'eux  porte  sur  son  épaule 
un  grand  manteau  à  pointe  fourchée;  ils  semblent  effrayés. 

Au  second  plan  le  tombeau,  en  forme  de  caisse  carrée.  Le  Christ 
en  sort;  le  corps,  droit,  est  fortement  musclé;  une  draperie  s'enroule 
autour  des  épaules  ;  le  bras  gauche  tient  une  croix  à  long  bâton  à 
laquelle  est  attachée  une  oriflamme  à  deux  pointes,  portant  le  des- 
sin d'une  cx'oix.  Une  main  est  dirigée  vers  le  ciel.  L'expression  du 
visage  est  sévère;  les  cheveux  sont  flottants;  autour  de  la  tête, 
une  auréole.  Le  corps  tout  entier  est  entouré  d'une  vesica  piscis 
rayonnante.  Au  dernier  plan,  à  gauche,  une  vitre  de  style  pseudo- 
orionlal,  coupoles;  un  édifice  porte  une  coupole  double. 

Ces  planches  sont  traitées  dans  une  manière  sobre  et  énergique, 


LES  GRAVURES   OniGIN\LES   DE   LÉONARD   L1B90S1N.  4fi 

qui  rappelle  celle  de  certains  graveurs  sur  bois  ;  le  trait  est  hardi. 
—  Dans  le  dessin,  tout  de  verve,  la  correction  n'est  guère  cherché, 
mais  il  a  beaucoup  de  caractère  ;  les  extrémités  sont  maniérées;  les 
têtes,  en  général,  ne  sont  pas  soignées.  Les  ombres  sont  massées 
largement  ;  lorsqu'il  y  a  lieu,  les  tailles  sont  croisées. 

Ces  compositions  portent  les  caractères  très  particuliers  que  l'on 
retrouve  dans  les  œuvres  de  Léonard,  môme  lorsque  celles-ci  ont 
été  faites  d'après  des  gravures,  ou  des  cartons  dus  à  d'autres 
artistes. 

Il  existe  au  Musée  de  Cluny  une  suite  de  six  pièces  ovales  fai- 
sant partie  d'un  chemin  de  croix,  comme  nous  dirions  aujourd'hui. 
Parmi  ces  six  pièces,  nous  en  trouvons  trois  qui  reproduisent  les 
gravures  de  la  Bibliothèque;  ce  sont  :  VEntrée  à  Jérusalem,  Jésus  au 
Jardin  des  Oliviers  et  la  Résurrection  (1). 

Les  émaux  exécutés  d'après  les  planches  de  Léonard  ne  portent 
ni  sa  signature  ni  ses  armes. 

Je  pense  que  les  compositions  que  je  viens  de  décrire  sont  des 
créations  de  Léonard;  elles  étaient,  nous  l'avons  vu,  destinées  à  être 
reproduites  dans  son  atelier.  C'étaient  des  matériaux  de  travail, 
par  lesquels  notre  grand  émailleur  remplaçait,  probablement  par 
économie,  les  gravures  italiennes  et  allemandes. 

Ces  compositions  hâtives  sont  loin  d'être  sans  valeur  :  elles  nous 
montrent  un  côté  du  talent  de  Léonard  qui  devait  élever  si  haut  son 
art  dans  Ylncrédulité  de  Saint  Thomas,  conservée  au  Musée  de 
Limoges. 

Camille  Leymarie. 


(i)  Voir  la  description  de  ces  plaques  dans  le  Catalogue  du  Musée  de 
Cluny,  si  magislralemcnl  rédigé  par  M.  Darcel. 


LES 


ASSEMBLÉES  DES  HABITANTS  iïAUBUSSON 


ET  LA  BAILIE  DE  MASVOUDIER 


A  côlé  du  corps  de  ville  chargé  du  pouvoir  exécutif  de  la  com- 
mune, qui  avait  son  origine  dans  des  dispositions  légales,  on 
trouve  rassemblée  générale  des  habitants,  souvenir  des  assemblées 
paroissiales  primitives.  La  réunion  de  ces  assemblées,  manifestation 
la  plus  ordinaire  de  la  communauté,  constituait  un  droit  essentiel 
pour  tout  groupe  d'habitants  érigé  en  municipalité.  La  Coutume  de 
la  Marche  (1521)  conférait  ce  droit  aux  plus  humbles  centres 
urbains  ou  même  ruraux.  —  <v  Les  habitans  en  aucune  Justice  qui 
n'ont  corps  commun  ou  consulat,  ne  se  peuvent  assembler  pour 
faire  congrégation  pour  les  affiiires  communes  ou  autres,  sans 
demander  licence  au  seigneur  justicier  ou  à  ses  officiers,  sur  peine 
d'amende;  mais  si  la  licence  leur  est  refusée,  et  s'ils  ont  déclaré  à 
la  Justice  la  cause  de  leur  assemblée,  si  elle  est  licite  et  honnête, 
ils  se  peuvent  assembler  et  parler  de  leurs  affaires  dont  ils  ont  fait 
déclaration,  nonobslanl  que  la  licence  leur  soit  refusée  (1).  » 

La  plus  ancienne  commune  de  la  Haute-Marche  était  celle  d'Au- 
busson,  dont  la  charte  de  franchises  avait  été  octroyée  parle  comte 
Hugues  XII  de  Lusignan  en  1262.  Une  enquête  faite  par  les  officiers 
de  la  sénéchaussée  de  Guérel,  le  5  novembre  1566,  constate  que 
quelques  années  auparavant  les  titres  de  la  ville  furent  pillés  et 
incendiés  par  les  prolestants.  Nos  archives  municipales  ont  été  dis- 
persées depuis  cette  époque  et  il  reste  peu  de  chose  de  ces  pré- 
cieuses collections.  Nous  sommes  réduits  à  chercher  des  renseigne- 
ments dans  les  actes  des  notaires.  Ces  officiers  publics  étaient 
habituellement  chargés  de  la  rédaction  des  procès-verbaux  des 
assemblées  des  habitants  et  les  déposaient  dans  leurs  minutes.  Les 

(  I  )  Coutumes  de  la  prooince  et  comté  pairie  de  la  Marche,  par  Coutu- 
rier DE  FouRNOue,  chap.  1^%  art.  VI 


LES  ASSEMBLÉES   DES   HABITANTS   u'aUBUSSON.  47 

règlements  de  la  manufacture  de  tapisserie  approuvés  par  Colbert 
et  les  délibérations  de  communauté  qui  leur  servent  de  préambule, 
furent  imprimés  sur  vélin  en  1665  :  nous  avons  pu  en  retrouver  un 
rarissime  exemplaire. 

Le  châtelain  d'Aubusson  ou  son  lieutenant,  assisté  des  consuls, 
réunissait  les  habitants  par  affiches  et  au  son  de  la  cloche,  tantôt 
dans  la  salle  d'audience  de  la  châtellenie,  tantôt  sur  une  place 
siluée  auprès  de  la  chapelle  de  Notre-Dame  de  la  Ville.  Lorsqu'il 
s'agissait  d'affaires  purement  religieuses,  la  population  étant  mixte, 
les  protestants  n'étaient  pas  convoqués;  mais  ils  assistaient  aux 
assemblées  lorsque  les  intérêts  religieux  n'étaient  pas  en  jeu.  On 
sait  qu'ils  avaient  une  organisation  toute  spéciale  et  des  assemblées 
particulières  dont  nous  ne  nous  occuperons  pas  ici. 

La  gestion  désintérêts  généraux  de  la  commune  formait  la  princi- 
pale attribution  de  l'assemblée.  Il  ne  paraît  pas  qu'elle  ait  eu  le  con- 
trôle des  dépenses  et  l'élablissement  des  comptes.  La  partie  finan- 
cière était  réservée  aux  consuls,  primitivement  sous  la  surveillance 
du  lieutenant  civil,  et  plus  lard  sous  celle  de  l'intendant  de  la  géné- 
ralité ou  de  son  subdélégué.  Pour  les  affaires  de  moindre  importance, 
on  se  contentait  de  réunir  «  les  habitants  faisant  la  plus  saine 
partie  du  lieu  ».  L'ancienne  formule  «  melior  et  sanior  pars  homi- 
num  loci  »  se  retrouve  particulièrement  dans  le  midi  de  la  France  : 
elle  était  très  usitée  chez  nous  au  xvi"  et  au  commencement  du  xvii* 
siècles.  On  désignait  ainsi  un  personnel  d'élite  dans  lequel  les 
consuls  étaient  pris  à  tour  de  rôle  et  qui  représentait  la  force 
morale  de  la  cité. 

Nous  avons  recueilli  un  certain  nombre  de  procès-verbaux  d'as- 
semblée des  habitants  d'Auhusson.  Nous  nous  contenterons  d'indi- 
quer sommairement  ceux  que  nous  avons  déjà  publiés. 

H  décembre  1878.  —  Vente  d'une  place  vague  auprès  du  pont 

de  la  Terrade. 

«  A  tous  ceulx  qui  ces  présentes  lettres  verront,  Jehan  Granchier, 
garde  du  scel  royal  estably  ez  contractz  au  pays  et  comté  de  la 
Marche  pour  le  roy  notre  sire  et  la  reine  Elisabeth,  douairière  de 
France,  salut. 

»  Scavoir  faisons  que  par  devant  Estienne  Dcscoulx  et  Loys 
Delacombe,  notaires  royaulx  au  dit  pays,  jurés  du  dit  scel  en  la 
ville  d'Aubusson,  ont  esté  personnellement  establys  honorables 
hommes  :  maistre  Pierre  Taraveau,  licentié  ez  lois,  lieutenant  en  la 
chastellenye  et  ville  d'Aubusson,  Francoys  Mage,  notaire  royal  au 
dit  lieu,  Nicolas  Cartaud  et  Denys  Barraband^  marchans,  habitans 


i8  SOCIÉTÉ  ARCHÊOLOGIQUK   ET   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

au  dit  lieu,  lesquelz  au  nom  et  comme  consulz  du  dit  lieu  d'Aubus- 
son,  Tannée  présente  commencée  à  la  Teste  de  saint  Michel  dernière 
passée,  de  leur  bon  gré  pour  eulx  et  leurs  successeurs  consulz 
advenir,  et  pour  subvenir  aux  réparations  requises  et  nécessaires  à 
faire  au  pont  appelé  de  la  Terrade,  qui  est  situé  au  dit  lieu  d'Au- 
busson,  sur  le  chemyn  publicq  de  Lymoges  en  Auvergne,  lequel  est 
faict  et  construict  de  boys,  lequel  boys  par  usage  et  anlhiquité  de 
temps  est  venu  se  pourrir  et  ledit  pont  demeure  inutile  à  ladite 
ville  sy  promptement  n'est  restauré  et  reparé,  ainsy  qu'il  a  été  cer- 
tiflié  ez  dits  consulz  en  la  présence  des  notaires  susnommés,  par  le 
rapport  et  délibération  de  honorables  hommes  :  raaistre  Eslienne 
Segliere,  receveur  des  tailles  en  Télection  de  la  Marche,  Jacques 
Segliere,  trésorier  des  domaines  du  roy  audit  pays,  maistre  Anlhoine 
Mourlon,  docteur  en  médecine,  Antlioine  Meaulme,  notaire  royal, 
sieurs  Léonard  Dumont,  Jehan  Furgaud,  Anthoine  Terrible,  Jehan 
Vallenet,    Francoys   Carreau,  Jehan   Mage,    Estienne    Chemin, 
Estienne  Jallasson,  Martial  xMercier,  Jehan  Pineton,  Jacques  Bou- 
chon, Francoys  Biennousvienne,  Pierre  Danton,  Michel  Bertrand, 
Jehan  filz  à  feu  Francoys  Mage,  Jacques  Barrabant,  maistre  Pierre 
Robichon,  Anthoine  Fourrier,  Jehan  Mercier,  Jehan  Briffoulière, 
Francoys  Terrible,  maistre  Jehan  Blandin  et  Léonard  Tourneboys, 
tous  manans  et  habilans  de  la  dite  ville  d'Aubusson  et  faisant  la 
plus  saine  partye  d'icelle  ; 

»  Par  Tadvis  et  délibération  desquelz  et  de  leur  voulloir  et  con- 
sentement lesdits  consulz  ont  vendu,  cédé  et  transporté,  et  par  ces 
présentes  vendent,  cèdent  et  transportent  i  perpétuité  à  Jehan 
RionnetTayné,  marchand  tappissier  au  dit  lieu  d'Aubusson,  certaine 
place  vague  et  inutile...  pour  le  prix  et  somme  de  seize  esculz  et 
un  tiers  d'escu,  chacun  des  dits  escutz  estant  de  soixante  solz  tour- 
nois... » 

f Papiers  de  la  famille  CouturierJ, 

5  janvier  1579.  —  «  Les  consuls  d'Aubusson,  en  présence  du  lieu- 
tenant en  la  chatellenie,  sur  Tadvis  et  délibération  de  honorables 
hommes  et  saiges  maistres  Anthoine  de  Myomandre,  recepveur 
des  décimes  en  Tesvesché  de  Limoges,  Estienne  Segliere,  etc., 
vendent  à  Jehan  Bordas,  marchand  cordonnier...  la  place  vuide 
et  inutile  scituée  et  posée  sur  la  pille  de  pierre  qui  est  au  milieu 
du  dit  pont  de  la  Terrade,  sur  la  rivière  de  Creuse,  du  costé  de  bas 
qui  regarde  le  dessoudant  de  la  ditte  rivière  vers  les  moulins  de  la 
Roche,  laquelle  place  vuide  se  commence  aux  quatre  piliers  de  bois 
qui  portent  la  couverture  du  dit  pont  du  coslé  de  bas...  » 


LES   ASSEMBLÉBS  DES  HABITANTS  D^AUBUSSON.  49 

13  novembre  1614.  —  Etablissement  des  Pères  Récollets. 

«  Ce  jourd'huy  treizième  novembre  1614,  par  devant  nous  Jean 
Tarraveau,  chastelain  et  juge  royal,  civil,  criminel  de  la  ville  et 
chastellenie  d'Âubusson,  en  assemblée  générale  des  habitans  catho- 
liques de  la  dite  ville,  au  devant  de  Téglize  et  chapelle  de  Notre- 
Dame  de  la  dite  ville,  se  sont  comparus  honorables  hommes,  maistre 
Jean  Robichon,  procureur  du  roy,  Antoine  Carreau,  sieur  de  la 
BuxerettH,  et  maistre  Jean  Terradon,  consuls  en  la  présente  année 
de  la  dite  ville  ; 

»  Lesquels  nous  ont  remontré  que  sur  la  nécessité  qui  leur  est 
apparue  que  Ton  a  en  cette  ville  de  gens  religieux  et  ecclésiastiques, 
tant  pour  les  prédications,  confessions,  célébrations  du  divin  service, 
exhortations  particulières  et  autres  fonctions  ecclésiastiques,  ils 
ont  jugé  à  propos  de  convoquer  la  présente  assemblée  par  affiches 
et  placars  publiqs  qu'ils  ont  fait  apposer  puis  le  jour  d'hier  ez  lieux 
et  endroits  accoutumez,  en  laquelle  s*étant  trouvé  grand  nombre 
de  principaux  habitans  catholiques  de  ladite  ville  faisant  et  repré- 
sentant la  plus  saine  partye,  tant  ecclésiastiques  que  séculiers  ; 

»  Suf  l'exposition  faite  par  les  dits  consuls,  tous  les  dits  habitans 
ainsi  convoqués,  d'un  commun  consentement  avec  nous,  ont  jugé 
être  à  propos  d'appeler  et  procurer  en  celte  ville  une  compagnie  des 
Pères  RécoUels,  qui  leur  semblent  estre  les  plus  propres  et  conve- 
nables pour  s'acquitter  des  dites  fonctions,  approuvant  le  desseing 
des  dits  consuls  de  rechercher  le  bienfait  en  la  dite  ville  et  les  pro- 
vocquant  en  tant  qu'il  leur  est  possible  de  continuer  à  les  amènera 
enliôre  exécuiion  au  plus  tôt  qu'il  leur  sera  possible,  et  pour  en  jeter 
les  fondements  et  commencer  un  sy  bon  œuvre,  requérir  par  le  dit 
consentement  publicq  les  Pères  Récollets  qui  sont  à  présent  en 
cette  ville  de  planter  la  croix  en  les  formes  et  solennités  en  tel  caâ 
requises  au  lieu  qu'ils  connoitront  plus  convenable  pour  cet  effet, 
sans  néanmoins  soumettre  la  dite  ville  à  autre  obligation  qu'aux 
bienfaits  volontaires  de  chascun. 

»  Dont  nous  avons  octroyé  acte  au  dit  procureur  du  Roy  et  con- 
suls qui  se  sont  soubsignés,  ensemble  plusieurs  autres  habitans 
avec  nous  ont  signé.  —  J.  Mage,  notaire  ;  J.  Coulaux,  prestre  ; 
J.  Tarraveau,  chastelain  ;  G.  Chaussai,  J.  Robichon,  procureur  du 
roy  et  consul;  A.  Carreau,  consul;  J.  Terradon,  consul;  J.  Belin, 
A.  DE  Mïomandre,  E.  Descoux,  receveur  du  domaine  ;  J.  Marthelade, 
A.  Meyron,  j.  Furgaud,  F.  Furgaud,  Jean  Matheyron,  J.  Carreau  de 
Marthelade,  G.  Bosfinet,  P.  Tixier,  M.  de  Claraveau,  J.  Beby, 
L.  Simon,  G.  Carreau,  J.  Devialeix,  Jean  Meaulme,  J.  Pineton, 
DuMONT,  J.  Meaulme,  Marthelade. 

»  Leslie,  notaire  royal  et  greffier  de  ville.  » 


50  SOCIÉTÉ   ARCBl^OLOGtQUR    RT   HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

5  février  1631.  —  Assemblée  générale  des  habitants  d'Aubusson, 
convoquée  par  les  consuls  pour  délibérer  sur  un  projet  de  création 
de  nouvelles  élections  dans  le  royaume  et  de  division  de  celle  de  la 
Marche  en  deux.  L'assemblée  se  prononce  contre  ce  projet  regardé 
comme  préjudiciable  aux  habitants  de  la  ville  et  de  toute  la  province, 
«  qui  sont  foulés  et  oppressés  de  toutes  sortes  de  misères,  sans 
pouvoir  donner  aucun  soulagement  à  icelles,  qui  seroienl  encore 
augmentées  par  une  pluralité  d'officiers  ».  L'assemblée  nomme  des 
commissaires  avec  de  pleins  pouvoirs  pour  exprimer  ses  doléances 
et  la  trisle  situation  de  la  province. 

Signé  :  Taraveau,  lieutenant  à  Aubusson;  Roullet,  substitut  du 
procureur  duroy;  Rousset,  consul;  Jean  de  la  Marthelade,  avocat 
et  consul;  Laurent  Vatsset,  marchand,  consul,  elc. 

f  Archives  de  la  Creuse^  série  C.  —  Complément.  Election  de  Gué- 
ret,  C,  345.) 

16SS.  Une  assemblée  générale  autorise  la  construction  d'un  pont 
de  pierre  sur  la  Creuse,  «  allant  au  village  de  La  Cour  »,  en  rem- 
placement de  l'ancien  pont  qui  était  en  bois. 

{Minutes  du  notaire  Finet.) 

1657.  Les  entrepreneurs  demandent  la  convocation  de  l'assem- 
blée de  ville,  «  à  l'eflFet  d'obtenir  un  délai  de  trois  ans  au  lieu  de 
deux  pour  l'achèvement  du  dit  pont  ».  (Idem). 

1658.  Nouvelle  délibération  de  l'assemblée  de  ville  pour  «  com- 
bler les  deux  bouts  des  aenlenants  du  susdit  pont  de  La  Cour,  faire 
un  canal  et  ouverture  entre  le  four  banal  du  quartier  de  la  rue 
Franche  et  faire  à  neuf  la  muraille  de  dessus  la  dite  porte  du 
dedans  de  la  ville  ».  (Idem.) 

Assemblées  des  marchands,  maîtres  et  ouvriers  tapissiers. 

Les  tapissiers  d' Aubusson  possédaient  une  liberté  presque  abso- 
lue pour  la  fabrication  de  leurs  produits,  alors  que  d'autres  fabriques, 
telles  que  celle  de  Beauvais,  étaient  soumises  à  des  règlements  fort 
étroits,  en  échange  de  privilèges  considérables.  Les  assemblées 
générales  qui  eurent  lieu  sous  le  ministère  de  Colbert  sont  un 
souvenir  des  vieilles  libertés  municipales.  Une  lettre  de  cachet 
du  roi  du  30  août  1664  ordonna  la  réunion  d'une  assemblée  des 
marchands  et  négociants  d'Aubusson,  les  conviant  à  s'adresser  & 
l'intendant  des  finances  pour  les  besoins  de  leur  industrie.  Le  châ- 
telain Jacques  Carreau  et  les  consuls  en  exercice  convoQBèfeiit  en 
même  temps,  et  sans  que  cette  mesure  fût  désapprouvée  en  haut 
lieu,  les  maîtres  et  ouvriers  tapissiers  delà  ville,  des  hameaux  voi- 


LES  ASSEMBLRES   DES    HABITANTS  D^AUBUSSON.  81 

sins  et  du  bourg  de  La  Cour.  La  corporation  toute  entière  se  réunit 
au  son  de  la  cloche,  dans  l'auditoire  de  la  châtellenie,  le  28  sep- 
tembre 4664.  «  Après  la  lecture  de  laquelle  lettre  de  cachet  en 
icelle  assemblée,  fut  faite  une  délibération,  en  conséquence  de 
laquelle  fut  passée  une  procuration  le  il^  octobre  ensuivant  à 
Jacques  Bertrand,  marchand  tapissier  de  cette  ville  et  Tun  des 
tapissiers  de  la  garde  robbc  du  roy  (4),  auquel  il  fut  donné  pou- 
voir pour  comparoistre  devant  mondit  seigneur  Colbert  pour  rendre 
compte  de  Testât  du  trafic,  commerce  et  manufacture  des  tapisseries 
qui  se  font  el  fabriquent  journellement  en  celle  ville  et  représenter 
que  Testablissement  en  est  de  temps  immémorial  sans  que  Ton  en 
sçache  la  première  institution,  que  les  habitans  du  lieu  semblent 
eslre  nez  à  ce  travail,  que  c'est  presque  la  seule  ville  du  royaume 
qui  connoisse  et  réussisse  heureusement  dans  cet  ouvrage...  » 

Jacques  Bertrand  remplit  sa  mission  auprès  de  Colbert  avec  une 
remarquable  intelligence.  Les  comptes  des  bâtiments  royaux  pour 
1666  ont  conservé  la  trace  de  son  séjour  à  Paris.  Divers  ouvrages 
de  la  fabrique  d'Aubusson  furent  présentés  à  Louis  XIV,  qui  en 
ordonna  l'acquisition.  A  son  retour,  dans  une  nouvelle  assemblée 
générale  de  ville  tenue  le  18  mai  1665,  un  projet  de  règlement  fut 
arréîé  et  des  vœux  furent  émis  pour  être  présentés  au  roi,  «  en  pré- 
sence des  soussignez  et  autres  en  nombre  qui  ont  déclaré  ne  sçavoir 
signer,  tous  lesquels  ont  d'une  commune  voix  accordé  et  consenti 
tous  les  articles  cy-dessus  mentionnez,  pour  estre  par  eux  et  leurs 
successeurs  gardez  et  observez  de  poinct  en  poinct  selon  leur  forme 
et  teneur.  »  Suivent  cent-vingt-huit  signatures,  en  tôtc  desquelles 
figurent  celles  du  président  châtelain,  du  lieulenant,  du  procureur 
du  roi  et  celles  des  cinq  consuls.  La  dernière  signature  est  «  J.  Ber- 
trand et  Botte,  secrétaire  de  la  ville.  Et  scelées  du  sceau  de  la  dite 
ville.  » 

Cette  importante  délibération  fut  enregistrée  à  Paris,  en  parle- 
ment, le  13  août  1668,  en  môme  temps  que  les  lettres  patentes  don- 
nées à  Saint-Germain-en-Laye  au  mois  de  juillet  précédent,  «  pour 
le  restablissement  de  la  manufacture  des  tapisseries  en  ville  d'Au- 
busson en  la  province  de  la  Marche  ».  La  fabrique  recevait  par 
privilège  le  titre  de  Manufacture  royale. 

L'article  l"des  statuts  de  1665  stipulait  que  les  officiers  et  consuls 
de  la  ville  feraient  nommer  quatre  jurés-gardes  «  dans  une  assem- 
blée générale  de  la  dite  ville  qui  se  tiendra  de  trois  ans  en  trois  ans 

(1)  Jacques  Bertrand  était  protestant.  Il  fit  al)juration,  le  24  octobre 
(Gdo,  dan%  Téglisc  des  P.  Récollets  d*Âubusson,  en  présence  du  marquis  de 
Sainl-Germain,  gouverneur  de  la  Haute  el  Basse-Marche. 


52  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LIMODSIR. 

à  cet  effet  ».  Ces  assemblées  se  composaient,  on  vient  de  le  voir,  des 
marchands,  maîtres,  ouvriers  tapissiers  de  la  ville,  faubourgs, 
hameaux  voisins  et  bourg  de  La  Cour.  —  Mais  les  anciennes  libertés 
locales  disparaissent  une  à  une,  à  mesure  qu'on  avance  dans  le  xvn' 
siècle.  Un  arrêt  publié  en  1677  fit  défense  aux  villes  et  communau- 
tés de  s'assembler  pour  prendre  des  délibérations  sans  permission 
du  roi.  Il  leur  fut  même  défendu  d'envoyer  des  députés  au  roi  et  au 
conseil  sans  en  avoir  préalablement  déclaré  le  sujet  à  l'intendant  de 
la  généralité  et  obtenu  son  autorisation. 

Les  lettres  patentes  du  i8  mai  1732  concernant  la  manufacture 
d'Aubusson  enlèvent  aux  ouvriers  le  droit  de  participer  à  l'élection 
des  jurés-visiteurs.  Cette  nomination  est  laissée  aux  marchands  et 
maîtres  fabricants  assemblés  devant  le  juge  de  police  de  la  ville.  Les 
inspecteurs  des  manufactures  furent  institués  pour  toute  la  France 
en  février  1745.  Dès  lors,  M.  Michel  de  Châteaufavier,  pourvu  de 
cet  office  pour  Aubusson  et  Felletin,  fut  chargé,  seul,  de  convoquer 
et  de  présider  les  assemblées  de  la  corporation  des  tapissiers. 

11  août  1688.  —  Assemblée  concernant  le  dépôt  des  sels. 

«  Aujourd'huy  H*  aoust  1685,  en  l'assemblée  publique  convo- 
quée au  son  de  la  cloche  en  l'auditoire  royal  de  cette  ville  d'Aubus- 
son, par  devant  nous,  François  Laboreys,  s'  de  La  Pigue,  con- 
seiller du  roy,  président  chasielain  de  cette  ville,  a  comparu 
maistre  Michel  Bellat,  consul  pour  la  présente  année,  qui  a  exposé 
que  à  la  requeste  de  M"  Jean  Fauconnet,  adjudicataire  géné- 
rai des  Gabelles  de  France,  il  a  été  sommé  de  faire  convoquer  les 
habitans  de  cette  ville  pour  nommer  un  d'entre  eux  entre  les  mains 
duquel  la  clef  du  dépost  qui  a  esté  esiably  soit  déposée,  au  terme 
de  Tarticle  4  du  litre  IV  de  l'ordonnance  de  1680  rendue  pour 
l'effet  des  gabelles,  requérant  que  la  dite  assemblée  ait  à  nommer 
tel  habitant  qu'il  avisera  bon  eslre; 

»  Les  habitans  prcsens  à  la  dite  assemblée  ont  eslu  maistre  Pierre 
Prugnier,  médecin  de'cette  ville,  entre  les  mains  de  qui  on  juge 
une  des  clefs  dudit  dépost  devoir  estre  remise  comme  estant  sa 
maison  contigue  audit  dépost.  Sur  quoy,  ouy  le  procureur  du  Roy, 
nous  avons  fait  acte  pour  servir  et  valoir  ce  que  de  raison  et  avons 
signé  avec  le  dit  procureur  du  roy  conseiller  et  présent  à  la  dite 
assemblée. 

Signé  :  Laboreys,  président  chasielain  ;  Ruben,  procureur  du  roy  ; 
M.  Bellat,  consul;  Prugnier,  Terradon,  J.  Bellin,  J.  Mage,  Mathey- 
RON,  Landriesfve,  Garreau,  Prugnier,  A.  Depl\igne,  J.  Dussel,  Fran- 
çois Vallenet,  j.  Bessette,  Le  Rousseau,  Dumonteil,  Moustier, 
Coulloudon,  Vignon,  Robichon. 


I.RS    ASSKMBLÈKS    HRS    HABITANTS    d'aUBUSSON.  53 

30  septembre  1732.  —  Sept  notables  habitants  du  faubourg  de  la 
Terrade  obtiennent  pour  eux  et  pour  leurs  familles  le  droit  de 
sépulture  dans  la  chapelle  de  la  Terrade. 

«  Le  trenle  septembre  1732,  clans  la  maison  de  ville,  les  consuls 
et  les  plus  notables  habitants  de  la  ville  d'Aubusson  étant  assem- 
blés au  son  de  la  cloclie,  à  la  manière  accoutumée,  pour  délibérer 
des  affaires  communes  de  la  dite  ville,  par  devant  nous,  Gabriel 
Laboreys  de  la  Pigue,  président  cbâtelain,  lieutenant  général  de 
police,  subdelégué  pour  Me»"  l'intendant  de  la  généralité  de  Moulins, 
se  sont  présentés  en  la  dite  assemblée  :  vénérable  maistre  Henry 
Taraveau,  prêtre,  chanoine  de  Notre  Dame  du  Mont  de  celle  ville, 
maislres  François  Picon,  Jacques  Corneille,  François  Assolanl, 
Jacques  Cartier,  Léonard  Civo  et  Michel  Charierre,  tous  marchands 
habitants  de  cette  ville,  lesquels  nous  ont  exposé  et  à  ladite  assem- 
blée qu'ayant  fait  bastir  et  construire  une  chapelle  publique  au 
quartier  de  la  Terrade  en  cette  dite  ville...  ils  avaient  demandé  à 
M?'  révéque  de  Limoges  la  permission  de  mestre  dans  la  dite  cha- 
pelle, à  leurs  frais,  chacun  un  tombeau...  laquelle  permission  leur 
auroit  été  accordée  ainsi  qu'il  paroit  par  l'ordonnance  du  dit  seigneur 
évéque  en  datte  du  onze  novembre  dernier,  signé  Benjamin  (de 
ri.sle-du-Gast),  évéque  de  Limoges,  et  plus  bas,  Davu),  secrétaire, 
laquelle  ils  ont  présentement  exhibée,  nous  requérant  et  lesdils 
consuls  et  habitans  de  vouloir  en  conséquence  leur  accorder  le  dit 
droit  de  sépulture. 

»>  Sur  quoy,  nous  ayant  entendu  et  reçu  Tadvis  des  dits  consuls 
et  habitans  assemblés,  après  qu*ils  en  ont  eu  délibéré  entre  eux  et 
que  d'un  commun  accord  ils  ont  consenti  d'accorder  aux  dits  expo- 
sant le  dit  droit  de  sépulture  dans  la  dite  chapelle,  oùy  aussi  et 
consentant  maître  Jacques-Philippe  Dessarlaud,  procureur  d'office... 
avons  accordé  du  consentement  cy-dessus  aux  dits  exposants  et  à 
chacun  d'eux  le  dit  droit  de  sépulture...  et  nous  sommes  soubsignés 
avecle  dit  procureur  d'office,  les  dils  consuls  et  habitans,  les  expo- 
sants et  noire  greffier  de  ville.  » 

Suivent  les  signatures.  De  La  Faye,  greftier  et  secrétaire  de 
rhoslel  de  ville  d'Aubusson. 

Et  plus  bas  :  Expédié  au  dit  seigneur  évéque. 

1788.  —  La  halle  aux  grains  s'élant  écroulée,  une  assemblée  de 
ville  se  réunit  par  ordre  de  Tintendant  de  Moulins,  M.  Foulon  de 
Douét  pour  délibérer  au  sujet  de  son  rétablissement. 


T.   XXXIX. 


54  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Les  communes  les  plus  importantes  de  la  Haute-Marche  étaient, 
par  ordre  d'ancienneté,  celles  d'Aubusson,  Chénérailles,  Ahun, 
Felletin  etGuéret.  On  trouve,  à  côté,  plusieurs  communautés  d'ha- 
bitants ayant  consulat  et  dotées,  dès  le  xiii*  siècle,  de  chartes  de 
franchises.  Un  grand  nombre  de  bourgs  prenaient  le  nom  de  ville, 
et,  sans  posséder  une  charte  d'affranchissement,  se  régissaient 
librement  par  des  consuls  électifs  et  un  prévôt-vigier  nommé  par  le 
seigneur.  De  simples  villages  avaient  des  consuls  et  les  héritages  y 
étaient  tenus  franchement  du  seigneur  laïque  ou  ecclésiastique. 
Quelques  bourgades  se  rattachaient  à  des  villes  de  commune  :  c'est 
ainsi  que  Chavannat  et  Saint-Martial-le-Mont  dépendaient  de  la 
franchise  d'Ahun.  Il  existait  enfin  dans  notre  région  des  associa- 
tions de  nature  particulière,  connues  sous  la  dénomination  de 
bailies,  qui  s'étendaient  non  pas  à  une  ville  seule,  mais  à  plusieurs 
villages  voisins. 

Gioux,  aux  sources  de  la  Creuse,  était,  en  1473,  une  bailie  dont 
le  chapitre  de  Moutier-Rauseille  percevait  les  émoluments.  Dans 
un  aveu  et  dénombrement  en  date  du  31  décembre  1478,  fourni  à 
Pierre  de  Bourbon,  comte  de  Clermont  et  de  la  Marche,  Jean  de 
Sainte-Feyre  est  qualifié  seigneur  du  dit  lieu  et  des  bailies  de 
Sainte-Feyre  et  de  Saint-Sulpice-le-Guérétois.  Le  14  août  1S45, 
François  de  Sainte-Feyre,  écuyer,  seigneur  de  Sainte-Feyre,  déclare 
tenir  du  comte  de  la  Marche,  comme  bayle  féal,  les  baihes  de 
Sainte-Feyre  et  de  Saint-Sulpice-le-Guérétois  (1).  La  mieux  connue 
de  ces  associations  rurales  était  celle  des  bailies  de  Masvoudier, 
composée  de  plusieurs  villages  des  paroisses  de  Vallières,  Banise  et 
Saint-Michel-de-Vaisse. 

Un  aveu  fait  au  roi,  en  1681,  par  les  consuls  des  bailies  du  Mas- 
voudier, vise  un  acte  des  notaires  Boffinet  et  de  La  Combe,  non 
daté,  mais  qui  doit  avoir  été  rédigé  aux  environs  de  l'année  1578, 
car  nous  savons  qu'à  cette  époque  Anthoine  Boffinet  et  Loys  de  La 
Combe  étaient  notaires  royaux  à  Aubusson.  Dans  cet  acte,  les  con- 
suls des  bailies  de  Masvoudier  hante  et  basse  déclarent  que  «  de 
tout  temps  et  anlienneté,  eux  ou  leurs  prédécesseurs  sont  pro- 
priétaires et  possesseurs  des  dites  bailhes,  franchement  et  en  fran- 
che condition,  en  général  et  en  parliculier,  suivant  l'affranchisse- 
ment à  eux  accordé  par  Monsieur  Jacques  de  Bourbon,  Roy  de 
Naples,  comte  de  la  Marche,  en  datte  du  vingl-cinquiesme  janvier 
mil  trois  cens  soixante-deux,  ratliflîé  par  dame  Eléonord  de  Bour- 
bon, sa  fille,  aussy  comtesse  de  la  Marche,  le  cinquiesme  mars  mil 
quatre  cent  ». 

(1)  Archioes  delaCreusûy  Série  E.  Famille  de  Sainte-Feyre. 


L8S  ASSEMBLÉES  DES  HABlTA^r^S  D*AUBUSSON.  55 

Remarquons  tout  d'abord  que  ces  dates  ne  concordent  pas  avec 
les  noms  des  concessionnaires  de  la  charte  d'affranchissement.  Jac- 
ques II  de  Bourbon,  qui  eut  le  titre  de  roi  de  Hongrie,  de  Jérusalem 
et  de  Sicile,  fut  comte  de  la  Marche  de  1397  à  1436,  et  sa  fille 
Eléonore  ne  put  confirmer  l'affranchissement  en  l'année  1400, 
puisque  postérieurement  à  son  mariage  seulement  (27  juillet  1424), 
elle  fut  instituée  par  son  père  comtesse  de  la  Marche,  conjointe- 
ment avec  son  époux,  Bernard  d'Àrmagnac.  Nous  sommes  là  en 
présence  d'une  de  ces  erreurs  de  copiste  assez  fréquentes  dans  les 
actes  anciens.  Quoi  qu'il  en  soit,  comme  la  bailie  de  Masvoudier  dépen- 
dait d'Aubusson  au  point  de  vue  judiciaire  (1),  il  intervint  un  juge- 
ment de  la  châtellenie  d'Aubusson,  en  date  du  15  septembre  1650, 
signé  Carreau,  greffier,  portant  confirmation  des  prérogatives  con- 
tenues dans  l'acte  reçu  par  les  notaires  Bofflnet  et  de  La  Combe, 
vers  la  fin  du  siècle  précédent. 

Ce  n'est  pas  sans  motif  que  l'on  a  signalé  Tavidité  des  fermiers 
généraux  de  l'ancien  régime.  En  1679,  ils  voulurent  induement 
percevoir  le  droit  de  petit  sceau  dont  la  province  de  la  Marche 
était  exempte.  Il  réclamaient,  en  outre,  le  renouvellement  du  ter- 
rier du  domaine  du  roi,  dans  le  but,  dit  le  président  Chorllon, 
d'augmenter  la  vente  du  timbre.  Les  habitants  du  Bourbonnais  et 
de  la  Marche  réclamèrent,  mais  l'intendant  fut  favorable  aux  pré- 
tentions des  fermiers.  M.  Imberl  de  Bouville  était  alors  à  la  tête  de  la 
Généralité  de  Moulins.  Il  se  rendit  à  Aubusson  et  obtint  des  con- 
suls de  cette  ville  la  déclaration  du  24  juin  1679  qui  restreignait 
leurs  libertés  municipales.  Dans  cet  acte,  les  consuls  ont  le  courage 
de  protester  et  de  dire  qu'ils  font  cette  déclaration  «  pour  satisfaire 
à  l'ordonnance  du  seigneur  l'intendant  ». 

M.  de  Bouville  avait  donné  commission  à  Jean  Foucher,  notaire 
royal,  de  «  passer  et  recevoir  les  déclarations  de  tous  les  particu- 
liers, possesseurs  des  biens  tenus  et  mouvans  du  Roy,  nobles, 
roturiers  ou  allodiaux  ».  Ce  fut  cet  agent  qui  reçut  l'aveu  et  décla- 
ration qui  suivent. 

1681, 15  mars.  —  Aveu  et  déclaration  faits  au  roi  par  les 
consuls  des  baillies  du  Masvoudier. 

«  Aujourd'huy,  quinziesme  mars  mil  six  cens  quatre-vingt-un, 
au  village  de  Masvoudier,  parroisse  de  Valière,  par  devant  nous 
Jehan  Foucher,  nottaire  royal,  estably  pour  la  confection  du  papier 

(4)  Le  7  janvier  1606,  M*  Seiglière  est  qualifié  c  receveur  du  domaine 
du  Roy,  et  chAtellenyes  d'Aubusson,  Felletin  et  Masvoudier  », 


66  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   RT   DISTORIQUR   DU   LIMOUSIN. 

terrier  du  Roy  de  la  province  de  la  Marche,  se  sont  prcsantez  en 
leurs  personnes:  Damien  le  Grand,  masson,  du  village  de  Bru- 
jaud,  Gabriel  le  Fanre  (1),  laboureur,  habitant  du  village  de  la 
Goux,  paroisse  de  Vallièrc,  Michel  de  Martin,  laboureur,  du  village 
des  Conchas,  et  Annet  Clément,  masson,  laboureur,  du  village 
des  Gourcellcs,  parroisse  de  Saint-Michel  de  Vaisse,  consuls  des 
baillées  de  Masvoudier  haulte  et  basse Les  dites  baillies  con- 
sistant en  neuf  villages  et  territoire  d'iceux,  siluez  dans  les  par- 
roisses  de  Vallière,  le  bourg  de  Saint-Michel  de  Vaisse,  Banize, 
qui  sont  :  ledit  village  de  Masvoudier,  le  Fraisse,  Lascoux,  le  Bru- 
jaud,  parroisse  de  Vallière,  le  bourg  de  Saint-Michel  de  Vaisse, 
les  villages  de  Courcelles,  les  Conchas,  la  Villotte,  de  la  dite  par- 
roisse de  Saint-Michel  et  le  village  de  la  Vallade,  paroisse  de 
Banize.  Lesquelles  diltes  ballies  se  joignent  et  confrontent  : 
d'orient  aux  communaux  et  clîamps  froids  des  villages  de  Marniot 
et  le  Vert,  de  midy  aux  héritages  et  domaines  du  bourg  de  Val- 
lière, d'occident  au  village  de  Paigniact,  du  septentrion  au  village 
de  Vergnias,  paroisse  de  Saint-Sulpicc.  Et  que  pour  raison  d'icel- 
les  ils  sont  annuellement  et  solidairement  tenus  et  payent  au  Roy, 
en  tous  droiz  de  directe  seigneurie,  droits  de  lois  et  vantes,  à  rai- 
son de  vingt  deniers  pour  livre,  quarante-neuf  livres  de  taille  fran- 
che, payables  :  dix-neuf  livres  à  Notre-Dame  de  Mars  et  trente 
livres  à  Nostre-Dame  d'Aoust,  six  sols  pour  le  droit  de  fournage  et 
six  sols  pour  le  droit  de  vergues.  Desquelles  quarante-neuf  livres 
il  en  est  payé  par  les  habitants  des  villages  de  la  hautte  ballie,  qui 
sont  :  le  Masvoudier,  le  Fraisse,  Lacoux  et  le  Brujaud,  conjointe- 
ment avec  les  conienantiers  des  dits  villages,  dix-neuf  livres  douze 
sols,  sans  neantmoins  aucun  préjudice  à  la  solidité  de  la  dite  taille 
franche,  droit  de  fournage  et  vergues,  et  les  trente  livres  restantes 
sont  payées  par  les  habitans  et  conienantiers  de  la  basse  baillie  ; 
sans,  comme  dit  est,  préjudice  à  la  solidité  de  la  dilte  taille  franche, 
outre  les  redevances  et  menues  rentes  que  chacun  des  particuliers 
et  habitans  des  dits  villages  peuvent  devoir,  la  déclaration  desquels 
sera  faite  par  un  chacun  des  dits  habitans,  séparément  et  distincte- 
ment par  chaque  village  despendans  desdites  baillies.  Et  outre  ce 
que  dessus,  doivent  encore  le  droit  de  dixmc  et  lerrage  (2)  qui  se 


(i)  Il  csl  vraisemblable  que  M.  Amédée  Le  Faurc,  député  de  la  2*  cir- 
conscription d'Aubusson,  décédé  le  Î3  novembre  1881,  dont  le  buste  en 
bronze  orne  une  des  places  publiques  de  la  petite  ville  de  Vallière,  esl 
sorti  de  celte  famille. 

{t,  Le  droit  de  terrage  ou  de  semence  était  dû  pour  les  terres  ense* 
tnencécsdans  les  commiinau;;. 


LES   ASSEMBLÉES    DfrS   HABITANTS   d'aI'BUSSO?!.  57 

prend  el  se  paye,  suivant  le  dit  tillre  d'affranchissement  cl  sen- 
tence donnée  en  conséquence,  susdite  et  susdattée,  sur  les  bleds 
seigle  de  Saint-Michel  seulement  (1)  :  lequel  droit  de  dixme  et  ter- 
rage  est  que  qui,  dans  les  dites  baillies  sème  comble,  paye  ras,  sui- 
vant la  juste  réduction  et  cousturae  de  payer  ledit  droit  de  dixme  et 
terrage,  qui  sème  trois  boisseaux  de  Saint-Michel,  en  paye  au  Roy 
deux  boisseaux.  —  Les  dits  Legrand,  le  Faure,  Michel  de  Martin, 
Annel  Clément,  consuls  des  dites  baillies  ont  déclarez  ne  scavoir 
signer  de  ce  requis;  en  présence  de  maislre  Claude  UHardy,  huis- 
sier, el  Pierre  Duris,  praticien,  de  presant  au  dit  lieu,  qui  ont 
signé.  Signé  :  Foucher.  » 

{Archives  de  la  Crème,  série  E.  Terrier  de  la  vicomte  d*Aubusson). 

Par  contrat  du  14  juin  1686,  Louis  XIV  délaissa  au  maréchal 
François  d'Aubusson  de  La  Feuillade  la  vicomte  d'Aubusson,  la 
baylie  de  Masvoudier  et  six  autres  châlellenies  situées  en  Marche 
et  en  Forez,  en  échange  de  la  terre  et  seigneurie  deSaint-Cyr,  près 
Versailles.  L'évaluation  du  revenu  de  ces  terres  fut  faite  par  la 
chambre  des  comptes,  le  i6  octobre  1687.  Nous  y  relevons  le  docu- 
ment suivant  : 

«  Procès-verbal  d'évaluation,  —  I  bis,  Masvoudier. 

»  Est  à  notler  que  nous  ayant  été  administré  les  baux  de  la  bay- 
lie de  Masvoudier  suffisamment  pour  l'évaluer  en  total,  l'évaluation 
en  a  été  faite  sur  iceux,  pour  en  jouir  neanlmoins  par  le  sieur  ma- 
reschal  de  La  Feuillade,  suivant  le  nouveau  terrier  du  dit  Masvou- 
dier qui  est  à  la  fin  de  celuy  de  Fellelin  mis  au  greffe  de  notre 
commission.  La  haute  et  basse  baylie  de  Masvoudier  consistant  en 
taille  franche,  droits  de  pascage,  vergues,  fournages  et  redevance 
de  neuf  poules,  vingt-huit  gélines  et  soixante-dix  septicrs  trois 
boisseaux,  coupe  d'avoine,  mentionnés  au  dit  terrier,  a  été  évaluée 
h  la  somme  de  cinq  cens  quatre-vingt-cinq  livres  pour  chacune 
année,  par  notre  jugement  du  16  octobre  i687. 

»  Somme  tolale  de  la  recopie  du  revenu  annuel  de  la  baylie  de 
Masvoudier,  585  livres. 

»  Laquelle  somme,  au  denier  trente,  monte  en  principal  à  celle 
de  17.550  livres  pour  laquelle  la  dite  baylie  de  Masvoudier  sera 
donnée  au  sieur  mareschal  de  La  Feuillade  sur  et  en  déduction  des 
1!,000  livres  de  revenu  à  luy  données  par  le  contrat  d'échange  ». 

[Archives  nationales,  registre  P,  1854). 

(I)  Les  blés  ilils  (le  mars  en  cloienl  cxcmpls. 


58  SOGIÉTt  ARCHéOLOGlQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

On  aura  remarqué  iqu'en  1681,  malgré  leur  pompeuse  dénomina- 
tion de  consuls,  les  représentants  de  la  bailie  de  Masvoudier  ne 
savaient  pas  signer.  Les  bailes,  en  effet,  connus  en  Limousin  dès 
le  commencement  du  xiii'  siècle  (1),  tenaient  le  rang  le  plus  mo- 
deste dans  Torganisation  féodale.  Quelquefois,  il  est  vrai,  le  bayle 
féal,  tel  que  celui  de  Sainte-Feyre  et  de  Saint-Sulpice-le-Guérétois, 
était  un  grand  seigneur,  ou  bien  le  prévôt  d'un  chapitre,  comme  à 
Gioux  ;  mais  la  plupart  des  bailes  étaient  de  simples  paysans,  à  la 
fois  collecteurs  et  chefs  de  hameaux. 

Les  privilèges  de  la  communauté  de  Masvoudier  étaient  ceux  des 
communes  les  plus  favorisées.  Les  habitants  vivaient  sur  un  sol  de 
franchise,  ne  payant  au  châtelain  titré  qu'une  rente  franche,  sans 
aucun  mélange  de  la  directe  serve  et  mortaillable  condition.  Dans 
leur  aveu  au  roi,  dont  devait  bientôt  bénéficier  le  maréchal  de  La 
Feuillade  et  ses  successeurs,  il  n*est  pas  fait  mention  de  la  taille 
aux  quatre  cas,  de  la  corvée,  des  droits  d'arban  et  de  vinade,  non 
plus  que  de  celui  de  prélation  et  autres  droits  surannés.  Les  censi- 
taires de  la  bailie  acquittaient  une  partie  de  leur  dette  en  nature  et 
le  droit  de  lods  et  ventes  auquel  ils  étaient  soumis  n'était  pas  un 
revenu  immuable  mais  casuel.  Ils  avaient  enfin  la  faculté  d'élire 
des  consuls  chargés  de  répartir  équitablement  et  de  lever  Tirnpôt 
seigneurial,  de  défendre  les  intérêts  communs,  sans  être  soumis  à 
la  surveillance  d'un  prévôt.  Les  affaires  de  simple  police  étaient  de 
leur  ressort  et  les  autres  étaient  portées  devant  le  juge  châtelain 
d'Aubusson. 

Cyprien  Pérathor. 

(I)  Et  in  eadem  bordaria  nullum  fus  retinui;  nec  baylioas  aliquls  po- 
test  de  jure  aliquo  interrogare  in  eadem  bordaria»  (FoDdation  faite  par 
Pierre  Bernard,  seigneur  de  Châlucet,  d'un  anniversaire  au  monastère  de 
Solignac,  en  nnars  1933.  Ap.  M.  L.  Guibert,  Châlucet.) 


AYME  RI  G  GUERRUT 


ARCHEVÊQUE  DE   LYON 


Aymeric,  archidiacre  de  Paris  et  archevêque  de  Lyon,  a  occupé 
ce  siège  archiépiscopal  de  1^36  à  1245.  Les  savants  qui  se  sont 
occupés  de  lui  ne  sont  d'accord  ni  sur  le  lieu  de  sa  naissance,  ni  sur 
son  nom  de  famille.  Nous  avons  lu,  dans  divers  livres,  les  diverses 
opinions  des  savants,  et  nous  devons  les  rapporter  ici  (1),  avant 
crélablir  la  vérité  sur  ce  double  sujet. 

1"*   LIEU    DE  NAISSANCE   D'AYMERIC. 

La  plupart  des  savants  font  naître  Aymeric  au  Mans  ou  dans  le 
Maine  :  tels  sont  Le  Corvaisier,  dans  son  Histoire  des  évéques  du 
Mans  (2);  du  Boulay,  dans  son  Histoire  de  l'Université  de  Paris  (3)  ; 
Jean  de  La  Mure,  dans  son  Histoire  ecclésiastique  du  diocèse  de 
Lyon  (4). 

Un  autre  savant,  Jacques  Scvcrt,  dans  sa  Chronologie  historique 
des  archevêques  de  Lyon,  le  fait  naître  en  Auvergne,  et  prétend 
qu'il  était  de  la  famille  de  la  Tour  d'Auvergne,  et  neveu  de  Tarche- 
vtVjue  Robert  (5) . 


(0  In  diversis  divcrsa  legi,  ci  deboo  singuloruni  opinioncs  ponere 
(S.  HiERON.,  lib.  IV,  Comment,  in  C.  23  Math,), 

(2)  Noire  province  donna  à  l'Eglise  un  des  plus  illustres  prélats  de  son 
siècle,  (//wtoire  des  évéques  du  Mans,  <C48,  in-4o,  p.  314.) 

(3)  Aymericus  de  Ripis  Cenomanensis.( Wtstorta  Unioersltatls  parisien- 
m,  1666,  l.  m,  p.  674.) 

(4)  Aymeric  des  Rives,...  natif  du  Mans.  {Histoire  ecclésiastique  dttdlo- 
cèse  de  Lyon,  par  Jban-Maiue  de  La  Mure,  Lyon  1674,  p.  174.) 

(5)  Eral  aulem  Aemericus  ex  cognomine  et  familia  de  Turri,  oriundus 
in  Arvernia;  nepos  pra>(atoriim  Roborli  Archiiïaminis,  et  Odonis  Burgun- 
«liurn  ducis.  (Chronologla  hlstorlca  successlonis  hierarchlcœ  illustrisslmo- 
rum  arcAiantistitum  Lugdunensis  archieplscopatds,  etc.,  8°  édit.  Lugduni, 
Simon  Rigaud,  1688^  p.  «88,  n»  xcii.) 


60  SOCIÉTÉ    AnCHÉOLOGIQUfc.    KT    IIISTORIQLI':    DU    LIMOUSIN. 

Le  savant  Baluze,  dans  son  ouvrage  manuscrit  sur  les  Limousim 
illmtres^  daté  de  l'an  165*2,  a  consacre  un  article  à  Aymeric  (fol.  32, 
33)  qu'il  appelle  Aymericus  à  Ripis. 

Il  dit  à  propos  de  sa  patrie  :  «  On  comprend  par  son  épilaplin 
qu'il  élait  du  Limousin.  H  faut,  ajoute-t-il,  corriger  Sévert,  dans 
son  ouvrage  sur  les  archnvj^cfues  de  Lyon,  où  il  a  dit  qu'il  élail 
de  la  maison  des  seigneurs  de  la  Tour  en  Auvergne  ;  car  s'il  eût  cU* 
de  cette  famille,  Justel,  dans  l'Histoire  de  cette  maison,  ne  l'eût 
pas  omis,  ou  du  moins  l'aurait  nommé  (1).  » 

Or,  dans  Histoire  généalofjique  de  la  Maison  (VAureryne,  publiée 
en  1708,  plus  d'un  domi-siècle  plus  tard,  oubliant  ce  qu'il  avait  dit 
dans  son  ouvrage  des  Hommes  illustres  du  Limousin,  il  adopte  l'opi- 
nion qu'Aimeric  était  originaire  du  Maine  :  «  Je  trouve,  dit-il,  dans 
V Histoire  des  archevesques  de  Ujon,  composée  par  SeYert,qu'Aymery, 
archevesque  de  Lyon,  fonda  un  anniversaire  pour  Robert  d'Auver- 
gne, archevesque  de  Lyon,  son  oncle.  Et  par  conséquent  Aymery, 
qui  étoit  sorti  d'une  maison  du  Maine  dont  nows  ne  savons  pas  bien 
le  noniy  étoit  fils  d'une "scpur  <{{"  l'archevesque  Robert.  Il  se  démit 
de  son  archevcsché  entre  les  mains  du  pape  Innocent  IV,  en  l'année 
MCCXLV,  et  se  retira  en  l'ahhave  de  Gran  Imont  en  Limousin,  où 
il  mourut  en  l'année  MCGLVII  (2).  » 

Les  Bénédictins  du  Gallia  Christiana,  après  avoir  rapporté  l'opi- 
nion des  savanls  qui  font  naître  AymtM-ic  soit  au  Mans,  soit  en 
Auvergne,  ajoutent  celte  note  :  «  Un  de  nos  confrères  a  lu  ce  qui 
suit  dans  un  manuscrit  de  la  fondation  du  couvent  des  Frères- 
Prêcheurs  de  Limoges  :  «  Aymeric  Guerrat- (lisez  Guerrui),  origi- 
naire de  la  ville  de  Saint-Junien,  autrefois  archevêque  de  Lyon, 
mourul,  vers  l'an  1257,  â  Grandmont  (3).  » 

En  présence  de  ces  divers  documents,  qui  font  naître  Aymerir 
soit  au  Mans,  soit  en  Auvergne,  soit  en  Limousin,  les  Bénédiclins 


C)  Lcmovicenrcm  fuisse  intclligilur  ex  cpilapliio.  Corrigcndiis  Sovcr- 
lius  in  archiepis.  Liig;(iun.  (cnp.  9-i,  S  1).  "bi  «'ii'  eum  orinnduni  è  donio 
Dominorum  de  Turre  in  Arveriiia;  nam  ccrU>  si  hic  ex  eâ  l'uissel,  JuslciUis 
cumin  Historia  illiiis  ilomûs  non  |)raMcrmisissel,  el  illiim  saltcm  nominâs- 
sel.  (Bali'ZK,  Cataloguée  cirorum  lllustrlum  LemoolcenHum  quantum  od 
EcclesLam,  1052,  fol,  3'i,  33.  —  Bibliolhèquo  nalionalc,  Armoires  de  Baluzf. 
n«  548.) 

(2j  IlistOLi  e  (jL'/u'dlotjiquc  fie    lu  Mic'son  d' Aucenjne,  1708,  l,   I,  p.  7J 
(3)  Umis  rx  nuslris  ha'r.  Ic-il  iii  !iis.  cod.  ruDdalioins    fralrum  pia'dicjil. 
l.fMiiovic.    «  Ainiorinis   (iiMMral,    de   villa  S.    Juniani  oriunrius,  qiiondam 
arcliiepis('0|His   î.n^'diin.   ciroa  annum    1257,  obiil    apud  (irandimontem. 
[Gallia  Ckri>t.,  l.  IV,  col.  I4l).  » 


AYMERIC   GUKRRUT.  61 

n  osent  pas  se  prononcer  et  ils  tirent  celle  conclusion  :  "  La  patrie 
d'Aymeric  est  incertaine.  »  —  Ejiis  patria  incerta  (i). 

Or  la  patrie  d'Aymeric  n'est  pas  incertaine  du  tout;  nous  allons 
montrer  tout  à  l'heure,  par  des  documents  du  xmi*  siècle  et  par  une 
série  d'autres  témoignages,  qu'Airaeric  est  né  à  Saint-Junien  en 
Limousin.  Mais  avant  de  l'établir,  une  autre  question  se  présente  : 
Quel  élait  le  nom  d'Aymeric  ? 

^  NOM   DE   FAMILLE   D'AYMERIG. 

Le  Corvaisier,  dans  son  Histoire  des  évêques  du  Mans  (1648),  dit 
que  ce  prélat,  dans  le  Cartulaire  des  contrats  et  des  anniversaires 
du  Chapitre,  est  appelé  Ayraeric  Guehcrri  ou  Guerri,  et  que  dans 
la  France  chrestienne  de  Robert,  il  est  appelé  quelquefois  Aymé- 
ricm  de  Guerra  on  de  Serra,  quelquefois  de  Ripis  (p.  314).  Celte 
citation  manque  d'exactitude. 

En  effet,  Claude  Robert,  dans  son  Gallia  ChrUtiana  (1626),  se 
borne  à  dire  que,  dans  les  monuments  du  monastère  de  Grand- 
mont,  Aymeric  est  dit  être  surnommé  à  Ripis  (2)  :  c'est  ainsi  que 
Robert  a  traduit  le  nom  iVArips,  que  porte  Aymeric  dans  son 
épitaphe. 

Les  autres  savants  qui  ont  parlé  d'Aymerîc  ont  adopté  cette  inter- 
prétation du  moi  Afips  que  donne  Claude  Robert  :  Baluze,  dans  son 
ouvrage  manuscrit  sur  les  Ecclésiastiques  illustres  du  Limousin 
(1652),  appelle  l'archevêque  de  Lyon  Aimericus  à  Ripis  (3);  les 
frères  Sainte-Marthe,  dans  leur  Ga///fl  Christiana  (1656),  le  nomment 
Aymericus  de  Ripis  (4)  ;  le  chanoine  Collin,  dans  ses  Limomim  illus- 
tres (1660),  l'appelle  iEmericus  Guerrut,  sive  de  Ripis  (5); 
lia  Boulay,  dans  son  Histoire  de  l'Université  de  Paris  {\Q6Q) y  \e 
nomme  Aymericus  de  Ripis  (t.  III,  p.  674);  Jean  de  La  Mure,  dans 
son  Histoire  ecclésiastique  du  diocèse  de  Lyon  (1671),  lui  donne 
le  nom  d' Aymeric  des  Rives  (p.  174). 

L'abbé  Nadaud,  dans  ses  Mémoires  manuscrits  (1760),  l'appelle 
aussi  Aymeric  des  Rives  fp.  59).  D'autres  écrivains  l'ont  appelé 
simplement  Aymeric  Arips;  tiîlssonl  :  Pardonx  de  La  Garde  (1585) 
dans  son  Spéculum  Grandimontense,  ms.   du  Séminaire,  p.  116; 


'.)  GaUla  Christ.,  t.  IV,  col.  141. 

(i;  GalUa  Christiana,  Archiepis.  Liigdiiri.,  n"  83. 

(.t)  Uibliotlu>({uo  nationale.  Armoires  <lc  Baliizc,  n"  iiS,  toi.  3},  33. 

ri)  Gallia  Christiana,  archiepitcop.  Galliœ,  p.  3?3, 

(5)   [jetnooici  multiplici  eruditione  iliustrei*,  p.  68. 


69  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

Levesque  (1662),  dans  ses  Annales  de  l'Ordre  de  Grandmont;  le 
P.  Bonaventare  (1685),  dans  ses  Annales  du  LimoiAsin  (t.  III, 
p.  833);  Tabbé  Labiche,  dans  ses  Vies  des  Saints  du  diocèse  de 
Limoges  (t.  III,  p.  213). 

Les  Mémoires  des  Frères-Prêcheurs  de  Limoges  rappellent 
Aymeric  Gerrut  (4). 

Le  véritable  nom  de  famille  d'Aymeric  n'est  ni  Guerry,  ni 
Guerral,  mais  bien  Guerrut,  comme  nous  allons  le  démontrer. 

Mais  pourquoi  dans  son  épitaphe  est-il  surnommé  Arips?  Que 
signifie  ce  nom,  qu'on  a  traduit  par  à  RipiSy  de  Ripis^  ou  des 
Rives?  C'est  ce  que  nous  expliquerons  à  la  fin  de  ce  mémoire. 

3*'  AYMERIC   GUERRUT,    NÉ   A  SAINT-JUNIEN. 

Aymeric,  dans  son  épitaphe,  est  appelé  la  gloire  du  Limousin 
(gloria  Lemovicensis).Vo}iv(\\xo\  cela?  Est-ce  parce  qu'il  y  a  sa 
sépulture?  Non  sans  doute,  mais  parce  que  le  Limousin  l'a  vu  naî- 
tre. On  n'est  pas  la  gloire  d'un  pays  parce  qu'on  y  a  son  tombeau. 

Mais  quelle  est  la  localité  du  Limousin  qui  a  vu  naître  Aymeric  ? 

«  Les  Mémoires  de  la  fondation  des  Frères-Prêcheurs  de  Li- 
moges, dit  le  P.  Bonaventure,  le  nomment  Aymery  Gerrut,  natif  de 
la  ville  de  Saint-Junien  (2).  » 

Rappelons  la  note  des  Bénédictins  du  Gallia  ChriMiana  que 
nous  avons  déjà  citée  :  «  Un  de  nos  confrères  a  lu  ce  qui  suit  dans 
»  le  manuscrit  de  la  fondation  des  Frères-Prêcheurs  de  Limoges: 
»  Aymeric  Guerrat  (lisez  :  Guerrut),  originaire  de  la  ville  de  Saint- 
»  Junien,  jadis  archevêque  de  Lyon,  mourut  à  Grandmont  vers  l'an 
»  1257  (3).  » 

Un  autre  témoignage  du  xiu''  siècle  vient  à  l'appui  des  documents 
qui  précèdent  :  «  Il  est  sûr,  dit  l'abbé  Legros,  que  Pierre  Gerrul, 
chanoine  du  chapitre  de  Saint-Junien,  y  fonda  un  anniversaire  en 
1296  pour  feu  son  seigneur  archevêque  de  Lyon  (4).  » 

La  famille  Guerrut  est  connue  à  Saint-Junien  dès  le  xn*  siècle. 
Une  de  ces  chartes  qu'on  appelle  parta  per  scriptum  (8)  porte  un 

(1)  P.  Bonaventure,  t.  111,  p.  533.  —  GallLa  Christ,,  t.  IV,  col,  I4l. 

(2)  P.  Bonaventure,  Annales  du  Limousirv,  1685,  t.  111,  p.  533. 

(3)  Gallia  Chrvstiana^  t.  IV,  col.  141.  —  Voir  le  texte  latin  cilé  plus 
haut. 

(4)  L*abbé  Lkgros,  Dictionnaire  ms.  des  Hommes  illustres  du  Limousin, 
p.  404.  (Manuscrits  du  Grand  Sc^minaire). 

(5)  Les  parties  coupaient  la  charte  dans  la  ligne  des  Icltrcs  majuscules, 
et  en  cas  de  conlcstalion  on  ajustait  les  deux  morceaux. 


AYMBRIC   OUBRRUT.  63 

contrat  de  vente  entre  Pierre  du  Puy  et  Aimeric  Guerrut.  Elle  est 
du  temps  de  J.,  doyen  de  Limoges  (c'est-à-dire  Jean  de  Veyrac, 
qui  était  en  même  temps  prévôt  de  Saint-Junien),  entre  1188  et 
H97.  Par  ce  contrat,  Pierre  Dupuy  vend  à  Aimeric  Guerrut  la 
moitié  de  la  dîme  qu*il  possédait  dans  la  paroisse  de  Saint-Brice. 
Cette  charte  étant  inédite,  nous  croyons  devoir  la  publier  ici  : 

'0Î9  '89jno^  -f  'nezBîuoj^  '£ 
•J9S0>j  9p  xexniy  Ï9  'snnooBip  'j9tîS9jo^  snoiraiy  ï9  'oioug 
•g9p  •|i9dB0  'psjSBqg  .PFjnBr)  :^nns  89:^89^  i9j  8nfnjj 

'raBHIl09p  OUBq  •:idd  "pS  80^09X98 

)njj9n{)  ooiraiy  q«  to j  n9p  •  j  îinqcq  j9  *:^i889Duoo  uiBpu9p 
-îssod  ninnï9dj9d  ui  8in8  8nqijip9J9q  \9  i9  uBuiiD9p  ouBq 
19  *'0î9  '8ofreiY  9p  'd  Ïïin8  inb  sniipp9J  '|os  ax  rano  'inj 
-J9nr)ooiJ9raiy  iioua'gBiqoojjBd  uiji5q9qBq  uiBnb  9uiT09p 
ra9îB}9rp9ui  iip9pu9A  loj  n9p  •  j  pb  8nqiauio  %is  mnjo^ 

PETRUS  DEU  POJ.  A.  GUERRUT 

Notum  sit  omnibus  q^  P.  deu  Foi  vendidit  medietatem 
décime  quam  habebat  in  parrochia  S.  Bricii  Aimerico  Guer- 
rut, cum  XV  sol.  redditus  qui  sunt  P.  de  Maijos,  etc.,  et 
hanc  decimam  ei  et  heredibus  suis  in  perpetuum  possi- 
dendam  concessit,  et  abuit  P.  deu  Poi  ab  Aimico  Guerrut 
sexcentos  sol.  ppt.  hanc  decimam. 

Hujus  rei  testes  sunt  Gaufrid'  Ghastai,  capell.  de  S. 
Bricio,  et  Aimicus  Forestier,  diaconus,  et  Aimarde  Roser. 
J,  Montazen,  J.  Foures,  etc,  (1). 

Dans  la  chronique  de  Maleu,  chanoine  de  Saint-Junien,  mort  en 
i322,  —  chronique  publiée  par  nous  en  1847,  —  nous  trouvons  un 
Jean  Guerrut,  chanoine  de  Saint-Junien  et  procureur  du  chapitre 
en  1262(2).  L'abbé  Nadaud  a  pensé  que  ce  Jean  Guerrut  était  neveu 
d'Aymeric  Guerrut,  archevêque  de  Lyon  (3). 

(!)  Abbé  Lbgros,  Mémoires  sur  les  Chapitres  du  Limousin.  —  Sainl- 
Junien,  p.  397.  (Manuscrits  du  Grand  Séminaire.) 

(2)  Chronicon  Comodoliacense,  p.  86,  86,  88. 

(3J  Nadaoo,  Mémoires  mss.,  p.  59.  —  Celte  page  a  élé  déchirée  depuis 
que  noos  lavons  transcrite. 


G1  SOCIÉTÉ  ARCIlÉOLOr.lQUK  KT  UISTOniQlK  DU  LIMOUSIN. 

La  Taroille  des  Gucrrul  avait  de  nombreux  domaines  aux  environs 
de  Sainl-Junien,  comme  le  prouve  une  inscriplion  datée  de  Tan  1406, 
qu^on  lisait  dans  Téglise  de  Saint-Junien,  et  qui  était  relative  à  une 
fondation  du  cardinal  de  Cramaud.  Cette  inscription  élait  placée  à 
l'entrée  du  chœur,  du  côté  gauche,  sur  une  lame  de  cuivre.  En  voici 
le  commencement  : 

«  Reverendissimiis  in  Xpisto  pater,  Dominus  Symon  de  Cramaudo, 
loco  quodam  parochia^  de  Bianaco,  Lemovicensis  diaecesis,  palriar- 
rha  Alexandrinus,  dodit  huic  ecclesiae  bona  quae  Guerruti  habebanl 
vel  habuerunt  in  territorio  Sancti  Juniani  et  aliquîbus  locis  aliis 
vicinis,  etc.  (i).  » 

Le  chanoine  CoIIin,  de  Saint-Junien,  dans  son  livre  des  Ltfnotmtis 
illustres,  publié  en  1660,  a  consacré  un  article  à  Aymeric  Guerrut, 
archevêque  de  Lyon,  né  à  Saint-Junien  (2). 

Après  tous  ces  témoignages,  la  naissance  dAymeric  Guerrut  à 
Saint-Junien  nous  paraît  hors  de  conteste. 

4°   NOTICE   BIOGRAPHIQUE. 

Aymeric  Guerrut  était  né  vers  la  fin  du  xii*  siècle.  D'après  le 
savant  abbé  Nadaud,  il  fui  d'abord  chanoine  de  Saint-Junien,  où 
son  neveu,  Jean  Guerrut,  était  aussi  chanoine  en  1262  (3). 

Dans  son  Histoire  des  évéques  du  Mans,  Le  Gorvaisier  rapporte 
qu'Aymeric  «  fut  premièrement  chanoine  de  l'église  du  Mans  par  la 
résignation  de  son  oncle  Guillaume  Gueherri,  archidiacre  de  Sablé; 
ayant  achevé  son  cours  de  philosophie  et  de  théologie,  il  fut  fait  doc- 
teur à  la  Faculté  do  Paris,  puis  archidiacre  et  maître  d'école  de  son 
Eglise;  et  enfin,  par  ses  mérites,  fut  élevé  à  la  dignité  d'archevêque 
et  primat  de  Lyon  (4).  » 


(I)  Abbé  Lkgros,  Mémoires  sur  leri  chapitres  du  Limousin,  p.  387, 
diaprés  Nadaud  (Manuscrits  du  (^rand  Séminaire). 

Eslicnnol,  dans  ses  Fragmenta  d'histoire  d* Aquitaine ^  t.  il,  p.  28  (Biblio- 
thèque nationale),  a  commis  quelques  fauics  dans  la  lecture  de  cette  ins- 
criplion. 

("î)  iEmericus  Guerr<il,  sivo  de  Ripis,  à  S.  Jun.  —  Cujus  eliani  nominis 
floruerunl  Guerruti  canonici  San-Junianenses, circa  annum  1320.  {Lemootn 
illustres,  16B0,  p.  (ÎK.) 

(3)  a  Aimeric  des  Rives,  à  Ftipls,  ou  Guerrut,  selon  les  Mémoires  de  la 
fondation  des  Fn^res-Prôcheurs  de  Limoges,  fut  orijçinairo  de  la  ville  de  Snim- 
Junien  en  Limousin,  où  il  fut  chanoine,  et  où  son  iievcu,  Jean  Guerrut,  lui 
aussi  chanoine  vn  120i.  »  (Nadaud,  Mémoires  msn.^  p.  69.) 

(i;  Histoire  de^  ê cirques  du  Mans^  1018,  p    314. 


AYMERIG  GUERRUT.  G5 

Du  Boulay,  dans  son  Histoire  de  l'Université  de  Paris,  le  cite 
parmi  les  hommes  qui  onl illustré  ce  corps  célèbre  :  «  Vir  excellenlis 
ingenii,  juri  canonico  praesertim  animum  applicuit  »  (1). 

D'après  Alberic,  moine  des  Trois-Fonlaines,  c'est  en  1236,  après 
la  mort  de  Raoul,  archevêque  de  Lyon,  que  maître  Aymeric,  archi- 
diacre de  Paris,  fui  élu  archevêque  de  Lyon  (2). 

C'est  sous  son  épiscopat,  en  1239,  que  les  croisés  se  réunirent  à 
Lyon  pour  une  expédition  à  la  Terre-Sainte.  Venus  de  diverses  pro- 
vinces de  France  et  des  provinces  voisines,  ils  délibérèrent  sur  la 
route  à  prendre  pour  aller  en  Orient.  L'expédition  n'eut  pas  lieu 
par  suite  de  la  défense  que  lit  Innocent  IV.  Le  nonce  du  pape,  qui 
avait  précédemment  slimulé  le  zèle  des  chevaliers  pour  la  croisade, 
les  dissuada  fortement  de  partir.  D'après  Mathieu  Paris,  les  cheva- 
liers qui  s'étaient  réunis  à  Lyon,  qui  avaient  quitté  leurs  familles  et 
leurs  châteaux  et  aliéné  une  partie  de  leurs  biens  pour  se  procurer 
de  l'argent,  furent  très  mécontents  de  cette  défense  du  pape  (3). 

En  1245,  Aymeric  assista  au  concile  jrénéral  qui  se  tint  à  Lyon 
(XIII*  œcuménique),  et  qui  fut  présidé  par  le  pape  Innocent  IV, 
autrefois  chanoine  de  cette  ville.  C'est  dans  ce  concile  que  Frédé- 
ric II,  empereur  d'Allemagne,  fut  excommunié. 

Peu  de  temps  après  la  clôture  du  concile,  Aymeric  résigna  son 
archevêché  entre  les  mains  du  pape  Innocent  IV,  qui  par  un  bref 
dont  l'original  était  conservé  dans  les  archives  de  Grandmont,  lui 
réserva  une  pen.sion  de  cent  ducats  et  lui  accorda  la  permission  de 
se  retirer  dans  ce  monastère  (4). 

On  trouve  dans  les  Instrumenta  du  Gallia  Christiana,  à  la  suite 
des  archevêques  de  Lyon,  une  bulle  du  pape  Innocent  IV,  en  faveur 
d'Aymeric,  qui  après  s'être  démis  de  son  évêché,  s'était  retiré  à 
Grandmont.  Cette  bulle  est  datée  de  l'an  1246,  le  5  des  calendes 
d'août  (28  juillet)  : 

«  Innocent,  évoque,  serviteur  des  serviteurs  de  Dieu,  à  ses  fils 
bien  aimés  le  doyen  de  Limoges  et  le  prieur  de  Sainte-Radegonde 
de  Poitiers,  salut  et  bénédiction  apostolique. 

»  La  vraie  humilité  d'Aymeric,  ci-devant  archevêque  de  Lyon, 
s'est  manifestée  à  nos  yeux  et  aux  yeux  des  autres  en  ce  que  il  a 


(1)  Historia  unloeraitatls  Parisiensis^  1666,  l.  III,  p.  671. 

(2)  Radulphus,  Lugdunen.  archirpisc.  eu  m  magna  dcvolione  morilur.  — 
Magisler  Heymericas,  Parisieosis  archidiaconus,  in  archiepm.  Lu(;dunens. 
cligîlur.(Ribliothèque  nationale,  ms.  lai.  4896A,  fol.  358  v%  fol.  359.) 

(3)  Mathieu  Paris,  HUtor.  Major,  ad.  ann.  1239,  ôJit.  1644,  p.  497, 
(4}  Nadaud,  Mémoires  manuscrits,  p.  59. 


66  S0C1#.TÉ  ARCHéOLOGIQUC  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIir. 

résigné  librement  entre  nos  mains  la  charge  et  les  honneurs  du 
pontificat,  et  que,  de  riche,  il  est  devenu  pauvre,  son  désir  ayant 
toujours  été  pour  Facquisition  de  la  patrie  éternelle.  Donc,  Nous, 
qui  par  la  charge  de  la  dignité  apostolique  sommes  tenus  de  con- 
soler par  le  secours  d'une  provision  opportune  les  âmes  qui 
s'humilient  à  cause  de  Dieu,  Nous  avons  cru  devoir  statuer  que,  sur 
les  revenus  de  Tarchevéché  de  Lyon,  et  principalement  sur  les 
péages  de  la  Saône  et  de  la  Granestière  (?),  cinquante  livres  tour- 
nois soient  payées  par  les  mains  de  celui  qui  possédera  ces  biens; 
Nous  voulons  que  cette  somme  soit  payée  chaque  année  par  la  main 
des  Frères  de  la  Milice  du  Temple,  à  Paris,  en  la  fôte  de  saint 
Michel,  sous  les  peines  portées  contre  ceux  qui  ne  se  conforme- 
raient pas  à  cette  ordonnance  (1).  » 

Aymeric,  retiré  au  monastère  de  Grandmont,  y  mena  une  vie 
ornée  de  piété  et  de  doctrine,  s'appliquant  continuellement  à  Tétude. 
L'historien  des  évéques  du  Mans  se  trompe  quand  il  dit  que,  après 
la  mort  de  Durand,  évéque  de  Limoges,  le  peuple  de  ce  diocèse 
enleva  Aymeric  de  son  cloître  pour  l'élever  à  la  chaire  épisco- 
pale  (2)  ;  cet  écrivain  a  confondu  Aymeric  Guerrut  avec  Aymeric  de 
La  Serre,  qui  succéda  à  Tévêque  Durand  et  mourut  en  effet  en  4272. 

Aymeric  Guerrut  est  appelé  par  Mathieu  Paris  :  Vir  sine  querela 
et  pacificus  (3),  «  homme  sans  reproche  et  ami  de  la  paix  ». 

Pardoux  de  La  Garde,  dans  son  Spéculum  Grandimontense^  a  fait 
son  portrait  en  quelques  mots.  Il  dit  de  lui  :  «  Homme  ami  de  la 
pauvreté,  docteur  en  droit  canonique,  grand  ami  des  savants  et 
savant  lui-môme  ».  —  Vir  amator  paupertatis,  juris  canonid  doctor, 
studiosus  studiosorumque  amator  prœclarus  fuit  (4). 

Il  passa  onze  années  à  Grandmont,  dans  Tesprit  et  les  exercices 
de  cet  ordre,  toutefois  sans  en  prendre  Thabit.  C'est  à  tort  que  Vau- 
tour des  Moines  empruntés  a  reproché  aux  religieux  de  cet  ordre  de 
se  vanter  d'avoir  eu  Aymeric  pour  leur  confrère,  puisqu'ils  ne  l'ont 
jamais  regardé  que  comme  un  de  leurs  amis  et  de  leurs  bienfai- 
teurs. Il  lit  plusieurs  dons  à  ce  monastère  ainsi  qu'aux  Frères-Prô- 
cheurs  et  aux  Frères-Mineurs  de  Limoges,  auxquels  il  donna  sa 
Bible  avec  la  glose,  les  histoires  de  Pierre  Comestor,  l'Ordinaire  des 
évoques  et  cinquante  livres  d'argent  (8).  Il  mourut  en  odeur  de  sain- 


({)  GoUlia  Chrlstiana^  t.  IV,  instrumenta,  col.  30. 

(3)  Le  CoRVAisiER,  Histoire  des  éoêques  du  Mana^  1648,  p.  314. 

(3)  Ap.  Gallia  Christiana^  t.  IV,  col.  444. 

(4)  De  Antiquitate,  4585,  p.  ii6.  (Manoscrils  du  Séminaire). 

(5)  P.  BoNAVENTURK,  4685,  t.  III,  p.  593.  Nadaud,  Mémoires  mss.,  p. 


ATMER1C   GOERRUT.  G7 

teté,  en  1257  (1).  On  célébrait  son  anniversaire  après  le  dimanche 
de  la  Septaagésime. 

4''   TOMBEAU    d'aIMERIC  GUERKUT. 

Aymeric  fut  inhumé  à  Grandmont,  au  milieu  du  chœur  des  clercs, 
sous  une  dalle  de  cuivre  émaillé,  où  il  était  représenté  revêtu  de 
ses  ornements  pontificaux,  environné  de  pierreries  et  de  figures 
de  lions  (2).  Il  portait  pour  armes  de  gueules  à  la  croix  pattée  d'or. 
Voici  répitaphe  qu'on  grava  sur  son  tombeau. 

EPITAPHIUM. 

Dns  Aymericus  Arips  Archieps 
Cornes  Ludg.  ac  primas  Galliar. 

Laus  Cenomanensls  et  gloria  Lcmovicensis, 
Que  doctore  prius,  et  juste  judice  fulsit 
Inclita  Parisius,  et  que  pastore  refusit 
LugduDum  ;  patrise  decus,  et  arca  sophise; 
Largus,  famosus,  subtilis  et  ingeniosus, 
Hic  Aymericus  jacet,  ordinis  hujus  amicus. 
Et  quoniam  voluit  in  Grandimonte  locari. 
Fac,  Deùs,  illius  animam  super  aslra  levari. 

Amen. 
Sepultus  fuit  anno  Dni  M.  CC.  LVII  (3). 

Essayons  de  traduire  ces  vers  : 

«  Celui  qui  fut  Thonneur  du  Maine  et  la  gloire  du  Limousin, 
qui  jeta  de  l'éclat  sur  la  célèbre  ville  de  Paris,  d'abord  comme 
docteur,  ensuite  comme  juge  plein  d'équité,  —  qui  illustra  la  ville 
de  Lyon  comme  pasteur  suprême  ;  honneur  de  sa  patrie,  arche  de 

(I)  PardoQx  de  la  Garde  {loc,  cit,)  par  suite  d*une  mauvaise  lecture  de 
répitaphe  d' Aymeric,  place  sa  mort  en  1207. —  Levesque,  dans  ses  Annales 
Ordinis  Grand'montensls,  a  reproduit  cette  faute.  Le  P.  Bonaventure, 
t.  III,  p.  533,  parle  aussi  de  la  mort  d'Aymeric  en  1907,  et  le  fait  résigner 
son  archevêché  entre  les  mains  du  pape  Innocent  \U 

(î)  Sepultus  est  in  medio  chori  cjusdcm  ecclesise,  sub  lamina  incripta 
cminenli  cuprea.  (Pardoux  de  Là  Garde,  De  Antiquitate,  ms.,p.  H6). 

Gui  in  mcdio  choro  appositum  est  mausoleum,  cum  effigie  aurichalco 
exprcssa,  gemmis  et  leonibus,  hinc  inde  stipata,  necnon  infulatum  prœ- 
sulem  exhibente,  cum  iaminulis  et  aliis  curiosis.  (Levesque,  Annales  Or- 
dinis Grandlmoniensis), 

(3)  Paroooz  de  la  Garde  {loc,  cit.)  Levesque  [loc,  ciU)  P.  Bonaventure, 
t.  Itl,  p.  533.  —  Nadaud,  Mém.  ms.,  p.  59. 


C8  SOCIÉTÉ   AnCHROLOGIQUR   ET    HISTORIQUR   DO   LIMOUSIN. 

sapience;  généreux,  renommé,  subtil,  ingénieux,  ici-gît  Aymeric, 
l'ami  de  cet  ordre.  Et  puisqu'il  a  voulu  être  inhumé  à  Grandmont, 
faites,  ô  Dieu,  que  son  âme  soit  élevée  par-dessus  les  astres  du  ciel.  » 

Il  est  appelé  «  l'honneur  du  Maine  »,  parce  qu'il  avait  débuté 
d'une  manière  honorable  dans  la  carrière  ecclésiastique  comme 
chanoine  du  Mans  ;  mais  il  est  appelé  «  la  gloire  du  Limousin  » 
parce  que  cette  province  l'a  vu  naître.  Les  Bénédictins  du  Gallia 
prétendent  que  Baluze  interprétait  ce  vers  en  ce  sens  que  le  Maine 
était  la  patrie  d'Aymeric  et  que  le  Limousin  avait  sa  sépulture  (1); 
mais  celte  opinion  n'est  pas  soutenable  :  comme  nous  l'avons  dit 
déjà,  on  n'est  pas  la  gloire  d'un  pays  parce  qu'on  y  a  son  tombeau. 

Les  lames  de  cuivre  doré  et  émaillé  qui  couvraient  le  corps 
d'Aymeric  et  les  pierreries  dont  la  plaque  était  ornée  furent 
enlevées  par  une  bande  de  pillards  hngucnols  que  commandait 
Gaspard  Foucault,  seigneur  de  Sainl-Germain-Beaupré  (2). 

Levesque,  qui  rapporte  le  fait,  ne  dit  pas  en  quelle  année;  ce  doit 
être  en  1587,  car  cette  même  année,  Gaspard  Foucault,  chef  des 
Huguenots  en  Limousin,  prit  et  rançonna  la  ville  de  Château- 
ponsat  (3)  et  livra  au  pillage  le  monastère  de  FArlige,  et  ses  soldats 
couvrirent  leurs  chevaux  des  ornements  sacrés  (4). 

En  1639  on  ouvrit  le  tombeau  d'Aymeric,  et  on  le  trouva  revêtu 
de  ses  ornements  pontificaux  (5). 


5**   SIGNIFICATION   DU   NOM    D'ARIPS. 

Que  signifie  ce  nom  A'Arips  qui  est  donné  à  Aymeric  dans  son 
épitaphe. 

Ce  nom  avait  fort  embarras.sé  Baluze,  qui  dit  l'avoir  vu  (ranscrit 
de  la  sorte  de  la  main  de  Duchesnc,  d'après  les  monuments  de 
Grandmont  (6). 

Parmi  les  écrivains  qui  ont  parlé  d'Aymeric,  les  uns,  tels  que 
Pardoux  de  la  Garde,  dans  son  livre  Fur  les  Antiquités  de  Grand- 


(1)  Gallia  Chriatiana,  l.  IV,  col.  Ui,  I  i2. 

(â)  Quse  ullimo  sseculo  sublala  sunt  à  San  Germano.  (Levrsque,  Annales 
Ordlnls  Grandimontensis).  —  Uonaventure,  t.  III,  p.  533. 

(3)  M.  dkBeaufoht,  Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  VOuest^ 
4860-I8B1. 

(4)    P.  BONAVENTURE,  l.  111,  p.  438. 

(5)  Nadaod,  Mémoires  manuscrits,  p.  59. 

(6)  C'est  ce  que  disent  les  Bénédictins  du  Gallia  ChrisHana  (l.  IV,  *  iî)  ; 
nous  ne  savons  dans  quel  ouvrage  de  Baluze  ils  ont  puisé  ce  renseigne- 
ment. 


AYMF.RIC   GUEBRUT  69 

moHt{p.  116),  Lcvesqae,  dans  ses  Annales  de  l'Ordre  de  Grandmont, 
le  P.  Boaaveûlare  (l.  III,  p.  533),  ont  enregistré  simplement  ce 
nom.d'Arips,  sans  songer  à  le  traduire  autrement. 

Claude  Robert,  dans  sa  Gaule  chrétienne  (1626),  est  le  premier 
qui  ait  traduit  ce  motpai*A  i2tpt$;ila  étésuivi  par  Baluze,  dans  son 
ouvrage  manuscrit  sur  les  Ecclésiastiques  illustres  du  Limousin 
(1652). 

D'autres  savants  ont  traduit  ce  mot  par  de  Ripis;  tels  sont  :  Le 
Corvaisier  (1648),  les  Frères  Sainte-Marthe  (1656),  le  chanoine 
CoUin  (1660,  Du  Boulay  (1666). 

Enfin  ce  mot  A  Ripis  ou  de  Ripis  a  élé  traduit  en  français  par 
Jean  de  La  Mure  (1671)  et  l'abbé  Nadaud  (1670),  qui  appellent  Tar- 
chevôque  de  Lyon  Aimeric  des  Rives. 

Ce  root  Arips  n'a  aucune  signification,  et  ne  peut  être,  comme  Ta 
pensé  Claude  Robert,  qu'un  abrégé  de  A  Ripis. 

Or  ce  mot  A  Ripis  est  la  traduction  en  latin  d'un  nom  de  lieu  en 
langue  vulgaire,  ajouté  au  nom  d'Aimeric  Guerrut. 

On  commençait,  au  xni®  siècle,  à  ajouter  au  nom  patronymique 
un  surnom  tiré  du  nom  d'un  fief  ou  d'un  domaine  qu'on  possédait; 
c'était  un  moyen  de  distinguer  les  divers  membres  d'une  môme 
famille. 

Nous  voyons,  au  siècle  suivant,  que  Pierre  de  Soubrebost, 
chanoine  de  la  cathédrale  de  Limoges,  est  appelé  autrement  du 
Monteil  : 

Hoc  jacet  in  loco  dominus  P.  de  Superbosco 
Nomine  vel  alio  dictas  de  Montilio  (I). 

De  nos  jours,  comme  aux  deux  derniers  siècles,  on  voit  des  fa- 
milles bourgeoises  ajouter  à  leur  nom  patronymique  le  nom  d'un 
domaine  ou  d'une  propriété  rurale  ;  cela  sert  à  distinguer  les  divers 
membres  de  la  famille,  cela  donne  un  air  de  noblesse;  et  souvent 
le  nom  du  domaine,  précédé  de  la  particule,  fait  oublier  le  nom 
roturier  que  la  famille  portait  autrefois. 

Or  quel  est  le  nom  en  langue  vulgaire  qui  a  élé  traduit  par 
A  Ripis?  Est-ce  des  Rives,  des  Rippes  ou  des  Ribières? 

On  ne  trouve  pas  en  Limousin  de  localités  portant  le  nom  de 
Rives  ou  de  Rippes,  mais  on  y  trouve  des  localités  portant  le  nom 
de  La  Ribière  ou  Les  Ribières. 

Nous  voyons,  dans  le  Nobiliaire  limousin^  au  xni"  siècle,  un  da- 
moiseau nommé  Hugues  des  Ribières  {de  Ripperiis)  dont  le  père  se 

(11  Cathédrale  de  Limoges,  1883,  p.  175. 

T.  xxxtx.  5 


70  SOCIÉTÉ.   ARCH^.OLOOIQrS  HT   HISTORIQDB  DU  LIMOUSIN. 

nommait  Pierre  Balangis,  paroisse  de  Dournazat,  et  dont  la  mère, 
Gilberte  de  Cozet,  demanda  à  être  inhumée  dans  le  cimetière  de 
Saint-Junien  (1). 

Ce  fief  ou  ce  domaine  des  Ribières  a  donné  son  nom  à  des  fa- 
milles de  Saint-Junien.  Parmi  les  consuls  de  cette  ville,  au  xvi*  siè- 
cle, nous  trouvons  Vaury  des  Ribières,  consul  en  1540,  et  Valère 
des  Ribières,  consul  en  1547  (2). 

Le  surnom  d'Arips  {à  Ripis)  étail  donc  la  traduction  latine  du 
surnom  des  Ribières,  tiré  d'un  fief  ou  d'un  domaine  que  possédait 
Aymeric  Guerrut,  et  qui  servait  à  le  distinguer  des  autres  membres 
de  sa  famille. 

L'abbé  Arbellot. 

(I)  Par  son  teslamenl  dalé  du  l""  février  1281  (vieux  style).  {Nobiliaire 
du  LimotMin  de  Tabbô  Nadaud,  édition  Roy-Pierrefite»  t.  1,  p.  430.) 
Chronique  de  Maleu,  1847,  p.  245. 


ESSAI  DE  CLASSIFICATION 


DBS 


ANCIENNES  PORCELAINES  DE  LIMOGES 

SAINT-YRIEIX,    SOLIGNAG,    ETC. 

CONSBRYKKS 

AU  MUSÉE  NATIONAL  ADRIEN  DUBOUGHÉ 

(Suite)  (1). 


Ainsi  que  le  lecteur  va  le  voir,  le  caractère  de  leur  style, 
les  particularités  de  leur  fabrication  et  de  leur  décoralioQ  ne  nous 
seront  que  d'an  très  faible  secours  pour  confirmer  les  présomptions 
d'attribution  à  la  Manufacture  Royale  de  certaines  pièces  qui 
figurent  dans  les  collections  du  Musée.  Comme  je  l'ai  dit  plus  haut, 
les  documents  qui  pourraient  nous  guider  dans  nos  recherches 
sont  encore  rares  :  les  pièces  des  archives  sont  importantes,  mais 
trop  souvent  elles  ne  suffisent  pas  pour  trancher  les  questions 
douteuses. 

Il  est  fâcheux  que  Tinventaire  établi  au  moment  où  la  Manufac- 
ture Royale  fut  mise  en  vente  ait  été  très  sommairement  rédigé  ;  tel 
qu'il  est,  il  ne  nous  fournit,  il  faut  bien  en  convenir,  que  des  indi- 
cations assez  vagues.  La  nature  des  objets  y  est  bien  spécifiée,  mais 
aucune  particularité  de  forme  ou  d'ornementation  n'est  indiquée, 
en  sorte  que  TidentiGcation  des  pièces  désignées  dans  le  document 
en  question  avec  les  pièces  qui  se  sont  conservées  jusqu'à  nos 
jours,  cette  fdentification,  dis-je,  reste  hypothétique  et  il  est  néces- 
saire de  chercher  à  l'appuyer  sur  certaines  circonstances  de 
fabrication,  sur  certaines  particularités  de  forme,  d'ornementation 
ou  de  décor,  etc.,  qu'il  faudra  parfois  mettre  quelque  subtilité  à 
chercher.  Me  livrant  surtout  ici  à  un  travail  de  bonne  foi,  je  devais 
faire  cette  remarque  ;  en  présence  des  attributions  qui  lui  seront 
proposées,  le  lecteur  aura  donc  à  apprécier. 

(4)  V.  BuU.  Soc.  arch.  et  Lim.,  t.  XXXVII,  p.  454  et  ss.,  et  t.  XXXVIII, 
p.  36  et  S8. 


li  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE   DU  LIMOUSISC. 

Jusqu'ici,  nous  ne  trouvons  au  Musée  National  Adrien  Dubouché 
que  deux  pièces  pouvant,  en  toute  sûreté  pour  l*une,  et  avec  une 
grande  présomplion  pour  l'autre,  être  attribuées  à  la  fabrique  de 
Limoges  pendant  la  période  où  celte  fabrique  constituait  une  an- 
nexe de  la  Manufacture  Royale  de  Sèvres,  annexe  qui  me  paraît, 
quant  à  moi,  avoir  été  tout  à  fait  tenue  sous  la  dépendance  de  la 
direction  centrale  (1). 

Ces  deux  pièces,  décrites  sous  les  numéros  30  et  31,  sont  :  un  ca- 
chet portant  une  inscription  ne  pouvant  laisser  aucun  doute  sur  sa 
provenance  et  un  médaillon  de  Turgot  au  revers  duquel  nous  voyons 
une  fleur  de  lys  estampée  en  creux  au-dessous  du  motu  Limoges», 
cursivement  tracé  avec  le  manche  d'un  outil. 

Mais  la  première  de  ces  pièces  n'est  pas  très  importante  et  ne 
saurait  nous  renseigner  qu'au  seul  point  de  vue  de  la  qualité  des 
matières  employées  à  la  Fabrique  Royale,  sa  forme  étant  des  plus 
simples  et  son  ornementation  des  plus  élémentaires;  quant  à  la 
seconde  pièce,  on  doit  faire  sur  elle  des  observations  analogues; 
cependant  elle  nous  fournit,  toujours  sous  le  rapport  des  matières 
employées  et  de  la  fabrication,  un  point  de  comparaison  peut- 
être  plus  décisif  (2).  En  attendant  qu'il  ail  été  découvert  à  Sèvres, 
soit  au  Musée,  dans  les  réserves  ou  aux  archives  de  cet  établisse- 
ment, des  pièces  ou  des  documents  qui  puissent  porter  quelque  lu- 
mière sur  la  question  que  j'essaye  de  traiter  ici  —  et  l'on  peut  espérer 
que  de  telles  découvertes  seront  faites  plus  tard  —  en  attendant,  dis-je, 
qu'il  nous  vienne  de  là  bas  quelques  notions  de  nature  à  nous 

(4)  11  tmporle  toutefois  de  tenir  compte  de  la  silaation  créée  à  Tannexc 
de  Limoges  par  son  éloigncment  de  la  manufacture  mère  et  la  difficolté 
des  communicalious.  Celle  situation  a  pu  avoir  à  certains  moments  pour 
résultai  de  laisser  une  marge  très  large  au  directeur  à  Limoges,  qui  paraît 
parfois  en  avoir  abusé;  je  dis  parfois,  parce  quMl  est  probable  que  dans 
un  très  grand  nombre  de  cas,  notre  fabrique  devait  être  surveillée  par 
des  personnes  attachées  à  la  manufacture  de  Sèvres  qui  venaient  à  Limoges 
chargées  de  missions  spéciales. 

(2)  Il  convient  de  ne  pas  perdre  de  vue  cependant  qu*à  l'annexe  de 
Limoges,  il  fut  fait  emploi  de  pâles  diverses  par  leur  composition.  On  a  vu 
la  distinction  faite  au  moment  de  la  vente  entre  la  pâte  blanche  et  la 
pâte  jaune  ;  d'autre  part,  dans  une  facture  gravée,  M.  Leymarie  de  Laver- 
gne,  «  propriétaire  de  Claudebarre  (sic)  où  se  trouvent  les  plus  belles  car- 
rières de  porcelaine  du  Limousin  »,  ayant  des  magasins  à  Limoges,  Orléans 
et  Paris,  prévient  les  fabricants  a  qu'il  vend  des  terres  argileuses,  caillou- 
teuses, cailloux  bruts  et  piles,  pâte  dure  et  tendre  couverte  en  émail 
assortissanl.  » 

On  distinguait,  donc,  à  la  fin  du  xvmi°  siècle,  date  de  ce  document,  ttne 
pâle  tendre  de  porcelaine  naturelle  ou  kaolinique. 


ESSAI    DR  CLASSIPIGATION   DBS   ANCIENNES    PORCELAINES   DE  LIUOGES.         73 

éclairer,  nous  en  serons  réduits,  à  Limoges,  à  chercher  les  raisons 
d'aUribotion  à  la  Manufacture  Royale  des  biscuits  que  nous  possé- 
dons au  Musée,  surtout  dans  leur  comparaison  avec  le  cachet  de 
noire  fabrique  et  le  médaillon  de  Turgot. 

Ce  médaillon,  je  le  considère  comme  appartenant  bien  authen- 
tiquementà  la  période  qui  s'ouvre  en  1784;  je  n'ai  pour  ma  part 
aucun  doute  à  ce  sujet  et  cependant  il  faut  bien  convenir  que  cette 
fleur  de  lys,  qui  n'est  môme  pas  couronnée,  aurait  fort  bien  pu  être 
appliquée  sur  une  pièce  ne  provenant  pas  de  la  Manufacture  Royale. 
Tout  le  monde  sait  en  effet  que  si,  au  xv m'' siècle,  la  fleur  de  lys  avait 
souvent  un  caractère  en  quelque  sorte  officiel,  il  n'en  était  pas 
toujours  ei  forcément  ainsi.  Notre  fleur  de  lys  établit  bien  une  pré- 
somption en  faveur  de  la  thèse  que  je  soutiens,  mais  je  ne  fais 
aucune  difficulté  de  convenir  que  l'absolue  évidence  n'est  point 
faite  encore. 

Voici  la  description  du  cachet  et  celle  du  médaillon  : 

30".  Cachet  de  la  Manufacture  royale. 

Hauteur,  8  c.  ;  diamètre,  S  c.  1/S. 

Don  de  M.  François  Alluaud  (mars  1847). 

Cet  objet  a  la  forme  d'une  gerbe  comprise  ornementalement, 
dont  un  anneau  forme  la  ligature.  Elle  est,  sur  sa  surface  exté- 
rieure, divisée  en  quatorze  lobes  terminés,  en  haut  et  en  bas,  par  une 
section  de  cercle.  Le  cachet  est  couronné  par  une  sorte  de  chapeau 
en  champignon  également  lobé  et  ne  dépassant  pas  la  gerbe  exté- 
rieurement. Ce  chapeau  est  ovale,  tandis  que  le  cachet  est  rond,  et, 
comme  le  grand  diamètre  dudit  chapeau  et  celui  de  l'écusson  dont 
il  ya  être  question  sont  communs,  il  est  facile  de  diriger  le  sens  de 
Tempreinte. 

Cette  disposition  ingénieuse  rend  le  cachet  d'un  usage  commode 
et  permet  de  le  mettre  bien  en  main. 

Au  c^tre  du  sceau,  un  écusscm  ovale  armorié  de  France,  sur- 
monté d'une  couronne  royale;  deux  branches  de  laurier  avec  leurs 
fruits  se  croisent  à  la  base  entourant  l'écusson  ;  en  exergue,  l'ins- 
cription :  M.  N.  RE.  ROYAL.  DES.  (fleur  de  lys?)  P.  C.  L  d. 
UMOGES. 

La  pâte  du  biscuit  est  légèrement  bise,  la  pièce  est  bien  cuite, 
moins  cependant  que  dans  le  médaillon  de  Turgot  (n°  3i).  L'émail 
est  très  beau,  gras  et  profond,  le  blanc  est  très  sensiblement  plus 
pur  et  plus  éclatant  que  dans  les  porcelaines  à  la  marque  C.  D.  II 
semble  que  nos  produits  aient  gagné  en  qualité,  —  probablement 
depuis  la  réorganisation  opérée  sous  la  direction  de  Darcet. 

Cette  pièce,  la  seule  dont  l'authenticité  est  indiscutablement 


74  SOCIÉTÉ   ARCai^.OLOGlQUB   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

établie,  qui  n'est  pas  très  importante  au  point  de  vue  des  dimensions, 
de  la  forme,  etc.,  me  paraît  extrêmement  intéressante  :  étant  émail- 
lée,  elle  offre  quelques  éléments  sérieux  pour  l'identification  de 
certaines  autres  pièces  qui  figurent  au  Musée.  Le  cachet  de  la  Manu- 
facture Royale  confirme  l'opinion  exprimée  plus  haut,  que  la 
marque  C.  D.  n'a  pas  été  appliquée  après  que  la  fabrique  de 
Limoges  fut  passée  à  la  liste  civile  ;  car,  encore  une  fois,  les  carac- 
tères techniques  du  cachet  ne  sont  pas  absolument  les  mêmes  que 
ceux  que  Ton  remarque  dans  les  pièces  de  la  période  précédente.  Il 
est  infiniment  regrettable  queTormentation  du  cachet  de  la  Manu- 
facture soit  très  sommaire  et  qu'il  ne  porte  aucune  décoration  peinte. 

31**.  Médaillon  :  tête  de  profil,  cheveux  épars  et  bouclés,  à  Tocciput, 
on  voit  la  chevelure  descendre  pour  former  la  queue  en  bourse 
qui  n'est  pas  indiquée.  Au-dessous  de  la  tête,  un  fleuron  ;  en  exergue  : 

A.  R.    S.  TURGOT,  MINISTRE  d'EîAT,  CONTROLEUR  GÉNÉRAL  DES  FINANCES. 

Diamètre  :  13  c. 

Marque,  une  fleur  de  lys  exécutée  au  cachet;  au-dessous, 
Limoges,  exécuté  en  caractères  cursifs  avec  le  manche  de  Toutil. 

Don  de  M.  Barbou-Ley marie. 

Ce  médaillon  offre  la  reproduction  exacte  du  portrait  gravé  en 
1774  par  Le  Beau  d'après  l'original  peint  par  Troy  (voir  plus  haut 
page  12, 1**].  La  peinture  en  question  a  très  probablement  été  exécu- 
tée à  Limoges,  la  gravure  de  Le  Beau  est  mentionnée  dans  le  Manuel 
de  V amateur  d'estampes  de  Le  Blanc,  qui  lui  donne  le  format  in-4«. 

La  bibliothèque  de  Limoges  possède  la  gravure  de  Le  Beau;  dans 
sa  collection  de  portraits,  figure  aussi  une  planche  inachevée, 
signée  Jules  Porreau  1846,  représentant  Turgot  dans  son  cabinet 
de  travail  ;  la  tête  qui  a  été  légèrement  inclinée  pour  donner  au 
personnage  Tattilude  de  la  lecture,  est  la  reproduction  de  la  pein- 
ture de  Troy  (1). 

Un  buste  en  terre  cuite  de  Turgot  avait  été  exécuté  à  Limoges 
d'après  nature,  par  un  artiste  dont  le  nom  ne  m'est  pas  connu.  Ce 
buste  qui  appartenait  à  M.  Dumaneuf,  fut  reproduit  en  porcelaine 
par  un  céramiste  du  nom  de  Duchâteau  et  figura  à  l'exposition  des 

(1)  En  18H  un  arliste  qui,  m'ont  dit  quelques  contemporains,  exécuta 
des  portraits  à  Limoges,  lithographie,  sous  les  auspices  de  la  Société 
d'agriculture,  une  lithographie  bien  médiocre  d'après  le  grand  portrait  de 
Drouais  ;  il  dédia  aussi  cette  pièce  au  Conseil  Générai  de  la  Haute-Vienne 
et  au  Conseil  Municipal  de  Limoges.  En  Tan  Xil,  M.  François  Alluaud  avait 
fait  décider  par  la  Société  d'agriculture  le  principe  d'un  monument  à 
élever  à  Turgot.  Les  dépenses  évaluées  à  <5  OOO  fr.  devaient  être  cou- 
vertes par  une  souscription.  Aucune  suite  sérieuse  ne  fut  donnée  à  ce  projet. 


ESSAI   1>E  CLASSIFICATION   DBS  ANCIENNES  PORCELAINES   DE  LIUOGF.S.        75' 

produite  de  Findustrie  qui  eut  lieu  en  Tan  XII  (compte-rendu 
manuscrit  des  séances  de  la  Société  d'agriculture).  Ce  buste  de 
terre  cuite  aurait-il  été  Fœuvre  de  Troy  que  nous  avons  vu  fournir 
le  modèle  du  médaillon  commémoratif  décrit  page  12,  1\ 

On  a  \ii  que,  dans  le  curieux  mémoire  qu'il  remit  en  1781  à 
M.d'Angervillers,  Bachelier  conseille  rétablissement  à  Saint-Yrieix 
«  d'une  maison  pour  y  fabriquer  la  porcelaine  blanche  »  ;  il  n'est 
pas  improbable  que  ce  conseil,  venant  d'un  homme  aussi  autorisé  en 
l'espèce  que  Bachelier,  ait  été  pour  quelque  chose  dans  la  décision 
prise  trois  ans  plus  tard  d'acquérir  la  manufacture  de  Limoges. 

Il  semble,  d'après  le  langage  tenu  par  Bachelier,  que,  dans  sa 
pensée,  la  fonction  principale  de  la  fabrique  limousine  dût  être  la 
production  du  blanc  (1).  Les  biscuits  entraient  tout  naturellement 
dans  ce  programme,  et  j'ai  dit  plus  haut  quelles  étaient  les  raisons 
qui  permettaient  d'admettre  que  la  fabrication  des  biscuits  dut  être 
active  à  la  manufacture  de  Limoges. 

Il  convient  peut-être  de  rappeler  que  c'est  à  Bachelier  que  l'on 
doit  l'invention  du  biscuit  de  porcelaine  ;  il  paraît  donc  assez  natu- 
rel que,  dans  la  réorganisation  de  la  manufacture  de  Limoges, 
réorganisation  à  laquelle  Bachelier  fut  évidemment  appelé  à 
prendre  une  part  plus  ou  moins  directe,  il  paraît  donc  naturel, 
dis-je,  qu'une  large  part  ait  été  réservée  au  biscuit.  Le  passage  de 
son  mémoire  où  Bachelier  fait,  en  quelques  lignes,  l'histoire  du 
biscuit,  présente,  je  crois,  beaucoup  d'intérêt  au  point  de  vue  de 
cette  étude.  Voici  ce  passage  : 

«  Atelier  de  sculpture.  Dans  l'origine  de  la  manufacture,  la 
sculpture  n'avait,  ainsi  que  la  peinture,  d'autres  prétentions  que 
l'imitation  du  Japon  ;  jusqu'en  1749,  la  sculpture  était  luisante  et 
colorée.  L'impossibilité  d'approcher  des  figures  de  Saxe  par  l'éga- 
lité d'emploi  et  l'éplat  des  couleurs  allait  faire  renoncer  à  cette 
partie,  quand  le  sieur  Bachelier  proposa  d'essayer  la  sculpture  sans 
couverte,  c'est-à-dire  biscuit;  mais  il  n'y  avait  pas  d'exemple  de  ce 
genre,  aussi  fût-il  rejeté  comme  impraticable  et  ridicule.  Inutile- 
ment il  cita  le  marbre  statuaire  qui  n'est  ni  luisant  ni  coloré  et  qui 
cependant  a  des  charmes.  Ce  ne  fut  qu'en  1751,  que  le  ministre 
exigea  qu'on  en  fit  l'expérience.  Le  sieur  Bachelier  pensa  alors  que 
rien  ne  serait  plus  agréable  au  public,  et  de  plus  facile  exécution 
pour  l'espèce  d'ouvriers  qu'il  avait  alors,  que  de  traduire  en  por- 
celaine plusieurs  idées  pastorales  de  M.  Boucher.  Ce  genre  eut  le 
plus  grand  succès  jusqu'à  ce  que  M.  Falconnet,  chargé,  en  1787,  de 

(I)  «  Nous  ne  doutons  pas  qu^on  ne  puisse  y  peindre  un  genre  de  con- 
rant  avec  succès  o,  dit-il  cependant. 


76  SOCIKIÉ  AaCUtOLOGlQCB  ET  HISTORIQOK  DU  LIIIOUSIR. 

condaire  la  scolpture,  y  porta  on  genre  plus  noble,  d'un  goût  pins 
général,  et  moins  sujet  aux  révolutions  de  la  mode. 

0  En  1776,  le  sieur  Bachelier  reprit  l'inspection  et  suivit  le  genre 
de  M.  Falconnet,  en  ajoutant  plus  de  variétés  dans  les  modèles  qui, 
jusqu'alors  avaient  toujours  été  d'après  cet  artiste.  Alors  les  ama- 
teurs de  Bouchardon,  de  Pigal,  de  Salis  et  autres  hommes  célèbres, 
trouvèrent  à  satisfaire  leurs  goûts:  Tantique  contribua  même  à 
étendre  leurs  variétés,  sans  qu'aucun  de  ces  (1)  modèles  ait  occa- 
sionné de  dépenses. 

»  Si  depuis,  cette  partie  est  devenue  plus  dispendieuse,  c'est  que 
le  sieur  Parent  ordonnait  des  modèles  sur  toutes  ses  fantaisies, 
qu'il  faisait  exécuter  quelle  qu'en  fut  la  dépense.  » 

On  trouvera  aux  pièces  justificatives  la  nomenclature  des  moules 
qui  furent  vendus  en  même  temps  que  la  Manufacture  (2S  fructi- 
dor an  IV)  ;  on  remarquera  dans  cette  liste  une  suite  de  moules  de 
figures,  dont  chacun  est  désigné  malheureusement  trop  sommaire- 
ment; les  indications  quoique  bien  incomplètes  qui  nous  sont  don- 
nées dans  cette  pièce,  permettent  cependant  de  faire  certaines 
observations  qu'il  n'a  pas  paru  inutile  de  consigner  ici. 

Les  sujets  se  rapportent  à  deux  classes  :  l'ancien  genre,  suivant 
l'inspiration  de  Boucher,  estincomparablement  le  mieux  représenté; 
du  genre  nouveau  introduit  par  Falconnet,  on  ne  trouve  guère  que 
quatre  ou  cinq  spécimens.  Faut-il  inférer  de  ce  fait  que  la  manu- 
facture de  Sèvres  faisait  plus  spécialement  fabriquer  à  Limoges  les 
pièces  appartenant  à  l'ancien  genre,  démodé  alors?  peut-être, 
réservait-on  pour  le  genre  nouveau  les  artistes  plus  habiles  de  la 
manufacture  mère? 

Il  est  du  reste  bien  naturel  de  penser  qu'il  en  fut  ainsi  :  les  nou- 
veautés, pour  employer  l'expression  moderne,  constituaient  la  partie 
la  plus  intéressante  de  la  fabrication  de  la  Manufacture,  tout  au 
moins  pour  la  famille  royale  et  la  Cour,  conserver  à  Sèvres,  c'est-à- 
dire  à  la  portée  de  Versailles,  le  monopole  de  cette  production, 
c'était  à  la  fois  un  acte  de  convenance  et  d'habile  courtisanerie  ; 
les  récompenses  et  les  gratifications  allaient  évidemment  aux  tra- 
vaux extraordinaires  et  nouveaux,  présentant  de  l'originalité  et  aussi 
en  harmonie  avec  le  goût  régnant.  Il  aurait  fallu  que  la  direction 
n'eut  pas  eu  la  notion  de  ses  intérêts  pour  confier  à  une  succursale, 

(f)  Ne  conviendrail-il  pas  de  lire  a  ses  »;  alors  la  phrase  prendrait  uo 
sens  précis.  Bachelier  dirait  que  les  modèles  empruntés  à  Tanlique  ne  coû- 
taieut  riea,  les  dits  modèles  n'étant  pas  achetés  à  leurs  auteurs.  Encore 
aujourd'hui,  nos  maisons  de  bronze  vendent  (relativement  bon  marché  les 
sujets  qui  se  trouvent  «  dans  le  domaine  public  »,  par  exemple  les  réductions 
d*aprèa  Tantique  et  les  statues  de  l'époque  de  la  Renaissance,  etc. 


ESSAI    DB  CLâtSIFICATlON   DES   ANCIENNES   PORCCLAItlES  DE   LIMOGES.         77 

perdue  en  province.»  des  travaux  qui  d'ailleurs  pouvaient  sans  doute 
être  mieux  exécutés  à  Sèvres  même. 

D'après  les  titres  donnés  dans  la  pièce  en  question,  il  ne  semble 
pas  que  parmi  les  moules  désignés  il  y  en  ait  eu  aucun  d'après  un 
modèle  antique. 

Quoi  qu'il  en  ^oit,  Userait  imporlanl  d'établir  que,  parmi  les  pro- 
ductions portant  la  marque  de  Sèvres,  il  s'en  trouve  quelques-unes 
qui  ont  pu  être  fabriquées  à  Limoges,  mais  malheureusement,  pour 
une  pareille  recherche,  presque  tous  les  éléments  nous  manquent. 
Cependant,  dans  Tinléressanle  notice  sur  les  biscuits  de  porcelaine, 
publiée  par  H.  Gh.-E.  de  Ujfalvy  dans  la  Revue  des  arts  décoratif  s  y 
OD  remarque  des  indications  de  sujets  qui  pourraient  peut-être 
s'identifier  avec  certains  de  ceux  qui  se  trouvent  portés  sur  la  liste 
dont  nous  nous  occupons  en  ce  moment  Je  crois  devoir  indiquer  les 
sujets  en  question. 

Le  musée  de  Sèvres  possède  le  Batelier  y  figurine  d'après  Boucher. 
Nous  trouvons  une  pièce  portant  le  même  nom  sur  le  document 
des  archives  de  la  Haute- Vienne.  Le  Jardinier,  la  Jardinière  se  trou- 
vent au  musée  de  Sèvres  et  sont  portés  sur  notre  note.  Faut-il  voir 
dans  le  Poulailler  (l)  de  notre  document  le  pendant  de  \^  Fermière 
de  la  eoUection  de  Ujfalvy- Bourdon.  Cette  dernière  pièce  représente 
une  jeune  femme  tenant  d'une  main  une  poule,  à  ses  pieds  on  re- 
marque un  coq.  Je  pourrais  encore  signaler  d'autres  pièces. 

M.  de  Ujfalvy  reproduit  la  liste  des  sculptures  en  biscuit  qui  se 
trouvaient  parmi  les  présents  en  porcelaine  de  Sèvres  qui  furent 
offerts  «  à  la  reine  de  Naples,  à  l'occasion  du  baptême  de  la  prin- 
cesse sa  fille  dont  le  roi  est  parrain  ».  Parmi  ces  biscuits,  on 
remarque  un  Fluteur  d'après  Boucher  qui  pourrait  bien  être  la 
même  figure  que  celle  qui  est  désignée  sur  la  liste  des  archives  par 
ces  mots  :  le  Joueur  de  flûte. 

Il  serait  probablement  possible  d'identifier  avec  des  pièces  notoire- 
ment fabriquées  à  Sèvres  la  presque  totalité  des  moules  portés  sur 
la  liste  dont  je  m'occupe.  Cependant  les  pièces  y  sont  fort  incomplè- 
tement désignées,  ce  qui  sans  doute  rendrait  quelques  identifications 
plus  difficiles.  Certaines  désignations  parmi  les  plus  vagues  confir- 
ment même  la  pensée  que  l'on  se  trouve  en  présence  de  moules 
envoyés  de  Sèvres;  nous  trouvons  par  exemple  «  le  groupe  de  La  Rue  »: 
il  est  difficile  d'être  plus  concis  et  même  plus  incompréhensible  ; 

(1)  Dans  cette  hypothèse  «  ponlailler  »  ne  signifierait  pas  la  rustique 
cabane  où  logent  les  poules,  mais  bien  un  éleveur,  un  marchand  de 
volaille;  poulailler  aurait  ici  la  même  signification  que  notre  mot  de 
français  provincial  «  cocassier  ». 


78  SOCIÉTÉ  ARCffÉOLOGlQUK  HT   HISTORIQUE   DU   LmOdSIR. 

cependant  on  sait  que  La  Riie,  modeleur  de  talent,  a  fait  pour 
Sèvres  un  nombre  considérable  de  groupes  d'enfants  ;  quel  est 
celui  dont  on  entend  parler?  rien  ne  vient  ici  l'indiquer,  mais  La 
Rue  n'a  probablement  travaillé  que  pour  Sèvres  :  c'est  donc  d'un 
moule  de  Sèvres  dont  il  est  indubitablement  question. 

£n  résumé,  nous  avons  assez  de  points  de  comparaison  pour 
avoir  la  certitude  que  les  moules  mis  en  vente  en  l'an  IV  provien- 
nent de  Sèvres.  Les  trois  premiers  de  ces  moules  sont  accompagnés 
de  la  mention  «  bon  »,  les  autres  ne  portent  en  regard  aucune 
remarque  analogue,  et,  de  cette  circonstance,  nous  pouvons  sans 
doute  inférer  qu'ils  étaient. considérés  comme  bons  ou  tout  au 
moins  qu'ils  n'étaient  pas  regardés  comme  mauvais,  car,  pour 
d'autres  objets  portés  sur  la  même  liste,  l'épilhète  «  mauvais  »  est 
prodiguée.  Il  est  donc  probable  que  les  moules  plus  ou  moins  hors 
d'usage  ont  été  négligés;  or  nous  trouvons  une  quarantaine  de 
moules  de  figures  isolées  ou  de  groupes.  De  tout  ceci  nous  pouvons 
donc  conclure  que  la  production  des  petites  statuettes  en  porce- 
laine —  des  sujets  —  fut  active  à  Limoges,  et  ainsi  que  je  l'ai  dit 
plus  haut,  il  y  avait  à  cela  une  raison  technique  :  —  la  facilité  où 
Ton  se  trouvait  à  Limoges  de  choisir  les  terres. 

Les  pièces  dont  il  va  être  question  ont  toutes  été  trouvées 
à  Limoges;  parmi  elles  deux  fn~  32  et  33),  entrées  à  l'ancien 
musée  en  ISlè,  furent  qualifiées  par  le  donateur  de  «  porcelaines 
provenant  de  l'ancienne  Manufacture  Royale  ».  Ce  donateur  était 
M.  Roméo  Chapoulaud,  appartenant  à  une  ancienne  famille  de 
Limoges  et  se  trouvant  tout  à  fait  en  mesure  de  donner  un  té- 
moignage dont  il  convient  aujourd'hui  de  tenir  compte.  Il  serait 
possible,  à  la  rigueur,  que  parmi  les  biscuits  du  Musée  il  s'en 
trouvât  qui  aient  été  fabriqués  ailleurs  qu'à  la  Manufacture  Royale, 
mais  pourquoi  faire  une  telle  supposition  alors  que  rien  ne  vient  y 
inviter  ? 

Peut  être  s'étonnera-t-on  du  petit  nombre  de  biscuits  qui  sont 
entrés  au  Musée  Adrien  Dubouché  ?  Il  est  certain  que  les  biscuits 
paraissent  avoir  été  toujours  fort  rares  à  Limoges  (1).  Pour  ma 
part,  bien  que  m'élant  toujours  intéressé  aux  choses  de  l'art,  bien 
que  j'aie  eu  l'occasion  de  pénétrer  autrefois  dans  un  grand  nombre 
d'anciennes  demeures,  appartenant  à  une  famille  qui  s'est  occupée 
de  porcelaine  dès  le  commencement  de  sa  fabrication  chez  nous,  je 
ne  me  souviens  d'avoir  rencontré  à  Limoges  qu'un  nombre  extrê- 
mement restreint  d'anciens  biscuits.  Il  y  a  là  sans  doute  un  fait 

(<)  Sur  les  inventaires  de  biens  d'émigrés  qu'il  m'a  été  donné  de  con- 
sulter je  n'ai  remarqué  rindicalion  d'aucun  biscuit. 


ESSAI   DB  CLASSIFICATION   DBS  ANCIENNES   PORCELAINES   DB  LIMOCRS.         7& 

important;  mais  quelle  conséquence  con vient-il  d'en  tirer  ?  Faut-il, 
dans  celte  rareté  excessive  des  anciens  biscuits  dans  notre  ville, 
voir  une  circonstance  de  nature  à  permettre  le  doute  sur  cette  no- 
lion  que  je  me  suis  laborieusement  efforcé  d'établir,  à  savoir  que  de 
l'annexe  limousine  sont  sorlisun  grand  nombre  de  figurines  consi- 
dérées aujourd'hui  comme  ayant  été  produites  par  la  Manufacture  de' 
Sèvres  elle-même  ?  Mais  les  biscuits  fabriqués  par  Tannexe  pou- 
vaient très  bien  ne  pas  rester  à  Limoges,  et  il  est  môme  infiniment 
probable  qu'il  en  était  ainsi.  Le  centre  de  la  fabrication  contiuua 
à  être  à  Sèvres;  c'était  laque  se  trouvaient  cerlainement  les 
personnes  préposées  au  choix  des  porcelaines,  etc.  Les  biscuits 
sortis  des  fours  de  l'annexe  étaient  donc  tous  envoyés  à  Sèvres, 
et  les  pièces  qui  pourraient  se  trouver  dans  quelques-unes  de  nos 
anciennes  familles,  portant  la  marque  de  Sèvres,  risqueraient  fort 
de  n'être  pas  reconnus  de  nous  comme  appartenant  à  la  fabrication 
de  Limoges. 

A  l'époque  où  de  nombreux  marchands  d'antiquités,  attirés  chez 
nous  par  la  réputation  de  nos  émaux,  vinrent  dans  notre  pays,  où  ils 
achetèrent  lous  les  objets  d'art  qui  leur  parurent  avoir  quelque 
valeur,  il  devait  se  trouver  dans  nos  vieilles  familles  quelques 
anciens  biscuits;  ces  biscuits  portaient  la  marque  de  Sèvres  ou 
n'étaient  pas  marqués;  leurs  acquéreurs,  étrangers  au  pays,  les 
considérèrent  comme  des  productions  de  Sèvres,  bien  que  parmi 
eux  il  dût  certainement  se  trouver  des  pièces  sorties  de  nos  fours. 

Remarquons  qu'il  ne  pouvait  pas  en  être  autrement  en  l'absence 
à  Limoges  de  toutes  traditions  relatives  aux  pièces  de  ce  genre.  Il 
est  probable  que,  à  l'annexe,  la  confection  des  biscuits  et  leur  répara- 
tion étaient  confiées  à  des  artistes  envoyés  exprès  de  la  manufacture 
de  Sèvres  pour  exécuter  ces  opérations  qui  ne  pouvaient  pas  être 
dans  la  pratique  habituelle  de  notre  ancienne  Manufacture  (l).  Ces 
artistes  se  sont  peu  mêlés  à  notre  population,  ils  quittèrent  notre 
ville  très  probablement  bien  avant  la  mise  en  vente  de  l'annexe;  on 
est  du  moins  amené  à  le  supposer  par  l'état  d'abandon  et  de  vétusté 
où  furent  trouvés  les  moules  de  figurines,  sans  doute  depuis 
longtemps  sans  emploi.  Toutes  ces  raisons  pourraient  expliquer 
comment  le  fait,  si  frappant  cependant,  delà  fabrication  à  Limoges 
de  biscuits  de  Sèvres,  est  passé  inaperçu  dans  notre  ville. 

Mais  ce  fait  on  peut  le  considérer  comme  acquis  dès  à  présent. 
II  s'agit  maintenant  de  grouper  toutes  les  circonstances  accessoires 

(i)  Où  la  fabricalioa  des  biscuits  de  figures  tout  au  moins  ne  pouvail 
exister.  —  On  a  vu  dans  un  médaillon  commémoratif  dont  il  a  élé  parlé 
plus  haut,  une  pièce  de  biscuit  produit  dès  le  comaiencemcnt  de  la  fabri- 
cation limousine,  mais  il  n*y  a  là  qu'un  fait  accidentel  pour  ainsi  dire. 


80  SOCIÉTÉ  ABCHÉOLOCIQUK   ET   HISTORIQUE  OU  UMOUSIV. 

qui  s'y  rattachent.  Les  renseignements  qui  pourront  élre  trouvés  à 
Limoges  seront  sans  doute  peu  nombreux  ;  c'est  dans  les  divers 
dépôts  publics,  c'est  surtout  aux  archives  de  la  Manufacture  de 
Sèvres  que  les  investigations  des  chercheurs  devront  être  di- 
rigées ;  ces  recherches  pourront  être  fructueuses.  —  Il  est  possible 
Tjue  rhistoire  des  biscuits  de  Sèvres  soit  à  refaire,  tout  au  moins 
en  partie. 

A  Texposilion  qui  a  eu  lieu  à  Limoges  en  1886  les  biscuits  anciens 
étaient  très  rares  ;  aucun  d'eux  n'est  attribué  à  la  manufacture  de 
Limoges  par  les  rédacteurs  du  catalogue. 

Revenant  au  sujet  qui  nous  occupe,  je  ferai  une  remarque  : 

Aucun  des  biscuits  du  Musée,  et  que  Ton  attribue  généralement 
à  l'annexe,  ne  porte  la  marque,de  Sèvres.  Le  fait  est,  j'en  conviens, 
quelque  peu  embarrassant;  peut-élre  se  Irouve-t-on  en  présence 
de  pièces  d'essai  ? 

Voici  maintenant  la  liste  des  biscuits  du  Musée  que  leur  époque 
de  fabrication  semble  pouvoir  faire  classer  parmi  les  produc- 
tions de  la  fabrique  royale.  Il  me  faut  avant  tout  faire  une  remar- 
que importante,  c'est  que  parmi  ces  diverses  pièces,  deux  seule- 
ment fies  Enfants  buveurs)  se  retrouvent  sur  la  liste  des  archives. 

32<*  Mars  (?)  La  figure  représente  un  homme  jeune  dans  Tattitude 
delà  course  ;  il  a  les  bras  ouverts  et  semble  crier  victoire  en  arri- 
vant au  but,  it  est  coiffé  d'un  casque  surmonté  de  plumes  et  porte 
une  demi-cuirasse  moulant  le  torse  avec  plates  aux  épaules,  les 
cuisses  sont  couvertes  d'un  caleçon  collant;  —  cothurnes  aux  pieds, 
entre  les  jambes  une  cuirasse  sert  de  support;  socle  circulaire  en 
terrasse. 

Hauteur  :  37  c;  largeur  du  piédouche  :  12  c. 

Don  de  M.  Roméo  Ghapoulaud. 

Pas  de  marque. 

Par  le  style  et  le  costume,  cette  statuette  me  paraît  appartenir 
à  l'école  à  laquelle  on  a  attaché  le  nom  de  Vien;  on  sait  que 
beaucoup  de  sculpteurs  prirent  part  à  cette  tentative;  mais  en 
1784,  les  artistes  avaient  déjà  fait  un  pas  en  avant  dans  la  voie 
classique  où  Vien  ne  s'était  engagé  qu'assez  tinudement.  Le  Ser- 
ment des  Horaces  est  précisément  de  1784,  mais  il  avait  été  précédé 
par  d'autres  œuvres  —  peintures  ou  sculptures  —  où  les  nouvelles 
tendances  étaient  déjà  très  fermement  caractérisées. 

Mais,  si  de  la  manière  dans  laquelle  Mars  a  été  conçu  et  traité 
on  peut  inférer  que  le  modèle  de  cette  statuette  a  été  exécuté  anté- 
rieurement à  1784,  une  supposition  analogue  paraît  encore  mieux 
confirmée  en  ce  qui  concerne  la  figurine  qui  fait  le  pendant  aa 


KSSAl   DE  CLASSIFICATION   DRS   ANCICNKES  PORCELAINES   DR  LIMOGES.         Ri 

Mars,  Dans  cette  pièce,  on  remarque  tous  les  caractères  de  l'école 
c|ui,  sous  Louis  XV,  soit  antérieurement  au  commencement  au 
retour  vers  les  traditions  classiques,  soit  après  et  par  persistance 
de  slvlc»  se  rattache  aux  traditions  des  Coustou  et  de  Coisevox. 

De  tout  ceci,  ne  convient-il  pas  d'inférer  que  les  modèles  des 
statuettes  en  question  sont  antérieurs  à  1784,  que  par  conséquent 
ils  n'ont  pas  été  exécutés  spécialement  pour  l'annexe  de  Limoges? 
on  les  a  pris  dans  les  réserves  de  Sèvres,  et  il  est  probable  que  la 
plupart  sinon  tous  les  modèles  des  moules  que  nous  voyons  tigurer 
sur  rioventaire  sont  dans  le  même  cas. 

En  passant,  je  ferai  une  remarque.  Les  statuettes  en  question 
représentent-elles  vraiment  Mars  et  Vénus,  comme  on  Fa  toujours 
cru  à  Limoges  ;  ne  nous  trouverions-nous  pas  plutôt  en  présence 
d  un  Hippamène  et  d'une  Atalante?  Il  est  certain  que  l'attitude  du 
prétendu  Mars  semble  bien  être  celle  de  la  course  et  quant  à  la 
prétendue  Vénus,  son  costume  n'est  pas  celui  de  la  déesse  de 
Paphos  ;  Tamour  qui  forme  groupe  avec  elle  a  pu  donner  illusion, 
mais  cet  amour  serait  tout  aussi  bien  à  sa  place,  et  peut-être  mieux 
encore,  dans  Thypothèse  d'une  Atalante. 

Quoiqu'il  en  soit,  les  désignations  anciennes — peut-être  fautives — 
étant  connues,  je  n'ai  pas  cru  devoir  les  changer  ;  il  n'y  a  d'ailleurs 
aucun  inconvénient  sérieux  à  les  conserver.  La  véritable  question 
intéressante  est  Tattribution  des  pièces  :  la  détermination  du  véri- 
table sujet  qu'elles  représentent  n'est  que  secondaire. 

33.  Vénus  (?),  jeune  femme  dont  le  mouvement  assez  peu  déter- 
miné peut  être  celui  de  Tarrêt  au  milieu  d'une  course.  Elle  se 
tourne  h  demi  vers  un  amour  qui  la  retient  par  les  plis  de  la  tunique 
courte  dont  elle  est  vêtue  ;  un  des  bras  est  relevé  pour  retenir  une 
écharpe  ;  les  pieds  sont  chaussés  de  cothurnes.  Le  petit  amour 
ailé  est  monté  sur  un  casque  placé  près  d'un  tronc  d'arbre;  socle 
circulaire  en  terrasse. 

Hauteur  :  37  c;  largeur  :  12  c. 

Don  de  M.  Roméo  Chapoulaud. 

Pas  de  marque. 

34^  Divinités  groupées  sur  un  rocher.  Sur  un  socle  circulaire  en 
forme  de  disque,  sans  aucune  mouluration,  un  rocher  s'élève  en 
deux  étages;  de  ci  de  là,  dans  les  anfractuosités  de  la  roche,  des 
touffes  de  mousse.  En  bas,  quatre  personnages  debout,  savoir  : 
1**  une  jeune  femme  nue,  caressant  un  oiseau  qui  paraît  être  un 
cygne  (ce  personnage  a  une  main  cassée)  ;  2**  une  femme  drapée 
dans  une  tunique  longue,  laissant  à  découvert  les  bras,  la  tunique 


82  SOCliTi  ARCHÉOLOGIQCK  BT  HIftTORIQUR  DD  LIMOUSIN. 

étant  fendue,  les  jambes  sont  libres  à  partir  du  milieu  de  la  cuisse; 
ce  personnage  est  couronné  de  fleurs,  il  s'appuie  sur  un  thyrse 
revêtu  de  feuillage  ;  l'autre  bras  élevé  et  replié  tient  un  tambour 
de  basque  ;  3^  un  adolescent  ailé,  à  demi  drapé  et  couronné  de 
fleurs,  d'une  main  il  tient  un  flambeau  qu'il  allume  sur  un  autel, 
l'autre  bras  est  élevé,  sa  main  tient,  à  droite  et  à  ganche,  un 
chien  ;  4''  une  femme  nue  tenant  une  coupe,  à  ses  pieds,  un  aigle» 
Sur  la  partie  supérieure  du  rocher,  une  femme  demi-drapée 
tenant  une  guirlande  de  fleurs  (les  deux  bras  sont  cassés.) 

Hauteur,  39  c;  largeur  au  socle,  16  c. 

Marque,  J.  A.  (inexpliquée). 

Don  de  la  Municipalité  de  Limoges. 

Celte  pièce  n'a  qu'une  très  faible  valeur  artistique,  si  toutefois 
elle  a  une  valeur;  la  marque  n'a  pu  être  expliquée  jusqu'ici, 

35**  Enfant  ou  Amour.  Cette  petite  figure  couronnée  de  fleurs,  et 
tenant  d'une  main  une  guirlande  et  un  cœur  enflammé,  est  assise 
sur  un  rocher,  sur  lequel  on  a  figuré  des  touffes  de  mousses;  à 
droite  (de  la  figure),  une  gourde  et  une  coupe;  à  gauche,  un  petit 
chien  debout  sur  ses  quatre  pattes. 

Hauteur,  14  c;  largeur,  6  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

36**  Enfant  ou  Amour.  Cette  figure,  couronnée  et  tenant  un  bou- 
quet de  chaque  main,  est  également  assise  sur  un  rocher  au  pied 
duquel  se  trouve,  à  gauche  (de  la  figure),  un  vase  contenant  des 
fleurs;  à  droite,  une  gourde. 

Hauteur,  14  c;  largeur,  6  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

Ces  deux  figures,  ayant  la  même  direction  dans  leur  attitude,  ne 
se  font  pas  pendant.  Il  est  probable  cependant  qu'elles  faisaient 
partie  d'un  même  ensemble  de  pièces  ;  étant  donnés  les  attributs  qui 
les  accompagnent,  on  doit  sans  doute  y  reconnaître  les  Enfants 
bachiques  de  l'inventaire. 

Dans  le  n®  33  le  cœur  des  fleurs  est  peint  en  jaune  à  froid,  parti- 
cularité que  l'on  peut  remarquer  sur  un  certain  nombre  de  biscuits 
trouvés  à  Limoges. 


ESSAI    DR  CLASSIFICATION    DF8  ANCIRNNKS  PORCRLAINES    DK  I.IMOr.KS.         83 


§  I*'.  Commencement  de  Vinspiration  dite  classique,  formes  de  transi- 
tion et  formes  dites  Louis  XVI,  décor  Louis  XV ,  bouquets  jetés, 
décor  d'un  genre  nouveau,  d'un  caractère  léger,  décor  Louis  XVI, 
bouquets  disposés  symétriquement.  (Il  faut  remarquer  que  l'ancien 
genre,  où  les  lignes  courbes  prédominent,  a  été  usité  conjointe- 
ment avec  le  genre  nouveau). 

Les  indications  sur  lesquelles  sont  basées  les  propositions  d'attri- 
butions suivantes  sont,  il  faut  en  convenir,  d'un  assez  faible  poids. 
En  réalité,  si  les  pièces  dont  la  nomenclature  suit  n'avaient  pas  été 
trouvées  à  Limoges,  nul  sans  doute  n'eut  songé  à  en  doter  notre 
Manufacture,  cette  réserve  était  nécessaire. 

Bien  entendu,  je  n'ai  attribué  à  la  Manufacture  Royale  que  des 
pièces  dont  les  analogues  se  trouvent  sur  l'inventaire  dont  il  a  été 
parlé  à  plusieurs  reprises. 

37**  Seau  à  rafraîchir  les  verres,  dit  aussi  glacière  :  forme  ovale, 
on  peut  y  distinguer  trois  parties  :  un  piédouche  mouluré  avec  une 
grande  simplicité,  le  corps  delà  pièce  affectant  un  galbe  obconique, 
la  partie  supérieure  de  cette  panse  forme  bandeau  plat;  la  partie 
inférieure,  nettement  détachée  du  bandeau,  est  en  retraite  sur  lui  ; 
elle  Ta  se  rattacher  en  arc  de  cercle  au  piédouche  ;  au-dessus  du 
corpsdu  vase,  se  trouve  une  partie  découpée  constituée  par  des  feuilles 
ornementales,  très  sommairement  formulées,  faisant  retour  en  con- 
vexité sur  la  ligne  obconique.  Les  anses  sont  formées  par  des  mufles 
de  dauphins; filets  d'or  larges  et  filets  étroits,  les  détails  d'ornemen- 
tation sont  accentués  en  or;  au  milieu  du  bandeau,  un  chiffre 
entrelacé  formé  des  deux  majuscules  cursives  :  L.  et  L 

Hauteur,  18  c;  largeur  (au  bandeau  en  y  comprenant  la  saillie 
des  mascarons),  33  c;  petit  diamètre,  22  c. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

La  couverte  dont  cette  belle  pièce  est  revêtue  la  rapproche  d'une 
autre  verrière  portant  la  marque  de  Sèvres,  et  dont  les  formes 
différentes  sont  moins  cherchées.  Les  mufles  de  dauphin  sont  ana- 
logues à  ceux  que  Ton  peut  remarquer  sur  une  fontaine  en  terre 
recouverte  d'un  émail  brun,  qui  a  toujours  passé  pour  être  l'œuvre 
d'un  modeleur  de  la  Manufacture  Royale  dont  le  nom,  jadis  indiqué 
sur  cette  dernière  pièce,  d'après  M.  François  Alluaud,  a  disparu  et 
n'est  plus  connu  aujourd'hui.  Enfin  on  rencontre  des  glacières  sur 
l'inventaire  des  pièces  qui  se  trouvaient  à  la  Manufacture  au  mo- 
ment de  sa  Tente.  C5es  glacières  sont  suivies  de  la  mention  «  pâte 


81  SOCIÉTik  àlCnéOLOOlQUK  RT  HISTORIQUE  DD  LIMOUSIN. 

blanche  »  qui  convient  bien  à  notre  pièce  qui  est  d'une  très  belle 
qualité.  Ces  présomptions  sont  faibles,  mais  Taspect  général  de  la 
pièce  en  question  semble,  dans  une  certaine  mesure,  justifier  Taltri- 
bution  que  j'en  propose  à  la  fabrique  de  Limoges  (période  où  cette 
fabrique  était  devenue  succursale  de  Sèvres). 

38*  Pot  à  eau  couvert.  Un  piéJouche  sommaire  de  forme  générale 
concave  porte  le  corps  du  vase,  en  forme  de  bandeau  circulaire 
obconique;  la  partie  supérieure  cylindrique  se  rattache  à  la  panse 
par  un  large  congé;  le  goulot,  rapporté,  est  à  trois  pans,  sur  un 
plan  trapézoïdal;  l'anse  qui  lui  est  opposée  est  bi -coudée  sans 
ressaut  brusque,  comme  on  en  voit  dans  les  vases  de  porcelaine  ou 
de  faïence  dont  le  couvercle  était  retenu  à  Tanse  par  une  attache 
métallique;  on  trouve  déjà  cette  disposition  dans  un  pot  de  faïence 
(premier  fonds)  daté  de  1738.  Le  couvercle  présente  d'abord  une 
moulure  plate,  phis  un  arc  de  cercle  très  surbaissé  qui  se  rattache 
en  congé  à  une  sorte  de  petite  plate-forme  surmontée  d'un  bouton 
en  pomme.  Le  piédouche  porte  entre  deux  filets  une  couronne  de 
feuillages,  fins,  très  sommairement  exécutés  dans  le  genre  dit 
«  pipant  »  par  les  anciens  décorateurs  limousins  ;  à  la  partie  supé- 
rieure de  la  panse,  entre  larges  filets  or  et  bandes  pourpre,  une 
large  bande  divisée  par  une  dent  de  scie;  entre  chaque  dent  et 
s'opposant,  des  demi  fleurs  à  quatre  pétales;  décoration  analogue 
sur  le  couvercle.  Le  bouton  doré  en  plein,  le  bec  et  le  goulot  ornés 
d'an  décor  léger  tracé  en  «  pipant  »,  et  de  bandes  et  filets,  le  tout 
en  or.  Plusieurs  catégories  de  pots  &  eau  se  trouvent  indiquées  à 
l'inventaire. 

Hauteur  (y  compris  le  couvercle),  2S  c;  largeur  (grand  diamètre 
de  la  panse),  12  c. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

38"*  Compotier,  forme  quadrilobée  inspirée  peut-être  de  la  forme 
coquille  :  à  la  partie  antérieure  se  trouve  un  appendice  court  à  trois 
divisions  faisant  fonction  de  queue  ou  poignée.  Cet  appendice  rap- 
pelle le  style  intermédiaire  qui  a  succédé  au  rocaille.  Au  centre,  des 
reines-marguerites,  violettes, fleurettes  de  fantaisie  en  rouge-brun; 
courant  sur  le  bord,  un  décor  constitué  par  quatre  petits  médail- 
lons indépendants,  limités  par  un  cercle  d'or  et  renfermant  une 
rose  au  naturel,  des  lambrequins  sommaires,  des  rinceaux  plus 
importants  (rouge,  violet  et  bleu),  des  guirlandes  de  perles,  des 
branches  de  feuillages  (or),  des  guirlandes  de  fleurs  (rouge,  bleu, 
vert,  rose),  des  bouquets  jetés  au  centre;  un  pipant  et  des  filets  au 
bord,  peigne  et  ornements  variés  à  l'appendice  formant  poignée 


ESSAI   DB   CLASSIFICATION   DES   ANCIRNNES  POr.CELAl!«ES    DE   LIMOGES.         85* 

(or)  complètent  le  décor.  Le  jaune  d'or  est  employé  dans  des 
guirlandes  de  perles  et  des  boutons. 

Largeur  (appendice  y  compris)  22  c;  largeur  à  l'autre  diamè^ 
Ire  22  c. 

Marque  :  IX  en  chiffres  romains  (?)  tracée  en  or. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

Celte  pièce  est  d'un  beau  blanc,  le  décor  rappelle  celui  qui  figure 
sur  plusieurs  autres  pièces  dont  nous  allons  nous  occuper.  Son  exé- 
cution semble  indiquer  au  premier  aspect  un  ancien  Limoges.  —  Il 
convient  toutefois  de  faire  certaines  réserves.  —  De  nombreux  com- 
potiers figurent  à  l'inventaire.  Des  formes  analogues  ont  été  en 
usage  dans  plusieurs  fabriques  des  environs  de  Paris,  Chantilly, 
Sèvres,  etc. 

39*  Pot  au  lait,  forme  en  section  de  cône;  anse  simple  sans  res- 
saut, bec  largement  ouvert.  Le  décor  est  constitué  en  haut  par  deux 
filets  et  un  «  pipant  »  en  or;  en  bas  un  filet,  traits  droits  et  traits 
soulignant  la  forme,  palmettes  ornementales  sommairement  tracées 
sur  Tanse,  le  tout  en  or;  en  bas,  filet  or.  Sur  le  corps  du  vase,  bou- 
quets jetés  symétriquement,  roses  et  fleurettes  rouges  et  bleues; 
Couleurs  employées,  rose,  bleu,  rouge  brun,  vert  et  jaune. 

Hauteur,  12  c;  largeur  à  la  base,  9  c.;  à  l'ouverture  y  compris 
le  bec,  9  c. 

Don  de  M.  Barraud. 

Cette  pièce  où  l'on  remarque,  dans  la  forme,  très  simple  d'ail- 
leurs, l'influence  de  la  céramique  anglaise  est  d'une  bonne  mais 
pas  d'une  belle  fabrication. 

40*  Théière:  forme  en  cylindre  droit,  le  couvercle  rentrant 
dans  l'ouverture,  autour  de  laquelle  s'élève  un  rebord  en  galerie, 
un  bouton  en  forme  de  pomme.  L'anse,  de  forme  simple  et  sans 
ressaut  est  rentrante  à  sa  partie  médiane;  le  décor  compliqué  com- 
porte différents  filets  et  couronnes  de  feuillages  avec  ornements 
rappelant  le  rocaille,  le  tout  doré;  quatre  médaillons  à  perles  ovales 
et  rondes,  or,  sont  suspendus;  au  centre,  une  rose  au  naturel;  guir- 
landes alternées  de  barbeau  et  de  fleurettes  rouges  s'attachant 
d'une  part  à  la  partie  supérieure  du  médaillon  (au  milieu),  d'autre 
part  au  milieu  de  l'intervalle  laissé  entre  chaque  médaillon.  Décor 
analogue  sur  le  couvercle.  Le  bouton  doré  en  plein.  Ornements 
de  pratique  courante  dorés  sur  le  bec  et  l'anse. 

Hauteur,  12  c;  largeur,  9  c. 

Marque  (inexpliquée),  un  insecte  (libellule)  en  rougë  de  fer. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

T.  Xï^XlX,  5 


86  SOCIÉTÉ   ARCHéOLOGIQOF.   ET   BISTORIQUB   DU  LIMOUSIN. 

Cette  pièce  rappelle  les  numérosS  à 8 delà colleclioD Jacquemart 
qui  appartiennent  comme  on  sait  à  la  période  dont  les  pièces  sont 
caractérisées  par  la  marque  C.  D.  Le  décor  semble  indiquer  une 
main  limousine  (mais  il  y  a  à  cette  époque  une  très  grande  ana- 
logie entre  les  manières  des  décorateurs  des  différentes  fabriques), 
les  ors  sont  très  habilement  posés. 

Tout  en  hasardant  l'attribution  à  la  Fabrique  Royale,  je  dois  dire 
que  la  théière  dont  nous  nous  occupons  est  une  des  pièces  qui 
me  laissent  les  plus  grands  doutes. 


§11.  —  Inspiration  classique;  formes  de  transition;  tendances 
vers  la  régularité;  pondération  des  lignes  et  formes  Louis  XVI 
(apparition  de  la  ligne  droite,  etcj  Décor  de  transition  et  décor  à 
rinceaux,  inspirés  de  Salembier,  etc.  (Pièces  fabriquées  pendant 
les  dernières  années  de  Louis  XVI  et  la  période  révolutionnaire). 

Nous  voici  à  la  dernière  période  de  l'histoire  de  la  Manufacture 
Royale. 

Généralement  on  donne  aux  pièces  qui  appartiennent  à  ladite 
période  une  date  plus  récente  qu'il  ne  conviendrait;  on  les  attribue 
volontiers  au  commencement  de  l'Empire.  Mais  le  style  des  formes 
et  celui  du  décor  protestent  contre  une  telle  attribution,  et  si 
Von  veut  tenir  cbmpte  de  leur  aspect  au  point  de  vue  artistique 
et  décoratif,  il  ne  sera  plus  permis  de  confondre  avec  les  produits 
de  la  période  impériale,  même  à  ses  débuts,  les  pièces  fabriquées 
pendant  les  dernières  années  du  xvni''  siècle. 

Il  est  possible  néanmoins  que  Ton  se  trouve  parfois  en  présence  de 
certaines  survivances  de  style  ou  d'habitudes  d'atelier,  de  nature  à 
dérouter  le  chercheur.  Cependant  on  peut  dire  que,  en  thèse  géné- 
rale, le  style  qualifié  révolutionnaire  (mais  dont  les  origines  sont 
antérieures  à  1789)  a  été  abandonné  à  la  fin  Ju  wiu''  siècle;  ce  style, 
quand  il  est  pur,  est  très  particulier  ;  mais  souvent  et  surtout  en 
porcelaine,  une  circonstance  vient  encore  le  différencier  du  genre 
dit  académique  :  ce  sont  certains  emprunts  ou  plutôt  certaines  per- 
sistances de  motifs  décoratifs  appartenant  au  style  précédent,  dit 
Louis  XVI.  Par  exemple,  on  trouve  sur  certaines  pièces  du  Musée 
fabriquées  et  décorées  après  1788  des  frises  ou  autres  motifs 
d'après  Salembier  ou  très  directement  inspirées  par  cet  aimable 
artiste.  Il  est  à  peine  besoin  de  faire  remarquer  qu'après  1800  de 
semblables  motifs  eussent  été  repoussés  par  les  décorateurs. 


ESSAI   DE   CLASSIFICATION   DKS   ANCIFNNES   POP.CELAINES   DE   LIMOGES.        87 

Les  formes  des  pièces  de  la  fin  du  xviii*  siècle  sont  également 
très  particulières  et  très  faciles  à  distinguer.  Ces  formes  tendent 
plutôt  vers  la  simplicité  que  vers  la  régularité;  elles  sont  très 
cherchées  et  l'artiste  arrive  souvent  à  une  gi'aude  pureté  de  galbe, 
mais  ces  galbes  lui  appartiennent  et  ne  doivent  souvent  absolument 
rien  à  Fart  antique,  et  quand  des  emprunts  sont  faits  à  cet  art  ils 
ne  sont  jamais  littéraux,  si  je  puis  ra'exprimer  ainsi.  Il  en  est  tout 
à  fait  différemment  pendant  la  période  impériale,  où  la  constante 
préoccupation  des  artistes  est  la  copie  textuelle,  si  Ton  peut  dire, 
des  motifs  grecs  ou  romains. 

On  comprend  d'ailleurs  que  le  style  révolutionnaire  a  dû  varier 
dans  un  sens  ou  dans  un  autre,  selon  qu'il  est  resté  fidèle  à  certaines 
habitudes  décoratives  de  la  période  précédente,  ou  que,  au  con- 
traire, il  commence  à  admettre  des  éléments  nouveaux  dont  11  sera 
fait  abus  dans  la  période  suivante. 

On  a  cru  un  peu  légèrement  peut-être  que  pendant  la  période 
révolutionnaire  la  fabrication  porcelainière  a  périclité  à  Limo- 
ges, si  même  elle  n'a  cessé  tout  à  fait.  Cette  notion,  trop  géné- 
ralisée, deviendrait  absolument  erronée.  Que  Ton  ait  fabriqué  à 
Limoges  pendant  la  période  révolutionnaire  moins  qu'auparavant, 
la  chose  est  possible  et  il  n'est  pas  nécessaire  de  s'en  occuper  ici  ; 
le  point  important  et  que  l'on  ne  saurait  trop  faire  ressortir,  c'est 
que  loin  de  tomber  en  décadence,  au  point  de  vue  de  la  beauté  de 
ses  produits,  notre  Manufacture  a  vu  commencer,  dès  1788,  une 
ère  de  véritable  renaissance,  à  la  fois  technique  et  artistique.  Ce 
fait,  dès  à  présent  indubitable,  sera  certainement  confirmé  par  les 
recherches  subséquentes. 

Il  me  semble  qu'il  est  nécessaire  d'entrer  à  ce  sujet  dans  quel- 
ques développements.  Je  le  ferai  aussi  brièvement  que  possible. 

On  trouve  dans  les  Nouvelles  éphémérides  du  ressort  de  la  Cour 
royale  de  Lmoges(Darde,  1837,  in-8°)  un  article  ayant  pour  titre  :  Por- 
CELALNE,  histoire  et  statistique  de  cette  poterie  en  Limousin.  Ce  travail 
est  signé  par  M.  François  Alluaud,  dont  les  souvenirs  personnels, 
faciles  pour  lui  à  rectifier  ou  à  confirmer  grâce  à  ses  papiers  de 
famille,  devaient  être  encore  très  nets  au  moment  où  il  écrivit  les 
lignes  suivantes  qui  me  paraissent  devoir  faire  autorité  dans  la 
question. 

«  Organisée  par  les  soins  de  M.  d'Arcet,  de  l'Académie  des 
sciences,  la  manufacture  royale  de  Limoges  répandit  d'abord  de 
beaux  produits  dans  le  commerce. 

»  Les  difficultés  que  présentait  l'exploitation  de  la  carrière  de 
Clos-de-Barre,  dont  on  avait  employé  jusque-là  les  produits,  la 
firent  abandonner.  On  venait  de  découvrir  des  carrières  pouvelles 


88  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

à  la  Maison-Rouge  (roule  de  Paris)  et  dans  les  propriétés  de 
M.  Michelet  et  du  comte  de  Bonneval,  à  Coussac.  M.  Grcllel 
encombra  la  manufacture  royale  du  kaolin  de  ces  carrières,  et,  soil 
qu'il  eût  été  mal  trié,  mal  assorti,  mal  préparé,  ou  qu'il  fût  natu- 
rellement d'une  qualité  très  médiocre,  les  produits  de  la  manufac- 
ture du  roi  se  détériorèrent  à  ce  point  que  la  masse  de  la  fabrication 
de  1786  qui  se  composait  de  soixante-neuf  fournées  ne  s'éleva  qu'à 
la  somme  de  30,965  11.  6  s.  3  d.,  somme  qui  ne  représentait  pas 
le  quart  de  la  valeur  que  ces  fournées  auraient  dû  avoir. 

»  M.  Grellet  reçut  des  reproches  dont  il  ne  se  justifia  que  par  le 
zèle  qu'il  avait  porté  aux  travaux  dont  il  était  chargé  et  en  prenant 
pour  son  compte  les  mauvais  approvisionnements  dont  il  avait  en- 
combré la  manufacture  du  roi. 

»  S'élant  démis  de  ses  fonctions  en  1788,  M.  Alluaud,  ingénieur- 
géographe  du  roi,  fut  appelé  à  le  remplacer  (1). 

(4)  Il  me  semble  que  le  rôle  joué  par  H.  Alluaud  pèrp  dans  la  créalioD  de 
rinduslrie  porcelainière  limousine  n*a  pas  élé  suftisamment,  jusqu'ici,  mis 
en  lumière,  je  dirais  volontiers  en  relief.  Dans  ce  iravail,  on  ne  sauraitavoir 
la  pensée  de  irailer,  d'une  façon  complète,  lous  les  poinls  encore  si  obscurs 
de  rhisioire  de  notre  porcelaine.  Celui  qui  entreprendra  ce  travail,  qu*il  faul 
peut-être  se  liâter  de  faire,  consacrera  certainement  une  page,  qui  ne  sera 
pas  des  moins  intéressantes,  à  M.  François  Alluaud  père. 

La  famille  Alluaud  possède  de  nombreux  documenUs  qu'elle  a  très  libéra- 
lement mis  à  la  disposition  de  Fauteur  de  ce  travail,  qui  n'en  peut  faire 
usage  aujourd'hui,  étant  donné  le  cadre  restreint  de  ces  recherches. 

M.  Fray-Fournier  a  bien  voulu  prendre  pour  moi  les  notes  suivantes  : 

François  Alluaud,  né  à  Saint- Victurnien  en  1738,  vint  se  fixer  à  Limoges 
en  1763. 

De  1V65  à  4768,  11  travailla  sous  les  ordres  de  Pingénieur  Trésaguel,  à 
lever  le  plan  lopographique  de  Limoges  qui  servit  de  base,  à  partir  de  1775, 
aux  alignements  de  la  ville.  (V.à  ce  sujet:  P.  Ducourtibux, Limope^  diaprés 
868  anciens  plans ^  p.  2S  et  ss.) 

M.  Alluaud  exerça  ensuite  la  profession  d'entrepreneur  de  travaux  publics 

En  janvier  1786,  il  passe  un  marché  avec  la  municipalité  pour  Texécution 
des  travaux  des  allées  de  Fitz-James.  C'est  encore  k  lui  qu'est  donnée,  la 
même  année,  Tentreprise  de  construction  du  nouvel  hôtel  de  ville.  (Inv. 
arcb.  comm.  DDl). 

Il  avait  épousé  Marie  Vergniaud. 
'    Dans  lacie  de  baptême  de  son  fils  (91  septembre  1778),  il  est  qualifié  : 
ingénieur  géographe  des  ponts  et  chaussées. 

Dans  Pacte  de  baptême  de  sa  fille  (2l  janvier  1788),  il  prend  le  titre  d'in- 
génieur-géographe du  roi  et  directeur  des  porcelaines  royales  de  Limoges. 
{Ibid.  GG  ISi  et  126). 

Nommé  directeur  de  la  Monnaie  de  Limoges  le  20  dé'-cmbre  I79Î  par  le 
Conseil  exécutif  provi.<oirc,  il  resta  à  la  tête  de  cet  établissement  jusqu'à  sa 


ESSAI   DR  CLASSIPI CATION   OBS  ANCIEN^fRS   PORCELAINES   DE  LIMOGES.         S9 

»  Tous  les  vices  de  Tancienne  manutention  furent  corrigés  suivant 
la  prescription  du  comte  d'Angcrvillers  et  des  inspecteurs  des  tra- 
vaux de  la  manufacture  de  Sèvres,  et  dès  lors,  la  manufacture  de 
IJmoges  reprit  une  nouvelle  activité  et  se  distingua  bientôt  par  la 
beauté  de  ses  produits. 

»  Elle  maintint  la  supériorité  de  sa  fabrication  jusqu'à  ce  que  la 
Révolution  vint  en  paralyser  les  travaux.  Jaloux  de  conserver  cet 
ëlablissement  à  la  ville  de  Limoges,  M.  Âlluaud  la  soutint  longtemps 
aux  dépens  de  sa  fortune.  En  1791,  il  était  en  avance  d'une  somme 
considérable  qui  devait  s'engloutir  dans  le  gouffre  de  Tarriéré.  La 
manufacture,  réduite  à  l'unique  produit  de  quelques  ventes  en  assi- 
gnats, M.  Alluaud  donna  sa  démission.  Les  ouvriers,  mal  payés,  se 
dispersèrent,  et  le  18  vendémiaire  an  V,  la  manufacture  fut  vendue 
et  acquise  par  deux  de  ses  anciens  ouvriers,  les  sieurs  Joubert  et 
Cacate,  qui  se  partagèrent  cet  établissement.  » 

Ainsi,  des  faits  si  clairement  rapportés  ci-dessus,  il  résulte  que, 
par  suite  de  Tincapacité  de  Grellel,  le  mouvement  de  progrès 
imprimé  par  d*Arcet  à  la  Manufacture  Royale  ne  fut  que  de  courte 
durée;  il  y  eut  après  1784,  une  période  de  bonne  fabrication,  qui 
était  déjà  terminée  en  1786. 

C'est  pendant  ce  laps  de  temps,  qui  ne  peut  excéder  deux 
années,  que  la  Manufacture  a  pu  produire  les  porcelaines  que  je 
propose  plus  haut  de  lui  attribuer. 

La  Manufacture  périclite  jusqu'en  1788,  alors  elle  reprend  un 
nouvel  essor  après  la  démission  de  Grellet  et  son  remplacement 
par  M.  Alluaud. 

Il  convient  de  remarquer  que,  au  moment  où  il  devenait  direc- 
teur de  la  Manufacture  Royale,  M.  Alluaud  était  déjà  un  céramiste 
expérimenté,  au  moins  on  peut  le  présumer;  il  avait  possédé,  très 
probablement  dès  avant  1780,  à  Bordeaux,  une  fabrique  de  porce- 
laine qui  paraît  avoir  été  importante,  et  que  dès  la  fin  du  xviu*  siè- 
cle, nous  voyons  faire  des  expériences  de  cuisson  à  la  houille. 

Un  opuscule  cité  déjà  dans  ce  travail  et  dont  l'auteur,  M.  Rave- 
nez,  paraît  s'être  inspiré  des  souvenirs  de  M.  François  Alluaud, 
encore  plein  de  vie  à  l'époque  où  parut  la  brochure  en  question 
{^Aperçu  statistique  de  l'exposition  de  Limoges  en  i  855,  Limoges, 
ArdilUer),  confirme,  en  les  complétant  sur  certains  points,  les  indi- 
cations que  l'on  vient  de  lire.  Il  est  intéressant  de  rapprocher  les 
passages  de  M.  Ravenez,  écrits,  peut-on  croire,  sous  Tinspiration 

sappressiOQ,  prononcée  par  la  loi  du  29  vendémiaire  an  IV  (14  oclobre  1795) 
qai  réduisait  à  huit  le  nombre  des  hôtels  des  monnaies. 
Il  moarul  en  1799 


90  SOCIÉTÉ  AnCHÉOLOGIQUE  Rf  HlSTOniQUE  DO  LIMOUSIN. 

de.  M.  François  Alluaud,  de  la  citation  ci-dessus,  empruntée  à  an 
article  écrit  par  M.  Alluaud  lui-même. 

«  Limoges  comptait  alors  au  nombre  de  ses  habitants  un  homme 
d'une  haute  intelligence,  dont  Tesprit,  aussi  juste  qu'étendu,  pou- 
vait embrasser  en  un  instant  les  opérations  commerciales  les  plus 
difficiles  :  c'était  M.  Alluaud  qui  possédait,  avec  M.  La  vergue  de 
Saint-Yrieix,  les  belles  carrières  de  Marcognac  dont  on  avait  fait 
récemment  la  découverte;  il  fut  nommé  directeur  de  la  manufacture 
royale  de  Limoges. 

»  Grâce  à  ses  efforts,  les  vices  de  l'ancienne  manipulation  furent 
rapidement  corrigés,  des  procédés  nouveaux  furent  étudiés,  et  en 
peu  de  temps,  le  succès  le  plus  complet,  l'activité  la  plus  grande 
vinrent  le  récompenser  de  sa  persévérance.  Mais  les  premières 
secousses  de  la  Révolution  vinrent  ébranler  l'édifice  naissant. 
M.  Alluaud  n'était  pas  seulement  un  homme  intelligent,  il  était 
surtout  un  homme  de  cœur.  Le  trésor  royal,  fortement  obéré,  ne 
pouvait  venir  en  aide  à  la  manufacture.  M.  Alluaud,  qui  compre- 
nait combien  il  importait  de  conservera  la  ville  de  Limoges  un  éta- 
blissement qui  devait  plus  tard  en  développer  la  prospérité,  le 
soutint  au  prix  de  sa  fortune,  et  il  en  conserva  la  direction  jusqu'au 
!•'  octobre  1793,  époque  où  il  fut  appelé  par  le  ministère  à  la 
direction  de  la  Monnaie. 

»  M.  Massier  fut  alors  provisoirement  chargé  de  l'administration 
de  la  manufacture,  et  il  conserva  son  emploi  jusqu'au  1"  octobre 
1798.  Mais,  pendant  cet  intervalle,  la  fabrication  fut  proportionnée 
aux  faibles  rentrées  d'assignats  que  produisaient  les  ventes  ;  la  ruine 
de  rétablissement  devenait  imminente,  le  gouvernement  en  ordonna 
l'aliénation  ;  la  manufacture  royale  cessa  d'exister. 

»  Cependant  les  travaux  de  M.  Alluaud  avaient  porté  leifrs  fruits. 
Il  y  avait  dès  ce  moment  à  Limoges  et  dans  les  environs  une  pépi- 
nière de  bons  ouvriers... (1).  » 

(1)  A  rapprocher  les  mois  soulignés  d*une  phrase  très  explicite  que  Von 
trouve  dans  la  noiice  sur  François  Alluaud,  publiée  par  M.  Dubédat  dans  le 
Bulletin  de  la  Société  archéologique  du  Limousin^  t.  XXl(187i).  Après  avoir 
rappelé  que  c*esl  à  Turgot  que  nous  sommes  redevables  de  notre  première 
manufacture  de  porcelaine,  donl  il  place  par  erreur  la  création  en  1773  au 
lieu  de  1771,  M.  Dubédat  ajoute  :  «  Après  dix  ans  de  recherches  et  dressais, 
les  ouvriers  arrivèrent,  et  les  fabriques  s* élevèrent  dans  les  faubourgs. 
Une  d'elles  h\Siii  été  achetée  au  nom  du  roi  par  Dangervillers,  pour  devenir 
une  annexe  de  Sèvres.  Elle  passa  sous  la  direction  du  père  de  François 
Alluaud.  Grâce  à  lui,  rindustrie  se  transforma  et  le  succès  couronna  ses 
efforts...  » 

M.  Dubédat  s*est  servi  de  papiers  et  pièces  authentiques  communiqués 


ESSAI   DE  CLVSSiPiCATION   DES   ANCIENNES   PORCELAINES  DE   LIMOGES.        01 

En  somme,  nous  sommes  en  possession  des  données  suivantes 
qui  paraissent,  dès  à  présent,  hors  de  conteste  :  l'entrée  en  fonc- 
tions de  M.  Alluaud  fut  signalée  par  une  sorte  de  renaissance  de  la 
fabrication  devenue  auparavant  fort  inférieure  ;  ce  mouvement  se 
conlinua  probablement  jusqu*à  la  retraite  de  M.  Alluaud  (17  octo- 
bre i793),  mais  la  fabrication  ne  cessa  pas  à  sa  sortie  de  la  manu- 
facture, seulement  elle  se  ralentit  sans  doute  dans  une  large  mesure. 

11  est  donc  permis  de  proposer  d'attribuer  à  la  Manufacture 
Royale  —  qui  devint  un  peu  plus  tard  Manufacture  Nationale, —  des 
pièces  qui,  par  leur  forme  et  leur  décoration,  paraissent  appartenir 
à  la  dernière  période  du  style  dit  Louis  XVI  et  môme  à  la  première 
période  du  style  révolutionnaire  ;  il  convient  bien  entendu  de  grou- 
per autour  de  ces  propositions  d'attributions  quelques  raisons  qui 
les  rendent  plausibles.  C'est  ce  que  je  me  suis  efforcé  de  faire,  mais 
il  me  faut  avouer  que  les  présomptions  que  j'apporte  à  l'appui  de  la 
thèse  que  j'entreprends  de  soutenir  ne  sont  pas  absolument  décisives; 
cependant  les  pièces  dont  je  vais  m'occuper  maintenant  sont  datées, 
pour  ainsi  dire,  par  la  forme  et  le  décor,  et  on  ne  voit  pas  à  quelle 
fabrique  contemporaine  on  pourrait  les  attribuer  si,  un  peu  systé- 
matiquement peut-être,  on  les  refusait  à  notre  première  manufac- 
ture. 

Remarquons  que  d'après  M.  François  Alluaud,  lorsque  son  père 
en  devint  directeur,  l'anneKC  de  Limoges  fut  réorganisée  par  les 
soins  de  M.  d'Angervillers  lui-môme.  M.  Alluaud  père  ne  fut  donc 
pas  abandonné  à  ses  propres  forces,  qui  peat-ôtre  eussent  suffi.  II 
eut  encore  le  concours  bien  entier  de  la  manufacture  mère  et  il  est 
permis  de  supposer  que  le  fait  que  nous  savons  avec  certitude, 
pour  une  réorganisation  précédente,  celle  de  Darcet  se  reproduisit 
en  1788.  Je  veux  parler  de  l'envoi  à  Limoges  d'artistes  et  d'ou- 
\Tiers  de  Sèvres  ;  ces  artistes  ont  bien  pu  apporter  un  goût  nou- 
veau à  Limoges. 

Notons  que  d'après  MM.  François  Alluaud,  la  fabrication  a  conti- 
tinué  pendant  la  direction  de  Massié  et  n'a  cessé  qu'à  la  vente 
de  la  Manufacture  Nationale  ;  car  Massié,  personnage  modeste, 
semble-t-il,  ne  manquait  certainement  pas  d'expérience  technique. 

par  la  famille  Aliuaud.  Sa  notice  prend,  de  ceUe  circonstance,  une  vérilabla 
aniorité  au  poiui  de  vue  docunieniaire;  mais  de  ces  citaiions  sur  lesquelles 
il  me  parait  nécessaire  d'appeler  Tattention  du  lecteur,  on  devrait  inférer 
que,  avant  1784,  il  y  eut  plusieurs  fabriques  à  Limoges,  ou  peut-ôlre seule- 
ment que  plusieurs  tentatives  plus  ou  moins  suivies  de  succès  eurent  lieu 
pour  en  établir;  mais  aucun  fait,  môme  incertain,  n'est  venu  jusqu'ici  don- 
ner quelque  poids  à  cette  présomption. 


92  SOCIÉTÉ   JLBCUÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   L1X0USI.>. 

Nous  ne  possédons  pas  encore  assez  de  renseignements  sur  les 
commencemenis,  à  Limoges,  de  la  fabrication  pour  pouvoir  formu- 
ler des  jugements  fermes  sur  ses  promoteurs,  cependant,  sous  le 
bénéfice  de  ces  réserves,  il  semble  que  Ton  puisse  établir  une 
grande  différence  entre  les  Grellet,  qui  nous  apparaissent  comme 
des  brouillons,  cependant  assez  adroits  dans  la  sauvegarde  de 
leurs  intérêts  propres,  et  Massié,  ou  peut-être  les  Massié.  Encore 
une  fois,  Massié  paraît  avoir  été  un  personnage  modeste,  partant 
docile.  C'était  un  esprit  pratique,  et  il  n'avait  probablement  pas  ce 
tempérament  aventureux  qui  paraît  avoir  caractérisé  les  Grellet;  — 
il  semble,  notons  le,  qu'il  y  a  encore  à  distinguer  entre  les  deux 
frères.  —  Après  le  départ  d'Alluaud,  il  dirigea  donc  convena- 
blement la  manufacture —  tout  le  (ait  supposer,  du  moins;  en 
tout  cas  rien  n'est  venu  constater  jusqu'ici  qu'elle  ait  périclité 
entre  ses  mains.  Sa  production  a  pu  décroître  comme  quantité  sans 
que  la  qualité  ait  été  atteinte. 

Voici  la  liste  des  pièces  que  je  propose  d'attribuer  à  cette  der- 
nière période  : 

41*  Tasse  dite  trembleuse  ;  formes  très  décidément  conçues  dans 
le  style  nouveau;  la  soucoupe,  à  cavité  profonde  (trembleuse),  est 
à  bords  étroits,  relevés  ;  la  tasse  est  obconique,  de  galbe  très  sim- 
ple, deux  anses  en  «  grecques  »  à  lignes  inclinées  ;  la  partie  infé- 
rieure seule  présente  une  section  de  cercle.  Le  décor,  fort  savou- 
reusement  exécuté,  tout  en  or,  et  avec  une  liberté  véritablement 
artistique,  est  conçu  dans  le  goût  de  Salembier,  renouvelé  peut- 
être  par  une  inspiration  pré-révolutionnaire.  Sur  la  tasse  on  remar- 
que des  rinceaux,  dont  les  deux  nœuds  sont  surmontés  de  têtes  qui 
portent  des  coiffures  rappelant  le  bonnet  phrygien,  mal  déterminé* 
Des  médaillons  représentent  des  têtes  de  femmes  de  profil.  Sur  le 
marly  de  la  soucoupe,  décor  do  rinceaux,  mais  sans  aucune  repré- 
sentation figurée. 

Hauteur  (de  la  tasse),  9  c;  largeur,  9  c.  sans  les  anses,  avec  les 
anses,  M  c;  hauteur  de  la  soucoupe,  5  c;  largeur,  18  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Hugues  Dumas. 

U  me  paraît  de  toute  évidence  que  Ton  doit  attribuera  cette  pièce 
une  date  antérieure  ou  tout  au  moins  très  voisine  de  1789.  La 
forme  des  coiffures,  où  l'on  croit  reconnaître  des  bonnets  phrygiens, 
est  très  caractéristique;  il  importe  de  se  souvenir  que  ce  bonnet 
ne  doit  être  généralement  considéré  comme  un  attribut  purement 
révolutionnaire  que  lorsqu'il  a  sa  forme  classique,  pour  ainsi  dire; 
dans  un  grand  nombre  de  cas,  même  en  1793  le  bonnet  phrygien 


RSSAl   DE  CLAÇSinCATION   DES  ANCIENNES   PORCELAINES   DE   LIMOGES.         93 

a  conservé  une  forme  encore  hésitante,  si  Ton  peut  ainsi  dire  ;  ce 
doit  être  par  suite  dune  persistance  d'habitude  chez  les  artistes; 
dès  une  période  assez  ancienne  dans  le  xviii''  siècle,  le  bon- 
net phrygien  est  pris  comme  le  symbole  de  la  liberté;  mais  le  plus 
souvent  il  est  figuré  —  dirai-je  d'une  façon  fantaisiste  et  arbi- 
traire. 

Pour  revenir  à  notre  sujet,  la  forme  primitive  du  bonnet  (et  c'est 
à  peine  si  l'on  reconnaît  cette  coiffure)  indique  très  probablement 
une  époque  antérieure  à  la  Révolution.  La  qualité  de  la  porce- 
laine, la  limpidité  et  la  profondeur  de  Témail  caractérisent  une  très 
belle  fabrication;  il  me  paraît  donc  que  l'attribution  à  la  période 
qui  suivit  le  mouvement  de  renaissance  constaté  après  la  prise  de 
direction  par  M.  Alluaud,  il  me  paraît  donc,  dirai-je,  que  cette 
attribution  peut-être  soutenue. 

Il  est  bon  de  se  rappeler  que  Ton  a  dit  que  Limoges  avait  la  spécia- 
lité des  trembleuses  mais  ceci  ne  doit  pas  être  considéré  à  un  point 
de  vue  trop  exclusif,  car  au  xvm'' siècle  la  fabrication  des  trembleuses 
en  porcelaine  paraît  avoir  été  générale;  on  peut  rappeler  à  ce  propos 
que  les  faïenciers  qui,  on  le  sait,  fabriquèrent  fort  peu  de  tasses  (1), 
fournirent  cependant  l'idée  d'un  genre  de  trembleuses,  celles  ou  la 
partie  destinée  à  maintenir  la  tasse,  au  lieu  d'être  constituée  par 
une  cavité  de  la  soucoupe,  se  trouve  être  au  contraire  élevée  au- 
dessus  —  dans  ce  cas,  cette  partie  toujours  découpée  rappelle  la 
disposition  adoptée  pour  les  porte-huiliers  par  plusieurs  fabriques 
du  xvui*  siècle,  notamment  Moustiers,  Marseille,  etc. 

42*  Pot  à  eau  et  sa  cuvette.  Le  pot  à  eau,  en  forme  d'aiguière, 
est  porté  sur  un  court  piédouche  ;  l'anse,  élégamment  contournée, 
est  destinée  à  porter  une  attache  en  métal  (on  aperçoit  encore  ses 
traces),  se  rattachant  au  couvercle,  qui  manque  au  spécimen  du 
Musée.  Le  bec  est  bien  détaché. 

La  cuvette  est  de  forme  allongée,  se  terminant  en  ogive  aux  deux 
bouts,  forme  dite  en  bateau.  La  décoration  du  vase  est  constituée 
en  haut  par  une  frise,  entre  deux  filets  larges,  peinte  en  or  sur 
blanc  dans  le  style  de  Salembier;  le  corps  du  vase  est  revêtu  d'un 
fond  jaune  clair,  sur  lequel  se  détachent  des  papillons  et  des 
mouches  peints  au  naturel.  Le  piédouche  est  orné  de  deux  larges 

(I)Oq  peut  cependant  voir  au  Musée  Adrien  Dubouché  quelques  lassos  à 
café  en  faïence,  notamment  une  belle  Irembleuse  de  la  fabrique  d'Alcorn. 

Les  Italiens  fabriquaient  de  petits  plateaux  à  cavité  cenlrale  sur  les- 
quels on  présentait  des  verres  et  qui  sont  tout  à  fait  analogues  aux  sou- 
coupes de  00$  trembleuses. 


94  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUB   ET    BISTORIQUE  DU    LIMOUSIN. 

filets  entre  lesquels  court  une  guirlande  légère  ;  Tanse  et  le  bec 
sont  revêtus  d'une  couche  d'or  plein.  Le  centre  de  la  cuvette  est 
occupé  par  une  étoile  autour  de  laquelle  court  une  ornementation 
légère  :  le  tout  en  or.  Les  parois  sont  à  fond  jaune  clair  avec  pa- 
pillons peints  au  naturel  et  jetés  sans  ordre;  en  haut,  sur  le  bord, 
décoration  légère  en  or. 

A  l'extérieur,  filet  large  en  haut,  et  en  bas,  guirlandes  fixées  par 
des  attaches  (feuille  de  vigne),  au  milieu  de  chaque  guirlande,  un 
insecte. 

Hauteur  du  vase,  24c.;  largeur  (à  l'embouchure)  avec  le  bec,  11  c. 

Grand  diamètre  de  la  cuvette,  33  c;  petit  diamètre,  23  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

Cette  pièce  semble  bien  être  de  provenance  limousine,  outre  que 
les  pièces  de  formes  analogues  sont  fréquentes  dans  notre  fabrique, 
nous  constatons  certains  caractères  assez  décisifs  —  par  exemple 
la  forme  très  particulière  de  l'anse;  le  décor  à  fond  jaune  et  à 
papillon  date  la  pièce,  ainsi  que  les  ornements  dans  le  goût  de 
Salembier.  Nous  verrons  plus  tard  que  le  décor  à  papillons  a  été 
continué  au  commencement  de  ce  siècle,  mais  sa  combinaison  avec 
le  fond  jaune  indique  une  plus  grande  ancienneté. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  pièce  en  question  constitue  un  remar- 
quable spécimen  de  la  fabrication  limousine,  les  formes  surtout 
sont  d'une  bonne  composition;  l'originalité  a  été  trouvée  sans  qu'il 
ait  été  fait  appel  à  la  bizarrerie.  Nous  sommes  d'ailleurs  bien  évi- 
demment en  présence  d'un  objet  de  luxe.  Cependant  la  fabrication, 
et  surtout  la  décoration,  tout  en  étant  d'une  bonne  tenue,  n  ont 
rien  d'exceptionnel. 

43*  Tasse  droite.  A  la  base  se  trouve  un  petit  congé.  Anse  sim- 
ple sans  ressaut.  Le  décor  est  constitué,  en  haut,  par  une  cou- 
ronne or  (pipants)  entre  deux  filets  à  feuilles  alternées,  deux  par 
deux,  en  bleu  également  entre  deux  filets  or;  succession  de  guir- 
landes or  s'attachant  au\  derniers  filets;  bouquets  jetés  or  sur  la 
panse;  en  face  de  l'anse,  un  médaillon  formé  par  une  couronne  or; 
au  centre  une  rose  peinte  au  naturel  avec  feuillage  ;  en  bas,  deux 
filets. 

Hauteur,  8  c;  largeur  à  Fouverture,  8  c. 

Marque  :  un  C  en  or. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

On  trouve  au  Musée  trois  pièces  marqués  au  C.  Peut  être  fau- 
drait-il voir  dans  cette  lettre  l'initiale  du  nom  de  Clooslerman.  Cet 
artiste,  venu  en  Limousin  lors  de  la  reorganisation.de  la  Manufac- 


ESSAI    DE  «XASSIFICATION   DKS    ANCIENNES  PORCELAINES  DE   LIMOGES.         95 

lure  Royale  par  Darçet,  était  chargé  de  la  composition  des  cou- 
leurs. Il  a  été  occupé  à  la  fabrique  de  la  Seinie  à  Saint-Yrieix,  et  il 
me  semble  remarquer  enlre  le  ton  des  couleurs  employées  dans  la 
décoration  de  la  pièce  dont  je  m'occupe  et  celui  de  plusieurs  pièces 
de  Saint- Yrieix,  possédées  par  d'anciennes  familles,  une  grande 
analogie.  Mais  on  comprend  qu'il  ne  faut  peut-être  pas  faire  trop 
de  fond  sur  ces  similitudes  qui  peuvent  simplement  être  dues  au 
hasard. 

En  somme,  on  propose  ici  d'attribuer  à  l'annexe  des  pièces  qui 
appartiennent  à  diverses  catégories,  et  qui,  sous  beaucoup  de  rap- 
ports, se  diversifient  entre  elles;  nous  sommes  loin  de  l'homogénéité 
que  l'on  constate  dans  les  porcelaines  à  la  marque  G.  D.;  mais  cette 
variété  est  facilement  explicable  par  les  diverses  circonstances  de 
rhislolre  de  la  Manufacture  rappelées  brièvement  dans  ce  travail. 
Pendant  la  période  à  laquelle  il  paraît  possible  de  rattacher  les 
pièces  en  question,  l'annexe  a  changé  trois  fois  de  directeur  et 
nous  voyons  qu'elle  a  été  réorganisée  deux  fois  ;  d'autre  part,  la 
direction  Grellet,  tout  au  moins,  a  eu  deux  phases  signalées  plus 
haut,  et  il  paraît  bien  certain  que  les  pièces  fabriquées  dans  la  pre- 
mière de  ces  phases,  c'est-à-dire  immédiatement  après  la  réorga- 
nisation de  Darcet,  ne  pouvaient  ressembler  à  celles  exécutées 
pendant  la  seconde  de  ces  phases,  alors  que  les  mesures  prises  par 
l'illustre  chimiste  étaient  devenues  en  quelque  sorte  lettre-morte. 

En  résumé,  tant  de  causes  ont  pu  amener  la  diversité  des  pro- 
duits que  nous  ne  pouvons  pas  nous  étonner  de  ne  plus  trouver 
rhomogénéité  de  la  période  précédente. 

En  définitive,  et  on  ne  saurait  trop  le  répéter,  les  attributions 
proposées  ici  ne  s'appuient  que  sur  des  présomptions.  Les  faits  nou- 
veaux qui  Ton  recueillera  certainement,  si  l'on  veut  bien  s'en 
donner  la  peine,  confirmeront-ils  ou  infirmeront-ils  les  attributions? 
On  comprend  qu'il  est  impossible  de  le  décider  aujourd'hui. 

Nous  sommes  en  possession  d'un  certain  nombre  de  notions,  par 
suite  desquelles  les  attributions  proposées  ne  paraissent  pas  trop 
déraisonnables;  il  est  en  tous  cas  certain  que  la  manufacture  de 
Limoges  a  fabriqué  et  parfois  avec  activité,  de  1784  à  1795,  c'est-à- 
dire  pendant  onze  ans;  il  faut  bien  cependant  penser  que  certaines 
pièces  produites  alors  doivent  se  trouver  au  Musée. 

(A  suivre).  Camille  Leymaiue. 


LE  CHAPELET  A  LIMOGES 


DU  XV  AU  XVIIP  SIÈCLE 


J'ai  entrepris  d'écrire  l'histoire  du  chapelet,  qui  n'a  jamais  été 
faite,  malgré  la  popularité  de  ce  genre  de  prière.  Les  documents, 
que  je  recueille  patiemment  depuis  trente  années,  sont  si  nom- 
breux et  s'augmentent,  à  chaque  voyage,  d'une  façon  si  considéra- 
ble que  je  désespère  presque  d'aboutir.  J'ai  bien  fait  de  ne  pas 
presser  ma  publication,  puisque  j'aurais  omis  une  série  importante 
que  j'ai  eu  récemment  occasion  d'étudier  à  Limoges.  Le  point  de 
départ  de  mes  investigations  a  été  les  six  chapelets  de  pénitents, 
exposés  dans  la  salle  des  métaux  et  décrits  un  peu  trop  sommaire- 
ment par  le  catalogue. 

Qu'on  me  permette  donc  de  revenir  sur  la  question  pour  lui 
donner  tout  le  développement  qu'elle  comporte  et  aussi  pour  la 
compléter  autant  que  possible.  Je  crois,  en  ce  faisant,  être  utile 
et  agréable  à  la  Société,  dont  les  membres  m'ont  prêté  un  sympa- 
thique concours  lors  de  ma  visite  à  l'Exposition, 

L 

L'église  Saint-Michel-des-Lions  est  bien  sombre,  par  suite  des 
verrières  modernes,  trop  multipliées  et  trop  intenses  de  ton.  Ce- 
pendant l'œil  s'y  fait  et  finit  par  s'arrêter  aux  deux  beaux  vitraux 
de  l'arbre  de  Jessô  et  de  la  vie  de  saint  Jean-Baptiste,  qui  ornent 
le  chevet  à  l'orient.  Leur  restauration  n'est  pas  irréprochable,  car 
on  y  a  introduit  des  éléments  hétérogènes,  mais  l'ensemble  dit  une 
œuvre  remarquable,  contemporaine  de  la  construction,  c'est-à- 
dire  des  dernières  années  du  xv*  siècle. 

L'arbre  de  Jessé,  aux  vigoureux  rameaux  verts,  s'agrémente  de 
petits  tableaux  consacrés  à  la  vie  de  la  Vierge.  C'était  rationnel  : 


LE   CHAPELST  A  LIMOGES   DU   XV^  AU   XVIll®  SIÈCLE.  97 

Marie  est  la  tige  et  Jésus  la  fleur  de  Tarbre  mystique  (1),  la  mère 
est  l'aurore  de  ce  beau  jour  de  la  rédemption  dont  son  fils  est  le 
soleil  (2).  Ainsi  Ta  chanté  la  liturgie,  qu'il  faut  toujours  consulter 
pour  mieux  saisir  le  sens  et  la  portée  de  Ticonographie  du  moyen- 
âge. 

Je  ne  m'arrêterai  qu'à  une  scène,  celle  de  la  Visitation,  dont  un 
détail  n'a  peut-être  pas  été  observé  jusqu'ici.  Les  deux  cousines 
s'embrassent,  c'est  l'usage  :  la  Vierge  est  accompagnée  d'une  sui- 
vante, ce  qui  est  conforme  à  la  tradition,  mais  rare  à  cette  époque. 
Le  point  saillant  et  tout  à  fait  curieux  est  l'emploi  du  chapelet 
pour  ces  deux  personnages,  sous  deux  formes  différentes.  Celui 
de  la  mère  de  Dieu  est  droit,  pend  à  la  ceinture  en  avant,  est 
formé  de  grains  jaunes  et  terminé  par  une  houppe  :  son  vrai  nom 
est  dizain^  parce  qu'en  général  il  ne  comportait  qu'une  dizaine 
d'Ave.  Aux  xv*  et  xvi'  siècles,  le  chapelet  était  devenu  un  objet  de 
toilette  (3);  les  femmes  le  portaient  à  la  ceinture  comme  ornement 
et  le  décrochaient  quand  elles  voulaient  s'en  servir  pour  prier.  Les 
grains  étaient  souvent  en  orfèvrerie,  de  là  la  couleur  d'or  admise 
par  le  verrier;  ils  s'enfilaient  dans  une  cordelette  de  soie  qui, 
nouéeàl'extrémitépourlesarréter,  se  terminait  par  une  houppe(4). 
La  houppe,  usitée  encore  à  Rome,  n'est  autre  chose,  à  l'origine, 
que  l'eflaié  produit  naturellement  par  l'écartement  des  brins  de 
la  cordelière. 

On  pensait  donc  à  Limoges  que  la  Vierge  avait  récité  le  chapelet 
et  l'on  avait  raison,  car  telle  est  l'opinion  ecclésiastique  devant 
laquelle  ne  doivent  pas  reculer  les  archéologues  (5).  En  fait,  son 

(!)  a  Virga  Jesse  floroit,  Virgo  Deum  et  homînem  genuti;  pacem  Deus 
reddidil,  in  se  reconcilians  ima  summis  »  {Messe  votive  de  la  Vierge,  au 
Missel  romain). 

(t)  «  Hodie  nata  est  beala  Virgo  Maria  ex  progenie  l^avid,  per  quam 
salus  mundi  credenltbus  apparuit,  cujus  viia  glorioâa  lucem  dedil  sœculo  ». 
{Office  de  la  Nativité^  au  Bréviaire  romain),  —  «  Nalivitas  lua,  Dei  gc- 
iiitrix  Virgo,  gaudiom  annuntiavit  universo  mundo  :  ex  te  enim  ortus  est 
sol  justiliie,  Ghrislus  Deus  nosler  ».  (Ibid), 

(3)  «  ilodie  laotus  honor  ejusmodi  calculis  accessit  ut  non  modo  ex 
ligno,  saccino  et  corallio,  sed  ex  auro  argentoque  fiant  sinique  mulieribus 
instar  ornamenli  ô,  disait,  au  xvi*  siècle,  Polydore  Virgile,  dans  sou  traité 
de  Inoentoribus  rerum. 

(4)  Tombe  de  f500  (Léon  Gebmain,  Not,  sur  la  tombe  d^ Isabelle  de 
Musset,  à  Marcille.  Nancy,  1886). 

(5)  Des  émdits  d'un  certain  renom,  comme  Théophile  Raynaud  {Opéra, 
t.  VII,  p.  67),  attribuent  rinstilnlion  du  chapelet  à  la  Sainte  Vierge 
elle-même  et  citent  en  preuve  le  chapelet  conservé  à  Rome,  au  moins 
depuis   le  xni*  siècle,  parmi  les  reliques  de  sainte  Marie  in  Campi^ 


98  SOCrÊTé  AUCHtOLOGIQUR   RT   mSTORTQUR   DU    LIMOUSIN. 

chapelet  est  vénéré  à  Rome  Uans  une  église,  où.  chaque  année, 
s'en  failTostension  solennelle.  Historiquement  parlant,  Benoît  XIV 
reconnaît,  avec  sa  haute  science,  Tautorité  de  la  tradition  (i).  Marie 
y  récitait  des  versets  de  psaumes.  L'antiquité  du  chapelet  chré- 
tien se  démontre  par  la  conservation  de  cet  usage  chez  les  musul- 
mans (2),  qui  y  répètent  des  versets  du  Coran  (3)  :  ils  ne  l'ont  pas 

tellL  Jusqu'au  siècle  dernier,  on  lisait  encore  dans  cette  église  rinscriplion 
de  dédicace,  ainsi  conçue  :  a  In  nomine  Domini.  Amen.  Anno  1247,  Pou- 
tiGcaïus  Domini  Honorii  Papsie,  anno  ejus  secundo,  indiclione  6,  mensis 
aprilis  die  5,  consecrala  est  ecclesia  haec.  ab  eodem  Summo  PonltGce  ei 
universali  Papa,  per  cujus  sanclas  manus  reconditae  sunt  in  hoc  aliari 
Dcatae  Mariac  Virginie  multae  reliquiae  sanclorum  et  sanctarum,  videlicet 
de  ligno  Sanctae  Crucis,  de  lacté,  capillis  et  vestimenlis  gloriosae  Virginis 
Mariae  ;  item  pars  coronae  de  Pater  noster  Virginis  Variae.  » 

Ce  chapelet  existe  encore,  j'en  suis  positivement  certain,  mais  une  fausse 
honte  que  je  n'approuve  pas  empêche  de  Texhiber  seul  et  Ta  fait  reléguer 
parmi  les  reliques  suspectes.  Je  ne  saurais  donc,  puisque  je  ne  Tai  pas  vu, 
me  prononcer  sur  son  plus  ou  moins  d'authenticité,  mais  il  ne  me  répugne 
nullement  a  priori  de  croire  qu'il  a  pu  servir  à  la  mère  de  Dieu.  Lors 
même  qu'il  serait  apocryphe,  ce  serait  encore  un  argument  en  favear  de  la 
thèse  queje  soutiens,  car  il  attesterait  une  opinion  (iéjàancienne  au  xni^  siècle. 

Au  pignon  du  transept  nord  de  la  cathédrale  de  Reims,  le  xv«  siècle  a 
sculpté  la  scène  de  l'Annonciation,  où  Marie  est  figurée  récitant  son  cha- 
pelet, il  n'y  a  pas  là,  comme  l'a  cru  Thistoricn  de  la  cathédrale  (Ch.  Cerf, 
Hist,  et  deacript.  de  AT.-D.  de  Reims,  t.  Il,  p.  63),  une  erreur  iconogra- 
phique, qui,  pour  certaines  gens,  tourne  même  au  ridicule.  En  effet,  avant 
l'Annoncialion,  la  Vierge  pouvait  fort  bien  réciter  des  versets  de  psaumes 
et,  après  l'Incarnation  du  tils  de  Dieu,  les  paroles  mêmes  de  Tange,  qui 
lui  rappelaient  ce  mémorable  mystère.  Les  évangiles  apocryphes  disent 
que  Marie  travaillait  lors  de  la  visite  de  Gabriel  :  lo  mosaïste  des  saints 
Nérée  et  Achillée,  à  Rome,  a  adopté,  au  i\°  siècle,  cette  opinion  et  a  en 
conséquence  placé  des  fuseaux  entre  ses  doigts.  Le  sculpteur  de  Reims, 
au  contraire,  et  avec  lui  l'art  presque  tout  entier  du  moyen-âge,  s'est 
conformé,  en  mettant  un  livre  aux  mains  de  la  Vierge,  à  l'opinion  suivie 
U  Loreite.  Dans  la  Santa  Casa,  Ton  montre  la  fenêtre  par  laquelle  l'ange 
entra  et  l'endroit  où  Marie  était  agenouillée  en  prière. 

(1)  a  Rosariu*Y)  ab  ipsa  beaiissima  Virgine Maria  potuisse  recitari......  ulte- 

rius  eadem  beaiissima  Virgo  Maria  salulalionem  angelicam  recltare  potuerit 
ad  revetandum  mysterium  exsalutalione  peractum.  b  {AnaL  fur,  pont.,  t.  IV, 
col.  1388). 

(2)  En  1863,  j'ai  vu,  au  musée  de  Limoges  (où  je  ne  l'ai  pas  retrouve 
celte  année),  un  chapelet  musulman,  dont  les  grains  noirs,  faits  avec  des 
algues  de  la  mer  Rouge,  sont  enBIés  dans  un  cordon  blanc.  Ces  grains  sont 
au  nombre  de  dix-neuf.  Le  chapelet  se  termine  par  une  pendeloque. 

(3)  «Je  m'étonne  que  les  Grecs  d'Athènes  aient  conservé  le  chapelet  turc  : 
ce  sont  des  crains  enfilés  dans  un  cordon  de  soie,  que  les  doigts  remuent 


LB   CHAPELET   A   LIMOGES   DU   XV'   AU   XVlll*   S'ÈCLR.  99 

inventé,  mais  le  trouvant  établi  ils  Tont  gardé  en  môme  temps  que 
le  culte  de  la  Vierge,  traitée  avec  le  plus  profond  respect  par  leur 
code  religieux. 

La  jeuoe  fille  qui  suit  Marie  a  un  livre  sous  le  bras  et  un  cha- 
pelet à  la  main.  Ce  chapelet  est  rond  et  à  grains  blancs,  en  cou- 
ronne, corona^  comme  disent  les  Italiens  (i).  Les  grains  sont  blancs, 
d'ordre  inférieur  relativement  à  Marie  dont  le  chapelet  est  d'or; 
mais  ils  sont  accompagnés,  en  manière  de  terminaison,  par  une 
petite  pièce  d'orfèvrerie,  espèce  de  médaillon  que  les  inventaires 
appellent  ;oj(au,  en  raison  de  sa  valeur  matérielle  et  artistique. 

Il  n'est  pas  malaisé  de  deviner  ce  que  signifient  ces  deux  cha- 
pelets. Les  deux  saintes  femmes  ont  prié  pendant  tout  le  temps  du 
voyage  à  travers  les  montagnes  :  Marie,  pour  saluer  sa  cousine,  a 
interrompu  sa  prière  et  accroché  son  chapelet  à  sa  ceinture;  mais 
la  suivante  a  continué  la  sienne,  parce  qu'elle  ne  prend  part  que 
comme  accessoire  à  la  scène  de  la  Visitation.  L'idée  est  vraiment 
touchante  et  plaît  par  sa  naïveté. 

II. 

Voilà  un  premier  fait  en  faveur  de  la  dévotion  au  chapelet  à 
1  jmoges,  à  une  date  ancienne.  Il  en  est  un  second,  à  peu  près  du 
même  temps,  qui  a  dû  aider  singulièrement  à  sa  propagation.  Le 
catalogue  inscrit,  dans  la  seclion  de  la  librairie  locale,  n""  211,  un 

perpéinellement  depuis  le  malin  jusqu*au  soir,  dans  la  maison  ei  dans  les 
roes.  Il  me  semble  que  c'esl  porle."  à  la  main  un  brevet  d'insouciance 
el  de  paresse.  Au  moins  les  Turcs  répètent  quelques  versets  du  Coran 
sur  leur  chapelet,  comme  sur  le  nôtre  on  récite  des  Aoe  Maria;  mais 
remuer  cet  ignoble  jouet  pourse  donner  une  attitude  dans  la  rue,  c'est  par 
trop  puéril.  »(Michoi«,  Voyage  religieux  en  Orientai.  1,  p.  188). 

{•)  Le  terme  couronne  est  le  plus  ancien,  pqisqu'il  figure  dans  lïns- 
criplioo  de  Sainte-Marie  in  Campltelli,  dès  1217,  c'est-à-dire  un  an  avant 
que  Saint-Dominique  instituât,  dans  l'église  de  Sainte-Sabine,  en  présence 
et  avec  rassenlimeni  d*Honorius  111,  la  confrérie  du  Rosaire.  Les  Italiens 
ont  gardé  Texpression  primitive  et  ils  disent  encore  corona,  comme  au 
XIII*  siècle,  et  ceux  qui  fabriquent  ou  vendent  les  chapelets  sont  en  consé- 
quence appelés  coronari.  Ils  avaient  même  autrefois  une  rue  spécialement 
affectée  à  ce  genre  de  commerce  et  ils  lui  avaient  transmis  la  dénomina- 
tion que  motivait  leur  industrie  :  Via  dei  Coronari. 

«  Le  langage  vulgaire  a  donné  le  nom  de  couronne  à  cette  manière  de 
prier,  parce  qu'elle  rappelle,  en  les  réunissant  par  les  plus  heureux  liens, 
les  grands  mystères  de  Jésus  et  de  Marie,  leurs  joies,  leurs  douleurs  et 
leurs  triomphes  »  {Encijcllq,  de  Léon  XIII  sur  le  Rosaire,  1891). 


100  SOCIÉTÉ   ARCRÉOLOGÎQUE   ET   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

Ordinaire  de  méditations,  «  indispensable  aux  personnes  pieuses  »  et 
ira  primé  à  Limoges,  par  Claude  Garnier,  Tan  1528.  Son  litre  est  : 
Ordinarium  devotarum  nieditationum,    devotis  ac    quibuscutnqne 

personis  quam  maxime  necessarium A  la  fin,  on  lit  :  Impressum 

Lemovicis  per  Claudium  GamieTy  commorantem  ante  divi  Sancti 
Martialis  monasterium.  1528. 

Ce  petit  volume,  qui  appartient  au  Séminaire  de  Limoges,  contient 
deux  longues  formules  pour  la  récitation  du  chapelet  médité.  Ce  cha- 
pelet est  de  cinq  dizaines.  Il  débute  par  le  Credo,  le  Pater  ei  VAve. 
Chaque  dizaine  comprend  dix  Ave,  précédés  chacun  d*un  quatrain 
en  vers  latins  (1),  où  est  successivement  passée  en  revue  toute  la 
vie  du  Christ;  c'est  ce  qu'on  nomme  les  mystères,  depuis  que 
saint  Dominique,  en  instituant  le  Rosaire,  a  augmenté  le  chapelet 
de  ces  considérations,  vulgarisées  sous  les  dénominations  de  mys- 
tères joyeux,  douloureux  ei  glorieux.  Les  dizaines  sont  entrecou- 
pées, non  par  des  Pater  simplement  comme  de  nos  jours,  mais  par 
la  répétition,  ainsi  qu'au  début,  du  Pater,  de  VAve  et  du  Credo, 

M.  Louis  Guibert  a  eu  l'obligeance  de  me  copier  ces  formules 
de  méditations,  qui  doivent  trouver  place  ici  malgré  leur  longueur. 
Je  rétablis  les  vers,  que  l'imprimé  gothique  ne  distingue  pas,  tout 
en  respectant  l'orthographe,  mais  non  la  ponctuation  qui  ne  ferait 
qu'embarrasser  la  lecture. 

LnGIPIT  ROSARIUM   VuiGliNIS  MaRIE. 

Et  primo  dicatur  Credo,  Pater  Noster,  Ave  Maria  et  simili  ter  post 
decem  Ave  Maria,  semper  usque  ad  finem. 

Suscipe  rosarium,  Quo  impregnata,  citius 

Virgo,  dcauralum,  Gognatam  visitasti 

Jesu  per  compendinm  Johannemque  celerius 

Vita  decoratum.  In  ventre  f;anctificasti . 

Aoe  Maria,  Aoe  Maria, 

Quem  Virgo,  carens  viclo,  Quem  civitate  Bethléem 

De  Flamine  concepisli,  Letanda  genuisli 

Dum  Gabrieli  nuntio  Ncque  dolorem  aliqucm 

Humilime  conscnsisti,  Gignendo  pcrlulisti. 

Aoe  Maria.  Aoe  Maria, 

(1)  Ces  méditations  en  forme  d'hymnes  me  font  présumer  que  le  chapelet 
se  chantait.  Le  rythme  est  précisément  celui  qui  revient  le  plus  fréquem- 
ment dans  la  liturgie;  il  était  donc  facile  de  lui  adapter  un  air  connu. 

Le  chapelet  se  chante  encore  dans  l'ilalie  méridionale,  entre  autres  à 
la  cathédrale  de  Bénévent,  rite  solennel  que  je  me  permets  de  recomman- 
der à  MM,  les  curés  pour  faire  diversion  à  une  récitation  monotone. 


LE  CHAPKLET    A    LIMOGES    l»U    XV«   AU   XVIllO   SIÈCLE. 


101 


Qucm,  régis  David  génère 
Mox  natum,  adoras ti 
Ac  vagienlem  ubere 
Virgîneo  lactasli(l) 
Aoe  Maria. 

Quein,pannis,  fasciis 
Constrictum,  reclinasti 
Et  suis  obsequiis 
Te  tolam  mancipasti. 
Aoe  Maria. 

Quem  magno  cum  Irepudio 
Angcli  laudavcrunt 
Pacemquc  c.um  gaudio 
In  terris  cecinerunt. 
Ave  Maria. 

Qaem  paslorem  omnium 
Pasiores  cognoverunt, 
Dnm  in  presepe  Dominum 
Jacentem  invenerunl. 
Arc  Maria. 

Qui,  juxta  ritum  hominis, 
Passus  circumcisionem, 
Dulcis  Jésus  Nominis 
Cepit  imposilionem. 
Aoe  Maria. 

Qui  a  tribus  regibus 
Ferventer  adoratur 
Bfagnisque  muneribus 
Decenter  veneraiur. 

Pater  noster,  Aoe   Maria^ 
Credo  in  Deum. 

Quem  die  quadragesima 
In  templo  presenlasti 
Ac  Moysi  légitima 
Spontanée  subiisti. 
Aoe  Maria. 

Quem  Herodem  fugiens 
Egipto  adduxisti, 
Tandem  inde  rediens 
Ad  Nazarelh  venisti. 
Aoe  Maria. 


Quem  ad  feslum  Iransicns, 
Dolenler  perdidisti, 
Scd  mox  templum  adiens, 
Gaudenter  reperisti . 
Aoe  Maria. 

Quem,  manuum  per  opéra, 
Sollicite  nutrisli» 
Et  in  etate  tencra 
In  omnibus  providisti. 
A  oe  Maria, 

Quem  Jordanis  flumine 
Johannes  baptizavil, 
El  agnoscens  nomine, 
Digilo  monstravit. 
Aoe  Maria. 

Quem  Sathanas  astuciis 
Trifarie  templavit, 
Salvatorem  versuciis 
Prudenter  obviavit. 
Aoe  Maria. 

Qui,  tuo  pro  oraculo, 
Aquam  in  vinum  mutavil. 
In  quo  8U0  miraculo 
Discipulos  confirmavic. 
Aoe  Maria. 

Qui  obsessos  plurimos 
Dcmonibus  salvavit, 
Ac  infirmos  variis  (2) 
Languoribus  curavil. 
Aoe  Maria. 

Qui  Lazarum  cum  fîlio 
Vidue  suscitavit, 
Puellam  cum  prodigo  (aie) 
Ad  vitam  revocavit. 
Aoe  Maria. 

Qui  cum  pecatoribus 
Fréquenter  manducavit 
Hiisque  penitentibus 
Peccala  relaxavit. 

Pater  Noster.  Aoe  Maria*  Credo 
in  Deum. 


(i)  L'adoration  du  nouveau-né  commence  avec  le  xv«  siècle.  Tallaitc- 
ment  se  constate  dès  le  siècle  précédent  et  môme  plus  anciennement. 
(2)  Sic  pour  Ac  oariis  infirmas. 

T.  xixix.  7 


fOl 


S0€i6tB  ARGBfiOLOeiQOK  VT  BISTORIQUI  DU  LIMOUSIK. 


Cuius  pedes  laenmîs 
Peccalrix  irrigavit 
Dolensqae  ex  ialimis 
Veniam  impetravîL 

Ave  Maria. 
la  monte  Thabor  dcforis 
Qui  transfiguratur 
Et  gloriosi  corporis 
Maiestas  declaratur. 

Aoe  Maria. 
Gum  palmis  celeriter 
(1)  ...  quem  dixeronl 
Yespere  sed  tarpiter 
Vacuum  dimiserunt. 

Aoe  Maria, 
Id  cena  qui  novissima 
Pedes  suorum  lavit 
Escaque  nobilissima 
Cum  sanguine  cibavil. 

Ave  Maria. 

In  orto  mente  anxia 
Prolixe  qui  oravil 
El  aquam  pre  trisiilia 
Cum  sanguine  sudavil. 
Aoe  Maria. 

Quem  viri  maieficî 
Crudeliter  vinxerunl 
Anneque  pontifici 
Ligalum  adduxerunt. 
Ave  Maria. 

Vultum  cujns  turpibus 
Spulis  macuiabant 
El  pugnorum  ictibus 
Dire  verbcrabant. 
Aoe  Maria, 

Quem  Pilati  sedibus 
Damnandum  prescntabant 
Atque  falsis  testibus 
Dolose  accusabant. 
Aoe  Maria, 

À  Judeis  exhibitum 
Herodes  quem  immisit, 
Sed  per  despeclum  habilum 
Ut  fatuum  remisil. 
Aoe  Maria, 


Quem  indutum  purpura, 
Coiumne  ailîgatum, 
Corona  pungit  spinea, 
Flagcilis  verbe  ra  tu  m. 

P€Uer  Noster.  Ave  Maria   Credo 
in  Deum, 

Quem  confossum  vulncribus 
Milites  subsannaverunt 
Ac  :  Crucifige  !  vocibus 
Conclamaverunt. 

Ave  Maria. 
Ut  reum  quem  sceleris 
Pilatus  condemnavit 
Crucis  iignum  humerts 
Propriis  baiulavit. 

Ave  Maria, 
CaWarie  quem  vestibus 
Loco  cnierant, 
El  manibus  cum  pedibus 
Cruci  affixerunL 

Ave  Maria. 

Pro  suis  lorloribus 
Attente  hic  precatur, 
Dum  crucis  doloribus 
Extensus  tenebatur. 
Ave  Maria, 

Qui  latroni  omnia 
Criminn  dimisil 
Ac  paradisi  gaudia 
Illico  promisit. 
Ave  Maria. 

Qui  Johanni  discipulo 
Te  matrem  commcndavit, 
Quem  tibi,  in  patibulo. 
In  Glium  donavit. 

Ave  Maria, 
Qui  se  relictum  omnibus 
Discipulis  querebatur, 
Inimicorum  vocibus 
Turpiter  blasphematur. 

Aoe  Maria. 
Cuiy  dum,  exhauslis  viribus, 
Sitio!  cantavit, 
Fei  et  acelum  faucibus 
Miles  propinavit. 

Ave  Maria. 


(1}  Il  y  ft  ici  viiiblement  un  mot  sauté,  peut-être  regem. 


T.B   CHAPKLKT  A   LIMOGES   DU   XV«  AU   XVVl"  SIÈCLK. 


10.*) 


Qui  prophetarum  édita 
Gonsummans  passionc, 
Primi  parenlis  débita 
Persolvil  ratione. 
Aoe  Maria, 

In  maDas  Patris  tradidit 
Spiritom  preciosum, 
A)U  voce  dam  edidit 
Caniicum  dulcorosum. 

Paier  noster.  Aoe  Maria, 
Credo  if\  Deum, 

Cruels  mortem  subjiclcns, 
In  pace  obdormivit, 
Electos  eripiens 
in  eternum  iolroTrit. 
Aoe  Maria, 

Salelles  lalus  Doinini 
Lancea  perfora  vit 
Hinc  aqua  juncto  sanguine  {sic] 
Habunde  emanavit. 
Aoe  Maria. 

Gujus  corpus  sanclissimum 
Decruce  receperunt 
Et  sepdchrum  roundissimum 
Eidem  aptaverunt. 
Aoe  Maria, 

Qui  virtttle  propria 
A  morte  resurrexit, 
Teque  a  Iristilia 
Discipulosque  erexit. 
Aoe  Maria. 

Super  celorum  sidéra 
Ascendit  virtuose 


Atquc  in  Patris  dcxlera 
Rcsidet  gloriose. 
Aoe  Maria, 

Qui  te  super  cthcra 
Polenter  exallavit 
Et  in  sua  dextera 
becenter  collocavit. 
Aoe  Maria, 

Propter  mundi  scelera 
Qui  judcx  est  venturus, 
Singulorum  opéra 
Strenue  discussurus. 
Aoe  Maria. 

Diraque  supplicia 
Est  reprobis  daturus, 
Sed  electis  gaudla 
Eterna  coUocaturus. 
Aoe  Maria, 

Oranlibus  rosarium 
Aureum  tue  matris, 
Jesu  Xriste,  propilium 
Fac  vultum  tui  Pairis. 

Amen,  Pater  noster,  Aoe  Maria, 
Credo  in  Deum, 

f.  In  omni  tribulationc  et  angustia 
nostra. 

4.  Succurre  nobls,  beatissima  Mater 
Maria  ! 

Oratio,  —  Interveniat  pro  nobis, 
quesumus,  Domine  Jhesu,  nunc  et  in 
bora  mortis  noslre,  apud  luam  cle- 
mentiam  gloriosa  Vlrgo  Maria,  mater 
tua,  cujus  sacraiissimam  animam  in 
bora  passionis,  etc. 


Oratio.  —  Sanctlssima  et  incontaminata  Virgo  Maria,  deprecor  te  per 
iliod  donum  charitalis  quo  te  Deus,  etcrni  Patris  filius,  pre  omnibus  dita- 
tavit  mulieribus,  quod  me,  famulum  tuum,  N...,  vigilantem,  dormienlem, 
die  noctuquc  piis  precibus  tuis  defendcrp  et  liberare  digncris  a  subilanca 
et  improvisa  morte,  ab  infcstalione  et  illusione  dyabolica,  atque  in  hora 
cxitus  mci,  ab  eterna  damnatione.  El  si,  caslissima  virgo,  in  aliquo  de- 
licto  sivc  veniali  peccato  filium  tuum  unquam  offendi  vel  commisi  («îc), 
auxlliare  mihi,  quum  cum  taii  penitenlia  possum  eum  quercre  ut  mcrear 
tandem  sacrum  ejus  suscipere  atque  in  regno  celorum,  electis  ej us  sociari. 
Qui  vivis  et  régnas,  Deus,  per  omnia  secula  seculorum.  Amen, 


ioi 


SOCIÉTÉ   ARCBÉOLOGIQUB   ET   HISTORIQUE   DU  LtMOUSI!!. 


Sequilur  aliud  rosarium  Virginis  Marie  :  polest  dici  modo  istud,  modo 
aliud. 

Preambulum 

Vir  bonus,  eximiam  Yementes  rosas 

Solitus  salutare  Mariam,  Redolentes  et  spctiosas, 

Quinquagcsiesavcdiûcbatregineceli.  PerHcientes  sertum 

Non  desinit  servo  fideli.  Nimis  odore  refcrtum. 

Virgineo  more  In  caput  hoc  geslans, 

Cujus  suscepit  ab  orc.  Scandit  super  elhcra  rcgnans. 

Inde  cepit  ortum  sertum,  nunc  naufrago  portus  [sic). 

Post  dicat.  —  Pater  Noster.  Ave  Maria.  Credo. 

OrcUio,  —  Suscipe,  benignissima,  dulcissima  atque  gloriosissima  Virgo 
Maria,  a  me  indigno  peccatore  iliud  suave,  iocundum  et  salulifcrum  verbum 
quod  tibi  a  Domino  per  Gabrieiem  archangelum  transmissum  est. 


Primus  articulas, 

Gaudc,  Virgo,  jure  matris, 
Uue  splendorem  Dei  Patris 
Goncepisli  celitus. 
Ave  Maria, 

Que  Jobannem  illustrasli 
Ut  cognatam  visilasti, 
Donis  Sancti  Spiritus. 
Aoe  Maria, 

Quem  gestans  sine  tedio, 
Ënixa  es  cum  gaudio, 
0  Virgo  singularis. 
Aoe  Maria. 

Verbum  Patris  carnem  factum 
Ex  tuo  lacle  pastum 
Ul  Dcum  veneraris. 
Aoe  Maria. 

Quem  mox  pannis  involvisti, 
In  presepe  posuisli  ; 
Nec  dura  reprobavit. 
Aoe  Maria. 

Quem  celorum  exercilus 
Glorificat,  et  Angélus 
Tune  natum  nunciavit. 
Aoe  Maria. 

Quem  paslores  quesierunt, 
Bethléem  hune  invenerunt 
Flentem  in  presepio. 
Aoe  Maria. 


Qui  carne  circunciditur, 
Tlli  nomen  imponitur 
Die  Icsus  octavo. 
Aoe  Maria. 

Quem  très  magi  adoraverunt 
Verum  Deum  declararunt 
Mislicis  muneribus. 
Aoe  Maria, 

De  quo  Simeon  letatur 
Dum  in  templo  presentatar 
Tuis  sanctis  manibus. 
Pater  Noster.  Aoe  Maria,  Credo, 

Secundus  articulus. 

Cum  quo  merens  aufugisti 
In  Egiplum,  et  redisti, 
Montta  ab  angelo. 
Aoe  Maria. 

Quem  non  sponte  perdidisti, 
Post  très  dies  invenisti 
Hierusalem  in  templo. 
Aoe  Maria, 

Quique  malrem  consolatur 
Quando  pie  querulatur, 
Exhibons  sese  subditum. 
Aoe  Maria. 

Hic  est  tuus  commensalis, 
Quem  terdenis  annis  alis 
De  labore  manuum. 
Aoe  Maria. 


LE   CHAPKLET   A   LIMOGES   DU   XV«   AU   XVUI«   SIÈCLE. 


10» 


Quem  Johannes  baptizavit 
In  Jordane,  sed  expavit, 
StapcQsde  miraculo. 
Aoe  Maria, 

Quem  mox  démon  ter  tentavit. 
In  deserto  Salhan  slaluit 
Monte  et  pinaculo. 
Aoe  Maria, 

Nuptiis  congratulatur, 
Fons  in  vinum  transmutatur 
Prêter  rerum  ordinem. 
Aœ  Maria, 

Cum  immundo  predicavit, 
Multos  languidos  curavit, 
Pavit  multiludinem. 
Aoe  Maria. 

Lazanim  flens  suscitavit, 
Omnem  mortem  effugavit 
Corporis  et  anime. 
Ave  Maria, 

Cujns  pedes  Magdalena 
Abluil,  ardore  plena  : 
Munda  sit  a  crimine  ! 
Aoe  Maria. 

In  Thabor  monlis  vertice, 
Splendet  ut  sol  mirifice 
Corn  nimiocandore. 

Aoe  Maria,    Pater    Noster. 
Aoe  Maria.  Credo. 

Tertius  articulas. 

Cai  tnrbc  ludeorum 
Salvatori  populorum 
Occurrunt  cum  honore. 
Aoe  Maria, 

Corpus  suum  salulare 
Dans  et  sanguinem  gustarc 
Se  nobis  commendavit. 
Aoe  Maria. 

Ex  honore  et  pavorc 
Immineniis  roortis  bore 
Ta  ne  sanguinem  su«Javit. 
Aoe  Maria, 


Quem  ludei  et  gens  ausa, 
Ut  lalronem,  sine  causa 
Vinclis  stringunt  fortiter. 
Aoe  Maria. 

Anne,  Gaypbe  delatus 
Et  ad  mortem  accusât  us, 
ludicatur  turpiter. 
Aoe  Maria, 

Gujus  vuUum  speciosum 
Et  aspectum  graciosum 
Velabant  conspuentes. 
Aoe  Maria. 

Quem  maliciose  Icdunt, 
Golaphis  et  palmis  cedunt, 
Ac  piios  evellenles. 
Aoe  Maria. 

Purpura  et  alba  veste 
Slat  illusus  inhoneste  : 
Pellitur  e  limine. 
Aoe  Maria. 

Qui  columne  alligalur, 
Innocenter  flageilatur, 
Tolus  rubet  sanguine. 
Aoe  Maria. 

Dire  spinis  coronalur, 
Genu  ûexo  salutalur, 
Gesus  est  arundine. 
Aoe  Maria, 

Quem  gens  sua  reprobavit, 
Hune  Pilatus  condcmnavii 
Absque  legis  ordine. 

Aoe  Maria.  Pater   Noster, 
Maria.  Credo , 

Quart  us  articulus. 

Gum  scelcslis  dcpulalus, 
Crucem  portât  incurvatus  : 
Slcrnitur  sub  pondère. 
Aoe  Maria. 

Pius  scxtus  (I)  lacrimatiir: 
Mei  causa  conleslaliis(stc}. 
Flelum  noli  fundore. 
Aoe  Maria. 


Aoe 


{D  Scxas. 


lOG 


SOCIÉTÉ  ARCUÉOLOGIQUE  El  filSTORIQDE   DU   LIMOUSIN. 


Quem  nudatum  crucifigunt; 
Sacrum  corpus  sic  affligunt 
Tensum  crudelissine. 
Aoe  Maria, 

Cujus  arlus  el  junclure 
Disrumpuntur  :  vis  nature 
Dolet  amarissime. 
Aoe  Maria, 

Huic  dolori  addiderunl; 
Vach  !  ludei  clamaveruot, 
Vexantes  blasphemiis. 
Ave  Maria. 

Pro  his  Palrem  rogai  mère 
Qui  eum  crucifixere  : 
Parce,  inquit,  nesciis! 
Aoe  Maria, 

Ipse  peudens  cum  latrone, 
Amen  !  dixit  in  agone  : 
Mecum  eris  cilius. 
Aoe  Maria. 

De  (1]  lohanni  commendavit; 
Illum  tibi  adoptavit 
Ut  sit  tuus  filius. 
Aoe  Maria, 

Gemens  spirat,  et  post  pauca  : 
Hely  !  clamât  voce  rauca  ; 
Est  vox  isla  flebilis. 
Aoe  Maria. 

Fel,  acelum  et  mirrhatum 
Vinum  gustat  sibi  datum, 
Siticns  et  dcbilis. 
Aoe  Maria. 

Filius  intacte  matris 
Tune  in  manu  Dei  Patris 
Commendavit  spiritum. 

Aoe  Maria.    Pater  Noater,   A 
Maria,  Credç. 

Quintuê  articulas. 

Consummatum  exclamavii, 
Lachrimando  expiravit, 
Matris  solvit  debitum. 
Aoe  Maria. 


Ecce  agnus  immolatur, 
Tanquam  reus  morti  datur, 
Reos  solvens  crimine. 
Aoe  Maria. 

Cujus  laïus  perforavit 
Miles,  hastam  cum  vibravil, 
Fluxit  unda,  sanguine. 
Aoe  Maria. 

Terra  tremuit,  sol  expavit  : 
Heu  I  cor  meum  obduravit, 
Adamanie  durius. 
Aoe  Maria. 

Virgo,  trita  margarila, 
Utinam  me  pungat  ila 
Tui  cordis  gladius. 
Aoe  Maria. 

Quem  de  cruce  déponentes, 
Viri  iusti,  tecum  flenies, 
Tibi  daot  mestissime. 
Aoe  Maria. 

Quem  In  novo  monumenlo, 
Precîoso  cum  pigmento, 
Condunl  honestissime, 

Aoe  Maria. 

Limbumpatrum  penetravil, 
Consolatur  quos  amavii, 
Vinctos  inde  libérât. 

Aoe  Maria. 

Post  hec  surgens  in  triduo, 
Immense  fulgens  gaudio, 
Valde  te  letiticai. 
Aoe  Maria. 

Rapit  nubes  hune  repente; 
De  Celum  scandit,  te  videnie, 
In  virtute  propria. 
Aoe  Maria. 

Inde  misit  quem  promisit, 
Pneuma  sacrum  quod  immisit, 
Pau  pe  ru  m  precordia. 

Aoe  Maria. 


{^)  Te. 


LE  CHAPELET  A  LIMOGES   DU   XV«  AU  XVIII®  SIÈCLE.  107 

Super  elhera  elevans  -t.  Ora  pro  nobis,  Sancla  Deî  genitrix. 

El  in  dexlra  le  collocaos,  i^.  Ul  digni  efticiamup,  elc. 

AdfocaUm  conslUuit.  Oratlo.  —  Deus,  qui  nobîs  vilam 

Aoe  Mctria,  unigenili  lui  Domini  nostri  lesu  Xrisii 

Que  celi  scandis  verliccm,  ^^  gloriose  virginis  Marie,  matris  eius, 

Placalum  Dobis  Invicem  (4)  sedula  devolione  ia  rosario  recensere 

Reddas  ac  propicium.  concedis,  presia  nobis,  quesumus,  ut 

Aoe  Maria.  eorum   pie  conversaltonis  sequamur 

exempla,  amborumque  suffraganlibus 
AntipAoaa.   —  Laos,  gratiaruinaciiOj„griiis,  et  vilam  nostram  emendemus, 

Su  Marie  cum  Filio    ^^  e^érne  beaiiiudinis  premia,  te  do- 
Nuncelinperpetuum.njnte,  consequamur.    Per    eumdein 
Amen.  Xrislum  Dominum  nosirum. 

t<  Ostende  nobis^  Domine,  etc.  Amen. 


III 

Le  xvu*  siècle  est  largement  représenté,  à  la  fois  par  des  imita- 
tions de  chapelets  et  des  chapelets  en  nature. 

Quatre  chapelets  sont  figurés  sur  des  émaux  peints,  comme 
attribut  spécial  de  saint  Antoine,  de  saint  François  d'Assise,  de 
saint  Ignace  de  Loyola  et  d'une  veuve. 

l.Le  chapelet,  à  partir  du  xv"  siècle,  compte  parmi  les  attributs  de 
saint  Antoine  le  Grand,  abbé  en  Thébaïde  :  il  le  tient  à  la  main  ou 
à  la  ceinture.  Ce  n*est  pas  un  anachronisme,  car  on  sait  par  This- 
toire  que  telle  fut  la  prière  ordinaire  des  pères  du  désert,  pas  sous 
cette  forme  peut-être,  mais  au  moins  d'une  façon  analogue  (2). 

(1)  Judicem. 

(9)  De  la  Vierge,  le  chapelet  s*cst  transmis  aux  apôtres  et  le  plus  ar- 
dent à  le  propager  fut  saint  Barthélémy.  Voici  ce  qu'en  dit  le  bienheureux 
Alain  de  La  Roche,  dans  son  Psautier  du  Christ  et  de  Marie  :  u  Sanclus 
Barlholomaeus  apostolus  quoque  eam,  hoc  est  Angelicam  salutationem  et 
die  centies  et  centies  nocle  fréquentasse  proditur  cum  tolidem  adgenicu- 
lationibus.  Quo  in  numéro  quater  insunt  quinquagenae,  quarum  très  sic 
oratse  psalterium  Christi  Jésus  conslituunt,  ex  centum  quinquaginta  Domi- 
nicis  oralionibus  conslans  :  siculi  illud  ex  tolidem  Angclicis  salu lationibus 
dictis  Marias  efficit  psalterium.  Quarlam  vero  quinquagenam  adjccit  apos- 
tolus  ob  devolionis  causam,  ipsi  Deoque  notam.  Inde  Ecclesia,  seu  con- 
gregatio  christifidelium,  ciipiens  imilari  exemplum  orandi  synagogae,  ad 
modum  psalterii  Davidici,  quod  centum  quinquaginta  psalmis  complclur, 
eumdem  ad  numerum  tolidem  oraliones  Dominicas  et  Ângellcas  saluta- 
tiones  junclim  suis  in  comprccationibus  usurpavil  »  (Bcncdict.  XIV,  ap. 
Anal,  fur,  pont.,  t.  IV,  col.  4389). 

Au  IV®  siècle,  Tusage  du  chapelet  est  IM  d'une  manière  înconlcstable 


f08  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   BISTORIQUE  PO   LIMOUSIN. 

Sur  l'émail  de  TËxposilion,  le  chapelet  est  passé  à  la  ceinture,  ses 
grains  sont  gris  et,  à  la  suite  de  la  couronne,  pendent  trois  grains 
et  une  croix  à  branches  égales.  Voici  donc  le  troisième  mode  de 
terminaison  :  nous  avions  vu  précédemment  la  houppe  et  le  joyau, 

2.  Saint  François  d'Assise  a4-il  dit  le  chapelet?  C'est  possible, 
mais  rien  ne  le  prouve;  en  tout  cas,  il  ne  l'a  pas  imposé  à  son 
ordre.  Le  chapelet  qui  porte  son  nom  est  faux  et  a  été  condamné 
par  Rome  (1).  Je  ne  le  trouve  pas  avant  le  xvi*  siècle  comme  partie 
intégrante  du  costume  franciscain.  Attribuer  le  chapelet  à  saint 
François  est  une  erreur  archéologique  et  iconographique.  Jacques  I 
Laudin  (1627-1695),  en  le  lui  mettant  au  côté  droit,  n'a  pas  cher- 
ché ailleurs  son  modèle  que  sur  les  franciscains  qu'il  avait  sous 
les  yeux,  mais  il  l'a  singulièrement  embelli  en  faisant  ses  grains 
d'or,  ce  qui  est  absolument  contraire  au  vœu  de  pauvreté  et  à  la 
pratique  universelle  de  l'ordre. 

3.  Les  Jésuites  ont,  dès  l'origine,  adopté  le  chapelet  que,  dans 
toute  rilalie,  ils  portent  ostensiblement  au  côté  :  c'est  un  accessoire 

par  l*historien  ecclésiastique  Sozomène,  qui  en  indique  également  la 
forme.  Quand  saint  Paul,  premier  ermite,  voulait  prier,  il  prenait  autant 
de  petits  cailloux  qu'il  avait  d'oraisons  à  réciter  et  il  les  rejetait  au  fur  et 
à  mesure  qu'il  avait  terminé  Toraison.  Oi)  remarquera  le  nombre  de  trois 
cents,  qui  est  juste  le  double  du  nombre  des  psaumes  de  David  et  des 
oraisons  établies  par  saint  Barthélémy,  ce  qui  équivaut  à  dire  que  saint 
Paul  récitait  son  chapelet  deux  fois  par  jour.  «  Orationi  tantum  vacabal, 
trecentas  orationes  velut  tributum  quoddam  quotidie  persolvens  Deo.  Ac 
ne  forte  aberraret  ab  iategro  numéro,  trecentis  lapidibus  in  sinum  suum 
congestis,  ad  singulas  precationes  singulos  projiciebat  lapides.  Assump- 
tis  itaque  lapillis,  planum  fîebat  orationes  numéro  lapillorum  aequales  jam 
compte  visse  ». 

Percez  ces  cailloux,  eniilez-les  et  le  chapelet,  celui  que  nous  avons,  est 
définitivement  constitué- 
Quelque  simple  que  fût  ce  système,  il  a  fallu  encore  que  plusieurs  siè- 
cles s'écoulassent  avant  son  invention  et  établissement  défiuiiif.  Au  rapport 
de  Polydore  Virgile,  appuyé  par  le  témoignage  non  suspect  du  domini- 
cain Fernandez,  Pierre  l'Ermite  l'aurait  trouvé  en  4090,  à  l'époque  de  la 
première  Croisade  :  a  Modum  orandi  pcr  calcules  quinquagiuta  quinquc 

ita  ordine  dislinctos,  ut  post  dcnos  singuli  majusculi  affigantur  filo et 

quoi  hi  suni  loties  Dominicam  prccem,  quoi  illi  loties  angelicam  salula- 
tionem,  ter  numerum  ineundo  recitant,  terque  symbolum  brevius  insé- 
rant, quod  Deiparae  Virginis  psalterium  nuncupant  invenil  »  (Benedicl. 
XIV,  ap.  Anal,  fur.  pont,,  col.  1391). 

(I)  Dknrdict.  XIV,  ap.  AnaL  jur,  pont.^  t.  IV,  col.  4393.  La  condam- 
nation émane  d'Alexandre  VII  i,V.  le  Bull,  rom  ,  l.  Vi,  n°  149). 


LK    CHAPEt.F.T    A    L1U0GKS    DU    XV<^    AU   XVIll^   SIÈCLE  109 

du  costume.  Pourquoi  n'en  est-il  pas  de  même  en  France?  Jac- 
ques II  Laudin  (1663-1729)  n'a  pas  oublié  celte  caractéristique  sur  * 
son  bel  émail  de  saint  Ignace  de  Loyola  et  là  nous  constatons  une 
quatrième  terminaison,  qui  est  la  croix  combinée  avec  le  joyau.  En 
effet,  après  la  couronne  vient  une  croix,  puis  un  médaillon  qu'or- 
nent quatre  perles,  qui  sont  peut-être  simplement  les  saillies  glo- 
bulées  de  la  monture.  Le  médaillon  est  bien  petit  pour  qu'on  puisse 
en  déterminer  la  matière  et  l'objet  :  je  crois  volontiers  à  une  mé- 
daille,  usage  qui  s'est  maintenu  aux  chapelets  de  Rome,  où  la 
croix  terminale  est  beaucoup  moins  usitée.  Cette  médaille,  suivant 
les  analogues,  est  frappée,  d'un  côté,  à  l'effigie  de  la  mère,  puis- 
que le  chapelet  lui  est  dédié  [Rosarium  Virginis,  dit  l'Ordinaire 
limousin)  et  de  l'autre,  à  celle  de  son  divin  fils,  que  la  même  dé- 
votion lui  associe  par  la  récitation  du  Pater.  J'aimerais  voir  revi- 
vre en  France  cette  pieuse  coutume,  dont  le  symbolisme  est  si 
expressif. 

4.  Jja  veuve,  peinte  par  Jacques  I  Laudin,  a  les  larmes  aux  yeux. 
Elle  pleure  un  époux  chéri.  Voilée  de  son  manteau  noir,  les  mains 
gantées  de  noir,  elle  égrène  un  chapelet,  priant  pour  celui  qui 
n'est  plus  et  cherchant,  dans  un  souvenir  affectueux,  à  faire  du 
bien  à  l'àme  qu'elle  voudrait  soulager,  au  cas  où  elle  souffrirait  dans 
les  flammes  expiatrices  du  purgatoire.  Touchante  expression  de 
l'amour  vraiment  chrétien  qui  survit  à  la  tombe  !  Ce  chapelet  a  des 
grains  d'or  :  on  tenait  apparemment,  en  Limousin,  au  Rosarium 
aureum  dont  parle  l'Ordinaire  de  1523,  et  Ton  traduisait  littérale- 
ment une  épithète  qu'il  n'avait  employée  qu'au  figuré.  La  forme 
est  celle  de  la  couronne,  sans  l'addition  habituelle  d'un  prolonge- 
ment i*Ave  Maria.  La  croix  est  fixée  directement  à  la  corde- 
lière du  chapelet,  car  tous  les  anciens  chapelets  sont  enfilés. 

IV 

Passons  maintenant  aux  chapelets  eux-mêmes.  J'en  ai  eu  six 
entre  les  mains.  Quelques-uns  sont  décrits  dans  le  catalogue  de 
l'Exposition,  section  de  l'orfèvrerie,  aux  n*"*  121  et  suivants,  sous  le 
litre  de  Chapelets  de  pénitents.  M.  Louis  Guiberl,  dans  une  excel- 
lente brochure  intitulée  :  Les  confréries  de  pénitents  en  France  et 
notamment  dans  le  diocèse  de  Limoges,  nous  donne  ce  précieux  ren- 
seignement :  «  Le  costume  des  confrères  de  Limoges  était  analogue 
à  celui  de  toutes  les  autres  compagnies  du  même  genre  ;  seulement, 
au  lieu  de  porter  le  capuchon  généralement  adopté,  ils  avaient  un 
chapeau  pointu,  en  forme  de  cornet,  d'environ  deux  pieds  de  haut, 


\\0  SOCIÉTÉ  AHCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

d'où  tombait  un  voile  couvrant  le  visage.  Us  portaient  à  la  ceinture 
un  chapelet  sam  pompe  ni  superfltUtez.  Cette  recommandation,  bien 
qu'on  la  trouve  reproduite  dans  le  règlement  de  plusieurs  de  ces 
associations,  ne  fut  pas  longtemps  observée.  Dès  le  xvii*  siècle,  les 
pénitents  ornaient  leurs  chapelets  de  médailles  et  de  médaillons 
émaillés  à  double  face.  Il  y  avait  souvent  une  douzaine  de  ces  mé- 
daillons attachés  à  un  seul  chapelet,  les  membres  de  la  confrérie 
des  pénitents  pourpres  surtout  se  faisaient  remarquer  par  une 
véritable  profusionde  ces  ornements.  On  trouvait  encore  à  Limo- 
ges un  grand  nombre  de  ces  chapelets,  au  commencement  de  ce 
siècle  :  l'abbé  Texier,  Essai  historique  et  descriptif  sur  les  émail- 
leurs  et  argentiers  de  Limoges,  avertissement  »  (p.  103)  (1). 

Dans  ces  chapelets,  plusieurs  choses  sont  dignes  d'observation  : 
La  suspension  à  la  ceinture  à  Taide  d'un  anneau  (2),  le  nombre  des 
dizaines,  la  monture,  la  matière  des  grains,  les  médailles  d'argent 
ou  d'émail,  les  têtes  d'ivoire,  les  figures  de  métal,  le  mode  de  termi- 
naison, les  enseignes  de  pèlerinage  et  les  souvenirs  de  famille.  Je 
dirai  de  chacune  d'elles  un  mot  d'explication  à  l'occasion. 

1.  Le  chapelet  (n*  121,  page  44),  qui  appartient  à  M.  Marcel  Ray- 
mond, à  Châteauneuf  (Haute- Vienne),  comprend  six  dizaines.  Les 
grains  sont  en  nacre,  serrés  les  uns  contre  les  autres,  avec  les 
Pater  en  argent  travaillé  à  côtes  (3),  pour  employer  Fexpression 
des  inventaires.  Le  crucifix  qui  le  termine  est  en  argent.  Immédia- 
tement après  vient  une  double  tête  d'ivoire,  opposant  une  sainte  Face 
à  un  crâne  grimaçant.  La  prose  du  jour  de  Pâques  en  explique  le 
symbolisme  en  mentionnant  le  combat  qui  s'est  livré  entre  la  vie 
et  la  mort  et  le  triomphe  glorieux  du  Christ  ressuscité  : 

Mors  et  vita  duello  conilixere  mirando, 
Dux  vitœ  mortuus  regoat  vivus. 

Les  petits,  émaux  ronds,  que  l'on  voit  en  si  grande  quantité  à 
l'Exposition,  mais  détachés  des  chapelets  pour  lesquels  ils  avaient 
été  faits,  sont  représentés  par  deux  médaillons,  de  style  médiocre, 

(1)  L'abbé  Texier,  dans  son  Dictionnaire  d'orféorerie^  n'a.qu'unc  co- 
lonne sur  le  chapelel  :  ce  n'est  vraiment  pas  assez,  comme  on  peut  en 
jager  par  ce  mémoire.  J'y  relève  ce  passage  succinct  :  a  11  y  a  quelques 
années,  les  chapelets  des  pénitents  de  Limoges  avaient  une  grande  ma- 
gnificence. Les  médaillons  ronds,  où,  dans  une  monture  d'argent,  s'op- 
posaient de  manière  à  faie  face*deux  émaux  représentant  des  saints,  y 
élaienl  1res  nombreux  »  (col.  361). 

(2)  L'anneau  prenait  le  chapelet  par  le  milieu,  en  sorte  que  la  croix 
terminale  pendait  en  bas. 

(3)  Voir  le  mot  costé  dans  le  Glossaire  archéologique  de  Victor  Gay. 


LK   COAPKLRT  A   LIMOGES  DU   X\<>  AU  XVlIl"   SIÈCLe.  \\\ 

OÙ  saint  Jean-Baptiste  est  associé  à  la  Madeleine  et  les  cinq  plaies 
au  Sacré  Cœur.  Il  y  a  là  éviderament  un  souvenir  des  dévotions 
locales.  Le  précurseur  avait  donné  son  nom  à  la  confrérie  des 
Pénitents  blancs,  dite  de  saint  Jean-Baptiste,  érigée  à  Limoges,  en 
1604,  dans  Téglise  de  Saint-Julien  (Guibert,  p.  117  et  suivantes). 
«  La  confrérie  des  Pénitents  feuille-morte  »,  «  sous  l'invocation  de 
sainte  Marie-Madeleine  »,  remontait  à  Tan  1619  (p.  122).  » 

Les  cinq  plaies,  comme  on  le  faisait  alors,  sont  figurées  par  la 
marque  saignante  des  clous  aux  mains  et  aux  pfeds  ;  au  centre  ap- 
paraît un  cœur  enflammé,  cerné  d'une  couronne  d'épines,  parce 
que  la  lance  de  Longin  l'atteignit  lorsqu'il  perça  le  côté.  «  Les  sta- 
tuts des  Pénitens  pourpres,  arrêtés  en  assemblée  générale  dans 
l'église  de  Saint-Cessateur,  le  20  janvier  1662  »,  prescrivaient,  «  cha- 
que soir  »,  la  récitation  de  cinq  Pater  et  cinq  Ave,  en  souvenir  des 
cinq  plaies  de  Jésus-Christ  »  (Guïbert,  p.  134). 

Le  Sacré  Cœur,  entouré  de  roses,  indique  une  dévotion  naissante 
dans  l'Église  (1)  :  les  roses  lui  conviennent,  parce  que  cette  fleur 
a  toujours  été  considérée  comme  l'emblème  de  l'amour.  Or,  saint 
Jean  avait  dit  dans  une  de  ses  épitres  (I  Ep.,  iv,  8,  9)  :  «  Deus 
charitas  est  »,  «  charitas  ex  Deo  est  ».  La  charité,  qui  se  manifeste 
chez  les  Pénitents  par  les  œuvres  de  miséricorde,  est  donc  toute 
céleste. 

Je  compte  à  ce  chapelet  un  buste  de  saint  Léonard  et  cinq  mé- 
dailles, le  tout  en  argent.  L'influence  des  Jésuites,  qui  célébrèrent 
de  grandes  fêles  à  Limoges  pour  exalter  leur  canonisation,  justifie 
la  présence  de  saint  Ignace  de  Loyola  et  de  saint  François  Xavier  (2), 
tant  de  fois  représentés  alors  en  petits  tableaux  d'émail  que  la  dé- 
votion accrochait  au  mur  de  la  chambre  à  coucher,  près  du  lit  : 
ces  peintures  vitrifiées  ne  sont  pas  rares  à  l'Exposition. 

Faute  d'attributs,  je  n'ose  désigner  deux  personnages,  que  je  me 
contenterai  de  qualifier  saint  et  sainte. 

Saint  Pierre  et  saint  Paul,  répétés  deux  fois,  font  songer  à  un 
pèlerinage  aux  tombeaux  des  saints  apôtres,  dans  leurs  basiliques 
respectives  de  Rome,  surtout  à  Tépoque  d'un  jubilé,  en  1650  peut- 
être.  Quant  à  la  provenance  du  médaillon  filigrane,  je  n'ai  aucun 
doute  à  son  égard.  Il  provient  incontestablement  de  la  ville  éter- 
nelle, ou  ce  genre  de  travail,  fin  et  élégant,  jouissait  alors  d'une 
grande  vogue,  justement  méritée.  D'un  côté  est  effigie  le  Christ,  en 

(1)  Je  signale  à  ce  propos  une  toile  intéressante  dans  l'église  de  $ainl- 
Michel,  à  Limoges. 

(2)  Ils  furent  canonisés  le  même  jour  par  Grégoire  XV,  en  .1022  [Délia 
canonisât,  dei  eanti^  p.  67). 


1 1 4  SOCIÉTÉ  ABCBÉ0L061QUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

et,  au  revers,  ces  raômes  cœurs,  encore  enflammés  el  percés  de  la 
flèche  de  l'amour  :  {Un  mé)  ME  TRA.IT  LES  BLESSE.  Ce  médaillon 
est  assurément  bien  profane  pour  un  chapelet.  Cependant,  il  peut 
avoir  sa  raison  d'être  et  je  crois  pouvoir  Tinlerpréter  ainsi  :  la  devise 
amoureuse  ayant  été  peinte  à  l'occasion  d'un  mariage,  le  bijou  fut 
déposé  dans  la  corbeille  de  noces,  puis  suspendu  dans  la  chambre 
nuptiale.  Survint  inopinément  la  mort  de  l'épouse  et  l'époux  affligé, 
aûn  de  penser  plus  souvent  devant  Dieu  à  celle  dont  il  était  séparé 
momentanément,  attacha  le  joyau  sentimental  à  son  chapelet  de 
pénitent.  Dans  ces  conditions  franchement  chrétiennes,  quoique 
sous  un  aspect  léger,  nous  avons  là  le  digne  pendant  de  la  veuve 
au  chapelet.  Je  préfère  toutefois  la  belle  inscription  par  laquelle  la 
marquise  de  Vaubrun,  au  château  de  Serrant  (Maine-et-Loire),  en 
4748,  consolait  sa  douleur  :  Tôt  spes,  immatura  morte  prœreptaSy 
una  spe  solans  communis  œternitatis. 

4.  Le  chapelet  de  M.  Arthur  Parant,  à  Limoges  (n*  423,  p.  44),  ne 
compte  que  cinq  dizaines,  ce  qui  est  sa  forme  ordinaire,  les  cha- 
pelels  de  six  dizaines  étant  faits  en  vue  de  recevoir  les  indulgences 
spéciales,  dites  de  sain  te  Brigitte.  Les  grains  sont  en  argent,  en  argent 
tordu  et  plus  gros  pour  les  Pater.  A  la  croix  qui  le  termine  sont 
suspendues  deux  médailles  de  Saint-Martial  et  un  médaillon  dont  le 
treillis  à  jour  laissait  voir  les  reliques  qu'il  contenait. 

Les  médailles  qui  sont  attachées  en  divers  endroits  du  chapelet 
représentent:  saint  François-d' Assise  et  saint  Antoine-de-Padoue, 
le  Saint-Sacrement  et  Notre-Dame-de-Liesse,  Notre-Dame-du- 
Pilier,  à  Saragosse  et  Saint-Michel,  le  Christ  et  la  Vierge  en  buste, 
sainte  Anne  et  le  Saint-Suaire  de  Besançon  montré  parun  évoque  (4), 
saint  Dominique  et  Nolre-Dame-du-Rosaire  entourée  d'un  chapelet, 
plus  les  deux  statuettes  de  Saint-Martial  et  de  Saint-Léonard. 

Ces  dernières  ont  pour  objectif  une  double  dévotion  diocésaine. 
Comme  sur  tous  les  monuments  du  moyen-âge,  le  premier  évéque 
de  Limoges  tient  en  main  une  croix  de  procession,  au  lieu  de  la 
crosse,  parce  qu'il  évangélisa  l'Aquitaine,  dont  on  le  considé- 
rait, un  peu  plaloniquement,  comme  le  primat^  car  cette  théorie  ne 
revêtit  jamais  dans  la  pratique  canonique  une  forme  concrète. 

Le  Rosaire  devait  naturellement  se  joindre  à  son  instituteur  saint 
Dominique  ;  la  Vierge  avec  son  fils  dénote  le  double  but  de  la  réci- 
tation du  chapelet  et  Notre-Dame  del  Pilar,  fondée  par  l'apôtre 

(l)  M.Jules  Gauthier  a  publié  des  médailles  analogues,  avec  la  légende 
S.  SVAIRE.  D.  BESANCON  {Notes  iconographiqueê  sur  le  Saint-SucUre  de 
Besançon,  Besançon,  1884,  pi.  iV,  n<»  2).  L'une  d'elles  est  iascrite  au 
millésime  de  1627. 


LK  CHAPELET  A   LIMOGES   DU   XV«   AU  XVIII*  SIÈCLE.  H5 

Saint-Jacques,  un  souvenir  du  pèlerinage  espagnol,  apporté  par 
quelque  jacquier.  Les  deux  illustres  franciscains,  le  maître  et  le 
disciple,  se  rapportent  à  la  confrérie  des  stigmates  de  Limoges, 
peut-être  aussi  au  pèlerinage  de  Padoue,  où,  par  anlonomase,  saint 
Antoine  n*est  pas  connu  sous  un  autre  nom  que  //  Santo,  Quant  à 
saint  Michel,  une  des  églises  de  la  ville  est  dédiée  sous  son  vocable. 
L'ostensoir  à  pied  rond  et  sphère  à  rayons  alternativement  droits 
et  flamboyants,  exposé  entre  deux  lampes,  est  un  indice  d'un  rite 
nouveau  :  en  effet,  Texposition  et  la  bénédiction  du  Saint-Sacre- 
ment commencent,  au  xvu**  siècle,  à  occuper  une  place  notable  dans 
le  culte  liturgique.  M.  Rouyer,  dans  une  brochure  intitulée  :  Un 
rosaire  lorrain  du  xvn«  siècle,  et  pleine  d'érudition  (Nancy,  1881, 
in-8°)  attribue  au  pèlerinage  de  Notre-Dame-de-Liesse,  au  diocèse 
de  Laon,  le  type  de  la  Vierge  habillée,  unie  à  l'exposition  du 
Saint>Sacrement  (p.  14).  Il  cite  aussi  des  exemples  de  statuettes 
suspendues  (p.  8-10).  J'aurais  voulu,  comme  le  docte  numismate, 
m'arréter  davantage  aux  médailles  de  dévotion,  mais  ce  sujet  très 
vaste  m'eût  entraîné  trop  loin,  et  je  dois  ici  me  restreindre  aux 
considérations  générales  (1). 

5.  Le  chapelet  de  M.  Berger  a  été  catalogué  n*  154,  page  50.  Il 
est  le  plus  long  de  tous,  puisqu'il  comprend  neuf  dizaines  :  c'est  un 
rosaire  proprement  dit.  Tous  les  grains  sont  en  corail,  plus  gros 
pour  les  Pater,  que  distingue  encore  un  travail  en  spirale.  La  croix 
terminale  a  une  médaille  au  bout,  et,  sous  ses  bras,  les  statuettes 
pendantes  de  sainl  Léonard  et  de  sainte  Valérie. 

Les  médaillons  d'émail  y  sont  fort  nombreux.  Ils  associent,  face 
et  revers,  saint  Jérôme  et  sainte  Catherîne-de-Sienne,  la  Sainte- 
Vierge  (au  type  des  Sulpiciens,  dit  de  Yintérieur  de  Marie,  d  après 
l'original  de  Lebrun)  à  un  saint  carme  (2),  le  Christ  enfant  à  saint 
Charles-Borromée  (3),  la  Madeleine  à  saint  Antoine-de-Padoue  qui 
tient  un  crucifix  ;  la  Vierge  avec  l'enfant  au  même  saint  Antoine, 
saint  Jean-de-Dieu  (4)  à  sainte  Thérèse,  un  saint  pape  (sans  attri- 
buts ni  nom)  à  saint  Paul,  un  autre  pape  innommé  à  la  Sainte- 
Vierge,  qui  a  un  lys  à  trois  fleurs  épanouies  pour  indiquer,  avec  un 
vitrail  de  Saint-Nicolas-de-Port,  qu  elle  fut  vierge  avant,  pendant 
et  après  son  enfantement,  virgo  ante  partum,  virgo  in  partu,  virgo 
post  partum. 

(I)  La  question  est  surtout  de  la  compétence  des  collectionneurs  de 
médailles  religieuses,  tels  que  NM.  Rouyer,  Maxe  Werly  et  Boulillier. 
(9)  Peut-être  saint  Jean-de-la-Croix,  que  canonisa  BenoU  Xlil,  en  H26. 

(3)  La  canonisation  de  saint  Charles  remonie  à  l'an  4610  et  au  poniificat 
de  Paul  V. 

(4)  Saint  Jean-de-Dieu  fut  canonis(^  par  Alexandre  Ylll  en  1C90. 


I  IG  SOCIÉTÉ  ARCOÉOLOGIQUR  ET  HISTORIQUR  DU  LIMOUSIN. 

L'influence  des  Sulpiciens,  qui  dirigeaient  le  grand  séminaire, 
est  accusée  dans  deux  médaillons,  où  Ton  voit  la  Vierge  peinle 
d'après  leurs  idées  mystiques,  TEnfant  Jésus  et  le  cardinal  arche- 
vêque de  Milan,  dont  ils  avaient  fait  le  patron  du  clergé  qu  il 
réforma  et  pour  lequel  il  établit  un  séminaire,  conformément  aux 
prescriptions  du  concile  de  Trente. 

Les  carmes  et  carmélites  devaient  avoir  à  Limoges  leurs  affiliés  et 
dévots,  si  j'en  juge  par  deux  médaillons.  J'ai  déjà  parlé  de  la  con- 
frérie des  pénilenls  feuille-morte,  qui  honorait  particulièrement 
sainte  Madeleine.  Sainte  Catherine-de-Sienne  appartient  à  Tordre 
des  frères  Prêcheurs,  des  Jacobins,  comme  on  disait  en  Franco. 
Saint  Jérôme  s'explique  par  la  confrérie  des  «  Pénitents  bleus  de 
Saint-Jérôme,  qui  avaient  établi  leur  tribune  dans  l'église  parois- 
siale de  Saint-Paul,  dépendant  de  l'abbaye  bénédictine  de  Saint- 
Augustin  de  Limoges  »  (Guibert,  p.  110-117). 

Saint  Antoine-de-Padoue  est  revendiqué  par  les  Franciscains  ; 
une  connaissance  plus  exacte  des  dévotions  locales  ferait  découvrir 
les  deux  saints  papes  que  je  ne  parviens  pas  à  identifier,  mais  que 
M.  Guibert  nous  révélera  certainement. 

^  J'ai  gardé  pour  la  fin  la  pièce  la  plus  curieuse,  où  je  reconnais, 
comme  je  l'ai  déjà  insinué,  un  souvenir  du  pèlerinage  de  Rome  et 
un  joyau  terminal.  Ce  joyau  représente  les  bustes  des  saints  apôtres 
Pierre  et  Paul,  médaille  d'argent  admirablement  frappée  et  entourée 
d'une  gracieuse  bordure  en  filigrane  qui  se  découpe  en  huit  pétales 
dont  l'ensemble  dessine  une  rose;  elle  suit  un  cœur,  comme  on 
avait  l'habiiude  d'en  mettre  à  la  naissance  des  dizaines,  pour  attes- 
ter que  le  pieux  fidèle  allait  de  tout  cœur  à  Marie. 

6.  Le  chapelet  le  plus  intéressant  et  le  plus  riche  est  celui  de 
M"'  Ghoury,  à  Limoges  (n°  122,  p.  44).  Lui  aussi  est  à  six  dizaines, 
monté  en  chaînettes  d'argent  ;  sont  encore  en  argent  les  Ave  et  les 
Pater,  ces  derniers  losanges.  La  croix  terminale  présente  un  cru- 
cifix dont  les  plaies  saignent,  avec  les  initiales  du  propriétaire  R.  B.; 
au  revers,  l'Agneau  pascal,  les  instruments  de  la  Passion,  le  mono- 
gramme du  nom  de  Jésus,  I  H  S,  avec  la  croix  sur  la  lettre  médiane 
et,  au-dessous,  un  cœur  percé  de  trois  clous  pour  rappeler  les  cinq 
plaies,  plus  le  nom  de  Marie,  M  A. 

Les  objets  divers  attachés  à  ce  chapelet  sont  de  plusieurs  sortes, 
que  je  grouperai  par  catégories  : 

Une  monnaie  de  Louis  XIII,  qui  n'a  assurément  rien  à  faire  avec 
la  dévotion,  mais  qui  donne  la  date  exacte  du  chapelet. 

Une  crôix-reliquaire,  où  sont  gravés  les  instruments  de  la  Passion 
et  qui  met  en  regard  le  nom  de  Jésus  et  le  soleil,  parce  que  la  lilur- 
çle  dit  de  lui  dans  l'hymne  du  Carême  : 


LR   CHAPRLRT   A.  LIMOGES   DU  XT*  AU  XVlll*  SIÈCLE.  117 

0  sol  salutis,  intimis, 
Jesu,  refulge  mentibus. 

Un  médaillon,  en  corne  teinlée  en  rouge  et  frappée  dans  une 
matrice,  d'un  travail  remarquable  :  d'un  côté  la  Vierge,  de  Tautre 
saint  Nicolas-de-Tolenlin.  Peut-être  est-ce  un  souvenir  du  pèleri- 
nage au  tombeau  de  ce  saint;  ce  qui  me  le  fait  supposer,  c'est  que 
le  médaillon  est  de  style  italien. 

Quelques  médailles  d'argent  :  les  têtes  du  Christ  et  delà  Vierge; 
le  nom  de  Jésus,  avec  la  croix  et  les  clous  et  Notre-Dame-de-Pitié 
embrassant  son  fils  ;  saint  Jean-Baptiste  et  l'Agneau  pascal  ;  le 
Saint-Sacrement  adoré  par  deux  pénitents  agenouillés  et  tenant  un 
cierge  et  saint  Jérôme. 

Une  médaille  en  forme  de  bassin,  dans  le  creux  duquel  se 
détache  la  tête  coupée  de  saint  Jean-Baptiste  (1);  en  exergue  : 
DECOLATION  DE  S^  JEAN  BAPTISTE.  Au  revers,  l'Agneau 
pascal  dont  le  Précurseur  a  dit,  en  le  montrant  :  Ecce  agnus  Dei, 
ecce  qui  tollitpeccatummundi  (2).  Ce  mode  de  représentation  est  très 
original  et  je  ne  sache  pas  qu'il  soit  commun  ;  il  est  motivé,  ainsi 
qa'une  des  médailles  précédentes,  par  le  vocable  même  de  la  con- 
frérie à  laquelle  appartenait  le  possesseur  du  chapelet. 

Plusieurs  médailles  d'argent,  d'un  caractère  distingué,  frappées 
à  Rome,  dont  quelques-unes  portent  le  nom  :  Tête  du  Christ,  IN. 
ME.  SPECVLENTVR.  OMNIA;  tête  de  Vierge,  TV.  ES.  SPECVLVM. 
SINE.  MACVLA  ;  la  Visitation  de  la  Vierge  à  sainte  Elisabeth  et 
saint  François  de  Sales,  fondateur  de  l'institut  de  ce  nom;  l'enfant 
Jésus  et  sainte  Rose  de  Viterbe. 

Quatre  bouts  de  chapelets,  fabriqués  à  Rome  et  représentant 
one  médaille  entourée  de  filigrane  :  saint  Antoine  de  Padoue  et 
saint  François  de  Paule;  saint  Louis  de  Gonzague  et  saint  Stanislas 
Kostka  (3y  ;  la  Sainte-Vierge  et  les  apôtres  saint  Pierre  et  saint 
Paul.  Cette  dernière  médaille  est  extrêmement  remarquable. 

(I)  Une  lôte  divoire,  exposée  dans  la  grande  vilrine,  ne  peut  être  qu'un 
chef  coapé  de  saint  Jean-Baptisle,  auquel  il  manque  un  plal  pour  suppori. 
Le  style  est  espagnol  et  du  xvii^  siècle.  La  Gazette  des  Beaux-Aria  a,  la 
première,  attiré  rallenlion  sur  celte  dévotion  de  PEspagne  à  celte  époque. 

(9)  Saint  Jean,  1,  39. 

(3)  Ils  ont  été  canonisés  par  BenoU  Xni,en  17^6.  Les  pénitents  suivaient 
donc  avec  soin  Tinscription  des  saints  au  martyrologe.  Plusieurs  mé- 
dailles, rapportées  après  coup,  ne  concordent  pas  pour  la  date  avec 
Teosemble  du  chapelet,  ce  qui  s'explique  naturellement  par  cette  consi- 
dération qui  faisait  progresser  la  dévotion  dans  le  sens  de  Tirapulsion 
donnée  par  le  Saint-Siège  à  la  chrétienté. 

T.  xxxix.  8 


i\B  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

VI 

Passons  au  xviii*  siècle. 

1.  J'ai  décidé  M.  Nivet-Fontaubert  à  exposer  le  beau  chapelet 
qu*il  avait  eu  la  complaisance  de  me  faire  voir  dans  son  cabinet 
d'antiquités.  Les  grains  sont  en  corail  allongé,  que  relie  une  chaî- 
nette d'argent;  les  Pater,  en  argent  doré,  sous  forme  de  cônes 
réunis  par  la  base,  sont  flanqués  de  deux  perles  rondes,  aussi  en 
corail.  Le  prolongement  de  la  couronne  comprend  un  Pater  et  trois 
Ave  de  corail,  dont  un  rond.  La  croix  en  corail  est  ornée  de  deux 
grains  longs  et  de  deux  ronds.  Cette  croix  ne  paraissant  pas  suffi- 
sante, vu  ses  dimensions  exiguës,  il  en  a  été  ajouté  une  seconde  en 
argent,  dont  Tinlérieur  est  évidé  en  reliquaire  et  Texlérieur  gravé 
auxinstrumenls  de  la  Passion,  avec  le  nom  de  Jésus,  IHS  et  un 
cœur,  d'une  part,  car  Jésus  a  aimé  les  hommes,  et  de  l'autre  le  nom 
de  Marie,  MA,  avec  trois  pleurs,  la  Vierge  ayant  pleuré  la  mort  de 
son  fils,  selon  que  chante  l'Église  : 

Stabat  mater  dolorosa 
Juxta  crucem,  lacrymosa, 
Dum  pendcbat  Filius. 

Les  médailles  suspendues  s'offrent  aussi  nombreuses  que  variées. 
Ce  sont,  dans  l'ordre  où  elles  se  présentent  au  regard  :  une  croix 
de  Malte  sur  laquelle  est  appliquée  la  colombe  divine,  sujet  qu'af- 
fectionna le  xvii*  siècle,  qui  la  représenta  plus  particulièrement 
sur  les  devants  d'autel  et  les  voiles  de  calice;  l'ostensoir  entre 
deux  lampes  et  Notre-Dame  de-Liesse  ;  la  Vierge  entourée  dune 
auréole  rayonnante  et  flamboyante  et  saint  Philippe  Néri  (1);  le 
crucifix  contre  l'orage  et  la  tête  de  la  Vierge,  avec  l'exergue:  Be- 
nedicta  tu  in  ymilieribus]  saint  Faucher  et  saint  Gaucher,  deux 
saints  locaux,  tenant  une  palme  (2);  l'ostensoir  et  Notre-Dame  de 
Liesse,  Notre-Dame-de-Pitié   et   sainte  Anne  (3);  le  crucifix  et 

(t)  Il  fut  canonisé  le  même  jour  que  saint  Ignace,  saint  François- 
Xavier  el  sainte  Thérèse. 

(2)  Leur  nom  étant  écrit  sur  la  médaille,  il  n'y  a  pas  de  doute  à  avoir 
sur  leur  identilé.  Le  P.  Cahier,  dans  ses  Caractéristiques  des  saints, 
mentionne  saint  Gaucher  seul  (p.  893)  sous  le  nom  de  Gaucher  de  Li- 
moges, Le  Dictionnaire  hagiographique  (l.  XL  de  VEncyclopédie  tkéolo^ 
gique  éditée  par  Migne),  n'enregistre  aussi  que  saint  Gaucher  (t.  I,  coh 
4137-1138),  qui  mourut  en  4U0,  el  fut  canonisé  en  1494  par  Célestin  IlL 
La  palme  ne  peut  lui  convenir,  puisqu'il  ne  fut  pas  martyr. 

(3)  Les  émaux  de  Limoges  contribuèrent  beaucoup,  aux  deux  derniers 
siècles,  à  propager  la  dévotion  de  sainte  Anne. 


LK   CHAPELET   A   LIMOGES    DU  XV®   AU   XYIll®   STF.CLK.  <I9 

l'Agneau  pascal  opposant  la  vie  à  la  mort,  la  résurrection  à  la 
passion;  Tostensoir  entre  deux  chandeliers  et  la  Vierge  avec  TEn- 
fant,  assise  en  majesté  ;  la  crucifixion  et  TAgneau  pascal,  couché 
sur  un  livre  fermé  et  nommé  IHS;  l'exposition  du  Saint-Sacrement 
et  Notre-Dame-de-Liesse  ;  la  Sainte  Face  et  saint  Joseph  (1),  sainte 
Anne  faisant  lire  la  Sainte-Vierge  et  Notre-Dame-de-Pilié  ;  le  Christ 
et  la  Vierge  en  buste,  sainte  Anne  avec  la  Sainte- Vierge  et  Notre- 
Dame-de-Pitié,  la  Sainte-Face  entourée  des  instruments  de  la 
Passion  et  la  Vierge  debout  ;  sainte  Anne  faisant  lire  la  Sainte- 
Vierge  et  un  évéque  montrant  le  saint  suaire  ;  saint  Martial  avec 
sa  croix  et  sainte  Valérie  portant  sa  tête  dans  ses  mains. 

Revenons  sur  ces  médailles  pour  préciser  quelques  détails. 
Quatre  dévotions  se  manifestent  avec  intensité  :  la  Sainte  Face, 
sainte  Anne,  Notre-Dame-de-Liesse  etNotre-Dame-de-Pitié,  dont  les 
statues,  sculptées  aux  xv«  et  xvi^  siècles,  sont  fréquentes  à  Limoges, 
dans  les  éghses  et  jusque  sur  la  place  publique.  Saint  Joseph  com- 
mence à  avoir  de  la  vogue;  rémaillerie  limousine  Ta  popularisé  : 
témoins  les  petits  tableaux  de  l'exposition. 

L'ostensoir  a  sa  sphère  rayonnante  et  flamboyante,  ce  qui  lui  a 
fait  donner  le  nom  de  soleiL  Une  fois,  il  prend  la  forme  de  mons- 
trance  ;  l'exposition  en  avait  deux  de  ce  genre,  fournies  par  Je  Mu- 
sée national.  Il  est  exposé  sur  une  nappe,  garnie  de  dentelle;  deux 
chandeliers  ou  deux  lampes  brillent  en  son  honneur.  Un  baldaquin 
l'abrite,  ses  rideaux  sont  relevés  sur  les  côtés,  six  colonnes  le 
soutiennent  à  l'instar  de  celui  de  la  cathédrale  d'Angers,  d'un  si 
puissant  effet  décoratif. 

La  médaille  préservatrice  de  l'orage  a  été  frappée  à  Rome.  On 
y  invoque  le  roi  de  gloire.  Voici  la  formule  de  son  inscription,  qui 
accompagne  une  crucifixion  :  Jésus  Christus,  rex  gloriœ,  venit  in 
pace.  Deus  homo  factxis  est  et  Verbum  caro  factum  est.  Xps  viticit, 
Xps  régnât,  Xps  ah  omni  malo  nos  (defendalj.  Tout  cela  est  écrit 
en  majuscules,  séparées  par  des  points-milieux,  en  conformité  au 
système  épigraphique  encore  observé  dans  la  capitale  du  monde 
chrétien. 

Ajoutons  aux  médailles  deux  statuettes  d'argent  et  deux  médail- 
lons d'émail  :  l'un  simple,  c'est-à-dire  à  une  seule  face,  représen- 
tant l'Enfant  Jésus  sur  un  fond  jaune  et  l'autre  sertissant  deux 
sujets  dans  sa  monture  d'argent,  la  crucifixion  en  camaïeu,  sur  fond 
blanc  et  sainte  Madeleine,  sur  fond  bleu  clair;  la  pénitente  aies 
cheveux  épars  sur  les  épaules  et  dans  la  main  le  vase  à  parfums 
qui  est  son  attribut  le  plus  ordinaire. 

(f)  lien  fui  de  même  pour  la  dévotion  à  saint  Joseph.  Voir  à  rcxposi- 
tioa,  les  no«  359,  437,  454. 


190'  SOaéTÉ  ARCHÉOLOOIOUE  ET  HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

2.  Ce  chapelet  doit  dater  du  commencement  du  siècle  dernier. 
Un  autre,  dont  les  grains  sont  en  buis,  se  termine  par  une  croix 
à  crucifix  et  Vierge  habillée  au  revers.  Les  Pater  sont  en  argent 
côtelés  et  la  monture  en  chaînettes  d'argent. 

Une  statuette  figure  saint  Léonard.  Sur  les  médailles  sont  effi- 
gies :  le  buste  du  Sauveur  et  un  Ecce  Homo;  le  buste  de  la  Vierge, 
gravé  ;  l'ange  gardien  (4);  la  Vierge  avec  Tenfant  et  un  cœur  en- 
flammé ;  Pie  VII  et  la  Foi  personnifiée  ;  le  chef  de  saint  Martial, 
sainte  Madeleine  pénitente  et  saint  François  d'Assise,  sur  une 
feuille  de  métal  estampé. 

Un  médaillon  d'émail  oppose  la  Vierge-mère  à  saint  Jean-Bap- 
tiste, qui  était  le  patron  des  «  Pénitents  blancs  de  saint  Jean- 
Baptiste  »,  confrérie  «  érigée  en  1604  »  dans  l'église  de  Saint- 
Julien-Sain  te-Affre  (GUIBERT,  p.  117). 

3.  Le  chapelet  du  Musée  national  est  enfilé  et  de  six  dizaines, 
type  qui  semble  avoir  prévalu  en  Limousin.  Les  grains  de  faïence 
blanche  sont  décorés  de  fleurs  aux  couleurs  éclatantes  et  les  Pa^er 
ressortent  en  filigrane  d'argent.  Le  prolongement  droit  admet 
quatre  grains  de  faïence  et  quatre  de  filigrane  alternés,  disposition 
anormiile,  car  cette  partie  ne  comporte  que  quatre  Pater  et  quatre 
Ave,  A  l'extrémité  pend  une  croix  de  faïence,  à  branches  fuselées 
et  fleuries,  prise  entre  deux  Pater  filigranes.  La  date  doit  être 
la  fin  du  règne  de  Louis  XIV. 

4.  Le  chapelet  de  M.  Camille  Marbouty  débute  par  «ne  croix 
de  bois,  où  le  Christ  a  pour  nimbe  la  couronne  d'épines  qui  ensan- 
glanta sa  tête  et  dont  les  extrémités  s'épanouissent  en  appliques 
d'argent  assez  semblables  à  un  éventail.  Puis  se  présente  un  ivoire 
sculpté,  où  la  Sainte  Face  est  adossée  à  une  tête  de  mort.  Trois 
grains  forment  le  prolongement  d'Ave,  destinés  à  remémorer,  avec 
les  autres,  le  nombre  d'années  passées  par  la  Sainte-Vierge  sur  la 
terre.  La  chaînette  est  en  cuivre  ténu,  unissant  les  Ave,  grains  de 
verre  bleuâtre  rehaussé  de  feuillage  blanc,  aux  Pater,  lortils  (2)  de 
fil  d'archal  (3)  serrés  entre  deux  grains  de  verre  rouge  et  deux 
grains  d'émail  blanc. 

Les  médailles  ne  sont  pas  directement  attachées  à  la  chaîne, 
mais  suspendues  à  des  prolonges  en  tortil,  analogues  aux 
Pater,  Montées  en  cuivre,  elles  sont  protégées  par  un  verre  mince» 

{{)  La  dévotion  aux  saints  .4 nges  gardiens  s'affirme  aussi  dès  le  xvii* 
siècle. 
(3)  Voir  le  mol  cannetille  dans  le  Glossaire  archéologique. 
(3j  Ibidem,  au  mot  arcAal. 


LE    CHAPELET   A  LIMOGES   DU   XV^  AU  XVlll"  SIÈCLE.  ISl 

qui  recouvre  tantôt  une  gravure  tirée  sur  papier  et  tantôt  une 
feuille  de  clinquant  estampé.  Voici  la  liste  des  sujets  figurés 
deux  à  deux  :  Cœur  de  la  Vierge  percé  de  sept  glaives  et  sainte 
Hélène  arborant  la  croix  qu'elle  a  retrouvée  sur  le  calvaire  ;  le 
Sacré  Cœur  et  saint  Joseph  tenant  un  lys  paré  de  trois  fleurs  épa- 
nouies; le  Sacré-Cœur  et  une  Sain  te- Vierge  habillée  suivant  une 
coutume  ancienne  à  laquelle  les  curés  font  trop  souvent  la  guerre  ; 
Notre-Seigneur  tenant  une  couronne  impériale,  comme  s'il  allait 
Toffrir  à  un  élu  et  le  cœur  aux  sept  glaives  ;  YEcce  Homo  el  le  cœur 
transpercé  de  la  Vierge  de  douleurs. 

Une  parlicularité  intéressante  consiste  en  deux  médaillons  de 
papier,  peints  à  la  main  de  façon  à  imiter  Témail,  sans  doute  par 
économie.  Le  premier  est  à  l'image  de  saint  Jean-Baptiste,  qui, 
du  haut  du  ciel,  écoute  la  prière  de  deux  pénitents  vêtus  de  blanc, 
la  longue  cagoule  sur  la  tête  et  agenouillés  sur  le  sol,  et  de  saint 
Léonard.  Le  second  reproduit  la  face  du  précédent,  à  la  différence 
près  du  chapelet  noir  qui  pend  au  côté,  et  au  revers,  Charlemagne^ 
bardé  de  fer  et  drapé  dans  un  manteau  rouge. 

La  présence  du  précurseur,  deux  fois  répété,  précise  la  destina- 
tion du  chapelet  qui  se  rapporte  exclusivement  aux  pénitents 
blancs  qui  l'avaient  pour  protecteur.  Le  nom  de  l'empereur  n'est 
pas  précédé  du  qualificatif  saint,  car  son  culte  a  toujours  été 
suspect,  mais,  comme  la  cour  de  Rome  n'a  pas  protesté  et  que  les 
martyrologes  gallicans  font  maintenu,  il  faut  croire  qu'à  Li- 
moges on  prenait  un  moyen  terme,  tout  en  lui  rendant  un  certain 
culte  dont  M.  Guiberl  devrait  bien  rechercher  l'origine  et  le  motif, 
parce  qu'ils  touchent  à  l'histoire  locale. 

5.  Le  catalogue  de  l'exposition  attribue  à  Jean-Baptis  le  Nouailher 
les  plaques  émaillées  classées  sous  les  n"  407  et  409  (p.  147,  148). 
Sur  la  première,  saint  François  d'Assise  a,  au  côté  gauche,  pendu 
à  sa  corde,  un  chapelet  dont  les  grains  sont  en  bois,  avec  des  Pater 
plus  gros,  &  l'instar  de  ceux  portés  par  les  capucins.  Le  prolonge- 
ment de  la  couronne  se  réduit  à  un  grain  d'Ave  et  une  petite  croix 
à  branches  égales. 

6.  Le  second  émail  offre  encore  le  patriarche  des  frères  mineurs, 
mais  son  chapelet,  suspendu  de  la  môme  façon,  diffère  du  précé- 
dent par  ses  grains  noirs  et  son  joyau  terminal,  de  forme  elliptique, 
avec  quatre  globules  en  croix  à  la  monture. 

Je  clos  ici  cette  étude,  heureux  si  elle  provoque  des  recherches 
nouvelles  et  des  explications  complémentaires. 

X.  Barbier  de  Montaiîlt, 

Prélat    de    la   Maison  de    Sa    Sainteté. 


L. 


ANCIENS 


STATUTS  DU  DIOCÈSE  DE  LIMOGES 


Le  manuscrit  contenant  les  statuts  encore  inédits  du  diocèse  de 
Limoges  qui  fait  le  sujet  de  cette  publication  appartient  à  révôché, 
et  a  été  fort  obligeamment  communiqué  à  la  Société  archéologique 
par  M.  le  chanoine  Henri  Ardant,  secrétaire  général.  Il  n'est  connu 
jusqu'à  présent  que  par  la  description  et  l'analyse  données  par 
M.  Louis  Guibert(l). 

C'est  un  petit  volume  de  soixante  feuillets  de  parchemin,  ayant 
149mm  (Je  hauteur  sur  113  de  largeur.  Dans  ce  nombre  ne  sont  pas 
comptées  les  feuilles  de  garde  actuelles,  qui  ont  été  ajoutées  à 
l'époque,  très  rapprochée  de  nous,  où  le  manuscrit  a  été  relié  en 
parchemin.  Les  anciennes  feuilles  de  garde  offrent  quelques  alinéas 
d'un  interdit  ou  d'une  pièce  de  procédure  analogue. 

L'écriture,  souvent  difficile  ri  lire  avec  ses  nombreuses  abrévia- 
tions, accuse  les  dernières  années  du  xv*  siècle.  On  peut  môme 
préciser  davantage  en  remarquant  que  le  scribe  s'est  arrêté  à  la  fin 
d'une  pièce  datée  de  1492,  et  que  la  pièce  suivante,  de  1499,  est 
d'une  écriture  tout  à  fait  différente.  C'est  donc  entre  1492  et  1499, 
et  entre  l'épiscopat  des  deux  Barton  de  Monlbas,  qu'il  faut  chercher 
la  date  précise  de  ce  manuscrit. 

Notons  que,  du  commencement  à  la  fin  de  ce  petit  volume,  la 
lettre  initiale  de  chaque  alinéa  a  été  laissée  en  blanc.  Le  copiste 
se  proposait  sans  doute  de  remplir  cette  lacune  à  son  loisir.  Il  ne 
l'a  pas  fait. 

(1)  Anciens  statuts  du  diocèse  de  Limoges  (xiii",  xiv«  et  xv®  siècles).  — 
Paris,  1889.  (Extrait  du  Bulletin  du  comité  des  trao aux  historiques  et 
scientifiques). 


ANCIENS  STATUTS  DU   DIOCÈSE  DE  LIMOGES.  413 

Sur  la  première  feuille  on  lit  ces  huit  lignes,  auxquelles  il  semble 
difGcile  de  donner  le  nom  de  vers  : 

Ce  livre  yci,  se  me  semble, 
L^autre  iour  Ton  pourloii  a  vandre. 
Que  ie  acbaptis  argenl  content 
Cinq  ardiz  (I]  que  vallent  troys  blanc  : 

Vous  priant,  qui  le  trouvères, 
Pourtez  le  moy  a  Monmailler  (3). 
Je  vous  donre  gracieusement 
Ung  pot  de  vin  ou  de  Targent. 

P.  Chaboudib. 

Chaboudie  ou  Chabeaudie  est  un  nom  assez  commun  à  Limoges 
aux  XVI*  et  xvii'  siècles. 

Au  folio  3  commence  un  calendrier  avec  titres  et  quantièmes  en 
rouge.  Ce  document  nous  parait  peu  intéressant.  On  n'y  trouve,  en 
fait  de  saints  du  diocèse,  que  «  saint  Martial,  apôtre  »,  auSOjuin^  et 
«  saint  Léonard,  confesseur  »,  au  6  novembre.  Ni  sainte  Valérie,  ni 
saint  Junien,  ni  saint  Yricix  n'y  sont  nommés. 

Suit  une  prose  à  la  Sainte  Vierge  que  nous  donnons  plus  loin. 
Elle  est  accompagnée  de  différentes  oraisons  et  du  commencement 
de  TEvangile  selon  saint  Jean. 

Au  folio  13  verso  se  lit  une  addition  de  trois  pages  d'une  écri- 
ture très  différente  et  d'une  encre  très  blanche.  C'est  la  suite  des 
ordonnances  de  Jean  Barton  de  Montbas.  Leur  place,  en  suivant 
l'ordre  chronologique,  est  après  les  autres.  Elles  n'ont  été  mi- 
ses ici  qu'à  cause  du  manque  de  place  à  la  fln  du  volume  et  n'ont 
pas  été  ajoutées  avant  1499,  année  de  leur  promulgation. 

Viennent  ensuite,  dans  Tordre  suivant,  les  statuts  du  diocèse  de 
Limoges,  publiés  par  différents  évéques  dans  une  période  de  plus 
de  deux  siècles. 

L  —  Statuts  de  Raynaud  de  La  Porte,  1310. 

IL  —  Excommunications,  par  le  môme. 

IIL  —  Constitutions  synodales  de  Gilbert  de  Malemort  (décédé 
en  1294)  et  de  ses  prédécesseurs,  publiées  de  nouveau  par  Ray- 
naud de  La  Porte  en  i295. 

IV.  —  Constitutions  des  vicaires  généraux  (apparemment  de 
Jean  de  Gros),  vers  1370. 

(1)  Ancienne  monnaie,  qui  représentait  trois  deniers  et  équivalait  au 
liard. 
{%)  Un  des  faubourgs  de  Limoges. 


424  SOCIÉTÉ  ARCBÉ0L061QUE  KT  HISTORIQUE  DO  LIMOUSlIf. 

V.  —  Statuts  d'Aimeric  Chatti  de  la  Jauchat,  1379. 

VI.  —  Statuts  de  Pierre  de  Montbrun,  1428. 

VIL  —  Statuts  de  Jean  Barton  de  Montbas  1, 1492, 1499. 

VIII.  —  Statuts  de  Jean  Barlon  de  Montbas  II,  1802, 1506. 

Ce  sont  là  tous  les  statuts  inédits  du  diocèse  de  Limoges.  A 
partir  du  xvi*  siècle,  on  a  imprimé  ceux  qui  ont  été  donnés  par 
différents  évoques  et  on  en  trouve  encore  des  exemplaires.  Voici 
ceux  qui  nous  sont  connus  : 

IX.  —  Philippe  de  Montmorency,  élu  évêque  de  Limoges  le 
18  octobre  1516,  tint  un  synode  dans  la  cathédrale  le  5  mai  1519, 
où  il  (it  lire  et  publier  des  statuts  qui  ont  été  imprimés.  On  en 
trouve  un  exemplaire  aux  archives  départementales.  C'est  un  petit 
in4<*  de  36  feuillets,  dont  les  caractères  gothiques  et  les  initiales 
ressemblent  à  ceux  du  Missel  de  1505,  ce  qui  le  fait  regarder 
comme  une  œuvre  de  Paul  Berton,  fils  de  Jean,  premier  imprimeur 
fixé  à  Limoges.  Le  frontispice  est  orné  d'une  johe  gravure  sur  bois, 
représentant  saint  Etienne  et  saint  Martial.  Aux  pieds  des  deux 
saints  se  trouvent  les  armes  de  Mp"  de  Montmorency,  qui  sont  :  d'or 
à  la  croix  de  gueules  cantonnée  de  seize  alérions  d'azur. 

Ces  statuts  ont  été  imprimés  de  nouveau  dans  les  Documents  his- 
toriques sur  la  Marche  et  le  Limousin^  par  M.  Alfred  Leroux,  archi- 
viste du  département. 

X.  —  Jean  de  Langeac,  qui  prit  possession  de  Tévôché  de 
Limoges,  le  22  juin  1533,  Ht  imprimer,  le  28  octobre  suivant,  des 
statuts  dont  voici  le  titre  :  Statuta  sinodalia  diocesis  Lemovicensis 
denuo  revisa  et  adaucta  per  Reverendum  in  Christo  patrem  ac 
dominum  Joannem  de  Langeac  dicte  dyoceseos  episcopum.  On 
en  trouve  un  exemplaire  au  grand  séminaire  de  Limoges.  C'est  une 
plaquette  in-18,  caractères  gothiques  noirs,  dontla  fin  est  déchirée. 
Au-dessous  du  titre  est  l'écusson  épiscopai,  sans  émaux  :  paie  de 
cinqpièceSy  deux  d'or  et  trois  de  vair,  avec  la  crosse  et  la  mitre. 

XL  —  Raymond  de  la  Marthonie  prit  possession  de  Tévéché  de 
Limoges  le  15  octobre  1615,  et  François  de  La  Fayette  le  19  oclo- 
bre  1628.  C'est  à  eux  que  Ton  doit  les  statuts  suivants  : 

Statuts  et  règlements  du  diocèse  de  Limoges^  publiez  au  synode 
d'après  la  saint  Luc  en  Tannée  mille  six  cents  dix  et  neuf.  Seconde 
édition,  reveue,  augmentée  et  confirmée  par  Reverendiss.  Père  en 
Dieu  Messire  François  de  La  Fayette,  evesque  dudict  Limoges,  A 
laquelle  sont  adjoutez  les  règlements  des  paroisses  pour  Tordre  du 
service  divin,  administration  des  sacrements,  droicts  des  curez  et 
prostrés  d'icelles.  (Armes  de  Tévéque,  qui  sont  :  d'azur  à  la  bande 
d'argent  à  la  bordure  de  vairj.  —  A  Limoges,  par  A.  Barbou,  devant 


ANCIENS  STATUTS   DU   DIOCÈSE   DE  LIMOGES.  {tô 

Saint-Michel.  MDCXXIX.  —  In-16  de  336  pages,  plus  12  feuillets 
liminaires  non  chiffrés. 

A  la  fin  du  volume  viennent  encore,  avec  une  pagination  distincte, 
les  Statuts  et  règlements  des  églises  paroissiales  de  Sainct-Pierre- 
du-Queyroir  et  de  Saint-Michel-des-Lions  de  la  ville  de  Limoges, 
pour  Tordre  du  divin  service  et  administration  v des  saints  sacre- 
ments. Ausquels  se  conformeront  les  austres  églises  paroissiales  du 
diocèse  de  Limoges,  hormis  ce  qui  sera  de  l'usage  propre  et  parti- 
culier des  dictes  paroisses.  Faicts  et  dressez  de  l'aulhorité  de 
Reverendissime  Père  en  Dieu,  Messire  François  de  La  Fayette, 
evesque  de  Limoges,  conseiller  du  Roy  en  ses  conseils  d'Estat,  et 
premier  aumosnier  de  la  Royne.  —  A  Limoges,  par  Antoine  Barbou, 
à  la  rue  de  la  Ferrerie,  devant  Saint-Michel,  MDCXXIX.  —  In-16 
de  81  pages.  » 

La  Société  archéologique  possède  un  exemplaire  de  ces  statuts. 

XIL  —  François  de  Carbonnel  de  Canisy,  nommé  évéque  de 
Limoges  le  8  septembre  1695  a  publié  les  :  Ordonnances  synodales 
du  diocèse  de  Limoges^  revues  et  imprimées  de  nouveau  par 
Mp"  riUustrissime  et  Reverendissime  François  de  Carbonnel  de 
Canisy,  évéque  de  Limoges.  (Armes  de  Tévéque,  qui  sont  :  coupé  de 
gueules,  cousu  d'azur  à  trois  tourteaux  d'hermine,  deux  sur  gueules 
et  un  sur  azur),  —  A  Limoges,  chez  Pierre  Barbou,  imprimeur  de 
TA^  révoque,  proche  Saint-Michel,  1703, 

C'est  un  volume  in-16  de  226  pages,  contenant  : 

1*»  Statuts  et  règlements  synodaux  publiés  par  M^f  Raymond  de 
la  Marthonie  Tan  1619. 

2*»  Ordonnances  synodales  de  M»' François  de  la  Fayette,  1629. 

3"  Ordonnances  synodales  de  Mb'  Louis  de  Lascaris  d'Urfé,  i683. 

4"  Ordonnances  synodales  de  M»^  François  de  Carbonnel  de 
Canisy,  1696-1700. 

On  a  ajouté  à  la  fin  du  volume  que  nous  possédons  :  Ordonnances 
synodales  de  Mk'  Antoine  de  Charpin  de  Genetines,  évoque  de 
ymoges,  1708-1711. 

XIIL  —  Statuts  du  diocèse  de  Limoges,  renouvelés  et  publiés  par 
W^  Prosper  de  Tournefort,  en  1838.  (Armes  de  l'évoque  qui  sont 
d'azur  à  la  tour  donjonnée  d'argent,  maçonnée  de  sable,  accostée  de 
deux  lions  affrontés  d'argent).  —  Limoges,  chez  Barbou,  imprimeur- 
libraire,  1838.  In-12  de  348  pages. 

Ces  statuts,  quoique  imprimés,  n'ont  pas  été  promulgués,  et  par 
suite  n'ont  pas  eu  force  de  loi  dans  le  diocèse. 

XIV.  —  Statuts  synodaux  du  diocèse  de  Limoges,  publiés  dans  le 
synode  général  tenu  du  18  au  21  octobre  1853  parMK^rillustrissime 
et  Reverendissime  Bernard  Baissas,  évéque  de  Limoges.  (Armes  de 


196  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

révéque  qui  sont  :  d'azur  j  à  l'agneau  passant,  tenant,  de  la  patte 
dextre  de  devant,  une  houlette,  le  tout  d'argent),  —  Limoges,  Bar- 
bou  frères,  1853.  In-12  de  216  pages. 

XV.  —  Ordonnances  de  Mg»"  révoque  de  Limoges  [Julien-Florian- 
Félix  Desprez]  pour  faire  suite  aux  ordonnances  synodales  de  1853. 
(Armes  de  révoque  qui  sont  :  parti,  au  /"  de  gueules  à  la  croix 
pommetée  d'or,  au  ^®  d'azur  aux  lettres  A  M  entrelacées  d'or;  au 
chef  de  sinople  à  V ancre  d'argent  posée  en  pal),  —  Limoges,  Barbou 
frères,  1857  et  1858.  In-16  de  24  et  12  pages. 

XVL — Statuta  diœcesisLemovicensis  Illustrissimi  ac  Reverendis- 
simi  DD.  Alfridi  Duquesnay,  episcopi  Lemovicensis  auctorilate 
condita  in  synodo  diœcesana,  habita  diebus  26,  27,  28,  29  augusli 
1876  (Armes  de  Tévéque,  qui  sont  :  de  gueules,  à  l'ange  aux  ailefi 
élevées  d'argent  sur  une  terrasse  de  sinople,  nimbé  d'or,  tenant  de  la 
dextre  une  épée  et  de  la  senestre  un  livre  ouvert  d'or,  ce  dernier 
chargé  des  lettres  ce  a  de  sable,  accompagné  en  chef  d'une  étoile 
rayonnante  de  six  rais  aussi  d'or).  —  Lemovicis,  ex  lipis  Barbou 
fratrum,  1877.  In-12  de  251  pages. 


Après  le  calendrier,  dont  nous  jugeons  la  reproduction  inutile, 
on  trouve,,  au  folio  10"  de  notre  manuscrit,  la  prose  suivante,  ac- 
compagnée de  deux  oraisons  à  la  Sainte  Vierge,  etc. 

Cette  prose,  encore  inédite,  offre  une  particularité  qu'il  est  facile 
de  remarquer  :  le  premier  mot  de  chaque  strophe  est  un  de  ceux 
qui  composent  la  salutation  angélique.  En  les  réunissant  cette 
prière  se  trouve  ainsi  formulée  : 

Ave  Maria  gratta  plena,  Dominus  tecum,  benedicta  tu  in  muli^ 
ribus  et  benedictus  fructus  ventris  tut  Jésus,  Sancta  Maria,  ora  pro 
nobis  tu.  Amen, 

Nous  avons  voulu  avoir  l'avis  de  W^  Barbier  de  Montault,  dont 
on  connaît  la  compétence  sur  ce  sujet,  et  qui  a  déjà  publié  un  cu- 
rieux travail  sur  VAve  Maria,  Voici  sa  réponse  à  notre  lettre  : 

«  Votre  Ave  ne  ressemble  nullement  à  ceux  que  j'ai  publiés  à 
Brive,  ni  aux  six  donnés  par  le  P.  Drèves  dans  ses  Cantiones  Bohe- 
micœ,  ni  à  celui  des  Heures  de  Poitiers  de  1525. 

»  Le  style  de  la  poésie  me  la  fait  attribuer  au  xv"  siècle  avancé, 
surtout  à  cause  de  l'invocation  finale  Sancta  Maria,  qui  est  plu- 
tôt du  xvi%  au  moins  comme  vogue,  car  on  la  trouve  exceptionoel- 
lemenl  dès  le  siècle  précédent,  par  exemple  à  Thôpital  de  Beaune 
(Côte-d'Or). 


ANCIENS   STATUTS  DU   DIOCÈSE  DE  LIMOGES. 


4  «7 


»  Vous  produirez  là  un  document  intéressantetje  vousen  félicite, 
tout  en  regrettant  de  ne  pas  Tavoir  connu  plus  tôt,  puisqu'il  est 
limousin  (1)  ». 


Ave,  mater  pietatis 
£t  tocius  bonitatîs 
Fons  misericordie. 

Maria,  que  Stella  maris 
Solem  verum  ex  le  paris, 
Ghristnm  regem  glorie. 

Gratia  plena  fuisti 
Dam  angeîo  credidisti 
Gabrieli  nomine. 

Plena  semper  verilatis 
£l  tocius  sanctitatis, 
Virtatis  et  gracie. 

Dominas  sancliGcavit 
Te  matrem  et  consecravit 
Gum  sacro  spiramine. 

Tecumïiiïi  et  est  Deus, 
Licel  Don  crcdat  Judeus, 
Et  erit  sine  fine 

Benedicta  in  te,  Christe, 
Quà  gustamus  panem  vite 
Cum  sua  dulcedioe. 

Tu,  preclara  ceii  slella, 
Libéra  nos  a  procelia 
Et  amuudi  turbine. 

In  te  fuit  casiilalis 
Signum  et  humilitalis 
Eiemplum  et  venie. 

MuUeribus  jocumda 
Sed  purior  velut  unda 
Qua  lavanlur  crimine. 

Et  in  partu  post  et  ante 
Virgo  manens  tota  meute 
Partus  sine  se  mi  ne. 


Fruciua  luus  fuit  Chriâtus, 
Panis  vivus  benedictus 
Mundans  nos  a  crimine 

Vent  ris  tui  clausa  porta 
Noslra  salus  est  exorla 
Garnis  sub  velamine. 

Tui  corporis  sacrata 
Pater  fecit,  Verbi  nala, 
Templum  deleclabile, 

Jésus  panis  nostre  vile 
Ex  te  natus,  vera  vite, 
Nos  redemit  sanguine. 

Sancta  mater  digna  Dei, 
Vera  salus  et  spcs  rci 
Et  tutrix  ecclesie, 

Maria^  cum  tuo  na:o 
Cruciiixo  coronato, 
Ecclesiam  sustine. 

Ora  Deum,  semper  pia, 
Ne  corrual  in  hac  via 
In  belli  discrimine. 

Pro  qua  Chr.slus  fundamentum 
Nobis  sit  et  firmamentum         • 
Fidei  calholice. 

Nohls  ergo  miserere, 
Jesu  dux  et  pastor  vere 
Sedis  apostolice. 

Tu  nos  rege,  nos  tu  ère 
Ne  valeamus  timere 
Jacula  perfidie. 

Amen  tandem  le  videre 
Mereamur  et  gaudere 
Cum  regina  glorie.  Amen 


Benedictus  ex  te  natus 
Atque  venter  sic  beaius 
Florens  aimo  germine 

Deos  qui  de  Béate  Marie  Virginis  uthero  verbum  tuum,  angelo  nunliante, 


(i;  Lettre  du  9  décembre  1890. 


138  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN, 

carnem  suscipere  voluisli,  presta,  supplicibus  luis  ut  qui  vere  eam  Dei 
geuitricem  credimus  ejus  apud  te  iutercessionibus  adjavemur.  Per  eum- 
dem  (f). 

Protège,  Domine,  ecclesiam  tuam  subsidiis  pacis,  et  nos  famulos  luos  Beaie 
Marie  semper  virginis  patrociniis  confidentes  a  cunctis  hostibus  redde  se- 
euros.  Per  Domioum. 

In  principio  erat  verbum  etverbum  erat  apud  Deum^el  DeuseralVerbam. 
Hocerat  in  principio  apud  Deum.  Omnia  per  Ipsum  facla  sunt,  et  sine  ipso 
factumesl  nichil  quodfaclum  est.  In  ipso  vita  eratetvitaeral  luxhominum. 
El  lux  in  tenebris  lucet  et  ténèbre  eum  non  comprebenderunt.  Fait  bomo 
missus  a  Deo,  cui  nomen  erat  Johaiines.  Hic  venit  in  testimonium  nt  lesti- 
monium  perbiberet  de  liimine,  ut  omnes  crederent  per  illum.  Non  erat 
ille  lux,  sed  ut  testimonium  perbiberet  de  lumine.  Erat  lux  vera  que  illumi- 
nât omnem  hominem  venientem  in  bunc  mundum,  et  in  mundo  erat,  et 
mundus  per  ipsum  faclus  est,  et  mundus  eum  non  cognovit.  In  propria 
venii  et  illi  eum  non  receperuni.  Quolquot  aalem  receperunt  eum  dédit 
eis  poteslatem  61ios  Dei  fieri  hiis,  qui  credunt  ii;  nomine  ejus.  Qui  non 
ex  sanguinibus  nequeex  volontate  [carnis,  nequeexvolontale](2)  virised  ex 
Deo  nati  sunt.  Et  verbum  caro  factum  est,  et  habitavit  in  nobis.  Et  vidi- 
mus  gloriam  ejus,  gloriam  quasi  unigeniti  a  pâtre,  plénum  gralie  et  verila- 
tis  (3). 

Omnipotens  sempiterne  Deus  qui  dedisti  famulis  tuis  in  confessione  vere 
Hdei  eterne  trinilatis  gloriam  agnoscere  et  in  polentia  magestatis  adorare 
unitaicm,  quesumus  ut  ejusdem  fidei  firmitale  et  omnibus  semper  munia* 
mur  adversis.  Per  Dominum  (4). 

In  iilo  tempore  missus  est  angélus  Gabriel  a  Deo  in  civitatem  (5). 

La  partie  de  notre  manuscril  qui  se  termine  ici  n'était  pas  jointe 
primitivement  aux  statuts  diocésains.  Elle  n'a  été  placée  en  tète 
de  ce  volume  qu'après  1492.  Lorsque  le  scribe  a  voulu  y  ajouter  les 
ordonnances  de  1499,  manquant  de  place  à  la  fin  du  volume,  il  a 
écrit  ces  dernières  ordonnances,  après  en  avoir  averti  dans  une 
note,  sur  les  deux  pages  laissées  en  blanc  à  la  fin  du  cahier  où 
sont  les  prières  ci-dessus  (folios  13  et  14);  il  a  aussi  gratté  avec  soin 


(1)  Cette  oraison  est  celle  de  la  fête  de  l'Annonciation  de  la  Sainte  Vierge  que  TEglise 
célèbre  le  25  mars.  Une  petite  variante  se  trouve  dans  le  texte  de  notre  manuscrit,  on  y  lit  : 
Dei  Genitricem,  pendant  que  les  livres  liturgiques  portent  Gerùtricem  Dei, 

(2)  Les  raots  entre  crochets  ont  été  omis  par  le  scribe. 

(3)  Ce  premier  évangile  est  celui  de  saint  Jean,  qui  se  lit  à  la  fin  de  la  messe. 
<4)  Cette  oraison  est  celle  de  la  fête  de  la  Sainte-Trinité. 

(5)  Ce  second  évangile,  dont  notre  manuscrit  ne  contient  que  denx  lignes,  est  celui  qui  se 
lit  à  la  fête  de  l'Annonciation  ;  il  est  au  chapitre  I  de  saint  Iaic. 

La  suite,  si  elle  avait  été  écrite,  aurait  renfermé  en  troisième  lieu  révangile  selon  saint 
Mathieu  (ch.  II)  :  Cum  natus  esset  Jésus  in  Bethléem  Juda,  de  la  fête  de  l'Epiphanie,  et  qua- 
trièmement celui  de  saint  Marc  (ch.  XVI)  :  In  illo  tempore  reeumbentibus  tindecim  diseipu' 
lis,  de  la  fête  de  l'Ascension,  suivis  chacun  d'une  oraison.  C'est  au  moins  ainsi  qa*on  le 
trouve  dans  les  livres  d'Heures  de  cette  époque. 


ANCIRNS   STATUTS  DU  DIOCÈSE  DR   LIMOGES.  <29 

un  ëcusson  chargé  de  trois  fleurs  de  lis,  qui  était  auparavant  sur 
la  dernière  de  ces  pages. 

Ces  treize  premiers  feuillets  étaient  le  commencement  d'un  Livre 
d'Heures.  Le  calendrier,  les  quatre  évangiles  suivis  d'oraisons 
commencent  ainsi  le  très  beau  livre  d'Heures  que  possède  M™''  la 
comtesse  de  Villelume,  à  TAumônerie.  Ce  précieux  manuscrit,  cou- 
vert des  plus  belles  miniatures,  porte  celte  suscription  :  «  Aques- 
tas  mandinas  sont  de  Katherine  Gentille,  molher  de  Marsau  Deu- 
bost,  demorant  en  la  rue  de  las  Taulas,  ou  près  Saint-Marsau  ».  Il 
a  été  peint  vers  1482,  époque  à  laquelle  saint  Bonaventure  fut  ca- 
nonisé; aussi  sa  fête  est-elle  indiquée  au  14  juillet  dans  le  calen- 
drier de  ce  livre.  Cette  môme  fête  n'étant  par  marquée  dans  celui 
de  notre  manuscrit,  il  est  probable  que  ce  calendrier  est  antérieur 
à  cette  date. 

C'est  au  folio  18'  que  commencent  les  statuts.  Il  faut  encore  re- 
marquer que  le  manuscrit  ne  portait  aucune  pagination; les  chiffres 
que  nous  citons  n'y  ont  été  mis  de  nos  jours  que  pour  en  faciliter 
l'étude. 

I 


Raynaud  de  La  Porte,  né  à  Allassac  en  Bas-Limousin  vers  le  mi- 
lieu du  xm«  siècle,  fut  d'abord  chanoine  de  Limoges  et  archidiacre 
de  Combrailles  dans  ce  diocèse.  Après  le  décès  de  Gilbert  de  Male- 
mort,  évéque  de  Limoges,  le  chapitre  élut  pour  le  remplacer  Pierre 
La  Sépière,  célèbre  prédicateur  et  docteur  en  théologie.  Sur  son 
refus,  Raynaud  de  La  Porte  fut  élu  le  IS  novembre  1294  et  son 
élection  fut  approuvée  par  le  pape  Boniface  VIII.  Il  avait  aussi  été 
précédemment  chanoine  du  Puy-en-Velay  et  vicaire  général  de  Guy 
de  Neuville,  évoque  du  Puy  (1). 

Dans  le  premier  synode  qu'il  rassembla,  il  confirma  les  ordon- 
nances de  Gilbert  de  Malemort  et  de  ses  prédécesseurs,  ordonnan- 
ces que  l'on  trouvera  plus  loin,  au  n*»  III.  Dans  celui  de  1297, 
il  décréta  que  la  fête  de  saint  Etienne  de  Muret,  fondateur  de  l'or* 
dre  de  Grandmont,  serait  célébrée  dans  tout  son  diocèse  le  8  fé- 
vrier et  que.  en  considération  des  aumônes  que  les  habitants  des 
villages  et  paroisses  d'Ambazac,  Saint-Sylvestre  et  Sainl-Léger  re- 
cevaient journellement  du  monastère  de  Grandmont,  le  clergé  et 
le  peuple  de  ces  paroisses  chômeraient  la  fête  (2). 


(1)  Baluzb,  VitiB  Papac,  Avenion.,  î,  col.  74î. 

(3)  BONATJBNTURR  DB  SaINT-AmABLB  . 


130  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  RT  HISTORIQUE  DtJ  LIMOUSIN. 

L'an  1300,  le  7  août,  premier  dimanche  du  mois,  il  releva  de 
terre,  à  Evaux,  le  corps  de  saint  Marien,  dont  il  plaça  les  reliques 
dans  une  précieuse  châsse  d'argent  {^). 

La  môme  année,  il  chargea  Guillaume  Laubat  (ou  Soubut),  cha- 
noine du  Dorât,  et  Jean  de  Solo,  chanoine  de  Sainl-Junien,  de 
faire  une  recherche  exacte  des  usuriers  qui  rançonnaient  la  ville 
de  Limoges  (2j. 

Le  5  des  calendes  de  novembre  1300,  il  approuvait  un  acte  capi- 
tulaire  pour  Tabbaye  des  Allois  (3). 

Son  chancelier,  Pierre  Faure,  ordonna  à  tous  les  notaires  et 
autres  officiers  de  faire  commencer  Tannée  au  i5  mars;  réforme 
qui  fut  appliquée  pour  la  première  fois  en  1301  (4),  et  Raynaud  de 
La  Porte  renouvela  cette  ordonnance  dans  les  statuts  de  1310. 

Pendant  les  difficultés  qui  s'élevèrent  entre  le  roi  de  France  et 
le  Saint-Siège,  il  fut  au  nombre  des  courageux  évoques  qui  n'hési- 
tèrent pas  à  répondre  à  la  voix  du  chef  de  l'église  malgré  les  me- 
naces du  roi  de  France,  en  se  rendant  au  concile  convoqué  à  Rome. 
Aussi  il  subit  les  rigueurs  de  l'édit  du  mois  de  juin  1303,  qui  ordon- 
nait la  saisie  de  tous  les  biens  des  évéques  qui  étaient  aJors  hors 
du  royaume. 

L'an  1307,  il  régla,  avec  Philippe-le-Bel,  roi  de  France,  le  com- 
mun pariage  de  la  cité  de  Limoges  et  de  la  ville  de  Saint-Léonard, 
c'est-à-dire  le  partage  de  la  justice  (S). 

Nommé  par  le  pape  Clément  V  commissaire  dans  l'affaire-  des 
Templiers,  il  se  rendit  à  Paris  en  1309  pour  entendre  les  déposi- 
tions des  inculpés  (6). 

En  1310,  il  tint  à  Limoges  un  synode  dans  lequel  il  promulgua, 
le  10  novembre,  les  statuts  qui  font  le  sujet  de  cet  article. 

Il  fut  nommé,  par  le  pape  Benoît  XI,  conservateur  des  privilèges 
de  l'ordre  de  Saint-Dominique,  dans  la  province  de  Toulouse,  et,  le 
15  novembre  1310,  il  introduisit  et  installa  solennellement  les  Do- 
minicains dans  leur  couvent  de  Saint-Junien  (7). 

En  1311,  il  assista  au  concile  général  de  Vienne  en  Dauphiné,  où 
fut  prononcée  l'abolition  de  l'ordre  des  Templiers. 

(1)  Bernard  Gui,  apud  Baluze,  ibidem»  743. 

(2)  Chronique  de  Saint- Martial,  p.  140. 

(3)  Notice  sur  les  Allois,  par  l'abbé  Roy-Pierrepitte,  p.  6. 

(4)  Chronique  de  Saint- Martial,  p.   440. 

(5)  Leymarie,  Histoire  de  la  Bourgeoisie,  II,  273,  el  Chronique  de 
Saint  -Martial^  p.  143.  —  Voir  sur  celte  question  :  La  commune  de  Saint- 
Léonard  de  Nohlat  au  xiir  siècle,  par  M.  Louis  (iuibert. 

(6)  Drvoyon,  Catalogue  des  éoéques  de  Limoges, 

(7)  Baluze,  Vitœ  Papar.  Avenion.^  1,  col.  743. 


ANCIENS   STATUTS  DU    DIOCESE   DE   LIMOGES.  131 

Le  15  février  1315,  il  releva  de  terre  le  corps  de  saint  Aurélien, 
qu'il  plaça  sur  rauteldeTéglise  de  Saint-Gessadre  (Sainl-Cessateur), 
située  hors  des  murs  de  Limoges,  en  présence  d'un  nombreux  clergé 
et  d'une  multitude  de  peuple  (1). 

C'est  sous  son  épiscopat  que  fut  bâti  en,  grande  partie,  le  chœur 
de  la  cathédrale,  En  1316,  il  accorda  à  l'Œuvre  de  la  cathédrale  la 
moitié  du  revenu  de  la  première  année  des  cures  qui  vaqueraient 
pendant  six  ans,  et,  de  plus,  des  indulgences  à  ceux  qui  feraient 
quelque  aumône  pour  la  construction  de  cette  église  (2). 

Le  31  décembre  1316,  il  fut  transféré  à  l'archevêché  de  Bourges 
par  le  pape  Jean  XXIL 

Vers  la  fin  de  l'année  1320,  le  môme  pape  le  créa  cardinal-prê- 
tre, des  titres  de  saints  Nérée  et  Achillée  et  le  nomma  évêque  d'Os- 
lie  en  1321  (3). 

Il  mourut  le  12  septembre  1325  à  Avignon  (4),  d'où  son  corps  fut 
porté  à  Limoges  et  inhumé  dans  la  cathédrale.  On  voit  son  tombeau 
sous  un  des  arceaux  du  sanctuaire  (5), 

Ses  armes  sont  :  de  gueules,  à  la  porte  accolée  de  deux  tours  d'or. 
Son  sceau,  que  Ton  trouve  sur  quelques  pièces  conservées  dans 
divers  dépôts  représente  l'effigie  d'un  êvêque  et  non  les  armes  de 
sa  famille. 

Ces  premiers  statuts,  promulgués  par  Raynaud  de  La  Porte  en 
1310,  se  composent  d'une  cinquantaine  d'articles  qui  paraissent 
constituer  un  véritable  règlement  pour  la  chancellerie  ecclésiasti- 
que. Plusieurs  passages,  dont  chaque  alinéa  commence  par  la  for- 
mule consacrée  :  Statuimus inhibemus,  etc.,  présentent  un  véri- 
table intérêt.  Il  faut  mentionner  tout  spécialement  ceux  qui  ont 
trait  aux  fonctions  des  notaires,-  aux  connaissances  et  aux  garan- 
ties qui  doivent  être  exigées  d'eux,  aux  formalités  de  leur  récep- 
tion, à  leur  immatriculation  au  greffe  do  rofficialilé.  La  nécessité 
de  pourvoir  aux  besoins  du  pubhc  avait  forcé  le  juge  ecclésiastique 
et  son  chancelier  d'investir  de  ces  fonctions  des  hommes  ignorants 
et  incapables.  Il  fallait  mettre  fin  à  cet  état  de  choses,  et  c'est  Tob- 
jet  des  premières  ordonnances. 

On  y  remarque  plus  loin  le  statut  qui  ordonne  aux  notaires  et  à 
tous  les  officiers  relevant  de  la  juridiction  ecclésiastique  de  com- 

(1)  Maleu,  Chronique^  p.  113. 

(2)  M.  Arbkllot,  Histoire  de  la  Cathédrale,  p.  112. 

(3)  Baluzk,  VUce  Papar.  Aoenion.,  I,  col.  744. 

(4)  Nadaud,  Tableau  des  évêques  de  Limoges. 

(5)  M.  Arbbllot,  Histoire  de  la  Cathédrale»  p.  tl3. 


133  SOCIÉTÉ   ARCHEOLOGIQUE   ET  HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

• 

mencer  Tannée  à  la  fôte  de  rAnnonciation  (25  mars),  ponr  éviter 
rinconvénient  qu'on  avait  précédemment  en  commençant  à  Pâ- 
ques, fôte  mobile,  dont  la  date  change  chaque  année. 

La  tenue  des  registres  de  rofficialité,  le  nombre  et  la  qualité  des 
témoins,  les  précautions  à  prendre  pour  prévenir  certaines  fraudes 
pour  établir  l'identité  des  contractants,  pour  assurer  Taudition  con- 
tradictoire des  parties  dans  les  procès,  font  Tobjet  d'un  certain 
nombre  de  ces  ordonnances.  Les  remises,  délais  et  ajournements 
sont  réglés.  Les  honoraires  de  la  chancellerie  sont  réduits  et  fixés 
à  un  taux  qui  ne  devra  pas  être  dépassé,  etc.,  etc. 

Vers  la  fin,  on  remarquera  quelques  articles  relatifs  aux  bailes 
de  «  la  Confrérie  ».  Ces  officiers  devront,  comme  les  consuls  de  nos 
communes  limousines,  rendre  leurs  comptes  à  la  fin  de  Tannée  et 
remettre  à  leurs  successeurs  Texcédent  des  recettes  de  leur  ges- 
tion. Ne  seront  réputées  faire  partie  de  la  confrérie  que  les  person- 
nes régulièrement  admises  par  les  bailes  et  inscrites  à  la  liste  des 
associés;  celles  qui  ne  figureront  pas  aux  registres  ne  seront  admi- 
ses ni  aux  banquets  ni  aux  autres  réunions  et  actes  de  la  compa- 
gnie; si  elles  s'y  présentent,  elles  devront  être  honteusement  chas- 
sées cum  ignominia  repellantur.  Bien  que  le  diocèse  de  Limoges  ait 
possédé,  dès  le  xi*  siècle,  des  associations  de  piété  pourvues  d'une 
organisation  assez  complète  (i),  les  derniers  articles  de  ces  statuts, 
concernent  uniquement  la  confrérie  que  formaient  les  officiers  de 
la  chancellerie,  les  notaires  et  les  autres  scribes  placés  sous  l'auto- 
rité de  rofficialité.  C'est  ce  que  prouve  l'obligation,  pour  tous  les 
confrères  demeurant  au  siège  de  la  cour  ecclésiastique,  d'assister  à 
la  messe  de  la  Sainte  Vierge  les  samedis  et  autres  jours  marqués 
par  leur  règlement. 

Enfin,  on  voit  que  ces  statuts  furent  promulgués  le  mardi  après 
rOctave  de  la  Toussaint  (iO  novembre  1310). 

Reginaldus,  Dei  gratla  Lcmovicensis  episcopus,  universis  advccatis, 
scriptoribus,  procuraloribus  gencium  presentibus  et  futuris  curie  nostre 
Lemovicensis  et  âliis  ad  quos  prosenles  iiltere  pervenerint,  salutem  et 
sinceram  in  Domino  carilalem. 

Ad  decorem  jnstiiic,  universorum  vitanda  dispcndia,  doctrinam  jurato- 
rum,  reformationem  et  ordinationem  eorum  qui  submictere  jurisdictioni 
ecclesie  Lcmovicensis  curie  ducuntur,  inter  quascumque  personoas  judi- 
ciales  cl  extrajudiciaies,  tain  in  negociis  quam  in  causis,  tanto  libencius 
et  fervencius  debemus  assurgcre,  quanto  ea  subdictis  fructuosa  et  uliliora 

{{)  On  a  conservé  les  statuts  de  la  Confrérie  de  Notre-Dame  de  Saint- 
Sauveur,  qui  remontent  à  1912  :  ils  sont  en  langue  romane.  La  Bibliothèque 
nationale  en  a  récemment  acquis  l'original. 


AHCIF.NS  ItATQTS   DU   DIOCiSSR   DR   LIMOGES.  133 

coospicimas,  et  cvenlus  eorum  conlrarios  jaris  dissoDos,  partibus  pericu- 
I08O8  et  perfecio  dampnabiles  experiuntur. 

Verum  cum  spcctcs  faclorum  (?)  que  in  causis  cl  negoeiis  accidunt  siot 
mullipliccs  et  innumcrabiles  quesingulariler  discuti  nequeunt  ad  ea  dan- 
tajiat, 

Nos  ad  prcsens  divcrlimus  que  nostris  occurerc  tcmporîbus  suot  in 
melias  emendenda  et  prudentiuon  consilio  super  hiis  staiuenlcs. 

In  primis  quod  olim  proptcr  oporlunitatcm  JDStaneium  jurali  multi 
fiebanl  per  officitlem  et  eancellarium,  quorum  ex  cis  plures  sunt  incompti, 
indocli,  viles  et  ignorantes  et  infidèles  in  biis  que  in  iiicris  poni  sunt 
sdiita. 

Et  in  rceeptione  debeut  fieri,  non  utentes,  propter  quod  omnes  et  sin- 

fpilos  noper  nostre  diocesis habuimus  coavocare  ut  muUitudo  lol* 

îerelnr,  minus  sufficieotes  privarentur  ofBcio,  et  sufficientes  remancrent 
eum  laudabili  leslimonio  et  sub  observanlia  ccrtarum  ordinadonum  quas 
eit  feeimns  tradi  et  in  eorum  litteris  sunt  inserte. 

item  duximus  staluendum  neminem  de  celcro  juratum  Lemovicensis 
eurie  de  cetero  recipi  nisi  pcr  officialem  cl  cancellarlum  nostros*  omnis 
qui  ioaimul  reeipiendus  ex  anexatione,  aflfectione  postposita,  soper  con- 
ditione  moribes  et  docirina,  quem  sic  receptum,  inter  «lios  juratos  in 
caterris  volamus  annolari  juramenlo  ab  eo  prius  prestito  de  fidelitate  ofli- 
cium  exereendo  et  de  hiis  que  pcr  nos  ordinata  sunt  et  stalutasuis  viribus 
in  Mis  recipiendis  conlractibus  et  lilteris  observando,  aliter  reccplio  non 
valeal,  ymo  prorsus  nuUius  sit  momenli. 

Item  statuimus  ut  quilibet  juralus  et  commissarius  de  cetero  papirura 
teoeat,  io  que  notas  coniractuum  cl  gcstorum  coram  se,  rcdigat  et  re- 
geslrel,  ut  io  aliquo  casu  eommissario  prcdicto  impcdito,  vei  mortuo,  pcr 
eumdf  m  littore  pcrfecte  non  fuerint,  vel  perfeclc  (?)  pericrint  vcl  aliter 
contenta  in  cis  in  dubium  rcvoecntur,  petcnlibus  illis  ad  quos  pertinebit, 
possit  auctoritatc  ordinaria  pro? ideri.  In  receptionc  vero  iilterarum  et  in 
8U0  officio  sic  diclos  commissarios  haberi  volumus.  Et  super  gcslis  coram 
eis  litteras  inter  personnas  notas  recipiant  at  prout  mclius  crit  cis  possi* 
bile  in  forma. 

De  personnamm  noticîa  earumdcm  nomina  et  cognomina,  parochias  (tt 
leea  onde  oriendi  existunt  exprimant  cl  désignent,  ne  falso  et  simulato 
Domine,  ut  in  quibusdam  casibus  exlilil  adinvenlum,  talsilas  hujusmodi 
concedendis  et  recipiendis  litteris  eommutatur,  addicienlcs  ut  jurati  malli 
inullis  contraeiibas  aut  rébus  summe  aut  valons  sexagcnla  solidornm  et 
uHra  recipicndo,  duos  lestes  secum  advocent  et  subscripbant.  Ncc  indic* 
tandi  et  scribendi  modo  ulalur  verbis  :  Nos  officialU,  etc.  Noverilis  quod 
coram  nobis,  etc.  Constilutis  eliam  laiium  juralorum  noslrorum  proprie 
manus  subscriptio,  si  opus  csset,  Iilterarum  comparaliooe  et  sui  sigilli  im- 
pressio  cum  certis  inlersignis  assignant  in  calervis  cum  eorum  nominibus 
et  supradictis  aliis  remanebuni,  ut  adhibitis  rautelis  competcnter  quibus- 
cumque  fraudibus  de  cetero  faciiius  falsitatibus  occuralur.  Résidentes  in 
villa  et  curia  Lemoviccnsi  idem  pcr  omnia  observarc  habcbunt,  hoc  salvo 
quod  sub  modo  dictandi  iu  noslra  presentia  deputabuDlur  ccrii  in  curia 
T.  xxzix.  9 


134  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQDE  ET  BISTOIIIQOB  DU  UMOUSllV. 

continue  résidentes  qui  de  fidclitatc  probati  cl  induslria  cxpcrti  sinl  spé- 
ciales clerici  subilla  forma;  Inpresenlia  nosira,  etc.,  récipient  illoque  sub 
illa  forma  recipientium  nomina  palam  scripla  erunt  in  nostra  curia  et 
appensa. 

Slatuimus  eliam  ul  nullus  juratus  de  cetero  repnletur  qui  in  scriptis 
redaclus  non  fuerit  et  positus  f u  regislris. 

Item  ut  illorum  qui  horam  soliiam  et  debitam  prevenire  ac  adversario- 
rum  suoram  absentium  captare  ac  vel  maliciose  et  precipitose  conantes 
agere  faciunt  per  servientem  nostnim  adversarios  proclamari  et  in  papiro 
statim  scribi  faciendo  maliciis  et  fraudibus  obvietur  : 

Duximus  statucndum  ul  in  nostra  curia  Lcmovicensi  sic  nullus  de  oeiero 
proclanietur,  nisi  de  nostra  audiencia  inchoala  et  oiBciali  nostro  aul  suum 
iocum  tenente  pro  tribunali  sedentibus  serviens  vero  proclamans  carteilos 
recipiet  et  cusiodiet  donec  audiencia  per  inlegrum  recepla  fuerit,  el  cause 
per  ofHcialem  nostrum  aut  ejus  Iocum  tenenlem  audite«  posl  recessum 
vero  oHicialis  ad  pulsalionem  campane  in  curia  nostra  appense.  Demum 
receplor  car  tellorum  proclamabit  sic  fine,  hoc  que  nichil  recipiet  pro  se- 
cundo clamore. 

Talis  impclravil  contra  adversarios  et  si  nullus  appareal  contradtctor. 

Tum  in  papiro  scribatur  et  habeal  scriptor  unum  denarium  tantum  pro 
scriplura.  Si  vero  contradicior  appareal  scribetur  lalis  impedivii  impe- 
trare  volentem  et  solvcl  tum  contradicior  obolum  pro  scriplura. 

El  nisi  contradicior  appareal  partes  ad  officialem  expediende  milienlor» 
aliter  revocalorie  impetrate  nullius  penitus  sit  momenli.  Impctrans  Umen, 
si  posl  curiam  vel  extra  invcntus  fuerit,  cilari  poteril  ut  expedire  causam 
veniat.  Quod  si  venire  contempserit,  revocabitur  quicquid  per  cum  fuerit 
impelratum.  Verum  quia  per  fraudem  quarum  ambas  parles  revo- 
calorias  impelrare  contingit,  idcirco  illam  vallere  decrevimus  que  ab 
officiali  vel  ejus  Iocum  tenente  in  figura  judicii  fuerit  impetrata,  ad  ser- 
vientis  vero  clamorem  obteola  nullius  sit  valoris. 

item  quia  nonnulli  minime  actendenles  judicem  contenlum  eliam  (?) 
debere  altéra  jpean  absenti  contumaciter  (?)  imponenda,  nisi  demum  ubi 
conlumaciis  proler\'ilas  id  exposcit  adversarium  aut  inlerdictum  excom- 
municalum  vel  agravatum  paulo  posl  lazacionem  expensanim  aliquaram 
somarum  (?)  cilari  faciunt  audiluros  el  lune  (?)  expensis  laxari  faciunt 
contra  ipsos. 

Hoc  statucndum  de  cetero  inhtbimus,  nisi  demum  elapsis  tribus  men- 
sibus  a  tempore  prime  senlencie  computandis,  quibus  quidem  elapsis 
tribus  mensibus  in  taxacione  de  prima  sentenlia  tidem  plenariam  fîeri 
volumus  laxari  cujus  dalum  in  litlcra  laxacionis  idem  taxator  inseri  facial 
atque  poni,  aliter  vero  in  casu  premisso  taxat.io  facta  non  valeal,  el  impe- 
Irans  tenealur  parti  alteri  in  expensis. 

Item  slatuimus  pro  agravaiionibus  concedendis  a  nemine  aliquid  exi- 
gatur  super  quorum  concessîone  el  inspectione  inferius  est  specialius 
ordinalum  (1). 

(1)  Ces  ordonnances  spéciales  se  trouvent  plus  loin  au  d*  II. 


ANCIENS  STATUTS   DU    DIOCÈSE  HE  LIMOGES.  135 

Prohibilionibus  vcro  conccssis  in  casibus  a  jure  permissis  per  conec- 
dcDtem  scxdcnarios  levari  volumus  lanlum.  Inhîbenles  ne  pro  ipsis  inhi- 
bilionibus  nisi  quod  per  nos.ordinatum  est  statulum  altcrius  cxigalur. 

Item  quod  fréquenter  dedicimus  quod  cum  proplcr  iniquitatem 
et  injusliciam  aliquorum  adullerina  sigilla  in  litleris  Lemoviccnsis 
curie  apponentur  eas  exccutoribus  quibus  diriguntur  minime  pre- 
sentando  et  alias  propter  mulliludincm  lillerarum  et  personarum  in  eis 
coDlenlarum  mullos  injustos  denunciari  si  inddatos  el  ligalos  multoties 
accidisse. 

Slatuimus  ut  nulle  sentencie  cilaliones  vel  aggravaliones  fidem  faciant, 
née  ad  probandum  valeant,  nisi  sigillale  fuerint  sigillo  cappellani  vel  vi- 
carii  illius  contra  quibus  diriguntur  el  impelrantur,  vel  alias  per  relatio- 
ncm  executoris  allerius  super  execulione  contenla,  in  ipsis  lillerisdepuiati 
el  cadcm  causa  staluimus  ut  liltera  cxcommunicationis  a  modo  fidem  non 
faciat,  nisi  pars  hujus  lilteram  excommunicalionis  exhibcre  de  interdiclo 
a  quoemanavit  excommunicalionis  senlcnlia,  sigillo  cappellani  vel  vicarii 
sigillato,  vel  specialis  executoris  ad  hoc  docuit  et  de  eo  fecit  plenariam 
lîdein. 

Item  quia  non  nulli  qui  post  absolutionem  concessam  scntenciarum 
litteras  retinent,  etc.,  illi  contra  absolutos  impétrant  et  agravant  multo- 
ciens  fraudulenter* 

Slatuimus  ut  post  absolutionem  alicujus  concessa[m],  vel  relaxationc 
darantc,  litière  agravatorie  vel  quccumque  impétrant  minime  valeant  nisi 
qui  absolutionem  se  oblinuisse  assoruil  eamdem  exhibilurus  citalus  con- 
lumax  existens  el  in  prislinis  sentenciîs  rcdaclus  fueril,  vel  aliter  citalus 
de  novo  super  querelis  non  apparuerit  cl  ab  hoc  sentcncialus  fuerit  ejus 
contumacia  exigen[s]. 

Item  maliciis  ciiacionium  tandem  denunlianlur  ne  pars  sibi  precipitaia 
providere  in  agchdis  nec  ad  arripicndum  itcr  comodc  sperare  valeat  ob- 
viare  volentes.  Slatuimus  quod  in  lociis  circa  civilalem  silis  citra  quatuor 
leacas  per  duos  dics  anle  diem  quoquis  cilaiur.  In  locis  disianlibus  a 
dicta  civitale  ultra  quatuor  Icucas  usque  ad  duodccim,  per  quatuor  dies. 
In  locis  disianlibus  ultra  duodccim  Icucas  usque  ad  decem  et  octo,  per 
sex  dies.  In  locis  disianlibus  ultra  decem  et  oclo  leucas,  per  oclo  dies, 
illt  qui  citabilur,  citacio  nuncielur  quorum  dierum  numéro  diem  nun- 
ciationis  citalionis  volumus  compulari. 

Adicienles  in  agravationibus  scntenliarum  in  civilate  Lemovicensi  el 
castre  et  locis  infra  duos  leucas  silis,  senlentie  contra  personas  ibidem 
commorcntas  postlapsum  duorum  dierum  el  non  ante  valeant  aggravari. 
CoQlra  personas  vero  in  locis  ultra  duas  leucas  silis  commoranlcs  post 
lapsam  seplem  dierum.  Contra  commorantes  in  locis  ultra  seplem  leucas, 
demom  elapsis  diebus  duodccim  senlcncia  agravelur.  Impetratas  autem 
agravationes  aliajs  et  precipitalas  temporc  el  anle  tempussuperius  prelaxa- 
tum,  volumus  non  valere. 

Gum  multi  mullociens  agravationes  multiplicent,  ut  parles  fatigent  labo- 
ribas  et  involvant  in  expensis,  item  quia  mulli  in  agravando  formam  de- 
biiam  non  observant,  verba  superflua  in  ipsis  agravationibus  fréquenter 


136  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIK. 

ymo  comuniter  mulliplicanl  et  involvunl,  quilibct  per  maUtiam,  quilibel 
per  iguoranliam  et  impudenliam,  ut  partes  gravent  sumplibus  muitiplicala 
scriplura;  ideo  cerlos  et  limitatos  modos  agravandi  sentencias  duximus 
ordinandos  quos  in  curia  palam  faciemus  appendi. 

Staluentes  ut  scriptores  de  cctero  modos  et  formas  hujusmodi  teneant 
in  faciendis  agravalionibus  et  observent  scripturas  ;  si  contrarium  feccrint 
quod  non  Icnebit  agravatio  et  ipsi  aliter  débite  punientur.  Cum  tamcn 
personarum  contemptus  evidens  aut  negociorum  qualitas  vel  tcmporis  diu- 
lurnitas  id  exposcerit,  nos  de  specialibus  agravationibus  curabinnus  pro- 
videre. 

Item  caplantium  et  procurantium  vexaciones  partium  sumptus  et  la- 
bores  maliciis  occurere  cupicntes  citationcs  super  securitale  prestanda 
super  denunciantis  quod  vcnire  ru..suros  in  juris  subsidium,  ut  aliqui  de 
aliéna  diocesi  ad  nostrum  diocesim  quis  trahatur  impetrari  nolumus,  nec 
concedimus  ad  sigilliim«  nisi  prius  officialis  nostri  vel  iocumtenentis  ejus- 
dem  super  hor.  habita  licencia  spécial!.  Cum  in  hiis  quorum  sit  opus  io- 
formacione  summaria  ad  evitandum  dolum  qui  multociens  in  hiis  commilti 
contingit,  anlequam  ad  dandum  licentiam  de  hujusmodi  impetrandis  cUa- 
cionibus  concedamus. 

Item  ad  excludendum  maliciam  illorum  qui  quoniam  ut  alios  fraudent 
suis  debitis,  se  fraudulenler  absentant,  seu  moneri  super  debitis  suspi- 
canles,  duximus  staluendum  ut  monitiones  ipsis  personis  principalibus 
si  invcniantur  aliter  publiée  in  ecclesii  cujus  existent^  vol  in  domicilio 
ubi  morari  soient,  vel  consueverunl,  de  celcro  nuncientur;  de  cujus  dc- 
nunciationis  temporc  denunciandi  capcllanus  et  executorcs  nos  certificient 
per  cartellos  ipsis  monilionibus  anncxaios,  pro  quibus  non  rccipiant  nisi 
lantum  unum  denarium  pro  labore.  Inibentes  dislricte  ne  monitiones 
hujusmodi  aggraventur  nisi  dcmum  elapso  tempore  in  ipsa  inonilione 
contcnto.  Sic  enim  monitiones  et  scnlcncias  in  ea  contentas  amodo  valcre 
volumus.  licct  principales  personnas  nisi  inveniri  potucrint  minime  ap> 
prehcndant. 

Statuimus  etiam  de  cctero  datam  litterarum  annuatim  in  festo  Ânnun* 
tiacionis  Do:ninice  mutari,  prout  mutacionem  alias  fieri  in  festo  Pasche 
extiterit  ordinatum,  cum  propier  binum  cursum  in  anno  uno,  predicli  fcsti 
Pasche,  in  computatione  date  multi  quoniam  (?)extitcrunt  circumve&ti{l). 


(1)  Le  commencement  de  l'année  au  ztii*  siècle  était  fixé  à  Piquet.  Mais  il  y  ATait  vn  rê«l 
inconvénient  à  commencer  l'année  à  une  fête  mobile,  car  on  pouvait  trouver  deux  fois  la  mësie 
date  dans  la  même  année.  Ceitpar  exemple  ce  qui  était  arrivé  peu  avant  l'élection  de  Raynaad 
deLalorte.  L'année  allant  de  Pâques  1203  \29  mars)  à  Piques  1294  (18  avrU),  avait  ej  vingt 
Jours  en  double  :  deux  30  mars,  deux  31  mars,  deux  1"  avril,  etc.,  jusqu'au  18  ;  en  sorte  que 
les  actes  datés  du  1"  avril,  sans  autre  indication,  peuTent  être  indifleremment  attribsés  a« 
1"  avril  1293  ou  au  1*'  avril  1294.  L'autorité  ecclésiastique,  qui  réglait  toutes  les  questions  d« 
calendrier,  fit  cesser  cet  inconvénient.  Pour  cela,  son  chancelier  et  garde-sceau  de  Limoges, 
Pierre  Faure  (a),  rendit  en  1300  une  ordonnance  d'après  laquelle  on    devait  coounencer  l'an* 

{a)  Magister  P.  Fabri,  cancellarius  et  custos  sigilll  curie  Lemovieensis  (BiM.  nat.,  m»,  laft., 
U019,  foi.  275). 


ANCIENS  STATUTS   DU   DlOCÉf>V   DB  LIUOOES.  4 3*7 

Rursus  causarum  négocia  emendendacredentes  ctamputans(?)dilacioneni 

materiam  intendcntes  in seu  litis  inilio  dari  sta- 

tuimasdiem  ad  respondendum  vel  proponendum  nisi  sil  lalis  pelicio  com 
sit  statuni  de  slilo  curie  Lemovicensis  respondendum. 

Item  et  quo  ad  poncndum  et  respondendum  nisi  sit  talis  pcrsona  coi 
commicti  debeat,  nec  non  ad  dicendum  in  personas  cl  in  dicta  testium  in 
causis  una  cl  eadcm  dies  parlibus  de  cetero  prcfigalur  de  posicionibus 
et  parlibus  ad  concludendum  vel  ad  audiendum  jus  in  causa  certa  dics 
exUlerit  assignata  contraponal  si  contraponere  volneril  el  alias  super 
eodcm  facto  non  posueril  seu  contraposuerit  in  processu  ullerius  cum 
ad  coDtraponendum  dilacio  minime  concedalur. 

hem  si  exceplio  excommunicalionis  in  processu  posila  cl  recognita 
Tel  alias  probata  per  parlem  adversam  absolulio  proponalur,  proponens 
absoluciones  hujusmodi  siatim  de  ipsa  doceat  nec  ad  probandum  alias 
admiclatur  nisi  juramento  proprio  appareat  se  absolulioncm  pre  manibus 
non  habere  ;  quo  casu  terminum  unum  ad  docendum  de  ca  sic  propo- 
nenli  dari  lantum  volumus,  nec  ulterius  cumdcm  admicli,  ne  de  procès- 
sibus  cause  fiant  et  lites  ex  litibus  oriantur,  rursus  ne  probationis  maleria 
rcslringatur,  injurie  que  et  maleficia  non  remaneant  impunila. 

Slatuimus  ut  de  celero  in  causis  injuriarum  et  in  cxceplione  spolia- 
cionis  facto,  lestes  teslimonio  compellantur  etiam  per  pcrsonam  quam- 
cumque,  cum  judicia  claudicare  non  debeant,  jurclurquc  de  cclcro  in 
spoliacionis  cxceplione  ad  probandum  super  ea  dlc  assignata. 

Item  in  causis  excusationis  ullra  duas  vices  minime  admicli  slatuimus 
qnin  per  procuratorem  procedi  poterit,  nisi  veritas  excusacionis  coram 
OAbis  légitime  probarelur.  Quam  probationem  et  spacium  sive  Icmpus 
interprimam  et  sccundam  excusationem  aut  sil  competens  noslro  arbîlrio 
reservamus,  cum  per  excusaciones  multipliées  pro  cclcrala  négocia 
impcdiri  qac  fines  litium  parlibus  maliciose  hoc  procarantihus  dicimus 
per  cxperla  insuper  ut  cause  sine  calumpnia  procédant,  lites  que  brèves 
fiant.  Statuimns  nt  nullum  de  celero  deffensorem   admicli  in  causis  pro 


née  le  jour  de  la  fête  de  rAnnoncUtion  (35  mars)  (b).  Ces  statuts  de  1310  donnent  ici  )a  con- 
firmation, on  peut-être  la  simple  réédition  de  cette  mesurei  en  prescrivant  aux  notaires  et  à 
tons  les  officiers  relevant  de  la  juridiction  ecclésiastique  d'avoir  à  obéir  à  l'injonction  du 
eliaxieelier. 

Le  système  ioaaguré  en  1301  et  confirmé  par  l'évêque  de  Limoges  dans  ces  statuts  de  1310 
resta  en  vigueur  265  ans.  L'édit  de  Boussillon  en  Dauphiné,  donné  le  4  août  1561  par 
Charles  IX,  fixa  au  1"  janvier  suivant  le  commencement  officiel  de  l'année  1565  dan»  toute 
rétendae  da  royaume  :  ■  Voulons  et  ordonnons  qu'en  tous  actes,  registres,  instruments,  con- 
trais, édita,  lettres  patentes,  missives  et  toutex  écritures  privées  l'année  commence  doresna- 
vaAt  et  soit  comptée  du  premier  jour  de  janvier.  »  Cet  édit  vérifié  et  enregistré  par  le  parle- 
ment de  Bordeaux  dès  le  20  avril  1565,  fut  publié  à  Limoges  le  20  septembre  et  appliqué  daos 
toute  la  province  le  1*'  janvier  1566.  (Voir  :  Des  formules  de  date  et  de  l'époque  du  comtnen- 
ce*neni  de  Va  utéeen  Limrttuint  par  I<ouis  Guibert.  —  Tulle,  Crauffon,  1886). 

{b)  Nota  quod  data  litteraruro,  contraciuum  solebat  mutari  in  festo  Pasche,  in  dyocesl  Le- 
movicen^i  :  sed  magister  PetruH  Fabri,  cancellarius  et  custos  sigilli  curie  Lemovicensis  losti- 
tuit  quod  data  muuretur  quolibet  anno  in  festo  Annnntiationis  Béate  Marie  (Chron.  de  Saint- 
Jfartial^  publiées  par  Duplès-Agier,  p.  140). 


138  SOCIÉTÉ  ARCHÊOLOGIQUB   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

présente  in  dioccsi,  nullojusto  impedimenlo  detcnlo  donec  juratum  fueril 
de  calampnia  pcr  eumdeni. 

Peticionique  centum  soiidorum  summam  non  excedcntem  de  cetero 
Rtalim  volumus  responderi,  et  si  quis  citatus  fueril  causas  et  raciones 
anditurus  contra  in  monitione  ad  ejus  instanciam,  impetrala  die  qua  sit 
adversarium  suum  citari  fccerit  vol  alias  ad  dicendum  fuerit  assignala, 
licteris  exhibitis,  dicat,  nec  aiia  diiacio  concedalur. 

Item  si  quis  absolvi  petierit  et  contra  ipsum  manifesta  offensa  propo- 
sita  fuerit  et  probata,  is  qui  se  absolvi  petierit  de  saiisfactione,  solucione 
vel  quictacione  vet  alia  justa  replicatione  utalur.  Statim  rcplicationi  sue 
per  partcm  responderi  slatuimus.  Quod  etiam  in  aliis  exceptionibus  ne 
c^usarum  protrahelur  cxpeditio  volumus  et  observari  jubemus. 

Item  statuimus  non  impelrari  citation  cm  auditurum  causas  et  rationes 
ab  eo  qui  monitus  fuerit  ultra  terminum  quindecim  dierum,  quod  si  fes- 
tum  fuerit  citatio  non  valeat,  et  impctralio  teneatur  parti  alteri  in 
cxpcnsis,  cum  per  bas  cilationes  terminum  longiorem  habentes  crcditorcs 
suis  debitis  per  protractionem  et  dilacionem  minime  dcfraudentur. 

Item  ad  excludendum  omncm  fraudem  statuimus  quod  non  fiant  aliqua 
memoralia  nisi  per  scriptores  in  curia  résidentes,  et  quod  si  memoralia 
sigillanda  parlium  concensu  porlentur,  concodentcs  exprcssis  nominibus 
et  présentes  manu  propria  se  subscribanl  in  eis,  vel  coram  altero  de 
juratis  in  curia  residentibus,  qui  noiiciam  corum  habeant  pcrsonaliler 
comparentcs  per  eum  scribi  faciat  quod  coram  eo  et  a  talibus  est  con- 
cessum,  processus  enim  habitas  extra  curiam  etiam  de  concensu  nullius 
sit  momenli. 

.  Cum  intelleximus  aliquos  privatos  abuti  processibus  judiciariis,  et  extra 
curiam  nunciant  intra  se  causas  processus  et  memoralia  facere,  que  res 
sicut  erronea  est  penitus  exiirpanda. 

Memoralia  etiam  signata  nisi  solum  sigillentur  ipsa  die  qua  concessa 
fuerinl  et  signata,  fidem  facere  nolumus  :  Cum  mulli  in  fraudem  sigilli 
talia  solum  signata  longo  tempore  icneant  et  niulti  sub  sigillis  antiquis 
quorum  caractères  non  apparent  liquide  postmodo  seducendo  cancclla- 
riam  ipsam  talia  non  sine  dampno  partium  quidam  procurant  et  faciunt 
sigillari. 

item  litière  testimoniales  que  ad  sigillandum  porlari  continget  et  ag- 
gravaiioncs  etiam  previdebuntur  pcr  aliquos  a  cancellario  dcputandos,  ut 
constel  quod  a  juratis  curie  liltere  sunt  recepte  et  aggravationes  secun- 
dum  usum  approbatum  et  solitum  impctrcntur. 

Itcpi  slatuimus  quod  si  partes  super  expcnsis  summarum  deffectuum  (?) 
vel  quorumcumque  proccssuum  inler  se  conveniant  vel  componant,  quod 
cis  liceat,  et  quod  taxator  pro  expensis  nichil  percipiat,  nec  partes  ad 
taxandum  aliter  invilos  compellat  sui  laboris  cum  (?)  erit  exoneratio,  sine 
quo  nichil  débet  recipere.  Ymo  quod  partes  volunt,  potius  sequi  débet. 
Nec  etiam  idem  taxator  aliquid  percipict  pro  illis  que  in  causis  matrimo- 
nialibus  pro  interesse  videlicct  sponsoliorum,  pro  carnali  copula,  pro  de- 
floratione  vel  ex  consimilibus  causis  adjudicantur  quas  cum  illa  judiciali- 
1er  venianl  et  idco  reddenda  et  agenda  sunt  gratis. 


ANC'.EIfS  STATUTS  DU    DIOCESE  DE  LlIlOGBS.  i39 

Item  illi  coram  quibus  posicionîbus  et  articulis  respondetur,  moderatum 
salariam  rccipiant  pro  labore,  et  pars  que  copiam  pétition um  et  articulo- 
rum  liabere  voluerit,  eam  fieri  et  scribi  faciat  per  quemcumque  scriplo- 
rem  curie  Lemovicensis  quem  duxerit  eligendum,  licet  quodvis  aliud 
fuerit  observalum. 

Item  quia  quando  comode  non  polest  habcri  judicis  copia,  duximus  sla- 
tueodum  ut  si  partes  unanimiler  coram  altero  de  juntis  in  curia  residen- 
libus  et  propriam  sedem  habentibus  promiltant  se  expedirc,  si  altéra  pars 
iu  expedito  negotio  recédât  postmodum  quod  ad  relalicncm  talis  jurali 
propria  manu  se  subscribenlis  et  coram  eo  extitit,  concedatur  contra  con- 
lumacem  sentencia  vel  deffectus.  Et  in  causas  coram  advocalis  expediri 
subscribat,  et  quod  tam  résidentes  quam  foranel  in  omnibus  litloris  quas 
de  cetero  facient  nomen  suum  subscribant. 

Item  statutmus  quod  bajuli  coiifratrie  semel  in  annô  de  levatis  et  per- 
ceptis  juribus  confratrie  reddant  rationem  et  computum  et  prestent  reli- 
qua  hiis  qui  post  ipsos  fuerunt  bajuli  depputati,  et  non  levata  ab  liiis  qui 
solvcndo  eztiterunt  obuoxii  seu  confratrie  obligati  fuerunt,  nichilominus 
de  suc  reddere  dicti  bajuli  preslare  habeant  ut  insistentur  ad  diligentiam, 
et  ad  recuperandum  ipsius  confratrie  dcveria  fortius  vlgilent,  et  inten- 
dant culpam  eorum  et  dcsidia  totaliter  non  pertranseant  inpuncta.  Adi- 
cicntes  ul  illi  confratrcs  duntaxat  de  cetero  repuleatur,  qui  recepti  erant 
per  bajulos,  et  in  eorum  papiro  scripti  non  fuerint,  scribi  se  faciant;  si  ad 
comestiones  vel  ad  alios  confratrie  actus  spçctant  admitti,  cum  ignominia 
repeilantur. 

Districtius  injungentes  ut  confratrcs  in  curia  resîdenles,  hora  débita, 
ante  epislolam  ad  lardius,  ad  missam  béate  Marie,  dicbus  sabbalis  et  aliis 
de  quibus  statutum  est  veniant;  alioquin,  sine  omni  remissiohc,  duorum 
denariorum  pcnam  solvant,  cum  ex  facililate  venie  dissuctudincm  assump- 
serint  a  paucis  temporibus  veniendi. 

Item  statula  oostra,  una  cum  usibus  approbatis  aliis,  quos  stilum  curie 
vocamus,  tam  in  negociis  quam  in  causis  ab  omnibus  observari  precipi- 
mus,  subteneri  sub  pénis  excommunicalionis;  districtius  injungentes  ut 
contra  ea  nullus  stetur,  facere  aut  actemptare  présumât.  Quod  si  contra- 
rium  factum  aut  contcmptatum  fuerit,  id  decrevimus  non  valere,  trans- 
gressoribus  pena  débita  infligenda. 

Acta  fuerunt  hoc  et  per  nos  staluta  et  ordinata  die  martis  post  oclavas 
omnium  sanctorum,  anno  Pomlni  millesimo  ccc'"^»  decimo. 


II 


Au  31*  folio  du  manuscrit,  à  la  suite  des  statuts  précédents,  et 
sans  aucun  entête  ni  préambule,  se  trouve  l'ordonnance  spéciale, 
annoncée  plus  haut,  au  sujet  des  excommunications  avec  aggrave. 

Le  concile  de  Tours,  tenu  en  1239,  prescrit  la  manière  de  pro- 
céder en  înatière  d'excommunication  :  il  défend  aux  prélats  la  pré- 


140  SOClÉTi  AllOIÉM.Oâiai>K  KT  BlST0ftK}UR  DO  USIOrSIN. 

cipitation;  il  vent  qu'après  les  monitions  et  rexeomiBunicatioa,  ils 
usent  de  Taggravation  en  cas  de  eontumace,  et  eDRn  de  la  réaggra» 
yation,  quand  le  coupable  montre  une  obslloation  invincible. 

La  forme  des  aggrares  et  réaggraves  é(ait  différente  sdon  les 
usages  des  diocèses.  Dans  quelques-uns,  on  les  prontiançait  par  un 
seul  acte,  avec  des  délais  përemptolres;  mais  dans  la  plupart  Ton 
usait  de  deux  actes  séparés.  L'ordonnance  suivante  nous  fait  con- 
naître avec  détail  comment  les  choses  se  passaient  dans  le  diocèse 
de  Limoges. 

Les  aggraves  et  réaggraves  qu'on  publiait  après  rexcoromuoica- 
tion  n'étaient  qu'une  confirmation  des  premières  censures  que 
l'Eglise  faisait  publier,  afin  de  donner  lieu  à  ceux  qui  avaient  en* 
couru  l'excommunication  de  faire  des  réflexions  sur  leur  état. 
C'est  pour  les  monitoires  qu'on  employait  le  plus  ordinairement 
les  aggraves  et  les  réaggraves.  Le  juge  qui  avait  permis  la  publi- 
cation d'un  monitoire  permettait  aussi  d'obtenir  de  l'offlcial  un 
ordre  pour  publier  ces  confirmations  d'excommunications  contre 
ceux  qui  refusaient  de  révéler  les  faits  dont  ils  avaient  connaissance. 
(D'Héricourt,  Lois  eccles.,  p.  174). 

L'aggrave  ou  anathème  se  publiait  ordinairement  au  son  des 
cloches  et  avec  des  cierge3  allumés  qu'on  tenait  en  main,  qu'on 
éteignait  ensuite  et  qu'on  jetait  par  terre.  (Dugasse,  Traité  de  la 
jurid.  eccles.^  Part.  xi%  p.  203.  —  Fleury,  Inst,  au  droit  eccU^.y 
1. 1,  p.  72). 

Si  cilasli  talem  ad  talem  diem  pro  tali  comparenle  quoniam  noa  venil, 
nec  misil  ipsum  quem  exqao  présentes  rccepilis  ialerdicimus,  sie  sentcn- 
tia  dcnuntietar  nisi  defifectum  impelraverit. 

Quoniam  talis  tandiu  sustinuil  interdici  a  nobis  pro  tali  ipsam  quem 
cxcommunicamus  et  ejus  familiam  interdicimus  sicaentencia  deouncietur. 

Quoniam  lalis  sostinuit  interdici  et  excommunicari  a  nobis  et  ejus  fami* 
lia  interdici  pro  tali  scntentia  agravando  vobis  mandamus  qualhinus  ipsum 
cxcommunicalum  denuncietis  nominalim  et  publice  singulis  diebus  demi- 
nicis  cl  fcslis,  cxlinctis  candelis,  et  pulsalis  campanis  et  ejus  familiam 
sub  disiriclo  Icncat  inlerdicto. 

In  virlulc  sanclc  obcdicniic  cl  sub  pcna  cxcommunicalionis  vobis  man- 
damus qualhinus  seniencia  lala  a  nobis  in  talem  cl  districtc  in  ejus  fami- 
liam interdictum  pro  tali  prout  late  sunt^  firmitcr  observelis  et  dcnuocic- 
lis,  cxlinclis  candelis,  cl  pulsalis  campanis,  prout  alia  dalum  est  in  man- 
dalis.  Et  ter  in  qualibet  seplimana  cl  in  isla  polcris  poni  seu  moneri 
dietum  (t)  et  servientem  et  etiam  parlicipanles  usquc  numerum  vigcnii 


(1)  Ce  mot,  répété  plusieurs  fois  dans  la  saite,    est  toujours  écrit   dum;   on  peut   lire  die- 
tum, dominirm,  ou  autre  mot  semblable. 


iSCClKNS   STATUTS   DU   DIOC&SK   DK  LIUOGRS.  141 

taDtum.  Et  dicatur  sic  moaeatis  ules  nec  cum  diclo  excommunicalo  partî- 
cipenl  edendo,  libendo,  terras  suas  vcl  vincas  excolendo,  domos  suas 
conducendo,  vel  a!io  quoquomodo,  nisi  in  casibus  a  jure  permissls»  et 
nichil  amplius  pooatur  in  ista  clausula  nisi  conclusio,  videlicet  quod  si 
feoeriol  contra  eos  gfavius  procedainus. 

Iterato  in  virlote  sanclc  obediencie  et  sub  pona  cxcommunicaiionis  vo- 
bis  mandamas  quathinos  senlentia  lata  a  nobis  exigente  justitia,  in  lalem 
et  districte  in  ejus  familiam  inlerdictum  pro  tali  prout  laie  sont  observelis 
et  eas  dcnuncietis  uorninatiin  et  pubiice  singulis  diebus  dominicis  et  festi- 
vis,  eztinctis  caodelis  (4)  et  pulsatis  campanis,  et  ter  amplius  in  qualibet 
septimana  prout  alias  datum  est  in  mandatum;  et  cesselis  a  divinis  officiis 
ipso  vel  aliquo  de  ejus  familia  présente  in  ecclesiis  vel  in  portalibus  ea- 
ramdem,  et  moneatis  iterato  dictum  et  senicntem,  et  compellanl  infra 
sex  dies  reddentur  ad  fîdelium  unionem.  Quod  nisi  nnonili  fecerint,  ipsos 
quos  ex  nunc  interdicimus,  sub  interdicto  teneatis  et  iterato  moncanlur 
participantes. 

Iterato  quod  erit  3o  ut  supra,  hoc  addito,  quod  cessetur  ipso  excommu- 
nicato  vel  ejus  familia  prescntibus  in  ecclesiis  vel  in  portibus,  seu  cimitc- 
ris  et  dictum  et  servientcm  et  in  ista  moncantur  iterato  quod  erit  tertio 
participantes  et  si  fecerint  eonlraricim  et  cooslent  denuncientur  excommu- 
nicati. 

Iterato  quod  erit  quarto  etc.,  ut  supra,  hoc  addilo  quod  fiel  agravalio 
contra  dictum  extinetis  caodelis  et  in  subsequentibus  agravalio  ni  bu  s  post 
agraventar  contra  dictum  sicut  contra  principalem  et  participantes  denun« 
tieotur  excommunicati  nt  supra  et  nichil  amplius  aggravelur  contra  eos 
sed  denuntientur  modo  ut  supra. 

Iterato  quod  erit  quincto,  etc.,  ut  supra,  tam  contra  dictum  quam  contra 
principalem  et  denuncienlur  bis  in  missa  solempni  cujuslibel  dici  domi- 
nice  et  diebus  festivis. 

Itéralo  quod  erit  vi^,  etc.,  ut  supra,  hoc  addito  quod  mandetur  denun- 
cîari  ter  in  qualibet  missa  solempni  cojuslibet  diei  dominiee  et  festive, 
tam  contra  principalem  quam  contra  dictum. 

Iterato  quod  erit  vti^,  hoc  addilo  quod  mandentur  dcnunciari  semel  in- 
ler  alias  très  ad  portai e  ccclesiarum. 

Iterato  quod  erit  oclavo,  etc.,  ut  supra,  hoc  addilo  quod  in  denuncialionc 
que  fiet  ad  portalc,  prohicianlur  très  lapilli  versus  domum  excom- 
municati. 


(1)  Ces  excoBimuDicatJoiifly  où  l'on  éteignait  les  oierges,  rappellent  la  célèbre  excommuni- 
cA:oii  des  Pères  da  eoocile  de  Limoges  de  1031,  coûeile  d'où  sortit  fa  Trêoe  ou  la  Paix  de 
JHem. 

w  Ex  autoritate  Del  patrh  omnipotentis  ....  excomaninicamus  iUos   militeft qui  pacem  et 

â*  junitiain  episcopo  suo  firmare  nolunt.  Maledicti  ipsi  et  adjutores  eorum  in    malum;   maie- 

•  dkrU  arma  eorum  et  cab«IU  Uloritai;  emnt  cura  Caîn  fratrida,  et  cam  Joda  tradttore,  et  cnm 

•  DfttlMo  et  AMron,  qo!  Tiri  iotroieront  in  infcrnqm.  Bt  Kicot  he  lucerne  extlnguuBtar  in 
M  ocalia  TeatrU,  ita  gandium  eorum  extinguetur  in  conspectu  saootorum  angelorum...  »  Om- 
ne*  epUcopi  et  presbyteri  nandelas  ardentes  in  manibus  tenentes,  mox  eas  in  terram  proji- 
cictttes  êxtiaxemoi.  Ad  quod  verbom  cor  populi  valde  expavit,  et  omnes  clama veniiit 
discentea  :  «  Sic  ezUnguat  Detis  letitiam  eorum,  qui  pacem  et  justitiam  suscipere  noiuat.  » 


14i  SOCIÉTè   ARCHéOLOGIQOE   ET   HISTORIQUR   DU    LIMOUSIN. 

Uerato  quod  erit  nono,  elc,  ut  supra  et  quod  dcDuncieotur  scmel 
amplius  singulis  dîebus  non  feriatis  cum  coniumacionibus  que  mandabilur 
cessari  villls,  castris,  burgis,  et  locis  at  otiam  feriatis  ter  in  mlssa  solen- 
niori  ut  supra. 

Iterato  quod  erit  decimo,  etc.,  ut  supra  cum  contumatione  cum  simili. 

Ileralo  quod  cril  xi",  etc.,  ut  supra*  ci  in  ista  nisi  sit  in  villa  populosn 
multum  poierit  poni  illa  clausula  quod  cessetur  villls,  castris  ita  quod  non 
ponatur  familia. 

Iteralo  quod  erit  XII*  ut  supra  et  in  ista  ponantur  quod  denuncientur 
singulis  diebus  feriatis  et  non  feriatis  et  ter  in  qualibct  missa.  Âlie  impe- 
irontur  ab  officiale  vel  cancellario  antequam  scribenlur. 


m. 


CONSTITUTIONS   SYNODALES. 


Sous  ce  titre  français,  on  trouve  au  folio  35*  des  constitutions 
publiées  à  la  suite  du  second  concile  général  de  Lyon,  tenu  par 
Grégoire  X  en  1274,  Ces  constitutions  sont  en  quelque  sorte  le 
résumé  des  actes  de  ce  concile  pour  les  parties  que  Févéque  de 
Limoges  voulait  promulguer  d'une  manière  particulière  dans  son 
diocèse.  L'auteur  de  notre  manuscrit  a  indiqué,  à  la  suite  de  cha- 
cun des  cinq  premiers  articles,  les  chapitres  du  Corpus  juris  conte- 
nant les  actes  de  ce  concile  d'où  ils  sont  extraits.  Ses  indications 
sont  abrégées  et  incomplètes.  Nous  les  complétons  et  donnons 
môme  en  note  le  texte  de  ces  chapitres. 

Avec  la  suite,  nous  avons  vraisemblablement  les  statuts  de  Gil- 
bert de  Malemort  et  de  ses  prédécesseurs,  ainsi  que  nous  l'apprend 
Raynaud  de  la  Porte  lui-même,  en  les  publiant  de  nouveau.  Le 
premier  article,  qui  défend  aux  religieux  et  autres  de  recevoir  les 
dîmes  qui  appartiennent  aux  églises  paroissiales,  s'appuie  sur  le 
concile  de  Montluçon,  tenu  en  1266,  antérieurement  à  Tépiscopat 
de  Gilbert  de  Malemort.  La  rédaction  de  cet  article  doit  dater  de  la 
tenue  de  ce  concile. 

Ces  statuts  avaient  été  publiés  dans  un  des  deux  synodes  rassem- 
blés chaque  année,  le  premier  à  la  Pentecôte,  et  le  second  à  la 
fête  de  Saint-Luc  (18  octobre).  Au  xvn*  siècle,  les  évoques  de 
Limoges  les  rassemblaient  toujours  à  peu  près  aux  mêmes  époques, 
puisque  les  statuts  de  1619  portent  cette  ordonnance  :  «  Suivant  les 
anciens  statuts  et  Tusage  de  ce  diocèse,  les  synodes  se  tiendront 
deux  fois  chaque  année,  à  savoir  :  le  premier  jeudi  après  l'octave 
de  Pâques,  et  le  premier  jeudi  après  l'octave  de  Saint-Luc, 


ANCIENS  STATUTS   DU   DIOGÀSE   DK   LIMOGKS.  143 

Raynaud  de  la  Porte  confirma  ces  statuts  et  les  publia  de  nou- 
veau dans  le  premier  synode  qu'il  tint  à  la  Saint-Luc,  probablement 
Tannée  1295  :  In  presenti  synodo  Sancti  Luce  quam  primam  celé- 
bramus, 

La  puissante  maison  de  Malemort  avait  pris  son  nom  d'une  terre 
située  à  une  demi-lieue  de  Brive.  Les  seigneurs  de  Malemort,  barons 
du  Limousin,  se  qualifiaient  princes  dans  les  chartes  desx*"  et  xi«  siè- 
cles. Ils  prirent  part  à  la  première  croisade,  en  1096,  et  fondèrent 
le  monastère  de  Dersses  en  1212. 

Gilbert  de  Malemort,  fils  d'autre  Gilbert  de  Malemort,  était  archi- 
diacre de  Limoges  lorsqu'il  fut  élu,  le  IS  ou  le  16  décembre  1275, 
par  le  clergé  assemblé,  pour  être  successeur  d'Aimeric  de  Serre, 
après  une  vacance  de  trois  ans  cinq  mois  et  treize  jours.  Il  reçut 
sa  confirmation  de  Tarchevôque  de  Bourges,  dans  l'octave  de  Noël 
de  la  môme  année,  et  fut  sacré  le  dimanche  de  la  Passion,  22  mars 
suivant. 

Il  fit,  en  1282,  une  transaction  avec  le  chef  des  Templiers  du 
Limousin,  touchant  les  églises  qui  dépendaient  de  cet  ordre.  En 
1280,  il  assista  au  concile  de  Bourges.  En  1287,  il  obtint  de  Philippe- 
le-Bel  un  mandement  portant  défense  à  qui  que  ce  fût  de  troubler 
révoqué  de  Limoges  dans  sa  juridiction  temporelle  de  la  Cité.  Le 
23  août  1278,  il  assista  au  concile  d'Aurillac  en  Auvergne.  Le  19  sep- 
tembre 1286,  il  assista  à  un  autre  concile  de  Bourges.  Il  était  à 
Rome  le  16  novembre  suivant.  En  1288,  il  unit  des  archiprétrés  à 
quelques  cures. 

Il  fit  son  testament  en  1293  et  un  codicille  le  mercredi  après  la 
fête  de  Saint-Nicolas  de  mai,  12  de  ce  mois  1294,  et  mourut  le  9  ou 
le  H  juin  1294.  Il  fut  enterré  dans  la  cathédrale,  au  milieu  du 
chœur.  On  voyait  son  inscription  sur  une  plaque  de  cuivre,  dans  la 
chapelle  des  Trois-Rois  : 

Qui  jacet  iu  lumulo  si  quserat  forte  vialor 

Hic  jacet  antlsles  moribus  cximius, 

Gilberlus    Malamorl   erai    ilH    nomen    avorum. 

Reddldil  hune  celebrcm  fama  decusque  patris. 

Poiiliticali  annis  b!s  novem  munere  functo 

Corpus  lerra  rapil,  spiritus  asira  capil 

Obiil  anno  dotnini  1294. 

Un  sceau  de  cet  évéque  portait  une  main  bénissante,  mais  ses 
armes  de  famille  sont  :  fascé  d'argent  et  de  gueules  de  six  pièces. 

m 

Constitutions    synodales, 
Scnlencia  lala  in  consilio  Lugdunensii  in  illos  qui  ralione  regalium,  sou 


144  SOCIÉTÉ  AMGMÉOLOGIQUK  KT  HlfiTORIOOK  DV  UMOUSirc. 

cusiodie  sive  advocâiioDîs  bana  ccclesiarum,  sede  vacaiite«  osnrpaai  de 
novo  uk  ex[lractum]  de  Ekct.  Caput  Generali,  (XIII  de  ElecL  L.  I.  Til.  6, 
inVI)(l). 

Ilem  in  illos  qui  per  violenliam  vel  metu  presumenlurextorquere  absolu* 
cionem  vel  revocalionem  senlenlie  excommuDicaiionis,  suspencionîs  vel 
interdicli  ui  ex[tractum]  de  his  qui  ci  metus  oe  causa  fiunt.  Capot.  Ah- 
solutioniê,  (L.  1.  Til.  XX,  Capul  unîcnm)  (%). 

Item  in  illos  qai  prelaios  vel  personnasecclesiasticas  submiiicfe  subjaeere, 
vel  SQpponere  sibi  présumant,  nisi  de  consensu  suicapUnli  rt  !iceneia  sedis 
aposiolice  ex[traclum]  de  rebua  ecclesie  non  alienandis.  Capai  ttoo  eonaïU- 
tiaêimo.  (t.  III,  Til.  IX,  in  VI)  (3). 

(1)  CAPUT   ZIIl 

GenenM  constltotione  sâncimus,  uniTersof  et  singulos,  qai  regalîa.  custodiam,  aive  gtiardiam, 
adrocationis  teu  defeneionis  titulum  in  Eficlesiis,  monaeterilii,  tea  quibuslibet  aliis  plia  locis, 
de  ttftvo  uturpare  cODantes,  bona  eccleaianim,  monaaterionim  aat  loooruin  Ipaoram  ^acaintiom 
eecupare  proatonvat»  quantneunque  digmUtls  honore  prnAilgaant  :  Clefieoe  etiam  Boeleaianioi, 
Monacbos  monaateriorum,  et  personaa  caeteraa  loconim  eorumdem,  qui  boc  fieri  procoraot,  eo 
ipKo  excooimuDicationia  aententis  decernimus  subjaeere.  Illos  vero,  qui  ae  (ut  deberent)  talia 
fteieotibui  fioA  oppoDunt,  de  proventibua  Ecclesiarom,  aaa  loconim  ipsoram,  pro  tempore  qoo 
pnamissa  aloe  débita  contradictione  permiseriDt,  aliquid  peicipere  districtius  inhibemus.  Qui 
autem  ab  ipAarum  Ecclesiarum,  caeterorumque  locomm  fundatione.  Tel  ex  antiqua  consueto- 
dine  Jura  aibi  hujusniodi  Tindicant,  ab  illorum  abatru  aie  pmdenter  abstineaot,  et  sacs  miois* 
tros  in  eta  aolicite  faclant  abatioere,  quod  ea,  qusB  non  pertinent  ad  fnictuaaive  reditua  proTe-> 
nientes  vacationis  temporel  non  usurpent  :  nec  bona  estera,  quorum  ae  afferunt  haberc 
cDStodiara,  dilabi  permittant,  aed  In  bono  statu  conserrent. 

(2)  CAPUT  UNICUM 

Crregeritta  X  in  eoncUio  generali  Logdun. 

(an  U73  in  Gattla.) 

Absolutionia  beneflcium  ab  exeommunicationia  aentebtia,  vel  quamciinqu«  reToettloviein 
ipsius,  aut  suapenaionis,  seu  etiam  interdicti  per  vim  vel  raetum  extorta,  prawentia  constitotio- 
nis  auctoritate  omnino  viribus  vacuamus  Ne  autem  sine  vindicta  vlolentias  crescat  audacia, 
eoa,  qui  abaolntionem  aeu  revocalionem  hujuamodi  vi  vel  metu  extoracrtnt,  ezcommuftiea- 
tionis  aententisB  dêcerDimua  aubjacere. 

(3)  CAPUT  H. 

GregoriuB  X  in  concilio  generaii  Lugdua. 
Hoc  consultiasimo  prohibemus  edicto,  universos  et  singulosprœlatos  Eccleaiaa  sibi  commisaaik 
l)ona  immobilia,  seu  jura  ipeaiom  UtioiB  aubmittere,  aubjicere,  aeu  supponere,  abaque  Capi- 
tuli  Bui  consensu  et  Apostolicaa  aedis  lioentia  speciali  ;  non  concedendo  bona  ipai  vel  jura  in 
emphyteuslm,  seu  alias  allenando  in  forma,  et  casibus  a  jure  permiasis  :  sed  eonstituendo,  vel 
recognoBcendo,  seu  profîtendo  ab  illis  ea  tauquam  a  superioribus  se  tenere  :  seu  ab  ipsisi 
easdero  advocando,  prout  in  quibusdam  partibus  vulgariter  dicitur,  avoher,  vel  ipsoa  Paintno^. 
vel  advocatos  Ecclesiarum,  seu  bonorum  ipsarum  perpétue,  aut  ad  tempus  non  Inodicum  ata- 
tuendo.  Contraclus  autem  omnes  etiam  juraroenli,  pnnn,  vel  alterius  cujuslibet  firmltatia 
adjectione  vallatos  (quos  de  talibus  allenationibus  sine  hujusmodi  liceutia  et  consenau  contl- 
gerit  celebrari)  et  quidquid  ex  eia  secutum  fuerit,  dicernirous  adeo  viribua  omnino  earere,  ut 
nec  jus  aliquod  tribuant,  nec  prsscribeDdi  etiam  causam  parent.  Et  nihilominus  Prdatos,  qui 
secQs  fecerint,  ipso  facto  ab  officio  et  administratione  :  Clerioos  etiam,  qui,  acientea  contra 
inhibitionem  praedictam  aliquid  esse  pr»9umptoroi  td  auperiori  denuntiare  oeglexerist  a  per- 
cepUone  beneflciorum,  quse  in  Ecclesia  obtinent  sic  gravata,  trienno  statuimus  eaae  auapeoaoa. 
Laici  vero,  qui  Prslatoa  vel  Capitula  Ecclesiarum  aeu  alias  personaa  ecclesiastl<;^a  ad  aubmis- 
fiiones  hujusmodi  faciendas  hactenus  compulerunt,  niai  poat  competentem  moniiionem  (remiasa 
aabmissione,  quam  per  vim  vel  metiim  exegerant)  Ecclesias.  et  bona  eccleaiastica  eis  submtasa 
taliter  in  sua  libertate  dimittant  :  Illi  vero,  qui  de  c«etero  Praslatos,  vel  pereonaa  ea«dem  ad 


ANCIENS  STATUTS  BU   niOCàlIR  DR  LIMOGES.  U5 

Id  illos  qni  pigDorant. 

Item  in  illos  qui  pignorant,  id  esl  personnes  ecolesiaslicas  pro  aliis,  ni^i 
infra  mcnsem  desllterinl  exira[clum]  de  infurus  et  dampno  dcUo.  G»pvt 
Et  9i pignorationes  (L.  V,  Til.  VIII,  in  VI)  (1). 

în  regps. 

Item  in  reges,  principes,  barones  et  nobiles,  vel  quoslibet  eoram  mlnis- 
tros  aut  quoscumque  alios,  si  ipsi  laies  iicenliam  danl  alicui  occidendli 
capiendi,  vel  alias  in  personnis  vel  bonis  surs,  sca  suorum,  gravandi  illos 
qni  tnlcrint  sententiam,  vel  in  illos  quorum  occasione  latesunt,  vel  obser- 
valores  eorum,  vel  lalibus  communicare  volenies,  nisi  re  iniegra  licencitm 
revocaverint,  vel  ubi  bona  propter  hoc  capta  restituant.  Et  in  illos  qui 
faciunt  premissa  ratione  mandat!  vel  proprio  motu  et  si  per  duos  mease:i 
sententlas  sosiinuerint,  non  polcrunlabsolvi,  nisi  a^ede  apostolica  ex[trac* 
lum]  de  êententiaexeommunieationiê,  C^pui  Quicumque.  (L.  V.  Til.XI,ca-» 
pulXI)(2). 

hem  non  babet  locum  relaxaiio  ad  cautelam  quoad  inierdidi  sententi«m 
generaliter  promnlgaiam  in  civilates  et  castra  vel  quelibel  alla  loca  ut  ei- 
[tracLum]  de  sententia  excommunicationie.  Caput  Preêenti  (L.  V.  Tit.  Xi, 
capat  X)  (3). 

UKa  fkcienda  compulerint  (eujoBcamqQe  sint  conditionis  «ut  etatas  )  excommiMifcalioBl*  «int, 

mdUdiU  laoodatL  Ex  «ontncUbus  prstaraa  Buper  pr^mitSM  (hujoaiaodl  ttceotia  H  «odmimv 

iaterv«iiioMibus)  hactenac  ÎAitis,  Tel  quos  io  futurum  loiri  contigerit,  nau  occa»ioae  iUoruo  : 

Laîci  ultra  id,  quod  ex  natiira  contractuum  ipsoruoii  vel  adhibiU  in  iliia  lege  permittitur,  aliquid 

non  usarpent.  Qui  vero  secus  egcrint  (nisi  légitime  moniti  ab  hujasmodi  uaarpatione  deatiterlnt, 

restititende  etiam  ea,    qu»  taliter  usarpaniat)  eo  ipso  nentcotiain  exoonmuDicationiB  bicuTrMit  : 

et  ez  tnne  ad  •uppooeaduv  terratn  ipaoram  (si  «pus  fuerit)  Eccletiattico  intardlcto,  ybtji«  pro- 

cedator. 

(1)  CAPUT 

ISt  si  pignorationes,  qaas  rulgaris  etocatio  represalias  nominat,  in  qufbut  aSiaa  pre  atio 
pr«e7PaTatiir,  tanquam  graves  legibua  et  «quHati  aaturali  «oatranc,  civlH  aiat  eonatitittioDe 
^rotubitae  :  ot  tamen  aoraqi  prohibitio  In  personit  eceletiaaticia  tanto  aropliwa  timeatiir,  qo^nto 
ia  illis  specialiof  iobilientur,  eaa  concedi  contra  personas  prœdictas  seu  bona  ipsoriun,  aut 
«laantain  cunque  ;;eneraliter  prœtextu  cujus  vis  contuetudinis  (quam  potim  reputamus  abuaurn 
fore)  conceasati,  ad  tUaa  extendi  prie^enti  décrète  districtina  inhibemas.  IIU  autem,  qui  coatra 
fbceriot,  adrersw  ptraonaa  eaadom  plgnorationea  aeu  repreialias  contadendo  vel  ^iendando 
ad  eaa,  ant  pnNumptiooeqi  httjuamodi  revocaverint,  a  coQceasionia  vel  extensionis  tecnpore 
jntnt  menaeiUi  ai  peraonse  stngiilares  fuerint,  aeotentiam  excommunicationia  incurrant;  ai  vero 
uirfversltas,  e<;clesiiaatico  aubjaceat  interdicto. 

i%)   CAPUT   XI. 

Qpicvnqiie  pro  eO|  quod  in  Hegea,  Principes,  Barones,  nobiles,  ballivos,  vel  qnoslibet  minis- 
tros  eoram,  aot  quoacunque  alioa  excommunicationis,  suspenaionis,  aeu  tntcrdicU  aententia 
fuerit  promulgata,  licenciam,  alicui  dederint  oecidiendl,  capiendi,  aea  aliaa  ia  pêr«iofliia  aat 
bonia  auia,  vel  suozQia  gravaiidi  eoa  qii  talea  aenttntiaa  protulemaC  ajve  quoruD  aint  occa* 
aione  pr(4a(«.  vel  easdem  aeatentiaa  observantes,  seu  talit^r  excommunicatis  commanicara 
noleaies  [niai  licentiam  ipum  re  intégra  revocaverint,  vel  si  ad  bonorum  captionem  occa- 
sione ipsias  licentiœ  sit  processum,  obi  bona  ipsa  fuerint  intra  octo  dieram  »patioin  reatkata, 
aot  «attafactio  pro  Ipais  iaspcasa]  eo  fpso  sententiaai  excommanicatianis  incvnaot,  Siadem 
qooqve  aaataMia  MOt  iaaodati  omnea,  qui  aoal  fuerint  prsedicta  licentia  data  uti,  vel  fjiquod 
praenùsaoram,  ad  qun  committenda  dari  licentiam  probibuimus,  aliaa  committere  aoo  motu. 
Q^  aatem  in  eadem  aententia  permanserint  duoram  mensium  spatio,  ex  tune  ab  ea  non  pos- 
iiiit  niai  per  aedem  apoatolicam,  absolutionia  benefleium  obtl&ere. 

(S)  CAPUT  X. 
Pneaenti  général!  declaramaa  edlcto,  beneficium  relaxationia  ad  cautelam,  quod  ioterdicti 


146  sociRTé  arguêologi^iib  rt  histoeiqub  oc  lihoosin. 

• 

Item  onlinatioseustatulum  concilii  provincialisapud  Montemliicium  cçle- 
brati  (I),  quod  noDnulli  rcligiosi  receperont  décimas  a  las'cis  sine  cou- 
sensu  dyocesaniet  alii  layci  et  seculares  clerici  in  prejudicium  ecclpsiaronn 
parochialium  juris  prohibiciouem  tenenl,  contempnentes,  sacro  approbanie 
coDcilio,  ordinamus  qood  rectores  ecclesiarum  vel  eorum  vicarit,  publiée  in 
ecclesiis  suis  semel,  11",  et  terno,  aslaote  plèbe,  moneant,  prohibeant  et 
tradendo  vel  recipiendo  lalia  de  cetero  actemptenl,  quod  si  moniçione 
hujusmodi  non  obstanle,  contra  premissa  fecerint  vel  venerint  ipsos  quos 
ex  iiinc  sàcro  approbante  concilie  in  scrîplis  excommunicamus  ;  excomrou- 
nicalos  auctoriiate  dicti  concilii  publiée  diebus  dominicîs  etfesiivis  nuQcie- 
lis  vel  nunciari  factatis. 

Moneantur  etiam  semel,  secundo  et  teriio  per  eosdem  ilH  qui  contra  juris 
disposiiionem  décimas  receperuut  ut  eas,  quia  cum  periculo  animarum  sua- 
rum  detinent,  restituant  ecclesiis  parrucbialibus  ad  quas  spcctant,  alioquin 
ad  resliiuendum  easdem  per  locorum  ordinarios,  sive  sint  exempti,  sive 
quocumquc  jure  fieri  poicrit  arceanlur. 

Hoc  etiam  denunciarl  precipimus  semel,  secundo  et  tertio  per  rectores 
ecclesiarum  parochialium  vel  eorum  vicarios  in  monasleriis  et  religiosi^ 
locis  sitis  in  suis  parochiis,  vel  eisdem  proprioribus  (?},  ne  pretextu  igno- 
rancîe  se  super  hos  valeant  excusare. 

Item  quod  non  nulli  secularem  jurisdiciioDem  exercentes  maxime  reli- 
giosi  publiée  pacis  emuli  tirannisarecupienles  in  salutis  dispendiumener^'are, 
impedire  ac  etiam  periurbare  conaniur  jurisdiciioDem  ecclesiasticam  contra 
civiles  et  canonycas  sanctioneset  etiam  conlra  consueiudinesdiuobservatas 
nunc  inbibendo  subdictis  suis  ne  litigent  in  foro  ecclesiastico  etiam  de 
causis  de  quibus  poiest  in  eodem  licite  litigari,  nunc  capiendo  e<»s,  nunc 
bona,  nunc  propinquorum,  nunc  propter  hoc  eis  occasiones  frivolas  vel  fie- 
licias  in  ponendo,  compellendo  etia^i  clericos  et  alias  personnas  a  causis 
inceptls  desistere  et  quidem  coram  se  ligitare,  et  bona  ipsorum  vel  paren- 
tum  vel  propinquorum  eorundem  et  alias  directe  vel  indirecte  per  se  vel 
per  alium  muUipliciter  molcstando  et  alias  fieri  de  cetero  sacro  approbanie 
coosilio  prohibemus.  Et  si  monitiones  hujusmodi  facte  fuerint,  eas  precipi- 
mus renovari,  precipientes  ut  singuli  rectores  ecclesiarum  aut  eorum 
vicarii  in  ecclesiis,  plèbe  asianle,  dielus  dominicis  et  festivis,  semel  secundo 
et  tercio  moneaut  generaliter  et  prohibeant  ne  quis  de  cetero  talia  aciemp- 
tare  présumât,  quod  si  hujusmodi  monitione  premissa  aliqui  de  cetero 
talia  fecerit  ipsos  quos  ex  tune,  sacro  approbante  consilio,  excommunica- 
mus,  in  scriplis  excommunicatosdenunlient  aucloritate  dicti  consilii  diebus 
dominicis  et  feslivis.  Et  si  vobis  constilerit  de  premissis  ipsos  excommuni- 
calos  denuntient  nominatim  et  publiée  et  ad  divina  eosdem  et  eorum  fami- 
liam  non  recipiant,  ymo  tamdiu  teneant  excommunicatos  quousque  ab  dio- 
cesano  vel  ejusofiiciali  mereanlur  absolvi. 

Item  et  nos  auctoritate  ordinaria  monitione  prius  competenti  premissa 
excommunicamus  omnes  illos,  sive  sint  clerici,  sive  laycl,  cttjuscumquc 

I 

senteotias  In  civitat«s,  castra,  vel  quatUbet  alia  loca,  sive  terras  aliquas  generaUter  piomat> 
gâtas,  locum  aliquatenas  non  habere. 
(1)  ConcUe  provincial  de  ModUuçod  célébré  en  1246  {Gall,  Christ.,  II,  71.) 


ANCIBKS   STATUTS  DU   OlOCtSB  DR   LIMOGRS.  447 

ordiDÎs,  di^nitaiis  seu  condiiionis  exisUnl,  qui  inhibenl  seu  impediunt  el 
inhiber!  seu  impcdiri  faciunt,  directe  vel  indirecle  quominus  more  soliio, 
cleri  vel  lavci  Lemovicensis  diocesi  libère  cl secure  venianlad  curiam  Lemo- 
vicensem  et  litif^anl  in  cadem,  seu  liligare  volentes,  per  caplionem  bono^ 
rum,  vel  per  infeslacionem  parenium,  affinium,  vel  amicorum  qualiler 
cnmque  silere  compellanl  (i). 

hem  innovamus  slalulum  alias  per  nostros  predecessores  factum  quod 
quicumquc  Duncio^  noslros  vel  ofticJalis  noslri  vel  execuiorum  noslroruoi 
seu  officiariorum  ejus.dem  liitcras  defferentes,  verberaverint  vel  impedive- 
rint  per  se  vel  per  alium,  vel  litteras  rapuerint  aul  maliciose  reiinuerinl 
aul  quicumque  racione  causarunrt  quas  plene  coram  nobis  vel  officia|i 
noslro  moveanlur,  inierdum  insidianiur  vel  dairipnificant  in  peisonpis  vél 
in  rébus,  ipso  fado  sentenliam  excommunicalionis  incurrunt,  el  omncs 
illi'  qui  ad  hoc  opem  prebuerinl  vel  asseiisum,  consllium,  mandatum,  a 
quasenientia  per  nos  absolvi  non  possunt. 

Item  vobis  iojungimus  et  sub  pena  excommunicalionis  dislricte  precepi- 
mus  quathinus  omnes  preposilos,  servienles  et  baylivos  et  quoscumque 
altos  juridicionem  temporalem  exercentes  subditos  nostros  cum  vobis  con- 
tilebnntur,  inter  cetera  requiralis  an  in  aliquo  de  prediiis  casibus  contra 
nos  aut  curiam  noslram  l.emovicensem  deliquerini,  quod  si  fuerint  con- 
fessi  sicque  vinculo  excommunicalionis  leneaniur  aslricti  fpsos  ad  nos  vel 
oflicialem  noslrum  non  injuncla  pena  remiclatis  absolvcndos,  nisi  predidis 
confitenlibus  morlis  pcriculum  imminuerit,  quo  casu  ipsos  per  vos  volumus 
posse  absolvi,  ila  lamen  quod  ipsorum  corpoia  non  (radaniur  ecclesiastlco 
sépulture,  nisi  de  licencia  a  nobis  super  hoc  oblenla,  ad  quod  ipsi  per  vos 
prout  melius  ficri  poterit  judicanlur. 

llem  excommunicamus  et  excommunicalosdenunciari  niandamns,  moni- 
tione  premissa,  publicos  raptores  el  dcpredatores  bonorum  ecclcsiarum, 

alteracionis  antique  (9) 

dubium  presentis  redivive  conslitulionis  oraculo  dedicentes  : 

Bigamos  omni  privilegio  clericali  declaramus  esse  nudatos,  et  cobilioni 
fori  secularis  addiios,  consueludine  contraria  non  obstante  ;  ipsis  quoque 
sab  anaibemate  prohibemus  déferre  lonsuram  vel  habilum  clericalem  (3). 

Item  excommunicamus  omnes  iliospresbyleros  el  clericos  qui  non  vocati 
veniunt  ad  alias  sepulluras. 

Item  cum  intellexerimus  quod  in  die  Pasche  ad  commonionem  corporis 
Chrisii  asiinentes  magis  confusioncm  timenles  quam  in  caritate  sHcrosahcli 
corporis  Cbrisli  ferventes,  utappareanthominibus  communicantes,  hosliam 
benediclam  cum  aliis  communicanlibus  seu  ipsis  videntibusacapellanisseu 

(1)  Cet  questions  de  juridiction  ecclésiastique  an  xiii*  siècle  et  les  discussions  qu'elles  engen- 
drèrent, pariicalièrement  sous  Gilbert  de  Malemort,  ont  été  exposées  par  M.  Louis  Guiberi 
dans  Z«  Commune  de  Saint- Léonard- de-Noblat  au  ziii*  tiècle  i  Bulletin  de  la  Société  archéo' 
logique  du  Limousin^  t.  XXX VU). 

(1)  Il  y  a  ici  une  lacune  dans  le  manuscrit.  Comme  on  est  au  milieu  du  cahier,  il  est  à 
croire  qu'il  manque  au  moins  deux  feuilles. 

(9)  C'est  le  17*  article  du  concile  de  Lyon  où  il  est  dit  :  Pour  couper  court  aux  disputes, 
noas  déclarons  les  bigames  déchue  de  la  cléricature  et  sujets  au  for  séculier,  nonobstant  tout 
usage  contraire.  Défense  à  eux,  sous  anathème«  de  porter  la  tonsure  et  l'habit  de  clerc. 


H8  SOCIÉTÉ  ARCBF.OLOGIOVe  RT  HISTORIQOB  1>D   LIMODSIK. 

vicariU  suis  sibi  dari  facîunl,  ul  per  talem  simulacionein  iippareant  homini- 
bus  eommunicantes,  ipsa  hosiia  beoedicia  tam  a  se  qoam  a  slaniibos  non 
sîne  specie  ydolatrie  el  ypocrisis  indebila  reverencia  Ipsius  corporis  Cbrisli 
habeatur. 

StaUimus  qood  capellani  laltbvs  exeomMUuicaiis,  publicis  pecatorîbos, 
1d  die  Pasche  bosliara  benediclam  de  celero  non  administreet,  scd  ad 
mairiculario  ipsius  ecclesie  panem  benediclum  si  roluerlQt  ad  parlem  reci- 
piani  prottt  esi  in  aliis  diebas  dominicîs  consuetum. 

Item  statulmus  quod  nulli  crace  signati  prîvilegio  crucis  yaudeant  nisi 
crucem  magnam  el  patenlem  in  omnibus  pannis  superioribus  deflferant  ei 
quod  cappellani  inhibiiiones  seu  alias  lilteras  pro  eis  racione  privilegii  cru- 
cis  impetratas  non  teneanlur  alias  sigillare. 

Ttem  slatuimus  quod  advene  et  alieni<j;ene  presbyterî  non  recipiantnr  in 
nostro  diocesi  ad  celebrandum  quousque  nobis  constet  de  eorum  proufio- 
tione. 

£t  volumus  quod  cappellani  ccclesiarum  inquibus  dicli  presbileri  cele- 
brarcnl,  nobis  dcnuncienl  pcr  suas  lilteras  patentes,  siglllis  suis  sigll- 
iatas  et  nos  de  illis  ordinabimus  pro  mclius  videbimus  expedirc. 

Item  cum  iniellexerimus  quod  quidam  clerici  nostre  diocesis  contra 
eanonicas  xanciones  et  honeslatem  clcricalem  asseosant  a  dominis  secala-^ 
ril>us  prepositaïus,  baylias,  et  sergencias  quibus  in  est  merum  et  raixtam 
imperium  ctjuridiciotemporalis  et  quidam  eonim  preposili  assisias  lenent 
el  ipsam  juridicionem  temporalem  ut  servicnles  sergencias  vel  alia  per 
omnia  ut  layci  exercent  et  captione  lucri  juridicionem  ecclesiasticam  de- 
curtant  et  personnas  ecclesiaslicas  opprimunt.  Et  quod  est  orribile  pejus 
tr^ictant  quam  layci,  subtiliores  cautclas  invenientes  ad  nocendum  otsœpe 
sentenlia  excommuaicationis  lalas  contra  periurbalores  junsdiclionls 
ecclesiaslice  incurrentes,  cum  aliis  clericiis  passim  divinis  in  ecclesiis  se 
inmiscent.  Inhibimus  ne  decetero  aliqui  clerici  prepositatus,  baylias,  ser* 
gencias  in  nosira  diocesi  asscnsent  vel  assensas  teneant  vel  alia  exer- 
centes  slatuimus  et  firmiter  inhibemus  et  in  contrarium  facienles  excom- 
municationis  senlentiam  promulgàmus. 

Item  cum  iniellexerimus  quod  quidam  abusus  surrexerunt  in  nostra 
diocesi  quod  nobiles  malrimonialiler,  banois  non  editis,  copulantur  cum 
tamen  longiores  et  longius  cognationes  et  aflfinitales  habeant  quam  pie- 
bei,  no  de  celero  eorum  malrimonia  sine  bannis  faciatis  in  virlule  obe* 
dieniie  vobis  inhibimus,  alias  vos  graviter  ut  de  clandestinis  puoiemus. 

Item  inhibimus  quod  cappellani,  presbileri  et  clerici  super  persaaali-^ 
bus  actionibus  non  rcspondeanl  voluntarie  coram  judicibus  secularibus, 
bive  trahantur  a  laycis,  sive  a  clericis.  El  si  contrarium  fecerint  in  ipsos 
excooi municationis  senlentiam  promulgàmus* 

Itam  excoramuicamus  omnes  laycos,  barones,  nobiics,  clericos  ci  alios 
quoscumque  feoda,  seu  relrofeoda  nostra  cl  ecclesie  «oslre  Lemovicensls 
decurtant,  dimihunnt  et  ocultanl,  el  ab  aliis  dominis  advohant  se  lencrc 
in  feodum;  et  illos  qui  advobaciones  aliquas  de  nova  fecerenlde  prediciis 
ieodis  «4  rotroleodîs,  vel  de  aliqua  parle  de  eoruradem,  volamus  quod  ae«- 
lenlia  publieetor  per  vos  in  e^dosiis  vestris. 


ANCIKN<   STATUTS   DU    DIOCRSK    DE   UUOGRS.  149 

Item  cum  décime  de  jure  cornmuni  spcclent  ad  ecclcsias,  omnes  illos 
qui  décimas  novalium  (i)  pcrcipiunt  et  de  cetcro  percipicnt  conlra  volun- 
talem  rcclorum  eeclcsiarum  in  quorum  parrochiis  consislunl. 

Cum  slalulum  fuerit  per  predcccssores  nostros  (S)  quod  eccicsie  iilorum 
qui  non  r^^sidcnt  in  eisdcm,  ncc  non  cl  corum  qui  ad  ordines  quos  ipsa- 
ram  ccclesiarum  cura  rcquicit  non  lacèrent  infra  juris  terminum  promo- 
veri,  eccicsie  eorum  saisirenlur,  et  suspcndcrent  omnes  illos  qui  ex  lune 
ïn  eorum  ecclesiis  présument  celebrare;  nos  ipsum  slalulum  approbanles 
ac  etiam  innovantes,  dictas  que  ecclcsias  cl  fruclus  eorum  lalium  saizien- 
les  et  saiziri  mandantes,  et  eorum  vicarios  et  quosciimque  alios  in  ipsis 
ecclesiis  eorundem  reclorum  nomine,  sine  licenlia  nostra,  célébrantes, 
post  mensem  ex  nunc  suspendimus. 

lohibenles  ne  recloribus  dictarum  ecclesiarum  de  diclis  fructibus  vel 
aliqui  aiii  pro  ipsis  rcspondere  présumant,  quos  fruclus  nobis  vel  man- 
dato  noslro  reddi  per  integrum  precipimus,  et  mandamus,  in  utililate 
ecclesie  converlentes,  ipsos  que  redores  si  duranlibus  diclis  senlenliis, 
aliqoid  de  predictis  fructibus  recepcreni,  vel  capifacerint  conlra  hujusmodi 
inbibicioncm  nostram,  scu  resldenliam  personalem  non  faciendo  ofïicium 
cl  tenendo  bospitium,  excommunicalionis  sentenlia  innodamus;  exceplis 
canonicis  lemovicensibus  et  sociis  et  cicricis  familiarlbus  noslris,  quos 
pro  noslro  servicio  specialiler  duximus  relinendos,  quos  per  dictas  son- 
lentias  voiumus  non  iigari.  injungcnles  singulis  arcliipresbytcris  in  vir- 
lule  obediencie  quod  ecclcsias  iilorum  qui  ut  premiililur  residere  in  suis 
ecclesiis  contempncnl  saiziant  et  nomine  noslro  fruclus  lèvent  cl  preci- 
pîant,  et  dictas  ccclesias  officiari  faciant,  et  de  hoc  nos  ccrlificcnl  posl- 
quam  sciverint  infra  mensem. 

llcm  precipimus  quod  omnes  religiosi  in  locis  collcgiatis  seu  conven- 
lualibus  commoranles,  comcdant  simul  in  refectorio  cl  jaceani  in  dormi- 
lorio  (3)  et  habilu  condecenli  sue  religioni  utantur,  ne  facianl  sibi  vestes 
de  panno  rubeo,  vel  de  aliis  divcrsis  coloribus  colorota*^,  sed  de  panno 
coDvcnienti  sue  religioni,  nec  habeant  caméras  vel  domos  sibi  singularcs 
et  approprialas,  nisi  nécessitas  officii  id  exposcal,  et  de  licencia  sui  abba- 
lis  vel  prelali.  Quod  lameo  raro  et  justa  de  causa  liât.  In  coutrarium  fa- 
eî^nles  excommunicalionis  scnlenliam  promulgamus  auclorilate  concilii 
antedicli. 

llem  injungimus  et  precipimus  vobis  sub  pena  suspensionis  qualhinus 

(I)  On  tait  que  lea  Navales  étAient  les  dîmes  que  payaient  leii  terres  oouveilemeat  défri- 
chées et  misen  en  valeur. 

(i)  C'est  l'évéque  Gilbert  de  Malemort  qui  renouvelle  ce  statut  de  nés  prédécesseurs,  qui 
esC  alors  aotérieur  à  1274. 

(3)  Simon  de  Beaulieu,  archevi^que  de  Bourges,  dans  la  visite  qu'il  ât  en  lif^  fait  la  même 
d^ense  :  «  Le  mardi  7  août  1285,  Tillustre  prélat  entrait  à  Meymac,  où  il  fut  reçu  honorable- 
ment par  l'abbé  et  ses  religieux.  Il  dit  la  messe  et  fut  traité  pour  ce  jour-là  aux  frais  du 
monastère.  Mais  parce  qu'on  lui  avait  donné  à  entendre  que  les  moines  de  cette  abbaye  vi- 
vaient d'une  manière  relâchée,  couchaient  dans  leurs  cellules,  au  lieu  d'être  ensemble  au  dor- 
toir, mangeaient  en  leur  particulier,  au  lieu  de  se  rendre  au  réfectoire,  il  convoqua  l'abbé  et 
se4  religieux  et  leur  défendit  de  coucher  et  de  manger  à  l'avenir  dans  leurs  cellules;  il  excepta 
de  cette  défense  les  officiers  et  les  infirmes.  L'abbé  et  les  moines  promirent  d'obéir  au  prélat 
comme  k  leur  supérieur  naturel.  •»  {Hiitofre  du  diocèse  de  Tulles  par  l'abbé  Poulbiukur,  p.  387.) 
T.    XXXIX.  10 


thO  SOCléTfe   ARCHÉOLOGIQUE   ET    HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

malrimonla  illicite  contracta  si  que  esse  iu  parocliiis  veslris  siverilis,  nobis 
vel  officiali  quam  citius  commode  poteritis  inlimelis,  et  ne  aliquias  per- 
sonnas  malrimonialiter  conjugatis  nisi  sint  in  étale  légitima  ad  matri- 
monium  conlrahendum,  et  banis  prius  editjs  ut  est  moris,  srilicct  quod 
masculus  sil  in  xin°  anno  et  fcmina  in  xii°  quamquam  ab  aliquibus  prc- 
tendatur  quod  in  personnis  hujus  modi  malitia  supleat  etatem.  Cum  cogni- 
tio  hujusmodi  ad  nos  vel  officialem  nosiram  pertineat  in  prediclis,  con- 
Irahenles  eliam  clandestine  et  cooperaiores  présentes  scienlcr  ad  hoc 
concilium  prestantes,  sive  cleri,  sive  layci,  seu  religlosi  vel  seculares, 
sequendo  statuta  predecessorum  nostrorum  (ï),  et  consilil  provincialis  (2) 
excommunicalos  esse  voluir.us  ac  eliam  denunciamus. 

Item  inhibimus  quod  nulhis  sacerdos  vel  clericus  bencficialus  muliercm 
habeat  in  domo  sua,  nec  teneat  que  sit  suspecta,  precipienics  archiprcsbi- 
teris  quod  archiprcsbilcralu  suo  diligcnter  exquiranl  si  sint  aliqui  talcs 
mulieres,  et  omnes  hujusmodi  mulicres  suspectas  a  domibus  ipsorum 
cxpellant.  Si  quis  aulem  publice  canonice  monilus  deinceps  conviclus, 
ecclesia  seu  beneiicio  privetur,  nisi  ex  causa  probabili  cum  eo  misericor- 
diter  fuerit  dispensandum. 

Item  inhibimus  ne  proies  illégitime  nata,  in  domibus  seu  de  bonis 
ecclesiam  aliquathinus  nutriantur. 

item  ne  presbiteri  nej^ocialores  publici  fiant,  nec  tabernas  fréquentent, 
nec  ad  talos,  vel  aleas  ludant;  quod  si  fecerint  graviter  puniantur. 

item  abusores  liitcrarum  apostolicarum  scienter,  sunt  excommunicatî 
ipso  facto  auctorilale  concilii  provincialis. 

Item  precipimus  quod  presbiteri  parochiales  admoneant  parochianos 
suos  ut  saltem  semcl  in  anno  conHleantur  eisdem  pecata  sua.  Ipsi  aulem 
quibus  confessi  fuerint  caveanl  ne  aliquo  verbo,  vel  signo,  vel  àliqua 
parle  circumlocutione,  vel  aliquo  modo,  révèlent  pecata  eis  confessa,  quod 
si  fecerint  non  solum  a  saccrdotali  officio  deponendi  sunt,  scd  eliam  in 
arcto  loco  ad  agendam  peniicnliam  sunt  lenendi. 

llem  inhibemub  ne  aliqui  prosbileri,  seu  religlosi,  vel  aliqui  alii  cujus- 
cumque  status,  seu  condicionis  exislanl,  excommunicalos  auclorilate  ordi- 
naria  prêter  quam  in  articule  monis  absolvant,  nec  tradanl  ecclesiastice 
sépulture  donec  ab  ordinario  defuncli  sepeliendi  obtenta  fuerit  licenlia 
specialis.  Si  vero  in  conlrarium  de  sic  defunclis  aliquid  actemptelur  a 
quibuscumque,  cujuscumque  conditionis  existant,  tam  in  eos  quam  in 
cooperaiores,  et  qui  opem,  consilium,  vel  consensum  ad  hoc  dcderinl, 
et  qui  expensas  administraverinl,  et  qui  présentes  scienter  fuerint  lali 
funeri,  noverint  se,  auclorilate  dicli  concilii  provincialis  excommucalionis 
scnlenlia  innodalos.  Similitcr  sciant  se  sentenlie  subjacere  qui  publicos 
usurarios  in  suis  cimiteriis  prcsumpserinl  sepelire. 
'  Item  cum  slalutum  fuerit  in  provinciali  consilio  quod  redores  eccle— 
siarum  et  alii  clerici  beneficiali  qui  per  annum  excommunicalione  persli- 

(1)  Les  prédécesseurs  de  Gilbert  de  Malemort. 

(2)  Ce  Concile  provincial  est  probablement  celui  de  Bourges  de  1286,  où  l'on  publia  ube 
Constitution  sur  plusieurs  points  de  discipline,  ou  pfiut-étre  un  de  ceux  tenus  dans  la  mèm« 
ville  en  1276,  1280  ou  1282  ;  ou  encore  celui  de  Montluçon  de  1266  déjà  cité. 


ANCIENS   STATUTS    DU   JÎIOCÈSE    DE   LIMOGES.  151 

terint  si  negligenlcs  iinpelranda  absoiulione  fuerint,  suis  benefîciis  pri> 
venlur.  Nos  juxia  lenorcm  consilii  monemus  ul  si  sint  aliqui  vestrum 
talibus  scnientiis  innodati,  infra  mensem  faciant  se  absolvi,  alioquin 
contra  ipsos  ad  privationem  bcneficiorum  suorum  prout  jura  voluot  et 
ipsam  stalutum  requirit,  procedemus. 

Mandantes  nîchilominus  archiprcsbiteris  noslris,  quod  nomina  talium 
excommunicatorum  qui  tanto  tempore  dictas  senientias  susliauerint  nobis 
intimare  procurent;  citantes  eosdem  excommunicalos  ad  certam  diem, 
mense  elapso,  coram  nobis,  privationem  dictorum  beneficiorum  audituros. 

Cum  intellexcrimus  quod  in  multis  comitatibus  slatuta  de  novo  facta 
fuisse  contra  privilegium  ecclesiasiice  libertalis  et  imrnunitatem,  mone- 
mus slatucntcs  ul  infra  duos  menscs  premissa  statuta  revocent  penilus  et 
anallent.  Quod  nisi  sic  monili  fecerent  ipsos  quos  ex  lune  ut  ex  nunc 
excommunicamus,  tanquam  excommunicalos  evitandos  El  cum  intellexeri> 
mus  etiam  statuta  de  novo  fada  iuisse  in  multis  comitatibus  civitaiis  et 
diocesis  nostre  contra  ecclesiastîcam  libcrtaiem,  excommunicamus  sta- 
tuentes,  scripiores  slalutorum  prcdictorum  et  judices  secundum  ea  judi- 
cantes,  nisi  infra  duos  menses  predicta  statuta  revocaverint  et  de  capitu- 
laribus  suis  amoverint  vel  fecerint  amoveri. 

item  cum  per  certe  facta  monilione  ne  cum  ck  communicatis  pereant 
roajori  excommunicalionc  ligantur,  vos  volumus  non  lalere  quod  isle  per- 
sone  post  monilionem  talem  participantes  ligali  excommunicati  sic  rema- 
ncant  donec  per  nos  vel  officialem  nostrum  spccialilcr  absolvantur.  El  si 
forte  casu  aliquo  vobis  absolutio  parlicipanlium  commiltatur,  non  est 
intencionis  notre  vobis  commillerc  pro  participanlibus  specialiter  inno- 
datis. 

El  nos  Reginaldus,  miseracione  divina  Lemovicensis  episcopus,  supra- 
dicta  slatuta  hic  lecla,  per  bone  memorie,  Gilberlum,  Lcmovicensem 
episcopum^  predecessorem  nostrum,  et  alios  predecessorcs  édita  et  per 
eos  in  suis  synodis  publicata,  confirmantes,  approbantes  ac  etiam  inno- 
vantes, modo  et  forma,  in  presenti  synodo  sancti  Luce,  quam  primam 
cclebramus,  una  cum  quibusdam  aliis  slatulis  publicamus  et  ca  sub  pénis 
impositis  per  predecessorcs  nostros  prcditos  [et]  alias  in  cis  positis  a  sub- 
ditis  noslris  prccipimus  obscrvari,  elc. 


IV 


Jean  de  Crose,  cousin  au  troisième  degré  du  pape  Grégoire  XI, 
est  communément  connu  sous  le  nom  de  Cardinal  de  Limoges.  Il 
fut  professeur  de  droit  canon,  avant  d'être  nommé  évéque  de  Li- 
moges par  le  pape  Clément  VI,  le  26  octobre  1348. 

C'est  lui  qui,  étant  seigneur  de  la  Cité  de  Limoges,  en  poussa  les 
habitants  à  abandonner  les  Anglais  pour  se  ranger  sous  la  ban- 
nière de  France.  Aussi,  lorsque  le  prince  de  Galles  s'empara  de  la 


15)  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQUfe   F.T   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Cité,  le  19  septembre  1370,  sa  vengeance  s*exerça-t-elle  parlicnliè- 
rement  sur  lui.  Il  le  retint  prisonnier,  le  livra  ensuite  au  duc  de 
Lancastre,  lequel  lui  fit  grâce  de  la  vie  sur  la  prière  du  pape  Ur- 
bain V,  mais  en  retira  une  forte  rançon,  dont  le  roi  de  France 
paya  une  partie. 

Grégoire  XI  le  fit  cardinal-prétre  du  titre  des  SS.  Nerée  et  Achil- 
léeenl37i.  Il  fut  aussi  nommé  grand  pénitencier  de  TEglise  ro- 
maine et  défenseur  des  privilèges  des  Frères  prêcheurs. 

Pendant  qu'il  était  à  Rome,  où  il  avait  accompagné  Grégoire  XI, 
il  fut  transféré  à  l'évêché  de  Préneste  ou  Palestrine,  et  mourut  à 
Avignon  le  22  novembre  1383. 

Ses  armes  sont  :  d*azur  à  trois  pans  de  murnilles  crénelés  d'ar- 
gent et  maçonnés  de  sable,  au  chef  de  gueules. 

C'est  à  son  épiscopat  que  peuvent  se  rapporter  les  constitutions 
suivantes,  incomplètement  datées.  Par  Tordre  chronologique  ob- 
servé dans  notre  manuscrit,  nous  voyons  qu'elles  sont  postérieures 
à  celles  de  1310  et  antérieures  à  celles  de  1379.  Ensuite  elles  sont 
publiées  par  les  vicaires  généraux  de  l'évoque,  dont  le  nom  n'est  pas 
prononcé.  Jean  de  Crose  avait  en  effet  chargé  ses  vicaires  généraux 
d'administrer  le  diocèse  pendant  qu'il  était  prisonnier  par  les  An- 
glais et  lorsqu'il  accompagnait  le  Souverain  Pontife  Grégoire  XI. 
C'est  donc  entre  1348  et  1371  qu'il  faut  chercher  la  date  précise  de 
ces  constitutions. 

Elles  sont  relatives  aux  marques  de  respect  à  donner  au  Saint- 
Sacrement,  à  l'exécution  et  à  la  sanction  des  sentences  ecclésiasti- 
ques, à  l'observation  des  statuts  synodaux  et  provinciaux  et  des 
canons. 

Hcc  sunl  constitulioncs  el  slaluta  édita  per  dominos  vicarios  Domini 
episcopi  Lemoviccnsis  :  ex  decimokalendas  junii  anno  Domini  millcsimo... 

Ad  divini  nominis  gloriani  et  decorem  universalis  ecciesie  mililantis  el 
populi  clirisliani  devotiouem  augendam  mandamus  omnibus  ecclesiarum 
rccloribus  el  curalis  ut  deinceps  cum  corpus  Domini  porlabitur  per  loca 
sue  parochie  ad  infirmes  quod  curenl  reverenler  proul  tanlo  sacramento 
convenu  campanam  parvam  coram  se  sacerdoles  facere  porlari  pulsando, 
nec  non  et  lamcn  scu  lumina  accensa  in  lalerna,  si  lorlicum  vcl  tor- 
licia  {\)  hcbcre  non  possenl,  anlc  se  semper  porlari  procurent  cl  continue 

(1)  Les  torches  étaient  en  cire  et  emmanchées  de  bâtons;  on  s'en  servait  pour  rélévatioD. 
Dans  un  inventaire  de  1!>K0,  on  voit  que  la  Confrérie  du  Saint-Sacrement  de  SaiQt-Pierre-<iu» 
Queyroix  possédait  •  vingt-deux  torches  pour  le  service  à  la  lévation  du  Corpus  Domini.  » 
Le  nom  de  tortisseau  était  donné  aux  bâtons  sur  le.tquels  étaient  fixés  les  cornets  et  les  tor» 
ches.  Le  même  inventaire  de  1550  signale  «  Dix  tortisseaux  de  boys,  à  porter  les  cornetz 
^'ar^ent.  •  L'expression  résulte  de  la  forme   même  t{ui  figure  du  bois  tordu,  ou   simpletneBt 


ANCIENS  STATUTS   OU    DIOCÈSE   DE   LIMOGES.  453 

(lonec  ad  ecclesiam  suam   redierint  opère  consummato,  et  hoc  sub  pena 
arbitraria  deinceps  precipimus  observari. 

Item  saizimus  ex  nunc  omnia  bona  mobilia  et  pcndcncia  quarumcumque 
personnarum  ecclesiarum  curam  vel  noQ  curam  habcntium  animarum  quo 
conira  conslituliones  synodales  et  provinciales  et  canoncs  ultra  tcmpus 
in  dictis  coastilutionibus  comprchensum  excommunicationis  sentcntiam 
SQSlinent  ;  mandamus  omnibus  archipresbitcris  Lemovicensis  diocesis  ut 
vice  et  anlorilate  nostra  bona  predictorum  excommunicatorum  tanquam 
pernos  et  ex  nunc  saiiiita  recipianlel  expleclcnt  et  nobis  ralioncm  celé- 
nter  reddere  procurent  et  de  nominibus  dictorum  excommunicatorum 
nos  curent  reddere  cerliores  eosdem  cilaudo  ad  certas  dies  personaliter 
coram  nobis  ad  finem  juxta  tenorem  statulorum  predictorum,  ad  priva- 
tionem  beneficiorum  suorum,  et  ad  satisfaclioncm  creditorum  suorum,  et 
ad  alias  graves  penas  arbitrarias  contra  ipsos  procedere  valcamus. 

Injungimus  omnibus  archipresbitcris  seu  localenentibus  corumdem 
ut  omnia  nomina  prelatorum  et  rectorum  archipresbiteratiis  sui  qui  pré- 
sentes ad  banc  vcniunt  synodum  nobis  Iradant  in  scriptis  ut  contra  contu- 
maces inobedientes  ad  penas  taies  procedamus  quod  deinceps  eis  et  aliis 
transeant  in  exemplum.  Et  hoc  deinceps  in  synodis  pcr  archipresbileros 
statuimus  observari. 

Mandamus  insuper  omnibus  rectoribus  ecclesiarum  sub  pena  excommu- 
nicationis ut  cessent  penitus  a  divinis  offîciis  in  ecclesiis  eorumdem 
qaoeiens  et  quocumque  per  secularem  polcstatem  personam  ecclesias- 
ticam  sciverint  detineri,  doncc  a  nobis  vel  officiali  nostro  conlrarium  re- 
ccperunt  in  mandatis. 

Insuper  inhibimus  et  mandamus  per  omnes  ecclesiarum  prelalos,  rec- 
tores  et  alias  personnas  ecclesiasticas,  constituliones  provinciales  et 
synodales  olim  factas,  et  sepe  et  publicc  insinuatas,  inviolabiliter  obser- 
vari, et  si  qui  fuerint  contemptores,  violatores  sou  aliter  non  observantes, 
mandamus  omnibus  archipresbitcris  ut  nobis  celeriler  revelare  procurent 
ut  ultra  penas  in  dictis  conslitutionibus  apprehensis,  ad  alias  penas 
graves  arbitrarias  pro  ut  arbitrio  nostro  conveniet  procedere  valeamus. 

Item  mandamas  omnibus  rectoribus  et  prelatis  ut  copiam  recipiani 
de  premissis  ne  se  valcant  pretextu  alicujus  ignorancie  cxcusare,  que 
una  cum  aJiis  constitulionibus  secum  leneant,  et  ad  soqucnles  sinodos 
apportent,  si  penam  inobediencie  cupiant  evitarc,  etc.  Benedictus  Jésus. 
Amen. 


entortillé  de  quelque  ornement,  comme  on  le  voit  dan»  la  dencription  de  la  proceision 
de  SaJnt-JeaD-Baptiste  à  Tulle,  faite  par  un  prêtre,  curé  au  diocèse  de  Limoges  en 
1680:  «r  Après  viennent  quatre  porte- flambeaux  élevé»  dans  l'air  sur  des  bâton»  garnis 
d'un  ècuitson  de  Saint-Jean  et  entortilles  d'une  couronne  de  buis  bigarrée  d'autres  couleurs.  » 
Ce  n'est  que  plus  tard  que  l'usage  des  souches  commença.  On  remarque  dans  un  inventaire, 
fait  le  14  octobre  1790,  chez  les  religieuses  Bernardines  de  Tulle  :  u  six  cierges  à  ressort.  » 


1S4  Société  archéologique  et  historique  du  uvousin. 


Aimeric  Chati  deLa  Jauchat  (i),  originaire  de  ce  lieu,  près  la 
ville  de  Saint-Yrieix,  était  gouverneur  de  Bologne  au  nom  du  pape 
Innocent  VI,  lorsque  celui-ci  l'éleva surlesiègedecette ville enl361. 
Etant  chancelier  de  TUniversité  de  Bologne,  il  fit  venir  de  toutes 
les  parties  du  monde  les  hommes  les  plus  savants  qu'il  put  trouver 
pour  établir  la  faculté  de  théologie,  obtint  en  1365  de  Terapereur 
Charles  IV  la  confirmation  des  privilèges  de  son  église  et  le  titre 
de  Prince  de  TEmpire.  Il  gouverna  cette  église  jusqu'en  1391,  et 
s'en  démit  en  passant  en  France. 

Il  était  à  Avignon  depuis  l'octave  de  la  Pentecôte  et  y  avait  ap- 
porté beaucoup  d'argent  pour  payer  les  sommes  considérables  qu'il 
devait  au  collège  des  cardinaux;  mais  le  pape  l'ayant  transféré  à 
révêché  de  Limoges,  voulut  qu'il  employa  cet  argent  à  réparer  les 
dommages  qu'avait  souffert  cette  église. 

Le  nouvel  évoque  de  Limoges  nomma  d'abord  trois  vicaires  gé- 
néraux :  Etienne  Benoit,  prieur  de  Noblac  ;  Guillaume  Gaufridi, 
prévôt  de  La  Souterraine,  et  Pierre  de  Chastres,  curé  de  Cham- 
boulive,  qui  le  3  ou  le  7  septembre  1371  prirent  possession  de 
révéché  en  son  nom  et  le  lendemain  firent  lire  et  notifier  les  bulles 
du  prélat  dans  le  cimetière  de  Saint-Pieire-du-Queyroix,  où  la  cour 
se  tenait  avec  beaucoup  de  solennité. 

Le  6  janvier  1371  [n.  s.  1372J  le  duc  d'Anjou,  en  qualité  de  lieu- 
tenant du  roi,  institua  Aimeric  Chati  gouverneur  et  réfermateur 
général  et  souverain  a  pour  et  au  nom  du  roi  et  du  sien  ez  cités, 
villes  et  évôchés  de  Limoges  et  de  Tulle  et  en  toute  la  vicomte  de 
Limoges.  » 

Il  fit  son  entrée  solennelle  dans  la  cité  en  novembre  1373.  Nous 
le  voyons  ensuite,  le  9  décembre  1378,  au  lit  de  justice  que  le  roi 
Charles  V  tint  à  Paris.  Son  successeur,  Charles  VI,  lui  témoigna 
aussi  une  estime  particulière. 

Dans  un  livre  de  prières  en  patois,  à  l'usage  de  l'église  de  Sainl- 
Pierre-du-Queyroix  (2),  on  trouve  les  ordonnances  qu'on  doit  dé- 
noncer au  peuple  l'an  1379.  C'est  l'année  de  nos  statuts. 


(J)  La  véritable  orihographe  de  ce  nom  est  TAge-aii-Chai. 

(2)  Ce  livre,  qui  appancnait  au  siècle  dernier  à  M.  Juge  de  Sainl-Mariin. 
conseiller  au  prôsidial  de  Limoges,  esi  aujourd'hui  la  propriété  de  HM.  \t> 
direcleurs  du  ^rand  séminaire. 


ANCIENS  STATUTS  DU   DIOCÈSE  DB   LIMOGES.  155 

Aimeric  Ghati,  qui  habitail  le  château  d'Isle,  vint  tenir  son  sy- 
node H  Limoges  la  semaine  de  la  Pentecôte  i389;  il  consacra 
réglise  des  Frères  Prêcheurs  de  Limoges  au  mois  de  juillet  de  la 
môme  année  et  mourut  dans  son  château  dlle  le  8  août  1390.  «  Ce 
prélat,  également  recommandable  par  les  qualités  qui  font  le  ci- 
toyen, par  les  vertus  d'un  évéque  et  par  le  caractère  libéral  d'un 
prince,  fut  pleuré  comme  un  père.  Protecteur  des  savants,  et  sa- 
vant lui-même,  il  répandit  ses  bienfaits  sur  les  gens  de  lettres  (1)  ». 

Ses  armes  sont  d'argent  à  deux  lions  passants  de  gueules. 

La  partie  des  statuls  qui  se  rapporte  à  Tépiscopat  de  cet  évoque 
nous  monire  son  procureur,  en  1379,  requérant  Tofflcial  de  faire 
promulguer  et  enregistrer  au  recueil  des  statuts  d'anciennes  cou- 
tumes de  l'Eglise  de  Limoges  qui  ne  se  trouvaient  pas  insérées  aux 
ordonnances  synodales.  Suivent  quelques  articles  relatifs  à  la  re- 
présentation des  parties,  à  la  constitution  des  procureurs,  etc. 

Anne  Domini  millesimo  ccc°  scpluagesimo  nono,  die  jovis  post  festum 
sanctt  Andrée  aposloli,  que  fuil  prima  mensis  decembris,  vencrabili  et 
cîrcumspccto  viro  magislro  Johannc  de  Vallibus  f2),  liccnciato  in  legibus, 
officiaii  Lemovicensi,  in  curia»  hora  expcdicionis  causarum,  pro  tribunali 
sedenti  fuit  pro  parle  Rcverendi  in  Chrislo  Patris  et  Domini,  Domini 
Dostri  Aymerici,  Dei  gracia  Lemoviccnsîs  episcopi,  ibidem  explicatum 
quod,  licct  omncs  slili  et  observaliones  curie  predicte  in  presenli  libro 
non  contineantur  ad  plénum,  tamen  sunt,  et  diu  est,  et  ab  antiquo  tuerunt 
observali  aliqui  et  alique,  qui  et  que  slilus  dicte  curie  nuncupanlur,  qui 
sub  generali  clera  {sic)  in  presenli  libro  contenti,  videlicet  in  hujus- 
modi  possunt  el  debent  comprehcndi.  El  inler  cetera  fuit  et  est  slatulura 
et  ab  anliquo  observalum,  quod  marilus  alicujus  mulicris  pro  dote  sibi 
promissa  et  liber  seu  liberi  heredum  eorum  patris  pro  debilis  lali  palri  (?) 
dum  lamcn  die  ad  quam  adjornali  fuerunt  audiluros  causas  el  raciones 
ctiam  antequam  ulantur  lilleris  notorium  fcccrunt  partibus  prcsentibus 
videlicet  lalis  marilus  de  matrimonio  contracto,  el  talcs  libori  cl  lieredes 
qui  sunl  hercdes  excequenrio  suas  liltcras  monitionisimpclratas  in  talibus 
prout  uli  et  gauderc,  lalisque  monitio  suos  effeclus  sorliri,  nisi  alie  cause 
proponantur  et  probenlur  que  obsistant. 

Item  et  quod  quicumque  juralus  dicle  curie  abilis  ad  comparendum 
absque  mandalo  in  scripiis  pro  aliquo  alio  valcnterin  judicio  per  se  com- 
parere  nisi  personam  requiral  propriam,  asscrcns  se  habcrc  in  mandalo 
cxpcdiendi  admili  debere  (?)  ul  procurator  ad  comparendum  et  terminus 
expcdiondi  juxia  cl  secundum  quod  dics  dcsidcrat  el  requiril.  Tamen  ad 
partis  requeslam  Icnelur  lalis  procurator  jurare  se  mandalum  habere  el 
super  hoc  in  forma  juris  canonici  cumqiic   de  prcmissis  idem    procurator 

(1)  L'Advocat,  Dictionnaire  hUtoriqne. 

(2)  Voir  plus  loin  la  note  gur  la  famille  de  Vaux,  en  1502. 


t36  SOCIÊTR    AHCQKOLOGIQUe   ET    HISTORIQUE   r>U    LIMOUSIN. 

domini  notorium  feceril  et  informaverit  sufficienler  idem  dominas  ofYî- 
cialis  premissa  inviolabililer  voluil  observare,  presenlibus  ad  hoc,  vocatis 
et  rogalistestibus  venerabilibusot  discrctis  virisdominisPetrodeu  Rcysscs 
capcllanode  Niolio  et  canccllario  curie  prcdicle,  Stcphano  dcu  Stieones 
prcsbitcro  regestralore  et  impétrante  Bernard©  Ruaud  (2)  in  legibus  licen- 
lialo  cl  prcsbilero  et  aliis,  ci  de  liiis  débet  dari  instrumcnlum. 


VI 


Pierre  de  Montbrun,  né  au  château  de  ce  nom,  commune  de 
Dournazac,  fils  d'autre  Pierre,  seigneur  de  Montbrun,  était  moine 
bénédictin  et  abbé  de  Saint-Augustin  de  Limoges  en  1413.  Il  fut 
nommé  évoque  de  Limoges  par  le  pape  Martin  V,  du  consentement 
du  roi  et  prêta  le  serment  à  la  cathédrale  le  17  avril  1427.  Dans  sa 
balle,  Martin  V  loue  en  lui  le  zèle  de  la  religion,  la  science  des 
lettres  et  la  pureté  de  la  vie.  Son  sacre  eut  lieu  à  Tulle. 

Le  roi  Charles  VII  le  nomma  à  son  grand  conseil  et  le  chargea 
de  plusieurs  ambassades. 

Il  témoigna  beaucoup  de  zèle  pour  l'administration  de  son  dio- 
cèse et  la  défense  des  droits  de  son  siège.  Dès  1428,  il  promulgue 
les  statuts  qui  suivent.  En  1433  il  fait  la  visite  du  diocèse,  ainsi 
qu'en  1440,  1443, 1444.  Ayant  obtenu  une  bulle  du  pape  Eugène  IV 
pour  faire  la  visite  dans  les  monastères,  les  églises  collégiales  et 
autres,  il  la  commença  le  28  avril  1436,  la  renouvela  en  1446, 
1448,  1440.  Enfin,  lorsque  l'âge  et  les  fatigues  vinrent  s'opposer 
à  l'exercice  de  son  zèle,  il  eut  un  coadjuteur  nommé  Michel,  de 
Tordre  des  Frères  Prêcheurs,  évéque  de  Nicosie,  qui  visitait  pour 
lui  le  diocèse  en  1454  et  1456. 

Ses  courses  dans  le  diocèse  n'étaient  pas  sans  danger;  ainsi,  en 
1434,  il  fut  pris  par  Tandonnet  de  Fumel,  son  ennemi,  capitaine 
de  Ghâlucet,  qui  l'emmena  dans  ce  château  et  le  rançonna,  il  fui 
souvent  tracassé  par  les  vicomtes  de  Turenne,  qui  le  lirenl  aussi 
prisonnier  et  l'obligèrent  à  se  racheter,  pour  une  forte  rançon, 
vers  l'an  \  444. 

Il  habitait  le  plus  souvent  son  château  d'Ile  et  quelquefois  celui 
de  Montbrun,  auquel  il  fit  beaucoup  travailler. 

Il  se  trouvait  à  Limoges  à  rentrée  du  roi  Charles  VII  en  1438; 
le  2  janvier  1454  (v.  s.)  il  consacra  l'église  de  Saint-Pierre-du- 
Queyroix,  et,  en  1455,  celle  de  Saint-Michel-des-Lions. 

(1)  En  1378,  Etienne  Ruaud  fondait  une  vicairie  (Nadaud,  Chronol.  des  évèqae«  de  Limo- 
ges), et  un  peu  avant  (en  13S2)  Johannce  Buaudi  était  chapelain  perpéti»el  dao»  l'église  de 
Notre-Iame  def-ArcncF,  a  LimoFet-  [Uull.  Soc.crch.  de  Limoges,  i.  XXX,  p.  67.) 


>NCIRNS  STATUTS   DU   DIOCÈSK   DK   LIMOGES.  IK'' 

Le  7  mai  1456,  il  permettait  à  un  prêtre  de  la  ville  de  Saint- 
Léonard,  nonobstant  les  constitutions  synodales,  de  tenir  plusieurs 
enfants  sur  les  fonts  baptismaux;  et  dans  les  pouvoirs  qu'il  avait 
accordés  le  2  janvier  1434  (v.  s.)  à  Guy  de  Montbrun,  son  neveu, 
curé  de  Donzenac,  on  remarque  celui  u  d'autoriser  les  prêtres  à 
être  parrains.  » 

Il  mourut  au  château  d'Ile,  le  19  février  1456  (v.  s.),  et  fut  en- 
terré dans  la  cathédrale  de  Limoges. 

Ses  armes  sont  :  d'azur  à  la  croix  d'or. 

Dans  les  statuts  de  cet  évéque  nous  voyons  que  la  Cour  de 
rOfficial  se  tient  dans  la  chapelle  du  cimetière  de  Saint-Pierre- du- 
Queyroix,  an  château  de  Limoges.  C'est  en  effet  dans  la  ville  du 
Château  que  se  sont  réfugiés  les  chanoines  et  que  siège  la  juridic- 
tion ecclésiastique  depuis  la  destruction  des  murailles  de  la  Cité, 
après  la  prise  de  cette  dernière  ville  par  le  Prince  Noir.  L'évéque 
habite  son  manoir  d'Isle  ou  la  forteresse  de  Montbrun. 

Les  premières  lignes  nous  font  assister  aux  formalités  d'entéri- 
nement et  de  promulgation  des  statuts  ecclésiastiques. 

Les  ordonnances  enregistrées  après  ce  préambule  ont  trait  aux 
violences  commises  à  l'égard  des  ecclésiastiques,  aux  sentences 
portées  contre  les  auteurs  de  faits  de  cette  nature  et  aux  procédu- 
res à  suivre  en  pareil  cas.  Sont  nommés  comme  témoins  de  la  pro- 
mulgation de  ces  articles  :  Martial  Gui  (Vidonû),  Guillaume  Cliam- 
bon,  Guillaume  Albiac  et  Guillaume  des  Coutures,  commissaires  et 
jurés  de  la  Cour  de  l'Offlcial.  L'instrument  original  est  signé  G.  de 
Pinu.  Cette  famille  Dupin  a  fourni  un  grand  nombre  de  notaires. 

Nola  quod  anno  Domini  millésime  cccc<^  vîcesimo  oclavo,  indictione 
spxta.  poDlificalus  sanctissiml  in  Chrislo  Palris  et  Domini  noslri  Domini 
Marlini,  divina  providencia  pape  quinti  anno  nndecimo,  excellenlissimo 
que  principe  et  domino  noslro  domino  Karolo,  Dei  gracia  Francorum  rege 
régnante,  die  vero  sexta  mensis  sepiembrls,  in  capella  civoril  (*)  ecclesic 
parochialis  el  curaie  sancti  Pétri  de  quadrivio,  in  qno  loco  lenebatur  curia 
venerabilis  virl   domini  ofticialis   l.«*movicensis,   per  venerabilem  virum 

(1)  CÙMirhm,  écrit  quelquefois  Ciboriwn,  a  toujours  désigné  en  LimousiD  la  chapelle  du 
cbamier  do  dioetière.  Un  grand  nombre  de  textes  en  parlent  au  xiii*  siècle.  Celle  du  cime- 
lière  de  Saint-Pierre-du-Queyroix,  où  se  tenait  alors  la  Cour  de  l'Official,  était  au  chevet  de 
ré^sMae,  à  l'endroit  où  sont  aujourd'hui  les  sacristies.  Le  texte  suivant  nous  fait  connaître 
ceDe  de  Saiot-Gérald  :  •  1252  —  In  rua  per  quant  itur  a  civorio  sancti  Geraldi  ad  portam  de 
Piehaoaeha  juxta  fouatvm  ».  (A.  Lkhoux,  Invent,  des  arch.  hotpit.  de  Limones^  III«  C.  3). 
Dans  ao  statut  du  chapitre  de  Saint-Junien  de  l'an  1262,  on  lit  :  «  Universi  et  singuli  dedditus 
el  proventut,  eum  omnibui  juribvs  et  pertinentiis  suis...  sacrisiia,  civorio  seu  oratorio  cime- 
terii  et  eeclefia,çue  sancti  Pétri,  etc.  ».  (Nadaud,  Fouillé  manuscrit,  il,  91).  Cette  chapelle 
ou  cîToire  do  cimetière  de  Saint-Junien  fut  rebâtie  par  Gérald  Godardi  en  1281  {Idem),  En 
1779  la  paroiftiie  de  V^erneuil,  en  érigeaut  un  nouveau  cimetière,  y  construisit  une  chapelle 
sépolcrale  et  dès  Ion  ce  cimetière  fut  appelé  cimetière  du  Civoîre  (Registres  paroissiaux). 


i5Ô  SOCIÉTÉ  ARCHBOLOGIxiDB   ET   HISTORIQUB   DU   LIMOUSIN. 

dominum  Johannem  de  Peysaco,  canonicum  ecclesie  Lemovicensis  (I), 
instante  et  requireuie  vcnerahili  eldiscreto  viro  domino  Nicolao  de  Vossaco, 
eliam  canonico  ecclesie  Lemovicensis,  procaratore  que  reverendi  in  Cbrislo 
palris  et  domini  domini  P[elri],  misericordia  divina  Lemovicensis  episcopi, 
et  sigillifero  dicte  Lemovicensis  curie  sive  cancellario,  fuit  judiciaiiter 
lecta  quedam  parva  papiri  cedula  scripia,  ibidem  [per]  prefalum  dominum 
ofKcialem,  exhibita  et  porrecta,  ac  delerminatum,  et  declaraium,  et  ordina- 
lum  modo  et  forma  et  prout  in  eadem  cedula  coniinetur.  Et  de  quibus 
prefatus  venerabilis  procurator  peciil  instrumentum  unum  el  plura.  Et 
cujus  papiri  cedule  lenor  sequitur  sub  hiis  verbis. 

Quum  omnis  ulriusque  sexus  persona  injiliens  manus  temere  violentas 
maliciose  et  injuriose  in  clericum  aut  personnam  aliam  ecclesiasticam , 
ipsofacio,  sententiam  excommunicalionis  incurrai  jiixta  canonem  :  Si  quis 
suadente  diabolo  (3),  et  ideo  de  slilo  et  longa  observantia  presentis  curie 
diutius  observatis  a  tanlo  tempore  quod  de  initio  memoria  bominum  non 
existil.  Dum  aliquis  clerus  per  aliquem  verberatus  venit  querelosus  ad 
officialem  venerendi  in  Christo  pairis  et  Domini  Domini  episcopi  Lemovi- 
censis, quod  aliqua  persona  ipsum  percussit  maliciose  et  injuriose,  procu- 
rator dicti  Domini  ad  promotionem  dicli  cierici,  aut  alterîus  persone  eccle- 
siastice  taciat  fieri  informationem  secretam  cum  leslibus,  et  dum  constat 
per  ipsam  informationem  quod  ipsa  persona  injicit  manus  suas  temere  vio- 
lentas, maliciose  et  injuriose  in  ipsum  clericum,  seu  aliam  personam  eccle- 
Riaslicam,  tonsuram  et  vestes  cléricales  palam  et  publiée  defercnieni, 
dominus  officialis  vel  cancellarius  concedit  lilteras  de  eoUetis  nuncupatas, 
juxta  diclum  stillum  ;  que  iitlerc  si  pars  verberans  anle  eorum  concessionem 
se  opponat  quod  non  concedantur,  coram  prefato  domino  ofBciali  aut  can- 
cellario, seu  coram  eorum  locumtenentibus  non  couceduntur  et  non  nuUi 


(1)  La  famille  de  Peyzac,  originaire  de  la  paroisse  de  ce  nom,  dans  l'ancien  archiprètré  de 
Lubersac,  a  donné  à  l'église  de  Limoges,  au  zv*  siècle,  plusieurs  prêtres  distingués  : 

Jean  de  Peyzac,  dont  il  est  parlé  ici,  semble  être  le  neveu  d'autre  Jean  de  Peyzac,  aussi 
chanoine  de  Limoges,  dont  on  peut  voir  la  tombe  sous  le  clocher  de  la  Cathédrale  :  C'est  une 
dalle  en  pierre  de  plus  de  deux  mètres  de  hauteur.  Le  défunt  y  est  représenté  couvert  des 
ornement^  sacerdotaux,  les  mains  jointes  et  coiffé  de  Taumusse.  Son  aube,  son  étole,  sa 
chasuble  ample  et  souple,  le  manipule  qu'il  porte  au  bras  gauche,  sont  dessinés  d'un  trait 
ferme  et  élégant.  Autour  se  trouve  l'inscription  suivante,  en  lettres  gothiques,  avec  abrévia- 
tions, et  assez  difficile  à  lire  :  ■  Hic  jacet  bone  memorie  dominus  Joannes  de  Peyiaco  [et  non 
de  Peyraeo  comme  plusieurs  ont  lu],  loci  Vtnolt'o,  canonicus  Lemoviceruis  qui  obiit  die 
ultimo  [?\  anno  Domini  M  CCCC^.  Anima  ejus  requiescat  in  pace.  Ut  Deus  patcat  W,  die 
lector  miserere  met  «.  Tbzier,  Epigraphie,  p.  246.  —  M.  Arbellot,  Histoire  de  la  Cathé- 
drale p.  223). 

Jean  de  Peyzac,  chanoine  de  la  cathédrale  et  du  monastère  de  la  Règle,  qui  fonde  une 
vicairie  à  la  cathédrale  le  24  juillet  1444  ^Nadaud,  Pouillé,  art.  Cathédrale),  est  peut-être  le 
même  que  celui  de  nos  statuts. 

Noble  Annet  de  Peyzac,  mort  avant  le  14  novembre  1496,  avait  pour  frère  ou  proche 
parent  vénérable  et  religieux  homme  frère  Gaultier  de  Peyzac,  prieur  d'Asnede,  ordre  de 
Saint-Benoit  (iVofti'/iairc,  III,  198). 

(2)  Ce  canon  est  le  15*  du  concile  cénéral  de  Latran  présidé  en  1139  par  le  pape  Inno- 
cent II  :  Si  quis  suadente  diabolo,  hujus  sncrilegii  reatum  incurreri*.,  quod  in  Clericum  v^l 
Afotiaehum  violentas  manus  intulerit,  anathematis  vincuh  subjatfint,  et  nullus  Rpiscoporum 
lllum  prfFsumat  absolvere^  nisi  m'trtis  urgente  periculo,  donec  apostolico  conspeetui  protsente- 
turj  ri  eJus  mcuidatum  suscipiat. 


ANCIENS  STATUTS   DU    DlOCÀSR    DR    LIMOGES.  1£9 

abstinere  vclioi.  Quod  etiam  si  Ulis  persooa  verbcrans  sic  opponens  anle 
eanim  executionem,  non  niandantur  excecutioni,  excecuiioni  nec  valent. 
Nos  Yolenles  liies  minuere  cl  a  laboribus  ac  expensis  relevare  subjectos, 
ac  inconvenienliis  que  exinde  oriri  possenl  obviaie,  el  quia  humana  nalura 
oovas  semper  de...  cdii  formas  per  quas  liies  coiidie  invenire  conànlur 
aclcndentes  eliam  quod  exce^ulor  iiiterarum  nutlam  cause  cognicionem 
habel,  ha bilo  semper  hoc  mnluro  consilio,  et  juridica  deliberaciooe  cum 
periiiset  antiquis  curialibus  bujus  curie,  et  de  expresso  mandato  reverendi 
in  Christo  patrîs  el  Domini  Domini  Pelri,  Dei  gracia  Lemovicensis  episcopi 
▼ive  vocis  oraculo,  nobis  coram  canceliario  suo  facto,  pro  tribunali  sedente 
decrevimus,  declaramus,  ordinamus  que,  et  statuimus  quod  opposicio 
quuliscumque  fiât  et  coram  qualicumque  persona  contra  dicias  liltcras  eoitetùs 
nominatas,  nisi  fiât  coram  officiali  vel  Ciincellario,  seu  eorum  locumlenen- 
iibus  non  valeat  et  sil  nullius  efGcacie,  seu  valoris,  nec  impediat  concessio- 
nem  et  executionem  earumdem. 

Item  etiam  statuimus  et  ordinamus  quod  taies  liltere  eoUetis  nominale 
împetrate,  concedi  valcant  atque  possint,  et  eorum  impelratio  atque  con- 
cessio  valeat  etiam  die  feriato,  seu  fesiivo,  cum  non  sil  actus  judiciariussed 
mandativus. 

Acia  fuerunl  hec  ubi  supra,  presenlibus  discretis  viris  magistris  Martiale 
Vidonîs,  Guillermo  Chambo,  Guillermo  Albiac,  et  Guillermo  de  Culturis, 
dicte  Lemovicensis  curie  commissariis  et  juralis  el  quampluribus  aliis 
Icslibus  ad  hoc  vocatis  specialiter  et  rogalis.  Sic  signaium  :  G.  de  Pinu. 
lia  fuit  acium. 


VIL 


Jean  Barton  de  Monlbas  I,  fils  de  Pierre,  vicomte  de  Monlbas, 
naquit  à  Guéret  en  1417.  Il  fut  chanoine  en  U48,  puis  doyen  de 
réglise  de  Limoges,  abbé  du  Dorai,  conseiller-clerc  au  Parlement 
de  Paris,  président  des  enquêtes,  et  enfin  évêque  de  Limoges  en 
1487.  Sacré  à  Bourges,  il  prit  possession  personnelle  de  son  évéché 
le  18 septembre  ou  décembre.  A  roccasien  de  sa  prise  de  possession, 
il  fut  ordonné  que  désormais,  lorsque  les  évoques  la  prendraient 
personnellement,  tous  les  corps  ecclésiastiques,  séculiers  et  régu- 
liers de  la  ville,  cité  et  faubourgs  de  Limoges,  assisteraient  proces- 
sionnellemenl  à  la  réception  solennelle  des  évéques.  En  1462,  il 
reçut  le  roi  Louis  XI  dans  sa  ville  épiscopale,  avec  le  duc  de  Berry, 
frère  da  roi,  et  plusieurs  princes  du  sang.  En  1458,  à  la  sollicitation 
de  son  chapitre,  il  avait  donné  une  dispense  aux  pauvres  de  la  ville 
pour  manger  du  fromage  pendant  le  carême,  dispense  qui  est  deve- 
nue depuis  générale  et  perpétuelle.  Il  contribua  beaucoup  à  la 
construction  d'une  partie  de  la  nef  de  la  cathédrale.  Fatigué  du 
fardeau  de  Tépiscopat,  il  résigna  son  évôché  à  Jean  Barton  de 


460  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGiQUB  RT  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

Montbas  II,  son  neveu,  le  i  février  1483  ou  4484,  et  fut  arche- 
vêque titulaire  de  Nazareth  en  1497.  Il  mourut  à  Limoges  le  3 
ou  le  4  mai  de  cette  môme  année,  et  fut  enseveli  dans  un  caveau 
creusé  au  centre  du  chœur  de  la  cathédrale.  M.  l'abbé  Texler,  qui 
y  est  entré  en  1852  et  1856,  nous  dit  :  «  Sa  croix  archiépiscopale, 
en  cuivre  doré,  est  debout  au  fond  de  la  crypte,  et  sur  la  traverse  se 
Ut  cette  inscription  :  Johanncs  Bartonis  archiepUtcopus  Nazari- 
sen  (sic),  antea  episcopus  Lemovicensù,  Le  corps  du  prélat  était 
revêtu  des  ornements  pontificaux  ;  sa  stature  était  très  petite,  à  en 
juger  par  Texiguité  de  ses  sandales.  » 

Nous  aussi  avons  visité  ce  caveau  en  1^72;  alors  il  avait  été  un 
peu  transformé.  Un  mausolée  en  granit  cache  les  sépultures  épis- 
copales  qu'on  y  a  réunies.  Sur  la  façade  on  lit,  après  les  épitaphes 
de  M»*"  du  Bourg  et  de  M^^  Buissas,  celte  inscription  qui  se  rapporte 
aux  deux  Barton  de  Montbas,  à  W"  Louis  Lascaris  d*Drfé  et  à 
M«r  Benjamin  de  Tlsle  du  Gast  :  «  Hic  requiescunt  in  Domino  ossa- 
quatuor  episcoporum  Lemovicensium  (1).  » 

Une  dalle  funéraire,  en  cuivre  doré,  représentant  le  prélat  cou- 
vert de  ses  ornements  de  pontife,  était  placée  au-dessus  du  caveau 
devant  le  maître-autel.  Elle  a  disparu  pendant  la  Révolution.  Elle 
portait  l'épitaphe  suivante,  en  lettres  gothiques  : 

Virgo,  fave  cœptis,  quaeso  sanctissima,  meis, 
Quod  mihi  corde  sedct,  quod  lola  mente  volulo, 
Scribere  sii  mihi  fas,  uonnullo  minime  Iseso. 
Hoc  jacel  in  lumulo  Johannes  episcopus,  hujus 

Urbis  honor,  pairiae  gloria,  plebis  amor. 
Marchia  quem  genuii,  Bartonis  cognominatus, 
Pago  Garactensi,  nobili  de  génère  natus. 
Lilios  dum  flores  senatus  villa  regali 
Legeret  parisius,  in  sede  praesidiali, 
Paslorem  peliii  Ecclesia  Lemovicensis, 
Qucm,  orbala  duce,  elegil  Plamine  sacro. 
Defensor  palrise  fuit  et  tulela  suorum. 
Inviclum  fidei  robor,  et  correctio  morum. 
Hic  facandus  erat,  largus,  et  cuoclis  abundans  : 
Hamilis  in  populo  doclrinae  jubare  micans. 
Interea,  dum  senio  prope  jam  canus  eleetus, 
El  pastoris  arara  rexisseï  lempore  longo, 
Archiprassul  dignus,  translatus  Nazariensi  ; 
Jura  linquens  sedis  nepoii  caro  Johanni; 

(O  Voir  :  Histoire  de  la  Cathédrale  de  Limoges,  par  M.  Arbellot, 
[rage  212. 


ANCIBN6  STATUTS   DU   DIOCÂMS   M   LIMOGKS.  16f 

Vivens  in  Domino,  odogenus  aslra  beavil. 
Inde,  milleno  quatuor  centum  nonageno, 
1d  crucis  festo  mail,  lune  adde  sopleno. 
Cujus  vita  fuit  prœseus  sibi  loia  laboris, 
Posl  morlem  sit  ei  rcquies,  finis  que  doloris. 

Ses  armes  sont  :  d'azur,  au  cerf  à  la  reposée  d'or,  au  chef  échi- 
9ueté  d'or  et  de  gueules  de  trois  traits. 

La  première  orilonnance  de  cet  évoque,  qui  se  Irouye  au  bas  du 
feuillets?*,  dispose  que  la  veille  de  la  Toussaint  n'est  pas  considérée 
comme  un  jour  férié  eh  ce  qui  concerne  la  délivrance  des  moni- 
loires. 

Après  une  lacune,  deux  feuillets  ayant  été  déchirés,  les  statuts 
qui  suivent  se  rapportent  à  certaines  enquêtes  et  aux  délais  et 
formalités  qu'elles  comportent. 

Nola  quod  die  infra  scripta  fuit  factum  notarium  per  prncticos  curie  quod 
vigilia  Omnium  Sanclorum  quoad  impclraciones  monicionom  non  est 
fcriata  et  consuevii  dari  absolutio  generalis. 

Actum  die  décima  oclava  mensis  maii  anno  Domini  millesimo  quadrin*- 
gcntesimo  sexagesimo  quinlo,  sic  signalum  :  de  Beyssaco  retalit  (1). 

Ârliculatim  ac  dictarum  ac  dictarum  positionum  et  responsionum  hinc 
inde  copia  décréta  assignabitur  ipsis  partibus  prima  dilatio  ad  probandum 
scripturas  prediclas  ad  finem  quod  processus  suo  marte  jurât. 

Deinde  secunda  dilatio,  terna  et  quarta  successive  et  communiter  ipsis 
partibus  aut  una  pro  omnibus  prout  consuetum  est  fieri  concedenlur. 

Quibus  dilationibus  pendeniibus  fient  inqueste  super  factis  et  scripturis 
per  dictas  parles  hinc  inde  traditis  juxta  et  secundum  materiam  subjectam 
cl  stillum  curie  presentis,  et  ad  diem  pro  quarta  dilacione  inclusa  assi- 
gnatam,  ipsé  inqueste  rcfTerentur  et  publicabuntur  juxta  formam  in  pre- 
senti  cnria  consu*(îtam. 

Et  non  requiretur  fîeri  processus,  nec  ordinabitur  donec  et  qnonsquc 
traditis  objectibus  et  salvationibus  hinc  inde  inqueste  super  cis  fiende 
fuerint  publicate,  et  pro  unica  vice  duntaxat. 

Pariler  tradentur  objectus  et  salvationes  per  dictas  parles  respective, 
sicQt  et  scriplure  principales  cum  eis  iradilis  ac  fM)silo  et  responso  ârlicu- 
latim pront  supradictnm  est,  fiet  probatio  sub  duabus  dilaciontbus  pro 
omnibus  quarta  inclusa  eisdem  partibus  commuoibus  in  ipsis  que  objectif 
bus  et  salvationibus  extra  maleriam  objeclivam  contra  testes  et  eorum 
dicta;  nuUa  facta  nova  sub  pcna  emende  arbitrarie  pr^onantur. 

Et  solum  concedetur  una  dilatio  ad  concludendum,  fada  conclnslone  cl 
reounciatione  in  cau«a,  tenebuntur  procuratores  partium  ponere  ei  pro- 

(1)  Deux  feuillets  ont  été  déchirés  en  cet  endroit  du  manuacrit.  Dans  la  pai^ination  moderne 
on  a  mis  58  4  un  morceau  du  premier  de  ces  feuillets,  sur  lequel  il  reste  encore  quelques 
mots  ne  donnant  aucun  sens.  Je  continue  le  texte  avec  la  page  59, 


163  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

ducerc  processum  in  forma  débita,  grossatum  et  sigillatum,  nisi  fuerit  per 
DOS  ordinatum  quod  fiat  per  cxlraclum,  cum  qualilas  dicti  processus  hoc 
exqoirit. 

Ceterisque  omnibus  in  antiquo  stilo  curie  prescnlis  contenlis  in  suo 
robore  permanenlibus. 

Factafuerunt,  décréta,  lecta  et  publicata  judicialiter  statula  predicta,  el 
in  stilo  presenlis  curie  redigi  precepta  (i),  et  insinuata  ad  [registnim] 
per  practicos  et  curiales  ipsius,  ordiuata  per  Revcrcndum  in  Ghristo  pa- 
trnm  Dominum  Pctrum  Barthonis  (1),  in  decrctis  liccntiatum,  abbalem 
nionasterii  Sancti  Augustini,  revereudissimi  in  Ghristo  patris  et  domioi 
nostri,  Domini  Johannis  Dei  gratia  Lcmovicensis  episcopi,  officiaicm  et 
vicarium  generalem  in  aula  cpiscopali,  die  mercurii,  ui"  mensis  octobris, 
prima  juridictione  post  (?)  vcndemias,  anno  Domini  millesimo  cccc'nona- 
gesimo  t". 


VIII 


Jean  Barton  de  Montbas  II,  qui  avait  été  curé-archiprétre  et 
chantre  du  Dorât,  fut  aussi  doyen  de  la  cathédrale.  Il  succéda  à  son 
oncle  sur  le  siège  épiscopai  de  Limoges,  dont  il  prit  possession  [e 
38  avril  1484.  II  avait  secondé  son  oncle  dans  le  bien  qu*il  avait 
fait  au  diocèse,  et  contribua  aussi  beaucoup  à  la  construction  de  la 
nef  de  la  cathédrale.  Eo  1489,  il  eut  un  procès  avec  le  chapitre 
pour  avoir  visité  les  églises  dépendantes  de  la  juridiction  de  ce 
corps  et  exemptes  de  celles  de  révoque.  Il  mourut  le  13  septembre 
1510  et  fut  enterré  dans  la  cathédrale  auprès  de  son  oncle,  soa 
prédécesseur.  Ses  armes  sont  :  d'azur,  au  cerf  à  la  reposée  d'or,  au 
chef  échiqueté  d'or  et  de  gueules  de  trois  traits. 

Die  scilicet  quarta  mensis  decembris,  anno  Domini  miiles'mo  quadrin- 
gentesimo  nonagesimo  nono,  fuît  inhibitum  sub  excommunicationis  pena 
omnibus  practicis  ne  in  lilleris  citatoriis  quando  procitatur  aclalor  jus  et 


(1)  Ici  se  termine  le  manuscrit,  aa  verso  du  60*  et  dernier  feuillet.  Mais  on  trouve  au  bai 

l'indication  suivante,  qui  est  d'une  écriture  différente  :  Cetera  vide  in  principio  istitu  libri 

C'est  en  effet  au  verso  du  13*  feuillet  que  se  trouve  la  suite,  fort  difficile  à  lire,  écrite  par  Tau- 
teur  de  cette  indication. 

(2)  Pierre  Barton,  fils  d'autre  Pierre,  vicomte  de  Montba«,  et  de  Pérette  Lefèvre,  était  frère 
de  Jean,  évèque  de  Limoges,  et  de  Guillaume,  évêque  de  Lectoure.  En  1480,  il  était  religieux 
bénédictin  et  prieur  de  Porse,  au  diocèse  de  Rodez.  11  fut  élu  abbé  de  Saint-Augustin  de 
Lio^oges,  pour  succéder  à  Louis  de  Comborn  en  1482.  Il  fit  imprimer  en  1483  le  Missel  ad 
usttm  Lemovicensis  ecclesicBf  m-foUo,  sur  vélin,  en  caractères  gothiques,  sur  deux  colonnes, 
avec  majuscules  coloriées  et  manuscrites,  ainsi  que  les  notes  du  plain-chant.  On  y  lit  en  effet, 
après  le  canon,  et  avant  la  messe  du  jour  de  Pâques  :  «  Orale  pro  fratre  Petro  Bartonis  ordi- 
natore  hujus  mitsaiis.  Requiescat  in  paee.  Amen.  »  Il  mourut  le  24  août  1503,  et  fut  enterré 
dans  l'abbaye  de  Saint- Augustin,  qu'il  avait  résignée,  en  1500,  en  faveur  de  son  neveu,  Jean 
Barton. 


ANCIENS  STATUTS  DU    DIOCÈSE   DE   LIMOGES.  J63 

justiciam  pro  defcclu  diei dical,  ne  habcanl  poncre  clausulam, 

et  intérim  rclaxainus  sub  pcna  emendc. 

Die  XXll  mensis  fcbruarii,  anno  Domini  millesimo  quingentcsimo  se- 
cundo, Jlominus  et  assessor  Bencdicti  (<},  rcquiescente  vencrabili  viro  ma- 
î»islro  Martiale  de  Valle  (2),  procuratore  gcnerali  Revercndi  in  Christo 
Palris  et  Domini  Domini  Lemovicensis  episcopi,  ordinavil  quoadmodo  in 
aniliea  non  erit  interruplio  in  causis  malrimonialibus  pcr  lapsum  trium 
mensium. 

Die  sexta  mensis  octobris,  anno  Domini  millesimo  quingenlesimo  3°, 
venerabilis  magister  Petrus  Benedicli,  in  dccrclis  licenciatus,  assessor 
venerabilis  officiatus  Lemovicensis  pro  Iribiinaii  ccdcnle  instituit  et  ordi- 
navit  quoadmodo  in  anthea  omnes  termini  erunt  preceplo  in  V  a  sex  Icu- 
cis  ciira  erant  pretaxati  ad  octo,  sine  inlerpellalione,  et  in  foro  diocesis  ad 
quindccim,  et  in  modo  probationis  solummodo  vigenti  dilationis  preccpto 
per  dislanciam  locorum  non  dempta. 

Die  lercia  julii,  anno  Domini  millesimo  quingenlesimo  VI°,  dominus 
officialis  Bencdictus  ordinarius,  de  consiliis  advocatus  ordinavit  quod  ad 

cetero renot faclum  per  judicem  lalcum  de  consensu... 

et  tenebil  et  fuit  ex (3) 


••  •«•#«•«•««•• 


Abbé  A.  Legler. 


(1)  Pierre  Benoit,  liceacié  en  l'un  et  l'autre  droit  et  ctianoine  de  la  cathédrale  de  Limoges, 
était  un  des  hommes  les  plus  congidérés  de  cette  époque.  En  150S.  il  était  choisi  pour  arbitre 
dans  un  différend  entre  les  consuls  de  Limoges  et  l'abbaye  de  Saint-Martial  (Regalre»  con- 
sulaireiy  I,  p.  16).  Il  fut  envoyé  en  ambassade  par  la  viUe  de  Limoges  auprès  du  roi  Fran- 
çois I"  en  1515  {Idem,  p.  77).  Il  était  ofQcial  de  Limoges  et  curé  de  Montjauvy  en  1516 
{Idem,  p.  84). 

(2)  On  trouve  aussi  dans  la  famiUe  de  Vaux  plusieurs  personnages  dont  différentes  chartes 
nous  conservent  les  noms  : 

Ro'.gerius  de  Valle  est  témoin  dans  une  donation  faite  à  Uzerche  en  mai  1044  {Cartulatre 
d'Userche^  par  M.  Champeval). 

Aymerkus  de  YcUle  est  nommé  prieur  de  Pradeaux  en  133i  (Bull.  Soc.  arch,  Lm.^  XXX, 
p.  62). 

/ohannes  de  VallibuSj  licencié  es-lois  et  officiai  de  Limoges,  dont  il  est  parlé  précédem 
ment  dans  les  statuts  de  1379. 

Pierre  de  Vaux,  abbé  de  Saint-Martin,  1392-1401  (Fouillé  manuscrit  de  Nadaud).  Avant  la 
Révoltition,  on  voyait  sa  tombe ,  relevée  en  bosse  devant  le  grand  autel  de  la  chapelle  de  cette 
abbaye.  Il  y  était  représenté  rétu  de  la  chasuble,  tenant  sa  crosse  de  la  main  droite  et  un  livre 
de  la  gauche  ;  la  tète  est  appuyée  »ur  un  coussin  ;  on  y  lisait  :  Bic  jaeet  Petrus  de  Vallibus 
abbas  (Biblioth.  nat.  des  manuscrits.  S.  F.  5024,  p.  156). 

Pierre  de  Valle,  notaire  royal,  1502  {BulL  de  la  Société  archéologique  de  Brive,  XII, 
p.  50). 

(3)  Les  trois  ou  quatre  dernières  lignes  de  cette  page  sont  il]i<tibles.  Elles  ont  été  écrites, 
comme  nous  f avons  déjà  dit.  sur  une  feuille  de  parchemin  portant  auparavant  un  écusson 
cbarçc  de  trois  fleurs  de  lis,  encore  très  reconnaissable  malgré  le  grattage  qu'il  a  subi. 


DOCUMENTS 


POUR  SERVIR  A  L'BISTOIRE 


DE  L'INDUSTRIE  ET   DES  MANUFACTURES 


EN   LIMOUSIN 


Favorisées  parle  mouvement  qui  porte  les  esprits  vers  rélude 
des  questions  d'histoire  locale,  nos  vieilles  provinces  reconstituent 
peu  à  peu  les  annales  de  leur  passé.  La  liste  est  déjà  longue  des 
essais  retraçant  les  origines  et  les  développements  des  institutions 
qui  firent  leur  grandeur  ou  leur  force  et  les  événements  de  tout 
ordre  dont  elles  furent  le  théâtre.  Se  reliant  les  uns  aux  autres,  ces 
travaux  iront  bientôt  verser  dans  le  courant  plus  vaste  de  Thistoire 
du  pays  un  ensemble  de  faits  définitivement  établis  et  de  vues  nou- 
velles. 

L'apport  à  cet  utile  labeur  s'effectue  simultanément  sous  deux 
formes  différentes  :  pendant  que  Thistorien,  s'emparant  d*un  épi- 
sode marquant,  en  fait  l'objet  d'études  critiques  et  de  récits  ani- 
més, ou  encore  pendant  qu'il  place  dans  son  cadre  et  dans  son 
milieu  un  personnage  ioconnu  qui  s'est  révélé  à  lui,  de  plus  mo- 
destes travailleurs,  explorant  les  dépôts  d'archives,  arrachent  à 
l'oubli  des  matériaux  que  d'autres  mettront  on  œuvre  ou  dans  les- 
quels ils  puiseront  des  éléments  précis  d'information  et  de  discus- 
sion. C'est  un  effort  de  plus  dans  ce  sens  que  nous  tentons  aujour- 
d'hui sur  le  vaste  domaine  de  l'industrie  et  des  manufactures  en 
Limousin. 

La  publication  de  l'inventaire  des  archives  de  llntendance  de 
Limoges  (série  C  des  archives  départementales)  vient  de  mettre  en 
lumière  un  assez  grand  nombre  de  documents  concernant  l'impri- 
merie, les  manufactures  de  tissus,  les  fabriques  de  faïence  et  de 
porcelaine,  les  papeteries  et  les  exploitations  minières.  A  l'exem- 
ple de  ce  qu'a  fait  M.  Alfred  Leroux  pour  le  fonds  de  l'ancien 
collège  de  Limoges  (série  D),  nous  nous  proposons  de  tirer  de  ce 


DOCUMENTS   SUR   L*1NDUSTR1E   ET   LES   MANUFACTURES   EN  LIMOUSIN.       10) 

fonds  de  rinleûdaDce,  poar  les  publier  intégralemenl,  les  pièces 
les  plus  importantes,  celles  qui  sont  susceptibles  d'être  consultées 
avec  fruit  pour  l'histoire  industrielle  de  notre  province. 

Aucun  sujet  ne  nous  a  paru  plus  propre  à  intéresser  les  hommes 
de  notre  pays  et  de  noire  temps;  il  offre  môme  plus  qu'un  intérêt 
de  vaine  curiosité,  si  Ton  considère  les  problèmes  qui  s'y  rattachent. 
Nulle  branche,  en  effet,  de  l'activité  humaine  ne  se  lie  plus  étroi- 
tement au  développement  de  la  prospérité  publique  et  du  bien-être 
des  citoyens. 

Les  documents  dont  nous  comptons  faire  une  ample  moisson 
apparlienn^t  à  la  seconde  moitié  du  xvn*  siècle  et  au  xviu*.  Ils 
embrassent  la  période  qui  va  de  Golbert  à  Turgot,  du  représentant 
le  plus  éminent  de  la  protection  et  de  la  réglementation  industriel- 
les au  partisan  le  plus  convaincu  de  la  concurrence  et  de  la  liberté. 

Par  les  encouragements  qu'il  lui  prodigue,  Golbert  ouvre  à  l'in- 
dastrie  jusqu'ici  négligée  la  voie  de  nouvelles  richesses.  Après  sa 
mort,  et  surtout  après  la  révocation  de  Tédit  de  Nantes,  l'industrie 
nationale  subit  une  période  d'inaction  et  d'abandon.  Mais  le  siècle 
qui  s'ouvre  est  plein  de  germes  féconds.  Bientôt,  des  novateurs 
dans  tous  les  genres  soulèveront  tous  les  problèmes,  agiteront 
toutes  les  questions.  En  ce  siècle  de  rêve  et  d'analyse,  toutes  les 
sciences  vont  faire  d'immenses  progrès  et  réaliser  des  merveilles. 
Les  mathématiques  atteindront  presque  leur  apogée  et  la  chimie 
va  devenir  l'une  des  branches  les  plus  étendues  des  connaissances 
humaines.  Or,  ces  progrès  provoquent  [d'autres  progrès.  Chaque 
conquête  de  la  science  trouve  immédiatement  une  application  à 
rindustrie,  qui  en  reçoit  une  vive  impulsion. 

Tandis  que  l'esprit  de  la  nation  devient  singulièrement  hardi,  le 
pouvoir  royal  persiste  dans  son  indolence.  Aussi,  au  milieu  de 
toutes  les  transformations,  à  peine  l'influence  de  son  représen- 
sentant  se  fait-elle  sentir.  Cependant,  lorsqu'il  se  nomme  Boucher 
d'Orsay,  Aubert  de  Tourny  ou  Turgot,  l'Intendant  de  la  Généralité, 
duquel  relèvent  toutes  les  questions  industrielles  ou  manufactu- 
rières, a  le  souci  des  besoins  des  populations  et  des  intérêts  de  la 
province.  Rompant  avec  les  préjugés  stériles,  il  stimule  les  efforts 
qui  ont  en  vue  la  création  de  nouvelles  branches  d'industrie  et 
leur  imprime  une  direction  naturelle  en  les  appliquant  aux  pro- 
ductions qui  conviennent  le  mieux  au  sol  ou  aux  aptitudes  des  ha- 
bitants. S'il  ne  permet  pas  d'éluder  les  règlements  qui  entravent 
le  travail,  il  s'applique  du  moins  à  en  atténuer  les  effets,  et  on  le 
verra  plus  d'une  fois  protéger  Tarlisan  contre  l'exclusivisme  des 
corporations. 

En  même  temps,  la  législation,  jusqu'alors  diverse  et  variable, 

T.  XXXiX.  i\ 


166  SlOGIÉT^  ABCQÉjOLOQiaPR  ET  HlSTOBIQUi;  VQ  VKOU^Ii. 

devient  plus  tmiforme  et  plqs  pr<icise.  Au  régime  des  priyil^gei;  at 
des  autorisations  individuelles  se  substitue  peu  à  peu  le  régime 
des  lois  gënér^iles;  et  dans  ces  moditicatiQns,  Ton  peut  déjà  prea^entir 
une  préoccupation  nouvelle  qui  trouvera  ui)  jour  s^  fortn^l^  clans 
le  principe  de  Tégalité  devant  la  loi. 

Tous  ces  avantages  eussent  dû  fendra  Tindustri^  florU^unta 
s'Us  q'avajent  été  en  partie  s^pnihilés  par  des  restrictions  de  twte 
sorte  résult^r^t  d'une  régleipents^tiQn  élroHe  quii,  S4^us  pirét6i:t€i  do 
sauvegarder  les  droits  des  maîtres  et  Thonneur  professiouqelt  ^^ 
$^i  à  la  production  par  des  fornaalilés  çt  des  lenteurs  inutiles. 
i>*aut[res  causes,  telles  que  le  désordre  de^  finances,  1^  disettes 
fréquentes  ^t  1^  ruineuse  Guerre  de  Sep(-Ans,  viendront  encore  en- 
traver les  réformes  éconopiiques.  Au^^'^i*  auprès  les  éphédHère^  ten- 
tatives de  Tvirgat,  ne  faudrs^-t-il  ri^en  rnoios  qu'we  révoluUon  pour 
proclamer  la  liberté  du  travail  et  Vérp^ucipatjon  du  pr^d^ctetiF. 

A.  Fray-Fournier. 


IMPRIMERIE. 


ArréP  C(mcernant  les  imprimeurs  de  la  ville  de  Limoges.  —  1704. 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d'Estat  du  Roy. 

Sur  la  requeste  preseotée  au  Roy  en  aou.  Conseil  par  GaJ>i:iel 
Famé,  Jean  Chapoulaud,  François  Meilha.ç,  Valérie  Guillot,  veufve 
de  Jean  BarJinet  et  Jeanne  Le  Moine,  tous  imprimeurs  et.  Iibraj,re& 
de  la  ville  de  Limoges,  contenant  qu'Us  ont  esté  déQlai:ez  déchu;&  du 
droit  de  tenir  imprimerie  et  librairie  en  la  ville  de  Lin^oge^  par  arresL 
du  Conseil  du  vingt  trois  juillet  mil  sept  cent  [trois]  pour  ne  s*estre 
pas  fait  recevoir  en  la  manière  portée  par  les  arresla  des  sîj^  octobre 
mil  six  cent  soixante-sept  et  six  decen^.bre  mil  sept  cens«  sauf  k  eux 
à  se  pourvoir  au  Conseil,  en  conforna^ilé  de  ces  arrests.  t'esloi^ne- 
ment  dans  lequel  ils  sont  ne  leur  ayant  pas  permis  de  satisfaire  à 
cet  arrest  aussi  promptement  qu'ils  Tauroient  soubaitté,  il  leur  a 
esté  fait  deffences  par  un  second  arrest  du  dix-sept  décembre,  der- 
nier d'exercer  rimpriiperie  et  la  librairie  danjs..  la.  villes  dçi  tiniQgcs. 


DOCDMEIIT»  Sun   L*1KB0.STKIB   ET  LIS   MANUFACTUBES  BIT   LIMOUSIN.        iCtl 

Comme  cette  interdiction  fait  nn  grand  préjudice  àu)t  suppliàâs,  qui 
ne  font  subsister  leors  familles  que  par  leur  travail,  et  à  la  ville  dé 
Limoges  mesme  où  le  commerce  de  rimprimerie  est  trez  conslde-» 
rable  et  pourroit  prendre  un  austre  cours,  ils  ont  recours  à  Sa 
Majesté  poor  la  très  humblement  supplier  de  vouloir  bien  les  rece- 
voir maislres  imprimears  en  la  manière  portée  par  les  arrests  de 
mil  six  cent  soixante-sept  et  mil  sept  cens  et  en  conséquence  leur 
permettre  de  continuer  Texercice  de  leur  art  comme  par  le  passé. 
Ils  s'y  sont  establissur  la  foy  de  la  liberté  publique,  ils  sont  mesitie 
la  pluspart  dans  la  profession  de  père  en  fils,  tout  leur  bien  con- 
siste dans  leurs  presses  qui  sont  très  considérables  et'ileurjdevien- 
droient  inutiles  ;  il  n'y  en  a  point  qui  n'en  ayent  au  moins  deux 
fournies  de  bons  caractères  dont  pas  un  ne  trouvera  à  se  desfaire. 
1 /exercice  de  leur  profession  est  la  seule  ressource  qu'ils  atent 
pour  faire  subsister  leurs  familles  qui  estant  réduites  à  la  mendl^ 
ciléseroient  à  la  charge  de  la  ville  et  ne  pourroient  plus  payer  de 
capitations,  tailles,  taillons,  ustancilles,  quartiers  d'hiver  et  autres 
impositions,  les  suppliansne  seroientpas  non  plus  en  estât  de  payer 
à  Sa  Majesté  les  sommes  auxquelles  elles  les  a  taxez  pour  la  confir- 
mation de  l'hérédité  des  charges  de  jurés  trésoriers  et  autres 
qu'elle  leur  a  reuny.  Ils  ont  d'autant  plus  lieu  d'espérer  que  toutes 
ces  considérations  toucheront  Sa  Majesté  que  la  voye  de  se  pour- 
voir qu'elle  leur  a  ouverte  par  l'arrest  du  Conseil  du  13  juillet  mil 
sept  cent  trois  est  une  preuve  asseurée  de  la  disposition  où  elle  est 
de  leur  accorder  leur  établissement. 

A  ces  causes  requeroient  qu'il  plust  à  Sa  Majesté  ordonner  que 
les  arrests  du  Conseil  des  six  octobre  mil  six  cent  soixante-sept  et 
six  décembre  mil  sept  cens  seront  exécutés  selon  leur  forme  et 
ieûent  ;  ce  faisant,  qu'ils  seront  receus  maistres  imprimeurs  et  li- 
braires de  la  ville  de  Limoges  en  la  manière  accoutumée,  à  la 
charge  d'observer  les  arrests  et  règlemens,  et  en  conséquence 
lever  les  deffences  portées  par  les  arrests  des  vingt  trois  juillet  et 
dix-sept  décembre  mil  sept  cent  trois. 

Veu  la  dite  requeste  signée  Du  Mesnil,  avocat  des  suppUans,  et 
leurs  pièces  y  attachées;  ouy  le  rapport  du  sieur  de  Lamoignon  de 
Courton,  conseiller  du  Roy  en  ses  Conseils,  maistre  des  requestes 
ordinaires  de  son  hotet,  commissaire  à  ce  député,  et  tout  consi- 
déré» le  Roy  estant  en  son  Conseil,  de  l'avis  de  Monsieur  le  Chan- 
celier, a  débouté  lesd.  Yalerie  Guillot,  veufve  Jean  Bardinet  (1) 

(I)  Depuis  le  décès  de  son  mari,  en  1691,  la  veuve  de  Jean  Bardinet 
avait  continué  d'exploiter  son  imprimerie  avec  l'aide  de  ses  fils.  A  la  suite 
des  arrêts  de  4703  et  4701,  elle  se  pourvut  d^une  autorisation  pour  tenir 


168  SOCIÉTR   ARGHiOLOGIQOK  ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

et  Jeanoe  Le  Moine  (Ij  de  leurs  demandes,  et  faisant  droit  sur 
celles  desdits  Gabriel  Famé,  Jean  Ghapoulaud  et  François  Mei- 
Ihac  (2),  a  ordonné  que  les  arrests  des  six  octobre  mil  six  cent 
soixante-sept  et  six  décembre  mil  sept  cens  seront  exécutés];  ce 
faisant,  ordonne  que  lesd.  Gabriel  Farne,  Jean  Ghapoulaud  et 
François  Meilhac  seront  receuz  maistres  imprimeurs  et  libraires  en 
prestant  le  serment  au  cas  requis  pardevant  le  lieutenant  gênerai 
de  police  et  à  la  charge  d'observer  les  reglemens  de  librairie  et 
imprimerie  ;  et  attendu  qu'au  moyen  de  l'arrest  rendu  en  faveur 
de  Sardine  le  vingt-six  novembre  mil  sept  cent  trois  (3),  de  celuy 
rendu  en  faveur  de  Barbou  le  onze  février  dernier  (4)  et  de  celuy 
en  faveur  de  Voisin  le  vingt-six  février  dernier,  (5)  ensemble  du 
présent  arrest,  il  se  trouve  six  maîtres  imprimeurs  et  libraires  dans 
la  ville  de  Limoges  dans  laquelle  celuy  de  deux  est  suffisant,  a  or- 
donné Sa  Majesté  qu'il  ne  pourra  estrereceuen  la  place  des  quatre 
premiers  qui  viendront  à  décéder  (6). 

une  boutique  de  libraire.  Michel  Bardinet,  Tatné  des  fils,  n'en  conlinua 
pas  moins  l'exercice  du  métier  d'imprimeur  qu'il  fut  contraint,  plusieurs 
fois,  d'interrompre.  Il  bnit  par  obtenir,  le  27  mai  4709,  sur  l'avis  favora- 
ble de  l'intendant  Carré  de  Monlgeron,  un  arrôt  l'admettant  à  la  maUrise. 
Toutefois,  il  ne  fut  reçu  qu'en  4710. 

(1)  Jeanne  Le  Moine  fut  autorisée,  le  \^^  septembre  1704,  à  tenir  une 
boutique  de  libraire. 

(9)  C'est  à  François  Meilhac  que  Marivaux  confia,  quelques  années  plus 
tard»  l'impression  de  sa  première  pièce  de  théâtre,  composée,  dit-on,  à 
la  suite  d'un  pari,  durant  son  séjour  à  Limoges  où  il  passa  plusieurs  an- 
nées de  sa  jeunesse. 

L'œuvre  de  début  de  l'ingénieux  écrivain  a  pour  titre  :  Le  père  prudent 
et  équitable  ou  Crlspin  V heureux  fouri>e^  comédie.  —  A  Limoges  et  à 
Paria,  au  Palais,  MDCCXII  (in- 12). 

(3)  A  cette  date  du  26  novembre  4703,  Jacques  Sardine  avait  obtenu 
un  arrêt  du  Conseil  autorisant  sa  réception  comme  maître  imprimeur.  11 
exerça  jusqu'en  4712  et  eut  pour  successeur  son  fils  Martial. 

(Â)  A  raison  de  ce  qu'il  était  revêtu  de  la  charge  d'imprimeur  du  roi» 
Pierre  Barbou  fit  opposition  à  l'arrêt  du  93  juillet  4703,  qu'il  prétendait  ne 
pas  lui  être  applicable.  Il  dut,  comme  ses  confrères,  régulariser  sa  situa- 
tion. 

Les  Barbou  étaient  en  possession,  depuis  4636,  du  monopole  pour  l'im- 
pression des  édits,  déclarations  et  autres  actes  émanant  du  Roi  ou  de  son 
Conseil.  Antoine  Barbou  avait  reçu  brevet  à  cet  effet  le  20  août  4636.  Son 
privilège  fut  transféré  à  son  tils  Martial,  le  30  avril  4  653,  et  passa  à  son  petit- 
fils,  Pierre,  le  4  juin  1703. 

(8)  Antoine  Voisin  (f  30  juillet  1707)  eut  pour  successeur  son  fils  Barthé. 
lémy,  reçu  maître  imprimeur  le  4'*  octobre  4708. 

(6)  L'arrêt  du  11  juillet  4704,  qui  fixait  le  nombre  des  imprimeurs  pour 


DOCUMENTS  SUR   L^INDUSTRIB   ET   LES   UAMUFACTURES  EN  LIMOUSIN.        169 

Fait  au  Conseil  d'Estat  prive  du  Roy  tenu  à  Versailles  le  Iroi- 
siesme  mars  mil  sept  cent  qualre. 

[Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  fonds  de  la  séné- 
chaussée de  Limoges,  registre  des  provisions  d'offices  de  justice, 
1701-171  S), 


Arrêt  du  Conseil  d'Etat  du  Roi  qui  fixe  le  nombre  des  imprimeurs 

dans  le  royaume,  —  1739. 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d*Estat. 

lie  Roy  s*estant  fait  représenter  Tarrest  rendu  en  son  Conseil  le 
21  juillet  1704,  par  lequel  le  nombre  des  imprimeurs  libraires  du 
royaume  auroit  esté  fixé,  et  autres  arrests  portant  permission  d'es- 
tablir  quelques  imprimeries  particulières,  Sa  Majesté  auroit  jugé  à 
propos  de  se  faire  rendre  un  compte  exact  de  Testât  où  se  trouvent 
les  différentes  imprimeries  qui  subsistent  actuellement.  Elle  auroit 
esté  informée  qu'une  partie  des  imprimeurs  ne  peut  se  soustenir 
par  le  produit  de  son  travaij,  ce  qui  les  expose  à  s'occuper  à  con- 
trefaire des  ouvrages  imprimés  par  d'autres  avec  privilège,  ou  à  en 
imprimer  clandestinement  de  mauvais  et  qu'ils  ne  pourroient 
obtenir  la  permission  de  faire  paroître;  que  d'ailleurs,  dans  les 
villes  où  il  devoit  y  avoir  des  imprimeurs,  suivant  l'arrest  de  1704, 
le  nombre  en  a  esté  porté  au-delà  de  celui  qui  cstolt  fixé  par  le  dit 
arrest;  et  que  dans  plusieurs  de  celles  où  il  ne  pouvoit  y  avoir  au- 
cunes imprimeries,  selon  le  môme  arrest,  les  officiers  de  police 
ou  aulres,  qui  ont  excédé  les  bornes  de  leur  pouvoir,  en  ont  laissé 
eslablir;  qu'enfin,  le  privilège  accordé  aux  veuves  d'imprimeurs 
par  l'article  55  du  règlement  de  1723,  pour  les  authoriser  à  conti- 
nuer le  travail  de  leurs  imprimeries,  aprez  le  décès  de  leurs  maris, 
a  encore  donné  lieu  à  la  multiplication  des  imprimeries,  par  la  fa- 
cilité qu'on  a  eu  de  disposer,  pendant  leur  vie,  des  places  d'impri- 

chacuDe  des  villes  du  royaume,  porla  ce  nombre  à  quatre  pour  Limoges. 

Pas  plus  que  celui  du  3  mars  de  la  même  année,  cet  arrêt  ne  reçut 
jamais  une  application  bien  rigoureuse;  Tud  et  Tautre  semblent  même 
avoir  été  promptement  perdus  de  vue.  En  effet,  dès  le  mois  de  février 
*708,  Barthélémy  Voisin  obtenait,  malgré  la  clause  d'extinction,  de  succé- 
lier  à  son  père,  et,  Tannée  suivante,  Michel  Bardinet  se  faisait  recevoir 
maître  imprimeur. 

De  même,  Jean  Barbou  obtenait,  le  23  décembre  1717,  un  arrêt  ordon- 
nant sa  réception  et  Jacques  Famé  était  admis,  le  12  février  1748,  à  rem- 
placer son  père  décédé. 


170  SOCIÉTÉ  ARCHÊOLOGIQUR  ST  HISTORIQUH  DU  LIMOUSIN. 

meurs  qui  avoient  vacqué  par  la  mort  de  leurs  dits  maris.  Sa  Ma- 
jesté auroit  jugé  à  propos  de  faire  cesser  des  abus  également  con- 
traires à  son  authorité,  au  bien  public,  aux  interests  et  aux 
règlemens  de  la  librairie  ;  à  quoi  voulant  pourvoir,  le  Roi  estant 
en  son  Conseil,  de  l'avis  de  Monsieur  le  Chancelier,  a  ordonné  el 
ordonne  ce  qui  suit  : 

Article  premier. 

Le  nombre  des  imprimeurs  demeurera  fixé  sçavoir  :  à  trente-six  à 
Paris  ;  à  douze  dans  chacune  des  villes  de  Lyon  et  de  Rouen;  à  dix 
dans  chacune  des  villes  de  Bordeaux  et  de  Toulouse  ;  à  six  dans 
les  villes  de  Strasbourg  et  de  Lille;  à  quatre  dans  chacune  des 
villes  d*Aix,  Besançon,  Caën,  Dijon,  Dofiay,  Grenoble,  Nantes,  Or- 
léans et  Rennes  ;  à  trois  dans  chacune  des  villes  de  Marseille  et  de 
Troyes;  à  deux  dans  chacune  des  villes  d'Âlençon,  Amiens,  An- 
gers^ Angouleshe,  Arras,  Rayonne,  Bourges,  Chaalons*sur-Mame, 
Chartres,  Clermont,  Dunkerque,  La  Rochelle,  Le  Mans,  Limoges, 
l|etz,  Montauban,  Montpellier,  Moulins,  Saint-Omer,  Pau,  Poitiers, 
Rheims,  Soissons  et  Tours;  à  un  dans  chacune  des  villes  d^Abbe- 
ville,  Agen,  Alby,  Avranches,  Aurillac,  Ausch,  Autun,  Auxerre, 
Bayeux,  Beauvais,  Béziers,  Blois,  Boulogne,  Bourg-en-Bresse, 
Saint-Brieux,  Catiors,  Cambray,  Castres,  Challon-sur-Saône,  Chau- 
mont,  Calmar,  Compiègne,  Coadom,  Coutances,  Dieppe,  Dinan, 
Dole,  Evreux,  La  Flèche,  Le  Hâvre-de-Grâce,  Langres,  Laon, 
Lizieux,  M&con,  Maubeuge,  Meaux,  Mende,  Montargis,  Narbonne, 
Nevers,  Niort,  Nismes,  Noyon,  Périgueux,  Perpignan,  Pezenas, 
Provins,  Le  Puy,  Saint-Quentin,  Quimper,  Rhodez,  Riom,  Roche- 
fort,  Saintes,  Salins,  Saumur,  Senlis,  Sens,  Toul,  Toulon,  Tulle, 
Valence,  Valenciennes,  Vannes,  Verdun,  Vezoul,  Villefranche-en- 
HoMërgue  et  Vitry. 

Art.  2. 

Les  imprimeries  qui  sont  establies  actuellement  dans  les  villes 
ci-après  nommées  demeureront  supprimées,  sçavoir  dans  les  villes 
d'Aire,  Amboise,  Arraentières,  Beaugé,  Beaune,  Calais,  Carcas- 
sonne,  Caslelnaudary,  Chasleaugontier,  Chastellerault,  Chaslillon- 
sur  Seine,  Chinon,  Dol  en  Bretagne,  Eu,  Saint-Flour,Fonlenay,Gray, 
Saint-Jean-d'Angély,  Joinville,  Laval,  Libo«rne,  Saint-Lô,  Loches, 
LpBs4e-SaulnJer,  Loudun,  Saiol-Maixent,  Mantes,  Melun,  Sainte- 
Menchould,  Montbrison,  Morlaix,  Nuitz,  L'Orient,  Saiût-PawMe- 
Léoit,  PéranAe,  Redon,  Sarlat,  Sedans  Seez,  llMniars,  Treguier, 
Vatog/nes,  Vewdosmo,  ViHe-Franche-en-Beao|oHois,  Vke  et  Vrtrê. 


DOCUMRNTS  SCR   L*mDUStniB   ET  LES   MANUFACTURES   EN   LIMOUSIN.        \1\ 

Art.  3. 

Lés  règlemens  de  la  librairie  et  imprimerie  seront  exécutés  selon 
leur  forme  et  lenetrr;  et,  en  conséquence,  Sa  Majesté  fait  detfenses 
aux  officiers  de  police,  et  à  tous  autres,  de  quelque  qualité  et  con- 
dition tjti'ils  soient,  d'authoriser  à  Tavenir  des  imprimeurs  à  exer- 
cer Tart  d'imprimerie,  et  aux  imprimeurs  de  s'immiscer  dans  la 
dite  profession,  en  vertu  de  quelques  lettres  ou  privilèges  que  ce 
puisse  estré,  sans  avoir  fait  apparoir  à  Monsieur  le  Chancelier  de 
leurs  titres  et  capacités  et  sans  avoir  obtenu  un  ar^rest  du  Conseil, 
pouf  y  èstre  tecMi;  le  tout,  en  la  manière  accoutumée. 

Art.  4. 

Leâ  places  des  imprimeurs  qui  seront  décédez  ne  (feront  point 
remplies  à  l'avenir^  tant  que  leurs  veuves  continueront  d'exercer 
rimprimerie.  Enjoint  Sa  Majesté  aux  lieutenans  généraux  et  autres 
officiers  de  police  d'observer  et  faire  observer  exactement  les  dis- 
positions contenues  au  présent  ai-rest,  et  aux  sieurs  intendans  et 
commissaires  départis  dans  les  provinces  d'y  tenir  la  main,  chacun 
en  qui  ee  les  regarde^  et  d'informer  exactement  Monsieur  le 
Chancelier  des  contraventions  qui  pourroient  y  eslre  faites.  Fait 
au  Conseil  d'E.'^ial  du  Roy,  Sa  Majesté  y  étant,  teno  à  Versailles,  le 

trente-un  mars  mil  sept  cent  (renrle-neuf. 

Signé  :  Pbelypeaux. 

f Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne ,  f^nds  de  Vlnten- 
fêanee  de  Limoges,  série  C.  n"  i  8J, 


Privilège  accordé  à  VEvêque  de  Limoges  pour  l'impression  des  livres 

liturgiques,  —  1785. 

Louis,  par  la  grâcef  de  bietr,  roy  de  France  et  de  Navarre,  à  nos 
aoïez  et  féaux  conseîîlers  les  Gens  tenant  nos  Cours  de  Parlement, 
Maîtres  des  requesies  ordinaires  de  notre  hôtel,  grand  Conseil, 
Prévost  de  Paris^  baillifs,  sénéchaux,  leurs  lieuienans  civils  et  au- 
tres nos  justiciers  qu'il  appartiendra,  salut.  Notre  amé  et  féal  con- 
seiller en  noS' conseils,  te  sieur  Jean  Gilles  du  Coêtiosquet,  évéque 
et  comte  de  Limoges,'  bous  a  fait  exposer  que  le  privilège  que  nous 
l«y  «vons  cy  devant  accordé  pour  l'impression  des  usages  de  son 
dioeëze  ëtoit  expiré  et  ^'autant  qu'il  luy  est  important  qa'ils  ne 
puissent  être  réimprimés  par  auti^es  libraires  ou  imprimeurs  que 


I7i  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   OU   LIMOUSIN. 

celuy  qu'il  choisira,  il  nous  a  supplié  de  renouveller  ledit  privilège 
et  de  luy  accorder  nos  lettres  sur  ce  nécessaires. 

A  ces  causes»  voulant  favorablement!  traiter  le  dit  sieur  évéque 
et  seconder  ses  pieuses  intentions,  nous  luy  avons  permis  et  per- 
mettons par  ces  présentes  de  continuer  de  faire  imprimer,  par  tel 
imprimeur  qu'il  voudra  choisir  (1),  tous  Bréviaires,  Diurnaux, 
Missels,  Rituels,  Antiphonaires,  Manuels,  Graduels,  Procès- 
sionnaux,  Episioliers,  Pseautiers,  Demi-pseautiers,  Directoires, 
Heures,  Catéchismes,  Ordonnances,  Mandements,  Statuts  syno- 
daux. Lettres  pastorales  et  instructions  à  Tusage  de  son  dit 
diocèze,  en  tel  volume,  marge,  caractère,  conjointement  ou 
séparément  et  autant  de  fois  que  bon  luy  semblera  et  de  les  faire 
vendre  et  débiter  par  tout  notre  royaume  pendant  le  temps  de 
douze  années,  à  compter  du  jour  de  la  date  des  dites  présentes, 
sans  toutefois  qu'à  Toccasion  des  livres  cy-dessus  spécifiés,  il 
puisse  en  être  imprimé  d'autres  qui  ne  soyent  pas  dud.  sieur  évé- 
que; faisons  delTenses  à  toutes  sortes  de  personnes  de  quelques 
qualités  et  condition  qu'elles  soyent  d'en  introduire  d'impression 
étrangère  dans  aucun  lieu  de  notre  obéissance,  comme  aussy  à 
tous  libraires,  imprimeurs  et  autres  que  celuy  que  led.  sieur  évéque 
aura  choisy,  d'imprimer  ou  faire  imprimer,  vendre  ou  faire  vendre, 
débiter  ni  contrefaire  lesd.  livres  cy-dessus  exposés  en  tout  ou  en 
partie  et  d'en  faire  aucuns  extraits  sous  quelque  prétexte  que  ce 
soit,  conformément  et  sous  les  peines  portées  par  le  privilège  que 
nous  avons  accordé  aud.  sieur  évéque  le  18  mars  1740,  que  nous 
avons  renouvelle  et  renouvelions  par  ces  présentes  pour  être  exé- 
cuté suivant  sa  forme  et  teneur.  Car  tel  est  notre  bon  plaisir. 


(1)  Le  titre  d'imprimeur  de  Tévêque  ei  du  clergé  fut  maintenu  à  J.*B. 
Dalesme,  qui  l'avait  obtenu  en  P40  et  le  transmit  plus  lard  à  son  fils  Fran- 
çois, lequel  en  jouit  jusqu'à  la  Révolution. 

Parmi  les  ouvrages  sortis  des  presses  de  ce  dernier,  Tun  des  plus  impor- 
tants est  le  bréviaire  à  Tusagc  du  diocèse  de  Limoges  en  quatre  volumes 
in-i!2  (1783).  Aux  termes  du  traité  passé  le  24  janvier  Hdl  pour  la  réim- 
pression de  ce  bréviaire,  il  devait  être  fait  un  tirage  de  4,000  exemplaires 
sur  papier  carré  fin  d'Angoulême  et  il  devait,  en  outre,  être  fourni  k 
l'évêché  100  exemplaires  sur  papier  supertin,  dont  55  reliés  en  beau  maro- 
quin rouge,  tranches  dorées,  et  45  reliés  en  veau.  L'impression  devait 
être  faite  en  caractères  neufs  appelés  Gaillarde  petit  œil,  et  chaque  volume 
orné  d'une  estampe.  Le  prix  de  vente  ne  devait  pas  dépasser  9  livres 
Texeniplaire  en  feuilles  et  13  livres  relié  en  basane.  Une  avance  de  24,000 
livres,  remboursable  sans  intérêts  par  annuités  de  2,000  livres  à  partir  de 
décembre  1783,  était  faite  à  Timprimeur  (Archioea  départementales  de  la 
Haute-Vienne^  fonds  de  VEoéchéy  n®  prooisoire  279 1), 


D0GCMENT3  SUR  l'iNDUSTRIB   ET   LES   MANUFACTURES   EN   LIMOUSIN.        HZ 

Donné  à  Versailles,  le  sixième  jour  de  septembre  Tan  de  grâce 

mil  sept  cent  cinquante-cinq  et  de  notre  règne  le  quarante-unième. 

Par  le  Roy  en  son  Conseil, 

Signé  :  Pagbaut. 

Au  dos  est  écrit  : 

Registre  sur  le  registre  treize  de  la  Ohambre  royale  des  libraires 
et  imprimeurs  de  Paris,  n*  572,  fol.  443,  conformément  au  règle- 
ment de  1723,  qui  fait  défense  à  toutes  personnes  de  quelque  qua- 
lité qu'elles  soient  autres  que  les  libraires  et  imprimeurs  de  vendre, 
débiter  et  faire  afficher  aucuns  livres  pour  les  vendre  en  leurs 
noms,  soit  qu'ils  s'en  disent  les  auteurs  ou  autrement.  Et  à  la  charge 
de  fournir  à  la  susdite  chambre  neuf  exemplaires  de  chacun  pres- 
crits par  Fart.  108  du  même  règlement. 

A  Paris,  le  13  octobre  1758. 

Signé  :  Didot,  premier  syndic. 

C Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  fonds  de  VÊvéché^ 
fi*»  provisoire  2791  ). 


Arrêt  concernant  les  imprimeurs  de  la  ville  de  Limoges  —  1758. 
Extrait  des  registres  du  Conseil  d'Etat. 

Le  Roy  s'étant  fait  rendre  compte  de  l'état  des  imprimeries  éta- 
blies dans  la  ville  de  Limoges,  des  noms  des  imprimeurs  et  des 
litres  en  vertu  desquels  ils  y  exercent  l'art  de  l'imprimerie, 
Sa  Majesté  auroit  reconnu  que  quoique  par  l'arrêt  du  trente-un 
mars  mil  sept  cent  trente  neuf  le  nombre  des  imprimeurs  de  la  dite 
ville  erlt  été  fixé  à  quatre  (ij,  cependant  il  s'en  trouvoit  actuelle- 
ment six,  desquels  les  nommés  Chapoulaud  et  Voisin  (2)  avoient 
exercé  la  dite  profession  sans  aucun  titre,  le  nommé  Barbou  (3) 
Fauroil  également  exercée  sans  avoir  les  qualités  requises,  n'ayant 
pas  été  reçu  précédemment  imprimeur  par  arrêt  du  Conseil  de 
Sa  Majesté,  et  sous  le  prétexte  de  provisions  par  lui  obtenues 

(!)  Contrairemenl  à  cette  indication,  il  n'était  attribué  que  deux  impri- 
meurs à  Limo$res  (V.  ci-dessus,  p.  470). 

(2)  Pierre  Chapoulaud  et  Jean-Baptiste  Voisin  exerçaient  déjà  en  1747. 
Leurs  imprimeries  ayant  été  fermées,  ils  se  firent  recevoir,  le  6  septembre 
de  la  dite  année,  maîtres  libraires-relieurs.  On  voit  qu'ils  avaient  rouvert 
leurs  imprimeries. 

(3)  Martial  Barbou. 


(74  SOCIÉTÉ  AltC0ftOtO6ra^B  ET  HlStÔRIQtffi  OU  LtMOOStft. 

en  1747  d'Imprimeor  de  Sa  Majesté,  et  le  nommé  Sardine  (1)  en  V(?rtti 
seulemenl  d*«n  arrêt  da  Conseil  par  lequel  il  auroit  êlé  réço  impri- 
meur dans  la  dite  ville  par  grâce  et  sans  tirer  à  conséquence,  de 
sorte  qu'il  n'y  avoii  que  les  nommés  Dalesrae  (2)  et  Famé  (3) 
qui  fussent  en  règle,  ayant  été  reçus  en  vertu  d'arrêts  dn  Conseil 
des  <2  février  1718  et  19  décembre  1729  ;  dans  ces  circonstances, 
Sa  Majesté  ayant  considéré  que  si  la  disposition  du  dit  arrêt  du 
31  mars  1739  étoit  exécutée  à  la  lettre  il  se  trouveroit  quatre  des 
dites  six  imprimeries  qui  devroient  être  supprimées,  et  que  cette 
suppression  tomberoit  sur  celles  qui  paroissent  les  mieux  fournies, 
soit  par  le  nombre  des  presses,  soit  par  celui  des  caractères  qui  y 
sont  employés,  elle  auroit  jugé  nécessaire  d'expliquer  ses  inten- 
tions à  ce  sujet,  de  façon  que  le  maintien  des  règiemens  et  du  bon 
ordre  pût  être  concilié,  autant  qu'il  étoit  possible,  avec  Tintérêt  de 
ceux  qui  par  erreur  ou  autrement  ont  joui  jusqu'icy,  sans  aucun 
trouble,  du  dit  état  d'imprimeur  en  la  dite  ville  ; 

A  quoi  voulant  pourvoir,  ouï  le  rapport  et  tout  considéré,  le  Roy 
étant  en  son  Conseil,  de  Tavis  de  M.  le  Chancelier,  a  ordonné  et 
ordonne  que  l'arrêt  du  conseil  du  81  mars  1739  sera  exécuté,  et  en 
conséquence,  que  le  nombre  des  imprimeurs  de  la  dite  ville  de 
Limoges  sera  et  demeurera  fixé  au  nombre  de  quatre  prescrit  par 
le  dit  arrêt,  ce  faisant  ordonne  que  les  dits  Barbon  et  Chapou- 
laud  (4)  seront  reçus  imprimeurs  en  la  dite  ville  en  vertu  du  pré- 
sent arrêt  en  prêtant  par  eux  le  serment  en  tel  cas  requis  et  accou- 
tumé par  devant  le  Lieutenant  gênerai  de  police  de  la  dite  ville, 
ordonne  que  l'imprimerie  du  dit  Voisin  sera  et  demeurera  dès  à 
présent  éteinte  et  supprimée,  en  ce  qui  concerne  celle  rfa  dit  Sar- 
dine permet  par  grâce,  et  sans  tirer  à  conséquence  à  lui  et  sa 
femme,  d'en  jouir  jusqu'à  leur  decez,  après  lequel  leur  imprimerie 
sera  et  demeurera  éteinte  et  supprimée  en  vertu  du  présent  arrêt,  et 

{{)  Martial  Sardine.  Uo  arrél  du  16  septembre  4726  lui  avait  réservé  la 
première  place  vacante. 

(2)  Jean-Bapiisle  balesme,  reçu  matire  imprimeur  le  14  février  1730  en 
vertu  d'un  arrêt  du  f9  décembre  I729  Tautorisant  à  succéder  ù  françois 
Meilhac,  son  beau-père,  démissionnaire  en  sa  faveur. 

A  son  décès  (3  juin  j767)  il  fut  remplacé  par  son  fils  François,  admis  à 
la  nwltrise  le  5  octobre  suivant. 

(3)  Jacques  Farne  exerçait  en  venu  d'un  arrêt  du  12  février  1718.  Il 
mourut  le  20  juin  1760  et  eut  pour  successeur  son  lils  Jean-Bapiisie  qui 
obtint,  le  6  octobre  de  la  môme  année,  ses  lettres  de  provision  et  fut  reçu 
le  la  décembre  suivant. 

(4)  Pierre  Cliapoulaud  fut  reçu  le  là  avril  1758  et  Martial  Barbou  le  SS  du 
même  mois. 


DOCUMENTS  SUR  l'inDUSTSIS   KT   LES  MAIfUPAGTUfteS  EN   LIMOUSIN.        f75 

sans  qa'il  en  soit  besoin  d*autre,  à  la  charge  néanmoins  d'en  être  le 
fonds  remboorsé  à  leurs  héritiers  ou  ayant  cause  par  les  dits  Bar- 
boa  et  Ghapouiaud  par  égale  portion  suivant  restimalion  qui  en 
sera  faite  par  experts  convenus  par  les  parties,  sinon  nommés 
d*ofGe6  par  le  dit  Lieutenant  général  de  police;  ordonne  que  le 
présent  arrêt  sera  enregistré  dans  les  registres  des  imprimeurs  et 
libraires  de  la  dite  ville  (1),  enjoint  au  sieur  Intendant  et  Commis- 
saire départi  en  la  Généralité  de  Limoges  de  tenir  la  main  à  sou 
exécution. 

Fait  au  Conseil  d'Etat  do  Roy,  Sa  Ms^esté  y  étant,  tenu    à 
Versailles  le  vingt-i^eptiéme  mars  mil  sept  cent  cinquante-huit. 

Signé  :  Pbelypeaux* 

( Archives  dép.  de  la  Haute-Vienne  y  série  C,  Reg,  des  édits  et  décla- 
rations de  1740  à  i7SôJ. 


Arrêt  €oncem(»nt  tes  imprimettrs  de  la  Généralité  4e  Umoges,  — 

1709 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d'Etat. 

Le  Roy  étant  informé  que  nonobstant  les  règles  prescrites  par 
(lifîérens  arrêts  de  son  Conseil  et  notamment  par  ceux  des  vingt-un 
juillet  mil  sept  cent  quatre  et  trente-un  mars  mil  sept  cent  trente- 
neuf,  pour  prévenir  les  abus  d'un  trop  grand  nombre  d'imprimeries 
dans  le  royaume,  il  s'en  seroit  établi  dans  quelques  villes  ou  lieux 
contre  la  teneur  desdits  arrêts,  et  même  sans  observer  les  forma- 
iitez  prescrites  par  ceux  des  vingt-huit  février  mil  sept  cent  vingt- 
trois  et  vingt-quatre  mars  mil  sept  cent  quarante-quatre  ;  Sa  Ma- 
jesté auroit  jugé  à  propos  de  se  faire  représenter  l'état  de  toutes 

(t)  Par  une  ordonnance  du  30  novembre  1735,  rintendanb  Boucher 
d'Orsay  avait  institué  une  chambre  syndicale  des  imprimeurs  el  libraires 
de  Limoges. 

Un  arrêt  du  Conseil  d'Ëtat  du  30  aoât  f777  supprima  ceire  chambre  el 
rattacha  la  communauté  des  imprimeurs  et  libraires  de  Limoges  à  la 
chambre  syndicale  de  Poitiers  Le  même  arrêt  ordonnait  la  remise  à  celte 
Uemière  chambre  de  tous  tes  registre*»  et  papiers  des  communautés,  nouvel- 
lement placées  dans  son  ressort. 

A  ta  Révolution,  M.  JonyneaH-DesIbges,  inspecteur  de  fa  librairie,  resta 
détenteur  des  archives  du  bureau  de  Poitiers.  Une  partie,  vendue  par  sa 
vente,  est  atijoiird*k»ut  conservée  à  la  bîbliolbôque  publiqveda  eeUe  ville; 
le  surplus  est  entré  dans  des  collcclions  pariiculières.  (Vey.  Invent,  des 
arehioes  dép.  du  la  Vienne,  série  C,  Introd.  p.  73.) 


476  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU  LIHOUSIM. 

les  imprimeries  qui  existent  actuellement  dans  les  différentes  Gé- 
néralités de  son  royaume»  et  d'expliquer  définitivement  ses  inten- 
tions à  ce  sujet,  de  manière  que  le  nombre  desdites  imprimeries 
et  le  sort  de  ceux  qui  les  tiennent  soient  désormais  fixés  irrévoca- 
blement en  chacune  des  dites  Généralités,  ainsi  que  rentière  exé- 
cution des  règles  et  formalités  prescrites  pour  être  admis  à  l'exer- 
cice d'un  art  si  utile  en  lui-même,  mais  qui  deviendroit  nuisible  à 
Tart  même  et  à  la  bonne  police  du  royaume  s'il  était  trop  multiplié. 
A  quoi  voulant  pourvoir,  ouï  le  rapport  et  tout  considéré,  le  Roy 
étant  en  son  Conseil,  de  Tavis  de  Monsieur  le  Chancelier,  a  or- 
donné et  ordonne  que  les  arrêts  de  son  Conseil  des  trente-un  mars 
mil  sept  cent  trente-neuf,  vingt-huit  février  mil  sept  cent  vingt- 
trois  et  vingt-quatre  mars  mil  sept  cent  quarante-quatre,  seront 
exécutés,  et  en  conséquence  que  le  nombre  des  imprimeurs  de  la 
Généralité  de  Limoges  demeurera  fixé  à  celui  de  sept,  scavoir  qua- 
tre pour  la  ville  de  Limoges,  deux  pour  celle  d'Angoulême  et  un 
pour  la  ville  de  Tuile,  ordonne  que  les  imprimeries  établies  dans 
les  villes  de  Brive  et  de  Tulle  par  Jean-Pierre  Paye  et  Léonard 
Dalvy  seront  et  demeureront  supprimées  ;  fait  Sa  Majesté  défenses 
auxdits  Paye  et  Dalvy  d'y  imprimer  à  peine  de  confiscation  des  vis, 
presses,  caractères  et  autres  ustenciles  d'imprimerie  ;  fait  défenses 
à  toutes  personnes  sans  exception  d'exercer  ou  faire  exercer  ledit 
art  dans  aucunes  autres  ville  ou  lieux  de  ladite  Généralité  que  ceux 
cy-dessus  marquez;  fait  pareillement  défenses  à  tous  imprimeurs 
sans  exception  d'exercer  ledit  art  dans  aucune  desdiles  villes  ou 
lieux  s'ils  n'ont  été  reçus  en  la  forme  prescrite  par  les  règlements, 
à  peine  de  cinq  cents  livres  d'amende  et  de  confiscation  des  vis, 
presses  et  caractères  de  leurs  imprimeries.  Enjoint  Sa  Majesté  aux 
lieutenants  généraux  de  police  desdites  villes  et  lieux  d'observer 
et  faire  observer  exactement  les  dispositions  contenues  au  présent 
arrêt,  comme  aussi  au  sieur  Intendant  et  commissaire  départi  en 
la  Généralité  de  Limoges  de  le  faire  publier  partout  où  besoin  sera, 
de  tenir  la  main  à  son  exécution  et  d'informer  exactement  Mon- 
sieur le  Chancelier  des  contraventions  qui  pourroient  y  être  faites. 
Pait  au  Conseil  d'Etat  du  Roy,  Sa  Majesté  y  étant,  tenu  à  Ver- 
sailles le  douzième  may  mil  sept  cent  cinquante-neuf. 

Signé  :  Phelipeaux. 

Suit  l'exécutoire  de  l'intendant  Pajot  deMarcheval  du  26  mai  1759 
et  la  mention  de  l'enregistrement  au  greffe  de  la  Cour  sénéchale 
de  police. 

(Archives  dép.  de  la  Haute-Vienne,  série  C,  registre  des  édits  et 
déclarations  de  1 740  à  1 7 H 5.) 


DOCUMKHTS  SUR  l' INDUSTRIE  BT  LES  MANUFACTURES  EN  LIMOUSIN.       177 


TISSAGE. 

État  des  manufactures  de  draps  et  autres  étoffes  établies  dans  la 
Généralité  de  Limoges,  avec  l'indication  de  leurs  produits  pendant 
l'année  i73i. 

SAINT-LÉONARD. 

Elamines  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  25  à  30  aunes  de  long 
sur  demi-aune  de  large»  du  prix  de  23  à  36  sols  l'aune. 
On  emploie  de  Tétain  filé  de  38  à  40  sols  la  livre. 
9  métiers  battants. 

1  —      sans  travail. 

Serges  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  23  à  30  aunes  de  long  sur 
demi-aune  de  large,  du  prix  de  24  à  28  sols  Taune. 
On  emploie  de  la  laine  filée  de  24  à  28  sols  la  livre. 
6  métiers  J)attants. 

2  —      sans  travail. 

Droguets,  par  pièce  de  50  aunes  de  long  sur  demi-aune  de  large 
et  plus,  du  prix  de  14  à  20  sols  Taune. 

On  emploie  du  fil  de  plain  filé  de  12  à  14  sols  la  livre  et  de  la 
laine  du  pays  de  24  sols  la  livre. 
11  métiers  battants. 
3     —      sans  travail. 
Au  total,  28  fabricants,  ayant  produit  1,099  pièces. 

LIMOGES. 

Toiles  de  coton,  en  coton  des  îles,  par  pièce  de  3/8  à  5/4  de 
large  sur  50  aunes  de  long  pour  les  toiles  de  coton,  et  de  3/4  à  5 
de  large  sur  50  aunes  de  long  pour  celles  en  fil  et  coton. 

Les  toiles  tout  coton  valent  de  25  à  35  sols  Taune;  celles  en  fil 
et  colon  de  24  sols  à  3  livres  Taune. 

Le  coton  filé  que  Ton  emploie  est  de  45  sols  à  6  livres. 
11  métiers  battants. 
1      —      sans  travail. 

Un  seul  fabricant,  qui  a  produit  780  douzaines  de  mouchoirs  et 
80  pièces  de  toile. 

Grisetles  en  laine  du  Querci  et  soie  de  Lyon,  par  pièce  de  26  à 
32  aunes  de  long  et  demi-aune  moins  un  seizième  de  large,  du  prix 
de  54  à  58  sols  Tanne. 

L'étain  filé  est  du  prix  de  3  livres  5  sols  à  4  livres  et  la  soie  de 
29  à  30  livres. 


178  s«ciÈri  ARCBtOLOarooB  rr  oihtouqui  »u  uHouttu. 

3  métiers  battanls. 

2  —      sans  travail. 

Popcliaes,  par  pièce  de  26  à  32  aunes  de  long  sur  demi-aune 
moins  un  seizième  de  large,  du  prix  de  S5  sols  à  3  livres  Taune. 

Les  matières  employées  sont  les  mêmes  que  pour  Tarticle  précé* 
dent. 

5  métiers  battants. 

Un  seul  fabricant  pour  ces  deux  derniers  articles.  Sa  production 
a  été  de  460  pièces. 

Serges  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  25  à  30  aunes  de  long  sur 
demi-aune  de  large,  du  prix  de  26  à  28  sols  Taune. 

On  emploie  de  la  laine  fllée  de  24  à  27  sols.] 
5  métiers  battants. 

3  —      sans  travail. 

Droguets,  par  pièce  de  50  aunes  de  long  et  demi-aune  de  large, 
du  prix  de  14  à  20  sols  l'aune. 

On  emploie  du  Ql  de  plain  ûlé  de  12  à  14  sols  et  de  la  laine  filée 
de  24  sols  la  livre. 
19  métiers  battants. 

5  —      sans  travail, 

répartis  entre  12  fabricants,  qui  ont  produit  991  pièces. 

SAIIfT-JUNIlH. 

Etamines  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  25  aunes  de  long  sur 
demi-aune  de  large,  du  prix  de  21  à  28  sols  Taune. 
On  emploie  de  l'étain  filé  de  39  à  41  sols  la  livre. 

6  métiers  battants. 

4  —     sans  travail. 

Serges,  par  pièce  de  25  à  30  aunes  de  long  sur  demi-aune  de 
krge,  du  prix  de  25  à  28  sols  Taune. 
On  emploie  de  la  laine  filée  du  pays  de  25  à  27  sol»  la  Mvre. 
10  métiers  battants. 
6      —     sans  travail. 
Au  total,  20  fabricants,  qui  ont  produit  i72  pièees. 

TULLE. 

Ras  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  35  à  40  aunes  de  long  sur 
demi-aune  de  large,  du  prix  de  20  à  23  sols  Faune. 
On  emploie  de  Tètain  filé  de  36  à  42  solsi  la  livre. 
30  métiers  battants. 
10     —     sans  travaiL 


Camelols  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  35  à  40  aunes  de  long 
sur  demi-aune  de  large,  du  prix  de  19  à  2i  sols  l'aune. 
On  emploie  de  Tétain  filé  de  44  à  45  sols  la  livre. 
30  métiers  battants. 
5      —      sans  travail. 
Au  total,  39  fabricants,  ayant  produit  1,980  pièces. 

BRIVES. 

Ras  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  35  à  40  aunes  de  long  sur 
demi-aune  de  large,  du  prix  de  91  à  34  sols  Taune. 
On  emploie  de  Tétain  filé  de  37  à  43  sols  la  livre. 
i4  métiers  battants. 
9      —      sans  travail. 

5  —      abattus. 

Camelots  en  laine  du  pays,  par  pièce  de  35  à  40  aunes  de  long 
sur  demi-aune  de  large,  du  prix  de  19  à  23  sols  Faune. 
Où  emploie  de  Tétaîa  fité  de  45  à  80  sols  la  livre. 

6  métiers  battants. 

3     -^     sans  travail. 

3  —     abattus. 

Au  total,  30  fabricants  ayant  produit  486  pièces. 

ANGOULÊME. 

Etamines  en  laines  du  pays  et  d'Espagne,  par  pièce  de  30  à  40 
aunes  de  long  etdemi-aunéde  large,  du  prix  de  23  à  30  sols  Taune. 
On  emploie  de  Tétain  filé  de  44  à  46  sols  la  livre. 

2  métiers  battants. 

4  —     abattus. 

Kas  en  laine  dti  pays  et  d*Espagne,  par  pièce  de  30  à  49  aunes 
de  long  sur  demi-aune  de  large,  du  prix  de  30,  37  à  39  sols  Faune. 
On  emploie  de  Fétain  filé  de  44  à  46  sols  la  livre. 
14  métiers  battants. 
9     —     sans  travail. 

7  —     abattus. 

Drapées  et  serges  en  laine  du  pays  et  d'Espagnci,  par  pièce  de 
30  à  40  aunes  de  long  sur  demi-aune  de  large,  du  prix  de  35  à  42 
sols  Faune. 

On  emploie  de  la  laine  filée  de  25  à  37  sols  la  livre. 
fO  métiers  battants. 

3  -^      sans  travail. 

8  —     abattus. 

Au  total,  34  fabricants  ayant  produit  1,126  pièces. 


180  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOOIQOE   ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

NARSAT  (1). 

Draps  pour  les  capucins,  par  pièce  de  30  aunes  de  long  sur  une 
aune  de  large,  apprêtée,  du  prix  de  6  livres  40  sols  à  7  livres 
Taune. 

On  emploie  des  laines  filées  du  pays  ou  d'Espagne,  de  25  à  30 
sols  la  livre. 

2  métiers  battants. 
*1      —     abattu. 

Drapées,  par  pièce  de  30  à  40  aunes  de  long  sur  demi-aune  de 
large,  du  prix  de  38  à  41  sols  l'aune. 

On  emploie  des  laines  filées  du  pays  ou  d'Espagne  de  30  à  35 
sols  la  livre. 

7  métiers  battants. 

6  —      sans  travail. 

7  —     abattus. 

Serges,  par  pièce  de  30  à  40  aunes  de  long  sur  demi-aune  de  large, 
du  prix  de  31  à  32  sols  Taune. 

On  emploie  des  laines  filées  du  pays  ou  d'Espagne,  de  30  à  35 
sols  la  livre. 

5  métiers  battants. 
4      ^     sans  travail. 

3  —      abattus. 

Au  total,  17  fabricants  ayant  produit  298  pièces. 

Soit,  pour  Tannée  1731,  un  ensemble  de  ; 
195  métiers  battants. 

76      —     sans  travail. 

38      —     abattus. 

Et  une  production  de  7,472  pièces,  réparties  entre  182  fabricants. 
(Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne^  fonds  de  l'Inten- 
dance, série  C,  n**  /  3J. 


Arrêt  du  Conseil  d'Etat  portant  privilège  pour  la   manufacture 
d'étoffes  établie  à  Limoges  par  les  frères  Laforest.  —  /  743. 

Sur  la  requête  présentée  au  Roy  en  son  Conseil,  par  Louis  et 
Guy  Laforest  frères,  marchands  fabriquans  à  Limoges,  contenant 
que,  depuis  plusieurs  années,  ils  ont  entrepris  une  fabrique  d'étof- 

(1)  Nersac,  aujourd'hui  département  de  la  Gordlew^   • 


DOCUMENTS   SUR   l'iNDUSTTIE   RT   LES   MANUFACTURES   EN  LIMOUSIN.        181 

fes  mêlées,  dont  la  chaine  est  de  soye  et  la  trame  de  coton,  laine, 
poil  de  chèvre,  fleuret  de  soye,  qu'ils  cherchent,  par  des  soins  con- 
tinuels à  porter  au  plus  haut  point  de  perfection  ;  que  cet  établis- 
sement leur  a  coûté  des  sommes  considérables  et  beaucoup   de 
soins  pour  vaincre  les  difBcultés  presqu'insurmontables  qu'ils  ont 
rencontrées  pour  former  des  ouvriers  propres  à  travailler  ces  étof- 
fes; qu'elles  étoienl  inconnues  dans  la  province,  et  que  leur  perfec- 
tion en  fait  journellement  augmenter  le  débit,  tant  dans  le  royaume 
que  dans  le  païs  étranger  ;  mais  qu'ils  seroient  exposés  à  ne  pas 
jouir  du  fruit  d'un  établissement  aussi  avantageux  et  pour  lequel 
ils  ont  risqué  toute  leur  fortune,  si  Sa  Majesté  n'avoit  pas  la  bonté 
de  leur  accorder  un  privilège  exclusif  au  moyen  duquel  ilîf  puissent, 
eux,  leurs  veuves  et  enfans,  le  cas  de  leur  décès  arrivant,  continuer 
cette  fabrique  avec  sûreté;  sans  quoy  d'autres  particuliers  pour- 
roient,  en  établissant  une  pareille  fabrique  avec  moins  de  soins  et 
moins  parfaitte,  discréditer  celle  qu'ils  ont  formée  avec  tant  de 
peine.  A  ces  causes  requéroient  les  supplians  qu'il  plut  à  Sa  Majesté 
leur  accorder  à  eux,  leurs  veuves  et  enfans,  le  privilège  exclusif 
de  fabriquer  pendant  vingt  années,  dans  la  province  du  Limousin, 
toutes  sortes  d'étoffes  mêlées,  chaînes  de  soye,  trame  de  coton, 
laine,  poil  de  chèvre,-  fleuret  de  soye,  avec  exemption  de  taille, 
fourage,  ustancile,  logement  de  gens  de  guerre,  collecte,  sindicat, 
tutelle,  curatelle  et  autres  charges  publiques,  et  ordonner  qu'ils 
seront  taxés  d'oflice  à  la  capitation  par  les  sieurs  intendants  de  la 
province  ;  et  que  leurs  enfans  quoyque  garçons,  ne  seront  point 
sujets  à  la  milice  ny  à  aucune  contribution  pécunière  pour  raison 
d'ycelle. 

Yeu  ladite  requeste,  ensemble  l'avis  du  sieur  de  Tourny,  inten- 
dant et  commissaire  départy  en  la  Généralité  de  Li^noges,  ouy  le 
rapport  du  sieur  Orry,  conseiller  d'Etat  ordinaire  au  Conseil  royal, 
controUeur  gênerai  des  finances. 

Le  Roy  en  son  Conseil  a  accordé  et  accorde  aux  dits  Louis  et 
Guy  La  Forest  frères  le  privilège  exclusif  de  fabriquer,  eux,  leurs 
veuves  et  enfans,  pendant  vingt  années,  dans  la  ville  de  Limoges 
et  à  dix  lieues  à  la  ronde,  toutes  sortes  d'étoffes  de  coton  mêlé 
avec  de  la  soye,  du  fleuret,  de  la  laine  et  du  poil  de  chèvre;  fait 
Sa  Majesté  deffense  à  toutes  personnes  de  quelque  qualité  et  con- 
dition qu'elles  soient,  de  les  troubler  dans  l'exercice  dudit  privi- 
lège ny  de  fabriquer  de  pareilles  étofl'es  pendant  ledit  temps,  à 
peine  de  tous  dépens,  dommages  et  intérêts;  excepte  néanmoins 
Sa  Majesté  desdites  deffencesle  sieur  Renier,  fabriquant  à  Limoges, 
lequel  [Ourra  continuer  la  fabrique  qui  luy  est  permise,  même 
l'augmenter  jusqu'à  six  métiers  seulement,  sans  que,  sous  prétexte 

T.  XXXIX,  12 


.7  é  ' 


f83  SOCIÉTÉ  AâCRtOLOOIQOB  ttt  NrStÔftfQUi  DU  LIITOOStN. 

dti  présent  privilège,  lesdits  sieor$  La  Forest  puissent  Tinquiéter. 
Veut  Sa  Majesté  que^  pendant  la  durée  du  présent  privilëge^sdit< 
sieurs  Laforest  frères,  leurs  veuves  et  enfans  fabriquant,  soient 
personnellement  exempts  de  logement  de  gens  de  guerre^  fourag^, 
ustancille,  colleete^  sindîcat,  tutelle,  curatelle  et  aut4*es  ehafges 
publiques  ;  qu'ils  soient  aussi  pendant  ledit  temps  taxés  d'office 
modérément  à  la  taille  et  autres  impositions  par  le  sieur  intei»daot 
et  commissaire  départy  en  la  Généralité  de  Limoges  ;  qu»  leurs 
enfans  quoyque  garçons  ne  soient  point  sujets  à  la  milice  ny  a  au- 
cune Contribution  pécunière  pour  raison  d'icelle  ;  le  tout  à  eofkdi- 
lion  p'ir  les  dits  sîeurs  La  Porest  frères,  leuri  veuves  et  eufiinj, 
d'avoir  dans  le  courant  de  Tannée,  à  compter  do  présent  arretf,  et 
d'entretenir  toujours  cinquante  métiers  battans,  sous  peine  de  ré- 
vocation du  présent  privilège.  Et  pour  Texécution  du  présent  arrêt 
et  juger  les  contraventions  et  contestations  qni  peuvent  survenir 
sur  ladite  exécution,  Sa  Majesté  commet  ledit  sieur  intendant  et 
commissaire  départy  en  la  Généralité  de  Limoges  pour  les  juger, 
sauf  rappel  au  Conseil,  luy  attribuant  à  cet  eiïet,  toute  cour,  juris- 
diction  et  connoissance,  icelle  interdisant  à  toutes  ses  cours  et  au- 
tres juges.  Fait  au  Conseil  d'Etat  du  Roy,  tenu  à  Versailles,  le 
trentième  jour  du  mois  de  juillet  1743.  Collationné.  ^§né  :  Db- 
vouGN!.  Et  à  la  marge  est  écrit  :  Le  11  mars  1744,  le  présent  arrest 
a  été  enregistré  es  registres  de  la  cour,  en  conséquence  de  celuy 
dudit  jour,  pour  y  avoir  recours  quand  besoin  sera.  Fait  à  Bor- 
deaux, au  greffe  de  la  dite  cour,  le  dit  jour,  mois  et  an  que  dessus. 
Collatlonné.  Signé:  Rogea. 

Lettres  patentes  sur  le  stisdit  arrêt. 

IjOUii,  parla  grâce  de  Dieu,  roy  de  France  et  de  Navarre,  à  flos 
amés  et  féaux  conseillers,  les  gens  tenant  notre  Cour  de  parletMnt 
à  Bordeaux,  salul.  Nos  bien  amés  Louis  et  Guy  La  Forest  frères, 
marchands  fabriquans  à  Limoges,  nous  ont  fait  représenter  que 
depuis  plusieurs  années  ils  ont  entrepris  une  fabrique  d'étoffe 
meslée,  dont  la  chaisne  est  de  soye  et  la  trame  de  coton,  laiue,  poil  de 
chèvre,  fleuret  et  soye,  qu'ils  cherchent  par  des  soins  continuels  à 
porter  au  plus  haut  point  de  perfection  ;  que  cet  établissement  leur 
a  cousté  dès  sommes  considérables  et  beaucoup  de  soins  pour  vain- 
cre les  difficultés  presque  insurmontables  qu'ils  ont  rencontréeâ 
pour  former  des  ouvriers  propres  à  travailler  ces  étoffes  qui  étoient 
inconnues  dans  la  province  ;  et  que  leur  perfection  en  fait  journel- 
lement augmenter  le  débit  tant  dans  notre  royaume  que  dans  les 
pays  étrangers,  mais  qu'ils  seroient  exposés  à  ne  pas  jouir  an  f^iiil 


D0CUME5TS  SUR   l'iNDDSTRIB   ET  LES   UANOPACTURES   EN   LIMOUSIN.        183 

d'un  établissement  aussy  avantageux  et  pour  lequel  ils  ont  risqué 
toute  leur  fortune,  si  nous  n'avions  pas  la  bonté  de  leur  accorder 
un  privilège  exclusif  au  moyen  duquel  ils  puissent,  eux,  leurs 
veuves  et  enfans,  le  cas  de  leur  déceds  arrivant,  soutenir  cette 
fabrique  avec  sûreté,  sans  quoy  d'autres  particuliers  pourroîenl,  en 
établissant  une  pareille  fabrique,  avec  moins  de  soins  et  moins 
parfaitte,  discrédilter  celle  qu'ils  ont  formée  avec  tant  de  peine. 
Nous  avons,  par  arrest  de  notre  Conseil  du  trente  juillet  dernier, 
statué  sur  les  uns  et  conclusions  de  la  requeste  des  dits  exposans 
insérée  audit  arrêt,  à  l'exécution  duquel  voulant  pourvoir,  à  ces 
causes,  de  Tavis  de  notre  Conseil  qui  a  veu  ledit  arrêt  du  trente 
juiiUet  dernier,  dont  extrait  est  cy  attaché  sous  le  contre-scel  de 
notre  chancellerie,  nous  avons,  conformément  à  iceluy,  accordé  et 
par  ces  présentes  signées  de  notre  main,  accordons  aux  dits  Louis 
et  Guy  La  Forest  frères,  le  privilège  exclusif  de  fabriquer,  ew, 
leurs  veuves  et  enfans,  pendant  vingt  années,  dans  la  ville  de  Li- 
moges et  à  dix  lieues  à  la  ronde,  toutes  sortes  d'étoffes  de  coton 
mesié  avec  de  la  soye,  du  fleuret,  de  la  laine  et  des  poils  de  chè- 
vre; faisons  deffenses  à  toutes  personnes,  de  quelque  qualité  et 
condition  qu'elles  soient,  de  les  troubler  dans  Texercice  du  dit 
privilège  ny  de  fabriquer  de  pareilles  étoffes  pendant  ledit  temps,  à 
peine  de  tous  dépens,  dommages  et  intérêts.  E\emptons  néanmoins 
des  dites  deffencesle  sieur  Renier,  fabriquant  à  Limoges,  lequel 
pourra  continuer  la  fabrique  qui  lui  est  permise,  même  l'augmenter 
jusqu'à  six  métiers  seulement,  sans  que  sous  prétexte  du  présent  pri- 
vilège les  dits  sieurs  Laforest  puissent  il'inquiéter.  Voulons  que  pen- 
dant la  durée  du  présent  privilège,  les  dits  sieurs  Laforest  frères,  leurs 
veuves  et  enfans  fabriquant,  soient  personnellement  exempts  de  loge- 
ment de  gens  de  guerre,  fourage,  ustancile,  collecte,  syndicat,  tutelle, 
curatelle  et  autres  charges  publiques;  qu'ils  soient  aussi  pendant  le 
dit  temps  taxés  d'oiBce  modérément  à  la  taille  et  autres  impositions 
par  le  sieur  intendant  et  commissaire  départy  en  la  Généralité  de 
IJmoges,  et  que  leurs  enfans,  quoyque  garçons,  ne  soient  point 
sujets  à  la  milice  ny  à  aucune  contribution  pécuniaire  pour  raison 
d'icelle  ;  le  tout  à  condition  par  les  dits  sieurs  Laforest  frères,  leurs 
Teuves  et  enfans, d'avoir,  dans  le  courant  de  l'année,  à  compter  du 
jour  du  dit  arrêt,  et  d'entretenir  toujours  cinquante  métiers  bat- 
tans,  sous  peine  do  révocation  du  présent  privilège.  Sy  vous  man- 
dons que  ces  dites  présentes  vous  ayez  à  faire  regislrer  et  de  leur 
contenu  jouir  et  user  les  dits  sieurs  Laforest  frères,  leurs  veuves  et 
enfans,  pleinement  et  paisiblement  ;  cessant  et  faisant  cesser  tous 
trembles  et  empêchements,  nonobstant  toutes  choses  à  ce  contraires. 


484  SOCiftTé  ARCBÉOLOOIQOB   ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIl^. 

Car  tel  est  notre  plaisir  (1).  Donné  à  Versailles,  le  sixième  jour  de 
décembre,  Tan  de  grâce  1743,  et  de  notre  règne  le  vingt  neufvième. 
Signé  :  Louis.  Veu  au  Conseil,  Signé  :  Orri.  Et  plus  bas  :  Par  le 
Roy.  Signé  :  Phelipeaux.  A  la  marge  :  Le  onze  mars  1744,  ces  pré- 
sentes ont  été  enregistrées  es  registres  de  la  Cour,  en  conséquence 
de  Tarrest  du  dit  jour,  pour  y  avoir  recours  quand  besoin  sera.  Fait 
à  Bordeaux,  au  greffe  de  la  dite  Cour,  le  dit  jour,  mois. et  an  que 
dessus.  Signé  :  Rogier.  Collationnées  et  scellées  du  grand  sceau  de 
cire  jaune. 

(Suit  Texécutoire  royal  adressé  à  intendant  de  la  Généralité, 
30  juillet  1743,  —  et  Tarrôt  du  Parlement  de  Bordeaux  portant  en- 
registrement des  dits  arrêt  et  lettres  patentes,  11  mars  1744.) 

(Arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne,  registre  d'édits  et  déclarations 
concernant  la  police ,  de  1 740  à  1785,  série  C,  second  complément 
à  publier, J 


Règlement  pour  la  fabrication  des  étoffes  dans  la  généralité  de 

Limoges,  —  1749. 

De  par  le  Roy, 

Henry-Louis  de  Barberie  de  Saint-Contest,  chevalier,  seigneur 
de  la  Chataigneraye,  Menombles,  Malnoyer,  Mont-Cliauvef,  La 
Boutonnière,  La  Montagne  et  autres  lieux,  conseiller  du  Roy  en 
tous  ses  conseils,  maître  des  requêtes  ordinaire  de  son  hôtel.  In- 
tendant de  justice,  police  et  finances  de  la  Généralité  de  Limoges, 

Vu  le  projet  de  règlement  pour  les  étoffes  de  laines,  estame, 
fil  on  coton,  qui  se  fabriquent  dans  la  Généralité  de  Limoges, 
dressé  en  exécution  de  nos  ordres  par  le  sieur  de  Bonneval,  ins- 
pecteur général  de  manufactures,  et  le  sieur  Muret,  inspecteur 
particulier  dans  la  dite  Généralité,  en  présence  et  du  consente- 

(1)  Les  frères  Laforest  obtinrent,  en  17i8,  pour  leur  établissement,  le 
litre  de  manufacture  royale. 

En  1763,  celle  manufaclure  possédait  soixante  métiers  ballants..  Les 
exemptions  et  privilèges  précédemment  concédés  leur  furent  continués, 
ù  l'exception  toutefois  du  monopole  du  fabrication.  (Y.  la  correspon- 
dance échangée  entre  rinlendanl  Turgot  et  M.  Trudaine,  chef  du  bureau 
des  manufactures,  au  sujet  «  des  encouragements  réclamés  par  les  frères 
Laforest  et  des  faveurs  qu*on  peut  en  général  accorder  à  ces  sortes  d'éla- 
blisscmenis  ».    Œuorea  de  Turgot,  édil.  Guillaumin,  1844,  t.  I). 


DOCUMENTS  SUR  L^INDUSTRIB   BT   LES   MANUFACTURES   EN   LIMOUSIN.        185 

ment  des  fabricants  des  dites  étoffes,  Tavis  des  négociants  et  mar- 
chands de  la  ville  de  Limoges,  qui  ont  jugé  que  ledit  projet  de 
règlement  éloit  égalememt  utile  pour  le  bien  du  commerce  et 
pour  celui  du  public,  et  les  ordres  à  nous  adressez  par  le  Conseil, 
portant  que  ledit  projet  y  ayant  été  approuvé,  nous  pouvions  l'au- 
loriser  et  le  faire  exécuter. 

Nous,  Intendant  susdit,  avons  sous  le  bon  plaisir  du  Roy,  et  en 
vertu  du  pouvoir  à  nous  donné  par  Sa  Majesté,  ordonné  et  ordon- 
nons ce  qui  suit  : 

ARTICLE  PREMIER. 

Les  droguets  qui  se  fabriquent  à  Limoges  et  dans  la  banlieue 
auront  en  chaîne  au  moins  30  portées  de  SO  fils  chacune,  faisant 
600  fils  y  compris  les  cordons  qui  seront  de  la  môme  matière  et  de 
la  môme  couleur  que  le  corps  de  Tétoffe,  passez  dans  des  rots  de 
demi-aune  un  seize,  pour  avoir  au  Sortir  du  métier  au  moins  demi- 
aune  un  vingt-quatrième  de  largeur  et  revenir,  pour  ceux  qui 
seront  foulés,  à  demi-aune  moins  un  seize,  mesure  de  Paris,  le 
tout  à  peine  de  confiscation  des  pièces,  qui  seront  coupées  de  cinq 
aunes  en  cinq  aunes,  et  de  vingt  livres  d'amende  pour  chaque  pièce 
et  pour  chaque  contravention. 

Art.  2. 

Les  chaînes  des  dits  droguets  seront  composées  de  fils  de  lin  ou 
de  chanvre  du  cru  du  pays,  ou  autre  de  qualité  équivalente, 
lesquels  seront  également  filés,  et  dans  la  proportion  que  toutes  les 
chaînes  montées  sur  les  roestiers  conservent  exactement  la  largeur 
de  demi-aune  un  seize  ordonnée  par  l'article  premier  du  présent 
règlement,  et  sous  les  mômes  peines. 

Art.  3. 

La  trame  desdits  droguets  sera  composée  de  laines  des  abats  de 
Limoges,  St-Junien,  St-Léonard,  ou  autres  de  qualité  équiva- 
lente, sans  mélange  de  bourre,  laneton,  poël,  ny  autre  mauvaise 
matière,  à  peine  de  confiscation  des  matières  qui  seront  trouvée» 
chez  les  ouvriers,  et  des  étoffes  dans  lesquelles  il  en  auroit  été 
employé,  lesquelles  étoffes  seront  coupées  de  cinq  en  cinq  aunes, 
et  de  vingt  livres  d'amende. 

Art.  4. 

Les  chaînes  desdits  droguets  seront  montées  sur  les  métiers  à  la 
longueur  de  80  aunes  au  plus,  à  peine  de  confiscation  des  excédants 


n 


186  SOCIÉTÉ  AACHÊOIiOGlQUE   ET   fllSTORIQUC   DU   LIM017S1X. 

d'aunage  et  de  cinq  livres  d'amende  contre  les  fabricants  aux- 
quels lesdits  idroguets  appartiendront,  et  encore  d'autre  amende 
de  trois  livres  contre  les  ouvriers  qni  les  auront  faits. 

Art.  5  à  30. 

Ces  articles  reproduisent,  pour  la  fabrication  de  chaque  sorte 
de  tissu,  les  dispositions  des  artides  précédents  :  nombre  des  fils 
de  chaîne,  dimension  des  pièces  et  amendes  applicables  en  cas  de 
contravention. 

Ils  se  résument  en  ce  qui  suit  : 

Drof  nets  rayé&,  en  fil,  laine  et  coton,  fabriqués  à  Limoges  :  900 
lils  par  pièce  de  78  aunes  de  longueur  et  3/4  d'aune  de  largeur. 

Serges  drapées  et  croisées,  en  laine  cardée  du  pays,  partie  laine 
de  toison  et  partie  d'abats,  fabriquées  &  Limoges  et  dans  la  banlieue  : 
S76  fils  par  pièce  de  32  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  lar- 
geur. 

Ras  et  camelots  fabriqués  à  Tulle,  Brive,  au  bourg  de  St-Etienne 
de  Girael  et  autres  lieux  eircon voisins  :  1080  fils  par  pièce  de  80 
aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Serges  drapées  à  chaîne  et  trame  d'estame,  fabriquées  dans  les 
mêmes  localités  :  936  fils  par  pièce  de  48  aunes  de  longueur  et 
demi-aune  de  largeur. 

Serges  drapées  à  chaîne  d'estame  et  trame  de  laine  cardée, 
fabriquées  à  Tulle,  Brive,  Corrèze,  et  lieux  circonvoisins  :  1800  fils 
par  pièce  de  48  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Gros  ras  ou  bures,  à  chaîne  et  trame  de  laine  cardée,  fabriqués 
dans  les  mêmes  localités  :  38  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de 
largeur. 

Serges  drapées  et  croisées  à  chaîne  et  trame  de  laine  cardée, 
fabriquées  àAngouléme,Nersac,  Pombrelon  et  lieux  circonvoisins: 
672  fils  par  pièce  de  32  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  lar- 
geur. 

Serges  drapées  et  croisées  à  chaîne  d'eslame  et  trame  de  laine 
cardée,  fabriquées  dans  les  mêmes  localités  :  i,160  ûls  par  pièce  de 
32  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Serges  rases  à  chaîne  et  trame  d'estame,  de  même  provenance  : 
1,240  fils  par  pièce  de  32  aunes  de  longueur  et  demi-^une  de 
largeur. 

Serges  drapées,  à  chaîne  d'estame  et  trame  de  laine  cardée,  fa- 
briquées à  Saint- Junien  ei  lieux  circonvoisins  :  864  fils  par  pièce 
de  26  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Grosses  serges  à  chaîne  et  trame  de  laine  cardée,  fabriquées 


DOCUMENTt  set   l'inbUBTRIE   «T  L€S  MA K^ FACTURES  EN  tlilOUSIN.       i87 

dans  les  mêmes  localités  :  720  flls  par  pièce  de  28  aunes  de  lon- 
gueur el  demi-aune  de  largeur. 

Staminés  en  éXain  sur  éUm^  de  Saiot-Léonard  ei  Ueux  ^ircon- 
Toisine  :  768  fils  par  pièce  de  30  aunes  de  longueur  et  demi-auo^ 
de  largeur. 

Ras  en  étala  sur  éUin,  fabriqués  dans  les  mêmes  localités  ; 
1,024  iUs  p4r  pièce  de  49  aunes  de  longueur  sur  demi-aune  da 
largeur. 

Serges  drapées  el  croisées,  de  même  provenance  :  600  fils  par 
pièce  de  35  auj>e3  de  longueur  sur  demiaune  de  largeur. 

Serges  appelées  bures  ou  petits  draps,  de  méoie  pr^veuaoce  : 
720  fils  par  pièce  de  32  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Draps  croisés  ou  ratines  brunes  pour  Thabillement  des  capucins 
el  des  récollets  :  1,728  fils  par  pièce  de  17  aunes  de  longueur  et 
une  aune  de  largeur. 

Droguets  chaîne  de  fil  et  trame  de  laine,  de  même  fabrication  : 
700  fils  par  pièce  de  72  aunes  de  longueur  et  demi-aune  de  largeur. 

Art.  31. 

Seront  tenus  les  fabricants  de  broder  ou  de  faire  broder  au  sortir 
du  métier,  tant  à  la  tête  qu'à  la  queue,  sur  les  chefs  ou  entrebâts 
de  chaque  pièce  desd.  étoffée,  en  caractères  distincts  et  lisibles, 
et  ftan«  abréviation,  la  première  lettre  de  te«r  nom,  leur  surDom, 
e  nom  du  lieu  de  leur  demeure  en  entier 

Art.  32. 

Défenses  sont  faille  à  tous  fabricants  et  ouvriers  de  mettre  les 
noms  et  surnoms  d'un  autre  fabricant  au  Heu  du  leur....  et  le  nom 
d*un  autre  lieu  de  fabrique »  le  tout  à  peine  de  faut,  de  confis- 
cation desd.  étoffes  qui  seront  brûlées  dans  la  place  publique  et 
de  300  livres  d'amende  pour  ^aque  pièce  et  pour  chaque  contra- 
vention. 

kan.  33. 

Seront  tenus  les  foulonniers  de  faire  parfaitemeat  dégraisser* 
fouler  et  dégorger  les  étoffes  qui  leur  seront  données  à  fouler  et  à 
dégraisser,  à  peine  d'être  garants  o.t  responsables....  des  dommages 

qu  elles pourroient  souffrir et  dans  le  cas  où  les  dites  étoffes 

BA  seriMitpas  s.vfiisatOQ)i3ni  dégraissées,  jbmlées  et  dégorgées,  odes 
seront»  à  ladiligeoce  des  gardes  jurez,  renvoyées  dans  les  qk^uIIbs 
à  fouler  pour  y  être  dégraissées,  foulées  et  dégorgées  de  nauv4^.au 
aux  frais  et  dépens  des  dits  foulonpiers. 


188  SOCléTft  ARCHiOLOGIQDE  BT  HISTORIQUE  DU  LIM0U8IM. 

Art.  34. 

Les  étoffes,  après  avoir  été  dégraissées,  foulées  et  dégorgées, 
seront  portées  directement  pour  être  visitées  et  marquées  à  chacun 
des  bouts  des  pièces  du  plomb  de  la  fabrique  par  les  gardes  jurez 
en  cas  qu'elles  se  trouvent  fabriquées  en  conformité  du  règlement; 
sinon  ils  les  saisiront,  en  dresseront  des  procès-verbaux  de  saisie 
et  en  poursuivront  le  jugement  avec  les  condamnations  de  confls- 
cation  et  d'amende  pardevant  les  juges  des  manufactures,  qui  ne 
pourront,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit,  modérer  les  peines 
portées  par  led.  règlement 

ART.  35. 

Défenses  sont  faites  aux  tondeurs  et  apprêteurs  d'humecter  ni 
souffrir  que  leurs  ouvriers  humectent  en  aucune  matière  d'huile 
ni  d'aucune  sorte  de  graisse  les  étoffes  qui  leur  seront  confiées,  à 
peine  de  confiscation  des  étoffes  et  des  forces  dont  les  tondeurs  se 
servent  pour  les  dits  apprêts  et  de  100  livres  d'amende  pour  chaque 
pièce 

Art.  36. 

Ne  pourront  les  fabricants,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit, 
payer  les  salaires  de  leurs  ouvriers  autrement  qu'en  argent,  à  peine 
de  t(0  livres  d'amende. 

Art.  37. 

• 

Les  marchands  et  tous  autres  faisant  commerce  de  laines  et  les 
fabricants  et  ouvriers  seront  tenus  de  souffrir  les  visites  des  gardes 
jurez  des  fabricants  dans  leurs  maisons,  magasins,  ouvroirs  et 
boutiques...  à  peine  de  300  livres  d'amende.... 

Art.  38. 

Les  gardes  jurez  tiendront  un  registre  en  papier  commun  et  non 
timbré...  dans  lequel  ils  enregistreront  de  suite  et  jour  par  jour 
les  pièces  d*éloffes  qu'ils  auront  visitées... 

Art.  39. 

Il  sera,  dans  chaque  chef-lieu  de  fabrique,  fourni  aux  frais  des 
communautés  desquelles  ils  dépendent,  un  bureau  de  grandeur 
suffisante,  situé  dans  un  endroit  commode  et  convenable,  pour  la 
visite  et  la  marque  des  étoffes... 


DOCUMENTS   SUR   l'iNDUSTRIB   ET   LES   MANUFACTURES   EN   LIMOUSIN.        189 

Art.  40. 

Défenses  sont  faites  à  tous  ouvriers  cardeurs,  peigneurs  et  tis- 
seurs de  quitter  le  travail  des  fabricants  pour  lesquels  ils  travail- 
leront, sans  avoir  préalablement  obtenu  de  ceux  qu'ils  quitteront, 
un  certificat  ou  billet  de  congé,  à  peine  de  30  livres  d'amende 
payables  par  corps  ;  défenses  sont  aussi  faites  aux  fabricants  de 
donner  de  l'ouvrage  aux  ouvriers  qu'auparavant  ils  ne  leur  ayent 
représenté  le  billet  ou  certificat  de  congé  du  fabricant  qu'ils  auront 
servi  en  dernier  lieu,  à  peine  de  100  livres  d'amende. 

Art.  41. 

A  l'avenir,  il  sera  dans  l'intervalle  du  1"'  au  10  décembre  de 
chaque  année,  procédé  en  la  forme  et  manière  accoutumées,  dans 
chaque  chef-lieu  de  fabrique,  à  l'élection  de  nouveaux  gardes  jurez 
des  fabricants,  pour  entrer  en  exercice  le  2  janvier  de  l'année 
suivante.  Chacun  des  dits  gardes  jurez  aura  son  coin  ou  marque 
particulière  dont  il  se  servira  pour  l'empreinte  des  plombs  de 
fabrique  ...  sur  lesquels  coins  ou  marques  seront  gravées  l'année 
d'exercice  en  tête  et  au-dessous  la  première  lettre  du  nom  et  le 
surnom  en  entier  du  garde  juré... 

Art.  42. 

Pour  assurer  l'exécution  du  présent  règlement,  les  gardes  jurez 
seront  tenus,  à  peine  de  50  livres  d'amende,  de  faire  au  moins  tous 
les  mois  une  visite  générale  dont  ils  certifieront  l'inspecteur  des 
manufactures,  chez  les  marchands  et  autres  faisant  commerce  de 
laines,  chez  les  fabricants,  tisserants,  tant  des  villes  que  de  la 
campagne,  teinturiers,  tondeurs,  apprôteurs  et  foulonniers,  à 
l'effet  de  saisir  les  laines  et  les  pièces  d'étoffe  qui  seront  par  eux 
trouvées  en  contravention.... 

Art.  43. 

Les  procès-verbaux  qui  seront  dressez  des  saisies  faites  des 
laines  et  des  étoffes....  feront  mention  des  articles  du  règlement 
auxquels  il  aura  été  contrevenu... 

Art.  44. 

Les  confiscations  des  laines  et  des  pièces  d'étoffes  défectueuses 
dont  Temploy  est  défendu  seront  prononcées  moitié  au  profit  des 
pauvres  de  l'hôpital  du  lieu  où  les  jugements  auront  été  rendus  ou 


190  flœiM  AUSViOlXXMQIIE  CT  histouktm  dv  limoiww. 

da  plus  prochain,  et  Taulre  moitié  au  profit  des  gardes  jurez  pour, 
avec  le  droit  de  marque  qui  sera  à  Tavenir  payé  à  raison  de  deux 

sols  par  pièce  d'étoffe, être  employées  au]i  frais  et  dépenses 

dn  bureau  de  fabrique  et  de  visite... 

Art.  48. 

Il  est  ordonné,  conformément  à  Tédil  du  mois  d*août  1660,  que 
tous  procès  et  différends,  mus  et  à  mouvoir,  tant  entre  les  fabri- 
cants et  leurs  ouvriers  qu'entre  les  marchands  et  fabricants  pour 
raison  des  saisies  et  contraventions  aui  règlemens  ou  autres  ma- 
tières concernant  leur  fabrique  ou  leur  commerce,  seront  instruits 
et  jugez  sommairement  par  les  juge»  des  manufactures,  sans  mi- 
nistère d'avocats  et  de  procureurs,  à  Taudience,  sur  ce  qui  aura 
été  di(  ot  représenié  par  les  parties  mémes^  ei  dans  Le  cas  ot  i\  y 
aurait  quelques  pièces  à  voir  et  que  les  différends  fussent  de  nature 
k  ne  pouvoir  être  jugés  sur  le  champ,  que  les  pièces  seront  mises 
sur  Is  bureau,  pour  être,  les  différends  jugés  sans  appointements 
procédure,  ni  autres  formalités  de  justice,  et  sans  que,  pour  quel- 
que caiise  que  ce  puisse  être,  les  dits  juges  des  manufactures  puis- 
sent recevoir  ni  prendre  aucun  droit 

Fait  à  Limoges,  le  3i  oiars  1749. 

De  Barberib. 

(Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  série  C,  registre^ 
des  édits,  déclarations  et  arrêts  de  /  740  à  1 785). 


r^mft 


Mémoire  de  M.  Comuau,  inspecteur  des  manufactures  de  la  Généra- 
lité de  Limoges,  sur  les  manufactures  de  siamoises  de  cette  ville. 
"Vers  i 77 6, 

L'établissement  des  manufactures  de  siamoises  dans  la  vilie  de 
Limoges,  depuis  vingt-cinq  ou  trente  ans{l),^  a  fait  naître  une  nou- 
velle branche  d'industrie  ;  la  filature  de  coton  et  de  lin  qui  a  com- 
mencé à  celle  époque  a  fait  des  progrès  très  considérables,  surtout 
depuis  la  décadence  d'une  aaeienne  fabrique  d'épingles  qui  était 
autrefois  très  florissante,  mais  qui  ne  subsiste  plus  aujourd'hui,  ou 
du  moins  qui  est  dans  un  étal  très  languissant. 

(1)  Ces  «  2.H  ou  30  aos  »  sont  bien  singuliers  «oui  la  plume  4'uo  iospec- 
leur  des  manufactures.  C'esl  en  1726  que  tut  fondé  le  premier  éia|)lis.^e- 
meni  de  ce  genre,  celui  du  sieur  Thévenln  du  Genesty,  et  en  1743  que  fat 
fondé  fe  second,  celui  des  frères  Laforest. 


DocuMrxm  scu  t'mDusTnu  kt  lss  itANorAcruRies  nv  limousin.      191 

Les  établissements  de  filature  se  sont  étendus  et  multipliés  dans 
la  plupart  des  villes  du  Limousin  sous  Tadministratioa  de 
M.  Turgot.  Il  s'en  est  formé  dans  les  villes  de  Saint  Léonard, 
Bourganeuf,  Âimoutier,  Treignac,  Ghalus,  Saint-Germain,  Solom- 
niac,  Pierrebuftière,  Uzerche  et  Âlassac  (1).  On  a  distribué  dans 
chacune  de  ces  villes  un  certain  nombre  de  rouets  ;  on  y  a  même 
envoyé  des  maîtresses  pour  l'instruction  des  fileuses.  Tous  ces 
établissements  subsistent  encore  et  se  perfectionnent  touts  les  jours  ; 
mais  il  n'y  en  a  aucun  qui  soit  comparable  à  celui  qui  existe  dans 
la  ville  et  les  environs  de  Limoges.  Dans  la  classe  des  pauvres 
artisans  et  manœuvres,  qui  comprend  au  moins  le  quart  des  habi- 
tans  de  la  ville  (2),  les  femmes  et  les  enfans  depuis  l'âge  de  six  à 
sept  ans  n'ont  d'autre  occupation  que  la  filature.  11  est  à  désirer  que 
celle  ressource  ne  leur  manque  point,  car  c'est  la  seule  qui  puisse 
leur  procurer  les  moyens  de  gagner  leur  vie. 

Les  secours  que  Messieurs  les  Inlendans  ont  bien  voulu  accorder 
pour  encourager  la  filature  à  Limoges  sont  très  considérables  :  on 
y  a  distribué  plus  de  i  ,500  rouets  depuis  quinze  ans  ;  et  non  seule- 
ment on  a  fourni  des  rouets  neufs  aux  pauvres  fileuses,  on  a  même 
entretenu  ces  rouets  jusqu'à  présent,  à  l'exception  des  cordes  et 
des  broches  qu'on  ne  leur  fournil  plus.  Cette  partie  de  Tentretien 
étoit  très  dispendieuse  par  elle-même  et  plus  encore  par  les  abus 
qu'il  étoit  presque  impossible  de  réprimer. 

La  quotité  des  fonds  annuels  accordés  par  Messieurs  les  Inten- 
dans  pour  l'achat  ou  pour  l'entretien  des  rouets  de  charité  a  varié 
suivant  les  circonstances  et  les  besoins.  En  1771,  M.  Turgot  en  fit 
distribuer  près  de  deux  cents.  En  1774  et  au  commencement 
de  1775,  M.  Daine  en  a  fait  distribuer  environ  cent  trente  ;  mais 
depuis  ce  temps  là,  on  s'est  borné  à  quelques  raccommodages  dont 
les  frais  depuis  six  mois  ne  se  sont  montés  qu'à  74  II. 

il  y  a  quelque  tems  qu'un  homme  étoit  chargé  de  faire  la  visite 
des  rouets  de  charité,  de  rendre  compte  de  leur  état  et  de  les  rap- 
porter au  dépôt  lorsqu'il  les  trouvoit  vacans,  soit  par  la  mort  de  la 
fllouse  à  qtti  on  les  avolt  donnés,  soit  parce  qu'elle  gagnoitsa  vie 
à  d'autres  occupations  ;  mais  ceci  n'a  plus  lieu  depuis  que  M.  Tln- 
lendanl  n'a  plus  voulu  permettre  qu'on  fît  ces  recherches  (3). 


(1)  Saiot-L^onard,  EyœouUers,  GliAlvs,  $aiBt«Germain*I(î6-BeJle«^  SoJi- 
gtat  et  Pierrebulfière  sont  aujourd'hui  dans  la  Haul«-Vienne;  Bourganeuf 
est  diiw  la  Creuse;  Uzereèe  «t  Allassae  sont  daos  la  G(M>nèzie. 

p)  Lifnoge«  coiopiaii  mk>n  envifon  48,000  habiianlB. 

{%)  «  le  ne  me  aiiis^ïoiat  refusé  à  ce  que  l'on  fit  cène  visiie  aoeontumée; 
je  peusc   même  qu*e]le  est  nécessaire  ;  mais  je  dési rois  être  parfaitement 


192  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DD  LIMOUSIN. 

Les  manufactures  du  Limousin  ne  sont  pas  dans  un  état  assés 
florissant  pour  consommer  le  coton  qu'on  y  file  ;  ce  qui  donne  lieu 
à  un  commerce  de  coton  assés  considérable  qui  se  fait  à  Limoges 
par  plusieurs  négociants  qui  en  exportent  tous  les  ans  une  très 
grande  quantité;  la  plus  grande  partie  de  cette  denrée,  transportée 
à  Bordeaux  et  à  Poitiers,  y  est  employée  dans  les  fabriques  de 
bazin,  de  bonnets  et  de  bas  au  métier. 

(Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne^  C.  13.) 


«  Second  mémoire  »  de  M.  Cornuau^  inspecteur  des  manufactures 
de  la  Généralité  de  Limoges,  sur  la  filature  du  coton  dans  cette 
ville.  —  Vers  1776. 

On  ne  trouve  à  l'intendance  aucun  mémoire  sur  la  filature  de 
coton  à  Limoges.  Tout  ce  que  Ton  sait  sur  l'origine  de  cet  établis- 
sement, c'est  que  M.  de  la  Millière  (1)  fit  venir  à  Limoges  plusieurs 
femmes  étrangères  pour  former  une  école  de  filature.  Ces  maîtres- 
ses fileuses  restèrent  quelques  années  à  Limoges,  y  formèrent  un 
certain  nombre  d'élèves  qui,  s'étant  accru  successivement,  est* par- 
venu au  point  où  nous  le  voyons  actuellement. 

Quoique  la  filature  de  coton  se  soit  fort  étendue  dans  la  ville  de 
Limoges,  elle  ne  s'y  est  pas  perfectionnée  dans  la  même  propor- 
tion; c'est  à  Treignac  et  à  Aimoutier  d'où  l'on  tire  le  plus  beau 
coton.  La  plus  grande  partie  de  celui  qui  se  file  à  Limoges  ne  peut 
être  employée  que  pour  les  grosses  siamoises.  • 

En  1770,  M.  Turgot  fit  construire  plusieurs  dévidoirs  connus 
sous  le  nom  de  dévidoirs  à  l'angloise,  par  le  moyen  desquels  on 
peut  connoître  de  la  manière  la  plus  précise  le  degré  de  finesse 
des  dilïérens  écheveaux  de  coton.  L'usage  du  dévidoir  aurait  été 
très  avantageux  aux  manufactures,  parce  qu'il  auroit  servi  à  fixer 
le  tarif  des  prix  de  la  filature  et  à  faire  connaître  la  quantité  de 
coton  nécessaire  pour  former  une  chaîne  de  telle  ou  telle  lon- 

inslruit  de  ce  qui  concerne  cet  éiablissement  avant  de  donner  aucuns  ordres 
qui  y  fussent  relatifs,  et  il  devroit  y  avoir  à  l'Intendance  un  état  du  nombre 
de  rouets  de  charité  existans,de  toutes  les  personnes  entre  les  mains  de  qui 
ils  sont,  lorsque  l'on  les  retire  des  mains  de  ceux  qui  sont  dans  le  cas  de  les 
rendre  ;  me  présenter  un  étal  à  arrêter  d'autres  personnes  à  qui  les  distri- 
buer; faire  note  de  tout  sur  TélatgénéraU.  Wote  marginale  de  Vuitendant.) 
(1)  Chaumont  de  la  Millière  tut  intendant  de  la  Généralité  de  Limoges 
de  1751  k  1756. 


DOCUMENTS   SUR   L*1NDUSTRIE  ET   LES    MANUFACTURES   EN    LIMOUSIN.        193 

guear.  Cependant,  il  n'a  pas  été  possible  d'introduire  à  Limoges 
Tusage  de  ce  dévidoir  :  les  entrepreneurs  des  manufactures  n'ont 
jamais  pu  assujettir  leurs  flleuses  à  s'en  servir. 

Remarques  sur  le  catalogue  des  fileuses. 

On  a  rangé  sous  différentes  classes  les  noms  des  fileuses  à  qui 
on  avait  distribué  des  rouets,  suivant  les  quartiers  et  les  paroisses 
où  elles  demeuroient  ou  suivant  les  fabriquants  pour  qui  elles  tra- 
vailloient;  mais  jusqu'à  présent  il  n'a  pas  été  possible  de  rien  faire 
de  bien  satisfaisant  dans  cette  partie. 

La  forme  de  registre  qui  m'a  paru  la  plus  commode  et  d'après 
laquelle  j'ai  formé  le  catalogue  des  fileuses  à  qui  j'ai  distribué  des 
rouets  depuis  un  an  et  demi,  est  la  forme  alphabétique  en  obser- 
vant de  mettre  à  côté  du  nom  de  la  fileuse  le  numéro  de  la  maison 
où  elle  demeure.  Mais  ce  registre,  qui  doit  comprendre  les  noms  des 
autres  flleuses  qui  ont  reçu  des  rouets  antérieurement  à  cette  épo- 
que, sera  fort  difficile  et  fort  long  à  faire.  Il  faudra  pour  le  cons- 
truire parcourir  toutes  les  maisons  où  il  y  a  des  fileuses,  ce  qui 
exigera  beaucoup  de  temps. 

Les  difficultés  qui  se  présentent,  toutes  les  fois  qu'on  se  propose 
de  faire  une  visite  générale  sont  sans  nombre;  et  à  moins  de  faire 
faire  cette  visite  au  moins  tous  les  trois  mois,  on  ne  parvien- 
dra jamais  à  avoir  un  registre  en  règle;  dans  le  nombre  de  près  de 
1,300  fileuses  qu'il  yaà  Limoges,  les  unes  meurent;  les  autres  se 
marient  et  changent  de  nom  ;  les  autres  changent  de  demeure  ou 
vont  s'établir  à  la  campagne  et  emportent  leurs  rouets;  celles  qui 
en  ont  et  qui  n'en  font  pas  usagé  les  cachent  et  employent  toutes 
sortes  de  ruses  pour  les  soustraire  à  la  visite. 

Gomme  on  ne  distribue  les  rouets  de  charité  que  sur  la  présen- 
tation des  certificats  de  MM.  les  curés,  il  y  a  eu  des  femmes  qui  ont 
eu  le  secret  de  se  procurer  plusieurs  rouets  sous  différents  noms; 
ensuite  elles  ont  loué  ces  rouets  trois  sols  par  mois;  le  seul  moyen 
de  réprimer  cet  abus  a  été  défaire  savoir  que  tous  les  rouets  loués 
appartiendroient  à  celles  qui  s'en  servoient  et  entre  les  mains  de 
qui  ils  se  trouvoienl,  pourvu  qu'elles  fussent  dans  le  cas  de  la 
chanté. 

Il  y  a  deux  ans  qu'on  étoit  dans  Itisage  de  fournir  des  cordes  et 
des  broches  aux  fileuses.  Celte  partie  de  l'entretien  des  rouets 
étoit  très  dispendieuse,  car  il  faut  au  moins  une  broche  par  an  et 
quatre  cordes  four  l'entretien  de  chaque  rouet;  et  à  ne  compter 
que  1,200  rouets,  cela  auroit  fait  un  objet  de  1,200  11.,  à  raison  de 


i9i  SOCIBTÉ  AVCHAOLOeiQUR  BT  BIftTORIQUR  BD  LIStODSlIT. 

211.  6  sols  la  corde,  et  10  sols  la  broche.  Mais  comme  il  est  très 
difficile  de  connoitre  les  fileuses  qui  n'onl  pas  le  moyen  d  acheter 
une  corde  on  une  broche,  la  distribution  de  ces  outils  ne  pouvoit 
pas  manquer  d'être  un  peu  arbitraire  et  sujette  à  bien  des  abus  : 

Présentement  que  le  pain  n'est  pas  fort  cher,  je  crois  qu'il  seroit 
à  propos,  si  M.  Tinlendant  le  trouve  bon,  de  supprimer  totalement 
Tentretien  des  roue.ts;  cela  engageroil  les  (ileuses  à  les  mieux  con- 
server. Cet  entretien  des  rouets,  quelque  précaution  qu'on  prenne, 
est  sujet  à  une  foule  d'abus,  ne  soulage  que  médiocrement  lès  (ileu- 
ses et  ne  facilite  que  très  peu  les  progrès  de  la  filature;  les  frais 
d'entretien  ne  se  sont  montés  pour  les  six  derniers  mois  de  1775 
qu'à  74  11.,  au  lieu  que  les  années  précédentes  cel  entretien  coutoit 
cinq  ou  six  cents  livres  par  an.  D'ailleurs,  M.  l'intendant  ayant  bien 
voulu  accorder  des  fonds  extraordinaires,  Thiver  passé  1774,  pour 
acheter  des  rouets  neufs,  il  est  censé  que  la  plus  grande  partie  des 
(ileuses  en  est  pourvue  actuellement. 

Jusqu'à  présent,  les  visites  générales  n'ont  pas  procuré  un  grand 
nombre  de  rouets,  quoi  qu'il  y  en  eut  beaucoup  de  vacans,  parce 
que  les  fileuses  prévenues  de  cette  visite  ont  eu  la  précaution  de 
les  cacher.  Mais  je  me  suis  servi  d'une  autre  méthode  :  lorsqu'une 
femme  m'a  apporté  un  billet  de  son  curé  et  que  je  n'ai  point  eu  d'or- 
dre pour  faire  des  rouets  neufs,  je  lui  ai  dit  d'en  chercher  un  elle- 
même,  c'est-à-dire  de  s'informer  où  il  pouvoit  y  en  avoir  de  vacants. 
Lorsqu'elle  en  a  trouvé  un  et  qu'elle  a  indiqué  la  maison  où  il  est, 
j'envoye  le  tourneur  le  chercher  et  je  le  fais  délivrer  à  cette  femme 
qui  l'a  dénoncé,  à  moins  que  la  première  femme  à  qui  il  appar- 
tenoît  n'ait  des  raisons  légitimes  pour  suspendre  sa  (ilature.  Cela 
arrive  quelquefois  et  alors  on  lui  rend  son  rouel. 

f  Archives  départementales  de  la  Haute-Viôtme^  C,  /  3J. 


Etat  du  département  de  l'inspecteur  des  manufactures  de  la  Gêné- 
ralité  de  Limoges  [dressé  par  Cornuau  (1)  vers  i780]. 

Etendtte  de  ce  département.  —  Ce  département  comprend  les 
provinces  du  Limousin,  de  la  Basse-Marche,  de  l'Angoumois  et  de 
la  Sainlonge.  Je  joins  ici  une  petite  carte  réduite,  qui  indique  la 
position  des  villes  de  la  généralité,  dont  j'aurai  occasion  de  parler 
dans  ce  mémoire  en  donnant  la  notice  des  principales  branches  de 
commerce  et  d'industrie  qu'on  y  cultive. 

(I)  D'après  récriture  île  la  pièce. 


DOCDUnm   tCR  L*1N»0STIIIB   BT  les  HAirUFAâTCKES   EN  LIMOOSIN.        195 

AppoiHêemens  de  l'Inspecteur.  —  Les  appointemens  de  rin»pee- 
teor  des  manufactures  sont  de  2,000  IL  Cette  somme  est  imposée 
sor  la  généralité,  comprise  sur  les  rolles  de  la  taille  et  payée  au 
trésor  royal. 

Sous-inspeet&urs,  —  Le  sieur  Gomuau  (1  )  est  seul  inspecteur  de  son 
département.  Il  n'y  a  ancun  sons-inspecteur  qui  lui  soit  subordonné. 

Bureaux  de  marque  et  de  controlle.  —  Ces  bureaux  ont  été  éta- 
blis autrefois  dans  la  généralité  de  Limoges  et  ont  subsisté  jusqu'à 
Tannée  1761.  Depuis  cette  époque,  il  n'y  a  eu  aucune  nomination 
de  gardes  jurés. 

L'arrêt  du  Conseil,  en  date  du  1*'  décembre  1777^  adressé  à 
H.  l'Intendant,  ordonne  le  rétablissement  de  ces  bureaux.  En  consé- 
quence, j'ai  été  chargé  par  H.  l'Intendant  d'en  conférer  atec  les 
principaux  négocians  el  fabricans.  Il  étoit  naturel  que  ceux-ci, 

(I)  Fierre  Comuào,  ingénieur-g^ograplie,  naquit  h  fft  tnâi  ttIO  k  Voutré, 
aajoord'btii  département  de  la  Mayenne.  \\  fut  d'abord  aiiaché  aux  travaux 
d«  la  carte  de  France  de  Gassini.  Signulé  à  Turgot  comme  un  sujet  de  grand 
méritCf  il  devinl,  en  i76.\ruQ  des  collaborateurs  de  Tlntcndant  de  Limoges, 
qui  le  cbarijea  d  opérations  cadastrales.  Il  succéda,  en  1772,  à  Desmareis, 
dans  les  fonctions  d'inspecteur  des  manufactures  de  la  Généralité^  qu'il 
exerça  jusqu\^  la  Révolution. 

Secrétaire  de  l'assemblée  provinciale  du  Limousin,  en  1787^1  fut  désigné, 
le  (8  août  1790,  pour  remplir  le  même  emploi  auprès  de  Fadminlstration 
du  disirîet  de  Limogés,  il  occupa  ce  poste  pendant  un  an  et  rédigea  tous 
les  procës*verbaaz  des  délibérations  du  directoire.  Homme  flMdesie  et 
d'opinions  modérées,  Cornuau  resta  constamment  étranger  stnx  agitations 
et  aux  luttes  des  partis.  Cependant,  lorsqu'en  février  (795  le  représentant 
du  peuple  Clédel,  en  mission  dans  la  Haute«-Vienne,  fit  appel  à  son  dé> 
vouement,  il  accepta  une  place  vacante  d'administrateur  du  département. 
A  peine  éiait-il  installé  qu'une  loi  réduisait  le  nombre  des  membres  de 
cette  administration,  Cornuau  se  retira,  mais  pour  revenir  trois  mois  après 
reprendre  sa  place  parmi  ses  collègues.  II  resta  en  fonctions  jusqu'aux  élec- 
tions générales  d'octobre  1795. 

A  la  création  de  Técole  centrale  de  la  Haute- Vienne  il  fut  pourru  (jan- 
trer  1797)  de  la  chaire  Ôe  mathématiques  pour  laquelle  le  dt^signaient  sra 
connaissances  spéciales  et  qu'il  occupa  tant  que  subsista  eeite  école 

Nommé  membre  du  conseil  mualcipat  de  Limoges  le  16  août  tMO,  il 
vit  à  plusieurs  reprises  renou vêler  son  mandat  et  prit  n ne  pan  active  aux 
travaux  de  cette  assemblée  dans  laquelle  il  siégea  sans  interruption  juaqa*à 
son  décès  (26  mai  1822). 

Cornuau  avait  fiait  partie  de  la  société  d'agriculture  de  Limoges  de  4772 
à  1785.  H  a  dressé  et  publié  plusieurs  cartes  du  diocèse  et  de  la  généralité 
de  Limoges.  (V.  à  ce  sujet  le  Choix  de  documents  historiques^  publié  par 
M.  Alfred  Leroux).  On  article  nécrologique  lui  a  été  consacré  dans  les 
Annotée  delà  ffautè-VUnnè  au  Z\  mai  1822. 


196  SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

accoutumés  depuis  seize  ans  à  jouir  d'une  espèce  de  liberté  dont  ils 
assurent  et  dont  il  ne  paroit  pas  qu*ils  ayent  abusé,  fissent  des 
représentations  contre  le  rétablissement  d'un  usage  qu'ils  préten- 
dent être  moins  propre  à  rétablir  le  bon  ordre  et  à  inspirer  la  bonne 
foy  qu'à  décourager  les  fabricans  par  l'extrême  sévérité  des  peines 
que  les  anciens  réglemens  prononcent  contre  les  plus  légères  con- 
traventions. 

En  effet,  disent-ils,  la  multiplicité  des  anciens  réglemens  en  rend 
l'exécution  impossible,  et  l'arbitraire  qui  règne  dans  les  bureaux  de 
visite  pour  la  manutention  et  la  police  est  un  effet  des  contradic- 
tions fréquentes  qu'on  remarque  entr'eux.  Souvent  un  usage  établi 
dans  une  ville  et  qui  devoit  son  origine  à  des  causes  particulières 
et  à  des  circonstances  locales,  a  fait  la  matière  d'un  règlement  dont 
on  a  ensuite  prescrit  l'exécution  dans  tout  le  royaume.  Il  y  a  aussi 
des  réglemens  dont  l'exécution  peut  être  facile  et  même  avanta- 
geuse à  telle  manufacture  et  qui  seroit  impossible  et  préjudiciable 
à  une  autre.  Prenons  pour  exemple  les  manufactures  de  siamoises 
de  Rouen  et  de  Limoges.  Il  y  a  dans  la  première  de  ces  deux  villes 
une  filature  immense  et  anciennement  établie.  Il  est  facile  à  chaque 
fabricant  de  choisir  dans  les  marchés  le  fil  et  le  coton  propres  à  la 
qualité  de  l'étoffe  qu'il  se  propose.  Mais  à  Limoges,  les  fabricans 
n'ont  pas  le  même  avantage.  Ils  sont  obligés  de  faire  filer  le  fil  et 
le  coton  qu'ils  employent,  et  ils  sont  obligés  de  les  employer  tels 
que  leurs  filenses  les  remettent.  Il  est  vrai  qu'ils  font  un  triage  ; 
mais  malgré  cela  ils  sont  forcés  de  fabriquer  des  étoffes  plus  ou 
moins  grosses  et  par  conséquent  plus  ou  moins  larges. 

Il  n'est  pas  nécessaire  d'insister  sur  le  nombre  des  portées  pour 
ce  qui  concerne  les  siamoises,  parce  que  le  fil  qu'on  employé  pour 
la  chaîne  de  ces  sortes  d'étoffes  étant  moins  cher  que  le  coton,  il 
n'est  pas  de  l'intérêt  du  fabricant  de  diminuer  le  nombre  des  por- 
tées, car  alors  les  fils  de  la  chaîne  devenant  plus  écartés  occasion- 
nent une  plus  grande  consommation  de  coton  dans  la  tramé. 

Il  y  a  même  des  siamoises  qui,  par  leur  nature,  exigent  plus  ou 
moins  de  portées,  quoique  la  largeur  soit  la  même.  Ainsi  dans  les 
siamoises  sur  chaîne  blanche,  le  trop  grand  nombre  de  fils  dans  la 
chaîne  masqueroit  la  trame  qui  doit  paroître,  et  au  lieu  d'un  bleu 
tendre,  par  exemple,  on  n'obtiendroit  qu'une  couleur  grisâtre  et 
désagréable. 

Telles  sont  les  objections  qui  m'ont  été  faites  par  les  principaux 
fabicans,  dont  la  plupart  prétendent  d'ailleurs  n'être  pas  dans  le 
cas  d'être  assujeliis  au  bureau  de  marque  et  de  controlle,  ni  môme 
aux  anciens  réglemens  qui  n'ont  pas  pu  prévoir  l'état  actuel  de  leur 
fabrique  ni  la  nature  des  étoffes  qu'ils  font  fabriquer.  Le  sieur 


DOCUMENTS  SUR   L*INDUSTniE   ET   LES   MANUFACTURES  EN   LIMOUSIN.        197 

Leclerc,  par  exemple,  qui  a  établi  à  Brive  une  manufacture  d'étoffes 
de  soye  et  coton,  façon  d'Angleterre,  représente  qtie  dans  la  fabri- 
que des  mouchoirs  imprimés  le  mordant  ne  perçoit  pas  si  la  chaîne 
éloit  composée  d  un  trop  grand  nombre  de  fils  ;  que  d'un  autre  côté 
ces  mêmes  mouchoirs  s'érailleroient  au  débouillissage  si  le  nombre 
des  portées  n'étoit  pas  suffisant  et  que  la  trame  ne  fut  pas  assés 
battue  ;  que  pour  éviter  ces  deux  inconvéniens,  il  est  continuelle- 
ment obligé  de  varier  le  nombre  des  portées  suivant  la  nature  de 
rétoffe  qu'il  fabrique,  et  qu'un  règlement  qui  l'assujettiroit  à 
employer  un  nombre  déterminé  de  portées  sans  avoir  égard  à  la 
grosseur  plus  ou  moins  considérable  des  fils  de  soye  équivaudroit  à 
une  défense  de  fabriquer  la  plupart  des  étoffes  qui  sortent  de  sa 
manufacture. 

Foires.  —  Il  y  a  un  très  grand  nombre  de  foires  en  Limousin, 
mais  on  n'y  observe  aucune  police  particuhère.  Le  seul  objet  de  ces 
foires  est  la  vente  des  bestiaux  de  toute  espèce,  mais  principale- 
ment des  bœufs  gras  pour  la  consommation  de  Paris. 

Etat  du  commerce  et  des  manufactures  dans  la  Généralité  de 
Limoges.  —  Cet  état  n'est  point  un  exposé  des  manipulations  et  des 
procédés  qu'on  employé  dans  chaque  fabrique  ;  c'est  une  notice 
générale  des  principales  branches  d'industrie  de  la  généralité.  Cette 
notice  pourroit  être  plus  complète  et  embrasser  plus  de  détails. 
C'est  ce  que  je  me  propose  de  faire  lorsque  j'aurai  recueilli  dans 
mes  différentes  tournées  tous  les  renseignemens  nécessaires  pour 
former  un  tableau  complet  du  commerce  et  des  différentes  espèces 
d'industries  répandues  dans  la  généralité. 

f  Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  série  C,  n"  iSJ. 


Lettre  de  Comuau,  inspecteur  des  manufactures  de  la  Généralité  de 
limoges^  au  sujet  du  rétablissement  des  bureaux  de  marque.  — 
Vers  1780. 

Monsieur  (1).  Il  y  a  environ  deux  mois  que  M.  l'intendant  de 
Limoges  écrivit  à  M.  le  Directeur  général  au  sujet  de  l'établisse 
ment  des  Bureaux  de  marque  et  de  visite  dans  le  Limousin. 
M.  Daine  observoit  qu'il  n'étoit  pas  possible  que  cet  établissement 
pût  avoir  lieu  à  Tépoque  fixée  du  1"  juillet,  attendu  que  les  lettres 
patentes  du  Roy,  postérieures  au  5  mai  1779,  n'avoient  point  encore» 

(1)  Le  nom  aassi  bien  que  la  qualilé  du  destinataire  sont  omis. 

T.  XXXIX.  13 


108  SÛCIÉTé  ARCBËOLOGIQtJB  ET   àlSTORlQUift   HD   LlilOUSIff. 

été  ëiii*ègistrê*es  an  î^arlémetit  de  bordeaut,  et  ^e  M.  lé  directeur 
gétiëral  avoit  marqué  lui-môme  de  ne  faire  aucune  démarche  à 
ce  sujet  qu'après  l'enregistrement  des  nouvelles  lois  relatives 
aux  manufactures.  J'ai  eu  l'honneur  tl*écrire  plusieurs  fois  à 
M.  beLdttè  (?)  et  de  lui  représenter  que  la  Généralité  de  Limoges 
étoit  dans  un  cas  particulier  par  rapflort  au  nouveau  régiine  pres- 
crit par  le  tlonseil,  parce  que,  depuis  près  de  vingt  ans,  les  Bu- 
reaux de  marque  ont  été  Supprimés  dans  cette  Généralité,  te  qui 
devoit  rendre  leur  établissement  sujet  à  des  détails  longs  et  minu- 
tieux, qui  èntrainerôient  nécessairement  beaucoup  de  tfems  avant 
que  la  machine  fiit  remontée  flàhs  toute  ïa  Gèiiéràlllé  et  que  toutes 
choses  ifussènt  remise^  au  coui^tit.  Cependant  les  nêgocians  et 
fabricans  ne  sont  point  sans  inquiétude  et  craignent  que  leurs 
étoffés  he  soient  saisies  par  les  commis  de^  fermes.  M.  l'in- 
tendaht,  à  qui  je  me  suis  adressé  pour  lui  demander  ses  ordres  et 
le  plah  de  conduite  que  je  devois  suivre,  ne  m'a  prescrit  autre 
chose  que  d'attendre  renregislrement  de  toutes  les  lettres  patentes 
avant  de  faire  aucune  démarche.  Dans  cet  étal  d'attente  et  d'încer- 
litade,  que  je  trouve  très  embarassanl  pour  moi  et  qui  me  réduit 
à  une  espèce  d'inactivité  relativement  aux  fonctions  de  mon  état, 
je  prends  la  liberté,  Monsieur,  de  ra'adresser  à  voiis  pour  vous 
prier  de  vouloir*  bien  me  donner  vos  ordres  et  me  tracer  le  plan  de 
conduite  que  je  dois  tenir  dans  la  circonstance  actuelle. 

J'iai  l'honneur  d'être  avec  un  profond  respect,  Monsieur,  rotre 
très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

GORNUAU. 

{Archives  départementales  de  la  tiaute-Vièfine,  C,  iS). 


He^/uête  vfi»  sietPrs  lifardriy  LabrùUs^  et  fJ^%  fàtrkmts  de  siamaises 
à  Limoges^pour  obtenir  la  vérification  de  leurs  produite.—  178ÎI. 

A  Monsiôlgneur,  Mgr  Vintendàht  de  GénéralitJé  de  Litiibgés. 
Sûpllerit  humblemétit  les  sieurs  Martin,  Lab^ousse  et  C*%  entre- 
Jireneurs  de  la  Manufacture  de  siamoises  et  de  flanelles  de  cette 
Ville,  disant  que  par  arrêt  du'Côhseitdu'll  décembre  '1775,  le  Roy 
adroit  eu  la  bonté  de  leur  accorder  une  gratification  de  deux  livi'es 
par  châ'qiie  piess'e  tfe  siamoises  ou  de  flanelles  de'ÎO  aunes,  qui 
sera  fabriquée  dans  leur  manufacture  au  delà  des  800  premières 
piesses,  le  tôlrt  jusqu'à  la  c:oùc\irrence  de  2,000  piessBS  p^r  an. 


DOCUMENTS  SUR   L^IUDUSTRIE   ET  LES   HA.NUPAQTUKE$  HN   LIMOUSIN.      499 

pendant  dix  années,  à  compter  du  l**  janvier  1776,  en  sorte  que  la 
dite  gratification  portera  annuellement  sur  les  1,200  dernières  fa- 
briquées. Et  comme  Sa  Majesté  veut  que  dans  le  cas  auquel  fsicj 
les  dits  entrepreneurs  ne  pouroient  pas  remplir  dans  les  premières 
années  le  nombre  fixé  de  2,000  piesses,  ils  ayentla  faculté  de  com- 
pletter  dans  les  années  suivantes  ce  qui  leur  auroit  manqué 
les  précédantes,  ils  ont  recours  à  vous,  Monseigneur,  afin  qu'il 
vous  plaise  nommer  tel  commissaire  que  vous  jugerés  à  propos 
pour  vérifier  la  quantité  de  piesses  que  les  supliants  ont  fait  fabri- 
quer pédant  le  cours  de  la  présante  année,  et  sur  son  raport 
ordonner  le  payement  des  dittes  deux  livres  par  chaque  piesse  de 
20  aunes. 

Les  supliants  ne  cesseront  de  former  des  vœux  pour  la  conser- 
vation de  votre  santé. 

En  marge  :  Apostille  de  Tiatendant  prescrivant  qu'il  soit  dressé 
procès-verbal  du  nombre  de  pièces  d'étoffes  fabriquées  par  les 
suppliants.  29  déc.  1783. 

A  la  fin  :  Certificat  du  subdélégué  constatant  qu'il  a  été  fabriqué 
43,122  aunes  formant  2,166  pièces  d'étoffe.  5  janv.  1784. 

{Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  Cy  i3). 


CÉRAMIQUE. 


faïencerie  D'ANDRÉ  MASSIÉ  a  LIMOGES. 


Les  produits  de  cette  faïencerie,  dont  quelques  spécimeas  ont  fait  Tob- 
jet  d*un  mémoire  présenté  par  M.  E.  Boudet  au  Congrès  scientifique  de 
France,  en  1859,  sont  encore  peu  connus. 

M.  Boudet  signalait  trois  plais  de  grandes  dimensions,  parmi  lesquels 
deux  portant  une  date.  L'un  de  ces  plais  est  aujourd'hui  au  Musée  céra- 
mique de  notre  ville;  un  autre  parait  être  entré  dans  les  collections  de 
Sèvres:  nous  ignorons  ce  qu'est  devenu  le  troisième. 

Actuellement,  la  manufacture  de  Massié  n'est  encore  représentée  au 
Musée  de  Limoges  que  par  deux  pièces  d'origine  certaine,  qui  sont  : 

I.  —  Une  fontaine  d'applique  de  38  c.  de  hauteur,  92  c.  d'ouverture  et 
38  c.  de  largeur,  décor  en  camaïeu  bleu,  semé  de  sujets  japonais  ;  la  face 
présente  deux  écussons  accolés,  l'un  d'azur  à  raigle  (?)  prenant  son  ool 
vers  un  soleil  â^or  cantonné  à  dextre  de  Vécu^  l'autre  d'azur  aa  chevron 


fOO  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  KT  HISTORIQUR   DU   LIMOCSIN. 

â!or  accompagné  en  chef  de  deux  fleura  de  lys  d'argent  et  en  pointe  de 
trois  besans  aussi  d'argent  posés  2  et  1. 
A  rialérieur  on  lit,  peint  eo  bleu  clair  :  Limoges,  4739. 

II,  —  Un  plal  rond  de  58  c.  de  diamètre,  dont  le  centre  est  occupé  par 
un  sujet  de  style  :  la  Justice  assise  sur  un  trône  et  tenant  en  mains  le 
glaive  et  la  balance  foule  aux  pieds  le  Crime;  debout  auprès  d'elle  sont 
la  Religion,  la  Vérité  et  la  Loi,  distinguées  par  leurs  attributs.  Une  belle 
bordure,  dans  le  genre  de  Moustiers,  encadre  cette  gracieuse  composition 
exécutée  probablement  d'après  un  carton  d'émailleur.  Au-dessus  da  trône 
sont  appliquées  les  armes  de  M.  de  Tourny,  intendant  de  Limoges,  qui 
sont  :  de  sable  à  V  aigle  S  or  éplogée  fixant  une  étoile  d'argent  canton- 
née  en  chef  à  dextre  de  Vécu, 

Ces  différents  motifs  sont  peints  en  camaïeu  dans  des  ions  très  doux  cl 
très  glacés. 

Au  revers  on  lit  :  A  Limoges,  le  I8°*«  mat  1741. 

Une  autre  pièce  du  même  Musée  passe  pour  être  également  sortie  de 
la  fabrique  de  Limoges,  mais  cette  attribution  reste  douteuse.  C'est  une  fon- 
taine de  forme  ronde,  mesurant  35  c.  en  hauteur  et  30  c  dans  sa  pins 
grande  largeur;  elle  est  ornée  de  deux  mascarons  en  relief  formant  an- 
ses; décor  polychrome,  sujet  japonais.  Si  elle  se  rapproche  beaucoup 
comme  décoration  de  la  fontaine  mentionnée  plus  haut,  elle  en  diffère 
sensiblement  par  la  qualité  de  la  matière  employée. 

Diaprés  la  description  sommaire  qu'en  a  donnée  M.  Jacquemart  dans 
son  Histoire  de  la  céramique,  le  plat  du  Musée  de  Sèvres  est  décoré  en 
couleurs  pâles  d'un  paysage  animé  par  une  chasse  au  cerf,  d'après  Tem- 
pesla. 

Le  nombre  des  pièces  reconnues  de  la  manufacture  d'André  Massié  est« 
comme  on  le  voit,  des  plus  modestes*  ce  qui  s'explique  aisément  par  ce 
fait  que  ce  centre  de  production  est  demeuré  longtemps  ignoré  des  savants 
et  des  amateurs.  Si  l'on  considère,  d'une  part,  qu'il  en  sortit,  dès  sa  créa- 
lion,  des  objets  d'une  réelle  importance  et  d'une  belle  exécution,  en 
même  temps  que  des  articles  courants;  d'autre  part,  que  cette  fabrique 
fonctionna  de  1736  à  1773,  époque  de  sa  transformation  en  manufacture 
de  porcelaine  ;  qu'ainsi,  elle  dut  fournir,  durant  trente-six  années,  à  la 
consommation  de  la  province,  on  admettra  difficilement  qu'un  aussi  petit 
nombre  de  ses  produits  ait  échappé  à  la  destruction. 

Sur  la  foi  d'un  écrivain,  sincère  nous  le  voulons  bien,  mais  trop  enclin 
à  généraliser  des  exemples  empruntés  à  un  milieu  très  borné,  on  va  répé- 
tant que  la  faïence  élait  presque  inconnue  à  Limoges  au  siècle  dernier.  De 
nombreux  témoignages  écrits  démentent  cette  assertion  deJ.-J.  Juge  de 
St-Martin.  En  veut-on  une  preuve?  En  1796,  au  décès  de  Jean  Dalesme, 
bourgeois  de  cette  ville,  il  est  dressé  inventaire  de  ses  |biens  biens.  Or. 
veut-on  savoir  quelle  quantité  d'objets  en  faïence  recèlent  son  logis  de  la 
rue  du  Temple  et  sa  maison  de  campagne  d'Aigueperse? 

25  douzaines  d'assiettes, 
76  plats, 
tO  écuelles, 


DOGOMPJITS  SUR   L^INDOSTRIE   ET  LES   MANUFACTURES   EN  LIMOUSIN.        201 

4  saladiers, 
)  soupières, 

5  pots  )i  eau  avec  cnvette. 

La  porcelaine  est  représentée  par  4  écuelles  en  porcelaine  de  rebut, 
Noas  pourrions  multiplier  les  citations,  car  il  n'est  aucun  des  nombreux 
inventaires  d'objets  mobiliers  saisis  sur  les  émigrés  ou  abandonnés  par 
eux  durant  la  Révolution,  qui  ne  fasse  fréquemment  mention  de  faïences. 
Nous  avons  la  conviction  que  des  recherches  consciencieuses  parmi  les 
pièces  non  classées  des  collections  publiques  ou  particulières,  ou  encore 
parmi  celles  qu'un  examen  trop  sommaire  a  fait  attribuer  à  d'autres  fabri- 
ques, conduiraient  à  la  découverte  de  nouveaux  spécimens  de  l'industrie 
limousine.  C'est  particulièrement  sur  les  pièces  considérées  comme  prove- 
nant de  Houstiers,  —  avec  lesquelles  celles  de  Limoges  ont  une  certaine 
analogie  au  point  de  vue  du  décor,  sans  doute  parce  que  Massié  avait  em- 
prunté ses  artistes  à  cette  localité,  —  que  devrait  porter  l'examen.  >—  Nous 
ne  sommes  pas  le  premier  à  demander  que  cette  vérification  soit  entre- 
prise par  des  hommes  compétents.  Faut«il  espérer  que  ce  vœu  sera  un 
jour  réalisé  ? 


Arrêt  du  Conseil  d'Etat  autorisant  rétablissement  à  Limoges  de  la 
manufacture  de  fayencerie  du  «'  André  Massié.  —  1736. 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d^Estat. 

Vu  au  Conseil  d'Eslat  du  Roi  la  requeste  présentée  en  îcelui  par 
André  Massié,  architecte  et  entrepreneur  des  ouvrages  des  ponts 
et  chaussées  de  la  Généralité  de  Limoges,  contenant  que  Téloigne- 
ment  des  manufactures  de  fayancerie  des  villes  de  Bordeaux,  Mou- 
lins et  Nevers,  les  traverses  pénibles  et  la  difficulté  des  chemins, 
rendant  cette  sorte  de  marchandise  extrêmement  raredanslehautet 
bas  Limosin,  le  supliant  se  seroit  porté  à  en  établir  une  dans  la 
dite  Généralité,  à  Teffet  de  quoi  ayant  fait  venir  du  dehors  des 
ouvriers  capables  d'exécuter  ce  projet  conjointement  avec  lui,  il  a, 
de  la  terre  préjugée  propre  à  celte  fabrique,  fait  faire  différens 
essais,  lesquels  en  promettent  un  succès  assuré.  Mais  comme  cette 
entreprise  exige  des  dépenses  considérables  dont  le  supliant  ne 
scauroit  espérer  de  s'indemniser  que  par  une  possession  tranquille 
de  son  état,  de  la  jouissance  des  exemptions  el  privilèges  que  Sa 
Majesté  a  la  bonté  d'accorder  ordinairement  à  ceux  qui  veulent 
bien  employer  leurs  soins  et  leur  fortune  pour  l'utilité  publique, 
il  a  lieu  d'espérer  que  Sa  Majesté,  considérant  les  avantages  qui 


902  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LIMOUSIN. 

résulteront  de  rétablissement  d'une  pareille  manufacture  dans  la 
Généralité  de  Limoges,  se  perlera  d'autant  plus  yolontiers  à  la 
favoriser  que  le  supliant  n'est  entré  dans  le  projet  dont  il  s'agit 
qu'à  la  persuasion  des  personnes  les  mieux  informées  des  besoins 
de  la  province  et  les  plas  zélées  pour  le  soulagement  de  ses  ha- 
bilans. 

A  ces  causes  requéroit  le  supliant  qu'il  plût  à  Sa  Majesté  lui  ac- 
corder le  droit  de  fabriquer  seul  de  la  fayance  dans  le  haut  et  bas 
Limosin,  pendant  le  temps  et  espace  de  vingt  années  avec  deffenses 
expresses  à  toutes  personnes  d'en  faire  ou  faire  faire  pendant  le  dit 
temps  en  la  dite  province,  à  peine  de  trois  mille  livres  d'amende, 
de  confiscation  des  matières  travaillées  ou  préparées  et  de  tous 
dépens,  dommages  et  intérêts,  l'exempter  pendant  le  dit  temps, 
ensemble  les  fabriquans  et  ouvriers  qu'il  sera  obligé  de  faire  venir 
des  provinces  circonvoisines,  de  la  taille  personnelle,  fourrage  et 
ustancile,  logement  de  gens  de  guerre,  collecte,  tutelle,  curatelle 
et  nominations  à  icelles,  guet  et  garde  et  autres  charges  publiques, 
ordonner  que  la  dite  manufacture  sera  érigée  en  manufacture 
royale  et  lui  permettre  de  faire  fouiller  des  terres,  sables  et  autres 
matériaux  propres  à  la  dite  fabrique  partout  où  il  s'en  trouvera, 
en  dédommageant  les  propriétaires  des  fonds  à  dire  d'experts. 

Veu  aussi  l'avis  du  s'  Aubert  de  Tourny,  maître  des  requestes  et 
intendant  de  la  Généralité  de  Limoges,  ensemble  celui  des  députez 
du  commerce. 

Ouy  le  rapport  du  sieur  Orry,  conseiller  d'Estat  et  ordinaire  au 
Conseil  royal,  controlleur  général  des  finances. 

Le  Roy  en  son  Conseil  a  permis  et  permet  au  sieur  Massié  de 
faire  et  fabriquer  toutes  sortes  d'ouvrages  de  fayancerie  dans  tel 
lieu  de  la  province  et  Généralité  de  Limoges  qu'il  jugera  le  plus 
propre  pour  rétablissement  delà  dite  manufacture,  faisant  défenses 
à  toutes  personnes  de  l'y  troubler,  à  peine  de  tous  dépens,  dom- 
mages et  intérêts.  Veut  Sa  Majesté  que  le  dit  sieur  Massié,  le 
contre-maître  et  le  peintre  qui  seront  par  lui  employez  soient 
exempts  de  la  taille  pour  raison  de  la  dite  manufacture  seulement 
et  qu'à  cause  de  leurs  biens  personnels  et  autres  qu'ils  pourront 
faire  valoir,  ils  soient  taxez  d'office  parle  s'  Intendant  de  la  dite 
Généralité.  Ordonne,  en  outre,  Sa  Majesté,  que  le  dit  Massié  sera 
pareillement  exempt  des  fourrage,  ustancile,  logement  de  gens  de 
guerre,  collecte,  tutelle,  curatelle  et  nominations  à  icelles,  guet  et 
garde  et  autres  charges  publiques,  tant  et  si  longuement  que  sub- 
sistera la  dite  manufacture,  à  la  charge  par  lui  de  justifier  au  con- 
seil de  l'établissement  d'icelle  dans  un  an,  à  compter  du  jour  et 
date  du  présent  arrêt,  sur  lequel  seront  toutes  lettres  nécessaires 
expédiées. 


DOCUMENTS  SUB    l'iNDUSTRIE   ET   LES  VANUFACTUBES   EN  LIMOUSIN.       303 

Fait  au  CoDSf&U  d*Est^^  ^n  ^oi  tequ  à  Yersa^le^  le  yipgt-neuf 
may  mil  icpt  cent  trente-six.  CoIlatiouDé.  Signé:  I)e  Vav^^i^Y* 

J^côtë  est  écrit  :  enregistré  ai^  coatro,^e  gênerai  des  finances  par 
QPU3^  Conseiller  d'Estat  et  ordinaire  au  Conseil  royal,  Conlrolleur 
gei^eral  des  finances.  A  Fontainebleau,  le  Yipgt-neuf  octobre  mil 
s^pt  pent  trente-sept.  Signé  :  Orry. 

^t  au-dessous  est  aussi  écrit  :  le  Yingt-septiesme  may  mil  sept 
c^t  qi^araQte,  en  conséquence  de  Tarrét  de  la  Cour  de  Parlement 
de  çejourd'^iuy,  le  présent  arrêt  a  esté  enregistré  e?  registres  (Je  la 
dita  Qour  pour  y  aYoir  repour»  si  besoin  est.  F^jt  à  Borde^jax,  4u 
greffe  de  la  di(e  Cour^  ledi^  jour  q^e  dessus.  CoUaliqnné.  Signio  : 

Et  à  Gfilé  :  le  dit  arrest  du  Conseil  a  esté  registre  au  greffe  de  1^ 
Cour  de3  aydes  de  Clermopt-Ferrand,  pour  jouir  par  l'impétrant  de 
Teffet  et  contenu  en  icehiy  et  pour  y  avoir  recours  quapd  besoin 
sera  suivant  Tarret  de  la  Copr  de  çejourd')iuy,  dix-sept  novembre 
mil  sept  cent  quarante.  Signé  :  Tixikr. 

Suivent  des  lettres-patentes  données  à  Fontainebleau  le  8  oc- 
tobre 1737  et  mention  de  l'enregistrement  au  Parlement  de  Bqr- 
de^ux,  à  la  Cour  de$  Aides  de  CJermont-Ferrand  et  au  greffe  de  la 
Cour  sénéchale  de  Limoge^. 

Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  registre  d*édits  et 
déclarations  de  i740  à  1785,  série  G,  second  complément  à 
publier. 


Acquisition  par  André  Massié  d'un  emplacement  pour  établir  une 

fabrique  de  faïence  (1736). 


Dans  un  jardin  appartenant  à  sieur  Arnlré  Hassié,  entrepreneur 
é^s  ouvrages  du  Roy,  situé  au-dessous  des  révérends  pères  Au- 
guslins  de  celte  ville  de  Limoges,  paroisse  de  Saint-Michei  des 
Uon9i  le  quatorze  du  mois  de  juin  mil  sept  cent  U'ente-six,  après 
midy,  pardevanl  moy  Jean  Belut,  notaire  royal  de  la  dite  ville  et 
iémoinç  soussignés,  fut  présente  dem"®  Catherine  Lajudie  veuve  de 
sieur  Blarlial  Arnaud  d'Encombe,  habitante  de  Limoges  rue  des 
Aresnes,  paroisse  du  dit  Saint-Michel,  laquelle  de  son  bon  gré, 
libre  et  franche  volonté,  et  bien  iostruile  de  ses  faits  ei  droit,  a 
ven4iM>  cédié,  quiUé  et  iransporic,  comme  par  ces  présentes  elle 
vend,  cède,  ^viiUi^  et  transporte,  avec  promesse  de  garantir,  four- 


304  BOCliTÉ  ARCBËOLOCIQUE  ET  BtSTOniQUE  DU  LIMOUSIN. 

niretfaire  valoir  de  tous  troubles,  évictions,  empêchemens  géné- 
ralement quelconques,  aud.  sieur  Massié,  habitant  dud.  Limoges, 
fontaine  des  Barres,  paroisse  dud.  Sainl-Michel,  à  ce  présent  et 
acceptant,  un  lopin  de  terre  joignant  et  attenant  au  jardin  acqnis 
par  led.  sienr  Massié  de  sieur  Jean-Baptiste  Bourdeau,  de  la  con- 
tenance d'une  éminée  de  pays  ou  environ,  confrontant  de  deux 
parts  au  jardin  acquis  par  led.  sieur  Massié,  d'autre  et  par  le  bas 
au  restant  de  la  terre  de  lad.  dem'"  Lajudie,  et  par  côté  à  autre 
terre  de  lad.  dem"*  Lajudie,  un  petit  cbemin  de  servitude  entre 
deux,  dans  lequel  lopin  de  terre  les  parties  ont  fait  mettre  des 
piquets  pour  y  mettre  des  bornes;  led.  lopin  de  terre  cy-dessus 
vendu,  franc  et  quitte  de  toutes  charges,  dettes,  hypothèques, 
arrérages  de  rente  de  tout  le  passé  jusqu'au  présent  jour,  à  la 
charge  par  le  sieur  Massié  de  payer  à  l'avenir  sur  led.  lopin  de 
terre  vendu  ou  à  la  décharge  des  autres  héritages  de  lad.  dem"* 
Lajndie  deux  quartes  froment  mesure  de  l'abbaye  de  Saint-Martial, 
au  seigneur  abbé  dud.  Saint-Martial,  seigneur  foncier  et  direct, 
et  ce  chaque  année.  Cette  vente  ainsy  faite  pour  et  moyennant  le 
prix  et  somme  de  cent  soixante  livres,  laquelle  somme  led.  sieur 
Massié  a  présentement  compté  et  réalisé  en  louis  d'argent  et  autre 
bonne  monnoye  ayant  cours,  à  lad.  dem"*  Lajudie,  par  elle  nom- 
brée,  reçue  et  emportée,  dont  elle  s'en  est  contentée  et  en  a  quitté 
led.  sieur  Massié,  et  promis  icelluy  lopin  de  terre  garantir  envers 
et  contre  tous,  en  ce  que  led.  sieur  Massié  sera  tenu  et  obligé  de 
payer  pour  l'adveoir  un  chacun  an  à  la  dite  dem"°  Lajudie,  on 
and.  seigneur  abbé  de  Saint-Martial,  à  la  mesure  de  l'abbaye,  une 
ëmine  froment  sur  led.  lopin  de  terre  vendu,  ou  à  la  décharge 
des  autres  héritages  de  lad.  dem'"  Lajudie,  moyennant  quo; 
icelle  s'est  démise,  dessaisie  et  dévétiie  du  susd.  lopin  de  terre 
et  en  a  saisi  et  envétu  led.  sieur  Massif,  pour  le  bail  et  tradition 
des  présentes,  consentant  qu'il  en  prenne  la  réelle,  actuelle  et 
corporelle  possession,  qu'il  en  jouisse,  use  et  dispose  à  son 
plaisir  et  volonté,  dans  lequel  lopin  de  terre  led.  sieur  Massié 
a  déclaré  y  vouloir  bastir  pour  une  manufacture  royalle  de 
fayance. 

Et  tout  ce  que  dessus  ayant  été  accepté  par  les  dites  parties, 
icelles  ont  promis  de  le  tenir  sous  l'obligation  respective  de  Ions 
et  un  chacun  leurs  biens,  meubles  et  immeubles,  présens  et  à 
venir.  Dont  et  du  tout  a  été  concédé  lettres  sous  le  scel  royal  en 
la  meilleure  forme,  ez  présence  des  sieurs  Pierre  Chassaigne  et 
Pierre  Morin,  praticiens,  habitans  de  la  présente  ville,  témoins  h 
ce  requis  et  appelles.  Ainsi  signé  à  l'original  ;  Catherine  Lajuoie, 
veuve  Arnaud  de  Combes,  Marsië,  CsASSAicnE,  Moam  et  BELtrr, 


OOCUMKKTS   SUR   L'iNDUSTRIB   ET  LES   HANOFACTUBES   EN   LIMOUSIN.       SOS 

not"  royal  héréditaire.  ControUé  à  Limoges,  le  vingt-cinq  juin 
1736.  Reça  trois  livres  deux  sols  six  deniers,  signé  :  Baresge. 

Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne,  classement  provi- 
soire A  19. 


Aubert  de   Toumy^  intendant  de  la  Généralité  de  Limoges^ 
à  Monsieur  Fagon,  intendant  des  Finances. 

A  Limoges,  le  17  décembre  1741.     , 

Le  s' Massié,  sur  la  manufacture  de  fayance  duquel  j'ai  eu  Thon- 
neur  d'écrire  à  M.  le  contrôleur  général  le  15  de  ce  mois,  en  réponse 
à  «a  lettre  du  8,  a  désiré  vous  envoyer  différentes  petites  pièces  de 
sa  fayance  qu'il  a  fait  mettre  à  votre  adresse  dans  une  boête  partie 
par  le  messager  de  cette  semaine,  afin  que  vous  puissiez  connoitre 
si  elle  mérite  la  protection  du  Conseil  ;  l'état  en  sera  joint  avec  les 
prix  ;  il  me  prie  de  vous  en  prévenir  et  dit  que  si  son  débit  augmen- 
toit  par  la  diminution  des  droits  de  sortie,  il  pourroit,  en  se 
contentant  de  moins  gagner  sur  chaque  pièce,  les  donner  à  meil* 
leur  marché. 

J'ay  l'honneur  d'être.  Monsieur,  etc.  Tourwy. 

Etat  de  la  fayance  de  la  manufacture  de  Limoges,  contenue  dans 
une  caisse  adressée  à  M.  Fagon  le  22  décembre  1741,  par  le  sieur 
Massié  : 

3  assiettes 4  livres  la  douzaine. 

2  jattesovales 1  liv.  10  s.  la  pièce. 

1  pot  à  l'eau 1  liv.  — 

1  compotier 8  s.  — 

1  théyère 18  s.  — 

1  plat  de  service  ordinaire  qui 
vaaufeu 1  liv.  — 

II  y  a  dans  cette  manufacture  d'autre  fayance  de  toute  espèce  qui 
soutient  le  plus  gros  feu,  comme  casseroUes,  plats,  pots  à  soupe, 
même  des  réchauts  et  des  alambics  ;  on  y  fabrique  des  assiettes  de 
prix  plus  bas  que  celles  cy-dessus  à  3  liv.,  2  liv.,  et  1  liv.  15  s.  la 
douzaine. 

Si  l'entrepreneur  avait  plus  de  débit,  il  pourroit,  en  se  conten- 
tant d'un  médiocre  profit,  donner  la  marchandise  à  beaucoup 
meilleur  marché. 

("Archives  départementales  de  la  Gironde,  série  C,  n°  /  766.) 


aoQifeTi  AncHâoLOQiQUE  et  DiSToniQut  du  UKOUsia. 

DÉCOUVERTE  DU  KAOU.N 
Près  de  Saint-Vrieii  (ETaule-Vienae). 


La  découverte  de  gisements  de  kaolin  aux  environs  de  Saini-Yrieix,  à 
laquelle  se  rattacheni  les  origines  des  premières  manufactures  de  porce- 
laine du  Limousin,  n'a  ]>ai  jusqu'Ici  iitA  l'alleatioD  des  êrudiis.  Les  cir- 
constances dans  lesquelles  se  [iroduisii  cette  découverte,  qui  a  eu  de 
si  heureuses  conséquences  pour  la  prospérité  iodustrielie  de  notre  région, 
inâriieraient  cependant  d'être  mieux  connues.  Des  traditions  subsistenl, 
qui  n'oDi  jannai»  été  coatrOlées  et  ne  reposent  snr  aucuu  foodenie^l. 
C'est  aiuEi  qu'une  opinion  très  répandue  aiVrii)ue  i  i-et  évèaenienl  ans 
cause  purement  rortiiite,  alors  qu'il  ressort  avec  évidence  des  fait  connus 
que,  si  le  hasard  y  fut  pour  une  pari,  de  patientes  recherches  mirent  aussi 
sur  la  raie  de  cette  découvcrie. 

Plusieurs  noms  yoni  d'ailleurs  été  associés  sansqne  l'on  ait  pu  dire  dan« 
quelle  mesure  ici  ou  lel  personnage  y  a  contribué  et  quelle  part  de  mérite 
revient  à  chacun. 

Les  documents  ajant  Irait  à  celte  question  sont  aujourd'hui  disséminés 
dans  divers  dépôts  d'archives  ou  bibliotliéques.  Nous  avons  entrepris  de 
les  rapprocher,  en  en  publiant  tout  au  moins  les  parties  essentielles.  L'ud 
des  plus  imporianis  parmi  ces  documents  est  sans  contredit  la  notice  hisio- 
rique  sur  la  manufacture  de  Sèvres,  écrite  par  Hilloi,  directeur  des  fours  el 
du  laboratoire  des  pitcs.  La  seconde  partie,  coiisaciée  à  la  porcelaine  dure, 
abonde  en  détails  sur  le  sujet  qui  nous  occupe.  Nous  espérons  donner  un 
jour  le  texte  de  cette  notice,  dont  M.  Aug.  Bosvieui  a  laissé  uue  analyse. 
En  attendant,  il  paraît  utile,  pour  l'inielligence  des  pièces  qu'on  va  lire, 
de  rappeler  brièvement  quelques-uns  des  faits  qui  précédèrent  la  décou- 
verte de  nos  gisements  kaollciques. 

C'est  en  (764  qu'un  traité  fut  conclu  entre  la  Manufacture  royale  de 
France  et  le  si  ras  bourgeois  Hannong,  directeur  de  la  faïencerie  de  Pran- 
kentha!,  pour  l'acquisition  des  procédés  de  fabriration  de  la  porcelaipe  dure. 
Le  secret  une  fois  révélé,  on  s'aperçut  que  la  matière  première  manquait 
complèlement  et  que  Hannong  se  trouvait  dans  l'impossibilité  d'en  fournir. 
U  traité  ne  fut  tésllié  qu'en  176». 

Hillot  rapporte  que  vers  cette  époque,  H.  Courleii  étaul  comous&tire  du 
roi  près  la  Manufacture,  il  arriva  un  jour  une  caisse  contenant  douv  i 
quinze  livres  de  kaolin  avec  lequel  lurent  faits  des  essais.  Ceux-ci  ayant 
donné  de  bons  rËsuliats,  le  direcieur,  M.  Boilcau,  s'eoqult  de  la  provenance 
de  ce  kaolin  ei  questionna  à  ce  sujet  H.  de  Nuits,  secrétaire  de  H-  Cour- 
leiï,  mais  sans  pouvoir  obtenir  de  lui  une  indication  précise. 

Le  récit  de  Hilloi  soulève  ici  une  i^nigme  que  sa  notice  ne  résout  pas. 
Le  fait  d'interroger  le  secrétaire  de  H.  Courtelx  est  en  lui-même  sans  por- 
tée;   tout  au  plus  pourrait-on  en  ilrer  celle  indui.liou  que  M.  de  Nuits 


DOCUMENTS   BVtL   l'uidGSTRIE   RT  LES  MANUFACTURES   EN  LIMOUSIN.       207 

deTait  élre  le  personnage  qui  avait  reçu  la  caisse  de  kaolia.  Mais  il  acquiert 
une  signification  particulière  si  on  le  rapproche  d'un  passage  des  délibéra- 
tions de  la  Société  d'agriculture  de  Limoges.  Dans  la  réunion  tenue  le 
5  avril  1766  par  cette  Société,  il  fut  présenté  une  terre  blanche  que  Turgot, 
—  dit  le  procès-verbal,  —  reconnut  pour  être  le  véritable  ha-ou-lin  de  la 
Chine  (1). 

L'envoi  provenait  d'un  associé  libre,  M.  Jean-Claude  Bounin  de  Nouït, 
(le  nom  est  parfois  orthographié  :  de  Nuits),  juge  royal  de  Rançon,  en 
Basse-Marche,  physicien  et  neveu  de  Tabbé  Nolel,  deTAcadémie  des  sciences. 

Serait-il  invraisemblable  de  supposer  que  M.  de  NouU  avait  également 
fourni  le  kaolin  destiné  aux  expériences  de  la  Manufacture,  et  quMl  Tavait 
expédié  au  secrétaire  de  9A.  Courteix,  auquel  le  rattachaient  apparemment 
des  liens  de  parenté  ? 

Nous  ne  faisons  toutefois  qo^émettre  une  simple  conjecture.  Le  registre 
de  la  Société  d'agriculture  ne  conlii^nt  malheureusement  trace  d'aucune 
autre  communication  sur  ce  sujet,  ei  nous  .n'ignorons  pas,  d'autre  part, 
qu'à  un  certain  moment  le  directeur  de  Sèvres,  dans  le  but  de  faciliter  les 
recherches,  avait  pris  le  parti  de  distribuer  à  plusieurs  savants  les  frag- 
Tnents  du  kaolin  restés  en  sa  possession. 

L'arehevéque  de  Bordeaux  visitant  un  jour  la  Manufacture  de  Sèvres  fut 
émerteillé  éa  k  blancheur  d'une  plaquette  de  porcelaine  obtenue  à  la  suite 
des  premiers  essais.  Il  prit  un  échantillon  du  kaolin,  promettant  de  le 
montrer  i  un  apothicaire  de  Bordeaux,  du  nom  de  Villaris,  qui  passait 
pour  être  très  versé  dans  les  sciences  naturelles. 

Mis  au  conrant  des  efforts  tentés  de  tous  côtés  pour  se  procurer  la  précieuse 
matière,  Villaris  comprit  bien  vite  tout  le  parti  qu'il  pourrait  tirer  d'une 
telle  découverte.  Il  se  mit  aussitôt  en  recherches  et  explora  les  Pyrénées  et 
les  Cévennes  sans  rien  trouver.  De  retour  à  Bordeaux,  il  songea  à  envoyer 
au  chirurgien  Darnet,  de  Sainl-Yrieix,  avec  lequel  il  avait  autrefois  voyagé 
en  Allemagne,  un  fragment  du  kaolin  qui  lui  avait  été  confié,  en  lui  de- 
mandant s'il  n'en  connaîtrait  pas  de  semblable  dans  son  canton.  Soit,  comme 
on  rassure,  que  la  femme  de  Darnet  eut  déjà  appelé  l'attention  de  son  mari 
sur  les  propriétés  d'une  argile  blanche  et  onctueuse  dont  elle  s'était  servie 
pour  blanchir  le  linge,  soit  que  l)arnet  eut  lui-même  constaté  la  présence 
de  celte  argile  à  proximité  de  la  ville,  sa  réponse  ne  se  fît  pas  attendre. 
Elle  fut  suivie  d'un  envoi  d'environ  trois  livres  de  kaolin,  qui,  de  Bordeaux, 
furent  expi^diées  sur  Sèvres. 

De  nouvelles  expériences  faites  à  la  Manufacture  avec  cette  argile  réussi- 
rent pleinement  et  Millot  songea  à  s'approvisionner. 

Alors  commença  entre  Villaris  d'une  part,  le  ministre  Bertin  et  ses  inter- 
médiaires  d'autre  part,  une  guerre  de  ruses  qui  devait  avoir  pour  résultat 
d'assurer  à  l'apothicaire  de  Bordeaux  le  bénéfice  exclusif  de  la  découverte 
du  kaolin,  que  l'on  présumait  avoir  été  trouvé  aux  environs  de  celte  ville. 
Ce  sont  les  péripéties  de  cette  lutte  que  retracent  les  pièces  que  nous  publions 
ci -après,  et  celles  qui  suivront. 

(1)  Vof.  Choix  de  documents  historiques  sur  le  Limousin,  publié  par  M.  A.  Lbhoux. 


t08  SOClÂTé   AltCHÉQLOGIQOB   ET   DISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

De  son  côté,  H.  Edouard  Garnier  qui,  dans  une  conférence  donnée  à  Li- 
moges au  mois  d*août  i890,  a  présenlé  rhistoriqne  de  l'industrie  de  la  porce- 
laine en  France  au  xvii®  siècle,  a  iMnleniion  de  publier  une  série  de  lettres 
dans  lesquelles  le  chimiste  Hacquer,  chargé  en  1768  de  reconnaître  les 
gisements  signalés  du  côté  de  Toulouse  et  de  Tarbes,  manifeste  ses 
espérances  et  ses  déceptions.  On  aura  ainsi  un  ensemble  de  documents 
susceptible  de  faire  la  lumière  complète  sur  les  circonstances  dans  les- 
quelles fut  découvert  le  kaolin  du  Limousin. 


L'archevêque  de  Bordeaux  [Louis- Jacques  d'Audibert  de   Lussan) 
à  M.  MacqueTy  de  l'Académie  des  sciences. 

Ce  25  février  1767. 

Me  trouvant,  Monsieur,  il  y  a  quelque  temps,  avec  M...  chez 
monsieur  de  Berlin,  ministre  de  notre  province,  et  qui  est  chargé 
de  la  manufacture  de  porcelaine,  je  lui  dis  que  j'avais  vu  dans  les 
mains  d'un  apothicaire  de  Bordeaux,  bon  chimiste  et  connaissant 
dans  les  minéraux,  une  pierre  qu'il  prétendoit  être  le  vrai  pétunzé 
de  la  Chine,  et  qu'il  connaissait  un  canton  de  notre  province  où  elle 
était  commune. 

Monsieur  Berlin  me  pria  de  faire  venir  un  échantillon  de  la  pierre 
pour  la  faire  examiner.  J'ai  écrit  pour  cela  et  j'ai  reçu  un  morceau 
de  celte  pierre.  M.  Berlin  m'a  prié  de  vous  la  remettre  pour  l'exa- 
miner et  faire  les  expériences  nécessaires.  C'est  pourquoi  je  vous 
serais  obligé  si  pouviez  vous  donner  la  peine  de  passer  chez  moi 
demain  ou  après  demain,  avant  dix  heures  et  demie  du  matin. 

J'ai  l'honneur  d'être.  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéis- 
sant serviteur. 

f  L'archevêque  de  Bordeaux. 

{Bibliothèque  nationale,  fonds  françai^^  n®  9 1 35), 


L'archevêque  de  Bordeaux  à  M.  Macquer. 

Ce  lundi  (4768). 

J'ai  vu.  Monsieur,  il  y  a  quelques  jours,  M.  de  Berlin,  notre 
ministre,  à  Versailles,  qui  me  fil  des  reproches  de  ce  que  l'apothi- 
caire de  Bordeaux  qui  avait  enyoyé  un  échantillon  de  matière  à 
porcelaine  que  vous  avez  trouvé  très  bon,  n'avait  plus  répondu,  ce 
qui  lui  donnoit  lieu  de  croire  que  cet  échantillon  ne  venait  pas  de 


DOGUXBKTS  SCB   L*1NDUSTRIR   RT  LES   MANUFACTUR&S  Klf   LIMOUSIN.        309 

France.  Il  y  a  eu  de  ma  faute  dans  ce  retardement.  Ayant  passé 
plusieurs  mois  à  mon  abbaye,  j'avais  perdu  de  vue  cet  objet. 

Si  vous  voulez  vous  donner  la  peine  de  passer  chez  moi,  aujour- 
d'hui, vers  onze  heures,  je  vous  communiquerai  la  lettre,  et  vous 
verrez  lue  dans  le  contenu  de  cette  lettre  il  offre  d'en  fournir  plus 
de  cent  barriques  et  de  les  expédier  par  mer  jusqu'à  vous. 

J'ai  l'honneur  d'être,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéis- 
sant serviteur. 

f  L'Archevêque  de  Bordeaux. 

{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n«  91 55). 


Instructions  données  par  le  ministre  Bertin  à  M.  Macquer 

(s.  d.  — 1768). 

Tout  étant  d'accord  avec  le  s'  Villaris,  il  parait  qu'il  est  essentiel 
d'aller  sans  délai  sur  les  lieux,  avant  la  mauvaise  saison,  pour  re- 
connaître l'état  de  cette  terre  et  constater  si  elle  est  en  suffisante 
quantité  pour  le  service  de  la  Manufacture.  Pour  cela,  il  faudrait 
que  le  s'  Villaris  demande  d'abord  au  propriétaire  la  permission 
de  sonder  le  terrain,  en  lui  faisant  espérer  que,  s'il  trouve  dans  son 
errain  la  matière  qu'il  cherche,  il  se  propose  de  l'acheter  et  de  lui 
en  donner  un  prix  avantageux.  Il  sera  accompagné  dans  cette  re- 
cherche par  celui  qui  a  découvert  la  terre. 

S'il  résulte  de  celte  première  opération  que  la  terre  est  de  bonne 
condition  à  tous  égards,  alors  il  sera  d'autant  plus  essentiel  d'en 
assurer  la  possession  à  la  Manufacture,  et  le  plus  promptement 
possible.  Le  moyen  qui  paraît  le  plus  convenable,  c'est  que  le 
s'  Villaris  l'achète  en  son  nom  du  propriétaire,  comme  s'il  devait 
l'employer  à  des  ouvrages  qui  lui  seraient  particuliers  et  qu'ensuite 
il  cédât  son  entreprise  au  Roi. 

Suivant  tout  ce  qu'il  en  a  déjà  dit  jusqu'à  présent,  les  couches  de 
cette  terre  ont  de  l'épaisseur,  de  la  profondeur  et  l'étendue  du  terrain 
dans  laquelle  elle  se  trouve  est  à  peu  près  de  la  grandeur  du  Palais- 
Royal.  Si  cela  est  ainsi  et  qu'on  trouve  beaucoup  d'épaisseur  aux 
bancs  de  cette  terre,  il  ne  serait  point  nécessaire  d'acquérir  tout  le 
terrain  dans  lequel  elle  s'est  montrée,  mais  seulement  la  portion 
de  ce  terrain  où  elle  est  la  plus  épaisse  et  de  mielleure  qualité.  Il 
est  possible  que  tout  le  terrain  où  se  trouve  cette  terre  n'appar- 
tienne pas  au  même  propriétaire  ;  cela  est  même  vraisemblable. 
Dans  ce  cas,  il  résulterait  un  grand  avantage,  pour  faire  l'acquisi- 
tion à  un  meilleur  compte,  à  causede  la  concurrence. 


9f0  SOCIÉTF.   ARCnéOLOGlQDR   RT  RIST0RT(/1]li   EKJ   UMOUSIN. 

Il  faut,  pour  la  réalisation  de  ce  projet,  que  le  s' Viilaris  garde  le 
secret,  -qu  il  adresse  la  terre  de  la  Manufacture  comme  à  un  associé. 
Le  sieur  Viilaris,  par  ses  connaissances,  est  propre  à  surveiller 
Texploitation  :  s'il  ne  le  peut,  on  chercherait  dans  le  pays  un 
homme  intelligent  qu'on  instruirait  de  tout  ce  qu'il  faut  qu'il  sache 
et  à  qui  on  s'adresserait. 

Le  s' Viilaris  fera  reconnaître  Tétat  de  la  terre  et  du  terrain. 
Cette  connaissance  doit  précéder  non-seulement  l'exécution  des 
promesses  faites  conditionnellement  au  s'  Viilaris,  mais  encore 
l'acquisition  du  terrain. 

f Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n"*  91 35), 


Le  ministre  Bertin  à  M.  Fargès,  intendant  de  la  Généralité 

de  Bordeaux, 

K  Gompiègne,  le  20  aoust  1766. 

M.  Tarchevêque  de  Bordeaux,  Monsieur,  m'avoit  donné  la  con* 
noissance  d'une  terre  a  porcelaine  dont  le  s' Viilaris  (1),  apoticaire 
de  Bordeaux,  avait  fait  la  découverte  et  les  essays  que  j'en  avais 
fait  faire  à  la  manufacture  du  roy  ayant  très  bien  réussi,  je  m'étais 
déterminé  d'acheter  du  s'  Viilaris  le  secret  de  sa  découverte.  C'est 
à  dire  qu'au  moyen  d'une  somme  convenue  avec  lui,  il  donnerait 
Tindication  du  terrain  où  se  trouve  cette  terre  et  le  nom  du  parti- 
culier à  qui  il  appartient  pour  pouvoir  en  traiter  avec  luy,  mais  à 
peine  suis-je  parvenu  par  la  médiation  de  M.  Tarchevêque  de 
Bordeaux  à  traiter  avec  le  s' Viilaris  et  lorsque  je  me  proposais 
d'envoyer  M.  Maquer,  de  l'Académie  royale  des  sciences,  pour  re- 
connaître sur  les  lieux  la  terre  en  question  et  s'assurer  quela  masse  en 
était  suffisante  pour  fournir  aux  besoins  de  la  manufacture,  que  le 
S'  Viilaris  s'est  répandu  en  propos  indiscrets  sur  ce  traité  et  il  a 
poussé  l'indécence  jusque  à  dire  qu'il  ne  donnerait  aucune  indica- 

(4)  M.  Marzelles,  pharmacien  à  Bordeaux,  possède  ua  buste  de  Viilaris 
«n  porcelaine.  Sur  le  socle  on  lit  : 

Marc-Hilaire  Viilaris 

né  à  Bordeaux  en  MOCCXXX 

y  est  décédé  en  MDCCXCII 

pharmacien,  chimiste  et  naturaliste. 

On  lui  doit  la  découverte 

du  kaolin  (terre  blanche. 

à  porcelaine)  à  Saint-Yrieix, 

départeRieut  de  la  Hte^Vienne, 

en  4767. 

F«  Baif  nol,  C  f* 
de  porcelaine  à  Limoges. 


DOCUMENTS   SOR    l/lNDOSTRIR   ET  LKS   lIAmiPACTlIflKS   CN  LTHOUSIN.        ^11 

lion  jusqu'à  ce  qu'il  eot  touché  le  montant  ôe  la  récompense  q«i 
lui  avait  été  promise,  sauf  à  le  rendre  si  l'objet  ne  remplissait  pas 
lool  ce  qu'il  avait  annoncé.  Ge  dernier  trait  a  mis  le  comble  au 
mécontentement  que  j'avais  du  s'  Villaris  et  la  malhonnêteté  ôe 
son  procédé  m'a  fait  craindre  qu'il  ne  remplît  pas  avec  fidélité  ses 
engagements.  C'est  pourquoy  j'ai  rompu  la  convention  qui  avait  été 
felte  avec  luy  par  la  médiation  de  M.  TArchevôque  de  Bordeaux  qui 
veut  bien  se  charger  de  le  faire  dire  au  s' Villaris.  Tout  étant  entier  à 
cetégardetne  nous  ayant  donné  aucune  espèce  de  reoseignemeotje 
prends  le  parti  d'envoyer  sur  les  lieux  M.  Maquer,  de  l'Académie 
royale  des  sciences  et  commissaire  à  la  manufacture  du  roy,  pour 
faire  les  recherches  nécessaires  à  cet  objet.  Je  vous  prie^  Monsieur 
é^  l'aider  en  tout  ce  qui  pourra  dépendre  de  vous  et  de  luy  faire 
faire  connaissance  avec  l'ingénieur  des  ponts  et  chaussées  de  votre 
département  qui,  par  la  nature  de  ses  travaux,  a  une  connaissance 
phis  particulière  des  différentes  espèces  de  terres  blanches  qui 
seraient  propices  à  la  porcelaine  et  des  lieux  d'où  on  peut  les  tirer 
aisément;  peut  être  même  aurait-il  connaissance  des  recherches 
que  le  s'  Villaris  avait  fait  et  parviendra-t-il  par  là  à  la  découverte 
de  sa  terre.  Ce  n'est  point  ici  le  secret  d'un  artiste,  mais  la  con- 
naissance d'un  local  que  tout  le  monde  peut  avoir  comme  luy. 
Enfin,  je  vous  serai  très  obligé  des  facilités  que  vous  procurerés 
à  M.  Maquer,  et  je  vous  prie  de  lui  faire  éprouver  en  cette  occa- 
sion les  effets  de  la  protection  du  Roy. 
Je  suis,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Bbrtct. 

(P.  S.  de  la  main  dn' ministre J.  Vous  entendes.  Monsieur,  qu'il 
est  essentiel  que  le  voyage  et  les  irecherches  du  s'  Macquer  soient 
tenues  très  secrets. 

(Archives  départementales  tfe  fa  Gironde^  série  C,  if  1 766). 


Le  ministre  Bertin  à  Vlntendant  de  Bordeaux. 

A  Paris,  le  -i  octobre  1768. 

Jai  appris,  Monsieur,  par  la  lettre  que  vous  m'avez  écrit  le 
trois  de  ce  mois  (septembre),  que  le  sieur  Vilaris  s'est  trouvé  chez 
M.  Tarchevôque  de  Bordeaux  avec  M.  Maquer  qui  vous  a  dit  qu'il 
regrettait  sur  l'objet  de  sa  mission  que  la  négociation  avec  le  sieur 
Villaris  fut  rompue  ;  qu'en  conséquence,  vous  avez  fait  sentir  ses 
loris  au  sieur  Vilaris  qui  s'en  remet  actuellement  à  ce  que  vous  et 
M.  l'archevêque  de  Bordeaux  me  proposerez  ;  et  sur  ce  que  le  sieur 
Vilaris  vous  a  dit  que  ce  terrein,  situé  hors  de  votre  généralité, 


âtâ  SOCIÉTÉ  ARCHRaLOGiQUR    KT   HISTORIQUE   DU   LIHODSIN. 

sera  au  plus  de  la  valeur  de  trois  mille  livres,  vous  pensez  qu'il 
n'y  aurait  pas   d'inconvénient  de  faire    faire   cette  acquisition 
avant  qu'aucune  recherche  préalable  en  fasse  hausser  le  prix. 
Vous  ajoutez  qu'il  serait  à  propos  d'en  charger  le  sieur  Vila- 
ris  lui  même,  sur  la  probité  de  qui  l'on  peut  compter.  Quelqu'éloi- 
gné  que  je  sois,  Monsieur,  d'entendre  de  nouvelles  propositions  de 
la  part  d'un  homme  qui  a  osé  mettre  de  la  défiance  dans  l'exécu- 
tion des  ordres  que  le  Roy  m'a  donnés,  je  veux  bien  oublier  ses 
torts,  mais  nullement  entrer  en  négociation  avec  lui.  Les  condi- 
tions ont  été  que  le  sieur  Vilaris  déclarerait  avant  tout  et  indique- 
rait précisément  le  lieu  de  la  province  et  du  canton  où  ce  terrein 
est  situé,  le  nom  du  propriétaire,  en  un  mot  tous  les  renseigne- 
mens  nécessaires  pour  trouver  le  local  au  moment  où  l'on  en  aurait 
besoin.  S'il  venait  à  arriver  au  sieur  Vilaris  quelque  accident,  ou 
qu'il  vint  encore  après  l'acquisition  à  faire  le  diflScile  sur  son  secret 
dont  il  faut  qu'il  nous  rende  dépositaire  dès  ce  moment  et  surtout 
qu'il  ne  s'échappe  point  comme  il  le  fait  en  propos  indiscrets  sur 
sa  découverte  dont  il  ne  doit,  avant  comme  après  l'acquisition, 
parler  à  qui  que  ce  soit.  Vous  procéderez  à  faire  l'acquisition  de 
ce  terrein  comme  vous  le  jugerez  le  plus   convenable,  ou  en  char- 
geant le  sieur  Vilaris  de  cette  commission,  ou  toute  autre  personne 
de  la  discrétion  et  de  la  probité  de  laquelle  vous  serez  assuré.  Il 
faut  que  le  particulier  qui  en  aura  la  commission  fasse,  comme  il 
est  d'usage  en  pareille  occasion,  sa  déclaration  de  l'acquisition 
qu'il  va  faire  en  son  nom  et  pour  le  compte  du  roy.  On  remplira 
ensuite  les  formalités  usitées  pour  en  acquérir  la  propriété  à  Sa 
Majesté.  Je  tiendrai  avec  exactitude  les  engagements  que  j'ai  pris 
pour  l'acquisition  du  secret  du  sieur  Vilaris  et  dont  M.  l'archevêque 
de  Bordeaux  est  porteur,  aussitôt  que  l'affaire  sera  consommée 
et  que  M.  Maquer  m'aura  assuré  que  la  terre  trouvée  et  achetée 
est  bien  celle  dont  les  épreuves  lui  ont  réussi  à  la  manufacture  du 
Roy,  et  que  la  quantité,  comme  l'assure  le  sieur  Vilaris,  en  est 
suffisante  pour  son  approvisionnement. 
Je  suis,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Bertin. 

(P.  S.  de  la  main  du  ministre),  Prenés  garde  à  l'indiscrétion  et 
à  la  légèreté  du  sieur  Villaris,  et  soyés  assuré  que  dans  le  moment 
où  on  luy  recommandait  le  plus  le  secret  et  où  à  peine  M.  l'Arche- 
vêque était  convenu  avec  moy,  le  sieur  Villaris  écrivait  le  tout  à 
plusieurs  personnes  à  Paris,  et  que  l'une  d'entre  elles  m'en  a  parlé 
comme  d'une  chose  en  quelque  sorte  publique. 

{Archives  départementales  de  la  Gironde^  G,  1766). 

(A  suivre). 


ÉTUDE  HISTORIQUE 


f 


SUR 


L'ANCIENNE  VIE  DE  SAINT  MARTIAL 


I.  —  La  vie  de  saint  Martial,  écrite  par  un  auteur  inconnu  qui  a 
pris  le  nom  d'Aurélien,  second  évéque  de  Limoges,  a  joui  d'un 
grand  crédit  au  moyen-âge.  A  cette  époque  on  la  regardait  comme 
authentique.  Au  xu*  siècle,  Orderic  Vital  Ta  insérée,  en  grande 
partie,  dans  son  Histoire  ecclésiastique ,  et,  avant  le  milieu  du  siècle 
précédent  (1031),  c'est  cette  légende  que  citent  les  Pères  des  con- 
ciles de  Limoges  et  de  Bourges,  ainsi  que  le  pape  Jean  XJX, 
qui  ont  proclamé  Tapostolat  de  saint  Martial. 

Cette  Vie  a  été  publiée  en  i366  par  le  carme  Beaulxamis,  à  la 
suite  des  Histoires  apostoliques  d'Abdias;  elle  a  été  réimprimée 
dans  l'édition  de  Surius,  en  six  volumes,  que  Mosander  a  donnée 
en  1617;  et  de  nos  jours  (1877),  un  savant  anglais,  M.  Walter  de 
Bray  Birch  en  a  donné  une  nouvelle  édition,  d'après  plusieurs  ma- 
nuscrits du  British  Muséum. 

Les  critiques  modernes  ont  rejeté  celte  vie  comme  apocryphe. 
Du  Bousquet  (depuis  évéque  de  Montpellier),  dans  ses  Histoires  de 
l'Église  gallicane  {i6S6]^  s'est  borné  à  en  faire  l'analyse,  en  termi- 
nant par  celte  phrase  :  «  Si  vous  exceptez  le  nom  de  Martial,  le 
rcsle  paraîtra  un  tissu  de  fables  (1)  ».  Dom  Ruinart,  dans  son  édi- 
tion de  Grégoire  de  Tours  (1699),  dit  que  les  Actes  de  saint  Mar- 
tial, ainsi  que  les  épitres  qui  lui  sont  attribuées,  n'ont  aucune  au- 

(1)  «  Atque,  si  unum  Marlialis  nomen  exemeris,  reliqua  omnia  ficta 
vtdebunlur  »  (Hiator,  Eccl.  galUc,,  4636,  lib.  I,  cap.  xxui,  p.  44). 

T.  XXXIX.  14 


214  SOCIETE   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  D(J   LIMOUSIN. 

torité  (1);  les  BoUandistes,  dans  le  tome  V*  de  juin  (2)  se  sont 
contentés  de  reproduire  l'analyse  qu'en  avait  donnée  du  Bousquet. 
Sans  doute,  cette  légende  est  apocryphe,  en  ce  sens  qu'elle  n'est 
pas  l'ouvrage  d'Aurélien  dont  elle  porte  le  nom;  mais  tout  apo- 
cryphe qu'elle  est,  elle  est  beaucoup  plus  ancienne  que  ne  le 
croyaient  les  critiques  précédents;  elle  est  même  très  ancienne, 
comme  le  montrent  les  vers  que  Fortnnat  a  composés  sur  cette  lé- 
gende et  dont  nous  prouverons  l'authenticité  à  la  fin  de  ce  travail; 
et  les  traditions  que  cette  légende  renferme  ont  été  consacrées  par 
la  croyance  immémoriale  des  populations  de  TAquitaine  évangéli- 
sées  par  saint  Martial. 

II.  —  Outre  cette  Vie  de  saint  Martial  par  le  pseudo-Aurélien , 
une  autre  Vie  plus  ancienne  du  môme  saint  nous  était  signalée  par 
des  écrivains  du  moyen-àge.  Mais  depuis  le  xi*  siècle  cette  Vie  était 
perdue;  du  moins  on  le  croyait. 

Nous  avons  eu  la  chance  de  la  découvrir  dans  un  manuscrit  de 
la  Bibliothèque  nationale  qui  date  du  x'  siècle  (3)  ;  mais  dans  ce 
manuscrit  cette  Vie  se  trouve  comme  en  lambeaux  détachés  et  offre 
certaines  lacunes.  En  annonçant  cette  découverte  dans  ïUnivers 
(24  septembre  1855),  nous  disions  :  «  Malheureusement  le  copiste 
du  X*  siècle,  qui  ne  connaissait  pas  le  latin,  a  fait  d'énormes  fautes 
d'orthographe  qui  rendent  diverses  phrases  inintelligibles;  de 
plus,  il  a  fait  un  mélange  de  certains  feuillets  qui  augmente  encore 
la  confusion  du  texte.  Qu'on  s'imagine  une  inscription  antique  que 
Ton  trouve  en  fragments;  il  s'agit  de  rapprocher  ces  débris  épars, 
de  les  rajuster  et  de  combler  les  lacunes;  c'est  un  travail  de  ce 
genre  qu'il  nous  faudra  entreprendre  pour  restituer  ce  lexte  ancien 
dans  sa  primitive  intégrité.  Et  malgré  nos  recherches,  nous  n'avons 
pu  trouver  que  ce  seul  exemplaire  de  l'ancienne  Vie  de  saint  Mar- 
tial, quoique  la  Bibliothèque  impériale  possède  plus  de  vingt  exem- 
plaires de  la  Légende  d'Auréhen.  » 

Malgré  les  diflicultés  qu  offrait  ce  travail,  nous  avons  publié  cette 
ancienne  Vie,  en  1860,  dans  nos  Documents  inédits  sur  Vapostolai 
de  saint  Martial.  Cette  Vie  se  compose  de  deux  parties  :  la  pre- 
mière, qui  raconte  en  abrégé  la  vie  du  saint;  la  seconde,  qui  fait 

(1)  <f  Ipsius  Acta.  quîe  circumferuntur,  nullius  videntur  auctoritatis,  nec 
majorem  merentur  epistolae  ipsi  atlributae  »  (Ruinart,  Gregor,  Turon. 
patrolog.^  t.  LXXl,  col.  850,  n.  d.). 

(2)  Acta  SS.,  t.  V  junii,  p.  53(5. 

C*}  Bibliothèque  nationale,  ms.  3851  a,  fol.  30-33. 


LTUDK   HISTORIQCE  SUR   L*ANaBNNR   VIR    DE  SAINT-MARTIAL  315 

le  récit  de  dix  miracles  opérés  à  son  tombeau.  La  première  partie 
offrait  plusieurs  lacunes,  une  surtout  considérable  dans  le  texte 
relatif  à  la  résurrection  d'un  compagnon  de  saint  Martial;  nous 
avons  essayé  de  combler  cette  lacune  à  Taide  de  la  légende  du 
pseudo-Aurélien  qui  a  copié  ce  passage.  Dans  la  seconde  partie, 
nous  avons  comblé  deux  lacunes  à  Taide  d'un  manuscrit  que  les 
Bollandistes  ont  publié,  au  tome  V«  de  juin,  sous  ce  titre  :  Quelques 
anciens  miracles  opérés  à  son  tombeau  (p.  553),  et  qui  n'est  autre 
chose  que  la  seconde  partie  de  celte  ancienne  Vie. 

Depuis  cette  publication,  nous  avons  bien  découvert  un  autre 
manuscrit  des  plus  anciens  miracles  de  saint  Martial,  dont  le 
récit  forme  la  seconde  partie  de  cette  ancienne  Vie;  mais,  quant  à 
la  première  partie,  qui  renferme  la  vie  abrégée  du  saint,  nous 
n'avions  pu  trouver,  ni  à  la  Bibliothèque  nationale,  ni  dans  les 
bibliothèques  de  Rome  et  de  l'Italie,  un  second  manuscrit  qui  pût 
nous  aider  à  publier  ce  texte  dans  son  intégrité  primitive. 

Au  moment  où  nous  y  pensions  le  moins,  la  Providence  est  ve- 
nue à  notre  aide.  M.  Tabbé  Georges  Ardant,  qui  termine  à  Rome 
ses  études  ecclésiastiques,  nous  écrivait  de  celte  ville,  le  5  mai 
1891,  qu'en  faisant  des  recherches  dans  la  Bibliothèque  Victor- 
Emmanuel,  il  avait  trouvé  un  ancien  manuscrit  provenant  de  l'ab- 
baye bénédictine  de  Farfa,  en  Sabine,  et  contenant  des  Vies  de 
saints,  entre  autres  celles  de  saint  Yrieix  et  de  saint  Martial.  Il  nous 
envoyait  en  môme  temps  les  premières  lignes  et  la  fin  de  celte  Vie 
de  saint  Martial.  Agréable  surprise!  C'était  justement  un  manus- 
crit de  cette  ancienne  Vie  que  nous  cherchions,  sans  pouvoir  le 
trouver,  depuis  trente-cinq  ans!  Sur  notre  demande,  notre  zélé 
correspondant  s'empressa  de  nous  transcrire  cette  Vie  ;  et  c'est  à 
l'aide  de  celte  copie  que  nous  allons  publier  une  édition  plus  exacte 
et  plus  correcte  que  celle  que  nous  avons  donnée  dans  nos  Docu- 
ments inédits.  Il  n'y  a  pas,  dans  ce  manuscrit  de  Rome,  les  lacunes 
regrettables  et  le  mélange  de  feuillets  qui  déparent  le  manuscrit  de 
Paris;  toutefois,  dans  le  préambule  et  dans  la  première  partie,  il  y 
a  quelques  phrases  incomplètes  et  quelques  incorrections,  de  sorte 
que,  même  avec  ce  nouveau  manuscrit,  nous  n'espérons  pas  don- 
ner une  édition  irréprochable. 

Mais  avant  de  publier  de  nouveau  et  plus  correctement  le  texte 
de  cette  Vie  anonyme  de  saint  Martial  et  d'en  prouver  l'antiquité  et 
l*aulhenticilé,  citons,  dans  un  premier  chapitre,  quelques  écrivains 
du  moyen-âge  qui  ont  fait  mention  de  celte  ancienne  Vie  et  en  ont 
décrit  les  caractères. 


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ÎI6  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LlMOOStN. 


CHAPITRE  PREMIER 

L'existence  de  cette  ancienne  Vie  nous  était  révélée  par  des  mo- 
numents d'une  haute  antiquité.  Ainsi  le  moine  Adémar,  dans  l'Epi- 
tre  où  il  rend  compte  de  la  discussion  qu'il  eut,  l'an  1028,  avec 
Benoît  de  Cluse  sur  la  question  de  l'apostolat  de  saint  Martial,  rap- 
porte ces  paroles  de  son  antagoniste  :  «  Quelques-uns  ont  coutume 
de  dire  que  son  ancienne  Vie  (de  saint  Martial)  périt  dans  un  incen- 
die quand  ce  monastère  fut  consumé  par  les  flammes  (1),  et  que 
dans  cette  Vie  il  n'y  avait  pas  autre  chose  sinon  que,  après  l'Ascen- 
sion du  Seigneur,  saint  Martial  avait  été  converti,  comme  beaucoup 
d'autres  païens,  par  la  prédication  de  saint  Pierre,  puis  avait  été 
instruit  par  lui,  et,  longtemps  après,  ordonné  évoque  et  envoyé  à  la 
seule  ville  de  Limoges,  comme  Apollinaire  à  Ravenne  et  Marc  à 
Alexandrie  (2)  ». 

Benoît  de  Cluse  avait  été  bien  renseigné  sur  ce  dernier  point, 
car,  dans  l'ancienne  Vie,  saint  Martial  est,  en  effet,  envoyé  par 
saint  Pierre  à  la  ville  de  Limoges.  Et  l'on  voit  par  ce  passage  d'Adé- 
mar,  que  l'an  1028,  cette  ancienne  Vie  passait  pour  être  perdue. 

Un  écrivain  antérieur  à  Benoît  de  Cluse  a  décrit  les  caractères 
de  celte  ancienne  Vie  d'une  manière  si  précise,  si  détaillée,  si  ca- 
tégorique, qu'il  est  impossible  de  s'y  méprendre  :  c'est  Pierre  le 
Scolastique,  qui  a  fait  sur  saint  Martial  un  poème  en  neuf  livres, 
poème  perdu  en  grande  partie,  mais  dont  nous  avons  recueilli  et 
publié  les  fragments  (3).  Dans  rarticle  qui  précède  les  fragments 
de  ce  poème,  nous  avons  établi  que  cet  écrivain  florissait,  non  pas 
à  la  fin  du  xi*  siècle,  comme  l'a  conjecturé  dom  Rivet  dans  vffis- 
toire  littéraire  de  la  France  (4),  mais  à  la  fin  du  x"  siècle,  puisqu'il 
se  dit  témoin  du  miracle  des  Ardents  (994).  Voici  en  quels  termes 
Pierre  le  Scolastique  parle  de  l'ancienne  Vie  de  saint  Martial,  en  la 
comparant  avec  la  Vie  composée  sous  le  nom  d'Auréiien  : 

(4)  Le  monastère  de  Saint-Martial  fut  incendié  en  95â  (Cf.  âdémar,  Pa- 
trolog.y  t.  CXLI,  col.  82). 

(9)  «  Soient  diccre  nonnulll  vilam  ejus  vetcranam,  quando  hic  locus 
arsit,  périsse  incendio;  in  qua  nihil  horum  agebatur,  nisi  duntaxat  quod 
post  ascensioncm  Domini  ad  Pétri  praedicalionem  sit  conversus,  sicut  aliî 
inulii  ex  paganis,  et  ab  eo  eruditus,  et  post  longum  lempus  ordinatus 
episcopus,  et  ad  solam  urbem  Lemovicum  missus,  sicut  Apollinaris  ad  Ra- 
vennam,  et  Marcus  in  Alexandriam  »  {Patrolog,^  t.  CXLI,  col.  95). 

(3)  PiERRE-LE-ScoLASTiQUE,  Fragments  du  poème  de  saint  Martial^  in-S», 
1857. 

(4}  Histoire  littéraire^  t.  VIII,  p.  504. 


KTVDB  HISTORIQUE  SUR   L'ATCCIRNNE  YIE  DE  SA1NT-VARTIAL  ^17 

Est  minus,  et  majiis,  de  Marciale  volumen; 
Qui  minus  egit  opus,  plane  non  est  michi  notus; 
Sed  scio  quod  sancto  fuerit  nequissimus  hostis  ; 
Propter  namque  fidem,  bene  quœ  dixisse  videtur 
Prœsulis  excerpsit  sermonibus  Aureliani; 
Frivola  vero  suo  deprompsit  pectore  tetro 
Ut  jubar  inficeret  (1),  quod  nubila  cuncta  repellit. 
Ergo  refutetur  condempneturque  malignus. 
At  plures  nlios  qui  composuere  libellos 
Sint  licet  ignoti,  nam  nusquam  nomina  ponunt, 
Quœ  bene  dixerunt,  vigili  sunt  mente  notanda; 
Is  maie  quœ  finxit,  penitus  debent  reprobari; 
Neve  rudes  hominum  sensus  malus  iînbuat  error, 
Sunt  etiam  doctis  raro^  numquamve  legenda. 
Sed  quœ  proposuit  miracula  sunt  retinenda, 
Testis  enim  verax  ipsi  narr avérât  illa. 
Nec  tamen  antiquo  curavit  credere  libro, 
Vulgari  famœ  tribuens  ea  quœ  re fer  ébat; 
Magnaque  vix  tangens,  contendit  condere  lumen. 
Et  curtm  verbis  animum  celare  nequivit. 
Ut  quicumque  sapit  salis,  hune  reprehendere  possit, 
Ergo  nichil  timeat,  sed  posse  probet  reprehendi, 
Multiplicique  virum  ratione  refellat  iniqnum, 
Namque  suis  armis  hostem  superare  valebit 
Et  aamnabit  opiÂS  quod  quilibet  offeret  ipsi  (3). 

Ces  vers  ont  besoin  d'un  commentaire  :  nous  allons  essayer  d'en 
éclaircir  le  sens  : 

I.  —  Est  mmus,  et  majus,  de  Marciale  volumen, 
«  Il  y  a  un  petit  livre  et  un  grand  livre  de  la  Vie  de  saint  Mar- 
tial ».  —  Le  grand  livre  de  la  Vie  de  saint  Martial,  c'est  la  légende 
apocryphe,  si  longue  et  si  diffuse,  dont  l'auteur  a  pris  le  nom 
d'Aurélien,  et  que  Pierre-le-Scolaslique  regardait  en  effet  comme 
l'œuvre  de  saint  Aurélien,  second  évoque  de  Limoges.  —  Le  petit 
livre  de  la  Vie  de  saint  Martial,  c'est  la  légende  courte  et  succincte, 
ce  sont  les  anciens  Actes,  qui  n'avaient  pas  été  publiés  jusqu'à  ce 
jour,  et  que  nous  avons  eu  la  chance  inespérée  de  découvrir.  Cette 
seule  mention  du  «  petit  livre  »  avait  fait  soupçonner  à  notre  sa- 

(1)  Nadaud,  Inftcerent. 

(2)  Pbtrub  Sgolasticus,  lib .  VI,  poema  vu  ;  Pierre-le-Sgolastiqub,  p.  33, 
34  ;  Nadaud,  Diêaertation  ms,  sur  saint  Martial,  chap.  u  ;  P.  Bonavbn- 
TCRE,  t.  i,  p.  i07.  • 


218  SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE  BT  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

vant  Nadaud  rimportance  de  cette  ancienne  Vie  :  «  Les  critiques, 
avait-il  dit,  qui  préfèrent  les  Actes  les  plus  courts  et  les  'plus  sim- 
ples à'ceux  qui  sont  plus  étendus  et  plus  chargés,  regretteront,  sans 
doute,  la  perte  de  cette  pièce  (1)  ». 

II.  —   Qui  minus  egit  opus,  plane  non  estmichi  notu^, 

«  Celui  qui  a  écrit  le  peiit  livre  m'est  tout  à  fait  inconnu  ».  — 
Pierre-le-Scolastîque,  qui  ne  doutait  pas  de  rauthenlicité  de  la 
légende  de  saint  Martial  composée  par  le  pseudo-Aurélien,  s'ima- 
ginait connaître  Tauteur  du  «  grand  livre  »  de  cette  Vie.  Quant  à 
Tauteur  du  «  petit  livre  »,  Pierre-le-Scolastique  ne  le  connaissait 
pas,  attendu  qu'il  n'a  pas  songé  à  se  faire  connaître.  C'éliiit  un 
usage  presque  général,  à  Tépoque  reculée  où  ces  Actes  ont  été 
écrits,  que  les  auteurs  des  légendes  des  saints  ne  mettaient  pas 
leur  nom  en  tête  de  leurs  ouvrages.  Ainsi,  que  Ton  parcoure,  dans 
la  table  du  troisième  volume  de  YHistoire  littéraire  de  la  France^ 
la  liste  des  écrivains  anonymes  qui  ont  composé  des  Vies  de  saints 
au  viVet  au  vu*  siècles,  on  en  comptera  plus  de  cent,  indiqués  dans 
ce  seul  volume.  Et,  pour  citer  des  exemples,  connait-on  Tauteur 
de  la  légende  de  sainte  Geneviève,  écrite  vers  Tan  530?  Les 
Actes  de  saint  Saturnin  de  Toulouse,  cités  par  Grégoire  de  Tours  ; 
ceux  de  saint  Ursin  de  Bourges  et  de  saint  Privât  de  Monde, 
où  le  même  historien  a  certainement  puisé  ce  qu'il  raconte  de  ces 
deux  saints,  voilà  des  documents  d'une  haute  antiquité,  dont  on  ne 
connaît  pas  les  auteurs.  Comme  ces  anonymes  écrivaient,  non  dans 
l'espoir  d'une  renommée  frivole,  mais  uniquement  pour  l'édifica- 
tion des  fidèles  et  pour  rendre  témoignage  à  la  vérité,  ils  oubliaient 
naturellement  de  mettre  leur  nom  en  tête  de  leur  ouvrage  ;  et  celte 
marque  de  modestie  est  une  preuve,  sinon  de  leur  science,  au 
moins  de  leur  sincérité. 

III.  —  Sed  scio  quod  sancto  fuerit  nequissimtis  hostis. 

Propter  namque  fidem,  bene  quœ  dixisse  videtur, 
Prœmlis  excerpsit  sermonihm  Aureliani; 
Frivola  vero  suo  deprompsit  pectore  tetro, 
Utjubardnficerety  quodnubiia  cuncta  repellit. 
Ergo  refutetiir  condempneturque  malignus. 

«  Mais  je  sais  que  c'était  un  ennemi  déclaré  du  saint;  car  ce  qu'il 
a  dit  de  louable  et  de  digne  de  foi,  il  l'a  extrait  des  écrits  de  l'évo- 
que Aurélien;  mais  il  a  tiré  de  son  fonds  mauvais  des  choses  frivo- 

(4)  Nadaud,  Dissertation  ms.  sur  saint  Martial  (mstniiscrils  du  sémi- 
naire de  Limoges). 


ETUDE  HISTORIQUE  SUR   l'aNCIENNB  VIE   DE   SAINT -MARTIAL.  ^t9 

Jes  pour  obscurcir  ce  soleil,  qui  défie  tous  les  nuages.  Donc  il  faut 
réfuter  et  condamner  ce  méchant.  » 

Pierre-le-Scolaslique  est  parfaitement  excusable  quand  il  se  ré- 
pand en  invectives  contre  Fauteur  anonyme  du  «  petit  livre  »;  e(, 
comme  il  ne  doutait  pas  que  la  légende  composée  par  le  pseudo- 
Aurélien  ne  fût  réellement  l'œuvre  du  successeur  de  saint  Martial, 
il  ne  pouvait  tenir  un  langage  différent.  En  effet,  la  légende  du 
pseudo-Aurélien  entre  dans  des  détails  qui  sont  tout  à  fait  à  la 
gloire  de  Tapôtre  de  TAquilaine;  elle  lui  donne  le  litre  d'apôtre  et 
de  disciple  du  Sauveur;  elle  le  fait  assister  aux  principaux  événe- 
ments de  la  vie  publique  de  Jésus-Christ,  à  la  résurrection  de 
Lazare,  à  la  Cène  et  au  lavement  des  pieds;  elle  en  fait  un  témoin 
de  la  résurrection  et  de  l'ascension  du  Sauveur;  elle  lui  fait  rece- 
voir FEsprit-Saint  au  jour  de  la  Pentecôte  ;  elle  entre  dans  de  grands 
détails  sur  les  miracles  que  saint  Martial  avait  opérés  à  Toul,  à 
Ahun,  à  Limoges,  à  Bordeaux,  à  Morlagne,  etc.  Au  contraire,  Tan- 
cienne  Vie,  plus  sobre  de  détails,  se  borne  à  dire  que  saint  Martial 
fut  envoyé  par  saint  Pierre  dans  les  Gaules,  et  à  Limoges  en  par- 
ticulier; qu'il  ressuscita  un  de  ses  compagnons,  comme  l'atteste  la 
renommée  populaire]  qu'il  convertit  et  baplisa  une  jeune  fille,  nom- 
mée Valérie,  laquelle,  ayant  refusé  un  mariage  qui  lui  était  offert, 
fut,  dit-on,  mise  à  mort  par  son  fiancé,  encore  païen.  On  ne  trouve 
dans  l'ancienne  Vie  ni  le  nom  des  deux  compagnons  de  saint  Mar- 
tial, saint  Alpinien  et  saint  Austriclinien,  ni  le  nom  du  duc  Etienne, 
ni  celui  de  Susanne,  mère  de  sainte  Valérie,  ni  ceux  d'A'urélien  et 
d'André,  prêtres  des  idoles,  ni  ceux  de  l'écuyer  Hortarius  et  d'Hil- 
debert,  fils  d'Arcadius,  comte  de  Poitiers,  etc.;  on  n'y  trouve  au- 
cun de  ces  détails  chronologiques  dont  la  légende  d'Aurélien  est  si 
prodigue;  par  exemple  que  saint  Martial  était  à  Rome  la  seconde 
année  de  l'empire  de  Claude;  qu'il  mourut  après  vingt-huit  ans 
d'épiscopat,  l'an  quarante  après  la  résurrection  du  Seigneur,  la 
troisième  année  de  l'empire  de  Vespasien,  la  troisième  année  de  la 
deux  cent  douzième  olympiade;  rien  de  tout  cela,  mais  seulement 
ces  quelques  paroles,  qui  offrent  peu  de  prise  à  la  critique  :  Immi- 
nente jam  tempore,  eximius  vir  migramt  ad  Dominum.  Pierre-le- 
Scolastique  ne  devait-il  pas  penser  que  cet  écrivain  anonyme  du 
ce  petit  livre  »  était  un  ennemi  du  saint,  puisqu'il  passait  sous  si- 
lence les  choses  glorieuses  et  magnifiques  qu'Aurélien  avait  dites 
en  faveur  de  son  héros? 

IV.  —  Propter  namque  fidem,  bene  quœ  dixisse  videtur, 
Prœsulis  excerpsit  gemiontbus  Aureliani. 

<f  Ce  qu'il  a  dit  de  bon  et  de  digne  de  foi,  il  l'a  tiré  des  écrits  de 


920  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DC  LIMOUSIK. 

révoque  Aurélien.  »  —  L'abbé  Nadaud,  avec  son  instinct  profond 
d'antiquaire,  avait  fort  ingénieusement  deviné,  d'après  ces  paroles, 
que  <c  la  vie  de  saint  Martial,  dont  on  fait  auteur  son  successeur, 
avait  quelque  chose  de  fondé  dans  l'antiquité  (1)  i>,  puisqu'elle 
renfermait  des  traits  semblables  à  ceux  de  l'ancienne  Vie  :  c'est  là, 
en  effet,  que  le  pseudo-Aurélien  a  puisé  ce  qu'il  raconte  de  la 
mission  que  saint  Martial  reçoit  de  saint  Pierre  ;  c'est  là  qu'il  a 
copié  le  discours  que  saint  Pierre  adresse  à  saint  Martial;  c'est  là 
qu'il  a  pris  le  récit  de  la  résurrection  d'un  des  compagnons  de 
l'apôtre  de  l'Aquitaine.  Pierre-le-Scolastique  croyait  naïvement  que 
l'auteur  du  «  petit  livre  »  avait  tiré  ces  détails  de  la  légende  d'An- 
rélien;  c'était  tout  le  contraire. 

V.  —  At  plures  alios  qui  composuere  libellos 

Sint  licet  ignoti,  nam  nusquam  nomina  ponunty 
Quœ  bene  dixerunt,  vigili  sunt  mente  notanda  : 
Is  maie  quœ  finxit,  penitus  debent^reprobari, 
Neve  rudes  hominum  sensus  malus  imbuat  error; 
Sunt  etiam  doctis  raro  numquamve  legenda. 

«  Plusieurs  écrivains  ont  composé  d'autres  op^iscules;  et,  quoi- 
qu'ils soient  inconnus,  —  car  il  ne  mettent  leur  nom  nulle  part,  — 
on  doit  noter  avec  soin  ce  qu'ils  ont  dit  de  bien  ;  mais  on  doit 
réprouver  tout  à  fait  les  fictions  de  cet  anonyme,  de  peur  que  ses 
fictions  ne  séduisent  les  esprits  grosssiers;  et  les  doctes  mêmes 
doivent  ne  les  lire  jamais  ou  que  très  rarement.  » 

Les  opuscules  anonymes  dont  parle  ici  Pierre-le-Scolastique 
nous  semblent  être  les  récits  des  divers  miracles  de  saint  Martial, 
opérés  du  vu*  au  ix*  siècle,  que  les  Bollandistes  ont  publiés  au 
tome  V*  de  juin  {^),  et  dont  nous  avons  avons  trouvé  une  rédac- 
tion différente,  à  la  Bibliothèque  nationale,  dans  un  manuscrit  du 
X*  siècle  (3).  Nous  avons  publié  le  texte  de  ces  opuscules,  en  re- 
gard de  celui  des  Bollandistes,  sous  ce  titre  :  Livre  des  miracles 
de  saint  Martial  (texte  latin  inédit  du  ix*  siècle),  1889: 

«  On  doit  étudier  ces  opuscules,  quoiqu'ils  soient  écrits  par  des 
auteurs  inconnus;  la  réprobation  ne  les  atteint  pas;  elle  ne  doit 
frapper  que  l'écrivain  anonyme  du  «  petit  livre  ». 

VL  —  Sed  quœ  proposuit  miracula  sunt  retinenda^ 

Testis  enim  verax  ipsi  narr avérât  tHa, 
«  Mais  les  miracles  qu'il  rapporte  doivent  être  conservés  ;  car  un 
témoin  véridique  les  lui  avait  racontés*.  » 

(1]  Nadaud,  Mém.  mss,  t.  IV.  (Bibliothèque  de  M.  Emile  Du  Boys). 
(«)  Acta.  SS.,  t.  V  junii,  p.  564-559. 
(3)  Fonds  latin,  ms.  S768  a,  fol.  81-90. 


ÉTUDE   HISTORIQUE  SUR   L^ANCIENNC  VIE  DE  SAINT   MARTIAL.  t%\ 

Pour  bien  comprendre  le  sens  de  ces  paroles,  il  faut  savoir  que 
TancienneVie  de  saint  Martial  se  compose  de  deux  parties;  la  pre- 
mière, qui  renferme  un  récit  court  et  substantiel  de  la  vie  du  saint; 
la  seconde,  où  sont  rapportés  les  plus  anciens  miracles  opérés  à 
son  tombeau.  «  Prescrivez  cette  vie  I  conservez  ces  miracles  I  »,  avait 
dit  Pierre-le-Scolastique.  Cette  recommandation  a  été  si  bien  ob- 
servée, qu'on  ne  trouve  plus  d'exemplaires  de  la  première  partie 
du  «  petit  livre  »,  tandis  que  la  seconde  se  trouve  dans  quelques 
manuscrits  (1),  et  a  été  publiée  par  les  BoUandistes  sous  ce  titre  : 
a  Quelques  plus  anciens  miracles  opérés  au  tombeau  de  saint  Martial  : 
—  Antiquiora  aliquot  {miracula)  patrata  ad  sepulcrum  (2).  Avant 
eux,  le  P.  Bonavenre  avait  trouvé  et  mis  à  profit  un  manuscrit  de  ces 
anciens  miracles (3); et  son  contemporain,  le  chanoine CoUin, disait: 
«  La  Providence  divine  m'a  fait  rencontrer  quantité  d'anciens  lam- 
beaux d'un  vieux  manuscrit  in-folio,  parmi  lesquels  j'ai  trouvé  la  fin 
de  la  Vie  de  saint  Martial^  dont  le  temps  a  consommé  le  commencement 
et  un  cayer  de  ces  miracles"  que  je  desirois  de  voir  avec  tant  de 
passion.  Ces  lambeaux  paroissent  avoir  été  écrits  il  y  a  plus  de  huit 
cents  ans  (4).  »  —  Etait-ce  le  temps  qui  avait  déchiré  la  vie  de  saint 
Marlial  qui  précédait  ces  miracles?  N'étaient-ce  pas  plutôt  les  dis- 
ciples de  Pierre-le-Scolastique?  Les  BoUandistes,  qui  ont  publié  la 
seconde  partie  du  «  petit  livre  »,  n'avaient  pas  trouvé  non  plus  la 
première  partie  :  on  voit  que  c'était  un  parti  pris  de  déchirer 
cette  ancienne  Vie  si  injurieuse,  en  apparence,  à  Saint-Martial. 

Vil.  —  Nec  tamen  antiquo  curavit  credere  lihro, 
Vulgari  famœ  tribuens  ea  quœ  referebat. 

«  Et  cependant  il  n'a  pas  pris  soin  de  s'appuyer  sur  l'autorité 
d'un  ancien  livre,  attribuant  à  la  renommée  vulgaire  les  faits  qu'il 
racontait.  » 

C'est  là  ce  qui  faisait  Fétonnement  de  Pierre-le-Scolaslique. 
Pourquoi  l'auteur  du  «  petit  livre  »,  au  lieu  de  citer  le  témoignage 
d'Aurélien,  ou  de  quelque  ancien  auteur,  s'appuie-t-il  sur  la  re- 
nommée et  sur  la  tradition  populaire  ? 

C'est  là,  en  effet,  ce  qui  caractérise  l'ancienne  vie  de  saint  Martial 
et  qui  en  fait  le  mérite.  L'écrivain  anonyme  qui  l'a  composée  n'avait 
garde  de  citer  le  pseudo-Aurélien,  qui  n'est  venu  qu'après  lui,  il  a 
consulté  la  voix  publique,  la  tradition,  et  il  a  écrit  son  récit  d'après 

(1)  Bibliothèque  nationale,  ms.  536S,  fol.  34  v*  —  44. 

(2)  Acta  SS.,  t.  V  junii,  p.  553. 

(3)  P.  BoiiAVEiiTURE,  t.  11,  p.  615  et  suiv. 

(4)  Vîea  des  Saints  du  Limousin,  1679,  p.  25â. 


âîi   '  SOCIÉTÉ  AR<CHiOLOGlQVB  BT  DiSTOftfQUB  DC  UMOUSI^r. 

les  soiivenirs  traditionnels.  Voilà  pourquoi,  en  parlant  de  la  résur- 
rection d'un  des  compagnons  de  saint  Martial,  il  s'exprime  ainsi  : 
«  Ce  qui  arriva,  comme  l'atteste  la  renommée  populaire,  »  —  Quod 
lia  factum  est,  ut  vulgi  fama  testatur.  Voilà  pourquoi,  en  parlant 
de  sainte  Valérie,  il  s'exprime  en  'ces  termes  :  Une  jeune  fille, 
nommée  Valérie,  comme  on  dtf,  issue  de  noble  race,—  Puellaquœ- 
dam,  nomine  Valeria,  ut  aiunt,  nobilis  orta  natalibus  :  —  et  en  par- 
lantde  son  martyre,  il  s'exprime  de  la  sorte,  et  elle  fut  mise  à  mort, 
comme  on  rapporte,  par  son  fiancé  encore  païen  ;  et  ut  postea 
fertur^  à  spomo  suo^  adhuc  gentili,  interempta  fuisse, 

VIll.  —  Magna  que  vix  tangens,  contendit  condere  lumeUy 
Et  curtus  verbis^  animum  celare  nequivit. 

«  Il  effleure  à  peine  les  traits  principaux  de  la  vie  de  saint  Martial, 
et  il  s'efl'orce  de  mettre  cette  lumière  sous  le  [boisseau,  et  dans  la 
brièveté  de  son  récit,  il  n'a  pu  cacher  son  mauvais  dessein. 

C'est  là  le  reproche  capital  que  Pierre-le-Scolastique  adresse  à 
l'auteur  du  «  petit  livre  ».  Et,  en  effet,  parmi  les  miracles  opérés 
par  saint  Martial  de  son  vivant,  cet  écrivain  se  borne  à  raconter 
la  résurrection  d'un  de  ses  compagnons,  et  passe  sous  silence  les 
autres  résurrections  elles  autres  miracles  opérés  par  saint  Martial. 
On  voit  que  tous  les  griefs  dont  il  se  plaint  sont  autant  de  traits 
distinctifs  qui  caractérisent  l'œuvre,  et  ne  laissent  aucun  doute  sur 
ridentité  et  l'antiquité  de  cette  pièce  importante,  que  nous  avons 
eu  l'heureuse  chance  de  retrouver  après  neuf  siècles  d'oubli. 


CHAPITRE  IL 

Il  nous  reste  maintenant  à  établir  l'antiquité  de  cette  vie  ano- 
nyme de  saint  Martial  et  de  montrer  en  particulier  qu'elle  est  an- 
térieure à  Grégoire  de  Tours. 

!•*  Ce  qui  montre  tout  d'abord  l'antiquité  de  la  légende  anonyme 
de  saint  Martial,  c'est  qu'elle  est  antérieure  à  la  légende  apocry- 
phe du  pseudo-Aurélien.  Dès  le  commencement  du  xi''  siècle,  c'était 
là  un  fait  reconnu  par  quelques  érudits,  et  Benoît  de  Cluse  soute- 
nait avec  raison  contre  le  fougueux  Adémar  que  celte  ancienne  Vie 
de  saint  Martial,  que  l'on  croyait  avoir  été  perdue  dans  l'incen- 
die du  monastère,  était  antérieure  à  la  légende  d'Aurélien,  chau- 
dement patronëe  par  son  antagoniste.  Il  suffit,  en  effet,  de  jeter  un 
coup  d'oeil  sur  cette  ancienne  Vie  pour  se  convaincre  qu'elle  a  été 
composée  d'après  la  tradition  orale,  alors  qu'il  n'y  avait  rien  d'écrit 


ÉTUDE   mSTqftlDUE  SUR  J," ANCIENNE  VIE   DE  SAINT-HAUTIAL  ?33 

sur  sainJ^Martial.  Voici,  par  exemple,  conuDent  s'exprime  Vauteur 
de  cette  ancienne  Vie,  à  propos  de  la  résurreclion  d'un  des  com- 
pagnons du  saint  évêque  :  «  Ce  qui  arriva,  comme  l'atteste  la  renom- 
mée populaire  :  »  Quod  faetnm  est,  ut  vulgi  faina  testatur.  Evidem- 
ment cet  écrivain  ne  se  serait  pas  appuyé  sur  la  renommée,  s'il 
avait  pu  s'appuyer  sur  l'autorité  d'Aurélien.  Dans  un  autre  passage, 
il  s'exprime  de  la  sorte  :  Une  jeune  fille,  nommée  Valérie,  comme 
on  (Ut  »  —  puella  qnœdam^  nomme  Valeria,  ut  aiunt  :  »  plus  loin 
encore  :  «  Et  ensuite,  comme  on  le  rapporte,  Valérie  fut  mise  à 
mort  par  son  fiancé,  encore  païen  :  et  ut  postea  fertur,  a  sponso 
8U0,  adhuc  gentili,  interempta  fuisse.  Voilà  pourquoi  Pierre-le-Sco- 
lastique  avait  remarqué  avec  un  certain  étonnement  que  Fauteur 
anonyme  du  «  petit  livre  »  ne  s'appuyait  sur  l'autorité  d'aucun  au- 
teur ancien,  mais  attribuait  à  la  renommée  populaire  les  faits 
qu'il  racontait  : 

Nec  tamen  antiquo  curravit  credere  libro, 
Vulgari  famœ  tribuens  ea  quœreferebat. 

Cela  ne  nous  montre-t-il  pas  que  la  vie  de  saint  Martial  n'avait 
pas  encore  été  écrite,  alors  que  cet  auteur  anonyme  entreprit  de 
la  rédiger  ? 

Du  reste,  il  est  incontestable  que  cette  ancienne  Vie  de  saint  Mar- 
tial a  servi  de  point  de  départ,  de  fonds  et  de  canevas^  pour  ainsi 
dire,  à  la  légende  du  pseudo-Aurélien.  Quand  on  compare  ces  deux 
pièces,  on  voit  que  ce  n'est  pas  cet  auteur  anonyme  qui  «  a  puisé 
ce  qu'il  dit  d'exact  dans  les  écrits  de  l'évéqueÂurélien»,  comme 
Pierre-le-Scolastique  l'en  accuse,  mais  que  c'est  au  contraire  le 
pseudo-Aurélien  qui  a  puisé  dans  l'auteur  anonyme  le  fond  de  son 
thème,  qu'il  a  augmenté  et  embelli  en  y  ajoutant  le  récit  d'autres 
miracles,  d'autres  traditions  populaires,  des  noms  réels  ou  fictifs, 
et  des  détails  de  pure  imagination.  C'est  ainsi  qu'il  appelle  par 
leur  nom  les  deux  compagnons  de  saint  Martial,  que  l'auteur  ano- 
nyme ne  nomme  pas;  c'est  ainsi  qu'il  désigne  le  lieu  d'£/5ô,  en 
Italie,  comme  étant  la  localité  où  saint  Martial  a  ressuscité  l'un  de 
ses  prêtres.  En  thèse  générale,  les  actes  les  plus  courts  sont  les 
plus  anciens,  et  c'est  une  remarque  judicieuse  de  Tillemont,  «  que 
ces  sortes  d'ouvrages  vont  plutôt  en  augmentant  qu'en  diminuant, 
csmme  on  le  voit  par  expérience  (1)  ». 

Or,  la  légende  du  pseudo-Aurélien  a  été  écrite  au  plus  tard  dans 
la  seconde  moitié  du  vi*  siècle,  comme  le  prouvent  les  vers  que 
Fortunat  a  composés  sur  cette  légende,  vers  que  le  dernier  éditeur 

(1)  TiLLEMONT,  Mémoires^  etc.,  t.  H,  p.  551. 


>  • 


S24  SOCIÉTR   ARGHÊOLOGIQUR   RT   HISTORIQUE   DU   UMOUSIIV. 

de  Fortunat,  en  Allemagne  (1),  a  rangés  parmi  les  apocryphes, 
mais  dont  nous  démontrerons  de  nouveau  Tauthenticité  à  la  fin  de 
ce  travail;  et  comme  la  Vie  anonyme  de  saint  Martial  est  antérieure 
à  la  légende  du  pseudo-Aurélien,  il  suit  clairement  qu'elle  date  au 
moins  de  la  première  moitié  du  vi*  siècle. 

IL  —  De  plus,  en  étudiant  les  caractères  intrinsèques  de  cette 
ancienne  Vie,  on  ne  peut  s'empêcher  de  reconnaître  qu'elle  res- 
semble parfaitement  aux  légendes  authentiques  de  cette  époque  et 
notamment  à  celles  que  Fortunat  et  Grégoire  de  Tours  nous  ont 
laissées.  Le  prologue,  dont  le  style  accuse  l'âge  de  transition  de  la 
période  romaine  à  celle  du  moyen-âge,  est  dans  le  genre  des  pro- 
logues de  ce  temps-là  (2)  ;  la  division  en  deux  parties,  Tune  consa- 
crée à  la  vie  du  saint  proprement  dite,  Tautre  aux  miracles  opérés 
après  sa  mort,  se  trouve  dans  la  Vie  de  saint  Hilaire  de  Poitiers, 
écrite  par  Fortunat  (3);  le  môme  auteur,  qui  a  rédigé  la  vie  de  saint 
Chamant,  évéque  de  Rodez,  lui  a  donné  pour  titre  :  Vita  cum  mira- 
culis  (4)  ;  la  conclusion  de  cette  vie  de  saint  Martial  est  conçue  dans 
les  mêmes  termes  que  celles  de  plusieurs  légendes  de  Fortunat  et 
de  Grégoire  de  Tours  (5);  puis,  dans  le  récit  des  miracles  opérés 
au  tombeau  de  saint  Martial,  les  formules  qui  servent  de  transition 
d*un  miracle  à  l'autre  sont  à  peu  près  les  mômes  que  celles  qu'em- 
ploie Fortunat,  comme  on  peut  s'en  convaincre  en  vérifiant  les 
citations  que  nous  faisons  à  la  fin  de  chacune  de  ces  formules  :  — 
Nec  etiam  quod  operœ  pretium  occurit  omittendum  est  (6)  ;  —  Adji- 
ciendum  est  etiam  quod  per  eumdem  Dominus  operatus  est  (7)  ;  — 
Jungatur  operi  quod  prœsens  testatur  auctoritas  (8). 

De  plus,  on  trouve  dans  cette  ancienne  Vie  des  expressions  par- 
ticulières à  l'époque  romaine  :  par  exemple,  poar  désigner  l'église 
de  saint  Martial,  l'auteur  anonyme  se  sert  de  cette  expression  : 

(1)  Fridericus  Léo»  Monumenta  Germaniœ  hlstorlca^  t.  IV,  pars.  4, 
p.  382.  —  Berolini,  «881. 

(2)  Voir  dans  Fortunat  le  prologue  de  la  vie  de  saint  Chamant.  (Patrolog,, 
t.  LXXXVIIl,  col.  513). 

(3)  Patrolog.,  t.  LXXXVIIl,  col.  439,  448. 

(4)  IbLd,,  col.  543. 

(5)  Fortunat,  Légendes  de  saint  HUaire  de  Poitiers  et  de  saint  Aubin 
d'Angers.  (Patrolog,,  t  LXXXVIIl,  col.  448,  486.  —  Grégoire  de  Tours, 
Historia  septem  Dormientium^  édid.  Ruinart,  col.  1983. 

(6)  Est  operae  pretium  illud  memoriaetradere,  etc.  (Fortunat,  Patrolog,^ 
t.  LXXXVIIl,  col.  462  :  voir  encore  col.  464,  469,  484,  538,  546. 

(7)  Fortunat,  ibid,y  coL  557  558. 
{«)  Id  .  ibid,,  509,  553. 


ÂTUDB  HlSTORIQUR  SUR  L^ANCIENNV  VIE  DE  SAINT  KARTlAL.  225 

beativifi  memoria  (1)  :  c'est  uae  expressioa' usitée  au  V  siècle  pour 
désigaer  les  églises,  comme  on  le  voit  par  divers  passages  de  saint 
Augustin  :  Nos  autem  martyribm  nostris,  non  templa  sicut  diU,  sed 
Memorias  sicut  hominibus  mortuisy  quorum  apud  Deum  vivunt  spiri- 
tus,  fabricamus  :  nec  ibi  erigimm  altaria,  in  quibus  sacrificemus 
martyribuSy  sed  uni  Deo  et  martyrum  et  nostro  (2).  Et  encore  : 
Ostendatar  mihi  Romœ  in  honore  tanto  templum  Romuli  in  quanto 
ibi  ostendo  niemoriam  Pétri  (3).  —  Et  encore  :  Imper ator  venit  Ro- 
mam,  quo  festinat  t  ad  templum  imperatoris,  an  ad  memoriam  pis- 
catoris  (4)  ?  On  trouve  la  môme  expression  employée  en  ce  sens 
dans  la  première  partie  du  Liber  pontificalis  :  «  Hic  {Anacletus)  ine- 
moriam  beati  Pétri  construxit  (8). 

Ajoutons  que  Fauteur  de  la  vie  de  saint  Yrieix,  qui  écrivait  peu 
de  temps  après  la  mort  du  saint  (591),  semble  avoir  emprunté  à 
l'ancienne  Vie  de  saint  Martial  la  phrase  suivante  :  Adjiciatur  operi 
res  adjecta  mysteriis  (6)  :  et  saint  Ouen,  dans  sa  vie  de  saint  Eloi, 
y  a  pris  mot  pour  mot  cette  phrase  :  Solet  enim  pertinax  cervicosi- 
tas  populorum  ut  aliqua  sibi  objecta  crimitia  sacramentis  expiare 
contendat  (7). 

m.  —  On  pourrait  objecter  que  c'est  l'auteur  de  l'ancienne  Vie 
de  saint  Martial  qui  a  tiré  cette  phrase  de  la  Vie  de  saint  Eloi,  jécrite 
par  saint  Ouen  au  vir*  siècle  ;  mais  nous  avons  d'autres  preuves 
que  les  miracles  rapportés  dans  cetle  ancienne  Vie  ont  été  écrits 
antérieurement  au  vu"  siècle. 

En  effet,  les  Bollandistes  ont  publié,  au  tome  V*  de  juin,  plu- 
sieurs opuscules  des  miracles  de  saint  Martial,  réunis  dans  le  môme 
manuscrit,  mais  rédigés  à  des  époques  différentes.  Or,  le  premier 
de  ces  opuscules,  auquel  ils  ont  donné  ce  titre  :  §  I.  Quelques 
miracles  plus  anciens  opérés  au  sépulcre  (8),  n'est  pas  autre  chose 
que  la  seconde  partie  de  la  Vie  anonyme  de  saint  Martial,  où  sont 

(1)  Corde  medilalus  est  bcali  viri  memoriam  expelere(iu(niniraculum}. 
(i)  De  cioUate  Dei,  lib.  XXII,  cap.  \0.  (Patrolog.,  t.  XLI,  col.  772). 

(3)  In  psalm.  XLIV.  {Patrolog.,  t.  XXXVI,  col.  509). 

(4)  In  psalm.  CXL.  {Patrolog.,  t.  XXXVII,  col  1830. 

(5)  Patrolog.,  t.  CXXXVII,  col.  1115.—  Voir  ibid.y  les  notes  sur  ce 
mot  memoria, 

(6)  Intér  opéra  Gregorii  Turonkns,  {Patrolog,,  t.  LXXI,  col.  tlî5. — 
Texte  de  la  vie  de  saint  Martial  :  Addatur  et  illud  quod  poteat  ad/unyi 
mygteriis  (XII  miraculum). 

(7)  Vita  S.  EUgU,  pars.  Il,  cap.  LVI.  {Patrolog,,  t.  LXXXVII,  col.  »80. 
(K)  Antiquiora  aliquot  (miracula)  patrata  ad  sepuicrum.  {Acta  S  S.,  t.  V 

junîl,  p.  553). 


I    ■/ 


f 

tle  SV)CléTfc  àMaÈOLCUilQXJK  tT  ffTSfORlQbE  Dti  tlMOtiSITC. 

relatés'  les*  plus  anciens  miracles  opërés  à  son'  tombeaa.'  G*est  à 
'  à  ràide  de  ce  premièc  opascule,  publié  par  les  BoUandistes^  que 
nous  avions  pu,  dans  la  première  édition  de  cette  Vie,  combler  les 
lacunes  et  corriger  les  défectuosités  de  notre  manuscrit.  Les  opus- 
cules suivants,  auxquels  les  Bollandistes  ont  donné  ce  titre  :  Mira- 
cles éqrits  aux  vn%  vin®  et  ix*  siècles  (1),  renferment  le  récit  d'autres 
miracles  opérés  depuis  le  vn«  siècle  jusqu'au  ix',  et  le  premier  mi- 
racle qu'on  y  raconte  se  rattache  à  Télection  de  saint  Loup,  qui  eut 
Heu  sous  Clotaire,  en  614.  Le  P.  Papebrock,  dans  son  manuscrit, 
avait  trouvé  ce§  opuscules  réunis  sous  le  même  titre,  mais,  ayant 
remarqué  la  conclusion  qui  termine  le  premier  opuscule  et  le  préam- 
bule qui  commence  le  second,  il  avait  conjecturé  que  ces  deux  par- 
lies  de  son  manuscrit  n'étaient  pas  du  môme  auteur,  et  que  la  ,, 
première  partie,  indépendante  de  la  seconde,  avait  été  écrite  aupara- 
vant (2)  :  il  avait  deviné  juste.  En  effet,  en  faisant  des  recherches 
à  la  Bibliothèque  nationale,  nous  avons  trouvé  dans  le  manuscrit 
2768  A,  fol.  81,  ce  second  opuscule,  détaché  du  premier  et  trans- 
crit séparément;  comme  le  style  de  ce  manuscrit  est  différent  de 
celui  qu'ont  publié  les  Bollandistes,  nous  avons  publié  les  deux 
recensions  en  regard,  sous  ce  litre  :  Livre  des  miracles  de  saint 
Martial  {texte  latin  inédit  du  ix*  siècle)  (3).  Donc  le  premier  opus- 
cule, qui  n'est  autre  chose  que  la  seconde  partie  de  la  Vie  anonyme 
de  saint  Martial,  est  antérieur,  par  la  date  et  la  rédaction,  aux  mi- 
racles suivants,  écrits,  d'après  les  Bollandistes,  de  614  à  855  ;  et 
c'est  pourquoi,  avant  de  savoir  que  cet  opuscule  n'est  que  la 
seconde  partie  de  l'ancienne  Vie,  nous  avions  dit  qu'il  nous  parais- 
sait avoir  été  écrit  au  vi*  siècle  (4).  La  Vie  anonyme  de  saint  Martial, 
dont  ce  premier  opuscule  n'est  qu'un  extrait,  est  donc  anlérieure  à 
l'an  614,  et  doit  être  attribuée  au  vi«  siècle. 

IV.— Ily  aplus:  cette  Vie  anonyme  de  saint  Martial  est  antérieure 
à  Grégoire  de  Tours,  car  c'est  là  que  cet  historien  a  puisé  le  récit  de 
trois  miracles  qu'il  raconte  dans  son  livre  de  la  Gloire  des  confesseurs. 

Dans  ce  livre,  il  a  consacré  trois  chapitres  à  saint  Martial.  Il  dit 
dans  le  premier  chapitre  que  saint  Martial  avait  été  envoyé  par  les 
évêques  de  Rome,  dont  il  n'indique  pas  le  nom,  (sanctus  Martialis 
episcopus  à  Rotyianis  missus  episcopisj  ;  il  ajoute  que  ce  pontife, 
«  après  avoir  renversé  les  statues  des  faux  dieux  et  aboli  leurs 
rites,  après  avoir  rempli  la  ville  de  Limoges  de  la  foi  au  vrai  Dieu, 

(1)  Miracula  sœculo'Vn,  VHI,  IX  scripta.  (Ibid.,  p.  654). 
(i)  Acta  SS,,  t.  V  junii,  p.  556. 

(3)  Paris,  1889,  Uaton,  rue  Bonaparte,  35. 

(4)  Dissertation  sur  l'apostolat  de  saint  Martial,  p.  57. 


&TUDG  .HISTQA1QP£  aUI^  L'ARaENNe  VK   QB  SAWT  MARTIAL.  t37 

,,  sortit  de  ce.  monde  fmigravit  a  mculo)  ?).  Il  dit  4e  pl«is;«  qu'il  y 
•  avait  avec  loi  deux  prêtres  qu'il  avait  amenés  avec  lui  d'Orient 
,  dans  la  Gaule  fquos  secum  ab  Oriente  adduxit  in  GalliamJ;  et  lors- 
qu'ils vinrent  à  mourir,  leurs  sarcophages  furent  réunis,  et  ils 
furent  ensevelis  dans  la  môme  crypte  que  le  saint  évéque  ;  l'un  était 
près  de  la  muraille,  l'autre  lui  élait  contigu,  mais  leurs  tombeaux 
n'étaient  pas  relevés  de  terre  et  Ton  ne  pouvait,  à  cause  de  cette 
juxtaposition,  ni  étendre  une  nappe  fpalaj,  ni  allumer  de  flambeau. 
Comme  les  habitants  du  lieu  voyaient  cela  avec  peine,  il  arriva 
qu'un  matin,  en  entrant  dans  la  crypte,  ils  trouvèrent  les  sépulcres 
placés  dans  des  murs  différents;  et  ainsi  l'accès  à  chaque  sépulcre 
fut  libre;  et  il  fut  manifesté  clairement  que  le  bienheureux  pontife 
devait  être  vénéré  comme  un  serviteur  du  vrai  Dieu  ».  Mettons  en 
regard  le  lexte  de  l'ancienne  Vie  et  celui  de  Grégoire  de  Tours. 


YlTA  S.  Martialis. 

Prefbyterl^  qui  cum  codem  ad- 
venerani,  supersiilcs  remanserunl; 
ac,  ubl  completl  sunt  dies^  ut  et 
Ipsl  migrarenta^œcaZo,  ineodem 
loco  quo  bealus  tumulariam  me- 
mit  sepulluram,  et  ipsi  sepulti 
8unt,.. 

Et  ita  factum  est,  ut  redcunti- 
bus  populis  coDsuelse  orationi 
vacare,  inoentœ  eunt  separatœ  ab 
Inoicem  sepulturœ aique  discretœ, 
ul  patcfieret  populis,  quo  tumulo 
pontifex  clauderctur. 


GrBGORIUS  TORONENSIS. 

Erant  iunc  (cmporis  cum  co 
duo  presbyte riy  quos  secum  ab 
Oriente  adduxil  in  Galliam  :  vcrum 
ubi  complet i  sunt  dles  oorum,  ut 
et  ipsi  vocarenlur  de  hoc  sœcalo^ 
conjuDCtis  sarcophagis.  In  eadem 
crypta  in  qua  sanclus  episcopus 
sunt  sepulti,,, 

Quod  cum  incoiae  loci  moleste 
fcrrcnl,  quodam  mane  accedentes 
a<l  cryptam  Inoenerunt  sepulcra 
dioersis  parietibus  esse  locata  ;  et 
sic  acccssns  liber  ad  utrumque 
scpulcrum  paluit,  et  qnalilcr 
beatus  antistcs  utcultorDei  vene- 
raretur  eniluit. 


Dans  le  chapitre  suivant,  Grégoire  de  Tours  raconte  la  guérison 
d'une  jeune  fille  dont  la  main  était  paralysée,  dont  les  doigts 
étaient  rentrés  dans  la  paume,  et  qui,  ayant  confiance  dans  la  vertu 
du  saint  confesseur,  lequel  avait  délivré  le  peuple  des  vaines 
pratiques  d'un  culte  superstitieux,  célébra  la  Vigile  dans  la  nuit  de 
sa  fête,  et  qui,  eu^  priant  devant  son  tombeau,  fut  tout  étonnée  de 
voir  sa  main  guérie  en  présence  du  peuple. 

C'est  là  le  premier  miracle  raconté  dans  l'ancienne  Vie  :  Puella 
quœdam,  cum  manus  unitis  officia  caruisset,  in  tantum  ut  ungularum 
transfoderetur  palma  acumine,,.  Quod  miraculum,  astantibus po- 
pulis qui  ad  ejm  festivitatem  adfluxerant^  operatum  est. 

Dans  le  troisième  chapitre,  Grégoire  de  Tours  raconte  la  guérison 
d'un  homme  qui,  après  avoir  prêté  un  faux  serment  dans  une 
église,  était  devenu  muet  :  sa  voix  ne  ressemblait  plus  à  une  ,voix 


928  SOCIÉTÉ  ABCHiOLOGIQDB  BT  HISTORTQUB  DU  LIIOUSIN. 

humaine,  mais  à  un  bêlement  de  brebis.  S'étant  prosterné  pour 
prier  devant  le  tombeau  du  saint,  il  sentit  comme  une  main  qui  lui 
touchait  le  gosier,  et  ayant  fait  signe  au  prêtre  qui  était  là  de  lui 
faire  le  signe  de  la  croix  sur  la  bouche,  il  recouvra  Tiisage  de  la 
voix,  et  raconta  tout  ce  qu'il  avait  souffert. 

L'auteur  de  la  vie  de  saint  Martial  raconte  ce  miracle  en  termes 
presque  identiques,  comme  on  peut  s'en  assurer  en  comparant  les 
deux  textes  que  nous  mettons  en  regard  : 


ViTA  S.  Martialis. 

Solet  enim  pertinax  cervicosUas 
populorum  ut  aliqua  sibi  crimina 
sacramentis  expîare  contendat... 
Mox  rigente  lingua^  ita  os  ejus 
rescratum  est,  ut  nequaquam 
mendacii  sui  potuisset  exercere 
action e m,  aed  quasi  balatum 
ooium  vocibua  similaret,  Adoe^ 
niens  autem  ad  hufus  confeasoris 
tumulum  prosternit  se  ad  oratio- 
nem.  Ubi,  cum  diutius  jacuisset, 
ianquam  si  guttur  ejus  aliquU 
tangeret,  ei  visum  est.  Qui, 
innuena  preabytero^  cui  ibidem 
offîcii  fuerat  agendi  cura  com- 
missa,  manu  oatendit  ut  gutturi 
auo  algnum  crucla  infigeret,  Quo 
facto,  prostraoit  se  homo  ille, 
vacans  orationL  Qui,  cum  eleca- 
tua  fuisset  a  pavimcnto,  reddlto 
oocia  officiOy  omnia  quœ  sibi  acci- 
derant  proprlo  populia  patefecit 
eloquio. 


GreGORIUS  TURONSIfSIS. 

Quidam  eloquium  meruit  hoc 
modo  Hic  elenim,  ut  cruda  opera- 
tur  ruaticUaa  populorum,  jura- 
mcntum  mendax  in  ecclesia  pro- 
tulit.  Mox  rigente  lingua,  mutus 
effectus  est,  ita  ut  non  vocis 
humanœ,  sed  bidentia  mugitum 
aimulare  oideretur.  Adoeniens 
autem  ad  hujua  confeaaoria  tumu- 
lum, proaternitur  ad  orationem^ 
sensitque,  ut  postca  asserebat, 
tanquam  ai  aliquia  guttur  ejus 
tangeret;  quod,  ut  credo,  virlus 
erat  dominicl  confessons.  Egres- 
susque,  preabyterum  qui  aderal, 
nutu  deprecabatur^  ut  algnum 
cruels  fauclbua  aula  imponeret  : 
quod  cum  preabyter  feciaaet^  itc- 
rum  proaternitur  ad  orationem; 
proiinusque  elevatua,  oocis  offi- 
elo  reddlto,  omnia  qu»  pertule- 
rat  proprio  patefecit  eloquio. 


Evidemment,  ou  bien  Grégoire  de  Tours  a  puisé  le  récit  de  ces 
trois  miracles  dans  la  Vie  anonyme  de  saint  Martial,  ou  l'auteur  de 
cette  Vie  a  emprunté  à  Grégoire  de  Tours  le  récit  de  ces  trois 
miracles.  De  quel  côté  se  trouve  la  vérité?  nous  affirmons  de  nou- 
veau ce  que  nous  avons  dit  ailleurs  :  Grégoire  de  Tours  a  pris  le 
récit  de  ces  trois  miracles  dans  l'ancienne  Vie  de  saint  Martial. 

Deux  savants  allemands,  dans  une  édition  récente  de  Grégoire  de 
Tours  (1884),  MM.W.  Arndt  et  Bruno  Grusch  ont  cité  notre  opinion 
à  ce  sujet,  et  tout  en  accordant  que  cette  ancienne  Vie  et  les  mira- 
cles qui  y  sont  racontés  ont  été  écrits  peu  de  temps  après  Grégoire 
de  Tours,  ils  adoptent  plutôt  l'opinion  que  c'est  l'auteur  de  cette 


/ 


ÉTUDE   HISTORIQUE   SUR   L^AMCIRNNR    VIR   DE  SAINT  MARTIAL.  %99 

aBcienne  Vie  qui  a  empruaté  à  Grégoire  de  Tours  le  récit  de  ces 
Irois  miracles  (i). 

Nous  eo  demandons  pardon  à  la  critique  allemande^  mais  elle 
nous  paraît  ici  en  défaut.  Prétendre  qu'un  écrivain  limousin  est 
allé  emprunter  à  Grégoire  de  Tours  le  récit  de  miracles  opérés  ^ 
Limoges,  c'est  aller  contre  toute  vraisemblance.  C'est  comme  si  on 
disait  que  Grégoire  de  Tours  est  venu  chercher  en  Limousin  le 
récit  de  miracles  opérés  en  Auvergne.  Ces  miracles  étaient  natu- 
rellement écrits  sur  place,  dans  les  lieux  où  ils  avaient  été  opérés. 
Est-ce  que  les  autres  miracles  qui  suivent  n'ont  pas  été  écrits  h 
Limoges?  Serait-ce,  par  hasard,  que,  à  cette  époque, il  n'y  avait 
pas  d'autre  écrivain  que  Grégoire  de  Tours?  Comment  soutenir 
cette  opinion  quand  on  convient,  du  reste,  que  ces  miracles  ont  été 
écrits  peu  de  temps  après  Grégoire  de  Tours? 

Mais,  objecte ra-t-on,  si  Grégoire  de  Tours  a  connu  Fancienne 
Vie  de  saint  Martial,  comment  n'a-t^il  pas  adopté  la  date  qu'on 
trouve  dans  celte  ancienne  vie?  Comment  n'a-t-il  pas  dit  que  saint 
Martial  avait  été  envoyé  par  saint  Pierre? 

Nous  répéterons  ici  ce  que  nous  avons  dit  ailleurs  (2).  Grégoire 
de  Tours  n'a  pas  voulu  contredire  ce  qu'il  avait  avancé  dans  son 
Histoire  des  Francs  (ch.  XXVIII).  Après  avoir  adopté  pour  la 
mission  des  sept  évéques  (et  par  conséquent  de  saint  Martial)  la 
date  qu'il  avait  trouvée  dans  une  passion  interpolée  de  saint  Satur* 
nia  (mais  qui  ne  regardait  que  cet  évéque),  c'est-à-dire  le  consulat 
de  Dèce  et  de  Gratus,  il  ne  pouvait  se  mettre  en  contradiction  avec 
lui-même.  Que  fait-il?  Il  reste  dans  le  vague  :  «  Saint  Martial,  dit-il, 
envoyé  par  les  évéques  de  Rome  ».  Quels  sont  ces  évéques?  Il  ne 
le  dit  pas,  et  pourtant,  la  première  année  de  l'empire  de  Dèce, 
révoque  de  Rome  était  saint  Fabien. 

Par  ces  évéques  de  Rome,  a-t-il  voulu  désigner,  comme  quelques 
savants  l'ont  pensé  (3),  a-t-il  voulu  désigner  saint  Lin  et  saint  Clé 

{{)  Miracula  quœ  Gregorius  subjecit,  ex  hoc  ipsa  viia  fluxisse.  Aebellot, 
Documents  inédits  sur  l'apostolat  de  saint  Martial,  Paris,  f860,  p.  33, 
staluit  ;  scd  è  Gregorio  potius  vilae  scriptor  profecil^  qui  bldentis  mugitum 
in  f^alantem  ooium  oocem  sententiam,  sensliquc,  ut  poslca  adscrobat. 
tanquaoi  si  aliquis  gollur  cjus  tangeret,  in  illam  tanquam  si  gutiur  ejus 
aiiqiiUf  t€tngerei.  Quamquam  miracula  non  adco  multo  tempore  posi  Gre- 
goriam  composila  esse  conccdo.  (Monumenta  Germaniœ  hlstorica,  — 
Seriftores  Rerum  Merooingicarum^  Gregor.  Turon,,  Hanocverae,  1984, 
p.  765,  note  1.) 

(2)  l^es  Sources  de  ^histoire  des  origines  chrétiennes  de  la  Gaule  dçuis 
Grégoire  de  Tours,  1890,  p.  SI. 

{Z)Ap,VRA:iCisc.?JiGi,Breoiariuniponti/ic,  /2o/na(i, t. IV,  p.  \9,  n.  xxxiii. 

T.  XXXIX.  16 


^30  SOCIÉTÉ  ARCHÊOLOGIQI'E  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

ment,  ou  saint  Clément  et  saint  Clet,  que  quelques  anciens  écrivains 
de  TEglise  latine  ont  prétendu  avoir  siégé  ensemble?  Ce  qui  pour- 
rait le  faire  supposer,  c'est  que,  en  parlant  de  saint  Eutrope  de 
Saintes,  il  dit  qu'il  avait  été  envoyé  par  saint  Clément  (1).  Or  saint 
Eutrope  avait  dû  passer  à  Limoges  pour  se  rendre  à  Saintes,  et  le 
Limousin  avait  reçu  la  lumière  de  TEvangile  avant  la  Saintonge. 

Si  cette  interprétation  n'est  pas  admise,  quels  sont  ces  évéques? 
Grégoire  de  Tours  n'en  sait  rien.  Ce  sont  aussi  bien  des  évéques 
du  1"  siècle  que  du  nv.  Donc  cet  historien  avoue  son  ignorance,  et 
reconnaît,  par  cela  même,  l'incertitude  de  la  date  qu'il  a  assignée 
une  fois  à  la  mission  des  sept  évéques,  savoir,  la  date  du  consulat 
de  Dèce  et  de  Gratus  (250),  date  complètement  invraisemblable  et 
contredite  par  de  nombreux  documents  anciens. 


CHAPITRE  m. 


VALEUR  HISTORIQUE  DE   L  ANCIENNE    VIE  DE   SAINT  MARTIAL. 

Quelle  est  la  valeur  historique  de  l'ancienne  Vie  de  saint  Martial  ? 

Nous*  n'avons  rien  de  plus  ancien  sur  l'apôtre  de  TAquitaine,  et 
nous  devons  voir  dans  cette  ancienne  Vie  un  écho  fidèle  de  la  tra- 
dition immémoriale  de  l'Église  de  Limoges.  Un  savant  peu  suspect 
en  la  matière,  puisqu'il  a  soutenu  le  système  de  Grégoire  de  Tours 
et  révangélisation  tardive  des  Gaules,  M.  l'abbé  Chevalier  a  dit  de 
cette  ancienne  Vie  :  «  Le  plus  ancien  document,  et  le  plus  grave,  à 
notre  avis,  est  la  Vie  assez  courte  découverte  par  M.  Arbellot  à  la 
Bibliothèque  Impériale  et  publiée  par  lui  dans  ses  Documents  iné- 
dits sur  Vapostolat  de  Saint-Martial.  On  n'y  voit  aucune  des  circons- 
tances manifestement  fabuleuses  introduites  dans  la  légende  du 
faux  Aurélien,  et  c'est  là  une  pièce  sérieuse  et  vraiment  digne  de 
l'histoire.  On  y  lit  que  saint  Pierre  envoya  Saint-Martial  à  Limoges. 
Cette  mention  serait  d'un  grand  poids  si  elle  était  antique  ;  mais  le 
manuscrit  est  du  x*  siècle  (1). 

Qu'importe  que  le  manuscrit  ne  soit  que  du  x*  siècle,  si  la  pièce 
elle-même  est  antérieure,  comme  nous  l'avons  montré,  à  Grégoire 
de  Tours  ? 

La  Vie  anonyme    de  Saint-Martial    est   l'expression    la   plus 

(I)  Grbgor.  Turon.,  De  gloriaMartyrum.  cap.  LVI,  edit.  Ruinart,  p.  786. 
—  Patrolog.f  t.  LXXI,  col.  756. 
{%)  Lee  Originea  de  V Eglise  de  Tours ,  4874,  p.  480. 


RTDDK  HISTORIQDB  SUR   l'aNCIRNNR   VIE   DE  SAINT  MARTIAL  S31 

ancienne,  la  plus  authentique  de  la  tradition  locale  sur  Tépoque  de 
la  mission  de  l'apôtre  de  l'Aquitaine.  On  n*a  aucun  motif  de  sus- 
pecter la  bonne  foi  de  l'écrivain  qui  l'a  rédigée.  Tout,  dans  cette 
Vie,  respire  la  sincérité.  Or,  cette  ancienne  Vie  dit  que  Saint-Mar- 
tial a  été  envoyé,  non  pas  par  le  siège  de  Rome,  mais  personnelle- 
ment par  saint  Pierre,  dont  elle  cite  les  paroles  et  les  actions  à 
celte  occasion.  Donc  ou  l'histoire  doit-être  muette  sur  la  date  de  la 
mission  de  Saint-Martial,  ou  elle  doit  dire  que,  selon  la  tradition 
locale,  antérieure  à  tout  autre  récit,  Saint-Martial  a  été  envoyé  par 
saint  Pierre  lui  môme. 

M.  l'abbé  Duchesne,  dans  son  mémoire  récent  sur  YOrigine  des 
sièges  épiscopaux  dans  V ancienne  Gaule  (1)  refuse  toute  valeur, 
môme  traditionnelle,  aux  légendes  des  saints  qui  les  premiers  ont 
prêché  révangile  dans  notre  pays.  Citons  ses  propres  paroles  : 

«  Les  légendes  offraient  un  ensemble  plus  imposant  :  leur  nombre, 
leur  concordance  apparente  —  apparente  seulement  —  ne  lais- 
saient pas  de  faire  impression  sur  les  personnes  qui,  pour  une  raison 
ou  pour  une  autre,  n'étaient  pas  en  situation  de  se  rendre  compte 
de  leur  véritable  valeur  Iradilionnelle. 

«  Aujourd'hui,  il  est  manifeste  que  cette  valeur  tradilîonnelle 
est  entièrement  nulle  ;  que  toutes  les  compositions  [dont  il  s'agit 
sont  postérieures,  et  quelques-unes  de  beaucoup,  à  Tavènement 
de  Charlemagne  ;  qu'elles  s'inspirent,  non  de  souvenirs  antérieurs, 
mais  de  prétentions  présentes  et  d'intérêts  de  clocher.  Elles  n'ont 
pas  môme  ce  degré  inférieur  d'autorité  qui  s'attache  aux  traditions 
populaires  à  quelques  siècles  des  événements.  Ce  ne  sont  que  des 
conjectures  artificielles,  des  fictions  de  lettrés.  En  tenir  compte, 
c'est  aller  contre  les  règles  les  plus  essentielles  de  la  méthode 
scientifique  ;  il  n'y  a  pas  même  à  discuter  avec  les  personnes  qui 
s'autorisent,  dans  la  question  présente,  à  de  semblables  docu- 
ments (2).  » 

Nous  avons  été  fort  étonné  de  lire,  au  bas'des  lignes  qui  précè- 
dent, la  signature  del'éminent  professeur  d'histoire  ecclésiastique 
à  l'institut  catholique  de  Paris.  Il  nous  a  semblé  que,  tenir  un  pareil 
langage,  c'était  manquer  de  mesure  et,  qui  plus  est,  manquer  de 
critique.  C'est  là  ce  que  nous  allons  prouver. 

M.  l'abbé  Duchesne  dit,  en  parlant  de  la  valeur  traditionnelle  de 
ces  légendes  : 

(1)  Dans  le  Bulletin  des  Antiquaires  de  France^  t.  X.  1890,  p.  337- 
416. 

(2)  Ibid,  p.  338. 


S32  SOCIÉTÉ  AECRÉ0L0G1QUR   RT  BISTORtQUB   Wi   LIMOUSIN. 

'    «  Aujeurd^hui  il  est  manifeste  que  cette  valeur  traditionnelle  est 
entièrement  nulle.  » 

Nous  ne  voyons  pas  qu'aujourd'hui  on  ail  prouvé  la  nullité  de 
cette  valeur  traditionnelle,  et  nous  ue  connaissons  personne  qui  ait 
fait  cette  démonstration.  Bien  au  contraire,  on  a  démontré  aujour- 
d'hui la  valeur  traditionnelle  de  quelques-unes  de  ces  légendes,  et 
nous-môme  nous  avons  consacré  un  article  à  ce  sujet  dans  nos  jDocm- 
ments  inédits  sur  Vapostolat  de  saint  Martial. 

En  refusant  aux  légendes  de  nos  premiers  évoques  toute  valeur 
tradilipnnelle.M.  l'abbé  Duchesne  se  montré  critique  plus  exigeant 
qu'un  académicien,  peu  suspect,  du  dernier  siècle,  nous  voulons 
parler  de  Fréret,  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des  Inscrip- 
tions et  Belles-Lettres  :  «  Les  anciennes  histoires,  dit-il,  celles 
môme  qui  n'étaient  fondées  que  sur  la  simple  tradition,  ont,  à  ce 
que  je  crois,  un  certain  degré  de  certitude,  moins  fort  à  la  vérité  que 
celui  des  histoires  contemporaines,  mais  tel  cependant  que,  malgré 
rélaigneraent  des  temps  et  des  lieux,  qui  nous  cache  une  partie 
des  circonstances,  et  qui  altère  souvent  la  vérité  de  plusieurs  autres, 
les  esprits  vraiment  justes  ne  se  croient  point  en  droit  de  les  rejeter 
enlièrement,  pour  le  gros  des  faits,  lorsqu'ils  n'ont  point  de  preuve 
positive  de  leur  fausseté  (1). 

Peut-être  M.  l'abbé  Duchesne  a-t-il  confondu  la  valeur  historique 
et  la  valeur  traditionnelle  ;  mais  nous  les  avons  parfaitement  dis* 
tinguées.  «  Il  y  a,  avons-nous  dit,  entre  la  valeur  historique  et  la 
yaleur  traditionnelle,  la  même  différence  qu'il  y  a  entre  la  certitude 
et  la  probabilité  ;  enlre  le  plein  jour  et  le  crépuscule.  Si  M.  l'abbé 
Duchesne  ne  veut  pas  reconnaître  à  ces  anciennes  légendes  ce 
certain  degré  de  certitude  dont  parle  Fréret,  nous  ne  voyons  pas 
pourquoi  il  leur  refuserait  un  certain  degré  de  probabilité,  et  c'est 
là  ce  que  nous  appelons  une  valeur  traditionnelle,  si  ce  n'est  pas 
certain  comme  de  l'histoire,  c'est  au  moins  probable  comme  une 
tradition. 

'  Ecoutons  sur  ce  point  un  savant  qui  a  fixé  avec  un  coup  d'œil 
judicieux  les  règles  de  la  critique  moderne  ;  «  Ces  traditions  res- 
pectables, dit  le  P.  Honoré  de  Sainte-Marie,  n'étant  que  des  opi- 
nions, tiennent  le  milieu  enlre  les  faits  certains  et  ceux  qui  sont 
supposés...  Les  historiens  qui  ont  écrit  avec  le  plus  d'exactitude 
n'ont  pas  manqué  de  démêler  ce  qui  est  probable  d'avec  ce  qui  est 
visiblement  faux  ;  s'ils  ont  supprimé  les  narrations  fabuleuses,  ils 
n'ont  pas  négligé  les  faits  historiques  qui  ont  de  la  vraisemblance, 

(«)  Aiém.  Acad.  Bell.  Lett.,  t.  iV,  p.  453. 


ETUDE   HI9T0MQUB   SUR   l'aNCIENNE   VIS   DR  SAINT   MARtlAL.  ^33 

et  ils  ont  cru  qu'ils  pourraient  trouver  place  dans  leurs  ouvrages  (I  ). 

En  refusant  aux  légendes  des  fondateurs  de  nos  églises  loule 
valeur  traditionnelle,  M.  Tabbé  Duchesne  sape  par  la  base  le  sys- 
tème de  l'école  historique  à  laquelle  il  se  fait  gloire  d'appartenir. 
Cette  école  s'appelle  historique,  parce  qu'elle  s'appuie  sttr  Grégol4*e 
de  Tours,  le  père  de  l'histoire  de  France.  Or,  Grégoire  de  Tourè, 
qui  vivait  dans  la  seconde  moitié  du  vi*  sièele,|avait-il  autre  chose 
pour  écrire,  à  quatre  ou  cinq  siècles  de  distance,  les  origines  chré- 
tiennes de  la  Gaule,  avait-il  autre  chose  que  des  légendes  ou  des 
souvenirs  légendaires?  non  sans  doute.  C'est  avec  des  légendes 
écrites  avant  lui  qu'il  a  parlé  de  saint  Saturnin  de  Toulouse,  de 
saint  Ursin  de  Bourges,  de  saint  Martial  de  Limoges,  de  saint- 
Privât  de  Monde  ;  c'est-à-l'aide  de  souvenirs  légendaire  qu'il  attri- 
bue au  pape  saint  Clément  la  mission  de  saint  Eutrope  de  Saintes^ 
qu'il  parle  de  cette  matrone  de  Bazas  qui  était  allée  à  Jérusalem 
recueillir  le  sang  de  Saint-Jean -Baptiste,  etc.  Or,  par  quelle  trans- 
formation merveilleuse,  ce  qui  était  légendaire  avant  lui,  est-il 
devenu  historique  après  lui  ?  Pourquoi,  si  vous  reconnaissez  aux 
légendes  de  Grégoire  de  Tours  une  valeur  historique,  refusez-vous 
aux  autres  légendes  une  valeur  traditionnelle  ?  Pourquoi  êtes-vous 
plus  sévères  que  l'Eglise,  qui,  en  insérant  dans  le  bréviaire  romain 
les  légendes  de  saint  Denys  de  Paris  et  de  sainte  Marthe,  a  reconnu 
à  ces  légendes  au  moins  une  valeur  traditionnelle? 

Continuons,  «  il  est  manifeste  que  tontes  les  compositions  dont  il 
s'agit  sont  postérieures  à  V avènement  de  Charlemagne,  » 

C'est  donc  au  ix*  siècle  ou  à  la  fin  du  vni*  qu'il  faudrait  placer  la 
composition  de  toutes  ces  légendes  :  il  est  facile  de  démontrer  Tinex- 
acUtude  de  cette  assertion  ;  par  exemple  :  est-ce  que  l'ancienne 
Vie  de  saint  Martial,  où  Grégoire  de  Tours  a  puisé  les  trois  miracles 
qu'il  rapporte,  n'est  pas  antérieure  à  l'avènement  de  Charlema- 
gne ?  Est-ce  que  la  légende  apocryphe  de  saint  Martial,  par  le 
psendo-Auréiien,  sur  laquelle  Fortunat  a  composé  des  vers  dont 
nous  avons  prouvé  Tauthenticité  (2),  est  postérieure  à  l'avènement 
de  Chartemagne  ?  Est-ce  que  la  légende  de  saint  Ursin  de  Bour- 
ges, que  Grégoire  de  Tours  a  reproduite  dans  son  Histoire  des 
Francs,  est  postérieure  à  l'avènement  de  Charlemagne  ?  Est-ce  que 
Fancîenne  passion  de  saint  Denys  qui  figure  dans  les  œuvres  de 
Fortunat  et  d'après  laquelle  ce  poète  a  composé  son  hymne  sur 
saint  Denys,  n'est  pas  antérieure  à  l'avènement  de  Charlemagne  (3)? 

(\)  Réflexions  .<ur  les  règles  et  sur  l'usage  de  la  critique^  l.  II,  1717, 
p,  «8. 

(i)  Disêertatlon  sur  l'apoHoUU  de  saln^  Martial,  1855,  p.  77  et  23i. 
{3j  Voir  notre  Etude  sur  saint  Denys  de  Paris,  1880,  p.  64  et  suiv. 


934  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DO  LIMOUSIN. 

Est-ce  que  la  légende  de  saint  Austremoine  composée  au  vu''  siècle 
par  saint  Priest,  évéque  de  Clermont,  n'est  pas  antérieure  à  Tavé- 
nement  de  Charleroagne  (1)  ?  Est-ce  que  la  légende  de  saint 
Clément  de  Metz  où  Paul  Warnefride,  en  778,  a  puisé  ce  qu'il  dit 
sur  cet  envoyé  de  Saint-Pierre,  est-ce  que  cette  antique  relation^ 
comme  il  rappelle,  n'est  pas  antérieure  à  Tavénement  de  Charle- 
magne  ?  Est-ce  que  la  légende  de  saint  Memmic  de  Ghâlons,  que  le 
savant  Mabillon  date  du  vii<^  siècle,  n'est  pas  antérieure  à  l'avéne- 
ment  de  Charlemagne  ? 

Comment  supposer  que  tous  les  savants  du  xi*  siècle,  Adon  de 
Vienne,  Usuard,  Notker  de  Saint-Gall,  Hincmard  de  Reims,  Hilduin 
de  Saint-Denys,  Jean-Scot-Erigène,  Wandalbert,  etc.,  aient  accepté 
aveuglément  comme  faits  historiques,  des  conjectures  artificielles^ 
des  fictions  de  lettrés  qui  ne  dataient  que  des  dernières  années  du 
siècle  précédent?  il  est  évideut  que  les  tradilions  dont  il  s'agit 
avaient  leurs  racines  dans  un  passé  |)lus  lointain. 

«  Il  est  manifeste  quelles  s'inspirent  non  de  souvenirs  antérieurs^ 
mais  de  prétentions  présentes  et  d'intérêts  de  clocher  ». 

C'est  faire  une  injure  imméritée  à  nos  devanciers  ecclésiastiques, 
que  de  leur  prêter  de  pareils  procédés,  de  leur  supposer  de  pareils 
sentiments,  de  les  proclamer  fourbes  et  de  mauvaise  foi.  Il  faut 
laisser  de  telles  appréciations  aux  encyclopédistes  et  à  l'école  de 
Voltaire  I  Quand  bien  même  on  trouverait  dans  les  légendes  primi- 
tives un  ou  deux  cas  de  ce  genre,  on  n'aurait  pas  le  droit  de  géné- 
raliser cette  accusation.  Quoi  !  tous  ces  écrivains,  la  plupart  reli- 
gieux, se  seraient  faits  faussaires,  et  auraient  menti  sciemment  à 
leurs  contemporains  I  et  les  contemporains  auraient  donné  sotte- 
ment dans  le  filet  et  auraient  accepté  ces  mensonges  sans  réclama- 
tion, sans  un  mot  de  protestation  !  Ils  étaient  donc  bien  naïfs,  nos 
ancêtres  duix*  siècle,  Hincmar  de  Reims,  Usuard,  Adon  de  Vienne, 
Rabant  Maur,  Notker  de  Saint-Gall,  etc.,  en  acceptant  comme 
véridiques,  comme  faits  historiques  des  conjectures  artificielles^  des 
fictions  de  lettrés,  œuvre  frauduleuse  d'invention  récente  1  Non  ! 
ils  n'étaient  pas  si  naïfs  qu'on  semble  le  dire  :  ils  s'en  rapportaient 
simplement  à  la  bonne  foi  de  leurs  devanciers. 

Des  intérêts  de  clocher  t  mais  quel  intérêt  de  clocher  pouvaient-ils 
avoir  à  inventer,  par  exemple  :  que  saint  Denis  de  Paris  avait  reçu 
sa  mission  de  saint  Clément  ?  Si  l'on  avait  voulu  mentir  dans  un 
intérêt  de  clocher,  on  serait  monté  plus  haut,  on  aurait  attribué 

(4)  Voir  nos  Obseroations  critiques  à  MM.  Bourassé  et  Chevalier  sur 
la  légende  de  saint  Austremoine^  1870,  p.  i-45. 


iTUDE  HISTORIQUR  SUR   L^ANCIENNB   VIB   DE  SAINT  MARTIAL.  935 

la  mission  de  saint  Denis  au  Christ  lui-même.  Et  puis,  à  côté  de  ces 
intérêts  de  clocher,  il  y  avait  désintérêts  rivaux  oa  mêmes  ennemis; 
ceux-là  n'auraient-ils  pas  manqué  de  réclamer,  de  protester  contre 
l'invention  et  le  mensonge?  Or,  ils  ne  Tout  pas  fait  :  donc  ces  souve- 
nirs légendaires  n'étaient  pas  d'invention  récente,  mais  comme 
nous  Favons  dit,  plongeaieat  leurs  racines  dans  un  passé  plus 
lointain. 

c(  Elles  n'ont  pas  même  ce  degré  inférieur  d'autorité  qui  s'attache 
aux  traditions  populaires  à  quelques  siècles  des  événements.  » 

Et  pourquoi  n'ont-elles  pas  ce  degré  inférieur  d'autorité  ?  Sans 
doute  parce  que  ce  sont  des  traditions  ecclésiastiques  et  par  consé- 
quent mensongères?  nous  ne  voudrions  pas  tirer  cette  conclusion; 
mais  en  bonne  logique,  elle  se  déduit  naturellement. 

«  Ce  ne  sont  que  des  conjectures  artificielles,  des  fictions  de  lettrés  ». 

Nos  ancêtres  du  ix"  siècle  étaient  donc,  les  uns  bien  fourbes,  en 
inventant  ces  fictions,  les  autres  bien  naïfs  en  acceptant  ces  fictions 
comme  documents  historiques.  Leur  faire  de  pareils  reproches,  c'est 
évidemment  manquer  de  mesure.  Que  certaines  légendes,  dans 
quelques  détails,  prêtent  le  flanc  à  cette  accusation,  c'est  possible. 
Le  tort  de  M.  Duchesne,  c'est  de  généraliser  cette  accusation  et  de 
rejeter  en  bloc  toutes  les  légendes  comme  des  conjectures  artifi- 
cielles et  des  fictions  de  lettrés.  Le  savant  Bollandiste  Daniel  Pape- 
brock,  que  don  Gucranger  appelle  «  un  critique  redoutable  et  d'une 
sévérité  outrée  »,  était  tout  à  la  fois  et  plus  tolérant  et  plus  clairvo- 
yant :  «  Je  pense,  disait-il,  qu'il  y  a  un  certain  fondement  historique 
à  beaucoup  de  ces  fables,  qui  ont  été  témérairement  insérées  dans 
les  Vies  des  Saints  les  plus  anciens, composées  quelques  siècles  après 
les  événements,  et  qui  ont  été  transmises,  de  bonne  foi,  par  des 
hommes  simples,  à  la  postérité  (1)  ». 

Donc  tout  n'est  pas  fabuleux  dans  les  légendes  apocryphes.  On 
peut  en  retirer  quelques  éléments  historiques  ;  et  c'est  là  ce  que 
reconnaissait  M.  l'abbé  Duchesne  au  congrès  catholique  de  Paris 
(avril  1891),  après  une  lecture  sur  une  charte  apocryphe  du  x'  ouxi* 
siècle,  faite  par  le  docteur  Grauert,  professeur  à  l'Université  de 
Munich. 

«  En  tenir  compte,  c'est  aller  contre  tontes  les  règles  de  la  mé- 
thode scientifique.  » 

Les  règles  de  la  méthode  scientifique  consistent,  non  pas  à  re- 

(f)  Censeo  complu res  qaîdem  fabulas,  sanclorum  velustorum  vitis,  post 
aliquol  sseculonim  (iecursum  compositis,  lemere  admixtas,  ei  ab  hominibus 
sioipllcibus  bonatide  iraditas  posieris,  liabere  aiiquod  in  vera  historia  fun- 
damenlum  {Acia  SS.,  t.  V  mali,  p.  137. 


236  BOCIÉTÊ   AttCBÉOLÔOIQUff   ET   HI8T0RIQ0R   OU   LIMOUSIN. 

jeter  en  bloc  toutes  les  léf^endes,  à  répudier  toutes  les  traditions, 
mais  à  démêler  ce  qu'il  y  a  de  vrai  et  ce  qu'il  y  a  de  faux  daHs  les 
traditions  et  les  légendes,  à  séparer  le  froment  dé  l'ivraie,  la  vérité 
de  Terreur.  La  méthode  scientifique  consiste  à  analyser  les  docu- 
ments et,  Comme  te  disait  le  cardinal  Baronius,  «à  séparer  avec  soiD 
ce  qui  fest  précieux  de  ce  qui  est  vil,  ce  qui  est  sacré  de  ce  qui  est 
profane  :  il  faut  après  avoir  rejeté  ce  qui  est  fabuleux,  conserver 
œ  qui  est  sincère  et  digne  de  foi  (1)  ». 

M.  Tabbé  Duchesne  nous  semble  avoir  manqué  de  critique  en 
voulant  pousser  la  critique  jusqu'à  l'excès  ;  il  a  perdu  de  vue  le 
né  quid  nimis  des  anciens  et  1'^^^  modus  in  rébus  d'Horace.  La  véri- 
table critique  ne  connaît  pas  l'exagération.  C'est  une  critique  sobre 
et  modérée  qu'on  peut  définir  avec  les  paroles  de  saint  Paul  : 
Non  plus  sapere  quam  oportet  sapere,  sed  sapere  ad  sobrietatem 
(Rom.  Xh,  3). 

Au  lieu  de  rejeter  en  bloc  les  légendes  de  nos  premiers  évéques, 
lé  savant  archevêque  de  Toulouse,  Pierre  de  Marca,  disait  :  c<  Je 
n'ignore  pas  qu'il  s'est  glissé  dans  les  Actes  de  ces  premiers  évé- 
ques certains  faits  qui  ont  besoin  d'être  élagués  par  une  main  ha- 
bile {quœ  manumedica  egeant.utrepurgentur)  :  mais  cela  n'attaque 
en  rien  la  mission  de  ces  évéques  à  l'époque  assignée  par  leurs 
Actes  :  or  c'est  la  seule  chose  que  nous  défendions  en  ce  mo- 
ment (2).  » 

«  //  n'y  a  pas  même  à  discuter  avec  les  personnes  qui  s'autoriseni 
dans  la  question  présente  à  de  semblables  documents.  » 

Nous  ignorons  si  nous  sommes  visés  par  ces  paroles,  nous  qui, 
en  effet,  nous  sommes  appuyé  sur  de  semblables  documents  dans 
la  question  des  origines  chrétiennes  de  la  Gaule;  mais  nous  trou- 
vons que  c'est  traiter  trop  cavalièrement  ses  adversaires  que  de 
les  juger  indignes  d'une  discussion. 

M.  l'abbé  Duchesne,  qui  a  reproché  aux  partisans  de  l'école  tra- 
ditionnelle «  leurs  formes  impétueuses  (3)  »  et  leur  manque  de 
calme  et  de  modération,  aurait  bien  fait  de  s'épargner  ce  reproche 
à  lui-même. 

Les  membres  de  l'Institut  mettent  d'ordinaire  plus  de  formes 

(1)  In  his  laborandum  erit,  ut  pretiosum  à  vili,  et  sanctâ  a  profanis  dis- 
tinguentes,  quae  improbata  atque  rejecla,  quae  sincera  atquc  rccepia  rcpc- 
riantur,  adducamus  io  médium.  {Martyrol.  roman.»  23  eepiemb.) 

(t)  De  tempore  prœdicatœ  primum  in  GalUis  fidei,  (Ap  Acta  S  S.,  L  V 
junii,  p.  552.) 

(3)  Bulletin  critique  y  2'-  année,  p.  i. 


àTUOK  HISTORK^L'B  SUR   l' ANCIENNE  VfB   Di   SAINT  MARTIAL  337 

dans  leur  polémique  et  traitent  leurs  adversaires  avec  plus  de 
courtoisie. 

Le  grand  journal  du  boulevard,  à  propos  du  Congrès  catholi'iue 
de  Paris,  a  fait  un  pompeux  éloge  du  savant  professeur  d'histoire 
ecclésiastique  et  lui  a  donné  en  même  temps  un  conseil  salutaire 
dans  les  lignes  qui  suivent  :  «  Peut-être  a-t-il  manqué  à  M.  Tabbé 
Duchesne,  pour  que  son  nom  devînt  plus  populaire,  un  peu  de  cette 
courtoisie  mondaine  qui  guide  l'écriture,  surveille  les  polémiques, 
embellit  les  relations  de  la  vie.  Né  en  Bretague  dans  une  famille  de 
marins,  il  a  l'audace  des  loups  de  mer.  Il  en  a  aussi  la  rudesse.  Il 
est  terrible  dans  ses  abordages.  Ce  qui  domine  en  lui  c'est  la  force. 
Il  tient  le  gouvernail  des  études  ecclésiastiques  en  France.  Il  est 
l'é^^uvantail  des  chanoines  érudits  de  province  et  des  antiquaires 
de  cathédrale  (1). 

Il  y  a  du  vrai  dans  les  lignes  qui  précèdent  ;  mais  nous  trouvons 
que,  dans  le  dernier  trait,  il  y  a  un  peu  d'exagération. 


ANCIENNE  VIE  DE  SAINT  MARTIAL. 


Nous  allons  publier  ici  Tancienne  Vie  de  saint  Martial,  et  nous 
donnerons,  en  note,  les  variantes  des  divers  manuscrits. 

Nous  n'avons,  pour  la  première  partie  de  cette  ancienne  Vie,  que 
deux  manuscrits  :  celui  de  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  du 
X®  siècle  (2),  que  nous  désignons  en  note  par  la  lettre  A;  puis 
celui  de  Rome  (3)  que  nous  indiquons  par  la  lettre  8. 

Quant  à  la  seconde  partie,  qui  renferme  le  récit  des  plus  anciens 
miracles  opérés  au  tombeau  de  saint  Martial,  nous  avons  deux 
autres  manuscrits  :  celui  qui  a  été  publié  par  les  Bollandisles  (4), 
qne  nous  indiquons  par  la  lettre  C,  et  le  manuscrit  8365  de  la 
Bibliothèque  nationale  (5)  que  nous  désignons  par  la  lettre  D. 


(0  Figaro,  l  avril  1891. 
(9)  Vs.  38»i  A,  fol.  33-34. 

(3)  Bibliothèque  Victor  Emmanuel,  londs  Farfensis,  rfl  Î9,  p.  436. 

(4)  T.  V  junii,  p.  553. 

(5)  Fol.  34. 


238  SOCIÉTÉ   ARCHEOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 


I2^.tif(  fi^i^^J     VITA  ET  MIRACULA 

Domni  Marcialis  episcopi  (1). 


iPROliOéOS]. 

Quicumque  sanctorum  beatissimas  actiones  cupit  propriis  ser- 
monibus  expolire  (2),  consideret  vires,  ne,  tantô  pressus  pon- 
dère (3)  quod  suscepit,  fatiscat  ingénie  (4).  Ille  tamen  bis  se  rébus 
débet  aptare  (5),  quem  et  facundiaB  (6)  vigor  attollit,  et  facultatis 
sermo  non  déficit  (7).  Ergo  quia  hujus  confessons  (8),  cujus  no- 
raen  tituli  (9)  denuntiavit  principium,  actionum  sériera  nilor  exe- 
rere,  vereor  ne  floccipendendus  magis  sit  sermo,  potius  quam 
paginait  conioquio  admittendus  ;  et  licet  nonnulli  doctissimi  (10) 
viri,  et  alacri  ferventes  ingenio,  quibns  et  doctrinae  norma  favet 
in  poesi  (11),  quibus  suppetit  et  philosophia,  ordo  recurrit  (12) 
rhetoricus,  Maronis  (13)  eliam  pêne  a»quiparent  dictiones,  cum 
cœperint  ad  taie  (14)  venire  propositura,  extemplo  (15)  eorum 
tepescit  auctoritas 

Ast  ego,  quem  tenui  vix  implet  musa  susurro  (16j,....  ac  si  pha- 


(4)  A  :  Inc  est  vila  beatissimact  miraculis  {sic)  domni  Marcialis  epi.  — 
R  :  Vita  et  actus  sancli  Marcialis  Lemovicinse  civitaiis  episcopus  {sic). 
(8)  Sic  B.  —  A  :  explere. 

(3)  Sic  B.  —  A  :  tantum  pressus  in  pondère. 

(4)  A  :  fatescat  ingenio.  —  B  :  fatescat  ingenium. 

(5)  Sic  B.  —  A  :  bis  rébus  débet  astare. 

(6)  Sic  B.  —  A  :  fecundie. 

(7)  Sic  B.  —  A  :  non  deflfecit. 

(8)  Dans  le  ms.  A  le  mot  confessoris  a  été  effacé,  et  Ton  a  écrit  au- 
dessus  :  apostoUs, 

(9)  A  :  momenticuli. 
(40)  A  :  doctissmorum. 

(\  I)  Sic  B.  —  Les  mots  in  poesi  minquent  dans  le  ms.  A. 

(12)  Sic  A.  —  B  :  Ordo  sucurrit. 

(13)  SicB.  ^  A: Matrones. 

(14)  A  .  talem. 

(45)  B  :  extimplo.  —  A  :  exemple* 

(16)  Sic  B.  —  A:  Bas  ergo  quem  tenui  vix  implemus  assurro  ..  Cette 
phrase  paraît  incomplète,  aiusi  que  la  précédente. 


ÉTUDE   HISTORIQUE   SUR   l'aNCIBNNR   VIE   DE  SAINT  MARTIAL.  f39 

leratis  (1)  non  valeo  verbis  explere  quod  cupio,  saltem  qui  volue- 
rit  hujus  textum  repetere  dictionis,  inchoatœ  rei  materiem  in 
peritissimum  deducat  styium.    i     v  J^ vf    ofiA^  fA^ ô  5 

[VIT A  INCIPIT]. 

I.  —  Igitur,  dum  adhuc  apad  provincias  Galliarum,  plarimae 
civitates  diversorum  ritaum  cultibus  praepollerent,  inter  quas  erat 
tune  temporis  Lemovecum  clvitas  (2),  diversorum  numinum  (3) 
referta  culturis  (4),  alque  errorum  cerimoniis  vacans  (5),  in  tanlum 
ut  nullus  eorum  in  ea  (6)  nomen  Domini  noverit  invocare,  nec  bap- 
tismi  (7)  salutaris  gratia  consecralus  divinis  vacarel  mysteriis;  — 
eodem  tempore  quo  (8)  beatissimo  Pctro  Romana  Ecclesia  (9) 
gubernandi  pontiGcio  fuerat  commendata,  cui  et  propositum  in 
universis  urbibussublimis(lO)  cathedraBac  fidei  pendebat  aucla(ll) 
devotio,  intenlissime  pro  Chrisii  nomine  laborabal,  ut  provinciae 
universaB  catholicae  EcclesiaB  disciplinisac  dogmatibusregerentur... 

Cognito  (12)  ilaque  tanto  sacrilegio  Gailias  subjacere,  diversis 
urbibus  mîsit  episcopos  (13)  quorum  doctrinis  ad  religionem  fidei 
populusChristi  (14)  nomen  adquireret.  Et  quia,  in  jam  dicta  civitate, 
maxima  (IS),  ut  antiquitas  propria  in  asdibus  auctoritate  (16)  adfir- 
mat,  nullus  rei  indicio  (17)  fastu  superbisB  (18)  Dominum  fateba- 
tur...  (19).  Quae  res,  pastorali  soUicitudine  inquisila,  pervenit  ad 

(I)  Sic  A.  —  B.  falerutis. 

(9)  Sic  B.  —  A  :  Lemo  civifatis. 

(3)  Sic  B.  —  A  :  diversorum  nominibus. 

(4)  Sic  B.  —  A  :  refferta  culluriis. 

(ft)  Sic  B.  —  Dans  le  ms.  A,  ce  mot  n*esi  indiqué  que  par  la  lettre  u. 

(6)  Sic.  B.  —  Ces  deux  mois  in  ea  sont  omis  dans  le  ms.  A. 

(7)  Sic  B.  —  A  :  bealissimi. 

(8)  Sic  B.  —  A  :  quod. 

(9)  Sic  A.  —  B  :  Romans  ecclesiae. 

(10)  Sic  B.  —  A  :  sublimi. 
(14)  Sic  B.  —  A  :  auta  devocio. 

(i3)  Sic  A.  —  B  :  Agnito. 

(id)  Dans  le  ms.  A,  on  lit,  au-dessus  de  miait  episcopos,  ces  deux  mots  : 
consecraoU  Marcialem, 

(14)  Sic  A.  —  B  :  populus  chrlstianum  nomen. 

(15)  Sic  A.  —  B  :  eo  quod  fuerit  maxime. 

(16)  Sic  B.  —  A:  auctorilatem. 

(17)  Sic  A.—  B:  uullius  rei  indicio. 

(18)  Sic  B.  —  A  :  factu  superbia. 

(19)  Sic  B.  —  A  :  Dominum  fate...  La  phrase  parait  incomplète. 


S40  SaOlÊTÉ   ARGHéOLOGIQUE  Kf  HISTOKIQtJK   DO  LtltOtTSlW. 

beatis^mum  Petrutn  episcopom  (1).  Ghristi  discipulutn  (3),  Roma- 
nsB  Ecclesias  sublimi  (3)  fastigio  cathedras  subiimatum.  Quâm  rem 
molestissime  ferens,  eo  quod  tanto  errori  (4)  deditus  populos 
subjaceret  (5),  Marcialem  episcopum,  dignum  Deo  virum  (6)  qui 
ad  hoc  adcitus  (7)  fuerat,  ut  ad  prsBdicàndum  genlibus  mitterelur, 
ad  se  vocavit,  cui  et  ait  (8)  : 

«  Fraler  sanctissime,  magislernoster  etDominus  Jesus-Chrislus, 
post  sacram  ac  (0)  veuerabilem  resurreciionem^  cum  Bobis  non  per 
enigmala,  sed  in  eo  habitu  et  forma  quam  de  maire  adsumpsit, 
apparuit,  boc  nobis  praecipiens,  dixit  :  «  Dala  est  mihi  (iO)  omois 
»potestas  in  cœlo  (11)  et  in  terra:  ite,  docele  omnes  gentes,  bapti- 
»  zantes  eos  in  nomine  Patris,  et  Filii,  etSpiritus-Sancli(12),  docen- 
»  tes  eos  servare  omnia  quaecumque  mandavi  vobis  ».  Quod,  bea- 
tissimefrater,  ulrisque  nobis  expedil  conservare  (13),  ut  praeceplido- 
minici  non  simus  imraeraores.  Quare  âge,  ô  vir  praBstanlissime  (14), 
etmeis  adquiesce  consiIiis,quo(15)  fiât  ut  nostro  particeps  efficiaris 
consortio  (16).  Àccinge  lumbos  luos,  et  absque  retractatione  (17) 
aliqua,  quanlocius  festinare.  jNon  différas  (18),  ut  populum  qui 
dèmoniis  noscitur  deservire,  ad  veram  et  integram  divini  cultus 
religionem  facias  pervenire,  ut,  amolo  errore  gentilium]  (19) 
Christo  valeant  confiteri.  Et  quia  longa  libi  restât  via,  ne  cuncteris 
meis  parère  sermonibus,  quibus  coronse  tuas  libi  magnum  adsumas 
bravium. 


(1)  Sic  B.  —  Dans  le  ms.  A,  ce  mol  semble  avoir  été  effacé,  et  on  a 
écrit  au-dessus  :  aplm  (apostolum). 
(f)  Sic  B.  —  Le  mol  Chrlsti  manque  dans  A, 

(3)  B  :  Sublimio  (faute  de  copiste). 

(4)  Me  B  —  A  :  errore. 

(5)  Sic  B.  •—  A  la  suite  de  ce  mot,  dans  le  ms,  A  :  Tanc  beatus  PeIruS. 

(6)  Sic  B.  —  A  :  dJgnum  Deo  el  verum. 

(7)  Sic  B.  —  A  :  adscilalis. 

(8)  Sic  B.  —  A  :  cui  ait. 

(9)  A  :  hac.  —  B:  el. 

(10)  A  :  michi. 
(tl)  A  omet  incœlo, 

(12)  A  omet  sancti. 

(13)  Sic  A  et  AurelkUi.  ^  B  :  observare. 

(H/  Sic  Aurelian.  —  A  :  praestanlissime.  —  B  :  ô  vir  prudeûtisslmc. 

(15)  Sic  B.  —  A  :  quod  fiai. 

(16)  Sic  B  ei  Aurelian.—  A  :  edicil...  sort... 

(17)  Sic  A  et  Aurelian,  —  B  :  recrastlnaiione. 

(18)  Sic  B  el  ms.  Anglic.  —  Beaulxamis  :  Ne  différas. 

(19)  Ce  qui  précède  entre  deux  crochets  manque  dans  le  ms»  A. 


ÉTUDE  HISTORIQUK  SOn    l' ANCIENNE  VIE  QB  SAINT-MARTIAL.  Sil 

»  Est  Bamque  qusedam  (1)  civiias  in  provinciis  Galliarum  [pro- 
fane vacans  errori,  nomine  Lemovix  (2).  Sume  tecuin  duos  pres- 
biteros,  qui  et  comilalui  tuo  obsequium  pra^boant,  et  coronae  prœ- 
miam  f3)  non  amillant.  In  tantum  âge,  ut  si  libi  gladiator  oecuiv 
rerit,  percuUenli  colla  submitte;  et  qui  le  in  dextram  maxillam 
perçussent,  prsebe  illi  e.t  alliani;  et  qui  te  expoliaverit  tunica  (4), 
dimitte  ei  et  pallium  ;  tantum  sequo  animo  esto]  (5). 

[Nec  mora,  sacralissimus  vir  (6)«  adjunctis  secum  duobuç  presbi- 
^ris  (7),  iter  juxta  quod  ei  fuerat  a  Ghristi  discjpulo  imperatum  (8) 
arripuit.  Et  cum  cœpli  itineris  roaluritatim  (9)  viara  conficeret  (10), 
conligit  ut  unusè  comitibus(H)  migrarel  a  sjecuio  (12).  Quo  vi8o(13), 
beatissiiBus  Marcialis,  velocissimo  gressu  Romam  non  intrepidus 
repedavlt,  nunciansque  (14)  beato  Ghristi  discipulo  (15)  omnia  q\m 
sibi  in  via  acciderant.  Quem  ille  percontatus  est  (16)  et  dixit  ad 
euiB  :  «  Quantoeius  propera,  sunipto  bacterio  meo  in  manu  tua,  et 
cum  (17)  ad  locum  perveneris  quo  fratrem  exanimen  reliquisti, 
tange  ex  ipso  defuncti  cadaver,  et  ego  Domino  fundam  oratio*- 
nem  (18)  statimque  veUit  à  somno  expergiscetur,  et  continuo 
tuo]  (19)  comitalui  inhaerebit  ».  Quod  ita  factum  est,  ut  vulgi  fama 
testatur.  Quce  res  secundum  Evangelii  senlentiam  intelHgenda  mlht 
yidetur,  dicente  Domino  discipuUs  suis  :  «  Si  habuerilis  fidem  siout 

(1)  Sic  Aurelian,  —  A  :  Est  namque  eîvitatis.  —  B  :  Est  quœdam 
civitas. 

(2)  Sic  Aurelian,  —  B  ;  LemoYex, 

(3)  Sic  Aurelian,  —  B  :  prsemia. 

(4)  B  :  lonica. 

(5)  Ce  qui  précède  entre  deux  crochets  manque  dans  le  ms.  A» 

(6)  Sic  B.—  Aurelian, <t  ms.  Anglic.  :  danctissimuaoir  MartiaMyi-^  tus. 
Roman  :  sacratissimus  vir  Martiaiis, 

p)  SicB.  —  Aurelian  :  duobus  discipuUs;  —  id»  ms.  Roman,  :  4aobus 
presbyleris. 

(8)  Sic  B.  —  Aurelian  :  perbeatum  Petrum  a  Domino  injuncluni. 

(9)  Sic  B.  —  Aurelian  :  maturitale. 
{\0)  Sic  B.  —  Aurel,  :  conficerent. 

(tl)  Sic  B.  —  Aurel,  :  conligit  ut  heatus  Auslriclinianiis,  unus  ^  comi- 
tibus. 

(13)  Aurel.  addidit.  :  in  loco  qui  Elsc  vocalur. 
{i'ô)  Sic  Aurel. —  B:  quod  visum. 

(14)  SicB. —  Aurel.  :  nunlians. 

(15)  Sic  B,  -^  Aurel.  :  beato  Petro. 

(16)  Sic  B.  —  Aurel.  :  percunctatus. 

(17)  Sic  B.  —  Aurel.  cumque. 

(48)  B  :  et  ego  Domino  fundens  (sic)  oratioa^io,  stalim... 

(19)  Ce  qui  précède,  entre  deux  crochets»  a  été  omis  dans  le  mSvA, 


S43  SOCIÉTB   ARCBÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

granum  sinapis,  dicetis  huic  montl  :  «  Transi  hinc  »,  et  transibil  ». 
Quo  taclo  (1),  membra,  quae  calore  sanguinis  fuerant  viduata, 
extemplo  rediviva  redduntur;  et  lucem,  quam  araiserat  moriendo, 
propriis  cœplt  luminibus  intueri  (2).  Hoc  ideo  factura  (3)  quis 
ambigatnisi  ut  beati  Pétri  fides  clarescerl  imperando  (4),  etbea- 
tissimus  Marcialis  his  (5)  incitaretur  exemplis,  quibus  coronare- 
tur  et  meritis  (6). 

Igitur,  cum  in  designatis  diebus(7),  venisset  ad  urbem  ubi  fuerat 
destinatus,  invenit  omnem  multiludinem  populi  diversis  idolorum 
vacare  culturis  (8)  :  quibus  instanter  verbum  Domini  cœpit  fideli- 
ler(9)  auribus  indicare  (10);qui  (11)  ita  suis  populura  convertit  allo- 
quiis,utintrapaucorumdierum  spatia  nullus  fuerit  qui  non  sibisalu- 
taris  lavacri  vel  crucis  impressionem  in  fronte  (12)  poposceret.  Ubi 
cum  in  Dei  nomine,  laboris  sui  fructum  maximae  messis  in  Domini 
JesU'Christi  ex  animabus  populi  in  horreo  congregaret,  vel  omnis 
multitudo  gentilis,  superstitione  detersa,  suis  cœpis5et(13)  obtem- 
perare  sermonibus,  frequenli admonitione  perduxit ad gratiam (14). 

Puella  quaBdam,  nomine  Valeria,  [ut  aiunl,  nobilis  orta  natalibus, 
sed]  (15)  nobilior  fide  quam  non  originine  natalium,  Deo  placuit, 
sed  [magis]?  fide  meritorum  (16).  Quae  cuidam  viro  sponsali  titulo 
erat  consociaturaconjugio.  In  tanlum  perhibetur  se  Dei  viro  (17) 
assidua  frequentatione  praeponere,  ut  ad  baptismi  gratiam,  eo  sua- 
dente  pervenerit  (18).  Et,  ut  postea  fertur,  pro  eo  quod  Christiana 
effecta  fuisset,  et  noiuisset  se  disposito  conjugio  sociare,  ab  sponso 
suo  adhuc  genlili  (19)  intcrempta  fuisse  (20). 

(I)  Sic  A.  —  B  :  quo  tactu. 

(î)  Sic  Aurel.  —  A  et  B.  intuere. 

(3)  Sic  B.  —  A  :  ideo  factum.  —  Aurel,  :  quod  ideo  factum. 

(4)  Sic  B.  —  A  :  imperaadum.  —  Aurel  :  exhorlanlis. 

(5)  Sic  A  et  Aurel,  —  B  a  omis  ce  mot  .his, 

(6)  Sic  A  et  B.  —  Aurelian  :  quibus  coronatus  est  et  meritis. 

(7)  A  :  cum  ip  desiinalis  diebus...  B  :  cum  période  natis  diebus. 

(8)  Sic  A.  —  B  :  diversis  vacare  culturis. 

(9)  Sic  B.  —  A  :  fidelibus. 
(40)  Sic  A.  —  B  :  inculcare. 
(4  4  )  Sic  B.  ^  A  :  quis  ita. 
(42j  Sic  A.  ^  B  :  in  frontem. 
(13)  Sic  A.  —B  :  cœpit. 

(il)  Sic  B.  —  A:  produxit  gratiam. 

(15)  Ce  qui  précède,  entre  deux  crochets,  ne  se  trouve  que  dans  le  ms.  B. 

(16)  Sic  A.  —  B  :  fine  meritorum. 

(17)  Sic  B.  —  A  :  se  Deo  vero. 
(48)  Sic  B.  —  A  :  pervenisset. 

(19)  Sic  B.  —  A  :  adhuc  gentile. 

(20)  Sic  A  et  B. 


ÉTUDE   HlSTORlOUIS  SUR  L* ANCIENNE   VIE   DB  SAINT  MAUTIAL.  ^43 

Quse,  pro  amoris  gratia  dicitur,  eo  (1)  quod  vir  Dei  sanctus 
Marcialis,  tam  itinere  fessus,  quam  labore  senioque  confectus... 
praefata  puella  sepulturam,  qua?  suis  cineribus  fuerat  prepa- 
rata...  —  ut  cum  in  Dei  nomine  bealus  Marcialis  de  bac  luce  migra- 
ret  ad  DomiDum,  concessisse  ut  ibi  beati  viri  membra  tumularent, 
adtribuil  (2). 

Quid  multa  ?  imminente  jam  tempore,  eximius  vir  migravit  ad 
Dominum.  Presbiteri,  qui  cum  eodem  advenerant  (3),  superstites 
remanserunt  ;  ac  (4)  ubi  completi  sunt  dies,  ut  et  ipsi  migrarent 
à  saeculo,  in  eodem  loco  quo  beatus  tumulariam  meruit  sepulturam 
(S)  et  ipsi  sepulti  sunl. 

[Et  cum  inter  utrasque,  arctus  ibi  esset  accessus,  et  ne  inhono- 
rum  confessorem  suum  diulius  Dominus  esse  pateretur,  cumque 
jam  creber  esset,  ad  cryptam  in  qua  positi  fuerant,  jam  Christianis 
itus  ac  reditus,  et  dum  varia  mentis  in  populo  intentio  vertere- 
tur,  quum  tam  vicinas  inter  se  sepulturae  esse  viderentur,  divina 
providenlia  factum  est,  ut  causa  quae  populo  rimante,  pendebat, 
divino  mysterio  cassareturj  (6)  et  ita  factum  est,  ut  redeuntibus 
populis  consuetae  orationi  vacarCjinventae  sunt  séparât» (7)  ab  invi- 
cem  sepulturae,  atqae  dlscretae,  ut  pateiieret  populis  quo  tumulo 
pontifex  clauderetur. 


[MIRACULA  SANCTI  MARCIALIS]» 

Igitur  beatissimus  Marcialis,  quibus  se  virtutibus  publicaverit, 
ut  michi  relatio  contulit  manifesta,  huic  paginae  inserendum  (8) 
esse  videtur;  quo  fiât  (9)  ut  populus  miretur  attonitus. 

I.  —  Puella  quaBdam,  cum  manus  unius  (10)  ofBcio  caruisset,  in 

(1)  Sic  A  —  B  :  in  CD  quod. 

(2)  Sic  6.  —  Ce  dernier  mol  manque  dans  A.  —  Les  trois  phrases  pré* 
cédcnles  paraissent  incomplètes  dans  les  deux  manuscrits. 

(3;  Sic  B.  —  A  :  qui  cum  eo  aderant. 

(4)  Sic  A.  —  B  :  at 

(5)  Celte  expression  —  tumulariam  meruit  sepulturam  —  se  trouve 
dans  les  anciens  Actes  de  sainl  Saturnin  (iv^  ou  v"  siècle). 

(6)  Ce  qui  précède  entne  deux  crochets  est  tiré  du  ms.  Bel  manque  daus 
le  ms.  A. 

(7)  Sic  A.  —  B  :  separatim. 

(8)  A  et  G.  —  B  :  inferendum. 

(9)  A  :  quod  fiât. 

(40)  Sic  B,  G  et  D.  —  A  :  manûs  officio. 


944  BOCIÉTV   ARCIléOLOGIQUR   BT   HiaTORlQOB   DU   LlllOUSIIf. 

tanUim  (1)  ut  ungularum  transfoderetar  (2)  palma  accumine,  sancti 
Marcialis  sepulcrum  expctiit  (3),  et,  ut  sui  misereretur  oravit.  Qua3, 
fusis  oracionum  precibus,  solotenus  inhaerens  pavimeulo  (4),  res- 
pecta divino,  pristinam  manûs  aridas  meruit  recipere  sanitatem  (5). 
Quod  miraculucD,  adslantibus  populis  qui  ad  ejus  festivitatem  ad- 
fluxerant,  operatum  est. 

IL  —  In  eadem  namque  nocte,  quid  ibi  miraculi  apparuerit  (6) 
nequaquam  silendum  putavi.  Mutas  a  nativitate  sua.  qui  etsi  usa 
linguaa  caruerat  (7),  tatnen  corde  rneditatus  est  beali  viri  mémo- 
riam  expetere;  ubi  illico  ingressis  liminibus,  fusa  Domino  intra  se 
oratione  (8j,  rigens  lingua  dissolvitar  (9);  qui  et  colloquiura  sta- 
tim  meruit  et  auditum. 

III.  —  Nec  illud  quod  operae  pretium  occurrit  omittendum  est. 
Solet  enim  pertinax  cervicosilas  populorum  ut  aliqua  sibi  objecta 
crimina  sacramenlis  expiarc  çontendat  (10).  Accidit  ut  quidam  cum 
ecclesiae  fores  fuisset  ingressus  (il)  ut  obpositum  (12)  sibi  crimén 
misera  libertate  defensare  deberet,  quo  manifestissiraus  habebaluf  ; 
mox,  rigente  lingua,  ita  os  ejus  seratum  est,  ut  nequaquam  men- 
dacii  sui  potuissetexerere(13)  aclionem  :  sed  quasi  balatum  ovium 
vocibus  similaret  (14).  Ad  venions  autem  ad  hnjus  confessons  (18) 
tumulum,prosternit(16)  se  ad  orationem.  Ubi,  cum  diutiusjacuisset, 

(1)  Sic  A.  C.  D.-—  B  :  lantam. 

(2)  Sic  A  et  B.  —  C  :  ut  ungularum  acumina  transfoderent  palmam. 
^  D  ;  utuilgule  transfoderent  paimam. 

(3)  Sic  C  et  D.  —  A  et  B  :  ad  sancti  Marcialis  sepulcrum  expetiit. 

(4)  Sic  C  et  D.  ^  A  :  inhurens  pavimentum.  —  B  ;  soloteaus  inbasrenç. 

(5)  SicB  etc.  —  A  :  pristina  manusarida.  —  D:  pristinam  manus  arida. 

(6)  Sic  A  et  B.  —  C  et  D  :  quod  ibi  miraonlum  apparaît. 

(7)  Sic  A  et  B.  —  D  :  qui  etiam  usu  ea  caruerat.  —  C  a  supprimé  qui, 

(8)  Sic  G.  —  A  :  fusa  Dominum  intra  se  oratione.  --  B  :  fuça  intra  se 
Dojfnino  OFatioqe.  -*  D  :  fqsa  Domino  oratione  intra  se. 

(9)  D  :  lingua  rigens  dissolvitur. 

(10)  Sic  A,  C  et  D.—  B  :  contendaiât«  Cette  phrase  a  été  copiée  tei^tuelle- 
ment  par  saint  Ouen  dans  la  vie  de  saint  Eloi.  (Pars  il,  Cap.  lvi,  Patrohg»^ 
t.  LXXXVII,  col.  5^0,)  Seulement  il  y  a  ^opiari  au  lieu  d'expiare, 

(H)  SicAet  D.  — '  B  ;  ecclesiae  foribus  fuisset  ingressus.^ C  :  ecdesiam 
fuisset  ingressus, 
(12)  Sic  A  et  B.  —  C  et  D  :  oppositum. 
(l3)Sic  A,  B  etD.  —  Crexercere. 
(<  4)  Sic  A,  B  et  C—  D  :  simularet. 
(15)  Sic  A,  B  et  C.  —  D  :  ad  hujus  sancti  apostoli. 
(<6)  Sic  B  et  C.  —  A  :  prostrar^t  9e,  ^  D  :  prostecaitvn 


ÉTUDE   HISTOftlQUR  SUR   i/aNCIRNNR   VIE    DE   SAINT   MAUTIAL.  î\5 

tanquam  si  guttur  ejus  aliquis  tangeret,  ei  visum  est.  Qui,  innuens 
presbitero,  cui  ibidem  offlcii  fueral  agendi  curra  commissa  (1), 
manu  osteodil,  ut  gutluri  suo  (2)  signum  crucis  infigeret.  Quo 
facto  (3),  prostravit  se  homo  ille,  vacans  orationi.  Qui,  cum  eleva- 
tus  fuisset  a  pavimento,  reddito  vocis  officio,  omnia  quae  sibi  acci- 
derant  proprio  populis  patefecit  eloquio. 

IV.  —  Mulier  quœdam,  dura  turpe  miseriae  suae  ludibrium  car- 
nale  vilium  exerceret  (4),  praeventa  (5j.cum  quo,  flagitii  hujus 
causa,  commissa  fuerat  (6),  pro  facinoris  sui  yerecundia,  basilicam 
sancti  Marcialis  uterque  expetierunt  (7),  ne  publics  a  judicibus 
disciplinis  subdereutur  addicti.  Et  cum  a  custodibus  fugitivo  gradu 
evasissent,  ad  sepulcrum  beati  autistitis  (8)  pervenerunt;  nesciente 
janitore(9)  intra  claustra  obserantur  (10).  Qaos  non  dubium  est  mi- 
seriam  suam  ibidem  pertinaciter  exercere  (11).  Non  reserato  ostio, 
non  pariete  transfosso,  non  fenestras  disrupto  [speculo,  sed  nitu 
divino  expulsi,  in  quadam  aquaB  inluvie,  quae  vicina  eminus  basi- 
licae  apparebat,  redeunte  luce,  frequententibus  populis,  utrique 
reperiuntur  (12)  stantes,  ita  ut  détecta  eorum  miseria  appareret,  et 
beatissimi  viri  yirtus  ostenderetur  in  factis. 

V.  —  Adjiciendum  est  et  illud  (13)  quod  per  eumdem  Dominus 
operatus  est.  Mulier  quaedam,  sitis  ardore  perculsa,  contigit 
Doctu  (14),  ut  sitis  incendium  temperaret,  sine  lumine  vasculum,  in 
quo  aquam  l.auserat  (18)  arripuit;  et  dum  avidissime  biberel,  cum 
haustu  aquae  bibit  nesciens  et  serpentem  (16)  ;  quem  diuturno  tem- 

(i)  Sic  B,  G  et  D.  —  A  :  officio  fuerat  agendi. 
(t)  Sic  B.  —  A,  G  et  D  :  gulturi  ejus. 

(3)  Sic  G  et  D.  —  A  et  B  :  quod  factum. 

(4)  Sic  A  et  C.  —  B  :  dum  turpe  miseriae  suae  ludibrium  carnalis  vitii  , 
exerceret.  —  D  :  dum  turpi  miseriae  suae  ludibrio  carnis  vitio  exerceret. 

(5)  S!c  A,  B  et  D.  —  G  :  invente. 

(6)  Sic  A,  B  et  D.  —  G  :  commixta  fuerat. 

(7)  Sic  A  et  B.  —  G  et  D  .  expetiit. 

(8)  Sic  A,  B  et  C.  —  D  :  aposloli. 

(9)  Sic  B,  C  et  D.  —  A  :  nesclenl[es]  viam  inlranilore  claustra. 

(10)  Sic  G  et  D.  —A  et  B  ;  reserantur. 

(1 1)  ^ic  A  et  B.  —  C  :  exercere  volulsse.  Qui,  etc. 
(IS)  Sic  G.  —  B  :  uterque  reperiuntur. 

(43)  Sic  B.  —  C  :  Adjiciendum  etiam  est  illud.  —  D  :  Ajiciendum  est 
etiam  illud. 

(14)  Sic  B  et  D.  —  C  :  contiyU  est  supprimé  :  nocte  au  lieu  de  noctu. 

(15)  Sic  G  et  D.  —  B  :  baurierat. 

(46)  Sic  B  et  l).  —  G  a  supprimé  nesciens. 

T    xxxis;.  t6 


24C  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   ËlSTOftfQUK   DU   LIMOUSIIf. 

pore  geslans  interius,  cœpit  segrotare  gravissime.  Quse  beatissimi 
viri,  uiremediiim  acqaireret,  basilicam  adiit;  ubi  cum  se  oralioni 
dedisset  (1),  comraotis  visceribus,  serpenlem  vivum  evomuit  :  que 
exempte  (2),  sanitalis  commoda  secum  doraum  reporlavil. 

VI.  —  Jungalur  operi  quod  praBsens  testatur  auctorilas.  Quidam 
de  assistenlibus  orficioj  (3)  basilicaB  sancli  confessons,  nomine 
MarcuUus,  inslintu  diabolicaB  persuasionis  arinatus,celluiam  in  qua 
beali  viri  clauditur  sepuUura,  ingressus,  crucem  quœ  super  sepul- 
crum,  pro  ornatus  causa  (4),  pendebat,  exlensa  manu,  clam  furlo 
subslraxil.  Qua»  res  ut  claro  miraculo  appareret,  compila  diversa- 
rum  provinciarura  perluslrans,  crucem  nundinariis  protuiit,  dalis 
pecuniis  venumdandam  ;  sed  nullatenus  quispiam  eam  (5)  ausus 
est  emere.  Qui,  dum  diulurno  tempore  vagaret  (6)  hue  alque  illuc, 
nec  quidquam  sibiprolalœspecieiproficeretprecium,  in  se  reversus 
alque  cènscio  pudore  percuisus,  crucem  insupcr  etsemctipsum  loco 
de  quo  eam,  maie  blandientis  inimici  insidia  (7),  furti  condilione, 
substraxerat,  post  annum  aut  eo  amplius,  pra^sentavit  (6)  ;  qui  et 
professidne  sua  (9)causam  sui  operis  publicavit  (10). 

VII.  Adhuc  recens  virtutum  clarescit  insigne  miraculum.  Contigit 
ut  quidam  public»  manciparelur  cuslodiae,  et  adstrictus  catenarum 
nexibus  tcnerelur.  Oppressis  somno  custodibus,  nocle  evasit  cus- 
lodia,  et  basilicam  {W)  sancli  Marcialis  adhuc  vinculalus  expeliit; 
qui  (12)  laclis  liminibus,  sed  lamen  seralis(13)  januis,  ita  ?incula 
sunt   comminuta,   ut  slatim  absolvcretus  adstrictus  ;  quse  etiam 

(1)  Sic  C  et  D.  —  B  :  in  orâlionem  dedisset. 

(2)  Sic  C.  —  B  :  qucm  exemphim.  ---  D  :  quœ  ex  scpulchro. 

(3)  Ce  qui  précède,  entre  deux  crochets,  manque  dans  le  ms.  A  da 
X*  siècle. 

(4)  Sic.  B.  —  A  :  pro  ornamcnlo  cause.  — G  :  ornatus  causa.  —  D  :  pro 
ornalu  causa. 

(5)  Sic  A  et  B.  —  C  el  D  :  nullatenus  eam  qu!spiam, 

(6)  Sic  B  el  D.  —  A  :  vaca...  —  C  :  vagaretur. 

(7;  Sic  B.  —  A  :  de  quo  elem,  etc.  —  C  :  de  quo  maie  per  blandientis 
inimici  insldias.  —  D  :  de  quo  eam  maie  blandimcnlis  inimici  insidiis. 

(8)  Ce  mot  manque  dans  B. 

(9)  D  :  pro  confessione  suo. 

(10)  Sic  A  elB.  —  On  ironve  dans  C  elD  la  phrase  suivante  :  et  pubtice 
satlsfaclena,  pœnitudinem  admlaai  facinorls  gessU,. 

(11)  B  :  ad  basilicam. 
(1i)  Sic  Aet  B.  —  C  :  ubi. 

(13)  Sic  B  et  C.  —  P.  Bonaventure,  t.  II,  p.  618:  obseratîs  •—  A  ;  fesc- 
ratis. 


ÉTUnS   BISTORIQUR  SUR    l'aNCIKNNK  VIE   DK   SAINT  iURTIAU.  24? 

catena,  teste  populo,  adpensa  cernitur  pariter  et  confracta  (1). 

VIII.  Simili  causa  aller,  dum  ei  ligne  colla  fuissent  constricta,  et 
ad  custodiam  carceris  duceretur,  invocans  sanctum  Dei  servum, 
ilico  lignum  de  cervicibus  manibusque  ejus  evulsum  est  (2),  ut  liber 
videretur  a  vinculo,  qui  fuerat  ferlasse  (3)  deputatus  (4)  mortis 
eventu  (5). 

IX.  Dum  reliquarum  virtutum  facerem  mentionem,  oblata  sunt 
michi  quse  paginis  cooscribantur.  Cum  ssBpe  se  vir  Dei  roanifestis 
demonstrarit  (6)  miraculis,  hoc  laroen  recens  teslatur  auctoritas  (7), 
Venientes  duo,  unus  a  Turonorum  civilate,  aller  hujus  incola  (8) 
regionis,  pari  vocabulo  alrique  Domoleni  (9),  una  debilitate  mem- 
brorum  percussi,  ad  bealissimi  viri  memoriam,  adstricti  membris, 
ut  manibas  magis  quam  pedibus  ambuiarenl,  pro  restituendis  cor- 
poris  usibus  (10)  expetierunl.  Qui  (11)  cœperunt  se  assidua  frequen- 
tatione  sanclis  inferre  liminibus,  precantes  ut  nervorum  venarum 
que  connexio  solveretur  ;  quorum,  pro  qualilate  su»  lidei,  membro- 
ru m  débilitas  reparatur;  et  qui  fuerant  alieuis  manibus  Yeclitati, 
gressu  proprio  revertuntur  è  tumulo. 

X.  Addatur  et  illud  quod  polest  ad[jungi  mysteriis  (12).  Caecus  è 
regione  Bituricorum  civilatis  (13),  pro  restituendis  sibi  luminibus, 
duce  praivio,  viam  proficiscens  (14),  ad  locum  usque  delatus  est  ubi 
sancti  anlistitis  (15)  assidue  clarescunt  rairacula.  Qai,  cum  sancti 
coDfessoris(16)]imina  fuisset  ingressus,  bajulans  pro  luce  tenebras, 
poposcit  se  exponi  ad  viri  bealissimi  lumulum.  Qui  diutissime  inhse- 

(I)  Sic  A  et  B.  —  C  et  D  :  quae  eiiam  catenœ,  teste  populo,  appcoFae 
cernuntur  pariter  cl  confractae.  —  D  :  Gcrnuntur  alque  confracla. 

(8)  Sic  B.  —  A  :  evulsus  est.  —  C  :  de  ccrvice  manibusqae  ejus  evulsum 
est.  —  D  :  Ilico  de  cen^cibus  manibusque  ejus  evulsum  Ugnum. 

(3)  Sic  A.  —  B  et  C  :  forlassis.  —  D  :  forte. 

(4)  Sic  B,  C  et  D.  ~  A  :  deportatus. 

(5)  Sic  A,  B  et  D.  —  C  :  evcntui. 

(6)  SicC.  — B  :  demonslrarct.  —  D  :  demonstral.  —  A  :  dcmonsirarc. 

(7)  Sic  B,  C  et  D.  ~  Ce  mot  manque  dans  A. 

(8)  Sic  B,  G  et  D.—  A  :  vincula. 

(9)  Sic  A,  G  etD.  —  B  :  domelini. 

(10)  Sic  B,  C  et  D.—  A  :  urbibus. 

(II)  Le  mol  qui  manque  dans  A. 
(13)  Sic  C  et  D.  —  B  :  mysterio. 

(13)  Sic  G  et  D.  —  B  :  a  regione  Bitoricorum  civilate. 
(U)  Sic  B  et  D.  —  C  :  praevio  viœ  proficiscens. 

(15)  Sic  B  et  G.  —  D  :  sancli  apostoli. 

(16)  Sic  B  et  C.  —  D  :  sanctissimi  apostoli. 


948  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE    ET    niSTORIQUB   DU  LIMOUSIN. 

rens  pavimento,  lucem  quam  amiserat,  sibi  reddi  precibus  postula- 
vit.  Cumque  flelibiis  vacaret  et  gcmilibus  (1),  ac  sanguineis  lacry- 
mis  (2)  genae  cernerentur  infusae  (3),  cessanlibus  guUis,  omne 
quidquid  tabidum  (4)  fueral  raundatur  ab  coulis,  et  lux  caeco 
redditur  oui  fuerant  dies  longe  tempore  pro  noclibus  aeslimati;  et 
qui  aliène  ducatu  ad  sepulcrum  beali  viri  fueral  inlroductus,  gressu 
proprio  reversus  est  ad  patriam  (5). 

Quantum  mihi  (6)  de  virtutibus  beatissimi  conressoris  a  fidelibus 
Dei  famulis,  fama  promuigante,  meis  patuit  (7)  auribus,  ac  si  non 
peiito  sermone,  huic  paginœ  adscribendum  putavi  ;  caeterum  aliae 
elsi  eccullae  populis  (8j,  Dee  aulem  clarescunl  assidu»  (9),  mani- 
feslae  (10)  in  purgalionc  demonum  (H),  in  debilium  reparatione  (12), 
in  sublevatione  languentium,  in  diversis  dénis  omnium  sanitatum. 
Sit  ergo  communis  oralio,  ut  cum  in  future  examine,  agni  ab 
haBdis(13)  suprema  sorte  distabunt,  ipse  pro  purgandorum  crimi- 
num  maculis  advecalus  nester  adsistat  (14)  ;  ipso  patrocinante  (15) 
de  sinistra  transire  valcamus  ad  dexteram  (16),  praBstanle  Domino 
nostfo  Jesu  Christo,  qui  vivit  et  régnât  per  omnia  saecula  sœculo- 
rum.  Amen.]  (17). 

(1)  Sic  C  et  D.  —  B  :  et  gemitu. 

(2)  Sic  B  et  G.  —  D  :  sanguinis  lacrimis. 

(3)  Sic  D.  —  B  :  genae  cernunlur  infusœ.  —  C  ;  gcnœ  csscnt  infusae. 

(4)  Sic  B.  —  C  el  D  :  noxium. 

(5)  Sic  B  et  C.  —  D  :  propria. 

(6)  Sic  B.  —  C  :  a  supprimé  ce  mot. 

(7)  Sic  B.  —  C  :  probavi. 

(8)  Sic  B.  —  G  :  occuUœ  sunt  populis. 

(9)  Sic  B.  -   C  :  [Alise]  assiduse  sunt. 

(10)  C  :  Manifesle.  —  B  :  manifesta, 
(41)  Sic  B.  — C  :  a  supprimé  demonum, 

(12)  Sic  B.  —-  C  :  in  reparatione  debilium. 

(13)  SicB.  —  C  :  agni  ab  haedis,  justi  [ab  injuslis]. 

(14)  Sic  B.  —  C  :  ipse  perpurgand  [is]  criminum  maculis  assistât. 

(15)  Sic  B.  —  C  :  ut,  ipso  patrocinante. 

(16)  B  termine  à  ce  mot,  ce  qui  suit  est  dans  C. 

(17)  Ce  qui  précède,  entre  deux  crochets,  manque  dans  A,  et  le  dernier 
paragraphe  manque  dans  D. 


ÉTUDE  BISTORIQUE  SUR   L*ANCIENNE  VIE   DE   SAINT   MARTIAL  ^4i) 


APPENDICE 


VIE   DE   SAIIST  MARTIAL  PAR  LE  PSEUDO-AURÉLIEIf. 

La  vie  de  saint  Martial,  par  le  pseudo-Aurélien,  est  apocryphe, 
en  ce  sens  qu'elle  n'est  pas  l'ouvrage  de  révoque  de  Limoges  dont 
elle  porte  le  nom  ;  mais  quelle  est  la  date  de  cette  légende  ?  à 
quelle  époque  a-t-elle  été  composée-? 

Les  critiques  modernes  se  sont  complètement  fourvoyés  sur  ce 
point.  Le  chanoine  Descordes  (1626),  s'appuyant  sur  ce  fait, 
qu'aucun  auteur  avdnt  l'an  900,  n'avait  fait  mention  de  cette 
légende,  la  croyait  du  x""  siècle  (1)  ;  un  savant  allemand,  Gaspard 
Barthius  (1624),  supposait  gratuitement  qu'elle  était  l'œuvre  d'un 
clerc  de  Reims,  nommé  Aurélien,  qui  florissait,  selon  Trilhème, 
vers  l'an  900  (2)  ;  Du  Bousquet,  dans  ses  HiMoires  de  VEgHse  Galli- 
cane (1636),  conjecturait  qu'elle  était  de  la  fin  du  x*  siècle  (3)  ; 
Fleury  (1691)  partageait  son  avis  (4);  Baillet  (1701)  l'avait  adopté 
(5)  ;  le  Bollandisle  Papebroch  (1709),  ne  voyant  pas  assez  clair 
dans  la  question,  l'avait  laissée  iodécise  (6)  ;  plus  hardi  le  béné- 
dictin dora  Rivet  assignait  pour  date  de  cette  légende  l'an  982(7)  : 

(1)  a  11  ne  se  trouve  aucun  témoin  digne  de  foy,  qui  en  ait  fait  mention 
avant  Tan  900  de  notre  salut  :  ce  qui  peut  faire  penser  que  celte  vie  a  été 
composée  députai  ce  temps  là.  (Ap.  Ronavent.,  t.  1,  p.  257.  —  Du  Bousquet, 
Hiatorlœ  Eccles,  Gallic.^  pars  II,  p.  63.  —  Acta  SS.,  t.  V  junii,  p.  543). 

(^)  Adcersaria  Comment,,  l.  XLV,  cap.  Vil.  fAp.  Bonavent,,  t.  f. 
p.  480). 

(3)  Quo  aulem  tempore  illa  (acta)  visa  sint  incertum  ;  nisi  lamen  conjec- 
tura nos  fallat,paulo  an  te  secundam  Marlialis  translalionem  quae  annoChrisii 
994  composita  esse  vidcntur.  {Historiœ  EcclesUe  GalUc.y  1.1.  c.  XXflf, 
p.  45). 

(4)  Histoire  ecclésiastique,  L.  LIX,  n.  XXiV. 

(5)  Vies  des  Saints,  édil.  in-4°,  t.  IV,  p.  927. 

(6)  Salis  habeo  quaeslionem  de  lempore  quo  primum  scripla,  relinquerc 
in  medio.  (Acta  SS.,  l.  V,  junii,  p.  oiO.) 

(7)  Hvstoi'-e  lUtér.  de  la  France,  t.  VI,  p.  C,I7. 


950  SOCIETE  ARCllftOLOGIQUK  KT  DISTOftlQUK  Ot3  L1II0CSI5. 

notre  savant  Nadaud  (1760)  adoptait  Topinion  du  moine  lombard 
Benoit  de  Cluse,  qui,  dans  sa  discussion  avec  Adémar,  Tan  1028, 
prétendait  que  cette  Vie  n'avait  été  composée  que  depuis  un  siè- 
cle (4)  ;  là  dessus,  Nadaud  rapportait  cette  légende  à  Tan  1028,  ni 
plus  ni  moins  (2). 

Uopinion  commune  des  critiques  était  donc  que  cette  légende 
ne  datait  que  du  x*  siècle.  Toutefois  le  Bollandisle  Papebroch 
avait  de  la  peine  à  souscrire  à  ce  sentiment.  «  Nous  avons  de  la 
répugnance  à  croire,  disait-il,  que  Topinion  attaquée  par  Descordes 
et  du  Bousquet  ne  fui  pas  encore  née  en  l'an  900  :  soit  parce  que 
nous  pensons  que  Florus,  auteur  bien  plus  ancien,  a  vu  les  Actes 
dans  lesquels  il  est  dit  que  saint  Martial  a  été  envoyé  par  saint 
Pierre  ;  soit  parce  que  Adémar,  moine  de  Saint-Cybard  d'Angou- 
léme,  au  commencement  du  xr  siècle  (3),  cite  avec  confiance  les 
Actes  canoniques  de  saint  Martial^  toujours  reçus  par  VEglise,  qui 
déclarent  sufQsamment  le  privilège  de  son  apostolat  (4). 

Adémar,  en  effet,  dans  sa  discussion  avec  Benoit  de  Cluse,  Fao 
1028,  soutenait  l'ancienneté  de  celte  légende  :  le  prieur  de  Cluse 
prétendait  qu'elle  n'avait  été  composée  que  depuis  un  siècle  par 
quelque  moine  de  Saint-Martial,  et  Adémar  lui  répondait  que 
depuis  un  temps  immémorial,  et  avant  même  l'établissement  du 
monachisme  dans  celle  église  (848),  celle  vie  était  répandue  dans 
toutes  les  provinces  des  Gaules, des  Espagnes,  de  la  Grande-Breta- 
gne et  de  l'Italie;  et  pendant  leur  discussion,  pour  donner  ^^ain  de 
cause  à  Adémar,  le  moine  Aymeric,  portait  on  très  vieux  volume, 
dans  lequel  se  trouvait  celle  légende  de  saint  Martial  (5). 

Adémar  avait  raison  :  nous  pouvons,  à  l'aide  d'autres  documents 

• 

(<)  Mâbillon,  AnnaL  Benedic.,  t.  IV,  Appendix,  p.  XLVI.  —  Patrolog, 
l.  CXLl,  col.  97. 

(2)  Dissertation  ms.  sur  saint  Martial,  p.  35.  (Séminaire  de  Limoges). 

(3)  Le  P.  Papebroch  dii  :  a  Vers  la  fin  du  XI I^  siècle  »,  nous  nous 
permettons  de  corriger  celte  faute  de  chroDologie. 

(4)  Nos  vero  aegre  possumus  credere  quod  opiDio,  quam  Cordesius  Bos- 
quetusque  oppugnanu  nec  naia  eraianno  Chrisii  DCCCC;  tum  quia  pula- 
mus  Fiorum,  tanlo  seniorcm,  vidisse  Acla  in  quibus  à  Peiro  missus  diceba- 
tur  Martialis  ;  lum  quia  Âdemarus,  S.  Eparchii  monachus,  circa  fbtem 
so&cali  XII  scribenSf  in  Commemoralione  abbatum  S.  Marlialis  sub  finem, 
contidenter  appellat  a  gesta  ejus  canonica^  semper  ab  Ecclesia  recepta^ 
quœ  satis  déclarant  prioilegium  apostolatûs  ejus,  »  {Acta  SS^  t.  V  junii, 
p.  540.  —  Voir  le  lexle  d'Adémar  dans  Migne,  Patrolog..  i.  CXLJ, 
coL  84j. 

(5)  Mabillon,  Annal.  Bened.y  l.  IV,  appendice,  p.  720.  —  Patroiog,. 
l.  CXLI,  col.  9-i,  96. 


ÉTUDE  HISTORIQUE  SUR  L  ANCIENNE   VIE  DE  SAINT   M/.IVTIAL.  :|5I 

plus  anciens,  constater  Texistence  de  cette  légende  d'Aurélien  au 
IX*  siècle. 

En  effet,  le  Livre  des  miracles  de  saint  Martial,  qui  a  été  publié 
une  première  fois  par  les  Bollandistes  (1),  et  que  nous  avons  publié 
de  nouveau  avec  une  recension  d'un  style  différent  (2),  ce  Livre  des 
Miracles  —  dont  la  rédaction,  diaprés  les  Bollandistes,  accuse  le 
milieu  du  iv  siècle  (855),  —  cite  les  Actes  de  saint  Martial,  et  ces 
Actes  ne  sont  autre  chose  que  la  légende  du  pseudo-Aurélien, 
car  il  est  question,  dans  ce  Livre  des  miracles,  du  tombeau 
du  doc  Etienne  (3),  qui  n'est  connu  que  par  la  légende  d'An- 
rélien. 

De  plus,  Usuard,  dans  son  Martyrologe  (875),  mentionne  dans 
son  article  sur  saint  Martial,  le  nom  des  deux  prêtres  ses  compa- 
gnons, saint  Alpinien  et  saint  Austriclinien  ;  or  cette  mention  est 
Urée  de  la  légende  d'Aurélien;  car  c*est  le  plus  ancien  monument 
qui  appelle  par  leur  nom  les  deux  compagnons  de  saint  Martial  : 
Usuard  Tavait  donc  consultée. 

D'ailleurs  n'est-ce  pas  à  cette  légende  d'Aurélien  que  fait  allu- 
sion Hildnin,  abbé  de  Saint-Denys  (835)^  quand  il  dit  que  les  Vies 
des  sept  évêques  dont  Grégoire  de  Tours  relarde  la  mission  jus- 
qu'au consulat  de  Dèce,  n'étaient  pas  d'accord  avec  lui  sur  l'épo- 
que de  leur  mission? 

Le  P.  Papebroch  avait  donc  raison  de  penser  que  Florus,  l'au- 
teur du  Martyrologe  (100),  avait  vu  les  Actes  dans  lesquels  saint 
Martial  est  dit  envoyé  de  saint  Pierre  (4)  :  et  ces  Actes  n'étaient 
pas  l'ancienne  Vie,  qui  a  clé  très  peu  répandue,  mais  la  légende 
d'Aurélien,  «  répandue,  comme  disait  Adémar,  dans  toutes  les  pro- 
vinces des  Gaules,  des  Espagnes,  de  la  Grande-Bretagne  et  de 
l'Italie  ». 

Mais  nous  pouvons  remonter  au-delà  du  vin®  siftcle.  Ce  qui- 
prouve  l'antiquité  de  cette  légende  du  pseudo-AurL»lien,  ce  sont  les 
vers  que  Fortunat  a  composés  sur  cette  légende,  et  dont  nous  allons 
prouver  l'authenticité. 


(I)  Acta  SS.,  l.  V  junii,  p.  55t-5o9. 

(î)  Liore  don  Miracles <ie  saint  Martial  (icxlc  latin  incîdil   du   ix*  si(> 
clei,  1889. 

(3)  Se  in  lerlia  crytella,  relro  tumulum  duels  quondam  Slhcphnui,  occul- 
lavil.  —  {Acta  S5.,*l.  V  junii,  p.  555). 

(4)  Acta  SS.,  t.  V  junii,  p.  540 


353  SOCI^.TR  ARCUÉOLOGIQUE  El   HISTORIQUE  DU  LIMOUSlff 


VERS  DE  FORTUNAT. 

Les  vers  de  Fortunat  sur  la  légende  de  saint  Martial  par  Auré- 
lien  ont  été  publiés  pour  la  première  fois,  en  1783,  dans  les 
Anecdocta  Litteraria  de  Rome  (i)  par  un  prélat  romain,  M»'  Jean- 
Christophe  Amaduzzi:  ils  lui  avaient  été  communiqués  par  le  savant 
Bandini,  bibliothécaire  de  Florence,  qui  les  avait  trouvés  dans  un 
manuscrit  de  la  Bibliothèque  Laurentienne,  du  commencement  da 
xn*  siècle.  Ces  vers  furent  insérés  dans  la  grande  édition  des 
œuvres  de  Fortunat,  qui  fut  publiée  à  Rome  en  1786,  par  le  béné- 
dictin Luchi  (2),  depuis  cardinal.  Cette  édition  a  été  reproduite,  en 
1857,  dans  la  Paîrologie  de  Migne  (t.  LXXXVIII,  p.  118). 

Comme  le  manuscrit  de  Florence  renferme  plusieurs  fautes  de 
copiste,  Mb*-  Amaduzzi  et  le  cardinal  Luchi,  qui  n*ont  connu  ces 
vers  que  par  ce  manuscrit,  n'ont  pas  donné  une  édition  correcte 
de  ce  petit  poème.  Il  en  est  de  même  de  l'édition  donnée  à  Berlin, 
en  1881,  par  un  savant  allemand,  M.  Frédéric  Léo,  qui  n'a  connu, 
lui  aussi,  que  le  manuscrit  de  Florence  (3).  Plus  heureux  qu'eux, 
nous  avons  trouvé  ces  vers  de  Fortunat  dans  deux  manuscrits  de 
Rome,  Tun  de  Saint-Jean  de  Latran  (4),  Taulre  de  la  Bibliothèque 
de  la  Minerve  (8),  et  enfln  dans  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque 
Ambroisienne  de  Milan  (6)  ;  et  en  collalionnant  ces  divers  manus- 
crits, nous  pensons  avoir  donné  une  édition  irréprochable. 

La  plupart  des  savants  qui,  de  nos  jours,  ont  combattu  Tapos- 
tolatde  saint  Martial,  ont  nié  Tauthenticilé  de  ces  vers  de  Fortunat; 
et  M.  Frédéric  Léo,  dans  Tédition  qu'il  a  donnée  de  ce  poète  en 
1881,  a  classé  ce  petit  poème  parmi  les  œuvres  faussement  attri- 
buées à  Fortunat.  C'est  pourquoi  nous  croyons  devoir  en  démon- 
trer Tauthenticilé. 

Ces  vers  portent  le  nom   de  Fortunat   dans  le  manuscrit  de 

(<)  Anecdota  Litteraria,  wo\.  iv.  —  Romae,  1783,  p.  433. 
(%)  FoRTUNATi  Opéra  omnia.  —  Romae,  1786,  pars.  I,  p.  71. 

(3)  Voici  quelques  fautes  :  Chrlste  pour  Chrtstus  ;  —  facunda  pour 
faceta\  —  oellera  tenens,  pour  mella  retexens^  etc. 

(4)  M.  A,  79  :  six  vol.  in  folio,  30  juin  (nis.  du  xi**  siècle). 

(5)  BibL  Casanata^  Passionale  sive  Vilae  SS.  saec  xi,  t.  1.  p.  i7,  v«. 
—  Catal.  ms.,  p.  350. 

(6)  Martyrologiuni  seu  Lcclionariuni,  sou  Vilap  plurium  sanclorum,  15, 
49,  inler,  p.  cxxxiii,  v". 


ÉTUDE   H18T0RIQUK  SUB   L*ANCIBRNE   VlB   DE   SAINT  UARTIAL.  953 

Florence.  Pour  donner  un  démenti  à  ce  titre,  il  faudrait  démontrer 
clairement  que  ces  vers  ne  sont  pas  dans  le  style  de  Fortunat,  et 
qu'ils  ne  portent  pas  son  cachet  littéraire.  Or,  bien  loin  de  là;  ces 
vers  portent  tellement  sa  margne,  que  des  savant  italiens,  tels  que 
le  bibliothécaire  Bandini,  qui  les  a  découverts  dans  ce  manuscrit, 
Msr  Àmaduzzi,  qui  les  a  publiés  à  Rome  en  1783,  Tillustre  cardinal 
Luchi,  qui  les  a  insérés  dans  son  édition  de  Fortunat,  en  1786, 
n'ont  pas  émis  le  moindre  doute  sur  leur  authenticité.  C'est,  en 
effet,  le  genre  de  Fortunat,  c'est  la  facilité  de  ce  poète,  qu'on  a 
appelé  avec  raison  le  dernier  des  poètes  latins,  c'est  sa  manière, 
c'est-à-dire  une  certaine  prétention  à  l'élégance,  qui  ne  sait  pas 
toutefois  se  débarrasser  d'une  certaine  rouille,  d'un  certain  embar- 
ras de  construction,  qu'elle  emprunte,  sans  s'en  douter,  à  la  bar- 
barie de  son  siècle.  D'ailleurs  ces  vers  se  trouvent  dans  un  manus- 
crit de  la  plus  haute  antiquité  conservé  dans  les  archives  de  Saint- 
Jean-de-Latran,  manuscrit  antérieur  aux  Conciles  de  Limoges, 
puisque  saint  Martial  y  est  appelé  simplement  évéque  :  on  lit  encore 
ces  vers  dans  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  Casanata,  dont  le 
savant  Brémonl,  général  des  Dominicains,  attribuait  la  rédaction  au 
vin*  ou  au  ix*  siècle  ;  nous  avons  trouvé  ces  vers  dans  un  manus- 
crit de  la  Bibliothèque  Ambroisienne  de  Milan  ;  M.  Léopold  Delisle 
nous  a  écrit  les  avoir  vus  dans  un  manuscrit  du  xi**  sièle  provenant 
de  l'abbaye  de  Luxeail  (1).  Dira-l-on  que  ces  vers  ont  été  attribués 
à  Fortunat  pour  le  besoin  de  la  cause?  Mais  k  cet  époque,  l'apostolat 
de  saint  Martial  n'était  pas  en  question,  et  d'ailleurs  ces  vers  ne  se 
trouvent  pas  dans  les  manuscrits  d'origine  limousine.  Dira-t-on 
encore  que  ces  vers  ont  été  composés  sous  le  nom  de  Fortunat  au 
vu*  ou  au  vHi*  siècle  ?  Mais  à  cette  époque  barbare,  pas  plus  qu'au 
XI*  siècle,  on  ne  composait  pas  des  vers  d'une  telle  élégance  et 
d'une  pareille  latinité  ;  ces  vers  portent  le  cachet  d'une  époque  la- 
tine, où  l'on  étudiait  encore  Virgile  et  Cicéron.  Au  reste  pour  ne 
laisser  subsister  aucun  doute  sur  l'authenticité  de  ce  poème,  nous 
allons  en  comparer  les  vers  avec  les  autres  vers  de  Fortunat,  et  si 
nous  y  remarquons  les  mômes  pensées,  les  mômes  tournures  de 

(I)  «  La  semaine  dernière,  j'ai  eu  entre  les  mains,  pendant  quelques 
minutes,  un  manuscrit  de  Tabbaye  de  Lnxeuil,  paraissant  remonter  au 
XI*  siècle,  et  dans  lequel,  après  les  passions  des  apôtres  el  des  évangélis- 
tes,  vient  la  vie  de  saint  Martial,  commençant  par  ces  mots  :  Prœdicante 
Domino,  Elle  est  précédée  du  prologue  en  vers  : 

Chri8tU8  principium,  finis,  lux  est^  via  Chrittus.,. 

Ce  manuscrit  a  passé  dans  une  vente  publique,  et  a  été,  je  crois,  acquis 
pour  l'Angleterre.  »  (Lettre  du  3  mars  !857,) 


ioA  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   KT    UISrOHIQUK   DU    LIMOL'SKX. 

phrase,  les  mêmes  expressions  rares  et  particulières  à  ce  poète,  il 
ne  sera  plus  permis  de  douter  de  Tauthenticilé  de  ces  vers  de 
Forlunat  sur  la  légende  de  saint  Martial. 

Christus  principium,  finis ^  lux  est^  via  Christus  (/), 
Nomine  cujus  in  almifico  {2)  semperque  beato 
Martialië  résonant  hic  veracissima  gesta  {3). 


(1)  te  Christ  est  le  commencement  et  la  fin  :  le  Christ  est  la  lumière  et 
la  voie,  —  Voici  des  vers,  tirés  de  la  Vie  de  saint  Martin,  qui  offrent  avec 
le  vers  précédent,  non -seulement  une  grande  similitude  de  contexture^ 
mais  encore  une  grande  ressemblance  de  pensée  : 

Vir  cai  Christus  amor,  Chrfsius  honor,  omnia  Christus, 
FIos,  odor,  esca,  aapor,  fons,  lux  ei  yloria  Christus. 

{De  Vita  S.  Martini,  L.  II,  v.  4«i  :  Patrolog.,  t.  LXXXVIII,  col.  390.) 

Ccst  la  même  répétition  du  mot  Christus  :  puis  les  deux  fins  de  vers  se 
ressemblent  :  Lux  et  gloria  Christus,  —  Lux  est»  oia  Christus. 

Autre  exemple  de  cette  répélilion  du  mot  Christus  : 

Sit  mihi  Christus  honor,  Christus  spes,  Christus  amator. 

(Edition  de  là.  Frédéric  Léo,  Appendix,  p.  t87.) 

Le  Christ  est  la  lumière  et  la  ooie  :  voici  un  autre  vers  de  Forlunat  où 
ce  poète  dit  qu'il  y  a  des  hommes  dont  Dieu  est  la  lumière  et  la  voie  : 

Kst  qaibos  interna  lux  Deus  atque  via, 

(Miscellan.,  L.  XI,  c.  XXXI  ;  Patrolog.,  Ibid.,  col.  344.) 

(2)  Ce  mot  ne  se  trouve  dans  aucun  lexique  ;  nous  Tavons  lu  toutefois 
dans  une  légende  manuscrite  de  saint  Saturnin.  Il  est  formé  (Talmua^ 
comme  mirificus  esi  formé  de  mirus, 

(3)  C'est  au  nom  du  Christ  que  se  Usent  ici  les  Actes  très  oéridiquee 
de  saint  Martial.  —  Le  mot  résonant  qui  veut  dire  sont  lus  (lus  à  haute 
voix)  est  une  expression  remarquable  qui  rappelle  la  manière  de  lire  des 
anciens.  Saint  Augustin  allant  voir  saint  Ambroise,  note,  comme  chose 
extraordinaire,  qu'il  lisait  des  yeux  seulement  et  non  à  haute  voix.  Voici 
d'autres  vers  de  Fortunal  où  le  mot  resonare  est  employé  dans  le  même 
sens  : 

Dam  tamen  alta  peto,  resonet  mihi  Gai  las  in  aure 
Oesta  beata  viri,  qaa  miligat  anda  furorero... 

{Dé  Vita  s.  Martini,  L.  111,  v.  1  7  ;  ibid..,  col.  3M.; 

Tempus  utrnmquc  dicans  causis  repetendo  daabos, 
fjectio  nunc  resoncms,  sibi  nunc  oratio  currens. 

{De  Vita  S.  Martini,  L.  Il,  ▼.  114  ;  ibid.,  col.  390. 


ÉTUDK    flISTORIQUB  S4}ll   L*AIi(CIKNNK  VIS   DE   SMNT  MARTIAL.  2S3 

Quis  hominum  digne  valeat  doctissimus  unquam 
Quanti  sit  meriti prœclarus  apostolus  ille  (/) 
Dicere,  vel  prosa,  vel  pulchri  carminé  metri  (^), 
Quo  saltem  modicis  decoretur  pagina  verbis  {3)9 


(1)  Saint  Marlial  est  appelé  apôtre  dans  le  légende  d^Aurélien  :  Exem," 
pies:  Inde  reversas  ma^ni  meriti  apostolus^  etc. ;  —  Hoc  audlens  sanctis- 
simus  apostolus^  etc. 

(2)  Qui  pourrait  dire  en  prose  ou  en  vers  habilement  mesurés,».  Celte 
opposition  de  la  prose  et  des  vers  est  une  tournure  familière  à  Fortunat, 
en  voici  un  exemple  : 

Nunc  qooqoe  prosaico^  modo  miltens  carmina  venu^ 
Blandior  affata  débita  sol  vit  amor. 

(L.  VII,  e.  IVIII  ;  Jblcf.,  p.  S55.) 

Le  mot  metrum  employé  pour  vers  mesurés  est  aussi  une  expression 
fréquente  dans  Fortunat,  comme  le  mot  reaoncwe  que  nous  avons  vu  plus 
haut  : 

Et  satls  constet  resonare  paacis 
Metra  poetis. 

(L.  IX,  c.  VII  ;  /«(/.,  col.  306.) 

Qmeqae  sant  rhythmis,  vel  arnica  metris.  (Ibid.) 
Metrica  tirones  dodc  promant  carmina  castos... 

(L.  VIII,  c.  IX  ;  ibid.  col.  S85.) 

(3)  Le  mot  pagina  est  une  métaphore  élégante  qui  cessa  d'être  usitée  à 
l'époque  où  la  langue  latine  cessa  d*élre  parlée.  Fortunat  aime  beaucoup 
celle  métaphore  : 

Christe,  fave  votis  *  hœc  pagina  cernât  amantes. 

[De  Excidio  Thtiringia^  lib.  I  ;  ibid.,  col.  432.) 

Pagina  me  recreet  missa,  salntis  ope 

(Lib.  V,  c.  XX  ;  f/»/rf,,  col.  20î.) 

Dt  faceret  tecum  pagina  m\MB,  loqui. 

(L.  VI,  c.  XI  ;  ibid.,  col.  829.) 

Et  tua,  ne  recréer,  pagina  muta  silet  ? 

(L.  VII,  c.  XII  ;  ibid.,  ool.  2S0.) 

Dam  pergit  hic  quisque  viam,  mea  pagina  carrât. 

(L.  X,  c.  XVI  ;  ibid.,  col.  341.) 

Qoas  mihi  porrexit  modo  pagina  missa  querelas. 

(L.  VU,  c.  III  ;  ibid.,  col.  SS4.) 

Tramiie  manilleo  celebravit  pagina  carsum. 

(L.  Vill,  c.  IXV  ;  ibid.,  ool.  t9f.) 

Hatribas  ac  Dominis  pagina  missa  loqm  ns. 

[Appendijr  :  Versos  inediti  ;  ibid.,  col.  594.) 


35C  SOCIÉTÉ  ABCBÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

Tullius  atque  Màro  veniant  ( /) ;  sit  lingua  faceta  : 
Versibus  aut  currens  (^),  autprosœ  mella  retexens  {3), 
Non  tua^  sancte  pater  [4),  poterunt  depromere  gesta^ 
Tellus  te  Romana,  quibm  te  Gallica  telltis 
Post  Petrum  recolunt  juniorem  parte  secundu. 


{{)  Fortunat  aime  beaucoup  à  associer  dans  ses  vers  Virgile  et  Cicôron 
et  à  les  opposer  Tun  à  l'autre.  Eo  voici  d'autres  exemples  : 

Fercala  sWe  qulbos  fort  dives  ntcrqne  minister, 
Tullius  ore  cibum,  pocala  fonte  Maro. 

(L.  VIII,  c.  !;</»<(/,  p.  «61.) 

Mais  c'est  surtout  Virgile  qui  revient  souvent  dans  ses  vers  : 

Aut  jfaroTrajano  lectas  in  orbe  foro... 

(L.  vil,  c,  Vllï  ;  im.,  col.  Î43.) 

QaidTe  poêla  potesl  Maro^  etc.  (L.  VU,  c.  XII  ;  ibid,^  248.) 
Manificamqae  patrem  aeqnaret  ncc  musa  MaronU. 

(L.  IX,  c.  XXIV:  ibid.,  8«1.) 

(8)  Veraibus  aut  currens,..  expression  recherchée  dont  nous  avons  vu 
déjà  plusieurs  ressemblances  :  mca  pagina  currat,.. 

Lectio  nanc  resonans,  sibi  nuDc  oratio  currens  (déjà  cité). 

(3)  Cette  expression  si  recherchée  :  le  miel  delaprose^  n'est  pas  sans 
exemple  dans  Fortunat.  Voici  des  vers  qui  en  sont  la  preuve  : 

Mdiûc&s  scrmonefavos,  nova  mella  rainistias. 

(L.  VU,  c.  I:  /Wrf.,  col.  233.) 

Te  doclrina  probum,  providentia  sacra  ministram, 
Fecit  et  eloquio  vincere  mdla  tuo. 

(L.  IX,  c.  IX;  ibtd,,  col.  309.) 

Celsos  la  hoc  humili  tamulo  Jacet,  Atticus  illc 
Qai  dabat  eloquio  duhia  mella  suo. 

(L.  IV,  c.  XVI,  col.  166.) 

(4)  Cette  tournure  et  cette  expression,  communes  à  la  vérité,  se  rencon- 
trent fréquemment  dans  Fortunat. 

Haec  qui.  sancie  pater,  elc.  (f..  IV.  c.  Vil  ;  ibid..  col  160.) 

Sed  tibl,  sancte  paier,  etc.  (m  Vita  s.  Martini,  L.  lll,  v.  267  :  ibid.,  (00.) 

Tu  tatuen,  aime  pater,  elc.  (L.  VIII,  c.  XVII  ;  ibid.,  col.  2S9.: 

Hoc  tamen,  aime  pater,  elc.  (L.  IV,  c.  III  ;  ibid.,  col.  154.) 

AIrae,  béate  pater,  etc.  (L.  VIII,  c.  XX  :  ibid.,  col.  290.) 

Unde,  béate  pater,  elc.  (L.  IX.  c.  X  ;  ibid.,  col.  309.) 

Seiitlo,  summe  pater,  elc.  (L.  V,  c.  VI  :  ibid,,  col.  197.) 


ÉTUDK    HISTORIQUE   SUR   l'aNCIENNR   VIE   DE  SAINT   MARTIAL.  357 

Cuni  Petro  recolunt  œqualem  sorte  priori  (/). 
Benjamita  tribus  te  gessit  sanguine  claro  ; 
Urbs  te  nunc  retinet  Lemovica  [2)  corpore  sancto. 
Hinc  tibi  sit,  rex  magne  Deus,  laus,  gloria,  Christe  {3)f 
Christe  caput,  finisque  cluens  {4),pax  lux,  via,  Christe {ô)t 

(f)  Ces  mois  aorte  priori  signifienl  ici  la  condition  supérieure  ou  la 
dignité  de  raposlolat.  Forlunat  emploie  souvcnl  le  mot  sor»  dans  ce  sens. 

Sortis  apostolicœ  vir  tuus  iste  fuit. 

(L.  V,  c.  Il  ;  ibid.,  col.  18î.) 
Soriis  apastoUca  qase  gesta  vocantur,  et  actos,  etc. 

(De  Vita  S.  Martini,  1.  I,  t.  22  ;  ibid.  ool.  366.) 

(2)  Urbs  Lemooica  :  c'est  le  nom  que  portait  Limoges  au  commencement 
et  à  la  lin  du  vi**  siècle.  Cf.  Acta  SS,  t.  V  aug,  p.  178,  184.  —  Conventus 
apud  Andelaum,  anno  DLXXXVIl  :  «  Dé  civilalibus  vero>  hoc  est  Burgegala, 
Lemovica,  etc.  (Grrgor.  Turon.,  edit.  Ruinart,  col.  442).  —  Au  vii«  siècle, 
saint  Oucn  rappelle  l.emooicœ;  un  anonyme  de  celte  époque  la  nomme 
Limodiccis;  Magnon  dit  Lemofex  Aug ustoretum,  (Voit  V Indicateur  du 
diocèse  de  Limoges,  1788,  p.  152.) 

(3)  On  trouve  fréquemment  dans  Fortunat  des  vers  d'une  semblable 
facture^  c'est-à-dire  composés  de  nombreux  substantifs  ou  adjectifs 
réunis.  En  voici  un  exemple  : 

Cbara,  benlgna,  micans,  pla,  sancla^  ▼erenda  venustas; 
Fl08,  decus,  ara,  nitor,  palma,  corona,  pudor. 
(L.  VIII,  c.  VII  i  ibid,,  col.  284.) 

(4)  Ce  mot  cluens  est  un  mot  tellement  peu  usité  que  le  savant  éditeur 
de  Forlunat,  le  cardinal  Luchi,  a  cru  devoir  en  donner  Texplication  : 
cluens^  dit-il,  veut  dire  puissant,  excellent;  cluen»  idem,  sonat  ac  potens 
(L.  X,  c.  IXy  note;  ibid,^  col.  335);  et  ailleurs  :  cluo^  quod  est  poUcre, 
exccllere  (L.  V,  c.  Xil,  note  ;  ibid.^  col.  230).  Or  ce  mol  si  rare  se  trouve 
ailleurs  dans  Fortunat  avec  la  même  signification  : 

Childeberte  cluens...  (L.  X,  c.  IX;  ibid.,  col.  335.) 

{Biblioth.  nation,  ms.  13,048,  p.  48  fo.  —  nfi  siècle.) 
Tecta  labore  novo,  qus  modo  culta  cluunt. 

(L.  X,  c.  VI  ;  ibid.,  col.  330.) 
pollens,  cZueclance,  Dynami... 

(L.  VI,  c.  XII,  col.  230.) 
Ex  iilo,  celebrande,  cluens,  stat  pars  mea  tecum. 

(Edit,  Berolini,  lib.  VI,  c.  X,  ▼.  47,  1881.) 

Mgr  Cousseau,  le  savant  é\'!5que  d'Angouléme,  nous  écrivait  à  propos  de 
cette  pièce  de  Fortunat  :  «  Votre  note  sur  rauihénticité  de  ces  vers  est  une 
analyse  démonstrative  ;  il  y  a  surtout  un  cluens  (mol  bizarre)  qui  est  con- 
cluant. (Lettre  du  21  février  1855.) 

(5)  Pax,  lux^  oia,  Christe!  —  Voici  un  autre  vers  de  Fortunat  où  la 
même  pensée  se  trouve  avec  les  mêmes  mots  : 

Est  qoibas  ut  tua  pax,  lux  Deus  atque  via. 

{Edit.  Paris,  ad  Sigoald.  comit.,  1.  X,  c.  XI.] 


âS8  SOCI^.Té  ARCHéOLOOTQUS  Xt  niSTORIQUB  DU  LIMOUSIN. 

Cette  pièce  de  vers  n'est  pas  la  seule  que  Forlanat  ait  composée 
sur  une  légende.  Nous  avons  trouvé  à  la  Bibliothèque  nationale, 
ms.  3,801,  fol.  32,  d'autres  vers  du  même  poète  qui  précèdent  la 
Vie  de  saint  Grégoire  de  Langres,  et  parmi  lesquels  on  lit  le 
suivant  : 

Hoc  veneranda  sacri  testatar  vila  Gregori. 

Or,  ces  vers  ont  été  insérés  dans  les  œuvres  complètes  de  Fortu- 
nat  (1). 

M.  Jules  Quicherat  suspectait  Tauthenticité  de  cette  pièce  sur 
saint  Martial,  parce  que,  disait-iU  elle  manque  dans  les  œuvres 
de  Fortunal  recueillies  avec  beaucoup  de  soin  par  lui-môme  (2)  I 
Nous  lui  avons  fait  observer  que  cette  pièce  se  trouve  dans  rédition 
de  Forlunat  Jonnée  à  Rome  par  le  cardinal  Luchi,  édition  repro- 
duite dans  la  Patrologie  de  Migne  comme  étant  la  plus  complète  ; 
que  d'ailleurs  les  diverses  éditions  de  Fortunat  se  sont  accrues  suc- 
cessivemenl  de  nombreuses  pièces  éparses  cà  et  là,  et  dont  l'au- 
thenticité n'a  jamais  été  mise  en  doute.  Ainsi  l'édition  du  cardinal 
Luchi  est  loin  d'être  complète,  car,  de  nos  jours,  le  savant  Guérard 
a  publié,  dans  ses  Notices  et  extraits  de  la  bibliothèque  du  Roi  (3), 
un  certain  nombre  de  pièces  inédites  qu'il  a  trouvées  dans  un 
manuscrit  du  ix*  siècle,  appartenant  à  la  Bibliothèque  nationale  (4). 
On  a  ajouté  une  de  ces  pièces  dans  Tédition  de  la  Patrologie, 
ainsi  qu'une  autre,  publiée  par  le  cardinal  Maï\  dans  le  tome  IX  du 
Spicilège  romain.  M.  Frédéric  Léo,  dans  son  édition  des  poésies  de 
Fortunat,  imprimée  à  Berlin  en  488i,  a  ajouté  les  pièces  trouvées 
par  Guérard,  et  cette  édition  peut  s'augmenter  encore.  L'objection 
de  M.  Quicherat  ne  prouve  rien  contre  l'authenticité  de  la  pièce  de 
saint  Martial. 

C'est  donc  à  tort  que  M.  Frédéric  Léo,  dans  son  édition  de  For- 
tunat, a  classé  parmi  les  œuvres  apocryphes  de  ce  poète,  non-seu- 
lement cette  poésie  sur  la  légende  de  saint  Martial,  mais  encore 
l'hymne  sur  saint  Denys  :  Fortem^  fideleniy  militemy  insérée  dans 
l'édition  de  Luchi,  et  dont  nous  avons  prouvé  ailleurs  l'authenti- 
cilé  (S). 


(t)  P&trôlogiê,  t.  LXKXVUI,  col,  153. 
(t)  LeUre  du  i6  mar»  'S55. 

(3)  Natioea  et  ê<£4raUê  des  maiiuscritB  de  la  biàlioikèquû  du  Roi  et  d€$ 
autres  bibliothèques,  1831,  t.  XIl,  â^"  partie,  p.  67. 

(4)  Fonds  latin,  ms.  l.),04d,  fol.  id  al  suiv.,  ix*  siècle,  écriiiire  lotnbar- 
diqiie. 

(5)  Etude  sur  saint  Denys  de  Paris,  p.  C5. 


ÉTUDE  HISTORIQUE   SUR   L*ANCIENNB  YIR   DR   SAINT   MARTUf..  959 


CONCLUSION. 


La  légende  de  saint  Martial,  par  le  pseudo-Aurélien,  sur  laquelle 
Fortunat  a  composé  des  vers  dont  nous  venons  de  prouver  l'au- 
thenticité, est  donc  antérieure  à  Fortunat  et  remonte  au  plus  tard  au 
milieu  du  vi*  siècle.  Il  est  vraisemblable  que  Grégoire  de  Tours  Ta 
connue,  puisqu'il  dit,  dans  son  livre  D^  la  gloire  des  Confesseurs,  en 
parlant  des  deux  prêtres  compagnons  de  saint  Martial,  que  cet  évo- 
que les  avait  amenés  avec  lui  d'Orient  dans  la  Gaule  —  quos  secum 
ab  Oriente  adduxitin  Galliam  (i).  Or  il  a  dû  puiser  ce  détail,  qui  a 
étonné  les  critiques,  plutôt  dans  la  légende  d'Aurélicn,  où  il  se 
trouve,  que  dans  la  tradition  orale.  Apparemment  il  a  cru  que  celte 
légende  était  dans  l'erreur  sur  l'époque  qu'elle  assigne  à  la  mission 
de  saint  Martial, p  uisqu'il  a  adopté,  pour  l'époque  de  cette  mission, 
la  date  du  consulat  de  Dëce  (an  250),  qu'il  a  trouvée  dans  une 
légende  interpolée  de  saint  Saturnin  ;  mais  sur  ce  point,  sa  critique 
a  été  en  défaut. 

Au  reste,  comme  nous  l'avons  montré  ailleurs  (2),  les  détails 
apocryphes  que  renferme  cette  légende  et  qui  l'ont  fait  rejeter  par 
les  critiques,  par  exemple,  les  noms  de  certains  personnages, 
Amulphe,  Sigebert,  Hildebert,  etc.,  les  dignités  qu'elle  mentionne, 
tels  que  le  duc  d'Aquitaine,  le  comte  de  Bordeaux,  le  comte  de 
Poitiers,  etc.,  portent  le  cachet  du  vr  siècle.  L'agiographe  qui  a 
composé  cette  légende  a  voulu,  pour  lui  donner  plus  de  crédit  et 
d'autorité,  la  faire  passer  pour  l'oeuvre  de  saint  Aurélien,  succes- 
seur de  saint  Martial,  mais  il  s'est  trahi  lui-même  en  accommodant 
les  choses  du  i"  siècle  aux  manières  et  coutumes  de  son  temps.  Il 
y  a  dans  son  ouvrage  des  détails  fabuleux  et  de  pure  imagination  ; 
mais  ce  qui  n'est  pas  fabuleux,  c'est  ce  qu'il  a  puisé  dans  l'an- 
cienne Vie  de  saint  Martial  sur  la  mission  que  l'apôtre  de  l'Aqui- 
taine a  reçue  de  saint  Pierre. 

Cette  ancienne  Vie  —  document  sincère  et  de  bonne  foi  —  est 
antérieure  à  la  légende  d' Aurélien;  et  si,  dans  la  seconde  partie  de 
cette  ancienne  Vie,  quelques  miracles  ont  été  ajoutés  dans  le  cours 

{i)  De  gloria  Confessorum^  c.  XXVII,  <^d.  Ruinard,  col.  917. 
(i;  dissertation  sur  l'Apostolat  de  saint  Martial,  18^5.  p.  80, 


SOO  SOGIRTK   ARCBÊOLOGIQUR   FT    HISTORIQUB   DU   LIMOUSIN. 

du  VI'  siècle,  la  première  partie,  qui  relaie  la  mission  de  saint 
Martial,  ses  prédications  et  sa  mort,  cette  première  partie,  disons- 
nous,  a  dû  être  rédigée  au  v*  siècle,  à  l'époque'  où,  dans  les  céré- 
monies liturgiques,  on  lisait  les  \ctes  des  Saints.  Cette  ancieniie 
Vie,  qu'on  ne  peut  suspecter,  a  une  grande  valeur  traditionnelle 
dans  ce  qu'elle  rapporte  de  la  mission  de  saint  Martial  ;  et  la  con- 
cordance des  traditions  des  Eglises  de  TÂquitaine,  de  Rome  et  de 
la  Toscane  avec  la  tradition  du  Limousin  donne  à  celte  mission 
de  saint  Martial  une  valeur  historique. 

L'abbé  Arbellot. 


LES  FRÈRES  PRÊCHEURS  DE  LIMOGES 


(1220-1693) 


PUKDATIO  ET  PRIORKS  CONVENTUS  LEMOVICÇNSIS,  AUCTORK  BERNARDO  GOIDONIS.^ 
MKMORIALIA  PRO  COKVRNTU   LEHOVIGKNSl.    —  FUNDATIONES  MISSARUM. 

La  fondation  du  couvent  des  frères  Prôcheurs  de  Limoges  est  liée  à  Tiic- 
tioD  aposiolique.de  saint  Dominique  qui,  eu  1220,  étant  de  retour  d'Espa- 
gne, envoya  le  toulousain  Pierre  Gellan  de  Paris  dans  celle  ville  où  il  fut 
reçu  avec  empressement  par  Tévêque  et  par  le  chapitre. 

Celle  circonstance  explique  déjà  le  zèle  des  historiens  de  Tordre  des  frè- 
res Prêcheurs,  B.  Gui  (f),  l'aiiieur  de  la  Chronique  anonyme  publiée  par 
Mamachi  {t),  Tsegius  (3),  Malvenda  (À),  Mamachi  (5),  Quétii  et  Echard(6),  etc. 
à  parler  de  cette  fondation. 

Il  y  a  une  autre  raison.  Ce  couvent  fondé  de  sr  bonne  heure  fournit,  au 
xiii«  siècle,  une  pléiade  de  religieux  de  tous  points  remarquables  11  suffit 
de  rappeler  les  noms  illustres  de  Gérard  de  Frachet,  d'Etienne  de  Salanhac, 
de  B.  Gui.  Mais  loin  de  s'épuisor  dans  cet  efilort,  il  ne  cessa,  dans  les  siècles 
suivants,  de  donner  à  Tordre  dos  hommes  distingués  qui  se  recommandent 
à  Thistoire  soii  par  leur  haute  situation  dans  TICgIise,  soit  parles  œuvres  de 
Tapostolat  et  les  vertus  les  plus  rares.  On  trouvera  ici  même  la  notice  de 
chacun. d'eux.  Le  couveni  de  Limoges  vit  donc,  dès  le  milieu  du  xiii^  siè- 
cle, sa  juste  réputation  s'étendre  cts*éiablir  dans  tout  Tordre.  Plus  tard,  elle 
ue  ôt  que  s^asseoir  plus  solidement  encore.  Gérard  de  Frachet  commença 
donc,  vers  1910,  à  écrire  son  histoire;  il  raconta  sa  fondation.  Ce  récit 
était  apparemment  le  Libellas  de  fundatione  conoentus  LemooicensLs  dont 

(1)  De  tribiu  gradibus  prœlaiorum  in  ordine  Prœdicatorum^   ubi  primo  agittvr  de  maiflttri» 
D.  MA.RTÈNB,  Thésaurus,  IV,  402. 

(2)  AnnaUi  ordinis  Prœdteatorum,  Append'x,  col.  307,  §  IV. 

(3)  Cronieon.  cité  par  Qu<r'F  et  Echard,  Script,  ùrd,  Prœd.f  II,  35,  et  Mamachi,  Annale*^ 
Ad.  an.  1219,  p.  13. 

(4)  Annales,  cité  par  QuÉrir  et  Echard,  Script,  ord.  Prœl.,  II,  455. 

(5)  Annales  ordinis  Praedicatorum. 
(6j  Script,  ord.  Prad.,  I,  79. 

T.  .xxxix.  17 


SGI  SOCIÉTt  ARCHEOLOGIQUE  RT  HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

parle  B.  Gui  ;  Etienne  de  Salanhac  poursuivit  celte  œuvre  utile;  etB.  Gui  ia 
reprit.  Dans  la  suite,  le  couvent  se  donna  le  soin  de  noter  les  faits  les  plus 
mémorables,  de  relever  les  noms  les  plus  dignes  de  riiisioire,  jusqu'au 
xvii<*  siècle,  jusqu*à  la  Révolution.  Trois  œuvres  aujourd'hui  connues  nous 
restent  comme  les  témoins  de  ce  zèle  studieux  et  tilial  :  i®  L'histoire  du 
couvent  par  B.  Gui,  intitulée  :  Fundatio  et  priores  oonoentu»  Lemocicensis  ; 
2'^  une  chronique  allant  jusqu'à  la  Révolution  et  dont  M.  l'abbé  licier  a  sauvé 
les  débris  (1)  ;  3<^  un  long  mémoire  ayant  pour  litre  :  Memorialia  pro  con- 
ventu  Lemooicensl.  Ces  Meniorialia  ou  recueils  de  notices  fureni  réunis  cl 
complétéB  en  1693.  Je  les  ai  trruvés  aux  Archives  de  la  Haute-Garonne,  eu 
même  temps  que  Thistoire  abrégée  des  couvents  d'Alais,  de  Béziers  cl  de 
Castres,  écrile  à  la  même  époque  (2).  La  composition  de  ces  histoires  parti- 
culières à  latin  du  xvii® siècle  esi  un  t'ait dij^nc  d'attention, non  pas  unique- 
ment, qu'on  veuille  bien  le  lemarqucr,  pour  riulérêt  propre  qu'y  trouve 
chacun  de  ces  couvents,  mais  parce  qu'elle  témoigne  d'uno  évolution  de 
Tordre  vers  les  étude.>  historiques,  que  cependant  il  n'avait  à  aucune  époque 
totalement  délaissées.  Sous  l'impulsion  de  la  grande  école  bénédictine  fran- 
çaise, les  frères  i^rèchcurs,  en  effet,  se  mirent,  à  la  iin  du  xvir  siècle,  avec 
activité  à  étudier  l'histoire,  et  d'abord  leur  propre  histoire,  fci  le  moyen  à 
prendre  qui  se  présentait  naturellement  à  l'esprit  était  celui-là  même  que  les 
Bénédiciins  avaient  adopté  pour  le  Monasticon  benedicUnuni  :  recueillir  los 
faits  locaux  destinés  à  être  les  matériaux  d'une  histoire  générale.  Les 
frères  Prêcheurs  publièrent  trois  grands  ouvrages  qui  sont  des  chefs- 
d'œuvre  :  Scrlptores  ordlnls  P^œdicatorum  par  Quètïf  et  ëcuard  (3),  Bul- 
larium  ordlnLs  FF.  Prœdlcatorum  par  Ripgll  (4\  Annales  ordinis  Prœ- 


(1)  Bxtrcdts  de  la  Chronique  des  frères  Prêcheurs  de  Zi  ..017»  (1200-1658^,  dans  Arch,  hi$t. 
de  la  Marche  et  du  Limousin,  t.  II.  121-135. 

(2)  Les  Archives  de  l'ordre  des  frères  Prêcheur*,  à  Rome,  possèdent  les  notices  suivantes  : 

1.  De  monasterio  sororum  Poutis  Viridis  (128\)-1307  ,  Lib.  Kl.,  fol.  313. 

2.  De  monasterio  Sancti  Pardulphi  (1293-1303).  Ibid.,  fol.  314. 

3.  De  anno  fundntionis  S.  Ronaui  Tho'osaiu  U'>)6)«  L.ib.  Haa.,  fol.  17S. 

4.  Histoire  du  couvent  de  Saint-Gaudens  (12921706),  Lib.  S,  fol.  175-188. 

5.  Histoire  du  couvent  d'Albi  (1210-17()«),  Lib.  S.,  fol.  247-292. 

'  Autre  histoire  du  couvent  d'Âlbi  (1276-1313),  Lib.  S.,  fol.  465-490. 

6.  Mémoire  pour  le  couvent  de  Béziers  (1247-,  Lib.  S.,  fol.  337-355. 

7.  Mémoire  pour  le  couvent  de  Montauban  (1251-1706).  Lib.  S.,  fol.  381-411. 

8.  Mémoire  pour  le  couvent  d'Alais  (1240-1700),  Lib.  S.,  fol.  417-422. 

9.  Mémoire  pour  le  couvent  de  Brive  (1261-1568),  Lib.  S.,  fol.  422-458. 

10.  MémOTe  pour  le  couvent  de  Clermon'-Lodève  (1317),  Lib.  Y.,  foL  176-191  ;  S.,  fol.  533. 

11.  Fondation  du  couvent  de  Can et,  vicariat  du  précédent  ((625),  Lib.  S.,  fol.  310. 

12.  Couvent  de  Rodez  (1383),  Lib.  U.,  fol.  1-55,  fol.  71-98. 

13.  Fondation  du  couvent  des  religieuses  de  Rodez  (1660),  Lib.  U.,  fol.  !36'^7. 

14.  Relatio  de  provincia  Tholosana  pro  capitulo  generali  (1580),  Lib.  III.,  fol.  9-136. 
Item.  Ms.   y  en.  P.  Sebast.  Michaeli^,  Lib.  lit,  fol.  480. 

15.  Historia  reformationis  Provinciae  Tolosanae  vl590-1693),  Lib.  S.,  fol.  9-136. 

16.  Varia  de provinciis  Tolosona  et  Occitana  (1647),  Lib.  Kl.,  fol.  213-237, 

17.  Varia  de  eonventu  S.  Severi  (1257),  Lib.  PP.,  fol.  532. 

18.  Varia  de  eonventu  Aginnemi  (1240-1706  ,  Lib.  Y.,  fol.  102  ;  Lib.  S.,  fol.  327. 
(Communication  du  R.  P.  Ligiez,  archiviste  de  l'ordre). 

(3)  2  vol.  in-fol.,  Paris,  1719-1721. 

(4)  8  vol.  in-fol.,  Rom»,  1721-1740. 


LES  ITRÈRRIS  PR^CHCUR*;   DE  LIMOGES.  2d3 

diratorunif  par  Mamacbi  (t).  Je  viens  de  prononcer  le  nom  de  Mamachi, 
On  sait  qu*une  commission  hisiorique,  composée  de  quaire  membres, 
fut  à  sa  demande  établie  au  couvent  de  la  Minerve.  II  la  présida.  Elle 
entreprit  à  son  compte  d'écrire  l'bistoire  générale  de  Tordre  élaborée  par 
le  P.  Brémond,  un  des  principaux  promoteurs  de  ces  études,  et  qui,  élevé  à 
la  première  charge  de  Tordre,  n*avait  pu  la  poursuivre:  histoire  complexe 
et  vaste,  nstudium  tam  longum  tamque  dlfflcUe  »,  disait  âlamachi(2);  œuvre 
impossible  à  réaliser,  si  chaque  couvent  n'avait  commencé  par  se  faire  con- 
naître, par  donner  ses  litres  à  Tatiention  de  la  commission.  Les  Memorialia 
pro  conoeniu  Lemooi^ensi  offrent  un  type  excellent  de  ces  histoires  parti- 
culières écrites  ou  recueillies  dans  le  but  indiqué  et  qui  durent  s'attacher  aux 
personnes  p)us  qu'aux  choses  (3).  lis  méritent  donc  à  bien  des  litres  d'être 
remarqués  et  retenus.  Faut-il  ajouter  que,  par  une  fortune  malheureuse,  les 
archives  du  couvent  des  frères  Prêcheurs  de  Limoges  si  anciennes,  si 
renommées  et  si  considérables,  sont  en  majeure  partie  perdues?  Les  Archi. 
ves  de  la  Haute-Vienne  n'en  ont  sauvé  que  quelques  débris  absolument 
insuftisants,  même  pour  ébaucher  son  histoire.  C'est  un  nouveau  motif  de 
recueillir  avec  soin  les  textes  qui  permettent  d'en  retrouver  le  fil.  11  m*a 
donc  paru  utile  de  réunir  et  de  publier  ensemble  trois  mémoires  auxquels 
on  n'hésitera  pas  à  accorder  la  valeur  de  documents  sinon  directs,  du  moins 
solides  :  <<>  Fundatio  et  priores  conoentus  LemoolcenélSy  auctore  Ber- 
nardo  Guidonis;  i°  Memorialia  pro  conoentu  Lemooicensi;  3o  Funda- 
tiones  missarum.  Le  premier  neul  a  été  en  partie  publié  par  D.  Marlène;  les 
deux  autres  sont  inédits.  Les  Memorialia  se  recommandent  d'eux-mêmes.  Ils 
contiennent  quelques  anciens  textes  et  représentent  la  chronique  du  cou- 
vent tenue  à  jour.  Le  récent  volume  de  M.  Aiig.  Molinier  :  Les  obi- 
tuaires  français  au  moyen-âge  (4),  a  montré  Tintérêt  qui  s'attache  aux 
rôles  des  fondations  de  messes,  i^es  Memorialia  et  les  Fundationes  mis- 
aarum  sont  donnés  ici  chacun  d'après  le  manuscrit  unique  connu.  Pour 
le  texte  dp  B.  Gui  :  Fundatio  et  priores  conoentus  Lemooicensisy  j'ai  suivi  le 
ms.  490  de  Toulouse  {\^  édition)  et  le  ms.  780  de  Bordeaux  (2«  édition)  (5). 
On  trouvera  des  renseignements  sur  le  couvent  de  Limoges  que  je  n*ai  pas 
ici  utilisés,  dans  deux  de  mes  publications  auxquelles  je  me  permets 
de  renvoyer  une  fois  pour  toutes  :  Essai  sur  l'organisation  des  études 
dans  l'ordre  des  frères  Prêcheurs  au  xiii®  et  au  xiv«  siècles  (6),  Avta 
capitulorum  prooincialium  ordinis  fratrum  Praedicatorum  (7). 

il)  Tome  I  (§eal  paru).  In-foL,  Rom«,  1756. 
{2 1  PrœfaUo,  XIX. 

(3)  Le  P.  Reboul  avait  écrit  ane  histoire  du  couvent  de  Saint-Maximioqae  M.  l'abbé  Albanés 
a  otllisé^î  dans  son  beau  livre  :  Le  couvent  royal  de  Saint- Afaximin  en  Provence.  In  8«,  Mar- 
seille, 1880.  C'est  de  ce  même  mouvement  vers  les  étuden  historiques  que  sont  sortis,  par 
exemple,  De  Botnana  provineia  par  le  P  Fontana.  (1670),  Historia  cœnohii  Avenionensis 
par  le  P.  Mahukt(1678|,  Afonumenta  ronventu$  Tolosanif  par  le  P.  PsiiciN  (1093),  Historia 
provindœ  hispaniœ,  par  le  P.  Meohanus  (1725). 

(4)  ln-8«,  Paris,  Imprimerie  Nationale,  1890. 

{i}  i/L.  Léop.  Dblislb,  Notice  tur  les  manuserits  de  Bernard  Gui,  320,  321. 

(6)  Io-8«,  Paris,  Picard,  1884. 

(7|  In-8*,  Tottlome,  Privât  (sons  presse). 


264  SOCIÉTÉ.   ARCHÉOLOGIQUR   RT   BISTORIQUR   DU   LIMOUSIN 


I 

FUNDATIO  ET  PRIORES  CONVENTUS  LEMOVICENSIS 

Auctore  R.  Gcidoms. 

(Bibl.  de  Toulouse  ms.  -490.  Toi   <28,   fol.  135.  —  Bibl.   de   Bordeaux, 

ms.  780,  fol.  59,  fol.  62) 

I.   —   FUNDACIO   CONVKNTUS   LEMOVICENSIS. 

Anno  Domini  M°CC**XIX°  (1),  paulo  anlc  quadragesiraam  (2), 
venjt  primo  frater  Pelrus  Cellani  Tholosanus  apud  Lemovicas  de 
Parisius  cum  sociis  sibi  datis,  rnissus  a  beato  Dominico  (3),  ut  acci- 
peret  ibi  domum  ;  fuilque  paterne  et  bénigne  receptus  a  venerabili 
episcopo  Lemovicensi  domino  Bernardo  de  Savena(4)  et  a  capilulo 
eiusdem  ecclesie  sedisLemovicensis.  Paulo  posl  diclus  frater  P.  (S) 

• 

(4)  N.  st.  1220.  Pour  B.  Gui,  Tannée  commençait  au  35  mars.  Vov.    le 
paragraphe  suivant.  Cf.  Mauachi»  Annales  ord.Prœd.,  pp.  522-536. 

(2)  Dans  les  premiers  jours  de  février  probablemeul.  Cette  année  Pâques 
tomba  le  29  mars,  et  le  niqrcredi  des  Cendres  le  i  I  février. 

(3)  «  Anno  Domini  MoCCoXlX»,  bealus  Dominicus  de  Hyspacia  veiiil  Pari- 
sius et  in  domo  Sancli  Jacobi  prcfaia  convenlum  XXX  frairum  invenil  ;  el 
inde  misii  Lemovicas  ad  convenlum  accipiendum  ibidem  fraircm  Pelrum 
Cellani  Tholosanum  superius  mcmoraium  ».  B.  Gui,  Cathalogus  Magistro' 
rum  ordinis  Predicatorum,  Bibl.  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  490 
fol.  54  B.  —  «Circa  annnm  Domini  MoCC'»Xllll«,  ingruonic  lempore  quo  ad 
Lateranenseconcilium  Romam  adiré ceperunlcpiscopi,  oblulerunl  sesanclo 
I»ominico  duo  probi  viri  el  ydonei  de  Tholosa.  Quorum  unus  fuii  fraier 
P.  Cellani,  qui  tuil  poslmodum  primus  prlor  Lemovict-nsis  ;  aller  vero  fraier 
Thomas,  vir  admodum  graiiosus  et  sermone  facundus.  Horum  primus 
nobiles  el  insignes  quas  Tholose  circa  Caslrum.Narbonense  domos  possé- 
derai, oblulit  el  dedil  sancio  Dominico  el  élus  sociis.  A  quo  lempore  cepe- 
lunl  primum  apud  Tholosam  in  eisdem  dominus  commorari  «.  B.  Goi,/6'd., 
fol.  53  A.  Le  premier  couvent  habile  par  sainl  Dominique  eu  aujourd'hui  le 
couvcni  de  Marie-Réparalrice.  Fr.  Pierre  Cellan  fui  un  des  premiers  compa- 
gnons de  sainl  Dominique  (B.  Gui,  Bibl.  de  Touiouse,  fol.  39  B);  en  I2Î6, 
l'évêque  de  Cahors  l'appela  pour  fonder  un  couvent  dans  colle  ville  (B.  Gui! 
Fund,  cono.  Caturc,  Ibid.^  fol.  Ul  A);  il  fui  le  premier  inquisiteur  (1233) 
el  le  qualrième  prieur  du  couvent  de  Toulouse  (B.  Gui,  Fund.  cono.  Toi. 
IbLd.,  fol.  119  A.) 

(4)  lîvôquedelîig  à  1226. 

(5)  Manque  dans  Mariène, 


LES   FRÈRBS    PKÊCBEURS   DE  LIMOGES.  .  165 

rediil  Parisius,  et  intérim  locus  ydoneus  pro  fratribus  querebatur 
et  disponebatur.  Hune  locum  quesitum  et  invenlum,  scilicet  extra 
villam  ultra  Vigennam  fluvium,  iuxta  ponlern  qui  dicitur  Sancti 
Marcialis  (1),  émit  pro  fratribus  et  dédit  patronus  vir  venerabilis 
dominus  Guido  de  Clausello,  archidiaconus  in  ecclesia  memorata, 
postmodum  vero  episcopus  in  eadem  (2). 

Anno  Domini  M^'CC^'XX*',  prefalus  fraler  P.  (3),  adiunctis  sibi 
sociis,  rediitde  Parisius  Lemovicas,  locumque  prefatum  paulo  post 
Natale  Domini  acceptavit,  in  quo  loco  fundata  fuit  ecclesia  in 
honore  sancte  Dei  genitricis  Marie,  de  voluntate  et  assensu  prefati 
dumini  (4)  Bernardi,  episcopi  Lemovicensis.  Et  prefatus  dominus 
Guido  patronus  primarium  lapidem  posuitin  eadem,  présente  clero 
et  populo  multo,  in  sequenti  festo  Anunciationis  Dominice  (5), 
incoante  iam  anno  Domini  M*'GC°XXI*'.  Intérim  vero  fratres  mane- 
bantin  domo  Sancli  Geraldi  in  una  domo  ad  partem  ;  et  in  loco 
prefalo  ad  habitandum  cdificia  parabantur. 

Anno  Domini  W^GC^^XXP,  in  feslo  Nativitatis  Béate  Marie  perpétue 
Virginis  mutaverunt  se  fratres  de  domo  predicta  Sancti  Geraldi  ad 
locum  suum  nova  m  ultra  pontem  Sancti  Marcialis,  quem  tune  pri- 
mitus  inhabitare  ceperunt.  In  sequenti  autem  festo  Epiphanie, 
constructo  iam  capite  ecclesie,  celebrata  fuit  missa  sollempniter  in 
cadem  (6j  a  prefato  domino  archidyacono  et  patrono.  In  hoc  autem 
primo  loco  manserunt  fratres  annis  viginti  nec  plus  nec  minus 
amplius  una  die. 

Postmodum  namque  propter  multam  ineptitudinem  et  inconve- 
nienciam  dicli  loci,  quia  notabiliter  ab  utraque  villa  remotus  et 
distans,  et  in  seipso  nimis  ardus  (7)  erat,  et  ad  sermones  et  ad  alia 
salutis  consilia  populus  confluere  non  (8)  valeret,  disposuerunt  se 
fratres,  Deo  pro  eis  melius  disponente,  mutare  ad  locum  secundum 
in  quo  nunc  habitant.  De  cuius  loci  empcione  et  miraculosa  solu- 
cione,  que  tune  impossibilis  fratribus  videbatur,  necnon  et  de 
muUis  aliis  contingentibus  circa  ipsum,  de  primo  quoque  loco 
plenius  et  difTusius  est  notatum  in  libelle  de  fundacione  conventus 
liemovieensis,  qui  ibidem  habetur. 

Anno  Domini  M*»  GC*»  XL**,  in  craslino  beali  Bartholomei  apos- 

(I)  DaPLÈs-ÂGiKR,  Chroniques  de  Saint-Martial  de  Limoges,  130. 
(9)  Evêque  de  U26  à  1235. 

(3)  llarlène  :  Petrus  Cellani, 

(4)  Manque  dans  Martène. 

(5)  Manque  dans  Martène. 

(6)  Manque  dans  Marlènc. 

(7)  Marlène  :  erectas. 

(8)  Ms.  de  Toulouse  :  nec. 


266  SOCIÉTÉ   AACnéOLOOIQUE  ET  HTSTORIQUK   DU   LIMOUSIN. 

toli  (1),  in  isto  secundo  loco  fuit  benedictum  cicniterium  liberum  et 
absque  omni  condicione,  a  venerabili  pâtre  domino  Philippe, 
Bituricensi  archiepiscopo  (2),  de  raandalo  domini  Peneslrini  cardi- 
nalis,  tune  apostolice  sedis  legati  in  Francia(3),  in  presencia  cleri 
et  populi,  vacante  tune  sede  Lemovicensi  (4). 

Anno  Domini  M*>  CC»  XLI\  Illlo  nonas  aprilis  (5),  fuit  fundala 
ecclesia  fratrum  in  isto  secundo  loco  a  domino  Durando,  Lemovi- 
censi episcopo,  tune  noviter  presulante  (6). 

Anno  Domini  M*»  CG*XLP,  in  festo  Nativitatis  Béate  Dei  genilricis 
Marie,  mutaverunt  se  fratres  de  primo  loco  ad  secundum,  sollemp- 
niter  ac  dévote  processionaliter  incedentes  cum  toto  provinciali 
capitule,  qnod  ibidem  tune  exlitit  celebratum(7).  comitanteclero  et 
populo  multo,  necnon  et  religiosis  viris  cum  canlicis  et  laudibus, 
sicut  in  prefato  libelle  plenius  est  descriptum  (8). 

II.  —  PrIORES  CONVENTUS  LEMOVICENSIS  (9). 

Primus  prier  in  conventu  fratrum  Predicaterum  Lemovicensi  fuit 
frater  Petrus  Gellani  prefatus,  qui  post  beatum  Deminicum  fuit 
primus  frater  ordinis  Predicatorum,  sicut  notatum  inveni  a  fralre 
Stéphane  de  Salanhac  (10),  vire  antique,  qui  ibidem  in  eius  mani- 
bus  est  professus.  Hune  fratrem  Petrum  Gellani  beatus  Deminicus 
suscepit  ad  ordinem  in  socium  et  in  fratrem  ;  ipse  vero  suscepit 
beatum  Deminicum  et  letum  qui  tune  erat,  imme  incipiebat  (il), 
ordinem  Predicatorum,  secum  in  hospicio  proprie  Tholose,  in  quo 
hespicio  fratres  primitus  habitaverunt. 

Gumque  beatus  Pater  Dominicus  post  obitum  gloriosi  principls 
domini  Symonis,  comitis  Montisforlis,  fratres  pro  dilatacione 
ordinis  dispergeret,  islum  (12)  fratrem  Petrum  Gellani  Lemovicas, 

(i)  Le  35  août  par  conséquenl. 

(2)  Philippe  Bcrruyer,  archevêque  de  1236  à  1261. 

(3)  Jacques  de  Pecoraria,  cardinal-évôque  de  Palestrina. 

(4)  Par  la  mort  de  Guillaume  du  Puy.  évoque  en  1235. 
(5j  2  avril. 

(6)  Evêque  jusqu'en  1245. 

(7)  Voy.  dans  les  Actes  de  ce  chapitre  provincial,  Acta  capUulorum  pro- 
oincialium,  pp.  18-20. 

(8)  Marlène  :  llbello  contiaetut. 

(9)  Tiire  courant. 

(10)  Marlène  :  Salanhaco. 

(H)  Marlène  :  qui  tune  in  i  no  incipiebat, 
(12)  Ms,  de  Toulouse  :  hune. 


^ 


LES  FRÈHKS   PBÉCHKURS   DB  LIMOGES.  26t 

ut  locuiD  et  conventum  ibidem,  sicut  prelactum  est,  acciperet, 
ileslinavit.  Cum  vero  ignoranciam  et  libronim  penuriam  alle- 
garet,  nam  unum  solum  quaternum  de  omeliis  beali  Gregorii 
tantara  habebat;  «  Vade,  inquit,  fili,  et  confidenter  vade,  omni  die 
bis  habebo  te  coram  Deo.  Et  ne  dubites,  mulluin  adquires  Deo, 
et  afferes  muUam  fructum.  Gresces  et  multiplicaberis,  et  Dominus 
erit  tecum  ».  Et  sicut  postmodnm  familiaribus  suis  sepius  enarra- 
vit,  cum  intus  vel  extra  angustia  artabatur  invocabat  dominum 
Dominicum,  reducens  ad  memoriam  promissum  suum  ;  et  omnia 
prospère  succedebanl. 

Hic  frater  Petrus  multis  habitum  sanctum  dédit,  et  in  terra  sicut 
unus  de  prophetis  anliqnis  apud  clerum  et  populum  in  magna 
reverencia  et  honore  consenuit,  optime  personatus,  constans  et 
reclus.  Prior  fuit  Leraovicensis  annis  tredecim.  Circa  flnem  vero 
dierum  suorum  Tholosam  rediit,  unde  extitit  oriundus,  ubi  primus 
cum  fratre  Guillermo  Arnaldi  (1),  viro  constantissimo,  deputatus 
fuit  ad  inquisicionis  ofQcium  contra  pravitatem  hereticam  exercen- 
dum  in  partibos  Tholosaois  et  per  tolam  terram  comitis  Tholosani, 
anno  Domini  M*  CG*  XXXIIl»,  sicut  habetur  et  legitur  in  Cronica 
magistri  Guillelmi  de  Podio  Laurencii  (2).  Hic  tandem  post  multos 
bonos  labores  in  conventu  Tholosano  sancte  in  Domino  diem  extre- 
raum[clausitj,  fructus  quietis  et  pacis  eternea  Domino  percepturus, 
VHP  kalendas  marcii  (3),  anno  Domini  M»  GG»  LV1P(4),  ut  estime 
de  anno  (5)  ex  auditis. 

Secundus  prior  frater  Geraldus    de  Fracheto  (6)    de    Castro 


(1)  LMnquisileur  tué  à  Avignoncl  en  4242. 

(2)  a  In  dicbus  autcm  legationis  ejusdcm  episcopi  Tornacensis,  pcr  sum> 
mum  Pomificcm  commissa  esl  fratribus  ordinis  Pracdicalorum  inquisitio 
ÎD  his  terris  contra  haerelicos  facienda;  fueruntque  ad  hoc  deputali  fraicr 
Petrus  Ccllani  et  Guillelmus  Arnaldi,  qui  Tolosae  quosdam,  quos  facilius 
convinci  posse  praesumebant,  cilaverunt.  o  Gap.  XLIII.  Ils  exercèrent  en- 
semble Toffice  de  l'Inquisition  dans  le  Quercy  et  à  Moissac  (G.  Pblbisso, 
Chronieon,  p.  95). 

(3)  îî  février. 

(4)  1958  (n.  st.). 

(5)  Ms.  de  Bordeaux  :  annis. 

(6)  B.  Gui  est  revenu  sur  ce  religieux  éminent  plusieurs  autres  fois, 
d'abord  dans  son  opuscule  :  Predicatores  graciosi  et  famoai  (Bibl.  de  la 
ville  de  Toulouse,  ms.  490,  fol.  43,  A);  ensuite  dans  son  opuscule  :  De 
prioribus  prooincialibus  (Ibid,,  fol.  67,  B)  :  Gérard  de  Frachet  fut  pro- 
vincial de  la  première  province  de  Provence  de  1251  à  Ii59;  enfin  dans 
VHistoire  de  la  fondation  du  couoent  de  Montpellier,  dont  il  fut  prieur  de 
IS60à  1963  {Tbid.,ïo\.  Ut,  B).   En  1263,  Gérard  de  Frachet  fut  désigné 


268  SOCIÉTÉ  ARCHÊOLOGiQrK  ET  OISTORIQUR  DD  LIMOUSIN. 

Luceti  (1)  Lemovicensis  diocesis,  successit  fralri  Petro  Cellani« 
anno  Domini  W  CC  XXXIIP.  Prefuit  autem  ac  profuit  (2) 
annis  XII.,  graliosus  ac  dilectus  Deo  et  hominibus,  persona 
canctis  spectabilis,  predicator  facundus  et  fecundus.  Hic  locum 
primum  consalte  dimisit,  incommoda  plurael  ineptitudineseiuspru- 
d enter coDsiderans  et  attendons:  et  locum  secundnm  in  quo  nunc  (3) 
habitamus  discrète  ac  sollicite  émit,  et  Beata  virgo  Maria  cum  (ilio 
sao,ymmo  filius  meritis  et  precibus  pie  matris  sue  per  servum  suiim 
dominura  Aymericum  Palmulz,  canonicum  Dauralensem  (4),  mira- 
culose  persolvit.  De  hoc  habetur in  Vitis  fratrum,  lib.  primo,  cap.VI, 
Cum  fratres  Lemovicenses,  etc.  (5)  ;  de  quo  loco  fuerat  visio  celitas 
premostrata,  sicut  habetur  in  eodem  libro  primo, cap.  niI'',A^flrrarîf 
michi  quidam  honestuscivis  Lemovicerms,  etc.  (6).  Hune  locum  etor- 
dinemhonoravitmullipliciter  et  promovit.  Hic  fuitprior  provincialis 
huius  provincie  oclavus.  Librumquoque,  qui  Vitas  fratfutm  inscri- 
bitur.  ipse  compilavit  etstudiose  recollegit,  quinque  libellis  ipsum 
distinguens,ad  mandatum  venerabilis  patris  fratris(7)HYmberti,  Ha- 
p:istri  ordinis.  Tandem  plenusdierum  etoperibus  bonis,  in  senectute 
bona.  migravitad  Dominum  inconventu  Lemovicensi,  in  festo  beali 
Francisci,  IIII»  nonas  octobris,  anno  Domini  M°CC°LXXl,  etalis  sue 
annoLXXVP,  ab  ingressuvero  ordinis  anno  XLVI°,  quem  intravil 
Parisius,  in  festo  beali  Martini,  anno  Domini  M°  CC'' XXV",  sub 
fralre  Matheo  priore,  et  in  sequenti  festo  Anunciacionis  Domi- 
nice,  in  manu  Magistri  ordinis  (8)  professionem  fecit,  sicut  scriptum 
inveni  de  manu  sua  in  quodam  iibro  suo.  SepuUus  est  in  claustre 
prope  oslium  ecclesie,  ubi  habentur  insculpti  in  lapide  sequentes 
versus  : 

Fraler  Geraldo  de  Fracheto  pie  valde, 
Tercius  liic  a  le  capilur  locus  immcdiato. 
Ordo,  gcnus,  vila,  discrecio,  linga  polil;i, 
Fama,  pudor,  pietas  te  iaudant,  pax,  amor,  clas. 

comme  électeur  du  Maitre  général  (IHd.^  fol.  398,  B}  ;  il  mourut  le  4  oc- 
tobre 1371  (Ibid.,  fol.  î5i,  B).  Voyez  sa  notice  dans  Quélif  cl  Echard, 
Script,  ord.  Prœd.y  l,  2159. 

(I)  Châlus  (el  non  pas  Châlucet),  arr.  de  Sainl-Yrieix  (Hauie-Vienne*. 
Cf.  Bernard  Gui  dans  Echanl,  Scriptores^  I,  259. 

(ât)  Ac  profuU  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(3)  Nunc  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(4)  Le  horal  (Haute-Vienn**)- 

(o)  VUœ  fratrum^  p.  30.  ln-i°,  éd.  lilbographiée,  Marseille,  1875. 
(C)  Ibld.,  p.  50. 

(7)  Fratrin  manque  dans  le  ms.  Je  Toulouse. 

(8)  Ms.  de  Toulouse  :  Magistri  Jordan/s. 


LRS   PRÈRKS   rnPXHKURS    DE  L1M0GRS.  ^GO 

Tercius  prior  fraler  Hugo  de  Mala  morte  (1)  Lemovicensis  dyo- 
cesis  successit  fratri  Geraldo  de  Fracheto,  anno  Domini  IV^CC^'XI^V® 
TelXLVI";  prefuitqueannisquinque.  Hic  fuit  nobilis  fçenere  et  anirai 
virlute,  vir.magni  rigoris  et  bone  discrecionis.  Fuit  eliam  prior 
Burdegaiis,  ubi  fuit  in  archiepiscopum  (2)  nominatus,  opinionis 
et  famé  preclare.  Hic  obiil  in  convenlu  Lemovicensi,  IIIP  kls.  ia- 
nuarii  (3),  anno  Domini  M°  CC**  LXIII».  Tandem  post  aliquot 
annos  ad  inslanciam  venerabilis  viri  domini  Helye  de  Mala  morte, 
(iecani  Lemovicensis,  etaliorum  parenlum  suorumnobilium,  trans- 
latum  est  corpus  eius  ad  fratres  Brivenses,  ubi  avunculus  et  nepos 
in  Domino  requiescunt. 

Quartus  prior  frater  Stephanus  de  Salanhaco  Lemovicensis  dyo- 
cesis,  bis;  prima  vice,  successit  fratri  Hugoni  de  Mala  morte,  anno 
Domini  M**  CC°  L**;  fuitque  inde  Iranslatus  in  priorem  Tholosa- 
num,  anno  Domini  W  CC*»  LIX\  Hic  frater  Stephanus  fuit  in  omni 
statu  ac  gestu  suo  religionis  spéculum  aspicientibus,  gracia  predi- 
cacionis  et  sermonis  benedictus  in  verbo  audienlibus,  prudencia  et 
sapiencia  preditus  in  regimine,  facundia  et  loquencia  redimitus, 
experiencia  muita  edoctus,  in  hiis  que  religionis  [sunt]  oplime  ins- 
Inictus  et  instruens  (4).  enarrator  gestorum  et  antiquitalum,  ac 
exemplorum  notabilium  graliosus  et  copiosus,  morum  ac  gesluum 
maturitate  compositus,  famosus  in  tota  patria  (5).  De  quo  adhuc 
infra. 

Quintus  prior  frater  Helyas  Navarra  Lemovicensis  dyocesis 
successit  fratri  Stephano  ;  prefuitque  anno  uno.  Hic  fuit  vir  sanctus 
et  dévolus,  vere  religionis  spéculum  et  ymago,  veneranda  valde 
persona,  fervens  et  gratiosus  predicalor,  in  correctione  rectus  et 
constans,  zelo  salutis  aliorum  velut  aller  Helyas  succensus.  Hic 
fuit  subprior  Tholosanus  et  prior  Narbonensis  (6),  et  Carcassonen- 
sis  (7)  et  Figiacensis  (8).  Tandem  in  senectute  bona,  obiil  in 
convenlu  Brivensi,  in  kalendis  (9)  septembris,  anno  Domini 
M*CG*LXX*.  Sepultus  iacetin  clauslro  prope  hoslium  capituli  ad 
levam  introeunlibus. 

(1)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne^  p.  i}9. 

(2)  Archevêque  de  H27  à  i2G2. 

(3)  30  décembre. 

(i)  Manque  dans  Marlène. 

f5)  QuÉTiF  et  EoHARi),  Scrip,  ord,  Prœd.y  1,  4lo  ;  —   Dou/.is,  Les  frèreu 
Prêcheurs  en  Gascogne^  p.  483. 

(6)  B.  Goi,  Ftindat,  cono.  Narbonennis.  Bibl.   de  la  ville  de  Toulouse, 
ms.  490,  fol.  255. 

(7)  B.  Gui,  Funiat.  cono.  Carcassonemiff.  Ibld  ,  fol.  tSG,  A. 

(8)  B.  Gui,  Fondât,  cono,  biglacensls,  Ibld,,  fol.  173,  A. 

(9)  Marlène  :  in  calendes,  30  aoûl. 


^70  SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE    ET    HISTORIQUE    OU   LIMOUSIN. 

Sextus  prior  frater  Geraldus  de  Sancto  Valerico  (1)  Lemovi- 
censis  dyocesis  saccessit  fralri  Helye  Navarra,  anno  Domini 
M"  ce**  LX"*;  prior  fuit  annls  quinque;  fuil  autem  absolutus  in  capi- 
lulo  generali  Montispessulani,  anno  Domini  M°  CC*"  LXV*  (2).  Hic 
de  monacho  Sancli  Marcialis  (3)  factus  est  predicalor  dévolus  et 
fructuosus,  gratus  et  letus  et  largus,  et  persona  venerabilis.  Tan- 
dem in  senectute  bona,  in  conventu  Lemovicensi,  in  die  Natalis  qua 
Christus  nalus  est  mundo,  nalus  est  ipse,  ut  pie  creditur,  in  celo. 
Illucescente  siquidem  aurora  illius  diei  saneti,  voluit  et  peciil  ut 
fratres  servilores  qui  ei  infirmo  assistebant,  coram  se  sibi  dicereol 
officium  misse  matutinalis  que  dicitur  in  aurora,  scilicet  :  Lux  fui- 
gebit  hodie  super  nos,  etc.  ;  quo  dévote  ac  attente  audito  ac  explcto, 
gracias  agens  Deo,  ait  :  «  Karissimi  fratres,  officium  misse  raaioris, 
scilicet  :  Puer  natus  est  nobis,  etc.,  audiam  in  celo  cum  angelis  »  ; 
et  post  paululum  in  Domino  obdormivit,  et  in  missa  conventuali 
corpus  eius  fuit  in  choro  fratrum,  anno  eiusdem  Domini  benedicti 
M"  GO*  LXXX**.  Sepultus  est  in  claustro  ante  limen  ecclesie,  ubi 
epithaphium  eius  sequentes  conlinel  versus  : 

Hic  situs  est  frater  G.  de  Sancto  Valerico. 
Subvcnidt  mater  Chrisli  pietatis  amico. 
Gratus,  amans,  hylaris,  Christo  florem  iuvenîHs 
Optulil  elatis,  susceptus  in  ordine  gratis 
In  malutino  medio  placuil  quoque  trino« 
Ac  uni  Domino  temporc  serolino. 
Sic  ubi  complevit  annos  ter  in  ortilae  quinos 
El  decies  tri  nos,  moriens  in  pace  quievit. 

Frater  Slephanus  de  Salanhaco  predictus  secunda  vice  successit 
fralri  Geraldo  de  Sancto  Valerico,  anno  Domini  W  CG"  LXV*». 
Temporo  prioratussuihac  ultimavice  intravit  ordinem  et  suscepit 
habitum  de  manuipsius,in  conventu  Lemovicensi,  venerabilis  pater 
dominus  Petrus  de  Sancto  Astérie,  episcopus  Petragoricencis  (4), 
anno  Domini  M'*  GG°  LXVII^;  qui  annis  XXXIIl  episcopatum 
digne  et  laudabiliter  gubernavit,  in  ordine  vero  annis  VIII  men- 
sibus  quatuor  cum  dimidio,  vixit  Lemovicis  laudabiliter  et  honora- 
biliter  ;  obiitque  féliciter  pridie  ydus  iulii  (5),  dominica  die,  anno 


(4)  Saint-Vaury  (Creuse). 

(2)  Bibl.  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  489,  fol.  70^ . 

(3)  L'abbaye  de  Saint-Martial  de  Limoges. 

(4)  Evêque  de  Périgueux  depuis  1234.  Voy.  plus  bas,  pp.  i3  4^. 
^5)  14  juillcl. 


Lf.S   PRÈRR8   rRÊCHKL'RS   DK  LIMOGES.  371 

Domini  M**CC*  LXXV»  ;  sepultus  est  in  medio  chori  fratrum  (1). 
Tempore  quoque  prioralus  fratris  Slephani  hac  secunda  vice,  anno 
Domini  W  CG**  LXIX%  fuit  inctioalum  et  fundalum  dormitorium 
ex  parte  inferiori  versus  orlum  ;  et  memoralus  dominas  P.,  Petra- 
goricencis  episcopus,  primarium  lapidem  posait  in  eodem,  de 
cuias  bonis  tam  in  vita  ipsius  quam  post  mortem  fuit  quasi  perfec- 
tum  et  consnmpmatum.  Hic  frater  Steplianus  compilavit  (2)  Iracla- 
tum  quemdam  brevem  et  devotum  devotis  :  De  quatuor  m  quibm 
Deus  Predicatorum  ordinem  insignivit,  quem  ego  in  notulis  scriplum 
de  manu  sua  (8)  semiperfectum  repérions  diligencius  recoUegi,  ipsum 
compingens  noviler  reformavi,  pluraque  (4)  superaddidi  in  locij 
suis  secundum  exigcnciam  materie  in  eodero  (5),  quam  invencrim  in 
eodem  (6).  Prior  fuit  Lemovicis  tam  prima  quam  secunda  vice  in  uni- 
verso  annisXVI,  fuitque  absolutus  hac  vice  in  capitulo  generali  Mon- 
tispessulani,  anno  Domini  M"*  GG°  LXXl°  (7).  Hic  fuit  prior  Poilien- 
sis,  et  Tholosanus  ;  tandem  plenus  dierum  quasi  sexagenarius  in 
ordine  obiit  Lemovicis,  Vl«»  ydus  ianuarii  (8j,-anno  Domini  M"  CG* 
nonagesimo  (9)  ;  sepullus  in  claustro  ante  hostium  ecclesie. 

Septimus  prior  frater  Nicholaus  de  Monte  maurilii,  sic  cogno- 
minatus  eral,  tamen  Lemovicencis  dyocesis  origine,  successit  fratri 
Stephano  de  Salaohaco,  vir  suavis  moribus  et  oplime  Utteratus. 
Prior  fuit  anno  quasi  dimidio;  fuit  autem  absolutus  ibidem  a 
priore  provinciali  fralre  Pelro  de  Valelica,  anno  Domini  M"*  GG** 
LXXI®,  post  Natale  Domini.  Hic  mullis  annis  rexit  et  tenait  stu- 
dium  générale  in  Monlepessulano  ac  sludiumjTholosanum  sollemp- 
niter  et  honorabiliter  utrobique,  et  in  Burdegalis;  in  convenlu  vero 
Leraovicensi  legit  et  docuit  plusquam  XV  annis  ;  tandem  legens 
canonicis  in  sede  cathedralis  ecclesie  Narbonensis,  in  cathedra 
more  doctoris  sedens,  et  cum  mirabili  fervore  et  devocione  sedens 
et  (10)  exponens  illud  Eccl.  XXIIil,  Quasi  cedrm  exaltata  sum  in 
LihanOy  etc.,  de  sapienlia  increata  et  de  natura  humana  in  Ghristo  et 

(1)  B.  Gui  a  consacré  une  notice  à  cet  iliuslre  religieux  dans  son  opuscule: 
De  quatuor  in  quitus  Deua  Predicatorum  ordinem  insignioit.  Bibl.  de 
Toulouse,  ms.  490,  fol.  35  A. 

(2)  lis.  de  Toulouse  :  incoaoit, 

(3)  Ms.  de  Bordeaux  :  fratris]  à  la  marge  :  Stepha  -, 
(4)'Martène  :  pleraque, 

(5)  In  eodem  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(6)  C*e8l  Topiiscule  déjà  cité. 

(7)  Bibl.  de  Toulouse,  ms.  489,  fol.  79^. 

(8)  H  janvier. 

(9)  121^1  (n.  Ht.). 

(lOj  Sedens  et  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 


S72  SOCIÉTÉ  AttCHROLOGIQUB   ET    HISTORIQUK    DD   LIMOUSIN. 

de  Virgiae  Beata,  dulciter  et  quasi  imperceptibiliter  cunctis  aslan- 
tibus,  sibi  vero  féliciter  (1  )  in  Domino  obdormivit,  feria  Vivante 
Ascensionem  Domini  de  mane,  quod  fuit  IIP  nonas  (2)  maii,  anno 
Domiui  M"  CO*LXXIX°.  Et  sic  assumpsit  euni  Deus  in  officio,  in  quo 
placuerat  ei,  sicut  sepe  audivi  a  plerisque  et  specialiter  a  fralre 
Hugone  de  Rofinaco  de  conventu  Brivensi,  qui  socius  eius  erat, 
et  presens  fuit  (3)  et  vidit  et  audivit.  Sepullus  est  Narbone  in 
claustro  fratruni  ante  hoslium  capituli. 

Octavus  (t)  prior  frater  Johannes  de  Chastanc  Lemovicensis  dyo- 
cesis  successit  fratri  Nicholao  predicto;  prefuit  annis  fere  tribus; 
fuit  autem  absolutusincapilutoprovincialiThoiosano,  anno  Domini 
M«GC°LXXIIII".  Hic  fecil  fieri  tempore  sui  prioratus  campanile 
ecclesie,  anno  Domini  M«CC°LXXIII".  Hic  fuit  vir  mente  devotus, 
fâcie  et  conversacione  ielus,  predicator  admodum  promptus  el 
copiosus,  sedulus  attractor  magnorum  peccalorum  ad  Deum.  Hic 
fuit  prior  Sancli  Emiliani  et  Brive  ;  tandem  in  senectute  bona  et 
canicie  veneranda,  sûbprior  Lemovicensis  existens,  obiit  III*  kls. 
aprilis  (5),  anno  Domini  M'^CO'LXXXP;  sepuUus  est  in  claustro  Le- 
movicensi  ante  ingressum  ecclesie  (6). 

Nonus  prior  frater  Petrus  de  Muiceone  Lemovicensis  dyocesîs 
de  predicacione  Brivensi,  ter  ;  prima  vice,  successit  fratri  Johannî 
de  Chastanc,  ex  lectore  Brivensi  factus  prior  Lemovicensis  ;  confir- 
matus  fuit  in  Briva  per  fratrem  P.  de  Planis  (7),  priorem  Brivensem, 


(\)  Et  quasi.,   féliciter  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(2)  Manène  :  Idua.  5  mai.  Ms.  de  Bord  ;  de  mane,  anno, 

(3)  Et  presens  fuit  manque  dans  Marlène. 

(4)  Ce  qui  suit  jusqu'à  declmus  nonus  prior  n'a  pas  élé  donné  par  Mar- 
lône. 

(5)  30  mars. 

(6)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne^  433. 

(7)  Lecteur  de  théologie  au  couvent  de  Cahors  en  1268  {Acta  capital, 
proolnc,^  Bibt  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  490,  fol.  305  A);  prédicaietir 
|i;énéral  en  1268  (Ihid.,ioL  306  A);  lecteur  de  Ihéoiuj^ie  au  couvent  de 
Limoges  en  1270  {Ibld.^  fol.  309  A);  au  couvent  de  Périgueux  en  I27â 
(76W.,  fol.  312  B),  au  couvent  de  Brive  en  1275  {Ihld.,  fol.  319  A);  prieur 
du  couvent  de  Brive  deux  fois  :  1^  de  1264  à  1366.  a  Primus  prior  in  con- 
veuiu  fratrum  Predicatonim  Brivensi  fuit  fraler  P.  de  Planis,  qui  bis  fuît 
prior;  prima  vice  fuit  inslilulus  in  capilulo  provinciali  Avinionensiin  feslo 
Béate  Marie  celebraio,  anno  Domini  M^CC' LXIiU<^.  Prior  fuit  hac  vice  annis 
duobus  et  amplius,  fuitque  absolutus  in  Briva  a  priore  provinciale  fralre 
Bernardo  Geraldi,  circa  Natale  Domini,  anno  Domini  M<*CC"LXV1°.  Hic  fuil 
mafrnus  promotor  loci,  procuralor  bonorum  et  attractor  amicorum.  —  Primus 
leclor  assignalus  Ibidem  fuit  frater  Johannes  do  Montccuco,  qui  lamen  non 


LRS  FRÊRBS   rRÊCBEURS   DE  LIMOGES.  973 

aano  Domini  M*CC**LXXI1I1°.  Tempore  huius  hac  prima  vice  fait 
coDsumpmatum  dormilorium  ex  parte  ecctesie,  et  fuit  facta  caméra 
lectoris  anle  hoslium  dormitorii,  et  fuerunt  facte  camere  private, 
omnia  fere  de  pecunia  domini  Pelri  (i),  PetragoriceDsis  episcopi 
roemorali  ;  prier  fuit  hac  vice  annis  scx  ;  fuitque  absolulus  in  capi- 
tule provinciali  Narbonensi,  anno  Domini  M"CC*LXXX%  et  ibidem 
lector  Lemovicensis  assignatus  (2).  De  quo  adhuc  infra. 

Decimus  prior  frater  Johannes  de  Nontronio  (3)  Lemovicensis 
dyocesis  successit  fratri  Petro  de  Mulceone,  de  subpriore  ibidem 
prior  effectus;  prior  fait  anno  uno,  fuitque  absoiutus  in  sequenli 
capitule  provinciali  Massilie,  anno  Domini  M'^CC''LXXXP.  Hic  fuit 
bene  reîigiosus  et  bonus;  plenusque  dierum  obiit  Lemovicis, 
IIII*  kls.  maii  (4),  anno  Domini  M°CCoLXXXIP  vel  III». 

Frater  P.  de  Mulceone  prefatus  secunda  vice  successit  fratri 
Johanni  de  Nontronio;  prior  fuit  hac  vice  annis  tribus;  fuitque 
ab.^olutus  in  via  qua  ibat  ad  capitulum  provinciale  Pirpiniani,  anno 
Domini  M'^CCL'^XXXIIIP.  De  quo  adhuc  infra. 

Undecimus  prior  frater  Petrus  Raymundi  Baranho  Tliolosanus 
successit  fratri  Petro  de  Mulceone,  de  priore  Castrensi  factus  prior 
Lemovicensis  circa  Natale  Domini,  anno  Domini  M'»CC°LXXXIIII°. 
Prior  fuit  anno  quasi  dimidio;  fuitque  absolulus  in  sequenti  pro- 
vinciali capitule  Condomiensi,  anno  Domini  M°CC*'LXXXV".  Hic 
fuit  prior  Castrensis,  Sancti  Ëmiliani,  Âlti  villaris,  Podiensis;et 
landem  subprior  Tholosanus  obiit  extra  in  predicatione  laborans, 
.sabbato  sancto  Pasche  (5),  anno  Domini  M<*CCGI''.  Sepultus  est 
Tholose  (6), 

venii  nec  legil,  undc  fraler  P.  de  Plaiiis  predictus  fuit  primus  prior  et  in 
ofticio  primus  lector,  tenens  ÎDsimul  calhedram  et  quadrigam  ».  (B.  Gui, 
Fondât,  cono.  Brioensis,  Ibid.^  fol.  194.  Cf.  D.  Martène,  Ampl.  collect,, 
VI,SOl-506);  âo  de  1273  à  1275.  «  Frater  P.  de  Planis  predictus  secunda 
vice  successit  fratri  Helyc  de  Briva  predicto,  ex  icciore  Lemovicensi  factus 
l>r:or  Brivensis»  confirmatus  ibidem  per  frairem  Stephanum  de  SalaDhac. 
Prier  fait  hac  ?ice  annis  tribus,  fuitque  absolulus  in  capitulo  provinciali 
Pirpînîani,  anno  Domini  M<^C<*LXXVo.  Hic  senex  bonus  et  famosus  in  palria, 
obiit  in  conventu  Brivensi,  sepultus  in  inlroitucapiiuli  in  ipso  liosiio,  anno 
Domini  )1'Cl<>LXXXVI<».  Hic  fuit  promotor  edifiriorum  couventus  induslrius 
et  sollicitus  toto  tempore  quoad  vixil  ».  (B.  Gui,  Ibid.,  fol.  194  B}. 

(1)  Pierre  de  Sainl-.Astier. 

(2)  Douais,  Les  Frères  prêcheurs  en  Gascogne^  457. 

(3)  Nontron  (Dordogne). 

(4)  28  avril. 

(5)  A  la  marge,  d*une  autre  main  :  Prima  die  aprilis.  PAqucs  tomba,  en 
effet,  le  2  avril. 

(H)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  460. 


â74  SOCIÉTÉ   ARCntOLOGlQUE  RT   HISTORIQUE   DU   L1M0USJN. 

Frater  P.  de  Mulccone  prefalus  Icrcia  vice  succcssit  fratri  Petro 
Raymundi  predicto  ;  prier  fuit  anno  une  ;  faitrfue  inde  prier  Lemo- 
.  vicensis  existens  Iranslalus  ad  prioralum  Mentispessulani,  post  pro- 
vinciale capitulum  Brageriaci,circa  feslum  sancti  Michaeli3(l),  anno 
Domiûi  M^CC^LXXXVI**  ;  prefuil  in  conventu  Lemevicensi  in  uni- 
verse  annis  X.  Hic  luit  vir  gratus  Deo  et  heminibus,  famosus  in  tola 
patria,  nebilis  génère,  nebiiior  humilitaiis  virtute,  super  afflictos 
et  misères  gestans  viscera  pietalis.  De  prieralu  vere  Montispessu- 
lani  factus  fuit  inquisiler  Thelesanus  paulo  pest  Natale  Domini, 
anne  Domini  M''CC'*LXXXIX\  De  oflicie  vere  inquisicionis  eleclus 
et  assumptus  est  ad  previncialatura  in  capitule  previnciali  Brivensi, 
in  Âssumpliene  Béate  Marie  Virginis  celebrate,  anne  Demini 
M°CC'»  nonag^  II**;  prierque  provincialis  existens,  in  conventu 
Mentis  albani  pesitus  ad  quera  venerat  visitandum,  migra  vit  ad 
Dominum,  VP  kls.  augusli  (2),  in  feste  béate  Marthe,  anne  Demini 
M^CC*  nenag*V®;ubi prime  iacuittumu]atus;deinde  translatum  fuit 
corpus  eius  ad  cenventum  fralriim  Brivensem,  in  capitule  previn- 
ciali Caturcensi  (3),  anne  Demini  M^CC*»  nenag**  VHP,  ubi  nunc  in 
Démine  in  capitule  requiescit. 

Duedecimus  prier  frater  Pelrus  Cepelli  de  Valeria  (4)  Lemevi- 
censis  dyecesis,  bis;  prima  vice  successit  fratri  Petre  de  Mulceene, 
de  lectere  Caturcensi  prier  Lemovicensis  effeclus  circa  festum 
Omnium  Sanclerum,  anne  Demini  M'^CC/LXXXVP;  prier  fuil  bac 
vice  annis  duebus  ;  fuit  autem  abselutus  per  litteram  prions  pro- 
vincialis, quam  ipsemet  precuravit  pest  provinciale  capitulum  Avi- 
nienense,  anne  Demini  M'T.C*  ecteg*  VHP  (5),  De  qne  adhuc 
infra. 

Tercius  decimus  prier  frater  Yterius  de  Cempuhace  (6)  Lemovi- 
censis dyecesis,  qualer;primavice,  successit  fratri  Petre  Cepelli,  de 
lecteris  cathedra  ibidem  prieris  pesitus  ad  cadrigam;  prefuil  anno 
une;  fuit  autem  abselutus  in  sequenti  previnciali  capitule  Narbo- 
nensi,  anne  Domini  M°CC°  ecteg°  IX°  (7).  De  que  adhuc^ infra. 

Quartus  decimus  prier  frater  Gaufridus  Leperarii  Lemovicensis 

(1)  29  septembre. 

(2)  29juillel. 

(3)  Les  Actes  de  ce  chapitre  sonl  muets  à  ce  sujet. 

(4)  Vallière  (Creuse). 

(5)  Le  ms.  de  Bordeaux  porte  par  erreur  nonag".  —  Douais,  Les  frères 
Prêcheurs  en  Gascogne^  452. 

(6)  Compreignac,  arr.  de  Bellac(Haule-Vienne).  hier  de  Compreignac 
mourut  a  Saiul-Junicn  (Haute-Vienne)  en  1304. 

(7)  Douais,  /6td.,  486.  —  Le  ms.  de  Bordeaux  porte  par  erreur  norKzg^, 


LKS   FRÈRGS   PRÊCHKIIRS   DR   LIMOGKS.  275 

dyoeesissiiccessilfralri  Yterio  de  Compuhaco,  de  subpriore  ibidem 
prior  effeclus;  prefoit  anno  uno  (1)  etmodicum  ampliiis  ;  fuit  autem 
absololus  per  lilleran  vicarii  provincie  fratris Bernardi  de  Trilia(2), 
in  feslo  beali  Andrée paulo  post  provinciale  capitulum  Appamiense, 
anno  Domini  M"CC°  nonag*».  Hic  bonus  vir  fuit;  obiit Lemovicis, 
XIIIP  kls.  iuUi  (3),  anno  Domini  M°CO*  nonag°  V°  vcl  VI»  (4). 

Fraler  Ylerius  de  Compuhaco  prediclus  sccunda  vice  succcssit 
fratri  Gaufrido  prediclo,  ex  lectore  ibidem,  sicut  et  prius,  prior 
effectus;  prefuit  bac  vice  annis  duobus;  fuitque  absolutus  in  capi- 
lulo  provinciali  Brivensi  per  priorem  Biluricensem  fralrem  Pelrum 
de  Massiis,  auctoritate  Magislri  ordinis  ;  et  fuit  ibidem  lector  Bur- 
degalis  assignatus,  anno  Domini  M"CC"  nonag"  Iî°  ;  non  tamen  illuc 
ivil,  set  lector  Lemovicis  remansil. 

Frater  P.  Copclli  predictus  sccunda  vice  succcssit  fratri  Yterio 
de  Compuhaco  ;  prëfuit  bac  vice  annis  duobus;  fuitque  absolutus 
bac  vice  per  lilteram  prioris  provincialis  fratris  Pétri  de  Mulceone, 
quam  ipsemel  secreto  optinuit  et  in  capitulo  Lemovicensi  in  festo 
beale  Marie  Magdalene  legit  ibidem  ad  veniam,  coram  fratribus 
liumiliter  se  proslernens,  post  générale  capitulum  Monlispessulani, 
anno  Domini  M'^CC'*  nonag*»  IIIP.  Hic  fuit  vir  mitis,  bumilis  et  dévo- 
lus, bene  religiosus,  dibctusDeoet  fratribus,  predicalor  bonus.  In 
flore  iuventulis  et  valoris  obiit  Lemovicis,  XV**  kls.  augusli  (5), 
anno  Domini  M»CC*  nonag*  VIII''  ;  quiescit  in  clauslro  iuxta  hos- 
lium  ecclesie  immédiate  ad  levam  intrantibus  in  lumulo  fra- 
irum  XI^*°». 

Quinlus  decimus  prior  frater  Joannes  de  Villanova  Lemovicensis 
dyocesis  (6),  bis;  prima  vice,  succcssit  fratri  Petro  Copelli,  electus 
lu  sequenti  feslo  béate  Marthe;  prefuit  bac  vice  annis  duobus;  fuit- 
que absolutuâ  in  capitulo  provinciali  Narbonensi,  anno  Domini 

M^CO»  nonag*  VI». 
Sexlus  decimus  prior  frater  Durandus  de  Pelrucia  (7)  dyocesis 

Rulhenensis  de   predicacione  conventus  Figiaci  successit   fratri 


(I)  Uno  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(3)  QuETiF  et  ËCHARD,  Scrift.  ord.  Prœd.,  l,  155;  —  Douais,  op, 
cU.,  393. 

(3)  18  juin. 

(4)  En  1289,  il  avait  été  nommé  prieur  du  couvent  de  Fi$çeac;  il  n'accepta 
pas.  B.  Gui,  Fufvd,  cono.  FLgLacensis,  Bibl.  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  490, 
fol.  «74  A. 

(5)  18  juillet. 

(6)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  443. 

(7)  Peyrusse  (Aveyron). 


S76  SOCIÉTR   ARCnéOLOGlQUB   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Jojianni  de  Vilianova;  prefuil  annis  quasi  duobus;  fuit  autem 
absoLutus  in  capilulo  provinciali  Gaturcensi,  ubi  fuit  ipse  diffinitor, 
aano  Domini  M»CC*  nonag°  VHP.  Hic  fuit  prior  Ruthenensis  et 
Narbonensis  et  poslmoduro  fuit  prior  Pirpiaiani  et  Albiensis.  Hic 
obiit  Figiaci  posl  provinciale  capitulum  Monlis  albanl,  in  quo  fuerat 
diffinitor,  anno  Domini  M°CCC°ni^,  in  oclabis  Omnium  Sanclorum, 
VP  ydus  novembris  (1), 

Frater  Johannes  de  Villa  nova  predictus  secunda  vice  successit 
fralri  Durando  ;  prefuil  hac  vice  annis  tribus  ;  fuitque  absolutus  in 
capitulo  provinciali  Agennensi,  anno  Domini  M°CGCI*.  Hic  fuit 
prior  Brivensis  et  prior  et  leclor  pariler  Podiensis.  Hic  obiit  in  senec- 
tute  bona  in  convenlu  Lemovicensi,  III''  kls.  iunii  (2),  in  sabbato, 
anno  Domini  M»CCCV°,  ab  ingressu  vero  ordinisanno  Domini  XLII«. 

Frater  Ylerius  de  Compuhaco  (3)  predictus  tercia  vice  fuit  electus 
feria  VI°  infra  octabas  Assumpsionis  Beale  Marie  (4),  et  confirmalus 
consequenter;  tamen  non  prefuitin  hac  vice,  quia  de  Caturco  ubi 
lector  erat  ad  iugum  venire  noluit  prioratus  ;  landem  eleclio  et  con- 
lirmacio  cassata  fuit,  Tholose,  in  vigilia  Puriiicacionis  Béate  Marie, 
anno  Domini  M^CCCI«  (Sj,  me  présente. 

Decimus  seplimus  prior  frater  Raymundus  Extranei  Lemovicensis 
dyocesis  de  predicatione  Brivensi  successit  fralri  Johanni  de  Villa 
nova  in  regimine,  electus  IlII»  ydus  februarii,  in  festo  Scolaslice 
virginis,  anno  Domini  M"CGCI°;  tempore  prioratus  fuit  facta  una 
pars  claustri,  scilicet  ex  parte  ecclesie,  anno  Domini  M"CCCIII*, 

(1)  Ce  religieux  que  B.  Gui  appelle  ailleurs  Durand  Salpicat,  Durcuidus 
Salpicati  (Fund.  cono.  Ruthenensis^  Bibl.  de  Toulouse,  ms.  490,  fol.  235  B; 
Fund.  cono,  Albiensis.  Ihld.^  fol.  219  B)  fournil  une  longue  ei  belle  car- 
rière :  éludianl  de  logique  au  couveni  de  Figeac  eo  1264  (Act.  cap.  proo. 
Ihid.,  fol.  i99  A);  étudiant  des  arts  au  couvent  de  Figeac  en  1265  (Ibid., 
fol.  300  À);  prédicateur  général  désigné  en  1289,  en  1286  el  en  1300 
[Ihid.,  fol.  335  A,  fol.  343  A,  fol.  380  A)  ;  visiteur  en  i29f,  en  1296,  et  celte 
année  visiteur  spécial  du  couvent  de  Pamiers  {Ibtd.,  fol.  366  Â,  fol.  370  A, 
B);  socius  de  Bernard  de  Jusic  (Douais,  Les  frères  Prêcheurs  \en  Gas- 
cogne, 387),  au  chapitre  général  de  1298  {/6id.,  fol.  .?72  B};  définileur  au 
chapitre  provincial  1*98,  de  1300  et  de  1303  (/6td.,  fol.  37i  B,  fol.  379  A, 

ol.  387  A);  vicaire  «le  la  province  en  1299,  annonce  la  mort  de  frère  Ray- 
mond Hiinaud  provincial  [Ibid.^  fol.  376  A,  B.  fol.  377  A),  prieur  du  cou- 
vent de  Narbonne  (B.  Gui,  Fund.  cono.  Narbonensis^  Ibid»,  fol.  250  A),  du 
couvent  de  Rodez  (B.  Gui,  Fund.  cono,  Ruthenensis^  Ibid,,  fui.  225  B),  du 
couvent  de  Perpignan  (B.  Gui,  Fund,  cono.  Pirpiniani^  Ibid.,  fol.  i58  B)  el 
du  couvent  d*Àlbi  (B.  Gui,  Fund.  cono.  Albiensis,  Ibid.,  fol.  219  B). 

(2)  30  mai. 

(3)  De  Compuhaco  manque  dans  le  ms.  de  Bordeaux. 

(4)  18  août. 

(5)  1302  n.  st. 


LES  FRÈRES   PRÊCHEURS   DE  LIMOGES.  977 

pro  qaa  habiiit  conventus  CXX  libras  de  legalo  domine  Valérie 
Manhana,  matris  fratris  Helie  Manha  (1).  Gonstitit  autem  amplius 
LXXX  librarum.  Prior  fuit  anois  duobus  et  dimidio  quasi  ;  fait 
autem  absolulus  in  capituio  generali  (i)  Tholose,  anno  Domioi 
MCCOIIIIo(3). 

Frater  Ylerius  de  Compuhaco  predictus  quanta  vice  successit 
fratri  Raymundo  Extranei,  confirmatus  Tbolose  in  orastino  sancti 
Johannis  Baptiste,  anno  Domini  M^'CGGIIII*.  Prior  fuit  bac  vice 
meusibus  fere  duobus  tantum.  Hic  prior  Lemovicensis  existens,  obiit 
iDter  priores  Lemovicenses  primicie  dormientium  priorum,  quia 
nulius  ante  ipsum  obiit  ibi  in  officie  prioratus  ;  obiit  autem  in  villa 
Sancti  Juniani,  ubi  precedenti  die  dominica  infra  octabas  Âssump- 
sionis  Béate  Marie  Virginis  in  ecclesia  predicans  de  eadem  :  In 
omnibus  requiem  quesivi,  more  suo  voce  qua  pote  rat  altiori  eius  glo- 
riosam  requiem  extollendo,  vix  Hnito  sermone  finem  predicandi 
pariter  et  loquendi  deinceps  ibidem  coram  populo  fecit  ;  indeque 
productus  ad  domum  prepositi  et  ad  lectum,  diem  claudens  extre- 
mum,  pervenit  ad  requiem  quam  predicaverat  et  optarat,  sequenti 
feria  V»,  scilicet  XIII®  kls.  septembris  (4),  in  festo  beati  Bernard! 
abbatis,  anno  Domini  M^'CCCIIII";  e&demque  die  fuit  corpus  eius 
aliatum  apud  Lemovicas  et  honorifice  in  capitule  tumulatum,  anno 
vero  ab  ingressu  ordinis  XLII',  quem  ingressus  est  anno  Domini 
M**CC«LXIII°,  in  festo  beati  Pétri  marliris  (5),  in  conventu  Lemovi- 
censi,  priore  existente  fratre  Geraldo  de  Sanclo  Valerico,  sub  étalé 
puerili,  circiler  XIII  aut  XIIII  annorum,  dilectus  et  electus  a  Deo 
cum  puritate  et  innocencia  vite,  quam  cum  claritate  famé  illibatein 
ordine  conservavit. 

(I)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  427. 
(t)  GeneraU  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(3)  Ce  religieux  a  fourni  une  longue  carrière.  Eolré  dans  Tordre  en  1965, 
(B.  Goi,  Fund.  cono,  Brioensls,  Bibl.  de  Toulouse,  ms.  490,  fol.  «96  A],  il 
fui  étudiant  des  arts  au  couvent  de  Figeac  en  1966  et  au  couvent  d'Orthez 
en  H67  {Act.  capit.prov.  Ibid,,  fol.  301  A^  foL  303  B);  visiteur  en  1991 
(Ibld,,  fol.  358  B)  et  en  1304  (Ibid.,  fol.  391  A);  porte  au  chapitre  provin- 
cial tenu  à  Béziers  en  1291,  une  demande  de  fondation  pour  Saint-Junien 
(Dordogne)  (Ibld.,  fol.  234)  ;  accepte  au  chapitre  de  Brive  de  i±%i  le  Ueu 
de  Sainl-Pardoux  (Ibid.,  fol.  346  A),  la  province  n'ayant  pas  de  provincial; 
vicaire  de  la  province  en  1299;  membre  du  chapitre  général  de  1993, 
{Ibid.j  fol.  359  A);  prédicateur  général  en  1304  (Ibid,,  foi.  Sdi  B;  prieur 
do  couvent  de  Brive  deux  fois,  de  1291  à  1293,  de  1306  à  1308  (B.  Gui, 
Fund.  conv.  Brioensis,  Ibid.y  fol.  195  A,  fol.  196  A);  prieur  du  couvent  de 
Bergerac  de  130i  à  1306  (B.  Gui,  Fund.  aoM.  Brageriaomiêis^  foK  199  B), 

(4)  90  août. 

(5)  Saint  Pierre  de  Vérone  dont  la  fête  se  célèbre  ic  99  avril. 

T.  XXXIX.  18 


2^8  SOCiAtK  ARCttéOLOGIQUE  Et   HlStORlOUK   DU   LlMOUSlM. 

Christiferam  venerans,  sic  damans  magnifîcavit, 
Quod  verbum  superans  devocio  debililavil  ; 
Rapta  fuit  mens,  liens  siluit  vox,  preco  Marie  ; 
Dum  docuit,  tune  ocubuit  lux  arclia  sophie. 

Decimus  octavus  priorfrater  Stephanus  Laurelli  de  Garaclo  (i) 
Lemovicensis  dyocesis,  bis;  prima  vice,  successit  fralri  Ylerio 
memorato  de  lectore  ibidem  prier  effectus,  sequenli  mense  septera- 
bris,  in  feslo  Sancle  Cruels,  anno  Domini  M°  CCGIIII**  ;  qiio  tempore 
factum  fuit  capitulum  novum  precio  CXL  (2)  librarum,  et  provinciale 
capltulum  celebraturo  in  sequenti  feslo  beale  Marie  Magdaiene,  et 
pars  claustri  ex  parte  capiluli  pro  maiori  parle  fada;  prior  fuit 
anno  quasi  uno  ;  fullque  absolulus,  paulo  posl  provinciale  capitulum 
inibi  celebratum,  per  lilleram  prioris  provincialis  fratris  Bertrandi 
de  Claromonte,  infra  oclabas  beati  Dominici  ;  et  repositus  ibidem 
ad  officium  lectionis,  anno  Domini  W  CCCV»  (3). 

Décimas  (4)  nonus  prior  omnium  minimus  successi  ego  frater 
fiernardus  Guidonis  fratri Stéphane  Laurelli,  in  vigilia  beati  Bartho- 
lomei  apostoli  (8),  Burdegalis  confirmatus,  anno  Domini  M®  CGC  V*. 
In  sequenli  vero  tempore  paschali,  anno  Domini  M*  CCCVI",  in  feslo 
beali  Georgii  marliris  (6),  quod  fuil  in  sabbato,  dominus  Glemens 
Papa  V  cum  oclo  cardinalibus  venit  Lemovicam  et  ad  domum  fra- 
Irum  Predicatorum  declinavit  sine  diverliculo  ad  manendum,  ubi 
concessit  priori  presenti,  agenli  gracias  et  petenli,  quod  confesser 
quem  sibi  eligeret  et  ipse  prior  super  fratres,  et  confessores  quos  ipse 
priorfratribus  deputaret,pro  una  vice  eamdem  et  tantam  haberent  in 
omnibus (7) poteslatem in  foro  penilenliali  absolvendi  et  dispensandi 
ab  omnibus  culpis  et  pénis  citra  purgalorium,  quanlam  ipse  Papa  su- 
per eoshabcbat  (8).  In  craslinovero  inquofuildiesdominica,  littera 
dominicaliB.,  idem  Papa,  visitalo  prius  corpore  Sancli  Marcialis. 
et  benedictione  data  populo  congregato  in  platea  Sancli  Geraldi, 
recessit  apud  Sollempniacum  (9),  versus  Burdegalam  dirigens  gressus 


(<)  Guérel  (Creuse). 

(2)  Ms.  de  Toulouse  :  CXV, 

(3)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne^4S%, 

(4)  Donné  par  Marlène,  col.  468,  469. 

(5)  23  août. 

(6)  93  avril. 

(7)  In  omnibus  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(8)  Quantam,  etc.,  manque  dans  Martène. 
(0;  Solignac  près  Limoges. 


Lies  FRBRB8  PRÂOHBURS   DB  LlliOGBd.  979 

suos(l).  Hoc  eodem  anno  DominiM»  CCCVI«,facta  fuit  libraria  pre- 
cio  C  librarum  et  amplius.  Prior  fui  anno  uno  et  dimidio  ;  fui  autem 
absolutus  per  litteram  Magislri  ordinis,  et  faclus  inquisitor  Tholo- 
sanus  per  litteram  prioris  provincialis  Francie,  receptis  inde  litteris 
utriusque  Lemovicis,  in  festo  beati  Marcelli  Pape  et  martiris  (2J, 
XVIP  kls.  febroarii,  anno  Domini  M«CCCVP  (3). 

Frater  (4)  Stephanus  Laurelli  predictus  secunda  vice  successit 
micbi  fratri  Bernardo  Guidonis,  ultima  die  ianuarii  electus,  in 
medk)  vero  sequentis  mensis  frebroarii  conQrmatus  Tholose  ;  ad 
eumque  pervenit  confirmacio  in  vigilia  vei  in  cathedra  sancti  Petri, 
anno  Domini  M'CGCVI"  (8).  Hoc  in  temporevicecomesLeraovicencis 
qui  diu  impediverat  et  retardaverat,  tandem  permisit  et  concessit  ut 
fratresprepararentetedificarent  (6)  sibi  portalein  locopriusempto 
versus  barrium  de  Manhenia,  ubi  facta  fuit  porta,  anno  Domini 
M*  CGCVII*.  Prior  fuit  bac  vice  anno  uno  et  mensibus  quinque  ; 


(1)  D'après  le  Regestum  ClementU  papae  V  publié  par  les  Bénédictins 
du  Moolcaflsin  (in-fol.,  Homae,  1885-1888),  le  pape  Clément  V  se  trouva  à 
La  Soulerraine  le  15  avril  (a*"  78i)  et  le  16  à  Graudmont  (n*  407).  De 
nombreuses  bulles  furent  expédiées  de  Grandmonl  le  18  (a<^  05S,  953, 
etc.),  le  20  (no*  4342,  1344,  1346,  1359,  etc.),  le  21  (no  423)  et  le  22  avril 
(n<»  787,  788,  79i,  793,  1047).  Sous  la  date  du  23  avril,  trois  bulles  portent 
Datum  Lemooicia  (n<"  1385,  1386,  1416);  par  la  première  {n^  1385),  le  pape 
accordait  cent  jours  d'indulgences  en  faveur  de  Téglise  de  N.  D.  de  La' 
Rochefoucauld,  diocèse  d'Angoulême,  aux  fêtes  de  la  Nativité,  de  TAnnon- 
cialion,  de  la  PuriHcaiion  et  de  1* Assomption  de  la  Sainte- Vierge;  par  la 
seconde  (n""  1386),  il  autorisait  le  doyen  de  cette  église  à  recevoir  un 
autre  bénéfice  ad  suam  sustentoUionem]  par  la  troisième  (n*  1416),  il 
l'autorisait  à  prendre  trois  autres  églises  et  à  retenir  20  livres  tournois  sur 
Téglise  N.  D.  de  La  Rochefoucauld.  Trois  autres  bulles  portant  Datum 
LemooicU  sont  placées  sous  la  date  du  20  avril  :  elles  sont  toutes  les 
trois  en  faveur  de  Tévêque  de  Lhnoges,  Reginal  de  la  Porte,  auquel  le 
pape  accorde  le  pouvoir  de  faire  recevoir  dix  religieux  dans  dix  des 
maisons  régulières  du  diocèse  (no  1336),  de  créer  six  prébendes  au  Dorât 
à  Ahun,  à  Moutier-Rauseille,  à  Saint-Junien  et  à  Saint-Yrieix  (no  1388), 
et  de  faire  réconcilier  par  un  prêtre  un  cimetière  souillé  per  effuaio- 
nem  sangulnis  oel  seminis  (n°  1389).  Deux  bulles  sont  datées  de  Soli- 
gnac,  où  Clément  V  se  trouva  le  24  avril  (no*  1345,  1335).  Le  27,  il  était 
à  Excideuil  (Dordogne)  <n«*  1314,  1318)  et  le  30  à  Férigueux  (n»*  4a,  789, 
790).  Etc.,  etc. 

(2)  Manque  dans  Hartène . 

(3)  16  janvier  1307  (n.  st.) 

(4)  Rien  de  ce  qui  suit  n*a  été  donné  par  Hartène. 
(»)  Le  21  ou  le  22  février  1307  (n.  st.) 

(6)  Ms.  de  Bordeaux  :  préparent  ut  edificarent. 


iÂO  SOCIÉTÉ:   ARCHEOLOGIQUE   ET  HISTORIQUE  OU  LIMOUSIN. 

fuitautem  absolulus  in  capitule  provinciali  Brivensi,  îd  festo  beale 
Marie  Magdalene  celebrato,  anno  Doraini  M°  CGCVIIP. 

Vicfcsimus  prior /rater  Thomas  Narmanni  (1)  de  Ageduno  successit 
fratri  Stéphane  Laurelli,  ceniirmatus  in  priorem  in  principio  mends 
decembris,  Baiene,  anno  Doraini  M^CCCVIII*»  ;  prier  fuit  anno  diini- 
die,  fuitque  absolutus  in  sequenti  capitule  provinciali  io  Petragerat, 
in  feste  beati  Barnabe  celebrato  (2),  anne  Domini  M*  GCCIX*. 

Vicesimus  primus  prier  frater  Guido  Helye  de  Anex.enie  (3)  suc- 
cessit fratri  Thème  Narmanni,  conlirmatus  in  priorem  paulo  post 
festum  sancti  Johannis  Baptiste,  anno  Domini  M**  GCGIX"*  ;  prier  fuit 
annis  duebus,  fuitque  absolutus  in  capitule  provinciali  Burdega- 
lensi,  anno  Domini  M*^  GGGXI^,  in  festo  Assumptionis  Béate  Marie 
Virginis  celebrato  (4). 

Frater  Stephanus  Laurelli  prediclus  tercia  vice  successit  fratri 
Guidoni  Helye,  centirmatus  in  priorem  in  Pruliane  (5),  in  festo 
sancti  Glementis  (6),  anne  Domini  M»*  GCGXP;  prier  fuit  mensibus 
sex  isla  vice,  priorque  existens,  ebiit  in  conventu  Ruthenensi,  ad 
queia  aceesserat  visitandum,  pridie  kls.  maii  (7),  anne  Domini 
M«  CCG»  XIP. 

Vicesimus  secundus  prier  frater  Helyas  de  Planis  Brivensis  succes- 
sit fratri  Stéphane  Laurelli,  ex  prière  sererum  Sancti  Pardulpbi(8) 
factus  prier  Lemovicensis,  cenOrmatus  quarta  die  mensis  iulii, 
anne  Domini  M""  CGG^'XII*';  prier  fuit  anno  une,  fuitque  absolu- 
tus |n  capitule  provinciali  Albiensi  in  festo  Magdalene  celebrato, 
^nno  Demini  M*»  CGC«  XIIP  ^9). 

{\)  Un  autre  frère  appelé  Thomas  Narmanni  Lemooicen^iA  était  étu- 
diant de  théologie  àloulouse,  en  1305.  Act.  cap,  prov,  fîibl.  de  Toulouse, 
ms.  490,  fol.  392  A. 

(2)  M...  celebrato  manque  dans  le  ms.  de  Toulouse. 

(3)  Nexon,  près  Limoges. 

(4)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne^  409. 

(5)  Frouille  (Aude). 

(6)  33  novembre. 

(7)  30  avril. 

(8)  Saint-Pardoux  (Dordognc). 

(9)  Etudiant  de  philosophie  (naturalia)  au  couvent  de  Figeac  en  1i87 
[Act.  cap.  proD,,  Bibl.  de  Toulouse,  ms.  490,  fol.  345  B)  ;  étudiant  de 
théologie  au  couvent  de  Limoges,  en  \2%9(Ibid.,  fol.  350  B);  au  couvent 
de  Toulouse,  en  1291  (IbLd.,  fol.  357  B)  et  en  1992  {Ibid,,  fol  359  B); 
au  couvent  de  Montpellier,  en  1293  {Ibid,,  fol.  363  A);  sous-lecteur  an 
couvent  de  Limoges,  en  1296  (IbLd.,  fol.  369  A);  lecteur  de  théologie  au 
couvent  de  CoUioure,  en  1298  (Ibld,,  fol.  372  B);  visiteur  en  131.'^  {Ibid.y 
foL   418  B);  prédicnieur  général  en  1315  (Bibl.  de  Toulouse,  ms.  488, 


LES   rRÊRBS   PRÊCHEURS   DR   tlIffOGRS.  â8l 

Frater  GuidoHelye  predictus  secandavice  successit  predîcto  fra- 
Iri  Helye,  confirmalas  in  priorem  in  festo  sanctse  Cecilie  (l)Tho- 
lose,  anno  Domini  W  CCC*>XIIP;  prior  fuit  aonîs  paulo  minus 
duobas;  fuitcfue  absolutus  per  lilteram  prioris  provincialis  post 
provinciale  capiiulum  Sancli  EmiUani,  anno  DomiM  M^  CGC*  XV*. 

Fraler  Thomas  Narmanni  predictus  secunda  vice  successit  fratri 
Gnidoni  Helye,  mense  augusti,  conGrmatus  in  priorem,  anno  Do- 
mini M*  CGC»  XV«»  ;  priop  fuit  tribus  anois  ;  fuitque  absolutus  in  cafpi- 
tulo  proviHciaU  Brivensi,  anno  Domini  M'*  GGG*  XVIIP  celebrato. 

Vicesimus  lercius  prior  frater  Dominicus  de  Monte  totrno  Tho- 
losaniis  successit  prediclo  fratri  Thome,  confirmatus  in  priorem 
mense  iulii,  anno  immédiate  prenominato;  fuitqne  absoLutus  in 
capitule  provinciaLi  Gastrensi,  anno  Domini  M"*  GGG  XX*",  in  festo 
apostolorum  Pétri  et  Pauli  (2). 

Frater  Thomas  Narmanni  predictus  tercia  vice  successit  predicto 
fratri  Dominico,  confirmatus  in  priorem  in  Gastris,  anno  quo  supra; 
prior  fuit  hac  vice  VII  annis  ;  fuitque  absolutus  per  litteram  pro- 
vincialis  post  capiiulum  provinciale  Lemovicense,  anno  Domini 
M*  GGG*»  XXVIl*».  Huius  tempore  fuerunt  edifîcate  due  partes 
claustri  ex  parte  refectorii  et  ex  parte  orti. 

Vicesimus  quartus  prior  frater  Petrus  Guidonis  successit  pre- 
diclo fratri  Thome  ex  lectore  Lemovicensi,  confirmatus  in  priorem 
in  Gaturco,  mense iulii,  anno  quo  supra;  prior  fuit  quasi  uno  anno, 
fuitque  absolutus  Tholose  in  capitule  provinciali  celebrato  post 
capitulura  générale,  anno  Domini  M°  GGG^XXVIIIo;  qui  factus  fuit 
primus  lector  canonicis  Sancli  Stephani  Tholose  (3). 

Vicesimus  quintus  frater  Johannes  de  la  Ghiesa  successit  predicto 
fratri Petro,  confirmatus  in  priorem  in  une  iunii,  anno  Dominique 
supra;  prior  fuit  tribus  annis,  fuitque  absolutus  in  capitule  provin- 
ciali Lectorensi,  anno  Domini  M»  GGG^  XXXP  (4). 

Frater  Thomas  Narmanni  predictus  quarta  vice  successit  predicto 
fratri  Johanni,  confirmatus  in  priorem  in  Morlanis,  circa  feslum 
Marie  Magdelene,  anno  Domini  M°  GGG*»  XXXI»  ;  fuit  prior  quatuor 
annis  integris  et  modicum  plus  ;  fuitque  absolutus  in  capitule  pro- 

fol  75  a);  prieur  du  monastère  de  Saint-Pardoux,  deux  fois,  de  t3H,  à 
1312,  et  en  1314.  (B.  Gui,  Fund.  cono,  Sanctl  Pardulphl,  Ihld.,  fol. 
247  B),  prieur  du  couvent  de  Brive,  trois  fois,  de  U09  à  1311,  de  4313 
à  1314,  de  1330  à  4323.  (6.  Gui,  Fand.  cono.  Brioenais.  Ibid,  fol.  196  B). 

(1)  Î2  novembre. 

(i)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  402. 

(3)  I^ouAis,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  453,  454. 

(4)  Voy.  les  Actes  de  ce  chapitre  dans  mes  Frères  Prêcheurs  en  Gas- 
cogne, 210. 


S83  SOCIÉTÉ  ARGDÉOLOGIQUE  ET  BI8T0RIQCB  DU  L1M0USIIC. 

Yinciali  in  Allô  villari  celebrato  (1),  anno  Domini  M'  CGC*  XXXV», 
in  feslo  Assiimptionis  Béate  Virginis. 

Vicesimas  sextas  prior  frater  Guido  de  Morluo  mari,  de  Sancto 
Asterio  (2)  Petragoricensis  dyocesis,  successit  memorato  fratri 
Thome,  confirmatus  post  capitulum  AUi  villaris,  circa  festum 
Omnium  Sanctonim,  anno  Domini  'M""  CGG"»  XXXV». 

(I)  Actea  dans  mes  Frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  931. 

(9)  Lecteur  des  arts  au  couvent  de  Castres  en  1323  {Act.  cap.  proo.^ 
Bibl.  de  Toulouse,  ms.  490,  foi.  442  B);  lecteur  de  théologie  au  couvent 
de  Belvez  en  1331  (ïbid.,  fol.  462  A);  visiteur  en  U^O  {Ibld,,  fol.  493  B); 
prédicateur  général  en  134i  (Ibid.,  fol.  500  À). 


LES   FRÈRES   PRÊCHEURS   OB   LIMOGES.  ^^3 


II 


MEMORIALIA  PRO  GONVENTU  LEMOVICENSI 

(Archives  de  la  Hauie-Garonne,   H.  Dominicains  étrangers»  Limoges). 

HEHORIALIA  PRO  CONVENTU  LEMOVICENSI  FRATRUM  PRAEDIGATORUM  eXCCrpta 

ex  vetustissimo  codice  characteribus  gallicis  manu  exarato  in 
pergameno,  in  guo  habetur  fundalio  hujusce  convenlus  cum  aliis 
ad  ipsum  spectantibus,  quorum  omnium  historia  quantum 
coDjectare  licet,  inchoata  est  circa  annum  Domini  1240  a  fratre 
Gerardo  de  Francheto,  aucta  deinde  a  fratre  Stephano  de  Sala- 
nhaco,  ornata  a  fratre  Bernado  Guidoiïis,  et  ad  haec  usque 
tandem  tempora  deducta  a  variis  incertisque  au[c]lhoribus, 
ab  omnibus  tamen  eidem  codici  mandata,  qui  integer  asservatur 
in  deposifo,  et  in  quo  haec  leguntur. 

I.  —  [fUNDATIO  PRIORIS  ET  POSTERIORIS  CONVENTOS  LEMOVICENSIS] 

Anno  {i  )  Doraini  millesimo  C0'XIX*(2)  circa  quadragesimam,  mis- 
sus  est  fr.  Pelrus  Cellani  (3),  natione  Tholosanus,  de  conventu  Pari- 
siensi,  cum  duobus  fratribus,  quorum  alter  conversus  erat,  apud 
Lemovicam,  ut  ibi,  accepta  domo  in  iis  quae  ad  nostrum  ordinem 
pertinent,  Domino  desérvirent,  si  quidem  beatus  Dominicus  antea 
praedixerat  hoc  esse  suae  voluntatis  ut  apud  Lemovicam  ubi  homi- 
nés  ecclesiae  devolos  audierat,fralres  inproximo  mitterenlur.  Cum 
igitur  dicli  fratres  ad  jam  diclum  locum  deyeuissent,  recepti  sunt 
hilariter  et  dévote  a  venerabili  pâtre  Bernardo  de  Savene,  Lemovi- 
censi  episcopo,  praecipue  vero  a  magislro  Guidone  de  Cluzello, 
Lemovicensi  archidiacono,  qui  et  lune  lemporis  decanus  erat  eccle- 
siae Sancti  Aredii  (4). Hic  autem,cum  esselvirmagaae  au[c]thoritatis 
et  inter  omnes  canonicos  illius  ecclesiae  in  dandis  eleemosinis 
niagis  excellens,  promisitsedaturum  dictis  fratribus  locum  ad  habi- 
tandum.  Sed  cum  adhuc  nondum  se  offerret  opportunitas,  de  volun- 

(I)  A  la  marge:  Adoentus  fratrum  apud  Lemovicam,  anno  Domini  Î2i9. 
(9]  liâO,  n.  st.  Voy.  plus  haut,  p.  264,  note  1. 

(3)  Yoy.  plus  haut,  p.  26i. 

(4)  Saint- Yricix  (Haute-Vienne). 


284  SOCI^É  ARCHiOLOOlQUB  ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

tate  et  consilio  dicti  archidiaconi,  redieraat  fratres  Parisids;  post 
pascha,  repeteruQt  iterutn  Lemovicam,  habito  nuacio  praedicto 
archidiaconi  cum  locutn  ordini  congraum  reperisset. 

Sequenli  autem  anno  posl  Natale  Doraini,  dictus  fr.  Petrus  rediit 
Lemovicam  associatus  ut  supra  dictuia  est,  et  datas  est  locus 
fratribus  ultra  pontem  Sancti  Marlialis  juxta  Vigennam  fluvium, 
emptus  si  quidera  de  proprio  dicti  archidiaconi  a  Petro  Jayo,  bur- 
gensi  castri  Lemovicensis,  qui  eum  vendidil  prelioLXXXl  librarum. 
Joannes  vero  Botis,  burgensis  Lemoviceusis,  cum  non  haberet 
libéras,  ad  ii^istaatiam  oiuUorum  praeroit  operibus.  Hic  autem  posi^ 
modum  muUa  bona  eontulit  fratribus,  inter  quae  iilud  peculiare, 
quod  ad  domum  fralrum  fontem  adduxit  propriis  suBOkptibus  et  in 
claus^FO  convenienter  s^ptavit.  Intérim  vero  fratres  manebaotin 
doma  Sancti  Gerardi(l),  in  una  domo  ad  partem  sibi,  prout  con- 
suetudo  ordiojs  est,  procurantes.  In  instanti  autem  quadragesima, 
videlicet  oetavo  calendas  aprilis,  quando  scilicet  Annuntialio 
DoEoini  in  ecclesia  solemniter  celebratur  (2),  de  voluntale  domini 
epîscopi,  mulio  clero  et  populo  praesentibus,  dictus  archidiaconns 
primarium  posuit  lapidem  in  fundamento  eeclesiae,  fundans  eam  in 
honorem  beatae  et  venerabilis  malris  Domini  nostri  Jesu  Chrisli. 
NuUa  autem  adhuc  domus  aedificabatur  ibi.  Intérim  vero,  scilicel 
in  prima  die  ipsius  quadragesimae  (3),  fr.  Petrus  recepit  ad  ordinem 
unum  fratrem  clericum  nomine  Briccium  (4)  qui  usque  ad  annum 
Domini  millesimum  CC'LXVI  supervixit,  et  in  sequenti  aestate 
unum  conversum  nomine  Martinum  de  Castro  Lemovicensi.  Facla 
autem.  jam  domo  una,  in  eodem  loco  venerunt  fratres  de  domo 
Sancti  Gerardi  ad  locum  novum,  et  tune  primo  inhabitare  coepe- 
runt,  videlicet  in  festo  Nativilatis  Beatae  Mariae  virginis  glorrosae. 

Do.musautem  Lemoviceusis  quinta  domus  ordinisfuitvelquarla(5), 
prima  filia  domus  Parisiensis  ;  secunda  vero  fuit  Remensis. 

Tune  ad  instantiam  fratris  Pétri  prioris  missi  sunt  de  Parisiis 
très  fratres  clerici.  Caput  ecclesiae  jam  constructum  erat,  sed  non- 

(4)  [<a  maison  Saint-Gérald  de  Limoges.  A  la  marge  :  Domus  SuncU 
Gerardi  est  domus  canonicorum  regularium  Sancti  Augustini. 

(2)  Le  jeudi  avant  le  dimanche  de  la  Passion,  Pâques  ayant  dû  tomber 
le  11  avril  en  iîîl. 

(3)  Le  U  février. 

(i)  A  la  marge  :  Fr.  Briccias  de  Peyrat  V««  frater  kujus  conoent. 
Len^v, 

(5)  Le  prieur  du  couvent  de  Limoges  occupait,  au  cbapilre  provincial 
de  la  première  province  de  Provence,  la  precniëre  place  à.  gauche,  le 
prieur  du  couvent  de  Toulouse  occupant  la  première  à  droite.  B.  (rui,  dans 
QuÉTiF  et  ËCHAKD,  Script.  Qrd,  Praed.,  I,  p.  ii. 


LtS   PRÈRK8    PRÂCffEURS  0B   L11I04VS.  2H5 

dum  ibidem  dîvinum  officiam  celebrabatur.  Postmodum  vero  In  dîe 
E^iphaniae  Domini  celebrata  fuit  ibi  missa  a  dieto  archidiacono  pa- 
trono  locî.  Iste  patronus  aedifîeavit  mijorem  partem  dorraitorii  et 
dédit  quosdam  libros,scilicetbreviarium,  missale,  Senecam,  et  ara- 
plins quaedam alia, et crucem argenteam quae habet  duobrachia (1). 
In  ipso  autem  anno,  antemutalionem  fratram,  obiit  foeiiciter  vene- 
rabiîis  et  primus  pater  et  instilutor  nostri  ordinis  Beatns  Doraini- 
cus  (2]  et  ideo  sequenti  anno  in  festo  Pentecostes  celebralartt  fuit 
Parisiis  capilulnm  générale,  ubi  interfuit  fr.  Petpus  Cellani  cum 
supradicto  fr.  Briccio.  Tune  vero,  inspirante  Dei  gratia,  electus  est 
concordîter  et  pacifiée  in  Magistrum  ordinis  foelicis  recordationis 
frater  Jordanis  Theutonicus  natione,  sed  conversationecoelestis(3). 
Hoc  autem  nomen  sortitus  est,  ut  ipse  asserebat,  quia  parentibus 
suis  causa  peregrinationis  in  Terra  Sancta  commoranlibus,  ibidem 
natus,  in  Jordanis  flumine  baplizatus  est.  Per  hune  autem,  cum 
esset  apud  Deumet  homines  admodum  gratiosus,  promovit  Deus 
ordinem  longe  lateque  et  religione  et  numéro  fratrum.  Hiis  autem 
quae  ad  capitulum  pertinebant  in  pace  peractis,  rediit  fr.  Petrus 
prier  apud  Lemovicam,  adJitis  sibi  pluribus  fratribus.  Domus  vero 
Lemovîcensis  fuit  de  provincia  Franciae  usque  ad  aliud  générale 
sequens  capitulum  quod  post  duos  annos  est  iterum  Parisiis  cele- 
bratum  ;  cui  et  interfuit  fr.  Petrus  cum  dicto  fralre  Briccio,  quo 
Ticet  renitente  assignata  fuit  domus  Lemovicensis  provinciae  Pro- 
viiîciae  (4)  commutata  pro  Lugdunensi. 

Consummata  interius  ecclesia,  dedicata  est  solemniter  a  dicto 
palrono  noslro  jam  facto  intérim  episcopo  Lemovicensi.  Cumque 
fratres  dlctum  locum  inbabitarent  a  secundo  anno  mutationis  et 
deinceps,  ipsius  loci  ineplitudinem  et  angustiam,  necnon  grava- 
mina,  mufta  damna  et  pericula  tam  corporalia  quam  spiritualia 
recognoscentes,  quae  ad  praesens  longum  esset  revelare,  et  aequa- 
niniiler  tolerare  non  possent,  in  quinto  anno  a  loci  institutione  de 
communi  consilio  missi  sunt  duo  fratres  ad  dictum  patronum  qui 
adhuc  archidiaconus  erat,  super  hoc  ipsius  voluntatem  et  consilium 


(1)  A  la  marge  :  Non  extat  illa  crux. 

{l)  Saint  Dominique  est  mori  à  Bologne,  le  6  août  1i2l. 

(3)  P.  Dahzas,  Etudes  sur  les  temps  primitifs  de  l'ordre  de  saint  Domi- 
nique. Le  bienheureux  Jourdain  de  Saxe.  3  vol.  in-8^,  Paris,  Oudin,  1873. 
—  QuÉTip  ET  EcBAaD,  Scrlpt.  ord.  Praed,,  1,  93. 

(4)  Première  province  de  Provence.  Le  couvent  de  Limoges  passa  à  la 
province  de  Toulouse  en  1303,  année  où  la  pr»îmière  province  de  Pro« 
vencc  tut  divisée  pour  former  la  province  de  Toulouse  et  la  seconde  de 
Provence. 


^86  SOCIÉTÉ  ARCBéOLOGIQUB  RT  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

habituri  :  ipso  enim  contradicente  vel  impedienle,  non  poteraal  fra- 
tres  perficere  quod  volebant;  erat  enim  magnanimus  et  salis 
potens.  Quo  audito,  dictus  patronus,  non  attendens  nec  ponderans 
verba  fratrum,non  solumassensumpraeberenonvoluit,sed  insuper 
non  modicum  turbatus,  se  contrarium  pro  viribus  fore  asseruit,  si 
hoc  fratres  praesumerent  attentare. 

Tacuerant  ergo  fratres  ad  tempus  licet  gementes,  nullam  super 
hoc  memopiam  in  aperto  facientes.  Ipse  autem  deinceps  durius  se 
habuit  ad  fratres.  Gumque  per  octo  annos  episcopatum  rexisset, 
morluus  est  in  senectute  bona  et  plenus  dierum.  Fuerunt  autem 
anni  vitae  eius,  ut  ipse  aliquando  asseruit,  CXXXX*velamplius(l). 
Huic  successit  dominus  Willelmus  de  Podio,  vir  venerandus  et  ma- 
gnanimus, canonicus  Engoiismensisecclesiae,  aetate  quidem  juvenis 
sed  morum  gravitate  senex  ;  sed  quia  terra  non  fuit  digna  tanlo  ac 
tali  laetari  praesule,  ante  consecrationemlongadetentus  in  infirmi- 
tate  infra  annum  in  pace  quievit. 

Post  hune  dominus  Durandus,  ecclesiae  Lemovicensis  archidiaco- 
nus  et  Sancti  Junianif2)praepositus,  ab  altéra  parte  capituli  electus 
est  in  episcopum.  Sed  cum  causa  super  ipsius  electione  diu  ventila- 
retur  et  mora  ad  se  periculum  traheret,  inspirati  fratres  a  Dec, 
videntes  adesse  temporis  opportunitatem,  ut  super  mutatione  sua, 
auxiliante  Deo,  suum  desiderium  adimplerent,  rogaverunt  per  se 
et  per  amicos  Heliam  de  Banxagiers  et  nepotes  ejus  qui  tune  tempo- 
ris simul  convivebant,  quatenus  terram  quamdam  quam  prope  utram- 
que  villam  habebant  in  parochia  Sancti  Michaelis  de  Pistoria  (3), 
quae  ad  aedilicandum  in  ea  conventum  congrua  videbatur,  vendere 
dignarentur(4).Quodcum  posl  multasprecespraestiturossepromis- 
sissent,  investiverunt  fralrem  Gerardum  de  Franchetto,  tune  tem- 
poris priorem,  pro  se  et  fratribus,  de  dicta  terra,  quam  ab  omni 
quittatam  dominio  et  liberam  pro  sex  mille  soiidis  concesserunt 
fratribus  in  perpetuum  possidendam. 

Instante  prope  diem  lempore  quo  fratres  ex  condicto  pecuniam 
pro  emptione  dicti  loci  numerare  tenebantur,  et  eam  in  manibus 
non  haberent  nec  mutuo  possent  invenire  accipiendam,  angustiali 
admodum  super  hoc,  omnique  humano  auxilio  destituti,  divinam 

(1)  A  la  mar^e  :  Anni  vitae  Guidonis  de  Cluzeîlo,  episcopi  Lemooicensif 
et  primi  conoentus  Praedicatorum  ultra  pontem  fundatoris^  fuerunt 
centum  quadraginta, 

(2)  Saint-Junien -sur-Vienne,  à  quelques  lieues  en  aval  de  Limoges. 

(3)  Saint-Michel-de-Pistorie,  église  de  Limoges  voisine  du  couvent  des 
Frères  prêcheurs. 

(i)  A  la  marge  :  OV-m  erat  duplex  Lemooicaj  una  inferior,  superlor 
altéra,  quae  et  Castrum  Lemoticense  dicebatur. 


LES    FRÈRES  PRÊCHEURS  DR   LIMOGES.  987 

opem  assiduis  et  instantibus  precibus  implorabant.  Deus  autem  qui 
non  deserit  sperantes  in  se,  fratribus  de  die  in  diem  Dei  adjutorium 
praestolantibus  subvenire  quantocius  non  tardavit.  Suscitavit  enim 
illis,  si  sic  loqui  fas  est,  salvatorem  dominum  Aymericum  Palmut 
vîrum  venerabilem,  canonicum  Daurentensis  (1)  ecclesiae,  qui  et 
antea  familiaris  et  benefîcus  ordini  fuerat,  cuique  in  proposito  et 
votis  erat,  expeditis  prius  domesticis  rébus  suis,  in  ordine  nostro 
Deodeservire,  reliquumquevitae  cum  nostris  transigere.  Hicinopi- 
natoLemovicamadveniens,  voeatisincapilulum  fratribus,  quampluri- 
mum  se  gaudere  dixit  de  futura  mutatione  conventus,  quam  ut  a 
Deo  inspiratam  impense  laudavit,  non  pauca  de  primi  loci  ineptitu- 
dine  annectens.  Quibus  omnibus  expositis,  pro  sua  erga  nos  bene- 
volentia  subjunxit  se  audivisse  nondum  nos  habere  patronum  qui 
loci  noviter  empti  pretium  solvat.  «  Igitur,  inquit,  Deus  ipse  Domi- 
nus  noster  Jésus  Christus  sit  patronus  noster  et  beatissima  mater 
cjus,  cigus  missam  tam  dévote  hodie  celebrastis  (erat  quippe  sab- 
batam);  et  ego  servus  ipsorum  persolvam  pro  ipsis  pecuniam  ad 
quam eslis  obiigati  ».  Hiis  auditis,  quantum  exhilarata  in  Domino  fue- 
rint  corda  fratrum  frequens  ad  Deum  gratiarum  actio  satis  proten- 
debat,  nec  facile  dictu  quanta  fuerit  quorumdam  fratrum  prae  gau- 
dio  eCTusio  lacrymarum,  velquot  et  quantae  sanctae  imprecationes 
tam  largo  promissori  non  tantum  animo  conceptae,  verum  etiam  et 
ore  propalatae  ! 

Soluta  est  ergo  predicta  pecuniae  summa  dictis  burgensibus,  qui 
postmodum  loci  pretium  mitigantes  de  recepta  jam  pecunia  reddi- 
derunt  fratribus  LX  libras,  ita  lamen  quod  tenerentur  fralres  satis- 
facere  Bemardo  Papalou  pro  dominio  et  aliis  quae  habere  poterat 
tam  ex  se  quam  ex  parte  mulieris  suae  in  praedicto  loco  empto  a 
fratribus,  quae  omnia  praefatus  Papalou  et  uxor  ejus  Hylaria,  datis 
prias  et  computatis  quingentis  solidis,  per  integrum  et  in  perpe- 
luum  fratribus  concesserunt  et  quittaverunt. 

Emerunt  etiam  fralres  a  Bemardo  Ruphi  XLII  libris  domum 
quamdam  in  ipso  praedio  aediiicatam  juxta  majorem  viam  cui  nunc 
conligua  est  major  porta.  Dominium  vero  hujus  domus  et  cen- 
sus  XII  solidorum  ad  praedictos  burgenses  pertinebat.  Quae  omnia 
transierunt  sub  pretio  quod  ante  habuerant  ;  hoc  enim  in  venditione 
loci  promiserant  non  solum  de  illa  domo,  sed  etiam  de  omni  loco 
qui  ad  ipsos  pertineret,  si  forte  ad  ampliandum  locum  aliquid  eme- 
retur.  In  isto  autem  loco  qui  ab  istis  burgensibus  emptus  est  sunt 
coemeterium,  ecclesia  et  omnis  domus  ;  et  ab  ultima  parte  dormi- 

(1)  Le  Dorai,  arr.  de  Bellac  (Haale-Vicnne).  A  la  marge  :  Daurat  est 
urbê  modlca  distans  8  leucis  a  Lemovica. 


988  SOCIÉTÉ  AftC^OLÔGIQUflT  BT  DlStORtQnB   DU  tlMOUSlK. 

torii  fendît  reèto  tramite  tertus  etclesiam  Bfeatae  Valeriae  (f)  u«qoe 
a!d  mm. 

Interea  cffrn  res  în  ipso  exordio  pablicaretar,  capellanw  Sancti 
ifïiehaeli?  de  Pîsloria  in  cnjus  parochia  locus  si  tus  est,  et  canonici 
âancti  Aredii  (2),  dJclae  eccFesiae  palponi,  opposaerunt  se  fratribos 
aedîfieare  tolentibus,  necnon  et  capellanî  castpi  et  civitafrs  Leraovi- 
cénsi^,  praecipere  awtem  qui  majores  et  mefiores  videbautur,  qui- 
dam occtrlte  ef  quidam  manifeste.  Venerabitis  vero  pater  Fbilippus 
Bitnrriffcnsis  archiepfscopns  (9),  qui  vacante  sedte  Leraovicensi 
mutandt  consilium  et  au[c]lhopitalem  dederat  sa«pe,  Beet  frustra, 
laboravit  ut  inter  fratres  et  dictum  capitulum  pacera  per  oftmia 
componeret.  Tandem  ut  totum  Deo  et  non  hominibus  tribueretur, 
fratres  cnm  dictis  capitule  et  capellano  Sancti  MBchaelis  padfke 
concordances  promiserunt  se  daturos  X  solides  renduales  (Mctae 
eccïesiae  Sancti  IWicbaelisr,  quos  postmodum  dominos  Pelrus  Ber- 
nard! de  Cafoçon  assignavit  eidem  ecclesiae  in  manso  suo,  dicto  de 
VHars,  accipiendos.  losaper  dedermrt  fratres  eidem  capellano, 
semel  ex  pacte,  nnirm  bonum  testimenlum  paratun»  eum  eag»la. 
Promisertmt  quoque  fratres  daturos  se  dîetis  caiK)»icis  doais  cappas 
sericas  quafs  habebant;  sed  eas  cum  vidîssenft  cffiaonici  parvipen- 
dentés  recipere  abniierunt. 

Cum  adhuc  vacante  sede  incoeptum  esset  aedificium  conVBaCas, 
dominus  Praenestinus  aposlolicae  sedis  legatus  in  Prancia,  ad  ins- 
tantiaifi  fratTum  dédit  in  mandats  vener^brK  patrt  archiepiscopo 
Bituricensî,  quatenus  in  eodem  loco  fratrura  coemetericum  benedi- 
ceret;  et  lîcet  a  multis  et  magnis  occulte  et  manifeste  conlradicere- 
tur,  aitis  eonfusis,  aliis  per  Dei  gratiam  et  domini  arehiepiscopi 
industrfam  pacatis,  in  presentia  cleri  et  populi  benediclum  est 
coemetericum  fralrumliberum  et  absque  omni  condilione,  videMcei 
in  die  sancti  Bartholomei  apo^toli  (4),  anno  M"  CC"  XL*»;  riec  oblî- 
vioni  dandum  verbum  dicti  arehiepiscopi.  «  Eccc  »,  inquil,  «  ma- 
gniHw  vobis  coemeterium  benedixi  ;  cavete,  fratres^,  ne  aiicm  ape- 
riatîs  tertam  ejus,  de  quo  non  credatis  quod  ei  Dominuis  aperiat 
cel^m  suam  w  (5).  Tertio  post  die,  allata  est  littera  domina  papae 


(4)  Sainte-Valérie,  près  le  faubourg  du  Pont-Saint-Marlial. 
(i)  A  la  marge  :  Urba  modlcain  Lemoolcinio,  dlstans  8  cLrcUer  JSeucis 
a  Lemocica. 

(3)  Philippe  Berruyer  (Iî36-f260).  A  la  marge  :   Eplscopus  Lemool' 
censés  est  saffraganeus  arehiepiscopi  Bituricensis . 

(4)  24  août. 

(5)  Le  droit  privait  les  héréticfues  de  la  sépulture  ecclésiastique.  Décret 
Grcg.  Lib.V,Til.  Vil,  c.  Viil. 


LB8   F9ÈRI»  PfiÊCHGUftS  DS  LIMOGES.  ^9 

super  confirmalione  eleclionis  domini  Durandi  ;  a  quo  sequcoti  anno 
fundata  est  ecclesia  fralrucn,  scilicet  quarto  nonas  aprilis. 

Ab  ipso  autem  principio  hujus  negotii  quaedam  matronae  casLri 
Lemovicensis  promiserunt  se  daturas  sumtnam  pecuoiae  pro  loco 
ao tique  fratrum,  in  quo  post  eorucn  recessum  propooebaat  sub 
habitu  religionis  Deo  famulari.  Huic  facto,  vacante  seJe,  dominus 
archiepiscopus  et  postmodum  dominus  Durandus  factus  jam  épis- 
icopus  au(c]thontatem  praebuit  et  assensum.  Quod  cam  rescissent, 
burgenses  castri  et  civitatis,  super  hoc  habito  multo  coosilio,  con- 
gregati  in  unum  et  ad  episcopum  accedentes,  coavocatis  fratribus, 
hoc  faclum  in  magnum  damnum  utriusque  villae  in  praesens  et  in 
posterum  posse  contingere  asseverabant,  rogantes  ut  destructis  aedi- 
ficiis  loci  anliqui,  ligna  et  lapides  porlarentur  ad  construendum 
locum  novum;  quod  et  factum  est  de  voluntate  et  assensu  domini 
archiepiscopi  et  domini  episcopi  Lemovicensis  tune  praesentium. 
Destructio  autem  capellae  fere  per  quinquennium  dilata  est,  spe- 
rantibus  semper  fratribus  inventuros  se  quempiam  virum  pium  qui 
empto  loco  ad  prudentum  arbitrium,  capeliam  et  coemeterium 
gratis  acciperet  et  ibi  Deo  deservirel.  Sed  frustratis  spe  t^ua  fra- 
tribus cum  talis  non  se  ofTerret  opportunitas,  de  consilio  et  volun- 
tate domini  Durandi  episcopi  capella  dirula  est  et  locus  venditus, 
extraclis  prius  inde  coi'poribus  fratrum  et  saecularium  ibidem 
quondam  sepultorum,  et  ad  novum  locum  cum  reverenlia  et  honore 
asporlatis,  ibique  conditis. 

Interea  anno  Domini  n°  CC*  XLP,  cum  priores  et  alii  fratres 
provinciae  secundum  consuetudincm  ordinis  ad  celebrandum  pro- 
vinciae  capitulum  apud  Lemovicam  convenissent,  die  quarta  ante 
festum  Nativitatis  BeataeMariae,  videlicetsecundo  nonas  septembris, 
supradictus  dominus  Âymericus  Palmut,  bonae  memoriae  patronus 
ooster,  assumpto  in  inUrmitate  sua  habitu  ordinis,  praesentibus 
quibusdam  fratribus  apud  Dauratum  (1)  migravitad  Dominum;  cum- 
que  Lemovicam  afferretur,  occurrit  ei  obviam  ad  duo  fere  milliaria 
multitudo  fratrum  nostrorum  qui  ad  capitulum  convenerant. 
Multi  quoque  fratres  Minores,  pluresque  alii  viri  et  mulieres 
de  Castro  Lemovicensi  congregali  deduxerunt  corpus  usque  ad 
domum  antiquam  ubi  adhuc  fratres  degebanl.  In  crastinum  vcro 
taonorilice  sepultus  est  in  capitulo  fratrum  novi  loci,  quorum  fuit 
propositum  Iransferendi  ipsum  juxla  ostiuro  ecclesiae  aparteclaus- 
tri,  sicut  ipse  defunclus  cum  adhuc  viveret,  requisivit;  Deo  sic  pro- 
vidente  ut  qui  frater  futurus  ad  habitandum  fratribus  locum  dede- 
rat  et  in  parte  aedificaverat,  tandem  jam  factus  frater  ejusdem  loci 

(i)  A  la  marge  :  Le  Daurat, 


Î90  SOCIÉTR  AltCHÉOLOGIQtlB  RT  IllSTORIQUB  DU  LIMODSIN. 

congruam  sibi  particulam  primus  e  fratribus  tam  béate  quam 
pacifiée  possideret.  Ipse  autem  tam  vivens  quam  moriens  de  bonis 
a  Deo  coUatis  fere  usque  ad  valorem  ducentaram  marcharum  fra- 
tribus largitus  est  et  juxta  cogaomen  suum  palmas  suas  extendit  ad 
pauperes  fratres  quam  largissime. 

lu  instante  feslivitate  Nalivitalis  Beatae  Virginis  Mariae,  fr. 
Ponlius  de  Lesparra  (1),  prior  provincialis,  cum  ministris  altaris 
sacris  indutus  vestibus  reliquias  sauctorum  et  sacra  vasa  portanti- 
bus,  omnesque  fratres  qui  ad  celebrandum  capitulum  conveneranl, 
quin  et  muiti  ex  fratribus  Minoribus  qui  mutuae  charitatis  erga  se 
nostris  adjunxerant  processionaliter  et  dévote  Domino  décantantes, 
praesenleet  comitanteplurima  cleri  et  populi  utriusque  villae  turba, 
a  loco  anliquo  ad  novum  mature  properantes  hiiariter  pervenerunt. 
Festivitatem  banc  et  veluti  translationem  diei  serenitas  decorabat. 
Consummatisque  divinis  laudibus  prout  tanta  solemnitas  exigebat, 
dies  ista  dévote  et  foeliciter  compléta  est.  Capitulo  provinciali  juxta 
ordinis  morem  et  rilum,  divina  opitulante  gratia,  fauste  com- 
pleto  (2),  fratres  sani  et  incolumes  ad  propria  redierunt.  Fuerunt 
autem  fratres  in  primo  loco  viginti  annis;  nec  defuit  nec  superfuit 
una  dies. 

Verum  cum  omne  fere  spatium  dicli  novi  loci  occuparetar  a  coe- 
meterio,  ecclesia,claustro,  dormitoriis,  infirmitorio  etaliis  officinis, 
et  admodum  exiguus  esset  hortus  ad  spaliandum,  varias  terrae  por- 
tiones  a  variis  emerunt  fratres  nostri,  quorum  omnium  nomina  et 
conditiones  contractuum  fusius  esset  hic  ea  scribere  et  parum  utile 
referre.  Hoc  unum  scire  juvat,  adeo  religiosos,  ad  charitatis  oflîcia 
erga  proximum  adeo  promptos  et  faciles,  uno  verbo  in  omni  virlu- 
tum  génère  adeo  praestantes  se  exhibuisse  fratres  nostros,  ut  brcvi 
omnium  animos,  admirationem  et  benevolentiam  sibi  concilia- 
rint.  Quod  vel  ex  eo  coUigere  in  promplu  est,  quod  non  lantum 
privati  homines,  verum  et  magistratus  ex  publica  pecunia  ultro  con- 
tulerint  ad  integram  solutionem  omnium  dictorum  camporum,  ex 
quibus  unilis  modo  constat  totum  conventus  territorium  mûris  cir- 
cumcinctum,  si  aliquam  coemeterii  se[u]  areae  anterioris  ad  eccle- 
siam  et  conventum  partem  excipias,  difTusum  usque  ad  quindecim 
circiter  jugera  gallica.  Antiquum  vero  locum  in  quo  primo  aedi- 
ficata  faerat  domus  fralrum  vendiderunt  fratres  Hugooi  Jauvi  (?), 
burgensi  caslri  Lemovicensis,  dirutis  priusei  solo  aequatis  omnibus 
aedificiis,  asportatisque  lapidibus,  lignis  et  aliis  ad  eonstructionem 
novi  conventus  aptis  et  utilibus. 

(I)  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne^  466. 
(a)  Douais,  Acta  capU,  prooinc,  48. 


LKS    FBÈRES   PnèCHKURS   DE   LItfOGRS.  201 

Àccidit  secundo  mutationis  anno  iitquidam  civis  de  Belloloco  (1), 
cujus  nomen  Âdemarus  d'Âguones,  unus  ex  optimalibas  illius  loci, 
fratribus  noslris  bene  affeclus  eorumque  hospes  beneticus,  uxorem 
habens  B[er]engardam  nomine,  matronam  utique  humilem  et  devo- 
tam  circa  vitae  suae  finem  de  manu  quorumdam  fratrum  (une  prae- 
senlium  babitum  nostri  ordinis  susciperel,  illucque  sepeliretur;  si 
quidem  dum  viverel  et  senili  uterelur  valetudine  ut  in  fratrem  con- 
versum  reciperelur  fuerat  illi  concessum.  Postmodum  illius  uxor 
liberis  orba,  vendilis  quae  ad  ipsam  perlinebant,  Lemovicam  venit 
et  prope  locum  frairum  quibus  spécial!  charitate  et  devotione 
aslringebatur,  émit  ab  Helia  de  Peiteus  (?)  quamdam  domum  coe- 
meterio  propinquam;  inqua  cum  per  quatuor  clrciter  annos  com- 
morata  fuisset,  honestam  in  Domino  vitam  agens,  dédit  fratribus 
praedictam  domum  cum  omni  illius  suppellectili  et  quibusdam  aliis 
secundum  suas  facultates;  asporlalisque  secum  coeteris  rébus  suis, 
ingressa  est  domum  sanctimonalium  sororum  nostri  ordinis  juxta 
castrum  de  Montargis,  sicut  diu  ante  pro  ipsa  exoraverant  fratres 
nostri,  eisque  fuerat  concessum. 

II.  —  De  morte  dohini  Durandi,  episgopi  Lexovigensis. 

Circa  annum  Domini  mill.  CC.  XLIIII,  dominus  Durandus,  Le- 
movicensisepiscopus,  in  rurali  domo  sua,  quae  Insula  (2j  dicitur,una 
leuca  dislans  a  Lemovica,  graviter  aegrotans,  diem  clausit  extre- 
mum,  mense  decembri.  Prier  autem  conventus  nostri,  fr.  scilicet 
Gerardus  Franchettus,  et  plures  alii  ex  fratribus  nostris  adfuerunt 
pr|a]esentes  ab  episcopo  vocali,  ut  ejus  ab  bac  vila  exilum  devolis 
precibus  suis  Domino  commendarent,  qui  e venit  ipsa  nocte  feslivi- 
tatis  beati  Thomae,  martyris  (8).  Cum  vero  hinc  transferretur  ad 
urbem,  occurrerunt  obviam  fralres  nostri  et  fratres  Minores  proces- 
sionaliter,  necnon  et  canonici  calhedralis  ecclesiae  cum  coeteris 
claustralibus  et  clericis  utriusque  villae  ;  populus  quoque  adfuit 
innumerabilis  ;  delalumque  est  corpus  ejus  ad  ecclesiam  cathedra- 
lem,  ubi  per  diem  illam  et  noctem  sequentem  remansit,  celebratis 
de  more  debito  ejus  exsequiis;  die  crastina  allatum  est  ad  domum 
noslrum  ubi  ipse  vivens  et  mentis  compos  sepulturam  delegerat; 
sepultusque  est  cum  reverentia  et  honore  in  capitule  fratrum 
aliquot  ante  diebus  benedicto  et  destinatoin  coemeterium  a  domino 

(1)  A  la  marge  :  Beaulieu  ou  Beloc, 

(2)  Isle,  près  Limoges. 

(3)  29  décembre. 


ftfS  SOCIÉTÉ  ABCgÂOLOâlQUR  ET  HISTORIQUE  DO  LIMOUSIN. 

BiUiriceftsi  archiepiscopo  de  conseosu  domioi  Durandi  episcopi  in 
miirmitate  positi.  Hae  auiem  exequiae  peraclae  suni  anno  Domini 
4245,  quarlo  kaleadas  januarii,  infra  quinquenDium  pontificalus 
domini  Durandi.  Propositum  aulem  fratrum  fuit  transferendi  cor- 
pus domini  Durandi  ad  ecclesiam,  cum,  Domino  volente,  aedificata 
fuisse!.  Quod  quidem  praestitum  est,  illiusque  corpus  e  capitulo 
exlraetum  repositam  fuit  in  medio  chori  ecclesiae  nostrae  aono 
Domini  125S,  ut  inferius  pro  loco  dicetur 


IIL  —  De  BENEFIGIIS  ET  MORTE  DOMINI   GuiLLELMI  DE  MaLOMONTE. 

Nec  excidai  a  memoria  fratrum,  ne  forte,  quod  absit,  Ingrati 
videamur,  quantum  dominus  Guillelmus  de  Malomonle,  quondam 
canonicus  et  archidiaconus  ecclesiae  catiiedralis,  benefîcus  nostri 
ordinis  extilerit  et  amicus,  avunculus  dicti  fratris  Gerardi  de  Fran- 
clietto  secundi  prioris  nostri.  Hic  cum  sanus  et  vivons  fratres  nos- 
tros  dilexisset,  multisque  sibi  obstrinxisset  sibi  beneficiis,  in  tinem 
dilexit  eos  [Joan.,  xiii,i],  in  tautum  ut  apud  nos  de  misericordia  Del 
etfratrum  precibus  confisus  sepulturam  destinaret  corpori  suo  et  ma- 
num  miinilicam  porrigeretadeo  largam  ut  ad  caput  ecclesiae  duabus 
testudinibus  peramplis  contentum  posset  suiBcere  construendum. 
Ipse  vero,  disposita  provide  domo  sua,  susceplisque  dévote  eccle- 
siae sacramentis,  plenus  dierum  bonorumque  operum,  migravit  ad 
Dominum,  sepultusque  est  in  capitule  fratrum,  anno  Domini  1247, 
pridie  idus  aprilis  (1)  ;  et  postea,  anno  Domini  1253,  translalus  fuit 
cum  domino  Aymerico  Palmut,  patrono  nostro,  de  capitulo,  et  in 
eodem  iocello  cum  dicto  patrono  repositus  in  muro  ecclesiae  juxta 
ostium  claustri  ad  ecclesiam,  ut  infra  dicetur  fusius. 


IV.  —  De  REUQuiis  GoLONiA  Lemovicam  adsportatis. 

Anno  Domini  1245,  frater  Geraldus,  tune  lemporis  prier,  usque 
Goloniam  properans  causa  capituli  generalis  ibidem  celebrandl  (2), 
altulit  inde  caput  unius  ex  undecim  millibus  virginibus  quae  ibidem 
martyrio  coronatae  coelum  celeriter  rapuerunl.  Attulit  etiam  de 
Treviri  unum  os  longum  quod  dicitur  fuisse  debrachio  sanctilnno- 
ceaiiidelegione  Thebaeae;  item,  quasdam  reiiquias  sancti  Maurilii  et 

(<)  12  avril. 

(!2)  Bibl.  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  489,  fol,  4&<>;  —  1>.  Uartènk, 
Thésaurus,  IV,  1688. 


LBS    FRàRKS   PR^XBEURS  DF    LIHOGES.  293 

sanclae  EUsabelh,  quaede  eadem  regione  oriunda  propter  eminen- 
tem  sanctitatem  ab  omnibus  honoratur.  Âttulit  quoque  reliquias 
quorucndam  aliorum  sanctorum;  item,  crucem  argenteam  parvulam 
cum  ligQO  Domini.  Sed  haec  modo  non  habentur  in  conventu,  cum 
majori  ex  parte  perierint  in  turbulentis  bellorum  civiliam  tempo- 
ribus. 

V.  —  De  be?iefigiis  Stepuani  Lespaiers  et  aliorum. 

Praetermittendum  non  est,  sed  potius  ad  posteros  per  scripta 
Iransmiltendum  quot  et  quanta  bénéficia  fratribus  praesliterit  Ste- 
phanus  Lespaiers,  burgensis  castri  Lemovicensis.  Gum  fratres  ad 
primum  locum  inhabitandum  devenissent,  antequam  in  ecclesia 
divinum  olïicium  celebraretur  altare  majus  ecclesiae  sumptibus 
propriis  construi  curavit,  et  de  omnibus  illius  ornamentis  tam  in 
calice  quam  in  libris,  indumentis,  cortinis,  mappis,  cruce,  thnri- 
balo,  vilreis  et  hujusmodi  abunde  providit.  Postmodum  eodem  in 
loco  erexit  capellam  testudinatam  admodum  decoram  et  amplam, 
quam  vitreis  et  picturis  et  choro  exornavit,  in  eaque  posuit  imagi- 
nem  aeream  deauralam  Beatae  Virginis  valde  pulchram  etformosam 
et  sumptuosam.  Adeo  enim  se  fratrum  obsequio  mancipaverat,  vir 
aliunde  tum  natalibus  tum  opibus  clarus,  ut  vix  fîeret  opus  aliquod 
in  domo,  ad  quod  ipse  de  suo  non  conferret.  Fieri  quoque  curavit 
in  ecclesia  majori  crucifixum  mediocris  staturae  ita  pulchrum  ut  vix 
simileopus  in  Iota  patria  posset  reperiri,  juxta  quem  sex  aliae  ima- 
gines fuerunt  repositae  diligenlissima  arte  elaboratae.  Postmortem 
etiam  ipsius  habuimus  de  rébus  ejus  pecuniam  satis  magnam,  et 
vitram  et  quedam  aiia  et  lampadam  perpetuam,  quae  omnia  pe- 
riere. 

Sciendum  etiam  est  quod  magister  G.  de  Vidariô  in  primo  anno 
adventus  fratrum  legavit  nobis  Historias  Manducatoris  (1)  correc- 
tas,  quas  manu  sua  ipsemet  scripserat,  et  licct  hoc  forsitan  modi- 
cum  quid  videretur,  in  scriptis  tamen  redigendum  duximus,  et 
quia  primus  dédit,  et  quia  débile  principium  melior  fortuna  subse- 
cula  est,  maxime  vero  ut  fralres  beneficiorum  ejus  memores 
existant  coram  Deo.  Hinc  est  quod  ad  notlliam  omnium  desidera- 
mus  venire  magistrum  Aymericum  d'Arlis,  canonicum  Sancti 
Aredii,  Deo  devotum  et  ordini  nostro  bene  affectum,  circa  dierum 
suorum  Onem  habitum  ordinis  nostri  sumpsisse  sicut  dia  ante  ipsi 
fuerat  concessum,  et  in  coemeterio  noslro  fuisse  sepultum.  Legavit 
autem  fratribus  multos  libros  quos  habebat. 

{\)  Pierre  Gomcstor.  PcUroL  lat,,  cxcviii,  1015. 

T.  xxxix.  19 


toi  SOCIÉTÉ  A RC0Ê0L06IQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSlft. 

Item,  magister  G.  de  Chambonio  dédit  simiiitermultos  libres  fra- 
tribus,  plures  et  meliores  prioribus. 

ltem,dominus  Aymericus  Guerrutde  villa  Sancti  Junîani(l)oriun- 
diis,  quondam  archiepiscopiis  Lugdunensis  (2),  cum  in  nianibus 
domini  papaelnaocentii  apud  Lugdunumilli  quam  regebat  ecclesiae 
resignasset  (3),  rediit  ad  partes  Istas  et  posl  paucos  annos  a  tempore 
resignalionis  suae  vilam  quam  scienlia  et  probis  moribus  ornatam 
in  longum  sati$  protraxerat,  foeliciter  finivit,  sepnltusque  est  in 
domo  Grandimonlensi.  Legavit  aulem  nobis  et  fratribus  Minonbus 
totam  bibliam  glossatam.  Nos  vero  de  consensu  fratrum  Minorum 
habuimus  primam  partem.  Insuper  historias  Manducatoris  et 
librum  valde  pulchrum  et  bonum  cui  titulus:  Ordinarim  episcopo- 
mm  (4).  Item,  habuimus  quinquaginla  libras  et  quaedam  alia. 
Item,  a  pluribus  aliis  personis  fama  et  doctrina  conspicuis  multos 
alios  habuimus  libres,  tum  canonices  et  sacres,  theologicos  et 
historicos. 

VI.—  LiTTERAE  GOMMENDATITIAE  DOMINI  DURANDI,  EPISGOPI  LeMOVICENSIS. 

Durandus  divina  miseratione  Lemovicensis  episcepus  dilecto 
sibi  in  Chrislo  officiali  sue  Lemovicensi,  salutem  cum  dileclione 
sincera.  Cum  domus  religioserum  virorum  fratrum  Praedicaterum 
Lemovicensium  non  sit  de  districtu  castri  Lemovicensis,  imo  pelius 
civitatis,  cum  sit  in  parochia  Sancti  Michaelis  de  Pistoria,  et  nos 
ipsos  alias  tamquam  eos  ques  ampleclimur  in  visceribus  charitalis 
velimus  quantum  cum  Domino  possumus  prosequi  gralia  et  favore, 
qui  et  ralione  libertatis  sibi  per  privilégia  eis  indulta  cencessae  cum 
dmni  tractandi  sint  honestate,  rogamus  vos  atque  requirimus  qua- 
tenus  eccasione  interdicti  lali  a  nobis  in  castrum  Lemovicense  eos 
ad  servandam  hujusmodi  senlentiam  nuUatenus  adstringatis,  sed 
eos  in  ea  esse  libertate  libère  permitlatis  in  qua  erunl  ecclesiae 
civitalis  vel  suburbiorum  ejusdem.  Dalum 

VU.  —  LiTTERAE  DOMINI  ÂYMERICI,  EPISGOPI  LeMOVICENSIS. 

Aymericus  (1)  Dei  gratia  episcepus  Lemovicensis,  ecclesiarum 

(1)  Saint-Junien  (Haute-Vienne). 
(«)  Aymeric  Guerry(  1236-1  i45). 

(3)  Bulle  d'Innocent  IV,  Gall.  christ.,  IV,  Inst.,  30. 

(4)  En  regard,  à  la  nnarge  :  Tune  temporU  pro  magno  et  pretioao  dono 
habebaniur  libri,  non  introducto  adhuc  impresslonU  U8U, 

(5)  AirHcric  de  la  Serre  de  Malemorl  (Iâ4tf-I272). 


LES  PRÈRKS  PRÊCQBURS  DE  I.IUOGBS.  SOd 

rectoribus  Lemovicensis  diocesis  constitutis  ac  vicariis  eorumdem, 
salolem  in  Domino.  Cum  religiosos  viros  fratres  Praedicatores 
Lemovicenses  speciali  amore  tanquam  charissimos  filios  charitatis 
visceribus  amplectamur,  volumus  et  rogamus  quatenus  de  sacris 
reliquiarum  pignoribus  quae  in  ecclesiis  vestris  habenlur,  ad  locum 
suum  Domino  dedicandum  dignemini  liberaliter  impartirî,  prout 
se  obtulerit  opportunilas  et  facultas.  Dalum  Lemovicae,  quarto 
idas  martii,  anno  Domini  mill.  ducentesimo  quinquagesimo  tertio. 


VIII.  —  De  CELEBRATIONE  OFFICII  ECCLESIASTICI  IN  ECCLESIA  NOVA  ET  CON- 
SEGRATIONE  MAIGRIS  ALTARIS  ET  ALIORUM  MINORUM  ALTARIUM. 

Ânno  Domini  millesimo  ducentesimo  quinquagesimo,  sexto  idus 
septembris,  in  festivitale  Nativitatis  beatissimae  Yirginis  Mariae, 
celebraverunt  fratres  oflîcium  ecclesiasticum  pro  prima  vice  in 
ecclesia  nova,  duobus  tantum  testudinibus  arcuatae  molis  peractis 
cum  porlione  templi  ;  primam  missam  solemnem  decantavit  frater 
Gerardus  deFranchelto,  tune  temporis  prior  Massiliensis.  Advene- 
rat  enim  Lemovicam  ad  visitandos  fratres  et  patrem  suum,  qui  de 
slrenuo  milite  in  loco  hoc  factus  fuerat  humiiis  frater.  A  lempore 
autem  mutationisde  loco  veteri  ad  novum  fluxerunt  novem  anni  per 
quos  fratres  ofQcium  divinum  celebraverunt  in  capitulo,  ante  quod 
erat  porticus  in  quo  recipiebatur  populus  ad  divina,  ubi  et  duo 
altaria  construcla  erant  ad  celebrandas  missas  privatas.  Venera- 
bilis  autem  pater  dominus  Philippus,  Bituricensis  archiepiscopus, 
instante  morte  domini  Durandi  episcopi  Lemovicensis,  benedixit 
coemelerium  in  praedictis  porlicu  et  capitulo,  sicut  supra  nolatum 
est.  Ipse  est  qui  etiam  primum  magnum  coemeterium  externum 
benedixerat,  ut  superius  dictum  est. 

Anno  Domini  millesimo  ducentesimo  quinquagesimo  sexto,  in  festo 
sancli  Georgii  (1)  quod  tune  conligit  in  octavis  paschae,  consecratum 
est  allare  majus  ecclesiae  nostrae  a  domino  Philippo,  Bittiricensi 
archiepiscopo,in  honorem  Dei  etvivificae  crucis  et  Beatae  Mariae  et 
omnium  sanctorum.  Repositae  autem  fuerunt  ibi  in  latere  dexlro 
reliquiae  inclusae  in  quodam  parvo  vasculo  aeneo,  videlicet  de 
tribus  partibus  crucis,  item  de  corpore  aposlolorum  Pétri  et  Jacobi, 
et  martyrum  Laurentii  et  Ëleutherii,  Joannis  Baplistae,  Martini 
confessons  Turonensis,  et  Mariae  Magdalenae  et  virginura  de  Colo- 
nia.  Haec  autem  dedicatio  facta  fuit  de  voluntale  et  consensu 
domini  Aymerici,  episcopi  Lemovicensis,  qui  tune  temporis  pro 

(I)  93  avril.  Celle  année,  en  effet,  la  fêle  de  Pâques  tomba  le  16  avril* 


âOG  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET    HISTORIQUR   DU    L1II0US1N. 

quibusdam  negoliis  absens  crat.  Alio  Icmpore  aliam  capellam  infir- 
raariae  solemniter  consecravit  dominus  Aymericus,  episcopus  Lenio- 
vicensis,  in  honorem  Domini  nostri  Jesu  Cbrisli  et  beatorum 
Joannis  Baplistae  et  JoannisËvangelistae,  et  eodem  anno  in  eadein 
capella  sepelivit  domiDumJoannem  deGaslronovo(i)iahabituordi- 
nis  nostri,  canonicum  quondam  ecclesiae  Sancti  Juniani,  qui  dictam 
capellam  propriis  sumptibus  exlruxerat  omnibusque  decoraverat 
ornamentis;  multis  etiam  aliis  iisque  insignibus  benefîciis  cumu- 
lavit  nos  praedictus  dominus,  inter  quae  illud  non  omittendum 
majorem  infirmariam  ab  ipso  propriis  sumptibus  extructam  fuisse, 
ad  quam  footem  deduxit  peraquae  ductum  insignem. 

Post  aliquot  annos  elapsos  nimirum  circa  annum  millesimum  du- 
centesimum  sexagesimum  sextum,  dominus  Petrus a  Sancto  Asterio, 
episcopus  Petragoricensis,  consecravit  alia  allaria  tum  in  ecclesia 
tum  in  sacristia. 

IX.  —  De  dedigatione  ecglesiae  nostrae  Lemovigensis. 

Anno  Domini  millcsimo  ducentesimo  quinquagesimo  tertio,  venit 
P.  F.  Gerardus  de  Fracheto  post  celebralum  provinciale  capitulum 
Lemovicae;  valediclurus  fratribus  congregatis,  dixitsuae  esse  volun- 
tatis  ut  ecclesia  nostra  dedicaretur  in  honorem  beatae  et  gloriosao 
semper  Virginis  Mariae;  et  hoc  polissimum  tribus  de  causis,  quarum 
prima  erat,  quia  hoc  fundalor  noslcr  dominas  Aymericus  Palmut  in 
votis  habere  demonslraveral,  dum  olTerendo  pecuniam  pro  emptione 
soli  ecclesiae  dixcrat  quod  Dominus  noster  et  ejus  sanclissima  mater 
forent  nostri  patroni.  Secunda,  quia  multa  huic  conventui  coUata 
fuerant  bénéficia  in  festivitatibus  Beatae  Mariae.Tertia,  quia  dominus 
Durandus,  episcopus  Lemovicensis,  fundaverat  ecclesiam  ponendo 
primarium  lapidem  in  honorem  Beatae  Mariae.  His  rationibus  moti 
fratres  omnes  consenserunt  tali  dedicationi  in  honorem  Bealac 
Mariae,  uno excepte  qui  erga  bealum  Dominicumpia  motus  affectione 
cupere  se  dixit  ut  in  ejus  honorem  consecraretur.  Sed  nondum 
faustum  hoc  tempus  dedicationisadvenerat.  Fluxerunt  enim  centum 
et  triginta  sex  anni  post  taie  coUoquium,  antequam  lantum  hoc 
nobis  accideret  bonum,  nempe  usque  ad  annum  1389"™,  quo 
dominus  Aymericus  Ghati  (2),  episcopus  Lemovicensis,  rogalus 
saepissime  a  fratribus  nostris  ut  ecclesiam  nostram  consecrare 

(1)  A  la  marge  :  FamLlia  baronurn  de  Castro  nooo,  gallice  Ckàteauneuf, 
est  inter  nobiliores  et  insigniores  LemooicinU. 

(2)  Aimcric  Chathi  de  rAge-au-':hapt  (137J-4390). 


Les   FRÈRES   PRÊCHEURS  DE   LIMOGES.  397 

dignaretur,  annuit,  pollicitusque  est  se  id  praesliturum  die  unde- 
cima  julii,  quae  erat  dominica.  Quo  audito  foelici  nuntio,  conventus 
licet  pauperrimus  et  multis  debilis  obstriclus,  confisus  de  Dei  et 
Deiparaeadjulorio,  cogitare  coepil,  de  necessariis  ad  tantamsolem- 
nilatena,  miltere  praedictum  fratrem  Arnaldum  ad  dominum  Ludo- 
vicum  de  Sancto  Marco,  decanum  ecclesiae  cathedralls,  ut  ipsum 
noroîne  totius  communitalis  rogaret  quatenus  ecclesiae  nostrae 
consecrandae  velletesse  patrinus;  quod  lubenter  acceplavit,  missa 
ad  conventum  salis  ampla  eleemosina.  Deinde  dominus  Aymericus 
episcopus  pro  hac  solemni  dedicatione  convocandos  curavit  per 
priorem  de  Chalar(l)  dominos  abbates  Sancli  Martialis  et  Sancti 
Martini  (2j,  canonicos  eliam  ecclesiae  cathedralis  Sancti  Stephani, 
cum  priore Sancti  Geraldi  et  capellano  Drulliensi(3);  quibus  libentis- 
sime  annuentibus,  dominus  episcopus  feria  sexta  venit  de  Insulae 
Castro  cum  armatis  militibus,  quosconduxeranlfralres  nostri  propter 
Anglos  qui  lune  provinciara  bellis  et  caedibus  infestabant;  mora- 
tusque  est  in  conventu  per  quinque  aut  sex  dies.  Instante  autem 
die  praedefinita  dedicationis  nostrae  ecclesiae,  dominus  episcopus 
in  primis  vesperis  sacris  indutus  vestibus  et  stipatus  praelalis 
ad  hoc  invitatis,  reliquias  omnes  de  ecclesia  extrahens,  illas  ad 
capeliam  Sanctorum  Joannis  Baptistae  et  [Joannis]  evangelistae, 
detulitinde  in  craslino  dici  sequenlis  quae  erat  dominica.  Ad  solis 
ortum  incoepit  solemniter  oflicium  dedicationis  ;  circuivit  enira  ad 
extra  ecclesiam,  ipsamquc  aqua  iuslrali  aspersit;  quo  peracto, 
reliquias  oranes  quas  in  capella  praedicla  collocarat,  in  ecclesiam 
reportavit.  Inde  ad  missam  celebrandam  properavit,  quae  cum 
multo  jubilo  tum  a  cantoribus  Sancti  Slephani  et  [Sancti]  Martia- 
lis, tum  a  noslris  decantata  fuit.  Consecr^ta  est  igitur  ecclesia 
nostra  in  honorem  Domini  nostri  Jesu  Christi,  Beatae  Virginis 
Mariae  et  vivificae  Crucis,  a  domino  Aymerico,  episcopo,  qui  etiam 
suae  erga  nos  benevolentiae  majora  dare  volens  indicia,  dédit 
indulgentiam  quadraginta  dierum  lam  pro  die  consecrationis 
quara  pro  octavis  perpeluis  futuris  lemporibus.  Insuper  dédit 
casulam  pulcherrimam  violacei  colons  ;  allare  etiam  in  honorem 
beati  Dominici  consecravil.  Convenlus  autem  volens  aliquod  grati 
anirai  monimentum  illi  dare,  promisit  se  ejus  anniversarium  quot- 
annis  post  mortem  ejus  facturum;  quod  facere  incoepit  anno 
sequenti,  quo  praedictus  dominus  episcopus  obiit. 

(I)  Le  Chalard  (Haute-Vienne). 

(9)  Saint-Martial  et  Sainl-Martin,  deux  abbayes  de  Limoges. 
(3)  La  Drouille,  prieuré  situé  non  loin  de  Tabbaye  de  Grandmonl  (Haulc- 
Vienne),  au  nord  de  Limoges. 


I 


998  SOCIÉTÉ  ARCQÉOLOGI^IIE   ET    HISTORIQUE   OU   LIMOUSIN. 

X.  —  De  quibusdam  reuquiis  in  ecclesia  nostra  repositis. 

Venerabilis  P.  Bernardus  Guidonis,  episcopus  Lodovensis,  in 
manascripto  ubi  agit  de  sanctis  diocesis  Lemovicensis,  ita  scrtbit  : 
«  Sanclus  Martinus  confessor  qui  fuil  capellanus  Garoli  apud  Sanc- 
tum  Praejectum  prope  Âxiam  (1  )  in  Domino  requiescit,  cujus  sacrum 
eaput  habent  fralres  Praedicatores  Lemovicis,  cujus  partem  quidaoi 
furtiveabstulit;  etcum  apud  quandam  matronam  deposuisset  pro 
00  quod  minus  reverenter  iliud  Iractaret,  terruit  eam  per  somnia  et 
per  visiones  horribiles,  nec  cessavit  sanclus  confessor  quousque 
caput  suum  reportari  fecit.  Hic  quoque  sanctus  vindiclaminhomi- 
nés  castri  Lemovicensis  qui  ecclesiam  ejus  invaserant  et  violave- 
rant,  dum  sacerdos  celebrarel  divina,  in  eodem  die  exercuit;  nam 
inlerfecli  sunt  ab  inimicis  suis  de  Âxia  plus  quam  triginta  (2).  » 

Idem  beatus  Guidonis  ibidem  ait  :  «  Sancta  Justina  et  sancla 
Rufina  virgines  et  martires  apud  Fursacum  secus  flumen  Gartampae 
quiescunt,  quae  apud  Hispalim  civilalera  Hispaniae  martirisatae 
leguntur.  Radulphus  miles  quidam  cachinnando  nomen  Rufinae, 
lepori  eam  assimilavit,  cujus  equum  mox  in  stabulo  ignis  absump- 
sit,  coeleris  illaesis  relictis.  Istarum  virginum  costas  et  bracbia 
habent  fratres  Praedicatores  Lemovicae.  Festum  earum  agilur  die 
XIIII  augusti  (3).  »  Haec  Bernardus  Guidonis.  Quantum  ad  dictas 
reliquias,  capitis  scilicet  sancti  Martini  et  costas  sanctarum  Rutinae 
et  Justinae,  conventus  fuit  sine  dubio  eis  spoliatus  :  non  enim 
dignoscuntur  defectu  schedularum. 

XI.  —  De  aliquibus  capftulis  tam  provingialibus  quam  generalibus 

IN  CONVENTU  LeMOVIGENSI  GELEBRATIS. 

Primum  capitulum  provinciale  fuit  hi<;  in  antiquo  conventu, 
nempe  ultra  fluvium  Vigennae,  celebratum,  in  ipsis,  ut  ita  dicam, 
ordinis  cunabulis.  Secundum  etiam  capitulum  provinciale  fuit  in 
antiquô  conventu  ultra  pontem  etiam  celebratum,  anno  Domini 
millesimo  CCXX|X1IIII,  cui  praefuit  frater  Romaeus  nalione  Cata- 
launus,  quintus  prior  provincialis  (4). 

(4)  Sainl-Priest-sous-Aixe  (Haute- Vienne). 

(2)  JC///°  ydus  AugustL  Ms.  450  de  Toulouse,  fol.  244  *.  Exempl.  original. 

(3)  Anno  Domini  M.CCLXXIIL  Ms.  450  de  Toulouse,  fol.  24î  fr. 

(4)  B.  Gui,  qui  a  fait  la  collection  des  Actes  des  chapitres  provinciaux 
de  la  première  province  de  Provence,  passe  sous  silence  ces  deux  chapitres. 
—  Voy.  sur  Fr.  Romée,  Quélif  et  Echard,  Script,  ordin.  Praedy  I,  «64  ; 
R.  P.  Cormier,  Le  bienheureux  Romée  de  Lioia.  In-H»,  Toulouse,  Privât. 
1884. 


LES  FRÈRES  PRECHEURS   D«   LIMOGES.  $09 

Item,  anno  Domini  millesimo  GCXLl%  in  Nativilate  Beatae  Virgi- 
nis  Mariae  celebratum  fuit  aliud  capitulum  provinciale  in  hoc  con- 
venta  sub  P.  fratre  Ponlio  de  Lesparra  Burdegalensi,  sexto  priore 
provinciali  ;  et  tune  facta  est  mulatio  fratrum  de  antiquo  in  novum 
conventum. 

Anno  Domini  millesimo  G(iLIII,  in  festo  Nativilatis  Beatae  Mariae 
Virginis,  (ransaclis  jam  duodecim  annis  a  mutatione  fratrum  de 
loco  antiquo  ad  novum,  celebratum  est  iterum  apud  Lemovicam 
provinciale  capitulum  sub  ven.  P.  fratre  Gerardo  de  Frachelo 
Lemovicensi  et  priore  provinciali  octavo.  Paucis  aulem  diebus  ante 
capitulum  translata  sunt  corpora  :  1®  domini  Durandi,  episcopi 
Lemovicensis,  de  capitulo  ad  médium  chori  ecclesiae;  2^  domini 
Aymerici  Palmut  canonici,  patroni  nostri,  et  Guillelmi  de  Malmonte, 
eliam  canonici  Sancti  Stephani,  ad  sepulcrum  sibi  paratum  in  muro 
ecclesiae  juxta  ostium  quod  vadit  ad  claustrum  cum  his  versibus 
leonicis  : 

Noslri  patroDi  sunt  hic  quorum  Deus  ossa 
Sic  volait  poni  sub  eadem  condila  fossa. 
Nosier  ab  hoc  emilur  locus,  allerius  fabricatur 
Nummis  ecclesia.  Reddat  sibi  virgo  Maria. 

Et  consequenter  in  lapide  sunt  haec  verba. 

Anno  Domini  MCGGXLI®,pridie  nonas  septembris  (1),  obiitdomi- 
nus  Aymericus  Palmut,  canonicus  Dauratensis,  et  hujus  loci  emptor. 

Anno  Domini  MGGXLIIP,  pridie  nonas  aprilis  (2),  obiit  dominus 
Guileimus  de  Malmont,  quondam  archidiaconus  Lemovicensis. 
Quorum  animae  requiescant  in  pace.  Amen. 

Juxta  sepulcrum  patroni  nostri  est  aliud  vili  coopertum  lapide. 
Magnum  autem  ihesaurum  continet,  nempe  corpora  duodecim  fra- 
trum qui  in  antiquo  conventu  ultra  Yigennae  pontem  obierant,  et  in 
unum  collecta  in  praedicto  tumulo  fuere  reposita  cum  hoc  epitaphio  : 

Qaamvis  exiguo  lumulo  fratres  duodeni 
SuDt  io  conliguo,  fama  virtuleque  pleni. 

XU.   —  SeQUITUR  SERIES  CAPITULORUM  LeMOVIGAE  CELEBRATORUM. 

Anno  Domini  MCGLXXVP,  celebratum  fuit  capitulum  provin- 
ciale in  isto  conventu  in  Nativitalae  Beatae  Virginis  Mariae  ;  et  tune 

(1)  4  septembre. 

(2)  i  avril. 


300  SOCIRTR  ARG8É0L06IQUB  ST   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIIf. 

fait  eleetus  in  proYiocialem  frater  Bernard  us  Gerardi  de  Monte 
albano.  Hic  fait  undecimus  provincialis  (1). 

Uem,annoMCGGV«,  celebralum  fuil  Lemovicae  capilulum  pro- 
Yinciale,  sicut  et  aliud  eliam,  anno  M  GGC  XXXIV**,  sub  ven. 
Hugone  Campano,  Magislro  ordinis;  sub  quo  eliam  anno,  capilu- 
lum générale  Lfemovicis  fuit  celebratum.  In  quo  inter  alia  fuit  ordi- 
natum  ut  post  quamlibet  horam  divini  officii,  cum  non  conlinuatur 
hora  vel  missa,  dicto  Fidelium  animae,  etc.,  dicatur  flexis  genibns 
antiphona  Beatae  Virginis  Mariae,  singularis  ordinis  et  hujus  con- 
rentus  patronae,  ut  habetur  in  glossa  Constitutionum,  cap.  deOfficio 
ecclesiœ,  text.  *»  (2). 

Aliud  etiam  capilulum  générale  fuit  hic  celebratum  anno  Domini 
M.  CGCIC';  sedquia  frater  Joannes  de  Podionucis  factus  fuerat 
generalis  tempore  schismatis  inler  Bonifacium  O"""*  el  Benedictum 
iâ*>°^,  ideo  merito  inter  générales  ordinis  non  computatur,  sicnt 
nec  capitulorum  generalium  Âcla  sub  ipso  celebrata  vim  aliquam 
in  ordine  habere  dignoscuntur. 


XIIL  —  De  sepulturis  insignïbus  conventus  Lemovicensis. 
1.  [De  fratre  Petro  de  Sancto  Asterio,  episcopo  Petragoricensi\. 

Multae  sunt  insignes  sepullurae  in  hoc  convenlu  personarum 
ulriusquesexus^jquae  lum  pietateet  eruditione,  tumecclesiaslicadig- 
nilate,  tum  nobililate  claruerunt.  Horum  praeclarum  agmen  ducel 
illustrissimus  simul  et  piissimus  Pelrus  de  Sancto  Âsterio  qui,  reUcto 
episcopatu  Petragoricensi,  factus  est  religiosus  hujus  conventus;  in 
cujus  memoriam  appensa  est  labella  in  choro  continens  haec 
verba  : 

Frater  Pelrus  de  Sancto  Asterio,  episcopus  Pelra- 
goricensis,  summa  scientia  et  eloquentia  praeditus, 
magnus  ac  solemnis  vir  utique  plus  ac  dévolus,  filius 
domini  de  Insula  prope  Petragoras,  venit  ad  hune 
conventum  fralrum  Praedicatorum  Lemovicensium 
prima  die  maii  anni  M  CG  LXVP  ;  et  in  habitu  epis- 

(1)  Les  Jetés  des  chapitres  provinciaux  de  1241,  de  1353  et  de  ii76 
tenus  à  Limoges,  paratlront  dans  un  volume  sous  presse. 

(2)  Le  chapilre  provincial  se  lint  encore  à  Limoges  en  1327  el  en  1334. 
lUbl.  de  la  ville  de  Toulouse,  ms.  490.  Cf.  fol  392,  452,  471  B.  Douais,  les 
frères  Prêcheurs  en  Gascogne»  356.  Voy.  les  Actes  du  chap.  général  de 
1334,  dans  ms.  489,  fol  165,  de  la  Bibl.  de  Toulouse. 


LFS   FRÈRES   PRÉCHRURS   DB   L1M0GBS.  301 

copali  maDsit  Ibidem  per  annum.  Tandem  maxima  euro 
diflîcullateprecibusimporlunis  cessionem  sui  episco- 
patus  obtinuit  a  domino  Clémente  4",  dignitate  epis- 
copali  in  omnibus  et  per  omnia  reservala,  quam 
cessionem  non  potuerat  oblinere  a  tribus  summis 
ponlificibus  Gregorio  nono,  Innocenlio  4°  et  Alexan- 
dro  4".  Post  paucos  dies  a  dicta  cessione  oblenta, 
habitum  ordinis  reverenter  accepit,  et  honorabiliter 
in  eo  Deo  et  ordini  militavit  annis  oclo  et  mensibus 
quatuor  cumdimidio.  Fecit  multa  bona  conventui  tam 
in  ornaraentis  ecclesiae  quam  in  libris  et  aedificiis; 
fecitque  aedificare  domum  de  Balaleon.  Obiit  autem 
pridie  idus  julii,  anno  Domini  M  CC  LXXV°  ;  et  est 
sepuUus  in  ecclesia  hujus  conventus  in  medio  chori. 

Mémorandum  quod  anno  Domini  millesimo  sexcentesimo  quin- 
quagesimo,  R.  P.  F.  Petro  Ranquet  inquisitore  Carcassonensi  (1), 
vicario  generali  congregationis  Sancti  Ludovici,  .visitante  hune 
conventum  Lemovicensem,  apertus  fuit,  ipso  et  fratribus  praesen- 
libus,  loeus  in  medio  chori  ubi  dicebatur  sepultus  ven.  f rater 
Petrus  de  Sancto  Asterio;  revolutisque  lapidibus,  repertum  fuit 
corpus  beati  episcopi  nondum  omnino  consumptum,  licel  in  calce 
sepuUum,  cum  casula,  mitra,  baculo  et  annulo  pastorali,  et  aliis 
pontificalibus  ornamentis,  quae  erarit  supralanea  indumenta  ordi- 
nis; quod  mirum  sine  dubio  videri  débet  post  trecentos  viginli  et 
très  annos.  Unde  fratres  acceperunt  sibi  partes  vestimentorum  pro 
reliquiis,  alias  vero  partes  reliquiarum  reposuerunt  in  sacristia 
in  arca  depositi.  Plura  de  eodemven.fr.  Pelro  rcperiri  possenl 
in  ecclesia  eathedrali  Petragoricensi  suae  quondam  sedis,  ubi  dici- 
tur  haberi  pro  sancto. 

2.  De  illustrissimo  ac  venerabili  fr.  Bemardo  Guidonis, 

Non  longe  a  turaulo  fr.  Pétri  de  Sancto  Asterio,  nempe  ad  sinis- 
trum  latus  allaris  majoris  videtur  sepulcrum  ven.  fratris  Bernardi 
Guîdonis,  filii  hujus  conventus  Lemovicensis  et  episcopi  Lodoven- 
sis,  qui  ex  nobili  prosapia  in  solo  Lemovieensi  ortus  juxta  sui 
nominis  proprietatem  tanquam  nardus  odorifera  vitae  pariter  sanc- 
tilate  ac  doctrina  odorem  suavissimum  Deo  et  hominibus  sparsit. 
Fuit  siquidem  vir  magni  consilii,  magnae  experientiae  et  magnae 
probitatis  et  religionis,  denique  omnium  virtutum  jubar  splendidis- 

(I)  A  la  marge,  d'une  autre  niîiin  :  Anno  1650  prooincia  nostra  reoe- 
batur  per  prooincialem. 


CiOî  SOCléTR  ARCnËOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

simutn.  Qui  ex  lectore  theologiae  in  conventu  Âlbiensi  factus  esl 
prior  in  multis  conventibus,  nempe  Âlbiensi,  Castrensi,  Carcas- 
sonensi  et  Lemovicensi  ;  deinde  inqiiisitoris  Tholosani  et  procura- 
loris  ordinis  in  Curia  Romana  officio  sublimatus  fuit  ;  quo  tempore 
a  Joatine  2*»  papa  missus  est  legatus  in  Italiam,  Galliam  et  Bel- 
gium  ad  odia  extinguenda  et  pacem  inler  principes  et  civitates 
promovendam.  Cumque  praedictis  officiis  et  legalionibus  digne  et 
laudabiliter  fuuctus  esset,  ab  eodem  Joanne  XX!!""  pontifice  primo 
ad  episcopatum  Tudensem  in  regno  Gallaeciae,  deinde  ad  Lodoven- 
sem  in  provincia  Narbonensi  evectus  est.  t'uit  vir  in  verbo  et  scriplo 
malta  facundia  praeditus  et  in  his  quae  ad  religionem  propagandam 
et  labis  haereticae  exierminium  pertinent  apprime  eruditus.  Plures 
libros  composait,  unum  de  Aclis  capitulorum  generalium  jussu 
ven.  fr.  Aymerici,  Magistri  ordinis,  cum  tractatu  de  votis  et  de 
quatuor  quibus  Deus  ordinem  fratrum  Praedicatorum  insignivit,  in 
quo  cuncti  fratres  nostri  nosse  polerunt  ordinis  praedicti  primordia 
et  progressus;  librum  etiaoi  de  Praxi  offlcii  Inquisilionis  (1),  Chro- 
nologiam  insuper  de  Romanis  Ponlificibus,  Imperatoribusac  Regibus 
Galliae  ab  incarnatione  Domini  usquead  sua  tempora;  Vitas  quoque 
sanctorum  ad  instantiara  ven.  fratris  Berengarii,  Magistri  ordinis, 
compilavit  et  novis  lucubrationibus  auxit.  Licet  autem  talis  ac  tan- 
ins esset,  attamen  ita  humilis  ac  erga  ordinem  bene  affectus  fuit 
ut  Avenione  existens  episcopus,  cum  multa  devotione  ac  humilitate 
renovavil  professionem  suam  coram  ven.  fratre  Barnaba,  Magistro 
ordinis;  posilisque  manibus  suis  inler  manus  praedicti  Magistri  ordi- 
nis, dixerit  distincte  haec  verba  :  «  Ego  frater  Bernardus  Guidonis 
episcopus  Lodovensis  facio  professionem», etc.  Tanlae  porro  puri- 
tatis  ac  innocenliae  erat,  ut  frater  Pelrus  Sicardi  qui  ejus  confes- 
siones  per  viginti  fere  annos  audiverat,  asseret  se  paratum  jurare 
quod  nunquam  deprehendisset  in  ejus  confessione  culpam  letha- 
lem.  Miraculis  vivus  et  mortuus  claruit.  Frater  enim  Arnaldus 
Borgueti,  inquisitor  Barcinonensis  et  provincialis  Aragoniae,  asse- 
rebat  se  a  ven.  P.  Bernardo  a  gravi  inflrmitate  Avenione  fuisse 
liberatum.Cum  enim  de  ejus  vitae  sanctitate  et  meritis  conGsus  sup- 
plicasset  ut  ei  in  mortis  periculo  subvenirel,  slatim  venerabiUs 
episcopus  ut  vidit  fldem  illius  :  «  In  nomine  »,  inquit,  «  Dei  prae- 
cipio  somno  ut  redeal  ad  oculos  inquisitoris  Barcinonensis,  et  quod 
discedat  ab  eo  omnis  aegritudo  inquietans  ».  Et  ecce  ad  verbum  viri 
Dei  repente  ab  omni  inlirmitate  praedictus  Inquisitor  liberalus  est. 
Hujus  miraculirumor  in  conventu  Avenionensi  praebuit  occasionem 
alteri  prodigio.  Nam  frater  Guilelmus  de  Gardaga,  qui  eodem  loco 

(\)  ln-4%  Paris,  Picard,  4886. 


LKS   FRÈRRS   PRÊCHEORS   DB   LIMOGES.  303 

et  tempore  dissenteriae  morbo  laborabat,  audita  miraculosa  sana- 
tione  inquisitoris  Barcinoncnsis,  petiit  etiam  a  venerabili  episcopo 
Bernardo  ipsum  visitante,  ut  ipsam  etiam  sanare  dignaretur.  Quod 
cam  venerabilis  GuidoDis  ob  hamilitatem  facere  recusaret,  attamen 
motus  continuis  iafirmi  precibus,  imperavit  morbo  ut  a  tali  die, 
nempe  festo  beati  Dominici,  patris  uoslri,  non  eum  amplius  grava- 
ret;  quod  et  faclum  est,  sicut  solitus  eral  referre  praedictus  frater 
de  Gardaga.  Haec  duo  signa  adeo  fucre  notoria  in  conventu  Ave- 
nionensi  ut  frater  Petrus  Bernardi,  tune  baccalaureus  Sacri  Palatii 
et  postea  Bayonensis  episcopus,  jocose  diceret,  praesente  venera- 
bili Guidonis,  quod  frustra  ordo  fratrum  Praedicatorum  laborabat 
pro  canonizatione  sanctorum  mortuorum  cum  posset  canonizare 
sanctum  vivum.  Hic  tandem  venerabilis  episcopus  pontiGcatus 
sui  anno  octavo,  post  multa  virtutum  opéra  tum  in  ordine  tum 
in  episcopatu  praeclare  gesta,  in  morbum  incidit;  susceptisque 
dévote  ecclesiae  sacramentis  et  plenaria  indulgenlia  peccatorum  a 
Joanne  XXIP  sibi  concessa,  die  XXX»  decembris  foeliciter  migra- 
vit  ad  Dominum  in  castro  de  Laurosio  diocesis  Lodovensis,  anno 
Domini  M.  GC.  XXXI®,  aetatis  vero  suae  anno  LXXI*».  Corpus  ejus 
iode  Lemovicas  delatum  in  ecclesia  conventus  fratrum  Praedicato- 
rum condilum  est,  sicut  ipse  ordinaverat. 

Notandum  quod  post  obilum  ipsius,  cum  frater  Thomas  Narman- 
ni,  prior  conventus  Lemovicensis,  in  ecclesia  post  matutinas  pre* 
ces  oraret,  vidit  subito  ingentem  ac  splendidam  luccm  quasi  de 
sede  priorali  usque  ad  sanctuarium  procedentem;  quod  cum  admi- 
raretur  ignorans  quid  porlenderet,  tandem  facto  mane  venit  nuntius 
asserens  episcopum  Lodovensem  e  vivis  migrasse,  ejusque  corpus 
in  conventum  Lemovicensem  deferri  tumulandum.  Tune  intellexit 
praefatus  prior  lucem  illam  splendidam  significare  venerabilem 
episcopum,  qui  vita  et  doctrina  ecclesiam  et  ordinem  illustrarat,  et 
quod  non  sine  causa  lux  illa  quam  viderat  a  sede  priorali  versus 
sanctuarium  procedebat,  quia  ipse  aliqnando  prior  exliterat;  nunc 
vero  in  sanctuario  corpus  ejus  bealam  resurrectionem  expectare 
debebat.  Plura  de  hoc  venerabili  episcopo  reforunt  dominus  Plan- 
tavitius,  episcopus  Lodovensis,  et  loan.  Bandellus,  oflicialis  Lemo- 
vicensis (1). 

3.  De  illustri  ac  venerabili  fr,  Bernardo  Bruni, 
In  dextro  latere  sanctuarii  videtur  efllgies  episcopi  insculpta  in 

(1)  Voy.  renoncé  des  uombrcux  travaux  consacrés  k  B.  Gui  dans  mon 
opuscule  :  Un  nouoeau  manuscrit  de  B,  Gui^  p.  1 ,  note  \ .  —  Sur  le  cha- 
noine Jean  BandM  morl  en  1639,  voy.  A.  Leroux,  Etude  criiique  sur  les 
Annaies  françaises  de  Limoges  dans  les  Annales  du  Midi,  4890,  p.  16. 


304  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE  kT   HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

lapide.  Hic  fuit  illustrissimus  Bernardus  Brani,  filius  hujus  conven- 
tus  Lemovicensis,  qui  ob  praeclares  dotes  eveclus  est  ad  episcopa- 
tum  Conseranensem  (1),  quique  moriens  in  ter  fratres  voluit  sepe- 
liri;  quibus  reliquit  Graduale  et  plures  alios  libres.  Obiit  XIII  kal. 
decembris  (2)  circa  annum  M  CGGG. 

4.  De  venerabili  fratre  Martiali  BoyoL 

In  inferiori  parte  ecclesiae  videlur  effigies  religiosi  ordinis  cum 
bac  inscriptione  : 

HIC  JACET  YEN.  FRATER  MARTIALIS  BOYOL,  OLIM  CANONICUS  ET  OFFl- 
CIALIS  LEMOVICENSIS,  QUI  TANDEM  IN  HABITC  ET  PROFESSIONE  FRATRUM 
PRAEDICATORUM  ANNIS  PLENUS,  OBIIT  ANNO  DOMINI  M.  GCC.  LXXXXVIl'',  DIE 
XIX»   JULU. 

Notandum  quod  cum  ejus  tumulum  fratres  nostri  vellenl  aperire, 
anno  Domini  M.  DG.  XXIIP,  ad  sepeliendum  dorainum  Petrum 
Boyol  ejusdem  familiae,  necnon  ejusdem  ecclesiae  caflonicum  et 
offlcialetn,  repererunt  praediclum  ven.  fratrem  Martialem  tolum 
fereincorruptum,  vestibus  ordinis  indutum,  suavissimumqueodorem 
exhalantem  post  centuni  et  viginti  sex  annos  ab  inhumatione 
sua.  Quapropter  in  alio  tumulo  corpus  domini  Pétri  Boyol  fuit 
reposilum.  Gernitur  iste  venerabilis  frater  Marlialis  in  habilu  or- 
dinis in  lamina  aenea,  oblatus  Beatae  Yirgini  puerum  Jesum  in 
ulnis  tenenti  per  B.  Stephanum,  cum  hoc  epitaphio  : 

lUis  sub  saxis  recubat  lam  nobilc  corpus 

Martialis  Boyol  qui  modo  summa  lenet. 
Canonicus  fuit  officialis  Lemovicensis 

Et  burgi  pasior,  qui  bene  fovil  oves. 

Orbis  tanta  bona  dimisit;  Praedicalorum 

Tandem  vila  pia  jam  sibi  grala  fuit. 
Mille  quingentis  hinc  demptis  ac  tribus  annis, 

Lace  petit  clara  superos  julii  décima  nona. 

Quaeso,  Jesu  bone,  cum  superis  sit  in  acthcre  tecnm, 

Deprecor  ut  redeat  spiritus  ad  Dominum.  Amen. 

5.  De  tumulo  domini  Dupeirat  canonici 

Sepullus  est  in  claustro  convenlus  nostri  Lemovicensis  dominus 
Petrus  Dupieirat,  canonicus  ecclesiae  cathedralis  Sancli  Stephani, 

(1)  Il  ne  figure  pas  sur  la  liste  des  évêqnes  de  Gouserans. 
(1)  18  novembre. 


LES    FRÈRES   PRÊCHEURS   DR  LIMOGES.  305 

qui  fuit  insignis  benefaclor  conventus,  cujus  epitaphium  in  lamina 
aenea  exaratum  sic  legitur  : 

De  Peiraio  corpus  tumulo  jacel  isto  : 

Spirilus  in  coelo  sit  propitio  sibi  Christo. 
Dudom  canonicus  fuit  ecclesiac  cathedralis, 

Nobis  munificus  et  amicus  specialis.  , 

Sanctum  Dominicum  sibi  sentiat  auxiliari, 
Ut  merealur  eo  duce  sanctis  associari. 
Anno  Domini  H.  CC.  L1. 

6.  De  epitaphio  Elisabeth  de  Ventodorio. 

In  muro  portae  claustri  cernitur  in  lamina  aenea  episcopus  indu- 
tus  ponlificalibus  et  oflicium  sepulturae  faciens  pro  femina,  fratri- 
bus  noslris  stipatus.  Haec  fuit  nobilis  domina  Elisabeth  de  Vento- 
dorio (1),  quae  obiit  anno  Domini  M.  CC.  LXXVin<»,  nonis  octobris  ; 
ad  cujus  sepulcrum  hi  versus  leguntur  : 

Clansa  jacet  tumulo  generosa  sub  hoc  Isabelis, 
Yirtulum  titulo  rutilans  vitiisque  rebellis; 
Haec  fralrum  manibus  hic  noslrorum  tumulala, 
niorum  precibus  ponalur  in  arec  beala  (3). 

7.  De  sepukris  comitum  de  Quadris. 

In  sanctuario  est  sepulcrum  concavum  illustris  et  antiquae  domus 
de  Quadris,  gallice  Descars  (3),  in  quo  quiescunl  ossa  anliquorum 
hujus  familiae  dynaslarum,  et  inter  alios  nobilis  ac  generosus 
cornes  Carolus  Descars,  qui  obiit  anno  Domini  M.  DC.  XXIIF,  die 
quinta  augusti.  Hic  et  ejus  anlecessores  fuerunt  insignes  benefac- 
tores  et  reparatores  conventus  Lemovicensis,  et  inter  coeteros  emi- 
nenlissimus  simul  et  piissimus  Annas  d'Escars  cardinalis  de  Giuri  (4), 
episcopus  Metensis,  qui  dédit  conventui  Lemovicensi  prioratum 
Nostrae  Dominae  de  Beinaco  (5);  cujus  effigies  videlur  in  fenestra 
vitrea  c^apellae  comitum  de  Quadris,  cum  insigniis  familiae,  quae 
in  multis  locis  conventus  insculpta  cernuntur. 

({)  Venladour  (Corrèze). 

(1)  Fondations  d'anniversaires  par  Isabelle  do  Ventadour,  1277.  (Archi^ 
vas  de  la  Haute-Vienne,  fonds  des  Jacobins,  n^  4406). 

(3)  Les  Cars  (Haute- Vienne). 

(4)  Anne  des  Cars  de  Givry.  évêque  de  Lîsieux  (1585-f598)  et  de  Metz 
(4608- 161  i),  prêtre  card.  de  Saintc-Susanne  (4596):  mort  en  1642. 

(5)  L'acte  de  prise  de  possession  du  prieuré  de  Beynac  se  trouve  aux 
Arc  h.  de  la  Haute-Garonne.  H,  Dominicains  étrangers,  Limoges. 


306  SOCIÉTÉ.  ARCHéOLOGIQUR  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

8.  De  imigniis  et  sepulîuris  quorundam  nobilium. 

In  clavi  fomicis  capituli  videntur  insignia  nobilis  domus  de 
Pompadour  (1),  videlicet  turres  sculptae  in  lapide,  in  signum  sine 
dubio  quod  dynastae  hujus  domus  constructioni  vel  saltem  répara- 
tion! dicti  capiluli  de  suis  opibus  plurimum  contalerunt. 

In  sacristia  etiam  sub  grandi  lapide  est  sepultura  baronum  de 
Monterocherio  cum  insigniis  familiae,  scilicet  bove  circundante  pe- 
dibus  et  cauda  aves. 

In  sanctuario  similiter,  in  dextro  latere,  videntur  insignia  nobilis 
domus  de  La  Tour,  nempe  très  turres  cum  tribus  liliis  Borbonicis. 

SuDtetaliaepluressepuUurae  lum  fratrum,  tum  canonicorum,  tum 
nobilium,  quaenimis  esset  longum  recensere.  Haec  pro  nunc  suf- 
ficiant. 


XIV.   —     NOMINA  FRATRUM  QUI   IN    CONVENTU    LeMOVÏCENSI    FLORUERUfTT 
AB  ANNO  MCCXX°   USQUE  AD  PRESENTES!  1693»»°> . 

(Ex  mauascripto  ven.  P.  Beroardi  Guidonis  parlim  desumentur). 

1 .  [De  venerabili  fratre  P.  Cellaîii], 

(Honventus  Lemovicensis  tanta  copia  viroram  illustrium  in  omni 
génère  gaudet  ut  pace  (sic)  aliorum  ordinis  couYentuum  dixerim, 
vix  alium  reperire  Ucebit  in  quo  plures  inveniantur  fratres  sancli- 
late  conspicui.  Testes  sunl  hujus  veritatis  venerabiles  fratres  Ber- 
nardus  Guidonis  et  Slephanus  de  Salanaco,  primi  scriptores  ordi- 
nis, qui  in  primo  saeculo  ordinis  fere  ducentos  fratres  enumerant 
qui  foelicissime  et  sancte  obierant  in  praedicto  conventu.  Horum 
omnium  nomina  brevitatis  causa  non  recensebo,  sed  tantum  prae- 
cipuorum.  Quorum  omnium  agroen  ducet  fundator  et  primus  prior 
conventus  Lemovicensis  venerabilis  P.  F.  Pelrus  Gellani,  qui  post 
bealum  Domioicum  fuit  primus  frater  ordinis  fratrum  Praedicalo- 
rum,  quique  primus  ordinem  in  suo  recepit  hospitio  Tholosae. 
Hune  beatus  Pater  Dominicus  post  obitum  gloriosi  principis  de 
Montfort  (2),  destinavit  et  misit  Parisiis  Lemovicas,  ut  ibi  locum  con- 
ventus acciperet.  Sed  cum  ignorantiam  et  librorum  penuriam  alle- 
garet;  «  Vade  »,  inquit,  «  fili,  et  confidenter  vade;  omni  die  bis 
habebo  te  coram  Deo  ;  et  ne  dubites,  multos  acquires  Deo  et  afferes 
multum   fructum;  cresces   et  multiplicaberis,    et  Dominus   erit 

(*)  Pompadour  (Corrèzc). 

(2)  Simon  de  Montlort  morl  en  l2l8. 


LES   FRÈRRS  PRÂCHRURS   DE  LIMOGES.  307 

lecum.  »  El  sicul  ipse  poslmodum  familiaribus  suis  saepius  enarra- 
vit,  cum  inlus  vel  exlra  anguslia  arctabatur,  invocabat  beatum  Do- 
minicum,  redacens  in  memoriam  promissum  suum;  et  omnia  pros- 
père succebebant  ei.  Veniens  igitur  Parisiis  Lemovicas  anno  Dorainî 
MCCXIX"  circa  quadragesimam,  ab  episcopo  Lemovicensi  bénigne 
acceptus,  locum  ad  habitandum  recepit,  ut  supra  fuse  diclum  est  ; 
induitque  habitu  ordinis  multos  fratres  qui  candore  famae  et 
bonae  vitae  ostenderunt  jure  merito  fratres  conventus  Lemovicen- 
sis  fuisse  adumbratos  per  processionem  pulcherrimam  dealbalorum, 
quam  quidem  vir  dévolus  bis  in  somnis  viderai  in  loco  ubi  nunc 
conventus  est  aedificatus.  Tandem  postquara  conventum  Lemovi- 
censem  tredecim  annis  sanctissime  rexissel  et  in  magna  reverentia 
apud  cierum  et  populum  sicul  unus  de  prophelis  antiquis  fuisset, 
circa  finem  vitae  Tholosam  rediit,  ubi  primus  inquisilor  cum  fratre 
Guilelmo  Ârnaldi  factus  est;  quo  ofRcio  per  plures  annos  laudabi- 
liter  funclus,  migravit  ad  Dominum,  octavo  kalendas  martii  (1), 
anno  M  CG  LVIP;  sepultusque  est  in  conventu  Tholosano. 

2.  De  venerabili  fratre  Gerardo  de  Francheto. 

Secundus  prior  Lemovicensis  qui  successit  venerabili  P.  Petro 
Cellani  fuit  venerabilis  P.  Gerardus  de  Francheto  Lemovicensis 
dioecesis  oriundus  de  Castro  Luceti  (2)  ;  vir  gratiosus  et  dilectus  Deo 
et  hominibus,  praedicalorque  facundus  ;  hic  duodecim  annis  con- 
ventui  praefuit;  quo  tempore  locum  ultra  Vigennae  ponlem  dimisil 
ob  varia  ejus  incommoda,  secundum  vero  locum  in  quo  nunc  habi- 
lamus  émit.  Sed  cum  non  haberet  unde  solveret,  Beata  Virgo 
Maria  mota  fralrum  assiduis  praecibus  canonicum  Dauratensem 
suscitavil  qui  pecuniam  pro  emptione  loci  persolvit,  ut  supra  dixi- 
mus.  Hic  venerabilis  vir  ex  priore  Massiliensi  factus  est  prior  pro- 
vincialis  octavus,  rexilque  provinciam  in  pace  et  aequilate  annis 
octo;  quo  lempore  ad  instanliam  venerabilis  fralris  Humberti  de 
Romanis,  Magistri  ordinis,  Hbrum  qui  inscribitur  Vitae  fralrum  com- 
posuit(3).  Hujusmemoriacumlandibus  mullisin  ore  vivenliumvivit. 
Ipse  vero  in  senectute  bona  migravit  ad  Dominum  in  conventu  Lemo- 
vicensi, in  festo  beali  Francisci,  anno  Domini  MCCLXXl»  ;  sepultus- 
que est  in  claustro  prope  ostium  ecclesiae,  ubi  hi  versus  leguntur  : 

(1)  2i  février. 

(î)  Voy  ci-dessus,  p.  268, 

(3)  Le  R.  P.  Cormier  en  a  donné  une  é<lition  lithographiée,  sous  le 
titre  :  VUa£  fratrum  ordinis  Praedicatorum^  in  quitus  quaniplurima 
exempta  et  monumenta  aniiquae  oirtutiSf  quais  ordo  initio  mouDime 
floruUf  recenaentur.  In  4o.  Marseille,  1875,  356  pages.  Épuisé. 


308  SOCIÉTÉ   ARCllÉOLOGrQUE   BT   HISTORIQUE    DU    LIMOUSIN. 

Fraier  Gerarde  de  Franchelo  pie  valde, 
Terlius  hic  a  le  capiiur  locus  immédiate. 
Ordo,  genus,  vila,  discrelio,  lingua  polila, 
Fama,  pudor,  pietas  te  laudant,  pax,  amor,  aetas. 

3.  De  venerabili  fratre  Hugone  de  Malamorte. 

Tertius  prier Lemovicensis  fuit  frater  Hugo  de  Malamorte  (1),  dioe- 
cesis  Lemovicensis,  nobilis  génère,  sed  nobilior  animi  virtute,  qui 
quinque  annis  hune  conventum  gubernavit,  deinde  faclus  est  prier 
Burdegalensis  ;  quo  tempore  tantam  de  se  excitavit  opinionem  ut  a 
majori  parte  capituli  ecclesiae  calhcdralis  in  arcliiepiscopum  Burde- 
galensem  fuerit  electus  ;  quam  dignilatem  tamen  constanli  animo 
recusavit.  Fuit  vir  magni  rigoris  elbonae  discretionis.  Obiitplenas 
dierum  in  convenlu  Lemovicensi,  anno  Domini  M  CG  LXIII",  die 
quarla  januarii. 

■ 

4.  De  venerabili  fratre  Stephano  de  Salanacho, 

Quartus  prior  Lemovicensis  fuit  venerabilis  fraier  Stephanus  de 
Salanacho  (2)  a  burgo  suae  originis  sic  cognominatusin  Lemovicensi 
dioecesi,  e  manibus  venerabilis  P.  Pétri  Cellani  habilum  ordiois  sus- 
cepit  circa  annum  M  CC  XXX""»;  expleloque  probationis  anno  et 
professione  emissa,  verbum  Dei  maximo  cum  audilorum  fructu  dis> 
seminare  coepit.  Piurimos  namque  haerelicos  albigenses  convertît 
ad  veram  fidem;  peccatores  etiam  multos  ad  meliorem  frugem 
reduxit,  nec  mirum  cum  de  eo  dici  potest  quod  Gregorius  de 
sancto  Basilio,  quod  sermo  ejus  erat  tonitru,  quia  vita  iiiius  eral 
fulgur  ;  vivum  enim  erat  exemplar  sancti  Patris  sui  Dominici.  Nullus 
eo  erat  humilior,  nullus  continentior,  sanctae  paupertatis  adeo  erat 
studiosus;  et  venerabilis  frater  Bern.  Guidonis  asse[ve]rat  se  posl 
ejus  obitura  invenisse  scripium  quod  venerabilis  frater  Stephanus 
rogabat  enixe  Magisirum  ordinis  ut  peleret  a  summo  ponlifice  qua- 
tenus  juberet  ut  ab  oralione  beati  Patris  nostri  Dominici  lollerentur 
haec  verba  :  temporalibiis  non  destituatur  auxiliis^  «  quia  »,  inquie- 
bat,  «  in  oralione  beali  Francisci  pelimus  terrena  despicere,  in  ora- 
lione vero  beati  Patris  Dominici  pelimus  dari,  quod  utique  incon- 
gruum  videlur  religiosis  qui  voto  solemni  bonis  temporalibus  re- 
nuntiaverunt  ».  In  capitule  generali  Mediolani  (3)  celebrato,  ob  suam 


(1)  Malemort(Corrèze). 

(2)  Le  Grand  Bourg  de  Salagnac  (Creuse). 

(3)  En  1250.  D.  Mabtkne,  Thésaurus,  IV,  1704. 


LKS    PRÂRF.S   PRÂCHBURS   DR   LIMOCKS.  309 

singularem  prudenliam  et  in  rébus  gerendis  solertiam,  definitor 
oleclus  est  sicutetin  Argentino  (1),  deinde  in  Scotiam  et  Angliam  a 
R.  P.  Magistro  generali  visitalor  missus,  ubique  insigniasuae  pieta- 
lis  et  prudentiae  monumenta  reliquit.  Electus  deinde  in  priorem 
Tholosanum,  expleto  quadriennio,  sui  conventus  Lemo\1censis 
semel  alque  iterum  habenas  regendas  suscepit  ;  quo  tempore  vene- 
rabilem  dominum  Petrum  de  Sanclo  Asterio,  episcopum  Petrago- 
pensem,  ordiuis  habitu  induit.  Unus  fuit  e  primis  scriptoribus  ordi- 
nis;  quae  enim  audiverat  vel  viderat  de  vita  martirum,  ponlificum, 
cardinalium  et  aliorum  virorum  illustrium  ordinis  fratrum  Praedi- 
catorum,  brevi  Iraclatu  et  compendiocomplexus  est.  De  eo  venera- 
bilis  P.  Guidonis  haec  habet  :  «  Hic  fuit  vir  religionis  spéculum 
aspicientibus ,  gratia  praedicalionis  benedictus ,  prudentia  et 
sapienlia  regiminis  praeditus,  facundia  sermonis  redimitus,  expe- 
rientia  multa  doctus,  in  his  quae  religionis  sunt  optime  instructus 
et  instruens,  narralor  geslorum  illustrium  et  exeraplorum  notabi- 
lium  gratiosus  et  copiosus  tempore  opportuno,  morura  ac  gestus 
maturilate  compositus,  famosus  et  notus  toti  patriae.  »  Haec  Gui- 
donis, quibus  nibil  addendum  superest.  Denique  hic  venerabilis 
Stephanus  plenus  dierum  et  quasi  sexagenarius  fere  in  ordine,  obiit 
Lemovicis,  sexto  idus  januarii,  anno  DominiM.GC.XC®;  sepultusque 
fait  in  claustro,  ante  ingressum  ecclesiae  tertio  loco. 

5.  De  venerabili  fratre  Helia  Navarra. 

Quintus  prior  Lemovicensis  fuit  venerabilis  frater  Helias  Navarra 
Ijcmovicensis  dioecesis,  de  quo  haec  habet  Guidonis  :  «  Vir  fuit 
dévolus  et  sanctus,  veneranda  valde  persona,  fervens  et  gratiosus 
praedicator,  in  correctione  rigidus  et  zelo  salulis  aliorum  velut 
aller  Helias  succensus,  vera  religionis  imago  successit  in  prioratu 
Lemovicensi  fratri  Stephano  de  Salanaco,  et  praefuit  anno  uno. 
Fuit  etiam  supprior  Tholosanus  et  prior  Narbonensis,  Garcasso- 
nensis  et  Figiacensis.  Tandem  in  seneciute  bona  obiit  in  conventu 
Brivensi,  kalendis  septembris,  anno  Domini  M.CG.LXX*».  » 

6.  De  venerabili  fratre  Geraldo  de  Sancto  ValeiHco. 

Sextus  prior  conventus  Lemovicensis  fuit  frater  Geraldus  de 
Sancto  Valerico (2)  Lemovicensis  dioecesis,  qui,  ut  ail  Guidonis,  «  ex 
monacho  Sancli  Martialis  factus  est  praedicalor  dévolus  et  fructuo- 
sus,  persona  venerabilis,  gralus,  laetus  et  largus.  Praefuit  conventui 

(1)  En  «260.  D.  Martine,  Thésaurus,  IV,  1728. 
(i)  Saint-Vaulry  (Creuse). 

T.  xxxix.  90 


3IOl  SOGIRTR   ARCBÉOLOGIQIIF.  ET   HlSTOftlQUE   DU   LIMOUSIN. 

Ijewoyicensi  anni$  quinque.  Tandem  in  seneclule  bona  in  conventu 
LeiDoyiceosiândie  NatalisDominiqna  Chrislus  nalus  esl  in  mundo, 
natus  est,  ut  pie  credilur,  ipse  in  coelo,  illuscescente  aurora  diei 
illius  ^a^clae.  Post  audilum  enim  officium  missae  matutinalis  qu^e 
incipil  :  Lux  fulgebit  hodie,  etc.,  dixit  sibi  ministranlibus  quod  ofli- 
ciui^  missae  sequentis,  sciMcei  Puer  natus  est  nobis,  etc.,  audilurus 
erat  cum  angelis  in  coelo.  Et  paulo  post  anle  missam  majorem 
conyentus,  in  Domino  obdormivit,  anno  Dominicae  incarnaùonis 
MCCLXXX*.  SepuUus  est  in  claustro  in  ingressu  ecclesiae;  elhoc 
habet  epilaphium  : 

Hic  siius  esl  frater  Geraldus  de  Sanclo  Valcrico. 
Subvenîal  mater  Christi  pieialis  amico. 
Gralus,  amans,  hylaris  Christo  tlorem  juvcnilis 
Obtulil  aeUilis,  susceplus  in  ordine  gratis. 
Sic  ubi  complevii  annos  ter  in  ordioe  quiaos 
Et  decies  trinos  mortcos  in  |)ace  quievît. 

7.  De  venerabili  fratre  Nicolao  de  Monte  MûuriUi, 

Septimus  prior  conventus  Lemovicensis  fuit  yenerabilis  frater 
Nicolaus  de  Morxle  Maurilii(l),  sic  cognominalus;  erat  tanien  Lemo- 
vicensis dioecesis.  Successit  in  prioralu  Lemovicensi  fratri  Stéphane 
de  Salanaco  ;  fuilque  modico  tempore  prior.  Vir  fuit  suavis  mori- 
bus  et  optime  litleratus;  per  quindecira  enim  annos  et  amplius 
honorabiliter  praefuit  studio  generali  Monlispessulani,  Tolosae, 
Burdegalae  et  Lemovicae.  Hic  tandem  lector  existens  canonicorum 
in  sede  catbedralis  ecclesiae  Narbonensis  et  aclu  legens  sacras  lille- 
ras  coram  posilis  audiloribus,  suavitcr  in  Domino  obdormivil; 
sicque  assumpsit  eum  Deus  in  officio  in  quo  placuerat  ei.  LfOcns 
quem  aclualiter  exponebat  dum  obiil  erat  hic  versus  Ecclesiasl.  34  : 
Qtiasi  ceirus  exaltata  sum  in  Libano,  etc,^  qnem  primo  de  sapientia 
increata  exponebat,  secundo  de  natura  humana  a  Christo  assumpta 
et  tertio  de  Virgine  Beala.  «  Fuit  vir  »,  inquit  Guidonis,  «in  ordine 
magnus  opinione,  nomine,  religione  et  lilteris.  Fuit  eliam  magnae 
innocenliae  etpersonaveneranda.  Sepultus  fuit  incapilulo  fratrum 
Narbonae,  anno  Domini  MGCLXXIX",  feria  sexta  anle  Ascentionem 
Domini.  » 

8.  De  venerabili  fratre  Joanne  de  Chastancs. 

Octavus  prior  Lemovicensis  fuit  venerabilis  frater  Joannes  de 
Chastancs  Lemovicensis  dioecesis.  Successit  fratri  Nicolao  de  Monte 

(1)  Peut-^lre  Montmo:'cau  (Charente) 


LES  F  116111(8   FflÊCtftEURS    DE  LIMOGES.  3f  f 

Haurilii,  praeftiitque  annis  tribus.  Tempore  hujus  factûm  est 
piDaenlnm  ecclesiae  positaque  sunt  funclamenta  et  partetês  elevali 
non  modicam  pro  inreriori  parte  ecclesiae.  «  Hie  fait  »,  inquit  Gmdo- 
nis,  «  devotus  mente  et  laetns,  praedicator  promptus  et  copiosus, 
sedulus  attractor  ad  Deum  roagnorum  peccalorum,  signantér  prae  • 
doDum  et  midioruro,  pro  quibus  reducendis  in  viam  juslitiae  et 
salutis  libenter  et  froctuose  laborabat.  Prior  fuit  Sancti  Aemiliani 
et  Brivensîs,  et  lector  in  convenlibas  maltis.  Tandem  in  sefrectute 
bona  eteanitie  Yenerabili  sapprior  Lemoricensis  existens,  foeliciter 
obiit  ;  et  quiescit  in  claustro  anle  ingressum  ecclesiae.  ObiH  autem 
tertio  kal.  aprilis,  anno  Domini  MGCLXXXI*'.  d 

9.  De  venerabili  fratre  Petro  de  lâulceone. 

Nonus  prier  convenlus  Lemovicensis  fuit  venerabilîs  frater'  Petrus 
de  Mulceone  Lemovicensis  dioecesis,  qui  êuccessit  fratri  Joanni 
Ghastancs  pro  prima  vice.  Fuit  enim  prior  tribus  vicibus  Lémovicis. 
Hnjus  tempore  consummatum  fuit  dormilorium  anfiquum  ex  parte 
ecclesiae,  fuerunlque  factae  camerae  feligiosorum  de  pecunià 
qoam  dédit  dominus  Petrus  de  Sancto  Asterio,  episcopos  l^elr'agorl- 
censis  memoratus.  De  praedicto  fratre  Petro  de  Mulceone  haed 
liabet  Guidonis  :  «  Fuit  vir  gratus  et  dilectus  Deo  et  hominibds  et 
famosus  in  iota  patria,  nobilis  génère,  nobilior  liumilitatis  virluté, 
super  mîseros  et  abjectes  pia  gestans  viscera.  De  prioratu  Monlis- 
pessulani  ubi  praefuit  annis  tribus  cum  fere  dimidiô,  translatus  est 
ad  officium  Inquisitionis  Tholosanae  quod  exercuit  ànnis  tribus  ; 
indeque  electus  est  prior  provincialis  in  capitufo  Bfivensi,  in  festo 
Assumptionis  B  jalae  Mariae  semper  virgiriis.  In  quo  officio  exi^itens, 
raigravit  ad  Dominum  in  conventu  Montalbanensi  in  festo  b>ea(àe 
Marthae,  anno  Dominî  MCCVC".  Deinde  iranslalum  est  corpus  ejus 
ad  convenlum  Brivensem  posl  1res  annos  in  capitule  provinclâli 
Caturcensi.  » 

10;  De  venerabili  fratre  hanHê  de  Nontrônio, 

Decimus  prior  conventus  Lemovicensis  fuit  fratcr  Joannes  de 
Nontronio  Lemovicensis  dioecesis,  qui  successit  fratri  Petro  Je 
Mulceone.  «  Fuit  »,  inquit  Guidonis,  «  vir  bene  religiosus  et  bonus  ; 
plenus  dierum  obiit  in  conventu  Lemovicensi,  quarto  Ical.  maii  ({), 
anno  Domini  MCGLiXXXir;  sepultusque  fuit  in  claustro.  » 

11.  De  venerabili  fratre  Petro  Copelli, 
Venerabilîs  frater  Petrus  Copelli  fuit  duodecimus  prioï*  convenfUs 

(1)  iS  avril. 


3f2  SOCIÉTÉ   AdCHÉOLOGlQl'R   &T   HISTORIOUK  DU   LIMOUSIN. 

Lemovicensis,  cui  bis  praefuil.  Oriiindus  eral  de  Valeria  (1)  in 
dioecesi  Lemovicensi.  Tanlae  fuithumililalis,  ut  cum  ex  leclore  Ca- 
larcensi  electus  esset  in  prioremLemovicensem,  abhoc  semei  atque 
iterom  absolvi  procuraverit  oflicio.  «  Virenim  erat  »,  inquit  Guidonis, 
«  humilis  et  dévolus,  bene  religiosus,  dilectus  Deo  et  fratribus, 
praedicator  bonus.  In  flore  suae  virtulis  et  valoris  obiil  Lemovicis, 
decirao  quinto  kalendas  augusti  (2),  anno  Domini  MCCIIO  ♦». 
Quiescit  in  claustro  prope  oslium  ecclesiaein  tumulo  duodecim  fra- 
trum,  qui  ex  primo  conventu  ubi  obierant  ultra  pontem  Vigennae, 
traiislati  sunt  in  istum  ubi  nunc  habilamus. 

12.  De  venerabili  fratre  Yterio  de  Comprenaco, 

Venerabilis  frater  Yterius  de  Comprenaco  (3)  a  burgo  suae  ori- 
ginis  sic  cognominatus,  qui  situs  est  non  longe  a  Lemovica,  ofGeium 
prioris  in  conventu  Lemovicensi  1er  exercuil;  compulsusque  est 
ullima  vice  per  sentenliam  excommunicalionis  ad  prioratum  accep- 
tandum.  De  hoc  venerabili  viro  P.  Guidonis  refert  quod  adolescens 
circiter  tredecim  aut  qualuordecim  annornm  habilum  noslrae  reli- 
gionis  sumpserat  cum  puritate  et  innocentia  vilae  quam  illibale  in 
ordine  conservavit,  et  quod  licet  esset  nobilis  génère,  attamen  nobi- 
lior  animi  generosilate  vidcbatur,  qua  omnem  vilae  ignobilitalem 
deleslabatur  in  quocumque  esset.  Praedicalor  fuit  fervidus  et 
veritatis  amicus,  qui  dura  in  festo  Assamptionis  bealissimae  Vir- 
ginis  Mariae  de  ipsa  gloriosa  domina  noslra  devolissime  et  cum  fer- 
vore  nimio  praedicaret  apud  urbem  Sancti  Juniani,  vocatus  a  prae- 
dicta  augustissima  regina,  ut  pie  creditur,  incidit  in  morbum  quo 
infra  paucos  dies,  videlicel  in  die  sancli  Bernardi  (4),  mortuus  esi. 
Ejus  corpus  quod  primo  apud  Sanclum  Junianum,agente  venerabili 
Jordano  de  Monlecuculli,  praeposito  capituli,  humalum  eral,  trans- 
latum  fuit  in  conventu  Lemovicensi;  ad  cujus  receplionem  maxima 
pars  civium  Lemovicensium  obviam  venit  cum  lacrimis  et  gemili- 
bus.  Ipsum  enim  lotus  populus  diligebat,  cum  invenirent  in  eo  salu- 
bria  consilia  tam  de  rébus  transitoriis  quam  aeternis.  Hic  beatum 
Dominicum  tenerrime  diligebat,  cujus  capellam  variis  picluris  et 
ornamentis  adornavit.  Sepultus  fuit  in  capilulo  et  hi  versus  supra 
tumulum  ejus  appositi,  anno  obilus  ejus  qui  fuit  ab  incarnatione 
Ghristi  MGiiClV"». 


(1)  Vallière  (Creuse). 

(2)  18  juillet. 

(3)  Compreignac  (Haute-Vienne). 
(4}  iOaoùt. 


LES   PBÈRRS   PRÊCHEURS    DE   LIMOGES.  313 

Christiferam  vcnerans,  sic  damans  magnificavit 
Quod  verbum  superans  devolio  debilîlavit; 
Rapta  fuit  mens,  flens  silull  vox,  praecoMariae 
Dum  docuit,  tune  occubuit  lux  arca  sophiae. 

Nomina  aliorum  priorum  conventus  Lemovicensis  quos  venerabi- 
lis  P.  B.  Guidonis  refert  hic  annotare  necessariurn  esse  minime 
pulo,  cum  de  ipsis  nihil  fere  spéciale  au l  notatu  dignum  putal.  Hoc 
iinum  referam  quod,  anno  MCCCVI*,  tempore  quo  idem  frater 
B.  Guidonis,  episcopus  Lodovensis,  de  quo  supra  mentionem  feci- 
mus,  prions  raunere  in  conventu  Lemovicensi  fungebalur,  dominus 
papa  Clemcns  quintus  cum  octo  cardinalibus  venit  Lemovicam  et 
ad  domumetconventum  fralrum  PraeJicatorum  declinavit,  in  eoque 
hospilari  ac  manere  voluit;  quo  tempore  concessil  priori  conventus 
Lemovicensis  quod  confessor  quem  sibi  eligeret  vel  quem  pro  fra- 
tribus  deputaret  lantam  haberet  potestatem  absolvendi  et  dispen- 
sandi  ab  omnibus  culpis  et  poenis  temporalibus  quam  ipse  papa 
habebat,  et  hoc  pro  una  vice  tantum. 

Venerabiiis  P.  Bern.  Guidonis  post  recensitos  priores  conventus 
Lemovicensis  usque  ad  annum  MCCCXII  refcrre  incipit  nomina 
fralrum  qui  in  praedicto  conveiUu foelicissime  obieranl(î).Sed  quia 
prolixior  esset  eorum  omnium  narratio  nominum  quorum  funda- 
mentum  maximum  habemus  quod  sint  scripta  in  libro  vitae,  maxi- 
me cum  in  primo  saeculo  ordinis  obierint,  in  quo  fratres  fere  omnes 
ad  summum  perfeclionis  et  sanctilatis  apicem  perveniebant  per 
vilae  austeritatem,  morum  innocentiam,  pracdicationis  fervorem, 
lucrum  animarum,  ac  denique  vitae  regularis  perpetuum  tenorem 
et  observantiam.  Quapropter  venerabiiis  frater  Slephanus  de  Sala- 
naco  de  illis  loquens  haec  habet  :  «  Ordo  Praedicatorum  habuit  ab 
initio  {supple  fratres)  qui  ad  justitiam  erudientes  mulios  luxerunt 
in  fîrmamenlo  ecclesiae  et  diversas  mundi  partes  illustraverunt 
verbis  parileret  exemplis,  sicut  stellae  in  perpétuas  aeternitates, 
ad  quod  lucide  cognoscendum  unum  subnecto  exemplum. 

«  Religiosus  vir  domnus  Geraldus  de  Cardalaco,  prior  lune,  sed 
poslmodum  abbas  Obazinae (2)  Cisterciensis  ordinis  in  Lemovicensi 
dioecesi,  audiverat  ortum  esse  et  a  summo  pontifice  confirmatum 
onlinem  fratrum  Praedicatorum  ;  nullum  autem  fratrem  dîcti  ordi- 
nis adhuc  viderat.  Quadam  igitur  die  cum  dormiret  post  meridiem, 
ut  moris  est  apud  Cistercienses,  videbatin  visione  duos  soles  ingre- 
dientes  subito  claustrum  monasterii,  illumque  cum  vicinis  locis 

(I)  Ces  noms  ne  se  trouvent  pas  dans  les  mss.  connus. 
(3)  Obasine  ou  Aubasine  (Corrèze). 


314  S^'CIRTI^  AftCHiOLOOlQUe   RT   II1BT0BIQUB   DU  LIMOrSIK. 

liice  sua  irradiantes.  EvigilaQsautempraediclusdoamus  prior  visio> 
nemque  in  animo  versans  cum  admiratioae,  descendit  e  dormitorio, 
invenitque  duos  fralrcs  ordinis  Praedicatorum  coBventas  Lemovi- 
censis,  nempe  frairem  Bernardum  Alvern«ra,  suppriorem  Lemovi- 
ceDsem,etfratrem  JoannemBalislarii^ejusdem  conventus  aiumnum, 
qui  ambo  erant  eximii  divini  verbi  praecones  ;  statimque  in  spiritu 
didicit  ist09  esse  duos  soles  quos  in  visione  viderat.  Quapropter 
summo  affectu  deinceps  ordinem  prosequulus  est.  » 

13.  De  veneraMi  fratre  Jeanne  Balistario. 

tete  venerabilis  frater  Joannes  Balistarias,  quem  ad  instar  solis 
radranftem  prior  Gislerciensis  conspexit,  ut  dictum  est,  âiius  fuit 
urbis  et  conventus  Lemovicensis,  quem  Deus  tanta  repievit  focun- 
dia  in  ooncionando,  utclero  pariier  et  populo  esset  mirum  in  modum 
acceptais,  uberesque  frHCtus  pro  conversions  peccalorum  et  salute 
aniniarum  ex  praedicatione  sua  reportaret.  Postquaoi  aulefli  veiut 
sol  mundum  divini  verbi  luce  illuminasset,  in  terris  et  in  ccoventu 
Lemovicensi  occumbens,  octave  idus  julii  radtaturus  obiit  io  firma- 
mentuo)  coeli,  circa  annum  MCCLX^'^  (1).  Ejus  sermones  tasquam 
prctiosa  d  onilia  olim  servabaatur  in  arca  conventus  ;  duqc  vero 
lapsu  temporum  periere. 

14.  De  venerabili  fratre  Radulpho  de  Quadris. 

Frater Radulphus  de  Quadris  (3)  ex  illustrissima  forte  comitum  de 
Quadris,  insignium  benefactorum  conventus  Lemovkensis,  oriundas 
prosapia,  magis  tamen  elegit  abjectus  esse  in  dooio  Dei  io  coDveniu 
Lemovicensi,  quam  magnusiasaeculo.  Poslquam  au(em  ut  bonus 
et  fructuosus  praedicator  viueam  Dominl,  nempe  eeclesiam,  exeo- 
luissei,  amplam  a  patrefamilias  accepit  naercedem,  deoarium  oempn 
beaMtKdinis,  uqdecimo  kalendas  septembris(3),  circaaanumDomini 
MCCL»». 

iS.  De  vmerabili  fratre  Fetro  de  Riperia. 
Eandem  mercedem  venerabilis  frater  PetrusdeRîperia  cum  prae- 

(1)  Le  8  juillet  d*après  ftuéllfel  EjChard,  Script,  ord.  Prned,^  1, 460.  La 
notice  qu'ils  lui  onl  consacrée;  ressemble  beaucoup  à  celle-ci.  Etienne  de 
Sal&nhac,  B.  Gui  et  MalvenJa,  Annal,^  ad  an.  til7,  n.  9,  Pont  successive- 
ment loué  comme  prédicateur. 

(2)  Les  Cars  (Hai^to-Vienne). 

(3)  23  aot|t, 


LKS   FRÈRES   pnÊCBEURS   DE  LIMOCRS.  315 

dicto  fratre  Badulpho  accepit,  qui  eodem  modo  in  vinea  Domini 
laboravit.  Fuit  enim,  Guidonio  teste,  vir  sanctus,  sacerdos  et 
praedicatop;  et  ut  talis  11°  idus  februarii  (i)  ad  aeternam  sanctorutn 
mansionem  evocatus  est,  circa  annum  MCCL"™. 

16.  t)e  venerabiti  fratre  Guidons  de  Monpreset. 

Frater  Guido  de  Monpreset  sacerdos  ab  infantia  Deo  dévolus 
intrare  meruit  in  gaudium  Domini  sui,  laborum  diuturnorum  prae- 
mia  percepturus,  anno  Doraini  MGCLXII[°,  tertio  idus  januarii  (2), 
qui  etiam  ob  eximias  virtutes  specialem  babet  inscriptionem  lingua 
vulgari  exaratam  in  una  columnarum  capituli  ex  parte  claustri. 

il.  De  venerabili  fratre  Rogerio  de  Agedunù. 

Frater  Rogerius  deAgeduno  (3)  specialem  inscriptionem  meruit 
saper  tumulum,  ob  insignem  pietatem.  «Fuit  enim,»,  inquit  Gui- 
donis,  «  vir  sanctus,  sacerdos  et  praedicator  et  ultra  modura  offi- 
ciosus,  qui  quarto  idus  augusli  (4),  anno  MCCLXVP,  ex  bac  misera 
vita  ad  beatam  transiit.  » 

Eandem  gratiam  eodem  vei  sequenti  anno  a  Domino  consecutus 
est  venerabilis  frater  Slepbanus  Coralli  sacerdos,  litteralus  ac 
bonus,  sexto  idus  augusli  (5). 

18.  De  venerabili  fratre  Petro  Geraldi  de  Fraiicheto, 

Frater  Petrus  Geraldi  de  Francheto  qui  fuit  pater  secundum 
cârnem  venerabilis  P.  Geraldi  de  Francheto,  secundi  prioris  c(m- 
vcnlus  Lemoviceasis,  quique  ex  slrenuo  milite  faclus  est  frater 
dévolus,  postquam  Domino  soli  militasset  ac  de  salutis  nostrae 
hostibus  gloriose  triumphasset,  coronam  regni  percepturus,  migra- 
vil  e  vivis  VHP  idus  augusli  (6),  anno  circiter  MCCLXV\ 

19.  jD^  venerabili  fratre  Briccio  de  Peirato. 

Frater  Brrccius  de  Peirato  (7)  ex  illustri  familia  adhuc  etiam  flo 
rente  Lemovicis,  oriundu8,primus  omnium  sacri  Praedicatorum  ordi- 

(1)  ht  février. 

(2)  H  janvier. 

(3)  \huii,  près  Guérel  (Creuse). 

(4)  10  août. 

(5)  8  aotfl. 

(6)  6  août. 

(7)  Peyrat-le-Châleau  (Haute-Vienne). 


316  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  RISTORIOUB  DU  LIMOUSIN. 

nishabitum  sumpsil  in  conventu  Lemovicensi  de  manibus  venerabi- 
lis  P.  Peiri  Gelîani  funiJaloris,  anno  MCGXXP,  et  cum  eodem 
Parisius  ad  capitulum  générale  profectus  est.  Si  ergo,  ut  aiunt 
philosophi,  primum  in  unoquoque  génère  est  causa  caeterorum, 
qaam  gloriam  et  mercedem  asseculum  fuisse  patrem  istum  crc- 
dendum  est,  qui  tôt  sanctis  religiosis  dux  fuit  ad  viam  salutis 
demonstrandam  non  solum  priorilate  sua  in  ordine  fratrura  Prae- 
dicatorum  in  conventu  Lemovicensi,  sed  etiam  in  bono  exemplo 
elsanclitate.  «Fuit  enim)),inquitGuidonis,  «virsanclus  et  dévolus, 
nec  mirum  cum  ipse  primilias  spiritus  qui  sanctos  eiïicit  hauseril  ; 
merilo  ergo  illum  credimus  in  coelo  altius  a  terris  snblimatum 
cum  fundatore  conventas  Lemovicensis,  quem  in  terris  agnosci- 
mus  eorum  primogenitum.  Obiit  autem  octavo  idus  novembris  (1). 
anno  MGCLXVP  ». 

20.  [De  venerabili  fratre  Stephano  Racaldi]. 

Anno  sequenti,  XV.  kal  decembris,  frater  Stephanus  Racaldi 
sacerdos,  qui  mullos  libros  ecclesiaslicos  scripsit,  nempe  Missale, 
libros  Evangeliorum  et  Epistolarum,  etc.,  et  per  provinciam  ad  hoc 
faciendum  discurrens  correxit,  indesinenterque  usque  ad  finem 
vitae  suae  Deo  et  fratribus  dévote  servivit,  ad  praemia  laboribus 
suis  débita  accipienda  evocatus  est. 

21 .  [De  venerabili  fratre  Petro  Audierii], 

Frater  Petrus  Audierii  sacerdos  et  praedicator,  vir  mansuetus  et 
simplex,  ad  beatitudinem  quam  Ghristus  pauperibus  spiritu  promi- 
sit,  evolasse  credendus  est,  XII.  kal.  junii  (2),  anno  MGGLXVIII". 

22.  De  venerabili  P.  Bernardo  de  Cella. 

Quanti  apud  Deura  meriti  fuerit  venerabilis  P.  Bernardus  de 
Gella  dioecesis  Lemovicensis,  miraculaquae  facit  optime  testanlur; 
de  quo  nihil  aliud  legimus  nisi  quod  fuit  praedicator  fervidus  et 
gratiosus,  qui  sine  dudio  fecit  quod  alios  docuit,  sicque  talenla  a 
Deo  sibi  Iradila  amplians,  tantam  graliam  a  Domino  suo  obtinuit 
ut  mortuus  miraculis  clarcret,  febrientes  scilicet  sanando.  Obiit 
in  conventu  d'Arnet  (3)  ordinis  canonicorum  regularium  Arfigiae, 

(1)6  novembre. 

(2)  %\  mai. 

(3)  Cod.  ;  Darnet.  Auj  Sainl-Pardoux-d'Arnet  (Creuse).  L'Arlige  était 
un  petit  prieuré  de  chanoines,  sis  près  Limoges,  et  qui  se  disait  chef 
d'ordre.  B.  Gui  a  laissé  un  potit  traité  ;  De  fundacione  ordinis  Artlgie 
in  dinceai  Lemooicenai,  Ms.  de  Toulouse  450,  fol.  3S3  <:-d,  fol.  254a. 


L88    FRÈBES   PRÊCHEURS  DE  LIMOGES.  347 

in   quo  ejus   veoe  randae  reliquiae  asservanlur,  anno  circitcr 
MCCLXX%  XIIIo  kal.  aprilis  (1). 

23.  De  venerabilibus  fratribtis  Joanne  Rigaldi  et  Nicolao  Pauta,  etc. 

al  Zelus  salutis  animarum  qao  succensi  siint  fratres  Joannes 
Rigaldi  et  Nicolaus  Paula  effecit  ut,  trajeclo  mari,  loca  quae  a  Chrisli 
Domini  praesentia  saoctificalasantipsi  suapraedicatione  et  exemple 
bonae  vitae  sanctiiicare  conati  sint;  quapropter  inde  ad  terram 
fidelibus  a  Christo  promissam  foeliciter  migravere  uterque  in  civl- 
tate  Aconensi  (2),  in  qua  fraler  Joannes  Rigaldi  erat  prior  conventus 
ordinis  nostri;  frater  vero  Nicolaus  diaconus 

Eodem  fere  tempore,  nempe  in  primo  saerulo  ordinis  nostri, 
frater  Joannes  a  Sancto  Michaele  sacerdos  et  praedicalor,  sparso 
diYiniverbi  seminein  IonginquisPaIaestinaeregionibus,etipse  tan- 
quam  bonum  triticum  congregatus  est  in  horrea  Domini  in  civilate 
Ântiochena.  Erant  hi  très  fratres  e  dioeeesi  Lemovicensi  oriundi. 

bj  Venerabilis  frater  Joannes  Milriti  de  Philitino  (3)  oriundus  in 
dioeeesi  Lemovicensi  fuit  sacerdos,  praedicator  et  optimus  supprior 
conventus  Lemovicensis.  Quapropter  credere  pie  debemus  illum 
in  coelo  duplici  honore  dignum  judicatum,  quia  in  terra  bene 
praefuit.  Obiit  in  die  conversionis  Sancti  Pauli  (4),  anno  Domini 
MCCLXXIVo. 

cl  Frater  Helias  Martelli  tanto  praedicandi  evangelii  ardore  fuit 
succensus  ut  nec  glacies,  nec  nives  gelidi  septentrionis  obstare 
potuerint,  quominus  sacerdotis  et  praedicatoris  apud  Saxones 
munere  fungeretur.  In  quo  oflficio  occupatus,  lanquam  bonus 
servus  a  Domino  mercedem  accepit.  Obiit  apud  Pontes  in  Saxonia 
in  primo  ordinis  saeculo. 

dj  Fratres  Aymericus  Maumeli  et  Leonardus  e  dioeeesi  Lemo- 
vicensi oriundi,  in  terra  se  peregrinos  considérantes,  relicto  natal! 
solo,  apud  Niciam  (5),  in  Sabaudiae  finibus,  lucis  exempta  demons- 
trarunt.  Quare  tanquam  stellac  in  perpétuas  ae terni lates  in  coelo 
fuisse  collocatos  existimandum  est.  Obiere  in  primo  saeculo 
ordinis. 

el  Frater  Aymericus  Carpentarius  qui  multum  et  utlliter  labo- 
ravit  Lemovicae,  apud  Tarasconem  (6)  in  Provincia  praemia  suis 
laboribus  débita  percipere  meruit  in  eodem  saeculo. 

(1)  30  mars. 

\%)  Sainl-Jean-d'Acre. 

(3)  FelletÎD  (Creuse). 

(4)  25  janvier. 

(5)  Annecy  (Hanle-Savoie). 

(6)  Tarascon  (Bouches-du-Rhôiie). 


318  SOCIÉTÉ   ARCKÉOLOGIQUB   ET    BISTORIQUB   DU   LIMOUSIN. 

fl  In  ci  vitale  Aniciensi  qiiae  vulgo  Podium  Sanclae  Mariae  (i)  nun- 
cupatur,  frater  Hugo  de  Monte  Valerio  sacerdos  harailis  et  dévolus 
dioecesisLemovicensis,  post  multa  devotionis  ethumilitatis  exempla 
in  cadem  civitate  moriens,  a  Domino  in  coelis  meruit  exaltari  in 
primo  etiam  ordinis  saeculo. 

gl  Frater  Nicolans  de  Prino,  Lemovicensis  convenlus  alumnus, 
juvenis,  devotus  et  diaconus,  brevi  tempore  sui  exilii  curriculum 
consummans,  ad  coelestes  epulas  veste  nupliali  coopertus,  meruit 
evocari  apud  Narbonam  in  primo  ordinis  saeculo. 

A/  Frater  Aymericus  de  Bario  sacerdos  el  praedicator  gratiosus 
et  bonus,  qui  fuit  secundus  prier  conventus  Brivensis,  in  quo 
moriens  a  Domino  suo  sicut  bonus  et  fidelis  servus  remuneratus 
est. 

il  Frater  Guilelmus  de  Planis,  praedicator  bonus  et  dévolus, 
post  disseminalum  cum  fructu  copioso  verbum  divinum,  venil  ad 
Dominum  Deum  suum,  portans  manipulos  animarum  muUarum. 
Obiit  etiam  in  conventu  Brivensi. 

jl  Frater  Joannes  Molini  vir  innocens,  sacerdo?,  praedicator  et 
leclor,  haec  quinque  lalenta  sibi  a  Domino  tradita  quolidie  amplians 
et  alia  quinque  lucralus,  tandem  in  vigilia  Assumptionis  Beatae 
Mariae  Virginis  moriens,  dixil  se  sponso,  nempe  Ghrislo,  et  sponsae 
Beatae  Virgini,  Dominicoque  parenli  optirao  dalum  esse,  nempe 
ut  cum  ipsis  in  convivio  coelcstis  patriae  in  aeternum  epularetur. 
Obiit  in  conventu  Caturcensi;  erat  tamen  alumnus  conventus 
Lemovicensis. 

kl  Frater  Petrus  Borquoti  ex  urbe  Lemovicensi  oriundus,  fuit 
praedicator  gratiosus,  famosus,  fructuosus  et  dévolus  secundum 
B.  Guidonis,  in  muUisque  locis  fuit  prier.  Obiit  Burdegalae,  anno 
Domini  MCCLXXIX,  ut  in  Actis  capituli  Biterrensi  (2)legitur. 

//  Frater  Petrus  de  Jutclla  fuit  sicut  lampas  accensa  et  supra  can- 
delabrum  posita;dum  boni  et  religiosilectorismunussedulo  obivit, 
cxtincta  est  haec  lampas  in  terris  ut  in  perpétuas  aeternitates  luce- 
ret  in  coelis.  Hoc  tantum  bonum  ipsi  accidit  in  conventu  Burdega- 
lensi  in  primo  saeculo  ordinis. 

ml  Frater  Helias  Telfondi  de  Gora  nobilis  génère,  suavis  moribus 
et  virtute  gratissimae  societatis  secundum  Guidonem  conspicuus, 
sincerae  etiam  pietatis  et  religiositatis  sacerdos  et  praedicator, 
obiit  Tholosae,  dum  esset  socius  Inquisitoris,  quarla  die  octobri^, 
anno  Domini  MCCCXI°  ;  sepultusque  fuit  in  clauslro  supra  com- 
mune sepulcrum  ex  parte  dormitorii. 

(4)  Le  Puy-Nolre-Dame  en  Velay. 
(2)  Béziers  (Hérault). 


LRS  FBàBES  paÊCHEURS  DB  LlHOOKS.  319 

ni  Frater  Heiias  de  Manaco  ex  urbe  Nonlronii  (1)  oriundus,  vir 
religiosus  valdis  qui  dum  esset  supprior  in  conveatu  Lemovicensi 
el  in  gravem  et  periculosum  morbum  incidisset,  enixe  peliit  a  suo 
supprioratu  absolvi;  in  tantam  enim  limebat  onera  religtonis,  ut 
sisli  anle  tribunal  tremendi  judicis  cum  ipsis  non  auderet  ;  cumquc 
ejus  votis  &uperiores  satisfecissent,  tune  quasi  liber  pondère  mul- 
tum  ipsuni  premente,  laetus  exceBsit  e  vita,  anno  Domini 
MCCLXXXVI. 

0/ Frater  Petrus  deRupe  de  Reses(2),  qui  praedicti  fratris  Heliac 
fuit  successor  in  supprioratu  Lemovicensi,  ipsum  etiam  anno 
sequenti  sequutus  est  ad  sepulcrum.  Fuit,  teste  Bern.  Guidonis, 
modicus  corpore,  sed  magnus  virtute  et  praedicator  bonus.  Obiit 
aulem  XIII  kalendas  augusti'(3).  anno  MCCLXXXVIt. 

24.  [De  venerahili  fratre  Guilclmo  de  Forcellis]. 

Frateir  Guilelmus  de  Forcellis  de  Castro  Lemovicensi  (4)oriundus, 
vir  devotionis  el  sanctitalis  infatigabilis,  qui  de  oculis  suis  fontem 
feceratlacrimarum,  quaesiveoraret,  sive  missam  celebraret,  vel  de 
Deo  loqueretur,  staiim  fiuebant,  dutecs  lacrimae,  testes  amoris  et 
compunctionis  internae.  CbaritasDei  et  proximi  tanla  erat  in  corde 
ejus,  ut,  cum  intra  angustos  limites continerinequiret,  foras  ad  instar 
Rammae  erumpere  niteretur.  Quapropter  unus  fuit  ex  illis  fratribus 
qui  ad  Cumanorum  (S)  conversionem  procùrandam  missi  sunt,  nbi 
quot  et  quanta  incomoda  passus  sft,  ilie  novit  pro  quo  patiebatur, 
propter  quem  etiam  omnia  invicto  animo  superavit.  Sed  in  iribu- 
îationibus  suis  maximo  gaudio  replelus  est,  dum  pturimos  Cuma- 
norum cum  princtpibus  suis,  abjecte  inanium  deorum  cuttu,  vidit 
coUum  Chrisli  jugo  submitlere;  eorum  enim  conversioni  et  bap- 
tizationi,  teste  Bern.  Guidonis,  interfuit.  Reversus  demum  ex  illis 
geHdis  regionibns  in  natale  solum,  vitam  transegit  grandaevam  et 
oblongam  in  fervore  spiritus  et  assiduitate  orationis  et  fletus  ; 
annos  enim  supra  sexaginta  vixit  in  ordine.  Optandum  sane  ut 
venerabilis  B.  Guidonis,  qui  vitam  tam  sancti  viri  verbis  paucis 
perslrinxit,  prolixiorem  deea  suscepisset  narrationera,  sane  si  hoc 
esset,  omnium  virtutum  fervenlissimis  actibus  refectum  miraremur. 
Ex  paucis  tamen  quos  retulit  conjicere  licet  hujus  perfecti  yiri 

(f)  Nonlron  (Dordogne). 
(S)  Razès  (Haute-Vienne). 
(3>' 30  juillet. 

(i)  Limogcs-chAteau,  par  opposition  à  Limoges-cité. 
(5)  Les  Gumans  étaient  une  peuplade  tartnrc  alors  élablie  en  Hongrie, 
dans  la  région  appelée  aujourd'hui  Grande  et  Petite  Cumanie. 


330  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET  HISTORIQUE   DU    LlHOUSIN. 

perfectam  sanctimoaiam,  quae  illi  emiaentissimam  sedem  in  coelo 
comparavit,  V  kal.  maii  (1)  anni  MCCXCP. 

25.  [De  venerabili  fratre  Stephano  de  Malomonte]. 

Frater  Stephanus  de  Malomonte  (2)  cura  recoiiectione  interna  et 
pace  fraterna  in  sanctitate  vitae  assidua  vixit,  leste  Guidone,  qua- 
lem  illum  beatitudinem  quam  pacificis  Dominas  proroisit  assecu- 
tum  pro  cerlo  tenere  debemus.  Haec  pax  quam  habuit  cum  Deo  par 
vitae  sanctimoniam,  cum  se  ipso  per  recoUectionem  internant,  et 
cum  proximo  per  pacem  et  fraternum  amorera,  jusli  ejus  encomîî 
praebenl  materiam  tanto  copiosiorem,  quod  per  quinquaginta  annos 
quos  mansit  in  ordine  illam  sedulo  servavit,  et  quotidie  juge  sacri- 
ficium  offerens  Deo  quod  sane  tanto  saepius  et  reverentius  offerre 
polerat  ad  allare,  quo  se  magis  iramunem  erga  Deum  et  fratres  a 
culpa  sentiebat.  Tandem  hic  vir  pacificus  revelata  facie  visurus 
perrexit  in  patriam  quem  tolies  velatum  in  via  susceperat.  Obiil  Le- 
raovicae,  XVIII  kal.  februarii  (3),  anno  Domini  MGGLXXXXIII^ 

26.  [De  venerabili  fratre  Petro  Bometi], 

Frater  Petrus  Borneti  conversus  e  vico  Sancti  Joannis  super 
Ligoram  (4)  oriundus,  vir  modicae  staturae,  sed  virtutis  et  religionis 
excelsae  et  obedientiae  perfectae,  adeo  singuiaris  fuit  ejus  obser- 
vanlia  et  perpetuus  vitae  regularis  ténor,  ut  per  triginta  an- 
nos et  amplius  carnes  in  nullo  casu  comederit,  jcjunia  a  festo 
Sanctae  Grucis  (S)  usque  ad  pascha  in  nullo  casu  sive  intus  sive 
extra  fregerit;  quotidie  matulinis  precibus  intererat,  semperque 
alicui  bono  operi  erat  intentus  ut  nemo  illum  otiosum  viderit; 
horas  canonicas  clericorum  simul  et  conversorum  fere  singulis 
diebus  dicebat;  sicque  de  virtute  in  virtutem  progrediens,  per  quin- 
quaginta annos  et  supra  Deo  et  fralribus  indefesse  in  ordine  ser- 
viens  in  spiritu  et  veritale,  plenus  bonis  operibus  magis  quam  anuis, 
per  heroicam  patientiam  in  multis  et  gravibus  doloribus  et  morbis 
ingressus  est  in  atria  Domini.  Mirum  in  eo  videbalur  quod  litteras 
sacras  quas  in  scholis  non  didicerat  intelligeret  tamen  et  loqueretur. 
Plura  venerabilis  Ber.  Guidonis  de  eo  tacel  brevitalis  causa  ;  fatetur 
enim  se  mullo  praestantiora  in  eo  vidisse  quam  référât.  Ex  quibus 

(1)  27  avril. 

(%)  Peut-être  Maumont  (Corrèze). 

(3)  5  janvier. 

(4)  Saint-Jean -Ligourc  près  Limoges. 
(5j  U  septembre. 


LES  FiiBRBS   PRÊCHEURS   DE   LIMOGES.  3S1 

pensare  debemus  ad  quem  sui  status  apicem  perfectum  iste  devotus 
frater  perveneril;  quod  sane  suflSceret,  juxta  effatum  unius  summi 
pontificis,  ad  ejus  beatifîcationem.  Obiit  III»  Donas  martii  (1),  anno 
Domini  MGGXIG^. 

Hune  devotum  frairem  secuti  sunt  in  funere  post  aliquot  annos 
fraires  Stephanus  Martelli  et  Martinus  Bonelli  conversi,  qui  diu  et 
ulililer  servierant  in  ordine,  quique  ambo,  anno  Domini  M*  CGC»  II, 
obierunt  in  conventu  Lemovicensi. 

27.  [De  venerabili  fratre  Joanne  Mauridi]. 

Frater  Joannes  Mauricii  Lemovix,  sacerdos  et  praedicator,  vir 
magnae  orationis  quam  ab  initio  suae  conversionis  usque  ad  finem 
vitae  indefesse  continuavit,  in  qua  eliam  crebros  gemitus  et  lacrimas 
copiose  fundebat,  fuitplurimum  erga  seipsum  in  religione  severus, 
et  pro  observantia  regulari  conservanda  zelo  maximo  succensus. 
Quinquagmla  annis  vixit  in  fervore  spiritus  et  operatione  assiduus. 
Quapropter  in  eorura  numerum  receptum  censemus,  de  quibus  pro- 
phetaait  quod  dies  pleni  invenientur  in  eis  [Psal.  lxxii,  10].  Obiit 
pridie  kal.  martii  (3),  anno  Domini  MGGG^ 

28.  [De  venei^abili  fratre  Gerardo  Rosardi  de  Nontronio], 

Frater  Gerardus  Rosardi  (3)  de  Nontronio  vir  fuit  magnae  religio- 
nis  Jugis  contemplalionis,  orator  indefessus,  qui  assidue  choro  inte- 
rerat;  unde  B.  Guidonis  illum  vocat  nutricem  matrem  basimque 
chori  infrangibilem;  quibus  verbis  persuadere  vult  illum  tanto 
affectu  chorum  prosequutum  quanto  mater  unicum  amat  filium, 
nutrix  suum  fovet  infantulum,  et  basis  suum  sustentât  supposi- 
tum.  Tanto  enim  ardore  ad  divina  persolvenda  officia  properabat, 
ut  nuUo  negolio,  nulla  occupatione  ab  illisposset  avelli.  Vocat  eum 
insuper  Guidonis  virum  virlulis  et  veritatis,  quasi  dicat  illum  vir- 
lutibus  omnibus  copiose  refertum,  sed  maxime  verilate,  qua  ab 
omni  mendacio  abhorrebat,  in  tantum  ut  de  eo  dicere  possemus 
quod  ecclesia  de  B.  Dominico  pâtre  nostro  canit,  nempe  quod  lex 
veritatis  fuit  in  ore  ejus  et  quod  iniquitas  non  est  inventa  in  labiis 
ejus.  Obiit  in  vigilia  sancti  Lucae  evangelistae  (4),  anno  Domini 
MGGGVP,  ab  ingressu  vero  ordinis  anno  trigesimo  nono. 

(1)  5  mars. 

(2)  29  février  (année  bissextile). 

(3)  Le  ms.  original  portait  vraisemblablement  Ronsardi' 

(4)  \7  octobre. 


1 


3|i  SOCIKTé   ARCatoLOGIQUS   ET  RISTOtlQirR  DO   LIMOUSIN. 

29.  [De  tribus  fratribus  ad  cardinalatum  assumptis]. 

A  saeculo  millesimo  trecenlesimo  curreale  1res  fratres  ordinîs 
patria  Lemovicenses,  qui  omnes  fuerunt  leclores  artium  in  con- 
veolu  Lemovfcensi,  assumpli  saat  ad  cardinalatam,  quoram  pri- 
mus  fait 

a/  Frater  Gerardus  de  Sanclo  Adamaro  vd  potias  Daumario, 
conventus  Brivensis  alumnus,  qui  dum  Parisiis  legeret  Sententias, 
olectus  est  in  capitulo  générait  Carcassoneasi  ia  Magislrum  gène 
raiein  ordinis  et  successorem  fratris  Hogonis  Gampani,  anno 
Oomini  MGCCXLP;  deinde  ab  avunculo  suo  Glemente  sexto 
summo  pontifice  presbiter  cardiaalis  Sanclae  Romanae  Ecdesiae 
tituli  Sanctae  Sabinae  creatus  est.  In  ejus  gratîam  malttim  fovil 
'  ordini  nostro  summas  ponlitex  Glemcns  sextus  rescindendo  omnia 
quae  contra  ordine m  feceratBened ictus  papa  duodeeimus.  Sed  non 
(tiu  lanto  patrono  ordo  fratrum  Praedicatorum  apud  summum  pou- 
tiiicem  gavisusest;  nam  anno  revoluto,  morte  praematura  sublatus 
est.  Forsan  transtulit  illum  Deussicut  Enoch,  ne  fulgor  purporaeei 
pondus  legationis  Galliae  cor  ejus  elevarent  et  innoeentiam  labe- 
factarent.  Fuit  enim  vir  innocens,  gratus,  humilis  et  p^ica^  a«  in 
pauperes  munificus,  denique  omnium  virtulum  exemplar.  Obiit 
Tholosae  in  legatione  Gatliae,  anno  MGCGXLV<»(1),  sepultosque 
fuit  et  Iranslatus  in  convenlu  Brivensi  cujus  erat  professus.  In  Actis 
capituli  provincialis  Orlhesii  celebrali  anno  MGGCXVI%  prae- 
diclus  frater  Gerardus  de  Daumario  positus  fuit  lector  artium  in 
conventu  Lemovicensî,  et  frater  Ber.  Gapreoli  ad  legendum  Sen- 
tentias  ibidem.  In  capitulo  etiam  provincial!  apud  Lectoram  idem 
frater  Gerardus  assignatus  fuit  in  lectorem  theologiae  in  eodem 
convenlu  Lemovicensi  una  cum  fratre  Gerardo  de  Sancto  Aredio  (4). 

6/  Secundus  cardinalis  Lemovicensis  ordinis  nostri  fuit  vencra- 
bilis  fraler  Joannes  de  Molendino,  conventus  Brivensis  alumnns. 
Hic  in  capitulo  Rivis  celebrato  anno  Domini  MCCGXXIX*  assi- 
gnatus fuit  lector  secundarius  theologiae  in  isto  convenlu  Lemovi- 
censî, deinde  ad  munus  magislri  Sacri  Palatii  et  inquisitoris  Tholo- 
sani  evectus  ;  tandem  in  capitulo  generali  apud  Barcinonam  celebrato 
anno  MCCCIL*  electus  est  in  Magistrum  generalem  totius  ordinis: 

(I)  Le  calendrier  du  Missel  de  Jean  Joffrcd  Te  fait  mourir  en  I34Ï. 
bAi.uzE,  Vitaepap.  Aoen,^  IT,  752. 

(3)  Prima  Vua  démentis  VI,  dans  Baliizr,  VU,  pap.  Air.,  1,  xA^\ 
Tertla  Vlta,  /6i(i  ,98U,  Quarta  VUa,  Ikld.,  300,  Baluzs«  Ibid.^  8St,  066. 
—  QuÉTiP  cl  EcHAHD,  ScHpt.  oni.  PrtBd.  I,  (*09.  —  Douais^  Les^  frères 
Prêcheurs  en  Gascogne,  1 56,  24 1 ,  41 5. 


LES   PRfCItES   PRèCURlIRS   I^R  UKOGES.  323 

fr^itrum  Prâedicalorum:  in  quo  magislerio  mansil  solum  per 
annum  cl  dimidiuro,  quia  Clemens  papa  sextus  illum  in  defuncU 
nepolis  sui  fratris  Gerardi  locum  sublimavit,  eumque  cardinal^m 
presbiterum  lituli  Sanctae  Sabinae  creavit,  anoo  MCCCIL'',  kal. 
januarii,  dum  in  visilandis  ordinis  provinciis  in  Gallia  esset  occu- 
palus.  De  eo  legilur  quod  fuit  magnus  clericus  et  egregius  praedi- 
calor.  Obiit  aulem  Avenione,  anno  MCCCLVIII»,  et  ejus  corpus 
ad  convenlum  noslrum  Thoiosanum  inhumandum  delalum  est  (1). 
c)  Terlius  cardinalis Lemovicensis  ordinis  fralrura  Praedicatorum 
fuilvenerabilis  frater  Guillelmus  Sudre,  conventus  eliam  Brivensis 
alumnus,  qui  primo  in  capilulo  apud  Petracoras  celebralo  positus 
fuit  lectorarliumin  convenlu  islo  Leraovicensi,  anno  MCCCXXXI^, 
deinde  proviocîalis  Tholosanus  et  magister  Sacri  Palatii  factus, 
inde  ad  Massiliensem  episcopatumregendum  assumptusest,deinum 
ab  Urbano  quinlo  summo  ponlifice  presbiter  cardinalis  tituli  Sanc- 
lorum  Joannis  et  Pauli,  et  episcopus  Ostiensis  et  Veliternus  creatus 
est  (2).  Obiit  Avenione,  quarto  kal.octobris  (3),  anno  MGCCLXXIIP 
et  ibidem  in  conventu  fratrum  Praedicatorum  tumulatus. 

30.  [De  venerabili  fratre  Arnaldo  Trotan4i\. 
Frater  Arnaldus  Trotandi,  praedicator  fervidus  et  devQtus,  qui 

(1)  QoÉTiP  et  EcHARD,  Script,  ord.  Prœd.y  T,  6î7.  —  Prima  Vita  Cle- 
mentis  VI,  dans  Baluzk,  Vitae  pap.  Ao.^I.  259;  Tertia  Vita,  /è»d.,  996  ; 
Quarta  Vita,  Ibid.,  d08;  Baluze,  Ibid,,  906,  990.  —  Frrcki,  Monumenta 
converUuB  Toloaani  FF.  ordinis  Praedicatorum ,  Soeculum»  II,  an^  l.^50« 
n**  3.  —  Coemeterium,  Ibid,,  Pars  secunda,  cap.  Il,  n' a.  In-fol.,  Tou- 
louse, 1693.  —  Douais,  Les  frères  Prêcheurs  en  Gascogne,  439. 

(2)  a  Tercius  decirous  prior  provinciaiis  [provlucie  Tholosane]  frater 
Guilhermus  Sudre  convenlus  Brivensis,  oriundus  de  Laguena  ;  qui  cum 
esset  Icclor  CarcasbOimencis  elcctus  est  in  eodern  capilulo  Sancii  Gauden- 
cii,  anno  Domini  M.CCC.XLVili,  infra  octavas  apostoloruno  Pétri  et  Pauli; 
et  confirmalus  fuit  per  fratrem  Johannem  de  Molandinîs  Magistrum  ;  rexii- 
que  provinciam  duobus  annis,  post  quos  absolulus  per  liitcram,  factus 
magister  sacri  palacil,  ubi  legitad  honorcm  Del  el  ordinis  mnltis  annis, 
et  tandem  eleeius  episcopus  Hassiliensis  per  dominum  papam  Urbanum 
quinlum,  assumptus  est  in  presbyierum  cardinalem  tituli  sanctorum 
Johannis  et  Pauli  ;  deinde  promotus  est  in  episcopum  Hostiensem  et  Velle- 
trcnsem*.  Continuât  de  B.  Gui,  Prior  proo.  Bibl.  de  la  ville  de  Toulouse, 
ms.  490,  fol.  73  B.  —  Prima  Vita  Urbani  V,  dans  Baluzk,  Vitaepap.  Av,, 
I,  374,  385;  Secunda  VUa,  Ibid,,  405,  409;  Baluzk, /6td.,  990.  1037,  1036; 
lier  italicum^  Ibid,,  11,  771  et  ss.  —  Quétif  et  ëchard.  Script,  ord 
Praedy  l,  670.  —  âlbanrs.  Armoriai  et  sigillographie  des  éoéques  de 
Marseille,^^-  84.  ln-4«,  Marseille,  1884. 

(3}  38  septembre. 


3Si  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

procuravit  muUa  bona  conventui  et  inter  alia  dedicationem  eccle- 
siae  nostrae  Lemovicensis,  obiit  circa  annum  MCCGXX""*. 

31 .  [De  illustrissimo  fratre  Joanne  de  Podionucis] . 

liïustrissimus  fraterJoannes  de  Podionucis  (1)  conventus  Lemovi- 
censis alumnus,  ex  prioreejusdera  conventus  factus  est  Magisler  or- 
dinis  fratrum  Praedicatorum  (2)  tempore  schismalis  inter  Benedic- 
tum  Xni  et  Bonifaci'im  IX»™,  sed  poslea  electo  Ulini  in  capilulo  ge- 
neraliR.P.  fr.ThoraaFirmano  proobedientiaBonifaciinonilegitimi 
papae,  cedens  Magisterio  in  concilio  Constantiensi  factus  est  epis- 
copus  Catanensis  in  Sicilia  et  per  tredecim  annos  ecclesiam  suam 
gubernans,  obiit  tandem  circiler  {sic)  annum  MCCCCXXXI. 

Excmplar  epistolae  (3)  quam  sanctus  Vincenlius  Ferrerius  scrip- 
sit  ad  Reverendissimum  Palrem  Joannem  de  Podionucis,  reli- 
giosum  conventus  Lemovicensis  ac  generalem  ordinis  fratrum 
Praedicatorum. 

Reverendissimo  in  Christo  patri  fratri  Joanni  de  Podionucis, 
Magistro  generali  ordinis  fratrum  Praedicatorum. 

Reverendissimo  Magister  et  Pater, 

Propter  inestimabiles  me  tenentes  occupationes  non  valui  ves- 
irae  Reverentiae  scribere  ut  decebal  ;  nam,  ut  ven:m  fatear,  ex  quo 
recessi  de  Romanis  usque  nunc  inclusive,  quolidie  me  opportuit 
circumfluentibus  undique  popuUs  praedicare  et  frequenlissime 
celebrare.  Itaque  post  itinera  pro  communi  comestione,  dormi- 
tione  et  aliis  pertinentiis  vix  mihi  superest  tempus,  quinimo 
itinerando  opportet  me  ordinarc  sermones.  Verumtamem  ne  forte 
mihi  imputaret  non  scribendo  ad  negligentiam  vel  contemptum,  ex- 
torsi  mihi  per  quamplures  dies  et  septimanas  et  menses  aliquid 
teraporis  quotidie  in  tantis  occupalionibus,  ut  saltem  breviter  scri- 
berem  vobis  aliquid  de  via  quamfeci.  Novcrit  ergo  vestra  Reveren- 
dissima  Paternitas  quod  postquam  recessi  de  Romanis  ubi  me 
ullimo  dimisisti,  per  très  menses  continues  fui  in  Delphinatu  praedi- 

(1)  Jean  de  Puy  de  Noix,  né  à  Bcynac  (Haule-Vienne). 

{%)  A  la  marge  :  Extat  epUtola  fr,  VincentU  Ferrerii  ad  iUum  sicut 
ad  generalem  ordinis  fratrum  Praedicatorum, 

Qi)  ttuétif  et  Echard  ont  cru  celle  lettre  perdue,  ils  Tool  mise  sous 
la  date  du  t7  décembre  1403.  Script,  ord.  Praed,  1,766  b.  Ed.  en  partie 
dans  Act.  SS.,  April.  1. 1,  p.  480,  n«  H,  en  entier  par  Fonlaua,  Afo/ium. 
Domin.y  274  ;  traduite  par  Touroû,  Hommes  illustres^  t.  UI,  30. 


LFS   PRÈHBS  PHÊCfiBURS   HK   LIMOGES.  325 

cando  in  clrciiitu  ^erbuno  Dei  per  civitates,  casteilaet  yillad  in  qui- 
bus  Dondum  fueram  ;  praecipue  visitavi  très  illas  famosissimas  val- 
les  haereticorum  {i)  dioecesis  Ebreduni,  qaarum  una  vocatur 
Frizerna(3),  altéra  Ârgenteia  et  terlia  Vallis  puta.  Jam  quidem  antea 
visitaveram  eas  bis  vel  ter  ;  et  cum  devolione  ac  reverenlia  magna  per 
(irratiam  Dei  susceperant  catholicae  verilalis  doctrinam,  sed  ad  eorum 
confirroalionem  iterum  volui  visitare.  Qiio  peraclo,  ad  requestas 
et  rogamina  multorum  lam  verbo  quam  scripto  transivi  in  Lombar- 
diam,  obi  continuo  praedicavi  per  annum  et  mensem  in  cunctis 
iirbibns,  villis  et  caslris  nunc  obedienliae,  et  ultra  scllicet  in  domi- 
nio  Montisferrati,  et  ad  mullas  requestas  et  rogamina  domini  et 
suorum  ;  in  partibus  illis  ultra  montanis  quamplures  inveui  valles 
haerelicorura  tamValdensium  quamGazariorum  perversorum,quas 
percurri  in  dioecesi  Maurianensi  (3),  et  singulas  per  ordinem  visitavi 
praedicando  in  unaquaque  ipsarum  fidem  et  doctrinam  catholicae 
veritatis  cum  improbatione  errorum  ipsorum,  et  omnes  per  Dei 
misericordiam  ardentissime  et  cum  magno  devotionis  affectu  ae 
sermonem  confirmante,  causam  reperi  in  eis  praecipuam  haeresum 
et  errorum  esse  absentiampraedicalionum.  Nam,  ut  veraciter  per- 
cepi  ab  incolis  illis,  triginta  anni  erant  elapsi  quod  nullus  eis  prae- 
dicaverat  nisi  Valdenses  haerelici  qui  ad  eos  consuetudinarie  venie- 
bant  de  Apulia  bis  in  anno.  Ex  quo  considero,  Reverendissime 
Magister,  quanta  culpa  sit  praelalorum  ecclesiae  el  aliorum  qui  ex 
officio  seu  ex  sua  professione  habent  talibus  praedicare,  et  potius 
volunl  in  magnis  civilatibus  et  viliis  requiescere  in  pulcris  cameris 
cum  suis  obiectamentis,  interire  vero  animas,  pro  quibus  Ghristus 
salvandis  mortuus  est.  Pereunt  ex  defectu  presbiteri  spirilualis, 
cam  non  sit  parvulis  qui  frangat  panem  ;  messis  quidem  muila, 
operarii  autem  pauci.  Unde  rogo  Dominum  messis  ut  mittat  opera- 
rios  in  messem  suam.  De  episcopo  quodam  haereticorum  quem 
inveni  in  una  valle  illarum  quae  dicilur  Lusorio,  quomodo  voluit 
mecum  conferre  et  conversus  est  ;  item,  de  scholis  Valdensium 
quas  inveni  in  valle  quae  dicitur  Kngroya  et  earum  destructione  ; 
item,  deGazaris  haereticis  in  valle  Pontis,  quomodo  a  suis  abomi- 
nalionibus  conversi  sunt;  item,  de  haeriticis  vallis Lanlii  alias  Quini, 
ad  quam  olim  confugerant  interfectoresbeati  Pétri  marliris  (4),  qua- 
liter  se  habuerunt  erga  me  ;  item,  de  cessatione  partium  ;  item,  de 
guelphis  et  gibeiinis;  item,  de  conciliatione  et  pacificatione  gene- 

(I)  Les  Vaudois  ou  Pauvres  de  Lyon. 

(i)  EmbruD  ^Uaules-Alpes). 

(^)  SaiDl-Jean-de-MaurieDQC  (Savoie), 

(4j  Saint-Pierre  de  Vérone,  martyr,  près  Milan,  125:1. 

T.  XXXIX.  â1 


'iiÙ  SOCIÊTé  ARCUÉOLOGIQUB   ET   RISTORIQUR  DU   LIMOUSIN. 

rali  in  parlibus  illis,  el  de  aliis  innumeris  quae  Deus  dignatus  est 
operari  ad  gloriam  suaiii  et  utilitatem  aniuiarum,  taceodeprae- 
senti;  sed  in  omnibus  benedictus  sit  Deus.  Completis  autem  Irede- 
cim  mensibus  continuis  in  Lombardia,  intravi  Çabaudiam  et  quin- 
que  jam  sunt  menses  elapsi  ex  quo  requisitus  ulique  per  praelatos 
et  dominos  palriae  pluries,  cum  magno  effeclu  eam  visitavi,  per* 
curri  dioeceses  quatuor,  videlicet  Àugustoduni,  Taranlasiae,  Hau- 
riauae  et  Gebennae  (1),  quae  multum  habet  in  Sabaudia,  praedi- 
cando  in  circuitu  per  civi  ta  tes,  villas  et  castra  earum  plus  et  minus, 
prout  expediens  videbatur;  el  sum  modo  in  diocesi  Gebennensi. 
ïnter  alia  vero  enormia  inveni  in  parlibus  illis  unum  errorem  nimis 
dilalatum,  celebrando  feslum  solemniter  quolibet  anno  in  crastino 
Corpori3  Christi  et  tenendo  confratrias  in  nomine  Sancti  Orientis  ; 
dixcrunt  mihi  fratres  noslri  et  Minores  et  alii  religiosi,  ac  etiam 
curali  quod  non  audebant  jam  praedicare  vel  aliquid  dicere  contra 
hune  errorem.  Nunc  principaliler  insistendo,  praedicaodo  quotidie, 
Domino  coopérante  et  sermonem  efficaciler  confirmante,  extirpatus 
est,  gentesque  islae  venienles  nunc  dolent,  audientes  se  tantùm 
errasse  in  fide.  Cum  vero  per  Dei  gratiam  hic  error  fuerit  plenissime 
extirpatus,  habeo  inlrare  Lausanensem  dioecesim  et  protinus  era- 
dicare  morem  ilUim  paganorum  quem  habent  et  manifeste,  cum 
adorant  solem  sicutDeum,  maxime  rustici,  exhibendo  ei  de  mane 
suas  orationes  et  reverenliam  ei  faciendo.  Nam  ipsemel  Lausanen- 
sis  episcopus  bene  per  duas  vel  très  diaetas  venit  ad  me  humililer 
obsecrando  ex  corde  quod  suam  diocesim  visilarem,  ubi  sunt  muN 
tae  villae  haereticorum  in  iinibus  Alemanniae  et  Sabaudiae;  quod 
et  promisi.  Audistis  aulem  quod  haerelici  istarum  vallium  sunt 
nimis  temerarii  et  audaces;  sed  confidens  de  Dei  misericordia  con- 
sueta,intendo  ibi  esse  circa  lempus  instantis  quadragcsimae  ;  sicut 
aulem  fuerit  volunlas  in  coelo,  sic  fiat.  Socius  meus  frater  Anloni- 
nus  et  ego  simul  cum  eo,  humililer  nos  recomendamus  vestrae  Reve- 
rendissimae  Palernilati,  quam  virginis  filius  indelicienter  conser- 
ve! in  exemplum  et  custodiam  sanclae  observanliae  regularis. 
Amen.  Datum  in  civitate  Gebennensi,  die  décima  septembris,  anno 
millesimo  quadringenlesimo  quarto. 
De  manu  mea  loco  sigilH 

Inutilis  servus  Christi  humillissimusque  Tilius  vester 

Fr.  Vincentius  praedicator  (2). 

(1)  Aoste,  Tarantaise,  Saint-Jean  de  Maurieune  et  Genève. 

(2)  G'csl  à  celle  lettre  si  curieuse  de  saint  Vincent  Ferrier  que  faisait 
allusion  cet  oraieur  dominicain  du  xv®  siècle  dont  j'ai  irouvé  Ics^^rmon^. 
Elle  confirme  ma  conjecluro  que  le  maître  Vincent  de  ces  sermons  n'est 
autre  que  saint  Vincent  Ferrier.  Les  manuscrits  du  château  de  MeroUle, 
7i^  88,  89. 


LES   FRÈRES  PR^HBUBS   DE  LIMOGES.  327 

Hic  venerabilis  pater  frater  Joannes  de  Podio  nucis  ad  quem 
scripsit  hanc  epislolam  saoctus  Vincenlius  Ferrerius,  patria  fuit 
Lemoyicensis  el  ex  priore  bujus  sui  originalis  coaventus  Lemovi- 
censis  factus  est  geaeralis  in  capitulo  generali  ibidem  celebrato, 
anno  Dotnlni  1399;  fecitque  consiruere  capitulum  conveatus  et 
librariam  superius  tesludinatam  seu  arcuatam  cum  fenestris  ex 
parte  ciaustri;  in  qua  voiucnina  multa  et  magna,  antiqua  etiam, 
aulcjlborum  ordinis  etaliorum  manuscripta  et  impressa  videbantur 
incantenata  super  iignariis  scamnis  instar  veterum  bibliothecarum; 
quae  modo  non  extat,  sed  loco  ejus  staot  ceilae  et  capella  novitia- 
tus;  imagines  etiam  grandes  lapideas  sanctornm  patris  nostri 
Dominici,  Pétri  martiris,  Thomae  Àquinatis  etsanctae  Mariae  Mag- 
dalenae  in  dicto  capitulo  fleri  jussit,  quae  adhuc  supersunt.  Eral 
autem  generalis  conventuum  et  provinciarum  ordinis  in  regnis  et 
urbibus  quae  sequebantur  partes  Benedicti  XUP.  Fuit  fervens  reli- 
giosus  et  multum  exemplaris  superior  qui,  visa  decisione  concilii 
Gonstantiensis,  per  quam  B^nedictus  XlIIetalii  duoantipapae  Gre- 
gorius  XII^"  et  Joannes  XXIII"*  deciarabanlur  illegitimi  Christi 
vicarii,  una  cum  sancto  Vincentio  Ferrario  et  aliis  religiosis  et  pro- 
vinciis  ordinis  reliquit  partes  Benedicti,  cessitque  generalatui 
ordinis  in  manibus  Martini  quinti  unanimiter  electi  in  pa- 
pam  ;  qui,  cognila  ejus  integritate,  elegit  ipsum  in  suum  confessa- 
riura  ac  deinde  in  episcopum  Catanae  in  regno  Siciliae,  suumque 
magnum  vicarium  apostolicum  creavit  in  iilis  parlibus.  Fuit  autem 
generalis,  ut  notalur  in  veteri  kaiendarlo  conventus  Lemovicensis, 
per  annos  decem  et  octo  et  deinde  episcopus  Gatanensis  per  trede- 
cim  annos;  obiitque  annoDomini  1431. Non  legitur  ubi  sitsepultus; 
auturoandum  [estj  sane  illum  in  urbe  sua  episcopali  defunctum  et 
tumulatum,  in  cujus  archiviis  plura  de  eo  possent  reperiri.  Non 
etiam  reperiuntur  Àcta  capiluli  generalis  tempore  sui  generalatus 
in  conventu  Lemovicensi  celebrati,  nisi  quod  ipse  primus  fuit  qui 
in  hoc  suo  capitulo  instituit  ut  ofticium  Beatae  Virginis,  matutinis 
et  laudibus  exceptis,  in  choro  recitaretur.  Praedictus  autem  P.  fr. 
Joannes  de  Podio  nucis  successit  in  goneralatu  ordinis  fr.  Nicolao 
Vallisoletano  (1),  qui  successerat  fr.  Nicolao  de  Trilia  (2)  et  iste 
fr.  Helyae  Raymondi  (3),  qui  vocatur  Tholosanus,  quamvis  esset 
Petracoricensis  et  alumnus  convenlus  B  T^^eracensis  ;  cui  fratri 
Helyae  Tholosano  nominato  successerat  frater  Raymundus  de 
Capoa(4}  pro  provinciis  quae  legitimo  pontiiici  Urbano  Vl"*  adhac- 

(1)  QuÉTiF  et  EcHARD,  Script.  ord.  Praed.,  I,  706. 
(9)  Alias  de  Troia.  Quetip  et  Ecu\ko,  Ibld.^  1,  702. 

(3)  QuAtif  et  EcBARD,  Jbid  ,  1,  OtiO. 

(4)  QuÊTiF  el  KcHARO,  Ibid.,  I,  G79. 


3â8  SOCIÉTÉ   ARCBÉOLOGIQUB   ET    niSTORIQVE  DU   LIMOUSIN. 

rebant;  et  illi  fr.  Raymundo,  fr.  Thomas  de  Firme  (4);  et  huic,  fr. 
Leonardus  Slacius  de  Florenlia,  qui,  wt  ait  sanctus  Anloninos, 
3*  p.  Hist.,  C.  12,  iQ  concilie  Constantiensi  fuit  deputalas  unus  de 
electoribus  papae  Martini;  et,  ablato  schismate  in  dicto  concilio, 
remansit  unicus  lotiusordinisMagister.  Al  vero,ut8cribitidenn  sanc- 
tus Antoninus,  qui  erant  tune  temporis  in  aliqua  una  dignilate  plu- 
res  conslituti  quae  dividi  non  posset,  uni  eorum  dabatur  illanempe 
dignitas,  et  alleri  aliud  recompensatorium  sicut  in  ordine  fralrum 
Praedicatorum  conligit,  in  quo  erant  duo  Magistri  générales  in 
duabus  obedientiis,  nempe  fr.  Leonardus  de  Florentia  in  obedieniia 
Joannis  XXIIP,  et  quidam  alius  notabilis  Magister,  qui  fuit  praefa- 
tus  venerabilis  P.  frater  Joannes  de  Podio  nucis,  in  obedieniia 
Benedicti  XXIir.  Decretum  ergo  fuit  ut  Magisterium  lotius  ordinis 
cum  unum  sit,  sicut  ipse  ordo,  remaneret  fralri  Leonardo;  alteri 
vero  collatus  episcopatus  Calanensis,  notabilis  dignilas  in  Sicîlia: 
et  sic  in  similibus  (2). 

Circa  praecedenlia  in  brevi  catalogo  Magislrorum  generaliom 
etvirorum  illustriura  ordinis  fratrum  Praedicatorum,  item  et  in 
libro  privilegiorum  conccssorura  eidem  ordini  a  summis  ponliûci- 
bus  compilalo  jussu  Reverendissirai  P.  fr.  Slephani  Ususmaris  (3), 
generalis  ejusdem  ordinis,  qui  liber  habetur  in  conventu  Carcas- 
sonensi,  leguntur  sequentia  : 

«  Vigesimus  primus  Magister  ordinis  fr.  Simon  Lingonensis  pro- 
vincialis  Franciae,  qui  fuit  electus  in  eonvenlu  Castrensi. 

«  Vigesimus  secnndus  frater  Helias  Raymundi  Pelragoricensis, 
domini  papae  poenitentiarius,  anno  1367,  Avenioni  ex  ordinis  vica- 
rio  Magister  eleclus  per  viginti  duos  annos  praefuit.  Primus  capi- 
tula biennia  instituit  schismalis  lempore  anno  1380;  cum  provin- 
ciis  Franciae  et  aliis  Cleraenti  VII  anlipapae  obedientibus  eidem 
adhaesit,  ac  anno  1389  Avenioni  defunctus  est.  Ex  provinciis  ergo 
quae  Clcmenti  adhaerebant  fralres  Cesaraugustae  congregali  anno 
1391  elegerunt  fr.  Nicolaum  de  Trilia  Provinciae  regni  ;  quo  posl 
très  annos  defuncto,  in  ejus  locum  sufîeclus  est  fr.  Nicolaus  Valliso- 
letanus  provincialis  Hispaniae,  cui  anno  ^399  successit  fr.  Joannes 
de  Podio  nucis,  prier  Lemovicensis,  electus  apud  Lemoricas.  qui 
rexit  ordinem  usque  ad  annum  i419,  quando,  sublato  de  ecclesia 
schismale,  totus  ordo  unius  lantum  Magistri  Leonardi  Statii  obe- 
dientiam  amplexus  est.  De  quo  infra. 

«  Vigesimus   ergo    tertius    legitimus   Magister   generalis    fuit 

(1)  QUBTIF  et  ECHARD,  Ibld.^  l,  7-47. 

(î)  QuÉTiF  cl  EcHARD,  ScHpt,  ord.  Praed.,  I,  708;  JI,  8ÎI. 

(3)   UUKTIF  cl  ËCUARD,  Ibid.^  Il,    U3. 


LKS   PABRKS   PRÊCHEURS   DR  LIMOCRS.  320 

fr.  Rayraundus  de  Capua,  provincialis  Lombardiae,  a  provinciis 
Ilaliae  et  aliis  Urbano  VP  legilimo  ponlifici  obedientibus  eleclus 
BoQoniae  anno  1380.  Hic  regularis  vitae  reparalioni  quae  tune  in 
Germania  sub  fratre  Conrado  Teutonico  et  in  Italia  sub  fratre 
Joanne  Dominici  parvis  initiis  oriri  coeperat,  plurimum  favit  per 
decem  et  novem  annos  quibus  ordini  sanclissime  praefuit,  ac  tan- 
dem anno  1399,  Nurimbergae,  5  oelobris,  sancte  obiit.  Hic  annus 
fuit  1399  quo  noster  fr.  Johannes  de  Podio  nucis  electus  fuit  Le- 
movicae,  in  capitule  generali  ibidem  celebrato,  in  Magistnim  gene- 
ralem  ordinis,  qui  tune  alium  non  habebat  nec  in  Italia,  nec  in  Gai- 
lia,  donee  anno  1401,  provinciae  Bonifacio  IX  adhaerenles 
elegerunt  apud  Ulinum  fr.  Thomara  de  Firme,  et  post  islum  fr.  Léo  • 
nardum  SUilium  Florentinum.  » 

32.  {De  venerabili  fratre  Joanne  Mathaei]. 

Fraler  Johannes  Mathaei,  sacerdos  et  praedicator,  fuit  prier 
hujus  convenlus  Lemovicensis  ;  quo  tempore  multa  bona  conventui 
procuravit  et  imprimis  imagines  sanctorum  ordinis  quas  posuit 
super  calhedras  chori.  Insuper  ille  est  qui  nomina  fratrum,  qui  ab 
anno  MCCCGXIP  obierunt  usque  ad  annum  MCCCCILXIX  dili- 
genter  nolavit.  In  bis  et  aliis  multis  bene  meritus  de  convenlu 
Lemovicensi,  obiit  anno  MCCCCLXXII,  die  prima  novembris; 
sepultusque  fuit  in  clauslro  prope  oslium  sodalitii  Beatae  Mariae 
Virginis,  ubi  effigies  ejus  insculpta  in  ultime  lapide  cernitur. 

33.  [De  venerabili  fratre  Joanne  Peconeti], 

Frater  Joannes  Peconeti,  sacerdos,  hujus  conventus  alumnus, 
post  consummatum  cursum  longioris  et  annosae  vitae,  quam  in 
bonis  operibus  et  moribus  transegerat,  ad  semper  tranquillam  et 
foelicem,  ut  pie  creditur,  transiit  in  vigilia  sancti  Valentini, 
13*  februarii,  anno  Domini  MDXVP. 

34.  [De  venerabili  fratre  Joanne  Mazelier], 

Frater  Joannes  Mazelier,  hujus  conventus  alumnus,  fuit  poeni- 
lenliarius  domini  episcopi  Lemovicensi-^,  et  prier  convenlus  nostri 
in  eadem  urbe,  cui  multa  bona  procuravit.  Gum  autem  per  quadra- 
gesimam  in  civitate  Sancti  Leonardi  concionaretur,  ibidem  morluus 
est  et  iranslatus  inde  ad  conventum  Lemovicensem,  ubi  juxla  fun- 
datores  conventus  fuit  inhumatus,  anno  Domini  MDXLI®. 

35.  [De  venerabili  fratre  Aegidio  Berton], 
Frater  Aegidius  Berton,  conventus    et  civitatis  Lemovicensis 


330  SOCIÉTR   ARCHFOLOGIQUR    RT   HISTORIQUE   DU  IJUOrSIN. 

alumnus,  dum  ex  obedientia  et  charitate  in  colligendis  fïdelium 
eleemosinis  ad  sustentalionem  fratrum  suorum  esset  occupatus  in 
loco  de  Anedo  (1),  vila  funclus  est  anno  DominI  MDIL"*. 


XV. —  De  reformatione  conventus  Lemovicensis. 

Ânno  circiter  roillesimo  sexcentesimo  tertio,  R.  P.  Henaldus 
Rabaudus,  prier  conventus  Lemovicensis,  tactus  dolore  cordis 
intrinsecus  propter  incompositos  mores  fratrum  sui  conventus  et 
neglectam  ab  eis  ac  pessundalam  regulae  ac  constitutionum  ordinis 
fratrum  Praedicatorum  observantiam,  tanto  malovolensoccurrere, 
Roroam  petiit  cum  aliis  religiosis  eodem  zelo  incensis;  detulitquc 
secum  litteras  commendatitias  consulum  et  optimatum  urbis  Lemo- 
vicae,  quibus  Reverendissiraum  patrem  generalem  enixe  preca- 
bantur,  quatenus  aliquos  fratres  e  striction  observantia  mitterel 
Lemovicas  ad  conventum  praedictum  reformandum.  Eorum  votis 
et  petitioni  annuens.  Révérend issimus  Pater  Hieronimus  Xa- 
vierre  (2),  pro  tune  Magister  generalis  ordinis,  ad  illos  hanc  misit 
epistolam  : 

«  Âdmodum  illustres  Domini,  salutem. 

))Cum  vestras  litteras  accepi,perlegi  el  consideravi,vixlacrimaruni 
habenas  coropescere  potui,  audiens  tantas  strages  conventui  nostro 
nobilissimo  et  sanctorum  seminario  ab  humani  generis  ho^^te  illatas; 
nec  sane  tanlo  malo  mederi  posse  sperarem,  nisi  vestrum  promptum 
animum  et  ardens  desiderium  dictum  conventum  juvandi  perpen- 
dissem.  Quare  patres  istos  advenientes  religionis  zelantes,  refor- 
mationem  appetentes  et  a  vobis  coromendatos  humanissime  excepi 
et  omnia  quae  eorum  desiderium  et  regularis  observantiae  instaura- 
tionem  posse  juvare  cognovi,  libentissime  conc^^ssi  et  ordinavi. 
Obnixe  igitur  vos  rogo  ut  dictam  reformationem  foveatis,  protega- 
tis,  et  ut  patres  filios  amplexemini.  Valete. 

»  Romae.  die  I9&  maii  anni  1604. 

»  Admodum  illustres  domini  vester 

»  Ad  vota 

»  F.  Hieronimus  Xavierre,  generalis 

ordinis  Praedicatorum.  d 
Ad  petitionem  igitur  consulum,  civium  et  quorundam  religio- 

(1)  Nedde  près  Eymouliers  (Hauie- Vienne)  possédaii  un  prieuré  rele- 
vant de  Tabbaye  de  Soligoac. 

(2)  QuÉTiP  et  EcBARD,  Script,  ord.  Praed.^  II,  343. 


LES  FRÈRBS   PHÊCHBORS    DB   LIMOGES.  331 

sori:ni  convenlus  Lemovicensis,  missi  fuerunl  de  mandalo  et  volun- 
tate  Magistri  generalis  ordinis  e  convenlu  Tholozano  reformalo 
Iresfratres,  nempeP.  fr.  RenalusChaillanl  Andegavensis,qui  factus 
faitprior  convenlus  Lemovicensis,  P.  fr.  Guiielraus  Guibert  Lerao- 
vix  et  fr.  Pelrus  Daudiere  diaconus;  qui  omnes  pro  stabilienda 
striction  observanlia  iaboraverunt  in  tantum,  ut  suo  bono  exemplo 
multos  scholares  ad  conventum  et  ordinem  attraherent.  Sed  proh 
dolor!  nondum  erat  maturus  fructus  reformationis  pro  conventu 
Lemovicensi.  Vix  enim  unus  aut  aller  annus  effluxerat,  («uod  patres 
provinciae  quibus  exosa  erat  reformatio  coegerunl  iilos  Tolosam 
reverti,  intimantes  eis  fraudulenter  aliquas  litleras  Magistri  ordi- 
nis et  obedienliam  falso  sigillo  consignatam,  cui  nimis  creduliler 
obedienles  reliquerunt  conventum  et  reformalionem  in  eo  inchoa- 
lam,  maximo  omnium  bonorum  civium  moerore,  qui  eos  muilum 
diligebant  ac  venerabantur,  eisque  largas  faciebant  eleemosinas. 
Negotium  ergo  reformalionis  inteclum  remansit  usque  ad  annum 
MDCXXII"",  quo  piis  aliquot  civibus  denuo  instantibus  per  litle- 
ras apud  Reverendissimum  palrem  generalem  Seraphinum  Siccum 
pro  renovanda  reformalione  in  praedicto  conventu  Lemovicensi, 
ille  tandem  ad  Reverendum  P.  Georgium  Laugerium,  vicarium 
congregalionis,  talem  destinavit  epistolam  : 

«  In  Dei  filio  sibi  diiecto  admodum  Reverendo  P.  magistro  fratii 
Georgio  Laugerio,  vicario  nostrae  congregalionis  occitanae  ordi- 
nis Praedicalorum,  fr.  Seraphinus  Siccus  (1)  Papiensis  sacrae 
theologiae  professor  et  totius  ordinis  ejusdem  humilis  Magister 
generalis  et  servus. 

»  Inenarrabili  gaudio  perfundimur  cum  restaurandae  regularis 
disciplinae  uti  (2)  a  vetere  instituto  defeceril,  opportuna  nobis  sese 
offert  occasio.  Cives  Lemovicenses  instantissime  a  nobis  petierunt 
ut  reformalionem  in  nosiro  conventu  ea  in  ci  vitale  silo  inslituere 
vcllemus,idque  tum  Reverendissimo  ejusdem  civilalis  episcopo  cum 
universo  clero,  tum  cunclis  magislralibus  ac  civibus  gratissimum 
fore  affirmarunt.  Quare  nos  hujusmodi  occasionem  amplecli  urge- 
reque  cupientes,  presenlium  tenore  districte  libi  pr^ecipimus  ut 
quamprimum  ad  eam  Lemovicensem  civitalem  te  conféras  et  refor- 
malionem juxta  nostras  constitutiones  in  praedicto  nostro  conventu 
instituas,  fratres  ibi  degentes  suscipiendae  reformationi  paratos 
reipsa  reformes  ;  nonnuUos  ex  fratribus  tuae  congregalionis  quo 

(0  QoiTiP  ei  EcBARD,  Script,  ord.  Praed.,  II,  379. 
(2)  Ubi  sans  douie. 


5.13  SOCIl^TR   ARCBÉOLOOIQUF.  ET  BISTOBIQUK   DU   LIMOUSIN. 

foelicius  pergat  negotium  adciscas  ;  praesentem  prioron  Patrem 
roagistrum  Guilelroum  Sicreum,  si  reformationi  sit  adversus.  Tel 
eam  vere  suscipere  et  promovere  neglexerit,  ab  officio  deponas, 
aliumque  virum  gravem  de  reformatione  bene  meritum  eligi  cures 
et  electum  confirmes,  veluli  Palrera  Guilelmum  Guibert,  supprio- 
rem  convenlus  Annuntiaiae  Parisiensis,  aut  P.  fr.  Andream  Lagarde 
unicum,  ut  accepi,  illius  conventusfilium  reservatum,  aut  aliumali- 
quem  rjui  pro  tua  prudentia  ad  fovendam,  tuendam  a  te  institutam 
reformationem  sit  idoneus.Fratribus  vero  aliis  iu  eodemmet  convenlu 
Lemovicensi  existenlibus  et  vitae  reformatae  resislentibus  de  aliis 
conventibus  a  suo  provinciali  provideri  cures,  omniaque  et  singula 
facias  [quae]  ad  instituendam  juxta  nostras  constitutiones  reforma- 
tionem necèssaria  tibi  visa  fuerint  et  opportuna;  ad  ea  enim  pera> 
genda  his  nostris  tibi  plenam  authoritatem  et  Tacultatem  conferi- 
mus,  excepto  quod  praedictum  conventum  a  sua  provincia  separare 
non  possis.  Mandamus  vero  fratri  provinciali  nostrae  provinciae 
Tholozanae  et  quibuscumque  fratribus  ejusdem  provinciae  aliisque 
nostrae  obedienliae,  sub  formali  praecepto,  necnon  sub  poena  ex- 
coromunicationis  latae  sentenciae,  bac  una  pro  trina  canonica 
monitione  praemissa,  ne  te  ullomodo  sive  per  se  sive  per  alios, 
directe  aut  indirecte,  impedire  audeant,  quominus  hoc  tibi  reforma- 
tionis  injunctum  munus  libère  exequi  etperficere  valeas.In  nominc 
Patris  et  Filii  et  Spirilus  Sancti.  Amen.  In  quorum  fidem  his  officii 
nostri  sigillo  munitis  manu  propria  subscripsimus.  Datum  Romae, 
die9»Juliian.  1621.  ^> 

Rdus  p^  fr  Georgius  Laugerius,  vicarius  congregationis,  hac 
accepta  Reverendissimi  epistola,  Lemovicas  se  contulit,  ut  injunc- 
lae  reformationi  totis  viribus  intenderet;  et  hac  de  causa  misit  qua- 
tuor patres  reformalos,  nempe  R.  P.  fr.  Thomam  Gergot  Lemovi- 
c[ens]em  quem  dédit  in  priorem  conventus,P  fr.  Hyacintum  Decor- 
des,  P.  fr.  Franciscum  JonquouxetP.  fr.  Andream  Lagarde,  et 
alios  successive,  qui  pauperrimum  et  ex  magna  parte  destruclum 
recipienles  conventum,  ipsum  interiusexteriusque,  Deo  bene  ipsos 
juvante  et  piis  largas  illis  eleemosinas  largientibus,  reformarunt  ; 
imprimis  enim  ecclcsiam  et  sacristiam  novis  ornamentis  decora- 
runt,  bibliotecam  mullis  libris  auxerunt,  et,  quod  satius  ac  utilius 
est,  plures  juvenes  bonae  voluntatis  tanquam  reformationis  propa- 
gines novas  habilu  ordinis  nostri  induerunt.  Sicque  per  Dei  graliam 
et  vilam  eorum  exemplarem  conservalus  fuit  convenlus  et  confir- 
matus  in  strictiori  observanliain  tanlum,  ut  etiam  segregalus  fueril 
post  aliquot  annos  a  jurisdiclione  provincialis  non  reformali  uni- 
tusque  congregationi  reformatae,  quae  nunc  provincia  Tholozana 
nuncupatur.  Faxit  Deus  ut  in  perpeluum  in  reformatione  perma- 
neat.  Amen. 


LKS   FnÈRRS  PBAcHCORS  DE   LIMOGES.  3S3 


XVI.    —  OBITUS   FRATRUM   POST   I.NTRODUCTAM   REFOUMATICNEM. 

4.  Primus  frater  qui  post  receplam  slrictiorem  observantiam  in 
conventQ  Lemoviceosi  obiit,  fuit  Tr.  Dominicus  Buisdeligand  con- 
versus  boDus  et  anoosus,  qui  multum  laboravit  pro  introducendis 
patribus  reformatis  in  hune  conventum  Lemovicensem,  el  cum 
ipsis  zelo  vilae  regularis  incensus  remansit.  Ideo  pie  credendum 
illum  a  Domino  misericordiam  consequutum,  pro  cujus  amore  el 
honore  institutae  reformationi  tantopere  faveral.  Obiit  autem  circa 
annum  Domini  MDCXXVd'^'",  sepultusque  fuit  inclaustro. 

2.  Anno  Domini  MDCXXXP,  die  18»  augusli,  peste  ictus  obiit 
R.  P.  fr.  Franciscus  Secousse,  conventus  Tholosani  professus  et 
tertius  prior  conventus  Lemovicensis  post  reformatiooem  de  eo 
factam.  Hic  fuit  praedicator  doctus  et  fervidus  qui  in  muitis  cathe- 
dralibus  concionatus  fueral,  lectorque  theologiae  admodum  dodus 
extiterat.  Tandem  apudBeynacum  (l)prioratum  conventus  Lemovi- 
censis quo  iverat  luem  declinandi  causa,  incidit  in  eam;  sicque 
perdevote  et  dulciter  psalmos  et  bymnum^v^,  JUaris  Stella  canens, 
defunctus  est  et  ibidem  in  coeraeterio  communi  sepuUus. 

3.  Eodero  anno  et  eodem  modo  apud  Beinacum  obiit  fr.  Joannes 
Desnols  con versus  natione  belga,  professus  conventus  Sanctae 
Mariae  Annunliatae  Parisiensis,  reiigiosus  perdevotus,  pius,  obser- 
vantissimus  et  valde  laboriosus,  qui  in  eodem  loco  de  Beynaco  in 
coemeterio  communi  fuit  sepuitus. 

4.  Eodem  quoque  anno  et  eodem  modo  obiit  in  conventu  Lemo- 
vicensi  mense  martio  peste  correplus  fr.  Hyacintus Saint  conversus, 
filius  conventus  Tuliensis  in  Lolharingia,  devotus  et  laboriosus  fra- 
ter ;  sepultusque  fuit  sub  infirmaria  conventus  ubi  decessit. 

5.  Ânno  circiter  millésime  sexcentesimo  trigesimo  quinto,  obiit 
in  conventu  Albiensi  Rd"«P.  fr.  Thomas  Gergot  Lemovix,  qui  fuit 
primus  prier  conventus  Lemovicensis  ab  introducta  reformatione 
ac  de  illo  bene  et  optime  merilus;  quem  enim  pauperrimum  et 
undique  fere  desolatum  receperat  gubernandum,  sua  soUicitudine 
et  in  agendis  solertia  tum  in  ornamentis,  libris  et  paramentis  pluri- 
mom  ornavit  ac  reparavit.  Fuit  enim  vir  reiigiosus  et  exemplans, 
Rosarii  beatissimae  virginis  Mariae  singularis  praedicator  et  egre- 
gius  cultor,  ac  propterea,  ut  pie  credendum  est,  inter  ephebos 
tantae  reginaein  coelo  collocatus  post  trigesimum  a  sua  professione 
annum. 

(i)  Beynac  près  Limoges 


334  SOCIBTR  ARCHEOLOGIQUE  BT  HI8T0RIQDB  DU  LIMOUSIN. 

H.  R.  p.  fr.  Ludovicus  Bertrand,  Lemovix  hiijusque  coaventus 
professas,  boDus  et  devotus  religiosus,  dura  Tholosae  concionalo. 
ris  ordinarii  munas  obiret,  ex  hac  luce  sublractus  in  aeternam  mi- 
gravit  in  convenlu  Tholozano,  circa  annum  MDCXXXVI. 

7.  R.  P.  fr.  Hyacintus  Binet,  urbls  et  convenlus  Lemovicensis 
alumnus,  postquam  fideliter  et  constanter  desudasset  pro  introdu- 
cenda  et  conservanda  strictiori  observantia  in  conventu  Carcasso- 
nensi,  ibidem  moriens  laborum  mercedem  percepit,  circa  annum 
MDCXXXVI. 

8.  R.  P.  frater  Geraldus  Garcias  Arvernus  natione,  professas 
conventus  Tholozani,  vir  religionis  observantissimas  et  bonus,  qui 
bis  fuit  prier  conventus  Lemovicensis  post  admissam  reforoiatio- 
nem  ac  de  eo  bene  meritus;  tempore  enim  sui  prioratus  dormito- 
rium  ex  parte  Sancti  Michaelis  de  Pistoria(l)  fere  perfecil  et  aplum 
ad  manendum  reddidil.  Tandem  initio  sui  repetiti  prioratus,  obiit 
anno  Domini  MDCXXXIX»,  die  IX*  februarii  ;  sepultusque  fuit 
in  capitule. 

9.  Eodem  anno  1639,  obiit  in  eodem  conventu  fr.  Gabriel  Fau- 
cher, conversus,  oriundus  e  vico  Sancti  Joannis  de  Ligora  (i)iD  Le- 
movicinio  et  hujus  conventus  professus,  devotus  valde  ol  laboriosus 
religiosus. 

10.  Hune  secutus  est  eodem  anno  alius  frater  conversus,  Nicolaus 
Pricquel  nomine,  qui  eral  professus  conventus  Sanclae  Hariae 
Annunciatae  Parisiensis;  fuitque  dum  viverel  admodum  religiosus 
et  plus,  fidelisque  et  expertus  oeconomus.  Obiit  in  convenlu  Lemo- 
vicensi,  sepultusque  est  in  claustro  ante  osliumecclesiaesubulliaio 
lapide. 

H.Anno  Domini  1639,  obiitillustrissimusR.  P.  fr.  Franciscusde 
Lomenius  Lemovicensis  et  ordinis  fratrum  Praedicalorum  alumnus, 
qui  primum  factus  fuit  abbas  abbatiae  de  Josaphal,  deinde  episco- 
pus  Massiliensis  per  mullos  annos  (3).  Hic  parentes  videndi  causa 
venions  Lemovicas,  ibidem  in  gravem  et  extremum  morbumincidit, 
cumque  acutis  doloribus  gravaretur,  haec  solum  verba  ad  Deum  se 
convertens  ilerabat  :  «  Domine,  non  sum  aeneus.  »  Post  ejus  obi- 
tum,  corpus  ejus  delatum  est  ad  ecclesiam  conventus  Lemovicensis 
ut  ipse  vivons  pelierat,  in  qua  per  unam  noctem  mansit;  deinde 
ad  ecclesiam  cathedralem  Sancti  Stephani  comilante  episcopo  Le- 
movicensi  in  pontiflcalibus  cum  universo  clero  tam  seculari  quam 
regulari,  in  sepulcris  majorum  fuit  repositum;  ejusque  funebrem 

(i)  Saint-Micbel-de-Pislorie,  église  paroissiale  de  Limoges. 
(3)  Saiiil-Jean-Ligoure  près  Limoges. 
(3)  1634-1639. 


LES   FRàllES  PRÈCBBORS   DV   LIMOGES.  33S 

orationem  panygericam  (sic)  pronunliavit  R.  P.  fr.  Basilius  Vivi- 
nus(l),  convenlus  Lemovicensis  alumnus. 

iâ.  Ânno  DomiDi  1643''  die  21'*  junii,  obiit  in  bac  conventu 
Lemovicensi  fraler  Raymundas  Bodet  conversas,  olim  professus 
conventus  Foutenensis  in  provincia  Franciae,  qui  zelo  vitae  regula- 
ris  enixe  petiit  in  conventu  iste  affiliari,  in  quo  pie  et  laboriose 
vivens,  res  communes  et  religionem  zelans,  iaborum  metam  inve- 
nil;  sepultusque  fuil  in  clauslro  ante  porlam  capiluli. 

13.  Eodem  anno  1643  [obiil]  venerabilis  P.  fr.  Ludovicus  Lacour 
Leodiensis  in  Belgio  et  conventus  Tullensis  in  Lotharingia  profes- 
sas, assignatus  lamen  in  conventu  Lemovicensi  in  quo  religiosis- 
sime  conversatus  est.  Erat  enim  vir  bonus,  simplex  et  charitalis 
visceribus  affluens  pro  proximis,  quorum  confessiones  bumaniter 
et  bénigne  excipiebat  (am  in  infirmitate  quam  sanitate,  pro  quorum 
etiam  sainte  se  mortis  periculo  lempore  pestis  exposuil.  Enituit 
insuper  ejus  chantas  erga  damnatos  ad  mortem  ob  crimina,  quos 
ad  suplicium  comitabatur  suisque  exhorlationibus  et  admonitioni- 
bus  illius  acrimoniam  minuere  nitebatur.  Tandem  post  multa  cha- 
ritatis  opéra  migravit  adDominum  in  balneisBorbonicis(2)ad  quae 
sanitalis  recuperandae  causa  se  conluierat;  sepultusque  fuit  hono- 
rifice  in  conventu  nostro  Molisnensi  tanquam  proximiori. 

14.  AnnoDoraini  1644*»,  die  16*  julii,  obiit  in  hoc  conventu  Le- 
movicensi R.  P.  frater  Ambrosius  Bonet  ex  oppido  Nexonii  in  Le- 
movicinio  oriundus,  suppriorque  existens  pro  tercia  vice  dicli 
conventus.  Hic  fuit  religiosus  admodum  erga  seipsum  austerus, 
jejuniis,  vigiliis,  disciplinis  et  aliis  austeritalibus  corpus  macerans. 
Sororibus  tertii  ordinis  praeposilus,  eas  ad  perfeclionis  apicem 
tum  verbis  tum  exemplis  animabat.  Infirmos  et  pauperes  lubenter 
visitabat,  eos  suis  exhortationibus  ad  patientiam  accendens,  quod 
dum  faceret  in  xenodochio  suam  ibi  ultimam  contraxit  aegritudi- 
nem,  quae  illi  ad  coelos,  ut  pie  autumandum  est,  aditum  palefecit. 
Post  ejus  mortem  populus  qui  eum  summopere  diligebat  ac  vene- 
rabatur,  non  cessavit  conlluere  ad  videndum  corpus  ejus  tota  die 
qua  mansit  in  feretro  expositum;  quidam  etiam  parliculas  vestium 
ejus  scindere  visi  sunt,  quas  in  reliquias  servaverunt.  Sepultus 
fait  in  claustro  prope  ostium  ecclesiae. 

15.  Eodem  anno  nempel644,  obiit  in  conventu Ruthenensi  (3)  circa 
festum  sancii  patris  nostri  Dominici  P.  fr.  Antoninus  Combellusex 

(0  QoÊTiF  et  EcHARD,  SûHpt,  ord.  Praed.y  II,  608. 

(2)  Probablemeol  Bourbon  TArchambault  (Allier),  plutôt  que  Bourbonne- 
les-Bains  (Haute-Marne),  en  raison  de  la  proximité  de  Moulins, 

(3)  Rodez  (Aveyron). 


336  SOCIÉTÉ  ARCBÉûLOGIaUB  BT   HISTOEIQUB   DU   LIMOUSIN. 

oppido  Solonis(l)  in  dioecesi  Lemovicensi  oriandus,  conventus  Le- 
movicensis  professus,  qui  fuil  vir  religiosus,  humilis,  officiosus  et 
utilis,  quibus  virlutibus  ad  aeternum  bealorum  regaum  sibi  viam 
communivit. 

16.  Anno  1650,  obiit  in  hoc  conventu  Lemovicensi,  die  23*  fe- 
bruarii,  P.  fr.  Bernardas  Carrière,  urbis  et  conveotus  Baionensis 
alumous,  qui  desiderio  strictions  observanliae  amplectandae  Tolo- 
sam  veniens  sub  venerabiii  P.  fr.  Sebasliano  Michaelis  primitias 
spiritus  reformationis  ita  hausil  ut  deinceps  in  coaventibus  in  qui- 
bus vigebat  roanere  operae  pretium  duxerit.  Tandem  ultimatc  in 
conventu  isto  Lemovicensi  assignatus  et  afflliatus  est,  in  quo  bis  aut 
ter  supprioris  munus  exercens  pro  vitae  regularis  stabili  faoda- 
roento  piurimnm  laboravit.  Erga  Deiparam  virginem  tantopere 
atîectus  erat,  ut  millies  in  die  eam  cum  puero  Jesu  salutaret,  plura 
dicendo  rosaria.  Insuper  parvum^ejus  officium  muitis  licet  morbis 
et  doloribus  atflictus  cum  diurno  quotidie  recilaret.  In  audieadi< 
confessionibus  tum  pauperum  lum  divitum,  magnorum  etiam  pec- 
catorum,  charitas  et  patienlia  ejus  enituerunt.  Denique  coelo  jam 
maturus  post  sexaginta  annos  in  ordine  noslro  exactos,  religiosus 
hic  senex,  bonus  ac  timens  Deum,  migravit  ad  Dominum;  sepui- 
tusque  fuit  in  capitulo  communi,  populo  multo  concurrente  ad  ejus 
exequias  propter  bonum  nomen  et  gratiam  quam  sibi  apud  omnes 
conciliaverat. 

17.  Anno  Domini  1651,  die  S6^  martii,  obiit  P.  fr.  Henricus 
Golombus,  secundus  professus  hujusce  conventus  Lemovicensis 
post  inlroductam  strictiorem  observantiam.  Hic  fuit  vilae  regularis 
tenacissimus  cullor  et  fervidus  zelator;  quapropter  ad  officium  ma- 
gistri  novitiorum  in  conventibus  Sancti  Maximini  et  Burdegalensi 
electus,  illud  cum  multa  sollicitudine  et  exemplo  administravit. 
Tandem  post  vigesimum  septimum  a  suo  ingressu  in  ordinem  an 
num,  anima  ejus  e  carcere  corporis  egressa,  ad  coelum,  ut  pie 
creditur,  evolavit.  Sepultus  fuit  in  claustro  juxta  portam  capiluli. 
ubi  beatam  resurreclionem  expectat. 

18.  Anno  Domini  1658,  die  4^  decembris,  ex  bac  luce  in  sempi- 
ternam  migravit  venerabilis  et  devotissimus  P.  fr.  Hyacinlus  Grou- 
chaud,  hujusce  civitatis  et  conventus  Lemovicensis  alumnus;  cujus 
sane  si  egregias  virtutes  et  praeclara  facta  omnia  recensera  vel- 
lem,  nimium  excrescerel  mca  narratio;  pauca  de  muitis  referam. 
Ex  urbe  Lemovica  honestis  parenlibus  originem  duxit,  apud  quos 
exacta  sancte  pueritia,  ordinem  fratrum  Praedicatorum  in  conventu 
Lemovicensi  recenter  ad  vitae  regularis  normam  redacto,  amplexus 

(1)  Peut-être  Salons  (Corrèze). 


'     LES   FRÈBES  PRACHRURS   DE  UHOOBS.  337 

est.  In  quo  per  triginla  sex  annos  ita  vixit,utse  vivum  beati  patris 
noslri  Dominici  exemplar  praeberel.  Ejus  enim  amorem  seraphi- 
cum  erga  Deum  optimum  maximum  imilalus,  nunquam  de  eo  fere 
sine  jnbilo  et  tripudio  loquebalor;  ad  omnia  semper  promptus 
fuit  quae  ad  ejus  houorem  et  serTîtium  spectabant.  Erga  augustis- 
simum  Eucharisliae  sacramentum  tenerrima  affectus  devotione,  ab 
ipso  limine  conventus  illud  profonde  adorabat.  Croatis  (1)  Lotbarin- 
giam  devastantibus,  ipse  solus  in  convenfu  nostro  Bianvilleo  roan- 
sit  intrepidus  et  jejunus  usque  ad  quartam  dîei  horam  ul  sanctis- 
simi  sacramenli  parliculas  quaeeranl  in  sacra  pixide  deglulirel,  ne 
in  manus  impiorum  haereticorum  deyenirent;  quod  et  praeslilit, 
quamvis  barbari  iili  evaginato  ense  morlem  intenlarent.  Cumprop- 
ler  Yertiginis  morbum  a  sacro  celebrando  impediretur  et  a  sacra 
synaxi  sumenda  iila  die  cum  fralribus  adesse  recreationi  non  au* 
débat,  Yociferans  se  indignum  cum  religiosis  conversari,  cum  qui- 
tus non  esset  dignus  sacrorum  misteriorum  parliceps  fieri.  Beatis- 
sîmae  Yirginis  cnltui  totus  erat  mancipatus,  ante  ejus  imagines 
nunquam  quin  genibus  flexis  illam  yeneraretur  praeteribat,  sal- 
tem  dum  solus  esset;  quotidie  ejus  parvum  offlcium  cum  sacro 
tripudio  simul  cum  rosario  recitabat,  et  ne  solus  in  suprema 
coelorum  regina  colenda  yideretur  occupatus,  omnes  quos  poteral 
ad  Rosarii  sodalitatem  amplectendam  animabat.  Pari  deyotionis 
sensu  erga  beatum  patrem  nostrum  Dominicum  et  sanctos  ordinis 
rapiebalur,  sicut  et  erga  beatum  Martialem  Lemoyicensium  aposto- 
lum,  in  cujus  templum  cum  per  urbem  gradiebatur,  de  more  ora- 
turus  intrabat,  blande  socios  ad  talem  cultum  compellens.  Pro 
proximo  gestabat  yiscera  charitatis;  nunquam  fuit  auditns  maie  de 
absentibus  loqui,  utpote  qui  eorum  defectus  quantumvis  apparen- 
tes diligenlissime  el  charitative  obtegeret  et  in  bonara  partem  inter- 
pretaretur.  Religiosos  omnes  tam  externos  quam  conlubernales 
singulari  afTectu  prosequebatur,  eisque  in  necessariis  pro  posse 
subyeniebat,  foyebat,  adjnyabat.  In  direptione  urbis  Blanyilleae  in 
Lotharingia  ex  motîYO  charitatis  calicem  dédit  impio  Croatae  he- 
retico  ad  redimendam  foeminam  quam  captiyam  abducere  yolebat 
cum  pudorîs  periculo.  Quid  dicam  de  ejus  assiduitate  in  sequela 
chori  nocte  dieque,  et  caeteris  communitatis  exercitiis,  a  quibus 
nec  aeger  abesse  yolebat?  Et  si  aliquando  uti  dispensatione  coge- 
batur,  hoc  maximum  tormentum  reputabat.  De  patientia  ejus  in 
adyersis  et  morbis  quid  loquar?  Fuit  enim  maxime  singularis; 
nunquam  yisus  est  iratus,  nunquam  auditus  de  re  aliqua  conqueri, 

(1)  Ces  Croates  sont  éfidemmenl  un  parti  dlmpériaux  combattant  contre 
:a  France. 


338  SOCIÉTÉ  ARCHÉ0L06IQUV  ET  HISTORIQUB  DO  LIIIOUSllC. 

Dec  verbutn  minus  sapidam  proferre,  quatnvis  pluribus  aegritu- 
dinibus  essel  obDoxius.  Fidem  habebat  non  vulgarem,  spero  etiam 
ila  firmam  ut  comprebensorem  magis  quam    vialorem    diceres. 
Obedientiae  legibus  ita  erat  addictus,  ul  quamvis  aegerrime   per 
urbem  vagari  pateretur,  altamen  ad  superiorum  nutum  fratram 
omnium  qui  in  urbem  pergere  volebant  socius  esse  non  dedigna- 
batur.  Àb  amore  parentum  ita  propler  Deum  erat  alienus,  ut  tor- 
mentum  subire  viderelur  cum  illos  invisere  eosque  alloqui  cogeba- 
tur,  quem  rigorem  erga  propriam  sororem  servant,  quinimo  et 
erga  ipsam  matrem.  Obediens  enim  Christi  discipulus  cum  ex  isto 
convenlu  Leroovicensi  in  alium  esset  assignatus,  profeclus  est  ma- 
ire in  extremis  positajamjamque  morilura,  et  reipsa  defuDcta  est 
die  profectionîs  filii;  dimisitque  juxta  verbum  Christi  morluis  mor- 
tuam  sepeliendam.  De  castitale  ejus  quid  dicam,  nisi  quod  fratres 
qui  ejus  audierunt  confessiones  asserunt  cum  justo  Tundamento 
illum  virginitatis  candorem  usque  ad  obitum  servasse;  ad  quam 
conservandam  magna  utique  diligentia  semper  usus  est.  Pauper- 
tatem  ita  coluit,  ut  quidquid  in  convenlu  vilius  aut  detritum  magis 
esset  in  suos  usus  assumeret,  ilinera  sine  viatico  et  pecunia  quam 
nequidem  contingere   immédiate  audebat  conticeret.  Ejus  labori 
indefesso  omnia  notatu  digna  quae  j  imretulimus  plurima,  plurima- 
que  aiia  memorialia  tum  urbis  tum  conventus  Lemovicensis  debe- 
mus  [pretermitlere],  quae  exacte  nobis  conventus  scripta  reliquit. 
Tandem  dévolus  iste  paler  et  a  seipso  et  a  cunclis  rébus  caducis 
alienus,  totus  inhians  coelestibus,  cui  vivere  cum  Paulo  Christus 
erat  et  mori  lucrum  reputabat,  ad  exlremim  suam  veniens  aegri- 
tudinem,  mortem  quam  a  longo  tempore  optabat  iaetus  aspexit,  die 
quarta  decembris  anni  supradicli.  Vix  ejus  mors  fuit  per  urbem 
divulgata  quod  factus  est  concursus  populorum  ad  ecclesiam  nos- 
tram  ad  videndum  corpus  ejus,  in  tantumque  crevit  devolio  ut  ves- 
tes defuncii  in  reliqoias  sibi  assumèrent,  eumque  fere  nudum  reli- 
quissent  nisi  quanlocius  fuisset  inhumatus.  In  capitulo  claustri 
sepuUus  fuit,  sed  praeclarae  ejus  virtules  virenli  semper  memoria 
in  ore  omnium  qui  eum  vivenlem  agnoverunt  adhuc  vigent  et  vige- 
bunt.  Faxit  Deus  ut  ejus  precibus  et  mentis  illi  aMquaodo  m  eoelo 
conjungamnr. 

19.  Ànno  Domini  1669,  die  quarta  julii,  obiit  in  conventa  Lemo- 
vicensi  venerabilis  P.  fr.  Dominicus  Drapeiron  e  Liber8aco{l)  oriun- 
dushujusque  conventus  professus,  qui  non  vulgari  pietate  fuit  cons- 
picuus.  De  eo  enim  vere  dicere  possemus  quod  divus  Pauliis  de 
primis  chrislianis,  quod  mortuus  erat  et  vita  ejus  abscondita  eral 

(1)  Lubersac  (Gorrèze),  plutôt  que  Libersac  (Oordogae). 


LES  PBftRSS   PRÊCUEURS   DR  LIMOGES.  339 

cuin  Christo  in  Deo(Colos.,  III, 3.];  vita  enim  ejus  vere  mors  poterat 
vocari  lum  propter  poenitenliae  rigorero,  lum  propler  diligenliam 
quam  adhibebatut  inocculto  manerel.  Sed  lamen  nonpotuitlucerna 
ejus  virtuturo  ita  sub  roodio  humililalis  delitescere  et  abscondi 
ut  non  luceret  religiosis  et  saecularibus  multis,  apud  quos  adhuc 
memoria  ejus  in  benedictione  est.  Plurimos  enim  ad  cultum 
vilae  spirilualis  efTormavit,  lum  novilios  quorum  institution!  prae- 
fectusestinconventibusÂvenionensi,  Burdegalensi  et  Lemoyicensi, 
tum  etiam  sorores  de  poenitentia  quarumculpas  quantumvisexiguas 
scveris  et  salutaribus  coercebat  poenitentiis.  Non  enim  erat  de 
illorum  numéro confessorum  quiconsuuntjuxtaprophetaeeffatum, 
pulyillossub  omni  cubilo  manus  [Ezech.,  XIII,  18],  quin  potius  in 
poenitenliae  tribunaii,  ita  ab  omni  humana  consideratione  alienus 
erat,  ut  poenitenlibus  ad  illum  accedentibus  unum  e  duobus  esset 
eligendum,  aut  ad  perfectionem  tendere  viam  arctam  amplectendo, 
aut  ad  ipsum  non  acceiiere.  In  vita  spirituali  fuit  exercilatissimus, 
ut  testantur  ejus  scripla  summam  pielalem  redolentia  ;  in  interioris 
hominis  reforroalione  et  oratione  assiduus,  Dei  presentiae  addictis- 
simus  erat;  vilae  insuper  regularis  iirma  fuil  columna;  denique 
omni  virtutum  génère  omatissimus,  dignus  fuit,  ut  pie  credimus, 
ad  monlem  Domini  virtutum  in  aeternum  mansurus  accedere  die  et 
anno  praedictis. 

20.  Anno  Domini  1672,  obiit  in  conventu  Brivensi  venerabilis 
P.  fr.  Vincenlius  Lansade,  civitalis  et  conventus  Lemovicensis 
alumnus,  qui  fuit  divini  verbi  fervidus  praeco  et  unus  ex  illis  quos 
propheta  nubes  vocat,  quia,  ut  ait  bealus  Gregorius,  verbis 
pluunt  et  exemplis  coruscant.  Sic  iste  dévolus  pater  sanctum  Vin- 
centium  patronum  suum  imitatus,  majorem  suae  vilae  partem 
insuropsit  in  evangelii  praedicatione.  Circuibat  enim  Salvatoris 
exemplo  per  vicos,  castella  et  parrochias  fere  continue  ut  rusticos 
et  indoclos  fidei  et  doctrinae  cbristianae  rudimentis  imbuerel,  et 
oves  perditas,  nempe  peccatores,  ad  gratiae  Christ!  ovile  adduceret. 
Porro  ila  ab  omni  humana  consideratione  erat  alienus  in  funclioni- 
bus  concionatoris  et  confessarii,  ut  personam  cujusquam  non  reve- 
reretur  et  leonis  ad  instar  ad  nuUius  paveret  occursum.  Hanc 
poUssimum  ostendit  animi  magniiudinem  erga  dynaslam  potentis- 
simum  cui  in  faciem  restilisse  dicilur,eumquein  confessione  audire 
récusasse  donec  quaedam  pedagia  injuste  inducta  removissetet 
reslilulionem  pro  eorum  inductione  debitam  fecisset.  Qua  de  causa 
mullas  passus  est  persecutiones,  opprobria  et  ludibria,  quae  laeto 
et  inviclo  animo  suslinuil,  memor  verbi  Domini  qui  bealos  illos 
nominal  qui  perseculionem  paliunlur  propler  justiliam  [Matth.,  Y, 
lU].  Praecipuus  cullus  quo  beatam  virginem  Deiparam  venerabatur 


3iO  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  KT  HIBTORIOUK  BU  LIMOUSIN. 

efficiebat  ut  modis  omnibus  et  tolo  conatu  Rosarii  deyotioBeoi^ 
ampliare  satageret.  Plura  sunt  alia  ejus  praeclare  gesta,  quae  ad 
ineam  non  renere  cognilionem,  quaeque  hune  devotum  et  fenridum 
missionarium  adeo  venerabilem  in  populi?  reddiderunt,  ut  post  obi- 
tum  ejus  qui  contigit  circa  Testa  Paschalia  anni  praedicti,  plures  cer> 
tatim  pro  reliquiis  sibi  assumèrent  res  quae  ejus  usui  fuerant  depu- 
tatae.  Sepultus  fuit  in  conventu  Brivensi,  ubi  obierat. 

21.  Anne  Domini  1673°,  die  17^  martii,  obiit  venerabilis  P.  fr. 
PetrusÂndre  exista  urbe  Lemovica  oriundus,  et  hujusce  conventus 
Lernovicensis  primus  professus  post  iotroductam  strictiorem  obser- 
vantiam.  Hic  fuit  cbcrubim  luminosus  in  scientia  etdoctrina,  quam 
ostendit  in  concionibus  depromendis  cum  clarissima  fama  in  multis 
regni  Gailiae  principalioribus  cathedralibus.  At,  quod  et  rarius  et 
consequenter  mirabilius  est,  munus  concionatoris  exercuit  absqae 
ullo  humano  respeclu,  in  omnibus  tam  oplimatibus  quam  pauperi- 
bus  yitia  redarguens.  Non  enim  eral  ex  eorum  numéro  de  quibas 
propheta  conqueritur  dicendo  quod  sunt  canes  muti,  non  valentes 
latrare  [Isai.,  lvi,  10];  quin  potius  nosterdivini  verbi  praeco  in  boc 
se  verum  esse  demonstravit  Dominicanum,  id  est  canem  Domini  in- 
diiïerenter  contra  omnes  peccaiores  obiatrantem.  Quapropler  pro 
tessera  sumpserat  haec  verba  regii  valis  :  Et  ne  auferas  de  are  meo 
verbum  veritatU  itsquequaque[Ps.  cwiii,  43J.  Hujusceveritatis  plura 
praebuit  argumenta  in  concionibus  quas  habuit  adpopulum  civitatis 
Lemovicensis  et  civitalum  aliarum  in  quibus  praedicavit,  quibus 
sufficienter  probavit  se  tanquam  fidelem  servum  Domini  mundo 
placere  non  appetiisse.  Reiiquit  nobis  ingenii  sui  et  laboris  plurima 
monumentain  bibliotheca  communi  asservala,  quae  ejus  profundam 
doctrinam  et  sanctorum  patrum  claram  notiliam  aperte  déclarant. 
Sepultus  fuit  in  concavo  capituli,  ubi  beatam  resurrectionem  ex- 
pectat. 

ââ.  Girca  annum  Domini  1674  obiit  in  insulis  Americae  R.  P.  fr. 
Josephus  Cbastagnac,  piis  honestisque  parentibusLemovicaenatus  et 
conventus  Lemovicensis  professus  abanno  1656".  Hic  fuit  dévolus  et 
fcrvidus  religiosus,  quem  solus  honoris  Dei  et  salutis  animanim 
zelus  incitavit  ut  in  extremas  Americae  oras  evangelium  propalarel. 
Quod  utique  conjicere  licet  ex  ilia  animi  magnitudine  quam  osten- 
dit in  sua  ad  Americam  transmissions  Dum  enim  navis  in  qua  erat 
saeva  tempestate  jaclaretur  ita  ut  omnes  qui  in  illa  erant  me  tu 
mortis  et  laboris  nimietate  pêne  essent  exanimes,  ipse  solus  malo 
navis  voluit  alligari  ut  iode  tumentes  fluctus  intrépide  conteaipla- 
retur;  per  quod  ostendit  quam  radicitus  infixa  esset  spei  suae 
anchora  in  Dei  adjutoris  et  in  testimonio  conscientiae  suae.  Obiit  in 
iaboriosis  fuactionibus  suae  missionis  citius  nimis  ui  videtur,  etsi 


LES   FRÈRRS   PRECHEURS   DR   LIUOGES.  341 

quatuordecim  fere  annos  in  illis  consumpserit  pro  insulanis  Ame-* 
ricae,  quibus  et  verbo  et  exemplo  plurimum  profuisset,  sed  pro  se 
foeliciier  dum  ex  procellis  hiijus  muadi  ereptus,  in  tranquiUo  portu 
bealitadinis,  ulpiecredimus,  conquievit. 

S3.  Circa  annum  Dotnini  1678,  obiit  in  conventuTholozano  dévo- 
lus et  fepvidus  fr.  Jacobus  Tirebas,  civilatis  et  convenlus  Lemovi- 
censis  alumnus.  Hic  fuit  vere  Israelila  in  quo  dolus  non  erat  et 
in  quo,  si  ita  loqui  fas  sit,  Adam  peccasse  non  videbatur,  ita  ut 
ma^ister  noviiiorum  in  ejus  confossionibus  materiam  absolutionis 
vix  inveniret.  Quamvis  aulem  ita  reclus  esset  et  innocens,  erga 
seipHuni  lamen  austerus  existebal.  Tholozam  missus  studiorum 
causa,  ibi  in  gravem  et  ielhalem  morbum  incidit,  quo  ex  hac  luce 
migravit  post  tertium  aut  quartum  a  sua  professione  annum;  et 
licet  fuerit  consummatus  in  brevi,  attamen  per  fervorem  etinno- 
centiam  explevisse  illum  tempora  multa  aulumandum  est.  Sepul- 
tus  est  in  convenlu  Tholozano,  ubi  obiit. 

24.  Anno  Domini  1674,  in  die  festo  Penlecostes,  obiit  in  hoc 
convenlu  Lemovicensi  R.  P.  fr.  Josephus  Romanet,  Lemovix  et 
hujus  conventus  professus,  juvenis  sacerdos  magnae  spei,  qui  diu 
puimonario  morbo  laborans  dolensque  quod  incolatus  ejus  in  hac 
miseriarum  valie  prolongatus  esset,  desiderabat  cum  bealis  spiri- 
tibus  prospicere  faciem  Domini  Dei  sui;  unde  morti  proximus  R.  P. 
priori  haec  divi  Pauii  verba  protulit  :  «  Cupio  dissolvi  et  esse  cum 
Christo  »  [Phil.,  1,231;  et  brevi  post  tempore,  carne  solutus  voto  suo, 
ut  pie  credendum  est,  potilus  est.  Sepultus  est  in  capitulo  com- 
mun!, ubi  bealam  resurreclionem  expectat. 

25.  Qrca  annum  Domini  1676"™,  obiit  R.P.  fr,  Marlialis  Boubiat  e 
Burgooovo  (l)in  Lemovicensi  dioecesioriundus  et  conventus  Lemo* 
vicensis  professus.  Hic  fuit  Fervidus  et  doctus  religiosus  tirmaque 
coiumna  vitae  regularis.  Propterea  novitiorum  institutioni  in  con* 
ventibus  Sancti  Maximioi  et  Lemovicensi  praefectus  est  ;  in  quo 
officio  per  plures  annos  magno  religionis  incremento  mansit.  Tan- 
dem iû  Monspelieasi  conventu  prier  existons,  ibidem  subilanea  sed 
non  improvisa  morte  sublatus  est.  Sepultus  est  in  conventu  Mons- 
peliensi. 

26.  Anno  Domini  1676**,  circa  feslum  sacratissimi  Corporis 
Christi,  obiilin  hoc  convenlu  Lemovicensi  frater  Raymundus  iMon- 
rejaud  conversus,  Tholozanus  orij^ine  et  professus  convenlus  Lemo- 
vicensis,  pius,  exaclus  et  fervidus  religiosus,  qui  diu  et  mullum 
pro  isto  conventu  laboravit.  Unde  pie  aulumandum  est  illum  labo^ 

(I)  Boarganeaf  (Creuse). 

T.  xxxix.  2Î 


3t9  SOCIÉTÉ  AKCHÉOLOGIQUB  ET  BI9T0EIQU£  DU   LIMOUSIN. 

rum  mercedem  in  coeio  a  Domino  fuisse  consecututn.  Sepultas  est 
in  capitule  claustri. 

27.  Ànno  Domini  IGIT",  obiit  in  hoc  conventu  dévolus  frater 
Joannes  Duclareix  e  yico  SanctiLaurentii  (l)in  dioeoesiLemovieeiisi 
oriundus  et  hujus  conventus  professus,  novitius  magnae  spei,  qui 
pulmonario  morbo  diu  laborans,  per  mensem  fere  agonizavit.  Tan- 
dem in  vigilia  Nalalis  diei  Ghristi  Domini,  sacramenlis  rite  munitus 
ut  iu  coelo  nasceretur,  ex  hoc  mundo  migravil.  Sepultus  fuit  in 
capitulo,  ubi  beatam  expectat  resurrectionem. 

28.  Anoo  Domini  1678,  mensejanuario,  obiit  devotus  fralerJor- 
danus  Robi,  hujusce  conventus  profcssus,  diaconus  senex  et  gran- 
daevus,  erga  pauperes  valde  misericors,  quibus  fere  quotidie  su! 
prandii  portionem  relinquebat.  Eadem  charitate  motus  fratribus 
onerosus  esse  nolebat,  iia  ut  banc  enixe  a  Deo  optimo  maximo 
gratiam  postularet  ne  eum  ante  obitum  diu  in  infirmitate  dplineri 
permitteret  ;  quam  certe  obtinuisse  eum  et  credimus  et  vidimus  : 
landiu  enim  licetaeger  se  in  propria  cella  continuit  donec  ad  extre- 
ma  redactus  ad  inlirmariam  deduclus  est,  ubi  per  unum  soium  aut 
alterum  diem  manens,  sacramentis  dévote  susceptis,  placidissime 
obdormivit  in  Domino.  Sepultus  fait  in  capitulo  claustri,  ubi  adven- 
tum  magni  Dei  expectat. 

29.  De  venerabili  P.  /r.  Petro  Poilefwo, 

Anno  Domini  1679,  obiit,  die  I*  novembris,  venerabilis  ac  im- 
morlali  laude  dignus  R.  P.  fr.  Pelrus  Poileveus,  civitatis  el  con- 
ventus Lemovicensis  et  alumnus  et  ornamenlum,  cujus  memoria 
in  benediclione  est.  Hic  siquidem  ampla  parentum  beredilatc 
dimissa,  dum  esset  hères  unicus,  per  calcatas  divitlas  simul  et 
matris  vidnae  lacrimas  perrexit  in  ordinem  fratrum  Praedicatorum, 
cujus  habilum  de  manu  R.  P.  fr.  Pétri  André  suscepil,  annoque 
evoluto  probationis,  professionem  coram  R.  P.  fr.  Dominico  Regio, 
Inquisitore  Tholosano,  emisit.  Mirum  dictu  quot  et  quanta  fervidus 
tyro  de  humani  generis  hoste  trophaea  reportavit,  quae  omnia  ille 
solus  novil  qui  pugnantem  adjuvit  et  nunc  coronat  victorem.  Seip- 
sum  enim  praebuit  vivum  omnium  virtutum  e.\emplar;  nam  a 
Christo  Domino  edoctus  inlerius  qui  dicit  :  Discite  a  me  quia  mitis 
sum  et  humilis  corrfp  [Math.,  xi,  29],  mansueludiniet  humilitati  per 
totam  vitam  assidue  operam  dédit.  Tanta  fuit  etiam  ejus  modestia 
et  continenlia  ut  ad  foeminarum  coUoquia  nonnisi  aegerrime  et 
coactus  etiam  in  poenitentiae  Iribunali  accederet.  Rarum   erat 

(1)  Peul-étre  Ssiint-Laurent-sur-Gorre  (Haute- Vienne). 


LK8  FRÈRES   PRftCBBURS   DE   LiyOGBS.  343 

in  eo  et  fervens  poenitentiae  desiderium,  qao  proprio  corpori 
bellum  perpetuam  indixeral,  illud  disciplinis,  jejuniis,  catenis  fer- 
reis  et  aliis  plurimis  austeritatibus  continuo  fere  edomans.  Pau- 
pertatis  studiosissimus,  quidquid  in  yestiario  erat  vilius  in  suos 
Qsus  semper  expetebat.  Spiritu  coropunctionis  et  timoris  Dominl 
itarepletus  erat,  ut  quamyis  vilam  duceret  innocentissimam,  atta- 
men  quolidie  unius  fere  horae  spalio  crebris  gemitibus,  lacrimis 
et  pectoris  tansionibus  se  ad  confitenda  peccata  levissima  praepa- 
raret.  Sed  post  multos  gemitus  et  suspiria,  benignissimus  Deas 
consolalionibus  suis  laetificabat  aniraam  ejus  secundum  multi- 
tudinem  dolorum  in  corde  ejus  in  tanlam,  ut  ex  abundantia 
supernae  dulcedinis  cor  ejus  ad  instar  cerae  liquescere  vide- 
retur  ;  cujus  rei  indicia  et  testes  erant  dulces  illae  lacrimae  ubertim 
ex  oculis  ejus  defluentes,  maxime  dum  sacrum  missae  sacrificium 
peragerel.  Charitate  erga  Deum  optimum  maximum  et  proximum 
ardenti  flagrabat  in  tanlum,  ut  pro  animarum  salute  multis  se 
proprii  corporis  subjiceret  cruciatibus.  Dono  discrelionis  spirituum 
a  Deo  optimo  maximo  mirum  in  modum  fuit  insignitus.  In  vita 
etiam  spirituali  fuit  exercitatissimus,  in  interioris  hominis  refor- 
matione  etoratione  assiduus  ac  Dei  presentiae  addiclissimus  fuit. 
Quapropter  plurimos  ulriusque  sexus  fidèles  ad  cultum  vitae  spi- 
ritualis  eiïormavit,  quos  ad  arctam  perfectionnis  viam  tum  verbis 
polentibus  et  divina  unclione  plenis,  tum  potentioribus  exemplis 
adducebat.  Spiritu  prophetico  mulla  praedixit  quae  suo  tempore 
evenere.  Cordium  arcana  ei  divinitus  détecta  esse  pluribus  signis 
et  argumentis  demonstravit.  Qnid  dicam  de  ejus  orationum  et  pre- 
cum  eiScacia,  quam  ego  ipsemet  qui  haec  scribo  tolies  expertus 
sum,  ila  ut  ultro  falear  coram  Deo  optimo  maximo  et  hominibus 
quod  sine  tam  sancti  viri  precibus  e  claustro  egressus,  ut  mihi 
mens  erat,  jam  sine  dubio  periissem.  Addo  praeterea  quod  si  quid 
boni  in  ordine  fecerim,  hoc  ipsum,  post  Deum  et  ejus  sanctissimam 
matrem,  precibus  ejus  me  debere  veraciter  agnosco  :  quippe  qui 
de  meo  semper  tepidus  et  negligens  extiti,  ejus  vero  amantissimi 
patris  pias  intercessiones  apud  Deum  optimum  maximum',  sive 
dumviveret,sive  nunc  etiam  postmortem,in  necessitatibus  expertus 
sum  efficaciter.  Plura  alia  virtutum  opéra  hujus  sanctissimi  viri 
brevitatis  causa  omitto;  dicam  solum  quod  bis  supprioris  et  magis- 
tri  noYitiorum  ofBcium  in  hoc conventu  [cum]  magno  religionis  incre- 
mento  administra  vit.  Inde  vero  Reverendissimi  Magistri  generalis 
jussioneasuperiore  conventusLemovicensis  destiuatus  est  confes- 
ser monialium  Sancti  Benedicti  monasterii  quod  vulgo  Regulam  (1) 

(4)  La  Règle,  ablmye  de  Limoges. 


344  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  BT  BIATORtOUE  DU  LIMOUSIN. 

vocant.  Quod  munus  dum  sedulo  obiret,  îd  morbum  tncidit,  ex 
quo  (Derilis  plenus  coeloque  jam  maturus  in  feslo  Sanctorum  Om- 
nium, lit  eorum  sane  numerum  augeret,  placidsssime  expiravil 
anno  1679^.  SepuUus  fuit  in  capituio  clauslri.  Faxit  Oeus  oplimus 
maximus  ut  tam  sancti  viri  meritis  et  precibus  ad  sanctorum  ali- 
quando  consortium  pervenire  mereamur.  Amen. 

30.  Girca  annum  Domini  1685''",  obiit  in  hoc  conventu  Leino- 
vîcensiR.  P.  fr.  JoannesLaschenaud,exdioecesi  Lemovicensi  orian- 
dus  et  istius  conventus  professus,  qui  habitu  ordinis  levi  de  causa 
primum  exutus,  militiae  saeculari  nomen  dédit,  et  per  plures  annos 
inter  effraenatam  armorum  licentiam  amorem  sacri  nostri  ordinis 
quem  invilus  deserere  coactus  fuerat,  ita  servarît,  ut  e  bello  re- 
versns  maxima  cum  humilitate  et  perseverantia  denuo  habitu  ordi- 
nis indui  postulayerit.  Quam  gratiam  et  miscricordiam  post  multas 
preces  asseculus,  cum  magno  spirilus  fervore  omnia  religionis 
munia  obivit;  seipsum  enim  novae  militiae  adscriptum  memorans, 
contra  très  humani  generis  hostes  continuum  bellum  movit  ;  de 
quibus  per  Dei  omnipotentis  auxilium  reportata  Victoria,  consum* 
matoque  brevi  temporis  intervallo  cum  vita  certamioe,  coronam 
beatitudlnisasupremo  judice  accipere  meruit.  Quod  ex  ejus  conver- 
satione  devota  et  religiosa  cum  justo  fundamento  conjicere  llcet. 
Obiit  morbo  pulmonario  salis  longo.  Bepultus  fuit  in  capituio 
claustri. 

31.  De  venerabili  P.  fr,  Petro  Chastagnac. 

Ânno  Domini  1601,  die  17»  augusti,  obiit  in  hoc  conventu  vene- 
rabilis  et  aelerna  memoria  dignus  R.  P.  fr.  Petrus  Chastagnac, 
actualiler  prier,  qui  honeslissimis  et  piis  parentibns  in  hac  urbe 
Lemovica  nalus  est  circa  annum  1639"™.  Adolescens  vero  ordinero 
fratrum  Praedicatorum  amplexus,  in  isto  conventu  Lemovicensi 
sacro  habitu  religionis  indutus  est  a  R.  P.  fr.  Joanne  Franc. 
Dufaur  in  die  sancto  Pentecostes.  Judicandum  sane  est  illuro 
cum  habitu  novum  hominem  induissc  novumque  spiritum  spi- 
rare  coepisse.  Indolem  enim  suam  ad  jocosa  proclivem  dein- 
ceps  contraxit,  ut  senilem  gravilatem  et  angelicam  modes- 
liam  toto  vitae  tempore  assumpsissevisus  fuerit.  Humihtatis  nebula 
praeclaras  animi  sui  dotes  ita  obtegere  illi  curae  fuit,  ut  quarovis 
ingenii  acumine  caeleros  quosque  antecelleret,  omnium  lameo  infi- 
mus  et  simplicissimus  apparebat  ;  quarovis  in  scienlia  ei  doctrina 
vix  parem  haberel  in  provincia  noslra  Tholozana,  lectores  tamen 
omnes  modestia  et  mansuetudine  superabal;  quamvis  denique  in 
concionibus  depromendis  esset  facundissimus  et  melUflutm  pieta- 


' 


LK8  raintS  PRÊCHEURS  DE  LIHOOBS.  3i5 

iem  spiràns,  altamen  saepius  ad  crates  monialium  quam  in  hono* 
ratioribuft  cathedris  praedicare  eligebat.  Jugis  in  ejus  corde  chari* 
tas  ardebal,  qua  Deo  per  ejus  praesentiam  fere  continuam  et  mentis 
elevationem  uniius  videbalur.  Proximo  vero  quaecumque  poterat 
iinpendebat  o£Dcia,  etiam  iis  a  quibus  muUa  passas  fuerat.  Purita- 
tem  tum  anlmae,  tum  corporis  ita  adamavit  ut  confessarius  qui 
ejus  excepit  confessiones  asserat  se  per  quinquennium  in  ejus 
confessionibus  peccatum  veniale  ex  voluntate  deliberata  perpétra- 
tum  non  inTenisse.  À  Reverendissimo  Pâtre  Magistro  generali 
Romain  rocalus  ut  novitiorum  institution!  in  conventu  Sanctae 
Sabinae  praeficeretur,  ibidem  suae  profundae  doctrinae  et  periliae 
Clara  dédit  indicia,  respondendo  quaesitis  circa  difQcultates  summo 
ingenii  acumine.  Has  exercilationes  sibi  pergratas  esse  significavit 
Innocentius  undecimus  summus  ponlifex.  Tholozae  et  Lemovicis 
pluries  magistri  novitiorum  offlcio  fanctus,  tanta  prudentia  et  pie- 
tate  illud  adminlstra?it,  ut  omnium  sibi  derinciret  afTectum  et  ad 

quaecumque  vellet  novitiorum  animos  pietatis  opéra  inclinaret 

hoc  Lemovieensi  conventu  prions  munus  exercuit nec  minis 

nec  querimoniis  ullis  potuit  impediri  quin missarum  stipendia 

et  celebrationem  multa  débite  or quae  nunc  ut  rite  facta  pro- 

bantnr  ;  mos  enim  illi  erat  ita  firmiter  bono  agnito  adhaerere  ut 
nulla  considérations  nec  ullis  hominum  dictis  aut  factis  ab  illo 
prosequendo  averteretar,  sed  tamen  ita  mitis  ut  cum  nulio  pro- 
terve  contendere,  aut  verbum  minus  sapidum  proferre  toto  vitae 
teropore  in  religione  auditus  sit.  Quid  dicam  de  ejus  recoUectione 
et  oralione  sine  qua  nihil  aggredi  solitus  erat,  quamque  omnipo- 
tentissimam  fuisse,  ut  ita  loquar,  in  multis  occasionibus  probavit 
éventas?  Quid  de  ejus  observantia  regulari,  quae  tanta  et  talis  fuit 
ut  ad  instar  Chrisli  Domini,  ne  perderet  obcdientiam  perdiderit 
Titam?  Cum  amore  et  zelo  nimio,  si  ita  loqui  audeam,  constilutio- 
nes  servandi,  ad  inflrmarfam  ire  detrectavit  omnium  religiosorum 
moerore  qui  illius  vires  exhanstas  esse  penitus  non  ignorabant. 
Unde  tandem  debili talis  et  infirmitatis  ponderi  succumbere  coactus 
est.  Illum  jamjam  morlturum  invisit  illustrissimus  episcopus  Lemo- 
vicensis  (i)  ut  se  ejus  precibus  commendaret.  Obiîtdie  17>  augusti 
anni  i691;  vestesque  ejus  in  feretro  sunt  decerptae  a  populo  qui 
eum  publiée  sanctum  appellavit.  Nec  sine  Dei  oplimi  maximi  spe- 
ciati  providentia  factum  exislimo  illum  sanctum  virum  paucis  die- 
bus  ante  feslum  sancti  Bernardi  cujus  orationem  panygericam  in 
ecclesia  RR.  PP.  Fuliensium  erat  pronunciaturus,  ex  hac  vita 
migrasse.  Aequum  quippe  videbatur  ut  quem  in  meiunua  pieiate 

(1)  Louis  de  Lasctris  d'Urfé  (1676-1^95). 


346  SOCIÉTÉ   AIICHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

et  summa  devotione  fuerat  imitatus,  hune  in  mortis  tempore  seque- 
retur.  SepuUus  fuil  in  capitule  claustri  quod  sui  prioratus  tempore 
politis  lapidibus  stratum  fuit  perpulcre.  Si  ergo  ejus  praeclare  facta 
coeteri  taceant,  lapides  claustri  concinne  strati  clamabunl  usque  in 
fines  saeçulorum.  Clamabunt  et  deauratae  altarium  nostrorum 
figurae  et  tabulata.  Concédât  nobis  Deus  optimus  maximus  ut  tam 
sancti  viri  meritis  et  precibus,  in  sempiterna  beatitadine  illi  in 
aeternum  conjungamur.  Amen. 

32.  Anne  Domini  1689,  circa  festa  paschalia,  obiit  venerabilis  et 
plurima  laude  dignus  R.  P.  fr.  Michael  Bonardeau  e  Sancto  Ger- 
mano(l)in  dioecesi  Lemovicensi  oriundusethujusceconventus  pro- 
fessus  ab  anno  164S;  in  que  se  per  totum  vitae  curriculum  omnium 
virtulum  exemplar  absolutum  exhibuit.  Fuit  enim  regularis  obser- 
vantiae  rigidissimus  observator,  divini  verbi  fere  cônlinuus  ac 
fervidus  praeco  ;  cui  corporis  domitor  assiduus,  chori  et  oralionîs 
perpetuus  amicus,  salulis  animarum  cupidissimus,  pro  quibus  se 
plurimis  subjecit  laboribus  et  aerumnis;  Beatae  Mariae  Virginis 
psaltes  egregius,  cujus  Rosarii  sodalilatem  in  quamplurimis  par- 
rochiis  instituit  et  restauravit;  a  dignitatibus  et  praelaturis  reiigionis 
ita  alienuSfUt  prions  et  supprioris  officia  in  hoc  conventu  nonnisi  sub 
formali  praecepto  obedientiae  coactus  acceptaverit.  Circa  finem  sui 
prioratus,  anno  nerope  1680,  introducta  fuit  laudabilis  consuetudo 
singulis  diebus  dominicis  e(  festivis  Rosarii  partem,  addito  brevi 
meditalionis  argumente  e  suggestu  concionatoris,  recitandi,  cujus 
author  fuit  R.  P.  fr.  Antoninus  Massoulié  (2),  provincialis  tune  pro- 
vinciae  nostrae  Tholozanae,  qui  hune  rilum  in  Iota  sua  provincia 
induxit  pluribus  decausis,sed  praesertim  pro  pelenda  haereticorum 
conversione.  Nec  tune  fefeilil  eventus;  vix  enim  très  aut  quatuor 
anni  elapsi  sunt  ab  hac  saluberrima  institutione  quod,  agente  Dei- 
para  sanctissima,  quae  sola  cunclas  hereses  in  universo  mundo 
interemit,  calvinianae  haereseos  in  toto  Gailiae  regno  et  eliam 
alibi  dissipata  sunt  fundamenta,  oronia  nempe  haereticorum  templa 
eversa,  fugati  ac  proscripti  nefarii  haereseos  doctores  ac  ministri^ 
caeterique  haerelici  publiée  suam  haeresim  abjurare  coacli,  posl 
duplicem  quam  de  eorum  exercitibus  reportavit  victoriam  dominus 
de  Sancto  Rufo,  dux  regii  exercitus,  primam  quidem  in  Delphinala, 
secundam  vero  in  Vivariensi  provincia,  cujus  rei  nos  oculati  testes 
sumus.  Sunt  et  alia  plurima  bona  quae  nobis  venerunt  pariter  cum 
illa  assidua  et  publica  sanctissimi  Rosarii  recitatione.  Taceo  commu- 
nia toti  ecclesiae,  ordini  noslro  et  toti  provinciae  Tholozanae,  ubi 

(i)  Sainl-Germain-les-Belles  (Haute- Vienne), 

(î)  QuÉTiF  IT  EcBARO,  ScHpU  ord.  Praedic,»  11,  769,  8^7. 


LES  FttÊBBS  PHtoHEURS   DE  LIMOGES.  347 

hacc  devotio  magis  viguit,  ul  ad  particularia  descendam»  quae  Deus 
optimus  maximus  et  sanctissima  Deipara  virgo  coQveDtui  Lemovicensi 
per  islam  piissimam  Rosarii  recitandi  consuetudinem  contulerunt. 
Imprimis  enim,  quamvis  semper,  altamea  ab  illo  maxime  tempore 
floruit  conventus  isle  per  observantiam  regularem  et  pietatem  sin- 
gularem,  ita  ut  religiosi  hajusce  convenlus  in  tota  hac  urbe  et 
dioecesi  sint  etiam  nunc  bonus  odor  Jesu  Ohristi.  Floruit  insuper  et 
floret  modo  sodalilas  Sanctissimi  Rosarii  in  tantum,  ut  optimales 
hujus  urbis,  tam  clerici  quam  saeculares,  summo  ducant  honori  in 
illa  adscribi  et  ofBcio  aliquo  fungi.  Mirabilis  est  et  superioribus 
rétro  saeculis  nunquam  visa  tanla  magniflcentia  in  celebratione 
festi  Sanctissimi  Rosarii,  nusquam  tantus  ornatus  in  templo  nostro 
visus,  nusquam  audita  tanta  simphonia  in  choro,  nusquam  tanta 
assiduitas  confratrum  in  processionibus,  nusquam  tantus  numerus 
(idelium  utriusque  sexus  aggregari  volentium  in  Sanctissimi  Rosa* 
rii  confraternitate  ;  denique  a  primaeva  convenlus  istius  Lemovi- 
censis  fundatione,  nihil  taie  factum  accepimus  quale  nunc  cernimus 
per  Sanctissimi  Rosarii  devotionem.  Sed  quia  vulgo  bona  tempo- 
ralia  adjiciuntur  spiritualibus,  omnem  prorsus  superat  admiratio- 
nem  quod  convenlus  iste  qui  semper  modicus  et  pauper  extitit^ 
etiam  tempore  quo  saeculares  abundabant  opibus  et  divitiis,  nunc 
tempore  belli,  inopiae  extremae  et  sterilitatis  universalis  in  toto 
fere  Galliae  regno,  in  quo  maxima  pars  populi  famé  jam  periit, 
et  quotidle  périt,  attamen  tam  misero  tempore  claustruro  nostrum 
cum  capitulo  concinne  politis  lapidibus slratum  fuit;  quod  per  quin- 
que  rétro  saecula  fieri  nequiverat.  Capella  Sanctissimi  Rosarii  ma- 
gnificentissime  piclis  labellis  cum  quadratis  et  egregiis  cancellis 
decorata  fuit.  Figurae  et  imagines  ligneae  majoris  aitaris  Rosarii 
et  Sancti  Hyacinthi  cum  tabulali  parle  perpulcre  sunt  deauratae  ; 
sacristia  nostra  pretiosis  et  pluribus  ornamentis  aucta  et  decorata; 
domus  prioratus  nostri  Beynacensis  a  fundamenlis  erecta  et  ad 
instar  convenlus  magnifice  edificala;  mulla  alia  bona  huic  conventui 
coUata  sine  dubio  per  Rosarii  devotionem  praetereo.  Hoc  unum 
addam  sanctissimam  virginem  Deipararo  nostris  hisce  temporibus 
suum  beato  Alano  de  Rupe  (1)  factum  promissum  adimplevisse,  cui 
olim  dixit  quod  quandiu  Rosarium  in  ordine  fratrum  Praedicatorum 
floreret,  tandiu  ipse  ordo  per  pietatem,  doctrinam,  observantiam 

regularem suorum  religiosorum  maxime  floreret,  quod  nunc 

nostri  vident,  tangunt  et  experiuntur.  Ulinam posteri  qui 

haec  memorialia  futuris  legent  temporibus verborum  sanctis-> 

simae  Virginis  Deiparae  in  nobis  adimpletorum  lotis  viribus  tam 

(1)  QuÉTiPct  EcBAHD,  Script,  ord,  Praed.y  1,  849. 


MB  SOCIÉTÉ  ARCaiOLOGlQOR   BT   HISTORIQUK  DU   LIMOUSIN. 

«atabrem  Rosarii  devolionem  studeant  ampliare,  nec  unquam, 
quod  Deu8  optimus  maxirnus  avertet,  ab  ejus  publica  et  assidaa 
recitatione  jam   inlroducta  abstineant.  Amen. 

Haecin  gratiacn  R<^'P.  fr.  Micbaelis  Bonardeau  adjeci,quia  prior 
erat  coDventas  et  reclor  sodalitatis  Rosarii,  quando  laudabilis  con- 
ftuetudo  illud  publiée  recitandi  fuil  inlro Jucta,  quiqiie  postea  electus 
est  in  primum  parrochum  et  curatum  nostri  prioraïus  Beinaccnsis, 
quem  cum  per  aliquot  annos  sanctissime  et  religiossiroe  guber- 
nasset,  obdormivit  îd  Domino  ;  sepuitusqae  fuit  m  capitulo  con- 
tentus  cum  suis  fralribus.  Plura  sunt  ejus  praeclare  gesta  quae  non 
retuli,  quia  hic  devotus  pater  humilitatis  vélo  opéra  suabona  tegere 
imprimis  curavit. 

33.  ÂnnoDomini  1692,  obiit  in  vicariatu  Nostrae  Dominae  Monge- 
rensis  conventus  Bittepensis(l)R.  P.  Fr.  Ântonius  Lagrave  bujusee 
dioecesis  et  Lemovicensis  convenlus  alumnus,  qui  juxta  divi  Hiero- 
niroi  coDsilium  per  calcatum  aliquo  modo  palrem  perrexil  constant! 
et  invicto  animo  in  ordinem  nostnim,  in  quo  per  viginli  duos  annos 
religiose  conversatus  est.  Fuit  enim  admodum  officiosus  et  charita- 
tivus,  zeloque  incensus  pro  haereticorum  conversione  in  eorum 
misslonibus  plurimum  laboravit,  ac  tandem  ex  zelo  nimio  justitiae 
extremum  suum  contraxlt  morbum  ;  ex  quo  vita  functus,  in  coeium 
migrasse  eredimus. 

34.  Anno  Doraini  1693,  die  23»  februarii,  obiit  venerabilis  P.  fra- 
ter  Dominicus  Froment  in  hac  civitate  Lemovica  nalus  anno  1612, 
hujus  vero  conventus  professus  ab  anno  1633.  Hic  fuit  magna  pru- 
dentia  praeditus,  experientia  mulla  doctus,  et  in  dandis  consiliis 
sapientiae  laude  florens.  Fuit  eliamfigidus  vi(iorum  censor,  pravo- 
mm  mastix  fsicj,  ac  vilae  regularis  et  chori  perpeluus  amicus. 
Dono  diseretionis  spirituum  aDeo  optimo  maximo  speciaiiler  dona- 
tus  et  insignilus,  plurimo?  utriusque  sexus  tideles  ad  perfeclionis 
semitaro  longo  annorum  curriculo  et  usque  ad  decrepilam  aetatem 
segniier  et  sedulo  deduxit.  De  isto  conventu  Lemovicensi  optinie 
merilus,  cui  multa  bona  sagacitate  sua  tam  in  libris  qnam  in  ecciesiae 
et  sacrisliae  ornamentis  procuravit,  humilitatis  sludiosus,  mulla 
virtutum  opéra  ejus  vélo  nobis  obtexit;  mansuetudinis  ac  patienliae 
Christi  Domini  sedulus  sectator,  iudibria  mulla  et  querimonlaa  de 
se  factas,  graves  etiam  et  diuturnas  aegritudines  patienter  sustinuit; 
et  quamvis  doloribus  muUis  vexaretur,  quolidie  tamen  fere  choro 
intererat  ac  sacrosanclum  missae  sacrificium  peragebal.  Plura 
nobis  seripta  reliquit  suae  pietatis  non  obscura  indicia,  quibus  ad 

(  I  )  Douais,  Le  pèlerinage  de  Notre-Dame'de- Pitié  de  Mougères  (Hérault), 
Son  hietoire  et  son  culte. 


LIS   FBàRBS   PRÂCBEURS  DE  LIH06BS.  di9 

perfectionis  consequendum  apicem  iter  planum,  solidum  ae  rectum 
demonslral.  Tanla  fuit  ejus  opinio  sanclitatis, ut  fidèles  postobitum 
ejus  vesliuro  particulas  in  reliquias  sibi  assumere  contenderint. 
SepuUus  fuit  in  capitulo  claustri,  ubi  beatam  expectat  resurrecUo- 
nem.  Âmen. 


XVII.  —  [BuLLA  Pauli  quintï  pro  reformatione  conventus 

LfiMOViCENSIS]. 

[Haie  operi]  finem  imponam  referendo  bullam  Pauli  quinli 
[Maximi]  Pontificis  directam  ad  ofBcialem  Lemovicensem,  anno 
Domini  ^1606],  pro  reforroatione  conventus  Lemovicensis.Iste  aulem 
officialis  erat  dominus  Petrus  Boyol,  in  juribus  licentialus  et  cano- 
nicus  ecclesiae  catbedralis  Sancti  Stephani,  cujus  ossa  in  hujusce 
conventus  ecclesia  condita  jacent.  Ex  bac  bulla  conventus  Lemovi- 
censis  praestantia  dignoscilur. 

Ex  bulla  Pauli  quinti  directa  ad  officialein  Lemovicensem 

anno  Domini  1606. 

Paulus  episcopus  servus  servorum  Dei  dilectofilio  offlciali  Lemo- 
yicensi  salutem  et  apostolicam  benedictionem.  Romanucn  decet 
pontificem  pia  semper  animadversione  esse  sollicitum  ut  per  ejus 
communionis  opem  et  auspicium  pia  et  regularia  loca  quaelibet, 
praesertim  quae  sanctorum  Dei  pieiatesingulari,  fundatione  et  anti- 
quitttte  insignia  e<^se  dicuntur,  ac  personae  iis  in  locis  sub  suavi 
religionisi  jugo  et  regularis  sui  fundatoris  observantiae  institutis, 
altissimo  jugiter  famulantes  in  suis  necessilatibus  congruum  susci- 
piant  subsidium,  ut  exinde  personae  ipsae  snblevatae  majores  in 
vinea  Domini,  Deo  dantc,  valeant  educere  fructus  ac  fidei  orto- 
doxae  hostium  et  haereticorum  partium  in  quibus  degunt  continues 
et  temerarios  conatus  et  versutias  refellere.  Dudum  siquidem 
omnes  etc.  {Et  post  alignas  lineas  :)  Et  sicut  exhibita  nobis  nuper 
pro  parte  dilectorum  filiorum  prions  et  fratrum  domus  Sancti 
Dominici  Lemovicensis  ordinis  Praedicatorum  petitio  continebat, 
domus  praedicta  a  dicti  Praedicatorum  ordinis  primordio  ab  ipso- 
met  sancto  Dominico  fundata  vel  ejus  jussu  priscis  temporibus  in 
regnlaris  disciplinae  observantia,  litlerarum  scientia  tanlumflorue- 
rit  ut  nulli  alleri  regulari  ejusdem  Praedicatorum  ordinis  domui 
cessent  et  ex  ejus  fratribusduocardinalatus(l),unusque  archiepis- 

(4)  En  regard  à  la  marge  :  Très  tectores  Lemooicenees  fuere  cardinales. 


3SÔ  SOaÉTR  AHCHtOLOGlQUK  ST   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIK. 

copâli  et  quinque  vel  sex  episcopali  digaitatibus  et  honoribus  déco- 
rât! etplurium  summorum  pontificum  poenitentiarii  fuerint,  aliique 
numéro  quadraginta  ad  inGdelium  partes  pro  divini  verbi  praedica- 
tione  transmissi  pro  fide  catholica  vitam  cum  sangaine  forliler 
profuderint(i)  alque  in  eacentani  et  viginti  fratres  alias  exliterinf ,  et 
eliam  nunc  inter  insignes  totius  Galliae  regalares  domos  non  infi- 
mum  locum  obtinere  censeatur.  A  centum  vero  et  viginti  circiter 
annis  civitate  ipsa  Lemovicensi  ab  Anglis  qui  illam  invaserant 
depredata,  domus  destructailliusque  scripluraedeperditae  fuerint,  ac 
ea  postea  restaurala  denuo  ab  istorum  temporum  haereticis  quibus 
magna  in  parte  dicta  civitas  illiusque  circumvicina  loca  labefacta 
reperiunlur  funditus  eversa  et  solo  adaequata,  ac  deinde  per  dllec- 
(um  lilium  nobiiem  virum  modernum  comitem  Descars  aliquan- 
lisper  restiluta  fuerit,  et  superioribus  annis venerabilis  fraternoster 
episcopus  Lemovicensis  et  dilecli  filii  dictae  civitatisincolae,  quibus 
praemissa  maximo  eorum  cum  dolore  satis  superque  innotescant, 
pristinum  diclae  domus  splendorem  secum  ipsi  revolventes  ac  illius 
jacturam  déplorantes,  foelicis  recordacionis  Clementem  Papam  VIII 
predecessorera  nostrum  et  etiam  tune  existentem  dicli  ordinis  Prae- 
dicatorum  Magistrum  precibus  et  lilteris  sollicitaverint,  ut  in  prae- 
dicta  domo  regularem  observantiam  a  qua  iliius  fratres  propter 
hujusmodi  ruinas  et  temporum  calamitates  defecerant  restitui  et 
litterarum  studia  quibus  potissimum  ad  haereticorum  errores  refel- 
lendos  opus  est  institui  curarent,  dictusque  generalis  Hagister  non- 
nullos  dicli  ordinis  Praedicalorum  fratres,  etc.,  qui  in  ea  regutaris 
vitae  norroam  et  studia  restituèrent,  et  transmiserit,  etc.  Datum 

Romae,  apud  Sanctum  Petrum  anno  incarnationis  Domini  1606 

maii,  pontificatus  hostri  anno  secundo.  Sigillalum  in  plurobo. 

(1)  En  regard  à  la  marge  :  Martlrum  horum  nullam  mentionem  kabe- 
mus. 


LKS   FBiRBS  PRÉCHKUR8  DB  UMOGES.  354 


III 


FUNDATIONES  MISS  ARUM  CONVENTUS  LEMOVICENSIS 

FRATRUM  PRAEDICATORUM 

1.  Una  missa  solenmis  quolibet  anno  pro  domina  de  Petrabuf- 
faria(l),  pro  qua  legavit  intestamento  suo  die  12martii  1304  vigiDti 
solidos  $iye  uDam  libram  census  anaui,  quae  tamen  a  triginta  et 
duobus  annis  soluta  non  fuit,  nec  in  posteruro  solvenda  creditur, 
licet  servitium  factuni  sit. 

3.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  cum  tôt  missis  privatis 
quot  sacerdotes  interfuerint  huic  missae  solemni,  pro  Guodefrido 
de  Turribus  (3),  pro  quabus  missis  tum  solemni[bu|s  tum  privatis 
relicuit  (jtc)  très  libras  census  annuiin  suo  testamento,  feria  quinta 
ante  festum  Annunciationis  ann.  1334.  Item,  idem  legavit  unam 
libram  censns  annui;  praeterea  legavit  quatuor  libras  census  per- 
petui  pro  una  missa  singulis  diebus  dicenda,  ita  quod  pro  qualibet 
missa  non  reliquerit  très  denarios.  Diu  litigatnm  est  cum  haeredi- 
bus;  expensae  tamen  litis  satis  modicae  sunt,  nec  ascendunt  ad 
summam  triginta  vei  quadragintalibrarum,  si  numerentur  expensae 
ab  ipsis  solulae. 

3.  Duae  missae  solemnes  cum  absolutione  generali  singulis 
annis  pro  domino  Ronulpho  de  Quadris  (3),  pro  quabus  legavit  octo 
libras  census  annui  in  suo  testamënto. 

4.  Una  missa  solemnis  cum  absolutione  generali,  feria  G'^cujus- 
libet  hebdomadae.  Item,  absolutio  generalis  singulis  diebus  post 
complelorium  pro  domino  Guodefrido  ejusdem  familiae  de  Quadris, 
qui  legavit  triginta  quinque  libras  census  annui  pro  praefatis,  ut 
creditur,  missis  et  absolutionibus. 

5.  Item,  missa  solemnis  singulis  diebus  totius  anni  cum  absolu- 
tione generali,  necnon  cum  vesperis  defunctorum  singulis  septi- 
isanis,  pro  domino  Carolo  de  Quadris  eiusdem  familiae;  pro  quabus 
missis  et  vesperis  legavit  centum  libras  census  annui  in  suo  testa- 
mënto 30  martii  1635  ;  diuliligatum  est  cum  haeredibus,  et  tandem 
conveotione  facta  cum  domino  de  Quadris  ad  minus  sexcentas  libras 

(4)  PierrebufHère  (Haale-Vienne). 

(5)  Las  Tours  (Haute-Vienne). 
(3)  Les  Cars  (Haute-Vienne). 


992  SOCIÉTÉ   AMStffeOLOtflQOB  fiT  ËISTOtf^l  00   LIMOUSIN. 

factarum  expeosarum  amisimus,  qoq  adhuc  computata  diminu- 
tione  reddituiim  qui  a  pluribas  anais  debebantur,  quae  ad  sam- 
mam  sexcentarum  adhuc  librarum  ascendit  ;  difScit  semper  eril 
istius  fundatioDis  solutio  propler  potentiam  haeredum  ;  et  isto  qui 
modo  existit  semel  defunclo,  majores  lites  jure  limeolur. 

6.  Una  missa  solemnis  quolibel  anno  pro  Jacobo  Gbeisne,  pro 
qua  legavit  unam  libram  census  annui  in  suo  testameuio  30  juiiii 
1529. 

7.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  et  una  missa  privata 
singulis  primis  diebus  domini|ci]s  cuiusiibet  roensi^  pro  Petro 
Foresta  ;  pro  quabus  reliquil  1res  libras  census  annui  in  suo  lesta- 
mento  28  januarii  1362. 

8.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Petro  Gervais,  pro  qua 
legavit  quinque  libras  census  annui  in  suo  testamento  18  augusti 
1569. 

9.  Duae  missae  privatae  singulis  septimanis,  pro  quabusiibet 
Jacobus  Rogier  et  Anna  Benoist  legaverunt  duos  solidos  census 
annui  in  eorum  testamento  31  julii  1613. 

10.  Duae  missae  solemnes  quolibet  anno  pro  Jacobo  Rogier  et 
Gatharina  Dubois  ;  pro  quabus  legaverunt  quinque  libras  census 
annui. 

11.  Duae  missae  privatae  singulis  septimanis  pro  Joanne  Ruaud, 
pro  quabus  legavit  viginti  quinque  libras  census  annui  in  suo  tes- 
tamento 29  decemb.  1620.  Haeredes  modo  pauperiores  facli  vix 
solvere  possunt,  et  specialiter  duae  domiciilae  quae  partem  haere- 
ditatis  obtinebanl  ut  creditoribus  satisfacerent  bona  vendiderunl; 
fundationem  quantum  ad  ipsas  obtinebant  exlinxerunl,  solutis 
conventui  250 11.,  quas  conventus  nondum  collocare  poluit,  sed 
acceplare  coactus  est,  ne  ad  mendicitatem  praefatae  liliae  dedu- 
cerentur;  et  contra  alium  haeredem  actu  lilem  movimus,  imo 
proposuimus  et  annuimus  ut  non  solverel,  modo  ab  onere  funda- 
tionis  essemus  liberi  et  alius  satisfaceret. 

12.  Daodeciffl  missae  solemnes  cum  vigiliis  defunctorum  et 
abaoiutione  generaii  pro  Petro  Boyol;  pro  quabus  legavit  triginla 
libras  census  annui  in  suo  testamento  4  julii  1623. 

13.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Petro  Merigaud  ;  pro 
qua  legavit  in  suo  testamento  26  septem.  1626,  quadraginta  libras 
semel  solvendas,  sive  duas  libras  census  anoui,  quae  summa  aolula 
est  ;  nec  tamen  constat  in  quo  fuerit  expensa. 

14.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  cum  vigiliis  defunclorum 
pro  Marliali  Pabot,  et  pro  aîtero  Marliali  Pabot  alla  nû&fta  solemnis 
quolibet  anno;  pro  quabus  solvuntur  quatuor  Ubrae  et  decem 


LES  FftiAES   PRECHEURS  DR  L^MOûRS.  353 

solidi  census    annui;  prima    missa   fuudata  esl  ia  teâlameulo 
Si  marLii  1627,  seconda  vero  circiler  1665. 

15.  Très  missae  privatae  singulis  aanis  pro  Joanna  Malpieaa  ; 
pro  quabus  legavit  unaiu  Ubraro  census  annui  m  sap  leBtameato 
28  decem.  1627.  Una  missa  priyala  qualibet  feria  2*  tolius  aooi  pro 
Guilhdmo  Labiebe;  pro  qua  legavit  duodecim  libras  census  aonui 
in  SUD  (estameuto  30  januarii. 

16.  Viginti  missae  privalae  quolibet  anao  pro  Petro  Bourbon  ; 
pro  quabus  legavit  quinque  libras  census  annui  in  suo  teslamento 
il  novemb.  1628. 

17.  Duae  missae  privatae  qualibet  septimana  pro  Petro  Dubois; 
pro  quabus  legavit  sexcentas  libras  in  suo  testamento  27  martii  1631  ; 
haec  summa  soluta  est,  nec  tamen  de  ejus  coUocalione  constat» 

18.  Centum  quinque  missae  singulis  annis  et  septuaginta  octo 
missae  soLemnes  singulis  eliam  annis  pro  Joanne  de  la  BreuUle  et 
Anna  Gai;  pro  quabus  reliquerunt  in  suo  teslamento  35  juUi  1632 
aliquod  fundum  ex  quo  proveniunt  viginU  quinque  Ubrae  census 
annui. 

19.  Una  missa  privala  qualibet  septimana  pro  Joanne  Ruaud  ; 
pro  qua  legavit  viginti  quinque  libras  census  annui  in  suo  testa- 
naenlo  30  novemb.  1639;  magnis  curis  et  iteratis  postulationibus, 
neenon  nisi  multis  accepUs  injuriis  et  contumeliis  pluribus  affecti 
sdndici  solutionem  hucusque  oblinere  potuerunt;  jamquç  a 
pioribus  annis  non  fuit  soluta  nec  solvenda  creditur  nisi  cogente 
sententia  judicis,  quam  tamen  litem  incohare  metuimus  propier 
potentiam  haeredis  qui  est  regiarum  causarum  procuralor  in  hac 
Lemovicensi  curia. 

20.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Gnilelmo  Nicot;  pro 
qua  legavit  centum  libras  in  suo  testamento  4  julii  1640,  quae  in^ 
sumptae  sunt  in  constructione  dormitorii. 

21.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Francisco  de  Titregas  ; 
pro  qua  legavit  3  libras  census  annui  in  suo  teslamento  5  januarii 
4641. 

22.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Petro  Geliere;  pro 
qua  legavit  duas  libras  census  annui  in  suo  testamento  20  sepiemb. 
1646. 

23.  Quadraginta  quinque  missae  privatae  quolibet  anno  pro 
Petro  Gombrouze;  pro  quabus  legavit  septemdecim  libras  census 
annoi  in  suo  teslamento  i'^  decemb.  1650. 

24.  Quatuor  missae  privatae  quolibet  anno  pro  Petro  Hardi  ;  pro 
quabus  dédit  in  suo  testamento  28  augus.  16..  parvuium  fundum,  ex 
quo  proveniunl  viginti  solidi  aul  circiter  census  annui. 

25.  Uoa  mi^sa  privala  qualibet  septimana  pro  Petro  Crouchaud; 


354  sociftri  archéolooique  st  historique  do  Limoobik. 

pro  qua  legavit  quindecim  libras  ceosus  aanui  in  sao  testamento 
21  oclob.  1655. 

26.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Sincone  {sic)  Auxîliat  ; 
pro  qua  legavit  duas  libras  census  annui  in  suo  testamento  20  mar- 
tii  1656. 

27.  Sex  missae  privatae  pro  defunctis  quolibet  anno  pro  Josepho 
Ghastaigoac;  pro  quabus  dédit  quingentas  libras  semel  solvendas 
in  suo  testamento  6  apriiis  1656;  quae  summa  consumpta  fuit  eo 
quod  religiosi  non  adverterint  praefatum  legatum  fuisse  cum  onere 
fundationis,  quod  tamen  onus  ideo  solum  adjunctum  fuit  ut  tollere- 
tur  haeredibus  occasio  iiligaiidi  pro  praefato  legato  non  solvendo, 
ut  soient  plerique  liligando  se  eximere  a  solutione  eorum  quae  ali- 
quis  legavit  religioni  quam  vult  profiteri. 

28.  Sex  missae  privatae  quolibet  anno  pro  Leonardo  Vilieneufve  ; 
pro  quabus  legavit  très  libras  census  annui  in  suo  testamento 
28  januarii  1662. 

29.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Laurentio  Beuverie, 
quam  dotavit  quinque  iibris  census  annui  26  maii  1666. 

30.  Duae  missae  privatae  et  una  solemnis  cum  absolutione  ge- 
nerali  quolibet  anno  pro  Jeanne  Besse;  pro  quabus  legavit  très 
libras  census  annui  in  suo  testamento  31  decemb.  1668. 

31  (1).  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  pro  Josepho  Rabbi; 
pro  qua  legavit  census  annui  triginta  solides  in  suo  testamento 
18  decemb.  1668;  non  solvitur,  nec  modo  est  aliqua  spes  solutionis, 
quia  non  sunt  bona  sufficientia  ad  solutionem. 

32.  Duae  missae  privatae  singulis  mensibus  pro  Francisco  Gra- 
bois  ;  pro  quabus  legavit  quindecim  libras  census  annui  in  suo  tes- 
tamento 27  octob.  1670.  Item,  pro  eodem  una  missa  solemnis  quo- 
libet anno,  pro  qua  dédit  quatuor  libras  et  decem  solides  census 
annui;  haec  summa  totalis  unde  praefali  redditus  proveniunt 
semel  fuit  soluta  conventui;  et  diligentissima  facta  inquisitione  ut 
securius  collocaretur,  tradila  fuit  duobus  fratribus  qui  hucusque 
exactissime  redditus  solverunt; modo  tandem  agnovimus.quod  inso- 
lubiles  prorsus  sunt  propter  plura  débita  anteriora  ab  ipsis  con- 
tracta; unde  facta  ipsorum  bonorum  distributione  quam  creditores 
prosequi  volunt,  ut  certius  accepimus,  summam  integram  cum  suis 
reddil[ib]us  conventus  aroittet. 

33.  Psalmus  De  profundis  et  prosa  Stabat  singulis  feriis.  sexliis, 
pro  quibus  conventus  accepit  sexaginta  libras  ;  praefata  summa  con- 
sumpta fuit,  nec  uUus  ex  ea  proventus  superest. 

34.  Joannes  Goudin    scindicus  noster   secularis  (qui    scindici 

(4)  Ms.  :  32,  et  dans  la  suite  33  au  lieu  de  3i,  34  au  lieu  de  33,  eic. 


LRS   FRilIBS   PRftCHEUBS   DB  LIMOOBS.  365 

proptertale  officium  multis  poliunlar  privilegiis  in  tolajuridicUone 
parlaroenti  Burdigalensis  in  qua  degimus,  ut  inter  alia  quod  ab 
omni  tutela  eximentur,  propter  quod  plures  sunt  praefati  scindica- 
lus  canditati,  qui  tameo  nullum  conferunt  fructum  conveutui),  bis 
mille  libras  cutn  ea  condilione  ut  haeres  integram  summatn  semel, 
vel  centutn  libras  annui  redditus  solveret  conveutui,  non  simpliciter 
onerans  paires  nostros,  ut  fieri  solet,  sed  rogans  ut  siogulis  diebus 
una  pro  ipso  missa  dicalur;  quae  summa  ab  haeredibus  semel  so- 
luta  Iradita  fait  domino  de  Quadris,  cum  quo,  ut  supra  diximus 
num.  5,  diu  liligatum  est;  et  quo  defuncto  amissa  penitus  credi- 
tur,  eo  quod  commune  sil  apud  praefatos  nobiles  in  suis  testamen- 
tis  et  nupliarum  contractibus  omnia  boua  sustituere,  sicque  haere- 
des  posteriores,  ut  a  solutione  debilorura  suorum  immediatorum 
praedecessorum  se  libèrent,  nusquam  se  illorum  haeredes  pro(i- 
tenlur,  sed  ipsorum  bona  per  suslitutionem  vel  transaclioneoi  âbi 
obvenisse  dicunt,  et  tandem  ad  minus  litigandum  eril;  et  propter 
illorum  poteoiiam  et  autoritatem  vix  lites  flniuolur  necnon  nisi 
multis  factis  expensis  quae  nusquam  redduntur. 

38.  Hae  sunt  fundationes  quarum  memoria  habebatur  et  reddi- 
tus possidebantur  tempore  reparatioois  conventus  qui  olim  magni- 
ficentissimus  utpole  in  quo  degebafnjt  octoginta  fratres  bis  ever- 
sus  et  destructus  fuit,  necnon  bonis  et  reddituum  titulis  spoliatus,  in 
quo  catalogo  repositae  sunt  aliae  quae  deinceps  factae  sunt.  Praeter 
istas  autem  nuper  aliae  repe[r]tae  sunt,  quarum  nulla  prorsus  exta- 
bat  apud  nostros  patres  memoria,  nec  illarnm  ullo  modo  possidentur 
[redditus]  ;  quod  enim  de  viridario  quodam  diciturignoratur  prorsus 
ubi  situm  esset,  nisi  forte  sit quidam  locuspublicusantejanuam  eccle- 
siae  et  conventus,  qui  ad  nostrum  fundumpertinel;  sed  de  [eo]nullus 
proventiis  obvenit  conventui,  nisi  quod  1res  domus  in  extreroitale 
constructae  aliquid  solvunt  ad  profitendum  quod  in  solo  conventus 
sunt  aedificatae  ;  praelerea  non  extal  campanile  de  quo  fit  mentio, 
neque  de  vitrea  aliquid  constat;  illa  siquidem  quae  modo  existit 
tota  fere  muro  clausa  est;  et  similiter  cappella  Sancti  Vincentii 
quae  modo  existit,  adeo  parva  est  ut  nulle  modo  sit  illa  de  qua 
sit  sermo,  et  adeo  ecclesiam  nostram  déformât  ut  jamdiu  conclu- 
sum  fuerit  a  patribus  nostris  ut  muro  clauderetur;  alia  denique 
bona  quorum  conventus  haeres  e[s]l,  relictas  {sic)  sicut  et  vasa 
argentea  et  paramenta,  a  nobis  non  habentur,  praefata[s]que  fun- 
datione[s]  légende  annotavimus  quod  quaedam  annotantur  quae 
semel  tantum  erant  faciehdae  et  non  in  perpetuum;  aliae,  ut  nobis 
videtur,  erant  tilulo  gratitudinis,  non  vero  rigorosae  obligationis  ; 
sunt  quaedam  pro  religiosis  qui  quaedam  bona  contulerunt  con- 
ventui  non  ante  sed  post  proffessionem,  ut  constat  specialiter  de 


/ 

i 


356  SOCIRTR  ARCHBOLOGIQUB  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

quibiisâam  inquisitoribus.  Nolavimus  eliam  quod  pliira  anniversa- 
ria  eodem  die  celebrabanlur  sub  una  missa  soleinni,et  quod  specia- 
Hier  alicubi  dicittir  quod  conveatus  se  obligavit  ad  unam  oraUo- 
nem  in  missa,  unde  concludimus  quoJ  illi  eliam  qui  praefatas 
fundationes  constiluebant  exigebant  solum  ut  pro  ipsis  offerelor 
sacrificium  una  cum  aliis  pro  quibus  offerebatur,  non  curaudo 
ulrum  uua  Tel  plures  missae  dicerentar  ;  tandem  in  quantum  ob- 
servare  poluimus,  hoc  manuscriptum  erat  potius  veluli  kalenda- 
rium  a  canlore  compositum,  in  quo  annolabat  tam  omnes  funda- 
tiones perpétuas  quam  semel  faciendis,  et  omnes  denique  pro 
quibus  orare  debebant  religiosi  noslri;  sed,  ut  de  his  alii  judicent, 
subjicimus  praefatas  fundationes  u(  habentur  in  praefato  vetuslis- 
simo  kalendario  litteris  gotlicis  conscriplo. 

Numerus  missarum  quae  quotidie  a  (idelibus  postulantur  uUra 
praefatas  fundationes  jam  recensitas  ascendit  ad  viginti  circiter 
mis$as  pro  qualibet  die,  pro  quabus  otTerunt  modo  octo,  modo 
septem,  modo  quinque  solidôs,  secundum  quod  ipsis  visum  fue- 
rit  et  sine  scandale  recusari  non  possunl,  neque  eliam  peli  stipen- 
dium  ab  episcopo  statulum,  quod  est  octo  solidorum.  Hoc  expe- 
rientia  comprobatum  est  sub  reverendo  Pâtre  Chastaignac  priore 
tune  existente  ;  publica  siquidem  voce  dictum  est  nos  prae  nimiis 
divitiis  quibus  abundamus  nulle  amplius  proximorum  saluti  invi* 
gilare,  et  thesaurizandi  cupiditate  gabellam  supra  missas  impo- 
suisse;  cumque  soli  essemus  inter  omnes  religiosos  qui  missas 
nobis  oblatas  recusaremus  et  simul  pro  nobis  oblatis  taxatum 
stipendium  postularemus,  ad  alios  se  con  verterunt,  sicque  inlra  brève 
tempus  conventus  ad  eam  paupertatem  redactus  est,  ut  vix  quin- 
decim  aut  viginti  fratres  nutrire  posset,  multis  etiam  contraclis 
débiles  adeoque  omnibus  odibiles  facti  ut  vix  coram  secularibus 
apparere  auderemus. 

Ad  hoc  sine  dubio  evitandum  scandalum  successores  oblatas  sibi 
missas  aeceperunt,  accepte  stipendie  sponte  a  tidelibus  oblato, 
scriptis  missis  iab  ipsis  postulatis.  Numerus  vero  earum  quae  di- 
cendae  restant  ascendit  ad  quinque  millia  septi[n]gentas  et  viginti 
très,  et  quarum  stipendie  fratres  consueti  et  necessarii  in  hoc 
conventu  nutriuntur;  siquidem  omnes  redditus  conventus  ultra 
fundationes  supra  recensitas  ascendunt  ad  summam  usque  ad 
sepli[njgentas  vel  ocli[n]gentas  libras,  et  pro  expensis  unius  anni 
requirunlur  circiter  quinque  millia  librarum;  unde  redditus  a  sa- 
cristia  proveniens  est  plus  quam  bis  mille  librarum. 

Requiruntur  in  hoc  conventu  quatuor  leclores  tum  theologiae, 
tum  philosophiae  tam  pro  secularibus  quam  pro  religiosis,  qui 
actu  existunt  in  conventu.  Est  enim  haec  urbs  caput  totius  pro- 


LES   FRÈRES   PRÊCHEURS   DE   LIUOGBS.  357 

yînciae  Lemovicensis,  neque  in  ea  est  alius  theologiae  cursus  ins- 

titulus.  Unde  quidam  falso  proposuerunt,  ul  audivimus,  nullum  in 

ista  provincia  reperiri  theologiae  cursum,  cum  a  tempore  repara- 

tionis  conventus  semper  seculares  apud  nos  theologiam  audierint. 

Requiruntur  insuper  praedicatores  hoc  anno  quatuor,  [ut]  mittan- 

tur  [ad]  conciones  habendas  per  adventum  et  quadragesimam;  et 

hoc  notandum,  quod  praedicatorum  stipendia  in  ista  provincia  tota 

fere  consistunt  in  missis  quae  a  fldelibus  praedicatoribus  offerun- 

tur;  quae  tamen  inter  summam  a  sacristia  provenientem  non  compu- 

tantar.  EtdocninusEpiscopns  alias  adhuc  postuiavit,  si  habuissemus. 

Requiruntur  praeterea  officiales  ordinarii  cujuslibet  conventus  et 

sacerdotes,quiintersint  choro  et  saecularium  confessiones  audiant; 

sex  ad  minus  confessores  in  ecclesia  requiruntur;  sicque  circiter 

sexdecim  sacerdotes,  imo  viginti  essent  necessarii  ad  proximo  inser- 

viendum  et  divinum  officium  celebrandum,  etcumpauci  sacerdotes 

inlersint  choro,  et  confessiones,  lectiones  etpraedicationes...,  neces- 

sarium  fuit  instituere  noviliatum  in  isto  conventu.  Igitur  septemde- 

cim  sacerdotes,  quorum  duo  missam  celebrare  non  possunt,  undecim 

novitii  et  très  fiatres  conversi  actu  communitatem  constituunt. 

Postulavimus  praeterea  praedicatorem  ordinarium  et  unum  fratrem 

conversum.  Sicque  ad  minus  necessarii  sunt  Iriginta  très  religiosi 

in  isto  conventu;  et  ut  possemus  subvenire  dominis  curatis  qui 

quotidie  subsidium  nostrum  requirunt,  necessarii  adhuc  forent  ad 

minus  très  vel  quatuor  sacerdotes.  Cum  tamen  redditus  stabiles  con- 

Yentus  una  cum  fundationibus  non  efTiciant  summam  bis  mille 

librarum,  caeteraque  omnia  proveniant  ex  fidelium  liberalitate, 

qui  in  hac  provincia  nihil  largiuntur  nisi  pro  missarum  célébra- 

tione,  unum  solum  petimus,  ut  nobis  licilum  sit  missas  nobis  sponte 

oblatas  accipere  applicando  pro  singulis  qui  eas  offerunt,  et  nihil 

exigendo  ab  ipsis,  sed  praecise  recipiendo  quae  sponte'  offerunt, 

cum  de  facto  non  solum  sint  stipendia  missarum,  sed  laborum 

omnium  quos  in  eorum  sainte  procuranda  toleramos;  neque  enim 

ex  illorum  numéro  sumus  qui  novas  quotidie  missas  eraendica[n]t, 

quamvis  plures  habeant  etiam  fundatas  quam  dicere  possint;  sic 

tuta  consciencia  poterimus  pro  ipsorum  salute  laborare. 

Sequuntur  fundationes  nuper  repertae  in  vetnstissimo   kalendario 

nobis  hucmque  ignotae, 

Januarius 

mi.  non.  Ânniversarium  domini  Joannis  de  Chirone  presbiteri 
et  parenlum  suorum,  a  quo  conventus  habuit  quadragintajscuta 
T.  xxxix.  S3 


358  SOGlèTt  ARGVÉOLOGIQVB  KT  «ISTOHIOUB  DU  UUOUSIIf . 

auri  pro  aedificio  majoris  vitreae;  et  coaventus  obligavit  se  ad 
dicenduoi  unam  missam  siogulis  hebdomadis  feria  2  in  capelia 
saacU  Pétri  marliris. 

IIL  QOB.  Anniversarium  Catbarinae  dePonleeiparentum  snonim, 
quae  legavit  viridarium  situm  ante  eonventum  ;  et  conventus  obli- 
gavit «a  tali  die  ad  facieadum  dicium  anniversarium. 

Fundationes  missarum  conventus  Lemovicensis  ordinii 

fratrum  Predicatarum. 

4304.  Una  missa  privata  singulis  diebus,  et  una  solemnis  quoli- 
bet anno  cum  tôt  privalis  quot  saeerdotes  huic  solemni  inter- 
fuerint,  altéra  solemnis  quolibet  eiiam  anno  ;  pro  quabus  omnibus 
solvuntur  tantum  annuatim  ocio  librae. 

1625.  Una  missa  solemnis  quolibet  die  cum  absolutione  generali  ; 
item,  vespere  defanctorum  singulis  hebdomadis  ;  pro  qua  fuoda- 
tione  legatae  sunt  tantum  annuatim  cenlum  iibrae. 

1670.  Una  nûssa  privata  singulis  diebus,  pro  qua  solvuntur 
centum  librae  annuatim;  antiquitus  una  missa  solemnis  qualibel 
hebdomada,  pro  qua  solvuntur  annuatim  triginta  quinque  librae. 

1613.  Duae  missae  privatae  qualibet  hebdomada,  pro  quabus 
solvuntur  annuatim  decem  librae  et  octo  solidi. 

1620,  Duae  missae  privatae  qualibet  hebdomada,  pro  quabus 
annuatim  solvuntur  viginti  quinque  librae. 

1631.  Duae  missae  privatae  qualibet  hebdomada,  pro  quabus 
semel  solutae  sunt  sexcenta  librae;  de  quarum  impensa  aut  colio- 
catione  non  constat. 

1630.  Una  missa  privata  qualibet  hebdomada,  pro  qua  legatae 
sunt  annuatim  viginti  librae. 

16S8.  Una  missa  privata  qualibet  hebdomada,  pro  qua  solvuntur 
annuatim  quindecim  librae. 

16...  Una  missa  privata  qualibet  hebdomada,  pro  qua  solvuniar 
annuatim  duodecim  librae. 

1623.  Una  missa  solemnis  quolibet  mense  cum  vigiliis  defuncto- 
rum,  pro  qua  solvuntur  annuatim  triginta  librae. 

1670.  Duae  missae  privatae  quolibet  mense  et  una  solemnis  quo- 
libet anno,  pro  quabus  annuatim  solvuntur  circiter  viginti  librae. 

l.%2.  Una  missa  privata  quolibet  mense  et  una  solemnis  quolibet 
anno,  pro  quabus  solvuntur  annuatim  très  librae. 

1304.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno,  pro  qua  legata  est 

annuatim  una  libra. 

Anliquitus  duae  missae  solemnes  cum  absolutione  generali,  pro 
quabus  legatae  sunt  annuatim  octo  librae. 


LUS   FRftRBS  FRÊGHEURS   DR  LIMOGES.  359 

1K29.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno,  pro  qna  legatae  saat 
annuatim  quinque  Ubrae. 

15â9.  Una  missa  solemnis  qaolibet  anno,  pro  qaa  annuatim 
legata  est  una  iibra. 

1S69.  Duae  missae  solemnes  qnolibet  anno,  pro  quabus  legatae 
sunt  annuatim  quinque  librae. 

16%.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno;  pro  qua  solutaesunt 
semel  quadraginta  librae  ;  de  quarum  expensa  aut  coUocatione  non 
constat. 

1627.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno  cum  Tigiliis  defunctorum; 
item,  altéra  missa  solemnis  qualibet  etiam  anno  ;  pro  quabus  sol- 
Tunlur  annuatim  quatuor  librae  et  decem  solidi. 

1627.  Très  missae  privatae  singulis  aonis,  pro  quabus  solvuntur 
annuatim  viginti  solidi. 

1628.  Viginti  missae  privatae  quolibet  anno,  pro  quabus  solvun- 
tur annuatim  quinque  librae. 

1632.  Gentum  quinque  missae  privatae  et  suptuaginta  octo  so- 
lemnes, pro  quabus  solvuntur  annuatim  circiter  viginti  quinque 
librae. 

1640.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno,  pro  qua  semel  solntae 
sunt  centum  librae  in  construclione  dormitorii  consumptae. 

1611.  Una  missa  solemais  qaolibet  anno,  pro  qua  legatae  sunt 
annuatim  très  librae. 

1646.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno,  pro  qua  solvuntur  an- 
nuatim duae  librae. 

1652.  Quadraginta  quinque  missae  privatae  quolibet  anno,  pro 
quabus  solvuntur  annuatim  septemdecim  librae. 

16...  Quatuor  missae  privatae,  pro  quabus  dantur  annuatim 
viginti  quinque  solidi. 

1666.  Duae  missae  solemnes  quolibet  anno;  pro  quabus  legatae 
sunt  annuatim  duae  librae. 

1656.  Sex  missae  privatae  quolibet  anno  pro  assecuratione  ali- 
cujus  legati  fundatae. 

1662.  Sex  missae  privatae  quolibet  anno,  pro  quabus  legatae 
sunt  annuatim  très  librae. 

1666.  Una  missa  solemnis  quolibet  anno,  pro  qua  solvuntur  an- 
nuatim quinque  librae. 

1668.  Duae  missae  privatae  et  una  solemais  cum  absolulione  ge- 
nerali  quolibet  anno,  pro  quabus  legatae  sunt  annuatin  très  librae. 

Psalmus  Deprofundis  et  prosa  Stabat  singulis  feriis  sexlis  ;  pro 
quibas  solutae  sunt  semel  sexaginta  librae. 

Praeter  istas  fundationes  sunt  et  aliae  aatiquae  septingentarum 


360  SOCIÉTV  ARCBéOLOGIQUB   ET   UISTORIQUE   DU   LlMOUSI!!. 

octoginta  quinque  missarum  privatarum  et  quadragînta  quinqne 
solemnium,  quolibet  anno,  notatae  in  veteri  cpdice  e  pergameno 
post  iteratam  conventus  destructionem,  quibus  non  fuit  satisfactum 
usque  ad  presens  tempus,  tum  quia  ignotae  erant,  tum  quia  reditus 
annuus  aut  coUocatio  nuUo  modo  apparent  nisi  in  quatuor  aut 
quinque  casibus. 

F.  Joannes  Grosier,  supprior. 

F.  Martinlies  probablement  Marti- 
•  netus(«ic)  Nicolas,  yicarius. 

F.  Joannes  Lagouote,  scindicus. 


Les  Archives  de  la  Haute-Vienne,  fonds  des  Jacobins,  contiennent 
des  pièces  relatives  à  quelques  fondations  : 

1<»  Rentes  et  fondations,  n"  prov.  3836. 

2*  Fondations  d'anniversaires  par  Isabelle  de  Venladour  (1277), 
n^  prov.  4406. 

3"  Rente  pour  fondation  d'anniversaire  par  Bernard  de  la  Por- 
cherie (1284),  n»  prov.  8304. 

4*  Legs  d'une  rente  à  Feytiat  pour  un  anniversaire  (4340), 
n*  prov.  4827. 

5®  Fondation  d'anniversaire  par  Mathieu  Botin  (1404),  n®  prov. 
4406. 

6''  Legs  fait  par  Guillaume  MioUs  pour  deux  anniversaires  (1417), 
n»  prov.  4895. 

7*  Fondation  de  Gautier  de  Pérusse  (1422),  n^  prov.  4157. 

8*  Fondations  d'anniversaires.  Pièces  de  procès  (xiv«-xvui« 
siècles),  n*  prov.  3854. 


TABLE  DES  MATIERES 


DES  DOCUMENTS  SUR  LES  FRÈRES  PRÊCHEURS  DE  LIMOGES 


PuNDATio  irr  PRiOREs  coNvvNTus  LsMOviCBNsis,  aoclore  Bernardo  Gui- 
dODis S6i 

II 
Mbmokialu  peo  gonventu  Lemovigensi 283 

I.  —  [FuDdatio  prions  et  posterions  conventus  Lemoviceosîs] S83 

II.  —  De  morle  domini  Durandi  episcopi  Lemovicensis 291 

III.  —  De  bcD^ticiis  et  morte  domini  Guillcimi  de  Malomonle 303 

IV.  —  De  reliquiis  Colonia  Lemovicam  adsporiatis 993 

V.  —  De  beneliciis  Slephani  Lespaiers  el  alioram 993 

VI.  —  Litlerae  commendaiitiae  domini  Durandi^  episcopi  Lemovicensis  994 

VII.  —  Litterae  domini  Aymerici,  episcopi  Lemovicensis •  994 

VIII.  —  De  celebratione  oflicii  ecclesiastici  in  ecclesia  nova,  et  conse- 

cratione  majoris  aitarîs  et  atiorum  minorum  allarium 395 

IX.  —  De  dedicatione  ecclesiae  nostrae  Lemovicensis 996 

X.  —  De  qnibusdam  reliquiis  in  ecctesiu  iioslra  reposilis 398 

XI.  —  De  aliquibus  capitulls  tam  provinciaiibus  quam  generalibus  in 

conventa  Lemovicensi  celcbraiis. 398 

XII.  —  Sequitur  séries  capitulorum  Lemovicae  celebratam 999 

XIIL  —  De  sepalturis  insignibas  conventus  Lemovicensis 300 

1.  [De  fratre  Petro  de  Sancto  Asterio,  episcopo  Pctragoricensi] 300 

3.  De  illustrissimo  ac  venerabili  fr.  Bernardo  Guidonis 301 

3.  De  illustri  ac  venerabili  fr.  Bernardo  Bruni 303 

4.  De  venerabili  fratre  Martiali  Boyol 30l 

5.  De  lumalo  domini  Dupeirat  canonici 304 

6.  De  epitapbio  Elizabeth  de  Ventodorio 305 

7.  De  sepulcris  comitura  de  Quadris 305 

8.  De  insigniis  et  sepuliuris  qaorumdam  nobilium 306 

XIV.  —  Nomina  fralrum  qui   in  conventu  Lemovicensi  floruerunt  ab 

anno  MCCXX<»  usqae  ad  presentem   \ 693»» 306 

I.  [De  venerabili  fratre  P.  CellaDÎ] 306 

9.  be  venerabili  fratre  Gerardo  de  Francheto 307 

3.  De  venerabili  fratre  Hugone  de  Malamorte 308 

4.  De  venerabili  fratre  Stéphane  de  Snlaohaco 308 


363  TABLE   DES  MATIÈflBS. 

Page». 

5.  De  venerabili  fratre  Helia  Navarra 309 

6.  De  venerabili  fratre  Geraldo  de  Sancto  Valerico 309 

7.  De  venerabili  fralre  Nicolao  de  Monte  Maurilii 310 

8    De  venerabili  fratre  Joanne  de  Chaslancs 310 

9.  De  venerabili   fratre  Petro  de  Miilceone 3H 

40.  De  venerabili  fralre  Joanne  de  Nontronio ..  311 

1 1 .  De  venerabili  fratre  Petro  CopeUi 311 

H.  De  venerabili  fratre  Yterio  de  Comprenaco 312 

13.  De  venerabili  fratre  Joanne  Balistario 3U 

14.  De  venerabili  fratre  Radulpho  de  Quadris 3U 

15.  De  venerabili  fratre  Petro  de  Riperla 314 

16.  De  venerabili  fratre  Gaidone  de  Monpreset.. Zif^ 

17.  De  venerabili  fratre  Rogerio  de  Ageduno 315 

18.  D^  venerabili  fratre  Petro  Geraldi  de  Francheto*. 1 315 

10.  De  venerabili  fralre  Briccio  de  Peirato 315 

20    [De  venerabili  fratre  Slepbano  Racaldi] 316 

21 .  [De  venerabili  fralre  Petro  Audlerii] 3l6 

22.  De  venerabili  P.  Cernardo  de  Cella 316 

23.  De  venerabilibus  fratribus  Joanne  Rigaldi  et  Nicolao  Paula,  etc.  317 

a/ Joannes  Rigaldi  et  Nicolaus  Pauta 317 

bl  Joannes  Mitrili TAl 

cl  Relias  Marlelli 317 

d/  Aymericus  Haumeti  et  Leonardus 31"? 

el  Aymericos  Garpentarius 317 

fl  Hugo  de  Munie  Valerio 318 

ji/ Nicolaus  de  Prlno 3i8 

hj  Aymericus  de  Bario , 318 

i)  Guilelmiis  de  Pianis 318 

jl  Joannes  Molini 318 

kj  Peirus  Borqueli Sl8 

Il  Petrus  de  Jutella 318 

m/ Relias  Telfondi  de  Gora 318 

ni  Relias  de  Manaco , 319 

0/  Petrus  de  Rupe  de  Reses 319 

tl.  [De  venerabili  fratre  Guilelmo  de  Forcellis] 319 

25.  [De  venerabili  fratre  Slephano  de  SiaîaRioate} 3i0 

26.  [De  venerabili  fratre  Petro  Borneti] 3*0 

27.  [De  venerabili  fratre  Joanne  Mauricii] 3Î1 

28.  [De  venerabili  fratre  Gerardo  Rosardi  de  Nontronio] 3îl 

29.  [De  tribus  fratribus  ad  cardinalatum  assumptis] 3i2 

al  Frater  Gerardus  de  Sancto  Adamaro 3*2 

b)  Frater  Joannnes  de  Molendino 32i 

c/  Frater  Guillelmus  Sudre 3î3 

30.  [De  venerabili  fralre  Arnaldo  Troiaodi] âi3 

.'Jl .  [De  illustrissimo  fralre  Joanne  de  Podio  nucis] 324 

Exemplar  epistolao  quam  sanclus  Vincentius  Ferrariasscripsit  ad 
Reverendissimum  Patrem  Johannem  de  Podio  nucia 3î4 


TABLR   DKS   MXTIÈRES.  363 

Pages. 

Vigesimus    primus  Magisler   ordinis    Praedicatorum,    necnon 

vigesimus  secundus  el  vigesimus  tertlus. . .   328 

39.  [De  venerabili  fralre  Joanne  Malhaci] 3t9 

33.  [De  venerabili  fratre  Joanne  Peconeti]  329 

34.  [De  venerabili  fralre  Joanne  Mazelier] 329 

35.  [De  venerabili  fratre  Aegidio  Berton] 329 

XV.  —  De  reformatfone  conventus  Lemovicensis 330 

ICVI.  —  Obitus  fratrum  posl  introductam  reformaiionem 333 

1 .  Fraler  Dominicus  Buisdeiigand 333 

2.  Fraler  Franciscus  Secousse 333 

3.  Fraler  Joannes  Desnols 333 

4.  Fraler  Hyacinlus  Saint 3C3 

5.  Fraler  Thomas  Gergoi 333 

6.  Fraler  Ludovicus  Bertrand 334 

7.  Fraler  Hyacinlus  Binel 3)4 

8.  Frater  Geraldus  Garcias 334 

9.  Fraler  Gabriel  Faucher , 334 

iO.  Fraler  Nicolaus  Pricquel 334 

1 1.  Fraler  Franciscus  de  Lomenius • 334 

42.  Fraler  Raymundus  Bodet 335 

13.  Fraler  Ludovicus  Lncour * 335 

44.  Frater  Imbrosius  Bonet é  335 

15.  Fraler  Antoninus  Combellos 335 

46.  Frater  Bernardus  Carrière « 336 

17.  Frater  Henricus  Golumbus «..^ d3é 

1 8.  Fraler  Hyacinlus  Grouchaad' 336 

19.  Frater  Dominicus  Drapeiron • • 336 

90.  Frater  Vincenlins  Lansade. .  •   339 

91.  Fraler  Pelrus  André 340 

92.  Fraler  Josephus  Chastagnac é 340 

93.  Frater  Jacobus  Tirebas * 34i 

94.  Fraler  Josephas  Romanel ...«..«..  341 

95.  Fraler  Marlialis  Boubiai 344 

26.  Fraler  Raymundus  Monrejaud .341 

97.  Fraler  Joannes  Duclareix. .  «  ^ « 342 

98.  Fraler  Jordanus  Robi 342 

99.  Dv5  venerabili  P.  fr.  Pelro  Poileveo *.*,.  342 

30.  Frater  Joannes  Laschenaud ««.«.#«....  344 

31 .  De  venerabili  P.  fralre  Petro  Chastagnac  *..  » < . .  344 

39.  Fraler  Hichael  Bonardeau « .<.....««..■•  346 

33.  Frater  Anlonius  Lagrave ^ 348 

34.  Fraler  Dominicus  Froment 318 

XVII.  --  [BuIIa  Pauli  quinli  pro  reformalione  conventus  Lemovicensis]  349 

ni 

FuodatioDes  missarum « .  « <«.<«......•  354 


DISCOURS  A  LA  LOUANGE  DES  LIMOUSINS 


Ce  discours,  que  nous  avons  trouvé  dans  un  grenier  de  Tulle,  peul  être 
daté,  selon  nous,  du  siècle  dernier,  et  nous  oserions  presque  le  remonier 
jusque  vers  1738,  malgré  les  détails  qu'il  conlienl  sur  noire  manufacture 
d*armes  de  Tulle  et  la  vogue  lointaine  qu'il  lui  attribue  légitimement. 
Tulle,  en  effet,  a  près  de  trois  siècles,  à  notre  avis,  de  fabrication  des  ar- 
mes. Il  résulte  de  diverses  commandes,  par  lettres  classées  dans  nos  papiers 
et  écrites  il  y  a  plus  de  cent  ans,  que  les  fusils  de  luxe  que  Tinduslrie 
privée  y  faisait  pour  la  chasse,  n'étaient  pas  moins  en  faveur  que  ceax 
destinés  à  «  Tarmée  du  ponant.  » 

Nous  placerions  donc  volontiers  ce  panégyrique,  d'une  bonne  latinité,  et 
d'une  saveur  originale  pour  nous  gens  du  pays  surtout,  sous  l'épiscopat 
de  Mkt  Duplessis  d'Àrgentré,  prélat  qualifié  vénérable  par  La  Biche  et  qui  a 
laissé  divers  ouvrages  philosophiques  et  de  théologie.  Le  professeur,  un 
jésuite  sans  doute,  qui  s'adresse  ainsi  par  dessus  l'épaule  des  élèves  du 
collège  de  Tulle  à  la  région  tout  entière,  dit-il  :  LemooLcus,  n'était  sûre- 
ment pas  du  Bas-Limousin,  notre  compatriote,  comme  en  témoigne  sa  lati- 
nisation exotique  des  noms  de  lieux,  tels  que  le  Puy-d'Arnac,  en  réalité, 
Podium-Asnaci,  Le  Saillant,  El  Salhent,  de  Salhento,  etc. 

On  remarquera  les  détails  qu'il  nous  donne  sur  les  gondoles  ageuaises  et 

le  bel  éloge  de  nos  savants. 

J.-B.  Chahpeval. 

LEMOVIGORUM  PANEGYRICUS. 

Mirum  forte  cuipiam  videbitur,  auditores,  quod  Lemovicus,  de 
Lemovicis,  apad  Lemovicos  aiideat  disserere  :  quorsurn  vero? — An 
quia  laudare  se  neminem  decet?  Quasi  vero  quod  Gracos  oratores 
de  Grœcis,  Romanos  de  Romanis  decuit  olim,  hoc  idem  me  non 
deceret.  An  quia  in  vestras  laudes  nimium  effusus,  adulationis 
mihi  famam  turpiter  inurere  videar  vobis?  Quasi  detracla  veritate, 
vestram  milii  liceat  gratiam  aucupari.  Quanquam  tamen  ita  sumus 
anime  constituli  feré  omnes  ut  (]uidquid  de  natali  solo  dictum  est 
gloriosius,  universim  in  nos  illud  idem  atque  avide  recipiamus. 

Verum  con(idite,  auditores,  niliil  alienum  fictitium  nihil  ibi  inea 


DISCOURS   A    LA   LOUANGE   DES  L1M013SINS.  365 

haec  proferet  ralis  ubi  se  sine  fuco  prsebeat  videndam  simplex  nu- 
daque  veritas.  Non  enim  sum  ego  ex  hiis  qui  amore  patriae  obcae- 
cati,  quidquid  in  eâ  gloriosum  vident,  gloriosius  enumerent  ad 
ostenlationero  ;  turpe  autem  quidquid  animadvertendum  turpiori 
pudore  dissimulent.  Ea  dicam  qusB  oculis  subjecta  fidelibus  nemi- 
nem  fallant;  quse  invitis  auribus  commissa  neminem  effugiant; 
quae  certis  consignata  litteris,  neminem  decipiant;  imo  et  fidem,  ut 
à  fontibus  minime  dubiis  proficiscuntur,  Tel  à  nolentibus  extor- 
queant. 

Duo  bîc  igilur  occurrunt  celebranda  in  vobis,  Leraovici  viri  : 
vester  nempè  labory  religioque  vestra,  iaborem  dico  indefessum, 
illaesam  apello  religionem.  Quod  geminum  laudis  nostrae  caput 
opationis  gemino  dum  capite  demonstravero,  vestra  me  bénigne 
excipiat  comitas,  sustentet  benevolentia,  audiat  humanitas! 

Faveas  dicenti,  prœsul  illustrissime,  pro  tuo  ita  singulari  in  litte- 
ras  amore,  ut  juniores  musarum  alumnos  in  hoc  uno  inlentos  velis, 
quibusque  ad  nugas  dum  omnes  prsecludis  aditus  reconditioris 
litleraturae  penetraiia  reseras.  Faveas  non  minus  pro  tuo  in  reli- 
gionem studio  :  argumentum  enim  mihi  incumbit  ejusmodi,  ut  ma- 
jorem  in  eo  sibi  partem  religio  vindicet.  Unum  vereor,  ne  qua- 
rum  in  ecclesia  Tutellensi  virtutum  quotidie  testis  ipse  es  oculatus, 
earum  numerum  ne  minimum  quidem  mea  non  comprehendat 
oratio. 

Favebis  dicenti.  Major  urbis  sapientissime,  intervalla  negolio- 
rum,  et  ita  otio  dispunges  ut  particulam  aliquam  saltem  pretiosi 
tcmporis  quod  in  nostra  omnium  utilitate  impendis  oratori  mihi 
quamlibet  tenui,  ultrô  sis  concessurus.  Non  id  moleste  ferel  amata 
perinde  conjux  ut  amabilis,  uni  tibi  concessa,  ut  uni  tibi  concc- 
denda,  uni  tibi  data  ut  uni  tibi  danda;  marcescente  invidiâ,  tabes- 
cente  malitiâ,  approbante  sapientià,  piaudente  oppido,  communi 
que  omnium  hominum  suflfragio. 

Favete  et  vos  quotquot  adestis,  auditores  ornatissirai,  vestris  in 
laudibus  ibi  non  immorabor  ubi  tota  mea  vestri  praeconium  suscipit 
oratio. 

Prima  Pars. 

Nascimur  omnes  in  labore  et  ad  Iaborem;  neque  alia  servis,  alia 
dominis,  nascendiest  conditio.  Vitae  tamen  nécessitas  quamvis  dura 
illa  sit,  durior  in  aliis,  in  aliis  esse  mitior,  saepenumerô  solet.  Pro- 
vinciis  quibusdam  sic  favit  praepolens  rerum  moderator,  Deus,  ut 
mitiorem  cœli  naturam  sorlitae  benigniorique  solo  perfruantur.  Op- 
pida  quaedam  sic  locuplelat,  utlargas  illis  opes  impense  distribuât. 


366  SOaÊTR  ARQBÉOIOGIQUB  VT   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

Viros  qnosdam  sic  informât,  ut  in  eos  ingenii  sagacitatem,  judieii 
acumen,  merooriaB  felicitatem  abunde  conférât  ;  dumreliquis  haec 
omnia  minus  asquà  manu  elargitur.  Verùm  enim  verô  quibus  favet 
minus,  sedulitate  illi  atque  industriâ  natara&  vices  supplere,  com- 
moda  quasi  elapsa  revocare,  fortunaB  bona,  labore  summo  compa- 
rare,  ita  ut  undë  invideant  nemini,  unde  omnes  invideant  sibi 
habere  se  glorientar. 

Vestra  h^c  omnium  sors  est,  Lemovici  viri,  qui  natursB  parum, 
arti  debetis  plurimum;  qui  quantô  aliis  naturâ,  vos  lanto  iliis  supe- 
riores  labore  esse  existimo. 

Quibus  ergo  in  rébus  Lemovicorum  se  proditlabor?  In  iis  tribus, 
ni  fallor,  in  agrarum  culture,  in  mercatnrœ  studio,  in  sdentiarum 
percepHom. 

Ponite  vobis  ob  oculos,  auditores,  Galli»  partem  illam,  quae 
tonornm  instar  musicorum  desultoriis  undequaque  coUibus  eminet; 
nisi  forte  sparsi  hinc  et  inde  saltus  perfringant  oculorum  aciem. 
Cernite  animo  agros,  naturâ  sylvestres,  lapidosos,  stériles  et 
malignos,  iisque  passim  quibus  scaturiunt  fontibus  superena tantes, 
ni  vestrum  cum  pede  animum  alio  transferre  suadeant,  et  tradn- 
cant  ad  meliora.  Gontemplamini  ipsius  terrae  cœlum  crassum  illud 
quidem  ac  dubium,  ita  ut  frigidum  ac  tenebrosum  cum  liquuntur 
vicinorum  montium  nives,  liquatis  nivibus  fervidum  sit  ac  lorri- 
dum  :  nisi  forsan  aëris  inclementia  obvalato  {sic)  licet  capite 
regredi  cogat  vos  vel  invitos.  Quo  tuo  jam  cunque  est  qui,  hœc 
omnia  ubi  oculo  lustraverit  erudito,  qui  non  exclamet  protinus; 
Solum  illud,  non  hominum  sedes^  sed  ferarum  recessus  voluit  esse, 
imo  debuit  ! 

Noii,  quaeso,  reclamare,  vir  bone!  quisquis  es,  vldisti  patrisB 
concessum  à  naturà  munus,  artis  admirare  opus  deinceps,  prope 
dixi  miracula  intuere.  Operosi  hue  adesle,  quotquot  estis  coloni, 
illo  non  minus  pervigiles  viro,  qui  dolere  se  aiebat  quolies  antelu- 
canâ  opificum  victus  essel  industriâ  ;  hue  inquam  adeste  coioni,  et 
dignes  laborura  fructus  meo  huicce  viro  coramonslrate,  jam  vides 
ut  vel  in  ipso  itineris  exordio  sylvestrem  agri  dediscant  animum, 
ut  déclives  molliter  pedibus  areas  subjiciant  colles,  ut  in  cacumine 
ambulacra  quibus  coronantur  sylvae  frugiferae  utiliter  exhibeant, 
ut  ipsae  rupes  (quod  non  credat  nisi  qui  viderit),  gravidis  onerentur 
messibus;  ut  aquarum  scaturigines  certis  quibusdamin  locis  coarc- 
tatsB,  in  varies  deinde  canales  influant,  pratis  irrigandis  idone»  ; 
ut  omnis  omninô  generis  arbores  adolescant  in  poma  Hesperidum 
pomls  invidiam  factura;  ut  adornati  floribus  innumeris  horti,  spi- 
rent  soavissimum  odorem  et  verni  temporis  imaginem  continuam 
prsB  se  feranl;  ut  in  vitibus  uvœ  purpurescant  turgidœ;  ut  et  ubi- 


DISCOURS  A   LA   LOUANGE  DES  L1M00SINS.  367 

que  demùm  tellus  agricoIaruEn  labarl  non  minus  quam  Totis  res- 
pondeat.  Alque  illud  à  me  assentatoriè  magis  qaam  verè  pronun- 
ciatu  Yideatur. 

Teates  vos  apello,  Saliani  (1)  colles,  qai  non  tam  ad  nostram 
quam  aliorum  sitim  reslinguendam,  liquores  ministratis  suaviter 
ignitos,  lené  mordicantes,  sincère  limpidos;  et  vos  à  Sancto  Basilio 
vina  qua  non  minorem  in  pola  suavitatem  quàm  ab  baustu  sala- 
britatem  relinquitis  I  Vosque  generosa  Pidamacea  pectori  arnica 
magis  si  minus  generosa  1  Magnum  hoc  profectè  vinitorum  opus! 
Qui  dissolvere  illud  ipsum  quod  sociaret  natura  non  récusa verunt  ; 
dum  solidos  dies  pendentes  de  rupe»  novelleta  ut  conserant  ipsis 
rupibus  excavandis  impendunt  quidquid  babent  industriaB  ac 
laboris. 

Testes  eritis,  et  vos,  Subterranenses  tractus,  vos  Treniacenses^ 
vosmetipsi  Ussellenses,  qui  totidem  veluli  proviaciaB  frumentariae  ne 
patiamur  esuriem  prastô  estis,  vestrasqae  fruges  in  borrea  nostra 
simul  devolvendas  studiis  rivalibus  depromilis.  Desinant  postea 
populi  nomini  nostro  infensi  —  castaneas— deridendo  mensisappo- 
nere;  malim  nos  apellent  verum  ut  falear,  frurnentarii  esores 
panis  (2);  magnum  hoc  profectô  agricolarum  opus  qui  variis  tempus 
satibus  assuefacti  agros  sudantibus  membrts  humectarum  etterram 
fruges  abnuentem  fieri  feracem  coegére. 

Teslem  te  apello,  Donzenacum,  cujus  persica  inter  tôt  fructuum 
delicias,  indice  vel  oculo  morsum  invitantia  salivam  nostram  com- 
movent;  quamquam  quid  dico  noslram  dum  coronandis  aulae  régime 
mensis  inserviunt,  Lutetiam  translata.  Magnum  hoc  profectô  olito- 
rum  opus!  Qui  surculos  modo  terebratos,  modo  perticatos,  modo 
coronarios  inserunt  industrii  juxta  ac  laboriosi. 

Ât  si  noster  in  agrorum  cuUurd  se  prodit  labor^  an  minus  in 
mercaturœ  studio?  an  magis  illud  idem  inquirendum. 

Fluvialibus  oppidis,  urbibusve  marilimis,  mercaturam  exercere 
neque  difûcilis  neque  operosa  res  est,  auditores;  illis  enim  unda^ 
prasterlabentes  viam  indicant  quam  ingrediantur  ;  hue  illuc  convo* 
lantes  alienigenae  docent,  quas  construant  naves  asportatœ  merces 

(4)  Le  Saillant  (Voutezac  et  Allassac).  Saint-Razile-de-Meyssac,  jadis 
Saint-Baudile,  Sancti  BaudilU,  et  Le  Puy-d'Arnac,  Podium  Asnacij  trois 
erus  e<«UiDés  du  Bas-Limousin. 

(2)  Dicton  :  Limousin^  mangeur  de  potn^  màche-raoes.  —  Si  La  Sou- 
terraine, Treignac,  Ussel  sont  les  greniers  du  Limousin,  d'après  ce  dis- 
cours, Donzeoac  en  est  le  verger,  car  il  produit  d^excelleots  fruits.  Voyez 
nos  Prooerbea  patois  da  pays,  en  vente  2  l'r.  chez  M™*  Ducourtieux,  à 
Limoges. 


368  SOCIÉTÉ   ARCHÉ0L06IQUR   ET  HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

divendendas  exhibent;  opes  comparataB,  comparandas  offerant; 
periculis  assuefacli  pericula  timere  vêtant;  verlitur  timorin  felicem 
atidaciam;  felix  audacia  commercium  instituit,  fcvet,  amplificat, 
verum  hue!  Quam  dispar  conditio  vestra  est,  Lemovici  viri^  qui 
quominus  nalurâ  potestis,  subsidio  vobis  diligentiam  comparalis. 
Confidite  tamen,  vobis  est  pro  mari  continens,  equi  pro  navibus, 
pro  gubernatore  indastria,  nautica  pro  pixlde  inopia,  nummi  pro 
vectoribus,  oppidapro  portubus,  unde  freti  tumulluantis  procellas, 
naufragii  expertes  placido  intuemini  oculo. 

At  enim  quid  hoc  est?  Men'ludit  error  amabilis?  Vestrurn  est 
mare  cum  suis  navibus,  vestrae  naves  cum  suis  mercibus,  vestra^ 
merces  cum  suis  auctoribus,  vobis  panditur  forum  argenlarium, 
vobis  patet  syngraphus,  curandis  mensarià  permutatione  pecuniis. 
Angles  jam  video  ab  aquilonibus  properantes,  Batavos  à  paludibus, 
Hispanos  ab  australi  plagâ,  insulares  ab  insulis,  solis  ab  ortu 
Syrios,  cœterosque  Asiae  populos,  nummorum  vacuos,  quia  mer- 
ciura  plenos.  At  Lemovicos  siraul  video  plenis  se  fundentes  itineri- 
bus,  ex  eâdem  provinciâ,  sed  varium  ob  flnem  proflciscentes  ;  hic 
Anglorum  coria,  cum  butyris  Batavorum  quaesilurus,  Burdigalam 
traducitur;  ille  Hispanorum  lanas  exculturus,  Baionam  deducitur; 
alii  insularium  saccharum  expurgaturi  Rupellam  transvehuntur; 
alleri  trabum  fabas  torrefacturi  oris  appeliunt  Aremoricis.  Praeler- 
quam,  quôd  ut  iia  transmigrent,  non  sunt  multum  adhortandi, 
quippe  quos  turmalim  hùc  illûc  advolanles,  cogenle  nemine,  quol- 
annis  videmus  :  an  tamen  opimis  aliorum  spoliis  locupletati,  vos 
auditores,  ab  aliis  victos  patiemini?  Nihil  ne  vobis  erit  vicissim 
quôd  in  exteras  regiones  deducatis?  Erit  profectô  aliquid,  non 
tantâ  cum  uberlate,  sed  non  minori  cum  utilitate.  Sunt  et  erunt 
boves  qui  ruslicis  an  te  laboribus  exercebuntur  quàm  impinguati, 
aliéna  delibent  pascua,  alibi  devorandi.  Sunt  et  eruni  equi,  cursu 
celeres,  crure  expediti,  cenice  ardui,  brèves  alvo,  dorso  rolundi, 
quos  honorificè  conscendant  provinciarum  nobiles,  quippe  qui  ad 
honores  non  ad  onera  nati,  honores  tuentur,  onera  deponunl.  Sunt 
et  erunt,  atque  hoc  vobis  peculiare,  viri  Tutellenses,  sunt  et  erunt 
catapulta, qwx  miroelaborataeartificio,  Rupefortiumtransvehantur, 
in  regiis  servandaî  armamentariis;  unde,  flagrante  belle,  depromplae, 
hostiles  frangantimpetus,  et  licet  in  oppido  omni  ex  parte  indefenso 
fuerint  fabricalsB,  oppidum  tamen  illud  reddant  quasi  Galllae  totius 
propugnaculum.  Sunt  et  erunt  castaneœ,  qusB  quanquam  ab  longin- 
quis  regionibus  despeclœ,  avide  tamen  ab  iis  recipiantur,  ita  ut  suam 
non  minus  doleant  quàm  nosmetipsi  sortem  dolemus  noslra.m, 
cum,  cœlo  minus  favente,  earum  quoque  minor  copia  facta  sit. 


DljGOCRS   A   LA   LOUANGB   DES   LIMOUSINS.  369 

Sanl  et  erunt  encausticœ  imagines (i),i\^uvdd,  vasa,  lineamentis  des- 
cripta,  coloribus  temperata,  arte  configurala,  umbrâ  ac  luce  apte 
composita,  omûibus  pingendi  lenociûiis  adornala,  qualia  perilus 
Zeuxis,  doctus  Apelles,  aut  celebris  Parrhasius  anliquilus  descrip- 
sisset  :  qualia  efformare  qui  voluerunt  œmuli  non  ignobiies  certaDdo 
victi  tenuilatem  confessi  sunt  suam,  victoribus  vobis  debitam  lau- 
dem  coDcedendo,  laudem  vestram  tum  industriam  penilus  pers- 
pexere. 

Vestri  me  miseret,  viri  Aginnenses^  qui  dulci  quod  vobis  offert 
curstis  cimbarum  reciprocm  spectaculo  frui  gaudelis  molles  ac  desi- 
des dùro  natursB  benigûioris  aura  afBati,  urbem  vestram  divitiorem 
opibus  deliciis  cumulatiorem  pleniorem  incolis  reddere  vobis  lici- 
tum  foret. 

Vestramdoleo  sortem,  viri  Engolismenses,  quos  genio  indulgentes 
liberaliler,  in  adornandis  opipare  conviviis  unice  videmus  occupa- 
tos,  ut  vestrâ  modo  mensâ  excipiatis  hospites  splendidè  ac  ma- 
gnifice  alienâmodo  quadrâ,  eodem  quoque  apparatu  ab  iis  vicissim 
excipiendi;  dùm  civitatem  vestram  eam  in  quâ  maxime  floreret 
commercium  reddere  facere  liceret  vobis  absque  labore  summo, 
non  levi  tamen  hujus  increraento.  [Quo  neglecto  dicere  caetera  ne- 
cesse  estj  (ces  mots  sont  raturés). 

Veslra  me  tangit  ignavia,  Santones  viri  qui  Engolismemiutn  ins- 
tar victitantes,  quô  blandius  suum  vivendi  suadent  modum  eô  faci- 
liùs  admittitis  œmulando,  pêne  dixerim,  amplificatis  admiltendo. 
Dùm  mercaturae  labores  amovetis,  temere  ad  solem  reclinati,  in 
vos  apprimé  cadit  maligna  vestrae  genlis  apellatio. 

Nuuc  autem,  ne  oratio  longius  progressa  videatur,  quem  in  merca- 
turœ  studio  laborem  vidistis,  eundemin  liberalibus  disciplinis  videte. 
Quod  si  quis  affirmanti  mihi  minus  assenserit,  intueatur  in  eos  qui 
in  hoc  adsunt  concilio,  ingenio  et  doctrinà  praecellentes  viros  qui- 
que  docti  sermones  utriusque  linguae,  alienis  minus  spoliis  videntur 
divitcs  quàm  de  suo  locupletes,  sivè  in  congressu  ubi  reconditioris 
litteratnrae  opes,  parce  non  tàm  quàm  fuse  explicant,  sive  in  foro 
ubi  reddunt  populis  jura,  ornatae  rationis  pondère  suffulti,  digni 
certe  qui  Themidem  Parisiacam  suis  cohonestarent  judicibus  et  vel 
ab  îpsâ  vicissim  cohonestarentur,  vivos  tamen  et  praesenles  orait- 
tamus  sanè  :  malo  enim  ne  unum  quidem  nominare  quàm  debito 
quemquam  fraudare  testimonio.  iEtates  retrolapsas  potius  mecum 
interrogate. 

Muretum  admirata  quidem  es,  Roma^  cujus  in  variis  lectionibus 
ubertatem  etpicturam,  in  orationibus  granditatem«  in  versibus  pie- 

(4)  Émaux  de  Limoges. 


370  SOCIÉTÉ  ARCHKOLOGIQUK  BT  IltSTORIOUK  OU  UMOUSIK. 

tatem  et  elegantîam,  in  disputationibus  sublililatem,  in  epistolis 
suavitatem,  in  schoUis  veritatem,  aoimo  percepisti;  nascentem  non 
vidisti  !  hoc  Ubi  munus  indulsii  pagus  cui  Muretus  nomen  :  et  unft 
quidquid  in  TtUlio  sublimius,  quidquid  pleniusin  Horatio,  qniAqmd 
in  Plinio  suavius,  tuis  assertom  roœiiibas  invexit. 

Baluzium  admirata  es,  Lutetia,  non  illum  quidem  criticum  in 
judicando  [severiorem]  (semble  raturé)  faciliorem,  celeriorem  qui 
opus  quodcanque  probaret  vel  reprobaret,  prout  brevi  teniporis 
spatio  placuisset  inter  legendum  Tel  displicuisset;  non  morosam 
illum  ac  difficilem  qui  limam  in  authorem  exacueret  censoriam;  non 
invidum  illum  ac  severiorem  qui  oblreetalione  operis  alieni  glo- 
riam  sibi  malignam  compararel,  sed  qnalem  debuit  esse  is  qui  doc- 
tissime  eruditus  gloriosum  eruditi  nomen  jure  sibi  adeptus  est, 
sire  in  disculiendis  operibus  alienis,  sive  dùm  suo  perpoliret.  Sed 
veloces  nascenti  spiritus  afilavere  Tutellenses,  et  ingeniam  exco- 
lendo  quidquid  habuere  illustrius  dederunt  tibi  summè  libérales 

Auratum  admirata  es,  Burdigala,  et  musas  ipsius  ore  loqaentes 
audiisti,  sive  dûm  sonos  ederet  molles  et  elegiacos,  sive  dùm  6a- 
rumnas  ripas  canora  pulsaret  testudine,  sive  dùm  heronm  facla 
celebraret  egregius  olor,  at  quam  tibi  commodavit  Lemovicum  jure 
sibi  vindicat! 

Innumeri  sunt  et  alii  quibus  apellari  à  me,  non  tàm  honorificum, 
quàm  erit  à  vobis  desiderari  gloriosum.  Qui  ergo  in  agrorum 
culturà,  in  mercaturae  studio,  in  scienliarum  perceptione  se  prodit 
labor  indefessus  apelletur  necesse  est  quod  priore  loco  demons- 
travi,  illaesam  verô  esse  religionem  hoc  altéra  orationis  meae  parte 
snperest  demonstrandum. 

Secunda  Pars. 

Religioso  licet  populo  nil  pulchrius,  nil  tamen  hoc  nostro  rarius 
saeculo,  audilores,  qui  enim  se  religiosos  haberi  volunt,  nil  minus 
plerumque  quàm  religionem  amant.  Quam  loquuntur  inter  omnes 
pauci  norunl,  qui  praecepta  admirantur  exempla  refugiunt,  qui 
jugum  intuentur  jugum  excutiunt  impie  audaces.  Grescente  audaciâ 
crescit  impielas,  quae  si  semel  primarios  ac  nobiles  invadat  pestis, 
grassatur  in  infimes  brevi  tempore  contagio  et  quam  ^nfelicem 
bonis  labem  moribus  non  aspergit!  Simile  quidpiam  in  vobis  nil 
doleo,  Lemovici  viri,  sic  enim  ego  promptes  alque  alacres  ad  vête- 
rem  retinendam  religionem,  ut  ad  falsam  rejiciendam  recentium 
hereticorum  doctrinam  extilisse  cognovi.Unde  autem  patet  illaesam 
adhuc  esse  religionem  veslram?  Ex  hoc  triplici  momento  :  ex 
morum  probitatey  ex  heresum  fugd^  ex  fidei  monumentis,  quae  Iria 
breviter  atque  ordine  perstringo. 


DISCOURS   A   LA   LOUANGE   DKS  LIMOUSINS.  37 f 

Probitas  worww,  patri»  decus,  civium  utililas,  religionis  colu- 
men,  jure  sempcr  extitit;  quamdiu  viget  florent  imperia,  lutantur 
leges,  religio  manet;  altis  semel  defUa  radicibus  nullà  vi  uaquam 
labefaclari  potest,  in  tempestate  qaiescit,  in  tenebris  elucescit,  in 
prosperis  noD  inlumescit,  in  adversis  non  concutitur  ubique  de- 
mum  sibi  conslal.  Ubinam  autem  reperielur  in  vobis,  auditores?  — 
In  quâlibetvitaB  condlttone. 

Videte  eam  apud  nobiles  qui  jure  suo  non  abuluntur  ad  injuriam, 
qui  e  suprême  dignitatis  gradu  descendunt  aliquando,  ut  quoties 
occasio  tulit  tanto  inferiores  infiniis  familiariler  fiant  quantô  iUis 
dignitate  snperiores.  Qui  opes  adaugent  non  ut  divitiores  évadant, 
sed  ut  se  prsebeant  munificenliores,  qui  timeri  dedignantes,  volunt 
amari,  qui  oderunt  servitutem  libertatis  amantes,  qui  tyrannidem 
aspemantur  reverentiae  studiosi,  quique  ita  dominatum  exercent 
quasi  rêvera  non  dominarentur.  Animadvertile  eam  in  agrestibus 
qui  anliquam  aetatis  aureae  simplicitatem  redolentes,  moîle  pcra- 
gunt  otium  securi;  qui  omni  fœnore  soluti  partam  hereditario  jure 
lerram  bobi^  exercent  suis,  liberis  transmittendam;  qui  dominorum 
ntilitati  potius  quàm  suo  serviunt  incremento  ;  qui  nocturnis  iabo- 
ribus  diurnisque  fracti'  vitam  degunt  omni  carenlem  iabe  et  si  à 
laboribus  quiescant  aliquando,  sive  in  viridi  gramine,  sive  in  um- 
brosis  collibus,  sive  in  margine  ripae  considentes,  jocis  non  nisi 
innocuis  exhilaranlur. 

Gircumspicite  eam  inforo  ubi  taies  Themis  habet  judices  (quales 
hîc  oculis  designare  licet  complurcs)  viros,  qui  res  suas  attendunt 
minus  quam  res  intelligant  aliénas,  qui  jura  nonint  ideo  ut  rectum 
ament,  qui  vindices  legum,  legibus  obtempèrent,  qui  ^everè  mise- 
ricordiae  tribuant  multum,  qui  duriter  gratiori  nihil  omnino  gratiae 
indulgeant,  quique  justi  tenaciter  aequitati  demùm  omnia  concédant. 

Intnemini  eam  in  mercatoribus  qui  fideliter  callidi  calliditatem 
à  fîde  nunquam  sejungant;  qui  honestë  avidi  de  die  in  diem  iucri- 
faciant;  qui  parce  fenerantes  commodant  suum  ut  reposcant  suum 
parce  amplificaturo;  qui  nunquam  fraudulenti  nunquam  sunt  alié- 
na; rei  decoctores;  quique  suo  demum  contenti  fato  vivunt  moran- 
lem  fortunam  expeclanles. 

Spectate  eam  in  re  militari  ubi  noslros  sic  habet  Mars  alumnos 
animo  fortes,  manu  promptos,  viiae  sapienler  prodiges,  ut  regem  in 
solio  cum  cœleris  el  prœter  cœleros  tueantur;  qui  non  indecoro 
pulvere  sordidi,  commilitonum  gloriae  nihil  invident  suae  tantum 
modo  studiosi  quique  tandem  palmissi  redeant  cohonestati  pulchro 
sese  in  olio,  non  desidiosi  conlineant. 

Observate  eam  in  clero,  ubi  Dei  viventis  reperire  sit  ministres 
qui  pietate  (en  interligne,  le  copiste  semble  avoir  écrit  malicieuse- 
ment et  en  sourdine  :  pape  lar)y  vigilanliâ  et  sedulitate  insignes, 


372  SOCIETE   ARCHÉOLOGIQUE    KT    HISTORIQUE   DU   LlHOU&lK. 

omnibas  in  suâ  quisque  conditione  praeeunt  exemplo;  sive  qui  ad 
sublimes  erecti  gradas  solidam  diem  in  horas  partiunlur  ad  sacri 
pensa  ministerii  persolvenda,  quique  dulci  modulamine  caelitum 
choros  pic  aflfectu  imitantur  in  terris  :  sive  qui  inferiores  quamvis 
facli  oviam  pastores,  dùm  lupos  ab  ovilibus  arcent,  et  oves  à  pabu- 
lis  nocentibus;  sive  qui  infimi  dùm  devotà  simplicitate  in  minimis 
exercent  sede,  majora  impetraturi  aliquando;  sive  in  tenerarum 
seminario  plantarum  quse  irrigatae  auris  lepentibus  floribus  purpn- 
rascunt  fructus  olim  editursB,  fidèles  nempë  ne  unquam  tollant? 
educatorum  manus. 

Cùm  autem  eâ  fueritis  probitati  morum,  hereseos  venenam  hûc 
ad  vos  dimanâsse  nunquam,  pari  vel  potiori  jure  contendo. 

Recurrant  in  anirais  omnes  haereseon  fluclus  et  tempestales  qui- 
bas  veluti  submersas  fuerunt  lot  Galliarum  provinciae.  Faerunt 
illaBquidem  luctus  noslri  caasa;  nec  tandem  exempli  incitamenlum. 
Diversas  indaerunt  formas  ut  simplicium  deciperent  oculos;  at 
columbarum  simplicesoculi,  aquilarum  facti  suntocuU  perspicaces. 
Delegati  ad  nos  fuerunt  erroris  magistri,  eos  refellerunt  discipuli 
veritatis.  Armatis  viribus  accesserant  ipsae,  constanliae  vi  repulsae 
cesserunt  loco  ;  neque  ullam  non  dico  regnantem,  sed  nec  manea- 
tem  introspeximus,  quaenam  enim  vero  apud  nos  dorainaretar. 

An  Ariana  impietas?  an  Eutychiana  tabès?  Altéra divinam  Christi 
naturam  alrâ  caliglne  obscurabat;  naturarum  in  Ghristo  discrimen 
auferebat  altéra  ;  hoc  satis  ut  utramque  repudiaret  constantia  nos- 
Ira  repudiavit. 

An  domestica  pestis  Calviniana,  quse  magnam  occupavit  regni 
partem?  At  sublatâ  veteri,  novam  aedificabat  ecclesiam;  at  Deum 
iramisericordem,  hominera  coactum,  sacraraenta  sine  re  exhibebat, 
et  hoc  ipsum  satis  ut  repelleretur,  repuisa  est.  • 

An  e  Calviniano  prognata  semine  novitas  Janseniana?  Ampla 
verùm  et  pertinax  in  consiliis,  timida  et  prudens  in  incessu,  effusa 
in  progressu,  et  temeraria,  ecclesias  retinens  ecclesiam  reprobal  ; 
authoritatem  (posuit?),  de  authoritate  de  flectit,  submissionis  jugum 
exosajugum  non  excutit,  venerata  pastores  pastores  fsicj  non  au- 
dit; vinculum  unitatis  sensim  enodando  vinculum  non  abrumpil; 
neque  pacata  neque  belligerans,  neque  rebellis  neque  morigera, 
crebris  confessa  vulneribus,  vulneribus  superstes,  pietalis  larvâ 
vitium  dissimulans;  nuncia  [veri?]  mendacii  tenax,  stabili  sede 
carens,  ,'errabundo  quia  ex  omni  parte  puisa;  illud  ipsum  plus 
quàm  satis  ut  non  admitteretur  non  admissa  est. 

An  Sociniana  subtilitas?  Qusb  nimia  subtilitate  evanescit, 
quae  scripturam  admittendo  scripturaô  sensum  detorquet,  quae  non 
Deum  in  Ghristo  sed  creaturam  agnoseit,  Arianae  similis  quam 
removimus  et  idipsum  satis  ut  removeretur  remota  est. 


DISCOURS   A   LA   LOUANGE  DBS   LIMOUSINS.  373 

An  SpinosaB  eluvies  qaae  tota  in  sordibus,  spurcitie  est  infamis, 
qui  tût  Epicuros  liabet  quot  sectarios,  qui  non  sibi  placent  nisi  cum 
Yolutantur  in  cœno  libidinum,  qui  sensuum  corporeorum  judicio 
omnia  fere  metiuntur;  a  quâ  abhorret  natura,  humanitas  et  ratio, 
et  hoc  ipsum  satis  ut  amandaretur,  amandata  est. 

Sola,  ergo,  apud  vos  christiana  religio  quam  unam  agnoscitis  ut 
veraro  pastoribus  ecclesidB  adherendo;  quod  vobis  in  eâ  nasci  sammo 
Dei  optimi  maximi  beneûcio  fuerit  concessum  gaudentes,  iir  ei 
vivere  de  vobis  vos  gioriosius  praedicatis,  atque  foveri  eam  à  vobis 
demonstrant  egregia  qusB  extant  fidei  veslr»  monumenta. 

Quod  enim  unquam  vel  usquam  muneris  in  religioneiu  praBter- 
missum  est  à  vobis  qui  per  modica  intervalla  excitatis  ubique  tem- 
pla,  excitata  exornatis,  exornata  illuminalis,illuminata  conservatis; 
qui  statuas  et  imagines  in  singulis  urbium  vestrarum  angulis  ad 
publicam  proponilis  reverentiam,  quas  eundo  et  redeundo  vosmet- 
ipsi  pio  ritu  salutatis;  qui  insignia  crucis  in  bivio  quoque  erïgitis, 
ut  in  solo  Christiano  versari  se  sciant  attoniti  qui  fuerant  primo 
hospites  et  alienigensB;  qui  sanctorum  retiquias  apud  vos  fréquentes 
ingenti  fervoris  spirilu,exusta  quoties  tellus  poscit  aquam  casiestem 
Trequentiori;  adhuc  comitantechoropervicosetcompitavenerabundi 
immensaasportatis,  vel  quoties  nubium  glomeraminaagros  exundant 
resoluta;qui  numerosas  religiosorum  familias  hospitio  excepistis 
etiam  non  rogati,  quibus  plerumque  et  vestes  et  alimenta  dividitis 
pié  benefici  prout  singulis  opus  est  quibusque  morituri  legalam 
ssepe  saspius  scribitis,  quasi  illi  vobis  mortuis  rerum  omnium  es- 
sent  inopes  futuri  ;  qui  sodalitates  immensis  penè  sub  titulis  insti- 
tuitis  quotidie,  ut  negotiorum  labores  pietate  temperetis  ;  qui  libe- 
ros  vestros  cavetis  iisne  magistris  quorum  dubia  fides  prsBbeatis 
educandos,  illos  vero  committitis  eorum  fidei,  apud  quo&  non  litte- 
ras  modo,  sed  multo  magis  probitatem  et  addiscant  et  religionem. 

Dum  praestita  singulis  ultro  citroque  religiosa  persequor  bénéfi- 
cia veslra,  quis  mihi  jure  non  irascatur  si  vos  de  nobis  dicendo 
ingrate  paterer  silentio  praBtermissos,  viri  Tutellensesy  quibus  quan- 
tum debeat  universum  hocce  collegium  aestimare  qui  voluerit, 
quomodo  extiterit  à  longo  tempore,  a  longo  tempore  periturum 
aestimando  si  potest,  conelur  adaequare. 

Patetergo  ex  morum  probitate,ex  haeresum  fugâ,  ex  fidei  monu- 

mentis  illaesam  adhuc  esse  Lemovicorum  religionem,  quae  altéra 

laus  vestra  est  in  qua  percurrenda  quaedara  si  neglexero  vel  peni- 

tus  omisero,  hoc  in  tenuitatem  oratoris  refundatur  ;  si  votis  satis- 

fecerim  vestris,  hoc  in  vos  qui  amplam  mihi  laudum  segetem  pra- 

buistis  derivate. 

Dixù 

T.  xxxix.  Î4 


SOUTENANCE  D'UNE  THÈSE  DE  PHILOSOPfflE 


AU  COLLÈGE  DE  LIMOGES 


En  faisant,  à  la  Bibliothèque  nationale,  des  recherches  dans  un 
recueil  qui  a  eu  une  assez  longue  carrière  et  renferme  beaucoup 
de  documents  pour  l'histoire  ecclésiastique  du  xvm*  siècle,  les 
Nouvelles  ecclésiastiques  (1728-1803)  (I),  nous  avons  rencontré  un 
document  fort  intéressant  se  rattachant  à  l'histoire  de  l'ancien 
collège  de  Limoges^  dont  nous  désirons  vivement  voir  paraître  uoe 
monographie  complète  (2).  Nous  croyons  le  recueil  les  Nouvelles 
assez  rare  et  la  pièce  assez  peu  connue  pour  que  sa  reproduction 
soit  utile  dans  nos  annales  limousines. 

On  y  relèvera  une  vivacilé  d'attaque  et  de  critique  acerbe  qui 
tient  du  reste  à  l'esprit  janséniste  du  recueil,  contre  le  vénérable 
professeur  Mitraud  et  les  autres  juges  de  la  thèse,  et  une  animo- 
site  visible  contre  le  collège  en  général.  Mais  enfin  le  tableau  de 
la  séance  et  des  divers  incidents  qui  Tont  marquée  est,  on  nous 
l'accordera,  présenté  d'une  façon  aussi  complète  que  pittoresque, 
et  ce  n'est  pas  sans  un  certain  sourire  qu'on  lit  le  passage  relatif 
au  jacobin  et  à  l'abbé  Périgord  et  à  celte  sortie  grotesque  du  pre- 
mier. 

Emile  Du  Boys. 

Extrait   des  Nouvelles   ecclésiastiques    {BibL   nat,   L  ^1%  c)  du 

4  décembre  1789,  p.  194. 

DE    LIMOGES. 

On  a  soutenu,  le  27  juillet  dernier  [1789],  dans  le  collège  de  Li- 
mogesy  une  thèse  de  Logique,  Métaphysique  et  Morale,  qui  ne 

(i)  V.  Hatin,  Bibliographie  de  la  presse  périodique, 

(i)  Notre  confrère  M.  Leroux  a,  dans  une  préface  très  ample,  donné  on 
aperçu  historique  de  V ancien  collège  de  Limoges  en  lête  de  son  Inoentair9 
sommaire  du  fonds  du  collège  aux  Archives  de  la  Hauie-Vicnne  (1883). 


SOUTENANCB   o'UNB  THÈSE   DE   PaiLOSOPHIB   AU    COLLÈGE   DE   LIHOGBS.    975 

prouve  guère  ce  qu'où  a  peu  modestemeut  avaucé  dans  le  cahier 
du  clergé  du  diocèse,  que  cette  maison  d'éducation  ne  se  ressent 
pas  du  dépérissement  général  des  études.  (Voir  notre  feuille  du 
14  août  dernier).  Deux  sujets  ont  été  chargés  seuls  de  répon- 
dre, parce  que  sans  doute  ils  étoient  Télite  de  leur  classe,  et 
qu'on  n'en  avoit  point  d'autres  qu'on  pût  présenter.  Ils  ont  paru 
cependant  fort  minces.  Cette  thèse  de  Logique  a  été  la  seule, 
quoiqu'il  y  ait  aussi  dans  ce  collège  un  cours  de  Physique  et  un 
de  Théologie.  Les  professeurs  de  celui-ci  sont  deux  chanoines, 
bacheliers  ou  docteurs  de  Sorbonne  (i),  ils  ne  montrent  pas  plus 
de  zèle  que  les  autres  pour  l'avancement  de  leurs  élèves* 

La  thèse  contient  neuf  paragraphes.  On  dit  dans  le  second  que 
ccle  jugement  consiste  à  prononcer  sur  les  idées  ;  que  c*est  un 
acte  de  l'esprit;  mais  qu'on  ne  sait  s'il  appartient  à  la  volonté  ou 
â  l'intellect,  ou  à  quelque  troisième  faculté  de  l'âme  :  aut  ad  ter- 
tiam  quamdam  facultatem;  que  les  philosophes  disputent  sur  ce 
sujet,  etc.  Nous  demanderions  au  professeur  M.  Mitraïui  (2)  ce 

(4)  Le  Calendrier  ecclésiastique  et  cioil  du  Limousin  pour  l'année  1789 
BOUS  donne  les  noms  de  ces  deux  professeurs,  dont  le  second  est  men- 
tionné du  reste  plus  loin  :  Montbrial,  bachelier  de  Sorbonne;  Périgord, 
licencié  de  Sorbonne,  professeurs  de  théologie. 

(5)  M.  MUraud  était  un  des  deux  professeurs  de  philosophie;  Tautre 
était  {même  calendrier)  M.  Laforest,  chanoine  théologal  de  Saînt-Yrieix, 
bachelier  de  Poitiers. 

Une  nécrologie  bien  écrite  de  M.  Mitraud  a  été  publiée  par  les  Annales 
de  la  Haute-Vienne  (une  noie  d'Auguste  Du  Boys  nous  y  a  reporté).  Le 
Ténérnble  ecclésiastique,  dont  la  mémoire  s'inquiète  fort  peu  des  attaques 
des  NouoeUes^  mourut  en  1828,  le  8  décembre,  caré  de  Rochechouart, 
an  milieu  de  la  vénération  de  ses  paroissiens. 

c  Quelque  temps  après  la  chute  de  celte  société  célèbre  [les  jésuites], 
nous  dit  cette  Nécrologie, M.  Mitraud  fut  appelé  à  faire  partie  du  col- 
lège de  Limoges;  la  chaire  de  philosophie  lui  fut  réservée.  La  Révolution 
vint  bientôt  à  éclater  ;  elle  le  trouva  fort  de  sa  foi  et  de  ses  principes  ;  sa 
raison,  comme  son  coeur,  repoussa  toute  indigne  faiblesse,  toute  lâche  con- 
cession. M.  Milrand  trouva  une  honorable  hospitalité  au  sein  de  la  Pologne; 
il  se  livra  plus  que  jamais  à  son  goût  par  Tbistoire,  il  étudia  l'esprit  et  les 
mœurs  des  peuples  du  Nord,  et  surtout  du  peuple  polonais  que,  d*après  lui, 
nous  aurait  si  imparfaitement  fait  connaître  Rulhières.  »  11  fonda  ensuite, 
rentré  dans  sa  pairie,  le  collège  de  Magnac-Laval  qui  devint  très  prospère. 
Il  prit  la  chaire  de  rhétorique.  «  Mais  bientôt,  ajoute  la  nécrologie,  de  ce 
collège  si  renommé,  d'où  sont  sortis  tant  d'élèves,  Thonneur  de  la  Société 
dans  plusieurs  déparlements,  il  ne  resta  que  le  souvenir  d'une  trop  passa- 
gère illustration.  9(0n  sait  que  le  collège  de  Magnac  remonte  au  xvii*' siècle). 

De  principal  du  collège  de  Magnac,  M.  Mitraud  devint  simple  desservant 
d'une  succursale  de  campagne,  et  fut  ensuite  appelé  à  la  cure  de  Roche- 
chouart, qui  devait  élre  sa  dernière  élapu. 


376  soaiTÉ  argbéologiquk  bt  historiqub  du  limoosir. 

qu'il  entead  par  celte  troisième  faculté  de  Tâme,  qui  est  inconnue 
dans  la  plupart  au  moins  des  traités  de  philosophie? 

11  dit,  paragraphe  sixième  :  «  Dieu  souverainement  intelligent 
voit  les  choses  présentes,  embrasse  celles  qui  sont  passées,  pré- 
voit même  les  futurs  libres.  Mais  dans  quel  milieu?  Le  dise  qui 
le  sait  ».  Quo  autem  in  mediol  Dicat  qui  noverit.  11  est  bien  éton- 
nant que  dans  un  siècle  si  éclairé,  il  se  trouve  un  philosophe  qui 
ignore  quelque  chose,  et  même  assez  modeste  pour  avouer  publi- 
quement son  ignorance.  11  faut  pourtant  le  dire,  malgré  le  res- 
pect qu'on  doit  à  une  humilité  si  courageuse  et  si  rare;  c'est  être 
par  trop  ignorant.  M.  Milraud,  professeur  de  philosophie  depuis 
plusieurs  années  ne  sauroil  pas  ce  que  sait  un  enfant  qui  balbutie 
à  peine  son  catéchisme  ?  Qu'on  demande  à  l'enfant  pourquoi  telle 
chose  a  été?  il  répondra  :  c'est  Dieu  qui  Ta  voulu.  Qu'on  ajoute  : 
Telle  chose  arrivera- t-elle?  Il  dira  :  oui,  si  Dieu  le  veut.  C'est 
donc  sa  volonté  qui  fait  tout,  et  il  ne  se  fait  rien,  si  Dieu  ne  le 
veut?  Sans  doute,  parce  qu'il  est  tout-puissant  et  le  créateur  de 
toutes  choses.  11  sera  aisé  à  M.  Mitraud  d'en  conclure  que  Dieu 
voit  le  présent,  le  passé  et  le  futur  dans  sa  volonté,  dans  ses 
décrets.  Seroit-il  possible  que  ce  dogme  de  la  foi  et  de  la  raison 
fut  ignoré  dans  le  collège  de  Limoges  par  une  douzaine  de  pro- 
fesseurs, tous  revêtus  du  sacerdoce  et  plusieurs  gradués  dans  des 
Universités,  même  dans  celle  de  Paris?  11  en  est  sûrement  plus 
d'un  parmi  eux  qui  conuoît  ces  vérités  élémentaires.  Qu'il  les 
apprenne  donc  à  M.  Mitraud  son  confrère,  puisqu'il  le  demande 
si  humblement   :  Dicat  qui  noverit.  M,  Yitrac  surtout  n'au2*oit-il 
pas  dû  s'opposer  aune  thèse  qui  semble  donner  le  démenti  au 
témoignage  qu'il  a  rendu  dans  son  fameux  cahier  en  faveur  du 
collège  où,  selon  lui,  les  études  sont  en  si  bon  état.  Ne  devoit-il 
pas  craindre,  par  son  silence,  de  déplaire  à  M.  l'Evéque  pour  la 
première  fois  de  sa  vie^  Dieu,  comme  dit  l'enfant,  est  le  créateur 
et  le  souverain  maître  de  toutes  choses.  Voilà  le  milieu,  ou  le 
moyen  par  lequel  Dieu  voit  tous  les  êtres,  tous  les  événements, 
même  les  déterminations  des  agents  libres.  Ne  peut-on  être  phi- 
losophe qu'en  ignorant  une  vérité  si  simple?  ou  faut-il  faire  sem- 
blant de  ne  la  pas  savoir,   pour  se  donner  un  air  de  philoso- 
phisme ?  Si  le  professeur  veut  être  conséquent,  il  doit  aussi  mettre 
en  question  comment  Dieu  est  tout  puissant,  en  quoi  consiste  sa 
toute  puissance  :  Quo  medio  est  omnipotensf  Comment  sa  Provi- 
dence gouverne  toutes  choses  :  Quo  medio  est  providusl  et  répondre 
à  chaque  fois  :  Le  dise  qui  peut  :  Dicat  qui  noverit.  Ne  pas  savoir 
que  Dieu  voit  tout  dans  sa  volonté,  c'est  ignorer  comment  il  est 
(ont  puissant,  comment  sa  providence  règle  toutes  choses. 


80UTKIÏANGB  D^ONB  TBBSB  DE   PHILOSOPBIB  AU   COLLÈGK   1>K    JMOGES.    377 

Nous  sommes  d'autant  plus  autorisés  à  soupçoaner  M.  Mitraud 
d'ignorer  ce  qui  fait  la  toute  puissance  et  la  pro\  i<lruco  divines, 
au  point  qu'il  seroit  fort  embarrassé  de  dire  coiiiment  il  conçoit 
l'une  et  l'autre,  que  selon  lui,  Dieu  ne  conserve  pas  les  êtres  par 
une  action  continue,  iterata  creatione.  Dieu  ne  tient  donc  pas  tous 
les  êtres  dans  sa  main  active  et  productrice  ?  Il  n'est  donc  pas  tout 
puissant?  Il  n'arrange  et  ne  dispose  pas  toutes  choses  selon  sa 
volonté?  Le  professeur  avoit  dit  précédemment,  dans  une  thèse 
sabbatiney  que  la  conservation  de  la  part  de  Dieu  n'étoit  que  néga- 
tive :  Deus  négative  conservât.  C'est-à-dire,  que  Dieu  conserve  le 
monde  en  ne  le  détruisant  pas;  comme  un  homme  conserva  la 
maison  de  son  voisin  en  n'y  mettant  par  le  feu. 

Suivant  M.  Mitraud,  paragraphe  septième,  «  on  peut,  absolu- 
ment parlant,  admettre  des  idées  innées,  et  l'on  peut  dire  aussi 
qu'il  n'y  en  a  pas;  il  dépend  de  la  libre  volonté  de  Dieu  d'impri- 
mer ou  de  ne  pas  imprimer  des  idées  dans  notre  âme,  immédia- 
tement et  indépendamment  des  sens.  Il  faut'donc,  ajoute-t-il,  s'en 
tenir  à  l'expérience;  et  il  est,  sinon  certain  du  moins  très  proba^ 
ble  que,  dans  l'état  présent,  toutes  les  idées  tirent  leur  origine 
des  sens  ».  Cette  position  paroît  être  contredite  par  la  suivante  où 
le  professeur  dit  :  «  La  volonté  suit  à  la  vérité  les  lumières  de 
l'intelligence,  cependant  comme  elle  est  libre,  elle  se  tourne  du 
côté  qui  lui  plaît.  Des  sentiments  innés  dans  tous  les  cœurs, 
sensus  omnium  cordibus  ingenitiy  nous  excitent  à  embrasser  cer- 
taines choses  et  à  fuir  les  autres.  Il  existe  donc  une  différence 
essentielle  entre  le  bien  et  le  mal.  Il  faut  donc  rejeter  avec  exécra- 
tion les  systèmes  de  Spinosa,  d'HelveliuSj  de  Hobbes,  et  la  fausse 
opinion  de  Puffendorf.  Il  existe  donc  une  loi  naturelle,  appuyée 
sur  des  principes  inébranlables,  qui  oblige  avant  tout,  qui  ne 
dépend  point  de  la  volonté  arbitraire  de  Dieu,  et  qui  n'est  sus« 
ceptible  ni  d'abrogation  ni  de  dérogation.  » 

Ces  deux  positions,  quoiqu'elles  se  suivent  immédiatement,  ne 
sont  certainement  pas  faciles  à  concilier.  Suivant  la  première, 
l'âme  peut  avoir  ou  ne  pas  avoir  des  idées  innées;  et  l'expérience 
prouve  qu'il  est,  sinon  certain,  du  moins  très  probable  qu'elle 
n'en  a  pas.  Expei*ientiœ  standnm  est^  omnes  {ideas)  in  sUUu  prx- 
senti  originem  ducere  a  sensibus.  Il  est  donc  au  moins  très  proba- 
ble«  suivant  cette  position,  que  l'âme  est  créée  sans  pensée  et 
sans  amour;  qu'elle  est,  au  sortir  des  mains  de  Dieu,  une  table 
rase,  dénuée  de  toute  action,  de  toute  impression,  et  seulement 
capable  d'en  recevoir  par  le  canal  des  sens.  Dans  l'autre  position, 
au  contraire,  le  professeur  déclare  qu'il  faut  absolument  admet- 
tre des  sentiments  innés,  par  conséquent  des  idées  et  des  amours 


378  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGfQUB   ET   BISTOftlQI}^  DU  LIMOUSIN.  '  ' 

innés;  que  ces  senliments  imprimés  dans  notre  âme,  au  momenl 
de  sa  création,  sont  la  base  essentielle  de  la  distinction  du  bien 
et  du  mal  et  de  la  loi  naturelle.  Peut-on  plus  manifestement  se 
contredire  et  détruire  d'une  main  ce  qu'on  bâtit  de  Tautre. 

Un  professeur  de  philosophie  des  Jacobins  attaqua  la  septième 
position  et,  la  rapprochant  de  la  huitième,  prétendit  faire  voir  qu'il 
y  avoit  contradiction  à  dire,  d'un  coté  que  toutes  les  idées  viennent 
des  sens,  et,  de  l'autre,  qu'il  existe  des  sentimens  innés,  une  loi 
naturelle,des  principes  invariables,  etc.  L'objection  parut  difficile 
à  M,  de  Luret,  grand  vicaire,  chanoine  et  ci-devant  professeur 
de  théologie.  M.  Mitraud  répondil  que  par  la  loi  naturelle  il 
n'entendoit  autre  chose  que  le  sens  pur,  sensus  purus.  Qu'est-ce 
que  ce  sens  pur,  reprit  le  Jacobin  7  Quid  ille  sensus  purusl  L'abbé 
Périgord,  qui  affecte  en  tout  un  air  de  légèreté,  prit  la  parole  et 
d'un  ton  de  plaisanterie  alloit  dire  sans  doute  de  belles  choses. 
Mais  M.  Martin,  principal  du  Collège,  insinua  à  l'argumentant 
qu'il  ne  falloit  pas  ainsi  pousser  son  monde.  Aussitôt,  une  troupe 
de  jeunes  ecclésiastiques,  qui  ne  manquent  point  de  se  trouver  à 
ces  sortes  d'actes,  comme  auxiliaires,  se  mit  à  battre  des  mains. 
Le  Jacobin,  tout  étourdi  de  cette  manière  de  répondre,  salua  la 
compagnie  et  s'enfuit. 

Il  est  très  certain  qu'il  n'y  a  point  de  loi  naturelle,  ni  de  prin- 
cipes immuables  de  conduite  dans  l'homme,  ni  de  distinction 
essentielle  entre  le  bien  et  le  mal,  s'il  n'y  a  pas  des  idées  innées, 
si  toutes  les  idées  tirent  leur  origine  des  sens.  Helvétius  a  tiré 
formellement  cette  conférence,  en  disant  que  la  sensibilité  physi- 
que et  rintérêt  personnel  ont  été  les  auteurs  de  toute  justice;  et  en 
note,  qu'on  ne  peut  nier  cette  proposition,  sam  admettre  les  idées 
innées  (Diso.  3,  c.  4).  Lucrèce,  en  faisant  venir  les  idées  des  sens, 
dit  que  l'âme  est  matérielle,  et  cela  est  conséquent.  Locke  n'a 
pas  jugé  à  propos  de  s'expliquer  si  crûment;  mais  en  faisant 
venir  toutes  les  idées  des  sens,  il  ne  peut  dissimuler  qu'il  croit 
possible  que  la  matière  pense.  M.  de  Bufion  s'embrouille  pour 
dire  que  l'âme  est  spirituelle,  ou  qu'elle  n'est  pas  matérielle. 
C'est  sur  la  même  base  qu'ont  bâli  Condillac,  Rousseau,  Dalem* 
bert,  Voltaire,  de  Prades  et  toute  la  bande  encyclopédique. 
M.  Mitraud  nous  permettra  de  croire  au  moins  très  probable  que 
ces  philosophes  raisonnent  plus  conséquemment  que  lui.  Ils  ne 
pèchent  pas  par  les  déductions,  mais  par  le  principe  qu'ils  adop- 
tent et  qu'ils  soutiennent  avec  tant  d'unanimité  et  de  zèle. 

Pour  faire  à  M.  Mitraud  une  observation,  dont  il  sera  peut-être 
plus  touché  que  des  difficultés  directes,  contre  lesquelles  il  est 
sans  doute  aguerri  au  moyen  des  suppositions,  des  distingiu>  et 
autres  échappatoires  d'usage  ;  nous  lui  représenterons  que  toute 


SOUTENANCK   D*UNE  THÈSE  DE  PHILOSOPHIE   AU  COLLÈGE   DB   LIMOGES.     379 

erreur  découle  d'un  principe.  Or,  cette  impie  assertion,  que  la 
sensibilité  physique  et  tintèrtt  personnel  ont  été  les  auteurs  de  toute 
justice;  et  que  par  conséquent  il  n'y  a  ni  loi  naturelle,  ni  diffé- 
rence essentielle  entre  le  bien  et  le  mal  moral,  ni  principes  pri- 
mitifs de  justice  et  de  vérité  :  dérive-t-elle  de  la  doctrine  des 
idées  innées,  ou  de  l'opinion  que  toutes  les  idées  tirent  leur  ori- 
gine des  sens?  II  peut  s*en  rapporter  sur  ce  point  à  Helvétius  et 
aux  autres  prétendus  philosophes.  Leur  but  étoit  dintroduire 
une  règle  de  morale,  favorable  à  toutes  les  passions  et  destructive 
de  la  loi  naturelle.  C'est  pour  former  ce  grand  œuvre  qu'ils  ont 
fouillé  les  anciens  et  les  modernes,  qu'ils  y  ont  cherché  avide- 
ment tout  ce  qui  pouvoit  leur  être  de  quelque  secours.  Voyant 
que  la  doctrine  des  idées  innées  ne  se  prétoit  point  à  leurs  vues, 
ils  l'ont  attaquée  de  toutes  leurs  forces,  et  se  sont  efforcés  de  la 
couvrir  de  ridicule.  Ils  ont  embrassé  Topinion  contraire,  qui  étoit 
faite  pour  eux,  bien  moins  jaloux  d'être  chrétiens  que  raison- 
neurs conséquens.  C'est  de  môme,  pour  le  dire  en  passant, 
qu'ils  ridiculisent  la  prémotion  physique  (Voy.  Y  Eloge  de  M.  Da^ 
lemberty  par  M.  de  la  Harpe).  Il  leur  faut  un  Dieu  qui  ne  voit 
rien,  qui  ne  se  mêle  de  rien,  qui  ne  prenne  intérêt  à  rien.  Ils  ne 
se  conçoivent  libres  qu'autant  qu'ils  sont  indépendans.  La  pré- 
motion physique  répugne  à  ces  présomptueuses  chimères.  Aussi 
s'attachent* ils  au  système  molinien,  qui  leur  donne  précisément 
le  Dieu  qu'ils  demandent,  un  Dieu  tel  qu'ils  voudroient  qu'il  fût.. 
Nous  avons  peine  à  croire  que  M.  M itraud,  s'il  étoit  persuadé  de 
la  vérité  de  ces  réflexions,  tint  encore  à  un  pareil  système.  Ses 
confrères  du  moins  ne  sont  peut-être  pas  indiSerens  sur  toute 
espèce  de  doctrine,  quoique,  suivant  le  bruit  public,  ils  se  grati- 
fient entre  eux  de  l'affreuse  épithète  de  Rienistes.  Mais  enfin  une 
thèse,  dont  les  principes  tendent  à  l'irréligion,  a  été  soutenue 
chez  eux  et  en  leur  présence,  sans  réclamation  ou  plutôt  avec 
leur  approbation.  S'il  n'y  a  point  d'idées  innées,  il  n'y  a  pas  non 
plus  de  péché  originel;  et  que  devient  la  religion  sans  ce  dogme 
fondamental?  (Voy.  les  Remarques  sur  une  thèse  soutenue  en  Sor- 
bonne  en  1751,  par  M.  de  Loménie  de  Briennef  aujourd'hui  arche- 
vêque de  5en^).  M.  l'Ëvéque  de  Limoges  a  beau  dire  que,  'dans 
dans  un  collège,  ce  n'est  point  la  science  qui  est  nécessaire  aux 
professeurs,  à  cause  sans  doute  de  l'opinion  établie  dans  l'épis- 
copat  que  toutes  les  vertus  se  réduisent  à  l'obéissance  aveugle, 
qui  ne  peut  se  concilier  avec  une  solide  instruction.  Mais  entend- il 
aussi  qu'à  la  faveur  de  cette  prétendue  vertu  les  professeurs  ins- 
pirent à  leurs  élèves  les  plus  dangereuses  erreurs?  Croit-il  ne 
deyoiir  songer  qu'à  accumuler  des  bénéfices,  sans  se  mettre  en 
peine  de  l'enseignement  public? 


NOTES  ET  COMMUNICATIONS  DIVERSES 


Note  sur  une  Vierge  découverte  à  Azêrables{Creusé), 

La  Vierge  dont  dous  publions  le  dessin  a  été  découverte  pen- 
dant les  premiers  mois  de  Tannée  1891,  dans  une  terre  fertile  en 
vieux  souvenirs.  Au  même  endroit,  en  effet  et  presque  exacte- 
ment à  la  même  place,  le  propriétaire  du  champ  (1)  avait  extrait, 
Tannée  précédente,  une  boîte  en  pierre  fort  bien  taillée  contenant 
des  cendres  et  autres  débris  renfermés  dans  une  urne  en  veri*e(2). 

La  plaque  en  étaiû,  dont  le  relief  figure  la  Sainte- Vierge  et 
TEnfant  Jésus,  mesure  0°'095  de  hauteur  et  0">05  dans  sa  plus 
grande  largeur  ;  plate  au  revers,  son  relief  à  sa  plus  forte  épais- 
seur, la  tête  de  la  Vierge,  n'est  que  de  0'°01  et  son  poids  de 
180  grammes.  Un  trou  rond  percé  à  droite  de  la  tête  servait  pro- 
bablement à  fixer  la  plaquette. 

Le  temps  et  peut-être  Tauteur  de  la  découverte  ont  fait  dispa- 
raître les  traits  des  deux  visages,  mais  les  vêtements  et  les  lignes 
principales  subsistent  fort  heureusement  el  permettent  d*étudier 
cette  curieuse  figurine. 

Debout  et  soutenant  Tenfant  «Tésus  sur  le  bras  gauche,  la 
Vierge  penche  légèrement  le  haut  du  corps  à  droite  par  un  mou- 
vement naturel  d'équilibre.  Une  vingtaine  de  rayons  disposés 
en  cercle  forment  un  nimbe  autour  de  la  tête  et  de  la  partie 
supérieure  du  corps. 

Comme  vêtement,  une  robe  à  plis  droits  recouverte  d'une  sorte 
de  chlamyde  attachée  sur  Tépaule  droite  par  un  bouton  et  laissant 
le  bras  à  découvert.  De  la  main  droite  la  Vierge  retient  le  bas  de 
sa  tunique  relevée  sur  le  bras  gauche  pour  former  de  moelleux 
plis  sous  Tenfant. 

Admirablement  étudiée,  cette  figure  ne  présente  aucun  défaut: 

proportions,  pose,  plis  du  vêtement,  tout  est  juste  et  inspiré  delà 

nature. 
Moins  idéale  que  les  Vierges  du  moyen  âge,  elle  n'en  a  ni  les 

formes  toujours  un  peu  grêles,  ni  Texagération  de  longueur.  De- 
vons-nous Tattribuer  à  Tépoque  gallo-romaine  ?  Sa  découverte 

(4)  Le  champ  des  Grands-Pâtureaux,  près  le  village  des  Penots,  com- 
mune d'Azérables. 

{%)  Cette  pierre  a  été  transportée  au  bourg  de  Sainl-Germain-Beaupré 
par  le  propriétaire,  M.  Ghaput  ;  l'urne  a  été  brisée,  les  cendres  et  divers 
débris  dispersés. 


Vierge  en  étain  trouvée  près  d'Azérables  (Creuse), 


NOTES  ET   COMMUNICATIONS  DIVBRSBS.  381 

auprès  d'une  sépulture  de  cette  époque,  son  vêtement,  le  caractère 
réaliste  dont  elle  est  empreinte,  enfin  le  métal  dont  elle  est 
formée  (1)  nous  le  permettraient  peut-être.  Devons-nous,  au  con- 
traire, la  ranger  parmi  les  productions  de  la  Renaissance?  C* est 
notre  opinion  ;  mais  peu  compétent  en  ces  matières,  nous  laissons 

à  de  meilleurs  juges  le  soin  d'en  décider. 

G.  Berthomibr. 


Extraits  du  râle  de  la  taille  pour  la  ville  de  Limoges,  année  1635  (2). 

Les  archives  delà  Haute- Vienne  possèdent  (série  C  liasse  146), 
un  rôle  de  la  taille  pourla  ville  du  château  de  Limoges,  remontant 
à  l'année  1635.  Ce  document  fort  intéressant  à  beaucoup  d'égards 
fournit  des  indications  trop  brèves  malheureusement  sur  un  assez 
grand  nombre  d'orfèvres  et  d'émailleurs.  M.  Ardant  a  connu 
cette  pièce  et  la  mentionne  souvent;  mais  il  n'en  a  nulle  part  réuni 
les  extraits  se  référant  ou  pouvant  se  référer  à  nos  artistes.  Nous 
croyons  qu'il  n'est  pas  inutile  de  publier  ces  extraits.  On  les  trou- 
vera ci-après.  Nous  n'y  avons  pas  fait  seulement  entrer  les  arti- 
cles concernant  les  personnes  auxquelles  est  donnée  la  qualifica- 
tion d'orfèvre  ou  d'émailleur.  Notre  relevé  comprend  aussi  les 
passages  où  se  trouvent  mentionnés  des  contribuables  apparte- 
nant à  nos  familles  d'artistes  les  plus  connues  et  d'où  il  est  pos- 
sible de  tirer  quelque  induction  sur  les  alliances,  le  domicile  et 
parfois  un  indice  ou  tout  au  moins  une  hypothèse  sur  l'identité 
de  certains  de  nos  émailleurs  qu'on  n'est  pas  arrivé  encore  à  dis- 
tinguer, avec  précision,  d'homonymes  ayant  pratiqué  le  même 
art  et  vécu  à  peu  près  à  la  même  époque. 

Consulat  (3). 
Les  héritiers  et  biens  tenants  de  Jean  et  Pierre  Mouret  :  Guy- 
tard,  procureur,  doibt  paier  10  1. 

(\)  Nous  avions  cru  tout  d*abord  que  celte  vierge  était  en  plomb,  mais 
après  examen  attentif,  M.  Feigneux,  entrepreneur  de  plomberie,  nous  a 
déclaré  qu*elle  était  eu  étain.  Les  Romains  metiaieci  en  œuvre  ce  métal  : 
leur  exploitation  des  mines  de  Moiitebras  (Creuse)  nous  en  offre  une  preuve 
certaine. 

(9J  11  convient  de  rappeler  ici  qoe  la  Cité  et  ses  dépendances  avaient  leur 
rôle  à  part.  Le  montant  du  réle  de  1635  pour  la  ville  et  ses  orances  était 
fixé  à  6,000  livres,  mais  avec  les  accessoires  il  atteignait  près  du  double  ; 
d643L  «6  s. 

(3)  Le  premier  ou  les  premiers  feuillets  du  relevé  par  canton  manquent; 
nous  avons  supposé  que  les  pages  sans  titre  placées  avant  le  quartier  de 
m  la  Porte  b  se  rapportaient  au  quartier  du  Consulat. 


383  SOdBTB   ABCB6OLO6IQOE  ET   BISTORIQUB   DU   LIMOUSIN. 

La  veufve  Jeao  Veyrier,  4  1.  10  s. 

Jean  Hardy,  et  pour  son  8^  de  l'hérédité  de  feu  Boulhon,  12  1. 
Les  heoirs  de  ieu  Pierre  Mouret  :  Dominique  Mouret,  doibt 
paier  8  1.  10  s. 

La  Porte  [Poulailler e]  : 

Léonard  Veyrier  et  pour  les  biens  de  Meyze,  13 1. 

Pierre  Hardy,  24  1. 

Martial  Hardy,  5  1.  4  s. 

Pierre  Celiere,  le  jeune,  16  1.  10  s. 

Pierre  Celiere  Taisné  et  Jean  Celiere,  son  fils,  16  1. 

Manigne  : 

Jean  Reymond,  3  1.  10  s. 

Jean  Poylevé,  sieur  de  Bondi,  14  1. 

Nicolas  Reymond,  5  1. 

Pierre  Guybert,  orftmvre,  50  s. 

François  Limousin,  3  1. 

Les  héritiers  Léonard  Limousin,  gendre  chez  Dupin,  4  1. 

Jean  Limousin,  esmailleur,  9  1. 

Léonard  Limousin,  esmailleur,  gendre  chez  Dagen  (?),  9  1. 

Martin  Noailler,  dict  Chabrou,  9  1. 

Les  héritiers  feu  Pierre  Reymond,  5  1. 

Pinchaud,  orfeuvre,20  s. 

La  veufve  et  héritiers  feu  Reymond,  esmailleur,  40  s. 

Jean  Boisse,  orfeuvre,  8 1. 

Faubourg  Manigne, 

Noël  Laudin,  gendre  de  Guyneau,  40  s. 

Le  Marché. 

François  Poylevé,  6  1.  10  s. 

La  veufve  et  héritiers  de  Nicolas  Noailler,  8  1. 

Pierre  Veyrier,  12  1.  13  s. 

La  Fourie, 

La  veufve  et  heoirs  d'Andrà  Noailler  et  héritiers  de  M.  Pierre 
Lagorce,  17  L 

Le  Clocher, 

Dominique  Mouret,  131. 

Joseph  Boysse.  orfeuvre,  10  1. 

Jean  Penicaud,  orfeuvre,  20  s. 

Jean  Mouret,  le  jeune,  orfeuvre,  40  s. 

La  veufve  Martial  Mouret,  9  1. 10  s. 

Pierre  Roulhac,  geudro  de  Veyrier,  3  1.  5  s. 


NOTES   ET  COMMUNICATIONS  DIVERSES.  â83 

La  veufve  Jean  Guybert,  4  1, 
François  Guybert,  3 1. 
Philippes  Poncet,  4  I. 
Simon  Poncet,  30  1. 
François  Celiere,  orfeuvre,  4  1. 

Rue  Boucherie  [du  Collège]. 

Léonard  Noailler,  dictChabrou,  4  1. 

Pierre  Noailler,  31.  3  8. 

La  veufve  d'Hugues  Limousin  et  le  Tutour,  son  fils,  9  1. 

La  veufve  de  Léonard  Limousin,  dicl  Jay,  12  1. 

Pierre  Limousin,  dict  Jay,  14  1. 

Faubourg  Boucherie, 

Les  heoirs  Noël  Laudin,  8  1. 

Mathieu  Gosse,  dict  Reynaud  et  Pierre  Limousin,  61.  10  s. 

Lansecot. 
Antoine  Veyrier,  Il  1. 
La  veufve  de  Léonard  Pinchaud,  2  1. 
Jean  Noailler,  12  1. 
Anthoine  Terrasson,  esmailleur,  50  s. 

Pierre  Guybert,  et  pour  l'hereditéde  feu  François  Texendier,  81. 
Joseph  Blanchard,  4  1. 

Louis  GUIBERT. 


Relation  abrégée  de  la  prise  de  possession  de  M.  de  Canisy,  évique 

de  Limoges,  1696. 

Le  dix-neuvième  mai  1696,  jour  de  samedi >  M.  de  Canizy,  évo- 
que à  Limoges,  y  arriva  environ  les  huit  heures  du  soir,^  dans 
un  carosse  attelé  de  six  chevaux  blancs.  Les  cantons  furent  au- 
devant  sous  les  armes  avec  tambour  jusqu'au-dessus  de  la  Croix- 
Malecarre.  Il  avoit  couché  à  Belat.  Les  consulz  y  furent  aussi 
au-devant  avec  plusieurs  autres  cavaliers,  mêmes  des  ecclésias- 
tiques; il  fust  coucher  au  séminaire,  dans  la  maison  qu'avoit  faict 
bastir  son  prédécesseur  M.  d'Urfé.  11  y  fust  visité  les  jours  sui- 
vants de  Messieurs  des  Chapitres  Saint-Estienneet  Saint-Martial 
ensemble,  de  MM.  les  Trésoriers,  MM.  du  Présidial  et  les  autres 
corps  d'officiers  de  la  ville. 

Le  24  du  dict  mois  de  mai  au  dict  temps,  le  dict  Seigneur  de 
Canizy  se  fict  recevoir  et  installer  dans  sa  cathédrale. 

A  cest  effect,  il  se  fict  une  procession  solennelle  ou  les  Compa- 
gnies et  Communautés  et  Corps  suivants  assistèrent.  On  avoij;  faict 


384  sogiétA  archéologique  et  historique  ou  limousin. 

fermer  les  boustiqiies  et  tapisser  devant  les  maisons  des  rues  ou 
il  devoit  passer.  L'assemblée  s'en  fust  a  Saint-Eiinnne  et  en  sorti 
environ  les  quatre  heures  du  soir  pour  aller  prendre  mon  dict  sei- 
gneur dans  le  séminaire.  Ensuite  on  passa  sur  le  pav6  devant  les 
Jacobins  et  Carmélites,  dans  le  faubourg  de  Magnigne»  à  Croche 
dor  {sic),  à  la  Poullalière,  rue  Fourie,  au  Gras,  à  Boucherie,  de  là 
dans  le  faubourg  Boucherie,  dans  la  Cité  et  à  Saint-Estienne. 
La  mai*che  fust  ainsi  : 

Les  pauvres  de  l'hospital  marchoient  derrière  les  administra- 
teurs ;  eiisuile  venoient  les  Pèlerins  (i),  puis  les  Pénitents  rouges, 
feuilles  mortes,  gris,  blancs,  bleus  et  noirs;  après,  les  Récollets, 
les  Cordeliers,  les  Augusiins,  les  grands  Carmes,  les  Jacobins,  les 
paroisses  deSaint^Michcl  do  Pislorie,  Saint-Maurice,  les  commu- 
nautés de  Saint-Pierre,  Saint-Michel-des-Lions,  puis  abbayes  des 
Bénédictins  et  Feuillants,  puis  le  chapitre  de  Saint-Etienne,  le 
doyen  et  chantre  chappés.  IJn  prestre  devant  le  pavillon  qui  por- 
toient  (sic)  la  crosse.  Monseigneur  l'Evesque  dessous  :  Deux  pres- 
tres  à  ses  costes  et  les  quatre  cordons  du  dict  pavillon  portés  par 
quatre  consulz  et  quatre  basions  portés  par  quatre  gagiers  de  la 
maison  de  ville;  et  ensuite  venoit  le  corps  du  présidial. 

Estant  à  Saint-Estienne,  M.  le  Doyen  présenta  au  seigneur 
Evesque  l'eau  bénite  et  Tensensa  après.  Après,  il  fut  conduit  au 
grand  autel  et  ayant  adoré  le  Saint-Sacrement,  il  fust  prendre 
place  dans  sa  chaire  à  cosié  du  grand  autel  et  s'y  estant  reposé 
un  demi  quart  d'heure,  il  commença  le  Te  Deum  qui  fust  suivi  du 
chœur  et  de  Torgue.  Après  on  chanta  l'antienne  et  verset  de  Saint- 
Etienne.  Après  il  dit  Toraison  et  donna  la  bénédiction.  On  lui 
osta  la  chape,  eslole,  aube  et  mitre  et  ganls  violets,  en  ayant  de 
blancs. 

Puis  il  fust  conduit  par  les  dignitaires  et  chapitres  à  l'évéché. 
Cela  finit  environ  les  six  heures. 

Le  vingt  aoust  1697,  on  fist  une  procession  à  Lymoges  pour 
avoir  du  beau  temps  et  pour  lever  les  grains  ;  on  apporta  les 
châsses  des  corps  saincts. 

[Feuilles  volantes  en  la  possession  de  M.  l'abbé  Granet^  écriture  du 
temps). 

Institution  de  foire  et  marché  au  bourg  de  Mortemart, 

Aujourdhuy,  vingt-quatre  may  mil  sept  cent  trente,  dix  heures 
du  matin,  par  devant  nous,  Claude-Louis  Micheau,  sieur  du 
Meslier,  conseiller  du  roy,  son  sénéchal  de  robbe  longue  de  la 

(f)  La  confrérie  des  Pèlerins  de  Saint- Jac<]|ues. 


N0TR8  ET   COMMUNICATIONS   DITERSBS.  3g5 

sénéchaussée  de  MoDlmorillon,  en  noire  hôtel,  est  comparu  maî- 
tre Antoine  Richard,  conseiller,  procureur  du  roy  de  cette  cour, 
lequel  nous  a  remoutré,  que  par  arrest  de  nos  seigneurs  de  la 
cour  du  Parlement  de  Paris  estant  en  datte  du  treute-un  mars 
de  Tan  présent  mil  sept  cent  trente,  intervenu  sur  une  requête 
présentée  en  la  dite  cour  de  Parlement  par  le  seigneur  duc  de 
Morthemart,  af&n  d'enregistrement  de  lettres  patentes  par  luy 
obtenues    du    roy    noire   sire,   au    mois   d^octobre    mil    sept 
cent  six,  par  lesquelles,  pour  les  causes  y  contenues»  le  roy  a 
créé  et  élably  au  bourg  de  Morthemart  un  marché  tous  les  mar- 
dys  de  chasque  semaine  et  une  fouaïre  le  troisième  mardy  de 
chasque  mois,  ainsy  qu'il  est  plus  au  long  contenu  par  les  dittes 
lettres  patentes  et  de  surannation  du  trente  janvier  de  Tan  pré- 
sent mil  sept  cent  trente.  Il  a  été  ordonné,  avant  de  procéder  à 
l'enregistrement  des  dittes  lettres  patentes,  que  d'ofQce,  à  la  re* 
queste  de  Monseigneur  le  procureur  général,  il  sera  informé  par 
nous  à  la  poursuite  de  luy  dit  sieur  Richard,  comme  substitut 
de  mon  dit  seigneur  le  procureur  général  en  cette  cour,  de  la 
commodité  ou  incommodité  que  peut  apporter  la  création  et  éta- 
blissement au  bourg  de  Morthemart  d'un  marché  tous  les  mar- 
dys  de  chaque  semaine  et  d'une  fouaïre*  le  troisième  mardy  de 
chaque  mois  à  perpétuité  et  pour  savoir  si,  à  quatre  lieues  à  la 
rpnde  du  dit  bourg,  il  n'y  a  point  les  mesmes  jours  de  marchés 
et  de  fouaîres  auxquelles  le  susdit  élablissemeni  puisse  nuire  et 
préjudicier,  et  que  pour  l'exécution  du  dit  arrest  et  faire  l'infor- 
mation ordonnée,  a  fait  assigner  a  comparoir  aujourdhuy  par 
devant  nous,  au  présent  lieu  et  heure,  Messire  Edmond  Rochon, 
prestre,  curé  de  la  paroisse  du  dit  bourg  de  Morthemart;  Paul 
Maisondieu,  bourgeois  du  mesme  lieu;    M*  François  de  Ver- 
dilhac,  conseiller  du  roy,  élu  en  l'élection  de  Confollan  ;  Pierre 
Bienassis,  bourgeois  du  bourg  et  paroisse  de  Blond;  Ântoinne 
Meusnier,  marchand  ;  Jean  Meusnier,  aussy  marchand  du  dit 
bourg  et  paroisse  de  Blond  ;  Jean  Mélivier,  bourgeois;  Jean  Sau- 
nier, marchand  et  meusnier;  Pierre  Paumier,  sindicq,  demeu- 
rant en  la  paroisse  de  Nohic:  Messire  Louis  Dupin,  écuyer,  sei- 
gneur des  Bordes,  de  la  paroisse  de  Bussière-Beauflls  ;  Louis 
Burson,  marchand  de  la  paroisse  de  Montrol;  Dupin,  écuyer, 
sienr  de  La  Cour  ;  Lethien  fils,  laboureur  et   marchand,    de- 
meurant en  la  dile  paroisse  de  Montrol,  par  exploit  de  Migeon, 
huissier  royal,  du  dix-neuf  du  présent  mois,  contrôlée  à  Nohic 
par  Robert,  —  et  encore  Martial  Buisson,  sieur  de  Bretignol; 
M*  Jean  Aubroche,  sieur  de  Lavaud,  advocat  en  parlement  et  au 
siège  royal  de  Blac,  demeurant  en  la  ditie  ville  de  Blac,  par  ex- 
ploit de  Bonnin,  huissier  royal  de  ce  jour,  conlrollé  en  cette  ville 


386  SOCIÉTÉ.  AKCIliOLiOQIQUR  RT  HISTORIQUE  DD  LIMOUSIN. 

par  Marioa,  aux  fins  de  venir  déposer  de  vérité  en  rinformatioa 
que  luf  dit  sieur  Richard,  comme  substitut  de  Monseigneur  le 
procureur  général,  entend  faire  faire,  en  exécution  et  sur  les  faits 
portés  par  le  dit  arrest  du  trente-un  mars  dernier  :  lequel  arresi 
ensemble  les  lettres  patentes  mentionnées  par  iceluy  avec  les  dits 
exploits  il  nous  a  représenté  et,  en  conséquence,  a  requis  compa- 
rution des  dits  témoins  appelés,  et  qu'il  soit  par  nous  proceddé 
â  Tinformation  ordonnée  par  le  dit  arrest  et,  en  cas  de  non-compa- 
rution par  aucuns  des  dits  témoins,  qu'yl  soit  contre  eux  donné 
deffaut  au  proffit  suivant  l'ordonnance,  et  a  signé  :  A.  Richard. 

Pourquoy  avons  donné  acte  au  dit  sieur  Richard,  substitut  de 
Monseigneur  le  procureur  général,  de  sa  comparution. 

(Suivent  les  dépositions 

des  parties  énumérées  ci-dessus  et  qui  sont  sans  intérêt). 

(Extrait  des  Archives  de  la  Vienne,  Montmorillon,  135. —  Com- 
muniqué par  M.  6.  Touyéras). 


Difficultés  survenues  entre  l'intendant  de  Limoges^  M.  Pajot^  et  le 
Bureau  des  finances^  au  sujet  de  l'érection  d'une  fontaine,  1759. 

M.  Pajot,  intendant  de  Limoges,  avait  projeté,  près  de  son 
hôtel,  la  construction  d'une  fontaine  publique;  déjà  même  il 
avait  mis  les  ouvriers  à  l'œuvre,  quand  le  Bureau  des  finances 
de  cette  ville  fit  arrêter  les  travaux.  De  là  conflit  et  plaintes  au 
contrôleur  général,  M.  de  Silhouette,  qui  écrivit  au  procureur 
du  Roi  près  le  Bureau  la  lettre  que  nous  reproduisons,  à  laquelle 
il  fut  répondu  dans  des  termes  qui  indiquent  que  les  rapports 
entre  les  deux  pouvoirs  étaient  tendus  et  que  la  question  de  la 
fontaine  ne  fut  qn'un  prétexte  à  éclat  : 

A  M.  le  Procureur  du  roy  au  bureau  des  finances  de  Limoges. 

a  M.  l'intendant  de  Limoges  m'écrit  pour  se  plaindre  des  dif- 
ficultés que  les  officiers  de  voire  bureau  apportent  à  l'exécutiou 
d'une  fontaine  publique,  qu'il  a  projettée  au  quartier  du  nou- 
veau bastimentde  l'intendance,  et  dont  la  dépense  se  prend  sur 
les  fonds  destinés  à  la  construction  do  ce  bastiment.  Comme  il 
paroit  que  les  difficultés  ne  sont  fondées  que  sur  le  deffaut  d'aï- 
lignement  donné  par  le  bureau,  votre  place  vous  met  à  portée  de 
les  faire  cesser,  en  le  requérant  vous-même,  comme  instruit  du 
projet,  et  le  faisant  donner  aux  vues  de  M.  l'Intendant  et  sans 
aucuns  fraix  :  par  là  se  trouvera  conservée  la  juridiction  du 
bureau,  qui  d'ailleurs  ne  soufTriroil  pas  beaucoup  d'une  atteinte 
aussy  légère.  Je  compte  cependant  que  vous  m'informerés  de  ce 
qui  sera  fait. 

»  Je  suis,  Monsieur,  votre  affectionné  serviteur.  DeSilhoubttb, 
»  Fait  à  Versailles,  le  %S  mars  1759.  » 


NOTES  IT  COMMUNICATIONS  DIVERSES.  387 

Le  2  du  mois  d'avril,  le  bureau  j  où  siégeaient  MM.  Léonard  de 
Fressanges,  Regnaudin,  de  Martin  La  Bastide,  Garât  de  Saint- 
Yrieix,  Malledent  de  Feytiat,  Sanson  de  Masboyor,  Benoist  de 
Yen  taux,  Noalhié.des  Bailles,  Durant  et  Devoyon,  procureur  du 
roi,  fit,  parTorgane  doM.  Devoyon,  à  M.  le  contrôleur  général, 
la  réponse  qu'on  va  lire  : 

((  Monseigneur^ 

»  J'avois  prévenu  vos  ordres  à  l'occasion  de  la  oouvelle  fon- 
taine, au  quartier  de  Tintendance;  la  pyramide  est  placée;  si 
M.  Psyot  résidoit  à  Limoges,  il  auroit  vu  les  choses  par  luy- 
même  et  il  aime  trop  la  vérité  pour  s'estre  plaint  des  difficultés 
du  bureau  des  finances  à  ses  projets.  Jamais  ils  n'ont  esté  contre- 
dits dans  les  matières  qui  peuvent  nous  concerner,  quoy  qu'il  ne 
Dous  en  ait  pas  donné  de  connaissance.  Nous  luy  avons  seuUe- 
ment  représenté  que  l'ingéuieur  commis  dans  cette  province, 
dégradoit  les  clostures  des  villes,  pour  employer  les  pierres  à 
des  cailloutins,  et  que  ce  travail  étoit  plus  désagréable  et  à 
charge  aux  communautés  que  celuy  d'ouvrir  des  carrières. 

»  M.  Tintendant  écouta  nos  remonstrances  et  nous  dilqu^à 
l'avenir  on  [n'Jy  toucberoit  rien  sans  ses  ordres  et  sans  nous  les 
avoir  communiqués. 

»  Cependant,  nous  avons  vu  en  celte  ville  (à  l'aspect  de  la 
plus  belle  entrée)  destruire  une  partie  des  tours  et  remparts, 
sans  nous  en  avoir  donné  le  moindre  avis;  nous  n'y  avons  porté 
aucun  obstacle,  lorsque  nous  avons  pensé  que  les  matériaux  se- 
roient  employés  pour  une  aile  d'augmentation  au  bastiment  de 
l'Intendance. 

»  Cette  démolition,  faite  sans  ordre,  sans  mesures,  unique- 
ment réglée  par  l'avantage  que  certains  particuliers  en  reçoivent 
pour  un  plus  grand  jour  et  autres  commodités  à  leurs  maisons, 
a  esté  un  prétexte  pour  qu'un  chacun  continua  à  son  grés  les 
dégradations  même  au  préjudice  de  son  voisin  et  le  motif  de  la 
requeste  de  la  plainte  et  du  procès-verbal  du  29  janvier  dernier. 
Mais  aussitôt  que  j'ai  sçue  que  les  premiers  ouvriers  qui  avoient 
fait  les  brèches  étoient  employés  par  l'ingénieur,  j'ai  cessé  mes 
poursuites. 

»  Ces  jours  derniers,  des  ouvriers  arrachoient  et  choisissoient 
au  même  endroit  les  plus  belles  pierres  de  taille  ;  l'un  d'eux  fut 
mandé  par  mon  requis;  il  dissimula  ceux  qui  l'avoicnt  employé 
et,  sur  sa  simple  déclaration  que  ces  pierres  estoient  destinées 
pour  l'intendance,  j'ai  requis  et  le  bureau  a  prononcé  l'ordon- 
nance du  28  mars. 

»  Il  y  a  quelque  temps,  nous  avons  vu  prendre  une  partie 


7  <^-1S* 


4 


388  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

assez  considérable  de  l'eau  de  la  foataine  d'Eygoulène  pour  la 
conduire  à  rinleiidance;  quelques  particuliers  ont  souffert  de 
cette  opération  par  les  eaux  qui  ont  filtrées  dans  leurs  caves,  et 
on  a  si  mal  conditionné  les  pavés  que  cela  forme  des  creux  désa- 
gréables et  incommodes. 

»  Cette  fontaine  d'Eygoulène  est  un  des  plus  beaux  orne- 
ments de  notre  ville;  elle  emplissoit  deux  étangs  pour  fournir  du 
.  secours  aux  incendies  fréquents  et  dangereux,  pour  la  construc- 
tion de  nos  maisons  et  pour  la  propreté  de  nos  rues.  Pendant  le 
travail  pour  conduire  l'eau  à  l'intendance,  les  étangs  se  trouvè- 
rent à  secq;  un  feu  assés  léger  dans  son  principe  causa  par  ses 
progrès  de  grands  dommages  à  plusieurs  maisons  du  quartier  de 
la  fontaine  d'Eygoulène.  Malgré  la  clameur  publique  sur  tous 
CCS  fais  {sic),  nous  avons  gardé  le  silence  pour  ne  pas  contredire 
les  vues  de  M.  l'Intendant. 

»  Cette  fontaine  conduite  à  son  hôtel,  il  ne  paroissoit  pas 
qu'une  seconde  fut  nécessaire  au  même  quartier  assez  proche  de 
celle  d'Eygoulène;  cependant  on  y  en  destina  une  joignante  la 
maison  d'une  pauvre  femme  qui  nous  présenta  sa  requête,  sur 
laquelle  nous  avons  mis  Tordonnance  du  7  mars,  après  quoy  a 
esté  fait  le  procés-verbal  et  prononcé  l'ordonnance  du  12. 

»  Nous  avons  Thonneur,  Monseigneur,  de  joindre  à  notre  leU 
tre  tous  ces  actes  pour  justiffler  à  votre  grandeur  que  le  bureau 
a  plustôt  fait  violence  à  son  zèle  pour  le  bien  public  qu'il  n'a  eu 
intention  de  rien  disputer  à  l'autorité  de  M.  Pajot.  Nous  luy 
connaissons  des  sentiments  tropjustes  pour  penser  qu'il  en  abuze; 
nous  sommes  persuadés  que  luy-même  blâmera  ceux  auxquels 
il  commet  ses  pouvoirs,  lorsqu'il  connoitra  le  mauvais  usage 
qu'ils  en  font.  Messieurs  ses  prédécesseurs,  qui  agissoient  de 
concert  avec  nous,  dans  les  affaires  de  notre  compétence,  pour- 
roient  nous  rendre  des  témoignages  de  notre  ardeur  à  concourir 
avec  eux  pour  les  intérêts  de  l'Elat  et  du  public. 

»  Nous  supplions  Votre  Grandeur  do  nous  pardonner  si  nous 
passons  les  bornes  d'une  lettre,  mais  nous  obéissons  à  vos  ordres. 
Nous  devons  vous  rendre  compte  de  notre  ministère  et  il  est 
juste  que  vous  soyés  informé  de  ce  qui  se  passe  et  se  fait,  dans 
une  capitalle  qui  a  la  gloire  de  vous  avoir  donné  le  jour.  Elle 
espère  pour  l'amour  naturel  de  la  pairie,  de  votre  attachement 
pour  le  maintien  du  bon  ordre,  de  vos  lumières  et  de  votre  pru- 
dence pour  établir  des  règles  justes  el  équitables,  que  vous  pro- 
tégerés  ses  officiers  et  ses  habitants. 
»  Nous  avons  l'honneur  d'être,  avec  un  profond  respect,  etc.  >» 
{Registre  des  affaires  secrètes  du  bureau  des  finances  de  Limoges. 
—  Communication  de  M.  l'abbé  Granet.) 


AVIS 


à  MM.  les  Membres  de  la  Société 


Les  réuûions  de  la  Société  ont  lieu  invariablement  le 
dernier  niardi  de  chaque  mois.  —  L'ordre  du  jour  de  la 
réunion  est  publié  dans  les  journaux  de  fimoges,  mais 
il  n'est  pas  envoyé  de  lettres  de  convocation. 


Nous  ne  saurions  trop  engager  ceux  de  nos  confrères 
qui  changeraient  de  domicile  ou  dont  l'adresse  n'est  pas 
exactement  indiquée  à  la  Liste  des  Membres  de  la  Société  y 
à  faire  connaître  leur  adresse  actuelle  soit  au  Secrétaire 
général  (M.  Louis  Guibert,  rue  Sainte-Catherine,  8),  soit 
au  Trésorier  (M.  Louis  Bourdery,  rue  Pétiniaud-Beau- 
peyrat,  28),  de  façon  à  éviter  toute  erreur  dans  la  présen- 
tation des  reçus  de  cotisation  et  tout  retard  dans  Tenvoi 
du  Bulletin. 

MM.  les  Membres  de  la  Société  sont  instamment  invités 
à  adresser  ou  à  faire  verser  au  Trésorier  chaque  année, 
avant  le  31  mars,  le  montant  de  la  cotisation  de  Tannée  en 
cours  (15  fr.  pour  les  Membres  résidants,  et  7  fr.  pour  les 
correspondants).  —  Passé  ce  délai,  le  Trésorier  fera 
encaisser  par  la  poste  les  cotisations  non  payées,  en  ajou- 
tant au  montant  de  la  cotisation  50  centimes  pour  frais. 


Ceux  des  Membres  de  la  Société  qui  n'ont  pas  encore 

retii'é  leur  diplôme  voudront  bien  le  réclamer   à  M.  L. 

Bourdery,  Trésorier,    rue  Pétiniaud-Beaupeyrat,  28,  en 

lui  envoyant,  s'ils  ne  l'ont  déjà  fait,  le  montant  du  droit 

d'entrée  fixé  à  10  fr. —  Ce  droit  n'est  exigible  que  des 

Sociétaires  résidant  dans  le  département. 

Les  démissions  doivent  être  adressées  par  écrit  au  Président 

A  moins  qu'ils  n'en  témoignent  le  désir,  il  ne  sera  P^^ 
envoyé  de   quittance   aux  Sociétaires  qui  auront  adre^^_ 
leur  cotisation  par  mandat  ou  lettre  chargée  au  Trésor^^    *• 
lereçtï  de  la  poste  pouvant  en  tenir  lieu. 


[extrait  du  catalogîik  de  \à  munm  umm\y 

V  H.  0UCOURTIEUX 

T.   nuls   OEs    Ant-:>-i:»,   lihogb» 


isK  liBidiialti  (ina-tl»),  J"   n<-|C>rt«HaW«daUiaMittii.|arl.-a.a 


CJLLETIIN 

IIR  UpiiCIKTl; 

ARCHfiOrOGïOUE 

ET  HISTORIQUF, 
DU  LIMOUSIN] 

liiMli   XI,.    —    a-  "LIVRAl-i 


■,.j^^ 


LIMOGKS 

'  M  pnl  M  f:ii[B    ET    [.tiiKAiRin    uimoi1«isiî: 

V-  H.  DOCOURTIBOX 

,  ii*iE  BES  Atii  >  i:  -.  - 
I6DS 


AVIS 


à  MM.  loB  Membres  de  la  Société 


rt  Iii^Inriqiit-  .in   l.iii 


rJM-I'- 


La  Sfltlél^  arrli.''! 
sBs  Mcmbrcc  i|iii  !;■ 

CfRnil    !iOlD    cl    11' 

Inuii^  nalllM'  q\i .   .         '        ;   . 

Elli:  rDcomniiinJc  II  IJUi'ilhuii  it<    -'      'i    ■■■;.    ■ 
rngisLritti  (les  paroisse»,  les  ininiil''^    :<    <:i.  !<     i 

dos  luaii'ies,  des  bureaux  d'cnrugisinH.i  .'     i 

,  fftiâtuauï,  Ir;s  ihaflrliTS,  les  coltLiinyii^   i.sii.    li. 
L'-futciciL''  papiers,  livres  de  comptes,  jiiotchii        i 
1  iiolairi^îi,  etc.  Il  s'y  Irouve  souvent  des  iridJiMici  i-  '^   ■■ 
La  Soci^rli^  prie  îoul  spéciale  mcnl  sus  MniilMi-  im'  >  -.  ■■ 
EOinniiimi{iicr  les  procès- vurtiaui;  uii  ini'iUions  il  assoinhifi.-^  de  niirunn- 
taulés  paroissiales  aul^rieures  au  xvur  sièiti-  H  tout  ducumcni  u-  ra[i- 
lortuiii  nu  commerce  (it  à  l'industrie  du  pu.vs  avant  ITdO. 

Le»  rèuulonii  de  la  Soci^ti^  ont  lieu  invariablement  le  derni-i  i    '    i 
Bliaque  moi».  —  L'ordre  dti  juiir  du  la  réunion  e<it  piitili^l  dan 
«■uux  de  Làmogi's,  mais  il  n'est  pas  envoyé  de  lellres  rie  ronvi-  i 

:  Noos  ne  saurions  trop  engager  ceux  de  nos  conrri'restfuirlrji 
kdORiicilfOudont  l'adresse  n'est  pas  exactement  indiquée  i\  !.: 
^êmbrex  de  la  Sonélé.  k  faire  connaître  leur  adresse  actnrli 
.ïcrétaire  général  (M.  Louis  Guiberl,  nie  Sainte-Catherine,  ^ 
Jïésorier  (M.  Louis  Bonrdery,  rue  Péliniaud-Bcaupeyrat,28;i.  ' 
ftvilcr  toute  erreur  dans  la  prt^senlation  de»  rfiçus  de  cotisjiin  ■ 
retard  dans  l'envoi  du  Bulletin. 

MM.  les  Membres  de  la  Société  sont  inslamment  Invités  h  «ili  ■ 
taire  verser  au  Trésorier  chaque  annAc,  avant  le  31  mars,  le  u  !■ 
la  cotisation  de  l'année  encours  {iStr.  pour  les  Membres  n -i 
^  7  rr,  pour  les  correspondants).  —  Passé  ce  délai,  le  Trésoi'iiîi  (na  i-u- 
Lcaisser  par  la  poste  les  cotisations  non  payées,  en  ajonlonl  au  m«inlanl 
pjlo  la  cotisation  50 centimes  pour  frais. 

tieux  des  Membres  de  la  Socii>té  qui  n'out  pas  encore  r-'ii     '■  i 
diiilûme  voudront  bien  le  réclamer  il  M.  L.  Bourdery,  Tré-M.. 
Petiniaud-Beaupcjrat,  28,  en  li>i  envoyant,  s'ils  ne  l'ont  déjù  fin'    : 
tant  du  droit  (Ventrée  lixé  ii  10  fr.  —  Ce  droit  nesl  exigible-    l'i. 
Sociétaires  résidant  dans  le  département. 

Les  démissions  doiveut  être  adressées  par  écrit  au  Présideoi. 

A  moins  qu'ils  n'en  témoipent  le  désir,  il  ne  sera  pas  envoy''  ■-'    in; 
tance  aux  Sociétaires  qui  auront  adressé  leur  cotisation  par  n.  r 
lettre  chargée  au  Trésorier,  le  rei^n  de  la  poste  pouvant  en  tenu 


^êêM 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE 


A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS 


La   Souterraine.   —  Bridiers.   —  Breith.  —   Saint- 
Oermain-Beaupré  et  ses  Seigneurs 


I 
LA  SOUTERRAINE 


De  Limoges  à  la  Souterraine,  avec  Taide  de  la  vapeur  sur  la 
grande  ligne  de  Toulouse  à  Paris,  la  distance  est  assez  vile  fran- 
chie ;  après  avoir  traversé  la  région  si  accidentée  et  bien  connue 
de  la  plupart  de  nos  lecteurs,  qui  s'étend  entre  les  montagnes  de  la 
Creuse  et  les  chaînons  d'Ambazac  et  de  Saint-Sulpice-Laurière 
jusqu'à  la  pittoresque  vallée  de  la  Gartempe,  on  entre  dans  une 
contrée  moins  mouvementée  mais  dont  Faspect  frais  et  riant  est 
encore  celui  des  paysages  de  notre  Limousin. 

Nous  voici  à  La  Souterraine  :  la  ville  bien  située,  très  vivante, 
assise  sur  le  versant  d'une  colline  que  baigne  la  Sedelle,  petit  affluent 
de  la  Creuse,  a  fort  bon  air  avec  les  groupes  de  ses  maisons  qui 
s'étagent  et  d'où  émergent  à  quelques  intervalles  la  belle  chapelle 
du  couvent  des  Dames  du  Sauveur,  la  tour  de  son  église,  la  vieille 
porte  de  ville  et  le  campanile  de  Técole  primaire  supérieure  (1). 

(1)  Ce  mémoire  esi  le  compte  rendu  de  rexcursion  faite  le  6  juillet  1891, 
par  vn  certain  nombre  de  membres  de  la  Société  archéologique  et  histori 
que  du  Limousin  à  La  Souterraine,  à  Bridiers,  Breith,  puis  au  château  de 
Saint-Germain-Beaupré. 

Les  précieux  renseignements  qu*ont  bien  voulu  nous  fournir  les  aima- 
bles correspondants  de  notre  Société,  habitant  le  canton  Je  La  Souterraine, 
nous  ont  décidé  à  donner  à  ce  travail  plus  d'ampleur  que  ne  comportait 

T.  zu  25 


390  SOCIÉTÉ  AnCnÉOLOGIQUE   Br   HISTORIQUE    DU   LIMOUSIN. 

Sur  le  quai  même  de  la  gare  nous  sommes  reçus  par  MM.  Montau- 
don,  Bellet  et  Tabbé  Cialis,  membres  correspondants  de  notre 
Société  et  qui  ont  bien  voulu  nous  servir  de  guides  pour  toute 
cette  intéressante  journée;  c'est  à  leur  cordial  accueil,  à  leur  obli- 
geance extrême  que  nous  devons  une  grande  part  des  agréments 
de  notre  excursion. 

Le  ciel  qui  menaçait  au  départ  ne  semble  pas  cependant  vouloir 
sourire  à  nos  premiers  pas  ;  c'est  sous  une  véritable  averse  que 
nous  jetons  un  rapide  coup  d'œil  sur  la  chapelle  de  Timportanti^ 
communauté  des  Sœurs  du  Sauveur  ;  cette  chapelle  est  du  reste  de 
construction  récente;  son  vaisseau  intérieur  plaît  au  regard  par  ses 
belles  proportions,  par  sa  décoration  riche  et  de  bon  goût  ;  nous  le 
préférons  beaucoup  à  la  face  extérieure  d'une  ornementation 
trop  chargée  et  dont  Taspect  donne  plutôt  l'impression  d'un  chevet 
d'église  que  celle  d'une  façade  d'entrée  principale. 

A  signaler  aussi,  disons  le  pour  n'avoir  pas  à  y  revenir,  l'École 
primaire  supérieure  bâtie  il  y  a  quelques  années  seulement  sur  le 
faite  de  la  colline  et  qui  domine  la  ville  de  toute  la  hauteur  de  ses 
galeries  et  de  son  élégant  campanile.  C'est  à  n'en  pas  douter, 
l'école  la  plus  fastueuse  de  notre  région  et  probablement  aussi  la 
plus  coûteuse.  Mais  c'est  là  de  l'actualité  et  notre  voyage  n'a  pas 
précisément  pour  objectif  l'examen  des  œuvres  môme  très  méri- 
toires de  nos  architectes  modernes. 


UISTORiOUË.    —   MAISONS  ANCIENNES.   —  PORTES   DE  VILLE 

La  ville  ancienne  présente  à  notre  curiosité  des  monuments,  des 
vestiges  ou  des  souvenirs  qui  à  eux  seuls  valent  bien  le  voyage. 

le  récit  d'une  simple  excursion.  La  remarque  en  sera  faite  par  nos  lecteurs 
eux-mômes  surtout  pour  la  partie  relative  à  Saint-Germain-Beaupré  ;  loaic- 
fois,  et  sauf  pour  cette  dernière  partie,  notre  intention  ne  pouvait  être  et 
n'a  pas  été  d'écrire  l'histoire  des  lieux  que  nous  avons  visités  et  décrits; 
pour  mieux  connaUre  ces  lieux  et  leur  histoire,  il  sera  bon  de  se  reporter 
aux  ouvrages  et  aux  documents  déjà  publiés  sur  la  matière  et  que  nous 
avons  signalés  dans  nos  notes.  Celte  étude  n'est  donc  nécessairement  qu'un 
ri'*sumé  que  nous  nous  sommes  efforcé  de  faire  aussi  exact  et  aussi  précis 
que  possible,  en  complétant  ou  en  rectifiant  nos  devanciers  sur  divers 
points. 

Si  notre  travail  peut  offrir  quelque  intérêt,  il  le  devra  sans  nul  doute 
au  concours  de  nos  correspondants  et  particulièrement  aux  remarquables 
dessins  que  MM.  Albert  Gérardin  et  Georges  Berihomier  ont  bien  voulu 
composer  à  cette  intention. 


EXCURSION  ARCBÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE   ET  DANS  SES  ENVIRONS.   391 

Au  préalable  il  conviendrait  peut-être  ici  de  placer  une  notice 
historique  sur  les  origines  de  La  Souterraine  et  ses  destinées  pen- 
dant les  siècles  écoulés,  si  celte  notice  ne  devait  trop  excéder  le 
cadre  d'une  simple  narration.  Les  origines  ne  sauraient  d'ailleurs 
être  déterminées  avec  une  certitude  parfaite;  avant  Tère  chrétienne 
et  pendant  les  premières  périodes  de  celte  ère,  La  Souterraine 
n*existait  pas  à  titre  du  moins  de  population  agglomérée  ;  tout  fait 
présumer  que  laïcité  Gauloise  et  plus  tard  Romaine  était  située  un 
peu  plus  loin,  dansles  champs  de  Breith  ou  de  Bré  que  nous  visiterons 
dan»  la  journée.  Un  honorable  habitant  de  La  Souterraine,  qui  avait 
au  plus  vif  degré  le  culte  des  souvenirs  de  sa  ville  natale,  M.Fesneau, 
admettait  que  sur  remplacement  de  la  ville  actuelle  avait  dû  s'élever 
jadis  un  temple  dédié  à  Pluton  et  dont  les  Romains  se  seraient 
emparés  lors  de  la  conquête,  au  moyen  d'un  souterrain  qui  existe 
encore  par  traces  assez  bien  conservées  ;  cette  assertion  ne  peut 
avoir  d'autre  valeur  que  celle  d'une  conjecture  plus  ou  moins  har- 
die, comme  certaines  autres  suppositions  du  même  auteur;  en  tous 
cas  plusieurs  siècles  se  seraient  écoulés  avant  que  les  seigneurs  de 
Bridiers,  les  plus  proches  voisins  de  ces  lieux,  y  aient  fait  édifier 
un  fort  autour  duquel  une  bourgade  dût  assez  rapidement  se  for- 
mer ;  ce  fut  cette  bourgade  qui,  sous  le  nom  de  villa  Sosteranea,  fut 
donnée  par  Gérald  de  Crozant,  vicomte  de  Bridiers,  aux  moines  de 
l'abbaye  de  Saint-Marlial  de  Limoges,  à  la  date  du  9  août  997  (1); 
s'il  en  est  ainsi,  La  Souterraine  aurait  une  origine  toute  féodale  ;  la 
bourgade  du  x«  siècle  fit  comme  beaucoup  de  ses  pareilles;  elle 
grandit,  malgré  force  vicissitudes  et  malgré  les  sièges  qu'elle  eut  à 
subir  dans  la  suite,  notamment,  en  l'an  1160  sous  le  règne  de 
Louis  VII,  et  en  l'année  1381  où  elle  fut  assiégée  par  le  maréchal 
de  Sancerre. 

On  trouve  à  La  Souterraine  un  certain  nombre  de  maisons  des 
XIV*  et  xv«  siècles,  et  même  des  xn«  et  xni%  si  nous  en  croyons  quel- 
ques uns  de  nos  guides  ;  notre  attention  est  surtout  appelée  sur 
une  curieuse  maison  de  la  rue  Bessereix,  qui  présente  un  singulier 
mélange  d'ouvertures  ogivales  au  rez-de-chaussée  et  de  fenêtres 
en  plein  cintre  au  premier  étage  ;  celte  construction  s'élève  au- 


(I)  M.  Fesneau  émet  l'avis  qu'après  la  ruine  de  la  ville  de  Breilh  dont 
nous  parlerons  plus  loin,  les  malheureux  habitants  de  cette  ville  durent  se 
réfugier  et  se  construire  de  nouvelles  demeures  autour  du  fort  appelé 
Sortoranes  où, d*après  lui,  Pépin  le  Bref,  vainqueur  de  Waïfer,  avaii  établi 
garnison.  Voir  dans  les  Mémoires  de  la  Société  des  sciences  naturelles  et 
archéologiques  de  la  Creuse^  l.  111,  Tarticle  de  M.  Fesneau  sur  Breith, 
ollie  peinte. 


3d^  SOCtKTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

dessus  de  caves  de  grandes  dimensions  et  a  subi  des  remaniements 
manifestes;  d'après  M.  Ernest  Montaudon,  elle  serait  contemporaine 
de  l'église;  c'est  un  fait  qu'il  serait  bien  diflkile  d'affirmer. 

Des  fortifications  et  de  l'enceinte  de  la  ville,  il  subsiste  encore 
deux  portes,  une  tour  située  rue  de  la  Vigne,  et  des  fragments  de 
murs  et  de  trois  autres  portes  de  petites  dimensions  que  l'on  voyait 
encore  debout  au  commencement  du  siècle  ;  ces  restes  et  ces  vesti- 
ges suffisent  pour  reconstituer  et  suivre  l'enceinte  telle  qu'elle 
existait  au  moyen  âge. 

Des  deux  portes  encore  intactes,  la  plus  intéressante  est 
celle  qui  se  trouve  dans  le  quartier  de  Lavaud  et  qui  est  cou- 
nue  sous  le  nom  de  porte  Notre-Dame  ou  de  la  Prison,  parce 
que  jusques  vers  1860  elle  servait  de  prison;  bien  que  celte 
porte  soit  réputée  de  fondation  très  ancienne,  elle  ne  nous  paraît 
pas  devoir  remonter  au  delà  du  xvi*  ou  de  la  lin  du  xV  siècle  ;  elle 
est  du  reste  fort  bien  conservée  et  si  elle  n'a  rien  de  très  saillanl  au 
au  point  de  vue  architectural  en  dehors  de  sa  galerie  de  mâchi- 
coulis qui  supporte  le  comble,  elle  attire  et  retient  les  regards  par 
sa  structure  légère  et  très  élancée  ;  on  accède  au  corps  de  logis  qui 
la  surmonte  par  un  escalier  et  une  galerie  extérieurs  assis  sur  des 
restes  des  anciennes  murailles  et  dont  le  bon  état  d'entretien  témoi- 
gne que  l'édilité  locale  a  quelque  souci  de  la  conservation  de  ses 
vieux  monuments  (1). 


L*ÉGLISE  ET   SA  CRYPTE 


En  quittant  la  porte  de  la  prison,  on  arrive  directement  à  l'église. 
Celle-ci,  débarrassée  de  l'amas  de  constructions  privées  qui  l'obs- 
truaient naguère  du  côté  du  Midi,  apparaît  maintenant  dans  toute 
l'ampleur  de  son  vaisseau  ;  c'est  un  édifice  très  important.  Tune 
des  églises  les  plus  remarquables  de  toute  la  région,  qui  méritait  à 
divers  titres  d'être  classée  au  nombre  des  monuments  historiques 
et  d'être  l'objet  de  l'intelligente  restauration  qui  en  a  été  faite  il 
y  a  quelques  années,  sous  la  direction  d'un  éminent  architecte, 
M.  Abadie  (2).  La  forme  est  celle  d'une  croix  latine  dont  la  petite 

(1)  L'autre  porte  donne  accès  au  quartier  du  marché  au  blé  dans  le  fau- 
bourg du  Puyeharaud;  au-dessus  s'élèvent  deux  étages  habiles  par  des  par* 
liculiers;  mais  celte  porte  n*a  rien  qui  puisse  fixer  Tattention. 

(3)  Cette  restauration  n'est  pas  encore  entièrement  terminée.  La  partie 
nord  de  l'église  a  été  reprise  de  1848  à  1854,  le  chœur  et  le  transept  sud 
ont  été  restaurés  de  1871  à  4878;  pendant  cette  dernière  période  on  a  fait 
de  grandes  réparations  à  l'intérieur,  une  partie  des  voûtes  a  été  refaite,  des 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  KNVIRONS.     393 

extrémité,  celle  de  Tabside,  fait  peu  saillie  sur  la  croisée  et  se  ter- 
mine en  carré  ;  le  chevet  de  cette  abside  a  été  reconstruit  de  nos 
jours,  mais  pour  partie  en  pierre  calcaire,  ce  qui  fait  un  contraste 
un  peu  fâcheux  avec  le  granit  d'un  ton  assez  sombre  de  Tensemble 
du  monument.  A  Tautre  extrémité  qui  forme  la  face  occidentale  et 
sur  le  portail  principal  s'élève  un  clocher  très  remarquable.  Le  slyle 
de  ce  monument  relève  du  roman  des  diverses  époques,  mais  le 
transept  et  l'abside  et  mémo  certains  détails  secondaires  du  clocher 
appartiennent  manifestement  au  style  ogival  naissant. 

Un  aperçu  général  ne  saurait  donner  une  impression  assez  nette 
d'un  édifice  de  nature  aussi  complexe  et  qui  présente  au  surplus 
des  particularités  très  curieuses.  Il  est  donc  nécessaire  d'en  faire 
un  examen  plus  complet  et  assez  détaillé  pour  permettre  aux  lec- 
teurs d'en  apprécier  les  caractères  principaux  et  les  plus  originaux. 

Tout  d'abord  à  l'extérieur,  à  la  hauteur  des  bas-côtés,  règne  tout 
autour  de  l'édifice,  même  de  la  base  du  clocher,  mais  le  transept 
excepté,  une  galerie  à  parapet  reposant  sur  un  cordon  aux  modil- 
lons  grimaçants,  qui  contourne  les  contreforts  à  leurs  sommets  et 
qui  éveille  dans  l'esprit,  ainsi  qu'on  l'a  déjà  remarqué,  l'idée  d'un 
système  de  défense  ;  au-dessus  et  au-dessous  de  la  galerie  sont 
percées  des  fenêtres  en  plein  cintre,  les  premières  éclairant  la  nef 
principale,  les  autres  les  nefs  latérales.  Les  croisillons  du  transept 
sont  flanqués  de  contreforts  dans  toute  leur  hauteur  ;  sur  un  de  ces 
contreforts  au  Midi  se  trouve  une  statue  de  la  vierge  avec  l'enfant 
Jésus  sur  ses  genoux,  ainsi  que  cette  inscription  :  Ereocit  me  Jacohus 
d'Aubusson  de  Castel  NoveU  17-1 5  [i). 

Sous  le  clocher  s'ouvre  la  grande  porte,  formée  de  deux  arca- 
lures  ogivales  que  supportent  deux  colonnes  romanes;  elle  est  enca- 
drée sous  de  larges  et  profondes  voussures  formées  de  six  archi- 

vilraax,  sortamdes  ateliers  de  M.  Dideron  de  Paris,  ont  élé  placés  dans  les 
fenêtres  du  chœur  et  du  transept,  k  l'aide  de  souscriptions  particulières. 
Certaines  parties  de  Tédilice  et  surtout  la  façade  du  sud,  entre  le  clocher 
Cl  le  transept,  restent  encore  à  restaurer.  L'église  a  été  classée  comme  mo- 
nument historique  en  1845,  nous  dit  M.  Montaudon. 

(4)  Cette  date  est  évidemment  celle  d'une  réparation  faite  à  cette  partie 
de  Téglise. 

La  môme  vierge,  mais  paraissant  beaucoup  plus  ancienne,  se  voit  au 
fronton  de  la  porte  latérale  qui  donne  accès  dans  Téglise  du  même  côté  ; 
elle  est  d'un  travail  assez  grossier. 

Hais  une  autre  statue,  beaucoup  plus  artistique,  représentant  la  vierge 
debout  et  couronnée,  avec  Tenfant  Jésus  au  bras  droit,  occupe  une  niche 
(Je  style  rayonnant  à  l'angle  sud-est  de  la  tour,  vers  les  deux  tiers  de  la 
hauteur  totale. 


301  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   UISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

voltes  sans  chapiteanx  et  dont  les  bandeaux  polylobés  nous 
rappellent  l'ornementation  si  caractéristique  du  grand  portail  du 
Dorât.  Au-dessus  s'élève  une  tour  massive  et  carrée,  à  trois  étages, 
flanquée  au  premier  de  deux  tourillons  qui  sont  une  addition  ré- 
cente assez  heureuse  de  l'architecte  moderne,  percée  au  deuxième 
étage  de  deux  fenêtres  ogivales  sur  chaque  face,  d'une  seule  fenê- 
tre au  troisième  étage;  ce  dernier  étage  présente  ceci  de  particulier 
que  chacua  des  angles  de  la  tour  est  remplacé  ou  amorti  par  une 
tourelle  ou  grosse  colonne  de  granit  pleine  et  unie  ;  les  quatre 
colonnes  d'angles  ainsi  que  les  côtés  de  la  tour  supportent  une 
toiture  en  charpente  dont  la  physionomie  est  toute  particulière  ; 
inclinée  à  la  base,  cette  toiture  se  relève  ensuite  perpendiculaire- 
ment en  forme  de  prisme,  pour  s'incliner  de  nouveau  et  se  terminer 
par  un  lanternon  ;  ce  couronnement  n'est  peut-être  pas  celui  que 
comportait  le  style  de  l'édifice,  mais  tel  quel,  aux  yeux  des  indigènes 
et  même  des  touristes,  il  ne  manque  pas  d'une  certaine  origina- 
lité (1). 

La  tour  elle-même  a  dû  être  remaniée  et  refaite  dans  sa  partie 
supérieure,  comme  l'indique  assez  visiblement  la  différence  des 
matériaux  ;  mais  cette  réfection  paraît  avoir  été  faite  dans  le  sens 
vertical,  notamment  pour  toute  la  partie  de  l'Est  qui  présente  au 
sommet  des  motifs  d'une  ornementation  assez  riche  rappelant  le 
style  ogival  flamboyant,  tandis  que  les  autres  faces  sont  surmontées 
d'une  sorte  de  petite  galerie  à  niches  régnant  sur  un  simple  filet 
horizontal. 

La  date  de  1506  inscrite  sur  la  face  nord  de  la  tour  en  ces  termes  : 
Lan  mil  cinq  cent  et  six  fus  assis  et  celle  de  1604  gravée  sur  celle 
de  rOuest  et  qui  est  ainsi  figurée  : 


semblent  fixer  les  époques  de  ces  restaurations  successives. 

(1)  M.  E.  de  Beaiifort,  doni  le  nom  reviendra  assez  souvent  sous  noire 
plume  au  cours  de  celte  élude  et  qui  a  fail  une  descriplion  assez  complèle 
de  Téglise  ainsi  que  d'autres  monuments  des  environs,  émet  Tavis  que  la 
lour  dévalise  lerminer  dans  le  principe,  non  par  une  charpenie  en  bois, 
mais  par  une  plaie-forme  avec  un  parapcieldescîochetonssur  les  tourelles; 
la  plaie-forme  elle-môme  devail  être  surmontée  d'une  flèche.  Celte  flèche 
et  les  clochetons  auraient  élé  délruils  par  la  foudre  au  commencement  du 
xvn^  siècle,  ajoute  le  môme  auteur.  Celle  opinion  n*a  rien  d'invraisemblable 
[Recherches  archéologiques  dans  les  environs  de  Saint- Benoist^du^SauU 
par  M.  le  D**  E.  de  Beauforl,  Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de 
rOuest,  années  t860-6l). 


EXCUUSION  ARCHÉOLOGIQUE  A   LA  «"OUTennAINK  ET  DANS  SES  ENVIRONS      395 

La  façade  du  Sud  porte  aussi  une  inscriplion  qui  a  paru  à 
plusieurs  érudits  idenlique  à  celle  du  Nord,  quoique  formée  de  ca- 
ractères plus  grands  et  moins  bien  gravés  et  qui  donnerait  aussi  la 
date  de  l'année  1506;  M.  de  Beaufort  y  a  lu  au  contraire  celle  de 
12H  qui  correspondrait  à  rachèvement  du  clocher,  antérieur  de 
peu  d'années  à  celui  de  Téglise  même;  nous  préférerions  assez 
volontiers  cette  dernière  version,  si  les  caractères  gothiques  et 
français  de  cette  inscription  ne  se  prêtaient  mieux  à  la  première 
lecture;  la  question  est  encore  à  trancher. 

Quand  on  pénètre  à  l'intérieur,  on  a  devant  soi  une  belle  nef 
composée  de  cinq  travées,  accostée  de  deux  collatéraux  étroits; 
au-delà,  la  croisée  et  Tabside  au  fond  de  laquelle  s'ouvre  la  grande 
baie  de  la  fenêtre  principale  qui  penche  légèrement  sur  la  droite 
en  dehors  de  Taxe  de  Fédifice,  en  commémoration  sans  doute  de 
l'attitude  de  la  tête  du  Christ  mourant  sur  la  croix.  La  longueur  de 
l'ensemble  est  de  58  mètres;  la  largeur  de  13  mètres  70  c.  Il  est 
facile  en  parcourant  le  vaisseau  de  retrouver  les  caractères  distincts 
des  époques  auxquelles  on  doit  faire  remonter  la  construction  de 
ses  diverses  parties  :  la  première  travée,  celle  du  clocher,  est  voûtée 
en  une  coupole  soutenue  par  quatre  colonnes  simples  à  chapiteaux 
et  porte  bien  la  marque  du  xi*  siècle;  les  travées  suivantes,  avec 
leurs  voûtes  en  berceau,  leurs  colonnes  accompagnées  de  colon- 
nettes  de  dispositions  et  de  dimensions  variées,  leurs  chapiteaux 
curieusement  travaillés,  sont  évidemment  d'une  période  postérieure; 
quant  aux  nefs  secondaires  ou  collatéraux,  elles  ont  leurs  voûtes  à 
arêtes  et  leurs  arcs-doubleaux  en  plein  cintre. 

Si  l'aspect  de  la  nef  plaît  au  visiteur  par  ses  proportions  heureu- 
ses et  son  bel  ordonnancement,  il  est  permis  de  dire  que  ce  visi- 
teur est  séduit  et  tout  à  fait  charmé  par  la  vue  du  transept  et  de 
l'abside;  là  tout  révèle  un  art  plus  parfait  et  en  tous  cas  les 
inspirations  de  la  première  époque,  si  pure,  si  noble  et  si 
délicate  à  la  fois  de  l'architecture  ogivale.  Quatre  colonnes 
cruciformes,  accostées  chacune  de  huit  gracieuses  colonnettes, 
soutiennent  avec  les  demi-piliers  et  les  quarts  de  piliers  des 
côtés  et  des  angles  les  voûtes,  dont  celle  du  milieu  est  ellipti- 
que et  les  autres  en  berceau,  et  produisent  à  l'aide  de  cette  combi- 
naison assez  simple  l'effet  d'une  profusion  de  lignes  pleines  d'har- 
monie, que  relèvent  les  fines  sculptures  des  chapiteaux,  des  crosses 
de  feuillages  et  d'un  cordon  courant  à  la  hauteur  des  fenêtres  tout 
au  tour  de  l'abside  et  du  transept,  contournant  les  colonnettes  et 
donnant  lieu  par  celte  rencontre  à  des  motifs  d'une  décoration 
sobre  et  délicate. 

Sous  cette  partie  si  remarquable  de  l'édilice  se  trouve  une  crypte 


' 


I 


396  SOCléTÉ  ARCBÊOLOGIQUI   ET   HISTORIQUE   DU   LISI0U8IR. 

dans  laquelle  nous  descendons  par  une  porte  et  un  escalier  placés 
dans  Faile  droite  du  transept;  cette  crypte  assez  vaste,  voûté,  bien 
conservée,  quoiqu'elle  n'ait  pas  été  rendue  au  culte,  comprend  trois 
chapelles  réunies  par  un  couloir  et,  en  face  de  la  chapelle  du  milieu, 
un  vestibule  ouvrant  sur  un  caveau  rectangulaire  dans  lequel  on 
remarque  un  puits  à  margelle  d'une  seule  pièce;  l'existence  de  ces 
puits,  comme  Ton  sait,  n'est  pas  chose  rare  dans  les  monuments 
religieux  de  celte  époque  ;  le  caveau  lui-même  communique  avec 
un  autre  plus  étroit  dans  lequel  se  trouvait  autrefois,  dit-on,  le 
tombeau  de  Gérald  de  Crozant,  seigneur  de  Bridiers,  le  donateur 
de  La  Souterraine  à  l'abbaye  de  Saint-Martial  de  Limoges.  Sur  une 
grosse  pierre  encastrée  dans  le  mur  du  fond  de  ce  dernier  caveau, 
on  aperçoit  les  lettres  d'une  inscription  qu'il  est  assez  malaisé  de 
lire  et  surtout  de  traduire,  d'autant  plus  que  celle-ci  est  renversée. 

IS.  MANIBVS 
NL  FILL  ITEM 
PATRIS.  ITEM 

ACVS(l) 

Suivant  la  tradition  assez  curieuse  pour  être  rapportée,  l'inscrip- 
tion aurait  fait  pendant  longtemps  le  désespoir  des  érudits  d'autre- 
fois, notamment  des  religieux  de  l'abbaye  jusqu'à  l'époque  du 
passage  à  La  Souterraine  de  la  reine  Catherine  de  Médicis  qui  fit 
observer  que  l'inscription  était  renversée,  la  pierre  ayant  été  placée 
dans  la  maçonnerie  de  bas  en  haut  et  qui  en  donna  la  première 
lecture,  elle  ou  plus  probablement  un  des  seigneurs  de  sa  suite  (2). 

Cette  inscription  qui  était  évidemment  celle  d'un  tombeau  n'était 


(t)  V.  Manuel  d'épigraphie,  par  l*abbé  Texier,page  104.  Le  savant  abbé 
lisait  à  la  fin  de  la  3®  ligne  :  PIÊN,  qu'il  traduisait  :  pientissUnL 

Le  même  a  lu  A.  C.  Y*  S.  et  traduisait  :  animœ  carissimœ  ootum  soloU, 
D'après  une  autre  lecture,  il  y  aurait  A.  G.  V.  et  Tod  pourrait  traduire  : 
anima  carissima  valeas.  * 

Du  reste,  Tabbé  Texier  n*a  pas  fourni  la  traduciion  même  de  cette  ins- 
cription. Eu  outre  des  abbés  Nadaud  et  Texier,  TinscriptioD  ainsi  que  la 
suivante  relatée  au  texte  ont  été  relevées  par  d'assez  nombreux  épigra- 
phisles  qui  en  ont  donné  des  lectures  un  peu  différentes. 

(2)  M.  Ernest  Montaudon  conserve  un  vieux  manuscrit  où  on  lit  ceci  : 
a  ...  Dans  les  fondements  de  laquelle  (église)  se  trouve  une  inscription 
»  écrite  en  lettres  anciennes  sur  une  grosse  pierre  fort  dure,  rompue  par 
»  moitié  et  transposée  en  deux  endroits,  laquelle  ne  se  pouvait  lire  ni 
»  assembler  jusqu'à  ce  que  feu  M.  Merlin,  sieur  de  Rancy,  maître  des  rc- 
»  quêtes,  passant  en  la  dite  ville  (de  La  Souterraine)  avec  feu  M.  le  dac 


\ 


Clocher  de  l'û^tisc  ile  l.a  Souu-rraJiic. 


EXCUBSION  ARGléOLOGI^UB  à  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.    397 

point  la  seule  ;  il  en  existait  une  autre  qui  fut  recouverte  en  1750 
par  une  maçonnerie  et  qui  a  été  publiée  par  plusieurs  érudits  : 

ET  MEMORIAE  PAVLI. 

MEMORIAE  PAVLI... 

NERTACI  AVI  N... 

VIVVS  POS. 

Mais  suivant  Texemple  de  Duroux,  presque  tous  ont  oublié  la 
seconde  ligne,  comme  le  prouve  la  lecture  donnée  par  l'abbé  Na- 
daud  {Pouillé  rayé,  p.  126). 

Nous  estimons  avec  un  savant  épigraphiste  actuel,  M.  Espéran- 
dieu,  que  ces  deux  inscriptions  (la  seconde  rectifiée  par  l'addition 
de  la  deuxième  ligne)  étaient  les  deux  fragments  d'une  seule  et 
même  inscription  et  que  ces  fragments  doivent  être  rapprochés 
pour  pouvoir  en  faire  la  lecture  qui  devient  alors  facile. 

L'inscription  entière  doit  être  lue  ainsi  :  Dits  tnanibus  et  memoriae 
PauU[%\ni  fili[i];  item  memoriae  Pauli,  patris;  item  f  memoriae J  Ner- 
taci,  aviy  N[ert]acu8,  mvu8pos{uit). 

Aux  dieux  Mânes  et  à  la  mémoire  de  Paullinus,  son  Gis,  de  Pau- 
lus,  son  père,  et  de  Nertacus,  son  grand  père,  Nertacus  a,  de  son 
vivant,  élevé  ce  tombeau  (1). 

Indépendamment  de  ces  deux  inscriptions,  M.  Fesneau  cite  Texis- 
tence  de  deux  monolithes  et  celle  de  souterrains  dont  une  branche 
aurait  eu  son  orifice  dans  la  crypte  même,  comme  preuves  de 
rédification  d'un  temple  païen  sur  les  lieux  mômes  où  s*est  élevée 
réglise. 

Selon  cet  auteur,  Téglise  aurait  été  construite  sur  les  ruines  du 
temple  après  la  donation  de  Gérald  de  Crozant  aux  moines  de  Saint- 
Martial  dont  la  date  a  été  donnée  plus  haut,  et  n'aurait   été 

9  d*Anjou  et  la  Reine,  à  la  suite  de  l'armée  du  duc  des  Deux-Ponts  et  de 
9  ramiral,  en  Tan  1569,  en  laissa  des  copies.» 

Cette  indication  donne  quelque  raison  à  la  légende,  en  donnant  toute- 
fois le  mérite  de  la  découverte  à  un  des  compagnons  de  la  reine  et  non 
point  à  celle-ci. 

(1)  V.  Inscriptions  delà  cité  des  Lémooices  par  M.  le  capitaine  Espéran- 
dieu,  pages 93  et  suiv.  —Paris,  Tborin,  1891.  LMnlerprétenlion  de  M.  Espé- 
randieu  trouve  un  appui  dans  le  manuscrit  de  M.  Montaudon  que  nous  avons 
rapporté  plus  haut  en  note.  Mais  de  plus  le  rapprochement  et  la  lecture 
ensemble  des  deux  fragments  dont  il  s'agit  ont  été  faits,  avant  cet  érudit, 
parOruter  (copie  de  Scaliger).  En  1569  et  plus  tard  au  temps  de  Scaliger, 
la  pierre  était  brisée,  mais  complète.  Nadaud,  lui-mômc,  avait  dû  voir  le 
second  fragment  et  l'avait  lu  comme  Scaliger.  (Voir  aux  pièces  annexes  la 
restitution  de  Tinscription). 


398  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   BT   UISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

achevée  qu'en  1220;  ces  deux  dates  semblent  assez  bien  concorder 
avec  les  caraclères  du  monument.  Cette  fondation,  œuvre  de  deux 
siècles,  fut  pénible,  laborieuse,  souvent  interrompue  par  la  pénarie 
des  ressources,  par  des  entraves  et  des  difficultés  de  toutes  sortes 
et  même  par  des  luttes  très  vives  entre  les  religieux  et  les  bour- 
geois. Certains  documents  semblent  en  outre  établir  que  les  prin- 
ces anglais  qui  dominaient  alors  dans  la  /province,  coopérèrent  à 
ToBuvre  par  leurs  subsides  et  intervinrent  même  dans  rédification 
par  rinfluence  de  leurs  idées  et  peut-être  de  leurs  plans. 

Un  archéologue  exercé,  M.  de  Beaufort,  qui  a  publié  il  y  a  trente 
ans  une  description  technique  assez  minutieuse  de  Téglise  à 
laquelle  nous  avons  déjà  fait  allusion,  adopte  cette  manière  de  voir. 
On  ne  saurait  mieux  faire  à  cet  égard  que  de  renvoyer  ceux  des 
lecteurs  qui  voudraient  avoir  une  connaissance  plus  complète  du 
sujet  au  mémoire  de  cet  érudit  et  nous  détachons  seulement  de  ce 
mémoire  ces  quelques  lignes  en  sorte  de  conclusion  :  «  Le  mélange 
de  voûtes  ogivales  à  filets,  dit-il,  de  voûtes  en  plein  cintre,  en  ber- 
ceau, à  arêtes,  à  coupoles,  de  fenêtres  de  plein  cintre  et  à  ogives, 
place  clairement  la  construction  de  l'église  de  La  Souterraine  à  une 
époque  de  transition.  L'originalité  de  son  portail,  de  sa  tourà  tourel- 
les anglaises  à  l'étage  supérieur,  lui  donne  dans  l'aspect  quelque 
chose  d'arabe  et  d'anglais;  sa  galerie  sur  les  bas-côtés  et  sur  le 
devant,  s'élendant  sur  les  contreforts,  fait  naître  l'idée  d'une  dé- 
fense militaire  et  donne  à  présumer  qu'elle  a  été  conslruile  en 
temps  de  guerre  »  (1). 

Cette  appréciation  ne  manque  pas  de  justesse  et  si  elle  rencontre 
quelque  contradicteurs,  elle  précise  assez  bien  en  tous  cas  les  ca- 
ractères particuliers  et  les  plus  saillants  qui  recommandent  l'église 
de  La  Souterraine  à  l'attention  des  savanls. 

M0^UMENTS   DIVERS. 

La  ville  de  La  Souterraine  possède  encore  quelque  monuments 
de  moindre  intérêt,  notamment  un  fanal  funéraire  qui  a  été  réédi- 

(4)  V.  le  mémoire  de  M.  de  Beaufort,  Recherches  archéologiques  dans 
les  enoirons  de  Salnt-Benoist  du  Sault^  dans  le  volume  de  la  Société  des 
antiquaires  de  TOuest  cité  plus  haut  (années  1860-61). 

La  notice  sur  La  Souterraine  est  accompagnée  d'un  plan  et  d*une  vue  de 
Téglise  et  de  dessins  de  divers  détails  des  colonnes  ou  des  chapiteaux. 

L'auteur  y  raconte  aussi,  d'après  M.  Fesneau,  il  est  vrai,  les  incidents 
sur\enus  durant  la  construclion  de  l'église,  les  conflils  et  luttes  avec  les 
habitants  et  les  moyens  financiers  à  l'aide  desquels  les  religieux  parvin- 
rent à  terminer  leur  œuvre,  en  indiquant  les  principales  dates.  Il  nous 
serait  assez  difficile  de  conlrôler  la  véracité  de  toutes  ces  assertions. 


EXCURSION  ARCUéOLOGIQUK  A  LA  SOUTERRAINE  BT  DANS  SES  ENVIRONS.     399 

fié  pièce  par  pièce  dans  le  nouveau  cimetière  et  qui  consiste 
en  un  édicule  en  pierre  de  granit  taillé,  de  six  à  sept  mètres  d'élé- 
vation, de  forme  prismatique  hexagonale,  très  élancé,  reposant 
sur  un  socle  massif  et  surmonté  d'une  lanterne.  Ce  fanal  offre 
beaucoup  d'analogie  avec  celui  d'une  localité  voisine,  Sain t-Aignant- 
de-Versillat,  lequel  passe  toutefois  pour  être  mieux  conserve  et 
de  proportions  plus  parfaites  (1). 

Dans  un  de»  murs  du  même  cimetière,  on  nous  a  fait  remarquer 
une  pierre  très  fruste  où  nous  avons  eu  quelque  peine  tout  d'abord 
à  distinguer  l'effigie  d'un  personnage;  celte  figure  serait  à  ce  que 
Ton  rapporte,  celle  d'un  moine,  Raymond  deVigeois,  qui  fut  tué  en 
Tan  H72  pendant  une  sédition  des  bourgeois  provoquée  par  les 
contributions  levées  sur  eux  pour  la  construction  de  l'église  ;  les 
émeutiers  furent  condamnés  à  l'amende  et  à  élever  un  monument 
expiatoire  ;  mais  il  paraîtrait  que  la  rancune  populaire  survécut 
longtemps  au  souvenir  même  de  la  réparation  et  que  naguère 
encore  les  enfants  de  la  ville  ne  passaient  point  devant  l'image  du 
Monsgânier,  sans  y  jeter  des  pierres.  Si  la  tradition  n'est  qu'une 
légende,  celle-ci  du  moins  a  son  côté  piquant. 

Quelque  rapide  qu'ait  été  notre  promenade  à  travers  ces  vestiges 
du  passé,  l'heure  a  passé  encore  plus  vite  et  nous  rappelle  que 
nous  n'avons  encore  accompli  qu'une  partie  de  notre  tâche,  la  plus 
facile  à  coup  sûr,  puisque  nous  n'avons  pas  quitté  la  ville.  Bridiers, 
Breith,  Saint-Germain-Beaupré  sont  compris  dans  le  cadre  de 
l'excursion  ;  aurons-nous  le  temps  de  tout  voir  ?  C'est  la  question 
que  plusieurs  d'entre  nous  se  posent,  eir  constatant  avec  une  cer- 
taine inquiétude  que  nous  sommes  en  retard  d'une  bonne  heure 
sur  l'horaire  fixé.  Mais  les  optimistes,  il  y  en  a  toujours  par  bon- 
heur parmi  les  archéologues,  ont  réponse  à  toutes  les  préoccupa- 
tions; pour  remplir  son  programme,  il  suffit  de  vouloir!  Aussi  bien 
après  nous  être  arrêtés  quelques  instants  autour  de  l'excellente 
table  de  YHôtel  de  France  où  l'appétit  et  la  bonne  humeur  de  cha- 
cun trouvent  aisément  à  s'exercer,  nous  empressons-nous  de  faire 
route  pour  Bridiers,  notre  première  étape,  en  dépit  des  objur- 
gations des  voituriers  qui  se  récrient  contre  la  longueur  du 
voyage. 

(4)  Une  troisième  lanterne  des  morts  existe  dans  le  canton  de  La  Sou- 
terraine, au  cimelière  de  Sainl-Eliennc-dc-Fursac;  mais  elle  est  d*unc 
architecture  plus  vulgaire  que  celle  des  deux  fanaux  que  nous  venons 
de  citer. 


400  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGlQUe  KT  HlSTORfQUB  DU  LIMOUSllt. 


II. 


BRIDIERS. 

A  deux  kilomèlrcs  de  la  ville  que  nous  quillons  et  noii  loin  de 
la  grande  route  reliant  cette  ville  à  Sainl-Vaury  et  à  Guérel,  se 
dresse  une  haute  tour  qui  de  loin  sollicite  les  regards  à  travers  le 
paysage  où  elle  forme  une  masse  sombre  et  qui,  lorsqu'on  s'en 
approche,  revêt  un  aspect  très  imposant.  C'est  la  tour  de  Bridiers, 
le  seul  fragment  resié  debout  du  grand  château  féodal  qui  a  existé 
durant  des  siècles  au  lieu  de  ce  nom. 

L'abord  en  est  des  plus  commodes;  un  chemin  de  traverse  assez 
vite  parcouru  nous  conduit  au  pied  d'une  sorte  de  mamelon  ou  de 
plateau  pentagonal  dont  Tescarpement  nalurel  d'un  côté,  factice  de 
l'autre,  domine  la  colline  d'une  dizaine  de  mètres.  A  l'extrémité 
sud  de  ce  plateau,  sur  un  massif  en  forme  de  cône  tronqué  de  même 
hauteur  que  l'escarpement  et  qui  lui  sert  de  base,  s'élève  une  tour 
cylindrique  haute  elle-même  de  vingt-deux  mètres  ;  le  diamètre  à  la 
base  est  aussi  de  vingt-deux  mètres,  dans  la  partie  cylindrique  de 
dix-sept  mètres  soixante  centimètres.  C'est  assurément  l'une  des 
plus  grosses  tours  que  nous  possédions  encore  dans  nos  provinces 
du  centre.  Le  tout  est  en  pierres  de  granit  taille,  sauf  dans  la  partie 
inférieure  où  le  moellon  a  été  aussi  employé  dans  la  maçonnerie. 
Ça  et  là  les  hautes  murailles  sont  percées  de  quelques  lucarnes  ou 
fenêtres  étroites  dont  deux  sont  munies  de  meneaux,  mais  sans  mou- 
lures et  sans  ornements. 

Du  côté  du  plateau,  à  trois  mètres  environ  au-dessus  du  niveau  du 
sol  de  celui-ci  se  trouve  Tunique  porte  qui  donne  accès  dans  la  tour; 
on  y  arrivait  autrefois  au  moyen  d'un  pont-levis  venant  retomber  sur 
une  sorte  de  terrasse  qui  communiquait  elle-même  avec  le  sol  par 
un  escalier  et  dont  les  débris  se  voient  encore  à  une  petite  dis- 
tance de  la  tour;  actuellement  c'est  à  l'aide  d'une  échelle  prêtée  par 
un  obligeant  voisin  que  nous  devons  faire  l'ascension  de  la  porte. 
Lorsque  celle-ci  a  été  franchie  on  pénètre  dans  un  couloir  long  de 
quatre  mètres,  sur  lequel  donnent  à  gauche  un  escalier  descendant 
dans  les  soubassements,  à  droite  un  autre  escalier  en  spirale  qui 
meneaux  étages  supérieurs.  En  face  le  couloir  débouche  directe- 
ment dans  une  belle  salle  de  forme  hexagonale  de  sept  mètres 
d'élévation  et  de  neuf  dans  tous  les  antres  sens;  dans  les 
[»ans  de  l'hexagone  se  trouvent  réparties  deux  fenêtres  aux  pro- 
fondes embrasures,  une  cheminée,  divers  cabinets  ou  réduits;  la 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      401 

voûte  dont  les  filets  retombent  aux  angles  sur  des  consoles  d'un 
style  très  simple,  est  fort  bien  conservée  ;  mais  par  contre  le  plan- 
cher de  la  pièce  est  à  peu  près  en  entier  effondré  et  laisse  aperce- 
voir le  soubassement  qui  servait  de  cachot  et  dont  robscurilé 
régnante  rend  assez  difficile  l'examen.  Les  salles  supérieures,  au 
nombre  de  deux,  reproduisent  d'une  manière  assez  exacte  les  dis- 
positions de  la  première,  avec  un  peu  moins  de  hauteur;  l'escalier 
que  nous  avons  suivi  jusqu^à  celle  du  dernier  étage  permettait 
encore,  il  y  a  peu  d'années,  de  monter  jusqu'au  sommet  du  donjon 
sans  risque  d'accident;  M.  de  Beaufort  qui  le  visita,  il  y  a  quelque 
trente  ans,  décrit  la  plate-forme  qui  était  munie  d'un  parapet  et 
ornée  de  quatre  grandes  gargouilles  faisant  saillie  et  la  toiture 
consistant  alors  en  une  charpente  à  six  pans  surmontée  d'un  lan- 
ternon  (1);  à  cette  heure,  rien  de  tout  cela  ne  subsiste.  Les  ravages 
du  temps  se  sont  fait  sentir  sur  le  malheureux  donjon  avec  une 
rapidité  et  une  violence  inquiétantes  pour  l'avenir,  bien  qu'une 
société  d'amateurs  dévoués  en  ait  fait  l'acquisition  pour  conjurer 
les  effets  d'une  ruine  toujours  croissante;  on  peut  se  faire  une 
idée  de  la  marche  de  la  dévastation,  en  voyant  l'énorme  quantité  de 
gravats,  de  poussière  et  de  débris,  arrachés  sans  cesse  aux  maçon- 
neries du  dessus  et  qui  encombrent  l'escalier  du  faîte  jusqu'au  bas. 

Dans  son  mémoire,  M.  de  Beaufort  parle  aussi  de  deux  construc- 
tions qui  existaient  encore  lors  de  son  passage,  sur  la  gauche  et  au 
fond  du  plateau  ;  ces  constructions  ont  presque  entièrement  dis- 
paru. 

La  grande  tour  ou  donjon  qui  menace  ruine,  avec  quelques  débris 
assez  informes  sur  le  côté  gauche,  voilà  donc  tout  ce  qui  reste  de  ce 
qui  fut  le  siège  de  l'importante  vicomte  de  Bridiers. 

M.  Albert  Mazet,  architecte  à  Paris,  a  essayé  après  M.  de  Beau- 
fort  de  reconstituer  l'ancien  château  ;  il  a  publié  dans  la  revue  qui 
porte  pour  titre  :  l'ilmt  des  monuments,  une  notice  avec  un  plan  dans 
lequel  il  nous  représente  une  enceinte  pentagonale  suivant  les 
arêtes  du  plateau,  longue  de  trente-cinq  mètres,  large  d'une  tren- 
taine, fortifiée  aux  angles  de  quatre  tours,  en  sus  de  la  grosse  tour 
qui  servait  de  donjon  ;  la  porte  d'entrée  était  à  la  gauche  dé  ce  der- 
nier ;  on  en  voit  encore  les  traces  ;  les  constructions  signalées  par 
M.  (le  Beaufort  devaient  s'appuyer  aux  murs  d'enceinte  et  pouvaient 
être  des  corps  de  logis  pour  la  garnison,  ainsi  qu'on  en  trouve 

(f]  Toir  les  Recherches  archéologiques  6c  M.  de  Beauforl  dans  le  volume 
précité  de  la  Société  des  antiquaires  de  V Ouest,  pages  140  et  s.  L'auteur 
a  donné  à  la  suite  de  ce  volume  (planche  i)  un  plan  du  château  restitué  et 
une  coupe  verticale  du  donjon. 


401  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIR. 

d'autres  exemples  dans  les  forteresses  de  cette  nature.  Ce  plan 
que  nous  reproduisons  ici  grâce  à  l'obligeance  de  Tauteur  et  de 
l'éditeur  de  la  Retme,  est  accompagné  d'une  vue  cavalière,  des- 
sinée aus3i  par  M.  Mazet,  et  qui  doit  donner,  nous  semble-t-il,  une 
impression  assez  exacte  de  l'ensemble  du  château  (1). 

Cet  ensemble  n'avait  rien  d'exagéré  pour  une  seigneurie  de  l'im- 
portance de  celle  de  Bridiers. 


HISTORIQUE. 

Au  X®  siècle,  constate  M.  Leroux,  la  vicomte  de  ce  nom  était  déjà 
un  des  huit  fiefs  principaux  du  Limousin,  sous  la  suzeraineté  du  duc 
d'Aquitaine,  comte  du  Poitou  et  Limousin  (2)  ;  au  début  du  siècle 
suivant,  ce  fiet  devait  appartenir  à  Gérald  de  Crozant,  le  bien- 
faiteur des  moines  de  Saint-Martial  de  Limoges,  car  dans  la  dona- 
tion faite  à  cette  abbaye,  dont  il  a  été  déjà  parlé  plus  haut,  le  dona- 
teur est  qualifié  seigneur  de  Bridiers  (3). 

L'historique  et  la  généalogie  de  la  famille  sont  du  reste  assez  mal 
connues  et  présentent  plus  que  des  lacunes  ;  la  liste  que  Ton  a 
cherché  à  dresser  des  premiers  vicomtes  ne  compte  guère  que  trois 
à  quatre  noms,  après  lesquels  règne  un  très  grand  intervalle  lais- 
sant place  seulement  à  quelques  probabilités  ;  on  constate  cependant 
qu'en  1177  Bridiers  fut  pris  par  Henri  II,  roi  d'Angleterre,  sur  Hu- 
gues de  Lusignan,  comte  de  la  Marche,  et  par  lui  donné  à  Faucon  et 
Bernard,  vicomte  de  Brosses;  c'est  ainsi  sans  doute  que  la  vicomte 
passa  aux  mains  de  la  famille  de  Brosses,  qui  paraît  Tavoir  con- 


(<)  VAml  des  monuments  et  des  arts,  revue  périodique.  Année  1891, 
Ô"  année,  n^  24.  Le  Château  de  Bridiers^  par  M.  Albert  Mazet^  avec  un 
plan  et  un  dessin  de  reconstitution  par  Tauleur.  On  peut  rapprocher  ce 
plan  de  celui  dressé  par  M.  de  Beaufort  avec  lequel  il  a  du  reste  une  assez 
grande  similitude. 

(2)  Géographie  et  histoire  du  Limousin  par  M.  Alfred  Leroux,  archi- 
viste de  la  Haute-Vienne,  pages  31  et  suivantes. 

(3)  M.  de  Beaufort,  dans  son  article  sur  Bridiers,  place  cette  donation  en 
Tannée  1015,  tandis  que  dans  sa  notice  sur  Téglisc  de  La  Souterraine  il  la 
fait  remonter,  diaprés  M.  Fesneau  sans  doute,  à  997.  Il  y  a  là  une  inadver- 
tance dont  ne  s'est  point  aperçu  probablement  Thonorable  archéologue  et 
qui  ne  saurait  s* expliquer  par  ce  fait  que  Berald,  fils  de  Gérald  et  son  suc- 
cesseur, ayant  repris  h  cilla  Sosteranea,  en  fit  plus  tard  de  nouveau  dona- 
tion ou  restitution  à  l'abbaye,  car  M.  de  Beaufort  qui  relate  la  mort  de 
Gérald  en  1092,  parle  lui  aussi  de  la  restitution  faite  par  son  fils  en  lui  assi- 
gnant une  date  postérieure. 


EXCURSION  ARCRéOLOGIQUB  A.  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.     403 

servée  assez  longtemps,  peat-étre  jusqu'à  la  lin  du  xv*  siècle  ;  par  le 
même  fait  et  en  môme  temps  elle  passait  au  Poitou  pour  revenir 
peut-être  plus  tard  à  la  Marche,  à  ce  que  présument  du  moins  quel- 
ques historiens.  Au  xvur  siècle  en  tout  cas,  cette  vicomte  constituait 
une  des  enclaves  poitevines  avec  une  superficie  de  102,000  *.  hec- 
tares (1). 

Il  paraît  aussi  résulter  de  ces  faits  avec  assez  de  vraisemblance 
que  la  famille  des  vicomtes  de  Bridiers,  premiers  du  nom,  avait 
disparu  d'assez  bonne  heure  (2)  ;  on  a  vu  plus  haut  que  les  de 
Brosses  seraient  devenus  propriétaires  du  fief  avant  même  la  fin  du 
XII"  siècle  et  qu1ls  le  conservèrent  jusqu'à  la  fin  du  xv;  après  eux, 
celui-ci  appartint  successivement  à  Philiberte  de  Savoye,  duchesse 
de  Nemours  (1524),  à  Jean  de  La  Barre,  chevalier,  comte  d*Etampes 
et  seigneur  d'autres  lieux,  conseiller  et  chambellan  du  roi,  premier 
gentilhomme  de  la  chambre,  gouverneur,  prévôt  et  bailly  de  Paris 
(1528-1531);  à  Denise  de  La  Barre,  femme  de  Jean  de  Touteville 
(1559);  à  Claude  de  Linières,  dame  du  dit  lieu  et  de  Clam,  vicom- 
tesse pour  les  trois  quarts  de  la  dite  vicomte  et  à  Paul  de  Couhet, 
seigneur  de  La  Roche  (1598)  ;  à  Marguerite  d'Aubray  (1623).  Il  passa 

(I)  V   Géographie  de  M.  A.  Leroux,  plus  haut  citée,  pages  35  cl  40. 

(2}  On  retrouve  cependant  aux  siècles  suivants,  même  après  le  xv%  lo  nom 
de  Bridiers  porté  par  deux  familles,  celle  des  Bridiers-Garlempe  fixée 
depuis  longtemps  en  Provence  et  celle  des  Bridiers-Nouzerine  ou  Nou- 
senn  qui  fournit  plusieurs  chevaliers  ou  commandeurs  à  Tordre  de  Malte. 

Ces  deux  familles  se  rattachaient  sans  doute  à  celle  de  Bridiers,  dont  la 
branohe  aînée  était  probablement  éteinte. 

Voici  cependant  ce  que  nous  lisons  dans  un  article  de  M.  Napoléon 
Bonaparte  Wyse  sur  le  donjon  de  Chamborant,  publié  dans  les  Mémoires 
de  la  Société  des  Sciences  de  la  Creuse  {\'oL  III,  page  233  et  la  note)  :  a  La 
vicomte  de  Bridiers,  une  des  quatre  vicomtes  du  comté  de  Poitou,  étendait 
sa  juridiction  sur  quatre   baronnies   dont  Chamborant  était  la  première. 

»  Après  la  première  croisade,  un  chevalier  de  Bridiers  resta  en  Provence 
avec  le  nom  de  Bridiers-la-Gartempe,  il  portait:  d'azur,  un  losange  d'ar- 
gent au  centre  de  Vécu  et  trois  étoiles  ^or,  deux  en  chef  et  une  en  pointe, 

M  Bridiers-Nouzerine,  resté  au  donjon  de  Bridiers,  portait  :  d^orà  la  bande 
de  gueules.  Une  vicomtesse  de  Bridiers  a  été  reine  d'Espagne.  Les  com- 
commandeurs  Hathelin  et  Jean  de  Bridiers  furent  blessés  au  siège  de 
Kliodes  en  1480.  La  terre  de  Bridiers  a  successivement  paisé  dans  les  mai- 
sons de  Rochecbouard,  Mortemart,  Montaigul,  Naillac-Ccssac,  de  Brosses,  etc. 
La  tour  fut  livrée  par  un  traître  en  1356  aux  Anglais  ;  il  reçut  plus  tard  le 
cbàliment  qu'il  méritait,  on  voit  encore  des  restes  du  tableau  rappe- 
lant son  supplice,  au  mur  encore  debout  de  la  salle  de  justice  (petite  tour 
dclT.st)». 

Beaucoup  de  ces  assertions  demanderaient  examen. 


404  (société  archéologique  rt  historique  du  limousin. 

ensuite  aux  mains  des  Pot  de  Rhodes  (de  1658  à  1720);  en  Tannée 
même  1655,  Henry  Pot  de  Rhodes  fit  reconstruire  toute  la  partie 
haute  de  la  grande  tour  qui  était  en  mauvais  état  (1).  Âpres  eus  la 
terre  appartint  aux  Mesgrigny,  puis  aux  Bouthillier,  comtes  de 
Beaujeu,  qui  la  vendirent  en  1756  à  dame  Henrielle  de  Ija  Roche, 
veuve  de  Jacques  Boucher,  trésorier  des  colonies  françaises  en 
Amérique;  cette  dernière  la  transmit  à  sa  fille  mariée  à  Louis- 
François-Marie-Honorine  de  Rochechouard-Pontville,  condamné  à 
mort  par  le  tribunal  révolutionnaire  de  Paris.  En  1820,  madame  de 
Montagu-Lomagne,  né  de  Rochechouard-Pontville,  qui  en  avait 
hérité  de  sa  mère,  en  fit  donation  à  M.  le  comte  de  Hontagu- 
Lomagne,  son  fils,  qui  aliéna  les  terres  par  parcelles  et  vendit  la 
tour  à  la  société  d*amateurs  que  nous  avons  déjà  mentionnée  {i). 

On  remarque  en  définitive  que  les  propriétaires  de  Bridiers  onl 
été  pour  la  plupart  d'assez  grands  personnages  ;  dans  le  nombre 
figurent  sous  Tancien  régime  un  grand-maître,  un  chambellan  et  plu- 
sieurs gentilshommes  de  la  Chambre  du  roi  ;  et  parmi  leurs  alliances 
on  relève  les  noms  des  Foucauld  de  Saint-Germain,  Barlhon  de 
Montbas,  Pot  de  Rhodes,  de  Ligondès,  de  la  Celle,  de  Chamborand 
et  d'autres  familles  non  moins  connues. 

Rappelons  enfin  que  Bridiers  fut  le  siège  d'un  baillage  qui  rele- 
vait de  Montmorillon  (3). 


(1)  Voir  aux  annexes  le  marché  d'ouvrage  qui  fut  passé  à  celte  occa- 
sion entre  le  seigneur  et  un  maître  maçon.  La  famille  Pot  de  Rhodes  était, 
on  le  sait,  Tune  des  plus  anciennes  et  des  plus  illustres  de  la  province. 
Henri  Pol  de  Rhodes  dont  ii-esl  question  au  lexle  était,  comme  ses  ancê- 
tres, du  reste,  grand  maître  des  cérémonies  de  la  cour.  Saint  Simon  en  a 
laissé  un  portrait  très  sympalhiquc.  11  mourut  en  1699.  (Voir  Histoire  de 
Saint-Germain  Beaupré,  par  l'abbé  Ratier,  page  <37). 

(2)  M.  Albert  Mazet  a  publié  dans  la  notice  précitée  une  généalogie  des 
seigneurs  de  Bridiers,  qui  paraît  assez  complète  à  partir  de  la  fin  du 
XV®  siècle,  avec  des  indications  que  nous  n'avons  fait  que  résumer  et  qui 
doivent  avoir  été  puisées  à  des  sources  plus  sûres  que  les  renseignements 
déjà  donnés  par  M.  de  Reauforl  ;  M.  Mazet,  lui-même,  au  surplus,  a  tenu 
celle  liste  cl  ces  indications  de  ThoiiorableM.  Montaudon,  notaire  à  La  Sou- 
terraine, qui  possède  parmi  ses  minutes  des  titres  fort  intéressants  au 
point  de  vue  des  origines  de  propriété. 

(3)  Voir  notamment  un  article  de  M.  Louis  Guibert  sur  les  Enclaoee 
Poitevines  du  diocèse  de  Limoges^  dans  VAlmanach  Limousin  pour  18d6, 
page  86.  L'auteur  y  détermine  le  périmètre  que  formait  une  de  ces  impor- 
tantes enclaves  du  côté  du  Nord-Ouest  de  la  Creuse  actuelle;  elle  com- 
prenait Azérables,  Vareille,  partie  de  Saint-Aignant-dc-Versillat  et  de  Saint- 
Elienne-de-Fursac,  Nolh,Saint-Priesl-la-Feuille,  Saint-Maurice  et  quelques 


LA  bOU  1  LRRAINE.  —  Porte  Noire-Dame  ou  de  la  Prison. 


Plan  inédit  Ju  château  Je  BrUiers,  dessin  d'Alben  Mazet. 


EXCURSION  ARCHEOLOGIQUE  A  LA  SOITERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      i05 

III 

BREITH. 
Les  tumulus.  —  La  ville  gallo-romaine. 

Breith,  Bridiers,  La  Soulerraine  représentent  trois  époques  suc- 
cessives, trois  étapes  bien  distinctes  de  la  marche  de  la  civilisation 
dans  une  contrée  dont  le  rayon  ne  dépasse  guères  deux  kilomètres; 
le  lien  le  plus  intime  unit  évidemment  les  trois  localités;  La  Sou- 
terraine a  dû  naître  de  Bridiers,  comme  Breith  a  dû  être  la  pre- 
mière origine  de  Bridiers.  Il  est  remarquable  en  outre  que  le 
déplacement  des  populations  s'est  produit  là,  comme  presque 
partout  ailleurs,  dans  le  sens  de  Toccident.  Est  ce  le  fait  du  hasard? 
Est-ce  Teffet,  ainsi  que  le  dit  M.  Mazet  (1),  de  cette  impulsion  sin- 
gulière qui  depuis  le  commencement  du  monde  semble  pousser  les 
races  de  TEst  à  l'Ouest?  en  la  circonstance  on  ne  saurait  évidem- 
ment affirmer  la  réalité  de  celte  dernière  cause.  Pour  nous,  qui 
dans  le  cours  de  notre  excursion  devons  suivre  l'ordre  nécessité  par 
le  voyage  et  non  Tordre  chronologique,  nous  avançons  en  sens 
contraire,  c'est  à  dire  de  l'Ouest  à  l'Est,  et  du  moyen  âge  que  nous 
venons  de  quitter  avec  Bridiers,  nous  remontons  en  arrière  de  bien 
des  siècles  jusqu'aux  confins  de  l'ère  chrétienne. 

Des  ruines  du  château  à  l'emplacement  de  ce  qui  fut  Breith,  la 
dislance  n'est  pas  grande.  A  mi-chemin,  sur  la  route,  voici  le  village 
de  Bridiers  dans  lequel  on  a  cru  voir  un  ancien  faubourg,  le  seul  ves- 
tige encore  debout  de  l'antique  cité.  Rien  n'y  attire  l'attention,  si  ce 
n'est  peut-être  une  inscription  dont  la  pierre  forme  aujourd'hui  le 
linteau  d'une  ancienne  porte  murée  et  où  nous  avons  bien  de  la 
peine  à  déchiffrer  quelques  lettres.  Certains  érudits  l'on  lue  ainsi  : 

A  S  R  P  Q  I  R 

et  ont  ivdiimi: Augustoservatori  reipublicae  quœ  infnmid  ruebat{i). 

hameaux  autour  de  La  Souterraine.  «  La  tour  de  Bridiers,  dil-il,  était  au 
Poitou  et  le  baillage  dont  Bridiers  fut  longtemps  le  siège  relcvaii  de  Mont- 
morillon.  La  ville  de  La  Souterraine,  donn^^e  au  xi^  siècle  par  Gérald  de 
Crozant  à  Tabbaye  de  Saint- Martial,  devait  sans  doute  à  cette  mouvance 

d*étre  devenue  Limousine » 

(1)  M.  Mazet,  Notice  sur  Bridiers,  loco  eltato,  p.  24 
(â)  C*est  notamment  la  lecture  donnée  par  M.  de  Bcauforl. 
M.  Fcsneau  lisait  les  lettre  :  A  I  R  S  R  P  Q  qu'il  traduisait:  Augusto 
imperatori  romano  senatus  romanus  populusque, 

T.  XL.  26 


406  SOCIBTB  ARCHÉOLOGIQUE  ET   niSTORIQCK  DD  LlMOlISIiC. 

Celte  traduction  et  les  autres  qui  en  ont  été  données  sont  évidem- 
ment fantaisistes.  L'inscription  elle-même  parait  n'être  qa*un  faux 
à  M.  le  capitaine  Espérandieu,  Fauteur  des /n^onpftom  de  la  cité 
des  Lémovices  déjà  cité  par  nous  (Paris,  Thorin,  1891).  Il  est 
permis  en  tous  cas  de  la  considérer  comme  suspecte  (1). 

Un  peu  plus  loin,  presque  à  Tangle  intérieur  que  forment  en  se 
rejoignant  les  deux  routes  de  Dun  et  de  Guéret,  s'élèvent  deux 
tumulus  de  proportions  tout  à  fait  exceptionnelles;  Tun  d'eux  en 
effet  présente  une  circonférence  de  184  mètres  à  sa  base,  sa  hau- 
teur est  de  15  ou  16  mètres,  mais  elle  devait  être  plus  grande,  car  le 
sommet  paraît  en  avoir  été  beaucoup  aplani  et  présente  mainte- 
nant l'aspect  d'un  cône  tronqué  ;  le  second  de  ces  tumulus,  le  plus 
rapproché  de  la  route,  est  moins  vaste  dans  ses  dimensions,  mais 
il  a  dû  également  être  réduit  dans  son  élévation. 

J'ai  prononcé  le  mot  de  tumulus,  bien  que  l'origine  et  la  destina- 
tion de  ces  monuments  aient  été  assez  discutées  :  quelques  uns,  des 
militaires  particulièrement,  les  ont  considérés  comme  des  mottes 
d'observation  faisant  partie  de  tout  un  système  de  défense  ;  et  de 
fait,  si  l'on  raisonnait  de  leur  situation,  on  pourrait  être  tenté  tout 
d'abord  d'admettre  celte  manière  de  voir  ;  les  mamelons  occupent 
en  effet  le  centre  de  retranchements  de  forme  à  peu  près  circulaire, 
très  caractérisés,  et  qui  avec  leurs  fossés  et  leurs  levées  en  goise 
de  contre-escarpes,  constituent  assurément  un  des  camps  de  César 
les  plus  étendus  que  l'on  connaisse.  Mais  on  ne  comprend  guère 
de  pareils  travaux  aussi  élevés  pour  servir  de  points  d'observalion, 
alors  surtout  que  dans  les  environs  les  points  culminants  ne  fai- 
saient pas  défaut.  M.  deBeaufort  a  émis  l'avis,  encore  moins  accep- 
table semble-t-il,  que  ces  élévations  avaient  eu  probablement  pour 
destination  de  servir  de  bases  ou  de  plate-formes  aux  châteaux 
primitifs,  par  exemple  au  premier  château  de  Bridiers,  qui,  dans  la 
suite,  aurait  été  transporté  ou  plutôt  reconstruit  sur  les  lieux  on 
nous  en  avons  trouvé  les  ruines. 

(1)  Une  autre  inscriplion  aurait  été  découverte  en  1873  dans  le  cimetière 
de  Breilh,  si  Ton  en  croit  une  correspondance  échangée  dans  le  cours  de 
cette  année  entre  M.  Fesneau  et  M.  Egger,  en  môme  temps  quele  torse  d'une 
statue  en  pierre  blanche. 

Elle  serait  ainsi  figurée  en  deux  fragments 

a 


D  Y  ni  A  A  T  y 


b 

0  D  .  1  -  E 
/LERVN 
D  E-V 


M.  Espérandieu  n'entrevoit  pas  la  possibilité  d'une  restitution  :  on  ne 
saurait  môme  dire  si  les  lettres  proviennent  ou  non  d'un  même  texte. 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTiilRRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.     407 

Mais  il  est  plus  simple  et  plus  judicieux  d'admel^iPe  avec  la  grande 
majorité  des  archéologues,  que  ces  amas  de  terre  étaient  réellement 
des  sépultures.  Quand  on  examine  de  près,  comme  nous  avons  pu 
le  faire,  l'humus  qui  les  compose,  on  trouve  une  terre  très  friable 
d*un  ton  noirâtre  et  qui  rappelle  la  cendre.  Gomment  expliquer 
d'ailleurs  autrement  la  grande  quantité  d'urnes  funéraires  qui  y 
ont  été  découvertes  ?  des  anciennes  fouilles  non  encore  comblées, 
sortent  encore  sous  nos  yeux,  des  blocs  de  pierres  de  structure 
grossière,  mais  affectant  bien  la  forme  de  ces  urnes  de  façon  à  ce 
qu'on  ne  puisse  se  méprendre  sur  leur  caractère;  la  plupart  de  ces 
pierres  funéraires  ont  été  enlevées  depuis  longtemps  par  les  gens 
du  voisinage  et  parmi  elles  il  s'en  trouvait  d'un  travail  plus  délicat; 
de  plus  toutes  ces  urnes  contenaient  des  cendres  et  de  menus  objets 
en  métal;  le  doute  n'est  donc  pas  permis. 

Comme  dernier  détail  concernant  les  tumulus,  disons  que  dans 
ces  dernières  années  un  propriétaire  du  pays  a  construit,  sur  la 
plate-forme  du  plus  grand  des  deux,  une  maison  et  des  bâtiments 
agricoles,  entourés  de  cultures  diverses;  lui-même  nous  a  montré 
les  objets  qu'il  a  trouvés  en  creusant  les  fondations,  des  clous  et 
des  fers  à  cheval  en  quantité,  des  pièces  de  bois  singulièrement 
durcies  par  leur  séjour  en  terre,  quelques  monnaies  et  des  mor- 
ceaux de  métal  assez  délicatement  ouvragés. 

Les  tumulttë  et  ïoppidum  gaulois  qui  l'environne  marquent  en 
quelque  sorte  de  ce  côté  l'entrée  de  la  ville  gallo-romaine.  Nous 
sommes  déjà  sur  l'emplacement  de  celle-ci  et  nous  allons  en  par- 
courir l'étendue  dans  un  de  ses  sens  tout  au  moins.  Mais  si,  après 
après  avoir  lu  les  séduisantes  descriptions  que  quelques  amateurs 
en  ont  tracées  sous  le  coup  de  l'enthousiasme  suscité  par  leurs 
découvertes,  Ton  s'attendait  à  retrouver  de  véritables  ruines  ou 
môme  des  vestiges  assez  éloquents  de  la  grandeur  de  Breith,  on  . 
éprouverait  évidemmentune  grande  déception.  A  travers  ces  campa- 
gnes, où  nous  portent  nos  pas,  couvertes  en  ce  moment  de  l'année 
de  leurs  belles  moissons  bientôt  mûres,  parmi  ces  taillis,  ces  bois  de 
châtaigniers  touffus,  etces  vertes  prairies,  nous  suivons  d'étroits  che- 
mins bordés  de  buis  épais,  indices  certains  de  subslructions  ancien- 
nes, nous  rencontrons  ça-et-là  des  pierres  aux  arêtes  moussues,  mais 
qui  n'ont  pas  été  apportées  là  par  les  forces  de  la  nature  elle-même, 
nous  trouvons  des  débris  de  poteries,  des  fragments  de  briques  en 
grand  nombre;  un  champ  qui  domine  la  colline  el  que  l'on  nomme 
le  champ  du  théâtre^  est  littéralement  semé  de  ces  débris  ;  plus  loin 
sur  le  flanc  de  cette  colline  et  sur  un  espace  d'environ  cent  mètres 
à  découvert  s'alignent  deux  retranchements,  le  terme  est  il  exact? 
deux  murs  plutôt,  bâtis  en  pierres  de  petit  appareil  romain,  tous 


'i08  SÛCléTK   AilCHEOLOGIQUB   ET    HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

deux  de  faible  épaisseur,  parallèles  et  séparés  par  une  sorle  d'allée 
ou  de  couloir. 

Voilà  tout  ce  que  nous  révèle  la  vue  actuelle  des  lieux,  du  moins 
dans  la  partie,  non  la  moins  importante,  que  nous  avons  le  temps 
de  visiter!  (i)  des  fouilles  antérieures,  peu  ou  point  de  traces  :  les 
terres  ont  dû  être  remises  en  état  par  les  propriétaires.  Il  faut  donc 
que  l'imagination  vienne  quelque  peu  en  aide  à  notre  esprit  qui 
cherche  et  se  recueille,  pour  vivifier  de  nouveau  les  souvenirs  dis- 
parus, pour  évoquer  l'image  de  la  cité  qui  n'est  plus-  Celte  évo- 
cation du  rcsle  n'est  pas  un  mirage;  le  doute  ne  peut  être  permis. 
En  ces  lieux,  sur  une  surface  qui  n'était  peut-être  pas  de  quatre 
kilomètres  carrés,  comme  l'estimait  l'honorable  M.  Fesneau  (2), 
mais  qui  devait  être  cependant  assez  vaste,  s'élevaient  bien  vrai- 
ment des  constructions  considérables,  des  demeures  plus  ou  moins 
somptueuses,  des  rues,  des  temples,  des  théâtres  aussi  sans  doute, 
et  des  édifices  très  divers;  là  vivait  une  population  qu'animaient 
tous  les  instincts,  tous  les  soins  de  la  vie  humaine  et  sociale.  C'était 
bien  une  véritable  ville,  quoique  l'abbé  Texier  qui  n'avait  pu  assis- 
ter, croyons-nous,  qu'aux  résultats  des  premières  investigations, 
n'ait  voulu  y  reconnaître  qu'une  simple  villa. 

Les  témoignages  ne  manquent  pas  et  ils  offrent  les  plus  grandes 
garanties  de  certitude;  à  défaut  de  textes,  de  documents  écrits,  qu'on 
n'a  pas  trouvés  ou  qui  sont  bien  vagues,  la  pioche  des  ouvriers 
a  remué  ce  sol  un  peu  partout  depuis  quarante  ou  cinquante  ans 
et  a  mis  au  jour  de  toutes  parts  des  substructions  importantes,  des 
murs,  des  galeries,  des  citernes,  des  pavés  ou  des  mosaïques;  les 
archéologues,  les  chercheurs,  les  habitants  du  voisinage  y  ont 
recueilli  les  objets  les  plus  variés  et  souvent  précieux,  des 
vases,  des  urnes  funéraires,  beaucoup  de  fresques  représentant  des 
oiseaux  et  des  fleurs,  des  médailles  ou  des  monnaies  romaines  en 
quantité  énorme,  des  statues  même;  de  pareilles  trouvailles  repous- 
sent évidemment  l'hypothèse  d'une  simple  villa,  même  des  plus 
confortables  (3). 

(I)  Tierlaines  autres  parties  méritent  aussi  une  visite,  entr'autres  le  champ 
dit  des  Urnes,  qui  est  burdé  de  tous  côtés  par  des  urnes  funéraires,  en 
nombre  considérable,  trouvées  dans  le  terrain  même,  et  qu*on  a  réunies 
sur  ses  limites  en  guise  de  clôtures. 

(â)  Breith,  ville  peinte^  notice  de  M.  Fesneau,  publiée  dans  les  iV#émotre$ 
de  la  Société  des  sciences  de  la  Creuse^  tome  III.  —  A  consulter  aussi  le 
mémoire  de  M.  de  Beaufort,  dans  le  volume  précité  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  l'Ouest,  et  Tarticle  de  M.  Mazet,  sur  Bridiers,  aussi  indiqué  plus 
haut. 

(3)  Si  des  fouilles  assez  nombreuses  ont  été  faites  à  Breith,  il  ne  paraît  pas 


EXCURSION  ARCBÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  RT  DANS  SES  ENVIRONS.      409 

L'existence  d'une  cité  ne  paraît  donc  pas  contestable.  Mais  de  ses 
origines,  de  son  rôle  politique,  de  son  nom  même  et  de  la  signifi- 
cation de  ce  nom,  de  ses  destinées  et  de  sa  fin,  que  savons-nous? 
Autant  de  questions  qui  ont  déjà  fait  Tobjet  de  bien  des  contro- 
verses, de  problèmes  non  encore  résolus  et  sur  lesquels  planera 
toujours  le  mystère  des  temps  et  des  choses  non  connues  ! 

M.  de  Beauforl  a  tenté  de  démontrer  que  Breith,  Bré  ou  Breda, 
n'était  autre  que  la  fameuse  station  de  Prœtoriiim,  dont  fait  men- 
tion la  carte  de  Peutinger  et  dont  remplacement  exact  décourage 
encore  la  science  des  plus  érudits  ;  mais  la  situation  de  Breith  ne 
répond  guère  aux  indications  très  précises  de  la  carte. 

M.  Fesneau,  s'étayant  de  l'autorité  deProsper  Mérimée  qu'il  avait 
consulté,  dit-il,  au  sujet  de  l'étymologie  du  mot,  pense  que  Breith 
en  langue  celtique  signifie  Ville  peinte  et  que  ce  nom  lui  venait  des 
nombreuses  peintures,  des  fresques  notamment  qui  décoraient  les 
murailles  de  la  cité. 

La  même  incertitude  se  retrouve  pour  la  détermination  des  cau- 
ses qui  ont  pu  amener  la  destruction  ou  la  ruine  de  Breith  et  de  l'é- 
poque où  cette  ruine  a  dû  se  produire. 

D'après  un  vieil  écrivain,  Chàteaunières  de  Grenaille,  la  ville 
aurait  été  détruite  de  fond  en  comble  par  les  Anglais  pendant  leur 
domination  au  mojen  âge  (1).  Mais  un  pareil  événement  aurait 
laissé  quelques  traces  dans  nos  chroniques  de  l'époque. 

M.  de  Beaufort,  lui,  recule  la  date  de  la  destruction  à  l'année  410, 
lors  du  passage  des  Vandales,  qui  auraient  infligé  à  la  ville  le  trai- 
tement qu'ils  firent  subir  à  tant  d'autres. 

qu'elles  aient  iamais  été  entreprises  avec  une  méthode  raisonnéa  et  sur 
un  plan  «(«^oéral  d'ensemble;  la  faute  ne  peut  guère  en  être  imputée  aux 
explorateurs;  il  eut  fallu  sans  doute  des  travaux  considérables  et  forts 
coûteux»  analogues  par  exemple  à  ceux  qu'a  dirigés  le  Père  de  la  Croix 
à  Sanxay,  dans  le  Poitou,  à  faidc  de  ressources  collectives,  pour  se  rendre 
un  compte  un  ppu  exact  de  la  topographie  de  fancienne  cité  et  des  riches- 
ses qu'elle  peut  renfermer.  A  cette  heure  il  n'existe,  à  notre  connaissance, 
aucun  plan  qui  en  ait  é[6  relevé  et  il  nous  paraîtrait  difficile  qu'il  put  en 
élre  dressé  un  avec  les  éléments  épars,  trop  vagues  et  trop  superficiels  que 
Ton  possède. 

(1)  Cet  écrivain,  en  parlant  des  villes  remarquables  du  Limousin,  s'ex- 
prime ainsi  :  a  ...  Et  enfin,  les  vestiges,  si  aucuns  le  rocognoissenl,  ile 
la  ville  de  Bré  que  les  Anglais  rasèrent  et  enveloppèrent  au  profond  d'une 
étemelle  ruine.  » 

Chàteaunières,  qui  a  été  qualifié  plus  ou  moins  juslcmcnt  d'hisloricn  ou 
de  géographe,  était  Limousin,  originaire  d'Uzcrche.  Son  opinion  ne  semble 
pas  plausible. 


ifO  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

M.  Fesneau  adopte  une  date  intermédiaire  et  estime  que  Breith 
fut  prise  et  livrée  aux  flammes  par  Pépin  le  Bref,  vainqueur  de 
Waïfer. 

Nous  rappellerons  une  autre  opinion  fort  curieuse,  signalée  par 
M.  Tabbé  Artbellot  dans  son  élude  sur  Geoffroy  de  Vigeois,  et  qui  a 
sa  source  dans  la  Chronique  du  faux  Ttirpin;  d'après  un  passage 
de  cette  chronique  et  l'avis  même  du  célèbre  prieur  de  Vigeois,  la 
disparition  de  Breith  comme  cité  se  serait  produite  après  le  désas- 
tre des  armées  de  Charlemagne  à  Roncevaux,  à  la  suite  d'une  vé- 
ritable hécatombe  des  habitants  de  cette  cité  qui  auraient  péri  dans 
cette  funeste  défaite  (1). 

(4)  Voir  V Etude  sur  Geoffroy  de  VigeoLsy  par  M.  Tabbé  Arbellot,  publié 
dans  le  tome  XXXVI  (K^  livraison,  pag.  435  et  suiv.)  du  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  du  Limousin. 

Le  passage  auquel  nous  faisons  allusion  est  emprunté  au  chapitre  ix 
de  la  chronique  faussement  atlribuéc  à  Turpin.  Celui-ci  faisant  rénumé- 
ration des  plus  illustres  combattants  qui  se  trouvaient  dans  Tarmée  de 
Charlemagne  s'exprime  ainsi  :  «  Angélier,  duc  d^Aquitaine,  avec  quatre 
mille  combattants  ;  ils  étaient  instruits  à  manier  toutes  sortes  d'armes, 
surtout  les  arcs  et  les  flèches.  Cet  Angélier,  gascon  d'origine,  était  duc  de 
la  ville  d'Aquitaine,  laquelle  ville  était  située  entre  Limoges,  Bourges  cl 
Poitiers  ;  que  César-Auguste  établit  la  première  dans  ces  contrées  et  à 
laquelle  il  soumit  les  villes  de  Bourges,  de  Limoges,  de  Poitiers,  de  Sain- 
tes et  d'Angoulême  avec  leurs  provinces  respectives;  c'est  pourquoi  toute 
cette  contrée  fut  appelé  Aquitaine.  Or,  cette  cité,  après  la  mort  d'Angelier, 
étant  devenue  veuve  de  son  duc  [oiduata  duce  suo)  fut  totalement  dé- 
vastée, parce  que  tous  ses  citoyens  périrent  à  Roncevaux  par  le  glaive  et 
qu'à  partir  de  cette  époque  elle  n'eut  plus  d'autres  habitants  ». 

Quelle  était  cette  ville  d'Aquitaine,  d'importance  si  prépondérante,  et 
ainsi  caractérisée  dans  la  chronique  du  faux  Turpin?  Selon  Geoffroy  de 
Vigeois  lui-môme,  cette  ville  était  celle  de  Breith  dont  la  situation  répon- 
dait exactement  à  celle  indiquée  par  cette  chronique;  Geoffroy  rapporte 
que  lorsqu'il  fut  envoyé  à  La  Souterraine  par  l'ordre  de  l'illustre  abbé  Pierre 
(Pierre  V  del  Barry,  abbé  de  Saint-Martial  de  1163  à  H  74),  et  résidant  en 
celle  ville,  il  entendit  raconter  par  plusieurs  personnes  beaucoup  de  dé- 
tails sur  cette  ville  autrefois  fameuse,  placée  près  de  Bridiers  et  d'Esco- 
piac;  il  ajoute  que  ce  lieu  renfermait  presque  deux  camps  el  était  situé 
du  côté  du  soleil  levant. 

Et  cependant  le  bon  et  savant  prieur  manifeste  son  étonnement  de  ce 
que  dans  celle  histoire  il  soit  fait  mention  d'une  ville  qui  s'appelait  Aqui- 
tainCy  d'autant  que,  dit-il,  dans  les  actes  de  Saint  Martial,  docteur  des 
Aquitaines  ou  dans  les  annales  de  son  temps  on  n'en  trouve  la  citation 
nulle  part;  pareillement  dans  les  vies  de  Saint  Jusl,  de  Saint  Vaulry,  de 
Saint  Eloi,  de  Saint  Pardoux  qui  sont  nés  ou  ont  vécu  non  loin  de  cetlo 
ville,  on  n'en  cite  jamais  le  nom. 
il  nous  est  permis  de  partager  l'étonnement  de  Geoffroy  de  Vigeois  el 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.   4i  t 

Il  est  assez  diflTicile  de  raisonner  avec  des  conjectures  aussi  peu 
fondées  sur  des  textes  certains  ;  peut-être  serait-il  plus  naturel  et 
assez  judicieux  d'admettre  que  la  destruction  de  Breith  ne  fut  pas  le 
fait  d*uD  jour  ni  d'un  même  événemcnl  et  que  cette  destruction 
commencée  par  les  Vandales,  ne  devint  complète  et  définitive  que 
sous  les  règnes  de  Pépin  et  de  ses  successeurs. 

Quoiqu'il  en  soil,  que  la  ruine  soit  venue  un  peu  plus  ou  un  peu 
moins  tard,  qu'elle  ait  été  plus  ou  moins  précipitée  par  la  main  des 
hommes,  cette  ruine  est  bien  entière  depuis  déjà  des  siècles  (1).  Le 
temps  qui  vient  à  bout  de  toutes  choses  a  fait  là  son  œuvre  comme 
en  tant  d'autres  lieux  ou  la  vie  humaine  s'est  éteinte  après  avoir 
brillé  de  tout  son  éclat;  il  a  dans  sa  marche  patiente,  mais  iné- 
luctable, comblé  les  vallées,  les  galeries,  les  fossés,  aplani  les 
murs  et  les  sommets,  nivelé  et  recouvert  le  tout  de  cette  parure 
toujours  nouvelle  qui  est  celle  de  la  nature  même.  Cet  anéantisse* 
ment  des  œuvres  de  Thomme  est  arrivé  à  ce  point  qu'il  faut  un  jour 
que  de  véritables  pionniers  viennent  fouiller  jusque  dans  les  entrail- 
les du  sol  pour  y  retrouver  péniblement  quelques  souvenirs  de  ces 
œuvres!  Quant  à  nous,  simples  visiteurs  d'un  jour,  d'un  instant, 
devrais-je  dire,  nous  n'avons  même  pas  la  satisfaction  de  pouvoir  faire 
ce  qu'on  fait  avant  nous  ces  fortunés  travailleurs  ;  il  nous  faut  quitter 
les  champs  de  Breith  sans  avoir  pu  leur  arracher  un  de  leurs  secrets, 
avec  ce  regret  de  l'homme  qui  sait  fouler  un  trésor  sous  les  pieds 
et  qui  n'a  pas  le  temps  ou  le  moyen  d'y  atteindre. 

môme  d'exprimer  quelqaes  doutes  au  sujet  de  cette  ville  d'Aquitaine  et 
de  son  ideDtification  avec  «reilh.  Comment  expliquer,  en  effet,  Texistence 
d'une  ville  de  cette  importance,  dont  il  ne  soit  pas  fait  mention  dans  les 
actes  publics  ou  privés  de  l'époque,  et  dont  le  souvenir  se  soit  perdu  aussi 
vite  pour  les  générations  suivantes? 

En  ce  qui  concerne  Breith  même,  qu'elle  ait  été  cette  ville  d'Aquitaine  ou 
toute  autre,  il  paraît  également  assez  invraisemblable  que  le  désastre  de 
Roncevaux  et  le  massacre  de  ses  chevaliers  et  de  leurs  compagnons  aient 
pu  avoir  pour  conséquence  directe  la  ruine  et  la  disparition  même  de 
cette  cité,  si  aucune  autre  cause  n'est  venue  se  joindre  à  celle-ci.  Ne 
pourrait-on  pas  voir  dans  le  passage  de  la  chronique  une  image  un 
peu  hardie  de  Tauieur  s'appliquant  à  une  contrée,  celle  d'Aquitaine,  plu- 
tôt qu'à  une  seule  ville?  L'auteur  il  est  vrai,  emploie  le  mot  urbs  pour  la 
désigner;  plus  loin  il  se  sert  du  mot  :  cioltas.  Dans  tous  les  cas  l'explica- 
cation  ne  résout  pas  le  problème. 

(I)  L'absence  de  tous  vestiges  importants  et  extérieurs  permet  d'assi- 
gner à  la  destruction  de  Breith  une  date  très  reculée.  On  a  supposé  du 
reste  que  les  habitants  des  lieux  voisins  cl  notamment  ceux  de  La  Souter- 
raine ont  contribué  à  celle  destruction  par  les  emprunts  de  matériaux 
qu'ils  ont  du  y  faire  pour  bâtir  leurs  demeures  et  leur  ville  ;  la  supposition 
est  très  admissible. 


41â  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LlMOUSlff. 


IV 


DE  BREITH  A  SAINT-GERMAIN-BEAUPRE. 


En  laissant  Breith,  sans  revenir  sur  nos  pas  comme  l'exigerait 
l'ilinéraire  officiel,  et  sur  la  recommandation  de  nos  guides,  nous 
prenons  une  petite  roule  vicinale  qui  traverse  remplacement  de  la 
ville  morte  et  qui  doit  nous  conduire  à  Saint-Germain-Beaupré,  un 
peu  en  vertu  de  Taxiôme  que  tout  chemin  mène  à  Rome;  avons- 
nous  à  le  regretter? Non  certes,  à  mon  avis!  Si  la  route  est  plus 
longue  elle  est  aussi  des  plus  pittoresques  ;  étroite  et  sinueuse,  elle 
court  à  travers  champs,  longeant  de  belles  prairies,  enlaçant  de  son 
ruban  poudreux  les  collines  boisées,  suivant  les  ondulations  du  sol 
qui  sont  douces  dans  la  première  partie  du  voyage,  ouvrant  à 
chacun  de  ses  détours  une  de  ces  perspectives  variées  si  chères  à 
nos  yeux  limousins.  Pour  être  ami  des  choses  du  passé,  notre  cœur 
n'en  est  pas  moins  sensible  aux  charmes  de  la  création  toujours 
jeune,  toujours  vivante. 

Aux  environs  du  petit  village  de  Noth,  nous  côtoyons  à  plusieurs 
reprises  les  bords  du  bel  étang  de  la  grande  Casine  ;  sa  nappe  d'eau, 
qui  a  les  dimensions  et  la  limpidité  d'un  petit  lac,  baigne  les  con- 
tours harmonieux  du  riche  cadre  de  verdure  et  d'ombrages  qui 
l'enveloppe  et  brille  par  instants,  étincelante  sous  les  feux  du  soleil 
perçant  la  nue  entre  deux  averses  (1). 

Un  peu  plus  loin  le  sol  devient  très  accidenté;  la  route  descend 
des  pentes  rapides  en  faisant  de  brusques  lacets  ;  à  notre  droite  se 
creuse  une  vallée  dont  le  flanc  opposé  se  relève  en  un  versant 
abrupt,  hérissé  de  rocs  granitiques  d'une  teinte  sombre,  dernier 
anneau  d'un  de  ces  chaînons  secondaires  que  les  monts  de  la  Mar- 
che poussent  au  loin  et  dans  tous  les  sens  jusqu'à  la  région  où  nous 
sommes.  Dans  le  fond  de  la  vallée  coule  un  petit  ruisseau  qui  va 


(1)  L'étang  de  la  grande  Casine,  renommé  pour  Tabondance  du  poisson, 
faisait  autrefois  partie  des  terres  de  Rridiers  et  de  Rhodes.  M.  Montaudon, 
iiolaire  à  La  Souterraine,  possède  parmi  ses  minutes  un  contrat  du  9  fé- 
vrier 1775  relatif  à  la  vente  de  cet  étang  et  contenant  la  généalogie  des 
derniers  maîtres  de  Bridiers. 


Grosse  tour  de  Bridi 


EXCURSION  ARCHEOLOGIQUE  A  LA  SOUTBaRAlNC  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      413 

non  loin  de  là  mêler  ses  eaux  avec  celles  de  la  Sedellc,  que  celle-ci 
porte  ensuite  à  la  Creuse  au  pied  môme  du  site  grandiose  de  Cro- 
zanl.  Le  ruisseau  nous  accompagne  jusqu'à  Saint-Léger-Bridereix, 
autre  chef-lieu  de  commune  du  canton,  où  Theure  déjà  trop  avancée 
ne  nous  permet  pas  de  visiter  une  élégante  chapelle  du  xV  siècle 
accolée  à  Féglise  ni  le  dolmen  signalé  aux  alentours.  J'allais  oublier 
un  curieux  accident  de  paysage  entrevu  du  moins  en  passant;  ce 
sont  les  trois  moulins  superposés  de  Saint-Léger  que  la  même  chute 
d'eau  alimente,  formant  ainsi  une  cascade  non  moins  utile  qu'ori- 
ginale. 

Nous  quittons  près  de  là  notre  petite  route  pour  suivre  la  grande 
voie  qui  mène  à  Dun-le-Palleteau  et  prendre  bientôt  après  celle  qui 
relie  cette  dernière  localité  à  Saint-Germain.  Ce  n'est  point  sans 
une  certaine  inquiétude  que  nos  regards  interrogent  les  campagnes 
environnantes  d'où  aucun  château,  aucun  clocher  n'émerge  encore 
devant  nous.  Depuis  le  départ  cependant  bien  des  kilomètres  ont 
été  franchis;  mais  retenons  notre  impatience;  bien  joli  du  reste 
le  pays  qui  se  déroule  autour  de  nous,  joli  el  portant  aussi  toutes 
les  marques  de  la  fertilité  et  d'une  intelligente  culture;  ce  beau  do- 
maine que  nous  voyons  sur  la  droite  a  été  taillé  presque  en  entier 
dans  les  vastes  héritages  qui  dépendaient  jadis  de  la  vicomte.  El 
d'aulre  part,  si  nos  yeux  se  portent  à  l'Est  sur  l'horizon,  ils  jouis- 
sent d'une  vue  des  plus  étendues,  ils  embrassent  toute  la  contrée 
de  Dun  et  môme  au-delà  jusqu'aux  montagnes  des  trois  Cornes, 
derrières  lesquelles  se  cachent  Saint- Vaury  el  plus  loin  Guéret. 
Nous  touchons  d'ailleurs  au  terme  du  voyage;  c'est  au  galop  de 
nos  chevaux  que  nous  traversons  le  bourg  de  Saint-Germain  sans 
pouvoir  y  distinguer  autre  chose  que  le  clocher  bizarre  de  sa  petite 
église  el  quelques  instants  après  les  voitures  nous  déposent  à 
l'entrée  du  parc  duchâleau. 


41  i  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLÛGiaUB   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 


SAINT-GERMAES  -BEAUPRE 


et  ses  seigneurs  (1). 


Au  touriste  qui  Taborde  par  le  chemin  que  nous  venons  de  sui- 
vre, le  château  de  Saint-Germain-Beaupré  offre  tout  le  charme 
d'une  surprise;  assis  au  bas  de  la  déclivité  d'un  coteau  que  recou- 
vrent les  ombrages  touffus  de  son  beau  parc,  il  apparaît  tout  à 
coup  au  délour  d'une  allée,  à  travers  un  décor  luxuriant  de  ver- 
dure, dans  toute  l'ampleur  et  toute  la  majesté  de  ses  constructions, 
de  ses  tours  couronnées  de  dômes  aux  formes  étranges,  de  ses  ter- 
rasses, de  ses  larges  douves  encaissées  dans  leurs  quais  de  pierre, 
des  pièces  d'eau  qui  l'environnent  et  qui  semblent  encore  en  dé- 
fendre l'approche;  l'aspect  en  est  vraiment  saisissant;  ce  n'est 
point  l'effet  produit  sur  l'imagination  par  la  vue  d'une  de  ces  for- 
teresses féodales,  haut  situées  sur  leurs  sommets  escarpés  et 
dominant  tous  les  alentours  de  leurs  sombres  ruines  ;  ce.n'est  point 
Châlucet,  ni  Crozant,  ni  même  Bridiers!  L'impression  est  ici  tout 
autre;  par  elle,  l'esprit  ;se  sent  reporté  non  plus  au  moyen  âge, 
mais  vers  un  passé  moins  lointain  où  la  civilisation  plus  polie  sa- 
vait allier  déjà  aux  nécessités  d'une  défense  éventuelle  le  souci  du 
confort,  le  goût  du  beau  et  les  raffinements  d'une  vie  plus  luxueuse. 
Ne  semble-t-il  pas  que  l'on  va  voir  apparaître,  pour  compléter  ce 
cadre  somptueux,  toute  une  société  de  grands  seigneurs,  de  bril- 
lants cavaliers,  de  dames  empanachées,  tout  occupés  de  leurs  dis- 
tractions et  de  leurs  plaisirs?  Ce  n'est  là  qu'une  illusion  et  la  réa- 
lité d'ailleurs  ne  donne  pas  heu  de  la  trop  regretter  :  si  les  hôtes 

(I)  Une  observalion  sera  faite  sans  doulc  par  nos  lecteurs,  c'est  que 

nous  avons  donné  à  cette  dernière  partie  de  notre  élude  relative  à  Sainl- 

Germain-Beaupré  une  exiension  et  des  développements  peu  en  rapport 
avec  les  notices  qui  précèdent  sur  Breith,  Bridiers  et  La  Souterraine.  On 

voudra  bien  nous  pardonner  ce  qui  pourrait  être  assez  justement  qualifié 

un  défaut  de  proportionnalité;  noire  excuse  est  tout  entière  dans  Tinté- 

rét  très  saisissant  que  nous  a  paru  présenter  un  sujet  déjà  traité  par  quelques 

devanciers,  mais  pour  lequel  il  existe  encore  bien  des  lacunes  ci  des 

obscurités  qui  étaient  dignes  de  nouvelles  recherches  et  d'up  nouvel 

examen. 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.     415 

qui  nous  accueillent  à  Tarrivée  ne  portent  pas  le  pourpoint  et 
répée,  ce  sont  bien  les  plus  aimables  des  hôtes;  rien  ne  saurait 
égaler,  en  effet,  la  cordialité  de  cet  accueil  et  la  gracieuse  obli- 
geance avec  laquelle  MM.  Berthomier  père  et  fils,  les  propriétaires 
actuels  du  château,  nous  fout  les  honneurs  de  celui-ci.  Ils  savent 
prêter  à  noire  visite  déjà  si  attrayante  d'elle-même,  un  intérêt  tout 
particulier  grâce  à  leurs  explications  techniques  et  précises,  aux 
renseignements  historiques,  aux  détails  curieux  qu'ils  nous  four- 
nissent et  qui  témoignent  de  leur  connaissance  éclairée  des  lieux 
et  des  choses  qui  les  concernent.  Quels  meilleurs  guides,  du  reste, 
aurait-on  pu  souhaiter  que  les  habiles  reconstructeurs  de  Saint- 
Germain,  que  ceux-là  même  à  qui  Ton  doit  d'avoir  sauvé  le  château 
de  la  raine  complète  qui  allait  le  faire  disparaître! 

L'auteur  de  l'excursion  archéologique  dans  cette  partie  de  l'an- 
cienne Marche,  auquel  j'ai  déjà  fait  plusieurs  emprunts,  M.  E.  de 
Beaufort,  visitant  Saint-Germain-Beaupré  il  y  a  un  peu  plus  de 
trente  ans,  pouvait  écrire  ces  lignes  :«....  Hâtons-nous  de  recueil- 
lir, si  nous  voulons  avoir  quelque  chose  ;  hier  tout  le  monde  par- 
lait du  beau  château  de  Saint-Germain-Beaupré...  Aujourd'hui, 
quand  on  demande  le  château,  on  vous  répond  :  les  ruines  sont  au 
bas  du  coteau...  que  l'œuvre  de  destruction  est  rapide,  quand  tous 
les  efforts  concourent  pour  la  consommer!  »  (1). 

Si  M.  de  Beaufort  revenait  à  cette  heure,  quels  ne  seraient  pas 
son  élonnement  et  sa  satisfaction  de  retrouver  au  bas  du  coteau, 
non  plus  les  ruines  qu'il  y  avait  vues,  mais  un  bel  et  noble  édiflce! 

LE  CHATEAU  ACTUEL. 

Essaierai-je  ici  une  description  complète  et  détaillée  de  cet  édi- 
fice? Je  m'acquitterais  sans  doute  assez  mal  de  ce  soin,  surtoul 
après  la  description  technique  qu'un  homme  de  l'art,  M.  Albert 
Mazet,  en  a  tracée  dans  une  notice  encore  toute  récente  (2);  en 
renvoyant  le  lecteur  à  cette  notice  pleine  d'exactitude  et  de  préci- 
sion, il  doit  suffire  de  faire  connaître  l'aspect  général  et  les  traits 


{i)  Le  Château  de  Saint-Germaln-Beaupré,  par  M.  de  Beaufort,  Mé- 
moires  de  la  Société  des  antiquaires  de  V Ouest j  tome  XXVI,  année 
S  860-61,  page  184. 

(2)  Saint-Germain- Beaupré f  notice  publiée  par  H.  Albert  Mazet  dans 
la  revue  VAmi  des  monuments,  n^  17,  année  1890,  avec  un  plan  du  châ- 
teau restauré.  —  Grâce  à  Taimable  permission  de  Fauteur  et  de  Téditeur 
de  la  revue,  nous  avons  pu  reproduire  ce  plan  dans  notre  élude. 


416  SOCIÉTÉ  ARCUÈOLOGIQUR  ET  HISTORIOUK  DU  LIMOUSIN. 

les  plus  saillauls  que  présente  le  chàleau  actuel,  tel  qu'il  a  élé  res^ 
taure  par  M.  Bcrthomier. 

Aux  angles  d'un  terre-plein  qui  affecte  la  forme  d'un  pentagone 
irrégulier  et  qui  sert  d'assietle  au  château,  s'élèvent  des  côtés  de 
rOuest  etdu  Midi  trois  grosses  tours,  mesurant  chacune  Irente- 
huit  mètres  de  hauteur  jusqu'aux  toitures,  mais  d'un  diamètre  un 
peu  inégal  qui  peut  varier  de  huit  à  onze  mètres  ;  ces  tours  sont 
construites  en  moellon  taillé  et  sont  ornées  dans  le  haut  d'un  cor- 
don de  corbeaux  et  de  mâchicoulis  qui  sert  de  soutien  à  un  parapet 
en  briques  ajourées;  chacune  d'elle  est  surmontée  d'une  toiture  en 
dôme,  d'un  travail  remarquable  et  chacun  des  dômes  est  lui-même 
coiffé  d'un  lanternon  très  original;  le  tout  est  couvert  en  ardoises. 
Les  trois  tours,  qui  portent  les  noms  de  tours  de  la  Chapelle,  Mont- 
pensier  et  du  Midi,  en  allant  de  gauche  à  droite  à  l'arrivée,  sont 
reliées  entre  elles  par  des  corps  de  bâtiments  qui  n'ont  pas  tous 
les  mêmes  dimensions,  mais  qui  reproduisent  à  peu  près  le  même 
aspect  architectural  et  décoratif  que  celui  des  tours  (1^.  Le  bâti- 
ment du  fond,  le  principal  logis,  est  fort  élevé;  il  esl  éclairé  par  de 
larges  fenêtres  de  style  renaissance  et  couvert  d'un  haut  toit  en 
ardoises.  On  pénètre  dans  ce  logis  par  une  porte  assez  simple,  or- 
née toutefois  de  pilastres  et  d'un  fronton  en  ogive,  placée  tout  près 
de  l'angle  formé  par  les  bâtiments  faisant  retour  en  équerre;  dans 
ce  même  angle,  une  tourelle  forme  saillie  extérieure  et  renferme 
un  escalier  en  spirale. 

Le  surplus  du  terre-plein  est  occupé  par  la  cour  d'honneur;  à 
l'entrée  de  cette  cour,  du  côté  du  Sud-Ouest-Sud,  deux  autres 
tours,  qu'on  appelait  la  tour  Henri  IV  et  la  tour  du  Seigneur  ou  de 
Saint-Germain,  dont  il  ne  reste  plus  que  les  soubassements,  en- 
cadrent la  lête  d'un  pont  à  deux  arches,  muni  d'un  parapet  en  bri- 
ques et  à  jours,  qui  fait  communiquer  le  château  avec  le  parc  et 
Textérieur.  Tout  autour  de  cette  enceinte,  régnent  des  fossés 
profonds,  d'une  grande  largeur,  enfermés  dans  des  quais  en  pierre 
et  remplis  d'eau  vive;  ces  quais  soutiennent  au-dehors  des  terras- 
ses qui  forment  avec  les  allées  du  parc,  les  abords  des  étangs  etdes 
pièces  d'eau  et  les  prairies  adjacentes,  de  délicieuses  promenades. 

Si  la  physionomie  extérieure  du  château  est  très  séduisante, 
l'intérieur  ne  mérile  pas  moins  d'attirer  et  de  fixer  les  regards 
par  la  restauration  intelligente  et  fidèle  dont  il  a  été  aussi  l'objet 

(1)  Cependant  les  constructions  qui  avoisincnl  la  tour  du  Midi  et  qui  sont 
moins  élevées  que  les  autres  paraissent  avoir  été  édifiées  plutôt  on  vue 
des  nécessités  du  service  que  de  la  restauration  même  de  celte  partie  du 
château. 


EXCURSION  AUCBÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINS  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      417 

et  de  plus  par  les  souvenirs  ou  les  particularités  curieuses  qu'on 
y  relrouve  encore. 

La  porte  principale  décrite  plus  haut  donne  accès  dans  un  vesti- 
bule voûté  et  en  pierre,  comme  l'escalier  qui  lui  fait  face  et  dont 
les  clefs  de  voûte  sont  formées  de  deux  écussons  aux  armes  d'un 
des  seigneurs  de  Saint-Germain  et  d'une  maison  alliée  (1). 

Au  rez-de-chaussée  se  trouvent,  entre  autres  pièces,  deux  gran- 
des salles,  servant  Tune  de  salle  de  billard,  l'autre  de  salle  à  man- 
ger, toutes  deux  décorées  avec  beaucoup  de  goût;  dans  cette  der- 
nière on  remarque  surtout  deux  panneaux  du  xvir  siècle,  bien 
conservés,  représentant  le  premier  une  vue  d'ensemble  de  l'ancien 
château,  pris  du  côté  de  la  façade  occidentale,  l'autre  les  défenses 
du  nord  avec  pavillon  et  autres  annexes  (2). 

Au  premier  étage,  la  distribution  intérieure  reproduit  à  peu  près 
les  mêmes  dispositions  que  dans  le  bas  et  offre  aussi  à  notre  curio- 
sité deux  pièces  de  grandes  dimensions,  dont  une  est  ort^ée  d'une 
remarquable  cheminée  en  marbre  rouge,  reste  somptueux  de  la 
décoration  primitive  ;  cette  pièce,  qu'on  appelait  la  Chambre  de 
Cléopdtre,  parce  qu'elle  était  tendue  de  tapisseries  rappelant  l'his- 
toire de  cette  reine  fameuse  (3),  rappelle  aussi  d'autres  souvenirs  ; 

(I)  L'un  de  ces  écussons,  d'azur  aux  fleurs  de  lys  sana  nombre,  est 
celui  deGabrielFoucauldI»'  qui  épousa,  par  contrat  du  29  novembre  1533, 
Françoise  de  Villeluroc  el  dont  nous  parlerons  en  indiquant  la  généalogie 
des  Foucauld  de  Saint-Germain. 

Le  second  est  celoi  des  Vlllelume  :  d'azur  à  dix  besants  d*argent  posés 
4,  3,  2  et  1. 

Le  premier  de  ces  écussons,  celui  de  Gabriel,  se  trouve  aussi  dans  le 
parc,  près  Tangle  des  fossés  de  Touest  et  du  nord. 

Les  armes  de  Gabriel  Foucauld  et  de  sa  femme  (Gabriel  décédé  en  1559?), 
ne  pourraient-elles  pas  fournir  une  indication  utile  pour  la  date  de  la 
construction  ou  plutôt  d'une  des  reconstructions  du  château  auxvi^ siècle? 
Cest  là  une  question  que  nous  examinerons  plus  loin. 

(î)  Nous  avions  déjà  du  château  de  cette  époque  plusieurs  dessins, 
entre  antres  une  lithographie  insérée  dans  V Album  de  la  Creuse  de  Lan- 
glade  et  un  autre  dessin  donné  par  M.  de  Beaufort  dans  les  Mémoires  des 
Antiquaires  de  V Ouest  (tome  précité,  planche  III).  Mais  ces  deux  dessins 
sont  loin  de  présenter  le  môme  intérêt  que  les  deux  panneaux  dont  il 
s'agit  au  point  de  vue  artistique  comme  sans  doute  aussi  au  point  de  vue 
de  Fexactilude. 

(3)  M.Tabbé  Ratier,  dans  son  Histoire  du  château  de  Saint-Germain, 
a  donné  une  description  de  ces  tapisseries  qui  se  divisaient  en  six  tableaux 
ou  panneaux  représentant  des  événements  divers  de  Tcxistence  de  la 
reine  d'Egypte  et  qui,  en  très  mauvais  état, auraient  été  vendues  à  Paris  en 
1860  (voir  page  46Î).  x 


418  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   H1ST0R1QUB   DU   LIMOUSIN. 

c'est  elle,  en  effet,  qui  aurait  servi  d'appartement  à  W^*  de  Mont- 
pensier  pendant  son  séjour  au  château,  séjour  dont  la  légende  a 
fait  un  exil,  et  dont  nous  donnons  plus  loin  le  récit  exact. 

Cet  appartement  était,  à  ce  qu'on  assure,  et  Vassertion  est  vrai- 
semblable, très  richement  orné  ;  mais  les  tapisseries  et  le  mobilier 
ont  disparu  et  de  rornemenlation  ancienne  il  ne  subsiste  que  la 
cheminée. 

La  partie  de  Tédifice  comprenant  la  chambre  de  Giéopâlre,  la 
salle  à  manger,  avec  la  tour  Montpensier  qui  lui  est  adjacente  et 
quelques  annexes  et  attaches  de  constnictions  voisines,  voilà,  ou 
peu  s'en  faut,  ce  que  M.  Berthomier  père  avait  trouvé  encore 
debpul  au  moment  de  commencer  ses  travaux;  tout  le  reste  est  son 
œuvre,  œuvre  de  labeur,  de  difficultés  et  de  patience,  dans  laquelle 
il  s'est  attaché  à  reproduire  scrupuleusement  l'ancien  état  de  cho- 
ses, en  suivant  de  point  en  point  les  indications  que  lui  ont  four- 
nies les  fondations  et  les  vestiges  retrouvés  dans  les  fouilles,  les 
documents  écrits  ou  les  dessins,  tels  que  les  panneaux  dont  il  a  été 
parlé  plus  haut. 

l'ancien  CHATEAU. 

Cette  restauration  fidèle  permet  de  reconstituer  assez  facilement 
et  en  son  entier  le  château  qui  existait  antérieurement  et  qui  s'était 
conservé  du  reste  malgré  son  état  de  délabrement  jusque  dans  les 
premières  périodes  de  notre  siècle.  Ce  château  était,  comme  on  le 
sait  déjà,  beaucoup  plus  considérable  :  les  tours  Henri  IV  et  de 
Saint-Germain,  dont  on  ne  voit  à  présent  que  les  soubassements 
ou  étages  inférieurs,  se  dressaient  à  l'entrée  de  la  cour  dans  leur 
imposante  hauteur;  celte  entrée  était  la  môme  que  celle  de  nos 
jours,  à  cette  différence  près  que  le  pont  à  parapets  de  briques  ne 
joignait  pas  le  terre-plein  et  laissait  un  vide  sur  lequel  venait 
s'abaisser  un  pont-levis.  Les  cinq  tours  étaient  reliées  entre  elles 
par  des  corps  de  logis,  de  proportions  et  de  style  identiques  à  ceux 
du  grand  bâtiment  actuel  que  nous  avons  décrit.  Les  crêtes  des 
toitures,  les  lanternons  des  dômes  étaient  surmontées  de  girouettes 
et  de  hautes  flèches  fleurdelisées  et  dorées  qui  contribuaient  adon- 
ner à  l'ensemble  le  plus  noble  et  le  plus  brillant  aspect.  Entre  les 
bâtiments  se  trouvait  comme  enfermée  la  cour  d'honneur,  assez 
étroite,  un  peu  obscure  môme  à  cause  de  l'élévation  des  construc- 
tions (1);  aux  angles  intérieurs  de  cette  cour  se  trouvaient  des  lou- 

(')  Dans  cette  cour,  on  voyait  un  bassin  formé  d'un  énorme  bloc  de 
granit,  où  jaillissaii  une  fontaine  ;  ce  bassin  a  été  transporté  en  1861  dans 
un  jardin  de  La  Souterraine. 


EXGDBSION  ARCHÊOLOGIQUB  A  LA  SOUTERRAINE  ET  D>NS  SES  ENVIRONS        4t9 

relies  de  forme  ronde  contenant  les  escaliers  de  service.  Devant  la 
façade  de  VOuest  s'étendait  une  terrasse  avec  jeu  de  paume,  très 
nettement  indiqués  dans  le  panneau  n^  1  de  la  salle  à  manger.  Du 
côté  inverse,  celui  de  TEst  ou  du  Midi,  les  soubassements  encore 
intacts  à  cette  heure  et  qui  ne  sont  pas  une  des  moindres  curiosités 
du  château,  servaient  d'écuries  et  communiquaient  directement  avec 
Textérieur  par  un  pont  décoré  à  son  entrée  d*une  porte  construite 
en  pierres  et  en  briques  avec  niches  et  d'un  aspect  assez  monu- 
mental. 

En  dehors  des  fossés  formant  la  première  enceinte  se  trouvaient 
les  terrasses  garnies  par  devant  de  balustrades  de  pierre;  au-delà 
de  ces  terrasses,  d'autres  fossés  ou  canaux  et  des  étangs,  dont  un 
s'appelait  l'étang  carré,  formaient  une  seconde  ligne  de  défense; 
l'entrée  du  pont  était  protégée  par  un  corps  de  garde  accosté  d'une 
grande  tour.  Dans  le  parc,  on  trouvait  divers  pavillons  et  la  vaste 
orangerie,  encore  existante,  mais  qui,  hélas  I  des  deux  cents  oran- 
gers qui  la  garnissaient  jadis  et  faisaient  sa  renommée,  n'en  a 
conservé  que  trois  !  Ajoutons,  enfin,  que  ce  bel  ensemble  était  com- 
plété par  un  cadre  magnifique,  des  jardins,  des  bosquets  touffus 
et  la  belle  prairie  fort  étendue,  d'où  la  demeure  paraît  avoir  tiré 
son  nom(l). 

(I)  11  serait  peut-être  difBcile  de  reslituer  avec  une  précision  complète 
Fétat  primitif  de  Tenceinte  et  des  approches  du  château  ;  les  fossés  inté- 
rieurs, nous  dit  M.  Berlhomier,  n'ont  guère  subi  de  changements;  mais 
les  fossés  extérieurs  oni  été  remblayés  dans  la  partie  sud-ouest  qui 
s'éttndait  entre  la  terrasse  et  le  jardin  potager;  cette  terrasse  a  même  été 
abaissée  et  les  marches  ont  été  enlevées.  Ce  travail  dut  être  effectué  par 
M.  de  Villemolte,  Tun  des  prédécesseurs  du  propriétaire  actuel  ;  et  Ton 
rencontra  dans  le  sol,  au  cours  du  travail,  un  très  grand  nombre  de  cer- 
cueils. 

Le  pont  du  sud- est,  dit  des  Ecuyersy  qui  était  en  bois,  n'existe  plus, 
mais  le  portail  en  briques  qui  en  marquait  l'entrée  a  été  relevé  sur  la  ter- 
rasse du  même  côté. 

Il  ;  avait  encore  un  autre  pont,  au  nord-ouest,  reliant  le  parterre  au 
premier  étage  de  la  courtine  placée  entre  la  tour  de  la  chapelle  et  la  tour 
Henri  IV  ;  il  n'en  reste  plus  de  traces. 

Les  anciennes  écuries  situées  dans  les  sous-sols  et  le  cachots  qui  se 
trouvaient  sous  la  tour  Montpensier  et  sous  la  petite  salle  à  manger,  exis- 
tent encore;  les  soubassements  où  étaient  les  anciennes  écuries  sont 
d*une  ampleur  et  d'une  élévation  remarquables. 

Dans  le  tracé  du  parc  anglais  actuel,  on  a  respecté  plusieurs  allées 
droites  et  quelques  arbres,  marronniers  et  chênes,  vieux  témoins  du  jar- 
din à  la  française  ;  quant  aux  trois  marronniers  gigantesques  remarqués 
par  M.  de  Beaufort  et  dont  un  mesurait  quatre  mètres  trente  cenlimètrça 


•»'■>•■ 


430  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  BI8TOR10DE  DU  LIMOUSIN. 

A  quelle  époque  devons-nous  faire  remonter  la  construction  du 
château?  Si  elle  ne  peut  être  très  exactement  déterminée,  cette  épo- 
que du  moins  ne  saurait  être  reculée  au-delà  de  la  seconde  moitié 
du  XVI'  siècle  ou  du  commencement  du  siècle  suivant.  Sans  doute 
il  existait  bien  auparavant  et  depuis  fort  longtemps  déjà  un  château 
de  Saint-Germain-Beaupré  ;  ce  château,  dont  la  date  de  la  fonda- 
tion première  ne  nous  est  pas  connue,  avait  môme,  dû  être  l'objet 
de  plus  d'une  modification  ou  d'une  reconstruction,  car  au  xv*  siè- 
cle, pour  ne  pas  chercher  plus  avant,  il  avait  déjà  subi  plusieurs 
sièges,  dont  un  au  moins  parait  bien  avéré  (1);  les  traces  de  rema- 
niements multiples  et  successifs  retrouvés  par  M.  Berthomier  dans 
ses  fouilles  en  sont  des  preuves  assez  convaincantes. 

Mais  le  château  fut  repris  évidemment  dans  son  ensemble,  sur  un 
plan  et  sur  des  bases  nouvelles^  pendant  la  période  dont  nous 
venons  de  parler,  comme  certains  détails  de  style  suffisent  à  le  dé- 
montrer. Si  l'on  s'en  rapportait  uniquement  à  Tindicalion  fournie 
par  les  clefs  de  voûte  de  l'escalier  principal,  marquées  aux  armes 
de  Gabriel,  premier  du  nom  et  de  Françoise  de  Villelume,  sa 
femme,  qui  vivaient  avant  l'année  1560,  il  faudrait  attribuer  assez 
naturellement  au  seigneur  de  ce  nom  la  construction  dont  il  s*agiL 
Il  nous  semble  hors  de  doute  en  tous  cas  que  la  partie  de  l'édifice 
où  se  trouvent  compris  TescaUer  d'honneur  et  la  jolie  porte  d'en- 

dc  circonférence,  il  n'en  reste  plus  qu'un  seul,  placé  sur  la  droite  de 
l'allée  principale  en  allant  au  château  *,  les  autres  auraient  été  aballns  par 
la  foudre. 

On  a  beaucoup  parlé  aussi  de  galeries  souterraines  qui  partaient  du 
château  et  se  dirigeaient  en  divers  sens;  M.  IVibbé  Ratier  en  complaît 
quatre  principales  allant  aux  quatre  points  cardinaux.  Mais  ses  assertions 
reposent  surtout  sur  la  tradition.  Toutefois,  lors  de  la  création  du  parc 
moderne  par  M.  le  comte  d'Honorati  (1850-59),  on  découvrit  une  de  ces 
galeries  qui  devait  être  importante,  mais  que  les  eaux  ou  les  difficultés  du 
terrain  ne  permirent  guère  de  suivre  au-delà  des  fouilles. 

(1)  M.  Tabbé  Ratier  mentionne,  sans  les  préciser  du  reste,  deux  sièges 
qui  seraient  antérieurs  à  celui  fait  par  les  ligueurs  sous  Gaspard  Pou- 
cauld. 

Le  môme  auteur,  parlant  des  reconslruciions  du  château  aoléricures  au 
xvr  siècle,  prétend  que  la  première  fut  entreprise  sous  le  règne  de  saint 
Louis  par  Gui  Foucauld^  qui,  au  retour  des  croisades,  réédifia  complète- 
ment le  château,  en  lui  donnant  le  caractère  romano- byzantin  qu'il  a  tou- 
jours conservé  depuis...!  en  i407,  Marc Foucauld  fit  effectuer  une  nouvelle 
restauration  du  château,  en  lui  conservant  le  plan  et  la  forme  adoptés  par 
Gui. 

Mais  Tabbô  Ratier  ne  cite  aucun  document  à  l'appui  de  ses  affirmations, 
à  tous  égards  fort  hasardées. 


<• 


Plan  incJitdu  château  de  Saint-Germain-Bcaupré 
relevé  et  restiiuê  par  Albert  Mazet. 


mi 


Armes  de  Gabriel  1"  Foucauld 
et  Je  Françoise  de  ViUelume,  sa  femme. 


fekCURSION  ARCtlÉOLOGIQÙK  A   LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVP'ONS        42 1 

trée  dont  les  motifs  sont  d'inspiration  ogivale,  date  bien  de  cette 
époque  ;  cette  partie  est  en  effet  avec  les  cheminées  la  seule  qui 
présente  une  différence  marquée  avec  le  style  d'ensemble  du  reste 
de  cet  édifice.  Mais  pour  le  surplus,  Tœuvre  de  Gabriel  P%  si 
elle  avait  été  achevée  par  lui,  a  été  certainement  reprise,  restaurée 
et  peut-être  aussi  quelque  peu  modifiée  par  ses  successeurs,  à  la 
suite  des  destructions  tout  au  moins  partielles  que  subit  le  château 
après  sa  mort. 

En  1580,  tout  d'abord,  le  château  fut  assiégé  par  les  ligueurs  qui 
s'en  emparèrent  et  le  dévastèrent,  ce  dont  Gaspard  Foucauld  qui  en 
était  alors  le  maître  et  qui  appartenait  au  parti  protestant  se  vengea 
quelques  années  plus  tard  en  mettant  à  sac  Châteauponsac  et 
TArtige.  Celte  date  de  1580,  qui  n*a  pas  été  citée  par  Tabbé  Ratier 
dans  son  Histoire  de  Saint-Germain ,  ne  paraît  point  douteuse,  car 
elle  est  certifiée  en  quelque  sorte  par  une  lettre  d'Henri  IV,  alors 
roi  de  Navarre,  qui  se  plaint  au  duc  de  Montpensierde  la  dévasta- 
tion du  château  de  Saint-Germain-Beaupré  et  exprime  son  regret 
de  De  pouvoir  contribuer  à  son  relèvement  (1);  ce  relèvement  dut 
s'effectuer  cependant;  car  en  1605,  le  môme  prince,  devenu  roi  de 
France,  revenant  de  son  voyage  en  Limousin,  y  séjourna  avec  une 
nombreuse  suite.  Il  est  vraisemblable  que  ce  dernier  n'aurait  pas 
choisi  ce  lieu  pour  une  des  étapes  de  son  voyage,  si  le  seigneur  de 
Saint-Germain  n'eut  pas  été  en  état  de  l'y  recevoir. 

Quelques  années  plus  tard,  peu  de  temps  apparemment  après  la 
mort  du  roi  (2),  le  château  éprouva  de  nouvelles  vicissitudes  et  un 
sort  pour  le  moins  aussi  cruel.  En  l'absence  de  Gabriel  Foucauld, 
fils  de  Gaspard  et  deuxième  du  nom,  un  fils  du  gouverneur  de  Dun- 

(4)  Celte  leltre,  datée  du  i*^  novembre  1580,  a  été  relatée  dans  une 
notice  que  M.  Georges  Berthomicr  a  publiée  dans  le  Bulletin  XXXVHI  de 
la  Société  arch.  et  hist.  du  Limousin  (page  190). 

(9)  Il  est  fort  difficile  de  préciser  la  date  ;  M.  Tabbé  Ratier  qui  a  parlé  de 
ces  événements  d'après  les  extraits  de  la  correspondance  de  Gabriel  Fou- 
cauld et  de  sa  famille  {Histoire  du  Château  de  Saint-Germain,  page  70  et 
note)  ne  Fa  pas  indiquée  et  ne  pouvait  sans  doute  le  faire  à  défaut  de 
documents  certains;  plusieurs  passages  de  cette  correspondance  dénotent 
que  ce  nouveau  siège  de  Saint-Germain  est  bien  postérieur  au  passage 
d'Henri  IV,  et  d'autre  part  il  n'est  guère  admissible  que,  sous  les  dernières 
années  du  règne  de  ce  prince  qui  protégeait  les  Foucauld,  un  de  leurs 
ennemis  eut  risqué  une  pareille  entreprise.  Après  sa  mort  et  au  début  du 
règne  suivant,  les  troubles  qui  éclatèrent  en  beaucoup  de  lieux,  la  faiblesse 
du  gouvernement  d'alors  et  l'esprit  de  réaction  contre  la  royauté  devaient 
au  contraire  faciliter  cette  entreprise,  mais  la  date  exacte  reste  toujours  à 
déterminer. 

T.  XL.  VI 


Aîî  SOCIÉTÉ.  AIlCnéoLOGlQtJE    t.r  HiStOtilQCE  DU  LIMOUSIN. 

le-Palleteau,  d'Aumont,  héritier  de  vieilles  haines  de  famille,  ob- 
tint par  surprise  un  ordre  pour  mettre  garnison  dans  le  château 
de  Saint-Germain  qui  passait  pour  être  le  rendez-vous  des  hugue- 
nots ;  Gabriel  était,  disait-on  le  chef  de  ce  parti  et  était  accusé  de 
vouloir  formen ter  de  nouveaux  troubles.  Jeanne  Poussard  de  Fors, 
épouse  de  Gabriel,  refusa  de  recevoir  cette  garnison  ;  d'Aumont  vint 
accompagné  de  quatre-vingts  gentilshommes  mettre  le  siège  devant 
le  château,  le  canonna,  le  renversa  à  moitié  et  força  la  petite 
garnison  de  se  rendre  à  discrétion  avec  la  châtelaine.  Onajoute  que 
le  château  fut  pillé,  dévasté  et  démoli  jusqu'au  premier  cordon  (i). 

Gabriel^  après  ayoir  obtenu  justice  du  souverain,  fit  rebâtir  et 
embellir  sa  demeure  dont  quelques  parties,  notamment  le  rez-de- 
chaussée  du  bâtiment  intérieur  où  se  trouvaient  la  porte  et  Tes- 
calier  voûté,  avaient  dû  échapper  aux  boulets  etàla  ruine,  protégées 
qu'elles  étaient  par  les  tours  Montpensier,  du  Midi  et  du  Seigneur 
et  par  les  courtines  et  les  bastions  faisant  face  au  assiégeants. 

Gabriel  ne  borna  pas  ses  soins  à  cette  reconstruction  et  à  ces 
embellissements;  instruit  par  l'expérience,  il  augmenta  le  système 
de  défense  du  château  et  entoura  le  parc  d'une  muraille  de  6,000 
toises,  munie  de  créneaux,  de  meurtrières  et  de  portes,  qui  ne  fut 
achevée  qu'en  1651  et  dont  on  retrouve  encore  des  vestiges  (2). 

La  restauration  ainsi  entreprise  et  qui  en  dehors  même  des 
coupoles  et  des  lanternons  qui  surmontent  les  tours,  offre  bien 
les  traits  distinctifs  de  l'architecture  de  la  première  moitié  du 


(I]  Nous  reproduisons  &  peu  près  la  narration  de  ce  siège  faite  par  M.  de 
Beaufort  {loco  cUato)^  d'après  Touvrage  de  TabbéRatier,  en  y  faisant  quel- 
ques additions  et  rectifications. 

On  montre  dans  le  champ  dit  de  la  Faisanderie,  à  quelque  distance  du 
château,  du  côté  sud,  remplacement  encore  assez  visible  où  étaient  ins- 
tallées les  batteries  des  assiégeants. 

(t)  Les  dimensions  de  cette  enceinte  fortifiée  paraîtront  peut-être  très 
exagérées.  On  nous  assure  cependant  que  l'ancien  parc  circonscrit  par  la 
muraille  dont  il  est  parlé,  était  extrêmement  vaste  et  comprenait,  outre  le 
parc  actuel,  le  grand  pré,  la  faisanderie,  un  pacage  d'une  vingtaine  d'hec- 
tares, le  bois  de  La  Forge,  Tétang  du  moulin  Du  Bois,  une  partie  de  la 
forêt,  terre  de  la  maison  Breaud,  en  un  mot,  une  surface  correspondant  à 
retendue  indiquée  ;  on  retrouve  encore  en  effet  les  murs  existants  à  un 
mètre  du  sol,  et  qui  servent  de  clôture  pour  une  partie  du  domaine  et  à 
d'autres  propriétaires  voisins. 

Pendant  la  reconstruction,  Gabriel  s'était  retiré  àArgenton;  on  a  dans  sa 
correspondance  une  lettre  de  son  intendant  écrite  au  cours  de  ces  travaux, 
et  dans  laquelle  celui-ci  fait  allusion  aux  poursuites  alors  dirigées  contre 
d'Aumont  et  ses  complices. 


fcSCURSION  AttCHÉOLOGlOUe  A  LA  SOutCRRAlNE  Et  DANS  SES  ENVIRONS,      iââ 

xvii*  siècle,  ne  fut  évidemment  pas  Tœuvre  d'un  jour  (1);  elle  dût 
être  dans  tous  les  cas  complétée,  perfectionnée  par  ses  successeurs. 
L'orangerie  encore  intacte  trahit  par  son  style  et  par  la  forme  de  ses 
ouvertures  ou  lucarnes  une  époque  un  peu  postérieure;  les  jardins 
avaient  été  tracés  d'après  les  dessins  de  Le  Nôtre.  (C'est  en  1854  seu- 
lement qu'ils  ont  été  convertis  en  parc  anglais).  La  décoration  inté- 
rieure qui  était  des  plus  remarquables  et  dont  on  a  conservé  quel- 
ques vestiges,  portait  aussi  l'empreinte  manifeste  du  goût  et  des 
inspirations  du  règne  du  grand  roi.  Nous  avons  déjà  parlé  des 
meubles  et  des  tapisseries  qui  ornaient  la  chambre  dite  de  Cléopâtre. 
L'aile  nord  du  château  contenait  une  belle  collection  de  tableaux 
qui  était  composée  surtout  des  portraits  des  princes  et  de  grands 
personnages  de  ce  règne;  cette  galerie  dont  l'existence  était  un 
fait  fort  rare  dans  nos  contrée  et  mérite  à  ce  titre  d'être  signalée, 
se  trouvait  encore  à  Saint-Germain,  en  partie  du  moins,  il  y  a  moins 
de  cinquante  ans;  elle  disparut  avec  un  des  derniers  possesseurs 
du  château  (2). 

(1)  La  forme  des  coupoles  ou  des  dômes  des  tours  a  pu  faire  naître  dans 
quelques  esprits  des  réminiscences  du  style  oriental;  mais  on  ne  saurait 
admettre  avec  Tabbê  Rntier  que  ces  tours  aient  par  cela  môme  un  carac- 
tère byzantin  et  qu'il  faille  remonter  à  Gui  Foucauld,  au  moyen  âge,  pour 
retrouver  Torigine  de  ce  type  de  construction  qui  aurait  été  respecté  et 
conservé  dans  toutes  les  restaurations  postérieures,  môme  dans  celles  des 
XVI*  et  xvn«  siècles  ;  l'honorable  auteur  n'a  pas  réfléchi  que  la  forme  des 
toitures  ou  des  combles  de  cette  sorte  se  rencontre  très  communément 
dans  les  édifices  construits  au  cours  de  ces  deux  derniers  siècles. 

(3)  Cette  galerie  devait  être  importante,  si  nous  nous  en  rapportons  à 
divers  renseignements  et  aux  assertions  de  M«  l'abbé  Ralier,  ancien  curé 
de  la  paroisse  de  Saint-Germain;  d'après  ce  dernier,  elle  comprenait  les 
portraits  des  souverains  de  France  à  partir  d'Henri  IV,  ceux  des  mem- 
bres de  la  famille  royale,  de  princes  et  de  grands  personnages,  et  aussi 
les  portraits  des  seigneurs  de  Saint-Germain,  de  leurs  femmes  et  de  leurs 
alliés.  11  devait  aussi  y  avoir  quelques  tableaux  de  genre. 

M.  l'abbé  Ratier  dit  môme  que  M.  le  comte  de  VillemoUe,  qui  était  pro- 
priétaire du  château  après  4840,  avait  alors  en  sa  possession  un  magnifi- 
que portrait  de  Louis  XIV,  peint  par  Mignard,  la  collection  entière  de  per- 
sonnages de  la  cour  d'Henri  IV,  les  portraits  des  seigneurs  de  la  famille  de 
Foucauld,  de  châtelaines,  de  présidents  à  mortier  et  de  conseillers  du  roi 
alliés  à  cette  famille.  (V.  aussi  Histoire  de  la  Marche^  par  Joulirtton, 
tome  11,  page  145). 

M.  de  Villemotte,  en  vendant  le  château,  se  réserva  et  enleva  ces  ta- 
bleaux dont  une  partie  a  été  léguée  par  lui  dans  la  suite  à  la  ville  de  Blois 
pour  être  placés  dans  son  musée. 

Nous  donnons  aux  pièces  annexes  la  liste  des  portraits  et  tableaux  que 
possède  ce  musée,  grâce  à  l'obligeante  communication  qu'a  bien  voulu 
nous  faire  son  conservateur,  M.  Eugène  Gervais, 


4^4  âOClÉtB   ARCËéOLOGIQUE   Et  diSTOàlQUfc  bt*   LlMOOSlM. 

HISTORIQUE. 
LES  ORIGINES.   —   LES   PREMIERS  FOUGAULO. 

La  magnilicence  de  la  demeare  que  nous  venons  de  décrire  ré- 
pondait bien  à  l'ancienneté,  à  la  noblesse  ei  à  Timportance  de  ses 
maîtres,  les  Foucauld  de  Saint-Germain-Beaupré.  Peu  de  familles 
dans  nos  provinces  pouvaient,  comme  celle  des  Foucauld,  s'enor- 
gueillir d'une  lointaine  lignée  où  le  nom  s'était  toujours  perpétué 
de  mâle  en  mâle,  sans  interruption,  et  du  rôle  considérable,  sinon 
toujours  prépondérant,  qu'elle  avait  rempli  aux  époques  successives 
d^  notre  histoire.  ! 

Si  les  origines  de  cette  maison,  comme  celles  de  tant  d'autres, 
ne  peuvent  être  dégagées  facilement  des  ténèbres  ou  des  ombres 
qui  enveloppent  les  premiers  temps  de  la  féodalité,  du  moins  son 
existence  se  révèle-t-elle  avec  une  certitude  suffisante,  môme  avec 
quelque  relief,  malgré  les  divergences  ou  les  lacunes,  dès  une  épo- 
que très  reculée  du  moyen  âge. 

On  a  pu  supposer  que  le  château  de  Saint-Germain  avait  été 
fondé  vers  l'an  764  par  un  officier  de  Pepin-le-Bref,  appelé  Fuical- 
dus  qui  aurait  donné  son  nom  à  la  famille  des  Foucauld  ;  mais  ce 
n'est  là  qu'une  légende;  s'il  paraît  assez  vraisemblable  que  le  pre- 
mier de  nos  rois  Carlovingiens,  pendant  la  guerre  acharnée  qu'il 
poursuivit  contre  Waïfer  et  pour  mieux  assurer  sa  conquête, 
établit  des  postes  fortifiés  sur  le  territoire  de  l'Aquitaine  et  en  con- 
fiât la  garde  à  des  compagnons  d'armes  dévoués,  s'il  pdt  faire 
choix  de  Saint-Germain  pour  être  le  siège  d'un  de  ces  postes  on 
châteaux,  c'est  la  tout  au  plus  une  probabilité  qui  ne  saurait  suffire 
pour  déterminer  une  origine  (1). 

M.  l'abbé  Ratier  qui  a  eu  le  mérite  d'être  le  premier  historio- 
graphe de  la  famille  des  Foucauld  de  Saint-Germain,  —  nous  ne 

(1)  M.  Elie  de  Beauforl,  dans  sa  courte  nolice  sur  les  seigneurs  de  Sainl- 
Germain  (voir  son  ouvrage  précité),  fait  mention  de  cette  fondation  et 
ajoute,  d'après  Tahhé  Ratier,  que  vers  1065  Eymeri  de  Rochechouard 
en  serait  devenu  le  seigneur  par  son  mariage  avec  Tunique  héritière  des 
Foucauld  et  que  plus  tard,  vers  Tannée  1200,  la  terre  aurait  fait  l'apanage 
d'un  fils  du  baron  de  Rochechouard  qui  reprit  le  nom  de  Foucauld.  Nous 
ne  savons  à  quelles  sources  M.  de  Beaufort  a  pu  puiser  ces  renseigne- 
ments qui  nous  paraissent  des  plus  suspects,  mais  à  coup  sûr  ce  n'est  pas 
dans  Thistoire  de  Tabbé  Ratier,  qui  parle  de  la  fondation  de  764  à  titre  de 
simple  légende  et  ne  dit  rien  d'une  alliance  avec  les  Rochechouard. 


F.XCVRSiON  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTBRRAliN'E  ET   DAXS  SES  ENVIRONS.       i35 

disons  pas  le  premier  généalogiste,  car  avant  lui  les  généalogies  ne 
manquaient  pas  (1),  —  M.  Ratier  estime  que  les  Foucauld  étaient 
originaires  du  Périgord  et  descendaient  de  Gosselin,  fils  de  Guil- 
laume Fier-à-Bras  et  frère  de  Guillaume  V,  tous  deux  ducs  de 

{^)Le  Château  de  Saint-Germain- Beaupré, —  Les  Foucauld.  —  Généa- 
logie et  légendes,  par  M.  Tabbé  Ratier,  curé  de  Saint-Germain.  —  Li- 
moges, imprimerie  Henri  Ducourlieux,  1861. 

Parmi  les  principales  généalogies  et  sources  d'information  pouvan*. 
servir  à  ]*étude  de  l'histoire  de  Saint-Germain,  il  convient  dès  à  présent 
de  citer  : 

VHiêtoire  généalogique  et  chronologique  de  la  maison  de  France^  par 
le  père  Anselme,  tome  Vit,  maréchaux  de  France.  Voir  le  maréchal 
Foucauld. 

V  Armoriai  du  Périgord  et  la  généalogie  des  Foucauld,  par  Clabaud,  1765. 

Le  ProcèS'oerbaZ  de  V installation  de  Louis-Armand  Foucauld  en  la 
sénéchaussée  de  Guéret,  en  1718,  publié  par  la  Société  des  sciences  natu- 
relles et  archéologiques  de  la  Creuse,  tome  H,  page  31 2.  Ce  procès-verbal 
cite  Froissard,  du  Haillon,  Nicolle  Gille,  Fontenaillcs,  du  Vcrdicr  et 
Tarchevèque  du  Marca  comme  ayant  parlé  honorablement  de  celte  maison. 

Le  Nobiliaire  de  Nadand,  édité  par  M.  Tabbé  Lecler,  qui  fait  aussi  men- 
tion de  quelques  uns  de  ces  mêmes  chroniqueurs.  Malheureusement  la 
généalogie  donnée  par  le  Nobiliaire  est  fort  incomplète,  par  suite  de  la 
disparition  de  plusieurs  pages  du  manuscrit;  elle  a  été  complétée,  il  est 
vrai,  par  divers  fragments  extraits  d'autres  annalistes,  notamment  de  Cla- 
baud, tome  n,  pages  143  et  s.,  pages  183  et  s. 

V Armoriai  de  la  noblesse  du  Périgord^  par  A.  de  Froidefond,  publica- 
tion toute  récente.  —  Périgueux,  imprimerie  de  la  Dordogne,  1891. 

Et  divers  autres  ouvrages  ou  opuscules  que  nous  avons  déjà  cités  ou  que 
nous  indiquerons  encore  au  cours  de  ce  mémoire. 

Les  Anciens  registres  paroissiaux  qui  se  trouvent  à  la  mairie  du  bourg 
de  Saint-Germain-Beaupré,  peuvent  aussi  offrir  quelques  indications 
utiles.  On  y  rencontre  plusieurs  actes  relatifs  aux  baptêmes  ou  aux  décès 
de  membres  de  la  famille  des  Foucauld,  d'autres  où  ils  ont  figuré  comme 
parrains  ou  comme  témoins  et  revêtus  de  leurs  signatures  ;  malheureuse- 
ment ces  registres  à  peu  près  complets  pour  la  période  de  1700  à  179i, 
présentent  de  trop  grandes  lacunes  pour  le  xvii»  siècle  ;  le  plus  ancien  va 
de  1614  à  i6ii  et  le  suivant  commence  seulement  en  1668. 

Il  existait  avant  la  révolution  deux  ofiices  de  notaires  au  bourg  de  Saint- 
Germain- Beau  pré;  que  d'importants  et  précieux  documents  devaient  con- 
tenir les  minutes  de  ces  études  !  II  n'en  reste  rien  depuis  un  siècle  ;  la 
folie  révolutionnaire  les  a  livrés  aux  flammes,  en  même  temps  peut-être 
qu'une  partie  des  archives  du  château.  Nous  tenons  ce  renseignement  de 
Thonorable  M.  F.  Simon,  notaire  actuel  et  maire  de  la  commune. 

M.  Tabbé  Ratier  a  dû,  pour  la  confection  de  son  œuvre,  consulter  plu- 
sieurs de  ces  documents  ;  lui-môme  cite  la  généalogie  d'après  Clabaud, 
le  titre  d'iustallation   et  en  outre   les  carlulaires   de  Saint-Etienne  de 


426  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   RlSTOniQUE   DU   LIMOUSIN. 

Guienne,  où  leur  maison  était  souveraine.  Cette  origine,  lui  semble- 
l-il,  ne  serait  pas  autre  que  celle  d'où  proviennent  les  Foucauld  de 
la  Roche  ou  Laroche-Foucauld  et  toutes  les  autres  maisons  qui  por- 
tent le  nom  de  Foucauld  et  dont  celle  de  TArdimalie,  en  Périgord, 
paraît  avoir  été  la  maison  mère.  Cette  opinion  était  déjà  celle  de 
l'abbé  Le  Laboureur  et  du  généalogiste  Clabaud  qui  a  fait  observer 
que  le  lion  se  retrouve  comme  emblème,  tout  au  moins  au  début, 
dans  les  armes  de  ces  différentes  familles,  que  leurs  possessions 
étaient  dans  le  môme  voisinage,  que  les  premiers  ancêtres  des  uns 
et  des  autres  exerçaient  des  bénéfices  au  xi'  siècle  envers  Tabbaye 
d'Uzerche,  enfin  que  les  mêmes  prénoms  avaient  été  fréquemment 
et  pendant  longtemps  employés  dans  ces  familles  (1).  Suivant  ces 

Limoges,  le  cabinet  de  M.  Glairambault,  Duchêne,  Lachesnais-Dubois  et  plu- 
sieurs inscriptions,  mais  d'une  manière  générale  et  beaucoup  trop  vague 
pour  permettre  de  préciser  les  emprunts  qu'il  a  pu  leur  faire,  si  ce  n'est 
peut-être  en  ce  qui  concerne  certaines  indications  de  Clabaud. 

Il  importe  aussi  de  noter  que  cet  auteur  a  eu  en  sa  possession  pendant 
quelque  temps  des  livres  de  comptes  du  château  et  des  papiers  de 
famille,  tels  que  la  correspondance  de  Gabriel  Foucauld  découverte  en 
4842  (note  page  46);  Ces  documents  privés  ont  été  depuis  perdus  ou  sous- 
traits et  ne  se  retrouvent  malheureusement  plus  de  nos  jours. 

Le  livre  de  M.  l'abbé  Ratier  est  une  œuvre  des  plus  estimables,  écrite 
avec  des  intentions  excellentes,  et  dans  un  but  élevé;  mais  l'imagination 
de  l'auteur  y  a  pris  une  trop  grande  place  et  l'esprit  de  méthode  et  de 
critique  s'y  trouve  aussi  un  peu  trop  subordonné  à  des  considérations 
d'ordre  purement  littéraire  ou  moral. 

(4)  Au  point  de  vue  de  la  similitude  des  armes  des  familles  dont  il  est 
parlé  au  texte,  les  généalogistes  par  nous  cités  donnent  comme  exemples  : 
les  armes  des  Foucauld  de  Corgnac,  de  l'Ardimalie,  d'Issideuil,  etc.,  qui 
étaient  :  de  gueules  au  lion  d'or. 

Celles  des  Foucauld  de  Pontbriant  qui  étaient  :  parti  au  premier  d'or 
au  lion  couronné  de  gueules^  au  deuxième  d^azur  au  pont  d'argent 
soutenu  de  trois  arches  maçonnées  de  sable. 

Aymeric  de  Larochefoucauld,  vicomte  de  Châtellerault,  avait  pour  armes 
un  lion  et  pour  brisure  une  bordure  debesants  (sceau  apposé  au  bas  d'une 
charte  originale  de  4239). 

Les  armes  des  Foucauld  de  Saint-Martial  en  Languedoc  qui  ont  conservé 
le  lion  avec  un  chef  pour  brisure.  Au  sujet  de  ces  derniers  il  a  paru  dans 
un  journal  héraldique  et  généalogique  italien,  imprimé  à  Pise  (n**  de 
novembre  et  décembre  4875)  un  article  ayant  pour  litre;  «  Coup  d'œil* 
héraldique  sur  les  relations  probables  entre  les  différentes  branches  du 
nom  de  Foucauld  »,  ou  l'auteur  s'autorise  à  penser  que  cette  maison  des 
Foucauld-Saint-Martial  est  également  une  branche  des  Foucauld  de  l'Ardi- 
malie en  Périgord. 
Quant  aux  armes  des  Foucauld  de  Saint-Germain,  elles  ont  varié,  font 


EXCUSrON    ARCHÉOLOGIQUE  A  LA   SOUTERRAINE   ET  DANS  SES   ENVIRONS.     427 

auteurs,  la  généalogie  générale  desFoucauld,  celle  du  moins  qui 
^esso^ti^ait  des  textes,  ne  remonte  guère  au  delà  de  la  fin  du  \f  siècle  ; 
le  premier  dont  il  est  fait  mention,  Raymond,  vivait  au  temps  du  roi 
Robert  et  dHilduin,  évéque  de  Limoges;  il  fit  donation  en  Tan  iOOO 
à  l'église  de  Saint-Pierre  du  Dorât  de  douze  deniers  de  revenus  sur 
le  moulin  de  Villepontais.  Ses  successeurs,  auxquels  M.  Ratier  a 
consacré  un  chapitre  de  son  livre,  devinrent  des  personnages  assez 
importants  sous  le  nom  de  seigneurs  de  TArdimalie  en  Périgord  et 
donnèrent  naissance  à  diverses  branches  dont  une  fut  celle  desFou- 
cauld  de  Saint-Germain-Beaupré  (1). 

On  rapporte  en  effet  qu'Hélie  Foucauld,  seigneur  de  Corgnac,  de 
TArjElîmalie,  d'Issideuil(Excideuil?)etc.,  qui  portait  pour  armes  :  de 
ggièules  au  lion  d*or,  eut  cinq  fils,  dontTun  d'eux,  Hugues  reçut  en 
apanage  la  terre  de  Sainl-Germain-Beaupré  et  devint  la  tige  des 
seigneurs  de  ce  nom.  En  1060  celui-ci  donna  a  l'église  du  Dorât  ce 
qu'il  possédait  dans  la  paroisse  de  Dinsac.  Son  fils  Etienne  figure 
dans  une  autre  donation  faite  par  le  même  Hugues  en  1065. 

Le  fils  d'Etienne,  aussi  appelé  Hugues,  fut  présent,  dit  l'abbé 
Ratier,  avec  Guillaume  et  Amelin  Foucauld,  ses  cousins,  à  une 
transaction  faite  en  H08  sous  l'épiscopat  d'Eustorges,  évéque  de 

observer  les  mômes  auteurs.  Ainsi  en  H78,  au  bas  du  testament  du  Gui 
Foucauld,  seigneur  de  Saint-Germain,  on  voyait  un  lion  aeulf  lequel, 
ajoute-t-on,  figure  également  le  môme  dans  les  écussons  sculptés  sur  le 
château  et  la  chapelle  de  Saint-Germain-Beaupré,  maiâ  avec  un  lambel&u- 
dessus  pour  brisure,  indice  d'une  branche  cadette. 

Ce  ne  serait  qn'en  1393,  cent-vingt  ans  plus  tard,  que  l'arrière  petit-fils 
du  dit  Gui,  d'après  Glabaud,  aurait  scellé  une  quittance  d'un  sceau  semé  de 
fleurs  de  Us,  brisé  d'une  bande,  armes  qui  n'étaient  point  de  la  maison  et 
lui  avaient  été  attribués  par  erreur.  (Voir  Armoriai  de  la  noblesse  du 
Périgord  par  M.  de  Froidefond. 

Ces  indications,  tout  au  moins  en  ce  qui  concerne  les  armes  des  Fou- 
cauld de  Saint-Germain,  sont  en  contradiction  avec  les  autres  docunlents 
que  nous  citerons  plus  loin. 

(!)  Cette  maison  d'Ardimalie  a  toujours  été  considérée  comme  apparte- 
nant à  la  meilleure  noblesse  du  Périgord.  Le  dernier  du  nom,  marquis  de 
TArdimalie,  fut  élu  député  de  celte  noblesse  en  1789,  et  se  fit  remarquer 
par  ses  talents  et  son  mérite  autant  que  par  son  dévouement  ô  la  cause  de 
la  royauté. 

M.  l'abbé  Ratier  a  donné  dans  son  ouvrage  une  notice  sommaire  sur  les 
seigneurs  de  TArdimalie. 

De  toutes  les  branches  des  Foucauld,  y  compris  celle  de  Saint-Germain, 
qu'on  y  rattache,  ainsi  que  nous  venons  de  le  dire,  il  ne  resterait  plus  de 
nos  jours  que  celles  de  Hainay-le-Châleau,  de  Rieux,  de  Blis  et  de  Vaux- 
de  Dussac,  ces  deux  dernières  encore  fixées  en  Périgord. 


418  SOCIÉTÉ  ARCUÉOLOGIQUE   ET   HISTORrQUl.   DU   LIMOUSIN. 

Limoges  et  à  une  donation  de  ia  veuve  de  Bozon-le- Vieux,  comte  de 
la  Marche,  en  date  de  l'année  1115  dont  il  sera  parlé  ci-après. 

Telle  serait  la  filiation  des  Foucauld  de  Saint-Germain-Beaupré  ; 
mais  les  indications  qui  précèdent  sont  assez  vagues  et  ne  sauraient 
être  admises  qu'avec  beaucoup  de  réserve  ;  leurs  auteurs  ne  don- 
nent pas  de  dates  bien  précises  et  ne  citent  pas  leurs  sources.  Il  est 
à  remarquer  aussi  que  dans  le  procès-verbal  de  Tinstallation 
d'Armand-Louis  Foucauld  comme  gouverneur  delà  Haute  et  Basse- 
Marche,  en  1715,  il  n'est  point  parlé  de  ces  origines.  Les  orateurs 
qui  prirent  la  parole  en  cette  occasion  pour  retracer  en  termes  élo- 
gieux  rhîstoriijue  de  la  famille  du  gouverneur,  qui  fut  le  dernier 
des  Foucauld,  signalent  en  premier  lieu  Hugues  Foucauld,  en  disant 
qu'on  n'avait  pas  «  de  connaissances  distinctes  des  seigneurs  qui 
l'avaient  précédé,  mjis  que  l'on  pouvait  penser  qu'il  n'était  pas  le 
premier  de  sa  maison  ». 

L  —  L'identité  A'Hugues  Foucauld^  qu'il  ne  faut  pas  confondre 
avec  le  fils  d'Hélie  dont  il  a  été  plus  haut  parlé,  est  reconnue  par  tous 
les  annalistes  et  ne  nous  paraît  pas  douteuse.  Il  vivait  au  commen- 
cement du  xu"  siècle  et  il  souscrivit  comme  présent  sous  le  titre  de 
chevalier,  avec  les  principaux  nobles  du  comté  de  la  Marche,  à 
l'acte  de  donation  consenti  par  Aldèmodis,  veuve  de  Boson-le- 
Vieil,  comte  de  la  Marche  et  par  Audebert  et  Boson-le-Jeune,  ses 
enfants,  au  prieuré  de  Chastein,  en  l'an  1115  (1). 

Le  nom  de  Foucauld  qui  sera  celui  de  tous  les  successeurs 
d'Hugues  jusqu'au  siècle  dernier,  avait  pu  être  à  l'origine  le  nom 
particulier  du  fondateur  ou  de  l'un  des  ancêtres  de  la  famille, 
mais  il  était  devenu  et  demeura,  à  n'en  pas  douter,  le  nom  patro- 
nymique de  cette  famille. 

> 

IL  —  Après  Hugues  Foucauld,  la  filiation  de  ses  successeuis 

médiats,  sinon  immédiats,  Guillaume  I"  et  Guillaume  IP,  tous 

{\)  Voir  la  Généalogie  du  Père  Anselme.  —  Titre  d* installation.  — 
Nobiliaire  de  Nadaud  (tome  II,  annexe  page  484).  a  II  exislaii,  disent  Cfs 
documents,  au  trésor  de  Saint-Germain  l'original  latin  en  bonne  forme 
d*une  donation  de  Tan  1H5,  régnante  Ludoolco  (Louis-le-Gros)  tipapa 
Pascali  sedentc  (Pascal  II)  falie  par  la  veuve  de  Boson-le-Vieux,  comte  de 
la  Marche,  et  par  Audebert  et  Bozon-le-Jeune,  ses  enfants,  dans  laquelle  Hu- 
gues Foucauld,  seigneur  de  Saint-Germaio,  est  qualifié  chevalier  et  a  signé 
comme  présent. 

Il  est  à  noter  que  dans  le  Nobiliaire  de  Nadaud  proprement  dit,  la  gé- 
néalogie des  Foucauld  ne  commence  qu'au  début  du  xn*'  siècle,  avec  la  page 
H69,  les  pages  précédentes  ayant  disparu. 


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■'~"^. 


1.  PivilloB  du  Tort.  —  !.  : 
1.  C"l«ln».  -  lï.  J.a  de  p>i 
H).  ITiW*  d«  ChimpiiU*.  —  ïl.  Cl 


Façade  occidentale  du  cb'âtcau  de  Saini-Germain-Bt 

Kirdes'  —  14.  Tcordu  «clfneor.  —  IS,  Tour  Henri  IV.  ~  16.' a 
l-Biu  de  l'iung  d«  ChimpTille. 


Défenses  nord  du  château  de  Sa! nt- Germain  -  [kju,i 


.  —  Panneau  de  la  salle  à  manger,  xvn*  siècle. 

ntpenHBi.-  7.  Sllla  à  mtiigor.  ~  8.  Chunhro  Montpeniier. -  9.  ' 
o  Uidl,  —  17.  Jirdin  pouger,  —  18.  Corp»  ds  tuât.  —  IB.  Atlê« 


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EXCURSION  AR4:aR0L0GIQUB  A  LA  SOUTERRAINE  RT   DANS  SRS   EXVIRONS.     4*29 

deux  qualifiés  chevaliers  et  seigneurs  de  Saint-Germain-Beaupré, 
senoble  aussi  bien  établie  par  des  titres  datant  des  années  1173, 
1232,  1237,  quoiqu'il  existe  des  divergences  sur  les  noms  et  que 
cette  filiation  puisse  bien  offrir  quelques  lacunes  (1). 

Doit-on  admettre  avec  l'abbé  Ratier  qu'entre  Hugues  et  ces  deux 
Guillaume  il  y  avait  place  pour  d'autres  seigneurs  du  nom  de 
Foucauld?  cet  historien  cite  Amelin  fils  d'Hugues,  puis  Ber- 
trand, Âmelin  II,  Raymond  et  ne  parle  ensuite  que  d'un  Guil- 
laume dit  Gui,  lequel  ne  serait  aucun  des  deux  dont  nous  venons  de 
parler  et  se  confondrait  plutôt  avec  Gui  P'  qui  suit.  Mais  les  faits 
et  les  dates  qu'il  attribue  à  ces  divers  personnages  se  rapportent 
assez  exactement  à  Guillaume  P'  et  à  Guillaume  II,  sauf  peut-être 
ceux  qui  auraient  trait  à  Amelin  V\  Il  semble  plus  prudent  de 
suivre  à  cet  égard  la  généalogie  du  Père  Anselme  et  les  indications 
du  procès-verbal  d'installation  de  1715  (2). 


(I)  Ces  titres  sont  :  une  donation  faite  en  Tan  1172  au  prieuré  de  Bron- 
zeaux  depuis  uni  à  Tabbaye  de  Grandmont,  à  laquelle  fut  présent  Guillaume 
Foucauld  avec  Amelius  et  Ramnulphe  et  Âudebert  de  la  Marche  ((itre  du 
trésor  de  Tabbaye). 

Une  autre  donation  faite  par  Jordain,  chevalier  de  la  Buxière*  à  labbaye 
de  Grandmont,  de  la  portion  d^une  dixme  «t  Hef  située  en  la  paroisse  de 
Saint-Sylvestre  par  titre  des  ides  de  janvier  \  231  (titres  de  Tabbaye  de  Grand- 
mont), approuvée  par  Guillaume  Foucauld,  chevalier,  avec  Bozon  frère  du 
comie  de  la  Marche.  Au  bas  de  cet  acte  sont  le  sceau  du  comte  de  la  Marche, 
brisé  d'un  lambel,  et  celui  de  Guillaume  qui  est:  trois  fleurs  de  26a (ce qui, 
enti-e  parenthèses,  contredit  rassertion  de  rarmorial  du  Périfrord,  d'après 
laquelle  les  armes  des  Foucauld  de  Saint-Germain  qui  portaient  d'abord 
un  lion  n^auraicnt  fait  place  aux  fleurs  de  lis  qifen  1393). 

Une  autre  donation  par  laquelle  Guillaume  donna  à  l'abbaye  de  Grand- 
mont le  courant  d'eau  qui  tombait  dans  Tétanfiç  de  la  Tricherie  par  acte  du 
dimanche  .  ...  iS37.  die  dominicâ  qud  cantatur  ocuU  mei.  Anno  mt2* 
lesimo  ducentesimoDigèsûnoseptimo.  Scellé  desonscc*au  au  champ  d'azur 
j^emé  de  fleurs  de  lis  d*or  sans  nombre  (même  observation  que  la  précé- 
dente). 

Le  procès  verbal  d'installation  fait  allusion  à  d^aulres  titres  antérieurs  ou 
postérieurs  à  ceux-ci,  mais  dont  Tindication  n'offre  rien  de  précis. 

(9/  M.  Tabbé  Ratier  mentionne  la  présence  d'Amelin  I»'  à  une  donation 
fhite  en  M 50  au  chapitre  du  Dorât  des  dimes  de  la  paroisse  de  Tersannes. 

Il  rapporte  aussi  qu*en  1183,  tors  de  l'invasion  des  Paillers  et  des  Cot- 
lereaux,  la  seigneurie  de  Saint-Germain  éprouva  de  grands  malheurs;  mais 
qu  au  dire  de  la  chronique  de  Vigeois,  les  aggresseurs  furent  arrêtés  et  com. 
pléiement  défaits  dans  les  plaines  de  Dnn,  par  les  confrères  de  la  Paix  de 
Notre-Dame. 

Bertrand  Foucauld,  ajoute-t-il,  prit  part  à  la  troisième  Croisade  et  au 


430  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

III.  —  Gui  ou  Guy,  premier  du  nom,  mérite  déjà  à  divers  litres 
une  mention  particulière.  Il  fait  un  voyage  en  Languedoc  et  ac- 
compagne le  roi  Saint-Louis  en  Terre  Sainte.  Il  teste  pendant  Thiver 
1278  et  dans  ce  teslamenl  qui  était  conservé,  paraît-il,  au  château 
de  Saint-Germain  et  qui  était  réputé  un  document  remarquabU», 
il  fait  des  legs  au  profit  de  plusieurs  monastères  et  d'autres  dispo- 
sitions pieuses. 

Gui  I*"  aurait  été  marié  à  Anseline  (ou  Anceline)  de  Bri- 
diers  et  en  aurait  eu  plusieurs  enfants  dont  :  Gui  II  0|j  Guyard  le 
suivant  (1). 

retour  se  trouva  sans  ressources  ^  Venise,  d*où  il  ne  put  se  rapatrier  que 
grâce  aux  subsides  d*un  Génois  (page  24  et  note). 

Raymond  Foucauld,  son  petit  fils,  fils  d*Amelin  II,  épousa  Alix  de  Morle- 
mart. 

Le  Nobiliaire  de  Nadaud  fait  aussi  mention  de  ce  Raymond,  comme  ayant 
été  présent  à  la  donation  de  1231  avec  Hugues  son  père  (?;  et  Gui  son  fils. 

D*autre  part  le  Père  Anselme  cite  après  Guillaume  II  Emeric,  qa*on  ne 
trouve  dans  aucune  des  autres  généalogies. 

Evidemment  la  divergence  est  complète  entre  les  divers  généalogistes 
pour  la  période  dont  il  s'agit;  ce  ne  sera  pas  la  dernière  au  surplus  que  Ton 
aura  à  constater. 

Nous  avons  cru  devoir  adopter  la  filiation  indiquée  au  texte,  qui  est  celle 
du  procès-verbal  d'installation  et  même  celle  du  Père  Anselme,  à  rexception 
de  la  personnalité  d'Emeric. 

(1)  D'après  le  Nobiliaire^  tome  II,  pages  443  et  144,  le  même  dit 
que  les  armes  de  Gui  I<"  étaient  semées  de  France^  —  contrairement 
encore  au  dire  de  Clabaud  et  de  V Armoriai  du  Périgord  qui  assurent 
qu'elles  étaient  un  Uon  seul. 

L'abbé  Ratier,  qui  appelle  Gui  I^^  Guillaume  dit  Gui  (premier  du  nom  de 
Guillaume),  parle  de  plusieurs  donations  où  il  aurait  été  présent,  d'abord  de 
celles  de  1232  et  de  1237  (ou  1297)  que  nous  avons  attribuées  à  Guillaume, 
son  prédécesseur,  puis  d'une  donation  de  moulins  faite  à  Grandmont  par 
Pierre,  seigneur  de  Brigneul,  et  enfin  d'un  acte  de  1246  où  il  reconnut 
à  ce  monastère  au  nom  d'Abon,  seigneur  du  Puis,  cent  sols  sur  les  terres 
d'Auziac  en  la  paroisse  des  Eglises  (titres  de  Grandmont),  page  25. 

Après  Gui,  M.  Ratier  distingue  deux  autres  personnages  du  même  nom, 
que  nous  ne  retrouvons  pas  dans  les  autres  généalogies  et  qui,  d'après  lui, 
auraient  précédé  Gui  ou  Guyard,  savoir  :  1®  Gai,  premier  du  nom,  qui 
soutint  la  cause  de  Louis  IX  contre  Hugues  de  Lusignan,  comte  de  la  Mar- 
che et  seigneur  de  Crozani,  et  qui  attaché  par  la  faveur  de  son  souverain 
au  service  de  la  reine-mère,  Blanche  de  Castille,  aurait  été  chargé  par 
celle-ci  de  missions  de  confiance,  notamment  du  soin  de  régler  des  diffé- 
rends survenus  entre  l'archevêque  de  Narbonne  et  le  vicomte  de  cette 
ville  (1231).  Au  sujet  de  celte  mission,  l'abbé  Ratier  invoque,  sans  les  pré- 
ciser du  reste,  un  titre  de  l'abbaye  de  Grandmont  et  des  archives  de  Nar- 


EXCURSION   ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTKRnAINE  ET  DANS  SES  RNVIRONS.      431 

IV.  —  Gui  II  OU  Guyardy  fils  aîné  du  précédent  et  institué  par 
lui  son  héritier  et  seigneur  de  Saint-Germain,  entreprit  le  voyage 
d'outre-mer  pour  obéir  au  testament  de  son  père.  Il  servit  plus 
tard  dans  les  guêtres  de  Flandre  et  au  moment  de  partir  il  lit,  lui 
aussi,  à  la  date  du  ^juillet  1302,  un  testament  dans  lequel,  après 
avoir  manifesté  ses  sentiments  religieux  et  laissé  de  nombreux  legs 
en  faveur  de  plusieurs  communautés,  il  réglait  l'ordre  et  les  dé- 
penses de  ses  funérailles,  assurait  le  sort  d'Ahélis,  sa  femme,  pour 
le  cas  où  elle  ne  se  remarierait  pas,  constituait  son  fils  Guillaume 
son  héritier  universel  et  ordonnait  que  tous  ses  autres  enfants,  fils 
ou  filles,  entreraient  en  religion. 

Cette  dernière  disposition  du  testament  est  curieuse  et  même 
assez  insolite  pour  Tépoque,  a  fait  remarquer  M.  l'abbé  Texier. 
Mais  cet  acte  présente  d'autres  particularités  intéressantes;  c'est 
ainsi  que  le  testateur  y  prescrit  à  ses  exécuteurs  testamentaires  de 
ne  pas  vendre  ni  aliéner  ses  bois  et  qu'il  désigne  à  part  une  fille  et 
un  fils  naturels  auxquels  il  fait  quelques  legs  (1). 

Gui  avait  épousé  Âhélis,  plus  haut  nommée,  fille  de  Guillaume  de 
Saint-Julien;  il  mourut  probablement  vers  1320. 

bonne,  ainsi  qu'une  lettre  du  prieur  de  Saint-Gilles  do  juin  1255;  il  invo- 
que aussi  le  témoignage  de  l'archevêque  de  Paris  du  Marca,  suivant  lequel, 
la  transaction  conseillée  par  Gui  Foucauld  fut  bien  accueillie  de  toutes 
parties.  L'auteur  ajoute  que  Gui  suivit  saint  Louis  dans  ses  voyages  en 
Terre-Sainte,  et  fut  un  de  ceux  qui  ramenèrent  le  corps  du  souverain? 
après  sa  mort  devant  Tunis.  Gui,  dit-il,  à  son  retour,  termina  la  recons- 
truction du  château  qu'il  avait  entreprise  «après  la  première  croisade  de 
saint  Louis.  Enfin  en  4i73,  il  aurait  acquis  de  Marguerite,  vicomtesse  de 
Thouars,  les  droits  de  celle-ci  sur  la  Beraudic  et  la  vicomte  de  Bridiers. 

9®  Gui  11^  fils  du  précédent,  qui  aurait  épousé  Âyceline  de  Piagut,  de 
la  branche  des  Pot  de  Piagut.  Il  serait  Tauteur  du  testament  de  1278  dont 
il  est  question  au  texte  et  attribué  à  Gui  l^'^,  et  aurait  eu  pourfîls  et  succes- 
seur Gui  ou  Guyard  (V.  pages  30  et  suiv.). 

H.  Tabbé  Ratier  ne  donne  pas,  ce  nous  semble,  des  preuves  assez  posi 
tives  pour  permettre  de  tenir  sa  distinction  comme  suffisamment  établie. 
Les  détails  assez  complets  qu'il  fournit  en  ce  qui  touche  Gui  \^^  peuvent 
aussi  bien  s'appliquer  au  personnage  qu'il  nomme  Guillaume  dit  Gui  et 
qui  est  notre  Gui  I^';  il  ne  dit  rien  du  reste  de  son  mariage  ni  de  sa  mort. 
Quant  à  Gui  II,  il  signale  son  mariage  avec  Ayceline  de  Piagut  :  voilà  un 
fait  assez  précis  qui  autoriserait  à  ne  pas  le  confondre  avec  le  premier 
Gui,  dont  l'union  s'était  faile  avec  Anseline  de  Bridiers.  Ce  fait  demande- 
rait une  vérification.  M.  Batier  ne  citant  presque  jamais  ses  sources,  il  est 
fort  difficile  de  pouvoir  contrôler  ses  affirmations  qui,  dans  le  cas  présent, 
sont  contraires  à  celles  des  autres  généalogistes. 

{*)  Ce  testj^ment  fait  en  présence  de  témoins  fut  revêtu  suivant  les  rc* 


4'Ai  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   IIISTORIQrB   DU   LIMOUSIK. 


LES  FOUCAULD 


PENDANT  LA  GUERRE  DE  CENT  ANS. 


V.  —  Guillaume^  III*  du  nom,  chevalier,  seigneur  de  Sainl- 
Germain  à  la  suite  de  son  père  et  chambellan  du  roi,  fut  investi 
du  commandement  du  château  de  Crozant  par  Pierre  I",  duc  de 
Bourbon,  comte  de  Clerraont  et  de  la  Marche,  en  vertu  de  lettres- 
patentes  du  3  juin  1347.  Il  prit  part  à  la  bataille  de  Poitiers  et  y 
fut  même  fait  prisonnier  avec  son  fiU  (1356). 

D'après  le  Nobiliaire^  il  avait  épousé  Antoinette  de  Bonneval, 
selon  d'autres  une  demoiselle  de  La  Trémoille.  Trois  enfants  (1). 

VI.  —  Guillaume  IV  (ou  Gui  III,  d'après  quelques  annalistes), 
aussi  chevalier,  seigneur  de  Saint-Germain  et  chambellan  du  roi, 
servit  la  cause  du  roi  de  France  contre  les  Anglais;  il  était  avec  son 
père  à  Poitiers,  encore  très  jeune  probablement,  et  il  devint  ca- 
pitaine général  en  Berri,  Auvergne,  Bourbonnais  et  Marche. 

Poursuivi  à  raison  d'un  meurtre  qu'il  avait  commis  pour  venger 
une  injure  faite  à  son  père,  il  obtint  des  lettres  de  rémission,  en 
récompense  apparemmeni  de  ses  bons  et  loyaux  services. 

C'est  à  lui  que  paraît  se  rapporter  la  mention  faite  par  Froissard 
d'un  Foucauld  qui  prit  part,  en  l'an  1388  (ou  1389),  à  un  brillant 
fait  d'armes  ou  tournoi  soutenu  à  Bordeaux  par  cinq  chevaliers 
Français  contre  cinq  Anglais  ;  Guillaume  avait  pour  adversaire  le 
seigneur  de  Caumont  (Froissard,  3*  volume,  chapitre  139).  Ce 
même  chroniqueur  signale  aussi  un  chevalier  du  nom  de  Foucauld 
qui  était  présent  devant  Tunis  en  1390  (W.,  4®  vol.,  ch.  10).  Ce 
chevalier  était-il  le  même  que  Guillaume  dont  nous  nous  occupons? 

commandalions  de  son  auteur,  des  sceaux  du  chantre  et  de  Toflicial  de 
Limoges  le  4  des  calendes  d'août  1302.  Il  a  été  publié  par  M.  labbé  Tixier 
dans  un  des  Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique  du  Li- 
mousin et  par  M.  l'abbé  Ralier  comme  appendice  à  son  ouvrage,  p.  181 
(lexte  lalin  cl  traduction). 

(1)  V.  Tabbé  Ralier.  Cet  auteur  parle  aussi  d'un  titre  de  Tabbaye  de 
Colombe,  en  Poitou,  où  était  mentionné  le  testamment  de  Guillaume,  en 
date  du  19  août  1365,  et  contenant  des  legs  à  diverses  églises  et  des  dons 
à  plusieurs  personnes. 

La  filiation  de  Guillaume  111  et  de  ses  prédécesseurs,  disent  les  généalo- 
gistes, est  parfaitement  établie  par  des  litres  de  1282, 1991  et  13i0  sur  les- 
quels ils  ne  fournissent  pas  au  surplus  d'autres  explications. 


EXCUtlSlÔN  ABCâéOLOÔlQUB  À  LA  ÔÛUtEllKAlTtP.  ET  bANS  SES  EttVIRONS.     433 

le  fait  peut  faire  quelque  doute.  Les  annales  du  temps  mention- 
nent beaucoup  de  personnages  du  nom  de  Foucauld  et  notamment 
un  Gui  Foucauld  dit  le  Borgne,  qui  servait  avec  neuf  écuyers  au 
siège  de  Montignac  sous  le  maréchal  de  Boucicaut  (1398),  et  plus 
tard  en  Normandie,  où  il  donna  quittance  de  ses  gages  (14^1j.  Ce 
personnage  était  selon  toutes  vraisemblances  de  la  branche  de  Saint. 
Germain.  Son  sceau,  sans  être  exactement  le  même  que  celui  des 
Foucauld  qui  précèdent,  était  semé  de  fleurs  de  lis  avec  une  bande 
et  avait  pour  cimier  un  lis  fleuri  avec  sa  tige  (1). 
Guillaume  IV  avait  épousé  Marguerite  de  Bonneval  (2). 

VII.  —  Aubert  ou  Albert  Foucauld,  chevalier,  seigneur  de  Saint- 
Germain  et  des  Gros,  dont  il  fit  hommage  au  roi  (1394)  et  dont  il 
aurait  rebâti  le  château  démoli  par  les  Anglais,  joua  un  rôle  assez 
important  sous  les  règnes  de  Charles  VI  et  de  Charles  VII,  rôle 
affirmé  par  d'assez  nombreux  documents.  Conseiller  et  chambellan 
du  roi,  nommé  capitaine  général  en  limousin  par  le  dauphin  de- 
puis Charles  VII,  investi  ensuite  des  mêmes  fonctions  pour  le  Ni- 
vernais, la  Guienne  et  d'autres  provinces,  il  remplit  pour  son  sou- 
verain diverses  missions  de  confiance  et  notamment  il  fut  chargé 
par  lui  de  pacifier  les  esprits  et  de  faire  respecter  les  instructions 
royales  dans  ces  provinces,  avec  les  pouvoirs  les  plus  étendus  (let- 
tres patentes,  1418).  Il  prit  une  part  active  à  la  résistance  contre 

(1)  L'abbé  Raticr  dit  que  la  quittance  de  gages  de  1 421  était  scellée  de 
ce  sceau  avec  deux  lions  pour  support.  Ces  deux  lions  étaient-ils  une 
réminiscence  du  blason  des  Foucaud  de  TArdimalie...? 

(î)  Les  diverses  généalogies  présentent  encore  pour  cette  époque  de 
rincohérence  et  de  la  confusion.  L'abbé  Ratier  dislingue  Gui  lil  et  Guil- 
laume IV  et  en  fait  deux  personnalités  distinctes;  d'après  lui.  Gui  lli  au- 
rait épousé  en  1374  Marguerite  de  Bonneval  et  aurait  eu  pour  successeur 
Guillaume  IV,  qui  aurait  pris  part  au  tournoi  de  Bordeaux  et  se  serait 
marié  en  1399;  il  ne  dit  pas  du  reste  quelle  fut  la  femme  de  ce  dernier. 
Mais  il  mentionne  dans  un  compte  de  Pouppart,  argentier  du  roi,  du 
I*'  octobre  1399,  une  somme  de  108  livres  parisis  pour  achats  faits  par  le 
roi  et  le  dauphin  pour  les  noces  de  Guillaume  (p.  37). 

Cette  distinction  est-elle  fondée?  On  n'en  trouve  pas  trace  dans  les 
autres  généalogies.  Ce  Gui  était-il  un  personnage  autre  que  Guillaume  IV 
et  son  père  apparemment,  comme  le  dit  l'honorable  abbé?  La  supposition 
est  admissible,  si  l'on  considère  surtout  que  ce  dernier  devait  être  d'un 
ftgc  avancé  lors  du  tournoi  de  1 388,  étant  déjà  un  adolescent  à  la  bataille 
de  Poitiers  en  135G.  En  ce  cas  c*est  son  père,  Gui  Hi,  qui  aurait  été  pré- 
sent à  cette  bataille. 

Mais  le  défaut  d'une  ccrlilude  complète  ne  nous  a  pas  permis  de  l'ad- 
mettre au  texte. 


4ii  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE  Et  HIStORIQtJE   OU   UltOOSiK. 

les  envahisseurs  et  se  trouvait  en  1403  au  siège  de  Courbefy,  lors- 
que les  Anglais  en  furent  chassés. 

En  juillet  1411,  il  était  au  nombre  des  seigneurs  qui  soutenaient 
la  cause  du  duc  d*Orléans  contre  le  duc  de  Bourgogne  et  il  faisait 
partie  de  Tarmée  qui  guerroyait  contre  ce  cernier  entre  la  Seine  et 
rOise  et  l'obligea  à  battre  en  retraite  jusqu'à  Arras  (1). 

On  attribue  à  Aubert  la  reconstruction  du  château  de  Saint- 
Germain,  qui  avait  été  détruit  ou  fort  endommagé  par  les  Anglais  ; 
mais  les  indications  qu'on  donne  à  ce  sujet  sont  assez  vagues  et 
môme  contradictoires  (2). 

Aubert  avait  épousé  Isabeau  Pot  de  Rhodes  dont  il  eut  trois  en- 
fants, Jean,  Marc  et  Louis. 

Son  sceau,  d'après  le  Nobiliaire,  était  semé  de  fleurs  de  lis;  sup- 
port :  deux  lions;  cimier  :  un  /w  fleuri,  c'est-à-dire  à  peu  près  le 
même  que  celui  de  Gui  le  Borgne,  rapporté  ci-dessus.  Ces  armes 
étaient  donc  différentes  de  celles  des  prédécesseurs. 

VIII.  —  Jean  Foucauld,  fils  d'Aubert,  fut  ainsi  que  lui,  mais  en- 
core plus  étroitement,  môle  aux  luttes  du  parti  français  contre  la  do- 
mination anglaise  ;  en  toutes  circonstances  il  s'y  fit  remarquer  par  sa 
brillante  valeur  et  une  certaine  fougue  aventureuse  qui  se  retrouvera 
chez  plusieurs  de  ses  successeurs.  En  l'année  1426,  il  avait  été"  fait 
prisonnier  au  siège  de  Laval  et  délivré  grâce  à  une  rançon  pour 
laquelle,  dit-on,  les  Etats  du  Limousin  accordèrent  200  livres. 

Peu  d'années  après  il  combat  entre  Orléans  et  Paris  et  parfois 
môme  aux  côtés  de  l'héroïque  vierge  de  Domremy. 

Jean  Chartier  dit  de  lui  :  «  Un  chevaUer  limousin,  nommé  Jean 
Foucauld,  avec  trois  autres  (chevaliers),  vingt  écuyers  et  douze 

(1)  Voir  la  Geste  des  nobles  (atlribuée  à  G.  Gousinot  le  chancelier). 
Ms.  10297  de  la  Bibliothèque  nationale,  règne  de  Charles  Yl,  chapitre 
cxiii). 

(2)  L'abbé  Ratier  dit  que  le  château  fut  rebâti  en  1409  par  Marc  Fou- 
cauld, aux  frais  du  roi  Charles  VII,  et  sur  le  plan  même  qu^avalt  adopté 
Gui  Foucauld  deux  cents  ans  auparavant  (page  157).  Il  y  adans  cette  allé- 
gation deux  erreurs  pour  le  moins,  selon  nous  :  Marc,  eu  1409,  ne  pouvait 
être  qu'un  enfant,  s'il  était  môme  déjà  de  ce  monde  ;  Charles  VIT  n'était 
lui  aussi  qu'un  bien  jeune  dauphin  et  n'était  pas  plus  à  même  de  fournir 
des  subsides  pour  la  reconstruction  du  château  que  Marc  ne  pouvait  lui- 
môme  entreprendre  celle-ci. 

Le  môme  historien  fait  d*Âubert  le  frère  de  Guillaume  IV  et  non  soa 
fils.  11  rapporte,  en  outre,  qu'il  alla  combattre  les  Turcs  avec  les  cheva- 
liers de  Rhodes  et  qu'il  fut  l'un  des  seigneurs  Français  qui  contribuèrent 
le  plus  à  faire  construire  le  château-fort  de  Saint-Pierre  en  Cilicie 
(page  39). 


EXCURSION  AHCHÉOLOClQtJE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  t)ANS  SES  ENVIRONS.      À^D 

archers,  avait  la  conduite  et  le  gouvernement  des  archers  du  roi 
Charles  Vil  contre  les  Anglais  en  1429;  il  faisait  partie  de  la  garni- 
son de  Lagny  et,  dans  une  grande  escarmouche  qui  dura  trois 
jours  et  trois  nuits,  il  aida  à  repousser  l'ennemi;  c'était  un  vaillant 
homme...  »  La  Chronique  de  la  Pucelle  parle  de  Jean  Foucauld 
dans  les  mômes  termes;  elle  constate  sa  présence  à  l'armée  du  roi 
et  aux  escarmouches  qui  eurent  lieu  contre  les  Anglais  près  de 
Sentis  (août  1429);  dans  cette  campagne,  Foucaud  partageait  le 
commandement  des  archers  du  roi  avec  le  seigneur  de  Graville. 
Elle  parle  aussi  de  sa  belle  conduite  à  Lagny,  ville  mal  fortifiée, 
dont  le  roi  lui  avait  confié  la  défense  de  concert  avec  Guillaume  de 
Loré,  et  d'une  entreprise  hardie  qu'il  avait  projetée  avec  ce  dernier 
sur  Rouen,  par  le  moyen  d'un  certain  Grand  Pierre  (le  Grand-Perrin) 
et  qui  échoua  parce  que  quelques  grands  seigneurs  ne  surent  pas 
tenir  compte  de  leurs  sages  avis  (1).  Il  est  probable  aussi  qu'il  accom- 
pagna le  roi  dans  son  périlleux  voyage  à  Reims  et  qu'il  assista  à 
son  sacfe. 

On  rapporte  qu'en  1430  Jeanne  la  Pucelle  «  tira  sur  champs  avec 
Jean  Foucauld  et  autres  de  la  garnison  de  Lagny  et  qu'ils  rencon- 
trèrent trois  à  quatre  cents  Anglais  qui  se  mirent  tous  à  pied  con- 
tre une  haie;  alors  la  Pucelle,  Jean  et  les  autres  délibérèrent  de 
les  combattre  et  vinrent,  à  pied  ou  à  cheval,  frapper  sur  eux;  là,  il 
y  eut  très  dure  et  aspre  besogne,  car  les  Français  n'étaient  guères 
plus  que  les  Anglais  qui  furent  tous  tués  ou  pris.  Les  Anglais  de 
Paris  et  de  Corbeil  vinrent  à  leur  secours,  mais  ils  furent  repoussés 
par  plusieurs  vaillants  hommes  du  nombre  desquels  était  Jean  Fou- 
cauld. » 

Nous  trouvons  encore  le  môme  Jean,  en  1431,  soutenant  l'assaut 
du  duc  de  Redfort  devant  Lagny  et  l'obligeant  par  sa  valeur  à  se 
retirer,  après  un  siège  de  cinq  à  six  mois,  et  non  sans  avoir  enduré 
de  grandes  fatigues  et  de  grandes  privations,  qui  ne  cessèrent  que 
par  le  secours  que  lui  apporta  le  roi  (2). 

Plus  tard,  en  143S,  il  est  avec  le  maréchal  de  Rochefort  au  siège 
de  Saint-Denis  avec  1,000  ou  1,200  hommes  et  la  môme  année  il 
est  choisi  par  le  connétable  de  Richemonl  pour  défendre  cette  ville 
et  son  abbaye,  mission  dont  il  s'acquitta  avec  la  môme  bravoure. 

En  récompense  de  tant  de  loyaux  services,  il  fut  nommé  maré- 
chal de  France  (3). 

(I)  V.  Chronique  de  la  Pucelle  (altribuée  à  Cousinot  de  Montreuil), 
chapitres  60,  62  et  63. 

(3)  V.  ViLLARET,  Histoire  de  France,  U  XV,  p.  94. 

(3)  Le  Père  Anselme  ne  cite  pas  Jean  Foucauld  parmi  les  seigneurs 


436  àOClRt^.  AfKÎHRÔLOGlOUV  RT  fllStORIQbK  bU  LISàOUSl.M. 

Dan8  la  suite,  envoyé  en  Lombardie,  il  fut  nommé  podestat  de 
la  ville  d'Asti,  au  duché  de  Milan,  par  Valentine,  veuve  da  duc 
d'Orléans,  et  il  mourut  dans  ce  gouvernement  après  avoir  institué, 
par  son  testament  de  l'année  1465,  son  frère  Marc  et  son  neveu 
pour  ses  héritiers  (1). 


LES  FOUCAULD  SOUS  LES  VALOIS. 

IX.  —  Marc  Foucauld,  conseiller  et  chambellan  du  roi,  réunit 
les  seigneuries  des  Gros,  de  Châtelus,  de  Lauriëre  et  autres  à  ceUe 
de  Saint-Germain-Beaupré.  11  fit  ériger  le  prieuré  de  Bénévent  en 
abbaye  au  profit  de  son  frère  Louis,  qui  en  prit  possession  en 
grande  pompe,  accompagné  de  trois  cents  gentilhommes,  au 
rapport  d'un  titre  invoqué  par  Clabaud,  mais  qu'il  n'est  pas  possi- 
ble de  contrôler.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que  la  nouvelle  abbaye 
devint  l'objet  de  grandes  libéralités  de  la  part  des  maîtres  de  Saint- 
Germain  et  qu'à  partir  de  la  date  de  cette  érection  elle  se  maintint 
pendant  assez  longtemps  dans  leur  famille. 

Dans  le  titre  auquel  nous  venons  de  faire  allusion,  Marc  Fou- 
cauld  était,  parait-il,  qualifié  de  noble  sang  et  de  haute  lignée, 
appartenant  aux  comtes  de  Penthièvre  et  aux  seigneurs  de  Ghau- 
vigny. 

Il  avait  épousé,  le  31  octobre  1434  Gallieni  de  Pierrebuffière, 
dont  il  eut  trois  enfants;  11  mourut  en  1484. 


titulaires  de  Saint-Cermain  ;  mais  rindividualitô  et  l'importance  de  ce  per- 
sonnage ne  sauraient  être  mis  en  doute. 

Les  autres  historiens  sont  d'accord  pour  dire  qu*il  fut  fait  maréchal  de 
France  en  un  temps  où  cette  dignité  était  assez  rare  ;  le  titre  dlnsialla- 
tion  de  1715  le  mentionne  en  cette  qualité  et  comme  ayant  été  célèbre 
dans  rhistoîre. 

Le  Nobiliaire  de  Nadaud  donne  en  ce  qui  le  concerne  des  détails  très 
circonstanciés,  auxquels  nous  avons  emprunté  quelques  passages  dans 
notre  récit. 

L'abbé  Ratier  relate  aussi  quelques  autres  circonstances  sur  Jean  Fou- 
cauld  et  rapporte  qu'il  essaya,  mais  en  vain  et  malgré  Tappui  du  roi,  de 
faire  nommer  l'abbé  de  Bénévent,  un  de  ses  neveux,  au  siège  épiscopal 
de  Limoges. 

(1)  Après  la  biographie  de  Jean,  le  NobiUcUre  de  Nadaud  présente  une 
lacune  de  deux  pages  (1171  et  1172),  lacérées  sans  doute,  et  ne  reprend 
la  généalogie  des  Foucauld  qu'au  commencement  du  xvii*  siècle,  avec 
Louis,  comte  du  Dognon. 


Lanterne  des  morts  de  La  Souterraine 


t  a  Souterraine 

Pierre  tombale  du  Moine  Raymond  de  Vigeois 

dite  du  Mous  Ganter. 


EXCURSION  ARCHéOLOGlQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.     437 

X.  —  André  Foucauld,  fils  aîné  de  Marc,  avait  été  institué/en 
même  temps  que  celui-ci,  héritier  de  son  oncle  Jean  dans  le  testa- 
ment de  146S.  Seigneur  de  Saint-Germain,  du  Verger  (1),  etc.,  il 
obtint  du  roi  Charles  VIII,  le  26  novembre  1483,  une  lettre  de  sau- 
vegarde, dans  laquelle  il  est  qualifié  chevalier,  chambellan  et  con- 
seiller de  Sa  Majesté.  Il  fut  aussi  chambellan  du  duc  d'Orléans,  qui 
devint  plus  tard  Louis  XII.  On  dit  qu'il  eut  de  grandes  difficultés 
avec  François,  son  frère,  gentilhomme  de  la  maison  du  roi,  au  su- 
jet du  partage  de  la  succession  de  leur  père,  différends  qui  se  ter- 
minèrent par  un  accord  du  27  avril  1584  (2). 

André  épousa  Marguerite  d'Aubusson,  fille  de  Jean  III  du  nom  et 
d'Agnès  ou  de  Catherine  de  Rochechouard  (16  juillet  1469)  •  il 
mourut  probablement  avant  la  fin  de  Tannée  1489  (3).  ' 

XI.  —  Jacques  Foucauld,  son  Gis,  aussi  conseiller  et  chambellan 
du  roi  rendit  aveu  pour  ses  terres  à  Anne  de  France  fille  de  Louis  XI 
duchesse  de  Bourbon,  comtesse  de  la  Marche  et  femme  de  Pierre  II' 
duc  de  Bourbon,  à  la  date  du  15  février  1509,  d'après  quelques  anna^ 
les.  Il  fut  nommé  par  François  PMieutenant  du  roi  dans  le  Nivernais 
le  Bourbonnais  et  la  Marche,  en  vertu  de  lettres  de  provision  du 
30  novembre  1535,  qui  étaient,  paraît-il,  conservées  au  château  rtp 
Saint-Germain  (4).  ^iwieau  ae 

Il  avait  épousé  par  contrat  du  25  octobre  1506,  Claude  de  Tallev 
rand,  fille  de  Jean,  seigneur  de  Grignan  et  de  Chalais,  chevalier 
d'honneur  de  la  reine-mère,  capitaine  de  la  ville  de  Bordeaux  et  de 
Marguerite  de  la  Tour-Turenne,  dont  il  eut  quatre  enfants     ' 

Le  nobiliaire  place  son  décès  avant  1562  ;  mais  la  date  précise  ne 
nous  en  est  pas  connue. 

XII.  —  Gabriel  Foucauld,  premier  du  nom,  seigneur  de  Saint 
Germain,  de  Naillac,  de  Fleurât....,  né  le  7  février  1511   fut  chargé 
en  1542  et  1544  de  la  conduite  du  ban  etde  l'arrière-ban  des  gentils 
hommes  du  Berry  et  de  la  Marche,  et  devint  capitaine  de  cent 

(4)  Le  NohlUalre  (annexe  d'après  Clabaud,  page  185)  cite  un  bail  à 
ferme  consenti  a  Jean  Compais  par  André,  comme  seigneur  du  Verger 
(î)  D'après  le  Nobiliaire,  même  annexe.  ^ 

Le  procès-verbal  d'installation  ne  fait  pas  mention  d'André 

(3)  Une  sœur  d'André,  Nicole,  fut  mariée  à  Jean  de  Vouhet',  seigneur  de 
ce  nom  en  Bcrri,  et  fut  inhumée  dans  la  chapelle  seigneuriale  de  la 
famille  de  son  mari  (U86). 

L'abbé  Ratier  cite  son  épitaphe  el  dil  que  Marguerite  d'Aubusson,  sa 
be  le-sœur.  voulut  être  enterrée  dans  la  même  sépulture  (page  46) 

(4)  D'après  le  NobUiaire  (loco  cUatoj.  *        '' 

T.   XI.  ^ 


43S  SOCIETE   ARCHROLOGIQUfC   ET    HISTORIQUE  DU   LIMOUSm. 

arquebusiers  à  cheval,  colonel  des  gens  à  pied  et  lieulenant  de  la 
cavalerie  de  l'armée  qui  fut  envoyée  en  Ecosse  sous  le  commande- 
ment de  M.  de  Losse.  On  dit  que,  au  cours  de  cette  campagne  qu'il 
suivit  à  la  tête  de  500  chevau-légers,  il  fut  en  outre  chargé  de 
demander  au  parlement  d'Ecosse  la  main  de  Marie  Stuart,  encore 
enfant,  et  qu'il  eut  l'insigne  honneur  de  renouveler  la  cérémonie  des 
fiançailles  et  d'épouser  la  jeune  reine  au  nom  du  prince  qui  devait 
être  François  1I(1S50). 

Il  importe  de  noter  qu'il  avait  obtenu  en  mars  1546  et  en  jan- 
vier 1547  des  lettres  patentes  du  roi  pour  l'établissement  de  quatre 
foires  dans  Tannée  et  d'un  marché  chaque  semaine  au  bourg  de 
Saint-Germain. 

Nous  devons  rappeler  aussi  que,  selon  toutes  présomptions,  la  res- 
tauration du  château  dans  le  style  renaissance  dut  être  commencée 
sous  Gabriel  Foucauld  et  que  la  partie  de  ce  château  où  se  trou- 
vent ses  armes  et  celles  de  sa  femme  et  qui  était  encore  debout 
au  moment  de  la  reconstruction  actuelle,  faisait  partie  de  son 
œuvre. 

Gabriel  avait  contracté  mariage  le  15  novembre  1533  avec  Fran- 
çoise de  Villelume,  fille  d'Antoine,  écuyer,  seigneur  de  Graveron; 
dans  le  contrat  il  était  qualifié  chevalier,  baron  de  Saint-Ger- 
main (1);  il  testa,  dit  le  Nobiliaire,  le  10  janvier  1558  et  mourut 
quelque  temps  après. 

Un  de  ses  fils,  Louis,  que  plusieurs  des  annalistes  rangent  au  nom- 
bre des  seigneurs  de  Saint-Germain, fut  considéré  du  ducd'Alençon, 
plus  tard  François  II;  il  épousa  le  24  octobre  1565  Isabeau  deSor- 
bières  et  mourut  sans  postérité  le  26  avril  1574.  La  seigneurie 
passa  à  son  frère  Gaspard  qui  en  était  déjà  peut-être  le  titulaire  (2). 

(1)  I/âbbé  Ratier  donne  à  ce  mariage  la  date  de  1523  au  lieu  de  celle 
de  4533. 

(^]  Il  règne  quelque  inccrlitudc  sur  la  succession  exacte  des  seigneurs  de 
Saint-Germain  à  la  fin  de  celte  période.  C'est  ainsi,  que  selon  le  Nobiliaire, 
Jacques  Foucauld  serait  mort  avant  1563,  et  son  fils  Gabriel  qu*on  loi 
donne  pour  successeur,  vers  1558,  c'est-à-dire  très  probablement  avant 
son  père  ;  on  peut  supposer  que  Jacques  s'était  démis  en  sa  faveur.  D'autre 
part,  il  n'apparaît  pas  très  clairement  si  Gabriel  a  d'abord  eu  pour  succes- 
seur Louis,  un  de  ses  fils,  ou  si  Gaspard,  son  autre  fils  lui  a  succédé  direc- 
tement. Le  procès-verbal  d'installation,  le  père  Anselme  et  l'abbé  Ralicr 
ne  disent  rien  de  Louis. 

A  partir  de  Gaspard,  la  filiation  des  Foucauld  devient  beaucoup  plus  claire 
et  plus  certaine,  sauf  pcut-ôlre  sur  un  point  qui  demandera  examen. 

Après  avoir  noté  les  divergences  et  les  contradictions  mêmes  si  fréquentes 
que  nous  avons  dû  relever  entre  les  divers  généalogistes  pour  plusieurs 


EXCURSION  ARCBÉOL06IQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SKS  BMViftONS.      430 


SAINT-GERMAIN  A  L'ÉPOQUE  DE  LA  LIGUE.  —  GASPARD  FOUCAULD. 


Pendant  les  guerres  de  religion  et  surtout  pendant  celles  de  la 
Ligue,  le  rôle  des  maîtres  de  Saint-Germain  revêtit  un  nouveau  carac- 
tère et  prit  une  importance  encore  plus  grande  que  sous  leurs  pré- 
décesseurs; on  les  trouve  mêlés  à  tous  les  événements,  aux  dissen- 
sions et  aux  luttes  sanglantes  dont  notre  province  fut  le  théâtrcà 
cette  époque  si  critique  et  si  mouvementée. 

XIII.  —  Gaspard  Foucauld,  second  fils  de  Gabriel  embrasse,  le 
premier  de  sa  race,  la  religion  réformée  et  devient  un  des  partisans 
les  plus  décidés,  un  des  chefs  les  plus  entreprenants  de  cette  reli- 
gion dans  la  Marche  et  dans  le  Limousin. 


des  prédécesseurs  de  Gaspard,  il  ne  paraît  pas  inutile,  pour  mieux  faire 
ressortir  ces  divergences,  de  donner  ici  la  liste  des  seigneurs  de  Saint- 
Germain-Beaupré,  telle  qu'elle  est  indiquée  par  chacun  de  ces  généa- 
logistes. 

Généalogie  d'après  Vabbé  Ratier  : 

Branche  des  seigneurs  de  Saint-Germain-Beaiipré  :  1.  Hugues,  fils 

d'Uélie  (lige  des  seigneurs  de  cette  branche).  —  à.  Etienne.  —  3,  Hugues  II 
(donation  de  4115).  —  4.  Amelin.  -  5.  Bertrand.  —  6.  Amelin  II.  — 
7.  Ravmond,  —  8.  Guillaume  1",  dit  Gui.  —  9.  Gui  4'^  —  10  Gui  11.  — 
H.  Gui  ou  Guyard.— 42.  Guillaume  m.  —  13.  Gui  III.—  14.  Guillaume  IV. 

—  15.  Auberlon  Albert.  —  16.  Jean. — 17.  Marc.  — 18.  André. —  19.  Jacques. 

—  30.  Gabriel  I".  —  24.  Gaspard  (et  après  ce  dernier).  —  2i.  Gabriel  II. 

—  23.  Henri.  —  24.  Louis.  —  26.  Armand-Louis. 
Généalogie  d'après  le  procès- oerbal  d'installation  de  t7î5  : 

i.  Hugues  (donation  de  1 1 15).  —  2.  Guillaume  1®'.  —  3.  Guillaume  II.  — 
4.  Gui  !«'.  —  5.  Gui  ou  Guyard.  —  6.  Guillaume  III.  —  7.  Guillaume  IV. 

—  8.  Aubert.  —  9.  Jean.  —  10. Marc.  —  i  I.  Jacques.  —  12.  Gabriel  I^^.  — 
13.  Gaspard,  etc....  (comme  à  celle  de  Tabbé  Ratier). 

Généalogie  d'après  le  père  Anselme  : 

I.  Hugues  (donation  de  1145).  —  2.  Guillaume  1''.  —  3.  Guillaume  II. 

—  4.  Emcric  (cités  par  ordre  de  date,  mais  sans  que  la  filiation  en  soit  bien 
constatée).  —  5.  Gui  I'^  —  6.  Gui  II.  —7.  Guillaume  III.  --  8.  Gui  III.  — 
9.  Aubert.  —  iO.  Marc.  —  H.  André.  —  12.  Jacques.  —  13.  Gabriel  l'^ 

—  14.  Gaspard....  (les  autres  comme  ci- dessus). 
Généalogie  d'après  le  Nobiliaire  de  Nadaud  : 

(Le  commencement  fait  défaut),  après  Raymond,  Gis  d^Hugues,  il  cite  : 
I.  Gui.  —  2.  Gui  II,  ou  Guyard.  —3.  Guillaume.  — 4.  Gui  III.  — 5.  Aubert. 

—  6.  Jean  (la  suite  manque). 


440  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  niSTORIQUB  DD  LIMOUSllT. 

Un  fait  d'arme  bien  connu,  rapporlé  par  nos  chroniques  locales, 
témoigne  de  sa  fougue  et  de  son  intrépidité. 

Au  cours  de  Tannée  1576,  il  se  rendait  à  Châlucet,  alors  lieu  de 
rendez-vous  de  son  parti  qui  projetait  sans  doute  une  reprise  des 
hostilités,  quand  il  fut  surpris  au  petit  bourg  voisin  de  Boisseoil 
par  les  gens  du  capitaine  Vouzelle,  chef  des  milices  de  Limoges, 
qui  surveillaient  les  menées  des  huguenots  et  les  approches  de  la 
forteresse;  Gaspard  n'ayant  avec  lui  qu'un  très  petit  nombre  de 
compagnons,  dut  se  réfugier  dans  Téglise,  où  après  s'être  mis  à  l'abri 
d'un  coup  de  main  il  gagna  les  combles  du  clocher  et  passa  la  nuit. 
Mais  le  lendemain,  à  l'aube  naissante,  s'élant  aperçu  que  la  troupe 
qui  les  bloquait  allait  recevoir  du  renfort,  il  prit  une  résolution 
désespérée  et  se  précipita  au  dehors  l'épée  à  la  main  sur  les  mili- 
ciensqui,  déconcertés  par  cette  brusque  attaque,  ne  purent  résister. 
Gaspard  se  dégagea  ainsi  par  ce  trait  d'audace  et  Gt  même  prison- 
nier le  capitaine  Gallichier,  d'une  honorable  famille  de  Limoges, 
qu'il  emmena  avec  lui  à  Châlucet. 

'   M.  Tabbé  Ratier  raconte  assez  longuement  le  fait  dans  son  histoire 
du  château  de  Saint-Germain  (1). 

Le  môme  historien  dit  que  les  ligueurs,  commandés  par  M.  d'Aul- 
mont,  gouverneur  de  Dun-le-Palleteau,  l'un  de  leurs  principaux 
chefs  en  Marche,  s'étaient  emparés,  à  l'aide  du  canon  qu'ils  avaient 
empruntés  aux  consuls  de  Limoges,  de  plusieurs  places  appartenant  à 
Gaspard  Foucaud  ;  au  nombre  de  ces  places  il  ne  cite  pas  nommé- 
ment le  château  même  de  Saint-Germain-Beaupré  ;  mais  la  prise  du 
château  et  sa  dévastation  par  les  ligueurs  ne  sauraient  faire  de 
doute  à  ce  qu'il  semble,  en  présence  de  la  lettre  si  formelle 
d'Henri,  roi  de  Navarre,  datéede  Sainte-Foy  et  dul"novemdrel580, 
dans  laquelle  s'adressant  à  son  oncle  le  duc  de  Montpensier  il  se 
plaint  en  termes  exprès  «  de  la  démolition  et  du  razement  de  la 
maison  de  Saint-Germain».  L'événement  devait  être  assez  récent  au 
moment  où  le  prince  écrivait  cette  lettre  très  élogieuse  pour  son 
fidèle  aUié  et  nous  ne  croyons  pas  avoir  fait  erreur  en  lui  assignant 
déjà  plus  haut  pour  date  cette  même  année  1880  (2). 


(  i  )  Voir  Le  Château  de  SalnUGermain,  par  Pabbé  Ralier,  page  50.  ■ 

Voir  aussi  Histoire  de  Saint-Martial^  tome  IH,  pages  795  à  799. 

M.  Louis  Guiberl  mentionne  aussi  cet  épisode  dans  son  étude  sur 
Châlucet.  {BulL  Soc,  Arch,  et  Hist,  du  Limousin^  lome  XXXil,  1*  liv., 
p.  326. 

(3)  Nous  avons  déjà  en  effet  fait  mention  de  ce  siège  en  parlant  de  la 
fondation  du  château  et  des  remaniements  qu'il  a  subis. 


BXCURSION  ARCBéOLOGlQUB  A  LA  SOUTERRAIKR   ET  DANS  SES  ENVIRONS      441 

Gaspard  Foucauld  usa  du  reste  largement  de  représailles  et  sa 
vengeance  pour  n'avoir  pas  été  peut -être  tout  à  fait  immédiate, 
n'en  fut  que  plus  complète.  Quelques  années  après  (1587),  il  s'em- 
para successivement  de  Châteauponsac,  du  prieuré  de  UArtige  Qu'il 
livra  au  pillage,  et  un  peu  plus  tard  de  Laurière  où  après  être  tombé 
au  pouvoir  de  Tennemi  il  parvint  à  lui  échapper  grâce  au  secours 
du  vicomte  de  Châteauneuf,  prit  la  place  et  brûla  une  partie  de  ses 
maisons.  Il  réduisit  enfin  sous  l'obéissance  de  son  maître  plusieurs 
villes  de  la  Marche  et  notamment  celle  de  Guéret. 

Le  prince  qui  l'honorait  de  sa  confiance  et  de  son  amitié  le  récom- 
pensa de  ses  services  en  le  nommant,  en  mars  1589,  gouverneur  de 
toutes  les  places  de  son  parti  en  Berry  et  en  Marche,  et  en  1590 
gouverneur  particulier  d'Argenton. 

Stimulé  par  les  faveurs  royales  non  moins  sans  doute  que  par 
l'ardeur  de  ses  convictions  et  de  son  tempérament,  Gaspard  continua 
le  cours  de  ses  entreprises;  mais  s'étant  mis  à  la  poursuite  du 
sieur  de  Toirac,  chef  ligueur,  et  celui-ci  s'étant  réfugié  au  Moulier 
d'Ahun,  le  seigneur  de  Saint-Germain  fut  tué  d'un  coup  d'arque- 
buse sous  les  murs  de  l'abbaye,  qui  fut  du  reste  emportée  d'assaut 
par  ses  soldats,  pillée  et  brûlée  en  partie. 

Gaspard  avait  épousé  en  premières  noces  et  par  contrat  du 
29  août  1563,  Gabrielle  Rancé  fille  d'Hélion,  seigneur  de  la  Cha- 
pelle et  de  Marie  de  Magnac,  dont  il  avait  eu  deux  enfants,  Gabriel 
qui  suit  et  Anne  qui  conserva  la  foi  de  ses  pères  et  devint  abbesse 
de  Morienval;  en  secondes  noces  et  par  contrat  du  28  juin  1572,  il 
épousa  Isabeau  de  Pompadour,  fille  de  Geoffroy,  baron  de  Pompa- 
dour  et  de  Suzanne  des  Cars,  qui  lui  donna  trois  enfants  dont  deux 
moururent  en  bas-âge  et  le  troisième,  Eslher,  fut  mariée  à  Jean 
Tiercelin,  seigneur  de  La  Chapelle. 

M.  G.  Berlhomier  a  publié  la  IcUre  d'Henri  de  Navarre  dans  le 
tome  XXXVllI  du  Bulletin  de  la  Soc,  archéol,  et  histor.  du  Limousin, 
p.  190. 

Voir  au  surplus  Lettres  mlssioes  du  roi  Henri  de  Navarre,  par  Berger  de 
Xivrey,  1843.  Orlg.  Archioes  du  royaume t  sect.  hist.  série  K   101,  9. 

M.  de  Beauforl,  dans  ses  Recherches  archéologiques  {loco  citato)  signale 
bien  ce  siège  comme  ayant  eu  lieu  en  i580. 

M.  Ratier  qui  n*en  parle  pas,  observe  toulefois  dans  son  Histoire  que  le 
château  n*avait  pas  subi  moins  de  deux  sièges  au  zvi*  siècle. 


Âii  SOCIBTR  ARCnÉOLOGlQUE  ET  DiSTORlOlB  BU  LIHOUSIK. 


GABRIEL   II   FOUGAULD 

NLLAGB    DE    L*ABBAYE    DE    GRANDMONT.    —    VISITE    O'hEISRI    IV   A    SACST- 

GERMAIN.  —  NOUVEAU  SIÈGE  DU  CHATEAU.  —  LUTTES  ET  CONVERSION. 

XIV.  —  Gabriel  Foucauld,  deuxième  du  nom,  chevalier  était, 
d'aprèsle Nobiliaire,  seigneurde  Saint  Germain,  de Dun-le-Palleleau, 
de<irozant(1),'vicomledu  Dognon, baron  de  Royan.  etc.,  conseiller 
du  roi  en  ses  conseils  d'Etat  et  privé,  chevalier  de  son  ordre, 
maréchal  des  camps  et  armées,  gouverneur  particulier  de  la  ville 
et  du  château  d'Argenlon,  capitaine  de  cent  hommes  d'armes 
des  ordonnances  du  roi;  il  fut  fait  plus  lard  gouverneur  et 
lieutenant  général  de  la  Haute  et  Basse-Marche,  par  démission  de 
M.  de  Schomberg,  le  23  avril  16â1  et  prêta  serment  de  ses  fonc- 
tions le  10  mai  suivant  (2) 

Gabriel  avait  hérité  des  opinions  religieuses  de  son  père  en  même 
temps  que  de  son  naturel  fougueux  et  remuant;  mais  plus  ambi- 
tieux que  lui,  d'un  caractère  peu  scrupuleux  et  même  cupide,  il 
chercha  à  jouer  un  rôle  personnel  où  le  patriotisme  et  le  désinté- 
ressement ne  tinrf^nt  pas  toujours  la  première  place. 

Son  premier  soin  fut  de  venger  la  mort  de  son  père  qui  ne  lui 
paraissait  pas  suffisamment  expiée  parle  sac  de  l'abbaye  d' A  hun. 
Il  força  le  château  du  Mas-Laurens,  près  Fellotin,  qui  appartenait 
au  sieur  de  Toirac  et  où  celui-ci  s'était  retiré  et  en  fit  passer  la 
garnison  au  fil  de  l'épée  ;  le  cadavre  du  chef  ligueur  ayant  été 

(4)  M.  E.  de  Bcaufort  dit  que  Gabriel  ne  fui  investi  des  seigneuries  de  Don 
et  de  Crozant,  que  vers  la  fin  de  sa  vie,  en  1639.  Cette  assertion  parait  en 
désaccord  avccd*aulrcs  documents  ;  ccpendcant,  en  ce  qui  concerne  Croyant* 
le  président  Ghorlon  relate  que  celle  châlellenie  fut  en  efifct  vendue,  en 
1 639,  par  Louis  Xlll  à  Gabriel  Foucauld,  pour  1 8  ou  âO,000  livres .  (Af^/n.  p .  83). 

(2)  D'après  M.  de  Bcauforl,  Gabriel  aurait,  en  <6?4,  cédé  au  roi  son 
gouvernemenl  d'Argcnlon  et  reçu  en  échange  celui  de  la  Haute  cl  Basse- 
Marche;  mais  la  dale  de  I*annéc  1621  paraît  beaucoup  plus  certaine.  Il 
exislc  dans  les  registres  paroissiaux  de  Sainl-Germain  un  acte  de  baptrmo 
de  Charles,  Tun  des  fils  de  Gabriel,  dressé  le  23  mai  1631  et  dans  lequel 
ce  dernier  esl  déjà  qualifié  de  gouverneur  de  Haute  et  Basse-Marche  Ce 
Charles,  qui  devint  abbé  de  BénévenI,  eut  pour  parrain  Mk»"  de  LuyncS' 
connétable  de  France,  et  pour  marraine  sa  lanle  Eslher  Foucault,  femme  do 
Jean  de  Vance  Tiercelin.  Il  fut  nommé  par  messirc  François  Pot  de  Khodes» 
grand  maître  des  cérémonies  de  France  cl  baplisé  par  Me""  André  Fremyoi, 
patriarche,  aumônier  du  roi,  primat  d'Aquitaine  et  archevêque  de  Bourges- 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS   SES  ENVIRONS.      443 

trouvé  parmi  les  morts  fut  transporté  à  Saint-Germain-Beaupré 
pour  être  cloué  au  pilori.  L'année  d'après  (1592),  Gabriel  se  trou- 
vait au  combat  d'Aumale. 

L'affaire  du  Mas-Laurens  et  le  massacre  de  Toirac  et  des  siens 
n'étaient  que  des  actes  de  cruelles  représailles  que  justifiaient  dans 
une  certaine  mesure  les  mœurs  violentes  du  temps. 

L'invasion  à  main  armée  de  l'abbaye  de  Grandmont  et  les  excès 
de  toutes  sortes  qu'y  commit  le  maître  de  Saint-Germain  méri- 
tent une  qualification  plus  sévère.  Au  mois  de  mai  1596,  les  reli- 
gieux de  la  célèbre  abbaye  avaient  élu  conventuellement  pour  leur 
nouvel  abbé  un  homme  de  grande  piété,  François  Marrand  ;  ce 
choix  déplut  à  Gabriel  qui,  prétextant  d'une  nomination  obtenue  du 
roi  au  profit  de  François  d'Auberoche,  son  allié,  s'empara  de  Grand- 
mont^  non  sans  effusion  de  sang,  profana  les  reliques  et  enleva  de 
riches  dépouilles  qu'il  transporta  à  Saint-Germain.  Le  descendant 
de  ces  pieux  chevaliers  qui  avaient  témoigné  leur  vénération  pour 
cette  abbaye  par  tant  de  libéralités,  ne  craignit  pas  de  mentir  à  leur 
mémoire  en  commettant  de  tels  meurtres  et  de  tels  sacrilèges!  Trois 
ans  après  seulement  intervint  un  arrêt  du  Parlement  de  Paris  qui 
confirmait  l'élection  de  Marrand  ;  mais  les  infortunes  des  religieux 
ne  devaient  pas  se  borner  là;  Une  garnison  commandée  par  Monti- 
gnac,  gouverneur  de  Blois,  et  un  certain  Barreneuve  avait  été 
envoyée  pour  protéger  le  monastère  cl  le  nouvel  abbé;  ces  préten- 
dus défenseurs  se  comportèrent  en  véritables  brigands,  et  il  fallut 
recourir  à  un  appel  au  gouverneur  de  la  Marche  et  même  à  l'em- 
ploi du  canon  pour  les  débusquer  de  la  position.  L'abbaye  pouvait 
enfin  se  croire  sauvée,  lorsque  le  sire  de  Saint-Germain  reparut 
et  commença  une  nouvelle  occupation,  faisant  encore  une  fois,  dit 
le  Père  Bonaventure,  l'office  de  voleur  plutôt  que  de  pourvoyeur. 
Cette  occupation  se  continua  pendant  plusieurs  années  encore, 
peut-être  avec  des  intermittences,  et  la  délivrance  ne  paraît  avoir 
été  bien  définitive  que  vers  l'année  1607  (1). 

Non  moins  que  son  père,  Gabriel  jouissait  de  la  considération 
et  de  l'estime  du  roi  Henri  IV;  Il  avait  combattu  au  service  de  ce 
prince  ou  même  à  ses  côtés  au  siège  de  Rouen,  à  la  journée  d'Ar- 
qués et  à  la  bataille  d'Ivry  (14  mars  1390).  Mais  dans  la  suite  sa 
conduite  à  l'égard  de  son  souverain  devint  fort  équivoque  et  ne 
mérite  assurément  pas  les  qualifications  assez  élogieuses  que  lui 
donnent  quelques  historiens.  L'abbé  Ralier  convient  lui-même  qu'il 
fut  mêlé  non-seulement  au  menées  des  protestants,  mais  encore  à 
plus  d'une  intrigue  et  d'une  cabale  qui  allaient  contre  les  inten- 

(I)  Histoire  de  Saint- Germain ^  p,  59. 


44  i  SOCIETE  ARCnÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LIMOUSIN. 

lions  du  roi.  Les  Mémoires  de  Sully  précisent  et  accentuent  le  carac- 
tère de  son  altitude  dans  diverses  circonstances;  ils  nous  montrent 
ainsi  Gabriel  conspirant  en  1594  avec  le  duc  de  Bouillon  el  d'au- 
tres seigneurs  pour  établir  une  République  aristocratique,  à 
Texemple  des  Pays-Bas,  el  dont  l'électeur  Palatin  aurait  été  le  chef. 
Une  lettre  du  roi  lui-môme  écrite  à  Gabriel  au  cours  de  l'année 
1597  (vers  le  4  juin),  fait  allusion  à  ces  griefs  et  contient  de  plus,  à 
radresse  de  ce  dernier,  des  remontrances  assez  sévères  au  sujet  de 
faits  qui  ressemblent  beaucoup  à  des  abus  de  confiance  (1). 

En  dépit  de  ces  griefs  assez  fondés,  Henri  IV,  qui,  par  politique 
autant  que  par  nature,  oubliait  volontiers  ou  feignait  d*oublier  les 
les  torts  de  ses  serviteurs  pour  ne  se  souvenir  que  des  services  ren- 
dus, donna  à  Gabriel  une  marque  assez  particulière  de  sa  considé- 
ration en  le  visitant  à  Saint-Germain,  au  retour  de  ce  voyage  en 
Limousin  qui  lui  avait  été  inspiré  par  ses  calculs  personnels,  mal- 
gré Topposition  de  la  Cour  et  qui  fut  pénible  mais  fécond  en  ré- 
sultats. Le  roi  arriva  le  24  octobre  1605,  accompagné  de  Sully  el 
d'une  nombreuse  suite,  coucha  au  château  et  en  repartit  le  lende- 
main 25  octobre.  Il  ne  séjourna  donc  pas  à  Saint-Germain  pendant 
huit  jours,  comme  l'a  écrit  Tabbé  Ratier,  employant  ses  loisirs  à 
chasser  el  à  recevoir  la  noblesse  des  environs.  Les  meilleures  preu- 
ves que  Ton  a  de  ce  court  séjour  sont  les  intéressantes  lettres  écrites 
par  le  roi  à  la  reine  durant  cette  période  de  son  voyage  (2j.  Le  châ- 
teau relevé  de  ses  ruines  depuis  le  siège  de  1580,  devait  alors  se 

(i)  Cette  lettre  qui  existe  ù  la  Bibliothèque  nationale,  fonds  BéihuDC. 
mss.  8955,  (^  36  recto,  a  été  publiée  par  M.  G.  Berthomicr  dans  sa  notice 
[Bull,  XXXVIII  de  la  Soc,  arch,  et  hlst.  du  Limousin,  p.  190  et  suiv.;. 

Quant  aux  passages  des  Mémoires  de  Sully  où  il  est  parlé  de  Gabriel 
Foucauld  et  qui  ont  été  aussi  relatés  par  M.  G.  Berthomier  dans  cette 
même  notice,  consulter  ces  Mémoires  (ColIeclionMich.  etPouj.,  chap.  lxxx. 
p.  27î.  —  Chap.  Liv  et  lxxv,  p.  252). 

(9)  Les  lettres  relatées  dans  la  notice  de  M.  G.  Berthomier  citée  plus 
haut,  portent  les  dates  des  34  octobre  (deux)  35  et  36  octobre  1005.  Les 
deux  premières  ont  précédé  Tarrivéc  du  roi  à  Saint-Germain,  celle  da  35 
annonce  son  départ  du  môme  lieu  cl  la  dernière  a  été  écrite  en  Berr\\ 
Dans  cette  correspondance,  le  prince  exprime  son  impatience  de  quitter 
une  province  où  il  a  été  éprouvé  moralement  et  physiquement,  et  ensuite 
sa  satisfaction  d'en  élre  sorti  pour  rentrer  dans  a  la  douce  France  ». 

Il  convient  toutefois  de  noter  une  autre  leUre  d'Henri  IV  adressée  le  8 
novembre  1605  au  Landgrave  de  Hcsse  et  dans  laquelle,  parlant  de  son 
voyage  en  Limousin,  il  dit  qu'il  Ta  accompli  très  heureusement. 

Le  roi  était  parti  pour  ce  voyage  le  15  septembre  précédent  avec  une 
petite  armée,  dont  rarlilloric,  composée  de  deux  canons,  deux  couleuvrines 
et  deux  bastardes,  était  sous  les  ordres  du  Sdly. 


EXCURSION  ARCHEOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DAMS  SES  ENVIRONS.      44$ 

trouver  en  bon  état  de  restauration  et  devait  offrir  de  grandes  res- 
sources, car,  au  rapport  de  Tintendant  royal,  malgré  la  suite  nom- 
breuse du  roi  et  Taffluence  probable  des  visiteurs,  la  dépense 
extraordinaire  ne  dépassa  pas  soixante-dix  livres  tournois.  On  a 
prétendu  que  le  roi,  en  souvenir  de  celte  réception,  avait  ajouté 
une  troisième  fleur  de  lys  aux  armes  des  Foucauld;  mais  nous 
avons  de  justes  motifs  de  penser  que  ces  armes  (existaient  déjà 
telles  quelles  et  depuis  longtemps  dans  la  famille. 

Cinq  ans  après,  Henri  IV  tombait  sous  le  couteau  de  Ravaillac. 
Sa  mort  fut  le  signal  un  peu  partout  de  nouvelles  dissensions  et  de 
troubles  que  sa  main  prudente  el  énergique  n'était  plus  là  pour 
réprimer  ou  pour  atténuer.  Gabriel  Foucauld  n'avait  point  renoncé 
à  la  foi  protestante,  ni  môme  sans  doute  aux  visées  de  son  ambi- 
tion personnelle  ;  il  passait  dans  toute  la  région  pour  le  chef  et  le 
meneur  du  parti.  Seigneur  riche  et  puissant,  il  devait  être  plus 
qu'un  autre  exposé  aux  rancunes  et  aux  entreprises  de  ses  adver- 
saires politiques  qui  avaient  aussi  peut-être  contre  lui  plus  d'une 
injure  à  venger;  la  faiblesse  du  gouvernement  de  la  régente  favo- 
risait aussi  les  représailles  et  excitait  les  revanches  à  prendre  en 
fournissant  plus  d'un  prétexte. 

C'est  pendant  cette  époque,  à  une  date  fort  dificile  d'ailleurs  à 
préciser,  que  se  place  Taggression  violente  dont  le  château  de 
Saint-Germain  fut  encore  une  fois  l'objet,  en  l'absence  de  son  sei- 
gneur, et  que  nous  avons  déjà  racontée  avec  quelques  détails. 

Sous  le  prétexte  de  concihabules  qui  s'y  tenaient  entre  les  pro- 
testants, mais  obéissant  sans  doute  à  des  rancunes  personnelles  ou 
à  des  inimiliés  de  famille,  un  fils  du  gouverneur  de  Dun,  d'An- 
mont,  surprit  un  ordre  du  souverain  pour  mettre  garnison  dans  le 
château  et  s'en  empara  par  la  force,  malgré  la  résistance  opiniâtre 
de  la  châtelaine  et  de  quelques  serviteurs;  nous  savons  comment  il 
le  démolit  presque  entièrement  et  comment  aussi  Gabriel  le  rebâtit 
par  la  suite  en  y  faisant  de  grands  embellissements  et  en  commen- 
çant tnéme  autour  du  parc  une  muraille  fortiûée  d'une  vaste 
étendue,  pour  prévenir  le  retour  de  pareilles  surprises.  Ce  siège  du 
reste  fut  le  dernier. 

L'aggression  de  d'Aulmont  ne  resta  pas  impunie  ;  averti  par  son 
fidèle  allié  Chateauneuf,  le  sire  de  Saint-Germain  se  hâta  de  se 
rendre  à  Paris  où  il  se  disculpa  assez  facilement.  D'Aumont  fut 
condamné  à  faire  amende  honorable,  à  payer  à  la  victime  une  forte 
indemnité  et  de  plus  il  perdit  son  gouvernement  de  Dun,  qui  fut 
même  plus  tard  conféré  à  Gabriel  Foucauld  (1). 

(I)  L'auteur   de    V Histoire  du  château  [de  Saint^Germain    a    donné 


4id  SOCIÉTÉ  ARCHROLOGIQUP  ET   HISTORIQUE   DO   LIMOUSIN. 

La  carrière  de  ce  dernier  ne  se  finit  pas  avec  ces  événements. 
Il  vécut  longtemps  encore,  trop  peut-être  pour  sa  gloire  et  pour  sa 
réputation  ;  son  caractère  entreprenant  et  son  esprit  de  prosélytisme, 
mais  surtout  son  ambition  et  son  avidité  trouvèrent  bien  des  occa- 
sions nouvelles  de  s'exercer,  et  lui  suscitèrent  des  conflits  avec  ses 
voisins  et  des  embarras  avec  Tautorilé  royale.  Il  dut  céder  enfin 
aux  désirs  de  Louis  XIII  qui  lui  voulait  quelque  bien,  mais  encore 
plus  aux  volontés  de  l'inflexible  cardinal  son  ministre,  quand  peu 
d'années  avant  sa  mort  il  abjura  solennellement  le  protestantisme 
avec  les  personnes  de  sa  famille  en  l'église  de  Magnac-Laval  et 
entre  les  mains  de  Tarchevéque  de  Bourges  venu  à  cette  intention. 

Dans  cette  dernière  phase  de  Texistence  de  Gabriel,  à  coté  des 
actes  connus  de  sa  vie  publique,  il  y  aurait  d'autres  faits  à  recher- 
cher et  à  signaler  mais  sur  lesquels  règne  encore  une  certaine 
incertitude.  Devenu  gouverneur  de  la  Haute  et  Basse-Marche  en 
1621  suivant  les  uns,  en  1624  selon  d'autres,  il  paraît  avoir  fait  de 
son  pouvoir  un  usage  assez  arbitraire  et  tyrannique,  pour  ne  pas 
dire  plus.  Un  célèbre  chroniqueur  du  temps,  Tallemant  des  Réaux, 
nous  a  laissé  de  lui  dans  ses  Historiettes,  une  fort  vilaine  peinture  : 
«  Saint-Germain-Beaupré,  dit-il,  n'était  ni  un  homme  de  cœur,  ni 
un  homme  de  maison  fort  illustre;  ça  été  un  fort  grand  tyran  en 
toutes  choses  :  quand  un  paysan  ou  un  bourgeois  avait  des  biens,  il 
le  forçait  à  donner  sa  fille  à  quelqu'un  des  gens  de  M.  le  Gouver- 
neur et  c'était  ainsi  qu'il  récompensait  ses  domestiques.  Grand  vo- 
leur, grand  emprunteur  à  ne  jamais  rendre  et  grand  distributeur 
de  coups  de  bâton.  Quelquefois  il  lui  est  arrivé  de  faire  assassiner 

des  gens Madame  de  Rambouillet,  eu  égard  au  pays  montueux 

où  il  habitait  et  à  sa  manière  de  vivre,  disait  que  c'était  un  autre 
vieil  de  la  montagne  »  fl). 

L'auteur  du  château  de  Saint^ermain,  qui  connaissait  ce  pas- 
sage des  historiettes  et  le  mot  de  Madame  de  Rambouillet,  car  il  a 


beaucoup  de  détails  curieux,  non  sur  le  siège  lui-môme,  mais  sur  des 
faiis  postérieurs  qui  s'y  rallachent,  en  même  temps  que  sur  certaines 
particularités  de  la  vie  intime  et  de  famille  de  Gabriel  Foucauld  ;  ces  détails 
consistent  surtout  en  extraits  de  la  correspondance  de  Gabriel  avec  sa 
femme,  son  intendant  et  d*aulres  personnages,  correspondance  que  l'au- 
teur avait  eu  la  bonne  fortune  d'avoir  à  sa  disposition  et  qui  ne  se  reu-onve 
malheureusement  plus  de  nos  jours.  Nous  renvoyons  nos  lecteurs  à  ces 
extraits  qu'il  eut  été  trop  long  d'insérer  ici. 

(1)  Historiettes  du  Règne  de  Louis  XJII, 

Tallemant  des  Réaux  a  tracé  d'Heuri,  fils  de  Gabriel,  un  portrait  équiva- 
çnt  de  celui  du  père  et  que  nous  reproduisons  plus  loin. 


EXCURSION  ARCBEOLOGIQUK  A  LA  SOUTERRAIKE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      447 

inlitulé  un  de  ses  chapitres  «  le  vieux  de  la  montagne  »,  ne  préteguères 
d'importance  aux  accusations  de  Tallemant  de  Réaux  ;  «  des  juge- 
ments si  passionnés,  dit-il,  ne  sont  guères  dangereux  ». 

Il  est  permis  de  faire  une  part  à  Texagération,  dans  ce  portrait 
du  chroniqueur  comme  dans  beaucoup  d'autres  émanés  de  sa  plume, 
qui  passent  pourtant  en  général  pour  avoir  un  fond  de  vérité. 

Mais  on  a  contre  Gabriel  un  témoignage  plus  grave,  c'est  celui 
des  Cahiers  de  la  Marche,  où  se  lisent  les  lignes  suivantes  :  «  En 
1645,  les  habitants  portèrent  plainte  contre  Gabriel  Foucauld,  leur 
gouverneur  et  obtinrent  contre  lui,  en  163S,  une  sentence  par  con- 
tumace, rendue  en  la  chambre  de  la  Tournelle....  Henry  Foucauld, 
fils  aîné  du  gouverneur  de  la  Marche,  en  1642,  lui  succéda  dans 
cette  charge  »  (d). 

La  concision  de  ces  lignes,  le  vague  peut-être  intentionnel  dans 
lequel  elles  restent  sur  la  nature  de  la  condamnation,  ne  peuvent 
rien  enlever  à  la  réalité  des  faits  et  nous  laissent  entrevoir  une 
longue  suite  de  griefs,  de  débats  et  de  luttes  entre  Gabriel  Foucauld 
et  ses  administrés,  où  celui-là  malgré  son  audace  et  la  fertilité  de 
ses  moyens,  en  dépit  de  ses  hautes  protections,  et  après  bien  des 
péripéties,  finit  sans  doute  par  ne  pas  être  le  plus  fort. 

Gabriel  Foucauld  n'était  pas  un  homme  de  trempe  ordinaire  :  sa 
personnalité  se  détache  dans  la  longue  galerie  des  seigneurs  de 
Saint-Germain  avec  un  relief  tout  particulier,  et  jce  n'est  pas  sans 
raison  que  l'abbé  Ralier  lui  a  fait  une  place  tout  à  fait  exception- 
nelle dans  son  histoire,  en  consacrant  à  sa  biographie  ses  plus  longs 
chapitres. 

Mais  si  le  portrait  physique  qu'en  trace  l'honorable  auteur  est 
tout  à  fait  séduisant,  quand  il  nous  le  représente  d'après  des  pein- 
tures de  famille,  sous  des  traits  dont  la  fierté  était  tempérée  par 
une  grâce  incomparatde  (2)  ;  si  la  lecture  des  extraits  de  sa  corres- 
pondance révèle  chez  Gabriel  l'existence  de  certaines  qualités 
privées  et  de  sentiments  de  famille  très  estimables;  s'il  possédait 
évidemment  aussi,  malgré  les  dires  de  Tallemant,  quelques  unes 
des  vertus  de  sa  race. et  de  son  rang,  la  fermeté,  la  bravoure,  le 
dévouement  envers  les  siens  qui  paraît  lui  avoir  concilié  beaucoup 
d'amis  ou  d'alliés  en  lesquels  du  reste  sa  puissance  trouva  de  solides 
appuis;  on  ne  saurait  souscrire  toutefois  au  jugement  beaucoup 
trop  sympathique  et  trop  indulgent  que  l'auteur  porte  sur  la  mora- 
lité de  l'homme  et  dans  Tapprécialion  de  ses  actes. 

L'abbé  Ratier  ne  trouve  guère  à  lui  reprocher  que  son  impêtuo- 

(1)  Cahiers  de  la  Marche^  édités  par  M.  L.  Duval,  pages  74  et  suivantes. 

(2)  Voir  Histoire  du  Château^  page  9f  • 


448  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  BT  HISTORIQUK  DU  LIMOUSIN. 

site  de  caractère  qui,  dans  sa  jeunesse  surtout,  le  rendit  si  redou- 
table à  ceux  qui  avaient  le  malheur  de  lui  déplaire.  L*âge  corrigea, 
dit-il,  ce  terrible  défaut,  mais  ne  répara  pas  tous  les  désastres  qo  il 
avait  causés  (1). 

Il  subsiste  malheureusement  contre  ce  personnage  trop  de 
preuves  pour  nous  convaincre  qu'il  avait  d'autres  défauts  que  Tim- 
pétuosité  du  caractère  et  que  ces  défauts  ne  passèrent  pas  chez  lui 
avec  rage.  Il  ne  fut,  à  dire  vrai,  ni  le  sujet  fidèle,  ni  le  cœur 
excellent,  ni  le  seigneur  bienveillant  que  son  panégyriste  s'est 
efforcé  de  nous  représenter.  Son  excuse  fut  d'être  né  et  d'avoir  été 
élevé  en  un  temps  de  trouble  et  de  révolution  où  les  notions  du 
juste  et  de  l'injuste  étaient  facilement  confondues,  où  toutes  les 
passions  et  tous  les  intérêts  étaient  en  lutte,  et  la  raison  du  plus 
fort  était  souvent  la  seule  loi  qui  s'imposât  aux  consciences  de  ses 
contemporains. 

Gabriel  Foucauld  mourut  en  1642. 

Il  avait  épousé  le  li  novembre  1607,  Jeanne  Poussard,  fille  de 
Charles,  seigneur  de  Fors  et  du  Vigean  et  d'Esther  de  Pons.  De  ce 
mariage  provinrent  six  enfants.  1**  Henri  dont  nous  parlons  plus 
loin  ;  2*  Louis,  qui  s'acquit  une  grande  notoriété,  sinon  la  célébrité 
sous  le  nom  de  comte  du  Dognon;  3"*  François,  seigneur  d'Eguzon, 
mort  à  l'armée  du  roi  en  Flandre,  n'étant  encore  que  volontaire  ;4* 
Charles,  abbé  de  Bénévenl  en  1638;  5**  Anna,  devenue  abbesse  de 
Morinval,  après  sa  tante;  6*  Gabrielle  qui  épousa  un  seigneur  de 
Monlagnac  (2). 


HENRI  F0CJC4UD  ET  LOU(S  COMTE  DU  DOGNON  SON   FRÈRE 
UNE  QUESTION  A  RÉSOUDRE 

XV.  —  Henri  Foucauld,  chevalier,  vicomte,  puis  marquis  de 
Saint-Germain-Beaupré,  comte  de  Crozant,  etc.,  conseiller  ordinaire 

(1)  Le  père  Bonaventare  de  Saint- Amable  ne  pouvait  lui  pardonner  le 
pillage  des  abbayes  où  tant  d*atrocilés  avaient  été  commises  et  dit  de  lui 
que,  môme  après  sa  ccoversion,  il  conserva  dans  les  actions  peu  réglées  de 
sa  vie  un  reste  de  la  lie  de  son  hérésie. 

(9)  A  la  suite  de  la  biographie  de  Gabriel,  l'abbé  Ratier,  fait  mention 
d*une  branche  de  la  famille  de  Saint-Germain,  dont  Sully  a  parlé  dans  ses 
MémolreBj  les  Saint-Germain  de  Clan,  en  Poitou,  qui  étaient  aussi  calvinistes 
et  firent  parler  d  eux  pendant  cette  même  période  ;  un  de  ses  membres 
cependant  prit  part  à  une  expédition  en  Hongrie  contre  les  Turcs  et  s'y 
couvrit  de  gloire  (1599).  —  Cette  branche  reviut  aussi  au  catholicisme. 


KIGURSlOlf  ARCHEOLOGIQUE  A  LA  SOUTURRAINB  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      449 

au  conseil  d'état  et  privé,  maréchal  des  camps  et  armées  du  roi, 
devint  comme  son  père  gouverneur  de  la  Haute  et  Basse-Marche 
et  du  vivant  même  de  celui-ci  qui  résigna  cette  charge  en  sa 
faveur  (1). 

Admis  à  la  cour  où  il  dût  même  passer  quelques  années  de  sa 
jeunesse  ainsi  que  son  frère  Louis,  qui  y  fut  élevé  (3),  il  entra  tout 
jeune  au  service  du  roi  et  parcourut  une  carrière  militaire  longue 
et  assez  brillante,  au  rapport  des  généalogistes  et  des  historiens  de 
la  maison.  On  s'accorde  en  effet  à  le  représenter  comme  se  trou- 
vant déjà  guerroyant  à  Tlle  de  Ré  en  1630,  lors  de  la  défaite  des 
Anglais,  au  siège  de  la  Rochelle  en  1638,  à  Privas  en  1630,  puis 
aux  batailles  de  Veillanes,  de  Garignan.  Henri  à  cette  époque 
n'avait  guères  plus  de  SI  à  22  ans  ;  quelques  années  après,  il  lève 
une  compagnie  de  cavalerie  et  se  fait  remarquer  par  sa  hardiesse 
contre  l'ennemi.  En  1642  il  est  à  Lens,  puis  au  secours  de  Gasal,  au 
siège  de  la  Molhe  en  Lorraine,  à  Landrécies,  à  Gastellet,  à  Arras, 
à  la  levée  des  sièges  du  Mouron,  de  Gorbie,  à  la  défaite  du  comte 
de  Bucquoy  ;  il  aurait  même  été  blessé  le  9  juillet  1671,  au  siège  de 
Nimègue,  à  un  âge  déjà  très  avancé.  Partout,  à  ce  qu'on  assure, 
Henri  donna  des  preuves  de  sa  valeur  et  de  son  courage  (3). 

Aussi  en  récompenses  de  ses  services  le  roi  érigea-t-il  à  son 
profit  en  marquisat  la  terre  de  Sainl-Germain-Beaupré  qui  était 
devenue  fort  importante  (Lettre  du  mois  d'août  1645)  (4). 


(1)  D*après  les  Cahiers  de  la  Marche,  il  n^aurail  reçu  ce  gouvernemeul 
qu'après  la  mort  de  son  père  en  1042.  Le  discours  d*inslallaiion  dii,  au 
coQlruire,  qu'il  en  fui  invesii  en  1630.  Si  cette  dernière  date  n'est  pas  abso- 
lument certaine,  il  y  a  lieu  de  croire  du  moins  qu'Henri  était  déjà  gouver- 
neur en  1635;  nous  en  donnerons  plus  loin  un  témoignage  qui  semble  assez 
convaincant. 

(2)  M.  G.  Berthomier  dans  son  étude  sur  LouU  Foucauld,  comte  du  Do- 
gnon,  vice-anUral  et  maréchal  de  France  (Montluçon,  imp.  Herbin,  1890), 
a  publié  d'après  la  Gazette  de  Renaudot,  le  curieux  récit  d'un  ballet  qui  fut 
donné  à  la  Cour  en  1633  et  dans  lequel  figuraient  Henri  Foucauld  et  son 
frère,  à  côté  du  baron  du  Vigean,  de  Candole,  du  duc  de  Longueville  et 
autres  brillants  seigneurs. 

(3)  Si  ce  n'est  peut-être  à  la  bataille  d'Eiwhein,  en  1673  (?),  où  du  Buis* 
son  on  plutôt  Gaticn  des  Courtils  lui  reproche  de  s'être  lait  couvrir  de 
honte  (voir  le  Nobiliaire)»  Le  grand  Age  d'Henri,  il  avait  à  cette  époque 
soixante- cinq  ou  soixante-six  ans,  pourrait  expliquer  cette  défaillance.  Mais 
le  fait  même  est-il  bien  établi  ? 

(4)  L'érection  de  la  terre  de  Saint-Germain  en  marquisat  à  cette  date  ne 
fait  aucun  doute.  Dans  le  discours  d'installation  de  1715,  il  est  dit  que  le 
roi  créa  ce  marquisat  en  considération  de  la  valeur  et  des  services  qu'Henri 


450  soaiéré  ARCHÉOLOr.iotir.  kt  iiistoriqlb  di:  limousin. 

L*abbé  Ralicr  dépeint  le  nouveau  marquis  comme  un  seigneur 
très  opulent,  hospitalier  et  recevant  ses  invités  avec  une  magniti- 
cence  toute  royale.  La  description  qu'il  fait  du  château  à  cette 
époque,  de  son  mobilier  somptueux,  de  sa  galerie  de  tableaux,  du 
personnel  nombreux  et  de  toutes  sortes  qui  Toccupait,  des  plaisirs 
délicats  et  des  distractions  variées  qu'on  y  trouvait,  renferme  à 
coté  de  quelques  exagérations  probables,  une  assez  grande  part  de 
vérité.  Mademoiselle  de  Monipensier  donl  nous  raconterons  plus 
loin  le  voyage  à  Saint-Germain  du  temps  d'Henri  Foucauld,  en  a 
fourni  elle-même  le  témoignage  et  ce  témoignage  n'est  point  banal. 

Henri  Foucauld  avait  épousé,  le  46  mars  164i,  Agnès  de  Bailleul, 
fille  de  Nicolas,  chevalier,  baron  de  Château-Gontier,  président  à 
mortier  au  parlement  de  Paris,  surintendant  des  finances,  ministre 
d'état,  et  d'Elisabeth  Mollier,  dont  il  eut  deux  enfants  :  Louis  et 
Gabriel,  ce  dernier  connu  sons  le  nom  de  comte  de  Crozant(l). 

Enfin  selon  les  annales,  Henri  mourut  à  Saint-Germain  le  il 
septembre  1678,  après  avoir  vu  son  fils  Louis  investi  de  son  titre  et 
de  la  survivance  de  son  gouvernement  dès  1674. 

Cette  belle  carrière  du  marquis  de  Saint-Germain,  terminée  par 
une  mort  paisible,  au  milieu  des  siens,  dans  le  château  de  ses  an- 
cêtres, entourée  môme,  à  ce  que  rapportent  plusieurs  chroniqueurs, 
des  sympathies  et  des  respects  de  ses  vasseaux,  cette  carrière  et 
cette  mort  paraissent  très  véridiques.  Et  cependant,  si  l'on  cons- 
tate certaines  sources  d'information  assez  dignes  de  foi,  qu'il  est 
difficile  de  négliger,  bien  qu'elles  aient  été  ignorées  ou  passées 
sous  silence  par  les  divers  généalogistes,  la  biographie  d'Henri 
Foucauld  telle  que  nous  venons  de  la  présenter  se  trouverait  être 
tout  à  fait  problématique. 

avait  rendu  aux  combals  de  l'Ile  de  Ré,  et  à  plusieurs  sièges  de  villes  donl 
le  dénombremenl  est  tait  dans  les  letires  paientes  qui  turent  enregislrées 
en  parlement,  en  la  chambre  des  comptes  ei  à  la  coar  des  aides. 

(4)  Agnès  de  Bailleul  survécut  de  longues  années  a  son  mari,  elle  mou* 
rut  en  effet  à  Paris,  le  91  novembre  1706,  et  fut  inhumée  à  Belle-Chasse 
où  elle  s'était  retirée. 

D*après  le  Nobiliaire,  Gabriel  Foucauld,  comte  de  Crozanl,  iils  cadet 
d'Henri,  fit  plusieurs  campagnes  on  qualité  d*aide-de-camp  et  de  lieulenaal 
de  la  colonne  du  régiment  des  gardes  et  se  distingua  en  diverses  rencontres, 
particulièrement  au  siège  de  Maêsiricht,  ^  la  conquête  de  la  Franche-Conté. 
il  prit  sa  retraite  dans  son  château  de  Croyant,  non  loin  duquel  il  fit  édifier, 
on  1686,  une  chapelle  connue  sous  le  nom  de  Notre-Dame-des-Places  qu'on 
y  voit  encore  de  nos  jours. 

M.  Tabbé  Ralier  a  consacré  au  comte  de  Crozant  el  à  sa  fondation  deux 
chapitres  (ch.  xxi  et  ixii),  et  dit  qu'il  mourut  à  la  fia  de  Tannée  1689. 


EXCURSION  ARGHEOLOGIQUK  A  LA  S0T3TERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      ^51 

Un  autre  chroniqueur  du  temps,  fort  connu  et  très  estimé  des 
érudits,  Pierre  Robert,  lieutenant  général  au  siège  du  Dorât,  qui 
était  un  coiitemporain  et  connaissait  bien  les  Foucauld,  dit  expres- 
sément dans  sa  nouvelle  chronique  qu'Henri  fut  impliqué  dans  les 
poursuites  faites  contre  un  certain  nombre  de  grands  seigneurs 
aux  grands  jours  de  Poitiers  (septembre  1634  à  la  fête  des  rois 
1635)  pour  voleries,  pilleries,  concussions,  exactions,  meurtres, 
incendies  et  autres  malversations,  et  qu'au  mois  de  février  ou  de 
mars  1635,  il  y  eut  contre  lui  un  furieux  arrest  du  Parlement  de 
Paiis,  par  défaut  et  contumace  le  condamnant  à  avoir  la  tête  tran- 
chée, sa  maison  rasée...,  le  déclarant  indigne  et  privé  de  sa  charge 
de  gouverneur,  ce  qu'ayant  prévenu  de  bonne  heure  il  s'en  était 
défait  au  profit  de  son  lils  aîné.  Et  Pierre  Robert  ajoute  que  le  dit 
sieur  de  Saint-Germain  mourut  en  cet  état,  sans  avoir  jamais  osé 
purger  sa  contumace  (1). 

L'articulation  est  fort  nette  ;  mais  ce  n'est  pas  tout.  Le  chroni- 
queur du  Dorai,  parlant  d'Henri,  le  qualifie  par  ces  mots  :  Feu  mes- 
sire  et  affirme  qu'il  mourut  avant  lui  ;  or,  comme  Pierre  Robert  est 
lui-même  décédé  en  1658,  il  doit  s'en  suivre  nécessairement 
qu'Henri  Foucauld  n'était  plus  vivant  à  cette  dernière  date  et  n'a 
pu  mourir  par  conséquent  en  1678  (4). 

Ces  indications  si  précises  de  Pierre  Robert  trouvent  un  appui 
dans  d'autres  témoignages  (3)  et  notamment  dans  un  passage  de 
Tallemant  des  Réaux;  ce  dernier,  qui  a  tracé  de  Gabriel  Foucauld 
le  portrait  peu  flatteur  que  nous  connaissons  et  qui  n'a  pas  été  plus 
indulgent  pour  ses  enfants,  s'est  exprimé  en  ces  termes  sur  le 
compte  d'Henri  :  «  Celui  dont  nous  parlons  et  qui  est  son  aîné 
(Tallemant  venait  de  parler  de  Louis,  comte  du  Dogoon)  n'a  pas 

(1)  Extrait  de  la  nouvelle  chronique  de  Pierre  Bobert  (de  f  598  à  1645). 
—  Grands  jours  de  Poitiers  (1634-35).  —  Voir  aux  Chartes^  chroniques, 
mémoriaux  pour  seroir  à  V histoire  de  la  Marche  et  du  Limousin^  pu- 
bliés sous  les  auspices  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  ans  de  la 
Gorrèze,  par  Alfred  Leroux  et  feu  Auguste  Bosvieux.  —  Tulic,  imp.  CrauflFon, 
1886  p.  299. 

Nous  donnons  cet  extrait  comme  appendice. 

(3)  M.  A.  Leroux,  ne  pouvant  douter  de  la  véracité  du  récit  de  Pierre 
Robert,  n'hésite  pas  à  penser  qu'Henri  mourut  avant  1658  et  que  c'est  par 
erreur  que  le  Nobiliaire  place  sa  mort  en  1678.  {Histoire  de  la  réforme 
dans  la  Marche  et  le  Limousin,  —  Limoges,  Gély,  1888,  p.  \li  et  noie    ). 

(3)  On  nous  assure  qu'un  honorable  magistrat  du  pays  a  euentre  ses  mains 
des  pièces  de  la  procédure  faite  contre  Henri  Foucauld.  La  condamnation 
d'un  personnage  de  cette  famille  ne  peut  donc  guère  être  révoquée  en 
doute  ;  la  seule  difficulté  est  d'établir  l'identité  du  personnage  môme. 


452  sociérÉ  arcbéologiquk  et  historique  du  lihoosin. 

eu  meilleure  réputation  que  son  père  pour  la  bravoure  et  n'est 
peut-être  guère  moins  pillard.  Il  eut  une  querelle  avec  un  genlil- 
homme  de  feu  M.  le  prince,  nommé  Villepéau,  qu'il  attaqua  si  bien 
à  son  avantage  dans  la  rue  Saint-Antoine,  qu'un  grand  laquais  qu'il 
avait  lui  donna  un  coup  d*épée  dont  il  mourut.  Saint-Germain 
voulut  faire  passer  cela  pour  une  rencontre;  on  demanda  grâce  au 
roi,  qui  dit  :  «  Ce  n'est  pas  à  lui  qu'il  faut  le  donner,  c'est  à  son 
grand  laquais  »  (1). 

Tallemant  continue  en  faisant  le  récit  des  difficultés  que  le  sei- 
gneur de  Saint-Germain  éprouva  dans  la  suite  pour  se  marier»  de 
son  mariage  avec  la  fille  de  feu  le  Président  Bailleul  et  plus  taixl 
de  ses  malheurs  conjugaux  et  de  ses  vices,  qu'il  décrit  avec  une 
liberté  de  langage  que  l'on  ne  saurait  reproduire  ici. 

Comment  concilier  cette  peinture  plus  que  déplaisante,  ces 
graves  accusations,  cette  condamnation  à  la  peine  capitale  avec 
la  biographie  toute  sympathique  présentée  par  les  autres  histo- 
riens? Comment  expliquer  les  rigueurs  de  la  justice  et  cet  étal 
de  contumace  qu'Henri  n'osa  purger,  avec  les  faveurs  du  sou- 
verain et  l'élévation  de  sa  seigneurie  en  marquisat?  Mais  sur- 
tout comment  expliquer  la  mort  d'Henri  Foucauld  attestée  par 
Pierre  Robert  et  qui  serait  survenue  avant  la  sienne,  c'est-à-dire 
avant  1658,  avec  le  décès  de  ce  môme  Henri  en  1678?  Car  à  vrai 
dire,  s'il  n'y  avait  cette  circonstance  de  la  date  du  décès,  il  ne 
serait  pas  impossible  d'admettre,  malgré  l'assertion  du  chroniqueur 
du  Dorât,  que  le  roi  finit  par  faire  grâce  au  gentilhomme  coupable 
en  souvenir  de  ses  services  rendus  aux  armées. 

Pour  résoudre  la  difficulté,  il  faudrait  établir  que  les  généalo- 
gistes et  les  historiens  se  sont  trompés  en  faisant  mourir  Henri 
le  H  septembre  1678.  Mais  l'erreur  n'est  guère  soutenable  :  la  cer- 
titude du  fait  ressort  au  contraire  manifestement  des  documents  tes 
plus  authentiques  et  dont  la  foi  probante  est  pour  le  moins  égale  à 
celle  de  la  chronique  de  Robert. 

Tout  d'abord  il  paraît  hors  de  doute  qu'Henri  Foucauld  vivait 
encore  quelques  années  avant  cette  dernière  date.  Dans  un  acte  de 
naissance  de  Marguerite  Agnès  de  Malleret,  fille  de  noble  Fiacre  de 
Malleret  de  LaNouzière,  écuyer,  du  17  septembre  1665,  est  présent 
comme  parrain  messire  Henri  Foucauld,  seigneur  de  Saint-Germain, 
gouverneur  de  la  province  de  la  Marche,  etc..  (2).  D'autre  part,  le 

(1)  Historiettes  pour  servir  àVhistolre  du  règne  de  Louis  XIII,  t.  VII, 
p.  155  el  suiv.  — Edition  Garnier  frères. 

(t)  Cet  acte  existe  sur  la  première  feaUle  d'un  registre  paroissial  de 
Saint-Germain,  à  tort  qualifié  de  f  664  à  I67i  et  qui  ne  commence  en  réa- 


EXCUHSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA   àOUThIRRAINK  ItT  DANS  SES  ENVIRONS.     id3 

rôle  de  la  première  convocation  et  monstre  des  nobles  de  la  séné- 
chaussée de  la  Haute-Marche,  faite  à  Gucret,  le  30  août  1674,  par- 
devant  François  Mérigot,  seigneur  de  Sainte-Feyre,  sénéchal  de  la 
province,  porte  sous  la  rubrique  :  «  Chastellenie  de  Crozant.  .  Mes- 
sire  Henry  Foucauld,  marquis  de  Saint-Germain,  gouverneur  des 
provinces  de  Haute  Basse-Marche  (1). 

Mais  la  date  même  de  1678  et  les  circonstances  qui  marquèrent 
le  décès  à  celte  époque,  reposent,  entre  autres  preuves,  sur  un  té- 
moignage non  suspect,  celui  de  Chorlon,  président  du  prési- 
dial  de  Guéret,  qui  était  un  contemporain  et  dont  les  mémoires 
ont  une  valeur  incontestable  (2). 

Le  président  Chorlon  raconte  le  décès,  au  cours  de  septembre 
1678,  de  M.  de  Sainl-Germain-Beaupré,  gouverneur  de  la  Haute-Basse- 
Marche,  en  soTi  château  de  Saint-Germain,  âgé  de  soixante-huit  à 
soixante-dix  ans  ;  (Henri,  né  vers  1608  ou  1609,  devait  bien  avoir  cet 
âge);  il  donne  des  détail^  sur  la  maladiequi  Ta  emporté,  sur  les  person- 
nes qui  l'entouraient  à  ses  derniers  moments.  «  Il  était  en  joie,  dit-il, 
recevoir  M""  la  marquise  de  Saint-Germain,  sa  belle-fille,  venue 
avec  sa  mère...  »  Il  termine  en  disant  que  «  toute  la  province 
regretta  son  gouverneur,  et  certes  avec  raison,  d'autant  qu'il  en 
usait  assez  bien  avec  tout  le  monde,  particulièrement  avec  cette 
ville  (Guéret)...  Il  n'était  pas  mal  faisant,  il  se  rendait  à  la  raison. 

—  Mon  père  et  moi,  ohserve-t-il,  perdimes  en  la  personne  de 
M.  de  Saint-Germain  un  bon  amy  et  appuy  qui  avait  toujours  eu 
depuis  longtemps  beaucoup  de  considération  pour  mon  père,  le  lui 
ayant  tesmoigné  en  tous  rencontres...  »  (3). 

Ce  tableau  n'est-il  pas  l'antithèse  même  de  celui  que  nous  re- 
présente le  chroniqueur  du  Dorât? 

Chorlon  connaissait  bien  Henri  Foucauld,  il  l'avait  approché  peut- 
être  de  plus  près  que  Pierre  Robert,  dans  la  dernière  période  de 
son  existence  ipême,  et  rien  de  ce  qui  le  concernait  lui  et  sa  famille 
ne  lui  était  indifférent  ;  dans  ses  mémoires,  tenus  d'après  Tordre 

litô  qu'en  Taanée  f668.  L'acle  dont  il  s'agit  a  Hé  évidemment  rapporté 
sur  ce  registre;  il  n*est  pas  signé;  mais  il  nous  parait  être  de  la  même 
écriture  que  celles  des  actes  contenus  dans  le  registre  lui-môme. 

(I)  A.  Bos VIEUX,  BuUeUn  de  la  Sociéié  des  sciences  naturelles  et  archéo- 
logiques de  la  Creuse,  t.  H. 

(i)  Mémoires  du  Prés'.dent  Chorlon  {\6Zo'\6So),  édités  par  M.  Autorde. 

—  Guéret,  Amiault,  1886.  —  V.  pages  13Î  et  suiv. 

(3)  Depuis  que  nous  avons  écrit  ces  lignes,  nous  avons  retrouvé  dans 
les  registres  paroissiaux  de  Saint-Germain  l'acte  môme  de  décès  d'Henri 
Foucauld  dressé  le  ta  septembre  1678.  Nous  le  donnons  en  appendice  de 
cette  étude.  Aucun  doute  ne  saurait  donc  subsister. 

T.  xu  29 


45-i  SOCIETE  ARCHâOLÛGlQUlK  gT   itlSTOKlQUB   Dti   LlSlODStH. 

chronologique,  il  ne  manque  jamais  de  relater  les  événemenls  un 
peu  salUanls  relatifs  à  la  maison  de  Saint-Germain;  il  men- 
tionne ainsi  quelques  années  avant  le  décès  dont  il  s'agit,  celui  de 
l'abbé  de  Bénévent,  frère  d'Henri,  survenu  en  1676,  le  mariage  du 
fils  aîné  de  ce  dernier  avec  M"'  Ferrand  de  Jauvry  (ou  Janvris)  en 
1677...,  etc.  (1). 

La  contradiction  est  donc  très  formelle  et  le  problème  subsiste 
dans  toute  sa  force.  On  pourrait  un  instant  être  tenté  de  supposer 
qu'Henri  Foucauld,  décédé  en  1678,  n'élait  pas  le  môme  que  celui 
condamné  en  1635,  dont  parle  Pierre  Robert,  qu'il  était  un  de  ses 
fils  ou  un  de  ses  frères  en  même  temps  que  son  successeur;  mais 
le  chercheur  ou  le  critique  ne  peut  s'arrêter  à  cette  conjecture  : 
Henri  avait  trois  frères  dont  la  carrière  est  parfaitement  connue  et 
qu'il  n'est  pas  possible  de  confondre  avec  un  personnage  de  ce 
nom;  c'étaient  Louis,  comte  du  Dognon,  qui  fut  mêlé  à  des  événe- 
ments importants  et  mort  d'ailleurs  bien  avant  1678;  François,  sei- 
gneur d'Eguzon,  qui  périt  tout  jeune  à  l'armée  de  Flandre,  et  le 
prieur  de  Bénévent,  dont  le  décès  est  aussi  antérieur.  Quant  à 
l'hypothèse  d'un  fils  d'Henri  portant  son  nom,  elle  doit  être 
repoussée  par  cette  simple  observation  que  ce  fils  n'aurait  pu  être 
îlgé  en  1678  de  près  de  soixante-dix  ans,  son  père  n'étant  né  qu'en 
1608  ou  1609.  Au  surplus,  l'existence  de  deux  seigneurs  du  nom 
d'Henri  aurait  laissé  quelques  traces,  offert  quelques  particularités 
qu'on  ne  rencontre  nulle  part  ;  aucun  annaliste,  aucun  historien  n'y 
a  fait  la  moindre  illusion,  ce  qui  suflirait  déjà  à  rendre  l'hypothèse 
invraisemblable. 

{{)  Mémoires  du  Préaident  Chorlon^  psLges  100,  122.  Chorlon  constate, 
ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit,  que  des  membres  de  la  famille  de  Saint- 
Germain  jouissaient  depuis  quelque  temps  de  Tabbayede  Bénévent,  qui  était 
de  Tordre  des  chanoines  réguliers  de  Saint-Augustin. 

Charles  Foucauld,  devenu  abbé  do  Bénévent  en  1638,  n'était  pas  prêtre 
et  avait  Tabbayc  en  commande.  Le  chroniqueur  dit  qu'après  sa  mort  le  roi 
refusa  au  chevalier  de  Saint-Germain,  fils  du  gouverneur,  Tabbaye  qui  fut 
donnée  à  M.  Pellisson,  maUrc  des  requêtes,  homme  de  bel  esprit;  qu'il  y 
eut  procès  entre  ce  dernier  et  M.  de  Saint-Germain  qui  avait  tout  pris  entre 
ses  mains,  procès  porté  en  la  sénéchaussée  de  Limoges  et  qui  se  termina 
à  l'amiable.  Ce  Charles  Foucauld,  dont  nous  avons  cité  plus  iiaut  dans  une 
note  l'acte  de  baptême  (23  mai  16â1),  figure  lui-même  comme  parrain  et 
comme  signataire  dans  Tacle  de  baptême  de  Charles  de  Malleret,  fils  du 
seigneur  de  Malleret  et  de  La  Nouzière,  écuyer  du*  marquis  de  Sainl-Ger- 
mam,  né  le  3  janvier  1671  .  Il  y  est  qualifié  haut  et  puissant  seigneur 
Messire  Charles  Foucault,  abbé  de  Saint-Barthélémy  de  Bénévent,  conseil- 
ler du  roi,  aumônier  de  la  reine,  premier  chanoine  de  Salnt-Elicnne  de 
Limoges  (Kegislres  paroissiaux]. 


EtCUBSlON  ARCËÈOLOGIQOR  A  L\  SOIÎTRRRAINE  Et  DANS   SBS  ENVIRONS.     4o.i 

La  seule  explication  à  donner  nous  parait  être  la  suivante  :  Pierre 
Robert  du  Dorât  a  confondu  probablement  la  personnalité  de 
Gabriel  Foucauld,  père  d'Henri,  avec  celle  de  ce  dernier;  la  confu- 
sion était  assez  facile  ;Talleniant  des  Réaux  nous  dépeint  le  père  et 
le  fils  à  peu  près  sous  les  raémes  couleurs;  tous  les  deux  étaient 
coutumiers  sans  doute  des  mômes  abus,  disons  plus,  des  mêmes 
méfaits;  ils  avaient  soulevé  contre  eux  plus  d'un  grief,  plus  d'une 
plainte  ou  d'une  accusation,  avec  celte  atténuation  peut-être  pour 
le  fils  que  sa  jeunesse  elles  exemples  paternels  pouvaient  dans  une 
certaine  mesure  excuser  les  écarts  de  sa  conduite.  Rappelons  ce  que 
nous  avons  dit  plus  haut  de  Gabriel,  d'après  les  Cahiers  de  la 
Marche  :  celui-ci  fut  condamné  sur  la  plainte  portée  contre  lui  et 
par  contumace  en  la  chambre  des  Tournelles  en  l'année  1635, 
c'est-à-dire  précisément  à  l'époque  qui  suivit  les  grands  jours  de 
Poitiers  et  ou  Pierre  Robert  a  placé  la  condamnation  d'Henri.  Si  ce 
dernier  se  trouva  mis  sur  la  sellette  pendant  l'instruction  des  grands 
jours  ou  après,  il  est  bien  cerlain  qu'il  n'y  fut  pas  seul  el  que 
Gabriel,  contre  lequel  s'étaient  élevées  tant  de  réclamations  de  la 
part  de  ses  administrés,  dut  l'y  suivre  ou  l'y  précéder;  peut-être  des 
poursuites  furent-elles  dirigées  en  même  temps  contre  les  deux  et 
ces  poursuites  se  lerminèrenl-elles  par  une  double  condamnation  du 
père  et  du  fils,  bien  que  Tallemant  ne  prête  pas  d'autre  cause 
à  celle  qui  a  pu  intervenir  contre  le  fils  que  son  duel  ou  plu- 
tôt son  guet-à-pens  à  l'égard  de  Villepréau?  Mais  Pierre  Robert, 
fort  éloigné  de  Paris,  a  pu  ne  pas  connaître  exactement  la  procé- 
dure et  les  faits  et  imputer  à  Henri  ce  qui  était  le  cas  de  Gabriel  ou 
tout  au  moins  leur  cas  commun.  Cette  confusion  des  noms  ou  même 
des  personnes  une  fois  admise,  et  il  semble  bien  difficile  de  ne 
pas  Ûadmettre,  tout  le  reste  concorde  parfaitement  avec  le  récit  du 
chroniqueur  du  Dorât  :  Gabriel  mourut,  en  effet,  comme  l'on  sait, 
quelques  années  après,  en  1642,  c'est-à-dire  bien  avant  Pierre 
Robert  et  dès  avant  1635  il  avait  résigné  les  fonctions  de  gouver- 
neur en  faveur  de  son  fils  Henri,  ainsi  que  le  rapporte  la  chronique 
d'accord  avec  toutes  les  indications  qui  proviennent  des  autres 
sources. 

Il  importe  d'ailleurs  d'observer  sur  ce  dernier  point  qu'Henri  lui- 
même,  alors  âgé  de  vingt-sept  ou  vingt-huit  ans,  n'aurait  pu  trans- 
mettre son  gouvernement  à  son  Bis  qui  n'existait  pas  encore  apparem- 
ment, puisque  son  mariage  avec  Agnès  de  Bailleul  n'eutlieu  qu'en  1644 
et  que  rien  ne  peut  faire  présumer  qu'il  eut  contracté  une  première 
union  et  qu'il  eut  déjà  un  héritier.  Ce  qui  doit  nous  convaincre  tout 
à  fait,  c'est  précisément  ce  mariage  avec  la  fille  du  président  de 
Bailleul  qui  précéda  d'un  an  environ  l'érection  de  la  terre  en  mar- 


^56  S0C1F.TS   ARCHKOLOGIQUB  ET   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

quisat,  ce  sont  les  renseignements  que  l'auteur  des  Historiettes 
donne  sur  les  diffîcuités  qu'Henri  éprouva  pour  se  marier  et  le 
tableau  qu'il  fait  de  ses  malheurs  conjugaux,  en  même  temps  que  des 
vices  qu'il  lui  attribua,  tableau  postérieur  nécessairement  aux  événe- 
ments dont  parle  Robert;  faits  qui  seraient  en  contradiction 
formelle  avec  l'état  de  contumace,  dans  lequel,  au  dire  de  ci» 
dernier,  Henri  aurait  terminé  sa  vie  sans  purger  sa  condamnation. 
Nous  devons  donc  conclure  sans  grande  hésitaiion  que  la  sen- 
tence capitale  dont  fait  mention  la  chronique  de  Pierre  Robert  ne 
saurait  s'appliquer  à  Henri  Foucauld  et  qu'elle  ne  peut  concerner 
d'autre  que  son  père.  Tallemant  ne  dit  pas  positivement  qu'Henri 
fut  condamné  à  la  suite  du  meurtre  de  Villepréau  ;  celte  condamna- 
tion n'est  sans  doute  pas  invraisemblable,  qu'elle  ait  été  motivée  par 
ce  meurtre  même  ou  par  des  faits  analogues  à  ceux  reprochés  à 
Gabriel  ;  mais  si  Henri  encourut  pareille  pénalité,  il  en  fut  certaine- 
ment relevé  par  la  faveur  royale  dont  il  reçut  même  d'autres  témoi- 
gnages plus  sensibles  que  la  grâce  ;  peut-être  aussi,  après  des  éga- 
rements regrettables,  fit-il  oublier  plus  tard  ses  excès  de  jeunesse, 
et  rompant  avec  les  traditions  paternelles  justifia-t-il  dans  une  cer- 
taine mesure  reloge  posthume  qu'en  fit  le  président  Chorlon  I 

Henri  eut  un  de  ses  frères,  Louis,  dont  le  nom  a  déjà  été  pro- 
noncé par  nous,  qui  acquit  une  certaine  célébrité  sous  le  nom  de 
comte  du  Dognon  et  qui  joua  dans  tous  les  cas,  au  point  de  vue 
de  l'histoire  générale,  un  rôle  beaucoup  plus  important  que  celui  de 
son  aîné.  M.  Georges  Berthomier  en  a  reîracéla  carrière  et  les  faits 
et  gestes  dans  une  notice  très  documentée  et  fort  intéressante  à  lous 
égards,  car  elle  nous  initie  en  môme  temps  aux  mœurs  et  à  des  épi- 
sodes curieux  du  temps  de  la  Fronde  (1).  Pour  connaître  et  appré- 

{{)  Louis  Foucauld  de  Saint-Germaùn-Beaupré,  comte  du  hognon, 
vicc-ainiral   cl  maréchal   de  France  (I6Ï6-1659),  par  M.  G.  Berthomier 
—  Montluçon,  imp.  Herbin,  1890. 

L'auleur  y  relate  un  grand  nombre  d'exlrails  de  documents  contempo- 
rains relatifs  à  Louis  Foucauld,  tels  que  la  Gazette  de  Renaudot^  la  chro- 
nique en  vers  de  Loret  et  des  lellros  de  correspondance. 

Le  Nobiliaire  de  Nadaud  fournit  aussi  de  nombreux  détails  sur  Louis 
Foucauld.  L'abbé  Ralicr  lui  a  consacré  un  assez  court  chapitre  de  son 
histoire  (page  115). 

Quant  à  Toriginc  du  litre  de  comte  du  Dognon,  on  a  supposé  qa*elte 
provenait  du  nom  du  petit  village  du  Dognon,  situé  a  proximilé  de  Saiot- 
Gcrniain  et  de  Forgpvieille;  cependant,  on  ne  retrouve  dans  ce  lieu  aucune 
trace  de  château  ni  même  aucun  souvenir  historique  ;  ne  pourrait-on  pas 
admettre  avec  plus  de  vraisemblance  que  Louis  Foucauld  avait  tiré  ce 
titre  d'une  autre  localité  du  môme  nom,  mais  beaucoup  plus  importante, 


KXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.     457 

cier  ce  personnage,  dont  la  biographie  sortirait  par  trop  des  limites 
de  notre  cadre,  nous  ne  saurions  mieux  faire  que  de  renvoyer  les 
lecteurs  à  cette  notice  elle-même.  Quelle  singulière  figure,  peu 
sympathique,  à  coup  sûr,  rebutante  même  parfois,  mais  bien  carac- 
téristique de  répoque  où  il  vivait,  que  celle  de  ce  comte  du  Dognon, 
de  nature  complexe,  élevé  à  la  cour,  protégé  même  de  Richelieu, 
brave  soldat,  marin  distingué,  moins  bon  général,  qui  après  avoir 
soutenu  vaillamment  la  cause  royale  pendant  la  première  Fronde  en 
combattant  les  Bordelais  révoltés,  ne  vit  plus  ensuite  que  Tinlérôt 
de  sa  fortune  et  de  son  ambition  démesurée,  trompa  tous  les  partis, 
abusa  son  protecteur  le  duc  de  Condé,  fit  de  son  gouvernement  du 
Brouage  et  de  l'Est  une  véritable  dictature  sur  TAunis  et  la  Sain- 
tonge,  entra  en  révolte  ouverte  contre  les  troupes  du  roi  et  après 
plusieurs  revers  finit  par  vendre  sa  soumission  moyennant  le  gou- 
vernement d'Oléron,  le  paiement  de  500,000  livres  et  le  bâton  de 
maréchal  de  France  ! 

Louis  Foucauld  assez  maltraité,  lui  aussi,  par  les  chroniqueurs 
de  son  temps,  peu  estimé  d'une  grande  partie  de  la  cour,  mourut  à 
Paris  le  40  octobre  1639,  âgé  seulement  de  quarante-trois  ans. 
La  Gazette  de  Renaudot  assure  qu'il  fit  une  fin  chrétienne,  qu'il 
désira  être  inhumé  sans  aucune  pompe  et  qu'il  laissa  de  l'argent 
destiné  à  être  distribué  aux  pauvres  et  à  faire  dire  6,000  messes  pour 
le  repos  de  son  âme  (1). 

Les  physionomies  des  Foucauld  que  nous  avons  cherché  à  esquis- 
ser à  partir  de  Gaspard,  et  quelque  incomplète  que  nous  ayons 
laissé  celle  de  Louis,  comte  du  Dognon,  présentent  un  air  de  famille 
et  des  traits  communs  dont  on  ne  peut  s'empêcher  d'être  frappé;  de 
Gabriel  et  de  ses  deux  fils,  il  serait  vrai  de  dire  :  tel  père,  tels  fils. 
Chez  le  grand  seigneur  qui  intriguait  contre  son  roi,  qui  s'érigeait 
en  potentat  de  province  et  qui  abusait  de  son  autorité,  comme  chez 

fiisaDt  partie  aujourd'hui  de  la  commune  du  Chàtonct-on-Dognon  (Hautc- 
Vienoe),  el  qui  a  dû,  à  certaines  époques,  être  comprise  dans  les  apanages 
des  Foucauld  de  Sainl-Germain. 

(1)  L'abbê  Rauier  qui  n'a  consacré  qu'une  assez  courte  notice  au  comte 
du  Dognon,  lui  donne  k  sa  mort  l'âge  de  qiiaranle-huit  ans.  Il  fut  enterré  à 
Paris  à  l'église  de  VAoe  Maria. 

Le  comte  du  Dognon  avait  épousé  en  1653  Marie  Fourré  de  Dampierre, 
qui  mourut  longtemps  après  son  mari,  le  95  avril  '696,  et  fut  inhumée 
auprès  de  lui. 

De  ce  ma^age  étaient  nées  deux  filles,  dont  une,  Louise-Marie,  mariée 
&u  marquis  Qf  Castelnau-Mauvissière,  gouverneur  de  Brest,  se  trouva 
venvc  encorelîès  jeune  et  fut  l'héroïne  de  certaines  aventures  que  raconte 
M.  l'abbé  Ratier  (chap.  xxii). 


4r>8  ËÛCIÉTR    APCnÉOLOGlQUe    KT    HISTOBIQUR   DU   LIllOtSIN 

le  gentilhomme  de  cour,  esclave  de  ses  passions,  ou  le  frondeur 
sans  vergogne,  on  retrouve  celte  même  fougue  de  tempérament  que 
tous  les  trois,  semble-t-il,  avaient  héritée  de  leur  père  ou  de  leur 
aïeul,  mais  aussi  môme  ambition  personnelle,  môme  avidité,  même 
absence  de  scrupules  dans  le  choix  des  moyens,  qui  devaient  les 
entraîner  aux  mômes  abus  et  aux  mômes  excès.  C'étaienl  là  sans 
doute  les  fruits  d'une  éducation  et  de  principes  communs  ;  mais 
c'étaient  là  aussi  les  défauts  du  temps  auquel  ils  appartenaient, 
époque  de  transition  où  les  esprits  et  les  mœurs  conservaient  encore 
l'impression  des  agitations  et  des  violences  des  guerres  civiles  ei 
étaient  comme  en  travail  d'une  société  nouvelle.  Gaspard,  Gabriel 
et  les  fils  de  ce  dernier  personnifient  bien,  à  notre  sens,  les  périodes 
successives  de  cette  époque  de  notre  histoire  qui  vit  à  son  début  la 
royauté  française  mise  en  péril,  battue  en  brèche  et  bien  près  de 
sombrer  et  qui  aboutit,  après  tant  de  vicissitudes,  au  triomphe 
absolu  de  la  monarchie. 

Bien  avant  môme  la  mort  d'Henri  Foucauld,  cette  tranformation 
était  déjà  un  fait  accompli  :  Louis  XIV  régnait  en  maître  ei  comme 
le  maître  le  moins  incontesté.  Chez  les  derniers  Foucauld  il  n'y 
aura  plus  les  instincts,  ni  les  appétits,  ni  môme  peut-être  Tétoffc 
de  politiciens  ou  de  frondeurs;  il  leur  suffira  de  vivre  en  seigneurs 
pacifiques,  respectueux  envers  leurs  souverains  et  jaloux  de  ses 
moindres  faveurs. 

LES   DERNIERS   FOUCAULD. 

XVI.  —  Ijouis  Foucauld,  fils  aîné  d'Henri,  marquis  de  Saint- 
Germain-Beaupré,  comte  de  Dun,  avait  obtenu,  dès  1674,  c'esl-n- 
dire  quatre  ans  avant  la  mort  de  son  père,  la  survivance  de  son 
gouvernement  de  la  Marche;  comme  ce  dernier,  il  suivit  la  car- 
rière des  armes  et  prit  part  aux  guerres  d'Allemagne,  de  Flandre 
et  de  Hollande,  sous  M.  de  Turenne,  avec  le  litre  d'enseigne  des 
gardes;  il  se  distingua,  dit-on,  aux  batailles  d'Enlzen,  de  Nordlin- 
gen,  de  Cassel  et  de  Senef  et  devint  mestre  de  camp,  puis  briga- 
dier des  armées  du  roi  (1).  C'est  en  cette  qualité  d'officier  général 

{\)  D'après  le  Nobiliaire,  L'abbé  Ratier  donne  des  détails  assez  expli- 
cites sur  les  campagnes  de  Louis  Foucauld  (page  139  el  suiv.). 

Les  Mémoires  de  M"®  de  Montpensier  fonl  mention  d'un  fait  assez  peu 
flatteur  pour  la  mémoire  d'un  des  Foucauld.  Ils  raconient  en  effet  qu'à 
Tépoque  où  rinfanlerie  royale  était  occupée  à  des  fortifications  nouvelles 
à  Dunkerque,  le  ministre  Louvois  passant  à  Monlreuil  et  rendant  compte 


EXCURSION  ARCnéOLOGIQUR  A  LA  SOUTRRRAINR   RT  DANS  SES  ENVIRON?.    ^159 

quMl  suivit  le  dauphin  à  la  conquôle  de  Philippsbourg  et  du  Pala- 
tinat. 

Revenu  dans  ses  terres  sur  le  désir  même  du  roi,  qu'il  voulut 
cependant  encore  accompagner  au  siège  de  Namur,  il  reçut  la 
mission  de  faire  exécuter  dans  sa  province  le  nouvel  édit  rendu 
contre  les  protestants  (octobre  168S).  Au  cours  de  cette  mission, 
dit  le  Nobiliaire,  il  se  rendit  à  Âubusson,  dont  il  fit  démolir  le 
temple,  et  par  sa  modération  et  sa  douceur  il  entraîna  la  conver- 
sion au  catholicisme  de  trois  cent  cinquante  réformés,  y  compris 
celle  de  Jean-Antoine  Jacoby  ou  Jacob  leur  ministre.  Cette  abjura- 
tion eut  vraisemblablement  d'autres  motifs  que  les  exhortations  du 
gouverneur  ou  le  désir  de  rentrer  dans  le  giron  de  TEglise;  on 
trouve  dans  l'histoire  d'Aubusson  de  M.  Cyprien  Pérathon  (1)  le 
texte  d'un  procès-verbal  de  l'abjuration  qui  fut  faite  en  présence 
du  marquis  de  Saint-Germain  par  quinze  habitants  de  cette  ville, 
dont  les  noms  sont  désignés,  procès-verbal  où  les  mots  d'abjura- 
tion volontaire  sont  bien  prononcés;  mais  l'auteur  lui-môme  estime 
que  cette  abjuration,  comme  d'autres,  fut  faite  en  réalité  pour 
obéir  au  roi.  Nous  ne  connaissons  pas  d'autres  textes  de  conver- 
sions à  Aubusson  qui  aient  été  publiés,  et  le  chiffre  de  trois  cent 
cinquante  conversions  cité  par  le  Nobiliaire  pourrait  paraître  très 
exagéré,  si  l'on  ne  possédait  une  lettre  de  Louvois  du  26  octobre 
1685,  dans  laquelle  il  est  dit  que  toute  la  ville  d'Aubusson  se  con- 
vertit ainsi.  Quant  au  ministre  Jacoby,  il  abjura  le  2  novembre 
1685,  à  Saint-Germain  môme,  entre  les  mains  du  curé  de  cette  pa- 
roisse et  en  présence  du  gouverneur  et  de  deux  autres  témoins.  Le 
procès-verbal  de  son  abjuration,  publié  par  l'abbé  Ratier  dans  son 
Histoire  du  château  (2),  rapporte  qu'il  agit  de  sa  bonne  volonté  et 

Je  Tétat  des  troupes,  signala  la  brigade  de  Sainl-Gcrmain-Bcaupré  comnrie 
étant  la  plus  faible  et  la  moins  bonne  de  ces  troupes.  Sainl-Gcrmain  en- 
courut un  blâme  très  sévère  de  M.  de  Lauzon  qui  menaça  môme  de  le 
faire  casser  et  ne  céda  qu'aux  supplications  de  la  duchesse,  mais  en  lui 
recommandant  de  ne  plus  lui  faire  de  pareilles  recommandations.  M.  le 
docteur  Vincent  a  reproduit  ce  passage  dans  son  article  sur  le  prétendu 
exil  de  Mademoiselle  de  Montpensier  dont  nous  parlerons  plus  loin  (Mé- 
moires de  la  Société  des  sciences  naturelles  de  la  Creuseyiome  IV,  p.  301). 

Les  Mémoires  ne  donnant  pas  de  date,  il  nous  a  été  impossible  de  la 
déterminer  et  de  savoir  si  le  fait  et  le  blâme  qui  en  fut  la  suite  doivent 
éirc  imputés  à  Louis  Foucauld  qui  parait  avoir  été  un  bon  officier  ou  à 
Henri  Foucauld,  son  père,  tous  les  deux  ayant  été  meslrcs  de  camp. 

(!)  Histoire  d'Aubusson,  par  M.  G.  PArathon  (page  158  et  suiv.). 

(8)  Annexe  IV,  page  193.  —  Ce  procès-verbal  est  relaté  dans  les  regis- 
t.-es  paroissiaux  de  Saint-Germain. 


400  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE    El    DISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

sans  aucune  contrainte;  mais  la  preuve  de  sa  sincérité  exigerait 
peut-être  aussi  d'autres  éléments  de  certitude  (1). 

En  1699,  le  marquis  de  Saint-Germain  donna  son  concours  à 
rétablissement  d'un  collège  deBarnabites  àGuéret,  créé  à  l'instiga- 
tion de  M.  Couturier  de  la  Prungne,  parent  et  héritier  de  Thisto- 
riographe  Varillas,  qui  lui  avait  légué  sa  fortune  pour  une  œuvre 
utile.  Les  lettres  patentes  de  cette  création  sont  du  mois  de  mars 
1699. 

Louis  Foucauld  avait  épousé,  le  23  décembre  1677,  Hélène  Fer- 
rand,  fille  de  feu  Pierre,  chevalier,  seigneur  de  Janvry,  conseiller 
au  Parlement  de  Paris,  qui  avait  péri  en  1632  lors  de  Tembraî^e- 
ment  de  Thôtel  de  ville  par  la  populace  révoltée,  et  d'Hélène 
Gillot  (2)  ;  cette  union  ne  fut  pas  de  longue  durée,  car  la  marquise 
mourut  au  château  de  Saint-Germain  dans  le  cours  de  Tannée 
1682,  laissant  trois  enfants  :1°  Armand-Louis-François,  qui  succéda 
à  son  père;  2°  Armand-Louis-Joseph,  né  en  1681,  chevalier  de 
Malte,  colonel  d'infanterie  en  1702,  brigadier  des  armées  du  roi, 
ambassadeur  extraordinaire  de  son  ordre  dans  les  Pavs-Bas  en 


{\)  Consulter  aussi  V Histoire  delà  Réforme  dans  la  Marche  et  le  Li- 
mousin^  de  M.  Alfred  Leroux,  page  317.  L*auteur  pense  que  beaucoup  de 
conversions  à  cette  époque  ne  furent  pas  volontaires,  mais  dictées  par  Tin- 
timidation  et  les  mesures  violentes  dont  étaient  menacés  les  récalcitrants. 
11  tient  pour  avéré  que  des  missions  de  dragons  furent  envoyées  en  Mar- 
che, sans  doute  à  Âubnsson  comme  dans  d'autres  villes  où  il  y  avait  des 
protestants,  et  que  cet  appareil  militaire  dut  avoir  son  influence  sur  les 
résolutions.  Un  certain  nombre  de  convertis,  dit  aussi  M.  Leroux,  ne  s'en 
rendirent  pas  moins  à  l'étranger,  pour  y  reprendre  le  libre  exercice  de  la 
religion  à  laquelle  ils  avaient  renoncé  par  contrainte;  on  retrouve  les 
noms  de  plusieurs  d'entre  eux  en  Allemagne. 

(2)  Le  président  Chorlon,  dans  ses  Mémoires  (page  32)  constate,  à  la  Bn 
de  Tannée  1677,  le  mariage  de  M.  le  marquis  de  Saint-Germain,  fils  de 
M.  le  gouverneur  de  cette  province,  et  qui  avait  eu,  dès  Tannée  1674,  les 
lettres  de  survivance  du  gouvernement,  avec  M"«  Ferrand  de  Janvry  ol  il 
ajoute  i  «  On  dit  que  c'est  un  parti  de  nii<^  (400)  mille  livres.  Les  lettres 
de  survivance  avec  le  contrat  de  mariage  furent  enregistrés  en  Taudience 
de  la  sénéchaussée  de  Guéret  du  mois  de  mars  de  Tannée  présente.  On  a 
donné,  dit-il,  par  le  contrat  un  (4,000)  livres  de  rente  pour  tout  apanage  à 
M.  le  chevalier  de  Saint-Germain,  puiné  de  la  maison,  et  qui  est  lieute- 
nant aux  gardes.  » 

En  ^682,  le  même  Chorlon  annonce  la  mort  de  M*"'  de  Saint-Germain, 
gouvernante,  au  château  de  Saint-Germain,  d'une  fièvre  violente.  —  Les 
registres  paroissiaux  contiennent  son  acte  d'inhumation;  décédée  le 
SO  avril  1683,  elle  fut  inhumée  le  22  du  dit  mois  dans  la  chapelle  sei- 
gneuriale de  Téglise. 


EXCURSION  ARCH^.OLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  KNVIRONS.     461 

1719;  3*  autre  Armand-Louis-Joseph,  dit  le  comte  de  Saint-Ger- 
main, né  en  1682,  enseigne  de  vaisseau,  mort  le  11  décembre  170S, 
colonel  d'un  régiment  de  dragons,  et  sans  postérité. 

Louis  Foucauld  mourut  le  23  janvier  1719  (1).  Il  avait,  dès  le 
mois  de  mars  1711,  résigné  sa  charge  et  son  gouvernement  au 
profit  de  son  fils  aîné. 

Au  dire  de  Tabbé  Ratier,  Louis  Foucauld  jouissait  de  toute  l'es- 
time du  grand  roi  qui  lui  aurait  fait  l'honneur  de  correspondre 
avec  lui  et  lui  aurait  envoyé  son  portrait  peint  par  Mignard.  C'était, 
ajoute-t-il,  un  homme  recommandable  par  sa  grande  douceur  et 
son  esprit  bienfaisant,  quoique  d'un  caractère  ferme  à  Toccasion, 
ayant  des  connai.ssances  étendues  et  une  conversation  agréable. 
Ces  qualités  ne  l'ont  pas  empêché  d'être  décrié  par  Saint-Simon  et 
d'être  taxé  par  lai  de  «  ennuyeux  et  plat  important  qui  n'avait 
jamais  été  de  rien  et  mourut  chez  lui,  laissant  son  petit  gouverne- 
ment de  la  Marche  à  son  fils,  homme  fort  obscur...  ». 

Comme  Tallemant,  Saint-Simon  ne  fut  jamais  tendre  pour  les 
Foucauld. 

XVn.  —  Armand' Louis  François  Foucauld,  marquis,  parfois 
aussi  appelé  le  chevalier  de  Saint-Germain  (2),  entra  très  jeune  au 
service  du  roi  et  en  1704  était  mestre  de  camp  de  cavalerie  et  colo- 
nel d'un  régiment.  Il  prit  part  à  plusieurs  campagnes,  à  celle  d'Ita- 
lie notamment,  dans  l'armée  de  Philippe,  roi  d'Espagne,  et  il  se 
distingua  sous  le  duc  de  Vendôme  aux  batailles  de  Cassan  et  de 
Calcinato,  plus  tard,  à  la  retraite  de  Turin,  avec  le  duc  d'Orléans, 
en  Catalogne,  aux  sièges  de  Lerida  et  de  Tortosa,  en  Flandre  et  en 
Allemagne,  à  Landau  et  à  Fribourg  (3).  Ces  bons  et  nombreux  ser- 
vices lui  valurent  le  grade  de  brigadier  des  armées  (1"  février  1710) 
et  en  outre  le  titre  de  commandant  des  troupes  du  roi  en  la  géné- 
ralité de  Moulins. 

Le  11  mars  1711,  Armand-Louis  épousa  Anne-Bonne  Doublet  de 
Persan,  qui  était  fille  de  Nicolas,  conseiller  à  la  grand'chambre  du 
Parlement  de  Paris  et  de  Bonne-Ursule  Garnier  de  Salens.  Ce  ma- 
riage eut  lieu  sous  les  auspices  du  souverain,  avec  une  grande  so- 

(1)  H  fut  inhumé  dans  la  chapelle  le  t4  janvier.  Les  registres  paroissiaux 
donnent  son  acte  de  décès  et  d'inhumation. 

(î)  Le  Nobiliaire  énumère  les  autres  titres  d*Armand-Louis;  il  était  en 
outre  comte  de  Dun,  de  Crozant,  des  Places,  seigneur  de  la  Guierche,  la 
Ligne,  le  Terrail,  Mandrezat,  Pierrefilte. 

(3)  Voir  l'ouvrage  de  M.  Tabbé  Ratier  qui  donne  des  renseignements 
plus  complets  sur.la  carrière  militaire  d^Armand-Louis  et  le  dépeint  conime 
un  brave  soldat  et  un  officier  de  valeur. 


i6*.  SOCir^.TÊ  ARCHÉOLOGIQUE   ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

lennité,  si  nous  en  croyons  les  orateurs  qui  prirent  la  parole  dans 
la  séance  dMnstallalion  du  même  Armand-Louis  comme  gouverneur 
de  la  Marche  et  dont  nous  allons  parler  plus  loin.  Louis  XIV  dai- 
gna signer  au  contrat  ainsi  que  M"*«  de  Maintenon  et  plusieurs 
princes  et  grands  personnages  de  la  cour  (1). 

A  Toccasion  môme  de  ce  mariage  et  de  Tagrément  royal,  le  père 
d'Armand-Louis  se  démit  au  profit  de  celui-ci  de  sa  charge  de  gou- 
verneur de  la  Haule-Basse-Marche;  les  lettres  de  provision  en  date 
du  mois  de  mars  1711  ne  furent  entérinées  en  la  sénéchaussée  de 
Guéret  que  le  10  novembre  1715. 

Le  procès-verbal  d'entérinement  et  d'inslallalion  du  nouveau 
gouverneur  qui  fut  dressé  en  la  circonstance  fut  marqué  surtout 
par  les  harangues  que  prononcèrent  le  conseiller  honoraire  Goulu- 
rier  de  la  Prungne  et  le  procureur  du  Roy  ;  les  deux  orateurs,  après 
avoir  fait  l'historique  de  la  famille  de  Louis-Armand  Foucauld, 
signalé  les  faits  principaux  ou  même  des  particularités  notables 
concernant  ses  devanciers,  s'attachèrent  à  faire  ressortir  l'ancien- 
neté, l'authenticité  de  la  noblesse  de  la  maison  de  Saint-Germain- 
Beaupré  et  ces  deux  remarques,  à  savoir  que  cette  maison  ne 
s'était  jamais  mésalliée  et  qu'elle  s'était  perpétuée  de  mâle  en  mâle 
et  de  père  en  fils  pendant  dix-sept  générations  (2). 

(i)  La  famille  des  Persan,  à  laquelle  s*ailiait  Armand -Louis,  n*était  ni 
d'ancienne  ni  de  grande  noblesse,  mais  elle  était  de  celles  qui  avaient  su 
le  mieux  faire  leur  chemin  à  la  cour.  Saint-Simon,  parlant  du  père 
d'Anne-Bonne,  dit  que  Doublet  de  Persan,  conseiller  au  parlement, 
a  trouva  le  moyen  de  percer  partout  et  d'être  du  plus  grand  monde  »,  et 
d'Ânne-Bonne  elle-même  il  dit  :  «  Plus  heureuse  que  sa  belle  grand- 
mère,  fille  du  président  de  Bailleul,  qui  ne  put  obtenir  de  manger  à  la 
cour  et  d'entrer  dans  les  carrosses,  elle  l'obtint  fort  promptemenl  et  fut 
admise  à  Marly,  ce  qui  n'était  accordé  qu'à  un  bien  petit  nombre  de 
grandes  dames...  » 

Mais  le  même  Saint-Simon,  parlant  de  la  noblesse  des  ^ersan,  se  mon- 
tre assez  dur  :  «  ...  Les  deux  frères  Doublet,  tons  deux  conseillers  et  dont 
l'alné  avait  du  mérite,  de  la  capacité  et  de  l'estime,  avaient  acheté  les 
terres  de  Persan  et  de  Crol  dont  ils  prirent  les  noms.  Ils  allèrent  à  Tau- 
dience  du  premier  président  de  Harlay,  il  les  connaissait  très  bien,  mais 
il  ne  laissa  pas  de  demander  qui  ils  étaient.  A  leur  nom  le  voilà  courbé 
en  révérences,  puis,  se  relevant  et  les  regardant,  comme  les  reconnais- 
sant avec  surprise  :  Masques,  leur  dit-il,  je  vous  connais  Et  il  leur  tourna 
le  dos.  (Saint*Simon,  page  404,  tome  111). 

(2)  Cette  dernière  proposition  n'était  pas  tout  à  fait  exacte;  en  retra- 
çant la  généalogie  des  Foucauld,  nous  avons  constaté,  en  effet,  que  tout 
au  moins  l'un  d'eux,  Jean  Foucauld,  était  mort  sans  enfants  en  1465  et 
avait  institué  pour  légataires  son  frère  et  son  neveu. 

Le  discours  d'installation  d'Ârmand-Louis  a  été  publié  pour  la  première 


EXCURSION  ARCRÉOLOGliiUE  à  LA  SOUTERRAINE   ET  DANS  SES  ENVIRONS.     AÙ^ 

L'orateur  qui  relatait  celle  dernière  circonstance  pouvait-il  se 
douter  qu'avec  Armand-Louis,  celui  même  auquel  il  adressait  son 
panégyrique,  allait  s'éteindre  la  descendance  mâle  et  presque  en 
même  temps  la  famille  des  Foucauld? 

De  son  mariage,  Armand-Louis  eut  plusieurs  filles  et  seulement 
uu  fils,  qui  périt  encore  enfant  des  suites  d'un  accident;  plusieurs 
de  ses  filles  elles-mêmes  moururent  en  bas-âge;  Taînée  seule  survé- 
cut, Anne-Françoise,  qui  fut  mariée  en  1739  avec  Alexandre- 
Auguste  Grivel,  marquis  d'Onroy,  colonel  d'un  régiment  d'infante- 
rie de  son  nom,  (ils  unique  de  Paul  d'Onroy  et  de  Marguerite- 
Françoise  de  Bourgoin  de  Fauliers  (1). 

Le  dernier  des  Foucauld  s'éleignit  au  mois  de  mars  1782.  Ce  fut 
sans  nul  doute  pour  lui,  aux  approches  de  la  mort  comme  pendant 
la  dernière  période  de  son  existence,  un»;  cruelle  amertume  que  la 
pensée  d'emporter  avec  lui  dans  le  silence  de  la  tombe  le  nom 
même  de  ses  ancêtres  et  de  sa  race.  Sa  (in  fut  pieuse,  car,  nous  dit 
rhistorien  de  Saint-Germain,  l'arrière  pelit-fils  des  gentilhommes 
huguenots  était  animé  de  sentiments  religieux  et  avait  même 
quelque  tendance  au  rigorisme  des  jansénistes.  Le  même  historien 
nous  a  laissé  de  ses  derniers  moments  une  narration  un  peu  solen- 
nelle où  l'imagination  parait  avoir  la  plus  grande  part,  mais  qui 
ne  manque  point  de  poésie  (2). 

Armand-Louis  fut  inhumé  dans  l'église  du  bourg  de  Sîrint-Ger- 
main,  ainsi  qu'il  résulte  de  son  acte  de  décès  revêtu  des  signatures 

fois,  croyoDS-nous,  dans  les  Annales  de  Société  des  sciences  naturelles 
et  archéologiques  de  la  Creuse^  à  la  suite  d'une  communication  qui  en 
fut  failc  à  H  Fiosvicux,  archiviste  de  ce  département,  par  H.  le  marquis 
de  Bonncval,  auquel  le  document  appartenait.  (9"*'  bulletin,  page  3l2). 

(I)  D'après  le  Nobiliaire,  Armand-Louis  conserva  une  autre  fille,  Anne- 
Bonne,  qui  devint  religieuse  à  Montargis. 

(â)  D'après  lui,  le  marquis  s'entoura  de  tous  les  souvenirs  des  grands 
jours,  il  fit  assembler  ses  anciens  compagnons  d'armes,  tous  ses  servi- 
teurs et  mourut  en  leur  adressant  ses  adieux  et  en  contemplant  une  der- 
nière fois  le  château  et  son  beau  parc,  qu'il  prévoyait  devoir  passer  bien- 
tôt en  des  mains  étrangères.  Il  avait  recommandé  &  son  serviteur  de  con- 
fiance de  faire  déposer  et  murer  dans  îes  caveaux  de  la  chapelle  ou  de 
cacher  en  certains  endroits  du  parc  l'artillerie  du  château  et  des  coffres 
où  étaient  enfermés  beaucoup  d'objets  précieux  et  des  litres  de  famille. 
Ces  ordres  auraient  été  fidèlement  exécutés.  On  n'a  jamais  pu  retrouver, 
dit  Tabbé  Ratier,  malgré  bien  des  fouilles,  les  lieux  où  avaient  été  déposés 
ces  objets. 

Ces  assertions,  pour  partie  assez  pou  vraisemblables,  doivent  avoir  leur 
source  dans  des  traditions  accréditées  dans  le  pays,  mais  dont  la  preuve 
n'ost  point  établie. 


464  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   BT   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

d'un  grand  nombre  de  seigneurs  et  d'ecclésiastiques   du   voisi- 
nage (1). 

Ânne-Bonne  Doublet  de  Persan,  son  épouse,  mourut  elle-même 
à  Saint-Germain  le  16  janvier  1755  et  fut  enterrée  à  côté  de  son 
mari  sous  les  dalles  de  la  chapelle  seigneuriale  que  celui-ci  avait 
fait  restaurer. 

Leur  fille,  Anne-Françoise,  mariée,  comme  il  a  été  dit  plus  haut, 
au  marquis  d'Onroy,  ne  devait  pas  conserver  longtemps  le  domaioe 
de  ses  pères.  Après  une  union  stérile  et  qui  paraît  avoir  été  des 
plus  malheureuses,  séparée  de  biens  d'avec  son  mari,  elle  se  retira  à 
Nancy  où  elle  mourut.  En  1772,  le  château  elles  terres  furent  ven- 
dus à  Nicolas  Doublet,  marquis  de  Persan,  son  cousin,  pour  le 
prix  de  500,000  livres  (2). 

Ce  prix  était  vraisemblablement  bien  au-dessous  de  la  valeur  de 
ces  importants  domaines  qui  comprenaient,  dit  l'abbé  Ratier,  indé- 
pendamment du  château  et  de  ses  dépendances,  trente  grosses 
métairies  dans  le  Berry,  le  Poitou,  la  Marche  et  le  Limousin,  dix  à 
douze  vastes  forêts,  presque  tous  les  moulins  sur  la  Creuse  depuis 
Chéniers  jusqu'à  Argenton,  les  moulins  sur  la  Sédelle  depuis  la 
Petite-Chapelle  jusqu'à  Crozant,  les  droits  sur  halle  et  four  banal 
de  plusieurs  localités,  les  dîmes  sur  plus  de  cent  vingt  paroisses. 

Entre  les  mains  du  nouveau  châtelain,  de  mœurs  frivoles  etd*nn 
caractère  dissipateur  (3),  ce  riche  patrimoine  ne  demeura  pas  in- 


(1)  M.  l'abbé  Ratier  a  publié  cet  acte  de  décès  à  l'appendice  V  de  son 
livre  (extrait  des  registres  paroissiaux). 

(2)  L'auteur  de  VHistoire  du  château  de  Saint^GermcUn  place  cette 
vente  à  la  date  du  16  juin  1768  et  dit  en  outre  qu'elle  fut  consentie  par 
Louis-Henri,  marquis  de  Pons,  René  de  Blinac  et  la  marquise  de  Jouhé, 
cousins  et  seuls  héritiers  d'Anne-Françoise,  morte  à  Nancy  le  \'^  septem- 
bre 1766.  —  Celte  date  de  juin  1763  est  erronée;  il  résulte  en  effet  de 
litres  authentiques  que  le  marquis  de  Persan  dcvinl  acquéreur  du  ch&teau 
le  12  mai  1772  à  la  suite  d'une  saisie  réelle  enregistrée  à  Paris  au  greffe 
des  décrels  et  requêtes  le  13  mars  1769  (Voir  notice  de  H.  A.  Mazel). 

(3)  Ce  marquis  de  Persan  parait  avoir  été  un  vrai  marquis  fin  de  «£éc2e. 
Dans  leurs  Portraits  du  xviii®  siècle^  MM.  de  Concourt  raconlent  qne  la 
trop  célèbre  Théroîgne  ou  plutôt  Terwagne  de  Méricourt  trouva  en  lui  uc 
protecteur  tout  d'abord  assez  généreux.  Par  contrat  du  21  avril  1786,  il 
reconnaissait  à  Anne-Josèphe  Terwagne,  mineure,  demeurant  à  Paris,  rue 
de  Bourbon-Villeneuve,  5,000  livres  de  renie  annuelle  cl  viagère,  exemple 
de  toutes  impositions,  payable  de  six  eu  six  mois;  celle  conslitotion 
de  renie  était  faite  sur  le  pied  de  50«000  livres  que  le  dit  sieur  de  Persan 
reconnaissait  avoir  reçues  de  demoiselle  Terwagne;  il  avait  la  faculté  de 
b'en  libérer  en  restituant  cette  somme.  Le  marquis  chercha  plus  lard  à  se 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      4G5 

lad  ;  les  terres  et  les  forêts  furent  vendues  les  unes  après  les  au- 
tres et  en  1792  le  château  avec  ses  dépendances  immédiates  fut 
lui-môme  vendu  et  acquis  par  M.  Martin  Ducouret,  président  du 
district  de  La  Souterraine,  moyennant  le  prix  de  88,000  livres, 
dont  42,000  furent  payées  comptant  en  assignats  et  le  surplus  était 
stipulé  payable  en  dix  ans  (1). 

Quelques  mots  seulement  nous  restent  à  dire  en  ce  qui  concerne 
les  derniers  possesseurs  du  château.  Celui-ci  demeura  la  propriété 
de  la  famille  de  M.  Martin  Ducouret  jusque  vers  1840;  la  ruine 
commencée  pendant  cette  période  ne  fit  que  s'accroître  sous  le 
nouveau  propriétaire,  M.  de  Grimould,  comte  de  Villemole;  il  n'en 
subsistait  plus  guère  qu'une  tour,  une  tourelle  et  une  partie  d'un 
corps  de  logis,  quand  M.  d'Honorati  en  devint  acquéreur  ;  mais  ce 
dernier  s'occupa  de  la  transformation  et  de  l'embellissement  du 
parc,  plutôt  que  de  la  restauration  des  bâtiments  (2).  En  1860, 
la  destinée  du  château,  si  longtemps  critique,  voulut  qu'il  passât 
aux  mains  de  M.  Berthomier;  on  sait  déjà  que  ce  fut  pour  lui  le 
salut. 


UN  EPISODE 
SÉJOUR  DE  MADEMOISELLE  DE  MONTPENSIER  A  SAINT-GERMAIIS. 

Le  château  de  Saint-Germain-Beaupré,  en  plus  des  sièges  qu'il  a 
subis  et  des  faits  qui  se  rattachent  directement  à  l'histoire  de  ses 
seigneurs,  a  été  le  témoin  de  plusieurs  événements  mémorables  ;  le 
passage  du  roi  Henri  IV,  par  nous  signalé  sous  la  biographie  de 
Gabriel  Foucauld,  est  un  de  ces  souvenirs  qu'on  ne  saurait  oublier. 
Mais  au  môme  titre  il  convient  de  rappeler  le  voyage  qu'y  fit 
le    21  octobre  1666  Anne-Marie-Louise  d'Orléans,  duchesse  de 

soustraire  à  soq  engagement,  si  Ton  en  juge  d'après  ce  billet  que  Terwa- 
gne  écrivait  de  Gônes,  le  9  mars  1789,  à  son  ami  Perregaux  :  «  Je  vous 
suis  fort  reconnaissante  des  peines  que  vous  vous  êtes  données  pour  me 
faire  payer  de  M.  de  Persan...  » 

Nous  devons  cette  curieuse  indication,  ainsi  que  plusieurs  autres  d'ail- 
leurs, à  Fobligeance  de  M .  G.  Berthomier. 

(4)  M.  Tabbé  Ratier  donne  comme  date  de  cotte  acquisition  Tannée 
1789;  c*esl  évidemment  une  erreur;  on  a  encore  le  contrat  daté  du  38  fé- 
vrier I79i,  enregistré  le  22  mars  même  ann^e. 

(3)  M.  d'Honorati  fil  effectuer  des  terrassements  et  des  travaux  assez 
considérables  pour  la  transformation  de  l'ancien  jardin  à  la  française  en 
parc  anglais. 


^ 


tdG  SOCIÉTÉ  ARCBËOLOGIQUR  KT  aiSTORIQUB  DU  LIKOCSIK. 

Monipensier,  si  connue  dans  l'hislotre  soiis  le  nom  de  la  Grand' 
Mademomlle  (1). 

Ce  voyage  se  place  aii  temps  où  Hen ri  Foucauld  était  le  maitre  ()■■ 
f^ainl'Germain;  la  plupart  des  annalistes  ont  raconté  que  la  cél^hre 
duchesse  Tut  exilée  à  Saint-Germain  et  qu'elle  y  lit  un  asssez  Iomj 
séjour  ;  ce  récit  paraissait  d'accord  avec  la  tradition  ;  on  raonlraii 
les  appartements  qu'elle  avait  occupés,  la  chambre  dite  de  Cléopâtre, 
contenant  le  riclie  ou  curieux  mobilier  qui  servait  à  son  usap>: 
l'on  parlait  volontiers  des  carpes  à  dos  mottxseux  qu'elle  appelait  an 
son  (l'une  cloche  près  du  balcon  en  fer  forgé  que  l'on  voit  encore  ji 
une  fenêtre  du  côté  de  la  tour  Montpensier. 

Laissons  la  Grande  Mademoiselle  nous  raconter  elle-même  son 
voyage  dans  ses  Mémoires  :  a  ....  Je  m'en  allai  en  Berry  ou  j'ai  de- 
terres,  dil-elle,  dans  le  dessein  de  voir  à  vendre  du  bois  où  jt 
réussiti  fort  mal  ;  on  prit  l'affaire  de  travers  et  au  lieu  d'en  fain' 
une  bonne  j'en  lis  une  très  mauvaise  :  je  fus  voir  M"'  de  Saint-Ger- 
main-Beaupré en  la  Marche,  qui  n'était  qu'à  cinq  ou  six  lieut'â 
d'Argenton,oùje  demeuraisdix  ou  douze  jours.  C'est  un  fort  vilain 
lieu;  le  château  est  tel  que  je  n'y  logeais  pas.  Mais  celui  de  Saînl- 
Germain  est  très  beau,  très  magnifique  et  sent  bien  sa  maison  à<.' 
grand  seigneur  ;  j'y  fus  deux  jours  où  l'on  me  fit  grande  chère  ;  je  n'y 
en  voulais  être  qu'un;  mais  ils  avaient  des  poissons  d'une  si  pro- 
digieuse grandeur  que  cela  m'ohiigea  à  y  demeurer  par  les  instantes 
prières  qu'ils  m'en  firent.  Madame  de  Saint-Germain  me  vint  con- 
duire jusqu'à  Chiverny  où  je  passai  en  revenant  (SJ  ». 


(1)  C'est  par  erreur  que  ce  voyage  a  616  placé  par  les  uds  au  cours  de 
raDn6c  1651,  par  il'aulrcs,  pendant  rann6c  1656;  la  vëritalile  date,  celte 
ddli  oclobrc  1666,  csl  élablic  non  seulement  par  les  Mémoire»  de  M"'  de 
Uonipensicr,  mais  eneore  par  la  mention  qu'a  faite  de  ce  voyage  le  prijsi- 
dent  Chorlon  dans  ses  Mémoires  précités  (pages  49  et  90).  Cliorlon  ajoute 
que  la  compagnie  dont  il  faisnil  panie  d6puta  plusieurs  de  ses  ofticiers 
pour  alicr  saluer  cl  compliinenler  la  duchesse. 

(S)  Ce  passage  esi  extrait  de  l'édition  des  Mémolreu  publiés  par 
H.  Cliéruel,  cliez  Charpentier,  tome  IV,  page  *î. 

H.  le  docteur  Vincent,  de  la  Creuse,  qui  iiaralt  avoir  reclirié  le  premier 
l'erreur  liisloriquc  relative  au  prétendu  exil  de  M"'  de  Montpensier,  dans 
un  mémoire  insôré  en  1873  au  ButlelU  de  la  Société  des  scUnces  natu- 
rellee  et  archéologiques  de  la  Creuse,  cite  aussi  le  passage  des  Uémoirei 
qui  a  irnil  au  voyage  ii  Saint-Germain,  mats  avec  une  version  diffé- 
rente. Voici  cetic  version  ;  «Les  affaires  que  j'eus  à  Argentan  (Argentoa) 
m'y  tirent  séjourner  dix  â  douxe  jours,  de  là  j'allai  chez  M.  de  Ssiol-Ger- 
main-Bcaupré,  où  je  lis  la  plus  grande  chère  du  monde,  surtout  en  pois- 
sons d'une  grosseur  monstrueuse,  que  l'on  prend  dans  les  fossés  qui  sont 


1 


fcXGURSlOtf  ARCBÂOLOOIQUB  A  LA  SOOtBRRAlKE  ET  D/NS  SfiS  ENVIRONS.      4Ù1 

Il  est  donc  avéré  que  Mademoiselle  de  Monipensier  ne  fut  pas 
exilée  à  Saint-Germain  et  que  son  séjour  y  fut  de  très  courte  durée. 
C'est  ainsi  que  la  réalité  fait  souvent  tort  à  la  légende.  Celle-ci,  tou- 
tefois, comme  toutes  les  légendes  est  encore  assez  accréditée  pour 
que  le  souvenir  de  la  célèbre  héroïne  de  la  Fronde  soit  resté 
attaché  à  ces  pierres  et  leur  ail  communiqué  je  ne  sais  quel  charme 
très  attrayant. 

Combien  d'autres  personnages  moins  illustres  sans  doute,  mais 
d'importance  cependant,  ont  dû  venir  aussi  en  ces  lieux,  les  honorer 
de  leurs  visites  et  de  leurs  présences  I  Si  les  surfaces  claires  et  lim 
pides  des  pièces  d'eau  pouvaient  encore  nous  rendre  les  images  des- 
grands seigneurs  ou  des  élégantes  promeneuses  qui  s'y  sont  reflé- 
tées, si  les  murs  du  château  on  les  bosquets  du  parc  pouvaient  nous 
redire  les  échos  des  conversations  et  des  fêles  qu'ils  ont  entendus, 
tout  cela  nous  apprendrait  apparemment  que  Saint-Germain-Beau- 
pré fut  pendant  près  de  deux  siècles  le  rendez-vous  d'une  société 
brillante  et  fastueuse.  Mais  à  défaut  même  de  tels  témoignages, 
l'aspect  du  château,  la  grandeur  du  cadre,  l'étendue  des  dépen- 
dances, la  magnificence  des  détails  ne  suffisent-ils  pas  à  nous 
convaincre  que  ce  château  et  ses  maîtres  eurent  un  rôle  tout  à  fait 
prépondérant  parmi  les  maisons  seigneuriales  de  la  contrée,  rôle 
bien  démontré  du  reste  par  tous  les  textes  et  les  documents  qui 
nous  restent. 


très  beaux.  On  leur  donne  à  manger  d'une  maniôre  extraordinaire  ;  on 
sonne  une  cloche  et  ils  viennent  tous.  Cela  me  pa^ut  assez  singulier  pour 
le  remarquer  Ici.  M.  de  Saint-Germain-Beaupré  vint  me  conduire  jusqu'à 
Chiverny.  » 

Les  deux  versions,  qnoiqu*assez  différentes  sur  quelques  points,  sont 
intéressantes  :  mais  à  la  dernière  nous  préférons  celle  donnée  par  M.  Ché- 
ruel,  comme  plus  authentique.  On  sait  que  les  curieux  Mémoires  de  la 
duchesse  parurent  pour  la  première  fois  en  1735,  sous  la  rubrique  '  Ams- 
terdam-Paris (8  volumes  in-12);  mais,  ces  Mémoires,  publiés  d*une 
manière  infidèle  dans  les  diverses  collections  de  Thistoire  do  France, 
notamment  dans  celle  de  Petitot,  ont  été  réédités  par  M.  Chérucl  d'après  le 
manuscrit  autographe,  avec  notes  historiques  (i8S(6-59.  —  4  volumes 
in-4«). 

Mademoiselle  de  Hontpensier,  née  à  Paris  en  1627,  moprut  en  l'année  1699. 


468  sociAtb  archéologiqub  gr  iiistoriquk  du  limousipi. 


CONCLUSION. 

Dans  cette  étude,  Tintérôt  môme  du  sujet  nous  a  entraîné  sans 
doute  bien  au-delà  du  cadre  modeste  que  nous  nous  étions  proposé 
au  début;  rencontrant  sur  notre  chemin  cette  curieuse  famille  des 
Foucauld  de  Saint-Germain,  nous  n'avons  pu  résister  au  désir  de  la 
suivre  à  travers  les  âges,  d'en  rechercher  les  origines  lointaines  el 
la  généalogie,  d'en  esquisser  les  particularités  et  les  physionomie? 
les  plus  saillantes;  mais,  ce  faisant,  notre  but  a  été  surtout  de 
dégager  les  faits  qui  présentent  quelque  certitude,  de  ceux  qui  res- 
tent encore  obscurs,  de  rectifier  des  erreurs  trop  accréditées,   à*" 
recueillir  sur  notre  sujet  le  plus  de  rcpseignemenls  qu'il  nous  a  éiê 
possible,  d'après  le  plus  de  sources  qu'il  nous  a  été  permis  de 
consulter.  Notre  prétention  n'a  pas  été  et  ne  pouvait  être  d'écrire 
rhistoire  même  de  la  maison  de  Saint-Germain.  Cette  histoire  e>i 
cependant  encore  à  faire,  semble-t-il,  même  après  nos  recherches, 
même  après  le  livre  de  M.  l'abbé  Ratier,  ouvrage  estimable  et  d'une 
lecture  attrayante,  mais  où  l'imagination  a  trop  souvent  suppléé 
aux  incertitudes  de  l'érudition.  Il  se  trouvera  certainement  quelque 
jour  une  plume  exercée  et  dévouée,  habile  autant  que  savante,  pour 
retracer  cette  histoire  dans  les  conditions  d'exactitude  qu'impose  la 
science  de  nos  jours  et  pour  nous  donner  dans  cet  ordre  d'idées  et 
en  quelque  sorte  l'équivalent  de  la  restauration  matérielle  entre- 
prise pour  le  château  et  si  bien  menée  à  terme  par  M.  Berlhomier. 
Que  notre  souhait  ne  soit  pas  jugé  excessif!  Peu  d'histoires  de  nos 
familles  locales  nous  paraissent  offrir  autant  d'attrait  et  d'impor- 
tance même  que  celle  des  Foucauld  de  Saint-Germain  ;  et  cela  non 
seulement  à  raison  de  l'ancienneté  de  cette  famille,  de  sa  filiation 
facile  à  suivre  malgré  des  lacunes,  de  la  longévité  singulière  du  nom 
de  Foucauld,  du  rôle  très  remarquable  qu'ont  joué  quelques  uns 
de  ses  membres  et  du  relief  que  présentent  les  physionomies  de 
plusieurs  d'entre  eux  ;  mais  encore  par  ce  fait  que  Texistence  des 
Foucauld  a  été  assez  étroitement  mêlée,  à  diverses  époques,  aux 
événements  de  noire  province,  de  telle  sorte  que  faire  leur  his- 
toire, c'est  en  même  temps,  à  bien  des  points  de  vue,  écrire  l'histoire 
de  celte  province. 

S'il  nous  fallait  maintenant  reprendre  le  récit  de  Texcursion  du 
6  juillet  1891,  nous  devrions  exprimer  le  regret  éprouvé  par  tous 
les  membres  de  notre  société  de  n'avoir  pu  consacrer  à  la  visite  du 


EÎCURSIÔN  AhCHROLOâlOue  A  LA  SOUte<^tlAlNfi  Et  DANS  &tS  RNViRONS.     401^ 

château  de  Saint-Germain-Beaupré  et  de  ses  environs  les  instants 
que  cette  visite  eut  exigés.  Malgré  les  ruines  et  les  modifications 
profondes  apportées  dans  ces  lieux  par  la  marche  des  temps  et  de 
la  civilisation,  bien  des  souvenirs  subsistent  encore,  bien  des  ves- 
tiges se  retrouvent  des  œuvres  de  jadis  et  des  faits  mémorables  que 
nous  avons  notés  au  cour  de  notre  travail.  Mais  Theure  inexorable 
nous  refuse  cette  satisfaction  chère  au  cœur  de  tout  bon  archéolo- 
gue, comme  elle  nous  prive  du  plaisir  de  faire  honneur  à  l'aimable 
hospitalité  qui  nous  est  si  franchement  offerte. 

Le  chemin  que  nous  prenons  pour  revenir  à  La  Souterraine  est 
cette  fois  direct;  aussi  le  retour  est-il  rapide  à  travers  ces  belles  et 
riantes  campagnes,  rafraîchies  par  les  averses  de  la  journée  et 
qu'animent  encore  les  feux  du  soleil  couchant  ;  à  mi-route,  nous 
traversons  le  petit  bourg  de  Saint-Aignant-Versillat,  sans  avoir  le 
loisir  de  nous  y  arrêter,  ne  fùtrce  qu'un  instant,  pour  jeter  un  coup 
d'œil  sur  sa  vieille  église  romane  et  pour  examiner  d'un  peu  plus 
près  rélégant  fanal  funéraire  qui  domine  son  cimetière  (1). 

Et  le  soir,  quand  une  heure  après  la  vapeur  nous  ramène  à  notre 
point  de  départ  du  matin,  la  même  impression,  j'en  suis  certain, 
est  ressentie  par  tous  les  excursionnistes  de  notre  société,  celle  que 
laisse  dans  l'esprit  une  journée  des  plus  agréables  et  des  mieux 
remplies,  utile  à  notre  instruction  personnelle,  fructueuse  pour  la 
science  qui  nous  intéresse  et  pour  la  connaissance  plus  complète  de 
notre  vieille  et  chère  province  qui  gagne  tant  à  être  vue  de  plus 
près  et  à  être  mieux  connue. 

Camille  Jouhanneaud. 

(I)  M.  Elie  de  Beaiifort  a  donné  un  dessin  de  ce  fanal  dans  le  volume 
précité  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'Ouest  (v.  planche  VU). 

M.  A  Mazet  {loco  citato.  Ami  des  monuments,  5<»  année,  1891,  n?  24)  cite 
rinscriplion  de  la  plus  grosse  des  cloches  de  l'église  de  Saini^Aignant- 
VerslIIat,  d*après  laquelle  ccUe  cloche  fut  baptisée  en  (772  et  eut  pour 
parrain  messirc  Louis-François-Marie-Hooorine  vicomte  de  Roche- 
chouard-Ponlville,  Bridicrs  et  autres  lieux,  et  pour  marraine  dame  Anne- 
Adélaïde  AymcrcUc  de  Gareau,  épouse  de  haut  et  puissant  seigneur  mes- 
sire  Anne-Nicolas  Doublet,  chevalier,  marquis  de  Persan,  Saint-Germain 
et  autres  lieux. 

D*aulrc  parl,M.  Berlhomier,  dans  une  co  mmunication  k  la  Société  archéo- 
logique du  Limousin,  a  signalé  Texislence,  au  bourg  de  VersiUat,  d'une 
curieuse  pierre,  dite  des  trois  provinces,  qui  aurait  été  une  borne  indica- 
tive de  la  limite  du  Poitou,  de  la  Marche  et  du  Limousin  (lome  XXXIX, 
séance  du  30  décembre,  page  798). 


T.  v.,  30 


PIÈCES  JUSTIFICATIVES  ET  ANNEXES 


ANNEXE  A. 

INSCRIPTION  DE  LA  CRYPTE  DE  L  ÉGLISE  DE  LA  SOUTERRAINE. 

Fragment  a  (donné  par  M.  Espérandieu,  d'après  un  estampage  pris  par 
M.  Guillot,  directeur  de  FÉcole  primaire  supérieure  à  La  Souterraine). 

IS  -  MANIBVS 

NI  -  FILI  -  ITEM 

PATRIS  -  ITEM 

ACVS 

Fragment  b  (donné  par  M.  Espérandieu,  d'après  le  manuscrit  de  Legro-?. 

reproduisant  la  copie  de  Nadaud). 

ET  MEMORIAE  PAVLI 

MEMORIAE  PAVLL... 

NERTACÏ  AVI  N.... 

VIVVS  POS 

Inscription  complète  (d'après  Grûtcr.  Copie  de  Scaliger). 

DUS  -  MANIBUS  ET  -  MEMORIAE  PAVLII 
NI  -  FILI  -  ITEM  -  MEMORIAE  -  PAULI 
PATRIS- ITEM- NERTACI -AVI  N 
ACUS  VIVUS  POS 


Restitution  (diaprés  M.  Espérandieu). 

(iîIS  MANIBUS 
NI -FILI  -ITEM 
PATRIS  -  ITEM 
ACUS 

Traduction  (d'après  le  même). 


ET  MEMORIAE  PAVLLt 
MEMORIAE  -  PAVLI 
NERTACI  AVI  Nert 
VIVUS  POS 


Diis  manibus  et  memoriae  Paul][i]  ni  fili(i);  item  memoriae 
Pauli,  patris;  item  (memoriae)  Nertaci  avi.  N[eri]acus,  vivus,  pos(uit). 


ËXCURSTOri  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOOTÊRRAINB  Et  DANS  SES  ENVIRONS.       47*1 


ANNEXE  B. 

Marché  pour  la  démolition  et  la  réfection  de  la  partie  haute  de  la  grosse 

tour  de  Bridiers  (1®"^  novembre  1655). 

Marché   éTouvrages.  —  Le  premier  jour  de  novembre  mil  six   cent 
cinquante-cinq,  après  midy,  en  la  ville  de  La  Sousteraine,  pardevant  le 
notlaire  royal  soubsigné  furent  presens  en  leurs  personnes  haut  et  puis- 
sant seigneur  messire  Henry  Pot,  chevalier,  seigneur  de  Rhodes,. ....... .i 

....,  Mondon,  vicomte  de  Bridiers  et  autres  piasses,  conseiller  du  Aoy  en 

SCS  conseils  d'état....  grand  maisire  des  cérémonies  de  France,  demeurant 

à  présens  au  chasteau  de  Bridiers,  parr"  de  la  ville  d'une  part.  Et  Martial 
Pierrefische,  maistre  maçon  demeurant  au  village  de  Lacoste  paroisse  de 
Saint-Maurice,  d'autre  part,  lesquelles  parties  de  leurs  grès  et  voUontés 
ont  fait  faire  entr*eux  les  pactes,  conventions  et  obligations  qui  s'ensui- 
veat,  c'est  asseavoir  que  le  dit  Pierrefische  a  entrepris  de  faire  la  desmo- 
lition,  la  charpente  et  couverture  de  la  grosse  tour  du  dit  chasteau  de  Bri- 
diers et  mettre  le  Tout  à  terre  et  apcès  y  faire  une  vonlte  au  haut  d'icellc 
pour  servir  de  plate-forme  pavée  au-dessus  de  la  d.  voulte  en  bonnes 
pierres  plaltes  et  cimentées  dans  les  jointures  des  d.  pierres,  en  sorte 
que  Teau  né  perce  point  la  d.  voulte,  sur  lequel  pavé  icelui  Pierrefische 
sera  tenu  de  faire  six  gargouilles  ou  conduits  es  endroits  les  plus  néces- 
saires et  ce  de  pierre  de  taille  pour  sortir  la  d.  eaue  au  delà  de  la  mu- 
raille de  la  d.  tour,  laquelle  pierre  il  sera  pareillement  tenu  de  tailler, 
et  en  ouire  sera  encore  tenu  le  d.  Pierrefische  de  carier  deux  chambres 
dans  la  d.  tour  ensemble  les  gardes  robes  et  cabinets  des  d.  chambres, 
faire  les  enduisages  qui  seront  nécessaires  dans  les  d.  chambres  et  cabi- 
nets et  faire  le  tout  à  ses  despans  bien  et  duement  et  dont  il  sera  fait 
visite  aussi  à  ses  dépans,  en  ce  que  le  d.   seigneur  sera  tenu  de  fournir 
les  matériaux  nécessaires  y  ceux  faire  mener  et  conduire  sur  la  place  à  la 
réserve  néansmoings  de  la  pierre  et  sable  nécessaire  à  faire  la  d,  voulte 
et  pavé  que  le  d.  entrepreneur  sera  tenu  de  faire  tirer  à  ses  despans,  le 
d.  seigneur  devra  le  faire  conduire,  et  en  outre  de  donner  et  payer  au  d. 
entrepreneur  la  somme  de  trois  cents  livres  tournois  et  deux  arbres  pour 
employer  au  d.  ouvrage  et  qui  seront  nécessaires,  que  le  d.  entrepreneur 
sera  aussi  tenu  de  faire  débiter  à  ses  despans,  et  en  outre  la  démolission 
et  débrit  de  la  d.  tour  appartiendra  au  d.  entrepreneur  et  dont  il  en 
pourra  disposer  à  sa  voUonté,  laquelle  somme  de  trois  cents  livres,  le  d. 
seigneur  sera  tenu  de  payer  à  mesure  que  le  d.  ouvrage  sera  fait  et  continué 
et  néanmoings  tenu  de  l'avoir  fait  parfait  en  bon  estât  deub.  à  dire  d'ex- 
perts et  gens  à  ce  cognaissans  dans  la  feste  de  Saint-Jean  prochaine  car 
ainsy  les  parties  Font  voullu  et  accordé,  juré,  stipullé  et  accepté  ôt  à  l'en- 
tretenement  des  présentes  obligé  et  hypothéqué   tous  et  chascun  leurs 
biens  à  peine  de  tous  despans,  dommages  et  interesls...  Et  en  outre  le 
preneur  sera  tenu  de  fournir  au  d.  seign'  une  grosse  des  présentes  à  ses 
despans  dans  huit  jours.  Fait  en  présence  de  Jean  de  Nonbcl,  escuyer, 


ilî  àOCliîà   ARCHÊOLOÔIQUri   Et   HISTOtilQtlB   DU   LtllOUsm. 

sieur  de  la  Tacheety  demeuran  par"'^  de  Naillat  et  de Piiigaud,  mac^^Q 

de  la  présente  ville,  tesmoinf[s  à  ce  requis  et  appelés  soussignés  avec  le^ 
parties,  fors  dud.  Pingaud  qui  a  déclaré  ne  savoir  signer  de  ce  enquis. 
Signé  :  Henry  Pot  Rhodes,  de  Montbel,  presant;  Pierrepichb  et  LegraS; 
notaire  royal  héréditaire. 

(Cette  pièce  est  la  cooie  littérale,  à  quelques  mots  près  qui  n'ont  pu  être 
déchiffrés,  d'un  acte  faisant  partie  des  minutes  de  M"  Leroy,  notaire  à  La 
Souterraine). 


ANNEXE  C. 


Liste  des  tableadx  ou  portraits  prooenartt  du  château  de  Saint -Gérmaiii- 
Beaupré  et  appartenant  actuellement  au  Musée  de  la  oUle  de  Bloi»- 
(Legs  de  M.  le  comte  de  Villemotte). 

\ .  Une  collection  de  portraits  du  xvl<*  au  xviii<>  siècle  dont  la  plus  grande 
valeur,  au  dire  de  M.  Eugène  Gervais,  conservateur  du  Musée  de 
Blois,  est  d^éire  des  portraits  historiques  provenant  de  la  galerie  <ie 
Saint-Germain  en  Berry  (ou  plutôt  en  Marche). 

9.  Un  portrait  d'homme  avec  armure,  xviii*  siècle,  toile  ovale. 

3.  Portrait  d*enfant,  xviii®  siècle,  toile  ovale,  jeune  fille  en  Cërès,  xtiii* 

siècle. 

4.  Allégorie,  xviiio  siècle.  Haut.  i^'SS,  larg.  <"0Î. 

5.  Portrait  de  femme  attribué  à  Jouvenet.  Haut.  0«80,  larg.  0"60. 

6.  Portrait  de  femme  cuivre,  xviu®  siècle.  Haut.  0"iO,  larg.  0™dO 

7.  Portrait  d'homme,  xviu*  siècle.  Haut.  0™40,  largeur  0«»30, 

8.  Moine  de  Saint-Germain  fils,  xviii*  siècle.  Haut.  0°*45,  larg.  0*"36. 

9.  La  fortune,  copie  d'après  Le  Guide.  Haut.  i™82,  larg.  t'°45. 

10.  Pavane  à  la  Cour  de  Henry  111,  école  de  Glouet,  xyi«  siècle,  toile  ovale. 

Haut.  O°^80  sur  0»64  de  larg. 
il.  M™*  de  Saint-Germain,  xvi«  siècle,  toile  ovale  0*»80  sur  O^Gi. 
iî.  Anne  d'Autriche,  xvii«  siècle,  toile  ovale  O^TS  5ur6"58. 
13.  M'^*  de  Bourbon-Montpcnsier,  xvu"  siècle  0"64  sur  4*04  de  larg. 
U.  Le  duc  d'Enghien,  xvii"  siècle,  toile  ovale  0*79  sur  O^ISS  de  larg. 

15.  Saint-François  de  Salles,  évéque  de  Genève,  xVii®  siècle,  lotie  ovale 

0°»78  sur  O^eO. 

16.  Portrait  d*enfani  en  guerrier,  xvii®  siècle.  Haut.  1«34,  larg.  0"^. 

17.  Satyres,  enfants,  école  Flamande,  xvii®  siècle,  0™8i  sur  1"*02  de  larg. 

18.  Mort  de  Didon,  école  Flamande,  xvue  siècle.  Haut.  1>°30,  larg.  0^4d, 

10.  Portrait  d*enfant  avec  armure  et  la  croix  du  Saint-Esprit,  toile  ovalf. 

Haut.  0«°45,  sur  O^Sô. 
{D'après  la  communication  de  M,  Eugène  Gerçais^  conserûùteur  du 
Musée  de  Blois). 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  A  LA  SOUtERBAINE  ET  PANS  SES  E!fVIRONS.     i73 


ANNEXE  D. 

Extrait  de  la  nouvelle  chronique  de  Pierre  Robert,  lieutenant  général 
au  siège  du  Dorât  (1598  à  1645,  —  des  Grands  Jours  de  Poitiers  de 
ran1634à16Z5), 

c  Cette  cour  des  Grands  Jours  (à  laquelle  de  toute  part  Ton  y  accourait 
»  en  grande  affluence  par  ceux  qui  avaient  reçu  des  torts  et  outrages] 
»  dura^epuis  le  premier  jour  du  mois  de  septembre  1634  jusqu'à  la  fête 
»  des  Rois  1635  avec  effroy  et  épouvantoment  particulièrement  des  gen- 
k»  tilshommes,  qui  se  trouyèrcnt  pour  la  majeure  partie  en  grande  peine 
»  et  les  prisons  remplies  de  leurs  personnes.  Feu  messire  Henri  Foucaud, 
»  seigneur  de  Saint-(iermainrBeaupré,  gouverpeur  de  la  Haute-Basse- 
9  Marche,  avait  grand  peur  que  sa  vie  fut  recherchée,  car  il  avait  fait 
»  tant  de  voleries,  piileries,  concussions,  exactions,  fait  faire  des  meur- 
»  très,  fait  brûler  des  maisons  et  autres  malversations  qu'il  en  était  en 
9  graud'peinc,  car  il  m'écrivit  par  diverses  fois  de  ce  que  Ton  disait  de 
»  lui  aux  dits  Grands  Jours,  si  je  ne  savais  pas  qu'on  eut  parlé  de  lui  ;  et 
»  de  fait,  Us  dits  Grands  Jours  ne  furent  sitôt  finis,  que  dans  les  mois  de 
»  février  ou  de  mars  de  Tan  1635  il  y  eut  un  furieux  arrest  contre  lui  au 
9  parlement  de  Paris,  donné  par  défaut  et  contumace,  par  lequel  il^fut  con- 
»  damné  d'avoir  la  tôte  tranchée,  sa  maison  rasée,  privé  et  déclaré  indi- 
»  gne  de  sa  charge  de  gouverneur,  ce  qu'ayant  prévenu  de  bonne  heure, 
»  il  s'en  était  défait  au  profit  de  son  fils  aîné  en  la  faveur  de  qui  il  Tavait 
»  résignée;  il  mourut  le  dit  sieur  de  Saint-Germain  en  cot  état,  sans  avoir 
9  osé  jamais  purger  sa  condamnation,  il  y  eut  un  gentilhomme  du  pays 
»  nommé  Coursât,  qui  demeurait  en  sa  maison,  lequel  fut  pour  les  maux 
x>  que  le  dit  sieur  de  Saint-Germain  lui  avait  fait  faire,  décapité  en  place 
»  de  Grève,  à  Paris,  contre  lequel  sieur  de  Saint-Germain  il  y  eut  tant  de 
n  plaintes  contre  lui  de  son  vivant  dans  le  Parlement  que  c'était  une 
»  pillé.  » 

(Chartes,  chroniques  et  mémoriaux  pour  servir  à  V histoire  de  la  Mar- 
che et  du  Limousin,  publiés  sous  les  auspices  de  la  Société  des  lettres, 
sciences  et  arts  de  la  Co  rèze,  par  Alfred  Leroux  et  feu  Auguste  Bosvieux, 
— •  Tulle,  Grauffon,  1886,  page  999). 


ANNEXE  E. 


Acte  de  décès  d'Henri  Foucault, 


Le  12  septembre  1678,  sur  les  deux  heures  après  minuit,   est  décédé 
hault  et  puissant  seigneur  messire  Henri  Foucault,  seigneur  marquis  de, 
ce  lieu,  comte  de  Dun,  Guierisbc,  les  Places  et  auUres  lieux,  gouverneur 


474  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQCR   KT   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

et  lieutenant  général  pour  le  Roy  des  provinces  de  Haute  et  Basse-Marcbe, 
lequel  a  été  inhumé  le  13  du  présent  moys  dans  la  chapelle  de  celle 
église  et  dans  les  tombeaux  de  ses  prédécesseurs.  Il  est  mort  (du  tout)  bon 
catholique,  après  avoir  (reçu)  tous  les  sacrements  de  l'église  et  dans  toui- 
tes  les  marques  d'un  bon  chrétien  ;  il  était  grand  ausmonier  et  le  (vériia- 
ble)  père  des  pauvres  (et  c'est  avec  raison)  et  justice  que  je  le  califie.  — 
Tel  faict  en  présence  de  Pierre  Jabilly  (ou  Jabely),  m«  d'escholle  (signé)  : 
Claude  Robbrt,  Jabilly,  Ranjon,  Uartin...,  Peschant,  curé. 


ICONOGRAPHIE 

Aux  dessins  inédits  de  MM.  Gérardin  et  Georges  Berlhomier  qui  accom- 
pagnent le  texte  de  cette  étude,  il  est  peut-être  utile  d'ajouter  les  dessins, 
gravures,  lithographies  et  plans  qui  ont  été  publiés  antérieurement  à  noire 
connaissance  sur  La  Souterraine,  Bridiers  et  Saint-Germain-Beaupré  {i)i 

LA    SOUTERRAINE. 

4®  La  Souterraine,  vue  de  la  ville.  Gravure  sur  bois,  d'après  un  dessin 
de  Taylor  (Géographie  de  la  Creuse,  de  Jeanne). 

3°  La  Souterraine,  forteresse  de   Hugues,  annonce  de  V Album  de  la 
Creuse^  de  Langlade. 
'3^  Eglise  de  La  Souterraine.  Imp.  lith.  Tripon  (Hist,  monum.), 

4"  Église  de  La  Souterraine,  Lith.  de  P.  Langlade  (Album  delà  Creuse). 

5^  EgUsede  La  Souterraine.  Gravure  sur  bois  {Mosaïque  du  Midi,  1840). 

6®  Eglise  de  La  Souterraine,  Gravure  sur  bois,  d'après  un  dessin  de 
Félix  Merion,  J.  Daucard,  sculp.  {De  Paris  à  Agen^  par  Célestin  Port,  et 
Géogr.  de  la  Creuse,  de  Joanne). 

7*»  L'église  de  La  Souterraine  {Recherches  archéologiques^  de  M.  E.  de 
Beaufort  *,  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  V Ouest,  années 
1800-61,  planches  annexes),  vue  de  l'église,  plan,  détails  des  colonnes  et 
des  chapiteaux). 

H^  Intérieur  de  VégUse  de  La  Souterraine,  Clément  et  Tripon,  lithogra- 
phes à  Limoges  {Hlst.  monum,) 

^  Chapelle  souterraine,  à  La  Souterraine.  Tripon,  del  et  lith.  {Hist, 
monum,) 

10®  Porte  de  V église  de  La  Souterraine  {Dictionnaire  d'architecture. 
de  Viollet  Le  Duc,  tome  VII.  —  Paris,  Morel  et  G'**). 

HO  Porte  de  la  oille  de  La  Souterraine.  Imp.  lith.  Tripon  {Hist. 
monum.), 

42®  Porte  fortifiée  de  La  Souterraine,  Armes  de  La  Souterraine^ 
Eglise  de  La  Souterraine  avant  sa  restauration,  {Nouo.  Dlct,  hist.  de  la 
Creuse,  par  P.  Valadcau). 

*   (1)  MM.  Ducourtieuz,  Fàge,  Tixier  et  Lachenaud.  ont  fait  paraître  en  1S91  le  Catalogue  è" 
gravures  et  de  lithographies  snr  le  Limousin,  1*  partie  :  Costume,  paytagc*,  vues  pittoresque*. 
(Liinogfes,  V^  Ducourtieux).  Nous  avoos  consulté  ce  travail. 


EXCURSiOrf  ARCnftOLOGIQUB  A  LA  SOUTERRAINE  ET  DANS  SES  ENVIRONS.      475 


BRIDIERS. 

1*  Ruines  de  la  tour  de  Bridiers,  Imp.  lith.  Tripon  {HUt,  monum,), 

%^  Restitution  du  château  de  Bridiers  (dessin  de  M.  A.  Mazet,  Ami 
des  monuments  et  des  arts^  revue  périodique,  année  1891,  5°  année, 
n»  24). 

30  Plan  de  l'ancien  château  de  Bridiers ^  par  H.  A.  Mazet  {L^Ami  des 
monuments  et  des  arts,  année  4891,  5*  année,  n**  24)  (i). 

4**  Plan  de  Vancienchâteau  et  Coupe  oertica  le  du  Donjon^  par  M.  E.  de 
Beaufort  (Recherches  archéologiques'^  Bull.  Société  des  antiq.  de  l'Ouest^ 
planche  !'•). 

5<*  Château  de  Bridiers^  commune  de  La  Souterraine  (Nouveau  DicU. 
hist,  de  la  Creuse,  par  P.  Valadeau). 

SAINT-GBRMAIN-BEAUPRÉ. 

lo  Château  de  S aint-Germain- Beaupré,  Imp.  lith.  Tripon  {Hist, 
monum.), 

t^  Château  de  Saint-Germain-Beaupré,  Lith.  de  Langlade  {Album  de 
la  Creusé). 

3«  Vue  du  château  de  Saint-Germain-Beaupré.  Eau-forte  inédile  si- 
gnée S.  J* 

À^  Saint-Germain^ Beaupré^  vue  et  plan  du  château  {Recherches  arch, 
de  M.  de  Beaufort;  Bull.  Soc,  des  anl.  de  l'Ouest,  années  1860-61,  plan- 
che III). 

5<>  Plan  au  châteuu  actuel  restauré^  par  M.  A.  Mazet  (Revue  VAmi  des 
monuments  et  des  arts^  n®  17,  1890  (2). 

&*  Château  de  Saint-Germain- Beaupré  {Noue.  Dict,  hist.  de  la 
Creuse^  par  P.  Valadeau). 


SAINT-AIGNANT-DE-VERSILLAT. 

Lanterne  des  mx>rts,  dessin  de  M.  de  Beaufort,  Recherches  archéologi- 
ques', Bull.  Soc.  des  antiq.  de  l'Ouest,  années  1860-64,  planche  VU. 


(l,  2)  Ces  deux  plans  ont  pu  être  reproduiUi  dans  notre  étude»  grâce  à  l'autorisation  gra- 
cieuse de  M.  Mazet  et  de  M.  Normand,  directeur  de  la  revue  l'Ami  dea  monuments  et  des 
arts» 


MONOGRAPHIE 


I>€  LA 


COMMUNE    DE    THOURON 


Aspect  général  du  pays.  —  La  commune  de  Thouron  n'est  pas 
tout  à  fait  dans  la  partie  montagneuse  du  canton  de  Nantiat.  Le 
sommet  de  ses  coteaux  dépasse  peu  400  mètres  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer.  Riche  en  étangs,  en  petits  cours  d'eau  et  par 
suite  en  prairies,  elle  est  encore  assez  boisée.  On  y  trouve  de  fort 
gracieux  paysages,  qui  n'ont  pas  toutefois  les  vastes  horizons  des 
montagnes  voisines.  Le  prince  Napoléon- Weyse  qui  a  habité  quel- 
que temps  ce  pays  a  écrit,  non  sans  raison,  que  «  Thouron  était 
une  magnifique  terre,  entourée  d'eaux  et  de  forêts,  émaillée  d'étangs 
et  de  verdoyants  pâturages  ». 

Rivières.  —  Le  Vincoa,  qui  prend  sa  source  entre  Compreignac 
et  Saint-Sylvestre,  est  la  seule  rivière  qui  arrose  cette  commune. 
C'est  le  principal  affluent  de  la  Gartempe  dans  le  département  de  la 
Haute-Vienne.  Il  a  une  longueur  de  cinquante  kilomètres,  et  dans 
son  cours  inférieur  il  atteint  une  largeur  de  quatorze  mètres.  Il 
traverse  les  étangs  de  Tricherie  et  de  Ghâteaumoulin,  et  sert 
ensuite  de  limite  à  la  partie  nord  de  la  commune.  Ses  eaux  sont 
assez  poissonneuses,  mais  les  poissons  voyageurs,  comme  la  truite, 
ne  remontent  pas  au-delà  de  ses  étangs. 

Nature  du  sol.  Éléments  ûu'il  fournit  a  l'lndustrie.  —  Le  sol  de 
la  commune  de  Thouron  est  granitique  et  n'offre  aucun  élément  à 
à  l'industrie.  On  trouve  partout  des  carrières  de  moellon,  et  en  quel- 
ques endroits  d'assez  beau  granit  pour  pierre  de  taille. 


MONOGRAPBIE  DE  LA  COMMUNE  DE  THOURON.  i77 

Produits  naturels  du  sol. —  Le  chêne,  le  châtaignier  et  le  bouleau 
sont  les  arbres  les  plus  répandus.  Le  long  des  ruisseaux  croissent 
l'aulne,  le  saule,  el  un  petit  nombre  de  peupliers.  L'accacia  et  le 
peuplier  blanc  sont  assez  commun.  On  trouve  aussi  quelques 
arbres  verts  qui  réussissent  parfaitement,  et  quelques  sorbiers 
dans  la  forêt  qui  couvre  une  superficie  de  H3  hectares.    , 

Le  seigle  est  cultivé  partout,  pendant  qu'on  sème  fort  peu  de 
froment.  Le  blé  noir  ou  sarrazin,  couvre  de  nombreuses  terres.  On 
fait  aussi  un  peu  de  maïs,  de  trèfle  et  autres  plantes  fourragères. 

Le  botaniste  trouvera  dans  plusieurs  étangs,  en  particulier  dans 
celui  du  château  et  celui  de  Tricherie  Trapa  natans,  L.  ;  et  comme 
curiosité  le  gui  croissant,  dans  le  parc  du  château,  sur  Taccacia,  le 
peuplier  blanc  et  le  tilleul. 

Langage.  —  Dans  la  commune  de  Thouron  tout  le  monde  com- 
prend le  français  et  le  parle  avec  les  étrangers  ;  mais  le  langage 
usuel  est  le  patois.  Nous  sommes  ici  sur  les  limites  du  Limousin  et 
de  la  Marche,  et  par  suite  sur  celles  de  la  langue  d'oïl  et  de  la  langue 
d'oc;  aussi  le  langage  se  sent-il  de  ses  deiïx  dialectes.  Je  donne, 
comme  document,  un  curieux  testament  écrit  dans  la  langue  du 
pays,  en  1475,  par  Jehan  Faulcon,  seigneur  de  Thouron. 

Mœurs.  —  Les  doctrines  politiques  répandues  de  nos  jours  et 
rémigration  des  ouvriers  qui  atteint  encore  cette  commune,  ont  une 
influence  pernicieuse  sur  la  famille  et  les  bonnes  mœurs.  Beaucoup 
d'hommes  valides  quittent  chaque  année  le  pays,  et  vont  à  Paris 
ou  à  Bordeaux,  abandonnant  le  soin  de  leur  patrimoine  et  de  leur 
famille  aux  vieillards,  aux  femmes  et  aux  enfants.  Les  bénéfices 
qu'ils  rapportent,  quand  il  y  en  a,  n'ont  jamais  compensé  les  pertes 
causées  par  l'abandon  de  la  terre,  qui  ne  reçoit  jamais  aucune  amé- 
lioration. 

On  trouvera  de  curieux  détails  se  rapportant  aux  anciens  usages, 
dans  le  testament  de  Jean  Faulcon,  à  la  fin  de  cette  monographie. 

Commerce.  —  On  ne  connaît  d'autre  commerce  dans  la  commune 
de  Thouron  que  la  vente  des  bestiaux  et  des  produits  de  la  terre. 
Les  habitants  fréquentent  surtout  les  foires  de  Gorapreignac,  le  8  de 
chaque  mois,  et  celles  de  Nantiat,  le  4.  Pour  s'approvisionner,  ils 
trouvent  dans  ces  deux  localités  de  nombreux  magasins  de  dra- 
perie, nouveauté,  mercerie,  etc.,  etc. 

Industrie.  —  L'industrie  est  à  peu  près  nulle  dans  cette  commune. 

iNSTrruTiops.  —  Il  y  a  au  chef-lieu  de  la  commune  une  école  com- 


478  SOCIÉTÉ  archéologique;  bt  historiquk  ou  liuodsin. 

munale  pour  les  garçons .  fréquentée  par  quarante  élèves  et  one 
pour  les  filles  qui  en  réunit  trente-cinq.  Thouron,  qui  est  une  des 
onze  paroisses  composant  le  doyenné  de  Compreignac,  fait  partie  de 
la  perception  de  Compreignac,  et  dépend  du  bureau  de  poste  et 
du  receveur  d'enregistrement  de  Nantiat. 

Voies  de  communication.  —  Cette  commune  est  desservie  par  le  che- 
min de  fer  de  Limoges  au  Dorât.  La  station  de  Thouron  esta  quatre 
kilomètres  du  bourg.  Elle  est  traversée  dé  TOuesl  et  à  TEst  par  le 
chemin  de  grande  communication  n"*  5,  de  Confolens  àBourganeaf. 
et  du  Midi  au  Nord  par  le  n«  7,  de  Limoges  au  Blanc.  Le  chemin 
n®  96  de  Bellac  à  Compreignac,  est  en  construction;  il  doit  passer 
au  village  de  la  Combe. 

Souvenirs  et  monuments  msTORiQUES.  —  Les  souvenirs  historiques 
sont  peu  nombreux  dans  cette  commune;  ils  se  rapportent  surtout 
à  son  château.  Il  n'y  a  pas  d*aulre  monument  ancien  à  citer. 

Thouron,  chef-lieu  de  cette  commune,  doit  probablement  son  nom, 
qu'on  écrivait  jadis  Touron,  à  son  ancien  château.  En  Limousin,  on 
donne  le  nom  de  tour  à  tous  les  châteaux  forts.  On  dit  les  tours 
deChâlucet,  la  tour  de  Bar,  la  tour  deLur,  la  tour  de  Royère,  etc., 
au  lieu  de  château  de  Châlucet,  château  de  Bar,  château  de  Lur,  châ- 
teau de  Royère.  Le  mot  Tour  a  du  former  Touron  et  même 
Touradis,  nom  d'un  village  de  cette  commune. 

Sa  position  géographique  est  sur  le  46''  degré  de  latitude  nord.  La 
ligne  qui  représente  ce  degré  passe  près  du  chef-lieu  et  divise  son 
territoire  en  deux  parties  à  peu  près  égales.  Cette  commune,  qui  a 
une  population  de  571  habitants  et  une  superficie  de  1372  hectares, 
fait  partie  du  canton  de  Nantiat  et  se  trouve  bornée  à  TEst  par  la 
commune  de  Compreignac,  au  Nord,  par  celles  de  Saini-Sympho- 
rien  et  du  Buis,  à  TOuest,  par  celle  de  Naniiat,  et  au  Midi,  par  celle 
de  Saint-Jouvent. 

«  L'histoire  de  cette  bourgade,  dit  le  prince  Napoléon- Weyse, 
est  obscure.  Elle  ne  contient  que  celle  des  différentes  dynasties  de 
ses  seigneurs,  et  si  on  le  veut  bien,  les  vertus  de  ses  curés, 
modestes  serviteurs  de  l'Eglise,  qui  après  une  vie  silencieusement 
dépensée  au  service  de  Dieu  et  de  l'autel,  se  reposaient  au  pied  de 
ces  mômes  autels,  où  pendant  tant  d'années  ils  répandaient  le  sang 
Ihéandrique  régénérateur  du  monde. 

»  J'ai  longtemps  habité  le  Château  de  Thouron.  Il  est  bien  bon  de 
prier  dans  son  humble  église,  Dieu,  peut-être,  parle  mieux  à  l'âme 
fidèle  dans  ce  temple  villageois  déserté  que  dans  ht  magnifique 
cathédrale.  » 


NONOGRAPBIR   Oë  LA  COMMUNS   DE   THOURON.  iT9 

Nous  allons  étudier  séparément  : 

I.  —  L'église. 

II.  —  Le  cliâteau  et  les  familles  qui  ront  possédé. 
IIL  —  Le  bourg. 

IV.  —  Les  villages. 

L— L'ÉGLISE. 

Thouron  fut  donné  à  la  cathédrale  de  Limoges  en  1012,  puis 
cédé  à  Flavignac  en  1084.  On  trouve  ensuite  en  1098,  la  donation 
de  Téglise  de  Thouron  à  Tabbaye  de  Saint-Marlial.  A  la  suite  de  ces 
donations,  Tabbayede  Saint-Martial  de  Limoges  posséda  l'église  de 
Thouron  et  quelques  biens  fonds  dont  le  revenu  servait  de  traite- 
ment au  curé.  Aussi,  depuis  cette  époque,  jusqu'à  la  Révolution,  ce 
fut  toujours  l'abbé  de  Saint-Marlial  qui  nomma  les  titulaires  de, 
cette  cure. 

Le  patron  de  la  paroisse  est  saint  Pierre-ès- Liens,  dont  on  fait 
la  fête  le  1"'  août. 

L'église  est  une  construction  romane  du  xu*  siècle,  restaurée 
en  1498.  Elle  n'a  qu'une  seule  nef  (15"',60  sur  5°,50)  qui  n'a  pas 
conservé  sa  voûte  primitive.  Un  lambris  en  bois,  fait  vers  1728,  l'a 
remplacée  jusqu'en  1888,  époque  à  laquelle  remonte  la  voûte, 
en  brique  actuelle.  Elle  est  éclairée  par  quatre  fenêtres  plein-cintre. 

Le  sanctuaire  (4°,80  sur  8"*,70)  a  une  voûte  d'àrète  au  centre 
de  laquelle  on  a  placé,  postérieurement  à  1620,  une  pierre  en  forme 
de  clef  de  voûte,  portant  les  armes  de  la  famille  Dupeyrat.  Il  est 
éclairé  par  deux  baies,  décorées,  depuis  1861^  de  vitraux  à  person- 
nages. Celui  duNord  représente  saint  Pierre-ès-Liens,  patron  de  la 
paroisse,  et  celui  du  Midi  la  Vierge  Immaculée.  Au  bas  sont  les 
armes  des  donateurs  :  parti,  au  /*'  d'argent  au  lion  desable^  armé, 
lampassé  et  couronné  de  gueules^  qui  est  du  Breuil-Helion  de  La 
Guéronnière  ;  au  2""  d'argent,  à  trois  vaches  bretonnes  de  gueules 
l'une  sur  l'autre,  qui  est  de  Brettes. 

La  porte  ouverte  dans  le  pignon  ouest  est  formée  d'une  seule 
voussure  avec  colonnette  continuée  dans  le  cintre,  au-dessus  des 
chapitaux  sans  sculpture.  Sur  une  pierre  qui  la  surmonte  on  lit  la 
date  1682,  indiquant  probablement  l'époque  d'une  réparation. 

On  remarque  dans  cette  église  un  tableau  venant  de  l'ancienne 
abbaye  de  Saint-Martin-des-Feuillants  à  Limoges^  qu'a  possédée  en 
dernier  lieu  la  famille  de  Brettes.  Dans  un  grand  cadre  triangu- 
laire avec  la  courbure  d'une  voûte  ogivale,  sont  représentées  les 
trois  personnes  de  la  Sainte-Trinité  :  Dieu  le  Père,  avec  un  nvmbe 


480  SOC1FTÉ   ARCHÉOLOGIQUR   KT    HISTORIQUE    DU    LIMOUSIN. 

triangulaire;  le  Fils  en  face  de  lui,  tenant  sa  croix;  et  au  haut  du 
tableau,  le  Saint-Esprit  sous  forme  de  colombe. 

La  chaire,  en  bois  sculpté,  représente  le  Bon  Pasteur,,  accom- 
pagné des  quatre  évangéhstes  ;  elle  serait  Tœuvre  de  M.  Pacaîlle, 
curé  de  cette  paroisse,  de  1728  à  1750. 

Uéghse  de  Thouron  possède  encore  des  rehques  des  martyrs  de 
la  légion  Thébéenne,  placées  dans  un  reliquaire  en  bois,  muni  du 
sceau  de  Mgr  d'Argentré.  On  ht  sur  ces  ossements  :  Sancti  Bran- 
dini,  mart,  de  legione  Thebeorum.  Sancti  Trani,  mart.  de  legiane 
Tbebeorum.  Quand  à  la  grande  chasse  en  cuivra  émaiUé  et  doré 
qui  lui  fut  donnée  en  1790,  on  verra  plus  loin  le  sort  qu'elle  a  eu. 

Le  clocher  en  bois,  placé  au-dessus  de  la  porte,  avait  jadis  plu- 
sieurs cloches,  dont  une  à  inscription  gothique,  qui  furent  prises 
pendant  la  révolution;  celle  qu'il  conserve  aujourd'hui  a  0"*67  cen- 
timètres de  diamètre,  ce  qui  indique  un  poids  approximatif  de 
165  kilos,  elle  porte  cette  inscription  :  IHS,  MA.  S.  Petre,  S.  Paule 
orale  pro  nobis.  —  Parrain,  noble  Gilbert  de  la  Gousse,  tnarraine 
Gatherine  Madoz.  —  Syndics  :  Jehan  de  VaucourbeU  et  Jehan 
Baritau,  1602, 

Une  vicairie  avait  été  fondée  dans  l'éghse  de  Thouron  par  les 
seigneurs  du  lieu  ;  elle  fut  augmentée  en  1475  par  Jehan  Faulcon, 
seigneur  de  Thouron  et  de  Saint-Pardoux  dont  le  leslamenl  se 
trouve  plus  loin. 

Plusieurs  autres  fondations  existèrent  aussi  dans  cette  égUse  jus- 
qu'à la  Révolution.  Une  note  de  1764  nous  fait  connaître  les 
suivantes  : 

«  1°  Un  service  :  tous  les  lendemains  de  chaque  bonne  fête  de 
Tannée,  et  le  jour  de  saint  Jacques  et  Philippe  pour  M.  Jacques 
Dupeyrat  de  Thouron. 

»  2*»  Tous  les  ans,  le  jour  de  saint  Martial,  pour  Hélie  Madot, 
bourgeois  de  Thouron. 

»  3<>  Tous  les  ans,  le  lendemain  de  la  fôle  de  saint  Pierre-ès- 
Liens,  pour  M.  Pacaille,  curé  de  Thouron,  qui  ayant  acheté  la 
petite  cuisine  autrement  la  boulangerie  de  Jean  Crousillaud,  la 
donna  à  la  cure  moyennant  un  service  tous  les  ans. 

»  4»  Tous  les  ans,  le  jour  de  la  Purification  de  la  sainte  Vierge  un 
service  fondé  par  François  Mounier,  dit  le  meunier  de  la  Combe, 
taxé  deux  Hvres  deux  sols  six  deniers.  Le  sieur  Martin,  notaire  de 
Compreignac  a  fait  le  testament  environ  l'an  1724. 

mS*"  Tous  les  ans  le  jour  de  Saint-Joseph,  service  pour  Joseph 
Thouron,  de  Croix-Forge,  taxé  une  livre  cinq  sols.  Le  sieur  Couly, 
notaire  à  Saint-Jouvent,  a  fait  le  testament  environ  Tan  1740 
ou  1745  ». 

Il  y  avait  encore  un  service,  tous  les  ans,  le  jour  de  saint  Jean, 


IIONOGRAPHtS   DR    LA    COHMCNB  DE  TUOURON.  431 

pour  Jean  Teslet  du  village  de  Villelte,  qui  l'avait  fondé  par  son 
leslamenl  du  21  août  1770,  et  un  autre  le  jour  de  Sainte-Aune  pour 
Anne  Durousôeau,  sa  mère,  chacun  une  livre  dix  sols. 

Gabriel  Mounier,  du  village  de  la  Grêle,  paroisse  de  Saiot-Jou- 
vent,  devait  annuellement  à  l'église  de  Thouron  la  somme  de  vingt 
livres  pour  le  luminaire  de  la  lampe  du  saitit  Sacrement,  somme 
qu'il  payait  à  Noël. 

Il  y  avait  k  Thouron,  comme  dans  la  plupart  de  nos  paroisses, 
des  confréries  dont  faisaient  toujours  partie  les  familles  les  plus 
honorables  du  pays.  Les  charges  et  les  dignités  étaient  ordinaire- 
ment mises  aux  enchères.  Le  produit  de  ces  enchères  formait  la 
caisse  de  la  confrérie.  Les  registres  paroissiaux  de  1720  nous  en 
font  connaître  deux  :  La  confrérie  du  Très-Sainl-Sacremenl,  qui 
celte  année  eut  les  dignitaires  suivants  :  Le  roi,  M.  Dupeyrat;  la 
reine,  M""  de  Thouron  ;  le  dauphin,  Léonard  du  Rousseau  ;  la  dau- 
phine,  M"«  Madot  ;  le  mignon,  Martial  Bérard  ;  la  mignonne,  Jeanne 
Géraudeau  ;  le  porte-enseigne,  Léonard  Mounier,  etc.  La  seconde 
était  la  confrérie  de  Saint-Jean-Baptiste.  En  1720,  le  roi  fut 
M.  Madot;  la  reine,  M"'  Madot;  le  dauphin,  M.  de  Monlaurand,elc. 

Pendant  toutle  moyen-âge, on  a  souvent  enterré  dans  les  églises, 
et  cette  coutume  existait  à  Thouron  comme  ailleurs.  Les  regis- 
tres paroissiaux  nous  signalent  un  certain  nombre  de  ces  sépul- 
tures. Outre  celles  des  curés  du,  lieu,  dont  la  place  était  dans  le 
sanctuaire,  nous  connaissons  celles  des  seigneurs  de  Thouron  : 
Louis  Faulcon,  seigneur  de  Thouron,  avait  son  tombeau  devant 
l'autel  de  Saint-Martial.  Son  fils  Jehan  Faulcon,  par  son  testament 
de  1475,  veut  être  enterré  dans  le  même  lieu. 

Antoine  Dupeyrat,  fils  de  Pierre  et  d'Isabeau  Duléry,  estenseveli 
le  14  mai  1690  devant  l'autel  de  sainte  Madeleine. 

Hélie  Madot,  notaire  du  bourg  de  Thouron,  est  enterré  dans 
l'église  en  1702. 

Le  30  août  1747,  Anne  Jouve,  veuve  de  Jean  Pacaille,  y  est  ense- 
velie en  présence  de  Léonard  Pacaille  sont  fils,  curé  de  Thouron. 

Le  22  février  1752,  Marie  Origet,  épouse  de  Jean  Deschamps,  est 
enterrée  en  présence  de  Jean  Deschamps,  son  fils,  curé  de  Thouron. 

Le  11  octobre  1756,  Jean  Deschamps,  époux  de  la  précédente. 

Le  8  septembre  1767,  François  Dupeyrat,  seigneur  du  Mas. 

Le  8  décembre  1772,  Jean-Baptiste-François  Dupeyrat. 

Une  ordonnance  de  i776  a  interdit  les  sépultures  dans  les  églises, 
et  cet  usage  a  cessé  dès  ce  momenl. 

Devant  la  porte  de  Téglise  on  remarque  une  belle  croix  en 
pierre,  portée  sur  une  colonne  canelée,  qui  elle-même  surmonte 
un  autel  en  pierre.  C'est  là  que  l'on  dépose  le  cercueil  lorsqu'on 
vient  célébrer  des  funérailles. 


482  SOCIRTR   ARCBÉOLOGIQUR    ET  HISTORIQUE   DU   LIUOCSIN. 

Toutes  les  sépultures  ne  se  faisaient  pas  dans  l'église,  car  pour 
cela  il  fallait  ou  avoir  des  droits  acquis,  ou  payer  une  somme  à  la 
fabrique.  La  plupart  des  habitants  étaient  enterrés  dans  le  cime- 
tière paroissial.  Ce  dernier  élait  à  une  centaine  de  mètres  au  sud 
de  réglise.  11  paraît  très  ancien.  Au  centre  se  trouve  la  chapelle  de 
Saint-Roch,  bâtie  probablement  en  1631,  époque  à  laquelle  tout  le 
pays  fut  ravagé  par  la  peste.  J'ai  vu  dans  cette  chapelle,  il  y  a 
vingt-cinq  ans,  deux  belles  dalles  funéraires  portant  des  armes  qui 
semblent  bien  être  celles  de  la  famille  Chauvet;  d'argent  à  trois 
fasces  d'azur  accompagnées  de  neuf  merlettes  de  gueules  ni  paitées. 
ni  becquées,  3,  3,  2  et  i ,  Aujourd'hui,  non  seulement  ces  tombes 
ont  été  enlevées,  mais  encore  la  toiture  de  ce  petit  édifice  est  tom- 
bée, et  cette  gracieuse  chapelle  si  pieusement  élevée  au  centre  du 
champ  du  repos,  sous  les  grands  arbres  qui  ombragent  encore  tant 
de  sépultures  chrétiennes,  n'est  plus  maintenant  qu'une  masure. 

On  a  cessé  d'enterrer  dans  ce  cimetière  en  1864.  Le  nouveau 
est  situé  beaucoup  plus  loin  au  nord-est  du  bourg. 

Voici  le  nom  des  curés  de  Thouron,  avec  la  date  à  laquelle  ils 
exerçaient  le  ministère  dans  cette  paroisse  : 

Jean  Ronger,  prêtre,  chapelain  de  Thouron  en  14S0. 

Vinehaud,  le22avriH541. 

De  VauGourbeil.  Deux  prêtres  de  ce  nom  furent  curés  de  Thou- 
ron, à  une  date  qui  ne  m'est  pas  connue,  peut-êlre  vers  1600,  lors- 
que Jean  de  Vaucourbeil  était  syndic  de  la  paroisse. 

Pierre  Barrèges,  était  curé  de  Thouron  en  1658,  il  y  est  mort  et 
a  été  enterré  dans  le  sanctuaire  de  l'église  le  28  mars  1687.  A  son 
enterrement  étaient  présents  Joseph  Dupeyral,  écuyer,  seigneur 
baron  de  Thouron,  et  Pierre  de  Vaucourbeil. 

Jean-Charles  de  La  Brousse,  docteur  en  théologie  1692,  1698. 

Pierre  Dutreix,  dont  on  trouve  quelquefois  le  nom  écrit  Dutreuil , 
1698, 1710. 

Guy,  1711,  1719. 

Jean  Fraisseix,  1720, 1728. 

Léonard  Pacaille,  1728-1750.  Pendant  vingt-deux  ans  qu'il  resta 
curé  de  Thouron  il  fit  beaucoup  de  bien,  son  successeur  a  écrit  de 
lui  sur  les  registres  paroissiaux  :  «  Quand  il  vint  à  Thouron  l'église 
était  comme  une  grange.  C'est  lui  qui  l'a  fit  voûter  (1),  qui  fit  faire 
le  retable,  qui  fit  boiser  le  sanctuaire,  et  a  fait  faire  la  chaire  et  la 
sacristie.  En  outre,  c'est  lui  qui  a  fait  faire  la  maison  curiale,  et 

(1)  Le  sanctuaire  conserve  encore  sa  voûte  primitive.  Celle  indiquée  ici  est 
probablement  le  lambris  en  bois  qui  était  dans  la  nef,  et  qui  a  été  remplacé 
en  1888  par  une  voûte  en  brique. 


MONOGRAPHIE^DB    LA   COMMUNE  DE   THOURON.  4B3 

cela  la  plus  grande  partie  à  ses  dépens.  Il  est  le  premier  qui  com- 
mença à  faire  tout  à  fait  sa  résidence  à  Thouron.  Ses  devanciers 
n'y  résidaient  presque  jamais.  Nous  devons  tous  lui  savoir  obliga- 
tion, comme  à  notre  bienfaiteur.  » 

«  Le  15  mars  1750,  messire  Léonard  Pacaille,  curé  de  la  paroisse 
de  Thouron,  décédé  le  jour  précédent,  en  la  communion  des  véri- 
tables fidèles  prêtres,  âgé  d'environ  cinquante  ans,  a  été  inhumé 
dans  le  sanctuaire  de  l'église,  en  présence  du  sieur  Jacques  Bou- 
riaud,  son  beau-frère,  et  Négrier,  » 

Jean  Deschamps,  1750,  1782.  Pendant  tout  le  temps  qu'il  a  été 
curé  de  Thouron,  il  a  écrit  un  très  grand  nombre  de  notes  sur  tous 
les  feuillets  libres  des  registres  paroissiaux.  Je  les  ai  publiées,  en 
1890,  sous  le  litre  de  Chronique  paroissiale  de  Thouron,  dans  le 
tome  II  des  Archives  historiques  du  Limousin.  Il  nous  fait  connaître 
son  arrivée  dans  cette  paroisse  :  «  Je  soussigné,  curé  de  Thouron, 
y  suis  entré  le  15  mars  1750,  nommé  par  M.  Négrier,  chanoine  de 
Saint-Martial,  et  y  ai  pris  possession  le  15  novembre.  Cela  occa- 
sionné par  une  contestation  entre  M»'  l'Evêque  et  M"  les  chanoines 
de  Saint-Martial,  M'  de  Coëtlosquet,  alors  évéque,  nommait  ^,  le 
curé  de  Morterol  près  Bessines,  disant  que  tous  les  bénéfices  cu- 
riaux  appartenant  à  M.  l'abbé  de  Saint-Martial,  lorsque  Tabbaye 
est  vacante,  leur  nomination  lui  appartient  de  droit.  El  M"  les  cha- 
noines soutenaient  le  contraire.  Chacun  faisait  décider  leur  droit 
par  les  avocats  de  Paris.  Mk^  l'évêque  fut  condamné.  Ce  qui  fit  qu'il 
me  donna  mon  visa  en  vertu  de  la  nomination  de  M' Négrier,  après 
m'avoir  laissé  huit  mois  vicaire  régent.  » 

En  1764,  il  donne  la  liste  des  services  fondés  dans  l'église 
de  Thouron,  liste  qui  est  reproduite  précédemment. 

Il  constate  en  1765  que  les  châtaignes  produites  par  les  arbres 
du  cimetière  «  ont  toujours  été  au  profit  des  âmes  du  purgatoire, 
et  que  les  curés  en  ont  employé  le  revenu  en  services.  On  saura 
également  que  les  offrandes  qui  se  font  aux  âmes  du  purgatoire  et 
qu'on  vend  à  l'enchère  à  la  porte  de  l'église,  sont  privilégiées  pour 
le  curé.  De  tout  temps  le  curé  en  a  eu  la  préférence  en  en  donnant 
le  prix  du  dernier  enchérisseur  ». 

Les  revenus  de  la  cure  de  Thouron  consistaient  dans  le  produit 
de  quelques  terres  et  de  quelques  prés,  appartenant  au  chapitre  de 
Saint-Martial  dont  cette  cure  dépendait.  En  1769,  M.  Descharaps 
abandonna  le  tout  au  chapitre  à  condition  qu'il  lui  payerait  une 
pen.sion  de  500  livres. 

En  juin  1782,  il  quitta  la  cure  de  Thouron  en  permutant  avec 
Etienne-Antoine  Laurier  pour  une  vicairie  de  chœur  à  l'abbaye  de 
Saint-Martial  de  Limoges.  Il  passa  dans  ce  nouveau  poste  les  di\ 


4^4  âOCliT^.   ARCBÉOLOGIQtJB  Et   BlStORIQOE   DtJ  LIllODSifV. 

dernières  années  de  sa  vie.  La  constitution  civile  du  clergé  le  trouva 
ferme  dans  sa  foi  ;  avec  tous  les  autres  membres  de  ce  chapitre  il 
la  repoussa  ainsi  que  le  serment  schismatique  que  Ton  demandait 
alors  à  tous  les  ecclésiastiques.  Il  supporta  avec  courage  le  com- 
mencement de  la  persécution,  et  mourut  en  décembre  1792,  étant 
âgé  de  soixante-dix  ans  environ.  Il  a  une  notice  biographique  dans 
les  Martyrs  et  confesseurs  de  la  foi  du  diocèse  de  Limoges  (i). 

Etienne-Antoine  Laurier,  1782,  1793,  élaitfils  de  Martial  Laarier 
etd*Anne  Gondeaud.  Il  avait  d'abord  été  enfant  de  chœur,  puis 
vicaire  de  Fabbaye  de  Saint-Martial.  Il  succéda  par  permutation  à 
M.  Deschamps,  et  comme  lui  il  écrivit  un  grand  nombre  de  notes 
sur  les  registres  paroissiaux.  Ces  notes  font  partie  de  la  Chronique 
paroissiale  de  Thouron  que  j'ai  signalée  plus  haut. 

Il  y  fait  connaître  une  lettre  de  TEvéque  de  Limoges,  du  6  mai 
1784,  annonçant  «  que  le  dessein  de  Sa  Majesté  et  du  Clergé  de 
France  est  d'augmenter  les  portions  congrues  de  M"  les  cur^s 
congruîstes.  Ils  n'ont  que  500  livres  et  on  leur  en  fait  espérer  800.  - 

En  1788  V  le  nommé  Leypaud  achète  une  tombe  dans  le  cimetière, 
attenante  le  vase  de  M<  Masdoty  moyennant  34  sols  qu'il  a  donnés 
au  syndic  fabricien  Pierre  Nicole  ». 

«  Le  18  mai  1788,  dit-il,  par  permission  de  M.  Fabbé  de  Moussai, 
vicaire  général  et  abbé  de  Saint-Martial,  j'ai  béni  solennellement 
la  grande  croix  de  pierre  que  j'avais  fait  élever  dans  le  cimetière. 

»  Cette  année  [1787]  j'ai  commencé  à  jouir  des  200  livres  d'aug- 
mentation accordée  par  le  roi  Louis  XVI.  Les  congruistes  ontactuel- 
lement  700  livres.  Je  paye  aussi  66  livres  de  décimes.  » 

En  1790,  M.  Laurier  reçut  pour  la  paroisse  de  Thouron  une  des 
grandes  chasses  en  cuivre  émaillé  et  doré,  provenant  de  l'abbaye 
Grandmont;  je  donnerai,  aux  documents,  le  procès-verbal  de  sa 
translation  qu'en  a  fait  le  curé  de  Thouron.  Cette  magnifique  œuvre 
d'art  a  dû  être  livrée,  comme  celles  de  Razès,  Saint-Sylvestre,  etc., 
à  l'agent  national  recherchant  du  cuivre  pour  faire  une  chaudière. 

Au  moment  de  la  Révolution,  M.  Laurier  eut  la  faiblesse  d'ad- 
hérer à  la  schismatique  constitution  civile  du  clergé,  et  de  prêter 
le  serment.  C'est  après  cela  qu'il  se  qualifie  «  curé  de  Thouron, 
aumônier  de  la  garde  nationale,  secrétaire  et  greffier  de  la  muni- 
cipalité »•  Le  28  octobre  1792  il  fut  élu  officier  public  par  70  suffra- 
ges, et  arriva  en  1794  à  oublier  tous  ses  devoirs  de  prêtre.  Il  finit 
misérablement,  peu  de  temps  après,  frappé  d'une  maladie  mysté- 
rieuse, disent  les  anciens. 

Pendant  les  premiers  jours  de  la  Révolution,  un  prêtre  fidèle  que 

(I)  Limoges,  V«  H.  Ducourtieux,  1892,  un  vol.  in-8«»de  748  p. 


HONOGBAPBIB  DE  LA  COMMUNE  HE  THOURON.  485 

je  crois  originaire  de  celle  paroisse,  Jean-Baptisle  Mazéraud,  s'y 
relira  après  avoir  été  chassé,  pour  refus  de  serment,  de  Saint- 
Priest-le-Beloux,  sa  paroisse.  Il  rendit  de  grands  services  aux  habi- 
tants, mais  il  ne  put  pas  y  rester  longtemps,  et  fut  obligé  d'émigrer 
à  Chambéry.  Il  revint  dès  que  la  persécution  cessa,  et  y  fut  main- 
tenu pour  curé  à  Tépoque  du  Concordat,  Il  y  est  mort  en  1807.  Un 
décret  impérial  du  28  août  1808  érigea  en  succursale  cette  paroisse 
et  un  très  grand  nombre  d'autres. 

Après  M.  Mazeraud,  la  paroisse  de  Thouronfut  desservie  alterna- 
tivement par  le  curé  de  Nantiat,  de  Saint-Jouvent  ou  de  Gomprei- 
gnac.  Ce  ne  fut  qu'en  1846  qu'elle  eut  pour  curé  M.  Paul  Baleynaud  ; 
et  ensuite  : 
MM.  Jean-Bapliste  Chassaing,  1847-1849. 

Faure,  1849-1852. 

Mathieu  Gaston,  1882-1854. 

Adrien  Ghambon,  1854-1861. 

Christophe  Cohade,  1861-1872. 

Gyprien  Verger,  1872-1880. 

Jean-Hippolyte  Dequioudeneix,  1880. 


IL  —  LE  CHATEAU  ET  LES  FAMILLES  QUI  LONT  POSSÉDÉ. 

Il  serait  difficile  de  dire  aujourd'hui  ce  qu'était  l'ancien  château 
de  Thouron.  Lç  peu  de  mots  qu'on  trouve  dans  les  auteurs  anciens 
le  montrent  comme  une  place  forte  importante.  Il  était  situé  près 
et  au  sud-ouest  de  Téglise,  en  parlie  sur  le  monticule  qui  domine 
la  prairie  en  partie  sur  remplacement  du  château  actuel.  Construit 
au  xu*  siècle,  il  devait  comme  nos  autres  châteaux  limousins  de 
cette  époque,  former  un  quadrilatère  avec  de  fortes  tours  carrées 
à  ses  angles.  Il  n'en  reste  pas  la  moindre  trace, 

La  chronique  de  Saint-Martial,  qui  en  parle  en  1438,  le  nomme 
Castrum  de  Touront, 

On  voit  qu'en  1591,  M.  Boyol  de  Montcocuet  son  gendre,  M.  de 
Villelume,  y  tenaient  garnison  pour  le  roi. 

En  1634,  après  le  meurtre  de  Fontréaulx,  «  la  tour  du  château  de 
Thouron  fut  ruinée  et  démolie  en  partie  ;  c'était  une  place  forte, 
ajoute  Robert,  qui  avait  servi  durant  les  guerres  de  la  ligue  et  les 
autres  d'un  nid  de  voleurs  et  de  tanière  de  brigands.  » 

En  1658,  M.  Dupeyrat,  trésorier  de  France  en  avait  réparé  une 
partie,  qui  était  en  élat  de  résister  à  une  attaque  lorsque  la  force 
armée  vint  de  Limoges  pour  délivrer  M"'  de  Meilhac. 

Enfin,  dans  les  dernières   années   du  xviu"  siècle  M.  Joseph 

T.  XL.  3t 


•466  SOCIETE  ARCnéÔLOQlQUfe  Kt  HIStORIQbS  DU  LlHOUSlN. 

Dupeyrat  le  fit  démolir  pour  construire  à  la  place  celui  qui  existe 
aujourd'hui.  Le  gros  œuvre  en  était  à  peine  terminé  lorsque  la 
Révolution  vint  tout  arrêter,  et  l'intérieur  n'a  été  fait  qu'en  1840 
lorsque  M.  Pascal  Eudel  en  devint  acquéreur. 

Comme  souvenir  de  l'ancien  château  il  ne  reste  qu'une  fontaine 
dont  je  parlerai  plus  loin.  Quant  au  nouveau,  le  dessin  que  nous 
devons  à  l'habile  crayon  de  M.  le  baron  de  Verneilh-Puyrazean, 
le  fera  parfaitement  connaître.  D'autre  part,  il  a  été  ainsi  décrit 
par  le  prince  Napoléon-Weyse  : 

«  Le  château  de  Thouron  s'offre  au  regard  au  milieu  de  vastes 
pelouses,  entremêlées  de  bosquets  à  l'anglaise,  dans  les  belles  pro- 
portions d'un  palais. 

«  Quand  le  soleil  tombe  sur  son  granit  brun  et  poli  comme  du 
marbre,  c'est  d'un  magnifique  effet.  Deux  vastes  perrons  vis  à  vis 
l'un  de  l'autre,  dont  le  dernier,  un  des  plus  beaux  de  France,  a  deux 
embranchements,  conduiscntau château,  sous  la  majesté  d'un  fron- 
ton grandiose,  portant  l'écusson  des  anciens  seigneurs  du  lieu, 
effacé  par  le  marteau  révolutionnaire. 

«  Thouron,  oasis  suisse  dans  un  pays  accidenté,  n'a  pas  d'his- 
toire. Nous  avons  cependant  sagement  fait  en  sauvant  de  l'oubli 
ces  quelques  miettes,  car  de  même  que  les  fleuves  se  composent 
de  petites  rivières  et  de  minces  ruisseaux,  de  môme  l'histoire  géné- 
rale se  compose  de  mille  histoires  locales  et  particulières  ». 

L'architecte  limousin  qui  a  construit  le  château  de  Thouron  est 
M.  Broussaud,  élève  de  l'architecte  Louis,  le  construcleur  du  grand 
théâtre  de  Bordeaux.  Notre  contrée  possède  plusieurs  de  ses  œuvres 
qui  ont  toutes  une  grande  ressemblance  avec  le  château  de  Thouron. 
C'est  à  Limoges,  l'Évêché  et  la  maison  Naurissart,  aujourd'hui  la 
Banque  de  France.  Le  château  de  La  Cosse,  commune  de  Veyrac, 
celui  de  La  Vergue,  commune  de  Saint-Priest-Ligoure,  et  celui  de 
Brignac.  On  lui  doit  aussi  l'église  de  Saint-Silvain  d'Ahun  (1777- 
1781). 

Les  premiers  seigneurs  de  Thouron  qui  nous  soient  connus 
appartiennent  à  la  famille  de  La  Celle;  et  ce  sont  probablement  eux 
qui  ont  bâti  le  premier  château.  Mais  il  ne  faut  pas  les  rattacher, 
comme  on  la  fait  à  la  famille  qui  tire  son  nom  de  La  Celle  canton  de 
Dun,  famille  qui  dès  le  xi*  siècle  possédait  dans  cette  dernière  pa- 
roisse le  château  de  Bouëri.  Le  berceau  des  La  Celle  de  Thouron 
est  entre  Eymoutiers  etTreignac.Les  armes  établissent  parfaitement 
cette  distinction.  Pendant  que  les  seigneurs  de  La  C^Ue-Dunoise 
portent  d'argent  à  l'aigle  éployée  de  sable^  membrée  d'or^  les  La 
Celle  de  Thouron  portent  d'or  semé  de  fleurs  d^e  lis  et  de  tours. 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  DB  THOURON.  487 

Pierre  deLaCelle-Bonnefon  (nom  de  deux  paroisses  des  environs 
de  Treignac),  écuyer,  était  seigneur  de  Thouron  en  1223.  A  cette 
date  il  donna  plusieurs  rentes  à  Grandmont,  ce  qui  le  fit  inscrire  au 
nombre  des  bienfaiteurs  de  cette  célèbre  abbaye. 

Jouberl  deLaCelle,  écuyer,  fut  seigneur  de  Thouron,  et  succéda 
à  Pierre.  En  i260,  il  donna  aussi  à  l'abbaye  de  Grandmont  tous 
les  droits  qu'il  avait  sur  l'étang  de  Thouron,  appelé  aussi  de 
Tricherie. 

Je  ne  puis  préciser  jusqu'à  quelle  année  les  de  La  Celle  possédè- 
rent Thouron.  Je  ne  connais  que  deux  autres  membres  de  cette 
famille  :  Hugues  de  La  Celle  qui  paraît  dans  une  charte  de  H16, 
par  laquelle  Bernard,  vicomte  de  Comborn,  donne  un  mas  de  terre 
paroisse  de  Tarnac  (Corrèze)  à  l'abbaye  d'Uzerche,  et  Robert  de  La 
Celle,  chevalier  qui  en  1314  assistait  au  mariage  d'Eble  de  Venta- 
dour,  avec  Marthe  de  Comborn,  fille  de  Richard  de  Comborn,  sei- 
gneur de  Treignac,  et  en  1329,  était  témoin  dans  une  vente  faite 
par  le  môme  seigneur  de  Treignac  à  Pierre  Rodier,  évoque  de  Car- 
cassonne. 

La  terre  deThouron  passa  de  la  famille  de  La  Celledans  celle  des 
Faulcon,  qui  la  possédèrent  environ  deux  siècles.  Ce  changement 
se  fit  probablement  par  suite  d'une  alliance  avec  rhéritière  de  cette 
première  maison,  car  nous  voyons  les  Faulcon  dont  les  armes  sont 
6' azur  à  la  croix  rf'or  alias  d'or  à  la  croix  d'azur,  les  écarteler  d'azur 
à  trois  fleurs  de  lis  d'or  2  et  i,  mêlées  de  trois  tours  d'argent  i  et  2, 
qui  sont  de  La  Celle.  Les  Faulcon  étaient  une  famille  fort  consi- 
dérable. Dans  notre  province  ils  étaient  seigneurs  de  Laron,  de 
Thouron,  du  Puyménier,  barons  de  Saint-Pardoux,  seigneurs  de 
TAge,  deChamborand,  en  partie  des  Lèzes,  de  Boisse,  de  Lermont, 
du  Carreau,  de  Journhac,  des  Couperies,  de  Linards,  etc.,  etc. 

Louis  Faulcon,  chevalier,  était  seigneur  de  Thouron  et  de  Saint- 
Pardoux  antérieurement  à  1450.  Il  fut  enterré  dans  l'église  de 
Thouron,  devant  l'autel  de  Saint-Martial;  ses  descendants  ont  formé 
les  branches  de  Saint-Pardoux,  des  Lèzes,  de  Lermont  et  de  Boisse, 
de  Thouron  et  du  Carreau. 

Son  fils  aîné,  Jean  Faulcon,  seigneur  des  mêmes  lieux  et  de  Laron, 
est  qualifié  noble  et  puissant  seigneur  dans  un  acte  du  22  octobre 
1461.  C'est  une  transaction  passée  entre  l'abbaye  de  Saint-Martin- 
de-Limoges,  en  vertu  de  laquelle  il  assigne  à  cette  abbaye  huit  setiers 
de  seigle  à  prendre  sur  la  dime  de  Saint-Symphorien,  à  la  charge 
de  célébrer  chaque  année  un  anniversaire  solennel  avec  vigile  et 
absoute  pour  le  repos  des  âmes  de  ses  parents  (Arch.  hospit.  de 
Limoges.  B.  469).  Jean  Faulcon  qui  figure  à  la  Montre  des  noWes 


488  société  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

de  la  Marche  en  i470,  testa  en  4475.  Je  donne  plus  loin  le  texte  de 
son  testament.  Il  avait  épousé  Marie  de  Rochechouart,  fille  de 
Simon  de  Rochechouart,  chevalier,  seigneur  d'Ancourt-Morogues, 
dont  les  armes  sont  :  onde  d'argent  et  de  gueules  de  6  pièces  en 
fasce.  Il  eut  pour  (ils  :  l"" Albert  qui  suit;  3^  Antoine,  qui  a  fait  la 
branche  des  Lèzes. 

Albert  Faulcon,  seigneur  de  Thouron  et  du  Puyménier,  épousa 
Charlotte  de  Linards,  dont  il  eut  :  4°  Florence  Faulcon,  qui  épousa 
par  contrat  du  4août  4508,  Jean  Jovion,  fils  de  Mathieu  Jovion,  sei- 
gneur de  l'Echoisier,  paroisse  de  Bonnac,  qui  porte  d'azur  à  trois  coqs 
d'argent,  pattes,  becqués  et  greffés  d'or,  2  et  1\^  Foucaud  Faulcon, 
qui  suit;  3*  Valérie  Faulcon,  qui  épousa  par  contrat  du  20  février 
1530,  Christophe  de  Roffignac,  écuyer,  seigneur  de  Sannat,  fils  de 
Guy  deRoffignacet  de  Françoise  Chauvet.  De  Roffignac  porte  :  d'or 
au  lion  rampant  de  gueules  armé  et  lampassé  de  même,  alias  :  d'azur 
au  lion  ratnpant  d'or.  Valérie  Faulcon,- qui  avait  porté  à  son  mari  le 
fief  du  Puyménier,  testa  en  1585. 

Foucaud  Faulcon,  chevalier  de  l'ordre  du  roi,  était  seigneur  de 
Thouron  le  4"  juillet  1556.  On  le  trouve  parmi  les  nobles  de  la 
sénéchaussée  du  Haut-Limousin  au  ban  et  arrière  ban  de  1868. 
Lors  qu'il  entra  en  possession  de  la  terre  de  Thouron,  elle  se  com- 
posait d'un  nombre  considérable  de  villages,  mais  il  en  vendit  la 
plupart.  Ainsi  en  4566  il  vendit,  sous  faculté  de  rachat,  moyennant 
4,000  livres,  à  Jean  Beaubreuil  une  douzaine  de  villages  dénommés 
au  contrat,  au  nombre  desquels  était  le  village  et  tiercerie  (1)  de 
Touradis.  Cependant  en  1575,  il  paya  Jean  Beaubreuil  et  repris  son 
bien. 

En  1567,  il  vendit  à  Léonard  Barny,  seigneur  du  Mazet  à  Com- 
preignac,  plusieurs  autres  villages  et  fonds  nobles. 

En  1674,  il  cédait  le  moulin  noble  appelé  Chàteau-Moulin,  avec 
quantitéd'autres  fonds  etdroits  considérables,  à  FrançoisFonlréaulx, 
pour  la  somme  de  4,000  livres. 

En  1576,  il  vendait  pour  la  somme  de  400  livres  à  Etienne  Yver- 
naud,  marchand,  et  à  Pierre  Massoulard,  procureur  au  présidial  de 
Limoges,  la  sixième  partie  des  dîmes  de  la  paroisse  de  Saint-Sym- 
phorien  (Arch.  hospit.  de  Limoges,  B.  469). 

Enfin  après  cette  dernière  date,  il  ne  lui  restait  plus  de  la  belle 
terre  de  Thouron,  que  le  château  et  le  bourg.  Lorsqu'il  mourut,  vers 

(1)  La  tiercerie  est  le  droit  seigneurial  de  la  tierce  gerbe  dans  les  blés 
naissant  et  croissant  sar  un  fond  de  terre.  Aujourd'hui  il  n*y  a  que  des 
métairies  où  le  propriétaire  a  la  moiiié  du  blé;  les  tierceries  ne  sont  plas 
connues. 


MONOGRArUIE   DE  LA  COMMUNE   DE  THOURON.  i89 

1596,  ses  deux  héritiers  se  partagèrent  le  peu  qu'il  laissait  et  encore 
furent-ils  bientôt  obligés  de  le  vendre.  On  trouve  le  4  février  1620, 
Hélène  Faulcon,  encore  dite  dame  de  Thouron  en  partie,  inscrite 
au  rôle  des  nobles  delaBasse-Marche.  Nous  verrons  plus  loin  l'acqui- 
sition de  la  terre  de  Thouron  par  Pierre  de  Fontréaulx  en  1620. 

Pendant  que  les  Faulcon  possédaient  Thouron  deux  événements 
se  rattachant  à  l'histoire  de  ce  château  méritent  d'être  signalés.  Le 
premier  est  le  passage  Je  Charles  VII,  en  à  Tannée  1438  ;  l'autre,  la 
mort  de  Pierre  de  Boyol  et  de  son  gendre,  appartient  à  l'année  1891 . 

Le  roi  de  France  Charles  VII,  dit  le  Victorieux,  après  avoir  recon- 
quis sur  les  Anglais  presque  tout  son  royaume,  voyageait  avec  une 
suite  nombreuse  pour  montrer  au  peuple  fidèle  son  fils  le  Dauphin, 
qui  fut  plus  tard  Louis  XI.  11  vint  passer  à  Limoges  une  dizaine  de 
jours.  Un  moine  de  l'abbaye  de  Saint-Martial  nous  a  laissé  le  récit 
détaillé  des  fêtes  et  des  réjouissances  qui  eurent  lieu  à  cette  oc- 
casion. Le  roi  était  au  Dorât  le  1"*'  mars  1438  [n.  s.  1439].  Le  lende- 
main lundis  il  vint  dîner  au  château  de  Thouron,  accompagné  des 
ducs  d'Anjou  et  de  Bourbon,  des  comtes  de  la  Marche  et  de  Ven- 
dômes,  de  l'archevêque  de  Toulouse,  des  seigneurs  de  Dunois  et  de 
la  Fayette,  et  autres.  Son  fils  le  Dauphin,  qui  avait  dtné  à  Bellac, 
vint  le  rejoindre  à  Couzeix,  et  ils  firent  ensemble  leur  entrée  solen- 
nelle dans  la  ville  de  Limoges.  On  montre  aujourd'hui,  sous  les 
beaux  arbres  du  parc,  quelques  marches  en  pierre,  qu'on  croit  être 
celles  de  la  porte  principale  par  laquelle  le  roi  de  France  et  sa 
suite  entrèrent  dans  le  château. 

Le  second  événement  qui  se  rattache  à  l'histoire  du  château  de 
Thouron  est  assez  peu  connu  jusqu'à  présent  et  demande  quelques 
éclaircissements;  je  vais  les  puiser  dans  des  documents  contempo- 
rains. 

Jean  de  Villelume,  fils  de  Marien-Guillaume  de  Villelume,  sei- 
gneur de  Barmontet  (commune  de  Verneugheol,  Puy-de-Dôme),  et 
de  Louise  de  Green  de  Saint-Marsault,  embrassa  la  carrière  des 
armes,  et  fut  même  reçu  chevalier  de  Malte  vers  1572.  Il  vint  en- 
suite s'établir  en  Limousin  en  épousant,  le  2  avril  1S88,  Jeanne  de 
Boyol,  fille  de  Pierre  de  Boyol,  seigneur  de  Montcocu  (commune 
d'Ambazac)  et  de  Marie  Rougier.  La  famille  dans  laquelle  il  entrait 
avait  passé  à  la  religion  prétendue  réformée,  mais  lui  était  et  resta 
toujours  catholique. 

Or  Pierre  de  Boyol  faisait  la  guerre  aux  religieux  de  Grandmont. 
«  Et  il  avait  même  fait  tuer  un  religieux  du  dit  Grandmont,  honnête 
homme,  frère  du  sieur  de  Lessard  (1)  ».  En  1891,  le  sieur  de  Mont- 

(i)ChrorUquedeVAnonyme  de  Saint" Léonard^  publiée  par  H.  A.  Leroux, 
p.  969. 


490  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DO  LIMOUSIN. 

COCU  et  son  gendre  tenaient  garnison  pour  le  roi  à  Thouron.  Us 
partirent  de  là  avec  leurs  hommes  pour  aller  secourir  la  ville  du 
Dorât  assiégée  par  les  ligueurs.  Le  sieur  de  Lessard  (commune  de 
Roussac),  les  voyant  passer  près  de  chez  lui,  crut  le  moment  oppor- 
tun de  venger  la  mort  de  son  frère.  Il  vint  donc  les  attaquer  entre 
Lessard  et  la  forêt  de  Rançon.  On  se  battit  avec  acharnement: 
Pierre  de  Boyol  et  Jean  de  Villelume  furent  tués.  Voici  ce  que  la 
veuve  du  dernier  a  écrit  dans  son  livre  de  raison  :  «  Dieu  relira  à 
soi  Mons.  du  Bastiment  mon  mary,  le  5"  de  may  1591,  ung  diman- 
che, heures  de  vespres,  allant  secourir  la  ville  du  Dorât  pour  le 
service  du  roi  Henri  III,  roi  de  France  et  de  Navarre.  Fut  tué  près 
la  forest  de  Renquon  [Rançon]  d'une  embuscade  des  ennemis  et 
rebelles  du  roy  par  Terzane  et  Cezar  le  5*  may  1591  ». 

Après  le  combat  les  survivants  remportèrent  à  Thouron  les  corps 
de  ceux  qui  en  étaient  parti  quelques  heures  auparavant.  Jean  de 
Villelume  fut  ensuite  transporté  à  Àmbazac,  et  enterré  dans 
régUse  paroissiale.  En  1789,  on  y  voyait  encore  sa  tombe  placée 
près  des  fonts  baptismaux. 

On  a  répété  plusieurs  fois  que  Jean  de  Villelume  et  Jeanne  de 
Boyol  avaient  construit  au  Bâtiment  (commune  de  Ghamboret}, 
une  chapelle  catholique  et  un  temple  protestant.  C'est  une  erreur. 
Le  premier  auteur  de  cette  assertion  voulait  seulement  dire  qu'ils 
pratiquaient  leur  religion  séparément  et  chacun  selon  sa  croyance. 
De  plus,  le  livre  de  raison  de  Jeanne  de  Boyol  prouve  qu'ils  n'ont 
jamais  habité  le  Bâtiment.  Ayant  fait  observer  cela  à  l'éditeur  de 
ce  livre  de  raison,  il  a  ensuite  placé  à  Thouron  les  deux  chapelles 
en  question.  Mais  Pierre  de  Boyol  et  son  gendre  qui  «  tenaient  gar- 
nison pour  le  roi  à  Thouron  »  n'y  ont  jamais  construit  aucune  cha- 
pelle. 

Le  Nobiliaire  du  Limousin,  en  suivant  la  généalogie  publiée  par 
M.  Ambroise  Tardieu,  s'est  aussi  trompé  sur  le  nombre  de  leurs 
enfants.  Jean  de  Villelume,  marié  le  2  aviil  1588,  n'a  eu  que  trois 
enfants  :  Pierre,  né  le  24  avril  1589  ;  Marie,  née  le  16  juin  1590; 
et  Jeanne,  née  après  la  mort  de  son  pèreu  le  20  novembre  1591. 

Hélène  Faulcon,  épousa  N...  du  Breuil;  ils  furent  les  héritiers  de 
Foucaud  Faulcon  son  père.  Ce  sont  eux  qui  firent  ériger  au  milieu 
delà  cour  du  château,  en  1598,  l'élégante  fontaine  que  donne 
notre  dessin.  Elle  existe  encore,  et  c'est  le  seul  souvenir  qui  reste 
de  l'ancien  château.  Elle  est  formée  d'une  belle  coupe  en  granit 
très  finement  sculptée,  que  porte  une  colonne  carrée  ornée  de  mou- 
lures ;  le  tout  placé  au  milieu  d'un  bassin  circulaire.  Sur  le  devant 
de  la  coupe  se  trouve  un  écus8on  eoupé  en  deux,  qui  porte  au  bas  la 


HONOGRAPUIS  DE  LA  COMMUNE  DB  THOUBON.  -491 

date  1598,  et  au  haut  des  armoiries  malheureusement  détruites. 
Cest  pour  établir  un  déversoir,  qu'un  ouvrier  sans  goût  a  pratiqué 
un  trou  au  milieu  de  cet  écusson.  On  y  distingue  cependant  encore 
à  dextre,  le  côté  et  les  crénaux  d'une  tour,  ce  qui  porte  à  croire 
qu'il  y  avait  les  trois  tours  des  armes  de  la  famille  Faulcon,à  moins 
qu'on  veuille  y  voir  celles  de  l'époux  d'Hélène  Faulcon. 

Pour  conduire  l'eau  à  cette  fontaine,  le  propriétaire  fit  creuser 
et  voûter  dans  toute  sa  longueur  un  fort  bel  acqueduc,  qui  existe 
encore  aujourd'hui  ;  il  devait  en  môme  temps  servir  de  sortie  secrète 
pour  l'ancien  château.  Il  passe  sous  le  château  actuel,  et  s'étend  à 
200  mètres  du  côté  du  levant. 

Nous  avons  vu  précédemment  ce  qu'était  devenu  la  terre  d3 
Thouron  après  la  mort  de  Foucaud  Faulcon.  Dubreuil,  posséda  le 
château  jusqu'en  1620.  A  cette  époque  il  fut  encore  mis  en  vente. 
Pierre  de  Fontréaulx,  écuyer,  seigneur  de  Beaumont,  lieutenant 
criminel  au  siège  royal  du  Dorât,  s'en  rendit  adjudicataire.  Des 
difficultés  s'élevèrent  pour  le  paiement  qu'il  voulait  faire  au  moyen 
de  créances,  et  il  ne  fut  mis  en  possession  qu'au  mois  de  septem- 
bre 1632,  par  le  prince  de  Condé,  accompagné  des  sieurs  François- 
Théodore  de  Nesmond,  qui  fut  dans  la  suite  président  à  mortier 
du  Parlement  de  Paris,  et  René  Le  Voyer  d'Argenson,  intendant 
de  justice,  police  et  finances  en  Limousin,  Haute  et  Basse- Marche, 
lorsqu'ils  passèrentau Dorât, en  allant  àLimoges.  L'ancien  seigneur 
die  Thouron,  gentilhomme  du  Périgord,  chassé  de  son  manoir  par 
le  prince,  s'était  retiré  dans  le  Bas-Limousin,  où  il  intéressa  à  sa 
cause  une  grande  partie  de  la  noblesse.  De  là,  il  épiait  l'occasion 
de  reprendre  son  château  par  la  force.  Pierre  de  Fontréaulx  ne  la 
lui  fit  pas  longtemps  attendre. 

Vers  le  carnaval  de  1633,  le  lieutenant  criminel  eut  la  malheu- 
reuse pensée  d'aller  à  Thouron  faire  pécher  quelques  étangs,  sans 
tenir  compte  des  avertissement^^  qui  lui  étaient  donnés  par  ses 
amis,  auxquels  il  répondait  qu'il  était  Pierre  sans  peur;  et,  pour 
prouver  son  courage,  il  eut  l'imprudence  aussitôt  arrivé,  de  faire 
ôter  quelques  grilles  de  fer,  et  toutes  les  défenses  du  logis. 

Du  Breuil,  averti  de  ce  qui  se  passait,  arrive,  pendant  la  nuit, 
avec  force  Périgourdins,  et  pénètre  dans  la  maison  avec  cent  ou 
cent-vingt  hommes  armés.  Il  entre,  le  pistolet  à  la  main,  dans  la 
chambre  ou  reposait  Fontréaulx  en  s'écriant  avec  colère  :  «  Où  est 
celui  qui  se  dit  seigneur  de  Thouron  ?»  —  «  C'est  moi  »,  répond 
courageusement  Fontréaulx;  mais  du  Breuil  n'était  plus  maître  de 
lui-même  le  vise  à  bout  portant  et  l'atteint  au  bras  gauche  en 
criant  :  «  Tu  en  mourras  !  »  Fontréaulx  blessé  saisis  néanmoins  un 
pistolet  et  le  vise  en  répliquant  :  «  C'est  toi  qui  en  mourras!  »  Il 


493  SOCl&TB   ARCHÉOLOGIQUE   BT   HISTORIQUE   DD  LIMOUSIN. 

arail  dit  trai,  car  du  Breuil,  frappé  droit  au  cœur,  tombait  raide 
mort.  Les  fils  de  du  Breuil,  à  la  vue  du  cadavre  ensanglanté  de 
leur  père,  tirent  des  coups  de  fusil  sur  Fontréaulx,  et  le  frappent 
mortellement  dans  le  ventre.  Il  languit  quelques  heures,  étendu  à 
terre  et  priant  Dieu;  puis  ils  Tachevèrent. 

Le  cadavre  du  lieutenant-criminel,  dépouillé  de  ses  vêtements, 
fut  transporté  sur  la  place  devant  le  château,  où  il  resta  exposé  à 
toutes  les  injures  jusqu'au  moment  où  les  habitants  du  Dorât  vinrent 
le  chercher.  Les  dix  ou  douze  soldats  qui  étaient  avec  Fontréaulx 
furent  dépouillés  de  leurs  vêtements,  blessés,  volés  et  outragés  de 
toutes  les  manières. 

Un  si  grand  crime  ne  pouvait  pas  rester  impuni  ;  la  justice  s'en 
occupa  immédiatement,  mais  il  ne  fut  pas  possible  d'arrêter  les 
coupables  ;  ils  furent  cependant  jugés  et  condamnés  à  mort  par 
contumace. 

L'année  suivante,  la  Cour  des  Grands-Jours  se  tint  à  Poitiers  et 
dura  depuis  le  1"  septembre  1634  jusqu'à  la  fête  des  Rois  1633. 
Par  arrêt  delà  dite  Cour  tous  les  lieutenants-généraux,  lieutenants- 
criminels  et  les  procureurs  du  roi  de  chaque  bailliage  et  sénéchaus- 
sée devaient  comparaître  en  personne  pour  rendre  raison  de  leurs 
fonctions  et  charges.  Pierre  Robert,  lieutenant-général  de  la  séné- 
chaussée du  Dorât,  apprit  à  la  Cour  des  Grands-Jours  que  plusieurs 
des  assassins  de  Pierre  Fontréaulx,  qui  n'avaient  pas  subi  la  peine 
à  laquelle  ils  avaient  été  condamnés  par  contumace  s'étaient 
retirés  et  fortifiés  dans  le  château  de  Thouron.  Par  arrêt  de  la  dite 
Cour  des  Grands-Jours  du  20  novembre  1634.  Paul  de  Noslet,  sei- 
gneur de  TEspault  et  du  Mas-du-Bosl,  sénéchal  de  la  Basse-Marche, 
fut  commis  avec  de  La  Lande,  vice-sénéchal  d'Angers  et  prévôt  des 
dits  Grands-Jours,  pour  arrêter  les  coupables.  Ils  arrivèrent  à 
Thouron  avec  une  force  armée  suffisante,  investirent  rapidement  le 
château  et  s'emparèrent  de  tous  ceux  qui  y  étaient.  Ils  furent 
emmenés  prisonniers  à  Poitiers,  où  peu  de  jours  après  ils  furent 
pendus  en  exécution  de  la  condamnation  portée  contre  eux, 

«  La  tour  du  château  de  Thouron,  ajoute  Pierre  Robert,  qui 
nous  a  conservé  tous  ces  détails,  fut  alors  ruinée  et  démolie  en 
partie;  c'était  une  place  forte  qui  avait  servi  durant  les  guerres 
de  la  ligue  et  les  autres  d'un  nid  de  voleurs  et  tanière  de  bri- 
gands ». 

La  famille  Dupeyrat  connue  à  Limoges  dès  1108,  et  dont  un  des 
membres,  Etienne  Dupeyrat  est  qualifié  chevalier  de  Saint-Martial 
avant  1114,  va  ensuite  posséder  Thouron  pendant  deux  siècles,  ses 
armes  sont  :  d'azur  à  la  tour  d'argent  ouvrée^  maçonnée  et  épurée 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  DE  THOORON.  493 

de  sable.  On  trouve  aussi  la  variante  :  d'azur,  au  château  donjonné 
de  trois  tours  d'or,  maçonnées  de  sable.  C'est  en  sa  faveur  que  la 
terre  de  Thouron  fut  érigée  en  baronnie. 

Voici  la  généalogie  de  la  branche  qui  a  possédé  Thouron;  elle  est 
presque  entièrement  prise  dans  les  registres  paroissiaux  qui 
remontent  à  4658. 

Jacques  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  acquéreur  la  terre  de 
Thouron  eut  pour  enfant  :  1°  Joseph  qui  suit;  2**  Marie  qui 
épousa  François  Igonin,  seigneur  de  Ribagnac,  dont  les  armes  sont  : 
d'azur  à  la  montagne  d'argent,  à  deux  lions  affrontés  rampant  sur 
cette  montagne,  au  chef  d'argent  chargé  d'une  croix  ancrée  d'or. 

Joseph  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  doyen  des  trésoriers  de 
France  au  bureau  de  Limoges,  mourut  à  l'âge  de  quatre-vingt-dix- 
sept  ans  le  20  juin  1731.  Il  avait  épousé  Marguerite  Des  Maisons, 
dont  les  armes  sont  :  d'argent  à  un  chesne  de  sinople  accosté  de 
deux  maisons  de  gusules,  surmonté  de  deux  étoiles  de  sinople  en  chef. 
Leurs  enfants  furent  :  1*»  Catherine,  née  le  18  et  baptisée  le  17  avril 
1667,  qui  épousa  Jean  de  Poncharraud,  écuyer,  seigneur  du  Fan, 
de  la  ville  de  Bellac,  fils  d'autre  Jean  de  Pontcharraud  et  de 
Suzanne  de  Rofflgnac;  2*»  Léonard,  qui  épousa,  le  29  janvier  1726, 
Marie  de  Pontcharraud,  fille  de  Jean  et  de  Suzanne  de  Rofflgnac, 
veuve  de  Gaspard  Chauvet,  seigneur  de  Nantiat  et  de  Fredaigues; 
3*»  Joseph,  qui  suit;  4^^  Jacques,  né  le  12  juillet  1685,  tonsuré  en 
1705;  5«  Thérèse  qui  se  fit  religieuse  à  Sainte-Claire,  à  Limoges, 
en  1703. 

Joseph  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  né  le  20  février  1684,  épousa 
Françoise  Vidaud  du  Dognon,  qui  mourut  en  1754  et  dont  les 
armes  sont  :  d'azur  au  lion  léopardé  d'or,  au  chef  de  France,  sou- 
tenu d'or.  Leurs  enfants  furent  :  1*»  Louis,  qui  suit;  2*  Jean-Joseph, 
l(msuré  en  1733,  était  sous-diacre  le  2  juillet  1737  lorsqu'il  fut 
nommé  à  l'abbaye  du  Palais,  près  Bonrganeuf,  il  reçut  ses  bulles 
le  31  décembre  suivant,  prit  possession  le  4  mars  1738,  et  mourut 
en  1741  ;  3«  Louise  née  le  6  et  baptisée  le  7  juillet  1710  ;  4°  Le  Père 
de  Thouron,  carme  déchaussé,  vivant  en  1751. 

Louis  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  né  en  1720,  mourut  à  vingl- 
neuf  ans  en  1749.  Il  avait  épousé,  le  5  novembre  1741,  Henriette- 
Charlotte -Françoise  de  La  Saigne  de  Saint-George,  fille  de  Léonard 
de  La  Saigne  de  Saint-George  et  de  Marie -Anne  de  Bonneval.  Ses 
armes  sont  :  écartelé  aux  /"  et  4*  de  sable  au  lion  grimpant  d'ar- 
gent armé  et  lampassé  de  gueules  (qui  est  de  La  Saigne),  au  2^  et  3' 
d'argent  à  la  croix  de  gueules  (qui  est  de  Saint-George).  Leurs  enfants 
furent  :  l**  Joseph,  qui  suit;  2^  Françoise,  qui  épousa  Grégoire  de 
de  Roulhac,  chevalier,  procureur  du  roi  aux  finances,  à  Limoges, 


49 i  SOCIÉTÉ  ARCIlÉOLOGl^i(JË    KT    UISTORIQUE   DU   LIMODSIN. 

dont  les  armes  sont  :  d'azur  à  lafasce  d'or  accompagnée  en  chef  d'un 
croissant  d'argent  et  en  pointe  de  trois  étoiles  de  même,  2  et  1- 
3°  Jean  Baptiste-François,  qui  épousa  Madeleine  Salot;  4*  Marie 
qui  épousa,  en  1764,  Jean-Cliarles  Baudoulat  de  Puymège,  écuyer, 
sieur  de  La  Salvanie  de  la  ville  de  Tulle,  qui  porte  pour  arme^ 
d'argent,  à  la  rose  tigée  de  sinople  hissant  d'un  croissant  de  gueules^ 
surmontés  de  trois  étoiles  d'azur  en  chef. 

Joseph  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  ancien  officier  de  royal- 
dragon,  était  à  l'Assemblée  générale  de  la  noblesse  de  la  Basso- 
Marche,  tenue  au  Dorai,  capitale  de  la  province,  le  16  mars  1789, 
il  avait  épousé,  à  Compreignac,  le  10  mai  1768,  Elisabeth  de  Cou- 
teillas  de  La  Ribière,  fille  de  François  de  Gouteillas  de  La  Ribière, 
avocat  au  Parlement  de  Paris,  et  d'Anne  Dérabier.  Leurs  enfants 
furent:  1*» Jean-Baptiste-François,  né  le8mii  1771,  et  enterré  dans 
l'église  de  Thouron  le  8  décembre  1772;  2'  Grégoire  qui  suit; 
3® Marie,  née  le  l**"  aoûtl77«^;  4°  Françoise,  née  le  27  septembre  1776, 
qui  épousa  Joseph  Roulhac  de  Mazandrieux;  5°  Anne-Françoise, 
née  le  20  décembre  1777,  qui  épousa  Jean-Baptiste  Dupuy-Lavaud  ; 
6°  Marie  Angélique,  née  le  25  mai  1779;  7«  Marie-Elisabeth,  née  le 
30  juillet  1780,  a  épousé,  le  29  octobre  1806,  Geoffroy  des  Flottes, 
ancien  capitaine  de  cavalerie,  fils  de  Jean-Baptiste  et  d'Angélique- 
Françoise  Jarrit  Delille.  Les  armes  de  celte  famille  nous  sont 
données  par  un  sceau  de  Léonard  des  Flottes,  bourgeois  de  Limo- 
ges en  1680,  portant  un  écu  chargé  de  cinq  arbres  dont  trois  grands 
et  deux  petits;  8°  Marie-Grégoire,  née  le  11  juillet  1782,  a  épousé 
Antoine  Lanouaille;  9<»  Marie-Antoine-Grégoire,  né  le  o  septembre 
1783;  10°  Gabrielle  Grégoire  Thérèse-Françoise,  née  le  2S  février 
1785;  11^  Françoise,  née  le  2  mai  i786. 

Grégoire  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  né  le  30  août  1772,  a 
possédé  la  terre  de  Thouron  en  vertu  d'une  donnalion  qui  lui  en  fut 
faite  par  son  père  et  sa  mère  par  acte  du  2  juin  1806.  Il  Ta  ensuile 
vendue  à  Pascal  Eudel,  directeur  des  douanes  à  Hambourg,  par 
acte  du  26  juin  i810. 

Jacques  Dupeyrat  fut  propriétaire  de  la  terre  de  Thouron  à 
la  suite  des  héritiers  de  Foucaud  Faulcon.  Nous  avons  tu 
Pierre  Fontréaulx  en  devenir  adjudicataire  par  le  décret  dt» 
1620,  les  difficultés  qui  suivirent  ce  décret,  et  sa  mort.  En  1637,  il 
plut  au  roi  d'accorder  à  Jacques  Dupeyrat  le  droit  de  prélation,  qui 
le  subrogea  au  décret  de  1620  à  la  place  de  Fontréaulx.  Alors  il 
paya  cette  acquisition  en  argent,  ce  que  n'avait  pu  faire  ce  dernier. 
Puis  il  racheta  les  différentes  parties  qui  avaient  été  vendues  pré- 
cédemment et  reconstitua  la  terre  de  Thouron  qui,  en  sa  faveur, 
fut  érigée  en  baronnie. 


HONOGRAPRIB  DR  LA  COMMUNE  DB  THOORON.  495 

Dès  qu'il  fut  en  possession  de  Thouron,  Jacques  Dupeyrat  s'oc- 
cupa de  faire  réparer  le  château  qu'il  allait  habiter,  en  négligeant 
toutefois  le  donjon  ou  tour  principale,  qui  avait  été  démantelée 
par  ordre  de  la  cour  des  Grands-Jours.  Il  avait  aussi  formé  le  projet 
de  construire  l'église  paroissiale  en  un  autre  endroit  afin  de  déga- 
ger son  château  sur  ce  côté.  Les  propositions  qu'il  fit  dans  ce  but  à 
Tautorité  diocésaine,  ne  purent  aboutir,  car  celte  dernière  exigeait 
qu'une  croix  fut  élevée  sur  l'emplacement  de  l'église,  et  que  les 
paroissiens  conservassent  le  droit  d'y  aller  en  procession,  comme 
aux  autres  croix  de  la  paroisse. 

En  4658,  le  château  de  Thouron  fut  le  théâtre  d'événements  qui 
causèrent  une  grande  émotion  dans  tout  le  pays.  En  voici  le  récit 
abrégé  (1). 

Anne-Marie  de  Maleden  de  Meilhac  était  pensionnaire  au  couvent 
de  Sainte-Glaire  à  Limoges,  lorsqu'il  y  vint  une  demoiselle  de  la 
ville,  Marie  Dupeyrat,  qui  disait  vouloir  s'y  faire  rehgieuse.  Nous 
allons  voir  que  son  but  était  tout  autre. 

Le  8  février  1658,  jour  de  la  Purification  de  la  Sainte-Vierge, 
pendant  que  les  religieuses  récitaient  l'office,  Anne-Marie  de  Male- 
den fut  attirée  par  sa  nouvelle  compagne  dans  le  jardin  et  conduite 
près  du  grand  portail.  La  prétendue  postulante  ayant  demandé  avec 
une  apparente  ingénuité  si  la  traverse  en  bois  qui  fermait  la  porte 
se  pouvait  enlever,  Anne-Marie  répond  affirmativement,  et,  voulant 
indiquer  comment  cela  se  pratiquait^  t^lle  avance  d'un  pas.  Mais,  à 
ce  moment,  elle  se  seni  arrêtée  par  sa  compagne  :  la  porte  s'ouvre, 
et  deux  hommes,  d'un  bras  vigoureux,  la  saisissent  et  la  jettent  en 
un  carosse  à  quatre  chevaux  qui  s'éloigne  avec  rapidité.  «  On  me 
fermait  la  bouche  avec  les  mains,  dit-elle,  afin  d'étouffer  mes 
cris.  Je  disais  :  «  Sainte-Vierge!  »  Je  pleurais,  je  protestais!  » 

Une  femme  du  peuple  ayant  vu  le  carosse  et  entendu  les  cris, 
réveil  fut  donné.  Demi-heure  après,  le  carosse  revenait  à  vide. 
G'était  une  voiture  à  quatre  chevaux,  celle  de  Mathieu  de  Malden, 
grand  père  de  la  victime  :  cette  circonstance  inexplicable  ajoutait 
une  perplexité  de  plus  aux  perplexités  de  l'opinion. 

Pierre  Mouchel  dit  Champagne,  cocher  de  Mathieu  de  Malden, 
fut  immédiatement  appelé  devant  la  justice.  Joseph  Descoutures, 
conseiller  au  présidial,  dirigeait  l'instruction.  Voici  ce  que  révèle 
la  déposition  de  ce  témoin  :  le  matin  avant  jour,  Pierre  Mouchet 
pansait  ses  chevaux  près  le  cimetière  des  Arènes.  Le  valet  de 
chambre  de  Joseph  Dupeyrat,  baron  de  Thouron,  l'est  venu  trouver 
et  hii  a  dit  d'atteler.  M.  de  Malden,  a-t-il  ajoute,  avait  prêté  le 

(1)  Pierre  Lafohest,  Limogea  au  \\n^  êiècle^  3«  édit.,  p.  528, 


496  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUB   ET   BISTOBIQUE  DU   LIMODSIN. 

carosse  à  son  maître  pour  faire  visite  à  un  gentilhomme  logé  près 
Saint-Maurice.  Avant  d'atteler,  le  cocher  est  allé  prendre  les 
ordres  de  son  maître;  puis,  revenant,  il  a  conduit  en  voiture  le 
jeune  baron  de  Thouron  et  son  laquais  au  lieu  indiqué.  Là  le  gentil- 
homme, après  avoir  fait  ranger  les  chevaui  contre  la  muraille  est 
entré  dans  le  logis  Saint-Laurent.  Il  en  est  sorti  au  bout  d'un 
quart  d'heure,  et,  montant  en  voiture,  a  eu  soin  de  tirer  les  rideaux 
sur  lui.  Tout  à  coup  la  porte  du  couvent  s'est  ouverte,  une  jeune 
fille  vêtue  de  jaune  s'est  précipitée  dans  le  carosse  :  le  cocher  à 
reconnu  celle-là;  c'était  Marie  Dupeyrat  de  Thouron.  Au  même 
moment,  une  autre  jeune  demoiselle  à  lui  inconnue,  vêtue  de  gris, 
a  été  jetée  dans  la  voilure  par  deux  cavaliers,  dontl'iin  portant  des 
plumets  à  son  chapeau.  Celle-ci  poussait  des  cris  et  disait  :  «  Marie, 
ne  me  quittez  pas?  »  Ces  deux  jeunes  filles  étant  ainsi  dans  le 
carosse,  le  cocher,  sur  l'ordre  du  jeune  baron  poussa  ces  chevaux 
du  côté  du  Crucifix  d'Aigueperse  jusqu'à  la  maison  de  la  Graule, 
et  là  seulement  il  s'aperçoit  que  le  carosse  est  escorté  d'une 
troupe  de  vingt-cinq  ou  trente  jeunes  hommes  armés  et  à  cheval. 
Là  aussi,  dit  le  témoin,  on  a  fait  descendre  la  demoiselle  inconnue, 
on  l'a  assise  à  cheval,  et,  sans  avoir  égard  à  ses  cris,  les  gentils- 
hommes ont  pris  tous  ensemble  la  route  de  la  Maison-Rouge. 

Déjà,  en  toute  h&te,  sur  la  réquisition  de  la  famille  de  Malden, 
le  vice-sénéchal  rassemblait  ses  troupes.  M.  de  Champigny,  inten- 
dant de  la  généralité,  donnait  des  ordres  de  son  côté,  et  autorisait 
la  famille  à  faire  sonner  le  tocsin  dans  les  paroisses  voisines  du 
château  sur  lequel  la  jeune  fille  était  dirigée. 

Anne-Marie  de  Meilhac  arriva  au  château  de  Thouron  brisée  de 
lassitude.  «  Le  cheval,  dit-elle,  allait  très  vite  ;  je  souffrais  beau- 
coup d'une  douleur  de  côté.  Il  m'était  insupportable  de  me  voir 
ainsi  entre  plusieurs  hommes.  Quand  nous  fûmes  arrivés,  on  me 
descendit  de  cheval  ;  je  ne  pouvais  me  soutenir.  On  m'aida  à  mar- 
cher, et  je  fus  conduite  à  un  appartement  où  je  trouvai  du  feu; 
l'on  m'y  servit  des  friandises.  Il  est  facile  de  juger  de  Tétonnement 
que  j'éprouvai  en  me  voyant  ainsi  séparée  de  tous  les  miens.  On  fit 
venir  une  femme,  mais  au  bout  d'un  moment  elle  disparut.  Tons 
ces  messieurs  se  retirèrent  aussi;  il  ne  resta  dans  l'appartement 
qu'un  prêtre  et  le  jeune  homme  qui  prétendait  obtenir  ma 
main  (1).  » 

Instruit  des  préparatifs  qui  se  faisaient  à  Limoges,  le  baron  de 
Thouron  pensait  que  le  seul  moyen  de  conjurer  l'orage  serait  de 

(<)  Vie  d' Anne-Marie  de  Meilhac,  Mère  du  Calvaire^  écrite  par  elle- 
même. 


MONOGRArnrE   DB   la   COMMUIfR   DE  TBOURON.  497 

hâter  la  bénédiction  nupliale.  Alors  le  prêtre,  couvert  d'une  élole 
et  un  livre  à  la  main,  s'adressant  à  Anne-Marie  de  Meilhac  qui 
était  assise,  lui  demanda,  en  désignant  son  neveu,  si  elle  acceptait 
ce  jeune  homme  pour  son  époux  :  «  Non,  Monsieur,  répondit  avec 
fermeté  la  jeune  fille;  j'ai  résolu  d'être  religieuse  1  »  —  «  C'esl  moi 
qui  prononce,  reprit  vivement  le  jeune  homme,  et  je  dis  oui  pour 
tous  deux.  »  Et  le  prêtre  couvrit  ce  mariage  illusoire  d'une  béné- 
diction sacrilège. 

Anne-Marie  de  Meilhac  n'avait  pas  tout  à  fait  quatorze  ans  ;  elle 
n'était  donc  pas  en  âge  d'être  mariée.  Elle  devait  être  un  jour  fort 
riche;  c'est  à  sa  fortune  que  le  jeune  homme  en  voulait.  Une  am- 
bition que  rien  ne  justifiait,  car  le  ravisseur  possédait  des  biens 
considérables,  était  Tunique  mobile  de  cette  entreprise  insensée. 

L'attentat  avait  eu  lieu  vers  sept  heures  du  malin.  A  une  heure 
après-midi,  commencèrent  à  paraître  en  vue  du  château  les  trou- 
pes envoyées  de  Limoges.  Il  y  avait  deux  cents  hommes  ;  le  vice- 
sénéchal  qui  les  commandait  somma  le  château  de  se  rendre  ;  mais 
les  assiégés  s'étaient  barricadés;  du  haut  des  tourelles  et  de  l'em- 
brasure des  fenêtres,  ils  menaçaient  de  faire  feu  sur  la  troupe. 
Voulant  à  tout  prix  prévenir  l'effusion  du  sang,  le  vice-sénéchal  fit 
reculer  ses  troupes  et  demanda  à  Limoges  du  renfort.  Le  lendemain 
dimanche,  sur  le  soir,  six  cents  hommes  cernaient  la  place.  Ces 
mouvements  de  troupes  coûtèrent  aux  de  Malden  trois  mille  livres. 
Le  lundi  matin  4  février,  toute  résistance  étant  impossible,  le  ba- 
ron de  Thouron  demandait  à  capituler.  Lui  et  son  oncle,  en  ren- 
dant la  mineure  enlevée,  s'engagèrent  par  écrit  à  se  constituer 
prisonniers  si  la  jeune  fille  se  plaignait  d'aucunes  violences. 

Le  même  jour,  pendant  que  ceci  se  passait  au  château  de  Thou* 
ron,  Simon  Descoutures,  avocat  du  roi,  lançait  à  Limoges  un  man- 
dat d'arrêt  contre  le  gentilhomme  et  ses  complices. 

La  cour  présidiale  de  Limoges,  dont  la  plupart  des  membres 
appartenaient  à  l'une  ou  à  l'autre  des  familles  intéressées,  ayant 
dû  se  déclarer  incompétente,  les  parties  furent  envoyées  devant  le 
tribunal  de  Brive  pour  y  être  jugées  prévôtalement.  Les  prévenus 
n'avaient  évidemment  aucun  moyen  de  détruire  l'accusation.  Dé- 
clarés coupables  de  rapt  d'une  mineure,  crime  prévu  par  l'article  42 
de  l'ordonnance  de  Blois,  Joseph  Dupeyrat,  baron  de  Thouron, 
son  valet  de  chambre  et  Pierre  Dupeyrat,  chanoine  théologal  de 
Saint-Martial,  furent  condamnés  à  la  peine  de  mort  par  sentence 
du  19  juillet  1658.  Les  prévenus  étant  contumaces,  la  sentence  fut 
exécutée  en  effigie  le  23  du  môme  mois.  Marie  Dupeyrat  de  Thou- 
ron, déclarée  coupable  du  même  crime,  fut  condamnée  à  avoir  les 
cheveux  rasés  et  à  être  enfermée  en  un  couvent  le  reste  de  sa  vie. 


498  âOCI^Ê  ARCBéOLOGIQCE   ET   0I8T0RIQUB  DU  LIMOUSIN. 

Le  baron  de  Thouron  et  ses  complices  furent  en  outre  condamni^s 
à  cinquante  mille  livres  pour  la  réparation  civile,  cinq  mille  livres 
d'amende  envers  la  personne  offensée  et  aussi  aux  dépens,  qui 
étaient  considérables. 

Pendant  près  de  cinq  ans,  tous  les  biens  du  baron  de  Thouron 
restèrent  saisis.  Enfin  la  famille,  qui  était  des  plus  honorables  de 
Limoges,  pour  mettre  un  terme  à  cet  état  de  choses,  eut  recours  à 
M^'  de  La  Fayette,  évoque  de  Limoges,  qui  fut  accepté  par  les  deux 
partis  comme  juge  arbitre. 

Il  rendit  un  jugement  arbitral  le  10  juillet  1663,  aux  termes  du- 
quel la  famille  de  Malden  se  désisterait  de  tous  ses  droits  moyen- 
nant la  somme  de  23,000  livres.  L'évoque  obtint  aussi  du  roi  grâce 
pour  la  peine  de  mort  portée  contre  le  baron  de  Thouron  ;  lequel 
fut  renvoyé  avec  les  autres  coupables  au  siège  de  Bellac  pour  y 
purger  la  contumace. 

La  sentence  fut  révisée.  Le  31  janvier  1664  il  «  a  été  déclare 
atteint  et  convaincu  d'avoir  inconsidérément,  et  par  une  action  de 
jeunesse,  tiré  la  dite  demoiselle  Anne-Marie  de  Malden  du  dit 
monastère  de  Sainte-Claire,  à  l'insu  et  sans  le  consentement  de  la 
supérieure  et  de  ses  parents  et  icelle  amenée  et  retenue  en  sa 
maison  de  Thouron...  et  pour  réparation  du  fait  ordonné  que  les 
accords  et  contrat  (sentence  de  révoque  de  Limoges)  tiendront  et 
seront  exécutés  pour  réparation  civile....  et  en  outre  le  dit  Joseph 
Dupeyrat,  condamné  à  i  ,000  livres  envers  les  religieuses  de  Sainte- 
Claire,  80  d'amende  envers  le  roi  et  80  d'amende  aux  pauvres  de 
l'Hôtel-Dieu  de  Bellac,  et  aux  dépens.  » 

Ainsi  fut  terminée  cette  affaire,  qui  avait  si  justement  ému  les 
habitants  de  Limoges  et  de  Thouron.  Les  sommes  versées  par  le 
coupable  servirent  à  M.  Malden  de  Savignac,  tuteur  de  M"*'  de 
Meilhac,  pour  les  grandes  et  charitables  fondations  qu'il  fit  à  Li- 
moges et  sa  nièce  devint  la  Révérende  Mère  Marie  du  Calvaire,  fon- 
datrice du  petit  couvent  de  Sainte-Claire. 

Joseph  Dupeyrat  et  autre  Joseph,  fils  et  petit-fils  de  Jacques, 
l'acquéreur  de  Thouron^  eurent  un  procès  en  1718,  qui  vint  en 
appel  en  1728,  à  propos  d'une  rente  de  seigle  que  leur  réclamait 
le  sieur  de  Gensignac,  qui  avait  succédé  à  Fontréaulx  comme  pro- 
priétaire de  Château-Moulin.  C'est  dans  un  mémoire  publié  à  l'oc- 
casion de  ce  procès  que  j'ai  trouvé  le  récit  des  péripéties  par  les- 
quelles passa  la  terre  de  Thouron,  depuis  Foucaud  Faucon,  jusqu'à 
la  date  de  ce  procès. 

A  la  fin  du  siècle  dernier,  Joseph  Dupeyrat  entreprit  de  rebâtir 
le  château  de  Thouron.  Les  travaux,  relativement  considérables, 


HONOGRA^niB   t)E  LA  COMlUlNt;   Dft  TfiOURON.  499 

furent  exécutés  assez  rupicleuicnl  sous  la  direction  de  Tarchitecte 
Bi'ousseaud.  Mais  lorsque  la  Révolution  éclata,  on  terminait  seule- 
ment le  gros  œuvre,  tout  l'intérieur  était  à  faire.  ïl  resta  dans  cet 
état  jusqu'au  rétablissement  de  l'ordre. 

En  i806,  Joseph  Dupeyrat  donna  Thouron  à  son  fils  aîné  Gré- 
goire. Ce  dernier  ne  fit  exécuter  au  château  que  fort  peu  de  tra- 
vaux et  le  vendit,  en  1810,  à  M.  Pascal  Eudel,  ancien  directeur  des 
douanes,  à  Hambourg. 

Le  nouveau  possesseur  fit  achever  le  château  et  le  mit  dans  l'état 
où  nous  le  voyons  aujourd'hui;  il  fit  tracer  le  parc  et  retendit  jus- 
qu'au sommet  du  coteau,  d'où  l'on  jouit  d'une  belle  vue  sur  les 
montagnes  de  Gompreignac.  Après  avoir  habité  ce  lieu  près  de 
vingt  ans,  il  se  retira  à  Limoges,  et  la  terre  de  Thouron  fut  encore 
vendue  une  autre  fois. 

G'est  en  1830  que  la  famille  du  Breuil-Hélion  de  La  Guéronnière 
lit  cette  acquisition.  Cette  famille,  dont  les  armes  sont  :  d'argent  au 
lion  de  sable  armé,  lampassé  et  couronné  d'or,  était  fixée  en  Poitou 
au  moins  dès  le  xv®  siècle.  Elle  vint  en  Basse  Marciie  dès  1750, 
par  le  mariage  d'Antoine-Amable  du  Breuil-Hélion  de  La  Guéron- 
nière avec  Marie-Sylvine  Robert  de  Villemartin,  dont  les  armes 
sont  :  d'azur,  au  cygne  éployé  d'argent  becqué  et  membre  de  gueules. 

Leur  fils  aîné  fut  François-Emmanuel-Bernard,  qui  épousa  en 
1781  Julie-Elisabeth  Irland  de  Bazoges,  dont  les  armes  sont  :  d'ar- 
gent à  une  fasce  de  gueules  surmontée  de  trois  étoiles  d'azur. 

Le  fils  puîné  de  ces  derniers  a  formé  la  branche  de  Thouron, 
dont  voici  la  généalogie  : 

Charles-Antoine  du  Breuil-Hélion  de  La  Guéronnière,  fils  de 
François-EmmanuelBernard,  né  en  1783,  épousa  en  1809  Margue- 
rite-Hélène de  Tessière  de  Boisberlrand,  dont  les  armes  sont  : 
losange  d'argent  et  de  gueules.  Leurs  enfants  furent  :  l»  Pierre- 
Marie-Alfred,  qui  suit;  2^  Louis-Etienne  Arthur,  né  au  Dorât  en 
1817.  a  épousé  en  183S  Marie-Kulalie-Caroline  de  David  Lastour  des 
Etangs,  dont  les  armes  sont  :  d'or  à  trois  coquilles  de  saint  Jacques 
d6*tnop/e;3'»Marie-Sylvie-Hérminie,  née  en  1821,  mariée  en  1842 
au  baron  Raphaëlis  de  Broves;  4°  Charles- Antoine,  né  au  Dorât  en 
1827,  marié  en  1851  à  Iseult  de  Carion  de  Nisas. 

Pierre-Maric-Alfred  du  Breuil-Hélion  de  La  Guéronnière,  né 
au  Dorât  en  1811,  a  épousé  en  1833  Marie-Aimée,  dite  Syl- 
vie-Anne de  Brettes,  dont  les  armes  sont  :  d'argent  à  trois 
vaches  bretonnes  de  gueules  l'une  sur  l'autre.  Leurs  enfants 
sont  :  1°  Charles-Pierre-René,  né  à  Limoges  en  1834,  a  épousé 
en  1882  Théophile-Catherine-Mathilde  de  Saint-George,  dont 
les  armes  sont   :   d'argent  à   la  croix  de  gueules;    2°    Pierre- 


fSOO  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  BISTOKIOUK  DU  LIMOUSIN. 

Gédéon  qui  suit;  3*  Rose-Marie-Louise-Sara,  née  en  1837,  mariée 
en  1860  à  son  cousin  Louis-Alexandre-Ludovic  du  Breuil-Hélion  de 
La  Guéronnière  ;  4*  Marguerite-Hélène,  née  en  1840,  a  épousé  en 
1860  son  oncle  breton  Henri  de  Brettes;  5<» Marie-Elisabelh-Angèle, 
née  en  1843,  a  épousé  en  1861  Georges  d'Alexéïeff,  maréchal  de  la 
noblesse  et  maître  de  la  cour  de  S.  M.  l'empereur  de  Russie,  dont 
les  armes  sont  :  d'or  au  monument  en  forme  de  colonne  surmonté 
d'une  étoile  d'azur,  au  chef  parti  :  au  /",  de  gueules  à  une  abeille 
au  naturel,  au  2*,  d'azur  au  livre  ouvert  d'argent;  6*  Marie-Louise- 
Gérosime-Marlhe,  née  en  1845,  mariée  en  1865  à  Pierre-Henri- 
Victor  Rognes  de  Fursac,  dont  les  armes  sont  :  de  gueules  à  la 
croix  ancrée  d'argent  chargée  de  cinq  billettes  d'azur. 

Pierre-Gédéon  du  Breuil-Hélion  de  La  Guéronnière,  né  à  Thou- 
ron  en  1841,  a  épousé  en  1862  Ida  Mummy.  Leurs  enfants  sont  : 
1"  Hélène,  qui  a  épousé  en  1884,  Georges-Gustave-Edoaard  Adet; 
^  Alfred  ;  3»  Gaston  ;  4«  Robert  ;  5*  Louis;  6«»  Adèle  ;  !•  Madeleine  ; 
8*  Henri. 


in.  —  LE  BOURG. 

Le  bourg  de  Thouron  n'a  jamais  été  fort  important.  Avec  Téglise 
et  le  château,  on  y  trouvait  cependant  une  autre  habitation  assez 
considérable  qui  a  conservé  le  nom  de  château  des  Vaucourbeil.  Le 
presbytère  et  cinq  ou  six  autres  maisons  était  tout  ce  qu'il  compre- 
nait. Aujourd'hui  on  y  compte  en  tout  dix-huit  mai^ns,  dix-neuf 
ménages  et  quatre-vingt  trois  habitants.  Je  ne  crois  pas  qu'il  en 
ail  eu  jamais  davantage. 

Le  château  des  Vaucourbeil  est  formé  d'un  corps  de  logis  flanqué 
d'une  tour  carrée  renfermant  l'escalier  en  hélice.  D'autres  bâti- 
ments, en  forme  de  cloître,  entouraient  une  cour  carrée.  II  semble 
avoir  été  bâti  au  xvi«  par  la  famille  dont  il  porte  le  nom.  Cette  fa- 
mille a  pour  armes  :  écartelé  au  /•'  et  4*  d'azur  à  la  tour  d'argent, 
sur  laquelle  est  posé  un  oiseau  ;  au  2*  et  3^  d'or  au  lion  de  gueules. 

Deux  prêtres  du  nom  de  Vaucourbeil  ont  été  curés  de  Thouron 
antérieurement  à  1600.  Jean  de  Vaucourbeil  était  syndic  de  la  pa- 
roisse en  1602,  comme  nous  l'apprend  l'inscription  de  la  cloche. 
Puis  les  registres  paroissiaux  nous  donnent  quelques  détails  généa- 
logiques sur  les  habitants  de  ce  château  : 

Jean  de  Vaucourbeil,  seigneur  de  l'Age,  notaire,  habitant  le 
bourg  de  Thouron,  avait  épousé  Jacquette  Duclou,  dont  :  V  Mar- 
guerite, qui  épousa  le  6  février  1661  Louis  Goumot,  fils  de  Pierre 
Goumot,  sieur  du  Mas-de-Faye,  juge  lieutenant-sénéchal  de  Saint 


MONOGRAPHIE    DR   LA    COMMUNE   t)E  mOURON.  l)Qi 

Âmand-Jarloudeix;  ^  Gabriel,  qui  épousa  en  1663  Louise  de  la 
Biolhie,  (ille  d'Etienne  et  de  Léonarde  du  Gondeau. 

Jacques  de  V'aucourbeil,  avocat,  habitant  le  bourg  de  Thouron 
en  1661,  épousa  Louise  Charron,  et  alla  ensuite  se  fixer  au  lieu 
noble  de  Juniat,  paroisse  de  Chamborel,  en  1669.  Leurs  enfants 
furent  :  1°  Marie,  née  le- 15  juillet  1667,  qui  eut  pour  parrain 
Sylvain  de  Vaucourbeil,  notaire;  2°  Jicquetle,  née  le  4  septembre 
1668;  3Mean,  baptisé  à  Chamborel  le  26  juillet  1671. 

Pierre  de  Vaucourbeil,  sieur  de  l'Age,  habitant  le  bour;?  île  Thou- 
ron, était  procureur  d'office  de  la  justice  et  châtellenie  d<î  Thouron 
fin  1669,  puis  conseiller  du  roi  et  lieutenant  de  la  maréchaussée  de 
Bellacen  1677. 11  mourut  le  30  avril  1691.  Il  avait  épousé  Marie 
Guilhem  ou  Guilhemet,  dont  :  1**  Jacques,  qui  suit  ;  2«  Anioine,  né 
le  14  juin  1669;  3*»  Françoise,  née  le  17  avril  1671,  qui  épousa  à 
Thouron,  le  2  juin  16S7,  Jean  Masdot,  conseiller  du  roi  au  siège 
présidlal  de  Limoges,  fils  de  Uartial  Masdot,  bourgeois  de  la  ville 
de  Limoges,  et  de  N...  de  Jayac;  4' Pierre;  5**  Suzanni^  née  le 
14  mars  1674;  6<>  Jean,  né  le  14  novembre  1675;  7*  Marie,  née  le 
16  septembre  1677. 

Jacques  de  Vaucourbeil,  écuyer,  seigneur  du  Puybariîau,  pa- 
roisse de  Saint-Jouvent,  licencié  ès-lois,  puis  conseiller  du  roi  et 
lieutenant  de  robe  courte  en  la  maréchaussée  de  la  Basse-Marche 
à  Bellac,  épousa  :  1*  Jeanne  Roulhac;  2"  Françoise  Sandemoy.  Du 
second  mariage  il  eut  Marie  de  Vaucourbeil,  qui  épousa,  le  7  jan- 
vier 1720,  Mathieu  Blondeau,  seigneur  de  Compreignac. 

Une  autre  famille  qui  a  habité  le  bourg  de  Thouron  et  y  avait 
«{uelque  importance  est  la  famille  Masdot,  dont  les  armes  sont  : 
d'azur  à  la  fasce  d'or  chargée  d'une  flèche  de  sable  dans  le  même 
sens^  accompagnée  en  chef  d'un  croissant  d'argent  et  en  pointe  d'un 
lion  naissant  d'or. 

Hélie  Masdot,  habitant  le  bourg  de  Thouron,  vendit  dans  le  mi- 
lieu du  xvu*  siècle,  à  M.  Dupeyrat,  seigneur  de  Thouron,  le  grenier 
â  blé  de  ce  bourg. 

Catherine  Masdot  était  marraine  de  la  cloche  fonduo  en  1602. 

Martial  Masdot,  bourgeois  de  la  ville  de  Limoges,  mort 
avant  1687,  avait  épousé  N...  Jayac,  dont  :  I*  Jean,  qui  suit; 
2^  Hélie  Masdot,  notaire  au  bourg  de  Thouron,  qui  fut  enterré  dans 
l'église  paroissiale  en  1702.  A  son  enterrement  assistaient  Jean 
Masdot,  son  frère,  et  Jean  Masdot,  son  cousin. 

Jean  Masdot,  conseiller  du  roi  au  siège  présidial  de  Limoges, 
épousa  à  Thouron  Françoise  de  Vaucourbeil,  fille  de  Pierre  de 
Vaucourbeil,  conseiller  du  roi,  lieutenant  de  robe  courte. 

T.   XL.  3S 


SOS  SOCIÉTÉ  ARCtaKOLOGIQUE  ET  HISTORIQim  Dt)  LIMÔUSIK. 

Jean  Masdot,  bourgeois,  épousa  Jeanne  Gercleix,  dont  :  1^  Fran- 
çoise, qui  épousa  à  Thouron,  le  26  novembre  i72f5,  François  Du- 
faure,  sieur  de  Belisle,  fils  d'autre  François  et  de  Marie  Coustiu: 
2°  Marie,  née  le  18  septembre  1707. 

On  trouve  aussi  à  Thouron  :  Antoine  Masdot,  écolier,  1693: 
Jules  Masdot,  notaire,  1677;  Jean  Masdot,  praticien,  1692. 

Cette  famille,  dont  on  signale  encore  les  tombeaux  dans  le  cime- 
tière de  Thouron  en  1785,  semble  s'être  fixée  à  Guéret,  où  nous 
trouvons  en  1767  Louis-Antoine  de  Madot,  écuyer,  sieur  du  Soulier, 
épousant  Marguerite  Prunier. 

Dans  la  paroisse  de  Thouron,  outre  les  fabriciens  qui  s'occupaient 
de  réglise,  il  y  avait  aussi  des  syndics  pour  les  affaires  qui  regar- 
daient toute  la  paroisse.  Plusieurs  nous  sont  connus.  Ainsi,  lors- 
que le  1"  juillet  1572  Lazare  Amadou,  conseiller  au  Grand-Conseil 
érigea  le  siège  secondaire  à  Bellac,  les  syndics  des  paroisses  dé- 
pendant de  ce  siège  furent  convoqués  pour  Tinstallation.  Le  procès- 
verbal  indique  parmi  ceux  qui  étaient  présents  «  Messire  Foucault 
Faulcon,  chevalier  du  roi,  seigneur  chaslellain  en  la  chaslellenie  de 
Thouron;  Simon  Gerbaud,de  Richefort,  et  Jean  d'Adam,  au  Villat, 
syndics  de  la  paroisse  de  Thouron.  »  L'inscription  de  la  cloche 
nous  fait  aussi  connaître  Jehan  de  Vaucourbeil  et  Jehan  Baritau, 
qui  étaient  syndics  en  1630. 

Jusqu'à  la  Révolution,  la  paroisse  de  Thouron  continua  à  traiter 
toutes  les  affaires  qui  Tinléressaienl  dans  des  assemblées  de  pa- 
roisse; on  en  trouve  la  preuve  dans  la  note  suivante,  extraite  des 
registres  paroissiaux  :  «  Le  6  juillet  1783,  après  la  messe  de  pa- 
roisse, il  fut  convenu  par  Assemblée  de  paroisse,  convoquée  le 
dimanche  d'auparavant,  que  la  paroisse  souscrirait  ce  que  de  rai- 
son pour  faire  construire  dans  l'église  une  tribune,  un  banc  pour 
les  officiers  de  l'église  et  la  boiserie  nécessaire  aux  fonts  baptis- 
maux. » 

La  justice  fut  toujours  exercée  par  les  seigneurs  de  Thouron  sur 
toute  retendue  de  leurs  terres  et  cette  châtellenie  dépendait  du 
siège  royal  de  Bellac.  Le  mémoire  de  M.  de  Bornage,  rédigé  en 
1698,  nous  dit  en  effet  que  du  siège  de  Bellac  dépendaient  six  jus- 
tices seigneuriales  :  Darnac,  Le  Deffens,  Touron,  Chabannes,  Bon- 
nac  et  Nantiat. 

Un  état  des  paroisses  de  la  généralité  de  Limoges  dressé  en 
1687  nous  apprend  que  Thouron  avait  alors  quatre-vingt-huit  feux 
et  que  M.  le  baron  de  Thouron,  trésorier  de  France  à  Limoges,  en 
était  seigneur.  «  C'est  un  lieu  situé  sur  des  collines,  entouré  de 
grands  bois  et  de  montagnes;  il  s'y  recueille  du  blé,  deè  chastaigne^, 
il  y  a  des  prés  et  s'y  nourrit  des  bestiaux.  » 


Monographie  de  la  commone  de  tëouron.  8Ô.1 

Une  statistique  de  la  même  époque    constate  que  cette  pa- 
roisse : 

En  1680  payait  727  U.  d'imposition  et  possédait  1 1  bœufs  et  44  vaches. 


f 


En  1681 

78411. 

En  1682 

--    76711. 

En  1683 

—    84611. 

En  1684 

-    80411. 

En  1685 

—    78011. 

En  1686 

—    76011. 

9      - 

..      47 

9     - 

-      47 

9      - 

-      45 

10     - 

-      63 

10      - 

-      12 

11      - 

-      40 

Thouron  eut  aussi  ses  jours  de  deuil.  Vers  la  fin  de  sep- 
tembre 1630,  un  voyageur  de  nom  et  d'origine  inconnus, 
descendu  à  l'hôtel  des  Trois-Anges,  à  Limoges,  y  mourut  de  la 
peste  qui,  cette  année-là,  ravageait  l'Europe  entière.  Telle  fut 
rorigine  de  la  contagion  qui  dépeupla  cette  ville  et  les  environs. 
S'il  faut  en  croire  les  Annales,  elle  emporta,  «  tant  dans  la  ville 
que  dans  la  Cité,  aux  faubourgs  et  la  banlieue,  20,000  personnes.  » 
On  pratiqua  de  grandes  fosses  au  cimetière  de  Saint-Cessateur,  où 
furent  jetés  en  hâte  et  sans  les  égards  accoutumés,  les  corps  bien 
souvent  privés  de  cercueil,  car  les  ouvriers,  comme  les  fossoyeurs, 
ne  suffisaient  pas  au  funèbre  travail.  Dès  le  ^S  octobre,  la  paroisse 
de  Compreignac  était  atteinte;  il  dût  en  être  de  même  de  celle 
de  Thouron.  Pierre  Mesnagier,  réfugié  dans  sa  métairie  de  Beaune, 
a  écrit  que  dans  certains  villages  «  il  n'est  demeuré  vivants  ni 
hommes,  ni  femmes,  ni  petits  enfants  ».  Enfin,  dans  toutes  les 
paroisses  on  fit  des  vœux,  des  processions  en  l'honneur  de  saint 
Roch,  et  le  fléau  cessa  le  jour  de  la  fête  de  ce  saint.  C'est  dans  ces 
circonstances  que  les  paroissiens  de  Thouron  bâtirent  la  chapelle 
de  Saint-Roch  au  milieu  du  cimetière.  Cette  chapelle,  dont  j'ai  déjà 
parlé,  a  été  toujours  fréquentée,  comme  heu  de  dévotion,  tant  que 
le  cimetière  a  existé!  Nous  verrons  plus  loin,  en  1787,  que  les  ha- 
bitants de  Thouron  eurent  encore  recours  à  saint  Roch  pendant 
une  nouvelle  épidémie. 

En  1785,  la  paroisse  fut  fort  éprouvée.  Le  curé,  dans  les  notes 
qu'il  a  laissées  sur  les  registres,  nous  dit  :  «  Cette  année,  après 
six  mois  de  froid  et  de  neiges  extraordinaires,  il  a  fait  des 
chaleurs  et  des  sécheresses  si  excessives,  que  toutes  les  semences 
vertes  ont  séché  sur  pied.  Le  foin  s'est  vendu  pris  au  pré  sept 
livres  dix  sols  le  quintal.  Les  chanvres  ont  péri  entièrement. 
Il  n'y  a  eu  que  beaucoup  de  raisins,  assez  de  blé  dans  le  bon 
pays  et  quelques  châtaignes.  La  plupart  des  particuliers  ont 
été  obligés  d'abandonner  leurs  bestiaux.  Les  foires  n'ont  rien  valu 
et  la  viande  était  pourtant  très  chère.  Après  l'Ostension  de  toutes 


504  SOClÉTé   AllCBÉOLOGlQUR  ET   HISTORIQUE  DU  LlMOUSIlf. 

les  reliques,  par  mandement  de  MM.  les  vicaires  généraux,  loule> 
les  églises  de  Limoges  et  de  la  campagne  ont  exposé  le  Tri'?- 
Sainl-Sacrement,  fait  des  processions  générales  pour  obtenir  de  la 
pluie,  et  le  ciel  s*est  refusé  à  nos  vœux.  Les  sources  ont  presque 
tari  entièrement  et  il  n'y  a  eu  que  très  peu  de  fourrages.  » 

Pendant  cetle  disette  de  fourrages,  il  était  à  craindre  que  des 
accapareurs  vinssent  encore  augmenter  le  mal  dont  souffraieut 
les  campagnes;  aussi  prit-on  des  mesures  pour  Tempécher.  Le 
curé  de  Thouron  note  que  le  15  août  1786  «  il  a  publie,  à  l'issue 
de  la  messe  paroissiale,  un  arrêt  du  Parlement  de  Paris,  par 
lequel  la  Cour  fait  défense  à  qui  que  ce  soit  de  faire  aucuns 
achapts  en  foin,  paille  et  autres  fourrages  au-delà  de  la  quanlilè 
nécessaire  à  chacun,  sous  peine  de  100  livres  d'amende  ei 
ordonne  que  tous  ceux  qui  auront  du  fourrage  à  vendre  le  fas- 
sent taxer  par  les  juges  des  lieux.  Cet  arrêt  est  du  19  juillrî 
1785.  » 

En  1787,  le  pays  eut  a  souffrir  de  maladies  épidémiques.  «  Celle 
année  il  est  passé  certains  brouillards  qui  ont  occasionné  des 
maladies  épidémiques.  Les  gens  meurent  après  trois  ou  quatre 
jour»  de  maladie;  ils  sont  atlaqués  par  une  douleur  vive,  sous  le 
sein  gauche;  l'humeur  se  porte  aussitôt  à  la  poitrine  et  ils  meu- 
rent en  pleiue  connaissance. 

«  Le  13  lévrier  susdite  année,  j'ai  commencé  en  Thonneur  de 
saint  Roch  une  neuvaine  pour  les  malades  de  Thouron,  qui  sont 
en  grand  nombre.  Les  paroissiens  s'y  rendaient  avec  affluence. 
Il  paraît  que  ce  concours  plaît  au  ciel  ;  les  malades  donnent  espé- 
rance de  soulagement.  » 

Le  môme  nous  fait  encore  conn«iître  les  dégâts  que  fit  un  oura- 
gan :  «  Le  11  novembre  1787,  qui  éloit  un  dimanche,  il  lit  un 
ouragan  et  un  vent  si  impétueux  qu'il  enleva  plusieurs  couvertures 
de  maison,  arracha  une  infinité  d'arbres  et  de  plantes.  » 

L'année  1788  fut  une  des  plus  froides  et  des  plus  cruelles  qu'on 
ait  vues  de  longtemps.  Le  setier  de  seigle,  mesure  de  Limoges,  va- 
lut 10  livres,  et  il  n'y  en  eut  pas  pour  tous  ceux  qui  en  voulaient. 
La  gelée  pénétra  dans  la  terre  de  quatorze  pouces. 

Le  4  mars  1789  eut  lieu  à  Thouron  l'assemblée  du  Tiers-Etal. 
M.  Martin,  juge  de  Thouron,  fut  président  de  cette  assemblée; 
il  eut  pour  greffier  M.  Ruaud  dit  Lafontanelle.  Les  députés  choisis 
pour  porter  les  cahiers  furent  Jean  Defianas  l'aîné  et  Jean  Ruaud, 
laboureur,  du  village  de  Commerat. 

Par  suite  du  décret  du  15  janvier  1790,  sur  la  division  du  terri- 
toire français  en  quatre-vingt-trois  départements,  Compreignac  fut 
un  chef-lieu  de  canton  dans  le  district  de  Bellac;  il  comprit  les 


MONOGRAPHIE  DF.  LA  COMMUNE  DE  THOUnON.  50S 

communes  de  Compreignac,  La  Garde-Saint-GéraUl,  Sainl-Sympho- 
rien,  Saint-Sylvestre  et  Thouron.  Plus  tard,  celte  division  lerrilo- 
riale  fut  remaniée.  On  réunit  les  cantons  de  Cieux  et  de  Comprei- 
gnac, et  le  chef-lieu  de  ce  nouveau  canton,  dont  fait  parlie  la 
commune  de  Thouron  fut  fixé  à  Nantiat. 

Lorsque,  au  moyen  d  une  commission  dite  des  réguliers,  on  eut 
délruit  l'ordre  de  Grandmont,  les  révolutionnaires  n'ayant  pas 
encore  commencé  à  s'emparer  du  bien  de  leurs  victimes,  l'évéque 
de  Limoges,  en  1772,  obtint  une  bulle  par  laquelle  les  biens  de 
Grandmont  situés  dans  son  diocèse  furent  unis  à  la  manse  épisco- 
pale.  L'évéché  de  Limoges,  mis  en  possession  de  l'abbaye  elle-même, 
fit  distribuer  à  toutes  les  paroisses  du  diocèse  l'incomparable 
Irésor  qu'elle  possédait.  Thouron  reçut  alors  nne  des  sept  grandes 
chasses  toutes  resplendissantes  des  feux  des  pierreries  et  de  l'éclat 
des  émaux,  qui  décoraient  précédemment  l'autel  majeur  de  la 
basilique.  Elle  fut  transportée  solennellement  dans  cette  paroisse 
le  H  septembre  1790,  comme  en  fait  foi  le  procès-verbal  publié 
aux  documents.  Mais  peu  de  temps  après  elle  dut  avoir  le  même 
sort  que  les  autres  châsse?  données  à  Razès  et  à  Saint-Sylvestre. 
Les  registres  de  ces  paroisses  nous  apprennent  qu'elles  furent 
livrées  sur  la  réquisition  de  l'agent  national  cherchant  du  cuivre 
pour  faire  une  chaudière. 

La  période  révolutionnaire  n'a  laissé  dans  cette  commune  aucun 
souvenir  particulier  qui  ne  soit  déjà  signalé. 

La  statistique  de  1808  nous  dit  que  la  commune  de  Thouron 
avait  alors  89  feux  et  16  hameaux;  sa  population  était  de  477  ha- 
bitants, comprenant  135  garçons,  125  filles,  81  hommes  mari»is, 
HO  femmes  mariées  ;  15  veufs,  24  veuves  et  17  militaires. 

Le  nouveau  presbytère  a  été  bâti  vers  1858,  et  les  écoles  et  la 
mairie  en  1890. 

IV.  —  LES  VILLAGES. 


i 


( 


CnATEAr-MoiiuN  :  1  maison,  1  ménage,  10  habitants.  Le  moulin 
l  l'étang  formaient  un  fief  de  la  terre  de  Thouron  qui  fut  vendu 
en  1574,  par  Foucault  Faulcon,  seigneur  de  Thouron  la  somme 
le  4,000  livres,  au  sieur  François  Fontréaulx.  En  1715  le  sieur  de 
Gensignac  le  possédait  à  titre  d'héritage.  L'étang  qui  existe  tou- 
jours couvre  une  superficie  de  15  hectares  19  ares. 

Chez-Frapet  :  1  maison,  1  ménage,  10  habitants. 

Le  Cliseau  :  3  maisons,  3  ménages,  9  habitants. 

L.V  Combe  :  13  maisons,  13  ménages,  58  habitants. 


506  SOCIÊTR    ARCHEOLOGIQUE   LT   HISTORIQUE   DU    UIIOUSIN. 

CoMBECHoux  :  1  maison,  1  ménage,  2  habitants. 

CoMMÉRAT  alias  FouLANGEAS.  Voir  ce  dernier  nom. 

Croix-Forge  :  1  maison,  i  ménage,  9  habitants.  Ce  village  n  esi 
pas  indiqué  sur  la  carte  de  TEtat-Major. 

FoL'LANGEAS  :  1  malsou,  4  ménage,  2  habitants. 

GouRGEAU-DE-Loi'P  :  2  maisous,  2  ménages,  9  habitants.  Cc^illape 
est  placé  sur  le  Vincou,  c^^ans  un  endroit  fort  pittoresque. 

La  Maueleiise  :  1  maison,  1  ménage,  7  habitants.  Ce  lieu  situé 
vers  Textrémité  méridionale  de  la  forôl  de  Thouron,  a  fait  partie  de 
la  terre  de  Thouron  depuis  les  temps  les  plus  reculés,  et  en  a  suivi 
toutes  les  péripéties.  Avant  1475  il  était  posséda  par  Jehan  Faulcon. 
En  1663,  Pierre  Dupeyrat  était  seigneur  de  La  Madeleine,  il  épousa 
Isabéau  Duléry,  dont  :  ioJean  Dupeyrat,  baptisé  le  27  juin  1696; 
2**  Antoine  Dupeyrat  enterré  dans  l'église  de  Thouron,  devant 
l'autel  de  Sainte-Madeleine  le  14  mai  1699.  Le  domaine  de  La 
Madeleine  et  la  petite  forêt  du  môme  nom,  ont  été  acquis  par 
M.  Athanase  Moreny,  par  contrat  du  21  mai  1891. 

Une  chapelle  rurale,  dédiée  à  sainte  Madeleine  existait  en  ce 
lieu.  Jehan  Faulcon  en  parle  dans  son  testament  de  H75.  Elle  a  été 
interdite  en  1741,  et  est  tombée  en  ruine  peu  après. 

Le  Mas  :  4  maisons,  4  ménages,  25  habitants.  Ce  lieu  est  placé 
dans  une  agréable  situation,  sur  une  hauteur  en  face  du  château 
de  Thouron.  Il  faisait  partie  de  la  terre  de  Thouron,  comme  on  le 
voit  dans  le  testament  de  1475  reproduit  aux  documents. 

Lorsque  la  famille  Dupeyrat  fit  l'acquisition  de  Thouron,  une  di- 
ses branches  s'établit  au  Mas;  elle  le  possède  toujours;  en  voici  la 
généalogie  d'après  les  registres  paroisiaux  : 

Pierre  Dupeyrat,  épousa,  le  25  septembre  1720,  Thérèse  de 
Marsanges,  (iile  de  Paul  de  Marsanges  de  Vaulry  et  d'Anne 
de  Bretles.  La  famille  de  Marsanges  porte  :  d'argent  à  trois 
merlettes  de  sable,  2  et  i .  D(i  ce  mariage  naquirent  :  1«  Pierre 
Dupeyrat,  ccuyer,  sieur  du  Mas,  qui  épousa,  par  contrat  du  2  juil- 
let 1749,  Marguerite  Noualhier,  fille  d'Antoine  Noualiiier  des  Bailles 
et  de  Marguerite  de  Bigorie.  Elle  était  veuve  en  1751  et  habitait 

Limoges.  Ses  armes  sont  :  de  gueules  au  chevron  de chargé 

d'un  poisson  accompagné  de  3  coquilles  2  et  I  ;^  Jean-François 
qui  suit. 

Jean-François  Dupeyrat,  chevalier,  seiji^neur  du  Mas,  capitaine 
au  régiment  de  Sainl-Chamon,  mourut  le  8  septembre  1767  à  l'âge 
de  quarante-trois  ans.  Il  avait  épousé  Madeleine  Laurens  d'Arfeuile 
dont  les  armes  sont  :  d'argent  au  chevron  de  gueules  accompagne 


MONOG&APBIE  DE  LA  COMMUNE  DE  THOURON.  507 

en  chef  de  deux  étoiles  d'azur  et  en  pointe  d'un  croissait t  du  même. 
Leurs  enfants  furent  :  1»  François,  né  le  28  mai  1753  ;  2**  Joseph- 
François,  qui  suit;  3"  Françoise-Madeleine,  née  le  21  juillet  1786; 
*•  autre  Joseph-François,  né  le  26  octobre  1788;  5**  Jean,  né  le 
!•'  septembre  1760;  6"  Henriette-Marie,  née  le  29  août  1761,  morte 
le  19  février  1762;  7°  Joseph,  né  le  14  novembre  1762,  sieur  de 
Royèras,  était  commandant  de  la  milice  de  la  paroisse  en  1790. 

François-Joseph  Dupcyrat,  chcvaHor,  seigneur  du  Mas,  né  le 
7  décembre  1784,  épousa  Léonarde  Barny  de  Romanet,  dont  : 
1»  Madeleine-Thérèse,  née  le  6  août  et  morte  le  8  septembre  1782; 
^  Marie-Madeleine-Constance-Léonarde,  née  le  28  novembre  1783, 
morte  à  Tâge  de  quinze  ans;  3°  François-Joseph-Hélie-Malhieu,  né 
le21  décembre  1784;  4**  François-Joseph-Léonard,  qui  suit;8®  Pierre- 
Prosper,  né  le  31  octobre  1788,  mort  capitaine  de  génie  au  régi- 
ment de  Ralisbonne  ;  6**  Joseph-Magloire,  né  le  8  juillet  1790. 

François-Joseph-Léonard  Dupeyrat,  né  le  6  juillet  1786,  mort  le 
9  août  1868,  avait  épousé,  par  contrat  du  17  octobre  1820,  Marie- 
Joséphine  Chandeon  de  La  Valette,  fille  de  Georges-Edme-Baltazard 
Chandeon  de  La  Valette  et  de  Claire-Emmanuelle-Caroline  Corvi- 
zirt  de  Montmarin,  morte  le  8  octobre  1837.  Ses  armes  sont  :  d'azur 
nu  chevron  accompagné  en  chef  de  deux  étoiles,  et  en  pointe  d'une 
gerbe  d'or.  Leurs  enfants  furent  :  1*  Edmond-Raoul-Georgcs, 
qui  suit;  2°  Louis-Constantin-Emeric;  3°  Marie-Thérèse-Georginc. 

Edmond-Raoul-Georges  Dupeyrat,  mort  en  1869  avait  épousé  sa 
cousine-germaine,  Adélaïde  Dupeyrat,  fille  de  Joseph-Magloire, 
dont  :  1°  Henriette,  morte  le  19  janvier  1860;  2^  Marthe  Joséphine, 
née  le  13  juin  1864,  a  épousé,  le  9  août  1884,  Armand  Foriasky  ; 
3"*  Louis  Emeric,  né  le  27  octobre  1866,  qui  a  épousé,  le  14  juin 
1892,  Lucile  Juge  de  Saint  Martin.  Celte  dernière  famille  porte  : 
d'azur  à  une  main  mouvante  du  flanc  senestre,  tenant  une  épée  en 
pal,  qui  supporte  le  fléau  d'une  balance  à  deux  bassins  d'argent. 

Dans  les  dépendances  du  village  du  Mas  on  trouve  un  très  beau 
châtaignier  dont  le  tronc  a  sept  mètres  de  circonférence. 

Maison-Neuve  :  1  maison,  1  ménage,  10  habitants.  Un  souterrain- 
refuge  de  Tépoque  gauloise  a  été  découvert  en  1890  près  de  ce 
village.  Il  est  dans  une  terre  labourée,  à  30  mètres  de  la  route. 
L*ébouleraent,  à  la  suite  duquel  j'ai  pu  y  pénétrer,  s'est  produit  à 
un  de  ses  carrefours.  De  là  une  galerie  s'étend  à  10  mètres  environ 
du  côté  de  l'orient;  mais  à  cet  endroit  elle  est  fermée  par  des  terres 
provenant  d'un  autre  éboulement  qui  date  de  quelques  années. 

Les  Pucieux  :  18  malsons,  18  ménages,  72  habitanls. 

Le  Pont  :  1  maison,  1  ménage,  12  habitants.  Quelques  membres 


5A8  aoCltlk   ARCH^.OLOGIQUR   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

de  la  famille  Diipeyrat  prenaient  le  nom  de  Dupeyral  du  Pont, 
lieu  qu'ils  possédaient,  et  qni  est  encore  un  domaine  de  la  lerredr* 
Thouron.  Dans  les  anciens  litres  ce  lieu  est  appelé  Ponl-Vieax, 
pour  le  distinguer  de  Pont-Neuf  qui  existait  près  de  Maison- 
Neuve. 

RrcHEFORT  :  14  maisons,  14  ménages,  65  habitants.  C'est  à  tort 
que  le  nom  de  ce  village  a  été  écrit  Bocheforl  sur  la  carte  de 
TEtat-major. 

RoYÊRAS  :  Le  lieu  de  Royéras,  dont  Joseph  Dupeyrat  était  sei- 
gneur à  la  (in  du  xvui*  siècle,  n'a  conservé  aucun  bâtiment,  son 
étang  seul  existe  toujours  à  quelques  centaines  de  mètres  du 
bourg. 

Saint-iMoras  :  20  maisons,  20  ménages,  86  habitants.  Martial  de 
Saint-Moras,  qui  vivait  en  1475,  est  désigné  par  Jehan  Faulcon, 
seigneur  de  Thouron,  pour  desservir  la  vicairie  qu'il  fonda  par  son 
testament. 

TRouRAurs  :  13  maisons,  13  ménages,  54  habitants.  Foucauld 
Faulcon,  seigneur  de  Thouron,  en  1566  vendit  Touradis,  mais  le 
racheta  ensuite. 

Tricherie  :  2  maisons,  2  ménages  13  habitants.  L'étang  de 
Tricherie,  appelé  aussi  de  Thouron,  a  une  étendue  de  28  hectares 
72  ares. 

En  1260  Jaubert  de  La  Celle,  successeur  de  Pierre  de  I^  Celle, 
seigneur  de  Thouron,  donna  à  l'abbaye  de  Grandmonl  tout  son  droit 
sur  l'étang  de  Thouron,  autrement  dit  de  Tricherie.  A  la  fin  du 
siècle  dernier,  lorsque  le  gouvernement,  au  moyen  de  la  commis- 
sion dite  des  réguliers,  eut  prononcé  la  destruction  de  Tonlre  de 
Grandmont,  les  biens  que  possédait  cet  ordre  dans  le  diocèse  de 
Limoges  furent  unis  à  la  mense  épiscopale.  Aussi  ce  fut  aux  frais 
de  l'évéché,  qu'en  1788,  on  exécuta  des  travaux  considérables  à 
la  bonde  de  cet  étang.  M.  Laurier,  curé  de  Thouron,  bénit  ces 
travaux  le  4  mai  1788.  Le  gouvernement  s'empara  peu  après  de 
tous  les  biens  du  clergé  et  chargea  le  district  et  Tadministration 
des  domaines  de  vendre  cet  élang.  La  vente  eut  lieu  le  18  a>nl 
1791,  et  on  en  relira  la  somme  de  li,200  francs.  Aujourd'tiui  il 
est  revenu  la  propriété  de  la  maison  de  Thouron. 

La  Valette  :  6  maisons,  0  mén.igos,  35  habitants.  Avant  1475, 
ce  bien  appartenait  à  Jean  Faulcon,  qui  en  parle  dans  son  testa- 
ment. 

Vm.lat  ou  Vii.LARD  :  On  ne  retroiive  plus  le  nom  de  ce  village, 
où  habitait  en  1574  jL»an  d'Adum  un  des  scyndics  de  la  paroisse. 


MONOr.RAPHIE  DE   LA    COMMUNE   DE   THOURON. 


S09 


V    -    DOCUMEiNTS. 


Le  lexle  du  leslament  fie  Jehan  Faulcon,  seigneur  de  Thouron, 
nous  a  élé  conserve^,  par  Robert  du  Dorât.  Malheureusement  il 
renferme  plusieurs  mauvaises  lectures  qu'il  n*estpas  facile  de  réta- 
blir; aussi  sa  traduction  est  elle  assez  hasardée  en  plusieurs  points. 
Malgré  cela  on  y  remarque  de  fort  curieux  usages  de  cette  époque 
déjà  reculée. 

Ce  lexle  n'est  pas  complet,  les  dernières  lignes  manquent.  Simon 
Descoutures,  chargé  de  la  vérification  des  titres  de  la  noblesse  en 
1666,  a  examiné  ce  testament,  et  il  nous  apprend  dans  son  Nobi- 
liaire que  Jehan  Faulcon  testa  en  faveur  de  son  fils  Antoine. 


TEXTE. 

You  Johan  Faulcon,  chivalier, 
lengut  segond  la  rosade  deu  monde, 
seigneur  et  adrainistratour  de 
rhoslel  et  terre  de  Thoront  et  de 
Saint-Pardoulx  ;  cognoissent  que 
tous  esmes  en  aquet  paubre monde 
come  hosteis  et  peleris;  et  que  no 
eys  en  héritage  perpétuel  ;  et  que 
tous  devem  desirar  a  parvenir  au 
benoit  réanime  de  paradis  ;  consi- 
dérant que  non  es  chauso  plus 
certaine  que  de  la  mort,  et  py  plus 
incertaine  que  Touro  :  you,  per  la 
grâce  de  Dieu,  estant  so  de  mon 
corps,  et  en  mon  bon  perpoux,  sens 
et  mémoire;  non  voulent  départir 
de  quet  misérable  monde  sen  pre- 
mièrement ordonar  de  mon  arme  et 
corps,  et  de  beys  lous  quaulx  nos- 
tre Seigneur  mê  ho  donnas  et  prey- 
las  en  aquet  monde,  sen  faire  mon 
ordenance,  testament  et  darniere 
volontat:laquale  chause  you  fault 
en  la  meilleur  forme  et  manière 
que  siax  ni  peu,  en  eissi  que  sen 
set;  en  fasen  le  signe  de  la  hono- 
rade  creux  :  in  nomine  Patris  et 
Filii  et  Spiritus  sancti.  amen, 
Jésus, 

Premieramenl  recommande 
mon  arme  et  mon  corps  à  la  infi- 
nide  miséricorde  de    notre  ^ei- 


TRADUCTION. 

Moi  Jehan  Faulcon,  chevalier, 

seigneur  et  ad ministrateur  de  l'hô- 
tel et  terre  de  Thouron  et  de  Saint- 
Pardeux;  connaissant  que  tous 
nous  sommes  en  ce  pauvre  monde 
comme  hôtes  et  pèlerins;  et  que 
nous  ne  Tavons  pas  en  héritage 
perpétuel  ;  et  que  tous  nous  devons 
désirer  parvenir  an  béni  royaume 
du  paradis;  considérant  qu'il  n'est 
pas  de  chose  plus  certaine  que  la 
mort'  et  ni  plus  incertaine  que 
l'heure  :  moi,  par  la  grâce  de  Dieu, 
étant  sain  de  mon  corps  et  en  mon 
propos,  sens  et  mémoire  ;  ne  vou- 
lant partir  de  ce  misérable  monde 
sans  premièrement  ordonner  ce 
qui  regarde  mon  âme  et  mon  corps, 
et  les  biens  que  notre  Seigneur 
m'a  donnés  et  prêtés  en  ce  monde, 
sans  faire  mon  ordonnance,  testa- 
ment et  dernière  volonté,  laquelle 
chose  je  fais  en  la  meilleure  ferme 
elmanièrequi  soit  et  peut,  et  ainsi 
(ju'il  s'en  suit;  en  faisant  le  signe 
(le  la  croix  vénérée  :  au  nom  du 
Père  et  du  Fils  et  du  Saint-Esprit. 
Ainsi  soit-il.  Jésus. 

Premièrement,  je  recommande 
mon  âme  et  mon  corps  à  l'inlinie 
miséricorde    de   notre    Seigneur 


S10 


SOCIRTR  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 


gnour  Dieu,  lo  Paire  tout  pois- 
sant, deu  Fils  et  deu  Sainl-Esprit, 
qui  es  la  saincle  Trinitat,  lous 
treys  en  une  personne  ;  et  beneyle 
vergene  Marie,  précieuse  pucelle 
Marie,  sa  benoite  maire  ;  et  a  Mon- 
sieur saint  Michau,  Tarchange;  a 
M.  saint  Gabriel,  Tange;  a  mon 
bon  ange  qui  m*a  éngarda,  a 
M.  saint  Johan-Baptiste,  saint 
Peyr,  saint  Pau,  saint  Andriou, 
saint  Marsau,  saint  Lienard,  saint 
Anlhoni,  saint  Entropie,  saint  Se- 
bastie  et  saint  Christophe;  a  mas 
damas  saincte  Anne,saincte  Marie- 
Magdelaine,  saincle  Catherine, 
?aincle  Cécilia,  saincte  Valeria;  et 
généralement  a  tousles  saincls  elà 
toutas  las  sainctas,  angeux,  archan- 
geux  et  patriacheys,  evangelisles, 
apostous,  confessours,  prophelas, 
ignocens  et  vergenas  de  paradis; 
aux  quaulx  et  a  laqualas  humble- 
ment requeris  que  me  sian  advo- 
rals  et  advocadas  envers  nostre 
Seigneur  Dieu  Jésus-Christ,  et  a  sa 
miséricorde,  et  que  Jour  plaisso  de 
mettre  en  advode,  et  govidnar  ma 
paulre  arma  a  l'oure  de  mon  trépas. 

Item,  —  Vuelh  et  ordonne,  que 
la  sépulture  de  la  paubre  c'har- 
ronhe  de  mon  corps  sie  en  la 
église  de  monsieur  saint  Peix  de 
Thoront,  davant  l'oustardde  mon- 
seignour  saint  Marsau,  ou  est  se- 
puiturat  monseigneur  Louis  Fau- 
con, chivalier,  mon  pair,  auquau 
nostre  Seigneur  face  marse  et 
miséricorde  et  a  moux  prédéces- 
seurs. 

Item.  —  Vuelh  et  ordene  que  si 
lou  cas  avet  que  Dieu  permette 
que  you  trapasse  a  la  guerre  ou 
ailleurs  loin,  per  que  mon  corps 
ne  peucheestrebounemanl  portât 
en  ladiche  esglieso  do  Thoron,  que 
quand  mon  corps  siro  detiunt,  que 
l'on  fasse  coment  que  sla  a  porter 
moux  hos  en  ladiche  esglieso  de 
Thoron  per  mo  héritier  ci  des- 


Dieu  le  Père  tout  puissant,  du  Fils 
et  du  Saint  Esprit,  qui  est  la 
sainte  Trinité,  les  trois  en  une 
personne  ;  et  la  bénie  vierge  Marie, 
précieuse  pucelle  Marie,  sa  bénie 
mère,  et  à  Monsieur  saint  Michel. 
Tarchange;  à  M.  saint  Gabriel, 
range;  à  mon  bon  ange  qui  me 
garde;  à  M.  saint  Jean-Baptiste, 
saint  Pierre,  saint  Paul,  saint  An- 
dré, saint  Martial,  saint  LéonanK 
saint  Antoine,  saint Eulrope,  saint 
Sébastien,  saint  Christophe  ;  et  à 
Mesdames  sainte  Anne,  sainte 
Marie-Madeleine, sainte  Catherine, 
sainte  Cécile,  sainte  Valérie  etgéné- 
ralement  à  tous  les  saints  et  a  tou- 
tes les  saintes, anges, archangesel 
patriarches,  évangôlistes,  apôtres, 
confesseurs,  prophètes,  innocents 
et  vierges  du  paradis;  auxquels  et 
auxquelles  je  demande  humble- 
ment qu'ils  me  servent  d'avocats 
et  d'avocates  auprès  de  notre  Sei- 
gneur Dieu  Jésus-Christ,  et  à  sa 
miséricorde,  et  qu'il  leur  plaise  de 
me  mettre  parmi  ceux  qu'il  recon- 
naît, et  garder  ma  pauvre  âme  à 
l'heure  de  mon  trépas. 

Item.  —  Veux  et  ordonne  que  la 
sépulture  de  la  pourilure  de  mon 
corps  soit  en  l'église  de  Monsieur 
saint  Pierre  de  Thouron,  devant 
l'autel  de  monseigneur  saint  Mar- 
tial, où  est  enseveli  monseigneur 
Louis  Faulcon,  chevalier,  mon 
père,  auquel  notre  Seigneur  fasse 
merci  et  miséricorde  et  à  mes  pré- 
décesseurs. 

Item.  —  Veux  et  ordonne  que  si 
le  cas  arrive  que  Dieu  .permette 
que  je  meure  à  la  guerre  ou  ail- 
huirs  au  loin,  et  que  pour  cela 
je  ne  puisse  être  aisément  porté 
en  ladite  église  d«»  Thouron.  que. 
lorsque  mon  corps  sera  détruit, 
l'on  fasse  alors  de  manière  à 
porter  mes  os  dans  ladile  église 
de  Thouron  par  les  soins  de  mon 


MONOGRAPHIE!  DE  LA  COMMUNE  DE  THOURON. 


5fl 


soubs  nommât,  qui  sero  seignour 
de  Thoron. 

/fem.— Vuelh  et  ordene  et  com- 
mande à  mon  héritier  qui  sera 
dessoubs  nommât  per  estre  sei- 
gnour de  Thoron,  et  a  moux  exe- 
qutours,  que  ci  ampres  seranl 
nommas,  que  tous  moux  debtes 
sian  payas,  amendas  et  restituas 
plainement. 

Item,  •—  Vuelh  et  ordene  que,  le 
jour  que  mon  corps  sera  sépul  • 
lurat,  que  y  sians  covidas  trente 
et  un  preslre  a  disre  messas,  pre- 
gar  Dieu  per  mon  arme  et  de 
moux  parens  ;  et  que  chalcun  aye 
treys  soûls,  et  equillz  qui  dirant 
messas  en  chants  qualtre  soulx;  et 
a  tous  lour  dinar  ;  et  que  y  aye 
Ireze  paubres  a  qui  Ton  donne  a 
chascun  lo  drapl  de  une  raube 
bonne  et  bon  drapt,  et  Ireze  tor- 
chas de  sero  que  tendranslousdicts 
fiaubres,  chascune  torche  de  treys 
ioras  de  sero;  lasqualas  demora- 
rans  en  service  de  ladicie  esglieso, 
et  autant  a  la  septene  de  toutas 
chausas;  et  autant  au  bout  de  l'an 
de  prestres;  et  deprestres  que  y 
en  aye  cinquante  qui  ayant  pareil- 
lement come  sur  eis  dict  de  rau- 
bas;  aultres  Ireze  paubres  a 
ladicte  septene  et  au  bout  de 
Tan;  mas  qui  ne  pourrie  à  la 
septene  que  remuden  lou  jour 
un  meys  ampres,  et  que  au  bout 
de  Fannade  y  aye  haulmone  cre- 
dade,  et  a  tous  aquils  qui  y 
voldriant  venir  avant  un  liart  de 
treys  deiniers  et  lour  refecliou,  et 
a  chacun  jour  de  ladicie  septene  et 
bout  de  l'an,  y  aye  autant  de  tor- 
chas comme  sus'  en  dicl,  et  de 
chacuns  treys  lieras,  et  aullras 
douze  torchas  de  chacune  une 
lioreetdemie,  et  l'aullre luminaire 
nécessaire.  Et  que  lout  demoure 
au  service  de  ladicie  ('irlieso  et  de 
le  chapelo  (lelVlap:delaine. 

Item,  —  Vuelh,  ordene  el  co- 


héritier   ci-dessous   nommé,    qui 
sera  seigneur  de  Thouron. 

Item,  —  Veux,  et  ordonne  et 
commande  à  mon  héritier  qui  sera 
ci-dessous  nommé  pour  être  sei- 
gneur de  Thouron  et  a  mes  exé- 
cuteurs qui  ri-après  seront  nom- 
més, que  toutes  mes  dettes  soient 
payées,  amendées  et  restituées 
entièrement. 

Item,  —  Veux  et  ordonne  que, 
le  jour  où  mon  corps  sera  ense- 
veli, on  invite  trente  et  un  prêtres 
pour  dire  la  messe,  prier  Dieu 
pour  mon  âme  et  celles  de  mes 
parents;  el  que  chacun  ait  trois 
sous,  et  ceux  qui  diront  la  messe 
chantée  quatre  sous;  et  à  tous 
leur  dîner;  et  qu'il  y  ait  treize 
pauvres,  auxquels  on  "donnera  à 
chacun  le  drap  d'une  belle  robe  et 
de  bon  drap,  et  treize  torches  de 
cire  qui  resteront  pour  le  service 
de  ladite  église,  et  autant  de  toutes 
choses  à  la  septaine  ;  et  autant  de 
prêtres  au  bout  de  l'an  ;  et  des 

I  prêtres  qu'il  y  en  ait  cinquante  qui 
aient  pareillementcomme  il  est  dit 

I  ci-dessus,  pour  les  robes,  autres 
treize  pauvres  à  la  dite  septaine 
(itau  bout  de  l'an;  mais  ceux  qui 
ne  le  pourront  à  la  septaine,  qu'ils 
viennent  un  mois  après  et  qu'au 
bout  de  l'an  il  y  ait  aumône  criée 
et  que  ceux  qui  voudront  y  venir 
auront  un  liard  de  trois  deniers 
et  leurs  repas,  et  à  chaque  jour  de 
la  dite  septaine  et  bout  de  l'an, 
qu'il  yailaulantdc  torches  comme 
il  est  dit  ci-dessus,  et  chacune  de 
trois  livres,  et  autres  douze  tor- 
ches de  chacune  une  livre  et 
denue,  et  l'autre  luminaire  néces- 
saire. Et  que  tout  demeure  pour  le 
service  de  la  dite  église  et  du  cha- 
pelain de  Madeleine. 

Item.  -  Veux  ordonne  el  com- 
mande que  au  bout  de  l'an,  et 
pareillement  i\  la  septaine  tous  mes 


$13 


SOCIKTR   ARCHEOLOGIQUE    LT    HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 


mande  que,  au  bout  de  Tan,  et 
mais  qui  porie  à  la  septene,  lous 
raoux  homes  et  vesis  siant  covidas 
a  venir  a  mas  nopsas  a  laquaux 
prege  a  lous  que  fassian  bonne 
charo  ;  et  que  aqui  l'on  ave  un 
religieu  qui  généralement,  de  par 
me,  requero  pardon  au  poble  qui 
aqui  syro,  et  a  tousaultres,  de  ce 
que  non  loux  aye  adjudasen  lour 
nécessitas,  mas  lour  ay  demandât 
Ion  lour etfaist  demandar,  preys  et 
fait  prendre  injustemant;  en  non 
ay  point  manlegut  jusiice,  el  que 
point  n*ay  faict  mon  devoir  enver 
Ils;  et  que  lour  plesso  de  me  par- 
donar  et  pregar  notre  Seigneur 
per  mon  arme  ;  et  que  me  donnen 
chiecung  cinq  Paternoster  et  sept 
Ave  Maria.  El  fasse  assaberàtous 
que  aquils  que  ne  me  vouldrian 
pardonnar  que  lour  semblaire  que 
me  ou  mon  dici  paire  lour  (an- 
guessiam  ton,   sie  herilages  ou 
aultras  chausas,   que  vuelhan  a 
mon  dict  héritier  qui  sero  seignour 
de  Thoront,  el   expressément  à 
mous    exequlours.   Ions    qua'ilx 
veilh  que  inconlinent  salisfacion 
pianierement  so  que  aquils  voul- 
drian  juras  et  meltre   sur   lour 
arme,  que   lour  leniens  tort,  q«ii 
justement     el    inconlinent    non 
monslrari  lo  contrarie  per  gens  de 
be,  sens  me  alegear  nv  mon   dict 
pairs  nostras  lettras  ni  pocessious. 
Item.  —  Vuelh  et  ordene  que 
despeis  lo  jour  de  mon  Irepas  jus- 
quesau  bout  de  l'an,  que  l'on  me 
fasse  dire  chacun  jour,  durant  tout 
Tan,  une  messoaudict  autardavant 
ma  sépulture  nonobstant  tous  loux 
aijtrcys  services  dessus  per  me 
commandas:    ont  en  ave    de  la 
saincte  Trinilal,  de  Notre-Dame,  et 
en    l'honneur    deux    saincls    et 
sainctas  dessus  nommas,  et  mayde 
las   douas  pois  de  requiem,  en 
remissieu  de  tous  péchas  et  de- 
falitnenlsde  mondicl paire,  parens 
et  beifuciours. 


hommes  et  voisins  soient  invités  à 
venir  à  mes  noces  pour  lesquelles 
je  demande  à  tous  qu'on  fasse 
bonne  chère  et  qu'il  y  ait  un  reli- 
gieux qui  généralement  et  de  ma 
part  demandera  pardon  au  peuple 
qui  y  sera,  et  à  tous  les  autres  de 
ce  que  je  ne  leur  ai  pas  porié 
secours  dans  leurs  nécessites,  si 
je  leur  ai  demandé  et  fait  demander 
ce  qui  leur  appartenait,  pris  et  fait 
prendre  injustement:  el  ne  leur  ai 
point  rendu  justice  et  ai  manqué  à 
mon  devoir  envers  eux  ;  et  qu'il 
leur  plaise  de  me  pardonner  et 
prier  notre  Seigneur  pour  mon 
âme  et  que  chacun  me  dise  cinq 
Pater  noster  et  sept  Ave  Maria.  El 
qu'il  fasse  savoir  à  tous  ceux  qui 
ne  voudraient  pas  me  pardonner, 
qui  croiraient  que  moi  ou  mon 
père  leur  aurions  fait  tort  soit 
pour  des  héritages  ou  pour  autres 
choses,  qu'ils  s'adressent  à  mon 
dit  héritier  qui  sera  seigneur  de 
Thouron,  et  expressément  à  mes 
exécuteurs,  lesquels,  selon  ma 
volonté,  satisferont  immédiate- 
ment cl  entièrement  ceux  qui  vou- 
dront jurer  et  mettre  sur  leur 
âme  que  nous  leur  avons  fait  tort, 
et  qui  avec  justice  et  immédiate- 
ment ne  seront  pas  contredits  par 
des  gens  de  bien,  sans  alléguer 
pour  moi  ou  pour  mon  dit  père 
nos  titres  et  possessions. 

Item.  —  Veux  et  ordonne  que 
depuis  le  jour  de  ma  mort  jus- 
qu'au bout  de  l'an  l'on  me  fasse 
dire  chaque  jour,  durant  toute 
l'année,  une  messe  à  Taulel  devant 
mon  lombeau,  nonobstant  lous  les 
autresservices  que  j'ai  commandés 
ci-dessus  ;  qu'il  y  en  ait  de  la 
Sainte-ïrinilé,  de  Notre-Dame  el 
en  riionueur  de  tous  les  saints  et 
saintes  ci-dessus  nommés,  el  même 
deux  messes  de  requiem,  pour  la 
rémission  de  tous  les  péchés  et 
des  fautes  de  mondit  père,  parenls 
et  bienfaiteurs. 


MONOGRAPHIK   DE   LA   CÛMIIUNR   DR  THOURON. 


ÔI3 


Item. — En  remissieu  deu  defail-  ] 
limens  et  rodemptionde  las  armas 
de  mondici  pay  ei  may,  de  tous 
mouxparens,  parenlas,  beifactours 
et  que  poirien  tenir  tort,  et  per  la 
mie  paubre  arme,  you  ordene, 
constitui  et  funde  perpetualement 
et  a  tousjours,  mays  uno  messo  lo 
sepmaine,  tous  lous  dilus,  de 
requiem  en  ladicte  egliesode  Tho- 
ront,  audict  outar  de  nostras  sepul- 
turas  ;  laquale  messo  fonde  de  cent 
soubs  monede  corrent  ;  loux  quaulx 
assigne  saubre  Tostan  noble  de 
Vileta  sos  tengudas  oportenuras 
cinquante  soux,  trenlo  soubs  sobre 
rerilage  deu  Mas  que  tet  Peyre 
deu  Mas  et  sas  eparienenses  ;  et 
douze  soubs  sobre  la  Valola  et  la 
Mazeyro,  sobre  soqueen  teSymon 
de  la  Valeta  ;  a  payar  a  chacun  an 
lous  dict  cenls  soubs,  au  vicari 
que  diroladicte  messo,  soubre  los 
héritages  susdicts;  et  vuelh  que 
mosscu  Marsan  de  Sainl-Morasprc- 
stre,  si  es  en  vite  et  vertus,  Paye 
et  la  sierve  tant  que  porro;  en 
après  que  sio  a  donar  a  mon 
héritier  et  successeur  a  quieu  que 
sero  seigneur  de  Thoron  a  tou- 
jours mays,  et  vuelh  et  ordone 
que  touchant  toujours  mays  la- 
dicte rende  bono  et  valable,  seis  en 
re  faire  perdre  au  prcslre  qui  ser- 
viro,  la  somme  de  cent  soul)s;  et, 
en  cas  que  per  guerras,  ou  morta- 
iitas  ou  aultremenl  ladicte  rende 
ne  se  porrie  be  pegar,  yeu  la  assi- 
gne perpetualement  sur  Tostar  et 
seigneurie  de  Thorontetsas  apar- 
lenensas,ou  que  toujours  mais  en 
aultres  bons  leucs  Ton  la  assigne 
et  teno  Ton  bonne  a  perpeluole- 
ment  franche  et  be  payade  au 
vicari  et  prestre  qui  ser\iro  ;  et  en 
défaut  de  payemen,  tousjours  la 
assigne  e  perpetuelitat  en  ladict 
maison  de  Thoron,  et  que  ave  a 
toujours  niays,  et  quieu  qui  sero 
seigneur  de  Thoron  a  tener  lou  dict 


Item.  — En  rémission  des  fautes 
et  pour  la  rédemption  des  âmes 
de  mon  père  et  de  ma  mère, 
de  tous  mes  parents,  parentes, 
bienfaiteurs  etqui  pourraient  avoir 
quelques  torts  et  pour  ma  pauvre 
âme,  j'ordonne,  constitue  et  fonde 
perpétuellement  et  pour  toujours, 
une  messe  de  requiem  chaque 
semaine,  lous  les  lundis,  en  l'église 
de  Thouron,à  l'autel  de  nos  sépul- 
tures, laquelle  meî^se  je  fonde  de 
cent  sous,  monnaie  courante,  que 
j'assigne  sur  la  maison  noble  de 
Vilaie  et  ses  dépendances  pour 
cinquante  sous,  trente  sous  sur 
l'héritage  du  Mas,  que  lient  Pierre 
du  Mas  et  sur  ses  dépendances, 
et  douze  sous  sur  la  Valete  et  la 
Mazeyre,  sur  ce  qu'en  lient  Simon 
de  la  Valete;  à  payer  chaque 
année  au  vicaire  qui  dira  ladite 
messe,  les  cent  sous  pris  sur  les 
héritages  susdits;  et  je  veux  que 
Monsieur  Martial  de  Sainl-Moras, 
prêtre,  s'il  est  en  vie  et  en  santé.  Tait 
et  la  conserve  tant  quil  pourra; 
après  elle  sera  à  donner  par  mon 
héritier  et  successeur  qui  serasei- 
gneurdeThouronetloujoursainsi, 
je  veux  et  ordonne  que  tou- 
jours cette  rente  bonne  et  valable 
soit  pour  le  prêtre  qui  servira 
cette  fondation,  et  sans  rien 
retrancher  de  la  somme  de  cent 
sous,  et  au  cas  où  par  suite  de 
guerre  ou  de  mortalité,  ou  autre- 
ment, cette  rente  ne  pourrait  être 
payée,  je  l'assigne  pe  petuelle- 
ment  sur  le  château  et  la  seigneu- 
rie de  Thouron  el  sur  ses  dépen- 
dances, ou  (|ue  pour  toujours  elle 
soit  assignée  sur  quelque  autre 
bon  lieu,  et  qu'on  la  tienne  bonne 
et  perpétuellement  franche,  et 
qu'elle  soit  bien  payée  au  vicaire 
et  prélre  qui  servira  celle  fonda- 
tion; et  a  défaut  de  paiement  je 
l'assigne  pour  toujours  et  a  perpé- 
tuité sur  ladite  maison  de  Thou- 


81i 


SOCIRtE   ARCHÉOLOGIQUE  Et    BISTORlQUE    DU    LlttOUSlPC. 


heritar(outar]  devant  nostras  dicts 
sepulturas,  be  que  et  ornât  de 
lior  vestemens,  en  calice,  trallas, 
luminario  et  aultras  chausas  ne- 
cessarias 

Fact  lo  xxviii*  jour  de  mars  Tan 
mil  iiiicLxxv. 


ron  et  qu'il  en  soit  ainsi  toujours 
dans  la  suite;  et  celui  qui  sera 
seigneur  de  Thouron  et  tiendra 
l'aulel  devant  nos  sépultures,  le 
pourvoira  des  ornements,  calice, 
nappes,  luminaire  et  autres  chose? 

nécessaires 

Fait  le  xxvni*  jour  de  mars  de 
l'an  mil  quatre  cent  soixante- 
quinze. 


GRANDE  CHASSE  DE  GRANDMONT  DONNEE  A  TDOURON. 

Le  9  septembre  1790,  je  me  suis  rendu  à  Limoges  accompagné 
du  sieur  Martial  Merliadon,  officier  municipal  et  électeur  du  canlon 
de  Compreignac,  habitant  le  présent  bourg  de  Thouron,  et  de  là 
chez  M.  Legros,  vicaire  de  Sainl-MartiaL  qui  a  eu  la  bonté  de  nous 
accompagner  le  lendemain  à  une  des  salles  de  Tévéché,  où  élanl,  il 
m'a  remis  les  reliques  des  saints,  avec  une  chasse,  comme  il  est 
dit  au  procès-verbal,  déposé,  ainsi  que  les  lettres  et  autres  pièces  à 
ce  concernant,  dans  les  papiers  de  la  cure.  Le  onze  des  dits  mois  et 
an  que  dessus,  les  susdites  reliques  ont  été  conduites  par  moi  et 
déposées  dans  la  chapelle  Saint-Roch  en  cette  paroisse  ;  d'où  le  len- 
demain elles  ont  été  transportées  en  grande  célébrité  en  Féglise 
paroissiale,  après  vespres.  Le  jour  fixe  annuel  de  leur  fête,  vénéra- 
lion  et  procession,  est  aussi  indiqué  dans  les  susdits  papiers  déposés 
parmi  ceux  de  la  cure.  En  foi  de  tout  quoy  nous  avons  signé  pour 
servir  et  valoir  en  toute  vérité.  —  A.  E.  Laurier,  prêtre,  curé. 

A  Thouron,  le  H  septembre  1790. 


A.  Lecler. 


ÉTUDE  BIOGRAPHIQUE 


SUR 


aUILLu^UMJE    LAMY 


Patriarche  de  Jérusalem 


I. 

Guillaume  Lamy,  évéque  de  Charlres  et  patriarche  de  Jérusalem, 
mort  en  odeur  de  sainteté  en  1360,  occupe  un  rang  distingué  parmi 
les  hommes  illustres  du  Limousin.  Ce  prélat,  que  les  écrivains  de 
notre  province  honorent  du  titre  de  bienheureux,  et  qui  a  joué  un 
rôle  important  dans  plusieurs  événements  historiques,  n'a  pas  été 
jusqu'à  présent  l'objet  d'une  étude  particulière.  Nous  allons  essayer 
de  combler  cette  lacune. 

La  vie  de  Guillaume  Lamy,  telle  qu'on  la  trouve  dans  le  chanoine 
CoUin  (1)  et  dans  le  P.  Bonaventure  (2),  renferme  sans  doute 
quelques  détails  authentiques,  mais  ne  mérite  pas  grande  confiance. 
L'auteur  de  cette  vie  a  écrit  un  éloge  plutôt  qu'une  histoire;  les 
détails  inexacts  qui  abondent  dans  son  récit  enlèvent  tout  crédit  à  ce 
qu'il  peut  dire  de  vrai;  c'est  ainsi  qu'il  représente  Guillaume  Lamy 
comme  remplissant  les  fonctions  pastorales  dans  le  diocèse  de 
Chartres,  alors  que  ce  prélat,  qui  résidait  à  la  cour  des  papes,  était 
employé  à  des  missions  diplomatiques. 

Le  chanoine  Collin  et  le  P.  Bonaventure  ont  puisé  les  détails 
qu'ils  rapportent  dans  un  ouvrage  que  nous  n'avons  pu  nous  pro- 
curer, mais  que  nous  avons  vu  indiqué  dans  la  Bibliothèque  Histo- 
rique du  P.  Lelong,  et  dont  voici  le  titre  : 

«  Recueil  de  la  Vie  et  des  miracles  du  bienheureux  Lamy,  évéque 
de  Chartres  et  patriarche  de  Jérusalem^  mort  en  1560^  par  Luc 
Lamy  y  vicaire  de  la  vicairie  fondée  par  le  dit  patriarche.  —  Limoges, 
Chapoulaud,  in-8«,  sans  date  »  (3). 

(1)  Vies  des  Saints  du  Limousin^  1672,  p.  2*4. 

(2)  Histoire  de  Saint- Martial,  1. 111,  Annales  du  Limousin,  1685,  p.  G43. 

(3)  Bibliothèque  historique^  édit.  Fontelte,  t.  I,  n°  9385. 


^16  SOCifcTR  AllCH^.OLOGlQCB  RT  mSTORIQtJR  DU  LllIOtJSl?^. 

»  Cet  éloge  n'est  que  de  sept  pages  (1). 

Cet  ouvrage  a  dû  être  publié  vers  l'an  1665  (2). 

Si  nous  en  croyons  cette  vie  légendaire,  Guillaume  Lamy  naquii 
à  Limoges,  Tau  1303;  il  était  lils  de  Jean  Lamy,  bourgeois  de 
celle  ville,  et  de  Jeanne  de  Murmans. 

Dès  son  enfance,  Guillaume  Lamy  donna  des  présages  de  ce 
qu'il  devait  être  un  jour;  il  assemblait  autour  de  lui  nombre  de 
petits  enfants,  qu'il  invitait  à  la  prière  et  auxquels  il  faisait 
de  petits  sermons;  puis  étant  assez  avancé  dans  la  langue  latine, il 
passa  en  philosophie;  et,  ayant  fait  connaître  à  ses  parents  qu'il  as- 
pirait au  sacerdoce,  on  lui  permit  d'étudier  la  théologie. 

Après  la  mort  de  son  père,  il  fui  envoyé  à  l'Université  de  Paris 
où  il  lit  de  grands  progrès  dans  l'étude  de  la  théologie  et  du  droii- 
canon.  Etant  parti  de  Paris  pour  rentrer  en  Limousin,  il  eut  révé- 
lation, près  d'Orléans,  de  s'en  aller  au  pays  chartrain,  oiu  par  ses 
prédications  et  l'exemple  de  ses  vertus,  il  produisit  des  fruits  mer- 
veilleux. Les  habitants  de  Chartres,  ayant  perdu  leur  pasteur,  firent 
instance  auprès  de  Clément  VI  afin  d'avoir  Guillaume  Lamy  pour 
évéque.  Le  pape,  ne  pouvant  leur  refuser  cette  faveur,  ordonna  à 
Guillaume  de  consentir  à  cette  élection.  Forcé  de  subir  le  joug, 
Lamy  remplit  tous  les  devoirs  d'un  évoque  avec  un  zèle  admirable. 
A  cette  occasion,  l'auteur  de  sa  vie  donne,  sur  ses  exercices  de 
piété  et  ses  pratiques  de  mortification,  des  détails  qu'il  serait  trop 
long  d'énumérer. 

Guillaume  Lamy  avait  environ  quarante-huit  ans  lorsque  le 
pape  Clément  VI,  étant  venu  à  mourir  (1332),  eut  pour  successeur 
Innocent  VI,  de  même  nation  que  lui.  Ce  pape,  connaissant  les  mé- 
rites de  l'ôvéque  de  Chartres,  l'appela  à  Avignon  et  lui  offrit  le 
chapeau  de  cardinal.  Guillaume  refusa  cette  dignité  «  parce  qu\ile 
avait  trop  d'éclat  et  trop  peu  de  travail  pour  Notre-Seigneur  ». 
Alors  le  pape  le  pressa  d'accepter  le  patriarchat  de  Jérusalem  (3\ 
dont  le  siège  était  alors  à  Nicosie,  une  des  plus  belles  villes  du 
royaume  de  Chypre. 

Guillaume  accepta  cette  dignité,  et  se  mettant  en  route,  il  arriva 
à  Nicosie  où  il  s'occupa  avec  zèle  de  tous  les  devoirs  de  sa  charge 
pastorale.  Parmi  les  bonnes  œuvres  qu'il  énumère,  fauteur  de  sa 


(I)  Bibliothèque  historique,  supplément, l.  IV. 

(i)  «  Sa  Vie,  imprimée  depuis  peu,  qai  dAcrit  ses  vertus  el  ses  miracles, 
m'exempte  cfen  parler  plus  au  long  ».  (P.  Bonaventcrb,  Histoire  ée  saint 
Martial,  t.  II,  1672,  p.  i35). 

(3)  C'est  le  pape  Clément  VI,  —  el  non  le  pape  lunouccnt  Vi  —  qni 
nomma  Guillaume  Lamy  patriarche  de  Jérusalem,  en  1349. 


ÉTODK   BIOGRAPBIQUR   ^UR   GUlLLAtlHR   LAMY.  M 7 

vie  dit  que  Guillaiirne  Lamy  envoyait  à  son  frère  Ez^chias  une 
grande  quantité  de  billettes  d'or  pour  les  réduire  en  monnaie,  afin 
(le  marier  beaucoup  de  pauvres  (iîles,  notamment  àLimogcs,  lieu  de 
sa  naissance. 

Après  que  Guillaume  eut  passé  sept  ans  à  Nicosie,  le  pape  In- 
nocent VI,  désirant  le  voir,  l'appela  auprès  de  lui  pour  appren- 
dre de  sa  bouche  l'état  de  son  Eglise  de  Syrie  et  de  Jérusalem. 
Guillaume  obéit,  se  rendit  à  Avignon,  et  après  avoir  rendu  compte 
au  pape  des  affaires  de  son  patriarchat  et  reçu  sa  bénédiction,  il 
voulut  voir  ses  parents  à  Limoges,  avant  de  s'en  retourner  dans  son 
Kglise  «  pour  y  mourir  comme  en  un  lit  de  fleurs  ». 

Mais,  arrivé  à  Montpellier,  il  fut  pris  d'une  fièvre  violente  et 
connaissant  que  Dieu  voulait  abréger  son  voyage,  il  lit  son  testa- 
ment et  fonda,  des  biens  de  son  patrimoine,  la  vicairic  qui  porte 
son  nom  dans  la  chapelle  de  saint  Thomas,  située  dans  la  cathé- 
drale de  Limoges.  Puis  son  âme  s'envola  vers  le  ciel,  le  9"  jour  de 
juin  1360(1). 

Voici  la  légende  :  nous  allons  voir  qu'elle  diffère  un  peu  de  l'his- 
toire. Mais  avant  d'aborder  notre  sujet,  examinons  deux  qneslions  : 
!«*  quelle  est  l'année  de  la  naissance  de  Guillaume  Lamy  ?  2°  quelle 
était  l'orthographe  de  son  nom  en  langue  vulgaire? 

1**  D'après  sa  vie  légendaire,  composée  vers  1665  par  Luc  Lamy 
et  reproduite  par  le  chanoine  Collin  et  le  P.  Bonaventure,  Guil- 
laume serait  né  en  1305  et  serait  mort,  à  l'âge  de  cinquante-cinq 
ans,  en  1360  ;  mais  celte  vie  ren  ferme  tant  d'anachronismi's,  qu'elle 
ne  mérite  pas  grande  confiance. 

Le  docteur  Pilton,  dans  ses  Annales  de  la  Sainte  Eglis!»  (VAix, 
publiées  en  1668,  dit  que  Guillaume  mourut  en  1360,  à  l'âge  de 
soixante-quatre  ans,  ce  qui  porterait  sa  naissance  à  fan  1296. 

D'après  un  document  du  xiv«  siècle,  le  Catalogue  des  êrégues  de 
Chartres  (2),  Guillaume  aurait  été  nommé  patriarche  de  Jérusalem 
Tan  1349,  à  l'âge  de  cinquante  ans,  anno  quinquagesimo,  ce  qui 
porterait  sa  naissance  à  l'an  1299;  cette  dernière  date  nous  paraît 
la  plus  probable,  puisqu'elle  s'appuie  sur  un  document  conlempo- 
rain. 

2*  Quelle  était  l'orthographe  de  son  nom  en  langue  vulgaire? 

Les  écrivains  étrangers  qui  ont  parlé  de  Guillaume  Lamy  fap- 

(I)  M.  L'abbé  Lecler,  dans  sa  Généalogie  de  la  famille  Lamy  de  la 
Cfcapc//c  (Î873\  a  donné  la  vie  du  bienhejreux  Latny  d'après  le  chanoiin! 
Collin  el  le  P.  Bonavenlurc. 

(i)  Cilé  par  Baluze,  Vltœ papar.  Aoenion  .  t.  1,  col.  011.  —  Cartulaire 
de  Notre-Dame  de  Chartresy  I8C5,  l.  I,  p.  28, 

j.  XL.  33 


$18  SOCIÉTR   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

pellent  Guillaume  Amici;  c'était  la  coutume  au  moyen  âge,  quand 
on  traduisait  le  nom  de  famille  en  latin,  de  mettre  ce  nom  au  gé- 
nitif. —  Mais  une  question  se  présente  :  le  nom  du  patriardie 
était-il  Ami  ou  Lami? 

Dans  la  séance  de  la  Sorbonne  où  nous  avons  lu  notre  Mémoire 
sur  le  patriarche  (8  juin  1892),  M.  Antoine  Thomas,  chargé  de 
cours  à  laFaculté  des  Lettres,  signalait  dans  un  document  du  25  no- 
vembre 1325,  conservé  aux  Archives  nationales,  la  meDtion  de 
«  Guillaume  Ami,  procureurde  révérend  père  l'esvéque  de  Limoges  ». 
qui,  d'après  lui,  devait  être  parent  du  patriarche  de  Jérusalem. 

Il  serait  possible  que  ce  fût  lui-même.  Le  procureur  de  révéque 
de  Limoges  devait  être  un  ecclésiastique.  Guillaume  ne  devait  avoir 
que  vingt-six  ans  ou  environ,  mais  Hélie  Talleyrand  de  Périgoni, 
évéque  élu  de  Limoges  en  1324,  n'en  avait  que  vingl-cinq.  L'ortho- 
graphe primitive  de  son  nom  serait  donc  Guillaume  Ami.  Ce>i 
ainsi  que  rappellent  plusieurs  écrivains  du  pays  de  Chartres.  Le 
P.  Bonaventure-Saint-Amable  écrit  Guillaume  L'Ami  avec  une  apos- 
trophe 

Les  héritiers  et  neveux  du  patriarche,  écrivant  le  nom  de  Laray 
sans  apostrophe,  comme  on  le  voit  par  une  inscription  qui  élail 
placée  près  de  son  tombeau  (1),  nous  avons  adopté  celte  orthographe 
qui  date  au  moins  de  quatre  siècles. 


II 


I.  —  D'après  un  ancien  calendrier  de  la  Cathédrale  de  Limoges, 
Guillaume  Lamy  naquit  d'une  famille  d'honnêtes  bourgeois.  Quelques 
écrivains  étrangers  le  font  naître  d'une  illustre  famille  :  c'est  ainsi 
que  Souchet,  chanoine  de  Chartres,  prétend  qu'il  était  oncle  d'El- 
zéar  de  Sabran,  Tépoux  de  sainte  Delphine  et  qu'il  fut  son  premier 
maître  (2).  La  maison  où  il  naquit  était  située  dans  la  Château  de 
Limoges  (3),  à  gauche  en  descendant  dans  le  portail  Imberl,  de 
l'autre  côté  du  couvent  des  Sœurs  de  la  Croix.  Au  xvn**  siècle,  et. 


(1)  Cathédrale  de  Limoges^  1883,  p.  940. 

(î)  Souchet, t.  III,  p.  179.  —  Souchet  est  né  à  Chartres  vers  1590.  —  Son 
Histoire  de  Chartres  s'arrôte  en  Ï620.  Elle  a  été  publiée  en  quatre  gros 
volumes  en  1876  et  1877  parla  Société  archéologique  de  Chartres.  {Note 
de  M.  le  chanoine  Goussard). 

(3)  Au  moyen  âge,  il  y  avait  à  Limoges  ileux  villes,  toutes  les  deux  envi- 
ronnées de  murailles  :  la  Cité,  bâtie  autour  de  la  Cathédrale,  et  le  Ckdttau, 
({ui  devait  son  origine  au  monastère  de  Saint-Martial. 


KTUDE  BrOÛRAPHIOUK  SCR   GUILLAUME   LAMY.  fttd 

croyons  nous,  jusqu'à  la  Révolution,  on  voyait,  devant  cette 
maison,  Testatue  {sic)  du  patriarche  (1). 

Quelles  sont  les  dignités  ecclésiastiques  que  posséda  Guillaume 
Lamy  avant  d'être  promu  à  Tépiscopat?  nous  n'avons  sur  ce  point 
que  des  données  vagues  et incertaini3S.  L'abbé  Devoyon,  dans  l'épi- 
taphe  du  prélat  qu'il  a  composée,  dit  qu'il  avait  été  d'abord  cha- 
noine de  Limoges.  Quelques  écrivains,  tels  que  Souchet,  que  nous 
avons  déjà  cité,  et  Doyen,  dans  son  histoire  de  YEglise  des  Chartres^ 
disent  qu'il  avait  été  abbé  de  Saint- Victor  de  Marseille  (2)  :  nous 
n'avons  pas  trouvé  son  nom  dans  la  liste  des  abbés  de  Saint- Victor 
publiée  dans  IcGallia  Christiana. 

IL  —  D'après  un  ancien  document  de  l'Eglise  de  Chartres,  Guil- 
laume Lamy,  homme  d'une  science  profonde,  d'une  grande  probité 
et  de  mœurs  exemplaires,  était /"amt/ter  de  Pierre  Roger,  cardinal 
archevêque  de  Rouen,  c'est-à-dire  qu'il  faisait  partie  de  sa  maison 
ecclésiastique  (3).  Pierre  Roger,  qui  était  né  en  Limousin,  et  qui 
devait  être  pape  sous  le  nom  de  Clément  VI,  fit  nommer  Guillaume 
Lamy  auditeur  de  la  Chambre  apostolique,  c'est-à-dire  auditeur  de 
Rote  (4),  comme  on  dit  aujourd'hui.  Cette  fonction,  qui  suppose  de 
grandes  connaissances  en  théologie  e(  en  droit-canon,  rattachait 
à  la  cour  pontificale.  Par  suite  de  la  même  recommandation,  Guil- 
laume Lamy  fut  promu,  en  1341,  à  l'évêché  d'Apt  en  Provence;  il 
prêta  serment  le  28  octobre  de  cette  année  (5).  C'était  sous  le  ponti- 
ficat de  Benoit  XII. 

Depuis  quelques  années,  Philippe  VI,  roi  de  France,  et 
Edouard  III,  roi  d'Angleterre,  étaient  en  guerre  ouverte.  Benoit XII 
envoya  vers  les  souverains  deux  cardinaux  pour  les  engager  à 
traiter  de  la  paix  ou  pour  convenir  d'une  trêve  :  ce  fut  sans  succès (6). 
Ce  pape  mourut  le  25  avril  1342.  Comme  Guillaume  Lamy  résidait 
à  la  cour  pontificale  d'Avignon,  les  cardinaux  l'envoyèrent  en 


(I)  Inscripiioi)  de  la  chapelle  de  saint  Thomas,  dans  la  Cathédrale  de 
Limoges.  (Voir  noire  Histoire  de  cette  cathédrale,  2" édition,  p.  240). 

C3)  Doyen,  Histoire  delà  oUle  de  Chartres^  1780,  p.  160.  —  Souchkt, 
Histoire  de  Chartres,  l.  III,  p.  179. 

(3)  Vir  summœ  scienlix,  probilatiset  morum.  Hic  fuil  familiaris  Dumini 
Clemonli.^  paisse  VI  et  ab  eo  Âuditor  Camerœ  apo»loiicae  conslilutus  et  lu 
episcopum  Aplensem  promotus  {ap.  Baluzb,  Vitœ  papar.  Aoenion^  1. 1,91 1; 
CartulcUre  de  Notre-Dame  de  Chartres,  I,  28). 

(4)  Tribunal  qui  juge  les  causes  importantes  de  TElat  ecclésiastique,  et 
quelques  autres  qui  y  viennent  en  appel  des  Etats  catholiques  de  TEuropc. 

(5)  GalUa  chrUtiana,  t.  Vlll,  \  174,  —  1. 1,  361. 

(6)  Vitasexta  Benedictl  XII,  ap.  Baluzs.  t.  1,   col  335. 


StÔ  SOCIÉTÉ  A n Cil ÉO LOGIQUE  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

France,  au  commencement  de  mai  1342,  pournégocier  la  paix  enlre 
les  rois  de  France  et  d^Anglelerre  (1).  Clément  VI,  élu  peu  aprê> 
(7  mai),  lui  continua  cette  légation  (2).  A  la  sollicitation  du  pap<^  et 
des  cardinaux,  dont  Guillaume  Lamy  était  Tinterprèle,  une  irêvr 
fut  faite  entre  les  deux  rois,  au  mois  de  février  1343. 

III.  —  Le  11  septembre  de  Tannée  1342,  Guillaume  Lamy  fui 
présent  au  contrat  de  mariage  d'Ahélide  Roger,  nièce  du  pape 
Clément  VI,  avec  Guillaume  de  la  Tour  :  on  lit  en  effet  à  la  fin  du 
contrat  «  passé  en  présence  d'Etienne  Albert,  Pierre- André  et  Guil- 
laume Lamy,  évoques  de  Clermont,  de  Noyon  et  d'Apt(3)  ». 

IV.— C'est  à  tort  que  quelques  historiens  avignonais  ont  prétendu 
que  Guillaume  Amici,  évéque  d'Apt,  s'appelait  Guillaume  Amie  de 
Sabran,  et  qu*il  appartenait  à  cette  illustre  famille  dont  une  branche, 
celle  de  Giraud  de  Sabran,  avait  adopté  le  surnom  d*Aaiic  qur 
portèrent  après  lui  plusieurs  de  ses  descendants.  Cette  erreur  a  été 
reproduite  dans  un  ouvrage  récent  sur  les  évéques  d*Apl  (4). 


III 


GUILLAUME  LAMY,    ÉVÉQUE  DE  CHARTRES 

Le  7  octobre  1342,  Guillaume  Lamy  fut  transféré  au  siège  épi^- 
copal  de  Chartres  (S),  où  il  remplaça  Aimeric  de  Chdlus  (6),  fami- 
lier de  Clément  VI,  promu  cardinal  du  titre  de  Saint-Martin-des- 
Monts.  Il  prêta  serment  le  11  oclobrel342  (7). 

D'après  les  notes  manuscrites  de  du  Fourny,  Guillaume  Lamj 
n'aurait  été  consacré  évêque  que  le  11  novembre  1342,  ce  qui  ne  se 
comprend  pas,  disent  les  Bénédiclins  du  Gallia,  puisque  il  élaii 


(1)  Dans  le  Gallia  chrUtiana,  t.  I,  col.  3)4,  il  y  a  ce  lapsus ^  ioier 
episcopos  Gallise  et  Ângliae. 

(3)  Exlant  harum  rerum  testes  Litterae  Cardinalium  et  Clemenits  in  libro 
quarlo  Epislolarum  ejus,  Episi  474  et  seqq  ;Baluze,  Vitœ  papar,  l.  I,  90). 

(3)  Gallia  christûma,  l.  1,  col.  364.  —  Cet  Elieniio  Âiiberl,  évéque  év 
Clormonl}  devint  pape  sous  le  nom  d^lnnoceniW.  {Gallia  christ.,  i  11,SS7). 

(4)  Les  éoêques  d'Apt,  leurs  blasons  et  leurs  familles,  par  \l.  Jules  de 
Terris,  1877   —  Semaine  religieuse  d'Aoignon,  10  juin  l89i. 

(5)  Baluze,  Vitœ  papar.  Avenion,,  l.  I,  col.  910. 

(6)  Appelé  parquciques  historiens  Aimeric  de  Càdtelus^  «  de  Chatellux  t 
secundum  Tavellum  in  nïs.  ap.  Severt.  Episcnpi  Carnotenses^  p.  183. 

(7)  Gnllia  chrUtttana,  t.  Vlll,  col.  1174. 


ÉTUDE  BIOGRAPHIQUE   SUR   GUILLAUME    LAMY.  5)1 

déjà  évoque  d'Apt  (1).  On  pourrait  expliquer  la  chose  en  disant 
qu'il  avait  été  élu  évoque  d'Apt,  et  n'avait  pas  encore  été  consacré. 

Dans  un  très  ancien  Catalogne  des  évéqnes  de  Chartres,  écrit  vers 
1360,  on  lit  ce  qui  suit  sur  cet  évéque:  «Guillaume  Lamy,  Limousin, 
homme  d'une  science  profonde,  d'une  grande  probité  el  de  mœurs 
exemplaires.  11  fut  familier  du  seigneur  pape  Clément  VI  et  nommé 
par  lui  auditeur  de  la  chambre  apostolique,  puis  promu  à  Tévôché 
d'Apt  et  ensuite  transféré  à  l'évéché  de  Chartres,  qu'il  régit 
pendant  huit  ans,  demeurant  toujours  à  la  cour  romaine;  et  de  là 
il  fut  fait  patriarche  de  Jérusalem,  dans  sa  cinquantième  année; 
et  avec  le  patriarcat  il  eut  en  commende  l'église  de  Fréjus,  et  il  est 
réputé  saint  »  (2). 

Guillaume  Lamy  prit  possession  de  Tévéché  de  Chartres  par 
procureur  et  il  est  douteux  qu'il  ait  jamais  résidé  dans  ce  siège, 
demeurant,  comme  on  vient  de  le  dire,  à  la  cour  pontificale  d'Avi- 
gnon et  chargé  par  Clément  VI  de  diverses  missions  diplomatiques. 
On  cite  un  évoque,  du  nom  de  Bernard,  dont  le  titre  épiscopal 
n'est  pas  connu,  et  qui  faisait  les  fonctions  épiscopales  en  son  lieu 
et  place  dans  le  diocèse  de  Chartres  (3). 

Ce  qui  prouve,  ajoute  Baluze,  la  vérilé  de  ce  qui  est  dit  plus 
haut,  que  Guillaume  Lamy  demeurait  toujours  à  la  Cour  romaine, 
ce  sont  les  lettres  des  vicaires-généraux  de  Chartres,  datées  de  1343, 
en  réponse  aux  lettres  d'indiction  du  Concile  de  Paris  :  «  Aux 
révérends  pères  et  seigneurs  les  évéques  de  Paris,  d'Orléans, 
d'Auxerre,  de  Troyes,  de  Meaux  et  de  Nevers,  ou  à  leurs  vicaires, 
—  les  vicaires  généraux,  au  spirituel  et  au  temporel,  de  révérend 
père  et  seigneur  Guillaume  Lamy,  évéque  de  Chartres,  qui  se 
trouve  actuellement  auprès  du  siège  apostolique  —  salut  et  respect 
avec  honnneur  (4). 

Le  24  juin  1343,  il  nomma  des  vicaires  chargés  d'annexer  la  cha- 

(1)  Ordlnatus  episcopus  dicitur  xi  novcmbris  in  scheJis  D.  du  Fourni, 
quod  non  omnino  intelligitur.  Jam  enim  episcopus  eral  Âplensis,  ut  cons- 
tat, etc.  {Gallla  Christ,  t.  VIII,  col.  1174). 

(2)  Guillelmus  Amici,  Lemovicensis,  vir  summae  scicnlia;,  probiialis,  ei 
morum.  liic  fuii  familiaris  Domini  Cleinenlis  papa;  VI,  el  ab  eo  auditor 
(^amerae  apostolicae  conslitutus,  el  in  episcopum  Âplenscm  promoiu^;  iiide 
que  ad  episcopalum  Carnoiensem  irauslalus,  quem  rexil  octo  annis, 
manens  sempcr  in  Guria  romana  ;  el  inde  patriarcha  Jérusalem  faclus,  anno 
(|uinquage$imo;  cum  qiio  habuitin  commenda  episcopalum  Foro;Juliensenn, 
ei  sancius  repuialur.  [Ap  B\luze,  V/tojpapar.  Aoenlon  .  t.  l,  col  910-91  I). 
—  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Chartres,  t.  I,  p.  28. 

(3)  Noie  envoyée  de  Chartres  au  P.  Lamy,  jésuite,  à  Limoges. 

(4)  Baluzr,  Vitœ  papar*Aoenion,^  t.  I,  col.9l1. 


Htî  <:0C1ÉtA   ArCHÉOtOGlQUE   ET   HISTOHIQOB   DU   LIMOUSIN. 

pelle  (le  Gondreville  à  l'infirmerie  de  Josapbat  (1),  près  de  Charlne^. 

La  même  année,  il  fut  choisi  comme  arbitre  entrd  Guillaume 
Bertrand,  seigneur  du  château  de  Saint-Romain,  dans  le  diocèse  de 
Saint-Flonr,  et  Jean-de-Chandorat,  évoque  du  Puy,  au  sujet  de  la 
propriété  du  Domaine  fvillaj  de  la  Chapelle  dans  le  diocèse  tïu 
Puy  (2).  ' 

D'après  M.  Doyen,  historien  delà  ville  de  Chartres,  lesarmoirit- 
de  Guillaume  Lamy  étaient  de  gueules  à  la  colombe  d'argent  1 3  . 
Bien  avanl  lui,  les  Frères  Sainte-Marlhe,dans  leur  Gallia  Christiann 
(i656),  disent  la  même  chose  (4). 


IV 

SA   LÉGATION  A  NAPLES  (1348). 

Pendant  qu'il  était  évoque  de  Chartres,  Guillaume  Lamy  fut 
mêlé  à  un  événement  tragique  qui  a  eu  un  certain  retenlisseroeni 
dans  rhiàloire  et  sur  lequel  nous  allons  donner  quelques  détails. 

Robert,  roi  de  Naples,  étant  mort  en  1343,  avait  désigné,  pour 
lui  succéder,  sa  pelite-fiUe  Jeanne,  encore  mineure,  qui  avait 
épousé  André,  frère  du  roi  de  Hongrie.  L'année  suivante  (1344), 
le  pape  Clément  VI  envoya  dans  le  royaume  de  Naples,  comme 
légat  à  latere,  Aimeric  de  Châlus,  cardinal-prélre  du  litre  de  Sainl- 
Martin-les-Monts,  pour  y  prendre  les  rênes  du  gouvernement,  en 
vertu  des  privilèges  de  suzeraineté  qui  donnaient  au  pape,  en  cas 
de  minorité,  l'administration  du  royaume.  Ce  cardinal,  contrarié 
dans  sa  mission,  était  de  retour  à  Avignon  vers  la  fin  de  Tannée. 
L'année  suivante  (1345),  le  pape  Clément  VI  chargea  Guillaume 
Lamy,  le  successeur  d'Aimeric  sur  le  siège  de  Chartres,  d'aller  pro- 
céder au  couronnement  d'André  et  Jeanne,  comme  roi  et  reiue  de 
Naples (5).  L'évoque  de  Chartres  se  rendit  dans  cette  ville;  mais 
avant  que  la  bulle  du  couronnement  fut  arrivée,  le  jeune  roi  André 
périt  victime  d'un  guel-apens  (17  septembre  1345). 

Il  était  à  Aversa  avec  la  reine  et  venait  de  se  coucher,  quand  les 

(I)  Gallin chrcstiana  ,  t.  VIII,  col.  1174. 

(î)  Raluze,  Vitœ papar.  Aoenlon.,  l.  l,col.  911. 

(3)  Histoire  de  la  oille  de  Chartres  et  du  pays  Chartrain^  P86,  L  I, 
p.  345. 

f4)  Gallia  Chrisilana,  l.  I,  1656,  archfepiso.  Aquenses,  p.  18. 

(5)  Tenta  Vita  Clémentes  V/,  ap.  Baluze,  Vitœ  papar.  Acenion  ,  l.  ï. 
col.  291. 


ÉTUDE  BIOGRAPHIQUE  SUR  GUILLAUME  LAMY  5i3 

conjurés  réveillent  avec  précipitation,  lui  disent  qu^il  y  a  une 
émeute  à  Naples  et  qu'il  faut  aller  Tapaiser.  Quand  le  prince  est 
sorti  de  sa  chambre,  on  lui  passe  autour  du  cou  un  cordon  de  soie, 
on  rétrangle,  on  le  pend  à  un  balcon;  presque  en  môme  temps  on 
coupe  la  corde,  et  le  corps  inanimé  tombe  dans  un  jardin  sur 
lequel  donnait  le  balcon.  On  allait  l'ensevelir  dans  cet  endroit  si 
une  des  femmes  de  chambre  de  la  reine,  hongroise  de  nation,  ne 
se  fût  éveillée.  Par  le  bruit  que  fait  celte  femme,  les  conjurés  se 
retirent,  de  peur  d'être  découverts.  Aussitôt  la  reine  se  lève  et  fait 
lever  ses  gens.  Elle  se  rend  à  flapies,  assemble  les  grands  du 
royaume,  leur  expose  ce  qui  s'est  passé  dans  la  mort  de  son  époux 
et  ordonne  à  Bertrand  de  Baux,  grand  justicier,  d'informer  du 
crime  (1). 

Guillaume  Lamy  quitta  Naples  en  toute  hâte  et  vint  à  Avignon 
rendre  compte  à  Clément  VI  de  ce  triste  événement  (2).  Le  pape, 
ayant  tenu  conseil  avec  les  cardinaux,  porta  les  peines  les  plus  sé- 
vères contre  les  coupables  et  leurs  cpraplices  (3).  La  reine  Jeanne, 
qu'on  avait  soupçonnée  de  complicité  dans  cet  assassinat,  prouva 
son  innocence  dans  une  assemblée  de  cardinaux  présidée  par  le 
pape. 

Pendant  ce  voyage  qu'il  avait  fait  à  Naples  comme  nonce  aposto- 
lique, Guillaume  Lamy  avait  été  chargé  d'une  autre  mission.  En 
effet,  dans  le  tome  III»  des  Annales  des  Frères  Mineurs,  par  Wad- 
ding  (Appendice,  p.  330),  on  trouve  un  bref  du  pape  Clément  VI, 
en  date  du  xii  des  calendes  de  septembre  (21  août  1345),  et  adressé 
à  Jean,  archevêque  de  Naples,  et  à  Guillaume,  évéque  de  Chartres 
et  nonce  apostolique,  pour  faire  restituer  et  appliquer  à  des  œu- 
vres pies  les  biens  laissés  par  feu  la  reine  Sanche,  reine  de 
Sicile  (4). 

Les  Bénédictins  du  Gallia  chrisiiana  prétendent  que,  d*après 
l'auteur  de  la  Seconde  Vie  de  Clément  VI,  Guillaume  J^amy  «  fut 
délégué  par  le  cardinal-légat,  Aimeric  de  Châlus,  cette  année  1348, 
pour  apaiser  les  discordes  qui  existaient  toujours  entre  les  habi- 

(I)  Histoire  de  Prooence^  par  messire  de  Gaufridi,  Aix,  1C94,  t.  I, 
p.  2<5;  —  Vita  démentis  VI,  ap.  Baluzb,  p.  Î70,  i9ï. 

(S)  Secunda  Vita  démentis  VI,  ap.  Bâluzb,  Vtiœ  papar,  Aoenion., 
t.  I,  col.  270.  —  Les  Bénédictins  se  trompent  quand  ils  disent  :  Ut  regem 
faceret  certiorem.  11  ne  s'agit  pas  du  roi,  mais  du  pape  {Gallia  christ,^ 
t.  VIII,  col.  n7i). 

(3)  Secunda  Vita  démentis,  ap.  Baluze,  t.  I,  col.  270;  —  Prima  Vita, 
ibid.,  col.  âi7. 

(4)  Gallia  christlana,  t.  VIII.  col.  U7i. 


5Î4  SOCIETE   ARCBEOLOGIQL'K   ET    UIStOniQUE   DO   LIMOISIK. 

tanfs  de  Pise  el  le  vicomte  Luchin,  el  pour  engager  les  pelîls  prin- 
ces de  rilalie  à  s'abslenir  de  leurs  mutuelles  querelles  »  (1).  Nous 
avons  parcouru  celle  Seconde  Vie  de  Clément  VI,  el  nous  n'avons 
pas  trouvé  trace  de  celte  prétendue  mission. 


SA  LÉGATI0?i  A  PARIS. 

En  1347,  au  mois  d'avril,  Guillaume  Lamy  fui  envoyé  par 
le  pape  Clément  VI,  en  qualité  de  nonce  apostolique,  auprès, 
du  roi  de  France,  avec  Pasteur,  archevêque  d'Embrun,  de  Tordrt* 
de  Saint-François  (2).  Les  deux  prélats  étaient  chargés  de  présen- 
ter à  Philippe  VI  une  lettre  dans  laquelle  le  pape  protestait  contre 
une  ordonnance  portée  par  le  roi,  qui  conlisquail,  au  proiit  du 
trésor  royal,  tous  les  revenus,  dixmes  et  autres  biens  apparlenaat 
aux  prélats  el  autres  personnages  ecclésiastiques  qui  élaient  ab- 
sents du  royaume  le  13  février  précédent.  Le  pape  proteste  contre 
ce  décret  qu'il  regarde  comme  attentatoire  à  la  liberté  el  à  l'immu- 
nité de  l'Eglise;  il  annonce  au  roi  l'envoi  de  deux  députés  chargés 
de  traiter  de  celte  affaire  avec  lui  :  «  Nous  vous  avons  envové,  lui 
dit-il,  nos  vénérables  frères  Pasteur,  archevêque  d'Embrun,  et 
Guillaume,  évêque  de  Chartres,  nonces  du  Saint-Siège  apostolique, 
hommes  d'une  science  profonde,  distingués  par  leur  probilé  et  leur 
maturité,  ayant  à  cœur  votre  honneur  et  votre  intérêt,  comme 
étant  originaires  de  votre  royaume  (3). 

Le  pape  écrivit  pour  le  même  sujet  à  Jeanne,  reine  de  France  (4;, 
à  Foulques  de  Chanac,  archevêque  de  Paris  (5),  et  à  Firmin  Coque- 

(I)  Narrai  scriptor  viiae  secundae  Clcmenlis  VI,  quomodo  Guillclmns 
ab  Aimerico  Cardinale  Lcgato  dclcgatus  csl  ponliticalûs  Clcmenlis  annoiV, 
hoc  est  1345,  ut  discordias,  inlcr  Pisanos  cl  Luchinum  vicccomilem  non- 
dum  sopitas,  conciliarcl,  et  Insubriae  régules  à  muluis  inserendis  cladibus 
abduccrct  [Gallia  christ,,  t.  VIII,  col.  Mo4). 

(i)  Voir  la  lettre  do  riôment  Vi  aux  deux  nonces  dans  Baluze,  VUœ 
papar.  Aoenion.,  l   II,  col.  716. 

(3)  n  Ap'^siolicae  sedis  nuncios,  virus  uliqne  profundilale  scicnliie  pw- 
dilos,  probilaiis  el  maluriinlis  venustate  conspicuos,  luîque  honoris  H 
commodi,  velut  oriundos  de  rej^no  luo  pra»dic(o,  zelaiores  sinceros  - 
{Ap.  RALUZiC.    VUœ  papar.  Avenlon,,  I.  H,  701-703). 

(4)  D'\CHhUY,  Spicilcge,  l.  IV,  p.  tli,  —  Gallia  christ.,  l.  Il,  col.  1174. 

(5)  Ap,  Baluze,  Vitœ  papar,  Aoenion»,  t.  11,  col.  702. 


ÉTUDE  BIOGRAPHIQUE  SUR   GUiLLAUHE   LAMY.  525 

rel,  doyen  de  cette  (église,  priant  ce  dernier  de  ménager  aux  deux 
nonces  apostoliques  une  entrevue  avec  le  roi  Philippe  et  la  reine 
Jeanne  (1). 

Wadding,  dans  sos  Annales  des  Frères  Mineurs^  rapporte  que 
Guillaume  Lamy  fut  envoyé  en  France,  comme  nonce  apostoliijue, 
avec  Pasteur  de  Sarrescudie,  archevêque  d'Embrun,  pour  ol)tenii* 
de  Philippe  VI  la  liberté  de  Pierre  Bertrand,  cardinal-prôtre  du 
litre  de  saint  Clément  et  d'autres  cardinaux  que  le  roi  tenait  en 
prison,  et  en  même  temps  pour  faire  révoquer  les  décrets  que  le 
roi  avait  portés  contre  Tautorité  et  l'immunité  de  l'Eglise. 

Wadding  dit  avoir  trouvé  le  titre  de  cette  légation  dans  le  regis- 
tre des  Lettres  secrètes  de  Clément  VI  (2),  et  il  ajoute  que  les  deux 
prélats  durent  rester  longtemps  à  Paris  pour  agir  sur  le  cœur  en- 
durci du  roi  et  qu  enfin,  grâce  aux  instances  et  à  l'intervention  de 
la  reine  Jeanne,  ils  obtinrent  la  révocation  des  décrets  royaux 
portés  contre  les  cardinaux  et  les  ecclésiastiques  de  leur  maison  (3). 

Sponde,  dans  son  Abrégé  des  Annales  de  Baronius,  dit,  à  pro- 
pos de  la  mort  du  roi  Philippe  VI  :  «  Qu'on  peut  difficilement 
l'excuser  d'un  fait  qui  lui  est  reproché  dans  les  lettres  du  pape 
Clément  VI,  à  savoir  qu'il  avait  fait  mettre  en  prison  Pierre  Ber- 
trand, cardinal  du  titre  de  saint  Clément,  et  quelques  autres  cardi 
naux,  ainsi  que  les  ecclésiastiques  de  leur  maison,  parce  qu'ils 
avaient  résisté  à  certains  décrets  royaux  qui  attentaient  à  l'autorité 
et  à  l'immunité  de  l'Eglise.  C'est  pourquoi  Clément  VI  envoya  vers 
le  roi  l'archevêque  d'Embrun,  Pasteur,  de  l'ordre  de  saint  François, 
et  Guillaume,  évéque  de  Chartres,  qui  eurent  beaucoup  de  peine  à 
obtenir  la  révocation  des  décrets  et  l'élargissement  des  cardinaux, 
et  qu'ils  l'obtinrent  toutefois  grâce  aux  soins  et  à  l'intervention  de 
la  reine  Jeanne  (4). 

(I)  Ap.  Raluze,   Vltœ  papar,  Aoenlon.^  l.  Il,  col.  703. 

(1)  In  Ubrosecr.  annl  sextl  démentis  V/,  cp.  171  el  i28. 

(3)  beinde  Pasioris  0|)era  usus  est  (Clemcns  VI)  in  multis  rébus  gravis- 
simis;  cujus  eliam  prudentiam  et  dexlopilalcin  cxpcrlus  est  Clemcns  VI, 
qui  mullis  muneribus  et  legationis  functum  creavit  cardinalcm.  In  hujus 
ponlificis  rcgeslo  inveni  instrumenta  legalionis  sil)i  el  (iuilielmo  Carnoi. 
cpiscopo  ad  Philippum  regem  Galliarum  commissîP,  super  reiaxandis  seii 
libcrandis  Pelro  Cardinali  presbylero  litiili  Sancli  (llemenlis,  aliisque  car- 
dinalibus  cl  eorum  l'amiliaribns,  quos  rex  sub  cuslodia  detinebat;  cl  super 
revocandis  hiis,  quœ  conlra  Kccloslie  aucloritaUMn  el  immiiniialem  cons- 
litucraU  Ui  obduraUim  Régis  animum  emullire  possonl,  longo  lempore 
Pîirisiisimmorari  oporluii;  et  tandem  coopérante,  ac  sollicite  inlervenientc 
Joanna  regina,  oblinnerunl  (Wadding,  Annales  zV/tnoram,6ditioD  de  Rome, 
1733,  l.  Vil,  p   «25.  —  Ad  anti.  1339,  §  2). 

(4J  Gum  nihilominus  vix  unquam  excusari   valcat  quod    ex    regcsto 


526  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LiMOCSlM. 

Baluze,  qui  a  publié  plusieurs  lettres  de  Clément  VI  relatives  à 
la  légation  de  Guillaume  Lamy,  soupçonne  que  Wadding  s'est 
trompé  en  ce  qui  concerne  remprisonnement  de  Pierre  Bertrand 
et  des  autres  cardinaux  ;  et  la  raison  qu'il  en  donne,  c'est  que 
Odoric  Rainaldi,  dans  ses  Annales,  ne  parle  pas  de  cet  incident  :  ce 
qu'il  n'eût  pas  manqué  de  faire  si  le  fait  eût  été  vrai,  ajoute 
Baluze,  en  raison  de  ses  sentiments  d'hostilité  à  l'égard  de  la 
France  (1). 

Le  silence  de  Rainaldi,  relativement  à.  remprisonnement  des 
cardinaux,  ne  nous  paraît  pas  suffisant  pour  infirmer  le  témoignage 
de  Wadding,  qui  déclare  avoir  lu  le  fait  dans  les  lettres  secrètes 
de  Clément  VI,  et  que  Baluze  reconnaît  comme  un  écrivain  très 
érudit  et  de  bonne  foi  (2). 


VI 


GUILLAUME    LAMY  PATRIARCHE    DE    JERUSALEM. 

En  1349,  Guillaume  Lamy  fut  nommé  par  le  pape  Clément  VI 
patriarche  de  Jérusalem.  En  lui  conférant  cette  haute  dignité,  le 
pape  reconnaissait  ses  mérites  cl  le  récompensait  des  services  ren- 
dus à  l'Eglise.  Ce  n'était  pas  là  un  vain  titre,  comme  l'a  dit  un 
savant  (3).  Il  est  vrai  que  Guillaume  ne  devait  pas  résider  à  Jéru- 
salem :  «  Le  siège  de  ce  patriarcat,  dit  l'auteur  de  sa  Vie,  avait  été 
transporté  à  Nicosie,  capitale  de  l'île  de  Chypre,  où  s'étaient  réfu- 
giées un  grand  nombre  de  familles  honorables  de  la  Syrie(4)  ».  Un 
des  prédécesseurs  de  Guillaume  dans  le  patriarcat  de  Jérusalem, 
le  célèbre  Pierre  de  La  Palu,  était  allé,  lui  aussi,  à  Nicosie,  ou  plu- 
sieurs historiens  le  font  mourir  (5J. 

Nous  lisons  dans  un  historien  de  la  ville  de  Chartres  que,  «  à  la 

démentis  pontificis  habemiis,  Ipsum  in  custodiam  dédisse  Pelrum  lier* 
trandi  S.  Clemenlis,  aliosque  nonnullos  cardinales,  et  eorum  famiiiares, 
eo  quod  restitisscnl  regiis  quibusdam  decretis  contra  Ecclesia&  auctorila- 
tcm  et  immunitatcm.  Qua  de  causa  missi  ad  regem  à  Clémente  Paslor 
minorila,  archiepiscopus  Ebrcdunensis,  et  Guillelmus  episcopus  Carno- 
tcnsis,  aegrè  dccrelorum  revocalionem  et  cardinalium  relaxalionem 
oblinucrunt,  opéra  et  intervenlione  Joannœ  regiiia3(l.l,édit.  1678,  p.  506). 

(1)  Baluze,  Vitœ  papar.  ADenion.^  t.  1,  col.  785,  893. 

{i)  Erudilissimum  cl  bon»  fidei  scriptorcm  [Ibld  ,  col.  785). 

(3)  lllo  inani  lilulo  gaudens  (Sévkrt,  £piscoptCa/'ftote/ises,  p.  183). 

(4)  P.  BoNAVRNTURR,  t.  111,  p.  634;  —  CoLLiN,  Vlcê  des  Saints^  p.  279. 

(5)  MoRERi,  Diction,  hiat.,  arl.  La  Palu. 


ÉTUDE   BIOGRAPHIQUE  SUH   GUUXAUME  LAMY.  527 

recommandation  de  Jean,  duc  de  Normandie,  Guillaume  Amy  rési- 
gna son  évôché  de  Charlres  à  Louis  de  Vaucemain,  Champenois, 
qui  était  conseiller  du  roi  et  chanoine  de  Chartres  (1).  Louis  de 
Vaucemain  fut  élu  le  18  mars  1349. 

Guillaume  Lamy  ajouta  à  son  titre  de  patriarche  celui  d'admi- 
nistrateur perpétuel  du  diocèse  de  Fréjus,  qui  lui  fut  donné  en 
commende  (4)  et  dont  il  touchait  les  revenus.  C'est  pourquoi  il  est 
appelé  évoque  de  Fréjus  dans  une  épitaphe  rapportée  par  le  Gallia 
chrûtiana  et  qui  paraît  dater  du  xv!*"  siècle.  Le.'^  Frères  Sainte- 
Marthe  disent  que  c'est  seulement  en  1357  qu'il  reçut  le  titre  d'ad- 
ministrateur perpétuel  du  diocèse  deFréjus;  mais  la  date  1349,  rap- 
portée par  Baluze,  s'appuie  sur  un  document  de  tin  du  xiv®  siècle (3). 

Joseph  Antelme,  dans  son  livre  sur  les  Commencements  de 
l'église  de  Fréjus^  rapporte  que  ce  prélat  «  illustra  cette  église  par 
de  saintes  ordonnances  et  par  une  munificence  digne  d'éloges  (4).  » 

Lequien,  dans  son  Oriem  Christianus,  a  mentionné  dans  la  liste 
des  patriarches  de  Jérusalem,  en  1351,  un  certain  Guillaume  (Guil- 
lelmus  quidam)  qu'il  n'a  pas  su  être  Guillaume  Lamy  (5). 

Parmi  ses  prédécesseurs  sur  ce  siège  patriarcal,  nous  comptons, 
outre  Pierre  de  La  Palu,  le  célèbre  dominicain,  Hélie  II  des  Nabi- 
naux  (de  Nabinalis),  du  diocèse  de  Périgueux  (1345)  (6),  Pierre 
de  Casa  (Des  Maisons,  né  à  Limoges),  prieur  général  de  l'ordre  des 
Carmes,  mort  en  1348  (7). 

Ce  titre  de  patriarche  de  Jérusalem  ne  fut  pas  pour  Guillaume 
Lamy  un  vain  titre.  Si  nous  en  croyons  l'auteur  de  sa  vie,  il  se 
rendit  à  Nicosie,  dans  l'île  de  Chypre,  où  le  siège  du  patriarcat 
avait  été  transféré. 

L'île  de  Chypre,  lors  de  la  création  du  royaume  latin  (1196), 
avait  été  divisée  par  le  papeCôlestin  III  en  quatre  diocèses  :  Nico- 
sie, résidence  de  l'archevêque,  Paphos,  Famagousle  et  Limasso 
{Nimocia)  (8). 

(I)  DoYKN,  Histoire  de  la  cille  de  Chartres,  l.  I,  p.  344. 

(t)  Baluze,  Histnr.  papar.  Acenion.,  t.  I,  col   9H . 

(3)  Gallia  Christiana,  t.  1,  col.  436. 

(i)  Ecclcsiam  noslram  administraloria  vice  modoratur,  quam  el  sanclis 
ordinationibus  el  laudabili  munificentia  nobililal.  Undc  illius  mcmoria 
apud  nos  anniversario  rilu  rcviviscil  11  kal  febr,  (De  Initiis  enclestœ  Foro- 
jullensis  dissertatiOy  1680,  p.  164) 

(5)  OriervB  Christianus,  t.  III,  p.  911. 

(6)  Baluzr,  Vitœ  papar.  Aoeaion.^  l.  I,  col.  836;  —  De  Maslatrie,  Tré- 
sor de  chronologie^  clc,  p.  2i03. 

(7)  Baluze,  Vitœ  papar.  Aoenlon.^  1. 1,  col.  791. 

{fi)  Dis  Maslatrie,  Trésor  de  chronologie^  d'histoire  et^de  géographie, 
col.  2303. 


3!6  SOCIÉTÉ   ARCRÉOLOGIQUR    ET    HISTORIQUE   DO   LIMOUSIN. 

V  Arrivé  à  Nicosie,  il  commença,  à  guise  d'un  soleil,  à  épancher 
de  toutes  paris  les  rayons  de  ses  vertus  et  de  sa  doctrine  ;  il  alloit, 
d'un  cours  infatigable,  éclairer  les  dévoyés,  fortifier  les  faibles, 
encourager  les  pusillanimes  et  frayer  le  chemin  du  Paradis  à  tou^. 
Il  estoit  le  père  des  pauvres,  le  nourricier  des  orphelins  et  la  con- 
solation des  veuves  et  des  malades.  Il  procuroil  rornement  des 
autels,  la  réparation  des  églises,  l'érection  des  hôpitaux  et  le  bien 
universel  de  son  peuple.  Il  marioit  les  pauvres  filles  ou  les  plaçoit 
dans  des  couvents,  assistoit  avec  assiduité  et  dévotion  aux  offices 
divins  et  aux  affaires  de  son  église.  Ne  se  contentant  pas  de  soula- 
ger les  pauvres  voisins,  cstendant  bien  au  loin  les  effets  de  sa  bê- 
néficence,  il  envoya  à  son  frère  Ezëchias  quantité  de  billeties  d'or, 
avec  permission  du  roi  Jean,  régnant  en  France,  pour  les  réduire 
en  monnoye,  aHn  de  marier  beaucoup  de  pauvres  filles,  notamment 
de  Limoges,  lieu  de  sa  naissance  (i)  ». 

Ce  qui  confirme  ce  séjour  de  Guillaume  Lamy  à  Nicosie,  cVst 
une  lettre  que  le  pape  Clément  VI  écrivit  de  Villeneuve,  diocèse 
d'Avignon,  en  date  du  x  des  calendes  d'octobre,  an  x  de  son  pon- 
tificat (22  septembre  1351),  pour  la  cause  de  la  foi  des  Arméniens  : 
«  A  nos  vénérables  frères  Guillaume,  patriarche  de  Jérusalem,  Phi- 
lippe, archevêque  de  Nicosie  (2),  Eude  (Odo),  évéque  de  Paphos, 
Léger,  évoque  de  Limassol  (Nimocie)  »,  etc.  (3).  Dans  celte  lettre, 
Clément  VI  leur  enjoignit  d'envoyer  sans  retard  au  calholicon  /pa- 
^riarcA^y/ des  Arméniens,  un  homme  enflammé  du  zèle  de  la  foi 
catholique,  (|ui  exigeât  avec  prudence  et  fermeté  des  réponses  ca- 
tégoriques sur  les  divers  articles  de  foi  (4). 


{\)   P,  BONAVKNTURE.   t.  lll,  p.  634. 

(9)  M.  de  Masialrie  a  omis  ce  nom  dans  sa  liste  des  archevêques  de  Ni- 
cosie {Trésor  de  chronologie  y  d'hUtoire  et  de  géographie,  col.  iî03). 

(3)  Vencrabilibus  fralribus  Guillelmo,  patriarchae  Hierosolymîlano,  et 
Philippo,  archicpiscopo  Nicosiensi,  et  Odoni  Paphensi,  et  Leodcgnrio  Ni- 
mocionsi  cpiscopis,  data  x  kalendis  oclobris  (id  est  2â  scptembris)  anno 
ponlitlcalus  X,  ap.  Waddingum,  t.  IV  Annalium  ad  cum  annum,  num.  3, 
p.  ^.  —  De  en  opislola  menlioncm  faciunl  Rîiynaldus,  i.  XVI,  ad  cum  an- 
num,  n<^  9,  et  Innocenlius  VI.  papa  in  epislola  data  anno  1353,  dif^  I. 
ocloh.  ihid.,  ad  cum  annum,  num.  35  (Oriens  ChrlstianuSj  i740,  l.  III, 
col.  1207). 

(4)  Wadding,  A/ifiaZ.  A/c/ior.,  édil.  1733,  Rome,  l.  VIII,  p.  5î;  — Rm- 
NALDi,  ad  ann.  135 1,  n»  i9,  edil.  Lucsb,  1750,  l.  VI.  —  Baluzc  fail  mentioa 
do  cette  IcUre  dans  ses  Armoires^  348,  fol.  5'. 


ÉTUDE   BIOGRAPHIQUE   SUR   GU1LLAUMK   LAUY.  5S9 


VII 


Guillaume  Lamy  a-l-il  été  archevêque  d'Aix?l]n  grand  nombre 
de  savants  Tont  affirmé.  Ainsi  Sévert,  dans  sa  liste  des  évoques  de 
Chartres,  dit  que  Guillaume  Lamy,  avant  d'être  évêque  de  Char- 
tres, fut  d'abord  archevêque  de  la  province  d'Aix  (1).  —  Pitton, 
dans  ses  Anna /^5  de  la  sainte  église  d'Aix  (1668),  cite  les  paroles 
suivantes,  tirées  des  archives  de  celte  église  :  Le  R.  P.  Guillaume 
Lamy,  archevêque  d'Aix,  était  un  homme  remarquable  par  sa  sain- 
teté (2).  Avant  lui,  Jean  Chenu,  dans  sa  Chronologie  des  évéques  de 
France  (1621).  —  Claude  Robert,  dans  sa  Gaule  chrétienne  (1626), 
-  -  les  Frères  Sainte-Marthe,  dans  le  Gallia  Christiana  vêtus  (1656), 
le  classent  parmi  les  archevêques  d'Aix,  et  ces  derniers  prétendent 
qu'il  siégea  dans  cette  métropole  pendant  deux  ans,  ayant  remplacé 
Arnaud  Bernard  de  Piréto,  mort  le  x  de  calendes  d'août  (23  juillet) 
1358  (3).  Joseph  Antelme,  dans  sa  Dissertation  sur  les  commence- 
ments de  r  Eglise  de  Fréjus  (1680),  dit  que  Guillaume  Lamy,  après 
avoir  été  administrateur  de  cette  église,  fut  transféré  à  l'église 
métropolitaine  d'Aix  (4);  Nicolas  et   Pierre  Antelme,  dans  leur 
Nomenclature  de  l'Eglise  de  Fréjus,  disent  la  même  chose.  «  C'est 
une  opinion  commune,  disent  les  Bénédictins  du  Gallia  Christiana, 
que  Guillaume  Lamy  a  été  archevêque  d'Aix  (5).  Nos  écrivains 
limousins,  tels  que  Allou,  dans  ses  Monumerits  de  la  Haute-Vienne 
(p.  260)  lui  ont  également  donné  ce  titre  ;  on  le  trouve  dans  une 
inscription  du  xvu*  siècle,  qui  était  placée  près  de  son  tombeau. 

Baluze,  qui  avait  d'abord  adopté  celte  opinion  dans  son  ouvrage 
inédit  sur  les  Ecclésiastiques  illustres  du  Limousin  (6),  Ta  rejelée 
plus  lard;  et  voilà  comment  il  s'exprime  dans  ses  notes  sur  les 

(1)  Guiilelmus  Âmici,  Lemovix,  vulgo  d^Amy,  Rolae  auditor,  prius 
Aqucnsis  provinciae  archiepiscopus  16,  deinde  episcopus  Carnolcnsis 
anno  l34l.  (Chronologla  Historica^  elc,  Episcopi  Carnotenses,  p.  183, 
édit.  \QiS.)L?  première  édition  de  cet  ouvrage  est  de  1607.  Sévert  aura 
probablement  confondu  l*évéché  (ÏApt  avec  celui  d'Aix,  (Aqu.),  et  les 
autres  écrivains  auront  reproduit  son  erreur. 

(2y  R.  D.  P.  Guiilelmus  Amici  Aqu.  archiepis.  erat  vir  sanclimonia  in- 
signis.  {Annales  de  la  sainte  Eglise  d'Aix ^  1668,  p.  \Hi.) 

(3)  Gallia  christiana  vetus^  archiepis.  Aqucnses,  t.  I,  1656,  p    18. 

(4)  Oe  InUiis  Ecclesiœ  ForojuliensLs  DisHértatio,  p.  464. 

(5)  GaUia  Christiana,  t.  1,  p.  436. 

(6'  Catalogus  virorum  lllaHrlum  Lcmovicensium^  quantum  ad  Ecclc- 
fiiam^  fol.  50-51.  -  Bibliothèque  nationale  y  armoires  de  Baluge^  n**  ^48. 


530  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   RT   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Vies  des  papes  d'Avignon  :  «  Ceux-là  cerlamement  se  trompent,  qui 
écrivent  qu'il  a  ^té  archevêque  d'Aix  »  (1). 

Les  Bénédictins  du  Gallia  C hristiana  oni  adopté  celle  opinion  de 
Baluze;  et  ils  s'appuient  sur  Tépitaphe  de  Guillaume  Lamy  qu'on 
lisait  sur  une  lame  de  cuivre  placée  près  de  son  lombeau,  et  dan? 
laquelle  il  est  dit  seulement  patriarche  de  Jérusalem  e(  évéque  de 
Fréjus. 

«  D*après  cette  épitapijc,  disent-ils,  il  est  clair  que  Guillaume 
Lamy  n'était  pas  archevêque  d'Aix  quand  il  mourut,  car  s'il  avait 
eu  cette  dignité,  pourquoi  serait-il  appelé  simplement  évéque  de 
Fréjus?  Rien  d'étonnant,  si,  dans  cette  épitaphe,  il  n'est  pas  fail 
mention  des  évôchés  d'Apt  et  de  Chartres,  dont  il  ne  jouissait  plus 
quand  il  mourut.  Or,  si  avant  sa  mort,  il  avait  eu  en  même  temps 
Tarchevéché  d'Aix  et  Tévéché  de  Fréjus,  il  eût  été  absurde  de 
mentionner  la  moindre  dignité  et  de  passer  Tautre  sous  silence  (2).  > 

Ce  raisonnement  des  Bénédictins  ne  nous  semblait  pas  péremp- 
toire.  Guillaume  Lamy  aurait  pu  être  nommé  archevêque  d'Aix, 
et  donner  sa  démission  de  ce  siège,  comme  il  Ta  donnée  des  évêchês 
d'Apt  et  de  Chartres.  Il  ne  serait  donc  pas  étonnant  que  celte 
dignité  ne  fût  pas  mentionnée  dans  son  épitaphe,  puisqu'il  ne  la 
possédait  plus  au  moment  de  sa  mort.  D'ailleurs  Tépitaphe  sur  la- 
quelle se  fondent  les  auteurs  du  Gallia  christiana  n'est  que  du  xvi* 
siècle  (probablement  l'œuvre  de  Bardon  de  Brun),  et  celui  qui  l'a 
rédigée  a  pu  ignorer  les  dignités  qu'avait  eues  Guillaume  Lamy. 
C'est  à  tort  qu'on  l'appelle  évéque  de  Fréjus,  puisqu'il  n'a  été 
qu'administrateur  de  ce  siège.  Notre  savant  Nadaud,  malgré  l'au- 
torité de  Baluze  et  des  Bénédictins,  a  maintenu  à  Guillaume  Lamy 
le  titre  d'archevêque  d'Aix  dans  l'épitaphe  qu'il  a  composée,  et 
que  nous  publierons  plus  loin  (3). 

Nous  avons  écrit  sur  ce  sujet  à  M.  l'abbé  Albanès,  et  voici  la 
lettre  que  ce  savant  ecclésiastique  nous  a  fait  l'honneur  de  nous 
adresser  : 

u  II  me  semble  que  la  carrière  de  Guillaume  Amici,  sur  lequel 
vous  voulez  bien  m'interrogcr,  est  assez  clairement  tracée  pour 
qu'il  n'y  ait  pas  à  s'y  tromper.  Il  n'a  jamais  été  archevêque  d'Aix. 
D'abord  évéque  d'Apt  en  1341,  évéque  de  Chartres  en  1342,  pa- 
triarche de  Jérusalem  en  1349,  et  chargé  le  même  jour  d'adminis- 
trer l'évêché  de  Fréjus,  qu'il  a  possédé  jusqu'à  sa  mort,  cette  suc- 

(\)  Errant  profecio  qui  scribunt  illum  fuisse  arcbiepiscopum  Aquensum. 
(Vitœ  papar.  Aoenion.,  t.  1,  p.  911.) 
(I)  Gallia  Christiana^  1. 1,  col.  436. 
(3)  Voir  à  l'appendice. 


RTUDE   BIOGRAPHIQUE  SUR   GUILLAUME   LAUY.  S$31 

cession  de  dignités  bien  établie  ne  permet  pas  de  le  placer  dans 
un  autre  siège.  D'autre  part,  il  n'y  a  pas  place  pour  lui  parmi  les 
archevêques  d'Aix  dont  la  succession,  au  xiv»  siècle,  est  parfaite- 
ment sûre,  malgré  les  grosses  erreurs  du  GalUa  christiana, 
Arfna7id  de  Narcès  tint  le  siège  d'Aix  de  1329  à  1348;  —  Arnaud 
Bemardi  de  Pireto  lui  succéda  immédiatement  en  1348,  et  siégea 
jusqu'en  1361,  où  il  eut  pour  successeur  Jean  Peissoni,  jusqu'en 
1368  où  arrive  Géraud  de  Pousillac  jusqu'en  1379.  La  chaîne  est 
étroitement  liée;  toutes  les  bulles  de  provisions  sont  là,  et  men- 
tionnent le  prédécesseur  et  le  successeur.  D'ailleurs  les  vacances 
du  siège  sont  très  brèves,  et  il  n'y  a  pas  un  jour  où  l'on  puisse 
intercaler  un  autre  archevêque. 

»  Votre  Guillaume  doit  donc  se  contenter  de  ses  trois  évéchés  et 
de  son  patriarcat  honorifique  :  il  a  laissé  assez  peu  de  souvenirs 
dans  ses  deux  églises  provençales,  où  pourtant  il  paraît  avec  une 
assez  grande  renommée  de  vertu.  Je  n'ai  vu  aucun  litre  où  son 
nom  soit  écrit  autrement  que  Guillaume  Amici,  Vous  seul  pourrez 
nous  dire  si  dans  les  titres  français  on  le  nomme  Lamy,  et  si  sa 
famille  portait  réellement  ce  nom.  J'hésite  beaucoup  quand  il  s'agit 
de  traduire  ou  d'interpréter  un  nom  du  moyen  âge,  si  quelque  docu- 
ment contemporain  ne  me  sert  de  guide,  aimant  mieux  le  plus  sou- 
vent laisser  le  nom  tel  que  je  1^  trouve,  que  de  m'exposer  à  une 
fausse  interprétation.  Mais  en  ceci,  il  est  certain  que  les  écrivains 
locaux  sont  plus  à  même  de  frapper  juste  que  ceux  qui  se  trouvent 
à  distance  (1)  ». 

VIII 

Signalons  l'erreur  commise  par  quelques  historiens  qui  ont  pré- 
tendu que  Guillaume  Lamy  avait  été  nommé  cardinal.  C'est  ainsi 
que  Sabion^  dans  son  Histoire  de  Vauguste  et  vénérable  Eglise  de 
Chartres,  dit  en  parlant  des  évêques  de  cette  église  :  «  Plusieurs 
ont  été  cardinaux  et  légats,  comme  Guillaume  66*  évesque  (2).  » 
Doyen,  dans  VHistoire  de  la  ville  de  Chartres  et  du  pays  chartrain, 
dit  également  en  parlant  de  Guillaume  Lamy  :  «  Le  pape  le  fit  car- 
dinal (3).  »  L'auteur  de  la  vie  légendaire  du  patriarche  dit  seule- 
ment que  le  pape  lui  offrit  le  chapeau  de  cardinal,  lequel  il  refusa 
à  cause  que  cette  dignité  avoit  trop  d'éclat  et  trop  peu  de  travail 
pour  Notre  Seigneur  (4). 

(1)  Lettre  datée  de  Marseille,  18  juin  1892. 

(â)  Histoire  de  Vauguste  et  vénérable  Eglise  de  Chartres,  2«  édition, 
1683,  p.  79. 
(3)  Histoire  de  la  vUîe  de  Chartres,  HSd.  t.  I.  p.  314. 

\i)  P.  BOIIAVBNTURK,  t.   III,  p.  634. 


t 


532  SOCIETE  ARCRÊOLQOQUE  ET  HISTORIQUE  DU  UMOVSIPC. 

Ce  que  dit  Tauleur  de  celte  vie  est  assez  vraisemblable.  Guil- 
laume Lamy,  après  avoir  été  nonce  à  IJaples  et  à  Paris,  avait  quel- 
ques droits  à  la  pourpre  cardinalice;  et  nous  voyons  que  son  collè- 
gue dans  la  légalion  auprès  du  roi  Philippe  VI,  Pasleur,  archpv<V|u 
d'Embrun,  fui  admis  dans  le  sacré-collège  le  il  décembre  1350  I 


IX 


GUILLAUME   LAMV,   l'ttLVOT   I)  EYMOUTIERS  ET   DE   LAVAUR 

Outre  révéché  de  Fréjus,  que  Guillaume  Lamy  avait  en  coni- 
mende,  et  dont  il  fut  nommé  administrateur  perpétuel,  ce  prélai 
possédait  d'autres  bénéfices  :  ainsi  nous  trouvons  que,  en  13SS>,  ii 
était  prévôt  du  chapitre  d'E\mouliers  (2);  une  note  publiée  par 
Baluze,  prouve  qu'il  était  également  prévôt  du  chapitre  de  I^- 
vaur  (3). 

Les  papes  d'Avignon,  pour  fournir  aux  cardinaux  et  autres  di- 
gnitaires de  la  cour  pontificale  les  revenus  dont  ils  avaient  besoin 
pour  soutenir  leur  rang,  les  nommaient  à  des  évéchés  où  ils  étaient 
dispensés  de  résider,  et  leur  assignaient  d'autres  bénéfices  eccli'- 
siastiques,  tels  que  des  litres  de  prévôts  de  chapîlre,d'archiprélres, 
dont  ils  louchaient  les  revenus. 

C'est  ainsi  que,  sans  sortir  du  Limousin,  le  pape  Clément  V,  en 
1313,  annula  l'élcclion  de  Guillaume  d'Ahent  (d'Eymouliers),  faite 
par  le  chapitre  de  Sainl-Junien.  Le  pape  dit  qu'il  s'était  réservé  la 
collation  de  ce  bénéfice,  en  raison  de  la  plénitude  de  son  pouvoir: 
et  au  mois  de  septembre  i313,  il  conféra  la  prévôté  de  Sainl- 
Junien  à  Gaucehu  de  Jean,  son  chapelain,  et  auditeur  du  second 
degré  des  causes  du  sacré  palais  (4).  Nommé  par  le  pape  Jean  XXII 
vire-chancelier  du  Saint-Siège  et  cardinal  en  1317,  ce  prélat  pos- 
sédait encore  la  prévôté  de  Saint-Junien  en  1336  (5j. 

(!)  Baluze,  Vitœ  papar,  Aoe/ito/i.,  t.  I,  col.  894. 

(2)  Bulla,  in  superioribus  laudala,  in  qua  appollatur  prseposilus  Ahealrn- 
sis  Ecclesia;  diœcesis  Lemovicensis  [GalUa christ,  i.  1,  col.  4H6)  —  Nadaid. 
Pouilléms.—  Leouos,  Chapitres  du  Limousin,  Eymouiiers,  {Manuscrits  du 
Séminaire  de  Limoges). 

(3)  De  Guillelmo  isla  legunlur  in  Necrolov^io  Ecciesiae  Vaurensis  ad 
diem  XXIX.  Aprilis  :  Obilus  Domini  Domioi  Guillelmi  Amîci  quornlarti 
prœposili  Vaurensis  et  palriarchœ  Hierosolymilani.  (Ap.  Baluze,  Vitœ  pa- 
par. Aoenion.^  l.  I,  col.  1433). 

(4)  Chronique  de  Maleu,  publiée  par  nous  en  1847,  p.  413. 

(5)  Documents  historiques  sur  la  oiMede  Sainl-Junien,  ibid,^  p.  178. 


ÉTUDE  BIOGRAPIIIOUB  SUK  GUILLaCME  LAIIY.  S(3S 


SA  MORT  ET  SA  SÉPULTURE 

Guillaume  Lamy  mourut  à  Montpellier,  le  9  juin  (360.  Son  corps 
fut  d'abord  inhumé  dans  cette  ville,  dans  l'église  des  PP.  Carmes; 
puis,  au  bout  de  quoique  temps,  il  fut  transporté,  selon  ses  der- 
nières volontés,  dans  la  cathédrale  de  Limoges  et  inhumé  dans  la 
dernière  chapelle  de  Tabside,  appelée  de  saint  Thomas,  où  il  avait 
fondé  une  vicairie.  «  Son  mausolée,  dit  le  P.  Bonaventure,  est 
relevé  au  milieu  de  la  chapelle  »  (1). 

Dans  un  ancien  Calendrier  de  l*Eglise  de  Limoges^  publié  par 
le  P.  Labbe,  on  lit  ce  qui  suit  : 

«  V.  idus  junii.  Hic  fiât  anniversarium  quondam  dom.  Guillelmi 
Amici  de  castro  Lemovicarum,  et  familiae  honestorum  burgensium 
Amici  oriundi,  Garnotenis  episcopi  ac  Hierosolymitani  palriarch», 
viri  utique  sanctissimi,  et  miraculis  in  dies  coruscantis,  hâc  die 
defuncti,  anno  Domini  MCCCLX,  supra  ejus  tumulum  in  capella 
S.  Thomas  (2). 

«  Le  cinq  des  ides  de  juin  (9  juin).  Qu'on  célèbre  l'anniversaire  du 
défunt  seigneur  Guillaume  Lamy,  originaire  du  château  de  Limo- 
ges, de  la  famille  des  Lamy,  honnêtes  bourgeois,  qui  fut  évéque 
de  Chartres  et  patriarche  de  Jérusalem,  homme  assurément  très 
saint,  et  qui  s^illustre  de  jour  en  jour  par  des  miracles  ;  sur  son 
tombeau,  dans  la  chapelle  de  Saint-Thomas  ». 

Dans  cette  chapelle,  qu'on  appelait  pour  cela  la  chapelle  du 
patriarche,  on  voyait  la  statue  en  pierre  d'un  évéque,  représenté  à 
genoux,  avec  celle  inscription  : 

GVILLERMVS 

AMICI 

PATRIARCHA 

IHEROSOLI 

MITA 

NV 

S. 

près  de  la  statue,  sur  une  lame  de  cuivre,  on  lisait,  au  xvii'*  siècle, 
l'inscription  suivante  : 

(  1}  P.  Bonaventurk,  l.  II,  p.  234. 

(t)  Bibliotheca  nooanxas,  Ubror.^  t.  Il,  p.  7G0. 

T.    XL,  3* 


8.1i  dOClÉTE   ARCHEOLOGIQUE  Et  illfttORtQUiS  DU  LlMOtJStK. 

Guillermus  Âmici,  ex  urbe  Lemovicensi  oriuDdus,  patriarchâ 
lerosoliraitanus  et  Forojuliensis  quondam  episcopus,  vir  pietatf 
iDsignis  et  miraculis  clarus,  apud  Montempessulanum  ex  bac  riia 
excedens,  migravit  in  cœlum  die  nona  mensis  junii,  aono  Vè^l 
Cujus  corpus  sacrum,  cum  primum  in  templo  S.  Mariae  de  Carmelo 
honorificis  exequiis  ecclesiasticae  sepullurse  mandalum  esset,  po>i 
aliquod  tempus,  juxta  susb  piaB  voluntalis  ultimum  elogiom,  ifl 
Ecclesiam  Lemovicensem  translatum,  ibidem  in  sacello  S.  Thomir 
nuncupato,  celeberrime  conditum  est,  beatam  cum  sancUs  resor- 
rectionem  expectans  (1). 

Celte  inscription  a  été  probablement  rédigée  au  coonmencemeDî 
du  xvH*  siècle  par  Bardon  de  Brun  (2;. 


XI 

Par  quel  concours  de  circonstances  le  patriarche  Lamy  serail-il 
mort  à  Montpellier? 

Si  nous  en  croyons  l'auteur  de  sa  vie,  le  vénérable  patriarche, 
après  avoir  été  appelé  de  Nicosie  à  Avignon  parle  pape  Innocent  VL 
et  lui  avoir  rendu  compte  de  sa  charge  pastorale,  aurait  eu  le  désir 
d'aller  voir  ses  parents  à  Limoges;  et  c'est  en  passant  par  Mont- 
pellier que,  saisi  d'une  fièvre  violente  il  aurait  rendu  son  âme  à 
Dieu.  Malheureusement  pour  cette  version,  Montpellier  n'est  pas 
sur  le  chemin  d'Avignon  à  Limoges.  Pitton,  dans  ses  Annales  de 
l'église  d'Aix,  donne  une  version  plus  vraisemblable,  la  voici  : 

«  Sesmaux,  par  l'avis  des  médecins,  Tobligèrentà  changer  d*air, 
et  d  aller  chercher  celuy  de  sa  patrie.  (C'est  leur  ordinaire  défaite, 
lorsque  la  maladie  a  mis  leur  art  en  déroute,  et  souvent  ils  ordon- 
nent ce  qu'ils  n'entendent  pas  :  car  le  véritable  air  natal,  est  celuy 
de  l'autre  monde,  puisque  nos  âmes  sont  de  Dieu).  Aussi  la  maladie 
de  notre  prélat  empirant,  il  fust  à  Montpelier  pour  consulter  les 
plus  célèbres  médecins  de  l'Europe.  L'escole  de  médecine  y  a  donûê 
(le  très  grands  hommes;  elle  a  cet  avantage  d'estre  la  première  du 
royaume  et  ses  professeurs  continueroient  dans  restiroe  de  très 
sçavants,  qui  leur  est  deûe  avec  justice,  et  qu'ils  ont  acquise  par 
leurs  doctes  escrits,  si  les  Régences  continuoienl  d'estre  mises  à  la 
dispute,  et  non  pas  à  l'enchère,  et  données  à  prix  d'argent,  ou  par 
la  faveur  d'une  personne  d'autorité  pour  quelque  service  imaginaire, 

(1)  Ap,  Baluze,  Vltœ  papar,  Aoenion,^  1693,  t.  I,  col.  OIS.  -    GaBi^ 
christiana,  l.  I,  col.  436. 
(2j  Voir  le  P.  BoNAVENruuE,  l.  lll,  p.  635, 


^UDK   BIOGRAPHIQUE  SUR   GUILLAUIÉE   LAMV.  fc3it 

ce  qui  est  un  mal  assez  commun  et  universel  dans  ce  siècle  cor- 
rompu. 

»  Les  médecins  de  cette  célèbre  Université  ne  purent  empêcher 
que  Tarchevôque  Amici  n'y  trouva  {sic)  la  (|n  de  ses  jours,  la 
soixantc-qualriesme  année  de  son  âge,  après  avoir  été  notre  prélat 
environ  deux  années,  et  huH  celuy  de  Chartres.  Son  corps  fust  mis 
en  depos  dans  Téglise  des  Carmes,  d'où  il  fust  porté  à  Limoges, 
lieu  de  sa  naissance,  laissant  une  bonne  odeur  de  sa  vie,  comme  le 
témoignent  les  paroles  des  Archives  de  celte  Eglise  qui  disent  : 
R.  D,  P.  Guillelmus  Amici  Aqu,  archiepi$.  erat  vir  sanctimonia 
insignis  (1)  ». 

XII 

sors   TITRE   DE   BIENHEUREUX 

Guillaume  Lamy  est  appelé  bienheureux  par  beaucoup  d'écri- 
vains limousins  :  par  Luc  Lamy,  son  biographe;  par  le  chanoine. 
CoUin,  dans  ses  Vies  des  Saints  du  Limousin  (2),  par  le  P.  Bona- 
venture  Saint- Amable  (3),  etc.  Les  Annales  manvscrites  de  Limoges 
lui  donnent  même  le  titre  de  saint  (4). 

Un  ancien  catalogue  des  évêques  de  Chartres,  rédigé  peu  de 
temps  après  sa  mort  (1380),  dit  quH7  est  réputé  saint  (5)  ;  dans  un 
ancien  calendrier  de  Féglise  de  Limoges,  que  nous  avons  déjà  cité, 
on  dit  de  lui  :  <i  Homme  très  saint,  qui  s'illustre  de  jour  en  jour 
par  des  miracles  »  (6);  Pilton,  dens  ses  Annales  de  l'Eglise  d'Aix, 
rapporte  une  note  tirée  des  archives  de  cette  église,  où  il  dit  de 
Guillaume  Lamy  :  «  homme  remarquable  par  sa  sainteté  (7);  les 
savants  auteurs  du  Gallia  christiana  disent  qu'il  est  mort  avec  une 
certaine  réputation  de  sainteté  (8). 

Le  P.  Bonaventure  raconte  plusieurs  guérisons  miraculeuses 
opérées  par  son  intercession  ;  elil  ajoute  que  «  le  vénérable  Bardon 
de  Limoges  a  recueilli  quelques  miracles  du  saint  quMI  (il  graver 

(I)  Annales  de  la  Sainte-Eglise  d'Aix,  par  M.  J.  Pitton,  Jocteur  en 
médecine,  de  la  ville  (i*Aix.—  Lyon,  1668,  in-4^  p.  182. 
(i)  Vies  des  Saints  du  Limousin^  1672,  p.  274, 
('-$)  Annales  du  Limousin ,  t.  III,  p.  635. 
(•4}  Annales  manuscrites  de  Limoges,  p.  !î3f. 
(h)  El  sanctus  repuiatur(ap.  Baluzb^Vc^c»  papar,  Aoenion,,  t.  f,col.9l  i). 

(6)  Viri  uiiqae  saDCtissimi,  et  miraculis  in  dles  coruscaniis  (ap.  Labbk, 
BibL  nooa  ms3.  libr.  t.  II,  p.  260). 

(7)  Vir  sancUmonia  insignis  (Annales  de  l'Eglise  d^Aix,  p.  18i^. 

(8)  GalUa  christiana,  i,  I,  coi.  364. 


536  SOCIÉTÉ   AnCHÉOLOGiQUE  ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIK. 

sur  une  lame  de  cuivre  et  attacher  à  la  muraille  près  de  son  lom 
beau  »  (t.  III,  p.  635). 

Parmi  ces  miracles,  citons  la  guérison  d'un  frère  carme,  noma'^ 
Annolet,  qui  était  lépreux,  et  qui  après  avoir  trempé  dans  de  IVa.^ 
bénite  des  fleurs  qui  étaient  auprès  de  son  tombeau,  en  lava  <•- 
corps  et  vit  sa  lèpre  disparaître  entièrement. 

Le  chanoine  CoUin  et  le  P.  Bonaventure disent  même  quonoi'- 
bre  la  fêle  du  bienheureux  Lamy  dans  le  diocèse  de  Chartres,  elc^^' 
par  Tordre  exprès  du  siège  apostolique  (1)  ;  ils  doivent  avoir  pai?' 
cette  assertion  dans  la  vie  du  bienheureux,  par  Luc  Lamy  ;  mi^^ 
d'après  des  renseignements  pris  à  Chartres,  ce  détail  n'est  pa^ 
exact. 

XIII 

C'est  sans  doute  à  cause  de  cette  réputation  de  sainteté  que  h 
tombe  du  patriarche  Lamy  fut  profanée  par  les  vandales  de  1*3. 
Leurs  mains  sacrilèges,  qui  épargnèrent  les  autres  torobeaui, 
fouillèrent  son  sépulcre  et  jetèrent  ses  ossements  au  feu.  Sa  léie. 
qui  fut  retirée  des  flammes,  fut  placée  plus  tard  dans  une  urc» 
que  Ton  conser\e  pieusement  dans  l'église  de  Saint-Pierre,  coran)'' 
on  le  voit  par  l'inscription  suivante,  gravée  sur  une  lame  de  cuivir, 
dans  la  chapelle  de  sainte  Anne,  qui  était  celle  des  pénitents  noirs. 

«  Dans  cette  urne  est  renfermé  le  chef  du  bienheureux  palriar- 
che  Lamy,  qui  jeté  avec  d'autres  ossements  au  milieu  dun  i^^ 
allumé  dans  l'église  de  Saint-Etienne  en  1793,  fut  plusieurs  foi^ 
rejeté  par  les  flammes.  Ce  que  voyant,  un  sonneur  la  ramassa  pi»*»- 
sèment,  et  la  remit  à  une  sœur  de  charité,  qui  elle-même  ea  tii 
cadeau  à  la  Compagnie  des  pénitents  noirs  de  Saint-Pierre.  CV- 
pourquoi  nous  l'avons  religieusement,  conservée  et  renfermée  dai^ 
l'urne  des  cendres  du  vénérable  Bardon  de  Brun,  le  3  mai  iSli» 
jour  de  l'Invention  de  la  Sainte-Croix,  et  placée  dans  celle  chapelle  on 
nous  faisons  nos  ofïices.  » 

Dans  cette  chapelle  de  sainte  Anne,  se  trouve  un  vitrail  qui  re- 
présente le  patriarche  Lamy.  Au-dessous  on  voit  ses  ârme>  : 
de  gueules  à  la  colombe  d'argenty  qui  sont  encore  aujourd'hui  l^"^ 
armoiries  de  la  famille  Lamy  de  La  Chapelle.  M"'  Lagorce,  ih'*' 
Lamy  de  La  Chapelle,  fit  placer  ce  vitrail  en  Thonneur  de  son  îHu^* 
tre  parent,  en  1887. 

Quelques  années  auparavant,  son  frère,  le  P.  Lamy,  de  la  Com- 
pagnie de  Jésus,  avait  transféré  le  chef  du  patriarche  dans  un  roli- 
quiiire  placé  au-dessus  de  l'urne  du  vénérable  Bardon. 

(I)  r.oLLiN,  vies  des  Saints  du  Limousin^  p.  274;  —  P.  BosAVumîB^ 

i.  iil,  p.  u:ij, 


ÉTUDE   BIOGRAPHIQUE   SUR   GUILLAUME  LAMY.  537 


APPENDICE 


I 


EPITAPHES  DE  GUILLAUME  LAMY  ;   INSCRIPTIONS  DE  SA  CHAPELLE. 

Dans  un  ouvrage  manuscrit  du  siècle  dernier  (1780)  qui  a  pour 
litre  :  Recueil  d'inscriptions  et  d'antiquités  de  Limoges^  par  l'abbé 
Legros,  nous  trouvons  quelques  détails  sur  les  épitaphes  de  Guil- 
laume Lamy  et  sur  diverses  inscriptions  qui  ornaient  la  chapelle 
(le  saint  Thomas,  où  le  patriarche  était  inhumé.  A  l'époque  où  fut 
rédigé  cet  ouvrage,  Tépitaphe  latine  que  nous  avons  rapportée 
plus  haut,  et  que  nous  avons  publiée  d'après  Baluze,  avait  disparu. 
Citons  le  manuscrit  de  Tabbé  Legros  : 

«  CV.  Dans  la  chapelle  de  saint  Thomas,  dans  la  cathédrale, 
sur  le  mur  collatéral  à  gauche,  en  y  entrant,  on  voit  trois  plaques 
de  cuivre,  dont  la  supérieure  représente  le  patriarche  Lamy,  en 
habits  pontificaux;  ses  armes  au-dessous,  et  autour  deux  bande- 
rolles  qui  portent  ces  mots  en  caractères  majuscules  de  notre 
temps  : 

Sur  Tune  : 

MVLTI  DICVNTVR  AMICI  :  MAGIS  AMICA  VERITAS. 

Sur  l'autre  : 

AMICVS,  ANIMiE  DIMIDIVM.  S.  Aug.  (1).  » 

Nous  lisons  dans  un  autre  manuscrit  de  l'abbé  Legros  que  ces 
inscriptions  étaient  l'œuvre  de  Bardon  de  Brun.  Ce  vénérable  prê- 
tre de  Limoges  avait  composé  un  recueil  de  la  vie  et  des  miracles 
du  patriarche  Lamy  qu'il  avait  fait  graver,  au  commencement  du 
xvii"  siècle,  sur  une  lame  de  cuivre  attachée  sur  le  mur  de  la  cha- 
pelle de  saint  Thomas.  Cet  ouvrage  de  M.  Bardon  était  en  latin  et 
gravé  sur  trois  colonnes  (2).  Le  P.  Bonaventure  confirme  le  fait  en 
ces  termes  :  v  Le  vénérable  Bardon,  de  Limoges,  a  recueilli 
quelques  miracles  du  saint,   qu'il  fit  graver  sur  une   lame  de 

(I)  Legros,  Recueil  d'inscriptions  et  d'antiquités  de  Limoges^  p.  66. 
Manuscrits  du  Séminaire. 
(3j  Legros,  Vies  des  Saints^  9  juin.  t.  lii,  p.  374,  note  1 . 


53d  SOCléTB  ARCniîOLOrilQUR  ET  niSTORlQUfe  ÙV  LIHOUSIR. 

cnivpp,  et  attacher  à  la  muraille  proche  de  son  tombeau  (1).  ' 
«  CVI.  Au-dessous  des  susdites  plaques  de  cuivre,  on  voit  h 
ligure  en  pierre  de  ce  patriarche,  qui  est  à  genoux  sur  on  prie- 
Dieu,  sur  la  face  antérieure  duquel  on  voit  ces  mots  gravés  cd 
caractères  majuscules  assez  conformes  aux  nôtres  : 

GUILLERMUS 

AMICI 
PATRIARCHA 

HEROSOLI- 

MITA  (2).  » 

Cette  leçon  nous  paraît  plus  exacte  que  celle  que  nous  avons 
publiée  d'après  Baluze. 

Voici  une  épitaphe  plus  moderne  :  citons  encore  Tabbé  Legros  : 
u  Dans  la  chapelle  de  saint  Thomas,  dans  Tëglise  cathédrale,  à 
gauche  en  entrant  dans  la  dite  chapelle,  on  lit  sur  une  lame  de 
cuivre  jaune,  appliquée  au  mur  collatéral,  Tëpitaphe  suivante  : 

D.  0.  M. 

Hic  jacet 
Reverendissimus  D.  D.  Guillelmus  Amici,  gallicè  Lamy, 

Patriarcha  Jerosolimitanus 
Ortu  Lemovix. 
Hujusce  Ecclesiae  quondam  canonicus  inclylus, 
Apostolicae  sedi  obsecutus,  varias,  alternalim,  diœceses  rexit, 

Pluribus  ut  prodesset. 

Zelum  quo  flagrabat  totus  impendit  totum 

In  commissas  sibi  oves  ; 

Solliciludine  pastor,  charitate  pater,  moribus  forma, 

Summorum  pontiflcum  benevolentiam,  cleri  amorem,  plebis  vola 

In  se  convertit 

Vir  utique,  démentis  VI,  papas  oculatissimi  judicio, 

a  Profunditate  scientiae  praeditus, 

»  Probitatis  venustate  conspicuus, 

»  Honoris  et  commodi  Regni  Francorum  zelator  sincerus.  » 

Anno  salutis  1360,  apud  Montempessulanum  obiit, 

Deo  plenus,  coelo  maturus  (3). 

Vilae  sanctions,  mortisque  beatae  famam  obtinet. 

Qnae  miraris  in  ipso,  imitari  satage  (4). 

(1)   P.    BONAVENTORE,  t.  Ul.  p.  634. 

(2)  Legros,  Recueil  d'Inscriptions^  etc  ,  p.  66. 

(3)  Dans  un  premier  projet,  à  la  suite  de  ce  mot,  on  trouve  la  ligne  suivante  : 
Nalali  solo  reddidit  corpus  hic  tumnlalum  (Leoros,  p.  9i). 

(4j  Lègros,  Recueil  me,  d'inscripilons  p.  49.  [Séminaire  de  LimogeB.) 


ÉTUDE   BIOGRAPIIIÛUR  SUR   GUILLAUME   LAMY.  53d 

Celle  épitaphe  fut  composée  en  1765  par  M.  l'abbé  Devoyon, 
alors  chanoine  delà  cathédrale  (1),  lorsque  le  Chapitre  de  cette 
église  se  détermina  à  revêtir  la  nudité  de  la  chapelle  du  patriarche, 
décorer  son  tombeau  et  illustrer  sa  mémoire.  L'abbé  Nadaud  ne 
goûta  pas  cette  épitaphe,  il  en  fil  une  critique  quil  envoya  à 
M.  Devoyon,  et  lui  substitua  la  suivante  à  laquelle  ce  chanoine  fit 
quelques  emprunts,  qu'il  a  insérés  dans  celle  qu*il  fit  imprimer  en 
tête  de  YEloge  du  patriarche  (2),  imprimé  en  1771  chez  Pierre 
Chapoulaud  à  la  suite  de  l'Eloge  de  Mb'  de  La  Fayette,  évoque  de 
Limoges. 

Voici  répitaphe  composée  par  Tabbé  Nadaud  (inédite)  : 

Hic 

Cum  sanctis 

Qui  aevo  suo  sanclus  reputalus, 

[Et  cum  sodalibus  suis 

Hujusce  Ecclesiae  canonicis] 

Beatam  resurrectionem  expectat 

GUILLELMUS  ÂMICI 

Lemovicensis. 


Vir  utique,  teste  summo  ponliBce  Clémente  VI, 

Profunditate  scientiae  prœditus, 

Probitatis  et  maturitatis  venustate  conspicuus, 

Honoris  et  commodi  régis  Francorum  zelator  sincerus, 

Ad  varios  apices  vicissim  sublimatus  est  : 

Cunctis  profuit. 


Camerae  apostolicae  auditor, 

Praepositus  Ahentimonasteriensis  et  Vaurensis, 

Aptensem  et  Carnotensem  rexitEcclesias; 

Forojuliensem  sibi  commendatam 

Sanctis  ordinationibus  et  laudabili  munificenlia  nobilitavit. 

Aquisextiensis  archiepiscopus, 

Demum  patriarcha  Hierosolymitanus, 

jÛbiit  apud  Montempessulanum, 

V.  idusjunii,  M.  CGC.  LX  (3). 

(1)  Plus  tard  supérieur  du  Séminaire  des  Missions  et  vicaire-général 
du  diocèse. 

(2)  Legros,  Recueil  d' Inscriptiona,  etc.,  p.  93.  {Manuscrits  du  Grand' 
Séminaire.) 

(3)  Legros,  Recueil  ms.  d'Inscriptions,  p.  93.  —  On  voit  que  malgré 
rautorilé  de  Baluze  et  du  GalUa  christianay  Nadaud  a  maintenu  à  Guil- 
laume Lamy  son  titre  d'archevêque  d'Aix. 


540  SOCIiri  AaCHROLOGIQUR   ET   HISTORIQOE  Dl)   LIMOUSIN. 

De  la  fin  du  xvu"  siècle  était  aussi  une  autre  inscription  grayée 
sur  une  lame  de  cuivre,  et  attachée  au  mur  collatéral,  à  droite  en 
enlranl,  en  face  du  tombeau  du  patriarche;  elle  portait  ce  qui  suit  : 

«  Ad  perpetuam  rei  memoriam. 

»  Illustrissime  et  Révérendissime 

»  Guillaume  Lamy,  qui  fut  auditeur  de  la  Rote  dans  la  cour  de 
Rome,  puis  évéque  de  Chartres,  administrateur  perpétuel  de  Fréjus, 
archevêque  d'Aix  et  patriarche  4e  Jérusalem,  mourut  à  Montpellier 
le  9«  juin.  Tan  1360,  et  son  corps  fust  transporté  à  Limoges,  suivant 
sa  dernière  volonté,  et  enseveli  dans  ce  monument,  dans  la  cha- 
pelle de  StThomas,  où  il  fonda  sa  vicairie.  Les  archives  de  la 
ville  d'Aix  et  Jean  Chenu,  parlent  de  lui  comme  d'ung  sainct,  et 
M.  Pillon,  aux  Annales  qu'il  a  faict  de  Téglise  d'Aix,  Sainte-Marthe, 
i.  \,  de  Aquens,  archiep,,  t.  2,  de  Camot.  episc,  fol.  492,  num.  Hî, 
de  ForojuL  episc,  fol  591,  num.  39  ;  Vir  fuit  sanctimonia  insignis 
qui  apud  Montempessulanum  animam  Deo  reddidit,  die  9  junii,  ann. 
1360,  Le  Dictionnaire  historique  dit  qu'il  étoit  bien  aimé  et  estimé 
de  Clément  VL  —  Helie  Lamy  estoit  chanoine  dans  cette  cathé- 
drale l'an  1391,  trente-un  ans  après  le  décès  du  patriarche. 
Après  luy  furent  M"  François  et  Jean  Lamy,  esleuz  par  le  Roy  aa 
haut  pais  de  Limousin,  François  vivoit  l'an  1S24  et  laissa  Jean  son 
ûls,  aussi  esluz.  Sa  maison  estoit  celle  qui  est  au  portail  Imbert, 
ou  est  l'estatue  du  patriarche.  Jean  laissa  Estienne  Lamy,  prévost 
de  Limoges,  auquel  appartenoit  la  maison  du  Roy  de  Navarre,  qui 
est  à  présent  celle  de  Thré^soriers,  etc.  (1).  » 

Cette  inscription,  relativement  récente,  manque  d'autorité. 


II 


MEMBRES   DE  LA   FAMILLE   LAMY  AU   XIV*   SIÈCLE 

/**  Etienne  Lamy 

Une  inscription  composée  de  dix  vers  léonins  se  trouvait  au  siècle 
dernier,  dans  le  sanctuaire  de  la  petite  église  de  Saint-Jean-Sainl- 
Etienne,  aujourd'hui  détruite.  Cette  inscription  avait  été  iranscriio 
par  l'abbé  Nadaud,  et  copiée  d'après  lui  par  l'abbé  Legros,  dan< 

(1]  LeoROS,  Vies  des  Saints  du  Limousin^  9  juin,  t.  III,  p.  37$. 


ÉTUDE   BIOGHAPHIQIJR   SUR    GUILLAUME  LAMY.  541 

son  Recueil  d'Inscriptions  et  d'Antiquités  de  Limoges,  Elle  est  iné- 
dite. Elle  se  rapporte  à  une  fondation  faite,  l'an  i3i2,  par  Etienne 
Lamy.  On  devait  dire,  tous  les  mercredis  (quarta  feriaj,  en  l'hon- 
neur de  Marie,  mère  du  Christ,  une  messe  chantée  à  haute  voix, 
avec  cierges  allumés.  Etienne  Lamy  s'était  engagé,  par  écrit,  à 
donner  pour  cette  fondation,  une  rente  de  seize  sols.  Il  avait  mis 
cette  condition  que,  si  on  cessait  de  dire  la  messe,  la  fondation 
serait  révoquée,  et  la  somme  affectée  à  cet  œuvre  serait  restituée  à 
rhérilier  du  fondateur.  L'inscription  se  termine  par  cette  prière  : 
Faites,  6  pieuse  Vierge,  que  votre  Fils  soit  apaisé^  par  le  donateur, 
afin  qu'il  lui  accorde  le  lieu  du  perpétuel  repos.  Amen. 

Voici  la  copie  de  l'abbé  Legros  : 

«  CCXIV.  A  Saint-Jean,  dans  la  cité  de  Limoges,  dans  le  sanctuaire, 
du  côté  de  l'épître,  on  lisoit  cette  inscription  maintenant  enlevée, 
ou  cachée  par  la  boiserie  : 

Anne  milleno  lercenleno  duodeno 

Hic  missam  dicl  Sleph[anu]s  stabilivit  Amici, 

1d  quarta  ferla  :  de  Christi  matre  Maria, 

Allé  caDtando,  candelas  [atjque  cremando. 

Octo  bis  assignans  solides,  scriptoque  (1)  signans 

Al  (2)  si  cesselur,  donatio  tune  revoc[elur], 

Dooatasqoe  res  habeal  (3)  suus  et  ievel  hères  (i), 

Distribuons  licite  celeslis  muQe[ra]  vilae. 

Fac  el  placatum  (5),  pia  Virgo,  donalore  (6)  nalum, 

Ui  concédai  ei  loca  perpeiuae  requiei.  AiN  (ameD)  (7).  » 

^°  Elie  Lamy 

Quelques  écrivains  ont  avancé  qu'Ehe  Lamy,  chanoine  de  Limo- 
ges, était  un  frère  du  patriarche.  11  ligure,  avec  deux  de  ses  con- 
frères, Séguin  de  Pompadour  et  Bernard  de  la  Tour,  dans  un  acte 
solennel  du  24  août  1370,  par  lequel  les  habitants  de  la  Cité  de 
Limoges  se  donnent  au  roi  de  France  et  lui  jurent  obéissance  et 

(i)  Copie  :  pictoq. 
(ï)  Ms:  \d. 

(3)  Ms  :  heat. 

(4)  Ms  :  has: 

(5)  Ms  :  deootum  qui  ne  rime  pas  avec  natum. 

(6)  Ms  :  dotore. 

(7)  Lkgkos,  Recueil  d'Inscriptions  et  d'Antiquités  de  Limoges,  p.  104. 
Manuscrits  du  Séminaire, 


5^2  SOCIÉTÉ   ARCBÉOLOGIQUR   RT   HtSTORlODE   DU   LIMOUSIN. 

fidélité  (1).  Au  mois  de  septembre  suivant,  la  cité  fut  prise  d^assaut 
et  saccadée  par  le  prince  de  Galles. 

«  Trois  ans  après  (1373),  il  n'y  avoit,  dit  le  P.  Bonavenlure,  que 
quatre  chanomes  résidons  dans  la  Cité,  et  y  vivant  très  pauvrement  : 
Mathieu  de  Fellelin,  HelieLamy,  Pierre  de  Soubrebost  et  Pierre  de 
Lubersac(2).  » 

D'après  une  inscription  de  la  chapelle  de  saint  Thomas  que  nous 
avons  déjà  citée,  Hélie  Lamy  vivait  encore  en  1391 ,  trente  et  un  ans 
après  la  mort  du  patriarche;  par  conséquent  c'était  plutôt  an  neveo 
qu'un  frère  de  Guillaume  Lamy. 

3»  Marguerite  Lamy 

Nous  lisons  dans  le  Gallia  christiana,  que  Marguerite  Lamy,  ab- 
besse  du  monastère  des  AUois  (aujourd'hui  commune  deLaGeney- 
touse,  Haute- Vienne),  en  1348  et.  1354,  avait  sous  sa  direction 
soixante  jeunes  filles  nobles  (3). 

Elle  figure  au  douzième  rang  à  partir  de  la  première  prieure,  et 
au  dixième  rang  parmi  les  abbesses  de  ce  monastère.  Voici  la  noie 
que  le  P.  Bonaventure  lui  a  consacrée  :  «  La  dixième  abbesse  Mar- 
guerite Amyge,  1347  (4)  ». 

Elle  était  contemporaine  et  vraisemblablement  parente  du  pa- 
triarche Lamy,  mais  nous  ne  savons  à  quel  degré.  Voici  la  date  de 
différents  actes  que  l'abbé  Nadaud  avait  trouvés  sous  son  nom  : 
«  Marguerite  Amici,  alias  Lamy  ou  Lamige,  de  Limoges,  1343, 
134S,  1348,  1387  (5)  ». 

Pierre  de  Soubrebost 

Pierre  de  Soubrebost,  chanoine  de  Limoges,  fut  un  serviteur 
fidèle  et  obéissant  du  patriarche  et  voulut  être  inhumé  près  de  loi. 
Il  y  a  quarante  ans,  on  voyait  son  épitaphe  engagée  dans  le  mur 
de  clôture  du  chœur,  du  côté  de  l'abside,  en  face  de  la  chapelle  où 
Guillaume  Lamy  avait  son  tombeau.  Depuis  les  réparations  mo- 
derne de  la  cathédrale,  cette  épitaphe  a  été  placée  dans  la  chapelle 

(1)  Voir  cet  acte  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique,  t.  XVill, 
p.  117. 

(2)  P.  Bonaventure,  1. 111,  p.  664. 

(3)  Xil.  Margarila  I.  Lamy  sexaginla  nobitibus  puellis  pra&crat  an.  t3i8 
cl  1354.  {Gallia  christiana^  l.  Il,  col.  617). 

(4)  P.  BONAVKISTURE,  t.   lli,  p.  499. 

(5)  Bulletin  de  la  Société  archéologique ^  t.  IX,  p.  I5i.  —  Guide  dt 
l* étranger  à  Limoges^  2**  par  lie,  p.  t62. 


ÉTUDE  BIOGRAPHIQUE  SUR   GUILLAUME   LAMY.  5i3 

de  saint  Joseph,  dans  la  muraille  à  gauche  en  entrant  :  en  voici  le 
texte  : 

liocjacet  in  loco  Dominus  P.  deSuperhosco. 

Nomine  vei  alio  dictus  de  Momilio. 

Vir  moribus  plcnus,  canonicus  Lemovicanus. 

Hic  voluit  poni,  patriarchae  junclus  honori  ; 

Cui  bene  servivit,  iideliler  et  obedivit. 

Iste  peragravit  Romam,  Jacobumqnc  Piclavis  : 

Hic  Katerinam  coluit,  Je  banne  m  que  Mariam, 

Illico  reversus,  gratus  fuit  sibi  lecius, 

Ubi  aegroiavii  pluribus  hebdomadis, 

  festo  Magdalene  usque  fcstum  Katcrine. 

Félix  obivii,  hora  nona  vere  finivil, 

Novembris  mensc,  quaria  vicesima  die, 

Anno  miileno  cenleno  ter  ociuageno 

Quatuor  adjunctis.  Requies  œterna  defunclis. 

Vos  qui  transitis,  quociens  venilis  cl  ilis, 

Cum  prece  vos  silis,  ul  Chrisius  sit  ipsi  mitis. 

Ici  gît  le  seigneur  Pierre  de  Soubrebost, 

Appelé  d'un  aulre  nom  du  MontelL 

Homme  de  bonnes  mœurs,  chanoine  de  Limoges. 

Il  voulut  éire  inhumé  dans  ce  lieu,  partageant  Tbonneur  du  palriarche, 

Dont  il  fui  le  fidèle  et  obéissant  serviteur. 

Il  alla  en  pèlerinage  à  Rome,  à  Saint-Jacques,  à  Poiti*MS  :  [Vierge. 

Il  eut  beaucoup  de  dévotion  à  Sainte-Catherine,  à  Saint-Jean,  ii  laS^iinle- 

\)h'i  qu'il  fut  de  retour,  son  lit  lui  fut  agréable, 

Il  y  resta  malade  plusieurs  semaines,  [Iherine  (24  novembre]. 

Depuis  la  fête  de  Sainte-Madeleine  {22  juillet)  jusqu'à  la  iôle  de  Sainte-Ca- 

Il  mourut  heureusement  et  expira  à  Theure  de  none  [3  heures  du  soir). 

Le  vingt-quatrième  jour  du  mois  de  novembre. 

L'an  mil  trois  cent  quatre  vingt, 

El  quatre  {ans)  de  plus.  —  Repos  éternel  aux  défunts  ! 

0  vous  qui  passez,  toutes  les  fois  que  vous  allez  el  venez. 

Obtenez,  par  vos  prières,  que  le  Christ  soit  doux  pour  lui  ! 


III 


V1CAIR1E  DE   SAINT  THOMAS 

Le  patriarche  Lamy  avait  fondé  une  vicairie  dans  la  chapelle  de 
saint  Thomas,  oiï  il  était  inhumé.  Quelles  en  étaient  les  conditions? 
Quels  en  étaient  les  revenus?  Nous  l'ignorons  :  nous  n'avons  pu 
nous  procurer  le  titre.  Nous  voyons  par  une  note  manuscrite  de 


!$U  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUR   RT   HISTORIQUK   DU   LIMOUSm. 

TabbéNadaud,  que  M.  Vidaud,  capitaine,  nomma  à  cette  vicairieen 
1736.  Nous  lisons  en  outre  dans  un  mémoire  de  M.  Maurice  Ârdant, 
publié  dans  les  Ephémérides  de  i837,  que  la  famille  Navières-des- 
Gouttes  était  en  possession  de  nommer  le  prêtre  titulaire.  Les  der- 
niers ecclésiastiques  qui  en  ont  été  pourvus  sont  HM.  Roroanet-de- 
Briderie,  Navières,  ancien  curé  de  Saint-Pierre,  fondateur  du 
bureau  de  bienfaisance  et  M.  Tabbé  Cogniasse.  Le  titre  de  ce 
bénéfice,  qui  m'a  été  communiqué,  ajoute  M.  Maurice  Ârdant,  est 
entre  les  mains  de  M.  Cogniasse  du  Breuil,  conseiller  auditeur  (i). 

L'abbé  Arbellot. 


(I)  Ephémérides  de  1837^  par  M.  Laurknt,  p.  Î6î. 


UN  TRIPTYQUE  EN  ÉMAIL  PEINT  EN  GRISAILLE 


par  Martin  Didier 


AU  MUSES  CIVIQUE  DE  BOLOGNE 


Le  Musée  civique  de  Bologne  (Italie)  possède  cinq  émaux 
peints  limousins  des  xvi'  et  xvii*  siècles,  tous  intéressants  à  plus 
d'un  titre  ;  mais  la  pièce  principale  est  un  grand  triptyque  peint  en 
grisaille,  représentant  des  scènes  de  la  vie  de  saint  Jean-Baptiste, 
et  qui  porte  la  signature  M.  D.  (avec  un  I  dans  le  D),  dont  on  peut 
voir  la  reproduction  jointe  à  cette  étude  (1).  Disons  tout  d'abord 
que  c'est  un  des  chefs-d'œuvre  de  notre  école  limousine  au  mo- 
menl  de  son  apogée  ;  il  doit  dater  du  milieu  du  xvi*  siècle.  Il  est 
signalé  comme  une  pièce  extrêmement  précieuse  dans  le  Guida  del 
Museo  civico  di  Bologna,  édition  de  1887,  page  59,  salle  XIV, 
ouvrages  d'artistes  divers,  lettre  A.  En  voici  la  description  dé- 
taillée : 

Grand  triptyque  de  bois  doré,  long  de  1™  28  c,  y  compris  les 
deux  volets,  et  haut  de  0"  59  c,  y  cpmpris  le  fronton.  La  monture 
du  panneau  central  est  rectangulaire,  en  largeur,  et  divisée  en  six 
compartiments  par  deux  meneaux  et  une  traverse  formant  croix 
avec  eux;  aux  deux  angles  supérieurs,  la  moulure  d'encadrement 
est  arrondie  et  laisse  en  dehors  un  écoinçon  triangulaire  de  chaque 

(1)  Le  30  janvier  1892,  M.  Luigi  Frali,  directeur  de  la  Section  du 
Moyen  Age  et  de  la  Renaissance  de  ce  Musée,  nous  a  fait  Thouneur  de 
faire  exécuter pournous  une  excellente  photographie  de  ce  triptyque,  qui  a 
servi  à  donner  la  reproduction  ci-jointe,  sur  nos  instances  personnelles  et 
celles  de  notre  dévoué  confrère,  M.  l'abbé  Georges  Ardant,  pendant  son 
séjour  en  Italie.  Nous  sommes  heureux  de  les  en  remercier  ici  de 
nouveau. 


546  âÔClKtÉ   ARCHROLOGIQÙ^    Bt   UlSTOtlfQUË  DU  LIlÉOUSlft. 

Côte;  le  panneau  est  surmonté  d'un  fronton  formé  de  deux  longues 
accolades  élégamment  surbaissées.  La  disposition  des  deux  volets, 
combinés  pour  épouser,  une  fois  fermés,  la  forme  extérieure  du 
panneau  central,  comprend  en  bas  un  compartiment  rectangulaire 
séparé,  par  la  traverse,  du  compartiment  supérieur,  lequel  est  ar- 
rontli  du  côté  de  la  charnière,  un  écoinçon  de  ce  même  côlé,  et 
au  dessus  une  accolade  correspondant  à  la  moitié  du  fronton  cen- 
tral. Il  en  résulte  que  les  plaques  d'émail  sont  disposées  horizon- 
talement en  trois  ordres  superposés,  savoir  :  au  premier  rang,  en 
bas,  cinq  plaques  rectangulaires,  une  sur  chaque  volet,  et  trois  sur 
le  panneau  principal,  hautes  chacune  deO"  225et larges  deO"  165, 
sauf  celle  du  milieu,  qui  ne  mesure  que  0™  130  en  largeur.  —  Au 
deuxième  rang,  au-dessus  des  traverses,  cinq  autres  plaques,  de 
mêmes  largeurs,  hautes  de  0"  131.  —  Enfin,  au  troisième  rang, 
d'abord  les  quatre  plaques  triangulaires  qui  garnissent  les  écoin- 
çoQs  adossés  deux  à  deux  de  chaque  côté  des  charnières  supérieu- 
res; puis  les  quatre  plaques  allongées,  terminées  en  pointe,  qui 
occupent  l'intérieur  des  accolades  du  fronton.  Au  total,  dix-huit 
plaques  d'émail,  peintes  en  grisaille  et  or. 

L'arrangement  général,  qui  fournit,  comme  on  l'a  vu.,  un  ensem- 
ble de  dimensions  considérables,  est,  en  somme,  fort  simple,  mais 
de  relîet  le  plus  heureux.  Nous  allons  voir  que  les  peintures  exé- 
cutées par  larliste  offrent,  de  leur  côté,  un  très  grand  intérêt. 

Le  premier  rang  est  consacré  aux  sujets. 

Première  plaque  (volet  gauche).  Lenfance  de  saint  Jean  (?).  Au 
premier  plan,  à  gauche,  une  femme  est  assise  à  terre,  allaitant  un 
enfant;  en  face  et  la  regardant,  se  tient  un  vieillard  debout;  au 
second  plan,  au  milieu,  deux  hommes  et  une  femme  causent,  ac- 
croupis; au  fond,  autres  personnages,  animaux  et  arbres. 

Deuxième  plaque  (compartiment  gauche  du  panneau  cenlrall. 
Le  Baptême  de  Notre-Seigneur.  Notre-Seigneur  est  debout  dans  le 
Jourdain,  nu,  avec  une  petite  draperie  seulement  au  milieu  du 
corps,  les  mains  jointes,  tourné  de  trois  quarts  à  droite;  il  plonge 
dans  l'eau  jusqu'au-dessus  des  genoux.  Saint  Jean,  à  gauche,  un 
genou  en  terre  sur  la  berge,  vê(u  d'une  peau  d'animal  et  d'un  man- 
teau flottant,  verse  de  la  main  gauche  l'eau  sur  la  tête  du  Sauveur. 
A  droite,  en  arrière-plan,  un  petit  ange,  aux  ailes  éployées,  se  tient 
debout  sur  la  rive,  une  draperie  entre  les  bras.  Au-dessus  du  Christ 
plane  le  Saint-Esprit,  sous  la  forme  d'une  colombe;  et,  tout  à  fait 
en  haut,  le  Père  Eternel  apparaît  ami-corps  dans  les  nuages,  les 
bras  étendus,  bénissant  de  la  main  droite,  et  la  gauche  appuyée 
sur  le  globe  du  monde.  A  droite  et  à  gauche,  quelques  arbres;  au- 
delà  du  Jourdain,  des  collines. 


tjN  tri^tYqob  èH  ÉstÀfL  ifbiNt  bn  crisailLr.  84*9 

Troisième  plaque  (comparliment  de  milieu  du  panneau  central). 
La  Prédica'Aon  de  saint  Jean.  Saini  Jean  debout,  au  centre,  dans  le 
même  costume  que  sur  la  plaque  précédente,  parle  à  la  foule,  dont 
il  est  séparé  par  une  barrière  rustique.  Il  appuie  son  argumenta- 
tion du  geste  des  deux  mains,  dont  les  index  se  joignent.  De  cha- 
que côté,  groupes  de  personnages  habilement  étages,  hommes, 
femmes  et  enfants.  En  avant,  sont  couchés  un  lion  et  un  cerf.  Fond 
de  forêt. 

Quatrième  plaque  (compartiment  droit  du  panneau  central).  La 
Décollation  de  saint  Jean,  Au  premier  plan,  à  gauche,  le  corps  du 
saint,  décapité,  est  agenouillé  et  prosterné  en  avant,  les  bras  liés. 
Derrière  lui,  le  bourreau  debout,  appuyé  de  la  main  droite  sur  une 
longue  épée,  dépose  de  la  gauche  la  tête  de  saint  Jeaû  sur  le  pla- 
teau que  lui  présente  Salomé,  s'avançant  vers  la  gauche.  Deux 
vieillards  et  diverses  figures  occupent  le  fond.  La  scène  se  passe 
dans  un  intérieur  d'appartement.  Au-dessus  de  la  scène  principale, 
et  balançant  le  motif  de  la  deuxième  plaque.  Dieu  le  Père  dans  les 
nuages,  la  table  du  festin,  à  laquelle  quatre  petits  personnages 
sont  assis,  et  Salomé  apportant  la  tête  de  saint  Jean  sur  un  plat  à 
Hérodiade. 

Cinquième  plaque  (volet  droit).  Sujet  inconnu.  Un  homme  âgé 
est  assis  en  avant  à  droite,  à  côté  d*un  petit  enfant  nu  qui  joue  avec 
un  chien;  un  autre  homme  est  accroupi  derrière  lui.  A  gauche,  un 
homme  et  une  femme  debout,  causent  ensemble.  Les  quatre  per- 
sonnages semblent  porter  leur  attention  sur  un  événement  qui  se 
passerait  à  droite,  en  dehors  du  tableau.  Dans  le  lointain,  quatre 
petites  figures  en  avant  d'un  bois  à  droite,  une  colline  surmontée 
d'un  château  et  le  ciel. 

Le  deuxième  rang  de  plaques  est  entièrement  occupé  par  de  Tar- 
chitecture  et  de  Tornementation.  ^ensemble  de  la  composition  a 
été  di<^posé  de  façon  à  encadrer  les  sujets  dans  un  édifice  architec- 
tural de  style  Renaissance,  supporté  par  des  pilastres  et  des  sou- 
!)assements  qui  font  partie  du  premier  rang,  tandis  qu'au  second 
s'élèvent  les  frontons,  amortissements,  vases,  figurines,  consoles 
feuillagées,  etc.,  qui  couronnent  si  richement  le  monument.  La 
reproduction  ci-jointe  nous  dispense  d'une  description  détaillée. 

Au  troisième  rang,  comme  nous  Tavons  indiqué  déjà,  se  trouvent 
les  quatre  petits  anges  des  écoinçons  volant  dans  les  nuages  et 
sonnant  de  la  trompette;  et  les  quatre  anges  plus  grands  et  dans 
la  même  attitude,  sur  les  deux  plaques  du  fronton  central  et  les 
deux  demi-frontons  des  volets.  Pour  ne  pas  revenir  sur  ce  détail, 
disons  de  suite  que  rien  ne  pouvait  mieux  convenir  au  couronne- 
ment de  l'œuvre  que  ces  figures  célestes  qui  planent  dans  l'espace 


548  SOCIETE  ARCHEOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

au-dessus  de  la  composilion  et  garnissent  si  bien  les  nus  du  fron- 
ton et  des  écoincons. 

Au-dessus  du  sujet  central,  la  Prédication  de  saint  Jean,  le  fron- 
ton semi-circulaire  domine,  coname  il  convient,  les  frontons  trian- 
gulaires latéraux.  Son  tympan  est  occupé  par  un  écu  de  forme  ita- 
lienne que  soutiennent  deux  enfants  nus.  Sur  le  champ  de  i*écu  on 
lit,  en  lettres  capitales  d'or  *  M  *  D  *  avec  un  I  dans  la  boucle  du  D. 

La  partie  extérieure  du  triptyque  est  en  bois  naturel,  sans  aucun 
ornement. 

Ce  monument,  considéré  à  Bologne  comme  un  des  objets  les 
plus  précieux  du  Musée  civique,  et  d'une  conservation  parfaite,  esi 
entré  dans  cette  collection  lors  de  Tincorporation,  dans  cet  établis- 
sement^ du  Musée  de  TUniversité  ;  il  en  faisait  partie  depuis  1814, 
ainsi  qu^il  ressort  du  Guide  de  ce  Musée,  publié  par  Schiassi,  qui 
n'indique  pas  la  provenance  antérieure.  C'est  à  M.  le  directeur, 
Lnigi  Frati,  que  nous  devons  ces  intéressants  renseignements. 

Cette  œuvre  considérable  est   également   remarquable  par  \à 
composition,  le  style  et  l'exécution;  elle  est  digne  d'élie  classée 
parmi  les  plus  belles  productions  de  l'école  de  Limoges.  Au  pre- 
mier abord  on  est  frappé  Je  son  aspect  aussi  majestueux  qu'êlr- 
ganl.  L'édifice  architectural  qui  encadre  les  tableaux  ne  nuit  en 
rien  à  leur  effet,  malgré  sa  très  réelle  importance.  De  robustes 
pilastres,  reposant  sur  un  soubassement  heureusement    propor- 
tionné, supportent  un  solide  entablement,  terminé  lui-même  par 
des  frontons  triangulaires  latéralement  et  semi-circulaire  au  cen- 
tre. Chaque  scène,  comprise  dans  une  travée  du  monument,  reçoit 
ainsi  son  encadrement  particulier  et  se  lie  intimement  à  Tarrange- 
ment  général.  Chaque  partie,  tout  en  conservant  sa  valeur  propre, 
concourt  admirablement  à  l'effet  d'ensemble,  grâce  à  l'unité,  à 
l'harmonie  simple  et  savante  du  plan.  Et  cette  unité  n'a  nullement 
exclu  la  variété,  car  l'artiste  a  fait  preuve  dans  son  décor  d'une 
richesse  d'imagination  surprenante;  ses  motifs,  pleins  de  verve, 
sont  presque  tous  variés,  mais  la  pondération  est  si  juste  que  Toeil 
n'éprouve  aucune  fatigue,  aucun  trouble  à  errer  au  milieu  des  figu- 
res, de  la  construction  générale  et  des  détails.  La  monture,  elle- 
même,  si  sobre  avec  sa  forte  moulure  et  ses  petits  bois,  accuse  les 
divisions  principales  aussi  heureusement  que  la  solide  armature 
dune  verrière  bien  comprise.  Elle  n'a  pas  à  dissimuler  sa  fonction, 
du  moment  où  elle  la  remplit  si  justement.  D'ailleurs,  à  la  robus- 
tesse du  monument  s'allient  une  élégance  et  une  originalité  plei- 
nes de  charmes.  Si  on  a  mis  et  maintenu  les  parties  essentielles 
franchement  en  place,  on  leur  a  enlevé  toute  lourdeur  par  Tadjonc- 


MUSÉE     civigi 


Triptyque  en  é 


I::      BOLOGNE 


'  Martin  Didier 


fini 
''i'; 

'Ul 
àv*; 


Nu 


UN   TPlPfvQUE   EN    ÉMAlt   PEINT   E^   GRtSAILLE.  Hii 

tion  d'un  décor  qui  court  partout,  sur  les  soubassements,  socles, 
pilastres,  entablements,  tympans,  etc.,  en  rinceaux,  trophées,  car- 
louches,  mascarons,  têtes  de  chérubins,  bustes,  vases,  consoles 
chimériques,  amours,  génies,  anges,  etc.,  tout  cela  semé  à  profusion, 
avec  une  science  qui  atteint  le  brio,  mais  d'une  main  toujours  maî- 
tresse d'elle-même,  et,  lorsqu'il  le  faut,  aussi  discrète  que  presti- 
gieuse. 

Passant  à  l'examen  des  sujets  proprement  dits.  Ton  n'est  pas 
moins  frappé  de  la  belle  tournure  des  personnages.  La  noblesse 
des  poses  et  des  ajustements  se  ressent  de  l'école  de  Raphaël. 
Nous  ignorons  d'après  quel  maître  l'artiste  a  exécuté  ces  scènes, 
car  nous  n'osons  supposer  qu'elles  soient  de  sa  création.  L'in- 
fluence italienne  est  évidente  dans  la  composition  et  dans  le  style 
des  figures  qui  sont  d'un  dessin  magistral.  D'ailleurs  c'est  presque 
toujours  chez  Raphaël  et  les  grands  maîtres  italiens  que  Martin 
Didier  prend  ses  modèles.  En  même  temps,  l'émailleur,  qui  sem- 
ble amoureux  plus  que  pas  un  du  beau  classique,  leur  donne  cet 
air  sain  et  robuste  qu'il  a  su  imprimer  à  toutes  ses  productions  et 
qui  est  une  des  caractéristiques  de  son  talent,  il  faut  noter  aussi 
chez  lui  celte  façon  particulière  d'éclairer  le  blanc  des  yeux  de  ses 
personnages  d'une  touche  éclatante  dont  l'effet  est  accentué  par 
le  froncement  des  sourcils  et  qui  donne  un  certain  air  farouche  à 
ses  figures,  mode  d'expression  qu'il  semble  affectionner  particuliè- 
rement, ainsi  que  Couly  Nouailher  et  quelques  autres  émailleurs 
de  la  Renaissance. 

Ici,  comme  dans  presque  tous  ses  émaux,  Martin  Didier  a  fait  des 
enlevages  à  la  pointe  la  base  de  son  travail.  Une  fois  les  plaques 
émaillées  en  noir,  il  les  a  enduites  d'une  mince  couche  d'émail 
blanc.  C'est  sur  cette  dernière,  séchée  mais  non  cuite,  qu'après 
avoir  décalqué  tout  son  sujet,  il  l'a  dessiné  et  modelé  à  l'aide  de 
traits  et  hachures  qui  enlevaient  la  poussière  blanche  pour  faire 
apparaître  le  fond  sombre.  Ce  procédé  offre  le  grand  avantage  de 
laisser  l'émailleur  traiter  en  toute  liberté  et  à  loisir  un  sujet  de 
longue  haleine,  puisque,  travaillant  sur  une  couche  sèche,  il  peut 
abandonner  et  reprendre,  à  volonté,  son  sujet.  La  méthode  ordi- 
naire de  modelé  en  blanc  au  pinceau  oblige,  au  contraire,  l'artiste 
à  pousser  d'une  seule  traite  dans  la  pâte,  et  jusqu'au  bout,  chaque 
partie  distincte  de  son  travail,  ce  qui  présente  quelquefois  de  très 
réelles  difficultés,  sur  des  figures  de  grande  dimension,  par  exem- 
ple; la  volatilisation  assez  rapide  de  l'essence  ne  laisse  pas  toujours 
le  temps  de  parfondre  les  teintes  selon  les  besoins  du  modelé.  Par 
contre,  les  enlevages  à  la  pointe  ont  l'inconvénient  de  communiquer 
de  la  dureté  et  de  la  sécheresse  au  travail.  Martin  Didier  y  a  remé- 

T.   XL.  3S 


^OO  SOClBtB  ARCHEOtOÛlQtJB   ET  filSfORtQtlÉ  DtJ  LlMOUStlC. 

dié,  comme  il  convenait,  par  des  lavis  de  blanc  au  pinceau  étendus 
en  diverses  couches  fixées  chaque  fois  par  le  feu.  Ses  enlevages 
couvrent  presque  toutes  les  plaques,  où  Tarchitecture,  les  fonds  et 
les  ombres  n'offrent  qu'un  réseau  de  petites  hachures,  croisées  ou 
non,  ténues  et  serrées;  mais,  par-dessus,  les  glacis  plus  on  moins 
légers  de  blanc,  gradués  habilement  des  demi-teintes  aux  empâte- 
ments des  lumières,  donnent  le  moelleux  et  Téciat  et  adoucissent  le 
travail  préparatoire  de  la  pointe,  qui  ne  communique  pins  que  de 
la  netteté  et  de  la  délicatesse. 

Cet  ouvrage  est  d*un  très  haut  intérêt,  tout  à  la  fois  pour  l'élude 
de  Tœuvre  de  son  auteur,  qu'il  place  au  premier  rang  de  nos  artistes 
locaux,  et  pour  la  connaissance  de  notre  art  limousin  lui-même, 
qu'il  nous  révèle  sous  un  autre  aspect  que  celui  des  travaux  habi- 
tuels de  nos  émailleurs.  Ces  derniers,  en  effet,  ont  exécuté  presque 
toujours  des  œuvres  spéciales  plus  ou  moins  remarquables  à  tel  ou 
tel  point  de  vue.  S'ils  ont  tenté  de  faire  des  monuments  d'ensemble, 
ils  s'y  sont  pris  en  exécutant  des  séries,  des  suites  de  pièces  isolées, 
rapprochées  ensuite  et  groupées  dans  un  même  cadre  de  dlsposilion 
plus  ou  moins  heureuse  :  témoins,  les  tableaux  de  la  Sainte-Cha- 
pelle, de  Léonard  Limosin,  où  chaque  sujet  se  suffirait  à  lui-même; 
ou  bien  encore  les  grands  portraits  du  même  arliste,  dont  l'effet  est 
considérablement  augmenté  par  la  monture,  grâce  à  un  arrangement 
ingénieux,  et  voilà  tout. 

Ici  il  en  est  autrement.  L'artiste  a  conçu  un  monument,  il  en 
a  fait  le  plan  et  coordonné  les  différentes  parties,  non  seulement  en 
vue  d'un  effet  général  auquel  elles  viennent  se  rattacher  avec 
bonheur,  mais  comme  les  membres  d'un  tout  ihlimement  unis 
les  uns  aux  autres.  Que  la  composition  des  sujets  proprement  dits 
soit  sienne  ou  non,  il  n'en  est  pas  moins  créateur  d'une  œuvre,  et  il 
l'exécute  en  maitre.  Et  ce  maître  semble  être  un  des  plus  savants 
de  notre  école.  Outre  l'aspect  gras  et  éclatant  qu'il  donne  à  ses  tra- 
vaux, le  grand  style  de  ses  figures,  la  beauté  du  modelé  et  la  puis- 
sance d'effet  supérieure  qu'il  atteint,  si  l'on  étudie  de  près  ses  beaux 
ouvrages,  on  est  frappé  de  leur  méthode.  Dans  ce  triptyque,  par 
exemple,  tant  pour  l'arrangement  que  pour  l'exécution,  tout  esl 
raisonné  et  pesé,  mais  sans  fatigue  et  sans  froideur  ;  la  verve  ne  lui 
fait  pas  défaut,  mais  il  ne  s'y  laisse  pas  entraîner,  et  son  œil  ne  perd 
jamais  la  justesse  de  l'effet  ;  il  arrive  à  un  fini  délicat  et  son  style» 
garde  toute  sa  puissance.  Il  est  en  pleine  possession  de  son  talent. 
Avec  les  procédés  de  Pierre  Reymond,  il  a  euiprunté  les  effets  de 
Jean  III  Pénicaud,  et  s'il  montre  moins  de  fougue  que  ce  dernier,  il 
fait  preuve  de  plus  de  science. 


UN  TRI^TYQVB  EN   ÉMAIL   PEINT   EN   GRlâAlLLE.  8îil 

Nous  avons  donné  à  l'auteur  du  triptyque  de  Bologne  le  nom  de 
Martin  Didier,  parce  que  l'on  est  convenu  de  désigner  ainsi  Témail- 
leur  qui  signe  M.  D.  (souvent  avec  un  Idans  le  Dj.  C'est  M.  le  comte 
L.  deLaborde  qui,  ayant  trouvé  dans  les  comptes  royaux  de  1599  Par- 
ti cle  suivant  :  A  Martin  Dicdier,  esmailleur  de  Sa  Majesté,  la  somme 
de  trente  livres  tournois  à  lui  ordonnée  pour  ses  gaiges,  en  a  conclu 
que  cet  émailleur  ne  devait  être  autre  que  notre  artiste,  lequel 
n'aurait  employé  dans  ses  signatures  que  les  initiales  de  son  nom. 
Mais,  il  est  impossible  que  ce  Martin  Dicdier,  qui  est  resté  en  charge 
jusqu'en  1609,  soit  l'auteur  du  triptyque  de  Bologne  et  des  nom- 
breux travaux  signés  ou  non  mais  reconnaissables  pour  être  de  la 
même  main.  Tous  ces  ouvrages  datent  du  milieu  du  xvi*  siècle,  de 
Tapogëe  de  notre  art  local,  du  moment  où  l'émail  bat  son  plein  à 
Limoges,  et  Témailleur  du  roi,  qui  cède  sa  charge  de  son  vivant  à  son 
fils,  en  1609,  ne  devait  être  qu'un  enfant  lorsqu'ils  ont  été  pro- 
duits. En  outre,  ce  nom  de  Dicdier  n'est  pas  limousin,  il  ne  se  ren- 
contre jamais  dans  nos  écrits  du  Moyen  Âge  ou  de  la  Renaissance 
(ce  n'est  que  sous  la  forme  Dizier  qu'on  le  voit  paraître  dans  la 
Creuse)  ;  le  prénom  de  Martin  lui-même  est  très  rare  à  Limoges  au 
XVI''  siècle.  Par  contre,  M.  D.  fait  suivre  quelquefois  sa  signature  des 
lettres  PP,  ou  du  mot  PAPE,  qui  ne  figurent  pas  à  l'article  des 
comptes  royaux  précités,  mais  qui  nous  fournissent  sans  doute  Tin- 
dication  d*un  nom  ou  surnom  très  limousins,  encore  de  nos  jours. 
Quel  est  donc  le  vrai  nom  de  l'émailleur  M.  D?  L'état  actuel  des 
connaissances  historiques  locales  ne  permet  pas  même  de  hasarder 
timidement  une  hypothèse,  et  nous  devons  attendre  que  le  dépouil- 
lement de  nos  archives  ou  quelque  heureuse  découverte  nous 
donne  la  clef  de  cette  énigme  et  permette  de  déchirer  le  voile 
derrière  lequel  s'est  abrité  trop  modestement  le  talent  de  ce  grand 
artiste  (1). 

Quoiqu'il  soit,  il  n'en  est  pas  moins  une  des  gloires  de  l'école  de 
Limoges. 

Notre  émailleur  semble  avoir  affectionné  tout  spécialement  les 
sujets  tirés  de  la  vie  de  saint  Jean-Baptiste.  Portait-il  lui-même 
parmi  ses  prénom3  celui  du  Précurseur,  lui  avait-il  voué  un  culte 


(1)  Un  auteur  italien,  Schiassi,  dont  nous  avons  déjà  parlé,  avait  donné 
une  explication  aussi  erronnée  qu'ingénieuse  du  monogramme  M.  D. avec  un  I. 
II  y  voyait  tout  simplement  le  millésime  1501.  11  va  sans  dire  que  cette  in- 
terprétation n'a  pas  besoin  d'être  réfutée.  11  ne  faisait  d'ailleurs  qu'émettre 
le  premier^  ou  rééditer  l'hypothèse  émise  par  Maurice  Ardant  a  EmaiUeurs 
et  EmaUlerie  de  Limoges  s.  —  Islc,  4855,  page  142. 


852  SOClÉTi^  ARGËÉOLOGTQUfi  Et  HI&TOàlOUE  Dt)   LllÉOUSlft. 

particulier  ou  recevait-il  d'une  confrérie,  d*une  communauté,  d'une 
personne  puissante,  de  fréquentes  commandes  en  rhonneur  du 
saint?  Nous  Tignorons.  Toujours  est-il  qu'il  s'est  plu  à  lui  consacrer 
son  pinceau.  Nous  connaissons  quantité  de  ses  plaques  reproduisant 
des  épisodes  de  la  vie  de  saint  Jean-Baptiste,  et  pas  moins  de  dii 
triptyques  plus  ou  moins  importants  et  analogues  à  celui  de  Bo- 
logne. 

Le  Musée  impérial  de  TErraitage,  à  Saint-Pétersboug,  possède  un 
triptyque  qui  est  une  réplique  à  peu  près  exacte  de  celui  dont  noD:^ 
venons  de  nous  occuper.  A  cause  de  son  importance  et  de  la  simi- 
litude frappante  des  deux  monuments,  nous  n'hésitons  pas  à  en 
donner  la  description  (i).  Il  provient  de  l'ancienne  collection 
Basilewsky,  achetée  en  bloc,  pour  six  millions,  en  1884,  par  S.  M. 
l'Empereur  de  Russie. 

«  Collection  de  l'Ermitage  impérial  à  Saint-Pétersbourg,  n*  434. 
Triptyque  formé  de  dix  plaques  d'émail.  Grandes  plaques,  H.  0,240; 

—  L.  0,150.  Petites  plaques,  H.  0,150;  L.  0,150.  Art  français, 
xvi«  siècle.  —  Martin  Didier  dit  Pape. 

»  Triptyque  en  cintre  surbaissé  composé  de  dix  plaques  —  cinq 
rectangulaires  —  une  carrée  —  et  quatre  cintrées. 

»  Partie  centrale  formée  de  six  plaques.  Sur  les  trois  plaques 
inférieures,  La  Prédication  de  saint  Jean-BaptiMe;  plaque  cen- 
trale, saint  Jean  nimbé,  debout,  protégé  contre  la  foule  par  une 
traverse  de  bois  fixée  à  deux  troncs  d'arbre.  Un  lion  et  un  cerf  cou- 
chés au  premier  plan.  A  droite,  en  arrière-plan,  une  femme  assise 
à  terre  tenant  un  entant  nu,  et  deux  personnages  au  fond  ;  à  gauche, 
des  hommes  et  des  femmes  assis  à  terre,  chantant  en  s'approchant 

—  fond  d'arbres  —  sur  le  terrain  à  gauche  le  monogramme  M.  D. 
»  Plaque  de  droite  —  au  premier  plan,  une  femme  assise  à  terre 

coiffée  d'un  turban  plat,  allaitant  un  enfant,  à  côté  d'un  veillard 
debout  —  huit  personnages  en  arrière-plan  —  fond  d'arbres.  Pla- 
que de  gauche  :  au  premier  plan,  quatre  hommes  assis  ou  debout 
et  un  enfant  jouant  avec  un  chien;  trois  personnages  en  arrière-plan 

—  fond  d'arbres  et  un  château  sur  une  éminence. 

»  Chaque  plaque  est  bordée  latéralement  par  un  pilastre  avec 
chapiteau  composite  et  base  reposant  sur  un  soubassement  à  res- 
sauts sous  chaque  pilastre.  Cette  ornementation  est  combinée  de 
façon  k  ce  que  les  détails  de  deux  plaques  adjacentes  se  raccordent 
pour  ne  former  qu'un  pilastre. 

»  Les  trois  plaques  supérieures  fîgurent  un  entablement  porté 

(i)  Telle  qu'elle  nous  a  été  si  obligeamment  envoyée  par  M.  le  comte 
(reorges  d'Alexélefi,  maître  de  la  Cour  de  S.  H.  TEmpereur  de  Russie. 


UN  TRIPTYQUE   EN   ÉMAIL   PEINT   EN   GRISAILLE.  553 

par  les  pilastres,  chaque  travée  est  abrilce  par  un  fronton.  Celui  du 
centre  est  circulaire,  orné  dans  son  tympan  d'un  carlouche  où  deux 
masques  sont  adossés  —  et  sur  son  archivolte  de  deux  enfants  nus, 
debout,  appuyés  d'une  main  à  un  vase  central,  et  tenant  suspendus 
de  Tautre  main,  l'un  un  cartel,  l'autre  un  bouquet  de  feuilles. 

»  Un  fronton  triangulaire  surmonte  chacune  des  travées  latéra- 
les, orné  d'une  tête  dans  son  tympan  et  surmonté  par  un  ornement 
composé  d'un  balustre  feuillage  entre  deux  consoles  semi-circu- 
laires terminées  supérieurement  par  un  masque.  De  nombreux 
fleurons  s'en  échappent.  Une  urne  placée  sur  le  ressaut  qui  sur- 
monte chaque  pilastre  sépare  et  accompagne  les  trois  frontons, 
une  demi-urne  étant  figurée  sur  chacune  des  plaques  adjacentes. 

»  Volet  de  droite.  —  Plaque  inférieure.  Le  Baptême  du  Christ.  — 
Saint  Jean  nimbé,  vêtu  d'une  peau  et  d'un  manteau,  agenouillé, 
étend  la  main  sur  la  tête  du  Christ  à  nimbe  radié,  debout  dans  l'eau 
jusqu'au-dessus  des  genoux.  —  La  colombe  descend  vers  lui.  Au- 
dessus,  Dieu  le  Père,  en  buste,  dans  une  auréole  de  nuages.  — 
Même  fond  d'arbres  et  de  rochers;  même  entourage  qu'aux  pla- 
ques latérales  du  centre.  —  Plaque  supérieure.  Même  ornement 
qu'aux  plaques  latérales  du  centre. 

»  Volet  de  gauche.  —  La  Décollation  de  saint  Jean.  Plaque  infé- 
rieure. Saint  Jean  nimbé,  agenouillé  de  profil  à  gauche,  les  mains 
jointes,  la  tête  inclinée,  derrière  lui  le  bourreau  debout,  en  costume 
du  XVI»  siècle,  levant  son  glaive.  Du  côté  opposé,  la  fille  d'Héro- 
diade  tenant  un  plat  de  ses  deux  mains.  Trois  personnages  en 
arrière-plan,  intérieur  d'appartement.  —  Même  entourage  qu'à  la 
plaque  adjacente,  mais  en  contre-partie.  Plaque  supérieure  sem- 
blable à  celle  adjacente,  également  en  contre-partie.  —  Grisaille 
sur  fond  noir,  d'après  un  maître  allemand,  trait  et  préparation  de 
hachures  par  enlevage.  Modelé  par  empâtements,  quelques  re- 
hauts d'or.  » 

Lorsque  ce  triptyque  était  encore  en  la  possession  de  M.  Basilewsky, 

ce  dernier  le  lit  figurer  dans  les  galeries  de  l'Art  ancien,  au  Troca- 
dero,  pendant  l'Exposition  universelle  de  1878.  Et  voici  ce  qu'en 
disait,  dans  la  Gazette  des  Beaux- Arts,  M.  Darcel  :  «  Son  tiuivre  la 
plus  considérable  (de  Martin  Didier,  à  cette  Exposition)  est  le 
^  triptyque  de  la  colieclion  Basilewsky,  composé  de  dix  plaques, 
représentant  la  Prédication  de  saint  Jean-Baptiste,  entre  le  Bap- 
tême du  Christ  et  la  Décollation,  encadrées  par  une  architecture 
dans  le  style  de  la  Renaissance  ». 

Bien  que  le  triptyque  de  Bologne  soit  encore  plus  complet,  puis- 
qu'il possède  un  fronton  et  des  écoinçons^  on  a  pu  voir  quelle  était 
l'importance  de  celui  de  Saint-Pétersbourg  et  sa  similitude  avec  le 


5^4  SOCIFTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   flISTORIQUR   DO   LIMOUSIN. 

premier.  C'est  évidemment  le  même  carton  qui  a  servi  aux  deux 
monuments.  Les  dimensions  des  plaques  sont  à  peu  près  analogues, 
la  forme  en  est  la  même.  À  peine  quelques  variantes  de  détail  dans 
Tornementation,  pour  prouver  au  besoin,  la  fécondité  d'imagination 
de  l'artiste.  La  modification  la  plus  notable  est  dans  la  scène  du 
volet  gauche,  la  Décollation  de  saint  Jean,  où  le  saint  n'a  pas  encore 
la  tête  tranchée,  tandis  que  dans  le  tableau  de  Bologne,  le  bourreau 
dépose  la  tête  sur  le  plateau  de  Salomé,  et  le  corps  décapité  du 
saint  s'affaisse  à  terre.  Un  changement  de  cette  importance  dans 
une  scène  du  plus  beau  style  classique  n'était  pas  assurément  le  fait 
d'un  artiste  vulgaire.  La  petite  scène  du  festin,  qui  surmonte  ce 
sujet  à  Bologne,  semble  aussi  avoir  été  supprimée  à  Saint-Péters- 
bourg. Enfin,  on  remarquera  la  place  différente  qu'occupent  deux 
scènes  dans  le  triptyque  de  Saint-Pétersbourg,  où  la  plaque  du  vo- 
let gauche  est  celle  de  droite  du  panneau  central  de  Bologne,  et  où 
celle  du  volet  droit  remplace  celle  de  gauche  du  panneau  central. 
Il  est  probable  qu'elles  ont  été  déplacées  après  coup  sur  Tua  des 
triptyques,  car  deux  de  ces  plaques  portant  un  pilastre  à  droite  et 
un-demi  pilastre  à  gauche,  et  deux  autres  un  pilastre  à  gauche  et 
un  demi-pilastre  à  droite,  la  transposition  peut  s'opérer  indifférem- 
ment sans  que  l'arrangement  architectural  ait  à  en  souffrir,  A  Saint- 
Pétersbourg,  la  signature  est  au  bas  du  sujet  central,  qui  est  tou- 
jours la  Prédication  de  saint  Jean,  et  dont  la  plaque  porte,  en 
conséquence,  sur  les  deux  triptyques,  un  demi-pilastre  de  chaque 
côté.  Quant  à  l'attribution  du  modèle  à  un  maître  allemand,  nous 
ne  voyons  pas  ce  qui  a  pu  la  motiver  sérieusement;  le  style  est  du 
plus  beau  classique  italien. 

Dans  notre  description  du  triptyque  du  Musée  de  Bologne,  nous 
avons  tenu  à  conserver  aux  sujets  la  désignation  qui  leur  est  donnée 
en  Italie,  où  les  deux  scènes  des  volets  passent  pour  représenter, 
l'une  (à  gauche)  l'enfance  de  saint  Jean,  l'autre  (à  droite)  un  sujet 
inconnu.  Le  rapprochement  de  ce  triptyque  avec  celui  de  Saint- 
Pétersbourg  et  avec  ceux  du  Musée  de  Lyon,  du  capitaine  Ley- 
land,  etc.,  dont  nous  allons  dire  quelques  mots  tout  à  l'heure, 
éclaire  nettement  sur  la  nature  du  sujet.  Comme  nous  le  faisions 
pressentir  plus  haut,  les  deux  plaques  des  volets  de  Bologne  ont 
été  transposées:  celle  du  volet  droit  occupait  primitivement  la 
gauche  du  panneau  central,  et  celle  du  volet  gauche  était  en  face, 
à  droite.  C'est  ainsi  que  les  sujets  sont  encore  placés  aujourd'hui 
sur  les  autres  triptyques  du  même  auteur,  où  les  trois  plaques  du 
panneau  central  représentent  ensemble  La  Prédication  de  saint 
Jean.  On  peut  voir,  en  effet,  sur  la  gravure,  que  les  personnages 
du  volet  droit  mis  à  la  place  du  Baptême  du  Christ,  .et  ceux  du  vole  t 


UN   TRll'TYQCK  EN    ÉMAIL   PEINT   EN   GRISAILLE.  555 

gauche  remplaçant  la  Décollation,  la  scène  principale  s'explique 
d'elle-même  :  ce  sont  les  auditeurs,  tournés  les  uns  et  les  autres 
vers  le  Précurseur,  c'est  la  foule  admirablement  mise  en  place  et 
équilibrée,  en  avant  d'un  môme  paysage  boisé.  L'arrangement  des 
pilastres  et  demi-pilastres  reste  le  môme.  Il  n'y  a  donc  en  réalité, 
que  trois  sujets  au  lieu  de  cinq,  ce  qui  conviendrait  beaucoup  moins 
bien  à  la  composition  d'un  triptyque,  et  c'est  la  disposition  des  pla- 
ques de  Saint-Pétersbourg  qui  est  rationnelle. 

La  collection  de  M.  Louis  Fould,  vendue  en  1860,  contenait 
(n**  1995  du  Catalogue)  un  triptyque  important  de  Martin  Didier, 
monté  en  ébène  doré,  composé. de  six  plaques  d'émail  peintes  en 
grisaille  légèrement  teintée.  11  présente  une  arcade  de  plein  cintre 
dans  la  partie  principale  et  une  demi-arcade  dans  chacun  des 
volets.  Les  trois  plaques  inférieures  sont  rectangulaires  et  mesurent 
0"30  de  hauteur,  sur  0"22  pour  le  centre  etO'°ll  pour  les  volets;  les 
trois  plaques  supérieures  épousent  la  forme  de  l'arcade  et  desdemi- 
ârcades.  L'ensemble  mesure  avec  le  cadre  O^eO  de  hauteur  et  0°»70 
de  largeur.  Partie  centrale.  Prédication  de  saint  Jean-Baptiste.  Fond 
de  forêt  ;  hommes,  femmes  et  enfants  entourant  le  saint.  Au-dessus, 
sur  la  plaque  cintrée.  Dieu  le  Père,  porté  sur  les  nues,  bénissant.  — 
Volet  gauche.  Le  Baptême  de  Jésus-Christ,  Môme  composition  que 
celle  que  nous  connaissons  déjà.  —  Volet  droit.  La  Décollation  de 
saint  Jean.  Le  saint  est  agenouillé,  les  mains  jointes,  devant  la 
prison  ;  le  bourreau  lève  le  glaive  sur  sa  tôte.  C'est  à  peu  près  la 
môme  scène  que  sur  le  triptyque  de  Saint-Pétersbourg,  moins 
Salomé  et  les  personnages  du  fond.  —  Dans  chacune  des  deux  par- 
ties cintrées  qui  surmontent  les  volets,  un  ange  sonnant  de  la 
trompette. 

On  voit  que  ce  triptyque  est  à  peu  près  une  réédition  des  deux 
précédents,  simplifiée.  Il  fut  vendu  7,100  francs  et  racheté,  sans 
doute,  par  M.  Edouard  Fould.  Nous  le  retrouvons,  en  effet,  à  la  vente 
de  la  collection  de  ce  dernier (5-9  avril  1869) sous  le  n^  201  àu-Cata- 
logue.  Il  atteignit  alors  le  prix  de  7,900  francs.  Il  provenait  de  la 
célèbre  collection  Didier  Petit  de  Lyon.  Cet  amateur  distingué 
déclare  que  la  pièce  était  d'une  parfaite  conservation,  d'un  fort  beau 
dessin  et  du  style  de  Raphaël.  Elle  fut  adjugée  à  M.  Soumesson 
au  prix  de  2,310  francs,  à  la  vente  de  celte  collection,  en  1843 
(no  36  du  Catalogue). 

Le  palais  Manfrin,  à  Venise,  possédait  autrefois  un  triptyque  de 

noire  émailleur,  presque  aussi  important  que  celui  de  Bologne. 

M.  de  Laborde  l'appelle  «  œuvre  capitale  de  Martin  Didier  »,  et 


556  SOCIÉTÉ  ARCUÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

M.  Jules  Labarte  «  peut-être  le  chef-d'œuvre  du  maître de  la 

meilleure  époque  de  la  peinture  en  émail  de  Limoges  ».  Sur  k 
tableau  central,  divisé  en  trois  parties,  s'étale  la  Prédication  de  saint 
/^aw,  avec  toute  la  foule  des  auditeurs;  sur  le  volet  droit,  leBaptHnc 
de  Notre-Seigneur  ;  sur  le  volet  gauche,  la  Décollation  du  Précur- 
seur, Peintures  en  grisaille,  signées  sur  deux  plaques,  MD  avec  un 
I  dans  le  D,  et  sur  deux  autres  MDPP,  toujours  avec  un  I  dans  le  D. 
Au-dessus  de  ces  cinq  plaques,  dans  la  partie  supérieure,  des  ara- 
besques et  des  anges.  On  retrouve  bien  ici  la  disposition  de  nos 
deux  premiers  triptyques. 

M.  Jules  Labarte  [Histoire  des  Arts  industriels  au  Moyen  Age  et  n 
la  Renaissance.  Emaillerie.  Page  108),  croit  que  c'est  ce  triptyque 
qui  a  été  acquis  par  le  capitaine  Leyland,  de  Londres.  Bien  que 
probable,  cela  n'est  pas  absolument  certain,  car  le  triptyque  expo>é 
à  Londres  en  1862  par  le  capitaineLeyland,est  ainsi  décrit  au  Cata- 
logue de  cette  exposition  (Iraduclion  du  Catalogue  of  the  spécial 
exhibition  of  works  of  art  on  loan  at  the  South  Kensitigton  Muséum. 
London,  1862)  :  «  n«  1726.  Triptyque  composé  de  quatorze  pan- 
neaux de  dimensions  variées,  peints  en  grisaille  sur  un  fond  noir. 
La  partie  centrale  est  composée  de  huit  plaques  et  représente  la 
Prédication  de  saint  Jean-Baptiste,  figurée  tout  entière  sous  un 
dais  ouvragé.  Sur  le  volet  gauche  est  le  Baptême  de  Notre-Seigneur, 
sur  l'autre,  la  Décollation  de  saint  Jean-Baptiste.  Quelques-unes  des 
plaques  sont  signées  MD  (avec  un  pelill  dans  le  D)  PP.,  d'autres 
M.  D.  (avec  un  petit  I)  seulement.  Les  cinq  plaques  principales  ont 
0'",241  sur  0'",177  ;  les  plaques  supérieures  ont  0",203  de  haut.  (De 
la  collection  Manfrini?).  Exposé  par  le  capitaine  Leyland  ». 

On  voit  que  c'est  avec  réserves  que  l'on  indique  à  Londres  la  pro- 
venance du  palais  Manfrin.  En  outre,  il  est  dit  ici  que  le  Baptême 
de  Notre-Seigneur  occupe  le  volet  gauche,  tandis  qu'à  Venise,  d'aprè< 
M.  Labarte,  ce  sujet  figurerait  sur  le  volet  droit.  Peut-être  l'un  des 
auteurs  a-t-il  commis  simplement  une  légère  erreur  en  nous  indi- 
quant la  place  occupée  par  chaque  sujet.  Quant  au  nombre  de  pla- 
ques, qui  est  ici  de  quatorze  en  tout,  dont  huit  sur  le  panneau  central, 
cela  s'explique,  si  l'on  se  rappelle  qu'à  Bologne,  par  exemple,  il  > 
a  en  effet  cinq  plaques  pour  les  sujets,  cinq  pour  l'architecture  v\ 
quatre  pour  les  écoinçons,  'soit  quatorze  en  tout  et  huit  au  mihen 
(plus  le  fronton  qui  n'existe  pas  ici).  M.  Labarte  peut  avoir  négligé 
de  signaler  les  quatre  plaques  très  petites  des  écoinçons.  L'iulénM 
de  ces  observations  est  de  savoir  si  les  triptyques  Manfrin  et  Ley- 
land ne  font  qu'une  seule  et  même  pièce,  ce  qui  est  probable,  ou 
s'ils  constituent  deux  œuvres  distinctes  do  Martin  Didier. 

Le  capitaine  Leyland  avait  encore  exposé  son  triptyque  dans  le? 


UN  TRIPTYQUE   EN    ÉMAIL   PEINT    EN   GRISAILLE.  557 

galeries  de  VHistoire  du  Travail  à  TExposition  universelle  de  1867, 
et  c'est  de  lui  que  M.  Ferdinand  de  Lasteyrie  disait,  dans  son  compte 
rendu  de  celle  exposition  rétrospective  :  «  Parmi  les  plus  admira- 
bles chefs-d'œuvre  d'émaillerie,  je  me  contenterai  de  citer la 

Légende  de  saint  Jean^  peinle  en  grisaille  et  montée  en  triptyque, 
chef-d'œuvre  de  Pape  qui  appartient  au  capitaine  Leyland  ». 

Nous  retrouvons  enfin  le  triptyque  du  capitaine  Leyland,  exposé 
par  lui  au  Musée  de  South  Kensinglon,  à  Londres,  en  4874  [Cata-  ' 
logue  de  V exposition  spéciale  d'Emaux  sur  métal  prêtés,  n"601).  Il  y 
est  décrit  assez  longuement,  et  indiqué  comme  mesurant  en  tout 
1M55  de  large, sur  0"S58  de  haut.  Il  n'est  pas  dit  qu'il  provienne  du 
palais  Manfrin.  La  présence  des  quatre  écoinçons  ornés  d'anges  et 
d'enfants,  un  peu  différents  de  ceux  de  Bologne,  est  mentionnée, 
ainsi  que  Tattitude  particulière  de  saint  Jean  qui  dénombre  ses 
arguments  sur  ses  doigts,  au  milieu  de  la  foule  des  auditeurs  occu- 
pant avec  lui  les  trois  panneaux  du  centre. 

Un  autre  triptyque  de  Pape,  toujours  consacré  à  saint  Jean,  a  eu 
aussi  son  histoire.  C'est  celui  de  la  collection  Debruge-Duménil 
{n'>  749  du  Catalogue  de  cette  collection).  Monté  dans  un  cadre  en 
ébène,  enrichi  d'appliques  de  cuivre  doré,  il  se  composait,  comme 
celui  de  la  collection  Fould,  que  nous  avons  signalé  et  dont  il 
est  bien  distinct,  de  six  plaques  d'émail;  trois  rectangulaires  en 
bas  et  trois  cintrées  au-dessus,  épousant  la  forme  de  l'arcade  da 
plein  cintre  de  la  partie  centrale,  et  des  demi-arcades  des  volets. 
Au  milieu,  la  Prédication  de  saint  Jean-Baptiste  (0"14  sur  0"H),  et 
sur  la  plaque  cintrée  de  dessus,  le  Père  Eternel  (0"04  sur  0™H  à  la 
base).  Volet  droit,  le  Baptême  de  Notre-Seigneur  {0'"14  sur  O^OSS). 
Volet  gauche,  la  Décollation  de  saint  Jean  (mêmes  dimensions)  ;  et 
sur  chacune  des  plaques  cintrées  des  demi-arcades,  un  ange  sonnant 
de  la  trompette  (hauteur,  0""04;  largeur,  0"0o5). 

Ce  triptyqfue  est,  comme  on  le  voit,  de  dimensions  bien  plus  res- 
treintes que  les  précédents,  mais  les  plaques  y  sont  peintes  en 
émaux  de  couleurs.  Quoique  non  signé,  comme  celui  de  la  collec- 
tion Fould,  il  n'en  a  pas  moins  été  reconnu  jusqu'ici,  sans  conteste, 
par  MM.  de  Laborde,  J.  Labarte,  etc.,  comme  l'œuvre  de  Martin 
Didier.  M.  de  Laborde  [Notice  des  Emaux  du  Louvre,  i857,  p.  282, 
note  i)  y  remarque  des  «  tons  violets  et  verts,  que  refroidit  un 
pointillé  blanc  »,  des  expressions  violentes  et  du  rapport  avec  la 
Vierge  du  môme  auteur,  n"  acluel  D.  4i)8  du  Louvre.  Or,  ce  dernier 
émail  est  une  pièce  superbe,  exécutée  tout  entière  d'abord  en 
grisaille,  modelée  par  enlevajçes  à  l'ai^Miille,  et  recouverte  de  colo- 
rations sombres,  avec  fehauts  d'or  aujourd'hui  à  peu  près  effacés. 


5$â  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQUK  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Traitée  largement,  et  d'une  main  libre,  elle  est  remarquable  parle 
dessin  et  la  facture,  et  d'un  grand  caractère. 

Lors  de  la  vente  Debruge-Duménil,  en  1S50,  le  prince  SoltykofiT 
acheta  en  bloc,  pour  300,000  francs,  les  objets  qui  devaient  faire 
partie  des  deux  dernières  vacations,  et,  de  ce  fait,  le  triptyque 
passa  dans  sa  collection.  Il  y  fut  vendu  en  1861  (n""  967  du  Catalo- 
gue de  la  collection  Soltykofî)  6,9S0  francs  et  acheté  par  un  riche 
amateur,  M.  E.  Dutuit.  Ce  dernier  Texpose  au  Musée  Rétrospectif, 
en  1865  (n«  2S5S  du  Catalogue)  ;  et  M.  Labarle,  dans  son  grand 
ouvrage  précité  (p.  111),  indique  ce  «  charmant  triptyque  »  comme 
un  ouvrage  de  Pape,  datant  de  la  meilleure  époque  de  la  peinlore 
en  émail. 

Le  Musée  de  Lyon  possède  encore  (n~  139  à  143  de  son  CatçLlo- 
gue)  les  cinq  plaques  rectangulaires  (hautes  de  24  c),  peintes  en 
grisaille,  qui  avaient  dû  former  autrefois  les  parties  principales 
d'un  grand  triptyque  à  décor  architectural,  comme  ceux  de  Bolo- 
gne, de  Saint-Pétersbourg  et  du  palais  Manfrin.  La  première  repré- 
sente le  Baptême  de  Notre-Seigneur,  les  deuxième^  troisième  et 
quatrième,  la  Prédication  de  Saint  Jean^  la  cinquième,  la  Décolla- 
tion du  Précurseur.  On  y  lit,  sur  un  des  pilastres,  les  initiales  : 
M.  D.  L  Ces  émaux  avaient  été  déjà  signalés  par  M.  Didier  Petit 
dans  le  Catalogue  de  sa  collection  (1843),  liste  des  émailleurs, 
page  xxvn.  —  Ces  plaques  proviennent  du  legs  Lambert  au  Musée 
de  Lyon  (1880). 

Nous  ne  pouvons  pas  passer  sous  silence  le  grand  triptyque  de 
la  collection  limousine  de  M.  de  Theïs.  Il  mesurait  en  tout  0"  52  de 
haut  sur  0"  76  de  large,  et  était  composé  de  six  plaques  peintes  en 
grisaille,  avec  chairs  teintées  et  rehauts  d'or,  et  montées  dans  un 
cadre  d*ébène.  La  disposition  était  la  môme  que  pour  les  tripty- 
ques des  collections  Fould  et  Debruge-Duménil  :  au  ce|[Ure,  la  Pré- 
dication de  Saint  Jean,  plaque  signée  du  monogramme  en  or,  en 
bas  à  droite;  au-dessus,  dans  le  cintre,  le  Père  Eternel;  —  volet 
g^vichey  le  Baptême  de  Notre-Seigneur  ]  —  volet  droit,  la  Décolla- 
tion de  Saint  Jean.  Dans  le  haut  de  chacun  des  volets,  une  plaque 
en  demi-arcade  avec  un  ange  sonnant  de  la  trompette.  Belle  con- 
servation. Cette  pièce  avait  figuré  à  l'Exposition  universelle  de 
1867,  dans  les  galeries  de  THistoire  du  Travail.  Elle  fut  adjugée  en 
1874,  à  la  vente  de  la  collection  de  Theïs  (n®  68  du  Catalogne). 
9,550  fr.  au  riche  antiquaire  parisien,  M.  Stettiner  (1). 

(\)  \}n  comilé  local  avait  été  organisé  à  Limoges  en  1892,  pour  que  la 


UN  TRIPTYQUE  EN   EMAIL   PEINT  EN   GRISAILLE.  559 

Encore  un  mol  d'une  pièce  importante  et  d'une  collection  célèbre 
du  voisinage.  Il  s'agit  du  triptyque  de  M"*  de  La  Sayetle,  de  Poi- 
tiers (n"*  138  du  Catalogm  de  vente,  contenant  130  émaux  peints, 
4860).  Il  était  analogue  de  formç  et  disposition  à  celui  de  M.  de 
Theïs.  Six  plaques,  avec  les  trois  sujets  placés  dans  le  môme  ordre, 
montées  en  bois  noir  avec  moulures  dorées  et  attribuées  à  Pape. 
Elles  étaient  peintes  en  grisaille  légèrement  teintée.  L'ensemble 
mesurait  0"  60  de  hauteur  sur  0*  70  de  largeur.  La  pièce  fut  ad- 
jugée à  10,800  francs. 

Nous  la  voyons  reparaître  à  la  vente  d'un  amateur  anonyme,  qui 
eut  lieu  les  12  el  13  février  1864  (n'  4  du  Catalogue^.  Elle  n'y  atteint 
plus  que  le  prix  de  5,800  francs. 

Le  dernier  triptyque  complet  que  nous  avons  à  signaler  est  celui 
de  la  richissime  collection  Spitzer.  Il  est,  comme  les  précédents, 
composé  de  six  plaques,  peintes  en  grisaille  et  rehauts  d'or,  dispo- 
sées de  môme  façon  et  avec  les  trois  sujets  ordonnés  de  môme. 
Comme  le  dernier,  il  n'est  pas  signé,  mais  attribué  à  Martin  Didier, 
On  en  trouve  la  description,  par  M.  E.  Molinier,  dans  le  splendide 
catalogue  illustré  de  la  collection  Spitzer  paru  récemment  (n«  119). 
Il  est  d'une  dimension  assez  importante,  puisque  la  plaque  centrale 
mesure  0"  303  de  haut  sur  0™  205  de  large. 

Ce  triptyque  avait  été  prôté  par  M.  Spitzer  à  l'Exposition  rétros- 
pective d'art  industriel  de  Bruxelles  en  1888  (n«  269  du  Catalogue), 

Nous  terminerons  ces  citations  en  mentionnant  une  «  très  belle 
plaque  provenant  d'un  triptyque  représentant  des  personnages 
dans  un  paysage,  regardant  vers  la  gauche  et  paraissant  écouter 
une  prédication.  Grisaille  par  M.  Pape.  Hauteur,  32  cent.  Largeur, 
175  millim.  »  Elle  faisait  partie  d'une  vente  anonyme  qui  a  eu  lieu 
en  avril  1872  et  y  a  été  adjugée  à  2,500  francs.  Il  va  sans  dire  que 
c'était  la  scène  de  droite  du  panneau  central  d'un  grand  triptyque 
analogue  à  ceux  de  Bologne,  Saint-Pétersbourg,  etc.,  où  ta  Prédi- 
cation de  saint  Jean  occupe  trois  plaques.  Le  prix  atteint  par  ce 
fragment  d'un  ensemble  considérable  prouve  la  beauté  du  travail. 

ville  et  la  région  fussent  représentées  h  rËxposllion  historique  de  Madrid 
de  celle  môme  année,  en  l'honneur  du  quatrième  centenaire  de  la  décou- 
verlc  de  rAmériquc.  Le  comilé  désirait  envoyer  àTExposilion  rétrospedive 
de  Hladrid  une  collection  d'émaux  peints  anciens  de  Limoges.  M.  Sleltiner 
avait  eu  rextrôme  obligeance  de  mellre  son  beau  iriplyque  à  noire  dis- 
position. Malheureusemenl,  pour  des  motifs  étrangers,  le  comilé  a  du  re- 
noncer h  son  projet» 


&60  SOaÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

Tels  sont  les  dix  triptyques  de  Martin  Didier  (comprenant  de  six 
à  dix-huit  plaques),  consacrés  à  saint  Jean-Baptiste,  que  nous 
connaissons  pour  le  moment.  Nous  n'avons  pas  à  insister  sur  le 
rang  qu'ils  assignent  à  leur  auteur  parmi  nos  artistes  locaux. 

Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  rapprocher  enfin  de  ces  monuments 
un  autre  triptyque  représentant  aussi  la  Prédication  de  saint  Jean- 
Baptiste,  attribué  celui-là,  à  Pierre  Reymond.  Nous  voulons  parler 
des  trois  grandes  plaques  (H.  0,317  ;  L.  0,158)  peintes  en  grisaille, 
qui  devaient  former  primitivement  un  môme  ensemble,  et  qui  ont 
été  exposées  au  Musée  de  South  Kensington,  à  Londres,  en  4874 
(n»»  699,  700,  701  du  Catalogue  précité  qui  en  donne  une  très  belle 
reproduction.)  Les  deux  premières  appartiennent  au  Musée  de 
South  Kensington,  la  troisième  à  M.  F.  Davis.  Les  scènes  occupent 
toute  la  surface  des  plaques,  qui  ne  présentent  pas,  par  conséquent, 
comme  celles  de  Pape,  un  encadrement  architectural.  En  outre,  la 
disposition  est  très  différente.  Sur  la  première  plaque,  saint 
Jean  est  debout  à  gauche,  en  avant  d*un  grand  tronc  d'arbre, 
enroulé  de  lierre,  et  tourné  de  profil  à  droite,  vêtu  d'une  peau  de 
bêle  et  d'un  manteau,  tenant  de  la  main  droite  la  longue  croix  à 
oriflamme,  et  le  bras  gauche  étendu,  dans  l'attitude  d'un  orateur; 
il  est  séparé  des  auditeurs  par  une  barrière  rustique.  Au  premier 
plan,  on  voit  de  dos  une  femme  coiffée  d'un  turban  et  une  autre 
femme  tenant  un  enfant,  assises  à  terre;  au  second  plan,  un  grand 
cerf  couché.  Plaque  du  milieu  :  la  foule  groupée  des  auditeurs,  et 
deux  sortes  de  grands  prêtres  ou  riches  bourgeois  debout  en  avant, 
tournés  à  gauche  vers  saint  Jean  qu'ils  considèrent.  Au  premier 
plan,  un  cerf  et  un  lion  couchés  ou  accroupis.  Troisième  plaque 
(plaque  de  droite)  :  les  derniers  assistants,  sur  divers  plans.  Un 
homme  assis  à  terre,  en  avant,  le  menton  appuyé  sur  sa  main  gau- 
che, fixant  le  saint,  dans  la  pose  d'un  auditeur  attentif;  un  autre 
grand  personnage  debout  à  droite,  tourné  de  profil  à  gauche  et 
tenant  un  enfant  par  la  main.  Au  fond,  un  cerf  debout.  Fond  géné- 
ral de  paysage  très  boisé  avec  rivière. 

La  composition  est  d'un  excellent  style  et  dénote  le  milieu  du 
XVI'  siècle.  Mais  elle  est  toute  flamande  et  n'a  plus  rien  du  classi- 
que italien.  Les  ajustements  et  les  types  sont  caractéristiques.  Le 
dessin  est  très  bon,  mais  les  figures  vulgaires  et  tout  à  fait  réalistes. 
L'aspect  est  d'ailleurs  magistral.  Les  groupes  sont  habilement 
équilibrés;  toutefois,  la  position  du  Précurseur,  à  une  extrémité  âv 
la  composilion,  est  beaucoup  moins  heureuse  que  dans  les  tableaux 
de  Marlin  Didier,  où  il  occupe  le  centre  et  où  l'ccil  trouve  de  suite 
et  naturellement  le  sujet  principal. 


ntf  tRI^TYQUE   EN   ftilAJL  ^BIKT  ËN   6RISAILL1c.  5^1 

Comme  exécutant,  Pierre  Reymond  ne  se  montre  guère  inférieur 
ici  à  Pape,  qui  lui  a,  du  reste,  emprunté  tous  ses  procédés.  C'est  la 
môme  préparation  du  travail  par  enlevages,  adoucis  de  lavis  au 
pinceau,  et  rehaussés  de  brillants  empâtements  dans  les  lumières, 
avec  cette  même  franchise  et  vigueur  de  dessin,  et  cette  même 
puissance  d'effet.  Toutefois,  que  ce  soit  le  fait  du  modèle  ou  du 
tempérament  de  l'artiste,  nous  trouvons  à  l'œuvre  de  Pape  quelque 
chose  de  plus  nerveux  et  de  plus  puissant.  Quoiqu'il  en  soit,  par  la 
noblesse  et  l'élégance  de  son  style,  Tagencement  plus  sobre  et  plus 
savant  de  la  composition  et  l'importance  bien  autrement  considé- 
rable du  monument,  le  triptyque  de  Martin  Didier  l'emporte  de 
beaucoup  sur  celui  de  Pierre  Reymond. 

Limoges,  le  14  août  4892. 

Louis   BOURDERY. 


CHRONOLOGIE 


DE 


[/HISTOIRE  DE  SAINT-YRIEIX-IA-PERCHE 


I 


INTRODUCTION 


Je  n*ai  présentement  ni  le  temps  ni  le  goût  de  composer  une 
histoire  de  Saint-Yrieix,  pour  si  intéressant  que  puisse  être  le 
sujet.  Mais  comme  j'ai  réuni  d'assez  vieille  date  de  nombreux  do- 
cuments sur  cette  ville  et  que  toutes  facilités  m'ont  été  données 
pour  en  augmenter  la  somme,  je  crois  utile  d'en  faire  profiter  le 
public  en  construisant  tout  au  moins  la  carcasse  de  cette  hisloire. 
D'autres  viendront  après  moiqui  y  ajouteront  deux  choses  essentiel- 
les :  la  chair  et  la  vie,  sans  lesquelles  il  n'y  a  pas  d'histoire  digne 
de  ce  nom. 

J'ai  indiqué,  il  y  a  une  dizaine  d'années,  quelles  étaient  les 
sources  du  sujet  (1).  Depuis  lors,  bien  des  progrès  ont  été  accom- 
plis. Un  dépôt  d'archives  fort  bien  conservé  a  été  inventorié  (2)  ; 
des  chroniques  et  journaux  personnels,  traitant  de  Saint-Yrieix,  ont 
été  pubhés  (3).  Le  fonds  Bosvieux  qui  contient,  pour  la  période  du 

(t)  Notes  pour  se  roi  r  à  l'histoire  de  Saint-Yrieix^  clans  le  Bull,  delà 
•Soc.  arch,  du  Limousin^  XXX,  p.  Î9-38. 

(1)  Voy.  noire  inveniaire  des  archives  hospitalières  de  Saint-Yriolx,  dans 
Vincent  des  arch*  dép.  de  la  Haute-Vienne^  H  suppl. 

(3)  Dans  ïiQ&  Chartes^  chroniques  et  mémoriaux  pour  servir  à  Vhistoire 
du  Limousin  6gure  le  Journal  historique  du  chanoine  A  moine  de  Jarrige, 
(600-1633.  —  Dans  les  Llores  de  raison  limousins  et  marchais^  publiés  en 


CtiRONOLOGIB  t>B  L^HlStOlRE   t)B  SAINT- tB1BlX-LA-t>ÉftCHB.  &^â 

raoyen-âge  féodal,  une  série  de  textes  fort  copieuse,  a  été  classé  et 
analysé  par  M.  J.  de  Cessac  (1).  Enfin,  pour  l'époque  révolution- 
naire, les  nombreux  documents  provenant  de  Fadministration  du 
district,  du  comité  de  surveillance  et  du  tribunal  de  Saint-Yrieix 
viennent  d'être  classés  et  sommairement  inventoriés  par  les  seins 
de  M.  FrayrFournier  (2). 

Malheureusement  la  source  la  plus  abondante  pour  la  période 
tQoderne,  tout  au  moins  pour  les  deux  derniers  siècles,  est  encore 
inexplorée  :  j'entends  cette  riche  collection  de  registres  d'état  ecclé- 
siastique provenant  des  cinq  paroisses  englobées  depuis  1790  dans 
la  commune  de  Sainl-Yrieix.  Cette  collection  ménage  vraisembla- 
blement d'intéressantes  découvertes  à  celui  qui  aura  le  loisir  et  le 
courage  de  la  dépouiller,  la  plume  à  la  main.  Ce  qu'ont  fourni  jadis 
les  registres  paroissiaux  d'Eymoutiers  est  un  demi-garant  de  ce 
qu'on  peut  attendre  de  ceux  d'une  ville  collégiale  comme  Saint- 
Yrieix.  Un  habile  chercheur  du  Bas-Limousin,  M.  du  Teilhel  de 
Lamothe,  nous  a  entretenu,  il  y  a  quelques  années,  du  projet  qu'il 
avait  conçu  de  tirer  de  cette  collection  tout  ce  qu'elle  peut  fournir 
à  l'histoire.  Il  est  à  souhaiter  que  ce  projet  ne  soit  pas  abandonné 
et  même  qu'il  soit  étendu  aux  registres  des  anciens  notaires  de  la 
ville. 


Nous  allons  rappeler  sommairement  les  travaux,  malheureuse- 
ment fragmentaires,  dont  Sainl-Yrieix  a  été  l'objet. 

Au  XVII*  siècle,  l'historien  du  chapitre  Saint-Martin  de  Tours, 
Raoul  Mousnyer  consacra  deux  sections  de  son  ouvrage  à  la  collé- 
giale de  Saint-Yrieix,  membre  dépendant  du  chapitre  de  Tours  (3). 
Ces  deux  sections,  nous  les  reproduisons  en  appendice,  d'après 
l'exemplaire  conservé  à  la  réserve  de  la  Bibliothèque  nationale. 

collaboralion  avec  H.  L.  Gaibert,  figurent  le  Livre  de  raison  d*uti  sieur 
Jarnge,  1610-1625,  et  le  Journal  du  sieur  Pardoux  Gondinet,  4613-1630. 

(I)  Inoentaire  manuscrit,  conservé  aux  Archives  de  la  Haute-Vienne.  Les 
pièces  concernant  Saint-Yrieix  sont  rangées  sous  les  art.  L.  3^-50. 

(9)  T.  11  et  m  des  Archioea  réoolutionnalres  de  la  Haute-Vienne,  Voy. 
en  particulier  les  art.  719-795,  877-88i,  iOOi.1013,  4056-1059,  1086-1088. 
4117-1132. 

(3)  L*ouvrage  est  incomplet  et  ne  porte  pas  de  date.  Nous  savons  cepen- 
dant, grâce  à  Tobligeance  de  notre  confrère  de  Tours,  M.  Ch.  de  Grand- 
maison,  qu*il  fut  imprimé  vers  1666.  Cf.  sur  Mousnyer  VHiat,  de  Tourainey 
par  Ghalmel,  IV,  340,  et  les  Mîém,  de  la  Soc,  arch,  de  Touraine^  XXVII 
p.  367.  La  publication  parait  avoir  été  interrompue  par  Tinfluence  dès 
prévôts  é»  Saint-Martin  de  Tours,  qui  trouvaient  que  Mousnyer  n^avait  pas 
assez  bien  parlé  des  origines  de  leurs  dignités. 


664  sbClRTE   ARCHÉOLOGIQUE   ET   QISTORIQOÉ  DU    LIMOUSIN. 

Dans  la  seconde  moitié  du  xvni*'  siècle,  Tinfati^able  Nadaud  fit 
entrer  dans  son  Fouillé  du  diocèse  tout  ce  qu'il  put  recueillir  dans 
les  archives  du  chapitre  et  des  paroisses  de  Saint-Yrieix.  Son  mé- 
moire fut  utilement  développé  par  l'abbé  Legros  en  1784  (1),  et, 
grâce  à  la  copie  qui  en  subsiste  dans  le  fonds  Bosvieux  (copie  qni 
fut  faite  par  Tabbé  Roy-Pierrefitle),  nous  avons  pu  augmenter  notre 
chronologie  de  plusieurs  faits  inconnus  d'autre  part. 

Plus  près  de  nous,  le  D'  Gondinet,  sous-préfet  de  Saint- Yrieîx 
sous  rÉmpire  et  la  Restauration,  s'occupa  moins,  il  est  vrai,  de 
l'histoire  de  cette  ville  dont  il  était  originaire,  que  des  antiquités 
de  l'arrondissement.  Il  n'y  a  pour  nous  rien  à  retenir  de  son  mé- 
moire, qui  d'ailleurs  a  été  publiée  en  48S7,  dans  le  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  du  Limousin  (2),  après  avoir  formé  la  subs- 
tance du  chapitre  qu'AUou  consacra,  en  1821,  à  l'arrondissement  de 
Saint-Yrieix,  dans  sa  Description  des. monuments  de  la  Haute-Vienne. 

Enfm  Aug.  Bosvieux  avait  lui  aussi  songé  à  écrire  l'histoire  de  sa 
ville  natale.  Ce  fut  sa  première  et  plus  constante  préoccupation.  Dès 
1881,  n'étant  encore  qu'élève  de  l'École  des  chartes,  il  faisait, 
devant  la  Société  archéologique  du  Limousin  (3),  lecture  du  chapitre 
qui  traitait  des  origines  du  monastère.  Publié  par  lui  dans  un  petit 
journal  local  (4),  où  il  était  depuis  longtemps  oublié,  ce  chapitre  figure 
dans  notre  appendice.  Plus  tard,  au  cours  de  sa  laborieuse  carrière, 
Bosvieux  rassembla  sans  relâche  les  matériaux  du  travail  d'ensem- 
ble qu'ilprojetait.  Ces  matériaux,  nous  l'avons  dit  déjà,  subsistant 
bruts  et  informes.  Nous  en  avons  tiré  bon  nombre  d'indications  et 
de  documents  pour  la  chronologie  et  l'appendice  qui  suivent. 

Juste  à  la  même  époque,  Emile  Grignard,  l'auteur  d'un  Diction- 
naire géographique  de  la  Haute-Vienne  encore  manuscrit,  présenta 
au  concours  de  statistique  ouvert  par  la  Société  centrale  d'agricul- 

(!)  Mémoire  pour  le  chapitre  de  Saint-Yridx-la- Perche.  (Fonds  Bos- 
vieux, L.  37).  A  la  fin  de  ce  mémoire,  se  trouve  rindicalion  suivante  : 
«  Toutes  les  additions  ci-dessus  sont  des  observations  que  j'ai  faites  sur  les 
lieux,  dans  un  voyage  que  j'ai  fait  à  Saint-Yrieix  au  mois  d'octobre  t78i. 
J'ai  appris  les  traditions  que  j'ai  rapportées  de  M.  Paigtion,  chaDoioe  de 
cette  église ». 

{t)  T.  Vli,  p.  157-I9i.  Ce  mémoire  est  daté  de  1821.  Dès  1819,  M.  Gon- 
dinet avait  rédigé  une  Description  etatistique  de  V arrondissement  com- 
munal de  Saint-Yrieix  pour  le  concours  de  statistique  ouvert  en  1819  par 
rAcadémie  des  sciences  de  Paris.  Il  subsiste  un  fragment  de  cette  statistique 
dans  le  fonds  Bosvieux,  L.  39,  et,  si  j'ai  bonne  mémoire,  dans  une  liasse  de 
la  série  T  des  Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne-. 

{^)  Bulletin,  lii,  435  et  MS. 

(4)  Le  Frelon,  journal  de  l'arrondissement  de  Saint-Yrieix. 


CHRONOLOGIE    DR   I/hISTOIRE   DR   SAINT-  YniRIX-LA-PERCHE.  563 

ture  de  Paris,  une  Monographie  du  canton  de  Saint-Yrieix  qui 
obtint  le  premier  grand  prix  (23  avril  i852  (1).  Ce  travail  n'a  mal- 
heureusement jamais  été  publié.  On  le  retrouverait  peut-être  dans 
les  cartons  de  la  Société  d'agriculture  (2). 

Nous  noterons  aussi  quelques  travaux  de  détail  dont  il  faudrait 
tenir  grand  compte  si  Ton  écrivait  l'histoire  de  cette  ville.  Lais- 
sant de  côté  tout  ce  qui  se  rapporte  à  saint  Yrieix,  à  sa  vie,  à  sa 
généalogie,  nous  citerons  seulement  : 

Abbé  Arbellot,  Le  testament  de  saint  Yrieix,  dans  le  Bull,  de  la 
Soc.  arch.  du  Limousin,  XXllI,  p.  474; 

Abbé  Barbier  de  Montault,  Inventaire  du  testament  de  saint 
Yrieix,  ibid,,  XXXVI,  p.  247  ; 

Abbé  Texier,  Commentaire  d'une  courte  inscription  du  xu*  siècle 
relevée  sur  le  moûtier,  dans  le  Recueil  des  inscriptions  du  Limousin^ 
p.  164; 

Abbé  Texier,  Description  d'une  maison  du  xm*  siècle  à  Saint- 
Yrieix,  dans  le  BulL  de  la  Soc.  arch.  du  Limousin,  I,  173.  Cf.  M.  de 
Verneilh,  ibid.,  III,  SS.  Cette  maison  est  reproduite  dans  plusieurs 
publications  et  en  dernier  lieu  dans  le  Limousin,  p.  181. 

Abbé  Barbier  de  Montault,  Le  Trésor  de  Saint-Yrieix,  dans  le  jBuH. 
de  la  Soc,  hist.  de  Brive,  1892,  p.  99-137,  avec  gravures.  L'auieur 
ne  semble  pas  avoir  connu  ce  curieux  passage  des  Annales  de 
Limoges,  dites  de  1638,  p.  160  :  «  Laquelle  chasse  de  saint  Yrieix 
a  été  depuis  refaicte  d'argent  par  M.  Léonard  Baysse  (mieux  Boysse), 
orpheuvre  de  Lymoges,  l'an  1641.  » 

Camille  Leymarie,  Essai  de  classification  des  anciennes  porce- 
laines de  Limoges.  Saint-Yrieix...  dans  le  jBwH.  delà  Soc,  arch. 
du  Limousin,  XXXVII  et  ss. 


*  * 


La  chronologie  qui  suit  est  suffisamment  abondante  pour  qu'il 
soit  possible  déjà  de  distinguer  avec  quelque  netteté  plusieurs 
périodes  dans  l'histoire  de  Saint-Yrieix,  j'entends  par  là  l'histoire 
des  habitants  et  non  pas  seulement  du  chapitre,  qui  jusqu'ici  a  seul 
préoccupé  les  historiens. 

La  plus  ancienne  de  ces  périodes,  celle  durant  laquelle  notre 
petite   localité    s'appelle    Attanum,    commence   à    une    époque 

(1)  Voyez  notre  notice  sur  Emile Grignard  dans  le  BulL  delà  Soc.  arch. 
du  Ltmou^m,  XXXVl,  p.  180. 

(2)  On  en  trouve  tout  au  moins  la  substance  dans  son  Dictionnaire  géo- 
graphique de  la  Haute-Vienne,  ms,  dont  le  tome  V  (lettres  T.  Z.]  porte  la 
date  de  1853. 

T.  XL.  3G 


IS66  SOCIETE   ARCHEOLOGIQUE    Kt   filStORIO^E  DU    LlMOIJSIff. 

qu*on  ne  saurait  délcrmiaer,  pour  prendre  tin  à  la  fondation  d'un 
monastère  de  religieux  par  saint  Yrieix,  vers  564  (1). 

Alors  s'ouvre  pour  les  habitants,  qui  vont  se  grouper  toujours 
plus  nombreux,  à  l'ombre  de  ce  monastère,  une  seconde  période* 
durant  laquelle,  serfs  ou  sujets  de  Tabbé,  ils  ne  connaissent  d'an- 
tre pouvoir  que  le  sien,  avec  ses  avantages  et  ses  inconvénients. 
C'est  le  temps  des  luttes  armées,  des  guerres  intestines  entre  le 
chapitre  et  les  féodaux  voisins,  en  particulier  le  vicomte  de  Limo- 
ges. Uinsécurité  est  constante,  en  dépit  des  murailles  dont  la  ville 
est  fermée.  Pourtant,  à  partir  de  1307,  la  justice  du  roi  qui  prend 
pied  dans  la  ville  à  la  faveur  d'un  partage  avec  les  chanoine^ 
apporte  aux  habitants  quelques  répits,  en  rendant  plus  circonspecU 
les  ennemis  du  chapitre.  Celte  seconde  période,  partagée  ainsi  en 
deux  phases,  se  prolonge  jusqu'en  1565. 

A  cette  dernière  date  commence  une  troisième  période  qui  ne  se 
terminera  qu'en  1790.  Les  habitants  fatigués  de  Tautorité  du  cha- 
pitre, leur  principal  seigneur,  demandent  au  roi  la  permission  de  se 
constituer  en  commune  pour  gérer  eux-mêmes  leurs  affaires.  Il  y 
a  vers  la  même  époque  des  demandes  toutes  semblables  en  Limousin  : 
le  consulat  de  Tulle  date  de  1566,  celui  de  Bellac  remonte  à  1571. 
Mais  ce  ne  sont  plus  que  des  communes  administratives,  dont  le> 
pouvoirs  ne  ressemblent  guère  à  ceux  des  communes  du  moyen 
âge.  Les  droits  souverains  sont  maintenant  exercés  par  la  royauté; 
les  consuls  ou  échcvins  élus  par  les  habitants  n'ont  plus  que  de* 
attributions  très  limitées. 

Quoiqu'il  en  soit,  la  volonté  manifestée  par  les  habitants  en 
Tannée  1565  de  gérer  eux-mêmes  leurs  affaires,  était  un  acte  d'indé- 
pendance à  l'égard  du  chapitre  et  marquait  la  fin  de  la  tutelle 
exercée  par  celui-ci  pendant  dix  siècles.  Les  habitants  se  sentent 
majeurs  :  ils  ont  place  dans  l'ensemble  des  villes  du  royaume,  sou* 
la  protection  du  roi.  Le  chapitre  des  chanoines  n*est  plus  dès  lors 
qu'une  des  institutions  de  la  ville,  la  plus  vieille,  la  plus  respeclée. 
celle  qui  donne  encore  à  Saint-Yrieix  tout  son  lustre,  mais  enfin  um* 
unité  dans  le  groupe  et  non  plus  comme  autrefois  la  raison  délre 
du  groupe. 

Durant  cette  troisième  période,  les  événements  de  l'histoire  in- 
térieure de  Saint-Yrieix  sont  à  l'unisson  de  l'histoire  générale  de 

(1)  Il  n'est  point  exact  de  dire,  comme  on  Ta  fait  si  souvent,  qae  Saint- 
Yricix  doit  son  origine  à  un  monastère,  tout  comme  Saint-LéoDard, 
Eymoutiers,  elc.  Nous  savons,  en  effet,  que  le  monastère  fut  fondé  dans 
un  lieu  déjà  habité,  dont  le  nom  même  nous  est  connu,  ce  qui  ne  paraît 
pas  avoir  été  le  cas  pour  Saint-Léonard  ni  Eymoutiers. 


^i. 


CHRONOLOGIE    DE  L*»ISTOtRE   DE   SAiNT-YRiGlX-LA-PERCBE.  567 

la  France.  Mais  après  la  fin  des  troubles  provoqués  par  les  que- 
relles religieuses  et  le  soulèvement  des  Crocquants,  la  ville  voit 
peu  à  peu,  quoique  fort  lentement,  augmenter  son  importance  par 
le  nombre  toujours  plus  grand  des  institutions  qui  naissent  dans 
son  sein.  Pendant  une  ou  deux  années  (lS94etss.),  elle  est  chef-lieu 
d'une  élection  de  finances.  Elle  possède  aussi  une  église  réformée 
qui  ne  prendra  fin  que  dans  la  tourmente  de  1628.  L'existence  de 
cette  église  amène  à  Saint-Yrieix  les  Récollets,  puis  les  Clairettes, 
plus  tard  le  mouvement  de  restauration  catholique  provoque  la 
formation  d'une  compagnie  de  Pénitents.  La  ville,  qui  est  déjà  lieu 
d'étape  pour  les  troupes  en  marche,  lieu  de  garnison  pour  la  ma- 
réchaussée, devient,  grâce  à  son  hôpital,  Tun  des  mieux  adminis- 
trés du  diocèse,  lieu  de  passage  de  cette  bohème  mendiante  qui, 
sous  l'ancien  régime,  avec  des  noms  divers  et  par  des  causes  mul- 
tiples, circulait  sans  trêve  par  tout  le  royaume.  Au  milieu  du 
xvm»  siècle,  Saint-Yrieix  prend  subitement  une  importance  considé- 
rable par  la  création  d'une  sénéchaussée  royale  qui  hérite  de 
quelques-unes  des  attributions  de  la  cour  d'appeaux  de  Ségur,  sup- 
primée par  ordonnance  du  roi.  La  ville  a  si  bien  conscience  de  son 
importance  qu'elle  songe  à  en  consacrer  la  durée  par  rétablisse- 
ment d'un  collège  classique.  Le  projet  fut  agité  vers  1784,  les  fonds 
furent  réunis,  mais  des  obstacles  retardèrent  l'exécution,  et  la  Ré- 
volution survenant  porta  les  esprits  vers  d'autres  préoccupa, 
tiens. 

A  dire  vrai,  l'avenir  de  Saint-Yrieix  n'était  point  dans  cette  direc- 
tion. Si  cette  ville  de  chanoines  a,  mieux  que  celle  de  Saint-Junien, 
vu  aboutir  ses  efforts  pour  monter  au  rang  de  ville  auxiliaire  du 
pouvoir,  jamais  elle  n'a  réussi  à  se  placer  au  rang  de  Bellac  bu  de 
Brive.  De  nos  jours  encore,  à  une  date  fort  rapprochée  de  nous, 
elle  a  subi  des  diminutions  qui  lui  ont  été  sensibles.  Tout  au  con- 
traire, Saint-Yrieix  a  pris,  à  la  (în  de  l'ancien  régime,  une  activité 
industrielle  et  commerciale  que  n'ont  eue  au  môme  degré  aucune 
des  villes  secondaires  de  la  Haute- Vienne,  sauf  Saint-Junien,  et  qui 
dure  toujours.  La  découverte  de  vastes  gisements  de  kaolin  en 
1768,  la  fondation  d'une  manufacture  de  porcelaine  qui  en  fut  la 
conséquence  en  1775,  l'ouverture  de  la  route  de  Limoges  à  Gahors 
en  1785,  donnèrent  à  l'industrie  porcelainière  et  à  l'industrie  plus 
ancienne  des  forges  et  des  tanneries,  une  impulsion  nouvelle.  11  en 
résulta  pour  la  ville  un  développement  dont  le  contre-coup  se  cons- 
tate dans  l'augmentation  progressive  du  chiffre  de  la  population. 
Ce  chiffre  n'était  que  de  720  feux  nu  2,580  ou  2,680  habitants  en 
1686,  de  700  feux  =  2,500  ou  2,600  habitants  en  1698.  Il  est  monté 
successivement  à  5,028  habitants  en  1801,  à  6,252  en  1808,  à  6,078 


ti'jH  société   ABCQÉOLOGIQUB  ET  HISTORIQUR   DU   LIMOUSIN. 

en  1811,  à  6,413  en  1821,  à  t),54â  en  1831,  à  6,900  en  ISaô  ;l).  Il 
était  de  7,613  en  1864.  Au  recensement  de  1891  Saint-Yrieîx  comp- 
tait 8,711  âmes  de  population  totale  (3). 

La  Révolution  consacra  ces  acquêts.  Saint-Yrieix  d(*vint  chef- 
lieu  de  district  et  conserva  son  trii)unal.  En  1795,  le  tribunal  est 
supprimé  comme  tous  les  tribunaux  de  district,  mais  il  esl  réiabli 
en  1800,  en  môme  temps  qu'est  instituée  la  sous-préfecture  de  Tar- 
rondissement.  C'est  dire  que  Saint-Yrieix  a  possédé  dès  lors  tous 
les  services,  toutes  les  institutions  afférents  à  cette  circonscriplioDi 
conseil  d'arrondissement,  recette  particulière,  conservation  de< 
hypothèques,  etc. 

Mais  pas  plus  aujourd'hui  qu'à  la  fm  du  xviii*  siècle,  ce  groupe 
ment  des  services  administratifs  ne  donne  à  Saint-Yrieix  une  im- 
portance particulière.  S'il  est  par  sa  population  en  meilleur  ranc 
que  Rochechouart  et  même  Bellac,  il  le  doit  à  la  pratique  ininter- 
rompue de  l'industrie  porcelainière,  de  la  tannerie  et  du  lissage, 
à  l'ouverture  de  la  route  de  TuUe-Chabanais  et  surtout  à  la  cons- 
truction de  la  ligne  ferrée  qui  conduit  de  Limoges  à  Toulouse. 
Bellac  et  Rochechouart  n'ont  eu  la  leur  que  plus  tard.  Il  le  doit 
aussi,  depuis  l'année  dernière,  à  son  tramway  qui  donne  aux  pro- 
duits de  la  région  un  débouché  sur  Périgueux,  en  attendant  qu  ib 
en  trouvent  un  autre  sur  Angouléme   par  Thiviers  et  Nonlron. 

A  la  Révolution,  Saint-Yrieix  a  perdu  son  chapitre  de  chanoines, 
et  les  cinq  paroisses  qui  existaient  alors  n'en  forment  plus  qu*une 
seule.  Mais  il  n'y  a  aujourd'hui  que  les  historiens  pour  dénonc4»r 
ces  pertes  :  la  population  n'en  parait  point  souffrir  et  je  sais  bien 
ce  qu'on  pourrait  attendre  d'un  plébiscite  sur  cette  question  : 
Faut-il  releverl'antique  et  vénérable  chapitre  à  qui  Saint-Yrieix  doit 
son  renom  dans  le  passé?  —  Les  deux  communautés  de  Réc^ltets 
et  de  Qaireltes  ont  disparu  également,  mais  ont  été  remplacées  par 
d'autres  :  Verbe  incarné,  Présentation,  Frères  de  lîji  Doctrine. 

L'hôpital  subsiste  toujours,  agrandi  et  restauré.  Enfin  le  projet 
de  collège  communal  a  été  réalisé  en  1860. 


*  * 


Ces  phases  déterminées,  nous  allons  résumer  brièvement  ce  que 
l'on  sait  des  diverses  institutions  qu'a  possédées  Saint-Yrieix  aa 
moyen  âge  et  sous  l'ancien  régime. 

(0  Voy.  la  Statistique  de  la  Géfiéralité  de  Limogesen  1686  (p.  150., 
le  Mémoire  sur  la  Généralité ,  de  1608  (p.  231),  la  Statistique  de  la 
Haute-Vienne  de  4808  (p.  190),  la  Statistique  générale  de  la  France  :  ter 
ritoire  et  population,  1837  «p.  279). 

(^t)  A  la  Diôme  date  Sainl-Junien  complaît  9,^76  babilants. 


CHRONOLOGIE   DB  L*H1ST0IRB   DE   SAINT-YRIKIX-LA-PKRCBE.  5C9 

En  ce  qui  louche  le  chapitre,  nous  serons  bref,  car  le  chanoine 
Raoul  Mousnyer  el,  plus  près  de  nous,  M.  A.  Bosvieux  en  ont 
relracé  soit  les  origines,  soit  les  relations  avec  Sainl-Marlin  de 
Tours.  Pour  le  surplus  (relations  avec  les  vicomles  de  Limoges  et 
la  royauté,  réformes  intérieures,  etc.),  on  trouvera  des  détails  suf- 
Tisants  dans  la  chronologie  qui  suit. 

En  1698,  le  chapitre  était  composé  d'un  doyen,  un  chantre, 
douze  chanoines  et  six  titulaires  du  bas-chœur  (1).  En  1774,  le 

P ouille  du  diocèse  (2)  lui  consacre  la  notice  que  voici  :  « Ce 

chapitre  relève  de  celui  de  Saint-Martin  de  Tours.  11  est  cçmposé  ; 
K**  d'un  doyenné,  seule  dignité  élective  par  le  chapitre  et  conKrma- 
tive  par  les  doyen,  trésorier  et  chapitre  de  Saint-Martin  de  Tours; 
2**  d'une  chantrerie-personat,  avec  une  prébende  y  annexée,  élec- 
tive par  le  chapitre,  qui  confirme  en  même  temps;  3**  d'une  théo- 
logale, avec  une  prébende  y  annexée,  dont  le  titulaire  n'a  que  le 
rang  de  sa  réception;  cette  place  est  aussi  élective  par  le  chapitre 
qui  confère  en  élisant;  4*  d'une  sacristie,  avec  une  prébende  y  an- 
nexée, dont  le  titulaire  n'a  aussi  que  son  rang  de  réception;  il  est 
élu  parle  chapitre  qui  confère;  5**  de  neuf  canonicats  on  prében- 
des, indépendamment  de  celles  ci-dessus,  à  la  nomination  du  cha- 
pitre qui  confère  en  élisant;  6"  d'un  diaconat;  7**  de  six  grandes 
vicairies  que  le  chapitre  confère  en  élisant.  » 

La  liste  des  doyens  a  été  dressée  plusieurs  fois.  Il  resterait  à  faire 
suivre  chaque  nom  d'une  notice  biographique. 

On  trouvera  la  description  des  sceaux  du  chapitre,  de  son  doyen 
et  de  son  chantre,  dans  les  études  sigillographiques  que  MM.  L.  Gui- 
bert  et  de  Bosredon  ont  insérées  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
archéologique  du  Limousin,  XXVI,  p.  129  ;  XXXVIII,  p.  18,  et  XXXIX 
p.  387. 

Au  xvnr  siècle  et  probablement  dès  le  xvn%  lemoûlier  avait  un 
orgue  (3).  Il  passait  pour  soigner  tout  particulièrement  le  chant  des 
offices  et  le  détail  de  la  liturgie  :  c'est  à  lui  que  le  chapitre  cathé- 
dral  de  Limoges,  en  quête  de  chantres  el  de  «  serpents  »,  s'adres- 
sait le  plus  ordinairement  (4). 

D'après  le  Fouillé  de  1773,  la  ville  de  Saint-Yrieix,  comprise  de 
toute  ancienneté  dans  l'archiprétré  de  La  Meyze  et  le  ressort  de 
Tofflcialité  de  Limoges,  comptait  cinq  paroisses  séculières  : 

(1)  Mémoire  de  M.  de  Bornage  sur  la  Généralité  de  Limoges,  p.  183 
de  notre  édiliou. 

(«)  Edité  par  Tabbé  Lecler,  p.  <7. 

(3)  Legros,  Mémoire  ms.  de  4784. 

(4)  Voy.  nos  extraits  des  Registres  capilulaircs  de  Saint-Eticnnc  de 
Limoges,  passim. 


570  <^OCIÊTR  ARCIIÉOLOGIQUR   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Le  MouTiER,  sous  le  vocable  de  la  Vierge  et  le  patronage  do  cha- 
pitre, comptait  1,100  communiants  ; 

Saint-Pierre,  dans  les  murs,  sous  le  vocable  du  dit  saint  et  k 
patronage  du  chapitre,  comptait  360  communianfts; 

Sainte-Catherine,  sous  le  vocable  de  la  dite  sainte  (antérieure- 
ment sainte  Valérie)  et  le  patronage  du  doyen  du  chapitre,  comptait 
340  communiants  ; 

La  Noaille,  sous  le  vocable  de ?(1)  et  le  patronage  du  doyen 

du  chapitre,  comptait  560  communiants  ; 

Notre-Dame,  ou  la  Haute-Chapelle,  sous  le  vocable  de  la  Vierge 
(antérieurement  saint  Jacques)  et  le  patronage  du  chapitre,  comptait 
280  communiants.  En  1763,  le  Mémorial  des  visites  ciel' évéqtie  porte 
cette  indication  :  «  Cette  église  est  dans  un  état  si  menaçant  d'une 
ruine  prochaine  que  je  Tai  interdite,  à  commencer  du  1"  octobre 
prochain,  jusqu'à  ce  que  les  bastiraens  aient  été  mis  dans  un  état 
solide.  Le  service  est  transféré  dans  l'église  de  Sainte-Catherine 
qui  est  le  plus  à  portée  (2)  ». 

L'Hôpital  nous  retiendra  davantage.  Fondé  au  milieu  du  xiii*  siê- 
ccle,  au  dire  de  la  tradition  (3),  plus  vraisemblablement  dans  la 
seconde  moitié,  il  fut  longtemps  dépendant  du  chapitre  et  gou- 
verné par  un  aumônier  dont  le  nom,  pour  être  bien  entendu,  doit 
être  pris  dans  son  sens  étymologique.  Ce  dignitaire  du  chapitre 
administrait  en  effet  les  libéralités  ou  plus  exactement  les  crédits 
que  les  chanoines  allouaient  chaque  année  sous  forme  d'aumône 
aux  pauvres  de  la  ville. 

Pendant  l'époque  troublée  des  xiv«  et  xv*  siècles,  l'hôpital  dut 
subir  bien  des  éclipses.  Toutefois  son  existence  paraît  démontrée 
par  de  nombreux  actes  analysés  sous  les  articles  B.  12,  E.  2,  16,  19 
et  ss.  de  notre  inventaire  du  fonds  d'archives  subsistant. 

Au  mi|ieu  du  siècle  dernier,  les  administrateurs  de  l'hôpital  igno- 
raient exactement  à  quelle  épo  lue  Taumônerie  primitive  avait  pris  fin. 
Cependant  le  syndic  Pierre  Gondinet,  s'aidant  des  mentions  fournies 
par  quelques  vieux  titres  de  rétablissement,  plaçait  vers  15671e  pas- 
sage du  régime  ecclésiastique  au  régime  laïque  (4).  11  ne  se  trompait 
guère.  Sans  preuve  directe,  nous  pouvons  en  effet  affirmer  que  le? 
syndics  hospitaliers,  dont  l'existence  est  constatée  par  un  tilre  de 

(1}  Le  Poullîé  ne  l'indique  pas.  Mais  nous  apprenons  d'autre  source  que 
le  vocable  était  Saint-Pierre  de  Vérone,  succédant  à  l'Assomption  de  la 
Vierge.  ConF.  le  Mémoire  de  Lcgros,  1784. 

(2)  Voy.  nos  Chartes^  chroniques  et  mémoriaux^  p.  4!î. 

(3)  Inoent.  des  arch.  hospit.^  B.  9. 
(4;  Ibld.^  E.  9  ei  19. 


CBRO^OLOGIR   DE   L*H1ST0IRS   DE   SAINT-YRIRIX-LA-PERCOE.  571 

1567  et  dont  la  nomination  avait  lieu  au  xvn*  siècle  le  jour  même  de 
Tolcction  des  syndics  municipaux,  remontaient  comme  ceux-ci  à  For- 
donnance  royale  de  1365  qui  autorisa  les  habitants  de  Saint-Yrieix  à 
former  une  commune.  Cette  innovation  appelait  l'autre:  le  chapitre 
cessant  d*exercer  la  tutelle  administrative  de  la  ville  et  de  perce- 
voir certaines  redevances,  cessait  en  môme  temps  de  gouverner 
rétablissement  qu'il  avait  fondé  et  d'en  porter  la  charge. 

L'administrationdessyndics, réorganisée, semble-t  il, versl6S7(i), 
subsista  pendant  cent-cinquante  ans  et  s'honora  par  la  bonne  ges- 
tion des  revenus  qui  lui  étaient  confiés.  En  1727,  en  vertu  d'une 
déclaration  royale  du  12  décembre  1698,  un  grand  changement  eut 
lieu,  qui  inaugura  la  troisième  phase  de  l'histoire  de  cet  établisse- 
ment. Un  bureau  de  direction  y  fut  installé  (2j,  comme  dans  beau- 
coup d'autres  hôpitaux,  et  le  contrôle  de  l'Etat,  représenté  par 
rintendant  de  la  généralité,  s'introduisit.  Des  délégués  du  chapitre 
firent  partie  de  ce  bureau  jusque  vers  1750-51  (3j,  date  à  laquelle 
ils  crurent  de  leur  dignité  de  cesser  d'y  paraître,  la  présence  des 
délégués  de  la  sénéchaussée  nouvellement  établie  à  Saint-Yrieix 
ayant  porté  ombrage  à  leur  susceptibilité.  Ainsi  composé,  le  bureau 
de  direction  a  duré  jusqu'à  l'année  1795.  L'hôpital,  après  avoir 
fermé  ses  portes  durant  quelques  mois  (4),  les  rouvrit  sous  le  régime 
de  la  loi  du  16  vendémiaire  an  V,  qui  le  replaça  dans  la  dépen- 
dance directe  de  la  municipalité.  C'est  le  système  qui  règne  encore, 
en  dépit  de  toutes  les  modifications  subies. 

Au  xviu*  siècle,  trois  autres  faits  sont  à  noter  :  d'abord  un  effort 
tenté  en  1730,  renouvelé  en  1749  et  1783,  mais  toujours  vainement, 
pour  obtenir  du  roi  des  lettres  patentes  qui  établissent  juridique- 
ment l'existence  de  l'hôpital  (5)  ;  en  second  lieu,  la  substitution  en 
1761  d'une  religieuse  de  Saint-Alexis  à  la  gouvernante  laïque  qui 
jusque  là  prenait  soin  des  malades  (6)  ;  enfin  l'établissement,  à  une 
date  incertaine,  d'une  petite  chapelle  intérieure,  qui  devint  plus 
tard  publique  (7). 

Dans  son  Mémorial  de  1763,  l'évéque  diocésain  ne  ménage  pas 
les  critiques  à  l'hôpital  de  Saint-Yrieix.  «  Les  bâtiments  sont  très 


(1)  Invent,  des  arck.  hospit,^  E.  26,  Î7,  28. 

(2)  Jbid,,  B.  9,  H.  6,  E.  *,  44  et  ss. 
(3)/6id.,  A.  1,  H.  6. 

(i)  Ibid,,  E.  89. 

(5)/ôtrf.,  H.  1,  B.  12,  A.!,  E.2. 

(6)  Ibid,  B.  9,  E.  68,  H.  6.  CL  notre  inlroluciion  à  Vlnocnt,  des   arch 
dép,y  série  E.  suppl.  p.  xxviii,  el  nos  Chartes  et  chroniques^  p.  41  '. 

(7)  Legeios,  Mémoire  de  1784,  ms. 


571  SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU    LIMOUSIN. 

vieux  et  en  très  mauvais  élat,  et  les  deux  salles  des  malades  mal 
saines.  Il  s'y  est  [en  outre]  glissé  un  abus  sous  le  prétexte  de  la 
petitesse  des  bâtiments  qui  est  que  l'on  donne  des  secours  au  dehors 
à  des  malades  sans  les  faire  transporter  au  dit  hôpital,  ce  qui  e^i 
sujet  à  de  grands  inconvéniens,  ce  qui  entraînerait  la  ruine  de  ceUt' 
maison,  ce  qui  indique  la  nécessité  de  réparer  les  vieux  batimenU 
et  même  d'en  construire  des  nouveaux.  L'hôpital  a  2000  11.  de  renii* 
au  moins  »  (1). 

La  situation  n'alla  point  en  s'améliorant,  si  nous  en  croyons  la 
Statistique  de  i SOS  (2).  L'hôpital  de  Saint-Yrieix,  nous  est-il  dit. 
«  jouissaiten  1789  de  1,714  fr.  de  renie;  il  donnait  asile  à  quatorze 
malades  et  à  trois  vieillards.  Ayant  perdu  dans  la  suite  une  partie  d(» 
ses  revenus  par  la  cessation  du  service  de  plusieurs  rentes  qu'il 
avoitsur  des  émigrés  et  sur  le  clergé  de  France,  il  ne  put  subvenir 
à  l'acquittement  de  toutes  ses  dépenses.  En  1801,  il  trouva  dans 
l'octroi  municipal  des  ressources  suffisantes  pour  réparer  ses  pertes 
annuelles  et  pour  recevoir  le  même  nombre  de  pauvres  qu'il 
admettoit  autrefois  «.Tel  est  le  point  de  départ  de  la  prospérité 
relative  dont  il  a  joui  au  cours  du  xix*  siècle. 

Aux  xur  et  xiv"  siècles,  Saint-Yrieix  parait  avoir  été  desservi, 
quelque  temps,  par  trois  autres  petits  hôpitaux,  ceux  de  Saint-André, 
Sainte-Anne  et  Saint-Jean  (3),  dont  l'histoire  est  perdue.  C'étaienl 
sans  doute  des  fondations  privées  qui  n'eurent  qu'une  couru» 
existence.  La  seule  mention  à  nous  connue  de  ces  trois  petits  hôpi- 
taux est  indirectement  confirmée  par  le  nom  de  «  grand  hôpital  • 
donné,  dans  un  acte  de  1298  (4),  à  l'établissement  qui  vient  de  nou5 
occuper. 

Pendant  le  dernier  tiers  du  xvi"  siècle,  Saint-Yrieix  a  possédé 
une  pelile  église  réformée,  dont  l'origine  nous  est  connue  (3).  Peut- 
être  a-t-elle  vécu  ostensiblement  :  mais  la  preuve  historique  fait 
défaut,  et  il  y  eut  assez  de  troubles  de  guerre  à  Saint-Yrieix. 
pendant  ces  trente  années,  pour  rendre  l'hypothèse  contrairo 
plus  probable.  En  tout  cas,  après  la  promulgation  de  TEdil  dr» 
Nantes,  les  protestants  secrets  ou  connus  se  groupèrent  en  église, 
appelèrent  un  pasteur  et  se  soutinrent  assez  bien  malgré  leur  petit 
nombre  jusque  vers  1614.  Le  chapitre  des  chanoines  dut,  à  parlir 
de  cette  époque,  leur  rendre  la  vie  fort  dure,  car  l'église  n'eut  plus 


(I)  Dans  nos  Chartes  et  chroniques,  p.  it  I. 
{t)  P.  Ï37. 

(3)  Invent,  des  arch,  hospit.  A.  1 . 

(4)  Statistique  de  la  Haute-Vienne  de  1808,  p.  237. 

(5)  Voy.  ci-dessous  la  Chronologie,  aux  anuOes  \o6\  et  lo6i. 


CHR0N0L0G1K   DR   l'bISTOIBE   DB   SAINT-YRIEII-LA-PERCHB.  573 

de  pasteur  et  parait  avoir  définitivement  disparu  dans  la  tourmente 
de  4628,  qui  abattit  violemment  tant  d'églises  issues  de  la  Réforme 
protestante  (i). 

Au  point  de  vue  féodal,  Saint-Yrieix  était,  depuis  le  xn«  siècle  au 
moins,  chef-lieu  d'une  chatellekie  qui  relevait  du  vicomte  de 
Limoges  et  comprenait  six  paroisses  :  la  ville  proprement  dite  ou 
Moutier-Saint-Yrieix,Glandon,  La  Nouaille,  La  Rocliette,  Sarlande, 
et  La  Meyze  (2). 

La  haute  justice  y  était  exercée  par  le  chapitre,  seigneur  de  la 
ville,  mais  en  pariage  avec  le  roi  depuis  1307  (3).  La  basse  justice 
était,  sous  le  nom  de  prévoté,  aux  mains  du  vicomte  de  Limoges,  à 
charge  d'hommage  au  doyen  (4).  Cette  situation  a  duré  jusqu'à 
Tannée  17S0.  Les  appels  étaient  portés  à  la  cour  d'appeaux  deSégur 
jusqu'à  la  suppression  de  celle-ci  et  sa  transformation  en  séné- 
chaussée de  Saint-Yrieix  (o).  A  partir  de  cette  date,  le  chapitre  n'a 
plus  que  la  basse  justice  sur  une  partie  de  la  ville,  appelée  le 
doyenné. 

Les  registres  d'audience  de  la  cour  du  pariage  sont  perdus,  en 
sorte  que  l'histoire  ne  sait  rien  des  causes  qui  furent  portées  devant 
cfîtte  juridiction.  Mais  les  registres  de  la  sénéchaussée  subsistent 
aux  Archives  départementales  de  la  Haute- Vienne  (6).  Le  dépouil- 
lement en  serait  sans  doute  fort  instructif. 

Dès  4268,  le  chapitre,  peu  confiant  dans  sa  propre  force,  avait 
demandé  au  roi  de  lui  envoyer  à  demeure  un  sergent  d'armes, 
chargé  de  le  protéger  contre  la  vicomtesse  de  Limoges  (7).  C'est  le 
premier  en  date  des  divers  pouvoirs  militaires  qui  ont  existé  à  Saint- 
Yrieix  :  gouverneur  particulier  au  temps  des  guerres  religieuses  (8) 

(*)  Pour  tous  ces  faits,  voy.  noire  Hlat.  de  la  Réforme  dans  la  Marche  et 
le  Limousin,  p.  55,  188-189  et  373. 

(3)  Clkmrnt-^ihon,  La  Vicomte  de  Limoges^  p.  143 

(3)  Voy.  la  Chronologie,  à  la  date.  —  Le  sceau  de  la  cour  du  pariage 
a  été  décrit  par  M.  L.  Guibert  (Bull.  Soc  arch,  du  Limousin,  XXVI,  p.  130, 
XXXIII,p.  15).  —  Il  subsiste  une  leUe  de  Colberl  à  Tinlendant  de  Limoges, 
20  juin  1682,  relative  à  ce  pariage,  mais  d'un  sens  assez  énigmaiique  : 
a  Je  vous  envoyé  un  arrest  qui  a  esié  donné  depuis  peu  au  Conseil  concer- 
nant la  justice  de  Sainl-Yrieix  que  le  roi  tient  en  pariage  avec  le  chapitre 
du  lieu.  Vous  tiendrez,  s'il  vous  plail,  la  main  k  ce  que  cet  arrest  soit 
exécuté...  ^>.  (Lettres  de  Colbert,  édil.  P.  Clément,  VI,  p.  75). 

(4)  CLRMeNT-SiMON,  ouv.  cilé,  p.  il  et  143. 

(5)  Voy.  la  Chronologie,  à  la  date 

(6)  Une  vingtaine  de  registres,  sans  compter  une  soixantaine  de  cahiers 
provenant  du  Bureau  des  insinuations  (série  B). 

(7)  Voy.  noir.'  Chronologie,  à  U  date. 

(8)  BosviEUX,  Inventaire,  L.  3i. 


574  SOCIÉTB   ARCHEOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN'. 

et  peut-être  même  plus  lard,  brigade  de  maréchaussée  au  ilemier 
siècle  (i).  Cependant  la  ville  ayant  été  munie  de  murailles  au  \i*  ou 
xu**  siècle,  nous  devons  en  conclure  qu'il  y  existait  dès  lors  un 
chef  militaire.  Saint-Yrieix  est  indiqué  comme  lieu  de  garni>on 
dans  un  document  de  1567  (2),  et  figure  comme  lieu  d'étape  sur  les 
caries  du  xvni«  siècle  (3). 

Les  guerres  religieuses  une  fois  passées,  Thistoire  de  rÉCHE\i!iAGE 
institué  en  1565  ne  paraît  point  avoir  été  bien  accidentée  (4).  Si  le> 
actes  du  maire  et  de  ses  adjoints  pouvaient  être  retrouvés,  ils  témoi- 
gneraient sans  doute  uniquement  de  leurs  longs  et  persévèrant> 
efforts  pour  se  garder  des  gens  de  guerre,  surveiller  les  foires  et 
marchés,  gérer  les  deniers  publics,  contrôler  Tadministralion  de 
rhôpital,  résister  aux  empiétements  des  pouvoirs  rivaux,  et,  à 
mesure  que  la  main  du  pouvoir  central  s'appesantit  sur  eux,  st» 
concilier  la  faveur  de  ceux  qui  le  représentent  en  exécutant  Gdèle- 
ment  leurs  ordres.  Leur  bonne  volçnté  était  insuffisante  cependant 
pour  remédier  à  tous  les  maux,  et  le  cahier  des  doléances  du  Tiers- 
Etat  de  la  ville  prouve  que  les  administrés  ne  considéraient  pas 
que  tout  fut  alors  pour  le  mieux  (5). 

Nous  ne  pouvons  dire  exactement  combien  de  temps  a  duré 
l'élection  de  Saint-Yrieix,  instituée  en  1594  (6).  A  coup  sûr,  peu 
de  temps.  11  n'est  point  certain  pour  nous  qu'elle  ait  été  autre  chose 
qu'un  démembrement  provisoire  de  celle  de  Limoges,  géré  par  une 
délégation  du  tribunal  des  élus  de  cette  ville. 

Antérieurement  et  postérieurement  à  cette  institution  éphémèn\ 
Saint-Yrieix  a  toujours  fait  partie  de  l'élection  de  Limoges.  A  dater 
de  1704,  elle  devint  chef-lieu  de  l'une  des  32  subdélégations  de  la 
généralité  de  Limoges  (7). 

Nous  ne  savons  pas  grand  chose  de  la  compagnie  des  pémtems 

(1)  Dans  un  document  de  1770  analysé  par  M.  Anl.  Thouas,  Inoent,  des 
arch.  comm.  de  Limoges^  FF.  t.  Mais  ilesl  vraiisemblable  que  ceUe  brigade 
de  maréchaussée  existait  depuis  longtemps  déjà. 

(2)  Dans  les  Mémoire  de  VAcad,  de  Clermont,  <864,  p.  558. 

(3)  A.  Leroux,  Inoent ,  des  Arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne,  C.  5-£6. 

(4)  Voy.  notre  Chronologie,  à  la  date.  PouV  le  sceau  de  la  ville,  voy. 
L.  GuiBKRT,  [Bull,  de  la  Soc,  arch.  du  Limousinj  XXVI,  p.  1S8). 

(5)  Il  n*en  subsiste  à  notre  connaissance  que  deux  exemplaires  :  Tan  à  la 
bibliothèque  du  Grand-Séminaire  de  Limoges  (collection  Legros),  Taulre 
dans  la  bibliothèque  do  M.  de  Lalour  à  Courbefy.  Cf.  FaAY-FocaNiEB,  Bi- 
bliographie de  Vhist  de  la  Réoolution  dans  la  Haute-Vienne^  u»  i3. 

(6)  Voy.  la  Chronologie,  à  la  date. 

(7)  Voy.  notre  notice  sur  la  Généralité  de  Limoges^  en  tète  de  Vlncfnu 
des  arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne^  série  C,  p.  xxvn. 


CHRONOLOGIE   DB   L*HISTOIRE   DE   SRINT-YRISIX-LA-PERCIIK.  575 

BLEUS  fondée  vers  1663.  Cependant,  un  siècle  plus  tard,  révoque  de 
IJmoges,  dans  le  Mémorial  de  ses  yisites,  constate  que  cette  com- 
pagnie veut  se  soustraire  à  la  juridiction  du  curé  et  ne  reconnaître 
que  celle  du  chapitre.  Il  ajoute  :  «  Dans  la  continuation  d'appro- 
bation que  je  leur  ai  accordée,  je  leur  ai  enjoint  de  reconnaître 
leur  curé,  de  lui  porter  le  respect  et  Tobéissance  qu'ils  lui  doivent, 
et  ce  sous  peine  d'interdit  »  (i).  Les  Pénitents  disparurent  à  la 
Révolution.  Nous  ne  voyons  pas  qu'on  ait  depuis  lors  tenté  de  les 
relever. 

Nous  nesavons  rien  de  la  communauté  des  Récollets,  qui  remon- 
tait à  1613  ou  4618  (2^.  Elle  n'est  même  pas  mentionnée  dans  les 
Mémoriaux  de  la  visite  épiscopale  de  1763  (3).  Par  contre  les 
Clairettes  le  sont  (4),  et  c'est  de  là  que  nous  apprenons  qu'elles 
étaient  gouvernées  parles  Cordeliersd'Exideuil.  «  Elles  en  ont  pour 
leur  aumônier  et  directeur,  nous  est-il  dit.  Elles  font  faire  un  bâti- 
ment considérable,  cequi  leur  suppose  de  l'aisance.  Elles  ont  trente- 
quatre  ou  trente-cinq  religieuses  et  ont  des  pensionnaires  »  (5). 

Les  INSTITUTIONS  SCOLAIRES  n'ont  jamais  été  nombreuses  ni  impor- 
tantes à  Saint-Yrieix.  Nous  avons  déjà  dit  que  le  plus  ancien  projet 
de  fondation  d'un  collège  classique  ne  remonte  qu'à  1784  (6)  et  ne 
fut  réalisé  qu'en  1860.  De  bons  esprits  estiment  qu'il  y  aurait  grand 
intérêt  pour  la  prospérité  de  la  ville  à  transformer  ce  collège  en 
école  primaire  supérieure  d'où  sortiraient  des  chefs  d'atelier  experts 
et  des  négociants  instruits. 

Au  commencement  du  siècle,  vers  1804  (7),  un  sieur  Abrias- 

(1)  chartes  et  chroniques ^  p.  411. 

(î)  Sur  la  valeur  de  ces  deux  dates,  cf.  ci-tlessous  la  chroDologie, 
année  1G.3.  —  Le  sceau  des  Kécollelsa  été  décrit  par  M.  L.  Guibert,  {BalL 
de  la  Soc.  arch,  du  Limousin^  XXVI, p.  13))  et  par  M.  de  Bosredon,  ibld.^ 
XXXIX,  p.  4«7). 

(S)  Elle  existait  encore  cependant,  puisque  les  Ephémérldes  de  1769  la 
nomment  .(p.  H 4)  et  lui  aitrihuent  huit  religieux.  Toutefois  nous  ne  les 
vojons  pas  représentés  lors  de  Tappel  des  membres  du  clergé  formant 
rassemblée  préparatoire  de  1789,  bien  que  les  Clairettes  le  soient.  (Abbé 
Lkcler,  Martyrs  et  confesseurs^  t.  I,  p.  131).  Dans  son  élude  sur  les 
Franciscains  en  Limousin,  Tabbé  Roy-Picrrefiltc  consacre  exactement  deux 
lignes  aux  Kécollets  de  Saint-Yrieix.  C'est  dire  qu'il  ne  nous  apprend  rien. 

(4)  Leur  sceau  a  été  décrit  par  M.  L.  Guiberi,  comme  ci-dessus,  XXVl, 
p.  4  30. 

(5)  Chartes^  chroniques  et  mémoriaux ^  p.  410.  Les  Ephémérldes  de 
1765  leur  attribuent  26  religieusesde  chœur  (p.  114). 

(6)  Legros,  Mémoire  ms,  rédigé  en  1784. 

(7)  Statistique  de  la  Haute  Vienne  de  1808,  p.  918. 


STd  SOCliTÉ  ARCHEOLOGIQUE  ET  HISTORIOUE  DU  LIXOUSIK. 

Laforét  fonda  une  école  secondaire  qui,  en  1837,  était  aux  mains  de 
M.  Bonnel-Lamonnerie.  A  cette  dernière  date  il  y  avait  égalemeol 
deux  pensionnais  de  jeunes  filles,  dirigés  l'un  par  une  dame  Coo- 
damy,  Tautre  par  une  dame  Crezeunet.  La  ville  possédait  égalemeni 
en  1839,  un  instituteur  communal  et  sept  instituteurs  privés  «Ji.  Il 
ne  nous  a  pas  été  possible  de  retrouver  les  vicissitudes  subies  par 
ces  divers  élablissemenls. 

Il  serait  instructif  de  connaître  quelles  furent  les  plus  anciennes 
INDUSTRIES  exercées  à  Saint-Yrieix.  Mais  les  renseignements  manquf*ni 
avant  le  milieu  du  xvni*  siècle.  En  1765  seulement,  les  Ephéméridrx 
de  la  Généralité  de  Limoges  consacrent,  dans  une  courte  notice  sur 
Saint-Yrieix,  les  lignes  suivantes  à  Tlnduslrie  et  au  commerce  de 
la  ville  : 

«  Il  y  a  dans  cette  ville  quelques  tanneurs  qui  préparent  de> 
cuirs  forts,  des  vaches  en  baudriers,  des  veaux  et  des  basanes  ; 

V  Des  tisserands  qui  font  des  toiles  ouvrées  et  d'autres  toiles  de 
ménage  assez  bonnes  ; 

«  Trois  sergetiers  qui  fabriquent  de  grosses  serges  croisées, 
chaîne  et  trame  de  laine  cardén,  à  Tusage  des  gens  de  la  campagne. 

«  Dans  les  foires  et  dans  les  marchés  de  celte  ville  il  se  débite  une 
assez  grande  quantité  de  fil  de  chanvre  que  les  fabriquants  de  dro- 
guets  de  Limoges  enlèvent.  On  y  vend  aussi  un  grand  nombre  de 
bœufs  qu'on  engraisse  vers  Ségur,  Libersat,  etc.  Cette  ville  est  le 
centre  du  commerce  de  l'antimoine.  » 

'  La  Statistique  de  1808  confirme  ces  détails.  Saint-Yrieix,  dit-elle, 
p.  190,  «  a  quelques  tanneries  (2)  et  Ton  y  fabrique  des  toiles  et  des 
étoffes  communes.  On  y  débite  une  assez  grande  quantité  de  fil  de 
chanvre  qu'achètent  les  marchands  de  Limoges  pour  la  fabrication 
des  droguets;  on  y  fait  le  commerce  de  l'antimoine  et  de  la  terre  à 
porcelaine  ».  Etailieurs,  p.  47o:  «  L'arrondissement  de  Saint-Yrieix, 
qui  pourrait  fournir  beaucoup  de  meules  de  cercles  par  la  grande 
quantité  de  ses  bois  taillis,  ne  s'occupe  qu'accidentellement  de  ca» 
commerce,  par  la  diflicullé  des  voies  d'exportation  qui  ne  lui  sont 
ouvertes  que  lorsque  les  vins  abondent  dans  le  département  de  la 
Dordogne  », 

Le  même  ouvrage  parle  aussi  des  nombreuses  forges  qui,  depuis 
le  XVI"  siècle,  occupaient  tant  de  bras  à  Saint-Yrieix  même  et  dans 


(l)  Laurent,  Nouo.  éphémérides,  1837, 

(9)  Il  esl  dit  dans  un  aulrc  passage  du  même  ouvrage,  p.  477,  qu*tt  y  a 
cinq  tanneries  A  Sainl-Yricix. 


CHRONOLOGIE   DE   L*UI8T0IIIE   DE  SAINT-YRIEIX-LA-PERCHE.  577 

les  environs.  Il  y  en  avait  encore  deux  dans  la  Tille  mèroe  en  i808  (1) 
et  quatre  en  1821  (2). 

Quant  à  la  manufacture  de  porcelaine  fondée  par  M.  Dugarreau 
de  La  Seinie  vers  1775  (3),  occupée  par  M.  Baignol  de  1789  à  1797, 
fermée  ensuite  pendant  quelques  années,  puis  rouverte  par  trois 
ouvriers  parisiens  qui  ne  purent  la  faire  prospérer,  elle  passa  en 
1805  aux  mains  d*un  sieur  Clostermann  bien  connu  à  Limoges.  «  Il 
fit,  la  première  année,  une  douzaine  de  fournées,  nous  apprend 
la  Statistique  de  la  Haute-Vienne  de  1808  (p.  A36).  Mais  les  mêmes 
obstacles  qu'avaient  éprouvés  ses  prédécesseurs  contrariaient  déjà 
ses  opérations  ».  L'auteur  de  la  Statistique  croit  en  connaître  les 
raisons.  «  Cette  fabrique,  nous  dit-il,  quoique  très  rapprochée  des 
carrières  de  kaolin  et  quoiqu*au  milieu  des  bois  nécessaires  pour 
Talimenter,  ne  prospérera  jamais  qu'autant  qu'on  y  versera  des 
capitaux  suflisans  pour  ne  pas  craindre  les  variations  inséparables 
de  ce  genre  de  commerce;  d'ailleurs,  si  la  localité  présente  quel- 
ques avantages  pour  les  matières  premières,  elle  ojBTre  bien  des 
inconvéniens  si  l'on  considère  la  diflSculté  de  se  procurer  des  dé- 
bouchés lointains  et  surtout  celle  d'y  fixer  des  artistes  qui  ne  pour- 
roient  trouver  à  la  campagne  les  agréments  dont  ils  jouissent  dans 
les  grandes  villes  ». 

De  main  en  main,  la  manufacture  s'est  perpétuéeetsubsisleencore; 
elle  a  même  eu  deux  concurrentes  sous  le  second  Empire.  Mais  c'est 
moins  la  fabrication  de  la  porcelaine  que  l'exploitation  des  carriè- 
res de  kaolin  qui,  à  Saint- Yrieix,  occupe  les  bras  et  fait  vivre 
nombre  de  familles.  En  1808,  il  y  avait  dans  la  ville  ou  dans  la  ban- 
lieu  sept  centres  d'extraction  (4).  Il  y  en  avait  vingt  en  1837  (5). 

Antérieurement  à  la  manufacture  de  porcelaine,  Saint-Yrieix  pos- 
sédait une  manufacture  de  faïence  dont  l'origine  n'est  pas  exactement 
connue.  On  croit  qu'elle  fut  établie  vers  1768  par  les  sieurs  Chape- 
lias  et  Pouyat  (6).   «  Les  propriétaires  l'affermèrent  ensuite  à 

(1)  Statistique  delà  Haute-  Vienne^  p.  403.  L'une  appartenait  à  un  sieur 
Robert,  l'autre  à  un  sieur  Dujardio.  Elles  produisaient  toutes  deux  respec- 
tivemeni  4000  royr.  de  fer,  consommaieui  6700myr.c(e  fonte  et  6000  niyr. 
de  charbon,  et  possédaient  chacune  deux  aflineries  et  six  ouvriers. 

(2)  D'après  M.  Gondinei,  Bull,  de  la  Soc.  arch,  du  Limousin^  Vil,  188. 

(3)  Voy.  la  Chronologie  à  celle  daie. 

(4)  Statistique  de  la  Haute-Vienne  en  1808,  p.  428-429. 

(5)  Laurent,  Nouo.  éphémérides,  1837,  p,  t99. 

(6)  Dans  le  Mémoire  de  l'abbé  Legros,  rédigé  en  1784,  je  trouve  celle  pr«^- 
cieuse  indication  :  a  Le  cieur  Pouyat  en  avoii  aussi  entrepris  une  (manu- 
facture de  porcelaine)  ;  mais  il  a  été  obligé  de  l'abandonner  ainsi  que  sa 
fabrique  de  faïance.  v 


K^d  SOClÉtÉ    ARCHÉOLOGIQUE  EC   HISTORIQUE   DU   LlHOUSl?f. 

M.  Robert,  maître  de  forges  à  Saint-Yrieix,  qui  la  garda  pendant 
sept  aos  ;  elle  fut  reprise,  par  M.  Pouyat  qui  ne  tarda  pas  à  l'afifer- 
mer  de  nouveau  à  deux  de  ses  ouvriers.  «iCux-ci  la  conservèrent 
jusqu'au  moment  où  son  fils,  revenu  des  armées,  se  mil  à  la  tétede^ 
travaux.  On  y  fait  (en  1808)  une  quinzaine  de  fournées,  du  prix  de 
4  à  500  fr.  chacune.  Les  travaux  de  ce  petit  établissement  n'occu- 
pent que  six  ouvriers.  La  terre  argileuse  qu'on  y  emploie  vient  de 
Sauvagnac,  et  on  y  ajoute  un  quart  de  casline  qu'on  lire  du  dépar- 
tement de  la  Corrèze.  Le  four  est  alimenté  de  petit  fagotage  et  de 
genêt.  On  ne  se  sert  de  gros  bois  que  pour  commencer  le  feu,  ei 
cet  usage  en  exige  fort  peu. 

<(  La  fabrication  se  borne  presque  tout  entière  à  la,  plateri^;  ou 
fait  peu  de  creux.  L'émail,  qui  est  blanc,  est  composé  d'élain,  de 
plomb  et  de  silice.  On  y  môle  de  la  manganèse  pour  l'émail  brun, 
dont  on  recouvre  la  faïence  qu'on  destine  au  fourneau.  La  faïence 
qui  sort  de  cette  fabrique  est  susceptible  d'amélioration.  La  paie 
n'en  est  pas  assez  solide  et  son  émail  pourroit  être  mieux  glacé  ;  sa 
qualité  est  bien  inférieure  à  celle  des  faïences  de  Nevers  et  de 
Strasbourg;  cependant  la  médiocrité  de  son  prix  en  assure  le  débit; 
elle  se  consomme  presque  toute  sur  les  lieux;  on  n'en  vend  qu'une 
faible  quantité  qui  s'exporte  dans  les  villes  les  plus  rapprochées  du 
département  de  la  Dordogne.  » 

Vers  1833,  M.  Tenant  de  La  Tour,  originaire  du  Chalard,  connu 
plus  tard  comme  bibliothécaire  du  palais  de  Compiègne  et  comme 
auteur  des  Mémoires  d'un  bibliophile^  détermina  un  sieur  Noyer  à 
s'établir  imprimeur  à  Saint-Yrieix.  C'est  Noyer  qui  imprima  succes- 
sivement l'^rMen  (1835-37),  le  Frelon  (1840-51),  le  Nouvel  Arédien 
(1853-64),  VEcho  de  Saint-Yrieix  qui  dure  depuis  1864,  et  même, 
pendant  quelques  mois,  Y  Ordre,  journal  officiel  delà  Haute- Vienne 
(1841)  (1).  C'est  de  ses  presses  également  que  sortirent  le  Limousin 
historique  d'Achille  Leymarie  (1837),  V Explication  du  maréchal 
Clauzelsur  l'expédition  de  Cotistantine  (1837)  et  maint  autre  ouvra- 
ge que  les  imprimeurs  de  Limoges  eussent  pu  prétendre  imprimer. 

Des  détails  qui  précèdent  sur  les  diverses  industries  de  Saint- 
Yrieix,  on  peut  déduire  quels  étaient  les  principaux  objets  de  son 
commerce.  En  1806,  un  membre  du  conseil  général  de  la  Haute- 
Vienne,  réclamant  le  parachèvement  de  la  route  de  Limoges  à 
Cahors  par  Saint-Yrieix,  rappelait  que  cette  dernière  ville  était 
«  le  centre  de  presque  toutes  les  relations  commerciales  entre  le 

(t)  Nous  devons  ces  indications  exactes  à  Tobligeance  de  MPray-Fournier, 
qui  possède  toute  une  bibliographie  de  la  presse  périodique  dans  la  Haute- 
Vienne. 


CBRONOLOCiR   DK   L*H1ST01RE   DB   SAlNT-YRlElX-t<\-PEBâttG.  5*)^ 

déparlement  de  la  Haute- Vienne  elles  départements  de  h  Dordogne, 
de  la  Corrèze  et  du  Lot))(l).  Nous  constatons  cependant  qu'en  1891, 
les  recettes  effectuées  par  la  gare  de  Saint-Yrieix  (P.-O.)  ne  se  sont 
élevées  qu'à  288,479  fr.,  alors  qu'elles  atteignent  414,400  fr.  à 
Saint-Junien  (2).  Nous  nous  bornons  à  ajouter  que  la  ville,  qui  pos- 
sédait douze  foires  par  an  en  1808,  en  possède  actuellement  dix-sept. 
Un  trait  à  noter  dans  l'histoire  de  Saint-Yrieix,  c'est  que  les 
relations  sociales  et  économiques  de  cette  ville  ont  été  beaucoup 
plus  tournées  vers  Périgueux  que  vers  Limoges.  Cet  état  de  choses 
n'a  commencé  de  changer  qu'à  partir  de  Térection  de  la  sénéchaus- 
sée (1750)  et  de  l'ouverture  de  la  route  de  Limoges  à  Cahors  (1785). 
Auxix'  siècle  ce  changement  de  front  s'est  encore  tout  naturellement 
accentué.  Mais  le  irafic  du  tramway  de  Saint-Yrieix  à  Périgueux 
(1891)  et  les  relations  de  famille,  par  raison  de  mariage,  de  parenté 
ou  de  traditions  prouvent  que  Périgueux  est  resté,  en  dépit  de  la 
distance  (environ  75  kil.),  un  petil  pôle  d'attraction  pour  les  Aré- 
diens.  C'est  qu'à  l'origine  un  voyage  à  Périgueux  par  la  vallée  de 
l'Isle  était  chose  dix  fois  plus  aisée  qu'une  excursion  à  Limoges  à 
travers  les  monts  et  vaux  qui  séparent  cette  ville  de  Saint-Yrieix  et 
marquent  la  limite  des  bassins  de  la  Loire  et  de  la  Garonne. 


* 


Saint-Yrieix  a  produit  quelques  hommes  connus,  dont  voici  les 
noms  : 

Slodilus,  abbé  de  Saint-Yrieix,  éluévéque  de  Limoges  en  843. 

Gérald,  doyen  de  Saint-Yrieix,  élu  évoque  de  Limoges  en  1137. 

Elie,  moine  à  Saint-Florent  de  Saumur,  évéque  d'Uzès  en  13i5, 
cariJinal-prôtre  en  1357,  mon  à  Avignon  en  1367  Connu  par 
divers  ouvrages  théologiques. 

(Voy.  \dL  BiO' Bibliographie  de  M.  Ulysse  Chevalier). 

Pierre  Seichespée,  de  Saint-Yrieix,  membre  de  l'ordre  des  frères 
prêcheurs,  vit  la  Sorbonne  condamner  en  1559  trois  de  ses  propo- 
sitions comme  entachées  d'erreur. 

(D'Argentré,  Collect.  judiciorum,  II,  201 ,  282  et  ss.). 

Etienne  Bellengard,  auteur  d'un  Sententiarum  volumen  absolutis- 
simum,  publié  a  Lyon   en  1559   et  1587  ;  devint  principal  du 

(4)  A.  Leroux,  Analyse  des  délibérations  manuscrites  du  conseil  général 
de  la  Haute-Vlenne^  p.  67. 

()}  Rapport  de  Ting^nieur  en  chef  du  contrôle  des  chemins  de  fer  d'Or- 
léans (dansi  les  Rapports  des  chefs  de  serolce  du  département  à  M,  le 
Préfet  de  la  Haute-Vienne,  l892,  p.  63). 


580  SOCIÊTé   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

collège  de  Limoges  en  1557  (et  non  à  la  fin  du  xvi''  siècle,  comme 
il  a  été  dit  souvent). 
(Voy.  Bull,  de  la  Soc,  arch.  du  Limousin,  XXXIII,  98). 

Léonard  Garreau,  jésuite,  missionnaire  au  Canada,  massacré  par 
les  Indiens  en  1656. 

Yrieix  Gondinet,  xvn*  siècle,  médecin  de  la  reine-mère  Anne 
d'Autriche. 

Chouly  de  Permangle,  né  à  Saint-Yrieix,  mort  en  1679.  GouTer- 
neur  de  Limoges,  se  dislinga  au  siège  de  Maestricht. 

Yrieix  de  Magonlhier  de  Laubanie,  né  en  1614,  mort  en  1706, 
générai  français  connu  par  la  défense  de  Landau  contre  les  lroape> 
des  Impériaux.  La  Bibliothèque  communale  de  Limoges  possèdt^ 
un  portrait  gravé  de  ce  personnage. 

L'abbé  Lecler,  dans  ses  Martyrs  et  confesseurs  de  la  foi  sous  h 
Révolution  (t.  1"'),  consacre  une  notice  à  plusieurs  noms  de  Sainl- 
Yrieix:  J.-B.  de  Paignon, chanoine; P.  Y.  La  Brouhe  de  La  Borderie. 
chanoine;  Jarrige  de  La  Morélie  des  Biars,  prêtre  ;  J.-B.  Bonhomme 
de  Forestier,  chanoine;  Pierre  Mazard,  chanoine;  Jarrige  de  I^ 
Morélie  du  Breuil,  chanoine;  Jarrige  de  La  Morélie  de  Puyrédon 
doyen;  Paignon  de  Chantegraud,  chanoine;  Fr.  Beaure,  chanoine. 

Gondinet,  sous-préfet  de  l'arrondissement  de  Saint-Yrieix,  doc- 
leur  en  médecine,  associé  correspondant  des  Sociétés  médicales  de 
Paris,  de  Montpellier,  du  Gard,  de  Bruxelles,  de  Toulouse,  de  Bor- 
deaux, de  Marseille,  de  l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  el 
arts  de  Turin,  de  la  Société  royale  et  centrale  d'agriculture,  de  la 
Société  d'agriculture  de  la  Haute-Vienne,  de  la  Société  d'agricul- 
ture de  Saint-Yrieix  et  de  l'ancienne  Société  royale  de  médecine  de 
Paris. 

Tels  sont  les  titres  qu'il  prend  dans  sa  Description  statistique 

de  1819,  dont  nous  avons  parlé  ci-dessus,  p.  564. 

Achille  Leymarie,  historien  et  publicisle,  mort  en  1864. 

(Voy.  la  notice  que  lui  a  consacrée  M.  Buisson  de  Mavergnier  dans 
le  Bull,  de  la  Soc,  arch,  du  Limousin,  Xï,  129,  275). 

Auguste  Bosvieux,  érudit,  archiviste  de  la  Creuse,  mort  en  I87r 

(Voy.  la  notice  que  nous  lui  avons  consacrée  dans  le  BulL  de  In 
Soc.  arch,  du  Limousin,  XXXVI,  186  et  276). 

De  Loménie,  écrivain,  membre  de  l'Académie  française,  mort 
en  1878.  Son  éloge  a  été  prononcé  par  M.  Taine,  qui  fut  son 
successeur  à  l'Académie. 

Edmond  Gondinet,  auteur  dramatique,  mort  en  1888. 

(Voy.  VAlmanach  Limousin  pour  1890,  partie  historique,  p.  203). 


! 


CHRONOLOGIE   DE  L'HISTOTHE    PK   SAINT -YRIEIX-LÀ-PKRCHE.  581 


Nous  finirons  par  ou  commencent  d*ordinaire  les  monographies 
méthodiques,  en  disant  que  Saint-Yrieix,  chef-lieu  d'arrondissement 
d  a  déparlement  de  la  Haute- Vienne,  appartient  dans  le  passé  à  la 
région  historique  du  Haut-Limousin.  A  335°*  d'altitude,  à  45"*  30' 
37"  de  latitude,  à  1*  8'  7"  de  longitude,  il  est  traversé  dans  sa  lar- 
geur par  un  petit  ruisseau  de  60  kil.  de  cours,  la  Loue,  qui  sort  de 
l'étang  de  Bonneilles  à  quelques  kilomètres  au  nord  de  la  ville,  et 
lombe  dans  llsle  un  peu  au-dessous  d'Excideuil.  Saint  Yrieix  est 
également  situé  sur  le  chemin  de  fer  de  Paris-Limoges-Figeac- 
Toulouse  et  est  tête  de  ligne  pour  le  tramway  de  Périgueux.  La 
population  totale  de  la  commune  était  de  8711  habitants  au  recen- 
sement de  1891. 


T«  XL.  37 

I 


k 

l 


68$  âOGlÉTÉ  ARGBÉOLOOIQUE  ET  tlISTORlOtJlC  DU  UllOUSIff . 


II 


DOCUMENTS  DIVERS  TIRES  DU  FONDS  BOSVIEUX 


EXTRAITS  de  VaHistoire  générale  de  Saint-Martin  de  Toun 
par  le  chanoine  Raoul  Monsnyer  [vers  1666]  (1) 


Cap.  XX.  —  De  noblU  Ecclesia  collrgiata  Sancti  Aredii  Acthanenslf 

in  agro  Lernooicensi  constituta. 

Ut  ad  lertiam  Matricis  Ecclesiœ  Sancli  Martini  Turoucnsis  filism  transpj- 
mus,  nunc  pergendum  nobis  ost  ad  aliam  asquè  collegiatam  et  parochialem. 
sed  à  Tumulo  Bcatissimi  Martini  remotissimam,  ipsi  tamem  subjectaïK. 
sciiicet  sancti  Aredii  Acthanensis  etsi  tempore  à  prœdicta  sancti  Venanii. 
viciniorem  ;  oam  prodire  cœpit  ut  nobilis  filia  à  Basilica  Sancti  Mariio. 
Turoncnsis  anno  Christi  59i,  quo  anno  migravit  è  vita  sanclus  Arcdius  ic 
agro  Lemovisensi  Acthanensis  oppidi,  quod  à  tanto  viro,  sancti  Aredi> 
nonien  habuit. 

F  ro  eu  jus  planiori  intelligentia  priemittimus  sequentin.  Sanctus  Arcdios 
Jocundi  Lemovicensis  civitatis  comiiis  et  Pelagiae  uxoris  suae,  sanrîr 
mulieris  quondam  filius,  cum  in  loco  sui  juris  et  fundi  cui  Aclhanum 
nomen  est,  ab  urbe  Lemovica  sex  leucis  Francicis  distante,  ex  sua  propru 
familia  Monasterium  Monachorum  excitari  et  aedificari  curasset,  quod  pO'^t- 
modum  in  ceiebrem  Abbaliam  sub  nominc  sancti  Aredii  excrcvil,  magn«>- 
que  pietatis  sensu  sepulchnim  beati  Martini,  quem  pra^cipuo  cultu  vcnere- 
batur,  adiisset,  indèque  regressus,  condilo  Teslamento,  super  famiiu 
pecunias  legasset,  haercdcmque  majoris  partis  bonorum  suorum  fecissfi 
et  instituisset  sanclum  Martinum,  suos  tandem  monacbos  Acthanenee? 
defensioni  et  protectioni  Basilic»  cjusdem  Sancti  Martini  Turonensiscom- 
misit  et  submisit,  cui  tanquam  nobiie  membrum  voluil  in  perpetoumcssc 
subjeclos. 

Hic  merilô  potest  cujus  esscnt  Régulas  isti  Monachi  Acthanenses  seu 
Arcdiensos,  cum  nundum  sancli  Aredii  tempore.  nec  nisi  pcr  aliqa*>î 
annos  posteà  publicata  fuerit  et  observata  in  istis  Galliae  parlibus  Aquita- 
nicis  Sancti  Benedicti  Régula. 

(1)  Voy.  et  dessus,  page  563.  note  3 


CHRONOLOGIE   DR  l'hISTOIRE   DK   SAINT-YRIKIX-LA  PERCHE.  583 

Cui  quœslioni  apertissimè  respondel  Grcgorius  noster  libre  decimo  his- 
loriae  Francorum  capitc  vigesimo,  quod  esl  tolum  de  viln  et  goslis  sancti 
Arcdii,  his  verbis  :  Ex  propria  t'amiliaTonsuratosinslituit  Monaclios,  cœno- 
biumque  fundavit,  in  quo  non  mod6  Gassiani,  verumetiam  Basilii,  et  reli- 
quorum  Âbbalum  qui  Monasterialem  vitam  insliluerunt,  celebraolur  Regulae, 
beatâmuUere  viclum  alquc  vcstitum  singulis  ministrante.Quibushissancli 
Gregorii  verbis  videas,  Monachos  Aclbanensesseu  Aredienscs,  non  unam 
in  suo  Monasterio  Regulam  observasse  vivendi,  nec  plures  insimnl,  Gas- 
siani scilicel,  Basilii,  et  aliorum  vilae  solitarise  el  cœnobiticseMagistrorum, 
scd  exipsis  aliqua  tanlùm  capitula,  quae  pro  tempore  existentes  Abbates  et 
vilse  Monasticae  Patres  suisMonachis  observanda  proponebant. 

Cum  autem  Pipinus  Francorum  Rex  et  Pater  Caroli  Magni  hoc  oppidum 
Aclhanense  bellis  attritum  adiisset,  et  prislino  suo  slatui  aliquo  modo 
rcsiiiuere  cupiens  Aionastcrium  Acthanense  omninô  desolatum,  inibi  loco 
Monachorum  ibidem  olim  exislentium  de  consilio  Primatum  suorum  triginta 
duos  regulares  canonicos  instituil,  ac  Abbalem,  Dccanum,  cantorem  et 
sacrislam  Dignitalcs  Ecclesise  sancti  Aredii  prsefecit  ;  qu»  omnia  postmodum 
Carolus  Magnus  Pipini  Régis  filius  illuc  transiens  lam  sancti  Aredii  Testa- 
mcnlum  quam  patris  sui  institutiones,  exoratus  à  canonicis,  non  modo 
ratas  babuil,  sed  pralcrca  laudavit  et  confirmavit,  ut  sequenlibus  charlis 
el  sequenti  hujus  nobilis  EcclesiiS  palet  historiâ,  quae  initium  accipiel  à 
Tcstamento  sancti  Aredii,  à  quo  lauquam  à  fonte  émanai. 


Cap.  XXL —  InstitutLo  Canonicorum  in  Eccleaia  Sancti  Aredii  Acthanensis 
per  Pipinum  Franciœ  Regem  factaj  et  Caroli  Magni  Imperatoris  et 
Fçanciœ  Régis  authoritate^  anno  Christi  Domini  794,  confirmata. 

In  nomine  Domini  noslri  Jcsu  Ciiristi,  anno  incarnationis  ejusdem 
Domini  noslri  794.  Ego  Carolus  graliâ  Dei  lotius  imperii  Romani  quamvis 
indignus  Imperalor,  anno  siquidem  tertio  noslri  imperii  ad  Hispanias  Iran- 
siens  parles,  ad  quemdam  locum  noslrum  nomine  Aclhanum,  unà  cum 
exercitunosiro,  paulisperad  manendum  duabus  hebdomadis  supcrslilimus, 
in  quo  dum  morarcmur,  anle  prœsenliam  noslri  meorum  Antccessorum 
Tcstamenta  adlata  sunt,  in  quibus  luculenier  didici,  prœfaïus  l9cus,  qua- 
Hter  meorum  Proedecessorum  temporibus,  Sigisberti  scilicet  gloriosissimi 
Régis  ac  Reginœ  BrunichildaB,filiiquc  ejus  Childeberli  necnon  cliam  filio* 
rum  quoque Childeberli,  Teodeberli  videlicet  elTheoderici  fratrum  diligen- 
tissime  à  Domno  Aredio  Abbale  filio  Jocundi  Lemovicorum  Principis,  ipsis 
Regibus  adiestanlibus,  bcne  fuit  prœordinatus.  Igitur  screnissimusac  pius 
genitor  meus  Pipinus  post  adiens  hune  locum,  consilio  omnium  suorum 
Primatum  voluit  eum  reslitui  in  pristinum  gradum  quem  inveneral  jam  olim 
omnibus  bonis  penè  desolalum  ac  deslilulum.  Volens  igitur  ibi  restiluere 
Monachorum  normam,  sed  nonnulli  obnixô  adclaman tes  melius  vigere  canoni- 
corum regulam,  dicunl  enim  inibi  deficere  viclus  Monachorum,  abundantiam 
aquarum,  sive  piscium,  déesse  flumina,  déesse  stagna  el  alia  quam  plura 


89i  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   Et    BlStORïQUE   DU   LlHOtSIÎï. 

Monachis  ncncssaria  (qaia  sIcuL  piscis  sine  aqua,  sic  Monachus  sine  ^.pa  » 
sine  régula)  adhuc  quod  esset  Regia  domus  populorum  concursus.  Qnid  if 
ror?vicitmaxima  pars  acOrdoCanonicorum  dévolus,  oui  et  enim  trigiotadui* 
praebendas  raancipavit,  undequolidie  triginladuo  alerenlur  fraircs.qnibû- 
denique  apposuit  quatuor  adstare  columna«,  videlicet  Âbbatem,  Decaoui 
Canlorem,  et  Monaslerii  Sacrislam  undè  in  omnibus  nécessita tî bus  sosl??:- 
larelur  Monachorum  calerva  ;  hos  namquc  vero  magnis  honoribus  diîavi 
hos  igitur  lali  conventu  inler  fratrcs  esse  conslituit,  ut  (quod  absît)  si  qu> 
illorum  aliquando  à  régula  doviaveril,  ac  cum  fralribus  vivere  neglex^rr 
separatim  hactenus  laïcaliter  viveret,  alque  cum  fralribus  nihil  coœmu: 
amplius  haberet.  Canonicos  vero  in  tantam  liberalitatem  vivere  prœcepi 
ut  nullus  scilicetnec  Princeps  quisquam,  nec  aliqua  cujusque  persona,'* 
ibi  cosequaretur,  hoc  est  in  loco  Achlano,  nec  in  tota  villa  propter  qn-- 
Dominus  fuit  princeps  ipsius  villae,  ac  Lemovicae  civitalis  Aredius,  :p 
verô  sint  judices  suarum  causarum,  servorum,  ac  famulorum  suorum,  iu  a 
nullus  Ecclesîasticus,  intra  clauslrum  manens,  aut  alicui  Ecclesiasticoser- 
viens,  Gabium,  nec  Telonarium,  nec  aliquam  justiliam  per  vim  exsohcrei. 
nisi  ab  ipsis  Dominis  cum  quibus  moralus  fucrit.  Invasores  verô  Canoai- 
corum  injuste,  nisi  satisfacerent  cui  laescpint,  damnali  exiUuni    persoho- 
rint  :  Unde  ego  rclcgens  pii  genitoris  mei  Pipini   Testamcnla,  voh  r 
judicio,  ut  in  perpcluum  sint  rata,  ac  perpetualiler  firma  euro  slipulaticBe 
subnixa,  nullo  contradicente,  si  quis  hoc  destruere  voluerit,  vox  sua  nihr, 
proriciat,et  coactus  auri  libras  mille  et  argenti  pondéra  duo  intllia  conden.» 
natus  persolvat,  et   insupcr  bannum  noslrum,  ac  cum  Juda  Scharioib,  »'• 
Datan,  et  Abiron  excommunicatus  existai,  omnes  verô  dicant  amen,  >'c 
fiât.  Infra  vero  villam  si  quis  letigerit  aliam  aut  perçussent  injuste  hooore 
privatus,  bannum  noslrum  persolvat,  et  in  exilium  niiltatur  donec  salî^- 
facial  cui  lajserit.  Ego  Carolus  gralia  Dei  Rex  hoc  Testamentum  relegi  ac 
subscribere  jussi  sub  die  calendarum   Maïarum,  lunA  septima,  indictiont^ 
oclavâ,  Principibus  nostris  adlestanlibus,  scilicet  Dorano  Turpione,  Oigeno 
Palatino,  ac  Guillclmo  Curbinaso,  Berlranno  validissimo,    Rolgerio  cor- 
nuallo.  S.  Joscionis  Cancellarii,  S.  Richardi  Capellani,  S.  Astonis  Prœpositi 
Parisii,   S.   Aldegarii    Lemovicornm   Principis.   Decrevi  etiam    ut  peoe? 
Armarium  Domni  Turonensis  Martini  scmper  istud  haberetur  Teslameo- 
lum,  nam  cura  istius  loci  altinct  ad  locum  beati  Marlini.S.  Leonis  Abballs. 
S.  Frodoarii  studiosissimi  decani,  S.  Bernerii    Prsecenloris,    S.  Hicnnn 
sacristae.  (Et  en  lettres  majuscules  ou  capitales  se  lisent  ces  mots  en  la  der* 
nière  ligne)  :  Giroardus  domini  Caroli  Magni  notarius,  hoc  teslamenlam 
subscripsil  alque  diligenter  peregit. 

En  Canonicorum  sancti  Arcdii  instilutio  peranliqua,  Regio  et  imperii'j 
Diplomate  confirmata,  cujus  haîc  ullima  verbavaldènolandasuul.  DecreNii 
etiam  ut  pênes  Armarium  Domni  Turonensis  Martini  semper  istud  hab^ 
reiur  Teslamenlum,  Scilicet  sancii  Aredii,  cujus  cuslodiRD  in  Armario,  iJ 
est  in  Archivis  Sancii  Martini  Turonensis  hanc  reddil  rationem  immeJial'^ 
posteà  idem  Carolus  Magnus  Imperator.  Nam  cura  istius  loci,  scilicet  saoci' 
Aredii  attinet  ad  hune  locum  B.  Martini,  quibus  verbis  et  immédiate  priP- 
cedcnlibus  palet  Garolum  Magnum  Imperalorem  confirmare  TcslamcDWQi 


CHRONOLOGIE   OR   l'hISTOIRE    DB  SAINT-YKISIX-LA-PERCIIE.  58o 

r>raRclicli  sancti  Aredii,  et  non  obscure  significare  Ecclesiam  et  canonicos 
>ancti  Aredii  subesse  ditioni  Ecciesiae  Sancti  Martini  Turonensis  et  ab  ea 
Jcpcndere. 

Qnod  praelerea  patet  ex  Regio  Diplomate  Caroli  Galvi  Franciœilem  Rogis, 
:jui  in  suo  Diplomate  dato  Turonis  civitate,  anno  decimo  qiiinlo  rcgni 
sui,el  Chrisli  Domini  855,  manifesté  déclarât  ecclesias  sancti  Aredii  de 
Àclhano,  et  sancti  Martini  de  Rausalia  sive  de  Rodera  ab  Ecclesia  beatis- 
simi  Martini  Turonensis  dependere  et  eidem  esse  subjectas. 

Neque  tantum  a  Regibus  nostris  et  Imperatoribus  confirmatum  fuit  saucii 
Aredii  Testamentum,  verum  etiam  ab  omni  Ecclesia  Gallicana,  quod  non 
inodô  convenions,  sed  etiam  fuit  utcunque  necessarium,  ut  sic  ab  utraque 
authorilatc,  id  est  làm  spirituali,  quam  Icmporali  vîm  haberet  cfficaciorcm, 
quod  ut  lectori  meliùs  iniiolescal,  in  lucem  liic  edimus  ex  archivis  cjus- 
dom  Ecciesiae  Sancti  Martini,  acla  nondum  visa  synodi  generalis  l4,  pro- 
vinciarum  qu»  tune imperio Caroli  Calvi  Régis  Franciae  parebant in  Tullensi 
fiiœcesi  Tussiaci  cclebralte  annoChisti  860,quaBsic  habent. 


Art  a  concila  secundi  TullensU  In  Gallia  celebratl  Tussiaci,  anno  Christ  i 
iV6'0,  pro  conflrmatione  Tdstamenti  sancti  Aredii»  qui  sancturn  Marti" 
ntim  Turonensem  instituit  suum  hœredem. 

Sancla  generalis  Synodus  Ecclesiœ  Episcoporum  Xllll  provinciarum  Lug- 

dunonsium  scilicet,   Rothomagenslum,   Turonensium,  Senonum,   Vicen- 

ncnsium,  Aureîatensium,  Vesontionum,  Moguntinorum,  Agripinnensinm, 

Trevirorum,  Remorum,  Biturigensium,   Burdegalensium,  Varbonensium, 

qui  secundum  instituta  Ecclcsiastica  favore  Sedis  Aposiolicœac  nutu  Domi- 

norum  nostrorum  Caroli  et  Lolharii  Regum  gloriosorum,  anno  DominicaB 

Incarnationis  DGCG.  LX.  indictione  nonû,  septimo  Idus  novembris  conve- 

nimus  in  villam  Tussiacum  Tullensis  parocliiae,  omnibus  ordinibus,  potcs- 

latibus,  personis  ac  dignitatibus  universis,  praesentibus  scilicet  et  fuiuris, 

gratia  vobis  et  pax  à  Dco  Pâtre  et  Domino  nostro  Jesu-Christo,  vcro  Filio 

ejus,  et  à  spiritu  Sancto,  Trinitati  scllicel  individuae  Deitatis  detur  atque 

muitiplicetur.  Gum   apud  nos  EcclesiasticEC  utilitatis    atque  necessitatis 

negotia  more  Ecclcsiastico  vcntilarcntur  atque  defioircntur,  obtulit  nobis 

vencrabilis  abbas  Hilduinus  Privilégia  monasterii  Sancti  Martini,  quorum 

lenore  comperimus  beatorura  Episcoporum,  ac  praedecessorum  nostrorum 

subscriptionibus  roborata,  inter  quae  ostendit  nobis  Testamcntum  sancti 

Aredii  de   rébus  à  se  sancto  Martino  datis,  quod  ipse  manu  suâ  cons- 

cripsit,  et  sub  maximis  attestationibus  confirmavit  :  Testamonla  etiam  de 

Bladomo,  et  de  Burgogalo,  ac  de  Lirardo,  nccnon  et  praeccpla  regum  attjue 

impcratorum  qui   tempore   obitus  beatissimi  Martini    ipsum    cœnobium 

honorabiliter  coluerunt,  et  rejbus  atque  donis  admoJum,  ditaverunt,  sacrœ 

synodo   praesentavit    prosecutusque    est   etiam   idem    venorabilis  abbas 

Hiliiuïnus,  quoniam  infestatione  Norlmannorutn  qui  antc  hos  annos  illud 

Monaslerium  incenderunl,  quaedam  tùm  privilégia  Episcoporum,  quëm  prae- 


686  SOCIETE   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOlTSIN. 

cepta  Regum  ex  eodem  loco  sunt  pcrdita,  sed  plura,  paucîs  paroaotih:^ 
Ministrorum  sint  soliicitudine  custodilâ,  sed  in  commotionc  regnii]}^* 
nota  esl,  nupcr  sediliosorum  hominum  factione,  quaedam  loca  et  >i!h< 
minus  neccssariô  Dominum  timentes,  sibi  in  suam  pcrnicicm   usarpann: 
interquos  cl  EmenusMonasteriuno  sancli  Aredii,quod  ci  jani  tcrtiè et  Re;:^ 
polcslas  et  Episcopalis  auLhoritas  interdixil,  sed  diabolicâ  obdurationv 
suo  perverso  conatu  resipisccre  noluil,  suavis  quoque  nomioe  et  durus  con.- 
mine  et  aclione,  in  damnalionem  suam  sibi  usurpare  prsesumpsit.  i^r- 
propter  sanclorum  Episcoporum  ac  Prdedecessorum  nostroram,  qui  cm 
Deo  in  Cœlo  régnant  et  in  terris  Miraculis  coruscant  confirmalionum  Privi- 
légia prosequentcs,  hoc  quoque  Privilcgium  communi  consensu  fîcri.  et  :• 
nobis  confirmari  decrevimus,  ut  quorum  sedibus  praesidemus,  contirmâ- 
tiones  eliam  roboremus,  Ëvangelicâ  et  Aposlolicà,  atque  canonicâ  etEp.^- 
copali  autlioritate  confirmantes  et  obtestantes  ut  honoris  Privîlegiamqo>i 
cœnobium  vcnerandi,  semperque  colendi  beati  Martini  Pontifîcis  lune  l>^ir. 
poris  habuit  quando  Domnus  Carolus  divae  memoriae  Imperator  ab  i>! 
saeculo  emigravit,  ab  omnibus  conservetur.  Res  quoque  et  mancipia  q^i 
lempore  i)lo  ihm  in  Alemannia,  quàm  in  Francia,  vcl  in  Italia,  sive  Aqui- 
tania,  seu  in  Provincia,  \(*\  ubi  et  ubi  legitimo  jure  posscdil,  vel  quf 
posteà  lidelium  eidem   sancto  Domini  contulerunt,  vcl    quae   de  ester 
collata  à  quocunquc  cxtilerint,  ncmo  contra  statuta  canonum  sibi  usurpar? 
pnesumat,  sive  pessumdet,  et  praesumptorcs  qui  eas  nunc  indebilè  rett- 
nent  postquam  ex  divino  mandatur,  et  hœc  prœceptionis  et  confîrraation>< 
nostra  anthoritas  ad  eorum  nolitiam   vencrit  nuUalcnus  contra   slatoi^ 
divina,  vota  Fidelium  infideli  usurpatione  sibi  evendiccni,  sed  dispos) i ion i 
Rectoris  Monaslerii  beat!  Martini  quœ  sua  sunt,  licenter  cl  libéré  ordioari 
permitant.  At  si  contra  hœc  statuta  forte  quispiam  prœsumpseril,  secun- 
dum  Canonicas  et  Apostolicas  Régulas  ac  Privilégia  bcatorum  £pisco{K)- 
rum  qui  nos  in  Domino  praecesserunt,  et  juxta  sancti  Arcdii  Tcstamenlop 
à  communionc  Redcmptionis  nostrae,  et  omnium  fidelium  societatejudioM< 
Sancti  Spirltus,  alienus  efficiatur  doncc  resipiscat,  cl  qu»  Monastcrio  sanoi* 
Martini  sunt  Iradita,  cum  satisfaciionc  restituât. 

Herardiis  Turonensiam  Mciropolis  Kpiscopus. 
Rodulphus  Biturigeusiam  Archiepiscopus. 
Gantarius  Âgripineasis  EcclesiaQ  Episcopus. 
Atto  indignas  Episcopus  ]  firmavit. 
Launus  Aquanislnsc  sedis  Episcopas. 
Arduinas  Uvellanensis  EcclesiaB  episcopus. 
Siabilis.  Arvarnensis  Ecclesiae  Episcopus. 
Raginelmus  Tornacensis  Ecclesiae  Episcopas. 
Hamfridas  Morlnensis  Ecclesiae  Kpiscopus. 
Jonas  Eduorum  Episcopas. 
Christlanus  Autissiodorcnsis  Episcopus. 
Reinigius  Ecclesia;  Lugdunensis  Episcopas. 
Hincmaras  sanctae  Ecclesia?  Reinoruin  Episcopas. 
Uvanilo  munere  Divino  Scnnensis  Epis<*opas. 
Frotharius  Burdigalensis  Episcopus. 
Uado  munoro  Divino  Viennensis  Episcopus. 


?»^* 


CHRONOLOGIE   DE   L  HISTOIRE    DE    SAlNT-YRIKIX-LA-rKRCHK,  5>. 

Agius  indignas  Episcopas  signavit. 

Ercambertus  indignus  Episcopas. 

Ercharandus  Ca.alancnsis  Eccleslae  Episcopas. 

Isaac  sanctae  Lingonensis  Ecclesias  episcopus. 

Braldingus  Maslicenliura  Ecclesiae  hamiiis  Epi«copn>. 

Adalfas  Barcinonensis  Episi*x)pas. 

Hildegarias  Moldoosis  Eccleslœ  Episcopus. 

GunbertuB  Ebrolcensis  Ecclesias  Episcopas. 

Urisanas  sancta  Marise  titulo  Episcopas. 

Inganardos  sanctse  Pictavensis  EccleBisB  Episcopus. 

iGneas  Parisii  indignas  Episcopas. 

Andesyndus  Helenensis  Episcopas. 

Ego  Aldainus  indignas  Episcopas  Aalensis. 

Ego  Fridoldus  indignas  Episcopus. 

Staailo  Episcopas. 

Cîrca  banc  Testamenli  sancti  Aredii  insigncm  ab  uno  et  triginta  Epis- 
copis  in  plenaria  Galiiarum  Synodo  Nationali  confirmationem,  boc  est  ab 
univcrsa  Ecclesia  Gallicana,  observa,  quod  cum  bi  sancti  Patres  confirma- 
vcrint  absolutè,  et  juxta  volunlalem  sancti  Aredii  omnia  quae  donavit 
Ecclesiœ  santi  Martini  Turonensis  ;  indè  neccssariô  scqui  eos  confirmasse 
superiorilatem  Ecclcsite  praediclic  sancti  Martini  supra  Ecclesiam  sancli 
Aredii,  quia  ut  manifestum  est  ex  ipso  Teslamenlo,  sanctus  Aredius  Eccle- 
siam à  se  8ediBcatam,cum  monachis  et  Monasteriosuo  Aclhanensi  submisit 
el  donavit  Ecclesiae  Sancti  Martini  Turonensis,  eique  tanquam  nobile  illius 
membrum,  voluit  esse  subjectam. 

Neque  solùm  Ecclesia  Gallicana,  sed  etiam  tolius  Ecclesiae  Gaput,  sum- 
mus  Pontifex,  praedictum  sancti  Aredii  Testamentumconfirmavil,  cum  enim 
SS.  D.  noster  Urbanus  Papa  H,  vcnisseï  in  bas  Galiiarum  partes  anno 
Christi  4096,  ipsique  Ecclesia  Sancli  Marlini  Turonensis  inler  allia  sua  Pri- 
viicgia  r.onfirmanda,  oblata  fuissent  diclîe  synodi  14.  Provinciarum  Galliœ 
acta  quae  prœdiclum  sancti  Aredii  Tesiamentum  confirmabant,  eapraedictus 
Romanus  Pontifex  Urbanus  in  Concilio  Piclavis  cclebralo,  approbavit  bis 
verbis,  quae  aliàs  citavimus  in  libro  nostro  Apologclico  jurium  et  liberla- 
lum  cjusdem  Ecclcsi:e  sancli  Marlini  Turonensis,  cap.  4:Quidquid  prœtercà 
liberlatis,  quidquid  immunitatis,  vcl  praedccessores  nostri  Romani  Ponti- 
ficcs,  vel  Turonenses  archiepiscopi^  vel  Gallicanarum  Provinciarum  apud 
Tussiacum  in  Tullcnsi  Parochia  generalis  synodus  congregala  probati  et 
A postolici  confessons  Martini  revercnlia,veslrœ  Ecclesiœ  vestrisque  praede- 
cessoribus  contulerunt:  Nos  quoquc  praesenlis  Dccreti  pagina  confirmamus. 

Motivum  autem  seu  causa  quae  impulit  Decanum  et  canonicos  sancli 
Martini  bujus  aîvi  ad  oblincndum  ab  Urbano  Papa  supràdiclam  confirma- 
lionem,  ea  fuit. 

Cum  annis  aliquot  ante  banc  Urbani  Papse  confirmalioncm  Testamenli 
sancli  Aredii,  canonici  Arcdicnses  à  subjcctione  el  obedientia  qiiam 
.sanclo  Marlinoel  ejusEcclesiai Turonensis  debenl,  nescio  qua  de  causa  dofc- 
cisscnt,  ipsosqucfacli  liojus  tandem  aliquandopœnilerel,  id(;o:(ue  vcniara  à 
Clcro  sancli  Martini,  coram  Pciro  Decano  cl  canonicis  ejusdcm  Ecclosiie 
postulassent,  seque  non  modo  in  sanctum  Marlinum,et  cjus  Ecclesiam  gra- 


588  SOCIÉTÉ   ABCHÉOLOGIaUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIMOUSIK. 

viler  peccasse,  sponle  et  ullrô  confesst  fuissent,  sed  prœterà  se  îpsos  et 
successores  suos  cum  omni  sua  Ecelesia  omnimodam  debere  Saneto  Mar- 
lino  subjeclionem  recognovissenlanno  Ghrisli  Î090,  voluisscnlque  insoper, 
ut  priores  quos   éligerent,  maxime   Decanus  insiituercnlur  el  contirmi- 
renlur  à  capilulo  Sancli  Martini  Turonis  oui  praesenlarentur,  hanc  ip^i* 
culpam  ignoscere,  lam  Petro  Doado  lune  decano,   qui  vir  eral    pins  eî 
bonus,  quam  cnnonicîs  sancli  itfarlini  quia  submissionem  eorum  recîpie- 
bant,  non  fuit  admodum  difficile,  in  quorum  omnium  recognitionem,  et 
hujus  modi  subjeclionis  et  obedientiae  Canonicorum  Arediensiunn  perenaem 
memoriam,  ipsos  el  in  futurum  Aredienses  Canouicos  in  fralres  Ecdesix 
sancli  Martini  inslituerunt;  sed  ne  deinceps  similem  couarentar  defectto- 
nem  Aredienses  Canonici,  Praecaventes  sancli  Martini  Decanus  el  CaDonici, 
supràdictam   a  summo   Ponlifice   super  Testamento  sanctl  Aredii  loties 
confîrmalo  oblinuerunt  :  ut  sic  Pontificiâ,  Imperiali  et  Regia  autboritatibos, 
eliam  Ëcclesi»  Gallicanae  praemuniti  essent  in  Aredienses  canonicos,  si  aii- 
quando  conlingerei  eos  Saneto  Martino  fore  inobedientes. 

Inde,  boc  est,  ab  anno  illo  1090,  abhinc  scxcenlis  ferè  annis  orlum  esl 
jus  quod  iiabentCanonici  sancli  Martini  tanquam  superiores  Ecclesis  sep^è 
dictse  sancli  Aredii  confirmandi  in  hanc  usquc  diem  electiones  Uecanorum 
Arediensium,  jusque  iUud  alterum  quod  habcnt,  tam  Decani,  quam  Are- 
dienses Canonici  intrandi  chorum  EcclesiaB  sancli  Martini,  et  in  eodein, 
locum  inter  Canonicos  ejusdem  Ecclesiae  bonorabilein,  quod  baclenùs 
observatur. 

Yerum  cum  super  his,  et  modo  recipicndi  in  Arediensi  Ecclesiae  Deçà- 
num,  dignitates  et  Canonicos  sancli  Martini,  Canonicorum  Arediensium 
superiores,  orta  fuisset  gravis  controversia  inter  Aredienses  et  sancli  Mar- 
tini Canonicos  quae  tam  cil6  exlingui  non  poluit. 

Histemporibus  circa  annum  scilicelChristi  1183,  prctiosum  sancli  Aredii 
corpus,  quod  in  Eccicsia  Monasleril  Rauzoliensis  per  multos  annos  qaie- 
verat,  ubi  et  injuria  bcllorum  relatum  fait  in  suam  Àredicnscm  Ecclesiani, 
de  qua  reversîone  hxc  babet  nolanda  verba  chronica  Gaufredis  prions 
Vosiensis  parle  allcrâ  cap.  t3,  pag.  339  :  Palris  Aredii  Healissimi  Corpus 
loco  prislino  solemnller  refcrtur  à  Guilielmo  Vosiensis  abbale,  Barlho- 
lomco  f.rioredc  Chalax,  Beraldo  sequino,  ci  Gulplieriode  Turribus  prœsenle 
et  viccpomite,  et  populo  universo. 

Quod  mcliùs  et  planiùs  innotescere  nequis  behcvolis  lecloribus,  quam  ex 
charlaconcordia;  quas  anno  Christi  1189,  faclafuil  inler  Canonicos  ulriusque 
Ecciesise,  quse  sic  habct  ex  arcbivis  malricis  Ecclesise  sancli  Martini  Turo- 
ncnsis,  sub  inscriptione  seu  tilulo  : 


Innooatio  ant'quœ  inatitutionis  inter  canonicos  Ecclesiœ  Beati  Mcu^tinl 
TuronensiSf  ei  Canonicos  Beati  Aredii  quœ  a  Beato  Arcdio  initinm 
habuit. 

Philippus  Decanus,  Rolrodus  thesaurarius,  Guiilelmus  prœcentor,  Hamc- 
linus  maglslerscholarum,  Oberlus  subJccanus,  Augerius  celcrarius»  el  ani- 


CHRONOLOGIE    DR    l'hISTOIRB    DE   SAlNT-YI\IEiX-LA-Pl.RCHE.  589 

versum  capîtulum  Beali  Marlîni  Turonensis,  Ecclos.ae  el  Canonicis  sancli 
Arcdii  Âclhanensis  in  Episcopalu  Lcinovicensi  in  perpcluum.  Quoniam 
noccndi  artifex  est  praesens  aelas,  el  ibi  plcrumquc  inîpcdimenlum,  ubi 
vcritatis  csl  et  justicia  inexpugnabilc  munimcntum,  praesenli  paginae  testi- 
rnonio  ad  prsesenlium  poslerorumque  nolitiam  Iransmittere  dignum  duxi- 
rnus,  laudahilis  et  antiquas  novalioncm  institulionis  quae  à  Bealo  Aredio 
înitium  habuit,  (irmatae  inter  nos  et  Canonicos  Beati  Aredii,  quâ  Ecclcsia 
corum  Ecclcsiae  nosirœ  lenclur  in  debitam  subjectionis  revcrcnliam, 
sancilum  enim  et  confirmatum  fuit  ulriusque  favore  et  asscnsu  Ecclesia), 
quod  quoties  Dccanus  vel  Thesaurnrius  noster  pro  quacunquc  occasionc  ad 
Ecclesiam  illorum  accessum  habuerint,  cum  processione  ab  eis  recipienlur, 
el  sedcbunl  in  digniore  sede  ipsorum  Ecclcsiae,  el  procurabuntur  ab  eis  • 
honorificè  secundum  faculalcm  Ecclcsiae;  si  quid  verô  corrigcndum  vcl 
ordinandum  in  Ecclcsia  illa  fuerlt,  aulhorilale  noslrse  Ecclesise  cum 
consilio  Decanl  eorum  et  Capituli  poleslalem  habeant  corrigendi  et  ordi- 
nandi  :  similiter  et  quatuor  Priores  noslri  praedicii,  excepta  processione, 
siniplices  verô  Canonici  noslri,  si  per  Ecclesiam  illorum  transitum  habue- 
rint, honcslè  hospilabunlurel  procurabuntur,  si  vcr6Mansionarius\llicesse 
voluerit,  litleras  Capituli  noslri  super  hoc  demonslraverit,  Chorus  et  capi- 
lulum  intregram  praebendam,sicul  unus  ex  canonicis  habcbil.Quando  crgo 
conligerii  quod  Decanus  corum  decesscrit,  libcram  poleslalem  habeant 
instiluendi  Decanum  quandocunque  voluerint,  sed  obitum  defuncti  posl 
paucos  dies,  vel  infra  mensem  denuntiabunt  nobis,  et  si  fcslinanter  cele- 
brata  fuerit  allerius  electio,  utrumque  simul  nobis  denunciare  debebunl, 
c'-  nos  defuacti  excquias  celcbrabimus,  si  ver6  quacunque  occasionc  conli- 
gcrit  instiluendi  Decani  eleciionem  ditferri  non  minus  prius  nobis  defuncti 
obitum  denuntiabunt  ;  ita  lamen,  ut  non  propter  hoc  Decani  inslitutio 
possit  impediri  vel  irratiri,  eleciionem  aulem  ejus  qui  insiituendus  cril, 
poslquam  facta  fuerit,  post  paucos  dies  vel  infra  mcnscm  nobis  signitica- 
bunl.lnslilulo  autem  Decano^statim  Capitulum  suum  inlrabunt,  et  Dccanus 
fiiJnliter  promitlet  eis  quod  infra  ipsum  annum  ad  Ecclesiam  noslram 
veniet,  cl  Canonici  ex  parte  Capiluli  eum  nobis  prœsentabunt,  nisi  mani- 
festa nécessitas  cum  impedieril,  aut  a  nobis  ampliorcm  dilalionem  impe- 
Iravcrit,  si  verô  evidcnli  necessilate  impeditus  fuerit,  quominùs  ad  prœ- 
fatum  tcrminum  venire  possit,  per  litleras  Capiluli  excusationem  suam  nobis 
insinuet,  et  dilalionem  ampliorem  à  nobis  obtincat.  Cum  vero  ad  Eccle- 
siam nostram  primùm  advenlavcrit,  cl  Canonici  ipsius  Ecclcsiae,  ipsum 
nobis  prœsentavcrint,  noslrum  est  eleciionem  simul  et  praîscntationem 
approbare,  cl  Decanum  communi  assensu  Capituli  instilulum  sine  difficul- 
tale  rccipicmus.  Quo  facto  ipsumdeconsuetudineconcanonicabimus,  etipse 
slalim  prœstabit  juramentum  quod  alii  fralres  noslri  cum  canonicantur 
prîesliterunt,  post  modùm  aliud  prœstabit  juramentum,  videlicel  fidelitalis, 
quod  ipsc  ncc  Ecclesiam  sancli  Aredii,  ncc  se  à  subjeclione  Eccbrsiae 
nostrae  subtrahel,  nec  subtrahi  patietur,  sed  quantum  possit  conscrvet  et 
tueatur,  el  nlhilominùs  libcrlatcm  et  jura  et  possessiones  Ecclesiîe  sancli 
Aredii  mlnui  non  paliclur  nec  alienari  ;  non'aiilem  in  primo  adventu  suo, 
ipsum  cum  sociis  suis  procurabimus,  vcrumlamcm  in  tcmporibus  aliis  si 


590  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  niSTORIQUE  DU  LIUOUSl!f . 

ad  Eccicsiam  nostram  dcclinaverit,  ipse  )n  cxpensis  suis  providcbit.  Caci 
aulcm  simplices  illius  EccIcsiœCanonici,  forlè  ad  Eccicsiam  nostram  tran- 
silum  habucrinl,  si  Chorum  voiucrint  intrarc,  clmajoriMissae,  el  MaiutiQi> 
intéresse,  habebunl  quolidianae  fruclum  prsebendse  sicul  Fratres  noslrî;  si 
vero  unus  ex  eis,  vel  duo  vcl  très,  aliquâ  grandi  caiisâ  de  terra  sua  fucrint 
cxpulsi,  el  h'ileras  Capiluli  sui  in  tcslimonium  produxerint,  in  Choro  nobi>- 
cum  erunt,  et  in  Capilulo,  el  illi  simul  dimidiae  frucium  prsebendae  penr;- 
pient,  et  si  forlè  (quod  absit)  de  fidclilate  Ecclesiae  illorum  et  subjectioco 
quâ  nobis  tenentur,  aliquis  malignando  moverit  quaestionem,  cis  prsesu- 
bimus  operam  et  coosilium,  sicul  el  aliis  Ecclesiarum  quae  ad  nos  specia- 
liter  perlincnl  praeslare  consucvimns  canonicis,  ut  ne  forte  aliqua  malt- 
gnandisurriperepossitoccasio,decrevimusid  praBsentipaginaecommendare, 
et  tam  nostro,  quam  Êcclcsiae  illorum  sigiilo  communire.  Âclum  publiée  in 
Gapitulo  nostro,  anno  Domini  1185 

—  His  ita  constitutis  ab  utriusque  Ecclesiœ  Canonicis  clapsisquc  dcioàt^ 
aliquot  annis  ab  bac  inita  concordia,  accldit  Girardum  de  Marcbia,  sancii 
Aredii  Dccanum,  Circa  annum  Christi  1215  è  yila  discodcrc,  sicque  prr» 
eligendo  in  ojus  locum  alio  Decano  intcr  Canonicos  Arcdicnscs  per  duu^ 
annos  disceplari,  alii  unum,  alii  alterum  eligerc  volentcs,  quod  turbas  in 
Ecclcsia  Arediensi  plurimas  excilavit,  donec  convenicnles  omncs  cli^mu 
Guidonem  de  Clausellis  Archidiaconum  Lemovicensem,  virum  litlcratum, 
providum  ethoneslum,  de  cujus  electionc  ul/Ccrtiorcs  reddcrint  ipsî  c-auo- 
nici  Aredienses  D.  D.  Dccanum, Tlicsaurarium  et  Canonicos  sancti  Martini 
superiores  suos  juxta  eorum  slatuln,  banc  ad  ipsos  mitlunl  cpisloiam  com- 
monitoriam,  quœ  sic  babel  ex  archivis  ejusdcm  Ëcclesiae  Sancii  Blartinl 
Turonensis  : 

Venerabilibus  Patribus  el  Dominis,  Decano  et  Thesaurario,  lotique  capi- 
tulo  Sancti  Martini  Turonensis,  capitulum  Sancii  Aredii,  salutem  cl  revc- 
rcntiam,  tam  dcbilam,  quam  devotam.  Cum  super  Decanatu  Ecclosi.p 
nostrae  ferè  per  biennium  inter  nos  contcnlio  fuoril  agitata,  nunc  omui 
altcrcatione  sopitâ,  ad  unilatem  et  concordiam  lotum  capitulum  por  Dej 
gratiam  est  rcductum,  proindô  discrctioni  veslrae  placuil  iulimandutn 
quod  Magistrum  Guidonem  Archidiaconum  Lcmoviccnscm,  viruin  liiler.i- 
tum,  providum  et  honcslum,  cum  omnipace  in  Oecanum  Ecclcsiai  noslra 
promovimus,  illum  ilaque  in  proximo  Pascliale,  vel  si  melius  insimul  es*c 
polcritis  in  Oclava,  beato  Marlino  et  capilulo,  sicul  moris  est,  duximu< 
paesenlandum,  caetera  in  ore  latoris  prœsentium  posuimus. 

—  Huic  aulem  Guidoni  Decano  primùm  conccssam  fuisse  à  Dominis  f>c- 
cano,  thesaurario,  canonicis  et  capilulo  Sancii  Martini  Turonensis  licon- 
tiam  cl  polcstatcm  fcrcndi  baculum  in  signum  jurisdictionis  cl  poleslali> 
quam  habct  in  ecclcsia  Sancti  Aredii,  patel  charla  sequcnli  exarchi\iv 
malricis  ecclosiae  Sancii  Mai  Uni  Turonensis  : 

Rcvcrcndis  Dominis  el  in  Christo  charissimis  Decano,  el  univcrso  capi- 
lulo Sancii  Martini  Turonensis  :  Guido  docanus,  (oiumque  capitulum 
Sancii  Aredii  Iv'dosiae  Leniovicensis  Oiœcesis,  salutem,  el  cum  reverenlu 
obcdientiam  dcbilam  et  devotam.  Affectum  nostrae  dilcclionis  et  zcIuth 
quos  circa  nos  et  Ëcclesiam  nostram  gorltis  humilitcr  atlcndentes  vcslrst 


«'.HRONOLOGIK   DM   L*H1ST01RE   DE   SAINT -YRIEIX-LA- PERCHE.  591 

quanlas  possumus  gratiarum  referimus  actiones,  super  co  quod  Guidoni 
venerabili  Decano  nostro  habere  Baculum  contendentes,  ipsum  conlulistis 
eidciTi  in  signum  dignilatis,  jurisdiclionis,  potcstalis  Ecclesiie  noslrse,  ab 
ecclcsia  veslra  ab  antiqiio  indullanim,  et  haclenùs  oblenlarum,  conce- 
dcnlpsnihilominùs  succcssoribus  cjus  Dccanis  noslris  in  pcrpcluum  fcrcndi 
Baculum  et  utendi  eodem  libcram  potcstatem,  tune  primùm  cum  à  nobis 
vobis  prœsenlati,  secundum  consnoludinem  anliquam  Ecclesiae  veslrae  ac 
noslrae  haclenùs  obscrvatam,  i'uerint  insliluii,  quod  nos  ratum  et  gratum 
habcnles  commun!  asscnsu,  cl  unanimi  in  hujus  rei  testimonium,  prae- 
scnles  litleras  sigilli  nostri  munimine  fccimus  roborari.  Actum  anno 
Domîni  1221,  mense  novembri. 

—  DefuDclo  Guidone  de  Clausellis  Decano,  ejusque  obilu,  ut  moris  erat, 
cl  dcinceps  haclenùs  fuil  D.  D.  de  capitule  Basilicie  Sancli  Martini 
Turonensis  denunlialo,  eligunt  Arcdienses  canonici  B.  in  Decanum, 
qnem  cum  quatuor  è  canonicis  suis  confirmandum,  Turones  millunl  ad 
Ecclesiam  sancli  confessons  Martini,  quinto  Idus  Maii  anno  Christi  1227, 
proul  sequens  cpislola  capiluH  Arcdicnsis  docel  his  verbis  : 

Rcverendis  Dominis  in  Chrislo  charissimis,  Patribus  suis,  N.  Decano, 
P.  Thesaurario,  universoquc  capitulo  Bcali  Martini  Turonensis,  B.  Gantor, 
totuniquc  capitulum  Sancli  Aredii  Lemovicensis  Diœccsis:  salulem  et 
reverentiam  ac  subjectionem  dcbitam  cum  honore.  Dominalioni  veslrae 
humiiiler  inlimamus,  nos  graliâ  Sancli  Spiritus  invocalA,  Magislrum 
B.  concanonicum  nostrum,  virum  utlque  de  logitimo  matrimonio  natum, 
virum  ulirà  moribus,  scientiâ  commcndandum,  in  Decanum  nostrum  ca- 
nonicô  ac  consensu  unanimi  clegisse,  undè  vobis  praedictum  Magislrum 
per  charissimos  canonicos  noslros  P.  sacrislam,  Guillelmum  Coiel,  Ann. 
Gaufridi,  N.  de  Clausellis,  Jacobum  de  Bre  cum  praesentibus  capituli 
nostri  litleris  humililer,  proul  est  antiquae  approbatae  consucludinis,  prae- 
seulamus.  Data  apud  Sanctum  Aredium,  quinto  Idus  Maii  anno  vcrbi 
incarnati  13i7. 

—  Circahaec  lempora  mold  conlcnlione  sivo  disoordlA  inlcr  Vicecomilem 
Lemovicensem,  cl  Marchiae  comilem  ;  cum  Domini  Dccanus,  Thcsanrarius, 
cl  canonici  Sancli  Martini  Turonensis,  supcriores  et  Patres  Ecclc«»ite  Sancli 
Aredii  limèrent,  nec  sine  causa  suspicarcntur,  ne  indô  maii  aliquid  cve- 
niret  Eccbîsiae  et  canonicis  Sancli  Aredii,  filiis  et  subditis  suis,  hanc  ad 
comilem  Marchiae  cl  Engolismae  commendatitiam  epistolam  millunl,  ex 
archivis  Ecclesiae  Sancli  Martini  Turonensis  : 

Dilecto  Domino  et  amico  suo  llugoni  de  Lizigniaco,  nobili  comiii  Mar- 
chiae ei  Engolismae,  N.  Decanus,  P.  Thiîsaurarius,  lotumque  capitulum 
Ecclesiae  beali  Martini  Turonensis  :  silulem  cl  amoris  intcgrltalcm.  Quo- 
niam  de  dilcclione  veslra  crga  Eccicsiam  Beali  Martini,  Patron!  nostri 
habita  cl  habenda,  nccnon  cl  de  uobililale  veslra  quae  disponil  cl  agit 
singula  cum  honore,  piano  conlidinuis,  vos  precamur  humililer  et  obnixô 
pro  Ecclesia  Sancli  Aredii  quae  nostraî  est,  ulpolè  ad  Ecclesiam  noslram 
iiullo  medisnie  pertinens  cl  annexa,  qnalenùs  si  minas  et  inimicilias  inier 
vos  ex  una  parte,  cl  Vic«»comiicm  Lemovicensem  ex  altéra  conceptas,  in 
actum  prodire  contigerit  Ecclcsia;  et   Villa))  rébus  et  hominibus   Beali 


592  SOCIETE   ARCHEOLOGIQUE   ET    HISTORIQUE    DU    LIMOI'SIN. 

Aredii,  et  vicis  ad  ipsam  Ecclesiam  pertineniibus,  velilis  parcere.  vasia- 
tioiiem  et  rapinam  inde  pro  aniore  Dei  et  Beati  Martini  mîscrîcordiier 
amoventes,  scicnles  nos  exindè  vobis  esse  obnoxios  el  devotos  ,  el  ad  ob- 
sequia  prompliores,  lanquam  ipsi  EcclesigB,  el  loco  Beati  Martini  el  pro- 
priis  ejus  cuUoribus  parcerelis,  Valete. 

—  Anno  deindô  124.'*,  ut  prudenteret  occulté  rébus  Ecclesiae su»,  boUisel 
incnrsionibus  Anglorum  altrilœ,  consulerenl,  D.  D.  superioribus  suis,  non- 
cium  mittunt  cum  lilteris  quibus  rogant  fidem  nuncii  diclis  ut  adhibeant. 
quas  ut  luce  dignas,  hic  ex  archivis  matricis  Ecclesiae  Sammaritinianae  io 
médium  proferimus  : 

Reverendis  in  Chrislo  Patribiis  Dominis  el  amicis  in  Christo  charissimis, 
Decano,  Thesaurario  el  capitulo  Ecclesiae  beati  Martini  Tuionensis,  Deca- 
nus  el  capilulum  Sancli  Aredii  Lemovicensis  diœcesis  salulcm  cum  omoi 
reverentia  el  honore;  palernilati  veslrse  mitlimus  dilcctum  et  concanoni- 
cum  nostrum  Jacobum  de  Breno  latorem  praesentium,  eamdem  roganles 
humiliter  el  devolé,  qualenus  super  his  quœ  coram  vobis  proposuerit  ex 
parte  nostra,  et  Ecclesiae  consilium  cl  auxilium  quod  polerilis  impendatis, 
et  eidem  fidcm  indubitanler  in  omnibus  lanquam  nobis  adhibealis.  Damus 
eidem  concanonico  nostro  in  mandalis,  ne  plcnariam  poleslaiem  Iraclandi 
de  nuncio  vobiscum  qucmadmodum  conslituimus,  in  Ecclcsia  nostra  raluni 
habcntes  et  firmum  quidquid  per  ipsum  faclum  fuerit  super  praennissis. 
Datum  quarlâ  feriâ  post  festum  apostolorum  Pétri  et  Pauli,  anno  Doniini 
M.  ce.  XLIIi. 

—  Cum  autem  per  id  tempus  Angli  qui  Aquilaniam  et  parles  Lemovicas 
occupabanty  invasissent  oppidum  Arediense,  sive  quod  illud  crederent 
non  salis  esse  munilum  ad  resislendum  Gallorum  incursionibus,  sivc  alia 
de  causa,  pro  majori  securitate  et  tuinonc,  propugnaculum  seu  lurrim 
lapideam  quadratam,  quse  eliam  nunc  conspicilur,  in  oppidi  loco  emineo- 
tiore  conslruunl,  sicut  ab  hoc  lempore  fuerit  Oppido  et  Aredicnsi  Eccle- 
siae secura  defensio,  cui  scdulô  invigilanles  Aredienses  canonici,  Anglis 
expulsis,  sibi  ipsis  restituli,  expetunt  exinde  à  su()remo  suo  Domino  Gal- 
lorum Rege  Philippe  hujus  nominis  tertio  Audaci  dicto  defendi,  idcirr.o  al> 
eo  obtinent  diploma  Regium,  quo  Rex  antedictus  eorum  Ecclesiam  cum 
omnibus  suis  bonis  el  possossionibus  in  sua  speciali  proleclionc  et  cuslo- 
dia  suscipil  hujusce  lenoris  : 

Philippus  Dei  gratiâ  Francorum  Rex,  Piclavensi,  Pelragoricensi,  et  aliis 
seneschallis,  Prsepositis,  Balllvis  et  Allocalis  nostris  ad  quos  littcrae  pne- 
sentes  pervenerint  salulcm,  cum  Decanus  el  capilulum  Ecclesiae  Sancli 
Aredii  Lemovicensis  diœcesis  cum  hominibus,  possossionibus  el  aliis  lem- 
poralibus  bonis  suis  in  nostra  prolectione  et  gardia,  seu  cuslodia  speciali 
consistant  ulpolc  privilegiali  privilegiis  antecessorum  noslrorum  Regum 
Franciœ  super  hoc  concessis  Ecclesiae  beati  Martini  Turonensis,  cujus  ho- 
norabile  membrum  oxislunl,  Decanus  et  capilulum  Ecclesiai  Sancli  Aredii 
anledicti,  vobis  prœcipiendo  mandamus  qualenus  praediclos  Decanum  cl 
capilulum  Sancli  Aredii,  homines,  ot  possessionos  ei  alia  temporalia  bona 
sua  ab  injuriis,  violcnliis,  et  injuslis  0|)pressionihus  drfcndalis.  Aclimi 
Parisiis  crastino  Nalivilatis  beati  Joannis  Baplislae,  anno  Domini 
M.  ce.  LXXXIL 


CHRONOI.OGIE   Dr.   L*TltSTOIRE    DE   SAlNT-YRlRlX-L\-PEKCnB.  593 

Dcfunclo  Philippe  tertio  rcgc  Francise,  Aredienscs  caDonici  conveniunt 
successorcm  suum  Philippum  quart-im  dicium  le  Bel,  à  quo  conlirmalionis 
privilegium  dictœ  siiae  Ecclcsiae,  huic  penilùs  similc  diplôme  Regium  ob- 
tinent  anno  chrisli  M.  CG.  LXXXX. 

—  Deindè  sibi  rebusquc  suis  et  EccIcsiaB  suœ  meluenles  ob  Anglorum 
novos  incursus,  qui  Philippum  Rogem  circa  liltus  maris  Occeani,  et 
Rupellx  partes  moliebanlur  cum  aggredi,  majus  auditorium  justitiae,  quam 
tam  in  oppido,  quam  in  adjaccntiis,  vicis  et  locis  jus  habent  per  suos 
officiarios  exerccndi  quasi  de  novo  roaedificant  in  mûris  ipsis  à  pane  me- 
ridionali,  è  rcgiono  Ecclcsiae  susb  construclis,  ut  lam  sibi  canonicis  cl  aliis 
Ecclcsiae  suse  clcricis,  quam  oppidanis  esset  propugnaculo,  intérim  in 
excrcUio  jurisdictionis  suse  hujusmoJi  in  mullis  impcdiuntur  ab  otliciariis 
prœdicii  Régis,  hinc  indô  jurisdictio  tcmporalis  Ecclcsiae  Sancli  Aredii 
discutilur,  et  post  exactam  disculionem,  Serenissinius  princcps  Philippus 
Pulchcr  anno  chrisli  i;)07,  cum  diclis  Arediensibus  canonicis  per  suos 
Procuratorcs  scu  commissarios  transcgit  in  hune  qui  sequitur  modum  : 

Philippus  Del  graliâ  Francorum  Rcx,  Uniwrsis  praesenlcs  lillcras  inspec- 
turis,  salulem.  Lilteras  Decani  ei  Capituli  Ecclcsiae  Sancli  Aredii,  ac  dilecli 
Guilhermi  de  Nogarcto  militis  noslri,  et  Geraldi  de  Solo  canonici  Ecclesiae 
praedictae,  ipsorum  sigillis  veris  et  intcgris  sigillatas,  noverilis  nos  ha- 
buisse  ac  diligenter  inspexissc,  quarum  ténor  talis  est.  Universis  prsesen- 
tes  lilteras  inspccluris,  Decanus  et  capilulum  Ecclesiae  Sancli  Aredii,  salu- 
tem,   prsesentibus  dare  fidem.  Sequeules  lilteras  cum  veris    et   inlegris 
sigillis  loquenlium  in  eisdem  sigillatas,  noverilis  nos  vidisse  ac  diligenter 
inspexisse,  quarum  lenor  talis  est   Universis  praesenles  lilteras  inspecluris; 
nos  Guilhermus  de  Nogareto  Domini  noslri  Régis  miles  gerens  in  bac  parle 
ncgolium  ipsius,  et  Geraldus  de  Solo  caoonicus  Ecclesiae   Sancli   Aredii 
Lemovicensis  diœcesis,    Procurator    Decani    el    Capituli    Ecclesiae    prae- 
dicko,   Procuralum  ipsorum    nomine,    notum    facimus,    quod    nominibus 
quibus  suprà  conventiones   inivimus,  et  inlerposuimus   quae   sequuulur. 
Ego  ehim  Procurator  dictorum   Decani   el  Capituli,  allendens  el  consi- 
derans  evidenter  ulililalem  Ecclesiae  praediclae    si    Dominus    Rex    asso- 
cietur  scu  cummuniatur  in  sequenlibus,  cum   propler  polenliam  manus 
Regiae,  porlio  dimidia  jurisdictionis  infràdiclae  plus  utilllaiis  afferel  Eccle- 
siae praediclae,  quàm  si  dicla  Ecclesia  in  solidum  possideret  condilionibus- 
que  diligenter  inspeciis  locorum  ipsorum  ac    palriae,    necnon    potemia 
vicinorum,  qui  dictam  Ecclesiam  retroactis  lemporibus  graviter  oppresse- 
runt,  omnino  in  perpetuum  dicto   Domino  Régi   el  ejus   successoribus 
regibus  Franciae,  omnimodam  jurisdiclionem  aliam  el  bassam   diclae  villae 
Sancli  Aredii,  el  tolius  alterius  terrae  Ecclcsiae  ipsius,  proul  mclius  et  ple- 
nios  ad  dictam  Ecclesiam  antcà  pcrliuebat,  necnon  et  aciiones  ipsis  Decano 
el  Capilulo  compétentes,  rationc  jurisdictionis  praediclae,  et  ex  causa  com- 
munionis  bujusmodi  :  Ego  dicius  Procurator,  do  et  coiicedo  dicio  Domino 
Régi,  et  diclo  ejus  militi  vice  ejus  recipienli,  dimidiam   pariem  indivisam 
omoimodae  jurisdictionis  altae  et  bassae  omnium  praemissorum,  et  ex  causa 
isia  constituo  dictos  Decanum  et  Capilulum  possidere  ullra  quam  praemissa 
juriddicliooem  praedictam,  nomine  ipsius  Domini  Régis,  que  usque   per 


594  SOGléTÊ   ARCHÉOLOGIQUE    ET    H1ST0RIQUK   DU    LIMOUSIN. 

cum  realis  possessio,  vel  quemlibel  eorumdem  fueril  appreheasa,  qiias 
non  apprehendet,  nec  occasîone  praernissorum  aliquid  pelci,  donec  real.= 
recompensatio  facia  fuerit  secuudum  quod  inferiùs  coniiuetur:  et  vice  versa 
Ëgo  Guilhermu!)  lie  Nogarelo  prxdiclus  vice  Domini  Régis  pnedîcti,  pr^- 
dicla  recipiens,  ex  causa  permulalionis  ejusmodl,  promitlo  diclum  Demi- 
num  Regom  prœslaturum  diclae  Ecclesiae  recompensationem,  décerner  io 
lerra  proborum  virorum  ponendorum  cominuniler,  arbilrio  siaïuenJuai, 
postquam  valor,  el  condilio  corum  qu£  idem  Dominus  Rex  recipîei  à  dicta 
Ecciesia,  in  pnemissis  per  probos  viros  communiter  ponendos,  fuerÎD; 
sstimala  anlequam  Dominus  Rex  realiier  prsedicla  appréhendai.  Fuît  :iuieai 
diclum  commun!  Iraciatu  et  concordato  inler  nos  Procuralorem^  et  Mililem 
prsdictos  sub  formis  cl  condiiionibus  infràscripiis,  videlicel  qaod  Domi- 
nas Rex  extra  manum  suam,  vel  ejus  successorcs  non  ponent,  ner.  possiot 
ponere  aliquid  de  iis,  quae  in  ipsum  per  bas  lilleras  iransferunlor,  in:û 
absque  aliquo  medio  tenebunt  semper. 

Item  quod  villa  el  terra  Sancii  Aredii>et  homines,  villae  et  lerrse  prsdîclJ* 
roganlur  jure  scripto. 

Item  ponentur  sive  deputabunlur  Viguerius,  judex  ac  servientes  ad  exer- 
cendam  et  expleciandam  jurisdictionem  in  praedicta  villa,  et  terra  commu- 
niter per  diclos  Decanum  et  Capiiulum  el  Dominum  Regcm  quolies  opus 
erit,  seu  per  depulaios  ab  eis,  qui  destituentur  per  eosdem,  cum  causa 
légitima  suberit,  cujus  cognilionem  communiior  ipsi  Decanus  et  Capiialom 
ac  Dominus  Rex  seu  depulandi  ab  eis  habeant. 

Item  quod  servienles  in  terra  Ecclesiae  expleelabili,  quam  diclî  Decaous 
el  Capiiulum  habent,  sivealii  vicarii  ejusdem  Ecclesiae  extra  Villam  praedictain, 
ipsi  servienles  sinl communiter  positi,  non  tacienl  aliquod  oflicium  sergeola- 
rium,  nec  oxplectabunl  nisi  cum  judiclsinstituti,  ut  praemitiilur,  in  qaibos 
contineatur  faclum,  pro  quo  conlingii,  homines  expleciabiles  cilari,  vel  in 
terra  Ecclesiae  explectabili,  eos  oflicio  sergentario  uli. 

item  quod  nullus  alius  serviens,  sive  ofâcialis  Régis,  nisi  depiitatus,  ul 
praemitiilur  à  praedictis  tn  dicla  villa,  et  terra  nullum  sergentarium  oflBcium 
exequatur. 

Item  quodsitibi  sigillum  commune  inler  diclos  Decanum  et  Capiiulani,et 
Dominum  Regem  sub  quo  concedantur,  et  fiant  obligationes,  el  contractos^ 
el  alia  sub  modo  et  forma  sigilli  Domini  Régis  in  Baylia  d'Oleron  (I),  sive 
de  monte  Dornse.  Quod  sigillum  unus  ex  officiiilibus  icnebit  :  eritque  con- 
tra sigillum  parvum,  cujus  sigilli  liltera  eril  sigillum  curiae  Domini  Régis 
Francise,  et  Decani  el  Capiluli  Sancii  Aredii.  El  in  charactere  erunt  scaïun 
Domini  Régis  cum  floribus  lilii  ex  una  parle,  et  ab  alia  parle  Âbbas  indu- 
lus  sacerdotal ibus  cum  crossa;  el  cum  diclo  conirasigillo  Acia  et  processus 
judiciales  villae,  et  terrae  praedictae  sigillabuntur;  in  quo  contrasigillo  erit 
caracier  unius  tloris  lilii,  et  una  crossa  el  liltera  erit  sigillum  sancii 
Âredii. 

item  quod  notarii  Régis,  sive  commissarii  sub  alio  sigillo  sive  signe,  in 
dicta  villa  et  lerra  non  exercebuni  oflicium,  nisi  illi  olim  solùm  qui  depu- 
tabunlur sub  praedicto  sigillo. 

(1)  Il  faut  très  probablement  corriger  Oléron  en  Laron,  chef-lieu  d'un  baUUage  roT«l, 
sU  près  de  Peyrat-le-Château  (Haute-Vienne).  'A.  L.] 


CBRONOLOGIE    DR  L^TlLSTOinfi   DE  SAtNT-YftlElX-LA-rERCHR.  595 

Item  offîcialcs  pnedicli,  quotiescunque  continget  eos  instiiui,  in  sua 
însliiutionc  jurabunt  privilégia  el  lilteras  sive  mandala  concessa  à  prae- 
diclo  Domino  Roge  et  praedecessoribus  suis  Docano  et  capitulo  praîdiciis 
cl  singiilaribus  canonicis,  personis  et  hominibus  eorumdem  fideliier  cuslo- 
dire,  i^m  super  bonis  Ëcciesiaslicis,  quàm  super  bonis  patrimonialibus 
eorumdem,  ac  cosdem  gardiare  et  defcndere  cum  bonis  suis  à  quibuscun- 
que,  prout  in  lilleriis  rcgiis  et  privilegiis  conlinetur,  et  litleras  regias  el 
mandata  praediciis  Decano  et  capiti^lo,  ac  canonicis  singuiaribus,  et  aliis 
quibuscunquc  direcia  secundum  conlinenliam  el  tenorem  eorundetn,  exe- 
culioni  cum  efifeclu  mandare^  quam  executioncm  diciarum  litterarum 
Regiarum,  Dominus  Uex  diciis  officiulibus  institucndis,  ut  praelermitlilur, 
necnon  etiam  gardiam  sive  defensionem  ipsis,  et  eorum  cuilibel  in  soli- 
dum  committel,  et  cliam  mandabit  Dominus  Rcx  per  suas  litleras  quod 
omnes  justiciarii  cl  subdili  suî,  praîdlclis,  cl  cuilibel  eorumdem,  inslituen- 
dis,  ipbis  pareant  et  intendant  secundum  lonorem  litterarum  Regiarum, 
authorilate  super  gardia  diciis  Decano  el  Cap'tulo,  ac  Canonicis  concessa  ; 
quam  cxecutionem  ipsi  communes  officiales  exercebunl,  et  corum  quiiibei 
h)  solidum,  ita  quod  non  sit  meliorcondiiio  occupanlis  absque  emolumento 
aliquo  ad  requisilionem  Procuraloris,  Decani  et  capiluli  ac  singularum 
personarum  ipsius  Ecclesia;,  vel  alterius  ipsorum;  quod  si  non  feceriot  ab 
officio  suo  eo  ipso  erunt  privali  absque  alia  cognilione. 

item  jurabunl  eiiam  de  emolumcntis  diclorum  sigillorum  fideliter,  et 
comniuniter  respondere  diciis  Decano  et  capitulo  pro  média  parte,  et 
Domino  Régi  pro  alia,  necnon  elinm  et  omnia  contenta  in  prsediclis  litlcris 
iirmiier  obscrvare. 

Item  quod  Dccanus  elCanonici,  sive  ca|»ilulum,  el  aliae  personae  praediclae 
Ecclesiae  ac  bomines  eorumdem  qui  nunc  sunl  et  pro  tempoi-e  fuerinl,  non 
teneantur  liligare,  seu  comparere  in  aliqua  causa  coram  aliquo  alio  judice, 
nisi  coram  judicc  insliluendo  in  dicla  villa,  ut  praemitiilur,  vel  coram 
Domino  Hegc,  seu  curia  sua  paritcr  super  eorum  gardia  secundum  teno- 
rem privilegiorum  el  liiierarum  ipsis  concessarum. 

Item  quod  dicli  Decanus  elCapitulum  cogniiionem  anniversarioram  prsc- 
senlium,  praeteritorum  et  iuturorum,  sive  aliarum  rerum  legatarum  et 
Icgaudarum  ipsi  Ecclesiae,  et  personis  ejusdem  censuum  et  reditoum,  el 
expleciorum  dicla»  terrîR  sua;  ac  familiae,  soli  et  in  solidum  habeanl,  ac  de- 
finitionem  et  executioncm  eorumdem;  ita  quod  ofliciales,  qui  pro  lemporc 
fuerinl,  ut  prsetermittiuir,  insiituti,  omnem  violentiam  et  inipedlmentum 
pro  juramenio  suo  amoveanl,  el  cxeculionom  cum  rcquisiti  fuerinl  absque 
expensis,  judicii  ipsorum  super  pnemissis  conjunctim,  vel  divisim  libéré 
exeqni  teneantur.  El  quod  Decanus  et  Capilulum  el  aliae  personae  prae- 
diclaî  Kcclesias  possinl  acquirere  in  Fheudis  et  retro|)heudis  dictae  Ecclesiae, 
lia  quod  non  teneantur  ratione  amorlisalionis,  nec  pro  medietate. 

Item,  el  quod  Dominns  Rex,  in  loco  sive  molà  in  qua  olim  fuit  turris 
vocata  turris  abbaiis,  aeilincare  facial  expensis  communibus  suis,  cl  diclo- 
rum Deeani  cl  capiluli  domum.  sive  lurrim  ubi  juslilia  reddatur,  et  ubi 
delinqientes  teneantur,  secundum  quoi  ipsis  oflicialibus  vidubilur  facien- 
dum  vocaiis  diciis,  Domino  Regc,  seu  ejus  geniibus,  et  Decano  cl  capitulo, 


fSdô  SOCIKTE  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE   DU   LlIlOOSIlf. 

seu  depuialis  ab  ipsis,  qua  sediflcalâi  eruni  commania  Donriîoo   Re|^  ei 
Ecclesiae  incmoralîB. 

llem  quod  lolum  emolumentum,  quod  provenire  polerit  per  viam  acti>>- 
nis  seu  denuncialionis,  vel  ex  officio  vel  ex  quavis  alla  causa,  ex  lolans 
praeleritis  sive  praesentibus  casibus  quibusciinquo  commissis  et  cominiitrD- 
tibus  ralionc  jurisdiclionis  prsediclse  communiier  dividalur,  înter  DomiDoni 
Regem  et  Dccanum  el  Capilulum  praedicluin. 

llem,  de  hujusmodi  associalione  excipienlur  ieuda  quae  à  Decano  lenea- 
lur,  el  homagia  quse  ei  debenlur  nomine  EcclesiSf  et  Turris    dtciorum 
Decani  el  Capiluli  sita  juxla  clauslrum  diclae  Ecclesiae  el  jurisdiclîo  qaain 
cl  ipsi  habenl  conjunclim,  vel  divisim  secundum  consueludincm    lerras  Te! 
palriae  in  rébus,  quae  leiienlur  seu  movenl  de  feudis  Ecclesiae    praedic  r, 
sive  à  Decano  el  Capitule  res  ipsae  moveani  el  teneantur,  aui  ài    singalari- 
bus  canonicis,  sive  ab  aliis  personis  Eccleniae  praeJiclae,  quae  jurîsdiciio  lu 
solidum,  et  eliam  honores,  vendse  el  alia  deveria  ad  hoc  facienlîa   rema- 
neanl  Ecclesiae  praefalae,  el  ejus  personis  pra;diciis  el  eorum  successoribus 
cum  expleclis,  laliis  decimisque  quas  habenl  in  hominibus  et  terris  praedi<r- 
lis  :  quod  si  lorlè  praemissorum  occasione  quia  conveotiones  et  commuaiO' 
nem  hujusmodi,  el 'conlractus  fecerint  :  vel  eliam  ex  eo  quod  castra  de 
Chaslucio  dicto  Chabrol,  superius  el  infcrius,  el  de  CurbeHoo»  el  de  Breno, 
cum  eorum  caslellaniis  et  perlinentiis,  necnon  et  inparrochiisdeTrocha,  de 
Benayas,  de  Lubcrciaco,  de  Gourbario  (1),  de  Capelia  Nantiac,  ei  de  septem 
piris,  quse  sunl  de  perlinentiis  castri  de  Breno,  in  solidum,  seu   pro  parte, 
sub  cerlis  pactis  el  condilionibus,  in  diclum  Dominum  Regem  transférant 
per  alias  litieras  inde  confeclas,  dicli  Decanus  el  Capitulum,  sive  singulares 
Canonici,  ac  aliae  personae  diclae  Ecclesiae  vexarentur,  seu  damnum  incurre- 
rent,  Domlnus  Rex  el  successores  sui  tenebuntur  damnum  resarcire,  et  à 
quibuscunque  eos  defendere. 

Item,  quod  Dominus  Rex  sub  speciali  gardia  sua  et  suorum  surcessonim 
diclum  Decanum  el  capilulum  ac  singulares  canonicos  cum  bonis  eorom 
palrimonialibus  sive  hominibus  taliabilibus  sive  de  corpore  ex  causa  ponet; 
ila  quod  non  teneantur  coram  aliquo  alio  judice  sseculari  respoodere,  oisi 
solùm  coram  dicto  Rege  vel  judice  instiiuendo,  utsuprà  praemillitur.  Caasae 
verè  iiomiuum  expleciabilium  praedictorum  communitcr  per  prsefatum  com- 
munem  judicem  insiituendum,  procuratore  tameo  Ecclesiae  praeseote.  an- 
dienlur  el  definienlur. 

Item  quod  privilégia concessa  à  praedecessoribus  suis  Ecclesiae  beali  Martini 
Turonensis,  el  membrissuis,  cujus  Ecclesia  Sancti  Aredii  est  honorabile  mem- 
brum,  diclae  Ecclesiae  el  personis  ejusdem  custodielet  senrabii.  Caeterum  ego 
Procurator  praediclus,  diclo  militi  Domini  Régis,  pro  dicto  Domino  Rege 
solemniler  slipulanli,  promis!  me  raclurumetcuralurum  bonâ  fideqaod  dicii 
Decanuset Capitulum  diclam  communionem^et  praemissaomniaei  singala  ex- 
presse ratificabunt,  approbabunl  per  solemnes  litieras,  ac  etiam  innovabunt,  cl 
ego  dictus  miles  vice  versa  promisi  Procuratori  praedicto,  quod  dicto  Decano 
et  Capitulo  nomine  diciae  Ecclesiae  solemniler  stipulanti,  me  faclurum  el  eu- 


(1)  Faute  de  lecture  pour  Curbifino.  zi  Courbefy.         [A,  L.] 


CBIkONOLOGlE   DE   L*HIST01RK   DE   SAINT-YniRIX-LA-PERCHE.  597 

ralurum  boDfttidc,  quoddiclusDominus  Rexdictam  communioneni,  praernU- 
saque  omnia  et  singula  approbabilei  raiificabil  per  suas  solemncs  Hueras,  ac 
cllam  iDnovabit,  in  quorum  omnium  tesiimonium  et  munimenlum  nos 
diclus  Miles  el  Procuraior  praedictus  sigilla  nosira  duximus  praesentibus 
apponenda.  Âctum  Parisius  anno  Oomini  M.  CGC.  VIL  mcnse  Augusli,  in 
die  fesli  beali  Domiiiici  confessons.  Quae  prœmissa  universa  el  singula  deli- 
berato  consilio  super  omnibus  praemissis  in  capitulo  noslro  ad  lioc  specla- 
I  lier  COQ vocato,  pensaiâ  ulilitaie  Ecclesiae  noslrae  praemissa  expresse  per 
has  praesenles  lilleras  solemniter  ionovamus,  raliticamus,  approbamus,  lau- 
damus^  et  inviolabiliter  observare  promiltimus,  et  in  fidem  et  tesiimonium 
prsemissorum  sigiilum  uoslrum,quo  commuuiterutimurpraesenlibusliileris, 
duximus  apponendum.  Datum  apud  Sanclum  Aredium  mense  prsedicio  iu 
craslinum  Assumplionis  Beatae  Mariae  anno  Domini  M.  CGC.  Vil.  Nos  ver6 
etiam  omnia  univera  ei  singula  prout  superiùs  in  liUeris  diclorum  Mililis 
et  Geraldi  suni  descripta,  expresse  per  has  prdesentes  litteras  solemniier 
înnovamus,  ratificamus,  approbamus,  laudamus  et  inviolabiliicr  tenere, 
cusiotlire,  observare  et  facere  promitlimus,  et  per  successorcs  noslros 
Hcges  Francise,  ac  quoscunque  jusliciarios  sive  subdîtos  noslros  volumus 
custodiri,  et  in  fidem  et  tesiimonium  ac  munimenlum  omnium  praemisso- 
rum  sigiilum  nostrum  prsesentlbus  litteris  jussimus  apponi.  Actum  Pissiaci 
anno  Dooiini  M.  GGG.  VII,  mense  Augusti. 

—  Cum  aulem  à  lemporeinslilutlonis  suseadeô  copiosèet  magnîHcè  dotata 
cl  dilata  plurimis  bonis  subsisterel  Ecclesia  Sancli  Aredii  usque  ad  lempus 
Philippi  Pulchri  Francorum  Régis  sic  ut  esset  secunda  saecularis  Ecclesia 
quae  posl  Lemovicensem  Ecclesiam  t'ulgeret  honoribus,  el  posscssionibus, 
et  in  qua  nullus  reperiebatur  in  Ganonicum  nisi  graduaius  aut  nobilis 
rxislerel;  tamen  Anglorum  bellis  altrita,  qui  per  sexaginla  annos  et  am- 
pliùs  has  Lemovicenses  partes  conlinuis  suis  incursionlbus  vaslarunl,  tan- 
lam  passa  est  in  facultalibus  et  bonis  suis  inopiam,  ut  eorum  fer^  dimidiA 
parle  spolialâ  vicenarium  Ganunicorum  suorum  numerum,  quo  gaudebal  el 
iselabalur,  ad  duodenariumreducere,  non  sine  mœrore  coacta  fuerit,  quod 
incœpit  exequi  anno  Ghrisli  4422.  Siatulo  solcmni  ea  tamen  de  causa  facto, 
cujus  confirmalionem  cum  à  summo  pontitîce  peliisset,  iliam  obtinet  anno 
sequenii  1423,  die  octavo  Marlii,  aiino  sexlo  Ponlificalus  Mariini  papae  V, 
prout  sequenli  ejusdem  Bullà  inscriplâ  Decano  Ecclesiae  Lemovicensis,  cl 
enuDcialivâ  eorum  quae  siiprà  diximus,  videre  est,  ex  archivis  Ecclesiae 
prsedictas  Sancti  Aredii  jam  primùm  in  lucem  prolata  : 


Bulla  Martini  papœ  V,  quâ  numerus  ciglnti  canonicatuum  et  prœben- 
darum  Ecclesiœ  Sancti  Aredii  ob  diminutionem  facultatum  et  pro- 
oentuum  ejusdem  Ecclesiœ  reducitur  ad  numerum  duodecim  canonica- 
tuum et  prœbendarum  qui  nunc  est  in  eadem  Ecclesia 

Martinus  episcopus  servus  scrvorum  Dci,  dileclo  filio  decano  Ecclesiae 
Lemovicensis,  salulem  et  aposlolicam  benedictionrm.  Regimini  univer- 
salis  Ecclesiae  dUponente  Domino  praesidentes  cujus  assiduis  augmenta- 

T.   XL.  38 


598  SOCIÉTÉ  ARCHEOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU   LlMOUStlf. 

tionis  et  soIlicitudinisassiduitale(?)  pulsamur,  ulcircasiatum  EcclesiaroD 
prœserlim  Romanne  Ecclcsiae  immédiate  subjeciarum  salubriter  dirigt'c- 
dum,  solerter  attendamus,  ul  numerum  personarum  in  eis  allîssimo  famu- 
lantium  sic  ordine  provido  limitemus,  quod  superflua  ipsius   maltitod 
provisione  non  carcat,  nec  earum  [laucitate  dignum  Deo  servi tium  aliqca- 
tenus  subtrahatur;  exhibita  siquidcm  nobis  insuper  pro  parte  dilectorosi 
filioruin  capituli  Ecclesiae  Sancli  Aredii  ejusdem  Romanae  Ecclesise  immé- 
diate subjeclœ  Lemovicensis  diœcesis  petitio  conlinebal,  quod  olim  ips: 
providè  attendentes  dictam  Ecclesiam  à  tempore  primitivae  snaB  fandatit*- 
nis  fuisse  fundatam,  et  post  etiam  per  ionga  tempora  pluribus  nolabiiibu* 
reditibus,  obventionibus,  dominiis,  deveriis  utilibus  atque  jurisdiclioQi' 
bus  meram,  mixtam,  altam,  mediam  et  bassam  jurisdictionem  habeoliba^ 
refertam  adeo  in  tantum  quod  hujusmodi  temporibus  erat  secanda  sa^*^ 
laris  Ecclesia  post  Ecclesiam  Lemovicensem  in  honoribus  et  commodis. 
et  in  eadcm  Ecclesia  Sancti  Aredii  non  debebat  aliquis  in  canonicnm  redpi 
nisl  graduatus  vel  nobilis  cxisteret;  in  eadem  viginti  praebeodae  pro  toti- 
dem  canonicis,  ac  decanus,  canlor  et  sex  majores  vicarii  ad  decaDtaodcs: 
et  cclcbrandum  divina  officia,  ac  eis  interessendum,  qui  illis  temporibss 
habebant  multum  notabiliter  unde  vivere,  et  eorum  statum  deceoter  suj»- 
porlare  posscnt,  quodquepostmodum,  propter  guerras  hostiles,  ferocesqrït 
ac  miserabiles  Ânglicorum  insultus,  quibus  ipsi  à  sexaginta  annis  et  ultn. 
partes  ipsas  incessanter  vastaveranl  et  a^flixerant  et  adhuc  vasiare  etaffligerf 
non  desinuDt  ;  dicta  ecclesia  Sancti  Aredii  adèo  collapsa,  ac  in  egestatem  d 
inopiam  deducta  ac  in  suis  fructibus  diminuta  foret,  quod  decanus  cantor, 
canonici  et  vicarii  supràdicti  ex  fructibus  ipsius  commode  susten tari  naqui- 
rent, sed  cogerentur  ab  eadem  EcclesiaSancti  Aredii,  omissis  inibi  omuioo 
divinis  officiis,  hincinde  vagari,  discurrere,  et  victum  sibi  mendicare.  Ilaqne 
quod,  nisi  ipsi  Ecclesise  Sancti  Aredii  quœ  notabilibus  aedifîciis  constrada. 
una  de  pulchrioribus  diclje  diœcesis  existebat  et  existit,  céleri  sucurrerct  re- 
medio,  fioali  subjaccret  ruiuae,  unde  ipsius  capilulum,  eorum  decano  lunf 
in  remotis  agente,  volentes  tôt  et  tamis  incommodis  ob\iare,  et  dijudicame^ 
fore  utilius  hujusmodi  divina  officia  ex  praedictis  personis  numéro  compe- 
lenti  adimplere,  quam  illa  3x  earum  superfluo  et  excedenti  derelinquere, 
voto  earum  unanimi,  dictum  numerum  viginti  canonicaturo  et  totidem 
praebendarum  ad  duodenarium  duntaxat  numerum  reduxerunt,  intcr  ali^ 
statuentes  quod  deinceps  inanteà^nullumad  aliquosex  dictis  canonic-atibus 
et  prsebendis  illius  Ecclesise  Sancti  Aredii  quovismodo,  prcelcr  quam  per 
liberam  resignationem  simpliciter,  vel  ex  causa  permutationis  factam  vd 
fiendam  vacantes  vel  vacaluras,  quavis  authoritate  recipcre  et  admitiere 
dcberent,  et  quod  se  ad  hujusmodi  slalutum  inviolabiliter  sub  perjurii  et 
privationis  praebendarum  suarum,  quas  in  eadem  Sancti  Aredii  Ecclesi* 
obtinerent  pro  tempore,  pœnis  ad  hoc  corporalibus,  praestitis  jurameoli^ 
obligarunt,  prout  in  patentibus  iittcris  inde  confectis,  eoramdem  Capituli 
sigillo  munitis,  dicitur  plcnius  conlincri.  Quare  pro  parte  Capituli  prsfai' 
nobis  fuit  humiliter  supplicatum  ut  reductioni,  slaïuto  et  litteris  prœdicli^ 
apostolicae  robur  coniirmationis  adduceret,  et  aliàs  eis  prsmissis  oppor- 
tune providere  de  benignitate  apostolicà  dignaremur.  Nos  igitur  hujus- 


CHRONOLOGIE   DE  l'hISTOIRE   UB  SAINT-YRlElX-LA-PERCtlE  599 

modî  supplicaliouibus  inclinali,  discretioni  tuae  pcr  apostolicd  scripta 
mandamus  quaienus,  si  ita  est,  hujusmodi  rcduclionem,  slatulum  et  lit- 
leras,  absque  lamcn  illorum,  qui  ante  datum  prœsentium  gratias  expec- 
lativas  ad  canonicatus  et  prsebcDdas  in  eadcm  Santi  Âredii  Ecclesia, 
processusque  super  iis  in  talibus  fieri  consuetos  obtinuerint,  praejudiciO) 
authoritate  nostrâ  approbes  et  confirmes,  suppicndo  defectus  omnes  qui 
fortasse  aliàs  intervencrint  in  prsemissis,  contradictores  per  censuram 
Ecclesiasticam,  appellatione  posiposita,  compesccndo,  non  obstantibus 
constitutionibus  et  ordinationibus  aposlolicis  ac  statutis,  et  consueludini- 
bus  dictas  Ecclesiae  Sancti  Âredii  quibuscunque  contrariis,  juramento,  con- 
firmalione  apostolicâ,  vel  quacunque  firmitale  aliâ  roboraiis,  aut  si  aliqui 
apostolîcâ  vel  aliâ  quavis  authoritate  in  dicta  Ecclesia  Sancti  Aredii  in  cano- 
nicos  sint  recepti,  vel  ut  recipiantur  insistant,  seu  si  super  hoc  brevibus 
sibi  fiendis  de  canonicalibus  et  prœbendis  ipsius  Ecclesiae  Sancti  Aredii 
specialiter  aut  alias  beneficiis  Ecclesiasticis  in  illis  partibus  générales 
Âposiolicae  sedis,  vel  Legatorum  ejus  lltteras  impetrarint,  etiamsi  per  eas 
ad  inhibitionem,  rescrvationem  et  decretum,  vel  aliàs  quomodolibet  sit 
processum  ;  quas  quidem  litteras  et  processus  habiios  per  cosdem  ad 
omnes  suppressas  praebendas  volumus  non  extendi,  sed  nullum  per  hos 
cis  quod  ad  assecutionem  canonicatuum  et  prebendarum,  aut  beneficio- 
rum  aliorum  praejudicium  generari,  et  quibuslibel  privilegiis,  indultis  et 
litteris  apostolicis  generalibus  vel  specialibus  quorumcunque  tcnorum 
existant,  per  quae  praesentibus  non  expressa  vel  totaliter  non  inscripta, 
effectus  carum  impediri  valeat  quomodolibet,  vel  differri,  et  de  quibus 
quorumcunque  totis  tenoribus  de  verbo  ad  verbum  habenda  sit  in  nostris 
litteris  mentio  specialis,  nos  autem  ex  nunc  irilum  decernimus  et  inane; 
si  secus  super  hiȈ  quocunque  quavis  authoritate  scienter  vel  ignoranter 
contlgerit  attcntari.  Datum  Romœ  apud  Sanctum  Petrum  octavo  idus  Mar- 
tii  Pontificatus  nostri  anno  sexto  (1417) 

Registrata  gratis.  C.  de  Ghomacillis. 

Supra  dicta  autem  BuUa  fuit  exécution!  demandata  per  D.  Joannem  Rul- 
pium  decanum  Lemovicensem  die  deciraâ  quintà  mensis  januarii  anno 
Chrisli  14^6. 

—  Omni  fcrè  tempore  quo  bellis  Anglorum  Aredienses  canonici  infestan- 
tur,  eadem  ab  illustrissimisD.D.  Episcopis  Lcmovicensibus,  ut  Ecclesiam 
Ârcdiensem  sibi  acquirercnt,  naclis  occasionem  horum  bellorum,  molestiâ 
afliciuntur,  quod  vidèrent  eam  visitari  non  posse  à  decano,  thesaurario 
et  canonicis  Sancti  Martini  Turoncnsis  ejusdem  superioribus.  Rcs  ita  se 
babet.  Illustrissimus  Dominus  Bcrnardus  de  Bonavalle  factus  Episcopus 
Lcmovicensîs,  ut  non  decsset  officio  suo  diœcesim  suam  more  decessorum 
suorum  visitât,  monet  Aredienses  canonicos  ul  sint  parati  ad  se  suosque 
recipiendum,  quia  ab  hac  parte  diœcesis  sus  visilationcm  incipere  ani- 
mum  induxcrat.  Quibus  auditis,  Aredienses  D.  Episcopum  per  suos  depur- 
tatos  seu  commissarios  conveniuni,  ipsique  cum  humilitate  et  modestia 
représentant  Ecclesiam  suam  jcum  omnibus  personis  ejusdem  nusquam 
fuisse  de  diœcesis  Lemovicensi,  etiamsi  esset  in  diœcesi  Lemovicensi  quod 
ab  ipso  sancto  Aredio  in  ipsa  sua  prima  ipstilutionc  submissael  donata  fuc- 


600  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUK.    RT   HISTORIQUE    DU   LIMOUSIIV. 

rit  Ecclesise  Sancti  Martini  Turonensis,  ut  manifeslum  erat   pcr  tesUirf?- 
tum  ejusdem  sancli  Aredii  confirmatum  in  generali  concîlîo  Episcop-r:: 
Gailiae  anno  860,  cujus  juris  cliam  haclcnùs  erat,   eumquc  idcircô  emv 
rogant,  ut  nihil  ob  reverentiam    sancli   Aredii  contra   cjus   institutiocf' 
mollatur.  Quâ  non  obstante  supplicalione,  cum  in  dictam  Ecclesiam  civ. 
fuisset  ingredi,  et  repulsam  passus  ab  Arediensibus  canonicîs,  ipsi  suhiu- 
invicti  cum  D.  D.  decano,  thesaurario,  canonicis,  et  capilulo    Sancli  V^'- 
tini  superioribus  suis,  convenire  cum  faciunt   coram  suprema  Parlam'C 
Parisiensis  curia,  in  casu  novitatis  et  saisinae  ul  vocant,  in  cujos  lilis  ;' 
secutione  moritur,  anno  Cbristi  1403. 

Dominus  Hugo  de  Magniaco  succcssor  ejus  immedialus    rcsumit  iiU' 
circa  annum  Chrisli  U05,  scd  cum  aliquol  annis  postea  mîgrare  cogiu:  •■ 
diœcesi  sua  et  civitale  Lcmoviccnsi  ad  urbem  Parisiensem  ut  bujusmo. 
causam  prosequatur,  migrai  cliam  e  vi(a. 

Pelrus  dcniquè  de  Montebruno  île  m  Ëpicopus  Lemovicensis,  cum  sv<- 
rum  deccssorum  lilem  resumpsisset,  et  iliam  animosè  fuisset  prosecu.2> 
aliquot  annis,  addidit  animos  D.  D.  decano,  Ihesaurario,  canonicis  el  capi- 
tulo  Ëcclcsise  ftlalricis  sancli  Martini  Turonensis  Aredionsis  Ecclesissof- 
rioribus   immedialis  ;  hi  enim   litcm   canonicorum  Arediensium    fîlioru^ 
suorum  suam  facientes,  tandem  causam  obtinent  arrcslo  inter  parles  roc- 
tradîctoriè  lato  anno  Chrisli  1444,  cujus  arresti  haec  imprimis  verl^a  consU^^ 
randa  sunt.  Notum  facimus  quod  iite  molâ  inter  dilectos  nostros  decaDum. 
thesaurarium  et  capituium  Ecclesiae  beati  Martini  Turonensis,  ac  decaourcci 
capiiulum  Ecclesiae  Sancti  Aredii  Lemoviccnsis  diœcesis  de  membris  per- 
tinenlibus  et  dependentiis  ejusdem   Ecclesiae    sancti  Martini    existent^: 
consortes,  adores,  et  conqucrenies  in   casu  novitatis  et  saisinx  ex  uoi 
parle,  et  detunctum  Hugonem  de  Haignaco  epiî^copum  Lemovicensem  q  :• 
îoco  defuncti   Bernardi  de   Bonavalle  etiam  episcopî    Lemoviccnsis  lian: 
vivebat  prœdecessoris  sui  immediali^prssentem   processum    resumpsorat. 
defensorem  et  opponentem  in  diclo  casu  ex  altéra  :  super  eo  quod  àkc- 
bant  dicti   actores  et  conqucrenies  quod  sanclus    Marlinus    Turonensis 
unus  de  gloriosioribus  confessoribus  de  quibus  commemoralio  in  sanris 
Dci  Ecclesia  lolaquc  christianilate  fiebat,  crat  et  fuerat,  proptcr  ejus  hoDO- 
rem  et  reverentiam,  suique  corporis  pretiosi  in  ipsa  Ecclesia  requiesceDt>> 
reverentiam,  plures  Imperalores,  Rcges  Francise  et  alii  Principes  el  Ma- 
gnâtes hujus  regni   noslri,   alleriusque   patriae   erga   eandem  ecdesii^^ 
sancli  Martini  magnam  devotionem  habuerant,  et  ipsam  pluribus  magoi^ 
et  notabilibus  dominiis,  redilibus  et  revenutis(?;iu  eodem  nostro  regoo  fi 
alibi  consislentibus  dotaveranl  et  augmentaverant,  eaquc   Ecclesia  saocii 
Martini  prsedicla  cum  personis  ejusdem  lam  in  capite,  quàm  in  membris 
per  privilégia  aposlolica  ab  omni  jurisdicilone  patriarcharum,  ArchtepfS- 
coporum,  Episcoporum  et  quorumlibet  aliorum   Judicum,  Ordinariorotn. 
Ecclesiaslicorum,  notoriè  exempta,  sedique  apostoiicae  immédiate  subjecii 
erat  et  fuerat  :  ulterius  dicebant  dicti   actores    et   conqucrenies,  quoi: 
sanctus  Aredius  magnus  et  notabilis   dominus  in  patria  Lemovicensi  sai 
tempore  extiterat,  et  quandam  Abbatiam  Reli^iosorum  in  villa  tanc  Actb^* 
oensi  Lemoviccnsis  diœcesis,  nunc  verè  sancti  Aredii  in  qua  corpus  eju> 


CHRONOLOCIB   DE  l'iiISTOIBE   DE  SAINT-YRIEIX-LA-PKRCHE.  60i 

rcquiescit,  nuncupata,   fundaverat  et  dotaverat,  eamque  in  sui  primsva 
iundatione  et  inslilutione,  ob  devolioDcm  magnam  quam  crga  praedictum 
«sanctum  Marlinum  et  ipsius  Basilicam  habebal,  praedicto  sancto  Marlino 
donaveral  et  subjecerat,  et  quod  de  membrîs,  perlinentiis  ac  dependentiis 
ipsius  exlarct,  monachique  tune  in  ea  consistentes,  et  qui  ibidem  inantca 
forent,  sub  dilione,  ordinalione,  potestate  et  dominnlione  praedicti  sancti 
Martini  dictaeque  suse  Basilicae,  tàm  in  spiritualibus  quàm  in  temporalibus 
viverent,  volucrat  et  ordinaverat,  prout  per  lestamenlum  dicti  sancti  Are- 
flii  cjus  manu  propriâ  scriplum.iidem  adores  et  conquerentes  latius  appa- 
rere  dicebant,  etc.  Deinde  haec  alla  verba  quae  pro  parte  dicti  D.  Pétri  de 
Montebruno  episcopi  Lemovicensis  sunl,  valdè  notanda.  Dicto  defensore  in 
contrarium  dicente  et  proponenle  quod  diœcesis  sua  Lemovicensis  ma- 
gna et  ampla,  inlra  quam  dicta  Ecclesia  sancti  Aredii  inler  plures  alias 
ecclesias  tàm  saecularcs  quàm  regulares  sibi  subjecta  erat  et  fuerat,  quam 
ejus  personas  dictus  defensor  et  ejus  prœdecessores  Lemovicenses  epis- 
copi ad  causam  jurisdictionis  suorum  jurium  episcopalium  visitaverant  et 
reformaverant,  ac  visilari  et  reformari,  puniri  et  corrigi  fecerant,  procu- 
ralioncmque  ratione    dictfe   visilationis  debitam   ab  ipsi  decano  et  capi- 
lo  ecclesiae  Sancti  Ârcdii  saltem  semel  in  anno  liberô  et  absque  contradic- 
lione  receperanl,  ac  recipi  et  levari  fecerant,  etc.  Et  post  quœdam  ejus 
cxposita  sic  concludit  :  quare  pelcbat  dictus  defensor  ipsum  locum  et  in 
solidum  ad  causas  dicti  sui  Episcopatus  Lemovicensis  in  possesslone  et 
saisina  diclam  Ecclesiam  Sancti  Ârcdii  in  praedicta  sua  diœcesi  Lemovi- 
censi   existentem,  et  personas   aliasque   gentes  ecclesiasticas  ejusdem 
saltem  semel  in  anno  visitandi  et  visitare  faciendi,  et  procurationem  ra- 
lione  dictae  visilationis  debitam  ab  eisdem  recipiendi  et  exigendi,  uecnon 
dccanum  et  capitulum,  ac  easdem   Ecclesiae  ipsius  singulares  personas 
reformandi,  puniendi,  corrigendi,  cilandi,  excommunicandi,  et  in  eos  om- 
nom  jurlsdictionem   Ecclesiasticam   ordinariam  exercendi  manuteneri  et 
conservarl  ne  dictos  conséquentes  ad  malam  et  injustam  causam  couques- 
tos  fuisse,  et  diclum  defcnsorem  ad  bonam  et  justam  causam  se  oppo- 
suisse  dici  et  dcclarari,  etc.  ;  super  quibus  et  multis  aliis  bic  à  nobis  ex 
qualilatibus  non  ex  scriptis  ut  brevitali  studeamus,  quid  à  curia  Parla- 
menti  statutum,  et  à  quibus  partibus  justilia  stctcrit,  lector,  attende.  Visis 
igîtur   rcqueslâ  civili,  duobus  articulis  et  litigato   praedictis,  ipsisque  ac 
omnibus  aliis  littcris  et  cîetcris  munimentis,  ac  requesta  suprà  dicla  dili- 
genler  cxaminata,   compertoque  quod  prdesens   processus  absque  dictse 
Biillcne  Innonentii  copia  judicari  potcral,  per  judicium  dtclae  curiae  nostraî 
diclum  fuit  diclos  conquerentes  ad  bonam  cl  justam  causam  se  conquestos 
fuisse,  et  diclum  opponentcm  ad  malam  et  injustam  causam  se  opposuisse, 
ipsosque  adores  et  conquerentes  in  supràdictis  eorum  possessionibus  et 
snisinis  eadem  curia  nostra  per  idem  judicium  manutenuit  et  conservavit, 
manutenelque  et  conservai  manum   noslram  in  dictis   rébus  contensiosis 
apposilam,  ad  utilitatem  dictorum  Actorum  et  conquerenlium   levando  et 
amovendo,  ac  eundem  defensorem  ab  expensis    causas   bujusmodi,  el  ex 
causa  relevando;  in  cujus  rei  testimonium  jiostrum  praesentibus  litteris 
jijssimus  apponi  sigillum.  Dalum  Paiisius  in  Parlamonto  nostro  vigesima- 
quarla  die  Martii,  anno  Momini  M.  CCCC.  XLIV,  et  regni  noslri  XXlli. 


602  SOCIÊTR  ARCnÊOLOGlQCB   ET  HISTORIQUE 


E  DU  LIMOUSIN.  J 

imque  duravit  inlerD.lJ 
,  quomodo  D.  D.  decas^J 


Vides  itaque  hac  homni  lite  quae  diù  mullumque 
Episcopos  Lemovicenses  el  Canonicos  ÂredicDSCS 
ihesaurarius,  canonici  ctGapilulum  Ecclesias  Sancli  Marlini  Turonensis  Sj- 
periorcs  immédiate  dictorum  canonicorum  Aredîcnsium,  causam  obu 
nuerinl  in  diclos  D.  D.  Epicospos  Lemovicenses  pro  jurisdictionc  eccl^- 
siastica  et  spirituali  ejusdem  Arediensis  Ecclesiae  in  qua  consen'ati  s-i^i 
et  hactenùs  conservanlur,  et  in  omnibus  aliis  suis  juribus  saper  eaiks 
Ecclesia. 

—  Nunc  ut  ad  alia  ejusdem  Ecclesi» pergamus  :  videre  juval  etiam  cir^i 
illa  tempera  quanto  Principes  cl  Magnâtes  affectu  venerarentor  £ccle>;a" 
Sancti  Aredii,  babemus  enim  ex  Aclis  ejusdem  ecclesiae  anno  Chrisii  UiS. 
hoc  est  annis  tantum  quatuor  ab  arresto  suprà  relato,  illusirissimuro  Prir- 
cipem  Dominum  Joannem  de  Britannia  Gomitem  Penlheuriae  et  Peira- 
goricenscm,  Vicecomitem  Lemovicensem  fundasse  unum  anniversarin^ 
pro  salute  patris  et  matris,  ac  parentum  suorum  ;  sicut  liquel  ex  Aci> 
ejusdem  anni  quœ  sic  habent  :  Egregius  Princeps  et  Dominas  Joannes  i- 
Britannia  comes  Penlheuriae  et  Petragoricensis^  vicecomes  LeaiOTtc«Ds> 
exdevotione  sua  fundavit  in  hac  Ecclesia  Sancti  Aredii  de  Acihano  I^isi- 
vicensis  diœcesis  unum  anniversarium  perpetuum  pro  salute  patns  d 
matris,  ac  parenlum  suorum,  quod  dotavit  de  quindecim  Ubris  rendasl:- 
bus,  et  tringinta  sexleriis  frumenti,  et  quadraginta  sexteriis  siligiois.  ^'i 
triginta  sexleriis  avens  rendualibus  perpeiuô,  quos  quidem  reditus  pne- 
diclos  promisit  assignare  in  bonis  loeis  et  competenlibus,  prout  consi:. 
per  inslrumentum  rcceplum  per  Magislros  Petrum  de  Bosco,  Magistrom  a 
artibus.  et  Dominum  Petrum  de  Veterinarii,  Presbylerum  Nolarium,  prs- 
sentibus  nobilibus  viris  Gualtero  de  Perussa  Domino  de  Cadris,  et  Pei.'o 
de  Boyero  Domino  de  la  Jaroussa,  etc.  Aclum  die  décima  octarâ  meQ>i* 
octobris  annl  prsesentis  H.CGGC.XLVIII. 

Hune  autem  egreglum  Principem  fuisse  unum  ex  prsecipuis  bcnefado- 
ribus  suis  fatentur  Aredienses  Canonici  c6  vci  maxime  quod  inbaman 
volueril  in  dicta  Ecclesia,  eu  jus  ipse  vidi  sepulchrum  in  loco  seu  anii- 
quiori  sacello  in  quo  nunc  habetur  capitulum  ejusdem  Ecclesiœ,  cui  etm 
alia  multa  bona  contulit. 

Praelereà  sunt  alii  plures  insignes  viri  in  eadem  sepulti,  inter  quos  f>t 
Sequinus  ante  quingentos  annos  Abbas  ejusdem  Ecclesise,  de  quo  nonai- 
hil  suprà  diximus. 

—  Cum  autem  in  supcrioribus  fusé  salis,  ut  reor,  demonstraveriTnu«iQ> 
confirmandi  vel  infirmandi  electiones  D.  Decanorum  Ecclesi»  saepcdicU» 
Sancli  Aredii  Turonis,  quod  habetà  lanlo  tempore  insignis  Basilica  Samii 
Martini  Turonensis  lanquam  Matrix  diclœ  Ecclesiae  Arediensis,  nihilqa  ' 
supersit  amplius  in  hoc  negolio  videndum,.quam  executio  juris  hujusmoi/:. 
cum  sine  excculione  jus  islud  mortuum  essel  ;  illa  verô  executio  nou 
fieri  mclius  nequeat,  quam  ex  mullis  Decanorum  Sancti  Aredii  confirroj- 
lionibus  per  D.  D.  decanum,  thesaurarium,  canonicos  et  capitulum  ialrin- 
Ecclesiae  Sancli  Martini  Turonensis  ex  iniervallo  faclis,  nos  sufficcre  puU- 
mus  si  ab  annis  ducenlis  et  eo  amplius  ad  hoc  usque  tempus  aliqui^ 
hujusmodi   confirmationes  hic  in  gratiam   veritatis  exhibeamus;  quarum 


CHRONOLOGIE   DE  l'biSTOIRE   DE   SA)NT~YaiEIX-LA-PERCBB.  603 

primam  habcmus  ad  annum  Christi  4454,  cum  enim  hoc  anno  vacasset 
dccanatus  Sancti  Aredii  per  obitum  Reverendi  Palris  Domini  Joannis  de 
Perussa  Sagiensis  Episcopi,  et  in  ejus  locum  fuisset  eleclus  in  decanum 
dîclie  Arediensis  Ecclcsise  vir  nobilis  et  eruditus  D.  Pontius  de  Salignac, 
quem,  inquiunl    acla  ejusdem   Ecclesiae   Sancti   Martini  Turonensis,  die 
Vcneris  27,  mensis  Junii,  coram  ipsis  Dominis  meis  personaliler  constitu- 
Inm  canonicaverunt,  et  facto  per  ipsum  solito  juramento  quod  alii  cano- 
nici  necnon  Decani  supràdiclœ  Ecclesiae  Sancti  Aredii   faciunt  et  praes- 
tant  in  hoc  capitulo,  ac  facere  etpraeslare  consuevernnt,  ipsum  Magistrum 
Pentium  in  Decanum   ejusdem  Ecclesiae  Sancti   Aredii  duxeruni  die  se- 
quenti   horâ  tertiâ   recipîendum,  litteris  ejus  electionis  priùs   visis  et 
inspectis,  in  quibus   habebatur  ipsum  unanimiter  ab  omnibus  canonicis 
faisse   electum,    qua  die    advenienie,   prœdtctum   Dominum    Magistrum 
Pentium,  ex  nobili  génère  procreatum,  flexis  genibus  anie  majus  Altare 
per  traditionem  Baculi  Cantoris  hujus  Ecclesise,  ipsi  Domini  mei  in  Deca- 
num diclœ  Ecclesiae  Sancti  Aredii  recipientes,  ipsum  deindè  in  choro  ejus- 
dem à  parle  illius  sinistra   cum  solemnitatibus  assuetis  installarunt,  jure 
suo  et  quolibet  aiieno  in  omnibus  sempcr  salvo. 

Ex  quibus  Actis  patel  Decanos  Sancti  Aredii  cum  in  Ecclesia  Sancti  Mar- 
tini Turonensis  confirmantur,  et  primum  recepiuntur  fieri  Canonicos  ejusdem 
Ecclesiae,  et  ideô  juramentum  duplex  praestare,  primum  Canonicorum  ejus- 
dem Ecclesiae,  de  quo  in  superioribus,  allerum  Dccanorum  ejusdem  Eccle- 
siae Sancti  Aredii  iidelitatis  erga  eandem  Ecclesiam,  quod  sic  se  habet,  ex 
libro  manuscripto  rituum  et  slatulorum  ejusdem  Ecclesiae,  sub  hoc  titulo  : 
juramentum  Decani  Ecclesiae  sancti  Aredii. 

Decanus  Sancti  Aredii  de  Acthano  jurât  juramentum  Canonicorum  istius 
Ecclesiae  et  deindè  jurai  in  hune  modum  : 

Item  juro  quod  àmodo  fidelis  ero  huic  Ecclesiae,  et  vobis  de  Ecclesia 
Sancti  Aredii  Acthanensis,ac  Decanatu  ejusdem,  eorumque  pertinentiis,et 
quod  Ecclesiam  Sancti  Aredii  neque  me  à  subjcctione  hujus  vcstrae  Eccle- 
siae, nec  a  vestra  substraham  aut  substrahi  patiar  :  sed  quanlùm  polero  in 
tidelitaie,  subjectione  et  obedientia  vestra  conservabo  et  tuebor,  et  quod 
libertatem,  jura  et  possessiones  Ecclesiae  Sancti  Aredii  minui  non  patiar 
neque  alienari,  alienataque,  si  quae  sint,  ad  jus  et  proprictatem  ejusdem  pro 
posse  reducam,  et  reduci  procurabo. 

Secunda  conlirmatio  habetur  ad  annum  Christi  i482  de  persona  Domini 
Armandi  de  Guntault  dicti  de  Biron,  his  verbis  :  Die  24  mensis  Aprilis  con- 
venienlibus  more  solito  ad  sonum  campana^^  capilularis  in  capitulo  hujus 
Ecclesije, de  manè  horâ  decantalionis  annivcrsarii,  Dominis  meis,  faclaque 
coram  ipsis  relatione  D.  D.  commissariorum  super  visionc  pnediclarum 
litlerarum  et  informatione  per.  eos  cum  viris  fide  dignis  facta,  quia  reperie- 
runt  cundem  Armandum  esse  de  légitime  malrimonio  ac  nobili  génère  ex 
ulroque  parente  procreatum,  aetalis  25  annorum,in  Ordine  subdiaconatus 
constilutum,  in  legibus  bachalarium,  ac  littérature  sufficientis,  ac  aliàs 
vitâ,  moribus  et  conversatione  idoneum,  ipsam  eleclionem  laudavcrunt, 
approbaverunt  et  confirmarunt,  supplenles  omnes  et  singulos  deffectus  (si 
qui  forsan  inlervenerint),  ipsumquc  Armandum  coram  ipsis  praesentem,  ut 


604  SOCIÉTÉ  AnCUÉOLOGIQUE  ET  UISTORIQUE  OC  LIMOUSIK. 

moris  est,  canonicaverunt,  et  facto  per  eum  soîito  jaramento,  eanden 
Armandum  ante  majus  aliare  deduclum,  per  traditionem  Baeuli  Canlori^ 
ipsius  Ecclesiae  per  h.  Decanum  vice  eorumdem  dedignitato  Decanali  prs- 
dictae  Ecclcsiœ  Sancli  Aredii  investiri  fecerunt  et  investivcrunt,  et  in  Ikrt- 
num  ejusdem  EcclesiaB  Sancli  Aredii  receperunt,  eidemque  stailum  in  iaiere 
siuistro  chori  per  D.  Camerarium  fecerunt,  ut  moris  est,  assigoari,  liuens- 
que  suas  super  praemissis  expediri  fecerunt. 

Tertia  patct  adaiinum  Cbristi  4540,  in  persona  Domini  Anthonii  deS^âi- 
gnaco,  qui  die  feslo  Nalivilalis  Bealae  Marise  Yirginis  ejusdem  anni  foi: 
investitus  de  dignitate  Decanali  Sancli  Aredii  per  Dominum  Claudion] 
Briant  Canonicumet  canlorem  Malricis  Ecclesiœ  Sancli  Martini  Taronensis, 
vice  et  aulhorilalc  Dominoruqi  incorum  de  CapiUilo  ejusdena  Ecclesiz 
Sancti  Martini,  et  ab  eis  in  Canonicum  et  Fratrcm  receptus,  et  ia  nna  t\ 
inferioribus  sedibus  sinistri  lateriscbori  ejusdem  installatus,  eoquod  sacris 
ordinibus  nondum  esset  iniliatus. 

Qnarta  confirmatio  habetnr  ad  annum  Christi  1604.  €um  enîm  vacasseï 
Decanatus  Sancti  Aredii  per  obitum  Domini  Francisci  Fabry,  electas  fuit  ic 
Decanum  Sancli  Aredii  à  majori  et  saniori  parte  Gapituli  Domious  Fran- 
ciscus  do  Bcllengard  ejusdem  Ecclesiae  Canonicus  prœbendalus,  ia  juribos 
licentiatus,  Diaconus  tanquam  benèmeritus,  sufficiens  et  idoneos,  die 
sextâ  mensis  februarii  ejusdem  anni,  cum  bac  speciali  claasula  :  Soppli- 
cantes  nihilominus  dlscretos  ac  vencrabiles  Dominos  Decanum,  Thesaa- 
rarium  et  Ganonicos  Ecclesiae  bcatissimi  Martini  Taronensis  supràdieir. 
ut  quatenus  dictam  clectionem,  nominationem  et  provisionem  predictas 
confirmare  et  approbare  velint  etdignentur,  modo  et  forma  in  talibns  Ëeri 
consuetis;  qui  dictus  de  Bellengard  constilutus  personaliter  in  Capitol^* 
Malricis  Ecclesiae  fuit  die  46  mensis  februarii  confirmatus  cum  ceremoaiis  et 
solemnitatibus  in  superioribus  descriptis  et  assuetis. 

Non  est  hic  autem  prselermitlcndum  ad  gloriam  et  bonorem  Ecclesix 
Sancti  Aredii,  praedicti  Francisci  Fabry  Dccani  eleclionem  aliquantùm  fuisse 
vexatam  à  Canonico  ejusdem  Ecclesiae,  qui  ide6  diclum  Fabr\'  in  jus  voca- 
yeral,  quod  eam  non  ad  Oapilulum,  scd  ad  Regem  Francise  contra  morem 
hactenùs  in  eadem  observalum,  perlinere  conlenderel;  verùm  audilis 
patribus,  et  inspeclis  corum  actis  cl  inslrumcnlis,  maxime  quod  eligendo 
conferrcnl,  Decanatum  Ecclesiaî  suae  Canonici  Aredienses,  cujus  confirma- 
tioncm  et  approbationem,  corum  Decani  pro  lemporc  elecli,  acciporen'.  a 
Capitulo  insignis  Ecclesiae  Sancli  Martini  Turonf:nsis  judice  ordinario  fi 
supcriore  diclae  Ecclesiae  Sancti  Arodii,  dictus  Fabry  fuit  in  sua  clectione 
cl  posscssione  conscrvatus  ;  sicquc  Canonicis  Arcdiensibus  jus  cUgemii, 
Canonicis  Sancti  Marlini  Tiiroiicnsis  eorum  superioribus  jus  confirmandi  »*» 
approbandi  Decanos  cleclos  conservalur;  proutconslat  Arresto  seu  Judici» 
cquidem  solcmni  Magni  Consllii  Régis,  hujuscc  tenons,  hîs  vcrbi< 
Gallicis  : 

Nostrodit  Conseil  faisant  droit  sur  ladite  appellation  a  mis  et  met  icelit; 
appellation,  cl  ce  dont  a  esté  appelé,  au  néant  ;  et  pour  le  regard  de  ladite 
complainte,  après  les  déclarations  de  Glusel  et  de  nostrcdit  Procurear 
général,  a  maintenu  cl  gardé,  maintient  el  garde  ledit  Fabry  en  la  poss<*>- 


CnA0N0L06IB  DE  L^HISTOIRE   DR   SAINT-YRIRIX-LA-PERCUB.  60o 

sien  et  joaissance  du  dit  doyenné  de  Saint  Yrieys.  fruits,  profils,  revenus  et 
émolumenls  d*iceluy,  a  levé  et  osté,  lève  et  oste  au  profil  dudil  Fabry  nostrc 
main,  et  tous  autres  troubles  et  empcschcments  mis  cl  apposez  suc  lesdils 
fruits;  et  a  ordonné  et  ordonne  que  les  commissaires  cslablisau  régime  et 
gouverneinent  dMceluy  rendront  compte  et  reliquat  audit  Fabry  des  fruits 
par  eux  {>erceus,  et  a  condamné  et  condamne  ledit  A'upetit  es  despens  de 
ladite  instance  de  complainte,  dommages  et  intcresls,  et  restitution  de 
fruits,  si  aucuns  y  en  a.  Si  donnons  en  mandement,  etc.  Donné  et  prononcé 
en  Taudience  de  nosiredlt  Grand  Conseil  à  Tours,  le  dixiesme  jour  de  May 
mil  cinq  cent  soixanie  et  dix  sept. 

Jam  ut  quas  confirmationes  nostrâ  aetale  fieri  vidimus,  perstringamus, 

du»  et  non  plures  factae  sunt;  quarnm  prima,  quam  ordine  nostro 

...quintam  collocamus,  facta  fuit  die  Dominica  30  mensis  octobris,  anno 
Christi  4644,  in  persona  Domini  Pauli  de  Jarrige  de  la  Morellie  Diaconi  in 
sacra  Theologia  Doctoris,  qui  more  decessorum  suorum  fuit  per  bominum 
Rcnatnm  Saicher  Cantorem  insignis  ejusdem  Ecclesiîe  Sancti  Martini  Turo- 
mensis  anthoriiateet  vice  D.D.Meorum  de  Capitule Sancli  Martini  invesiitus 
de  dignitate  Decanali  Sancti  Arcdii,  et  receptus  in  canonicum,  et  fratrem 
denique  installatus  in  sinistra  parle  chori,  quibus  ipse  interfui. 

Sextam  denique  et  ultimam  confirmationem  absolvel  Dominus  Helias  de 
Jarrige  de  La  Morellie  superioris  Decani  nepos,  presbyter  et  in  sacra  Théo- 
logiae  facultate  Rachalaureus,  qui  die  Dominicâ  30  mensis  octobris  anno  4660, 
fuit  per  Dominum  Franciscum  Le  Loyer  Canonicum  prœbondatum  et  canlo- 
rem  ejusdem  Ecclesise  Sancti  Martini  Turonensis,  more  Patri  sui,  el  aliorum 
decessorum  suorum  Decanorum  Sancti  Âredii,  simililcr  invesiitus,  ut  moris 
est,  et  cum  solemnitalibus  assuetis  de  dignitate  Decanali,  quam  digni- 
tatem  modo  digne  possidet. 

—  Quibus  in  hoc  negotio  haec  non  sufficiunt  plura  non  sufficient.  Quare 
ut  ad  aliapergamus  el  finem  pcculiarishujus  historiae  Sancti  Aredii  tandem 
faciamus,  scirc  juvat  pro  Coronide  ex  ils  quae  à  nobis  allala  sunt,  Dominos 
Decanos  Sancti  Aredii  solilos  esse  in  sua  receplionc  et  inslallaiione  jurarc 
bcalo  Martine  làm  pro  se«  quàm  pro  sua  Aredicnsi  Ecclcsia,  el  insigni  ejus 
Basilicse  Turonensi,  omnimodam  subjeclionem  ;  quod  juramenlum  cum 
annoChristi  4489  mense  maio  Ganonici  Ecclesise  Sancti  Aredii  (absente  suo 
Decano)  violassent  quod  Dominorum  Cantoris,  Cellerarii,  Canonicorum 
Malricis  suae  Ecclesiae  visitationem  in  Ecclesia  sua  Arediensi  admilterc,  ut 
moris  eral,  récusassent,  hujussuifacli  cum  non  longô  posleà  cos  pœniluisset, 
veniamque  ejusdem  à  D.  D.  Superioribus  suis  peliisscnt  cl  oblinuissenf, 
ne  tamen  in  poslerum  simile  quid  accidal,  Canonici  Anidienses  in  judi- 
cium  vocantur  à  Decano  Thesaurario,  Canonicis  et  Capitule  Sancti  Martini 
Turonensis  superioribus  suis,  agilaia  hinc  indô  per  annum  causa,  de  ea 
parles  tandem  inler  se  dicedunt,  maxime  quoad  superioritalcm  et  visila- 
tionem  depuialorum  Ecclesiae  Sancti  Marlini  [de  quibus  prœcipua  eral 
quaestio)  sicque  Aredienses  Canonici  conspiranli  consensu  por  Procuralores 
sues  prsedictas  superioritatem  et  visitationem  subscribunt  el  obsignanl. 
Notum  facimus,inquiunl,  quod  cum  nos  nuper  Dominos  Decanum,Thesau- 
rarium  et  Capilulum  ipsius  Ecclesiae  bcalissimi  Marlini  Turonensis,  quibus 


60G  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE  ET  UISTORIQUK   OU   LIVODSllC 

nos  et  dicta  nostra  Ecclesia  in  spiritualibus  et  temporalibus  immédiate  sub- 
jicimur,  venerabilcs  fratres  et  Canonicos  nostros  Magistros  Bertrandoni  de 
Royeria  et  Gabrielem  Genlilis  Procuratores  nostros  pro  pacifîcaliooe  ejiif- 
dem  diffcrentiae  sive  discordise,  lilis  et  causse  inter  dictos  Dominos  Deca- 
num,  Thesaurarium  et  capitulum  superiores  nostros  ex  una,  el  aos  ex  û\i 
partibus,  ratione  supérioritatis  quam  habent  in  dicta  noslra  Ecclesia,  ntc- 
non  et  visitationis  cjusdem  noslrae  Ëcclesiae  ac  personarum  ipsius,  etspt- 
cialiter  quia  venerabilescircumspcctosviros  Magistros  Jacobum  d'Argouges 
Cantorem  et  Johannem  Guernadum  Celerarium  et  Ganonicos  ipsius,  Ecde- 
si»  beati  Martini  commissarios  ab  eisdem  Dccano,  Tbesauraiio  et  Capiiolo 
ad  visitandum  et  corrigendum  nos  et  eandcm  noslram  Ecclesiam  ab  anoo 
citra  depulatos  ad  hujusmodi  visllationcm  peragendam,  admiuere  recu«a- 
vimus,  etc.  Yerùm  ut  ne  ullo  unquam  tempore  suspecta  sit  fîdes  tam 
solemnis  Aredicnsium  Canonicorum  consensus,  utraquc  pars  stîpulatur,  ai 
magni  consilii  Régis  authoritalc  et  Ârresto  comprobetur,  quod  et  faclaai 
fuit  die  vigesimà  prima  mensis  Augusti  anno  Christi  1490  bis  verbisgaliicis: 

Ouy  laquelle  Requête,  et  vous  iesdils  traité,  transaction,accord  etappoiD- 
tcment  ainsi  faits  par  les  dites  parties,  les  gens  de  nostredit  Grand  Consei!. 
par  leur  arrest  et  jugement  ont  condamné  et  condamnent  lesdites  partie^ 
et  cbacunes  d'elles  endroit  soy  à  garder  et  entretenir  ledit  accord,  appoio- 
tement  et  transaction  de  point  selon  sa  forme  et  teneur,  et  a  ordonné  cl 
ordonne  nostredit  Conseil  ledit  accord  et  appointement  cstre  mis  à  exéco- 
tion  selon  le  contenu  en  iceluy,  en  ce  que  exécution  y  est  ou  sera  requise. 

A  quo  deinde  tempore  frequunliores  fuerunt  Dominorum  Decanl,  Tbe- 
saurarii,  canonicorum  et  capituli  insignis  Ëcclesiae  Matricis  Sancti  Martini 
Turonensis  in  Arediensi  Ecclesia  visitationes  ad  boc  usque  tempos,  n 
quibus  duas  nos  fecimus,  primam  anno  1658,  et  alteram  anno  1666,  qnas 
omnes  brevitatis  causa  praetermittimus,  ut  buic  Arediensis  Ëcclesiae  hisiorif 
tinem  imponamus. 

—  Cum  addiderimus  prœdictos  Sancti  Aredii Dominos Dccanum,canonioos 
et  capitulum  idenlidem  pro  re  nala  ad  faciendas  tara  Ëcclesiae  suae,  quain 
cymeleriorum  ab  ea  dependentium  pollutorum  reconcilialiones,  reqaisiisse 
aulboritatem  et  licentiam  Dominorum  Decani,  canonicorum  et  Capituli  Ma- 
tricis ëcclesiae  Sancti  Martini  Turonensis;  quas  ctiam  proplereà  oblinocrunt. 
ut  his  paucis  sequcnlibus  palet  ne  iongior  sim.  Die  Dominiez  vigesimà 
prima  mensis  deccmbris  anno  Domini  4502,  dicti  Domini  mei  lanquani 
superiores  et  ordinarii  judices  in  bac  parte  ad  reconciliandum  magnum 
cymeterium  de  Froyria  poUuium  per  mulilationem  ei  occisionem,  vonera- 
bilem  virum  M.  Anlhonium  de  Vellhan,  in  decretis  Rachalarium,  canoui- 
cum  praebendaium  dlclaa  Ëcclesiae  Sancti  Aredii  commiscruiii. 

Anno  4634,  die  Mariis  non&  Aprilis,  ob  similcm  pollutionem  propter  ho- 
micidium  in  dicta  Sancti  Aredii  Ecclesia  die  Dominicà  in  Ramis  Palmarum 
factam,  ad  eam  reconciliandam  D.  Franciscum  de  Bellengard  presbyterum, 
canonicum  Praebcndalum  dictae  Ëcclesiae  commitiunl,  et  ei  liileras  bar 
in  re  necessarias  expediri  el  Iransmitti  jubenl. 

Praelcreà  Domini  Decanus  et  canonici  Aredienses  de  bonis  Ëcclesiae  sus 
nihil  statuere  consueverunt  inconsultis  dominibus  superioribus  sais  Malri- 


CHRONOLOGIE  DK  L*HiSTOIRE  DE  SAtNT-YRIBIK-LA-PRRCBR.  G07 

cis  Ecclesi»  Sancti  Martini  Taronensi s,  sicut  actu  seqaenti  oppignerationis 
veclîgalis  Tabularîi  forensis  Aclbanensis  oppidi  videre  est,  ex  archivis 
ejusdem  Matricis  EcclesisB  : 

Anno  Domini  1611,  die  Jovis  vîgesimâ  mensis  ociobris,  ad  relationem 
Domini  Guerin  caoonici  hujus  Eccicsiae  prœbcndaii,  alterius  commissario- 
rum  ad  îd  depuUtorum,  et  viso  per  Dominos  superiores  in  bac  parte  con- 
traclu  oppignerationis,  vnlgô  d'engagement  per  Dominos  Decanum,  cano- 
nicos  et  Capitulum  ecclesiœ  collegiahe  Sancti  Aredii  de  Actbano  in  patria, 
seu  territorio  Lemovtcensi  constitulx  de  membris  bouorabilibus  hujus 
ecclesiae  existentis,  eisdemque  Dominis  meis  in  spiritualibus  et  lemporali- 
bus  immédiate  subject»  de  Grafariatu  civili  et  criminali  curiae  Rcgalis  et 
communia  Pareagii,  vulgô  du  commun  Parcage  dieti  loci  et  Urbis  Sancti 
Ârediiy  cum  pacto  seu  reservaliooe  pacti  redempiionis  perptHuae,  vulgô 
Rachapt  perpétuel,  Magîstro  Aredio  de  la  Fon,  in  juribus  licentiato,  locum 
tenenle  pro  Rege  et  dictis  de  capitule  Sancti  Aredii  in  curia  Regali  prœdicta 
pro  prelio  et  summa  quatuor  mille  librarum  Turonensium  refusioni  et  solu- 
tion! plurimorum  denariorum  In  quibus  dicli  de  cnpilulo  tenebantur  et 
obligabantur  applicando,  dicto  conlraclu  de  data  die  27  mensis  junii  anno 
pnesenti  exislente,  et  per  de  La  Fon  notarium  Regium  dicti  loci  Sancti 
Aredii  et  Secrelarium  Capituli  dictae  collegiatae  receplo,  eisdem  Dominis 
meis  perdiclum  Bellengard  nomine  et  fine  praedictis,  prœsentalo.  Praefati 
Domini  mei  diclum  coniractum  oppignerationis, vulgô  d'engagement,  secun- 
dum  eju8  formam  et  tenorem,  et  sub  condilionibus  in  eo  appositis  lauda- 
runt,  ratificarunt  et  bomologaruni,  laudant,  ratificant  et  homologant,  eâ 
adjectft  conditione,  ut  dicti  de  Capitule  Sancti  Aredii  processuni  inter  eos 
et  Dominum  Comitem  Descars  vertentem  prosequi  et  terminari  quam  citiùs 
poierunt  facere,  necnon  de  primis  denariis  per  eos  rccipiendis  dictum 
Grafariatam,  sic  per  eos  ut  praemitlitur  oppigneratum  redimere  lencantwr. 

Denique  sicut  à  Tcstamento  sancti  Aredii  lanquam  2i  capite  pcculiaris 
haec  ejus  historia  incœpit,  sic  féliciter  conligii,  nos  ab  eodem  vero  sancti 
capite  finem  ipsi  facere,  cum  enim  absente  Decano  hujus  collegiatae  cccle- 
siae  mola  fuisset  inter  canonicos  Aredienses  super  ostensione  sacri  capitis 
illius  ad  veneralionem  populorum,  controversia,  ad  quem  scilicet  illorum 
pertineret  facienda  haec  oslensio,  nec  inter  se  convonire  satis  posscnt,  re 
omnium  calculis  ad  canonicos  Superiores  Matricis  Ëcclesiae  delatA,  sequens 
ab  ipsis  retulerunl  judicium  die  veneris  duodecimft  mensis  Julii  in  Capitule 
generali  anno  Domini  1630.  Domini  met  in  hanc  sententiam  devencrunt, 
ut  nihil  eorum  quae  circa  dictam  oslensionem  hacleniis  facta  cl  observala 
fuemnl,  inuovari  debere  conseutiant,  pra3rogativam  ostensionis  bujusmodi 
faciebdae,  Decaoo  absente,  vel  in  sacro  presbylcratus  ordine  munimè  cons- 
tituto,  antiquiori  canonico  dictae  Ecclesiae  pro  tempore  existenli  adjudica- 
rum,  proul  authoritate  suà  supcriori  adjudicarunt  et  adjudicant. 


Séries  Decanorum  aliquot  Aredienalum. 

I.  —  Seguinus,  abbas  Monasterii  et  Ecclesiae  Sancti  Aredii,  anno  Ghrisli 
1070,  qno  eodem  temporo  Ramnulphus  erat  ejusdem  Eccicsiae  Sancti  Aredii 


608  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE  LT  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

Decanus,  ut  amplius  patebii  ex  infra  dicendis  de  reslauratione  M onasleriî 
RauzoUensis,  cujus  Seguini  abbatis  videtur  sepulcbrum  in  clauslroejusd^m 
Ecclesix. 

II.  —  Geraldus  Decanus  Sancti  Aredii  anno  1184,  de  quo  haec  faabeniBr 
in  chronico  Gofredi  prioris  Vosiensis.  Vigilia  Natalis  Domini  Geraldus 
filius  Bernardi,  fraler  Aldeberti  de  la  Marcha,  Sancti  Aredii  Decanus  efficitur. 

in.  _  Girardus  de  Marchia  Sancli  Aredii  Decanus  circa  annum  1300. 

IV.  —  Vuir.elmus  cognomento  Peregrinus,  vicecomiiis  Lemovicensis 
tilius,  reliqiiii  vacanlcm  Decanatum  Sancli  Aredii  queni  circiter  ires  anoos 
possedil. 

V.  —  Guido  de  Glausellis  Archidiaconus  Lemovicfosis,  soccedîl  dic:o 
Vuillelmo  in  Decanaiu,  circa  annum  (916. 

Vï.  —  Geraldus  de  Javerihac,  D.  N.  Papa  per  resignationem  Vuillelmi 
tun';  Dccani  in  curiâ  Romanâ  fil  Decanuà  Sancli  Aredii  anno  1249. 

VIT.  —  Helias  Decanus  Sancli  Aredii  4382,  obiil  Parisiis  anno  Domiui 
li93mense  Aprili  in  proseculione  negoiiorum  dicl£  Ecclesiae. 

Vlil.  —  Oirberlus  Pulverelli  canonicus  Lemovicensis  eligilur  DccaoQS 
Sancli  Aredii  Scalcnd  junii  ejusdem  aiini  (293  per  obiium  dicli  Heliae 

IX.  —  Helias  de  Malomonle  absens  Decanus  eligilur,  et  Girberlo  saccedii 
anno  1396. 

X.  —  Geraldus  de  Lobescorn  eligilur  Decanus  Sancli  Aredii  per  obiion] 
dicli  Heliae  de  Malomonle  anno  1305. 

XI.  —  Rolgerius  de  Tcrminis  fil  Decanus  Sancti  Aredii  anno  Domini  I3n« 
habuiique  Decanatum  vacaniem  per  promoiionem  Domini  Hugonis  Geraldi 
ad  Episcopalum. 

XII.  —  Guillelmus  de  Ahento  fil  Decanus  circa  annum  13iî;  pnescntalar, 
ut  moris  est  iMpitulo  Sancli  Martini  Turonensis  superiuri,  et  ordinarïo 
ejusdem  Ecclesiae  Sancli  Aredii  anno  Domini  1H18. 

XIII.  —  Joannes  de  Perussa,  Sagiensis  Episcopus  in  Normannia,  et  Deca- 
natus  Ecclesi»  Sancii  Aredii  per  plures  annos  adminislrator  perpeiuos, 
obiil  anno  Chrisli  l454,  cui  successit  in  Dccanalu  : 

XIV.  —  Ponlius  de  Salignac  nobili  génère  orlus,  vir  pius  el  doctus, 
eligilur  ei  rit  Decanus  per  obitum  dicli  de  Perussa  eodem  anno  i4S4. 

XV.  -  Pelrusde  Salignac,  in  decreiis  licenliatus,  successil  Pontio  palruo 
suo  in  diclo  Decanalu,  quem  resignavit  Armando  de  Guniaull. 

XVI.  —  Armandusde  Gunlault  diclus  de  Biron  per  resignationem  supra- 
dicli  Pelri  de  Salignac  fil  Decanus  anno  Domini  i486,  fuilque  nobili  génère 
procrealus  ex  ulroque  parenie;  cui  successil  : 

XVII.  —  Ànlhonius  do  Salaroiaco  anno  149r>,  cul  successil: 

XVlil.  —  Anlhonius  item  de  Salarnlaco  junior,  superioris  nepos,  quidiu 
vixit  in  Decanatu,  oum  in  vivis  adhuc  esscl  anno  Chrisli  15iO. 

XIX.  —  Jacobus  de  Bourdeillos  fit  Decanus  anno  1546,  per  obiium  ilirii 
Anlhonii  de  Salarniaco  junioris,  cui  successil  : 

XX.  —  Peims  de  Bourdeilles  ejus  nepos,  qui  fuit  eiectus  in  Decanatn 
circa  annum  (558. 

XXI.  —  Franciscus  Tenent  fil  Decanus  per  cossionem  dicli  Pclri  dtf 
Bourdeilles,  fuilque  receptus  anno  Domini  1563,  obiil  aulem  anno  i576. 


CHRONOLOGIE   DE  L*HISTOIRE   DE  SAINT-YRIE1X-LA>PERGHE.  6ûd 

XXII.  —  Franciscus  Fabry  fuit  receplus  Decanus  die  pcnuIlimA  mensis 
Maii  1576,  el  cum  oblinuisselcausam  adversus  Regalislam,  die  decimâ  mensis 
Mali  coDseq  :cntis  anni  1577,  judicio  seu  arreslo  Magni  Consilii  Régis,  vir- 
tnte  illius  denu6  possossiouem  adiil  cjusdem  Decanalus;  obiit  anno  Domini 
4614  et  vacavit  Decanalus. 

XXIII.  —  Franciscus  de  Bellengard,  in  Juribus  licenlialus,  fuit  in  locum 
supradicti  Fabry  eleclus  el  confirmalus  Decanus  Sancli  Aredii  anno  i6H, 
obiilanno  1616. 

XXIV.  —  Gaspardus  de  Gentils  Dominus  de  TA^çeauchapt  successit  diclo 
de  Bellengard,  fuilque  in  Decanum  eleclus  à  capitulo  die  decimâ  quintâ 
mensis  Augusli  anno  Domini  1616,  cui  successit: 

XXY.  —  Guillelmus  Thiersault  eodem  anno  1616,  qui  Decanatam  tenuit 
usque  ad  annum  1644,  quo  obiit,  vacavit  que  Decanalus  per  ejus  obitum. 

XXVI.  —  Paulus  de  Jarrige  de  la  Morelie  Diaconus,  canonicas  Ecclcsi» 
Sancli  Aredii,  successit  diclo  Domino  Thiersault,  fuit  enim  eleclus  Decanus 
mense  Junio  ejusdem  anni  164i  et  à  matrice  Ecclesia  Sancli  Martini  Turo- 
nensis  irigesima  die  mensis  oclobris  ejusdem  anni  praescns  confirmalus. 
Obiit  anno  1660,  vacavit  Decanalus  per  ejus  obitum. 

XXVII. —  Relias  de  Jarrige  de  la  Moretie,ex  fralre  nepos,  canonicus  ejus- 
dem Ecclesiae  eligitur  Decanus  eodem  anno  1660,  quo  recipitur  à  Capitulo 
diclse  Ecclesiae  Sancti  Aredii  el  prsescns  conGrmalur  à  Dominis  Decano, 
Thesaurario,  canonicis  et  capitulo  matricis  EcclesiiB  Sancti  Martini  Turo- 
nensis;  etiamnum  vivit. 


Sequuntur  Bénéficia  ad  collationem,  prooiaionem  et  omnlmodam  dispo- 
sithnem  D,  D.  DecoM,  Canonicorum  et  capUuli  Ecclesiœ  Sœcularis  et 
Coîleglatœ  Sancti  Aredii  de  Acthano  pleno  jure  pertlnentia, 

Decanalus  quae  est  digniias  prima  ejusdem  Ecclesiae. 

Cantoria  quae  est  ofiicium  in  eadem  Ecclesia. 

Sacristinia,  quae  est  iiem  ofDcium  in  eadem  Ecclesia. 

Praebenda  nuncupala  de  la  Salelte  puerorum. 

Duodecîm  canonicalus  el  praebendae. 

Sex  vicariae  majores  semipraebendalorum,  quarum  duaespectant  ad  colla- 
tionem plenariam  Domini  Decani,  et  aliae  quatuor  pleno  jure  ad  disposilio- 
uem  praedicti  capituli. 

Duae  Vicariae  nancupatae  des  Palmiers  fundalae  ad  aliare  beatissimi  Aredii 
in  praedicla  Ecclesia. 

Duae  Vicariae  vocalae  de  Pompadorio,  fundalae  ad  altare  Sancli  Frontonis 
in  pruiîicta  Ecclesia. 

Prioratus  Saecularis  Sancli  Laurentii. 

Prioratos  Saecularis  Sanclae  Calharinae  de  Ghavaralas. 

Eleemosinaria  Sancli  Aredii. 

Vicaria  perpétua  Beaiae  Hariae  de  Vinea  in  capella  cimelerii  de  Vinea 
fundata. 

Vicuria  perpétua  Beats  Hariaa  Hospitalts  oovi. 


6t0  SOCIÉTÉ   AaCBÉOLOGlQDB  GT   HISTORIQUE  DU  LIHOUSIIC. 

Vicaria  perpciua  Beat»  Mariae  de  Viraco. 

Vicaria  perpétua  Sancli  Martini  ad  altare  dicti  sanctî  infra  dictam  Ecde 
siam  Sancti  Aredii  insiiluta. 

Vicaria  perpétua  Saociae  Nagdalenae  ad  altare  ipaius  Sanclae  ialra  dictam 
Ëcclesiam  insiituta. 

Vicaria  perpétua  Sanctœ  Marguaritœ  ad  ejnsdem  altare  ia  dicia  Eeclesii 
institu^a. 

Vicaria  perpétua  Sancti   Eligii  ad  illius   altare  in    prsdicta  EcclesU 
instituta. 

Vicaria  Sanctae  Radegaodis  perpétua  in  altari  ejusdem  in  Ëoclesia  pne- 
dicta  instituta. 

Vicaria  perpétua  Beati  Martialis  ad  altare  Sancti  Johannis  Baptistv,  ei 
trium  sororum  Maris  Instituto-. 

Vicaria  perpétua  Beati   Basilii    ad    ejusdem   aHare   in    dicta    Eeclesiâ 
instituta. 

Vicaria  perpétua  Sancti  Johannis  Evangelistse  ad  altare,  et  capellam  ejos* 
dem  Sancti,  et  in  Ecclesia  praedicia  instituta. 

Hue  usque  de  nobili  Ecclesia  Sancti  Aredii  Acihanensis,  que   Gallicè 
dicitur: 

Salnt-Yriers-la- Perche  en  Limousuu 


ORIGINES  DU  MONASTÈRES  DE  SAINT-YRIEIX 

Par  Aug.    BosviEUX 


AVERTISSEMENT 

Fairt^  d*une  manière  suivie  et  sans  interruption  l*bistoire  particulière 
d  une  seule  ville,  et  surtout  d*une  petite  ville,  est  chose  complètement  im- 
possible ;  car,  outre  Tinsuflisance  des  documents,  qui  doivent  nécessaire- 
ment présenter  dans  une  série  de  plusieurs  siècles  de  nombreuses  lacooes, 
il  est  une  ioule  d'événements  auxquels  chaque  localité  ne  prend  pas  une 
pari  spéciale  et  distincte,  et  dans  lesquels  elle  ne  joue  qu'un  r6ie  commun 
avec  toutes  les  autres  fractions  de  la  nationalité  dont  elle  fait  partie.  Aussi, 
pour  mettre  en  scène  pendant  toute  la  durée  de  son  existence  une  cité 
même  importante,  il  faudrait  reprendre  d'un  bout  à  Tautre  Thistotre  gêné* 
raie  de  tout  le  pays,  sauf  à  faire  ressortir  en  leur  lieu  les  faits  propres  à  la 
ville  dont  on  s'occuperait.  Et  ce  ne  serait  plus  alors  une  histoire  particulière 
qu'on  rattacherait  à  l'histoire  générale  par  ses  points  de  contact,  mais  une 
histoire  particulière  qu'on  détacherait  lambeau  à  lambeau  de  l'histoire  géné- 
rale où  elle  était  englobée,  et,  pour  ainsi  dire,  imperceptible.  Un  pareil  travail 
exigerait,  non  pas  quelques  pages,  mais  des  milliers  de  volume  où  seraient 


CHRONOLOGIE  DE   L*HIST01R$   DE   SAmT-YRIBlX-LA-PBaCBB.  6t  1 

compilés  les  innombrables  documents  qui  ont  trait  à  Fhistoire  de  France, 
et  des  générations  d'érudits  pour  mettre  en  ordre  ces  documents  et  leur 
donner  i'unilé  nécessaire. 

Nous  serons  donc  forcés  de  grouper  dans  divers  récils  tous  les  faits  rela- 
tifs à  rhistoire  de  Saint-Yrieix  que  nous  rencontrerons,  soit  dans  les  chro- 
niques locales,  soit  dans  les  différents  recueils  historiques,  en  ayant  soin 
d'indiquer  à  quels  auteurs  appartiennent  les  extraits  cités,  pour  en  rendre 
facile  la  vérification. 


PREMIER  RÉGIT 

VIE   DE   SAINT    YRIEIX 

Avant  d'écrire  Thistoire  d'un  pays,  il  est  logique  de  faire  connaître  le 
théâtre  des  événements  que  Ton  va  raconter,  afin  que  le  lecteur  ne  se 
trouve  pas  transporté  sans  indication  sur  un  terrain  inconnu.  C'est  une 
précaution  que  rhi:»toricn  oublie  rarement  de  prendre,  mais  qui  serait  ici 
complètement  inutile  et  superflue.  En  effet,  quel  est  le  membre  de  la 
Société  qui  ne  connaît  pas  la  topographie  de  Saint-Yrieix,  qui  ignore  que 
la  ville  est  b&lic  sur  les  versants  de  deux  collines  dont  les  extrémités  supé- 
rieures sont  deux  des  points  les  plus  élevés  (1)  du  département  de  la 
Haute-Vienne,  et  qu'elle  est  traversée  et  longée  par  deux  ruisseaux  qui 
prennent  leur  source  aux  environs. 

Quant  à  la  géographie  des  lieux  où  s'élevait  l'ancien  Attanum,  nous  ne 
pouvons  en  juger  que  par  conjecture  :  a  Le  paya  dcoait  n'être  qu'une  Im^ 
mense  forêt ^  s' étendant  bien  au-delà  du  château  de  La  Salnie,  dit  un 
oieil historien  {i}  de  Saint-Yrieix^  puisqu'il  y  aoait  là  un  lieu  appelé  le 
Puy-'dea- Bêtes,  c'est-à-dire  le  lieu  oà  se  cachaient  ordinairement  une 
forte  quantité  de  bêtes  ou  d'animaux.  »  Quoique  ce  raisonnement  n'ait 
rien  de  bien  concluant,  il  n'en  est  pas  moins  probable  qu'avant  le  vi^  siè- 
cle, le  lieu  d'Atianum  n'était  en  effet  qu'une  forêt  sauvage  et  déserte,  pro- 
pre à  fournir  un  repaire  aux  bêtes  féroces,  ou  un  asile  aux  saints  ermites 
qui  voulaient  abandonner  le  monde,  pour  louer  Dieu  dans  la  solitude. 

A  cette  époque,  chaque  foréi  du  Limousin  voyait  s'élever  dans  ses  pro- 
fondeurs, jusqu'alors  inhabitées,  de  modestes  oratoires  où  accouraient  en 
foule  les  populations  voisines  afin  d'obtenir  les  faveurs  de  Dieu.  C'étaient 
les  habitations  de  pieux  solitaires,  dont  la  renomm(''e  s'étendait  bien  vite 
dans  les  pays  éloignés,  et  qui  bientôt  se  voyaient  entourés  de  nombreux 
prosélytes  qu'attirait  l'éclat  de  leurs  miracles.  Autour  de  la  chapelle  les  dis- 
ciples construisaient  leurs  cellules  :  et  que  de  villes  modernes  doivent  leur 
origine  à  ces  chétives  cabanes  des  premiers  ermites.  Alors  l'amour  de  Dieu 
faisait  les  villes  autour  d'une  sainte  église,  comme  plus  tard  la  crainte  des 
hommes  fit  élc/er  les  cités  aux  pieds  des  donjons  féodaux. 

(1)  Almanach  du  bureau  des  longitudes, 

(2)  Mo  range. 


612  SOCltrÉ  ARCHÉOLOGIQUE   BT   mSTOHIQUB   DU  LIMOOSIK. 

Les  forêts  de  Pave  et  de  Gomodolîac  commençaient  à  se  peopler  ft  la  saiie 
de  Saint-Léonard  et  de  Saint-Junien,  celle  d^Âltaoum  allait  deveutr  la 
iJemeure  d'un  saint  non  moins  illustre. 

Suivant  une  généalogie  fort  ancienne  de  saint  Yrieix,  extraite  des  archi- 
ves du  chapitre  de  Saint-Martin  de  Tours,  Arédius  était  le  fils  de  Jocoode, 
gouverneur  de  Limoges  sous  Clovis.  il  était  allié  par  sa  mère  Pélagie  à  h 
famille  des  Mérovingiens,  et  très  proche  parent  du  roi  des  Francs  austra- 
siens»  Théodebert.  Grégoire  de  Tours,  son  contemporain,  sans  coofirmer 
précisément  cette  illustre  origine,  nous  apprend  que  ses  parents  «  teoaieotà 
Ijmoges  tout  à  fait  le  rang  d'hommes  libres  »,  et  son  récit  semble  fixer 
la  naissance  du  saint  au  commencement  du  vi^  siècle. 

Quoiqu'il  en  soit  de  son  extraction  royale,  il  est  certain  qu^Arédios  fo^ 
envoyé  jeune  encre  à  la  cour  du  roi  Théodebert,  et  quil  y  exerça  la  chai^ 
importante  de  chancelier.  Mais  la  vie  bruyante  du  palais,  les  jeux  san- 
glants, les  repas  tumultueux  des  leudes  francs  convenaient  peu  à  son  ime 
mélancolique  et  déjà  remplie  de  l'amour  divin.  Ses  seuls  plaisirs  étaient 
l'étude  et  la  prière,  sa  seule  ambiiton,  le  royaume  céleste  et  le  titre  de  r^o- 
fesseur  de  Dieu. 

Car  déjà  il  avait  appris  à  ronnattre  la  vraie  religion  au  raoaasière  du 
VIgeois,  où  il  avait  passé  son  enfance. 

«  En  ce  temps,  la  ville  de  Trêves  avait  pour  évéque  Nicet,  bomme  d'ooe 
grande  sainteté,  et  non-seulement  d'une  admirable  éloquence  dans  la  pré- 
dication, mais  très  célèbre  aussi  parmi  le  peuple  par  ses  bonnes  œuvres  et 
ses  œuvres  merveilleuses.  Rencontrant  le  jeune  homme  au  palais  du  roi, 
et  remarquant  dans  sa  figure  je  ne  sais  quoi  de  divin,  il  lui  ordonna  de  le 
suivre.  Lorsqu'ils  furent  arrivés  dans  sa  cellule  et  eurent  parlé  des  choses 
de  Dieu,  l'adolescent  demanda  au  bienheureux  évoque  de  le  cori|^r,  de 
l'instruire,  de  l'éclairer  et  de  l'exercer  dans  la  connaissance  des  livres 
divins  (4)  «.  Nicet  s'attacha  le  jeune  néophyte,  Ia  garda  auprès  de  lai*  loi 
enseigna  les  vérités  chrétiennes,  et  enfin  lui  donna  la  tonsare. 

Dieu  manifestait  déjà  la  gloire  de  son  confesseur  par  des  miracles  et 
témoignait  d'une  manière  éclatante  que  son  élu  était  rempli  de  la  grâce  da 
Saint-Esprit.  Car,  un  jour  qu'Arédius,  réuni  aux  autres  disciples  de  Nicei, 
chantait  les  psaumes  dans  la  cathédrale  de  Trêves  a  une  colombe  descendit 
de  la  voûte,  et  vint  en  voltigeant  se  placer  sur  sa  tête.  Lui,  s'efforçanl  de  la 
chasser,  non  sans  une  honte  modeste,  elle  voltigea  encore  un  peu,  pais 
revint  se  placer  sur  sa  tête  et  son  épaule  :  et  non-seulement  dans  réglise, 
mais  lorsqu'il  rentra  dans  la  cellule  de  Tévêque,  elle  voulut  continuer  de 
demeurer  avec  lui.  Cela  dura  pendant  plusieurs  jours,  ce  que  Tévéque  ne 
voyait  pas  sans  admiration  (2)  ». 

La  mort  de  son  père  et  de  son  frère,  Eustache  (3),  rappela  Arédius  dans 
son  pays,  auprès  de  sa  mère  Pélagie,  qui  n'avait  plus  de  parents  que  daoj* 
ce  fils-là. 


(1)  Grégoire  de  Tours.  —  Trad.  de  M.  Gulzot. 

(2)  Grégoire  de  Tours.  —  Trad.  de  M,  Guizot. 

(3)  Généalogie  de  Saint- Yrieix,  ma. 


CIIRONOLOGIR    DB  l'hISTOIRR   DE   SAINT-YRIEIX-LA'PRRClIR.  6l3 

Ce  fut  alors,  vers  570,  qu'il  résolut  de  se  retirer  du  monde  ei  d'abandon- 
ner  les  affaires  lerrestres,  pour  se  consacrer  tout  entier  au  service  de  Dieu. 
II  fit  bâtir  à  Limoges  Téglise  de  Saint-Michel  de  Pîslorie,  fil  chercher  les 
reliques  de  plusieurs  saints  pour  en  enrichir  sa  nouvelle  fondation,  et  vint  je- 
ler  à  Altanum  les  fondements  du  couvent  à  qui  la  ville  de  Saint-Yrieix  doit 
son  origine.  «  il  lonsura  ses  propres  serviteurs,  en  fil  des  moines  et  leuf 
imposa  la  règle  non  seulement  de  Cassien,  mais  aussi  de  Basile  et  des 
autres  abbés  qui  avaient  institué  des  ordres  monastiques  (1)».  Pendant  qu*à 
leur  téta  il  défrichait  la  terre  et  glorifiait  Dieu  par  le  jeûne  et  Toraison,  sa 
pieuse  mère  veillait  aux  travaux  domestiques,  apprêtait  la  nourriture  com- 
mune et  les  vêtements  des  nouveaux  cénobites,  allégeant  par  la  prière  ses 
rudes  occupations. 

Arédius  vivait  ainsi  dans  son  monastère,  partageant  sa  vie  entre  les  tra- 
vaux des  champs  ci  l'élude  des  choses  divines,  guérissant  chaque  jour  par 
de  nouveaux  miracles  les  malades  qui  arrivaient  en  foule  vers  lui,  et  ne 
quittant  sa  ct^llule  que  pour  aller  en  pèlerinage  aux  tombeaux  de  Saint- 
Julien  ou  de  Sainl-Mariin,  lorsqu'un  terrible  événement  le  força  à  regagner 
cette  cour  qu'il  croyait  avoir  abandonné  pour  jamais.  C'était  en  579  :  le 
froid  avait  été  excessif,  les  vignes  avaient  gelé,  et  malgré  cela  le  référen- 
daire de  Chilpéric,  Marc,  avait  imposé  à  chaque  habitant  un  impôt  de  deux 
pots  de  vin  par  arpent  de  vignes.  Le  peuple  s'était  soulevé  à  Limoges,  avait 
incendié  les  livres  du  fisc  et  maltraité  le  référendaire  qui  ne  fut  sauvé  que 
par  la  protection  de  Saint-Féréol,  alors  évéque.  Chilpéric  furieux  envoya 
Jes  émissaires  en  Limousin  qui  éteignirent  la  révolte  dans  des  flots  de 
sang. 

Plusieurs  prêtres  furent  même  torturés  et  condamnés  à  mort.  Arédius  ne 
put  voir  sans  être  ému  une  pareille  affliction  s'étendre  sur  se^  compatriotes; 
bravant  la  colère  du  roi,  il  se  rendit  à  sa  cour,  et  par  ses  prières  désarma 
le  courroux  de  Chilpéric,  qui  dans  un  moment  de  repentir  brûla  lui-même 
toas  les  registres  de  rimp6t. 

A  peine  de  retour  dans  son  couvent,  il  en  fut  arraché  de  nouveau  pour 
porter  encore  des  paroles  de  paix  à  la  cour  d'un  autre  roi,  à  la  cour  de 
Gontran.  Il  alla  lui  demander  la  grâce  du  duc  Didier  qui  avait  abandonné 
le  parti  du  roi  de  Bourgogne  pour  celui  de  l'aventurier  Gondovald,  élevé 
sur  le  pavois  de  Brive-la-Gaillarde,  et  il  fut  assez  heureux  pour  Tob- 
teoir  (2). 

Ce  fut  la  dernière  fois  qu'on  le  vit  se  mêler  aux  affaires  du  siècle.  Il  vécut 
encore  qnelque  temps  dans  son  monastère,  croissant  de  plus  en  plus  en 
sainteté  et  en  réputation,  opérant  chaque  jour  de  nombreux  miracles  ; 
mais  ses  jours  étaient  comptés  et  Dieu  le  rappela  bientôt  à  lui.  Il  était  allé 
à  Tours  visiter  le  sépulchre  de  Saint-Martin  ;  et  «  y  étant  demeuré  quelques 
jours,  rapporte  Grégoire  de  Tours,  ii  nous  dit  qu*il  n'avait  plus  de  longs 
jours  à  rester  dans  ce  monde,  et  que  certainement  il  mourrait  bientôt.  Il 

(1)  Grégoire  de  Toors. 

(2)  Grég.  de  Tours. 


(yii  SOCli^.TÊ  AECHÉOLOfîlQUE   ET   HISTORIQUE  DU   LlHOUSIIf. 

nous  dil  adieu,  e(,  s'en  allaul,  rendit  grâce  à  Dieu  de  ce  qu'avant  de  mot- 
rir  il  avail  obtenu  de  baiser  le  tombeau  du  bienheureux  évôqae.  » 

En  arrivant  à  sa  cellule  il  6t  son  testament,  qui  nous  a  été  conserré,  par 
lequel  il  désigna  Téglise  de  Saint-Hiiaire  à  Limoges  pour  le  lien  de  $2 
sépulture,  institua  pour  ses  héritiers  les  moines  d'Attanum  el  Téglise  4e 
Saint-Martin  de  Tours,  sou«  la  dépendance  de  laquelle  il  mit  son  manastèfe. 
nomma  Astidius,  abbé  du  Vlgeois,  pour  son  successeur  et  légua  à  di?erses 
églises,  entr'autres  au  monastère  du  Yigeois,  des  richessses  considéra- 
bles (1). 

a  Le  sixième  jour  de  sa  maladie,  une  femme  souvent  tourmentée  de 
Tesprit  immonde,  que  le  saint  n'avait  pu  guérir,  s*étant  fait  lier  les  malci 
derrière  le  dos,  commença  à  crier  et  à  dire  :  Courez,  ciiovens,  sorte: 
promptemeot,  peuple  de  la  ville,  allez  au  devant  des  martyrs  et  des  confes- 
seurs qui  viennent  se  réunir  pour  les  obsèques  du  bienheureux  Arédias. 
Voilà  Julien  qui  arrive  de  Brioude,  Privai  de  Mende,  Martin  de  Tours,  Mar- 
tial de  sa  propre  ville.  Saturnin  arrive  de  Toulouse,  Denis  de  la  ville  df 
Paris,  et  en  voilà  beaucoup  d'autres  de  ceux  qui  habitent  le  ciel  et  qae 
vous  adorez  comme  martys  et  confesseurs  de  Dieu.  —  Et  comme  elle  com- 
mençait à  crier  ainsi  dans  les  premières  heures  de  la  nuit,  elle  fut  attachée 
par  son  maître. 

a  Mais  rien  ne  put  la  contenir,  elle  rompit  ses  liens  et  commença  à  mar- 
cher vers  le  monastère,  en  répétant  les  mêmes  paroles.  En  même  temps  le 
bienheureux  rendit  Tesprit,  non  sans  un  témoignage  de  cette  vérité  qu'i! 
avait  reçue  par  les  anges.  Lors  de  ses  funérailles,  cette  femme,  avec  une 
autre  que  tourmentait  aussi  le  malin  esprit,  dès  que  le  sépulcre  fut  fermé. 
se  trouva  délivrée  de  la  malice  des  démons  qui  la  persécutaient;  et  je  crob 
que  ce  fut  par  Tordre  de  Dieu  qu'il  ne  put  la  guérir  pendant  cette  vie  mor- 
telle, afin  que  par  ce  miracle  ses  funéraillles  fussent  glorifiées  (2)  •. 

Arédius  mourut  le  95  août  59t,  et  c*est  ce  jour  que  l'église  le  fête.  S«9 
funérailles  furent  célébrées  par  saint  Féréol,  et  il  fut  inhumé  dans  l'église 
de  Saint-Hilaire  ou  restèrent  ses  précieuses  reliques  jusqu'en  1 178. 


MIRACLES   DE  SAINT   YRIBIX 

La  vie  des  hommes  extraordinaires  nous  apparaît  toujours  entourée  d'no? 
auréole  de  merveilleux,  semée  de  prodiges  surhumains,  dans  lesqoeis 
Tenlhousiasme  exalté  reconnaît  sûrement  le  doigt  de  Dieu  et  qu*il  regarde 
comme  des  signes  infaillibles  de  prédestination,  lorsque  ce  sont  le  pla> 
souvent  de  simples  effets  de  la  nature.  Mais  parmi  ces  hommes,  les  saiot? 
surtout  possèdent  le  privilège  de  ces  aventures  miraculeuses,  et  parre 
qu'ils  ont  des  droits  légitimes  à  la  protection  divine,  on  dirait,  k  entendre 
leurs  légendaires,  que  Dieu  s'est  démis  en  leur  faveur  de  sa  toute-puissance. 

Aussi  quelle  foule  de  miracles  bizarres,  de  merveilles  peu  surprenantes 

(1)  TesUment  de  Saint- Yrieix. 

(2)  Greg.  de  Tours. 


CHRONOLOGIE  DK   l'hISTOIRE   DE   SAINT*  YRIBIX-LA-PERCHR.  GI5 

ont  accomplis  nos  premiers  saints,  lorsque  Tesprit  crédule  et  superstitieux 
de  nos  ancêtres  attribuait  k  une  cause  surnaturelle  les  phénomènes  tout 
naturels  que  Tignorance  leur  rendait  incompréhensibles.  Les  miracles  de 
celte  sorte  ne  sont  pas  rares  en  Limousin  :  lémoio  le  loup  de  Saint-Psalmet 
qui,  ayant  eu  Tincroyable  audace  de  dévorer  Tâne  de  Termite,  fut  obligé 
de  le  remplacer  dans  son  service  et  de  porter  à  la  cellule  le  bois  dont  était 
chargée  sa  victime  (I). 

Sous  ce  rapport,  saint  Yricix  n'a  rien  a  envier  aux  autres  saints,  ses 
compatriotes  ;  il  a  eu  sa  large  part  des  faveurs  divines;  et  c'est  sans  doute 
à  sa  considération  que  son  père  Joconde,  sa  mère  Pélagie  et  sa  nièce  Karis- 
sime  doivent  leur  titre  de  bienheureux.  Cette  dernière  qui  était  ensevelie 
dans  notre  église,  avait  la  charge  de  faire  retrouver  les  faucons  perdus;  et 
son  image  ne  manquait  pas  d'être  placée  auprès  des  volières  seigneuriales. 

Quant  à  saint  Yrieix,  ses  pouvoirs  étaient  universels  et  sans  doute  aussi 
plus  réels,  car  plus  heureux  que  beaucoup  d'autres,  ils  les  a  conservés 
jusqu'à  nos  jours.  Il  guérissait  les  maladies  curables  et  incurables,  rendait 
la  vue  aux  aveugles,  Fouie  aux  sourds,  la  force  aux  paralytiques,  chassait 
les  démons,  délivrait  les  prisonniers,  arrêtait  les  fléaux,  découvrait  les  sources 
souterraines,  en  un  mot  accomplissait  toutes  les  espèces  de  miracles  connus, 
comme  nous  rapprennent  ceux  qui  ont  écrit  de  lui  aux  différentes  époques. 

Ainsi,  allant  un  jour  avec  sa  mère  à  la  basilique  de  Saint-Julien,  à 
Brioude,  il  arriva  vers  le  soir  dans  un  lieu  aride  et  que  l'absence  d'eau  cou- 
rante avait  rendu  stérile.  Sa  mère  lui  dit  :  Mon  fils,  nous  n'avons  pas  d'eau; 
comment  pourrons- nous  passer  ici  la  nuit?  Mais  lui,  prenant  une  baguette 
(probablement  de  coudrier),  la  tourna  deux  ou  trois  fois  dans  le  sable,  et 
il  en  jaillit  une  source  abondante  (9}.  Pour  ce  miracle,  quelques  siècles  plus 
tard  rinquisition  l'aurait  brûlé  comme  sorcier,  et  de  nos  jours  l'Académie  des 
sciences  l'aurait  relégué  au  rang  de  ces  pâtres  divinateurs  qui  avec  le  fa- 
meux bâton  fourchu  découvrent  l'eau  au  sein  de  la  terre. 

Une  autre  fois,  pendant  qu'il  voyageait,  un  nuage  de  pluie  commença  à 
venir  sur  lui,  et  comme  il  avait  sans  doute  négligé  de  prendre  son  man- 
teau, il  était  exposé  à  se  mouiller,  lorsque,  levant  les  mains  au-dessus  de 
la  tête  et  s'inclinant  un  peu  sur  le  cou  de  son  cheval,  les  nuages  se  divisè- 
rent en  deux  parts  et  répandirent  autour  de  lui  des  torrents  d'eau,  sans 
qu'une  seule  goutte  vint  le  toucher  (3). 

Les  maux  de  dents,  il  les  guérissait  sans  douleur.  Un  citoyen  de  Tours, 
Westrimond,  surnommé  Tatlon,  souffrait  d'un  violent  mal  de  dents  qui 
avait  fait  enfler  sa  mâchoires;  il  s*adressaau  bienheureux  :  et  celui-ci  ayant 
imposé  sa  main  sur  l'endroit  où  il  souffrait,  la  douleur  disparut  aussitôt,  et 
depuis  ne  se  réveilla  plus  (4). 

C'était  un  saint  aristocrate  que  saint  Yrieix,  et  ce  qui  le  prouva  bien,  c'est 
qu^après  sa  mort  aucune  force  humaine  ne  fut  capable  de  transporter  son 


(1)  CoLUN«  Viei  des  Saints  du  Limousin. 
(S)  Grég.  de  Tours. 
(3)  Id. 
(4'  Id, 


61 C  SOCléTÉ  ARCHÉOLOGlQim  ET   HISTORIQUE   l>ll    LIMOITSIII. 

corjis  sur  la  place  des  Savetiers  (4)*  Que  dois-tu  donc  penser  là-hant  de  t^ 
protégés,  6  notre  illustre  patrori,  et  de  quel  œil  courroucé  dois-la  regarda' 
cette  ville  qui  autrefois  t'était  si  chère,  alors  que  tu  en  éloignais  la  peste  f 
la  famine  ? 

Au  XVI*  siècle,  il  se  fit  plusieurs  miracles  que  nous  a  rapportés  un  témc: 
oculaire,  M.  de  Jarrige.  C'est  en  1599  un  homme  de  Coussac  qui,  aan 
demeuré  aveugle  pendant  trois  ans,  recouvre  la  vue  aussitôt  après  s'f(r> 
frotté  les  yeux  avec  la  soie  qui  enveloppait  le  chef  de  saint  Yrieix.  Ce  sec: 
des  femmes  de  Léymérigie  et  de  Montluc  qui,  vouant  à  saint  Yrieix  leerç 
enfants  morts-nés,  les  voient  ainsi  rendus  à  la  vie. 

Et  plus  près  de  nous  encore,  en  4806,  cest  un  journalier  des  Salices, 
Jean  Frange,  dit  Regourdi,  qui,  n*ayant  pu  marcher  jusqu'à  Vàge  de$cS 
ars,  retrouve  Tusage  des  jambes  au  milieu  de  la  procession  des  reliques  ûf 
saint  Yrieix  où  l'on  avait  fait  vœu  de  le  porter,  et  remonte  seol  et  ssss 
secours  jusques  chez  son  père.  «  Il  vit  encore  et  marche  aussi  bien  qn'ac 
autre.  »  dit  M.  Morange,  Thistorien,  qui  rapporte  ce  fait  en  1837.  Un  aotrt 
enfant  fut  guéri  de  même  dans  les  Barris  (2). 

Je  pourrais  citer  encore  bien  d^autres  miracles  par  lesquels  le  saint  patron 
de  cette  ville  a  fait  éclater  sa  puissance,  Ténumération  est  loin  d>n  étn- 
épuisée  ;  mais  ceux  que  j'ai  rapportés  ne  sont-ils  pas  déjà  suffisants  poor 
établir,  aux  yeux  même  des  plus  incrédules,  la  sainteté  d'Arédios  ? 


DEUXIÈME  RËCIT. 

(DE  LA  FIN  DD  VI*  SlÈChB  A  LA  FIN  DU  XII*  SIÂCLB). 

De  tous  les  doyens  de  Saint-Yrieix,  Bernard  fut  sans  contredit  le  plas 
illustre  et  celui  qui  joua  le  rôle  le  plus  considérable.  A  la  mort  de  sec 
frère  Aymar  IV,  arrivée  en  \  148,  il  fut  nommé  tuteur  de  son  fils  Boson,d:t 
Aymar  Y  :  et  en  cette  qualité  il  administra  à  son  profit,  concurremmeoî 
avec  son  frère  Arehambaud,  la  vicomte.  Les  bourgeois  de  Limoges  Fayaoi 
insulté  au  moment  où  il  se  faisait  remettre,  comme  représentant  du  vicom le, 
une  pleine  main  des  deniers  qu'on  fabriquait  à  la  monnaie  publique,  il  sVo 
vengea  en  conseillant  au  roi  d^Angleterre  de  renverser  les  remparts  ds 
château  (castri),  rebâtis  depuis  peu.  Ce  roi  était  alors  à  Limoges  avec^^n 
épouse  Aliénor  et  venait  de  s'y  faire  sacrer  duc  d'Aquitaine  (M52).  Mécos- 
tent  lui-même  de  Taccueil  qu'il  avait  reçu  de  la  part  de  l'abbé  de  Saîot- 
Marlîal,  il  suivit  le  conseil  de  Bernard,  et  les  murs  de  la  ville  proprement 
dite  furent  détruits  de  fond  en  comble  (3). 

Bernard  avait  profité  de  la  minorité  de  son  neveu  pour  agrandir  ses  pos- 
sessions; et  Aymar,  pour  recouvrer  ses  biens,  fut  obligé  de  lui  faire  b 
guerre.  En  1 173,  le  vicomte  mit  le  siège  devant  le  château  d'Excideuiidoot 


(1)  Geoffroi  db  Vioeois,  Ch.  XV.  AtUno  monasterio  magnus  iUe  qiiiescit  Arediu»,  euic» 
corpus  ad  testimonium  urbanae  nobUitatis  per  plateam  cerdonum  deferri  nequivit. 

(2)  M.  Morange,  m^. 

^3)  N»  du  Frelon  15,  30  décembre  1830  cl  26  janvier,  Ch.  un  et  liv. 


CHBONOLOGIB   DB   l'biSTOIRB   DR   SAINT -TRIKIX-LA-PEaCHE.  617 

son  oncle  s'était  emparé,  et  après  un  siège  d'un  mois,  il  parvint  à  Ten 
chasser.  Ce  fut  le  signal  d'une  guerre  générale  entre  tous  les  seigneurs  du 
Limousin,  guerre  qui  dura  jusqu'à  ce  qu'Aymar  eût  donné  à  son  oncle 
nernard  le  château  de  Salon  à  ta  place  de  celui  d'Excideuil.  Mais  Archam- 
l>aud  qui  l'avait  enlevé  à  son  neveu,  ne  le  restitua  que  l'année  suivante,  et 
Bernard,  dans  un  traité  de  paix  définitif,  l'échangea  contre  le  château  de 
Saint- Yrieix  (1). 

Le  doyen  était  alors  arrivé  au  comble  de  sa  puissance  ;  mais  son  pou- 
voir le  rendit  imprudent.  Il  s'aliéna  le  roi  d'Angleterre,  son  ancien  appui, 
en  favorisant,  contre  te  gré  de  ce  prince,  l'élection  de  Sebrand  Chabot  à 
Vé\éi\ié  de  Limoges,  élection  qui  s'élaitfaitc  secrètement  dans  l'abbaye  de 
Saint-Yrieix.  L'intrigue  fut  découverte  au  mois  de  septembre  1 178.  a  Pour 
y  avoir  participé,  les  chanoines  furent  chassés  de  leur  propre  demeure, 
l'église  devint  veuve  de  ses  fils,  et  fut  privée  pendant  vingt  et  un  mois  des 
saints  mystères  (2).  Bernard,  en  expiation  de  ses  péchés,  entreprit  le 
voyage  de  la  terre  sainte,  et  il  mourut  en  revenant  de  son  pèlerinage.  Il 
rapportait  de  Jérusalem  de  précieuses  reliques  et  de  riches  tissus  que 
GoufBcr  de  Lasiours  recueillit  et  remit  à  Téglise  de  Saint-Yrieix (3). 

Au  temps  où  Bernard  était  doyen  se  rattachent  deux  faits  très  intéres- 
sants pour  l'histoire  de  notre  ville  :  le  passage  d'Henri  II,  roi  d'Angleterre,  à 
Attanum,  et  la  translation  des  reliques  de  saint  Yrieix. 

En  {182,  Henri  11  était  accouru  d'Angleterre  avec  Henri  le  Jeune  pour 
porter  secours  à  son  suzerain  Philippe  Auguste,  attaqué  par  les  seigneurs 
de  son  royaume,  ayant  à  leur  tête  le  comte  de  Flandre  ;  mais  à  son  arrivée 
on  France,  il  trouva  la  paix  rétablie,  et  il  en  profita  pour  visiter  ses  pos- 
sessions d'Aquitaine  désolées  par  la  guerre  que  le  duc  Richard  Cœur-de- 
Lion  faisait  au  comte  d'Angoulèmc  et  à  ses  partisans. 

Richard  était  alors  occupé  au  siège  d'Excideuil  qui  appartenait  à  Hélie  do 
Talleyrand  ;  son  père  l'y  rejoignit  peu  de  temps  après  la  Pentecôte,  et, 
après  s'être  emparé  des  faubourgs  du  château  assiégé,  il  revint  sur  ses  pas. 
a  II  s'arrêta  à  Saint-Yrieix  pendant  quelques  jours,  se  fil  présenter  la  vie 
(lu  saint,  la  lut  avec  respect,  et,  laissant  dans  la  ville  une  garnison  suffi- 
sante, il  alla  faire  le  siège  de  Pierrebuffière  qui  capitula  au  bout  de  douze 
jours.  » 

De  là,  il  retourna  à  Périgueux  pour  réunir  ses  forces  à  celles  de  Richard 
(|ui  assiégeait  le  Puy-Saint-Front,  et  Henri  le  Jeune  s'y  rendit  lui-môme,  le 
I®'  juillet,  en  passant  par  Sainl-Yrieix. 

L'ordre  des  faits  nous  amène  à  placer  ici  une  discussion  historique,  et 
qui,  je  l'espère  ne  paraîtra  pas  oiseuse,  sur  les  reliques  de  saint  Yrieix. 
Un  chroniqueur  du  xii'  siècle,  mort  en  1183,  et  par  conséquent  vivant  au 
temps  de  la  translation  du  corps  de  saint  Yrieix,  qui,  par  sa  position, 
devait  être  bien  instruit  des  événements  religieux  du  diocèse,.  GeoflFroi, 
moine  de  Saint-Martial  et  plus  tard  prieur  de  Vigeois,  nous  a  transmis  sur 
cette  translation  des  détails  sans  doute  très  vrais,  mais  qui  sont  en  opposi- 

(1)  Voir  numéro»  du  Frelon,,  de»  15,  30  décembre  IS.Ml  Pt  Sfi  janvier.  Chap.  LXvii;. 
^2)  Geoff.  du  Vig.  Ch.  lxx. 
(3)  td.  Ch.  xxit. 


618  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMODSIK. 

lion  avec  cette  opinion  généralement  reçue,  que  le  corps  de   saint  Yrieii 
resta  dans  Téglise  de  notre  ville,  après  y  avoir  été  transporté. 

Saint  Yricix  avait  par  son  testament  choisi  pour  le  lieu  de  sa  sépnltorf 
Téglise  de  Saint-Hilaire  à  Limoges.  Pépin -le-Bref,  en  7d3,  passant  par 
cette  ville,  place  dans  deux  coupes  ces  précieuses  reliques,  ei  elles  farea 
conservées  à  Limoges  jusqu'en  H  78.  (ieoffroi  du  Vigeois  vient  confirmer  ce 
fiit  en  nous  apprenant  que,  vers  1130,  Elle,  fils  du  vicomte  Aymar  Ifl,  est 
enterré  à  Limoges  sous  le  sépulcre  de  saint  Yrieix  (i). 

Ce  môme  auteur  raconte  aussi  la  translation  de  <^es  reliques  en  ces  ter- 
mes :  «  Le  dimanche  après  les  rogations,  le  46  des  calendes  de  juin  (c'est- 
»  à-dire  le  18  mai),  le  corps  du  bienheureux  Yrieix  est  retiré  de  son  tom- 
»  beau  par  Tévéque  Sebrand,  les  abbés  du  Vigeois  et  de  Brantôme,  Goil- 
»  laume  et  Eudes,  et  les  prieurs  du  Ghalard  et  de  TArtige,  parce  qu*oo  se 
»  préparait  à  reconstruire  les  murs  de  la  basilique.  Le  vicomte  Aymar  ave^ 
»  une  foule  innombrable,  et  en  même  terAps  les  seigneurs  de  Lastonrs  por- 
»  tcnt,  suivant  la  coutume,  le  corps  du  saint  sur  leurs  épaules  •  (2). 

Du  reste,  pas  la  moindre  indication  sur  le  lieu  où  les  saintes  reliques 
sont  déposées.  Et  à  Tannée  1182,  il  ajoute  :  <(  Le  corps  du  bienheureux 
»  confesseur  Yrieix  est  rapporté  solennellement  à  son  ancienne  place  par 
»  Guillaume,  abbé  du  Vigeois,  Barthélémy,  prieur  du  Ghalard,  Gérai  Se- 
»  guin  et  Gouffier  de  Lastonrs,  en  présence  du  vicomte  et  de  tout  le  peoi 
»  pie  »  (2). 

Ce  fait  est  précis  et  rapporté  par  un  homme  digne  de  confiance  ;  aussi,  à 
moins  qu'il  n*y  ait  eu  une  translation  postérieure  dont  Thistoire  ne  fait  pas 
mention,  il  est  probable  que  le  corps  de  saint  Yrieix  u'a  jamais  reposé  dans 
notre  ville,  et  que  le  Moûtier  n*a  jamais  possédé  des  reliques  de  son  patrou 
que  le  chef  qu'on  y  vénère  encore.  Le  reste  du  corps  aura  disparu  saos 
doute,  lors  de  la  destruction  de  Féglise  de  Saint-Hilaire,  et  aura  subi  le  sort 
commun  aux  reliques  des  autres  saints  de  la  famille  de  saint  Yrieix.  Ea 
effet»  qui  nous  dirait  mieux  où  reposent  aujourd'hui  les  restes  de  saint 
Joconde,  père  d' Yrieix,  de  sainte  Pélagie,  sa  mère,  et  de  sa  nièce  sainte 
Rarissime? 

Avec  Yrieix  s'éteignit  la  splendeur  momentanée  d'Âltanum.  Les  reliqoes 
du  saint  n'étaient  pas  là  pour  attirer  par  leurs  miracles  la  foule  pieuse  et 
souffrante  ;  ses  moines  n'étaient  encore  que  de  pauvres  serfs  ignorants  et 
incapables  de  prêcher  aux  hommes  la  parole  divine;  et  son  monastère 
n'était  qu'une  modeste  colonie,  où  chaque  habitant,  devenu  le  serviteur  de 
Dieu  après  avoir  été  l'esclave  des  hommes,  s'adonnait  comme  auparavant 
aux  pénibles  travaux  du  sol,  célébrant  par  de  naïves,  mais  ferventes  prières, 
ce  roi  du  ciel  qui  les  affranchissait  de  la  servitude  des  rois  de  la  terre. 
Aussi  l'histoire  qui  avait  répandu  dans  le  monde  la  renommée  de  leur  pre- 
mier abbé,  se  taisait-elle  devant  leur  vie  tranquille  et  ignorée  :  et  c'est  A 
peine  si,  à  de  longs  intervalles,  quelques  donations  pieuses  viennent  révéler 
l'existence  du  nouveau  monastère. 


(1)  GEOFr.  DE  ViOEois,  1"*  partie,  ch.  xxxvii  :  qui  umen  Helias...  sub  corpore  S.  Aredu.. 
Lemovicae  tumultatur. 
''2)  Id..  t"*  partie,  ch.  jcxii:  :  Patris  Âredii  beatissimi  corpas  loco  pristino  solemniter  refer- 

tur....  etc. 


CHRONOLOGIE  DE  l'hISTOIRE  DE  SAINT-YRICTX-LA-PERCHE.  6i0 

Cependant,  sous  les  mains  des  moines,  le  sol  se  défrichait  et  se  cultivait; 
la  Taste  forêt  d'Attanum  entendait  résonner,  mêlé  aux  chants  d'église,  le 
bruit  des  instruments  du  travail,  et  voyait,  au  milieu  de  ses  profondeurs 
jusqu'alors  incultes,  se  dresser  dans  des  champs  nouveaux  des  moissons 
inconnues;  les  bâtes  sauvages  cédaient  leur  antique  demeure  à  un  peuple 
d'ouvriers  et  de  laboureurs  qui  venaient  prendre  leur  part  d'une  terre  sans 
maître  et  établir  leurs  habitations  sous  la  puissance  protectrice  d'une  sainte 
basiliqu*.  ' 

La  vie  cénobitique,  austère  mais  utile,  se  continua  ainsi  pendant  près  de 

deux  siècles  dans  le  monastère  d'Attanum,  sous  les  successeurs  d'Astidius, 

son  second  abbé,  et  c'était  encore  la  règle  monacale  qui  subsistait,  au 

milieu  du  viii«  siècle,  comme  nous  l'apprend  le  testament  de  Karissime, 

nièce   de  saint  Yrieix.  Vers  759,  cette  pieuse   femme,   voulant  enrichir 

de  ses  libéralités  la  fondatiou  de  ses  ancêtres,  disposa,  avant  de  mourir, 

de  tous  ses  biens,  qui  étaient  immenses,  en  faveur  du  couvent  d'Attanum. 

Elle  lui  légua  à  perpétuité  le  monastère  de  Roseille,  près  d'Aubusson,  avec 

ses  deux  cents  manses  et  ses  trois  cents  broderies,  mit  les  moines  sous  la 

dépendance  de  ses  abbés,  et  n'exigea  pour  un  tel  don  que  la  faveur  d'être 

ensevelie  dans  la  basilique  d'Attanum,  dans  un  magnifique  tombeau  qu'elle 

avait  acheté   du  comte  de   Narbonne   (I).    Le  mausolée  a  disparu,  mais 

on  remarque  encore  au  Moûtier  (l'ancienne  église  du  monastère),  près  de 

la  porte  du  cloître,  une  pierre  scellée  qui   recouvrait,  dit-on,  le  corps  de 

Karissime.  On  peut  même  voir  au  bas  des  marches  du  grand  autel,  du  côté 

du  chœur,  une  pierre  sculptée,  usée  par  le  temps  et  le  pas  des  prêtres  où 

Ton  distingue,  quoique  difficilement,  un  chevalier  dans  le  costume  du 

XII®  siècle,  tenant  sur  le  poing  un  faucon  :   c'était  peut-être  une  pierre 

vouée  pour  quelque  oiseau  perdu  à  la  sainte  patronne  des  chasseurs. 

Mais  ces  libéralités  ne  relevèrent  que  momenlanément  la  prospérité  du 
monastère  d'Attanum  :  les  fîefs  légués  par  Karissime  furent  bientôt  enlevés 
par  les  vicomtes  d'Aubusson,  et  les  moines,  sans  appui  et  sans  forces  mili- 
taires^ furent  contraints  de  renoncera  leurs  possessions  de  la  Marche,  au 
moins  pour  plusieurs  siècles. 

En  même  temps  ils  cessaient  de  cultiver  la  terre,  qui  jusque  là  leur  avait 
procuré  les  choses  nécessaires  à  l'existence;  si  bien  que,  pillés  par  les 
seigneurs  voisins  de  leurs  domaines,  et  n'ayant  pas  encore  distribué  le  sol 
à  des  serfs  qui  leur  payassent  la  dlme,  il  virent  leur  nombre  se  réduire  de 
jour  en  jour  et  leur  maison  tomber  en  ruines. 

C'est  dans  cet  état  de  misère  et  de  délabrement  que  Pépin  trouva  le  mo- 
nastère d'Attanum,  lorsque  la  guerre  d'Aquitaine  l'appela  en  Limousin. 
Ce  roi,  ami  du  clergé  auquel  il  devait  la  consécration  de  son  usurpation, 
et  voulant  s*appuyer  sur  celui  d'Aquitaine  pour  établir  sa  domination  mé. 
connue  dans  cette  province,  semait  partout  sur  son  passage  les  donations 
en  faveur  des  églises  et  des  monastères,  relevait  les  uns  de  leurs  ruines 
et  en  édifiait  de  nouveaux.  Dans  une  de  ses  exp<^ditions  on  Aquitaine, 
vers  l'an  763,  il  passa  à  Allanum,  pour  se  rendre  de  Uahors  à  Limoges. 

;i)  Gallia  christiana,  t.  II,  Instrumenta. 


0;!0  i^OClÉTF.   AltGlié'3L061QUB    KT   HISTORIQOB    DU    LIMOOSI:*. 

Los  moines  lui  présenlèrent  les  Charles  de  doDatioas  qui  leur  avaiest  é^ 
faites  par  Sigebërl,  roi  d'Auslrasie.  Cbildebert  II,  son  fils,  Bruaehaut,  s«: 
épouse,  cl  Théodebert  Tbéoderic,  ses  pelils-fiis.  Le  fondateur  de  la  dynasii^ 
carlovingienne  ne  voulut  pas  se  montrer  moins  généreux  que  les  MéroviB- 
giens  ses  prédécesseurs.  11  se  proposait  de  rendre  au  couvent  sou  ancieDoe 
splendeur,  de  le  faire  même  plus  puissant  que  jamais,  tout  en  y  laissas. 
subsister  l'ordre  monastique  ;  mais  les  moines,  dégoûtés  de  la  vie  dort 
et  austère  des  premiers  cénobites,  demandèrent  avec  insistance  1er 
sécularisation.  Les  raisons  qu'ils  firent  valoir  sont  étranges.  Leur  monas- 
tère, disaient-ils,  était  une  maison  royale  où  arrivaient  de  toutes  par.5 
des  hôtes  qu'il  fallait  héberger  ;  puis  le  sol  ne  pouvait  plus  leur  prorarer 
leur  pain  de  chaque  jour  et  les  ruisseaux  étaient  sans  poissons.  Or,  ajoa- 
laient-ils,  —  de  même  que  pas  de  poisson  sans  eau.  de  même  pas  dt 
moine  sans  poisson,  et  partant  pas  de  règle  (I). 

Sur  l'avis  des  grands  de  sa  cour.  Pépin  accéda  à  leur  demande  :  les 
pauvres  moines  devinrent  de  riches  et  puissants  chanoines.  II  établit 
trente-deux  prébendes  pour  fournir  à  la  subsistance  d'autant  de  chaDoiDP5 
et  il  plaça  ceux-ci  sous  le  pouvoir  de  quatre  grands  dignitaires  :  un  abbé, 
un  doyen,  un  grand  -chantre  et  un  sacristain  ;  il  exempta  de  tout  iHbst 
et  de  toute  redevance  à  perpétuité  la  nouvelle  collégiale,  avec  ses  serfs  et 
ceux  qui  seraient  à  son  service  ;  il  fit  les  chanoines  hauts  justiciers  dans 
rétendue  de  leurs  terres,  et  les  rendit  indépendants  de  toute  puissance 
laïque,  hors  la  puissance  royale.  Toutefois  ils  ne  cessèrent  pas,  malgré 
leur  sécularisation,  d'être  soumis  à  l'église  de  Saint-Martin  de  Tours  sou< 
la  dépendance  de  laquelle  Yrieix  avait  en  mourant  placé  son  monas- 
tère (î). 

Charlcmagne  maintint  les  privilèges  accordés  par  son  père  à  Tancie^ 
couvent,  maintenant  abbaye  collégiale  et  séculière  de  Saint-Yrieix  : 
s'étant  arrêté  en  778  à  Atlanum,  lors  de  sa  seconde  expédition  en  Espagne, 
il  confirma  la  donation  de  son  père  dans  un  diplôme  spécial  où  il  la  rap- 
pelle tout  au  long,  et  qu'il  fil  déposer  et  garder  dans  les  archives  du  cha- 
pitre de  Saint-Martin  de  Tours.  Parmi  les  signataires  de  l'acte  figure  Tabhc 
Léon  (3). 

De  celle  époque  dale  véritablcmcnl  la  puissance  de  Tabbaye  de  Saioi* 
Vrieix  :  ses  possessions  étaicnl  immenses  et  s'étendaient  dans  le  Péri- 
gord,  le  Haut  et  le  Bas-Limousin,  la  Marche,  l'Angoumois.  et  jusque  dan^ 
l'ilc  d'Oléron  :  ses  doyens,  indépondanls  de  Tévôque  de  Limoges  et  sou- 
mis seulement  à  Taulorilé  du  chapitre  de  Saint-Marlin  de  Tours  qui  était 
trop  éloigné  pour  pouvoir  exercer  sa  suprématie  d'une  manière  efficace- 
ses  doyens,  dis-je,  étaient  des  prélats  aussi  puissants  que  beaucoup  d>vé- 
qucs,  et  souvent  ils  échangeaient  leur  bourdon  contre  la  crosse  épisio* 
pale.  Ainsi  Slodilus,  abbé  de  Saiot-Yrieix  d'Altanc,  fut  le  trenlre-troisiêmc 
évoque  de  Limoges.  11  avait  été  chargé  auparavant,  en  845,  d'apporter  lo> 


(1)  GalL  christ.,  t.  II,  Instr 

(2)  /d.,  ib.d, 

(3)  Id,,  ibid. 


CnRO.XlLOGlK  DE  L'HISTOIRB   DE  SA1TT-TRIIUX-LA.-PKBCH8.  Oïi 

restes  d'Hatton,  autrefois  duc  d*Aquitaine,  à  Téglise  d'Âlaon  que  saint 
Wandrégisile,  descendant  de  ces  princes,  avait  fait  élever  dans  le  Haut- 
Aragon  et  dédiée  à  la  Sainte-Vierge  (i). 

Cette  prospérité  eitraordinaire  fait  dire  au  vieil  historien  déjà  cité,  tou- 
jours M.  Morange,  que  «  la  ville  de  Saint-Yrieix,  suivant  Thistoire  géné- 
rale, est  la  ville  chérie  des  rois  de  la  première  et  de  la  seconde 
race  des  rois  de  France.  »  Nous  laissons  à  son  auteur  la  responsabilité 
d^une  pareille  assertion,  tout  en  regrettant  qu*ii  ne  nous  ait  pas  fait  part 
des  faits  sur  lesquels  il  motivait  son  dire. 

Car  quoiqu'il  affirme,  nous  n'avons  trouvé  dans  Thistoire  générale,  jus- 
qu'au xi^  siècle,  que  le  petit  nombre  de  documents  que  nous  avons 
cités. 

En  I05t,  les  chanoines  de  Saint-Yrieix,  gr&ce  à  la  protection  de  Guil- 
laume, comte  d*Âuvergne,  recouvrent  le  Moùtier-Roseille  qui  leur  avait 
été  légué  par  sainte  Karissime  et  enlevé  par  les  vicomtes  d'Aubusson.  Un 
de  leurs  descendans,  Renaud  ou  Ramnulphe,  effrayé  de  ces  paroles  de 
l'Evangile  :  le  fils  ne  portera  point  l'iniquité  de  son  père,  et  peut-être 
plus  encore  de  la  protection  accordée  aux  chanoines  de  Saint-Yrieix  par 
le  comte  d'Auvergne,  fit  réparer  le  monastère  détruit  par  ses  prédéces- 
seurs, le  replaça  sous  l'autorité  des  chapitres  de  Saint-Yrieix  et  de  Saint- 
Martin  de  Tours  en  faveur  desquels  il  se  désista  de  toutes  ses  prétentions 
et  assura  l'indépendance  des  clercs,  en  statuant  dans  sa  charte  de  dona- 
tion que  quiconque  frapperait  un  clerc,  serait  condamné  à  perdre  la  main 
coupable  ou  à  payer  au  chapitre  de  Saint-Yrieix  cent  livres  d'argent  pur, 
sous  peine  de  devenir  serf  du  monastère.  A  cette  restitution  il  joignit  le 
don  des  églises  de  Saint-Priest  et  de  Saint-Julien  dans  la  Marche.  Enfin  il 
autorisa  ses  vassaux  à  faire  des  donations  pieuses  à  Tabbaye  de  Saint- 
Yrieix,  et  plusieu^'s  imitèrent  son  exemple.  C'est  ainsi  que  notre  chapitre 
devint  possesseur  de  la  chapelle  d'Aubusson  qui  lui  fut  léguée  par  Rotgé- 
rius  et  Amélius,  tous  deux  frères,  et  par  Eymery  Gorza  (9). 

Les  chanoines  de  Saint-Yrieix  prirent  solennellement  possession  de 
leur  nouveau  fief  en  y  transportant  la  châsse  de  leur  patron,  qui  signala 
à  cette  occasion  ses  mérites  par  de  nombreux  miracles  (3).  A  cette  époque 
l'abbé  de  Saint-Yrieix  était  Seguin,  et  le  doyen,  Ramnulphe,  son  neveu, 
tous  les  deux  d'une  famille  noble  du  château  de  Lastours,  mais  vassaux 
toutefois  des  seigneurs  de  ce  lieu.  Ramnulphe  donna  au  couvent  de  Saint- 
Martial  la  ville  des  Cars  et  fut  enterré  ^  Limoges  près  de  la  demeure  de 
l'abbaye  de  Saint-Martial  (i).  Seguin  est  le  dernier  abbé  connu  de  Saint- 
Y'ricix  :  ce  titre  dut  disparaître  vers  ce  temps,  et  celui  de  doyen  le  rem- 
plaça. 


(1)  FvUKiKL,  Hist.  de  la  Gauh:  mérid.;   chiric  •!  A  H..r 

(2)  Gall.  ehrUt.,  t.  II,  lostr. 

(3>  GfEOFFROI   OB  ViGEOIS,  chap.  XIV. 

(4)  Gboff.  db  Vie,  ?•  partie,  ch.  XXVI,  GcUl.  cJtrist. 


G22  SOCIÉTB   ARCHEOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU   LIHOUSIK, 

PIÈCES  DIVERSES 


Vente  de  la  préoôté  de  SaLnt-Yrielx  consentie  au  chapitre  de  ScUnt-YrieU 
par  Alain  d'Albret^  pour  le  prix  de  1800  Uorea.  1483 

Saichent  tous  presens  et  a  venir  que,  en  la  court  du  Roy  nostre  sire,  â 
Tours,  en  droit  par  devant  nous  personnellement  estably  très  haiiU  et  très 
puissant  prince,  Alain,  sired'AIbret,  conte  de  Dreux,  deGaure,dc  Panlievre 
et  de  Perregorl,  viconte  de  Tartas  et  de  Limoges,  captai  de  Bach  et  sei- 
gneur d*Avesnes,  soubzmectant  soy,  ses  hoirs,  avecques  tous  et  chacons 
ses  biens  meubles  et  immeubles,  ou  qu'ilz  soient,  presens  et  a  venir,  i  la 
jurisdiction,  cohertion,  povoir  et  ressort  de  lad.  court,  sans  nulle  autre 
advouer,  requerre  ne  demander  quant  au  fait  qui  s'ensuit  :  lequel  seigneur 

a  congneu  et  confesse  en  droit,  en  lad.  court, 

comme  il  confesse,  de  son  bon  gre,  certaine  science,  pure, 

franche  et  liberalle  voulente  et  sans  contraincte  de  nulluy,  tant  en  son 
propre  et  prive  nom,  que  comme  légitime  administrateur  et  ayant  le 
bail  et  gouvernement  de  Jehan.  Gabriel,  Pierre,  Amenion,  Loyse,  Ysabeau, 
Charlotte  et  Anne,  ses  enffans  de  feue  Madame  Fransoyse  de  Bretaîgne,  sa 
femme,  avoir  vendu,  cède  quicte  et  transporte,  encores  parla  teneur  de  se^ 
présentes  vend, cède,  quicte  et  transporte  des  maintenant  a  tous  jours  mes, 
perpétuellement,  aheritaige,  a  vénérables  personnes,  les  doyen,  chanoines 
et  chappilre  de  l'église  collégial  de  Saint-Yrieiy,  vénérables  scientifâcques 
personnes,  Messircs  Pons  de  Salignac,  doyen,  et  Bertrand  de  Royere,  cha- 
noine de  lad.  église,  tant  en  leurs  propres  et  privez  noms  que  comme 
procureur  desd.  chanoines  et  chappitre,  ad  ce  presens  et  achaptans,  pour 
eulx,  leurs  successeurs  et  d'eulx  ayans  cause,  la  terre  et  seigneurie  de  la 
prevoste  de  Saint-Yriey,  tenue  a  foy  et  hommaige  desd.  doyen  et  chap- 
pitre, ensemble  la  forteresse  diruite,  assise  en  lad.  ville  dud.  Saint- 
Yyriey,  hommaige,  hors  les  hommaigcs  des  seigneuries  des  Cars  et  de  Las 
Tours  seulement,  ensemble  comport,  droiz,  devoirs,  cens  et  rentes,  justice 
et  jurisdiction,  droit  et  ressort,  estangs,  moulins  et  autres  appartenances 
et  deppendances  quelzconques,  et  tout  le  droit  que  led.  seigneur  el  Mes- 
seigneurs  ses  enffans  et  chacun  d'eulx  peuvent  ou  pourroient  avoir  csd. 
prevoste,  terre  et  seigneurie  et  autres  choses  dessusd.,  et  dedans  les  fins 
el  limites  d'iccluy  prevoste,  a  avoir,  tenir,  joyr,  user,  posséder  et  exploic- 
ter  desd.  achapteurs,  leurs  successeurs  et  ayans  cause  d'eulx,  lesd.  choses 
a  eulx  ainsi  vendues,  comme  dit  est,  o  tout  droit  de  saisine,  de  posses- 
sion, de  propriété,  de  seigneurie  et  de  domaine,  avecques  tous  et  chacuos 
les  droiz,  noms,  raisons,  actions,  pétitions,  demandes  réelles  et  person- 
nelles, telles  comme  led.  seigneur,  vendeur  ou  non  que  dessus,  y  avoitel 
avoir  povoit  paravant  ccst  fait,  et  entendoit  a  y  avoir  ou  temps  anteriurs 
el  en  faire  doresenavent  toute  leur  plaine  voulente,  hault  et  bas,  par  nom 
et  tillredela  vcndiliondessud:  laquelle  vendition  a  este  et  est  faictc  pour 
le  pris  et  somme  de  dix  huit  cent  livres  lournoiz,  paiez  contant  eo  courl, 
en  nostre  présence  es  espèces  d'or  cy  après  declairees,  c*ebt  assavoir,  en 


CnnONOLOGlB   DB  L'HISTOIRB   de  SAlNT-TRtBlX-LA-PERGBE.  6i3 

escuz  au  soleil,  deux  cens  cinquante  six,  a  trente  cinq  sols  la  pièce»  val- 
lant  Iroys  cens  cinquante  cinq  livres  cinq  sols  tournoiz  ;  fleurons,  deux  cens 
cinquante  six,  vallans  seize  vingts  livres,  ducats  ;  cens  quarenle,  vallans 
deux  cens  quarente  cinq  livres  tournoiz  ;  salutz^  soixante  unzc,  vallans  cent 
vingt  quatre  livres  cinq  solz  tournoiz;  escuz  a  la  couronne,  soixante  quatre, 
vallans,  xxxnj  s.  uijàd.,  cent  six  livres  treize  sols  quatre  deniers  tournoiz  ; 
henricques,  soixante  cinq  et  demye,  a  quarente  cinq  solz  pièce,  vallans 
cent  quarante  sept  livres  sept  solz  six  deniers  tournoiz  ;  lyons,  quinze,  val* 
lans  trente  une  livres  dix  septsols  six  deniers  tournoiz;  ung  noble  de  Henry 
vallanl  soixante  dix  sol//,  fleurons  au  monde,  vingt  ung,  vallans  vingt-huit 
livres  dix  sept  solz  six  deniers  ;  reaulx  et  nobles  à  laroze,  quarente,  vallans 
cent  huit  livres,  carlins,  six  livres  unze  solz  ung  denier,  et  le  résidu  en  or  et 
monnoyes  de  diverses  espèces  qui  se  montent  en  somme  toute,  la  somme 
de  dix  huit  cent  livres  tournoiz  :  des  quelles  sommes  led.  seigneur  s*est 
tenu  et  tient  par  devant  nous  pour  content  et  bien  paie,  et  en  a  quicle  et 
quicte  lesd.  achapteurs,  leurs  successeurs  et  ayans  cause.  Et  par  lad.  ven. 
dition  faisant  a  este  dit  que  Mond.  seigneur  recompensera  Mesd.  seigneurs 
ses  enfifans,  et  des  a  présent  a  voulu  que  pour  recompense  ils  ayent  et  a 
eulx  demeure  a  jamais  perpétuellement  la  chastellenie,  terre  et  seigneurie 
de  Moneur  en  Perigourt;  pour  en  joyr  tout  ainsi  et  par  la  forme  et  manière 
qu*ilz  eussent  fait  de  sad.  prevoste  ;  et  aussi  a  voulu  et  promis  led.  seigneur 
d*Alebret  faire  avoir  pour  agréable  lad.  vendition,  et  icelle  faire  ratifier  et 
approuver  a  Mesd.  seigneurs  ses  enffans  et  a  leur  curateur,  ce  que  sur  ce 
leur  sera  baille,  et  décréter  et  auctqriser  lad.  vendiiion  par  auctoritc  de 
justice,  dedans  la  fesle  de  la  Penthecousle  prochainement  venant  ;  et  a 
ce  faire  et  accomplir  se  sont  obligez  expressément  cl  de  leur  bon  gre  Mes- 
sire  Antboine  de  Sallignac,  chevalier,  s*"  dud.  lieu  de  Sallignac,  Kegnaul  t 
de  Saint-Chamand,  s*^  de  Lissac,  et  Jacques  de  Livron,  s' de  Vart,  presens 
es  choses  dessus  dictes,  et  ung  chacun  d'eulx  seul  et  pour  le  tout,  à  la 
peine  de  mil  livres  tournoiz  à  applicquer  auxd.  doyen  et  chappitre  si  lad. 
paine  est  declairee  commise  par  deffauU  de  non  avoir  accomply  co  que 
dessus  est  dit.  Et  les  quelles  choses  ainsi  vendues,  comme  dit  est,  led. 
seigneur  vendeur  en  la  qualité  que  dessus,  tant  pour  lui  que  pour  ses 
hoirs  et  ayans  cause  de  luy,  a  promis  et  promccl  garcnlir,  sauver,  délivrer 
et  defifendre  auxd.  achapteurs,  leurs  successeurs  et  ayans  cause,  de  tous, 
vers  tous  et  contre  tous,  et  délivrer  de  tous  empeschemens  et  encombre- 
mens  quelzconques  a  tous  jours  mais,  perpétuellement,  quoy  qu*il  advien- 
gne,  nonobstant  droit,  us,  stille  et  coustumc  de  pays  a  ce  contraire  .... 

,  (formules  ordinaires). 

Ce  fut  fait  aud.  Tours  et  juge  a  tenir  par  le  jugement  de  lad.  court,  led. 
vendeur  présent  et  consentant,  et  promist  par  les  foy  et  serment  de  son 
corps,  pour  ce  corporellemenl  baillez  en  noz  mains,  de  non  jamais  faire  ne 
venir  encontre.  Et  scelle,  a  sa  requeslc  du  scel  royal  estably  et  dont  Ton 
use  aux  contratz  en  la  ville,  chastellcnie  et  ressort  de  Tours,  entesmoing  de 
vérité.  Donne  le  derrcnierjour  de  janvier,  l'an  mil  cccc  quatre  vingts  et  Iroys. 

Sous  le  repli  : 
Passe  par  nous.  Signé  :  BoiuAN-CaiERCflAYs. 


6U  SOCitTR  ARCBÉOLOGIQCB  ET  IIISTOHIQUE  DU  UU<IU1I>. 

El  celle  iiolc  écrite  poslMeuremcnl  : 

>  Cancpilc,  pour  ce  que  le  rachapt  de  ccalc  terre  ■  csle  Taït, 
appert  par  insIruTUCDl  pris  par  M"  Pierre  Conault,  notaire  de  S'-l 
ïij'de  janvier  iiij"iij.  » 

(Le  sceau  maD< 

{ArcA.  dép.  des  BasBes-Pyrénéee.  S'-Yrieix.  E,  801.) 


"  Lettres  royaux  obtenues  par  Messieurs  du  chappUre  [de  Sainct-Yri- 
eys\  concernant  le  bruslement  de  leurs  tUtrea  par  ceua:  de  ta  reli- 
gion B.  —  1583.  Copie  du  temps  sur  papier. 

Henry,  par  la  grâce  do  Dieu  roy  de  France  et  de  Pologne,  au  senécba 
de  LimousiD  juge  viguier  de  la  cour  royalle  du  commun  pariage  de  Saiael- 
Vrieys  ou  leurs  lieuteneus  ci  chacun  d'eux  sur  ce  premier  requis,  salni. 

Hos  bien  amez  les  doyens,  clianoiues  et  cliappjires  de  l'esgtiïi;  collegi»l1r 
du  dict  Saincl-Yrieys  nous  ont  faicl  remoustrer  (I)  que  le  camp  de  ceux  dr 
la  religion  prétendue  reformée,  coriduicl  par  le  feu  admirai  de  Cliastilboo. 
passa  au  mois  de  juin  1569  par  la  ville  el  lieux  circonvoi^îias  du  diti 
Sainci-Yriejs  (i)  et  v  séjourna  l'expace  (sic)  do  trois  sepmaine  ou  cnriroo: 
pendant  lequel  temps  (3)  les  dlcis  de  la  prciendue  religion  brûlèrent  ci 
démolirent  en  parlye  loultea  les  esglizes  de  la  dicte  ville  et  mcsmes  la 
grande,  en  laquelle  les  dicis  exposans  celebroienl  le  service  diviu,  toereni 
et  meurlrireni  inhumaiiiemenl  les  presbtres  et  autres,  prendrenl,  pillèrent, 
ravirent  et  cmporicrcnl  entièrement  tous  et  cliacuns  les  orncmens  royaui, 
argenteries  ei  autres  meubles  des  dicis  e^;lizcs  (4),  rompirent  cl  consom- 
merent  en  rcndres  les  lettres,  Chartres,  lillresi  documcns  el  cnseigaernen- 
de  leur  fondation  et  dmictz  pour  en  faire  pcr'lrc  la  mémoire  (5);s*Dbi 
prétexte  de  quoy  la  pluspart  des  subjetz,  cmpithcotes  [sic]  ei  rcpdevables 
aux  dicis  doyen,  chanoines  et  cliappitrc  font  a  présent  rcfuz  de  leur  payer 
los  cens,  renies  et  auirus  droitz  et  debvoir»  qu"ilz  leur  doibvcnt  (6),  el  ;ilr] 
leur  en  passer  lïUres    nouveaux    cl    recognoissanecs  sans    premic  renie  ai 

II)  La  chincclteric  ravale  ae  contente  d'cDrcgiatrer  1«  dcRlmUans  <te  la  pulie  inlcrcù. 
nm  llicmn  inolituer  une  enquête  roniradiulre.  Le  prii^i-i-vrrh.it  d<!  l'irreildlp  de'  làtiii'i:-- 


i-thbè  Rarbicr  de  Montaalt  (flu».  de  h  Soc.  hitlarigae  de  Brivt,  1«9!,  p.  9»!.  Il  es  p..«- 

'^'  demi".  Touten    n'ont  donc  pai  été  r.ri»  e>  lit-.-, 

e»  ici  reproduite,. 


CHRONOLOGIR   DE  L^HISTOIRB   DB  SAmT-TRIBIK  LA  PERCHE.  625 

leur  faire  apparoir  des  originaux  d'iceux»  scachant  bien  qu'ilz  oni  esté 
brusiés,  pillés  et  emportés,  ainsy  que  dlct  esc  :  les  privant  et  expoliani  par 
tel  moyen  di>  leurs  biens  temporels  dont  ilz  ont  tousjours  cy-devant  jouy 
plaineinent  et  paisiblement,  voire  de  temps  immémorial.  A  quoy  ayant 
esgard  les  dicts  exposans  nous  ont  très  humblement  requis  et  supplié 
leur  pourvoir. 

Nous,  à  ces  causes  désirant  leur  subvenir  en  cet  endroit,  vous  mandoni^ 
commettons  et  très  expressément  enjoignons  par  ces  présentes  que,  sy 
appcllées  ceux  qu'il  appartiendra,  vous  appert  sommairement,  par  infor- 
raation  ou  autrement,  deuhement  de  ce  que  dessus,  mesmes  des  brusle- 
mens,  emportz  et  perte  de  leurs  dicts  tiltres  des  dicts  cens,  rentes, 
droilz  et  debvoirs,  de  la  teneur  dMceux,  ensemble  de  leur  dicte  pos- 
session immemorialle  ou  de  tant  que  suflire  doibve,  vous  en  ce  cas, 
en  les  maintenant  de  par  nous  en  leur  dicte  possession  et  jouyssance, 
faicles  lesjouyr  etuzer  et  leurs  successeurs  au  dicte  chappilre,  plainemeiit 
et  paiziblemenl,  de  tous  et  chacuns  leurs  dicts  biens,  renies,  droictz  et 
debvoirs,  et  leur  en  payer  les  arrerrages  k  eux  deubz  tant  pour  le  passé 
que  dores  en  avant  à  Tadvenir,  ainsy  que  cy  devant  ilz  en  ont  tousjours 
bien  et  deubemenl  jouy  et  uzé,  nonobstant  que  pour  les  raisons  dessus 
dictes  ilz  ne  puissent  faire  apparoir  des  originaux  de  leurs  dicts  tiltres,  [ce] 
que  ne  leur  voulons  aucunement  nuire  ny  prejudicier,  ce  dont  en  tant  que 
besoing  seroit  les  relepvons  de  grâce  especial  par  les  dictes  présentes,  en 
contreignant  à  ce  faire,  souffrir  et  obeyr  tous  ceux  qu'il  appartiendra  ;  et 
pour  ce  seront  à  contraindre  mesmes  à  passer  aux  dicts  exposans  tiltres 
nouveaux  et  recognoissances  de  leurs  dicts  cens,  rentes,  droictz  et  debvoirs 
par  touttes  voyes  deuhes  et  raisonnables,  nonobstant  oppositions  ou  appel- 
lations quelconques,  pour  lesquelles  et  sans  préjudice  d'icelles  ne  voulons 
estre  différé.  Car  tel  est  nostre  pbnsir.  Nonobstant  aussy  queizconqucs 
lettres  à  ce  contraires,  de  ce  faire  vous  donnons  pouvoir,  mandons  et 
commandons  k  tous  nos  justiciers,  olQciers  et  subjeiz  que  à  vous  en  ce 
taisant  soit  obéy. 

iionné  à  Paris,  le  dixhuietieme  jour  de  mars.  Tan  de  grâce  mil  cinq  cens 
quatre  vingts  trois  et  de  nostre  règne  le  neufviesme. 

Signé  par  le  roy  en  son  conseil  :  Bielment  (?)  et  scellé  du  grand  sceau  en 
cire  jaune. 

{Fonds  Bosoieux,  L,  37,  des  Archioea  départementales  de  la  Haute- 
Vienne), 

Consultation  pour  le  chapitre  de  Saint-Yrielx,  contre  les  empiétements 

deséoêques  de  Limoges  [i739]. 

Si  M' TEvêque  de  Limoges  envoie  un  mandement  au  chapitre  de  Saint- 
Yrieixy  ou  qu'il  vienne  sans  mandement  pour  visiter  les  doyen,  chanoines  et 
chapitre  de  Sainl-Yrieix,  ils  auront  un  notaire  royal  assisté  de  témoins  pour 
dresser  procès-verbal  de  la  remontrance  qu'ils  feront  au  dit  seigneur 
évéque,  savoir  :  qu'ils  sont  membre  dépendant  du  chapitre  Saini-Manin  de 
Tours,  soumis  immédiatement  à  la  visite,  correction  et  jurisdiction  du  dit 


G26  SOCIÂTé   ARCHEOLOGIQUE   FT   HISTOBIQUE   DU   LIMOUSIN. 

chapitre,  privalivemenl  à  tous  autres  juges  ecclésiastiques,  qu'il  t  de  loos 
temps  exercée  sur  eux,  et  qu'ainsi,  jouissant  depuis  un  temps  îmméoiona.' 
de  Texemption  de  la  juridiction  ordinaire,  ils  supplient  très  humblemeLi 
ledit  seigneur  évéque  de  ne  vouloir  rien  innover.  Et  en  cas  qu'au  préjodic^ 
de  ladite  remontrance,  ledit  seigueur  evêque  voulût  passer  oufre,  ils  lei 
déclarent  quMls  prennent  sa  procédure  pour  trouble  à  la  possession  immé- 
moriale en  laquelle  ils  sont  d*étre  visités  par  les  députés  dndit  chapitre  de 
Saint-Martin  de  Tourss,  formant  complainte  et  demandant  d*éire  maintenas 
et  gardés  dans  la  possession  immémoriale  qu'ils  ont  d*6tre  visités  et  corrigés. 
tant  en  corps  qu'en  particulier  par  les  députés  et  officiers  dudit  chapitre  de 
Saint-Martin  de  Tour,  d*étre  exempts  de  la  juridiction  dudit  seigneur  evêqae 
et  soumis  immédiatement  a  celle  du  chapitre  de  Saint-Martin  de  Tours, 
protestant  de  nullité  de  toutes  les  procédures  que  ledit  seigneur  evéqee 
pourrait  faire  au  préjudice  de  ladite  complainte,  sur  laquelle  il  est  prealabW 
à  toute  chose  que  le  juge  royal  statue  avant  que  ledit  seigneur  evèqoe 
puisse  passer  outre,  en  conséquence  lui  déclarent  qu'ils  se  retirent  poar 
ne  pas  nuire  à  leur  possession  immémoriale,  dont  ils  donneront  avis  as 
chapitre  de  Saint-Martin  de  Tours,  leur  supérieur. 

Délibéré  par  M.  Noubt, 
avocat  au  parlement  de  Paris^ 

{Fonda  Bosoieux^  L,  38,  des  Archives  déparUmentales  de  la  Hctute- 

Vienne). 


Extrait  du  Registre  des  délibérations  du  chapitre  royal  et  collégial  de 
Saint 'Yrieix,  au  diocèse  de  Limoges,  1790, 

'    Au  chapitre  extraordinaire  tenu  au  son  de  la  cloche  capUulaire  el  en  U 
manière  accoutumée,  auquel  ont  assisté  MM.  Pierre  de  Lamorelie  dePui- 
redon,  doyen  :  Jean -Baptiste  Valette,  chantre;  Jean- Baptiste  Bonhomme  de 
Forestier,  François  Beaure,  Jean-Baptiste  Paignon,  Pierre  Mazard,  Jean- 
Françols  de  la  Morelie,  Joseph  Paignon  de  Chantegraud,  syndic  ;  Antoine- 
Alexis  Labroûhe  de  Laborderie,  Pierre-Yricix  I^brouhe  de  la  Gondamioe, 
Pierre  Pichon,  Elie  Abriat  de  La  Forest,  théologal  ;  Jean  de  Sanzillon,  cbt- 
noiue  capitulans  de  Téglise  royale  et  collégiale  de  Saint-Yrieix,  men>bre  de 
Tinsigne  église  de  Saint-Martin  de  Tours,  les  dits  sieurs  capitulans  ins- 
truis que  très  prochainements  on  leur  signiffîcra  le  décret  portant  suppres- 
sion de  leur  chapitre,  et  qu'on  procédera  à  l'apposition  des  scellés  sar 
leurs  trésor,  archives,  effets  et  mobillier,  considérans  que  quelques  boas 
citoyens  qu'ils  veuillent  être,  ils  ne  poevent  se  dissimuler  rincompétance 
de  l'Assemblée  nationale  sur  la  hiérarchie  en  la  jurisdiction  ecclésiastiques. 
Leur  état,  leur  devoir,  leurs  obligations  ne  reconnurent  jamais   d*aatre 
source  que  dans  la  puissance  spirituelle,  ils  ne  chercheront  jamais  à  favo- 
riser ou  fomenter  les  murmures  d'un  peuple  religieux  qui  gémit  déjà  de 
la  cessation  très  prochaine  du  culte  public.  Suivaos  le  conseil  de  Tapétre 
Qbeditc  prœpositis  vestris,  ils  lui  prêcheront  toujours  robéissance  i  l^ 


CHRONOLOGIE   DE  l'BISTOIRE   DE  SAINT-YRIBIX-LA-.PERCÎIE.  627 

puissance  civile  ;  mais  dans  ce  mommenl  leurs  consciences  les  obligent  à 
déclarer  el  ^  consigner  sur  leur  registre  le  témoignage  de  leur  fidélité  et  de 
leur  attachement  à  la  religion  catholique  et  à  son  église  ;  que  ce  n'est  qu*en 
cédant  à  la  force  et  à  Tempire  des  circonstances  qu'ils  vont  interrompre 
leurs  ofHces  publics,  s'opposans  à  toute  innovation  dans  Tordre  et  puis- 
sance ecclésiastiques,  jusques  a  ce  qu*un  concile  légalement  et  librement 
convoqué  et  délibérant»  où  le  souverain  ponAfe,  seul  chef  de  l'église,  et  les 
évéqùes  du  royaume,  seuls  leurs  supérieurs  de  droit  de  divin,  ayent  con- 
courru  auxchangemens  des  ordres  de  Téglise  de  France,  de  quelque  nature 
qu'ils  puissent  ^tre,  el  notamment  du  chapitre  dont  ils  sont  membres,  et 
établi  dans  la  ville  de  Saint-Yrieix,  depuis  douze  siècles  près,  déclarent 
protester,  comme  ils  protestent  par  ces  présentes,  contre  le  décret  de 
TAssemblée  nationale  du  43  juillet  1790  portant,  sans  compétence,  sup- 
pression de  tous  les  chapitres  du  royaume,  et  lui  attribuant  la  puissance 
spirituele. 

Les  S»  capitulans  ont  arrêté  que  coppie  de  leur  présente  délibération 
serai  délivrée  à  MM.  les  commissaires  chargés  de  Texéculion  du  susd. 
décret,  qu'ils  seront  priés  de  Tinsérer  dans  leur  procès-verbal  et  de  donner 
acte  auxd.  sieurs  capitulans  de  la  remise  de  ladite  coppie.  Délibéré  et 
arrêté  dans  la  sale  capitulaire  du  chapitre  de  Saint-Yrieix,  le  23  novombre 
1790.  Et  ont  signé  lesd.  sieurs  capitulans,  exceptés  MM.  Valette,  chantre, 
et  Beaure,  chanoine.  Ainsi  signé  : 

L'abbé  de  Puiredon,  doyen;  Forestier,  Paignon,  Mazard,  L.  de  Lamo- 
relie,  Paignon  de  Ghantegraud,  l^broûbe  de  Laborderie,  Labrouhe  de  La 
Gondamine,  Laforest,  théologal;  Pichoo,  Sanzillon. 

Certifié  conforme  à  l'original. 

Paignon  de  Ghantegraud,  chao'-syndic. 

Contrôlé  à  Saint-Yrioix,  le  9  décembre  4790. 
Reçu  quinze  sous. 

Jeantin. 


Aujourd'hui,  oeufvième  du  mois  de  décembre  mil  sept  cent  quatre-vingt- 
dix,  après  midy,  en  la x ville  de  Saint-Yricix,  en  Limousin,  étude  cl  par- 
devant  le  notaire  royal  soussigné,  en  présence  des  témoins  cy-après  nom- 
més, a  comparu  M.  Joseph  Paignon  de  Ghantegraud,  prêtre,  chanoine  sindic 
du  cbappitre  de  cette  ville  et  y  habitant,  lequel  nousadil  et  exposé  que  les 
scellés  ayant  été  ce  matin,  et  en  vertu  des  décrets  de  l'Assemblée  nationale, 
apposés  sur  les  portes  du  chœur,  sacristie,  trésor  et  archives  dud.  chap- 
pitre,parMM.  du  Directoire  du  district  de  lad.  ville,  il  se  seroit  présenté 
en  compaigoie  des  autres  chanoines  et  doyen,  et  auroit  déclaré  h  MM.  du 
Directoire  que  luy  et  sesd.  confrères  protestoient  contre  le  décret  de 
l'Assemblée  nationale  du  12  juillet  dernier,  et  auroit  prié  lesd.  sieurs  de 
recevoir  coppie  de  leur  protestation,  de  l'insérer  dans  leur  procès-verbail 
et  de  luy  donner  acte,  ainsi  qu*à  ses  confrères,  de  la  remise  qu'ils  en 


6î8  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  KT  RI)$T0R10UC  DU  LlVOUSflC. 

faisoient.  MM.  du  Directoire  s'étant  reffasés  à  leur  demande,  le  dil  sinir 
PaigDon  de  Chantegraud,  en  sa  susd.  qualité  de  syndic,  nous  a  présnt^ 
lad.  coppie,  et  nous  a  requis  de  la  recevoir  en  dépôt,  pour  être  inserrrf 
au  nombre  de  nos  minuttes  :  ce  que  nous  luy  avons  accordé. En  consequesop 
nous  a  tout  presenlement  remis  et  déposé  en  nos  mains  la  snsd.  coppîe, 
que  nous  avons  tû  écrille  sur  une  grande  feuille  de  papier  commuo,  es 
daite  du  23  tiovembre  dernier,  centrée  conformée  à  son  original  par  ïeé. 
sieur  Paignon,  et  controllée  ce  jourd*huy  au  bureau  de  cette  TÎlle  par 
Jeantin,  commençaut  par  ces  mots  :  «  Extrait  da  Registre  des  délitiéretioo? 
du  chappiire  royal  cl  collégial  de  Saint-Yrieix  etc.  »,  et  finissant  par  cenx-cy  : 
«  Labrouhe  de  La  Gondamine,  Latbrest,  théologal  ;  Pichon,  Sanzillioo,  >  la 
susd.  coppie  contenant  un  rolle  d'écriture,  et  sans  aucune  trassure,  inter- 
ligne ny  ranvois.  De  laquelle  susd.  remise  et  dépôt  led.  sieur  Paignon 
de  Ghanlegraud  en  sa  susd.  qualité,  nous  a  requis  acte  que  luy  a^ons  non- 
cédé  sous  scel  royal,  pour  d'icelle  coppie  et  présent  acte  de  dépôt  lay  eo 
être  délivré  expédition  et  aux  parties  y  ayant  intérêt.  Fait  et  passé  en  pré- 
sence du  s'  Jean  Lapayre,  surnuméraire  des  Domaines  du  Roy  au  Bareao 
de  Saint-Yrieix,  et  du  s'  Nicolas  Jarry  de  La  Forge-Basse,  pralicse», 
témoius  à  ce  requis,  habiians  de  la  présent  ville,  qui  ont  signé  avec  led. 
s^  Paignon  de  ChantegrauH,  sindic,  et  nous. 

Paignon  de  Chantegrauo,  chan-siodic 

Lapkyrb,  Jarrit  dk  Forokbassb, 

GoNDiNET,  n'»  royal, 

Contrôlé  à  Saint-Yrieix,  le  18  décembre  1790.  Reçu  quince  sols,  compris 

les  dix  sous  p.  G  l. 

JEANTin. 

(Fonds  BoRoieux,  L.  38,  des  A rchioes départementales  delà  Haute-Vienne], 


CBROXOLOCÏK  DB'l'hISTOIRK    DR   SAINT-YRIBIX-LA-PERCBK.  629 


III 


CHRONOLOGIE 


Epoque  romaine.  —  Sur  la  carte  du  Pagus  Lemovtctnus  de  M.  Max. 

Deloche,  Attannm,  nom  primitif  de  la  localité,  figure  déjà 

dans  la  vicairie  de  Cher\ax. 
o64.  —  Fondation  d'un  monastère  à  Altanum  par  saint  Yrieix 

(t  591).  Ce  monastère  fut  par  lui  placé  sous  le  patronage 

de  Saint-Martin  de  Tours.  —  Grégoire  de  Tours,  Histoire 

ecclés.  liv.  X. 

7o3.  —  Don  de  Moutier-Rauseille  fait  par  Carissime  à  saint  Yrieix 
et  à  son  monastère.  —  Gallia  christ,  nova,  II.  inst.  177. 
(Charte  fausse,  avec  ce  titre  :  Additamentum  ad  instru- 
mentum  pro  Attanensi  monasterio  quod  edidit  Quercetanus 
in  notis  ad  hibliothecam  Cluniacensem.  Cf.  Labbe,  Alliance 
chronol.  IL  p.  405). 

794  (?).  —  Diplôme  de  Chariemagne  en  faveur  du  monastère  de 
Saint-Yrieix  (faux).  —  GalL  christ,  nova,  II,  inst.  178, 
sous  la  date  circa  800.  Cf.  ci-dessus,  p.  583. 

854.  —  Diplôme  pour  Saint-Martin  de  Tours  dans  lequel  le  monas- 
"  tère  de  Saint-Yrieix  est  nommé  comme  membre  dépen- 
dant. —  Historiens  de  France,  VIII.  537. 

Vers  1090.  —  Erection  du  monastère  en  collégiale.  La  date  est  peu 
certaine.  Elle  se  déduit  pour  nous  de  ce  fait  que,  aux 
environs  de  1090,  le  successeur  d^un  abbé  décédé  prit  le 
litre  de  doyen  (Bosvieux,  Inventaire,  L.  37).  Une  tradi- 
tion attribuait  cette  sécularisation  à  Pépin-le-Bref,  763, 
et  ajoutait  qu'elle  avait  été  confirmée  par  Chariemagne 
en  794.  (Mousnyer,  Histoire  de  Saint-Martin  de  Tours,  Cf. 
la  charte  fausse  de  794,  mentionnée  ci-dessus).  AUou 
donne  la  date  «  vers  1100  »,  dans  sa  Descript.  des  monu- 
ments de  la  Haute-Vienne,  p.  351. 

Vers  1147.  —  Mandement  de  l'archevêque  de  Bourges  au  doyen  du 
chapitre  de  Saint-Yrieix  pour  lui  enjoindre  de  réparer 
vis-à-vis  de  Tabbé  de  Solignac  le  tort  qu'il  a  causé  à  ce 
dernier  en  dépouillant  l'église  d'Ayen  et  en  Toccupant  de 

T     XL.  ^g 


ftdO  SOGlEtK  AaCa&OLO0tQU<  BT  BlSTORlQUB  DO   LlltOUStlI. 

vive  force.  —  A.  Leroux^  Chartes,  Chroniques  et  Mémo- 
riaux pour  servir  à  l'histoire  de  la  Marche  et  du  Limaum. 
p.  31. 

Vers  1147.  —  Requête  de  Tabbé  de  Solignac  à  Tarchevéque  de 
de  Bourges  contre  le  doyen  de  Saint-Yrieix  qui  aui: 
emprisonné  les  marchands  de  Tabbaye.  —  Ibid.j  p.  33. 

Vers  1147.  — Mandement  de  Tarchevêque  de  Bourges  à  réTéqi^ 
de  Limoges  pour  Tin viter...  à  obtenir  satisfactioa  du  doyes 
de  Saint-Yrieix.  —  Ibid.,  p.  33. 

Vers  1147.  —  Mandement  de  l'évoque  de  Limoges  au  doyen  d- 
Saint-Yrieix  pour  lui  enjoindre,  sous  peine  d'excommaai- 
cation,  de  restituer  l'église  d'Ayen  à  l'abbaye  de  Soligny 
et  de  réparer  tous  les  dommages  qu'il  a  causés  à  cell^ 
ci.  —  Ibid.,  p.  34. 

Vers  1147.  — Mandement  de  l'évêque  de  Limoges  au  clergé  de  li 
vicomte  pour  l'informer  de  l'excommunication  portée  coq* 
tre  le  doyen  de  Saint-Yrieix  qui  avait  dévasté  l'égii^ 
d'Ayen.  —  Ibid.,  p.  35. 

Vers  1147.  —  Mandement  de  l'archevêque  de  Bourges  à  Tévégiie 
de  Limoges  pour  lui  enjoindre  de  faire  exécuter  la  sen- 
tence portée  contre  le  doyen  de  Saint-Yrieix  coupable  d^ 
nouvelles  violences.  —  Jfttd.,  p.  36. 

Vers  1147.  —  Requête  de  l'abbé  de  Solignac  à  l'archevêque  i^ 
Bourges  contre  le  doyen  de  Saint-Yrieix  qui  avait  renou- 
velé ses  violences  avec  l'appui  secret  de  l'évêque  de  Limo- 
ges. —  Ibid,^  p.  37. 

Vers  1147,  —  Mandement  de  l'archevêque  de  Bourges  au  doyen  du 
chapitre  de  Saint-Yrieix  pour  lui  enjoindre  de  réparer 
vis-à-vis  de  l'abbé  de  Solignac  le  tort  qu'il  a  causé  à  ce 
dernier  en  dépouillant  l'église  d'Ayen  et  en  l'occupanl  de 

vive  force.  —  Ibid.,  p.  45. 

1174.  —  Accepit  Bemardus  fvicecomes]  ab  Ademaro  {vîcecomile- 
Lemovicarum]  castnim  Sti  Aredii  pro  castro  Geloneasi 
(Salons). —  Geoffroi  de  Vigbois,  Chronique  dans  Bisif^ 
riens  de  France,  XII,  444. 

1178.  —  Kal.  septembris  détecta  est  apud  S.  Aredium  Sebrandi 
electio.  Idcirco  expulsi  sunt  canonici  a  propria  domo: 
extranea  facta  est  mater  a  filiis,  ac  per  annum  ac  nieDse> 
novem  omni  caruit  mysterio  divine.  —  Geoffroi  de  Vi- 
GEOis,  Chronique  dans  Historie^is  de  France^  XII,  446. 

1181,  mai.  —  Translation  des  reliques  de  saint  Yrieix  par  Sébrand 
Chabot,  évêque  de  Limoges.  —  Geoffroi  de  Vigeois,  Ort- 
nique,  ibid,,  XII,  448. 


GttROrtOLOGifc  DK   L*BI8tOIRB    DE  gAlNt-YRIËIX-LA-PBRCâB.  63 1 

Mai  1184  —  août  1183.  —  Constniction,  en  vingt-sept  mois,  du 
chœur,  du  transept  et  d'une  partie  de  la  nef  du  moûtier 
de  Saint-Yrieix. 

il 82.  — Henricus  rex  Angliœ...  apud  S.  Aredium  abiens  commo- 
ratus  est  ibi  (c'est-à-dire  à  Saint-Yrieix),  per  dies  aliquot: 
vitam  sancii  Âredii  honeste  suscipiens  totam  ipse  perlegit 
ac  veneratus  est  ;  et  relicta  ibi  munitione  congrua,  per- 
rexil  apud  Petram  Bufferiam.  —  Geoffroi  de  Vigeois, 
Chronique  dans  Historiens  de  France,  XVIII,  212. 

\  182  ou  1183.  —  Gérald,  prieur  d'Altavaux,  demande  au  monastère 
de  Saint-Yrieix  les  reliques  des  saints  Pierre  et  Paul,  du 
pape  Sixte,  des  saints  Laurent,  Nicolas,  Yrieix,  Léonard 
et  du  prophète  Amas.  —  A.  Leroux,  Doc.  hist.  sur  la 
Marche  et  le  limousin^  I,  p.  85. 

1182  ou  1183.  — Arnaud  de  Clermont,  prieur  d'Altavaux,  meurt  à 
Saint-Yrieix.  —  A.  Leroux,  Doc,  hist..  1,  84. 

1185. — Innovatio  antiquœ  instilutionis  inter  canonicos  ecclesiœ 
beati  Martini  Turonensis  et  canonicos  beati  Aredii.  — 
Mousnyer,  ci-dessus,  p.  588.  Cf.  Table  chronolog.  des 
diplômes,  IV,  75. 

1221.  —Le chapitre  de  Saint-Martin  de  Tours  autorise  le  doyen 
du  chapitre  de  Saint-Yrieix  à  porter  la  crosse.  —  Mous- 
nyer, ci-dessus  p.  591. 

1226.  —  Guido  de  Glausello  successit  in  episcopatu  memorato  do- 
mino Bernardo...  Erat  autem  decanus  Sancti  Aredii  et 
archidiaconus  in  ecclesia  Lemovicensi.  —  Bernard  Gui, 
Nomina  episcop.  dans  Historiens  de  France,  XXI,  754. 

Vers  1227.  —  Lettre  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  à  Hugues  de  Lusi- 
gnan,  comte  de  la  Marche,  pour  lui  demander  d*épargner 
à  leur  ville  les  horreurs  de  la  guerre.  —  Mousnyer,  ci- 
dessus,  p.  591. 

Vers  1243.  —  Construction  de  la  tour  du  Plot,  qui  faisait  partie 
des  fortifications  de  la  ville. — Mousnyer,  ci-dessus,  p.  592. 

1247,  5  sept.  —  Sentence  arbitrale  rendue  par  le  prieur  du  Cha- 
lard  et  un  chanoine  de  Saint-Yrieix  sur  les  contestations 
qui  s'étaient  élevées  entre  le  vicomte  de  Limoges  et  le 
doyen  de  Saint-Yrieix  au  sujet  de  leurs  droits  seigneu- 
riaux. —  Raymond,  Invent,  des  arch.  des  Basses  Pyrénées^ 
E,  855. 

1256, 14  déc.  —  Hommage  rendu  par  le  vicomte  de  Limoges  Gui 
VI  au  doyen  du  chapitre  de  Saint-Yrieix.  —  Bosvieux, 
Inventaire  du  fonds  par  lui  légué  aux  archives  de  la  Haute- 
Vienne,  L,  37. 


632  SOCIÉTÉ    ARCHÉOLOGIQUE   BT   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIN. 

1260,  24  déc.  —  Altestatioa  donnée  par  le  vicomle  de  Limoges 
Gui  VI  au  doyen  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  pour  recon- 
naître que  celui-ci,  en  fournissant  des  hommes  d'anne>, 
n'avait  fait  qu'un  acte  gracieux.  —  Bosvieux,  Inventaire. 
L.  37. 

1265.  —  Enquête  faite  sur  l'ordre  du  roi  par  Henri  de  Courance> 
^de  CrosanciisJ^  sénécha\  de  Périgord,  pour  savoir  qui 
a  placé  Tétendard  royal  sur  le  monastère  de  Saint-Yrieii 
et  qui  Ten  a  arraché.  L'enquête  prouve  que  ce  sont  le? 
gens  du  roi  qui  ont  agi  dans  le  premier  cas,  et  ceux  de  la 
vicomtesse  de  Limoges  dans  le  second.  —  Olim,  édit. 
Beugnot,  I,  p.  217. 

1268-69.  —  Plaintes  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  au  roi  de  Franc*» 
contre  les  injures  que  lui  faisait  subir  la  >1comlesse  de 
Limoges.  Le  chapitre  demande  un  sergent  royal  pour  sa 
défense.  Ce  sergent  fut  accorde  et  maintenu  malgré  une 
réclamation  de  la  vicomtesse.  ~  OKm,  édit.  Beugnot,  1,745. 

1269. —  Sentence  du  conseil  du  roi  ordonnant  au  sénéchal  de 
Périgord  de  contraindre  la  vicomtesse  de  Limoges  à 
remettre  au  chapitre  de  Saint-Yrieix  les  chaînes  et  autres 
objets  qu'elle  leur  doit.  —  Olim^  édit.  Beugnot,  I,  781. 

1271.  — Homines  et  burgenses  Sancti  Aredii  irruerunl  in  domum 
decani,  et  très  domicellos,  qui  minati  fuerant  quemdam 
canonicum  qui  fovebat  partem  illorum,  ceperunt  :  unde 
multa  mala  passi  sunt.  —  Pierre  Goral,  Chronique  dans 
Historiens  de  France,  XXI,  777. 

1276.  —  Arbitrage  prononcé  à  Saint  Yrieix  entre  les  consuls  ilt» 
Limoges  et  le  vicomte.  —  Pierre  Goral,  Chronique  déjà 
citée,  XXI,  p.  786. 

1276,  4  octobre,  Vincennes.  —  Sauvegarde  accordée  par  le  roi  de 
France  Philippe  III  au  chapitre  de  Saint-Yrieix.  —  Or- 
donnances des  rois  de  France,  VI,  242. 

1279,  24  fév.  —  Hommage  rendu  par  Arlur,  vicomte  de  limoges, 
au  doyen  du  chapitre  de  Saint-Yrieix.  —  Bosvieux,  Inren- 
taire,  L.  37. 

1282.  —  Sauvegarde  accordée  au  chapitre  de  Saint-Yrieix  par  le 
roi  de  France  Philippe  III  et  confirmée  par  Philippe  le 
Bel  en  1290.  — Mousnïer,  Hist.  de  Saint-Martin  de  Tours, 
ci-dessus,  p.  592. 

1298,  28  sept.  —  Commission  royale  donnée  à  Jean  d*Ancey  et 
Raoul  de  Bruillac  pour  régler  les  différends  survenus 
entre  le  vicomte  de  Limoges  et  le  chapitre  de  Saint- 
Yrieix.  —  Raymond,  Invent,  des  arc  A.  des  Basses-Pyré- 
nées, E,  855. 


CHRONOLOGIE  DE   L*HlSTOiRE  DE   SAINT- YRIKIX-LA- PERCHE.  G33 

XIIP  S.  —  Querelles  entre  le  doyen  de  Saint-Yrieix  et  le  vicomte 

de  Limoges  au  sujet  de  la  délimitation  de  leurs  droits.  — 

Olirn^  édit.  Beugnot,  I,  passim. 
1302,  31  mars.  —  Conventions  entre  le  chapitre  de  Saint-Yrieix 

et  le  vicomte  de  Limoges.  —  Raymond,  Invent,  des  arch. 

des  Basses-Pyrénées,  E.  855. 
1302,  Sjuillet.  — Hommage  rendu  par  Jean  de  Bretagne,  vicomte 

de  Limoges,  au  doyen  du  chapitre  de  Saint-Yrieix.  — 

BosviEux,  Inventaire,  L.  37. 

1307,  août.  —  Pariage  conclu  entre  le  roi  de  France  et  le  chapitre 

de  Saint-Yrieix  pour  la  justice  du  lieu.  —  Original  aux  Ar- 
chives nationales,  J.  398,  n*  28.  Cf.  les  Ordonnances  des 
rois  de  France,  VI,  238;  l'analyse  que  donne  Bonaventure 
de  Saint-Amable,  Annales,  p.  608,  et  Mounyer,  ci-dessus, 
p.  593. 

1308.  —  «  Le  doyen  des  chanoines  fait  saisir  sur  les  vicomtes  de 

Limoges  les  châteaux  de  Saint-Yrieix,  La  Roche-F Abeille 
et  Ségur,  pour  défaut  d'hommage  ».  —  Cl.  Simon.  La 
vicomte  de  Limoges ,  p .  1 42 . 
1308-1310.  —  Actes  royaux  subséquents  de  l'acte  de  pariage.  — 
Raymond,  lurent,  des  arch.  des  Basses-Pyrénées,  E.  856. 

1313,  20  août.  —  Le  pape  Clément  V  nomme  Roger  des  Ternes  au 

doyenné  de  Saint-Yrieix,  vacant  par  la  promotion  de 
Hugues  à  révéché  de  Cahors.  —  A.  Thomas,  dans  Bull,  de 
la  Soc.  arch.  du  Limousin,  XXX,  p.  53.  Cf.  p.  54. 

1314,  20  fév.  —  Arrôt  du  parlement  relatif  à  un  procès  entre  le 

vicomte  de  Limoges  et  le  chapitre  de  Saint-Yrieix.  —  Bos- 

viEux,  Inventaire,  L.  43. 
1316.  —  Violences  commises  aux  foires  de  Saint-Yrieix  par  les  gens 

du  vicomte  de  Limoges.  Les  coupables  poursuivis  furent  au 

nombre  d'environ  quatre  cents.  —  Raymond,  Invent,  des 

arch.  des  Basses-Pyrénées,  E.  856. 
1316,  11  déc.  — Sentence  du  bailli  de  Limoges  rendue  entre  le 

vicomte  de  Limoges  et  le  chapitre  de  Saint-Yrieix  à  propos 

des  violences  commises  par  les  gens  du  vicomte,  pendant 

la  foire  du  25  juillet.  —  Ibid.,  E.  856. 
1317-1323.  —  Violences  exercées  par  le  vicomte  de  Limoges  contre 

les  chanoines  de  Saint-Yrieix,   dans  un  différend  mû  à 

l'occasion  de  la  juridiction. — Archives  nat.,  Actes  du 

Parlement,  II,  n"'  5015,  5037,  6160,  6683,  7154  et  7339. 
1319,  15  juin.  —  Charte  de  Jean  de  Bretagne,  vicomte  de  Limoges, 

autorisant  le  chapitre  de  Saint-Yrieix  à  faire  rebâtir  la 
'     tour  de  la  maison  contiguë  aux  bâtiments  du  doyenné.  — 

Raymond,  Invent,  des  arch.  des  Basses-Pyrénées ^l£i.  856. 


634  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HL^TORIOOE  DU  LmODSIN. 

1324,  16  dëc.  —  OrdoDaance  royale  obligeant  le  chapitre  de  Saint- 
Yrieix  à  réparer  les  dommages  commis  par  lui  au  préja- 
dice  du  vicomte  de  Limoges.  —  Ibid,  E.  856. 

1334.  —  Requête  présentée  au  roi  par  le  chapitre  de  Sainl-Yrieix 
contre  le  vicomte  Limoges  et  réponse  de  celui-ci,  article 
par  article.  —  Ibid,,  E.  860. 

1334.  —  Violences  commises  aux  foires  de  Saint-Yrieix  par  les  gens 
du  vicomte  de  Limoges.  Les  coupables  poursuivis  furent 
au  nombre  d  une  centaine  environ.  —  /Wd.,  E,  856. 

Vers  1334.  —  Plaintes  du  vicomte  de  Limoges  au  roi  contre  le  cha- 
pitre de  Saint-Yrieix.  —  Ibid. y  E.  856. 

1370.  —  Prise  de  Saint-Yrieix  par  Duguesclin  au  nom  du  roi  de 
France.  —  Froissart,  Chroniques,  à  la  date. 

1376, 4  oct.  Vincennes.  —  Charles  V  accorde  des  lettres  de  sauve- 
garde au  chapitre  de  Saint-Yrieix.  —  Bull,  de  la  Sac. 
arch.  du  Limotmn^  Vil,  178. 

1376  (n.  st.  1377).  —  Lettres  royaux  confirmant  le  don  que  le  cha- 
pitre de  Saint-Yrieix  a  fait  au  roi  de  la  moitié  de  la  justice 
sur  la  dite  ville.  —  Bosvieux,  Inventaire,  L.  44.  Voy. 
ci-dessous  à  Tannée  1461. 

Vers  1423.  —  Bulle  du  pape  Martin  V  réduisant  à  douze  le  nombre 
des  chanoines  de  Saint-Yrieix.  —  Mousityer»  ci-dessus, 
p.  597. 

Fév.  1430  (n.  st.  1431).  —  Lettres  de  Charles  VII  confirmant  le 
partage  de  1307.  Voy.  ci  dessous  à  Tannée  1461. 

Juillet  1445.  — Rédaction  des  statuts  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  par 
les  déléguésduchapilrede  Saint-Martin  de  Tours,  en  vingt- 
six  articles.  —  Ces  statuts  sont  publiées  dans  A..  Leroux, 
Doc.  hist,,  I,  276-286. 
De  nouveaux  statuts  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  furent  rédigés 
en  1490,  1494,  1500,  1511,  1527,  1538,  1610.  —  Ibid,  I, 
285,  note. 

1461,  déc.  —  Accord  entre  le  roi  et  le  chapitre  de  Saint-Yrieix 
relativement  à  Texercice  de  la  justice.  —  Ordonnances. 
XV,  p.  290. 
Le  roi  confirme  les  lettres  de  ses  prédécesseurs,  Charles  Vil 
(fév.  1430/31)  et  Charles  V  (octobre  1376),  qui  confirmaient 
elles-mêmes  les  patentes  de  Philippe-le-Bel,  d'août  1307, 
relatives  au  pariage. 

1475.  —  Saint-Yrieix  octroyé  60  11.  à  Alain  d'Albret,  vicomte  de 
Limoges,  à  Toccasion  du  mariage  de  Jeanne  de  Bretagne, 
sœur  puinée  de  la  vicomtesse,  sa  femme.  —  Cl.  Simo^,  La 
vicomte  de  Limoges,  p.  40. 


CHRONOLOGIE  DB  L'hISTOIRS  DR  SAINT-YRIEIX-LA-PBRCHE.  635 

1479, 6  sept.  —  Acte  par  lequel  Alain  d'Albret,  vicomte  de  Limoges, 
reconnaît  devoir  foi  et  hommage  au  chapitre  de  Saint- 
Yrieix  à  cause  de  la  châtellènie  de  La  Roche-F Abeille.  — 
BosviEux,  Inventaire,  L.  33, 

1483  janv.  (n.  st.  1484).  —  Vente  de  la  prévôté  de  Saînl-Yrieix  faite 
au  chapitre  du  lieu  par  Alain  d^Albret,  vicomte  de  Limoges, 
pour  la  somme  de  1800  IL  Elle  fut  rachetée  par  lui  en 
janv.  1492  (1493).  —  Raymond,  Invent,  des  arch.  des 
Basses-Pyrénées,  E.  861.  Cf.  ci-dessus,  p.  622. 

XV»  siècle.  —  Droits  féodaux  perçus  à  Saint-Yrieix.  —  Cl.  Simon,  La 
vicomte  de  Limoges,  p.  66  à  68. 

1ÎM)6  (?)  —  Vente  de  la  prévoté  de  Saint-Yrieix,  consentie  par 
Jean  II,  sire  d'Albret,  à  Yrieix  Gentilz.  —  BulL  de  la  Soc, 
arch,  du  Limousin,  I,  124. 

1534, 24  août.  —  Transaction  entre  le  syndic  des  habitants  de  Saint- 
Yrieix  et  le  chapitre.  (Voy.  l'art,  suivant). 

1537  mars  (n.  st.  1538).  —  Ratification  par  les  habitants  de  Saint- 
Yrieix  d'une  transaction  intervenue  entre  leur  syndic  et  les 
chanoines  du  chapitre,  le  24  août  1534,  ayant  pour  but  de 
mettre  fin  à  plusieurs  procès  en  instance  au  parlement  de 
Bordeaux  et  à  la  cour  du  commun  pariage  de  Saint-Yrieix. 
—  BosviEux,  Inventaire,  L.  34. 

1561,  25  janv.  —  «  Ceulx  de  la  religion  nouvelle  fisrent  la  cène  à  la 

forme  de  Genesve  en  la  présente  ville  [de  S.-Y.];  et  fut 
faicte  en  la  maison  qu'on  appelle  communément  Gyvonnie, 
appartenant  à  Messire  Paul  Gentilz,  viguier  de  la  dicte 
ville,  où  assistèrent,  comme  je  fus  adverly,  trois  ministres. 
Et  le  dict  jour  mesrae,  après  ycelle  faicte,  fust  repceu 
ministre  Yrieiz  Gentilz,  lequel  avoit  esté  chanoine  en 
réglise  de  la  dicte  ville,  curé  de  Saint-Sulpyce  et  de  Saint- 
Guillaume  »>.  —  Journal  de  Pierre  de  Jarrige^  édit.  Mon- 
tégut,  p.  4. 

1562.  —  «  Nota  que  le  12  d'aoust,  ceulx  de  la  religion  nouvelle  fis- 

rent la  cène  en  la  dicte  ville  [de  S.-Y.),  en  la  maison  aupa- 
ravant faicte,  et  feust  administrée  par  Messire  Yrieix 
Gentilz,  ministre  de  la  dicte  religion.  »  —  Ibid,,  p.  6. 

1663-1564.  —  La  peste  sévit  à  Saint-Yrieix  où  il  meurt  1978  per- 
sonnes. —  Ibid,y  p.  10.  Cf.  A.  Leroux,  Nouv,  doc,  histo- 
riques sur  le  Limousin,  p.  330. 

1365.  — Lettres  royaux  portant  création  de  la  mairie  de  Saint- Yrieiz, 
composée  de  cinq  échevins,  dont  Fun  prendra  le  nom  de 
maire.  —  Bull,  de  la  Soc,  arch.  du  Limousin,  III,  155. 


636  SOCICTK  ARCHÉOLOGIQUE  Kf  HISTORIQUE  DU  UHOUStSV. 

«  Les  habitants  de  Dostre  ville  et  fauk-bourgs  et  juridicUoa  d^- 
Sainct-Yrieys-la-Perche  en  Limousin  [nous]  on  t  faict  remon-- 
Irer  qu'ils  sont  déparliz  en  cinq  parroisses,  deux  daos  le 
fort  <ie  la  dicte  ville  et  les  autres  trois  aux  faulx-bourgs 
d'icetle;  n'ayant  aucuns  consulz,  eschevins  ny  administra- 
teurs de  leurs  atTaires  communes  et  aullres  concernant  l** 
faict,  gouvernement  et  exercice  de  la  ville, ». 

1868  nov.  —  Passage  du  vicomte  de  Joyeuse,  conduisant  de  8  a 
10,000  hommes  au  duc  d'Anjou  à  Chauvigny  :  «c  Ce  qui  fu>i 
une  grande  foulle  pour  les  habitans  de  la  dicte  ville  dr 
Saint-Yrieix  ».  —  Pierre  de  Jarrige,  Journal,  p.  3o. 

1569,  2  fév.  -  2  mars.  —  Les  compagnies  des  sieurs  de  Neu\iIlo  h 
Masset  viennent  prendre  garnison  à  Saint-Yrieix,  sur  l'or- 
dre du  duc  des  Cars,  gouverneur  de  la  province.  «  Plai- 
dant leur  séjour  n'y  firent  chose  qui  mérite  d'escrirc,  sinon 
manger  la  poule  sur  le  bonhomme  et  vivre  à  discrétion 
sans  payer  aulcune  chose,  qui  fustun  commencement  delà 
ruyne  de  la  dicte  ville  de  Sainct-Yriez  ».  —  Ibid.y  p.  39-4i. 
Cf.  les  Mémoires  de  Castelnau,  de  La  Noue,  de  SauK- 
Tavannes,  etc. 

1569,  12 juin.  —Prise  de  Saint-Yrieix  par  messire  de  Bonneval. 
capitaine  de  l'armée  protestante.  —  Bull,  de  la  Soc.  arck. 
du  Limousin^  IV,  43.  Cf.  Pierre  de  Jarrige,  Joumai 
p.  53-55,  et  ci-dessus,  p.  624,  la  pièce  de  1583. 

1575.  —  Accensement  de  la  tour  du  Plot,  fait  par  les  chanoines  à 
Jean  Carreau,  notaire  de  Saint-Yrieix.  —  A.  Leyharie, 
Limousin  hist.^  L  336. 

1578.  —  Transaction  entre  Henri,  roi  de  Navarre,  et  Yrieix  deG»*n- 
tilz,  seigneur  de  TAge-au-Chapt,  relativement  à  la  prévélé 
de  Saint-Yrieix.  —  Ibid.,  I,  110. 

1583.  —Lettres  royaux  obtenues  par  le  chapitre  de  Saint-Yrieix  con- 
cernant le  brùlement  de  leurs  titres  par  Tarmée  proteslanie 
en  1569.  —  Bosvieux.  Itiventairey  L.  37.  Ces  lettres,  noa> 
les  avons  publiées  ci-dessus,  p.  624,  d'après  une  copie  du 
temps. 

1589,  9  mars.  —  La  ville  de  Saint-Yrieix  est  mise  sous  robéissamv 
du.  roi.  —  Papier-Journal  de  Pardoux  Roch,  cité  dans  le> 
notes  du  Joumai  de  Pardoux  de  Jarrige  y  p.  97,  note  2. 

1589,  15  mars.  —  La  ville  de  Saint-Yrieix  est  mise  par  trahison 
.  sous  l'obéissance  du  sieur  de  Rastignac,  l'un  des  chefs  d«' 
la  Ligue  en  Limousin.  —  Pardoux  de  Jarrige,  Journal^  p.  9'- 
Cf.  les  Annales  de  Limoges  dites  de  1638,  p.  364. 


CHRONOLOGIE  DE  l'HISTOIRB   DR   SAINT-YRIBIX-L  A -PERCHE.  637 

1589, 4  mai.  —  La  ville  est  prise  par  l'armée  du  roi.  —  Pardoux  de 
Jarrice,  JouniaL  p.  98. 

1591,  12-30  mars.  —  La  ville  est  assiégée  par  les  troupes  de  la 
Ligue  commandées  par  M.  de  Pompadour.  Une  armée 
royale,  commandée  par  M.  de  I^  Rochefoucauld,  est 
battue  par  les  assiégeants  qui  néanmoins  lèvent  le  siège. 

—  Ibid,y  p.  99-103.  Cf.  les  Amiales  de  Limoges  dites  de 
1638,  p.  371. 

1594.  —  Invasion  des  Crocquants  au  nombre  d'environ  2,000.  Une 
centaine  d'entre  eux  est  empoisonnée  par  les  habitants. 
À.  Leymarie,  Limousin  hist.y  I,  21. 

Yers  1594.  —  Erection  d'une  élection  de  finances,  bientôt  sup- 
primée. —  Noël  Valois,  Invent,  des  arrêts  du  Conseil 
d'Etat  sous  Henri  IV y  n*»  1646.  Cf.  A.  Leroux,  Invent, 
des  arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne,  G.  551. 

1603,  1"  avril.  —  Ostension  du  chef  de  saint  Yrieix.  —  Antoine  de 
Jarrige,  Journal  historique,  dans  nos  Chartes,  chroniques 
et  mémoriaux,  p.  310. 

1610,  sept.  —  Des  chanoines  de  Tours  viennent  inspecter  le  cha- 
pitre de  Saint-Yrieix  et  prescrivent  diverses  réformes. 

—  Antoine  de  Jarrige,  Journal  déjà  cité,  p.  311-312  (La 
note  1,  qui  indique  comme  imprimés  les  statuts  rédigés  à 
cette  occasion,  est  fautive.  Ces  statuts  semblent  perdus;. 

1613  (1).  —  Fondation  de  la  communauté  des  Récollets.  La  cons- 
truction du  couvent  ne  fut  achevée  qu'en  1620  et  l'olFice 
n'y  fut  célébré  qu'à  partir  de  1630.  —  Journal  de  Pardoux 
Gondinet  dans  L.  Guibert,  Livres  de  raison  li'tnousins  et 
marchoiSy  p.  273  et  276,  —  et  Livre  de  raison  d'un  sieur 
Jarrige,  ibid.,  p.  277. 

1617, 10  fév.  —  Arrêt  du  parlement  de  Bordeaux  réglant  les  droits 
respectifs  du  chapitre  et  des  échevins  de  Saint-Yrieix.  — 
Antoine  de  Jarrige^  Journal  déjà  cité,  p.  312. 

1621,  9  janv.  —  11  mars.  —  Six  compagnies  du  régiment  du  sieur 
Charon  de  Louzière  prennent  garnison  à  Saint-Yrieix, 
commandées  par  le  sieur  de  Crommières  «  qui  nous  a 
faict  force  despance  et  bailhé  beaucoup  d'incommodité  ». 

—  Pardoux  Gondinet,  Journal  déjà  cité,  p.  273. 

1625  (?).  —  Etablissement  des  Clairettes  urbanistes  (?).  —  Nadaud, 

(1)  Cette  date,  fournie  par  Pardoux  Gondinet  et  le  Poulllé  du  diocèse 
de  1773,  Dous  semble  douteuse.  Nous  lui  préférerions  celle  de  1618  que 
donnent  les  Ephémérides  de  la  Généralité  de  1765,  et  quelques  aulrcs 
ouvrages  modernes. 


638  SOCIÉTÉ  ARGHBOLOeiQQE  ET  HISTORIQUE  DO   LIMOOSIR. 

Chronologie  des  évéques  de  Limoges  dans  le  Dictionnaire 
géographique  de  Tabbé  Texier,  p.  20.  —  U  semble  toute- 
fois que  ces  Clairettes  urbanistes  se  confondent  aTec  les 
Filles  de  Sainte-Glaire  qui  arrivèrent  en  1630. 

1627-1628.  —  Correspondance  entre  le  gouverneur  du  Limoasin  et 
les  échevins  de  Saint-Yrieix  au  sujet  de  renvoi  de  maçons 
à  La  Rochelle  pour  y  construire  la  digue.  —  Bull,  de  lu 
Soc.  arch.  du  Limousiny  III,  1S8-159. 

1630  (1).  —  Fondation  de  la  communauté  des  Filles  de  Sainte- 
Claire.  —  Journal  de  Pardoux  Gondinet  déjà  cité,  p.  273. 

1631,  avril.  —  La  peste  sévit  à  Saint-Yrieix  et  emporte  de  SOO  à 
600  personnes.  —  Antoine  de  Jarrige,  Journal  déjà  cité, 
p.  315. 

1631,  16  avril.  —  Ostension  des  reliques  de  saint  Yrieix.  —  An- 
toine de  JARRiGE,/otimaI  déjà  cité,  p.  315. 

1632, 17  déc.  —  Arrêt  de  la  cour  des  aides  de  Glermont  fixant  au 
1*' janvier  Tépoque  des  élections  municipales.  —  Bosvieux, 
Inventaire,  L,  34. 

1652-1653.  —  Réparation  des  murailles  de  Saint-Yrieix.  —  Archi- 
ves histor.  du  Limousin,  IV,  110. 

1663.  —  Bulle  d'approbation  accordée  par  Alexandre  VII  à  la  com- 
pagnie des  Pénitents  bleus  de  Saint-Yrieix.  —  Ephéméri- 
des  de  1765,  p.  114. 

Cette  bulle  semble  perdue.  En  tout  cas,  sa  date  ne  peut 
être  identique  à  celle  de  la  formation  de  la  compagnie, 
qui  existait  peut-être  déjà  depuis  plusieurs  années.  Les 
registres  paroissiaux  de  Saint-Yrieix  pourraient  donner 
réponse  à  cette  question. 

1668, 19 août.  —Lettre  de  d'Aguesseau,  intendant  de  la  Généralité 
de  Limoges,  aux  échevins  de  Saint-Yrieix,  pour  les 
inviter  à  entreprendre  rétablissement  de  quelque  mana- 
facture.  —  BulL  de  la  Soc.  arch.  du  Limousin,  III,  160. 

1671^  12  juillet.  —  Bref  de  Clément  X  autorisant  Texposition  du 
Saiat-Sacrement  dans  la  chapelle  de  Thôpital,  avec  indul- 
gence plénière  pour  sept  ans.  —  A.  Leroux,  Inveni.  des 
arch.  hospit.  de  Saint-Yrieix,  C,  1.  Cf.  E.  2. 

1675.  —  Octav8B  Sancti  Aredii  abbatis  et  Sancti  Juliani  martyris  (S; 
ad  usum  capituli  Sancti-Aredii  et  de  consensu  ejusdem 
capituli  et  approbatione  superiorum.  —  Lemovids  ex  ly- 

(I)  Et  non  1625,  comme  dit  le  Dict.  giogr.  de  Tabbé  Texier. 
(9)  11  s*agit  probablement  de  Saint-ialien  de  Brioada,  à  qui  saint  Yrieix 
avait  fait  b^tir  un  oratoire,  d*après  Grégoire  de  Tours. 


CHRONOLOGIK   DB  L*H18T0IRB   DB   SAINT*TR1EIX~LA-PBRCHE.  639 

pographia  Martini  Dessables^  MDGLXXV,  in-S"*  de  82  pa- 
ges. —  Bull  de  la  Soc,  arch.  du  Limousin,  XXXIX,  p.  636. 

i698..—  Les  mines  de  fer  des  environs  de  Sainl-Yrieix  sont  men- 
tionnées pour  la  première  fois.  —  Mémoire  de  M.  de 
Bernage  sur  la  Généralité  de  Limoges,  1698,  p.  163  de 
notre  édition. 

XVII*  siècle.  —  Aliénation  Ae%  terres  du  domaine  royal  comprises 
dans  la  circonscription  de  Saiot-Yrieix.  —  Mémoire  de 
1698,  p.  220.  Cf.  Archives  nat.,  Q\  n«  1621. 

1723.  "-  Adhésion  des  chanoines  du  chapitre  de  Saint- Yrieix  à  la 
constitution  Unigenitus  et  à  la  déclaration  faite  dans  ce 
sens  par  leurs  supérieurs  de  Tours.  —  Archives  départe- 
mentales de  la  HauteVienne,  fonds  de  TEvôché,  n»  prov. 
4073. 

1 739.  —  Consultation  pour  le  chapitre  de  Saint-Yrieix  contre  les 
empiétements  des  évéques  de  Limoges,  la  dite  consulta- 
tion délibérée  par  le  sieur  Nouet,  avocat  an  parlement  de 
Paris.—  BosviEux,  Inventaire,  L,  38.  Cf.  cidessus,  p.  628. 

i  742.  —  Le  chapitre  de  Saint-Yrieix  fait  imprimer  à  Tours  chez 
Gripon  un  cahier  in-folio  intitulé  :  Missae  sanctorum  qui 
speciali  ritu  coluntur  in  ecclesia  regali  et  collegiata  Sti 
Aredii  de  Athano  ;  puis  un  Proprium  sanctorum  qui  ritu 
speciali  coluntur  in  ecclesia  regali  et  collegiata  Beati  Aredii 
de  Athano  {s.  n.  ie  lien).  ^  Legros,  Mémoire...  de  1784 
(dans  BosviEUx,  Inventaire,  L,  37). 

1780.  —  Edit  du  roi  portant  suppression  du  siège  des  appeaux 
de  Ségur  et  de  la  justice  de  la  ville  de  Saint-Yrieix  —  et 
création  d'une  nouvelle  sénéchaussée  en  la  dite  ville  de 
Saint-Yrieix,  recevant  les  appels  de  trente  paroisses  envi- 
ronnantes. —  Bull,  de  la  Soc.  arch.  du  Limousin,  VI,  124, 
et  René  Page,  La  cour  d'appeaux  de  Ségur,  142.  Cf.  les 
Ephémérides  de  la  généralité  de  Limoges  de  1768,  p.  114. 

Vers  1780.  —  Etat  des  sommes  auxquelles  peut  être  réglée  la 
fiuance  des  officiers  du  sénéchal  de  Saint-Yrieix.  — 
R.  Fage,  La  cour  d'appeaux  de  Ségur,  p.  146. 

1787.  —  Lettre  de  M.  de  Lespine  de  Limoges,  demandant  de  Tan- 
timoine  à  un  correspondant  de  Saint-Yrieix.  —A.  Leroux, 
Invent,  des  arch.  hosp.  de  Saint-Yrieix,  G.  1.  —  Cf.  Sta- 
tistique de  la  Haute-Vienne  de  1808,  p.  422  :  «  On  a  dé- 
couvert depuis  près  d'un  siècle,  dans  les  environs  de 
Saint-Yrieix,  des  mines  d'antimoine;  mais  ce  n'est  que 
depuis  quarante  ans  qu'elles  ont  été  l'objet  d'une  exploi- 
tation régulière...  » 


640  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   F.T    HISTORIQUE   DU   LIMOUSIN. 

1760.—  Règlement  du  doa  gratuit  pour  les  villes  du  ressort  du 
Parlement  de  Bordeaux:  Saint- Yrieix,  500  fr.  —  A.  Th^^ 
MAS,  Invent,  des  arch.  communales  de  Limoges^  CC.  8. 

xvui«  siècle.  —  Taxe  des  villes  de  l'élection  de  Limoges  pour  obt«?- 
nir  rabolition  des  cens,  renies,  etc.  dus  au  roi  :  Saini- 
Yrieix,  1,500  fr.  —  A.  Thomas,  Ibid.,  CC.  12. 

1762.  —  Visite  de  Tévéque  de  Limoges  aux  diverses  paroisses  de 
Saint-Yrieix.  —  A.  Leroux,  Chartes,  chroniques  et  mémo- 
riaux ^  p.  409  et  ss. 

1768.  —  Découverte  du  kaolin  aux  environs  de  Saint-Yrieîx  par  If 
chirurgien  Darnet.  —  Statistique  de  la  HauteVienne  en 
1808,  p.  424.  A  rectifier  parM.Fray-Fournierdans  lefiw//. 
de  la  Soc.  arch,  du  Limousin^  XL,  206  et  ss. 

Vers  1768.  —  Fondation  d'une  manufacture  de  fayence  par 
MM.  Chapetias  et  Pouyat.  Quelque  temps  interrompue, 
vers  1784,  cette  manufacture  subsistait  encore  sous  le  pre- 
mier empire.  —  Statistique  de  la  Haute-Vienne  de  18C* 
p.  441.  Cf.  ci-dessus,  p.  577. 

Vers  1775.  —  Fondation  d'une  manufacture  de  porcelaine  par 
M.  Dugarreau  de  La  Seinie,  continuée  par  M.  Baignol  de 
1789  à  1797.  —  Statistique  de  la  Haute-Vienne  de  1808. 
p.  433.  La  date  de  1773,  quelle  fournit,  paraît  devoir 
être  corrigée  en  1775.  Voy.  M.  Fray-Fournier,  Documents, 
dans  le  BulL  de  la  Soc.  arch.  du  Limousin,  XL,  S*  livr. 

1781.  —  Rubriques  particulières  au  chapitre  de  Saint-Yrieix.  Ma- 
nuscrit rédigé  en  1781 ,  cité  par  Bosvieux,  Inventaire,  L/S^- 

Vers  1784.  —  <»  On  travaille  à  y  fonder  un  collège.  Il  y  a  des  fonds 
affectés  à  cet  établissement,  dont  le  doyen  actuel  jouit, 
en  attendant  quïls  s'effectuent  ».  —  Leguos,  Mémoire  de 
1784  (dans  Bosvieux,  Inventaire,  L,  37).  —  Le  projet  n»' 
réussit  pas.  Cependant  on  constate  en  1785  la  préseDC4' 
à  Saint-Yrieix  d'un  professeur  d'humanités,  le  sieur  Boiv 
set,  qui  demande  que  la  maison  préceptorale  soit  réparée 
à  son  profit  {Invent,  des  arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne, 
C.81). 

1785.  —  Premiers  travaux  de  construction  de  la  route  de  Limoge.< 
à  Cahors  par  Saint-Yrieix,  sous  l'intendance  de  Meulan 
d'Ablois.  C'est  aujourd'hui  la  route  départementale  n*i 
dite  de  Limoges  à  Cahors,  classée  par  décret  de  janvier 
1813.  Les  travaux,  interrompus  par  la  Révolution,  ne 
furent  repris  que  longtemps  après.  En  1817  un  membre 
du  Conseil  général  de  la  Haute- Vienne  déclarait  que  cett«* 
route  n'était  qu'ébauchée.  Antérieurement,  Saint-Yrieix 


CHRONOLOGIE   DE  L*HIST01RE  DB  SAINT-TRIBIX-LA  PERCHE.  641 

correspondait  avec  Limoges  par  Ghâlus.  ^  À.  Leroux, 
Invent,  des  arch.  dép.  de  la  Haute-Vienne,  G.  333,  345, 
346,  et  Analyse  des  délibérations  manuscrites  du  Conseil 
général,  p.  123,  180,  190,  192.  Cf.  la  Statistique  de  la 
Haute-Vienne  de  1808,  p.  526. 

1729,  février.  —  Les  corps  constitués  rédigent  en  assemblée  pri- 
maire leurs  doléances.  —  Celles  du  tiers-état  ont  été  seu- 
les conservées  (cf.  ci-dessus,  p.  574).  Les  cahiers  des 
assemblées  des  trois  ordres  de  la  sénéchaussée  de  Saint- 
Yrieix  furent  rédigés  à  Limoges  avec  ceux  de  la  sénéchaus- 
sée de  Limoges. 

1790-  —  Saint-Yrieix  est  érigé  en  chef-heu  du  district  de  ce  nom. 

—  A.  Teomks,  Invent,  des  arch.  comm.  de  Limoges^  AA, 
9his.  —  N.-B.  La  circonscription  de  district  et  ses  ins- 
titutions furent  supprimées  par  la  constitution  de  Tan  IlL 

1790.  —  Saint-Yrieix  est  désigné  pour  siège  du  tribunal  du  district 
et  d'une  justice  de  paix.  Cf.  Fray-Four.^ier,  Bibliographie 
de  la  Révolution,  n*^  238. 

1790,  23  nov.  —  Délibération  du  chapitre  de  Saint-Yrieix  protes- 
tant contre  le  décret  de  TAssemblée  nationale  du  12  juil- 
let 1790  qui  porte  suppression  des  chapitres  du  royaume. 

—  BosviEux,  Inventaire^  L.  38.  Cf.  ci-dessas,  p.  626. 
Cette  protestation  fut  renouvelée  verbalement  le  9  décembre 

suivant  par  devant  le  directoire  du  district  de  Saint-Yrieix. 

—  Ibid.y  id. 

1791  et  1793.  —  Saint-Yrieix  fournit  373  défenseurs  de  la  patrie.  — 

BosviEux,  Inventaire,  L.  34. 
1793,  août.  —  Insurrection  de  la  municipalité  de  Saint-Yrieix  contre 

la  Montagne.  —  Moniteur  universel^  n*  du  10  août,  séance 

du  7  août. 
An  II,  .8  brumaire  (29  octobre  1793).  —  Décret  de  la  Convention 

nationale  portant  que  la  commune   de   Saint-Yrieix-la- 

Perche  s*appellera  désormais  Saint-Yrieix-la-Montagne. 

—  Moniteur  universel,  à  la  date. 

1798.  —  Institution  de  la  conservation  des  hypophèques. 

1800.  —  Saint-Yrieix  est  érigé  en  chef-lieu  de  Tarrondissement  de 
ce  nom  et  devient  le  siège  d'une  sous-préfecture  et  d'un 
conseil  d'arrondissement. 

1800.  —  Erection  du  tribunal  civil  de  l'arrondissement  de  Saint- 
Yrieix. 

1800.  —  Etablissement  de  la  recette  particulière  de  Saint-Yrieix. 

Vers  1804.  —  Fondation  d'une  école  secondaire  par  le  sieur  Abrias- 
Laforét.  — Statistique  de  la  Haute-Vienne  de  i  808,  p.  218. 


B4t  dOClÉTi  ARCBtOLOdlOOB  filT  HliTORIQDE  BO  LtNODdlR. 

1808,  21  aoûl.  —  Ereclion  de  la  cure  de  Saint-Yrieîx,  de  1"  classa 

Vers  1822.  —  Découverte  d'une  carrière  de  feld-spath  aux  enfiroos 
de  Saint-Yrieix.  —  A.  Leroux,  Analyse  déjà  citée,  p.  185. 
303  et  330. 

1826.  -*  Achèvement  du  cadastre  de  Saint-Yrieix  et  de  soa  cantoc 
L'examen  de  la  feuille  consacrée  à  Saint-Yrieix  môme  prou^f 
que  la  ville  ne  s'est  guère  agrandie  depuis  lors.  Seule,  h 
gauche  de  la  route  qui  mène  du  chemin  de  fer  au  foirai! 
à  été  bâtie.  Mais  le  quartier  du  Moutier  et  celui  de  la  Sojxsr 
préfecture  ne  diffèrent  pas  beaucoup  aujourd'hui  de  cr 
qu'iis  étaient  en  1826.  Mêmes  constatations  sur  un  plandr 
1810,  en  plusieurs  feuilles,  conservé  aux  Archives  dépâr 
tementales. 

1827, 1842, 1884.  —  Agrandissements  successifs  du  palais  de  jus- 
tice de  Sainl-Yrieix.  — Archives  départementales,  série  V 
Cf.  A.  Leroux,  Analyse  déjà  citée,  p.  201  et  217. 

Vers  1833.  —  Introduction  de  l'imprimerie  à  Saint-Yrieix.  —  Cf.  ri- 
dessus,  p.  578. 

1838.  —  Fondation  du  premier  journal  qu'ait  eu  la  ville  :  YArédien. 
—  Cf.  ci-dessus,  p.  578. 

1836.  —  Etablissement  des  religieuses  du  Verbe-Incarné.  —  Ordo 
dioc.  Lemovic. 

1838.  —  Classement,  par  décret,  de  la  route  départementale  n'^ 
de  Tulle  à  Chabanais  par  Saint-Yrieix. 
La  partie  comprise  entre  Ch&lus  et  Saint-Yrieix  avait  été 
classée  dès  1835.  La  demande  de  construction  de  ce  tron- 
çon avait  été  faite  par  le  conseil  d'arrondissement  dès 
1806.  —  Cf  A.  Leroux,  Analyse  des  délibérations  wurnuseri- 
tes  du  conseil  général  de  la  Haute-Vienne ,  p.  67  et  311. 

1847,  —Etablissement  des  sœurs  de  la  Charité  et  de  la  Présenta- 
tion (de  Tours).  —  Ordo  dioc,  Lemov. 

1852.  —  Formation  de  la  Chambre  consultative  d'agriculture. 

1855.  —  Etablissement  des  frères  des  écoles  chrétiennes.  —  Ordo 
dioc,  Lemov. 

1860.  —  Fondation  d'un  collège  communal. 

1861 .  —  Fondation  de  deux  manufactures  de  porcelaine.  L'une  a 
disparu  en  1871  ;  l'autre  dure  encore. 

1863, 27  mai.  —  Ouverture  du  bureau  télégraphique. 

1867.  —  Fondation  de  la  Société  de  charité  maternelle. 

1868.  —  Fondation  de  l'orphelinat  agricole  de  Lafaye  près  Saiol- 

Yrieix  (1). 

(I)  En  1820,  le  Conseil  d'arrondissement  de  Sainl-Yrieix  avait  demandé 


CliaONOLbOlB  DE  L^BISTOIRB  Dt  SAINT- yRlBlt-LA-^SRCËK.  6i3 

1868.  —  Commencement  des  travaux  de  restauration  du  Moutier, 

classé,  depuis  1841,  comme  monument  historique. 
1875.  —  Ouverture  de  la  ligne  ferrée  de  Limoges  à  Saint-Yrieix 

avec  prolongement  sur  Brive,  Figeac,  Toulouse,  (41  kil. 

de  longueur,  1  h.  de  trajet  par  certains  trains). 
1884.  —  Fondation  du  Ck)mice  agricole  de  Saint-Yrieix.  Réclamé 

dès  1839.  Yoy.  A.  Leroux,  Analyse  déjà  citée,  p.  372. 
1887.  —  Formation  du  syndicat  des  boulangers  de  Saint-Yrieix  et 

de  Tarrondissement. 
1890.  —  Suppression  de  la  recette  particulière  des  finances. 
1891, 16  août.  —  Ouverture  du  tramway  de  Saint-Yrieix  à  la  Juvé- 

nie  et  Périgueux  (75  kil.  de  longueur,  5  heures  de  trajet). 

—  Rapport  de  l'ingénieur  en  chef^  dans  les  Rapports  des 

chefs  de   service  à  M.  le  Préfet  de  la  Haute-Vienne, 

session  d'avril  1892,  p.  24. 

l'établissement  d'une  ferme  expérimentale.  Le  Conseil  général  repoussa 
cette  demande.  (Voy.  V Analyse  des  déUbérationa  manuscrites  du  Conseil 
général,  p.  156). 

A.  Leroux. 


1 


LES  BÉNÉDICTINS  DE  SAINT-MAUR 


orig^aires  du  Limousin 


Le  monastère  de  Saint- Augustin,  à  Limoges,  tire  son  nom  d'unt^ 
église  érigée  en  Thonneur  du  saint  docteur,  à  la  fin  da  v«  siècle,  par 
révoque  du  lieu,  Rorice  TAncien.  Ce  monastère  devint,  au  moyen- 
âge,  une  florissante  abbaye  de  bénédictins.  Un  de  ses  plus  beaux 
titres  de  gloire  est  d'avoir  été  le  berceau  de  la  Congrégation  de 
Sainl-Maur,  qui  s'est  rendue  si  célèbre  par  les  savants  qu'elle  a 
produits,  et  par  les  œuvres  d'érudition  qu'elle  a  publiées. 

Le  fait  n*est  pas  contestable  :  il  est  reconnu  depuis  le  xvii*  siècle. 
LeP.Bonaventure  Sainl-Amable,  dans  ses  Anna/<'S, publiées  en  1685. 
s'exprime  ainsi  :  «  Ce  monastère  fut  mis  sous  la  juridiction  des  R.  P. 
(réformés  de  Lorraine)  qui  le  desservirent  avec  édification;  eL 
Tan  1617,  le  réunirent  et  redonnèrent  à  leurs  confrères  reformés  de 
France,  pour  estre  doresenavant  le  chef  et  le  premier  monastère  de 
la  très  fleurissante  Congrégation  de  Saint-Maur  (1).  » 

C'est  l'abbé  du  monastère  de  Saint- Augustin,  dom  Jean  RegnaulL 
qui  fit  adopter  cette  réforme  dans  son  abbaye  :  aussi  est-il  appelé, 
dans  son  épitaphe,  l'auteur  principal  de  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur  : 

HIC  lACET 

R.  P.  D.  D.  lOANNES 

REGNAVLT 

ABBAS  HVIVS-CJE 

iMONAST.  ET  CONGREG. 

S"  MAVRI  PRECIPVVS 

AVTHOR.   - 

OBIIT  IN  DOMINO  31  JANVAR. 

1622  (2). 

{{)  P.  BONAVENT.,  l.  Ml.  p.  .^55. 

[i)  Lkgros,  Recueil  d'inscriptions,  p.  24  (manuscrits  du  Sémioaire}. 


tRS  B&NiOlCTINS   DR   &AINT-1IAUR   OBIGINAIHES   DU   MI|OUSIN.  Otô 

L  abbayç  de.  Sa,ift(rAugujâliQ  e^t  doac  le.  berceau  de  celtei  célèbre 
congrégation;  et  voilà  pourquoi,  dans  ia  bulle  d^lÇ27  quicoofirme 
l'èreçtioQ  de  la  Gongrégaliou  de  Saint-Maur,  le  monastère  de  Sainl- 
Auguslin  est  nommé  le  premier. 

La  Révolution  chassa  les  religieux  de  leur  monastère.  Sou$  le  pre- 
oaier  empire,  en  1810,  Tabbaye  de  Saint-Augustin  fut  transformée 
en  maison  centrale  de  détention.  On  vit  alors  se  réaliser  cette 
parole  prophétique  de  Joseph  de  Maistre  :  «  Il  leur  faudra  bâtir  des 
bagnes  avec  les  ruines  des  couvents  qu'ils  auront  détrttits  ». 
Depuis  1872,  la  maison  centrale  est  devenue  une  caserne  d'infan- 
terie, et  voilà  pourquoi  la  Société  Archéologique  n'a  piis  osé  mettre 
sur  le  portail  de  Tédifice  Tinscription  suivante  : 

IC[  FUT   LE  BEHCEAU 
DE   LA  CONGRÉGATION   DE  SAINT-MAUR. 

l^e  Limousin  a  fourni  à  cette  congrégation  un  certain  nombre  de 
religieux.  Nous  allons,  dans  cette  notice^  signaler  ceux  d'entre  eux 
qui  se  sont  distingués  comme  écrivains,  soit  qu'ils  aient  publié  des 
ouvrages,  soit  qu'ils  les  aient  laissés  manuscrits. 

Dom  Jean  Audebert. 

I.  —  Audebert  (Jean),  plus  connu  sous  son  nom  de  religion  «  dom 
Bernard  Audebert  »,  naquit  en  1600  à  Bellac,  d'une  famille  noble  et 
ancienne,  qui  a  donné  un  membre  distingué  à  la  Compagnie  de 
Jésus,  et  plusieurs  vice-sénéchaux  à  la  Basse-Marche.  A  la  fin  de 
sa  rhétorique,  il  entra  chez  les  bénédictins  de  l'abbaye  de  Saint- 
Augustin  de  Limoges, qui  l'envoyèrent,  pour  son  noviciaX,  au  monas- 
tère de  Noaillé,  en  Poitou.  Il  y  lit  profession,  à  l'âge  de  vingt  ans, 
le  11  novembre  1620. 

Il  occupa  successivement  diverses  charges  de  son  ordre,  et  fut 
appelé,  par  son  mérite,  à  exercer  les  plus  importantes.  D'abord  cel- 
lérier  à  Saint-Jean  d'Angély,  il  fut  ensuite  nommé  secrétaire  et 
visiteur  de  Gascogne;  puis  il  devint  successivement  prieur  de 
Saint-Laumer  de  Blois  (1628),  de  Saint-Mélaine  de  Rennes  (1630), 
de  Sainte-Croix  de  Bordeaux  (1633),  premier  abbé  de  Saint-Sulpice 
de  Bourges  (1)  après  que  la  réforme  de  Saint-Maur  y  eut  été  intro- 
duite(1636  et  1639),  prieur  de  Saint^enys  en  France{l642  et  1645), 
assistant  du  général  de  l'ordre  pendant  six  ans  (1648  et  1681),  prieur 

(i)  GMia  chriêtiana  nooa^  1. 11,  col.  430.  —  Reoue  catholique  de  Bor- 
deaux^ 1881,  p.  983.  —  Biographie  limousine^  p.  33. 

T.  XL.  44 


Ô4(^  dOGIÊTÊ   ARCHEOLOGIQUE   F.t   ItlSTORlQDiS   ù\5  LlHOtmiX. 

de  Sainl-Gsrmaia-des-Prés  (1654  el  16B7)  ;  enfln,  dans  le  cbapitre 
général  de  l'ordre  tenu  à  Marmoutiers,  près  de  Tours,  en  1660,  û 
fut  nommé  supérieur  général  de  la  Congrégation  de  Sainl-Haur. 
et  fut  continué  trois  autres  fois  dans  cette  charge  en  1663,  16d6 
et  1669. 

A  la  fin  de  son  dernier  Iriennat  (1672),  étant  devenu  aveugle,  il  îux 
déchargé  de  la  supériorité,  et  mourut  simple  religieux,  le  29  août*  673, 
à  rage  de  soixante-quinze  ans,  à  Paris,  dans  le  monastère  de  Saint- 
Germain-des-Prés  (1). 

II.  —  Dom  Bernard  Audebert  était  prieur  de  Saint-Denys  lorsqu'il 
prit  pos^^ession,  pour  son  ordre,  du  monastère  d'Argenteuil,  l^* 
11  novembre  1646  (2). 

Le  8  novembre  1664,  la  reine-mère,  Anne  d'Autriche,  accompa- 
gnée de  Monsieur,  frère  du  roi,  se  rendit,  sans  se  faire  annoncer. 
à  Saint-Denys,  afin  d'y  prier  pour  la  reine  de  France  Marie-Tbé- 
rèse,  dont  la  santé  causait  de  vives  inquiétudes.  Dom  Bernard 
Audebert  qui  se  trouvait  dans  le  monastère  avec  le  nonce  du  Papr 
et  l'ambassadeur  de  Savoie,  accourut  aussitôt  pour  la  recevoir,  elsr 
plaignit  humblement  de  cette  surprise.  La  reine  lui  répondit  avec  sa 
bonne  grâce  ordinaire  qu'elle  n'était  venue  que  pour  faire  ses  dévo- 
tions. Lorsqu'elle  eut  satisfait  à  sa  piété,  dom  Bernard  lui  montra 
le  trésor  des  reliques  et  les  tombeaux  des  rois. 

Après  la  mort  d'Anne  d'Autriche,  son  corps  fut  transporté,  \e 
28  février  1666,  à  Saint-Denys,  où  il  arriva  à  minuit.  Dom  Bernard 
Audebert,  comme  supérieur  général  de  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur,  fit  l'office,  et  s'avança  accompagné  d'un  diacre  et  d'un  sou<- 
diacre  pour  donner  l'eau  bénite  et  faire  les  encensements.  Après 
qu'il  eut  répondu  au  discours  éloquent  du  grand  aumônier  àe 
France,  Henri  de  la  Mothe-Houdancourt,  il  conduisit  le  cercueil 
royal  dans  le  chœur  de  la  basilique,  où  se  dirent  les  laudes,  qai 
furent  suivies  de  l'absoute. 

En  1668,  il  forma  le  projet  d'envoyer  quelques-uns  de  ses  reli- 
gieux en  mission  dans  diverses  localités  qui  dépendaient  des  monas- 
tères de  sa  Congrégation,  afin  de  pouvoir  récompenser  en  quelque 
sorte,  par  ces  secours  spirituels,  les  travaux  de  ceux  dont  il  recueil- 
lait les  fruits  temporels.  Pour  agir  en  cette  affaire  avec  plus  d'aulo- 
rite  et  de  succès,  il  fit  proposer  son  dessein  au  pape  Clément  IX, 
qui  non-seulement  approuva  son  projet,  mais  encore  voulut  l'en- 

(1)  Gallia  christiana,  t.  Vli,  col.  482-484. 

(2)  Mallebay  de  la  Mothe,  Plcui  pour  aeroir  à  l'histoire  du  Comté  de 
la  Marche,  '767,  p.  126. 


tK5    Bt^.îniCriN>    O'i    S\l\T-MAUR    ORlGîNORF.S   DU    M»OUSlN,  617 

courager  par  une  indulgence  qu'il  accorda  durant  le  leraps  de  cha- 
que mission  (1). 

Dom  Marlène,  dans  la  Vie  d'un  saint  religieux  de  la  Congrégation 
de  Saint-Maur,  a  fait  le  plus  grand  éloge  de  la  prudence,  du  zèle,  de 
la  douceur  et  des  autres  vertus  de  dom  Bernard  Audebert.  «  Ce 
grand  personnage,  dit-il,  servit  Dieu  dans  la  Congrégation  d'une 
manière  si  pure  et  si  dégagée  des  sens  et  des  créatures,  que  sa 
vie  était  plus  angélique  qu'humaine.  Dans  d'autres  ordres  reli- 
gieux, ajoute-t-il,  on  poursuivrait  avec  beaucoup  de  justice  sa  cano- 
nisation (2j  ». 

Pendant  les  douze  ans  qu'il  fut  supérieur  général,  un  (certain 
nombre  de  monastères  en  France,  quelques-uns  du  Limousin,  furent 
affiliés  à  la  Congrégalion  de  Sainl-Maur. 

Le  chanoine  Collin,  qui  a  cité  dom  Bernard  Audebert,  même  de 
son  vivant,  dans  son  Catalogue  des  Limomim  illustres,  dit  qu'il  se 
rendit  célèbre  par  son  érudition  (3).  Le  P.  Labbe,  savant  jésîiite, 
qui  lavait  connu  alors  qu'il  était  abbé  de  Saint-Sulpirede  Bourges, 
rappelle  «  homme  très  lettré  et  très  religieux  »  (4).  Dom  Esliennol, 
bénédictin  très  érudit,  dit  qu'il  était  «le  père  des  gens  de  lettres  »  (S); 
Son  nom  figure  parmi  ceux  des  dignitaires  de  la  Congrégation  de 
Saint-Maur  qui  Krent  travailler  aux  Annales  de  l'Ordre  de  Saint- 
Benoît  et  qui  (irent  rechercher  les  monuments  de  celle  histoire  dans 
les  bibliothèques  et  les  archives,  soit  de  la  France,  soit  des  autres 
pays  (6).  C'est  lui  qui  ordonna  au  savant  Mabillon  de  publier  les 
Actes  des  saints  de  l'ordre  de  Saint-Benoît,  et  de  préparer  une 
nouvelle  édition  des  Œuvres  de  Saint  Bernard  (7).  «  Cet  illustre  béné- 
dictin, qui  avait  connu  particulièrement  le  P.  Bernard  Audebert, 
n'en  parlait  jamais  qu'avec  une  profonde  vénération;  et  il  rédigea 
des  mémoires  de  ce  que  l'on  avait  retenu  de  ce  pieux  général  de  la 
Congrégation  de  Saint-Maur  »  :  ce  sont  les  paroles  de  dom  Ruinart 
dans  sa  Vie  du  P.  Mabillon  (8). 


(4)  Dom  Fêlibibn,  Histoire  de  l'abbaye  de  Salnt-Denya^  p.  503,  606, 508. 

(2)  V'\edu  P.  Claude  Marri/i,  préface,  p.  59  et  60. 

(3)  Lemooici  multipliai  eruditione  illustres^  1660,  p.  4.  —  Voir  encore  sa 
Table  chronologique  et  historique^  vi*'  colonne,  xvii^  siècle. 

(4)  Bibliotheca  nooa  mas.libr,^  t.  il,  p.  435. 

{fi)  Antiquit,  Benedict»  BUuricy  pari.  1,  p.  76  (ap.;N\DAUD,  Mém,  mja., 
t.  l,p.  4i9). 

(6)  Mabillon,  Annal,  Bened..,  t.  I,  prsef.  §  1,  n°  9. 

(7)  Acta  SS.  Ord.  «.  Bened.  sae:..  I,  prœf.  n.  5.  -^  S.  Bern.  edit,  1690, 
praeh,  n.  7. 

(8)  Vie  du  P.  MabiUon,  p.  267. 


648  SOCiRtB  ARCHBOLOGIQUR   Et   lkl8tO&IQU£   DU    LIllOCShH. 

IV.  —La  Re9me  Catholique  de  Bordeaux  a  publié,  en,  1881 ,  d'aprè? 
les  manuscrits  de  la  Bibliothèque  Nationale,  deux  lettres  adressée^ 
à  dom  Bernard  Audebert  :  Tune,  lorsqu'il  était  prieur  de  Sainte- 
Croix  de  Bordeaux,  écrite  par  le  savant  Èesly,  auteur  de  V Histoire 
des  Comtes  du  Ppitou,  en  date  du  25  avril  1636  ;  lautre,  lorsqu'il  était 
abbé  de  Saint-Sulpice  de  Bourges,  écrite  par  le  P.  La  vie,  de  la  Com- 
pagnie de  Jésus,  en  date  du  i4  janvier  1637.  —  Celle  publicatioo 
porte  la  signature  pseudonyme  d'Ant.  de  Lantendy  (1). 

On  a  de  dom  Bernard  Audebert  : 

1*>  Mémoire  des  antiquités  de  rabbaye  de  Saint-Sulpice  de  Bourges. 
de  V  ordre  et  Congrégation  de  Saint-Benoit  y  dressé  en  Vannée  f63f. 
{BibL  Nation,,  mss.  lat.  12,697,  fol.  227)  ; 

2*  Des  Extraits  sur  Saint-Denys  (mss.  lat.  12,678,  fol.  169); 

3»  Mémoires  sur  l'abbaye  de  Sainte-Croix  de  Bordeaux  (mss.  lai. 
12,667,  fol.  170). 

[Matricule,  n**  77;  Nécrologe  de  Vabbaye  de  Saint-Germain-des- 
Prés,  mss.  fr.,  16,861,  fol.  14;  mss.  lat.,  12.697,  fol.  277;  mss. 
lat.,  12,678,  fol.  169;  mss.  lat.,  12,667,  fol.  170)  (2). 

Dom  Chapelle  de  Jumilhac 

Chapelle  de  Jumilhac  (Pierre-Benoît),  naquit  en  1611,  an  châ- 
teau de  Sainl-Jean-Ligoure  (canton  de  Pierre-Buffière,  Haute- 
Vienne),  d'une  famille  qui  avait  été  anoblie  par  Henri  IV,  en 
1597  (3). 

Nous  pensons  —  sans  en  avoir  la  preuve  positive  —  qu'il  élaii 
(ils  d'Antoine  Chapelle,  écuyer,  baron  de  Courbefy,  seigneur  de  Ja- 
milhac,  qui  avait  épousé,  le  3  janvier  1610,  Loyse  d'Auteforl,  fille 
de  François,  baron  d'Aulefort  (4). 

La  noblesse  de  cette  famille  alla  en  progressant  :  en  16S6,  sous 
François  Chapelle,  seigneur  de  Saint-Jean-Ligonre  et  baron  d*Ar- 
feuille,  la  terre  de  Jumilhac  fut  épigée  en  marquisat  (3).  . 

Pierre-Benoit  de  Jumilhac  étudiait  en  philosophie  à  Bordeaux, 
quand,  se  senlant  appelé  à  la  vie  religieuse^  il  prit  la  résolution  de 
se  consacrer  à  Dieu  dans  Tordre  de  Saint-Benoît  et  dans  la  Congre- 

(\)Reoue  catholique  de  Bordeaux,  ,16  mai  1881,  p.  MI-Î90.  —  (L'abbé 

L.  Berirand).  ...-..*  . 

(â)  Ulyssb  Robert,  Supplément  à  VHUtoire  littéraire  deê  Bénédictin»  de 
Saint'Maur.  —  Paris,  Alphonse  Picard,  1881,  p.  «1. 

(3)  Nobiliaire  Limousin^  t.  II,  p.  605. 

(4)  NobiUaire  Limousin,  1. 1  («"«  édition),  p.  498,  431. 

(5)  Nobiliaire  Limousin,  l.  I,  p.  410. 


LES   BÉNÉDICTINS    DE   SAlNT-MAt'R    ORIGINAIRES    DU   LIMOUSIN.  649 

r    '  ',  ;       •  , 

gestion  deSainUMaur.  Cette  réforme  venait  d'être  introduite  dans 
l^abbaye  ide  Sainte-Croix  de  Bordeaux.  Pierre-Benoît  n'avait  alors 
qil'e  dix-Kuit  ans.  A  Tinsu  de  ses  parents,  il  se  rendit  au  noviciat 
de  Saiiit-Remy  de  Reims,  où  il  prit  Tiiabit  religieux  le  24  mars  1629. 

Quand  le  baron  de  Jumilhac  apprit  que  son  fils  était  au  monas-* 
1ère  deSainl-Remy,  il  partit  en  toute  hâte  pour  Reims,  et  employa 
tous  les  moyens  possibles  pour  le  détourner  de  sa  vocation  : 
mais  tout .  fut  inutile  :  Pierre-Benoît  résista  aux  intances  de  son 
père,  à  ses  caresses  comme  à  ses  menaces,  et  il  fit  profession  le 
6  avril  1630. 

.Après  ses  études,  il  fut  envoyé  à  Rome  par  dom  Grégoire  Tarisse, 
supérieur  général  de  Tordre,  afin  de  servir  de  compagnon  à  Pierre 
Xe  Simon,  procureur-général  près  la  cour  romaine,  et  pour  lui  suc- 
céder en  cas  de  besoin.  Mais  sa  santé  ne  put  résister  au  climat  et 
aux  grandes  chaleurs  de  Tltalie,  et  il  revint  en  France,  toutefois 
après  avoir  grandement  profité  de  son  séjour  dans  la  ville  étemelle. 

C*est  pendant  son  séjour  à  Rome  qu'il  s'appliqua  à  bien  étudier 
les  cérémonies  de  TÉglise.  Pour  s'en  instruire  à  fond, il  consulta  les 
hommes  les  plus  savants  et  les  plus  habiles  en  celte  matière.  H 
écrivit  des  notes  sur  tout  ce  qu'il  apprit,  et  s'en  servit  utilement 
pour  la  première  et  la  seconde  édition  des  Cérémonies  monastiques, 
ouvrage  composé  par  un  ancien  religieux  bénédictin,  nommé  Bau- 
drv. 

Au  chapitre  général  de  1647,  il  fut  nommé  prieur  de  Saint-Julien- 
de  Tours,  et  quelques  années  plus  tard,  supérieur  des  religieuses  , 
du  monastère  de  Chelles.  Pendant  les  guerres  civiles  de  la  Fronde, 
il  fit  preuve  d'une  grande  prudence  et  d'une  grande  fermeté  :  grâce 
à  ses  démarches,  le  monastère  fut  préservé  du  pillage,  et  les  reli- 
gieuses n'eurent  pas  à  subir  les  insultes  auxquelles  elles  étaient 
exposées  de  la  part  des  troupes  étrangères. 
*  En  1651,  il  fut  nommé  prieur  de  Saint-Nicaise  de  Rouen  ;  mais  il 
resta  peu  de  temps  dans  cet  emploi,  parce  que  le  visiteur  de  Bre- 
tagne étant  venu  à  mourir,  il  fut  appelé  aie  remplacer.  Il  remplit  si 
dignement  celle  charge,  que  le  chapitre  général  de  1654  le  nomma 
visiteur  de  la  province  de  Toulouse.  Le  zèle  et  la  prudence  dont  il 
fit  preuve  pour  maintenir  ces  deux  provinces  dans  la  paix  et  la 
régularité  lui  concilièrent  l'estime  et  le  respect  de  tous.  En  1657, 
il  fut  élevé  à  la  dignité  d'assistant  du  père  général,  et  dans  ce  poste 
éilttineht,  il  rendit  de  grands  services  à  la  congrégation  par  ses  con- 
seils et  sëà  bonè  exemples. 

En  1660,  il  fut  nommé  prieur  de  Saint-Corneille  de  Compiègnc; 
mais  conimè  son  corps  était  usé  par  les  travaux  et  les  austérités,  au 
Chapitre  suivant,  en  1663,  on  l'envoya  en  qualité  de  prieur,  dans 


G[»0  SnCIFTÊ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   OU   LIMOUSllI. 

le  monastère  de  Saint-Fiacre,  comme  dans  un  lieu  de  repos,  on. 
dispensé  des  exercices  les  plus  pénibles,  il  pourrait  rétablir  se? 
forces.  Dans  tous  les  monastères  dont  il  fut  supérieur,  il  donna  de? 
marques  de  sa  régularité  et  de  sa  modestie. 

Devenu  inlirme  par  suite  de  ses  austérités  et  de  ses  travaux,  il 
supplia  le  Chapitre  général  de  4666  de  le  décharger  de  la  supério- 
rité. Sa  demande  fut  accueillie,  et  le  monastère  de  Saint-Gerroaiu- 
des-Prés  lui  fut  assigné  pour  demeure.  Il  y  fit  l'office  de  sous-prieur, 
et  donna  à  la  communauté  l'exemple  de  la  régularité  et  des  autn^ 
vertus  monastiques. 

Ses  supérieurs,  voyant  sa  santé  rétablie,  voulurent  le  remettiv 
dans  les  charges  de  Tordre  :  mais  il  s'en  excusa  humblement,  ei 
demanda  de  finir  ses  jours  comme  simple  religieux. 

Il  mourut  pieusement  le  jour  de  saint  Benoît,  dont  il  portail  Ir 
nom,  c'est-à-dire  le  21  mars  1682,  à  Tâge  de  soixante-onze  an>, 
après  cinquanle-deux  ans  de  profession  religieuse  ;  il  fut  inhumé 
dans  la  grande  chapelle  delà  Sainte- Vierge  (1). 

On  a  de  lui  : 

«  La  science  et  la  pratique  du  plain-chant^  où  tout  ce  qui  appar- 
tient à  la  pratique  est  établi  par  les  principes  de  la  science  et  confir- 
mé par  le  témoignage  des  anciens  philosophes,  des  ph^es  de  l'Eglise 
et  des  plus  illustres  musiciens;  entf  autres  de  Guy  Arétin  et  de  Jean 
des  Murs,  par  un  religieux  bénédictin  de  la  Congrégation  de  saint 
Maur,  —A  Paris,  chez  Louis  BlUaine,  1673, 1  vol.  in-4*.  » 

«  L'auteur  dit  dans  sa  préface  que  la  principale  raison  qui  Ta 
engagé  à  entreprendre  cet  ouvrage,  est  que,  dans  la  multitude 
d'auteurs  qui  ont  écrit  sur  le  chant,  à  peine  s'en  trouve-t-il  un 
seul  qui  ait  traité  tous  les  points  de  théorie  et  de  pratique  qui  1^ 
concernent.  Après  avoir  apprécié  les  travaux  des  auteurs,  tant  an- 
ciens que  modernes,  il  déclare  que  son  dessein  est  de  faire  un  re- 
cueil de  tout  ce  qui  se  trouve  épars  dans  leurs  meilleurs  livres,  et 
d'assembler  en  un  corps  tout  ce  qui  peut  appartenir  à  la  théorie  el 
à  la  pratique  du  plain-chant. 

»  Le  P.  de  Jumilhac  divise  son  ouvrage  en  plusieurs  parties,  et 
réduit  à  six  principaux  chefs  tout  ce  qui  concerne  le  chant.  Chaque 
partie  est  divisée  en  plusieurs  chapitres.  La  première  traite  de  la 
science  du  chant  et  ne  contient  que  peu  ou.  point  de  pratique  ;  la 
seconde  traite  des  sons  ou  des  voix  et  de  leurs  intervalles  ;  la  troi- 
sième, du  tempsou  delà  mesure  des  mêmes  sons;  la  quatrième,  des 

(1)  DoM  Tassin,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégation  de  Saint- Maur, 
1770,  p.  95-98. 


LES   BÉNÉDICTINS   DE   SAINT-UAUR   ORIGINAIRES   DU    LIMOUSIN.  651 

tons  ou  modes  des  pièces  de  chant  ;  la  cinquième,  de  leurs  cadences 
et  du  temps  ou  mesure  des  silences  ou  pauses  des  mômes  caden- 
ces ;  la  sixième,  de  la  pratique  ou  de  la  manière  de  s'exercer  au 
chant. 

»  L'auteur  ajoute  deux  autres  parties,  qui  sont  la  septième  et  la 
huitième,  et  servent  de  preuves  et  d'éclaircissements  aux  points  les 
plus  importants  du  texte  des  six  parties  précédentes.  La  huitième 
et  dernière  contient  tous  les  exemples  figurés  dont  il  est  fait  men- 
tion dans  l'ouvrage.  Les  trois  premiers  exemples  sont  représentés 
sur  des  planches  gravées;  et  les  autres,  au  nombre  de  vingt,  sont 
seulement  imprimés  sur  les  pages  du  livre.  L'auteur  n'a  pas  oublié 
les  différentes  manières  dont  on  notait  le  chant  en  Occident,  avant 
que  Guy  Arétin,  bénédictin  du  monastère  de  Pompose  au  duché  de 
Ferrare,  eût  inventé  les  lignes,  les  notes,  les  lettres  ou  clefs,  le  B 
carre  ou  le  B  mol,  avec  les  syllabes  tit,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si.  Les 
fréquents  passages  de  cet  ancien  moine  italien,  cités  par  dom  Be- 
noît de  Jumilhac,  sont  pris  d'un  manuscrit  du  xi*  siècle,  apparte- 
nant à  l'abbaye  de  Saint-Evroult  en  Normandie. 

»  Il  y  a  beaucoup  d'art  et  d'érudition  dans  le  livre  du  P.  de  Ju- 
milhac.  Comme  son  nom  ne  paraît  point  au  frontispice,  les  pères 
Bouillard  et  Le  Cerf  ont  avancé  qu'il  a  seulement  dirigé  l'impres- 
sion de  cet  ouvrage,  et  que  dom  Jacques  Le  Clerc (1)  en  est  l'auteur. 
Mais  leur  prétention  est  combattue  par  dom  Martène,  qui,  dans 
rhisloire  manuscrite  de  la  Congrégation  attribue  à  dom  Benoît  de 
Jumilhac  La  science  et  la  pratique  du  plain-chant  (2).  » 

C'est  lui  «  qui  revit  et  perfectionna  les  petites  Règles  de  la  con- 
grégation de  Saint-Maur,  et  celles  qu'ell»^  prescrivit  à  tous  les  offi- 
ciers. Les  unes  et  les  autres  ifurent  imprimées  sous  le  généralat  de 
dom  Bernard  Audebert  (1663-1669).  Elles  parurent  encore  en  1687, 
sous  ce  titre  :  Règles  communes  et  particulières  de  la  Congrégation 
de  Saint-Maur,  nouvelle  édition  corrigée  sur  les  constitutions,  décla- 
rations et  règlements  des  chapitres  généraux,  1  vol.  in-S'»  (3). 

Dom  François  Chazal 

Dom  François  Chazal,  un  des  plus  stricts  observateurs  de  la 
règle  de  saint  Benoît  et  des  pratiques  de  la  réforme  de  saint  Maur, 

(1)  Ce  religieux,  né  h  Langres,  6 1  profession  à  Sainl-Âugustin  de  Limo- 
ges, le  10  avili  1641. 

(S)  Dom  Tassin,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégation  de  Saint-Maur^ 
p.  98-99. 
.  (3)  Id,  lUdy^.dB. 


bo2  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ftl   IIISTOHIQCE    DU   LmoUSIKC. 

hàt|ult,  on  1677,  de  parents  distingués  par  leur  noblesse,  dans  U 
petite  ville  de  Meymac  (aujourd'hui  Corrèze).  Il  éhtrti  dans  te^o- 
grégâtion  de  SainUMaur  et  pportonçases  vœuxâ  l'Age  de  di%-sépî 
ans,  le  1"  août  1694,  dans  l'abbaye  de  Saint-Augustin  de   Limoges. 

1.  —  Elevé  par  son  mérite  au\  digbilcs  de  son  ordre,  il  fut  un 
dés  supérieurs  les  plus  accomplis  de  la  congrégation.  Lorscjù'îl^fait 
prieur  de  Sainl-Pîerre  de  Brantôme,  il  écrivit  rhiétoire  de  cette 
abbaye. 

2,  —  Pendant  qfuMl  gouvernait  Tabbaje  de  Saint-Mâixent  en  Poi- 
tou, il  en  composa  en  latin  Thistoire,  avec  TofiBce  de  ce  palron.  On 
les  conservait  dans  la  bibliothèque  de  Fleury  ou  de  Sain t<-B^!neît- 
sur-Loire. 

3.—  Dom  Chazal  fut  nommé  prieur  de  cette  abbaye  dans  le  Cha- 
pitre général  de  1717.  11  consacra  tous  ses  loisirs  à  en  composer 
une  histoire  complète.  L'ouvrage,  en  deux  volumes  io-foffo,  est 
partagé  en  douze  livres  :  le  premier  est  précédé  d'une  épître  dédî- 
catoire  au  glorieux  patriarche  saint  Benoît  et  d'une  longue  préface. 
Celte  hisloire,  où  Ton  remarque  une  critique  judicieuse,  est  pleine 
de  recherches  sur  les  anciens  moines  de  cette  abbaye  qai  se  sont 
distingués  par  leurs  vertus,  leur  sainteté  et  leur  érudition.  Dom 
Rivet,  dans  la  préface  de  VHistoire  littéraire  de  la  Franee,  témoi- 
gne qlte  le  P.  Chazal  lui  a  donné  plusieurs  connaissances  et  com- 
muniqué diverses  découvertes  sur  les  savants  que  Tabbaye  dé  Fleur> 
ou  Saint-Benoît-sur-Loire  a  formés  dans  tous  les  siècles;  et  il 
ajoute  que  dom  Chazal  a  écrit  une  histoire  de  cette  abbaye  «  qui 
mériterait  de  voir  le  jour  ». 

4.  —  Ce  savant  religieux  écrivit  ensuite  la  notice  des  manuscriti 
de  la  riche  bibliothèque  de  Tabbaye  de  Fleury. 

5.  —  Il  composa  en  outre  les  oflices  de  la  translation  et  de  Tilla- 
tion  des  reliques  de  saint  Benoît  dans  celte  célèbre  abbaye.  Ces 
offices  ont  été  imprimés. 

6.  —  Le  Chapitre  général  de  17i3  confia  à  dom  Chazal  la  direc- 
tion du  monastère  de  Pontlevoi.  Il  commença  par  y  attirer  les  reh- 
gieux  les  plus  aptes  à  instruire  la  jeunesse  qu'on  élève  dans  le 
collège  ou  séminaire  de  celle  abbaye.  H  en  fit  Thistoire  sur  le« 
titres  originaux,  comme  il  avait  fait  celle  de  Solignac  et  des  antres 
maisons  dont  il  avait  été  supérieur. 

7.  —  II  composa  des  Heures  particulières  à  Tusage  des  écoliers 
associés  à  la  petite  congrégation  de  l'Enfance  de  Jésus.  Elles  furent 
examinées  par  un  grand  vicaire  de  l'évoque  de'Blois,  et,  sur  son 
{approbation,  imprimées  dans  cette  ville  chez  Philibert  Masson. 

Devenu  hydropiqué  depuis  quelques  années,  dom  Chazal  se  pré- 
para à  la  mort,  et,  au  mois  de  février  1729,  il  fit  son  testament  spi- 


LES   RÂTIÉOlCTIffS  M  gAtUT-IIAIjn    ORKINAIftES   DU   LIMOUSIN.  tê^ 

riUtéldâï]fcSiIeqael:iIttémoigne:son:attachefliBnt  à  .la  isame  docifine 
et  son  enlièi^e  soamisston  àl'EgUse.  .11  mourut  ie  .13  âéi^enÂre 
1729,  h'Yige  ée  tinquantwdeuxaii^,. regrette  non  s^ulemeat  detses 
codfrèrc^,  mais  des  hommes  dn^mofide  qui  dTaient  Tavi^Qt^e  4e 
le  eoonaitre  (1). 

Doxn  Jaan  Colomb 

Dmiv  Jean  'Colomb  naquit  à  Limoges,  xl'use  famille  de:  riches  né- 
,  godants,  le  là  novembre  1688.  Il  était  fils  ile.  Pierre.  Colomb  et  de 
Catherine LaTîe  (â).  Uentradans  la  congrégation  4es  ifiénédictins 
de  Saint*Manr,  et  fit  son  noviciat  à  Rennes,  dans  Tabbaye  deSaint- 
Mélame.  C^est  dans  celte  maison  jopi'il  prononça  sesivœux»  le  fômai 
I707,^à l'âge  de  dixrnenf  ans. 

Dom  Rivelse  Tassocia  avec  deux  anlre&  bénédictins,  nés  à'  Limo- 
ges, dom  Dnctou;  et  dom:  Poucet,  pour  la  composition'  de  V Histoire 
iittépaire  de  la  France,  Ces  religieux  demeuraient  ensemble  à 
Tabbaye  de  Sainte  Vincent  du  Mans.  Le  premier  volume  de  ce.  grand 
ouvrage  parut  en  1733;  le  second  et  le  troisième,  en  1785;  laqua- 
■  trième  en  1738,  et  les  autres  successivement,  fiom  Coloilib,  entré 
dans  cette  carrière  en  1727,  y  marcha  d'an  pas  ferme,  sans.-que 
rien  fût  capable  de  ralentir  son  zèle  et  de  refroidir  son  ardeur. 
Dom  Rivet  étant  mort  en  1749,  après  la  publifialion  du  .huitième 
volume,  dom  Colomb  De  cessa  de  fournir  des  roémoires.aux  conti- 
nuateurs de  rzrûfotr^/i^ratr^^  domi  Taillandier,  dom  Glémencet, 
dom  François  Clément.  Il  avait  fait,  pour  la  suite  de  .ce  grand  ou- 
vrage, des  recueils  considérables^  qui  s'étendaient  depuis,  le  xm* 
siècle  jusqu'au  xvi*  inclusivement. 

(I)  Dom   Tassun,  Histoire  lilténUre  de   la   Congrégation    de    Saint- 
Maufy  p.  49 J. 

(S)  Voici  80D  acte  de  baplôme,  que  nous  avons  transcril  dans  les  regis- 
tres de  la  paroisse  de  Saint-Pierre  : 

<r  Ledoaziesme  novembre  1688,  j^ay  baplizé  un  garçon»  n^Jc  mpsone 
joor,  de  Pierre  Coulomb  et  de  Catherine  Lavie  (son  épouse),  a  esl^  pommé 
Jean  et  a  eu  pour  parrain  Jean  Coulomb,  et  pour  marraine  d^^  J^ge,.veufve 
de  feu  H"  Jacques  de  Velxlac,  vivant  procureur  au  si^ègc  pré.sidiat.et  «éné- 
'clîal  de' la  présente  ville. 

'  i  "(Ont  sigtié)  *!  Framçoise  Juge  ;  Jean  Colomb. 

y.  GiBOT,  vicaire. 

Dans  an  autre  acte  de  baptême  (^^'janvrer-'tOOd),  Pierre;  Cimlomb  esr  dit 
maréhand* 
Autre  acte,  t  août  I0li6. 

.  '{Archivée^  communales,  de  Limageê). 


'654  SOCIÉTÉ   ARCaÊOLOGIQUE    RT   HISTORIQUE   DU  LIMOUSIIC. 

Dom  Colomb  ne  s'est  pas  borné  à  travailler  avec  applicatiGi)  à 
VHistoire  littéraire  de  la  France  :  il  a  donné  aussi  une  utile  col- 
laboration aux  savants  auteurs  de  VArt  de  vérifier  les  date$.  O 
monument  de  la  science  historique,  entrepris  par  dom  Maur  DaL- 
tine,  continué  par  dom  Clément  et  dom  Durand,  eut  une  première 
édition  en  1750;  une  seconde  édition,  augmentée  et  complétée  par 
Dom  Clément,  vit  le  jour  en  1770.  Les  savants  bénédictins  rendeoi 
hommage  à  dom  Colomb,  et  disent  dans  la  préface  de  leur  ouvrage: 

«  M.  Le  Jeune,  chanoine  prémontré  de  l'abbaye  d'Estival,  et  doE 
Jean  Colomb,  religieux  de  Tabbaye  de  Saint- Vincent  du  Manf. 
nous  ont  aidés,  par  les  mémoires  qu'ils  nous  ont  fait  parTenir  à 
débrouiller  la  chronologie  et  la  succession  des  grands-a]ailre>  du 
Temple.  Nous  avons  reçu  de  dom  Colomb  bien  d'autres  services, 
dont  nous  ne  devons  jamais  perdre  le  souvenir  :  tant  que  le  Sei- 
gneur lui  a  laissé  la  vue,  dont  il  est  privé  depuis  trois  ans  (1767. 
il  n'a  cessé  de  faire  des  recherches  pour  nous;  et  ce  que  nou^ 
avons  dit  de  mieux  sur  les  comtes  d'Anjou,  du  Maine,  de  Poitiers. 
de  la  Marche,  du  Périgord  et  d'Angouléme  est  le  fruit  de  s^> 
recherches  (1). 

En  dehors  de  sa  collaboration  à  VHistoire  littéraire  de  la  France 
et  à  Y  Art  de  vérifier  les  dates,  dom  Colomb  a  composé  plusieurs 
ouvrages,  dont  voici  le  litre  : 

1®  Histoire  de  l'abbaye  de  Saint-Vincent  du  MatiSj  qui  commence 
à  la  fondation  du  monaslère,  en  572,  et  finit  à  Tintroductioa  de  la 
réforme  de  Chezal^Benoit  en  1502  :  cette  histoire,  restée  manas- 
crite  jusqu'à  nos  jours,  a  été  publiée,  sous  la  direction  de  MM.  An- 
jubault  et  Legeay,  dans  les  Annuaires  administratifs  de  1864,  1865 
et  1866  (2). 

2°  Lettre  sur  Gilles  de  Paris,  auteur  du  poème  intitulé  Carouiv. 
Cette  lettre,  imprimée  dans  le  Journal  de  Verdun  (septembre  !75S, 
p.  206),  fut  réfutée  par  M.  du  Radier  dans  ce  même  journal  Jan- 
vier 1759,  p.  413); 

3**  Lettre  sur  Christophe  de  Longueil.  Dom  Colomb  le  fait  cod- 
naître  comme  professeur  de  droit  à  Poitiers,  fait  ignoré,  dit  Tauteur, 
(le  ceux  qui  ont  parlé  de  cet  homme  illustre  (^Journal  de  Verdn», 
janvier  1764,  p.  52); 

4'  Mémoire  pour  servir  de  supplément  et  de  correctif  aux  écrivais 
qui  ont  parlé  de  Charles-Fernande  moine  de  la  congrégation  ât 
Chezal'Benoity  par  le  R,  P,  Colomb,  religieux  bénédictin  (Journal 
de  Verdun,  décembre  1755,  p.  445)  ; 

(1)  Art  de  oérlfier  les  dates^  édit.  1770,  p.  viii. 
(2)'  Nous  devons  ce  dernier   repseignement   à  dom   Plolin   (Icitrc  do 
30  février  1866). 


LES   RÂNâDIGTlNS   DK  6AINT-HAUR   ORIGINAIRES   DU   LIMOUSIN.  658 

5®  On  trouve  à  la  Bibliothèque  nationale,  dans  Tun  des  derniers 
volumes  de  la  collection  dite  de  dom  Housseau,  une  correspon- 
dance autographe  dans  laquelle  dom  Colomb  transmet  à  dom  Hous- 
seau  de  fréquents  renseignements  sur  Ihisloire  de  la  province  du 
Maine,  que  ce  dernier  avait  entreprise  (1); 

6"  Une  Histoire  des  évéques  du  Mans  a  été  publiée  en  1837  sous 
le  nom  de  dom  Colomb;  mais  l'auteur  de  V Histoire  de  l'église  du 
Mans,  dom  Piolin,  bénédictin  de  Solesmes,  fait  observer  que  l'on 
peut  raisonnablement  douter  que  dom  Colomb  en  soit  Tauteur. 
D'abord  ni  dom  Tassin  ni  aucun  biographe  ne  la  lui  attribuent,  et 
cependant  ils  font  connaître  les  ouvrages  manuscrits  que  cet  au- 
teur avait  laissés.  Ensuite  on  ne  reconnaît  point  dans  cet  abrégé 
le  talent,  le  caractère  et  surtout  les  idées  bien  connues  de  dom 
Colomb  (4). 

Voici,  du  reste,  ce  que  dom  Piolin  nous  a  fait  l'honneur  de  nous 
écrire  à  ce  sujet  :  «  L'éditeur  de  Y  Histoire  des  évéques  du  Mans, 
attribuée  faussement  à  dom  Colomb,  est  Charles-Joseph  Richelel» 
bibliothécaire  de  la  ville  du  Mans  de  1826  à  1836,  puis  imprimeur- 
libraire  au  Mans,  né  à  Cacn  le  22  janvier  1803,  et  mort  aux  envi- 
rons de  Caen  vers  4849  ou  1850. 

»  Le  manuscrit  dont  il  s'est  servi  existe  à  la  bibliothèque  du 
Mans.  Il  est  mutilé  des  premières  pages,  et  Richelet  a  composé  ces 
premières  pages  sans  en  avertir.  Il  ne  porte  aucun  nom  d'auteur; 
mais  on  est  fondé  à  Tatlribuer  à  Jean-Baptiste  Guyard  de  La  Fosse, 
prêtre  delà  ville  de  Mayenne  et  janséniste  des  plus  obstinés. 

»  Richelet  n'allègue  aucune  raison  pour  assigner  cet  ouvrage  à 
dom  Colomb.  Il  savait  que  ce  religieux  avait  écrit  une  Histoire  de 
r abbaye  de  Saint-Vincent,  Il  lui  fallait  un  nom  quelconque  et  un 
nom  déjà  connu  :  il  prit  celui-là.  Ce  procédé  était  tout  à  fait  dans 
les  manières  de  Richelel,  et  au  Mans  il  n'y  a  pas  le  moindre  doute 
(|u'il  n*ait  pris  ce  nom  uniquement  pour  le  besoin  du  moment,  sans 
s'inquiéter  d'autre  chose  (3).  » 

Dom  Colomb,  quoique  d'une  santé  faible  et  délicate,  et  malgré 
ses  travaux  continuels,  parvint  à  un  âge  très  avancé.  Devenu  aveu- 
gle sur  la  fin  de  ses  jours,  il  était  estimé  de  tous  dans  la  ville  du 
Mans,  autant  pour  l'aménité  de  ses  mœurs  que  pour  ses  grands 
sentiments  de  piété  et  de  religion.  Il  mourut  eu  celte  ville,  dans 
l'abbaye  de  Saint- Vincent,  le  30  janvier  1774,  à  l'âge  de  quatre- 
vingt-six  ans  (4). 

{{)  Dom  Pjolin,  Histoire  de  Véglise  du  Mans,  l.  (,  p.  cjtiii. 

(2)  bom  Piolin,  Histoire  de  V église  du  Mans,  t.  I,  p.  cxxii. 

(3)  Lettre  de  dom  Piolin,  iO  février  1866. 

(i)  Dom  Tassin,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégation  de  Saint- Maur^ 
p.  761.  —  P.  Laforest,  Limoges  au  XVII^  siècle^  p.  109, 


'On  Sait  qneA' HUtQire  liUéraire  de  la  France,  interrompue  par  U 
B^vplutH>n,'fat  reprise. en «1807. par  ordre  de  ('empereur/  et  que  b 
ràdaclion  «n  fut  jConTiée  à  T'Académie  des  Inscriptions  et  BeUa- 
L«^^^5.  DaQs  ravertis&ement  qui  précède  le  treizième,  volume,  ie< 
continuateurs  de  ce  grand  ouvrage  rendent  un  hommage  méntè 
aux  deux  bénédictins  limousins  dom  Poncet  et  dom  Colombo  «  Le< 
mémoires  de  dom  Colomb  relatifs  à  VHistaire  littéraire  restèrest 
au  Haps,  disent-ils,  après  la  mort  de  ce  dernier  :   ils  ont  été 

recueillis,  mis  en  ordre  et  conserv.és  avec  soin  par  M.  l'abbé  R^ 
nouard,  conservateur  de  la  bibliothèque  départementale  du  Maos. 
lequel,  sur  un  ordre  de  Son  Excellence  le  ministre  dé  rintérieur. 
en  a  fait  la- remise  à  la  classe  d'histoire  etlde  Qllérature  ancienne 
»  Quelque.  insufOsant  que  soit  ce  secours,  la  commission  se  fait  uii 
devoir  d'en  reconnaître  l'utilité  et  de  payer  le  tribut  d'esUme  dû  a 
'deux  solitaires  (sic),  qui,  sans  aucune  eàpéraoce  de  gloire,  tétaient 
.dévoués. à  CA  travail  (i).  » 

M.  ClémQntfSimon,  au  ch&teau  de^fiacb,  commune  de. NaTe> 
{Gorrèzç),  possède,  nous  .a-t-on-dit,  de  nombreux  manuscrits  df 
dom  Colomb. 

Dom  François  Deschamps 

Dom  François  Deschamps,  né.  à.  Limoges  le  24  février  ilid  {%. 
entra  dans  la  congrégation  des  Bénédictins  >de  Saint-Maur.  li  fit 
profession  dans:  l'abbaye  de^  Saint-Allyrede  Clermont,  le  11  octo- 
bre 1746  (3),  à  râg.î  de  divhuit  ans,  dit  la  matricule  de  l'ordre . 

Reçu  membre  de  l'Académie  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de 
Clermont-Ferrand,  nous  ne  savons  en. quelle  année,  il  y  lut  plu- 
sieurs mémoires,  qui  sont  conservés,  à  la.  Bibliothèque  de  Cler. 
mont,  dans  les  cahiers  de  cette  savante  compagnie.  Citons  en  par- 
ticulier les  deux  suivants  : 

1°  Dissertation  sur  les  rois  d'Auvergne,  par  dom .  Descbamp$. 
ne)igieux  bénédictin  de  la  Congrégation  de.Saint-rMaur,  et  de  la 
Société  littéraire  de  Clermontv  lue  à  l'assemblée  publique  de  1761. 
Cette  dissertation  existe  dans- les  registres  de  la  Société.  On  en 
trouve  un  extrait  dans  le^Mercure,  mars  1765  (p.  1|6  433). 

«  yauleurrnégligeant  de  traiter  de  l'origine  des  Auvergnats, 
comme  étant  une  question  fort  obscure  et  peu  susceptible  de  noo- 

(1)  Hist,  lUtér.  de  la,  France^  ^•,^?^^  avertisse çncnl. 
(S)  Legros^  Poat7té|m8.  de  Nadauà^  t.  If,  an.  1805. 
(3)  DchiTassin,  Histoire  lùiéraire  deYaÙon^régation  de  Sofni-Ma^^ 
p.  7Ô9.  .       ♦     i  -     .•  - 


velles  lomières,  se  côntcûle  de  prouver  que  leur  pays  était  fort 
peuplé  et  la  lïation  plrfssante  dès  ratr  629cte  la  fottdàtibYi  dé'  Rome, 
ce  (pA  répond  tf  ceû't  vingt-deux  ans  avatrt  Tère  clïrôlîénné.  If  entre 
dans  té  plus  grand  détail  str^  ce  cfuî  concerne  lèà  roîs  d'Auvcfgne, 
leur  gouvérnèibent,  leurs  richesTses,  leurs  nftBUrs;  et  il  cMduîl  cette 
histoire  jusqu'à  la  mort  de  Vércingétorîx.  II  fixe  la  portion  de 
Gergovia  sur  h  montagne  qui  en  porte  le  uoni,  à  mfile  lieue  éû  sud 
de  Cterniont.  R  déterminé  le  passage  de  l'Allier  par  César  à  Vkfiy, 
où  il  prétend  qu'on  trouve  encore,  des  restes  des  pieuX  ^uî  softfte- 
naient  un  pont  de  bois.  EnGn,  il  traite  de  Nemossus,  caput  Arvemo- 
rum^  que  Strabon  platce  sur  la  Loire,  mais  qui  n'était,  selon  dom 
Deschamps,  que  la  première  ville  d'Auvergne  dans  cette  partie,  et 
non  la  capitale  dé  totit  le  pays  des  Arvernes  (1).  » 

Nous  lisons  dans  le  Supplément  de  la  Bibliothèque  hlstoriqt$e  dé  là 
France,  parle  P.  Lelong  (édition  Fontette),que,  «  le  25  août  1766, 
dom  François  Deschamps,  bénédictin  de  la  congrégation  de  Saint- 
Manr,  lut  à  l'Académie  de  Clermoni  un  Utémoire  historique  sur  les 
anciens  rois  d'Auvergne  »,  qui  était  sans  doute  le  complémettt  ou 
la  suite  du  travail  précédent,  el  on  ajoute  :  «  Ce  Mémoire  est  entre 
les  mains  de  l'auteur,  qui  travaille  à  Une  histoire  générale  de 
l'Auvergne  »  (2). 

^  Dissertation  sur  le  temps  od  a  técU  Vinnebr'and,  auteur  de  la 
Vie  de  saint  Aïlyre,  évéque  de  Cïermoni, 

Cette  Dissertation,  conservée  dans  les  registres  de  la  société  lit- 
téraire de  Clérmont,  se  trouve  datiis  la  Bibliothèque  de  cette  ville. 
La  vie  de  saint  AUyre,  par  Vinnebrand,  était  manuscHte  dans  les 
arctiives  de  l'abbaye  de  Sâint-Allyi-e.  Ce  rtiatluicrit  est  cité  par  Sa*- 
vàrôn  ;  et  presque  tous  lés  historiens  qui  ont  inailé  de  l'Auvergne, 
dom  Mabilion,  les  auteurs  du  Gallia  chri^tiàna\  s'autorisent  de  soh 
léàïoignage  :  mais  on  n'a  pôirtt  encore  assigné  d'époyjtfe  stire  à  ce 
manuscrit. 'On  a  dit  qu'il  est  de  Vinnebrrftid,  moîne  de  Saint-Xhjrè, 
dont  on  ignore  l'époque,  cujus  œtas  ig)%ora'tiir.  L'auteur  de  la  dis- 
sertation rapporte  ce  rtianuècrit  et  le  temps  xiii  a  Vécu  son  auteur  & 
la  fin  du  vni*  siècle  ou  au  commencement  du  ix®  ;  il  donne  en 
môme  tempâ  an  entrait  de  ce  manuscrit  (3). 

Outre  les  dissertations  citées  dans  la  Bibliothèque  -dû  P.  Lelong, 
on  conserve  à  la  Bibliothèque  de  Clermont,  dans  les  papiers  de 
l'anciennne  Académie,  quatre  autres  mémoires  de  doVn  Frataifois 
Deschamps. 

{^)'BWliatfiè^ue  historique  <ie  la  France^  par  le  P.  Lelong,  édition 
Pttrftw^B,  h«  3;9I5,  t.  1,'p.  Uâ. 
(ï)  Jbid.,  n»  37,403.  l.  V,  p.  490. 
(à)  "Blétiàih^ue  historique  d£  la  France,  n«  fc/ili,  t.  I;  p.  Stô. 


é 

i 


d5d  SOCIÉTÉ  AnCllROLOÛIQÛe    Rt   BI^rORlOUB   DU   L1É0US)K. 

Les  volumes  340  et  347  de  la  colleclioa  Moreau  conlieDoent<]o 
nombreuse& lettres  de  ce  religieux,  toates  relatives  à  sa  mission  en 
Auvergne,  et  une  série  de  pièces  copiées  par  lui  dans  des  monas- 
tères ou  des  châteaux  de  la  partie  haute  de  cette  province  (1). 

Nous  voyons,  d'après  une  note  manuscrite  de  l'abbé  Legros  î 
que  dom  François  Deschamps  résidait  à  Meymac  (Corrèze)  en  18û5, 
Û  était  alors  âgé  de  soixante-seize  ans;  il  est  probable  qaile>i 
mort,  peu  de  temps  après,  dans  cette  ville.  Mais  nous  ignorons  h 
jdate  précise  de  son  décès. 

Dom  Joseph  Duclou 

Duclou  (Joseph)  naquit  à  Limoges  vers  1680.  Il  était  fils  de  Jean 
Duclou,  bourgeois  et  marchand,  demeurant  faubourg  Monlmailler. 
ot  de  Marie  Romanet. 

Son  père,  qui  prend  le  titre  de  sieur  duTeilloux  ou  du  Teillol  3 
obtint,  le  28  mars  4698,  un  brevet  d'armoiries,  signé  Charl»*? 
d'Hozier,  que  nous  avons  sous  les  yeux.  Ces  armes  sont  :  d^azur  à  m 
chevron  d'or  surmonté  d'un  croissatit  d'argent,  accompagné  de  troit 
clous  d'argent,  deux  en  chef  et  un  en  pointe. 

Joseph  Duclou  entra  jeune  encore  dans  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur  et  prononça  ses  vœux  dans  Tabbaye  de  Saint-Augustin  de 
Limoges,  le  30  mars  1698.  Ses  gouls  et  ses  aptitudes  le  portaient 
vers  les  recherches  historiques,  vers  Télude  des  antiquités  chré- 
tiennes et  de  la  lillérature  nationale.  Ses  supérieurs  l'appelèrent  à 
Paris,  fi  l'abbaye  de  Sainl-Garmain-des  Prés,  pour  travailler,  sons 
la  direction  du  savant  Denys  de  Sainte-Marthe,  au  Gallia  christiana. 

Le  premier  volume  de  cet  important  ouvrage  avait  paru  en  1715: 
Denys  de  Sainte-Marthe,  en  1717,  s'adjoignit  dom  Duclou;  etdaQ> 
l'avertissement  qui  précède  le  second  volume,  publié  en  1720,  il  a 
soin  de  dire  que,  outre  les  collaborateurs  mentionnés  dans  la  pré- 
face du  premier  volume^  il  s'est  associé,  depuis  trois  ans,  deux 
membres  de  sa  congrégation,  deux  hommes  très  religieux  et  très 
doctes,  dom  Jean  Thiroux  et  dom  Joseph  Duclou,  qui  lai  prêteat 
l3ur  concours  pour  la  continuation  et  l'achèvement  de  l'ouvrage 
commencé  (4). 

(1)  Lettre  de  M.  A.  Vernièrb  (Brioude,  21  juillet  1887). 

(2)  PouUlé  ni8,  (ieNADAUD,  t.  Il,  an  1803. 

(3)  Ce  domaine  noble,  situé  dans  la  commune  de  Chaplelat,  fut  acheté, 
le  14  août  1647,  par  Jeaa  Duclou,  aïeul  du  bénédictin.  Les  descendants 
actuels  de  Jean  Duclou  ont  ajouté  le  nom  de  ce  domaine  à  leur  nom  de 
famille  et  signent  Duclou  du  Teillol. 

(4)  Prsetcr adjutores  et socios  mei  laboris  in  prasralionc  primi  Gallie  Cbris- 


LES  BéNROrCTINS   DB  SAINT-MaOK   ORlGINAtHKS  DU   LIllODSIH.  6^0 

-  Le  troisième  volume  parut  en  1725  ;  Denys  de  Sainte-Marllie 
étant  mort  celte  année,  dom  Duclou  fut  chargé  de  continuer  l'ouvrage 
avec  la  collaboration  de  dom  Jean  Thiroux  et  de  dom  Félix  Hodin.  II 
lit  paraître  les  deux  volumes  suivants  :  le  quatrième,  publié  en  1728, 
renferme  un  grand  nombre  de  ses  recherches  (I);  le  cinquième 
parut  trois  ans  plus  tard  (1731). 

La  réception  forcée  de  la  bulle  Unigenitus,  en  1723,  dans  la  con- 
grégation de  Saint-Maur,  ayant  eu  pour  résultat  de  faire  disperser, 
par  lettres  de  cachet,  les  religieux  de  Tabbaye  de  Saint-Germain  qui 
avaient  donné  dans  les  idées  jansénistes,  dom  Duclou  subit  le  môme 
sort  que  plusieurs  de  ses  confrères  qui  furent  bannis  de  Saint- 
Germain  à  cause  de  leur  opposition  à  la  bulle;  il  fut  relégué  dans 
Tabbayede  Chezal-Benolt,  diocèse  de  Bourges,  et  ensuite  dans  celle 
lie  Saint-Vincent  du  Mans. 

Dans  celte  nouvelle  retraite,  dom  Duclou,  sans  cesser  de  fournir 
des  matériaux  pour  la  continuation  du  Gallia  christiana,  fut  associé 
à  dom  Rivet  de  la  Grange  pour  travailler  à  V Histoire  littéraire  de  la 
France.  Ce  savant  bénédictin,  né  à  Confolens,  «  ne  pouvait  suffire  à 
à  ce  travail  :  il  choisit  parmi  ses  confrères  quelques  religieux  qui 
pussent  l'aider  dans  ses  recherches  ;  il  les  voulait  laborieux,  exacts, 
réguliers,  d'un  goût  sûr  et  capables  de  l'éclairer  lui-même  dans  les 
discussions  épineuses  d'un  ouvrage  de  celte  nature:  il  eut  le  bonheur 
de  trouver  ces  qualités  réunies  dans  dom  Joseph  Duclou,  dom  Mau- 
rice Poncet  et  dom  Jean  Colomb.  Ces  trois  religieux,  qui  étalon L  déjà 
ses  amis,  devinrent  ses  associés  ;  ils  travaillèrent  de  concert  depuis 
ce  moment,  et  leur  assiduité  fut  si  grande,  qu'en  1728  dom  Rivet  se 
irouva  en  état  de  commencer  l'impression  de  ï Histoire  litté- 
raire  (2)  ». 

Toutefois,  le  premier  volume  ne  parut  qu'en  1733  :  dom  Rivet 
mourul  en  1749,  après  la  publication  du  VHP  volume  et  eut  pour  suc- 
cesseurs, dans  la  direction  de  l'œuvre,  d'abord  domClémencet,  puis 
dom  Clément. 

On  a  de  dom  Duclou  une  notice  sur  dom  Rivet.  Cette  notice  a 
été  publiée  dans  \^  Journal  historique  de  Verdun,  mars  1751, 

lianae  tomi  commémorâtes, duos  ex  noslro  sodalilio  à  tribus  annis  accessc- 
ruDt,  viri  religiosissimi  et  doclissimi  domnus  Johannes  Tliiroux  etD.Jose- 
pbus  Duclou  qui  mutuam  operam  mihi  conferunt  ad  suscepli  operis  conti- 
nualionem  et  perfectionem.  {Gallia  christiaixa^  t.  Il,  admonitio). 

(1)  In  prs^^enti  volumine,  opéra  et  studio  DD.  Johannis  Thiroux,  Joseph 
Duclou  et  Felicis  Hodin  confecto.  [Gallia  christiana,  t.  IV,  col.  xux). 

(3)  Eloge  de  dom  Rivet,  dans  VHlêtoire  littéraire  de  la  France  t.  IX, 

p.  XXIX. 


De  nombreux  documents,  peeueîllis.  par  le  tobecieiifeiL  bé^édietin. 
Mt  servi  a^x  membres  de  LlnsUtat  chargés  de  Qe^UaueF  ÏBùtoir^ 
littéraire  de  la  France. 

Bom  Ducloit  mourtil  à  Sasat-ViDceat  da  Mans  le  34  avril  1735, 
wftt  la  rèpucation  d'ua  religieux  Irès  savaat  et  très  piena  (1). 

Dom  I/éoBard  Duclou 

Ducloa  (Léoiianl)>  né  à  Limoges,  aevea  du  préeédeol  el  hè^t- 
dietift  comme  lui,  mourut  au  monastère  de  Soligoac  Ters  1790  (i . 

Ilafail  composé  un  Bieiionnaire  de  la  langue  liw^êunnê^  Am\ 
il  montrait  l'analogie  arec  les  langues  anciennes  et  modernes. 

Cet  ouvrage  avait  paru  digne  de  l'impression,  puisqu'il  est  saivi 
du  permis  d'imprimer. 

On  trouve,  dans  le  Calendrier  limourin  de  4777,  un  prospectus 
de  ce  Dictionnairey  proposé  par  souscription  à  5  franoa^  en  juîu 
1776.  L'ouvrage  devait  former  un  volume  in-8*  et  paraître  en  mars 
1777;  il  ne  fut  pas  publié  faute  de  souscripteurs. 

Le  volume,  resté  manuscrit  (in-é^"),  se  trouvait,  en  1811,  entre 
les  mains  de  xV.  Duclou,  commissaire  aux  impositions  :  en  185i  i) 
faisait  partie  de  la  bibliothèque  de  M.  Roméo  Cbapoolaud,  impri- 
meur; il  appartient  aujourd'hui  à  ses  enfants  (3). 

Dom  Dumas  (Jean-Laiireiit) 

Dumas  (Jean-Laurent),  né  à  Lubersa^,  diocèse  de  Umog<»ft  iao- 
jTMird'hui  diocèse  de  Tulle),  fit  profession  à  Saint-Augustin  de  li- 
moges le  15  août  1628,  à  l'âge  de  dix-neuf  ans.  Il  était  né  par 
conséquent  en  1609«  Il  monrut,  le  8  mai  1676,  au  moiuaslère  do 
SOiigiuic.  Il  a  fourni  au  Monaitkùn  Benedictinum:  Abrégé  des  cko- 
$n  plus  remarquables  arrivées  ou  qui  se  reneantremi  au  monastère 
de  SolemnaCy  depuis  la  fondation  diceluy,  1663  (BlbltoCheque 
natiuiaie,  manuscrits  ialins,  n""  12^7,  fol.  137  (4). 

M.  l'abbé  Leder,  coré-doyen  de  Gompreignac,  possède  «me  copie 
de  cet  ouvrage. 

(t)  Bom  Lb  Ceef,  Bibliothèque  historique  de  la  Congrégation  de  ^aint-- 
Maur,  p.  465;  —  Dom  Tassin,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégatloti  de 
Saint'Maur,  1770,  p.  792;  ~-  Âbbô  Vitra^,  Aiuiales  de  îBtt^  31  mi, 
p.  173.;  —  Auguste  Du  Boys,  Biographie  limousine^  1834,  p.  213» 

(3)  Âbbé  ViTBAC,  manuscrit. 

(3)  Annales  de  ÎBÎÎ^  vendredi  31  mai, p.  173;  —  Biographi$  ImQjtmne, 
(Auguste  Du  Boys),  p.  StS;^  Laporbst,  Limoges  au  XVtî*  gié<d€^  p.  aHè, 

(4)  Matricule f  n»  307;  —  Ulysse  Robert,  Supplément  à  rhistoire  Utté- 
ruire  des  Bénédictins  de  Saint-Maur^  p.  41, 


lF.S  bftl^éDlGtlNS  t>B   SAlKT-lkAUlt   OlfOINAIKft»   DO   UWODSIN.  661 


Dom  Dupeyrat  (Michel) 

Dapeyrat  (Michel),  né  à  Limoges  vers  4633,  fit  profession  dans 
le  monastère  de  Saint-Augustin  le  47  février  4654,  à  Tàge  de  dix- 
sept  ans.  Il  mourut  à  Saint-Savin  de  Poitiers  le  34  décembre  1694, 
à  rage  de  cinquante-huit  ans.  Il  est  Tauteur  de  Commentaires  sur 
la  règle  de  Saint-Benoit  conservés  à  la  Bibliothèque  nationale,  ms. 
lat.  42,642  1^4). 

Dom  Dupin  (Jean- Augustin) 

Dupin  (Jean-Augustin),  né  à  Limoges  eii  4577,  embrassa 
la  réforme  de  Saint-Vanne  et  fit  profession  dans  Tabbaye  de 
Saint-Vanne  de  Verdun,  en  Lorraine,  à  l'âge  de  trente  ans, 
le  25  mars  4607.  Il  fut  du  nombre  des  religieux  bénédictins 
de  Saint- Vanne  qui  vinrent  de  Lorraine  en  France  pour  intro- 
duire la  réforme  dans  les  monastères.  Envoyé  à  Tabbaye  de 
Saint-Augustin  de  Limoges,  il  seconda  puissamment  dom 
Regnault,  le  principal  fondateur  de  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur  (2).  En  4G35,  il  se  trouvait  à  Limoges  dans  Tabbaye  de  Saint- 
Auguslin.  Il  mourut  dans  l'abbaye  de  Sainte-Croix  de  Bordeaux 
le  24  février  4652,  à  l'âge  de  soixante-quinze  ans.  «  On  conserve  en 
manuscrit  à  Saint-Augustin  de  Limoges,  dit  domTassin,  V Histoire  de 
celte  abbaye,  par  dom  Augustin  Du  Pin,  religieux  de  ce  monas- 
tère (3;.  Ce  manuscrit,  que  l'abbé  Nadaud  avait  vu,  a  malheureu- 
sement disparu. 

Dom  Fdye  (André-Joseph) 

Faye  (André-Josephj,  né  à  Solignac  en  4654,  fît  profession  à 
Saint-Mélaine  de  Rennes,  le  34  août  4672,  à  Fâge  de  vingt  et  un 
ans.  H  nwurut  le  45  octobre  4699,  au  monastère  de  Beaulieu  en 
Limousin.  Il  a  composé  l'ouvrage  qui  a  pour  litre  :  Le  moyen  de 
vivre  content,  qui  est  conservé  jl  la  Bibliothèque  nationale  (ms. 
français  49,322)  (4). 

(4)  Matricule,  n»  1376;  — Ulysse  Robert,  loc.  cit.,  p.  80. 
(3)  Laforest,  Limogea  au  XVIl^  siècle,  p.  104,  105, 

(3)  Dom  ÎASsm,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégation,  de  Saint-Maur^ 
p.  51  ;  —  Biographie  limousine^  p.  2i6. 

(4)  Matricule,  0^307;  —  Ulysse  Robert,  op.  cit.,  p.  4%. 

T.  XL.  il 


^^' 

..<*' 


66S 


SOCIÉTÉ  ARCaÉOLOGIQUK  Kt  HISTORIQUE  DU   LlttOUSIN. 


m^ 


Dom  Galand. 


Il  ^^• 


h-^. 


Galand  (Jean-Martial),  né  à  Saint-Julien,  diocèse  de  Tulle,  ni 
profession  à  Bourgueil,  le  30  janvier  1724,  et  mourut  à  Notre-Dame 
des  Noyers  en  1766.  On  a  de  lui  : 

1»  Histoire  ou  chronique  de  t  abbaye  royale  de  Saint-Maur  if 
Glanfeuil'Sur-Loire,  1748,  ms.  franc.  18,923; 

2"  Histoire  des  évéques  d'Angers.  Ibid.,  p.  261  ; 

3**  Chronologie  des  seigneurs  de  Craon  depuis  Van  9^7  jns 
qu'en  i738,  ms.  franc.,  19,863  (publiée  par  M.  NobiUeau). 

Il  nous  apprend  lui-môme  (ms.  fr.  18,923,  p.  255)  qu'il  a  corih 
posé  une  Histoire  de  l'abbaye  de  Beauiieu-les-Loches,  Est-ce  1^ 
notice  qui  est  dans  le  ms.  lat.  12,797,  fol.  158,  v^? 

(Matricule,  no  5767.  —  Ms.  fr.  18,923  et  19,863)  (1). 


Dom  Laurent  (François) 


9 


Laurent  (François)  alias  Laurens  et  Lorenl,  né  à  Bourgaoeuf. 
diocèse  de  Limoges,  en  1625,  fil  profession  dans  l'abbaye  de  Saini- 
Augustin  de  Limoges  le  18  octobre  1642,  à  l'âge  de  dix-sept  ans.  Il 
mourut  le  29  septembre  1688,  au  monastère  de  Mauriac,  en  Au- 
vergne. Il  a  fourni  au  Monasticon  Benedictinum  l'histoire  du  Monas 
tère  de  Saint-Pierre  de  Mauriac.  —  Bibliothèque  nationale.   m>. 

lat.  12,683,  fol.  159  (2). 

» 

Dom  Martin  (Joseph) 

Martin  (Joseph),  né  à  Limoges  vers  1669,  fit  profession  au  rai>- 
nastère  de  Saint-Augustin  de  cette  ville  le  12  avril  1688,  à  l'âge 
de  dix-neuf  ans.  Il  mourut  à  Saint-AIlyre  de  Clerraont  le  19  juiii 
1709.  On  a  de  lui  :  Apparatus  in  editionem  Theodereti,  ms.  Ju 
supplément  grec  de  la  Bibliothèque  nationale. 

(Matricule,  n'»3759.  —  Ms.  417  du  supplément  grec  (3). 


(()  Ulysse  Robert,  Supplément  à  l'histoire  des  bénédictins  de  Scùa:- 
Maur.  p.  47. 

(t)  Matricule,  n"  lOlS;  m-?,  lat.  «2,683,  fol.  '59;—  Ulysse  Robert. 
Supplément  à  l'Histoire  littéraire  de  la  Congrégation  de  SairU-Maur, 
p.  61. 

(3)  Ulysse  Robert,  Supplément  à  l'Hist,  littér,  de  Ut  Congrégation  de 
Saini'hiaury  p.  71. 


l 


LES  BÉNÉDICTINS   DR  SAINT-llAUR   OUlGINAlRES  DU   LIMOUSIN.  56^ 

Dom  Léonard  de  Massiot. 

Dom  Léonard  de  Massiot  naquit  en  1643,  à  Saint-Léonard  de 
Noblac  (1),  diocèse  de  Limoges. 

La  famille  Massiot  était  très  ancienne  à  Saint-Léonard.  M.  Louis 
Guibert,  dans  son  Recueil  des  livres  de  raison  (2),  a  publié  les  regis- 
tres de  comptes  et  notes  diverses  de  Gérald  Massiot  et  de  ses 
enfants,  du  17  février  1431  jusqu'à  la  fin  du  xv*  siècle.  Parmi  les 
prieurs  de  TArtige,  on  en  trouve  deux  de  cette  famille  :  Etienne 
Massiot,  prieur  en  1432  et  1436;  autre  Etienne  Massiot,  en  1468(3). 

Léonard  entra  dans  la  congrégation  de  Saint-Maur  en  1661 ,  et  il 
prononça  ses  vœux  le  13  octobre  1662,  dans  l'abbaye  de  Saint-Allyre 
de  Glermont. 

En  1678,  il  fut  nommé  prieur  de  Mauriac.  Pendant  plus  de  vingt- 
cinq  ans,  il  fut  successivement  supérieur  dans  plusieurs  monastères  : 
prieur  de  Tabbaye  de  Saint-Savin  en  Poitou  (4701-1702),  prieur  de 
Tabbaye  royale  de  Saint-Cyprien  de  Poitiers  (1703-1709),  il  fut  sou- 
vent député  aux  Chapitres  généraux  de  son  ordre;  partout  il  sut 
conquérir  Teslime  et  mériter  Taffection. 

Religieux  d'une  vertu  éminenle,  il  réunissait  une  vaste  science  à 
une  grande  piété.  Son  talent  pour  la  prédication  se  fit  connaître  un 
jour  dans  une  grande  assemblée.  Le  prédicateur  se  trouvant 
empêché  par  une  indisposition  subite,  dom  Massiot  monta  en 
chaire  et  improvisa  un  sermon  qui  excita  l'admiration  de  tout  son 
auditoire. 

Sur  la  fin  de  ses  jours,  dom  Massiot,  devenu  très  infirme,  obtint 
d'être  déchargé  de  ses  fonctions  de  supérieur.  11  souffrit  ses  maux 
avec  une  patience  et  une  douceur  admirables.  Sa  mort  répondit  à  sa 
vie  édifiante;  il  rendit  son  âme  à  Dieu  le  25  avril  1717,  à  l'âge  de 
soixante-quatorze  ans,  dan  l'abbaye  de  Saint-Cyprien  de  Poitiers, 
où  il  avait  été  supérieur  (4). 

On  a  de  lui  l'ouvrage  suivant  : 

Traité  du  sacerdoce  et  du  sacrifice  de  Jésus-Christ,  et  de  son  union 

(1)  Et  non  pas  à  Saint-Léonard  de  Noaille,  comme  on  lit  dans  dom  Le 
Cerf  (p.  3!7)  et  dans  dom  Tassin  (p.  380). 

(2)  Liorea  de  raison,  registres  de  famille  et  journaux  indioidueU 
Limousins  et  Marchais,  1 888. 

(3)  Prieuré  de  VArtige^  par  Tabbé  Roy-Pierrefitte,  Bulletin  archéolo- 
gique, t.  YiU,  p.  102. 

(4)  Don  Tassin,  Histoire  littéraire  de  la  Congrégation  de  SainUMaur^ 
p.  380-81. 


6di  SOCliTB  ARCUÉ0L0G1Q|]E  Et  DISTOR^QUB  l>l)  LlliOUSiM. 

avec  les  fidèles  dans  ce  mystère,  —  A  Poitiers,  chez  Jean  Fleuriaut:; 
Jacques  Faulcon,  1708,  iD-4^ 

Seconde  édition  en  1714,  à  Poitiers,  chez  Jacques  Faulcon,  in4*, 
642  pages. 

Ce  traité  était  achevé  en  1701,  aiors  que  dom  Massiot  était  prieur 
de  Saint-Savin  en  Poitou. 

L'ouvrage  est  divisé  en  quatre  livres.  Le  premier  traite  du  sacri- 
fice en  général  :  on  y  trouve  des  pages  savantes  sur  les  preuves  d? 
l'existence  de  Dieu,  sur  le  culte  intérieur  et  extérieur  qui  lui  estdiL 
et  sur  le  sacrifice,  qui  est  la  forme  la  plus  excellente  du  cqIU: 
divin. 

Le  second  livre  traite  du  sacerdoce  et  du  sacriGce  de  Jésus-Chri^i 
où  le  Sauveur  est  tout  à  la  fois  prêtre  et  victime.  L'auteur  montn* 
Tunité  et  la  durée  de  ce  sacrifice,  qui,  commencé  dans  le  temps, 
se  perpétue  dans  la  suite  des  siècles  et  se  continue  tous  les  joQ^^ 
sur  nos  autels. 

Le  troisième  livre  traite  des  effets  et  du  mérite  du  saciifîced»- 
Jésus-Christ,  sacrifice  d'expiation,  sacrifice  de  louanges  et  d'actions 
de  grâces,  mystère  d'unité,  signe  de  l'union  des  fidèles,  mystère  de 
foi,  oii  Dieu  manifeste  sa  toute  puissance  :  ici  l'auteur  donne 
diverses  preuves  de  la  présence  réelle  dans  Teucharislie. 

Le  quatrième  livre  traite  du  sacerdoce  de  Jésus-Christ,  en  tant  qu'il 
se  communique  aux  ministres  de  son  Eglise.  Ici  l'auteur  parle  de  la 
dignité  des  prêtres  et  de  leurs  devoirs  d'état;  il  montre  le  pouvoir 
qu'ils  ont  reçu  d'offrir  le  sacrifice,  de  remettre  les  péchés  et  d'ins- 
truire les  peuples. 

Il  termine  ce  quatrième  livre  par  de  savantes  considérations  sur 
les  ornements  sacrés  et  sur  les  cérémonies  liturgiques,  dont  ii 
explique  le  symbolisme  et  le  sens  mystérieux  ;  il  entre  dans  de  grands 
détails  sur  les  prières  et  les  diverses  cérémonies  de  la  Messe. 

Les  nombreux  passages  des  pères  et  des  docteurs  de  L'Eglise  qui 
sont  cités  dans  ce  livre  accusent  chez  fauteur  une  vaste  érudition, 
et  les  savanls  commentaires  dont  il  les  accompagne  dénotent  on 
esprit  doué  de  facultés  éminentes. 

L'évêque  de  Poitiers  (Jean-Claude  de  la  Poype)  à  qui  cet  ouvrage 
était  dédié,  le  fit  lire  dans  son  séminaire.  Il  dit,  en  approuvant  ce 
traité  :  «  Nous  le  croyons  très  utile  pour  renouveler  dans  les  prêires 
et  dans  le  reste  des  fidèles  la  foy  et  la  ferveur  avec  laquelle  il  faut 
participer  »  au  sacrifice  de  Jésus-Christ. 

M.  de  Rochebonne,  évoque  élu  de  Noyon,  disait  également  ;  *& 
traité  m'a  paru  très  capable  d'instruire  et  d'édifier  les  fidèles  ». 

Le  P.  Pouget,de  l'Oratoire,  auteur  in  Catéchisme  de  Montpellier. 
s'exprimait  ainsi  :  «  Ce  livre  n'est  qu'un  précis  de  ce  que  les  Sainls- 


V!. 


LES   BÉNÊDICTIKS   DE   SAINT  MAUR   ORlGlNAfRRS   DU   LIMOUSIN.  665 

Pères  ont  dit  de  plus  beau  et  de  plus  édifiant  sur  cette  impor- 
tante matière.  Les  prêtres  et  les  simples  fidèles  ne  sauroienl  trop 
se  remplir  de  la  doctrine  divine  répandue  dans  tout  cet  ouvrage  ». 

Ce  livre  est  aujourd'hui  fort  rare  et  fort  recherché  (1). 

«  Le  nécrologe  de  Saint-Cyprien  de  Poitiers,  où  mourut  dom 
Massiot,  rappelle  très  religieux  et  très  instrui,t  dans  les  lettres. 
Supérieur  plusieurs  fois,  il  s'aquitta  dignement  de  sa  charge,  sur- 
tout pendant  six  ans,  à  Saint-Cyprien  de  Poitiers.  Il  mourut  muni 
des  sacrements  et  est  enterré  dans  le  chapitre.  Il  était  habile  théo- 
logien, quoiqu'il  n'eût  pas  enseigné.  Il  avait  commencé  et  a  laissé 
inachevé  un  autre  ouvrage  :  «  De  la  nature  réparée  par  Jésus- 
Christ  [i)  ». 

II.  —  Ajoutons  ici  quelques  notes  sur  divers  membres  de  la 
famille  Massiot. 

1.  —  En  1SS3,  le  lundi  11  septembre,  le  siège  présidial  de 
Limoges  fut  installé  par  M.  Massiot,  conseiller  au  parlement  de 
Bordeaux  (3). 

2.  —  Jacques  de  Massiot  se  distingua  dans  les  écoles  de  droit  de 
Toulouse,  et  devint  conseiller  au  parlement  da  Bordeaux  en  1558  (4). 

3.  —  Lacroix-du-Maine,  dans  sa  Bibliothèque  Française,  publiée 
en  1584,  cite  un  Massiot  parmi  les  savants  limousins  qui  florissaient 
de  son  temps  (5).  Il  s'agit  sans  doute  de  Léonard  de  Massiot,  dont 
nous  connaissons  un  distique  latin  placé  au  dessous  du  portrait  de 
Bernard  de  Gérard,  historiographe  de  France,  en  tôle  de  son  édi- 
tion de  l'Histoire  de  France,  publiée  à  Paris  en  1576  : 

In   effigiem    B.    Girardi    Francorum    historiographie 

Leonardi  Massioti  Lemovicis  Nobiliaci  distichon  : 

Corporis  ista  quidem  est,  animi  sed  imago,  volumen; 

Carta  capax  formœ,  non  opus  ingenii, 

Léonard  de  Massiot,  fils  de  Mathieu,  conseiller  à  Télection  de 
Limoges,  était  aussi  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux  (6). 

4.  —  La  famille  Massiot  fut  anoblie  au  xvi*  siècle,  et  devint  pro- 


(1)  Dans  les  catalogues  du  libraire  Demichelis,  il  est  coté  20  francs 
(février  1865),  24  francs  (février  1869),  25  francs  (mai  I86i).  Nous  possédons 
un  exemplaire  de  la  seconde  édition. 

(î)  Nadaud,  Dictionn.  ma,,  p.  287,  318. 

(3)  P.  BONAVENTURE,  t.  111,  p.  775. 

(4)  Annales  de  la  Haute- Vienne,  il  juillet  1812. 

(5)  Bibliothèque  Française,  p.  305. 

(6)  Annales  de  la  Haute-Vienne,  i.i  juillet  18ti. 


666  SOCl^É   ARCHÉ0L0G1QUK  KT  HtSTORIQUC  OU  LIMOUSIN. 

priétaire  dn  ch&teau  du  Muraod,  qui  appartenait,  au  xv*  sièele,  àia 
famille  Daniel  (1).  Léonard  de  Hassiot,  écuyer,  sieur  do  Morand, 
élu  en  rélection  de  Limoges,  épousa,  en  1606,  Madeleine  de  Jo- 
milhac,  fille  d'Antoine  Chapelle,  écuyer,  seigneur  de  Jumilhac  en 
Périgord  (2). 

8.  —  En  1638,  le  chanoine  Jacques  de  Massiot  fut  dépoté  avec 
le  chanoine  Jean  Fargeaud  pour  porter  à  la  reine  Anne  d'Autriche 
une  relique  de  saint  Léonard  (3). 

6.  —  En  1701,  on  voit  figurer  parmi  les  consuls  de  la  ville  d/* 
Saint-Léonard  M.  de  Massiot,  sieur  du  Muraud,  frère  oo  neveu  do 
bénédictin  (4). 

La  famille  Massiot  n'existe  plus  à  Saint-Léonard  ;  elle  est  tombée 
en  quenouille  dans  la  famille  Veyrier  du  Muraud.  Le  dernier  repré- 
sentant du  nom,  Jacques  Massiot,  chanoine  de  Périgueux,  mort  à 
Saint-Léonard  en  novembre  1763,  avait  une  sœur  mariée  avec 
M.  Veyrier  de  ViroUe,  qui,  en  héritant,  par  son  mariage,  du  châ- 
teau du  Muraud,  ajouta  ce  nom  à  son  nom  de  famille. 

Dom  Maurice  Poncet. 

I.  —  Dom  Maurice  Poncet  naquit  à  Limoges  vers  Tan  1684. 
Il  suivit  l'exemple  d'un  frère  qui  s'était  consacré  à  Dieu  dans  Tor- 
dre de  Saint-Benoit,  et  alla  faire  son  noviciat  dans  la  célèbre 
abbaye  de  Marmoutiers,  située  dans  un  faubourg  de  la  ville  de 
Tours.  Il  y  prononça  ses  vœux  à  l'âge  de  dix-neuf  ans,  le  27  mai 
1705,  en  même  temps  que  dom  Rivet,  dont  il  devait  être  plus  tard 
le  collaborateur  pour  VHistoire  littéraire  de  la  France. 

Il  suivit  avec  beaucoup  d'application  et  de  succès  les  cours  do 
philosophie  et  de  théologie,  sans  jamais  négliger  ni  perdre  de  vue 
les  moindres  obligations  de  Tétat  religieux  qu'il  avait  embrassé;  el, 
comme  il  manifestait  une  rare  aptitude  pour  les  œuvres  d'érudilion 
et  les  travaux  littéraires,  il  fut  envoyé  avec  dom  Rivet  à  l'abbaye 
de  Saint-Florent  de  Saumur,  où  les  supérieurs  de  la  Congrégalion 
avaient  fondé,  pour  le  perfectionnement  des  études,  une  académie 
de  langues  savantes  et  de  sciences  ecclésiastiques. 

Cette  académie,  composée  de  religieux  distingués   par   leurs 

(1)  Nobiliaire  Limousin,  t.  Il,  p.  9  et  36. 

(tjNobiUaire  Limousin,  t.  ili,  p.  20  ;  t.  !•%  t«  édil.,  p.  428. 

(3)  L'ABOi  Oboux,  Histoire  de  la  oie  et  du  cuUe  de  saint  Léonari, 
1760,  p.  180. 

(4)  Vie  de  saint  Léonard^  1863,  p.  Î72. 


LES   BENEDICTINS   DE   SAINT-HAUR    ORIGINAIRES  DU  LIMOUSIN.  667 

talents,  était  dirigée  par  dom  Thierry  de  Viaixnes,  habile  théolo- 
gien de  la  congrégation  de  Saint- Vannes,  malheureusement  entaché 
de  jansénisme,  que  les  ordres  de  la  cour,  en  1710,  avaient  transféré 
à  Saumur  à  cause  de  son  opposition  à  la  bulle  Unigenitus,  Dom 
Rivet  et  dom  Poncet  subirent  un  peu,  il  faut  l'avouer,  l'influence 
de  leur  maître. 

L'Académie  de  Saint-Florent  avait  pour  objet  la  science  de  la 
théologie  dégagée  de  la  méthode  scolastique  et  étudiée  principale- 
ment dans  ses  sources.  Ainsi  c'était  surtout  dans  les  textes  origi- 
naux de  l'Ecriture,  dans  les  Conciles,  dans  les  Pères  grecs  et  latins, 
dans  les  anciens  historiens  de  l'Eglise,  que  les  académiciens  de 
Saumur  puisaient  la  science  ecclésiastique. 

«  L'émulation  fut  telle  dans  cette  société  de.  jeunes  littérateurs 
qu'en  moins  de  deux  ans  ils  composèrent  à  l'envi  plusieurs  disser- 
tations sur  les  sujets  les  plus  difficiles  de  l'érudition  sacrée  (1).  » 
Dom  Poncet,  qui  se  livrait  à  l'étude  avec  beaucoup  de  zèle  et  de 
succès,  fit  plusieurs  dissertations  remarquables,  dont  une  seule, 
élaborée  vers  17i3,  a  été  publiée  en  1760.  Elle  a  pour  titre  : 
Nouveaux  Éclaircissements  sur  Vorigine  et  le  Pentateuque  des  Sama- 
rilainsy  par  un  religieux  bénédictin  de  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur. 

IL  —  Chose  digne  de  remarque,  ce  n'est  pas  dom  Poncet  qui  a 
fait  paraître  cet  ouvrage  :  c'est  dom  Clément,  savant  et  laborieux 
bénédictin,  l'auteur  de  la  grande  édition  de  VArt  de  vérifier  les 
dates,  le  continuateur  du  Recueil  des  historiens  de  France,  Dom 
Clément  a  revu  et  publié  cette  dissertation,  du  vivant  même  de 
l'auteur.  11  a  mis  en  tête  du  livre  une  préface  très  instructive,  et  il  a 
ajouté  à  la  fin  une  partie  du  xi'^  chapitre  et  le  xn®  en  entier  (2). 

Cette  dissertation  traite  principalement  du  Pentateuque  des  Sama- 
ritains. L'auteur  parle  d'abord  de  l'origifie  de  ce  peuple,  des  causes 
de  la  haine  mutuelle  des  Samaritains  et  du  peuple  juif,  des  livres 
qu'ils  reconnaissaient  comme  canoniques,  de  l'époque  où  ils  avaient 
reçu  leur  Pentateuque,  des  différences  qu'il  y  a  entre  leur  texte  et 
le  texte  hébreu  des  Juifs,  etc.  Dom  Poncet  met  dans  tout  son  jour 
et  développe  parfaitement  la  preuve  que  les  théologiens  ont  cou- 
tume de  tirer  du  Pentateuque  samaritain  pour  démontrer  l'authen- 
ticité et  l'intégrité  des  cinq  livres  de  Moïse. 

Les  journalistes  de  Trévoux  parlèrent  de  cet  ouvrage  avec  éloge. 

Dom  Poncet  avait  composé  une  autre  dissertation  qui  avait  pour 


(1)  D.  Clément,  préface  du  Pentateuqtie  Samaritain,  p.  13. 

(2)  FiLLER,  Dict,  hist,,  art.  D.  Clémcni. 


668  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HlSTOaiQt'B   DU   LfHOUSlN. 

litre  :  «  De  l'inspiration  des  livrés  saints^  contre  Leclerc,  MoUma. 
Lsesius,  Richard  Simon  »;  mds  le  manuscrit  est  perda  (i). 

m.  —  Dom  Poncet  avait  été  appelé  à  Paris  avec  Dom  Rivei  : 
mais  le$  sentiments  d'opposition  qu*il  avait  manifestés,  avec  sot 
confrère,  contre  la  bulle  Unigenitus,  le  firent  reléguer  avec  iaî,  ^s 
1723  v2),  à  l'abbaye  de  Saint- Vincent  du  Mans.  «  Ses  supérieur- 
voulurent  sauver  avant  tput  Tintégrité  de  la  foi.  Qu'importe  h 
science,  si  elle  s'égare,  et  que  fait  la  grandeur  de  Tesprit  si  la 
vérité  s'amoindrit  (3)  !  » 

A  Saint-Vincent  du  Mans,  dom  Poncet  fut  associé  aux  travanv 
du  savant  bénédictin  dont  ii  avait  partagé  la  disgrâce.  Dom  Rivet. 
né,  comme  on  sait,  à  Confolens  (4),  avait  conçu  le  vaste  dessein 
d'écrire  VHistoire  littéraire  de  la  France.  II  chercha  autour  de  In: 
quelques  savants  religieux  qui  pussent  l'aider  dans  cette  immeo?^ 
entreprise,  et  il  choisit  pour  collaborateurs  trois  bénédictins  nés  à 
Limoges,  dom  Joseph  Duclou,  dom  Maurice  Poncet  et  dom  Jean 
Colomb. 

Voici  le  témoignage  que  dom  Rivet  a  rendu,  dans  la  préface  d** 
VHistoire  littéraire  :  «  Dom  Maurice  Poncet,  en  particulier,  ayant 
bien  voulu,  dès  1723,  s'associer  avec  nous  pour  l'exécution  de  noire 
dessein,  en  a  partagé  le  travail  (autant  que  les  différentes  situa- 
tions où  la  Providence  l'a  mis  ont  pu  le  lui  permettre)  jusqu'au 
commencement  de  celte  année  1732.  Il  est  fâcheux  que  sa  santi^ 
Tait  abandonné  au  besoin,  et  l'ait  obligé  d'interrompre  ses  utiles 
recherches  (8).  » 

En  1732,  «  obligé  d'aller  où  la  Providence  l'appelait  »,  pournou- 
servir  des  expressions  de  dom  Tassin,  il  continua  d'amasser  des 
matériaux  atin  de  contribuer  à  la  perfection  de  ce  grand  monument 
littéraire. 

IV.  —  Ce  qui  dislingue  surtout  dom  Poncet,  c'est  le  noble  dé- 
sintéressement avec  lequel  il  se  livrait  à  ses  utiles  travaux.  Loin 
de  vouloir  en  retirer  aucun  avantage  personnel,  il  communiquait 


(1)  Nadaud,  Mém,  mss,  —  Vitrac,  Annales  de  la  Haute-Vienne^  16|mar« 
4813. 

(t)  Si  nouseo  croyons  une  feuille  clandestine  et  janséniste  inlttulée:  In 
Nouoellea  Ecclésiastiques,  celte  relégalion  aurait  eu  lieu  le  99  août  I7il. 

(3)  L'abbé  Saivet,  Biographie  de  dom  Rœet . 

(4)  Voirdansla  Semaine  religieuse  6' Anf^oul&me^  iO  mai  et  tO  juin  1866, 
une  remarquable  biographie  de  dom  Rivet,  qu*on  doit  à  la  plume  facile  et 
savante  de  M.  Tabbé Saivet  (depuis  évéque  de  Perpignan). 

(5)  Histoire  littéraire  de  la  France,  préface,  p.  ixxiu. 


LE3  BteBDlCTINS  OB  SAINT-HAUR   ORlGlflAIRBS  DU   LIMODSIIV.  669 

libéralement  à  ses  confrères  le  fruit  de  ses  laborieuses  recherches, 
montrant  par  là  qu'il  ne  travaillait  pas  dans  Tespoir  d*une  vaine  et 
stérile  renommée,  mais  dans  l'intérêt  de  la  science  ecclésiastique 
et  pour  la  gloire  de  la  religion. 

Parmi  les  autres  bénédictins  qui  reçurent  de  lui  une  précieuse 
collaboration,  nous  citerons  les  savants  auteurs  du  Nouveau  Traité 
de  Diploinatigue,  dom  Touslain  et  dom  Tassin.  Ces  religieux,  qui 
étaient  ses  amis,  lui  en  ont  témoigné  leur  reconnaissance  dans 
deux  endroits  de  leur  ouvrage  (1). 

<(  Ce  n'était  pas  seulement  à  ses  confrères  qu'il  donnait  le  fruit 
de  ses  lectures  continuelles  :  plusieurs  savants  séculiers,  tels  que 
M.  Ponce  des  Essarts  et  M.  de  Mongeron,  profilèrent  des  mémoires 
qu'il  leur  envoya.  » 

V.  —  «  Il  serait  difficile,  dit  l'historien  de  la  Congrégation  de 
Saint-Maur,  a  qui  nous  avons  emprunté  une  partie  de  ces  détails 
biographiques,  il  serait  difficile  de  trouver  un  homme  dont  l'éru- 
dition fût  plus  vasle.  Il  y  Joignait  une  candeur  et  une  simplicilc 
admirables.  Mais  ce  qui  fait  encore  mieux  son  éloge,  c'est  sa  ten- 
dre piété,  l'amour  de  son  état  et  la  pratique  continuelle  et  persé- 
vérante de  toutes  les  vertus  chrétiennes  et  religieuses  (2).  »  C'est 
dans  ces  saintes  dispositions  qu'il  finit  ses  jours  dans  l'abbaye  de 
Coulombs,  au  diocèse  de  Chartres  (3),  le  2  novembre  1764. 

Les  manuscrits  de  dom  Poncet  relatifs  à  VHistoire  littéraire 
du  xin*  siècle,  et  s'étendant  môme  jusqu'à  la  fin  du  xiv%  furent, 
après  sa  mort,  envoyés  à  Paris,  à  l'abbaye  des  Blancs-Manteaux.  — 
Les  membres  de  l'Académie  des  Inscriptions,  chargés  de  continuer 
IHiMoire  lUtérait^e  de  la  France,  se  sont  fait  un  devoir  de  recon- 
naître l'ulilité  des  recherches  de  dom  Poncet,  et  de  payer  un  Iribut 
d'estime  à  son  érudition,  aussi  solide  que  d^^sintéressée  (4). 

Un  autre  bénédictin  du  même  nom,  dom  Poncet,  fut,  à  l'époque 
de  la  Révolution,  le  dernier  prieur  claustral  de  l'abbaye  de  Saint - 
Augustin,  à  Limoges. 

Bom  Armand  Vaslet. 

Armand  Vaslet,  religieux  bénédictin,  prieur  de  Beaulieu,  en 
1723  et  1727,  a  écrit  V Abrégé  de  l'histoire  de  Beaulieu  (5). 

(i)  Nouoeaa  Traité  de  diplomatique,  1750-1765,  t.  I,  p.  544. 

(9)  Dom  Tassin,  HUt.  littér,  de  la  Congrégation  de  Saint  Maur,  p.  760. 

(3)  Aujourd'hui  canton  de  Nogent-Ie-Roi,  département  d'Eu re-ct- Loir. 

(4)  Hist,  littér,  de  la  France,  t.  XIII,  Avcrlissemenl. 

(5)  Chronique  de  Brigueil  l'ainé,  Arckioes  historiques^  t.  IV,  p.  16 
(1899). 


670  SOCIÉTÉ  AnCBÉOLOGIQUE  ET   HISTORIQUE  DU   LIHOUSIN. 

Dom  Verthamond  (Jean-Grégoire). 

Verthamond  (Jean-Grégoire),  né  à  Limoges  vers  1601,  fil  prth 
fession  à  Nouaillé,  en  Poitou,  le  23  mai  1620,  à  Tâge  de  dix-neaf 
ans.  Il  mourut  le  5  mai  1680,  à  Jumiëges.  Il  est  Tauleur  de  di- 
vers ouvrages  qui  sont  demeurés  manuscrils  à  Jumièges. 

(Matricule,  n'88;  —  Nouvelles  acquisitions  franc,  4170).  Hù- 
toire  de  l'abbaye  de  Jumièges,  2*  partie,  p.  184  (1). 

L'abbé  Arbellot. 


(1)  Ulysse    Robert,    Supplément   à    VHist,  littér,  des  Bénédictins  df 
SainUMauTy  p.  94. 


L'ÉGLISE  DE  BLOND 


Parmi  les  diflférentes  communes  qui  forment  T arrondissement 
de  Bellac,  une  des  plus  intéressantes  pour  Tarchéologue  aussi  bien 
que  pour  le  touriste  est  certainement  la  commune  de  Blond.  Au 
touriste,  ce  coin  de  pays  pauvre  et  montagneux  offre  plus  d'un  site 
pittoresque,  soit  que  des  hauteurs  nues  et  couvertes  de  bruyères 
qui  dominent  le  bourg  au  Sud,  on  découvre,  charmé,  dans  la  direc- 
tion de  Bellac  et  au-delà,  un  immense  horizon  ;  soit  que,  tout  en 
parcourant  Tune  des  cinq  ou  six  roules  qui  traversent  celte  com- 
mune, on  se  trouve  tout  à  coup  au  milieu  de  quelque  vaste  lande, 
entrecoupée  ça  et  là  de  vieilles  châtaigneraies  mélancoliques  aux 
troncs  difformes  et  plus  que  séculaires.  Que  dis-je?  Le  touriste  peut, 
à  unefaible  dislance  du  bourg,  dans  la  montagne,  admirer  une  véri- 
table curiosité  naturelle,  je  veux  parler  des  fameux  rochers  de  Puy- 
chaut,  ces  trois  blocs  gigantesques  qui  oscillent  sur  eux-mêmes. 
Mais,  plus  encore  que  le  voyageur  en  quête  des  beaux  sites  ou  des  phé- 
nomènes de  la  nature,  Farchéologue  a,  dans  la  commune  dont  il  s*agi  t, 
de  quoi  exercer,  de  diverses  manières,  ses  sagaces  investigations. 

En  dehors  du  bourg,  l'emplacement  encore  visible  de  l'ancien 
château  de  la  Barde,  ainsi  que  les  ruines  gallo-romaines  de  la  forêt 
de  laTourette;  dans  le  bourg  même,  la  vieille  église,  semblable  de 
loin  à  une  sorte  de  forteresse,  tout  cela  sollicite  également  l'atten- 
tion des  amateurs  du  passé. 

L'église  de  Blond!  Il  y  a  certes  là  le  sujet  d'une  étude  spéciale, 
d'autant  plus  qu'elle  n'a  pas  seulement  pour  nous  un  intérêt  archéo- 
logique, mais  que,  si  nous  en  croyons  la  curieuse  chronique  inscrite 
en  marge  de  son  plus  ancien  registre  paroissial  qui  remonte  à  1559, 
elle  aurait  joué,  pendant  la  seconde  moitié  jdu  xvi*  siècle,  à  l'occa- 
sion des  guerres  de  religion,  un  rôle  très  important.  Aussi  e^-ce  à 
ce  point  de  vue  particulier  que  nous  allons  nous  placer.  Nous  nous 
proposons,  dans  le  court  et  modeste  travail  qui  va  suivre,  d'étudier 


6Ti  SOCIÉTF.  ARCRROLOGIQUE  RT  DISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

successivement  l'église  doDt  les  habitants  de  Blond  sont  justemenl 
fiers,  par  son  côté  archéologique  d'abord,  puis  par  son  côté  his- 
torique. 

Sous  le  rapport  archéologique,  il  est  certain  que  cel  édifice  esl 
des  plus  remarquables.  On  peut  s'en  convaincre  en  considérant  taat 
soit  peu  allenlivement  les  excellentes  vues  photographiques  que  je 
suis  heureux  de  pouvoir  offrir  à  la  Société  historique  et  archéolo- 
gique du  Limousin  et  que  je  dois  au  talent  et  à  Tobligeance  de  mon 
beau-frère  le  C*"  Maurice  des  Monstiers  Mérinville. 

Deux  de  ces  vues  surtout  nous  donnent  une  idée  très  complète 
du  monument  que  je  voudrais  essayer  de  décrire  en  quelques 
lignes. 

L'une  est  prise  du  côté  Est  du  bourg,  l'autre  de  la  petite  place 
qui  précède  l'église  au  Nord-Ouest.  La  première  nous  montre  l'en- 
semble de  la  nef  terminée  par  un  chevet  arrondi,  éclairé  lui-même 
par  trois  fenêtres  gothiques  et  étayé  de  deux  légers  contreforts.  La 
seconde  nous  fait  apparaître,  vue  de  biais,  la  tour  carrée  du  clocher, 
avec  sa  belle  façade  que  surmonte  un  campanile  et  dans  la  partie 
inférieure  de  laquelle  s'ouvre  un  large  portail  roman  à  triple  toos- 
sure.  Acoup  sûr  tous  ces  détails  donnent  à  l'église  qui  fait  l'objet  de 
cette  étude  un  aspect  des  plus  intéressants.  Mais  ce  n'est  pas  là  tout. 
Ce  qui  la  recommande  le  plus,  selon  moi,  à  notre  attention,  c'e-^t 
le  système  défensif  qui  paraît  avoir  élé  adapté,  à  une  époque  donnée, 
à  chacune  de  ses  parties.  Ce  n*est  pas  en  effet  seulement  de  loin, 
comme  nous  Tavons  dit  tout  à  Fheure,  que  notre  église  ressemble  à 
une  forteresse;  plus  on  la  regarde  de  près,  et  plus  ce  caractère 
lui  semble  inhérent.  Ne  voit-on  pas  d'abord  que,  tout  autour  de  la 
partie  supérieure  tant  de  la  nef  que  du  clocher,  règne,  immédiate- 
ment au  dessous  du  toit,  toute  une  série  de  fenêtres,  les  unes  bou- 
chées, les  autres  encore  béantes,  qui  étaient  évidemment  destinées 
à  concourir  à  la  défense  de  l'édifice  eu  cas  d'attaque  ?  Puis  chacun 
des  quatre  gros  contreforts  servant  d'appuis  à  la  tour  carrée  du 
clocher,  n'est-il  pas  surmonté  d'une  espèce  de  petit  réduit  également 
pourvu  d'ouvertures  et  par  conséquent  approprié  de  même  à  la 
défense?  Enfin  que  dire  de  ces  mâchicoulis  qu'on  aperçoit  au-dessus 
du  portail,  à  la  hauteur  des  réduits  dont  nous  venons  de  parler? 
Comme  l'indique  assez  clairement  la  porte  à  demi  murée  dont  le 
seuil  apparaît  un  peu  au-dessus  d'eux,  ils  sont  sans  aucun  doute 
les  restes  d'une  sorte  de  balcon  en  pierre  qui  avait  pour  but,  lui 
aussi,  de  protéger  de  ce  côté  l'édifice.  Ainsi,  sous  quelqu'aspeetque 
l'on  considère  l'église  de  Blond,  il  est  évident  que  nous  avons  là, 
comme  à  Rançon  et  à  Compreignac,  une  de  ces  anciennes  églises 
fortifiées  qui  abondaiont  autrefois  dans  la  Basse-Marche  ainsi  que 


dans  la  règioa  enYironnante,  et  qui,  noa  moins  qae  les  châleaux- 
forts^  servaient,  en  temps  de  guerre,  à  la  défense  du  pays. 

Très  intéressante,  on  le  voit,  au  point  de  vue  archéologique, 
l*église  à  laquelle  nous  avons  consacré  celte  élude,  Test  peut-être 
encore  davantage  au  point  de  vue  historique.  On  connaît  en  effet 
son  histoire  pendant  les  guerres  religieuses  de  la  moitié  du  xvi*  siè- 
cle, où,  nous  le  répétons,  elle  a  joué  un  rôle  relativement  impor- 
tant. Ce  rôle,  il  est  vrai,  n'avait  pas  encore,  à  notre  connaissance 
du  moins,  été  mis  en  lumière  par  les  différents  historiens  ou  chro- 
niqueurs qui  se  sont  occupé  de  Thistoire  du  pays,  et  pourtant  il 
nous  est  attesté  par  un  témoin  irrécusable,  par  M*'  Martial  Michau. 
Curé  de  Blond  de  1865  à  <613,  celui-ci,  sur  les  registres 
paroissiaux  dont  la  tenue,  selon  Tusage  d'alors,  lui  était  confiée,  a 
eu  l'heureuse  idée  d'inscrire,  en  marge,  une  mention  plus  ou  moins 
détaillée  de  chacun  des  événements  importants  ou  simplement 
curieux,  qui,  à  cette  époque  mémorable,  s'étaient  passés  dans 
sa  paroisse  ou  y  avaient  eu  leur  contre-coup.  Nous  n'avons 
donc,  pour  raconter  l'histoire  de  l'église  de  Blond  pendant  les 
guerres  de  religion,  qu'à  reproduire  successivement  les  passages 
les  plus  intéressants  de  la  chronique  laissée  par  le  vieux  curé  du 
xvi'  siècle,  et  nous  essayerons  en  môme  temps  de  compléter  ou 
d'expliquer  ces  précieux  documents  par  les  renseignements  que 
nous  fournit  l'histoire  du  Poitou,  de  la  Basse-Marche  et  du  Limousin 
durant  cette  môme  période. 

C'est,  nous  l'avons  dit,  à  Tannée  1559  que  remontent  les  actes 
les  plus  anciens  contenus  dans  le  plus  vieux  des  registres  paroissiaux 
conservés  à  la  mairie  de  Blond.  Quant  à  la  chronique  de  Messire 
Martial  Michau,  lequel  commence,  comme  curé  de  la  paroisse,  à 
écrire  de  sa  main  les  actes  de  baptême  avec  le  1"  janvier  1565,  celte 
chronique  débute  en  octobre  de  Tannée  1567,  à  l'occasion  du 
passage  des  troupes  protestantes  dans  le  pays.  Voici,  inscrite  à  la 
suite  d'un  baptême  du  29  octobre,  la  note  aussi  curieuse  qu'impor- 
tante relatant  les  graves  événements  dont  la  paroisse  qui  nous 
occupe  venait  d'être  le  théâtre. 

«  Ce  mesme  jour  et  penultiesme  dud.  moys  d'octobre,  l'église  de 
B|om  fust  ruinée  et  du  tout  deslruicle  par  les  heuguenaulx  jusques 
aux  grilhes  des  fenestres  et  veries,  et  ne  vit  ount  jamais  tant  grant 
companie  de  gens  d'armes  qu'il  passa  par  led.  bourg  lesd.  deux 

jours,  et  autour  sept  ou  huit  lieues lellememenl  que  en  passant 

ils  preigniount  les  lièvres  enlr'eulx  sans  chiens,  et  le  say  par  gens 
qui  en  virent  prendre  les  ungs  en  dessendent  de  la  lande  à  Mont- 
large,  et  d'autres  es  landes  du  chaîne  de  la  lègue,  comme  me  dict 
et  assura  le  grant  Jehan  de  la  Bourderie,  par*  de  Monsteroullet,  en 


674  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOÛIQUB  Et   BIStORlQUE  DU  LlMODSlK. 

venant  de  Montmorilhion,  ensemble  le  lO*  jour  de  janvier  15Tî 
emprès  que  lui  et  Jehan  de  Bral  en  virentprendre  deaxesd.  laade< 
sans  ciens  et  une  qui  se  saulva. 

»  Les  ornements  de  l'Eglise  de  Blom  furent  tous  prins  par  lesd. 
heuguenaulx  en  ung  secret  qui  estoit  chez  Jehan  Marchadier. 
demeurant  aud.  bourg,  et  fust  led.  secret  enseigné  par  Maisirt 
Guilhelme  Gravier,  iceulx  estant  mountés  à  cheval  pour  s'en  aler. 
car  ils  ne  le  heussent  peu  aultremenl  trouver,  mesmes  qu'il> 
couchèrent  droict  dessus  sans  en  rien  congnoistre.  » 

Ainsi,  d'après  la  chronique  en  question,  dans  ces  derniers  jours 
d'octobre  1567,  l'église  de  Blond,  dont,  à  la  première  nouvelle  de 
l'approche  des  huguenots,  on  s'était  empressé  de  retirer  les  «  orne- 
ments »  pour  les  cacher  chez  un  habitant  du  bourg,  M«  h  han  Mar- 
chadier, l'église  de  Blond  n'avait  pas  échappé  à  la  fureur  icono- 
claste de  ces  terribles  partisans  :  tandis  que,  pendant  deux  jours 
consécutifs,  leurs  bandes  innombrables  ne  cessaient  de  traverser  le 
bourg  de  Blond  et  inondaient  le  pays  à  deux  ou  trois  lieues  à  la 
ronde,  ceux  d'entre  eux  qui  s'étaient  arrêtés  dans  cette  localité  rai- 
naient et  détruisaient  entièrement  l'église  catholique,  principal  objet 
de  leur  haine.  Faut-il  prendre  toutefois  à  la  lettre  la  phrase  de  Bles- 
sire  Martial  Michau  relative  à  cette  destruction  et  croire  qu'il  ne  soil 
rien  resté  de  réditice  dont  il  s'agit?  Evidemment  non,  puisque  le 
môme  chroniqueur  a  soin  d'ajouter  que  si  «  l'Eglise  de  Blond  fut 
ruinée  et  du  tout  destruicte  »,  ce  fut  seulemement  «  jusqaes  aux 
grilhes  des  fenestres  et  verries  ».  Ce  qu'il  aura  voulu  dire  surtout 
dans  sa  phrase  un  peu  obscure^  c'est  que  les  huguenots,  comme  ils 
le  faisaient  du  reste  partout  ailleurs,  avaient  non  seulement  détruit 
et  peut-être  brûlé  tout  ce  qui  se  trouvaient  à  l'intérieur  de  l'église 
en  fait  de  bancs,  confessionnaux  et  autres  boiseries,  mais  qu'ils 
avaient  arraché  aussi  les  barraux  de  fer  des  fenêtres,  et  brisé,  dans 
leur  zèle  fanatique,  lesvitraux  où  étaient  représentés  les  images  de> 
saints. 

On  sait  d'ailleurs  par  l'historien  Pierre  Robert  que,  le  81  de  ce 
môme  mois  d'octobre  1567,  une  armée  calviniste  de  2,000  hommes, 
commandée  parSaint-Cyr,  après  avoir  incendié  lebourgdeI-.eslerp< 
et  traversé  celui  de  Peyrat,  devait  venir  mettre  le  siège  devant  la 
ville  du  Dorât;  nul  doute  par  conséquent  que  la  »  tant  granl  com- 
pagnie de  gens  d'armes  »  qui  avait  passé  par  Blond  le  29  et  le  30. 
c'est-à-dire  la  veille  et  l'avant-veille,  ne  soit  précisément  cette 
armée  de  Saint-Cyr. 

Si  Tannée  1567  avait  été  néfaste  pour  les  habitants  de  la  paroisse 
dont  il  s'agit,  l'année  1569  devait  être  pour  eux  encore  plus  néfaste. 
N'était-ce  pas  le  temps  ou  les  huguenots  battaient  les  catholiques  à 


L^iOLISR  Dl  ftLONb.  675 

la  bataille  de  La  Roche-r Abeille  en  Limousin,  et  où  Goiigny  passait 
par  le  Dorai  en  se  rendant  à  Poitiers,  dont  il  devait  entreprendre  le 
siège,  non  sans  avoir  détruit  sur  son  passage  Téglise  de  Saint-Sau- 
veur-de-Charroax?  Aussi  ne  sommes  nous  pas  surpris  de  voir  cette 
année-là  le  bourg  de  Blond  et  son  territoire  en  butte,  à  plusieurs 
reprises,  aux  incursions  de  Tennemi.  Mais  laissons  la  parole  à  notre 
chroniqueur  :  «  Le  l"jour  de  juingi569,  dit-il,  Téglise  de  Blom  fut 
parachevée  de  ruiner  et  le  clouchier  bruslé  par  ung  (parti  de)  quatre 
cent  chevaulx  qui  vindrent  de  Conroulant  conduits  par  le  page 
Vosnial  et  le  capitaine  nommé  Monsieur  de  Montbrun  qui  fut  lue 
trois  ou  quatre  jours  emprès  devant  Chabanois.  » 

Quel  était  ce  page  Vosniat  dont  parle  M*  Martial  Michau?  Nous 
rignorons.  Quant  au  capitaine,  nommé  Monsieur  de  Montbrun,  il 
s'agit,  croyons-nous,  de  François  deCoussac,  seigneur  de  Montbrun, 
qui  en  février  1568,  Tannée  précédente  par  conséquent,  avait  été 
cité  au  rôle  des  nobles  du  Haut-Limousin  convoqués  pour  le  ban  et 
Tarrière-ban.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que  ces  deux  chefs  hugue- 
nots se  montrèrent  non  moins  impitoyables  pour  les  malheureux 
habitants  de  Blond  que  ne  Tavaient  été  deux  ans  auparavant  les 
troupes  de  Sainl-Cyr,  puisqu'ils  achevèrent  de  ruiner  Téglisè, 
déjà  si  saccagée  par  leurs  devanciers,  et  môme  n^iésilèrent  pas  à 
mettre  cette  fois  le  feu  au  clocher. 

Après  avoir  accompli  ces  actes  de  vandalisme,  Vosniat  et  Mont- 
brun se  dirigèrent  du  côté  de  Chabanais  où  le  second  de  ces  deux 
personnages  devait,  paraît-il,  trouver  la  mort;  mais  leur  troupe  ne 
larda  pas  à  être  remplacée  par  une  autre  compagnie  de  gens 
d'armes  qui,  si  elle  ne  se  rendit  pas  coupable  d'excès  aussi  graves, 
n'en  fut  pas  moins  à  charge  à  la  population  de  notre  paroisse,  car, 
répartie  dans  les  villages  où  elle  était  logée,  elle  se  livrait  au  pillage 
et  à  la  maraude.  «  Le  i8«  du  d.  moys  (d'octobre)  »,  ajoute  en  effet 
le  chroniqueur,  «  fut  prins  ung  jument  de  quelque  compagnie  qui 
estoit  lougiée  à  Villeahroulze  et  Puisgranier  (1).  D'aulcuns  qui  s'en 
estoient  venuz  longer  à  chez  la  Mercière  de  lad.  compagnie  dirent 
que  ce  estoit  des  larrons  et  allèrent  quérir  des  gentilshommes  qui 
estoient  pour  lors  à  Puisregnau  pour  icelle  (jument)  avoir;  lad. 
compagnie  estant  venue,  il  n'y  demeura  homme  au  bourg?  que  trois 
ou  quatre,  tant  ils  estoient  aimés?  et  firent  de  grant chouses?  » 

Puisregnau,  dont  il  est  ici  question  n'est  autre  que  Puernaud, 
lieu  noble,  aujourd'hui  disparu,  qui  étaitsitué  tout  près  du  village  de 
ce  nom,  à  quelques  centaines  de  mètres  du  bourg  de  Blond,  non 

(1)  Villerajouze  et  Puygrcnier,  villages  situés  dans  la  montagne  aa  sud 
el  dans  la  paroisse  de  Blond. 


loin  de  la  route  actuelle  de  Vanlry.  Tenu  directement  à  foi  et  hom- 
mage de  la  chateHenie  de  Mortemart  (1),  il  appartenait  alors  à 
«  N.  H.  Melchior  de  Blom,  escuyer,  seigneur  de  Beaupuy  ». 
donl  une  fille  avait  été  baptisée  le  4  avril  1863  dans  Téglise  de 
Blond,  et  dont  la  femme,  damoiselle  Marguerite  de  Gaing,  arait 
figuré  comme  marraine  Tannée  d'après  dans  la  même  église  {2.. 
Le  seigneur  de  Puernaud  était  par  conséquent  bon  catholique 
et  ce  n'était  pas  lui  qui  avait  attiré  volontairement  les  huguenots 
dans  son  manoir.  D'autre  part,  comme  on  le  voit,  les  gentilshommes 
du  parti  contraire  aux  catholiques  qui  avaient  occupé  momentané- 
ment ce  manoir  faisaient  observer  aux  soldats  auxquels  ils  com- 
mandaient un  semblant  de  discipline,  puisqu'ils  s'étaient  chargés 
d'aller  punir  eux-mêmes  les  larrons  calvinistes  de  ViHerajouze  et 
de  Puygrenier. 

Vers  la  môme  époque,  avait  eu  lieu  de  l'autre  côté  de  Limoges  la 
bataille  de  La  Roche-l' Abeille  à  la  suite  de  laquelle  Coligny  victo- 
rieux emmena  son  armée  dans  le  Poitou  afin  d'en  assiéger  la  capi- 
tale. Il  dut  passer  à  peu  de  distance  de  Blond,  entre  le  bourg  et  la 
ville  de  Bellac  et  c'est  très  f,robablement  au  passage  dans  la  con- 
trée del'armée  protestante  que  fait  allusion  M""  Martial  Michau  dans 
le  passage  suivant  de  sa  chronique  écrit  en  marge  des  actes  du 
mois  de  juillet  (1569). 

<(  En  ce  temps  ici  emprès  passa  le  camp  des  heuguenaulx,  eU  an 
plus  près  de  nous,  longèrent  à  Nouy  (3)  et  Mazières  (4)  et  tenoit 
tout  jusques  à  la  Vienne  (5)  et  bien  cinq  ou  six  lieues  en  bas,  et 


(f)  Voir  aux  archives  de  la  Vienne  Paveu  renda  en  1540  au  roi  Fran- 
çois h'  à  cause  de  son  comté  du  Poitou  et  tour  de  Maubergeon  par  «  luQt 
ei  puissant  seigneur  M'®  François  de  Rochechonart,  chevalier,  gentilbonime 
ordinaire  de  la  chambre  du  Roi,  seigneur  des  baronies  de  Morlheaian  • 
eic»  pour  «  son  chaslel  place  forte  seigneurie  et  baronie  de  Monhemart, 
terres  et  seigneuries  de  Beaufre  et  de  <a  Bar^  dépendantes  d'icelle,  etc.  On 
voit  par  cet  important  document  que  la  terre  seigneuriale  de  la  Barde, 
dont  relevaii  toute  la  partie  poitevine  des  paroisses  de  Blond,  Berneuîl, 
Breuil-au-Fa,  Vaulry,  et  Cieux,  était  dès  lors  annexée  à  la  baronie  de  Mor- 
lemart,  ce  qui  nous  explique  comment  il  lesie  aujourd'hui  si  pou  ée 
chose  de  son  ancien  manoir,  sans  doule  déjà  en  ruine  au  xvi^  siècle. 

(â)  Voir  dans  le  Dictionnaire  des  familles  du  Poitou^  par  Beauchei 
Filleau,  la  généalogie  de  la  famille  de  Blom. 

(3)  Nouie,  commune  du  canton  de  Mézière»,  arrondissement  de  Bellac. 

(4)  Mézières,  chef-lieu  de  canton,  arrondissement  de  Bellac. 

(5)  La  Vienne  passe  en  effet  à  l'Isle  Jourdain,  qui  éiait  sur  le  chemin  de 
Tarmée  de  Coligny  pour  se  rendre  sous  les  murs  de  Poitiers. 


Ëgliw  de  Blond  (la^adc). 


•    -       F 


l'êolisc  db  blond.  677 

séjournèrent  cinq  ou  six  jours  et  bruslëreat  plusieurs  églises  (1)  et 
maisons,  et  tuèrent  beaucoup  de  prebtres  et  paisaas.  » 

Une  des  conséquences  du  passage  des  protestants  non  loin  de 
Biond  en  cette  circonstauce  fut  évidemment  une  nouvelle  occupa- 
lion  par  eux  du  bourg  et  l'iropossibilité  où  se  trouva  le  curé  de  bâp- 
User  les  enfants  nés  alors.  Aussi  en  marge  des  actes  de  baptême 
relatifs  à  ces  derniers  et  qui  ne  sont  pas  rédigés  à  la  manière  ordi- 
naire, a-t-il  inscrit  cette  note  très  significative  dans  son  laconisme  : 

«  Ne  faut  s'esmerveiller  des  actes  cy  dessoubs  inscripts  contre  la 
forme  des  aultres  parce  que  ce  est  pour  démonstrer  que  les  eufens 
qui  naquirent  lors  ne  peurent  estre  baptisés  jusques  à  ce  que  les 
heuguenaulx  se  en  furent  aiez.  » 

Les  huguenots  s'en  allèrent  en  effet  et  M*"  Martial  Michau  ainsi 
que  ses  paroissiens  eurent  enfin  quelques  mois  de  tranquillité  rela- 
tive. Mais,  le  3  octobre,  nouvelle  alerte,  comme  nous  rapprend 
notre  chronique. 

«  Le  2*  jour  d'octobre  1569,  vindrent  treize  chevaulxde  vouleurs 
des  quartiers  de  Saint-Savin(â),  heuguenaulx,  entre  lesquieulxestoit 
Mons.  du  Vinau,  Paient  d'Escheyrac  et  Mons.  d'Antainlt  qui  se 
départit  àMaubertrand  (3)  de  peur  qu'il  ne  feustcongneu  en  délibé- 
ration, pour  prendre M^  Jehan  Gravillact  de Vergondau,  et,  ne  Taiant 
peu  tro.uver,  prindrent  M*  Guillelme  Gravier  et  François  VerdiUac, 
et  tuèrent  W  Jehan  de  la  Gousture  d'un  coup  de  pistolle  pour  ce 
qull  ne  vouloit  suivre,  et  YoulèrentNoslet(4}  droict  au  poin  du  jour 

(  1  )  Entre  autre,  croyons-aouo,  celle  de  Berneuil  ;  car,  en  reconatruisaiit  der- 
nier cmeni  celle  vieillis  é{g[lise,oa  a  retrouvé  dans  la  partie  supérieure cle«  murs 
de$  bouts  de  poutres  et  de  solives  calcinés  parle  feu,  preuve  manifeste  d'un 
incendie  survenu  autrefois  dans  l'édifice  en  question  (communication  due  à 
robligeance  de  M.  Henri  Noualhier,  maire  de  Berneuil.) 

(2)  Saint-Savin-sur-Gartempe,  chef-lieu  de  canton  dans  la  Vienne,  au 
nord  de  Montmorillon.  Celte  petite  ville  possédait  une  abbaye  célèbre,  qui 
fut,  pendant  les  guerres  de  religion,  dévastée  par  les  huguenots,  irôs  nom- 
breux dans  le  pays  ;  voir  pour  Thistaire  de  cette  abbaye  à  Tépoque  en 
question,  la  Chronique  des  éoénements  arrhes  à  Saint-SaoUi  et  aux 
encirone  depuis  Vcu^née  ÎS62  jusqu'en  1607,  (D.  Fonlenet^ii  t.  XXV,  p. 
615  et  suiv.). 

(3)  Maubertraod,  village  situé  dans  TancieuDe  paroisse  de  Vacqueur, 
aujourd'hui  réunie  à  celle  de  Btoud.       * 

(4)  Nollet,  lieu  noli>le  dans  la  paroisse  de  Bload,  appartenait  alors  à 
uoe  famille  du  même  nom  qui  figure  souvent  sur  le»  regUures  paroissiaux 
de  Blond  et  dont  un  membre,  Robert  de  Nollet,  escuy.er,  S**  de  Rousseix, 
après  avoir  servi  vers  1587  comme  homme  4'armes  dans  la  oompagoie  d'or- 
donuance  de  Gabriel  delà  Rie,  seigneur  de  La  Goste-Mézières,  devait,  en  l$04, 
commander  à  Bellac  une  compaanie  de  cent  hommes  de  g aerre  ar^pie- 
busiérs  k  pied  fcançaiso  (Voir  Bibl.  nat.,  oab.  des  èiures,  dossier  Nollet  aux 
Carrés  d*Hozier,  et  fonds  français,  montres,  vol.  25,830,  n"  1,107. 

T.  XL.  48 


670  SOClirA  AECHÉOLOGIOPK  IT  BISTORIQUK  do  LIHODSltl . 

etMons.  de  Font  Haubert  (i),  el  tuèrent  un  cousturier  de  la  Bastide 
à  mon  advis  à  Nouic  et  blessèrent  le  cousturier  des  Ages  d*un  coup 
de  pistoUe  qui  desceda  le  15*  jour  de  décembre  emprès,  et  lesdits 
prisonniers  furent  délivrés  en  ung  chasleau  qu'on  nomme  Lavau, 
paroisse  de  Bussières-Poictavine,  à  la  poursuite  de  Hoos'  de  la  Geste 
et  le  Cadet  deDroux,  et  les  compagnies  qui  les  suivirent.  » 

Nous  n'avons  malheureusement  guère  de  renseignements  à  don- 
ner au  lecteur  sur  les  trois  chefs  huguenots,  venus  de  Sainl-Savin, 
dont  parle  le  curé  de  Blond.  Quant  au  nom  des  personnages  qu'ils 
étaient  venus  chercher  pour  les  emmener  au  loin  comme  otages  et 
qui  furent  tués  ou  blessés  en  essayant  de  se  soustraire  au  sort 
funeste  qui  les  menaçait,  ces  noms  ne  nous  sont,  point  inconnus.  Ce 
sont  ceux  des  principaux  habitants  de  Blond  et  le  même  registre 
paroissial  où  est  contenue  notre  chronique  les  cite  plus  d'une  fois 
chacun  dans  les  actes  de  baptême  de  l'époque.  Ils  furent,  ajoute  le 
chroniqueur,  conduits  au  château  de  Lavau,  dans  la  paroisse  de 
Bussière-Poilevinc  (2).  Ce  fait,  assez  intéressant  pour  nous  à  con- 
naître, prouve  deux  choses  :  d'abord  que  ce  château,  qui  appartenait 
alors  à  Jehanne  de  Razès  (3),  «  veuve  de  feu  Nycolas  de  la  Lande  > 
et  à  son  fils,  autre  Nicolas  de  la  Lande,  avait  pour  châtelains  des 
seigneurs  attachés  au  parti  calviniste,  puisqu'il  était  assez  fort  pour 
qu'on  crût  pouvoir  y  déposer  en  toute  sûreté  des  prisonniers. 

Il  n'est  pas  non  plus  sans  intérêt  pour  nous  de  savoir  le  rôle  im- 
portant que  jouaient  dès  cette  époque-là,  dans  la  noblesse  du  pays. 
Gabriel  de  la  Rye,  seigneur  de  La  Coste-Mézières,  et  Pierre  Je 
Ghamborant,  fils  cadet  de  feu  Pierre  de  Ghamborant,  seigneur  de 
Droux,  et  de  Philippe  de  Loubes.  Avons-nous  besoin  de  dire  que 
tous  deux  étaient  réservés  aux  plus  brillantes  destinées?  Le  pre- 
mier, qui  avait  été  les  années  précédentes  homme  d'armes  dans  la 
compagnie  du  comte  d'Escars  (4),  devait  devenir  successivement 
«  lieutenant  de  trente  lances  du  Roi  sous  la  charge  de  Monsieur 
de  Morlemarl»  (1573-1574),  enseigne  de  la  compagnie  du  duc  d'An- 
jou, frère  du  Roi  (1577-1580)  (5),  chevalier  de  l'ordre  et  capitaine 

(t)  Le  sieur  de  Fontmobert,  terre  située  dans  les  environs  de  Bellac  eo 
tirant  vers  Morlemart,  était  à  cette  époque  un  Audebert,  dont  no  descen- 
dant, Pierre  Audebert,  sieur  du  Fiancourl  en  Saiut-JunieD-les-Gombes,  élatt 
vers  le  milieu  du  xvu^'  siècle,  vice-sénéchal  de  la  Basse-Marche  à  BeUac. 

(3)  Le  fief  de  Lavau  en  Russière-Poitevioe  relevait  directemeni  de  labaroû- 
nie  de  Morlemart.  Il  est  cité  en  ceUe  qualité  dans  les  aveux  de  Morlemart 
au  comté  du  Poitou. 

(3)  D'après  le  rôle  pour  1  arrière  ban  de  la  noblesse  du  Haut-Limousin 
dressé  en  1568. 

(4)  Rôle  de  Tarnère  ban  de  4»68. 

(5)  Voir,  dans  les  différents  recueilsde  montres,  conservés  aux  manuscrits 


L*éALlSB  DB  BLOND.  679 

d'une  compagoie  de  cinquanle  hommes  d'armes  d'ordonnance 
(1585)  (1);  enfin,  en  1588,  gouverneur  de  la  Haute  et  Basse-Marche, 
en  remplacement  du  vicomte  de  la  Guierche  (2).  Le  second,  seigneur 
de  Droux  en  partie,  de  La  Beaune,  Monl-Givray,  La  Pougerie,  du 
Coulombrail,  baron  d'Ars  et  de  Neuvy-Saint-Sépulchre,  sera  sous 
Henri  III  chevalier  de  Tordre  du  Roi,  gouverneur  pour  S.  M.  de  la 
grosse  tour  de  Bourges,  conseiller,  chambellan  et  colonel  de  la 
garde  suisse  de  François  de  France,  duc  d'Alençon,  son  Ueutenant 
général  en  Berry,  etc.  (3).  Remarquons  aussi,  pour  revenir  à  leur 
rôle  dans  la  délivrance  en  1569  des  otages  de  Blond,  que  ni  Tun  ni 
Tautre  n'étaient  absolument  étrangers  à  cette  paroisse.  Au  mois  de 
janvier  de  la  même  année,  «  Gabriel  de  la  Rie,  s'  de  la  Goste  », 
n'avait-il  pas  tenu  sur  les  fonds  baptismaux  de  Téglise  de  Blond 
u  Jehanne,  fille  de  N.  H.  François  de  la  Cousture?  »  Et  de  son  côté, 
le  «  Gadet  de  Droux  »  n'avait-il  pas  pour  oncle  Martial  de  Lavau, 
seigneur  de  Brouilles? 

Pendant  la  période  qui  s'étend  de  1569  à  1580,  si  nous  nous  en 
rapportons  à  la  chronique  de  M""  Martial  Michau,  les  habitants  de 
la  paroisse  de  Blond  semblent  avoir  joui  d'un  assez  long  répit  de 
la  part  des  huguenots. 

D'après  les  mémoires  de  Pierre  Robert,  dans  le  courant  de  l'an- 
née 1573,  un  chef  protestant,  Sarrabourg,  accompagné  de  4  à  5,000 
hommes,  aurait  pris  les  faubourgs  de  Bellac,  et,  après  être  entré 
dans  la  ville,  y  aurait  commis  les  plus  grands  désordres.  Notre 
chronique  ne  fait,  il  faut  bien  le  reconnaître,  aucune  allusion  à  cet 
événement.  Et  cependant  il  s'en  faut  que,  même  en  ces  années-là, 
la  paroisse  de  Blond  eilt  toujours  été  à  l'abri  des  exactions  des 
gens  de  guerre.  Quand  ce  n'étaient  pas  les  troupes  protestantes 
qui  passaient  par  le  pays,  c'étaient  les  troupes  royales,  et  les  pas-, 
sages  de  celles-ci,  pour  être  moins  redoutés,  ne  laissaient  pas 
d'être  encore  assez  onéreux  pour  les  habitants.  Pour  se  convaincre 
de  la  vérité  de  ce  que  nous  avançons,  il  suffit  de  relire,  dans  les 
Registres  consulaires  de  Limoges,  les  doléances  présentées  au  Roi 
par  l'assemblée  syndicale  en  1581.  «  La  continuation  des  troubles  »^ 

de  la  Bibliolhëque  naiionale,  celles  relatives  à  la  compagnie  Je  René  de 
Rochechouarl,  seigneur  de  Monemart,  et  à  celle  de  François,  duc  d'Anjou. 

(1)  Voir  aux  archives  nalionales,  dans  les  registres  du  Parlement,  une 
plaidoirie  de  janvier  1585,  au  sujet  d'un  procès  entre  Guy  de  Daillon  et 
Gabriel  de  la  Rie  (X^»  5134,  f^  4). 

(2)  Voir  dans  VHiatoire  du  Dorât,  par  M.  Aubugeois  de  la  Ville  du  Bost, 
la  lettre  écrite  à  cette  occasion  par  Henri  III  au  seigneur  de  La  Coste- 
Mézlères. 

(8)  Voir  dans  le  Dictionnaire  des  familles  du  Poitou  déjà  cité  la  généa- 
logie de  Chamborant. 


èSO  SOCIÉTÉ  ARCâEOLOOIQOB   ET   BISTOlUQUIk   00   LlMODSlN. 

7  est-il  dit,  «  ayant  toujoars  esté  grande  audict  païs  (de  Limousin) 
puis  l'aD  1575,  les  habitants  dMcelui  ont  esté...  privés  de  traficq  da 
bestaiI...ont  esté  contraints  par  emprisonnementde  leurs  personne? 
et  prinse  de  leurs  meubles,  de  payer  la  solde  de  ceulx  de  la  religion 
prêt,  réformée  qui  tenoientpar  force  les  chasleaux  et  places  fortes 
aud.  pays,  etc.  ».  Il  résulte  également  de  cet  important  et  intéres- 
sant document  que  «  led.  pays,  puis  Tan  1569,  »  aurait  «  tousjoan: 
esté  visité  par  les  gens  de  guerre,  tant  à  pied  qu'à  cheval  »,  appar- 
tenant à  l'un  et  à  Tautre  parti.  Nous  n'entrerons  pas  ici,  avec  les 
auteurs  des  Doléances,  dans  le  détail  de  ces  fréquents  passages 
d'armées  qui  y  sont  tous  énumérés;  nous  nous  contenterons 
de  relever  celui  du  régiment  du  sieur  de  Bussy  (I),  qui 
pendant  Tannée  1875,  peu  de  temps  après  l'armée  du  vicomte 
de  Turenne,  auraient  passé  et  même  séjourné  en  Limousin. 
Or,  nous  savons,  par  un  des  actes  de  baptême  rédigés  par 
M*  Martial  Michau,  que,  dans  les  premiers  jours  de  mai  de  celte 
même  année  1575,  une  des  compagnies  du  régiment  de  Bussy 
était  logée  à  Blond  ou  dans  les  environs.  Le  2  mai,  en  effet,  Jehan, 
fils  de  Noël  Pouyat,  demeurant  à  Grateyrolle,  fut  tenu  sur  les 
fonts  de  l'église  qui  nous  intéresse  par  «  Jehan  de  Bruet  de  Douvre 
Quérial,  natif  de  Bouchain,  près  Abbeville,  en  Picardie,  estant  logé 
chez  led.  Noël,  de  la  compagnie  du  cappitainc  de  Saint-Séval  du 
régiment  de  Mons'  de  Bussi  ». 

Etait-ce  aussi  un  chef  de  guerre  en  garnison  momentanée  à 
Blond  ce  «  Mons.  de  la  Villatte  (â)  »,  qui  le  7  juin  1579,  d'après  une 

(1)  Louis  de  Glermonl,  seigneur  de  Bussy  d*Amboise,  bien  célèbre  dans 
l'histoire  du  règne  de  Henri  111  donl  il  était  Tun  des  c  Mignons  *  el  qui  lui 
donna  en  t576  le  gouvernement  de  l'Anjou.  Il  avait  reçu  en  1674  le  corn- 
mandement  d'un  régiment  d'infanterie  composé  de  quatre   compagoies, 
et  avail  assisté  avec  son  régiment  aax  prises  de  FoQtenay  e*.  de  Lasignaa 
sur  les  huguenots  en  septembre  1574  et  en  janvier   1573.  L^historien  de 
Bussy,  A.  Joubert,  nous  apprend  qu'après  la  reddition  de  Lusignau,  celoi-ci, 
pour  se  reposer  de  ses  fatigues,  était  retourné  à  la  Cour.  C*est  alors   évi- 
demment que  son  régiment  fut  envoyé  prendre  ses  quartiers  d'hiver  dans  ie 
sud  du  Poitou,  et  c'est  ainsi  que  le  capitaine  deSaint-Séval,  à  la  tête  d'nne 
des  compagnies  de  ce  régiment,  se  trouvait  au  printemps  suivant  du  cdié 
de  Blond. 

(9)  Il  y  avait  dans  la  paroisse  de  Saint-Junien-Ies-Combes  le  lien  noble 
de  la  Villatte  dont  était  alors  seigneur  propriétaire  Charles  Chauvet,de  Tan- 
cienne  et  illustre  famille  des  Chauvet  de  Frédaigues,  de  Sannat,  de  la  Vil- 
laUe^  etc.  Marié  en  1557  avec  Françoise  du  Mosnard.  il  était  père  de  Jehan 
Chauvet,  S*"  de  la  Villatte,  qui  devait  faire  partie  en  1577  de  la  compagn'e 
d'ordonnance  du  duc  d'Anjou  dont  Gabriel  de  la  Rie  devait  être  de  son 
côté  enseigne.  Peut-être  le  meurtrier  de  Léonard  Baritaud  était-il  ce  Char- 
les Chauvet,  seigneur  de  la  Villatte. 


L*EGLISB  DS  BLOND.  681 

note  de  notre  chroniqueur,  se  serait  rendu  coupable  d'un  de  ces 
actes  malheureusement  trop  communs  dans  les  temps  de  guerre 
civile  en  tuant,  probablement  sans  motif  de  légitime  défense,  un 
habitant  du  bourg  que  sa  paisible  profession  —  c'était  un  tailleur 
—  aurait  dû  mettre  à  Fabri  d  un  sort  semblable?  Toujours  est-il 
qu*en  marge  de  Tacte  de  baptême  de  Léonard  Michau  qui  eut  pour 
parrain  :  «  Léonard  Barilau,  tailheur  »,  le  curé  a  inscrit  la  note 
suivante  :  u  Led.  Léonard  Baritau  fust  blessé  d'un  coup  d'espée 
le  jour  de  Pentecoste  emprès,  environ  vespres,  par  Mons'  de  la 
VlUatte,  qui  estoit  le  7  juing  1579,  lequel  décéda  dud.  coup  le  10* 
jour  dud.  moys  emprès...  » 

Cependant,  dans  Tintervalle  de  calme  relatif  où  ils  avaient  vécu 
de  1569  à  1580,  les  habitants  de  Blond  non  seulement  avaient  ré- 
paré les  dégâts  faits  par  les  huguenots  à  leur  église  en  1567  et  en 
1569,  mais  encore,  par  tout  un  système  de  forliflcations,  très  pro- 
bablement celui  dont  nous  voyons  aujourd'hui  les  restes,  Tavaienl 
mise  en  état  de  soutenir  en  cas  de  besoin,  fermée  et  gardée  par  eux, 
un  véritable  siège.  Et  bien  leur  en  avait  pris,  car  de  juillet  1580  à 
mars  1581,  la  guerre  entre  les  protestants  et  les  catholiques  ayant 
recommencé  dans  le  Limousin  et  dans  les  provinces  environnantes 
plus  vive  que  jamais  (1),  il  n'y  eut  guère  de  jour  où  ils  ne  pussent 
craindre  de  voir  tout  à  coup  apparaître  quelque  troupe  ennemie  sur 
leur  territoire,  voire  même  à  l'entrée  de  leur  bourg.  Ainsi  «  le  lundi 
au  soir  23*  du  pr*  moys  de  janvier  1581  »,  c'est  M»  Martial  Michau 
qui  parle,  «  vint  grant  nombre  de  lansquenets  penssant  loger  au  pré- 
sent bourg  ».  Mais  les  habitants,  encouragés  par  leur  curé  et  peut- 
être  commandés  par  M*  Guillaume  de  la  Cousture  (2),  étaient  sur 
leurs  gardes  ;  retranchés  dans  leur  église  comme  dans  un  château- 
fort,  et  apparaissant  en  armes  à  chacune  des  ouvertures  faites  en 
forme  de  meurtrières  que  nous  y  avons  signalées  au  début  de  celle 
étude,  ils  opposèrent  la  force  à  la  force.  Les  assaillants  furent, 
pour  employer  les  termes  de  notre  chroniqueur,  «  repoussés  à  cops 
d'arquebusades  »  et  obligés  d'aller  chercher  gite  ailleurs. 

Ils  n'allèrent  pas  loin  du  reste  et  purent  s'établir,  pour  y  passer  la 


(f  )  Voir  les  Registres  consulaires  de  Limoges  pour  celle  époque. 

(t)  Les  registres  paroissiaux  de  Blond  mentionnent  en  effet,  à  la  date  du 
10  janvier  1607,  rinhumation  d'un  certain  «  M*'  de  La  Couture  »  qualifié  en 
cette  occasion  o  cappilaine  de  Blond  »  Peut-être  est-ce  ce  personnage  qui,  en 
459f ,  lors  du  siège  de  Bellac  par  les  ligueurs,  avait  joué  un  rôle  si  actif  du 
côté  des  royalistes;  en  tous  cas  si  M^  Guillaume  de  La  Coulure  avait  jamais 
exercé  réellement  les  fonctions  dont  en  1607  il  portait  le  titre,  c*est  pendant 
les  guerres  religieuses  que  ces  fonctions  avaient  dû  lui  être  conférées. 


981  SOCIKTE   AKCliOLOGIQOB   Wt  BlSTOftlQUI  DU   LIMOCSIK. 

nuit,  au  manoir  de  la  Couture,  dans  la  paroisse  de  Vacqueur  (i).  Us 
«  logèrent,  scavoyr  est  le  commissaire  coronal  et  sa  compagnie  et 
une  autre  à  la  Cousture,  où  il  y  avoit  plus  de  cinquante  feux  dehors 
sans  ceulx  qui  estoient  au  couvert.  Les  autres  logèrent  à  Bedone- 
ret,  Vocées,  la  Vergne,  le  Broutilh  Lage,  Ghasteau  Bastard,  Mont- 
large,  Boneisset,  Champeimart  etàGouhas(2);  et  partirent  le  mardi 
de  bon  matin.  Le  commissaire  dict  qu'il  estoit  pour  le  moings  à  la 
Cousture  neurcentou  bien  mille  sans  les  femmes  ». 

Ce  passage  par  la  paroisse  dé  Blond,  à  la  (in  de  janvier  1881,  des 
lansquenets  huguenots  qui  en  sont  repoussés,  puis  vont  passer  la 
nuit  àia  Coulure,  n'est  évidemment  qu'un  des  nombreux  épisodes  de 
la  vie  inquiète  et  surexcitée  que  durent  mener  les  habitants  de  cette 
paroisse  pendant  huit  mois,  de  juillet  4580  à  mars  158i  ;  quant  à 
rhistoire  de  Blond  pendant  ces  huit  mois,  M«  Martial  Michau  la 
résumée  dans  la  note  suivante  placée  par  lui  en  regard  d*un  acte  de 
baptême  du  10  juillet  1580  : 

«  Le  lundi  18*  jour  de  juillet  aud.  an,  Téglise  de  Blom  a  est^ 
fermée  et  gardée  par  les  habitans  en  temps  de  guerre  sans  y  faire 
aucung  servisse,  mais  se  faisoit  au  cimetière  jusques  au  vendredi 
17  de  mars  1581,  auq.  jour  on  se  réunist  dedans  y  faisant  Toifice;  et 
estoit  le  vendredi  devant  les  Rameaux.  Ce  a  esté  ung  grant  profOt 
pour  la  paroisse,  car  il  ne  vint  compagnie  qui  ne  fût  repoussée  ». 

Ici  s'arrête,  au  point  de  vue  des  documents  relalirs  aux  guerres 
de  religion,  la  chronique  de  M*  Martial  Michau.  Grâce  à  cette 
chronique  si  précieuse  et  pourtant  restée  jusqu'ici  inédite,  on  voit  le 
rôle  important  qu'a  joué  en  ces  années  là  Féglise  qui  a  fait  le  prin- 
cipal objet  de  cette  étude.  D'abord  saccagée  et  détruite  en  partie  par 
les  protestants,  lors  de  leurs  premiers  passages,  elle  s'est  vue 
bientôt  remise  en  état,  puis  fortifiée  par  les  habitants  qui,  à  Tabri 
derrière  ses  murs  crénelés,  ont  pu,  pendant  les  dernières  guerres 
religieuses,  préserver  entièrement  leur  bourg  et  leur  territoire  de 
nouvelles  incursions  de  la  part  de  l'ennemi.  Ainsi  l'archéologie  et 
rhistoire  s'unissent  pour  faire  de  cette  vieille  église  un  des  édifices 
religieux  de  l'arrondissement  de  Bellac  à  coup  sûr,  et  peut-être  du 


(1)  L'ancien  manoir  de  La  Couture,  qui  fait  aujourd'hui  partie  du  terri- 
toire de  Blond,  est  situé  sur  unt  éminence  aux  trois  quarts  escarpée,  qoi 
domine  à  une  asseï  grande  hauteur  la  vallée  do  Vincou.  U  appartenait 
à  François  de  La  Couture,  escuyer,  seigneur  dndit  lieu,  mari  de  d'^*  Marie 
du  Queyroix,  et  homme  d'armes  en  1573  de  la  compagnie  de  René  de  Mor- 
temart,  seigneur  de  Rochechoaart. 

(2)  L.a  plupart  de  ces  villages  sont  situés  dans  la  commune  de  Blond,  non 
loin  de  La  Couture. 


ESSAI  DE  CLASSIFICATION 

DES 

ANCIENNES  PORCELAINES  DE  LIMOGES 

BAINT-YRIBIX,   80LI6NAG,   ETC. 

coNssRrAts 
AU  MUSÉE  NATIONAL  ADRIEN  DUBOUGHÉ 

(suite)  (!) 


Je  vais  maintenant  essayer  de  présenter  un  résumé  de  rhisloire 
de  rannexe  de  Limoges  pendant  les  derniers  temps  de  son  exis- 
tence ;  peut-être  enlrerai-je  dans  des  détails  quelque  peu  étrangers 
à  mon  sujet,  en  manière  de  circonstance  atténuante  je  répéterai 
que,  de  certaines  données  qui  au  premier  abord  peuvent  paraître 
indifférentes,  il  est  parfois  possible,  au  point  de  vue  de  raltriba- 
tion  des  pièces,  de  tirer  des  inductions  utiles.  D'autre  part,  croyant 
avoir  à  faire  connaître  quelques  faits  nouveaux,  je  me  suis  laissé 
entraîner  à  profiter  de  l'occasion  qui  m'était  offerte  de  les  donner 
au  public. 

On  se  rappelle  que  Massié  reprit  la  direction  de  la  Manufacture 
lors  de  la  retraite  de  M.  Allnand  père,  nous  verrons  plus  loin  que, 
de  certaines  pièces  conservées  aux  archives  départementales  et 
aux  archives  municipales  de  Limoges,  il  semble  résulter  que,  pen- 
dant une  partie  de  sa  durée  tout  au  moins,  la  direction  de  Massié 
fut  à  peu  près  simplement  nominale  (2). 

(1)  Voir  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique,   t.   xxxvii,  xxxviii  et 

XXI1X. 

(2)  Nous  voyons  dans  une  pièce  publiée  tout  récemment  par  M.  Fray- 
Fournier  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique^  que  M.  Massié  qol 
a  créé  la  fabrique  de  faïence  portait  le  prénom  d'André,  tandis  qoe  le 
dernier  directeur  de  la  Manufacture  royalo  se  nommait  Joseph,  il  paraît 
que  c'est  déjà  Joseph  que  nous  avons  vu  en  1771  s'associer  avec  Foumeyral 
et  les  Grellet. 

Grâce  à  des  recherches  actives,  dirigées  avec  une  remarquables  saga- 


ESSAI  DB  CLASSIFICATION  DIS   ANCIENNES  PORCELAINES   DE  LIMOGES.      685 

Après  le  départ  d'AlIuaud,  la  Manufacture  parait  avoir  1res  peu 
produit  ;  il  est  probable  que  son  personnel  fut  diminué,  il  est  égale- 
ment à  présumer  qu'il  ne  sortit  plus  de  ses  fours  que  des  objets 
usuels. 

Peut-être  un  certain  nombre  de  pièces  produites  pendant  les  der- 
nières années  de  la  fabrication  ont  elle  été  surdécorées  plus  tard. 
Nous  verrons  bientôt  deux  fabriques  employer  le  môme  blanc, 
dans  certaines  circonstances  ;  il  ne  paraît  pas  improbable  que  pen^ 
dant  la  période  impériale,  par  exemple,  des  fabricants  s'étant 
procuré  à  de  bonnes  conditions  des  produits  de  la  Manufacture 
au  moment  de  sa  vente  les  ont  confiés  à  leurs  décorateurs.  Alors 
on  fabriquait  certainement  avec  beaucoup  plus  de  difficulté  qu'on 
ne  le  fit  plus  tard  ;  ceci  suffit  à  rendre  plausible  la  supposition  sou- 
mise en  ce  moment  au  lecteur,  laquelle  s'appuie  sur  certains  faits 
dans  le  détail  duquel  il  serait  superflu  d'enlrer  aujourd'hui. 

Une  pièce  des  archives  nous  apprend  que,  au  moment  de  la  vente, 
la  porcelaine  «  cuite  »  qui  se  trouvait  à  la  fabrique  fut  évaluée  à 
340  livres  environ,  ce  chiffre  indique  déjà  un  stock  respectable, 
mais  il  est  probable  que,  antérieurement,  d'autres  ventes  de  blanc 
avaient  eu  lieu,  d'ailleurs  la  question  est  d'assez  mince  importance. 
Cependant  il  a  paru  nécessaire  de  signaler  un  fait  qui,  négligé  ou 
mal  observé  pourrait  devenir  une  cause  d'erreurs  regretables.  Mais 
il  serait  inutile  d'insister. 

Je  reviens  à  l'histoire  de  la  Manufacture  pendant  les  derniers 
temps  de  son  existence.  Les  archives  de  la  Haute- Vienne  possèdent 
une  pièce  de  laquelle  il  semble  résulter  que  la  fabrication  avait 
presque  complètement  cessé  en  1794.  Il  s'agit  d*un  rapport  fait 
par  Paul-Esprlt-Marie-Joseph  Martin,  délégué  par  le  district  de 
Limoges  à  l'effet  de  «  constater  l'état  d'inaction  dans  lequel  se 
trouve  la  Manufacture  et  indiquer  les  moyens  de  lui  rendre  son 
activité  ».  Martin  s'étant  transporté  à  la  Manufacture,  fit  connaître 
au  citoyen  Massié,  directeur  provisoire,  l'objet  de  sa  mission  et 
voici  en  résumé  quel  fut  le  résultat  de  leur  conférence  si  l'on  peut 
ainsi  dire. 

.  Il  existait  alors  à  la  Manufacture  deux  fours,  mais  on  ne  faisait 
aucun  usage  du  plus  grand  que  Martin  et  son  collègue  proposent  de 
démolir  en  partie,  «  sauf  à  le  rétablir  lorsque  la  Manufacture  sera 

ciié  ei  un  1res  grand  esprit  de  suite,  M.  Fray-Fournier  est  parvenu  à  dé- 
couvrir, aux  Archives  de  la  Hdute-Vienne,  aux  Archives  nationales  et  à 
laBibUothèque  de  la  rue  Richelieu,  des  pièces  grâce  auxquelles  l'histoire  de 
la  découverte  du  kaolin  et  celle  des  commeacemènts  de  la  fabrication  de 
la  porcelaine  à  Limoges  pourront  bientôt  être  écrites. 


686  SOCIÉTÉ  ARCBB0L0G1QUB  BT   HISTOBIOUK  DU  LIMOUSIK. 

en  activité  »,  afin  de  se  procurer  les  briques  nécessaires  pour  ré- 
parer le  petit  four  qui  avait  précédemment,  sans  doute,  reçu  des 
modifications  intempestives,  puisque  nous  lisons  dans  la  pièce  des 
archives  »  qu'il  est  indispensable  de  changer  les  trois  bouches,  de 
rëlablirles  feux  dans  leur  premier  état,  de  démonter  la  cheminée 
et  de  rélargir,  »  grâce  à  l'économique  mais  assez  étrange  combioai- 
son  proposée  par  le  délégué,  ces  réparations  ne  devaient  s'élever 
qu'à  la  somme  de  120  livres  environ. 

Une  visite  aux  ateliers  permit  de  constater  qu'il  y  existait  on 
stock  d'au  moins  vingt-cinq  fournées  de  «  porcelaine  fabriquée 
(pour  environ  30,000  fr.)  et  prêt  à  mettre  au  four  qui  attendu  sa 
fragilité  dans  Télat  appelé  crû  dépérissait  journellement  ». 

Un  peu  plus  loin  nous  voyons  que  les  ouvriers  demandaient  as 
délégué  la  fourniture  de  deux  cents  rondeaux  de  bois  estimés  cent 
livres. 

Constatation  est  faite  qu'il  existe  une  réserve  de  kaolin  assez 
grande  pour  entretenir  la  fabrique  pendant  longtemps. 

Martin  ajoute  :  «  Attendu,  qu'il  faut  à  peu  près  un  al)al  de  boi< 
par  fournée,  il  en  résulte  qu'il  est  instant  d'autoriser  le  directeur 
provisoire  à  s'en  pourvoir  ainsi  que  de  terre  à  gazette  ». 

Et  plus  loin  :  «  Il  résulte  donc  de  notre  examen  que  la  dépense 
extraordinaire  pour  mettre  la  manufacture  de  porcelaine  en  valeur 
consiste  dans  la  réparation  du  four  et  dans  l'achat  des  rondeaux  : 
qu'on  ne  peut  comprendre  dans  la  dépense  extraordinaire.  Tachai 
du  bois  et  de  la  terre  à  gazette,  objets  de  dépense  courante  et  jour- 
nalière pour  lesquelles  il  suffira  de  mettre  une  somme  à  la  dispo- 
sition du  directeur  provisoire,  à  la  charge  par  lui  d'en  rendre 
compte  à  qui  de  droit.  ') 

Nous  ignorons  si  les  réparations  demandées  furent  exécutées. 
La  chose  paraît  probable,  cependant  une  pièce  dont  il  sera  ques- 
tion plus  loin  établit  qu'au  moment  de  la  vente  il  y  avait  encore 
deux  fours,  et  il  n'est  pas  spécifié  que  l'un  d'eux  fut  démoli  en  par- 
tie, mais,  dans  un  des  inventaires  fait  au  moment  de  la  vente  (celui 
où  sont  comprises  les  porcelaines  cuites),  nous  voyons  mentionnée 
«  une  partie  de  barres  de  fer  provenant  du  grand  four  à  porce- 
laine ».  Faut-il  conclure  de  là  qu'il  avait  été  donné  suite  aux  pro- 
positions de  Martin? 

Un  important  document  auquel  j'ai  déjà  fait  de  larges  em- 
prunts me  servira  encore  pour  établier  que,  contrairement  à  ce  que 
croyait  M.  François  Alluaud  fils,  les  ouvriers  de  la  Manufacture  ne 
s'étaient  pas  dispersés  au  moment  où  M.  Alluaud  père  avait  quitté 
la  direction,  ou  peut-être  seulement  avait  presque  cessé  de  s'eo 
occuper.  Voici  d'ailleurs  reproduit  in  extenso  les  très  curieux  pa?- 


ESSAI  DE  CLASSIFICATION  DES  ANCIENMKS  rORCBLAINKS  DR  LIMOGES.        6S7 

sages  du  rapport  de  Rolland  qui  nous  intéressent,  rappport  déjà 
cité  plus  haut. 

a  Depuis  le  1"  mai  4788  jusqu'en  octobre  1792,  le  nouveau 
directeur  AUuaud  prétend  avoir  fait  pour  46,306  livres  6  sous 
3  deniers  d'avance,  et  réclame  en  ce  moment  le  remboursement 
de  cette  somme. 

»  Dans  les  détails  qu'il  joint  à  cette  demande,  il  estime  par 
aperçu  la  totalité  de  Factif  de  cet  établissement  à  une  somme  de 
soixante-seize  mille  sept  cent  vingt-huit  livres,  vintg  mille  sept 
cents  livres  pour  local,  ustensiles,  créances  solides  et  approvision- 
nement de  bois,  ci  20.500  11. 

»  Pour  cinquante-un  mille  deux  cent  vingt-huit 
livres  de  porcelaine,  ou  crues  dans  les  ateliers,  ou 
fabriquées,  existant  soit  au  magasin,  soit  dans  divers 
dépôts  à  Limoges,  Toulouse,  Bordeaux  et  autres 
villes,  ci 81 .  228  11. 

a  Douze  cents  quintaux  de  mauvaises  pâtes,  évaluées 
à  trois  mille  six  cents  livres,  ci 3.600  11. 

«  Et  six  cents  quintaux  de  kaolin  décanté,  évalué 
à  douze  cents  livres,  ci 1 .200  11. 

<c  II  résulte  d'autres  renseignements  donnés  par  le 
directeur  caissier  Alluaud,  qu'il  reste  dû  à  cette  ma- 
nufacture, pour  ventes  faites  h  crédit  à  divers  parti- 
culiers depuis  son  origine  jusque  et  y  compris  les  neuf 
derniers  mois  de  1792,  une  somme  de  six  mille  six  cents 
trente-deux  livres  deux  sous;  mais  la  solvabilité  de 
ces  créances  n'étant  point  vérifiée  et  pouvant  se  re- 
garder, au  moins  en  partie  comme  douteuse,  je  ne  la 
compterai  que  pour  mémoire,  ci mémoire. 

Total 7r~76/728ir 

«c  Sur  lesquels  en  déduisant,  s'il  y  a  lieu,  les  quarante-six  mille 
trois  cents  six  livres  six  sous  trois  deniers  réclamés  par  le  direc- 
teur Alluaud,  ci 43.306  11.  6  s.  3.  d. 

«  Et  les  quatorze  mille  quatre  cents  vingt- 
deux  livres  onze  sous  quatre  deniers  réclamés 
par  l'ancien  directeur  Grellet,  ci 14.422 11. 11  s.  4  d. 

Total 7      60.728  11.  17  s.  7  d. 

«  Il  ne  resterait  en  actif  réel  qu'une  somme  de  quinze  mille 
neuf  cents  quatre-vingt-dix-neuf  livres  deux  sous  cinq  deniers 
ci 15.999 11.  2  s.  6  d. 

<c  Le  directeur  Alluaud  m'a  remis  en  même  temps  un  compte- 
rendu  des  recettes  et  dépenses  de  la  manufacture  pendant  les  neuf 
premiers  mois  de  1792. 


68H  SOCIÂTK  .\RCnÉOLO'«IQUt:  RT  BI8T0R1QCK  DU  UMODSIV. 

«  Dans  ce  compte  les  dépenses  pour  les  mêmes  premiers  mois  df 
1792,  montent  à  43.387  livres  17  sous  3  deniers  savoir  : 

«  Les  appointements  des  principaux  employés,  le  directeur  e; 
son  commis,  le  contrôleur  et  son  commis,  s'élèvent  à  la  somme  de 
trois  mille  neuf  cent  soixante  quinze  livres,  ci. .    3.975  11. 

«  Lesappointemenls  et  salaires  des  ouvriers  au 
nombre  de  dix  seulement,  cinq  mille  sept  cent 
trente-six  livres  un  sou  neuf  deniers,ci S.736  11.  i  s.  9d. 

«  En  dépenses  diverses  telles  que  achat  d'or 
et  couleurs,  pâtes,  terres,  briques,  charbon, 
chandelle  et  autres  fournitures ,  deux  mille 
trois  cents  dix-huit  livres  six  deniers,  ci 2.3i8  11.  6  d. 

«  En  dépenses  extraordinaires  pour  loyer  de 
magasin,  deux  cent  vingt  livres,  ci 220  11. 

u  En  achat  de  bois,  six  cent  soixante  livres,  ci.         660  11. 

«  En  remises  à  4  p.  ®/o  au  directeur  en  sus  de 
ses  appointements  et  autres  revenus  à  4  p.  •/© 
sur  les  ventes  faites  à  l'entrepôt  delà  dame  Tha- 
raud,  quatre  cents  soixante-dix -huit  livres 
quatre  sous,  ci 478  11. 4  s. 

Total 13.387  U.  17  s. ad. 

«  Dans  ce  même  compte,  les  recettes  montent  à  une  somme  de 
sept  mille  trois  cent  quatre-vingt-six  livres  deux  sous  six  deniers 
ci 7.388  11.  2  s.  6d. 

«  Mais  le  directeur  AUuaud  y  a  mal  à  propos 
compris  pour  neuf  cent  trente  et  une  livres  trois 
sous  six  deniers 7.385  11.  2  s.  OJ. 

«  Acompte  reçus  des  anciens  débiteurs  et  en 
déduisant  cette  somme,  il  ne  restera  d'effectif 
pour  la  recette  des  neuf  premiers  mois  de  1792 
que  six  mille  quatre  cent  cinquante  quatre 
livres  dix-neuf  sous,  ci 6.454  U.  19  s. 

«  Ainsi  pendant  les  neuf  premiers  mois  de  Tannée  4792,  cet  éta- 
blissement n'a  offert  que  6.45411.  19  s.  de  recette  pour  13.387  11. 
17  s.  3  d.  de  dépenses,  et  présente  dès  lors  pour  ce  seul  espace  do 
temps  un  déficit  de  six  mille  neuf  cent  trente-deux  livres  dix-huit 
sous  trois  deniers,  ci 6.93211. 18s.3d. 

«  Ajoutez  à  ce  détail  :  1^  que  depuis  l'acquisition  de  la  manafac- 
ture  de  Limoges  ou  plutôt  la  mine  de  kaolin  qui  en  dépendait  et  que 
Ton  dit  main  tenant  épuisée  n'a  pas  fourni  pour  plus  de  18,017  livres 
de  matières  à  celle  de  Sèvres  ; 

«  2*  Que  depuis  celte  même  acquisition  et  indépendamment  de 


teSSAl  DÉ  OLÂSSI^ICATION  t)Bâ  ANâlKNlfBS  ^ORCKLAINRS  bB  LlHOGKS.        d8d 

rarticle  précëdeat,  la  caisse  des  b&timeDls  et  celle  de  la  ci-devant 
liste  civile  ont  versé  dans  cet  établissement  plus  de  ^3,000  livres, 
lesquelles  ont  été  payées  par  le  caissier  de  Sèvres  sur  les 
822,208  livres  de  secours  dont  il  a  été  fait  mention  plus  haut  ; 

tt  3*»  Que  dans  ces  233.000  livres,  Tacquisilion  originelle  dont  le 
fonds  fut  évalué  à  30  ou  40.000  livres  par  Darcet  et  ne  présente 
maintenant  tout  compris  qu'une  valeur  de  16.000  livres  au  plus  est 
entrée  pour  une  somme  de  106.000  livres. 

<'  Et  Ton  aura  une  idée  que  je  n'ose  encore  regarder  comme  ap- 
proximative de  rinconcevable  absurdité  de  cette  opération. 

«  Mon  opinion  est  qu'il  faut  se  hâter  de  se  défaire  d'un  tel  éta- 
blissement et  mon  premier  mouvement  fut  même  d'ordonner  sur  le 
champs  la  suppression  des  travaux  qui  après  tout  n'intéressent  quo 
neuf  à  dix  ouvriers,  car  je  ne  comprends  pas  les  principaux  em- 
ployés dans  les  éonsidérations  que  leur  sort  peut  inspirer.  J'ai  cru 
néanmoins  convenable,  avant  de  prendre  aucun  parti,  de  me  pro- 
curer des  renseignements  plus  positifs,  et  j'ai  écrit  en  conséquence 
au  département  de  la  Haute- Vienne,  pour  qu  il  ait  à  me  rendre 
incessamment  un  compte  rendu  détaillé  de  l'état  au  vrai  et  tant  à 
charge  qu'à  décharge  de  cette  onéreuse  et  inutile  entreprise.  » 

Il  est  évidemment  intéressant  de  rapprocher  les  lignes  que  l'on 
vient  de  lire  des  indications  et  renseignements  donnés  par 
M.  François  Àlluaud  dans  un  travail  écrit  de  sa  main  dont  un  pas- 
sage est  reproduit  plus  haut. 

Il  paraît  que  le  pessimisme  de  Rolland,  sans  doute  assez  justi- 
Hé  à  un  certain  point  de  vue,  mais  qui  s'était  peut-élre  exagéré  à  la 
suite  de  certaines  manœuvres  plus  ou  moins  avouables,  il  paraît 
que  le  pessimisme  de  Rolland  n'était  pas  partagé  par  tout  le  monde 
à  Limoges.  Nous  savons  eu  effet  que  des  intrigues  furent  nouées  à 
plusieurs  reprises  par  divers  personnages,  qui  désiraient  voir  tom- 
ber entre  leurs  mains  l'ancienne  Manufacture  royale  et  cela  dans 
les  meilleures  conditions  possibles  pour  eux. 

Il  sera  suffisant  de  donner  quelques  détails  sur  celles  de  ces 
menées  qui,  grâceà  de  nombreuses  pièces,  nous  estla  mieux  connue. 

On  trouve  aux  Archives  de  la  Haute-Vienne  (1)  un  important 
dossier,  grâce  auquel  nous  sommes  dès  à  présent  renseignés  au 
sujet  de  certaines  intrigues  qui,  ainsi  qu'il  est  dit  plus  haut,  se 
nouèrent  entre  quelques  personnages,  dont  certains  assez  peu 
scrupuleux,  à  l'effet  d'acquérir  à  vil  prix  l'ancienne  Manufacture 
royale.  Les  pièces  en  question  :  interrogatoires,  lettres  saisies,  etc., 

(I)  Comité  de  survetUance  de  Limoges  :  suspects,  affairas  Brlgaeil  et 
Préat,  série  I^.  852.  Archives  départementale,  série  L.  95. 


690  SOCIÉTÉ  AACBÉOLOGIQOR   RT  HISTORiQUt  DO   LlMOUSlIf. 

n'éclairent  qn'un  point  de  vue  delà  question,  néanoioins  elles  met- 
tent sur  une  piste  que  l'historien  futur  de  la  Manufacture  ne  derra 
pas  abandonner.  Jusqu'ici  on  avait  pu  que  soupçonner  ces  istri- 
gués  dont  nous  ne  connaissons  pas  encore  l'histoire  complète  mats  û 
est  probable  qu'elles  se  multiplièrent  sous  toutes  les  formes,  b 
définitive,  la  Manufacture  était  considérée  par  quelques  iodividiis 
comme  une  proie  qu'ils  se  disputaient  et  que,  encore  une  foi>, 
chacun  d'eux  cherchait  à  s'approprier  par  des  moyens  plus  oa 
moins  licites. 

M.  Brigueil  (1),  ancien  maire  de  la  Cité,  personnage  notable  et 
possédant  des  capitaux  importants,  songea  à  s'adonner,  accessoire- 
ment sans  doute,  à  la  fabrication  delà  porcelaine.  L'ancienne  manu- 
facturé royale  végétait  ;  on  ne  savait  trop  ce  qui  sérail  décidée 
d'elle;  serait-elle  abandonnée,  vendue  ou  lui  donnerait-on  use 
impulsion  nouvelle  ?  Cette  dernière  hypothèse  paraissait  alors  U 
plus  invraisemblable.  Quiqu'il  en  soit,  posséder  la  Manafactare 
royale  devint  l'objectif  de  Brigueil.  Cette  pensée  assez  naturelle,  si 

(1)  Voici  la  noliceDècrologique  publiée  sur  M.  Brigueil,  au  moment  de  sâ 
mon  arrivée  en  1809,  par  le  Journal  du  département  de  la  H atUe- Vienne. 

«  Le  47  de  ce  mois,  à  dix  heures  du  matin  est  décédé  par  suite  d'ane  re- 
monte dégoutte,  M.  François  Brigueil  du  Mazé,  ai'jointaii  maire  de  la  con- 
mune  de  Limoges,  où  il  était  né  le  17  juin  1745. 

a  Dans  le  temps  où  il  y  avait  deux  mairies  dans  notre  commune,  Vune  pour 
la  ville,  Tautre  pour  la  cité  ou  ancienne  ville,  ce  qui  a  cessé  d'exister  eo 
4794,  M.  Brigueil,  qui  dans  sa  jeunesse  avait  été  négociant  et  garde  do 
comte  d'Artois,  fut  successivement  notable,  échevin  et  maire  de  la  cité 
depuis  1776  jusqu'au  changement  opéré  dans  nos  administrations  par  U 
constitution  de  l'assemblée  nationale.  Ensuite  il  a  été  un  des  admioistra- 
teurs  du  district  de  Limoges  et  i*'  adjoint  au  maire  de  Limoges  lors  de  la 
réorganisation  par  le  pouvoir  consulaire  de  l'état  présent.  Il  étaitaussi  lîeo- 
tenant  de  la  dixième  conservation  de  la  grande  louvelerie,  membre  et  tré- 
sorier de  la  Société  d'agriculturo,  des  sciences  et  des  arts  de  son  départe- 
ment. A  la  tête  d'une  fortune  brillante  qu'il  savait  augmenter  par  des  sociétés 
de  commerce,  il  savait  aussi  en  faire  les  honneurs  avec  dignité  et  la  rendre 
utile  à  ses  coociloyetis  et  profitable  aux  infortunés.  Toujours  très  attaché 
au  quartier  qui  l'avait  vu  naître,  il  a  travaillé  à  y  établir  un  monument  qui 
conservera  longtemps  la  mémoire  de  ses  bienfaits,  puisque  ce  monument  est 
connu  sous  le  nom  de  fontaine  Brigueil.  II  laisse  une  jeune  veuve  et  un  fils 
à  qui  les  regrets  de  leurs  conciioyens  doivent  être  de  grands  motifs  de 
consolation  de  la  perte  d*uQ  époux  et  d'un  père  digne  de  ces  deux  noms  ». 

M.  François  Brigueil  mourut  au  moment  où  sévissait  à  Limoges  la  terrible 
c  maladie  espagnole  »,  il  parait  qu'il  contracta  le  germe  de  ce  mal  en  visi- 
tant des  prisonniers  ;  ce  fut  pour  ménager  l'opinion  publique  que  Ton  parla 
d'une  remonte  de  goutte. 


ESSAI  DE  CLASSIPICATION  DKS  ANCIENNES  PORCELAINES   DR   LIMOGES         69  I 

elle  ne  lui  Yinl  pas,  lui  fut  certainement  inspirée  par  un  homme  qui 
se  mélat  beaucoup,  trop  peut-être,  de  ses  projets  et  de  ses  affaires; 
il  s'agit  de  Prëat,  ancien  peintre  sur  porcelaine  de  la  Manufacture, 
personnage  intelligent,  mais  qui  parait  s'être  complu  aux  intrigues. 

M.  Brigueuil  avait  des  relations  suivies  avec  M.  d*Hautefort  qui 
possédait  de  vastes  terres  dans  le  Périgord.  Il  s'occupait  beaucoup 
des  terres  et  des  intérêts  de  M.  d'Hautefort;  celui-ci  ayant  émigré, 
ses  papiers  furent  mis  sous  séquestre  et  une  correspondance  volumi- 
neuse ayant  été  saisie  chez  lui,  on  trouva  des  lettres  compromet- 
tantes pour  Brigueil  qui  fut  arrêté.  Les  Archives  possèdent  un  des 
interrogatoires  que  subit  l'ancien  maire  de  la  Cité,  à  la  date  du 
io  ventôse  an  II. 

Cet  interrogatoire  ayant  révélé  que  Préat  avait  servi  de  corres- 
pondant à  Paris  entre  Brigueuil  et  Hautefort,  Préat  fut  incarcéré 
le  jour  même,  le  lendemain  il  fut  également  appelé  devant  le 
Comité  de  surveillance  de  la  commune  de  Limoges  ;  il  était  accusé, 
conjointement  avec  Brigueil,  d'avoir  pratiqué  auprès  du  ministère 
et  des  commissaires  de  la  Convention  des  menées  pour  acquérir  à 
vil  prix  un  établissement  national. 

Préat  paraît  avoir  été  un  homme  très  entreprenant,  très  remuant 
et  sans  doute  sans  beaucoup  de  scrupules;  praticien,  probable- 
ment fort  habile,  il  devinait  l'avenir  réservé,  à  Limoges,  à  l'in- 
dustrie porcelainière.  Ayant  toute  la  confiance  de  Brigueil  peut- 
être  en  abusa-t-il  pour  conduire  celui-ci  là  où  il  n'aurait  pas  songé 
à  aller,  toujours  est-il  que  Préat,  dont  la  sincérité  n'était  pas  la 
plus  grande  vertu,  dut  autant  que  possible  dissimuler,  même  à 
l'homme  dont  il  s'était  fait  le  factotum  qu'il  comptait  bien,  pour 
arriver  à  ses  fins,  ne  pas  se  laisser  arrêter  par  les  scrupules  habi- 
tuels aux  parfaits  honnêtes  gens. 

Préat  songea  d'abord  à  se  faire  nommer  directeur  provisoire  de 
la  Manufacture  et,  plus  tard,  lorsque  le  comité  put,  grâce  à  la  cor- 
respondace  trouvée  chez  Brigueil,  formuler  contre  Préat  une  accu- 
sation basée  sur  des  preuves  matérielles,  celui-ci  pour  se  disculper 
et  donner  le  change  sur  le  but  qu'il  poursuivait,  afilrmait  encore 
qu'il  n'avait  jamais  eu  qu'une  visée,  celle  de  la  direction  provisoire. 

Notre  intrigant  se  rendit  à  Paris  et  là  il  se  livra  à  une  série  de  ma- 
nœuvres fort  habiles  d'ailleurs.  Il  voulut  se  faire  nommer  commis- 
saire pour  le  règlement  de  «  l'affaire  de  la  porcelaine  »,  selon  ses 
expressions,  puis  ne  pouvant  parvenir  à  ses  fins,  il  tenta  de  se  joindre 
aux  commissaires  venus  de  Paris.  Son  but  était  de  les  circonvenir, 
grâce  aux  connaissances  spéciales  qu'il  possédait;  peut-être  à  un 
moment  donné  songea-t-il  à  trahir  les  intérêts  de  Brigueuil  et  à 
intriguer  à  son  propre  bénéfice,  c'est  du  moins  ce  qui  semble  res- 
sortir d'un  passage  assez  curieux  de  son  interrogatoire. 


601  SOCIÉTÉ   A1ICil#.OL0GlQOK   RT   HlSTORIQOK  BtJ   LIHÔOSI9I. 

«  Brigaeit,  dit-il,  m'ayant  offert  à  plusieurs  reprises  de  me  mettra 
à  la  tête  de  rétablissement  de  la  porcelaine  et  m*ajaiit  donné  à 
entendre  qu'il  roe  ferait  un  sort,  je  crus  d'après  ces  offres  réiléree> 
qu'il  compterait  mes  talents  pour  quelque  chose,  et  qu'en  metUat 
des  fonds  dans  cette  manufacture,  nous  partagerions  le  profil;  bien 
loin  d'effectuer  celte  promesse,  j'appris  par  une  voie  sûre  qa'U 
avait  été  à  Saint-Yrieix  trouver  Baignol,  qu'il  lui  avait  offert  d«* 
compter  ses  talents  pour  une  somme  de  quarante-huit  mille  livres 
ou  à  peu  près  avec  une  somme  de  vingt-quatre  mille  que  Baipol 
pouvait  mettre,  ce  qui  faisait  en  tout  soixante-douze  mille  livn^. 
Brigueil  offrit  de  mettre  pareille  somme  à  intérêts  commuos  ;  j^ 
devais  d'autant  moins  me  douter  de  cet  arrangement  destniciif 
(les  avantages  qu'il  m'avait  offerts,  qu'à  son  retour  de  Sainl-Yri^U 
il  m'en  parla  et  me  proposa  une  place  inutile  de  contrôleur,  en  m^ 
disant  :  «  Je  ne  veux  pas  que  tu  cesses  de  travailler,  je  te  donnerai 
des  appointements  suffisants  pour  vivre,  tu  surveilleras  loale  la 
manufacture ,  et  s'il  te  reste  quelque  temps  tu  peindras  pour 
Ion  compte.  »  Voyant  que  Brigueil  avait  manqué  à  ses  promesse? 
et  m'étant  persuadé  qu'il  serait  plus  avantageux  pour  la  République 
de  nommer  un  directeur  provisoire  à  la  porcelaine  que  d'en  faire 
la  vente  en  bloc,  je  crus  devoir  écrire  à  Brigueuil  de  ne  pas  presser 
le  rapport  de  Doudet  qui  tendait  à  amener  la  vente  de  l'établisse- 
ment de  la  porcelaine.  » 

Quelques  extraits  de  la  correspondance  de  Brigueuil  et  de  Préal, 
conservée  aux  archives,  suffiront  à  faire  bien  complète  la  lumière 
dans  l'esprit  du  lecteur. 

Préat  à  Brigueuil,  H  août  1793.  ~  «  EnGn  ne  pressez  pas  Doudet 
sur  son  rapport,  vous  gâteriez  toute  ma  besogne,  le  ministre  ennuyé 
va  me  nommer  commissaire  pour  aller  sur  les  lieux  lui  en  faire  nn 
rapport  officiel.  Vous  devez  sentir  que  j'arrangerai  tout  cela  au 
mieux,  mais  surtout  ne  pressez  pas  Doudet,  je  vous  le  répète.  An 
reste  tout  va  bien.  Ayez  l'air  à  Limoges  de  ne  plus  vous  soucier  de 
cet  établissement.  » 

Un  mois  auparavant  (10  juillet),  Préat  recommandait,  au  con- 
traire, à  Brigueil  de  presser  Doudet  pour  qu'il  se  décidât  enfin  à 
faire  le  rapport  dont  il  était  chargé  depuis  plus  de  six  mois.  Dans 
une  autre  lettre  du  même  à  un  destinataire  inconnu  (31  juillet), 
nous  lisons  :  «  Dites  au  citoyen  Brigueil  que  je  fais  tout  mon  possi- 
»  ble  pour  accélérer  la  vente  de  la  manufacture,  etc. 

Du  même  à  Brigueil  (23  août)  «  . . . .  Soyez  assuré  que  je  met5 
tout  en  œuvre  pour  conclure  Taffaire  de  la  porcelaine,  mais  Au- 
doin,  député,  m'a  remis  à  quinzaine  et  m'a  promis  de  m'en  ct^Jtger. 
Soyez  tranquille,  tout  ira  bien.  » 


KSSAI  DB  CLASSIlriCATION  DES  ANCIBNNKS  PORCELAINES  DB  {.IMOGES.       693 

Du  même  au  même  (8  septembre)  « l'affaire  de  la  manu- 
facture se  poursuit  avec  chaleur,  j'ai  été  voir  Audoin  à  Sèves  (sic) 
à  la  manufacture,  il  m'a  dit  qu'ils  étaient  deux  pour  celte  affaire  et 
qu'il  ne  pouvait  rien  décider  sans  son  collègue,  il  m'a  engagé  à 
l'aller  voir,  ce  que  je  fis  celui-ci  ne  parait  pas  décidé  à  me  donner 
cette  commission  et  il  voudrait  y  aller  lui-même  ;  il  doit  aller  à 
Sèves  mercredi  rejoindre  Audoin,  et  là  ils  décideront  définitive- 
ment cette  affaire.  » 

«  Du  même  au  même  (<3  septembre)...  Je  vous  ai  rendu  compte 
dans  mes  dernières  lettres  de  l'envie  qu'a  le  député  Batelier,  collè- 
gue d' Audoin,  de  venir  lui-même  à  Limoges  terminer  l'affaire  de 
la  manufacture  ;  mais  il  m'a  promis  de  m'employer  comme  com- 
missaire-adjoint. Ainsi  telle  détermination  qu'il  prenne  vous  voyez 
que  nous  réussirons.  Surtout  n'ayez  plus  l'air  à  Limoges  de  vous 
occuper  de  cette  affaire,  vous  y  avez  des  concurrents,  vous  en  avez 
à  Paris  et  il  est  inutile  de  chercher  à  payer  cet  emplacement  plus 
cher  qu'il  ne  vaut. 

»  Batelier  va  à  Sèves  aiyourd'hui,  il  doit  m'écrire  ce  qu'il  aura 
Jécidé  sur  mon  mémoire;  s'il  ne  m'écrit  pas  promptement,  j'irai 
encore  à  Sèves  et  je  le  presserai  de  s'expliquer. 

»  Soyez  sans  inquiétude  je  mets  à  cette  affaire  toute  l'activité 
possible....  »    ' 

Du  même  au  même  (17  septembre).  —  «  L'affaire  de  la  porcelaine 
va  lentement,  je  n'ai  pas  encore  reçu  des  nouvelles  d' Audoin  et 
Batelier  qui  doivent  être  réunis  en  ce  moment  à  Sèves.  J'ai  écrit 
la  même  chose  au  citoyen  Hautefort  ;  je  ne  lui  cache  pas  ainsi  qu'à 
vous  que  vous  avez  bien  des  concurrents,  AUuaud  a  repris,  il  a 
nommé  un  des  ouvriers  sous  chef  en  lui  promettant  de  lui  donner 
la  direction  de  la  manufacture  nouvelle  qu'il  se  propose  d'établir 
au  cas  que  celle  nationale  ne  lui  soit  point  adjugée.  Vous  voyez 
qu'il  a  des  vues.  Un  particulier  de  Paris  en  a  aussi  envie  et  m'a 
fait  demander  des  renseignements  que  je  n'ai  pas  donnés.  Cependant 
le  moins  dangereux  concurrent  est  toujours  celui  qui  est  éloigné. 

»  Mon  avis  à  moi  est  celui  que  je  vous  ai  toujours  donné  est 
d'établir  (m'c),  que  vous  ayez  l'emplacement  national  oui  ou  non. 
Le  meilleur  remède  contre  la  concurrence  que  vous  paraissez  crain- 
dre c'est  les  fonds  que  que  vous  pouvez  y  mettre,  les  connaissances 
db  citoyen  Hautefort  et  le  choix  des  ouvriers.  Cependant  où  en  sont 
les  choses  je  vous  conseille  d'attendre  la  vente,  je  me  propose  de 
communiquer  ces  vues  à  Audoin. 

»  Souvenez-vous  bien  qu'à  Paris,  on  ne  va  pas  faire  acquisition 
de  bijoux  dans  une  rue  ou  il  se  trouverait  par  hasard  quelques  orfè- 
vres isolés;  mais  que  l'étranger,  le  curieux  cherchent  toujours  les 
quartiers  où  ces  sortes  de  marchands  sont  les  plus  communs. 

T.  XL.  44 


6d4  SOCI^à   ARCHÈOLOGlQtnt  St  ttlSTORlQt'fe  bU  LtMOOSlN. 

»  Je  n*al  pas  besoin  xla  vou^i  faire  l'applicalioa  de  cette  eonpi- 
raison,  vous  la  sentez  comme  moL  Tout  ce  que  je  vous  dirai,  c'esi 
que  plus  il  y  aura  de  manufactures  de  porcelaine  à  Limoges  (>1b2 
cette  ville  acquerra  de  renom  pour  ces  sortes  de  marchandises.  » 

Ces  derniers  passages  montrent  chez  Préat  une  hauteur  de  m 
qui  n'était  point  commune  au  xvnr  siècle  parmi  les  gens  de  sa  coir 
dition. 

Le  lendemain  du  jour  où  il  l'avait  écrite,  Préat  crut  devoir  ajouter 
à  sa  lettre  le  passage  suivant:  «  Du  18.  Rapprends  à  Tinstant  parii 
voie  des  journaux  qu'Audoin  en  commission  à  Sèves  a  été  rappelé 
pour  avoir  voulu  soutenir  des  employés  de  la  manufacture  eotK 
autres  un  individu  qui  se  trouvait  arrêté  comme  suspect.  Ceci  retar- 
dera peut  être  nos  affaires.  Jlrai  voir  Batelier  ce  soir  ». 

Du  même  au  même  (S5  septemdre).  «  Je  comptais  partir  arec 
Batelier  et  terminer  promptement  notre  affaire;  mais  sa  commissloo 
se  prolonge  à  Sèves,  il  ne  pourra  guère  finir  que  dans  un  mois; 
mais  tout  est  arrangé  et  nous  correspondrons  ensemble  en  atten- 
dant son  arrivée.  J'ai  vu  le  citoyen  Hautefort,  et  nous  avons  l'an 
et  l'autre,  à  cette  seconde  entrevue,  gagné  beaucoup.  Je  part  lundi 
prochain  et  je  serai  à  Limoges  vendredi  soir,  je  ne  vous  ferais  door 
aucun  détail  que  de  vive  voix.  » 

Les  lettres  de  Brigueil,  qui  se  trouvent  aux  archives  dans  le  dos- 
sier que  nous  étudions,  sont  moins  intéressantes  que  celles  de 
de  Préat,  cependant  quelques  extraits  doivent  trouver  leur  place  ici. 

Brigueil  à  Préat  (5  juillet).  «  Je  pense  bien  que  d'accord  avec  le 
citoyen  Hautefort  vous  ferez  tout  ce  qui  est  en  vous  pour  accélérer 
la  vente  de  la  fabrique  de  porcelaine  en  notre  faveur  et  certes  la 
République  dans  son  intérêt  doit  être  bien  aise  d'abandonner  un 
établissement  grevant,  et  dans  le  particulier  les  artistes  languissants 
à  côté  de  cet  établissement  sont  également  intéressés  à  voir  refi- 
vre  cette  manufacture.  Les  actionnaires  pénétrés  de  ces  intérêts  et 
de  l'amour  qu'ils  portent  à  cet  établissement,  désirent  une  prooipte 
décision,  faites  donc  tout  ce  qui  sera  en  vous  pour  l'obtenir,  je 
vais  m'accoler  à  Doudet  et  je  ne  le  quitte  pas  avant  qu'il  ait  fait  sod 
rapport  ». 

Ce  passage  doit  être  compté  à  l'actif  de  Brigueil,  il  parait  évident 
qu'il  avait  des  sentiments  bien  meilleurs  que  ceux  de  Préat.  Je  re- 
marquerai  le  mot  «  actionnaire  »  qui,  au  xvnr  siècle,  avait  la  même 
signification  qu'aujourd'hui.  Je  n'ai  malgré  mes  recherches  pu 
recueillir  aucun  renseignement  sur  ce  que  pouvaient  être  ces  action* 
naires. 

Le  22  juillet  Brigueil  parle  sur  le  même  ton  : 

«  Si  vous  pouviez  accélérer  la  vente  de  la  manufacture,  von» 


KdSAi  bB  CLA98iriCAtI0N  t>ES  AKaBNNBS  PORCBLAIKÊS  DB  LIHOOBS.       695 

tireriez  un  ver  rongeur  à  la  République  et  vous  feriez  du  bien  aux 
ouvriers  de  ce  départeraeut.  De  la  manière  dont  nous  avions  projeté 
de  monter  cette  fabrique,  avec  les  connaissances  du  citoyen  Hau- 
lefort,  en  temps  de  paix,  nous  ferions  de  belles  et  bonnes  affaires.  Je 
pjense  qull  est  temps  de  travailler  à  cet  établissement  parce  que 
je  crois  que  la  Convention  ne  tardera  pas  à  nous  délivrer  des  bri- 
gands de  la  Vendée,  etc.  » 

Voici  un  dernier  extrait  :  il  est  tiré  d'une  lettre  datée  du  22  sep- 
tembre : 

«  Occupe^  vous  toujours  de  notre  établissement  de  porcelaire;  si 
nous  ne  pouvons  obtenir  celui  de  Limoges,  nous  en  formerons  éga- 
lement un  sur  un  autre  local.  Comme  vous  Tobservez,  je  crois  bien 
qu'une  autre  fabrique  ne  fera  aucun  tort  à  la  nôtre;  ce  n'est  pas  la 
consommation  de  la  ville  qui  peut  être  considérée  pour  beaucoup 
et  rétablissement  qui  par  ses  talents,  ses  soins  et  ses  ressources 
fera  de  meilleur  ouvrage  en  imposera  à  l'autre.  » 

La  Gn  judiciaire  que  reçut  TafTaire  dont  nous  venons  de  nous 
occuper  ne  nous  est  pas  connue. 

On  pourrait  constater  des  intrigues  du  même  genre  que  celles  de 
Préat,  mais  pour  le  faire  il  faudrait  peut-être  sortir  des  borner  qu'il 
est  raisonnable  de  donner  à  ce  travail. 

L'ancienne  manufacture  royale  fut  vendue,  le  18  vendémiaire 
an  V,  aux  citoyens  Jean  Jouberl,  Jean-Baptiste  Cacate  et  François 
Joly,  demeurant  en  la  commune  de  Limoges,  laquelle  acquisition 
fut  faite  au  prix  de  40,084  11. 10  s.  9  d.  (1). 

Préalablement  les  citoyens  Lamontagne,  qualifié  tantôt  de  por- 
celainier,  d'artiste  en  porcelaine  et  d'entrepreneur,  expert  nommé 
par  Tadministration  départementale,  Pierre  Chabrol  fils,  expert,  et 
Joseph  Brun,  artiste  en  porcelaine,  nommés  dans  l'intérêt  de  la  ré* 
publique;  Etienne  Baignol,  directeur  de  la  fabrique  de  Saint-Yrieix, 
choisi  par  Cacate,  Joubert  et  Joly,  avaient,  sur  le  procès  verbal 
d'estimation,  procédé  à  divers  inventaires  que  possèdent  encore 
les  Archives  de  la  Haute- Vienne  et  dont  il  a  été  question  plus 
haut. 

L'inventaire  des  citoyens  Lamontagne  et  Chabrol,  daté  du  5  fruc- 
tidor an  IV  (22  août  1706),  est  consacré  à  la  désignation  des  immeu- 

(1)  Cette  somme  totale  se  décompose  ainsi  :  Prix  des 

immeables 36,0001. 

Outils  et  ustensiles 48,000 1. 

Matières  premières,  terres,  pâles  et  objets  manufactu- 
rés et  non  cuits 2,98i  I.  10  s.  0  d. 

40,0S41.  408.  9  d. 


M6  SOCliti  AKCflàOLOGIQUlC  îtr  ttlSTOUlQÛÉ  t>t)  LIHOUSIII. 

bles  où  Tex-Manufacture  royale  se  trouvait  installée.  L'analyse  d; 
cette  pièce  ne  se  lie  peut-être  pas  très  directement  aa  sujet  d** 
cette  étude,  cependant  je  crois  devoir  la  présenter  sommairemect 
au  lecteur  qui  trouvera,  sans  doute,  quelque  intérêt  à  connaiur 
quelle  était  la  disposition  des  locaux  où  Tindustrie  porcelainièn- 
trouva  son  berceau  à  Limoges. 

Les  bâtiments  de  la  Manufacture  étaient  situés  route  de  Paris, 
comme  on  sait,  ils  faisaient  face  au  portail  du  citoyen  Daclon,  leur 
étendue  était  de  vingt-et-une  toises  quatre  pieds  huit  pouces  en  lon- 
gueur, sur  une  largeur  de  trois  toises  trois  pieds  (1),  Au  rez-it- 
chaussée  le  bâtiment  de  la  fabrique  était  divisé  en  trois  magasinf 
et  un  bureau  boisé,  ces  quatre  pièces  garnies  de  rayons;  à  la  suite 
du  bureau  on  trouvait  trois  petits  ateliers  dont  un  garni  de  rayoïiN 
plusieurs  (2)  grands  ateliers  également  garnis  de  rayons,  enfin  un 
petit  cabinet  au-dessus  duquel  la  cave  était  située. 

Au  premier,  on  trouvait  un  corridor,  une  cuisine,  trois  chambres 
dont  une  boisée,  «  partie  en  alcovre  »  et  plafonnée,  enfin  une  qua- 
trième et  servant  d'atelier  aux  peintres  laquelle  était  garnie  de 
de  sept  petites  planches,  un  rayon  et  d'une  petite  armoire  :  pln> 
trois  greniers  dont  deux  rayonnes  servant  de  magasins. 

Un  petit  bâtiment  occupé  par  le  citoyen  Massié,  mesurait  cinq 
toises  quatre  pieds  huit  pouces  de  longueur,  sur  deux  toises  trob 
pieds  de  largeur,  ce  bâtiment  ou  maison  se  composait  au  rez-de- 
chaussée  d'une  cuisine,  d'un  petit  salon  et  d'un  escalier,  au  premier 
étage  on  trouvait  deux  chambres  à  coucher  et  un  cabinet,  au-dessus 
un  grenier. 

En  face  de  la  petite  maison  de  Massié  (3)  il  y  avait  un  hanganl 
mesurant  six  toises  en  longueur  et  largeur.  A  la  suite  du  dit  ban- 
gard  il  s'en  trouvait  un  autre  de  dix-huit  toises  un  pied,  sur  quatre 
toises  cinq  pieds.  Dans  ce  dernier  avait  été  établie  la  fosse  garoiî' 
de  planches  où  on  faisait  «  tremper  »  la  pâte. 

Un  local  mesurant  six  toises  deux  pieds  de  largeur,  sur  quatre 
toises  un  pied  six  pouced  de  longueur,  contenait  un  four,  une  dé- 


(')  Dans  une  antre  pièce  (cahier  des  charges  datée  dn  18  veodéniîtire 
an  V  (9  octobre  4  796),  on  évalue  le  «  local  »  de  la  Manufacture  à  environ  trois 
seterées,  mesure  de  Limoges.  Le  procès-verbal  d'expertise  de  Chabrol  et 
Lamonlagne  donne  la  môme  mesure  pour  pour  remplacement  où  se  trof- 
vait  la  Manufacture  en  y  comprenant  les  jardins. 

(9)  Le  bas  de  la  page  sur  laquelle  se  trouvait  le  chiffre  indiquant  les 
dimensions  des  grands  ateliers  a  été  brûlé. 

(3)  La  partie  de  la  pièce  où  la  situation  de  cette  maison  est  indiquée  so 
trouve  être  brûlée. 


K8SAI   DE  CLASSIFICATION  DES  ARCIBlfNES   PORCELAINES  DE  LIMOGES.       697 

charge,  un  atelier  à  cazettes  et  un  petit  magasin  garni  de  rayons. 

Dans  un  local  plus  petit,;  quatre  toises  trois  pieds  de  longueur  et 
largeur,  se  trouvait  un  second  four. 

Un  bâtiment  serrant  de  déchargeoir  et  surmonté  de  deux  gre> 
niers,  mesurait  neuf  toises  et  deux  pieds  de  longueur,  sur  deux 
toises  deux  pieds  de  largeur.;  à  la  suite  du  déchargeoir,  la  moufle 
était  installée  dans  un  local  de  neuf  pieds  de  longueur,  Tinventaire 
de  note  encore  aux  petits  bâtiments  de  latrines. 

L*expertise  avait  durée  trois  jours. 

Les  archives  possèdent  un  inventaire  fait  par  Etienne  Baignol 
et  Gérome  Lamonlagne,  des  marchandises  non  cuites,  ustensiles 
et  outils  divers  qui  se  trouvaient  à  la  Manufacture  au  moment  de 
la  vente,  plus  haut  il  a  été  tiré  un  certain  parti  de  cette  pièce 
qui  nous  fait  connaître,  mais  très  sommairement,  la  fabrication 
habituelle  de  la  Manufacture,  mais  il  n'est  peut-être  pas  inutile 
d'examiner,  en  ce  moment,  les  passages  de  la  pièce  en  question 
qui  ont  rapport  aux  outils  et  ustensiles. 

Une  remarque  s'impose  d'abord,  c'est  que  au  moment  de  la 
vente  le  mobilier  (outils  compris)  de  la  Manufacture  était  des  plus 
pauvres.  On  dirait  volontiers  qu'il  était  sordide  ainsi  que  les  indi- 
cations suivantes  le  montrent. 

La  Manufacture  ne  contenait  que  cinq  tours  (deux  estimés 
35  francs  et  trois  à  12  francs  chacun),  nous  y  voyons  encore  figurer 
deux  lournettes,  un  seul  carré  à  faire  les  croûtes,  quatre  paires  de 
règles  et  une  billette,  deux  moufles  très  mauvaises,  etc. 

Ces  indications  suffisent  à  nous  montrer  que,  tout  au  moins  en 
dernier  lieu,  la  production  de  la  Manufacture  était  très  restreinte, 
ou  a  vu  que  d'après  le  rapport  de  Rolland,  les  ouvriers  de  la  Ma- 
nufacture étaient  seulement  neuf  ou  dix,  il  semble  que  d'après 
le  document  que  j'analyse  rapidement,  ce  chiffre  doit  encore  être 
réduit  puisque  nous  ne  voyons  mentionner  que  huit  chaises. 

Un  autre  inventaire  (dont  il  a  été  question  précédemment)  nous 
fournît  la  preuve  que  la  confection  des  figures  avait  à  Limoges  une 
certaine  activité. 

La  vente  de  la  porcelaine  cuite  eut  lieu  après  celle  des  bâti- 
ments, ustensiles,  etc,  Les  archives  de  la  Haute- Vienne  en  possè- 
dent l'inventaire  dressé  par  Etienne  Baignol  qui  signe  Baigihol 
cadet.  Cette  pièce  ne  donne  lieu  à  aucune  remarque  intéressante. 
Les  archives  municipales  nous  montrent  une  décision  dans  les  re- 
gistres des  délibérations  du  Conseil  municipal,  en  date  du  1"  bru- 
maire an  V  (1"  octobre  1796),  selon  laquelle,  ce  Conseil  nomme, 
sur  l'invitation  de  l'Administration .  départementale,  le  .citoyen 
Duclou  comme  Commissaire,  pour,  de  concert  avec  celui  du  dépar- 


698  SOCiftTÉ  A1CBÀ0L06IQUI  KT  BISTORIOCT  DO  UHOUBlll. 

tement,  et  sous  la  surveillance  du  receveur  au  département,  pro- 
céder à  la  vente  dans  le  plus  court  délai  possible  de  la  porf^ 
laine  cuite  se  trouvant  dans  les  magasin  de  la  «  fabrique  naûo- 
nale.  » 

La  Statistique  du  département  de  la  Haute-Vienne^  publié  en  1808 
et  rédigée  par  Rougier-Ghatenet,  contient  sur  rinduslrie  de  U 
porcelaine  à  Limoges,  un  intéressant  article  qui  pourrait  biee  avoir 
été  inspiré,  ou  peut-être  même  écrit  par  M.  ÂUuaud,  car  on  3 
trouve  les  mêmes  faits  et  jusqu'aux  mêmes  phrases  que  dans  le 
travail  déjà  cité  paru  dans  les  Ephmérides  de  Laurent  ;  le  passagv 
suivant  n'est  pas  sans  intérêt. 

«  Quels  qu'aient  été  les  vices  d'administration  de  cette  manuiàc- 
ture  et  les  circonstances  malheureuses  qui  se  sont  réunis  pour  ea 
paralyser  les  travaux,  elle  n'a  point  été  onéreuse  au  trésor  pubUc 
et  le  gouvernement  en  a  retiré  l'avantage  de  créer  un  nouveaa 
genre  d'industrie  dans  la  ville  de  Limoges.  Cette  ville  de  son  céié 
n'a  point  à  regreter  cet  établissement  puisque  son  but  principal  a 
été  rempli  et  qu'elle  en  est  plus  que  dédomagée  par  les  diverses 
fabriques  qu'elle  a  vu  s'élever  sur  les  ruines  de  l'ancienne  mana* 
facture  royale  ». 

Il  y  aurait  bien  des  objections  à  faire  contre  cette  manière  d'en- 
visager la  question.  Par  les  détails  donnés  plus  haut  on  voit  quel 
fonds  il  faut  faire  sur  cette  ailirmation,  que  la  Manufacture  ne  fot 
pas  onéreuse  à  l'Etat;  d'autre  part  il  n'est  peut-être  pas  très  abso- 
lument exact  de  prétendre  que  le  but  principal  poursuivi  avait  été 
atteint.  Il  parait  au  contraire  probable  que  si  la  pensée  qui  semble 
avoir  animé  Turgot  lorsqu'il  établit  la  première  manufacture  li- 
mousine n'avait  par  été  brusquement  abandonnée,  l'industrie  eut 
pu  réaliser  des  progrès  autrement  rapides  que  ceux  qui  furent  ef- 
fectués. Sans  vouloir  nier  aucun  service  rendu,  peut-on  n'être  pas 
frappé  de  ce  fait  si  caractéristique  que  la  fabrication  de  la  porce- 
laine ne  fut  réellement  et  définitivement  naturalisée  à  Limoges 
qu'alors  que  la  succursale  privilégiée  en  eut  disparu?  En  somme  la 
fabrique  royale  paraît  avoir  surtout  été  utile  aux  intérêts  privés  de 
quelques  personnages  habiles  (1). 

(4)  On  a  géDéralement  considéré  les  («rellet  comme  des  spécsUleun  fi 
dans  mon  travail  ce  point  de  vue  a  éié  accepté,  voici  cependant  quelqies 
paroles  prononcées  à  Toccaslon  de  la  mort  de  Greliet,  fiar  le  citoyen  Boa- 
Ihac,  vice-président  de  la  Société  d'agricultore,  à  la  séance  publique  teaae 
par  cette  société  le  6  thermidor  ao  XÎ. 

«  Le  citoyen  Grellet-Habili^T  possédait  des  connaissances  pan  ordi- 
naires en  agriculture  et  en  métallurgie,  directeur  de  la  manufactart  de 


BS8AI  DR  CLASSIFICATION  BBS  ANCICffNI»  POKCRLAINES  DE  LIMOGES.       999 

Il  convient  de  faire  une  exception  pour  Massié  qui  parait  avoir 
terminé  sa  vie  dans  la  médiocrité.  Cest  au  moins  ce  qui  semble 
résulter  d'une  délibération  du  Conseil  municipal  de  Limoges,  séance 
do  H  floréal  an  IV. 

«  Vu  la  pétition  présentée  par  le  citoyen  Joseph  Massié,  lisons 
nous  dans  ce  document,  directeur  provisoire  de  la  Manufacture  Na- 
tionale de  porcelaine  tendante  à  demander  un  certificat  qui  cons- 
tate qu'il  a  trois  filles  à  sa  charge  et  qu'il  ne  possède  pour  toute 
fortune  qu'une  petite  maison  située  dans  cette  commune.  L'admi- 
nistration monicipaie  convaincue  de  la  vérité  de  l'exposé  du  pétition- 
naire arrête  que  le  certificat  qu'il  réclame  lui  sera  délivré.  » 

Cependant  s'il  est  permis  de  faire  quelques  réserves  sur  la  façon 
dont  l'annexe  de  Sèvres  fut  conduite,  il  est  bien  incontestable 
qu'elle  a  aidé  à  l'expansion  de  l'industrie  porcelainière,  en  créant 
à  Limoges  un  certain  nombre  de  spécialistes  dont  quelques  uns 
paraissent  avoir  été  fort  habiles.  D'ailleurs  il  est  a  peu  près  impos- 
sible de  porter  aiQourd'hui  un  jugement  ferme  sur  la  valeur  des 
pièces  sorties  des  (ours  de  la  Manufacture  Royale  (depuis  478*),  car 
nous  ne  connaissons  guère  sa  production  ;  on  peut  espérer  que  plus 
tard  il  n'en  sera  plus  ainsi,  cependant  il  y  a  lieu  de  croire  que 
jamais  nous  ne  pourrons  nous  rendre  compte  de  ce  qu'était  la  pro- 
duction de  la  Manufacture  Royale  aussi  bien  qu'il  nous  est  permis 
de  le  faire  peur  la  fabrication  caractérisée  par  la  marque  C.  D. 

En  somme  la  fabrique  de  Limoges  perdit  à  peu  près  tonte  per- 
sonnalité lorsqu'elle  devint  succursale  de  Sèvres,  et  il  paraît  pro- 
bable que  c'est  à  Sèvres  qu'il  faudrait  aller  chercher  les  éléments 
de  son  histoire,  c'est  peut-être  également  à  Sèvres,  que  nous  pour- 
rions apprendre  à  distinguer  les  produits,  assez  nombreux  vraisem- 
blablement, sortis  de  la  fabrique  Limousine,  mais  sortis  terminés, 
achevés  parla  dorure  et  la  peinture. 

Nous  voyons  dans  la  statistique  que  M.  Alluaud  ne  reçut  que  de 
faibles  acomptes  sur  la  somme  qu'il  réclamait,  somme  considérable 
ainsi  qu'on  sait.  Il  intervint  un  arrangement  dans  lequel  M.  Âl"- 

porcelaine  de  Limoges,  pendant  qu'elle  fut  régie  pour  le  compte  de  l'ancien 
gouvernement,  celte  précieuse  fabrication  lui  dût,  en  grande  partie,  les 
succès  qu'elle  obtint  à  cette  époque  ;  zélé,  actif,  laborieux,  non  moins 
bardi  dans  ses  conceptions  qu'infatigable  dans  ses  recherches  et  ses  expé- 
riences, la  Société  en  le  perdant  a  vn  à  regretter  un  de  ses  membres  les 
plus  distingués  soua  plusieurs  rapports  ». 

Ce  témoignage  est  précieux  pour  la  mémoire  de  Grellet;  peut-être  lorsque 
rbistoire  du  commencement  dé  la  fabrication  de  la  porcelaine  nous  sera 
nnieux  connue,  peut-être  pour  te  rôle  attribué  à  Grellet  preudra-il  pour 
nous  UD  nouYcl  aspect. 


700  SOaiTÉ  ARCHiOLOGIQOB   KT   HISTORIQUE   00   LIHÔ08III. 

luaud  obtint  comme  compensation  la  carrière  ou  partie  de  la  car- 
rière jadis  acquise  à  Saint-Yrieix  par  la  liste  civile  (1). 

Nous  avons  vu  que  l'ancienne  Manufacture  Royale  fut  acquise  par 
MM.  Joubert,  Cacate  etJoly,  —  ce  dernier  disparait  de  Tassodaiioii 
après  l'an  VIII,  —  il  exisle  aux  archives  une  lettre  du  directeur  de« 
domaines  à  l'effet  de  demander  aux  administrateurs  de  la  Haote- 
Vienne,  des  poursuites  contre  les  trois  acquéreurs  de  la  Manufac- 
ture, qui  à  cette  date  (28  brumaire  an  YIII)  ne  s'étaient  pas  encore 
complètement  acquittés.  Dans  une  autre  pièce  conservée  au  mém^ 
dépôt  et  datée  de  Tan  X,  il  n'est  plus  question  de  Joly. 

Dans  une  pétition  signée  de  Joubert  cadet  et  de  Cacate,  ceoi-d 
donnent  sur  eux-mêmes  des  détails  qui  ne  manquent  pas  d'intérêt. 
Ils  nous  apprennent  qu'ils  avaient  travaillés  à  l'ancienoe  fabrique 
dont  la  <c  chute  fit  disparaître  leurs  moyens  d'existence,  alors  ils 
réalisent  les  débris  de  leur  patrimoine,  mettent  à  contribution  h 
bourse  de  leurs  amis  et  font  l'acquisition  de  la  Manufacture  ^  dao^ 
la  suite  de  la  pièce  les  signataires  cherchent  à  établir  qu'il  y  aurait 
lieu  de  leur  accorder  une  réduction  de  1 ,762  fr.  en  se  basant  sor 
cette  considération,  qu'ils  avaient  acquis  une  manufacture  en  acti- 
vité, ce  qui  selon  eux  impliquait  que  les  outils  faisaient  partie  de 
l'acquisition  et  ne  devaient  pas  être  payés  à  part.  Joubert  et  Cacatle 
poursuivirent,  avec  des  fortunes  diverses,  leurs  revendications  et 
l'affaire  eut  sa  solution  en  Tan  XI,  alors  le  gouvernement  de  la  Ré- 
publique, le  conseil  d'Etat  entendu,  les  débouta  par  un  arrêté  du 
22  prairial  (Archives  de  la  Haute- Vienne). 

La  Statistique  nous  fait  connnaltre  les  faits  suivants  : 

«  MM.  Gacatte  et  Joubert  se  partagèrent  cette  manufacture,  le 
premier  fabriquait  pour  son  compte  dans  la  partie  qui  lui  était 

(2)  On  lit  le  passage  suivant  dans  la  notice  sur  Vergniaad,  rédigée  vers 
1849,  par  M.  François  Aliuand  et  insérée  dans  Fouvrage  de  M.  Vaiel: 
Vergniaud^  manuscrits  ^lettres  et  papiers,  a  Parmi  les  lettres  qui  nous  restent 
il  en  est  une  qui  nous  raontre  fexquise  délicatesse  des  sentiments  de  Ver- 
gniaud:  son  beau-frère,  à  qui  il  conservait  autant  d'amitié  quede  recooDais- 
sance,  était  créancier  de  Tétat  et  de  la  lisie  civile,  il  pria  Vergniand  de 
solliciter  le  règlement  de  ses  comptes  et  le  remboursement  de  ses  avances. 
Certes  il  ne  s'agissait  pas  de  demander  une  faveur  mais  un  acte  de  jusltee. 
Vergniaud  écrit  à  M.  Alluaud,  le  18  décembre  1791  :  c  Si  le  mtnistrip  n'est  pas 
«  de  bonne  volonté  il  me  sera  impossible  de  vous  être  utile,  commeje  neveu 
<t  pas  que  Ton  puisse  jamais  m'accuser  d'avoir  eu  une  opinion  qai  foi  le 
«  prix  d'une  faveur,  je  me  suis  fait  un  devoir  de  n'en  solliciter  ancuoe  quand 
«  je  parviendrais  à  avoir  assez  de  crédit -pour  en  obtenir.  Je  crois  que  ceue 
«  profession  de  foi  doit  me  rendre  plas  digne  encore  de  votre  ettioie  et  de 
c  votre  amitié.  » 


ESSAI  0B  GLASSIFIGATION  DBS  AUCIBHIIIS  PORCELAINES  DE  LIMOGES.         701 

échue;  M.  Joubert  afferma  la  sienne.  La  médiocrité  de  la  fortune  de 
M.  Cacate  et  la  nombreuse  famille  dont  elle  était  chargée  fsicj,  ne 
lui  permirent  jamais  de  faire  les  avances  nécessaires  pour  se  mettre 
au-dessus  des  chances  du  commerce  et  pour  assurer  le  succès  de  sa 
fabrication,  par  le  beau  choix  des  matières,  et,  dans  les  derniers 
temps  s'étant  avancé  dans  ses  dépenses  et  ne  pouvant  plus  soute- 
nir sa  fabrique,  il  a  été  forcé  de  la  mettre  en  vente  «. 

D'autre  part  M.  Paul  Ducourtieux  (Limoges  d'après  ses  anciens 
plansj  nous  apprend  que  M.  AUuaud  fils  loua  Tancienne  manu- 
facture, pendant  qu'il  achevait  la  construction  de  la  grande  fabrique 
desCasseaux,  »  d'après  le  passage  ci-dessus,  tiré  de  la  Statistique, 
on  voit  que  ce  fut  avec  Joubert  que  traita  M.  François  Alluaud. 

D'après  M.  Paul  Ducourtieux  {loc.  cif.).  la  Manufacture  Royale 
(c'est-à-dire  la  fabrique  établie  sur  son  emplacement)  a  appartenu 
successivement  à  MM.  Pierre  Tharaud,  Legay,  Barbe  et  Poncet, 
Poucet,  Poncet  et  Àrdant,  Vaslet  de  Fontaubert,  auxquels  il  faut 
ajouter  MM.  Thouvenet  et  Spikel,  enfin  MM.  Jouhanneaud  et  Bou- 
det,  possesseurs  actuels. 

Je  n'ai  pas  trouvé  la  plus  légère  indication  pouvant  permettre 
d'attribuer  aucune  des  pièces  conservées  au  Musée  céramique  à  la 
fabrique  Cacate,  qui  peut  être  considérée  comme  la  suite  de  la  Ma- 
nufacture. Mais  on  a  vu  par  ce  qui  précède  que  l'histoire  de  la 
fabrique  en  question  nous  est  à  peu  près  absolument  inconnue. 

FABRIQUE  MONNERiB.  —  Lcs  registres  des  délibérations  du  Conseil 
municipal  de  Limoges  nous  donnent  les  indications  suivantes  : 

«  Séance  pubhque  du  19  ventôse,  troisième  année  républicaine.  — 
Etablissement  d'une  manufacture  de  porcelaine  par  les  citoyens 
Monnerie  et  Joubert  :  «  Les  citoyens  Léonard  Monnerie  et  Jean 
Joubert  demandent  l'agrément  de  la  municipalité  pour  rétablisse- 
ment d'une  manufacture  de  porcelaine  dans  la  maison  et  dépen- 
dances du  dit  Monnerie,  située  faubourg  de  Paris,  section  de  la 
liberté. 

»  Le  Conseil  général,  voulant  seconder  les  intentions  de  la  Con- 
vention nationale,  qui  vient  de  donner  au  commerce  tout  l'encou- 
i*agement  nécessaire  pour  le  faire  fleurir,  a  donné  son  agrément 
à  rétablissement  proposé,  ne  pouvant  en  résulter  aucun  inconvé- 
nient fâcheux,  étant  situé  hors  l'enceinte  de  la  ville.  » 

(Deuxième  registre  des  délibérations  du  Conseil  général  de  la 
commune  de  Limoges.  —  Archives  de  l'hdtel  de  ville). 

Dans  son  Aperçu  statistique  sur  l'exposition  de  Limoges  en  1855, 
M.  Ravenez  donne  les  renseignements  suivants  sur  la  fabrique  qui 
nous  nous  occupe  : 


19%  MCltTÊ   AKCHÉ0L061QUI   BT   BISTOtlQOE  DU  .LMOUKlIt. 

«  En  1794,  M.  Horinerie  établit  une  nouvelle  manufacture  à 

Limoges,  dans  Tancien  couvent  des  Augustins,  dont  il  avait  fait 
l*acquisition  au  mois  de  septembre  4793.  Jusqu'en  1800,  ses  opéra- 
tions y  furent  assez  régulières,  il  s'y  faisait  par  an  environ  dix- 
huit  fournées,  qui  occupaient  une  vingtaine  d'ouvriers  et  de  ma- 
nœuvres. Mais,  sous  Tempire,  celte  fabrique  ne  fit  que  languir,  et, 
en  i808,  elle  ne  se  maintenait  que  par  TintelUgence  de  son  direc- 
teur :  c'est  celle  où  est  établi  aujourd'hui  M.  Ruault.  » 

En  Tan  X,  la  Société  d'agriculture  de  Umoges  organisa,  sor 
l'invitation  du  gouvernement,  une  exposition  préparatoire  qui  devait 
permettre  de  choisir  des  spécimens  des  produits  de  Tindostrie 
limousine  dignes  de  figurer  à  l'exposition  de  Paris.  Sur  un  tableau 
annexé  au  rapport  présenté  par  le  citoyen  Martin  au  nom  de  la  com- 
mission centrale,  à  la  séance  tenue  par  la  Société  d'agriculture  le 
47  prairial  an  X,  on  trouve  la  mention  suivante  :  «  Un  cabaret  de 
porcelaine  blanc  et  or  de  six  tasses  et  soucoupes,  une  caflfetière  (sic). 
une  théière  et  un  sucrier.  Moonerie,  fabricant  à  Limoges.  Prix  : 
60  francs.  » 

En  l'an  XI,  la  Société  d'agriculture  organisa  une  nouvelle  expo- 
sition qui,  comme  celle  de  l'année  précédente,  eut  lieu  dans  1  an- 
cienne  chapelle  du  collège.  Dans  le  rapport  lu  par  le  citoyen  Mar- 
tin à  la  séance  du  6  thermidor  an  XI,  le  passage  suivant  est 
consacré  à  Monnerie  : 

«  Le  C.  Monnerie,  créateur  de  sa  fabrique  dans  des  temps  diffici- 
les, n'a  offert  qu'un  vase  de  pharmacie  sans  peinture  ni  dorure  et 
un  plateau  de  déjeuner  peint  et  doré;  le  vase,  d'ailleurs,  remar- 
quable par  sa  grandeur,  a  paru  fumé,  et  les  mascarons  servant 
d'anses  ne  sont  pas  de  bon  goût;  le  plateau,  peint  par  son  (ib, 
élève  de  l'Ecole  centrale,  présente,  dans  la  femme  sortant  du  bain 
qui  en  fait  le  sujet,  des  formes  gracieuses  au  fini  moelleux  gui,  eo 
annonçant  de  grandes  dispositions,  faisaient  oublier  les  incorrec- 
tions de  ce  joli  tableau  ;  mais,  au  moment  où  le  public  applaudis- 
sait à  ses  succès,  cet  infortuné  jeune  homme,  non  moins  intéressant 
par  ses  vertus  privées  que  par  ses  talents,  épuisé  par  l'excès  da 
travail,  luttait  contre  une  mort  prématurée  qui  peu  de  jours  après 
l'a  enlevé  à  sa  famille  et  à  ses  nombreux  amis. 

»  Comme  fondateur  d'un  établissement  qui  tend  à  augmenter  la 
fortune  publique,  le  jury  décerne  au  citoyen  Monnerie  une  médaille 
d'argent.  ». 

On  serait  tenté  de  reconnaître  dans  le  vase  exposé  par  Monnerie 
en  l'an  XI  la  pièce  par  laquelle  commence  la  nomenclature  qui 
fait  l'objet  de  ce  travail;  cette  pièce,  je  l'avais  attribuée  aux  pre* 


ESSAI  DK  eLASSinCATION  DES  AlfCIERIIES  P0ECBLAIWE8  DE  LIMOGES.        702 

miers  temps  de  la  manufacture  Massié,  Grellet  et  Fourneyrat; 
j'avoue  qu'il  m*e8t  bien  dilHcile  de  renoncer  à  cette  pensée  en  pré- 
sence do  caractère  décoratif  très  franchement  Louis  XV  du  rase  en 
question  ;  si  c'est  bien  notre  vase  qui  a  été  exposé  par  Monnerie  en 
Tan  XI,  on  pourrait  penser  qu'il  ne  l'avait  pas  lui-même  fabriqué. 


FABRIQUE  INDÉTERMINÉE   (fin   dU  XVUl*  Sièclc) 

44.  —  Jatte  à  fraises,  forme  coupe.  Décor  barbeau.  Bord  couvert 
à  dents  de  loup.  Or. 

Largeur,  23  1/î.  Hauteur,  H/± 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  le  vicomte  de  Pelleport. 

L'émail  de  cette  pièce  a  quelques  légers  défauts  et  n'a  pas  une 
aussi  belle  «  étente  »  que  dans  les  pièces  portant  la  même  décora- 
tion et  sortant  de  la  fabrique  Baignol,  où  on  ne  paraît  pas  avoir 
jamais  employé  la  dent  de  loup. 

La  tonalité  de  la  décoration,  ainsi  que  les  particularités  de  la 
bordure  en  dents  de  loups  semblent  défendre  l'attribution  à  Bai- 
gnol. Les  dents  de  loup,  la  puissance  des  verts  etc.,  font  songer  à 
l'annexe  de  Sèvres.  Nous  nous  trouvons  évidemment  en  face  d'une 
pièce  exécutée  à  une  époque  où  les  traditions  de  l'ancienne  Manu- 
facture Royale  étaient  encore  très  vivantes. 

48.  —  Saucière.  Elle  est  de  forme  ovale  très  allongée,  fixée  à 
un  bateau  dont  le  fond  est  rectangulaire  et  l'ouverture  très  évasée 
octogonale  (disposition  qui  a  été  d'abord  appliquée  en  porcelaine 
tendre),  la  saucière  elle-même  est  droite,  avec  plusieurs  filets  en 
relief  en  haut  et  en  bas.  Aux  deux  extrémités  elle  portait  deux 
oreilles  (qui  ont  été  brisées)  percées  au  milieu.  Couvercle  rentrant 
surmontée  d'une  petite  poignée  rectangulaire  dont  les  angles  droits 
sont  abattus,  Décor  barbeau  bleu,  vert  et  noir.  Sur  la  saucière  et 
son  couvercle,  bords  festonnés  or. 

Longueur  de  la  jatte  (prise  à  l'ouverture)  :  30,  hauteur  :  y  com- 
pris le  couvercle, 

Aucune  marque. 

Don  de  M"*  A.  Ferru. 

Cette  pièce  parait  postérieure  à  la  précédente,  cependant  sa 
forme  était  bien  connue  à  la  fin  du  xviir  siècle.  Il  faut  remarquer 
que  la  bordure  en  dents  de  loups  si  usitée  par  les  décorateurs  de  la 
fabrique  du  comte  d'Artois,  ne  paraît  pas  avoir  été  employée  par 
les  fabriques  qui  succédèrent  à  l'annexe.  Au  Musée,  on  ne  la  cons- 
tate sur  aucune  des  pièces  pouvant  avec  quekjues  raisons  être 
attribuées  à  BaignoL 


704  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE  DU  LlMOUSIir.. 

LES  PREMIÈRES  FABRIQUES.  ^  Alluaud.  —  Par  88  situatioD,  par 
la  nature  de  ses  travaux,  M.  François  Âlluaud  père  dût  être 
appelé  un  des  premiers  à  se  livrer  à  la  recherche  du  kaolin.  Cette 
recherche,  on  s'en  occupa  beaucoup  dans  le  monde  officiel  et  îl 
était  naturel  qu'un  homme  qui  portait  le  titre  de  géographe  du 
roi  s'y  attacha;  d'autre  part,  la  connaissance  qu'il  possédait  cer- 
tainement de  la  topographie  du  département  le  rendait  particuliè- 
rement propre  à  ce  genre  d'investigations. 

L'histoire  de  la  découverte  du  kaolin  est  à  refaire.  Déjà  on  peut 
prévoir  le  moment  où  les  erreurs  acceptées  trop  légèrement  jus- 
qu'ici seront  enfin  réformées  (1).  François  Alluaud  père  fut-îl  pour 
quelque  chose  dans  la  découverte  du  gîte  de  Saint-Yrieix  ?  C'est  ce 
qu'il  n'est  pas  possible  de  dire  encore,  je  le  crois  du  moins,  mais  ce 
qui  est  certain,  c'est  que  de  très  bonne  heure  on  le  voit  proprié- 
taire de  carrières  de  compte  à  demi  avec  Elie  Leymarie  de  Laver- 
gne,  puis  Etienne  Baignol,  etc. 

Quoiqu'il  en  soit,  les  kaolins  qu'il  exploitait,  Alluaud  père  dut 
tout  naturellement  songer  à  en  tirer  directement  parti  en  devenant 
lui-même  fabricant  de  porcelaine,  d'autant  plus  que  la  manufac- 
ture royale  de  Sèvres  et  celles  de  Limoges,  possédant  elles-méme^ 
des  carrières,  n'offraient  aucuns  débouchés,  la  chose  est  du  moins 
fort  probable.  Nous  ne  savons  pas  d'une  façon  certaine  quels  motifs 
lui  firent  choisir  Bordeaux  pour  donner  suite  à  ses  projets,  mais  il 
est  facile  de  trouver  certaines  raisons  de  ce  choix  :  la  porcelaine 
était  alors  un  produit  de  luxe,  elle  se  vendait  très  cher  et  s'écoulait 
surtout  dans  la  noblesse  et  la  haute  bourgeoisie  ;  or  Bordeaux  était 
admirablement  placé  pour  opérer  sur  un  pareil  terrain  :  au  cen- 
tre d'une  riche  contrée,  où  la  noblessse  était  nombreuse,  cette 
ville  possédait,  dans  son  sein  même,  une  grande  bourgeoisie  com- 
merciale et  une  petite  noblesse  parlementaire,  qui  par  d'adroites 
alliances  avait  su  acquérir  l'opulence.  D'autre  part,  les  foires  de 
Bordeaux,  qui  attiraient  les  visiteurs  en  nombre  immense,  consti- 
tuaient un  excellent  champ  d'opérations. 

L'annexe  limousine  avait  bien  un  dépôt  à  Bordeaux,  mais  sans 
doute,  comme  il  arrivait  souvent  alors,  il  avait  périclité  à  la  suite 
d'une  mauvaise  direction. 


(I)  M.  Fray-Fournier  adécouvi^rtà  ce  sujet  des  documeats  fort  carieu 
dont  il  poursuit  la  publication  dans  le  Bulletin  de  la  Société  ordléo- 
logique. 


KSSAI  Dfi  CLAS8I»ICÀT10^;  DES  ANClBNNKS  l^OftCBLAmBS  DK  LlItOGES.        705 

BieQ  que  Vhistoire  de  la  fabrique  de  Bordeaux  constitue  un  sujet 
qui  ne  se  rattache  pas  très  directement  à  Tobjet  traité  dans  cet 
Essai,  il  a  cependant  paru  intéressant  d'entrer  ici  dans  quelques 
détails  relatifs  à  cette  fabrique  de  Bordeaux,  une  des  plus  ancien- 
nes créées  en  province.  Le  lecteur  verra  par  le  court  récit  qui  va  sui- 
vre à  quels  efforts  étaient  obligés,  au  xvui*  siècle,  les  citoyens  coura- 
geux qui,  alors,  tentèrent  de  doter  leur  patrie  d'une  industrie  dont 
la  fortune  devait  être  plus  tard  si  éclatante. 

Je  ne  suis  pas  en  mesure  quant  à  présent  de  donner  un  ensem- 
ble complet  de  renseignements  sur  la  fabrique  de  Bordeaux,  j'ai 
trouvé  les  indications  suivantes  dans  la  correspondance  de  Ver- 
gniaud  que  M"**  V«  Victor  AUuaud  a  bien  voulu,  très  libéralement, 
me  permettre  de  consulter,  j'ai  même  été  autorisé  à  prendre  quel- 
ques notes. 

Le  première  mention  faite  par  Vergniaud,  de  la  fabrique  de  Bor- 
deaux, se  trouve  dans  une  lettre  datée  du  11  avril  1786.  Il  est  pro- 
bable que  cette  fabrique  devait  avoir  été  établie  depuis  quelque 
temps,  quelques  mois  tout  au  moins,  car  le  succès  commençait  à 
répondre  aux  efforts  de  ses  promoteurs.  Vergniaud  en  effet  informe 
son  beau-frère  de  la  réussite  d'une  fournée,  peu  de  rebut  et  presque 
rien  de  cassé,  il  est  vrai  que  les  pièces  avaient  beaucoup  d'épaisseur 
«  elles  sont  cependant  belles,  continue  Vergniaud,  et  les  apparences 
doivent  tout  faire  présumer  pour  le  succès  de  cet  établissement  ». 

M.  Alluaud  s'était  associé  un  certain  Vanier  ;  —  Vergniaud  écris 
parfois  Vannier  —  porcelainier  habile  mais  homme  très  besogneux 
et  probablement  très  désordonné.  «Cet  homme  est  misérable  dit 
Vergniaud  et  le  moindre  retard  (dans  l'envoi  des  fonds)  le  met  aux 
abois  et  dans  l'impossibilité  de  travailler  ». 

Dès  cette  première  lettre,  nous  voyons  entrer  en  scène  une  per- 
sonne qui  suscitera  à  Vergniaud  bien  des  embarras.  C'est  M"* 
Vanier  :  avare,  dissipatrice  et  de  mauvaise  foi,  tels  sont  les  traits 
sous  lesquels  nous  la  connaîtrons  bientôt. 

En  1797  la  manufacture  continue  à  donner  de  belles  espérances, 
mais  rien  que  des  espérances;  une  lettre  en  date  du  18  juillet  nous 
apprend  de  curieux  détails.  «  Je  mène  de  temps  en  temps  quelqu'un 
à  la  manufacture  ;  dès  qu'elle  sera  un  peu  connu,  je  suis  persuadé 
qu'elle  aura  peine  à  suffire  aux  commandes  et  je  prédis  un  instant 
où  il  faudra  redoubler  d'avances  pour  lui  assurer  le  succès  et  les 
bénéfices  que  nous  promet  la  beauté  de  la  porcelaine  et  pour  fournir 
un  débit  qu'assure  l'infériorité  du  prix  sur  celle  de  Paris.  » 

Gomme  on  voit  il  n'est  pas  question  de  la  porcelaine  de  Limoges , 
mais  nous  sommes  en  1787  époque  ou  par  suite  de  la  mauvaise  di- 
rection de  Grellet  notre  Manufacture  Nationale  périclitait. 


706  SOCIÉTÉ  ÀftCaÉOLDOIQUI  ST  BIBTOMQOB  PU  ilKOOSlM. 

Un  an  après  (26  juillet  4788)  naus  trouvons  dans  la  corrcspondanee 
de  Vergniaud  une  note  analogue.  «  J  ai  vu  a^jo^d'hui  M.  Vanier 
qui  m'a  prié  de  vous  prévenir  que  le  mois  était  fini  et  qu'il  compte 
sur  vous  pour  le  prochain  courrier,  je  lui  ai  avancé  sept  louis  par 
ce  qu^ila  fait  des  dépenses  extraordinaires  pour  faire  serrer  etToi- 
turerdu  charbon  de  terre  et  du  bois,  celui-ci  sert  pour  faire  cuire 
les  couleurs;  il  a  fait  cette  semaine  Fessai  du  petit  four  destiné  à 
cet  usage,  le  succès  a  été  complet  et  je  vous  en  porterai  un  écbantS- 
Ion  avec  moi,  j'ai  mené  à  la  manufacture  plusieurs  dames  parieraen- 
taires  qui  en  ont  mené  d'autres  et  je  présume  que  les  commaDdes 
mettront  Vanier  hors  d'état  de  monter  un  magasin  à  la  foire  Je  suis 
votre  orateur,  jusqu'à  présent  cela  m'a  assez  bien  réussi.  » 

Il  semble  d'après  les  indications  de  Vergniaud  que  M.  ÂJluaud 
versait  tous  les  mois  à  Vanier,  une  somme  considérable;  deux  mille 
livres  probablement;  plusieurs  reçus  s'élevant  chacun  à  ce  chiffre  sont 
en  effet  mentionnés  ;  il  se  produisait  parfois  des  retards  dans  renvoi 
des  fonds,  circonstance  qui  n'a  rien  d'extraordinaire  étant  donné 
la  difficultés  des  communications,  Vanier  et  surtout  Madame  Vanier 
jetaient  alors  les  hauts  cris  :  «  J'ai  reçu  ce  matin,  pion  cher  frère  la 
visite  de  M.  Vanier,  écrit  Vergniaud,  à  la  date  du  4  juillet,  ii  a  pleuré 
comme  un  enfant  sur  le  retard  que  vous  lui  faites  éprouver,  il  m'a 
dit  qu'il  vous  avait  prévenu  qu'il  n'avait  pas  d'argent,  ni  crédit, 
qu'il  aimait  mieux  tout  abandonner  que  d'être  dans  cet  état...  que 
c'était  d'autant  plus  malheureux  que  jamais  il  n'avait  fait  d'aussi 
bel  ouvrage  (ici  des  détails  sur  la  misère  personnelle  de  Vanier),  il 
vous  observe  qu'il  n'a  pas  encore  vendu  et  qu'il  ne  s'est  pas  encore 
fait  annoncer,  parceque  ce  serait  une  folie,  tant  qne  le  magasin 
n'est  pas  encore  assorti,  qu'il  fait  une  fournée  tous  les  quinze  joars 
que  c'est  là  ce  qui  consomme  le  fonds,  mais  en  même  temps  que 
c'est  là  le  seul  moyen  de  pouvoir  paraître  à  la  foire  et  que  d'ailleurs 
quand  il  travaillerait  moins  il  ne  pajxraitni  plus  ni  moins  de  loyer... 
je  crois  que  vous  auriez  tort  de  négliger  cet  établissement,  si  j'avais 
mes  petits  fonds  du  Chateiiet  je  ne  balancerais  pas  à  vous  prier  de 
m'associer  jusqu'à  concurrence;  si  jamais  un  établissement  de  ce 
genre  a  dû  réussir  il  me  semble  que  c'est  à  Bordeaux,  surtout  que  je 
puis  connaître  qu'il  est  en  très  bonnes  mains,  etc;  » 

Il  est  peut-être  permis  de  trouver  extraordinaire  que  malgré  tous 
ses  efforts,  toute  son  habileté,  malgré  les  sacrifices  considérables 
pour  l'époque  faits  par  M.  AUuaud;  Vanier  ne  soit  pas  arrivé  plus 
rapidement  à  des  résultats  effectifs,  on  peut  se  démander  si  Ver- 
gniaud n'était  pas  légèrement  optimiste,  lorsque  à  la  date  du  44  avril 
1788,  il  écrivait  les  ligues  suivantes  ;  «  J'allai  voir  hier  matin  M.  Va- 
nier, il  travaille  à  force.  Il  attend  un  ouvrier  pour  faire  desassieUes. 


EdSAI  JM  CUL331F1CAT10H  D&S  AlICttNNSS  PORGBLAlNBS  OB  LlHOGKS.        707 

Le  four  a  faire  cuire  les  couleurs  est  prêt.  Je  pense  qa*à  la  foire 
vous  pourrez  avoir  au  beau  magasin  et  écraser  les  marciiands  de 
Paris  parce  que  vous  pourrez  donner  d'aussi  belle  marchandise  a 
20  p.  100  meilleur  marché.,  et  cependant  faire  les  mêmes  bénéfices 
il  ne  s'agira  que  d*être  assorli  et  d'avoir  des  services  complets  «  (ce 
passage  a  été  reproduit  par  H.  Vatel,  toutes  les  autres  citations  que 
l'on  a  trouvé,  on  que  Ton  trouvera  ici  sont  inédites),  je  crois  d'ailleurs 
pouvoir  vous  dire  qu'il  y  a  du  jet  et  de  l'ordre  dans  la  manufacture 
on  y  fait  de  la  porcelaine  magnifique,  j'y  vais  quelquefois,  le  maga- 
sin commence  a  être  brillant,  le  four  est  excellenl,  sur  la  dernière 
fournée  qui  s'est  faite  il  n'y  a  eu  que  sept  pièces  invendables  et  un 
petit  nombre  de  celles  dites  second  choix.  » 

Malgré  ces  belles  espérances,  la  porcelaine  de  Vanier  ne  parut 
même  pas  à  la  foire.  Les  sacrifices  continuent  toujours  sans  que 
l'on  constate  de  résultats,  cependant  dans  une  lettredu  16  mailT89, 
Vergniaud  annonce  que  a  cette  semaine  Vanier  à  vendu  quelque 
chose  ». 

Mais  enfin  Vergniaud  commence  à  concevoir  des  inquiétudes  ; 
en  février  1790,  il  écrit  :  «  Je  crains  qu'on  ne  vous  trompe,  quel- 
ques propos  d'ouvriers  augmentent  mes  craintes,  il  doit  en  venir 
deux  demain  pour  m'instruire,  ils  sont  inquiets  sur  leur  payement, 
j'ai  taché  de  les  calmer;  Vanier  crie  misère,  on  m'assure  qu'il  a  de 
Targent,  le  mandat  de  M.  de  Laporte  n'est  pas  retiré,  il  en  doit  le 
montant  quoiqu'il  soit  bien  impossible  qu'il  n'ait  pas  vendu  de 
quoi  s'acquitter  depuis  que  cette  affaire  dure,  il  a  livré  à  50  p.  100 
de  pertes  pour  mille  livres  de  marchandises  à  Verneuil,  cet  homme 
pourrait  faire  son  lot  et  décamper...  ». 

Mais  Vanier  ne  devait  pas  «  décamper  »  après  avoir  fait  son  lot 
ir  le  9  mars  1790,  Vergniaud  annonce  à  M.  AUuaud  la  mort  du 
pauvre  diable  survenue  à  la  suite  d'une  fluxion  de  poitrine  compli- 
quée dune  fièvre  putride.  Alors  commence  pour  Vergniaud  une 
série  d'ennuis,  de  fatigues,  de  dégoûts  de  toutes  sortes  qu'il  sup- 
porte avec  une  patience  et  une  égalité  d'humeur  véritablement  ad- 
mirables. La  fabrique  royale  était  alors^  pour  M.  Alluaud,  une  très 
grosse  charge  qui  l'absorbait  complètement  et  lui  imposait  de 
lourds  sacrifices,  sa  présence  eut  été  bien  nécessaire  à  Bordeaux, 
malheureusement  des  intérêts  supérieurs  l'appelèrent  à  Paris,  où 
il  dût  faire  un  assez  long  séjour  (1);  il  fut  d'autre  part  obligé  de 
faire  d*autres  voyages  en  sorte  qu'il  ne  répondit  par  aux  appels 

(1)  La  suscription  d'une  leUre  de  Vorgniaiid  nous  apprend  une  particn- 
Urité  assez  ioierrésante,  M.  Allaaud  éiail  descendu  chez  «  M.  Darcei,  mem- 
bre de  TAcadémle  royale.  » 


708  SOCIKtA  archéologique  BT  BI8T0RIQÛB  DC  LlltOCStfl. 

réitérés  et  pressants  de  Vergniaud.  Celui-ci  continua  pendant  quel- 
que temps  la  fabrication,  puis  commençât  une  liquidation  rendue 
très  laborieuse  par  suite  des  circonstances  dans  laquelle  elle  était 
faite  :  il  fallait  surveiller  étroitement  Madame  Vanier  dont  «  les 
mains  et  Thumeur  processive  étalent  également  dangereuses.»  Cette 
malheureuse  femme  semble  n'avoir  connu  aucuns  scrupules,  dou5 
la  voyons  convaincre  de  mensonge  à  plusieurs  reprises,  diantre 
part  sa  mauvaise  foi  était  évidente,  Yergniaud  nous  la  montre  du 
vivant  môme  de  son  mari  prenant  les  ouvriers  en  pension  se  faisasi 
payer  régulièrement  par  eux  et  ne  s'acquittant  pas  elleHOsémp 
envers  ses  fournisseurs  (elle  devait  huit  cents  francs  à  sa  boulan- 
gère) d'autre  part  les  ouvriers  l'accusaient  v  de  friponnerie  et 
d'avoir  enlevé  pour  plus  de  mille  francs  de  marchandises  aTant  la 
mort  de  Vanier  »,  eniin  Yergniaud  constata  des  détournements,  de< 
ventes  clandestines  à  vil  prix,  etc. 

L'affaire  se  termina  par  une  sentence  arbitrale  qui  déclara 
M.  Alluaud  créancier  de  la  société,  pour  une  somme  d'environ 
13,000  francs,  mais  Madame  Vanier  eut  l'adresse  de  faire  porter 
ses  dettes  particulières  (tailleur,  marchand  de  vin,  etc.)  comme 
dettes  de  la  société.  Il  y  avait  un  stock  considérable  de  marchandi- 
ses, mais  nous  ignorons  dans  quelles  conditions  la  vente  pât  s'en 
opérer. 

En  résumé  M.  Alluaud,  par  la  faute  de  ses  associés  ou  collabo- 
rateurs, se  trouva  avoir  fait  en  pure  perte  des  efforts  et  des  sacri- 
fices considérables  qui  eussent  dû  suffire  pour  créer  une  florissante 
manufacture.  Il  avait  réussi  à  produire  des  porcelaines  de  choix, 
pouvons  nous  croire  d'après  les  quelques  renseignements  qui  nous 
sont  parvenus  (1^  ;  elles  étaient  décorées  et  dorées,  il  est  probable 
qu'un  certain  nombre  de  pièces  sorties  de  cette  fabrique  furent  en- 
voyées à  Limoges,  où  quelques  unes  se  trouvent  peut-être  encore; 
mais  à  quels  signes  les  reconnaître?  Pour  nous  conduire  dans  cette 
très  difficile  recherche,  nous  ne  possédons  aucune  indication,  mais 
on  peut  espérer  qu'une  sérieuse  et  minutieuse  étude  de  la  ques- 
tion amènerait  la  découverte  de  certains  indices^  grâce  auxquels 
on  pourrait  avec  quelque  fondement  faire  des  attributions  à  la 
manufacture  de  Bordeaux. 

Cette  manufacture  de  Bordeaux  nous  intéresse  assez  directement, 
nous  autres  Limousins,  parce  quelle  a  été  créée  par  un  des  nôtres 
et  qu'elle  a  reçu  les  soins  d'une  de  nos  gloires  les  plus  pures;  elle 

(I)  Nous  voyons  dans  la  correspondance  de  Yergniaud  qa'nn  particulier 
avait  commandé  à  la  manufacture  de  Bordeaux  un  service  du  prix 
de  1 .900  livres. 


KS8AI  D8  CLA8SiriC/.Tt<Ml  MS  ANCiSNNBf  POfiCCLAIMBS  »8   I.IIIOÛKS.       709 

est  Itmousiae  en  quelque  sorte  peut-on  dire  mais  ce  qui  mi  ÛH 
maintenant  indobitaMe,  c>st  qoe  c'est  i  Bordeatii  et  par  la  créa* 
tioD  de  la  fabrique,  sur  laquelle  je  viens  d'appeler  Tattentien  4u 
lecteur  qu'une  famille  qui  devait  avoir  une  action  coasidé^raUe  wt 
le  développement  de  la  première  industrie  de  notre  ville  à  fait  9és 
débuts  dans  la  carrière  céramique. 

Il  est  probable  que,  ainsi  qu'il  est  dit  plus  haut^  M.  AUuaud  père 
avait  été  appelé  un  des  premiers  à  mettre  son  activité  au  service  des 
promoteurs  do  mouvement  à  la  suite  duquel  se  firent  les  débuts  de 
la  porcelainerie  limousine.  C'est  là  d'ailleurs  un  point  qui  sera  mis 
CD  lumière  par  des  recherches  subséquentes,  conduites  plus  loin 
qu'il  ne  m'est  permis  de  le  faire  ici,  étant  donné  le  cadre  de  ee 
modesle  travail. 

En  terminant  cette  disgression,  ^  car  c'en  est  une  ^  je  dois 
rectifier  une  errenr  commise  plnts  haut  j'ai  dii  que,  h  la  manufac- 
ture de  Bordeaux,  on  avait  fait  des  essaie  de  cul' son  à  Ja  bouille, 
mais  il  y  a  plus  eiil  ressort  de  la  correspondance  de  Vergniaud, 
qae  la  cuisson  an  charbon  de  ierre  fut  exdusjvemeni  employée  à 
l'usine  de  N.  Ailuaud.  La  bouille  a  été  employée  dès  le  xvm''  sfiècle, 
comme  combustible  par  plusieurs  fabricants  céramistes,  mais  il 
a'est  pas  téntéraiire  de  présumer  que  c^est  ches  M.  Alluaud  que 
cet  (emploi  se  fit  avec  le  plus  de  suite.  C'est  là  d'ailleurs  un  point 
qu'il  sera  Cacile  d'élucider. 

Autre  rectifieàiim,  la  datte  de  i780  a  été  hsnardèe  ici  eonme 
celle  de  la  fiwdaUon  de  la  fabrique  bordelaise,  mais  après  le  dé- 
pouillement qu'il  m'a  été  permis  de  faire  de  la  correspondance 
de  Vergniaud,  il  me  semble  que  la  pinemiëre  mauiufocture  de 
M.  Alluaud  n'a  dut  prendre  naissance  qu'à  une  époque  un  peu  ptos- 
térieune;  nous  pouvons  croire  que  Yanier  ne  menait  pas  rapide* 
ment  les  choses^  mais  il  paraît  difficile  que  si^  ans  après  ses  débuts 
il  n'eu  fut  arrivé  qu'au  point  où  nous  le  voyons  lorsqu'il  estquestion 
poar  la  première  fois  de  l'entreprise  à  laquelle  il  éUiii  associé;  k 
litre  puren^ut  hypothétique,  j'indiquerais  volontiers  Taunée  1784 
comme  cette  du 'Commencement  de  la  manufactaire  de  Bordeaux. 

Nous  avons  vu  que  M.  François  Alluaud  père  dirigea  pieudaut  de 
longues  années  la  manufacture  de  Limoges,  de  ITÀè  à  1793,  nous 
savons,  d'autre  ipart,  par  la  con*espondance  échangjée  entre  ^i- 
gueil  et  Préut  que,  en  1793,  Fraucçois  AUaaad  père  avait  repris  à 
Limoges  la  Jaforicalion  de  la  ptoroelaine.  M.  fiaveoez  s'est  donc 
tnampé  lorsque^  dans  l'ouvrage  cité  ^éjçi^  il  place  en  1796  la  «créa- 
tion de  la  première  usine  Alluaud;  vwci «bailleurs  comnent  U «'.eu- 
prime  À  ce  siyet  :  «(  U.  Albiaud  père  feada  uue  nouvelle  usine  en 
17â8.  Sou  ige  ue  hû  ppraiettsAt  (pius  alors  4e  donner  beau^np 

T.  xii.  45 


7fO  ^OGlirà  AttCHèoLOGlQUk   Rt  HISTOtIQOB  DU  UHOUSIK. 

d'aclivllë  à  ses  travaux,  il  s'altacha  priocipalemeol  à  étudier  la 
composilioD  des  pâtes  et  des  kaolins  qu'il  livrait  ensuite  au  aotra 
fabriques,  malheureusement  la  mort  vint  Tarrôter  dans  ses  expé- 
riences en  juillet  1799.  » 

On  ne  voit  figurer  aucun  produit  de  la  fabrique  Alluaud  sur  k 
tableau  de  l'exposition  des  produits  de  Tindustrie  de  Tan  X,  mat' 
dans  le  rapport  de  Martin,  également  cité  plus  haut  (an  XI)  on  lit  : 
u  La  fabrique  du  C.  Âlluaud  aîné  a  offert  de  beau  blanc  sa&s 
décoration,  et  parmi  les  peintures,  en  petit  nombre,  on  a  remarqué 
un  pot-à-eau,  sujet  pastoral,  peint  par  Yienot-Lafayette  avec  antafii 
de  grâce  que  de  vérité.  Les  talens  et  les  connaissances  du  C.  Âlhiand, 
l'activité  qui  règne  déjà  dans  sa  fabrique  quoique  naissante,  sod: 
un  sûr  garant  qu'il  écartera  tout  ce  qui  lient  à  la  routine,  et  qoe 
sous  sa  direction  Tart  fera  des  progrès  rapides.  Comme  membre 
de  la  Société,  le  Jury  n'a  pu  lui  décerner  un  prix,  mais  il  lui  foie 
des  remerciements  au  nom  de  ses  concitoyens.  » 

Le  il  prairial  an  XII,  la  commission  centrale  se  réunissait  au 
salon  des  arts  et  «  portait  Tattention  la  plus  scrupuleuse  sur  toas 
les  objets  soumis  à  son  examen  ».  Voici  la  partie  de  son  procès- 
verbal  ou  il  est  question  de  la  fabrique  Alluaud. 

«  Cette  fabrique  a  fait  depuis  Tannée  dernière  des  progrès 
étonnants,  élégance  et  variété  dans  les  formes,  richesses  et  grâce 
dans  les  ornements,  blanc  pur  et  bien  glacé,  tel  est  le  résultat  des 
observations  du  Jury  quand  à  cette  fabrique,  en  général.  » 

Pour  cette  même  année  1803,  je  trouve  un  document  qui  ne 
manque  pas  d'intérêt  : 

«  Manufacture  de  porcelaine  de  M.  Alluaud  aine,  place  de  lu 
Liberté,  à  Limoges, 

»  François  Alluaud  aîné,  propriétaire  de  Kaolin  et  de  Petunzé, 
obligé  d'établir  un  four  pour  les  essais  des  matières  préparées  qui 
alimentent  la  plupart  des  manufactures  de  TËtat  et  notamment 
celles  de  Sèvres,  a  insensiblement  créé  une  manufacture  de  porce- 
laine qui  vient  de  recevoir  l'activité  nécessaire  pour  remplir  promp- 
temenl  les  commandes  qui  lui  sont  adressées,  tant  en  blanc  qu>n 
décorations  de  tous  genres. 

»  N'ayant  rien  négligé  pour  assurer  le  succès  de  ses  travaux,  le  ci- 
toyen Alluaud  a  eu  la  satisfaction  d'obtenir  une  porcelaine  dont  la 
solidité  de  la  pâle  et  la  beauté  du  blanc  ne  laissent  rien  à  désirer. 
Les  formes  sont  aussi  commodes  qu'élégantes  et  les  peintures  dans 
les  goûts  les  plus  nouveaux...  »  {Journal  de  la  Haute-Vienne,  2  fri- 
maire an  Xil,  34  novembre  1803). 

On  le  voit  François  Alluaud  fils,  qui  était  aux  armées  lorsque" 
son  père  fonda  ses  premières  manufactures  à  Limoges,  reprit,  à  son 


RSSAl    DB  CLASSIPICAtlON  DES  ANCIENNES  FORCELAINES  DE  LIMOGES.        ^ll 

retour,  la  pensée  paternelle.  Et  ce  fut  par  une  petite  fabrique 
d'essai  qu*il  débuta,  laquelle  devint  insensiblement  la  grande  ma- 
nufacture que  l'on  a  connue. 

En  somme  nous  savons  que  vers  1784  François  Alluaud  père 
établit  une  fabrique  à  Bordeaux,  en  4793  nous  le  voyons  créer 
une  nouvelle  manufacture  qui,  probablement^  continua  à  fabriquer, 
peut-être  avec  des  interruptions,  mais  jusqu'à  sa  mort.  Peu  après 
sans  doute  celte  fabrique  fut  reprise  par  M.  Âlluaud  (ils  aîné 
lorsqu'il  put  quitter  le  service  militaire;  elle  était  d'abord  peu  dé- 
veloppée, et  tant  sous  la  direction  du  père  que  sous  celle  du  61s, 
elle  ne  constitua  d'abord  qu'une  sorte  de  grand  laboratoire  d'essais. 
Plus  tard  cette  fabrique  située  d'abord  rue  des  Anglais,  fut  rem- 
placée par  une  autre  manufacture  lancé  pendant  la  construction 
(lu  bàtitiment  des  Casseaux. 

Bientôt  il  sera  nécessaire  de  reprendre  cette  notice  sur  la  Manu- 
facture Alluaud  et  alors  on  entrera  dans  des  détails  plus  circonstan- 
ciés sur  les  fabriques  créées  ou  exploitées  par  MM.  Alluaud  au 
commencement  du  siècle. 

46*  Vase  dit  bouquetier,  ouverture  évasée  débordant  sur  les  lignes 
générales  qui  affectent  le  galbe  d'une  gerbe  (forme  qui  appartient 
au  style  de  l'époque  de  Louis  XYI,  bien  qu'alors  elle  n'ait  pas  été 
employée  en  céramique).  Le  vase  proprement  dit  dont  le  fond  est 
percé  d'un  trou  pour  l'écoulement  de  l'eau  d'arrosage  s'adapte  sur 
pied  bas  indépendant,  à  plan  circulaire  comme  celui  du  vase. 

Le  décor  du  fond  est  simplement  constitué  par  trois  bandes  dorées 
de  diverses  largeurs  dont  la  plus  étroite  se  trouve  au  milieu.  Le  vase 
est  divisé  par  des  motifs  en  or  s'arrangeant  dans  le  sens  vertical, 
entre  ces  motifs  un  médaillon  ovale  avec  cadre  en  or  mat  sur  le- 
quel de  délicats  ornements  s'enlèvent  en  bruni,  le  champ  du  mé- 
daillon est  en  brun  pourpre  (laque  de  mars)  au  milieu  s'enlèvent, 
en  blanc,  divers  attributs  qui  changent  avec  chaque  médaillons  ;  au- 
dessus  et  au-dessous  du  médaillon  des  ornements  en  or  disposés 
dans  le  sens  vertical.  En  bas  deux  bandes  or,  en  haut  une  bande  à 
l'extérieur  et  à  l'intérieur  en  bande  plus  large. 

Hauteur  :  14  centimètres,  largeur,  (à  l'ouverture)  :14  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

—  Le  même,  pendant  du  précédent;  quelques-uns  des  attributs 
différents. 

Ce  modèle  a  été  exécuté  dans  diverses  fabriques  de  Limoges  pen- 
dant de  longues  années  ;  ce  qui  m'a  fait  penser  que  Ton  pouvait 
attribuer  les  spécimens  qui  se  trouvent  au  Musée  à  la  fabrique 
Alluaud,  c'est  parce  qu'il  parait  remonter  à  une  époque  où  cette 


713  SOCIÊtI  AACHK0L061QUK  BT  BlSTOAlQQt  OU  UIIOUSIH. 

fabriqae  était  déjà  renommée.  Mais  c*est  surtout  parce  que  dâSi 
roraemeatatioQ  oa  remarque  certaines  analogies  arec  des  vais 
que  l'on  sait  avoir  été  fabriqués  chez  Alluaud. 

Les  vases  du  Musée  sonl  peu  importants,  il  serait  bien  à  souhaiter 
que  des  spécimens  plus  caractéristiques  prissent  place  dans  w 
vitrines. 

Fabrique  d'Etientib  Baignol.  -—  La  famille  d'Etienne  Baîgool  est 
très  anciennement  et  très  honorablement  connue  à  Limoges.  Toid 
à  ce  sujet  quelques  détails  (jue  M.  W.  Guérin,  fabricant  de  porce- 
laine à  Limoges,  a  bien  voulu  demander  à  M.  Camille  Bai^ol,  m- 
nufacturier  à  Boulogne  sur-Mer  qui,  très  obligeamment,  lui  a  Li: 
parvenir  des  renseignements  très  intéressants. 

H.  Camille  Bilgnol  possède  un  très  curieux  manuscrit  dont  toïci 
le  litre  plein  d'une  saveur  du  bon  vieux  temps  :  «  Dans  ce  petit  pa- 
pier sont  escrits  les  discours  faits  et  prononcés  en  public  par 
M'*  Pierre  et  Jehan  Baignol  frères,  advocals  au  siège  presiJial  de  la 
vile  deLymoges,  enfans  heriliers  de  Pierre  Baignol,  conseiller  et 
enquesteur  pour  h  Roy  audit  siège.  »  Une  note  marginale  qui  sr* 
trouve  à  la  page  140,  mentionne  que  Joseph  Baignol,  procureur 
aïeul  de  Pierre  et  de  Jehan  Baignol,  fut  le  1''  juin  1^6  l'un  de^ 
fondateurs  de  «  la  frairie  instituée  soubs  le  nom  du  pretieux  corp> 
de  Dieu  et  laquelle  se  célèbre  en  nostre  paroisse  de  Sainl-Hichel- 
des-Lyons  par  ses  vingt-quatre  confrères  ». 

Sur  la  liste  des  consuls  de  limoges,  on  relève  les  noms  de  plu- 
sieurs membres  de  la  famille  Baignol  savoir  : 

Guillaume  Baignol,  notaire,  consul  en  15(S  et  1522.  Ce  doit  être 
le  même  qu'un  Baignol  ou  de  Baignol  (BaignoUi),  notaire,  aatcor 
d'un  terrier  élaboré  en  1S03  et  1504  pour  le  monastère  de  Saint- 
Martial  ;  il  existe  également  un  terrier  postérieur,  œuvre  d*us  Bai- 
gnol et  concernant  aussi  Tabbaye  de  Saint-MartiaK  Ces  pièces  sont 
conservées  aux  archives  du  département  de  la  Haute-Vienne  (1). 

Albert  Baignol,  consul  en  1520  et  1525. 

Joseph  Baignol,  celui  dont  il  est  tjuestion  plus  haut  comme  Tuo 
des  fondateurs  de  la  «  frairie  »  de  Saint-Michef ,  consul  en  15S8, 
1696  et  1597. 

Pierre  Baignol  (probablement  Tun  des  auteurs  du  manuscrit 
cité  plus  haut),  consul  en  1633. 

D'autre  part  il  a  été  relevé  sur  diverses  pièces  anciennes,  le> 

(1)  Les  indications  COBCcrnaul  les  pièces  des  archives  m'ont  été  d«D- 
nées  par  M.  Louis  Guibert. 


SS8A1  DE  CLA8SIFICAT10II  DKS  ANCIENNES  PORCELAINES  DE  LIMOGES.        71  3 

noms  de  Joseph  Baignol,  sieur  de  Lavaux,  1656;  Pierre  Baignol 
consul,  1726,  et  enfin  d'un  Pierre  Baignol,  lieulenanl  au  régiment 
d'Anjou.  On  trouve  aussi  la  trace  d'alliance  avec  des  familles  nobles 
contractées  par  des  demoiselles  Baignol. 

Ces  renseignements  ne  sont  pas  indifférents  :  en  effet,  en  voyant 
qualifier  Etienne  Baignol  d'ancien  tourneur  de  la  Manufacture 
Royale,  on  pourrait  penser  qu'il  appartenait  à  une  famille  de  pro- 
létaires et  que  lui-môme  était  un  ouvrier,  ce  qui  n'eut  certainement 
pas  amoindri  son  mérite,  tout  au  contraire  peut  être,  mais  il  est 
intéressant  de  constater  (constatation  que  nous  aurons  encore  à  faire) 
que,  au  début  de  la  fabrication  de  notre  ville,  un  jeune  homme  ap- 
partenant à  la  meilleure  bourgeoisie  ne  craignait  pas  de  déroger 
en  devenant  simple  tourneur.  La  tradition  s'est  conservée  à  Limo- 
ges que  les  premiers  porcelainîers  portaient  l'épée.  C'est  là  un  fait 
qu'il  serait  peut-être  imprudent  d'accepter  sans  contrôle,  mais  il  est 
possible  que  ce  qui  a  donné  naissance  à  cette  légende,  si  c'en  est 
une,  c'est  que  la  pratique  de  l'art  de  la  porcelaine  était  alors  consi- 
dérée en  quelque  sorte  comme  une  profession  libérale. 

Dans  les  pages  que  je  consacrerai  plus  tard  à  la  fabrique  de  La 
Seynie,  dirigée  par  Ktienne  Baignol,  je  donnerai  des  détails  sur  les 
commencements  de  ce  céramiste. 

Nous  avons  vu  plus  haut  Préat  dire  que  Brigueil  avait  songé  à 
une  association  avec  Etienne  Baignol  pour  la  création  d'une 
fabrique  de  porcelaine,  le  fait  n'a  rien  que  de  très  vraisemblable, 
il  prouve  le  cas  que  l'on  faisait  de  la  capacité  du  directeur  de  La 
Sevnie. 

Quoiqu'il  en  soit  Etienne  Baignol  s'établit  à  Limoges  en  1797, 
selon  M.  Radenez,  dans  une  partie  du  couvent  des  Augustins 
achetée  à  M.  Mourier.  Sa  fabrique  eut  deux  fours  et  employa 
G4  ouvriers,  mais  il  est  probable  que  ce  dernier  chiffre  était  bien 
plus  modeste  au  début. 

Etienne  Baignol  avait  été  associé  à  des  exploitations  de  kaolin  ; 
à  Limoges  ;  il  établit  un  moulin  à  pâte  au  pont  Saint-Martial. 

En  Tan  X,  la  commission  centrale  déclara  que  les  produits  en- 
voyés par  Baignol  «  étaient  dignes  de  figurer  aux  portiques  du 
Louvre  ».  Ces  produits  sont  ainsi  désignés  sur  le  tableau  de  Martin  ; 

a  Un  cabaret  en  porcelaine  blanc  et  or,  composé  de  douze  tasses, 
un  pot  au  lait,  une  caffetière  [sic),  une  iheyère  [sic\  et  un  sucrier, 
60  fr. 

»  Un  pot  à  eau  forme  d'urne  avec  sa  jatte,  blanc  et  or  25  fr. 

»  Deux  vases  dorés  et  à  guirlandes  de  roses,  180  fr. 

n  Le  buste  du  premier  Consul  avec  son  pied  d'estal  décoré  (le 
buste  du  premier  consul  appartient  à  la  Société  d'agriculture  et  des 


71  i  SOCliTB   ARGHÉOLOOIQUB  ET   HISTOftIQUB   DU    UMOUSm. 

arts  qui  prie  le  ministre  de  l'agréer.  Ci-joint  la  description  da 
pied  d'estal).  » 

A  titre  de  curiosité  je  donne  cette  description  : 

«  Description  du  buste  de  Napoléon,  premier  consul  de  la  Rêpi- 
blique  française  : 

»  Au  milieu  du  pied  d'estal  et  sur  le  devant  est  un  mèdaillts 
doré,  au  centre  duquel  on  voit  un  chiffre  en  blanc  composé  de  troi? 
lettres  :  B.P.  C.  (Bonaparte,  premier  consul),  de  la  droite  de  cechiSne 
sort  une  main  présentant  une  branche  d*olivier,  simbole  (sic)  de  U 
clémence,  de  la  gauche  une  autre  main  tenant  des  balances,  embif- 
me  de  la  justice. 

»  Au-dessus  du  médaillon  est  un  soleil,  principe  de  la  lumière, 
entouré  d'une  couronne  civique  et,  reposant  sur  le  manteau  codsq- 
laire,  deux  guidantes  de  fleurs  sortant  du  soleil  semblent  annoncer 
le  retour  du  printemps  ;  enfin  le  médaillon  est  soutenu  de  laurier^ 
et  d'une  palme,  symbole  de  la  victoire  et  de  la  paix. 

»  Le  pied  d 'estai  en  marbre  vert  d'Italie  rappelle  les  victoire* 
du  premier  consul  et  le  socle  en  porphire  offre  l'emblème  de  la 
stabilité  d'un  bon  gouvernement,  au  sommet  du  pied  d'eslal  et  sons 
le  buste  est  un  autel  soutenu  par  la  prudence,  duquel  s'élèTC  une 
flame  {sic)  pure,  simbole  du  génie  vertueux  ;  à  droite  et  à  gaaclie 
de  cet  autel  est  une  chouette,  emblème  de  la  sagesse,  et  une  cigope 
emblème  de  la  piété  filiale  ;  sur  la  lame  les  jeux  de  la  paix  et  diffé- 
rents attributs  des  sciences,  des  arts,  du  commerce  et  de  l'abon- 
dance. —  Martin.  » 

Il  est  sans  doute  permis  de  condamner  la  composition  de  Tœuvre 
compliquée  et  prétentieuse  dont  on  vient  de  lire  la  description  faite 
dans  une  phraséologie  flagorneuse  bien  caractéristique,  mais  rien  ne 
démontre  que  la  pièce  en  question  fut  sans  valeur  artistique.  Ce 
devait  être  un  morceau  fort  curieux  d'un  art  qui  n'était  pas  sans 
mérite  ;  Tart  révolutionnaire  nous  a,  en  effet,  laissé  des  spécimens 
qui  nous  le  montrent  dérivant  d'une  inspiration  originale  :  entre  la 
grâce  élégante  du  style  Louis  XVI  et  la  pesanteur  bourgeoise  du 
style  impérial,  les  austères  artistes  de  la  Révolution  se  sont  créés 
une  place  bien  à  part. 

Quoiqu'il  en  soit,  on  doit  regretter  la  perte  d'une  œuvre  qui  était 
peut-être  la  plus  importante  de  celles  que  produisit  Etienne  Bai- 
gnol.  Il  est  probable  que  le  buste  du  premier  consul  était  de  gran- 
des dimensions  ;  ce  devait  être  un  biscuit  d'une  réelle  valear  ; 
d'autre  part  les  emblèmes,  les  figures,  les  attributs,  etc.,  dont  il 

(I)  M.  Camille  Baiguoli  de  Bordeaux,  petit-fils  d*Etieane  Baigool»  Bit 
approximativement  la  naissance  de  ce  dernier  à  1730. 


ESSAI  DE  CLASSIFICATION  DES  ANCIENNES  PORCELAINES  DE  LIMOCES.        715 

était  accompagné,  nous  fourniraient  de  précieuses  indications  sur 
Tétat  de  Fart  k  Limoges  au  commencement  du  siècle.  Peut  être 
d'ailleurs  le  buste  du  premier  consul  n'a-t-il  pas  péri  et  se  retrou- 
vera-t-il  un  jour  dans  quelque  grenier. 

Voici  comment  le  rapport  de  Martin  apprécie  les  envois  faits  par 
Baignol  à  Texposition  de  Tan  XI  : 

<(  La  porcelaine  en  général  était  plus  belle  et  mieux  décorée  que 
Tannée  dernière  ;  parmi  celle  surtout  de  la  fabrique  du  C.  Baignol  on 
a  particulièrement  distingué  trois  vases,  dont  un  grand,  forme 
Médicis,  peints  en  sujets  de  la  fable  par  Yienot-Lafayette  ;  quatre 
vases  blanc  et  or,  décorés  par  Clostermann;  un  pot-à-eau  et  sa 
jatte,  peints  et  décorés  par  Faure,  âgé  de  dix-sept  ans,  élève  de 
TEcole  Centrale;  une  corbeille  en  blanc,  un  porte-pendule  en  biscuit 
et  trois  Christs  modelés  par  Bonnevie  ». 

En  Tan  XII  Baignol  n*exposa  pas. 

Les  envois  à  l'exposition  de  Paris,  en  1806,  font  Tobjet  de  la  men- 
tion suivante  au  compte-rendu  officiel  :  (^  L  Enlèvement  des  Satines 
et  le  Cheval  de  Marly  de  la  fabrique  de  M.  Baignol  de  Limoges,  dont 
rindustrie  et  l'activité  sont  dignes  d'éloges  ». 

En  1809  nous  voyons  Etienne  Baignol  figurer  sur  la  liste  des 
souscriptions  en  faveur  du  Lycée  pour  une  somme  de  100  francs,  ce 
qui  constituait  un  fort  chiffre;  sa  souscription,  en  effet,  n'était 
dépassée  que  par  deux  autres  sur  la  liste  où  elle  figurait. 

Dans  une.lettre  adressée  à  M  Guérin  pour  lui  donner  des  rensei- 
gnements sur  Etienne  Baignol,  M.  C.  Baignol,  de  Bordeaux ,  donne  les 
très  intéressants  détails  suivants  : 

t  Etienne  Baignol,  était  désigné  par  tous  les  ouvriers,  les  siens  et 
ceuxc^es  autres  fabricants,  sous  le  nom  de  père  Baignol,  dans  le  sens 
intime  du  mol. 

»  Après  sa  mort  (1814)  et  pendant  la  durée  d'une  génération  lors- 
qu'un ouvrier,  quelque  fut  sa  condition  :  tourneur,  mouleur,  jour- 
nalier ou  useur  de  grain  venait  à  mourir,  il  était  admis  que  le  père 
Baignol  ayant  eu  besoin  d'un  porcelainier  l'avait  appelé  près  de  lui. 

»  Il  était  le  caissier  des  pénitents  de  toutes  les  couleurs,  et  le  jour 
(le  ses  obsèques  les  ouvriers  et  pénitents  voulaient  porter  son  corps, 
c'était  à  qui  le  prendrait  le  premier  ;  ce  premier  point  fut  réglé  dans 
l'église  en  faveur  des  pénitents,  sans  trop  de  difficultés,  par  suite 
du  respect  qu'inspirait  le  lieu  saint,  mais  lorsque  l'on  fut  arrivé  à  la 
place  Hontmailler,  les  ouvriers  demandèrent  à  remplacer  les  péni- 
tents, ceux-ci  refusèrent;  la  chronique  dit  qu'il  s'en  suivit  une 
mêlée,  presque  une  bataille,  ou  plus  d'un  pénitent  perdit  son  bonnet 
et  où  plusieurs  ouvriers  furent  blessés;  on  convint  enfin  que  les 
ouvriers  et  les  pénitents  porteraient  le  corps  à  tour  de  réie  >». 


4I€  socitri  AMBioLooiooB  RT  mairoïkiQOi  »«  Liiiovsui. 

Oh  peut  ajouter  qu'encore  AQjoQrd'bm  les  porcelainiers  rempb- 
cent  volontiers  le  terbe  «  moorir  m  par  Texpression  paloise  c  "m 
veîre  Bogniau  ». 

II  serait  à  peu  près  impossible  de  placer  suivant  un  ordre  chrMo- 
lo^qne  rigoureux  la  série  assez  nombreuse  des  pièees  sorties  de  li 
fabrique  Baignol  conservées  au  Musée,  je  me  sois  borné  à  les  réonir 
par  groupes.  Dans  un  premier  groupe  se  trouvent  placées  les  ptèfe5 
qui,  par  leurs  formes  surtout,  se  rapprochent  du  style  en  usage  à  la 
fin  du  xvin*  siècle,  puis  viennent,  dans  cet  essai  de classi6eatH>Dj<^ 
pièces  qui  ont  paru  dater  de  Tépoque  de  la  Révolution  et  du  com- 
mencement de  TEmpire  ;  la  fabrique  Baignol  ayant  prodoit  beau- 
coup de  biscuits,  il  est  assez  étonnant  et  très  regrettable  qoe 
le  Musée  ne  possède  pas  une  série  de  spécimens  de  ce  genre  de  fabri- 
cation. En  ce  genre,  la  production  de  Baignol  est  seulement  repré- 
sentée par  un  buste  du  premier  consul  et  encore  celte  attribatioo. 
qui  est  très  probable,  n'est-elle  pas  absolument  certaine  f  Enfin  une 
classe  spéciale  a  été  formée  pour  les  pièces  qui  portent  une  ou  plin 
sieurs  rangées  de  perles  blanches  en  relief,  genre  de  décoration  qui 
parait  avoir  été  pratiqué  pendant  un  temps  assez  long  à  la  fabrique 
Baignol. 

47*  Grande  cafetière,  forme  balustre,  anse  à  ressaut  rappelant 
le  style  rocaille,  bec  ouvert,  couvercle  débordant  légèrement  et  à 
bouton  en  olive,  le  bec  est  doré  en  plein,  l'anse  dorée,  mais  seule- 
ment à  Textérieur.  Le  décor  en  or  est  ainsi  constitué  :  large  filet  à  U 
base,  second  filet  à  la  partie  où  la  base  se  rattache  à  la  panse;  ao 
milieu  de  la  bande  concave  un  piparUy  en  haut  un  large  filet,  motif 
ornemental  en  bande  dans  le  style  de  Salem  hier;  le  couvercle  e^t 
décoré  de  feuilles  de  vigne  ornementales,  le  bouton  doré  en  pleio 
dans  sa  partie  supérieure. 

Hauteur  :  ilS  c.  ;  largeur  (la  plus  grande)  :  1S  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

L'attribution  à  la  fabrique  Baignol  est  motivée  par  la  décoration 
du  couvercle,  qui  présente  certaine  analogie  avec  quelques  partie> 
delà  décoration  de  plusieurs  vases.  Le  motif,  dans  le  style  de  Salem- 
bier,  porte  aussi  des  feuilles  ornementales  qui  rappellent  celle  de  U 
vigne,  on  les  retrouve  sur  une  pièce  portant  la  signature  de  Baignol. 
Les  formes  de  ce  vase  conduisent  à  penser  que  le  blanc  a  pu  éir^ 
fabriqué  à  la  fin  du  xvm*  siècle,  la  décoration  paraît  aussi  appartenir 
à  la  même  époque.  Elle  en  a  au  moins  tous  les  caractères,  le 
pipant  de  la  base,  par  exemple,  rappelle  de  très  près,  la  facture 
des  décorateurs  de  la  fabrique  du  comte  d'Artois. 


B9SAI  ftl  e^ASSIFICATKMi  DBS  ANCIKNWI9  WfteBLAINBS  DB  LIMOGES.        717 

48*  Pot-à*eau,  sur  piédouche  ou  aiguière^le  corps  de  la  pièce  est 
divisé  en  deux  sections  au  milieu  de  la  panse  ;  la  partie  inférieure 
affecte  la  forme  obconique,  les  lignes  en  sont  convexes,  les  lignes  de 
la  partie  supérieure  sont  au  contraire  concaves  et  Touverlure  se 
trouve  ainsi  rétrécie ;  bec  découvert,  bords  de  l'ouverture  sablés; 
des  trous  d^attache  que  Ton  remarque  à  la  partie  supérieure  de 
Tanse  indiquent  que  la  pièce  a  eu  un  couvercle,  Tanse  rappelle  celle 
de  Taiguière  n"*  51,  mais  elle  a  moins  d'importance  et  n'est  pas 
aussi  correctement  dessinée  ;  elle  pèche  surtout  par  rattache  infé- 
rieure. Sur  les  deux  faces  latérales  un  écusson  ogival,  que  je  consi- 
dère comme  caractéristique  de  la  fabrique  Baignol  occupe  la  place 
principale  et  est  un  bouquet  de  roses,  orné  de  feuillages  et  fleu' 
rettes;  riche  décoration  en  or  avec  quelques  ornements  en  rouge  et 
bleu  très  mal  cuit.  Â  la  partie  inférieure  formant  culot,  couronne  de 
fleurs  ornementales,  larges  bandes  ;  en  haut  et  en  bas  sur  le  pié- 
douche, le  milieu  du  vase  et  Torifice  entourant  le  bec  :  bande  sur  la 
partie  médiane,  ornements  divers  en  or. 

Les  formes  de  cette  pièce  appartiennent  à  lart  de  la  fin  du 
xvni*  siècle,  mais  on  se  trouve  en  présence  d'une  persistance  de 
style;  le  blanc  doitdater  des  premiers  temps  de  la  fabrique  Baignol, 
mais  le  décor  semble  un  peu  plus  récent. 

Aucune  marque. 

Hauteur  :  26  c.  ;  largeur  :11c. 

Don  de  M.  Dubouhé. 

49*  Grande  théière  ou  pot-à-eau,  forme  balustre,  bec  couvert,  anse 
à  ressaut,  le  couvercle  à  bouton  ogival,  rentrant  dans  la  bande  con- 
cave dont  le  col  est  exhaussé;  en  bas  piédouche  rudimentaire,  (ilet 
or,  à  la  base  pipant  dans  la  partie  concave  du  piédouche;  en  haut: 
guirlande,  branche  de  vigne  ornementale,  pipant  dans  la  partie 
concave  de  la  bande  supérieure,  laquelle  bande  délimitée  par  deux 
filets,  sur  l'un  se  trouve  des  hachures,  palmettes,  etc.  or.  Le  bou- 
ton du  couvercle  doré  en  plein  sur  la  partie  supérieure  seule- 
ment; bord  couvert;  guirlande  ornementale,  au  dessous  du  bec, 
médaillon  circulaire  délimité  par  une  bande  or,  lequel  médaillon 
attaché  par  un  ruban  or,  dans  le  médaillon  et  sur  un  fond  café  clair, 
peinture  pochée,  non  achevée,  représentant  une  figure  à  mi  corps, 
coiffée  d'un  chapeau  de  paille  et  portant  des  fleurs  Couleurs  emplo- 
yées: vert,  rose,  jaune,  brun  (la  peinture  pourrait  bien  être  un  esssai). 

On  remarque  sur  cette  pièce  le  pipant  caractéristique  déjà  signalé 
plus  haut  sur  une  autre  pièce. 

Hauteur  :  25  c.  ;  largeur  :  (à  la  panse),  lie.  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M«  Dubouché* 


71 B  SOCIÉTÉ   AftCHÉOLOGlOUB  ET   HISTORIQUE   DU  UMOUSIK. 

50*  Grand  pot-à-eau  a  bec  et  sa  cuvette,  forme  bateau.  Le  pol-î- 
eau  forme  baluslre  très  simble  ;  anse  avec  arrêt  pour  placer  le 
pouce  ;  bec  fermé  en  forme  de  gueule  de  poisson  ;  à  la  partie  supé- 
rieure la  bande  concave  qui  parait  caractéristique  de  la  fabrique  de 
Baignol  ;  couvercle  rentrant  à  bouton  sphérique  ;  riche  décor,  en 
or  a  rinceau  goût  de  Tempire,  mais  avec  des  réminiscence  de  Sa- 
lembier;  des  papillons  polychromes  sont  semés  ca  et  là,  (couleurs 
employées  :  noir,  rose,  bleu,  vert,  orange,  ocre  foncé,  jaaoe  son* 
fre  ;  la  décoration  est  divisée  en  trois  bandes  ou  étages  ;  sur  le 
milieu  deux  paysages  en  grisaille  dans  un  médaillon  ovale  pjr> 
forme,  inscrit  dans  un  trapèze,  les  écoinçons  en  brun  roage,  (laque 
de  mars).  La  cuvette  est  enrichie  d'une  décoration  analogue. 

Hauteur  du  pol-a-eau  :  25  c;  largeur  (au  plus  grand  diamèlre  de 
la  panse)  :  1^2  c.  i/2. 

Longeur  de  la  cuvette  :  32  c.  1/2;  largeur  :  23  c.  1/2. 

Don  de  M.  Dubouché. 

Marque  :  le  chiffre  23,  en  bleu,  sous  la  cuvette  et  sous  le  pot-à-eaa. 

81"  Pot-à-eau  sur  piédouche  ou  aiguière,  accompagné  desa  cuvette 
de  forme  dite  bateau.  Anse  en  S  à  laquelle  le  couvercle  est  releou 
par  une  attache  métallique;  la  forme  générale  du  pot-à-eau  a  quel- 
ques rapports  avec  celle  du  pot-à-Iait  n'*48,  la  partie  inférieure  e>t 
en  forme  d'œuf,  les  lignes  de  la  partie  supérieure  vont  au  contraire 
concave,  bec  découvert,  le  couvercle  offrant  une  moulure  légère- 
ment concave  et  à  plate-forme  de  laquelle  se  détache  un  bouton 
polylobé. 

La  décoration  très  compliquée,  très  soignée,  manque  d'harmooi*^ 
en  certaines  de  ses  parties  ce  qui  semblerait  indiquer  que  Tartistc 
qui  l'a  exécutée  n'avait  une  habitude  suffisante  de  la  peinture  sur 
porcelaine  ou  tout  au  moins  s* était  livré  rarement  à  des  travaux 
aussi  considérable.  Cette  décoration  comporte,  pour  le  piédouche 
deux  larges  bandes,  un  filet  et  un  pipant,  pour  la  partie  inférieure  de 
la  panse,  un  fond  richement  quadrillé  or,  sur  lequel  se  détachent 
quatre  médaillons  fond  blanc,  portant  alternativement  des  attributs 
champêtres,  dans  le  style  du  xvm*  siècle  en  polychromie  et  des 
corbeilles  de  fleurs  posées  sur  des  tables,  également  en  polychro- 
mie ;  la  partie  supérieure  du  vase  présente  des  médaillons  sur 
chacun  desquels  est  figuré,  en  grisaille,  un  amour  sur  fond  rose: 
corbeilles  de  fleurs  sous  le  bec  et,  en  face  Tanse  ;  vases  couvert^, 
au-dessus  des  médaillons;  lambrequin,  rinceaux,  guirlande  de  fleurs 
bandes  verticales  sur  lesquels  se  trouvent  figurées  des  fleurs  sur 
fond  vert  claire  etc.,  ces  ornements  sont  exécutés  en  or  ou  en  poly- 
chromie. 


BSSAI  DE  CUSSiriGATlOIC  DKS  AMC|Blf|fB8  rOUCELimBS  DB  LIMOGES.       719 

Ào  fond  de  la  cuvette  el  sur  champ  saumon,  on  remarque  une 
figure  couchée  et  une  guirlande  de  feuilles  de  vigne  en  noir  (rap- 
pel des  poteries  grecques),  sur  les  parois  décoration  analogue  à 
celle  de  la  partie  supérieure  de  la  panse  :  médaillons  fond  rose 
représentant  alternativement  des  amours  et  des  attributs  champê- 
tres ou  plutôt  pastoraux,  corbeilles  de  fleurs,  vases  fermés,  bandes 
verticales  portant  des  fleurs,  rinceaux,  lambrequin,  etc.,  large 
bande  or. 

Toute  la  palette  du  peintre  sur  porcelaine  a  été  employée  ;  sur  le 
piédouche  du  vase,  on  remarque  le  pipant  et  dans  la  décoration 
des  deux  pièces  les  feuilles  de  vigne  en  or  ;  deux  des  caractéris- 
tiques de  la  fabrique  de  Baignol. 

Hauteur  du  vase  :  25  c;  largeur  de  la  partie  la  plus  large:  19  c; 
longueur  de  la  cuvette  :  33  c.  8  m.:  largeur  :  23  c;  hauteur  :  8  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

52®  Pot-à-lait  (?),  forme  balustre,  anse  sans  ressaut,  bec  fermé  ; 
au-dessus  de  l'attache  du  bec  se  trouve  un  exhaussement  en  forme 
de  bande  concave  (disposition  qui  parait  caractériser  certaines  pièces 
de  Baignol),  décor  :  le  bec  et  Tanse  dorés  en  plein  extérieurement; 
deux  larges  filets  d'or  à  chaque  extrémité;  à  la  partie  supérieure  un 
ruban  de  couleur  rose  avec  filet  vert  au  centre,  sur  le  ruban  se 
détachent  des  bouquets  où  Ton  remarque  une  rose,  des  marguerites 
et  des  belles  de  nuit,  feuillages  de  rosier;  couleurs  employées  : 
rose,  violet,  jaune,  rouge  de  fer,  vert  et  noir;  pendentifs  formés  par 
des  guirlandes  de  fleurs  ornementales  rattachées  au  large  ruban 
rose,  par  de  légers  rubans,  le  tout  en  or,  fleurettes  *f  pipant  ». 

Au  centre  de  la  panse  un  écusson  ogival  en  or  (carastéristique 
de  certaines  pièces  de  Baignol),  sur  lequel  on  voit  le  chiffre  V.  C. 
entrelacés  en  capitales  bâtardes;  la  pièce  a  son  couvercle  rentrant 
dont  le  bouton  a  disparu. 

Hauteur  :  21  c;  largeur  (à  la  panse)  :  12  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  A.  Dubouché. 

53""  Sucrier  couvert  forme  obconique,  anses  en  anneau  fixées  à  la 
panse,  couvercle  forme  doucine  surmonté  d'un  bouton  rond,  les 
anses  et  le  bouton  dorés  en  plein  ;  même  décor  que  le  précédent, 
chiffre  identique  (cette  pièce  a  évidemment  fait  partie  du  même 
service),  fermeture  sablée. 

Hauteur  avec  le  couvercle  :  15  c;  largeur  :  12  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  A.  Dubouché. 


790  50CIRTI  AMGHiOLOOIQUB   ET   MISTORIQUE  DU   LIMOUSIN. 

54*  Veilleuse,  en  trois  pièces,  forme  géDérale  d*oii  vase;  le  pkJ 
ou  soubassement  en  forme  de  bande  étroite  percé  de  trous  d'aéra- 
tion, reçoit  un  vase  à  deux  anses  dont  le  haut  est  également  perte 
de  trous  ;  la  cafetière  de  la  veilleuse  se  place  sur  Touverture  de  n 
vase  et  porte  un  bec  et  une  anse.  Le  couvercle  est  à  bouton  poiDta. 
décor  or,  les  anses  du  vase  et  le  bec  de  la  caretière  or  plein,  surira 
soubassement  et  le  piédouche  du  vase  filets  de  diverses  largeurs, 
sur  la  panse  du  vase  et  celle  de  la  théière,  bandes  portant  une  fiiK 
décoration  genre  «  pipant  »;  sur  la  bande  de  la  théière  écu^son 
ogival  portant  le  chiffre  R.  M.  V.;  sur  la  partie  inférieure  de  U 
théière  bande  décorée  d*une  guirlande  de  lierre  ornemeolal. 

Hauteur:  21  c.  1/4;  largeur  du  vase  pris  dans  le  plus  grand  dia- 
mètre 12  c,  1/4. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  de  Laëre. 

Sî^"  Sucrier  couvert,  forme  obconique,  anses  en  anneau  fixés  à 
la  panse,  couvercle  en  doucine  avec  bouton  sphérique  (même  modèle 
que  le  n»  53),  décor  barbeau  ;  couleurs  employées  :  bleu,  ?ert, 
rouge  de  fer,  brun  (ces  deux  dernières  en  traits  légers),  filet,  près 
louverture  du  vase  et  touches  d'or  sur  les  anneaux  ;  bord  couvert, 
sur  le  couvercle  et  touches  en  pétales  de  marguerite  au  bouton, 
en  or. 

Hauteur  (avec  le  couvercle)  :  14  c;  Urgeur  :  9  c.  7. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Charles  Boudet. 

86*  Théière  forme  droite,  couvercle  rentrant  avec  bouton  sphé- 
rique; anse  en  S  sans  ressaut;  bec  à  attache  polygonale  et  k  ouver- 
ture circulaire:  décor  barbeau;  à  labase,tiiet  or;  à  l'ouverture, large 
Olet  en  bord  couvert  touche$  décoratives,  points  et  palmettes  sar 
Tanse  et  le  bec,  touches  en  pétales  de  marguerite  sur  le  boulon; 
brindilles  alternant  avec  les  barbeaux  à  la  partie  supérieure  (large- 
ment convexe)  de  la  théière,  toutes  ces  décorations  or. 

Hauteur  :  \6  c;  largeur  (du  plus  grand  diamètre)  :  12  c.  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Gh«  Boudet. 

B7*  Tasse  et  sa  soucoupe,  forme  dite  litron,  même  décor  que  ks 
pièces  ci-dessus. 

Hauteur  :  de  la  tasse  6  c;  largeur:  6  c;  hauteur  de  la  soucoupe: 
2  c.  1/2;  largeur  :  12  c.  «/*• 

Aucune  marque. 

Don  de  H.  Gh.  Boudet, 


ESSAI  SB  CLASSIFIGATIOC  OU  ANClBNIfBS  PCyBGRLAlNU  OS  LIMOGBS.       784 

88«  Le  même. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Ch.  Boudet. 

59^  Soucoupe  (même  service). 

AucuQd  marque. 

Don  de  M.  Nivet-Fontaubert. 

60*  Assielle  forme  ronde,  large  Blet  au  bord,  même  décoration. 

Largeur  :  23  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

61°  Vase  ornemenlal,  en  deuK  parties,  piédouche  panse  et  col; 
le  piédouche  joint  au  culot  forme  une  partie,  la  panse  jointe  au 
col  forme  une  autre  partie,  reliées  par  un  écrou  ;  anses  en  cros- 
ses, feuilles  ornementales;  base  carée.  La  base,  le  piédouche,  le 
culot  or  plein,  maïs  deux  lilets  en  relief  sont  réservés  en  blanc, 
les  anses  et  le  col  or  plein.  La  panse  est  divisée  en  plusieurs  zones. 
Dans  la  zone  supérieure  qui  est  la  plus  large,  à  la  face  antérieure 
dans  un  médaillon  de  forme  ogivale,  on  remarque  un  rébus  :  offert 
par  Tamitié  (os,  fer  par,  la,  mi,  tié)  deux  cygnes  dans  les  queues  se 
terminent  par  un  motif  ornemental  accostés.  A  la  face  postérieure, 
an  médaillon  de  môme  forme  avec  le  chiffre  entrelacé  E.  M.  en 
capitales  bâtardes,  accosté  par  deux  cornes  d'abondance.  Les 
cygnes  et  les  cornes  modelés  par  brunissage  à  l'effet,  les  antres 
zooes  décorées  de  motifs  géométriques,  etc. 

Hauteur  ^  e.  et  1/2,  largeur  6  c.  et  1/î  (ouverture  dn  goulot), 
la  plus  grande  dimension  de  la  panse  :  iO  c. 

La  forme  et  le  décor  de  cette  pièce  fort  intéressante  à  plusieurs 
point  devue,semblentindiquer  répoque  révolutionnaire,  je  croîs  ce- 
pendant qu'elle  ne  remonte  qu'au  commencement  du  siècle,  la 
loge  maçonnique  «  La  parfaite  amitié  »,  jouissait  alors  à  Limoges 
d  nne  véritable  vogue  ;  faut-il  supposer  que  nous  nous  trouvons  en 
présence  d'un  objet  ofrert;à  quelque  personnage  parla  loge  en  ques- 
tion dontBaignol  faisait  partie. 

69"  Sucrier  même  forme  que  les  n'^'SS et^;  suria  panse,  décoration 
eo  frise  représentant  une  femme  en  costume  pseudo  antique  qui  soi- 
gne une  plante  en  pot  ;  plus  loin  on  enfant  en  costume  mod^ne 
s'appuie  sur  une  bêche,  accessoires  champêtres,  outils  aratoires, 
caisses  d'orangers,  etc.,  en  tan  bistré  avec  rebanls  d'or;  dans  les 
fonds  arbres,  rochers  or;  filets  el  anses  or.  Sur  le  couvercle  des  fa- 
briques eides  arbres  traités  par  le  même  procédé  et  dafts  le  même 
go&t,  filet  en  bord  oapuvert  or  et  foMUton  er  plein. 


7fî  SOCiftTA  AltCBftOtOGIQOB  KT  RISTORlQUt  DU   LIMOCSIIV. 

Marque  en  rouge  indéchiffrable,  mais  ou  Ton  croit  reconn^tre 
les  deux  L.  enlacées  de  Sèvres. 
Don  de  M.  Paulin  Talabot. 
Hauteur  :  16  c,  largeur  :  42  c. 

63*^  Tasse  forme  litron  et  sa  soucoupe,  sur  la  tasse  un  amoar  oo, 
tenant  une  guirlande  or,  semble  danser  entre  deux  coupes  fumantes, 
attributs  divers  dans  le  goût  antique  ;  une  gaine  surmontée  d'nof 
tête  barbue,  autel  en  forme  de  colonne,  bouclier  sur  lequel  s€ 
trouve  un  cœur  percé  d'une  flèche,  carquois,  etc.,  arbres  et  brin- 
dilles en  or.  Le  génie  et  les  attributs  traités  dans  le  même  goût 
que  ci-dessus  ;  deux  larges  filets  or.  La  soucoupe  est  ornée  d*iine 
décoration  en  frise,  représentant  des  vases,  des  trépieds,  des  autels 
fumants,  etc.,  bistre  rehaussé  d*or,  brindilles  et  arbres  formaot 
lointains  or,  deux  larges  filets  or.  Le  centre  est  occupé  par  ane  dé- 
coration en  or  formant  rosace  où  Ton  remarque  quatre  pointes 
de  flèches  et  des  chutes  de  fleurs. 

Hauteur  de  la  tasse  :9c.;  largeur  :6  c.  —  Soucoupe,  hauteur  :  3; 
largeur  :  12  et  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Paulin  Talabot. 

64^  Tasse  et  sa  soucoupe  (même  blanc  que  le  numéro  précédent;, 
mais  la  décoration  diffère  par  sa  disposition.  Dans  un  cartel  de 
forme  rectangulaire  les  coins  supérieurs  abattus  en  écoinçons. 
un  guerrier  assis  sus  des  rochers  s'appuie  sur  une  h&che  à  lai^e 
tranchant.  Sur  la  face  de  la  tasse  opposée  au  cartel,  on  remarque 
un  paysage  traité  en  or  (fabriques,  ruines,  etc.),  dans  le  goût  da 
xvni*  siècle,  ce  paysage  forme  une  bande  qui  n'occupe  que  la  partie 
supérieure  de  la  panse  ;  larges  filets  d'or  et  anse  dorée.  La  soucoupe 
porte  comme  décoration  quatre  vases  en  bistre  avec  rehauts  d'or 
surmontés  de  têtes  de  femmes  or.  Ces  vases  portés  sur  des  trépieds 
en  or,  alternent  avec  des  palmettes  bistres,  relevées  d'or  et  accom- 
pagnées de  brindilles,  traits,  etc.  Au  centre  même  décoration  que 
le  numéro  précédent. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Paulin  Talabot. 

Ces  trois  pièces  malgré  certaines  disparates  de  décoration  pa- 
raissent avoir  appartenu  au  même  service,  la  tasse  portant  le  nu- 
méro 63  a  une  décoration  plus  caractéristique  et  semble  apparte- 
nir à  la  période  révolutionnaire.  Le  dessin  est  incorrect  et  l'exécu- 
tion négligée.  D'autre  part,  l'aspect  sombre  des  figures  se  détachant 
sur  le  fond  blanc  est  assez  déplaisant;  cependant  ces  figures  sont 
exécutées  avec  une  hardiease  qui  n'est  pas  sans  saveur  ;  peut-être 


ftSSAI  bS  CLASSItlCATION  DBA  ANClBIfNCS  POIICKI.AIIIBS  DB  LlMOÛBS.        7^3 

est-ce  là  l'œuvre  d'un  amateur  comme  il  y  en  avait  alors  quelques- 
uns  à  Limoges. 

65^  Sucrier  même  modèle  que  le  n^*  83  décor,  deux  grands  pa- 
pillons et  plusieurs  Qlets  et  anneaux  d'or,  insectes  ailés  ;  couleurs 
employées  :  rouge,  bleu,  vert-d'eau,  brun,  noir,  jaune-clair,  jaune- 
foncé. 

Hauteur  :  10  c;  largeur  (à  Touverture)  :  il  c.  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Adrien  Dubouché. 

66''  Tasse  forme  dite  litron,  très  mince,  anse  à  ressaut,  décor  un 
papillon  et  deux  insectes  ailés  ;  couleurs  employées  :  brun  ou  noir, 
orange,  vert-d'eau,  violet,  jaune  souffre.  Filet  bord  couvert  pipant 
sur  l'anse  or. 

Hauteur  :  8  c.  1/2;  largeur  ;  8  c.  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M;  Adrien  Dubouché. 

67<^  lia  même,  même  décor.  Mêmes  couleurs  sauf  le  vert. 
Aucune  marque. 
Don  de  M.  Dubouché. 

68»  La  même,  décor  très  fini,  constitué  par  une  guirlande 
ou  l'on  remarque  des  feuilles  de  vigne,  des  grappes  de  raisins 
blancs  et  noirs,  des  épis  de  blé,  des  coquelicots.  Couleurs  em- 
ployées :  rouge,  vert,  jaune,  brun,  violet.  Deux  larges  filets  or, 
l'anse  et  l'intérieur  dorés  en  plein. 

Marque  :  sur  le  fond  extérieur  de  la  tasse  la  signature  Millier  en 
caractère  de  bâtarde  tracé  en  or.  La  soucoupe  même  décor,  porte 
au  centre  un  large  filet  et  une  rosace  or. 

Don  de  M.  ProsperLajudie. 

69*»  Petit  sucrier  sans  couvercle  et  sa  soucoupe  ;  le  sucrier  forme 
œuf  sur  piédouche  très  simple,  anses  fixés  à  la  panse;  le  pied  or 
plein  large  filet  à  l'ouverture,  les  anses  or  plein  (l'intérieur  de  la 
pièce  n'est  pas  doré),  même  décor  que  ci-dessus.  Soucoupe  même 
décor  que  ci-dessus. 

Hauteur  du  sucrier  :  8  c.  et  1  /2;  largeur  à  l'ouverture  :  8  c.  Hauteur 
de  la  soucoupe  :  2  c.  et  1/2  ;  largeur  :  H  c.  1/4.  Le  sucrier  porte  la 
même  signature  que  la  tasse  n*  68. 

Don  de  M.  Prosper  Lajudie. 

70**  Tasse  et  sa  soucoupe  forme  litron  ;  anse  simple,  la  tasse  est 
décorée  d'ornements  de  fantaisie  en  forme  de  pendentifs  en  or. 


Hauteur  de  la  tasse  :5  c.  4  m.;  largeur  :  66.  —  Soocoape  fome 
obconique,  décor  analogue  à  celui  de  la  tasse,  largear  de  la  sou- 
coupe 11  c;  hauteur  2  c. 

Aucune  marque. 

Acquisition. 

li"*  Grande  tassse  ou  génieux  forme  calice,  sur  piédouche  bas, 
fond  bleu  grand  feu(probableflient  posé  sur  eouverle),  d'on  toa 
particulier  un  peu  clair;  près  du  bord,  ornement  courant  :  sortes  de 
rosaces  inclinées  ;  sur  la  face  antérieure  un  cartel  ogi^ral  orné  de 
draperies,  portant  au  centre  en  anglaises  un  chiffre  entrelacé  ou  on 
distingue  un  L.  et  un  D,  l'autre  lettre  ne  peut  être  bien  lue. 

Hauteur,  13  c,  largeur  (à  Touverture),  8  c.  et  8  mil. 

Don  de  M.  Dubouché. 

72°  Vase  sur  piédouche  et  à  col  large  ;  appendices  à  la  place  de> 
anses  en  forme  de  bec  de  théière,  se  terminant  à  la  partie  infé- 
rieure par  une  feuille  et  à  la  partie  supérieure  par  une  4éte  de  chi- 
mère. Dans  un  cartel  trapézoïdal  la  figure  de  mercure  en  grisaille 
couleur  bistre  ou  sépia  ;  à  la  face  opposée^  un  cartel  de  méoie  ferme 
dans  lequel  un  ovale  est  inscrit,  dans  les  écoioçons,  des  iasiru- 
ments  de  musique  de  très  petites  dimensions  en  or  mat,  fond  en 
laque  de  mars  d'une  très  vive  nuance  cire  à  cacheter.  Au  centre  an 
sujet  traité  en  grisaille^  mais  mince,  neprésentaot  une  divinité  cou- 
ronnant Tamour;  orniments  courants  enéeutés  avec  une  gnnit 
liberté;  mais  manquant  de  stjfle,  iilete  larges  or,  les  appendices  ser- 
vant d'anses  en  or  plein. 

Hauteur  :  22  c.  5  m.  ;  largeur  du  goulot:  8  c.  8  m.  ;  lapins  grande 
largear  à  la  panse. 

▲u  rêvent  on  lit  Vinscr iption  stjivaatequi  a  été  iascrite  au  me- 
ment  de  l'entrée  au  Musée  :  «  Doni^  par  M.  Baigaol  cadet,  fabri- 
qué en  1806  par  M.  Etienne  Baignol  son  père  et  décoré  par  le 
donateur.  » 

*~  Le  même.  Dans  un  cartel  une  bacchante  tient  une  coupe  et  use 
grappe  de  raisins  en  grisaille  ou  bistre.  Sur  Vautre  face  un  soj^t 
en  grisaille  noir  mince  qui  parait  être  le  sujet  connu  sous  le  nom  de 
jeunesse  d'Achile. 

TS""  Assiette  à  bords  circulaires;  au  centre,  une  rose4»aoia&  et 
feuillages  (rose  et  vert  de  cuivre)  le  mari;  est  décoré  d'uAe  guir* 
lande  de  feuillage  (pipant)  entre  deui  filets  of ,  bande  de  nibao 
croisé  au  milieu  guirlande  (pipant)  et  Oearetles,  te  tompovpre; 
de  distance  en  distance,  médaillon  circulaire  avec  fleurette  or; 
larges  rinceaux,  pendentifs  etc.;  rose,  noir  et  or,  vases  en  Meus 
minces  mr  pendentif  r^se. 


KSSAI   DE  CLASSIPlèATlOH  bSd  ANGIBITMBS  P0RCBLA1NKS  fel  LtSlOOB'*.       7){S 

Largeur  de  l'assiette  21 . 
Aucune  marque. 
Don  de  M.  Dubouetié. 

74*  Large  soucoupe  bords  obconique  ;  au  centre  paysage  avec 
deux  ligures  de  paysans  en  costume  moderne,  les  figures  et  le 
paysage  en  noir  sur  fond  saumon.  Bandes  or  entourant  le  fond  et 
formant  bord  couvert  sur  le  roarly  guirlande  or,  formée  par  bran- 
che de  vigne  ornementale. 

Aucune  marque. 

Largeur  :  17  c.  1/4  ;  hauteur  :  3  c. 

Don  de  M.  Dubouché. 

IS""  Vase  évasé,  rappelant  par  la  forme  générale  les  vases  dits 
Borghèse,  mais  les  proportions  sont  mauvaises  et  mal  étudiées:  une 
base  carrée  ^orte  le  piédouche,  la  partie  inférieure  du  vase  est 
surmontée  d'un  bandeau  sur  lequel  se  détachent  deux  têtes  sur- 
montées d'une  sorte  de  corne,  la  partie  supérieure  du  vase  est  très 
allongée  sur  la  base  et  le  piédouche  du  vase,  larges  bandes  dorées 
sur  le  bandeau  court  feuilles  et  fruits  de  lauriers  trësomemanisées, 
sur  le  corps  du  vase  ornements  palmettes  ;  les  têtes  et  leurs  appen- 
dices sont  dorés  en  plein,  toute  l'ornementation  est  dorée. 

Hauteur,  24  c;  largeur  (à  l'ouverture),  9  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

« 

76**  Buste  de  Napoléon  I",  porté  sur  un  piédouche,  qui  est  lui- 
même  supporté  par  un  piédestal  de  plan  circulaire  en  marbre  de 
deux  variétés.  Napoléon  jeune  est  encore  maigre,  sur  ses  épaules 
se  drape  uii  manteau  orné  d'abeilles  en  relief,  le  col  largement 
ouvert  est  retombant  comme  ceux  que  portaient  les  généraux  de 
la  République,  sur  la  poitrine  on  remarque  une  décoratiou;  la 
tête  est  couronnée  de  lauriers. 

Hauteur  du  buste,  le  piédouche  compris,  18  c. 

Aucune  marque. 

Acquisition. 

Ce  buste  remarquable  d'ailleurs  parait  être  une  sorte  d'adap- 
tation de  celui  de  Boizot,  représentant  Bonaparte  en  général  de 
Tarmée  d'Italie  et  dont  on  peut  voir  une  reproduction  en  biscuit 
(Sèvres)  dans  la  collection  Gasnault  au  n*»  1342.  Le  modeleur  de 
BaigQol  a  ajouté  le  manteau  et  la  couronne  de  lauriers  et  retranché 
la  chevelure  qu'il  a  ainsi  rendu  très  courte. 

77*  Coupe  sur  pied  ou  baguier,  le  pied  est  léger  à  sa  base,  il 
porte  une  rangée  de  perles  laissées  blanches,  un  second  rang  de 

T.  XL.  46 


^26  dUCIÉ^E  ARCBÉOLOttlQtl^  ET  aiSTOBIQUB  DU  ÙèOfÙSlK^ 

perles  se  trouve  à  rattache  du  pied  avec  la  coupe  ;  la  coUpe  trfe 
évasée  porte  à  sa  partie  supérieure  une  sorte  de  rebord  au  milieu 
duquel  se  trouve  uu  troisième  rang  de  perles  blanches  ;  des  app**&- 
dices  tenant  lieu  d'anses  se  terminent  en  têtes  de  femmes.  La  dé- 
coration du  dessous  de  la  coupe  présente  deux  cartels  à  fond  laque 
de  mars  sur  lequel  se  détachent  des  instruments  de  musiqoe  et 
des  branches  de  lauriers  traités  en  grisaille;  des  ornements  e£ 
forme  de  grandes  feuilles  sont  réservés  sur  le  fond  général  doré  ea 
plein;  les  têtes  sont  revêtues  d'une  teinte  verte,  avec  légères  dorures 
pour  imiter  le  bronze. 

Hauteur,  8  c;  largeur  à  l'ouverture,  H  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  Madame  Gavami. 

78"*  Vase  torme  dite  Borghèse,  le  piédouche  est  supporté  par 
une  base  carrée;  ce  piédouche  se  rattache  au  culot  du  vase  par  nu 
bandeau  étroit  sur  lequel  se  trouve  une  rangée  de  perles  en  relief 
laissées  en  blanc,  une  rangée  de  perles  pareilles  se  voie  également 
à  la  partie  ou  le  culot  se  rattache  au  vase  ;  des  anses  détachées 
prennent  naissance  au  bas  du  culot  et  se  terminentilans  leur  partie 
supérieure  par  des  bustes  de  génies  portant  des  ailes  qui  vont 
joindre*le  corps  du  vase. 

Les  bandeaux  de  la  base  sont  dorés  en  plein,  le  demi  boudin  qui 
termine  le  piédouche  également  doré  en  plein,  large  bande  à  h 
partie  supérieure  de  ce  piédouche  sur  lequel  une  légère  ornemen- 
tation a  été  tracée;  le  culot  porte  également  une  légère  décoration 
en  or,  le  corps  du  vase  est  revêtu  d'un  fond  rose  sur  lequel  se  dé- 
tachent deux  médaillons  carrés  dorés  et  brunis  à  l'effet,  l'un  de  ces 
médaillons  porte  un  aigle  dont  les  serres  s'appuient  sur  des  arme^ 
(bouclier,  cimetère,  flèche,  faisceau  de  licteur),  sur  l'autre  médailloQ 
des  ruines  dans  le  style  du  xvui*  siècle  ;  les  appendices  formant 
anses  sont  dorés  en  plein,  les  génies  sont  bronzés,  le  rebord  est 
orné  d'une  large  bande  or. 

Cette  pièce  est  formée  de  deux  partie  reliées  par  un  écroude  fer, 
Tune  constitue  le  piédouche,  l'autre  le  vase  et  son  culot. 

Marque  :  un  B  en  cursive,  suivi  d'un  trait  qui  indique  un  1  supé- 
rieur, c'est-à-dire  en  petit  caractère  comme  lettre  terminant  un  mot, 
tracé  sous  la  baseià  la  pointe.  Une  marque  en  bleu  de  four  parais- 
sant être  celle  de  la  fabrique  de  la  Courlille  se  voit  également  sous 
la  base.  Les  perles  en  relief  laissées  en  blanc  sont  tout  à  fait 
caractéristiques  de  la  fabrication  d'Etienne  fiaignol,  il  paraîtrait 
donc  difficile  de  lui  enlever  ces  pièces,  peut-être  Baignol  fabri- 
qua-t-il  pour  M.  Pouyat?  Parmi  les  pièces  authentiques  de  la 


ESSAI  DE  CLASSlPmATlÔN  DftS  AÏÏCIENNES  PORGRLAlNES  DE  Ll)l0GBS.        1î*i 

Courtille  qui  se  trouvent  au  Musée,  plusieurs  présentent  les  formes 
de  Baignol. 

—  Le  même,  mais  le  motif  du  cartel  représentant  des  ruines  est 
différent,  l'un  des  génies  a  été  cassé. 

Hauteur  :  22  c.  1/2  ;  largeur  à  la  partie  supérieure  :  13  c. 

Même  marque. 

Don  de  Madame  Gavarni. 

79»  Grand  plat  découpé  à  jour  dit  plat  à  g  lace, les  jours  sont 
disposés  en  deux  zones  rayonnant,  petites  palmettes  en  relief, 
cordon  de  perles,  cette  pièce  ne  porte  aucune  décoration  peinte. 

Largeur,  30  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

80®  Bol  ou  écnelle  couverte  avec  assiette  ou  présentoir  sur  pied. 

Le  bol  est  porté  sur  un  pied  assez  haut,  deux  anses  évidées  ter- 
minées par  des  têtes  de  femmes  dans  le  goût  antique  ;  rangs  de 
perles  en  relief  au  pied  et  près  du  bord  supérieur  du  bol.  Le  cou- 
vercle à  bord  dépassant  a  la  forme  générale  d'un  grand  congé, 
terminé  par  une  petite  plateforme  circulaire  sur  laquelle  est  posé 
le  bouton  de  forme  aplatie  ;  sur  le  dessus  du  bouton  est  figurée  en 
relief  une  fleur  ornementale  en  relief  (marguerite  ou  chrisanthème). 

Hauteur  totale  (jusqu'à  Textrémité  du  boulon)  :  16  c.  1/2;  largeur 
du  bol  sans  les  anses  15  c,  le  couvercle  porte  deux  rangées  de 
perlos»  Tune  près  du  bord,  l'autre  près  de  la  plateforme. 

Le  présentoir  ou  soucoupe  est  porté  par  un  piédouche  bas,  il  est 
également  décoré  de  deux  rangs  de  perles  délimitant  le  marli; 
larges  bandes  d'or  sur  le  bol,  le  couvercle  et  le  présentoir,  le  dessus 
du  bouton  or,  larges  bandes  d'or  sur  les  anses  partant  de  rattache 
et  s'arrétant  à  la  naissance  du  buste. 

Largeur  de  la  soucoupe  :  22  c. 

Aucune  marque. 

Acquisition. 

81*  Tasse  forme  droite  avec  rebord  s'évasant  portée  sur  trois  pieds 
en  forme  de  pattes  de  lion  se  terminant  par  des  feuilles  ornementales; 
au-dessus  de  chaque  pied  ou  griffe,  sur  la  panse  un  masque  de 
génie  entouré  d'une  sorte  d'auréole  à  pétales,  l'anse  est  formulée  en 
crosse,  son  extrémité  s'appuit  sur  un  des  masques,  sa  partie  supé- 
rieure était  formée  par  une  tête,  cassée  aujourd'hui,  accompagnée 
de  deux  ailes  éployées.  La  décoration  est  constituée  par  de  larges 
coupesàpied  rempliesde  fruits,  lesquelles  s'appuient  sur  les  masques; 
entre  chaque  paire  de  grandes  coupes,  une  petite  coupe  en  forme 
de  cratère  avec  des  anses  en  serpents  au-dessus  d'un  culot  donnant 


>  t 


^28  SÔCliTB   AkkCIlBOLOeiQUB    ET  BlSTOtilQtJB  DU   tlHOOSIlV. 

oai^ance  à  deux  fleurons  auxquels  est  attachée  une  draperie.  La 
soucoupe  sur  pied  bas  est  ornée  d'une  rangée  de  perles  en  relief 
restées  blanches.  Décor  analogue  à  la  tasse,  toute  la  décoration  en 
or  est  brunie  à  l'effet. 

Cette  piéee  d'un  style  sévère  rappelle  le  genre  révolu  (ioiiDaîre. 

Hauteur  :  25  c;  largeur  :  12  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Dubouché. 

82"*  Tasse  ou  génieux  sans  anse  ;  cette  pièce  de  formes  îDusitées 
est  divisée  eh  trois  zones  :  la  zone  inférieure  sur  plan  polygonal  est 
légèrement  obconique,  la  zone  intermédiaire  sur  plan  circulaire  e^t 
délimitée  par  deux  rangs  de  perles  se  détachant  en  relief,  la  zone 
supérieure,  de  peu  de  hauteur,  présente  simplement  un  rebord  évasé, 
elle  est  également  sur  plan  polygonal.  Le  décor  en  or  est  coDstitué.  à 
la  partie  inférieure,  par  un  large  filet,  à  la  partie  intermédiaire  par 
un  rinceau  où  Ton  remarque  des  rosaces,  la  partie  supérieure  est 
ornée  d'une  large  bande,  le  bord  est  laissé  blanc,  et  une  large  bande 
dorée  se  voit  également  à  Fintérieur. 

Hauteur  :  10  c;  largeur  à  l'ouverture  :  8  c. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Broussaud. 

82(>  Tasse  forme  droite,  anse  très  simple  sans  ressaut;  entre  deux 
bourrelets  on  remarque,  en  haut  et  en  bas  une  rangée  de  perles  en 
relief  laissées  blanches  ;  en  haut  et  en  bas  larges  bandes  or,  le 
champ  laissé  entre  les  deux  rangées  de  perles  a  été  couvert  d'an 
fond  clair  nuance  nanquin,  sur  la  partie  opposée  à  Tanse,  deux 
dauphins  se  regardant  sont  peints  en  brun  ou  bistre,  relevé  de 
touches  d  or,  ils  lancent  des  jets  d'eaux  parles  naseaux,  la  bouche  et 
le  nombril. 

Hauteur  :  6  c.;  Largeur  :6  c. 

Don  de  M.  Gaston  de  Lépinay. 

83**  Paire  de  chandeliers  forme  des  plaqués  de  l'époque  de 
Louis  XVI  ;  une  base  très  moulurée  supporte  un  fût  obconiqoe  qui 
lui  même  est  surmonté  d'un  vase  destiné  à  recevoir  le  flambeau: 
rangées  de  perles  à  la  base  et  à  la  bobèche.  —  Ces  chandeliers  soal 
en  blanc. 

Hauteur,  68  c;  Largeur  à  la  base,  30. 

Aucune  marque. 

(^es  chandeliers  appartenaient  à  la  compagnie  des  pénitents 
blancs  à  Tépoque  de  sa  dissolution  ;  ils  ont  été  offerts  au  Musée  par 
M.  Emile  Pouyat. 

Les  rangées  de  perles  désif^ent  la  fabrique  d'Etienne  Baignol, 


ESSAI  DR  CKASSiriCATlON  SES  ANCIKNRBS  F0RCCLAINB8  DE  LIMOGES.       719 

qui,  ainsi  qu*oii  la  va  plus  haut,  était  trésorier  des  compagnies  de 
pénitents  de  toutes  les  couleurs. 

85°  Tasse  et  sa  soucoupe  forme  dite  à  griffe  ;  la  tasse  montée  sur 
trois  pied,  anse  en  crosse.  Près  de  l'ouverture  une  rangée  de  perles 
laissées  en  blanc,  décor  fond  bleu  mat,  dit  bleu  Dumont  (1),  sur 
lequel  se  dessine  une  bande  où  se  remarquent  des  médaillons 
occupés  par  des  attributs  divers,  carquois,  fruits,  fleurs,  cœur  en- 
flammé, léte  de  folie,  masque  tragique,  fruits,  instruments  de  musi- 
que, perles,  etc.  et  brunissage  à  l'effet,  au  centre  un  écusson,  un 
chiffre  entrelacé  M.  T.  V.  (?)  capitales  anglaises  ;  les  pieds,  Tanse 
et  l'intérieur  de  la  tasse  dorés  en  plein.  La  soucoupe  décor  analo- 
gue, mais  le  centre  en  blanc,  un  disque  or  modelé  à  l'effet  en 
rosace. 

Hauteur  de  la  tasse  :  10  c;  largeur  à  l'ouverture  :  9  c. 

I-Argeur  de  la  soucoupe,  16  c.  1/2;  hauteur,  3  c.  1/2. 

Aucune  marque. 

Don  de  M.  Gabriel  Thomas. 

La  fabrique  établie  à  Limoges  au  commencement  du  siècle  par 
Etienne  Baignol  a  laissé,  parmi  les  praticiens  et  les  amateurs,  une 
grande  réputation.  Il  paraît  probable  que  cette  bonne  renommée  ne 
fera  que  s'accroître  à  mesure  qu'avanceront  les  études,  à  peine 
ébauchées  aujourd'hui,  sur  l'histoire  delà  porcelaine  à  Limoges.  On 
peut  esp/;rer  que  ces  études,  en  se  poursuivant  avec  quelque  conti- 
nuité, créeront  un  mouvement  grâce  auquel  notre  modeste  collec- 
tion des  porcelaines  Limousines  conservées  au  Musée  céramique 
s'augmentera  dans  de  larges  proportions.  Si,  comme  il  est  naturel 
en  l'espèce,  on  pressent  l'avenir  par  le  fait  actuel,  il  est  à  présumer 
que  la  proportion  très  remarquable  qui  s'observe  aujourd'hui  entre 
le  nombre  des  pièces  provenant  de  la  fabrique  Baignol  et  le  chiffre 
total  de  nos  porcelaines  limousines  ne  fera  que  s'accentuer;  la  répu- 
tation de  notre  vieux  porcelainier  ne  pourra  qu'y  gagner  et  bientôt 
peut-être,  tout  au  moins  au  point  de  vue  de  la  production  voisine  de 
l'art,  le  premier  rang  ne  pourra  plus  lui  être  contesté.  D'ailleurs 
depuis  de  longues  années  que  les  personnes  qui  s'intéressent  àla  por- 
celaine limousine  reconnaissent  le  haut  mérite  des  pièces  sorties  de 
la  fabrique  dont  nous  nous  occupons  en  ce  moment.  Il  y  a  trente 
ans  déjà,  au  moment  où  se  formait  notre  superbe  Musée  céramique 
les  mots:  «  C'est  du  Baignol  »  étaient,  dans  la  bouche  de  l'excellent 
Adrien  Dubouché,  le  suprême  éloge  pour  un  morceau  nouvellement 

(I]  Du  nom  d'uo  professeur  de  recelé  centrale  de  la  flaute- Vienne  qui 
Tàurait  inventé. 


730  SOCIÊTft  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQOC   DO   LIMODSIIC. 

entré  ;  et  il  fallait  voir  comme  il  les  prononçait  avec  une  satisfactioB 
orgueilleuse  —  orgueilleuse  pour  son  cher  Musée. 

Les  porcelaines  que  je  propose  d'attribuer  à  la  fabrique  BaipoL 
pour  la  période  à  laquelle  nous  sommes  arrivés,  sont  au  nombre 
de  trente-huit  etj*ai  procédé  avec  une  extrême  circonspection  dans 
mes  recherches.  J'indique  d*ailleurs  un  peu  plus  loin,  mais  trèf 
sommairement,  comment  j'ai  conduit  mon  travail.  Ces  (rente-bail 
pièces  forment  un  ensemble  très  varié,  je  dirais  volontiers  très  com- 
plet, grâce  auquel  il  nous  est  permis,  dès  à  présent,  de  nous  faire 
une  idée  à  peu  près  exacte  de  ce  que  fut  la  fabrication  de  BaignoL 
On  me  permettra  de  dégager  quelques  notions  générales  de  l'étodé 
de  ces  pièces,  de  leur  comparaison  soit  entre  elles,  soit  avec  les  pro- 
ductions contemporaines. 

Généralement  les  produits  de  Baignol  sont  d'une  qualité  remar- 
quable, le  blanc  en  est  fort  beau,  supérieur  je  crois  à  celui  de  laMaao- 
facture  Royale  et,  sans  injustice  pour  personne,  on  pourrait  peut'-étre 
dire  que  c'est  ce  fabricant-artiste  qui  a  commencé  la  haute  réputation 
à  laquelle  la  manufacture  limousine  devait  atteindre.  D'une  pâte  irré- 
prochable, d'un  façonnage  presque  toujours  sans  défauts,  d  un 
émail  superbe  et  d'une  cuisson  parfaite,  les  belles  porcelaines  de 
Baignol  constituent  des  céramiques  de  premier  ordre.  Quant  à  la 
décoration,  elle  nous  montre  chez  notre  fabricant  une  constante 
, préoccupation  d'étendre  les  ressources  dont  on  disposait  alors: 
parmi  les  productions  décorées  chez  Baignol,  les  essais  ne  sont  pas 
très  rares,  d'autre  part,  sa  palette  est  la  plus  étendue  de  celles  alors 
employées  à  Limoges  ;  la  réussite  de  ses  pièces,  soit  comme  fabrica- 
tion, soit  comme  décoration  est  généralement  parfaite. 

Au  point  de  vue  artistique,  les  productions  de  Baignol  se  recom- 
mandent à  notre  attention.  Ses  biscuits  ont  joui  d'une  juste  réputa- 
tion, il  s'appliqua  avec  suite  à  ce  genre  de  fabrication  on  semble 
avoir  excellé  l'annexe  de  Sèvres  ;  les  biscuits  de  Baignol  ne  sont  pas 
très  nombreux  aiyourd'hui  ;  le  Musée  en  possède  un  qui  n'est  pas 
sans  valeur. 

Quant  aux  porcelaines  d'usages,  aux  pièces  décoratives,  etc..  les 
formes,  généralement  bien  étudiées,  en  sont  très  variées  et  appar- 
tiennent à  des  inspirations  diverses.  Parmi  les  pièces  que  j'ai  eu  à 
désigner  il  en  est  quelques-unes  qui  sont  de  pur  style  Louis  XVI, 
par  exemple,  les  numéros  47  et48,  etc.,d'autres  rappellent  la  période 
révolutionnaire  ;  par  exemple  les  numéros  61,  77,  80  et  81,  tandis 
que  certaines  sont  bien  de  leur  époque,  c'est-à-dire  de  l'époque 
impériale  (du  commencement  surtout),  il  faut  citer  notamment  les 
numéros  50  et  51 . 

Comme  il  a  été  dit  déjà,  les  décorations  sont  très  diverses,  beau 


t, 


ESSAr  DF.  CLASSIFICATION  DRS  AHCIRNNES  PORCKLAINF.S  DR  LIMOGES.       731 

coup  de  pièces  sont  seulement  dorées,  avec  parlies  brunies  à  Teffet, 
mais  avec  quelle  richesse  et  le  plus  souvent  avec  quel  goût?  Les 
décorateurs  limousins  savaient  poser  Tor  avec  une  grande  décision, 
souvent  beaucoup  de  verve.  Lorsqu'ils  ne  créaient  pas  leurs  modèles 
ils  en  adoptaient  de  bien  choisis;  et  parmi  les  travaux  qu'ils  nous 
ont  laissés,  certains  pourraient  peut-être  encore  aujourd'hui  être 
regardés  avec  profit. 

Nous  rencontrons  dans  la  production  de  Baignol  quelques  fonds 
d'une  belle  venue  ;  le  fond  dit  laque  de  mars  pourrait  môme  avec 
d'autres  caractères  faire  distinguer  certaines  de  ses  pièces. 

On  remarque  dans  la  fabrication  de  Baignol  les  traces  de  certaines 
iradilions  décoratives,  de  certaines  habitudes  d'atelier,  qui  peuvent 
fournir  des  indications  précieuses,  par  exemple  les  filets  de  perles 
en  relief  laissées  blanches  ont  longtemps  été  particuliers  à  cette 
fabrique.  Dans  la  décoration  un  certain  cartel  en  écusson  ogival  et 
une  guirlande  en  feuilles  de  vigne  interprétées  très  librement  font 
reconnaître,  presque  à  coup  sûr,  un  grand  nombre  des  produits  de 
notre  fabricant.  Un  «  pipant  »  rappelant  les  anciens  procédés  déco- 
ratifs de  la  manufacture  du  comte  d'Artois,  constitue  aussi  un  carac- 
tère qu'il  ne  faut  pas  négliger.  Il  convient  aussi  de  noter  l'emploi, 
pour  les  anses  surtout,  de  bustes  souvent  ailés  et  imitant  le  bronze, 
par  l'application  d'une  couleur  vert  foncé  avec  des  rehauts  d'or. 

Dans  la  décoration,  on  reconnaît  —  et  la  chose  s'explique  aisé- 
ment —  quelques-unes  des  traditions  de  l'annexe  de  Sèvres  et  de 
la  fabrique  du  comte  d'Artois.  Baignol  a  dû  en  effet  employer  un 
certain  nombre  des  décorateurs  jadis  attachés  à  ces  manufactures  ou 
plutôt  à  cette  manufacture,  emploi  qu'il  a  dû  faire  concurremment 
sans  doute  avec  des  artistes  qui  s'étaient  formés  plus  tard.  Des 
praticiens  venant  des  fabriques  de  Bordeaux  (première  fabrique 
Ailuaud),de  Paris  (manufacture  de  laCourtille?),  etc.,  durent  aussi 
prêter  leur  concours  au  céramiste  limousin. 

Nous  savons  encore  fort  peu  de  chose  sur  les  premiers  fabricants 
limousins;  nous  sommes  dans  la  même  indigence  de  renseigne- 
ments au  sujet  des  artistes  qu'ils  employèrent;  Clostermann,  venu 
de  Sèvres,  resta  longtemps  à  Limoges  ou  à  Saint-Yrieix.  Nous  l'avons 
vu  préparer  les  couleurs  à  l'annexe  de  Sèvres,  fonction  alors  fort 
importantes,  puis,  pendant  la  période  impériale,  décorer  quelques 
pièces  en  or,  mais,  quelle  était  sa  valeur  artistique,  quel  était  le 
genre  qu'il  cultivait  le  plus  habituellement,  dans  lequel  il  excel- 
lait? C'est  lace  que  nous  ignorons  encore;  la  lumière  se  fera-t-elle 
sur  ce  point  qui  a  son  importance  ?  C'est  là  ce  qu'il  est  difficile  de 
prévoir  dès  à  présent. 

Mais  quant  au  peintre  Préat,  quant  au  porcelainier  Lamontagne, 


734  SOCIÉTÉ   ARCHEOLOGIQUE   ET   iriSTOniQCB   DU   LIVOUSIIt. 

jeune  peintre  est  correct  dans  son  dessin,  sa  louche  est  légère  t^i 
moelleuse,  ses  figures  sont  pleines  de  grâce  et  de  senliment.  Le  jnry 
convaincu  qu'avec  du  travail  et  de  bons  exemples  M.  Faure  peol 
devenir  un  peintre  très  gracieux,  lui  décerne  une  médaille  d'argent 

«  Le  jury  fait  mention  de  M.  Tharaud,  élève  de  la  fabrique  de 
MM.  Alluaud,  et  de  M.  Baret,  artiste  travaillant  dans  celle  de 
M.  Monerie  ». 

Grâce  à  la  collection  du  Musée,  grâce  aussi  à  des  indicatioDs 
telles  que  celles  qui  nous  ont  été  fournies  par  les  registres  de  U 
Société  d'agriculture,  la  période  qui  s'étend  des  dernières  années 
du  xvai*  aux  premières  années  du  xix«  siècle  —  de  1788  à  1804  ou 
1806,  si  l'on  veut,  —  est  assez  connue  pour  qu'il  soit  possible  de 
chercher  à  dégager  quels  étaient  les  caractères,  dirai-je  artisti- 
ques, de  ses  productions  en  porcelaine. 

Les  formes  longtemps  traditionnelles  que  nous  avions  empruntées 
à  la  Saxe,  qui  nous  les  avaient  prises  d'ailleurs  antérieurement,  mai> 
pour  les  alourdir,  sont  bien  définitivement  abandonnées.  CependanU 
de  la  longue  pratique  du  goût  rocaille,  il  est  resté  à  nos  artistes  une 
certaine  prédilection  pour  les  lignes  souples.  Les  formes  guindées, 
empruntées  à  la  céramique  anglaise,  n'eurent  chez  nous,  au  moins 
en  thèse  générale,  qu'une  vogue  éphémère.  En  revanche,  nous  con- 
servâmes longtemps  les  modèles  appartenant  à  un  genre  delransition 
où  les  formes  anciennes  ont  été  laborieusement  épurées  (la  plupart 
appartenant  à  la  fabrication  de  Baignol). 

Dans  certaines  pièces  du  Musée,  nous  constatons  une  plus  grande 
recherche  de  l'originalité;  les  anciens  souvenirs  paraissent  oubliés, 
c'est  bien  à  un  style  nouveau  que  nous  avons  à  faire.  La  pièce  48, 
appartenant  à  la  fabrication  de  Baignol,  peut  donner  idée  des  com 
binaisons  de  lignes  que  nos  artistes  trouvaient  alors;  cette  pièce 
est  d'ailleurs  loin  d'être  irréprochable  :  l'anse,  maigre,  chétire 
pourrait-on  dire,  est  assez  mal  formulée;  dans  le  galbe  du  vase  od 
a  peut-être  plus  cherché  la  bizarrerie  que  la  correction,  cette  pièce 
a  des  qualités  cependant;  il  y  a  dans  ses  lignes,  l'anse  misé  à  part, 
une  décision,  une  fermeté  dont  nos  artistes  se  déshabitueront  trop 
vite. 

L'aiguière  n»  81  est  remarquable.  Ici  l'anse  a  été  bien  étudiée,  on 
a  su  lui  donner  des  formes  à  la  fois  logiques  et  gracieuses,  le  profil 
du  vase  est  également  correct  et  élégant. 

Nos  artistes  ne  furent  pas  toujours  aussi  heureux  ;  certaines  de 
leurs  compositions  doivent  être  franchement  condamnées  ;  Telle  es( 
par  exemple  la  veilleuse  54,  quelques  pots-à-eau  sont  aussi  bien 
lourds,  les  tasses  à  griffes  (citons  les  n^*  83,  etc.)  imitées  des  modèles 
parisiens  affectent  des  aspects  solennels  assez  hors  de  propos, 


ESSAI  DB  CLASSIFIGATlOlf  DRS  ANCIKNNKS  l'ORCELAINKS  DE  LIMOGES.        735 

d'autre  part  ces  pièces  sont  trop  solidement  construites  ;  on  a  donné 
une  physionomie  pesante  à  des  objets  essentiellement  mobiles  ce 
qui  est  une  faute  contre  le  bon  sens  artistique. 

Les  vases  d'ornement  fabriqués  pendant  cette  période  sont  géné- 
ralement d'assez  faibles  dimensions,  leurs  formes  ne  manquent  pas 
de  pureté.  Nous  voyons  déjà  paraître  les  imitations  plus  ou  moins 
réussies  du  vase  Borghëse  dont  il  sera  fait  plus  tard  un  véritable 
abus. 

Quant  aux  décorations,  elles  sont  très  variées  et  de  valeur  très 
inégales.  Les  roses  en  jetés  réguliers  ou  non  ont  complètement 
disparu,  mais  nous  trouvons  encore  assez  fréquemment  des  roses, 
au  naturel,  traitées  en  médaillon  et  formant  sujet  principal.  Ces 
fleurs  sont  exécutées  parles  mêmes  procédés  que  pendant  la  pé- 
riode antérieure;  les  barbeaux  sont  nombreux,  ce  genre  de  décora- 
tion est  plus  ancien  que  la  porcelaine  dure  et  a  d'abord  été  en 
usage  pour  la  porcelaine  tendre  et  la  faïence. 

Ce  qui  a  été  dit  plus  haut  à  propos  des  porcelaines  de  Baignol, 
peut  s'appliquer  aux  autres  fabriques  limousines. 

fA  suivre j,  Camille  Leymarie. 


DOCU  MENTS 

POUR  SERVIR  A  L*BiSTOIRB 

DE  L'INDUSTRIE  ET  DES   MANUFACTURES 

EN  LIMOUSIN 


DÉCOUVERT!  OU  KAOLifv  (saite). 
p.-/.    Macquer  au   ministre   Berlin.  . 

A  Paris,  ce  ISaoasl  1768.    (fj 

Monsieur, 

Aujourd'hui,  veille  de  notre  départ,  M.  Tarchevéque  de  Bordeaui 
vient  de  me  communiquer  une  lettre  qu'il  a  reçue  hier  du  siear 
Villaris.  Par  cette  lelire,  ce  dernier  marque  de  nouvelles  méfiances 
et  indécisions  et  il  fait  entendre  qu'il  ne  donnera  aucune  iodicatioo 
de  la  terre  avant  d'être  en  possession  de  la  récompense  qui  loi  est 
promise,  sauf  à  la  restituer  s'il  ne  remplit  point  les  conditions 
qu'il  a  annoncées.  M.  Tarchevéque  de  Bordeaux  pense  que  dans 
ces  circonstances  il  serait  à  propos  d'attendre  pour  partir  qu'il  eût 
parlé  lui-même  au  sieur  Villaris,  devant  être  à  Bordeaux  au  com- 
mencement de  septembre,  il  doit  vous  écrire  à  ce  sujet.  De  mon 
côté,  Monsieur,  je  serais  au  désespoir  de  rien  faire  légèrement 
et  d'occasionner  la  moindre  dépense  inutile  à  la  manufacture.  C'est 
pourquoi  j'ai  cru  que  je  devais  différer  mon  départ  et  attendre  de 
nouveaux  ordres  de  votre  part.  11  est  fâcheux  d'avoir  à  faire  à  une 
aussi  mauvaise  tête  que  celte  de  Villaris,  cela  nous  a  fait  perdre 
un  temps  précieux  et  occasionné  toujours  quelques  dépenses  en 
pure  perte,  car  j'ai  loué  une  chaise  à  deux  qui  coûte  un  écu  par 
jour,  sans  compter  beaucoup  d'autres  faux  frais  qui  seront  aussi 
en  pure  perte  si  notre  voyage  n'a  pas  lieu.  Je  ne  puis  cependant  me 
figurer  que  le  sieur  Villaris  soit  assez  dépourvu  de  bon  sens  ponr 

persister  dans  une  méfiance  aussi  déraisonnable  et  je  crois  qu'en 
lui  parlant  et  lui  exposant  les  choses  telles  qu'elles  sont,  je  par- 
viendrais facilement  à  lui  faire  connaître  ses  véritables  intérêts. 

(1)  Nous  n'avons  pu  nous  procurer  cette  lettre  et  quelques  autres  qui 
suivent  assez  tôt  pour  les  donner  à  leur  rang.  Nous  sommes  ainsi  foité  de 
rompre  l'ordre  chronologique. 


DOCUBIENTS  SUR  L*lNiyDSTm   KT   LRS   MANDFACTOilBS   EN  LlllOUSlN.       737 

Mais  daztô  le  eas  même  oè  toute  négociation  deviendrait  impratica- 
ble avec  lui,  ne  serait-on  pas  fondé  à  espérer  de  trouver  la  terre 
dont  il  s'agit  sans  son  secours.  Nous  somiâes  assurés  qu'elle  ne 
peut  être  à  une  grande  distance  de  Bordeaux.  La  moitié  de  ce  terri- 
toire est  borné  à  dix  ou  douze  lieues  du  côté  de  la  mer.  En  pre- 
nant toutes  les  informations  convenables  dans  le  païs,  nous  pour- 
rons découvrir  l'endroit  où  le  sieur  Villaris  a  été  plusieurs  fois  et 
même  depuis  peu.  Nous  sommes  deux  qui  connaissons  cette  terre 
parfaitement  et,  dès  que  nous  l'apercevrons,  elle  ne  nous  échap- 
pera certainement  pas.  Pour  moi,  Monsieur,  si  vous  jugiez 
qu'il  Mtà  propos  de  faire  cette  recherche,  je  me  sens  tout  le  zèle 
et  tout  le  courage  nécessaires  pour  la  bien  faire  et  si  j'avais  le 
bonheur  de  réussir,  il  en  résulterait  une  épargne  au  moins  de  dix 
ou  douze  mille  francs  pour  la  manufacture. 

Les  nouveaux  fours  que  nous  avons  fait  construire  à  Sèvres, 
M.  de  Monligny  et  moi,  réussissent  très  bien,  et,  dès  que  nous 
aurons  une  bonne  terre  comme  celle  que  noijs  cherchons,  la  ma- 
nufaclure  pourra  faire  la  plus  belle  et  la  plus  excellente  porcelaine 
qui  soit  au  monde. 

J'attends  vos  ordres  et  suis ,  etc. 

Macqùer. 

f Bibliothèque  nationale  y  fonds  français,  n^  91 55). 


Le  Ministre  Berlin  à  V Intendant  de  Bayonne, 

À  Compiègnc,  le  30  août  1768. 

Quoique  les  différentes  terres,  Monsieur,  que  l'ingénieur  de  votre 
département  a  découvert  et  que  vous  m'ayez  enyoyées  n'ayent  pu 
faire  de  la  porcelaine,  comme  «lies  approchent  cependant  de  la 
qualité  de  celles  qu'on  recherche,  je  ne  doute  pas  qu'on  ne  parvienne 
i)ientôt  avec  son  secours  à  les  découvrir.  C'est  pourquoi  je  me  suis 
déterminé  d'envoyer  sur  les  lieux  M.  Macquer,  de  l'académie  royale 
des  sciences,  qui  est  commissaire  dans  cette  partie  à  la  manufac- 
ture du  Roy  et  qui  connaît  très  bien  la  terre  dont  il  est  question.  Je 
vous  prie  de  l'adresser  à  votre  subdélégué  et  à  l'ingénieur  qui  a  fait 
les  premières  recherches  et  de  donner  des  ordres  afin  qu'il  soit 
secondé  dans  les  fouilles  et  dans  les  démarches  qu'il  sera  obligé  de 
faire,  sans  cependant  faire  aucun  éclat,  ny  ébruiter  autrement  son 
voyage  que  comme  celuy  d'un  curieux  d'histoire  naturelle  qui  fait 
des  recherches  pour  son  objet.  Je  vous  serai  très  obligé.  Monsieur, 
des  facilités  que  vous  procurerez  à  M.  Macquer  qui,  indépendamment 
delà  commission  dont  il  est  chargé,  mérite  par  lui-même  les  égards 
dus  au  rang  diotinguè  qu'il  tient  parmi  les  savants  de  l'Europe. 


75S  <OCIÊTè  AUCBÈOLOGIQQR  Kt  ttlSTOftlQOB  DO   LIMOUBIK. 

Je  sais,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  senriteor 

Bert0. 

(Bibliothèque  nationale^  fonds  français,  n""  91 35 J. 


Parent,  premier  commis  des  finances,  à  M.  Maequer. 

Gompiègne,  S4  août  1768. 

Je  viens  de  communiquer,  Monsieur,  à  M.  Berlin,  la  lettre  qoe 
vous  m'avez  fait  l'honneur  de  m'écrire  le  21  et  qui  ne  m'est  par^^ 
nue  que  ce  matin  parce  que  vous  l'aviez  mise  sous  Tenveloppe  du 
ministre  et  qu'elle  a  séjourné  comme  il  est  assez  d'usage  aa  secré- 
tariat. J'ai  mes  ports  francs  et  vous  pouvez  m'écrire  directemeoL 
Je  serai  enchanté  d'entretenir  avec  vous  une  correspondance  qni 
me  flatte  à  tous  égards. 

M.  Berlin  me  charge  de  vous  marquer  qu'il  croit  inutile  de  dé- 
clarer l'objet  de  vos  recherches;  il  a  déjà  répandu  luy  même  l'en- 
vie qu'il  a  d'avoir  de  la  terre  à  porcelaine,  soit  par  les  ingénienr^ 
des  ponts  et  chaussées  qu'il  avait  chargé  de  lui  en  procurer,  soit 
par  MM.  les  Intendants  et  d'autres  personnes,  mais  que  s'il  Toa.^ 
arrive  de  trouver  ce  que  nous  cherchons  et  que  vous  en  wt^i 
physiquement  sûr,  vous  avertissiez  M.  Tin  tendant  afin  qu'il  pres- 
sente le  propriétaire.  M.  Berlin  sait  bien  qu'il  faudra  donner  plus 
que  la  valeur,  mais  on  ne  trouve  pas  partout  des  Villaris. 

Je  crains  que  vous  n'ayez  pas  reçu  ma  lettre  d'hier  par  laquelle 
je  vous  marquais  que  M.  Berlin  vous  priait  de  vous  abstenir  de 
voir  le  sieur  Villaris  à  Bordeaux,  ce  particulier  ne  méritant  plus 
aucune  considération. 

Nour  attendrons  avec  empressement  de  vos  nouvelles.  Je  dis 
nous,  car  je  vous  prie  de  marquer  directement  à  M.  Berlin  ce  qui 
vous  réussira,  les  moindres  détails  l'intéressent  et  il  est  juste  qu'il 
ait  les  premières  nouvelles... 

Rien  n'égale  le  sincère  attachement  avec  lequel  j'ai  Thonneur 
d'être  votre  très  humble  et  très  dévoué  serviteur. 

Parekt. 

(Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n**  91 55), 


P,'J.  Maequer  au  ministre  Bertin. 

A  Bordeaux,  ce  3  septembre  1768. 

Monsieur, 
Devant  vous  rendre  un  compte  exact  de  toutes  mes  opératioDs, 


DOCUMBNtS  SOa   LlNOUStRlB  Et   LES   AaNOPaCTURBS   GN    LUOUSIII.       739 

j'ai  rhonneur  de  vous  informer  que  pendant  lout  le  chemin  que 
nous  avons  fait  depuis  Paris  jusqu'ici,  nous  n'avons  cessé  d'observer 
tous  les  terrains  que  nous  parcourions,  surtout  dans  les  endroits  où 
la  terre  était  ouverte,  soit  pour  les  chemins,  soit  pour  les  puits, 
mettant  pied  à  terre  toutes  les  fois  que  nous  apercevions  quelque 
chose  qui  nous  paraissoit  digne  de  remarque.  Ces  observations 
n'ont  point  été  inutiles  ;  nous  avons  trouvé  entre  Tours  et  Poitiers 
une  terre  qui  nous  parait  s'approcher  beaucoup  de  celle  que  nous 
cherchons,  nous  en  avons  emporté  un  échantillon  avec  nous  pour 
Texaminer  plus  exactement  à  la  première  occasion,  et  si  elle  se 
trouve  bonne  nous  nous  proposons  de  sonder  ce  terrain  plus  parti- 
culièrement à  notre  retour. 

Arrivé  icy,  je  me  suis  conformé  à  vos  intentions  ;  j'ai  vu  M.  l'In- 
tendant dont  je  ne  pouvois  manquer  d'être  bien  reçu  et  bien  secondé 
avec  la  recommandation  que  j'avois  de  votre  part.  Il  m*a  fait  dîner 
le  lendemain  avec  M.  de  Saint-André,  premier  ingénieur  des  ponts 
et  chaussées  de  la  généralité,  auquel  j'ai  remis  une  description  et  un 
échantillon  de  la  terre  ;  il  n'en  connoit  point  de  pareille  dans  son 
district,  mais  il  enverra  la  description  que  je  lui  ai  laissée  à  tous  les 
sous-ingénieurs  de  son  dictrict,  et  d'icy  à  peu  de  temps,  s'ils  con- 
noissent  quelque  chose  d'analogue,  j'en  serai  informé.  M.  de  Saint- 
André  se  prête  avec  beaucoup  de  zèle  à  toutes  ces  recherches.  J'ai 
appris  de  lui  qu'il  y  avoit  à  l'intendance  un  cabinet  qui  contenoit 
plusieurs  terres  et  pierres  du  pais.  Ce  cabinet  a  été  fait  pa^ 
M.  Boulin,  alors  qu'il  était  intendant  de  Bordeaux.  Le  sieur  Villaris, 
qui  étoit  fort  lié  avec  lui,  a  travaillé  à  cette  collection. 

M.  l'archevêque  de  Bordeaux  est  icy  présentement,  il  m'a  fait 
l'honneur  de  m'inviter  à  dîner  chez  lui.  Je  vois  par  sa  conversation 
qu'il  est  très  mortifié  de  voir  manquer  cette  affaire  dont  il  s'étoit 
mêlé  avec  tant  de  zèle  ;  il  m'a  répété  encore  que  s'il  se  trouvoit  en 
argent  il  achepteroit  le  terrain  où  se  trouve  la  bonne  terre  pour  en 
faire  présent  au  Roy.  Il  doit  être  fort  mécontent  lui-même  du  sieur 
Villaris;  cependant  je  sens  bien  par  la  manière  dont  il  m'en  parle 
qu'il  souhaiteroit  beaucoup  que  sa  négociation  se  renouât^  mais  vos 
ordres  sont  si  précis  à  ce  sujet.  Monsieur,  que  je  lui  ai  dit  nette- 
ment que  je  ne  pouvois  parler  de  rien  au  sieur  Villaris. 

M.  le  doyen  du  Chapitre  de  Bordeaux  avec  lequel  j'ai  dîné  chez 
M.  l'Archevêque  et  auquel  j'ai  dit  que  l'objet  de  mon  voyage  étoit 
des  recherches  d'histoire  naturelle  et  de  minéralogie  s'est  empressé 
de  la  manière  la  plus  obligeante  à  me  conduire  dans  deux  cabinets 
assez  complets,  dont  l'un  appartenant  à  un  riche  négociant  de  cette 
ville  et  l'autre  à  l'ecclésiastique  qui  est  bibliothécaire  du  collège 
royal  (cy  devant  les  jésuites)  et  qui  me  paraît  être  le  meilleur  natu- 
raliste de  l'académie  de  Bordeaux.  Ce  dernier  me  donne  tous  les 


740  SOCIÉTÉ  ARCHiOLOGlQlïfe  KT  HldTOtllQVI  ftU  UttOOSlM. 

reaieignements  imaginabf^^  ôt  l'ayant  mis  sans  affeclalîoii  sur  1  ar- 
ticle des  terres,  toat  ce  qu'il  m'a  dît  à  ce  sojet  me  confirme  encore 
qtie  c'estdans  laChalosse  et  depuis  Dax  jusqu'aux  Pyrénées,  (fui  n'eu 
soiit  pas  fort  éloignées,  qu'il  faut  aller  les  chercher. 

Il  résulte  donc  de  toutes  les  perquisitions  que  j'ai  faites  que  c'est 
dans  ce  païs  qu'il  faut  aller.  J'ai  appris  même  que  le  sieur  ViHam 
Fa  parcouru;  en  conséquence,  ne  voyant  plus  rien  à  faire  icy,  noo? 
allons  nous  y  acheminer  dèâ  demain  ou  après  demain.  J'ai  d'autant 
plus  d'empressement  de  partir  et  de  quitter  Bordeaux  que  malgré 
toute  l'économie  possible,  les  frais  de  séjour  y  sont  excesafe  pour 
ceux  qui  ne  âont  pus  habituellement  domiciliés  dans  la  viBe. 

Le  sieur  Millot,  mon  compagnon  de  voyage,  se  comporte  très  bic«: 
il  n'épargne  ni  soins  ni  peines  ;  c'est  lui  qui  a  remarqué  le  premier 
la  terre  que  nous  avons  trouvée  en  cheitiin  et  pendant  que  je  prend? 
ici  le  plus  de  renseignements  qu'il  m'est  possible  par  les  moyens 
dont  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  rendre  compte,  il  fait  la  môme<Âose 
de  son  côtéen  questionnant  avecprudence  les  ouvriers  des  verrerie?, 
des  fayenceries,  avec  lesquels  il  peut  se  lier  et  qui  par  la  nature  de 
leur  travail  peuvent  avoir  connaissance  de  ce  que  nous  cherchons. 

Je  prévois  que  je  serai  obligé  de  séjourner  plus  longtemps  à  Dax 
que  dans  tout  autre  endroit;  ainsi,  si  vous  avez  quelques  ordres  a 
me  donner,  je  crois  que  vous  pourrez  me  les  envoyer  à  l'adresse  de 
M.  de  Borda,  président  au  présidial  dé  Dax,  correspondant  de  notre 
académie  des  sciences  de  Paris,  qui  a  fait  des  recherches  sar  les 
terres  de  son  païs,  que  tout  le  monde  me  dit  être  savant  et  comma- 
nicatif  et  sur  lequel  je  compte  beaucoup  par  toutes  ces  raisons. 

Je  suis,  etc. 

Macquoi. 

fBibiothèqâée  nationak,  fonds  français,  n""  9i3ô). 


P.'J:  Macquer  au  ministre  Bertiri. 

A  Dax,  ce  18  septembre  1768. 
Monsieur, 

Comme  Bayonne  n'est  qu'à  douze  heures  de  Dax  et  que  je  comp- 
tais y  trouver  M.  rin'tendant,  je  m'y  suis  rendu  de  Bordeaux,  mai? 
jai  appris  en  arrivant  que  M.  d'Aine  était  à  Pau  ;  il  m'aurait  falln 
faire  encore  une  assez  longue  route  pour  l'aller  trouver,  et  d'ailleurs 
je  prévoiais  par  tout  ce  que  j'avais  appris  que  je  pourrais  me  passer 
de  ses  ordres  et  même  de  l'assistance  de  M.  Gleise  qui  est  aussi  à 
Pau.  Je  me  suis  donc  contenté  de  voir  M"  de  Morancin  eft  du  €oar- 
neau,  ses  subdélégués,  qui  m'onl  donné  une  lettre  pour  M.  de  la 
Fargue,  siibdétégcré  à  Dax,  dontjc  ne  me  servirai  cependant,  siritant 


rn 


DoctttRNTs  Sun  L^'iNbustam  ter  les  kkANCFAcruhes  en  uhousin.     W 

vos  intentions  que  dans  le  besoin  et  probablement  ce  besoin  n'aura 
pas  lieu,  car  je  trouve  dans  M.  de  Borda,  président  au  présidial  de 
Dax,  correspondant  de  notre  académie  des  sciences,  tous  les  secours 
et  toutes  les  lumières  que  je  peux  désirer.  C'est  un  savant  rempli 
de  zèle,  qui  n'a  nulle  prétention,  nuls  secrets  et  qui  joint  à  ces 
belles  qualités  une  modestie  charmante  ;  il  a  fait  une  des  plus  belles 
collections  que  j'aye  encore  vues  de  minéraux,  de  terres  et  de  pier- 
res, et  ce  qui  est  très  précieux  pour  nous,  c'est  que  ce  cabinet  n'est 
composé  uniquement  que  des  terres  et  des  pierres  du  païs,  toutes 
en  bon  ordre,  avec  l'indication  précise  des  lieux  dont  elles  sont  tirées. 
Vous  croirez  bien,  Monsieur,  que  j'ai  profité  de  la  bonne  volonté  de 
M.  de  Borda  pour  examiner  en  grand  détail  toute  cette  collection. 
Entre  beaucoup  de  bonnes  terres  que  j'y  ai  vues,  j'en  ai  remarqué 
deux  qui  m'ont  paru  l'emporter  infiniment  sur  les  autres,  l'une  est 
d'un  lieu  qu'on  nomme  Bellus  et  l'autre  est  de  Pouillon  qui  est  l'en- 
droit où  M.  Gleise  a  déjà  commencé  à  chercher  par  vos  ordres. 
Pour  ne  m'en  pas  rapporter  uniquement  à  moi,  j'ai  prié  M.  de  Borda 
qu'il  trouvât  bon  que  mon  compagnon  Millot  examinât  aussi  ses 
terres,  et  il  n'a  pas  balancé  à  donner  la  préférence  à  celles  dont  j'ai 
l'honneur  de  vous  parler.  M.  de  Borda  nous  a  laissé  prendre  non- 
seulement  ces  deux  terres,  mais  encore  toutes  celles  que  nous  avons 
voulu;  voyant  môme  que  cela  était  l'objet  qui  nous  intéressait  le 
plus,  11  nous  en  a  procuré  encore  trois  autres  qu'il  n'avait  pas  pour 
le  présent  et  qu'il  fit  venir  d'assez  loin  par  des  exprès.  Notre  premier 
soin  a  été  de  comparer  la  plus  belle  de  ces  terres  avec  celle  de 
Passau  et  celle  du  sieur  Villaris  dont  nous  avions  emporté  des 
échantillons  avec  nous  et  nous  avons  remarqué  d'abord  que,  quoi- 
qu'elle les  égalât  en  beauté,  elle  était  cependant  d'une  nature  diffé- 
rente, mais  comme  il  ne  faut  pas  s'en  rapporter  aux  seules  appa- 
rences, nous  nous  sommes  mis  en  devoir  de  faire  un  examen  plus 
complet.  Millot  a  entrepris  d'en  faire  des  lavages  et  même  l'essai  au 
feu  et  quoique  nous  manquassions  de  tous  les  ustensiles  nécessai- 
res à  ces  opérations,  il  y  a  suppléé  on  ne  peut  pas  mieux  par  son 
adresse  et  par  son  industrie.  Sa  chambre  est  devenue  notre  labo- 
ratoire et  représente  presque  une  petite  manufacture  de  porce- 
laine, aux  fours  près  que  nous  ne  pouvions  avoir  et  auxquels  nous 
avons  suppléé  par  la  forge  d'un  serrurier.  Au  moyen  de  toutes  les 
précautions  que  nous  avons  prises,  nos  essais  s'y  sont  trè<^  bien 
faits;  ils  nous  ont  décidés  sur  celle  de  toutes  ces  terres  à  laquelle 
nous  devons  donner  la  préférence.  Elle  a  fait  une  porcelaine  qui 
nous  parait  approcher  de  celle  du  sieur  Villaris,  quoique  nous  ne 
puissions  nous  dissimuler  qu'elle  lui  est  bien  un  peu  inférieure  en 
beauté  et  que  nous  n'ayons  quelque  crainte  qu'elle  le  soit  aussi  un 
peu  en  bonté.  Mais  ce  n'est  encore  là,  Monsieur,  qu'un  premier 
T.  X'-  47 


aperçu.  Nous  alious  présenteaient  visiter  les  lieux  eui-mémes  e( 
faire  fouiller  aussi  amplement  qu'il  le  faudra  pour  trouver  tout  ce 
que  ces  cantons  peuvent  renfermer  de  bonnes  terres.  Peot-étre  en 
trouverons  nous  de  beaucoup  supérieures  à  celles  que  nous  avo&s 
déjà  essayées,  car  M.  de  Borda  n'a  pas  plus  fait  fouiller  que 
M.  Gleise  ;  il  s'est  contenté  de  prendre  des  échantillons  de  celles 
qu'il  a  eu  occasion  de  trouver  dans  les  fouilles  faites  pour  tirer  de  k 
marne  et  de  les  ramasser  en  simple  naturaliste.  Quoique  très  savant 
dans  la  minéralogie  et  très  bon  physicien,  il  ne  s'est  point  du  toat 
occupé  de  chymie,  il  n'a  point  de  laboratoire  ni  aucun  des  instru- 
ments nécessaires  aux  expériences,  il  n'a  jamais  pensé  à  faire  delà 
porcelaine  et  tout  savant  qu'il  est  d'ailleurs,  il  n'a  pas  méiae  le$ 
premières  notions  sur  cet  objet.  S'il  s'était  occupé  de  ce  travail, 
c'aurait  été  un  grand  avantage  pour  nous,  car  du  caractère  dont  il 
est,  je  suis  assuré  qu*il  nous  aurait  prêté  son  laboratoire,  tous  ses 
ustenciles  et  qu'il  nous  aurait  communiqué  sans  la  moindre  restric- 
tion toutes  les  connaissances  qu'il  aurait  pu  avoir,  sans  autre  motif 
que  celui  d'être  utile  et  de  contribuer  au  progrès  des  sciences  etdfô 
arts.  C'est  un  des  plus  aimables  et  des  plus  estimables  hommes  que 
je  connaisse,  je  ne  puis  assez  vous  exprimer,  Monsieur,  tout  ce  qu'il 
fait  pour  nous  donner  les  facilités  dont  nous  avons  besoin;  il  est 
d'ailleurs  la  prudence  et  la  discrétion  même.  J'ai  cru  qu'avec  uo 
homme  comme  celui-là  je  pouvais,  je  devais  même  mouvrir  jus- 
qu'à un  certain  point;  il  scait  donc  que  le  but  de  nos  recherches  est 
une  terre  propre  à  la  porcelaine  et  que  c'est  par  vos  ordres,  Moo- 
siéur,que  nous  faisons  ces  recherches.  Cette  confidence  qui  Ta  bean 
coup  flatté  lui  fait  prendre  en  même  temps  toutes  les  mesures  con- 
venables pour  entrer  dans  nos  vues,  c'est-à-dire  pour  que  nos 
opérations  se  fassent  bien,  mais  sans  éclat  et  comme  de  simples 
recherches  d'histoire  naturelle,  ce  qui  lui  est  facile  puisqu'il  est 
est  connu  comme  naturaliste  depuis  longtemps  dans  toute  la 
province 

Macquer. 

(Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n''91 35), 


P,'J.  Macquer  à  son  frère,  avocat  au  Parlement,  à  Paris. 

A  Dax,  ce  SS  septembre  1768. 

Je  VOUS  ai  dit  sans  doute  qu'il  n'y  a  pas  moyen  d'avoir  la  terre  du 
sieur  Villaris,  par  ce  qu'il  est  encore  plus  fâché  contre  le  Ministn' 
que  le  Ministre  contre  lui;  an  moyen  de  quoi  ma  comramission  est 


t>OOUllSNTS  MR  L^NI>«ftrill«   Et  LRS   HAKurACTUtlfi»   KH   UttOUSm.       743 

de  chercher  dans  ce  pais  cy  d'autre  terre  équivalente  dont  M.  Berlin 
avait  quelques  indications.  Je  suis  occupé  présentement  à  cette 
recherche,  nous  en  avons  déjàtrouvé  plusieurs  presque  aussi  belles, 
mais  pour  être  assurés  au  juste  de  leur  qualité,  il  faut  que  nous  en 
fassions  les  essais  et  pour  cela  nous  avons  établi  icy  une  sorte  de 
petit  laboratoire,  malgré  vent  et  marée,  car  nous  avons  eu  toutes 
les  difficultés  imaginables  à  surmonter  pour  cela  dans  ce  pais  où  Ton 
connaît  moins  la  chymie  et  la  porcelaine  que  Talcoran.  Mon  compa- 
gnon Millot  m'a  été  d'une  ressource  infinie  pour  cela.  C'est  un 
homme  plein  d'expédients,  d'industrie,  d'adresse  et  d'activité.  C'est 
un  homme  admirable  dans  une  pareille  occasion,  et  je  suis  enchanté 
de  l'avoir  avec  moi;  il  fait  avec  ses  doigts  et  son  couteau  des  creu- 
sets et  des  étuis  mieux  que  bien  d'autres  ne  les  feraient  sur  le 
tour;  voici  qu'il  va  entreprendre  de  faire  des  tasses  de  porcelaine 
avec  les  mêmes  outils  et  je  crois  qu'il  y  réussira.  Bref,  il  me  paraît, 
d'après  les  essais  en  plaquette,  que  nous  avons  déjà  un  pis  aller  en 
terre  qui  approche  de  bien  près  du  Villaris,  car  réellement  ce  pais 
cy  est  abondant  en  terres  très  belles  et  des  plus  singulières.  Dès 
que  nous  serons  décidés  sur  la  meilleure,  nous  tournerons  nos 
pasvers  Paris 

Magquer. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n*"  9135), 


PJ-.  Macquer  à  son  frère, 

A  Dai,  ce  4  octobre  t7^8 


Nous  avons  eu  le  bonheur  de  trouver  une  terre  à  porcelaine  qui 
en  vérité  me  parait  valoir  celle  Villaris.  C'est  une  des  plus  singuliè- 
res et  des  plus  originales  terres  que  j'aye  encore  vues  ;  elle  est  en 
gâteaux  et  galettes  de  différentes  grandeurs  qui  sont  entièrement 
enveloppés  d'une  croûte  de  terre  jaune  rouge  et  dont  les  angles 
sont  arrondis  comme  ceux  des  cailloux  roulés  ou  galets  de  la  mer.  En 
voyant  ces  g&teaux,  on  n'imaginerait  jamais  que  c'est  une  belle  terre 
blanche,  on  les  prendrait  d'autant  plus  pour  de  simples  pierres 
jaunes  qu'ils  ont  exactement  la  dureté  de  la  pierre,  il  faut  un  mar- 
teau pour  les  casser  ;  on  voit  alors  que  leur  intérieur  est  une 
matière  très  belle  et  très  blanche^  mais  cette  matière  ne  se  délaye 
pas  dans  l'eau  comme  toutes  les  terres,  on  l'y  laisserait  pendant 
huit  jours  qu'elle  resterait  toujours  aussi  dure.  Il  faut  nécessaire- 
ment la  broyer,  après  cela  aussi  elle  devient  aussi  liante  que  les 
meilleures  terres  et  ce  qu'il  y  a  de  mieux  c'est  qu'elle  fait  une  fort 


V4i  SOClifcTB  AtlCHiotOGitilUE  tX  àlStO^IQtB  DO  ÙÉOÛStlr. 

belle  porcelaine  qaand  elle  est  bien  choisie  et  bien  ëplochèe. 

Cela  me  donne  une  grande  satisfaction,  car  il  aurait  été  assez 

désagréable  de  revenir  sans  avoir  rien  trouvé 

Macquer. 
{Bibliothèque  nationale^  fonds  français,  n""  9135.) 


P.'J.  Macquer  au  ministre  Bertin. 

A  Dax,  ce  A  octobre  1768. 

Monsieur, 

Nous  voici  revenus  des  tournées  que  nous  venons  de  faire  pour 
la  recherche  des  terres  dans  le  territoire  de  cette  ville.  Vous  ver- 
res par  le  mémoire  que  j'ai  Thonneur  de  vous  envoyer  que  nous 
avons  non  seulement  visité  les  endroits  où  avait  été  M.  Gleise  ei 
ceux  qu'il  avait  indiqués,  mais  encore  plusieurs  autres  et  que  nous 
avons  fait  fouiller  autant  que  nous  l'avons  cru  nécessaire  dans  tous 
ceux  qui  nous  ont  paru  mériter  cette  attention.  Vous  verres  aussi 
par  ce  môme  mémoire  que  celte  recherche  nous  a  procuré  ont» 
nouvelle  terre  à  porcelaine  supérieure  à  toutes  celles  dont  il  était 
venu  des  échantillons  d'icy  à  Paris  et  qui  se  trouve  en  quantile 
suffisante  pour  le  service  de  la  manufacture. 

Nous  attendons,  pour  nous  décider  entièrement  sur  le  mérite  de 
cette  nouvelle  terre,  que  nous  ayons  constaté  par  des  épreuves  en 
grand  la  bonté  de  la  porcelaine  qui  en  résultera,  car  pour  ce  qui 
est  de  la  blancheur,  elle  approche  si  fort  de  la  belle  (terre)  de 
Villaris  lorsqu'elle  est  bien  choisie  et  bien  épluchée  que  pour  moi 
je  ny  vois  point  de  différence  sensible. 

Je  crois  donc  que  nous  avons  rempli  vos  instructions,  Mod- 

sieur,  autant  qu'il  était  en  nous  et  même  avec  bonheur  et  que 

notre  voyage  n'aura  pas  été  infructueux  pour  la  manufactore. 

Comme  j*ai  lieu  de  croire  que  nous  avons  épuisé  ce  territoire  par 

nos  recherches,  je  ne  vois  rien  de  mieux  à  faire  pour  le  présent 

que  de  nous  en  retourner  à  Bordeaux  avec  notre  butin  où  nou^ 

ferons  encore  quelques  tentatives  pour  découvrir  s'il  est  possible 

l'endroit  où  le  sieur  Villaris  a  trouvé  sa  terre,  après  quoi  nous 

reprendrons  la  route  de  Paris 

Macquer. 
(Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  no  9135), 


P.'J.  Macquer  à  son  frère. 

Bordea::x,  li  octobre  1768. 

> 

Le  lendemain  de  mon  arrivée  icy,  j'ai  été  voir  M.  l'archevêque 


DOCUNRNTS  SUR  l'INDUSTRIK   ET  LES   NANUFACTORES   EN   LIMOUSIN.       743 

de  Bordeaux.  Je  Tai  trouvé  fort  inquiet  de  savoir  si  nous  avions 
trouvé  quelque  belle  terre;  pour  le  contenter,  je  lui  ai  fait  voir 
celle  dont  je  vous  ai  parlé  avec  les  essais  que  nous  en  avions 
fait  et  ceux  de  comparaison  avec  la  terre  de  Villaris.  Il  en  a  été 
très  étonné,  il  ne  pouvait  en  croire  ses  yeux.  Le  sieur  Villaris  est 
entré  lui-même  comme  tout  cela  était  étalé  sur  la  table;  il  Ta  exa- 
miné avec  la  même  attention  et  la  même  surprise  que  M.  Tarche- 
véque.  11  me  paraissait  d'autant  plus  fâché  d'avoir  manqué  son 
affaire  que  M.  Bertin,  auquel  M.  l'archevêque  avait  écrit,  à  ce  que 
j'ai  lieu  de  présumer,  aussitôt  après  mon  départ  de  Bordeaux, 
pour  tâcher  de  le  raccomoder,  ne  lui  avait  fait  aucune  réponse  ; 
mais  une  circonstance  assez  singulière,  c'est  que  pendant  que  nous 
étions  là  tons  les  trois  à  nous  regarder  sans  rien  dire,  la  réponse 
du  ministre  est  arrivée  et  elle  contenait  que  puisque  le  sieur  Villa- 
ris se  repentait  de  ses  mauvais  procédés,  il  consentait  à  tenir  ses 
premiers  engagements  aux  mêmes  conditions.  La  joie  a  succédé  en 
un  moment  à  l'inquiétude  et  à  la  tristesse.  On  voulait  sur  le  champ 
me  déclarer  Tendroit  où  est  la  terre;  mais  comme  il  s'agit  d'enga- 
ger par  là  la  manufacture  à  une  dépense  de  quinze  ou  \ingt  mille 
francs,  dont  peut-être  elle  pourra  se  passer  à  cause  de  notre  dé- 
couverte, j'ai  cru  que  la  prudence  exigeait  d'attendre  que  j'eusse 
reçu  moi-même  une  lettre  de  M.  Bertin,  que  j'attends  d'un  jour  à 
l'autre,  en  réponse  à  celle  où  je  l'informais  de  la  découverte  de 
noire  nouvelle  terre. 

Ainsi,  cher  frère,  voilà  un  incident  qui  probablement  retardera 
un  peu  mon  retour.  J'en  suis  d'autant  plus  fâché  que  comme 
M.  Villaris  espère  beaucoup  depuis  cette  lettre  que  son  affaire  va 
se  terminer,  il  ne  se  tient  plus  si  fort  sur  la  réserve  et  qu'il  m'a  fait 
entendre  que  je  m'en  retournerai  par  un  autre  chemin.  J'ai  lieu  de 
présumer  que  ce  sera  par  le  Périgord  et  par  le  Limosin. 

Je  suis,  cher  ami  et  frère,  votre  très  humble  et  très  obéissant 
serviteur  et  frère. 

Magquer 
f  Bibliothèque  nationaley  fonds  français,  n*  9135). 


P.'J.  Macquer  à  son  frère. 

Limoges,  i  novembre  f  768. 

Voici  pour  le  coup,  très  cher  frère  et  ami,  la  fin  de  mes  opéra- 
tions et  de  mon  voyage;  il  est  bien  temps  que  tout  cela  finisse,  car 
sans  compter  le  désir  que  j'ay  de  me  retrouver  avec  vous,  les 
pluies  continuelles  et  tous  les  tristes  avant-çoureurs  4e  l'hiver  qui 


7-16  SOCliTÉ  ABCBiOL(iâiai)R   RT   BIS90»li^|  MJ  LUIOCISUE» 

arrive  à  vue  d*œil  el  qui  sont  de  si  mauvais  eompagaoos  de  vovmge, 
me  font  h&ter  ma  marche  et  courir  graud  traio  pour  trouTer  un  aiKi 
sous  notre  toit  commun.  J'ai  eu  tous  les  contre-tems  et  tous  tes 
désagrémcns  possibles  tant  de  la  part  du  ciel  que  de  celle  de  la 
terre,  c'est-à-dire  des  chemins,  pour  constater  le  kaolin  de  M.  Til- 
laris,  qui  se  trouve  beau,  bien  conditionné  et  bien  abondant,  ce 
qui  me  fait  plaisir,  car  ce  M.  Villaris,  quoique  singulier^  est  réell^Miit 
un  fort  aimable  et  un  fort  galant  homme.  D'ailleurs,  il  est  toiyottrs 
agréable  qu'une  commission  dont  on  est  chargé  se  teroiine  heu- 
reusement. 

Je  suis  arrivé  d'hier  icy  et  j'y  passe  anjourd'hui  la  journée  petr 
faire  charger  sur  {sic)  un  roulier  environ  800  livres  de  la  nouvelle 
terre  qui  est  d'une  blancheur  el  d  une  beauté  à  se  mettre  à 
genoux  devant  et  je  compte  partir  demain  pour  m'en  retooraer  i 
Paris. 

Je  suis  votre  très  affectionné  serviteur,  ami  et  frère. 

Macquer. 
fBMiaikèque  uatianal»^  fonds  français,  n""  9i  Sa). 


Villaris  à  Macquer. 

BordeaDK  3  décembre  I76S. 


Monsieur  le  Minisire  et  vous,  Monsieur,  me  faites  espérer  que 
i'auray  bienlost  des  marques  de  sa  bienveillance  et  que  je  recevrai 
incessamment  huit  mille  livres,  que  les  sept  mille  restantes  me 
seront  payées  dans  un  an.  Permettez  que  je  prenne  la  liberté  de 
vous  prier  de  représenter  à  Monsieur  le  Ministre  qu'il  avait  eu  la 
bonté  de  me  promettre  cette  dernière  somme  dans  tes  six  premiers 
mois  de  l'année  prochaine.  J'avais  espéré  que  par  Taveu  sincère 
de  la  dépense  et  de  la  perte  que  m'a  occasionnées  cette  découverte 
(comme  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  en  canvaincpe}^  qui  eibcède  iafini* 
ment  la  récompense,  il  n'aurait  non  seulement  pas  prolongé  le 
payement,  mais  l'aurait  accéléré.  Cela  me  fait  une  si  grande  diffé- 
rence que  si  j'étais  à  portée  de  la  représenter  à  M.  le  Ministre, 
j'aurais  tout  lieu  d*espér«f  non-«eQlement  l'exécution  de  sa  pre- 
mière promesse,  mais  encore  qu'il  aurait  eu  la  bonté  de  me  faire 
compter  tout  à  la  fois  les  18,000  livres.... 

J'ai  l'honneur  d'estre  très  parfaitement,  Honneur,  votre  très 
humble  et  très  obéissant  serviteur. 

ViLLAAfS. 

fmblioihègue  nationaUy  fonds  françaity  W"  9i3ô). 


DOCONBNTS  SBR  L*INDUSTR1B   ET  LES  HANUPACTUAeS  BN   LIMOUSIN.       747 

Damet  à  ViUaris. 

SaÎDl-Yrieix,  le  3  avril  1769. 

Monsieur  et  cher  ami, 

Je  ne  scais  si  vous  avez  reçu  les  deux  lettres  que  j'ai  eu  l'hon- 
neur de  vous  écrire  pour  vous  donner  avis  qu'il  y  a  trois  semaines 
qu'il  arriva  un  jeune  homme  de  Paris  en  poste  qui  fit  ramasser  un 
sac  de  ia  terre  en  question  et  la  mit  gur  des  chevaux  de  poste 
pour  remmener  à  Paris.  Dix  jours  après,  il  arriva  deux  Messieurs, 
aussy  en  poste,  dans  une  voilure,  avec  le  jeune  homme  dont  je 
vous  ai  parlé,  qui  était  leur  valet  de  chambre,  pour  s'emparer  du 
terrein  et  faire  marché  avec  la  dame  à  qui  appartenait  le  terrein 
de  la  terre  en  question.  Je  compris  qu'ils  voulaient  nous  jouer  le 
tour.  Je  fis  si  bien  que  je  fis  rompre  le  marché  à  la  dame,  lui  fai- 
sant entendre  qu'elle  ferait  une  grande  faute,  qu'elle  tirerai!  meil- 
leur parti  de  cette  terre  si  elle  voulait  s'en  rapporter  à  moi  et  que, 
d'ailleurs,  elle  désobligerait  M.  Bertin,  le  ministre,  qui»  voulait 
rendre  service  à  Monsieur  son  fils,  qui  était  au  service,  et  de  pa- 
tienter quelque  temps  que  certainement  je  lui  en  ferais  tirer  parti  ; 
de  plus,  qu'elle  ne  devait  pas  oublier  que  M.  le  Ministre  avait 
envoyé  des  commissaires  sur  les  lieux  pour  examiner  cette  terre. 
Toutes  ces  raisons  firent  qu'elle  n'a  rien  voulu  arrêter  avec  eux  ; 
ils  sont  repartis  sans  pouvoir  réussir.  Je  les  ai  questionnés  beau- 
coup; ils  me  dirent  que  cette  terre  était  pour  faire  de  la  porcelaine 
et  que  de  plus  ils  en  avaient  fait  une  tasse  qu'ils  avaient  présentée 
au  Roy  qui  l'avait  approuvée.  Ils  en  achetèrent  d'un  particulier 
dont  je  vous  ai  déjà  parlé,  qui  a  son  terrein  de  l'autre  côté  du 
chemin  qui  va  de  Saint- Yrieix  à  Limoges,  pour  faire  conduire  par 
des  rouliers  à  Paris  pour  en  faire,  disaient-ils,  un  service  de  por- 
celaine pour  le  Roy.  J'ai  aussi  empêché  ce  particulier  de  faire  au- 
cun marché  avec  eux,  il  s'est  contenté  de  leur  en  vendre  quelques 
sacs.  Je  crois  que  ce  n'est  point  de  porcelaine  qu'ils  veulent  en 
faire,  mais  bien  ce  que  vous  savez.  Ils  me  parlèrent  beaucoup  de 
vous  et  me  dirent  qu'ils  vous  connaissaient  et  que  vous  étiez  un 
élève  de  Rouelle.  Ils  me  parlèrent  aussi  d'un  médecin  de  Parme  et 
de  Plaisance  qui  était  venu  avec  vous  et  me  dirent  qu'il  avait  fait 
tout  ce  qu'il  avait  pu  pour  tirer  parti  de  cette  terre,  mais  qu'il 
n'avait  pas  pu  réussir  et  que  c'était  lui  qui  la  leur  avait!  indiquée. 
Ils  me  sollicitèrent  beaucoup  pour  engager  la  dame  Du  Montet  à 
leur  vendre  la  permission  de  creuser  pendant  vingt  années.  Je  leur 
répondis  franchement  qu'ils  ne  réussiraient  pas,  qu'elle  n'était  pas 
destinée  pour  eux,  que  le  terrein  était  déjà  arrêté,  qu'inutilement 
ils  avaient  feit  le  voyage. 


7i8  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOOIQUB  F.T  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

Il  s'agit  donc  de  prendre  vos  mesures  là-dessus.  Car  Madame 
Du  Montet  va  écrire  par  le  courrier  à  M.  le  Ministre  pour  deman- 
der la  permission  de  vendre  celte  terre  au  plus  offrant  et  dernier 
enohërisseur.  Le  dessein  de  ces  gens-là  était  de  faire  conduire  la 
terre  à  Limoges  dans  un  magazin  pour  ensuite  la  faire  conduire 
par  des  rouliers  à  Paris.  Je  n'ai  jamais  pu  savoir  quel  était  leur 
nom;  quand  je  le  leur  demandai,  ils  me  dirent  qu'il  était  inutile  de 
les  interpeller  puisque  je  ne  voulais  pas  leur  rendre  service  ;  ils 
sont  frères,  d'une  assez  grande  taille,  ils  ont  le  visage  long,  le  nez 
aquilin,  cheveux  et  sourcils  noirs,  mais  le  cadet  a  une  trace  à  la 
face  sous  la  mâchoire  inférieure,  du  côté  droit,  faisant  grande 
figure,  galonés  et  un  très  joli  équipage.  Voyez  si  vous  les  connais- 
sez par  le  signalement  que  je  vous  en  fais  et  soyez  persuadé  que 
je  ne  négligerai  rien  pour  vous  favoriser  dans  votre  entreprise,  mais 
faites  des  démarches  de  votre  côté.  Mandez  moi  le  langage  qu'il 
faut  que  je  tienne  à  la  dame  pour  empêcher  la  vente,  car  si  H.  le 
Ministre  la  demande  pour  quelqu'une  de  ses  créatures,  il  réussira. 
Faites  donc  agir  auprès  de  lui.  En  attendant  de  vos  nouvelles,  j'ai 
l'honneur  de  me  dire,  avec  attachement.  Monsieur  et  cher  ami,  etc. 

Darrst. 

(Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n^  9i  35). 


Uarchevêque  de  Bordeaux  à  Macquer. 

Bordeaux,  8  avril  1769. 

Le  sieur  Villaris  vient  de  recevoir  une  lettre  du  sieur  Damet, 
chirurgien  de  St.-lrieix,  avec  lequel  il  avait  fait  connaissance  lors- 
qu'il fut  sur  les  lieux  pour  chercher  les  30  livres  de  terre  que  je 
vous  rerois  à  Paris  et  pour  s'instruire  du  possesseur  du  terrcin. 
Pour  dépayser  le  sieur  Damet,  il  lui  avait  fait  confidence  qu'en 
qualité  d'apothicaire  il  faisait  de  l'eau  forte  et  que  cette  terre  estait 
très  propre  à  cela  et  qu'il  devait  obtenir  un  privilège  de  M.  Bertin 
pour  faire  de  l'eau  forte.  De  sorte  que  ce  chirurgien  vous  a  re^rdé 
comme  un  commissaire  du  Roy  pour  examiner  la  nature  de  cette 
terre  dans  rintérest  du  sieur  Villaris.  C'est  pourquoi  il  lui  donne 
avis,  par  une  lettre  du  3  avril,  qu'il  est  arrivé  à  St.-Iriey,  trois  se- 
maines auparavant,  un  jeune  homme,  etc.  (j'aime  mieux  vous  en- 
voyer copie  de  la  lettre  que  le  sieur  Villaris  a  reçue.  Il  me  faudrait 
trop  de  temps  pour  vous  transcrire  icy  tout  ce  détail).  J'écris  au- 
jourd'hui, en  conséquence,  à  M.  Bertin,  je  l'exhorte  à  finir  tout  de 
suite  l'achat  de  ce  terrain  s'il  ne  veut  qu'il  lui  soit  eniçvé. 


DOGUMBIfTS  SUR   l'iNDUSTRIB   ST   LES   MANUFACTURES   EN   LIMOUSIN.       749 

Il  parait  que  c'est  votre  médecin  de  Parme  (1)  qui  a  divulgué  le 
secret  à  Paris  et  qui  vous  accompagna  et  qui  peul-estre  Ta  vendu  à 
M.  Lauraguais,  car  je  me  douterais  que  ce  pourrait  bien  estre  luy 
qui  est  allé  à  grand  trall  sur  les  lieux... 

Soyez  persuadé  de  rattachement  avec  lequel  j'ai  l'honneur 
d'estre,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

f  L'Archevêque  de  Bordeaux. 
(Bibliothèque  nationale  y  fonds  français  ^  n**  91 35.) 


Damet  à  Villaris. 

Saint- Yrieix,  le  10  avril  ^769. 

Monsieur  et  cher  ami, 

J'ai  reçu  votre  lettre  on  date  du  8  courant  et  j'y  réponds  dans  ce 
moment.  Les  deux  Messieurs  dont  je  vous  avais  parlé  sont  reve- 
nus. Ils  ont  fait  faire  400  sacs  de  toile  d'étoupe  pour  voiturer  de  la 
terre  à  Paris.  Le  particulier  qui  possède  le  terrain  de  l'autre  côté 
du  chemin  de  Limoges  leur  en  a  vendu  une  quantité  étonnante  à 
1 1.  iO  s.  la  charretée.  Us  ont  fait  tout  ce  qu'ils  ont  pu  pour  avoir 
celle  de  M"**  de  Montet,  qu'ils  ont  trouvée  meilleure,  même  jusqu'à 
demander  des  ordres  à  l'intendant  qui  les  leur  a  refusés  sur  une 
lettre  que  je  lui  écrivis  à  ce  sujet.  M"*  de  Montet,  qui  me  doit  avoir 
de  grandes  obligations  pour  un  service  important  que  je  lui  ai 
rendu,  ainsi  que  son  fils,  m'ont  promis  que  personne  ne  l'aurait 
que  vous;  et  même  je  lui  ai  (je  l'ai)  si  bien  persuadée,  qu'elle  ne 
vous  coûtera  pas  si  cher  que  ce  que  vous  aviez  pensé.  Ces  Mes- 
sieurs s'appellent  Messieurs  Consfor,  anciens  écuyers  de  Madame 
la  Dauphine.  Ils  emportèrent  le  matin  30  milliers  de  cette  terre 
pour  Limoges,  pour  la  transférer  à  Paris.  Us  m'ont  assuré  que 
c'est  pour  faire  de  la  porcelaine,  que  les  autres  terres  dont  ils  se 
servaient  avaient  besoin  d'être  dissoutes  dans  l'eau-forte  pour  en 
séparer  les  matières  qui  n'étaient  point  vitrifiables  d'avec  les  coirs 
(quartz)  et  le  miqua.  Us  sont  partis  pour  Paris  en  poste  et  ont  dit 
qu'ils  reviendraient  dans  peu.  Us  ont  passé  double  avec  Bordas,  le 
particulier  en  question.  Us  ont  pris  de  grandes  qualités  dans  leurs 
doubles,  ils  sont  riches  et  possèdent  beaucoup  de  terres  en  justice, 
à  ce  qu'il  parait,  par  leurs  adresses.  Us  ont  chargé  Taubergiste  de 
Saint-Pierre  du  fauxbourg  où  est  la  terre  de  (la)  leur  faire  con- 

(I)  M.  Camati,  médecin  de  la  cour  de  Parme,  que  Macquer  rencontra 
en  Gascogne  d'abord,  à  Bordeaux  ensuite,  et  qui,  à  force  d'insister,  finit 
par  se  faire  admettre  en  la  compagnie  de  celui-ci 


7A&  SOCIKTR  ARCnÉOLOGIQBR  ET   B1.ST0IIIQCK   DO  UHOOSIS. 

duire.  Ils  se  sont  engagés  de  faire  crenser  la  terre,  de  recmiiUerle 
pays,  moyennant  1 1. 10  s.  la  charretée,  ce  qui  fait  dix  qQmtaox.  Ib 
dMnent  15  s.  par  jour  aux  ourriers.  Je  n'ai  pas  su  ce  qu*il  leur  es 
coule  de  port.  Ils  prétendent  faire  un  magasin  à  Limoges,  pour 
porifler  la  terre,  afin  qu*il  leur  en  coûte  moins  de  port. 

Dabiiet. 

f Bibhathèque  nationale,  fonds  français^  n"  9155). 


L'archevêque  de  Bordeaux  à  M.  Macquer 

A  Bordeaux,  ce  45  avril  4709. 

Vous  verrez,  Monsieur,  par  la  lettre  que  le  sieur  Villaris  a  rcçoe 
de  son  ami,  chirurgien  à  St-Iriey,  que  les  personnes  qui  onlsca 
nostre  découverle  sont  bien  plus  alertes  qu'on  ne  Test  da  costé  de 
la  manufacture  de  Sèvres  et  qu'ils  n'épargaent  point  la  dépensa 
puisqu'ils  ont  enlevé,  chez  un  voisin  de  Madame  du  Monté, 
vingt  milliers  de  celte  matière  poar  les  faire  venir  par  terre  â 
Paris.  Je  vous  avoue  que  je  crois  que  la  manufacture  de  Sèvres 
aura  à  se  reprocher  de  se  trouver  prévenue  dans  la  fabricatios 
d'une  bonne  porcelaine,  tandis  qu'il  y  a  deux  ans  qae  si  on  avait 
voulu  on  en  aurait  travaillé  (1).  Ce  s^^a  sûrement  un  sujet  de  re- 
proche de  la  part  de  Sa  Majesté  si  ces  particuliers  viennent  à  loy 
présenter  les  premiers  ouvrages  qui  en  auront  esté  faits  et  comptez 
que  si  ces  particuliers  trouvent  le  moïen  de  réussir,  toute  nostre 
belle  porcelaine  ancienne  tombera,  car  je  vois  que  les  bell^'s 
couleurs,  les  beaux  fonds  ne  viennent  pas  aussi  bien  sur  la  bonae 
porcelaine  que  sur  celle  qui  se  fait  à  Sèvres.  Il  en  sera  de  cette 
porcelaine  comme  des  marbres  qui  se  fonX  en  stuc.  Peut-estre  en 
tait-on  des  ouvrages  qui  ont  plus  d'éclat  que  le  marbre,  le  jaspe  «^ 

(1)  Après  les  actives  recherches  faites  pour  découvûr  le  kaolio,  ea  se 
s'expliquerait  pas  les  lenteurs  mises  à  s'assurer  M  possessioa  do  terraîo 
dans  lequel  on  Tavait  enfin  trouvé.  11  faui  savoir  que,  d'une  pari,  U  Gibri- 
cation  de  ta  porcelaioe  dure  était  considérée  à  la  Manufacture  comme  iâ 
ruine  des  traditions  de  Sèvres,  qui  jusqu'alors  n'avait  produit  que  de  la 
porcelaine  tendre;  aussi  M.  Boilcau,  directeur,  et  M.  Harroet,  contrôleor, 
montrèrenl-iis  à  Tégard  de  celte  innovation  plus  que  de  la  froidenr.  £a 
second  lieu,  les  essais  d*applicalion  des  couleurs  ne  donnèrent  pas  tout 
de  suite  des  résultats  satisfaisants  et  cet  insuccès  servit  de  prétexte  9n\ 
r<^sistances  des  fonctionnaires  de  la  Manulaclure.  Il  ne  fallut  rien  moias 
que  la  réussite  des  expériences  faites  par  des  particuliers  pour  éoHMivoir 
le  personnel  de  Sèvres  et  déterminer  l'acquisition  des  gissmenls  de 
k^oliq . 


nocuMiNTs  suB  l'ctidustrir  rr  u»  «ANiir^cmeKs  rn  livousin.     754 

le  porphire,  mais  eela  n'empêche  pas  qu'on  ne  donne  la  préfé- 
rence à  ]a  nature  (plutôt)  qn'à  Tart. 

Je  sais  bien  que  pour  moy  je  serais  de  cet  avis  et  que  je  préfé- 
rerais de  La  porcelaine  simplement  blanche  et  bien  exécutée  aux 
phis  beaux  ouTrages  de  fritte  (1). 

J'écris  encore  aujourdliuy  à  M.  Berlin  et  je  lui  envoyé  un  double 
de  la  lettre  que  je  vous  adresse  dans  cellecy.  Je  l'exhorte  à  donner 
tout  de  suite  des  ordres  au  sieur  Villaris  d'achepter  le  terrain.  G'esl 
le  moyen  de  finir  cette  affaire  tout  de  suite  et  de^  l'avoir  an  prix 
plus  bas.  Je  lai  adjo«te  que  vous  lut  certifieriez  la  droiture  de 
cœur  du  sieur  Villaris,  qu'il  pouvoit  y  mettre  confiance  et  qu'il 
estoit  incapable  de  rien  faire  qui  fut  contre  l'honnette  honnne. 

Soyez  persuadé,  Monsieur,  des  sentiments  avec  lesquels  j'ay 
l'honneur  d'estre  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

f  L'archevêque  de  bordeaux. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n'9i35,) 


L'archevêque  de  Bordeaux  à  M.  Maoqmr. 

Bordeaux^  %  may  1769. 

VoQ&  savez  sans  doute  que  M.  Bertia  m'a  marqué  de  faire  achep- 
ter  le  terrain  de  Madame  Du  Monté  (2)  et  même  celuy  du  particulier 
qui  a  vendu  de  la  terre  aux  deux  particuliers  de  Paris.  En  consé- 
quence, le  sieur  Villaris  partit  d'icy  le  dimanche  33  avril  ayant 
avec  luy  3,500 1.  et  ordre  de  ma  part,  au  cas  qu'il  eût  besoin  de 
davantage,  ae  m'écrire  et  que  lui  en? oyerois  des  inscriptions  sur 
le  receveur  des  tailles  de  Périgueux. 

M.  Bertin  demandait  20  barriques  de  la  terre  de  M*"*  du  Monté 
et  20  barriques  de  celle  du  particulier  pour  estre  portée  à  Bor- 
deaux et  de  là  à  Rouen  et  à  Tours,  mais  comme  M.  Bertin  a  vu  par 
une  lettre  du  sieur  Darnet,  chirurgien  à  Saint-Hyrieis  que  les  deux 

(1)  Porcelaine  ou  verrerie  «paque. 

(9)  Par  acie  da  5  mai  1709,  passé  devant  M®  Voisin,  notaire,  Villaris 
acquit  de  daneda  Monietet  de  son  fils,  demeurant  à  Saiot-Yrieix,  moyen- 
nant le  prix  de  3,000  livres,  le  droit  a  de  faire  creuser  la  levrc  blanche  qui 
se  trouve  dans  la  terre  appelée  du  cimciière,  du  côté  de  la  maison,  dans 
le  haut  dti  pré,  jusqu*à  Ja  première  rigole,  dans  tout  le  reclos  des  bœufs 
et  le  morceau  de  terre  qui  se  trouve  dans  le  reclos  »,  avec  permission 
d'exploiter  tant  qu'il  y  aura  de  la  lerre,  sauf  à  recombler  les  fosses. 

Le  37  du  même  mois,  Villaris  fit,  devant  le  même  notaire,  déclaration 
que  Tacquisition  réauUaot  du  contrat  du  &  mai  était  panr  le  compte  du  rpj 
et  de  sii  manufacture  de  Sèvres, 


752  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUB   DO    LIMOUSIN. 

particuliers  de  Paris  avaient  emporté  30  milliers  de  cette  matière 
par  les  rouliers  de  Limoges  et  qu'il  craint  d'estre  prévenu  dans  la 
fabrication  de  la  nouvelle  porcelaine  par  les  particuliers  qui  loi 
(s'en)  attribueraient  la  découverte,  il  m'a  marqué  d'ordonner  à 
Villaris  d'envoyer  ces  40  barriques  par  les  rouliers  au  moindre 
tems  qu'il  pourrait.  En  conséquence,  j'écrivis  au  sieur  Villari5, 
mais  malheureusement,  comme  il  n'y  a  qu'un  courrier  par  semaine 
qui  parte  pour  Limoges,  le  courrier  estant  parti  à  S  heures  da 
matin,  et  ma  lettre  arriva  à  6  heures,  ainsi  je  me  décidai  sur  le 
champ  à  faire  partir  un  valet  de  chambre  pour  attraper  le  courrier 
en  chemin  et  lui  faire  remettre  ma  lettre  ou  aller  à  St-Hîryes  join- 
dre M.  Villaris,  ou  aller  jusqu'à  Limoges  au  cas  qu  il  fût  parti  pour 
cette  ville.  Mon  valet  de  chambre  ne  put  partir  que  vers  les  9  heu- 
res à  cause  de  la  messe  et  de  la  permission  qu'il  faut  avoir  pour 
qu'à  la  poste  on  donne  des  chevaux.  Il  rencontra  le  courrier  à 
neuf  passes  de  Bordeaux,  dans  le  Périgord,  et  luy  remit  ma  lettre 
et  la  recommanda  au  courrier,  qui  promit  de  la  mettre  à  la  poste  à 
Limoges,  où  M.  Villaris  l'ira  retirer.  Je  ne  pourrai  avoir  de  lettre 
du  sieur  Villaris  que  jeudi  prochain  et  je  compte  que  H.  Bertm 
aura  des  nouvelles  aussitôt  que  moy. 

Il  ne  parait  pas  que  ces  deux  particuliers  ont  mis  de  Taction 
dans  celle  affaire  et  que  la  nouvelle  porcelaine  paraîtra  plus  tét 
qu'elle  n'aurait  paru.  Ainsi,  vous  ne  manquerez  pas  de  besogne 
pour  faire  les  nouvelles  recherches  tant  pour  la  cuisson  de  cette 
porcelaine  que  pour  les  couleurs.  Il  faudra  voir  si  vous  ne  trouve- 
rez pas  les  moyens  d'allier  les  couleurs  avec  des  verres  plus  durs. 

J'espère  que  vous  me  donnerez  des  nouvelles  de  la  réussite. 
Soyez  persuadé.  Monsieur,  des  sentiments  avec  lesquels  j'ay  l'hon- 
neur d'estre  votre  1res  humble  et  très  dévoué  serviteur. 

f  L'ARCHEVÊQUE   DE   BORDEAUX. 

fBibliothèqtie  nationale,  fonds  français^  n*»  9135). 


Monsieur, 


Villaris  à  Macquer. 

A  Bordeaux,  le  29  juillet  1769. 


Si  je  ne  n'ai  pas  répondu  en  son  temps  à  la  lettre  que  vous  m  avez 
fait  l'honneur  de  m'écrire,  c'est  qu'elle  ne  m'est  parvenue  que  fort 
tard  à  Saint-Yrieix  (où  je  ne  suis  de  retour  que  depuis  le  23  de  ce 
mois),  et  comme  j'avais  reçu  des  ordres  de  H.  le  Ministre  de  faire 
voiturer  la  terre  qui  me  restait  par  Montignac,  les  différents  voyagea 
que  j'ai  esté  obligé  de  faire  soit  pour  me  procurer  des  fAlailies  et 


bOCUllBlh'S  SUR   L^NDVâTllIR   Kt   LRS  ÉANUl^ACtÛRRà  feS  tlttOUSlI^.       7$d 

les  moyens  de  la  faire  voiturer,  je  n'ai  plas  esté  apportée  (à  portée) 
de  la  poste. 

Je  suis  bien  flatté  d'avoir  rempli  les  attentes  de  M.  le  Ministre. 
J'ai  rhonneur  de  vous  assurer  que  ce  n'est  pas  sans  beaucoup  de 
peine;  il  est  sûr  que  je  ne  peux  sans  abandonner  la  pharmacie  faire 
de  si  longues  absences,  car  il  ne  m'est  pas  possible  de  réparer  pour 
cette  année  le  vide  que  cette  opération  m'a  occasionné  dans  mon 
état.  Je  ne  crois  pas  que  M.  le  Ministre  puisse  mieux  placer  sa  con* 
fiance  pour  cette  exploitation  qu'en  M.  Darnet,  mais  je  crois  qu'il 
sera  essentiel  de  fixer  la  manière  d'opérer  et  comme  je  suis  dans 
l'intention  d'aller  à  Paris,  j'aurai  l'honneur  de  vous  faire  part  de 
mes  opérations  et  obsen^ations. 

M.  l'Archevêque  a  eu  la  bondé  de  me  communiquer  votre  lettre 
et  m'a  dit  que  M.  des  Mares  était  celuy  qui  disait  m 'avoir  indiqué 
le  Limousin  ou  TOvergne.  J'ai  l'honneur  de  vous  assurer  avec  toute 
vérité  que  M.  Desmares  ne  m'a  donné  nul  renseignement  ni  personne 
au  monde.  II  est  trop  jaloux  de  ses  talens,  il  désire  trop  d'estreseul 
utile  et,  je  crois,  trop  intéressé  à  cette  découverte  pour  que  je  doutte 
beaucoup  qu'il  eut  esté  trop  généreux  pour  faire  un  tel  aveu  à  qui 
que  ce  fut 

Je  suis  avec  toute  la  sincérité  possible, 
Monsieur, 
Vôtre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

ViLLARIS. 

{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n'^  9135), 


Monsieur, 


Parent  à  Macquer. 

Compiègne,  30  juillet  l769« 


Le  sieur  Darnet,  de  Saint-Yrieix,  se  plaint  de  ce  qu'il  a  seul  donné 
réveil  à  Villaris  du  kaolin;  que  cet  apoticaire  lui  avait  promis  de 
partager  avec  lui  le  prix  de  la  découverte  et  qu'aujourd'hui  il  se 
moque  de  lui.  Mais  voici  ce  que  cette  pique  a  produit.  Messieurs  Hoc- 
quarl  ont  découvert  à  Saint-Yrieix  du  petunzé.  M.  de  Lépine,  subdé- 
légué de  Limoges,  en  fit  voir  un  morceau  au  sieur  Darnet,  qui  fit  part 
au  sieur  Villaris  de  l'endroit  où  il  se  trouvait.  Darnet  aujourd'hui 
craint  que  Villaris  ne  se  iasse  également  honneur  de  sa  découverte 
pour  l'en  priver  et  il  en  envoyé  un  petit  sac  à  M.  Bertin.  Ce  ministre  va 
passer  deux  jours  à  Paris.  Je  charge  un  de  ses  gens  du  petit  sac  à 


votre  adresse  pour  le  remeUre  aa  suisse  de  Thotel,  chezqai  vous  foa* 
drez  bien  le  prendre.  Il  y  en  a,  dil  Darnel,  de  deux  qualités,  rune 
chargée  de  mica,  et  Tautre  qui  n^en  a  pas,  mais  toutes  deux  égale- 
ment fusibles.  Je  vous  prie  d'en  faire  part  à  M.  de  M ontigni  et  d^eu 
faire  promptemcnt  répreuve.  Quoiqu'il  soit  bien  difficile  de  faire 
plus  beau  que  les  pièces  d'épreuve  avec  le  silex,  si  néanmoins  ce 
petunzé  était  utile,  je  proposerais  à  H.  Berlin  d'en  écrire  au  sieor 
Darnet,  sinon  nous  réconduirions.  Voyez  y,  j'attendrai  de  vos  aoo- 
velles  incessamment,  afin  de  pouvoir  proposer  quelque  chose  à 
M.  Berlin  à  son  retour  de  Paris. 

Rien  n*égale  le  sincère  attachement  avec  lequel  j*ai  rhonneor 
d'être  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 


{Bibliothèque  nationale^  fonds  français,  n®  9155), 


Pareht. 


U Archevêque  de  Bordeaux  à  Macquer. 

Bordeaux,  9  aoosl  1 709. 


Monsieur, 


Il  est  très  faux,  Monsieur,  que  le  sieur  Darnet  se  plaigne  du  sieur 
Vilaris,  j'ay  encore  vu  ce  matin  une  lettre  qu'il  a  écrite  au  sieur 
Vilaris,  dans  laquelle  il  est  bien  éloigné  de  se  plaindre,  car  il  la  y 
rend  compte  qu'il  trouve  une  maison  à  louer  pour  servir  de  magasin 
à  renfermer  le  kaolin  pour  le  laisser  sécher  avant  de  le  mettre  dans 
les  barriques  ce  qui  diminuerait  considérablement  le  poids,  et  par 
conséquent  le  transport  en  sorte  que  une  barrique  qui  pèse  un  mil- 
lier ne  pèserait  que  six  cent  livres.  Il  prétend  qu'on  veut  affermer 
cette  maison  cent  livres,  mais  qu'il  espère  l'avoir  pour  soixante 
livres. 

Pour  ce  qui  est  de  la  connaissance  de  cette  terre  blanche  ou 
kaolin,  il  est  bien  sûr  qu'il  l'a  fait  connaître  au  sieur  Vilaris,  mais 
ne  connaissant  point  de  quel  usage  elle  pouvait  eslre  et  cela  il  y  a 
quatre  ans.  Il  lui  raconta  même  que  M.  Desmarets  estoit  venu  le 
voir  et  lui  avait  dit  que  c'estait  une  bonne  terre  à  foulon,  mais  que 
n'y  ayant  point  de  manufacture  de  draps  dans  le  pays,  on  ne  pouvaii 
en  faire  aucun  usage. 

M.  Villaris  a  chargé,  suivant  les  ordres  de  M.  Bertin,  le  sieur 
Darnet  de  veiller  à  la  conservation  du  terrain  et  il  le  fait  tout  exac- 
tement, car  ayant  trouvé  un  homme  qui  avait  esté  faire  des  ordures 
dans  l'excavation  qu'on  a  fait  pour  tirer  le  kaolin,  il  porta  plainte 
au  juge  qui  ordonna  à  cet  homme  d*aller  nettoyer  Tendroit  et  qui  a 


bOCUtilfit^TS  8ll«   L  INbÛSTRlE   Et  tF.S  «lAHVl^ACtUAKS  EK  LlJÉOUâlN.       755 

fait  dëfease,  sons  peina  de  prison,  d'aller  gaster  cet  endroil.  Ainsi, 
vous  voyez  que  les  propos  de  M.  Hocquart  sont  privez  de  tout  fon- 
dement, et  le  siear  Darnel  n'a  aucun  lieu  de  se  plaindre  du  sieur 
Villaris,  mais  je  crois  que  M.  Berlin  ferait  bien  de  donner  une  pelite 
pension  au  sieur  Darnet  pour  l'engager  à  avoir  soin  du  local  et  pour 
veiller  à  l'exploitation. 

f  L'Archevêque  de  Bordeaux. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n""  91 35), 


Monsieur, 


Millot  à  Macquer. 

A  SHint-Yfieix,  ce  19  août  1770. 


Je  croirais  manquer  si  je  ne  vous  donnais  avis  de  mes  opérations 
et  de  ce  que  j'ay  fait  à  Sàint-Yrieix  jusqu'à  présent.  J'ai  première- 
ment esté  en  arrivant  tout  droit  à  l'escavation,  là  où  j'ay  trouvé  le 
sieur  Darnet  qui  m'a  très  bien  reçu  et  a  voulu  que  je  fasse  ma  rési- 
dence chez  luy.  Le  lendemain  nous  avons  esté  voir  la  maison  dont 
il  avait  parlé  à  M.  Boileau  lorsqu'il  estait  à  Paris.  J'ai  trouvé  cette 
maison  en  très  mauvais  état,  il  est  vrai  qu'il  y  passe  un  ruisseau  au 
bas  du  jardin,  distant  de  la  maison  d'à  peu  près  10  à  12  toises 
et  toujours  en  montant.  L'on  n'aurait  pu  y  venir  sans  la  porter  à 
bras  ou  bien  faire  un  hangar  sur  le  ruisseau  qui  aurait  coulé  cher  et 
Ton  n'aurait  pu  y  faire  arriver  la  terre  qu'avec  des  hottes  ou  civières. 
Nous  en  avons  trouvé  une  autre  près  de  M.  Darnet,  beaucoup  plus 
commode  quoiqu  il  n'y  ait  point  de  ruisseau.  Cette  maison  est  com- 
posée d'un  grand  cellier  de  la  grandeur  de  40  pieds  de  long  sur  15  de 
large.  Ce  dépôt  tiendra  plus  de  80  milliers  de  terre  prête  à  laver; 
A  cdté  du  tas  j'ai  fait  placer  3  grands  cuviers  pour  en  faire  le  lavage . 
l'on  y  a  fait  venir  l'eau  d'un  puits  qui  est  dans  le  jardin  par  le  moyen 
d'une  gouttière  longue  de  7  toises,  au-dessus  du  cellier,  il  y  a  deux 
grandes  chambres.  Dans  la  plus  aérée  et  la  plus  exposée  au  soleil, 
j'ai  fait  faire  des  tablettes  tout  autour  et  dans  le  milieu  pour  y  mettre 
sécher  la  terre  d'à  peu  près  le  nombre  de  5  milliers.  L'on  se  servira 
de  moules  de  paille  pour  ressuyer  les  terres  sortant  des  cuviers  aussi 

bien  que  ceux  de  plâtre.  J'ai  fait  ouvrir  un  trou  de  15  pieds  sur 

tout  à  cotté  de  celuy  de  l'année  dernière.  Le  décomble  a  été  près  de 
8  pieds  avant  que  de  trouver  la  bonne.  Cette  terre  est  très  blanche, 
mais  bien  sableuze  par  endroits,  et  bien  capricieuse  dans  toute  sa 
masse.  Cependant  je  crois  qu'il  nous  donnera  à  peu  près  la  moitié  de 


boa  au  total.  Je  ne  perds  pas  un  seul  moment  depuis  trois  semaines, 
j*ai  profité  du  beau  temps,  et  je  crois  avoir  bien  fait,  le  temps  s>st 
remis  à  la  pluye  ces  jours  icy.  J'ai  déjà  dans  notre  dépôt  près  de 
quarante  milliers  de  terre  et  Ton  commence  à  laver  à  force.  Si  c*' 
n'était  la  grande  occupation  que  j'ay  dans  ce  pays,  je  ne  pourrais  y 
rester  un  moment.  Tout  y  est  plus  cher  qu*à  Paris  et  bien  de  la 
misère  dans  le  même  peuple.  Les  Messieurs  de  Gombron  font  parier 
d'eux  dans  ce  pays,  mais  pas  en  bien.  M.  de  Lépine,  subdélégué  de 
Limoges,  leur  a  prêté  pour  faire  l'exploitation  de  Tannée  demiêrf 
4,000  l.  et  ne  peut  pas  en  avoir  le  premier  liard,  quoi  qu'ils  plaident 
ensemble.  Il  y  a  à  la  manufacture  de  fayance  de  Limoges  un  jeune 
homme  de  Paris  qui  commence  à  faire  de  la  porcelaine.  G*est  N.  de 
Lépine  qui  a  écrit  à  M.  Darnet  ces  jours  cy.  M.  Darnet  a  aussi 
reçu  une  lettre  d'un  nommé  Depardieu,  de  Chantilly,  pour  en  faire 
un  établissement  dans  ce  pays.  Si  vous  voulez  faire  part  du  prin- 
cipal de  cette  lettre  à  M.  Boileau  ou  à  M.  Marmet^  je  vous  serai  bien 
obligé.  Je  leur  ay  écrit  il  y  a  trois  semaines  et  je  n'ay  pas  encore  eu 
le  plaisir  d'avoir  de  leurs  nouvelles. 

J'ai  rhonneur  d'être,   Monsieur,  avec  l'attachement  le  plus 
sincère,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 


MiLLOT. 


{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n"^  9135). 


Varchevêque  de  BordeaiAX  à  M.  Macquer. 

A  Bordeaux,  ce  39  septembre  1769. 

Les  mauvais  procédez  qu'éprouve  M.  Villaris  de  la  part  du 
sieur  Darnet  me  paroissent  bien  extraordinaires.  J'ay  écrit  à  ce 
sujet  à  M.  de  Montigni  et  à  M.  Bertin  et  leur  ai  marqué  que  je  con- 
naissois  le  sieur  Villaris  pour  un  homme  de  probité  et  très  véridi- 
que,  que  le  sieur  Darnet  n'avoit  d'autre  mérite  que  d'avoir  dit  au 
sieur  Villaris  qui  alloit  cherchant  de  la  terre  propre  à  faire  de  la 
porcelaine,  qu'il  y  avait  dans  le  pays  une  terre  blanche  et  de  ravoir 
mené  sur  les  lieux  et  lui  avoir  fait  connoitre  cette  terre  blanche 
dont  il  ne  connoissail  nullement  la  propriété  puisqu'il  lui  adjoula 
que  M.  Desmarest,  qui  est  attaché  à  M.  l'Intendant  de  Limoges, 
ayant  vu  cette  terre,  après  ravoir  examinée,  avoit  dit  que  cette  terre 
luy  paraissoit  une  bonne  terre  à  foulon  par  sa  finesse,  mai> 
que  n'y  aïant  pas  dans  le  Limousin  de  manufacture  de  draps,  elle 
devenoit  inutile.  Il  est  vray  que  le  sieur  Villaris  fit  accroire  au 
sieur  Darnet  que  cette  terre  seroit  propre  à  faire  de  l'eau  forte  et 


bbCtlMKNTS  SUR   L'^INDtSTRIB   Et    L^S  AAIfOFACtURte?  KÏÏ  tlMOOSIN.        78? 

qa'il  cberchoit  à  obtenir  un  privilège,  et  le  sieur  Darnet  en 
estoit  si  persuadé  que  lorsque  il'*  Hocquart  viûrent  sur  les  lieux 
pour  achepter  le  terrain  de  Madame  du  Montet  et  qu'ils  acheptë- 
rent  un  terrain  à  costé  appartenant  à  un  particulier,  il  en  donna 
avis  au  sieur  Villaris  et  luy  marqua  que  ces  Messieurs  prélendoient 
que  cette  terre  estoit  propre  à  la  porcelaine,  mais  qu'il  scavoit  à 
quoy  s'en  tenir  et  que  c'estoit  pour  ce  qu'il  scavoit  et  l'exhortant  à 
obtenir  incessamment  son  privilège. 

Il  est  vray  que  la  Manufacture  et  M.  Bertin  ont  grande  obligation 
au  sieur  Darnet  pour  avoir  empêché  ces  M"  Hocquart  d'enlever 
cette  matière  à  la  manufacture  de  Sèvres  et  je  crois  qu'il  mérite- 
roit  une  gratification.  J'engage  M.  Bertin  à  la  luy  faire  donner.  Il  me 
semble  également  qu'il  y  auroit  de  la  justice  à  luy  donner  une  pe- 
tite pension  pour  la  garde  du  terrain  et  pour  diriger  l'exploitation 
de  la  terre  et  l'envoy  qu'on  en  fairoit  à  Montignac 

f  L'archevêque  de  bordeaux. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n**  91  Sô,) 


t  xi.  tB 


V^d  SOGIÉtil  ARCttéOLOÔkQÛE  eV  àlS^ORIQÙB  OU  iiÉoudik» 

LA  PREMIÈRE  MANUFACTURE  DE  PORCBLAmE  DE  UMOGES. 

L'une  des  questions  les  plus  inléressanles  que  soulève  Thistoire  de  Ttrt 
céramique  moderne  est  celle  des  origines  et  des  développements  des  pn- 
mières  manufactures  de  porcelaine  en  Limousin. 

Or,  les  écrivains  spéciaux  se  sont  bornés  jusqu^à  présent  à  répéter  des 
généralités  qui  ne  laissent  pas  que  de  présenter  parfois  de  notables  inexK- 
titudes;  d'autre  part,  si  Ton  en  excepte  le  mémoire  donné,  en  1837,  par  M.  F. 
Alluaud,  dans  les  Nouvelles  éphémérides  du  ressort  de  la  Cour  royale  de 
Limoges,  on  ne  trouve  sur  ce  sujet,  dans  les  recueils  locaax,  qoe  deco«rU 
articles  qui  sont  loin  d'offrir  un  ensemble  de  connaissances  approfondies. 
Dans  VEssai  de  classification  des  anciennes  porcelaines  de  Limoges  publié 
ici-môme,  M.  Camille  Leymarie  a,  le  premier,  entrepris  avec  une  réellecom- 
pétence,  servie  par  un  rare  esprit  de  pénétration,  de  restituer  aux  aldiers 
de  Limoges  et  à  leurs  produits  le  rang  qui  leur  revient.  Quoique  écrit  à  un 
point  de  vue  spécial,  son  travail  apporte  une  sérieuse  contribution  à  rbi>- 
toire  définitive  et  complète  de  la  céramique  limousine. 

L'élude  d'ensemble  que  comporte  une  telle  matière,  —nous  voulons  dire 
celle  qui  est  destinée  au  grand  public,  —  reste  donc  à  faire.  Nous  poovo&s 
affirmer  que  les  matériaux  ne  manqueront  pas  à  quiconque  voudra 
tenter  de  l'écrire.  On  peut  même  dire  que  leur  abondance  répond  à  Piah 
poriance  de  la  question.  Les  archives  nationales  possèdent,  en  effet,  mé- 
langées aux  papiers  de  la  manufacture  de  Sèvres,  une  série  considérabk 
de  pièces  relatives  aux  fabriques  du  Limousin.  Pour  une  période  tout  aa 
moins  (1784-1790),  on  peut  suivre  de  près  les  travaux  de  nos  céramistes. 
Ignorés  ou  négligés  jusqu'ici,  ces  documents  permettront  de  substituer 
aux  notions  vagues  et  incertaines  des  notions  complètes  et  précises  et  ils 
éclaireront  d'un  jour  tout  nouveau  différents  points  jusqu'ici  mai  connus. 

A  quelles  influences  la  manufacture  de  Limoges  dut-elle  sa  rapide  pros- 
périté?  Quelle  suite  de  circonstances  amena  plus  tard  sa  décadence,  sx 
vente  au  roi  et  son  annexion  à  Sèvres?  Autant  de  questions  que  nol  ne 
s'est  encore  avisé  de  résoudre. 

Quoiqu'il  en  soit,  la  persistance  de  traditions  erronées  dans  les  pablici* 
tions  locales  les  plus  récentes  nous  porte  à  rappeler  brièvement  ce  qoe 
furent  les  débuts  de  la  fabrication  de  la  porcelaine  à  Limoges.  Nous  oe 
ferons  usage  que  de  renseignements  puisés  aux  sources  mêmes. 

L'étude  des  origines  de  cette  industrie  conduit  tout  d'abord  à  examiner 
quelle  part  Turgot  a  prise  à  son  introduction  dans  notre  province.  Disons 
immédiatement  que  cette  part  fut  considérable.  On  ne  peut  douter,  ea 
effet,  qu'avec  son  grand  sens  pratique,  Téminent  intendant  de  Uoioges 
n'ait  tout  de  suite  compris  quelles  immenses  ressources  le  pays  pouvaU 
retirer  de  la  nouvelle  industrie  et  qu'il  n'ait  résolu  d'en  faire  bénétider  U 
province  dont  l'administration  lui  était  confiée. 

Dès  la  découverte  des  kaolins  de  Saint-Yrieix,  il  était  à  prévoir,  \n 
l'abondance  des  gisements,  qoe  leur  exploitation  ne  serait  pas  restreinte 
aux  seuls  besoins  de  la  manufacture  royale  et  que  de  nouveaux  centres  de 
fabrication  ne  tarderaient  pas  à  être  créés.  Eu  égard  aux  difficultés  de  trans- 
port, ceux-ci  devaient,  autant  que  possible,  être  placés  à  proximité  da 
lieu  d'extraction  de  la  matière  première.  Limoges,  distant  de  huit  lieues 
seulement  de  Saint-Yrieix^  s%  trouvait  dans  des  conditions  d^autant  plus 


favorables  que  cette  ville  possédait  déjà  une  faïencerie  susceptible  d'être 
transformée  rapidement  et  k  peu  de  frais. 

Cest  dans  .cet  établissement  que  furent  faits,  sous  la  direction  de  Turgol 
lui-même,  les  premiers  essais  de  fabrication  et  de  cuisson  de  la  porce- 
laine dure.  Satisfait  des  résultats  obtenus,  Turgot  prend  Tiniliative  de  b 
création  d'une  fabrique  spéciale.  Après  s'être  assuré  la  coopération  du 
faïencier  Joseph  Massié,  il  tourne  vers  ce  but  l'activité  des  sieurs  Pierre  et 
Gabriel  Grellet  frères.  A  défaut  de  connaissances  techniques,  ceux-ci 
passaient  du  moins  pour  avoir  une  grande  pratique  des  afiPaires,  et  de  plus 
disposaient  de  capitaux.  Indépendamment  de  leur  commerce  d'épicerie  en 
gros,  de  chaudronnerie  et  de  fers,  ils  exploitaient  à  Limoges  une  tréfilerie  à 
laquelle  ils  avaient  projeté  d'annexer  une  fabrique  de  faulx  ;  l'un  d'eux 
venait  même  de  faire  un  voyage  en  Allemagne  pour  se  rendre  compte  des 
procédés  de  fabrication.  Aussi,  ne  fût-ce  qu'après  bieo  des  hésitations  qu'ils 
se  décidèrent  à  accepter  la  tftche  qui  leur  était  offerte.  Turgot  leur  adjoignit 
UH  homme  du  métier,  Nicolas  Fournerat,  élève  du  célèbre  Rouelle,  employé 
par  le  marquis  de  Courtanvaux,  de  TAcadémie  des  sciences,  à  des  recherches 
et  à  des  travaux  chimiques,  et,  le  1"'  mars  1771,  un  acte  d'association  fut 
passé  pour  une  durée  de  neuf  années,  sous  la  raison  Grellet  frères,  Massié 
et  Fournerat. 

Sous  l'impulsion  féconde  de  Turgot,  les  progrès  furent  rapides;  nul 
mieux  que  l'intendant  de  Limoges  n'était  capable  de  provoquer  ces  progrès. 
Ea  effet,  il  apportait,  avec  sa  collaboration  assidue,  de  hautes  connaissances 
en  chimie  Au  surplus,  il  n'invente  pas,  il  applique.  On  le  voit  arracher  à 
la  manufacture  de  Sèvres  les  secrets  de  sa  fabrication  et  jusqu'au  modèle 
de  ses  fours.  Il  abrège  ainsi  la  période  des  tiVtonnements  et  des  expé- 
riences, a  On  a  fait  ici,  —  écrit  le  25  novembre  I77i,  à  son  fils,  M.  de 
Lépine,  subdélégué  de  Turgot,  —  de  la  porcelaine  qui  est  très  belle, 
mais  ^horriblement  chère.  J'ai  actuellement  quatre  correspondants  qui 
m'en  demandent...  »  Et  le  4 S  mai  4773  :  a  quant  à  la  porcelaine,  tout  ce 
que  je  puis  faire  passer  à  ces  dames,  ce  sont  quelques  pots  à  pommade, 
le  tout  étant  extrêmement  cher:  un  service  de  six  tasses  assorti  se  vend 
cinq  louis  (1).  » 

Cependant  Turgot,  qui  volt  dans  la  porcelaine,  non  pas  un  sujet  de 
laboratoire  mais  un  nouveau  fonds  d'industrie  et  de  commerce,  ne  né- 
glige point  le  côté  économique.  11  place  au  même  rang,  dans  ses  préoc- 
cupations, l'art  de  produire  et  l'art  de  vendre.  Il  ne  lui  suffit  pas  d'avoir, 
l'un  des  premiers,  précisé  et  formulé  dans  ses  écrits  la  loi  du  progrès  ;  il 
en  poursuit  l'application  immédiate.  C'est  au  nom  de  l'intérêt  public  et  en 
vue  de  la  création  d'une  industrie  nationale  qu'il  réclame  pour  le  nouvel 
établissement  une  part  des  avantages  dont  la  manufacture  de  Sèvres  est 

(1)  M.  de  Lépine,  —  Tun  des  bons  esprits  de  son  temps,  —  semble  avoir  longtemps  douté 
de  Tavenlr  réservé  à  l'industrie  de  la  porcelaine.  Son  opinion  à  ce  sujet  fut  très  certame- 
ment  partagée  par  un  grand  nombre  de  ses  contemporains  et  c'est  pour  ce  moUf  que  nous 
Avons  cru  devoir  la  mettre  en  lumière.  Le  11  juillet  1774,  il  écrit  encore  à  son  fils  :  t  La  po- 
terie de  Savigny  foumisscût,  U  y  a  deux  cents  ans,  les  meUleurs  creusets  que  l'on  put  trouver 
en  France,  maie  elle  est  totalement  tombée  à  ce  que  je  vois  par  votre  lettre.  Il  y  a  aussi 
deux  cents  ans  que  le  Limousin  était  plein  de  verreries  dont  il  n'existe  pas  la  moindre  tnee, 
si  ce  n'eat  va  reste  de  four  qui  se  trouve  encore  dans  la  paroisse  d'Ambazac.  Si  l'on  a  cessé 
de  faire  du  Terre  dans  notre  province,  c'est  que  depuis  deux  cents  hhs  les  ouvrier»  trouvaient 
il  peine  le  payement  deîeurs  frais  j  il  en  sera  de  même  un  jour  de  la  porcelaine,  h 


*76b  SOCIÏTÊ    AUCBKOLOGIQUfe  ET  hlStO^IQUS  bQ  XtHoUslK. 

seule  à  jonir  :  exemption  des  droits  des  cinq  grosses  fermes  pour  la  ctr* 
culation  des  produits  à  Fintérieur  et  sortie  en  francbise  poor  TexporUlioB 
à  Tétranger.  Le  48  juillet  1773,  il  écrit  à  cet  effet  au  contrôleur  générai 
des  finances  et  il  lui  représente  que  le  commerce  de  la  porcelaine  n'exis- 
tant pas  encore,  il  ne  résultera  de  la  concession  des  avantages  sollicitée 
aucune  diminution  dans  les  revenus  du  roi.  Le  9  septembre,  le  conseiller 
d^Etat  Trudaine  de  Honligny,  chargé  des  détails  relatifs  au  coramercc, 
lui  répond  que  le  contrôleur  général  consent  à  la  sortie  en  franchise, 
mais  non  à  la  levée  des  droits  de  circulation  daos  le  royaume,  qui  tirerait 
à  de  trop  grosses  conséquences.  €e  ne  sera  qu'un  an  plus  tard  et  lon^ie 
Turgot,  devenu  à  son  tour  contrôleur  général,  aura  tout  pouvoir  à  cet  etei, 
qu'il  s'empressera  d'accorder  ce  qu'il  avait  vainement  demandé. 

Mais  là  ne  se  borneront  pas  ses  encouragements.  Un  arrêt  du  15  février 
1766,  tout  en  proclamant  la  liberté  de  la  fabrication  de  la  porcelaine*  avait 
expressément  prohibé  les  décors  polychromes  et  la  confection  des  ûgnrts. 
A  la  manufacture  du  roi  seule  était  réservé  le  droit  de  c  peindre  en  plu- 
sieurs couleurs,  d'employer  de  l'or  appliqué  ou  incrusté  et  de  faire  de$ 
figures  ou  ornements  de  ronde-bosse  avec  de  la  pâte  de  porcelaine  eo 
biscuit,  sans  couverte  ou  avec  couverte.  »  Turgot  couvre  de  sa  haote 
.  protection  les  infractions  à  ce  privilège,  et  dès  l'année  1774,  il  sortait  des 
ateliers  de  Limoges  une  caisse  entière  de  statuettes  ou  figurines. 

Pour  soutenir  la  concurrence  avec  les  autres  fabriques  établies  déjà  uo 
peu  partout  et  qui,  mieux  outillées  sans  doute,  produisaient  à  plus  bas 
prix  les  objets  d'usage,  les  directeurs  de  la  manufacture  de  Limoges  cher- 
chaient à  emprunter  une  somme  de  60,000  livres.  Turgot  intervient 
encore  et  leur  fait  accorder,  à  titre  de  subvention  la  moitié  de  la  sommé 
réclamée.  Hais,  ne  voulant  pas  laisser  l'établissement  qui  était,  pour  une 
large  part,  son  œuvre  personnelle,  livré  peut-être  à  Findifférence  de  s^ 
successeurs,  il  juge  prudent  de  répartir  la  subvention  en  dix  annuités  de 
3,000  livres  chacune.  Elles  étaient  payables  moitié  sur  les  fonds  libres  de 
la  Généralité,  moitié  sur  ceux  du  commerce  et  furent  d'ailleurs  versées  rép- 
lièrement  ainsi  que  l'attestent  les  quittances  qui  nous  ont  été  conservées. 

L'association  constituée  en  1771  fut  dissoute,  le  31  juin  t774,  à  Tégard 
de  Fournerat,  qui  se  sépara  de  ses  coassociés.  Presque  aussitôt  après, 
celui-là  entra  à  la  manufacture  de  La  Seinie.  Or,  aux  termes  de  leurs  cod- 
ventions,  chacun  des  associés  s'était  interdit,  en  cas  de  départ,  d'établir 
une  nouvelle  fabrique  à  vingt  lieues  à  la  ronde  ou  même  de  participer  à 
sa  création.  Poumerat  se  vit  donc  intenter  un  procès  par  Grellel  et 
Massié  ;  l'affaire  fut  portée  devant  l'intendant  de  Limoges  auquel  était 
réservée  la  connaissance  des  difficultés  de  cet  ordre.  Poumerat,  qui  prit 
pour  la  circonstance  la  qualification  (ïartUte  irioenteur^  allégua  poor  «a 
défense  qu'il  avait  été  contraint  de  s'éloigner  de  ses  coassociés  par  suite 
de  leurs  mauvais  procédés  à  son  égard.  Il  leur  reprocha  amèrement  de 
lui  avoir  enlevé  le  secret  de  faire  la  porcelaine,  inconnu  avant  lui  dans  la 
Généralité.  Il  n'en  fut  pas  moins  condamné,  par  sentence  de  l'intenda&t 
d*.4ine  du  30  janvier  1775,  à  6,000  livres  de  dommages  intérêts. 

Nous  arrêtons  ici  cet  aperçu  de  Tune  des  phases  les  plus  actives  de  Fexis- 
tence  de  notre  première  manulacture  de  porcelaine.  Nous  avons  seulemeai 
voulu  montrer  la  possibilité  d'écrire,  avec  toute  la  précision  et  i*exaetilDde 
qu'exige  la  critique  moderne,  l'histoire  de  notre  grande  indostrie. 


DOCUMBHTS  SUR   L*iMDUSTRIE   ET   LKS    MANUFACTURES   EN  LIMOUSIN.       761 


Turgot,  intendant  de  Limoges,  à  P.-J.  Macquer 

A  Limoges,  le  7  mai  4771. 

Vous  m'avez  fait  rhonneur  de  ni'écrire,  Monsieur,  il  y  a  un  peu 
plus  d*un  mois,  une  lettre  qui  vraisemblablement  s'est  croisée  avec 
celle  que  j'avais  adressée  à  M.  Parent  pour  vous.  Je  ne  puis 
qu'être  infiniment  sensible  à  ce  que  vous  voulez  bien  me  dire 
d'obligeant  sur  votre  voyage  en  Limousin.  J'ay  regretté  double- 
ment de  n'en  avoir  pas  été  instruit  et  d'être  privé  par  là  du  plaisir 
de  vous  en  rendre  le  séjour  le  plus  agréable  qu'il  m'eût  été  possible 
et  de  celuy  de  faire  une  plus  ample  connaissance  avec  vous. 

J'avais  prévu  l'obstacle  que  voire  délicatesse  mettrait  à  la  com- 
munication que  je  désirais  du  nouveau  fourneau  et  j'ay  eu  l'honneur 
de  vous  mander  que  j'écrivais  à  M.  Bertin  pour  obtenir  son  consen- 
tement. A  sa  place  je  ne  ferais  pas  difflculté  et  je  ne  comprends 
pas  pourquoi  on  ferait  mystère  d'une  chose  utile  pour  favoriser  une 
manufacture  plutôt  qu'une  autre.  Cependant  je  n'ay  point  reçu  de 
réponse.  Gomme  il  est  intéressant  pour  l'entrepreneur  de  savoir 
s'il  doit  espérer  ou  non  d'avoir  les  plans  du  nouveau  fourneau,  je 
vous  serai  infiniment  obligé  de  vouloir  bien  me  marquer  quelle  a 
été  la  décision  de  M.  Bertin  afin  que  si  elle  ne  vous  donne  pas  la 
liberté  de  me  faire  part  de  ce  secret,  l'entrepreneur  puisse  aller  en 
avant  et  faire  construire  son  fourneau  sur  le  principe  de  ceux 
d'Allemagne. 

J'ay  l'honneur  d'être  avec  l'estime  et  l'attachement  le  plus  sincère, 
Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Turgot. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n"*  9135), 


Ix  ministre  Bertin  à  Turgot 

Versailles,  3f  mai  1771. 

J'ai  vu  par  la  lettre  que  vous  m'avez  écrite  le  28  avril,  qu'il  s'est 
établi  à  Limoges  une  manufacture  de  porcelaine  qui,  profitant  de 
Tarrét  que  j'ai  rendu  en  1766  pour  la  liberté  de  cette  fabrication, 
se  propose  d'en  faire  une  grande  consommation  {sic)  à  cause  du  bon 
marché  des  matières  premières  qui  se  trouvent  sur  les  lieux  ;  mais 


76$  SOCtÊTR  ARCHÉOLOGIQUE   BT  BtSTORIQOB  DU  LtMOUSm. 

qu'il  serait  question  de  construire  également  un  fourneau  capable 
de  cuire  la  porcelaine  dans  toutes  ses  parties  et  que  vous  souhai- 
teriez que  M.  Macquer,  à  qui  vous  avez  écrit,  pût  être  autorisé  à  voos 
envoyer  le  dessin  de  celui  dont  on  se  sert  à  la  manufacture.  Ce 
serait  peut-être  fort  difficile  à  cause  des  changements  qu'on  y  fait 
tous  les  jours  à  mesure  qu'on  s'aperçoit  de  quelque  inconvénleot 
ou  d'une  amélioration  nécessaire  et  Ton  ne  vient  ainsi  à  la  perfec- 
tion que  par  degrés;  une  personne  qui  m'est  attachée  donna  à  h 
manufacture  de  Sève  dans  le  mois  de  février  1769  un  mémoire  ei 
les  dessins  d'un  four  rond  à  quatre  chauffes  qu'elle  esLime  qui 
serait  meilleur  et  d'un  feu  plus  égal  que  les  fourneaux  carrés  longs 
de  Saxe  et  de  Frakendal.  On  l'adopta  dans  le  temps,  on  y  fit  coire 
avec  succès  de  la  porcelaine,  mais  on  s'aperçut  qu'il  serait  plus 
avantageux  de  supprimer  une  chauffe.  Le  nouveau  four  qui  a  été 
construit  à  trois  chauffes  a  très  bien  réussi,  ce  qui  n'a  pas  empêché 
qu'on  y  ail  fait  de  nouveaux  changements  dont  on  ne  connaîtra 
peut-être  lesavantages  ou  les  inconvénients  qu'après  un  certain  nom- 
bre de  fournées.  Dans  cet  étal,  je  crois  ne  pouvoir  rien  faire  de  mieux 
que  de  vous  envoyer  le  premier  mémoire  el  les  dessins  qui  l'ac- 
compagnent. Je  suis  persuadé  que  vos  artistes  parviendront  à  en 
tirer  un  bon  parti  et  j'apprendrai  avec  plaisir  qu'ils  sont  parvenu? 
à  y  faire  cuire  la  porcelaine  parfaitement. 
Je  suis,  Monsieur,  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Bertu«. 
{Bibliothèque  nationale,  fonds  français,  n*  9135). 


P.-J.  Macquer  à  Turgot. 

Monsieur, 

Je  vous  demande  bien  pardon  de  ma  lenteur  à  vous  répondre, 
mais  il  n'a  pas  dépendu  de  moi  de  le  faire  aussitôt  que  je  le  dési- 
rois.  M.  Parent,  que  j'ai  vu  deux  jours  après  avoir  reçu  la  lettre 
que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  m'écrire  le  7  mai,  m'a  confirmé 
dans  l'idée  que  j'avois  déjà  de  la  très  bonne  intention  de  M.  Bertin 
de  vous  communiquer  ce  que  vous  demandez  et  dont  je  ne  pouvois 
douter  d'après  la  conversation  que  j'avois  déjà  eue  avec  ce  minisire 
depuis  votre  première  lettre.  M.  Parent  m'a  dit  de  plus  qu  il  m'en- 
verroit  le  surlendemain  une  copie  de  la  réponse  que  M.  Bertin 
devoit  vous  faire  afin  de  me  mettre  moi-môme  à  portée  d'avoir 
rhonneur  de  répondre  à  votre  lettre.  Mais  Madame  sa  fille  étant 


DOCUMENTS   SOR    l'iNDUSTRIB  ET   LES  UANUFACTURES   EN   LIHOUSIN.         763 

venue  à  accoucher  dans  cet  inlervalle,  tout  cela  s'est  trouvé  dé- 
rangé, de  manière  que  craignant  d'attendre  encore  trop  longtemps, 
j'aime  mieux,  sans  savoir  bien  au  juste  ce  que^M.  Bertin  décidera, 
vous  témoigner  toujours,  Monsieur,  Tempressement  que  j'ai  de  ré- 
pondre à  la  confiance  dont  vous  m'honorez. 

11  me  paroit  que  le  ministre,  malgré  toute  sa  bonne  volonté,  ne 
peut  guère  s'empêcher  d'avoir  égard  jusqu'à  un  certain  point  aux 
représentations  des  principaux  employés   de  la  manufacture  de 
porcelaine  dont  Tintéréi  est  que  cette  manufacture  prospère,  se 
soutienne  et  puisse  même  se  soutenir  d'elle-même  dans  le  cas  où 
le  roi  viendroit  à  l'abandonner  à  ses  propres  forces.  Or,  ils  pen- 
sent presque  tous  qu'attendu  les  dépenses  considérables  qui  vien- 
nent d'être  prises  sur  ses  fonds  pour  l'établissement  de  la  nouvelle 
porcelaine,  la  communication  de  ses  secrets  et  de  ses  procédés  par- 
ticuliers, lui  deviendroit  très  préjudiciable,  s'ils  étaient  connus 
avant  qu'elle  ait  eu  au  moins  le  temps  de  se  remettre  de  ces 
dépenses  extraordinaires   et    d'une  banqueroute  qui  l'ont    fort 
arriérée.  Je  présume  donc,  d'après  tout  ce  que  j'ai  entendu  dire, 
que  M.  Bertin  prendra  un  milieu  pour  vous  satisfaire,  Monsieur, 
sans  donner  trop  de  mécontentement  aux  personnes  dont  je  viens 
de  parler  et  ce  sera  de  vous  envoyer  le  plan  d'un  four  fort  différent 
de  celui  d'Allemagne  et  qui,  à  mon  avis,  lui  est  fort  supérieur,  que 
nous  étions  sur  le  point  de  faire  exécuter  à  Sèvres,  si  à  force  de 
faire  des  changements  à  celui  dont  nous  nous  servons  à  présent, 
nous  ne  fussions  parvenus  à  lui  faire  produire  à  peu  près  tout  le 
bon  effet  que  nous  désirions.  Peut-être  même  M.  Bertin  vous  a-t-il 
déjà  envoyé  ce  plan  et,  d'après  tout  ce  que  j'ai  observé  depuis 
longtemps,  je  ne  balance  point  à  vous  conseiller.  Monsieur,  d'en 
gager  l'entrepreneur  de  Limoges  à  construire  par  préférence  celui 
dont  vous  recevrez  le  plan.  N'ayant  point  vu  aller  ce  dernier,  je  tie 
puis  vous  affirmer  positivement  qu'il  produira  le  meilleur  effet  pos- 
sible; mais  autant  que  les  connaissances  que  j'ai  acquises  sur  cet 
objet  me  le  permettent,  je  crois  pouvoir  vous  assurer   qu'il  fera 
très  bien.  Je  ne  serais  pas  même  surpris  qu'il  fit  encore  mieux  que 
celui  dont  nous  nous  contentons,  car  ce  dernier,  quoique  passable, 
n'est  pas  encore  à  beaucoup  près  au  point  de  perfection  où  je  crois 
qu'il  est  possible  de  porter  des  fours  de  ce  genre  et  quand  il 
s'agira  de  le  reconstruire,  je  compte  bien  proposer  des  réformes  et 
des  changements  à  y  faire. 

Voilà,  Monsieur,  tout  ce  que  je  puis  avoir  l'honneur  de  vous  dire 
pour  le  présent  ;  j'aurais  encore  bien  des  choses  à  vous  ajouter  sur 
tous  ces  objets,  mais  cela  ne  se  peut  guère  dans  une  simple  lettre. 
Je  saisirai  avec  j^rand  empressement  l'occasion  de  vous  en  entrele- 


7^  SOCIÉTÉ  AftCBiOLOGIQlTB  ET   HISTOBIQOE  OU   LIMOUSIN. 

nîr  de  vive  voix  dans  le  preiliier  séjour  que  vous  ferez  à  Paris  si 
TOUS  voulez  bien  me  permettre  d'avoir  Thonneur  de  tous  7  faire 
ma  cour. 
Je  suis,  avec  l'attachement  le  plus  vif  et  le  plus  respectueux, 
.    Monsieur, 
Votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

Hagqokr. 

A  Paris,  ce  M' juin  hllî. 

fbibliothègt^  nationale,  fonds  français^  n"*  9135). 


Turgot  au  ministre  Bertin. 

A  Paru,  le  48  joi]letl773. 

Lorsque  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  rendre  compte  des  essais  faits 
à  Limoges  pour  établir  une  manufacture  de  porcelaine  et  des  pre- 
miers succès  qu'ils  avoient  eus,  vous  avés  bien  voulu  nie  faire 
faire  espérer  que  vous  protégeriez  les  entrepreneurs  et  que  vous 
leur  accorderiez  un  arrêt  du  Conseil.  J'en  ai  rédigé  un  projet  que 
j'ai  rhonneur  de  vous  adresser.  Outre  l'objet  principal,  je  veux 
dire  la  permission  d'établir  la  manufacture,  ses  dispositions  pré- 
sentent quelques  encouragements  qui  me  paraissent  nécessaires 
pour  indemniser  les  entrepreneurs  des  pertes  qu'ont  du  occasionner 
les  premiers  essais  nécessairement  infructueux.  Le  principal  de  ces 
encouragemens  est  l'exemption  des  droits  de  traite  soit  à  rentrée 
des  provinces  des  cinq  grosses  fermes,  soit  à  la  sortie  du  royaume 
pour  rétranger.  Comme  j'ai  présumé  que  vous  pourries  faire  quel- 
que difficulté  d'accorder  cet  article  sans  vous  concerter  avec 
M.  Trudaine,  je  préviens  celui-ci  en  lui  envoyant  copie  du  proijet 
d'arrêt  et  j'espère  que  vous  ne  trouverez  de  la  part  de  M.  le  Con- 
trôleur général  aucune  opposition. 

L'article  qui  m'attribue  la  connaissance  des  contestations  entre 
les  associés  est  d'une  très  grande  importance  dans  tes  circonstan- 
ces  où  se  trouve  cette  fabrique  et  j'ose  vous  supplier  de  l'adopter 
aussi. 

Je  suis  avec  respect, 

Votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur. 

TUHGOT, 

(Archives  nationales,  0\  n*  2063), 


DOCUMENTS  SUa  L*IMOUSTfilB  ET   LES  XANUFACTtJRBS    EN   LlUOUSlIf.       765 

Privilèges  accordés  à  la  manufacture  de  porcelaine  de  Limogés 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d'Etat  da  Roy. 

Sur  la  requête  présentée  au  roi  étant  en  son  Conseil  par  les 
sieurs  Grellet  frères,  Massier  et  Fourneira,  contenant  que  le  dit 
Massier,  l'un  d'eux,  ayant  obtenu,  le  8  octobre  1837,  des  lettres 
patentes  portant  permission  d'établir  une  fayancerie  en  la  ville  de 
Limoges  (1),  a  fabriqué  pendant  longtemps  et  fabrique  encore  de 
la  fayance  dans  la  manufacture  qu'il  a  établie  à  cet  effet;  que, 
depuis,  ayant  seu  que  la  province  du  Limousin  contient  toutes  les 
matières  les  plus  propres  à  la  fabricalion  de  la  porcelaine,  le  dit 
sieur  Massier,  aidé  du  sieur  Fourneira  et  des  sieurs  Grellet  frères, 
auxquels  il  s'est  associé,  a  fait  différentes  recherches  sur  les  mé- 
langes et  la  proportion  des  matières  qui  entrent  dans  la  composi- 
tion de  la  porcelaine  et  qu'ils  se  sont  livrés  de  concert  à  différentes 
expériences  pour  parvenir  à  découvrir  cette  composition;  que, 
quelque  dispendieuses  qu'aient  été  ces  expériences,  les  succès  mar- 
qués qu'elles  ont  eus  les  ont  de  plus  en  plus  encouragés  à  poursui- 
vre l'exécution  de  leur  dessein.  C'est  pourquoi  ils  ont  été  conseillés 
de  recourir  à  Sa  Majesté  pour  obtenir  les  encouragements  et 
exemptions  qui  leur  sont  nécessaires.  Requéraient  à  ces  causes  les 
supplians  qu'il  plaiseà  Sa  Majesté  les  autoriser  à  faire  passer  à  l'étran- 
ger, en  exemption  de  tous  droits,  les  ouvrages  de  porcelaine  provenant 
de  leur  manufacture,  exempter  eux,  leurs  commis  et  ouvriers  de  toute 
taille  et  impositions  à  raison  de  la  dite  industrie;  requérait  en 
outre  le  dit  sieur  Massier,  en  son  nom,  qu'il  plaise  à  Sa  Majesté  le 
confirmer  en  tant  que  de  besoin  dans  les  privilèges  et  exemptions  à 
lui  précédemment  accordés  par  les  dites  lettres  patentes  du  18  oc- 
tobre 1737  pour  l'établissement  de  la  manufacture  de  faïence  à  lui 
appartenant.  Vu  la  dite  requête,  signée  Bellart,  ensemble  l'avis 
du  sieur  Turgot,  intendant  et  commissaire  départi  en  la  généralité 
de  Limoges;  vu  pareillement  les  lettres  patentes  du  8  octobre  1737; 
ouï  le  rapport,  le  Roy  étant  en  son  Conseil,  a  autorisé  et  autorise 
lesd.  Grellet  frères,  Massier  et  Fourneira  à  faire  passer  à  l'étranger, 
en  exemption  de  tous  droits,  les  ouvrages  de  porcelaine  provenant 
de  leur  manufacture  à  la  charge  par  eux  de  peindre,  graver  ou 
imprimer  au  revers  de  chaque  pièce  de  porcelaine  les   lettres 

(1)  André  Massié  (et  non  Massier),  titulaire  du  privilège  de  1737,  était 
décédé  depuis  le  23  septembre  1763.  Mais  son  privilège  étant  transmis$i- 
ble  à  ses  eufants,  on  ne  considéra  que  le  nom  sans  se  préoccuper  d'éta- 
blir une  distinction  entre  le  père  et  le  fils, 


766  SOCIÊTé   ARCnÉOL0G!QUR  ET  BISTORIQDB  DU  L1H0USIR. 

C.  D.  (1)  et  de  faire  leur  soumission  par  deyant  le  sieur  inteodant 
et  commissaire  départi  en  la  généralité  de  Limoges,  de  se  serrir 
uniquement  de  lad.  marque  dont  ils  déposeront  Tempreinie  ao 
greffe  de  Tintendance;  ordonne  Sa  Majesté  quelesd.  Grellet  frères, 
Massier  et  Fourneira,  leurs  premiers  commis,  leurs  peintres,  sculfh 
teurs,  modeleurs,  répareurs  et  tourneurs  travaillant  depuis  $ii 
mois  dans  leur  manufacture  seront  exempts  de  tailles  et  autres 
impositions  à  raison  de  lad.  industrie  et  qu'ils  ne  pourront  étr^ 
imposés  que  pour  leurs  facultés  personnelles  ou  autre  commerce 
et  trafic  particulier;  fait  défense  Sa  Majesté  aux  officiers  des  élec- 
tions et  collecteurs  de  les  imposer  dans  les  rôles  des  tailles  et  au- 
tres impositions  ordinaires  et  extraordinaires  en  cas  qu'il  n'y  aient 
pas  encore  été  compris,  ni  d*augmenler  les  sommes  pour  lesquelles 
ils  pourraient  avoir  été  précédemment  compris  dans  iesd.  r6- 
les,  si  ce  n'est  à  proportion  du  bien  qu'ils  acquéreront,  ou  en  cas 
de  commerce,  trafic  ou  travail  autre  que  celui  relatif  aux  ouvrages 
de  lad.  manufacture  et  à  l'effet  par  Iesd.  commis,  artistes  et  ou- 
vriers de  jouir  desd.  exemptions  de  tailles  et  autres  impositions,  il 
sera  rerais  tous  les  six  mois  par  Iesd.  Grellet  frères,  Massier  et 
Fourneira  au  sieur  intendant  et  commissaire  départi  un  état  signé 
d'eux  contenant  les  noms  de  leurs  premiers  commis  et  autres  per- 
sonnes employées  à  lad.  manufacture  ;  enjoint  Sa  Majesté  au  sieor 
intendant  et  commissaire  départi  en  la  généralité  de  Limoges  de 
tenir  la  main  à  l'exécution  du  présent  arrêt,  lui  attribuant  à  cet 
effet  toute  juridiction  et  connaissance  qu'elle  interdit  à  lootes  ses 
cours  el  autres  juges.  N'entend  au  surplus  Sa  Majesté  rien  innover 
relativement  aux  privilèges  accordés  au  dit  Massier  par  les  lettres 
patentes  du  8  octobre  4737,  pour  la  manufacture  de  fayance  qu'il  a 
établie  el  dans  laquelle  il  continue  de  fabriquer  pour  son  compte 
particulier  ;  desquels  privilèges  led.  Massier  continuera  de  jouir, 
Sa  Majesté  l'y  confirmant  en  tant  que  de  besoin. 

Fait  au  Conseil  d'Etat  du  roy,  Sa  Majesté  y  étant,  tenu  à  Ver- 
sailles le  30  décembre  1773. 

(Archives  nationales,  F^^,  n*  1494). 


(1)  11  était  d*usage,  toutes  les  fois  que  l'iateudaut  adressait  au  ministre 
compétent  ane  proposition  devant  motiver  un  arrêt  du  Conseil,  qa  il  pré- 
parât lui-môme  un  projet  d'arrêt  et  le  joignit  à  sa  proposition. 

D'après  le  projet  présenté  par  Turgot,  le  cachet  qui  devait  servir  a 
marquer  les  produits  de  la  manufacture  de  Limoges  devait  porter  les  let- 
tres G.  M.  F.,  initiales  des  directeurs.  Lorsqu'il  fallut  expédier  Tarrét,  on 
y  substitua  les  lettres  C.  D.,  qui  seraient  les  initiales  du  comte  d* Artois» 
Ce  prince  venait  de  recevoir  en  apanage  la  vicomte  de  Limoges  et  prenait 
la  manufacture  sous  sa  protection. 


I 


bOCCMKNTS  SUR  L^NDUSTRIE   ET  LES   HAMUFACTURES   BR   LIMOUSIN.        76? 

Exemption  de  droits  de  circulation  en  faveur  des  produits  de  la 

manufacture  de  Limoges  (17  74), 

Extrait  des  registres  du  Conseil  d'Etat  du  Roy. 

Sur  la  requête  présentée  au  Roy  en  son  Conseil  par  les  sieurs 
Grellet  frères,  Massié  et  Foumeira,  entrepreneurs  d'une  manufac- 
ture de  porcelaine  à  Limoges  contenant  que  par  arrêt  du  Conseil 
du  30  décembre  4773,  Sa  Majesté  a  bien  voulu  :  4*^  autoriser  les 
suppliants  à  faire  passer  à  l'étranger  en  exemption  de  tous  droits 
les  ouvrages  de  porcelaine  provenant  de  leur  manufacture  à 
la  charge  par  eux  d*y  faire  mettre  la  marque  qui  leur  y  est 
prescrite  ;  ^  leur  accorder,  ainsi  qu'à  leurs  premiers  commis, 
leurs  peintres,  sculpteurs,  modeleurs,  répareurs  et  tourneurs  tra- 
vaillant depuis  six  mois  dans  lad.  manufacture  l'exemption  de 
taille  et  autres  impositions  à  raison  de  lad.  industrie  ;  3"^  enjoindre 
au  sieur  intendant  et  commissaire  départi  en  la  généralité  de  Limo- 
ges de  tenir  la  maio  à  l'exécution  du  dit  arrêt,  Sa  Majesté  luy 
attribuant  à  cet  effet  toute  jurisdiction  et  connoissance  ;  que  les 
suppliants  n'ayant  obtenu  par  cet  arrêt  qu'une  partie  des  grâces 
qu'ils  avaient  sollicitées,  il  est  arrivé  qu'ils  ont  éprouvé  des  diffi- 
cultés pour  leurs  envoys  de  porcelaine  à  Paris,  soit  par  l'apposi- 
tion du  plomb,  soit  par  la  visite  au  bureau  d'Àrgenlon,  où  une 

caisse  de  figures  a  subi  une  avarie  de  1,2001.  et  qu'en  outre  plu- 
sieurs de  leurs  ouvriers  à  qui  ils  avaient  fait  des  avances  ont 
abandonné  nuitamment  la  manufacture  ;  que,  pour  obvier  à  ces 
deux  inconvénients  qui  leur  causent  un  préjudice  considérable,  il 
seroit  de  la  bonté  du  Roy  de  joindre  aux  grâces  qu'il  leur  a  déjà 
accordées  par  led.  arrêt  celle  d'exempter  de  tous  droits  à  la  circu- 
lation dans  le  royaume  les  ouvrages  de  porcelaine  provenant  de 
leur  manufacture  et  d'attribuer  au  sieur  intendant  et  commissaire 
départi  la  connoissance  de  toutes  les  contestations  relatives  à  la  d. 
manufacture.  Requéroient  à  ces  causes  les  suppliants  qu'il  plût  à  Sa 
Majesté  ordonner  que  tous  les  ouvrages  de  porcelaine  fabriqués 
dans  lad.  manufacture  et  marqués  de  la  marque  prescrite  par  led. 
arrêt  du  Conseil  du  30  décembre  4773,  pourront  circuler  dans  tout 
le  royaume  en  exemption  de  tous  droits  et  que  toutes  contestations 
qui  pourront  s'élever  entre  eux,  leurs  associés,  ouvriers  et  autres 
à  l'occasion  de  leur  société  ou  des  travaux  de  lad.  manufacture 
seront  portées  pardevant  le  sieur  intendant  et  commissaire  départi 
en  la  généralité  de  Limoges  pour  être  par  luy  jugées  sauf  l'ap- 
pel au  Conseil  ;  luy  attribuer  à  cet  effet  toutes  cour,  jurisdic- 
tion et  connaissance  et  icelles  interdire  à  toutes  ses  cours  et 
autres  juges. 


768  SOCIÉTÉ  ARGBÉ0L061QCE  BT  DISTOHIQUC   DU   LiMOOSlN. 

Vu  lad.  requête,  ensemble  Tarrét  du  Conseil  du  30  décembre 
1773;  ouï  le  rapport  du  sieur  Turgot,  conseiller  ordinaire  et  au 
Conseil  royal,  contrôleur  général  des  finances. 

I^  Roy  en  son  Conseil  a  ordonné  et  ordonne  que  tous  les  onwn- 
ges  de  porcelaine  fabriqués  dans  la  manufacture  établie  à  Limoges 
par  les  sieurs  Grellet  frères,  Hassié  et  Fourneira  et  marqués  de  la 
marque  prescrite  par  Tarrét  du  Conseil  du  30  décembre  1771 
pourront  circuler  librement  dans  tout  le  royaume  en  exemption  dr 
tous  droits.  Veut  Sa  Majesté  que  toutes  les  contestations  qui  pour- 
ront s'élever  entre  les  suppliants,  leurs  associés,  ouvriers  et  autres, 
à  Toccasion  de  leur  société  ou  des  travaux  de  lad.  manufacture 
soyent  portées  pardevant  le  sieur  intendant  et  commissaire  départi 
en  la  généralité  de  Limoges  pour  être  par  luy  jugées,  sauf  Tappel 
au  Conseil  ;  Sa  Majesté  luy  attribuant  à  cet  effet  toutes  cour,  jurL»- 
diction  et  connoissance  qu*elle  interdit  à  toutes  ses  cours  et  autres 
juges.  Fait  à  Versailles  le  15  novembre  1774. 

{Archives  nationales^  F*  /^,  n*  1494). 
(A  suivre J.  A.  Fray-Fourmer. 


CIMETIÈRE 


Gallo-Romain,  MéroTingien  et  GitroUngien 


DE  LA  COURTINE,  A  LIMOGES 


kxx  mois  de  janvier  i892,  à  Toccasion  de  fouilles  exécutées  pour 
a  construction  d*une  maison  à  Tangle  des  rues  de  La  Courtine  et 
Dalesme,  on  a  découvert  une  partie  de  l'ancien  cimetière  de  Limo- 
ges, qui,  croyons-nous,  remonte  à  la  période  gallo-romaine. 

Nous  avons  pensé  que  la  description  de  ce  cimetière  pourrait 
présenter  quelque  intérêt  au  point  de  vue  archéologique,  bien  qu'il 
soit  beaucoup  moins  ric)ie  que  ceux  découverts  sur  d'autres  points 
de  la  France. 

Cette  pauvreté  tient  à  ce  que  cette  partie  du  cimetière,  placée  sur 
la  limite  de  la  première  enceinte  du  Château  de  Saint-Martial  (i) 
et  de  remplacement  occiipé  par  les  bâtiments  du  monastère  de 
Saint-Martial,  a  été  complètement  bouleversée  au  x*"  siècle. 

A  répoque  gallo-romaine,  les  cimetières  étaient  établis  en  dehors 
des  villes  et  sur  le  bord  des  voies.  Le  cimetière  gui  nous  occupe 
bordait  la  grande  voie  de  Lyon  à  Saintes,  dont  l'étape  avant  Limo- 
ges était  Prœtorium,  le  Puy-de-Jouer  (?)  (Creuse)  et  l'étape  suivante 
Cassinomagus,  Chassenon  (Charente).  La  voie  passait  à  1200  mètres 
de  l'agglomération  principale  de  notre  Augustoritum^AsLUs  la  direc- 
tion de  l'Est  à  l'Ouest.  En  rapprochant  les  diverses  découvertes 
de  monuments  funéraires  gallo-romains  faites  dans  notre  ville,  nous 


(1)  Cest  sous  ce  nom  que  Ton  désignait  ragglomération  qui  s'était  grou- 
pée autour  de  Vabbaye  de  Saint-Martial  et  qui  fut  entourée  de  murailles 
dans  la  première  moitié  du  x*  siècle.  Voir  Chroniques  de  Saint-Marllalf 
édition  DuPLis-AoïsR. 


pensons  que  ces  monuments  indiquent  le  tracé  de  la  Yoie  romaine, 
qui  devait  passer  entre  les  rues  de  la  Courtine  et  de  SaintpHarlial 
actuelles  pour  gagner  le  sommet  du  plateau. 

De  Prœtorium,  après  avoir  suivi  les  vallées  du  Taurion  et  de  li 
Vienne,  la  voie  atteignait  notre  ville  par  la  route  du  Palais,  suivait 
la  rue  du  Hasgoulel  actuelle  et  atteignait  le  premier  plateaa,  oc- 
cupé aujourd'hui  parla  cathédrale,  auprès  de  laquelle  on  trouveuD 
premier  indice  de  son  passage,  le  roilliaire  encore  dehoul,  dooi 
finscriplion  est  devenue  anépigraphe  par  suite  des  intempéries, 
mais  qui  présente  la  plus  grande  ressemblance  avec  celui  â'Abii&(i  >. 
On  remarque  aussi  auprès  de  ce  milliairey  derrière  le  chevet  de  la 
cathédrale,  un  monument  funéraire  gallo-romain  qui  a  pu  être 
déplacé,  mais  qui  devait  certainement  se  trouver  dans  le  voisinage 
ainsi  que  plusieurs  autres  cités  par  M.  Espérandieu  (2). 

Sur  le  second  plateau,  occupé  aujourd'hui  par  la  place  de  la 
République,  se  trouvait  un  autre  indice  du  passage  de  la  voie,  non 
moins  certain  que  le  premier,  le  tombeau  de  saint  Martial.  Ce  point 
a  été  conservé  très  exactement  à  travers  les  âges  à  cause  de  la  vé- 
nération que  Ton  avait  pour  ce  saint,  sur  le  tombeau  duquel  on  avait 
élevé  une  petite  chapelle  plus  tard,  englobée  dans  la  grande  basili- 
que de  Saint-Sauveur,  construite  au  x*  siècle  et  démolie  pendant 
la  Révolution. 

De  ce  point,  la  voie  gagnait  le  plateau  occupé  aujourd'hui  par 
Saint-Michel-des-Lions  et  enfin  celui  occupé  par  TAmphithéâtre. 
£Ue  prenait  ensuite  la  direction  de  Vemeuil,  et  traversait  avant 
d'y  arriver  le  village  des  Vases,  mot  qui  signifie  tombeau  dans  le 
pays  (3).  Au-dessous  de  Vemeuil,  la  voie  traversait  la  Vienne,  passait 
dans  la  forêt  d'Aixe,  puis  au-dessous  de  Cognac,  suivait  la  direc- 
tion de  Saint-Cyr  et  de  Saint- Auvent,  traversait  la  forêt  de  Roche- 
chouart  et  continuait  vers  Cassinomagus. 

Lorsque  les  moines  de  Saint-Martial  construisirent  la  basilique 
et  leur  monastère,  ils  firent  disparaître  les  traces  de  la  voie.  Troa- 
vaut  à  leur  portée  d'excellents  matériaux  dans  les  tombeaux  payens 
qui  entouraient  celui  deTapôlre  d'Aquitaine,  ils  les  utilisèrent  dans 
leurs  divers  bâtiments.  Cependant  ils  conservèrent  à  la  partie  Est 
du  terrain,  celle  dans  la  direction  de  Prœtorium  sa  destination 


(1)  Espérandieu,  Inscriptions  de  la  Cité  de  Lémovices,  p.  43  et  103. 
(9)  Id.  ibLd.,p.  61,  79,  8â,  85. 

(3)  M.  Tabbé  Lecler  a  bien  voulu  nous  communiquer   les  dessins  de 
lombes  mérovingiennes  découvertes  au  village  des  Vases. 


tlUm^KB  ÔALLO-ROHAIN,   MÉkOVINÙIEN    ET  CAHOLlNOlEh.  )Tl 

première  :  sous  les  noms  de  «  Cimetière  de  la  Courtine  »  et  de 
u  Grand  Cimetière  de  Saint-Martial  ». 

Presque  tous  les  monuments  épigraphiques  gaiio-romains  con- 
servés au  IHusfe  nalional  Adrien  Daboucliô  ont  élé  trouvés  soit 
'dans  les  Tondations  de  l'égiise  Saint-Martial  et  du  monastère  de  1790 
à  iSOO,  soit  dans  les  rues  avolsinantes.  Tout  uo  ëlage  de  l'une  des 
maisons  de  la  place  Fournier  est  construit  avec  des  monuments 
funéraires  et  on  en  trouve  aussi  un  grand  nombre  dans  les  murail- 
les des  maisons  des  rues  Saint-Martial  et  de  la  Courtine.  On  peut 
facilement  s'en  rendre  compte  en  se  reportant  aux  ouvrages  qui 
trailent  des  inscriptions  de  Limoges  (1). 

Toutes  les  fois  que  le  soi  de  ce  quartier  a  été  fouillé,  on  a  mis  au 
jour  un  grand  nombre  de  sépultures.  En  1836,  lors  de  la  construc- 
tion du  Thé&tre  qui  occupe  une  partie  de  l'emplacement  de  la  basi- 
lique; en  1844,  lors  de  l'ouverture  de  la  rue  Dalesme  et  de  la 
construction  de  maisons  à  l'angle  de  cette  rue,  et  en  1862,  lors  de 
la  construction  des  maisons  qui  forment  l'un  des  côtés  de  la  place 
Fournier,  toujours  on  a  fait  des  découvertes  archéologiques  inté- 
ressantes et  on  a  mis  au  jour  une  quantité  de  tombeaux  apparte- 
nant à  difTérentes  époques  (3). 

En  nous  appuyant  sur  les  découvertes  faites  ces  temps  derniers 
rue  de  la  Courtine,  nous  essaierons  de  démontrer  que  le  point  qui 
nous  occupe,  placé  sur  le  bord  de  la  voie  romaine,  a  reçu  les  sépul- 
tures des  habitants  de  Limoges,  sans  interruption,  de  la  période 
gallo-romaine  au  xm»  siècle.  D'après  Grégoire  de  Tours,  cité  par 
Viollet  le  Duc,  on  aurait  continué  à  enterrer  dans  les  cimetières 
gallo-romains  à  l'époque  mérovingienne;  il  parait  résulter  des 
découvertes  de  M.  l'abbé  Cochet  et  de  plusieurs  autres  archéolo- 
gues, qu'il  en  fut  de  même  pour  la  période  carolingienne,  dont  les 
sépultures  se  superposèrent  à  celles  de  la  période  précédente. 

La  partie  récemment  fouillée  se  trouve  à  SO  mètres  de  l'ancien 
tombeau  de  Saint-Martial.  Elle  mesure  il  mètres  de  longueur  sur 

(I]  Voy.  DufioDi,  E«ai  kiÊtorique  sur  la  Sénatorerie  de  Limoges, 
Limoges,  1811  ;  —  Allou,  [iescription  de»  monumenU  det  différenis  âgen 
obaeroéê  dana  la  Haute-Vienne.  Limoges,  ISil  ;  -  TaiPON,  Hittorique 
monumental  de  V ancienne  province  du  Limoatin.  Limoges,  1837;  — 
Tkxier,  Manuel  d'épigraphie.  Poitiers,  1851;  —  VAtLBNTiN,  Bulletin 
ép' graphique  de  laGaale.  Vieaae,  l88t-82;  —  EsfËRAKDiEir,  liucriptione 
de  la  Cité  des  Lémonicei.  Paris,  t39l. 

(S)  Voy.  Bulletin  de  la  Société  d'Agriculture,  eciencea  et  artê,  l.  XVI, 
XVn  et  XVIII  et  l.  XXIII,  p.  78  ;  —  Balletin  de  ta  Société  arckéot.  et  AUt. 
du  Lim.  l.  IX.  p.  9i  ;  t.  XII,  p.  93  ;  t.  Xltl,  p.  173  et  2t3.  Unelques-uDs  de 
CCS  tombeaux  ont  été  déposés  au  Musée  DalioDal  Adrien  Dubouché, 


la  rue  Dalesi^e  et  i2  mètres  sur  la  rue  dfi  la  Courtine,  sojf,  ane 
superficie  de  204  mètres  carrés.  Le  cimetière  occupait  le  Tersant 
d'une  colline  tournée  à  l'Est  et  regardant  le  cours  supérieur  jk  U 
Vienne,  qui  coule  à  une  distance  de  mille  mètres. 

La  profondeur  de  la  fouille  est  de  trois  à  quatre  mètres  an-dtt- 
sous  du  niveau  des  rues  adjacentes.  On  a  atteint  le  solide,  sans 
parvenir  à  la  couche  inférieure  des  tombeaux,  qui  reposent  dans  m 
tuf  très  dur,  et  se  superposent  les  uns  au-dessus  des  autres  en  tnk 
ou  quatre  couches,  d'une  façon  irrégulière. 

La  section  du  terrain  montre  les  différents  niveaux  qui  se  sont 
succédés  par  la  suite  des  temps.  Nous  en  avons  observé  quatre 
très  distincts.  La  terre  de  ces  différentes  couches  est  mélangée  d*Qi^ 
quantité  de  débris  :  briques  de  toutes  sortes,  ossements,  fn^- 
ments  de  poteries  gallo-romaines  et  mérovingiennes,  cailloux  roulés. 
cendres,  etc.  A  Tun  des  anglesde  la  fouille,  du  côté  de  la  rue  de  la 
Courtine,  on  remarque  un  ossuaire  de  3  mètres  de  c^té,  situé  dans 
la  couche  supérieure,  qui  dut  être  le  réceptacle  de  tous  les  osse- 
ments recueillis  lors  du  percement  de  la  rue  de  la  Courtine,  en  174i, 
sous  Tintendant  de  Tourny. 

Pendant  les  débiais,  qui  ont  duré  de  la  fin  de  janvier  à  la  fin  de 
février,  on  a  remarqué  le  bouleversement  des  tombes  de  la  couche 
supérieure,  leur  différence  d'orientation,  leur  superposition  et  la 
variété  de  leurs  matériaux.  11  est  impossible  de  ne  pas  reconnaître 
qu'il  y  a  eu  sur  ce  point  une  grande  modification  de  Tétat  primitif 
du  cimetière.  Cette  modification  avait  été  déterminée  par  la  cons- 
truction de  la  muraille  du  Château,  entre  902  et  936  (l)et  par  celle 
de  l'église  de  la  Courtine.  Plusieurs  tombes  furent  utilisées  dans 
les  murailles  que  Ton  construisit  à  cette  époqiie. 

Nous  allons  vous  présenter  le  résultat  des'  fouilles  par  ordre 
chronologique. 

PÉRIODE  GALLO-ROHAINE. 

De  la  période  d^incinération,  c* est-à-dire  des  trois  premiers  siè* 
clés,  on  n'a  pas  trouvé  de  monuments  en  place.  Les  monomenti) 
que  nous  décrivons  ci-après  ont  été  utilisés  comme  matôriaox*  H 
semblerait  même  que  Ton  se  soit  attaché  à  les  détruire. 

Le  premier  est  un  cippe  carré  surmonté  d'un  fronton  ayant  à 
son  centre  un  croissant  (S)  ;  il  est  en  granit  à  gros  grains  pror^iant 

(I)  Chroniques  de  SalnUMartial^  éd.  DuPLts-ÂQma.  p.  3,  40-49. 
(S)  Le  Qiusée  de  Saintes  possède  plusieurs  stèles  ornées  d'un  croi99aoi. 
Voy.  L.  AvfiiAT,  Catalogue  du  Musée  de  Scùnies^  période  gallo-romaioe. 


CmKTlènB  GALLO*A0UAiN,   tlÊliaViNGiEN   ET  CAÎldLlNGlEN.  1l^ 

de  carrières  situées  entre  Aureil  et  Saint-Léonard.  Hauteur, 
03  cent,  (y  compris  le  fronton,  17  cent.);  largeur,  42  cent.;  pro- 
fondeur, 59  centimètres.  Ce  cippe  a  été  repiqué  à  la  base  et  du 
côté  gauche.  Les  proportions  du  fronton  nous  font  connaître  sa 
largeur  primitive,  52  centimètres. 

Les  quatre  lignes  de  l'inscription,  seules  existantes,  ont  0,075 
millimètres  de  hauteur;  elles  sont  placées  dans  un  encadrement 
de  5  centimètres  de  largeur.  Les  lettres  ont  gardé  la  trace  d'une 
peinture  rouge. 

Cette  stèle  était  incorporée  dans  le  mur  de  la  chapelle  de  la 
Courtine,  construite  vers  le  x*  siècle,  le  côté  des  lettres  tourné 
vers  le  blocage. 

Le  propriétaire  du  terrain,  M.  Marbouty,  a  bien  voulu  offrir  au 
Musée  national  Adrien  Dubouché  ce  monument  ainsi  que  les  au- 
tres débris  que  nous  lui  avons  signalé.  Nous  sommes  heureux  de 
pouvoir  l'en  remercier  ici. 

Voici  rinscription  : 

miSmknibus 

cTMEMO.m^ 

.  INOSSA 

.)NAME 

•  •  » 

AUX  DIEUX  MANES  ET  A  LA  MÉMOIRE  DE   ..INOSSA  ...NAME. 

Il  existait  encore  une  ou  plusieurs  autres  lignes,  car  la  pierre 
est  repiquée  à  la  naissance  de  la  cinquième  ligne. 

Le  seul  point  abrévialîf  est  après  mémo;  il  est  placé  au  pied  de 
la  lettre  et  parait  rond  autant  que  le  grain  du  granit  permet  d'en 
juger.  L'E  manque  au  commencement  de  la  deuxième  ligne  ;  une 
lettre  manque  aussi  au  commencement  de  la  troisième  ligne;  mais 
il  en  manque  deux  au  commencement  de  la  quatrième,  qui  débute 
par  un  trait  arrondi  pouvant  appartenir  à  un  D,  à  un  0  ou  à  un  Q. 

Les  savants  qui  se  sont  adonnés  à  l'épigrapbie  pourront  peut 
être,  malgré  ces  lacunes,  obtenir  la  lecture  complète  de  l'inscription. 

En  nou«  appuyant  sur  les  Inscriptions  de  la  Cité  des  Lémovices, 
par  M.  Espérandieu,  qui  date  les  monuments  d'après  la  forme  plus 
ou  moins  pure  des  lettres,  nous  pensons  que  le  nôtre  peut  être 
attribué  au  m*  siècle.  Comme  dans  les  inscriptions  d'Arrènes 
(Crease)  et  de  Châteauponsac  (Haute-Vienne),  qui  sont  de  cette 
époque,  on  remarque  l'irrégularité  de  hauteur  et  de  largeur  des 
lettres  ;  le  premier  des  trois  M  est  écrasé  ;  les  trois  S  ont  des  ten- 
dances vers  la  cursive;  les  trois  A  ont  un  écartement  exagéré  ;  les 
deux  0  ont  la  forme  légèrement  pointue,  ils  sont  moins  haut  que 
les  aulrfô  lettres;  les  E,  très  étroits,  ont  lenrs  branches  égales. 

T.  XL.  49 


ili  SOCléTè  ARCItÉOLOGIQUE  ET  BlSTOblQUE  fit!  LlHOUSllt. 

Le  second  monument  est  un  cippe  prismatique  trouvé  dans  le 
mur  de  soutènement  de  la  chaussée  de  la  rue  de  la  Courtine.  li  est 
semblable  à  celui  placé  derrière  le  chevet  de  la  Cathédrale,  mais 
la  boule  qui  le  surmontait  et  surtout  l'inscription  qui  en  formait  la 
base  n'ont  pas  été  retrouvées.  Hauteur,  0,73;  largeur  au  sommet. 
0,25,  à  la  partie  inférieure,  0,67.  Sous  cette  partie  se  trouve  une 
réserve  creusée,  de  forme  rectangulaire,  (de  0,32  sur  0,40  et  0,03 
de  profondeur),  qui  indique  qu'elle  servait  de  couvercle  à  Turne 
renfermant  les  cendres,  comme  cela  a  été  observé  maintes  fois 
dans  plusieurs  monuments  de  la  France,  et  notamment  dans  ceai 
de  la  Haute- Vienne  et  de  la  Creuse. 

Enfin,  un  cippe  carré  a  été  utilisé  pour  former  la  partie  arrondie 
de  la  tête  de  Tun  des  sarcophages  en  granit  du  xn*  siècle.  Hau- 
teur, 50  cent.j;  largeur,  30  cent.  L'inscription,  très  maltraitée  par 
le  tailleur  de  pierre,  est  illisible;  elle  se  composait  de  quatre  ligne> 
de  0,06  cent,  de  hauteur  dans  un  encadrement  de  0,04  cent,  «ie 
largeur.  Nous  avons  cru  lire  :  DI,  début  habituel  des  inscriptions 
funéraires. 

Nous  pensons  que  Ton  doit  attribuer  à  la  fin  de  la  période  gallo- 
romaine  les  nombreuses  tombes  en  briques  et  en  calcaire  trouvée^ 
dans  la  couche  inférieure  du  cimetière  de  la  Courtine.  Elles  avaient 
la  forme  d'un  parallélipipède.  Leur  dimension  variait  suivant  la 
taille  du  défunt  de  1»,75  à  2»  en  longueur,  de  O^^iO  à  0-,50  en 
largeur.  Elles  étaient  orientées,  la  tête  au  couchant,  les  pieds  aa 
levant,  et  formaient  des  alignements  réguliers  allant  du  nord  au 
sud;  les  sépultures  étaient  séparées  par  des  intervalles  variant  de 
0™,50  centimètres  à  1  mètre.  Les  tombes  étaient  formées  de 
briques  ou  de  morceaux  de  pierre  de  0",40  à  0",45  sur  0",S5  à 
O^jéo,  et  de  6  à  8  centimètres  d'épaisseur;  ils  étaient  posés 
de  champ  sur  les  côtés  de  la  tombe,  et  à  plat  pour  le  fond  et  le 
couvercle.  Le  ciment,  s'il  y  en  a  eu,  n'était  pas  apparent.  Il  sem- 
blerait au  contraire  que,  la  fosse  étant  creusée,  on  l'aurait  tapissée 
(le  briques  ou  de  pierres.  Dans  quelques-unes,  on  s'était  seni 
de  tuiles  de  couverture,  dont  on  avait  abattu  le  rebord,  ou  bien, 
à  défaut  de  briques  assez  larges,  le  fond  comme  le  couvercle  se 
composaient  de  deux  briques  réunies  qui  présentaient  une  partie 
concave  sur  laquelle  reposait  le  corps  et  une  partie  convexe  pour 
le  recouvrir. 

Les  tombes  d'enfant,  en  briques,  étalent  en  plus  grand  nombre 
que  celles  des  grandes  personnes  et,  comme  elles  étaient  souvent 


ClJlïTlfcllE  CaLlO-ROUAIN,  HÉBOVlNGtSN  if  CAHCILIKCIkn.  ^7$ 

accolées  à  celles  en  granit  de  la  couche  supérieure,  nous  pen- 
sons que  ce  mode  de  sépulture  pour  les  enfants  a  subsisté  jusqu'au 
xui*  siècle. 

La  plupart  de  ces  tombes  s'étaient  affaissées  sous  le  poids  de  la 
terre  et  des  sépultures  placées  au-dessus.  Aux  trois  mètres  de  terre 
sous  lesquels  elles  reposaient  était  venue  s'ajouter,  depuis  le  com- 
mencement du  siècle,  une  couche  de  même  épaisseur  pour  former 
la  terrasse  située  à  l'angle  de  la  rue. 

Par  suite  de  cet  affaissement  on  devait  se  douter  que  les  infiltra- 
tions avaient  entraîné  beaucoup  de  terre  à  l'intérieur  des  tombes. 
En  effet  une  épaisse  couche  de  terre  recouvrait  le  squelette.  A  celte 
terre  se  trouvaient  mélangées  des  pierres  dune  certaine  grosseur, 
que  les  eaux  n'avaient  pu  entraîner  ;  mais  suivant  les  observations 
du  M.  l'abbé  Cochet,  qui  lui  aussi  a  trouvé  beaucoup  de  cercueils 
ri^mplis  de  terre,  ces  pierres  avaient  dû  être  mises  pour  soutenir 
la  tête  au  moment  de  l'ensevelissement  (1).  Les  eaux  ont  donc  sim- 
plement déplacées  les  pierres  qui  avaient  servi  d'oreiller. 

Nous  lui  empruntons  aussi  une  observation  qu'il  nous  a  été  impos- 
sible de  vérifier  complètement  au  cimetière  de  la  Courtine,  parce 
qu'il  aurait  fallu  suivre  les  travaux  du  matin  au  soir.  Dans  les  cime- 
tières du  Ménii  et  de  Fécamp,  M.  Cochet  a  vu  «  le  terrain  sillonné, 
souterrain emenl  par  des  substructions  de  SO  à  60  centimètres 
il'épaisseur,  courant  en  sens  divers  n.  Ces  murs,  d'après  lui,  for- 
maientdes  carrés  et  des  séparations,  des  compartiments  funéraires 
destinés  à  marquer  la  division  des  familles.  A  la  Courtine,  nous 
avons  rencontré  plusieurs  de  ces  murs,  construits  en  petit  appareil, 
quelques  uns  servant  de  socle  aux  sarcophages  en  pierre  des  épo- 
ques suivantes. 

Les  squelectes  étaient  intacts,  la  tête  tantôt  droite,  tantôt  légère- 
ment inclinée  sur  le  cété,  la  bouche  ouverte  ou  fermée,  les  bras 
allongés  et  serrés  le  long  du  corps.  Les  tombes  de  cette  époque  ne 
contenaient  qu'un  seul  corps.  Les  ossements  étaient  natjrellement 
en  moins  bon  état  que  ceux  des  couches  supérieures,  k  cause  de 
l'époque  reculée  des  sépultures  et  de  l'humidité  plus  grande  à  cette 
profondeur.  Ils  étaient  aussi  plus  légers  et  plus  fragiles. 

Les  objets  recueillis  dans  les  tombes  gallo-romaines  se  réduisent 
(I)  L'Abbb  CocBET,  La  fformandie  souterrain»,  pOMabn, 


^?Ô  SOCIÉTÉ  ARCaÉOLOGIQUE  Et  lUStORtQCÊ  bU  UltÔUStN. 

à  forl  peu  de  chose;  ceux  en  métal  sont  iellemeDl  oxydés  qu'ils  soDtà 
peine  reconnaissables.  S'appuyant  sur  la  pauvreté  de  ces  IrouTaiUesel 
sur  ce  fait,  depuis  longtemps  mis  en  lumière  par  M.  Félix  de  Ver- 
neilh,  que  dans  le  Limousin  et  le  Périgord  les  tuiles  à  la  roinaiDe 
furent  en  usage  jusqu'au  x*  ou  xi""  siècle,  quelques  personnes  oe 
pouvaient  croire  que  les  tombes  en  briques  remontassent  à  l'époque 
gallo-romaine. 

Une  découverte  est  venue  dissiper  tous  les  doutes.  Dans  Tunede? 
tombes,  et  mélangée  à  la  terre  dont  elle  était  remplie,  l'entrepre- 
neur, M.  Daccord,  a  trouvé  un  phallus  en  bronze  avec  anneau  de 
suspension,  recouvert  de  sa  patine,  dans  un  parfait  état  de  conser- 
vation. Cet  objet,  beaucoup  plus  ancien  que  la  tombe,  a  dû  être 
placé  là  comme  souvenir;  son  exécution  dénote  une  des  plus  belles 
périodes  de  Tart  romain. 

Quelques  cercueils  renfermaient  une  petite  boule  d'aspect  verdâlre 
dont  nous  donnons  l'analyse  d'après  M.  Barret,  conservateur  de  la 
section  de  minéralogie  au  Muséum  du  Limousin  :  «  Matière  cal- 
vreuse,  transformée  par  le  feu,  dans  laquelle  on  dislingue  de 
rémail  cuivreux,  du  charbon  de  bois,  des  grains  de  sable  et  des 
paillettes  de  mica.  Il  semble  qu'il  y  ait  quelques  parcelles  d'or  non 
attaqué  ».  Peut-être  était-ce  un  bijou  ou  une  amulette? 

Signalons  encore  une  bague,  des  épingles  de  suaire,  des  agrafes 
et  des  boucles  en  bronze,  très  oxydées  et  ne  présentant  qu'an 
médiocre  intérêt. 

Pouren  terminer  avec  la  période  gallo-romaine,  on  a  trouvé  aulour 
des  tombes  un  chapiteau  et  des  moulures  en  marbre,  un  fût  de 
colonne  cannelée,  en  grès  blanc,  de  0"  35  de  diamètre,  des  piliers 
carrés  en  poudingue  polygénique  de  Montbrond,  de  0"  50 de  côté: 
des  bases  de  colonne  en  granit  ayant  un  diamètre  de  0*  66  et  des 
claveaux  de  0"  90  de  longueur,  qui  par  leurs  proportions  ont  dû 
appartenir  à  un  édifice  très  important,  peut-être  à  l'Amphi- 
théâtre (i). 

Les  fragments  de  poteries  samiennes  avec  ornements  en  reUef 

étaient  nombreux  sur  le  sol.  On  y  a  trouvé  aussi  des  défenses  de 
sanglier. 

La  seule  monnaie  romaine  découverte  en  février  189Sesl  un  grand 
bronze  de  Néron;  mais  en  1862,  on  en  avait  trouvé,  dans  le 
voisinage, ,  aux  effigies  de  Claude,  Néron,  Vespasien,  Antonio- 
le-Pieux,  ainsi  qu'une  statuette  de  la  Vénus  ptidique  en  bronze  (2\ 

(1)  D'après  les  Annales  manuscrltea^  dites  de  1638,  les  moines  de  Saint- 
Martial  auraient  été  autorisés  par  Louis-le-Débonnaire  àse  servir  des  pierres 
(le  Ta  m  phi  théâtre  pour  leurs  cox»tructions. 

(ij  Bulletin  de  la  Soc,  arch.  et  hiat.  du  Limousin^  l.  XXXIV,  p.  260. 


ciuerièRK  gallo-romain  mêrovingikn  et  caroliingien.  777 

En  1836  (1)  et  en  1844  (î),  on  en  avait  trouvé  aussi.  Mais  nous 
pensons  avec  M.  labbë  Cochet  que  la  découverte  d'une  monnaie  ne 
peut  déterminer  une  date  si  elle  n'est  corroborée  par  d'autres  objets. 
En  présence  de  monnaies  de  plusieurs  règnes,  il  faut  prendre  la 
dernière  en  date. 


PÉRIODES  MÉROVINGIENNE  ET  CAROLINGIENNE. 

C'est  aux  périodes  mérovingienne  et  carolingienne  que  nous 
attribuons  les  tombeaux  en  calcaire  delà  couche  moyenne  du  cime* 
tière,  quelquefois  côte  à  côte  avec  ceux  de  la  période  gallo- 
romaine,  et  dont  q.uelques-uns  étaient  engagés  sous  les  muraiUes 
de  réglise  de  Sainte-Marie  de  la  Courtine  et  sous  celles  du 
Château,  construites  au  x'  siècle. 

Le  calcaire  dont  ils  sont  formées  provient  de  TAngoumois  et 
devait  être  conduit  à  Limoges  par  la  voie  de  Saintes. 

Le  poids  énorme  de  la  terre  qui  recouvrait  ces  tombeaux  en  avait 
écrasé  plusieurs  ;  ajoutons  que  l'humidité  du  sol  les  avait  rendu 
mous  et  friables.  C'est  avec  beaucoup  de  peine  qu'on  a  pu  en  recoos* 
tituer  deux,  qui  ont  été  déposés  au  Muséum  du  Limousin. 

Leur  forme  était  trapézoïde. 

Comme  les  tombeaux  en  briques,  ceux  en  calcaire  étaient  de 
dimensions  variable,  suivant  la  taille  des  défunts  ;  la  longueur  était 
de  1»  90  à  2«  10  ;  la  largeur  à  la  tête  de  0»  56  à  O""  68  ;  aux  pieds, 
de  O"»  3S  à  0»  45;  et  la  profondeur  de  0»  35  à  0«  45. 

lis  se  composaient  de  deux  pièces,  Tune  pour  Tauge,  l'autre 
pour  le  couvercle.  L'auge  était  à  arête  vive,  plus  large  à  la  tête 
qu'aux  pieds;  elle  présentait  cette  particularité,  observée  sur  plu- 
sieurs points  de  la  France,  que  les  angles  du  côté  de  la  tête  étaient 
inégaux,  l'un  droit,  l'autre  aigu.  Le  couvercle  était  à  dos  d'âne 
et  présentait  une  grande  épaisseur. 

Les  corps  avaient  la  même  disposition  dans  les  cercueils  que 
pendant  la  période  précédente.  Dans  ceux  qui  avaient  offert  un  pas- 
sage aux  infiltrations,  une  quantité  de  terre  recouvrait  entiè- 
rement le  squelette  et  remplissait  la  tombe,  dont  les  dimen- 
sions permettaient  parfois  de  mettre  deux  corps.  Fréquemment 
on  a  trouvé  deux  squelettes  dans  la  même  tombe;  souvent  aussi 
un  squelette  de  fçmme  avec  un  squelette  d'homme,  ce  qui  semble 

(3)  Bulletin  de  la  Soc.  d* agriculture,  sciences  et  arts^  1829,  p.  Mî, 
1837,  p.  61,  1838,  p.  426,  1839,  p.  64,  IH,  143. 

(%)  Ibld.y  1845,  p.  78.  V.  aussi  Bull,  de  la  Soc,  arch.  et  hlst.  du  Ll^ 
mousin,  t.  IX  à  Xlli. 


778  SOCIÉTÉ  ARCnÉOLOGlQUE  ET  HISTORIQUE  DU  UHOCSIR. 

indiquer  que  la  sépulture  renfermait  les  deux  époux.  Lorsqae  celle- 
ci  contenait  deux  corps,  on  trouvait  quelquefois  Tun  des  crânes 
placé  aux  pieds  ;  cette  particularité  a  été  observée  dans  d'autres 
cimetières  de  la  même  époque. 

Le  corps  du  défunt  avait  laissé  une  empreinte  brune  dans  le  fond 
des  sarcophages  en  calcaire. 

A  notre  connaissance  on  n'a  pas  trouvé  d'objets  dans  ces  sépultures. 

L'absence  de  sculptures  sur  ces  tombes  cependant  si  faciles  à 
travailler,  nous  les  fait  ranger  parmi  les  tombes  non  apparentes. 
Nous  devons  cependant  faire  exception  pour  trois  d'entre-elles. 
dont  malheureusement  on  n'a  trouvé  que  des  fragments,  aussi  ne 
sommes-nous  pas  sûr  que  ce  soit  des  tombeaux. 

La  première,  en  calcaire,  présente  un  motif  d'entrelacs  des  plas 
gracieux,  avec  bordure.  On  remarque  à  la  base  un  double  cordon 
de  moulures.  Nous  devons  le  dessin  de  cette  pierre  à  l'extrême 
obligeance  et  à  l'habile  crayon  de  M.  Jules  Tixier.  Gomme  la  pierre 
est  creusée  en  dessous  des  deux  côtés,  dans  le  sens  de  la  longueur, 
et  qu'à  la  base  elle  présente  un  vide  elliptique  permettant  de  croire 
à  un  emboîtement,  il  se  pourrait  que  ce  fût  un  fragment  de  porte 
ou  un  compartiment  d'un  édifice. 

Les  deux  autres,  en  terre  cuite,  sont  beaucoup  plus  épais  d'nn 
côté  que  de  l'autre,  comme  s'il  devaient  former  une  bordure  ou 
un  lambris.  La  terre  assez  fine  est  bien  cuite,  les  ornements  sont  en 
relief.  Le  motif  décoratif  du  premier  fragment  est  formé  par  dea\ 
lignes  en  zizag  séparées  par  un  filet  et  placés  dans  un  encadre- 
ment ;  le  second  offre  une  série  d'oves  dont  le  sens  est  alterné. 

PÉRIODE  DU  XI"  AU  XUI*  SIÈCLE. 

Les  tombes  du  xi'  au  xin®  siècles  peuvent  se  subdiviser  en  plu- 
sieurs catégories  suivant  les  niveaux  auquels  on  les  a  rencontrées. 
Lesl  plus  anciennes,  croyons-nous,  sont  celles  formées  de  la 
façon  la  plus  rudimentaire  :  des  blocs  de  granit  d'épaisseur  et  de 
longueur  différentes  pour  les  côtés,  à  la  tête  une  pierre  de  champ, 
une  brique  ou  une  pierre  arrondie  extérieurement  et  intérieure- 
ment ;  le  fond  tapissé  avec  des  briques  de  couvertures  dont  les 
rebords  sont  abattus,  et  enfin  le  couvercle  formé,  comme  les 
côtés,  de  deux  ou  trois  blocs  d'épaisseur  et  de  longueur  inégales. 

Il  semble  que  la  ville  traverse  une  période  de  misère.  Le  goût 
artistique  a  disparu.  Ou  se  sert  de  matériaux  provenant  d'édifices 
en  ruines.  Les  briques  de  couvertures,  les  anciens  dallages  en  gra- 
nit^ les  linteaux  de  portes,  etc.,  ont  été  utilisés. 


Monument  mérovingien  au  cimetière  de  la  Courtine 


ClUBriÈRE  GALLO-ROMAIN»    MÉROVINUIKN  ET  GAROI^INGISN.  779 

Dans  le  spécimen  recueilli  au  Muséum  du  Limousin  une  partie 
de  Tun  des  côtés  et  du  couvercle  se  compose  de  larges  dalles  en 
granit  dont  on  a  taillé  les  rebords. 

D'autres  tombes  sont  entièrement  en  granit.  L'auge,  qui  est  quel- 
quefois en  deux  pièces,  présente  une  excavation  qui  donne  Tidëe 
du  corps  enveloppé  de  son  suaire,  comme  une  momie  égyptienne. 
La  place  de  la  tête  n'est  pas  réservée.  Le  couvercle  est  prismati- 
que, en  dos  d'âne  ou  semi-circulaire. 

Le  granit  qui  a  sçrvi  à  ces  tombes,  d'après  M.  Barret,  est  un  gra- 
nit granuli tique  à  gros  grains  provenant  des  carrières  des  environs 
de  Saint-Léonard  ou  d'Âmbazac  (Haute-Vienne). 

Pour  quelques-unes,  les  pierres  formant  la  partie  arrondie  de 
la  tête  sont  en  grès  quartzeux  et  feldspathique  connu  sous  le 
nom  de  molasse^  que  Ton  trouve  près  de  Montbron  (Charente). 

Aux  granits  est  venu  s'ajouter  une  matière  nouvelle,  particu- 
lière au  Limousin,  c'est  le  poudingue  polygénique  de  Montbron. 
Le  nombre  des  tombes  en  poudingue  est  très  considérable  au 
cimetière  de  la  Courtine. 

D'après  M.  Barret,  le  poudingue  est  composé  d'une  pâte  informe 
à  cléments  multiples  provenant  de  roches  primitives  et  de  fragments 
plus  ou  moins  roulés  de  roches  diverses,  telles  que  schistes  cris- 
tallins, schistes  micacés  et  satinés,  serpentine,  etc.,  le  tout  forte- 
ment altéré  et  coloré  en  vert  ou  en  rouge  par  du  fer  silicate  et 
oxydé.  Son  aspect  verdâtre  a  fait  croire  tout  d'abord  que  les  tom- 
bes étaient  en  serpentine,  dont  les  gisements  bien  connus  des 
architectes  de  nos  églises  du  xu*  siècle,  avaient  servi  à  tailler  les 
colonnettes  des  portails,  etc.  Mais  le  poudingue  dont  il  s'agit  vient 
de  Montbron  (Charente),  où  les  Limousins  avait  l'habitude  d'aller 
chercher  leurs  matériaux  depuis  la  période  gallo-romaine. 

Le  poudingue  de  Montbron  ne  pèse  pas  plus  que  le  calcaire,  ce  qui 
le  rendait  transportable.  Il  se  prête  bien  à  la  taille,  mais  son  grain, 
très  gros,  ne  permet  pas  de  le  sculpter.  Il  est  très  poreux  et,  en  le 
mouillant,  on  sent  très  bien  l'odeur  cadavérique  dont  il  s'est 
imprégné. 

On  s'est  servi  du  poudingue  pour  les  tombeaux  de  la  région,  et 
on  en  trouve  un  certain  nombre  dans  le  cimetière  de  Chassenon, 
Tune  des  étapes  de  la  voie  romaine  de  Lyon  à  Saintes,  située  à 
proximité  des  carrières. 

Les  cercueils  en  poudingue  ont  tous  la  même  forme,  ce  qui  ferait 
supposer  qu'ils  étaient  taillés  dans  la  carrière  même,  pour  être 
ensuite  transportés  dans  diverses  localités.  Le  couvercle  est  plat, 
d'une  seule  pièce.  L'auge  est  aussi  d'une  seule  pièce,  elle  a  la 


780  SOCIÉTÉ  ARCflèOLOGIQee  BT  HISTOftIQUE  BU   LIMOUSIH. 

forme  trapézoïde.  Les  deux  angles  extérieurs  da  côté  de  la  tête 
sont  abattus  ;  à  rintërieur  la  place  de  la  télé  est  ménagée  par  on  In- 
tervalle entre  deux  cubes  de  4Î  cent,  carrés,  moins  élevés  de 
10  cent,  que  le  bord  de  Tauge;  entre  eux  une  saillie  de0",04  forme 
Toreiller  où  la  tôle  reposait. 

Enfin  nous  arrivons  à  la  dernière  forme  des  tombes.  Celles-ci  se 
composent  de  deux  pièces  en  granit,  Tune  pour  l'ange,  Tautre  pour 
le  couvercle,  qui  est  prismatique,  en  dos  d'&ne  ou  semi-eireolaiFe. 
Dans  range,  la  place  de  la  tête  est  ménagée.  G*est  le  type  bicD 
connu  des  sarcophages  du  xm*  siècle. 

Les  objets  découverts  sont  les  suivants  :  des  ampoules  en  verre 
très  mince  ayant  contenu  de  Teau  bénite  ou  des  parfums,  one 
barre  de  fer  et  une  sandale  en  gros  cuir  encore  fixée  aa  pied  do 
défunt. 

D'après  la  forme  des  tombeaux,  nous  pensons  que  Ton  cessa  d'eu- 
terrer  dans  le  cimetière  de  la  Courtine  après  le  xm*  siècle.  A  celte 
époque,  les  bâtiments  du  monastère  de  Saint-Martial,  à  la  suite  d*Qn 
incendie  probablement,  furent  transportés  du  côté  nord  de  la  ba- 
silique et  Tespace  qu'ils  occupaient  autrefois  devint  une  place  pu- 
blique connu  sous  le  nom  déplace  de  la  Claustre.  D'autre  part  de 
nombreuses  églises  paroissiales  furent  construites  et  elles  eurent 
toutes  leur  cimetière  particulier. 

Nous  avons  dit  plus  haut  que  les  sépultures  de  la  couche  supérieure 
seules  étaient  diversement  orientées.  Nous  nous  sommes  expliqué 
le  fait  plus  lard  lorsqu'on  a  dégagé  les  murs  de  la  chapelle  de  la 
Courtine.  Il  était  d'usage,  pendant  la  période  romane,  d*enterrer 
dans  l'intérieur  ou  sous  la  gouttière  des  églises.  Cet  usage  s'est 
manifesté  d'une  façon  curieuse  à  La  Courtine.  Sans  parler  des  nom- 
breuses tombes  placées  à  Tinlérieur,  on  en  a  trouvé  sur  le  senil 
de  la  chapelle  dix  en  poudingue,  se  touchant  toutes  par  la  léte  et 
formant  comme  un  soleil  rayonnant.  Le  long  des  murs  de  la  cha- 
pelle, les  cercueils  étaient  échafaudés  les  uns  au-dessus  des  autres 
avec  une  intention  pieuse  bien  évidente. 

M.  l'abbé  Cochet,  rendant  compte  de  ses  découvertes  à  Bouteille 
près  Dieppe,  cite  uu  certain  nombre  de  personnages  qui  avaient 
demandé  comme  une  faveur  d'être  enterres  sous  la  gouttière  de 
l'église. 

A  part  le  phallus  en  bronze  dont  il  a  été  question»  nous  avons 
dit  que  les  autres  objets  trouvés  présentent  peu  d'intérêt.  On  a  lieu 
d'être  surpris  de  ce  mince  résultat,  qui  ne  peut  avoir  pour  cause 
qu'une  spoliation  des  sépultures  à  une  époque  reculée.  En  voici  une 
preuve.  On  venait  de  dégager  uo  beau  sarcophage  en  granit  placé 


CiaiETlÈBK  GALLO-ROMAIN,    MÉHOVINGlfiN  ET    CAROLINCIBN.  78 1 

contre  le  mur  près  de  rentrée  de  la  chapelle  et  reposant  sur  une 
muretle  en  petit  appareil  romain.  Ce  sarcophage  mesurait 
2"",  10  de  longueur  sur  70  cent,  de  largeur,  et  il  avait  un  couvercle 
en  dos  d'âne  d'une  seule  pièce  pesant  un  poids  énorme.  Huit  hom- 
mes vigoureux  parvinrent  à  soulever  ce  couvercle,  et,  contre  toute 
attente,  les  personnes  présentes  >constatèrent  que  Tauge  ne  conte- 
nait qu'un  squelette  incomplet,  dont  les  os  avaient  été  déplacés.  Le 
crftne,  cette  partie  du  squelette  qui  se  conserve  le  mieux  et  le  plus 
longtemps,  n'y  était  plus. 

Le  nombre  des  tombes  découvertes  dans  ce  petit  coin  du  cime- 
tière de  La  Courtine  s'élève  à  plus  de  cent  cinquante,  d'après  l'in- 
dication de  l'entrepreneur,  M.  Daccord,  qui  s'est  servi  de  leurs 
débris  pour  construire  les  fondations  et  les  caves  de  la  maison. 


»  * 


On  a  vu  plus  haut  que  nous  signalions  une  monnaie  romaine, 
un  grand  bronze  de  Néron,  ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  ce  soit  la 
seule  découverte  ;  car  les  fouilles  nécessitées  par  les  constructions 
voisines  en  avaient  fait  découvrir  un  plus  grand  nombre  de  la 
même  période. 

Nous  devons  dire  un  mot  des  autres  monnaies  trouvées  dans  les 
fouilles. 

Les  monnaies  françaises  qu'il  nous  a  été  permis  de  voir  se  répar- 
tissent ainsi  :  une  carolingienne,  quatorze  capétiennes  ;  toutes  sont 
plus  ou  moins  frustes. 

La  monnaie  carolingienne  est  en  argent;  elle  a  été  frappée  avant 
le  xm*  siècle  par  l'un  des  comtes  de  la  Marche  (1).  Elle  porte  : 
^  LODOICVS,  entre  deux  grènetis,  croix  dans  le  champ. 
4    ^  EGOLISSIME  entre  deux  grènetis,  croisette  entre  quatre 
annelets,  dérivation  du  type  odonique  (2). 

C'est  un  type  connu  de  tous  les  numismates. 

Parmi  les  monnaies  capétiennes,  on  remarque  un  petit  tournois 
d'un  Philippe  (VI,  très  probablement).  Cette  monnaie  est  très 
fruste  et  elle  est  coupée  en  deux. 

(!)  Hugues  IK  de  Lusignaa,  comte  de  la  Marche,  par  son  mariage  avec 
Maibilde  d^Angouléme,  en  4181,  avait  réuni  les  deux  comtés. 

(2)  Le  Musée  national  Adrien  Dubouché  possédait  déjà  celle  monnaie. 
Quelques  auteurs,  et  notamment  Tabbé  Micbon  et  Fillloux,  pour  ne  citer 
que  ceux  de  notre  région,  Pont  attribuée  à  tort  à  Louis-le-Débonnaire. 
C'est  en  effet  ce  ror  qui  établit  des  comtes  d*AngouIême  en  839.  Mais 
d'après  plusieurs  aateup»  c'est  jusqu'à  Louis-d'Outremer  qu'il  faut  des- 
cendre pour  trouver  le  monnayage  qui  nous  occupe.  Notre  monnaie  a  été 
frappée  du  x<*  au  xm*  siècle,  parce  qu'à  partir  de  celte  dofnièrc  époque 
l'un  des  annelets  fut  remplace  par  un  croissant. 


*8I  SOCIÉTÉ  AftCaÉOLOGlQUB   ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIR. 

e  PHILIPPUS  REX,  croix. 

«    e  TURONUS  CIVIS,  châtel. 

Quatre  grands  blancs  de  Charles  VII,  dont  la  présence  dans  le 
cimetière  peut  s'expliquer  parlavisitedeceroiàVabbaye  de  Saint- 
Martial  en  1439  et  aux  libéralités  qu'il  dut  faire  à  cette  occasion  (f  ); 
—  les  autres  monnaies  sont  pour  la  plupart  des  doubles  tournoi^ 
en  cuivre  de  Louis  XIII  ou  de  Louis  XIV. 

Toutes  ces  monnaies  ont  été  offertes  au  Musée  national  Âdriec 
Dubouché  et  nous  devons  nos  remercîmen^s  à  M.  Louis  Marboutv, 
propriétaire,  et  à  M.  Daccord,  entrepreneur. 


♦  ♦ 


Au  point  de  vue  de  la  topographie  du  vieux  Limoges,  la  fouille 
de  la  rue  de  la  Courtine  a  permis  de  déterminer  exactement  : 
!•  une  partie  de  Tenceinte  de  Château  de  Limoges  an  x*  siècle; 
2^  remplacement  et  les  dimensions  de  Téglise  de  la  Courtine. 

La  portion  de  Tenceinte  se  compose  d'un  mur  de  Î^ïSO  d'épais- 
seur sur  12°  de  longueur,  placé  entre  les  rues  Fourie  et  de  la 
Courtine,  et  parallèle  à  ces  deux  rues.  Il  fait  une  saillie  de  2",50  sur  les 
maisons  ayant  façade  rue  de  la  Courtine  et  se  trouve  à  1 1",65  de  Faii- 
gnemenl  de  cetle  dernière  rue.  Il  se  terminait  brusquement,  comme 
un  mur  démoli,  du  côté  de  la  rue  Dalesme,  à  une  distance  de 
4°  75  de  cette  rue.  11  supporte  la  maison  où  se  trouvait  Tinslitu- 
tion  Barbaud  jusqu'à  une  hauteur  de  8°"  correspondant  à  la  hau- 
teur du  premier  étage  des  maisons  voisines,  du  côté  de  la  rue  de  la 
Courtine,  et  à  la  hauteur  du  rez-de-chaussée  de  ces  mêmes  maisons 
du  côté  de  la  rue  Fourie.  Au-dessus  de  ce  niveau,  s'élève  une  mu- 
raille moderne  de  8"*  de  hauteur  et  de  70  centimètres  d'épaisseur, 
ce  qui  donne  à  la  maison  une  hauteur  totale  de  16°. 

Il  est  à  remarquer  que  le  mur  de  2" ,50  doit  son  épaisseur  à  la 
juxtaposition  de  quatre  murs  différents;  les  deux  premiers,  de 
30  cent,  et  70  cent.,  d'épaisseur  appartenaient  à  l'église  de  la 
Courtine,  et  les  deux  autres,  ayant  1"  et  60  cent.,  fermaient  à  la 
fois  les  dépendances  de  l'abbaye  et  le  Château  de  Limoges. 

Les  ouvertures  pratiquées  dans  ce  mur  du  côté  de  la  rue  de  la 
Courtine  mettaient  en  communication  le  rez-de-chaussée  du  côlé 
de  la  rue  Fourie  avec  une  terrasse.  L'architecte  qui  a  pratiqué  ces 
ouvertures,  au  commencement  de  ce  siècle,  connaissait  bien  l'épais- 
seur de  la  muraille,  aussi  a-t-il  pu  sans  inconvénient  pour  sa  soli- 
dité faire  amener  les  terres  qui  formaient  la  terrasse. 

(1)  Ch.  de  Si-Martial,  p.  202. 


CIMCTIÂRE  GALLO-ROMAIN,   MÀROVINGIBN    ET  CAROLINGIEN.  783 

Les  fenêtres  des  étages  supérieurs  sont  sans  intérêt  pour  nous 
puisqu'elles  ont  été  pratiquées  dans  le  mur  moderne  construit  au- 
deasus  de  l'ancien  mur  d'enceinte.  La  surélévation  de  ce  mur  est 
de  date  récente,  car  les  maisons  voisines,  construites  du  \m*  au 
XIV*  siècle,  n'avaient  que  deux  étages  et  on  voit  très  bien  qu'elles 
ont  été  exhaussées  d'un  étage  à  une  époque  postérieure. 

Du  reste,  le  mur  de  Téglise  de  la  Courtine  s'appuyant  sur 
cette  partie  du  mur  d'enceinte,  avait  obligé  l'architecte  du  xni«  siè- 
cle à  tourner  la  façade  de  cette  maison  du  côté  de  la  rue  Fourie, 
et  c'est  de  côté  qu'elle  avait  toutes  ses  ouvetures  autrefois. 

II  se  pourrait  que  la  maison  dont  nous  parlons  ait  appar- 
tenu autrefois  à  l'abbé  de  Saint-Martial,  et  que  ce  soit  celle  dési- 
gnée dans  plusieurs  actes  sous  le  nom  de  la  Loge.  D'après  une  note 
de  M.  Louis  Guibert,  reproduisant  une  confrontation  tirée  d'un 
acte  de  15S1  (1),  il  est  dit  :  «  ...  maison  à  deux  arceaux  de  la  rue 
de  la  Claustre  confrontée  entre  la  maison  de  l'abbé  appelée  laLoge, 
la  maison  acquise  de  Joseph  de  Julien  par  Béchameil^  la  place  de 
la  Claustre  par  devant  et  la  maison  de  Béchameil  par  derrière.  ». 
Le  voisinage  de  l'ancienne  tour  de  l'Abbé,  construite  dans  l'axe 
de  la  rue  Dalesme  actuelle,  donnerait  une  nouvelle  force  à  celle 
hypothèse. 

La  maison  a  été  tellement  modifiée  de  nos  jours,  qu'il  est  bien 
difficile  de  se  rendre  compte  de  ce  qu'elle  était  au  xiv«  siècle, 
mais  elle  a  conservé  cependant  une  cuisine  spacieuse,  avec  voûte 
en  arête  soutenue  par  des  piliers  cyUndriques  sans  chapiteau. 
Du  côté  Nord,  on  remarque  une  vaste  cheminée,  à  droite  et  à 
gauche  de  laquelle  se  trouvent  deux  petits  fours,  probablement  des- 
tinés pour  les  rôtis  ou  la  pâtisserie.  Dans  cette  cuisine  s'ouvrent 
les  prises  d'air  des  caves  très  profondes,  placé  au-dessous,  comme 
il  en  existe  dans  toutes  les  anciennes  maisons  de  Limoges. 

Expliquons  maintenant  les  raisons  qui  nous  font  penser  que 
celte  muraille  est  un  des  restes  de  l'enceinte  du  Château  au 
X*  siècle. 

On  sait  que  la  porte  Orgolet  (2)  se  trouvait  dans  l'axe  de  la  rue 
Poulaillère  située  presque  en  face  de  la  rue  des  Taules.  En  venant 
du  haut  de  la  ville  pour  se  raccorder  à  cette  porte,  le  mur  d'en- 
ceinte était  placé  derrière  les  maisons  de  la  rue  du  Consulat, 


(f)  Gazette  du  Centre  du  M  février  1892. 

(3)  La  porte  Orgolel  a  reçue  dififérents  noms.  En  1305,  eUe  s*appclle 
Poissonnière  (CAr.  de  S.-Martlal,  p.  441);  en  1401,  elle  s'appelle 
Poulaillère(CAr.  de  S.-Martial,  p.  ÎOI). 


781  SOCICTÊ  ABCBÉOLOGiaUK  ET   DISTORIQUE  DU  LlMOUâlN. 

côté  pair,  comme  Tindique  la  différence  de  niveau  entre  celte  ne 
et  les  cours  intérienres  des  maisons  (1). 

De  l'autre  côté  de  la  porte  Orgolet,  située  à  peu  près  en  face  da 
n°  5  de  la  rue  des  Taules,  le  mur  se  prolongeait  dans  la  direction  in- 
diquée par  la  portion  découverte,  en  passant  devant  la  façade 
des  maisons  du  xni*  siècle  encore  existantes,  pour  aboutir  à  la  tour 
de  la  Courtine  ou  de  TAbbé  située  dans  Taxe  de  la  rue  Dalesme, 
comme  nous  Tavons  dit.  Le  mur  enfermait  ensuite  les  cimetières  de 
Saint-Martial,  en  passant  derrière  les  maisons  de  la  place  Fouroier 
jusqu'à  la  rue  Mirebeuf,  se  dirigeant  vers  la  rue  Saint-Nicolas  et 
englobant  la  partie  basse  de  la  place  de  la  République  actuelle. 
Sur  ce  point,  le  mur  de  Tenceinte  du  x'  siècle  retenait  les  terres 
qui  formaient  la  Terrasse  (2),  à  la  hauteur  de  la  rue  Fitz-James 
actuelle. 

L'enceinte  du  x*  siècle  laissait  en  dehors  des  quartiers  1res 
importants  qui  furent  englobés  déa'x  cents  ans  plus  tard  dans  la 
seconde  enceinte  (3).  L'abbé  pensait-il  qu'une  enceinte  pins 
étendue  eut  été  trop  difficile  à  défendre  ?  Etait-il  gêné  par  les  pré- 
tentions du  vicomte  ou  des  bourgeois?  Nous  pensons  que  ces  rai- 
sons ont  dû  dicter  les  limites  de  la  première  enceinte. 

Voici  maintenant  l'histoire  de  notre  pan  de  mur,  telle  que  nous 
l'apprennent  les  CAroniîM^«  ie  Satn^Afarrtal  (édition  Duplès-Agier;. 

En  premier  lieu,  la  partie  de  la  chronique  écrite  par  Adhémar 
de  Chabannes  dans  la  première  moitié  du  xr  siècle,  nous  apprend 
qu'Etienne  (920  f  937),  le  septième  abbé,  fit  construire  deux  por- 
tes dans  le  château  de  Saint-Martial,  une  près  des  monnayeurs  (4; 
appelée  Orgelet,  et  l'autre  près  des  Arènes,  appelée  Fustinic. 

Dans  la  chronique  rédigée  par  Bernard  Itier  à  la  fin  du  xir  siè- 
cle et  au  commencement  du  xni^,  il  est  dit  que  l'abbé  Etienne  fit 

(\)  y.  tioire  mémoire  sur  Limoges  d'après  ses  anciens  plans^  p.  47  et  ss. 

(2)  La  me  de  la  Terrasse  actuelle  doit  son  nom  à  cette  terrasse,  i 
laquelle  elle  aboutissait. 

(3)  V.  Limoges  d'après  ses  anciens  plans,  p.  47  et  ss. 

(4)  Chroniques  de  Saini-Martial  de  Limoges,  p.  3.  —  Nous  persistons 
à  croire,  jusqu'à  preuve  du  contraire,  que  le  mot  scutarius  doit  être  Ira- 
duit  ici  par  fabricant  d'écus  ou  monnayeur  et  non  par  fabricant  de  bou- 
cliers. Nous  pensons  que  le  nom  de  Scutari  ou  Escudari  donné  à  la  porte 
de  la  Cité  la  plus  rapprochée  du  qnarUer  des  Monnayeurs,  ad  scutario^, 
venait  du  voisinage  de  Tancien  atelier  monétaire.  11  se  poarrait  même  qoe 
le  domum  aus  rscbausiers  des  Chroniques  de  S.  Martial  (p.  40)  eàt  ia 
même  origine,  la  Monnaie.  On  trouve  dans  du  Gange,  au  mot  5etaat«m,  la 
mention  suivante  :  EsccciAU^in  Chron.  Franc. ad.  anq.  i:^,  apud  Leboeuf^ 
tom.  1.  Dissert.  pag.  cxlviij. 


CtltfiTIERE  GALLO-ROklAlN,   IIÂtiOVI^'GrBN  Et   CAKOLlNGlSN.  785 

construire  la  morèns  bu  courtine  (1),  la  tour  de  la  Courtine  et  la 
maison  aus  e^chausiers. 

Un  peu  plus  loin,  la  tnéme  chronique  (2),  indique  que  cette 
tour  de  la  l!lonrtioe  s'écroula  en  1211;  précédemment  elle  avait 
été  incendiée  le  jour  de  la  fête  de  saint  Hugues  (39  avril). 

C'est  tout  ce  que  les  chroniques  nous  disent  au  sujet  de  celte 
partie  de  la  muraille,  contre  laquelle  étaient  construits  les  bâti- 
ments claustraux  dont  la  basilique  de  Saint-Sauveur  formait  Tun 
.des  côtés  du  rectangle  (3). 

Dans  Tangle  le  plus  rapproché  de  la  place  Satint-Pierre  se  trou- 
vait l'église  de  la  Courtine  dont  nous  parlerons  plus  loin,  qui 
se  reliait  à  la  basilique  par  le  cloître.  Plusieurs  moines  étaient 
enterrés  dans  ce  cloîlriî,  entre  autres  Pierre  II  dit  Aubon,  dont  la 
sépulture  étaient  devant  Tautel  de  Sainte-Marie,  probablement 
devant  réglise  de  Sainle-Marie-de-la-Courtine  (4). 

A  la  suite  des  nombreux  incendies  du  premier  monastère  (S)  et 
surtout  après  l;i  révolte  des  bourgeois  contre  Tabbé  de  Saint- 
Martial  et  le  vicomte,  lorsqu'ils  eurent  obtenu  des  privilèges  des 
fils  d'Henri  II  d'Angleterre,  nous  voyons  les  moines  abandonner 
leur  premier  monastère  et  en  construire  un  nouveau  de  l'autre 
côté  de  la  basilique  à  partir  de  lâ40  (6). 

Bernard  Itier  nous  apprend  du  reste  que  le  premier  monastère 
était  en  très  mauvais  état  dès  12*20  et  que  la  reconstruction  du 
cloître  seul,  qui  tombait  de  tous  côtés  en  ruine,  exigeait  une  dé- 
pense de  50,000  sous  (7). 


(1)  AnsDjefcde  la  MorènCy  v.  Limoges  d^ après  ses  anciens  plans,  p.  44  etss. 

(2)  Chr.  de  S.  Martial,  p.  80. 

(3)  Ihid.,  p.  89. 

(4)  Annales  manuêcrites,  p.  447.  Dans  ses  Monastères  du  Limousin, 
M.  Roy-PierrcfiUe  fait  remarquer  que  cet  abbé,  indiqué  dans  le  GaUla 
Christiana  diaprés  plusieurs  manuscrits,  ne  hgure  pas  dans  la  liste  donnée 
par  le  conlinualeur  d'Adhémar  ei  par  Mabillon. 

Y.  pour  les  constructions  du  monaslère,  leurs  additions  ou  leurs  répa- 
rations les  Chroniques  de  Saint- Martial^  p.  IS,  66,  84,  92,  100,  107, 
M  4,  193. 

(8)  Les  Chroniques  de  Saint-Martial  en  signalent  sept  de  952  à  \tlO 
(V.  pages  4,  5,  10,  4â,  48,  52,  56,  66  et  107)  ;  les  Annales  manuscrites, 
flUes  de  1638,  ajoutent  ceux  de  919,  1051,  1403,4147,  p.  Ht,  441,446 
et  Ï52. 

(6)  Chr.  de  S.-Martial^  p.  423,  156.  C'est  à  tort  que  M.  Duplès-Agier 
émet  un  doute  sur  l'annnée  où  le  nouveau  cloître  fui  consiruiti  Le  texte  est 
formel. 

(7)  Ibld.,  p.  408  cl  109.  1 


786  SOCiFtÉ  ARC|IÉ01.0GrQVK  KT  mStOHlQtJB  Dt  LlllOtJSilt. 

A  la  fin  du  xiii'  siècle,  les  bourgeois  s'emparent  des  temins 
occupés  par  les  fossés  et  les  murailles  de  la  première  eneeinte. 
Suivant  la  disposition  des  lieux,  ils  adossent  leurs  maisons  à  U 
muraille,  ou  ils  font  disparaître  complètement  celle-^i. 

C'est  ainsi  que  sur  la  place  de  la  Claustre,  traversée  par  la  roe 
de  la  Courtine  actuelle,  cinq  maisons  datant  du  xrv*  siècle  ont  été 
construites  à  Talignement  du  parement  extérieur  de  l'ancien  mur 
détruit,  tandis  que  du  côté  de  la  rue  des  Taules,  les  maisons  odI 
deux  façades,  Vune  sur  cette  dernière  rue  et  Vautre  sur  la  place. 
A  Faulre  extrémité  de  la  rue,  il  n'était  pas  possible  de  démolir 
l'ancien  mur  sans  démolir  en  même  temps  Téglise  de  la  Cour- 
tine qui  s*appuyait  dessus.  Pour  cette  cause,  le  mur  d'enceinte  fut 
conservé  et  la  maison  que  Ton  construisit  s'y  adossa,  ayant  sa  fa- 
çade du  côté  de  la  rue  Fourie. 
• 

Les  bâtiments  du  monastère  disparurent  donc  de  la  place  de 
la  Claustre  après  1240  et  celle-ci  conservera  la  même  physio- 
nomie Jusqu'aux  premières  années  du  xviu'  siècle  : 

Au  fond  de  la  place  (côté  est)  se  trouvaient  les  ruines  de  Tancieo 
cloître  qui  reliait  Téglise  de  la  Courtine  à  la  basilique  de  Saint- 
Sauveur,  comme  le  prouvait  l'existence  d'une  porte  murée  (1)  un  peu 
au-dessus  de  la  porte  du  Lion.  Au  sud,  les  maisons  bourgeoises 
avec  leurs  deux  arceaux  au  rez-de-chaussée,  dont  quelques-unes 
subsistent  encore.  Au  nord,  la  basilique,  dans  le  transept  de  la- 
quelle était  pratiqué  le  portail  méridional  appelé  porte  du  Lion  à 
cause  d'un  lion  de  pierre^  monté  sur  un  socle,  qui  se  trouvait  à 
côté  (2).  A  gauche  de  celte  porte  se  trouvait  encastré  dans  la  mu- 
raille le  haut-relief  connu  sous  le  nom  de  la  Chiche^  si  souvent 
décrit.  Puis  venait  la  grande  sacristie  à  l'angle  de  laquelle  un 
escalier  accédait  aux  archives  placées  au-dessus,  la  petite  sacristie, 
la  maison  du  marguillier,  le  marché  au  blé,  dit  la  Claustre,  près 
duquel  se  trouvait  les  étalons  de  mesure  de  grains  encastrés  dans 
le  mur  de  l'église  et  enfin  à  l'ouest,  la  grande  maison  Romanet  du 
Cailiaud,  dont  une  partie  subsiste  encore,  à  l'angle  de  la  place  et  de 
la  rue  des  Taules.  L'autre  angle  était  formé  par  la  maison  Thé- 
venin. 

Au  centre  de  la  place  se  trouvait  la  fontaine  de  marhre  ou  mieu\ 
de  Saint-Martial  ou  du  Cloitre,  dont  l'image  nous  a  été  conservée 
dans  un  plan  du  commencement  du  xvi*  siècle,  exécuté  probable- 


(4]  BuU.  de  la  Soc»  d^agricuUure,  sciences  et  artSi  t.  XI  p.  il,  pi.  iv. 
(3)  Ce  lion  se  trouve  aujourd'hui  dans  le  jardin  du  Musée  national  Adriea 
Dubouché. 


J 


CTttfcTlinK  GALLO*ftOMAm,   ItéROVlNGIEIf  ET  CAROtmÛlKN.  787 

ment  à  l'occasion  dn  procès  au  sujet  du  partage  des  eaux  entre  les 
consuls  et  Tabbé  de  Saint-Martial  (1). 

La  fontaine  est  bien  telle  que  nous  la  décrit  Âbraham-Golnitz 
lors  de  son  passage  à  Limoges  avant  1631  (2)  :  «  ....  celle  de 
Saint-Martial  est  en  marbre  noir  (3)  ;  mais  son  ancienneté  est  cause 
qu'elle  est  fendue  et  qu'elle  menace  ruine;  elle  a  été  consolidée 
avec  des  liens  de  fer  qui  en  assurent  la  durée.  L'eau  de  cette  fon- 
taine est  regardée  comme  un  médicament  par  les  habitants;  elle 
est  aussi  utile  aux  ouvriers  qui  travaillent  les  métaux  (les  émail- 
leurs),  car  sans  elle  ils  ne  pourraient  pas  donner  la  couleur  bleue 
aux  objets  de  cuivre  ;  leurs  œuvres  sont  travaillées  avec  le  plus 
grand  art  et  sont  expédiées  en  grand  nombre  chez  les  Turcs.  » 

Derrière  le  Cloître  sejtrouvait  l'un  des  cimetières  de  Saint-Martial 
qui  à  rorigine  devait  déborder  sur  la  place  du  Cloître,  mais  nous 
ne  pensons  pas  que  Ton  ait  enterré  du  côté  de  la  place  à  partir 
du  xHi*  siècle.  Ce  qui  nous  le  fait  croire,  c'est  que  les  tombes  les 
moins  anciennes  trouvées  à  la  Courtine  sont  de  cette  époque.  Du 
reste,  à  dater  du  moment  où  les  moines  ont  transféré  le  cloître 
du  côté  nord  de  la  basilique,  ils  cessent  d'enterrer  de  ce  côté. 
De  plus,  des  églises  nombreuses  se  sont  élevées  et  elles  sont 
toutes  entourées  de  leur  cimetière  particulier. 

La  place  du  reste  n'était  pas  grande.  Le  plan  que  Turgot  fit 
dresser  en  1765  (4)  nous  en  donne  la  dimension  :  40  mètres  dans 
sa  plus  grande  largeur  et  64  mètres  dans  sa  plus  grande  longueur  ; 
mais,  comme  on  l'a  vu  plus  haut,  de  nombreuses  maisons  en 
saillie  en  réduisaient  beaucoup  la  surface. 

Le  même  plan  indique  les  modifications  apportées  à  la  place  de 
la  Qaustre  par  le  tracé  de  la  rue  de  la  Courtine,  en  1742.  Du  côté 

(1)  Ce  plan  appartient  à  la  Société  archéologique  du  Limousin.  V.  au 
sujet  du  procès  des  eaux  les  Reg,  co/is.,  1. 1,  p.  9^1 15. 

(2)  Ahrahami  Golnitz  itinerariumBelgicO' Gallium,  —  Lugduni  Batao^ 
exofjicma  EUeoiriana,  1631,  in-12.  —  La  traduction  relative  au  Limou- 
sin a  été  donnée  par  M.  Tabbé  Lecler  dans  VAlmanach  limousin  de  18'75. 

(3)  11  est  à  croire  que  cette  vasque  en  marbre  provenait  d'un  édifice 
gallo-romain.  Lors  de  la  percée  de  l'avenue  de  la  Révolution  nous  avons 
signalé  la  découverte  de  fragments  d'une  vasque  en  marbre  blanc,  qui  de- 
vait orner  le  jardin  d'une  riche  habitation  romaine.  Les  Annalea  manus- 
crites (p.  U6)  disent  en  parlant  de  la  fontaine  du  Clottre  qu'elle  provenait 
de  la  rue  Mcuia,  Il  se  pourrait  que  cette  rue  se  trouvât  autrefois  dans 
l'ancienne  ville  romaine  du  Pont-Saint-Martial  et  que  son  souvenir  ait  été 
conservé  encore  an  xvi'  siècle,  date  de  la  rédaction  de  la  première  partie 
des  Annales. 

(4)  Ce  plan  appartient  aux  Archives  départ.,  série  C,  443,  feuille  3. 


786  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGtQUK  ET  Ett$TO&tQ0K  DU   LIMOCStK. 

nord»  une  maison,  la  seule  existante,  était  frappée  d'alignèmeat. 
Celait  la  grande  maison  Romanet  du  Gaillaud,  tajoronrinii  à 
M.  Lajudie,  qui  a  conserré,  du  côté  de  la  rue  des  Taules,  ses  deui 
arceaux  surmontés  d'une  corniche  avec  modillons  sculptés.  Les  (er- 
rainsenprolongementfurenltransformésenjardins  avec  terrasse.  De 
l'autre  côté  de  la  rue,  on  vendit  aux  propriétaires  riverains  les 
seize  mètres  qui  les  séparait  du  nouvel  alignement,  pour  faire  anssi 
des  jardins  au-devant  de  leurs  maisons. 

Lorsque  la  terrasse  ft  Tangle  de  la  rue  de  la  Courtine  existait, 
on  était  loin  de  se  douter  que  Téglise  de  la  Courtine,  qui  arait 
vu  bien  des  enterrements,  se  trouvait  elle-même  enterrée  sous 
quatre  mètres  de  terre. 

L'église,  que  les  fouilles  nous  ont  permis  d^exhumer,  était 
orientée.  Elle  se  composait  d'une  seule  nef  avec  abside  en  cul  de 
four,  soutenue  par  trois  contreforts.  Le  mur  latéral,  parallèle  à  la 
rue  de  la  Courtine,  était  à  4"*  30  de  cette  rue,  et  il  y  avait  une  dis- 
tance de  3"  40  entre  Textrémité  de  l'abside  et  la  rue  Dalesme. 
La  chapelle  avait  12  mètres  de  longueur  totale,  savoir  :  contrefort, 
0"  75  ;  mur  de  l'abside,  0"  80  ;  abside,  S"  50  ;  mur  séparant  l'ab- 
side de  la  nef,  0»eO.;  nef,  6»  80;  seuil,  1"  18.  Sa  largeur  totale,  en 
y  comprenant  les  deux  murs  de  0"  70,  était  de  7*  40.  Le  diamètre 
de  l'abside  était  de  4  mètres  en  y  comprenant  les  deux  murs  de 
0""  80.  À  trois  mètres  du  seuil,  mais  pas  tout  à  fait  dans  Taxe  de  la 
chapelle,  se  trouvait  une  ouverture  circulaire  de  1"80  de  diamètre, 
donnant  accès  à  un  puits  (funéraire?)  dans  lequel  on  n'a  rien  trcavé. 

Ces  dimensions  ne  concordent  pas  avec  celles  données  par 
le  P.  Bonavcnture  (1)  :  9  pieds  de  largeur  sur  20  de  longuenr, 
soit  3  mètres  sur  7.  Cet  auteur  ajoute  que  «  devant  l'autel  se 
trouvait  un  degré  ou  escaUer  conduisant  à  quelque  cave  pour 
enterrer  les  morts  ».  Si  on  n'a  pas  retrouvé  l'escalier  devant 
l'autel,  en  revanche,  on  a  découvert  plusieurs  cercueils  et  une 
grande  quantité  d'ossements.  Il  est  à  croire,  du  reste,  que  le  pre- 
mier caveau  étant  plein,  on  construisit  le  puits  dont  il  est  question 

plus  haut. 

Le  niveau  de  la  chapelle  était  à  deux  mètres  en  contrebas  delà 
rue  de  la  Courtine.  Le  dallage  était  formé  par  des  carreaux  de  bri- 
ques en  terre  rouge,  dont  quelques  uns  étaient  encore  en  place. 
On  a  trouvé  aussi  quelques  petits  fragments  de  vitraux  peints,  très 
altérés  par  le  temps.  Une  moulure  du  portail  accuse  le  xiv*  siècle. 

La  chapelle  portait  plusieurs  traces  de  réparations,  notamment 

(!)T.ll,  p.3o6. 


RUK      DE      LA     COURTINE 


Plan  de  la  chapelle  de  la  Courtine 
sappuyant  sur  l'enceinte  du  Château  de  Limoges  au  x*  siècle 


dans  Tabside  :1a  cendre  et  les  charbons  dont  quelques  pierres  étaient 
couvertes  réyëlaient  les  traces  d'un  violent  incendie. 

Gomme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  le  mur  latéral  droit  faisait 
corps  avec  le  mur  d'enceinte.  Ce  mur,  comme  tous  ceux  de  la  cha^ 
pelle,  s'appuyait  sur  des  tombeaux.  Il  existait  des  tombes  à  une 
grande  profondeur  sous  l'emplacement  même  de  la  chapelle,  et 
celle-ci  étaient  complètement  entourées  par  des  tombes  empilées  les 
unes  au-dessus  des  antres.  Nous  en  avons  compté  douze  disposées 
en  éventail  sur  le  seuil,  toutes  réunies  par  la  tête. 

Voici  maintenant  ce  que  nous  avons  pu  retrouver  dans  les  chro- 
niques ou  les  annales,  relativement  à  l'église  la  Courtine. 

La  chronique  de  Geoffroy  de  Vigeois  (f  1185)  (1)  prononce  plu- 
sieurs fois  le  nom  de  l'église  de  Sainte-Marie  de  la  Courtine  ;  elle 
nous  apprend  qu'elle  renfermait  le  tombeau  de  l'un  des  architectes 
de  la  basilique,  Amasius,  construit  par  lui-même.  L'église,  d'après 
cela  remonterait  au  x*  siècle. 

Nadaud  et  Legros  reproduisent  le  même  renseignement  et  nous 
apprennent  que  celte  église  avait  le  titre  de  cure  en  1158. 

L'église  de  la  Courtine  est  aussi  mentionnée  dans  une  bulle 
d^Urbain  III  de  1186  qui  nomme  tous  les  bénéfices  dépendant  du 
monastère  de  Saint-Martial. 

Dans  les  Chroniques  de  Saint-Martial  (2),  nous  voyons  que  le 
vingt-cinquième  abbé,  Isembert(1174 1198),  homme  très  doux  et 
calme,  qui  s'était  fait  remarquer  par  la  bonne  administration  du 
prieuré  de  Rofiac,  dirigea  avec  non  moins  d'habileté  l'abbaye  de 
Saint-Martial.  Entre  autres  choses,  il  fit  réparer  l'hôpital  de  Saint- 
Martial,  construire  les  moulins  d*Aigueperse>  la  chapelle  du  cime- 
tière (3),  enfin  le  cellier  contre  la  chapelle  de  Sainte-Marie,  qui 
n'était  autre  que  l'église  de  Sainte-Marie  de  la  Courtine,  comme  la 
désignait  Geoffroy  de  Vigeois.  On  a  trouvé,  en  effet,  juste  en  face 
de  cette  chapelle,  une  ouverture  à  plein  cintre  donnant  accès  à  des 
caves  très  vastes. 

(1)  Ap,  Labbe,  B/6Z*  Aooa,  11,985,  Chronica  Gaufredi  prions  Vosiensis. 

« et  Âmasîum  qui  sepulchrum  apostoli  [Martialis]  et  suum,  quod  est  in 

ecclesia  Sanctae  Narfœ  de  Corlina,  propriis  manibus  construit...  v. 

(2)  Chr.  de  S. -Martial,. p.  13  à  <5. 

(3)  D'après  Tabbé  Roy- PierreHUe,  MonctêtèreB  da  Limou9inf  Saint" 
Martial,  p.  45,  Nadaud  croit  que  celte  chapelle .dn  cimetière  est  celle  de 
la  Courtine.  11  se  trouve  en  désaccord  avec  lui-mèmo,  puisqu'il  lui  donne 
le  titre  de  cure  en  i\b%,  c'est-à-dire  vingt  ansplus-t6t.  De  plus»  le  texte 
fait  certainemept  allusion  à  deux  chapelles  distincles^^l'une  dans  le  cime- 
tière, Taotre  appelée  de  Sainte-Marie,  u  ....Oapellam  que  est  in  cimiterio 
edificari  et  dedicari  fecît,  cellarium  justa  capellam  Saocte  Marie  cQQa« 
truxit...  B.  Ch.  de  S,-Martial»  p.  t4. 

T.  ih  50 


^90  société  AftcaèoLoôiQDE  Et  historique  bu  LlHOCht^. 

Sur  les  moulins  d'Aigueperse,  Isembert  prit  60  sous  de  renl^ 
annuelle  pour  la  cérémonie  des  frères,  qu'il  institua  le  lundi  de  la 
semaine  qui  suit  le  deuxième  dimanche  après  Pâques,  jour  où  Tod 
chante  :  Misericordia  domini,  et  40  sous  pour  son  anniversaire 
personnel.  Quelques  lignes  plus  loin,  les  Chroniques  reviennent  sor 
l'anniversaire  général  institué  par  Tabbé  Isembert,  pour  lui,  pour  le> 
moines  de  Saint-Martial  et  pour  tous  ceux  qui  reposent  dans  le 
cimetière  de  Tabbaye,  avec  procession  par  les  frères  et  prêtres 
dans  tout  le  cimetière.  Le  même  jour  les  pr(^tres  qui  avaient 
revêtu  Taube  devaient  recevoir  le  pain  et  le  vin,  comme  l'un  des 
frères.  En  outre  200  pauvres  devaient  recevoir  Taumône  et  300  w 
Pistrino  et  les  frères  dans  le  réfectoire,  d'après  les  rentes  acquises 
pour  cela  et  selon  la  nouvelle  règle. 

Si  nous  nous  sommes  étendu  sur  cet  anniversaire  général,  dont 
la  charte  de  fondation  est  rappelée  aux  pièces  justificatives  des 
Chroniques  (1)  vers  Tannée  1220,  c'est  qu'il  y  est  fait  plusieurs  fois 
mention  des  prêtres  et  des  clercs  de  ï église  de  la  Courtine,  Il  est  dit 
dans  l'acte  que  Raymond,  abbé  de  Saint-Martial,  et  le  chapitre  géné- 
ral, réunis  à  la  prière  de  Guillaume  La  Couche, de  la  volonté  et  do 
consentement  de  tout  le  couvent,  a  institué  et  décrété  que  chaque 
année,  le  quatrième  jour  après  l'octave  de  la  grande  fête  du  bien- 
heureux Martial,  pour  les  parents  du  même  Guillaume  déjà  décédés 
et  pour  tous  les  frères  déjà  ensevelis  dans  le  cloître  ou  en  dehors, 
dans  les  cimetières,  on  fasse  l'office  solennel  des  morts,  comme 
l'avait  commandé  l'abbé  Isembert. 

Les  Archives  départementales  possèdent  le  texte  d'une  transac- 
tion consentie  en  1224,  devant  les  consu]s  de  Limoges,  sous  le  por- 
che de  l'église  de  la  Courtine. 

D'après  les  Annales  manuscrites  (2),  à  la  suite  de  la  prise  de  la 
Cité  de  Limoges  par  le  s' de  Pompadour,  en  1589,  les  religieuses  de 
la  Règle  se  retirèrent  dans  le  Château  et  firent  leurs  offices  dans  la 
chapelle  de  la  Courtine. 

Lorsque  les  Ursulines  vinrent  se  fixer  à  Limoges,  elles  restèrent 
quelque  temps  dans  la  maison  Dupeyrat,  place  du  Qoître,  et  firent 
probablement  leurs  offices  dans  la  chapelle  de  la  Courtine.  Trois  ans 
après,  les  Oratoriens,  arrivant  à  Limoges,  restèrent  quelque  temps 
dans  la  même  maison  Dupeyrat. 

Il  parait  qu'en  1557,  le  chapitre  de  Saint-Martial  avait  cédé  la 

(1)  CAr.  de  S.-Marticd,  p.  301  et  301 

(2)  Anruilea  m<mu8crUe8  de  Limoges,  dites  Manuscrit  de  1638j  publiées 
par  E.  Ruben,  F.  Achard  etP.  Ducourtieux,!page 370.-— Limoges,  V^Dacoor- 
lieux,  1878,  in-8». 


ClltËTlèRE  GAlLO-nOllAm,   taÊROVlMûIfiif   Et  CAftOLINGiBN.  70  i 

chapelle  aune  confrérie  pour  y  tenir  ses  réunions.  Celte  confrérie 
se, composait  de  quatre  chanoines  de  la  cathédrale,  quatre  chanoi- 
nes de  Saint-Martial,  quatre  prêtres  communalistes  de  Saint-Pierre- 
du-Queyroix  et  quatre  de  Saint-Michel-des-Lions,  deux  officiers  ou 
magistrats  et  deux  marchands  (i). 

Au  xvm*  siècle,  la  chapelle  qui  était  en  très  mauvais  état  et  les 
ruines  du  cloître  opposaient  un  obstacle  à  la  circulation  entre  la 
haute  et  la  basse  ville.  En  1742,  l'intendant  de  Tourny,  qui  venait 
de  créer  les  allées  et  la  place  qui  ont  longtemps  porté  son  nom  (2), 
décida  Fouverlure  d'une  rue  partant  de  la  rue  des  Taules  et  abou- 
tissant à  Tancien  fort  Saint-Martin,  qu'il  avîdt  remplacé  par  une 
porte.  Ce  fut  le  signal  de  la  démolition  de  la  chapelle  de  la  Cour- 
tine, dont  les  plans  ne  firent  plus  mention,  et  qui  tomba  dans  Ton- 
bli  après  son  enfouissement  sous  trois  mètres  de  terre. 


* 


Il  nous  reste  à  vous  dire  un  mot  de  la  conformation  des  crânes. 
Pour  cela  nous  n'aurons  qu'à  emprunter  l'opinion  de  M.  le  D' Vacher, 
de  Treignac  (Corrèze)  (3)  «  ...La  race  lémovike  appartient  au  type 
sous-brachycéphale  de  la  division  de  Broca.  L'indice  céphalique, 
c'est-à-dire  le  rapport  du  diamètre  transverse  de  la  tête  au  diamètre 
antéro-poslérieurest  de  82,  d'après  des  mensurations  que  j'ai  faites 
sur  le  vivant.  La  collection  crâniologique  du  Muséum  d'histoire 
naturelle  de  Paris,  qui  comprend  trente  crânes  limousins,  fournit 
un  indice  céphalique  un  peu  moins  élevé  que  la  mensuration  sur  le 
vivant;  il  n'est  que  de  78.  Mais  ces  crânes,  recueillis  dans  les 
anciens  cimetières  Saint-Pierre  et  SAINT-MARTIAJj  (celui  qui  nous 
occupe),  remontent  à  une  époque  reculée,  très  probablement  au 
X*  ou  xu*  siècle....  » 

Contrairement  à  l'opinion  du  docteur  Blanchard,  qui  prétendait 
que  les  Limousins  avaient  la  tête  pointue,  en  forme  de  melon,  M.  le 
docteur  Vacher  dît  que  cette  conformation  du  crâne  est  loin  d'être 
la  règle  générale  et  que  d'après  ses  observations  personnelles,  elle 
n'existe  que  dans  un  cinquième  des  cas. 

Au  cimetière  de  la  Courtine,  sur  dix  crânes  recueillis  par  le 
Muséum  du  Limousin,  un  seul  présente  la  forme  pointue. 

En  dépit  du  dit-on  d'après  lequel  les  eaux  du  Limousin  gâtent  les 

(1)  Article  de  M.  L.  Guibert,  dans  la  Gazette  du  Centre^  du  17  février  1893. 

(2)  Avenue  des  Bénédictins  et  place  Jourdan  actuelles. 

(3)  Association  française  pour  ravancemenl  des  sciences,  19*  session.  -— 
Limoges,  1890.—  Paris,  1891,  I  vol.  in -8. 


fdî  SOClBTi  ARCHiOLOGiQQB  rr  BldTORlQOK  Ht  LlIlOlIStlC. 

dents,  toates  les  mâchoires  que  noas  aToos  recueillies  étaient  gar- 
nies de  dents  superbes  et  en  parfait  état. 

En  résuméi  ce  coin  du  cimetière  de  la  Courtine  nous  a  pêraii5 
de  suivre,  de  la  fin  de  la  période  gallo-romaine  jusqu'au  xni*  siëde 
les  différents  modes  de  sépulture  usités  à  Limoges,  d'étudier  la 
forme  et  la  nature  des  matériaux  employés  pour  leur  construclion  et 
de  recueillir  des  observations  anthropologiques  sur  les  premiers 
habitants  de  notre  ville. 

Grâce  à  cette  fouille,  on  a  pu  obtenir  des  indications  précieuses 
pour  la  topographie  de  l'ancien  Château  de  Limoges,  dont  Tenceinte 
du  x""  siècle  passait  sur  ce  point.  C'est  par  elle  que  Ton  a  déterminé 
remplacement  et  les  dimensions  de  Téglise  de  la  Courtine,  qui  ^ 
rattachait  par  un  cloitre  à  l'ancienne  basilique  de  Saint-Sauveur. 

Nous  avons  essayé  d'établir  que  les  inhumations  dans  ce  cime- 
tière se  sont  succédées  sans  interruption  pendant  dix  siècles,  et 
que  ce  champ  de  repos  avait  reçu  les  générations  qui  ont  formé  le 
berceau  du  vieux  Limoges. 

Paul  DccouRnEux. 


BOITE  EN  VERRE 


dans  une  sépulture   g^Uo-romaine 


TROVVÉR  A  LIMOGES 


Le  3i  mai  1893,  en  creusaot  les  fondations  de  la  maison  de 
M.  Gustave  Demartial,  située  avenue  de  la  Révolution,  à  Limoges, 
presque  en  faee  du  débouché  du  premier  tronçon  de  la  rue  de  la 
Croix-Verte,  les  ouvriers  découvrirent  une  sépulture  gallo-romaine. 

On  sait  que  la  ville  gallo-romaine  A' Angustaritum^  bien  qu'elle 
couvrit  Tespace  occupé  par  la  ville  de  Limoges  actuelle,  avait 
son  point  de  concentration  autour  du  vieux  Pont-Saint-Martial, 
dont  les  piles  datent  de  Tépoque  de  la  conquête  (1). 

Lors  de  l'ouverture  de  Tavenue  de  la  Révolution,  la  pioche  du  ter- 
rassier avait  mis  au  jour  de  nombreuses  substructions  ;  on  recueil- 
lit des  fûts  de  colonnes,  des  moulures  et  des  lambris  en  marbre,  des 
poteries  samiennes,  des  briques  de  toutes  formes,  des  monnaies  du 
haut  empire,  une  statuette  du  dieuTherme  en  bronze,  etc.  (2). 

Après  ces  découvertes,  il  était  permis  d'espérer  que  l'on  en 
ferait  de  nouvelles  lorsque  Ton  construirait  les  maisons  bordant 
ravenue. 

Déjà,  les  fondations  d'une  maison  située  un  peu  plus  bas  que 
celle  de  M.  Demartial,  près  de  l'usine  à  gaz,  ont  nécessité  la  démo- 
lition d'une  voûte  de  grande  dimension,  celle  d'un  four  peut-être, 
et  d'un  aqueduc  parallèle  à  la  Vienne  qui  coule  à  deux  cent  mètres 
de  ce  point.  Les  murs  gallo-romains  avait  près  de  trois  mètres  d'é- 
paisseur, et  ils  étaient  tellement  difficiles  à  démolir  que  l'on  dut 

(I)  Congru»  archéologique  éa  Frano»  i6«  sesaioD,  Limoges,  t.  L 
(9) .  Vt>yQ2  aotre  noiice  aur  les  Oécotioertta  faUes  6ur  Z emplacement  de 
oUle  gaUo  romaine^  dans  le  BM,  de  la  Sac.  arch.^  i.  XXKIV,  p.  t  j9. 


794  SOCIAtB  ARCHiOLOGIQUE  BT  HISTORIQUS  DU  LlMODSlit. 

employer  la  mine.  Les  ouvriers  recueillirent  des  fragment  de  cor- 
niche en  plâtre  d'un  excellent  effet  décoratif. 

La  sépulture  qui  nous  occupe  a  été  trouvée  à  5"* ,50  de  Taligne- 
ment  de  l'avenue  et  à  une  profondeur  de  trois  mètres,  dans  des 
terres  rapportées.  Elle  était  placée  sur  le  solide;  la  couche  de  terre  qui 
la  recouvrait  à  Torigine  n'avait  pas  plus  de  SO  centimètres  d'é- 
paisseur, comme  la  section  du  sol  rindique.  Elle  se  présentait  sous 
la  forme  d'un  coffre  en  pierre,  de  forme  parallélipipédique,  ayant 
1",05  de  longueur,  0"',70  de  largeur  et  0,"*65  de  hauteur. 

Les  petits  côtés  du  coffre  étaient  orientés  du  nord  au  sud.  De 
nombreux  vases  en  terre  ou  en  verre  l'entouraient  sur  ses  face> 
nord,  ouest  et  sud.  Ces  vases  avaient  dû  contenir  soit  des  aliments, 
soit  des  liqueurs  précieuses.  Leur  nombre  et  leur  nature  indiquaient 
déjà  une  riche  sépulture. 

Les  vases  pour  les  liquides,  au  nombre  de  cinq,  sont  tous  eu 
verre  d'un  blanc  verdâlre  et  affectent  la  forme  cuboïde,  avec  un 
goulot  court  et  une  seule  anse  carrée. 

Un  sixième  vase  en  verre  se  trouvait  dans  l'intérieur  du  coffre: 
il  a  la  forme  cuboïde,  avec  une  large  ouverture,  sans  goulot  ni 
anse.  Cette  sorte  de  vase  servaient  aux  Romains  pour  éteindre  le^ 
flammes  du  bûcher  avec  du  vin  (1). 

Les  vases  pour  les  aliments  sont  en  terre  de  différentes  couleurs, 
de  formes  et  de  dimensions  variées.  Ceux  en  terre  rouge  ou  sa- 
mienne  sont  très  gracieux  de  forme  et  de  décoration,  ce  sont  des 
bols  ou  coupes  ornés  sur  leur  pourtour  extérieur  d'une  joli  bor- 
dure. Les  plus  grands  (hauteur  0«»,32,  plus  grand  diamètre  0",26j 
sont  en  terre  grise,  ce  sont  des  cruches  à  large  ouverture,  sans  gou- 
lot, à  une  seule  anse  arrondie.  Un  vase  en  terre  rougàtre  (hauteur, 
0°*46),  sans  anse  de  forme  ovoïde,  présente  sur  son  pourtour  quatre 
rangées  de  stries  largement  espacées.  Les  vases  en  terre  noire, 
sans  anse  aussi,  sont  de  deux  sortes,  les  uns  aux  parois  épaisses 
sont  intacts,  les  autres  en  terre  beaucoup  plus  fine,  recouverts  d'un 
beau  vernis,  n'ont  pu  résister  à  la  pression  des  terres  et  se  sont 
tous  brisés. 

Arrivés  sur  les  lieux  deux  heure  aprèj  la  découverte,  nous  n*avons 
pas  vu  les  vases  en  place  et  nous  n'avons  pu  en  Gxer  la  position  que 
d'après  les  dires  des  ouvriers.  Mais,  comme  dans  le  cimetière  gallo- 
romain  de  Bersac,  nous  avons  constaté  qu'ils  étaient  placés  contre 
le  coffre  en  pierre  et  sur  le  même  niveau  que  lui, 

(I)  Coutume»  et  cérémonies  obaeroées  par  les  Romains,  tradait  dv  latin 
de  Nieuport,  par  Tabbé  Desfontaines.  —  Paris*  Nyon,  4740,  p.  808.  CHé 
par  Sauzat,  La  Verrerie,  p.  45.  —  Paris^  Rackette^  1875,  I  vol  in-<8. 


BOITE  EH  VBERB  DAMS  UNE  SÉPULTORE  GALLO-EOMAINB»  ^95 

Le  coffre  est  en  poudingue  polygénique  des  environs  de  Mont- 
bron  (Charente),  c'est-à-dire  de  même  nature  que  les  tombes  du 
xu*  siècle  trouvées  dans  Tancien  cimetière  de  La  Courline.  Ce  rap- 
prochemenJ  nous  permet  de  dire  qu'au  moyen  âge,  comme  à  l'épo- 
que gallo-romaine,  les  habitants  de  Limoges  continuaient  à  tirer 
leurs  matériaux  des  environs  de  Chassenon,  Tune  des  étapes  de  la 
grande  voie  de  Lyon  à  Saintes. 

Le  poudingue,  d'un  poids  relativement  léger,  se  taille  très  facile- 
ment, mais  sa  texture  rocailleuse  ne  se  prête  pas  à  la  sculpture. 
Aussi  n'avons-nous  trouvé  aucune  inscription  sur  le  coffre. 

Le  couvercle  du  coffre  a  une  épaisseur  de  cinq  centimètres  sur 
son  pourtour.  I^e  coffre,  lui-même  a  une  bordure  de  O'^.lî,  dont 
0",5  forment  une  saillie  à  l'intérieur  pour  recevoir  le  couvercle 
qui  s'emboîte  exactement  dessus  et  intercepte  ainsi  le  passage  des 
eaux  ou  de  tout  autre  corps  étranger. 

L'intérieur  du  coffre  se  trouve  réduit  par  le  fait  de  cette  épaisse 
bordure  ;  il  mesure  0'",46  de  largeur  sur  0",81  de  longueur,  lorsque 
le  fond  du  couvercle  a0°,60  de  largeur  sur  0,95  de  longueur,  mais 
celui-ci  est  moins  profond  de  0'",05. 

Indépendamment  du  petit  vase  en  verre  dont  il  a  été  parlé  plus 
haut  et  qui  était  placé  dans  l'angle  N.  0. ,  le  coffre  contenait  une  boite 
en  verre  remplie  des  cendres  du  défunt.  Cette  boîte  affecte  la  forme 
d'un  parallélipipède  et  elle  se  compose  de  six  plaques  de  verre 
mesurant,  les  quatres  du  dessus,  du  dessous  et  des  grands  côtés, 
0",27  de  hauteur  sur  0",47  de  longueur  ;  les  deux  des  petits  côtés 
©"^jâe  à  0'",27  carrés.  L'épaisseur  des  plaques  varie  entre  cinq  et 
sept  millimètres. 

Ces  plaques  devaient  être  plus  grandes,  car  elles  n'ont  conservé 
leur  bord  naturel  que  sur  un  ou  deux  de  leurs  côtés,  les  autres  ont 
été  coupés  péniblement  et  d'une  façon  irrégulière  avec  un  instru- 
ment en  acier.  Le  diamantde  nosvitriersn'aaucuneactionsur elles. 

Le  verre  est  coulé  et  non  souflé,  comme  l'indique  les  inégalités 
d'épaisseur  et  le  renflement  des  bords  naturels.  La  matière  forme 
comme  un  bourrelet  sur  les  bords.  L'une  des  plaques  a  deux  de  ses 
angles  arrondis  naturellement. 

Le  verre  a  la  même  nuance  blanc-verdâtre  et  la  même  trans- 
parence que  celui  des  flacons  qui  accompagnaient  la  sépulture; 
mais  il  n'est  pas  diaphane.  Le  temps  lui  a  donné  la  teinte  irisée 
par  endroits. 

Aux  angles  de  la  boîte  en  verre  se  trouvaient  de  nombreux  mor- 
ceaux de  fer  très  oxydés,  semblant  avoir  appartenu  à  une  armature. 
Il  fallait  du  reste  une  armature  solide  pour  maintenir  les  grandes 
plaques  et  leur  contenu.  Peut-être  cette  armature  était  elle  appli- 


706  .SOCitTÊ  ARCBS0L06IQUB  Et   MSTO&H}0B  DO   LIKOUSIK. 

quée  sur  un  cadre  en  bois,  dont  nous  atons  trouvé  les  traees.  L*ar- 
matore  était  ornée,  mais  les  omements  sont  tellements  fhistes  qu'il 
est  impossible  de  les  distinguer. 

Les  cendres,  d'après  les  traces  laissées  sur  les  parois  des 
plaques  qui  en  sont  encore  recouvertes,  remplissaient  la  boîte. 
Elles  ont  Taspect  d'un  mastic  grisâtre  et  forment  un  pâte  très 
douce  au  toucher. 

Lorsque  Tarmature,  rongée  par  la  rouille,  s'est  affaissée,  les  pla- 
-ques  de  verre  des  côtés  se  sont  renversées  sous  le  poids  des  ceo- 
dres,  qui  se  sont  répandues  dans  l'intérieur  du  coflre;  la  plaque  de 
dessus  est  descendu  alors  doucement,  emprisonnant  sur  la  plaque 
du  dessous  une  très  faible  partie  de  son  contenu.  C*est  dans  cet  état 
que  la  botte  en  verre  s'est  présentée  à  nous,  à  l'ouverture  du 
coffre. 

M.  Jules  Tixier,  qui,  avec  rassenliment  de  H.  G.  Demartial,  a 
recueilli  au  Muséum  limousin  la  boite  en  verre,  le  coffre  et  qoei- 
ques-uns  des  vases  qui  l'entouraient,  a  bien  voulu  dessiner  tous 
CCS  objets.  Nous  l'en  remercions  bien  sincèrement. 


* 


La  boite  en  verre  constitue  tout  l'intérêt  de  cette  découverte.  Il 
est  très  rare  de  rencontrer  des  plaques  de  verre  antique  de  grande 
dimension  et  tous  les  auteurs  qui  ont  parlé  du  veri^,  ont  décrit  de 
très  petits  morceaux.  Il  faut  arriver  à  la  Renaissance  pour  retrou- 
ver les  grandes  plaques  des  vitraux  peints. 

L'incinération  du  corps,  la  forme  du  coffre  en  pierre,  la  nature 
du  verre  de  la  boite  contenant  les  cendres,  et  les  vases  qui  entou- 
raient le  coffre,  tout  indique  une  sépulture  de  la  première  partie  de 
la  période  gallo-romaine.  La  présence  d'une  monnaie  nous  aurait 
permis  de  préciser  la  date  de  la  sépulture,  mais  les. ouvriers  nous 
ont  assuré  qu'ils  n'en  avaient  pas  trouvé.    . 

Le  fait  d'enfermer  les  cendres  dans  une  boîte  en  verre  est  unique 
dans  notre  Limousin.  Les  nombreuses  sépultures  gallo-romaines 
trouvées  jusqu'à  ce  jour  sur  notre  sol  se  présentent  de  la  façon 
suivante  :  une  urne  en  pierre  cubique  ou  cylindrique,  ayant  le  plu5 
souvent  un  couvercle  sphérique,  renfermant  ou  non  une  urne  en 
verre  ou  en  terre. 

Nous  avons  consulté  Y  Abécédaire  d'archéologie  de  M.  de  Cau- 
mont,  pour  savoir  si  des  découvertes  semblables  à  la  nôtre  avaient 
été  faites  dans  d'autres  départements.  Nous  y  avons  trouvé  la  des- 
cription de  coffres  en  pierre  de  même  forme,  mais  dans  lesquels  on 
avait  trouvé  Turne  en  verre  contenant  les  cendres  accompagnée 


BOITE   EN  VEftRB  DAMS  UN£  SÉPULTURE  GALLO-ROMAINE.  797 

des  vases  accessoires  pour  les  aliments.  Aucun  ne  renfermait  une 
boite  en  yerre. 

Nous  avons  écrit  à  M.  Salomon  Reinaeb,  directeur  du  Musée  de 
Saint-Germain  pour  lui  faire  part  de  notre  découverte  et  lui  de- 
mander s'il  possédait  des  plaques  semblables  et  si  des  découvertes 
analogues  avaient  été  faites  sur  d'autres  points  de  la  France. 

M.  Salomon  Reinach,  auquel  nous  adressons  tous  nos  remerci- 
ments,  a  bien  voulu  nous  répondre  ce  qui  suit  : 

(c  Dans  le  catalogue  sommaire  du  Musée,  il  est  question  (p.  86)  de 
fragments  de  vitres  romaines,  provenant  de  Garnac,  Compiègne  et 
Saalburg.  Une  découverte  analogue  à  celle  qui  vous  occupe  a  été 
faite  à  Saintes  (Revue  arch.,  1873, 1, 227).  On  s'est  d'ailleurs  vaine- 
ment demandé  alors  ce  qu'elle  signifiait.  Il  existe  à  Hombourg  une 
plaque  de  verre  provenant  du  camp  de  Saalburg  qui  a  0"  40  sur 
O*"  30.  Les  vitres  que  nous  possédons  ne  sont  que  des  fragments  ». 

Le  mémoire  de  la  Revue  archéologique  auquel  M.  Reinach  fait 
allusion  a  pour  titre  :  Tombeau  gallo-romain  découvert  à  Saintes,  en 
novembre  4871,  par  M.  Tabbé  P.  Th.  Grasilier  (1).  Nous  lisons  à  la 
page  15  :  «  Il  nous  reste  à  signaler  quatre  petites  vitres  carrées, 
légèrement  concaves  d'un  côté.  Quel  a  pu  en  être  l'usage?  Je  dois 
soumettre  cette  question,  ainsi  que  beaucoup  d'autres,  au  jugement 
lies  hommes  compétents  ». 

Dans  le  Catalogue  du  Musée  archéologique  d'Angers,  si  bien  rédigé 
parle  fondateur  de  ce  Musée,  M.  Godard-Faultrier,  nous  trouvons, 
sous  le  n""  S846  la  mention  d'une  plaque  de  verre  de  cinq  à  six  milli- 
mètres d'épaisseur,  sans  indication  de  dimension,  trouvée  dans  le 
Balnehm  des  Châlelliers  de  Frémur  (Maine-et-Loire)  en  1872. 


Si  Ton  consulte  l'ouvrage  de  Labarte  [Les  Arts  industriels),  celui  de 
Gerspach,  et  celui  de  Sauzay  [La  Verrerie),  on  voit  que  le  verre 
était  connu  des  anciens  :  Pline  dit  que  les  verreries  de  l'Egypte 
et  de  la  Phénicie  étaient  très  florissantes  de  son  temps.  Il  ajoute 
que  des  fabriques  de  verre  s'étaient  établies  en  Espagne  et  en  Gaule 
après  la  conquête.  D'autres  auteurs  du  i"  siècle  ont  parlé  du  verre. 
Citons  entre  autres  :  Tacite,  Philon,  Flavius  Josèphe,  Sénèque, 
ce  dernier  semblait  même  dire  qu'il  fut  trouvé  de  son  temps,  alors 
qu'il  remontait  à  plusieurs  siècles  avant  notre  ère. 

(4)  11  en  a  <^lé  fait  un  tirage  à  part  (Parls^  Didier ,  1873,  in-8<>  de  15  p.) 
dont  nous  devons  la  communicalion  à  Tobligeance  de  H.  Louis  Âudiat, 
président  de  la  Société  archéologique  de  la  Sainlonge  et  de  l'Auqis, 


798  SOCIÉrÉ  ARCHÉOLOGIQUK  BT  HMTOaiQUB  DU  UM0U8III. 

Malgré  ces  autorités,  plusieurs  savants  du  xvui*  siècle  se  refa- 
saient  à  faire  remonter  les  plaques  de  verre  à  une  aussi  haute  anti- 
quilé.  Il  fallut  pour  les  convaincre  que  Wlnckelman,  qui  défendait 
la  cau.^^e  des  anciens,  découvrit  dans  les  ruines  d'Herculanam  des 
fragments  de  vitre  et  des  châssis  destinés  à  les  recevoir.  Quelques 
années  plus  tard,  Tarchitecte  Mazois,  dans  son  ouvrage  sur  les 
Ruines  de  PompiU  rendit  lui  aussi  hommage  aux  anciens.  Les  vitres 
qu'il  découvrit  étaient  encore  posées  dans  les  rainures  d'un  châssis 
en  bronze;  elles  mesuraient  0"  50  de  largeur  sur  0"  74  de  hauteur; 
leur  épaisseur  était  de  cinq  à  six  millimètres. 

La  découverte  de  l'avenue  de  la  Révolution  à  Limoges  vient 
apporter  une  nouvelle  preuve  sur  ce  point  controversé  de  Fart  da 
verrier  à  l'époque  antiqiie. 

Paul  DUCOURTIEI'X. 


SAINT  PIERRE  DAMIEN  A  LIMOGES 


Saint  Pierre  Damien,  cardinal  d'Ostie,  est  un  des  personnages 
les  plus  considérables  du  xi'  siècle  ;  c'est  un  des  écrivains  ecclésias- 
tiques les  plus  distingués  de  son  temps;  ses  œuvres  ont  été  recueil- 
lies  en  un  volume  in-folio.  Nos  écrivains  limousins  avaient  ignore 
jusqu'à  présent  que  saint  Pierre  Damien  fût  venu  à  Limoges. 
M.  Tabbé  Georges  Ardant,  dans  ses  recherches  à  la  Bibliothèque 
du  Vatican,  a  eu  la  chance  de  découvrir  un  document  qui  met  ce 
fait  en  lumière. 

Saint  Pierre  Damien  est  venu  à  Limoges,  et  voici  à  quelle  occa- 
sion :  Tan  1063,  les  religieux  de  Tordre  de  Cluny  avaient  pris 
possession  de  Tabbaye  de  SainUMartial  (1). 

Cette  prise  de  possession  ne  se  fit  pas  sans  difficultés.  Les  an- 
ciens moines  se  révoltèrent  contre  les  nouveaux  venus.  Ils  envahi- 
rent leurs  cellules,  décidés  à  leur  faire  un  mauvais  parti. 

L'abbé  de  Cluny  envoya  Pierre  Damien  à  Saint-Martial  de  Limo- 
ges pour  y  mettre  la  paix. 

Après  avoir  publié  le  texte  transcrit  par  M.  Tabbé  Georges  Ar- 
dant,  nous  essaierons  d'en  donner  la  traduction. 

L*abbé  Arbellot. 
Vatican,  4920. 

De  Gallica  Domini  P.  Damiani  profectione  et  ejus  ultramontano 

itinere. 

Prologus.  Inceptio  itineris.  Kadaloo^  non  pastori,  sed  antique 
draconi.  Qualiter  D.  Petrus  se  habuerit  in  Gallico  itinere.  De  Do- 

(i)  Dlplês-Agxer,  Chroniques  de  Saint-Martial^  p.  48. 


800  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQCB  ET  HISTORIQUE  DU  UMOUSIN. 

roino  Adraldo  Bremetensi  abbate.  Laus  Gluniacensis  coDgregationis 
ejusque  abbatis. 

De  Lemovicensi  labore. 

In  Lemovicensi  namque  civitate,  célèbre,  devotissimum  atque 
ditissimum  in  honore  S.  Martialis  quoddam  est  monasterium,  qQod 
Gluniacensis  abbas  noviter  adqaisierat.  Sed  quia  illius  loci  moDa* 
chi  sibi  non  obtemperabant,maxima  in  eo,  tanc  temporis,  discordiâ 
versabalur. 

HuJQS  namque  adquisitionis  intuitu  et  ejusdem  abbatis  odio,  pront 
erant  seculares  monachi  a  monasterio  recedentes,  per  ejus  celluiai^ 
tiospitare  coeperunt  et  monasterium  hostiiiter  impugnabant  et 
monachorum,  quos  ibi  de  Cluniaco  posuerat,  sanguinem  siliebant. 

Ad  tantam  quoque  vesanae  mentis  audatiam  monachi  ipsi  pro- 
ruperant  ut  burgum,  in  quo  monasterium  positum  est,  concrema- 
ren^  et  cuncta  quae  circa  monasterium  fuerant  ignibus  devaslarent; 
et  nisi  Romana  auctoritas  interveniret  et  ex  apostolica  sede  rêve- 
renda  sibi  persona  succurreret,  vîdebaturlocus  pessumdari  et  maxi- 
mum praejudicium  pati. 

Quid  super  hoc  negotio  abbas  faceret  ignorabat  ;  quo  se  vcrteret 
nesciebat.  Hujus  itineris  pondus  nobis  suggcrere  verecundans  time- 
bat,  causam  perfici  aliter  minime  sperabat.  Tandem  erupit  in 
vocem  quod  scatebat  in  mente  et  quo  ille  doluerat,  ut  medicarelor 
oravit.  Hoc  ipse  abbas  rogabat,  hoc  tota  congregatio  precibu.< 
llagitabat. 

Tune  nostér  Osliensis  episcopus  hune  sibi  laborem  super  impo- 
nere  paululum  haesitavit  et  vix  posse  perflcere  credidit.  Sed  quia 
pro  sainte  ejus  monasterii  venerat  cicius  adquievit  et  in  suis  mem- 
bris  circumquaque  positis  sibi  auxiliari  disposuit. 

Sed  ante  ipsius  profectionis  initium,  cunctis  cum  fratribus  in 
capitule  residens,  peracto  serraone,  se  totus  in  terra  prosterailur 
et  ut  sibi  auxiliarentur  multis  requisîvit  precibus.  Girovagum  sana- 
fratYam  (coenobilam?)  et,  ut  consueveral,  se  miserum  monachum 
clamitabat.  Inter  haec,  tan  la  sibi  coelitus  lacrimarum  tribaitur 
copia  quod  omnes  a  fundo  cordis  longa  traxere  suspiria  et  unus- 
quisque  sibimct  displiccns  sic  proclamabat  :  0  bone  Jhesu,  sibomo 
isle  quem  uUrà  homines  credimus,  sic  ubevlim  lacrimans,  Umet, 
quid  nos  faciemus,  aridi  et. ad  6jus  comparationem  virtutibus 
alieni?  -r-  Nam  sicut  abbas,  me  adstante,  postmodum  retulit,  mul- 
tum  istae  lacrimae  omnibus  profuerunt,  audientium  melioraverant 
animes  et  mentes  prospectantium  solidaverunt. 

Tune  abbas,  communi  fratrum  consilio,  slaluit  ut  abbinc  pro  ejn> 
araore  f  emper  unus  pauper  pasceretur  et  vestirelur,  et  unus  semp^T 


SAINT  PlBRttE   DAXIKN  A   LIIIOGES.  ^) 

pro  eo  psalmus  in  coromunt  cantaretur,  et  denunciato  sibi  ejus 
obitu,  semper  in  suo  anniversario  solemnem  in  conventu  missaoi 
celebfare,  festtyam  corporum  refectionem  fratribus  praeparare  et 
qaidquid  a  mensa  remaoserit,  pro  ejus  animae  salute,  paupôribus 
statuit  erogare. 

Sic  omnium  fratrom  societate  muniti  et  pacis  osculo  confirmati, 
ad  S.  devenimus  Martialem. 

Interea  nostri  adventus  rumor  monachoram  qui  monasterium 
infestabant  corda  concusserat  et  eos  circooiquaque  per  divcrlicula 
fecerat  latitare.  Sed  mox  ut  renimus,  illis  litterae  destinanlur  qua- 
tenus  romanae  sedis  legato  se  repraesenlarent  etallegationeshujus 
negotii  si  justam  sperarent,  sine  alicujus  contrarieiatis  suspicione 
juslitiae  ralione  dependerent. 

Alioqain  sub  imperio  abbatis  deinceps  rivèrent. 

Sed  quia  prislinae  factionis  vermis  eorum  viscera  corrodebat 
et  Cluniacencem  ordinem  omnino  suscipere  renaebant,  ad  deniin- 
tiatum  ratiocinium  venire  spreverunt,  illum  sibi  praesse  abbatem 
poenitus  interdixerunt.  Tune  illius  civilatis  episcopo  comileque 
consttlto,  ad  hujus  diiBnitionis  calculum  res  ita  protrahilur.  In 
hujus  namque  episcopatus  ecclesia  quam  devota  frequentia  popu- 
lorum  repleverat,  illoram  contumacem  absenliam  coram  omnibus 
praesul  iste  narraverat,  qualiter  apostolicae  sedis  legato  reveren- 
tiam  et  abbati  debitam  obedlentiam  recusabant. 

Tune  apostolica  auctoritate,  populo  coUaudante,  praocepit  ut 
njsi  iila  hostilis  audacia  a  monasterii  et  monachornm  cessione  ees- 
saret,  excommunicationi  procal  dubio  subjacerent.  Supra  hoc  vero 
quod  abbati  obedire  nolcbant  diffluitivam  distulii  proferre  senten- 
tiam. 

Isto  igitur  negotio  taliter  diffinito  et  monasterio  in  tranquillitate 
jam  posito,  ne  a  divinae  servitutis  offlcio  pars  nostri  itineris  aliqua 
vacaret,  redeundo  ventmus  Silvaniacum. 

Sequilur  :  De  conservatione  ecclesiae  et  S"  Odilonis  corpore 
commulato.  De  congregata  synodo.  Madsconensis  episcopus.  Rbe- 
thoricae  locutionis  proemiura.  De  Reversione  (i). 


I 

Il  y  a  dans  la  dié  de  Limoges  un  célèbre,  très  dèrot  et  très 
riobe  DQOaasftère  en  Thonneur  de  saint  Bfartial,  donti'abbé  deCIuny 
ayait  fait  récomment  l'acquisition.  Mais  oomme  les  moines  de  ce 

(4)  Le  flfUinuserit  ne  porte  ni  date  ni  nom  d*«atetir. 


802  SOCIÉTÉ  ARCRÊOLOGl^OB  ET  BI&TOUlQUft  bC  LlMOOâlK. 

lieu  ne  lui  obéissaient  pas,  une  très  grande  discorde  y  régnait 
alors. 

Car  en  vue  de  Tacquisition  de  ce  monastère,  et  en  haine  de  VabM 
qui  s'y  trouvait,  les  moines  séculiers  qui  se  tenaient  hors  du  mo> 
nastère  commencèrent  à  s'emparer  des  cellules  et  ayaient  soif  do 
sang  des  moines  que  Tabbé  de  Cluny  y  avait  placés. 

Ils  en  étaient  venus  à  un  tel  degré  d'audace  et  de  foUe  qu'ils 
avaient  mis  le  feu  au  bourg  dans  lequel  est  situé  le  monastère,  en 
sorte  que  tous  les  environs  du  monastère  avaient  été  ravagés  par 
le  feu;  et  si  l'autorité  de  l'Eglise  romaine  n'était  pas  intervenue  et 
si  un  légat  député  parle  Saint-Siège  n'avait  pas  porté  secours,  ce 
lien  était  perdu  et  devait  souffrir  les  plus  grands  préjudices. 

II 

Quel  parti  prendre  dans  cette  affaire?  Tabbé  Tignorait.  Il  ne  sa- 
vait de  quel  côté  se  tourner.  Il  craignait  de  nous  suggérer  l'idée 
de  ce  pénible  voyage,  et  il  n'espérait  pas  autrement  venir  à  bout 
de  son  projet.  Enfin,  la  pensée  qui  était  cachée  dans  son 
cœur  se  manifesta  sur  ses  lèvres,  et  il  pria  pour  avoir  un  remèdf 
au  mal  qui  causait  sa  peine.  Et  ce  qu'il  demandait,  toute  la  Con- 
grégation l'implorait  par  ses  prières. 

Alors  notre  évéque  d'Ostie  hésita  un  peu  à  prendre  sur  ses 
épaules  un  fardeau  si  lourd  ;  à  peine  croyait-il  pouvoir  réussir.  Mais 
parce  qu'il  était  venu  pour  le  salut  de  son  monastère,  il  acquiesça 
promptement  et  il  se  disposa  à  demander  secours  aux  membres  de 
l'Ordre  qui  se  trouvaient  autour  de  lui. 

Mais  avant  les  préparatifs  du  départ,  se  trouvant  en  chapitre 
avec  tous  ses  frères,  après  avoir  prononcé  le  sermon,  il  se  pros- 
terna tout  au  long  sur  la  terre,  et  il  demanda  par  beaucoup  de 
prières  qu'on  vint  à  son  secours.  Il  disait  hautement  qu'il  n'était 
qu'un  cénobite  vagabond  (girovagum),  et  comme  il  avait  coutume 
de  le  dire,  qu'un  misérable  moine. 

Cependant  il  reçut  du  ciel  une  si  grande  abondance  de  larmes, 
que  tous,  du  fond  du  cœur,  poussaient  de  longs  soupirs  ;  et  chacun, 
mécontent  de  soi-même,  s'écriait  :  «  0  bon  Jésus,  si  cet  homme, 
que  nous  croyons  au-dessus  des  hommes,  et  qui  pleure  si  abon- 
damment, est  dans  la  crainte,  que  ferons-nous,  nous  si  arides,  et 
en  comparaison  si  éloignés  des  vertus?»  Car,  comme  l'abbé,  en  ma 
présence,  l'a  déclaré  plus  tard,  ces  larmes  furent  très  utiles  à  nous 
tous,  elles  améliorèrent  les  sentiments  des  auditeurs  et  affermirent 
le  cœur  des  assistants. 

Alors  l'abbé,  avec  Tassentiment  commun  des  frères,  décida  qu  a 


SAINT   PIERRE   DAtelEN   A   tlHOÔfiS.  803 

Tavenip,  par  amour  pour  lui,  on  nourrirait  toujours  un  pauvre, 
qu'on  le  vêtirait,  et  qu'un  psaume  serait  chanté  en  commun  pour 
lui  et  que,  quand  on  annoncerait  sa  mort,  on  célébrerait  toujours 
à  son  anniversaire  une  messe  solennelle  dans  le  couvent,  qu'on 
préparerait  pour  les  frères  un  repas  de  fête,  et  que  tout  ce  qui  res- 
terait de  la  table  serait  donné  aux  pauvres  pour  le  salut  de  son 
âme. 

Ainsi  fortiGés  par  la  société  des  frères  et  confirmés  par  le  baiser 
de  paix,  nous  arrivâmes  à  Saint-Martial. 

Cependant  le  bruit  de  notre  arrivée  avait  fait  impression  sur  le 
cœur  des  moines  qui  infestaient  le  monastère  et  les  avait  fait 
cacher  ça  et  là  dans  les  environs.  Mais,  dès  que  nous  arrivâmes, 
on  leur  envoya  des  lettres,  en  vertu  desquelles  ils  eussent  à  se 
présenter  devant  le  légat  du  siège  romain,  pour  faire  connaître 
leurs  droits,  s*ils  avaient  de  justes  raisons,  sans  aucun  soupçon  de 
contrariété  et  en  toute  justice. 

Autrement  qu'ils  eussent  désormais  à  vivre  sous  la  conduite  et 
le  commandement  de  Tabbé. 

Mais  comme  le  ver  de  l'ancienne  faction  leur  rongeait  les  entrail- 
les et  qu'ils  refusaient  absolument  de  recevoir  l'ordre  de  Cluny,  ils 
s'abstinrent,  par  mépris,  de  se  rendre  à  l'assemblée  et  ne  voulu- 
rent pas  du  tout  se  soumettre  à  cet  abbé. 

Alors,  après  avoir  consulté  l'évêque  de  la  Cité  ainsi  que  le  comte 
pour  prendre  une  solution  définitive,  l'affaire  est  ainsi  décidée. 
Dans  l'église  de  cet  évêcbé,  que  la  foule  pieuse  des  peuples  avait 
remplie,  l'évêque,  devant  tous,  avait  déclaré  leur  absence  contu- 
mace, comme  quoi  ils  avaient  refusé  de  rendre  respect  au  légat  du 
siège  apostolique  et  l'obéissance  due  à  l'abbé. 

Alors,  par  l'autorité  apostolique,  aux  applaudissements  du  peu- 
ple, il  ordonna  que  si  cette  audace  hostile  des  moines  et  cet  éloi- 
gnement  du  monastère  ne  cessait  pas,  ils  encourraient  certaine- 
ment l'excommunication. 

Mais  pour  ce  qui  est  du  refus  d'obéir  à  l'abbé,  il  différa  de  pro- 
noncer une  sentence  définitive. 

Cette  affaire  étant  ainsi  terminée,  et  le  monastère  étant  remis  en 
tranquillité,  de  peur  que  notre  voyage  nous  fit  perdre  une  partie  de 
l'office  divin,  nous  nous  mimes  en  route,  et  à  notre  retour  nous 
arrivâmes  à  Souvigny. 


VARIÉTÉS  ET  DOCUMENTS 


DOCUMENTS  INÉDITS  SUR  PEYRAT-LE-CHATEAU. 

La  ville  de  Peyrat-le-Château,  située  au  pied  des  collines  de  La 
Marche,  qui  lui  servent  de  ceinture  au  nord,  au  midi,  à  Test  el 
à  i^ouest,  dans  le  vaste  et  fertile  bassin  de  la  Maulde,  est  des  pla^ 
anciennes  du  Limousin.  Elle  existait  longtemps  avant  la  fondation 
des  trois  villes  voisines,  Bourganeuf,  Saint-Léonard  et  Eymoutier?. 
Connu  dans  la  période  du  premier  nH)yen  âge  sous  les  noms  de 
Patriy  Patriagum,  Patriciacum,  d'où  est  venu  Pairat  ou  Peyrat,  elle 
devait  former,  à  l'origine,  une  station  ou  mutation  romaine. 

On  y  voit  encore,  à  Textrémité  de  la  forteresse,  non  loin  de  la 
route  nationale,  n**  140,  des  vestiges  parfaitement  conservés  de  la 
muraille  qui  servait  d'enceinte  au  fort  on  oppidum.  La  maçonnerie 
fait  corps  avec  le  mortier  ou  ciment  romain.  C'est  en  cet  endroit 
que  M.  le  baron  de  Bertier-Bizy,  en  faisant  rétablir  une  allée  on 
plantation  de  diénes,  a  découvert,  en  1868,  trois  pièces  de  monnaie 
en  bronze  doré,  de  la  dimension  d'une  pièce  de  deux  francs,  por- 
tant, d'un  côté,  le  galbe  de  Jules  César,  et  de  l'autre,  deux  mains  en- 
trelacées, avec  cette  inscription  :  virtus  et  fides^  courage  et  fidélité. 

La  configuration  de  cette  petite  ville,  son  site  agréable  sur  le  ma- 
melon de  la  Garde,  son  grand  étang  dont  les  eaux  baignent  ses  ver- 
gers, ses  maisons  et  ses  tours,  son  enceinte  de  mnraiUes  et  de  fossés 
de  plus  de  buit  cents  mètres  d^étendue,  les  nombreux  souterrains  qui 
sillonnent  le  fort  ou  la  motte  carlovingienne  en  tous  sens,  les  cinq 
portes  fortifiées  de  son  enceinte  de  forme  triangulaire,  de  Saint- 
Denis,  de  Saint-Martin,  du  Barlet,  de  L&ge  et  du  Marchedieu,  ses 
faubourgs  du  Haslibath,  Mdrcfaedieu  et  Barlet,  eoramuniquant  avec 
la  ville  ancienne,  aujourd'hui  ensevelie  sous  une  épaisse  couche  d« 
gazon,  tout  nous  indique  que  Peyrat,  Patriagum  ou  lepagasPatriagi, 
ainsi  qu'il  est  fait  mention  dans  les  chartes  mérovingiennes  ou  ca- 
rolingiennes de  627,  636,  811,  905  et  949,  a  joué  un  rôle  important 
dans  l'antiquité  la  plus  reculée. 

Ses  souterrains,  la  plupart  voûtés  et  inexplorés  jusqu'à  c< 


bocuikEMts  KT  VAniÉtÊà.  86:> 

joar,  sonl  1res  remarquables.  Ceux  du  château  du  Montcil,  sout 
construits  en  forme  de  croix  latine. 

Avec  les  vestiges,  encore  subsistants,  de  la  forteresse,  sorte  d'el- 
lipse arrondie,  ayant  plus  de  deux  cents  mètres  de  longueur  et 
formant  deux  enceintes  à  trois  assises  superposées  parfaitement 
distinctes,  on  peut  supposer  qu'il  existait  à  Peyrat  des  antiquités  de 
trois  époques  successives  :  un  oppidum  gaulois  avec  ses  souter- 
rains, qu'on  désigne  toujours  sous  le  nom  de  la  motte,  un  castel- 
lum  romain  à  Tendroil  où  on  a  découvert  les  médailles  de  Jules 
César,  et  au  nord,  le  château  féodal  des  Lusignan,  comtes  de  la 
Marche,  reconstruit  avec  ses  tours  et  pont-levis  après  la  prise  et 
l'incendie  de  Peyrat  par  les  Brabançons  et  les  Albigeois,  com- 
mandés par  Laubard  et  le  jeune  Raymond  VI,  comte  de  Toulouse, 
le  7  février  1484. 

Dans  le  bois  taillis  de  Villechenine,  Villa  caninia,  on  signale 
des  mégalithes,  deux  blocs  de  pierre  dont  Tun  posé  en  équilibre 
sur  Tautre,  remontant,  d'après  toute  vraisemblance,  à  Tépoquè 
celtique.  De  vastes  souterrains  ont  été  découverts  en  cet  endroit, 
en  1888. 

Près  du  village  de  Quenouille  ou  Counouille,  sur  le  versant  du 
grand  Grandmont,  se  trouve  un  grand  bac  en  pierre,  en  forme  de 
demi-cercle,  appelé  Bac  le  cube^  Bô  lo  Cubo.  Un  banc  en  pierre  est 
taillé  dans  l'intérieur  de  cette  piscine  monumentale,  objet  d'un 
culte  superstitieux.  A  Figeac,  il  existe,  parait-il,  une  piscine  sem- 
blable sur  une  montagne. 

Au  village  de  Brudieu  se  trouvent  plusieurs  auges  en  pierre  de  la 
plus  haute  antiquité,  creusées  dans  le  roc.  Etaient-elles  destinées  aux 
chevaux  des  comtes  de  Brudieu,  morts  dans  la  première  croisade, 
ou  aux  sacrifices  des  Gaulois,  avant  l'établissement  du  christia- 
nisme? —  Toutes  les  conjectures  sont  permises.  —  Chose  digne 
de  remarque  :  avec  les  siècles  et  avec  les  années,  ces  auges  dimi- 
nuent de  profondeur,  d'après  les  obsei;vations  mômes  des  anciens 
de  la  contrée. 

Il  existe  peu  de  monuments,  dignes  de  ce  nom,  à  visiter  à  Peyrat 
le-Chàteau.  Seule,  la  tour  carrée  du  xm*  siècle,  aux  grandes  propor- 
tions, offre  un  certain  intérêt.  L'église  de  Saint-Martin,  détruite  en 
1184,  fut  reconstruite  au  xni"  siècle.  Elle  était  qualifiée  cure  en  ville 
murée.  L'ancienne  église  ou  chapitre  de  Saint-Denis  était  cons- 
truite dans  le  môme  style  que  l'église  paroissiale,  mais  dans  de  plus 
vastes  proportions.  Elle  fui  démolie  en  1793.  D'immenses  ossuaires, 
creusés  dans  le  tuf,  ont  été  découverts  en  1890  sur  l'emplacement 
de  Tancien  prieuré  ainsi  que  de  nombreux  sarcophages  mérovin- 
giens dans  une  cave  de  la  rue  du  Hà. 

T.  XL.  6i 


S6()  SOClftTÊ  ARCUÊOLOOQbE  Et  OiStORIQUK  bt)  Ulkotâlit. 

Les  églises  ou  chapelles  de  Saini-Jean  et  de  Pompëry  ont  disparu 
depuis  la  prise  et  Fincendie  de  Peyrat.  On  n'en  trouve  plus  de 
trace  que  dans  les  archives. 

Ouant  à  rhôpital,  il  subsiste  encore  avec  sa  chapelle  de  Sainte- 
Anne.  Mais  le  canloti  de  Royères  et  les  villages  de  Peyrat  ne  lui 
servent  t)lus  les  renies  accoutumées.  La  dernière  municipalité,  peu 
soucieuse  des  intérêts  des  pauvres,  a  vendu,  en  1882,  le  pré  qui 
constituait  sa  seule  ressource. 

Toutefois,  nous  ne  devons  pas  oublier  Tancien  palais  de  justice 
ou  auditoire  avec  sa  belle  façade  aux  ouvertures  armoriées  et 
sculptées,  qui  le  distinguent,  au  premier  coup  d*œil,  des  autres 
habitations. 

Il  est  expliqué  dans  la  charte  de  1449,  reproduisant  les  charte? 
de  1283  et  1306,  que  la  ville  de  Peyrat-le-t^hâleau  avait  été  de  tonte 
ancienneté  «  une  noble  ville,  close  et  fermée,  bien  peuplée  de 
»  gens,  tant  nobles  que  gens  d*église,...  qui  par  belles  lettres, 
»)  titres  et  contracis,  ont  de  très  beaux  et  nobles  privilèges,  liber- 
»  tés  et  franchises,  à  eux  longtemps  donnés,  passés  et  octroyés 
»  par  feus,  de  bonne  mémoire,  les  prédécesseurs  de  feu  messire 
»  Louis  de  Pierrebuffière.  »  Ces  privilèges  consistaient  à  ne  payer 
que  56  livres  d'imposition  et  à  jouir  des  six  puis  communaux,  entoa- 
rant  la  ville,  et  des  forêts  du  Mont  Laron,  La  Chavanière,  Crouzat 
et  La  Gladière,  sous  Tadministration  de  quatre  consuls,  élus  tous 
les  ans,  le  22  février. 

Parmi  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  Peyrat-le-Chàieau  nous  pou- 
vons citer  :  Jacques  Doublet,  Thistorien  deTabbaye  de  Saint-Denis, 
en  1625,  qui  consacre  plusieurs  pages  au  prieuré  de  Saint-Denis 
de  cette  ville; —  Uhier,  prieur  de  Grandmont, sur  la  prise  de 
Peyrat  ;  —  le  çhroniqneur  Geoffroy  de  Vigeois,  le  bénédictin  Michel 
Félibien,  les  abbés  Nadaud  et  Legros.  Plus  récemment  M.  Grellet- 
bumazeau,  ancien  conseiller  à  la  Cour  de  Limoges,  Alfred  Jacobs 
et  ÎMk*"  Rougerie  ont  aussi  publié  quelques  opuscules  sur  la  petite 
ville  dont  nous  voudrions  retracer  Thistoire,  et  qui  a  été  le  siège 
du  gouvernement  militaire  créé  en  1449  par  Charles  VII  pour  les 
trois  villes  de  Bourganeuf,  Eyrfioutiers  et  Saint-Léonard. 

Nous  avons  déjà  fait  paraître  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
archéologique  y  tome  XXX  VU,  page  391,  Tinventaire  des  litres  de 
la  baronnie  de  Peyrat  et  des  notes  diverses  sur  la  barbnnie  de 
Nedde  et  de  La  Villcneuve-au-Comte,  détachée  de  Peyrat  au 
XVI'  siècle. 

MM.  Retié  Page  et  Leroux  ont  bien  voulu  insérer,  dans  le  tome  IV 
des  Documents  historiques  de  la  Haute-Vienne ,  la  chatte  de  privi- 
lèges concédée  aux  habitants  dé  Peyrat  par  Jeanne  de  la  Marche, 


VARlÉtès  Et  bucuiikfiNtâ.  ftO^ 

le  <•' jain  1313,  ta  IraosacUon  des  consuls  de  Peyrat  avec  Olivier 
de  Saiat-Oeorgcs,  seigneur  de  Meyrigrvat,  du  8  novembre  1411,  la 
charle  de  privilèges,  du  16  juin  1495,  concédée  par  Louis  III  de 
Pierrebufflère  el  Facte  de  partage  fait  entre  François  et  Gabriel 
de  Pierrebufflère  du  10  juillet  1557. 

Les  pièces  dont  la  série  cotnmence  avec  le  document  ci- 
après  ont  une  très  grande  importance,  en  ce  sens  qu'elles  nous 
initient  aux  rouages  administratifs  ou  féodaux  de  cette  époque. 
Ija  vente  de  la  terre  de  Peyrat,  enclave  poitevine,  consentie 
le  23  novembre  1364  par  Geoffroi  et  Jean  de  M(^rtemart  à  Guy 
Albert,  frère  du  pape  Innocent  VI,  énumère  les  vingt-deux 
paroisses  qui  dépendaient  alors  de  cette  baronnie  et  contient  un 
vrai  traité  sur  les  serfs  plus  ou  moins  attachés  h  la  glèbe,  au  nom- 
bre desquels  étaient  les  inquilini,  attachés  à  la  maison,  à  la  fa- 
mille, les  ascriptices^  attachés  à  la  terre,  et  les  emphitéotcs.  Enfin 
les  deux  aveux  ou  hommages  des  24  juillet  1624  et  27  juillet  1779 
complètent  la  période  féodale. 

Pierre  Cousseyroux,  avocat. 


I.  —  Privilèges  et  franchises  de  Peyrat. 

On  trouve  dans  un  mémoire  imprimé  à  Paris,  en  1787,  que  le 
Parlement  de  Paris,  par  arrêt  de  1778,  avait  maintenu  les  habi- 
tants de  Peyrat  dans  leurs  privilèges  et  franchise,  dans  tout  le  vaste 
bassin,  formé  par  les  six  montagnes,  les  six  puis  ou  champs  froids 
qui  entourent  leur  ville,  et  par  conséquent  les  avait  exemptés  de 
tous  droits  de  lods  et  ventes  et  autres  devoirs  féodaux  pour  tous 
les  héritages  situés  dedans  leur  consutat  et  franchise^  ainsi  qu'elle 
est  réglée  et  se  comporte  dans  les  fins^  limites  et  finages  de  la  dite 
ville  de  Peyrat^  ses  appartenances  et  dépendances. 

Le  baron  du  Palland  et  son  ancien  fermier  général,  Perron,  sieur 
de  La  Coux,  avaient  soutenu  que  la  franchise  ne  s'étendait  pas  au^ 
delà  de  la  ville  et  des  faubourgs,  ou  du  moins  au-delà  des  quatre 
croix  monumentales  qui  sont  plantées  aux  quatre  points  cardinaux 
de  la  ville  comme  celles  d'Àhun.  Les  consuls  avaient  fait  opposition 
au  terrier. 

Production  fut  faite  des  anciennes  chartes  de  privilèges.  La  pre- 
mière en  date  est  de  1283.  Le  mémoire  en  question  en  cite  quel- 
ques fragments.  Quant  aux  chartes  elles-mêmes,  elles  sont  restées 
enfouies  dans  la  poussière  du  greffe  du  Parlement  de  Paris.  «  Une 
»  contestation  (est-il  dit  dans  la  cliarte  de  4283)  s'étant  élevée 


SbS  SOCtETE   ARGklEOiOGIQUk  fct   HlstoklQUk   DU   LkltOCSttC. 

»  entre  nous  [Gui  de  Lusignan]  et  nos  bourgeois,  et  nos  liomnie> 
»  et  DOS  femmes,  en  la  ville  de  Peyrat,  qui  sont  par  communauté 
h  de  la  taille  de  Peyrat,  sur  ce  que  le  seigneur  les  prétendait 
»  taillables  à  volonté  et  aux  quatre  cas.  Les  habitants  soutenaient, 
»  au  contraire,  n*étre  tenus  seulement  pour  les  choses  dessus  ^ies 
»  qu'à  50  livres  de  la  monnaie  courante  de  la  Marche,  à  chaccnao. 
»  et  qu'il  en  était  ainsi  de  temps  immémorial.  [Allusion  à  la 
»  charte  de  Jean-Sans  -Terre  de  1215,  trouvée  en  la  Tour  de  Lon- 
»  dres,  page  112,  t.  !•'  des  Rotuli  litterarum  patentium,  qui  coii- 
»  firme  les  anciennes  coutumes  de  Peyrat,  pratiquées  sous  le  règne 
»  d'Henri  II,  son  père]  A  raison  de  ce,  le  seigneur  Guy  de  Lusi- 
»  gnan  reconnaît  qu'il  ne  pourra  demander  aux  bourgeois  iJt' 
»  Peyrat  que  50  livres  par  an  et  25  livres  aux  quatre  cas,  pour  rai- 
»  son  de  taille  ou  de  quête  en  autre  manière,  »  Dans  les  article? 
suivants,  le  seigneur  baron  accorde  aux  habitants  de  Peyrat  la 
libre  disposition  de  leurs  biens,  tant  entre-vifs  que  par  lestameoU 
à  la  charge  seulement  de  lui  en  faire.hommage.  -  Guy  de  Lusignaa 
confirma  cette  première  charte  par  une  seconde  de  l'an  1306,  qui 
fait  mention  d'un  autre  privilège,  celui  ^e  l'usage  dans  trois  forêts  : 
(La  Chavanière,  Monllaron  et  Crouzat)  que  le  seigneur  baron 
déclare  commun  aux  habitants  de  Peyrat  et  à  tous  les  sujets  de  la 
seigneurie  qui  se  soumettront  à  payer  la  taille  de  celte  ville  : 
«  Voulons,  y  est-il  dit,  et  octroyons  auxdits  bourgeois,  nos  hommes 
»  etfemmes,etautresquisontetse rendrontpar50»m^,ç(l),depa)er 
»  à  nous  les  deniers  sus  dits  et  de  faire  les  autres  choses  conve- 
»  nables  et  nécessaires  à  la  dite  ville  de  Peyrat,  pour  raison  de< 
»  deniers  dessus  dits,  soient  habilans  en  la  dite  ville  ou  en  la  chA- 
»  tellenie  de  Peyrat,  qu'ils  puissent  user  et  exploiter  en  nos  dites 
»  forêts;  car  c'était  leur  droit  d'ancienneté  et  les  trouvâmes  fu 
»  bonne  et  longue  possession.  »  —  Enfin  dans  un  dernier  article  de 
cette  charte  de  1306,  le  seigneur  baron  permet  aux  consuls  et 
habitants  de  Peyrat  d'incorporer  en  leur  bourgeoisie  les  forains  et 
et  étrangers  qui  viendraient  pour  demeurer  au  bourg  et  au  baril 
[faubourg]  de  Peyrat,  à  l'exception  des  hommes  taillables  du  sei- 
gneur et  de  ses  vassaux. 
La  charte  de  1449,  mentionnée  dans  l'inventaire  des  titres  de  la 


(I)  Le  moi  par sonnler  ou  parsurUer  est  d'origine  très  ancienne.  On  1? 
trouve  employé  deux  fois  dans  la  charte  de  i306.  Ceux  qui  acquéraient 
droit  de  cité  à  Peyrat,  étaient  aussi  appelés  parsonniers. 

La  même  expression  est  mentionnée  deux  fois  dans  la  chanson  de 
Roland  (voir  les  vers  434  et  474)  :  MuU  orgoUluê  parçuaier  y  oo/yj, 
'^MuUi  aores  or^oillusparçunier. 


VAUtÉTÊS  BT  DOCUMRNTB.  800 

baroDnie,  reproduite  dans  le  Bulletin  delà  Société  archéologique, 
tome  XXXVII,  page  407,  débute  ainsi  :  le  Roy  voulant  exempter  de 
tous  logements  de  gens  de  guerre  les  habitans  de  la  ville  de  Peyrat, 
ensemble  les  paroisses  de  Saint-Martin-Château  et  Beaulieu,  nom- 
mait un  gouverneur  pour  les  trois  villes,  Bourganenf,  Esmoutiers 
et  Saint-Léonard.  Le  baron  du  Palland  porta,  le  dernier,  ce  titre 
pompeux.  —  En  1449,  Louis  de  PierrebuflBère  lit  une  transaction 
entre  Pierre  de  Viilard  et  Jean  Brunet,  noble  homme,  et  les  autres 
manans  et  habitants  de  la  ville  de  Peyral,  où  il  est  expliqué  que 
la  ville  de  Peyrat  avait  été  de  toute  ancienneté  «  une  noble 
»  ville  close  et  fermée,  bien  peuplée  de  gens,  tant  nobles  que 
»  gens  d'église,... qui  par  belles  lettres,  titres  et  contrats,  ont 
»  de  très  beaux  et  nobles  privilèges,  libertés  et  franchises,  à 
>>  eux  longtemps  donnés,  passés  et  octroyés  par  feus,  de  bonne 
»  mémoire,  les  prédécesseurs  dud.  feu  messire  Louis  de  Pier- 
»  rebufllère.  —  Nonobstant  ces  privilèges,  le  seigneur  baron 
»  avait  fait  prendre  les  pierres  des  maisons  de  plusieurs  habitans 
»  pour  s'en  servir  aux  réparations  de  son  château  ;  que  pour  faire 
»  construire  un  étang,  il  avait  pris,  occupé  et  noyé,  outre  les 
»  fossés  de  la  ville,  plusieurs  vergers,  prés,  terres  et  autres  pro- 
»  priétés  appartenant  particulièrement  aux  habitans  de  la  dite 
»  ville  et  faubourgs  de  Peyrat,  et  que  pareillement  prend,  noyé  et 
»  occupe  la  dite  eau,  une  très  belle  rebière  et  patureaux,  conte- 
»  nant  de  15  à  20  journaux  de  prés,  laquelle  rebière  est  joignant 
>}  aux  fossés  de  la  dite  et  est  commune  aux  habitants  de  la  dite 
»  ville  et  fauxbourgs  d'icelle,  pour  y  faire  paître  et  paturager  leur 
»  bétail,  et  autrement  les  exploiter  à  leur  profit.  »  —  Les  consuls 
et  habitants  soutenaient,  en  outre,  que  la  place  du  château  et 
plusieurs  autres  étaient  de  toute  ancienneté  des  appartenances  et 
dépendances  de  la  dite  ville  et  franchise;  —  qu'ils  en  avaient  une 
jouissance  immémoriale.  En  conséquence,  ils  demandaient  justice 
à  leur  seigneur  sur  tout  cela  et  la  confirmation  de  leurs  dits  privi- 
lèges, usanc.es  et  franchises  dont  ils  offraient  de  représenter  les 
litres.  Le  procureur  général  de  Louis  de  Pierrebufïière  disculpa  le 
seigneur  baron  des  reproches  qu'on  lui  avait  faits,  et  il  déclara 
«  qu'il  n'entendait  en  rien  préjudicier  aux  privilèges,  franchises  et 
»  libertés  des  d.  consuls  et  habitans,  tant  que  leur  touche.  »  Après 
s'être  fait  représenter  les  deux  premières  chartes,  Louis  de  Pierre- 
buffière  les  confirma,  en  absolvant  les  habitans  de  toutes  les  contra- 
ventions qu'ils  avaient  pu  commettre.  Il  leur  octroya,  en  outre, 
que  «  tous  les  bourgeois,  hommes,  femmes,  manans  et  habitans 
»  en  la  dite  ville,  fauxbourgs  de  Peyral  et  ailleurs,  en  la  dite  châ- 
h  lellenie  de  Peyrat,  (jui  sont  de  la  dite  communauté  et  francluse, 


M  SOCIÉTÉ  ARCBÉQU>GIQOE  BT  HISTOAIQUB  DU  LIMOUSIN. 

>»  tant  présens  qu'absens,  leurs  hoirs  et  successeurs  paissent  èdi* 
»  fier  des  maisons  au-dedans  du  dit  clos  et  closure  du  dit  ehàtfau, 
»  et  que,  tant  leurs  maisons  et  édiflces,  biens,  meubtes  et  immea- 
)>  bles  quelconques  soient  leurs  et  de  telle  et  pareille  condition  el 
»  jouissant  de  tels  et  pareils  privilèges,  libertés  et  fraocbise^, 
»  comme  faisaient  et  ont  accoutumé  faire  et  font  dès  i  présent  les 
»  bourgeois  et  autres  panans  et  habilans  en  la  dite  ville,  taux- 
»  bourgs  et  communauté  du  dit  Peyrat,  et  que  les  dits  con- 
»  suis  puissent  y  faire  les  mêmes  exploits.  »  Depuis  Tordon- 
nance  de  Philippe-le-Bel  de  il^7,  tout  aspirant  à  la  bourgeoisie 
devait  faire  une  déclarion  devant  le  prévôt  ou  le  maire  d'acheter 
une  maison  en  la  ville,  dans  l'an  et  jour  et  d*y  résider  depuis  la 
veille  de  la  Toussaint  jusqu'à  la  Saint-Jean.  Les  seigneurs  exi- 
geaient à  peu  près  les  mêmes  formalités. 

V  Pour  plus  amples  spécification  et  déclaration  des  octrois,  pri- 
»  vilèges  et  choses  dessus  dites  et  ci-après  déclarées  et  accordées,  » 
on  convint  de  plusieurs  articles.  Les  pf*emiers,  que  nous  regret- 
tons de  ne  pouvoir  reproduire  (le  mémoire  les  passant  sons 
silence),  sont  relatifs  au  château.  On  règle  la  police  qui  s'y  obser- 
vera, et  l'on  assure  de  nouveau  à  ceux  qui  demeureront  les  méoies 
privilèges  qu'aux  habitans,  en  les  soumettant  également  à  Tauto- 
rite  des  consuls. 

L'article  6  'porte,  «  que  les  dits  consuls,  habitans  et  retrabans 
»  ne  seront  tenus  payer  à  mondit  seigneur  de  nulle  autre  somme, 
»  fors  que  la  somme  de  56  livres  à  lui  due  poiu*  raison  de  la  dite 
»  franchise,  aux  termes  et  en  la  forme,  manière  d'ancienneté,  fors 
»  que  aux  quatre  cas,  etc. 

»  Article  7.  A  icelle  payer  seront  tenus  contiibuer  tous  et  un 
»  chacun  les  habitans  et  retrahans  au  dit  châtel  et  en  la  dite  \ille 
»  et  franchise  de  Peyrat,  ensemble  toutes  les  personnes  qui  ont  el 
»  auront  héritages,  cens  et  rentes  et  autres  devoirs  en  la  dite 
»  franchise,  chacun  selon  leur  taux.  A  l'exception  de  ce  que  le  sei- 
»  gneur  aura  dans  le  château.  » 

I^,s  articles  8  et  suivants  jusqu'à  l'article  22  exclusivement  trai- 
tent de  la  garde  el  police  du  château,  de  ses  murailles  et  àvs 
maisons  qui  y  seront  construites  par  les  habitants.  On  y  prend  les 
plus  grandes  précautions  pour  qu'il  n'y  reste  point  de  masures  et 
d'emplacements  vides. 

Sur  la  disposition  des  biens,  l'article  22  permet  aux  habitant; 
de  tester  comme  ils  l'ont  fait  d'ancienneté  et  de  donner  même 
leurs  biens  immeubles  à  Téglise,  et  au  cas,  y  est-il  dit,  «  que,  pour 
»  les  amortissements  mondit  seigneur  les  aurait  mis  eu  sa  main, 
})  qu'il  ne  les  puisse  teuir  qu'an  et  jour,  dedans  lequel  sera  teuu 


VARlÉTiS  BT  DOCUIIBNTS,  81  i 

»  de  les  amortir,  et  recevqir  le  prix  de  ses  amorlissemfins,  et  prp- 
»  nant  le  prix  et  juste  estimation  que  pourrait  valoir,  si  retenir  les 

»  voulait sans  y  mettre  autre  charge  de  rente réservé  à 

»  mon  seigneur  qu'il  puisse  retenir  à  soi  des  prés  jusqu*à  30  jour- 
)>  naux,  en  payant  de  la  franchise  pour  pareille  part  et  portion 
»  que  feraient  les  d.  hahitans,  s'ils  avaient  et  tenaient  les  d.  prés. 

L'article  23  assure  au  seigneur  baron  «  le  droit  de  succéder  aux 
»  biens,  meubles  et  immeubles  des  habilans  décédés  ab  intestat 
»  et  sans  hoirs,  qui  par  raison  leur  doivent  succéder,  à  la  charge 
»  des  frais  funéraires.  » 

L'article  24  oblige,  le  seigneur  baron  «  dévider  ses  mains  des 
»  biens  immeubles  tombés  et  déshérence  dans  Tan  et  jour,  sans  y 
»  pouvoir  mettre  aucune  charge  eu  tant  que  touche  les  dits  château, 
»  ville  et  fauxbourgs  dud.  Peyrat,  tant  seulement  et  ainsi  que  dessus 
»  est  dit  au  deuxième  et  précédent  article,  et  aussi  s'il  n'y  avait  prés 
»  que  mondil  seigneur  puisse  retenir,  comme  dit  est  dessus.  »  —  Le 
seigneur  baron  ne  pouvait  donc  exercer  le  retrait  féodal  dans  les 
limites  de  la  franchise.  Article  23.  «  Item^  en  tant  que  touche  les 
»  autres  propriétés,  villages  et  héritages  situés  en  la  dite  fran- 
»  chise,  hors  la  dite  ville  et  fauxbourgs  de  Peyrat,  quand  le  cas 
»  adviendrait  que  mondit  seigneur  puisse  les  retenir  en  sa  main, 
»  ainsi  que  a  accoutumé  faire  de  toute  ancienneté  et  fait  de  pré- 
»  sent  et  y  mettre  telles  charges,  rentes  de  blé  et  argent  et  autres 
»  rentes,  sans  servitudes  que  bon  lui  semblera  pourvu  et  que  les 
»  tenanciers  d'iceux  seront  tenus  eux  obliger  aux  dits  consuls, 
»  à  payer  leurs  parts  et  portions  de  la  dite  franchise,  comme  les 
»  autres  habitans  d'icelle  et  à  ce  faire  les  fera  obliger  mondit  sei- 
»  gneur  aux  dits  consuls  et  passer  lettres  en  bonne  forme.  »  — 
Les  articles  suivants  et  derniers  que  le  mémoire  ne  daigne  pas  re- 
produire, parce  qu'ils  ne  sont  pas  utiles  à  sa  cause  subtile  des 
lods  et  ventes,  concernent  uniquement  le  château,  les  foires  et 
marchés  de  Peyrat,  les  élaux  que  les'bourgeois  plaçaient  devant 
leurs  portes  et  les  mercuriales  de  la  halle  aux  grains.  —  Les  exemp- 
tions des  droits  seigneuriaux,  d'après  le  seigneur  baron,  ne 
s'étendaient  pas  au-delà  de  la  ville,  du  château,  des  fauxbourgs  et 
de  la  prairie  commune,  qui  louchait  la  ville.  Les  consuls  soute- 
naient, au  contraire,  que  cette  exemption  s'étendait  autrefois  dans 
toute  la  seigneurie  de  Peyrat,  et  qu'elle  n'avait  été  restreinte  au 
bassin  des  six  puis  que  par  l'usurpation  des  seigneurs  de  Peyrat. 
Les  domaines  exempts  ne  doivent  aucune  charge  au  seigneur  de 
Peyrat.  Il  ne  peut  pas  même  y  en  imposer,  lorsqu'ils  tombent  en 
ses  mains  à  titre  de  déshérence  ou  autrement.  M.  Guentin  de 
Richebourg,  baron  de  Peyrat,  dans  un  but  d'agrandissement,  avait 
exercé  le  retrait  féodal  ou  son  droit  de  prélation  sur  le  domaine 


'B\t  SOCtÂTÉ  ARCaéoLOGCQUB  ET  filSTORlQOB  DD  LlMOUSllI. 

de  Chasse-Pierre-le-Besson,  au  village  de  Mazel,  dépendant  da  fie! 
de  La  Garde.  Mais  Jean  Mayeux,  gendre  de  Léonard  Salon,  exci- 
pant  des  privilèges  de  la  franchise  de  Peyrat,  fit  débouter  le 
baron  de  sa  demande  par  sentence  des  requêtes  du  Palais,  du 
23  juillet  1725,  au  Parlement  de  Paris. 

Les  consuls  et  habitants  de  Peyrat,  dans  leur  opposition  aa 
terrier  du  baron,  en  1787,  protestaient  devant  le  Parlement  de 
Paris  contre  les  droits  généraux  de  péage  qui  n'existaient  pas  pour 
les  habitants,  de  guet,  d'arbans  et  de  corvée,  qui  avaient  éiè 
réduits  par  Tordonnance  du  1*' janvier  1687,  de  chasse  et  de  pèche 
qui  n'étaient  autres  que  ceux  autorisés  par  la  coutume  de 
Poitou  et  les  lois  du  royaume  et  non  autrement,  et  de  dime,  parc* 
qu'il  n'y  avait  pas  d'autres  fonds,  dans  la  terre  de  Peyrat,  grevés 
de  la  dîme  laïque,  que  les  siens  propres  du  Bost  La  Combe  et  Lin- 
tignat.  >-  Enfin  les  consuls  sommaient  les  reconnaissants  à  la 
peine  grave  de  la  commise  (1),  qui  n'était  autre  chose  que  la  con- 
fiscation de  la  tenure  des  reconnaissants  pour  inexécution  des 
conditions.  Les  consuls  contestaient,  en  outre,  au  baron  le  droit 
de  patronage  des  églises  et  bénéfices  de  Peyrat,  parce  que  le 
prieuré  de  Saint-Denis,  appartenait  à  l'église  de  Saint-Martial  de 
Limoges  et  la  cure  de  Saint-Martin  au  prieuré  de  Saint-Denis. 
Quant  aux  prêtres  filleuls  de  la  paroisse,  ils  avaient  place  en  la 
communauté  des  prêtres  de  la  commune  libre,  par  cette  seule 
qualité,  sans  la  nomination  de  personne,  en  sorte  que  le  seigneur 
de  Peyrat  ne  pouvait  pourvoir  qu'à  la  seule  chapellenie  de  Saint- 
Christophe,  le  sieur  Bieublanc  du  Bosc  ayant  le  patronage  d'une 
autre  chapelle.  —  Les  habitants  de  Peyrat  pouvaient  donc,  avant 
la  Bévolution  de  1789,  donner  leurs  biens  à  Téglise,  protester  vic- 
torieusement contre  les  empiétements  de  leur  seigneur  et  faire 
reconnaître  en  justice  leurs  droits  et  leurs  privilèges  sur  les  prai- 
ries, tejres  et  forêts  communales  et  sur  la  place  même  du  château 
et  de  plusieurs  autres,  qui  étaient  une  dépendance  de  leur  ville  et 
franchise.  Ils  administraient  librement  leur  petite  république  sons  le 
gouvernement  du  roi  très  chrétien. 

P.  CoL'SSEYROox,  avocal. 

(1)  La  commise,  terme  de  jurisprudence  féodale,  signifiait  la  confisca- 
tion d'un  fief  au  profit  du  seigneur,  faute,  par  le  vassal  de  rendre  Ir5 
devoirs  auxquels  il  était  tenu. —  Dans  les  pays  de  droit  coutumier,  la  com- 
mise des  rotures,  à  défaut  de  payement  du  cens,  était  autrefois  le  droit 
commun.  «  Qui  ne  paye  son  cens,  dit  Loysel,  doit  perdre  son  champ.  • 
—  Dans  les  pays  de  droit  écrit  existait  la  commise  emphitéotîque,  qoi 
n*était  autre  chose  que  la  confiscation  de  la  tenure  de  Temphitéote  pour 
inexécution  des  conditions. 


VAniÉTÉS  ET  DOCUMENTS.  b^3 


II.  —  Fondation  d'une  vicairie  dans  une  chapelle  contiguë  à  l'église 
de  Saint-Etienne  d'Eymoutiers  par  Pierre  Laporte,  chanoine 
d'Eymoutiers,  en  février  i289,  nouveau  style.  —  Yidimus  de 
4512.  —  Sceau  épiscopal  pendant  sur  queue  de  parchemin,  celui 
de  l'official  perdu  (Rente  sur  le  village  d'Artinsec,  paroisse  de 
Peyrat). 

Universis  présentes  litteras  inspecturis,  Cantor  et  Officialis  Lemo- 
vicensis  eternam  in  Domino  salulem.  Noverilis  nos  vidisse  sequen- 
tes  litteras  sigillis  reverendi  patris  in  Chrislo  Domini  Guirberti,Dei 
gratia  quondam  Lemovicensis  episcopi,  ac  venerabilium  virorum 
prepositi  et  capituli  Ahentensis  una  corn  sigillo  dilecti  in  Christo 
Pétri  Laporta«  canonici  dicte  ecclesie  Ahentensis  sigillatas,  quarum 
ténor  sequitur  in  haec  verba  : 

Guirbertus,Dei  gratia  Lemovicensis  episcopus,  universis  présen- 
tes litteras  inspecturis  salutem  in  Domino.  Noveritis  quod  dileetus 
in  Christo  Petrus  Laporta,  canonicus  ecclesie  Ahentensis,  coram 
Pelro  de  Pinu,  clerico  nostro  jurato,  personaliler  conslitutus, 
facit  et  constituit,  pro  sainte  anime  sue  et  parentum  suorum 
defunctorum,  quandam  vicariam  in  capella  quam  idem  canonicus 
fecil  edidcare  in  villa  Ahentensi,  contigua  ecclesie  lieati  Stephani 
Ahentensis.  Gui  vicarie  idem  canonicus  perpetuo  assignavit  et 
conlulit  redditus  qui  secunlur  :  videlicet  quadraginta  solides  et 
octo  sextarios  silliginis  et  sex  sextarios  avene  quos  habebat  ren- 
duales  in  manso  dArtinsec,  parrochie  de  Peyraco,  et  vigenli  quin- 
que  solides  renduales  in  manso  de  Pers  Villemojane,  sito  in  par- 
rochia  de  Belle  Monte,  quos  acquisivit  videlicet  quinque  solides 
ab  Helia  de  Peyraco,  domicello,  et  vigenti  solides  a  dicto  Bote  du 
Thillia  et  hujus  uxore,  et  novem  sextarios  selliginis  et  quinque 
sextarios  avene  renduales  in  manso  de  Fomosa,  sito  in  parrochia 
de  Belle  Monte,  et  vigenli  solides  renduales  in  manso  de  Vedrina, 
et  quindecim  solides  renduales  in  prato  illorum  de  Podîo  de  La 
Vacharessa  prope  Ahentum  et  decem  solides  renduales  in  manso 
deLa  Broa  Guidonis  Bernardi,  sito  in  parrochia  de  Chambareto. 
Item  assignavit,  ad  opus  candelle  faciende  ad  celebrandum  missas 
in  eadem  capella,  duos  sextarios  silliginis  renduales  quos  habebat 
in  dicto  manso  de  Vedrina,  et  unum  sextarium  frumenli  rendualem 
quod  habebat  in  dicto  manso  de  Vedrina,  ad  tenendum  in  dicta 
capella,  pervicarium  qui  pro  tempore  fuerit,  unam  lampadem  ar- 
dentem,  (qui  mansus  de  Vedrina  est  situs  in  parrochia  Sancli 
Âtûândî),  lev^ndos,  tenehdos  et  percipiendos  per  vicarium  qui  pro 


BU  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  BT  BISTORIQU^  DU  LIMOUSI!!. 

teinpore  fuerit  in  dicta  capella.  Item  voluit  quod  vicarius  ipsia? 
vicarie  qui  pro  tempore  fuerit,  singulis  diebus  celebrel  pro  aniim 

ipsius  canonici  et  parentum  suorum  missam Vel  faci^ 

cclebrare  in  eadem  capella,  exceptis  tamen  diebus  donainicis  >t 
festisj  in  quibus  capellanus  Béate  Marie  de  Àh^.nto  primo  anlequas 
aliquis  celebret,  consuevil  celebrare  usque  ad  evangelium.  Qaibns 
diebus  dominicis  et  festis,  idem  caoonicus  voluit  quod  dictos  liea- 
nus  missam  celebret  in  dicta  capella  posl  euvangelium  ;  roliiit 
eliam  quod  idem  vicarius,  antequam  celebrel,  indutus  sacris  vesli- 
bus,  cum  aqua  benedicta  ad  lumulum  suum  et  parentum  saonira 
accédât  et  ibi  commemorationjem  et  absolutionem  faciat  pro  an!- 
mabus  defunctorum.  Quam  vicariam  retinuii  idem  canooicus  per 
ipsum  quamdiu  vixerit  conferendam  persone  de  qua  sibi  videbi- 
tur  expedire.  Post  mortem  vero  ejusdem  canonici  et  post  morlem 
illius  vicarii  cui  dictus  canonicus  in  vita  sua  dictam  vicariau  du\e- 
rit  conferendam,  si  eam  in  vita  sua  conferre  contingat,  voluit  idem 
canonicus  quod  venerabiies  viri  prepositus  et  capituUim  Ahenteo- 
sesdiclam  vicariam  conférant  proximiori  clerico  de  génère  ejusdem 
canonici.  Qui  dictam  vicariam  volgierit  et  duxerit  acccplaDdam, 
receplo  prlus  juramento  ab  eodem  clerico  cui  coUala  fuerit  dicta 
vicaria,  nisi  promolus  fueril,  quod  infra  annum  a  tempore  collatio- 
nis  computandum  se  faciat  in  presbyterum  promoveri,  et  nisi  hoc 
faceret,  voluit  quod  ad  hoc  pcr  nos  vel  oilicialem  nostrum  com- 
pellatur  vel  successores  nostros  pro  tempore,  vel  ad  resignaDduoi 
dictam  vicariam.  Et  nisi  inveniretur  clericus  de  génère  ipsius  ca- 
nonici cui  conferretur  dicta  vicaria  vel  qui  vellet  eam  acceplare, 
voluit  idem  canonicus  quod  dicli  prepositus  et  capitulum  illa  vice 
lantummodo  eandem  vicariam  idoneo  conferrant  sacerdoli  infra 
mensem  a  die  obitus  ipsius  vicarii  computandum.  Et  si  infra  die- 
lum  mensem  non  conlulerint  dictam  vicariam,  voluit  et  precepii 
idi>m  canonicus  quod  nos  vel  successor  noster  pro  [tempore  alicui 
clerico  de  génère  ipsius  canonici  si  invenialur,  cui  dictam  vica- 
riam velit  acceplare;  vel  si  non  invenialur,  quod  alicui  idoneo 
sacerdoli  conferremus  sub  modo  et  forma  prediclis.  Item  voluit  idem 
canonicus  quod  vicarius  quicumque  insliluelur  in  eadem  vicaria,iuret 
in  institutione  sua  seprediclas  conditiones  observare.  Et  si  contin- 
geret  quod  dicta  vicaria  alicui  de  génère  ipsius  canonici  conferre- 
tur qui  non  esset  promolus,  voluit  quod  dictam  vicariam  officia- 
rius  faciat  [deservire]  per  alium  sacerdotem  donec  promolus  fuerit, 
ul  diclum  est,  infra  annum.  Item  voluit  quod  vicarius  prediclus 
oiTiciel  ecclesiam  Âhentensem  prout  alii  vicarii  ecclesie  ante  dicte. 
Quibus  omnibus  noslram  impartimur  aucloritatem  et  consensum,ei 
iu  leslimonium  premissorum  acta  fuerunt  coram  diclo  nostro  clerico 


VABIÉT^  ET  DOCUMENTS.  8J& 

jnralo,lx)conostri,cuinobls  hec  omola  relulit  viva  Yojce.  Ù}]m  rela- 
Uooi  fidem  plenariom  adhibemus.  Presentibus  litteris  sigillum  nos- 
trum  un^  cum  sigiilo  preposili  et  capituli  et  canonici  predictorum  pre- 
senlibus  Ultéris  sigilluiD  nostrum  duxicQus  apponendum  ad  instantiaiQ 
canonici  meroorati.  Et  nosjprefati  preposilus  et  capituluœ  Ahentenses, 
ad  iostantiam  ipsius  Pétri  Laporta,  canonici  nostri,  premissis  om- 
nibus consentimujs  et  nostrum  impartimur  consensum  et  assensum. 
Et  volumus  et  concedimus  quod  premissa  omnia  observentur  et 
promiltimos  qnod  premissa  faciamus  observare  et  teneri.  £t  da- 
mus  perpeluo  vieario  dicte  vicarie  et  concedimus  qaod  in  cotidianis 
distributionibus  ecclesie  nostre  tantum  babeat  et  percipiat  quan- 
tum una»  de  vicariis  ipsius  ecclesie  desservientibus  in  eadem  .cou- 
suevit  percipere  in  distributionibus  predictis.  Et  in  testimonium 
premissorum  presentibus  litteris  sigilla  nostra  una  cum  sigillis 
predictorum  domini  episcopi  et  canonici  duximus  apponendum  in 
tc&limoQîum  premissorum.  Et  ego  prefatus  P.  Laporta  sigillum 
meam  appono  ad  majorera  roborem  flrmiiatis.  Datum  vui  calenda» 
martii,  anno  Domini  M.  ducentensimo  octuagesimo  octavo. 

In  cuius  visionis  et  inspectionis  testimonium  nos  prediçtus  can- 
tor  sigillum  nostrum  et  nos  prediçtus  oflicialis  sigillum  nostrarum 
curiarum  presentibus  litteris  duximus  apponendum,  tertio  kalen- 
das  septembres,  anno  Domini  millésime  trecentesimo  duodecimo 
(Cette  pièce  nous  a  été  communiquée  par  M.  Léon  Balmet  et  dé- 
chiffrée par  M.  Leroux). 


III.  —  Achapt  de  la  rante  deue  sur  le  villaige  d'Artens,  sittué  en  la 
parroysse  de  Peyrat,  là  où  il  est  fait  mention  des  esploictz  et  ser- 
visses, par  Pierre  Jaubert  de  Noblac,  damoiseau,  le  3  juin  i  351 , 
—  (Transcription  de  M.  Aubépin,  archiviste  du  Cantal). 

Nos  Petrus  de  Peyraco,  custos  sigilli  autentici  domini  illustris 
Régis  Francie,  in  baylia  Lemovicenci  constitutif  Notum  facimus 
universis  quod  coram  ûdeli  juralo  et  commissario  noslro  subscriplo, 
ad  hec  specialiter  depulalo,  personaliter  constitutis  Rigaudo  de 
ArfolUa,  doraicello,  pro  se  et  suis  heredibus  et  successoribus  pre- 
sentibus et  futuris,  ex  una  parte,  et  Guidone  de  Grandimonte  de 
Bosco,  domicello,  procuratore  et  ut  procurator  et  nomine  procu- 
ratorio  Pétri  Jauberti  de  Nobiliaco,  domicelli,  et  pro  ipso  Petro 
JauberU  et  pro  suis  heredibus  et  successoribus  presentibus  et 
futuris,  ex  altéra  parle,  prefatus  Rigaudus,  non  cohactus,  non 
scductus,  scd  gratis,  provide,  cl  scienlcr,  dixil,  asseruit  et  dedjt 


Bl6  SOCIÉTÉ  ARCHËDLOGIQCTK  ET  HlSTOIIlQUft  DO  UMODSlR. 

intelligi  predicto  Gaidoni  presenti,  recipîenli  ac  sollcmpnilerpro 
dicto  Petro  Jauberti  stipulanti,  quod  mansus  seu  tenementom 
inferius  de  Artens,  parrochie  de  Peyraco,  quod  tenct  GeraWa-^ 
Leretier  de  Artens,  homo  ipsius  Rigaudi,  et  idem  Geraldus  Leretj^r 
sunl  ipsius  Rigaudi  et  serve  conditionis,  talliabiles  et  explecu- 
hiles  dicli  Rigaudi  et  sibi  speclant,  et  est  in  posse  seu  quasi  po5>i> 
dendi  et  explectandi  predictos  lenementum  et  hominem  in  oiddi 
conditione  et  génère  servilulis  per  lantum  lemporis  quod  suffici: 
et  jus  est  sibi  acquisitum.  Item  asseruit  diclus  Rigaudus  quod  dic- 
tus  mansus  sive  tenementum  valet  eidem  Rigaudo  auno  quolib*'t 
in  terminis  soUitis  quinque  sextaria  siliginis  rendualia,  mensun 
Peyraci,  et  vinatam,  et  duos  solidos  pro  encennio  (1),  el  unaa 
gallinam  rendualem  in  festo  Nativitatis  Domini,  et  quatuor  vigeoii 
ova  in  fcsto  Paschc  annuatim,  el  servicia  et  explecta  consaeu 
Item  asseruit  et  recognovit  idem  Rigaudus  quod  in  dicto  man^j 
pcrsone  subscriple  habent  redditus  infra  scriptes,  scilicct  magiî^ier 
Johannes  Quinlini,  clericus,  sex  sextaria  siliginis  et  unum  se\ia- 
rium  avene,  rendualia,  mensure  Peyraci,  in  auguslo,  annaatiro: 
et  dictus  Pelrus  Jauberti,  quinque  sextaria  siliginis  rendualia,  dkw 
mensure,  et  decem  solidos  in  denariis  renduales;  ilem  et  JohaDOlu> 
Cosleli,  très  eminas  siliginis  et  unam  eminam  avene,  renduales. 
dicte  mensure,  et  unam  gallinam  et  quinque  denarios  renduale.> 
in  auguslo  annuatim.  Item...  et  capitulum  Ahentis  mouaslerii, 
novem  denarios  renduales  annuatim  lin  terminis  consuelis.  Item 
capellantis  de  Peyraco,  duas  turtadas  siliginis,  mensure  Pegraa. 
renduales.  Itemprior  de  Peyraco  pro  cereo  pascali  très  obolos  ren- 
duales Item  heredes  domini  Hugonis  de  Sancto  Georgio,  niilili>. 
duodecim  solidos  renduales  annualim  in  terminis  consuelis.  Ceit-- 
rum,  cum  ul  predicilur  supra  dictus  Petrus  Jauberti  habeal  in  dicto 
manso  dictos  decem  solidos  renduales  quos  idem  Rigaudus  alia-^ 
ibidem  vendidit  et  assignavit  dicto  Petro,  Ucet ibidem  ipsos  non  ha- 
béret,  idem  Rigaudus  gratis  et  provide  reddidit,  cessit,  solnt  per- 
petuo  penilusque  quittavit  eidem  Petro  Jauberti  et  suis,  diclo  Gui- 
done  présente  et  stipulante,  supra  dictos  quinque  sextarios  siligini> 
renduales  quos  idem  Rigaudus  asseruit,  ut  supra,  se  habere  io 
dicto  manso  pro  dictis  decem  solidis  rendualibus  quos,  ut  supra, 
dictus  Petrus  habet  in  dicto  manso,  in  satisfactionem  el  recompen- 
sationcm  eorumdem,  dictusque  Guido  quo  supra  nomine  quilla>ii 

(1)  Le  moi  encœnium y  d'après  Ducange,  veut  dire  présent,  lioo  îaîUal; 
encœniare:  étrcnner,  origine  du  mol  grec,  xaivo;,  nouveau.  Nous  ivods 
l'expression  patoise,  usitée  encore  dans  les  baux  à  ferme,  intrageafy 
droit  d'entrée. 


dictum  mansam  de  decem  solidis  renduaiibus  prenolatis.  Quibus 
sic  dictis,  actis  et  assertis,  preiïatus  Rigaudus,  non  cohactus,  non 
seductus,  sed  gratis,  provide  et  scienter,  vendidit,  cessil,  concessil. 
Suivit   perpetuo  penitusque  quittavit   supradicto  Petro  Jauberti, 
dicto  Guidone  présente,  recipienle  ac  sollempniter  pro  dieto  Petro 
et  suis  stipulante,  ad  ejusdem  Pétri  lieredumque  suorum  faciendam 
ex  nunc  perpetuo  omniniodam  volunlatem  in  vilu  pariter  et  in 
morte,  predictos  mansum  et  homineni  Geraldum  Leretier  et  herc- 
des  suos  ipsius  Geraldi^  présentes  et  futuros,  cum  omnibus  homi- 
nibus,  heredibus,  proprietatibus,  possessiouibus,  domibus,  ortis, 
pratis,  ripperiis,  aquis,  aquarura  cursibus,  terris  calidis  et  frigidis, 
arboribus,  juribus  et  perlinentiis   dicti  mansi  et  cuxn  prediclis 
vinata,  duobus  solidis  pro  encennio  et  galiioa  renduali  et  quatuor 
vigenti  ovis  in  terminis  supradiclis,  serviciis  et  explectis  consuelis 
que  dictus  Rigaudus  habet  in  manso  prenotato  et  quecumque  jura, 
deveria,  cause,  querele  et  actionnes  ipse  Rigaudus  habet  in  eodem 
manso  quoquo  modo,  precio  siquidem  vigenti  trium  librarum  mo- 
nde nunc  currentis,  sculo  auri  valente  trigenta  solidos,  ut  asse- 
ruerunt dicte  partes;  quas  vigenti  très  libras  dicte  monete  predictus 
Rigaudus    recognovit  se  habuisse  et  récépissé  légitime  a  dicto 
emptore  in  bona  pecunia  numerala,  ipsumque  emptorem  quittavit 
perpetuo  de  summa  pecunia  an tedicte,  renuncians  exceptioni  dicte 
pecunie  non    habile,    non   receple,    non   numérale,   nec   bene 
soluté  et  exceptioni  spei  numerationis,  solutionis  et  receptionis 
future.  Kt  devestiens  se  predictus  venditor  de  prediclis  omnibus, 
ut  supra  perpetuo  venditis  et  declaratis,  et  eorum  singulis  et  de 
eorum  jure,  deverio,  dominio,  proprietate,  possessione  et  actione, 
usu,  servicio  et  explecto,  sibi  pertinentibus  in  eisdem,  predictum 
procuralorem  presentem  et  recipientem  ad  opus  dicti  Pétri  Jau- 
berti  et  suorum  investivit  perpetuo  per  tradicionem  notule  presen- 
tium  iitterarum  et  in  ipsum  emptorem  et  suds  omnia  jura,  loca, 
nomina  et  actiones  reaies,  personales  el  mixtas,  utiles  et  directas, 
judicis  officium  et  beneficium  restitutionis  in  inlegrum,  eidem  ven- 
ditori  compétentes  et  competituras  in  predictis  omnibus  perpetuo 
vendilis,  contra  quascumque  persoaas,  res  et  loca  ratione  et  occa- 
sione  eorumdem,  ex  causis  et  titulo  predictis,  cessit  et  transtulit 
perpetuo  pleno  jure,  nichil  prorsus  sibi  suisque  idem  venditor  re- 
tinens  in  eisdem  ipsum  emptorem  conslituit  ex  nunc  procuratorem 
ac  verum  dominum  supra  hoc  in  rem  suam.  Voiens  et  concedens 
dictus  venditor  quod  dictus  emptor  per  se  vei  per  alium  nomine  et 
ad  opus  sui  et  suorum  possessionem  omnium  predictorum  perpe- 
tuo venditorum,  quando  cumque  sibi  placuerit,  appréhendât,  pro- 
mittensidem  venditor  se  predicta  omnia  perpetuo  vendila  et  eoruii^ 


quelibet  garire,  gare&tire,  tnerl,  deiTerldere  et  ad  pacetn  tetle^éeidett 
emplori  et  sois  ia  judicio  et  extra  judicium  ab  ômni  homine,  domiQo. 
dominio  et  persona,  sazinâ,  amparamento,  emptione  et  evictioBc 
aniversali  el  parliculari,  obligalione,  engatgio,  irti^etitioûe  et  im- 
pedimenlo  quibuscumque,  ut  fuerit  rationis,  et  causam  seu  lites 
in  qua  super  hoc  moveatur  in  se  suscipere  et  ad  Qnem  debitum  ter- 
minare,  et  si  quid  forsan  eiinde  evictum  fuei'lt,  illud  et  omnia 
dampna  intéresse  deperdita,  missiones  et  expensas  que  et  qitas 
dictus  emplor  vel  sui  facerenl  ob  defanctum  dicli  garimenti,  eidern 
emplori  et  suis  emendare  ac  pènitus  ressarcire,  et  tamen  excepib 
et  salvis  rcddilibus  superius  declâralis  per  tcnentem  dictaiti  mao- 
sum  personis  superius  expressis  persolvendis.  Item  dictus  Rigao- 
dus  solvit  el  quitlavit  perpeluo  diclum  Geraldum  Lerelier  et  suos 
heredes,  ipso  Geraldo  présente  et  stipulante  ac  recipiente  pro  <e 
et  suis,  de  omnibus  queslis,  malis  tollis  et  aliis  quibuscumque 
debitis,  actionibus  et  petionibus  que  et  quas  dictus  Rigaudus  babot 
el  habere  et  requirere  potesl,  polerat  et  posset  contra  diclum 
Geraldum  Lerctier  usque  in  hodiemaro  diem  ;  precepitque  dictas 
Rigaudus  viva  voce  eidem  Geraldo  presenti  quod  ipse  Geraldus 
deinceps  et  perpeluo  obediat  et  respondeat  dicto  Petro  Jauberti 
et  suis  in  et  de  omnibus  illis  in  et  de  quibus  respondebat 
eidem  Rigaudo;  ipsumque  Geraldum  et  suos  heredes  res  et 
bona  sua  quecumque,  presentia  et  futura,  eidem  Petro  Jau- 
berti et  suis  sohit,  cessit  perpeluo  penttusque  quiltavit.  Quibus 
mandato  et  quiitalione  audilis  et  intellectis,  preffatus  Géraldus 
Lerelier,  coram  jurato  subscripto  ibidem  personaliler  constilutus. 
gratis  et  provide  promisil  obedire  el  respondere  deinéeps  el  per- 
peluo prediclo  Petro  Jauberti  et  suis  lu  et  de  omnibus  deveriis, 
servituUbus,  serviciis  el  expleclis,  sicul  homo  servus  ac  sicut  obe- 
diebat  dicto  Rigaudo.  Renuncians  super  premissis  dictus  Rigaudu.<^ 
el  dictas  Geraldus,  quantum  ipsum  tangit,  omni  exceplioui  doli. 
fori,  vivi,  mali,  loci,  in  factum  actioni,  sine  causa  conditioni  et 
omni  usui,  consueludini  et  slatuto  patrie  sive  loci  omnique  privi- 
legio,  eliam  juri  per  quod  quibuscumque  decepiis  quoiAodo  libel 
subvenitur,  et  dicenli  generalem  renunciatiotionem  non  valere  ni«i 
quatenus  est  expressa,  et  omnibus  aliis  et  singulis  racionibus,  de- 
ceptionibus,  cavillationibus,  <iubvenlionibus  et  deflSniUonibu5 
utriusque  juris  canonici  et  civilis  que  contra  tenoi'em  presenlinm 
possent  proponi.  Et  bec  omnia  dictus  Rigaudus  et  dictus  Geraldos, 
quatenus  ipsum  tangit,  sub  obligalione  sui  et  hefedum  ac  omnium 
bonorum  suorum  mobilium,  immobiIium,presentium  et  futuronim, 
promiserunl  altendene,  tedere,  servarô,  Tàcere  et  compléfe  el  con- 
tra non  venirc,  preslitis  ab  ipsis  Rigaudo  el  Geraldo^  et  conini 


quolibet  qualeousquamlibet  tangil^adsanclaDcievangelia  manibus 
tacta  juramentis.  Yolentes  et  permitentes  dicli  Rigaudus  et  Geral- 
dus  et  eorum  quilibet,  quatenus  qUemlibet  tangit,  se  et  suos  quan- 
tum ad  hoc  per  gentes  et  servientes  domini  Régis  Francorum  el 
per  aiium  quemcumque  judiceno,'  si  necesse  fueril,  compelli.  Hec 
autem  acta  fuerunt  coram  Petro  Gaillelmi,  (ideli  juralo  nostro, 
qui  dictos  Rigaudum  etGeraldum,  présentes,  volentes,  et  eorum 
qucmlibet  pro  se  el  suis,  predicto  Guidone  de  Grandimonte,  ins- 
tante et  recipiente  pro  dicto  Petro  Jauberti  et  pro  suis,  aucloritate 
predicta,  légitime  condempnavit  ut  idem  juratus  premissa  nobis 
(ifieliter  retulit  per  présentes  ;  relacioni  cujus.  Nos  fidem  plenam 
adhibentes  et  premissa  laudantes  et  confirmantes,  sigillum  predictum 
rogium  hiis  presentibus  littcris  duximus  apponendum  in  fidem  et 
tostimonium  omnium  premissorum.  Constat  de  rasuris.  Datum  et 
actum  coram  dicto  jurato,  presefilibus  Hugone  Malohega  de  Sol- 
nnanhat  el  Johanne  Fabri,  filio  quondam  Bernardi  Fabri  de  Pcyraco, 
ad  hec  testibus  vocatis,  die  tercia  mensis  junii,  anno  Domini  mille- 
simo  trecentesimo  quinquagesimo  primo.  P.  Guillelmi  recepit  et 
scripsit. 


En  i396,  Léonard  Velaud,  damoiseau  de  Peyrat,  parent  et  héri- 
tier de  Pierre  Jaubert  de  Noblac,  décédé  (Rigaud  d'Arfeuiile  étant 
aussi  décédé),  fit  rédiger  par  le  garde  du  sceau  royal,  dans  le  bail- 
liage de  Limoges,  pour  lai,  en  son  nom  et  au  nom  de  ses  successeurs 
et  héritiers,  la  reddition  delà  rente  d*Artens  de  cinq  septiers  de  seigle, 
quatre-vingts  œufs  et  une  vinade,  par  le  fidèle  juré  et  commissaire 
(in  sceau  royal  de  Tofficialité  de  Limoges,  Pierre  Leblanc  prêtre  : 
ladite  rente  due,  autrefois,  par  Gérald  Lérelier  d'Artens,  à  perpé- 
tuité Thomme  de  Pierre  Jaubert  de  Noblac,  et  maintenant  par 
Gérald  Socat  d'Artens.  Il  est  expliqué  dans  cette  charte  en  latin, 
qui  n'est  que  la  reproduction  de  la  précédente,  que  le  dit  Bernard 
Velaud,  noble  homme,  damoiseau  de  Peyral,  ne  peut  réclamer  au 
tenancier  d'Artens  plus  qu'il  n'était  dû  à  Pierre  Jaubert  de  Noblac 
el  à  Rigaud  d'Arfeuiile. 

Témoins  appelés,  Guidon  Esmoins,  domiceliOy  et  Jean  Medici, 
prêtre,  anno  millésime  trecentesimo  nonagesimo  sexto.  Signé 
Pelrus  Leblanc,  prêtre.  fA  suivre). 

NOTA.  —  Les  successeurs  de  Pierre  Jaubert  de  Noblac  prirent  le  nom 
de  Jaabert  du  Masfaure  qu'ils  ont  conservé  jusqu^en  1789.  GeUc  famille, 
mentionnée  dans  rhistoire  de  Saint-Léonard,  par  H.  Louis  Guibert,  est 
Tobjet  d'une  généalogie  spéciale. 


SiO  dOCléTE  ÀttCttEOtOÔIQUR  Et  âlSTORIQUK  bt^   Lt!É0t}S1!f. 


Le  collège  de  Grégoire  X/,  à  Bologne 

M.  Corrado  Ricci,  dans  son  article  sur  Tarchitecte  Giot-anni  in 
Siena,  publié  par  YArchivio  Storice  dell  Carte,  Rome  1892,  p.  23S- 
S66,  a  un  chapitre  intitulé  :  Collegio  Gregoriano.  J'en  traduis  <!*' 
qui  nous  intéresse  au  point  de  vue  de  la  biographie  du  f^K 
Limousin  : 

a  En  1371,  Grégoire  XI  acheta  aux  Pepoli  un  palais  à  Bologne 
pour  y  fonder  le  collège  que  de  son  nom  on  appela  Grégorien. 
L^édilice,  selon  Giuseppe  Guidicini,  serait  celui  qui  s'élève  à  Tangl' 
méridional  de  la  via  Sampieri  et  de  la  via  Castiglione  (Cose  nota- 
bili  de  Bologna,  Bologne,  1868,  I,  3i7).  Il  conserve  encore  son 
aspect  ancien  et  a  de  beaux  arcs  au  portique;  on  y  voit  aussi  ui. 
gracieux  balcon  du  xv  siècle. 

»  Dans  la  via  Castiglione,  n""  7,  s'élève  une  ancienne  maison  : 
aux  chapiteaux  existe  le  sigle  ou  monogramme  de  Grégoire  \l. 
Elle  correspond  précisément  à  Tarrière  du  vieux  palais  Pepoii. 
Nous  ne  saurions  dire  si,  à  la  rigueur,  cette  maison  seule  formait 
le  collège  Grégorien  ou  s'il  s'étendait  jusqu'à  comprendre  l'édilicp 
désigné  par  Guidicini.  Au  reste,  cela  parait  assez  probable  à  qui 
réiléchit  que  le  pape  avait  voulu  faire  un  grand  institut. 

'>  Ghirardacci,  dans  sa  Storia  di  Bologna,  Bologne,  1657.  (.  IL 
p.  202-203,  nous  fournit  deux  documents  à  ce  propos.  Dans  le  pn- 
mier,  Grégoire  XI  délibère  de  «  fabriquer  un  collège  fameux 
dans  l'autre,  il  nomme  pour  ses  acteurs  et  procureurs,  pour  Tachai 
du  palais,  Bernard  de  Guy,  prieur  de  Marmande,  et  Jean  de 
Sienne,  citadin.  » 

La  difticulté  soulevée  me  parait  facile  à  résoudre,  quand  on  a  \u 
les  lieux  :  Grégoire  XI  acheta  le  palais  Pepoli  et  s'en  servit  comme 
il  était;  mais,  le  trouvant  insuffisant,  il  ajouta  par  derrière  ud«' 
construction  nouvelle,  qu'il  marqua  de  son  monogramme.  L'en- 
semble prit  le  nom  de  collège  Grégorien,  souvenir  glorieux  à  la 
fois  pour  la  France  et  pour  le  Limousin.  Aussi  je  voudrais  qu»^ 
notre  Société  possédât  une  photographie  des  deux  faces  du  collèi:'' 
(ancienne  et  nouvelle),  ainsi  que  des  chapiteaux  qui  datent  et  nom- 
ment  le  monument. 

X.  Barbier  de  Montault. 


VAHlèTÉS  ET  i>ocuiiETrrs.  8il 


Note  relative  à  Véglise  des  Jésuites  de  JAmoges 

Les  Jésuites  de  Limoges  firent  bénir,  en  1629,  leur  chapelle, 
commencée  en  1607;  ils  devaient  être  aivides  de  Tenrichir  de  reli- 
ques. Je  reçois  de  Benayes,  où  je  ne  sais  quel  hasard  Fa  jetée,  une 
pièce  de  1630  qui  semblerait  répondre  à  ce  souhait.  Elle  porte  sur 
son  pli  :  AuR,  P,  Emmanuel  Martel  {t  douteux),  recteur  du  collège 
de  la  compag^  de  Jésus,  à  Lymoges,  Mais  je  dois  dire  :  1°  que  ce 
papier  ne  porte  ni  sceau,  ni  visa  d'aucune  autorité;  2^  que  le  car- 
dinal qu'on  y  nomme  ne  se  trouve  pas  dans  le  Dictionnaire  des  car- 
dinaux de  la  collection  Migne;  3**  que  beaucoup  des  noms  Je  saints 
énumérés  me  paraissent  étranges,  étant  données  les  règles  de 
l'Eglise  pour  la  dénomination  des  saints  inconnus  des  Catacombes 
(V.  Gerbet,  Esquisse  de  Rome  chrétienne,  t.  P%  chap.  ii,  p.  93  de 
l'édition  Tolra). 

«  Ego  infrascriptus  Joannes  Baplista  Fabius,  cùm  jussu  Illustris- 
simi  ac  Reverendissimi  domini^Federicii  Cardinalis  Zoller,  reliquias 
aliquot  sanctorum  martyrum  ex  cœmeterio  Callixti  extraxissem, 
juxta  facullalem  diclo  111"^  D"*  Federicio  cardinal!  a  Sanclissimo 
domino  nostro  Gregorio  Papa  decirao  quinto  per  brève  apostoli- 
cum  factam,  et  aliquas  mihi  dono  dari  a  diclo  lU"""  D°^  cardinali 
liumiliter  postulassem,  meisque  iile  votis  bénigne  annuens,  aliquas 
ex  ils  quas  meis  manibus  extraxeram.  concessisset,  postquam  eas 
aliquot  annos  decenter  asservassem  in  variis  capsulis  sigillo  muni- 
tis,  tandem  anno  millesimo  sexcentesimo  trigesimo  ex  eisdem  ali- 
quas partes  R.  P. Stephano  Sage,  Societatis  Jesu  religioso,  dono  dedi 
eique  brevis  apostolici  exemplum  ostendi  quod  Sanctitas  Gregorii 
Papae  decimi  quinli  dicto  III"**  D°°  Cardinali  Zoller  concesseral,  et 
juratus  supra  sancta  Evangelia  easdem  quas  dicto  Patri  Stephano 
Sage  dabam  sacras  reliquias  me  ex  dicto  cœmeterio  Callixti  mani- 
bus meis  extraxisse,  à  dicto  Cardinali  dono  accepisse  cum  facul- 
tate  alteri  dandi  vel  Roma  asporlandi,  eidemque  R.  P.  Stephano 
Sage  dono  dare  confirmavi  et  quidquid  habebam  juris  in  eum 
Iransferre  confirmavi,  coram  venerabili  sacerdote  Hieronymo  Sca- 
vincio.  In  cujus  rci  (idem  hoc  praesens  scriptum,  manu  mea  sub- 
scriptum,  dedi  30  octob.  1630. 

»Nomina  sanctorum  quorum  reliquias  dedi  hase  sunt  :  SS.  Âlexan- 
der,  Antonius,  Augustinus,  Agapilus,  Amadous,  Aurélia,  v.  m., 
Bernardus,  Bruno,  Basilissa,  Cornélius,  Camillus,  Constantius, 
Cœrasius,Chrysostomus,Cyriacus,  Cosmus,Camilla,  v.  m.,  Corona, 

T.    XL.  52 


^iî  dOGlirÉ  ARCHÉOLOGIQUE  KT  HIStOEIOUk  DU  LIMOUSIN. 

V.  m.,Damianus,Domistius,  Edoardus,  Ëlisabetha,  v.  m.,Fabianas; 
Fabritius,  Famianus,  Fœlix,  Federicus,  Fulgenlius,  Faustinus,  Fran* 
cisca,  Y.m.,  Gloriosus,  Generosus,  Gervasius,  Honoratus,  Joaones, 
Jacobus,  Innocens,  Julius,  Isidorus.Laurentius,  Lucianus,  LaYînii, 
Y.m.,  Laurentia,  v.m.,  Modestas,  Marcellinus,  Marcellus,  Hacarin?, 
Mauritius,  Marinus,MichaeI,Maximma,v.m.,  Magdalena,  t.  m.,  N(h 
minatus^  Octavius,  Parthenius,  Petrus,  Paulus,  Placidus,  Palroa, 
Y.  m.,Pauliiia,  y.  m.,  Perpétua,  y.  m.,StephaDUs,  Saturninas, Sabi- 
nus.  SeYerinus,  SeYera,  y.  m.,  Torquinius,  Valentinus,  VincenUus, 
Vilalis,  Venantius,  Valerius. 

»  lo  Gioan^  Battist,  de  Fabio  afferma  e  jiuro  sopra  Vetangeh 
havere  data  dette  reliquie  (1). 

Ego  Hieronymus  ScaYincius,  de  Macerieno,  SpoletanaB  dioecesi"^, 
sacerdos,  fidem  facio  diclum  Joannem  Baptîstam  Fabium ,  romanuiD, 
quem  Yirum  probum  judico,  dictas  reliquias  dicte  Patri  Slephano 
Sage  dédisse,  juramento  supra  sacra  EYangelia  quse  supra  scripta 
sunt  courirmasse. 

TÂbbë    POLLBRIÈRE. 


DÉLIBÉRATIONS  D'ASSEMBLÉES  PAROISSIALES 

Acte  de  ville  relatif  à  l'envoi  en  quariier  à  La  Souterraine  d'une 
compagnie  de  cavalerie  et  au  logetnent  des  hommes  et  des  chevaui 
(18  septembre  1732}.' 

Aujourdhuy,  dix-huitième  jour  du  mois  de  septembre  mil  sept 
cent  trente-deux,  en  la  Yille  de  La  Souteraine  et  place  publique 
d'icelle,  lieu  accoutumé  à  faire  les  actes  de  Yille,  par  deYant  le  no^ 
royal  soussigné,  prësens  les  tesmoins  cy-bas  nommez,  se  sont  pré- 
sentez Mess"  les  consuls  de  la  dite  Yille  de  La  Souteraine  de  la  pré- 
sente année  mil  sept  cent  trente-deu?^,  lesquels  en  parlant  à  tous 
les  habitants  icy  couYoquez  et  assemblés  à  leur  diligence,  ils  ooi 
dit  q*"  ont  eu  des  ordres  de  M.  le  marquis  de  Tourny,  intendant  de 
Limoges,  de  tenir  un  logement  prest  pour  les  caYaliers  et  cbeYaux 
d'une  compagnie  de  dragons  ou  cavalerie  qui  doivent  arriver  en 
cette  ville  incessamment  pour  y  rester  en  quartier  jusqu'à  nouvel 
ordre,  ce  qui  fait  q^*  somment  les  d.  habitants  d'indiquer  sur  le 
champ  des  maisons  et  escuries  convenables,  si  mieux  ils  n'ayment 
loger  la  d.  compagnie  chascun  chez  eux. 

(I)  Ecrilare  d'autre  main  :  le  scribe  est  le  témoin  invoqué,  Scavinzi. 


VARlériS  BT  DOCUMENTS.  823 

Lesquels  habitants,  bien  informés  des  sud.  ordres  et  de  Texposé 
cy-dessus,  après  avoir  deliibéré  enlreux,  ils  ont  tous  unanimement 
consentes  que  la  d.  compagnie  fut  casernëe,  et  po'  y  parvenir  ils 
ont  indiquez  les  maisons  appeliez  de  Laudiance,  de  Lavillatte  Ga- 
cheny,  du  Couret,  de  Logas,  et  de  Desrivaux,  lesquelles  ils  ont 
soutenus  eslre  plus  que  suffisantes  pour  loger  les  cavaliers  et  che- 
vaux de  la  d.  compagnie,  et  quant  au  logement  des  officiers  de  la 
<].  compagnie,  ils  ont  indiquez  la  maison  du  s'  Joseph  Pignet  de 
Mézières,  laquelle  ils  soutiennent  estre  très  convenable  pour  les  y 
loger. 

Et  à  rinstant,  les  d.  consuls  s'estant  porté  avec  la  majeure  et 
plus  saine  partie  des  d.  habitants  dans  les  d.  maisons  en  présence 
de  M.  de  La  Rochebrune,  commissaire  des  guerres,  icelles  bien 
examinez,  ils  ont  remarquez  que  la  maison  de  Laudiance  con- 
tiendra dix-huit  cavaliers  et  douze  chevaux,  que  le  loyer  est  par 
chascun  an  de  la  somme  de  vingt  livres  ;  q'  faut  faire  dans  la  pre- 
mière chambre  une  cheminée  de  dix  pieds  d'autheur;  dans  le  gre- 
nier mettre  quatre  appuys  de  chascun  sept  pieds  de  longueur  pour 
soutenir  la  charpente,  employer  à  la  couverture  deux  cent  de  latte, 
deux  milliers  de  clous  et  douze  cent  de  thuille,  q*  faut  mestre  dans 
Tescurie  un  appuy  de  neuf  pieds  pour  soutenir  la  poulre,  accom- 
moder la  porte  qui  est  dans  le  jardin,  de  manière  qu'elle  puisse 
fermer  et  s'ouvrir  commodément  et  que  les  chevaux  y  puissent 
entrer  et  sortir,  netoyer  la  d.  escurie  et  chambre  ;  mettre  des  chas- 
sits  aux  croisées,  des  ratelliers  dans  les  chambres  po'  accrocher 
les  bardes  et  armes,  des  dressoirs  pour  mettre  le  pain  et  autres 
ustancils,  ainsy  que  de  tout  il  sera  nécessaire.  Lesquelles  répara- 
tions ayant  esté  vues  et  bien  examinées  par  Georges  Chantaud, 
charpentier,  et  Pierre  Commarteau,  recouvreur,  ils  ont  promis 
faire  le  tout  pour  et  moyennant  la  so*  de  cinquante-cinq  livres.  El 
sur  le  champ  distraction  ayant  esté  faitte  des  réparations  utilles 
pour  le  prop"  d'avec  celles  qui  lui  sont  indifférentes,  il  a  esté  dit 
et  arresté  que  le  prop'"  en  supporterait  cinquante  livres  et  les  ha- 
bittants  cinq  livres. 

Que,  dans  la  maison  de  Lavillatte  Gacheuy,  il  y  logerat  quatre 
cavaliers  et  quinze  chevaux,  que  le  loyer  de  cette  maison  est  de 
vingt  livres,  q*  convient  metlre  dans  la  chambre  vingt-cinq  plan- 
chans  de  chascun  deux  pieds  et  demy  de  longueur,  raccommoder  le 
plancher  et  iceluy  terrer,  mettre  un  appuy  de  huit  pieds  de  lon- 
gueur pour  soutenir  le  d.  planché,  hausser  la  cheminée  de 
trois  pieds  et  pour  la  couverture  un  cent  de  latte,  cinq  cent 
de  clous  et  quatre  cent  de  thuille,  faire  une  auge  et  un 
ratellier  de  dix-huit  pieds  de  longueur  chascuns,   mettre  trois 


824  SOCIÉTÉ  ARCHÉdLOGlaUB  feT   lllStORIQUK   OU   LlItOUSlK. 

appuys  pour  soutenir  Tauge,  raccommoder  les  auslres  raslel- 
tiers  et  auges  qui  y  sont,  faire  dans  la  snsd.  escurie  les  pssés 
nécessaires  et  un  glassis  pour  découllcr  les  eaux,  taire  tous  cliassits, 
rastelliers  pour  accrocher  les  bardes  et  armes  et  les  dressoirs  pour 
mettre  le  pain  qui  seront  nécessaires  dans  la  d.  roaisoD.  El  It" 
tout  vile  et  examiné  par  les  d.  Chantaud  et  Commarteau.  ils  ont 
promis  le  faire  pour  la  somme  de  trente-cinq  livres,  dont  il  eo  sera 
supporté  par  le  prop"  la  somme  de  vingt  livres  et  les  quinze  livres 
par  les  habitants. 

Dans  celle  du  Gouret,  il  y  logera  douze  cavaliers.  Le  loyer  de 
cette  maison  est  de  vingt  livres.  Les  d.  Gbanteau  et  Gomoïarleaa 
ayant  aussi  examiné  les  réparations  qui  conviennent  y  estre  faîUes. 
ils  ont  dit  ny  en  avoir  aucune,  si  ce  n'est  de  mettre  et  employer  à 
la  cheminée  quatre  pleines  auges  de  mortier  et  q^  convient  aussi 
d'y  mettre  des  rastelliers  po'  accrocher  les  hardes  et  armes,  et  des 
dressoirs  pour  mettre  le  pain,  ce  q'»  ont  promis  faire  pour  la  somme 
de  quatre  livres  dix  sols,  dont  il  en  sera  supporté  par  le  prop" 
douze  sols  et  le  surplus  par  les  habitants. 

Dans  la  maison  de  Logat,  il  y  logera  huit  cavaliers  et  chevaux  : 
que  le  loyer  de  cette  maison  est  de  vingt  livres  ;  et  icelle  vue  et 
examinée  par  les  susnommés,  ils  ont  dit  q^  n'y  avait  de  réparations 
à  y  faire  si  ce  n'est  une  auge  et  un  ratellier  de  sept  à  huit  pieds  de 
longueur  cbascun  et  y  faire  les  chassiLs,  rastelliers  et  crochets  et 
dressoirs  nécessaires  :  ce  q^*  ont  promis  de  faire  pour  la  somme  de 
quatre  livres  dix  sols.  Et  attendu  que  cette  réparation  ne  tourne 
pas  à  l'utilité  du  prop",  il  n'en  supportera  rien. 

Que  l'escurie  des  Desriveaux  contiendra  six  chevaux,  le  loyer 
estimé  à  dix  livres  ;  laquelle  escurie  ayant  été  vue  et  visiltée  par  les 
desnommés  cy-^essus,  il  ne  sy  est  trouvé  aucunes  réparations  à  y 
faire,  non  plus  que  dans  la  maison  du  d.  Pierre  Pignel. 

Tous  lesquels  loyers  cy-dessus  montent  à  la  somme  de  quatre- 
vingt-dix  livres. cy         90    "• 

Les  réparations  à  la  somme  de  quatre-vingt-di.x-neuf 
livres cy         99    « 

Total  cent  quatre-vingt-neuf  livres cy       189    »• 

Laquelle  somme  les  d.  habitants  veuUent  et  consentent,  attenda 
que  les  prop'«"  des  d.  maisons  ne  sont  pas  à  présent  en  estât  de 
faire  faire  les  susd.  réparations,  qu'elles  soient  réparties  sur  eux  et 
autres  habitants  suivant  les  facultés  d'un  chacun,  sauf  aux  d.  ha- 
bitants de  répeter  contre  les  susd.  prop"'  ce  qui  se  trouvera  excé- 
der les  loyers  ainsi  q^*  sont  cy-dessus  expliquez  et  q*  soit  aussi 
reparly  tous  les  faux  fraits  et  fournitures  que  les  d.  consuls  seront 


VARIÉTÉS   ET   DOCUMENTS.  835 

obligez  de  faire  pour  le  logement  de  la  d.  com-pagnie  suivant  Testât 
quMls  en  rapporteront  deûement  veriffié  et  attesté. 

Et  les  d.  Chantaud  et  Comârteau,  establis  comme  dessus,  demeu- 
rants en  la  présente  ville,  promettent  et  s'obligent  de  f»  louttes  les 
susd.  réparations  et  fournitures,  ainsi  qu'elles  sont  cy-dessus  figu- 
gurées,  fournir  tous  mathériaux,  leur  peine  et  celle  des  ouvriers 
et  avoir  icelles  faitles  et  rendues  parfaitles  dans  huit  jours,  à  peine 
de  tous  dépens,  dommages  int^,  en  ce  q^  leur  sera  payé  la  d.  somme 
de  quatre-vingt-dix-neuf  livres,  prix  des  d.  fournitures  et  répara- 
tions. 

Dont  et  du  tout  les  d.  habitants  ont  requis  acte  au  d.  nV%  q^ 
leur  a  octroyé  po'  servir  et  valloir  ce  que  de  raison. 

Fait  en  présence  de  M®  André  Raimond  Betôlaud,  clerc,  et  de 
s'  Pierre  Dardanne,  marchand,  habitant  de  cette  ville,  lesmoins 
connus,  requis  et  appelles.  Et  ont  les  d.  Commarteau  et  consuls 
signez  avec  les  d.  habitants,  qui  ce  sont  soussignez,  et  le  d.  Ghan* 
taud  déclare  ne  sçavoir  signer  de  ce  interpellé.  Signé  :  P.  de  Com- 

MARTALD,    BONNET,    LaROCHE,  LaCOUTURE,  MoNTAUDON,    DE    GUARTEMPB, 

subd.;  MoNTAUDON,  Desvarenes,  BoN?jET,  Salleton,  Devollondat, 
Savy,  Forgemol,  Rocherolles,  Commarcniat,  Pier  Margotin,  Bos- 
deau,  Betôlaud,  Malerbaud,  A.  Deslignêres,  Ranjon,  not"  royal. 
Conlrollé  à  La  Souteraine  le  26*  septembre  1732.  Reçu  douze  sols. 
Signé  :  Nonique. 
(Communication  de  M.  J.  Bellel). 


Délibération  de  l'assemblée  paroissiale  de  Saint-Auvent  relative  à  la 

réparation  de  Véglise  (26  juin  1740). 

Aujourd'huy  dimanche,  vingt-sixième  jour  du  mois  de  juin  mil 
sept  cent  quarante,  par  devant  nous,  notaires  royaux  de  la  séné^- 
chaussée  de  Montmorillon,  soussignés,  étant  au  devant  de  la  grande 
porte  et  principale  entrée  de  Téglise  paroissiale  du  bourg  et 
paroisse  de  S*  Auvant,  à  l'issue  de  la  messe  paroissiale  du  dit 
lieu,  célébrée  par  Monsieur  le  Curé,  les  habiians  sortans  de  l'ouïr, 
assemblés  au  dit  lieu,  faisant  la  plus  grande  et  la  majeure  partie 
d'iceux  convoqués  au  son  delà  cloche  en  la  manière  accoutumée 
pour  déhbérer  ensemble  sur  les  affaires  qui  concernent  la  dite  pa»- 
roisse,  a  comparu  en  personne  sieur  Gaspard  de  Soudanes,  m*  chi- 
rurgien, habitant  au  bourg  de  S'  Auvent,  lequel,  en  qualité  de 
fabricîen  et  de  seindic  nommé  et  fondé  de  procuration  des  habitahs 


826  SOCIÉTÉ   ARCBÊOL06IOUB  BT  HISTORIQUB   OU   LIMOUSIN. 

pour  négocier  l'affaire  dont  sera  cy-après  parlé,  a  dit  et  remontré 
aax  autres  habitans,  parlant  à  eux  en  général,  qui  leur  a  demandé 
cette  convocation  afin  d'examiner  que  le  chœur  et  le  sanctuaire  de 
leur  dite  église  avec  le  clocher  qui  est  édifié  sur  le  même  chœur 
ayant  eu  besoin  de  réparations,  surtout  le  dit  clocher,  qui  a  été 
totalement  ruiné,  il  y  a  six  ans,  les  dits  habitans  se  pounreureni 
contre  Messieurs  du  chapitre  de  S*  Junien,  décimateurs  principaux 
de  la  dite  paroisse,  pour  les  obliger  en  celte  qualité  à  faire  les 
dites  réparations;  ensuite  il  auroit  été  fait  état  des  dites  réparations 
et  procédé  à  l'adjudication  par  un  bail  au  rabais,  laquelle  adjudica- 
tion auroit  été  enterrinée  par  arrêt  du  Conseil  d'Etat  du  quinze 
février  mil  sept  cent  trente-sept,  qui  auroit  ordonné  que  les  som- 
mes portées  parla  dite  adjudication  seroient  payées  par  les  déci- 
mateurs et  renvoyées  pour  l'exécution  du  dit  arrêt  Jevant  M*  Lenain. 
intendant  de  Poitiers,  commis  par  le  dit  arrêt,  auquel  arrêt  les  dits 
sieurs  du  chapitre  de  S^  Junien  ayant  formé  opposition  de  leur  part 
et  recherché  des  oppositions  tierces,  ils  en  furent  déboutés  ;  le  dit 
sieur  commissaire  ordonna  l'exécution  du  dit  arrêt  et  prononça 
une  guarenlie  en  faveur  du  dit  chapitre  contre  leurs  co-décimaleurs 
pour  contribuer  leur  quotité  par  son  ordonnance  du  vingt-huit  oc- 
tobre mil  sept  cent  trente-neuf,  de  laquelle  le  dit  chapitre  interjeta 
appel  au  dit  conseil,  sur  lequel  les  habitans,  en  la  dite  personne  du 
dit  sieur  de  Soubdanes,  ont  été  ialimés  eten  ont  obtenus  une  dé- 
charge des  condamnations  contre  eux  prononcées  par   le  sieur 
intendant  de  Poitiers,  commissaire  du  Conseil,  avec  dépens  par 
arrest  par  deffaud  du  neuvième  may  dernier,  qu'ils  ont  fait  signi- 
fier au  sindic  le  troisième  juin  aussi  dernier  :  tout  quoy  communi- 
qué aux  habitans  de  cette  paroisse,  il  a  été  délibéré  qu'ils  y  forme- 
roient  opposition,  ce  qu'il  a  du  depuis  fait,    en  sorte   qu'il  est 
question  à  présent  de  poursuivre  la  dite  opposition  pour    faire 
rapporter  le  dit  arresl,  demander  l'exécution  de  l'ordonnance  du 
dit  sieur  commissaire  du  conseil  du  dit  jour  vingt-huit  octobre  1739 
et  au  dit  arrest  du  conseil  du  quinze  février  1737;  et  comme  pen- 
dant les  dites  poursuites  déjà  faites  et  le  temps   qui   s'écoulera 
devant  celles  qui  sont  à  faire  pour  obtenir  un  arrest  définitif  au  dit 
conseil,  il  s'accumule  des  dégradations  faulte  des  dites  réparations, 
qu'il  y  aura  par  conséquent  une  grosse  augmentation  des  répara- 
tions à  faire  au  dit  chœur,  sanctuaire  et  clocher,  il  sera  nécessaire 
d'en  former  demande  au  dit  chapitre  de  S^  Junien;  et,  attendu  qo*iI 
n'a  aucun  fonds  de  la  fabrique  entre  les  mains,  il  requiert  les  dits 
habitants  en  général  et  chacun  en  particulier  de  lui  fournir  les  fonds 
nécessaires  pour  faire  les  dites  poursuites,  à  fin  et  à  mesure  et  an  cas 
où  ils  ne  les  luy  fourniroient  pas  h  présent  comptant,  qu'ils  consentent 


VARIÉTÉS   ET   DOCUMENTS.  837 

qu'il  en  fasse  un  emprunt  et  promettant  à  présent  de  demeurer  so- 
lidairement obligés  avec  luy  d'en  faire  le  payement  au  porteur  dans 
le  temps  qu'il  prendra  avec  lui,  et  en  conséquence,  requiert  que  les 
dits  habitans^  pour  la  dite  majeure  part  icy  assemblés^  tant  pour 
eux  que  pour  les  autres  absents,  ayant  à  délibérer  présentement 
sur  la  dite  remontrance,  ensuitte  la  ditte  assemblée  de  la  majeure 
partie  diceux  ayant  unanimement  délibéré  sur  la  ditte  remontrance 
aussy  présents  et  entre  autres  M*  Jean  de  la  Garde,  sieur  de  la 
Besse,  juge  sénéchal  du  S*  Auvant;  sieur  Sébastien  de  Mareilhac, 
bourgeois;  M*  Jean  de  La  Roche,  notaire  et  procureur  au  dit  lieu; 
sieur  François  Touyéras,  bourgeois  ;  sieur  François  Chapus,  aussi 
bourgeois;  Jean  et  François  Thamageron,  maréchaux;  Jean  Rayet, 
marchand  ;  Paul  Rousselat,  marchand  ;  Léonard-Laurent-Pierre  de 
Chezemartin,  marchand,  tous  habitans  du  d.  bourg  de  S'  Au?ent; 
Jean  et  Léonard  Glanissen,  marchands;  François  de  La  Joubertie, 
Martial  et  autre  Martial  Chambord,  habitans  du  village  du  Roule, 
présente  paroisse;  François  de  la  Garde,  charron;  Pierre  Mamaud, 
Léonard  et  Simon  de  Marcillac,  habitans  du  village  de  Chez-Monne- 
rie;  François  de  Villard,  marchand  du  village  de  laNouzille,  et  Jean 
Saneslas  dit  Lamont,  laboureur  du  village  de  Marthegoutte;  Jean 
Thomas  et  Jean  Leboutet  dit  Ragot,  Jean  du  Solier,  maçon  du  vil- 
lage du  Peyrat;  Léonard  et  Pierre  de  Vignerie,  François  Brun,  tous 
marchands  du  village  de  Trimolas;  Pierre  de  Marcillac,  marchand 
du    lieu   de  Planchât;  Jean  Vareille,  musnier;  Jean  Vareille  dit 
Maraud,  marchand  du  village  de  Boivieux;  Martial  Jallageas,  mar- 
chand :  Maniai  Boissaud,  Louis  Monnerie,  laboureurs  du  village  de 
laBellemenie;  Léonard  Javellaud,  marchand;  François  Blanchel, 
Pierre  et  Léonard  Nénert  frères,  laboureurs  du  village  de  Royer; 
Louis  Monnerie  et  Jean  Fourgeaud,  Jean  Peyrichon,  du  village  de 
Soumagnas;  Pierre  Pouzy,  marchand  du  village  de  la  Berle,letout 
paroisse  du  dit  S'  Auvent,  tous  convoqués  à  cet  effet  au  son  de  la  clo- 
che, en  la  manière  accoutumée,  tant  pour  eux  que  pour  les  autres 
habitans  absents,  ont  dit  qu'il  est  nécessaire  de  faire  promplemenl 
la  dite  poursuite  et  demande  ci-dessus  énoncée  au  dit  conseil  d'Etat, 
donné  de  nouveau  pouvoir  au  dit  sieur  de  Soiidane,  en  la  dite  qualité 
de  sindic  des  dits  habitans  et  fabriciens  de  la  dite  paroisse  de  faire 
les  dittes  poursuites  telles  qu'il  jugera  nécessaire,  consentent  qu'il 
fasse  un  emprunt  jusques  à  la  concurrence  de  la  somme  de  quatre 
cents  livres  pour  employer  aux  dittes  poursuites,  les  frais  de  laquelle 
ils  promettent  de  lui  allouer  sur  le  simple  état  qu'il  en  rapportera 
de  lui  cerlifflé,  promettent  les  d.  habitans  icy  assemblés  et  convo- 
qués, tant  pour  eux  que  pour  les  autres  absens,  de  rendre  et  payer 
avec  le  dit  sieur  Soudane  la  ditte  somme  de  quatre  cens  en qui 


828  SOCléTÉ  ARCHÊOLOGIQUJB  ET  HISTOAIQUB   OU  LIMOU$IX. 

luy  sera  à  cet  effet  prêtée  à  celay  qui  la  prêtera  dans  les  termes  ei 
pactes  qu'il  stipulera  en  vertu  du  présent  acte  et  sur  la  représenta- 
tion simple  du  billet  d'emprunt  que  le  dit  sieur  Soudane  en  la  ditk 
qualité  en  aura  donné.  A  l'effet  de  quoy,  il  mettra  entre  les  maÎËS 
du  prêteur  de  la  ditte  somme  une  expédition  des  présentes  es 
forme;  approuvent  dès  à  présent  ce  qui  sera  sur  ce  par  lay  fait 
et  s'obligent  pour  le  payement  de  la  dite  somme  ci  emprunter  taai 
pour  eux  icy  présens  que  pour  les  autres  habitans  absens,  solidai- 
rement les  uns  pour  les  autres,  et  le  meilleur  d'un  chacun  d'eui 
seul  pour  le  tout,  sous  les  renonciations  au  bénëdce  de  division. 
d'exécution  de  bien  et  ordre  de  droit  à  eux  donné  à  eutendre  par 
nous,  dits  noltaircs  soussignés,  être  tel  que  de  plusieurs  obligés 
ensemble  pour  une  même  chose,  un  n'est  tenu  du  fait  de  raolre 
sans  avoir  fait  les  dittes  renonciations,  ce  qu'ils  ont  dit  bien  sçavoir 
et  entendre,  et  y  ont  dabondant  renoncé  et  à  toutes  choses,  privilè- 
ges à  ce  contraires  sous  l'obligation  et  hipotëque  de  tous  et  cbacuos 
leurs  biens  présens  et  futurs,  et  en  cas  de  paiement  solidaires  par 
les  uns,  les  autres  s'obligent  au  remboursement  même  de  tous  frais 
qui  pourraient  se  faire  à  peine  de  tous  dépens  et  dommages  intérêts, 
et  consentent  même  les  dits  habitans  que  pour  parvenir  à  faire  les 
paiemens  et  remboursemens  de  la  ditte  somme  de  quatre  cens 
livres,  même  de  toutes  autres  sommes  qu'il  sera  nécessaire  d'em- 
prunter pour  la  môme  affaire  que  dessus  cy-après  jusques  à  défini- 
tion. Dont  et  de  ce  que  dessus  le  dit  sieur  sindic  et  habitans  et  com- 
parans  ont  requis  acte  à  eux  concédé  par  nous  dits  nottaires,  qui, 
pour  l'exécution  de  leurs  réquisitions,  les  en  avons  jugé  et  con- 
damnés; et  ont  les  soussignés  signés  avec  nous  dits  nottaires  ;  les 
autres  ont  dit  n'être  nécessaire  et  les  autres  ne  sçavoir  signer,  de 
ce  dûment  requis.  Fait  et  passé  au  dit  lieu  et  place  du  dit  S^  Au- 
vaut,  le  dit  jour,  mois  et  an  susdit.  (Suivent  les  signatures,  au  nom- 
bre de  vingt-quatre,  dont  trois  notaires.)  —  Controllé  à  Saint-Au- 
vant,  le  26  juin  1740.  Reçu  douze  sols.  Signé  :  De  la  Garde. 
(Communication  de  M.  Gabriel  Touyéras). 


Assemblée  paroissiale  de  Saint-Auvent  :  Nomination  de  Syndics. 

(6  janvier  1741). 

Le  sixième  jour  du  mois  de  janvier  mil  sept  cent  quarante  et  on, 
au  bourgt  de  S^-Auvant,  sous  la  halle  et  place  publique  du  dit  Uea, 
environs  les  dix  heures  du  matin,  à  issue  de  messe  paroissialle  du 
dit  bourgt  et  paroisse,  par  devant  les  Not'"^*  royaux  de  la  sénéchaas- 


VARIÉTÉS   ET   DOCUMENTS.  630 

sée  de  Montmorillon,  soussignés,  se  sont  présentes  en  leurs 
personnes,  Léonard  Leboutet,  demeurant  au  village  de  Trin- 
solas,  d'une  part,  Junlen  Hélias,  demeurant  au  village  de  Royer, 
le  tout  paroisse  du  dit  S^-Auvant,  les  quels  nous  ont  dit 
qu'ils  avoient  été  nommés  scindics  du  dit  bourg  et  paroisse  par 
les  dits  habitans  pour  en  faire  la  fonction  jusques  au  premier  du 
présent  mois  et  qu'ils  devoit  être  deschargé  du  dit  office  et  charge 

de  scindic  ainsi  qu'il  apparoist  par  l'acte  du mil  sept  cent 

quarante  receu  par no"  à  S'-Auvant,  controllé  au  bourgtdu 

dit  lieu  par  Delagarde,  et  comme  les  dits  habitans  ont  de  coutume 
de  s'assembler  sous  la  dite  halle  du  présent  lieu,  les  dits  Hélias  et 
Leboutet  nous  ont  requis  de  nous  transporter  avec  enn  au  dit  lieu 
où  Ton  a  accoutumé  de  nommer  les  dits  scindics.  A  quoiadhairant, 
nous  nous  sommes  transportés  avec  les  dits  Hélias  et  Leboutet 
sous  la  ditte  halle  et  place  publique,  où  étant  les  habitans  du  dit 
bourg  et  paroisse  assemblés,  qui  est  M"  Jean  de  Lagardo,  sieur  de 
La  Besse,  juge  sénéchal  du  d.  lieu  ;  M*  Jean  Delaroche,  no"  et  pro- 
procureur au  p*  lieu;  sieur  François  Gaspard  de  Soubdanes,  sieur 
Sébastien  de  Marcillac,  sieur  François  Chapus  aussi  bourgeois  ; 
M*  Jean  et  François  Tamagnon,  maréchaux  ;  Laurent  Rayet,  mar- 
chand ;  Jean  de  Laylevoix,  sergent  ;  Paul  Rousselat,  m**  ,  demeu- 
rant tous  au  dit  bourg;  Pierre  et  Léonard  de  Vignerie,  m^";  Fran- 
çois Brun,  m^  ,  d'  au  village  de  Trinsolas  ;  Léonard  Javellaud,  m^  ; 
François  Blanchard,  laboureur  d' au  village  de  Rouyer  ;  d'autres 
Jean  et  Léonard  Glanisson,  m^'  du  village  de  Roule;  Jean  Dela- 
garde; Charron  et  Léonard  Giraud,  de  villages  de  Chez-Monneric 
et  autres,  le  tout  paroisse  de  S'-Auvcnl,  auxquels  les  dits  Hélias 
et  Lebouttet  ont  remontré  que  leurs  charges  de  scindic  finissoicnt 
depuis  le  premier  du  présent  mois  et  ont  sommé  les  dits  habitans  du 
dit  bourg  et  paroisse  de  nommer  d  autres  sindics,  sy  non  et  fautte 
de  ce  ont  protesté  de  n'être  tenu  d'aucuns  événements.  D'une  môme 
voie  ont  nommé  pour  scindic  du  dit  bourg  et  paroisscde  S*-Auvent, 
pour  en  faire  la  fonction  pendant  un  an  à  comler  de  ce  jour- 
d'huy,  JeanBouyer,  dit  Jean  de  Lâge,  demeurant  au  village  de 
Lâge,  laboureur;  et  Jean  Goursaud,  journalier,  demeurant  au 
village  du  Roule,  le  tout  paroisse  du  dit  S'-Auvenl  :  dont  et  du  tout 
les  dits  Hélias  et  Lebouttet  nous  ont  requis  acte  aussi  bien  que 
les  dits  habitans,  de  ce  qu'ils  ont  nommé  au  lieu  et  place  des 
dits  Lebouttet  et  Hélias  que  nous  leurs  avons  octroyé  chacun  à 
leur  égard.  Après  leur  avoir  fait  la  lecture  du  présent  acte  aux  dits 
habitants,  les  dits  soussignés  ont  signé  et  les  autres  ont  déclaré 
ne  scavoir  signer  de  ce  interpellés.  (Suivent  les  signatures). 

Controllé  à  S'-Auvant  le  6  janvier  1741,  R.  N.  Delagarde  commis, 

(Communication  de  M.  G.  Touyéras). 


830  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIK. 


Assemblée  paroissiale  de  Saint-Cyr  :  nomination  d'un  sfnéic. 

(25  février  1742). 

L'an  mil  sept  cents  quarante-deux,  et  le  dimanche  viogt-cinquièai  ' 
février,  à  Tissue  de  la  messe  paroissiale  du  bourgt  et  paroisse  de 
S^-Cyr,  au-devant  la  grande  porte  et  principale  entrée  de  Téglw 
du  dit  lieu,  les  habilans  de  la  dile  paroisse  assemblés  au  son  de 
la  cloche  et  convoqués  à  la  manière  oiccoutumée  par  devant  nous 
no""  royaux  de  la  sénéchaussée  de  MontmoriUion,  soussigné,  ayaiit 
par  eux  été  requis  de  nous  transporter  au  dit  lieu,  c'est  présenif 
messire  Junien  Périgord,  prêtre,  curé  du  dit  bourgt  et  paroi5>«- 
du  d.  lieu,  qui  a  proposé  aux  d.  habitans  qu*il  n*y  a  point  de  sein- 
dicts  fabriliens  dansTéglise  de  la  dite  paroisse,  qu'il  est  nécessaire' 
d'en  nommer  présentement  deux,  qu  il  les  sommes  d'en  nomnitr 
présentement,  faute  de  quoi  il  proteste  d'en  faire  nommer  par 
monseigneur  Tinlendant.  A  quoi  les  d.  habitans  assemblés  compo- 
zantla  plus  grande  partie  de  la  d.  paroisse  ont  réponduqu'ils  éloient 
prest  de  nommer  les  deux  scinditcs  fabritiens  et  sur  le  champs  il> 
ont  délibéré  ensemble  et  après  leurs  délibérations,  ont  unanime- 
ment nommé  Jean  Léger,  s'  de  La  Fond,  bourgeois,  demeurant  au 
village  de  La  Barbe;  Léonard  Rouchette,  laboureur  du  village  de 
Broussas,  susdite  paroisse,  les  quels  icy  présents  ont  accepté  leurs 
nominations,  fait  leur  soumilion  et  prorois  de  saquiler  de  lear 
devoir  et  de  leur  charge  :  dont  et  de  tout  quoi  le  dit  sieur  caré,  les 
d.  habitans  et  les  d.  fabritiens  en  ont  requis  acte  que  je  leur  ai 
octroyé.  Parmis  les  quels  habitans  étoient  particullièreroenl 
M«  Estienne  Allegraud,  Jean  Descubes,  sieur  du  Repayre,  Jean 
Allegraud,  Estienne  DcHgnas,  Jean  Allegraud,  Guillen  Allegraud, 
Pierre  Allegraud,  André  Rouchette,  Laurent  Chapus,  Pierre  Cha- 
baud,  Pierre  Legnias,  Estienne  Reyx,  Simon  Reymondeau,  Laurens 
Rouchette,  Pierre  Nénert,  Guillen  Allegraud,  Pierre  Monoerie. 
dont  ceux  qui  savent  signer  ont  signé  et  les  autres  déclaré 
ne  sçavoir  de  ce  duement  requis.  Le  dit  sieur  curé  a  signé  el  h^ 
autres  ont  déclaré  ne  sçavoir.  Fait  et  passé  au  devant  de  la  d. 
grande  porte  de  l'église  les  d.  jour  mois  el  an  susdit. 

Suivent  neuf  signatures  et   celles  des  deux  notaires  royaux. 
Mallebay  de  Massé  et  Touyéras. 

Controllé  à   St-Auvent,  le  1^^  mars  1742,    reçea  deux  sols. 

Signé  :  L.  Lhomme. 
(Communiqué  par  M.  G.  Touyépas). 


VARIÉTÉS  ET  DOCUHSMTS.  831 


Assemblée  de  paroisse  de  St-Laurent-^ur-Gorre.  Examen  de  diverses 
réclamations  relatives  à  des  cotes  de  taille  (37  décembre  1774). 

ÂQJourd'hy,  jour  de  feste  vingt-ieptieme  jour  du  mois  de  dé- 
cembre mil  sept  ceDls  soixante-quatorze,  à  issue  de  la  grand  messe 
paroissiale  du  bourg  et  paroisse  de  8*-Laureas-8ur-Gorre,  célébrée 
par  H.  le  vicaire  du  dit  S^-Laurens,  Iqs  habitaos  assemblés  sous  la 
halle  et  place  publique  au  son  de  la  cloche  à  la  manière  accou- 
tumée, par  devant  nous  notaires  royaux  de  la  sénéchaussée  de 
Montmorillon,  soussignés,  a  comparu  Anthoîne  Duuoyer,  sindic  du 
bourg  et  paroisse  du  d.  S^-Laurens,  lequel  en  parlant  aux  dits 
nianans  et  habitans,  leurs  a  remontré  qu'il  a  receu  de  Monsieur  de 
La  Fordie,  subdélégué  de  Monseigneur  l'intendant  de  Poitiers 
trois  mémoires  d'oposition  en  surtaux  au  rolle  des  tailles  de  la 
paroisse  du  d.  S'-Laurens-sur-Gorre  pour  la  présente  année  mil 
sept  cents  soixante-quatorze,  qui  ont  été  donnés  et  fourny  par  de- 
vant Messieurs  les  présidents  lieutenant  conseillers  du  roy  et  eleus 
en  Télection  de  Gonfolens  par  Clément  Ratinaud,  du  village.de  la 
Roussille,  collon  du  s'  du  Pcyrat,  habitant  de  la  d*  paroisse  de 
S*-Laurens,  qui  dit  que  son  bien  est  symodique  et  que  son  revenu 
a  beaucoup  prés  suflsant  pour  ie  nourir  et  sa  famille  ;  qu*il  est 
obligé  de  faire  valoir  le  bien  d'autruy  à  moitié  fruit  et  que  tout  son 
bien  consiste  en  une  petite  maison  et  jardin,  trois  septérées  de 
prés,  trois  septérées  de  terres  seigle  et  six  à  sept  septérées  de 
bruyère  le  tout  médiocre,  qui  ne  fait  en  tout  que  douze  à  treize 
septérées  et  qu'il  a  été  cotisé  depuis  trois  ans  en  sa  de  prin- 
cipale taille  a  douze  livres  douze  sols  et  en  soixante-quatorze  à 
quinze  livres  ;  Georges  Frugier,  dit  Lirat,  collon  du  dit  sieur  du 
Peyrat,  auvillage  de  Bruyère,  sus  dite  paroisse  de  S'-Laurens,  qui  dit 
que  son  bien  et  si  modique  et  que  son  revenu  n'est  pas  suffisant 
pour  le  nourir  et  sa  famille,  qu'il  est  obligé  de  faire  valoir  le  bien 
d*autruy  à  moitié  fruit  et  que  tout  son  bien  consiste  en  une  petite 
maison,  grange  et  jardin,  quatre  septérées  de  prés,  trois  septérées 
de  palureaux,  huit  septérées  de  terres  à  seigle  et  douze  septérées 
de  bois  chastagniers,  ce  qui  fait  en  tout  environ  vingt-sept  septé- 
rées, le  tout  de  qualité  très  médiocre  ;  et  Jean  Reynaud,  dit  le  Reyx, 
du  village  de  Bruyère,  sus  d.  paroisse  de  S*-Laurens,  dit  que  son 
bien  et  sy  modique  et  que  son  revenu  n'est  pas  suPisant  pour  le 
nourir  et  qui  ne  possède  que  trois  septérées  de  prés,  une  septérée 
de  terre  et  bois  châtaigniers  avec  une  petite  maison  et  grange  et 
se  trouve  cotisé  trois  années  consécutives  à  dix  livres  douze  sols  et 
aujourdbuy  à  treize  livres  deux  sols. 


S39  SOCIÉTÉ  ARCB^.OLOGlQO£   ET   HISTOEIQUB  DU   LIMOUSIN. 

A  quoi  le  d.  sindic,  manans  et  habitans  de  la  d.  parois>o'> 
S'-Laureus,  fezanl  la  plus  seyne  et  grande  partie  des  principaiî 
habitans,  lesquels  après  avoir  examiné  les  trois  mémoires  d^ojnr- 
sltion  en  surtaux  des  tailles  fourny  par  les  d.  Clément  Ratioâs^I. 
Georges  Frugier  et  Jean  Reynaud,  dit  le  Roy,  ont  tous  unafliffir- 
ment  et  d'une  mesme  voye  dit  et  déclaré  qu'ils  ne  sontpa5s»ir- 
chargés  et  que  bien  au  contraire  qu'ils  ne  sont  pas  taxé  à  la  laiH. 
qu'ils  doivent  avoir  et  tout  ce  qu'ils  ont  avancé  par  lear  d.  oposiii'^'i 
est  faux  et  supozé.  Donc  et  tout  quoy  les  d.  comparans  nous  on: 
requis  acte  que  nous  leur  avons  octroyé  pour  leur  servir  et  valloi- 
ainsy  que  de  raison.  Fait  et  passé  au  d.  lieu  et  place  pubUiinf 
le  d.  jour  mois  et  an  sus  dit.  Lecture  faite  les  soussignés  ont  sigc*^ 
et  les  autres  ont  déclai'é  ne  sçavoir  signer  ny  n*ellre  de  bezoin. 
Signés  :  A.  Dunoyer,  sindit;  de  CnArzEMARirN,  Pierre  Ratsuk 
A.  Raynaud,  deLv  Cote  de  Chaizemartin,  L.  Braud,  Jacques  Rollvii». 
M.  Lavergike,  Pierre  Frugier,  C.  Veyreton  de  Massaloux,  n*  royal. 
TouYÉRAs,  notaire  royal. 

Controllé  à  S*-Auvent  le  1«^  janvier  1775,  reçu  quatorze  sols. 

Signé  :  de  Marcilluc. 
(Communication  du  môme). 


Privilège  d'Eugène  III  pour  l'abbaye  de  Solignac.  Sa  date. 

Le  R.  P.  Rigaudie  a  étudié  une  bulle,  jusqu'alors  inédite,  que 
possèdent  les  Archives  de  la  Haute-Vienne  sous  le  n*  8949  ftù  fonds 
de  Solignac.  C'est  un  privilège  du  pape  Eugène  II[,  acconlé  a 
l'abbaye  de  Solignac  en  1147.  Puis,  après  la  consciencieuse  étude 
qu'il  en  a  faite,  il  en  a  enrichi  le  dernier  Bulletin  de  la  Société 
archéologique,  t.  XXXIX,  p.  639. 

Dans  les  savantes  notes  qui  accompagnent  ce  document  il  nous 
dit  :  «  Ce  parchemin  a  subi  plusieurs  déchirures,  dont  la  plus  n^- 
gretlable  parait  avoir  été  occasionnée  par  l'arrachement  du  sceau 
en  plomb  appenda  au  privilège  et  qui  manque.  Malgré  cela,  il  o>t 
facile  de  rétablir  sûrement  le  privilège  dans  son  intégrité,  à  l>x- 
ception  toutefois  de  la  date  du  mois  et  du  jour  qu'il  est  impossibk 
de  préciser,  » 

L'impossibilité  de  rétablir  cette  ççgretlable  laciine  subsistera 
toujours  si  on  s'en  tient  au  parchemin  lui-niéme,  car  personne  ne 
peut  l'étudier  avec  plus  de  sagacité  et  en  retirer  plus  d'indicationi: 
fructueuses  que  le  R,  P.  Rigaudie.  C'est  donc  ailleurs  qu'il  faut 
c  rcher  la  solution. 


VARIÉTÉS  ET  DOCUMENTS.  833 

Celte  bulle,  avant  de  venir  au  dépôt  de  nos  archives  départe- 
mentales, était  conservée  au  trésor  de  Tabbaye  de  Solignac.  Elle  y 
était  notamment  vers  1658  lorsque  Fr.  Laurent  Dumas  composa  la 
Chronique  du  monastère  de  Saint-Pieire  de  Solignac^  chronique 
encore  inédite,  dont  je  possède  le  texte  autographe  de  Fauteur. 
C'est  un  petit  in-i*»  carré  de  180  pages,  dont  le  manuscrit  des 
Archives  nationales  n*»  19,857,  ne  contient  qu'une  partie.  Or 
ce  religieux  reproduisant  dans  son  manuscrit  les  documents  qui 
avaient  quelque  importance  historique,  ne  pouvait  oublier  le 
privilège  d'Eugène  III.  Il  donne,  en  effet,  le  texte  de  cette  bulle, 
pris  sur  l'original  qui  n'avait  alors  aucune  déchirure.  S'y  lit  très 
distinctement  :  «  Datum XVIII K"^.  Oct.  » 

Donné  le  18*  des  calendes  d'octobre,  c'est-à-dire  le  14  sep- 
tembre. 

Il  suit  de  là  que  l'indication  du  6  septembre  (VllI  id.  sept.) 
fournie  par  la  nouvelle  édition  des  Regesta  Pontif.  Roman,  de 
Jaffé  au  n**  9130,  ne  doit  être  exacte. 


Dans  rénumération  des  églises  appartenant  à  l'abbaye  de  Soli- 
gnac, le  R.  P.  Rigaudie  lit  dans  le  texte  de  la  bulle  :  «  Ecclesiam 
Sancti  Elegii  Delvica,  »  Et  il  hésite  à  identifier  cette  église.  Notre 
manuscrit  va  encore  lever  les  doutes  à  ce  sujet.  Il  porte  :  «  Eccle- 
siam Sancti  Elegii  de  Vicano.  »  C'est  en  effet  le  Vigen,  qui  appar- 
tenait à  Solignac  en  1147.  Il  ne  peut  pas  y  avoir  de  doute  sur  cette 
identification,  puisque  le  cartulaire  de  cette  abbaye  nous  apprend 
que  Gaucelin  de  PierrebulBère  céda  à  l'abbé  Guy,  qui  siégeait  en 
1071,  le  fief  presbytéral  de  Saint-Eloi  de  Vico. 

À.  Lecler. 


ERRATA 


Il  s*est  iDtroduil  quelques  légères  erreurs  dans  la  nolice  chrono- 
logique sur  Sain  t-Yrieix.  Ainsi,  rimprimerie  de  Noyer  fut  ëublie 
en  1835  (et  non  vers  1833,  comme  il  est  dil).  —  Le  médecio  d'Annie 
d'Autriche  s'appelait  Pardoux  Gondinet  (et  non  Yrieix).  —  H.  de 
Latour  habite  aujourd'hui  Le  Ghalard  (et  non  Courbefy).  —  Danfi 
la  liste  des  hommes  notables,  on  a  oublié  Antoine  de  Laloor,  tra- 
ducteur des  Prisons  de  Silvio  Pellico  (1833).  Voy.  l'article  qui  lui 
est  consacré  dans  la  première  édition  du  Vapereau. 

A.  L. 


NÉCROLOGIE 


M.  Astaix. 


La  Société  archéologique  et  historique  du  Limousin  a  perdu,  au 
cours  de  rannëe  1890,  un  de  ses  membres  les  plus  dévoués,  un  de 
ceux  dont  le  concours  fidèle  et  sûr  lui  a  été  le  plus  précieux. 

M.  Astaix,  ancien  directeur  de  TEcoIe  de  médecine  de  Limoges, 
chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  est  mort  le  24  septembre,  après 
quelques  jours  seulement  de  maladie,  C'était  un  savant  modeste, 
un  professeur  distingué,  un  homme  d'une  haute  honorabilité  et 
d'une  rare  bienveillance.  Il  a  laissé  des  regrets  unanimes  à 
Limoges,  où  sa  laborieuse  carrière,  qui  s'était  écoulée  sous  les 
yeux  de  tous,  fournissait  le  meilleur  des  exemples  et  la  plus  élo- 
quente des  leçons. 

Originaire  du  département  du  Puy-de-Dôme,  M.  Astaix  était 
venu  se  fixer  dans  notre  ville  après  avoir  fait  à  Paris  de  fortes 
études  couronnées  de  succès  exceptiounels.  Ces  succès,  s'il  avait 
eu  de  l'ambition,  lui  eussent  ouvert  une  brillante  carrière  scienti-. 
lilique.  Ses  goûts  lui  firent  préférer  une  existence  tranquille,  où 
rétude  modeste,  le  bien  fait  sans  étalage  et  les  joies  intimes  de  la 
famille  tiendraient  une  plus  large  place.  Il  établit  à  Limoges  une 
pharmacie  des  mieux  organisées.  Très  consciencieux,  très  dévoué, 
très  charitable,  chimiste  d'une  réelle  valeur,  il  jouissait  auprès  de 
ses  confrères  d'une  autorité  fort  grande  et  auprès  de  l'adminis- 
tration et  de  la  population,  d'un  crédit  dont  il  sut  user  au  profit 
du  bien  public.  Il  avait  conquis  peu  à  peu  une  situation  exception- 
nelle, et  après  la  mort  du  regretté  docteur  Bardinet,  il  fut  choisi 
pour  remplacer  l'éminent  chirurgien  à  la  tête  de  notre  Ecole  de 
médecine. 

M.  Astaix  appartenait  depuis  longtemps  à  notre  Société  archéo- 
logique, dont  il  était  le  premier  Vice-Président.  L'association 
comptait  peu  de  membres  aussi  compétents  que  lui  et  d'une  compé- 
tence aussi  variée.  Il  avait  étudié  avec  un  soin  particulier  les  ques- 


836  SOCIÉTÉ   ARCHÊOLOGIQOE  ET  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIK. 

tiens  relatives  à  rémaillerie  et  les  possédait  à  fond.  Aussi  passait- 
il  ajuste  titre  pour  an  véritable  connaisseur  et  son  opinion  était- 
elle  d*un  grand  poids.  Il  s*étàit  également  occupé  de  tout  ce  qoi 
a  trait  à  la  fabrication  et  au  décor  de  la  porcelaine  et  on  lai  doit, 
dans  cette  voie,  de  savantes  recherches  et  d'utiles  constatalioD>. 
Les  cours  et  conférences  qu'il  fit  à  diverses  époques  sur  ces  ma- 
tières furent  très  appréciés  et  rendirent  de  réels  services  i  rio- 
dustrie  limousine. 

Ajoutons  que  M.  Astaix  a  pris  une  part  très  active  à  la  fondation 
du  Musée  céramique,  et  que  c'est  en  grande  partie  'k  lui  que  noire 
ville  a  dû  la  renaissance  de  l'émaillerie  après  une  interruption  de 
plus  d'un  demi-siècle. 

Chrétien  exemplaire,  citoyen  dévoué,  père  de  famille  modèle. 
M.  Astaix  avait  exercé  des  fonctions  gratuites  de  toute  sorte;  il 
avait  notamment  appartenu  au  conseil  municipal  pendant  de  lon- 
gues années,  et  dans  les  questions  d'instruction,  de  voierie,  dans 
celles  surtout  où  la  sanlé  publique  était  intéressée,  il  était  fort 
écouté  de  ses  collègues.  Il  était  de  plus  membre  du  Conseil 
d'hygiène  depuis  sa  fondation  et  il  apportait  un  zèle  tout  parti- 
culier aux  travaux  de  cette  commission,  appelée  à  rendre  tant  de 
services  dans  une  vieille  et  populeuse  cité  comme  la  nôtre. 

La  mort  de  cet  homme  excellent  n'est  donc  pas  seulenient  un 
deuil  pour  sa  famille,  pour  ses  amis«  pour  le  corps  médical,  poor 
les  associations  où  il  exerçait,  comme  dans  la  nôtre,  une  ioflaenco 
que  sa  nature  douce  et  sympathique  faisait  accepter  de  tout  le 
monde.  C'est  une  véritable  perle  pour  la  ville  de  Limoges  et  nos 
concitoyens  Ton  vivement  ressentie. 

Louis   GCIBBRT 


ADDITION 


AU    NKMOIRE  ;  ' 


UN  TRIPTYQUE  EN  ÉMAIL  PEINT  EN  GRISAILLE 

PAR   MARTI?i    DIDIER 

Au  Musée  civiQue  de  Bologne 

(p.  54r>  do  présent  Bulletin; 


Depuis  quenoti;e  Iravail  avait  (Hé  mis  sous  presse,  nous  avons  eu 
la  bonne  fortune,  en  dcpouillantlesarchivesdu  xvii«  siècle,  de  l'étude 
de  M"  Billard,  notaire  à  Limoges,  fonds  Thoumas,  de  mettre  la 
main  sur  une  transaction,  en  dale  du  10  mars  1652,  entre  Cathe- 
rine Didier  et  la  dameBonnaret(?)  veuvedus'  Michel  de  Neufvillars, 
dit  Chambe  Nègre  habitant  le  village  de  La  Croze  dune  part,  et 
les  enfants  de  Neufvillars  d'autre  part,  pour  le  payement  auquel 
ils  avaient  été  condamnés  envers  elle.  —  Au  dos  de  l'acte,  le 
22  juillet  1652,  elle  leur  délivre  quittance  de  50  Hvres.  Voici  l'é- 
noncé :  «  présents  en  leurs  personnes  Catlicrine  Didier,  veufve  de 

feu  Pierre  Mérigou,   vivant,  .marchant  de  la  pr°^  ville » 

Signé  à  l'acte  et  à  la  quittance  d'une  écriture  quasi  gothique,  mais 
très  nette  :  Catherine  Didier. 

Ce  nom  de  Didier,  que  Ton  n'avait  pas  encore  remarqué  en 
Limousin  ne  pouvait  manquer  de  nous  intriguer;  mais  l'acte  ne 
fournissait  pour  nous  aucune  donnée  intéressante,  si  ce  n'est  tou- 
tefois rindication  que  Catherine  était  veuve  de  Pierre  Mérigou, 
nom  qui  ne  nous  était  pas  inconnu  dans  la  liste  des  anciens  émail- 
leurs. 

Aussi  nous  reportâmes-nous  aussitôt  à  \  Inventaire  sommaire  des 
archives  communales  de  Limoges  dressé  par  M.  A.  Thomas  en  1882, 
et  comprîmes-nous,  seulement  alors,  tout  l'intérêt  de  la  mention 
suivante  :  GG.  108,  ligne  5.  —  Saint-Michel-des-Lions.  Baptêmes, 


8  mai  U>âl  :  «Jehan,  fils  de  Pierre  Mérigou,  eymaUleur:  parriu 
Jehan  Didier,  m*  brodeur;  marrine  Catherine  Boolestey,  veiif^t» 
de  feiit  Léonard  Merigou.  » 

En  1621,  Catherine,  mariée  à  Pierre  Mérigou,  émailleur,  avait  eu 
un  fils,  Jehan,  auquel  elle  avait  donné  pour  parrain  son  frère  Jehaa 
Didier;  la  marraine  avait  été  prise  au  contraire  du  côté  paternel: 
c'était  la  belle-sœur  de  Pierre  Mérigou.  Nous  trouvons  donc  à  c«tte 
date  une  famille  Didier  bien  implantée  à  Limoges  :  Jehan,  maître 
brodeur,  est  à  la  tôte  d'un  atelier  d'art  industriel  ;  sa  sœur  Cathe- 
rine a  épousé  un  émailleur;  en  1652,  elle  est  veuve. 

Sans  exagérer  Timportance  de  ces  constatations,  il  était  bon 
qu'elles  fussent  faites  ;  et  si  elles  n'autorisent  pas,  sans  conteste, 
rhypothèse  suivante,  au  moins  permettent-elles  de  rétablir  avec 
quelque  vraisemblance  :  Martin  Didier,  qui  figure  aux  comptas 
royaux  en  1399  comme  «  esmailleur  de  Sa  Majesté  »,  et  qui  avait, 
sans  doute,  succédé  à  Léonard  Limosin  dans  cette  charge,  vers  !oTb. 
était  Limousin  et  Pierre  Mericrou,  son  élève,  serait  devenu  son 
gendre  avant  1621  (1). 

Mais  les  faits  ci-dessus  ne  jettent  malheureusement  pas  un  grand 
jour  sur  la  question  de  savoir  si  Témailleur  M.  D.  est  bien  notre 
Martin  Didier.  Sa  lille  présumée,  Catherine,  mère  en  1621,  et 
veuve  en  16S2,  avait  pu  naître  plus  ou  moins  avant  dans  le  xm* 
siècle,  ce  qui  ne  rendrait  pas  inadmissible  absolument  la  supposi- 

lion  de  M.  de  Laborde  (2)  :  «  Ton  remarquera  qu'il  (Martin 

Didier)  s'est  retiré  en  1609,  sans  doute  par  le  bénéfice  de  son  grandi 
âge  et  pour  céder  sa  place  à  Albert  Dicdier,  probablement  son  fils. 
On  peut  donc  renfermer  son  activité,  comme  peintre  esmaiUenr  d» 
lioy^  entre  les  années  1574  et  1609  ;  mais  il  a  pu  travailler  dès 
1550,  et  dans  les  vingt  années  qui  suivent  cette  dale  conquérir  la 
réputation  qui  l'a  désigné  pour  devenir  le  successeur  de  Léonard 
Limosin,  dont  il  était  peut-être  l'élève.  » 

15  janvier  «893. 

Louis  BOI'RIIER^. 

(i)  il  est  (h'ident  que  Pierre  Mérigou  «  marchand  »  est  le  mènie  que 
l>ierrc  Miîrigou  «  esmailleur  »,  ce  lllre  iHanl  rarement  donné  dans  les  aclcs 
notariaux  du  2cvii°  siècle,  où  toutes  les  professions  sont  confondues  sous  !e 
nom  de  «  marchant  ». 

On  ne  connaît  aucun  émail  de  Pierre  Merigou,  qui  aura  laiss<^  sans  doute 
le  voile  de  Panonvmat  sur  ses  travaux. 

(^ ;  Sotif-e  des  Emauœ  du  Louvre^  1857,  page  î80. 


■K' 


,  (■ 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES 


SÉANCE  DU  MARDI,  27  JANVIER  1891 


PréAldence  de  M.  Tabbé  AROBLLOT»  président 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellol,  de  Bruchard,  Paul  Ducour- 
lieux,  Fray-Fournicr,  Gany,  Ed.  Hersant,  Tabbé  Joyeux,  Nivet-Fon- 
laubert,  Savodin  et  L.  Guibert,  secrétaire. 

Lecture  est  donnée  du  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  qui 
est  adopté. 

Un  certain  nombre  de  volumes  et  de  publications  sont  parvenus 
au  secrétariat  de  la  Société  dans  le  mois  qui  vient  de  s'écouler. 
M.  le  président  les  signale  et  donne  une  mention  particulière  à  VAl- 
manach  Limousin  pour  le  département  de  la  Coirèze^  publié  par 
M.  Paul  Ducourtieuxet  où  se  trouvent  de  fort  bons  articles  d'his- 
toire et  d'archéologie;  à  l'étude  de  M.  L.  Guibert  sur  la  Commune  de 
Saint-Léonard  au  treizième  siècle,  qu'accompagnent  des  textes  fort 
curieux  et  fort  pittoresques;  à  la  dernière  livraison  du  Gay-Lussac, 
renfermant  un  travail  aussi  intéressant  que  précis  de  M.  le  docteur 
BouUand  sur  les  Maladies  épidémiques  et  contagieuses  à  Limoges,  Il 
appelle  également  lattention  sur  le  dernier  bulletin  de  la  Société 
archéologique  duPérigord,  qui  renferme  plusieurs  articles  de  M.  le 
baron  de  Verneilh,  entr'aulres  une  notice  sur  le  château  des  Com- 
bes, dans  le  Nontronnais  ;  sur  le  tome  XIII  du  bulletin  de  la  Société 
archéologique  de  Bordeaux,  contenant  des  renseignements  sur  les. 
Dorai  de  Limoges,  établis  dans  la  capitale  de  la  Guyenne;  enfin  sur 
la  Revue  de  Saintonge^t  d'Aunis,  où  il  est  rendu  compte  do  l'étude 
de  M.  Arbellot  sur  les  Sources  de  VHistoire  de  Grégoire  de  Tours. 

En  adressant  à  la  Société  son  originale  et  piquante  étude  sur  les 

T.  XI.  53 


■  *V     I 


Bà8  SOCIÉTÉ  ARCHÂOLOGIQCK  BT  Ol$TORfQOK  DO  LIHOUSIV. 

Chanson»  rustiques  du  Limousin,  M.  Camille  Leymarîe  fait  appd  ac 
concours  de  ses  confrères  pour  enrichir  son  recueil  de  Yienx  ciuii^ 
populaires  de  notre  pays.  M.  le  président  transmet  cet  appel  et 
signale  quelques  curieux  couplets  dans  lesquels  un  paysan  de  Boar- 
ganeuf  raconte  à  sa  manière  les  incidents  d'un  royage  à  Poitiers. 
M.  Arbellot  ne  se  rappelle  qu'une  partie  de  la  chanson  ;  il  ne  la 
plus  entendu  chanter  depuis  son  enfance;  .elle  paraissait  dater  ds 
temps  de  Louis  XIV. 

M.  Alfred  Leroux  vient  d'être  nommé  officier  de  rinstruction  pn- 
blique.  M.  le  président  eût  été  heureux  de  le  féliciter  d*une  distinc- 
tion si  bien  méritée  et  il  témoigne  le  regret  que  M.  T^roux  ne  soit 
pas  présent  pour  recevoir  ses  compliments  et  ceux  de  ses  confrères. 
La  Société^  si  récemment  éprouvée  par  la  mort  de  M.  Astaix,  vieot 
de  faire  une  nouvelle  perte .  qui  ne  lui  sera  pas  moins  sensible. 
M.  Joseph  Brunet,  membre  Jionoraire,  est  mort  il  y  a  peu  de  jour<. 
à  sa  propriété  de  la  Bourgade.  M.  le  président  rappelle  les  titres  de 
M.  Brunet  au  souvenir  de  tous  ceux  qui  aiment  leur  province  et 
étudient  son  histoire.  La.  carrière  politique  de  Tancien  président  da 
conseil  général  de  la  Gorrëze,  de  Tancien  sénateur,  de  Tancien  mi- 
nistre, ne  nous  appartient  pas.  Nous  nous  souviendrons,  tonlerois, 
que  M.  Brunet  a  donné  un  concours  paissant  à  l'œuvre,  s!  chère  i 
tout  Limousin,  ^e  Tachèvement  de  la  cathédrale,  et  que  la  Société 
lui  doit  sa  reconnaissance  comme  établissement  d'utilité  pnUique. 
Mais  c'est  surtout  la  part  prise  par  M.  Brunet  aux  études  mêmes  et 
aux  travaux  de  la  Société  qu'il  convient  de  rappeler.  Il  appartesait 
à  la  compagnie  depuis  1852  :  secrétaire-adjoint  en  1854,  secrétaire 
général  en  1861,  il  ne  put,  bien  que  réélu  en  186S,  continuer  ces 
fonctions  qu'il  avait  remplies  avec  sa  netieté  d'esprit  et  sa  cons- 
cience ordinaires.  M.  Brunet  a  donné  au  Bulletin  une  excellente 
Notice  sur  l'ancienne  Chartreuse  de  Glandier  et  a  publié  le  Terrier 
de  l'église  de  Beaumont.  Il  y  a  deux  ans,  au  retour  de  son  voyage  à 
Constantinople,  il  annonçait  renvoi  d'une  photographie  du  tombeau 
du  fameux  Achmet-Pacha,  qu'il  se  proposait  de  faire  acc(Hnpagner 
de  quelques  pages.  Il  est  resté  jusqu'à  la  fin  sympathique  à  la  Société 
et  attentif  à  ses  travaux.  La  Société  s'associera  aux  hommages  de 
respect  et  de  regret  qui  lui  ont  été  rendus  et  au  deuil  si  profond,  si 
justifié  de  sa  famille. 

Sont  présentés  en  qualité  de  membres  titulaires  :MH.rabbé  Gra- 
nd, curé  de  Saint-Hilaire-Bonneval,  par  MM.  Garrigou-Lagrange  et 
L.  Guibert;  et  Pierre  Cousseyroux, avocat  àLimoges,parMM.  le  cha- 
noine Arbellot  et  L.  Guibert.  M.  l'abbé  Lecler  et  M,  le  comte  des 
Monsliers-Mérinville,  présentent  comme  membre  correspondant 
M.  le  comte  de  Beauchesne,  membre  de  la  commission  historique  et 


PBOrls-VRRBAb'X   MS  SKAMCC!<.  839 

archéologique  de  la  Mayenne,  a«  ch&leau  de  Tor ce,  par  Ambrières 
(Mayenne). 

Il  sera  statué  à  la  séance  de  fémersur  ces  présentations,  confor- 
mément au  règlement. 

La  table  de  la  salie  des  séances  est  couverte  d'objets  et  de  frag- 
ments antiques,  provenant  des  fouilles  commencées  par  M.  Tabbé 
Joyeux,  curé  d'Oradour-sur-Glane,  sur  divers  points  de  cette  com- 
mune. M.  le  président  donne  la  parole  au  laborieux  chercheur  pour 
exposer  les  résultats  de  ses  investigations. 

M.  l'abbé  Joyeux  raconte  qu'il  y  a  quinze  mois  environ,  allant 
bénir  une  maison  à  Orbagnac,  village  de  sa  paroisse,  il  remarqua, 
parmi  des  débris,  un  fragment  de  tuile  antique.  Il  y  avait  donc  là 
d'anciennes  constructions.  M.  Joyeux  se  mit  en  devoir  de  les  recher- 
cher. A  vingt  mètres  à  peine  de  Fhabitation,  dans  un  champ  appar- 
tenant à  M.  Martial  Peyroux,  et  dont  le  niveau  était  sensiblement 
exhaussé  par  des  débris,  il  rencontra  de  nombreux  fragments  d'ob- 
jets; des  briques  à  dessins  parallèles,  du  verre,  des  poteries,  de 
curieuses  petites  figures  en  terre  blanchâtre,  creuses  :  oiseaux,  pois- 
sons, ours,  animaux  domestiques,  un  buste  brisé.  C'est  sur  une 
étendue  de  dix  mètres  carrés  à  peine  que  toutes  ces  trouvailles  ont 
été  effectuées.  H.  Joyeux  fait  successivement  passer  ces  fragments 
sous  les  yeux  de  son  auditoire,  en  indiquant  les  circonstances  dans 
lesqueUes  chacun  a  élé  recueilli. 

Au  nord  d  Oradour,  dans  les  dépendances  du  village  du  Theil  et 
à  300  mètres  environ  de  ce  village,  M.  Joyeux  a  reconnu  des  cons- 
tructions antiques  d'une  assez  grande  importance  ;  il  a,  sur  une 
longueur  de  30  mètres  environ,  fait  dégager  une  muraille  que  vien- 
nent rejoindre,  à  droite  et  à  gauche,  d'autres  murs  transversaux.  Il 
y  a  là  beaucoup  de  débris,  et  on  y  trouve  de  curieuses  briques  à 
emboîtages. 

Enfin,  à  3  kilomètres  au-dessus  du  Theil,  dans  un  champ  dit 
«  Champ  du  Bois  »,  l'existence  d'autres  substructions  a  été  consta- 
tée. On  a  recueilli  là  non  seulement  une  petite  lampe  en  bronze  et 
un  objet  du  même  métal  qui  parait  élre  un  éperon,  mais  une  hache 
en  silex  brisée. 

M.  Joyeux  rappelle  que  ces  diverses  stations  sont  échelonnées  le 
long  de  la  voie  qui  se  dirigeait  de  Limoges  sur  Poitiers  et  dont  on 
retrouve  d'importants  (ronçons,  en  fort  bon  état,  dans  la  forêt  de 
Veyrac  et  aux  abords  de  l'étang  de  Cieux,  qu'elle  traversait.  Les 
gens  du  pays  appellent  cette  voie  le  Chemin  du  diable.  Sur  son  par- 
cours, plusieurs  camps  retranchés  avaient  été  construits  :  ceux  de 
Charra  et  celui  des  Chastres  sont  assez  bien  conservés  et  présen- 
tent encore  un  relief  fort  net  sur  une  partie  de  leur  contour. 


8tO  SOCIETE  ARÛ&ÉÔLOGiQUft  Et  titSTORlOUE   DO   LiMOCStK. 

M.  le  président  remercie,  au  nom  de  la  Société,  M.  l'abbé  J6\eo\. 
dont  il  rappelle  les  fouilles  si  fructueuses  au  mont  Gargan  et  an 
mont  Ceix,  et  qu'il  encourage  à  poursuivre  ces  intéressantes  recher- 
ches. La  Société  n*hésitera  pas  à  aider  son  laborieux  pionnier  en 
mettant  à  sa  disposition,  sur  l'exercice  1891,  une  subvenlion  ausî; 
large  que  le  permettra  Tétat  de  ses  finances. 

A  propos  des  fouilles  du  montCeix,  M.  deBruchard  fait  connaitre 
que  de  nouvelles  substructions  ont  été  découvertes  auprès  de  celles 
mises  au  jour  par  M.  Joyeux  et  parle  delà  prodigieuse  quantité  de 
débris  antiques  qu'on  rencontre  dans  tousles  champs  des  enviroD<. 

Une  lettre  de  M.  Charles  Blanchaud  signale  Texistence  de  restes 
gallo-romains  sur  plusieurs  points,  dans  les  environs  du  Dorât,  no- 
tamment au  Fan,  sur  remplacement  même  de  l'habitation  de  M.d*Or- 
fond,  maire  de  Verneuil-Moûliers.  N'y  aurait-il  pas  eu  à  cet  endroit 
un  temple,  —  fanum?  Quoi  qu'il  en  soit,  on  y  a  découvert  des  tuile? 
à  rebords,  des  briques  à  dessins  concentriques,  des  fragments  d'en- 
duits avec  des  peintures. 

À  propos  de  la  coramunicaliou  faite  par  M.  Demassias  à  la  der- 
nière séance,  relativement  aux  Charités  du  Pas-de  Calais,  M.  Edouard 
du  Basty,  conservateur  des  hypothèques  à  Sens,  a  envoyé  à  la  So* 
ciété  une  note  fort  intéressante  sur  les  confréries  analogues  qui 
existent  en  Normandie^  et  dont  plusieurs  possèdent  des  chartes  et 
des  archives  fort  anciennes.  Ces  Charités  se  recrutent,  comme  celle 
de  Béthune,  parmi  les  chefs  de  famille  et  se  proposent  de  rendre  les 
derniers  devoirs  à  tousles  morts  de  la  paroisse,  riches  du  pauvres. 
Dans  certains  endroits  où  les  Charités  ont  disparu,  on  tire  au  sort. 
chaque  année,  le  nom  d'un  certain  nombre  de  chefs  de  maison  doni 
l'assistance  aux  obsèques  de  tout  habitant  de  la  commune  sera  obli- 
gatoire pendant  toute  Tannée  qui  suivra. 

M.  Anloine'Thomas  a  bien  voulu  signaler  à  la  Société,  dans  une 
note  dont  M.  Guibert  donne  lecture,  un  passage  de  lettres  de  rémis- 
sion accordées,  en  1353,  à  Tévéque  de  Limoges  par  le  maréchal 
d'Audrehem,  lieutenant  du  Roi  entre  la  Loire  et  la  Dordogne,  et  où 
il  est  dit  que  le  prélat  a  bien  mérité  du  Roi  en  consentant  notam- 
ment à  la  démolition  de  son  château  de  Xoiliaic  (sic).  M.  HoUnler, 
(]ui  a  publié  ce  document,  a  pensé  que  la  localité  en  question  est 
Noaillac,  près  Meyssac  (Corrèze);  tel  n'est  pas  Tavis  de  Jf .  Thomas  : 
il  estime  qu'il  s'agit  ici  de  Noblat,  près  St-Léonard,  et  M.  Arbellol 
et  M.  Guibert  considèrent  la  chose  comme  certaine.  M.  Thomas  se 
demande  ensuite  s'il  ne  faudrait  pas  chercher  dans  Novalia  plutôt 
que  dans  Nobiliacum  l'étymologie  de  ce  nom  de  Noblat.  H.  Arbellot 
ne  saurait  partager  cette  opinion.  Une  fort  ancienne  Vie  de  Saint- 
Léonard,  écrite  au  vP  ou  vu'  siècle,  donne  le  nom  de  celte  localité 


.•  ■. .'  •   ,   '-■••..  .1 
•  •/■••■ 


PROCiS-VERBAUX   DES   SBANCRS.  811 

SOUS  lâ  forme  Nobiliacum  et  ajoute  que  Saiut-Léouard  appela  ainsi 
ce  territoire  :  «  eo  quod  a  nobilissimo  rege  datum  ftierat  », 

Il  est  donné  lecture  par  M.  Ducourtieux  d'une  noie  de  M.  Félix 
Vandermarcq  relative  à  la  station  de  La  Bélhoule,  commune  de 
Champagnac,  à  3  kilomètres  et  demi  d'Oradour;  M.  Vandermarcq 
constate  que  cette  station,  occupée  à  l'époque  gallo-romaine,  l'avait 
été  pendant  la  période  antérieure;  il  a,  en  effet,  découvert,  auprès 
des  tuiles  à  rebords,  briques,  pesons  de  tisserand,  anse  de  vase,  gran- 
des poteries,  le  talon  d'une  hache  néolithique  en  silex  jaune  et  divers 
éclats  de  silex.  Il  signale  de  plus  un  ustensile  qu'il  croit  être  un 
moulin  à  main.  On  trouve  à  La  Béthoule  un  très  ancien  puits,  de 
22  pieds  de  profondeur^  que  M.  Vandermarcq  se  propose  de  fouiller. 
Peut  ôlre  est-ce  un  puits  funéraire? 

L'église  d'Oradour-sur-Glane  renferme  un  joli  cul-de-lampe  en 
granit,  sur  lequel  est  sculpté  un  paysan  jouant  de  la  chabrette.  Pour 
accompagner  un  charmant  dessin  de  ce  motif,  dû  à  l'obligeance  et 
au  talent  de  M.  le  baron  de  Verneilh,  M.  Paul  Charreire  a  bien 
voulu,  en  quelques  pages,  donner  à  la  Société  une  notice  sur  la  cor- 
nemuse, dont  il  rappelle  la  haute  antiquité,  et  dont  la  race  blanche 
a,  parait-il,  le  monopole  exclusif.  La  musique  rudimentaire  de  la 
race  jaune  et  de  la  race  noire  ne  connaît  pas  cet  instrument.  L'émi- 
nent  maître  de  chapelle  regrette  l'abandon  de  la  chabrette  :  elle 
avait  une  originalité  et  une  saveur  qui  convenaient  admirablement 
aux  mélodies  rustiques. 

M.  L.  Guibert  rappelle  que  le  Journal  du  consul  Lafosse^  jadis 
publié  par  lui,  donne  quelques  renseignements  intéressants  sur  la 
période  delà  Fronde  à  Limoges;  une  copie  des  Annales  de  1638, 
trouvée  par  M.  Tabbc  Granct  dans  les  archives  de  la  famille  de 
Voyou  et  collationnée  par  M.  Leroux,  fournil  aussi  quelques  notes 
sur  cette  époque.  Il  donne  lecture  d'un  document  relatif  aux  mêmes 
événements,  surtout  aux  lentatives  de  M.  de  Sauvebœuf,  et  copié 
par  lui  dans  les  manuscrits  du  Séminaire. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures  un  quart. 

Le  secrétaire  général, 
Louis  Guibert. 


■  ■'. 


1*: 


842  sociéTé  archéologiqus  et  histoeiqok  ]>«  linoosiit. 


SÉANCE  DU  MARDI  U  FÉVRIER  1891. 


Présidence  de  If.  l'abbé  ilLltBEL.L.OT,  I»r««Id««il. 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  Louis  Bourdery,  Jean  de 
Bruchard,  Paul  Ducourtieux,  René  Fage,  Fray-Fournier,  Ed.  Her- 
sant, Camille  Jouhanneaud,  Alfred  Leroux,  Paul  Marlaux,  Savodin, 
et  L.  Guibert,  secrétaire. 

Après  la  lecture  et  Tapprobation  du  procès^verbal  de  la  dernière 
réunion,  M.  le  Président  fait  connaître  les  titres  des  oaTrages  et 
publications  reçus  depuis  lors,  en  appelant  d'une  façonspédale  Tal- 
tention  sur  les  suivants  : 

1^  Le  dernier  Bulletin  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts 
de  Tulle,  renfermant  de  fort  intéressants  travaux,  parmi  lesquels  il 
faut  citer  la  continuation  de  VHistoire  du  collège  de  Tulle,  par 
M.  Qément  Simon,  et  de  la  précieuse  série  des  documeals  relatifs 
au  siège  de  cette  ville  (en  15iB3),  publiée  paç  M.  René  Fage  (on  y 
trouve  aussi  la  suite  de  Tarticle  de  M.  Arbellot  sur  les  oeurres  du 
Père  Martial  de  Brive,  le  tempérament  poétique  le  plus  remar- 
qpble  qu'ait  produit  le  Limousin  dans  les  temps  modernes); 

^  Le  dernier  Bulletin  de  la  Société  scientifique  de  Brive,  dans 
lequel  M.  Alfred  Leroux  publie  un  livre  de  raison  de  la  famille  de 
Saint-Feyre  donnant  des  renseignements  fort  curieux  sur  un  Toyage 
de  l'auteur  du  manuscrit  en  Italie  à  la  suite  du  duc  de  Nemours  et 
un  pèlerinage  à  Rome  fait  un  peu  plus  tard.  On  y  remarque  anssi 
une  chanson  dont  quelques  vers  sont  très  connus  :  Les  Châtaignes 
du  Limousin»  Les  éditeurs  disent  qu'on  n'eu  connaît  pas  Tautear. 
Suivant  M.  Arbellot,  l'auteur  n'est  autre  que  l'improvisateur 
Eugène  de  Pradel.  M.  Guibert  croit  qu'un  seul  couplet  peut  lui 
être  attribué  avec  certitude. 

M.  le  Président  signale  un  certain  nombre  de  brochures  fort  inté- 
ressantes accompagnées  d'excellents  dessins,  et  dont  M.  Albert 
Mazel,  architecte  à  Paris,  membre  correspondant,  a  bien  voulu 
faire  hommage  à  la  Société;  —  une  notice  de  M.  L.  Guibert  sur  Us 
anciens  syndics  du  commerce  à  Limoges;  —  une  livraison  du  Bulle- 
tin de  la  Société  des  Amis  des  Sciences  de  Bochechouart,  avec  des 
articles  de  MM.  R.  Fage  et  Précigout. 

Après  la  lecture  d'une  circulaire  de  M.  le  Ministre  de  Tinslruc- 
tion  publique,  ayant  trait  à  la  prochaine  réunion  des  Sociétés  des 
Beaux-Arts  à  Paris,  M.  le  Président  donne  .communication  d'une 


rROCàS-miAUl   DEB  SUIHCK8.  843 

lettre  de  M.  Àûtoine  Thomas,  relative  à  Tëtymologie  du  nom  de 
Noblat  et  faisant  remarquer  Fanlagonisme  qui  existe  entre  la  forme 
latine  Nobiliacum,  paraissant  dériver  d*un  gentiliee,  et  la  forme 
vulgaire  :  Noalae,  Noalhac,  Nouale,  qu'on  trouve  aux  xii%  xm*  et 
xiv*  siècles.  Cette  seconde  forme  indique  une  autre  racine  que 
celle  de  Nobiliacum.  M.  Thomas  demande  si  les  localités  placées 
autour  de  l'ancien  château  ne  porteraient  pas  un  nom  trahissant 
cette  autre  étymologie,  qui  pourrait  se  rapporter  à  Nêvalia.  On  ne 
connaît  malheureusement  pas  de  nom  répondant  à  ce  type,  et  le 
lieu  a  tooiours  été  dit  :  Noblat  ou  Pont  de  Noblat. 

M.  Tabbé  Georges  Ardant,  qui  poursuit  à  Rome  ses  études  de 
théologie,  a  signalé  à  M.  Arbellot  divers  ouvrages  faisant  mention 
de  Tautel  de  Saint-Martial  dans  la  basilique  de  Saint-Pierre.  Il 
résulte  des  renseignements  fournis  par  lui,  que  le  tableau  de 
Spadarino,  placé  au-dessus  de  cet  autel,  était  sur  toile,  et  qu'il  a 
été  enlevé  en  1824  seulement  :  on  sait  qu'il  se  trouve  aujourd'hui 
déposé  dans  Tatelier  des  mosaïstes. 

M.  Tabbé  Granet,  curé  de  Saint-Uilaire-Bonneval,  et  M.  Pierre 
Cousseyroux,  avocat  à  Limoges,  présentés  à  la  dernière  séance, 
sont  successivement  élus,  au  scrutin  secret,  membres  titulaires  de 
la  Société;  M.  le  comte  de  Beanchesne,  également  présenté  à  la 
réunion  de  janvier,  est  admis  comme  membre  correspondant. 

M.  Albert  de  Latour,  propriétaire  au  Chalard,  et  demeurant  à 
Paris,  rue  de  l'Université,  38,  est  présenté  en  qualité  de  membre 
correspondant,  par  MM.  le  chanoine  Arbellot  et  L.  Guibert. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  par  M.  Louis  Bourdery,  tré- 
sorier de  la  Société,  du  compte  des  recettes  et  dépenses  pour 
Texercice  1890. 

Après  avoir  constaté  que  la  Société  compte  actuellement  i47 
membres  titulaires  et  65  membres  correspondants,  M.  Bourdery 
résume  les  opérations  de  Tannée  1890  comme  suit  : 

Recettes. 

En  caisse  au  l^  janvier  1890 367  95 

133  cotisations  de  titulaires  à  15  fr * 1 .  980    » 

62           —  '     correspondants  à  7  fr 434 

5  droits  d'entrée  des  titulaires  à  10  fr 50 

Subvention  du  Conseil  général  pour  1890 500 

Prodoit  de  la  vente  des  bulletins  et  publications 37  25 

Boni  sur  frais  d'encaissements  par  la  poste  à  charge 
des  sociétaires  sans  déduction  des  frais  d'encaissements 

portés  aux  dépenses 29  85 

Total  des  recettes 3.399  05 


su  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQCB  ET  BtSTQRIQUE  DU  LIMOUSIN. 

Dépenses. 

Impression  du  Bulletin  de  1888,  lonie  37 1 .905  6» 

AilocalioD  pour  le  déplacement  du  jubé  de  la  cathé- 
drale et  allocations  diverses 133    - 

Bibliothèque  de  la  Société  :  acquisitions,abonnemenls.  112  Tr» 

Appointements  de  Tencaisseur 130 

Chauffage,  éclairage,  service  des  séances 67  8i) 

Ports,  fournitures,  impressions  diverses 237  3<i 

Total  des  dépenses 2.586  65 

D'où  un  excédent  de  recettes  de  812  fr.  40,  qui  se  trouvait  en 
caisse  le  1«'  janvier  1891  :  ce  qui,  avec  les  5,349  fr.  90,  déposés  à 
la  banque  de  MM.  Lamy,  Maigne  et  C*'  (les  intérêts  à  3  •/.  poor 
1890,  soit  159  fr.  10  compris),  porte  Tactif  de  la  Société  à  la  date 
du  1"  janvier  1891,  à  6,162.fr.  30. 

Tous  les  membres  correspondants  ont  acquitté  leurs  cotisalions 
pour  1890;  parmi  celles  des  membres  titulaires  une  seulemeoi  est 
encore  due. 

M.  le  président  remercie  M.  Bourdery  de  ce  rapport  et  le  félicite 
de  Texcellente  situation  qui  vient  d'être  constatée;  une  bonne  ges- 
tion financière  est  la  première  condition  de  la  prospérité  d*uDe 
entreprise.  Cela  est  vrai  d'une  Société  archéologique  comme  d'une 
iamilleou  d'un  Etat. 

M.  le  comte  de  Couronnel  a  adressé  à  M.  le  Président  un  extrait 
fort  intéressant  d'une  lettre  écrite  au  mois  de  novembre  1746,  par 
l'abbé  de  Laval  (depuis  cardinal)  à  un  de  ses  amis  d'Angleterre  ei 
dans  laquelle  est  rappelée  la  part  glorieuse  prise  aux  opération"^ 
militaires  d'Allemagne  et  de  Flandre,  par  Gui-André-Pierre  de 
Montmorency- La  val,  frère  de  l'auteur  de  la  lettre.  A  l'affaire  de  la 
Mesle,  il  commandait  les  troupes  françaises,  qui  battirent  un  ennemi 
supérieur  en  nombre  et  lui  enlevèrent  vingt  pièces  de  canon.  Celle 
journée  valut  au  jeune  colonel  le  grade  de  brigadier.  11  reçut  à 
Raucoux  une  affreuse  blessure  dont  il  ne  guérit  jamais,  bien  qu'il 
ait  survécu  de  longues  années  et  soit  parvenu,  en  1783,  à  la  haute 
dignité  de  maréchal. 

.  Un  nouveau  procès-verbal  d'assemblée  paroissiale,  celle-ci  tenue 
en  1750,  devant  la  porte  de  l'église  d'Oradour-sur-Vayres  (alors  en 
Poitou),  et  convoquée  à  l'occasion  de  difficultés  relatives  à  la 
dime,  est  communiquée  par  M.  G.  Touyéras,  qui  y  joint  un  extrait 
des  manuscrits  de  dom  Fonteneau  concernant  Finstitution,  les 
attributions  et  prérogatives  des  trésoriers  généraux  sous  Tancien 
•  régime. 


tt 


^  -^  ; 


TROCÈS-VERBAUX    DES   SEANCCS.  845 

M.  Georges  Berthomier  appelle  l'attention  de  la  Société  sur  le 
nom  de  Farliste  qui  a  exécuté,  en  1631,  les  beaux  vitraux  du 
chœur  et  du  chevet  de  l'église  de  Sainl-Eustache  à  Paris.  Ces  ver-  .^ 

rières  sont  signées  :  Soulignac,  Ce  Soulignac  ne  serait-il  pas  un 
Limousin?  On  ne  connaît  jusqu'ici  aucun  artiste  de  notre  ville  qui 
ait  porté  ce  nom. 

Lecture  est  donnée,  par  M.  Arbellot,  d'une  notice  biographique 
sur  Yrieix  de  Chouly  de  Permangle,  né  vers  1604  à  Saint-Yrieix  et 
petit-fils  du  premier  maire  de  cette  ville.  Destiné  de  bonne  heure 
au  métier  des  armes,  il  débuta  au  siège  de  Saint-Jean-d'Angély, 
puis  suivit  Louis  XIII  devant  Montauban  et  devant  La  Rochelle. 
Devenu  maréchal-de^-logis  de  la  compagnie  de  chevau-légers  de 
la  garde  du  roi,  Permangle  fit  bravement  son  devoir  pendant  la 
Fronde,  en  Angoumois  d'abord,  puis  sous  les  murs  de  Paris.  Ce 
fut  lui  qui,  au  passage  du  Rhin,  se  lança  le  premier  dans  le  fleuve, 
et  il  est  regrettable  que  Boileau  ne  l'ait  pas  jugé  assez  grand  sei- 
gneur pour  citer  son  nom.  Blessé  à  la  tête  au  siège  de  Maëstricht, 
il  prit  part  à  la  conquête  de  la  Franche-Comté  et  s'y  distingua, 
comme  partout.  Le  roi  lui  donna,  comme  retraite,  la  place  —  créée 
pour  lui  —  de  gouverneur  de  la  ville  de  Limoges. 

Permangle  mourut  en  1676,  au  château  de  Brie,  près  Champa- 
gnac,  alors  en  Poitou.  Sa  fin  fut  des  plus  édifiantes.  Le  P.  Séra- 
phin Avril,  augustin,  prononça  son  oraison  funèbre  dans  l'église  de 
Saint-Pierre,  en  présence  de  l'évêque,  de  l'intendant,  des  consuls  et 
(les  officiers  du  présidial.  Peu  après,  un  second  service  solennel  eut 
lieu  dans  l'église  de  Champagnac  et  une  nouvelle  oraison  funèbre 
fut  faite  par  le  P.  Boniface  Peyron. 

Au  mois  de  décembre  1890,  au  cours  des  travaux  pour  la  ligne  de 
Limoges  àBrive  parllzerche,  dans  la  tranchée  près  du  village  de  La 
Frélillc,  commune  de  Salons-la-Tour  (Corrcze),  il  a  été  trouvé, 
sous  un  monticule,  des  poteries  gallo-romaines  que  M.  l'ingénieur 
Draux  a  bien  voulu  offrir  au  Musée  national  Dubouché  et  que  pré- 
sente M.  Ducourlieux.  Tout  n'a  pas  élé  conservé  ;  car  les  ouvriers, 
malgré  les  recommandations  qui  leur  avaient  été  faites,  n'avaient 
pas  apporté  grand  soin  à  recueillir  ces  débris  et  en  avaient  laissé 
disperser  une  partie,  mais  on  a  pu  sauver  les  fragments  de 
deux  belles  amphores,  d'une  forme  très  allongée,  à  col  étroit  avec 
double  anse  et  d'une  terre  assez  fine,  fabriquées  hors  du  pays  selon 
toute  probabilité,  ne  mesurant  pas  moins  de  un  mètre  vingt  cen- 
timètres de  longueur  chacune,  et  dont  l'une  a  pu  être  presque 
complètement  reconstituée.  On  a  trouvé  aussi  des  petits  pots,  une 
jatte  sans  pied  et  une  sorte  de  terrine,  le  tout  de  terre  fort 
grossière  et  de  mauvaise  fabrication.  La  matière  de  ces  derniers 


■f-^ 


p, 


M6  SOCIÉTÉ  ARCliM.OC»QlrE  ET  WSIORK^I»  BQ  LIMOUSIH. 

objets  doit,  diaprés  les  personnes  compétentes  qu'a  consultées 
M.  Ducourtieux,  provenir  des  gisements  qui  s'étendent  enife 
Donzenac  et  Magnac -Bourg. 

Dans  les  papiers  de  la  famille  Péconnet  du  Ghatenet,  M.  Guibert 
a  copié  un  certain  nombre  de  documents  intéressants.  Dans  le  nom- 
bre, il  mentionne  des  lettres  de  «  veneur  et  louvetier  »  du  ressort 
de. la  Sénéchaussée  de  Limoges,  accordées  en  1607  à  JeaA  Pécon- 
net^ sieur  du  Chatenet,  et  qui  ne  diffèrent  pas  iMkablemeAl  des 
commissions  de  nos  lieutenants  de  loavelerie.  Ces  leilres  stat 
accompagnées  du  procès -verbal  d'installation  de  Jean  Pécoanet 
dans  cette  charge  en  1610. 

M.  Guibert  donne  également  lecture  d'un  contrat  d'apprentt»- 
sage  aux  termes  duquel  la  veuve  de  Jean  Péconnet,  en  son  vivani 
maître  orfèvre  de  Limoges,  place,  en  1643,  son  fils  Joseph  chez  un 
maître  poêlier  de  Saint-Léonard,  Léonard  de  Bruxelles,  pour  ôire 
initié  à  cette  industrie. 

M.  Page  lit  deux  lettres  fort  agréables  et  fort  bien  tournées  de 
Mascaron,  écrites  à  Toccasion  de  son  arrivée  dans  sa  ville  épisco- 
pale.  Il  parait  que  Ia[bonne  impression  produite  sur  le  prélat  par 
l'accueil  empresse  des  habitanls  de  Tulle,  ne  dura  pmnt.  Mascaroo, 
en  les  quittant,  se  montra  peu  eharilable  à  Tendroit  de  ceux  qui 
avaient  été  ses  ouailles  durant  quelques  années. 

On  donne  souvent  le  nom  d'Arfeuille  au  cardinal  «  de  A.f  riColto  • 
qu'on  fait  naître  près  de  Fetlelio.  Il  parait  qu'on  se  trompe  el  en 
ceci  et  en  cela.  Le  véritable  nom  de  cette  famille  est  AigrefeuiUe 
ou  Graffeuille,  et  le  cardinal  sérail  natif  de  Graffeuil,  près  Lalond, 
paroisse  de  Ghampagnac-Ia-Prune.  M.  Arbellot  reconnaît  que 
M.  Clément  Simon  a  établi  le  fait  d'une  façon  à  peu  près  indis- 
cutable. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures. 

Le  secrétaire  généraL 
L.  GumERT. 


SÉANCE  DU  MARDI  31  MARS  1891 


Pi-éelUcnee  de  M.  Pabbé  ilLllBK&.1.0T,  pr6»iaeaU 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  Paul  Ducourlieux,  Fray- 
Fournier,  Alfred  Leroux,  Léonard  MouOe,  Nivet-Fontauberl, 
G.  Touyôras  cl  L.  Guibert,  secrétaire. 


PROCàs-VfiRBAUX  DES  SfEANCES.  847 

M.  L.  Guiberl  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  dernière 
réunion»  qui  est  adopté. 

M.  le  Président  ënumère  les  volumes  et  publications  adressés  à 
la  Société  depuis  la  dernière  séance.  Il  signale  particulièrement 
une  brochure  de  M.  Ducourtieux  sur  une  intéressante  monnaie  mé- 
rovingienne frappée  à  Cussao;  une  notice  de  M.  Martial  Imbert  sur 
les  Anciennes  populations  du  plateau  central;  Tarticle  de  M.  Meillet 
sur  les  Mines  de  Yaiulry  et  de  Cieux  qui  a  paru  dans  le  Gay-Lussac; 
les  dernières  livraisons  delà  Revue  de  tart  chrétien,  Avl Bulletin 
archéologique,  du  Bulletin  historique  et  phihlogique  du  comité  des 
travaux  historiques,  où  il  est  fait  mention  de  travaux  de  M.  Arbel- 
lot  et  de  M.  Guibert;  de  la  Revue  archéologique  du  Maine^  qui 
contient  des  planches  reproduisant  les  tombeaux  émaillés  des 
Plantagenét;  ^ml  Bulletin  de  la  Société  d'agriculture  de  Poitiers^  où  se 
lisent  d*excellentes  pages  de  M.  le  colonel  Babinet  sur  la  première 
période  de  Thistoire  de  Jeanne  d'Arc  :  de  Vaucouleurs  à  Poitiers, 
M.  Babinet  rappelle  Texamen  auquel  fut  soumise  la  jeune  bergère 
lorraine  et  la  part  qu'y  prit  un  religieux  limousin  de  l'ordre  de 
Saint-Dominique,  frère  Seguin.  Celui-ci  ayant  demandé  à  Théroïne 
quel  langage  parlaient  «  ses  saintes  »  et  l'archange  Michel,  s'attira 
cette  riposte  :  —  «  Meilleur  que  le  vôtre.  »  Seguin  ne  garda  pas 
rancune  de  cette  boutade  et  porta  plus  tard  témoignage  de  la  sain- 
teté de  Jeanne.  M.  Arbellot  se  demande  si  ce  religieux  ne  serait 
pas  originaire  de  Saint-Junien.  Maleu  mentionne  au  xiv*  siècle  un 
chanoine  de  cette  ville  du  nom  de  Seguin,  et  il  existe  encore  près 
de  Saint-Junien,  deux  himeaux  conservant  le  nom  de  la  même 
famille  :  les  Seguines  et  la  Maison  Neuve  des  Seguines . 

Le  tome  XXXVIII*  du  Bulletin  de  la  Société  va  être  incessam- 
ment distribué.  M.  le  Président  en  présente  un  exemplaire  à  la 
Société  et  recommande  à  son  attention  ce  beau  volume,  de  plus  de 
cinq  cents  pages,  contenant  un  grand  nombre  d'articles,  de  curieux 
documents,  et  dix  planches  dont  une  carte  féodale  du  limousin  et 
de  la  région  au  commencement  du  xvu''  siècle. 

Une  circulaire  de  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique,  dont 
il  est  donné  lecture,  annonce  que  la  réunion  annuelle  des  Sociétés 
savantes  s'ouvrira  le  mardi  19  mai,  à  deux  heures,  n  la  Sorbonne. 

La  Société  désigne,  pour  la  représenter  à  ces  réunions,  MM.  Louis 
Bourdery,  Henri  B.  de  l)lontégut,  Paul  Ducourtieux,  A.  Judicis  et 
Paradis. 

Il  donne  communication  d'une  lettre  de  la  Société  de  Gymnastique 
demandant  à  la  Société  archéologique  d'allouer,  à  l'occasion  des 
fêtes  du  Congrès  qui  aura  lieu  à  Limoges  au  mois  de  mai,  une 
subvention  qui  serait  convertie  en  prix.  Le  Bureau  a  reçu  plusieurs 


Bi8  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET   HISTORIQUE   DU'LIHOUSIII. 

fois  (les  demandes  de  ce  genre  ;  il  n*a  cru  pouvoir  les  accaeillir  qn^, 
lorsque  le  but  de  la  fête  était  en  rapport  avec  l'objet  spécial  Af^ 
travaux  de  la  Société,  et,  sauf  avis  contraire  de  celle-ci,  il  eslimr» 
qu'il  n\Y  a  pas  lieu  de  donner  suite  à  la  lettre  en  question. 

M.  Albert  de  Latour,  demeurant  à  Paris,  rue  de  TUniversilé,  38, 
présenté  à  la  dernière  séance,  est  élu  au  scrutin  secret,  membre 
correspondant  de  la  Société. 

M.  Tabbé  Granet,  membre  de  la  Société,  a  trouvé,  dans  le^^ 
papiers  de  la  famille  de  Voyon,  à  La  Planche,  un  récit  intéressant 
de  l'entrée  de  M»'  de  Carbonel  de  Canisy,  évéque  de  Limoges, 
dans  sa  ville  épiscopale,  et  de  sa  prise  de  possession  (4696.. 
M.  Guiberl  donne  lecture  de  ce  document. 

M.  Guibert  donne  aussi  lecture  d'un  article  du  Conciliateur  àe  h 
Corrèze,  relatant  une  excursion  des  plus  intéressantes  effectuée  par 
notre  confrère  Ernest  Rupin  et  M.  Raymond  Pons  dans  la  grolie 
de  la  Crousade,  à  trois  kilomètres  de  Graraat.  I^s  explorateurs  ont 
rencontré  des  traces  évidentes  de  la  présence  de  l'homme  dans  c**s 
cavernes,  notamment  les  restes  d'un  pont.  Peut-être  la  Crousade, 
dont  une  partie  seulement  a  pu  être  reconnue,  réserve-t-elle  à  ses 
visiteurs  des  surprises  analogues  aux  merveilles  des  camsfs  de 
Padirac,  découvertes,  il  y  a  peu  d'années,  par  M.  Martel,  Tinlrépide 
explorateur  de  nos  curiosités  souterraines. 

Une  monnaie  en  cuivre  rouge,  à  refligie  de  Claude,  trouvée  par 
M.  Vidal,  fabricant  de  caisses,  dans  les  terrains  de  son  établisse- 
ment, rue  des  Sœurs-de-la-Rivière,  derrière  le  petit  quartier  de 
cavalerie,  est  présentée  par  M.  Ducourtieux  :  Tête  à  gauche,  avec 
la  légende  D.  N.  TI.  CLAVDIVS  CJES.  AVG.  P.  M.  T.  P.  —  Au 
revers,  un  personnage  en  tunique  courte,  debout  et  paraissant  tenir 
d'une  main  une  globe  ou  une  victoire,  de  l'autre  une  lance  ou  un 
long  bâton.  Les  lettres  S  C  sont  très  lisibles  dans  lelchamp;  mais 
la  légende  circulaire  est  effacée.  M.  Ducourtieux  rappelle  que 
M.  Maurice  Ardant  avait  autrefois  trouvé  d'autres  monnaies  de 
Claude  dans  le  même  quartier. 

Une  note  de  M.  l'abbé  Lecler,  dont  M.  Ducourtieux  donne  lec- 
ture, signale  la  découverte  à  Compreignac  d'un  nouveau  souterrain- 
refuge  creusé  dans  le  tuf.  Une  des  branches  de  ce  refuge  s'avance 
dans  la  direction  du  souterrain  déjà  découvert  sur  la  place  de 
l'église  et  dont  une  distance  de  50  mètres  à  peine  la  sépare. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  d'une  notice  de  M.  Arbellot 
sur  Aymeric  Guerrut,  archevêque  de  Lyon.  Ce  prélat  naquit  vers 
la  fin  du  xïi*  siècle  à  Saint-Junien,  où  sa  famille  est  d'ailleurs  con- 
nue au  moyen-âge.  Chanoine  de  cette  ville,  puis  chanoine  du  Mans, 
ensuite  archidiacre  de  Paris,  il  fut,  en  1236,  élu  à  l'archevêché  de 


PR0C6s-YKRDAUX   DES   SEANCKS.  M% 

Lyoïi;  il  assista  en  124o  au  Concile  œcaménique  lenu  dans  celle 
ville.  Peu  après  il  résigna  son  archevêché  et  se  retira  au  monastère 
de  Grandroonl,  où  il  mourut,  en  1257,  après  avoir  passé  ses  der- 
nières années  dans  le  recueillement  et  la  prière.  C'est  toutefois  à 
tort  qu'on  a  prétendu  qu'il  avait  pris  Thabit  de  religieux.  Aymeric 
Guerrut  légua  sa  bible  et  divers  autres  volumes,  avec  cinquante 
livres  d'argent,  aux  Frères  Prêcheurs  de  Limoges.  Son  tombeau, 
recouvert  d'une  dalle  de  cuivre  émaillé,  se  voyait  dans  le  chœur 
des  clercs,  à  Grandmont.  Dépouillée  de  ses  ornements  par  les  sei- 
gneurs de  Saint-Germain-Beaupré,  au  cours  des  guerres  de  religion, 
celte  sépulture  fut  ouverte  en  1639  et  on  y  trouva  le  corps  de  Tar- 
chevéque,  revêtu  de  ses  ornements  pontificaux.  L'épilaphe  de  ce 
prélat  lui  donne  le  nom  d'Aymeric  Arips  :  il  faut  lire  :  a  Ripis  ou 
à  RipariiSy  —  «  des  Ribières.  » 

M.  Guibert  donne  communication  à  la  Société  de  quelques  passa- 
ges du  cinquième  volume  des  Registres  consulaires  de  Limoges  dont 
il  prépare  l'impression.  Il  lit  une  lettre  du  chancelier  à  l'intendant 
au  sujet  de  la  prétention  élevée  par  les  curés  de  Saint-Pierre 
d'obliger  les  consuls  à  faire  célébrer  dans  cette  église  loutes  les 
cérémonies  religieuses  qui  se  faisaient  aux  frais  de  la  ville;  il  [si- 
gnale également  une  délibération  du  28  mai  1758,  relative  à  l'acqui- 
sition par  le  roi  de  la  maison  de  Goux  et  à  la  cession  de  cet 
immeuble  à  la  ville  à  la  condition  qu'il  sera  perpétuellement  affecté 
au  logement  de  l'intendant.  M.  Guibert  rappelle  à  ce  sujet  combien 
on  est  mal  fixé  sur  ce  qu'on  appelait  le  Breuil  (préfecture  actuelle), 
résidence  noble  au  xui"  siècle,  et  qui  appartint  plus  tard  aux  Jau- 
viond,  aux  de  Julien  et  à  d'autres  familles  riches  de  la  ville.  Est-ce 
bien  cette  maison  qui  est  appelée  le  Palais  royal  du  Breuil  à 
répoque  même  où  elle  appartient  aux  de  Julien?  Ce  nom  de 
«  Breuil  »  ne  servirait-il  pas  à  désigner  une  île  tout  entière  de 
maisons,  et  n'y  a-t-il  pas  eu,  au  \vi«  siècle,  plusieurs  «  maison  du 
Breuil?  » 

Quoi  qu'il  en  soit,  M.  L.  Guibert  ne  pense  pas  que  les  intendants 
aient,  dès  la  fin  du  xvn*»  siècle,  comme  l'ont  écrit  plusieurs  auteurs» 
d'après  Legros,  croit-il,  résidé  au  Breuil.  Frémin  habite  près  de 
Saint-Pierre;  d'Aguesseau,  le  territoire  de  la  même  paroisse. 
(M.  L.  Guibert  fait  remarquer  en  passant  qu'il  ne  connaît  aucun 
document  ni  tradition  permettant  de  penser  que  cet  intendant  ait 
jamais  habité  la  maison  de  la  rue  du  Consulat  ou  l'inscription 
d'une  plaque  commémorative  lait  naître  son  fils,  l'illustre  chance- 
celier);  Bidé  el  de  Nesmond  demeurent  sur  le  territoire  de  la 
paroisse  de  Saint-Maurice.  Dans  son  plan  de  Limoges,  Jouvin  de 
Rochefort  n'eût  pas  manqué  d'indiquer  l'alTcctation  du  Breuil  a 


856  SOCIÉTÉ  ARcaAoLOoiQim  n  aisvoftiQui  du  liiioosiii, 

rinteodance,  si  cette  affectation  edt  existé  de  son  temps.  Il  écril 
simplement  «  Le  Breuil  ».  On  connaît  beaucoup  de  lettres  d'istea- 
daots  de  Limoges  datées  d'Ângonléme,  et  toute  porte  i  cmire  4|n  ils 
ont  pan  résidé  à  Limoges  d*ane  feçon  ininterrompue  antèrieuns 
ment  à  1700. 

M.  Fray-Fournier  dit  que  le  fait  est  certain  en  ce  qui  cooeeme 
M.  de  Bemage  et  ses  deux  prédécesseurs,  qui  séjournèrent  près- 
que  constamment  à  Angouléme;  mais  il  y  a  lieu  de  croire  que  dès 
les  premières  années  du  xvin*  siècle,  les  intendants  ont  balHt^ 
Limoges  d'une  façon  constante.  Il  connaît  de  nombrenses  ordon- 
nances dont  la  date  peut  en  témoigner. 

Le  Livre  Juratoire  de  la  bastide  de  Beaumont  en  LomagM,  tran^ 
crit  et  annoté  par  M.  Gustave  Babinet  de  Rencogne,  publié  sous  la 
direction  de  M.  François  Moulenq,  a  été  offert,  Tan  dernier,  à  la 
Société  par  M,  P.  de  Rencogne.  M.  Guibert  a  étudié  ce  très  inté- 
ressant volume  et  en  rend  compte.  Il  signale  tout  particulièrement 
les  ordonnances  municipales  du  xni''  et  du  xiv*  siècles  qu'on  j 
trouve.  Il  cite  des  dispositions  relatives  à  lobservation  du  dimanche, 
h  la  vente  de  certaines  denrées,  à  la  lixation  des  prix,  la  défense 
aux  bouchers  d'abattre  et  d'écorcher  les  animaux  à  Tintérieur  des 
murailles,  Tinterdiction  aux  hôteliers  de  stationner  sur  la  voie 
publique,  de  solliciter  bruyamment  ou  avec  importuoité  les  voya- 
geurs et  les  passants,  de  se  disputer,  etc. 

Dans  rintroduction  dont  il  se  propose  de  faire  précéder  rînveo- 
taire  de  la  série  C  des  archives  départementales,  M.  Â.  Lerotti 
rapelle  que  la  généralité  de  Limoges,  créée  en  i5S8,  plusieurs 
fois  supprimée,  a  été  définitivement  maintenue  en  1S83.  Dès  1594, 
les  trésoriers  généraux  adressaient  au  roi  de  curieuses  doléances; 
on  en  connaît  d'autres  au  milieu  du  xviii*  siècle,  inspirées  par 
Tamour-propre  et  Tinlérôt  du  corps.  Comment  se  fait-il  qu  en  4789, 
les  trésoriers  n'aient  pas  rédigé  de  cahier  spécial?  M.  Lerou  ne 
peut  Te^pliquer  qu'en  supposant  qu'ils  se  soient  joints  à  titre  indi- 
viduel au  corps  de  la  noblesse,  dont  un  d'eux  a,  du  reste,  signé  le 
cahier. 

  partir  de  1635,  l'intendant  prend  une  situation  prépondérante 
qui  rejette  les  trésoriers  au  second  plan,  et  ceux-ci  se  trouvent 
confinés  dans  leurs  attributions  administratives  et  financières  qui, 
au  siècle  suivant,  seront  encore  diminuées  par  l'avènement  des 
ingénieurs.  M.  Leroux  rappelle  que,  comme  plusieurs  autres  corps 
judiciaires  ou  administratifs,  le  bureau  des  trésoriers  sabit  le 
contre-coup  des  événements  de  la  Fronde.  Un  arrêt  du  conseil 
ordonna  en  1651  son  transfert  à  Saint-Léonard  ;  mais  il  ne  reçut 
pas  d'exécution,  les  trésoriers  ayant  protesté  et  obtenu  un  arrêt  de 
maintien. 


nocfcs-vcuftAm  du  sraiicrb.  B51 

M.  Trajr-Fonrnier  exprime  r^vis  que  te  premier  arrêt  dut  être 
mis  à  exécution,  et  que  le  transfert  eut  réelieroent  lieu. 

A«  sujet  des  conflits  survenus  entre  les  trésoriers  de  France  et 
les  magistrats  du  présidîal,  et  des  arrêts  rendus  par  le  Conseil  pour 
régler  les  préséances  et  éfker  le  retour  de  pareils  incidents,  plu- 
sieurs membres  rappellent  l'esclandre  qui  se  produisit  en  1681  dans 
régtise  Saint-Michel.  Cette  affaire  donna  Heu  à  une  vive  polémique 
et  inspira  plusieurs  pièces  de  vers.  On  en  troave  dans  un  curieux 
recueil  dont  parlent  M.  Fray-Fournier  et  M.  Guibefl,  et  dont 
M.  le  chanoine  Tandeau  de  Marsac  possède  un  exemplaire.  A  pro- 
pos de  ces  vers,  on  est  amené  à  rappeler  la  pièce  bien  connue, 
composée  à  propos  de  la  réparation  de  la  fontaine  d'Algoulène. 
C'est  une  requête  adressée  à  Tintendant  par  la  nymphe  de  la  fon- 
taine. Elle  se  termine  ainsi  : 

Oq  gravera  sur  le  bassin 
De  celle  célèbre  Ton  laine  : 
«  Je  sois  la  superbe  Aigodène  ; 
»  Algdan  antrefois  me  6st 
»  Et  Salonces  me  rétablist.  » 

•  M.  Fray-Fournier  se  demande  si  Salonces  ne  désignerait  pas 
rintendaut  Barbery  de  Saint-Contest.  Il  se  peut  même  qull  n'y  ait 
là  qu'une  mauvaise  lecture  et  qu'un  copiste  ait  lu  Salonces  où  on 
avait  écrit  St-Contest  ou  S,  Contet. 

A  la  prochaine  réunion,  M.  Leroux  entretiendra  la  Société  des 
intendants  de  Limoges,  dont  il  a  pu  dresser  une  liste  complète,  en 
donnant,  grâce  aux  indications  recueillies  par  M.  Fray-Fournier 
dans  les  ouvrages  généraux,  quelques  renseignements  biogra- 
phiques sur  chacun  d'eux. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures  un  quart. 

Le  secrétaire  général^ 

L.    GUIBERT. 


SÉANCE  DU  28  AVRIL  1891 


PrésIOenee    de  M.  l'abbé  ARDELiCOT,   Président 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  E.  Hervy,  de  Bruchard, 
P.  Charreyron,  P.  Ducourtieux,  l'abbé  Granet,  Guyoooet,  Hersant, 


'8Si  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE   ET  BISTORlOUB  DU  LIMOUSllC. 

Alfred   LBroux,    Fray-Fournier,    P.    Mariaux,  '  Maurat-Ballange, 
L.  Moufle,  Paradis  et  L.  Guibert,  secrétaire. 

Après  la  lecture  et  l'adoption  du  procès-verbal  de  la  séance  de 
mars,  M.  le  Président  conomuniquc  à  la  Société  diverses  lettres. 
parmi  lesquelles  un  mot  fort  aimable  de  M.  L.  Delisle,  le  savafi: 
administrateur  de  la  Bibliothèque  nationale,  joignant  un  complî- 
ment  flatteur  à  Taccusé  de  réception  du  dernier  Bulletin  de  la  So- 
ciété, et  une  autre  lettre  de  M.  Antoine  Thomas,  contenant  une 
rectification  au  procès-verbal  d'une  séance  de  1889.  Il  est  dit  à  tort 
à  ce  procès-verbal  que  Selabunnac  a  été  une  vicairie  administra- 
tive :  au  texte  cité  par  M.  Deloche,  le  mot  vkaria  ne  désigne  ni 
une  vicairie  géographique  ni  une  vicairie  administrative,  mais  uc 
simple  droit  de  justice. 

M.  le  Président  signale  tout  particulièrement,  au  nombre  de> 
ouvrages  reçus  par  la  Société  depuis  la  dernière  réunion,  le  non- 
veau  volume  de  M.  René  Page  sur  la  Prise  de  Tulle,  où  sont  réunie 
des  documents  d'une  rare  précision  et  d'un  haut  intérêt.  Cet  inté- 
rêt a  été  vivement  apprécié,  et  noire  savanl  compatriote,  M.  Delo- 
che, a  fait  du  livre  de  M.  Fage  l'objet  d'une  communication  spéciale 
à  l'Académie  des  Inscriptions. 

Mention  est  également  faite  des  derniers  Bulletins  des  Sociétés 
de  Brive  etde  Tulle,  contenant  des  articles  très  variés  de  MM.Emile 
et  René  Fage,  Leroux, Lecler.Poulbrière,  Froidefond,  Ducourtieux. 
L.  Guibert,  Rouméjoux,  de  Veyrières  ;  -  du  Bulletin  de  la  Société 
de  Rochechouart,  qui  renferme  d'intéressantes  pages  de  M.  d'Abiac 
et  de  M-  Ducourtieux  ;  —  de  celui  des  Antiquaires  de  Poitiers,  où 
se  trouve  l'ouvrage  de  M.  le  capitaine  Espérandieu  sur  les  inscrijH 
lions  antiques  du  pays  des  Lémovices.  M.  le  Président  rend  hom- 
mage à  la  valeur  exceptionnelle  de  ce  travail,  déjà  signalé,  du  resio, 
à  une  précédente  séance. 

Une  livraison  des  instructions  du  Comité  des  travaux  historicjaes: 
Numismatique  de  la  France,  par  M.  Anatole  de  Barthélémy,  est 
présentée  ù  la  Société.  On  y  renconlrc  un  certain  nombre  d'indi- 
cations précieuses  sur  les  monnaies  découvertes  en  Limousin  ou 
en  provenant. 

Il  est  aussi  donné  communication  de  la  première  livraison  d'une 
belle  publication  inlilulée  l' Architecture  et  la  Sculpture  en  France^ 
par  M.  de  Noé. 

M.  R.  Fage  et  M.  P.  Cousseyroux,  se  trouvant  empêchés  d'assi>- 
ter  à  la  séance,  font  présenter  leurs  excuses  à  là  Société. 

A  la  dernière  séance,  M.  de  Latour  a  été  admis  comme  membre 
correspondant.  M.  de  Latour  habitant  une  partie  de  Tannée  Le 
Chalard,  a  demandé  à  faire  partie  de  la  Société  en  qualité  de  mem- 
bre titulaire.  Son  admission  à  ce  litre  est  prononcée. 


rROCfts-nDR&AUX   DBS  SfeÀNCfeS.  Btô 

L'ordre  du  jour  appelle  une  communication  de  M.  Alfred  Leroux 
sur  Tapplication  de  la  loi  de  Baer  aux  rivières  de  la  région.  Celte 
loi  a  plusieurs  formules.  Celle  dont  M.  Leroux  étudie  Uapplication 
peut  se  résumer  ainsi  :  tout  cours  d*eau  coulant  dans  le  sens  du 
méridien  subit  une  déviation  dans  un  même  sens.  S'il  se  dirige  de 
réquateur  vers  le  pôle,  il  devance  le  mouvement  du  globe  et  dévie 
à  TEst;  si  au  contraire  il  va  du  pôle  à  Tëquateur  il  dévie  à  TOuest. 
Il  suit  de  là  que,  géographiquement  du  moins,  les  cours  d'eau  ap- 
partiennent à  la  rive  vers  laquelle  se  portent  leurs  eaux.  Cette  loi, 
appliquée  à  la  portion  de  la  Vienne  qui  sépare  le  Limousin  de 
I*Angoumois,  adjuge  la  rivière  au  Limousin.  Par  la  même  raison 
le  Cher,  entre  l'Auvergne  et  la  Combraille,  doit  être  regardé  comme 
un  cours  d'eau  auvergnat,  et  la  Dordogne,  entre  Port  Dieu  et  La 
Valette,  comme  un  cours  d'eau  limousin.  Une  conséquence  de  ces 
constatations  est  de  rattacher  les  îles  placées  au  milieu  de  ces 
rivières  au  territoire  vers  lequel  les  eaux  dévient.  L'application 
pratique  de  cette  conséquence  a  été  récemment  faite  aux  lies  du 
fias-Rhône. 

M.  Ducourtieux  communique  un  sceau  de  cuivre  trouvé  à  Cha- 
banais  et  qui  lui  a  été  confié  par  M.  Foureau.  Ce  sceau,  qui  est 
écartelé  et  contre  écartelé  des  armes  de  France,  de  Chabannes, 
de  Dammartin  et  de....,  pourrait  avoir  appartenu  à  Gilbert  de  Cha- 
bannes, gouverneur  du  Limousin  en  1473.  Les  caractères  de  la 
légende,  d'une  lecture  assez  diflicile,  sont  en  effet  du  xV"  siècle. 

Quelques^poteries,  parmi  lesquelles  un  fort  joli  plat  de  terre  rouge 
très  fine,  avec  une  bordure  à  feuilles  de  lierre  d'une  très  forte 
saillie,  sont  présentées  par  M.  Hersant.  Elles  ont  été  trouvées  der- 
rière le  jardin  de  l'hôpital,  au  bord  de  la  nouvelle  avenue. 

C'est  une  figure  des  plus  intéressantes  que  celle  de  Guillaume 
Lamy  et  il  est  grand  temps  qu'une  biographie  sérieuse  de  ce  per- 
sonnage soit  écrite.  M.  Arbellot,  qui  y  travaille,  résume  à  grands 
traits  la  vie  du  patriarche,  sur  lequel  le  chanoine  Collin  et  le 
P.  Bonaventure  de  Saint-Amable  ont  débité  beaucoup  d'erreurs, 
empruntées,  semble-t-il,  à  un  opuscule  imprimé  à  Limoges,  chez 
Chapoulaud,  dans  la  première  moitié  du  xvii*  siècle  :  Recueil  de  la 
vie  et  des  miracles  du  bienheureux  Lamy,  par  Luc  Lamy,  vicaire 
d'une  vicairie  fondée  par  le  patriarche.  Cet  écrit,  aujourd'hui  in- 
trouvable, a  été  signalé  par  le  P.  Lelong. 

Fils  de  Guillaume  Lamy,  d'une  famille  appartenant  à  la  plus 
vieille  bourgeoisie  de  Limoges,  le  futur  patriarche  naquit  dans  la 
maison  longtemps  occupée  par  cette  famille,  à  gauche  du  Portail- 
Imbert,  en  descendant  :  sa  statue  se  voyait  au  devant  de  cette  mai- 
son, qui  appartient  aujourd'hui  à  M.  Ghatard. 

T.  XL.  54 


Ô&4  SOCiFTé  ARCHÉOLOGfQUB  ET   HtsrOAIQt»  DU  LIMOUSIN. 

Le  jeune  Guillaume  montra  les  plus  heoreases  disposîUons.  En- 
voyé à  Paris,  où  il  fut  reçu  docteur  en  droit  canon,  il  fnt  de  bonm 
heure  attaché  à  la  cour  pontificale  et  y  résida  presque  toute  sa  vie. 
H  était  auditeur  de  Rote,  quand  il  fut  promu,  en  4341 ,  à  Féréch^ 
d'Apt.  Dès  Tannée  suivante,  le  pape  Benoît  XII  renvoyait  auprès 
du  roi  de  France  et  du  roi  d'Angleterre  pour  amener  entre  eux  ui 
accommodement. 

Transféré  d'Apt  à  Chartres  en  1342,  il  ne  paraît  pas  avoir  jamais 
pris  personnellement  possession  de  ce  siège;  mais  il  revint  en 
France  en  1347  pour  obtenir  la  mise  en  liberté  de  divers  cardi- 
naux, retenus  par  Philippe  VI  à  l'occasion  de  faits  qui  sont  as^ex 
mal  connus.  Il  avait  été  délégué  par  le  Saint-Siège  pour  procéder 
au  couronnement  de  la  reine  de  Naples  et  de  son  époux  André  d^ 
Hongrie;  mais  ce  dernier  mourut  avant  la  cérémonie. 

Devenu  patriarche  de  Jérusalem,  il  remplit  en  même  temps  les 
fonctions  d'administrateur  du  diocèse  de  Fréjus  :  il  tenait  même  les 
prévôtés  de  Lavaur  et  d'Eymoutiers  en  commende.  Fut-il  archevê- 
que d*Aix?  Baluze  Ta  cru  d'abord,  puis  est  revenu  sur  cette  of»- 
nion.  Nadaud,  qui  avait  étudié  avec  soin  la  question,  la  résolut 
dans  le  sens  de  l'affirmative. 

Guillaume  Lamy  mourut  à  Montpellier  le  9  mai  1360.  Son  corp5, 
enseveli  d'abord  dans  une  église  de  cette  ville^  fiit  plus  tard  trans- 
porté, selon  son  désir,  dans  la  cathédrale  de  Limoges  :  il  y  avait 
fait  construire  une  chapelle  sous  Finvocalion  de  saint  Thomas, 
qu'il  avait  dotée  d'une  vicairie.  C'est  là  qu'il  fut  inhumé,  sous  on  mau- 
solée  surmonté  de  sa  statue.  Le  tombeau  fut  détruit  et  la  sépultare 
violée  sous  la  Révolution.  On  jeta  les  ossements  du  patriarche  dan> 
les  flammes;  sa  tête  fut  rejetée  du  brasier  et  ramassée  par  un  des 
assistants,  qui,  après  le  rétablissement  du  culte,  la  remit  à  ia  con- 
frérie des  Pénitents-Noirs.  Elle  se  trouve  aujourd'hui  renfermée 
dans  une  urne  qu'on  volt  k  Saint-Pierre,  dans  la  chapelle  de  sainte 
Anne,  autrefois  occupée  par  cette  Compagnie. 

Guillaume  Lamy,  qu'un  ancien  catalogue  des  évéques  de  Char- 
tres représente  comme  un  prélat  «  d'une  science  profonde  et  d'une 
vie  exemplaire  »,  mourut  en  odeur  de  sainteté.  On  lui  attribue  un 
certain  nombre  de  miracles. 

M.  L.  Guiberl,  dans  quelques  fragments  d'une  étude  sur  la  com- 
mune en  Limousin,  de  jiafln  du  xu'  au  milieu  du  xv**  siècle,  fait 
ressortir  les  obscurités  qui  régnent  sur  l'origine  de  nos  groupes 
municipaux.  Ceux-ci  lui  semblent  cependant  s'être  organisés  pour 
défendre  leurs  membres  contre  les  dangers  extérieurs,  contre  les 
bandes  de  pillards,  contre  les  violences  et  les  contre-coups  des 
guerres   privées,    plutôt   que   pour   se  soustraire   à   l'exercice 


l>ROcis-vca&AUx  dès  SÉAIVCES.  8ao 

régulier  des  droits  du  seigneur  local.  La  lulle  avec  ce  dernier 
ne  se  produisit  que  plus  tard,  après  que  Tinlérét  supérieur  de  la 
défense  cûmraune  réclama  d'une  façon  moins  évidente,  moins  im- 
périeuse,  la  discipline,  l'union  étroite  entre  le  château  et  l'abbaye 
d'une  part,  et -le  bourg  formé  à  ses  pieds,  de  l'autre. 

Le  mouvement  communal  se  rattache,  dans  notre  pays  comme 
ailleurs,  à  la  campagne  menée  par  l'Eglise  contre  les  violences  des 
seigneurs  elles  guerres  privées.  M.  Guibert  rappelle  les  décrets 
des  conciles  provinciaux  de  Charroux  (vers  988),  de  Poitiers  (vers 
998),  de  Limoges  (1031),  la  création  sous  le  patronage  de  TEglise 
et  sur  l'initiative  d'un  simple  charpentier  du  Puy,  de  la  grande  con- 
frérie des  Pacifères,  dont  les  membres  prirent  part  à  plusieurs 
combats  contre  les  bandes  des  routiers  appelées  dans  la  contrée 
entre  4170  et  1200.  Il  caractérise  le  beau  rôle  de  gardiens  de  la 
paix  publique  qu'ont  longtemps  rempli  nos  évoques. 

M.  Guibert  insiste  sur  les  différences  notables  qui  existaient  en- 
tre les  institutions  municipales  des  diverses  villes  du  Limousin  et 
de  la  Marche  :  les  unes  ne  possédant  qu'une  organisation  toute 
rudimentaire;  les  autres,  le  château  de  Limoges,  par  exemple, 
jouissant  d'un  ensemble  d'institutions  dont  le  caractère  républicain 
est  à  peine  atténué  par  la  reconnaissance  de  la  suzeraineté  du  roi 
de  France  ou  du  roi  d'Angleterre  el  l'obligation  de  fournir  le  service 
militaire  au  souverain. 

Dans  les  archives  de  la  famille  de  Voyon,  à  La  Planche,  M.  l'abbé 
Granet  a  trouvé  un  assez  grand  nombre  de  documents  intéressants 
dont  il  en  a  signalé  déjà  plusieurs  àla  Société.  Il  donne  lecture  d'une 
curieuse  correspondance  échangée  en  1759,  entre  le  contrôleur 
général  Silhouette  et  le  bureau  des  trésoriers  de  France  de 
Limoges,  au  sujet  de  l'établissement  d'une  fontaine  à  proximité 
de  l'intendance.  Un  conflit  s'était  élevé,  à  propos  de  la  question 
d'alignement,  entre  le  bureau  et  l'intendant  PajotdeMarcheval,qui 
résidait  alors  à  Angouléme. 

La  lettre  du  bureau  à  Silhouette  est  un  modèle  de  lettre  admi- 
nistrative. Sous  les  formes  les  plus  correctes,  sous  les  périphrases 
les  plus  élogieuses,  elle  constitue  un  réquisitoire  contre  les  prati- 
ques de  l'intendant  et  contre  celles  de  l'ingénieur  de  la  généralité 
qui  empiétait  sans  cesse  sur  les  attributions  du  bureau. 

M.  Fray-Fournier  fait  connaître  à  la  Société  un  document  d'une 
réelle  importance  pour  l'histoire  industrielle  de  la  province,  docu- 
ment qu'il  vient  de  découvrir  dans  les  registres  du  présidial  de 
Limoges.  C'est  le  texte  de  l'arrêt  du  Conseil  d'Etat  du  29  mai  1736, 
autorisant  André  Massié,  architecte  et  entrepreneur  des  ponts  el 
chaussées  de  la  généralité,  à  établir  dans  la  province,  vu  l'éloigné» 


8K6  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  ItlSTOaiQUE  DU  LIMOUSIN. 

ment  de  Nevers,  Bordeaax  et  autres  centres  de  fabrication,  une  ma- 
nufacture de  faïence  et  attribuant,  avec  un  privilège  sans  Hmitation 
de  temps  à  la  manufacture  elle-même,  diverses  exemptions  au  di- 
recteur, au  contre-maitre  et  au  peintre.  La  requête  sur  laquelle 
est  rendu  cet  arrêt  nous  apprend  que  Massié  avait  déjà  fait  des 
essais  de  terre  et  appelé  des  ouvriers  étrangers. 

Plusieurs  membres  font  ressortir  l'intérêt  de  la  découverte 
de  M.  Fray-Fournier.  Elle  nous  fixe  exactement  sur  le  point  de 
départ  de  la  fabrication  de  la  faïence  à  Limoges.  L*arrét  de  4736 
met  une  condition  au  privilège  accordé  à  Massié  :  c'est  que  la  ma- 
nufacture sera  établie  dans  le  délai  d*un  an.  Cette  condition  a  été 
remplie  Tannée  suivante,  puisque  des  lettres  patentes  royales  sont 
expédiées  pour  rendre  la  concession  définitive. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures  et  quart. 

Le  secrétaire  général^ 

L.  GUIBERT. 


SÉANCE  DU  2  JUIN  1891 


Prénldence  de  Bf*  l*abbé  ARDELiLiOX»  pr^sldeot 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  E.  Hervv,  Pierre  Coussev- 
roux,  Ducourlieux,  Fray-Fournier,  Tabbé  Granet,  Hersant,  Alfred 
Leroux,  P.  Mariaux,  L.  Moufle  et  René  Fage,  secrétaire. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  motive  une  observation 
de  M.  le  président;  il  y  est  dit  que  le  patriarche  Lamy  avait  fail 
construire,  dans  la  cathédrale  de  Limoges,  une  chapelle  sous  Tinvo- 
cation  de  saint  Thomas;  or,  Guillaume  Lamy  était  encore  très  jeune 
au  moment  de  la  construction  de  cette  chapelle;  il  serait  peut-étn^ 
imprudent  de  la  lui  attribuer.  Après  cette  observation,  le  procès- 
verbal  est  adopté. 

M.  le  président  communique  à  la  Société  les  publications  reçues 
depuis  la  dernière  séance  et  signale  tout  particulièrement  :  !•  les 
Institutions  privées  et  les  sociétés  d'économiey  d'épargne  oti  de  crédit 
àLimogeSy  par  M.  Louis  Guibert  (extrait  de  la  Réforme  sociale); 
2«  le  Petit  Guide  à  Limoges,  publié  par  M.  Paul  Ducourtieux  à  l'oc- 
casion de  la  fête  fédérale  de  gymnastique  ;  3**  trois  brochures  de 
Mk'  Rarbier  de  Montault,  dont  une  sur  les  Ostensoirs  du  XIV*  nèck 


PROCèS-VIBBAUX    DES  SÉANCES.  857 

en  Limousin;  4®  les  Souvenirs  d'une  ancienne  famille,  la  Maison  de 
Maillytn  Artois,  par  M.  le  comte  de  Goaronnel;  5°  le  Recueil  de 
l'Académie  des  jeux  floraux  pour  1 89iy  contenant  un  éloge  de  M.  de 
Belcastel,  par  M.  Dubédat;  &"  une  suite  de  vingt-deux  planches  in- 
piano  coloriées,  représentant  les  vases  panalhénaïques,  don  du 
ministère  de  Tinstruction  publique. 

La  Société  française  pour  Tavancement  des  sciences  tiendra  son 
Tingtième  congrès  à  Marseille,  du  17  au  24  septembre  prochain;  la 
Société  française  d'archéologie  se  réunira  du  16  au  26  juillet,  pour 
sa  88*  session  à  Dôle,  Salins,  Besançon,  Montbéliard,  et  terminera  son 
congrès  par  une  excursion  en  Suisse;  la  Société  archéologique  du 
Tarn-et-Garonne  célébrera,  les  23  et  24  juin,  le  28*  anniversaire  de 
sa  fondation  à  Montauban.  La  Société  est  invitée  à  se  faire  représen- 
ter à  ces  diverses  solennités  scientifiques. 

M.  Paul  Solanet,  propriétaire  à  Saint-Geniez-d*01t  (Aveyron),  est 
présenté  comme  membre  correspondant  par  MM.  Arbellot  et  Char- 
reyron;  il  sera  statué  sur  son  admission  à  la  prochaine  séance. 

La  parole  est  donnée  à  M.  Pierre  Cousseyroux,  qui  communique 
une  analyse  de  registres  de  la  justice  seigneuriale  de  Peyrat-le- 
Château  et  fait  connaître  les  causes  criminelles  soumises  aux  juges 
de  cette  seigneurie  de  1669  à  1724.  Les  vols,  les  coups  et  blessures, 
les  infractions  aux  ordonnances  de  police  sur  la  tenue  des  cabarets 
sont  les  délits  les  plus  communs.  Il  est  à  remarquer  que  le  vol  avec 
effraction  n'était  puni  que  d'une  amende,  tandis  que  le  délit  de 
chasse  était  puni  de  deux  jours  d'emprisonnement.  Dans  cette  pé- 
riode de  plus  d'un  demi-siècle,  trois  jages  s'étaient  succédé  sur  le 
siège  de  Peyrat-le-Château  :  Lafont  des  Yaiades,  Léonard  Garreau 
et  Gabriel  Laborne. 

M.  Paul  Ducourtieux  lit  une  courte  notice  de  M.  Tabbé  Lecler  sur 
une  monnaie  russe  du  x*  siècle,  donnée  au  musée  national  Adrien 
Dubouché,  par  M.  d'Aléxeïeff,  maître  de  la  cour  de  Russie. 
C'est  une  pièce  en  argent  pur,  dite  grima  de  Kiew,  du  poids  de 
31  francs,  sans  effigie  ni  inscription,  une  sorte  de  lingot  en  forme 
de  losange  dont  les  deux  extrémités  seraient  coupées. 

M.  le  président  donne  lecture  de  quelques  passages  d'une  intéres- 
sante étude  de  M.  l'abbé  Georges  Ardant  sur  l'autel  de  Saint-Martial 
dans  la  basilique  de  Saint-Pierre  de  Rome.  Cet  autel  était  orné  d'un 
tableau  représentant  saint  Martial  et  sainte  Valérie,  peint  en  1627 
par  Spadarino,  artiste  peu  connu,  mais  non  sans  mérite  si  l'on  en 
croit  certains  appréciateurs  de  son  œuvre.  L'autel  primitif  fut  dé- 
moli, reconstruit  plus  tard  et  consacré,  le  14  novembre  1657,  par  le 
cardinal  Barberini.  Les  pèlerins  d* Aquitaine  s'y  rendaient  en  foule. 
Le  tableau  de  Spadarino,  assez  bien  restauré,  le  surmontait  encore 


8!SS  SOCIÊTR  ARCBÊOtOOIQUE   Et   HISTOftlQOB   DU  LIMOUSIN. 

âo  commencement  de  ce  siècle  ;  on  Ta  enlevé  le  i9  mars  \&U.  poor 
lui  substituer  une  mosaïque  représentant  saint  François,  li  a  élr 
placé  dans  la  chapelle  de  sainte  Catherine  de  la  Rota  et  de  là  dao^ 
la  galerie  de  Tatelier  des  mosaïques  où  on  peut  le  roir  encorv. 
L'autel  est  resté  consacré  à  saint  Martial  et  à  saint  Léon  IX,  mai5^  li 
est  plus  connu  actuellement  sous  le  nom  d*autel  de  saint  Françots. 
à  cause  de  la  mosaïque  qui  a  remplacé  le  tableau  de  Spadarino:  il 
est  situé  dans  le  fond  du  transept  de  gauche  de  ta  basilique. 

La  bibliothèque  Victor-Emmanuel  de  Rome  possède  une  des  plu> 
anciennes  vies  de  Saint-Martial  qne  Ton  connaisse  ;  elle  proTient 
d'un  couvent  des  montagnes  de  la  Sabine.  M.  le  président,  à  qni 
M.  Fabbé  Ardant  a  fait  part  de  cette  précieuse  découverte,  esûwv 
que  cette  vie  a  dû  être  écrite  au  v«  ou  au  vi«  siècle. 

En  compulsant  les  ouvrages  généraux,  les  mémoires  du  temp>, 
nos  chroniques  et  les  documents  de  nos  archives,  M.  Fray-Fournipr 
a  recueilli  assez  de  renseignements  pour  établir  de  succintes  el 
substantielles  biographies  des  intendants  qui  ont  successivement 
administré  le  Limousin.  Il  communique  à  la  Société  quelques-unes 
de  ces  notices. 

Le  premier  en  date  est  Charles  Turquant,  qui  fut  envoyé  à  Limo- 
ges en  1588  avec  le  titre  de  surintendant  en  la  justice  et  police.  Il 
avait  pour  mission  de  résister  au  gouverneur  du  Limousin,  Edme  lio 
Hautefort,  qui  tenait  pour  fa  Ligue  et  s'était  mis  à  la  tête  d'un  véri- 
table complot  dans  le  but  de  livrer  la  ville  à  ceux  de  son  parti.  Tur- 
quant usa  de  rigueur,  déjoua  les  projets  des  ennemis  du  roi,  :^o 
montra  courageusement  dans  toutes  les  échauffourées,  et  finit  par 
faire  reconnaître  partout  s(m  autorité. 

Un  de  ses  successeurs  fut  Jean  de  Thumery,  sieur  de  Boissize,  con- 
seiller au  Parlement,  un  des  quatorze  envoyés  en  Guyenne  pour  rem- 
placer la  chambre  mi-partie.  La  duchesse  d'Angoulérae  venait  d'être 
nommée  gouvernante  du  Limousin  en  1893;  il  fallait,  pour  Tassisler, 
un  homme  prudent  et  expérimenté:  le  roi  ht  choix  de  Boissize.  Son 
séjour  à  Limoges  fut  de  très  courte  durée;  mais  il  y  revint  bienlùl 
eu  qualité  d  intendant  de  la  justice  (1594).  Il  assista  à  Tévacuation 
de  Gimel,  dernière  place  détenue  par  les  ligueurs  dans  le  pay.>. 
Les  esprits  s'étaient  calmés;  la  paix  régnait  maintenant  dans  la 
province.  Boissize  s'appliqua  à  réconcilier  les  partis.  Il  resta  trois 
ans  en  Limousin.  En  1598,  il  fut  envoyé  comme  ambassadeur  en 
Angleterre,  y  séjourna  pendant  quatre  années,  reçut  différentts 
missions  de  Henri  IV  et  de  la  régente,  fut  un  des  signataires  du 
traité  de  Saiote-Menehould,  en  1614.  Il  mourut  en  16Î3. 

Méry  de  Vie,  qui  s'était  distingué  aux  côtés  de  Henri  lY,  à  la 
bataille  d'Ivry,  fut  envoyé  à  Limoges  pour  assister  le  jeune  gouver- 


PROCès-VBBBAVX   DBS   SÉik!«CEft.  S59 

near  de  la  famille  de  Ventadour  ;  il  y  résida  assez  longtemps  et 
réussit  à  y  maintenir  la  tranquillité.  Il  fut  nommé  ensuite  conseiller 
d*Etat,  président  du  Parlement  de  Toulouse,  ambassadeur  et  enfin 
garde  des  sceaux  en  1622;  il  mourut  peu  après  dans  le  courant  de 
septembre  de  la  même  année.  C'était  un  bibliophile  de  goût;  il 
avait  réuni  dans  sa  collection  un  certain  nombre  de  Groslier. 

L*ordre  du  jour  appelle  la  lecture  de  M.  Alfred  Leroux  sur  la 
Société  d'agriculture  du  Limousin.  Lorsqu'elle  fut  fondée,  en  1759, 
il  n'existait,  en  France,  qu'une  seule  société  de  ce  genre,  qui  avait 
son  siège  en  Bretagne  et  datait  de  1757.  Elle  se  composa,  au  dé- 
but, de  sept  membres.  Ce  nombre  ne  tarda  pas  à  grossir;  aux 
membres  titulaires  résidants  furent  adjoints  des  associés  libres  et 
des  correspondants  étrangers.  M.  de  Lépine  fut  son  secrétaire  pen- 
dant plus  de  vingt-cinq  ans.  Plusieurs  de  ses  membres  ont  acquis 
une  notoriété  locale  :  Trésagaet  et  Dépéret  entre  autres  ;  quelques- 
uns  se  sont  fait  un  nom  dans  les  sciences,  notamment  l'astronome 
Montagne.  Le  clergé  lui  fournit  un  assez  grand  nombre  de  corres- 
pondants. La  Société  d'agriculture  de  Limoges  avait  fondé  une  bi- 
bliothèque spéciale,  souscrivait  à  des  publications  importantes; 
elle  eut  l'idée  de  publier  un  bulletin,  mais  fut  obligée  de  renoncer 
à  cette  entreprise  et  se  contenta  de  faire  imprimer  quelques  mé- 
moires. En  1766,  elle  institua  des  concours,  avec  des  récompenses 
pour  les  travaux  les  plus  méritants.  Elle  s'était  divisée  en  plusieurs 
sections,  répondant  aux  diverses  branches  de  l'agriculture  et  de 
l'élevage;  les  prairies,  les  défrichements,  les  reboisements,  la  séri- 
ciculture, les  haras  avaient  chacun  leurs  spécialistes.  Les  associés 
ne  se  bornaient  pas  à  des  discussions  théoriques  et  à  des  échanges 
d'observations  ;  ils  faisaient  aussi  de  la  pratique,  avaient  un  champ 
d'expériences  et  une  pépinière.  Malheureusement,  les  ressources 
de  la  Société  ne  suffisaient  pas  à  ses  besoins;  elle  fut  obligée 
d'abandonner  bientôt  sa  pépinière  et  son  champ  d'expériences. 
C'est  à  elle  que  l'on  doit  les  premières  observations  météorologi- 
ques faites  avec  suite  et  scientifiquement  dans  la  province.  L'astro- 
nome Montagne  les  commença  en  1762;  il  avait  un  correspondant 
h  Briveet  un  autre  à  Angouléme;  à  Limoges,  il  comptait  un  émule 
dans  la  personne  de  l'abbé  Cabanis.  • 

La  Société  d'agriculture  était  ouverte  à  toutes  les  idées  de  pro. 
grès,  et  nous  la  voyons  prendre  l'initiative  d'une  foule  de  mesures 
et  d'institutions  profitables  au  pays.  C'est  ainsi  qu'elle  jette  les  ba- 
ses d'un  catalogue  des  plantes  de  la  région  et  d'un  calendrier  bota- 
nique; qu'elle  étudie  l'installation  d'une  serre  chaude  à  Limoges; 
qu'elle  se  met  en  correspondance  avec  la  Gazette  de  l'agriculture. 
Tous  ces  projets  ne  purent  être  réaUsés.  La  ville  de  Limoges  dût 


860  SOCIÉTÉ  ARCaÉOLOGIQUE   BT   fllSTORlQUK  DU   LIMODSIEI. 

toutefois  à  ses  instantes  démarches  la  création  d'une  école  ▼étén* 
naire  qui  ne  fonctionna  que  peu  de  temps. 

Parmi  les  membres  les  plus  actifs  de  la  Société  d*agricaUare. 
quelques  noms  sont  à  retenir  :  Montagne,  qui  devint  membre  <:e 
rAcadémie  des  sciences;  Second  de  Gouyolie,  qui  avait  établi  sor 
ses  domaines  une  pépinière  de  100,000  sijgets  d'arbres  variés;  Del- 
peuch,  avocat  à  Bort,  qui  avait  porté  de  douze  à  cinquante  le  nom- 
bre des  bétes  à  cornes  de  ses  étables,  et  de  6,000  à  8,000  le  nom- 
bre de  ses  gerbes,  qui  annonçait  à  la  Société  la  publication  de 
Dialogues  champêtres  et  av,ait  mérité  d'être  qualifié  par  ses  collè- 
gues de  «  célèbre  agriculteur  ». 

Malgré  cette  activité  de  quelques-uns  des  siens,  la  Société  allait 
en  déclinant.  En  1773,  elle  n'a  plus  de  réunions.  Quelques  efforts 
tentés  en  1777,  pour  ranimer  son  zèle,  sont  infructueux.  On  essave 
en  1781,  pour  lui  donner  un  peu  de  vie,  de  lui  adjoindre  un  bu- 
reau littéraire.  Ces  tentatives  échouèrent.  En  1785,  elle  saspeod 
ses  travaux. 

Tous  ces  renseignements,  puisés  par  M.  Alfred  Leroux  dans  le 
registre  des  délibérations  de  la  Société  d'agriculture,  ont  vivement 
intéressé  les  membres  présents  à  la  réunion. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures  un  quart. 

Le  secrétaire, 
René  Fage. 


SÉANCE  DU  MARDI  30  JUIN  1891 


Présidence  de  M.  I*abb6  ilLRDELIX>X,  Pré»Meat* 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  Hervy,  P.  Cousseyrou^, 
P.  Ducourtieux,  René  Fage,  Fray-Foumier,  l'abbé  Granet,  Alf.  Le- 
roux, L.  Moufle,  Paradis,  Raynaud  et  L.  Guibert,  secrétaire. 

Après  la  lecture  et  l'adoption  du  procès-verbal  de  la  dernière 
séance,  M.  le  Président  rend  compte  des  livres  et  publications 
reçus  depuis  le  commencement  du  mois. 

M.  Albert  Mazet,  architecte  à  Paris,  a  adressé  à  la  Société  une 
notice  intéressante  sur  la  tour  de  Bridiers  (Creuse)  et  sur  le  châ- 
teau dont  elle  constituait  le  principal  édifice.  Un  plan  et  une  jolie 
vue  cavalière  accompagnent  ce  travail. 


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PEOCfcs-VBBBAUX   DES  SiX^ICES.  861 

Avec  une  brochure  intituée  :  Le  prince  royal  de  Danemarck  à 
Rocheforten  1692,  M.  Emile  Du  Boys  envoie  la  copie  d^un  article 
Jes  Nouvelles  Ecclésiastiques  sur  une  thèse  de  philosophie  pré- 
sentée à  Limoges  en  1789,  la  dernière  probablement  qui  ait  été 
soutenue  dans  notre  ville. 

M.  Ludovic  Drapeyron,  qui  promet  pour  le  prochain  bulletin  un 
article  sur  Fayen,  notre  médecin-géographe  du  xvi«  siècle,  a  envoyé 
deux  très  curieuses  notices  sur  Le  premier  atlas  national  français 
et  son  Evolution.  De  son  côté,  M^'  Barbier  de  MontauU  a  fait  don  à 
la  Société  du  tome  quatrième  de  ses  œuvres  complètes.  Ce  beau 
volume  appartient  à  la  première  série  des  travaux  archéologiques 
du  prélat  et  se  rapporte  aux  antiquités,  usages  liturgiques,  églises, 
musées  et  collections  de  la  ville  de  Rome. 

M.  le  Président  signale  aussi  la  dernière  livraison  du  Bulletin 
de  la  Société  des  Amis  des  Sciences  de  Rochechouart,  avec  mention 
particulière  d*un  article  de  M.  Mathey  sur  le  temple  de  Ghassenon, 
—  et  la  Revue  de  l'Art  chrétien,  où  se  lit  un  remarquable  travail 
de  M.  Muntz  sur  les  fondations  du  pape  limousin  Grégoire  XI,  à 
Avignon  et  dans  le  Gomtat.  11  est  parlé,  dans  cet  article,  de  deux 
évoques  de  Gatane,  Martial  et  Elle,  originaires  du  Limousin,  que 
plusieurs  auteurs  avaient  déjà  mentionnés,  à  propos  des  émaux 
(le  la  cathérale  de  Gatane,  attribués  à  des  artistes  limousins. 

Au  nom  de  M.  Georges  Berthomier,  M.  Guibert  communique  un 
croquis  très  fin  d'une  vierge  en  plomb,  soutenant  TEnfant  Jésus,  et 
trouvée  aux  Grands-Patureaux,  commune  d'Azerables  (Greuse). 
L'influence  de  la  Renaissance  se  fait  sentir,  de  la  façon  la  plus 
singulière,  dans  le  costume  de  cette  figure. 

M.  Gyprien  Pérathon,  qui  s^associe  toujours  utilement  aux  tra- 
vaux de  la  Société,  a  voulu  répondre  à  rappel  adressé  par  le  Secré- 
taire général  à  tous  les  membres,  en  vue  de  la  recherche  et  de  la 
publication  d'anciens  procès-verbaux  d'assemblées  paroissiales. 
M.  L.  Guibert  communique  quelques  pages  de  M.  Pérathon  fort 
intéressantes,  avec  des  procès-verbaux  de  la  communauté  d'An- 
busson  et  de  cette  curieuse  baiUe  rurale  du  Masvoudier,  déjà 
signalée  par  M.  Duval,  et  dont  les  consuls  paraissent  avoir  été 
choisis  dans  quatre  villages  différents  du  territoire  de  la  franchise. 

Autre  communication  de  M.  Gabriel  Touyéras  :  enquête  relative 
à  l'établissement  des  foires  à  Mortemart.  Particularité  à  remar- 
quer :  c'est  l'autorité  judiciaire,  et  non  l'autorité  administrative, 
qui  procède  à  cette  information. 

Deux  lettres  intéressantes  de  Ms^  du  Goëtlosquet,  évéque  de  Li- 
moges, ont  été  communiquées  à  M.  L.  Guibert  par  un  neveu  du 
prélat,  religieux  de  l'ordre  de  Saint-Benoît.  La  première  de  ces 


»..• 


863  SOCIÉTÉ  ABCHÉOLOGfQOE  ET  HI.StOftfOV<  DU  LIMOUSIN. 

lellres  témoigne  du  respect  de  l'évêque  pour  les  anciens  usages  de 
son  clergé,  notamment  pour  certaines  libertés  qui  ne  lui  parais- 
saient pas  offrir  d'inconvénient,  vu  le  bon  esprit  des  ecclésiasti- 
ques du  diocèse  :  Mp"  du  Coëtlosquet  y  manifeste  également  le  désir 
de  voir  disparaître,  au  moins  de  Tintérieur  des  églises,  les  tiim 
seigneuriales  qui  en  salissent  les  murs  et  d'affranchir,  dans  la 
mesure  du  possible,  la  maison  du  Seigneur  de  celte  «  servitude  '.. 
La  seconde  de  ces  letlres  se  rapporte  an  curieux  procès  entre  te 
roi  et  révéque  d'une  part,  et  le  comte  du  Saillant,  à  propos  de 
droits  de  régale,  possédés  jadis,  probablement  usurpés  par  le» 
anciens  vicomtes  de  Combom. 

H.  Paul  Solanet,  industriel  à  Saint-Geniez  d'Olt  (AveyroB),  pré- 
senté à  la  dernière  séance,  est  admis,  au  scrutin  secret,  en  qualité 
de  membre  de  la  Société. 

MM.  Charreyron  et  Maurat-Ballange  présentent  en  la  même  qua- 
lité, M.  Jules  Laumond,  avocat  à  Bourganeuf  (Creuse). 

M.  L.  Guiberl  rend  compte  de  Tétat  d'avancement  de  la  puMica- 
tion  du  cinquième  volume  des  Registres  consulaires  de  la  viUe  de 
Linwges,  Les  deux  tiers  environ  de  la  copie  sont  prêts.  Un  des 
membres  de  la  commission  chargée  de  ce  travail,  M.  Paul  Mariaox* 
a  donné  sa  démission  en  raison  de  ses  occupatiMis.  M.  Paol 
Ducourtieux  est  désigné  pour  le  remplacer. 

L'ordre  du  jour  appelle  une  lecture  de  M.  Fray-Fouroîer  sur  la 
Feuille  hebdomadaire,  le  premier  journal  qu'ait  eu  Limoges.  Dès 
1773,  Poiliers  possédait  une  feuille  d'annonces.  Dans  les  premiers 
mois  de  1775,  un  étranger  nommé  Ghambon,  sur  lequel  nous  sa- 
vons peu  de  chose,  mais  qui  était,  à  coup  sûr,  un  esprit  entrepre- 
nant et  plein  de  ressources,  forma  le  projet  de  fonder  une  pnbûca* 
lion  périodique  à  Limoges.  Grâce  à  l'aide  de  Turgot,  qui  s*inléres- 
sail  de  loin  à  tout  ce  qui  se  passait  dans  son  ancienne  généralité, 
il  surmonta  les  obstacles  d'ordre  administratif  qui  pouvait  entraver 
l'exécution  de  ce  projet,  et  le  28  avril  1778  parut  le  prospectus 
d'une  feuille  portant  pour  titre  :  Affiches,  annonces  et  avis  iirer$ 
ou  Gazette  hebdomadaire.  Le  prix  était  modeste  :  6  livres  pour 
Limoges,  7  livres  10  sols  pour  le  reste  du  royaume.  Le  cadre  de  la 
publication  était  assez  vaste  et  correspondait  à  peu  près  au  cadre 
du  journal  tel  que  nous  le  comprenons  aujourd'hui  :  nouvelles  d'in- 
térêt général,  informations  locales,  communications  de  particuliers, 
articles  littéraires  et  scientifiques,  annonces,  etc.  Le  premier  nu- 
méro parut  le  30  mai. 

Son  apparition  ne  produisit  pas  beaucoup  d'elTet;  elle  semble 
même  avoir  passé  presque  inaperçue;  toutefois  l'entreprise  réussit 
Ghambon  essaya  vers  le  même  temps  de  fonder  une  Académie  on 


PROCÈS-VERBAUX   DES  SE.VNGRS.  .863 

Société  IHtéraire;  mais  Tabbé  Vitrac,  qu'on  pressait  de  se  mettre 
en  avant,  ne  paraît  pas  s*en  être  soucié.  Clîambon  annonça  peu 
après  la  fondation  d'un  cabinet  de  lecture.  La  Peuille  hebdomadaire 
paraissait  entrer  dans  une  période  de  prospérité,  lorsque  tout  à 
coup,  dans  le  numéro  du  27  décembre  1775,  on  annonça,  en  ter- 
mes assez  singuliers,  que  Chambon  se  relirait  et  que  les  commu- 
nications devraient  à  l'avenir  être  adressées  à  Chapoulaud,  Tim- 
primeur  de  la  feuille.  Chambon  se  trouvait  sous  le  coup  de 
poursuites  pour  l'impression  clandestine  d'un  livre  :  la  Théologie 
portative,  dont  l'Assemblée  générale  du  clergé  de  1775  avait  spé- 
cialement demandé  la  suppression  au  roi. 

Le  président  remercie  M.  Fray-Fournier  de  cette  communication 
fort  intéressante  et  d'une  forme  très  littéraire. 

Le  projet  de  mise  en  état  de  navigabilité  de  notre  Vienne,  tant 
(le  fois  repris  et  tant  de  fois  abandonné,  est  plus  ancien  qu'on  ne 
le  croit  communément.  M.  A.  Leroux  rappelle  que,  vers  1537,  les 
habitants  de  Poitiers  demandèrent  la  canalisation  de  la  Vienne 
entre  Limoges  et  Châtellerault.  Vauban  fit  entrer  le  projet  dans 
son  programme  de  grands  travaux  publics;  plus  lard  M.  de  Saint - 
Laurent  proposait  de  joindre  la  Vienne  à  la  Charente  afin  de  faci- 
liter le  transport  c|es  grains. 

Les  autres  rivières  de  la  contrée  ont  été  l'objet  de  projets  ana- 
logues. Dès  1606,  Henri  IV  autorisait  des  particuliers  à  exécuter 
certains  travaux  pour  faciliter  la  navigation  sur  la  Vezère.  Sous 
Golbert,  une  somme  de  120,000  livres  fut  levée  dans  retendue  des 
généralités  de  Bordeaux  et  de  Limoges,  pour  la  canalisation  de 
cette  rivière;  mais  la  mort  de  Colbert  survint  et  ces  fonds  recuriînt 
une  autre  destination.  Le  projet  parut  plusieurs  fois  sur  le  point 
de  se  réaliser.  Il  fut  même  un  instant  patroné  par  le  comte  de 
Provence;  mais  n'aboutit  pas,  dans  son  ensemble  du  moins. 

Quant  à  la  Dordogne,  Vauban  et  Colbert  voulurent  la  canaliser, 
mais  il  n'y  fut  exécuté  que  quelcjues  travaux  imposés  ou  confiés  à 
des  particuliers. 

M.  Leroux  a  trouvé  trace  d'un  grand  projet  conçu  pendant  la 
seconde  moitié  du  xvui*  siècle,  pour  relier  la  Vienne  à  la  Dordo- 
gne, à  la  Corrèze  et  à  la  Creuse. 

M.  Fage  rappelle  qu'au  xviii"  siècle  quelques  travaux  furent 
exécutés  sur  la  haute  Dordogne,  notamment  au  Malpas,  près 
Argentat. 

Le  frère  Séguin  des  Séguines,  qui  faisait  partie  de  la  commission 
ecclésiastique  chargée  d'examiner  Jeanne  d'Arc  à  Poitiers  et  de  se 
prononcer  sur  le  caractère  de  sa  mission,  était,  on  le  sait,  origi- 
naire de  Saint-Junien.  M.  l'abbé  Arbellot,  qui  a  dcyà  entretenu  la 


864  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMODSIIT. 

Société  de  ce  personnage,  donne  lecture  de  Timportante  déposition 
qu'il  fit  au  procès  de  révision  ;  il  avait  alors  soixante-dix  ans,  était 
professeur  de  théologie,  doyen  de  l'Université  et  doyen  de  la  Fa- 
culté. Il  rendit  hommage  à  Tinnocence,  à  la  vertu,  à  la  Sainteté  de 
la  Pucelle,  sans  lui  garder  rancune  de  quelques  boutades  dont  il 
aurait  pu  se  montrer  froissé. 

Quatre  monnaies  sont  présentées  par  M.  P.  Ducourtieux  :  Tune, 
fort  détériorée,  trouvée  à  la  gare  des  Bénédictins  et  appartenant  à 
M.  Guyonnet,  est  une  fausse  pièce,  très  légèrement  dorée,  de  la  fin 
xiV"  siècle  ou  de  la  première  moitié  du  xv*  ;  la  seconde  est  un  petit 
bronze  d  Auguste  :  (LESAR  AVGVSTVS  IMPERATOR,  trouvé, 
comme  les  deux  suivantes,  aux  environs  d'Eymoutiers,  et  offrant 
au  revers  un  autel  avec  le  mot  AVG.  La  troisième  est  un 
moyen  bronze  avec  la  légende  :  TIBERIVS  GLaudius  C£Sar 
AYGusttis  Tribunitia  ^otestate.  Au  revers,  un  soldat  lan- 
çant le  javelot,  entre  les  lettres  S  G.  La  dernière  est  un  petit 
bronze  avec  les  mots  :  JVLIVS  CRISPVS  NOBILISSIMVS  C^SAR; 
au  revers,  un  autel  avec  Tinscription  :  YOTIS  XX,  et  la  légende  : 
BEATA  TRANQUILLITAS. 

M.  Cousseyroux  entretient  la  Société  de  l'importance  ancienne  de 
Peyrat-le-Chàteau.  Cette  petite  ville  ne  possédait  pas  moins  de  cinq 
églises  ou  chapelles.  L'église  de  Saint-Martin  était  l'église  parois- 
siale. Le  prieuré  de  Saint-Denis  dépendait  de  l'abbaye  de  Saint- 
Denis  en  France.  M.  Cousseyroux  signale  les  décimateurs  princi- 
paux de  la  ville  et  des  environs  de  la  ville  au  dernier  siècle  et 
rappelle  un  curieux  procès  entre  la  marquise  d'Orbec  et  le  prieur 
Maledent  de  Feytiat,  au  sujet  des  moulins  et  du  droit  de  pêche  de 
l'étang.  Ce  procès  fut  terminé  à  l'avantage  de  la  marquise  d'Orbec, 
par  un  arrêt  du  conseil  du  19  mars  171S,  dont  M.  Cousseyroux 
fait  une  vive  critique. 

Après  quelques  explications  données  par  M.  L.  Guibert  sur 
l'excursion  projetée  pour  le  6  juillet  à  La  Souterraine,  Bridiers, 
Breith  et  Saint-Germain-Beaupré,  la  séance  est  levée  à  dix  heures 
et  quart. 

Le  secrétaire  général, 
L.   Guibert. 


PROCÊS-VSRlIAUX  DBS  SEANCES.  865 


SÉANCE  DU  28  JUILLET  1891 


Présidence  de  l*abbé  ilABELiIAyr,  Préuldent 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Arbellot,  Em.  Hervy,  L.  Bourdery, 
Brisset-Desisles,  P.  Gharreyron^  Chassoux,  P.  Gousseyroux,  abbé 
Demars,  J.  Dubois,  P.  Dacoartieux,  R.  Fage,  Fray-Foarnier,  Gany, 
le  président  Gilbert,  Tabbé  Granet,  Hersant,  Jodicis,  Alf.  Leroux, 
P.  Mariaux,  Paradis,  Pérussault,  G.  Raynaud  et  L.  Guibert,  secré- 
taire. 

A  Fouverture  de  la  séance,  M.  Guiberl  demande  la  parole  et 
exprime,  au  nom  de  ses  confrères  présents  et  absenls,à  M.  le  cha- 
noine Arbellot,  récemment  nommé  officier  de  Tinstruction  publique, 
toute  la  joie  qu'ils  ont  éprouvée  de  la  nouvelle  distinction  récem- 
ment obtenue  par  leur  vénéré  président.  Leur  affection  pour  lui 
n'est  pas  un  des  moindres  liens  de  la  Société.  M.  Guibert  rappelle 
los  services  rendus  par  M.  Arbellot  à  l'histoire  et  à  Tarchéologie 
limousine  et  le  prie,  au  nom  de  tous,  de  ne  pas  perdre  de  vue  sa 
Biographie  générale  limousine,  dont  il  a  tous  les  éléments,  et  que 
lui  seul  est  en  mesure  de  publier. 

Après  quelques  paroles  de  remerciements  de  M.  Arbellot,  le 
secrétaire  donne  lecture  du  procès-verbal,  qui  est  adopté. 

Un  certain  nombre  de  livres  et  de  livraisons  de  bulletins  ont  été 
reçus  depuis  la  dernière  séance.  M.  le  président  signale  tout  par- 
ticulièrement le  dernier  Bulletin  de  la  Société  scientifique  de  Brive 
avec  un  article  intéressant  sur  Téglise  de  Lubersac,  et  une  suite  de 
dessins  des  chapiteaux  de  cette  église;  la  Revue  de  FAunis,  analy- 
sant le  Bulletin  de  la  Société;  le  n""  H  du  Bibliophile  limousin,  ren- 
dant compte  des  derniers  ouvrages  relatifs  à  la  province  qui  aient 
paru;  un  numéro  du  Vrai  Français,  avec  les  portraits  de 
MM.  Charles  Sibillot,  Vernanchet  et  Malfroy  ;  le  Bulletin  historique 
et  philologique  du  comité  des  travaux  historiques;  deux  articles  de 
M.  L.  Guibert,  relatifs  à  la  Culture  des  propriétés  collectives  au  wu" 
siècle  et  à  quelques  usages  locaux  relatifs  au  serment,  extraits  de 
cette  dernière  publication. 

M.  Jules  Laumond,  avocat  à  Bourganeuf,  présenté  à  la  dernière 
réunion,  est  élu,  au  scrutin  seci^et,  membre  correspondant  de  la 
Société. 


M€  SOCIÉTR  AlU:BiOL06IQOB  ET  aiSTOillQOC  DO  UMOUStir. 

M.  Fabbé  Georges  Ardant,- licencié  ès-letlres,  licencié  en  Ihéolo- 
gie  et  en  droit  canon,  en  ce  moment  à  Rome,  où  il  achève  ses  éco- 
des,  est  présenté,  comme  membre  résidant,  par  M.  le  chanoîQ»- 
Arbellot  et  M.  L.  Guibert. 

M.  l'abbé  Demars  fait  passer  sous  les  yeux  de  ses  confrères  nn 
certain  nombre  de  médailles  et  monnaies  parmi  lesquelles  on  rt^ 
marque  plusieurs  moyens  et  petits  bronzes  des  Flaviens  et  de> 
Antonins,  un  Constantin,  des  pièces  étrangères  et  un  fort  curieux 
jeton  paraissant  avoir  appartenu  à  une  société  bachique,  peut-éln- 
à  une  association  de  représentations  théâtrales  comme  il  en  existait 
une  à  Limoges  vers  le  milieu  du  dernier  siècle. 

M.  Cousseyroux  communique  un  doublon  d'Espagne  de  1777  et 
une  pièce  en  cuivre  doré  représentant  un  écusson  rond,  écartelr' 
des  armes  de  France  et  du  Dauphiné,  et  découvert  dans  un  sou- 
terrain à  Peyrat-le-Cliâteau.  I^a  légende  est  d'une  lecture  fort 
difficile. 

Une  lettre  de  M.  Camille  Jouhanneaud,  qui  s*excuse  de  ne  pou- 
voir assister  à  la  séance,  annonce  pour  une  réunion  ultérieure  sou 
rapport  sur  Texcursion  faite  le  6  juillet,  par  la  Société,  à  La  Sou- 
terraine, Breith,  Bridiers  et  Saint-Germain-Beaupré. 

Il  est  également  donné  lecture  d'une  lettre  de  M.  Tabbé  Jouhaod. 
curé  de  La  Porctierie,  relative  aux  antiquités  existant  dans  sa 
paroisse. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  des  notes  de  M.  Joseph  Bnmet 
sur  la  visite  qu'il  fit  au  tombeau  d'Achmet-Pacha  (Glaade- 
Alexandre  de  Bonneval)  au  cours  d'un  voyage  à  ConstanUoople, 
en  1888.  L'éminent  avocat  avait  bien  voulu,  avant  de  partir,  pro- 
mettre à  M.  Guibert  qu'il  lui  enverrait,  pour  la  Société  archéologi- 
que, une  description  de  cet  intéressant  monument.  Ces  notes,  très 
complètes  et  fort  curieuses,  ont  été  remises,  après  la  mort  de 
notre  regretté  confrère,  par  M"«  Brunet  à  M.  Guibert,  avec  deux 
belles  photographies  représentant  le  tombeau.  Ce  monument 
s'élève  dans  un  ancien  cimetière  dépendant  du  tekké  (couvent 
des  derviches  tourneurs  de  Péra,  que  décrit  M.  Brunel.  A  la  tête 
et  aux  pieds  du  tombeau,  dont  le  visiteur  a  noté  avec  soin  les 
dimensions  et  dont  il  indique  Tétat  actuel,  se  dressent  deux  cippes 
de  pierre  :  celui  de  la  tête  est  le  plus  haut  et  porte,  outre  la 
boule  à  turban  qui  marque  la  plupart  des  sépultures,  une  ins- 
cription souvent  reproduite,  mais  qui,  dans  plusieurs  notices,  a 
été  donnée  avec  une  date  erronée  (4425  de  l'hégire  au  lieu  de 
4460  qui  correspond  exactement  à  l'année  4747  de  notre  ère. 
date  de  la  mort  de  Bonneval-Pacha).  La  tradition  du  couv^^ot  est 
que  cette  sépulture  est  celle  d'un  français  du  nom  de  Botùcal, 


PUOCtS-VCIlRAUZ  DBS   SEANCKS.  807 

TBilitaire  distingué  et  grand  diplomate,  qui  avait  embrassé  Tisla- 
aiisroe  et  fut  un  bienfaiteur  spécial  du  tekké. 

Au  cours  de  ses  études  sur  les  Etats  particuliers  de  la  vicomte  de 
Turenne,  M.  René  Page  a  constaté  que  des  relations  avaient  existé  en- 
tre ces  états  et  Christophe  Ju«tel,  né  et  mort  à  Paris,  mais  apparte- 
nant, en  qualité  d'intendant,  à  la  maison  du  vicomte  de  Turenne.  On 
sait  que  Justel  a  composé  des  travaux  d'un  haut  intérêt  pour  notre 
province;  en  16â3,  il  fit  paraître  le  Discours  de  la  maison  de  Bouil- 
lon, et  douze  ans  plus  tard  son  Histoire  des  vicomtes  de  Tnrenne. 
Dès  avant  4634,  on  trouve  ce  savant  en  rapport  avec  les  Etats,  dont 
il  reçut  plusieurs  gratifications.  Il  avait  été  employé  par  eux  pour 
obtenir  la  confirmation  des  privilèges  dont  jouissaient  les  habitants 
ile^la  vicomte,  privilèges  auxquels  on  attachait  une  grande  impor- 
tance. M.  Page  rappelle  que  les  Etats  se  réunissaient  deux  fois  par 
an  et  qu  ils  se  composaient  des  consuls  et  syndics  des  villes  et 
bourgs  principaux  du  grand  fief  dont  les  seigneurs  ont  joué  un 
rôle  si  considérable  dans  notre  histoire. 

M.  l'abbé  Granet  a  trouvé,  dans  les  registres  du  Bureau  des 
trésoriers  de  Prance  à  Limoges,  la  preuve  irréfutable  de  la  trans- 
lation de  ce  Bureau  à  Saint-Léonard  au  cours  de  Tannée  1650.  On 
savait  que  la  mesure  avait  été  ordonnée,  mais  on  doutait  qu  elle 
eût  été  mise  à  exécution.  L'intendant  Foullée,  dont  le  séjour  à 
Limoges  a  laissé  de  très  mauvais  souvenirs,  avait  prétendu  obliger 
les  trésoriers  généraux  à  travailler  en  sa  présence  et  avec  lui  à 
l'assiette  et  à  la  répartition  de  la  taille.  Les  trésoriers  ayant  pro- 
testé, il  se  retira,  mais  il  revint  peu  après  avec  une  escorte 
en  armes  et  des  archers  qui  demeurèrent  dans  la  cour  du 
Bureau,  pendant  que  Poullée  se  présentait  de  nouveau  dans  la 
salle  des  réunions  et  renouvelait  ses  sommations  :  sur  un  nouveau 
refus  de  la  majorité  des  trésoriers,  il  partit  en  les  menaçant  de  les 
chasser.  Il  fit  en  effet  suspendre  plusieurs  d'entr'eux  de  leurs  fonc- 
tions. 

Le  conflit  fut  porté  devant  le  conseil  du  roi.  Le  conseil,  circon- 
venu par  Poullée  et  indisposé  par  les  mauvais  traitements  dont  les 
deux  trésoriers  qui  avaient  pris  le  parti  de  l'intendant  avaient  été 
l'objet  de  la  part  de  beaucoup  de  leurs  concitoyens,  ordonna,  par 
arrêt  du  3  juin  1650,  le  transfert  du  Bureau  de  la  Généralité  et  des 
diverses  recettes  en  dépendant  k  Saint-Léonard.  Ce  transfert,  qui 
devait  être  effectué  dans  les  trois  jours  de  la  signification  de  l'arrêt, 
est  constaté  par  l'enregistrement,  à  la  date  du  23  juillet,  de  l'arrêt 
en  question,  à  Saint-Léonard,  par  une  décision  du  Bureau  en  date 
27  juillet,  ordonnant  aux  huissiers  de  se  rendre  dès  le  lendemain 
à  leur  poste,  et  par  l'élection  de  domicile  de  divers  receveurs  à 
Saint-Léonard,  le  28  juillet  et  jours  suivants. 


868  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DO  LIMOUSW. 

Le  28  septembre  de  la  même  année,  la  mesure  fat  rapportée  : 
ragitation  produite  par  la  dureté  des  procédés  de  rintendant  me- 
naçait de  s'étendre.  Les  deniers  royaux  et  les  ofQciers  des  finance 
devaient  être  plus  en  sûreté  à  Limoges  qu'à  Saint-Léonard.  Le  bu- 
reau fut  réintégré  à  Limoges  et  les  trésoriers  suspendus  reprirent 
leurs  fonctions. 

M.  Fray-Fournier  rappelle  qu'avant  1648,  FouUée  avait  habité 
Limoges  avec  le  titre  et  les  fonctions  d'intendant  de  la  généralité, 
mais  qu'à  cette  date  de  1650,  il  était  un  des  quatre  intendants  gé- 
néraux des  finances  de  France  et  s'occupait  exclusivement  de  iâ 
rentrée  des  impôts  pour  le  compte  des  fermiers.  Il  faal  tenir 
compte  de  ce  détail  pour  comprendre  son  rôle. 

M.  Leroux  fait  remarquer  qu'il  ne  ressort  nullement  des  docu- 
ments, si  intéressants,  du  reste,  mis  au  jour  par  H.  l'abbé  Granet, 
la  preuve  du  transfert  de  l'élection  à  Saint-Léonard. 

M.  Guibert  dit  que  ce  transfert  a  pu  être  une  conséquence  de 
celui  du  Bureau  des  trésoriers,  sans  qu'aucun  conflit  spécial  entn- 
Foullée  et  les  élus  y  eût  donné  lieu.  On  sait  que  le  Musée  possède 
la  matrice  d'un  sceau  portant  les  armoiries  de  France  et  la  légende  : 
Scel  de  la  sen.  pre.  et  elect.  du  Haut-Limosin  à  S.'Léonard. 
Mais  ce  sceau  se  rapporte,  tout  donne  à  le  penser,  à  la  période 
agitée  qui  suivit  la  mort  de  Henri  III,  où  les  troubles  qui  éclatè- 
rent à  plusieurs  reprises  à  Limoges  motivèrent  aussi  le  transfert 
des  sièges  des  principales  juridictions  dans  la  petite  ville  voisine. 

M.  Guibert  donne  lecture  de  quelques  chapitres  de  son  travail 
sur  les  Communes  limousines  du  xn^  au  xv«  sièchy  dont  il 
a,  à  une  précédente  séance,  lu  la  première  partie.  II  montn^ 
le  serment  constituant  le  lien  essentiel  du  pacte  communal  et  rap- 
pelle que  la  coutume  de  Limoges  interdisait  le  serment  corporatif. 
L'organisation  des  métiers  parait  du  reste  avoir  été  tenue  en  suspi- 
cion par  le  Consulat,  non-seulement  à  Limoges,  mais  dans  d'autres 
villes.  A  Brive,  sous  saint  Louis,  les  chefs  des  métiers  rénsslreol 
à  renverser  l'ancien  régime  municipal  et  à  en  établir  un  nouveau  à 
leur  profit;  mais  le  Parlement,  saisi  de  l'affaire,  prescrivit  en 
1257  le  retour  aux  coutumes,  et  cette  curieuse  révolution  n'eut 
pas  de  suites. 

Les  relations  des  corps  municipaux  avec  le  clergé,  les  actes  par 
lesquels  la  commune  affirme  sa  foi  et  ses  sentiments  religieux,  les 
fondations  religieuses  ayant  un  caractère  municipal  sont  l'objet 
d'un  chapitre  particulier.  M.  Guibert  parle  ensuite  de  toutes  les 
œuvres  charitables  qui  attestaient  la  solidarité  des  membres  de  la 
commune  et  leur  sollicitude  pour  les  pauvres  et  les  malades.  Aussi 
le  dévouement  du  citoyen  au  groupe  est-il  complet  et  se  traduit-il 


PfiOCis-VBàBAUX  HKS  8KiNCBI«.  869 

de  la  mamère  la  plus  expressive.  M.  Guibertcite  des  manifestalions 
de  reconnaissance  et  de  dévouement  pour  la  commune  et  men- 
tionne un  certain  nombre  de  legs  faits  à  son  profit  par  des  citoyens 
du  xiu''  au  xv^  siècle. 

Il  termine  en  donnant  quelques  détails  sur  le  rôle  et  le  pouvoir 
des  consuls  du  Château  de  Limoges  aux  xiii°  et  xiv*  siècles,  en  insis- 
tant sur  la  diversité  et  la  largeur  de  leurs  attributions  et  en  faisant 
ressortir  le  caractère  républicain  de  nos  institutions  municipales 
à  cette  époque. 

I^a  séance  est  levée  à  dix  heures  et  quart. 

Le  Secrétaire  général, 

Louis  GUIBERT. 


SÉANCE  DU  28  AOUT 


Présidence  de  M.  l'abbé  ARBEI^I^OT,  Président 

Présents  :  MU.  le  chanoine  Arbellot,  Em.  Hervy,  P.  Ducourtieux, 
Fray-Fournier,  Tabbé  Granet,  A.  Leroux,  P.  Mariaux  et  L.  Guibert, 
secrétaire. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  de  juillet  est  lu  et  adopté.  A  propos 
de  la  communication  de  M.  Fage  concernant  Juste!,  M.  Leroux  dit 
qu'il  croit  pouvoir  attribuer  à  cet  érudit  le  Recueil  anonyme  des 
Privilèges  de  la  vicomte  de  Turenne,  dont  la  première  édition  parut 
en  1630  et  la  seconde  en  1652. 

M.  le  président  présente  à  la  Société  l'inventaire  de  la  série  C  des 
archives  départementales,  dressé  par  M.  Leroux,  et  qui  vient  de 
paraître.  Cette  publication  est  un  nouvel  instrument  de  travail  mis 
à  la  disposition  des  chercheurs,  et  son  auteur  a  rendu  un  signalé 
service  à  l'élude  de  l'histoire  limousine.  La  Société  est  heureuse  de 
se  joindre  au  conseil  général  du  département  pour  remercier  et  fé- 
liciter M.  Leroux. 

M.  Leroux  répond  que  le  conseil  général  de  la  Haute- Vienne  est 
un  de  ceux  qui  apprécient  l'importance  des  publications  de  ce  genre 
et  que  chaque  année  il  vote  une  somme  relativement  élevée  pour  les 
dépenses  de  publication  de  l'inventaire. 

M.  le  comte  de  Couronnel,  conseiller  général  et  membre  de  la 

T.  XL.  55 


8^0  SOCIÂTB  AJICttÈOtOGlQUE   Et  BIStOftiQtJE  DO   LIMODSIN. 

Société,  a  offert  à  la  bibliothèque  son  intéressant  livre  :  Sauremn 
d'une  ancienne  famille.  Ce  n'est  pas  seulement  un  ouvrage  généalo- 
gique :  Vintérét  qu*il  présente  dépasse  le  cadre  modeste  do  sujet  h 
on  y  trouve  beaucoup  de  renseignements  sur  l'histoire  de  rArto.' 
et  même  sur  l'histoire  nationale.  Des  remerciements  sont  adressera 
M.  de  Couronnel. 

Le  président  a  également  reçu  de  M.  l'abbé  Paré,  vicaire  généra' 
de  Tulle,  un  ouvrage  intitulé  :  LEgypte  et  la  Terre  sainte^  joumcl 
d'un  pèlerin  du  diocèse  de  Tulle  y  récit  du  voyage  accompli,  il  y  a  peu 
de  mois,  par  Mgr  Dénéchau,  que  l'auteur  accompagnait.  La  lectur*' 
de  cette  brochure  est  des  plus  attachantes;  mais  est-il  bien  exaci. 
comme  l'avance  M.  Paré,  qu'aucun  évéque  Français  n'avait  visité  b 
Palestine,  depuis  les  Croisades?  Le  fait  ne  paraît-il  pas  invraisem- 
blable si  on  considère  surtout  combien  les  pèlerinages  étaient  fré- 
quents à  l'époque  où  ils  étaient  aussi  longs  que  périlleux  ?  PlusieDr> 
de  nos  évéques  de  Limoges  visitèrent  alors  la  Palestine  ;  l'un  d*eai 
môme,  Jean  de  Veyrac,  y  mourut.  Si,  depuis  le  treizième  siècle,  il 
ne  paraît  pas  qu'aucun  des  successeurs  de  saint  Martial  ait  fait  ci" 
pèlerinage,  il  n'a  pas  dû  en  être  de  même  partout  et  on  souhaite- 
rait, pour  l'honneur  de  Tépiscopat  français,  que  M.  l'abbé  Paré  fût 
convaincu  d'erreur. 

Le  dernier  bulletin  de  la  Société  de  Tulle  contient,  avec  la  snitt" 
de  l'excellente  histoire  du  Collège  de  cette  ville,  par  M.  Clément 
Simon,  d'intéressants  documents  de  H.  Champeval  et  un  acte  des 
plus  précieux  pour  l'histoire  municipale  de  la  région  :  le  traité  con- 
clu à  Martel,  en  1296,  entre  le  vicomte  de  Turenne  et  les  bourgeois 
de  Beaulieu,  au  sujet  de  la  justice  de  cette  ville.  La  dernière  livrai- 
son des  Antiquaires  de  l'Ouest  renferme  4in  compte-rendu  des  mé- 
moires figurant  au  bulletin  de  la  Société  de  Limoges. 

Une  lettre  de  M.  Teste,  habitant  le  département  delà  Nièvre,  in- 
forme le  président  qu'il  possède  l'inventaire  des  archives  du  château 
de  Châlus,  probablement  perdues  aujourd'hui.Il  serait  utile  de  pos- 
séder au  moins  un  sommaire  et  des  extraits  de  ce  document. 

M.  Félix  Peyronnet  signale,  dans  le  Cantal,  un  petit  émail  signé 
I.  L.  (Jacques  Laudin)  et  représentant  Louis  XIV.  Il  est  possible,  vu 
les  dimensions  indiquées,  qu'il  s'agisse  d'un  simple  émail  de  bourse. 

Au  nom  de  M.  Berlhomier,  M.  Guibert  donne  lecture  d'uneconrte 
notice  sur  la  curieuse  vierge  d'étain,  de  l'époque  delà  Renaissance, 
trouvée  aux  Grand.s-Patureaux,  près  Saint-Germain-Beaupré,  et 
dont  un  dessin  a  été  communiqué  à  une  réunion  précédente.  — 
M.  Berthomier  signale,  en  outre,  la  découverte,  dans  l'église  de 
Saint-Germain,  d'une  litre  funéraire,  offrant,  sur  sa  bande  noire,  de 
60  c.  de  haut,  qui  entoure  toute  l'église,  des  écussons  aux  armes 


t>ROCis-?fiRBAUX  DKS  SftANCfiS.  871 

des  Foucauld.  Enfin,  en  nettoyant  un  tableau  représentant  un  évé- 
que  et  placé  dans  l'ancienne  chapelle  des  Seigneurs,  dans  la  même 
église,  on  a  pu  lire  le  nom  de  Pelage  sur  un  livre  foulé  aux  pieds 
par  ce  personnage  :  on  doit  en  conclure  que,  conformémenl.àran- 
cienne  tradition  locale,  et  contrairement  aux  indications  actuelles 
de  rOrdo^  le  patron  de  l'église  de  Saint-Germain  serait  Saint-Ger- 
main d'Auxerre  et  non  Saint-Germain  de  Paris. 

M.  Bellct  communique  plusieurs  pièces  trouvées  aux  environs  de 
La  Souterraine  :  une  intéressante  monnaie  gallo-grecque,  bombée, 
présentant  au  droit  une  figure  de  femme  et  au  revers  un  cheval 
avec  des  signes  qa'on  rencontre  assez  fréquemment;  un  grand 
bronze  d'un  Antonin,  des  petits  bronzes  de  Dioclétien  et  de  Gallien, 
une  pièce  en  argent  de  Volusianus,  un  moyen  bronze  indéterminé  ; 
—  plus  un  tesson  de  poterie  portant  le  sigillum  :  Divix,  déjà  ren- 
contré dans  le  pays.  Ce  mot  a  été  reproduit  deux  fois  sur  le  même 
fragment,  mais,  semble-t-il,  à  une  date  moderne. 

M.  Tabbé  Georges  Ardant,  présenté  à  la  dernière  réunion,  est  élu, 
au  scrutin  secret,  membre  résidant  de  la  Société. 

En  tête  de  Tordre  du  jour  figure  une  communication  deM.Tabbé 
Ardant^  Il  a  trouvé  dans  un  manuscrit  de  la  Biblothèque  valicane 
(n**  4,920)  le  récit  d'un  voyage  fait  à  Limoges  par  saint  Pierre  Da- 
mien,  cardinal,  légat  du  pape  et  protecteur  de  Tordre  de  Cluny.  Ce 
voyage,  dont  le  récit,  malheureusement  trop  sommaire,  est  dû  à  un 
des  compagnons  du  saint,  avait  pour  but  de  mettre  fin  aux  désor- 
dres occasionnés  par  Vinstallation  violente  des  clunistes  à  Saint- 
Martial.  Un  certain  nombre  de  religieux  n'avaient  pas  voulu  se  sou- 
mettre à  la  volonté  du  vicomte  et  avaient  été  chassés  de  Tabbaye. 
Les  expulsés  se  livraient  aux  actes  d'hostilités  les  plus  condamna- 
bles à  regard  de  la  nouvelle  communauté.  Ils  auraient  même  poussé 
la  folie,  d'après  l'auteur  anonyme,  jusqu'à  mettre  le  feu  aux  maisons 
qui  entouraient  le  monastère.  Ils  refusèrent  de  comparaître  devant 
le  légat,  et  l'évéque  dut  les  sommer  de  se  soumettre  sous  peine 
d'excommunication.  On  ne  voit  pas  si  les  choses  s'arrangèrent  : 
Pierre  Damien,  en  quittant  Limoges,  se  rendit  à  Souvigny. 

M.  l'abbé  Granet  analyse  la  première  partie  du  plus  ancien  regis- 
tre du  Bureau  de  la  généralité.  Il  y  relève  bon  nombre  d'édits  et 
lettres  royaux,  mais  parfois  l'enregistrement  est  postérieur  de  plu- 
sieurs années  à  la  date  de  l'acte.  Parmi  les  faits  notés  par  M.  Gra- 
net, mentionnons  une  dépense  de  138,500  livres  pour  les  quartiers 
d'hiver  des  troupes  et  les  étapes  en  4648,  mise  à  la  charge  de  la 
généralité;  l'envoi,  en  1649,  de  soldats  dans  les  paroisses  où  la 
perception  de  l'impôt  avait  provoqué  des  révoltes  ;  l'arrivée  à  Li- 
moges de  chevaux  chargés  de  l'argent  provenant  des  recettes  des 


87)  SOCIÉTi  AKCttÉOLOOtQUB  ET  HBTOUrQt»  DQ  LtHOUSlK. 

élections  dû  Bas-Limousin.  Ces  aoimattx  et  leur  précieuse  ehargt 
s'égarëfent  parfois  en  chetDin.  Il  semble  résulter  des  bord^^ni 
dépouillés  par  M.  Granet  que  Tor  était  alors  bien  rare  dans  la  pro- 
vince. On  neroll  guère  figurer  à  ces  bordereaux  que  des  pièces  d** 
vingt-sept  sols^  de  vingt-quatre  sols,  de  vingt  sols,  de  treize  sols  et 
demi,  de  douze  et  dix  sols. 

M.  Ducourtieux,  qui,  Tan  dernier)  a  présenté  à  la  Société  nn  plas 
de  Limoges  dressé  par  Tingénieur  Morancy  en  1785,  en  comraiu]!- 
que  un  autre  dressé  par  M.  AUuaud  en  1768,  avec  ce  texte  :  «  Plan 
de  la  ville  de  Limoges,  levé  sous  les  ordres  de  M.  Turgot,  intah 
dant.  »  Celui-ci  est  moins  détaillé,  ayant  été  fait  à  une  échelle  beao 
coup  moindre,  mais  il  est  fort  bien  dessiné  et  remarquablement 
net.  M.  Ducourlieux  note  les  différences  entre  les  deux  docamenu: 
mais  il  eonstate  que  beaucoup  d'indications  portées  au  plan  AJluaud 
sont  de  beaucoup  postérieures  à  la  date  qui  y  est  inscrite.  C'est 
aiosi^  par  exemple,  qu'on  y  voit  figurer  le  projet  de  mairie  de 
Tan  VIII,  sur  remplacement  même  de  Thôtel  de  ville  actuel. 

Si  les  Cisterciens  tiennejQt  une  grande  place  dans  l'histoire  mo- 
nastique de  la  province,  on  ne  voit  pas  que  saint  Bernard  ait  eu  des 
relations  spéciales  avec  les  habitants  du  Limousin  et  y  ait  exercé  une 
action  particulière.  Il  vint  pourtant  dans  le  diocèse,  mais  ne  fit  qu*eD 
traverser  la  partie  ouest,  très  probablement  en  1147,  lorsquHl  re- 
gagnait Poitiers  en  revenant  de  Toalouse,  --*  et  non  en  1135  comme 
rindique  Nadaud . 

H.  Arbellot  signale  et  étudie  cet  épisode "p^  connu.  Le  passage 
de  saint  Bernard  fut  signalé  par  deux  miracles  :  au  Châtelard,  en 
Angoumois,  où  il  célébra  la  messe  en  présence  de  Lambert,  évéqoe 
d'Angouléme,  et  de  Gérald,  évêque  de  Limoges,  il  guérit  un  enfant 
boiteux  et  privé  de  l'usage  d'un  bras;  le  lendemain,  à  Saint-Ger- 
main, en  Limousin,  il  rendit  la  vue  à  un  aveugle-né.  Les  localités 
où  ces  prodiges  ont  été  accohiplis  ne  peuvent  être,  d'après  M.  Arbel- 
lot, que  Châtelard-la*Rivière,  aujourd'hui  commune  de  Cherres, 
canton  de  Montembœuf  (Charente),  et  Saint-Germain,  sar  la  Viense, 
canton  et  arrondissement  de  Confoiens,  alors  en  Limousin. 

M.  Guibert  signale  à  la  Société  quelques  documents  d*an  certaîo 
intérêt  pour  l'histoire  limousine,  notés  par  lui  au  cours  de  recher- 
ches aux  archives  de  l'Etat  et  à  la  Bibliothèque  nationale  :  il  note 
un  récit  inédit  des  événements  de  1589;  une  lettre  de  Tévéque 
Sébastien  de  l'Aubespine  au  chancelier  (1577)  ;  une  charte  da 
xi°  siècle  relative  aux  Eschausiefs  {Escaumru),  qui  étaient  de^ 
officiers  de  l'abbaye  de  Saint-Martial  ;  des  inventaires  inédits  du 
trésor  du  monastère,  notamment  de  la  sacristie  du  sépulcre  (xR' 
et  xm""  siècles)  ;  une  curieuse  déclaration  de  lévéque  Aymericde 


la.  Serre  permetlant  au  roi  Saint-Louis  de  ne  pas  opérar  certaiaeè 
restiiuUoQS  dans  son  diocèse  (1259)  ;  un  arrôt  duParlement  de  1321 
relatif  à  des  violences  exercées  par  les  religieux  de  Sainl-Marlial 
sur  deux  sergents  royaux  ;  une  chronique  limousine  notant  surtout 
les  faits  dUntérét  municipal  et  allant  de  1372  à  1543- 

La  séance  est  levée  à  dix  heures  un  quart. 

Suivant  Tusagç,  la  Société  ne  tiendra  pas  de  séance  en  septembre, 

he  secrétaire  généraly 

LOUi^  GUIBERT. 


'mmm 


SÉANCE  DU  27  OCTOBRE  1891 


Présidence  de  M.  Tabbé  il.RBBL.LiOX,  Président. 

Présents  :  MM,  le  chanoine  Arbellot,  Son  Exe.  G.  d'Alexéïeff, 
Em.  Hervy,  Brisset-Desisles.  Chassoux,  Tabbé  Demars,  Paul 
Ducourtieux,  Reu^  Page,  Fray-Fournier,  Gany,  le  président  Gil- 
bert, Ed,  Hersant,  G.  Jouhanneaud,  Tabbé  Lecler,  Alf.  Leroux, 
Malevergne  de  LaFaye,  G.  Marbonty,  Paul  Mariaux,  G.  Raynaud, 
V.  Rogues  de  Fursac  et  L.  Guibert,  secrétaire 

M,  le  Président  invite  M.  le  comte  d'Alexéïeff  à  prendre  place 
auprès  de  lui  et  le  remercie  du  témoignage  de  bienveillant  intérêt 
qu'il  donne  à  la  Société  en  assistant  à  la  réunion.  Il  se  félicite  de 
voir  par  là  s'alBrmer,  en  quelque  sorte,  sur  le  terrain  de  la  science, 
comme  elle  s'est  affirmée  sur  tous  les  autres  terrains,  la  sympathie 
qui  unit  deux  grands  peuples  et  dont  les  roanifestalions  récentes 
trouvent,  ce  soir,  dans  l'assemblée,  un  modeste  mais  cordial  et 
et  chaleureux  écho. 

M.  d'Alexéïeflf  remercie  M,  le  président.  Rattaché  depuis  long- 
temps au  Limousin  par  le  plus  intime  des  liens,  il  suit,  avec  un 
très  grand  intérêt,  les  travaux  de  la  Société  à  laquelle  il  est  heu- 
reux d'apparUînir.  Il  apportera  en  Russie  le  souvenir  le  meilleur 
de  raccjueil  plein  d'aimable  cordialité  qu'il  reçoit  ce  soir  de  ses 
collèges. 

Lecture  est  donnée  du  procès-verbal  de  La  dernière  séance. 
M.  Fage  fait  remarquer  que  l'attribution  à  Justel  du  Recueil  des 
Libertés  et  privilège^  de  la  vicomte  de  Turenne  lui  semble  bien  hasar- 


874  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGICUB  BT  HISTORIQUE  t>l)  LIMOUSIN. 

dée  :  il  y  a,  en  effet,  des  différences  assez  notables  entre  le  teite 
de  certains  documents  compris  à  cet  ouvrage  et  celai  des  méiiie< 
pièces  insérées  dans  YHistoire  d^s  vicomtes  de  Turenne. 

M.  le  président  signale  les  ouvrages  reçus  par  la  Sociélé  depDi> 
la  dernière  séance  :  deux  charmants  volumes  de  MM.  Emile  fi 
René  Page  :  Portraits  du  vieux  temps  et  Oléron^  tous  deax  aus?i 
finement  pensés  qu'élégamment  écrits;  une  notice  fort  complète  t\ 
fort  attachante  de  M.  Ed.  Decoux-Lagoutte  sur  M.  Joseph  Bninei: 
un  brochure  de  M.  Tabbé  Georges  Ardant,  sur  V Autel  de  Samt- 
M  rtial  à  Rome,  dans  laquelle  notre  jeune  et  distingué  confrère  a 
réuni  de  nouveaux  détails  sur  une  question  qui  ne  doit  être  indif- 
férente à  aucun  bon  Limousin  ;  un  mémoire  fort  curieux  de  M.  Ch. 
Sibillot  sur  la  Navigation  aérienne,  siyet  d'un  si  haut  intérêt  scienti- 
fique, mais  d'une  si  redoutable  difficulté.  M.  Arbellot  mentionne 
encore  d*excellenls  articles  de  MM.  Thomas,  Leroux,  Pérathon  dâQ> 
\e  Bulletin  de  la  Société  des  sciences  naturelles  et  historiques  de  Guéret, 
une  note  sur  la  cloche  de  la  Chapelle-Montbrandeix  dans  les  Mémoirrx 
de  la  Société  des  archives  de  la  Saintonge  ;  enfin,  dans  le  Bulletin  du 
Comité  des  travaux  historiques,  les  discours  de  M.  le  Ministre  de 
rinstruction  publique  et  de  M.  Gaston  Boissier,  et  le  compte-rendu 
du  congrès  des  sociétés  savantes  où  se  lit  le  résumé  de  plusieurs 
communications  relatives  au  Limousin. 

Le  troisième  volume  des  Archives  historiques  du  Limousin  vient 
de  paraître;  il  comprend  un  Choix  de  documents  historiques,  parmi 
lesquels  de  nombreux  extraits  des  procès-verbaux  des  réunions  de 
notre  Société  d'Agriculture  au  dernier  siècle.  Le  second  fascicule 
des  Archives  révolutionnaires  de  la  Haute-Vienne  va  être  également 
mis  en  vente  :  il  renferme  un  Inventaire  des  documents  manuscrits 
et  imprimés  de  la  période  révolutionnaire  conservés  anx  archives 
départementales.  M.  le  Président  présente  les  deux  volumes  à 
la  Société;  il  remercie,  au  nom  de  tous,  MM.  Alfred  Leroux  et 
Fray- Fournier,  à  qui  on  doit  ces  utiles  publications.  C'est  un  nou- 
veau et  précieux  contingent  qu'ils  apportent  à  l'histoire  de  notre 
chère  province. 

Une  lettre  de  M.  le  curé  de  Peyrilhac,  accompagnée  d'une  photo- 
graphie, décrit  un  reliquaire  sur  lequel  se  trouve  gravé  le  portrait 
du  vénérable  Bardon  de  Brun  ;  cet  intéressant  objet,  provenant  do 
château  de  La  Motte,  est  aujourd'hui  au  Queyroix,  entre  les  mains 
de  M.  de  Bruchard.  Le  même,  correspondant  rappelle  qu'à 
Chavagnac  on  conserve  la  chambre  du  pieux  «  avocat  des  pauvres  *• 
et  qu'au  Breuil  existe  un  petit  portrait  de  saint  François  de  Sales 
qu'on  croit  lui  avoir  appartenu. 

M.  Antoine   Thomas,   le    savant  maître  de  conférences   de 


PKOCàs^VIRBAUX  DIS  SÉANCES.  875 

la  Faculté  des    lettres   de   Paris,    a   eu  occasion  d'étudier   un 

docament  cité  par  M.  Emile  Molinier  dans  son  ouvrage  sur  le 

maréchal  d*Audrehem.  Cette  pièce  mentionne  une  renie  assignée  à 

la  date  de  i382,  par  le  maréchal,  sur  la  ^réyôié  de  Malleo  et  de 

Leron.  Il  est  évident  qu'il  s'agit  ici,  non  de  Mauléon  et  d'Oloron, 

comme  l'avait  cru  M.  Molinier,  mais  de  Masléon  et  de  Laron,  dont 

le  bailliage  ou  prévoie  royale  a  fait  l'objet  d'une  notice  de  M.  L.  Gui- 

bert.  Ce  dernier  n'avait  pas  trouvé  de  mention  du  siège  de  Laron 

postérienremenl  à  1333.  Le  document  signalé  par  M.  Thomas  permel 

de  donner  à  l'institution  de  Philippe-le-Bel  dix-neuf  ans  au  moins 

d'existence  de  plus.  La  rente  en  question  fut  rachetée  en  1356  par 

le  roi,  au  prix  de  400  florins. 

M.  Gaillemer,  doyen  de  la  Faculté  de  droit  de  Lyon,  a  bien  voulu 
communiquer  à  M.  l'abbé  Arbellot  des  reproductions  fort  curieuses 
des  sceaux  du  Limousin  Aymeric  Guerrut,  archevêque  de  Lyon,  et 
de  ses  ofilciaux.  —  Un  souterrain  refuge  vient  d'être  découvert  tout 
auprès  de  l'église  de  La  Croix  ;  la  lettre  de  M.  le  curé  de  cette  pa- 
roisse qui  annonce  cette  découverte  est  remise  à  M.  l'abbé  Lecler.  — 
Il  est  enfin  donné  lecture  d'une  délibération  de  l'assemblée  parois- 
siale de  Saint-Laurent-sur-Gorre,  datée  du  4  octobre  1744  et  rela- 
tive à  l'adjudication  de  la  ferme  d'une  maison  léguée  à  la  paroisse 
pour  l'enlretien  d'une  lampe  (communication  de  M.  G.  Touyéras), 
et  d'une  lettre  de  M.  Michel  Gondinet,  relative  à  un  inventaire  in  • 
téressant  dressé  après  la  mort  de  Pardoui  Gondinet,  médecin  de 
la  reine  Anne  d'Autriche,  mort  en  1678  ou  1679,  et  où  sont  détail- 
lés les  titres  des  ouvrages  de  la  bibliothèque  de  Pardoux  et  ceux  de 
ses  manuscrits. 

La  parole  est  donnée  à  M.  Camille  Marbouty  qui,  dans  un  récit 
attachant  et  sans  prétention  communique  à  la  Société  les  impres- 
sions de  son  récent  voyage  dans  l'Amérique  du  Sud.  Sans  fatigue 
et  sans  mal  de  mer,  il  conduit  ses  auditeurs  à  Pernambuco  et  leur 
donne  un  aperçu  de  la  nature  si  riche  et  si  variée  de  ces  chauds 
climats.  Voici  Rio-de-Janeiro  avec  sa  magnifique  rade,  puis  Buenos- 
Ayres,  où  nous  nous  arrêterons  un  peu.  Les  caprices  du  terrible 
pampero  rendent  aussi  dangereux  que  difficile  l'abord  de  la  côte. 
La  ville,  qui  compte  550,000  habitants,  est  immense;  quelques- 
unes  de  ses  rues,  qui  toutes  se  coupent  à  angle  droit,  ont  jusqu'à 
2,800  numéros.  Il  faut  dire  que  l'édililé,  plus  prodigue  encore  de 
plaques  indicatrices  que  celle  de  Limoges,  fait  meltre  des  numéros 
aux  fenêtres  comme  aux  portes.  La  population  a  un  aspect  affairé 
qui  contraste  singulièrement  avec  celle  des  villes  espagnoles  du 
continent.  M.  Marbouty  décrit  sommairement  les  édifices,  les  égli- 
ses du  xvH*  siècle,  richement  décorées,  avec  leurs  rétables  flam- 


876  SOCIBTÂ  ARCHftOLOOIQOK  ET  lISTOBiQUE  DC   LIMOCSIK. 

boyanls  et  leurs  aulels  d'argent  massif,  les  habitations  luxueuses, 
la  Douane,  qui  remonte  à  Tépoque  de  la  conquête. 

Après  avoir  donné  lin  aperçu  des  gargantuesques  festins  aux- 
quels il  a  eu  Toccasion  d'assister,  et  montré  les  convives,  assis 
autour  d'un  jeune  mouton  tout  entier,  grillé  à  point,  en  dépeçant 
les  plus  succulents  morceaux  et  les  ingurgitant  sans  avoir  recours  à 
la  fourchette,  jugée  là-bas  un  luxe  inutile,  —  le  sympathique  voya- 
geur transporte  son  auditoire  au  milieu  des  pampas,  dont  il  décrit 
1  aspect  et  les  immenses  horizons  ;  il  les  invite  à  la  chasse  do 
batitoUy  un  des  gibiers  les  plus  appréciés  du  pays.  Puis  remettant 
à  une  prochaine  réunion  la  suite  de  sa  lecture,  M.  Marbonty  lait 
passer  sous  les  yeux  de  ses  collègues  un  très  intéressant  et  très 
authentique  émail  de  la  première  moitié  du  xvr  siècle,  qu'il  a 
trouvé  au-delà  de  l'Atlantique  et  qu'il  a  patriotiquement  rapatrié. 

M.  Paul  Ducourtieux  rappelle  que  H.  le  comte  d*Alexéteff,  nu- 
mismate distingué  et  auteur  de  publications  estimées  sur  la  matière, 
avait  bien  voulu,  l'an  dernier,  oiïrir  au  Musée  national  Adrien 
Dubouché  une  rare  et  curieuse  monnaie  slave  :  un  rooble  du  x*  siè 
de,  petit  lingot  d^argent  ayant  la  forme  d'un  paraliéltpîpède  de  77 
millimètres  sur  40  et  pesant  une  demi  livre  byzantine.  M.  d'Alexéœff 
vient  de  faire  au  musée  un  nouveau  cadeau.  M.  Ducourtieux 
donne  la  description  des  pièces  qui  le  composent  :  ce  sont  des 
monnaies  de  Pierre-le-Grand,  de  Catherine  II,  de  Nicolas  !•»,  toute 
la  série  des  pièces  d'argent  d'Alexandre  III,  enfin  une  précieuse 
médaille  représentant  d'un  côté  le  pape  Qément  XIV  et  de  l'antre 
Jésus-Christ  chassant  les  Jésuites,  avec  cette  singulière  légende  : 
Nunquam  novi  vos  :  discedite  a  me  omnes!  M.  Ducourtieux  re- 
mercie, au  nom  du  musée,  le  donateur  :  celui-ci  répond  qu'il  se 
fera  un  plaisir  d'augmenter  la  série  russe  de  la  collection  nuiuis* 
matique  du  musée. 

La  vicomte  de  Turenne  a  été,  jusqu'en  1738,  un  vériud)le  Etal. 
M.  René  Page  détermine  ses  limites  exactes  qui  seooblent  avoir  peu 
varié,  et  constate  qu'elle  jouissait  encore  à  cette  époque  de  la  plu- 
part de  ses  anciennes  coutumes. 

La  vicomte  possédait  ses  «  Etats  »  comme  la  France  et  ceux-ci 
avaientdes  sessions  ordinaires  et  des  sessions  extraordinaires  comme 
nos  Parlement?  modernes.  M.  Page  a  étudié  avec  soin  l'histoire  de 
ces  Etats,  que  les  savants  ont  négligée  jusqu'ici  et  sur  laquelle  il 
donne  quelques  détails.  Il  constate  que  leur  composition  a  change 
après  1550.  Avant  cette  date,  le  clergé  et  la  noblesse  y  avaient 
leurs  représentants  comme  les  communes.  A  partir  de  1388,  on 
n'y  trouve  plus  que  les  consuls  et  syndics  d'un  certain  nombre  de 
villes  et  de  bourigs.  Il  s'est  produit  là  une  sorte  de  rëYohXtiM  dé- 
mocratique dont  les  causes  restent  ignorées. 


PBOCès- VERBAUX   DK9  9BA{l€fiS.  877 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  du  rapport  de  M.  Camille 
Jouhauueattd  sur  Texcursion  faite  le  6  juillet  dernier  par  la  Société. 
Après  un    remerciement  sympathique    donné  à  nos  confrères, 
MM.  Bertbomier,  E.  Montaudon,  Bellet  et  Tabbé  Cialis,  dont  Tobli- 
geaate  cordialité  et  la  parfaite  connaissance  du  pays  ont  singuliè- 
rement accru  Tagréraenl  et  le  profit  de  cette  journée,  M.  Jouhan- 
neaad  décrit  la  ville  de  La  Souterraine,  ses  vieilles  et  pittoresques 
maisons,  son  école  roonumentalei  sa  belle  église  restaurée  par 
M.   Abadie  et  dont  le  rapporteur  caractérise  avec  beaucoup  de 
netteté  les  remaniemente  successifs.  Il  nous  fait  descendre  avec  lui 
dans  la  crypte,  mentionne  Tinscription  incrustée  dans  une  muraille 
et  que  lut  la  première,  s'il  faut  en  croire  une  curieuse  tradition, 
la  reine  Catherine  de  Médicis  à  son  passage  à  La  Souterraine.  Nous 
montons  par  la  vieille  échelle  de  pierre,  adossée  aux  maisons  voi- 
sines, jusqu'au  sommet  de  la  tour  qui  surmonte  la  principale  porte 
(le  ville.  M.  Jouhanneaud  n'omet  rien,  ni  les  caves  profondes  de 
plusieurs  habitations,  ni  le  fanal  du  cimetière,  ni  le  tombeau  de 
Mous  Ganier. 

On  a  mis  en  doute  la  valeur  des  anciennes  légendes  des  saints. 
M.  Arbellot  pense  que  si,  pour  quelques-unes,  la  critique  doit  faire 
des  réserves,  c'est  dépasser  la  mesure  et  tomber  dans  un  fâcheux 
excès,  que  de  refuser  toute  autorité,  même  traditionnelle,  à  ces 
intéressants  documents,  comme  Ta  fait  M.  Tabbé  Duchesne,  mem- 
bre de  rinstitut,  dans  son  mémoire  sur  YOrigine  des  sièges  épisco- 
panx  de  l'ancienne  Gaule.  Il  y  a,  entre  la  valeur  historique  et  la 
valeur  traditionnelle,  la  différence  qui  existe  entre  la  certitude  et 
la  grande  probabilité.  L'histoire  ne  peut  se  passer  de  la  tradition  : 
elle  lui  emprunte  maint  récit,  et  Grégoire  de  Tours,  l'autorité  prin- 
cipale de  l'école  historique  exclusive,  dans  la  discussion  sur  Tapos- 
tolicité  des  églises  de  Gaule,  s'inspire  lui-même  à  chaque  instant 
des  légendes  et  des  traditions.  D'après  M.  Duchesne,  les  vies  des 
saints  de  la  Gaule  seraient  toutes  postérieures  à  Gharlemagne.  Or, 
pour  nn  grand  nombre.,  on  peut  historiquement  démontrer  qu'elles 
sont  antérieures;  il  en  est  ainsi  des  légendes  de  saint  Martial,  de 
saint  Clément  de  Metz,  de  saint  Austremoine,  de  saint  Memmie, 
de  la  passion  de  saint  Denis  et  de  beaucoup  d'autres.  D'une  façon 
générale,  on  peut  dire  que  les  légendes  plongent  leurs  racines  dans 
le  passé  le  plus  lointain  :  la  méthode  scientifique  consiste  non  à 
rejeter  en  bloc  toute  cette  série  de  témoignages,  mais  à  séparer  ce 
qui  estdouieuxou  apocryphe  de  ce  qui  est  certain  ou  très  probable. 
M.  L.  Giiibert  a  publié  naguère  le  curieux  LÂ^re  de  raisoti  d'un 
riche  bourgeois  de  Limoges,  Etienne  Benoist.  Un  registre  du  Par- 
lement de  Poiliors  nous  apprend  qu'en  1432,  ce  personnage  fut 
accusé  tottt  simplemisai  d'avoir  iué  sa  troisième  lemmei  Jeanne 


87S  SOCIÉTR  ARCHÉOLOGIQUE  ET  BISTOEIQUB  VO  LlHODSIIf. 

Colomb.  Les  enfants  d'un  premier  lit  de  Jeanne  n'avaient  rin 
trouvé  de  mieux  que  cette  imputation  pour  s'exonérer  du  paiement 
à  Etienne,  d'une  somme  assez  considérable  donnée  à  titre  de  gain 
de  survie  par  leur  mère.  Le  brave  bourgeois  n'eut  pas  de  peine  i 
se  disculper.  M.  L.  Guibert  donne  la  physionomie  de  l'affaire,  ré- 
sume les  débats  du  procès  et  cite  quelques  curieux  passages  de$ 
plaidoiries. 
La  séance  est  levée  à  dix  heures  et  quart. 

Le  Secrétaire  général^ 
Louis  Guibert. 


SÉANCE  DU  24  NOVEMBRE  1891 


Préalden<se  <le  M.  l'abbé  ARBELiIX>X,  Rréstdent 

Présents  :  MM.  le  chanoine  Àrbellot,  l'abbé  Demars,  René  Page, 
Fray-Fournier,  Albert  Gérardin,  Eug.  Goutenègre,  l'abbé  Granei, 
Camille  Jouhanneaud,  Alfred  Leroux,  Camille  Marbouty,  Ducour- 
tieux,  Léonard  Moufle  et  L.  Guibert,  secrétaire. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté.  Le  se- 
crétaire s'accuse  lui-même  d'avoir  omis  d'y  mentionner  la  très 
curieuse  communication  de  M.  l'abbé  Lecler  sur  le  refuge  de  Gom- 
preignac,  un  des  plus  grands  souterrains  ^àe  ce  genre  qu'on  ait 
signalés  et  un  de  ceux  que  l'aménagement  et  la  complication  de 
leur  plan  recommandent  plus  particulièrement  à  l'attention  des 
archéologues.  La  communication  intéressait  d'une  façon  toute  spé- 
ciale le  secrétaire,  et,  en  écoutant  M.  Lecler,  il  a  oublié  de  prendre 
des  notes. 

M.  le  président  présente  V Annuaire- Almanach  de  la  Creuse  pour 
1892,  offert  par  l'éditeur,  H.  Ducourtieux,  et  non  moins  intéressant 
que  d'habitude.  Il  contient,  entre  autres  articles,  la  suite  du  «  Dic- 
tionnaire des  noms  de  lieux  de  la  Creuse  »  par  M.  l'abbé  Lecler. 
Ce  dictionnaire  va  être  publié  à  part. 

La  Société  a  également  reçu  une  curieuse  plaquette  de  M.  Emile 
Du  Boys  :  Une  page  inédite  de  la  Chronique  des  élections  à  f  Acadé- 
mie française. 

M.  le  président  signale,  dans  les  Bulletins  des  Sociétés  de  Tulle 
et  de  Brive,  des  textes  importants  publiés  par  M.  Clément  Simon. 


PllO€ibS-VBIlBAUX  DIS  SBAUCES.  879 

De  deux  lettres  de  Philippe  Hervé,  il  résulterait  que  Tancien 
principal  du  collège  de  Tulle  était  en  pourparlers  avec  les  consuls 
lie  Limoges,  pour  prendre  la  direction  du  collège,  en  1593,  c'est-à- 
dire  peu  d'années  avant  la  remise  de  cet  établissement  aux  Jésui- 
tes. On  trouve  aussi  dans  ces  bulletins  un  précieux  Dictionnaire 
des  médecins  Limousins,  de  M.  R.  Page,  et  des  remarquables  articles 
de  MM.  Ernest  Rupin,  Ducourtieux,  Champeval,  etc.  Les  Mémoi- 
res de  la  Société  du  Périgord  renferment  notamment  une  excel- 
lente liste  des  sénéchaux  du  Périgord,  dres3ée  par. M.  de  Bosredon 
(plusieurs  de  ces  officiers  furent  aussi  sénéchaux  du  Limousin),  et  uu 
très  intéressant  inventaire  du  château  de  Montréal  (1569),  publié 
par  M.  B.  de  Montégut. 

Lecture  est  donnée  d'une  circulaire  de  M.  le  Ministre  de  Tins- 
truction  publique,  relative  aux  sujets  dont  Tétude  est  recomman- 
dée aux  sociétés  savantes,  et  d'une  lettre  de  M.  Gh.  Sibillot  annon- 
çant que  le  projet  d'aérostat  métallique,  système  François  Gouttes, 
est  en  voie  de  réalisation. 

M.  l'abbé  Demars  a  découvert  et  fait  passer  sous  les  yeux  de  la 
Société  un  manuscrit  dont  le  contenu  mériterait  une  étude  spéciale. 
C'est  l'inventaire,  dressé  en  1778,  époque  de  la  suppression  du 
monastère,  des  titres  et  archives  du  couvent  des  Gélestins  des  Ter- 
nes (Greuse). 

M.  L.  Gnibert  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  l'abbé  Joyeux, 
empêché  par  une  indisposition  de  se  rendre  à  la  séance.  M.  Joyeux 
a  continué  ses  fouilles  avec  succès.  Au  Coudounier,  commune 
(i'Oradour-suf-Glane,  il  a  mis  à  découvert  des  portions  de  murail- 
les assez  considérables;  à  Orbagnac,  il  a  trouvé,  outre  des  restes 
de  constructions  sur  lesquels  il  fournit  quelques  détails,  des  frag- 
ments divers,  de  menus  objets  en  terre  cuite,  notamment  un  buste 
de  femme,  une  pointe  de  javelot,  etc.  Le  courageux  pionnier  se 
propose  de  poursuivre  ses  travaux,  et  il  espère  pour  l'an  prochain 
une  bonne  moisson. 

La  bibliothèque  de  la  Société  a  reçu  de  M»''  Barbier  de  Mootaull 
quelques  feuilles  d'un  assez  beau  papier  provenant  d'un  registre 
du  château  de  Ghilleau  (Deux-Sèvres).  Le  filigrane  présente,  outre 
rinscriplion  :  Limousin-Surfin^  un  écu  portant  de...  au  pal  de... 
avec  la  couronne  impériale  et  la  date  de  1742.  Deux  lions  pour 
supports. 

M.  l'abbé  Guimbaud,  vicaire  de  la  paroisse  de  Saint-Joseph  de 
Limoges,  est  présenté  en  qualité  de  membre  de  la  Société,  par 
MM.  Arbellot  et  Granet. 

La  Société  doit  à  M.  Bénaud,  de  La  Souterraine,  communication 
d'an  mémoire  manuscrit  intitulé  :  Sommaire  description  de  la  ville 
^t  pos«  du  Boussadois,  Ce  mémoire,  qui  parait  être  du  commen- 


880  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOOIQUS  ET  mSTOIlIQUB  PU  UMOUSlIf . 

cemeat  du  dernier  siècle,  donoe  quelques  délails  sur  les  monih 
inents,  les  juridictions,  Tétat  féodal,  les  usages;  il  est  iacdil,  el 
M.  Guibert  estime  qu'il  serait  utile  de  le  publier. 

La  parole  est  donnée  à  M.  Camille  Harbouty,  qui  continae  la 
lecture  de  ses  intéressantes  notes  de  voyage.  Nous  le  suIvods  de 
Buenos-Âyres  à  Meodoça  :  K50  lieues,  qu*on  franchit  en  trois  jours 
sur  le  chemin  de  fer  du  Pacifique.  Meodoça,  détruite  en  1861  par 
un  tremblement  de  terre,  s'est  relevée  de  ses  ruines  et  compte 
30,000  habitants.  Mais  nous  y  débarquons  un  jour  d*élection,  et 
les  revolvers  partent  tout  seuls,  La  place  n'est  bonne  en  ce  mo- 
ment ni  pour  un  négociant  ni  pour  un  touriste,  M.  Marbouty  se 
décide  à  passer  au  Chili  en  franchissant  la  Cordilliëre.  Deux  jaunes 
Espagnols  qui  vont  à  Panama  partent  avec  lui.  Le  consul  de  France 
lui  a  procuré  des  guides.  Quels  guides!  Des  personnages  d'un  pit- 
toresque  admirable,  mais  qui  semblent  échappés  de  la  collectioa 
des  Gueux  de  Callot.  Par  bonheur,  ils  n*ont  de  brigands  que  la 
mine,  et  le  voyageur  n'a  que  des  éloges  à  donner  a  leur  dévout*- 
ment. 

Le  chemin  est  pénible  :  on  traverse  d'abord  la  plaine  pierretisc, 
crevassée,  couverte  de  poussière  blanche  ;  puis  on  commence  à  c^ 
calader  les  contreforts  de  la  grande  cbaioe.  La  route  est  semée  de 
carcasses  d'animaux  :  les  innombrables  troupeaux  qui  traversent 
la  montagne  dans  la  belle  saison  laissent  en  chemin  un  dixième  au 
moins  de  leur  effectif.  On  aperçoit  beaucoup  de  condors.  Le  condor 
est  l'oiseau  le  plus  grand  et  le  plus  fort  qu'on  connaisse  :  sa  taille 
atteint  un  mètre  et  son  envergure  trois  mètres;  mais  bien  des 
récits  fabuleux  ont  couru  sur  son  compte.  M.   Marbout;  décrit 
rhospitaijté  sommaire  qu'on  trouve  dans  les  posadas  à  la  fin  de 
chaque  journée  de  marche.  —  On  monte,  on  monte  toujours.  Le 
regard  du  voyageur  embrasse  bientôt  un  immense  horizon  et  la 
magniOque  spectacle  qui  se  déroule  devant  lui  élève  sa  pensée  vers 
le  créateur  de  ces  meneilles.  Plus  l'homme  se  sent  petit  et  plas 
son  cœur  cherche  et  appelle  Dieu. 

Continuant  à  son  (x)ur  le  rapport  sur  l'excursion  du  6  juillet, 
M.  Jouhanneaud,  quittant  La  Souterraine,  conduit  ses  auditeurs  à 
Bridiers.  Bridiers,  avec  sa  grosse  tour  ronde  de  32  mètres  de  dia- 
mètre, a  été  un  point  féodal  qui  mérite  d'être  étudié;  on  connaît 
pou  l'histoire  de  la  famille  qui  Ta  occupé;  mais  on  entrevoit 
qu'avant  le  xq«  siècle  elle  a  dû  jouer  un  rôle  important.  Après 
avoir  décrit  le  château,  dont  à  part  la  tour  il  ne  reste  plus  rien  que 
des  ruines  et  dont  M.  Albert  Mazet  a  publié  un  joli  plan  et  un  inté- 
ressant essai  de  restitution,  M.  Jouhanneaud  parcourt  le  ierritoire 
de  Tancienne  vilie  gallo-romaine  de  BreijJi  :  ville  et  non  pas  sim- 
ple villa,  car  les  vestiges  de  ses  constructions  cmvrmit  nne  étea 


l>EOCfts-TS«ftàtJS  DBS  SÉANCBS.  881 

due  de  plusieurs  kilomètres.  Ces  restes  ne  sont  pas  aussi  caracié- 
risés  qu'on  pourrait  le  désirer,  et  il  faut  plus  d'une  fois  que  Fima- 
gination  vienne  en  aide  au  témoignage  des  yeux.  Après  s^ét^-e 
arrêté  devant  rinscriptron  antique  encastrée  dans  le  mur  de  la 
façade  d'une  maison  sur  le  bord  de  la  route,  M.  Jouhanneaud  parle 
des  deux  grandes  mottes  ou  tumulis  qu'on  observe  plus  loin  et  des 
nombreux  objets  qu'on  y  a  découverts.  Il  rappelle  les  résultats  des 
fouilles  faites  dans  les  environs  et  indique  les  différentes  traditions 
relatives  à  la  ville  de  Breilh,  en  faisant  remarquer  qu'une  d'elles 
se  trouve  consignée  dans  la  chronique  du  prieur  de  Vigeois,  au 
XII'  siècle. 

Le  rapport  de  M.  Jouhanneaud  est  complété  et  commenté  par 
les  charmants  dessins  de  son  collaborateur,  M.  Albert  Gérardîn; 
celui-ci  a  mis  à  la  disposition  de  la  Société  son  crayon  alerte  et 
fidèle  avec  une  obligeance  dont  on  ne  saurait  trop  le  remercier. 

Au  nom  de  M.  Joseph  Dubois,  M.  Leroux  communique  le  com 
mencement  d'une  étude  sur  les  registres  paroissiaux  de  Bujaleuf. 
Ces  registres,  qu'on  possède  à  partir  de  1614,  renferment  une  chro- 
nique non  sans  intérêt.  Notons  quelques  détails  sur  le  jubilé  de 
1648  et  sur  le  voyage  que  fit,  en  juin  de  la  même  année,  l'évôquc 
de  Limoges,  Mp^  de  Lafayette,  dans  ces  parages.  Il  ne  confirma 
pas  moins  de  4,000  personnes  à  Saint-Léonard,  de  500  à  Bujaleuf 
et  de  9,000  à  Eymoutiers.  On  sait  qu'autrefois  les  évêques  ne  fai- 
saient pas  d'aussi  fréquentes  tournées  qu'aujourd'hui,  et  nos  livres 
de  raison  nous  montrent  souvent  des  hommes  de  cinquante  à 
soixante  ans  se  présentant  à  la  confirmation  avec  leurs  enfants  et 
leurs  pelits-enfants. 

M.  Tabbé  Granet  poursuit  Tintéressant  travail  de  dépouillement 
des  registres  du  bureau  d6s  finances  de  la  généralité.  Il  note  au 
passage  bien  des  faits  curieux.  En  1641,  le  roi  crée  cinquante  offi- 
ces d'archers.  Ils  sont  tous  acquis  par  la  même  personne,  qui  les 
revend  au  prix  de  1,300  11.  l'un.  Peu  d'années  après,  la  réparation 
des  murailles  de  Saint-Yrieix  entraîne  diverses  difficultés.  En  1656, 
la  ferme  du  Domaine,  dans  la  Basse-Marche,  est  adjugée  pour  une 
période  de  cinq  ans  :  M.  Granet  fait  connaître  les  clauses  du  cahier 
des  charges.  Les  années  qui  suivent  1650  sont  marquées  par  des 
impositions  extraordinaires  que  provoquent  les  fréquents  passages 
de  troapes. 

Esqaissant  la  description  géographique  de  la  vicomte  de  Tu- 
renne,  M.  R.  Page  dit  qu'elle  n'a  emprunté  ses  limites  k  aucune 
circonscription  antérieure.  Son  territoire  ne  correspond  ni  à 
l'aacienne  vicairie  de  Turenne  ni  à  celui  du  pagns  Torinensis, 
qui  englobait  plusieurs  vicairies  environnantes.  C'est  aux  puis- 
sants seigneurs  des  Echelles  que  le  petit  Etat  dut  sa  constitution, 


8S2  SOCIÉTÉ  ARGBÉOLOOIQUB  ET  BISTORIOVK  DO  LIMODSIH. 

et  un  membre  de  cette  famille,    Bernard,  qui  vivait  à    la  fia 

du   V  siècle,   est  considéré   comme  le  cbef  de  la  lignée  de^ 

vicomtes;  ses  terres  s'étendaient  sur  le  Limousin,  le   Quercy  et 

le  Périgord;  mais,  à  la  suite  d*un  différend  porté  devant  la  reine 

Blanche,  une  sentence  de  cette  princesse  adjugea  la  portion  péh- 

gourdine  à  Elie  Rudel  ;  ces  territoires  firent  plus  tard  retour  à  k 

vicomte  de  Turenne,  mais  ils  lui  revinrent  privés  de  leurs  anciens 

privilèges  et  formèrent  une  sorte  d'annexé,  soumise  aux  impôts 

royaux,  en  dehors  de  Tautonomie  de  la  vicomte  et  de  Taclion  des 

Etats. 

Vu  rheure  avancée,  les  autres  lectures  portées  à  Tordre  du  jour 

sont  remises  à  la  prochaine  réunion,  et  la  séance  est  levée  à  di\ 

heures  et  demie. 

Le  secrétaire  général, 

L.    GUIBERT. 


SÉANCE  DU  29  DÉCEMBRE 


Présidence  de  M.  l'abbé  ARBeL.L.OX,  PrésldtMt* 

Présents  :  MM.  Arbellot,  comte  de  Beauchesne,  Ducouriieux* 
Guyonnet,  Granet,  Camille  Jouhanneaud,  Alfred  Leroux,  Malever- 
gne  de  Lafaye,  Nivet-Fontaubert,  Paradis,  Reynaud  et  Savodin. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et  adopté  après 
quelques  menues  rectifications. 

M.  le  président  présente  les  ouvrages  adressés  à  la  Société  par 
leurs  auteurs  :  Les  communes  en  Limousin  du  douzième  au  quinzième 
siècle^  par  M.  Louis  Guibert;  VAlmanachr Annuaire  Limousin  pour 
1892,  par  M.  Ducourtieux  ;  le  dernier  Bulletin  de  la  Société  des  Amis 
des  arts  de  Rochechouart,  contenant  les  procès-verbaux  de  Tannée 
1890;  enfin  le  Rapport  sur  les  antiquités  de  la  France  présenté  à 
rinslitut  par  M.  Roberl  de  Lastey rie.  L*auteur  signale  d'une  façon 
fort  élogieuse  la  monographie  de  la  Commune  de  Saint-Léonard  de 
Noblat  au  treizième  siècle,  par  M.  Louis  Guibert,  qui  a  obtenu  au 
concours  une  mention  honorable. 

La  seconde  partie  de  YAlmanach  limousin  renferme  un  certain 
nombre  de  notices  historiques  sur  lesquelles  H.  le  président  appelle 
Tatlention  :  L.  Dessalles,  les  Prénoms  patois  limousins  ;  L.  Gnibert, 
le  Troisième  mariage  d'Etienne  Benoist;  A.  Leroux,  les  Sociétés  sa- 


^EOCts-VKkftAUX  DES  SEANCES.  883 

vantes  de  Limoges;  G.  Leyroarie,  la  Poterie  d'oc  et  la  Poterie  d'oïl; 
G.  Jouhanneand,  Revue  littéraire;  P.  Ducourtieux,  la  XV IP  Fête 
fédérale  à  Limoges. 

Le  président  énuroère  ensuile  les  publications  périodiques  reçues, 
par  échange,  depuis  la  dernière  réunion  :  Le  Journal  des  Savants, 
la  Bibliographie  des  travaux  historiques  et  archéologiques^  par  M.  R. 
de  Lasteyrie;  les  bulletins  du  Musée  autrichien  de  Vienne;  les  mé- 
moires des  Sociétés  historiques  du  Maine,  de  la  Touraine,  de  Dijon, 
etc.;  leB  Chroniques  d'Âmaldi  et  de  Strambaldi,  publiées  par 
M.  René  de  Mas-Latrie,  dans  la  Collection  des  documents  inédits. 

Le  président  entretient  ensuite  la  Société  de  la  découverte  faite  à 
Peyrat-le-Château,  par  M.  Rouleau,  d^environ  cinq  cents  barbarins 
coupés  par  le  milieu  pour  obtenir  une  monnaie  divisionnaire.  On  a 
d'autres  exemples  de  ce  procédé  rudimentaire,  que  la  Banque  de 
France  n'approuverait  sans  doute  pas  aujourd'hui. 

Il  est  donné  lecture  d'une  notice  de  M.  le  comte  de  Gouronnel  sur 
une  découverte  de  poteries  romaines,  faite  dans  le  domaine  de 
Peu-Marchoux,  dépendant  de  Thospice  de  Magnac-Laval.  Elles  pa- 
raissent provenir  dune  sépulture.  L'une  de  ces  poteries,  présentée 
à  la  Société,  est  dans  un  parfait  état  de  conservation  :  c'est  une  sorte 
de  jatte  à  trois  pieds,  qui  a  tous  les  caractères  des  objets  similaires 
du  second  siècle  de  notre  ère.  M.  de  Gouronnel  se  réserve  d'en 
faire  don  au  musée  Adrien  Dubouché  lorsque  la  section  archéologi- 
que sera  reconstituée.  Il  prie  la  Société  de  vouloir  bien  en  accepter 
le  dépôt. 

M.  Toùyéras,  qui  continue  ses  fructueuses  recherches  dans  les 
registres  des  notaires  de  l'arrondissement  de  Rochechouart,  com- 
munique trois  procès-verbaux  d'assemblées  de  paroisses  à  Saint- 
Auvent  et  Saint-Gyr,  de  1740-42.  Ges  assemblées  ont  pour  objet  la 
nomination  de  syndics  et  la  réparation  des  bâtiments  paroissiaux. 

MM.  L.  Guibert  et  Nivet-Fontaubert  présentent  comme  membre 
titulaire  M.  Maurice  Laporte,  de  Jarnac. 

On  vote  sur  l'admission  de  M.  l'abbé  Guimbaud,  vicaire  de  Saint- 
Joseph. 

Pendant  qu'on  procède  au  vote,  M.  le  président  donne  lecture 
d'une  circulaire  de  M.  le  directeur  des  beaux-arts  annonçant  que  la 
16*  session  des  Sociétés  des  Beaux-Arts  coïncidera,  en  1892,  avec 
la  réunion  des  sociétés  savantes.  Les  adhérents  sont  invités  à  com- 
muniquer d'avance  les  mémoires  dont  ils  voudraient  donner  lecture. 

M.  l'abbé  Granet  entretient  la  Société  du  château  de  Breuil^  près 
Janailhac,  et  demande  si  on  connaît  des  documents  relatifs  à  ce 
lieu  dit. 

M.  le  comte  de  Beauchesne,  de  la  Société  historique  du  Maine» 
offre  à  la  Société  cinq  grandes  photographies  de  la  curieuse  église 


su  sociHi  AneaÉOLOoiQtn  n  viBTaRtgOB  >D  limousin. 

de  Blond,  prisf  sons  ses  divers  &speets  par  M.  le  comte  des  Moiiii- 
(ierR-Méri[)vi)le.  Le  président  remercie  M.  deBeauchesoe  de  ceiloD. 
qui  prendra  place  dans  les  cartons  de  la  Société. 

Le  même  membre  lit  une  notice  sur  cette  église  de  Blond  pendani 
la  seconde  moitié  du  xvi'  siècle.  Klle  fut,  en  4ÎMt7,  rarafîée  par  les 
troupes  huguenotes  qui  venaient  de  l'Angoumoîs.  Elle  le  fat  de  uob- 
veau,  à  deux  reprises,  en  4S69,  par  les  mêmes  troupes  conduite 
par  M.  de  Montbrun.  Pendant  les  années  qui  suivirent,  elle  troun 
quelque  répit  ;  mais  au  commencement  de  la  Ligne,  vers  1380,  H 
liabitanls  trouvèrent  bon  de  la  fortifier  pour  résister  auxeonemi^. 
On  retrouve  aujourd'hui  encore  les  mâchicoulis  qui  furent  pratique? 
au-dessus  du  portail  principal,  et  tes  réduits  de  défense  qui  hireot 
établis  dans  la  partie  supérieure  de  l'édiSce.  A  ce  point  de  vue. 
l'église  de  Blond  n'est  pas  sans  ressemblance  arec  celles  de  Beilaf. 
de  Rançon  et  de  Compreignac. 

Ces  détails  sont  empruntés  par  M.  de  Beanchesne  k  une  chroni- 
que du  temps,  composée  peut-être  par  un  curé  de  Blond  dn  nom  de 
Charraing.  et  couchée  par  lai  snr  les  registres  paroissiaux.  Dans 
lenr  étal  actuel,  ces  registres  commencent  en  1559  {et  non  4665, 
comme  il  a  été  dit  ailleurs).  La  chronique  s'étend  de  4567  k  1580. 
Elle  doit  prendre  rang  désormais  k  côté  des  relations  hisloriqies 
rjui  ont  été  signalées,  depuis  quelque  temps,  dans  les  registres  pa- 
roissiaux d'Eymoutiers,  Magnae-Laval,  Thouron,  Bujalear,  etc.  Au 
dire  de  l'auteur  de  la  chronique,  les  huguenots,  qui  étaient  de  900  i 
4,âOO,  prenaient  dans  la  campagne  les  lièvres  à  la  main. 

Le  président  remercie  M.  de  Beanchesne  de  son  intéresMate  eom- 
mnnication. 

M.  Leroux  a  la  parole  pour  annoncer  à  la  Société  que  les  négo- 
ciations dont  il  avait  été  chargé,  il  y  a  trois  ans,  pour  obtenir  les 
extraits  historiques  laissés  par  feu  M.  Duplès-Agier  vieoneit 
d'aboutir. 

M'"  Duplès-Agier,  qui  habite  Versailles,  a  remis  à  la  Société  ar- 
chéologique, outre  la  copie  des  Chroniques  ie  Sainl-Martiai,  que 
son  frère  avait  publiées  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France,  bon 
nombre  de  pièces  inédites  tirées  des  manuscrits  de  la  BibliolhN)ue 
et  des  Archives  nationales  et  intéressant  le  moyen-àge  limousin. 
M.  Leroux  est  chargé  de  trier  ces  papiers  et  de  transmettre  a 
M"'  Duplès-Agier  les  remerciements  de  la  Société. 

L'ordredu  jour  appelle  la  suite  do  rapport  de  M.  C.  Jonhanneand 
sur  l'excursion  faite  par  la  Société  le  6  juillet  dernier.  M.  JouUaa- 
neand  présente  d'abord  les  dessins  faits  par  M.  Berthomier  de  quel- 
ques panneaux  du  château  de  Saint-Germain-Beaupré  (Creuse;  « 
retrace  brièrement  l'historique  de  ce  monument  d'après  la  récenie 
notice  de  M.  Mazet.  Ce  n'est  plus  la  forteresse,  à  l'aspect  redovla- 


PROCès-VBRBAUX   DES   SÉANCBS.  H8a 

ble,  que  les  Ligueurs  détraisirent  en  4580,  mais  un  manoir  recons- 
truit à  la  fin  du  xvi*  siècle  ou  au  commencement  du  xvii«  siècle 
avec  cinq  tours,  de  nombreux  fossés  et  des  étangs  de  défense  ;  il 
était  alors  plus  considérable  qu'aujourd'hui.  Peu  à  peu  ruiné  après 
la  Révolution,  il  a  été  restauré,  à  partir  de  1860,  par  le  propriétaire 
actuel,  M.  Berthomier,  avec  intelligence  et  avec  goût. 

De  nombreux  souvenirs  historiques  se  rattachent  à  cette  rési- 
dence. Henri  IV  y  séjourna  en  1605,  et  la  grande  Mademoiselle  en 
1636.  Un  nouveau  siège,  subi  vers  1615-1618,  dévasta  le  manoir  qui 
ne  fut  complètement  réparé  qu'en  1650.  Il  possédait  alors  dévastes 
jardins  dessinés  par  Le  Notre,  et  une  galerie  de  portraits  historiques 
qui  sont  aujourd'hui  pour  la  plupart  au  musée  de  Bloià.  La  seigneu- 
rie de  Saint-Germain-Beaupré  fut  érigée  en  marquisat  en  1645.  A  la 
fin  du  xvi*  siècle,  les  seigneurs  étaient  protestants  :  l'un  d'eux  fut 
tué  au  siège  d'Ahun  en  1591;  un  autre,  Gabriel,  abjura  le  protes- 
tantisme en  1631  ;  son  fils  Henri  fut  condamné  à  mort  en  1635,  en 
punition  de  ses  nombreux  crimes.  Pendant  tout  le  xvu"  siècle,  les 
Saint-Germain-Beaupré  occupèrent  dans  la  Marche  des  situations 
importantes. 

L'excursion  de  la  société  s'est  terminée  à  Saiol-Germain-Beaupré, 
où  elle  a  trouvé  auprès  de  MM.  Berthomier  père  et  lils  le  plus  gra- 
cieux accueil. 

M.  le  président  prend  à  son  tour  la  parole  pour  entretenir  la  so- 
ciété de  Bardon  de  Brun,  dont  les  œuvres  poétiques  étaient  fort 
connues  à  la  fin  du  xvi*  siècle  et  au  commencement  du  siècle  sui- 
vant. Bardon  a  composé  une  tragédie  de  Saint- Jacques,  qui  fut 
représentée  à  Limoges  en  1596  et  1597,  sur  la  place  des  Bancs; 
des  poésies,  dont  un  sonnet  gravé  en  1624  sur  la  porte  du  tombeau 
de  Saint-Martial,  et  reproduit  par  Bonaventure  de  Saint-Amable  ; 
une  prose  à  l'honneur  de  saint  Martial,  publiée  par  Bandel  dans  ses 
Annales  de  1638^  une  prose  latine  en  l'honneur  de  saint  Martial, 
qui  date  également  de  1624  et  ne  compte  pas  moins  de  trente-trois 
strophes  de  six  vers;  d'autres  pièces  que  l'on  trouve  imprimées  dans 
les  Œuvres  du  P.  Solier,  enfin  une  lettre  latine  au  cardinal  Bellar- 
niin,  en  faveur  de  l'apostolat  de  saint  Martial. 

En  raison  de  l'heure  avancée,  M.  le  président  suspend  sa  lecture. 
D'autres  communications  portées  à  Tordre  du  jour  sont  renvoyées  à 
la  réunion  de  janvier  1892. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures. 

Pour  le  secrétaire  général^ 
Par  délégation^ 

Alfred  Leroux. 


■■b 


t.  XL.  56 


LISTE 
DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ 

AU  MOMENT  DE  LA  PUBLICATION  liU  BULLETIN 


BUREAU 


Président-né,  —  M.  le  Préfet  de  la  Haule-Vienne  (J). 
Président.  —  M.  Tabbé  Aebellot,  I.  P.  ^  ift. 
Vice- Présidents.  MM.  Hervy  (Emile)  et  Nivet-Fontaubert. 
Secrétaire  général.  —  M.  Guibbrt  (Louis),  A.  y. 
Trésorier.  —  M.  Bourdrry  (Louis),  ^. 
Secrétaire.  —  M.  Fagk  (René),  A.  ^J^. 
Bibliothécaire-archioiste.  —  M.  Leroux  (Alfred),  I.  P.  ||. 
Adjoints,  —  MM.  Moufle  (Léonard)  et  Marbouty  (Camille). 

CONSEIL  DWDMINISTRATION 

MM.  les  iMembres  du  Bureau. 
M.  Tabbé  Tandeau  de  Marsac. 
M.  Mariaux  (Paul). 
M.  Lachbnaud  (Emile). 

COMITÉ  DE  PUBLICATION 

MM.  le  Président,  les  Vice-Présidents,  le  Secrétaire  géxNéral. 

M.  Tabbé  Lbcler. 

M.  Jouhannbaud  (Camille). 

M.  Leroux  (Alfred,  I.  P.  ^. 

M.  DucouRTiEux  (Paul),  A.  ^. 

M.  Fray-Fournier  (Alfred),  A.  ^f. 

Commission  chargée  de  la  publication  des  Registres  consulaires  de  la 

oiUe  de  Limoges 

M.  GuiBERT  (Louis),  A.  ^,  Secrétaire  général  de  la  Société. 

M.  DE  Bruchard  (Jean). 

M.  DucouRTiEOx  (Paul),  A.  ^. 

M.  Fougeras-Lavergnollb  (Gaston). 

M.  Marbouty  (Camille). 

M.  Moufle  (Léonard). 


(I)  La  Société  a  été  fondée  le  26  décembre  1845,  et  s'est  constituée  à  la  suite  de  U  ocinc>- 
tion  d'une  commissioa  pour  la  recherche,  Tétade  et  la  conservatioa  des  monument»  histon^3<« 
désignée,  le  3  du  même  mois,  par  M.  Morisot,  préfet  de  la  Hante- Vienne. 


LISTE   DES  MUiBIlBS.  887 

MEMBRES  RÉSIDANTS 

MM. 

Arbbllot  (labbé),  I.  P.  0  >{(,  cbauoine  de  Limoges,  correspondant  hono- 
raire du  Comilé  des  travaux  historiques,  boulevard  de  la  Corderie,  49. 

NivET-FoNTAUBERT,  ancîen  directeur  d^assurances,  villa  Saint-Georges,  près 
Aixe-sur-Vienne. 

18»0 

Rrisset  (Frédéric),  ancien  juge  au  tribunal  civil,  9,  boulevard  Louis  Rlanc. 

182SI 

Graves  (le  comte  de),  propriétaire,  à  Verne»jil-sur-Vienne. 

18»8 

RoGUEs  DE  FuRSAC  (Victof),  notaire,  à  Âixe-sur-Yienne. 

I8SIO 

Lecler  (l'abbé),  curé-doyen  de  Compreignac  (Hte-Vienne). 
Tandeau  de  Marsac  (Fabbé),  chanoine  de  Limoges,  S,  place  Fournier. 

i^eo 

Labonne  (Martial  de),  propriétaire,  au  château  de  Montbrun,  par  Dournazac 
(Haute-Vienne). 

itiei 

Garrigou-Lagrangb  (Joseph),  ancien  avoué,  33,  avenue  Foucaud. 
Hervy  (Emile),  notaire  honoraire,  33,  boulevard  Gambetla. 

I8e3 

*•  Font-Réaulx  (Théophile  de),  ancien  notaire,  à  Saint-J union. 

Le  Sage  (Charles),  ^,  A.  ^,  ingénieur  civil,  ancien  maire  de  Limoges, 
18,  rue  Péliniaud-Beaupcyrat. 

Lagrangb  (Paul),  propriétaire,  20,  rue  Manigne. 

Jabet  (Edmond),  propriétaire,  37,  boulevard  Gambetta. 
Maurat^Ballange,  ^,  ancien  conseiller  à  la  Cour  d*;ippcl,  5,  faubourg  des 
Arènes. 


d88  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  ET  HISTORIQUE  DU  LIMOUSIN. 

MM. 

DucouRTiBux  (Paul),  A.  0,  imprimeur-libraire,  membre  correspoDdaat  dt 
comité  des  Sociélés  des  Beaux- Arts  des  déparlcmenls,  7»  rae  des  Ardoes. 

Ardant  (Georges),  imprimeur,  14,  rue  Pont-Hérisson. 

GuiBERT  (Louis),  A.  ^,  directeur  d^assurauces,  correspondant  du  minislère 

de  l'instrucUon  publique  pour  les  travaux  historiques,  membre  corres- 

pondant  du  Comité  des  Sociétés  des  Beaux-Arts  des  départements,  rse 

de  rObservatoire. 
JouB/NNEAUD  (Camille),  avoué,  28,  boulevard  Victor-Hugo. 
Joyeux  (Pabbé),  curé  d*Oradou>sur-G]ane  (Haute-Vienne). 
Larue  (Armand),  avocat-agréé  au  Tribunal  de  commerce   de    Limoges. 

6,  avenue  de  Juillet. 
Pinot  (l'abbéj,  curé  de  Saint-Michel,  13,  impasse  des  Clairettes. 
*  RoHANET  DU  Gaillaud  (Frédéric),  ^,  au  château  du  Caillaud,  près  Isle. 
Sbnehaud,  greffier  au  Tribunal  de  commerce,  f9,  rue  du  Consulat. 

I8r3 


•* 


Cressac-Bacbellbrie  (de),  percepteur,  au  Dorât. 
Page  (René),  A.  ^,  'avocat,  correspondant  du  ministère  de  rinslroctioo 

publique  pour  les  travaux  historiques,  25,  boulevard  Gambetia. 
Gadon  (Abel),  avoué  à  la  Cour  d*appel,  3^  boulevard  Montmailler. 
Vandbrharcq  (Eugène),  propriétaire,  7,  rue  du  Général  Gérez. 

BooDBT  (Gabriel),  A.  Q^  docteur  en  médecine,  l,rue  du  Général  Gérez. 
Ravmondaud  (E.),  ^,  L  p.  ^,  directeur  de  TEcole  de  médecine,  28,  iaa* 
bourg  Manigne. 

BouRDBRY  (Louis),  i|||c,  avocat,  peintre  émailleur,  correspondant  du  miois- 
1ère  de  Tinstruction  publique  pour  les  travaux  historiques,  membre 
correspondant  du  Comité  des  Sociétés  des  Beaux-Arts  des  départements, 
38,  rue  Pétiniaud-Bcaupeyrat. 

Constantin  (Jérémie),  avocat,  43,  avenue  de  Juillet. 

Léobon-Lètang,  notaire,  à  Sainl-Priest-Ligoure,  par  Nexon  (Haute-Vienne;. 

**  Montégut  (Emile),  ^,  homme  de  lettres,  rue  des  Gharselx,  6. 

Penicaut  (Léonce),  négociant,  3,  place  Denis  Dussoubs. 

Beaure-d'Augères  (J.-B.-Gustave),  avocat,  15,  rue  Gondinet. 
Guérin-Lézâ  (Guillaume  dit  William),  ^  fabricant  de  porcelaine,  It,  roe 
du  Petit-Tour. 


LISTE  DES  MEMBRES.  889 

MM* 


**MoNSTiBB$-MéRiNyiLLB(le  comte  Jean  des),  aa  château  du  Fraissc,  par 

Mézières  (Haute-Vienne). 
Noualhier  (Gabriel),  propriétaire,  à  Linards. 

*  YiGiBR  (fabbé),  curé,  à  iuzances  (Creuse). 

*  Cercle  de  l'Union,  à  Limoges. 

Dblor  (Adrien),  propriétaire,  maire  du  Vigcn. 
Deluret  de  Fbix,  propriétaire,  rue  d'isly. 
fiBRARD  (Emile),  négociant,  9,  boulevard  Montmaillcr. 
Laportb  (l'abbé),  curé-doyen  à  Saint-Mathieu  (Haute-Vienne). 
PoMMÊLiB  (le  baron  Melchior  de  la),  ^ ,  propriétaire,  au  château  du  Mont- 
joffre,  près  Saint-Léonard. 

Berger  (Elie),  L  P.  O,  professeur  au  Lycée,  9,  avenue  Saint-n^loi. 
Blanchaud  (Charles),  au  Dorai  (Haute-Vienne). 

*  Ducuateau  (Georges),  notaire,  à  Bessines  (Haute-Vienne). 
GouTENÈGRE  (Eug.),  A.  Oi  profcsscur  honoraire  au  Lycée,  23,  rue  du  Consulat. 
**  Leroux  (Alfred),  i.P.  ^,  archiviste  de  la  Hle-Vienne,  48,  faubourg  de  Paris. 
Leygonib,  ingénieur  hydrographe,  3,  rue  du  11^  Mobiles. 

Prouff,  médecin-oculiste,  4,  avenue  de  lu  Gare. 
TuÊzARD  (Lucien),  notaire,  8,  rue  Pont-Hérisson. 

Bkllabre  (Jules  de),  propriétaire,  au  château  de  Puyjoubert,  commune  de 

La  Geneytouse,  par  Saint-Léonard. 
Lachenauo  (Emile),  entrepreneur,  7,  avenue  du  MidL 
LÊPiNAY  (Gaston  de),  maire  de  Lissac,  au  château  de  MorioUes,  par  Larche 

(Corrèze). 
Mallbvbrgne  de  la  Fate,  ancien  juge  suppléant  près  le  tribunal  civil  de 

Limoges,  33,  boulevard  Victor  Hugo. 

BooLLAND  (Henri),  docteur  en  médecine,  36,  boulevard  Victor  Hugo. 
Drmengeon  (Emile),  receveur  Je  Fenregistrement,  i3,  cours  Jourdan. 

*  Laporte,  docteur  en  médecine,  à  Bessines. 
Marbouty  (Camille),  négociant,  48,  cours  Gay-Lussac. 

1891 

Geay,  architecte,  inspecteur  des  bâtiments  diocésains,  36,  avenue  de  Juillet. 

Gilbert  (l'abbé),  vicaire  général,  10,  boulevard  de  la  Cité. 

Mariaux  (Paul),  avocat,  48,  avenue  de  Juillet. 

Merlin-Lehas  (Abel),  avoué  près  la  Cour  d'appel,  3,  rue  Léonard  Limosin. 


890  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQUI   BT  HISTORIQUE   DU   LIMOUSIK. 

MM. 

Brisset-Desislrs,  aDcieû  fhagistrat,  directeur  de  la  compagnie  d^Assuranecs 

générales  sur  la  vie,  H,  avenue  de  Juillet. 
RouRDKAu  Dt  Lajudie,  (André),  9,  rue  Cruchedor. 

Cathbu  (Théodore  de],  ^,  propriétaire,  au  château  de  Juillac,  près  Limoges. 
Chatard  (Emile),  propriétaire,  h  Vicq,  par  Magnac-Bourg. 
Nénbrt  (André),  4,  avenue  Garibaldi. 
Savodin  (Jules),  50,  avenue  de  Juillet. 
TixiKR  (Jules),  architecte,  directeur  du  Muséum^  34,  boulevard  Gambetia. 

Bruchard  (Jean  de),  avocat,  8,  boulevard  Monlmaillcr. 
Chassoux,  ^,  ancien  préfet,  7,  avenue  de  Juillet. 
Dbgrond,  ^,  ancien  préfet,  9,  place  Denis  Dussoubs. 
Fougbras-Lavergnolle  (Gaston),  avocat,  24,  boulevard  Carnol. 
LouvET  (André),  avoué  près  la  Cour,  8,  cours  Bugcaud. 
Moufle  (Léonard),  avocat,  rue  de  l'Observatoire. 

WoTTLiKG,  A.  ^,  architecte,  ancien  directeur  des  travaux  de  la  ville,  4. 
avenue  des  Chareates. 

De  Bletterjb,  docteur  en  droit,  avoué  près  la  Cour  d*appel,  13,  faubooi^ 
des  Arènes. 

Bourdeau  d'Antony,  docteur  en  médecine,  5,  avenue  Garibaldi. 

Brigueil  (Louis),  ^,  ancien  président  do  Tribunal  civil  de  Lyon,  S,  boule- 
vard Carnol. 

Coffre  (l'abbé),  secrétaire  ^  l'Evôché. 

CouRONNEL  (comte  de),  if,  membre  du  Conseil  général,  à  Magnac-Laval. 

Delcaire  (Maurice],  avoué  près  la  Cour  d^appel,  3,  rue  du  Général  Cérex. 

DoRAT  (Hubert),  0.  "j^,  lieutenant-colonel  en  retraite,  8,  rue  des  Augustios. 

Gaumy  (l'abbé),  curé  de  La  Meyze  (Haute- Vienne). 

Gérardin  (Albert),  avocat.  11,  boulevard  Gambetta. 

Gilbert  (A.),  ^,  président  du  Tribunal  civil,  27,  avenue  du  MidL 

*  Lacoste  (André),  négociant,  à  Ghâteauponsac  (Haute-Vienne). 
Lamy  de  la  Chapelle  (Charles),  avocat,  i,  boulevard  Carnot. 
Maurat-Ballange  (Albert),  avocat,  16,  place  du  Champ-dc-Foire. 
Mazard  fils,  4C,  boulevard  Carnot.       i 

Do  Mazeaubhiin  (Antoine),  avoué  près  le  Tribunal  civil,  5,  rue  Neuvc-de-Paris. 

*  MoYNAT  (l'abbé),  supérieur  du  Petit-Séminaire  du  Dorai  (Haulc-Viennc;. 
PiEDON  (Joseph),  13,  boulevard  de  Fleurus. 

Sazerat  (René),  t,  rue  Dalesme. 

188tt 

Blëynib  (Louis),  I.  P.  0,  docteur  en  médecine,  4,  rue  d'Isly. 
BouDET  (Louis),  3«  rue  du  Général  Céroz. 


LISTE  DIS  MEMBRBS.  891 

Boucheron  (Edouard  du),  capitaine  d'étaumajor,  avenue  Foucaud. 
GabrigoU'Lagrange  (Paul),  À.  ^,  secrétaire  général  de  la  Société  Gny- 

Lussac,  à  l'Observatoire  météorologique,  23,  avenue  Foucaud. 
GuYONNET,  chef  de  district  à  la  compagnie  d'Orléans,  avenue  SaîntrEIoi, 

maison  Barny. 
Maigne  (Léopold),  banquier,  8,  rue  Pétiniaud-Beanpeyrat. 
Paradis,  entrepreneur  de  serrurerie,  6,  rue  des  Gharseix. 

Dehartial  (André),  avocat,  17,  rue  Pétiniaud-Beaupeyrat. 
Fray-Fournier,  a.  ^,  chef  de  bureau  à  la  Préfecture  de  la  Uaute-Viénne, 

rue  de  la  Croix-Verte,  4. 
Letmarie  (Camille),  A.  ^,  conservateur  de  la  Bibliothèque  communale, 

correspondant  du  ministère  de  Tinstruction  publique  pour  les  travaux 

historiques,    membre    correspondant   du    Comité    des    Sociétés   des 

Beaux-Arts  des  dépàrlcments,  14,  rue  Borneilh. 

*  CuARBONNiÊRAs  (l'abbé),  curé  de  ChàleauneuMa-Forôl. 

CouRifUKJOULs  (E.)i  0.*,  I.  P.  tl,  proviseur  honoraire  du  Lycée  de  Ver- 
sailles, 46,  rue  Péiiniaud-Beaupcyrat. 

Dubois  (Joseph),  avoué,  16,  boulevard  Victor  Hugo. 

Hersant  (Edouard),  directeur  particulier  de  la  compagnie  d'assurances  la 
Prooidence^i,  place  Manigne. 

JuDicîS  (Antoine),  architecte,  13,  rue  EUe  Berlhet. 

Lézaud  (Maurice),  directeur  particulier  de  la  compagnie  d'assurances  la 
Foncière^  3,  cours  Jourdan. 

Montaudon-Bousseresse,  0.  ^,  directeur  honoraire  de  rEnregistrcment  et 
des  Domaines,  administrateur  de  l'hospice,  46,  avenue  Garibaldi. 

Vergniaud  (Camille),  conseiller  de  Préfecture,  I,  avenue  du  Midi. 

Brouard  (Arsène),  naturaliste,  A  Limoges,  rue  Porte-Panel. 

Desbordes  (Charles),  propriétaire  au  Mont-Rù,  près  Rançon  (Haute-Vienne). 

*  Ecole  nationale  d'Arts  décoratifs  de  Limoges. 

Gany,  sous-chef  de  bureau  à  la  Préfecture,  iS,  boulevard  de  la  Cité. 

*  Lacbenaud  (Henri),  étudiant,  avenue  du  Midi. 

Raynaud,  »ii,  directeur  des  Magasins  généraux  du  centre,  vice-consul  du 

Portugal,  26,  boulevard  Victor  Hugo. 
Texier  (Hubert),  avocat,  t,  boulevard  Carnot. 
Tbomas-Doris  (René),  docteur  en  médecine,  à  Eymouticrs  (Haute-Vienne). 

D'Abzac,  percepteur,  à  Aixe  (Haute-Vienne). 

Charreyrom  (Pierre),  avocat,  docteur  en  droit,  boulevard  de  FIcurus. 
*Demars  (l'abbé),  curé  du  Chàtenet-en-Dognon  (Haute-Vienne). 
Monique  (l'abbé),  à  Nedde  (Haute-Vienne). 


SOCIÉTÉ  inCBÉOLOGlQUE  BT    iLSTORIQtJB  DU  LIHODMI*. 


HH. 

DuBoii  (ArmaDd),  I.  P.  Q,  docteur  en  médectne,  rue  du  CodsdUi.  9. 
Griffin  (Waller],  consul  des  Elala-Unis  de  l'Amérique  du  Nord  à  LîmOfes. 
PéiussAULT,  pharmacien,  place  Sainl-Pierre,  II. 

Sabroux    (l'abbé),    curé    de    Sa int-Laurenl- les- Eglises,   pir   U   Jontbèn 
{Hante- Vienne). 

■  SOI 

CoussEYRoux  (Pierre),  avocat,  rue  des  Vénitiens,  91. 
Gbanet  (l'sbbe),  curé  de  Saint-dilaire-Bonncval  {H  au  te- Vienne). 
GuiHBAUD  (l'abbé),  vicaire  à  Saint-Joseph,  faubourg  de  Paris,  11. 
Tenant  db  Latoub  (Albert],  au  Cbalard,  par  Saim-Vrielx. 

ISO» 

Abdant  (l'abbé  Georges},  vicaire  i  Saini-Jo&epb,  laubourg  de  Paris,  19. 
Chaptre  (Henry  Fayolle  ne  Conus  db],  #,  chef  d'escadron  de  canlerie 

territoriale,  au  château  du  Couret,  commune  de  Saini-Uarenl-lcs-EglIses, 

par  La  Jonch^rc  (Haute-Vienne). 
FoNTANEAU  (El.),  #,  ancien  ofTn'ier  de  marine,  cours  Bugeand. 
Galaro  De  BtAHK  (Ad.  de),  propriétaire,  avenue  Garibaldi,  S, 
Laportb  (Maurice),  #,  négociant,  maire  deJarnac. 
LoRGUB,  propriéUire  cl  maire,  A  Honlrol-Sénart,  par  Hortemart  [Haulc- 

Vienne). 
Mabouet,  docteur  en  médecine,  maire  à  Rochechoaart. 
RouLBAC  (Abel  de),  propriétaire,  boulevard  de  la  Corderie. 


MEMBRES  HONORAIRES  (I) 

is»«-is7e 


DeLOcas  (Maximln),  C.  Ht ,  membre  de  l'Institut  [Acadâmie  des  InsciJptionsV 
ancien  chef  de  division  au  Ministère  du  commerce,  5,  rue  Bersche  II,  Paris. 

Rougkbib  (Mgr),  évêtjue  de  Pamicrs, 

ise^'iseo 

Lahohbièbb,  C.  #,  membre  de  l'iusliint  (Académie  des  sciences  morales 
et  politiques),  Crémier  Président  honoraire  à  la  Cour  de  Cassation,  5,  me 
d'Assas,  Paris. 


LISTE  DES  MEMBRES.  893 

MM. 

DuBÉDAT,  ^,  ancien  conseiller  à  la  Cour  d^appel,  à  Toulouse. 

Claritie /Jules),  0.  ^,  de  rAcadémie  Française^  administrateur  du  Théâtre 
Français,  rue  de  Douai,  10,  à  Paris. 


Lastbtrib  (Comte  Robert  de),  ^,  de  TÂcadémie  des  Inscriptions,  profes- 
seur d*archéologie  à  FEcole  des  Chartes,  10  bis,  rue  du  Pré-au-Clercs, 
Paris. 

Dblisle  (Léopold),  C.  j||&,  de  TAcadômie  des  inscriptions,  administrateur 
général,  directeur  de  la  Bibliothèque  nationale,  rue  de  Richelieu,  Paris. 


MEMBRES  CORRESPONDANTS 


MM. 


Clément-Simon,  ancien  procureur  général,  château  de  Bach,  près  Naves, 
par  Tulle  (Corrèze). 

Lemas  (Elie),  #,  I.  P.  Q,  inspecteur  d'Académie  en  retraite  à  Brive  (Corrèze). 

isett 

CousTiN  DU  Masnadaud  (Ic  marquis  db),  au  château  de  Sazcrat,  par  Béné» 

vent  (Creuse). 
Debort  (Gabriel),  propriétaire,  à  Montaiguet  (Allier). 
Tandeau  de  Marsac,  notaire,  44,  place  Dàuphine,  à  Paris. 

PiCHON  (François),  avocat,  36,  rue  Carpenteyre,  à  Bordeaux. 

AuBÂPiN,  archiviste  du  département  du  Cantal,  à  Aurillac. 


** 


Drgoox-Lagoutte,  ancien  magistrat,  46,  route  d^Angouléme,  à  Périgueux. 
*•  PouLBRifcRB  (Pabbé),  directeur  au  Petit-Séminaire  de  Scrvières  (Corrèze). 


894  SOCIÉTÉ   ARCllEOLOOiQUK   ET   HISTORIQUi:   DU    LIMOUSIN. 

MM. 

Demautial  (Henri),  procureur  général,  à  Angers. 

Maoaket  du  Basty  (Edouard)j  Gonservaleur  des  hypothèques,  à  Sens  (Yonae) 


** 


Barbier  oe  Hontault  (Mgr),  ^^  I.  P.  ^,  prélat  de  la  maison  de  Sa  Sain- 
teté, 35,  rue  Saint-Denis,  à  Poitiers. 

AuBussoN  Ds  SouBREBOST  (Edouard),  propriétaire,  au  château  de  Poinsouze, 

par  Boussac  (Creuse). 
Lambbrtyc  (le  marquis  de),  au  château  de  Cons-la-Granville,  par  Longuyoo 

(Meurthe-et-Moselle). 
MoNTCBEuiL  (Paul  oe),  châlcau  de  Monlcheuil,  près  Nontron  (Dordogno). 
MoNTVAiLLER  (Paul  de),  avocat,  à  Conf'olens  (Charente). 
Petit-Séminaire  d'Ajain  (Creuse). 

David  (Gaston),  avocat,  33.  rue  de  Caudéran,  à  Bordeaux. 

DuJARRic  DES  Combes,  A.  ^,  licencié  en  droit,  ancien  notaire,  à  Périgueux, 

rue  de  Paris,  9. 
Maleplank  (Paul   Vilyrier  de),    receveur   particulier,    à   Chàleau-Chiaoo 

(Nièvre). 
Mazaudoi:)  (Philibert),  notaire  à  Treîgnac  (Coirèze). 

Bonhomme  de  Montaigut  (Henri),  ancien  magistral,  aux  Ombrais,  près  La 

Rochefoucauld  (Charente). 
BosviEUx  (Paul),  inspecteur  de  reuregistrement,  à  Niort  (Dcux-Sèvrcs). 

CiALis  (Pabbé),  curé  de  La  Souterraine  (Creuse). 

Rancogne  (de),  à  Angouléme  (Charente). 

**  Thomas  (Antoine-André),  professeur  à  la  Faculié  des  lettres  de  Toulouse, 

chargé  de  cours  à  la  Faculté  des  lettres  de  Paris,  boulevard  Raspail,  213, 

à  Paris. 

FouGRRAs  (Joseph),  sous-inspecteur  de  l'enregistrement,  à  Fontenay-le- 
Comte  (Vendée). 

MoLiNiER  (Emile),  conservateur  adjoint  au  Musée  du  Louvre,  5^,  quai 
Bourbon,  à  Paris. 


** 


LISTB  0£S  MBVBaBS. 


899 


199^ 


MM. 


Berthouier  (Georges),  propriélaire,  au  châlcau  de  Sainl-Germain-Bcaupré, 
par  La  Souterraine  (Creuse),  et  à  Paris,  85,  rue  d'Amsterdam. 

Grrllkt  db  Fleurelle,  substitut  du  procureur  général,  à  Agen. 

Sevneville  (db),  conseiller  à  la  Cour  des  Comptes,  5i,  rue  de  Grenelle,  à 
Paris. 

Dbmartial  (Octave),  ^^  conseillera  la  Cour  d'appel,  U,  rue  de  Tlnduslrie, 

à  Poitiers. 
RuBBN  (Emile},  libraire,  Charleville  (Ardennes}. 

IIkcquart  (Arlhar},  au  ch&leau  de  Vost,  par  Aigurandc  (Indre). 
TuÉZARD  (Philippe),  ingénieur  civil,  rue  de  Chazelics,  32,  à  Paris. 
TouMiEux  (Zenon),  notaire,  à  Royère  (Creuse). 


** 


Chami»isval  (Jean-Baptiste),  avocat,  à  Figeac  (Lot). 


Hellet,  instiluleur  communal,  h  Saint-Maurice,  par  la  Souterraine  (Creuse). 
*'  Fage  (Emile),  A.  Q,  vice-président  du   Conseil  de   préfecture  de  la 

Corrèze,  président  de  la  Société  des  Lettres,  Sciences  et  Arts  de  Tulle. 
lÉzAUD  (Georges),  ^,  ancien  magistral,  avocat,  à  Chambon-sur-Voueize 

(Creuse). 
Mazet  (Albert),  architecte,  boulevard  des  Balignolles,  26,  à  Paris. 
**  Rupin  (Ernest),  L  P.  |^,  président  de  la  Société  scientifique,  historique 

et  archéologique  de  la  Corrèze,  à  Brive. 
Termes  (Emile  des),  inspecteur  de  la  Compagnie  d'Assurances  générales, 

rue  de  TEst',  30,  à  Poitiers  (Vienne). 


1999 

RosREDON  (Philippe  de),  0.  *,  ancien  conseiller  d'Etal,  1"^,  rue  Verte,  à 

Sainl-Cloud  (Seine-ct-Oise). 
Drapeyrow  (Ludovic),  L  P.  ^î,  professeur  au  Lycée  Charicmagne,  directeur 

de  la  Reoue  de  Géographie^  rue  Claude  Bernard,  55,  Paris. 
GoKDiNET  (Michel),  avocat,  docteur  en  droit,  boulevard  Saint-Germain,  234, 

Paris. 
Mbunier-Poutbot  (Narcisse),  rue  du  Bac,  à  Suresnes  (Seine). 
Touyéras  (Gabriel),  percepteur,  à  Salnt-Julien-l'Ars  (Vienne), 
DuLAf  et.  C%  libraires,  37,  Soho-S<juare,  Londres, 


896  SOCIÉTÉ  ARCBÉOLOGIQUB  ET  HISTOIIIQtlE  DU  LIMOUSIN. 


**  AlexéTeff  (Son  Excellence  le  comte  Geurges  d'),  maître  de  la  Cour  et 

S.  M.  l'Empereur  de  Russie,  tuteur  honoraire,  rue  Serguievskaya,  lO-lS, 

Saint-Pétersbourg. 
Bénauo  (L.),  joaillier,  à  La  Souterraine  (Creuse). 
Cars  (le  duc  des),  75,  rue  de  Grenelle,  Paris. 
FiLBOULAUD  (Alfred),  propriétaire,  à  Bourganeuf  (Creuse). 
MoNTAUDON  (Ernest),  notaire,  ancien  membre  du  Conseil  général,  à  La  Son< 

terraine  (Creuse). 
**  Pératbon  (Cyprieo),  membre  correspondant  du  Comité  des  Sociétés  dcâ 

Beaux-Arts,  à  Aubusson. 
RiGAUDiE  (R.-J.).  missionnaire  de  Tlm  maculée-Concept  ion,  à  N.-D.  deGa- 

raison  (Hautes-Pyrénées). 
**  Verneilh  (baron  de),  au  château  de  Puyraseau,  par  Piégut  (Dordogne). 
Verthahon  (comte  de),  chftteau  d*Hauterive,  par  Saint-Germain-d'Esteail 

(Gironde). 

Beaucbesne  (comte  de),  membre  de  la  Commission  historique  et  méiéoro- 

logique  de  la  Nayenne,  au  château  de  Torcé,  par  Ambrières  (Mayenne). 
Laumond  (Jules)^  avocat,  à  Bourganeuf  (Creuse). 
Solanbt  (Paul),  propriétaire,  à  Saint-Geniez-d'Ault  (Àveyron). 

âutorde  (F.)*  archiviste  du  département  de  la  Creuse,  à  Guéret, 
Cbastenet  de  Géry  (Paul),  receveur  de  TEnregistrement  et  des  Domaines, 

à  TonnaV'Charente. 
Saint-Saud  (Aymar  d'Arlot,  comte  de),  propriétaire,  membre  dé  plusieurs 

Sociétés  savantes  au   château  de  La  Valouze,  par  La   Roche-Chalais 

(Dordogne). 
Tandbau  de  Marsac  (Henri),  propriétaire,  à  Marsac,  par  Bénévent  (Creuse). 
Trouet  (Fabbé),  curé  à  Quiers,  par  Mormant  (Seine-et-Marne). 

Etablissements  auxquels  la  Société  enooie  ses  publications  : 

Ministère  de  Tlnstruction  publique,  à  Paris. 

Bibliothèque  de  TEcole  des  Chartes,  à  Paris. 

Bibliothèque  communale  de  Limoges. 

Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne* 

Grand-Séminaire  do  Limoges. 

Ecole  normale  d^Instituteurs,  à  Bellevue,  près  Limoges. 


LISTE  DES  SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 


Aisne  : 
Société  Historique  et  Archéologique  de  Châleau-Thierry. 
Société  Archéologique,  Historique  et  Scientifique  de  Soissons. 

Algérie  : 

Société  Historique  algérienne,  à  Alger. 

Société  Archéologique  de  la  province  de  Conslantinc. 

Académie  d'Hippone,  à  Bône. 

Amer  : 
Société  d'Emulation  de  rAllier,  à  Moulins. 

Aube  : 

Société  Académique  de  l'Aube,  à  Troyes. 
Aveyron  : 

Société  des  Lettres,  Sciences  et  Arts  de  TÀveyron,  à  Rodez. 

Bonobes-da^Bhône  : 

Académie  des  Sciences  de  Marseille. 

Société  de  Statistique  de  Marseille. 

Académie  des  Sciences,  Agriculture,  Arts  et  Belles-Lettres  d*Aîx. 

Charente  : 

Société  Archéologique  et  Historique  de  la  Charente,  à  Angonlème. 

Ctaarente-Inférieare  : 

Société  des  Archives  historiques  de  la  Saintonge  et  de  FAunis,  à  Saintes. 

Cher  : 

Société  des  Antiquaires  du  Centre,  à  Bourges. 

Corrèie  : 
Société  des  Lettres,  Sciences  et  Arts  de  la  Corrèze,  ^  Tulle. 
Société  Scientifique,  Historique  et  Archéologique  de  la  Corièze,  à  Brive. 

Côte-d'Or  : 

Académie  des  Sciences,  Arts  et  BeHes-Leltres,  à  Dijon. 

Crenie  : 

Société  des  Sciences  naturelles  et  archéologiques  de  la  Creuse,  )i  Guéret. 


898  SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQCK  ET  fllSîORlQUB  DO  LIXOQSiN* 

Dordogne  : 
Société  Biâlorique  el  4rchéoIogique  du  Périgord,  à  Périgoeox. 

DonbB  : 

Société  d^Emulalion  du  Doubs,  à  Besançon. 

Eon-et-IiOlr  : 
Société  Danoise,  à  CiiUeaudun. 

Plniatère  : 
Société  Académique  de  Brest. 

ftard  : 
Académie  du  Gard,  à  Nîmes. 

Garonne  (Hante-)  : 

Académie  des  Jeux  Floraux,  k  Toulouse. 

Société  Archéologique  du  Midi  de  la  France,  à  Toulouse. 

Gironde  : 

Société  Archéologique  de  Bordeaux. 

Héranlt  : 

Académie  des  Sciences  et  Lettres,  à  Montpellier. 
Revue  des  Langues  Romanes  de  Montpellier. 

nie-et-7ilaine  : 
Société  Archéologique,  à  Rennes. 

Indre  : 

Rédaction  de  la  Reoue  du  Centre,  à  Châteauroux. 

Ittdre-et-IiOire  : 
Société  Archéologique  de  Touraine,  à  Tours. 

Société  française  d*Archéologie  pour  la  conservation  et  la  description  des 
monuments,  à  Tours. 

Isère  : 
Académie  Delphinale,  à  Grenoble. 


Société  de  Borda,  à  Dax. 

Loir-et-Chtr  : 
Société  Archéologique,  ScicntiGque  et  Littéraire  du  Vendômois,  à  Vcnd6R»>. 

Loire  : 

Société  d'Agriculture,  Industrie,  Sciences,  Arts,  Belles-Lettres,  à  St-Etienoe. 

Loire  (Hante-). 
Société  Agricole  et  Scientifique  de  la  Haulc-doirc,  au  Puy. 

Loire -Inl6ileure  : 

Société  Archéologique,  à  Nantes. 

Loiret: 
Société  Archéologique  de  TOrtéanais,  à  Orléans. 


SOCIETES  COARESPONBANTRS.  809 

Lot: 

Société  des  Eludes  Liuérairçs,  Scienlifiques,  Artistiques  du  Loi,  à  Cahors. 

Lot-et-Garonne  : 

Société  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts,  à  Agen. 

Maine-et-Loire  : 

Société  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts  de  Maine-et-Loire,  ù  Angers. 

Jlame  : 

Société  Archéologique,  à  GhMons-sur-Maroe. 
Académie  des  Lettres,  Sciences  et  Arts,  à  Reims. 

Meartha-et-Moselle  : 

Académie  de  Stanislas,  à  Nancy. 

Morbihan  : 

Société  Polymathique  du  Morbihan,  à  Vannes. 

Nord  : 

Société  des  Sciences,  de  rAgriculture  et  des  Arls,  à  Lille. 

Oise  : 

Société  Académique  d'Archéologie,  Sciences  et  Arls,  à  Beauvais. 
Comité  Archéologique,  à  Senlis. 

Pas-de-Calais  : 

Académie  des  Sciences,  Lettres  et  Arts  d'Arras. 

Société  Académique,  à  Boulogne-sur-Mer. 

Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie,  h  Sainl-Omcr. 

Pny-de-Dôme  : 

Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres  et  xVris,  à  Clermont-Ferrand» 

Pyrénées  (Basses-)  : 

Société  des  Sciences,  Lettres  et  Arls,  à  Pau. 

Bhéne  : 

Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres  et  Arts,  à  Lyon. 

Sa6ne-et-Loire  : 
Académie  des  Sciences,  Agriculture,  Arts  et  Belles-Lettres,  à  Mâcon. 
Société  Eduenne,  à  Autun. 

Sartbe  : 

Société  Uislorique  et  Archéologique  du  Maine,  au  Mans. 

Savoie  : 
Société  Savoisienne  d'Histoire  et  d'Archéologie,  à  Chambéry. 
Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres  et  Arls  de  Savoie,  à  Chambéry. 

Savoie  (Baate-) 
Société  Florimontane,  à  Annecy. 

Seine  : 
Société  des  Antiquaires  de  France,  à  Paris. 
Société  Française  de  Numismatique  et  d'Archéologie,  à  Paris. 


900  SOCléTÉ   AHCBÂOLOGIQUB    ET    IIISTORIQUK   DU  LlHOVStX. 

Selne-At-M arne  : 

Soctélé  Historique  ei  Archéologique  du  Galinaisy  à  Fontainebleau. 

8«ine-et-0iM  : 
Société  Archéologique  de  Rambouillet. 

Sdlne-Inféridiire  : 

Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres  et  Arts,  à  Rouen. 

Sevras  (Dans-)  : 

Société  de  Statistique,  Sciences  et  Arts  des  Deux-Sèvres,  à  Niort. 

Somme  : 

Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  à  Amiens. 

Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres,  Arts,  Agriculture,  à  Amiens. 

Tarn-at-aaromia  : 

Société  Archéologique  de  Tarn-et-Garonne,  à  Montauban. 

Var  : 

Société  d'Etudes  Scientifiques  et  Archéologiques,  à  Draguignan. 
Académie  des  Arts  du  département  du  Var,  à  Toulon. 

Vlanna  : 
Société  des  Antiquaires  de  TOuest,  à  Poitiers. 

Vianne  (Haata-)  : 

Société  d'Agriculture,  Sciences  et  Arts,  à  Limoges. 
Société  Gay-Lussac,  à  Limoges. 
Société  botanique  et  Revue  scientifique,  à  Limoges. 
Société  des  Amis  des  Sciences  et  des  Arts,  à  Rochechouart. 

Yonna  : 

Société  des  Sciences  Historiques  et  Naturelles  de  TYonne,  à  Auxerre. 
Société  Archéologique,  à  Sens. 


AHamagna  : 
Société  historique  dWix-la-Chapellc  {Aafhner  Geschichiscerein). 

Belfllqaa  : 

Académie  Royale  des  Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux -Arts  de  Belgique, 

à  Bruxelles. 
Académie  royale  d'Archéologie  d'Anvers. 

Etats-Unis  d*Amériqaa  : 
Société  Smithsonienne,  à  Washington. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Une  visite  au  tombeau  d'Ach  met -Pacha  (Claude^Alexandro  de  Bon- 
neval),  par  M.  Joseph  Brunet 5 

Zizim  à  Rour^aneuf  et  à  Rome,  par  M.  le  chanoine  Ârbellot H 

Les  gravures  originales  de  Léonard  Limosin  à  la  Bibliothèque  na- 
tionale, par  M  Camille  Lkymauie 40 

Les  assemblées  des  habitants  d'Âubusson  et  la  Bailie  de  Masvoudier, 
par  M.  Cyprien  Pératbon 40 

Ayroeric  Guerrul,  archevêque  de  Lyon,  par  M.  le  chanoine  Arbrllot  59 

Essai  de  classification  des  anciennes  porcelaines  de  Limoges,  Saint- 
Yrieix,  Solignac,  etc.,  conservées  au  Musée  national  Adrien 
Dubouché  (suite),  par  H.  Camille  Leymarib 71 

Le  Chapelet  à  Limoges,  du  xv^  au  xviii*  siècle,  par  Mgr  Barbikr  db 
MONTAULT 90 

Anciens  statuts  du  diocèse  de  Limoges,  par  M.  Tabbé  Lf.<:lbr i93 

Documenls  pour  servir  à  Thisloire  de  l'iDduslrie  et  des  manufactu« 
res  en  Limousin,  publiés  par  M.  A.  Fray-Fournier 464 

Elude  historiqne  sur  Tancienne  vie  de  saint  Martial,  par  M.  le  cha- 
noine Arbellot S13 

Les  Frères  Prêcheurs  de  Limoges  (1220-4693).  documents  publiés 
par  M.  l'abbé  Douais  (table  spéciale) S6< 

Discours  à  la  louange  des  Limousins,  oublié  par  M.  J.-U.  Cbampeval        361 

Soutenance  d'une  ihèse  de  philosophie  au  collège  de  Limoges,  pu- 
bliée par  M.  Emile  du  Boys 374 

Notes  et  communications  :  Vierge  d^Azérables,  par  M.  G.  Bertho- 
hier.  —  Rôle  de  la  taille  de  Limoges  en  i635,  par  M.  Louis  Gui- 
BBRT.  —  Relation  abrogée  de  la  prise  de  possession  de  Mgr  de 
Canlsy,  évéque  de  Limoges,  1696,  communication  de  M.  Tabbé 
Grankt.  —  Institution  do  foire  et  marché  à  Mortemart,  communi- 
cation de  M.  G.  TocYÉRAS.  —  Difficultés  survenues  entre  Tinten- 
liant  de  Limoges,  M.  Pajot,  et  le  bureau  des  tinanccs,  au  sujet 
de  Tércclion  d*une  fontaine,  1759,  communication  de  M.  Tabbé 

ItRANKT 380 

Excursion  archéologique  à  La  Souterraine  et  dans  ses  environs,  par 

M.  Camille  Jouhann eaud  .  .  : 389 

Monographie  de  la  commune  de  Thouron,  par  M.  l'abbé  A.  Leclrh.        476 
Elnde  biographique  sur  Guillaume  Lamy.  patriarche  de  Jérusalem, 

par  M  l'abbé  Arbkllot * 515 

^Q  triptyque  en  émail  peint  en  grisraille,  par  Martin  Didier,  an  Mu- 
sée civique  de  Bologne,  par  BI.  Louf»  Bourdery 515 


flOi 


•         • 


003  SOCIETE  ARCHEOLOGIQUE  ET  aiSTOEIQUE  DO  LlHOUSIIf. 

Chronologie  de  l'histoire  de  Sain t-Yrieiz- la-Perche,  par  M.  A.  Le- 
roux  ••   56Î 

Les  Bénédictins  de  Sainl-Nauroriginairesdu  Limousin,  par  M.  l'abbé 

Arbbllot W4 

L'église  de  Blond,  par  Bl.  te  comte  oe  Beauchbsnb 67i 

Essai  de  classification  des  ancienne»  porcelaines^  de  Limoges,  Saint- 

Yrieix,  Solignac,  etc.,   conservées  au   Musée   national   Adrieii 

Dubouché  (suite),  par  M.  Camille  Leymarib 684 

Documents  pour  servir  à  Thistôirc  de  l'industrie  et  des  manufactures 

en  Limousin  (suite),  par  M.  A.  Fray-Fournler 736 

Cimetière  gallo-romain,  mérovingien  et  carolingien  de  la  Courtine 

à  Limoges,  par  H.  Paul  Ducouhtieox. T69 

Boite  en  verre  dans  une  sépulture  gallo-romaine  trouvée  à  Limo- 

ges,  par  M.  P.  Ducourtieox 793 

Saint  Pierre  Damien  à  Limoges,  par  M.  Tabbé  Arbcllot 799 

Documents  inédits  sur  Peyrat-le-Château,  par  M.  P.  Cousseyroox...  Mi 
Le  collège  de  Grégoire  XI  à  Bologne,  par  Mgr  X.  Barbiea  de  Mon- 

TAULT 820 

Notes  relatives  à  Féglise  des  Jésuites  de  Lionoges,  par  M.  Tabbé 
POULBRIÈRC 9l\ 

Délibérations  d'assemblées  paroissiales:  La  Souterraine,  1731,  com- 
munication deM.  J.  Bkllbt;— Saint- Auvent,  1740  et  l74l;Sainl- 
Cyr,  1748;  Saint-Laurent-sur-Gorre,  1774,  communications  de 
M.  G.  TOUYÉRAS i SU 

Privilège  d'Eugène  lli  pour  l'abbaye  de  Solignac  :  sa  date,  par 
M.  Tabbé  A.  Llcler 83) 

Errata 83i 

Nécrologie  :  M.  Astaix,  par  M.  Louis  Guibsrt 835 

Addition  au  Mémoire  :  Un  triptyque  en  émail  peint  en  grisaille,  par 

Martin  Didier,  au  Musée  civique  de  Bologne,  par  L.  Boorobry...  836 


PROCÈS-VERBAUX  DES  SÉANCES 

Séance  du  87  janvier  1891 837 

—  du  24  février  1891 84t 

—  du  31  mars  1891 846 

—  du  88  avril  1891 .  851 

—  du  8  juin  1891 856 

—  du  30  juin  1891 860 

—  du  28  juillet  1891    863 

—  du  85  août  1891 869 

—  du  27  octobre  t89i 873 

—  du  2  i  novembre  1891 878 

—  du  89  décembre  l»9l 883 

Liste  des  membres  de  la  Société  au  moment  de  la  publication  du 

Bulletin .    ... .  886 

Liste  des  Sociétés  correspondantes 897 


TABLE. 


903 


PLANCHES 


Pages. 

Tombeao  d*Achmet-Pacba  dans  le  cimetière  du  Teické  de  Péra  (vue 

d^ensemblel,  dessin  de  M.  L.  BouitDERT,d*après  une  photographie  t 
Tombeau  d*Achmct  Pacha  dans  le  cimelière  du  Tekké  de  Péra  (c6lé 

ouest),  dessin  de  H.  L.  Bouangav,  d'après  une  photographie.. . .  S 
Derviches  tourneurs  du  Tekké  de  Péra,  dessin  de  M.  A.  G^hardin, 

d'après  une  photographie  6 

Château  de  Bonrganeuf  en  4742,  côté  du  nord,  d*après  un  plan 

dressé  par  M.  Desmarty Il 

Marques  de  Léonard  Limosin,  dessin  de  M.  G.  Leyiiarie 41 

Vierge  en  étain  trouvée  près  d'Axérables  (Creuse),  dessin  de  M.  G. 

Berthomier 380 

La  Souterraine  (vue  d'ensemble),  dessin  de  M.  A.  Gerardin H89 

Eglise  de  La  Souterraine,  détails,    —                  —  396 

—                 —               clocher    —                  —  397 
La  Souterraine, porte  Notre-Dame  ou  de  la  prisoD,  dessin  de  M.  A. 

Gbrardin 404 

Plan  inédit  du  château  de  Bridiers,  dessin  de  M.  A.  Mazet 405 

Grosse  tour  de  Bridiers,  dessin  de  M.  A.  Gerardin 41 S 

Château  de  Bridiers  (ensemble  des  ruines),  dessin  de  M.  A.  Gbrardin  413 
Plao  inédit  du  chJkteau  de  Saint-Germain-Beaupré,  relevé  et  restitué 

par  M.  A.  Mazkt 430 

Armes  de  Gabriel  i  Foucauld  et  de  Françoise  de  Villelume,  sa 

femme,  dessin  de  M.  A.  Géraroin 4Î0 

Château  de  Saint-Germaio -Beaupré,  dessin  de  M.  A. GÉRARDirr....  49i 
Façade  occidentale  du  château  d^  Saint-Germain- Beaupré,  panneau 

de  la  salle  à  manger,  ivu^*  siècle,  dessin  de  M.  G.  Berthomier.  . .  438 
Défenses  nord  du  château  de  Saint-Germain-Beaupré,  panneau  de 

la  salle  à  manger,  xvu^  siècle,  dessin  de  M.  G.  Berthomier 1^8 

Lanterne  des  morts  de  La  Souterraine,  dessin  de  H.  A.  Gérardin...  437 
La  Souterraine,  pierre  tombale  du  moine  Raymond  de  Vigeois,  dite 

du  Mou8  Ganier^  dessin  de  M.  A.  Gérardin 437 

Fontaine  du  château  de  Thouron,  i598,  dessin  de  ^.  i.  de  Verneilb  476 

Château  de  Thouron,  dessin  de  M.  J.  de  Verneilh  477 

Triptyque  eo  émail  peint  en  grisaille  par  Martin  Didier,  reprodcc» 

tion  directe  d'une  photographie 549 


904  SOCIÉTÉ   ARCHÉOLOGIQUE   ET    lUSTORIQUE   OU   LIMOUSIN. 

Eglise  de  Blond,  façade,  reproduction  d'une  photographie 6î6 

Eglise  de  Ulond,  chœur,  —  —  fn 

Tombes  sur  le  seuil  de  Téglise  de  la  Courtine,  reproduction  directe 

d'une  photographie 113 

Bijou  gallo-romain  Irouvédans  une  des  tombes,  grandeur  naturelle       773 
Tombe  mérovingienne  du  cimetière  de  la  Courtine,  dessin  de  M.  Ju- 
les TlXlEÇ '781 

Plan  de  la  chapelle  de  la  Courtine,  s'appuyant  sur  l'enceinte  da 
château  de  Limoges  au  x*  siècle,  relevé  par  M.  P.  Daccord,  en- 
trepreneur        789 

Tombeau  gallo-romain  contenant  une  boite  en  verre,  déccovert 
avenue  de  la  Révolution  (maison  Demartial),  dessin  de  M.  Jales 

TlXIER .  7 797 

Vases  trouvés  autour  du  tombeau  gallo-romain,  dessin  de  M.  Jales 
TlXIER 797 


Untioge»,  irap.  V  H.  Ducourtieux,  7,  me  dei  Arènes, 


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.VS  DU  BULLETIN 


*     arréable   à  nos   confrères  en  leur 
p  4  possède  encore  quelques  collec- 
r'  ît  que  ces  collections  peuvent  être 
rès  fixes  par  le  Bureau  : 

;  ima  nçiAfK  6  i^i«a  4p^l^«^    t.  1  à 

et  3  du 

'f'-^'/^^^-Ai    ai^  55f  4  *.v*.      '■    -     .    .  '      -  v    •  et  4  du 
■'tji^^:;  \nn  ^-J  :v  --/p.:.  .      .  180 fV. 


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XXXV,  —  manquent  treize  livraisons  ;  celles  2  et  3  du 
t.  I, — les  livraisons  3  et  4  du  t,  II,—  les  livraisons  1,  2,  3 
et  4  du  t.  III,  —  la  livraison  2  du  t.  IV,  —  les  livraisons 
1  et  2  du  t.  XXIII,  prix 160fr. 

3"  Une  collection  incomplète  comprenant  les  livraisojis 
1  et  4  du  t.  I,  les  livraisons  1  et  2  du  t.  II,  les  livraisons  1 
et  4  du  t.  IV,  les  livraisons  3  et  4  du  t.  V,  les  livraisons  2 
et  4  du  t.  XII,  les  tomes  %\,  26,  27,  28,  29,  30,  31,  32, 
83,  34  et  35,  prix 75  fr. 


La  Société  possède  en  outre  quelques  exemplaires  des 
t.  24,  t%  27,  28,  29,  30,  33,  34,  35,  36,  37  et  38,  à  7  fr. 
le  volume  ou  à  4  fr.  la  livraison  semestrielle. 

Les  envois  seront  faits  contre  remboursement. 

Adresser  les  demandes  à  M"''  V  Dugourtieux,  impri- 
meur-libraire de  la  Société,  7,  rue  des  Arènes,  Limoges. 


Avis  important 

Avec  la  présente  livraison,  MM.  les  Membres  de  la  So- 
ciété recevront  le  titre  du  tome  XL  et  une  planche  omise  i< 
,  la  1"  livraison  de  ce  volume  et  qui  doit  être  jointe  àTarticle 
de  M.  Leymarie,  page  41. 

Le  cinquième  volume  des  Registres  consulaires  vient 
de  paraître.  Il  est  envoyé,  avec  la  présente  livraison,  aux 
Sociétés  et  aux pey^sonnes  qui  se  trouvent  déjà  en  posses- 
sion des  quatre  premiers.  En  cas  d'omission,  s'adresser 
au  Secrétaire  général  de  la  Société. 


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