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A\TV O*
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE
DE FRANCE
LILLE. — 1MP. LE BIGOT FRERES
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE
DE FRANCE
TROISIÈME SÉRIE — TOME VINGT-SEPTIÈME
1899
PARIS
AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE
7, rue des Grands-Augnstina. 7
1888
A3
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE
DE FRANCE
Séance du 9 Janvier 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM. Barthélémy, à Maisons-Laffitte, présenté par MM. Bleicher
et Fiiche.
le Dr Imbeaux, à Nancy, présenté par MM. Bleicher et
Nicklès.
Camillo Crema, Ingénieur au Corps royal des mines
d'Italie, présenté par MM. Dou ville et Bergeron.
Le Président annonce la présentation de trois nouveaux membres.
Il rappelle qu'à la séance du 6 lévrier M. de Launay fera une
conférence : Sur les variations des filons métallifères en profondeur.
On procède ensuite, par la. voie du scrutin, à l'élection d'un
Président pour Tannée 1899.
M. E. de Margerie, ayant obtenu 125 voix sur 147 votants, est
élu Président de la Société en remplacement de M. J. Bergeron.
Sont ensuite nommés successivement :
Vice-Présidents : MM. A. de Lapparent, Termier, Almera et Bigot.
Secrétaire pour l'Etranger : M. de Martonne.
Vice-Secrétaire : M. L. Gentil.
Trésorier : M. Léon Janet.
Archiviste : M. G. Ramond.
Membres du Conseil : MM. Marcel Bertrand, Boule, Bergeron, Hauo et Boistel.
2~^02
6
SÉANCE DU 9 JANVIER 1899
Par suite de ces élections, le Bureau et le Conseil sont composés,
pour 1899, de la façon suivante :
Président : M. E. de Margerie.
Vice-Présidents :
M. A. de Lapparent. | M. Termikr. | M. J. Almera. | M. Bigot.
Secrétaires : Vice-Secrétaires :
MM. J. Blayac, pour la France.
E. de M ar tonne, pour l'Etranger.
MM. P. Cambronne
L. Gentil.
Trésorier : M. Léon Janet. | Archiviste : M. G. Ramond.
é
Membres du Conseil :
MM. G. Dollfus.
Carbz.
Cayeux.
douvillé.
MM. Ch. Bar rois.
Boistel.
schlumbbrgbr.
Fayol.
MM. Marcel Bertrand.
Bergeron.
Boule.
Haug.
Dans sa séance du 16 janvier, le Conseil a fixé de la manière
suivante, la composition des Commissions pour 1899 :
1° Commission du Bulletin : MM. Dou ville, Schlumberger, Boule, Bergeron.
Haug.
2° Commission des Mémoires de Géologie : MM. A. Gaudry, A. de Lapparent,
Vélain.
3° Commission des Mémoires de Paléontologie : MM. A. Gaudry, Munier-
Chalmas, Dou ville, Zeiller, Bergeron.
4° Commission de Comptabilité : MM. Douvillb, Termiek, Carez.
5° Commission des Archives et de la Bibliothèque : MM. Thèvenin, Caiiez.
Haug.
Séance du 23 Janvier 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGER0N, PUIS DE M. E. DE MARGERIE
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
M. J. Bergeron, Président sortant, s'exprime en ces termes :
u Messieurs,
» Au moment de quitter la présidence, j'éprouve à votre égard
un sentiment de gratitude plus vif encore qu'au jour où vous m'avez
élu. C'est que pendant cette année j'ai été plus à même de voir en
quelle haute estime est tenue notre Société et quel honneur en
rejaillit sur votre président ; c'est encore, et surtout, parce que j'ai
mieux senti la sympathie dont vous voulez bien m'entourer. Mon
premier devoir était de vous remercier encore et c'est ce que je fais
du fond du cœur.
» Mais j'ai encore d'autres remerciements à adresser, en votre
nom comme au mien, d'abord aux membres de votre Conseil qui
n'ont cessé pendant les nombreuses séances qui ont été tenues cette
année, de montrer par leur exactitude le souci qu'ils ont des inté-
rêts de la Société, puis à la Commission du Bulletin qui, en appli-
quant nos règlements avec fermeté, a pu réaliser sur les frais de
publication de sérieuses économies. Celles-ci ont été d'ailleurs
singulièrement accrues par la générosité de plusieurs de nos
confrères qui ont bien voulu prendre à leur charge tout ou partie
des frais de la confection de leurs planches: je suis heureux de
leur en témoigner toute notre gratitude.
» Je dois surtout remercier nos secrétaires et en particulier uotre
secrétaire pour la France, qui ont réussi à nous faire économiser
sur les dépenses prévues des sommes très importantes.
» Le résultat de tant d 'efforts a dépassé nos espérances : nous
avons pu cette année compenser, et même au delà, le déficit de
l'année dernière. Notre situation est donc redevenue prospère et
c'est une grande joie pour moi que de pouvoir vous signaler tous
ceux quit par leur dévouement, ont contribué à la rendre telle.
» Je regrette d'avoir à ajouter que la cause principale de nos
économies provient d'une diminution dans le nombre des corn mu-
8 SÉANCE DU 23 JANVIER 1899
nications et, par suite, des mémoires publiés. Il y aurait lieu d'être
inquiet d'un pareil état de choses, puisque c'est par nos publications
que nous nous faisons le mieux apprécier, s'il ne correspondait à
un simple temps d'arrêt dans notre activité ; il résulte de ce que
plusieurs de nos confrères ayant pris part au Congrès de Saint-
Pétersbourg ainsi qu'aux excursions qui l'ont précédé et suivi, se
sont trouvés dans l'impossibilité de faire aucun travail personnel
pendant les vacances de 1897. J'étais si convaincu qu'il n'y avait
pas de ralentissement dans l'ardeur des membres de la Société, que
j'ai cru iuutile de provoquer de leur part des communications.
J'ai pensé, au contraire, qu'il fallait profiter de ce moment de repos,
non pour thésauriser (une Société scientifique serait coupable de
thésauriser), mais pour réparer les brèches faites dans notre capital
par suite de notre exubérance de vie dans ces dernières années.
» D'ailleurs je prévoyais le choix que vous feriez d'un président
qui saurait entraîner la Société. Sous son impulsion, nos publica-
tions reprendront un nouvel essor et accroîtront encore notre bon
renom. Aussi suis-je très heureux- d'inviter M. de Margerie à occuper
le fauteuil présidentiel ».
M. E. de Margerie, en prenant place au fauteuil, prononce
l'allocution suivante :
« Messieurs et chers Confrères,
» Eu prenant possession du fauteuil présidentiel, auquel vos
bienveillants suffrages m'ont appelé, ma première parole doit être
un mot de gratitude pour ce précieux encouragement et cette
marque si honorable de sympathie.
» D ordinaire, votre choix se porte sur des géologues dont le
bagage scientifique, en fait de travaux personnels, est considérable,
et dont le nom a été mis en évidence soit par des découvertes
importantes dans le domaine de la Paléontologie ou de la Strati-
graphie, soit par un ensemble de recherches poursuivies avec
méthode pendant de longues années.
» En dérogeant à cette habitude, vous avez voulu sans doute
rendre* un hommage indirect à l'œuvre de M. Suess, que plusieurs
d'entre vous m'ont aidé à présenter aux lecteurs de langue fran-
çaise ; permettez-moi aussi de croire que votre intention a été
d'affirmer une fois* de plus les liens qui unissent à la (léologie la
Géographie, déjà représentée au Bureau par nos deux secrétaires,
si actifs et si dévoués. Mais, chez votre Président, la bonne volonté
ne saurait suppléer à l'expérience, et j aurai souvent l'occasion de
SÉANCE DU 23 JANVIER 1899 9
recourir à vos lumières pour me faciliter l'accomplissement de la
tâche que vous m'avez confiée.
» Il m'est particulièrement agréable de me faire ici l'interprète
de la Société tout entière, en remerciant M. Bergeron pour le
dévouement qu'il n'a cessé, pendant sa présidence, de prodiguer
aux intérêts dont il avait la garde ; comme vous le savez tous, c'est
à sa persévérance et à son zèle que la Société devra bientôt d'entrer
en possession d'un local digne de son importance ; j'espère que notre
savant confrère voudra bien, â l'avenir, nous continuer ses bons
offices, dans la mesure où le permettront les charges de son Ensei-
gnement et des explorations qui l'appellent si souvent loin de Paris.
M. Termier, lui aussi, a droit à notre vive reconnaissance pour son
excellente et sage gestion de nos finances. Quant à notre archiviste
sortant, il nous permettra, j'en suis sûr, dans le cours de cette année,
de compter sur ses conseils et sur sa compétence : car l'améliora-
tion de l'état de la Bibliothèque constitue le problème le plus délicat
que soulève notre prochain transfert à l'hôtel des Sociétés savantes.
» Quand je suis entré à la Société, il y a vingt deux ans, sous les
auspices de* mon cher maître M. de Lapparent, nous étions à la
veille d'un événement dont la portée a été grande, dans l'histoire
de notre Science, la fondation des Congrès géologiques internatio-
naux ; vous vous souvenez que le premier de ces congrès se tint, en
effet, Tannée suivante, pendant l'Exposition Universelle de 1878.
Aujourd'hui, le cycle s'achève, et les géologues du monde entier,
dans des circonstances identiques, vont se réunir pour la seconde
fois à Paris. La Société géologique de France ne saurait rester indif-
férente à l'éclat de ces assises solennelles ; elle s'efforcera donc de
seconder, dans la mesure des moyens dont elle dispose, les vues du
Comité d'organisation du Congrès et de son éminent Secrétaire
général.
» En terminant, il me reste à souhaiter la bienvenue à ceux de
nos confrères que votre choix a désignés, pour la première fois,
pour faire partie du Bureau : d'abord, à M. l'abbé Aimera, dont les
efforts, en organisant la Réunion extraordinaire de la Société à
Barcelone, ont été couronnés d'un succès si mérité ; à M. Bigot, qui,
nous l'espérons, voudra bien nous tenir au courant des progrès de
la Géologie normande ; à M. Janet, dont vous avez pu apprécier
déjà les services comme trésorier; à M. Ramond, que son érudition
désignait naturellement à vos suffrages pour veiller à l'entretien de
notre Bibliothèque ; enfin à M. Gentil, dont la présence parmi nous
est un nouveau témoignage de l'union qui n'a cessé de régner entre
les géologues algériens et ceux de la mère patrie ».
10 SÉANCE DU 23 JANVIER 1899
Le Président annonce que MM. J. Aimera et Bigot remercient
la Société de l'honneur qu'elle leur a fait en les nommant Vice-
Présidents.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance, il
proclame membres de la Société :
MM. David Levât, Ingénieur civil des Mines, à Paris, présenté
par MM. de Lapparent et de Margerie.
Ph. Dautzenberg, à Paris, présenté par MM. G. Dollfus
et H. Fischer.
l'abbé Boone, à Poitiers, présenté par MM. Welsch et
Munier-Chalmas.
J. Jean, ancien membre de la Société, à Castelbosc (Aude).
Le Président annonce une présentation.
M. Albert Gaudry s'exprime en ces termes :
J'ai l'honneur de déposer sur le bureau la première circulaire
du Comité d'organisation du Congrès géologique international qui
aura lieu à Paris en 1900.
Cette circulaire contient la liste des membres du Comité d'orga-
nisation. Elle annonce que les séances du congrès se tiendront du
16 au 28 août dans un bâtiment de l'Exposition. Puis elle donne les
titres de 22 excursions avec les noms des géologues chargés de les
diriger.
Les intérêts du Congrès géologique international de 1900 sont
trop unis avec ceux de la Société géologique de France pour que le
Comité d'organisation ait la pensée de demander votre appui ; son
œuvre sera votre œuvre. Les savants étrangers peuvent être assurés
que tous les géologues français leur feront un cordial accueil.
PREMIÈRE CIRCULAIRE DU CONGRÈS GEOLOGIQUE INTERNATIONAL DE PARIS
(VIII* SESSION. - 1900).
Sur la proposition des géologues français, le septième Congrès
géologique international réuni à Saint-Pétersbourg a décidé, dans
la séance du 3 septembre 1897, que sa huitième session se tiendrait
à Paris en 1900.
Les géologues français ont constitué un Comité d'organisation.
Dans une première séance, ce Comité a nommé un bureau et décidé
de s'adjoindre les personnes qui pourraient être utiles à l'organi-
sation du Congrès.
SEANCE DU 23 JANVIER 1899 il
La composition actuelle du Comité d'organisation est la suivante :
Président :
M. Albert Gaudry, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum
d'Histoire naturelle.
Vice-Présidents :
MM. Michel-Lévy, Membre de l'Institut, Directeur du Service de
la carte géologique, et Marcel Bertrand, Membre de l'Institut,
Professeur à l'Ecole des Mines.
Secrétaire général :
M. Charles Harrois, ancien Président de la Société géologique.
Premier secrétaire:
M. Cayeux, Préparateur à l'Ecole des Mines et à l'Ecole des Ponts
et Chaussées.
Secrétaires :
MM. Léon Bertrand, Maître de conférences à l'Université de
Paris ; Thévenin, Préparateur au Muséum d'Histoire naturelle ;
Thomas, Chef des travaux graphiques au Service de la carte géolo-
gique.
Trésorier :
M. L. Carez, Directeur de V Annuaire géologique. >
Membres :
MM. Bréon, Collaborateur au Service de la carte géologique ;
Bergeron, Professeur à l'Ecole Centrale ;
Bonaparte (le prince Roland) ;
Boule (Marcellin), Assistant au Muséum d'Histoire naturelle ;
Carnot, Membre de l'Institut, Professeur à l'Ecole des Mines :
Damour, Membre de l'Institut ;
Depéret, Correspondant de l'Institut, Doyen de la Faculté des
Sciences de l'Université de Lyon ;
Dollfus, ancien Président de la Société géologique ;
Douvillé, Professeur à l'Ecole des Mines ;
Fabre, Inspecteur des forêts ;
Fayol, Directeur de la Société de Commentry Fourchambault ;
Filhol. Membre de l'Insfittit, Professeur au Muséum ;
Fallot, Professeur à l'Université de Bordeaux ;
12 SÉANCE DU 23 JANVIER 1899
MM. Fouqué, Membre de l'Institut. Professeur au Collège de France ;
Grossouvre (de), Ingénieur en chef des Mines, à Bourges ;
Glangeaud, Maître deconférencesàrUniversitédeClermont-Fd;
Gosselet, Correspondant de l'Institut, Doyen de la Faculté des
Sciences de l'Université de Lille ;
Haug, Maître de conférences à l'Université de Paris :
Hautefeuille, Membre de l'Institut, Professeur à l'Université
de Paris ;
Janet (Léon), Ingénieur au Corps des mines ;
Jannettaz, ancien Président de la Société géologique ;
Kilian, Professeur à l'Université de Grenoble ;
Lacroix, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle ;
Lapparent (de), Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut
catholique de Paris ;
Launay (de), Professeur à l'Ecole des Mines ;
Leenhardt, Professeur à la Faculté de Montauban ;
Lindeh, Inspecteur général des Mines, Vice-Président du Con-
seil supérieur des Mines ;
Lory, Sous-Directeur du Laboratoire de Géologie de l'Univer-
sité de Grenoble ;
♦ MARGERiE(de), Collaborateur au Service de la carte géologique ;
Meunier (Stanislas), Professeur au Muséum d'Histoire natu-
relle ;
Milne-Edwards, Membre de l'Institut, Directeur du Muséum;
Munier-Chalmas, Professeur à l'Université de Paris ;
Nivoit, Inspecteur général des Mines, Professeur à l'Ecole des
Ponts et Chaussées ;
QEblert, Collaborateur au Service de la carte géologique :
Paquier, Préparateur à la Faculté des Sciences de Grenoble ;
Parran, Ingénieur en chef des mines ;
Pellat, ancien Président de la Société géologique ;
Peron, Intendant militaire en retraite ;
Rigaux, Géologue à Boulogne-sur-Mer ;
Rislkr, Directeur de l'Institut agronomique ;
Rouville (de), Doyen honoraire de la Faculté des Sciences de
l'Université de Montpellier;
Sauvage (Dr E.\ Directeur des Musées de Boulogne ;
Schlumberger, ancien Président de la Société géologique ;
Termier. Professeur à l'Ecole des mines;
Vasseur, Professeur à l'UnivArsité de Marseille ;
Vélain, Professeur à l'Université de Paris ;
SÉANCE DU 23 JANVIER 1899 13
MM. Wallerant, Maître de conférences à l'Ecole normale supé-
rieure ;
Zeiller, Professeur à l'Ecole des Mines ;
Zùrcher, Ingénieur en chef'des Ponts et Chaussées à Digne ;
Le Président de la Société géologique du Nord ;
Le Président de la Société géologique de Normandie ;
Le Comité, réuni les 11 janvier, 23 février, 13 avril 1898, a adopté
les bases suivantes pour l'organisation du Congrès géologique
international de 1900.
SESSION
Les séances du Congrès s'ouvriront à Paris le 16 août et se termi-
neront le 28 août 1900. La durée de la session permettra aux con-
gressistes de visiter l'Exposition universelle, d'étudier les musées
géologiques, et de suivre les courses aux environs de Paris.
Les séances du Congrès se tiendront dans un pavillon spécial
dépendant de l'Exposition : il n'y sera pas organisé d'exposition
permanente. Les membres du Congrès qui voudraient exposer des
cartes géologiques, coupes, photographies, échantillons, sont priés
de s'adresser au commissaire de leur pays, qui réservera à leur
exposition particulière une place dans la classe correspondante.
EXCURSIONS
Le Comité d'organisation, assuré de pouvoir compter sur le
concours de tous les géologues français, sera en mesure de montrer
la géologie de la France entière aux membres du Congrès. Pour
éviter de trop grandes affluences, et faciliter les études de détail
des spécialistes, il a décidé d'organiser un grand nombre d'excur-
sions simultanées, qui auront Heu avant, pendant et après le
Congrès.
Les excursions seront de deux sortes : générales, ouvertes au
plus grand nombre de membres possible ; spéciales, réservées aux
géologues et auxquelles ne pourront prendre part plus de vingt
personnes.
Les plans des diverses excursions feront l'objet d'une circulaire
ultérieure qui sera envoyée en 1899, quand les inscriptions indivi-
duelles seront demandées. Dès à présent, le Comité peut soumettre
à titre documentaire, et sauf modifications, une liste des excur-
sions qui seront organisées et les noms des savants qui en ont
accepté la direction.
14 SÉANCE DU 23 JANVJER 1899
EXCURSIONS GÉNÉRALES
1. — Bassin tertiaire parisien.
Des courses de 1 à 2 jouré seront faites sous la conduite de MM.
Munier-Chalmas, Dollfus, L. Janet, dans les gisements fossilifères
principaux des environs de Paris.
M. Stanislas Meunier conduira une excursion dans le parc de
l'Ecole d'Agriculture de Grignon avec des conditions exception-
nellement favorables à la récolte des fossiles.
Ces excursions dans le bassin parisien auront lieu pendant la
durée du Congrès, dans les intervalles des jours de séances.
2. — Boulonnais et Normandie, sous la conduite de MM. Gosselet,
Munier-Chalmas, Bigot, Cayeux, Pellat, Rigaux.
Étude des falaises de la Manche et des gisements classiques fossi-
lifères des terrains crétacé et jurassique de Boulogne à Caen. — For-
mations paléozoîques du Boulonnais et de la Normandie (10 jours).
3. — Massif central, sous la conduite de MM. Michel-Lévy,
Marcellin Boule, Fabbe.
Étude comparée, au point de vue géologique et de la Géographie
physique, des trois grandes régious volcaniques du massif central.
Chronologie complète des éruptions depuis le Miocène jusqu'à la fin
du Quaternaire. M. Fabre continuera l'excursion par les Causses de
la Lozère, les gorges du Tarn et la montagne de l'Aigoual (10 jours).
EXCURSIONS SPÉCIALES
I. — À r de n nés, sous la conduite de M. Gosselet.
Etude stratigraphique du terrain cambrien; succession des étages
dévoniens, leurs faunes et leurs faciès. Phénomènes de métamor-
phisme (8 jours).
II. — Picardie, sous la conduite de MM. Gosselet, Cayeux, Ladrièbe.
Phosphates crétacés de Picardie. Limons quaternaires du nord
de la France (6 jours).
111. — Bretagne, sous la conduite de M. Charles Barrois.
Succession des formations paléozoîques fossilifères, leurs modi-
fications sous l'influence des granités. Massifs volcaniques pré-
SÉANCE DU 23 JANVIER 181)9 15
cambriens et cambriens du Trégorrois. Massifs volcaniques silu-
riens du Meuez-Hom. Kersanton de Brest (10 jours).
IV. — Mayenne, sous la conduite de M. D. P. OKhlert.
Coupe du bassin de Laval : succession des formations siluro-
cambriennes, étude des principales faunes dévoniennes; série car-
bonifère. Roches cristallines paléozoïques des Coëvrons : roches
éruptives, filons. Relations stratigraphiques des terrains secondaires
et tertiaires avec les formations paléozoïques sous jaceutes (8 jours).
V. — Types du Turonien de Touraine et du Génomanien du Mans,
sous la conduite de M. de Grossouvre.
Succession des étages turoniens et sénouiens de la Touraine :
vallée du Cher, Vendôme, Saint-Paterne. Cénomanien de la Sarthe
(6 jours).
VI. — Faluns de Touraine, sous la conduite de M. Dollfus.
Visite des gisements célèbres les plus fossilifères des Faluns de
Touraine : Pont-Levoy, Manthelan. Leur faune, leur faciès, leur
stratigraphie (4 jours).
VII. — Morvan, sous la conduite de MM. Vélain, Peron, Bréon.
Terrains secondaires de la vallée de l'Yonne et région de TAval-
Jonnais (Auxerre, Vezelay, Mailly-la-Ville). Série liasique et infra-
liasique de Semur. Traversée du Morvan, failles limitatives, struc-
ture zonaire, succession des formations éruptives. Bassin permien
d'Autun ; massif volcanique de la Chaume, près d'Igornay ( 10 jours).
VIII. — Bassins houillère de Gommentry et de Deçà ze vil le,
sous la conduite de M. Fayol.
Particularités diverses et mode de formation du terrain houiller.
Commentry (3 jours); Decazeville (4 jours).
IX. — Massif du Mont-Dore, chaîne des Puys et Limagne,
sous la conduite de M. Michel-Lévy.
Étude des volcans à cratères des environs de Clermont; sou-
bassement granitique avec enclaves de schistes et quartzites méta-
morphiques; phénomènes endomorphes subis parlegranited'Aydat.
Succession des éruptions du Mont Dore. Etude des environs d'Issoire
et de Périer; pépérites, basaltes et phonolites de la Limagne (10
jours).
16 SÉANCE DU 23 JANV1EH 1899
X. — Gharent68, sous la conduite de M. Glangeaud.
Terrain jurassique des Charentes et ses divers faciès, à Céphalo-
podes, à oolites et à récifs coralliens. Terrain crétacé des falaises
des Charentes et leurs faunes de Rudistes (8 jours).
XI. — Bassin de Bordeaux, sous la conduite de M. Fallot.
Succession des couches du Lutétien au Miocène; principaux
gisements fossilifères : Roque-de-Tau et Blaye, Sainte-Croix-du-
Mont et Bazadais, Faluns de Léognan, vallée de Saucats, Salles
(6 jours).
XII. — Bassins tertiaires du Rhône, terrains secondaires et ter-
tiaires des Basses-Alpes, sous la conduite de MM. Depéret et
Haug.
Bresse méridionale (Pliocène); Bas-Dauphiné (Miocène supé-
rieur); bassin de Bollène (Pliocène, Miocène, Éocène); bassin
pliocène de Théziers, bassin oligocène d'Apt (Gargas) ; bassin oligo-
cène et miocène de Manosque et de Forcalquier (8 jours).
Série jurassique fossilifère des environs de Digne, mollasse rouge
et Miocène mariu de Tanaron, dislocations à la limite de la zone
du Gapençais et du Diois (4 jours).
XIII. — Alpes du Dauphiné et mont Blanc, sous la conduite
de MM. Marcel Bertrand et Kilian.
Grenoble; chaînes subalpines (Vercors, l'Échailion, Aizy). Chaîne
de Belledonne; la Grave. Zone intraalpine (grand Galibier). Albert-
ville; plis couchés du mont Joly et extrémité de la chaîne du mont
Blanc (10 jours).
XIV. — Massif du Pelvouz (Hautes-Alpes), sous la conduite
de M. Termier.
Du Bourg d'Oisans à Vénosc, Saint-Christophe, La Bérarde,
Ailefroide, Vallouise, Monôtier, le Lautaret, la Grave et le Freney.
Schistes métamorphiques et gneiss; massifs granitiques avec
syénites, diabases et lamprophyres ; Houiller avec éruptions d'ortho-
phyres; Trias et Lias avec éruptions de mélaphyres (spilites);
Jurassique supérieur; Nummulitique et Flysch ; nombreux pro-
blèmes tectoniques (10 à 12 jours).
SÉANCE DU 23 JANVIER 1899 17
XV. — Mont Ventoux et montagne de Lure, sous la conduite
de MM. Kilian, Leenhardt, Lory et Paquier.
Oraoge; mont Ventoux (Urgonien). Montagne de Lure (horizons
du Barrémien). Sisteron; terrasses fluvio-glaciaires. Devoluy et
Diois; transgressions et discordance du Crétacé supérieur, de l'Éocène
et de l'Oligocène. Cobonne (Mr Sayn) (10 jours).
XVI. — Basse-Provence, sous la conduite de MM. Marcel Bertrand,
Vasseur et Zûrcher.
Toulon et le Beausset; série fossilifère, nappe de recouvrement.
Marseille; gisements de la Bedoule et des Martigues; bassin de
Fuveau (Crétacé lacustre). Nappe générale de recouvrement (10 jours).
XVII. — Massif de la Montagne-Noire, sous la conduite
de M. Bergeron.
Saint-Pons, Saint-Chinian, Cabrières; Paléozolque fossilifère et
métamorphisé ; Jurassique inférieur fossilifère; Tertiaire fossi-
lifère; plis en éventail, écailles (8 jours).
XVIII. — Pyrénées (roches cristallines), sous la conduite
de M. Lacroix.
La Lherzolite de l'étang de Lherz. Ophites de la Haute-Ariège,
Granité et phénomènes de contact de la haute vallée de l'Oriège :
Quérigut (10 jours).
XIX. — Pyrénées (terrains sédimentaires), sous la conduite
de M. Carez.
Succession et tectonique des formations éocènes, crétacées et
jurassiques des Corbières, de Foix et des Petites-Pyrénées de la
Haute-Gqroune ; nombreux gîtes fossilifères. Série nummulitique
et crétacée de Lourdes, Glaciaire, roches éruptives crétacées. Cirque
de Gavarnie, Dévonien fossilifère et Houiller, Crétacé supérieur et
Nummulitique. L'excursion à Gavarnie pourrait être remplacée par
une course dans le Trias, le Crétacé supérieur et le Nummulitique
de Biarritz (10 jours).
Un livret-guide sommaire, écrit par les directeurs des diverses
excursions, sera mis en vente au commencement de 1900.
Au nom du Comité général d'organisation :
Albert GAUDRY, Membre de l'Institut, président.
Charles BARR01S, Secrétaire général.
10 Avril 1889. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 2
18 SÉANCE DU 23 JANVIER 1899
M. È. de Margerie présente, au nom de MM. L. Duparc et
L. Mrazec, un volume intitulé : Recherches géologiques et pétro-
graphiques sur le massif du Mont-Blanc. Dans cet ouvrage, qui forme
une importante contribution à l'étude des Alpes Occidentales, les
auteurs se sont surtout attachés à faire connaître la structure
microscopique et la constitution minéralogique des roches érup-
tives et des schistes cristallins, en insistant sur les phénomènes
d'injection et de métamorphisme exercés par la protogine. Au
texte sont jointes vingt-quatre planches : photographies d'affleure-
ments caractéristiques, reproductions de plaques minces et coupes
générales du massif. En raison des frais, la carte au 1 50.000* qui
devait accompagner cette monographie n'a pu être livrée à la
gravure, mais une copie manuscrite en a éfé déposée au Service de
la Carte géologique de la France.
M. E. de Martonne signale parmi les dons récemment parvenus
à la Société un important Mémoire de M. A. Rothpletz sur la
Tectonique des Alpes de Glaris : Das geotektonische Problem der
Glarner Alpen, 251 p. avec un atlas f°, comprenant 10 pi. et 1 carte
géologique au 1/100.0006 ; un volume des Monographs of the U. S.
Geological Survey, contenant une monographie des Méduses
fossiles, par Ch. Doolittle Walcot, 4°, 101 p., 47 pi. ; un Mémoire
de M. William Ramsay, intitulé : Ueber die geologische Entwic-
kelung der Halbinsel Kola in der Quartârzeit (extrait des Fennia),
151 p. av. 5 pi. et 1 carte ; une monographie géologique de l'Ile de
Purbeck, par M. Aubrey Strahan, The Geology of the hle of
Purbeck and Weymouth] (Memoirs of the geol. Survey of England
and Wales), 8°, 278 p. avec 11 pi. ; enfin plusieurs feuilles de la
Carte géologique d'Alsace-Lorraine.
M. J. Blayac présente au nom de M. G.-B.-M. Flamand les
ouvrages suivants :
1° Aperçu général sur la géologie et ks productions minérales du
bassin de l'Oued Saonra et des régions limitrophes, 1 vol. gr. 8°, 166 p.,
1 carte hors texte et 19 dessins, édition de luxe (Extrait des Docu-
ments pour servir à l'étude du Nord-Ouest africain). L'auteur déve-
loppe avec beaucoup d'iutérèt sa note sur la Géologie du Sahara
nord-occidental (B. S. G. F., t. XXIV, p. 891) ;
2° Notions élémentaires de Lithologie et de Géologie appliquées aux
grandes zones culturales de l'Algérie et de la Tunisie, in-8°, 40 p. ;
3° De l'Oranie au Gourara, notes de voyage, vol. 8°, 236 p., orné
de 17 phototypies et dessins originaux. Cet ouvrage est accompagné
d'une carte de l'itinéraire suivi par la mission dirigée par M. G.-B.-M.
Flamand dans le Sahara occidental.
SÉANCK DU 23 JANVIER 1899 19
Dans les premiers chapitrés de cet intéressant travail l'auteur
expose dans son ensemble la morphologie de la partie du Sahara
occidental qu'il a parcourue entre El Abiod-Sidi-Cheick et Gara-
Kergoub, au sud du Fort Mac-Mahon (plateaux du Tadmait) ; il
donne de précieux détails géographiques sur les zones d'épan-
dages des grands oueds, sur les puits de l'Erg, sur le Meguiden et
les plateaux de Tadmait, etc. Les géographes trouveront aussi dans
cet ouvrage de nombreux documents ayant trait au climat, à la
position de quelques points, tels que Tabelkoza, etc., et quantités
d'observations météorologiques.
Le Secrétaire signale parmi les dons reçus :
Topographie stratigraphique et prodrome de Géofogie utilitaire, l vol.
4°, 60 p., 1 carte, par M. A.-N. Parandier ; Annales de Géogra-
phie (N° 37, 15 janvier 1899) renfermant entre autres articles : 1° Un
exemple de plaine côtière : la plaine du Maine (Etats-Unis), par M. W.-M.
Davis ; 2° Le Moroan et ses attaches avec le Massif central (fin), par
M. A. Michel-Lévy ; 3° La Chine économique d'après les travaux
de la mission lyonnaise, 1895-4897, par M. L. Raveneau.
11 signale parmi les notes parues aux Comptes-rendus de l'Aca-
démie des Sciences (26 décembre, 2 et 16 janvier) : Sur un ensemble
de plis extérieurs à Belledonne et refoulés vers cette chaîne, par M. P.
Lory ; Sur la découverte de Graptolithes dans les poudingues du grès
vosgien des environs de Raon- l'Etape ( Vosges), par M. Bleicher ; Les
plissements crétacés du bassin de V Aquitaine, par M. Ph. Glan-
gëaud ; Une coupe transversale des Alpes briançonnaises de la Gyronde
à la frontière italienne, par MM. Kilian et Lugeon.
MM. Bleicher et Mieg adressent à la Société un tirage à part
pu Compte-rendu de la Réunion extraordinaire de la Société à Belfort.
M. G. Dollfus s'exprime en ces termes :
MM. Aimera et Bofill, nos confrères de Barcelone, m'ont prié
d'offrir de leur part à la Société géologique un gros volume qu'ils
viennent de publier (1) sur les Mollusques fossiles du terrain plio-
cène de la Catalogne.
C'est un travail considérable puisqu'il a conduit à la distinction
de plus de 650 espèces, sans compter un noihbre important de
variétés. Toutes les espèces citées sont accompagnées d'un renvoi
à quelque figure donnée dans quelque grand ouvrage classique de
Paléontologie ou de Conchyliologie ; toutes les espèces ou variétés
(1) Moluscos fosiles recogidos en los terrenos pliocenos de Cataluna. Madrid,
1898, 224 p., 14 pi. (Extr. del Boletin de la Cotnision del èlapa geologico).
20 SÉANCE DU 23 JANVIER 1899
nouvelles remarquables sont figurées dans quatorze planches. Par
une méthode excellente, les auteurs ont fait surtout des variétés
nouvelles de préférence à des espèces, chaque fois qu'ils se sont
trouvés en face d'un type ancien bien connu, légèrement modifié
par quelque condition locale, groupant ainsi avec une valeur plus
grande des formes qui eussent été comme perdues avec un nom
complètement nouveau dans une nomenclature déjà immense.
Ceux qui ont visité les environs de Barcelone apprécieront les
efforts des auteurs, car les gisements de cette région, même ceux
réputés les plus riches, ne présentent point l'abondance de certains
gisements de France ou d'Italie ; il a fallu des recherches extrême-
ment longues, minutieuses, pénibles, vingt fois répétées, pour que
les auteurs aient pu former des collections aussi variées, et nous
devons leur tenir compte de ces difficultés.
Le Messinien se borne à la faune à Congéries, très intéressante,
mais très réduite comme nombre d'espèces à Papiol et à Castel-
bisbal ; le Plaisancien a fourni le plus d'espèces ; il donne une pro-
portion de 50 •/© d'espèces vivantes communes avec la Méditerranée.
L'Astien n'a pas offert jusqu'ici de gisement important, c'est une
faune très appauvrie à côté de celle du Plaisancien. Enfin le Sicilien
est représenté par des dépôts terrestres près de la station de Mar-
torell et à Ubach de Rubi, dont la faune est presque identique à celle
de la Catalogne actuelle.
21
NOTES NOUVELLES
SUR LE CALCAIRE DE MONTABUZARD, PRÈS D'ORLÉANS
par MM. G. DOLLFUS et P. «AUGHERY.
Nous avons pensé, après les discussions récentes dont le calcaire
de Montabuzard (commune d'Ingré, à 6 kil. à l'ouest d'Orléans)
avait été l'objet, qu'il était utile de retourner une fois de plus sur
le terrain pour examiner la valeur des objections théoriques qui
nous avaient été faites sur cette partie de l'Orléanais. Nous avons
été servis à souhait, car le désir d'un forage à cet endroit, qu'avait
témoigné M. Munier-Chalmas, pour résoudre définitivement la
question, s'est trouvé complètement réalisé. Nous avons pu voir
un puits, profond de 30 mètres, dans le calcaire, creusé à l'endroit
même en litige et qui n'a rencontré aucune trace des sables dits de
l'Orléanais.
Les tranchées du chemin de fer d'Orléans à Patay sont encore
visibles et elles montrent que les sables de la Sologne sont culmi-
nants, reposant sur le calcaire et qu'ils ne s'intercalent en aucune
manière dans la masse calcaire qui forme les coteaux d'Ingré.
Villeneuve d'Ingré. Côté d'Orléans.
Stmtum..{Piàta) Tfeoob*. Paiêage àjfSnéur. Tranchée. Pmêaage k nieeuu/SaUure./
1*5 i5z u6 127 u3
0.
i'ii'i'i1 i' 'i 'i ' i' '» tC
I \ i'i - i* ' i ' î1 i1 ' i-'
CalomPê de McaUUmxareL
de VOrUaxiais
î\dêiù^"de"'iêi^€ ~~Jù&2e"ù*&'
Fig. 1.
Voici d'abord la coupe de la voie ferrée (fig. 1). A la station de Ville-
neuve d'Ingré, à l'altitude de 125 mètres, on est dans les sables ;
ces sables assez grossiers et un peu argileux ont l'aspect ordinaire
des sables de la Sologne. Un puits d'alimentation à la gare, ayant
22 G. DOLLFl'S ET P. GAUCHER Y 23 JaDV.
une trentaine de mètres de profondeur, a rencontré sous les sables,
dont la traversée a été muraillée, des calcaires solides d'une bonne
tenue et enfin a atteint la nappe d'eau générale dans la région, vers
la cote 95 ou 100.
Dans la tranchée à Test, dans la direction d'Orléans, la voie
descend régulièrement et montre les sables sur une épaisseur
de 4 à 6 mètres ; en! continuant dans la même direction, on arrive
à un faible vallon dans lequel un passage inférieur à la voie montre
à l'altitude de 116 mètres une section de calcaire blanchâtre, fragile,
noduleux, semblable à celui du hameau voisin de Montabuzard ; le
sable est visible directement au-dessus.
Dans une autre petite tranchée, toujours dans la direction d'Or-
léans, on retrouve les sables argileux gris et jaunâtres reposant par
un long contact sur un calcaire marneux, blanc ou jaunâtre, altéré
au sommet ; enfin, à 200 mètres plus loin, on atteint le passage à
niveau du hameau de la Levrette, à l'altitude de 113 mètres; on y
voit les marnes disparaître dans la profondeur et les sables occuper
la surface du terrain ; on observe encore deux sablières, depuis
longtemps abandonnées, à un niveau plus bas encore; ce sont
toujours des sables grossiers ou demi-fins, gris, devenant jaunes
et rougeâtres par altération et qu'on ne peut attribuer qu'aux sables
de la Sologne. Les sables montent ainsi visiblement le long du flanc
du coteau, depuis la cote 111 jusqu'à l'altitude de 134 mètres, en
s'appuyant sur le calcaire marneux d'Ingré.
Sur la grande route se trouve le ,'gite môme du calcaire de Mon-
tabuzard qui a fourni les ossements étudiés autrefois par Cuvier et
dont M. Douvillé a précisé l'emplacement; c'est aujourd'hui une
excavation peu profonde, reprise par la culture, confinant à un
groupe d'habitations à l'angle de la route vicinale qui va de la
grande route d'Orléans au village d'Ingré.
Nous préciserons cet emplacement par ses coordonnées géogra-
phiques prises par le clocher d'Ingré : 880m longitude Est, 800m lati-
tude Nord. Le puits que nous avons pu observer est situé chez M. Bris-
sard, à l'autre angle du chemin d'Ingré, à 150 mètres de l'ancienne
carrière et au même niveau, à l'altitude de 1^0 mètres environ. Le
calcaire du haut du puits, comme nous avons pu nous en assurer
par l'examen des débris qui en avaient été sortis et qui étaient
encore disposés en amas, est semblable à celui de la carrière; c'est
un calcaire noduleux, blanc-jaunâtre, fragile; il a été traversé sur
une épaisseur de 14 mètres, puis on a trouvé une marne verte,
argileuse, avec nodules blanchâtres, farineux, sur une épaisseur
1899 NOTES NOUVELLES SUR LE CALCAIRE DE MONTABUZARD 23
d'un mètre et offrant tous les caractères de la marne classique de
l'Orléanais. Au-dessous on est entré dans un calcaire très dur,
gris-jaunâtre, celluleux, d'un caractère très distinct, semblable à
celui exploité à Montpatour, chargé souvent de lits de silex et
appartenant au calcaire de Beauce, épais de 15 mètres. Le pro-
priétaire, son fils qui a aidé aux travaux, le puisatier Rousseau,
habitant d'Ingré, nous ont répété et confirmé ces détails et nous
ont affirmé l'absence complète de sables dans ce puits. Cependant
les sables sont visibles à une altitude très supérieure à celle du fond
du puits, les sablières de la Levrette sont à une altitude de 111
mètres, celle de Montabuzard est à 116 mètres, celle de Bout de
Coudes à 110 mètres. Le sable renferme dans cette dernière carrière
des galets d'argile verte, provenant des marnes de l'Orléanais
situées au-dessus vers l'altitude 115 mètres, témoignant d'un ravi-
nement intense.
Le niveau d'eau s'établit à 28 ou 29 mètres de profondeur, en
plein calcaire de Beauce, à une altitude absolue de 98 mètres qui
est celle de l'étiage de la Loire, au pont d'Orléans.
Tous les puits des environs ont donné des résultats identiques.
Au Bout de Coudes, un puits de 8 mètres a rencontré : a) calcaire
tendre, 3 mètres ; b) marnes vertes argileuses, lm25; c) calcaire très
dur, 3m75.
Nous en avons vu un autre à Ingté, près de l'Eglise, un autre à
Champgelin, puits de 40 mètres, à l'altitude de 132 mètres, resté
entièrement dans la couche calcaire.
Nous en avons vu un autre à Villeneuve d'Ingré ; nous avons
questionné les deux maçons et entrepreneurs du pays et ils nous
ont confirmé partout la même succession. L'eau se trouve vers 30
mètres de profondeur dans le calcaire ; il n'y a aucune intercalation
sableuse dans la succession des couches. Dans le fond d'Ingré, un
puits ouvert dans les sables a rencontré seulement des alternances
de sable et d'argile sans trouver aucun calcaire, et le niveau d'eau
s'est établi à une profondeur semblable sans changement de nature
du terrain. Deux petites carrières ouvertes, il y a peu d'années,
vers l'altitude de 132 mètres et situées un peu au-dessous de l'an-
cien télégraphe, sur le penchant nord-ouest du coteau, montrent
un calcaire noduleux, fragile, fournissant des matériaux d'ordre
tout à fait secondaire et faisant suite au calcaire de Montabuzard
qui est bien celui de l'Orléanais, car différents fossiles que nous y
avons trouvés en précisent la position stratigraphique : Hélix Tris-
tani Brongt., Hélix Moroguesi Brongt.
24 G. DOLLFUS ET P. GAUCHER Y 23 JailV.
Ajoutons que des carrières assez importantes de calcaire gris,
celluleux, dur, de calcaire de Beauce, ouvertes à Montpatour, en
contre-bas de la cote 107, nous ont fourni des coquilles bien diffé-
rentes : Planorbis solidus Thomas, Limnœa Noueli Desh .
L'argument tiré de la présence de sables tout autour du coteau
d'Ingré, suivant une courbe de niveau, n'est pas valable. Les sables
occupent les fonds, mais pas d'une manière générale ; on en trouve
aussi des lambeaux blottis à toute hauteur dans des poches du
calcaire ; parfois ils occupent les points hauts, mais cette situation
culminante n'est pas non plus générale. Us s'élèvent, ravinant leur
soubassement et en même temps que lui, vers Taxe anticlinal de la
forêt d'Orléans au nord-est (axe du Merlerault) reposant aussi bien
sur le calcaire de Beauce que sur celui de l'Orléanais. Ces coupes
sont conformes à celles que l'un de nous a déjà données à la Société
géologique comme visibles à la station de Suèvres; elles confirment
l'absence de sables de l'Orléanais à l'ouest d'Orléans, sur la rive
droite de la Loire. Elles permettent d'affirmer que les sables de la
Sologne sont au-dessus de la masse calcaire de la région. Enfin
elles mettent en évidence que le calcaire de Montabuzard succède
normalement aux marnes noduleuses de l'Orléanais. Ces marnes
argileuses à nodules farineux ne peuvent être considérées seule-
ment comme un produit d'altération du calcaire de Beauce, mais
elles constituent un horizon propre, normal, très étendu.
Diverses autres courses que nous avons faites en commun sur la
feuille de Blois, à Cour-Cheverny, Chitenay, Chevenelles, nous ont
permis de constater l'existence d'un sable granitique, épais, sous
une formation calcaire, exploitée pour matériaux de construction.
Ces sables granitiques, qui ont déjà été signalés en cet endroit par
M. Dou ville, sont grisâtres, grossiers, à stratification entrecroisée
avec débris d'ossements fréquents ; ils sont liés aux marnes vertes
de l'Orléanais par la présence de lentilles argileuses, dispersées
à diverses hauteurs dans la masse. Bien que le nom de sables de
l'Orléanais doive leur être appliqué en raison de leur faune et de
leur position stratigraphique, ils ne diffèrent ici en rien minéralo-
giquement des sables de la Sologne; l'élément calcaire y fait défaut
comme nous avons pu le constater par de nombreux essais faits à
l'acide, exécutés sur place, dans les carrières.
La réunion de ces sables aux marnes vertes est indiquée encore
par leur faune qui es* la même dans toute la région de Cour-Che-
verny à Suèvres.
Cet ensemble de marnes vertes et de sables de l'Orléanais est
4899 NOTES NOUVELLES SUR LE CALCAIRE DE MONTABUZARD 25
plus étendu sur la rive gauche de la Loire qu'on ne le supposait
antérieurement et pénètre sous une grande partie au moins de la
Sologne. Mais leur transformation minéralogique a contribué à les
faire méconnaître. Les marnes d'un vert vif à nodules blancs devien-
nent d'un vert grisâtre, les nodules sont moins abondants et
peuvent même faire défaut ; l'élément calcaire finit par n'être plus
guère appréciable à l'œil et la confusion avec les argiles de Sologne
est facile.
Les sables d'un grain souvent très gros, sans calcaire, grisâtres,
sans fossiles, prennent l'aspect des sables de Sologne et des deux
côtés les éléments ordinaires de distinction font défaut, ce qui expli-
que pourquoi ces niveaux ont été autrefois méconnus et confondus.
Les points d'affleurement des marnes de l'Orléanais, en Sologne,
étant peu importants, ces marnes ne sont guère utilisées en agri-
culture et nous ne les connaissons bien que dans divers forages
dont voici la liste.
Bassin du Cosson
Les marnes de l'Orléanais sont en affleurement en remontant le
cours de la rivière jusqu'à la Frogerie, château au confluent de la
Canne et du Cosson ; plus à l'est, on les rencontre aux profondeurs
suivantes :
n # . Altitude Cote
Prorondeur deg puit8 absolue
La Blondellerie (Commune de Crouy) . . . 6.50 103 96-
La Frogerie (Commifne de Ligny-le-Ribault). 15.00 102 86
Les Boitards (0> de La Ferté-S'Aubin) . . 35.00 130 95
Bassin du Beuvron
Chenée (Commune de Vouzon) 63.00 145 82
Aunois (Commune de Souvigny) 33.00 145 113
Bassin de la Sauldre
Mazeres (Commune de Nouan-le-Fuzellier) . 54.00 131 77
OrUe (Commune de Sajbris) . ....... 4.50 125 120
Remarday (Commune de Sa 1 bris) 2.50 116 113.50
Bassin de la Rère
G<* Montboulau (Commune de Theillay) . . 2.00 122 120
Bassin du Barangeon
Bois de la Vigne (Commune de Neuvy) . . 4.00 153 149
Château de Vouzeron(CommunedeVouzeron) 3.00 148 145
26 G. DOLLFUS ET P. GAUCHERY 23 JaUV.
Il résulte de ces renseignements que le niveau marneux, qu'on
peut placer en Sologne sur le prolongement de celui de l'Orléanais,
n'est pas horizontal, mais présente des ondulations qui s'orientent
transversalement comme les plis tertiaires généraux que nous
avons-vus s'enfoncer sous la Sologne. De pi us, nous devons appeler
l'attention sur la découverte des marnes de l'Orléanais dans la
vallée de Barangeon, suivant la dépression profondément creusée
à l'angle sud-est de la Sologne. Cette marne parait être la même que
celle rencontrée au Grand-Montboulau, sur la rive droite de la Rère.
Le Calcaire de Beauce a toujours été rencontré sous toute la
Sologne ; cependant on ne l'a pas signalé sur la limite Est, entre
Autry-le-Chatel et Vouzeron ; il existe un affleurement dans la
vallée de la Rère qu'il remonte sur la rive gauche jusqu'à son
entrée dans le département du Cher. C'est cette formation qui a été
désignée par erreur sous le signe C6, Craie marneuse, sur la feuille
de Bourges.
Les contacts directs des sables et argiles de la Sologne sur l'argile
à silex de la craie n'existent que sur la limite Est (où l'on ne trouve
pas de calcaire de Beauce) et sous les Ilots situés au Sud. Le contact
des sables et argiles de la Sologne avec lé calcaire lacustre de Brie
n'existe qu'à l'est de Vouzeron, et en ce point il est bien difficile
de distinguer le calcaire de Beauce de celui du Berry.
La classification générale peut se traduire comme suit :
m? Sables et argiles de la Sologne.
4. Calcaire noduleux de Montabuzard, Chitenay, à
Hélix Tristanx.
3. Marne verte à nodules farineux d'Orléans, de
m» Marnes, sables et I Suèvres, de Cléry, de la Sologne occidentale,
argiles de l'Or- ) centrale et méridionale.
( 2. Sables cal car eux ou granitiques en lits obliques
leanais. ayec 08semen^Sj (je Chitenay, Chevenelles, de la
Sologne centrale et méridionale.
1. Argiles pures ou sableuses de la Sologne occiden-
tale, centrale et méridionale. Vertes, grises ou
\ panachées.
( Calcaire dur de Beauce, grisâtre, de la Chapelle-S1-
m, Calcaire de Beauce. j Mesmin, à Limnœa Noueli, etc.
BIBLIOGRAPHIE
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G. F., 3« série, t. IX, p. 392.
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gency au 1/80.0006. Notice explicative.
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Feuille des Jeunes Naturalistes, tome XXIII, lw Mars 1893,
carte, figure ; B. S. G. F., 3» série, t. XXI, 24 Avril 1893.
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géol. de France, t. IX, N° 58.
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1898. G. Dollfus. Sur la Géologie de l'Orléanais, réponse à M. de
Grossouvre et observations de MM. MunierChalmas, A.
Gaudry, etc. B. S, G. F., t. XXVI, p. 9, 24 Janvier 1898.
Le Secrétaire donne lecture de la note suivante :
En réponse aux observations de M. M. Bertrand, M. E. Fournier
lait remarquer que la coupe de la Treille-au-Four n'a aucun rapport
avec la question de la nappe de recouvrement qui formerait la bor-
dure du bassin de Fuveau. En effet, le Trias qui, dans la coupe de la
Treille-au-Four, est renversé sur l'Aptien, fait partie du massif de
Saint-Julien, qui, de l'aveu de M. Marcel Bertrand lui-même (1), est
le prolongement vers l'ouest de l'ondulation transversale de Roque-
vayre. Comment ce Trias pourrait-il dès lors faire partie à la fois
d'une nappe appartenant à un pli et du pli qui lui-même est trans-
versal? M. E. Fournier fait aussi remarquer que la coupe de la Treille-
au-Four a été publiée pour la première fois par lui (2) et renvoie le
lecteur à l'interprétation qu'il en a donnée et qui a été confirmée par
les récentes études de M. Bresson (3) sur le massif de Saint-Julien.
(1) Marcel Bertrand. Le Massif «l'A llauch. Bull, des Services de ta Carte Gèol.,
t. III, N° 24, p. 32, lignes 31 et suivantes.
{i) E. Fournier. B.S. G. F., XXIII, (3), p. 510, coupe V.
(3) A. Bresson. Observations sur la structure du massif de S'-Jullen, près
Marseille, fl. S. G. F., (3), XXVI, 1898, p. 341.
28 23 Janv.
LAPIEZ DANS DES GRÈS CRÉTACÉS
(MASSIF DU BUCEGIU-R0UMAN1E)
par M. E. de IARTONNE.
Les Lapiez ou Rascles (Karren ou Schratten en allemand) ont
toujours été considérés comme une forme d'érosion spéciale au
calcaire (1). C'est le seul point sur lequel tout le monde soit
d'accord, et le fait même qu'on n'a jamais constaté de Lapiez
ailleurs que dans des roches calcaires a été invoqué comme un
argument par les partisans de la théorie qui attribue à la seule
érosion chimique la naissance de ces singulières formes topogra-
phiques (2). On conçoit dès lors qu'il y a lieu d'attribuer une cer-
taine importance à la découverte d'un champ de Lapiez, si réduit
soit-il, dans des grès siliceux.
C'est en parcourant le Massif du Bucegiu avec notre confrère,
M. Popovici-Hatzeg, que j'ai eu le bonheur de faire cette constata-
tion (3). On sait que ce massif est formé presque entièrement par
des conglomérats d'âge cénomanien qui présentent fréquemment
un faciès gréseux (4). Sur le flanc sud-ouest du Caralman, les bancs
gréseux sont très développés. De nombreux ravins, presque tou-
jours sans eau, entaillent les pentes dénudées que recouvre une
maigre herbe sèche, et mettent la roche à nu. C'est un grès grossier
dont les éléments peuvent atteindre un centimètre cube et sont
empruntés presque entièrement aux schistes cristallins qui forment
le soubassement des masses calcaires et cooglomératiques du
Bucegiu. Le ciment est siliceux.
(1) A. de L apparent. Géologie, 3* éd., p. 315-316. — Richthofbn. Fûhrer fur
Forschungsreisende, p. 103. — Penck. Morphologie der Erdoberflâche, I, p. 237. —
Cuuic. Das Karstpnânomen, p. 220. — Hassert. Beitrâge zur physikalischen Géogra-
phie vod Monténégro, p. 79.
(2) Spécialement Penck. Morphologie, I, p. 238.
(3) Je tiens à exprimer ici toute ma reconnaissance à M. Popovici-Hatzeg pour
l'obligeance avec laquelle il m'a guidé dans cette région dont il a donné une si
bonne étude stratigraphique. C'est à lui que je dois encore la plupart des détails
géologiques qui suivent sur le Bucegiu.
(4) Popovici-Hatzeg. Sur l'âge des conglomérats du Bucegiu. B. S. G, F., (3),
XXV, 1897, p. 669-675. — Cf. Etude géologique des environs de Campulung et
Sinaia, p. 108 et sq.
LAPIEZ DANS DES GRRS CRETACES
29
Dans le fond d'un de ces ravins, à une altitude d'environ 2250 m-,
on voit la roche creusée de sillons étroits et profonds descendant
selon la ligne de plus grande pente vers le thalweg. Ces sillons
isolent des bourrelets arrondis plus larges dans le haut qu'à la
base et percés de trous verticaux, des lames bizarrement contour-
nées, épaisses de 1 centim. ou 2, des blocs de forme parallélipipé-
dique portant sur leurs parois latérales des cannelures. La profon-
deur des sillons (maximum 0"70 à 1") diminue rapidement lorsqu'on
s'écarte du thalweg, ils sont envahis par la terre noire et l'herbe
sèche. Cet aspect rappelant si bien les champs de Lapiez en forma-
tion se continue pendant au moins 100 à 200 mètres tout le long du
ravin sur une largeur variant de 10 à 20 mètres. 11 est important
de remarquer que la ligne même du thalweg ne présente rien de
comparable aux Lapiez. On n'y observe qu'un cailloutis roulé par
les eaux qui s'écoulent après chaque grande pluie. Lorsque les
30 e. de martonne 23 Janv.
deux flancs du ravin présentent d'un côté un escarpement, de
l'autre une pente de 20 à 25° (ce qui est le cas le plus général),
l'escarpement ne porte aucune trace de Lapiez. Lorsque la pente
est particulièrement faible la roche apparaît traversée de cassures
se croisant dans deux directions, et à quelques pas de là on remar-
que les sillons profonds dont nous avons parlé suivant des direc-
tions semblables ; si bien qu'ils apparaissent comme un simple
élargissement des diaclases.
Il faut noter que si l'élément calcaire manque presque totalement
dans les grès qui affleurent ici, il se trouve au contraire largement
développé sur un sommet très voisin aux Babele et sur les pentes
deOmu, le point culminant du Massif du Bucegiu. Or, je n'ai rien
observé dans ces deux localités qui puisse être rapproché des
Lapiez. Les bancs gréseux y sont beaucoup moins puissants. Sur le
flanc sud de Omu ils manifestent une tendance très marquée à la
desquamation en minces plaquettes. Par contre, on trouve à
Strunga, dans le calcaire jurassique, des champs de Lapiez très
typiques.
Quelle peut être l'origine des Lapiez du Caraîman ?
Le fait que le fond même du ravin en est exempt suffirait à
prouver, s'il en était encore besoin, que l'érosion torrentielle, loin
de créer les Lapiez, les détruit au contraire (1).
Quelle que soit l'opinion qu'on ait sur l'existence d'une période
glaciaire dans le massif du Bucegiu (2), la topographie ne permet
pas d'admettre que le glacier ait passé par ce ravin et l'hypothèse
glaciaire ne peut être invoquée ici (3).
La position des Lapiez dans un creux, au fond d'un ravin, ne
(1) L'action de l'érosion torrentielle fut la première explication invoquée pour les
Lapiez (de Saussure : Voyages dans les Alpes, 1779, tome 1, p. 163-165, et
Schnyder : Besondere Beschreibung etllcher Berge des Entlibuches, 1783. Die
Schrattenfluh, p. 1-17).
(2) Lehmann, qui fut le premier à signaler les traces de glaciation dans les Kar-
pathes méridionales, ne croit pas à la glaciation du Bucegiu (Die Sùdkarpathen
zwischen Hetiezat und Kônigsteln. Zeitschr. Ges. f. Erdk. Berlin, 1885, p. 357).
M. Popovki-Hatzeo est d'un avis contraire (Bull. Soc. des Se. de Bucarest, VII, 6,
séance du 2/14 novembre 1898).
(3) Cette hypothèse mise en avant par Agassiz (Etudes sur les Glaciers, 1840,
p. 295), Charpentier (Essai sur les Glaciers. Lausanne. 1841, p. iOl et sq.) et Simony
(Ueber die Spuren der vorgeschicht lichen Eiszeit in Salzkammergut, 1847, p. 226-
234, in Eckert : Das Karrenproblem, p. 48-53) a été encore récemment reprise et
défendue par Renevier (Monographie des Alpes vaudoises, Matériaux pour la Carte
géol.de Suisse, 1890, p. 500-oOi) et Ratzel (Ueber Karrenfelder in Jura und Ver-
wandtes, 1891, in Eckert : Das Karrenproblem).
1899 LAPIEZ DANS DES GRÈS CRÉTACÉS 31
permet pas non plus de les expliquer par l'action éolienne, comme
l'a fait Hettner pour certaines cannelures des grès de la Suisse
saxonne (1).
Enfin le fait que les grès du Caraïinan sont à éléments assez
grossiers, empruntés aux schistes cristallins, et à ciment siliceux,
ne concorde pas très bien avec la théorie la plus généralement
admise à l'heure actuelle, qui considère les Lapiez comme l'œuvre
de la dissolution chimique du calcaire par les eaux météoriques (2).
Il ne reste plus qu'une explication possible, c'est celle qui attribue
les Lapiez à l'érosion mécanique. A l'altitude où se trouve le ravin
(2250m), la neige séjourne pendant au moins six mois, et le ruissel-
lement au moment de la fonte est extrêmement intense. Il en est
de même à chaque grande pluie. Les diaclases qui traversent la
roche, et que la chaleur et la gelée se chargent d'élargir, doivent
évidemment être suivies de préférence par l'eau. La grosseur très
variable des éléments du grès contribue à créer les formes irrégu-
lières qui donnent à ces ravinements l'aspect de Lapiez.
D'après les recherches les plus récentes sur les Lapiez, il semble
qu'il y ait lieu de tenir compte, plus qu'on ne le fait généralement,
du rôle de l'érosion mécanique (3) et de l'influence des diaclases (4).
Sans rien préjuger de l'action que peut et doit exercer l'érosion
chimique sur les roches calcaires, notre découverte permet d'aflir-
mer que l'eau de pluie et l'eau de fonte des neiges ruisselant sur
une roche à nu et guidées par les diaclases exercent une action
mécanique suffisante pour créer des formes de Lapiez.
Si, en effet, le champ de Lapiez que nous avons observé est loin
(1) Gebirgsbau und OberÛachengestaltung der Sâchsischen Schweiz. Forsck. zur
deutschen Lande und Volkskunde, II, 1887, p. 293.
(2) Cest la théorie défendue avec tant d'autorité par Heim (Ueber die Karrenfelder.
Jahrb. des achweizerischen Alpenclubs, 1877-78, p. 421-433), admise par Schaardt
(Etudes géologiques sur le pays d'en Haut Vaudois. Bull. Soc. vaudoise Se. nat.9
XX. N° 90, 1884, p. 113), Couic (Das Karstphànomen. Pencks Geogr. Abh.t V, 3,
1893, ch. I), Hasskrt (Beitrâge zur physikalischen Geogr. von Monténégro. Peterm.
Mitt. Ergànz. heft. N» Ho, 1895, p. 78 81), Saiîer (Erlauterungen z. geol. Spezial-
karte des K. Sachsens sect. Elterlein, N° 138, p. 36-37), Kollif.r (Sur les Lapiez
du Jura, Hull. Soc. Se. nat. Neufckatel, XXII, 1894).
(3) Bourgeat. Quelques observations nouvelles sur les Lapiez, etc. (H. S. G. F.y
[3], XXIII, 1895, p. 414-420). — Max Eckert. Die Karren oder Schatten {Peterm.
Mitt., 1898, N° 3) et Das Karrenproblem {Zeitschr. f. Naturwiss., LXV11I, 189H,
p. 321-432). C'est aussi l'opinion qu'expriment plus ou moins nettement MM. de
Lapparent (Géographie physique, 2e éd., p. 90), Martel (Les Abtmes, 1894, p. 110),
Penck (Morphologie, I, p. 237-238).
(4) Chaix. La topographie du désert de Plate, 1895, spec1 p. 17-19.
32 E. DE MARTONNE. — LAPIEZ DANS DES GRÈS CRÉTACÉS
d'égaler en extension ceux qu'on rencontre dans les massifs cal-
caires, on ne peut nier que les formes fondamentales du Lapiez n'y
soient représentées. Les arêtes n'y sont pas aussi vives, ni les cise-
lures aussi fines, que dans les Lapiez typiques, ce qui s'explique
facilement par la texture grossière du grès. On a remarqué depuis
longtemps la même particularité dans les calcaires impurs ou à
grains grossiers.
Il est vraisemblable que des formes voisines du Lapiez existent
encore dans bien des roches autres que le calcaire (1). Si Ton n'en
connaît pas plus d'exemples, c'est que l'attention n'a pas été appelée
sur l'importance de cette constatation. Tel était le but de la présente
note.
M. G. Dollfus a eu l'occasion d'étudier dans le Cumberland,
vers Silverdale, Arnside, de grandes surfaces de calcaire carbonifère
en tables profondément altérées, découpées en lapiez, et l'origine
de cette sculpture est due, sans doute possible, à la fusion de la
neige, sans qu'aucune action glaciaire ait été possible.
M. Léon Janet rappelle qu'on connaît depuis longtemps de
très beaux lapiez dans les gypses du bassin de Paris, au voisinage
des affleurements. Ils sont toujours recouverts par le limon pléisto-
cène, mais l'exploitation des carrières les met à découvert sur un
grand nombre de points.
(1) Nous ne faisons pas allusion aux Lapiez dans le gypse connus depuis long-
temps. Vogt (Lehrbuch der Géologie und Petrefactenkunde, 4« éd., 1879, tome I,
p. 566, II, p. 190, cité par Eckert) parle de Karren dans les gneiss et granités, mais
sans citer d'exemple, ce qui a fait considérer ses affirmations comme non avenues.
Pourtant M. Bauer a décrit récemment des cannelures dans le granité des Sey-
chelles qui rappellent de façon frappante les sillons qu'on rencontre sur les parois
verticales du Steinernes Meer, du Dachsteio, du désert de Plate (Beitrâge zur
Géologie der Seychellen. Neues Jahrb., 1898, II, p. 192-193, v. la planche XI). Il y
a longtemps déjà Guttbier (GeognosUsche Skizzen ans der sàchsischen Schwelz.
Leipzig, 1858, p. 58-60) avait signalé de pareilles cannelures dans les blocs isolés de
Quadersandstein. Hbttnbr (loc. cit.) attribue ces rigoles, dont la position est toute
différente de celle de nos Lapiez, à Faction éolienne.
33
Séance du O Février 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MÂRGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance/ dont la rédaction est adoptée.
Le Président, par suite de la présentation faite à la dernière
séance, proclame membre de la Société :
M. Spiess, Capitaine du Génie, à Chambéry, présenté par
MM. Munier-Chalmas et Haug.
Le Secrétaire annonce que M. Lacroix fait don à la Société des
ouvrages suivants : 1° Minéralogie de la France et de ses colonies,
tomes 1 et 2, 3 vol. 8° ; 2° Le gypse de Paris et les minéraux qui
l'accompagnent, 1 vol. 4°, 9 pi., 294 p.; 3° Diverses notes extraites
des C.-R. de l'Académie des Sciences, du .Bulletin de la Société
minéralogique et du Bulletin du Muséum d'Histoire naturelle.
11 signale parmi les autres dons reçus : la 3e série complète de la
Feuille des Jeunes Naturalistes et le Catalogue de la bibliothèque de
ce périodique (offerts par M. Adrien Dollfus) ; Travaux du labora-
toire de Géologie de la Faculté des Sciences de l* Université de Grenoble,
t. IV (1897-98), 2« fascicule (offert par M. Kilian).
M. P. Cambronne signale parmi les dons récemment parvenus
de l'étranger à la Société : 1° VAnnual Report du Geological Survey of
lovca (année 1897) ; 2° le fascicule 2 du tome III des Communicaçôes
da direcçâo dos trabalhos geologicos de Portugal contenant un article de
M. Bleicher intitulé : Contribution à V élude lithologique, microsco-
pique et chimique des roches sédimentaires secondaires et tertiaires du
Portugal ; 3° un travail de M. S. Calderon : Existencia del infra-
liasico en Espana y geologia fisiographica de la Meseta de Molina de
Aragon.
M. J. Bergeron annonce le décès de M. Charles de Grasset.
Il rappelle que notre confrère avait réuni une collection très
importante de fossiles de l'Hérault et. en particulier de fossiles
paléozoïques ; elle était mise très libéralement à la disposition de
ceux qui étudiaient la géologie de la région. C'est grâce à la coin-
30 Avril 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 3
34 SÉANCE DU 6 FÉVRIER 1899
munication qui lui en a été faite, que M. de Tromelin put donner
pour la première fois, vers 1877, une idée de la grande richesse de
la Montagne Noire en horizons paléozoïques. M. J. Berge ron, qui
n'avait jamais eu qu'à se louer de l'amabilité de M. de Grasset, tient
à rendre hommage à sa modestie et à sa libéralité.
Le Président prie M. Bergeron de présenter à la famille de notre
regretté confrère Ch. de Grasset, les condoléances de la Société.
M. Levât, en présentant son ouvrage intitulé : « Guide pratique
pour la recherche et l'exploitation de l'or en Guyane française », signale
les résultats géologiques qu'il a pu mettre en évidence pendant la
durée de sa mission dans la colonie. Il a pu substituer à la notion
vague de l'existence de deux zones aurifères parallèles à la côte,
celle plus exacte et plus nette de la concentration des formations
aurifères et par conséquent des placers, le long des contacts entre
le granité ou la syénite fondamentale et les gneiss ou micaschistes
qui les recouvrent.
En outre, la venue aurifère est intimement liée dans toute cette
région du Nord-Est de l'Amérique du Sud, depuis le Venezuela
jusqu'au Brésil, à la présence d'innombrables dykes de roche
dioritique ou amphibolique.
Ces deux ordres de considérations localisent beaucoup les régions
d'enrichissement maximum et constituent un guide précieux pour
la recherche des placers et des filons. Elles ont déjà été mises à
l'épreuve lors de la découverte récente des placers de la Haute-Mana
situés immédiatement au contact de la zone granitique prolongée
du Tapanahoni et des gneiss de la crique Inini.
Dans un autre ordre d'idées, l'auteur signale la présence de l'or
dans une roche ferrugineuse nommée roche à ravets en Guyane,
cascajo au Venezuela, qui forme à la surface du sol d'immenses
nappes de minerai de fer et sur la formation de laquelle il n'avait
pas été donné jusqu'à présent d'explication satisfaisante. L'étude de
M. Levât a permis de rattacher ces roches à ravets aux phénomènes
de décomposition des roches dioritiques pyriteuses. Ces dernières,
associées, comme on Ta vu plus haut, aux venues aurifères, ont
laissé le métal précieux au sein de la roche à ravets suivant des
lois comparables à celles qui ont présidé à la formation des placers.
M. de Launay fait une conférence sur les variations des filons
métallifères en profondeur.
Après avoir insisté sur la nécessité de se mettre en garde contre
SÉANCE DU 6 FÉVRIER 1899 35
la tentation de généraliser des faits accidentels ou de confondre le
côté industriel de la question avec le côté géologique, il distingue
deux catégories de variations en profondeur : celles qui ont pu se pro-
duire au moment même de la constitution des gisements, auxquelles
on a, jusqu'ici, attribué généralement une importance prépondé-
rante, et celles postérieures à cette formation, résultat de la circula-
tion des eaux oxydantes superficielles au-dessus du niveau hydros-
tatique, qui lui semblent, au contraire, avoir joué un rôle essentiel.
Il passe alors eu revue les principales de ces modifications posté-
rieures, en étudiant tour à tour l'influence possible de l'érosion (qui
a déterminé l'allure de la superficie actuelle), des variations du
niveau hydrostatique, de la durée des phénomènes d'altération (et,
par suite, de leur état d'avancement), des réactifs chimiques apportés
par les eaux, enfin des terrains encaissants, notamment des calcaires,
et renvoie, pour plus de détails, à son mémoire Sur les gîtes métal-
lifères, paru aux Annales des Mines, 11 août 1897.
Il examine, à ce propos, le cas spécial de chacun des principaux
métaux : fer, manganèse, cuivre, zinc, plomb, argent, or, etc. et
termine en attirant l'attention sur la possibilité d'obtenir une sorte
de coupe théorique profonde des gttes filoniens, avec leurs variations
originelles en profondeur, en considérant Tune après l'autre des
chaînes de plus en plus anciennes, dont une érosion de plus en plus
avancée a mis à jour des parties de plus en plus profondes. Le type
des gisements métallifères d'Algérie, des Apennins ou des Carpathes
se distingue aussitôt du type Bohème, Vosges, Plateau Central,
Meseta, lui-même différent du type Norwège-Canada.
Le Président remercie M. de Launay dans les termes suivants :
« Mon cher Confrère, depuis la publication du Traité des gîtes
métallifères, où vous aviez si largement ajouté aux notes laissées
par Fuchs, votre nom, plus que tout autre en France, est associé à
l'étude de la Géologie appliquée.
» Par vos savants ouvrages sur Les Mines d'or du Transvaal, sur
Les Diamants du Cap, sur la recherche rationnelle des Sources
minérales, et par de nombreux mémoires insérés de temps à autre
aux Annales des Mines, vous avez montré que, dans le Corps auquel
vous avez l'honneur d'appartenir, la glorieuse tradition des d'Au-
buisson, des Fournel, des Rivot, des Elie de Beauniont, des Dau-
brée, n'était pas près de s'éteindre.
» Au nom de la Société tout entière, je vous félicite et je vous
remercie ».
36 6 Févr.
NOTE
SUR LA BASE DU CARBONIFÈRE DANS LA MONTAGNE NOIRE
par M. ë. BERGERON.
SOMMAIRE
I. Caractères stratigraphiques, lithologiques et paléontologiqaes des premières
assises du Carbonifère dans la Montagne Noire. — II. Leur extension. —
III. Leur composition chimique.
J'ai eu l'honneur, au mois de juin dernier (1), d'attirer l'attention
de la Société sur les assises qui forment la base du terrain carbo-
nifère de la Montagne Noire ; je voudrais y revenir aujourd'hui
parce que quelques faits nouveaux ont encore augmenté l'intérêt
que présente ce niveau.
I
A la partie supérieure du terrain dévonien se voient dans la Mon-
tagne Noire des marbres, dits yrioltes, riches en Clyménies. C'est
le Clymenien-Kalk des géologues allemands. Dans le Hartz, sur ces
calcaires reposent des schistes à Cypridines ; dans le Languedoc, il
y a bien des schistes au même niveau, quand la série est complète,
mais jusqu'à présent je n'y ai trouvé aucun fossile ; cependant je les
assimile à ceux du Hartz. Us termineraient le Dévonien supérieur.
Puis vient au-dessus une série très riche en lydienne. Il en est de
même dans le Hartz et c'est avec cette série que les géologues alle-
mands font commencer le Carbonifère. En l'absence de tout fossile
qui put me guider, j'avais suivi leur exemple.
Dès la base, il y a alternance de bancs de lydienne et de bancs
calcaires. Les bancs de lydienne les plus anciens, c'est-à-dire ceux
qui sont le plus rapprochés des griottes, sont en général les plus
continus : ils ont une épaisseur maxima d'une dizaine de centi-
mètres, d'ailleurs rarement atteinte. Ces bancs sont de couleur
noire, à cassure brillante, irrégulière. Parfois, ils sont fendillés et
(1) Etude du versant méridional de la Montagne Noire. B. S. G. F.9 3* sér.,
t. XX VI, p. 472.
1899 8UR LA BASE DU CARBONIFÈRE DANS LA MONTAGNE NOIRE 37
les fissures sont tapissées de silice en veines très minces. Parfois,
encore, dans ces bancs bien réguliers, il y a des parties de couleur
claire, très souvent cariées, ou encore des vacuoles tapissées de
matière rougeàtre. J'aurai occasion d'y revenir plus loin. Si on suit
ces bancs de lydienne sur leur tranche, on les voit diminuer rapi-
dement d'épaisseur, puis disparaître, alors que cette épaisseur
restait constante sur un assez long parcours ; ce sont plutôt des
lentilles très allongées que des bancs. Il semble que leur mode de
formation soit celui des cherts, la silice étant fournie par une très
grande abondance de Radiolaires dont j'aurai à parler plus loin.
Les bancs calcaires qui alternent avec ces bancs de lydienne se
comportent comme ces derniers. Le tout est associé â des schistes.
A mesure que Ton s'élève dans la série, les bancs de lydienne
jouent un rôle moins important; mais la silice reste un élément
essentiel, elle forme de vrais nodules à structure zonée. compa-
rables jusqu'à un certain point aux silex de la craie. Ces nodules,
généralement aplatis, sont tantôt pleins avec traces douteuses d'orga-
nismes, tantôt creux et alors l'existence d'organismes aujourd'hui
détruits est incontestable, sans que le plus souvent il soit possible
de les déterminer.
Certains nodules portent à leur surface une couche de lydienne
qui se prolonge latéralement de manière à former au niveau du
plus grand diamètre une sorte d'expansion de quelques millimètres
d'épaisseur. Cette structure indique que la formation de la lydienne,
est postérieure à celle des nodules (1).
Pris isolément, ces nodules ressemblent beaucoup à ceux que Ton
trouve à la base de l'Ordovicien, dans les couches à Euloma-Niobe .
Dans ce dernier horizon, il n'y a pas de doute que la formation des
nodules ne soit postérieure au dépôt, car j'y ai rencontré quelques
fossiles engagés en partie dans des nodules, en partie dans des
schistes. Il a dû en être de même pour les nodules carbonifères.
Les nodules, à leur tour, finissent par disparaître ; les schistes
deviennent argileux, cassants, de couleur bleue ou verte, toujours
foncée. Ils ont une épaisseur de plusieurs centaines de mètres.
C'est à une certaine hauteur au-dessus de la série siliceuse, dont je
viens de parler, que se rencontrent des bancs de grès et de conglo-
mérats dont les éléments sont des cailloux roulés de quartz blanc
et de lydienne; ils forment un horizon très bien caractérisé qui,
par son apparition au milieu de schistes que l'on pourrait croire
(1) M. Levât dans un travail récent (4 fin. des Mines, 9* sér., t. XV, 1" livraison
de 1899) arrive à la même conclusion (Note insérée pendant l'impression).
38
J. BERGERON
6 Févr.
ordoviciens, permet facilement de se retrouver. Enfin, c'est encore
au milieu de ces schistes que se rencontrent en quelques rares
points des gîtes fossilifères à Spirifer tornacemis, Productus semi-
reticulatus, qui m'ont permis de déterminer l'âge de l'ensemble de
ces schistes. Ils sont surmontés par des grès à végétaux et à Phil-
lipsia, ainsi que par les calcaires viséens.
Comme je viens de le dire, c'est uniquement par comparaison
avec la série du Hartz que j'avais placé la limite inférieure du
Carbonifère, au-dessous de la série à lydienne. Mais il était préfé-
rable de s'appuyer sur des fossiles. J'ai donc prié M. Escot, de
Cabrières, de vouloir bien faire des recherches dans cette série et il
m'a envoyé quelques nodules avec traces de Goniatites. J'ai reconnu
que toutes appartiennent au genre Glyphiocercui ; une seule présente
un fragment de test qui permet de la rapporter au groupe du
Glyphioceras diadema. Or, les Gtyphioceras sont caractéristiques du
Carbonifère et n'apparaissent pas avant le début de cet étage. Cette
découverte vient donc confirmer pleinement l'assimilation que
j'avais faite.
Déjà, en 1892, M. "Rûst (1), de Hanovre, avait signalé, dans la série
dont je viens de parler, l'abondance des Radiolaires. Dans les
lydiennes, ceux-ci sont extraordinairement nombreux, mais mal
conservés ; dans les nodules dont Sf . Rûst note la remarquable
richesse en phosphate de chaux, point sur lequel je reviendrai plus
loin, il cite un très grand nombre de Radiolaires à des états très
différents de conservation. H y a reconnu, les vingt-cinq espèces
suivantes :
Cenosphœra macropora n. sp.
Liosphœra mer a n. sp.
Cromyosphœra prisca n. sp.
Odontosphœra echinocactua n. sp.
Xiphostylus asper n. sp.
Staurosphœra f'ragilis n. sp.
— quadrangularis n. sp.
Staurolonche micropora n. sp.
Hexalonche palœozoïca u. sp.
A canthosphœra macracanthan.sp.
Heliosoma Rœmeri n. sp.
Cromyomma grandœxum n. sp.
Cenellipsis diversipora n. sp.
Lithapium siluricum n. sp.
Druppula silurien n. sp.
Cenodiscus primordialis n. sp.
Zonodisctts dentatus n. sp.
Theodiscus gigas n. sp.
— planus n. sp.
Crucidiscus prœcursor n. sp.
Trochodiseus diversispinus n. sp.
Sethostaurus ex-seulptus n. sp.
Hrliodiseus aeucinctus n. sp.
Porodiseus cabrierensis n. sp.
Phorticium macropylium n. sp.
(1) Beitràge zur Kenntniss der (ossilen Radiolarien aus Gestelnen der Trias und
der PaW»ozoischen Schichten. Palœontographica, t. XXXVIII, p. 107, 1891-1892.
1899 SUR LA BASE DU CARBONIFÈRE DANS LA MONTAGNE NOIRE 39
Toutes sont nouvelles. Elles appartiennent à vingt-trois genres
différents. Parmi ceux-ci il y en a dix-sept représentés dans le
Carbonifère : .
Cenosphœra. Druppula.
Cromyosphœra . Cenodiscus.
Xiphostylus. Zonodiscus.
Staurosphœra. Theodiscus.
Staurolonche. Trochodiscus.
Hexalonche. Sethostaurus.
Acanthosphœra . Heliodiscus.
Heliosoma. Porodiscus.
Cenellipsis.
Les genres Cromyosphœra, Staurolonche, Druppula, Cenodiscus,
Theodiscus, Trochodiscus, atteignent leur maximum de développe-
ment numérique dans le Carbonifère.
Sur les vingt-trois genres, il y en a cinq fondés sur des formes
nouvelles de Cabrières ; ce sont les genres Odontosphœra, Cro-
myomma, Liihapium, Crucidiscus, Phorticium ; ils n'ont pas de repré-.
sentants en dehors des assises en question et, par suite, ne peuvent
servir à en déterminer l'âge. Il n'y a que quatre genres qui soient
représentés dans des assises d'âge reconnu silurien; ce sont les
genres : Cenosphœra, Staurosphœra, Ttieodiscus et Phorticium. Une
espèce de ce dernier genre, Phorticium macropylium, a été reconnue
à Cabrières et dans le Silurien inférieur de Langenstriegis ; par
contre, Cenodiscus primordialis et Theodiscus planus appartiennent
aux assises de Cabrières et aux lydiennes du Carbonifère inférieur
du Hartz.
Etant donné le peu de connaissances que nous avons sur les
Radiolaires, il est assez difficile de savoir quelle importance leur
attribuer dans la classiûcation des terrains ; cependant, on ne peut
manquer d'être frappé par tous les faits que je viens d'énumérer et
qui semblent rapprocher cette faune de Radiolaires de Cabrières,
du Carbonifère plus que du Silurien. M. Rûst lui-même signale la
ressemblance très grande qui existe entre les concrétions de
Cabrières et celles du Carbonifère de la Petschora.
Enfin, j'ai déjà dit l'identité de faciès lithologique des couches de
la base du Carbonifère dans le Hartz et dans le Languedoc.
Cependant M. Rûst a attribué la série du Languedoc au Silurien
inférieur; mais, en agissant ainsi, il n'a fait que se rapporter pour
40 j. bergeron 6 Févr.
l'âge à un travail du Dr Frech (1) sur les formations paléozoïques
de Cabrières. D'ailleurs, dans son mémoire, ce dernier auteur parle
fort peu de ce niveau si riche en silice. Dans la légende du Pic de
Bissous (p. 385), M. Frech le rapporte au Silurien inférieur, mais
avec doute. Il y distingue deux horizons : l'un, inférieur, qu'il
désigne sous le nom de Calcaire silurien inférieur (c'est le calcaire
à colonnes des géologues locaux) ; il renferme des calcaires, des
schistes, et est riche en concrétions siliceuses. Au-dessus vien-
draient les lydiennes franches constituant l'horizon supérieur. Dans
le texte, d'ailleurs, il n'est fait aucune mention spéciale de cette
série. On aura remarqué que les deux termes admis par M. Frech
sont en ordre inverse de celui que j'ai donné plus haut ; c'est qu'au
pic de Bissous il y a un renversement, ainsi que je l'ai indiqué
dans ma communication du mois de juin dernier et ainsi que ne
l'avait pas vu l'auteur allemand (2).
II
Ce niveau carbonifère à lydienne se retrouve également dans tous
les massifs montagneux situés plus au sud. Mais les auteurs qui
l'ont signalé ne lui ont pas attribué sa véritable importance ; bien
souvent il est simplement fait mention de la présence de lydienne
ou de phtanite. Cet horizon d'ailleurs a été classé dans des étages
différents ; jamais jusqu'ici on n'avait précisé sa place.
Voici les seules mentions qui en aient été faites :
Dans les Corbières, M. Viguier, aussi bien dans la légende de la
carte géologique du département de l'Aude (3) que dans plusieurs
mémoires (4), fait allusion à des phtanites accompagnant les
griottes ; il les range dans le Frasnien.
Dans les Pyrénées, Leyinerie (5) signale des lydiennes au milieu
des schistes de transition. Il dit simplement : « le jaspe noir appelé
lydienne forme des rubans et de minces couches dans les schistes
(1) Die palœozoischen Bildungen von Cabrières (l^anguedoc). Zeitsch. d. <L geol.
Gesellsch., t. XXXIX, 1887, p. :J60.
(2) Etude du versant méridional de la Montagne Noire. H. S. G. F., 3" série,
t. XXVI, p. 475.
(3) Carte géologique du département de l'Aude, par MM. Leymerie, de Rouville
et Viguier, 1887.
(4) Terrain de transilion des Corbiêres. H. S. G. F., 3« série, t. XI, p. 334. —
Etudes géologiques sur le département «le l'Aude. Thèse, 1887.
(5) Description géologique et paléontologique des Pyrénées de la Haute-Garonne,
p. 112.
1899 SUR L£ BASE DU CARBONIFÈRE DANS LA MONTAGNE NOIRE 41
de transition ». Dans le cours de l'ouvrage il n'en reparle plus,
soit à propos du Dévonien, soit à propos du Carbonifère.
M. Roussel (1) mentionne à plusieurs reprises dans le complexe
qu'il désigne sous le nom de Permo-Carbonifère des bancs de
lydienne, des bancs de phtanite, des schistes noirs fortement car-
bures, des lits de conglomérats à phtanite, sans que d'ailleurs les
rapports de ces bancs entre eux fassent l'objet d'aucune indication.
Il cite (p. 10), à Larbont, au-dessus des griottes qu'il range, à la
suite de M. Barrois, dans le Carbonifère, une série de schistes à
Productifs semireticulatus, Productus cora, etc., alternant avec des
lydiennes, des grès à Calamités ; mais il ne précise pas la place de
ces différents termes dans la série carbonifère.
M. de Lac vivier (2) a signalé incidemment dans le Dévonien de
l'Ariège la présence de phtanite. Les autres géologues qui se sont
occupés des terrains paléozoîques des Pyrénées et de leur prolon-
gement en Espagne, n'ont pas parlé de ce niveau à lydienne.
J'ai eu occasion de le retrouver dans les environs de Barcelone,
lors de la réunion extraordinaire de la Société en 1898.
Malgré le vague des indications relatives à cet horizon, il n'y a
cependant aucun doute que ce ne soit le même qui se rencontre dans
ces différentes régions, car partout il est compris entre les griottes
et le Carbonifère typique. Son extension et ses caractères litholo-
giques bien spéciaux en font un niveau des plus importants.
III
Mais, depuis quelques mois, il a acquis une nouvelle importance
au point de vue industriel.
M. D. Levât (3) a annoncé à l'Académie des Sciences l'existence
de phosphate de chaux dans un niveau « situé au contact du
» calcaire dévonien supérieur, le griotte des pyrénées, avec les
» schistes sus-jacents attribués soit au Permien, soit au Carboni-
» fère, soit même, d'après les travaux de M. Seunes, au Dinantien ».
M. Levât l'a signalé dans les Pyrénées, dans les Corbières et
jusque dans la Montagne Noire, aux environs de Caunes. Dès que
j'eus connaissance de ce travail, je n'hésitai pas à rapporter ce
niveau à celui des lydiennes et des nodules, dans lequel le I)r Rîist
(1) Etude stratlgraphique des Pyrénées. Bull, Serv. Carte géol. de Fr., t. IV.
(2) Etudes géologiques sur le département de l'Ariège et en particulier sur le
terrain crétacé.
(3) Sur les phosphates noirs des Pyrénées. C. R. Âc. Se, t. CXXVII, p. 8îJ4,
séance du 21 novembre 1896.
42 j. bergeron 6 Févr.
avait déjà indiqué la très grande richesse en phosphate; depuis, j'ai
eu l'occasion de voir à l'Ecole des Mines la collection rapportée par
M. Levât et j'ai été pleinement confirmé dans ma manière de voir (1).
Les lydiennes aussi bien que les nodules y sont représentés, mais
dans le gîte de Las Cabesses (Ariège), qui semble avoir été pris
comme type par M. Levât, l'aspect est différent de ce qu'il est le
plus souvent dans la Montagne Noire. Les nodules comme les
schistes qui les accompagnent sont de couleur noire, ils sont tra-
çants et ont pu être pris pour de l'anthracite. Ce gîte est voisin de
la mine de Manganèse si connue de Las Cabesses ; il a pu s'y pro-
duire des circulations d'eau enrichissant les assises en phosphate et
en matière organique qui est très abondante d'après les indications
de M. Levât. Je ne connais dans le Languedoc que quelques rares
points où le Carbonifère tout à fait inférieur se présente sous cet
aspect ; c'est toujours dans le voisinage d'une faille ou d'un filon.
Dans ce même gisement de Las Cabesses, la teneur des nodules
en phosphate de chaux s'élève en moyenne, d'après les analyses
données par M. D. Levât, à 67,75, le maximum étant de 77,28 et le
minimum de 61,26. Les schistes au milieu desquels se trouvent les
nodules renferment encore de 14 à 16 pour cent d'acide phospho-
rique. Ce gisement semble être particulièrement riche en phos-
phate et il ne faudrait pas compter trouver une pareille teneur
dans tous les affleurements de ce niveau.
Dans les nodules de Cabrières, M. Rûst a signalé la présence du
phosphate de chaux comme je l'ai dit plus haut; il en a fait l'analyse
et a trouvé les proportions suivantes :
Phosphate de chaux .... 73,65 (33,74 d'acide phosphorique).
Eau 1,08
Silicate argileux 25,27
100
Très frappé de cette grande richesse, M. Rûst désigna le niveau
h nodules sous le nom de Phosphorite de Cabrières. Mais cette teneur
est loin d'être constante, ainsi que Ta fait remarquer M. Levât. Pour
les nodules de la Montagne Noire dont j'ai analysé quelques-uns
avec le concours de mon ami M. Goldberg (2), la teneur est sensi-
blement celle signalée par le savant allemand. C'est dans ces
nodules qu'elle atteint son maximum, surtout dans ceux dont l'inté-
(1) Le récent travail de M. Levât ne laisse aucun doute sur l'exactitude de cette
assimilation (Ann. des Mines, 9* série, t. XV, p. U6). {Note insérée pendant l'im-
pression).
(2) Les analyses que nous avons faites au Laboratoire de Minéralogie et de Geo-
1899 SUR LA BASE DU CARBONIFÈRE DANS LA MONTAGNE NOIRE 43
rieur est poreux parce qu'il y a eu des organismes qui ont concen-
tré le phosphate autour d'eux ainsi que c'est le cas général. Dans les
lydiennes, les parties de couleur claire comme les parties cariées
en renferment plus que les parties compactes, à peu près autant
que les nodules. Le phosphate se retrouve encore dans les schistes
qui accompagnent les nodules, mais en moindre proportion; il
semble qu'il provienne de la trituration des nodules et concrétions
phosphatées dont j'ai parlé précédemment, car il n'y est plus concré-
tionné comme dans les nodules ainsi qu'il ressort d'un examen
microscopique que j'en ai fait.
En résumé, dans la région que j'ai étudiée, la richesse en phos-
phate de chaux du Carbonifère inférieur est moins grande que dans
la région de Las Cabesses. De plus, sur le versant méridional de la
Montagne Noire, il y a eu des mouvements du sol par suite des-
quels le niveau à Euloma-Niobe de la base de l'Ordovicien a été
ramené par chevauchement au contact du Dévonien supérieur et
du Carbonifère, c'est le cas par exemple dans la région de Caunes.
Or, cet Ordovicien inférieur renferme des nodules, parfois fossi-
lifères, très semblables, ainsi que je l'ai dit plus haut, à ceux du
Carbonifère; la confusion serait donc facile entre les deux étages,
dans le cas où la faune n'aurait pas été reconnue. Au point de vue
industriel, il pourrait en résulter de très grands mécomptes, l'Ordo-.
vicien ne renfermant pas de phosphate.
M. D. Levât expose qu'il est entièrement d'accord avec M. Ber-
geron sur la question de détermination du niveau des lydiennes,
niveau qui se confond d'ans toute la région des Pyrénées propre-
ment dites avec celui des phosphates qu'il a découvert en 1898,
notamment dans TAriège, entre Foix et Saint-Girons. Il a trouvé
dans un assez grand nombre de nodules de cette région des fossiles
ou des débris de fossiles, mais aucun n'était, comme celui que
M. Bergertm vient de citer, de nature à caractériser paléontologi-
quement le niveau en question. Les coupes nombreuses relevées
par M. Levât dans les Pyrénées ne laissaient aucun doute dans son
esprit sur la position stratigraphique du niveau des phosphates,
situé immédiatement au-desfcus du calcaire griotte et en strati-
fication concordante avec cet horizon.
logie de l'Ecole centrale, nous oui donné les résultats suivants pour la teneur en
acide phosphorique (pour cent) :
Nodule carbonifère 32,29
Schiste carbonifère de Cabrières 1,67
Schiste carbonifère de Caunes if45
Nodule ordovicien avec empreinte dAsaphelina Miqueli. 0,85
44
Séance dn 20 Février 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président fait part du décès de M. le professeur W. Dames,
membre de l'Académie royale des Sciences de Berlin.
Il annonce une présentation.
Le Secrétaire signale dans les comptes-rendus de l'Académie des
Sciences (séance du 13 février 1899), une note Sur la structure du
Briançonnais, par M. Termier, et dans les Annales des Mines
(lre livr. 1899, t. XV), un mémoire Sur les phosphates noirs des
Pyrénées, par M. D. Levât.
M. E. de Martonne signale parmi les dons parvenus de l'étranger
à la Société un volume au Bulletin of the geoiogical Society of America
(année 1898) et un volume des Geologiska Foreningens i Stockolm
Fôrhandlingar (année 1898).
Le Président fait part à la Société de la récente décision du
Conseil relative à la Réunion extraordinaire de 1899. Cette
Réunion aura lieu sur le versant méridional de la Montagne Noire,
sous la direction de MM. J. Bergeron, Depéret et Nicklès. — Un
programme détaillé sera prochainement publié.
Le Président informe la Société que le Congrès national des
Sociétés françaises de Géographie se tiendra à Alger, du 26 mars au
2 avril prochain. M. Ficheur, Professeur de Géologie à l'Ecole supé-
rieure des Sciences d'Alger, a été délégué par le Conseil pour repré-
senter la Société à ce Congrès.
Les membres qui désirent y assister devront, pour obtenir demi-
tarif sur les chemins de fer, se faire inscrire, 7, rue des Grands-
Augustins.
M. de Margerie annonce aussi que le septième Congrès interna-
tional de Géographie tiendra sa prochaine session à Berlin, du 28
septembre au 4 octobre 1899.
FRAGMENTS D'ASTÉRIES DANS LES COUCHES DE LA BASE DU MOKATTAM 45
M. Albert Gaudry, en présentant un travail de M. Lebes-
conte, s'exprime dans les termes suivants :
Notre savant confrère de Rennes, M. Lebesconte, me prie de faire
hommage en son nom à la Société géologique d'un travail sur les
périodes gallo-romaine et franque. Vivant en Bretagne, non loin
des curieuses formations du Mont S*-Michel, il a été séduit par ridée
de faire sur l'Ouest de la France des recherches analogues à celles
qui ont été entreprises par M. Gosselet dans le Nord de la France
et par M. Rutot en Belgique. Il admet la succession des immer-
sions et des émersions suivantes en Bretagne :
Période moderne Emersion
w a *• j v •« i ( Immersion
Moyen-âge a partir du Xe siècle . . < F
Période franque Immersion
Période gallo-romaine Emersion
A 4 i Imtnersion
Quaterna,re \ Emersion
Pliocène Immersion
SUR LA PRESENCE DE FRAGMENTS D'ASTERIES
DANS LES COUCHES DE LA BASE DU MOKATTAM
par M. R. FOURTAl.
Jusqu'à ce jour, à part les quelques Crinoïdes récoltés par Delà-
noue aux environs de Louxor (Thèbes), les couches nummulitiques
d'Egypte n'avaient, en fait d'Echinodermes, fourni aux recherches
des géologues que des Echinides, et aucune forme appartenant aux
autres classes de cet embranchement n'avait été signalée.
Tout récemment, au cours d'une promenade faite au Gebel
Ghiouchy, j'eus l'occasion de visiter d'anciennes carrières situées
au pied du Mokattam, derrière la citadelle du Caire, entre la tran-
chée du chemin de fer et l'arsenal de Fechikhana, où Ton exploitait
autrefois les bancs de la base du Mokattam que M. Mayer-Eymar
désigne sous le nom de glauconie grossière et qu'il dit caractérisés
par la présence de Vêlâtes Schmideliana Chem.
46 ASTÉRIES DANS LES COUCHES DE LA BASE DU MOKATTAM 20 FéVI\
J'y recueillis de beaux spécimens de Nummulites, très abon-
dantes dans cette couche, et quelques fragments de Porocidaris
Schmidelii Goldf. et Echinolampas africanus de Loriol ; mais mon
attention fut surtout attirée par de nombreux fragments de forme
prismatique dont une des faces était plus ou moins bombée et
arrondie aux arêtes. J'en récoltai un certain nombre et m'aperçus
bientôt qu'il y en avait des quantités disséminées dans la roche
que je suivis sur un parcours d'environ soixante mètres, c'est-à-
dire sur toute la longueur où elle a été mise à découvert par
l'exploitation.
Un examen attentif me fit reconnaître dans ces fragments des
plaques marginales d'Astéries des groupes Goniaster ou Crenaster.
Comme jusqu'à ce jour aucun fossile de cette classe n'avait été
signalé en Egypte, j'eus une ^hésitation, bien compréhensible du
reste, étant donné le peu de moyens de comparaison que nous
possédons en Egypte; aussi je m'empressai de soumettre à notre
confrère, M. V. Gauthier, une partie des spécimens que j'avais
recueillis. Son avis fut que nous étions bien en présence de plaques
marginales de Goniaster ou d'un genre voisin.
La dispersion de ces plaques dans la couche précitée, qui a
environ six mètres d'épaisseur, ne permet pas d'espérer trouver
des fragments pouvant servir à déterminer sûrement le genre et
l'espèce auxquels elles appartiennent; mais leur abondance m'in-
cite à en faire d'ores et déjà la caractéristique de cette couche de la
base du Mokattam, et cela avec d'autant plus de raison que le
fossile désigné par M. Mayer Eymar a une extension verticale très
grande dans i'Eocène d'Egypte et qu'il serait bien mieux à sa place
en caractérisant dans le Lutétien supérieur de ce même Mokattam,
la couche au-dessus des calcaires à Schizaster mokattamensis' de
Lor., dans laquelle des moules de Vêlâtes Schmideliana peuvent se
récolter par centaines.
1899 47
LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS
par M. P. TERHIER.
(Planche I).
SOMMAIRE. — Introduction. — I. Lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Cheva-
lier. — II. Substratum des lambeaux de l'Evchauda et de Serre-Chevalier. —
III. La première hypothèse. — IV. La deuxième hypothèse.
J'ai annoncé tout récemment à l'Académie des Sciences (1) qu'à
la suite de très longues et très minutieuses recherches sur la struc-
ture des montagnes comprises entre Briançon et Vallouise, j'étais
arrivé graduellement à l'idée que la zone du Briançonnais tout
entière, et la plus grande partie, sinon la totalité de la zone des
Schistes lustrés, sont formées de nappes charriées, empilées les
unes sur les autres, reposant sur le Flysch, et plissées, après le
charriage, en même temps que leur substratum. Je me propose,
dans ce mémoire de quelques pages, qui n'est lui-même qu'un
abrégé d'un travail plus complet, d'énumérer mes arguments et de
développer mon hypothèse.
Je prends la zone du Briançonnais dans la région même de
Briançon, je veux dire entre les vallées de l'Arc et du Guil. On a
beaucoup discuté sur la définition qu'il faut donner au prolonge-
ment septentrional de cette zone au-delà de l'Isère : on pourrait
discuter tout autant sur son prolongement méridional au-delà de
l'Ubaye. Mais, entre l'Arc et le Guil, la délimitation de la zone est
parfaitement précise. C'est à cette portion, très bien définie, de la
zone du Briançonnais que va s'appliquer mon essai de démonstra-
tion. Si ma théorie est exacte, le paquet des nappes charriées va
certainement bien au-delà de l'Arc et bien au-delà du Guil ; il va
même, probablement, bien au-delà de l'Isère et bien au-delà de
l'Ubaye. Sur beaucoup de points, l'exacte délimitation de ce paquet
ne pourra se faire qu'après de nouvelles études sur le terrain. Une
fois délimitée, c'est la région des terrains charriés qui formera la
zone du Briançonnais, sans qu'il soit désormais possible d'attribuer
un autre sens à cette expression géographique.
(1) Séance du 13 février 1899.
48 p. TERMiER 20 Févr.
De même, je considère les 'Schistes lustrés aux environs de
Briançon, entre les mêmes vallées de l'Arc et du Guil, sans m'occu-
per des terrains qui, vers Test, font suite à ces schistes. J'essaierai
de montrer que, dans cette région, les Schistes lustrés forment une
nappe supérieure, superposée aux nappes de la zone briançonnaise.
S'il en est ainsi, cette nappe supérieure comprend aussi les Schistes
lustrés de l'Ubaye, et ceux de la Tarentaise, et ceux des vallées du
Piémont. Où s'arrête- telle au nord, à l'est et au sud? c'est ce que
l'avenir apprendra.
Dans la région que je considère, la zone du Briançonnais est
limitée : à l'ouest, par une ligne un peu sinueuse qui coïncide
avec le bord oriental de la zone du Flysch; et à l'est, par une autre
ligne, également un peu sinueuse, où commencent les Schistes
lustrés. Sur le bord ouest, la zone repose sur le Flysch (qui repose
lui-même, avec ou sans interposition de calcaire nummulitique,
sur les terrains du Pelvoux); sur le bord est, on voit partout, sous
les terrains de la zone, s'enfoncer les Schistes lustrés (1). Les plis
du bord ouest sont couchés vers la France; les plis du bord est
sont couchés vers l'Italie. La zone est donc plissée en éventail. La
ligne axiale de l'éventail, suivie pas à pas par M. Kilian (2), se
tient, de l'Arc au col des Ayes (3), dans la partie médiane de la
zone, et, dans cette bande médiane (zone houillère de Lory), c'est le
terrain houiller qui, presque partout, affleure. Au sud du col des
Ayes, la ligne axiale de l'éventail se dévie peu à peu vers l'ouest
et cesse de coïncider avec l'axe de la zone houillère. MM. Kilian et
Haug (4) ont montré qu'à partir de Guillestre, c'est-à-dire au sud
du Guil, la zone du Briançonnais tout entière plonge, le long de
son bord occidental, sous le Flysch de l'Embrunais, ou, en d'autres
termes, que la ligne axiale de l'éventail passe graduellement, en
coupant obliquement les plis, de la zone du Briançonnais dans la
zone du Flysch.
Quant à la zone des Schistes lustrés, qui, nous venons de le
rappeler, s'enfonce, le long de son bord occidental, sous la zone du
Briançonnais, elle est plissée en un système de plis, généralement
isoclinaux et déversés vers l'Italie ; et elle repose à l'est sur des
terrains métamorphiques (schistes et quartzites cristallins, gneiss
graphitiques), longtemps attribués au Prépaléozoïque (5), mais
11) Lory. Descript. géolog. du Dauphiné, passiin ; et B. S. G. /■'., 3» série, t. IX.
(2) Kilian. Hull. des Services de la Carie géolog., t. X, 1898-1)9, p. 199.
(3) Kilian et Lugeon. C. R. àc. Sc.f séance du 1 janvier 1899.
(4) Kilian et Haucj. Bull, des Services de la Carte géolog. , t. X, 1898-99, p. 198.
(5) Zaccagna. Sulla geologia délie Alpi occidentale 1888, texte, carte et coupes.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 49
dont l'âge permo-carbonifère, indiqué dès 1894 par M. Marcel Ber-
trand (1), semble s'avérer de jour en jour (2). Les Schistes lustrés
eux-mêmes représentent, selon toute probabilité, un faciès parti-
culier du Trias supérieur et du Lias. Je ne connais du moins aucune
observation qui infirme à cet égard les preuves accumulées par
MM. Marcel Bertrand (3), Franchi et I)i Stefano (4), Kilian et Zûr-
cher (5).
La carte ci-contre (fig. 1) montre les limites des différentes
zones, entre les parallèles de Saint-Jean-de Maurienne et de Guil-
lestre. Pour le tracé de ces limites, nous nous sommes aidés des
travaux de M. Kilian (6).
Ebauchée par Lory (7), grandement perfectionnée par MM. Lâchât
et Potier (8) et par M. Zaccagua (9), puis précisée, et, sur certains
points, renouvelée par M. Kilian (10), la stratigraphie de la partie de
la zone briançonnaise comprise entre l'Arc et le Guil est aujour-
d'hui bien connue. Il me suffira d'énumérer les terrains qui affleu-
rent dans la région, en rappelant brièvement leurs caractères.
Le Hodiller est presque partout à l'état de grès (gi%è$ à anthracite
de Lory) assez grossiers, où abondent les paillettes détritiques de
mica. Il s'y trouve aussi des bancs de poudingues à galets de quartz,
et des assises schisteuses, de couleur noire ou grise. Les empreintes
végétales sont fréquentes, et appartiennent, le plus souvent, à la
(i) Marcel Bertrand. Etudes géologiques dans les Alpes françaises. B. S. G. F.,
3' série, t. XXII, p. 69 et suiv.
(2) Novarese. I giacimente di grafite délie Alpi Cozle. Boll. del R. Comilato
g coing., 1898, n* 1. — Kilian. liull. des Services de la Carte géolog., t. X, 1898-
1899, p. 200.
(3) Marcel Bertrand. Loch citato, p. 119 et suiv.
(4) Franchi et di Stefano. Sull ctà di alcuni calcari e calcescisti fossiliferi délie
valli Grana e Ma ira nelh» Alpi Cozle. Boll. del H. Comitato geotog., 18%, n°2.
(5) Kilian et Zûrcher. Hull. des Services de la Carte géolog., t. X, 1898-99,
p. 208.
(6) Kilian. Feuille de Saint-Jean-de-Maurienne (Carte géologique détaillée de
la France), et minute de la feuille de Briançon.
(7) Lory. Descript. géolog. du Dauphiné, 3P partie, 1884.
(8) Communications inédites et levés géologiques en minute.
(9) Zaccagna. Sulla geologia délie Alpi occidental^ 1888, pusslm.
(10) Kilian. Notes sur l'histoire et la structure géologique des chaînes alpines de
la Maurienne, du Briançonnais et des régions adjacentes, B. S. G. F., 3* série,
t. XIX, p. 571. — Sur l'existence du Jurassique supérieur dans le massif du
Grand-Galibier, ibid., t. XX, p. 21. — Kilian et Révil. Description géologique
de la vallée de Valloire et de quelques massifs adjacents. Hull. de la Soc. d'fiist.
naturelle de Savoie. Chambéry, 1899.
20 Avril 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 4
P. TERMIER
Fiji. 1. — Limites rcsppctivfs ries quatre jih\i-b alpines dans ta riyloo
de Rrlançnn. — Echelle de 1/ii0O.00O\
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 51
flore de la base du Stéphanien, quelquefois à celle du sommet du
Westphalien. M. Lâchât (1) a trouvé :
Aux Gardéolles, Sphenopteris Hœninghausi, avec nombreux
Sigillaires à côtes;
Au Freyssinet, Lepidodendron, Stigmaria;
APuy-du-Cros, Necropteris, Lepidodendron, Calamités Suckowi;
A Villard-Saint-Pancrace, Calamités Cisti;
A Puy-Saint- André, Asterophylli tes, Sigillaires tessellées,Annu-
laria;
A Saint-Martin-de-Queyrières, Calamités Cisti.
Les assises houillères n'ont subi, dans la plupart des cas, aucun
métamorphisme. Sur certains points, cependant, où le laminage a
été particulièrement intense, il y a développement de mica blanc
et de quartz secondaires ; mais nulle part ce métamorphisme dyna-
mique n'arrive à effacer le caractère élastique des dépôts.
L'épaisseur apparente du Houiller est très grande dans les envi-
rons même de Briançon, le long de la Durance et de la Guisanne;
elle semble augmenter encore quand on marche vers le nord, vers
Névache et la Maurienne. Mais quand on s'approche du bord ouest
de la zone du Briançonnais, on voit cette épaisseur apparente dimi-
nuer très rapidement : le Houiller ne forme plus alors, à la base
des écailles, que de minces lames, ou même des lentilles disconti-
nues. Quelle relation y a-t-il entre l'épaisseur apparente et la puis-
sance réelle? C'est là une question à laquelle nous ne pourrons
sans doute jamais répoudre, à cause de l'étonnante complexité de
la structure. Tout ce que l'on peut dire, c'est que, dans la plus
grande partie du bassin où il s'est déposé, le Houiller devait être
fort épais. On ne s'expliquerait pas, s'il en eût été autrement, ce
fait singulier que les terrains cristallins anciens, sur lesquels se
sont déposées les assises houillères, n'apparaissent presque jamais
à la base des écailles. Du Plan-de-Phazy, où Lory (2) (et après lui
M. Kilian) (3) a signalé l'affleurement d'une bande de granité, jus-
qu'à Villarly, près Moutiers, où M. Kilian (4) a retrouvé un petit
affleurement de micaschistes contigu à un affleurement houiller, les
terrains cristallins anciens ne se montrent en aucun point de la
(1) Lettre de M. Lâchât à l'auteur.
(2) Lory. Descr. géolog. du. Dauphiné. § 582 (p. 563).
(3) Kilian et Termier. D. S. G. F.y 3- série, t. XXVI, p. 357.
(4) Kilian Feuille Saini l-Jean-de- Maurienne dv la Carte géologique détaillée
de la France.
52 p. termier 20 Févr.
zone du Briançonnais : et il n'y a pas moins de 80 kilomètres du
Plan-de-Phazy à Villarly.
M. Kilian (1) a rapporté au Permien des assises bigarrées qui
s'intercalent çà et là, entre les grès houillers et les quartzites du
Trias. Ce sont, le plus souvent, des conglomérats à galets de quartz
rose et de quartz blanc, débris plus ou moins kaolinisés de felso-
phyres violets, et ciment lie-de-vin ou verdàtre. Ces conglomérats
rappellent le verrucano (serniiit) du canton de Glaris. Il s'y mêle
des schistes rouges et verts à mica élastique. Le passage aux quart-
zites du Trias se fait habituellement par des grès, blancs et roses,
plus ou moins quartziteux.
Le Trias (2) comprend plusieurs termes, dont deux seulement
ont la signification d'horizons précis : les quartzites et les calcaires
dits à Gyroporelles. Les quartzites marquent incontestablement la
base du Trias. Les calcaires (calcaires du Briançonnais, pro parte
maximâ, de Lory) se relient, sans aucun doute possible, à ceux
dans lesquels MM. Bruno, Diener, Mattirolo, Portis et Zaccagna,
ont découvert quelques fossiles du Muschelkalk : ils se rattachent,
d'autre part, à nos calcaires francs du massif de la Vanoise. Ce
niveau est marqué du symbole t, sur la carte géologique détaillée
de la France. Les calcaires en question ne sont que faiblement sili-
ceux et magnésiens.
Entre les quartzites tM et les calcaires t, s'intercalent généralement
des calcaires en plaquettes, des marbres phylliteux, des schistes
verdâtres ou roses, avec cargneules et gypse. Ce niveau a été
attribué au Muschelkalk inférieur (tj. Son épaisseur est très
réduite au nord de Briançon (d'après M. Kilian). Il semble au con-
traire très épais dans le massif de Pierre-Eyrautz. Mais l'âge des
terrains en question n'est pas connu d'une façon précise. De plus,
M. Kilian croit que des dépôts d'une nature analogue (schistes,
cargneules et gypse) forment, eu certains points, le sommet du
Trias.
J'ai rapporté à ce Muschelkalk inférieur (tj, sans avoir toutefois
aucune preuve certaine, les marbres en plaquettes, légèrement
phylliteux, que l'on peut suivre d'une façon continue, de Monètier
à l'Argentière (Grande-Cucumelle. versant ouest des Neyzets, base
de la chaîne de Montbrison). Ces marbres ne contiennent que fort
peu de magnésie. Ils sont habituellement très siliceux (de 10 à 25%
SiO2), et passent localement à des schistes gris, violets ou noirs
(1) Kilian. B. S. G. F., 3e série, t. XIX, p. 581.
[i) Id. lbid., p. 585 et «uîv.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BHIANÇONNAIS 5'J
(gorges de la Durance, près de Viliard-Meyer). D'après M. Lugeon,
ces mêmes marbres en plaquettes jouent un grand rôle dans la
constitution du massif de Pierre-Eyrautz. H est fort possible qu'une
partie d'entre eux soit une manière d'être locale des calcaires dits
à Gyroporelles.
Le Lias présente plusieurs faciès. Tantôt il est à l'état de brèche
calcaire ou de conglomérat à ciment calcaire (brèche du Télégraphe,
de M. Kilian). En général, cette brèche ne renferme pas d'autres
fragments ou d'autres galets que des fragments ou des galets de
calcaire triasique (Les Vigneaux, arête entre la Tète d'Amont et la
Salcette, Rocher Bouchard); à Prorel, elle est remplacée par un
conglomérat où abondent, avec les galets calcaires, les galets de
quartzites et même de micaschistes. La dimension des galets, habi-
tuellement inférieure à 10 centimètres, atteint parfois plusieurs
mètres aux Vigneaux et à Prorel (les galets de quartzites roses du
conglomérat de Prorel ont très fréquemment 2 ou 3 mètres, et
quelquefois jusqu'à 6 mètres de grand axe).
Ailleurs, le Lias est constitué par des calcaires noirs (1), sillonnés
de veines spathiques et alternant avec des bancs schistoïdes égale-
ment foncés, ou même avec de vrais schistes argileux noirs (route
de l'Argentière aux Vigneaux, col de TEychauda). M. Kilian a
trouvé Pentacrinus tuberculatus dans les calcaires noirs de ce type,
au col de l'Eychauda. Sur le versant Ouest de La Condamine, les
calcaires noirs en plaquettes, alternant avec des schistes, con-
tiennent des gastéropodes indéterminables et des entroques. M.
Kilian (2) a signalé le fait très important de l'association, sur la
route de l'Argentière aux Vigneaux, du faciès calcaire etschistoïde,
d'une part avec le faciès brèche du Télégraphe, d'autre part avec un
faciès coralligène.
A Vallouise, le Lias, extrêmement puissant, est formé de cal-
caires compacts, d'un gris clair, alternant avec des dalles et des
plaquettes grises, plus rarement avec de petits bancs de schistes
noirs. Ces calcaires sont fréquemment pétris d'entroques et de
débris de fossiles. Ils ressemblent au calcaire coralligène des Vi-
gneaux, et aussi à certains bancs à entroques du versant ouest de
la Condamine. Mais leur puissance, leur couleur claire, leur com-
pacité, en font un type très spécial du Lias briançonnais. Ce Lias
de Vallouise forme la base du paquet d'écaillés (et repose, par con-
séquent, sur le Flysch), depuis l'escarpement qui domine à l'est le
(1) Kilian. B. S. G. F., 3- série, t. XIX, p. 607.
(2) Kxuav. Ibid., p. 607.
54 p. termier 20 Févr.
hameau des Choulières, jusqu'au voisinage de la Tète d'Oréac, sur
une longueur totale d'environ sept kilomètres.
Le Malm présente dans toute la région le faciès dit de Guillestre (1).
L'extension de ce faciès au nord de la vallée du Guil a été signalée
en 1891 et en 1892 par M. Kilian (2). Il est caractérisé, soit par des
calcaires amygdalaires roses ou lie de-vin (marbre de Portor), soit
par des marbres blancs, ou bleuâtres, ou blauc-violacés. Ces divers
termes alternent parfois entre eux, ou alternent avec des schistes
friables, d'un gris clair ou d'un rose clair, ou rouges. La cassure
des marbres et des calcaires est esquilleuse (avec esquilles translu-
cides) et rappelle la cassure du silex, parfois même celle de l'opale.
Certains bancs contiennent des silex. Beaucoup renferment des
nodules ou des veines d'une limonite siliceuse. Des calcaires gris
bleuâtres et même des calcaires noirs, d'apparence triasique, s'asso-
cient parfois aux marbres et aux schistes. Les fossiles (Aptyclius,
Ammonites, Crinotdes, Duvalia), parfois assez abondants, se rencon-
trent dans les marbres roses, lie-de-vin, blancs, blanc-bleuâtres,
blanc- violacés.
Les marbres (quand ils n'ont pas été réduits en plaquettes par le
laminage) se laissent facilement distinguer des calcaires triasiques.
Us se présentent en gros bancs très compacts, montrant de loin
une couleur plus blanche que les calcaires du Trias, et prenant,
aux affleurements, par érosion chimique, des formes arrondies.
Ces gros bancs ont fréquemment 10 mètres, et quelquefois même
20 mètres, de puissance. Le phénomène des lapiez y est fréquent.
Quand il y a plusieurs de ces bancs (Montbrison, Condamiue), ils
sont habituellement séparés par des schistes rouges, roses ou gris,
et ces iutercalations sont assez épaisses pour donner lieu à des
formes d'érosion très spéciales. Les calcaires du Trias (calcaires
dits à Gyroporelles) forment un ensemble beaucoup plus puissant
et beaucoup plus homogène.
Si l'on étudie dans le détail les très nombreux affleurements de
Malm de la région, on constate qu'il y a, de l'un à l'autre, des diffé-
rences de faciès qui tiennent surtout à la prédominance de tel ou
tel genre d'assises. Ici, les marbres blancs, ou violacés, sont pré-
pondérants; ailleurs, ce sont les schistes; ailleurs, les marbres
roses. Mais il y a deux caractères qui ne manquent presque jamais
(1) Lohy. II. S. G. F., 3* série, t. XII, p. 147. — Collot. Descr. géol. des envi-
rons d'Aix-en- Provence, 1880, p. 149.
(2) Kilian. Sur l'existence du Jurassique supérieur dans le massif du Grand-
Galibier. B. S. G. F., 3* série, t. XX, p. 21 et sulv. — Id. Ibid./S* série, t. XIX, 1891.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNA1S 55
et qui me semblent être, par suite, les traits pétrographiques essen-
tiels du faciès de Guillestre : la compacité des marbres, et la bigar-
rure des assises dans les tons roses, violets, gris et blancs.
L'épaisseur apparente du Malm briançonnais est presque tou-
jours assez faible (50 à 60 mètres). A La Condamine et au Sablier,
où il n'y a, selon toute vraisemblance, ni reploiement des couches,
ni laminage intense, la puissance varie entre 60 et 80 mètres. Sur
quelques points (montagne de la Croix d'Aquilla, Montbrison, Tète.
d'Amont), le Malm est beaucoup plus épais (jusqu'à 300 mètres) :
mais cette exagération de puissance apparente me semble due à
des reploiements multipliés.
Le Flysch qui forme le substratum de la zone du Briançonnais
(substratum réel ou supposé) a des caractères assez constants. C'est
une alternance de grès plus ou moins fins, de grès assez grossiers,
de schistes gréseux micacés, et de schistes fins de couleur grise ou
noire. Dans l'ensemble, les grès forment l'élément prépondérant.
Ce complexe repose sur des schistes argileux fins (exploités pour
ardoises dans les hautes vallées de l'Onde et du Fournel), qui sont
eux-mêmes séparés des terrains cristallins du Pelvoux par une
faible épaisseur de calcaire à petites nummulites (faune de Faudon)
et par quelques mètres d'une assise gréseuse grossière, ou d'un
véritable conglomérat à galets granitiques.
Dans l'intérieur de la zone du Briançonnais, c'est-à-dire à l'est
de la bande oligocène qui va d'Embrun aux Aiguilles d'Arves, le
Flysch apparaît çà et là, sur le Malm, ou sur les calcaires du Trias.
Mais il présente alors un faciès un peu différent. Les grès grossiers
y font totalement défaut, ou du moins n'y jouent plus qu'un rôle
très secondaire. La prépondérance appartient à des schistes quart-
ziteux, parfois micacés, de couleur foncée (brune, rouge, verte ou
grise). Ces plaquettes siliceuses sont fréquemment ondulées. Des
veinules de quartz blanc les traversent dans tous les sens. Des
schistes argileux et micacés, à clivage luisant, habituellement de
couleur noire, alternent avec les plaquettes en question. On observe
aussi, mais rarement, de petits bancs d'un calcaire siliceux, parfois
un peu magnésien, assez semblables à certains bancs triasiques. Le
type de ce Flysch (dont les dépôts ont un caractère beaucoup moins
littoral que ceux du Flysch de l'Embrunais) se trouve dans les
montagnes de l'Eychauda, de Serre-Chevalier et de Prorel. A La
Condamine et au Sablier, des dépôts tout à fait analogues à ceux
de Prorel s'associent, d'une part à des grès identiques à ceux de
l'Embrunais, d'autre part à de petits bancs, sans grande continuité,
56 p. termikr 20 Févr.
d'un calcaire siliceux passant, par dissolution, à des sortes de car-
gneules.
Un troisième faciès du Flysch se rencontre à l'Eychauda et à
Serre-Chevalier, au milieu des schistes cristallins qui forment ce
que j'appellerai plus loio la quatrième écaille. Ce sont des conglo-
mérats à galets de schistes cristallins, et, plus rarement, à galets
triasiques et liasiques. Je n'y ai pas, jusqu'ici, rencontré de galets
de Malm. La grosseur des galets indique ud dépôt côtier; et, sur
la côte où se sont formés ces dépôts, il affleurait surtout des assises
cristallines. Les galets cristallins dont il s'agit ici ne viennent pas
du Pelvoux : ils sont arrachés à des schistes identiques à ceux de
la quatrième écaille.
J'aurai terminé cette brève revue de la stratigraphie briançon-
naise quand j'aurai mentionné les Schistes cristallins de la qua-
trième écaille. J'ai décrit ces schistes — et aussi les conglomérats
tertiaires, et les gneiss et amphibolites associés — dans un mémoire
publié ici même en 1895 (1). Je n'at presque rien à changer à la
partie pétrographique de cette étude. Il est certain qu'il y a «ne
liaison très intime entre les conglomérats dont j'ai parlé à l'alinéa
précédent, et dont l'âge tertiaire n'est guère douteux, et les schistes
cristallins eux-mêmes. Il est certain aussi que, là où les conglomé-
rats sont laminés (et le cas est fréquent), le ciment de ces conglo-
mérats devient très métamorphique, au point que l'on ne peut plus
le distinguer, sous le microscope, d'avec un schiste cristallin. Mais
de nouvelles observations m'obligent néanmoins à modifier l'opi-
nion que j'exprimais en 1895, et je ne puis plus conclure, comme
je le faisais alors, en attribuant au Tertiaire l'ensemble des terrains
cristallins en question, y compris les gneiss et les amphibolites.
Ma conclusion actuelle est que j'ignore l'âge de ces terrains cris-
tallins, mais qu'ils sont inséparables des roches vertes et micaschistes
intercalés dans les Schistes lustrés. Je réserve toutefois, dans l'affir-
mation qui termine la phrase précédente, le cas des gneiss de Serre-
Chevalier, qui pourraient, à la rigueur, être plus anciens. Quel que
soit l'âge des roches vertes des Schistes lustrés, il me paraît certain
que cet âge est antérieur à l'Oligocène; car je crois que les conglo-
mérats de l'Eychauda sont une forme du Flysch, et les roches cris-
tallines en question affleuraient déjà, et sous le même état physique
qu'aujourd'hui, quand ces conglomérats se sont formés.
(1) Sur les terrains cristallins, d'âge probablement tertiaire, des montagnes de
l'Eychauda, de Serre-Chevalier et de Prorel. — B. S. G. F., & série, t. XXIII,
p 372 et suiv.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 57
•
La raison qui me détermine à rattacher (contrairement à l'opi-
nion que j'ai autrefois émise) Jes schistes cristallins de l'Eychauda
et de Serre- Chevalier aux roches vertes des Schistes lustrés gît
dans la découverte de deux faits nouveaux, tous deux certains. Eu
premier lieu, il y a, à la hase des lambeaux cristallins, une lame
de Houiller, de Perraien ou de Trias, qui prouve que ces lambeaux
(contrairement à ce que je croyais en 1895) ne sont pas en place; et,
comme ils ne peuvent venir que de Test, ils viennent de la région
des Schistes lustrés. En second lieu, M. Kilian a découvert, dans le
courant de l'été dernier, à l'Alpet, au nord du Mont-Genèvre, sur
les confins de la zone des Schistes lustrés, des schistes cristallins
identiques à ceux de l'Eychauda, associés aux mêmes conglomérats
à galets cristallins et triasiques ; et, en revenant ensemble à ce gise-
ment de l'Alpet, nous avons constaté, M. Kilian et moi, que ces
schistes cristallins passent, vers le nord, à des roches micacées et
chloriteuses, semblables à celles qui s'intercalent dans les Schistes
lustrés, lesquelles roches, sous l'arête du col de la Lauze, alternent
avec des calcaires triasiques en plaquettes et des calcschistes. Quel-
ques jours plus tard, M. Kilian a retrouvé les mêmes schistes cris-
tallins, intercalés dans des calcaires triasiques passant aux Schistes
lustrés, en deux autres points (1) de la région briançonnaise, situés
aussi sur les confins des zones, au col Tronchet, et près de Villar-
gaudin.
Je prie le lecteur de vouloir bien remarquer qu'en disant que
j'ignore l'âge des roches vertes des Schistes lustrés, je n'entends
pas jeter le doute sur l'âge des Schistes lustrés eux-mêmes. Je con-
sidère, avec MM. Marcel Bertrand et Kilian, que ces schistes lustrés
sont un faciès du Trias supérieur et du Lias. Mais je regarde comme
peu vraisemblable l'hypothèse de la contemporanéité des schistes
et des roches vertes, et je crois que ces dernières (qui ont souvent
des structures de roches abyssiques ou hypo abyssiques) sont en
nappes intrusives au milieu des schistes.
Ayant ainsi rappelé sommairement la stratigraphie de la contrée,
j'arrive à mon essai de démonstration.
J'établirai successivement :
1° Que les lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Chevalier (qua-
trième écaille) sont des témoins d'une nappe venue de l'est ;
2° Que le substratum de ces lambeaux est un paquet d'écaillés,
(1) Kiuan. Sur divers faits nouveaux de la géologie des Alpes dauphinoises.
C. H.Ac. Sc.y 7nov. 1898.
58 p. termiek 20 Févr.
paquet plissé lui-même après l'empilement, et que le nombre des
écailles ainsi empilées, variable sans doute d'un point à l'autre de
la zone du Briançonnais, semble être de trois (lre, 2e et 3e écailles)
dans la région comprise entre Vallouise et Briançon;
3° Que, pour rendre compte des faits, deux hypothèses, et deux
seulement, viennent à l'esprit, et que l'une d'elles se heurte à de
très graves difficultés ;
4° Qu'au contraire, la deuxième hypothèse, celle que je propose,
fournit, de la tectonique locale, une explication plus vraisemblable,
et qu'en outre, elle s'arrange de façon assez séduisante avec ce que
nous savons de la géologie des Alpes Occidentales.
§ I . — Lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Chevalier.
Ces lambeaux sont représentés, sur la carte au 80.000e de la PI. I,
par un figuré spécial, et désignés, dans la légende de cette carte,
sous le nom de quatrième écaille. On voit qu'ils sont au nombre de
trois, et qu'ils occupent la partie haute des montagnes comprises
entre Briançon et la vallée de l'Eychauda.
Les trois lambeaux sont composés, presque partout, d'assises à
peu près horizontales ou plongeant faiblement vers le nord-est. Ils
reposent habituellement sur le Flysch (schistes quartziteux de cou-
leur foncée, brune, verte ou noire, schistes à mica détritique,
schistes argileux ou siliceux versicolores), qui, lui-même, repose
sur le Malm. En quelques points cependant, le Flysch disparaît en
s'étirant : la base des lambeaux confine alors au Malm. Le Malm
peut s'étirer à son tour, et la base des lambeaux confiner au Trias :
mais, en suivant l'affleurement de cette base, on voit bientôt repa-
raître ou le Malm, ou le Flysch.
Grâce à l'érosion, l'affleurement de la base des lambeaux peut
être suivie (et je l'ai suivie minutieusement) sur une longueur
totale d'environ 20 kilomètres. Sur les trois quarts, au moins, de
ce parcours total, on voit le Flysch former le substratum.
Le plus grand des trois lambeaux, celui de Test (Serre-Chevalier,
Prorel) a été percé par l'érosion, et l'on voit apparaître, dans son
intérieur, sur une surface d'environ un kilomètre carré, le même
substratum de Flysch, Malm et Trias, qui s'observe sur le pourtour
extérieur. Près de cette grande déchirure, le substratum perce
encore, à travers les terrains du lambeau, sur le chemin qui mène
au col de la Ricelle, et l'on voit alors pointer, sous les terrains du
lambeau, des affleurements de Malm, de Lias ou de Trias.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 59
Le long de son bord nord, au voisinage du point 1912 de la carte, le
lambeau de Serre-Chevalier s'enfonce nettement (avec une pente
d'environ 20° au nord) sous des terrains variés, Flysch, Malin,
Trias, identiques aux terrains du substratum, et formant une série
renversée. Tout se passe comme si le substratum du lambeau et le
lambeau lui-même étaient ployés en un synclinal dirigé est ouest
et fortement couché vers le sud. L'étude du substratum montre
qu'il en est bien ainsi. Ce substratum des trois lambeaux est ployé
en une série de plis peu continus et de direction un peu sinueuse :
un synclinal, dont le Flysch forme l'àme, va des Guibertesà Fréjus,
par le col situé immédiatement à Test de la Cucumelle; un autre
synclinal va de Villeneuve au point 1912, et l'àme de ce deuxième
synclinal est formée par le lambeau de Serre-Chevalier; entre ces
deux synclinaux, court, de Freyssinet uu point 2143, un anticlinal
qui fait affleurer les quartzites du Trias, mais cet anticlinal s'atté-
nue brusquement au sud de ce dernier point et finit même par
disparaître.
Ainsi, comme je l'ai indiqué en 1895, la partie haute du socle sur
lequel reposent les lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Chevalier
est formée d'une série de terrains en superposition normale, série
qui se termine par le Flysch. Les trois lambeaux sont posés tout
au sommet de cette série, exactement comme s'ils la continuaient,
je veux dire comme si leurs assises s'étaieut réellement déposées
sur celles du Flysch. Le socle et les lambeaux ont été plissés, en
plis, sinueux et peu continus, dirigés, d'une façon générale, vers
le nord-nord-ouest, et fortement couchés vers le Pelvoux. Le lam-
beau de l'Eychauda, qui, à l'Eychauda même, est horizontal, se
prolongeait vers le nord, avant l'érosion, par le synclinal qui va
de Fréjus aux Guibertes. Le lambeau de Serre-Chevalier forme lui-
même l'âme d'un deuxième synclinal qui va du poiut 1912 à Ville-
neuve ; et si les assises horizontales de Serre-Chevalier prolongent,
au moins à peu près, les assises horizontales de l'Eychauda, c'est
que l'anticlinal qui, plus au nord, sépare les deux synclinaux
dont je viens de parler, disparaît avant d'arriver sous l'arête
•
Eychauda-Serre-Chevalier.
Les coupes ci-dessous (fig. 2) résument la description précédente.
Les lambeaux de l'Eychauda, de Serre-Chevalier et de Prorel y
sont représentés comme des blocs, sans distinctions fondées sur la
nature des assises. Dans ces trois coupes, tout ce qui est dessiné en
traits pleins résulte directement de l'observation.
Si l'on compare la dernière de ces coupes avec la coupe Eychauda-
00
P. TERMIER
20 Févr.
Prorel que j'ai publiée en 1895 (1), on verra que la seule différence
essentielle, en ce qui concerne les lambeaux et la partie haute de
leur socle, est relative à la structure de Prorel. Cette montagne
m'apparaissait, en 1895, comme un anticlinal en éventail. Je crois
être, aujourd'hui, absolument certain que les schistes du Flysch
s.s.o.
Col
Sommet de
l 'Eychanda
N.N.e.
.\j \
sa
Serre -
Chevalier
N.E.
Goudiaaard
î^-*1 T La GuUaime
Sommet de
l'EycheadM
Cote 1SOO?
Serre -
Chevalier
E.
Rporel
f.V.'J II Mouiller.
^^B M ^ffitlm.
u JMunieattœ de
' l<t£? écaille
Fig. 2. - Coupes à travers les lambeaux de la quatrième écaille.
passent sous Prorel, et que la niasse de calcaires triasiques et
liasiques qui forment le sommet en question fait partie intégrante
du lambeau de Serre-Chevalier. C'est donc plus à Test, et proba-
blement non loin de la duisanne, que passe la ligne axiale de
l'éventail alpin.
[\) B. S. C. F., 3» série, t. XXIII, planche VII
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DC BRIANÇONNAIS 61
Or, ma conclusion (1), en 1895, était que, si les lambeaux cris-
tallins de l'Ëychauda et de Serre-Chevalier n étaient pas en place,
ils appartenaient à un anticlinal, couché vers l'ouest, et s'enraci-
nant au col de Prorel. Je considérais d'ailleurs cette dernière hypo-
thèse comme peu vraisemblable, et j'indiquais nettement mes pré-
férences pour la solution qui supposait les lambeaux en place, et,
par conséquent, exclusivement formés de couches tertiaires. J'eusse
été bien plus aflirmatif encore, si j'avais su ce que je sais aujour-
d'hui, à savoir que le Flysch passe sous Prorel, et que le col situé
à l'ouest de cette montagne (col de Prorel) correspond à un syn-
clinal, et non pas à un anticlinal. Nous allons voir, cependant,
que cette solution (lambeaux cristallins en place) ne peut plus être
admise aujourd'hui, et qu'ainsi Ton est obligé de faire appel à l'un
de ces charriages, venus de l'ouest ou de l'est, que je rejetais, en
1895, comme tout à fait invraisemblables.
Examinons en effet la composition des trois lambeaux, posés sur
le Flysch, qui constituent ce que j'ai appelé la quatrième écaille.
Le lambeau de l'Ëychauda comprend, presque partout, à sa base,
des conglomérats à galets de schistes cristallins, de quartz blanc,
plus rarement de quartzites permiens ou triasiques, et de calcaires
du Trias ou du Lias. Le ciment, parfois rougeàtre et chargé d'héma-
tite, est, le plus souvent, composé de petits débris des mêmes
roches. Les schistes cristallins des galets sont rarement feldspa-
th iques. Ils sont fort différents de ceux que 1 on peut trouver sur le
bord oriental du massif du Pelvoux (2), et sont, au contraire, iden-
tiques à ceux qui forment les assises superposées aux conglomérats.
Les galets de vrais gneiss sont très rares. Les galets que, dans ma
description de 1895, j'ai rapportés à la « grauulite », sont d'une
roche qui ne ressemble point aux aplites du Pelvoux, et qui est
probablement une sorte de leptyuite. Le granité du type Pelvoux
fait entièrement défaut. On rencontre assez souvent des galets
d'amphibolites, et le type de ces amphibolites en galets, très spécial,
est encore le même que celui des amphibolites en assises régulières,
superposées aux conglomérats.
Au-dessus de ces conglomérats viennent des assises cristallines,
le plus souvent quartzo-sériciteuses, ou quarlzo-chloriteuses, et
(1) Ibid., p. 581.
(2) Je rappelle ici que le bord oriental du massif du Pelvoux est presque exclu-
sivement formé de roches granitiques (granité, aplite, microgranite), ou tout au
moins très feldspathiques (gneiss à mica noir, gneiss amphiboliquesj. La brèche de
base du NummuliUque de la zone du Flysch est surtout faite de galets de granité.
62 p. termier • 20 Févr.
pauvres en feldspaths, quelquefois formées d'amphibolites à sphène,
ou d'un mélange allotriomorphe d'amphibole, d'épidote et d'albite,
quelquefois chargées de chlorite, de serpentine et de produits fer-
rugineux. Les assises formées d'amphibole, d'épi dote et d'albite
sont probablement des gabbros recristallisés.
Ces assises cristallines ont, à l'Eychauda, une grande épaisseur
apparente. Ce sont elles qui forment le sommet de la montagne
(point 2664). A 60 mètres environ au-dessous de la cime, sur le
versant nord, il y a, dans les assises cristallines, une intercalation
de conglomérat à petits galets cristallins. Les assises cristallines
du sommet de la montagne, horizontales au sommet, plongent elles-
mêmes (à quelques centaines de mètres au nord-ouest du sommet)
sous d'autres conglomérats. Il y a donc des conglomérats tout en
haut et tout en bas du lambeau de l'Eychauda, et de plus, en un
point, on constate un niveau iutermédiaire, également occupé par
des conglomérats. Si j'ajoute que les conglomérats sont laminés,
que leur ciment est riche en cristaux secondaires, que les assises
cristallines elles-mêmes sont inhomogènes et ressemblent à des
brèches dynamo-métamorphisées, que la séparation des assises cris-
tallines et des conglomérats est toujours fort difficile, on conviendra
que ma conclusion de 1895, relative à l'identité probable des conglo-
mérats et des assises cristallines, n'était pas sans quelque excuse.
Dans une butte ronde qui s'élève à un kilomètre environ au
nord-nord-ouest du sommet de l'Eychauda, un peu au sud du
point que couvre la lettre T* de la carte d'Etat-Major, la base dd
lambeau est faite de couches bieu singulières que j'ai déjà signa-
lées en 1895. Le croquis ci-dessous (fig. 3) représente, vue du sud,
cette butte, que j'appellerai désormais « Butte des Galets ».
..-->-'
EboulU '■'• '• \jb\V\ \^
\\
Fig. 3. — La Butte des Galets, vue du Sud.
La lettre F et les lignes ponctuées désignent les affleurements
des couches du Flysch qui -formçnt le substratum du lambeau. Ce
Flysch n'est pas visible, à gauche, sous les bancs E. Ceux-ci sont
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 63
des micaschistes quartziteux très durs; ils sont surmontés, en G,
par des roches amphiboliques d'un vert noirâtre (gabbros décom-
posés?). A est un gros bloc de calcaire du Trias, long de 7 mètres,
épais de 3 mètres, enveloppé dans une brèche résultant de l'écrase-
ment de micaschistes et d'amphibolites. Près de lui, et dans le
même ciment, il y a d'autres blocs, parfois arrondis comme des
galets, du même calcaire. Dans les bancs C, inférieurs à A, se
trouvent, dans les mêmes conditions, des blocs d'un marbre blanc
et rose ayant tous les caractères extérieurs du Malm; et le ciment
qui les enveloppe est fait, en grande partie, de débris de quartzites
rouges, non métamorphiques, identiques aux quartzites permiens.
En D, on trouve encore de petites enclaves de calcaire triasique
dans une sorte de schiste chloriteux reconstitué. En B, des schistes
analogues, très chargés de chlorite et de magnétite, renferment
une traînée de blocs de marbre rose de toute dimension. D'après
M. Kilian, le marbre rose de ces blocs serait probablement du Malm.
En H, enfin, l'arête est de la butte est formée de conglomérats du
type ordinaire.
Je me suis demandé bien longtemps si les gros blocs A, B, C,
sont des galets, ou s'il y faut voir, comme je le disais déjà en 1895,
« des lambeaux de terrains étirés et écrasés le long d'une surface
» de friction ». Cette deuxième manière de voir me parait aujour-
d'hui la plus vraisemblable, en raison de l'énorme dimension de
quelques-uns de ces blocs, de ce fait que beaucoup d'entre eux, en
A et en C, ont conservé des angles presque vifs, et de cet autre fait
que, dans certains bancs C, le ciment résulte visiblement de l'écra-
sement des blocs de quartzites permiens.
Il est donc d'ores et déjà probable que le lambeau de l'Eychauda
n'est pas en place, et qu'il y a, entre son substratum et lui, une
lame de terrains étirés. Pour qu'il fût en place, il faudrait d'ailleurs
que, conformément à ma conclusion de 1895, les assises cristallines
fussent du même âge que les conglomérats (à cause des alternances).
L'étude des autres lambeaux va nous permettre de trancher défini-
tivement la question.
Je ne dirai qu'un mot du deuxième lambeau, tout à fait exigu,
que l'on peut observer au sud-est du point 2143, sur un petit sen-
tier qui va de Fréjus à Goudissard. C'est un lambeau de terrain
houiller posé sur le Flysch. Et comme le Flysch en question est, sans
aucun doute possible, celui qui supporte le lambeau de Serre-Che-
valier, on voit que le lambeau houiller dont je parle fait partie de
64
P. TERMIER
20 Févr.
o.
E.
Um»
0.
E.
la même « quatrième écaille » que les lambeaux de Serre-Chevalier
et de l'Eyehauda.
Venons maintenant au grand lambeau de Serre-Chevalier.
Eu divers points, à sa base, on observe des conglomérats à galets
de schistes cristallins et de quartz. Sauf la dimension des blocs (qui
est ici bien moindre) et l'absence des galets de Trias et de Lias, ce
sont les mêmes conglomérats qu'à l'Eyehauda. Au-dessus de ces
conglomérats, vient, à Serre-Chevalier même, une longue série
d'assises très cristallines où s'intercale un banc, puissant de trois
ou quatre mètres, d'un magnifique gneiss porphyroïde (type du
Grand- Paradis ou de la Levanna). Les assises cristallines sont sur-
tout des schistes quartzo-
phylliteux. H y a aussi des
amphibolites.
Mais, ce qui est tout à
fait intéressant, c'est qu'eu
de nombreux points, tantôt
à la base même et immé-
diatement au-dessus du
Flysch, tantôt près de la
base et séparée du Flysch
par des assises cristalliues
ou des conglomérats, il y
a une lame de Houiller, ou
de quartzites permiens ou
triasiques, ou enfin de car-
gneules du Trias. Les trois
coupes ci -contre (tig. 4)
montrent des exemples de
cette disposition.
La première de ces cou-
pes s'observe au débouché
du cirque de Prorel, à
800 mètres environ au sud
du pointl912. La deuxième
est prise au nord-est de
Serre-Chevalier, sur l'arête qui (Jomîue au nord la fontaine de
Saint-Jacques. La troisième se voit à trois cents mètres au sud-
ouest du point 1912, sur le grand chemin des pâturages. Des
coupes semblables sont visibles en plus de dix autres endroits,
sur le pourtour de la grande déchirure, sur l'arête mousse qui
S.
N.
Fitf. i. — Lame houillère, permienne ou Iria-
sique, à la base du lambeau de Serre-Che-
valier.
Kl, Klysch": M. Malm ; Tr, Trias calcaire;
Q, fyuartzitcs ; Per, Pcrmicn ; Congl., Con-
glomérat a galets cristallins ; Sch. cr.,
Schistes cristallins : H, Houiller.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 65
descend de Serre-Chevalier au point 2143, à l'origine du grand
ravin qui passe à l'ouest de Goudissard (quartzites et cargneules).
La lame en question est donc à peu près continue.
S'il en est ainsi, et si, comme tout semble l'indiquer, le lambeau
de Serre-Chevalier est le témoin d'un synclinal couché vers le sud-
ouest, la lame houillère, permienne ou triasique, doit se retrouver
dans les parties conservées du flanc renversé de ce synclinal, c'est-
à-dire à Prorel même, et près de Goudissard. C'est en effet ce que
Ton observe. Le sommet de Prorel est formé de conglomérats
liasiques, à gros galets de quartzites et de calcaires du Trias. Ces
IVorel
2522-
Coldo Prorel
N.
Fig. 5. — Retour de la lame de quartzites dans le flanc renverse du synclinal,
à Prorel, et au-dessus des Faures.
Même légende que pour la fig. 4, et, en outre : L, Lias ; Gyp., Gypse.
conglomérats reposent sur des calcaires triasiques; et ceux-ci, sur
le bord est du col de Prorel, sont séparés des schistes cristallins
par une intercalatiou, peu puissante, de quartzites roses triasiques
et de schistes rouges permiens. D'autre part, sur le chemin qui
descend des hauts pâturages à Goudissard, à 600 mètres, environ,
au sud-sud-ouest des Faures, on voit un lambeau de quartzites
posé sur les schistes cristallins, et, un peu plus bas, schistes cris-
tallins et quartzites s'enfoncent sous les schistes bruns du FI y se h.
Je réunis ces deux coupes dans la figure ci-dessus (fig. 5).
La conclusion s'impose. Le lambeau de Serre-Chevalier renferme
partout, à sa base, ou près de sa base, une lame de Houiller, de
Permien ou de Trias. Quand cette lame n'est pas à la base même
20 Avril 18ÎW. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 5
66 p. tkrmier 20 Févr.
du lambeau, c'est-à-dire quand elle ne touche pas directement au
Flysch ou au Malin du substratum, elle en est séparée par une série
inverse, comprenant des schistes cristallins, et, au-dessous d'eux, des
conglomérats à galets cristallins. A Prorel, cette série inverse est
renversée, et par conséquent redevient une série normale; mais,
au lieu de montrer des schistes cristallins et des conglomérats, elle
montre, au-dessus des quartzites, des calcaires du Trias et une
brèche liasique à faciès tout à fait spécial (1).
On comprend maintenant pourquoi le deuxième lambeau (celui
qui se trouve au sud-est du point 2143) est simplement formé d'une
lame de Houiller posée sur le Flysch. On comprend aussi les sin-
guliers bancs de la « Butte des Galets », avec leurs blocs de Trias,
de Malm, de Permien, écrasés et enrobés dans une brèche de fric-
tion où se mélangent micaschistes et amphibolites. On comprend
enlin pourquoi la base du lambeau de TEychauda est habituelle-
ment formée par les conglomérats, et aussi pourquoi ces conglo-
mérats reviennent à mi-hauteur, et se retrouvent enfin tout en haut
de la série.
Les trois lambeaux ne sont pas en place. Ils ont été apportés sur
le Flysch par un phénomène de transport antérieur aux derniers
plissements (puisque la lame de Trias, de Permien et de Houiller
intercalée est plissée comme le substratum). La seule question qui
se pose désormais est celle de leur origine.
Tout d'abord, je ne crois pas que Ton puisse admettre qu'ils
viennent de l'ouest. Et je n'invoquerai pas, contre cette hypothèse,
mon argument de 1SÎ)5, à savoir qu a l'ouest des lambeaux tous les
plis sont couchés vers l'ouest : car nous allons voir qu'un argu-
ment identique pourrait être opposé à l'hypothèse de l'origine
orientale. Je n'invoquerai que des raisons de faciès. Les lambeaux
viennent d'une région où régnait le faciès briançonnais du Trias,
et où se développait, en outre, une formation de schistes cristal-
lins, d'amphibolites et de gneiss dont les types sont essentielle-
(1) On pourrait, au premier abord, être tenté de rattacher le. Lias de Prorel au
substratum des lambeaux, et d'y voir un témoin de ee substratum renversé. Mais
si l'on considère qur nulle part, dans le substratum non renversé, le Lias ne pré-
sente le faciès de Prorel, qur 1rs cailloux de quartzites roses du Lias de Prorel
sont d'une roche, identique à celle de la lame sousjaemte, qu'enfin, et surtout,
au col fit* Méa (lambeau de l'Kycbauila), il y a, dans les conglomérats à galets cris-
tallins qui s'associent aux schistes cristallins, qu'il y a, dis-je, des galets de brèche
liasique n cailloux de quartzites roses, e'est-a-dire des galets du Lias de Prorel,
on demeurera convaincu, avec moi, que le Lias de Prorel fait bien partie inté-
grante du lambeau de Serre-Chevalier.
1899 • LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 67
ment différents de ceux des micaschistes, gneiss et amphibolites
de la première zone alpine.
Les lambeaux viennent donc d'ailleurs que de l'ouest. Ici se
place la découverte dont j'ai déjà parlé, découverte de la plus haute
importance, faite par mon ami M. Kilian dans le courant de Tété
de 1898. Des terrains identiques à ceux des lambeaux existent à
l'est de la Durance, sur les confins de la zone des Schistes lustrés.
C'est à l'Alpet et à Serre-Thibaud, au nord du village de Mont-
Genèvre, que M. Kilian a découvert, formant des bandes isoclinales
dans des calcaires triasiques, des schistes cristallins, associés à
des roches vertes et noires (Gabbros décomposés), et à un conglo-
mérat à galets cristallins qui renferme aussi quelques galets de
quartzites et de calcaires du Trias. L'identité est absolue avec les
types de l'Eychauda. Une bande parallèle à celles de l'Alpet, et très
voisine, s'observe au pied (à l'ouest) du Chaberton, et se relie, sui-
vant toute vraisemblance, à la grande masse des roches vertes du
Mont-Genèvre. Au nord de l'Alpet, dans l'arête du col de la Lauze,
nous avons observé, M. Kilian et moi, de véritables alternances de
schistes cristallins (semblables à ceux de l'Alpet) et de calcaires
en plaquettes passant à des calcschistes du type Schiste lustré. J'ai
déjà dit qu'à Villargaudin et au col Tronchet, au sud-est de
Briançon, M. Kilian a signalé deux autres affleurements de schistes
cristallins, dans les mômes conditions générales.
11 appartient à M. Kilian de décrire ces diverses roches cristal-
lines et de montrer (ce qui nous paraît à tous deux évident) leur
liaison intime avec les roches vertes des Schistes lustrés. Je ne veux
retenir de cette découverte que ceci : les lambeaux de l'Eychauda
et de Serre-Chevalier viennent de l'est.
Je vais plus loin et je dis qu'ils viennent d'au-delà de la Durance,
c'est-à-dire qu'ils ne s'enracinent point dans les pentes qui, de
Prorel ou de Serre-Chevalier, descendent vers la Guisanne ou vers
Briançon. Car ces pentes, en dessous du socle de Trias, de Malin et
de Flysch qui porte les lambeaux, sont constituées par des assises
houillères qui forment la base de ce socle; et rien n'y affleure, en
dehors du terrain houiller. Et comme les montagnes qui dominent
immédiatement Briançon au nord et à l'est sont formées de Trias,
Lias et Malm du type ordinaire, il faut aller jusqu'au Gondran et
jusqu'à l'Alpet, c'est-à-dire jusqu'aux confins de la zone des Schistes
lustrés (1).
(1) J'ajoute qu'au Gondran, les roches vertes (gabbros décomposés) m'ont paru
reposer sur le Flysch, et ce Flysch in 'a semblé idenUque à celui de Prorel
68 p. termier 20 Févr.
Quelle que soit leur provenance précise, et mtone si le Briançon-
nais et si les Schistes Iwtréssont en place, les lambeaux del'Eychauda
et de Serre-Chevalier, qui, eux, ue sont certainement pas en place,
ont élé transportés, de Test à l'ouest, avant le dernier plissement
de la région et avant la formation de l'éventail alpin. Ils viennent
du pays des roches vertes, du pays des Schistes lustrés : c'est tout
ce que Ton peut dire quant à leur origine. Ou plutôt, ils viennent
d'un pays où le faciès Schiste lustré du Trias et du Lias se mélan-
geait encore au faciès briançonnais. Dans ce même pays passait le
bord oriental de la mer oligocène : car on ne peut guère douter que
les conglomérats de l'Eychauda et de l'Alpet ne soient un faciès
du Flysch.
Le Houiller existait-il dans ce lieu d'origine des lambeaux de
l'Eychauda et de Serre-Chevalier? Ce point me semble encore dou-
teux. Sans doute la lame qui s'intercale dans les lambeaux con-
tient du Houiller. Si cette lame représente un anticlinal couché, le
Houiller existait donc au lieu d'origine des lambeaux. Mais les
conglomérats ne m'ont jamais montré aucun galet houiller. D'autre
part, j'ai peine à croire que la lame soit un anticlinal, et je préfère
à cette notion du transport par plis celle du transport par nappes
que nous a donnée M. Lugeon. La lame serait ainsi la base de la
nappe. Mais alors, il a pu s'y accoler, pendant le charriage, quelques
fragments du substratum. Telle me parait être l'origine des blocs
de Permien, de Trias et de Mal m de la a Butte des Galets ». Le
Houiller de la lame pourrait avoir une origine analogue.
§ II. — Substratum des lambeaux de l'Eychauda
et de Serre-Chevalier.
De prime abord — et c'est ainsi que je l'avais jugé en 1895 —
le substratum des lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Chevalier
apparaît comme formé d'une série normale de terrains, allant du
Houiller au Flysch. Ces terrains montrent, le plus souvent, des
strates horizontales, ou faiblement inclinées. En réalité, ils sont
fortement plissés, en plis sinueux, peu continus, couchés vers le
Pelvoux.
(schistes à mica détritique, gris, noirs, verts et bruns, schistes quartziteux bruns
à veinules quartzeuses). Je suis donc porté à croire que les roches vertes du Gon-
dran, et du Mont-Genèvrc, et les schistes cristallins de l'Alpet, appartiennent à la
moine nappe de recouvrement que les lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Che-
valier.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNA1S 69
Quand on examine les choses de plus près, on voit que cette
masse plissée se décompose partout en plusieurs écailles, qu'il y a
partout, non pas une seule fois la série des terrains du Houiller au
Flysch, mais deux ou trois séries semblables superposées les unes
aux autres, avec ou sans intercalation d'une série renversée entre
deux séries normales consécutives. 11 y a donc eu deux phéno-
mènes successifs : formation d'un paquet d'écaillés; puis plisse-
ment de ce paquet.
Ces phénomènes ont été accompagnés d'étirements, d'amincisse-
ments, et même de suppressions d'étages, qui s'observent à chaque
pas. Dans le massif compris entre la zone du Flysch et la vallée
Guisanne-Durance, un terrain d'âge donné est susceptible de con-
finer à des terrains de tout âge : le contact anormal est presque
aussi fréquent que le contact régulier.
Voici les faits sur lequel s je m'appuie pour prétendre que le
massif en question estm paquet d'écaillés.
1° Les coupes de la chaîne de Montbrison. — C'est la grande chaîne
calcaire qui domine Vallouise à l'est (cimes de la Condamine, du
Sablier, de Monlbrison, de la Tète d'Amont). Elle se prolonge au
sud par l'arête de la Serre-des-Hières et par le long promontoire
qui sépare la Gyronde de la Durance. Dans la partie haute et sur le
versant est de cette chaîne, à une altitude moyenne de 2600 mètres,
sur une longueur de cinq kilomètres, on voit apparaître, d'une
façon continue, au milieu du Trias, une voûte de terrains plus
récents (fig. 6).
Sur la carte de la PI. I, cette voûté correspond à la longue
bande anticlinale, attribuée à la première écaille, et allant du
Rocher-Bouchard à la Tète-d'Amont. Ce n'est qu'à partir du Pic de
Montbrison que la clef de la voûte s'ouvre et laisse apercevoir le
Trias sous-jacent. Sous la Tète-d'Amont et sous le Pic de Mont-
brison, le Malrn, parfois très épais, parfois réduit à moins d'un mètre
de puissance, tantôt seul, tantôt accolé à des lambeaux de Lias ou
de Flysch, forme une lame continue, courbée en voûte, ayant pour
toit les calcaires triasiques compacts de l'arête, et pour mur le Trias
schisteux qui affleure dans tous les ravins.
Au nord-est de la Tôte-d'Amont, sous le mot « TEyrette » de la
carte, on observe, avec la même netteté, une deuxième voûte,
parallèle à la première, qui fait affleurer les calcaires du Trias sous
les quartzites. L'amorce de cette deuxième voûte est visible à
l'extrémité droite de la dernière coupe de la figure 6. Au sud de la
Tète-d'Amont et de la Croix-de-la-Salcette, les axes des deux voûtes
70
P. TERMIER
20 Févr.
plongent brusquement. Mais la courbure anticlinale de la masse
des terrains est visible jusqu'à La Bessée, dans le prolongement de
la voûte orientale. C'est à cette voûte orientale que se rattachent
les calcaires du Lias qui apparaissent dans le promontoire de La
o,
Horhrr Bouchard
28061!1
Calée 1m
ThacovJoite
Vallée
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Le Sablier
2933»
MonlWiaon
2825?
♦ ♦ ♦
'/ dwtitc tht JÎ-Jvou.-r .
l.~7] II Itouiiter.
Li_iJ \ t frias .*eAi.\
"Aistrtta?
'./".j T Calcaires thts 7rra*r.
(F FluscJitdes écailler,
lH JlhbK,.
(L Lias.
' F Ftyjvh de, l'JSmhrunais.
Fig. 6. — (loupes a travers la chaîne de Montbrison.
Bâtie (entre la Gyronde et la Durance) : ces calcaires s'enfoncent
de tout côté sous le Trias schisteux. C'est sans doute encore au
prolongement de la voûte orientale qu'il faut rattacher le bombe-
ment (signalé par M. Lugeon) du Malm au milieu du Trias près de
1899
LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS
71
la Roehe-de-Rame (1). Quant à la voûte occidentale, elle se relève,
au sud de la G y ronde, dans le massif de la Tête-de-la-Rochaille
(fig. 7), à l'est du col de la Pousterle.
Trie
d'Orcac
Col
de la
Bousterle
ta. Ouromie-
Colr 1000™
Fig. 7. — Coupe au voisinage du col de la Pousterle.
(Môme échelle et même légende que pour la ûg. G).
Le point H de la coupe ci-dessus (un peu à l'ouest de la Gy ronde)
désigne un affleurement houiller, très aminci, qui sépare les quart-
zites Q d'avec le Trias schisteux t. Un peu plus au sud, vers le
village de l'Argentière, ce Houiller prend une très grande épaisseur
et donne lieu à quelque exploitation d'anthracite. Il est flanqué, à
l'ouest, d'une laine de Permien qui le sépare des quartzites. A l'est,
il confine constamment au Trias schisteux.
Ainsi l'on ne peut douter que la chaîne de Montbrison tout entière
ne soit en chevauchement sur une écaille de Malm et de Lias, coin-
prenant aussi quelquefois du Flysch. Cette écaille (première écaille
de la carte) se fait jour, grâce au plissement qui a affecté tout
l'ensemble des masses chevauchantes et de leur substratum, dans
deux longues boutonnières qui correspondent à deux anticlinaux,
parallèles mais distincts. La masse chevauchante (deuxième écaille
de la carte) est elle-même plissée d'une façon intense. Après bien
des jours d'observations sur le terrain et bien des essais d'inter-
prétation, je ne me fais pas encore une idée bien nette de ces plisse-
ments secondaires. La réapparition du Flysch et du Malm dans les
replis des calcaires du Trias est si fréquente, et parfois si singu-
lière et si inattendue, que l'on peut douter, en de certains points,
de l'unité de la deuxième écaille, et songer, soit à l'existence locale
d'une autre écaille, intermédiaire entre les écailles 1 et 2, soit à la
présence sur le versant ouest de la chaîne, de quelques lambeaux
. (1) Communication inédite de M. Lugeon.
72 p. termier 20 Févr.
de la troisième écaille. Mais ce n'est pas ici le lieu de discuter ces
détails de structure, et l'interprétation des plissements secondaires
n'importe point à la thèse que je veux établir. En dehors de toute
interprétation, en dehors de toute hypothèse, une chose est cer-
taine : le chevauchement de la chaîne de Montbrison sur une écaille
profonde. Cette écaille affleure, à l'ouest, sous la forme des masses
calcaires du Lias de Vallouise. Nous savons qu'elle s'étend, à Test,
au moins jusqu'à La Bessée.
2° Le fait que l'écaillé de la Covdamine [deuxième écaille) plonge tout
entière sous celle qui supporte les lambeaux de l'Eychauda et de Serre-
Chevalier. — Je viens d'établir que la chaîne Montbrison-Condamine
est formée, dans son ensemble, d'une écaille complète (comprenant
tous les terrains du Houiller au Flysch), posée sur l'écaillé pro-
fonde. Le sommet de la Condamine montre la partie haute de cette
deuxième écaille : ce sommet, de forme arrondie, est un plateau
de Malin, avec un témoin, ou chapeau, de Flysch.
Or, quand on descend de la Condamine vers le nord, on voit ce
Flysch et ce Malm, et, sous eux, toute l'écaillé, plonger sous des
terrains triasiques de nature variée, quartzites (point 2112), cal-
caires schisteux ou calcaires compacts. Si l'on essaie de suivre, vers
le nord, l'affleurement de la surface supérieure de l'écaillé de la
Condamine, on voit, le long de cet affleurement, peu à peu dispa-
raître le Flysch, puis le Malm, puis les calcaires compacts du Trias.
Dans les pâturages de Clot-la-Selle, l'écaillé de la Condamine n'est
plus composée que de trias schisteux. Mais un peu plus au nord,
au-delà du col de Méa, le Flysch reparaît sur les schistes calcaires
du Trias, et, de là jusqu'à Monétier, sans autres hiatus que le
passage des éboulis, on peut suivre la double bande. Trias schis-
teux et Flysch, s'enfonçant à Test sous des terrains divers. De
l'Argentière à Monétier (20 kilomètres environ) on peut cheminer,
tout du long, sur les calcaires schisteux du Trias, sans jamais les
quitter, de sorte qu'il est tout à fait certain que l'écaillé de la Con-
damine se prolonge jusqu'à Monétier.
Une chose moins certaine, c'est la réapparition, figurée sur la
carte de la PI. 1, de l'écaillé profonde (première écaille) entre Clot-
la-Selle et Monétier. Ce qui reparaît, à Clot-la Selle, sous la bande
de Trias schisteux, c'est le Lias, et, associé au Lias en replis isocli-
naux, le Trias calcaire compact. A la rigueur, cette bande Lias-
Trias pourrait appartenir à des replis de la deuxième écaille, et
alors l'écaillé profonde manquerait (ou aurait disparu par étire-
ment) depuis le versant ouest de la Condamine jusqu'à Monétier.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNA1S 73
L'hypothèse que j'ai adoptée est cependant plus probable, eu égard
au faciès du Lias. Mais ce sont là questions d'intérêt secondaire.
Ce qui importe, au contraire, grandement, c'est de montrer que
les terrains sous lesquels s'enfonce, au nord, au nord est, ou à
l'est, la deuxième écaille, constituent eux-mêmes une écaille supé-
rieure, une troisième écaille, soubassement immédiat des lambeaux
de l'Eychauda et de Serre-Chevalier. La démonstration en est facile.
Entre le Flysch de la Condamine et le lambeau de l'Eychauda,
les terrains plongent uniformément vers le nord, c'est à-dire sous
ce lambeau, et forment une série normale : Trias schisteux, Trias
compact, Malm et Flysch. Si Ton suit vers le nord la base de cette
série, c'est-à-dire la bande de Trias schisteux, on y voit, au nord-
ouest du col de Méa, s'intercaler une lame de Houiller, dont l'affleu-
rement, lenticulaire, n'a jamais plus de quelques mètres d'épaisseur.
Cette lame de Houiller peut être suivie jusqu'à Monêtier, souvent
o.
. . ^Tin . Rmin de
\ ; -\ de Lorvario Chatrtekmbe
FIg. 8. — Coupe dans la forêt de Monêtier (Même légende que dans la fig. 6).
flanquée de quartzites. Elle se tient toujours près de la base de la
série, c'est-à-dire près du sommet de l'écaillé de la Condamine.
Dans le ravin de Chanteloube, au sud-ouest des Guibertes, l'érosion
laisse percer, sous ce Houiller, le Malin et le Flysch de la deuxième
écaille. Entre ce Flysch de la deuxième écaille et cette lame de
Houiller, il y a généralement, soit du Trias schisteux (massif de la
Cucumelle), soit une série renversée comprenant quartzites et Trias
schisteux. Tout l'ensemble est fortement ondulé, et même plissé
(fig. 8).
Suivons maintenant vers Test d'abord, vers le sud ensuite, en
partant de la Condamine, la base du paquet de terrains qui sup-
porte le lambeau de Serre-Chevalier. Cette base est facile à suivre,
car elle confine partout (c'est là sa définition) au sommet de la
deuxième écaille, et ce sommet est partout marqué par le Malm, le
Flysch ou le Lias. En longeant son affleurement, nous verrons que
la base en question, à partir du point 2H2, est partout formée ou
de quartzites, ou de Houiller, et nous parcourrons ainsi, ayant tou-
74
P. TERMIER
20 Févr.
jours à notre droite des terrains plus récents, à notre gauche des
terrains plus anciens, le chemin sinueux qu'indique la carte de la
PI. I, et qui est la limite de la deuxième écaille et de la troisième
entre le point 2112 et le vallon à Test de la Tète-d'Amont. Arrivés
en ce dernier point, nous constaterons que le paquet dont nous
avons ainsi suivi la base repose réellement sur la deuxième écaille,
\cwt»
'irtttfc
^
Ratière
T À
I\rjr-Chalvin
- J^ùvûU*.
Fig. 9. — Chevauchement de la troisième écaille sur la deuxième écaille.
(Même légende que dans la fig. G).
et qu'il y forme un long synclinal, de l'autre côté duquel la deuxième
écaille reparaît : et, longeant toujours l'affleurement de la base du
paquet (quartzites ou Houiller), nous serons ramenés vers le nord,
par Ratière et Puy-Chalvin, jusqu'à Puy Saint-André. Là, toutes les
couches sont horizontales, dans l'ensemble, et Ton voit une lame
de Trias (Trias compact et Trias schisteux) affleurer sous U Houiller
qui forme le socle de Prorel. Cette lame de Trias se rattache, sans
hiatus, aux calcaires de la Croix-de-la-Salcette, c'est-à-dire à la
deuxième écaille.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 75
Le paquet Houiller-Trias-Malm-Flysch qui supporte Prorel est
donc une troisième écaille, posée sur la deuxième, et plissée avec
elle. On peut conserver des doutes sur quelques points particuliers
de la structure, à cause de la complication, parfois presque inex-
tricable, qui est la suite du plissement secondaire. On peut aussi
hésiter sur le prolongement, au nord de Puy-Saint-André, des
limites des deux écailles. Mais, de même que la pénétration d'une
écaille profonde sous la chaîne de Montbrison est un fait au-dessus
de toute discussion, de même le fait que le socle de Prorel et de Serre-
Chevalier est lui-même une masse chevauchante, posée sur récaille
de Montbrison, me parait aujourd'hui absolument indiscutable.
Si Ton se reporte à la fig. 7, on verra que, de même, au sud de
la Gyronde, les deux écailles inférieures, nettement observables
sur le versant sud du col de la Pousterle, sont recouvertes en che-
vauchement par une troisième écaille, à laquelle appartiennent le
Houiller, le Permien et les quartzites de L'Argentière.
Mais j'ignore jusqu'où va, vers Test, le chevauchement. Ce que
je connais (1) des massifs situés à l'est de la grande vallée Gui-
sanne-Durance me donne à penser qu'ils sont intégralement formés
(dans la partie accessible à l'observation) par les reploiements de
la troisième écaille. S'il en est ainsi, la preuve matérielle de l'exten-
sion du chevauchement au delà de la ligne Guisanne-Durance ne
pourra être fournie que par des sondages.
§ III. — La première hypothèse.
Je crois avoir, dans les deux paragraphes précédents, établi d'une
façon définitive et inattaquable deux faits d'une grande importance.
Premier fait : les lambeaux de l'Eychauda et de Serre-Chevalier
sont des témoins d'une nappe venue de l'est, venue d'une région
où des Schistes lustrés, avec micaschistes et roches vertes, confi-
naient à des types encore brianconnais du Trias et du Lias. Deuxième
fait : le substratum de ces lambeaux et les massifs qui lui font
suite, au sud, jusqu'à Freissinières, sont constitués par un paquet
d'écaillés, et ce paquet renferme au moins trois écailles. Sur le
paquet en questiou, la nappe Eychauda-Serre-Chevalier est posée
comme une quatrième écaille. Tout cet empilement a été réalisé
postérieurement au dépôt du Flysch et antérieurement au dernier
(1) Communications inédites do MM. Kilian et Lugeon. Note des niâmes auteurs
à l'Académie des Sciences, séance du 2 janvier 1899.
76 p. tkrmier 20 Févr.
plissement de la région : l'empilement a ensuite été plissé d'une
façon énergique.
Tels sont les faits. Ils sont, je ne saurais trop le répéter, indépen-
dants de toute interprétation et de toute hypothèse. La carte de la
PI. I, qui les traduit aux yeux, a été dressée ahstraction faite de
toute idée théorique. Sans doute, cette carte n'est qu'une esquisse,
car les limites respectives des trois écailles inférieures ne sont pas
partout observables, et il n'est pas toujours possible de distinguer,
dans les masses reployées par le plissement secondaire, si les cou-
ches que l'ou a sous les yeux appartiennent à une seule écaille, ou
à plusieurs. Mais j'ose dire que cette esquisse est, dans ses grandes
lignes, conforme à la réalité.
Nous allons maintenant entrer dans le domaine de l'hypothèse.
Le lecteur est averti. Quand je défendrai devant lui la théorie
que je préfère, il voudra bien ne pas oublier que je ne confonds
pas cette théorie, si séduisante que je la trouve, avec une vérité
démontrée.
Je rappelle que la ligne axiale de l'éventail alpin, d'après MM.
Kilian et Lugeon, passe au col des Ayes; que, du col des Ayes, elle
se dirige vers Briançon : qu'enfin on la retrouve, au nord de La
Salle, jalonnée par des synclinaux, à peu près droits, de Trias,
enfoncés dans le Houiller. Il est fort difficile de la tracer avec pré-
cision, sur la carte, entre Villard-Saint-Pancrace et La Salle : car,
entre ces deux points, il n'afileure que du Houiller, et ce Houiller
est lui-môme caché, bien souvent, par le Glaciaire.
Cela étant, je ne vois actuellement, pouvant expliquer tous les
faits, que deux hypothèses générales. Je dis que je n'en vois que
deux, pour le moment : mais je ne dis point qu'on ne puisse en
imaginer d'autres, et je serais heureux qu'on en imaginât. Je n'ai
point oublié, en effet, la leçon que m'ont donnée les Schistes cris-
tallins de l'Eychauda et de Serre-Chevalier, pour lesquels je ne
concevais, en 1895, que deux hypothèses, et qui ont échappé,
depuis, à Tune comme à l'autre de mes deux conceptions, et se sont
rattachés à une solution nouvelle et bien inattendue. Je dis aussi
deux hypothèses générales : car on pourrait aisément y créer des
variantes, mais dont la discussion n'aurait pas sa place ici.
La première hypothèse est celle que tout le monde a admise jus-
qu'à ce jour. La zone houillère serait un anticlinal en éventail, qui se
renverserait, à l'ouest comme à Test, sur deux séries de plis isocli-
naux. Cette hypothèse paraît très satisfaisante quand on l'applique
aux montagnes comprises entre l'Arc et la Guisanne (M. Kilian);
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BR1ANÇONNAIS 77
elle convient encore^MM. Kilian et Lugeon) au [massif de Pierre-
Eyrautz et à la région du col des Ayes : mais cette congruence n'est
qu'apparente et tient à ce que les massifs en question ne montrent
qu'une seule écaille. Voyons comment on peut appliquer l'hypo-
thèse à la région des quatre écailles.
11 faut admettre d'abord que les trois écailles inférieures sont
trois plis couchés superposés. Le pli supérieur (troisième écaille)
s'enracinerait le long de la ligne axiale de l'éventail; lés deux plis
inférieurs auraient leurs racines plus à l'ouest. Ce paquet de plis,
analogue à celui du MontJoly, aurait été soumis, après coup, à un
nouveau plissement énergique.
Quant à la quatrième écaille, qui ne peut venir que d'au-delà de
l'éventail, elle serait le témoin d'un charriage antérieur au plisse-
ment, je veux dire antérieur à la formation des plis couchés. L'ori-
gine de ce charriage serait, bien entendu, à l'est, mais pourrait être
relativement prochaine. Si cependant, comme je n'en doute guère,
c'est sur du Flysch authentique (faciès troisième écaille) que repo-
sent les roches vertes du Gondrau, la provenance de la quatrième
écaille reculerait assez loin au-delà de la frontière italienne.
Cette première hypothèse se heurte, dans son application à la
région qui m'intéresse, à de bien graves difficultés, si graves que
je la tiens d'ores et déjà pour invraisemblable. Que l'on n'oublie
pas que la congruence apparente de l'hypothèse en question et
des coupes géologiques auxquelles on l'a jusqu'ici appliquée, que
cette congruence, dis-je, ne prouve en aucune façon le bien-fondé
de cette hypothèse, et ne rachète pas l'invraisemblance dont elle est
frappée dès qu'on essaie de l'appliquera notre paquet d'écaillés.
Une première difficulté réside dans les phénomènes d'étirement
qui ont accompagné la formation des écailles. Ces phénomènes sont
d'une intensité tout à fait extraordinaire. Nulle part, ni dans le
Pelvoux, ni dans la Vanoise, je n'en ai observé qui fussent compa-
rables. Je les comprendrais très bien, si les plis couchés avaient
longuement cheminé sur leur substratum, c'est-a-dire si le chevau-
chement avait une grande amplitude. Mais, dans l'hypothèse que je
discute, le chevauchement varierait entre G et 10 kilomètres. C'est,
je crois, trop peu pour que, presque partout, les séries renversées
soient réduites à zéro ou à une très faible épaisseur; pour que les
divers étages prennent une allure de yite en chapelet, une allure
lenticulaire; pour que, sur d'énormes épaisseurs, les calcaires sili-
ceux du Trias soient réduits en plaquettes de marbre où tous les
éléments sont recristallisés; pour que les auticlinaux et les syncli-
78 p. termier 20 Févr.
iiaux aillent fréquemment en se fermant du côté où ils devraient
s'ouvrir, eu s'ouvrant du côté où ils devraient se fermer (Voir à ce
sujet les diverses coupes données plus haut). Les plis couchés du
Mont-Joly ne montrent rien de semblable. La vérité est que les
étirements constatés dans les trois écailles inférieures sont entière-
ment comparables à ceux de la quatrième écaille (lame de la base).
Une deuxième difficulté est celle du plissement secondaire. J'ai
dit plus haut, et la carte et les coupes le montrent assez, que ce
plissement est très énergique. 11 ne s'agit plus ici, comme au Mont-
Joly ou en Provence, de simples ondulations. Les plis secondaires,
un peu hésitants, un peu incohérents dans leur allure, peuvent se
coucher jusqu'à l'horizontale. 11 faudrait cependant admettre, dans
l'hypothèse en question, que ce plissement secondaire eût respecté
l'éventail primitif : car si l'éventail actuel ne date que du plisse-
ment secondaire, nous tombons en plein dans la deuxième hypo-
thèse, celle où le chevauchement n'a plus de limites. Et il y a là
une double invraisemblance : d'abord, qu'après un plissement,
post-oligocène, capable de donner trois plis couchés superposés, il
se soit produit, dans la même région, un nouveau plissement, presque
aussi intense que le premier; ensuite que ce nouveau plissement
ait respecté l'éventail suivant lequel s'était ordonné le premier
plissement, et qu'il n'ait affecté que l'un des lianes (le flanc ouest)
de cet éventail.
Mais il y a une difficulté plus grqnencore : l'absence d'un enra-
cinement de l'éventail dans la vallée Guisanne-Durance, entre le
Serre-Barbin et Villard-Saint-Pancrace. C'est en vain que l'on cherche
la ligne où devrait s'enraciner l'anticlinal houiller, la ligne le long
de laquelle les affleurements houillers devraient être à peu près
verticaux. Sur les pentes de la rive droite, les strates sont partout,
ou bien horizontales, ou inclinées faiblement vers l'ouest ou le
sud-ouest, comme si l'on était déjà à l'est de l'éventail. 11 en est
de même sur la rive gauche. Dans le défilé de la Guisanne, sous
Briançon, la plongée est de tt>° vers le sud-ouest. D'autre part, à
Puy-Saint-Audré affleure la deuxième écaille; et l'on peut suivre
Vers le nord les affleurements houillers qui prolongent ceux qui
surmontent immédiatement cette deuxième écaille ; ces affleure-
ments dessinent une courbe de niveau et s'en vont vers Puy-Saint-
Pierre et vers les Eduits, toujours horizontaux ou plongeant sous
la montagne. C'est pour cela que, sur la carte de la PI. I, j'ai pro-
longé la deuxième écaille jusqu'à La Salle. 11 va sans dire que je ne
suis point sûr, ici, des limites de la deuxième écaille et de la troi-
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNA1S 79
sième. Mais je ne crois pas que l'on puisse douter du prolongement
du chevauchement jusqu'à la Guisanne, et alors c'en est fait de
l'enracinement de l'éventail.
Je ne dis pas, d'ailleurs, que Ton ne puisse pas se tirer d'em-
barras, quant à cette difficulté, en couchant momentanément vers
Test, depuis La Salle jusqu'à Villard-Saint-Pancrace, la surface
axiale de l'éventail (son plan de symétrie, s'il était symétrique). Et
c'est pourquoi je ne veux pas prétendre que l'enracinement de
l'éventail soit radicalement impossible : je le tiens seulement pour
invraisemblable.
§ IV. — La deuxième hypothèse.
La deuxième hypothèse, que j'accepte provisoirement, parce
qu'elle me paraît la seule satisfaisante, est celle qui supprime toute
racine à l'éventail, et prolonge les chevauchements, vers l'est, jus-
qu'à une limite inconnue.
Postérieurement au dépôt du Flysch et antérieurement au plisse-
ment (je veux dire ici le plissement de la région briançonnaise), il est
arrivé, sur les dépôts oligocènes encore horizontaux, des nappes de
terrains charriés. Quelle était l'origine première de ces nappes :
plis à racines lointaines, ou paquets de couches transportés d'un
mouvement d'ensemble, par un simple glissement? C'est ce que
j'ignore. Quelle était leur provenance? C'est ce sur quoi je m'expli-
querai dans un instant. Quoi qu'il en soit, ces nappes sont arrivées,
transportées de Test vers l'ouest, se poussant les unes les autres,
chevauchant les unes sur les autres, rabotant sous leur poids la
surface du Flysch, et s'arrétant enfin (je parle pour la région de
Briançon) devant le bord du Pelvoux. Ainsi s'est formé un empile-
ment d'écaillés charriées, variable évidemment, suivant les lieux,
de composition et d'épaisseur. Cet empilement comprenait au moins
quatre écailles dans la région qui nous occupe. Il est permis de
penser que, d'une façon générale, le nombre des écailles était
moindre.
Après leur mise en place, les écailles ont été plissées d'un mouve-
ment d'ensemble, et c'est là le seul plissement post-oligocène qu'ait
subi la région. Ce plissement s'est fait en éventail. Là où n'affleure
qu'une seule écaille, il est clair que l'éventail parait enraciné et
autochtone; mais cette apparence n'est qu'une illusion.
Ainsi s'expliquent les phénomènes d'étirement observés dans les
écailles, le plissement secondaire, si compliqué soit-il, l'absence de
80 p. tëkmier 20 Févr.
racines dans la vallée Guisanne-Durance. La structure que j'ai
décrite, et qui est si complexe, parait désormais toute simple.
Telle est l'hypothèse, réduite à ses éléments essentiels. Voyons
maintenant ses conséquences. Je ne me dissimule pas qu'elles sont
un peu effrayantes, au premier abord.
A peu de distance à l'est de Briançon, commence la zone <Jes
Schistes lustrés. On sait que, sur le bord de la zone, ces schistes
s'enfoncent sous les calcaires du Briançonnais.
Une première idée qui vient à l'esprit est que, peut-être, les
Schistes lustrés sont un faciès du Flysch : la zone du Briançonnais
serait seule charriée ; elle aurait, à sa droite et à sa gauche, et sous
elle, du Flysch eu place. Mais je repousse cette idée, à cause des
passages, plusieurs fois constatés par MM. Marcel Bertrand et
Kilian, et par moi-même, des Schistes lustrés à des calcaires d'un
type incontestablement triasique.
Une deuxième idée, c'est que, bien que triasiques ou liasiques,
les Schistes lustrés sont en place et supportent la zone du Brian-
çonnais, seule charriée. Le Flysch manquerait, ou aurait été raboté,
entre les Schistes lustrés et le paquet charrié. Le Houiller manque-
rait aussi le long du bord est du paquet; mais parfois (région
d'Etache) les quartzites formeraient la base du paquet et viendraient
au contact des Schistes.
Je repousse également cette deuxième idée, et cela pour deux
raisons.
D'abord, il me parait évident que, dans un paquet d'écaillés
charriées, c'est récaille supérieure qui a fait le plus long voyage.
C'est donc, ici, la quatrième écaille. Or, elle est formée de terrains
tout-à-fait singuliers, comme il n'eu affleure que dans la zone des
Schistes lustrés.
D'autre part, il y a, comme l'a montré M. Kilian, de nombreux
indices d'un passage des faciès dauphinois aux faciès briançonnais.
Près du bord ouest de la zone briançonnaise, les terrains briançon-
nais ont des affinités dauphinoises, les terrains dauphinois mani-
festent des affinités briauçonnaises. Si la zone du Briançonnais
était seule charriée, elle viendrait d'au-delà de la région des Schistes
lustrés ; et comme les terrains de la zone des Schistes lustrés n'ont
aucune affinité dauphinoise, on ne comprendrait plus les affinités
dauphinoises des terrains briançonnais.
Mais alors, il ne reste qu'une façon de comprendre l'hypothèse.
Il faut que la zone du Briançonnais, qui, le long de son bord est,
a l'air de reposer sur les Schistes lustrés, soit simplement renversée
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BR1ANÇONNA1S 81
sur eux, et qu'en réalité elle se prolonge sous ces Schistes. En d'autres
termes, les Schistes lustrés, au moins près de leur bord ouest, sont
charriés, eux aussi, et constituent la nappe supérieure, nappe supé-
rieure dont les lambeaux de ma quatrième écaille ne sont plus que
des témoins. Ou plutôt, tes Schistes lustrés sont la vraie nappe char-
riée, celle qui vient de loin et dont la migration se rattache à une
cause générale. Les écailles du Briançonnais ne doivent être consi-
dérées que comme des lames de charriage (Lugeon, Marcel Bertrand),
de simples lambeaux arrachés au substratum par le cheminement de
la nappe, et entraînés dans sa marche vers l'ouest, à .la façon du
lambeau de Gardanne entraîné vers le nord par le déplacement de la
chaîne de l'Etoile (1). La différence avec la Provence réside dans
l'ampleur, incomparablement plus grande, du phénomène. Au lieu
d'une seule lame de charriage, il y en a, ici, plusieurs, qui, locale-
ment, se superposent. L'une d'elles l'emporte, d'ailleurs, de beau-
coup sur les autres, et peut-être cette lame principale est-elle, en
d'autres points de la zone du Briançonnais, l'unique lame de char-
riage. Tandis que le lambeau de Gardanne ne mesure, en surface,
que quelques kilomètres carrés, c'est par centaines de kilomètres
carrés que se mesure la superficie totale des écailles charriées, qui,
superposées ou juxtaposées, constituent la zone du Briançonnais.
Pour pousser de semblables écailles, il a fallu le mouvement d'une
nappe immense. Et si l'on veut bien réfléchir à l'ordre de grandeur
du phénomène, on trouvera, avec moi, que pour charrier, même
de quelques kilomètres seulement, les terrains du Briançonnais,
ce n'est pas trop do faire appel à un mouvement d'ensemble de la
zone des Schistes lustrés.
Telle est actuellement la forme qu'a prise, dans mon esprit,
l'hypothèse du charriage : une nappe, venue de loin, composée des
Schistes lustrés ; et, poussées par cette nappe, et chevauchées par
elle, et se chevauchant les unes les autres, des écailles ou lames de
charriage, dont le déplacement a dû être très limité.
Les coupes publiées dans ma note à l'Académie des Sciences (2)
ne traduisent pas très exactement cette dernière forme de l'hypo-
thèse. Les quatre nappes y sont représentées, à l'est de la ligne
Guisanne-Durance. comme ayant à peu près la même importance.
Si je dessinais aujourd'hui, de nouveau, la partie hypothétique de
ces coupes, j'y montrerais les trois nappes inférieures finissant
(1) Marcel Bertrand. Le bassin crétacé de Fuvcau et le bassin houiller du Nord.
Ânn. des Mines, 9* série, t. XIV, p. 5 et suiv.
(2) Séance do 13 février 1899.
22 Avril 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. GéoJ. Fr. — 6
82 p. termier 20 Févr.
rapidement en coin, et la nappe supérieure, seule, se prolongeant
à l'est sur le substratum oligocène, jusqu'à une limite inconnue.
Je m'expliquerai maintenant en quelques mots sur l'origine de
la nappe et des lames de charriage.
Il est tout d'abord évident que les lames de charriage, c'ést-à-dire
les écailles formées de terrains briançonnais, ne viennent pas de
loin. On ne comprendrait, si elles venaient de loin, ni les affinités,
signalées par M. Kilian, entre les faciès briançonnais et les faciès
dauphinois, ni l'identité (ou tout au moins la quasi-identité) des
faciès dans ces diverses écailles. Pour les mêmes raisons, je ne
crois pas que la multiplicité de ces écailles soit un fait général, et
je ne crois pas non plus à la grande extension de leurs chevauche-
ments mutuels (1).
Quant à la nappe principale, celle des Schistes lustrés, tout ce que
l'on peut dire, actuellement, c'est que les lambeaux de cette nappe
qui sont aujourd'hui les plus avancés vers l'ouest viennent d'une
région où affleuraient (avant le charriage) des micaschistes, des
roches vertes, des quartzites du Permien, des quartzites et des cal-
caires compacts du Trias, et des conglomérats liasiques à gros blocs
. (type du Lias de Prorel). Peut-être le Houiller y affleurait-il égale-
ment ; mais ce n'est point sûr. Je crois bien, en tout cas, que le
Mal m n'y affleurait pas. La mer oligocène avait là son bord oriental,
et il se formait, sur ce bord, les conglomérats polygéniques que
nous retrouvons aujourd'hui à l'Alpet et à l'Eychauda. Quelle était
la largeur de cette mer, dont le Pelvoux, comme chacun sait, formait
la rive occidentale? C'est ce que nous ne savons pas encore : mais
il n'est pas impossible que nous le sachions un jour. Nous savons
seulement que, dans la région intermédiaire à laquelle ont été arra-
chées les lames de charriage, les sédiments du Flysch avaient une
finesse assez grande.
Sans doute, il reste bien des difficultés, et peut-être ne vou-
drais-je pas qu'elles eussent entièrement disparu. La principale est
(1) Le lecteur a dû remarquer que je n'ai pas tiré argument de ce fait qu'il y
a, dans le Briançonnais, pour tous les terrains, des faciès particuliers, et que ces
faciès apparaissent, parfois, brusquement, quand on passe, en traversant le Flysch,
de la première zone alpine à la troisième. Cette variation brusque, ou tout au
moins rapide, des faciès, peut en effet s'expliquer par des chevauchements de
quelques kilomètres, et n'a pas besoin de faire appel à de longs charriages. En
revanche, puisque j'admets, pour mes lames de charriage, une faible extension
vers l'est et un transport de faible amplitude, je ne crois pas que l'on puisse
invoquer contre mon hypothèse les passages du faciès dauphinois au faciès brian-
çonnais.
1899 LES NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNAIS 83
que l'on ne sait où limiter, du côté de Test, rétendue de la nappe
chevauchante. Faut- il y comprendre tous les Schistes lustrés? Faut-
il s'arrêter aux micaschistes et gneiss qui leur font suite? Faut-il
aller jusqu'aux plaines et renoncer à trouver, de ce côté, les terrains
en place? Ces questions sont fort embarrassantes. Mais on doit se
rappeler que, jamais, elles ne se sont encore posées à l'esprit des
observateurs qui ont parcouru les montagnes du Piémont. C'est
toute une série d'observations nouvelles que l'hypothèse du char-
riage va provoquer, et le problème sera peut-être plus simple qu'il
ne paraît aujourd'hui (1).
Eu tout cas, l'hypothèse en question s'arrange bien, et même de
façon séduisante, avec plusieurs des données les plus récentes de la
géologie des Alpes occidentales. Elle fournit une explication simple
des phénomènes de recouvrement signalés dans l'Ubaye par MM.
Kiliau et Haug. Elle rend compte des difficultés présentées par les
coupes du bord de la zone des Schistes lustrés dans la région d'Eta-
che (M. Marcel Bertrand). Elle enlève toute étrangeté aux plisse-
ments des terrains du Mont-Jovet (la remarque est de M. Marcel
(1) Pendant l'impression de ce mémoire, M. Kilian m'a fait l'honneur de commu-
niquer à la Société géologique (C.-R. S. de 1899, p. 32, séance du 20 mars) trois
nouvelles objections à l'hypothèse que je propose et défends ici. L'objection A est
très sérieuse. Il est certain que l'on ne voit pas, au nord de l'Arc, s'avérer une
séparation nette entre la zone du Flysch et ce que l'on a appelé jusqu'ici, dans les
mômes parages, zone du Briançonnais. Mais la question est précisément de dire
ce que devient la « zone du Briançonnais », lorsque, à la définition tirée de la
prépondérance de tel ou tel faciès (définition sur laquelle les géologues ne pour-
ront jamais se mettre d'accord), on essaie do substituer celle que je propose, savoir
que ladite zone est l'ensemble des lames de charriage poussées vers l'ouest par
le mouvement des Schistes lustrés. Il est probable que, dans la région de Mou-
tiers (je parle toujours comme si mon hypothèse était la réalité), la limite occiden-
tale de l'aire des lames de charriage ne coïncide pas avec le bord est de la zone
du Flysch. Peut-être même cette limite occidentale colncide-t-elle , dans ladite
région, avec le bord ouest de la bande de terrain houiller. En tout cas, je ne crois
pas que l'on puisse, à l'heure actuelle et sans nouvelles courses sur le terrain,
trancher cette difficulté, encore moins la déclarer insoluble. — Les objections B
et C de M. Kilian sont tirées de certaines particularités de la géologie piémon taise.
Je viens do dire, dans mon texte, que c'est du côté du Piémont que j'entrevois les
plus graves difficultés, mais qu'il serait imprudent de vouloir dès à présent les
discuter et surtout les résoudre. — Enfin, l'alinéa D de la communication de
M. Kilian est relatif aux schistes cristallins de l'Eychauda et de Serre-Chevalier.
Je crois que le lecteur est maintenant fixé sur l'absolue nécessité, en toute hypo-
thèse, de faire venir ces paquets cristallins d'au-delà de la Clarée (je n'ai jamais
dit « d'au-delà de la zone du Piémont »). Quant aux terrains analogues de l'Alpet
et du Mont-Genèvre, M. Kilian dit qu'ils sont bien en place et nullement charriés :
mais c'est là la question.
84 TERMIER. — NAPPES DE RECOUVREMENT DU BRIANÇONNA1S 20 Févr.
Bertrand), tandis qu'avec l'ancienne manière de voir, ces terrains,
qui sont posés sur le sommet de l'éventail, n'ont vraiment aucune
raison d'être plissés. Enfin, cette hypothèse relie les charriages de
la Provence (M. Marcel Bertrand) à ceux de la. Suisse (MM. Lugeon
et Schardt), et permet de rattacher ces phénomènes grandioses à
une même cause générale. Sans doute cela ne nous, dit pas quelle
est cette cause ; mais, de savoir qu'elle est générale, et qu'elle agit
sur toute région où se prépare un grand plissement, ce serait déjà
un résultat satisfaisant pour tout esprit que préoccupe la recherche
des lois. S'il y a eu des charriages en Provence et en Suisse, et
d'autres, à une époque bien différente, en Ecosse, — et, de ces
charriages là, personne ne doute plus aujourd'hui — c'est que la
mise en marche de pareils lambeaux de l'écorce est une phase nor-
male et nécessaire de l'histoire d'une chaîne.
M. Haug s associe pleinement aux réserves exprimées par
M. Kilian au sujet de la théorie, à première vue si séduisante, que
vient d'exposer si lumineusement M. Termier. 11 réserve son opinion
sur le charriage de la zone du Briançonnais pour le moment où il
aura sous les yeux les contours de la feuille de Briançon et les coupes
définitives de la région comprise entre le massif du Pelvoux et la
Guisane-Durance ; cependant il lui semble difficile, en tout état de
cause et en l'absence de preuves directes, de considérer la zone du
Piémont tout entière, c'est-à-dire la moitié environ de la largeur
totale des Alpes occidentales, comme une nappe de charriage
dépourvue de racine, alors que l'on ne donne même pas la moindre
indication sur le lieu d'origine probable de cette nappe. Quant à la
lame de « protogine » du Plan de-Phazy, qui vient pointer au milieu
de terrains à faciès briançonnais, M. Haug ne doute pas qu'elle soit
en place et rappelle que M. Termier lui-même est arrivé par un
examen microscopique à affirmer son identité avec la « protogine »
du Pelvoux. Puis, en ce qui concerne les trois nappes superposées à
faciès briançonnais, M. Haug se demande comment on peut faire
provenir a du même endroit » des bandes qui, développées à leur
étendue primitive et juxtaposées, occuperaient certainement une
largeur d'environ cent kilomètres, suivant laquelle il se produirait
sans doute des variations de faciès considérables. Il ne voit pas en
quoi l'hypothèse de nappes superposées est plus vraisemblable que
celle de plis couchés replissés, dont on connaît déjà un certain
nombre d'exemples (E. de Margerie et A. Heim, Les dislocations de
l'écorce terrestre, p. 62, lig. 70-79).
1899 85
LE MASSIF DU CHETTABA
ET LES ILOTS TR1ASIQUES DE LA RÉGION DE CONSTANTINE
par M. E. FICHEUR.
SOMMAIRE
Préliminaires; Aperçu géographique. — Stratigraphie: I. Terrains tertiaires;
II. Terrains crétacés; III. Le Trias. — Tectonique; Structure générale du
massif du Ghettaba. — Autres pointements triasiques de la région. — Consi-
dérations générales ; le Trias d'El Kantour. — Conclusions. — Ilots triasiques
des Ouled Rahmoun et d'El Guerrah.
Préliminaires. — La région de Constantine, déjà si intéressante
par la variété de ses formations et la complexité de sa structure,
vient encore d'offrir à la curiosité du géologue de nouveaux pro-
blèmes, dont la solution aura une heureuse influence sur l'inter-
prétation de certaines questions des plus obscures de la Géologie
algérienne.
A la suite de la Réunion extraordinaire de la Société géologique
en Algérie, en octobre 4896, l'attention de plusieurs de nos confrères
fut attirée par la découverte importante de fossiles d'apparence
triasique, dans les couches gypseuses du Djebel Chettaba. Notre
collègue M. Goux, professeur au lycée de Constantine, avait, sur
mes conseils, et d'après mes indications, exploré le versant est.de
cette montagne, à plusieurs reprises, dans le courant de 1896; ses
patientes et persévérantes recherches avaient été récompensées
par la découverte de plaquettes calcaires couvertes de bivalves qui
n'étaient autres que des Myophories. Dans le cours de la visite faite
par les membres de la Société aux collections du Service des mines,
déposées au lycée de Constantine, ces échantillons et d'autres
identiques, recueillis antérieurement par Tissot et étiquetés par
lui dans le Suessonien, furent soumis à l'examen de l'éminent
paléontologiste, M. Von Zittel, qui n'osa tout d'abord se prononcer
d'une manière absolue sur leur détermination. Au retour de Biskra,
après la clôture de la session, M. Marcel Bertrand, très intrigué
par cette constatation, entreprit, sous la conduite de M. Goux, en
compagnie de MM. Lantenois et Lory, une course sur le gisement,
86 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Fê\T.
d'où il revint avec la certitude, corroborée par la récolte de nom-
breux fossiles, de l'existence d'une bande triasique, dont il reconnut
et indiqua la situation en anticlinal déversé au nord-ouest sur le
Sénonien (1). La découverte si importante de M. Goux venait con-
firmer la détermination du faciès triasique, qui ne pouvait échapper
à la compétence incontestable de M. Bertrand.
Les coupes données par Coquand du flanc est du Chettaba (2),
l'interprétation de Tissot dans ses cartes géologiques, étaient
d'accord pour attribuer les couches gypseuses de cette montagne
au Suessonien et l'attention ne paraît guère s'être portée depuis
sur ce point.
Mes études sur la région au nord et à l'ouest de Constantine
avaient été, jusqu'à cette époque, cantonnées dans les terrains
tertiaires, sur la classification desquels j'étais arrivé à des résultats
assez précis (3). Mes courses dans la région ayant été très limitées
et très espacées, j'avais réservé pour une époque prochaine l'étude
des massifs crétacés, et je n'avais pas encore abordé le Chettaba.
L'observation capitale de M. Bertrand, tout en me laissant le regret
d'avoir été empêché, par suite de circonstances diverses, de l'accom-
pagner, .me conduisit à continuer dans ce massif les recherches
nécessaires pour les tracés de la Carte géologique au 50.000° (feuille
de Constantine). Je tiens à exprimer à noire savant confrère toute
ma gratitude pour les indications précises et très justifiées qu'il a
bien voulu me communiquer sur ses observations.
En avril 1897, je pus consacrer plusieurs courses à l'étude du
Chettaba, et je suis heureux de remercier M. Goux, qui a bien
voulu me guider sur les points fossilifères reconnus par lui, me
signaler sur place toutes ses constatations et m'accompagner dans
l'exploration d'une partie du massif.
L'étude de la feuille de Constantine, reprise en octobre 1897, nie
fit reconnaître plusieurs autres lambeaux triasiquos, indiqués pour
la plupart comme terrains gypseux par M. Jacob, ingénieur des
mines, dans les tracés géologiques qu'il avait commencés sur cette
feuille. A la môme époque, j'ai pu, en compagnie de M. Blayac,
étudier le pointement gypseux des Ouled Rahmoun, et plus récem-
(1) M Bertrand. Réunion extraordinaire do. la Société géologique en Algérie
(B. S. G. F., 3- sér., t. XXIV, p. 1184).
(2) Coquand. Géologie et Paléontologie de la région sud de la province de Cons-
tantine, 1862, p. 104.
(3) Ficheur. Les Terrains d'eau douce du bassin de Constantine {B. S. G. F.,
3- sér., t. XXII, p. 544).
1899 ET LES ÎLOTS TRIASIQUES DE LA RÉGION DE CONSTANTINE 87
ment, une nouvelle trace triasique a été reconnue auprès de la
station d'El G u erra h. Une course récente à la montagne de sel d'El
Outaïa, avec M. Blayac, nous a permis encore de reconnaître, et
nous le faisons avec une entière satisfaction, le bien fondé de l'opi-
nion émise par M. Bertrand relativement à l'origine sédimentaire,
probablement triasique, de ces masses de sel gemme et de gypse
sur lesquelles nous reviendrons avec détails dans une prochaine
communication.
* J'ai pour but, dans cette note, en décrivant les relations de ces
lambeaux triasiques avec les terrains crétacés et tertiaires, de pré-
senter quelques conclusions sur les conditions anormales dans
lesquelles ces îlots ont pu arriver au jour, avec la pensée que ces
observations permettront de rechercher plus facilement l'interpré-
tation de l'origine des pointements gypso-dolomitiques disséminés
en différentes régions de l'Afrique du Nord.
Aperçu géograpbique. — Le bassin lacustre de Constantine, dont
il a été question dans la note précitée, est limité au nord par le
tronçon delà Chaîne numidiennc, que j'ai désigné sous le nom de
Chaîne des Mouïas, et dont la constitution géologique a été som-
mairement décrite pour les terrains tertiaires (1). Au sud s'étend
une chaîne démantelée, fragmentée en tronçons, dout le principal
forme le massif du Chettaba, flanqué à l'ouest de la proéminence
du Djebel el Akhal, et à Test du plateau rocheux de Constantine,
qui n'est autre que l'éperon du Djebel Ouach.
Vers le milieu du bassin surgissent des assises tertiaires les
rochers du Kheneg, entaillés par le Roummel dans uue étroite
coupure, plus profonde et plus étendue que celle de Constantine;
au sud-ouest de ce plateau se dresse le Kef Béni Hamza, entouré
des dépôts oligocène?.
Le massif du Chettaba se compose de deux croupes rocheuses
dont les escarpements abrupts dominent au nord de 400 à 600 mètres
les collines argileuses de Rouffach. La plus importante, à l'Ouest,
le Djebel Zouaoui, occupe du sud-ouest au nord-est une bande de
13 kilom., d'une altitude moyenne de 1250 mètres (131Gm au signal
culminant). Le deuxième chaînon,- de même aspect, mais moins
important, occupe au nord-est un tronçon de 4 kilom. 500; c'est
le Djebel Karkara (1185m au sommet). Ces deux bandes rocheuses,
aux flancs escarpés, sont séparées par une dépression très acci-
dentée, d'aspect tout différent, broussailleuse, faiblement boisée de
(1) Ficheur. Les terrains éocènes dans la Chaîne des Moulas (À. F. A. S.
Bordeaux, 1895).
88 E. FICHEUR. — LK MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
chênes rabougris, qui se poursuit au sud par les chaînons secon-
daires s'étendant jusqu'au Roummel.
A Test du Karkara, une petite arête saillante, à laquelle s'applique
spécialement le nom de Djebel Chettaba (109Om) domine les contre-
forts mamelonnés et ravinés qui font face au Rocher de Constan-
tine, dont ils sont séparés par la dépression de l'Oued Melah. Ce
massif du Chettaba est nettement circonscrit au nord par les escar-
pements du Zouaoui et du Karkara, à l'ouest par les plateformes
qui rejoignent et entourent le Djebel el Akhal, au sud par la
dépression occupée par la vallée du Roummel entre l'Oued Athmenia
et Aïn Smara et à Test par l'Oued Melah.
Le Djebel el Akhal présente un sommet culminant (1256m) aux
flancs rocheux, escarpés au nord et à l'est, et qui s'abaisse vers
l'ouest par des plateaux découpés en terrasses.
Stratigraphie.
I. — Terrains tertiaires.
Je me contenterai de rappeler ici la succession des assises ter-
tiaires du bassin de Constantine telle que je l'ai indiquée; les obser-
vations récentes n'ont fait que confirmer ma première interprétation
que j'ai eu la satisfaction de voir approuvée par ceux de nos
confrères qui ont suivi les excursions de la réunion extraordinaire;
j'ai été heureux en particulier d'enregistrer le témoignage de notre
savant confrère M. Depéret. Les études approfondies qui ont été
faites récemment dans les environs de Constantine, par M Joleaud,
sous-intendant militaire à Constantine, dont le zèle scientifique
s'est manifesté par des recherches fructueuses, ont confirmé, en les
éclairant de nombreux points de détail, la classification à laquelle
je me suis arrêté.
Les formations lacustres de la région peuvent se résumer ainsi,
à partir des plus récentes :
1° Travertins du Mansourah, couronnant une nappe de conglo-
mérats et sables, dans lesquels ont été recueillies, en 1896 97, dans
les travaux de fondation de bâtiments militaires, de nombreuses
et importantes pièces d'Hippopotame (probablement Hippopotmnus
hipponensis Gaudry, d'après Pomel), d'Antilopes, de Porcins, etc.,
avec des coquilles d'eau douce, Paludiues, etc. La vigilance de
M. Lantenois, et la surveillance attentive de M. Goux ont permis
de réunir à l'Ecole des Sciences d'Alger une série importante de ces
débris de Vertébrés.
1899 ET LES ÎLOTS TRIAS1QUES DK LA RÉGION DE CONSTANTINE 89
2° Calcaires et travertins d'El.Hadj Baba, à Hélix subsemperiana
Thomas, Hélix fossulata Pomel, avec Hipparion, Sus phacochœroidcs,
etc., rapportés au Pliocène inférieur.
Ces travertins s'étendent à l'ouest du Chettaba, occupant un
vaste plateau démantelé par affaissement, dont les parties culmi-
nantes atteignent 1167 mètres (El Kalâ, à l'ouest du Zouaoui), et
s'élèvent jusqu'au sommet du Djebel el Akhal (1256 mètres).
Je tiens, à ce sujet, à rectifier une interprétation erronée, donnée
dans ma note sur les Terrains lacustres de Constantine. Les tra-
vertins à végétaux de l'Oued Zid, dont les paquets paraissent dissé-
minés au milieu des argiles à gypse oligocènes, proviennent incon-
testablement, par glissements successifs, des bancs de ces travertins
qui couronnent le plateau de Békeira, et qui, selon toute probabilité,
doivent se rapporter à la formation pliocène d'El Hadj Baba. Ceci
est hors de doute pour les lambeaux de travertins, absolument
identiques, que j'avais signalés à El Mala, et qui proviennent très
nettement des bancs démantelés couronnant les argiles oligocènes
au sud.
Ce Pliocène lacustre» sous le même faciès, joue un rôle considé-
rable dans la constitution de la région à l'ouest du massif du
Chettaba.
3« Argiles à lignites du Srnendou, au nord du bassin, d'âge Miocène
inférieur.
4° Poudingues du Coudiat-Aty, Aquitanien, très développés sur
les flancs du Chettaba, au nord et à l'est, où ils recouvrent les
5° Argiles à gypse et à Hélices dentées, dont j'ai indiqué l'exten-
sion dans le bassin, et qui se rapportent à l'Oligocène inférieur.
II. — Terrains crétacés.
Il est utile de remarquer tout d'abord que le Suessonien indiqué
parTissot, dans le Chettaba, et reproduit d'après ses tracés dans
la Carte géologique générale de 1889, n'existe pas dans ce massif;
cependant les nombreux fragments de silex caractéristiques repris
en amas plus ou moins conglomérés à la base des poudingues aqui-
taniens sur le flanc est du Chettaba, témoignent manifestement de
l'existence et de la destruction par érosion de ce terrain avant la
période oligocène.
1° Sénonien, très développé avec son faciès typique si constant
dans toute l'étendue du Tell algérien : marnes noires à rognons de
calcaires jaunes et marnes bleuâtres schisteuses, irrégulièrement
90 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
intercalées de calcaires marneux à empreintes d'ioocérames. Co-
quand a signalé au Chettaba Micraster Peini Coq. que nous avons
retrouvé en plusieurs points, notamment en certaine abondance,
sur les indications de M. Malen, Garde forestier, au voisinage d'Ain
Merouel, au pied sud ouest du Karkara, avec de nombreux Ino-
cérames et des traces d'Ammonites.
Les mêmes fossiles existent également au flanc est du Karkara,
dans les bancs calcaires qui occupent la base du Sénonien, au voisi-
nage du Marabout Sidi SÏimane (voir fig. 2).
La collection Heinz, acquise par le service de la Carte géologique
et déposée à l'Ecole des Sciences d'Alger, renferme, de ce point,
en outre d'exemplaires de Micraster. une Ammonite qui paraît peu
différente de Sonneratia Daubreei de Grossouvre (i) et des fragments
de Radiolites, probablement de ceux qui ont été désignés par
Coquand comme Radiolites cornu-pastoris ?
Sénonien supérieur. — Les assises précédentes sont surmontées en
quelques points par une assise en gros bancs rocheux de calcaires
durs, subcristallins, à nodules siliceux. Ces calcaires qui forment
en particulier la petite crête du Djebel Chettaba (fig. 2, p. 92), sont
surmontés de bancs calcaréo- marneux à Inocérames, et par suite
doivent être rapportés encore au Sénonien, dont ils constituent le
terme supérieur dans la région; c'est là un faciès spécial qui n'avait
pas encore été signalé, et que je ne connais d'aucune des régions
du Tell où le Sénonien présente tout son développement.
2° Turonien-Cénomanien. — Les calcaires du Rocher de Constan-
tine paraissent représenter l'ensemble de ces deux étages. Les bancs
supérieurs, immédiatement recouverts par les marnes noires du
Sénonien, renferment quelques Hippurites, depuis longtemps signa-
lés par Coquand. La carrière qui se trouve près de la route des-
cendant de la gare au Bardo présente un banc à Hippurites qui m'a
été indiqué par M. Joleaud, lequel en a recueilli un fragment impor-
tant. Plusieurs sections sont visibles dans ces calcaires durs; elles
présentent les caractères du groupe de V Hippurites giganteus d'Hom-
bres-Firrtias, et se rapprochent davantage de Hippurites in férus
Dou ville; ces deux espèces appartiennent au Turonien (2).
Les calcaires de l'assise moyenne renferment, ainsi que nous
l'avons indiqué (3), un banc pétri de Caprines, voisines, d'après le
(1) De Grossouvre. Les Ammonites de la Craie supérieure.
(2) Douvillé. Mémoires de Paléontologie de la Soc. géol. 1" fasc. Mém. n*6.
(3) Ficheur. Compte-rendu de l'excursion du 22 octobre 1896. Réunion extra-
ordinaire en Algérie (fl. 5. G. F., 3" sér., t. XXIV, p. 1167).
1899 ET LES ÎLOTS TRIASIQUES DE LA RÉGION DE CONSTANTIN h: 91
professeur von Zittel, de Caprina communis Gemellaro, du Céno-
manien supérieur.
L'absence de fossiles dans les bancs inférieurs empêche de pré-
ciser Tàge de ces calcaires dont le substratum est invisible.
3° Crétacé inférieur. — Aux divers étages de la série infra-crétacée
se rapportent les massifs calcaires qui constituent les saillies et
crêtes rocheuses du Chettaba (Djebel Zouaoui et Karkara), du Djebel
el Akhal, du Kheneg, et pointements accessoires du Kef Beni-
Hamza, du Hamma et du Djebel Kelal, à Test.
A. Calcaires du Karkara. — Ainsi que Tissot Ta indiqué sur ses
cartes, et contrairement à l'opinion émise par Coquand, les calcaires
du Karkara, en bancs bien réglés, qui présentent, au moins dans
les bancs supérieurs, l'aspect de ceux du Rocher de Constantine,
sont bien inférieurs à ce niveau et doivent se rattacher à TAptieu.
0. Dj. Zoaaoui
1286»
Ain el Brrfouft Karkara
lOfcZ1? ° ° U«i»
Fijar i • — Coupe du Djebel Zouaoui et du Karkara. — Echelle : . h l0 ^ .
A, Calcaires urgoaptiens: 1, Cale. k.Réquiénies; 2, Cale, à Ostracées (Zouaoui);
3, Cale, à Réquienies et polypiers (Karkara) ; 4, Marno-calc. grumeleux à Ostrea
aquila; 5, Cale, à Réquiémes; B, Sénonien marno-calcaire à Micraster Peini;
C, Calcaires durs à silex; D, Poudingues aquitaniens; F, Failles.
Le Djebel Zouaoui est formé par une puissante assise calcaire
régulièrement stratifiée, dont les bancs, faiblement inclinés au
nord-ouest, avec abaissement graduel au sud-ouest, montrent
leurs escarpements sur les deux flancs au-dessus des marnes du
Sénonien, incontestablement adossé par faille.
Les premiers calcaires, sans fossiles, sont surmontés de bancs
dans lesquels apparaissent les sections de Réquiénies (ou Toucasia?)
qui deviennent de plus en plus nombreuses, toujours empâtées
dans la roche, qui plus haut renferment également des Ostracées
indéterminables. Au-dessus, une zone de 3 à 5 mètres renferme de
nombreux moules de bivalves, quelques Gastropodes, des Echi-
nides : Epiaster restrict us Gauthier, Heteraster subquadratus Gau-
thier, et des Ostracées : Ostrea aquila d'Orb. abondant, avec la
variété plus carénée passant à Ostrea Cou font Defr., Ostrea macrop-
92 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
tera Rœmer, etc. Le sentier qui monte de la maison forestière suit
obliquement cette zone sur une longueur de 4 ou 500 mètres ; c'est
un niveau important dont on observe nettement le prolongement
vers le sud-ouest au voisinage de l'arête escarpée.
Au-dessus de cette zone se retrouvent les calcaires semblables
aux précédents avec sections de Réquiénies (ou Toucasia?). Ces
bancs sont surmontés par d'autres calcaires qui affleurent à l'ouest,
au-dessus du marabout de Sidi Belkassem'ben Zouaoui. Ils renfer-
ment quelques sections de Rudistes indéterminables. L'épaisseur
totale de la série calcaire visible au Zouaoui dépasse 250 mètres.
Au Karkara, la pointe nord-ouest montre un formidable escar-
pement, où les calcaires se superposent sur près de 500 mètres.
Peut-être y a-t-il sur ce point un anticlinal aigu replié au nord-
ouest, tel que l'indique Coquand (1) d'une manière un peu exagé-
rée? c'est ce que je ne suis pas en mesure de préciser; cependant
la superposition paraît bien régulière et la succession continue.
La coupe précédente (fig. 1), montre sur le flanc ouest du Kar-
kara une succession de bancs calcaires à sections de Réquiénies,
qui correspondent nettement à ceux du Zouaoui ; les bancs supé-
rieurs montrent des épaississements locaux de calcaires à poly-
piers, bien visibles à la crête. Au-dessus, se retrouve la zone marno-
calcaire avec Echiuides (Epiaster) et fragments de Plicatules, dont il
serait intéressant de poursuivre l'étude. Les bancs calcaires qui sur-
o.
Dj. Karkara
£.
U 1099»»
«/g/K^/tt/e/i/
Fig. 2. — Coupe du Karkara au Djebel Chettaba. — Echelle : a,,û00.
Mêmes notations que la fig. \.
a, Cale, rubanés à Microster; b, Marnes grises et brunes; c, Marno-calcaires à
Inocérames; ri, Cale, durs à rognons siliceux ; e, Cale, et marnes à Inocérames.
montent cette zone présentent des épaisseurs variables, et paraissent
nettement tronqués obliquement par les couches suivantes qui s'ap-
pliquent indistinctement sur l'une ou l'autre des assises de l'Aptien.
(1) Coquand. Loc. cit., p. 80, fig. 18.
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantine 93
•
Ce sont les premières couches du Sénonien qui présente une
coupe complète et une série régulière jusqu'à l'arête du Djebel
Cbeltaba (fig. 2).
Le Sénonien débute par des calcaires rubanés jaunâtres, en petits
bancs bien réglés, qui se chargent de nodules siliceux vers le nord,
au-dessus du marabout Sidi Slimaue; ces calcaires renferment des
Micraster et des Inocérames : la collection Heinz renferme, du voi-
sinage de Sidi Slimane de nombreux Micraster Peint Coq., Micraster
sp., un grand échinide un peu écrasé : Pseudananchys algira Coq.
sp., et un tronçon d'Ammonite voisine de Sonneratia Daubreei de
Grossouvre.
Au-dessus se développent les marnes caractéristiques du Séno-
nien, grises, bleuâtres et brunes, avec rognons de calcaires jaunes,
qui occupent la dépression et remontent sur le flanc opposé ; ces
marnes, s'inlercalant de lits de calcaires marneux à Inocérames,
présentent, à un niveau plus élevé, des strates nettes, qui sont cou-
ronnées en concordance par les calcaires durs à nodules siliceux
de Taré te du Chettaba; ces calcaires se terminent en biseau aux
deux extrémités et s'élargissent dans la partie médiane et culmi-
nante en deux bandes rocheuses, comprenant entre elles une zone
de calcaires marneux à Inocérames, qui forment ici la dernière
assise du Sénonien. La disposition de ces calcaires à silex du
Djebel Chettaba permet de reconnaître l'existence d'un synclinal
aigu déversé à l'ouest, dont le prolongement est visible au nord,
dans les marno calcaires c.
Sur le flanc ouest du Chettaba se retrouve la série renversée :
marno calcaires c; puis les marnes grises et brunes si caractéris-
tiques et qui semblent prendre un développement beaucoup plus
considérable que dans la coupe ci-dessus.
Remarque. — Il est important de constater, d'après ce qui précède,
l'absence des calcaires cénomano-turoniens entre l'Aptien et le
Sénonien; c'est un fait de transgression sénonienne qui conduit à
admettre l'existence d'un promontoire saillant formé par les cal-
caires du Zouaoui et du Karkara, et qui peut expliquer le faciès
récital des calcaires cénomaniens du Rocher de Constantine, de
même que le faciès spécial de calcaires à silex de la base du Séno-
nien à Sidi Slimane.
B. Calcaires du Kheneg. — Ces calcaires très puissants renfer-
ment également des Réquiénies dans les bancs supérieurs; ils sont
par places très dolomitiques ; cette dolomitisation peut être due
aux actions minera lisantes.
94 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 FéVI\
Au rocher du Hamma, les calcaires présentent aussi des sections
de Réquiénies, et paraissent devoir se rapporter au même niveau
que les calcaires du Karkara, dont ils forment en quelque sorte le
prolongement.
C. Djebel el Akhal. — Les rochers noirs qui ont fait donner son
nom à cette montagne (El Akhal ou el Lekhal, le noir), sont des
calcaires dolomitiques, puissants, aux flancs escarpés. Ils sont sur-
montés en concordance par des calcaires en bancs bien réglés qui
passent sous une puissante assise de marnes feuilletées avec lits
calcaires, dans lesquelles j'ai eu la bonne fortune de retrouver un
des niveaux fossilifères à Ammonites pyriteuses du Barrémien du
Djebel Ouach, sur les pentes sud-est du mamelon 912, au-dessus
du Douar el Abiod. Parmi les espèces déterminables je puis citer :
Phylloceras infundibulum d'Orb. sp.
Desmoceras Seguenzœ Coq. sp.
— cf. Nabdalsa Coq. sp.
Pulchellin cf. Sautageaui Hermite sp.
Holcodiscus sp. ; Ptychoceras sp. ; Belemnites sp. ;
Echinide ferrugineux : Toxaster ou Heteraster ?
Lucina cf. sculpta d'Orb., à l'état ferrugineux, etc.
Cette assise marneuse vient buter par faille au sud contre les
marnes sénoniennes.
La situation de ces couches barrémiennes au-dessus des calcaires
dolomitiques du Djebel el Akhal établit une démarcation entre le
Néocomien proprement dit et les calcaires à Réquiénies et à Ostrea
aquila du Djebel Zouaoui. Au Djebel Ouach, le Barrémien se montre
isolé sans relations avec les calcaires infra-crétacés. Au Djebel
Zouaoui et au Karkara, ou ne voit sur aucun point apparaître les
marnes à Ammonites pyriteuses. On est ainsi conduit à admettre
que les calcaires à Rudistes du Zouaoui, situés à peu près à égale
distance (8 à 10 kilomètres) entre le Barrémien du Djebel Ouach,
à Test, et le Barrémien du Dj. el Akhal, à l'ouest, correspondent à
un horizon supérieur au Barrémien, et, par suite, représentent
l'Aptien, caractérisé du reste par les fossiles (0. aquila, etc.) de
l'assise supérieure. Ce faciès récifal del'Aptien peut être rapproché
de celui qui a été signalé par M. Blayac au Djebel Sidi Rgheiss (1),
et qui paraît se retrouver dans les pointements et chaînons calcaires
isolés dans la zone des plateaux constantinois.
(1) Blayac. Sur le dôme du Sidi Rgheiss. B. S. G. F., 3« s^r ., t. XXV, p. <J6i.
ET LES ÎLOTS TRIASIQUES DE LA RÉGION IIE CONSTANTIN!! 9S
Il I II I I * îï II
Il 411 I II i il II
il 1 1M4 1
96 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CBETTABA 20 Fé\T.
La série crétacée de la régioo de Constantine parait donc pouvoir
se classer de la manière suivante :
i Calcaires durs à nodules siliceux du Dj. Chettaba.
Marnes noires à rognons de cale, jaunes.
Marno-calcaires à lnocérames et Micraster Peini.
Turonien. — Calcaires supérieurs à Hippurites de Constantine.
CÉNOMAMEN. — Calcaires à Caprines du Hocher de Constantine.
àlbien? — Calcaires supérieurs du Djebel Zouaoui.
jsupr ( Calcaires à Ostrea aquila, Epiaster restrictus.
\ infr ( Calcaires à Réquiénies.
Barrémien. — Marnes et cale, à Ammon. pyriteuses du Dj. Ouach.
K. ( Calcaires rubanés du Djebel el Akhal.
liEOCOMIE^i i/"ii_» ji_ •*.• •■
( Calcaires dolorai tiques îd.
Il est possible que le faciès récifal commence au nord dès le
Barrémien, ce qui expliquerait l'existence des calcaires dolomiti-
ques au Kheneg et au Kef Béni Hamza, sous les calcaires à Réquiénies.
III. — Le Trias.
Sur le versant oriental du Djebel Chettaba, les pentes jaunâtres
que Ton distingue très nettement de Constantine, sous les cailloutis
rouges de l'Aquitanien, se rapporleut aux terrains gypseux, dont
les masses sont exploitées depuis longtemps par les indigènes, et
ont été utilisées pour les besoins de la ville de Constantine. La
superposition, régulière en apparence, des diverses assises depuis
les bancs calcaires du Karkara, avait naturellement, depuis
Coquand, fait admettre l'idée que ces couches gypseuses bariolées,
surmontant le Sénonien, devaient appartenir à l'Eocène inférieur,
d'autant plus que Tissot attribuait déjà à cette formation les marnes
noires sous-jacentes à rognons de calcaires jaunes. Cette opinion
a entraîné l'attribution à l'étage suessonien de formations argilo-
gypseuses reconnues en bien des points de la province. 11 ne fallait
rien moins que la découverte de fossiles probants pour renverser
d'une manière aussi radicale les conclusions de la stratigraphie.
Le terrain triasique peut s'observer de la manière la plus nette
en suivant, au-dessus de l'Oued el Melah, le sentier qui conduit à
l'exploitation Masson et qui remonte au-delà, le flanc nord du
mamelon S28 (feuille de Constantine, au 50.000e).
Après avoir traversé les bancs caillouteux de l'Aquitanien, qui
se relèvent de plus en plus à l'ouest, on marche sur un terrain
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantine 97
recouvert d'une croûte gypseuse, englobant les fragments de cal-
caires bleu-noirâtres en menus débris, de calcaires jaunes dolomi-
tiques, et de cargneules, avec des marnes jaunes et violacées. Ce
terrain s'élève sur le flanc de la colline au-dessus de la carrière
Masson, et couronne la partie supérieure mamelonnée, s'étendant
sur le versant nord en une bande étroite dont la teinte vive jaune
et rougeâtre tranche d'une façon absolue sur les marnes noires du
Sénonien qu'elle surmonte.
Dans les argiles irisées, à cristaux de gypse et à cargneules,
s'intercalent des bancs de calcaires bleuâtres, disloqués, inter-
rompus, des lits de calcaire jaune de miel et de marnes jaunes,
avec cristaux de quartz bipyraniidé, de doloinie, de pyrite de fer.
Ces couches sont brisées, fragmentées et distribuées sans ordre
apparent. Cependant, on peut remarquer, d'une manière générale,
à la base, c'est-à-dire au dessus du Sénonien, les argiles irisées,
surmontées des calcaires jaune de miel, calcaires bleuâtres dolomi-
tiques, que couronnent de nouveau des argiles irisées à gypse.
L'épaisseur visible sur le versant nord est d'environ 40 à 50 mètres
(fig. 4), mais peut se réduire à quelques mètres. C'est principale-
ment sur le flanc sud du mamelon 828, au-dessus du ravin dans
lequel se trouvent les plâtrières arabes, à la Mechta ben Banés, que
ces masses d'argiles irisées, de calcaires jaunes, et de gypses en
amas, présentent les colorations les plus vives, auxquelles le soleil
étincelant donne des tons chauds, rouges et jaunes, du plus bel
effet. Les amas de gypse sont localisés principalement dans la bor-
dure orientale, que les ravins entaillent plus profondément; le
gypse est distribué irrégulièrement, traverse en filons les inters-
tices des roches disloquées, dont il englobe les fragments, brisés
parfois en menus débris et corrodés d'une façon toute spéciale.
Dans la carrière Masson, ce sont souvent de simples veinules qui
paraissent remplir les intervalles désagrégés des strates calcaires.
Les ruisseaux qui sortent de ce terrain ont tous l'eau saumâtre,
d'où le nom d'Oued el Melah, témoignant de l'existence du sel
gemme mélangé au gypse.
Les fossiles se rencontrent exclusivement dans les plaquettes de
calcaire jaune et rougeâtre, les calcaires gris cendrés et dans les
marnes jaunes qui les accompagnent. Les recherches renouvelées
de M. Goux les lui ont fait reconnaître sur bien des points, et mes
observations personnelles m'ont permis de constater que les traces
de fossiles y sont fréquentes. Sur les plaquettes calcaires les bival-
ves se montrent généralement à l'état d'empreintes, mais dans les
ii Avril 189». — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 7
98 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
parties plus friables, les coquilles sont dégagées avec leur test. Je
citerai, en particulier, le sentier qui s'élève sur le plateau à l'ouest
du point 828, comme l'un des points intéressants à étudier. Les
Myophories sont les plus abondantes et caractéristiques ; sur les
plaquettes s'y ajoutent des fragments de Genrillia et de Lima. D'après
la détermination de M. von Zittel, ces fossiles se rapportent à :
Myophoria vulgaris Schloth. (du Wellenkalk et du Rôth), Gervillia
socialis Schloth.
La démonstration de l'âge triasique est incontestable ; nous
verrons plus loin comment peut s'expliquer la situation anormale
de ce terrain.
Les calcaires dolomitiques existent en quelques gros bancs en
dessous du sommet 828, mais ces calcaires paraissent constituer
une masse d'une épaisseur d'environ 50 mètres, à la colline rocheuse
de Talaâ, qui domine la Mechta Talaâ, à la pointe nord-ouest de
cette zone (voir fig. 7). Ces calcaires sont durs, de couleur bleu
foncé, très nettement stratifiés en gros bancs intercalés de lits plus
minces de calcaires grumeleux ; je n'y ai reconnu qu'une section de
Gastropode indéterminable. Ces calcaires diffèrent totalement de
ceux du Crétacé ; ils passent graduellement aux calcaires dolomi-
tiques rougeâtres et jaunes à Myophories. D'après la disposition de
cette assise, ces calcaires représentent l'assise inférieure du Trias
qui affleure dans cette région et correspondent probablement au
Muschelkalk.
La série triasique, étirée et disloquée, parait ainsi comprendre les
assises suivantes, de bas en haut :
1° Calcaires dolomitiques, bleuâtres ;
2° Calcaires jaune de miel, cale, en plaquettes et marnes
jaunes à Myophories ;
3° Argiles irisées, gypses et cargneules.
Tectonique
1° Relations du Trias avec les terrains encaissants
(Voir la carte, lig. 3, p. 95).
La nappe triasique du Chettaba affleure sur une longueur d'envi-
ron quatre kilomètres du nord-est au sud-ouest et une largeur
maxima de trois kilomètres à peine.
Sur la bordure orientale, l'allleurement triasique est continu
dans une zone, d'abord très étroite, recouverte à l'est par les assises
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantine 90
oligocènes fortement redressées, puis s'élargissant de ce coté par
l'érosion de la couverture jusqu'à la pointe sud-ouest, où le terrain
disparaît à nouveau sous l'Oligocène et sous le Sénunien. Le
contact à l'ouest de cette zone avec le Sénonien parait sensiblement
vertical ; toute la nappe morcelée qui s'étend à l'ouest, se trouve en
superposition anormale sur le Sénonien. Ce sont ces relations que
nous allons examiner.
Dans la partie nord, la carte, fig. 3, montre deux bandes étroites
de Trias; celle de l'est se présente comme un véritable filon dont
j'ai essayé de rendre l'aspect dans le croquis suivant.
Tr, Trias; po, Poudlngucs oligocènes.
Le ravin, profondément entaillé, permet de reconnaître, du ver-
sant opposé au sud, la disposition des terrains dout les différents
aspects sont nettement tranchés. La bande triasique, de coloration
jaune avec taches irisées s'élève du fond du ravin, eu se rétrécissant
dans les parties élevées, où l'affleurement se réduit à quelques
mètres, et même à de simples traces sous les pond ingues oligocènes.
Ces conglomérats rouges montrant leurs tranches sensiblement
horizontales au sommet du contrefort 760, s'infléchissent a l'est
avec quelques interruptions laissant a (fleurer le Sénonien, et pré-
sentent au flanc du ravin une inclinaison fortement accusée; les
blocs et fragments éboulés de ces poudingues masquent un peu la
ligne de contact du Trias; la superposition est bien nette dans tes
parties élevées, et du reste, les premières couches conglomérées
renferment en abondance des plaquettes, à peine roulées, de cal-
caires triasiques.
Le sentier qui monte au nord du ravin, sur le tlauc du mamelon
100
E. F1CTEUR.
- LE MASSIF DU CHETTABÀ
20 Févr.
643, est très instructif à cet égard. A l'ouest, la ligne de contact du
Trias avec les marnes brunes du Sénonien est nettement marquée.
Dans la partie supérieure, où l'affleurement triasique s'élargît par
suite du ravinement latéral, on. voit des blocs de calcaires jaunes
sénoniens emballés dan» un magma gypseux, dont la formation est
due vraisemblablement à la cristallisation du gypse entraîné par
dissolution dans les eaux circulant à travers le terrain gypseux
triasique. Tout le flanc du contrefort, à l'ouest du poîntement
triasique, est constitué par le Sénonien, marnes noires et calcaires
marneux bleuâtres, dont les bancs, exploités pour la chaux hydrau-
lique à l'usine Micoud, sont plissés, écrasés et disloqués d'une
façon remarquable.
Si maintenant l'on examine du nord, d'un point du contrefort
760, le versant opposé du ravin, on voit de la manière la plus nette,
la bande triasique, s'élevant d'abord verticalement sur le flanc du
ravin, s'infléchir à l'ouest et se prolonger en une nappe continue
qui couronne le Sénonien.
Fig. S. — Superposition du Trias
Dord du Cbcttaba.
En suivant le sentier qui longe le flanc de la montagne, on se
trouve à peu près à ta limite des deux terrains; les argiles irisées
et cargneules recouvrant nettement le Sénouien sur une étendue
de plus de 2 kilomètres.
Il est bien évident que le pointement triasique du nord du ravin
(ûg. 4) représente ta racine d'un pli étiré et replié à l'ouest, et qui,
de ce coté, a complètement disparu de la surface du Sénonien avant
le dépôt des poudingues oligocènes (Voir plus loin la fig. 8, I).
La carrière exploitée pour l'usine Masson permet de reconnaître
une série de bancs calcaires marneux, analogues à ceux du Séno-
nien, qui sont pénétrés et traversés de filonnets gypseux. Au-delà,
l'assise d'argiles irisées, gypses, cargneules et calcaires dolomi-
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantine
101
tiques, présente une épaisseur qui peut atteindre 70 mètres; la
stratification est assez nette sur de petites surfaces. Au-delà, la
bande triasique s'amincit et vient passer sous les calcaires rocheux
qui couronnent le sommet 864; la coupe depuis le sentier présente
la disposition suivante :
8*V
a
Fig. 6. — Étirement de la bande triasique dans le Sénonlen.
Le Trias est surmonté par le Sénonien, marnes grises et calcaires
marneux, d'une épaisseur de 30 à 40 mètres, qui forme le talus
couronné par les calcaires durs à silex Se du Sénonien supérieur.
Ce lambeau en superposition normale témoigne de l'existence d'un
anticlinal triasique étiré dans le Sénonien. Sur le versant opposé
à l'ouest, on retrouve sous les calcaires supérieurs la même suc-
cession : marnes du Sénonien et Trias recouvrant le Sénonien qui
se développe au-delà sur toutes les pentes.
La bande triasique s'amincit davantage en se relevant au col qui
sépare le sommet 821 du Kef Talaâ; elle vient former une bordure
très étroite (3 à 4 mètres) toujours sur le Sénonien et au-dessous
des calcaires rocheux: la zone irisée passe au-dessus des gourbis
du Douar Talaâ et s'étale en une sorte de promontoire qui disparaît
à 300 mètres au nord sous les poudingues oligocènes.
an
N. N. £.
Fig. 7. — Proni du Kef Talaâ, vu^de l'ost.
Les calcaires dont il a été question ci-dessus, et qui paraissent
se rattacher au Trias, présentent dans les bancs supérieurs une
inflexion graduelle qui les incline d'abord à 50°, puis les redresse
à la verticale, au nord ; cette torsion semble indiquer un raccor-
102 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
dément avec les bancs inférieurs. Sur le flanc ouest, les calcaires
s'infléchissent également et paraissent s'enfoncer en coin dans les
argiles irisées qui viennent les recouvrir. Cette disposition implique
l'idée de la boucle d'un anticlinal étiré (Fig. 8, 1).
Au sud du contrefort 828, les ravins qui descendent vers l'ouest
à TOued el Melah entament la masse triasique dans laquelle les
gypses se montrent plus ou moins développés à la base (plà trières
arabes de la Mechta ben-Banès).
Le ravin de Sidi Malek permet de suivre le prolongement vers
Test de la bande triasique sous Jes poudingues aquitaniens; la
racine du pli, masquée par les dépôts oligocènes, est bien plus
large que ne le laissait supposer le pointement étroit de la fig. 4.
Plus loin, les poudingues rouges viennent former au-dessus du
Trias, une couverture démantelée, sorte de plate-forme à l'altitude
765, qui s'étend à l'ouest sur le Sénonien, masquant les relations
du Trias avec le Sénonien (Fig. 8, IV).
En remontant le Chabet Aïn-Mtaïra, au-dessus de Ben-Banès, on
voit toujours le Trias s'élever au-dessus du Sénonien qui occupe
les pentes intérieures. Au fond de ce ravin, les calcaires qui for-
ment un rocher disloqué (739) présentent des sections de Caprines
identiques à celles du Cénomanien de la corniche de Constantiue.
Des fragments et blocs entraînés sur les pentes inférieures sont
pétris de Caprines et ne peuvent laisser aucun doute sur la présence
d'un témoin cénomanien, reposant ici sur le Sénonien, et plus ou
moins recouvert par le Trias (Fig. 8, 111).
L'existence de ce lambeau cénomanien est d'une grande impor-
tance, en indiquant l'extension sur ce versant des calcaires céno-
maniens qui ne se rencontrent pas, ainsi que je lai montré plus
haut, entre l'Aptien et le Sénonien du Karkara (fig. 2).
En dehors de ce lambeau, M. Goux et moi avons encore reconnu
sur les pentes supérieures, disséminés à la surface des marnes
sénoniennes, quelques blocs de calcaire à Caprines.
La surface de contact anormal du Trias et du Sénonien remonte
en plan incliné vers l'est, la nappe triasique disparaît, et les pentes
ravinées ne montrent plus que le Sénonien. Mais plus haut se retrou-
vent quelques lambeaux intéressants dont la situation en recou-
vrement sur le Sénonien est absolument nette; on peut les recon-
naître en suivant le sentier qui contourne ce flanc raviné condui-
sant du mamelon 828 au sommet 917.
Un premier îlot de cargneules, argiles irisées et calcaires jaunes,
qui n'a pas plus de 10 à 15 mètres de côté, et quelques mètres
d'épaisseur, repose nettement sur le Sénonien.
1899 et les Ilots triasiques de la région de Constantin e
103
Un autre petit lambeau d'environ 80 mètres de long se trouve à
100 mètres plus loin ; ce sont de simples traces, que des érosions
violentes pourraient faire disparaître. Sur le mamelon au-dessus
de 869, un lambeau de gypse anciennement exploité avec calcaire
bleuâtre et cargneules, forme également couverture au Sénonien.
Toute la petite crête qui se poursuit au sud vers les anciennes
plâtrières, est triasique avec fossiles, le soubassement est formé
par le Sénonien.
2° Anticlinal triasique étiré dans le Sénonien
Les coupes suivantes, disposées dans leur ordre du nord au sud
à travers la bande triasique, résument l'allure du Trias par rapport
au Sénonien.
N.o
SE
OÏMelmh
î \ \ ^
oOwtJmrt
Fiff. 8. —Coupes parallèles dans le Trias du Chcttaba. — Fx»hHl<! : ■„■„ J00
Apt, Cale, du Karkara (Aptien); Cénom., Cale, à Caprint»*; Se. Cale, à nodules
siliceux (Sénon. sup.); ag, Argiles a gypse (Olipoeène) : po, Poudingue aqui-
taniens.
L'étude détaillée montre que :
1° La bordure est de la bande triasique se trouve, du côté de
l'ouest, en contact sensiblement vertical avec le Sénonien, suivant
104 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHLTTABA 20 Fé\T.
une ligne dirigée du nord-est au sud-ouest; cette bande, qui peut se
prolonger au nord-est au-delà de l'affleurement qui passe sous les
poudingues oligocènes, ne paraît pas se poursuivre au sud-ouest,
puisqu'on n'aperçoit aucune trace dans le ravin de l'Oued Mgha-
rouel, à un niveau bien inférieur à celui de l'affleurement terminal.
2° Sur tout le flanc est, le Trias est recouvert normalement par
les assises oligocènes, argiles à gypse et poudingues, sous lesquels
il se montre encore à 7 ou 800 mètres de la bordure.
3° Tout le reste de l'affleurement triasique se trouve en recou-
vrement anormal sur le Sénonien, suivant une surface inclinée
vers l'est.
4° Au nord-ouest, la nappe triasique (fig. 8, coupe II) s'étire dans le
Sénonien, même jusqu'à disparaître sur le flanc sud du sommet 884.
Il en résulte que l'on est amené à admettre l'existence d'un anti-
clinal triasique couché au nord-ouest sur le Sénonien. et même étiré
par un pli aigu dans ce terrain. La racine du pli est occupée par la
bande continue de l'est dont la largeur est masquée par les dépôts
oligocènes. Ainsi qu'en témoigne la nappe de poudingues de la
fig. 8, coupe IV, les dépôts oligocènes ont dû recouvrir la majeure
partie de l'affleurement triasique, que l'érosion seule a fait appa-
raître. En reconstituant cette couverture oligocène, on voit que le
Trias pouvait être simplement représenté par quelques traces plus
ou moins isolées, à la surface, du Sénonien.
Ces coupes nous présentent, dans leurs détails, les différentes
conditions dans lesquelles peuvent affleurer des lambeaux triasi-
ques amenés au jour par une cause analogue; soit à l'état de poin-
tement filonien (coupe I), correspondant à la racine seule du pli,
soit à l'état de témoins isolés à la surface de terrains plus récents
(coupes NI et IV), soit à l'état de nappe mince interstratifiée dans
le Sénonien (coupe II) et peuvent servir à expliquer les cas les
plus variés d'intrusion, soit verticale, soit oblique ou horizontale,
d'un terrain argilo-gypseux à faciès triasique dans les formations
plus récentes.
Ce pli déversé sur plus de 2 kilomètres, amenant au jour à tra-
vers le Sénonien une nappe triasique, dont les affleurements en
situation normale ne sont pas connus dans la région avoisinante,
constitue un de ces accidents singuliers dont nous allons chercher
l'explication dans la tectonique de la région.
/
i
1899 ei les Ilots triasiques de la région de constantine
3° Structure générale du massif
du Chettaba
Les chaînons calcaires culminants du
massif du Chettaba surgissent du Séno-
Dien par un réseau de failles bien mar-
quées et incontestables ; le Djebel Zouaoui
est complètement limité par deux grandes
failles qui font buter le pied des calcaires
aptiens contre le Sénonien à l'est et à
l'ouest; le Djebel Karkara est bordé à
l'ouest par une faille sensiblement paral-
lèle à celle du Zouaoui, et au nord par
' nue faille perpendiculaire. Entre les deux
failles principales, le Sénonien effondré
est affecté de plis longitudinaux qui se
poursuivent au sud-ouest.
A l'est, le rocher de Constantine et de
Sidi-M'cid est presque entièrement, sauf
au sud-est, limité par une faille polygo-
nale, qui met en contact les calcaires
cénomano-turoniens avec le Sénonien.
La ng. 9 montre la disposition de ces
lignes de fractures.
Ces masses calcaires, de même que
celles qui formeut le Kheneget le Djebel
el Akbal sont des tronçons découpés, en
quelque sorte à l'em porte-pièce, d'une
ancienne chaîne crétacée démantelée vrai-
semblablement après l'Eocène inférieur
et avant l'Eocène supérieur (Grès du
Djebel Ouacb).
Le flanc est du Karkara fait exception :
j'ai montré ci-dessus que les calcaires
aptiens sont recouverts directement par
le Sénonien, dont les coucbes se super-
posent régulièrement jusqu'à l'arête du
Djebel Chettaba; mais, à la pointe nord-
ouest du Karkara se manifeste un acci-
dent assez brusque : bossellement des
calcaires aptiens avec pli aigu du Séno-
1 2
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106 E. FICHE UR. -r- LE MASSIF DU CHETTABA 90 FéVT.
nien (fig. 8, coupe II). Au Djebel Chettaba, les calcaires du Séno-
nien supérieur sont repliés en synclinal aigu déjeté à l'ouest, ainsi
qu'il est facile de s'en assurer en constatant la terminaison en
biseau aigu du pli aux deux extrémités de cette arête.
Ce synclinal aigu, qui se poursuit au sud-ouest dans le Sénonie'n,
explique le renversement de l'anticlinal sénonien dont le noyau
est occupé par la nappe triasique. La présence des lambeaux de
calcaires à Caprines entre le Sénonien et le Trias, attestant l'étiré-
ment du Cénomanien, confirme encore cette interprétation. Le
noyau triasique traversant ainsi, sans les déranger visiblement,
les assises secondaires, probablement les calcaires liasiques et
toute la puissante série crétacée du Néocomien au Turonien, a
pénétré en s'étirant dans le Sénonien, dont les couches plastiques
se sont prêtées plus facilement à cet effort que les masses calcaires
sous-jacentes.
Il paraît logique* de supposer que cette poussée triasique s'est
produite dans l'écartement des lèvres d'une faille sensiblement
parallèle aux failles directrices du Karkara et du Zouaoui, et à la
faille occidentale du Rocher de Constantine.
Cet accident remarquable peut avoir également une cause dans
le foisonnement des gypses triasiques qui occupent en masses
importantes Taxe du pli, ou, s'il est permis d'employer cette
expression, la cheminée d'arrivée du Trias.
Remarquons encore, pour terminer, que cette pénétration du
Trias dans le Sénonien est antérieure aux dépôts oligocènes qui
sont transgressifs, et dont les poudingues renferment de nombreux
éléments repris des calcaires triasiques.
Autres pointements triasiques de la région.
Quelques ilôts de même constitution et de faciès tellement iden-
tique qu'il est impossible de les séparer du Trias, ont été reconnus
dans la feuille de Constantine, les principaux sur les indications
et les tracés de M. Jacob.
1° Bande d' Ain Goulia, — A 10 kilomètres environ au sud-ouest
de cette nappe triasique du Chettaba, au sud du Djebel Zouaoui et
au voisinage de la maison forestière du Chabet Saïd, se montre en
plein Sénonien une bande étroite d'argiles irisées, avec gypses,
marnes et calcaires jaunes et cargneules.
Cette bande commence vers le nord-est, en dessous du mamelon
848, avec une épaisseur de 10 à 15 mètres, intercalée en apparence
1899 et les Ilots tkiasiques de la région de constantine 107
dans le Sénonien. Elle se continue au sud-ouest, en suivant sensi-
blement le même niveau ; dans le ravin, sous la maison forestière,
elle s'épaissit légèrement (20 à 25 mètres), puis se relève sur le flanc
du mamelon 835, en s'amincissant par places jusqu'à disparaître
sous les éboulis du Sénonien.
Au mamelon 835, la coupe est très nette : marnes noires du Séno-
nien au-dessous de la zone d'argiles irisées, qui est surmontée par
les marnes et calcaires à I noce rames formant le sommet ; l'épais-
seur de l'assise irisée ne dépasse pas 10 mètres.
Cette bande très étroite qui donne un contour sinueux sur la
carte, appliquée au flanc des collines sénoniennes, est très visible
à distance, grâce à sa coloration remarquable, notamment du sud.
C'est, en résumé, une véritable lame mince qui plonge dans le
Sénonien suivant un plan faiblement incliné vers le nord ; l'affleu-
rement disparait au nord sous le Sénonien, sans qu'il soit possible
de voir la racine d'un pli. L'aspect de ce terrain, argiles irisées,
calcaires jaune de-miel, cargneules et quartz bipyramidés, est abso-
lument identique à celui des couches du Chettaba, et bien que je
n'aie pas rencontré de fossiles sur ce point, je n'éprouve aucune
hésitation à rapporter cette nappe au Trias; l'interprétation est du
reste facile à la suite des observations faites au Chettaba.
Il n'y a pas de masse gypseuse, mais seulement de petits lits de
gypse stratifié dans les argiles. Les bancs calcaires sénoniens parais-
sent en quelques points, brusquement tronqués, comme sous l'action
d'une intrusion violente.
Cette bande remonte dans le ravin au pied de 891, puis elle se
prolonge sur le flanc est du mamelon rocheux qui porte les ruines
d'Arsacal (El Goulia), passant sous les marnes sénoniennes en zone
étroite surmontée des bancs calcaires à nodules siliceux, ici rem-
plis de magnifiques empreintes d'Inocérames, qui appartiennent
sans conteste au Sénonien supérieur (calcaires du Djebel Chettaba).
C'est ici le commencement du faciès calcaire à lnocérames, déve-
loppé plus au sud à El Guerrah. A la pointe sud-ouest, la zone
triasique étirée, toujours très étroite, vient se terminer eu biseau
entre les calcaires et les marnes sénoniennes.
Ce point reproduit absolument la coupe donnée du Chettaba
(fig. 6), ainsi que le montre la figure suivante (fig. 10).
Cette petite lame se prolonge au sud jusqu'au mamelon 80o
(feuille de l'Oued Athmenia), toujours intercalée dans le Sénouien;
les gypses s'y montrent nettement stratifiés dans les argiles irisées
et les calcaires jaunes.
108 £. FICHEUR. — LE MA8SIF DU CHETTABA 20 Févr.
En résumé, cette lame triasique épaisse de 8 à 10 mètres en
moyenne affleure en une bande continue sur 2 kilomètres environ
du nord-est au sud-ouest et pénétrant environ de 1 kilomètre dans
le ravin vers le nord. L'apparition de ce Trias au milieu du Séno-
nien est due à la même cause que celle qui a amené une nappe
identique dans le Sénonien du Chettaba ; ici, par contre, le noyau
se trouve au nord-ouest et le pli est déversé au sud-est.
d'yirsaoal. 307
^MllIFÏÏIlllllMlllilllIlTffrc1 TrvtLs
1
Fig. 10. — Coupe du Trias à AId Goulia. — Echelle : 18 ^
2° A l'Ouest du Djebel Zouaoui, sur la crête qui forme ligne de
partage près du point 1084, apparaît, sous les argiles oligocènes, un
lambeau extrêmement réduit d'argiles irisées et gypses (25 mètres
d'affleurement) que je n'hésite pas à considérer comme ayant la
même origine.
3° Djebel el A khal — Au flanc nord, sur les calcaires dolomi-
tiques que j'ai considérés plus haut comme néocomiens, affleurent,
dans la tranchée de la route, des couches irisées présentant la
coupe suivante depuis la base : 1° argiles irisées; 2° calcaires jaunes,
dolomies et quartz bipyramidés; 3° argiles irisées; 4° cargneules,
calcaires jaunes et quartz. L'affleurement est masqué au-dessus
par les éboulis limoneux jusqu'au petit ravin que contourne la
route, et dans lequel se retrouvent des argiles irisées.
Le contact avec les calcaires dolomitiques parait se faire par une
faille, dont le prolongement à Test dans l'Oued Koton, donne lieu
à une source thermale.
4° Kef Béni Hamza. — Au nord-ouest d'Aïn Kerma, le piton ro-
cheux de Béni Hamza est formé de calcaires massifs analogues à
ceux du Kheneg, et qui sont à l'ouest en contact par faille avec un
lambeau important d'argiles irisées, cargneules, gypses, calcaires
jaunes, calcaires bleuâtres, absolument semblables à ceux du Chet-
taba; les recherches de M. Goux, comme les miennes, ont été infruc-
tueuses ; les calcaires jaune de miel restent à étudier avec soin.
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantine 109
Considérations générales sur la structure de la région
Les lambeaux triasiques plus ou moins importants dont il vient
d'être question, sont arrivés au jour en traversant, à la faveur de
failles profondes, les terrains crétacés et pénétrant dans le Séno-
nien. Dans la chaîne numidienne qui se développe à 20 kilomètres
au nord, à la bordure du bassin, les calcaires liasiques forment
l'ossature et se montrent sur une grande épaisseur au Kef Sidi Dris
et au Djebel Msid Aïcha. 11 semblerait rationnel de rencontrer dans
cette chaîne, entre le massif ancien et les affleurements liasiques,
des représentants plus ou moins importants de la formation triasi
que. On sait que le Trias a été indiqué par Coquand dès ses pre-
mières explorations de la province de Constantine, à El Kantour
et aux Toumiettes (1).
J'avais déjà visité les environs d'El Kantour à deux reprises, et
j'ai tenu* à l'étudier de plus près en compagnie de M. Blayac, en
novembre 1897.
Le Trias d'El Kantour.
Sous les calcaires liasiques, exploités en carrière à l'usine à
chaux de l'Armée-Française, au nord d'El Kantour, en remontant
la route on trouve une petite zone d'argiles rouges feuilletées, légè-
rement bariolées, ayant l'aspect des argiles irisées sans gypse ; puis
viennent des schistes satinés blanchâtres, avec psammites. Ces
schistes s'intercalent de lits de quartzites, grès et conglomérats à
petits éléments. Les couches très disloquées sont comprises entre
les calcaires (Lias inférieur d'après les fossiles) et les schistes et
phyllades à filons de quartz qui se rattachent au Précambrien du
massif voisin. L'épaisseur des assises intercalaires est d'environ 60
à 80 mètres.
En passant au Col au dessus du tunnel, on voit dans les argiles
rouges des marnes et calcaires jaunes qui rappellent entièrement
l'aspect des calcaires à Myophories du Chettaba, mais dans lesquels
nous n'avons pas vu de fossiles, pas de gypse non plus. Au-dessus
les calcaires liasiques à nodules siliceux, très réduits, sont sur-
montés directement des calcaires à Nummulites del'Eocène moyen.
(1) Coquand. Description géologique de la proYince de Constantine (Mém. de ta
Soc. GéoL de Fr. IKtt, p. U).
110 E. FICHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 Févr.
La zone des schistes précambriens, qui affleurent dans le ravin,
occupe Taxe d'un anticlinal, sur le revers sud duquel on voit,
dans les tranchées du chemin de fer et de la route, les couches
sous-liasiques disloquées : argiles rouges, schistes satinés, quart-
zites, grès, conglomérats à petits grains de -quartz, puis argiles
schisteuses, argiles rouges et grès rouges. Cet ensemble est bien
différent des assises du Chettaba, surtout par l'absence d'argiles
irisées à gypse et de cargneules.
Ce sont là des assises qui peuvent représenter le Trias? Suivant
Coquand, elles se prolongent dans Taxe des Toumiettes et au-delà
vers l'est. Elles peuvent, d'après leur situation stratigraphique,
être considérées comme un faciès sub-littoral du Trias ; il n'en est
pas moins surprenant de ne pas rencontrer ici, en situation nor-
male, les affleurements de ces argiles irisées du bassin de Constan-
tine. J'ai suivi vers l'ouest une assez grande étendue de la chaîne
jusqu'au Kef Sidi Dris et au Djebel Msid el Aïcha et je n'en ai pas
vu de traces. Les accidents qui ont amené le Trias à percer le Séno-
nien dans les conditions étudiées ci-dessus n'en sont que plus remar-
quables.
Conclusions.
La découverte des fossiles triasiques dans les argiles irisées,
gypses et cargneules du Chettaba est venue apporter à la question
des pointements gypseux du Tell et de la Chaîne saharienne, une
précieuse contribution, en donnant une base aux recherches plus
précises à reprendre sur les relations de ces Ilots avec les terrains
encaissants. Il demeure bien établi que l'arrivée au jour du Trias
gypseux à travers une puissante' série d'assises crétacées, est un
fait bien constaté, explicable, quelle qu'en soit l'étrange té, par le
jeu des failles et des écrasements latéraux ayant provoqué un étire-
ment extraordinaire de ces couches plastiques, dont les lambeaux
se montrent toujours dans un état de dislocation intense.
Les études détaillées de MM. Blayac et Gentil dans la région de
Souk Ahras (1), ont donné à cette question de l'extension du Trias
une certaine ampleur; j'ai été heureux de constater, en juillet der-
nier, que les observations signalées sont de la plus rigoureuse
exactitude. De même, les conclusions indiquées par M. Blayac sur
les lambeaux argilo-gypseux de la région des Chotts constanti-
(1) Blayac et Gentil. Le Trias dans la région de Souk-Ahras (B. S. G. F., 3* sér.,
t. XXV, p. ;>23).
1899 et les Ilots triasiques de la région de constantink 1 11
Dois (l)t relativement à la salure de ces bassins fermés, me parais-
sent bien justifiées.
Il en est de même des observations faites par M. Gentil sur le
Trias gypseux de la région de la Basse Tafna (2), dont j'ai pu véri-
fier, en compagnie de notre zélé confrère, les points principaux.
Il est certain que l'on se trouve, dans la plupart des cas, en pré-
sence de faits difficiles à interpréter surtout à cause de Texigùité
des affleurements.
Les pointements argilo-gypseux et salins du Trias, souvent accom-
pagnés de roches ophitiques, ont pénétré par intrusion, en quelque
sorte filonienne, dans les terrains de divers âges, la circulation des
eaux dissolvant le gypse et le déposant à nouveau, a dû exercer
une influence active sur les terrains encaissants, mais dans les cas
les plus probants, ces pointements occupent des axes anticlinaux.
M. Blayac a pu dernièrement, en signaler des exemples remar-
quables dans la région de Cbéria. Nous avons pu récemment, M.
Blayac et moi, faire sur la montagne de sel d'El Outaïa, quelques
observations importantes qui nie paraissent au moins concluantes
pour éloigner l'idée de métamorphisme de calcaires crétacés. Je
reviendrai sur cette question dans une prochaine communication.
Avant de terminer cette note sur la région de Constantine, je
tiens à signaler brièvement l'existence des lambeaux triasiques des
Ouled Rahmoun et d'El Guerrah.
Ilot triasique des Ouled Rahmoun.
Un pointement d argiles irisées et gypses est coupé par une tran-
chée de la voie ferrée à 1 kilomètre au nord de la station des Ouled
Rahmoun, à 23 kilomètres en ligne droite au sud de Constantine;
dans le voisinage, les indications de Chabet el-Djibs, d'Ain el Mêla h,
d'Ain el Amra (K> el Mrah) de la carte d'Etat-Major (feuille du
Kroubs), laissaient soupçonner suffisamment l'existence d'une zone
d'argiles irisées avec gypse et sel. Nous y avons fait une course
rapide, M. Blayac et moi, et les conclusions complétées par mes
observations récentes, ont été celles que nous présumions.
Les collines qui s'étendent à l'ouest des Ouled Rahmoun sont
constituées par le Suessonien inférieur composé de deux assises :
(1) J. Blayac. Los Chotts des Hauts-Plateaux de l'Est constantinois {B. S. G. F.,
3» sér., t. XXV, p. 907).
(2) L. Gentil. Note sur l'existence du Trias gypseux dans la province4 d'Oran
(B. S. G. /•'., 3 sér., t. XXVI, p. 457).
112 E. F1CHEUR. — LE MASSIF DU CHETTABA 20 FéVI\
i
1° l'inférieure, marnes jaunes et calcaires rognonneux à Ostrea
strtctiplicata; 2° au-dessus, calcaires gris-cendré et calcaires blancs
à silex caractéristiques de l'étage.
Les argiles irisées commencent à se montrer dans la tranchée de
la route au-dessus de la gare, sous des couches conglomérées forte-
ment inclinées, probablement pliocènes? Au-delà, la tranchée du
chemin de fer coupe le Suessonien inférieur. Dans la tranchée sui-
vante se montre un Ilot d'argiles irisées avec gypse cristallisé en
masse et en filonnets pénétrant en tous sens des couches boulever-
sées et englobant des blocs et fragments de calcaires blancs et gri-
sâtres, corrodés, qui me paraissent incontestablement appartenir
au Suessonien. Dans ces blocs empâtés, j'ai recueilli un fragment
de roche phosphatée qui ne peut laisser de doute sur son attribu-
tion au Suessonien.
Cette masse incohérente présente un bombement recouvert sur
les flancs par les marnes éocènes surmontées immédiatement par
les calcaires à silex.
Dans le Chabet el Djibs, à l'ouest, les deux versants et le fond
du ravin sont occupés par des argiles irisées, gypses, cargneules,
calcaire jaune-de-miel et calcaires bleuâtres, absolument sembla-
bles au terrain du Chettaba, et que nous n'hésitons nullement à
rapporter au Trias, malgré l'absence de fossiles. Ces argiles irisées
remontent le ravin, dans lequel on voit le gypse en couches nette-
ment stratifiées, verticales, passant sous des calcaires durs, dolo-
mitiques, en bancs bien réglés, qui ont absolument le faciès des
calcaires de Talaà (Chettaba). Ces bancs présentent des talus rocheux
au-dessus du ravin (Bordj el Youdi) et sont recouverts sur les colli-
nes voisines par les marnes du Suessonien.
Au sud-ouest, au Coudiat Radia, la coupe devient plus nette, les
couches triasiques bien stratifiées présentent la succession suivante,
de haut en bas :
1° Calcaires dolomitiques en gros bancs ;
2° Calcaires bleuâtres en petits lits;
3" Calcaires jaune-de-miel et marnes jaunes;
4° Argiles irisées, cargneules et gypse ;
5° Marnes suessoniennes à Ostrea strictiplicata, occupant la base
de la colline, et passant sous les couches triasiques de 4 à 1.
Plus loin, dominant immédiatement la route, se dresse le Kou-
diat el Amra (Koudiat el Mrah de la carte), sur les pentes duquel,
grâce au ravin encaissé, on peut constater de la manière la plus
1899 ET LES ÎLOTS TRIAS1QUBS DE LA RÉGION DE CONSTANT1NE 113
évidente la superposition au Suessonien de la série des couches
suivantes :
1° Argiles irisées et gypses stratifiés : 15 à 20 mètres ;
2° Calcaires jaunes, cargneules et gypses;
3° Zone étroite de tufs mélaphyriques avec filon ferrugineux;
4° Calcaires dolomitiques formant le Kef saillant.
S.E. hleJsimr* N.O
\A
8
Fig. 11. — Coupe du Koudiat el Amra (Ouled Rahmoun).
La superposition anormale est manifeste sur toute la bordure. Il
en résulte que les argiles irisées représeutent rassise la plus élevée,
et les calcaires dolomitiques l'assise inférieure, comme au Chettaba.
Toute une série de mamelons rocheux qui s'étendent au nord,
est couronnée de ces calcaires démantelés, rocheux, sous lesquels
on distingue toujours les argiles irisées qui prennent une impor-
tance plus grande sur le flanc du ravin El Hamra.
Dans la partie élevée du ravin, on voit une zone d'argiles irisées
surmontant les calcaires dolomitiques, et recouvertes par le Suesso-
nien qui constitue toute la zone marneuse et marno-calcaire du
Trik-elBab.
La superposition des argiles irisées au Suessonien est encore
très nette sur le flanc du Ka-Taouzé (846); la bande triasique,
épaisse de 25 à 30 mètres, montrant les calcaires compris entre
deux zones d'argiles irisées, se trouve intercalée dans le Suesso-
nien; c'est bien une nappe anticlinale étirée dont la racine se
trouve an nord-ouest et qui s'étale au sud est sur le Suessonien.
L'interprétation en est facile d'après le Chettaba ; le pli présente
la même allure qu'à Aïn Goulia. La zone d'affleurement occupe une
étendue de près de 5 kilomètres et une largeur de plus de 1500
mètres.
El Guerrah.
Un autre pointeinent d'argiles irisées, gypses et cargneules,
apparaît dans le prolongement de la bande précédente à 3 kilo-
5 Juin 1899. — T. XXVII. Bull. Sur. Grol. Fr. — S
114 SUR LES PLISSEMENTS 1)1* BASSIN DE L'AQUITAINE 20 Févr.
mètres au sud-ouest, et occupe une zone très étroite qui pénètre
entre deux failles dans Taxe d'un anticlinal des calcaires probable-
ment infra-crétacés du rocher d'EI-Guerrah. Cette zone se trouve en
arrière du rocher 940, à 1 kilomètre au nord d'El Guerrah. Des
traces irisées, masquées par les éboulis et les travertins pliocènes,
apparaissent sur les pentes et dans les ravins, indiquant le prolon-
gement, au sud-ouest, de cette zone.
Résumé. — Lasituationdu lambeau triasique des Ouled Rahmoun,
en pli étiré dans le Suessonien, indique que ces arrivées si surpre-
nantes du Trias se sont produites postérieurement au dépôt du
Suessonien inférieur. Cette période correspond du reste à une
phase importante des plissements de la Chaîne tellienne de la pro-
vince de Constantine.
SUR LES PLISSEMENTS Ï)U BASSIN DE L'AQUITAINE (1)
(OBSERVATIONS A UNE NOTE DE M. GLANGEAUD)
par M. V. RAULIIV.
M. Glangeaud a publié dans le Compte-rendu de l'Académie des
Sciences, 26 décembre 1898, une note dans laquelle se trouve le
passage suivant :
<( Plusieurs géologues, Mauès, Coquand, MM. Arnaud et Mouret,
)) ont fourni des données intéressantes relativement aux disloca-
)) tions du Crétacé de cette région, mais aucun pli n'avait été tracé
» jusqu'ici ».
L'auteur me semble ignorer les travaux publiés sur ce sujet, tant
par moi seul, sur les Landes, le Bordelais et la Saintonge, que,
avec mon collaborateur M. Jacquot, sur les Landes.
1° D'abord une note Sur quelques protubérances crétacées de la
partie occidentale de V Aquitaine, dans les Actes de l'Académie de
Bordeaux, 1862. donnant la description de six protubérances ou
plis avec leur longueur :
(1) Glangeaud. Sur les plissements du bassin de l'Aquitaine. C. R. Ac. Se,
i*6 décembre 189*.
1899 ' SUR LES PLISSEMKNTS Di: BASSIN DK L* AQUITAINE 115
Protubérances de Tercis et de Dax ( Mon tpey roux) 13 kil.
Protubérance au sud de Saint-Sever (Montaut-Eyres) . ... 11 kil.
— de Roquefort )
— a Test de Saint-Justin ) " ' ,b *"• °
— de Villagrain, au sud de Saucats . )
— de Landiras, à l'ouest de Langon . \ ' ' ' 16 klL 5
— entre la Gironde et la Charente (Ile d'Oléron-
Montlieu) 125 kil.
Relativement à cette dernière, je disais : « Celle-ci a été décrite
» en quelques points par M. d'Archiac, eu 1843, dans les termes
» suivants (1) : « La coupe de Moese à Soubise offre un exemple de
» dislocation ; les couches plongent fortement au nord et précisément
)> en sens inverse de leur inclinaisou naturelle Plus au sud, la
» vallée de la Seugne, et surtout celle de la Seudre, pourraient être
» en quelque sorte regardées comme des vallées d'élévation. 11
» nous serait impossible d'expliquer autrement l'apparition des
» couches inférieures, et leur position par rapport aux calcaires
» du deuxième étage, si parfaitement développés et caractérisés
» au nord et au sud de cette longue dépression. » Elle a été entière-
» ment reconnue et surtout représentée, en 1853, par M. Manès (2).
» Elle occupe la moitié du département de la Charente-Inférieure,
)> au sud-ouest de la Charente. Elle constitue un accident géologique
)> des plus remarquables, qui n'est en rien traduit par la topogra-
» phie extérieure ».
Après une description détaillée, j'ajoutais : « Cette protubérance
» est dirigée exactement du sud-est au nord ouest, à peu près parai-
)) lèlement au cours de la Charente, du confluent du Né à la pointe
» de Fouras, et à la côte nord-est de la Gironde, de Port-Maubert à la
i) pointe de la Coubre. Les calcaires à Ichthyosarcolites et les assises
)> inférieures se montrent de Saint-Genis à Brouage sur une Ion-
)) gueur de GO kilomètres, et même sur 30 kilomètres de plus, jus-
)) qu'à l'extrémité de l'île d'Oléron. Mais la longueur totale, de
» cette extrémité à Montlieu, est de 125 kilomètres; et probable-
» ment, au-dessous de la nappe de sable tertiaire, le bombement
» se poursuit encore au moins à 20 kilomètres plus loin, jusque
» vers la vallée de la Dronne.
» Pour M. d'Archiac, les dérangements qu'il avait observés, et,
)> d'après M. Manès, cette protubérance, très remarquable, s'accor-
)) deraient avec la dislocation du système du Mont-Viso(N. 22°30'O.);
(1) Etudes sur la formation crétacée, p. 89.
(2) Descript. phys.y geol. et minerai, de la C'A.-Jn/'., p. 119 à 176, passim.
116 v. raulin 20 Févr.
» mais il est à remarquer que sa direction (N. 45° 0.) est presque
w aussi rapprochée de celle des Pyrénées (0. 18° N.), et qu'aucun
)> fait de stratification discordante n'a été produit à l'appui de
» l'opinion qu'elle aurait été produite avant le dépôt de l'étage
» crétacé supérieur. Il me semble plus simple d'admettre que son
» élévation a eu lieu après le dépôt de toutes les assises crétacées;
» qu'elle a été ensuite uniformément arasée par des causes analo-
)> gués aux eourants diluviens, et que les sables tertiaires ont été
» indifféremment déposés sur les plateaux et les tranches des
» diverses assises ».
Ma note de 24 pages se terminait par le résumé suivant :
« L'Aquitaine, des bords du Gave de Pau, où viennent se termi-
)> ner les dernières pentes des Pyrénées, jusque non loin de Bor-
» deaux, renferme une série de protubérances allongées, ou crêtes
» parallèles à la chaîne. . . Elles sont formées par le terrain crétacé
» dont la série devient d'autant moins complète qu'on approche
» davantage du centre du bassin tertiaire. En effet, tandis qu'à
» Tercis l'étage néocomien arrive au jour, on ne voit plus à Roque-
» fort et à Saint-Justin, qu'une craie sans fossiles, probablement
» analogue à la partie inférieure de celle de Tercis, et à Villagrain
» et Landiras qu'une craie à fossiles semblable à la partie supé-
» rieure et aussi à celle de Talmont, près Royan.
» L'inclinaison des strates devient moindre aussi à mesure qu'on
» s'éloigne des Pyrénées : tandis qu'à Dax elle approche de la
» verticale, elle paraît ne pas dépasser 10° à Roquefort et 5° à
» Villagrain.
» Enfin, plus au nord encore, entre la Gironde et la Charente,
» dans le département de la Charente-inférieure, existe une autre
» protubérance très considérable, montrant toutes les assises du
» terrain crétacé et même l'étage éolithique supérieur, et dont la
» direction est intermédiaire entre celle des Pyrénées et celle du
w Mont-Viso ».
2° Ensuite, dans la Statistique géologique et agronomique des
Landes, que je n'ai pas encore donnée à la Société, mais qui se
trouve certainement à la bibliothèque de l'Ecole des Mines.
1™ partie, 1874 : il y a, pages 231-233, une description sommaire
des protubérances du département des Landes.
2e partie, 1888 : des pages 273 à 340 se trouvent, en 68 pages, les
descriptions suivantes :
1899
SUR LES PLISSEMENTS OU BASSIN DE L AQUITAINE
H7
Protubérance de Peyrehorade
— de Pouillon . .
Annexe de Dax
— de Saint-Lon ....
Protubérance de Saint- Sever
— de Roquefort .
273
278
292
308
312
329
par M. Raulin.
[ par M. Jacquot.
Cette dernière ayant une longueur de 80 kilomètres.
3e partie, 1897 : en résumant en quelques pages le mode de
formation du soldes Landes, je m'exprime ainsi, p. 659 :
« Les derniers dépôts secondaires, les terrains crétacés..., par
» suite de plissements du sol survenus probablement avant la
» période tertiaire, forment dans l'intérieur plusieurs protubé-
» rances insulaires, allongées suivant la direction des Pyrénées;
» celles de Sainte-Marie-de-Gosse, de Saint-Pandelon renferment
» desophites ; celles de Saint-Sever, de Roquefort n'en renferment
)> pas (non plus que celles du département de la Gironde) ».
Les plis situés entre la Garonne et les Pyrénées ont donc été
reconnus, étudiés et décrits en détail, et il en est de même du
troisième de M. Glangeaud, de l'île d'Oléron à Jonzac.
Deux autres : pli de Périgueux et pli de Mareuil Meyssac, jusqu'à
présent inconnus, appartiennent bien à M. Glangeaud, comme la
moitié sud-est de son 3e; ils viennent compléter l'ensemble compris
entre le Plateau central et les Pyrénées, ensemble dont les pre-
miers jalons ont été indiqués à Dax, par d'Archiac en 1837, et à
Villagrain, par Pigeon en 1840.
J'ajoute que quant à une protubérance à Tarnos, au nord de
Bayonne, je n'ai rien vu qui me la fasse soupçonner (M. Glangeaud,
qui m'avait envoyé l'extrait du Compte-Rendu, m'a écrit qu'il faut
y lire Tercis au lieu de Tarnos).
118
Séance du H Mars 1899
PRÉSIDENCE DE M. DE LAPPARENT, VICE-PRÉSIDENT
M. P. Cambronne, Vice-Secrétaire, donne lecture du procès-
verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président, par suite des présentations faites à la dernière
séance, proclame membres de la Société :
MM. Lugeon, Professeur à l'Université de Lausanne, présenté
par MM. Marcel Bertrand et Michel-Lévy.
Emile Bose, Docteur es sciences, Géologue de l'Institut
géologique du Mexique, présenté par MM. Aguilera et
Ordonez.
Il annonce une présentation.
Il informe la Société que M. Boule a été délégué par le Conseil
pour la représenter au Congrès des Sociétés savantes qui se tiendra
cette année h Toulouse, du 4 au 8 avril.
M. P. Cambronne signale parmi les dons récemment parvenus à
la Société : 1° Description géologique de la vallée de Valloire et de quel-
ques massifs adjacents, par MM. W. Kilian et J. Révil ; 2° Notice
sur les travaux géologiques relatifs à la Savoie, de G. de Mortillet9 par
M. J. Révil.
M. Albert Gaudry annonce que M. Le Bel vient de faire des
fouilles à Buschweiller. Il a donné au Muséum les résultats de ses
recherches. Le Lophiodon de Buschweiller, qui a été nommé
Lophiodon buxovillanus. mérite vraiment d'être séparé des autres
Lophiodons parce qu'il a des prémolaires plus simples. M. Le Bel
a trouvé une mâchoire supérieure d'un Paloplotherium, semblable
au Paloplotherium codiciense du calcaire grossier de l'Aisne, mais
notablement plus fort. Les débris de carapace d'Emyde, les Planorhes
et d'autres coquilles d'eau douce abondent dans les morceaux
qui renferment les restes de Mammifères.
119
NOTE PRÉLIMINAIRE
SUR LA DÉCOUVERTE DE MÉDUSES FOSSILES
par M. V. PAQUIER.
Dans le Campanien des environs de Grenoble se rencontrent des
empreintes à apparence rayonnée sur l'origine desquelles aucune
opinion définitive n'avait été formulée, lorsqu'à la suite d'un rapide
examen du mémoire de M. Walcott sur les Méduses fossiles (Geolo-
gical Survey, Monographs, vol. XXX), je fus frappé de l'analogie de
nos empreintes énigmatiques avec certaines formes décrites par
cet auteur, notamment avec les Brooksella. Il est, en effet, possible
de retrouver dans ces fossiles les caractères de Méduses Acalèphes.
Sur l'une des faces (fig. 1) s'observe une dépression centrale de
laquelle parteut cinq sillons aboutissant chacun à une échancrure du
limbe de façon à diviser la surface tout entière en cinq secteurs qui
représentent les lobes de l'ombrelle des Scyphoméduses. On trouve
d'ailleurs des apparences tout-à-fait semblables dans le mémoire de
Fig. I. Fig. 2.
Restauration d'un exemplaire dos Lauzes du Campanien
du Villard de Lans (Isère). — Très réduit.
Fig. 1. Face aborale. — Fig. 2. Face orale,
a, Face inférieure de l'Ombrelle ; by Bras oraux.
M. Walcott (Cf. Brooksella alternata, pi. 1, tig. 1 4), et la surface
en question doit être considérée comme la face supérieure de
l'ombrelle d'une Méduse. Quant à la dépression centrale il parait
tout indiqué d'y voir l'indice d'une cavité gastrique, centrale, solu-
tion à laquelle s'est arrêté M. Walcott. La face opposée (fig. 2) montre
120 V. PAQUIKH. — SUR LA DÉCOUVERTE DE MÉDUSES FOSSILES G Mars
une sorte d'étoile à cinq branches concrescentes jusqu'aux deux tiers
delà longueur, et dont chacune présente un épaississement radial
formant l'axe d'une saillie pétaloïde. Au centre et correspondant à
la dépression de la face opposée s'en montre une autre moins pro-
fonde. Par comparaison avec les Discoméduses, par exemple, on
voit que les saillies longitudinales ne sont autre chose que les bras
oraux et la partie pétaloïde sur laquelle ils sont en relief en repré-
sente le bord étalé. Quant à la dépression centrale elle occupe la
région buccale.
A côté de ces fossiles s'en rencontre un autre qui n'a aucune
analogie avec les formes figurées jusqu'ici. C'est également une
sorte d'étoile à six branches très saillantes et dont la forme générale
rappelle certaines étoiles de mer. Au point de convergence des
saillies médianes de ces branches, s'élève une sorte de pédoncule
brisé. La face qui les porte est très convexe ; quant à la surface
opposée, elle offre une concavité centrale assez marquée. 11 est assez
difficile à première vue de désigner le groupe auquel se rapporte
l'organisme en question, mais si l'on compare ce fossile à une
Méduse fixée (Lucernaire) une grande analogie se manifeste; on
observe de part et d'autre des côtes saillantes et la saillie centrale
représente le pédoncule. Quant à l'autre face, elle présente bien la
concavité de la face orale d'une Lucernaire déprimée. En termi-
nant, je désire faire remarquer quelques particularités qui pour-
raient contribuer à éclaircir l'évolution des Méduses. Les formes
signalées plus haut, de même que celles d'Amérique, offrent un
nombre de bras et de lobes assez variable, 4, 5, 6, 7 et davantage,
au lieu d'être distribués, comme chez les formes actuelles, d'après
le nombre 4 et ses multiples. Il semble donc qu'à l'origine les
Cœlentérés ne présentaient pas une symétrie établie avec autant de
fixité qu'aujourd'hui et les types archaïques chez lesquels la limi-
tation des lobes et des bras à des multiples de 4 n'était point encore
réalisée, vivaient encore dans le Campanien à côté de formes de
grande taille, voisines des Lucernaires.
M. Stuart-Menteath envoie les observations suivantes : Ayant
pu étudier pendant cinq mois les lydiennes du Hartz, après avoir
fait connaître en 18S1 l'extension considérable du Carbonifère fossi-
lifère dans les Pyrénées, j'ai constaté l'identité des lydiennes des
deux pays sous le rapport de l'extension, et spécialement de l'ana-
logie microscopique de leurs adinoles, diabases et quartzites. Mais
dans le Hartz les kieseUchiefer sont entre les couches à Goniatites
SÉANCE DU <> MARS 1899 121
crenistria et le sommet du Dévonien, tandis que dans les Pyrénées,
depuis Biriatou jusqu'à San Juan de las Abadesas les lydiennes
correspondantes sont toujours situées entre le Houiller supérieur à
plantes caractéristiques et le sommet de la Griotte à Goniatites cre-
nistria.
J'ai déjà, en 1881, signalé l'impossibilité de séparer le calcaire
carbonifère du Dévonien, et j'ai longuement prouvé plus tard
l'identité du Gault pyrénéen avec le Cénomanien. Dans le Devon-
shire, les géologues les plus exercés ont soutenu la première thèse,
et la seconde est aujourd'hui acceptée dans le pays du Gault.
M. Seunes a parfaitement dessiné le phosphate de Lhers (au sud
d'Oloron), dans le Bulletin des Services de mai 1893. Le phosphate,
mêlé de noir animal, remplit une cavité dans l'intérieur du calcaire
griotte pétri de Goniatites crenistria. Ce calcaire présente très fré-
quemment aujourd'hui des gouffres dont la profoudeur peut dé-
passer cent mètres et dans lesquelles des nuées de corbeaux atten-
dent les animaux qui y tombent facilement.
V2Ï
Séance du ZO Mars 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce deux présentations et proclame membre
de la Société :
M. Deprat, Géologue à Montra pon, près Besançon, présenté par
MM. Fournier et Bresson.
11 fait part du décès de M. Nagel, ingénieur des houillères de
Gagnières (Gard).
Le Président annonce que la Commission du prix Fontannes a
décerné cette haute récompense à M. E. Ficheur, auteur de nom-
breux et remarquables travaux sur la géologie de l'Algérie.
M. Peron a été chargé par la Commission de faire un rapport sur
les travaux de M. Ficheur. Ce rapport sera lu à la Séance générale
annuelle, qui aura lieu le 6 avril prochaiu.
M. Albert Gaudry s'exprime aiusi :
J'ai une pénible nouvelle à aunoncer : M. Beecher vient de me
télégraphier qu'avant-hier le professeur Marsh est mort à New-
Haven, après une courte maladie. M. Marsh a fait de si belles œuvres
que le chagrin de sa perte s'étendra bien au-delà des Etats-Unis,
pour se communiquer aux membres de la grande famille des géolo-
gues dispersés dans tous les pays. Depuis qu'Hayden a entrepris
l'exploration des Montagnes Rocheuses, la paléontologie améri-
caine a ajouté une multitude de types de Vertébrés fossiles à tous
ceux observés déjà dans notre vieille Europe. Leidy, Cope et Marsh
ont formé une glorieuse triade qui a ouvert la voie où sout main-
tenant engagés de nombreux et ardents travailleurs. Leidy et Cope
sont morts; Marsh aussi nous est enlevé.
C'est Marsh qui a le plus contribué à faire connaître les étranges
et gigantesques créatures des continents secondaires, réunies sous
le nom de Dinosauriens. 11 a arraché aux régions solitaires des
Montagnes Rocheuses les Stegosaurus, les Allantosaurus, les Bran»
tosaurus, les Triceratops et bien d'autres Dinosauriens dont il a
SÉANCE DU 20 MARS 1899 123
habilement reconnu les caractères différentiels. Il a découvert dans
le Crétacé des Reptiles volants dépourvus de dents et des Oiseaux
armés de dents, sur lesquels il a publié le magnifique ouvrage
intitulé : Les Odontornithes. Il a montré que les Mammifères des
Etats-Unis et de l'Europe avaient eu vers la même époque le même
état d'évolution. Il a décrit dans le Tertiaire les fameux Dinoceras,
les Titanolherium et bien d'autres Mammifères sur lesquels on
n'avait avant lui que de vagues notions.
11 a tiré lui-même des rochers la plupart des fossiles qu'il a
étudiés. Il a consacré à leur recherche une grande fortune; dans
ses nombreux voyages, il a oublié fatigues et dangers. On peut dire
que nul travailleur n'a donné à la science plus de preuves d'un
entier dévouement. Cependant il n'a point gardé pour lui tous ces
trésors qui lui avaient tant coûté. Dans un élan d'admirable géné-
rosité, il les a tous donnés aux établissements publics. La vie d'un
tel homme restera comme un titre d'honneur pour les paléontolo-
gistes américains et un exemple pour les savants de tous les pays.
Le Secrétaire signale parmi les ouvrages reçus en dons ou en
échange : 1° La 4e livraison (1898) des Annales de la Société géolo-
gique du Nord qui renferme un article de M. Gosselet Sur la
géographie physique du Nord de la France et de la Belgique : Cambrésis-
Vermandois; diverses notes de M. Barrois, dont une Sur les rela-
tions des mers détoniennes de Bretagne avec celles des Ardennes, et
une note de M. Ardaillon Sur la géologie de Java.
29 Le N° 38 des Annales de géographie (15 mars 1899) renfermant
entre autres articles : 1° Quelques observations sur la Région pari-
sienne orientale, par M. O. Barré ; 2° Structure orographique et
géologique du Bas- Languedoc , entre l'Hérault et le Vidousle (4 fig.
dans le texte), par M. P. Roman ; 3° Le pays des Nemenchas à l'Est
des Monts Aurès (avec une carte hors texte et cinq croquis dans le
texte), par M. J. Blayac.
Le Secrétaire appelle l'attention de la Société sur une note de
M. Boule parue aux C. R. de l'Académie des Sciences (6 mars 1899,
p. 624), Sur des fossiles nouveaux de Madagascar.
M. Douvillé résume la note de M. V. Paquier : Sur le parallé-
lisme des calcaires urgoniens avec les couches à Céphalopodes dans ta
région delphino-rhodanienne (C. R. Acad. des Se, M novembre 1898).
La conclusion de cette note est la suivante :
Dans le Dauphiné, la masse inférieure de l'Urgonien et la zone à
124 SÉANCE DU 20 MARS 1899
Orhitolines inférieure représentent un faciès zoogène du Barrémien
supérieur, la masse supérieure des calcaires doit être imputée à
l'Aptien inférieur développé sous le même faciès. Tandis que les
Agria et les Caproîines (s. 1.) se montrent dès la base dans la partie
barrémienne, les Caprininés n'apparaissent que dans le Bédoulien
et leur présence témoigne des liens qui rattachent cet étage au
Crétacé moyen.
M. M. Boule fait une communication Sur la géologie des terrains
sédimentaires de Madagascar , telle qu'elle résulte des envois de fossiles
faits au Muséum dans ces dernières années par des voyageurs, des
explorateurs et des oiïiciers : MM. Gautier, Bastard, Mager, les
capitaines Ardouin, de Bouvié, le lieutenant Marius Grillo.
Ces fossiles proviennent de régions assez variées pour que nous
puissions avoir une idée de la disposition des terrains de divers
âges autour du massif cristallin qui forme le centre et la partie
orientale de l'île.
11 y a d'abord une zone de grès, sur laquelle nous n'avons pas de
renseignements paléontologiques, et qui peuvent bien représenter
ici les formations de Karoo ou de Gondwana. Puis vient, sur quel-
ques points, du Lias bien authentique (1). Ensuite se développe
une zone où plusieurs étages de l'Oolite sont bien représentés,
notamment le Callovien (Macrocephaliles macrocephalus est un
fossile commun), l'Oxfordien (très belle série fossilifère), le Juras-
sique supérieur (Kimeridgien ou Portlandien). A l'ouest de cette
bande qui court du nord au sud, vient une nouvelle zone compre-
nant l'Infra-Crétacé, le Crétacé supérieur, avec Ammonites caracté-
ristiques. Enfin, la côte et les îles du littoral sont occupées par la
zone tertiaire (Nummulitique).
Une découverte importante est celle de fossiles sur la côte orien-
tale, que l'on avait toujours crue dépourvue de dépôts sèdimentaires.
Ces fossiles sont du Sénonien tout-à-fait supérieur, peut-être même
du Danien ; ils ont des rapports non-seulement avec ceux du Cré-
tacé de l'Est de l'Inde (Pondichéryl, mais aussi avec ceux du
Crétacé de l'Ouest de l'Inde et du Balouchistan.
M. Boule termine sa communication en présentant quelques
observations sur les théories d'Oldham, de Neumayr, de Suess, de
Kossmat, qui croient que pendant toute la durée des temps secon-
daires un continent réunissait l'Afrique à Madagascar et à l'Inde.
(1) Cette observation résulte d'un envoi tout-à-lait récent de fossiles dû à
M. Gautier.
SÉANCE DU 20 MARS 1899 125
Ces théories s'appuyaient principalement sur des faits négatifs.
Elles ne sauraient être maintenues aujourd'hui.
M. Munier-Chalmas rappelle, à propos de cette très inté-
ressante note, qu'il a étudié une très belle série d'Ammonites
d'Apandramahala (Madagascar) donnée au mois de juin 1898 au
Laboratoire de Géologie de la Sorbonne par M. le Dr Jourdran,
médecin militaire des colonies et par M. Adrien Dollfus. M. Munier-
Chalmas a eu aussi, grâce à l'obligeance de M. Douvillé, communi-
cation d'une autre série delà même localité.
La faune d'Apandramahala est nettement caractérisée par sa très
grande richesse en Perisphinctes, très voisins de formes portlan-
diennes de Russie et du Boulonnais.
Grâce aux collections de M. Pawlow, M. Munier-Chalmas a pu
comparer avec le concours de sou collègue de l'Université de
Moscou, les Perisphinctes d'Apandramahala avec ceux de Russie et
du Boulonnais.
11 résulte de cette étude que quelques-unes des formes malgaches
ont la plus grande analogie avec certains Perisphinctes portlandiens
que M. Pawlow considère comme ayant beaucoup d'affinités avec
les Virgatites du Portlandien du Nord de l'Europe.
Un des Perisphinctes d'Apandramahala se rapporte au P. Beyrichi
Futterer (1) du Jurassique supérieur de l'Est Africain.
11 signale encore la présence d'un Aspidoceras appartenant au
groupe de Asp. Rogosnicense Zeuschner du Tithonique alpin et de
Bélemnites très voisines de B. pistiliformis du Néocomien. Mais, à
cette liste il faut ajouter trois espèces d'Ammonites ayaut de grands
rapports soit avec les Lunuloceras, les Neumayria, soit avec certaines
prétendues Oppelia de l'Oxfordien.
M. Kilian fait part à la Société de la découverte, faite par M.
Baumberger, d'un deuxième exemplaire de Hoplites Euthymi
Pictet, dans le marbre bâtard (Valanginien inférieur des auteurs, des
environs de Bienne (Suisse). Cette nouvelle constatation, jointe au
fait que tous les Céphalopodes rencontrés par M. Baumberger dans le
Valanginien supérieur (Li mon i te) du Jura (Hopl. Arnoldi Pict., Thur-
manni Pict., Albini Kilian, etc.) sont des formes des marnes à Hopl.
neocomiensis du Midi ou des calcaires du Fontanil, confirme de la
façon la plus nette l'équivalence, proposée par M. Kilian, des couches
à Hopl. Boissieri (Berriasien) avec le Valanginien inférieur du Jura.
(1) Futterer. Beitrâge zur Kenntniss des Jura in Ost-Afrika (Zeitschrift d.
deutschen geolog. Gesells., t. XLVI, 1894).
126 20 Mars
SUR CERTAINS POINTS
DE LA STRUCTURE DES ALPES FRANÇAISES
(A PROPOS D'UNE HYPOTHÈSE RÉCENTE)
par M. W. KILIAN.
Je me propose d'exposer ultérieurement dans leurs détails les
raisons qui m'empêchent d'accepter la brillante et ingénieuse
hypothèse par laquelle M. Termîer a cherché récemment (1) à
expliquer les particularités tectoniques des environs ouest de Brian-
çon. Aux objections tirées de la répartition des faciès, que M. Ter-
mîer a bien voulu exposer en son nom et discuter devant la Société,
ainsi qu'à celles qu'a formulées M. Haug et auxquelles je me rallie
entièrement, je tiens néanmoins à ajouter dès à présent l'énoncé
des propositions suivantes :
A. — Par les relations étroites avec les assises plus anciennes,
de faciès briançonnais, que montre la zone du Flysch en Tarentaise
(nord de Moutiers, Crève-Tête, Nielard), près de Guillestre (Resoul,
Plan-de-Phazy) et dans l'Ubaye (pointements triasiques de Jausiers),
cette bande tertiaire est absolument solidaire de la zone du Brian-
çonnais ; si l'on veut donc admettre, avec M. Termier, que cette
dernière est charriée, il est nécessaire d'admettre comme conséquence
forcée de cette hypothèse que la bande de Flysch l'est aussi, et alors
certaines particularités, comme l'existence, dans cette formation,
de brèches grauitiques près du massif de Combeynot (Lautaret),
sont et demeurent inexplicables. Si on affirme, au contraire,
comme le fait M. Termier, que la zone du Flysch n'est pas charriée,
il en découle logiquement que la zone du Briançonnais ne l'est pas
non plus. Les deux propositions de notre confrère sont doncconfra-
dictoires dès que l'on considère, comme je le fais, la connexion des
deux zones susdites comme indiscutablement établie.
B. — La limite orientale du faciès briançonnais ne coïncide pas
d'une façon absolue avec celle de la « zone du Briançonnais »; elle
(1) P. Termier. C. R. Ac. Se, 13 février 1899, et C. fl. séances Soc. géol. de France,
20 février 1899. — 1d. Les nappes de recouvrement du Briançonnais (B. S. G. F.,
,T si'th», t. XX VII, p. i7), paru on avril 1899.
1899 SUR LA STRUCTURE DES ALPES FRANÇAISES 127
est très irrégulière et il existe (à Test d'Oulx, près d'Exilles, etc.)
des Ilots de calcaires triasiques, de cargneules et même des quart-
zites identiques à ceux de Briançon, au milieu des schistes lustrés
de la zone du Piémont.
C. — Comment expliquer, dans l'hypothèse de M. Termier, la
consterne? absolue du peudage vers la France des schistes lustrés,
micaschistes et pseudogneiss de la frontière franco-italienne à la
plaine du Pô? (dans la vallée du Peflice, par exemple, où je l'ai
nettement constatée).
D. — La présence, dans le massif de Prorel-Eychauda, d'une
lame de Houiller supportant des schistes gneissiformes avec brè-
ches polygéniques, et superposée à une série de nappes chevau-
chées, indique nettement l'existence, dans ces moutagnes, de phéno-
mènes de recouvrement, mais n'a en aucune façon pour consé-
quence nécessaire d'assigner à ces nappes une origine lointaine et
de les faire considérer comme venant d'au-delà de la Clarée, c'est-
à-dire de la zone du Piémont.
Ces pseudogneiss sont le résultat de Tétirement et du laminage
(par les plissements successifs) de masses éruptives de « roches
vertes » dont le caractère le plus constant est précisément d'être
discontinues et sporadiques. S'il a existé de ces intrusions au Mont-
Genèvre et à TAlpet (où elles sont bien en place et nullement charriées),
il n'y a aucune raison de ne pas admettre qu'il y en ail eu d'autres
plus près de Briançon et de l'Eychauda. Ces dernières auraient,
après un premier plissement, fourni à l'époque oligocène (?) une
auréole détritique de brèches puis auraient été englobées avec ces
dernières dans les dislocations subséquentes. Les nombreux filons
de roches vertes (Microdiorites) qui sillonnent le Houiller dans le
voisinage immédiat de la Guisane, ne seraient que des dépendances
profondes —, mises à nu par l'érosion — -, de ce foyer éruptif,
comme les syénites et les porphyrites du Gondran sont des dépen-
dances du foyer du Mont-Geuèvre.
Il convient d'ajouter que les brèches polygéniques de l'Alpet,
l'Eychauda, etc., rappellent beaucoup les brèches oligocènes des envi-
rons de Moûtiers en Tarentaise. Elles peuvent tout aussi bien être
une formation rie base du Flysch datant de la transgression oligocène,
qu'un cardon littoral de cette même formation. Rien n'autorise donc
à les faire venir de Test par l'effet de charriages problématiques.
128 20 Mars
SUR LA GÉOLOGIE DE LA RÉGION PÉTROLIFÈRE
DES ENVIRONS DE RELIZANE (ALGÉRIE)
par M. BRIYE.
D'importants gisements pétrolifères viennent d'être découverts au
sud-ouest de Relizane, vers l'Oued Tilouanet. Une course un peu
rapide dans cette région m'a permis de faire quelques observations
qui feront l'objet d'une note plus détaillée.
Les premières recherches ont été faites à travers les couches
helvétiennes ; d'autres ont rencontré les couches bitumineuses dans
les marnes cartenniennes, enfin les gisements les plus importants
se sont trouvés dans le Sénonien au voisinage d'une masse gypseuse
assez étendue.
L'étude que j'ai faite de cette région m'a amené à reconnaître une
faille importante non encore signalée et qui s'étend depuis le con-
fluent de la Mina et de l'Oued Tilouanet jusqu'à Kàlâa et même plus à
l'ouest. Sa direction générale est N.E.-S.O. ; au voisinage de la niasse
gypseuse et probablement sous sa dépendance la direction devient
est-ouest pour s'incliner de nouveau au sud-ouest vers Kâlâa.
Cette faille met en contact successivement toutes les couches
miocènes (Cartennien, Helvétien, Tortonien) avec le Sénonien. Elle
est, en outre, jalonnée de masses gypseuses plus ou moins appa-
rentes perçant à travers le Sénonien et qui sont accompagnées de
marnes bariolées, ce qui tend à en faire du Trias sans que cependant
on puisse en donner d'autres preuves que le faciès.
Cette faille est nettement post-tortonienne mais ne paraît pas
avoir intéressé le Sahélien qui est localisé plus au nord le long de
la bande sénooienne.
Tous les affleurements bitumineux reconnus paraissent en rapport
avec cette faille et les puits les plus importants sont précisément
ceux qui se trouvent les plus rapprochés d'elle et de la masse
gypseuse principale.
Il y a donc tout lieu d'admettre que les venues bitumineuses sont
arrivées au jour par la faille et que des coulées plus ou moins impor-
tantes se sont produites dans les terrains en contact. C'est ce qui
expliquerait la présence du bitume dans le Sénonien, le Cartennien,
l'Helvétien. le Tortonien et peut être aussi faudrait il voir comme
conséquence plus importante l'origine des gypses bitumineux inter-
stratifiés dans le Sahélien du Dahra et de la rive gauche du Chelif.
1899 129
QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES BÉLEMNITELLES
ET EN PARTICULIER SUR CELLES DES CORBIÈRES
par M. A. de «BOSSOUVRE.
Depuis l'époque où M. Toucas (1) a signalé pour la première fois
l'existence d'une Bélemnitelle dans le terrain crétacé des Corbières,
les découvertes de ce fossile se sont multipliées et il est possible
aujourd'hui de définir avec précision son gisement et de montrer
les rapprochements stratigraphiques qui en résultent.
La Bélemnitelle recueillie par M. Toucas à la Bastide, près Camps
(Aude), a été décrite en 1891 par M. Ch. Janet (2) sous le nom
d'Actinocamax Toucasi (loc. cit., p. 719, pi. XIV,fig.4); dansée même
travail, mon savant confrère faisait connaître une autre Bélemni-
telle, provenant du Bassin de Paris, qu'il appelait Actinocamax
Grossouvrei (M., p. 716, pi. XIV, fig.l, 2,3) : il avait pu en examiner
trois échantillons, deux de la craie à Marsupites des environs de
Beauvais et un troisième découvert par M. H. Thomas, dans la craie
magnésienne de Margny-lès-Compiègne.
A peu près vers ce moment, M. Roussel retrouvait des fragments
de Y A et. Toucasi dans les couches crétacées de la vallée de Saint-
Louis (Aude). Dans ces dernières années, au cours de diverses
excursions, j'ai eu moi-même l'occasion de recueillir dans les Cor-
bières un certain nombre d'exemplaires ou de fragments de Bélem-
nitelles et de constater ainsi leur gisement exact.
J'ai pu reconnaître que les Act. Toucasi et Act. Grossouvrei ne
sont pas deux espèces distinctes, mais deux formes extrêmes d'un
même type, reliées par une série d'intermédiaires.
Ils peuvent acquérir une assez grande taille, car je possède un
fragment dans lequel le diamètre transversal atteint 25 millimètres.
Quelques échantillons, ayant une extrémité postérieure dans un
meilleur état de conservation que ceux examinés par M. Janet,
m'ont montré que le rostre se termine par une pointe mucronée,
(1) 1879. A. Toucas. Du terrain crétacé des Corbières (B. S. G. F., 3* sér., VIII,
p. 39).
(2) 1891. Ch. Janbt. Note sur trois nouvelles Bélemnitelles sénoniennes (B. S.
G. F., 3" iér.f XIX, p. 716).
5 Juin 1891). — T. XXVII. Itull. Soc. Géol. Fr. — î>
130 DE GROSSOUVRE. — OBSERVATIONS SUR LES BÉLEMNITELLES 20 Mars
tout comme Am. mamillatus et les autres Bélemuiteiles séaonienaes
déjà connues.
Ces Actinocamax apparaissent dès la base du Santonien supé-
rieur : ils existent dans les marnes grumeleuses qui, dans le ravin
de la Fajolle, près Renues-les-Bains, accompagnent Hippnrites orga-
nisant ^ H. canaliculatus , H. turgidus, //. rennensis à une faible
hauteur au-dessus du banc calcaire à H. socialisel H. sublsevis, pro-
longement de la barre du Petit Lac. J'en ai recueilli d'autres, à un
niveau un peu supérieur, dans les marnes bleues à petits fossiles
et à petites Ammonites (Am. syrtalis, Am. Rousseli, Am. Rouvillci,
etc.) sur le chemin de Sougraigne aux Croutets.
Avec ces Actinocamax, j'ai rencontré une autre Bélemnitelle, que
j'ai précédemment désignée sous le nom d'Act. quadratus : un
nouvel échantillon plus complet et mieux conservé, récolté récem-
ment, m'oblige à rectifier cette détermination. Ce n'est pas YAct.
quadratus typique qui existe dans les Corbières, mais une forme
voisine, une mutation antérieure, caractérisée en particulier par
une cavité alvéolaire beaucoup moins profonde. M. Schlûter l'a
distinguée sous le nom d'Act. cf. granulatus Blainv., et aujourd'hui
cette espèce, assez abondante eu Allemagne, est généralement dési-
gnée sous ce nom. Elle caractérise les couches de l'étage Sénonien
inférieur des géologues allemands (Unter-Senon de M. Schlûter) (1),
étage que j'ai montré (2), il y a quelques années, être l'équivalent
du Santonien et de la zone inférieure du Campanien (Coquand),
comme le prouve la considération des faunes d'Ammonites corres-
pondantes.
A et. granulatus a été précédé dans le temps par une forme, A et.
westphalicus, dont le rostre présente une cavité très peu profonde
ou même dont l'extrémité antérieure se termine par une troncature
à facettes, comme cela arrive d'une manière constante chez A et.
plenus et Act. verus. Cette dernière espèce caractérise l'étage Emsché-
rien (Emscher) de M. Schlûter, équivalent exact du Coniacien de
Coquand.
M. E. Stolley, dans un excelleut travail (3), a insisté sur l'impor-
tance stratigraphique de ces diverses Bélemnitelles dont on peut,
(1) 1876. C. Schlûter. Cephalopoden der oberen doutschen Kreide ; zweiter
Theil. VcrbroitunK der Arten (Palxontographica, XXIV).
(2) 1891. A. de Grossouvre. Etude sur la craie supérieure : la craie des Corbières
(Bull, des Services de la carte géologique de la France. N° 25).
. (3) 1897. E. Stolley. Ueber die Gliederung der norddeutschen und baltischen
Kreide.
1899 ET Elf PARTICULIER SUR CELLES DES COR BIÈRES 131
à partir du Turonieni suivie les variations successives ; elles mar-
quent une série d'étapes dans le temps et peuvent servir de repères
pour la classification des couches daus lesquelles les Bélemnitelles
sont fréquentes, comme en Allemagne et en Scanie, par exemple.
Un des principaux caractères observés dans l'évolution de ce type,
qui part d'Act. icestphattew pour aboutir à Act. quadratus, est l'aug-
mentation progressive de profondeur de la cavité alvéolaire à mesure
que les exemplaires examinés proviennent de couches plus élevées
dans la série sédimentaire. Ainsi, dans les niveaux les plus infé-
rieurs, cette cavité fait le plus souvent défaut et l'extrémité anté-
rieure du rostre est tronquée, comme chez Act. plenus. Dans les
échantillons provenant des couches moyennes de l'étage Coniacien,
la profondeur de la cavité n'est jamais supérieure à 1/10 de la lon-
gueur du rostre; elle s'élève à environ 1/8 pour ceux des couches
limites du Coniacien (= Emscher) et du Santonien (= Unter-Senon,
pars) et à 1/6 pour les échantillons typiques d'Act. granulatus,
tandis qu'elle est de 1/4 en moyenne chez Act. quadratus. A ce
caractère on peut en ajouter quelques autres plus délicats à recon-
naître : en particulier, les échantillons d\ict. westphalicwt des
niveaux les plus inférieurs ont leur surface lisse; la granulation
ne commence à apparaître que chez ceux de la partie supérieure
du Coniacien où déjà se rencontrent les formes de passage de
westphalicus à granulatus.
En France, la première de ces Bélemnitelles est très peu répan-
due : je n'en connais d'échantillons que de la craie de Lezennes et
de quelques autres localités des environs de Lille, échantillons qui
me furent communiqués, il y a quelques années, par M. Gosselet.
La craie de Lezennes appartient à la partie supérieure de l'assise
dite à Micraster costestwlinarium (= M. decipiens Bayle) et c'est
exceptionnellement qu'on y rencontre quelques formes pouvant se
rattacher à M. coranguinum. La faune d'Ammonites de cet horizon
est purement coniacienne, ainsi que je l'ai indiqué (1), et c'est à
tort qu'on y a signalé A m. texanus. On y trouve associés In. invo-
lutus et In. digitntus : on ne peut donc considérer ce dernier comme
caractéristique de la craie à M. coranguinum, car non seulement à
Lezennes, mais dans l'Yonne (zone H de M. Lambert) et en Angle-
terre il se trouve avec in. inrolutus dans l'assise à M. decipiens.
Ainsi Act. tcestphalicus occupe à Lille exactement le même niveau
qu'en Westphalie, en Hanovre et en Suède : il y est accompagné
(1) IS89. A. de Grossouvhl. Sur le terrain crétacé dans le Sud-Ouest du bassin
de Paris [B. S. G. F.%fr sér., XVII, p. 475).
132 DE GROSSOUVRE. — OBSERVATIONS SUR LES BÉLEMNITELLES 20 Mars
par Act. verus, petite espèce dont l'existence s'est prolongée jus-
qu'au sommet de la craie à Act. granulatus.
De cette dernière Bélemnitelle, je ne connais en France d'échan-
tillons bien authentiques, en dehors de ceux de la craie des Cor-
bières déjà cités, que deux exemplaires recueillis par M. H. Thomas
avec Act. Grossouvrei dans la craie magnésienne de Margny-les-
Compiègne. Il est aussi fort probable que Ton doit rapporter à cette
espèce un échantillon d'Act. westphalicus que M. Janet m'a annoncé
autrefois avoir trouvé dans la craie à Marsupites des environs de
Beauvais, où il avait d'ailleurs découvert Act. Grossouvrei.
En France, Act. yranulatus et Act. Grossouvrei se montrent donc
ensemble dans la craie à Marsupites. Dans le Hanovre, à Lune-
bourg, la première de ces Bélemnitelles existe également dans le
gisement classique des Marsupites qui donnait des calices complets
de ces fossiles : ces derniers ont d'ailleurs été signalés dans plu-
sieurs gisements de l'Allemagne du Nord et toujours à la partie
inférieure de l'Unter-Senon, c'est-à-dire dans des couches corres-
pondant au Santonien.
En France, les Marsupites ne sont connus que d'un petit nombre
de points : je rappellerai plus particulièrement les environs de
Chartres (1) où, grâce aux recherches persévérantes d'un collabo-
rateur, M. A. Rousseaux, ces fossiles ont été découverts avec Vul-
sella turonemis dans une craie que j'ai montré précédemment être
le prolongement des couches à Am. syrlalis et Spondylun truncatus
de la Touraine.
Tous ces faits sont donc bien concordants et confirment la con-
clusion à laquelle j'étais arrivée que la zone à Am. syrtalis appar-
tient au même horizon que la craie à Marsupites.
M. Douvillé m'a fait connaître ces jours derniers qu'il venait de
recevoir communication de divers fossiles de la craie phosphatée
de Vaux TEclusier, près Orville (Pas-de-Calais), parmi lesquels Act.
Grossouvrei. Je rappellerai que j'ai précédemment (2) montré qu'il
y avait lieu de distinguer plusieurs niveaux dans la craie grise
phosphatée du Nord de la France : un inférieur, où Ton rencontre
seulement Act. verus et c'est de celui-là que provient Act. Grossou-
vrei; puis un autre avec Act. quadratus seul et enfin un supérieur
où existent à la fois A et. quadratus et Bel. mucronata.
La craie grise phosphatée, située immédiatement sous Act. qua-
(1) 1892. A. de Grossouvre. La craie de Chartres [C. R. Ac. Se., 1" août).
(i) 1894. A. de Grossouvre. Sur la craie grise (Compte-rendu des séances de ta
Soc. géol. de Fr.t 3# sér., XXII, p. lviij.
1899 ET EN PARTICULIER SUR CELLES DES CORBIÈRES 133
dratus* appartient donc à l'assise à Act. granulatus : à Vaux-1'Eclu-
sier Act. Grossouvrei s'y trouve, comme à Margny-lès-Compiègne,
et comme dans les Corbières.
Il est fort intéressant de constater que cette même association
existe dans l'Allemagne du Nord où Act. Grossouvrei a été aussi
recueilli ; quelques années après le travail de M. Janet, cette Bélem-
nitelle était décrite sous le nom d'Act. depressus, par M. Andreoe (1),
d'après quelques exemplaires provenant des carrières d'argile de
Broitzem, près Brunswick, où ils sont associés à Act. verus, Act.
granulatus, Am. bidorsatus, Am. pseudo Gardent, etc. En même temps,
ce savant distinguait une variété effilée, var. fusifonnis qui n'est
autre que Y Act. Toucasi.
Plus récemment, M. Stolley signalait cette même espèce dans la
craie de la Scanie, à Kùllemôlla, où elle accompagne Act. granu-
latus ; de ce même gisement M. Moberg avait décrit sous le nom
d'Aet. mamillatus var. ornata un échantillon que M. Stolley con-
sidère comme se rapportant non à Act. mamillatus, mais à Act.
depressus, c'est-à dire à Act. Grossouvrei : il se distingue seulement
par sa surface granulée, mais il est fort possible que l'espèce possède
réellement ce caractère, sans que nous puissions le constater, les
couches superficielles du rostre étant toujours enlevées sur les
échantillons de France, ainsi que l'a fait remarquer M. Ch. Janet.
Tout récemment, M. Anders Hennig a fait connaître (in Schlû-
ter) (2) qu'il avait trouvé des Marsupites dans les marnes de Lyckâs
caractérisées par Act. granulatus : cette découverte nous montre en
Suède la même association de fossiles qu'en Allemagne et en France.
Enfin un échantillon d'Act. Grossouvrei a été rencontré à l'état
remanié dans le Diluvium du Schleswig-Holstein.
L'aire de distribution de cette Bélemnitelle est donc fort étendue:
elle se trouve dans le Nord de l'Europe, en Scanie, en Hanovre,
dans le Bassin de Paris, mais partout elle paraît être assez rare.
Par contre, dans la région pyrénéenne, elle semble relativement
abondante : si l'on tient compte de ce qu'elle existe seulement dans
des niveaux marneux dont les affleurements sont très restreints et
de ce que le nombre des exemplaires, entiers ou fragments, recueil-
(1) 1895. A. Andrecb. Ein neues Actinocamax aus der Quadratenkreide von
Braunschweig {Mittheil. aus d. Rœmer Muséum Bildesheim). M. Andreœ a
reconnu depuis que les Bélemnitelles de ce gisement étaient non des quadratus
mais des granulatus.
(2) 1897. Schlûter. Ueber einige exocyclische Echiniden der baltischen Kreide
und deren Bett (Zeit. d. deutsch. geot. Gesel., p. 47).
1 34 DE GR0S80UVRE. — OBSERVATIONS SUR LES BÉLEMNITELLES 20 Mars
lis par les divers géologues qui ont exploré les Corbières, est assez
considérable, on peut dire que cette Bélemnitelle y est aussi abon-
dante que Y Act. quadratus dans la plupart des gisements de craie
blanche ; je fais exception pour la craie grise.
Or, les Bélemnitelles sont généralement considérées comme carac-
téristiques des régions septentrionales. Act. quadratus n'a jamais
été signalé aussi loin vers le Sud et le point le plus méridional où
on Tait rencontré se trouve aux environs d'Angoulême. Il y a là un
fait qu'il convient de mettre en évidence.
Avant de terminer il est utile aussi, je crois, de signaler une
observation importante faite par M. Stolley, (\u\ montre combien
il faut être prudent dans les conclusions à tirer de l'apparition de
nouvelles formes : d'ordinaire, on est porté à en déduire le syn-
chronisme des couches qui les renferment et cependant quand on
regarde les choses de plus près, on voit souvent que cette appari-
tion est loin d'être simultanée même pour des régions rapprochées.
Je pourrais en donuer de nombreux exemples : je me bornerai à
citer celui qui est fourni par les Echinocorys. Ce genre est, en
France, représenté par de nombreux individus dans la craie à M.
coranguinum, tandis qu'il est si rare dans la craie à M. decipicns,
que bien des géologues ont nié son existence dans cette assise.
Quelques exemplaires seulement en ont été rencontrés dans l'Yonne,
à ce niveau ; aux environs de Rouen, ils y sont un peu plus nom-
breux. A Lezennes, près Lille, M. Cayeux a signalé ce genre dans
une couche qui renferme à la fois M. bremporus et M. decipiens. Dans
la Thiérache et le Réthelois, M. Barrois l'a cité dans la Craie de
Vervins. En Westphalie, M. Schlûter l'indique dans le Scaphiten-
Plâner et même dans le Bronguiarti-Plâner, c'est-à-dire vers la base
du Turonien.
Je reviens à la question des Bélemnitelles : M. Stolley en a trouvé
dans les couches à Act. granulatus de Broitzem un échantillon à
peine différent de Bel. mucronata, qu'il a décrit sous le nom de Bel.
pr&cursor. C'est un fait encore unique et dont l'importance ne sera
définitivement acquise que s'il est complété par de nouvelles
découvertes.
Toutefois, je crois pouvoir, en partant des exemples analogues
fournis par d'autres fossiles, en déduire dès maintenant que l'appa-
rition de B. mucronata n'a pas eu lieu partout exactement au même
moment. C'est là probablement la réponse qui doit être faite à la
question que je posais en 1894 : j'ai montré alors qu'il existait dans
la craie grise une zone dans laquelle Act. quadratus existe seul et
1899 ET EN PARTICULIER SUR CELLES DES CORBIÈRES 135
qu'il faut monter uu peu plus haut pour rencontrer B. mucronata.
Je rappelais en môme temps que tous les observateurs sont d'accord
pour affirmer l'apparition simultanée de ces deux Bélemnitelles sur
de nombreux points du Bassin de Paris : il me suffit de renvoyer
aux travaux d'Hébert, de MM. Barrois, Cayeux, Gosselet, Lambert,
Peron, etc. Ces Bélemnitelles habitent ensemble de grandes épais-
seurs de couches, 70 mètres dans l'Yonne, d'après M. Lambert,
80 mètres aux environs de Reims, d'après M. Peron.
Comment expliquer le désaccord entre ces observations ? par une
lacune? ou plutôt à mon avis par une différence de date dans
l'apparition de B: mucronata en divers points.
Cette dernière manière d'envisager la question me paraît justifiée
par les faits analogues que nous connaissons dans d'autres pays.
En Suède, Act. quadratus, fort rare d'ailleurs, existe seulement bien
au-dessous du niveau. où commence à se montrer/*, mucronata.
Dans l'Allemagne du Nord, Act. quadratus est abondant, mais il est
presque toujours seul : c'est à peine si à la partie supérieure des
couches qu'il habite, on rencontre quelques exemplaires de B.
mucronata et tellement rares que bien des géologues ont nié cette
association. Les circonstances sont donc fort différentes de ce qui a
été constaté en France où, en de nombreux gisements, ces deux
Bélemnitelles apparaissent en même temps et vivent ensemble,
aussi fréquentes l'une que l'autre, sur de grandes épaisseurs de
craie blanche.
Que conclure de toutes ces observations, sinon que l'apparition
de Bel. mucronata ne peut nous fournir un repère précis pour la
chronologie des temps géologiques.
136
SUR LA
DÉCOUVERTE D'UN GISEMENT PALUSTRE A PALUDINES
DANS LE TERRAIN BATHONIEN DE L'INDRE
par I. OOSSIANN.
Dans le courant du mois de mai 1898, un de nos confrères de la
Société linnéenne de Bordeaux, M. E. Benoist, actuellement établi
à Argenton-sur-Creuse (Indre), me soumettait plusieurs échantillons
d'un fossile paludiniforme, recueilli par lui dans une couche assez
mince, intercalée entre des assises attribuées aux sous-étages
Vésulien et Bradfordien. A l'appui de cet envoi, M. Benoist m'en
voyait successivement plusieurs lots de Gastropodes, Pélécypodes,
Brachiopodes et Zoophytes, se composant soit d'espèces nouvelles,
soit d'espèces connues, caractérisant, de la manière la plus évidente,
l'âge stratigraphique des couches qui encadrent, dans cette carrière
de Saint-Gaultier, le lit d'origine palustre dont il est question dans
la présente Note.
En attendant qu'un examen, plus approfondi et comparatif de
toute cette faune, me permette de déterminer et de décrire les 215
espèces dont elle se compose, notre confrère m'a prié, pour prendre
date en ce qui concerne sa découverte, de présenter à la Société
géologique de France un exposé très sommaire des éléments qu'il
a relevés sur place, ainsi qu'une description préventive de la Palu-
dinequi a fixé son attention. Bien que je n'aie pas visité moi-même
la carrière dont il s'agit et que je ne puisse donner ici que la repro-
duction des coupes dont il m'a envoyé les croquis, je n'hésite pas,
en raison de l'intérêt scientifique qui s'attache à ce fait, à en faire
l'objet d'une communication urgente à la Société.
Le bourg de Saint-Gaultier, chef-lieu de canton sur le territoire
duquel est située la carrière de M. Bonargent, contenant les fossiles
recueillis par M. Benoist, est une petite ville d'origine romaine, sur
la rive droite de la Creuse, bâtie sur une terrasse d'alluvion chel-
léenne. Elle est située à 9 kil. O.N.O. d'Argenton-sur-Creuse, et
environ au S.S.O. de Châteauroux, sur la ligne du chemin de fer de
Tournon à la Châtre, en face du village de Thenay, qui est sur la
rive opposée de la Creuse.
18!
SUR LA DECOUVERTE n'UX GISEMENT PÀLI'STRK A PALUDINRS
137
Pour fixer approximativement l'allure des couches jurassiques,
aux environs de Saint- Gaultier, il y a lieu de se reporter aux deux
coupes ci-contre : l'une (fig. i) N.S., de Touvent à Thenay, indi-
quant les altitudes, qui sont: de 86™ au lit de la Creuse, près du
pont de Saint-Gaultier, delllm au sommet de la carrière Bonargent,
et de 146"» au som-
met du coteau ; l'au-
tre (fig. 2) O.E. de
Saint Gaultier a Cha-
benet (à 4 kil. N.O.
d'Argenton), indi-
quant le plongeaient
des couches; la base
du Batbonien au Pa-
lis, vers Argenton,
étant à 427m, la base
du même étage à
Saint-Gaultier étant
a 85™, enfin la dis-
tance entre le Palis
et Saint-Gaultier
étant de trois kilo-
mètres, on peut éva-
luer à 8°» par kilo-
mètre le plongement
de ces couches.
L'épaisseur proba-
ble du Batbonien a
Saint-Gaultier est de
45 à 50m ; toutefois il
subsiste encore un
peu d'incertitude au
sujet de la cote
exacte, attendu que
si le niveau d'affleu-
rement du Bajocien
à polypiers peut être exactement reconnu sur la rive opposée de la
Creuse, vers Thenay, l'existence d'une (aille, qui coïncide précisé-
ment avec le lit de cette rivière, s'oppose à ce que la même consta-
tation puisse se faire sur la rive gauche, de sorte que l'épaisseur du
Vésulien a dû être évaluée par approximation. Si l'on tient compte
*w fHf f
138
- GISEMENT PALUSTRE A PALUDINES 31) Mars
de cette faille, dans le calcul du plongeraient des couches, on trouve
que le chiffre de Sm par kilomètre, ci-dessus indiqué, est peut-être
exagéré; d'après l'appréciation de M. Benoist, il ne doit pas être, en
réalité, supérieur à Sm par kilomètre.
Flg. 8. — Coupe de Suint- Gaultier A Chabenet.
Méma légende et b, Bancs siliceux de Larlbere ; PI., Pliocène des platea
Ces renseignements topographiques et préliminaires étant donnés
sur le gisement, il nous reste à donner la coupe de la carrière, qui
représente un découvert d'une vingtaine de mètres de hauteur.
Flg. 3. — Coupe de la carrière du bourg de Saint-Gaultier.
A. — Lit de graviers ,'i silex chclléens .... Quaternaibe . . .
H. — Argile rouge avec galets quartzeux blancs Pliocenc (?)
t. — Calcaire oolithlque en plaquettes, a Rhyv-
chonella elegantula
t. — Calcaire subi Ithographlque a Fucoides. , \
3. — Couches palustres a Vimptirm ) 0,90 à 1-50
t. — Calcaire subcrayeuz a. P. Parkinsoni . . j i"30
5. — Calcaire oolitlque a Brachytrema ....
6. — Calcaire compact a Polypiers en massifs.
1899 DAN8 LE TERRAIN BATHONIEN DE L'INDRE 139
Comme on le voit par la coupe, la couche (fi g. 3) à Brachytrema,
qui est excessivement riche en fossiles marins, admirablement
conservés avec leur test, remplit seulement les intervalles existant
entre les massifs compacts de Polypiers ; ceux-ci constituaient évi-
demment des récifs dans lesquels se sont accumulés les mollusques,
au milieu d'une mer relativement tranquille ; puis la période vésu-
lienne s'est terminée par le dépôt des couches de mer profonde, qui
ne contiennent absolument que Belemniîes bessinus et Parkimonia
Parkmsoni, comme Céphalopodes.
A la fin de cette période, une émersion lente a dû se produire, la
mer s'est retirée à une certaine distance et des mares d'eau douce
ont pu se former sur le rivage; c'est là que les Paludines ont vécu,
et cette époque d'émersion a donné naissance au dépôt d'un lit
assez mince, dans l'épaisseur duquel M. Benoist a noté la succes-
sion suivante de feuillets, de haut en bas :
a. — Marne rougeâtre, avec petits galets calcaires o"*û
b. — Tuf jaune pâle, avec Paludines et Plantes 0"60
c. ~ Lignltes avec parUes brillantes 0"40
d. — Marne ferrugineuse avec galets du calcaire sous-jacent ... 0*10
Epaisseur moyenne i"20
Au bout d'un certain temps, la mer revenant à son ancienne place,
par suite d'un léger efiondrement, le Bradfordien à Pholadomya et
à Fucoïdes a recouvert le marécage où vivaient les Paludines ; puis
les autres couches marines se sont succédé, sans interruption,
jusqu'à l'Oxfordien. La plus importante est celle de calcaire subli-
thographique à Fucoïdes, qui se subdivise ainsi qu'il suit, de bas
en haut :
I. — Marne oolithiquc verdatre, avec traces de lignite. .... 0"25
II. — Calcaire lithographique avec Fucoïdes . 0*60
III. — Marne oollthique avec Rhyn. elegantula 0"20
IV. — Calcaire sublithographique, en deux bancs, l'inférieur
contenant des Fucoïdes 1"
V. — Marne verdatre 0-20
VI. — CalcalresublithographiqueavecP/io/arfomya, 6ardm7M,etc. 0"60
VII. — Marne oolithiqne verdâtro 0-10
VIII. — Calcaire sublithographique à Purporoidea, la partie infé-
rieure remplie de Pseudo mêlant a 1"70
IX. — Marne Jaune avec Lucina et petits Polypiers 0MC
Epaisseur minimum 4"75
A l'appui de ces données stratigraphiques, il convient de donner,
comme preuve paléontologique, la liste provisoire des espèces
140
C08SMANN. — GISEMENT PALUSTRE A PALU DINES 20 Mars
marioes du Vésulien et du Bradfordien, que M. Benoist a pu déter-
miner, ainsi que la description des deux formes caractéristiques
de la couche à Paludines. Je réserve, pour une communication
ultérieure, la description des fossiles nouveaux, provenant princi-
palement de la couche à Brachytrema, et la revision minutieuse de
ceux qui sont attribués à des espèces déjà connues.
Liste des espèces déterminées du Bathonien de l'Indre
(V — Vésulien ; B — Bradfordien)
Liopleurodon Grossouvrei .... V
Belemnopsts bessinus V
Parkinsonia Parkinsoni V
Nerinea Acreon V
— Voltzi V
— subbruntrutana V
Nerinella funiculosa V
— pseudocylindrica. . . . V
— scalaris. V
— elegantula V
Bactroptyxû axonensis V
— bacillus. V
Purpuroidea Morrisi V
Âlaria trifida V
Eustoma (?) cf. tvberculosum . . . V
Neritodomus hemisphœricus . . . B
Ampullina Verneuili V
Trochotoma cf. striata V
Pleur otomari a ornata V
— lœvis V
Patella squamosa V
— aubentonensis V
Lima proboscidea V
Eltgmus polytypus V et B
Ostrea costata V
Terebratula digona B
— ventricosa V
— submaxillala V
Dictyothyris coarclata ...... B
Eudesia cardium. V
Rhynchonella Theodori. . V et B (?)
— Hopkinsi B
— elegantula B
— decorata B
Collyrites analis B
Pygurus depressus B
Clypeus Plotli . V
— altus V
Echinobris8U8 Goldfussi B
— clunicularis . . . . V
Cidaris bathonica V
— meandrina V
— Guerangeri V
Acrosalenia hemicidarioides . . B
— spinosa ....... V
Hemicidaris langrunensis .... V
— luciensis. ...... V
— pustulosa B
— Lamarcki V
AsterocidarU. minor ....... V
Acrocidaris striata V
Pseudodiadema cf. florescens. . . V
— subcomplanatum. V
— pentagonum ... V
Stomechinus bigranularis .... V
— polyporus V
Polycyphus normanianus .... V
Anabacia orbulites B
Cryptocœnia bacciformis V
Calamophyllia radiata V
A ces 60 espèces déterminées, ou à peu près certaines, il y a lieu
d'en ajouter 92 dont la détermination est à faire, ou qui sont à
décrire comme nouvelles; c'est un total respectable de 153 formes
distinctes.
1899
DANS LE TERRAIN BATHONIBN DE L INDRE
141
Viviparus (1) aurklianus Benoist [in litt.).
Coquille à test peu épais ; taille moyenne ; forme assez élancée ;
spire allongée, pointue au sommet, à galbe régulièrement conique;
six ou sept tours très convexes, arrondis, séparés par des sutures
profondes, non canaliculées ; surface lisse, simplement marquée
par de fines stries d'accroissement, presque droites, antécurrentes
vers la suture inférieure. Dernier tour très grand, globuleux, plus
large que haut, régulièrement arrondi à la base qui porte une fente
ombilicale plus ou moins étroite, selon le degré de compression des
individus.
Fig. 4. — Viviparus aurelianus Cossmann.
Ouverture ovale, à péristome continu, presque détaché de la base,
en arrière ; labre mince, à peine sinueux, à profil presque vertical,
très antécurrent à la partie postérieure, se raccordant presque sans
sinuosité avec le contour supérieur; columelle lisse, régulièrement
excavée; bord columellaire un peu épaissi, légèrement réfléchi sur
la fente ombilicale.
Dimensions. — Hauteur : 33 mill. ; diamètre : 23 mill. ; hauteur du
dernier tour, mesurée de face : 25 mill. ; hauteur de l'ouverture :
20 mill. Il y a des échantillons écrasés ou comprimés, dont les
proportions sont tout à fait différentes.
Rapp. et diff. — Cette coquille se distingue de V. vivtpara L., et de
(1) On sait que la dénomination Viviparus Montf. (1810), Rappliquant au type
Hélix vivipara, est bien antérieure à Paludina Lamk. (1821), et doit, par consé-
quent, lui être préférée. Quant à Vivipara, c'est un simple adjectif, employé en
français (Vivipare) par Lamarck (1809), sans désignation du type spécifique et
latinisé beaucoup plus tard par Sowerby ; on ne peut donc substituer Vivipara à
Viviparus,
142 C0S8MÀNN. — GISEMENT PALUSTRE A PA LU DINES 20 Mars
la plupart des formes éocéniques, par son dernier tour plus dilaté»
de sorte que le galbe de son contour est conique, ou même un peu
extraconique, au lieu que ses congénères ont, au contraire, plutôt
un galbe pupoïdal. Mais, à part cette différence caractéristique, qui
justifie la séparation de ce fossile comme espèce distincte, il est
incontestable qu'il présente tous les caractères du genre Viviparns,
dont l'ancienneté est, par conséquent, actuellement démontrée.
Il existe, dans le Purbeckien de la Suisse, une sorte de Paludine,
que Sandberger et, après lui, Maillard, ont rapportée au genre
Lioplax Troschel(l); il paraît que les échantillons dont il s'agit,
présentent quelquefois, à la base, la trace d'une carène, qui carac-
térise les Lioplax des eaux douces de l'Amérique du Nord, mais qui
manque absolument sur tous les échantillons non déformés de
notre espèce. En ce qui concerne le genre Lioplacodes Meek et
Hayden, il s'applique à une coquille jurassique encore plus allongée
que Lioplax, à dernier tour plus rétréci (L. teternus M. et H.), qui
n'a aucun rapport avec V. aurelianus, ainsi que j'ai pu le constater
par la comparaison avec la figure originale publiée par ces auteurs.
En résumé donc, l'espèce du Bathonien de Saint-Gaultier paraît
absolument nouvelle; le nom qu'a choisi M. Benoist est celui que
porte la localité dans les vieux parchemins, Sainte-Aurèle étant la
patronne du pays.
Vi
Fig. 5. — Valvala Benoisti Cossmann.
Valvata (Cincinna) Benoisti, nov. sp.
Test mince ; taille moyenne ; forme turbinée et évasée ; spire assez
courte, à galbe conique, à sommet obtus ; cinq tours, dont la hau-
teur atteint le tiers de la largeur, convexes, séparés par des
sutures profondes, non canaliculées ; surface lisse, à peine mar-
quée par des stries d'accroissement un peu obliques. Dernier tour
II) Lioplax inflata Sandb. La ad u. Sussw. Coachyl., p. 62, pi. Il, flp. 17. —
Maillard, Invert. Pu ri». Jura, p. Ii5, pi. II, fig. 6-7.
1899 DANS LE TERRAIN BATHONIEN DE L'iNDRE 143
grand, large, surbaissé, un peu déprimé vers la suture inférieure,
arrondi à la base, qui est médiocrement convexe et qui est perforée
au centre par un entonnoir ombilical.
Ouverture à peu près circulaire, à péristome cootiuu, simplement
appliqué sur la base de lavant-dernier tour ; labre mince, oblique,
d'après la direction des stries d'accroissement ; bord columellaire
excavé, non réfléchi sur la perforation ombilicale.
Dimensions. — Hauteur : 8 mill. ; diamètre : 9 mil]. ; hauteur du
dernier tour, mesurée de face : 6, 5 mill. ; hauteur de l'ouverture :
4,5 mill.
Rapp. et di/f. — Cette coquille a beaucoup d'analogie avec V. pis-
cinalis Mull., qui est le type du Sous-Genre Cincinna Hubn. ; tou-
tefois elle est un peu plus déprimée à la base et sa spire est plus
obtuse au sommet. La direction de ses stries d'accroissement, la
continuité de son péristome qui repose simplement sur la base de
l'avant-dernier tour, s'opposeot à ce qu'on les rapproche des
Hélicéens, qui ont l'ouverture bien plus oblique en profil, et dont
le péristome est discontinu en arrière. D'ailleurs, on a déjà signalé
l'existence du genre Valvata dans le système Jurassique, seulement
ce sont des espèces planorbulaires, appartenant à la forme typique
du V. cristata Mull. : Maillard en a décrit un dans le Purbeckien du
Jura ( V. sabaudiensis, p. 68, pi. Il, fig. 12-13) ; Sandberger cite et
figure une espèce du Dorsetshire ( V. heliçoides Forbes), qui se trouve
aussi dans le Hanovre, d'après M. Struckmann(Weald. Hann, p. 85,
pi. H, fig. 21-22); d'autre part, Moore a décrit, en 1867 (1), deux
coquilles du Lias de Charter House (V. anomala et pygrnœa), qui ne
paraissent pas aussi douteuses que l'indiquent MM. Hudleston et
Wilson, dans leur Catalogue des Gastropodes jurassiques d'Angle-
terre.
Enfin, la détermination générique de notre fossile se trouve
confirmée par cette remarque qu'il est tout naturel de trouver des
Valvata associées à des Viviparus daus un gisement palustre, tandis
qu'on ne pourrait y expliquer la présence A' Hélix terrestres que par
entraînement d'individus isolés, ou par remaniement de la couche
ligniteuse infrajacente; or, ces hypothèses ne se concilient guère
avec le nombre et l'état de conservation des échantillons qu'a
recueillis M. Benoist, en place dans la couche palustre en question.
M) Quart Journ. Geol. Soc., vol. XXHI, n- 92, p. 556 et 357, pi. XV, fig. 5-9.
144
Séance générale annuelle du G Avril 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON, Président sortant
Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la dernière
séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites a la dernière séance, le Président
proclame membres de la Société :
MM. Authelin, à Nancy, présenté par MM. Bleicher et Nicklès ;
Giraud, Agrégé de l'Université, présenté par MM. A.
Gaudry et Boule.
Il annonce une présentation .
M. Albert Gaudry présente, de la part de M. Ph. Glangeaud,
la communication suivante :
M. Charles D. Walcott, réminent directeur du Geological Survey
américain, qui a publié très récemment une si curieuse monogra-
phie des Méduses fossiles, parmi lesquelles on doit signaler sur-
tout les Méduses cambriennes, m'apprend qu'il vient de faire une
découverte paléontologique des plus importantes. Il a trouvé
de nombreux restes de Crustacés fossiles dans le Précambrien
(Algonkien) de l'Etat de Montana, à quelques centaines de mètres
au-dessous de la base du Cambrien. Ces crustacés se rapporteraient
à l'ordre des Mérostomidés.
145
ALLOCUTION DE M. J. BERGERON, PRÉSIDENT POUR 1898
Messieurs,
Chaque année, à pareille époque, le président sortant doit prendre
une dernière fois la parole devant vous, et vous retracer la vie de la
Société 90us sa présidence. Il semble qu'en établissant cette cou-
tume, nos prédécesseurs aient voulu nous faire faire tous les ans
une sorte d'examen de conscience, nous permettant ainsi de nous
rendre compte si nous avons maintenu intactes nos traditions. Ces
traditions, qui remontent déjà pour nous à près de soixante-dix
ans, nous ont fait une situation unique parmi les sociétés savantes :
les théories ont passé, les chefs d'école se sont succédé ; notre
Société, qui avait su se tenir à l'écart de toutes les influences, a
conservé tout son prestige. Son esprit d'indépendance, la liberté
avec laquelle peuvent s'y soutenir toutes les opinions, la courtoisie
qui règle nos rapports entre nous, la vigilance avec laquelle ont
toujours été écartées les questions autres que celles d'ordre pure-
ment scientifique, lui ont valu l'honneur de compter parmi ses
membres des hommes de toutes opinions : sa réputation s'est faite
ainsi de toutes les gloires des géologues français.
Durant l'année 1898 ce fut le môme esprit qui anima notre Société.
De la liberté complète dont jouit chaque membre de traiter toute
question, pourvu qu'elle soit relative à la Géologie, est résultée une
grande variété dans les communications qui nous ont été faites.
Grâce à M. Michel Lévy, les questions théoriques ont reparu avec
un éclat qu'elles avaient perdu depuis la disparition d'Élie de
Beaumont. Les études pétrographiques ont été plus nombreuses que
d'ordinaire; il faut nous en réjouir car, si par ses méthodes la
pétrographie sort de notre domaine, elle nous appartient bien par
la plupart des résultats auxquels elle arrive. Ces études sont dues
à MM. Termier et Bréon.
Les travaux de stratigraphie ont été, comme toujours, les plus
abondants, et c'est naturellement l'étude du sol de la France qui a
donné le plus de mémoires. Dans l'ouest, MM. QEhlert et Bigot se
sont associés pour décrire le massif silurien d'Hesloup ; dans le Jura,
M. l'abbé Bourgeat a signalé de nouveaux faits relatifs à la tecto-
nique ; dans la Dombes et la Bresse, M. Boistel a repris l'étude de
7 Juin 1809. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 10
146 ALLOCUTION DE M. J. BKRGERON G Avril
quelques points encore mal élucidés ; dans le Plateau central
M. Mouret a donné une étude d'ensemble sur les terrains anciens.
La région alpine a fourni à MM. Termier et Kilian, Revil et Vivien,
Pierre Lory, Arnaud et David Martin, matière à d'importants
travaux. Les régions subalpines ont continué à être l'objet des
études de MM. Marcel Bertrand, Fournier, Bresson et Ropelin.
Le sud-ouest de la France commence à être abordé à son tour :
MM. Doucieux, Bresson, Stuart-Meuteatli et Harlè vous ont entre-
tenus des résultats de leurs recherches dans le Bas-Languedoc et la
région pyrénéenne. Ce sont donc Içs régions méridionales de la
France qui ont le plus sollicité l'attention des membres de la Société.
Mais l'activité des travailleurs n'a pas été moindre de l'autre côté
de la Méditerranée: MM. Peron, Ficheur, Gentil et Blayac nous ont
faire part de leurs découvertes en Algérie : quelques-unes sont
venues confirmer et éteodre les résultats de celles faites en 1896
lors de la réunion extraordinaire en Algérie, montrant une fois de
plus Futilité de ces excursions en commun.
La Roumanie, grâce aux travaux de MM. Popovici-Hatzeg et
Anastasiu, nous a fourni son contingent de faits nouveaux. 11 faut
espérer que ces études seront continuées et que la Roumanie, sous
l'impulsion de ces jeunes docteurs, deviendra un centre géologique
important.
Nos connaissances sur les pays d'outre-iner se sont accrues singu-
lièrement cette aonée : nous le devons à MM. Fourtau, Douvillé,
Zurcher et Aguilera.
M. Haug a essayé avec succès d'établir la valeur des étages ou
plutôt des termes de Portlandien, de Tithonique et. de Volgien.
La Paléontologie a continué à prendre dans notre bulletin une
place de plus en plus grande. Je vous rappellerai les mémoires
ou les notes que nous devons à MM. Ameghino. Harlé, Sauvage,
Priem, Sarasin, Kilian, Toucas, Schlumberger, Barrois, Canu.
Si nous nous reportons à un demi-siècle en arrière, c est. de la part
des membres de la Société, la même activité : c'est la même variété
dans les communications. Mais alors les questions de classification
et de parallélisme étaient à l'ordre du jour. Quelles assimilations
faire entre les assises permiennes de Russie, d'Allemagne et de
France ; à quels horizons tertiaires du bassin de Paris comparer les
dépôts nummulitiques du sud-ouest de la France ; à quel terrain
rapporter le calcaire dit pisolithique ? Tels étaient les sujets sur
lesquels il y avait de nombreuses et ardentes discussions auxquelles
1899 ALLOCUTION DE M. J. BERGERON 147
prenaient part de Verneuil, Coquand, d'Archiac, Elie de Beaumoot,
Delbos, Boubée. Je suis heureux de pouvoir saluer aujourd'hui en
M. Victor Raulin que nous comptons encore parmi nous, un de
ceux qui, dans cette étude du Tertiaire du sud-ouest de la France,
déployèrent le plus d'ardeur et firent faire les plus sensibles progrès.
C'est dans la discussion relative à l'âge du Calcaire pisolithique,
que M. Hébert se révéla tout entier ; il était pour ainsi dire à ses
débuts, car c'était la troisième fois qu'il prenait la parole devant la
Société; mais on juge déji dans son mémoire de* sa méthode, et les
arguments qu'il invoque pour placer ces assises à la partie tout à
fait supérieure du Crétacé ont conservé encore toute leur valeur.
Élie de Beaumont, d'Archiac, Viquesnel, de Roys prennent part à la
discussion, mais aucun ne traite la question avec la netteté de vue
de M. Hébert.
Parmi les membres qui firent durant Tannée 1848 les communi-
cations les plus importantes, je relève encore les noms de Aymard,
d'Hombres-Firmas, Daubrée, Pomel, Collomb; mais aucun ne pré-
senta d'étude régionale. A mesure que la géologie stratigraphique
a progressé, elle a modifié ses teodances ; son ambition aujourd'hui
est de suivre l'évolution de la terre aussi bien dans la distribution
de ses continents et de ses mers, que dans celle des organismes qui
y ont vécu. Elle se transforme en une sorte de Paléogéographie dont
les progrès sont parallèles à ceux de la Géographie du monde actuel.
Alors, comme aujourd'hui, la Société s'intéressait aux travaux
faits à l'étranger. Ami Boue la tenait au courant de ceux entrepris
par les géologues autrichiens; de Verneuil l'informait des progrès
réalisés en Russie et en A inérique. C'est ainsi qu'il annonçait l'appa-
rition du premier volume de la Paléontologie de l'Etat de New-York,
par James Hall. C'est cinquante ans après la publication de ce pre-
mier volume que notre confrère est mort : mais pendant ces cin-
quante ans, quel monument n'a-t-il pas élevé à la Paléontologie des
terrains primaires de l'Amérique!
Les travaux de Paléontologie ont été bien peu nombreux en 1848 :
ils sont signés par Bayle, Marie Rouault et Davidson.
Telle fut, à cette époque, la vie intellectuelle de notre Société;
mais notre Bulletin a gardé la trace de plusieurs événements dont
le récit nous fait revivre au milieu de nos anciens confrères. Au
début de l'année, la Société perdit le seul de ses membres qui ait
porté couronne royale. Nous lisons, en effet, daus le Bulletin, que le
7 février, le Président, qui était alors Michelin, adressa au nom de
148 ALLOCUTION DE M. J. BERGKRON 6 Avril
la Société une lettre au nouveau roi de Danemark pour lui dire
« avec quelle douleur profonde la Société a reçu la nouvelle de
la mort de Sa Majesté le roi Christian VIII, l'un de ses plus anciens
membres ». Mais il semble que notre Société dut regretter plus en
Christian VIII le confrère que le roi, si nous en jugeons par la
démarche qu'elle fit un mois après. En effet, le 8 mars suivant, le
même Président Michelin allait « avec un grand nombre de mem-
bres », ainsi que le dit le Bulletin, assurer les membres du Gouver-
nement provisoire du concours de notre Société. Je me suis laissé
dire par plusieurs personnes qui ont assisté à ces journées histo-
riques de 1848, que le nombre des délégations ainsi envoyées
auprès du Gouvernement provisoire avait été tel que le défilé dura
plusieurs jours et que les membres du Gouvernement durent, pour
veiller aux affaires de l'Etat, prendre des représentants, d'autres
disent des figurants, chargés de recevoir ces délégations. D'après
notre Bulletin, celle de la Société eut affaire à un adjoint au maire
de Paris, qui semble avoir eu quelque vague notion de ce qu'était
la Géologie.
Faut-il attribuer à cette démarche la subvention que le nouveau
gouvernement accorda à notre Société? Je ne sais; en tous cas le
19 avril suivant, Hippolyte Carnot, ministre de l'Instruction publi-
que et des Cultes, annonça au Président une allocation de mille
francs pour faciliter la publication du tome II de l'Histoire des pro-
grès de la Géologie de d'Archiac, avec le regret que l'état des fonds
de son département ne lui permit pas de faire plus. Comme vous
voyez, Messieurs, un intervalle de cinquante ans n'a rien changé
pour nous à la générosité des ministres, ni d'ailleurs à leurs regrets
de ne pouvoir faire plus.
En 1898 notre Société n'a pas eu à faire acte de dévouement à un
nouveau gouvernement ; d'ailleurs la politique est laissée par nous
hors de cette enceinte et il faut nous en féliciter, car c'est une de
ces mauvaises fées dont parle Perrault dans ses contes, mauvaise
fée qui transforme et empoisonne tout ce qu'elle touche. Les seuls
événements qui soient venus rompre la régularité, je^ne dis pas la
monotonie, de notre existence de travail, sont deux événements qui
auront un grand retentissement, du moins je l'espère, sur la vita-
lité de notre Société.
Par un décret en date du 6 août 1898, nous avons vu la Géologie
et la Paléontologie rentrer dans nos programmes de l'enseignement
secondaire ; ces deux sciences seront, je n'ose dire enseignées, mais
1899 ALLOCUTION DE M. J. BEROBRON 149
esquissées en quelques leçons» dans les classes où l'esprit commence
à s'ouvrir aux idées philosophiques. Nous sommes en droit d'espérer
que cette mesure nous amènera de nouveaux adeptes. Le rôle de ces
sciences sera encore mieux compris dans l'avenir, et sans doute on
ne les considérera plus comme bonnes tout au plus pour des élèves
de cinquième. Ce décret a été rendu à la suite des démarches faites
auprès du Ministère de l'Instruction publique par M. Albert Gaudry.
Je saisis avec empressement cette occasion de le remercier encore
en votre nom. Qu'il me soit permis d'exprimer aussi toute notre
gratitude à M. Mangin, Professeur au Lycée Louis-le-Grand, qui a
fait devant le Conseil supérieur de l'Instruction publique le rapport
à la suite duquel la décision a été prise.
De plus, grâce à la générosité de Mmo Fontannes, nous pourrons
dorénavant faciliter les travaux de Géologie, quels qu'ils soient; il y
aura là certainement un stimulant précieux pour les générations à
venir de géologues. Mais nous voyons encore autre chose dans ce
legs, c'est le moyen, conformément au désir de Mme Fontannes,
d'entretenir parmi nous le souvenir de son fils, dout le nom mérite à
tous égards de rester parmi les plus honorés de la Géologie.
Si nous pouvons avoir foi en l'avenir, par contre, notre situation
matérielle ne s'est pas améliorée; elle est restée telle que M. Barrois
vous l'exposait ici même, il y a un an.
Je vous ai dit au mois de janvier, comment, grâce aux avis de
notre trésorier et de M. Douvillé, notre dévoué rapporteur de la
Commission de comptabilité, la Commission du Bulletin et les
secrétaires avaient remis notre budget en équilibre, secondés qu'ils
ont été par plusieurs de nos confrères qui ont pris à leur charge
tout ou partie des frais de coufection de leurs planches. Mais cela
ne suffit pas; il faut que nos publications puissent se développer.
Nous avons dû, par suite de notre gêne, nous adressera un éditeur
pour la publication de nos mémoires de Paléontologie. Il nous faut
augmenter nos ressources; pour cela, augmentons l'intérêt de nos
publications; nous sommes sûrs alors de faire de nouvelles recrues.
Certainement un des attraits les plus puissants pour une société
scientifique, réside dans les discussions. En lisant nos anciens
bulletins, on est frappé de l'importance qu'elles prenaient après
chaque communication : c'était parfois de véritables argumenta-
tions; les questions posées aux auteurs n'ont pas toutes la même
valeur, mais toutes témoignent de l'intérêt que prenaient les audi-
teurs aux sujets traités. Aujourd'hui il y en a bien, mais elles sont
150 ALLOCUTION DR M. J. BERGERON 6 Avril
rares. Cela tient à ce que la science, devenant plus vaste, il faut se
spécialiser et dès lors, après chaque communication, la discussion
n'a lieu, encore quand elle a lieu, qu'entre spécialistes ; elle acquiert
peut-être ainsi une plus grande valeur scientifique, mais il est bien
à craindre qu'elle ne puisse être suivie par un grand nombre de
membres. C'est le cas, en particulier, pour bien des amateurs qui,
passionnés de science, n'ont pas toujours le loisir de faire les études
nécessaires pour se tenir au courant des questions à l'ordre du
jour. N'est-il pas à craindre que, cet état de choses persistant, nous
n'en voyions le nombre diminuer encore et môme qu'ils ne finissent
par nous quitter. Ce serait presque à maudire le progrès s'il devait
aboutir à la disparition de ces membres parmi lesquels nous comp-
tons parfois nos meilleurs amis et que nous sommes si heureux de
rencontrer soit ici, soit en excursion. Mais je crois qu'au grand
profit de tous, les spécialistes pourraient, ainsi que cela se fait à la
Société belge de Géologie, donner de temps à autre, dans des com-
munications qui tendraient presque à la vulgarisation, la mise au
point des questions les plus importantes. Ce serait pour eux l'occa-
sion de provoquer de nouveaux travaux complétant les leurs et de
répondre ainsi aux amateurs toujours disposés à dire :
Je marcherai pour vous, vous y verrez pour moi.
Autrefois les secrétaires tenaient la Société au courant des travaux
récents, et c'était un attrait de nos séances ; ils analysaient les prin-
cipaux mémoires parus sur les sujets les plus importants. 11 faut
reconnaître qu'il serait matériellement impossible, à l'heure actuelle,
à nos secrétaires de faire un pareil travail, étant donné le nombre
considérable de mémoires publiés chaque année ; mais les spécia-
listes, obligés de se tenir au courant des publications qui les inté-
ressent, pourraient en donner des analyses à la Société. Cette idée,
qui d'ailleurs n'est pas de moi, me parait très heureuse. Son appli-
cation exigerait peu de travail de la part de nos confrères, et quand
elle en exigerait, n'est il pas du devoir de tous de tâcher de déve-
lopper notre Société ?
Je disais en commençant qu'il nous fallait faire un examen de
conscience. Faisons-le sans faiblesse et reconnaissons que l'indiffé-
rence, le plus grand des maux pour une société, a commencé à
nous envahir. Nous suivons moins assidûment les séances ; les
excursions même sont abandonnées. En 1898 il n'y a que quelques
membres qui se soient rendus à Barcelone, à l'aimable invitation de
nos confrères espagnols. Cependant le programme des excursions,
1899 ALLOCUTION DE M. J. BERGERON 151
le pays que nous devions parcourir, étaient bien faits pour nous
attirer. Tous ceux qui ont été fidèles au rendez-vousontèté récom-
pensés de leur zèle et ont rapporté de ces courses un charmant
souvenir, dû non seulement à l'intérêt de la région explorée, mais
aussi à l'excellent accueil de MM. Aimera, Vidal, Bofill, ainsi que
de leurs compatriotes. Réagissons contre ce sentiment d'indifférence
qui malheureusement est général. Prenons exemple sur nos anciens,
sur nos maîtres, qui, non contents d'assister régulièrement aux
séances, marchent encore à notre tète dans ces réunions toujours si
instructives et si cordiales.
Peut-être y aurait-il un effort à tenter en vue de grouper entre
elles toutes les sociétés ayant pour objet l'étude de la terre ; il
semble que l'avenir appartienne aux associations qui seules donnent
le nombre et la force. Mais je reconnais qu'il y aurait de bien grandes
difficultés dans la réalisation de ce rêve. En attendant qu'il puisse
être sérieusement question de cette sorte de fédération, cherchons
à nous rendre utiles : ouvrons grandement nos portes à toutes les
sciences nouvelles qui peuvent se réclamer de la Géologie. Donnons
aussi plus d'importance à tout ce qui concerne les applications de
cette science. En 1848 nous comptons cinq communications dont
purent profiter l'agriculture et l'exploitation des mines ; en 1898
il n'y en eut pas une. S'inspirant des remarques faites Tannée
dernière par M. Barrois, sur le petit nombre des praticiens que
renferme notre Société, votre Conseil a institué des conférences de
Géologie appliquée. Nous avons entendu MM. Gosselet et Van den
Brœck qui nous ont montré que des questions semblant être, au
premier abord, d'un intérêt très spécial, peuvent, traitées par de tels
maîtres, devenir aussi intéressantes que les conceptions théoriques
les plus élevées. A ces conférences, le public a été plus nombreux
qu'à nos séances ordinaires. Mais ce n'est qu'à la suite d'un effort
continu que nous attirerons de la sorte les praticiens dans notre
Société.
C'est également à la longue que la mesure prise par le Conseil,
relativement à la perception du droit d'entrée, aura son plein effet.
Attendons avec patience les résultats de ces réformes.
L'année prochaine nous aurons un attrait de nouveauté provenant
de notre installation dans un local mieux aménagé que celui dans
lequel nous nous trouvons : il parait que cet attrait peut être très
grand. Néanmoins, on comprend qu'une Société hésite à se le donner
fréquemment, surtout, quand elle possède une bibliothèque comme
la nôtre. Mais la place nous manquant (hélas ! pour nos livres
152 ALLOCUTION DE M. J. BERGER ON 6 Avril
seulement), les conditions de conservation de nos cartes et de notre
bibliothèque n'étant pas satisfaisantes, et notre bail arrivant à terme,
votre Conseiladûprendreunegravedécision.Aprèsmûres réflexions,
après discussions très sérieuses, il s'est décidé à louer un apparte-
tement dans l'Hôtel des Sociétés savantes. L'espace qui nous est
réservé nous permettra d'accroître notre bibliothèque sans avoir à
craindre le manque de place d'ici une longue période d'années ; notre
salle des séances sera attenante à notre bibliothèque et nous aurons
la libre disposition de l'ornementation de cette salle : nous pourrons
donc y retrouver tous les souvenirs qui, ici, nous rappellent des
maîtres ou des amis. Enfin les conditions pécuniaires sont telles
que nous n'ayons rien à craindre, en supposant que notre situation
reste stationnaire.
De toutes nos traditions, la plus respectée et, certes, la plus
digne de l'être, est celle qui fait revivre devant nous, pendant
quelques instants, le jour de notre séance annuelle, les confrères
que nous avons perdus dans l'année. Comme si nous voulions les
associer une dernière fois à nos joies, c'est le jour où nous décer-
nons nos prix, où nous sommes réunis plus nombreux que de
coutume, que nous choisissons pour cela. Gardons-la cette tradition,
car c'est une de celles qui font le plus honneur à notre Société,
c'est aussi une des plus profitables. Grâce à elle, les jeunes appren-
nent comment leurs anciens ont concouru aux progrès de la Géolo-
gie, progrès que l'on est trop souvent porté à compter à partir de
son époque; ils apprennent aussi à mieux juger leurs devanciers,
en les comparant au milieu dans lequel ils ont vécu ; ils les jugent
à leur vraie taille, en se dégageant de cet effet de perspective qui
souvent diminue les hommes de science, quand on les voit à
distance.
Je ne me suis jamais si bien rendu compte de la facilité avec
laquelle on perd la notion de la valeur d'un homme qu'en étudiant
la carrière d'Edmond Hébert, mon premier maître. Il y a à peine
dix ans qu'il est mort, et déjà le silence s'est fait autour de son nom :
c'est que beaucoup des faits qu'il a trouvés sout tombés dans le
domaine public, et dès lors personne ne songe plus à savoir qui les
a découverts. Je ne puis, en ce qui concerne Edmond Hébert,
m'expliquer un tel état de chose que parce que, seul de nos prési-
dents, il n'a encore trouvé personne pour rappeler son œuvre. Il m'a
paru que ce silence prolongé davantage pourrait passer pour plus
que de l'oubli, pour de l'ingratitude de notre part, alors qu'il a tant
1899 ALLOCUTION DE M. J. BERGERON 133
fait pour notre bon renom, et j'ai pensé que comme Président de la
Société, ancien élève d'Edmond Hébert, il était de mon devoir de
dire quel avait été son rôle vers le milieu de ce siècle. Mais en
voyant la liste des notices nécrologiques que vous avez à entendre
aujourd'hui, en songeant que je vous retiendrai déjà bien longtemps
moi-même, j'ai cru préférable de remettre à une autre époque la
lecture de la notice nécrologique que j'avais préparée.
Nos morts ont été nombreux cette année : plusieurs semblaient
par leur âge devoir être encore pendant longtemps l'honneur de
notre Société. D'autres ont été des modestes, que nous entrevoyions
rarement, mais dont les noms évoquent quelques vagues souvenirs
d'excursions faites en commun, de sympathies naissantes à peine
ressenties. Saluons en MM. Faucher, Freund, Gallois, Gouverneur,
de Lavernede et Meunier, des confrères qui nous ont donné par leur
constance à faire partie de notre Société, la preuve de l'intérêt qu'ils
portaient à la Géologie.
Deux de nos plus anciens confrères, habitant tous deux l'Amérique,
se sont éteints cette année : Jules Harcou et James Hall. M. Barrois
vous retracera la carrière toute de travail de ce dernier. Je regrette
qu'une voix plus autorisée que la mienne ne se fasse pas entendre
pour vous rappeler la physionomie si originale de Jules Marcou. Né
dans le Jura, il en subit comme bien d'autres une influence spéciale
qui le porta vers la Géologie. 11 y avait, vers 1840, une pléiade de
géologues jurassiens dont l'âge seul ralentissait l'ardeur : c'étaient
de Luc, Gressly, Agassiz, Coulon, Dubois de Montpereux, Jules
Pictet. Jules Marcou, à cette époque, était jeune, il était enthousiaste ;
il devint bientôt pour ces vieillards un élève dont tous appréciaient
d'autant mieux les superbes qualités qu'ils commençaient à sentir
leur déclin. C'est dans cette atmosphère pleine de bienveillance,
qu'il conçoit et exécute ses premiers travaux qui justifient d'ailleurs
la haute opinion de ses vieux maîtres. Il publie dans nos mémoires
ses « Recherches géologiques sur le Jura salinois » qui sont et res-
teront un vrai modèle d'observation. Il continue ses études, toujours
avec la même ardeur, mais bientôt il se heurte à des obstacles qu'il
n'avait pas prévus ; il trouve des savants qui discutent ses opinions ;
ce n'est plus l'admiration des premières années. Son ardeur n'en
fait que croître, et son habileté à manier la plume va lui servir
non seulement à se défendre mais encore à attaquer, et ce sera
surtout contre le formalisme des administrations qu'il se révoltera.
Je regrette de ne pouvoir suivre Marcou par toutes les phases
d'enthousiasme par lesquelles il est passé ; mais je tiens à signaler
154 ALLOCUTION DE M. J. BKRGBRON 6 Avril
la tentative qu'il fit en 1857 d'établir pour les faunes fossiles une
répartition comparable à celle que Forbes venait d'esquisser pour
les animaux marins de la faune actuelle. Ce premier essai, d'ailleurs
fait sur des matériaux encore bien incomplets, aussi bien pour les
faunes fossiles que pour les faunes vivantes, ne pouvait réussir ;
mais du moins c'était la première fois que l'on entreprenait pareille
comparaison.
Son humeur voyageuse le porta en Amérique, où il finit par s'éta-
blir; là, il fut un véritable pionnier, s'avançant seul vers l'ouest
dans le Kansas, l'Arkansas, le Nouveau Mexique, les Montagnes
Rocheuses, à la recherche de faits géologiques nouveaux. De ses
voyages rapides il rapporta des notes fort intéressantes, mais qui
auraient demandé à être complétées ou même à être revues. Néan-
moins son esprit généralisateur lui fit entreprendre plusieurs
œuvres de synthèse qui eurent le mérite de la nouveauté : telle est
sa carte géologique de la Terre ; telles sont ses « Lettres sur les
roches du Jura et leur distribution géographique dans les deux
hémisphères ». Dans ses premiers travaux il se plaisait à rappeler
cette citation qu'il empruntait à Darwin, que passé cinquante ans
un géologue n'est plus bon qu'à eotraver les progrès de la science.
Marcou est mort à soixante-quatorze ans, n'ayant jamais cessé de
publier ni de combattre; il est probable qu'il avait changé d'opinion.
Bien que M. Zeiller doive nous donner une notice nécrologique
sur Maurice Hovelacque, je ne puis prononcer son nom sans rappeler
quel bon camarade, quel ami sûr il fut pour plusieurs d'entre nous ;
j'ai vivement regretté que les circonstances ne riraient pas permis
de lui rendre sur sa tombe l'hommage que je lui devais ; mais du
moins M. deMargerie a dit quelle perte notre Société faisait en lui.
Hippolyte Crosse fut un amateur, mais dans le sens primitif, je
dirais volontiers dans le joli sens du mot : il aima la science, il en
eut le culte désintéressé toute sa vie. A quinze ans il reçoit d'un
neveu d'Adanson une collection de coquilles vivantes : il la range,
il la classe, il la détermine, il l'augmente, et plus elle croit, plus il
trouve d'intérêt à l'étudier. Qui de nous n'est passé par cette phase
pleine d'émotions charmantes, où, grâce à notre ignorance, nous
avions constamment la joie de découvrir quelque chose de nouveau
pour nous, quoique bien connu pour les autres.
Avec le temps, cette passion d'eofant l'éloigna peu à peu du nota-
riat auquel il semblait qu'il fût destiné, par sa naissance et par
ses études de droit ; il s'adonna complètement à la Conchylio-
1899 ALLOCUTION DE M. J. BKROERON 155
logie, et sut grouper autour de lui par son savoir comme par
l'aménité de son caractère, un grand nombre de zoologistes et de
paléontologistes qui devinrent ses collaborateurs, lorsqu'avec son
amt Paul Fischer il reprit la publication du Journal de Conchylio-
logie. 11 ouvrit alors son recueil à des travaux de Paléontologie que
signèrent d'Orbigny, Deshayes, Hébert, Bayle, Toumouer, P. Fischer.
Mais par lui-môme il publia très peu sur les coquilles fossiles. Ses
œuvres principales, et auxquelles il doit sa notoriété scientifique,
sont relatives aux faunes malacologiques des régions exotiques.
S'il ne fut pas un de nos membres les plus actifs, il fut du moins
un de nos plus utiles auxiliaires par les travaux de Paléontologie
qu'il aida à publier. A ce titre nous lui devons un souvenir tout
particulièrement reconnaissant (1).
Noguès prit le goût de la Géologie en suivant les cours de l'École
supérieure des Mines, dont il fut élève libre ; et ce goût fut si tenace
qu'il trouva moyen, môme en menant la vie absorbante d'un ingé-
nieur praticien, de publier des mémoires de Géologie. Notre Bulletin
renferme plusieurs notes de lui sur les Pyrénées. Mais il était de
ceux qui trouvent qu'une foi sincère doit agir, aussi faisait-il du
prosélytisme en faveur d'une science qu'il aimait tant. Pendant un
séjour de quelque durée à Lyon, il organisa des cours publics de
Géologie qui eurent un vrai succès; mais il dut les interrompre
pour reprendre une situation d'ingénieur exploitant. A quelque
temps de là, lorsqu'il revint à Paris, la môme ardeur d 'enseigne-
ment l'entraîna à demander en 1885, lorsque se produisirent les
tremblements de terre de l'Andalousie, l'autorisation de faire à la
Sorbonne un cours libre de Séismologie. Mais dès ses premières
leçous, au printemps de 1886, les tremblements de terre ne faisant
plus de victimes, avaient cessé d'être d'actualité pour bien des gens,
il s'en aperçut au petit nombre de ses auditeurs. Noguès dévelop-
pait dans ses leçons une telle ardeur, il témoignait un tel désir
d'intéresser qu'il en était touchant. Cette fois encore les mômes
préoccupations matérielles le forcèrent à interrompre son cours;
il dut prendre une situation au Chili d'où la nouvelle de sa mort
nous est parvenue brutalement par un avis de la poste. Ce fut un
serviteur désintéressé de la science ; il a droit à nos hommages.
Gabriel de Mortillet est né en 1820 à Meilan, dans l'Isère, et, comme
beaucoup de ceux qui ont vu le jour dans les régions montagneuses,
(1) Pour la liste bibliographique des travaux d'Hlppolyte Crosse, voir le Jour-
nal de Conchyliologie (T. XLVIllj ainsi que la notice nécrologique publiée à part.
156 ALLOCUTION DE M. J. BKRGERON 6 Avril
il s'intéressa de bonne heure aux sciences naturelles. Après avoir
suivi le mouvement populaire de 1848, il se retira, de 1850 à 1864,
en Savoie et eu Suisse, où il classa les musées d'Histoire naturelle
d'Annecy et de Genève. Tous ses efforts tendirent à développer le
goût du grand public pour les sciences naturelles, d'abord par la
manière originale dont il groupait les objets, puis par ses travaux
de vulgarisation. C'est pendant cette période que de Mortillet publia
ses études géologiques sur la Savoie et l'Italie, études fort intéres-
santes qui nous font regretter qu'il n'ait pas continué dans cette
voie. Mais une science nouvelle venait d'apparaître et de Mortillet,
qui en avait pu suivre les progrès et en prévoir l'avenir, était trop
ardent pour ne pas s'y adonner aussitôt. Dès son retour en France,
en 1864, il fonda le périodique ayant pour titre « Matériaux pour
l'histoire de l'Homme », recueil qui provoqua un grand mouvement
de recherches. Il ne nous appartient pas de juger l'anthropologiste
ni de prendre parti dans les luttes qu'il eut à soutenir; mais là où
nous le retrouvons nôtre, c'est quand il emploie nos méthodes
stratigraphiques et paléontologiques ; il en montre toute la valeur
parce qu'alors il s'élève au-dessus de ses confrères. Pourquoi faut-il
que la politique soit venue envenimer les luttes qu'il eut à soutenir
pour ses idées scientifiques ? Elle est apparue et aussitôt il n'a
plus été tenu compte des progrès qui étaient dus à de Mortillet.
Soyons plus justes à son égard et souvenons-nous qu'il a fait hon-
neur à la Géologie (1).
La collaboration constante durant plus de vingt-cinq ans de
Cornet et de Briart avait fini par faire de ces deux noms une sorte
d'entité dans le monde géologique ; mais cela n'était pas pour
déplaire à nos confrères, tant était grande l'amitié qui les unissait.
Elle avait pris naissance, non dès l'enfance, ni sur les bancs des
écoles, mais dans une carrière de Saint- Vaast ; tous deux, ingénieurs
de charbonnages, faisaient de la géologie à leurs moments de loisir ;
le hasard les fit se rencontrer un jour dans cette carrière ; vous
savez ce qu'il advint de cette rencontre. Us publièrent, en collabo-
ration, une série de travaux qui, comme le disait Briart, n'auraient
jamais vu le jour, si les deux amis ne s'étaient encouragés mutuel-
lement dans leurs études. Le premier résultat de cette association
fut l'étude du calcaire grossier de Mons, dont ils surent préciser la
place ; ils en publièrent la faune, mais ce fut un travail de longue
(1) Vpir la liste bibliographique des travaux de Gabriel de Mortillet dans
l'Anthropologie (T. IX, p. (501).
1899 ALLOCUTION DE M. J. BERGERON 157
haleine qui ne prit fin qu'en 1877, treize ans après qu'il eut été
commencé. Entre temps ils publiaient la description du Crétacé et
de l'Aacheniendu Hainaut, de la meule de Bracquegnies, des gîtes à
silex de Spiennes. de la craie phosphatée de Ciply. Naturellement
les dépôts houillers de la Belgique furent l'objet tout spécial de
leurs études ; ils publièrent plusieurs mémoires dont le plus inté-
ressant est relatif au relief du sol de la Belgique après les temps
paléozoîques. Mais la mort vint interrompre en 1887 cette collabo-
ration si féconde. Il semble que Briart ait eu à cœur de suppléer, par
son activité, à la perte que la science venait de faire en la personne
de son ami. Il continue les études inachevées, niais c'est surtout la
géologie du bassin houiller du Hainaut qui va l'occuper : il en étudie
la structure dans le district du Nord ; enfin il publie son plus beau
mémoire sur la géologie des environs de Landelies et de Fontaine
l'Evéque. Ce fut certainement un sentiment de profond étonnement
qui accueillit l'apparition de ce travail dans lequel l'auteur éta-
blissait que la région houillère du Nord avait été le théâtre de
phénomènes de recouvrement comparables à ceux de la région
alpine. Peu de semaines avant l'apparition de ce mémoire j'eus
l'honneur de rencontrer Briart à Charleroi et c'est avec raison qu'il
pouvait me dire, faisant allusion à cet accident géologique : « nous
ferons envie aux géologues alpins ».
Ce travail, qui fut un des derniers de notre confrère, le classa
parmi les meilleurs géologues de la Belgique, et cependant la
géologie n'était pour lui qu'une sorte de récréation ; comme direc-
teur d'une des plus importantes exploitations houillères de la
Belgique, il avait une responsabilité qui le retenait presque cons-
tamment à son poste. S'il avait fait ses travaux de géologie avec
tant de soin, alors que ce n'était qu'un plaisir, c'était avec une
sollicitude bien autrement grande encore qu'il accomplissait son
devoir d'ingénieur, devoir double vis-à-vis de la compagnie qu'il
représentait comme vis-à-vis des ouvriers qu'il dirigeait. Il sut le
remplir à la satisfaction de tous, et à plusieurs reprises des mani-
festations de sympathie lui montrèrent l'affection et l'estime que
tous, administrateurs et ouvriers avaient pour lui. La plus touchante
fut provoquée par le cinquantenaire de son eutrée à la Compagnie
de Mariemont et de Bascoup. Ce jour-là, s'il regarda en arrière,
voyant le chemin parcouru dont chaque étape correspondait à un
progrès, soit dans la science, soit dans son art, soit dans l'amélio-
ration du sort de ses ouvriers, il eut pu être fier de lui si cela avait
été dans sa nature, mais c'était un modeste. Il sentit que c'était
158 ALLOCUTION DE M. J. BERGER ON 6 Avril
le digne couronnement de sa carrière, et il attendit la mort avec
sérénité. Elle arriva le 14 mars 1898 (1).
Félix Bernard, à la suite de brillantes études au Lycée de Clermont,
puis au Lycée Saint-Louis, entra en 1882 à l'Ecole normale supé-
rieure ; c'était l'ambition de sa jeunesse, c'était celle de la vaillante
mère qui seule avait eu à l'élever, car la mort était entrée de bonne
heure dans cette famille. Dès lors, toutes les joies que peut éprouver
un esprit d'élite, Félix Bernard va les ressentir : ses maîtres le
distinguent rapidement : parmi ses camarades il forme des amitiés
comme il est rare d'en rencontrer : à peine sorti de l'École il entre-
prend d'écrire un traité de Paléontologie qui n'est qu'une glorifica-
tion de la théorie de révolution, et il a l'honneur de voir son livre
approuvé par les maîtres les plus compétents. Ses études sur la
charnière des Bivalves lui donnent des résultats tout nouveaux pour
la Zoologie et la Paléontologie. C'est la renommée qu'il entrevoit ;
c'est en même temps le bonheur qui lui arrive avec toutes les espé-
rances qu'apporte avec elle la naissan^ d'un enfant ; c'est l'Académie
des Sciences qui songe à lui décerner un de ses prix ; c'est une
situation de professeur à l'Institut agronomique qu'il va prendre, et
avec elle ce sera presque l'aisance. Non ! c'est la mort qui le sur-
prend, à trente-cinq ans, au milieu des plus douces joies et des plus
nobles espérances de la vie ! La mort est toujours affreuse, mais ici
elle a quelque chose de plus douloureux encore, car Félix Bernard
était un vrai chef de famille dans toute l'acception du terme et sa
disparition sera doublement ressentie.
Quoique jeune il laisse des travaux dont l'importance est consi-
dérable au point de vue de l'évolution ; ils établissent en effet les
modifications que subissent les charnières des coquilles parallèle-
ment à celles qu'éprouvent les animaux qui les sécrètent. 11 donne à
ce que l'on considérait comme une enveloppe sans valeur, le même
rôle qu'à un organe essentiel, et c'est une découverte de premier
ordre car pour les Acéphales fossiles la coquille est le seul vestige
qui en persiste. Toutes les modifications de la coquille à l'état de
prodissoconque et de dissoconque furent suivies par Félix Bernard
chez les Anisomyaires, les Taxodontes et les Hétérodontes. Pour
(I) Je dois à l'obligeance de M. Julien Weiler, ingénieur en chef de la division
du matériel à la Société des charbonnages de Mariemont et de Bascoup, chargé
par cette société de faire l'éloge de Briart, communication des documents qui
m'ont permis de rédiger celte courte notice nécrologique ; je tiens À le remercier
publiquement.
1899 ALLOCUTION DE M. J. BERGERON 159
l'étude de ces derniers il avait été guidé primitivement par son
maître, M. Munier-Chalmas ; mais il l'a poussée beaucoup plus
loin qu'il n'avait été fait avant lui. Ces recherches devaient le con-
duire à des résultats nouveaux qu'il entrevoyait déjà, dont il entre-
tenait ses amis : elles lui avaient fourni, par la comparaison des
formes embryonnaires avec les formes éteintes, de uouvelles preuves
à l'appui de la théorie de l'évolution ; il se préparait à les publier.
Tous ces beaux rêves ont été anéantis, mais du moins Félix Bernard
aura eu la satisfaction de contribuer pour sa part à l'établissement
dune théorie dont il était un des plus fervents adeptes. Son sort est
eucore parmi les plus heureux si Ton n'envisage que le but de la vie
de l'homme de science.
Messieurs, j'ai iini de vous parler de nos confrères décédés ;
peut-être l'ai-je fait trop longuement, mais j'avoue i n'être complu à
suivre ces existences si bien remplies ; j'éprouvais un grand soula-
gement à trouver parmi les nôtres, des hommes qui ont su faire ce
qu'ils avaient à faire et qui n'ont jamais été guidés que par le senti-
ment du devoir. Inspirons-nous de leur exemple ; mais ayons con-
fiance qu'au sein de notre Société ces saines traditions de travail
persisteront, car nous comptons eucore bien des travailleurs compa-
rables à ceux que nous avons perdus. Je n'en veux pour preuve, que
l'embarras dans lequel s'est trouvée la Commission du prix Fon-
tannes quand il s'est agi de désigner le lauréat. Félicitons-nous de
cet embarras; félicitons également M. Ficheur d'avoir été choisi
parmi les meilleurs.
160 6 Avril
RAPPORT DE LA COMMISSION DU PRIX FONTANNES EN 1899
par M. PERON.
La Commission du prix Fontannes eut été cette année, Messieurs,
bien soulagée et bien heureuse si elle avait pu disposer de plusieurs
prix au Heu dvuu seul. Le mérite des candidats eu présence était
tel, en effet, que les membres de la commission ont été profon-
dément embarrassés pour faire un choix parmi eux, et qu'il a fallu
plusieurs séances pour en décider.
Dire les diflicultés de ce choix, c'est déjà faire l'éloge du lauréat
qui a pu l'emporter sur de tels concurrents. Ce lauréat, on vient de
vous le faire savoir, c'est M. Ficheur, Professeur de Géologie à
l'Ecole supérieure des Sciences d'Alger.
M. Ficheur, membre de notre Société depuis une douzaine
d'années seulement a déjà conquis dans cette société une telle
place et acquis une telle notoriété, que la tâche du rapporteur, qui a
pour mission de vous rappeler les titres du lauréat, en est singuliè-
rement simplifiée.
Travaillant sans bruit, loin de nous, isolé dans ces vastes régions
si peu connues encore, de notre colonie algérienne, c'est parle seul
effet de son labeur assidu et fécond, que notre confrère est parvenu
à acquérir cette notoriété.
Jeune venu dans la carrière, il possède déjà un bagage scientifique
considérable que pourraient lui envier beaucoup d'anciens profes-
sionnels de la géologie.
De ces travaux, la Commission, pour se conformer aux volontés
de notre regretté confrère Fontannes, n'a eu à considérer que ceux
publiés dans ces dernières années. Je n'ai donc pas à vous parler, à
mon grand regret, des travaux antérieurs à 1893, et, notamment, du
considérable mémoire de 1890, dans lequel M. Ficheur a débrouillé
le chaos des formations, si confuses, du grand massif du Djurjura.
Mais, en dehors de ces travaux, les matériaux que j'ai à vous
signaler abondent.
Dans les contrées, relativement neuves, qu'il a été appelé à explo-
rer, M. Ficheur a trouvé presque à chaque pas matière à d'impor-
tantes observations. Très actif et très laborieux, il a régulièrement
1899 RAPPORT DE LA COMMISSION DU PRIX FONTANNES EN 1899 161
fait connaître au monde savant les principaux résultats de ses
recherches. Aussi, depuis dix ans que j'analyse pour l'Annuaire
géologique universel, les travaux concernant l'Afrique du Nord, pas
une année ne s'est écoulée, sans que j'aie à signaler plusieurs nou-
velles et importantes contributions de M. Ficheur, à la connais-
sance de la stratigraphie algérienne.
Il ne m'est pas possible, dans le rapport forcément très succinct
que j'ai à vous présenter, d'entrer dans le détail de ces nombreux
travaux de notre lauréat.
Tout au plus pourrai-je vous en résumer les principaux résultats.
Tout d'abord, je trouve, dans notre bulletin, son Mémoire sur les
terrains crétacés du massif du Bou Thaleb, dans la province de
Constantine. Notre confrère y a complété et rectifié les observations
déjà publiées sur ces montagnes. Il y a, notamment, reconnu
d'importantes discordances qui n'avaient pas été aperçues, celles de
l'Oxfordien sur le Bathonien, du Néocomien sur le Tithonique, du
Sénonien sur l'Albien.
Peut-être quelques-unes de ces discordances n'ont-elles pas, au
point de vue de la classification des terrains, l'importance que leur
attribue notre confrère, car, comme je l'ai signalé moi-môme,
avec beaucoup d'autres, bon nombre de discordances ne sont qu'ap-
parentes et simplement dues à des mouvements postérieurs au
dépôt des assises. Quoi qu'il en soit, il faut retenir ici, au moins, la
transgression très remarquable des couches du Crétacé supérieur
sur celles du Crétacé inférieur, transgression qui s'étend sur une
vaste surface et dénote un important mouvement du sol algérien à
cette époque.
Signalons encore, dans ce mémoire, l'indication de plusieurs
faunes fossiles, en partie inconnues, notamment dans le Valanginien
du Teniet Courass et dans le Cénomanien du Kef Melah. Dans cette
dernière localité, M. Ficheur a retrouvé un grand niveau à Caprinelles,
qui constitue ici. pour cet étage, un faciès récifal très analogue à
celui que nous lui connaissons dans les Charentes et en Provence.
Un des mémoires les plus importants de M. Ficheur au point de
vue stratigraphique, est celui qu'il a publié, en 1894, sur les terrains
d'eau douce du bassin de Constantine.
L'attribution de ces divers dépôts lacustres a donné lieu, comme
on le sait, de la part des géologues africains, aux interprétations les
plus divergentes.
En poursuivant leur étude depuis Constantine jusque dans le voisi-
7 Juin 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Gôol. Fr. — il
162 peron 6 Avril
nage de Mila, où ils sont en relation directe avec une formation
marine bien caractérisée de l'étage helvétien, M. Ficheur est parvenu
à préciser l'âge réel de ces dépôts.
Les uns, comme les argiles bien connues à Hélix dentés du
polygone de Constantine et les poudingues du Coudiat-Aty, appar-
tiennent à l'étage oligocène ; les autres, comme les argiles à lignites
du Smendou, doivent être rapportés à l'étage miocène inférieur ou
Cartennien, dont ils constituent l'équivalent lacustre.
L'étude stratigraphique des formations oligocènes d'eau douce de
la province de Constantine a été poursuivie par M. Ficheur dans
d'autres régions, notamment dans le Djurjura, dans les environs de
Médéa, etc.
Enûn, dans une autre note plus récente, notre confrère a étendu
ses conclusions à d'autres formations d'origine continentale, qui
remplissent des vallées et des cuvettes daus le Djebel Aurès et qui
recouvrent le pied des contreforts de la bordure saharienne dans le
Sud coustantinois.
La classification de certaines de ces formations a été corroborée
par les études de M. Blayac, dans les contrées de Guelma et de
Souk-Ahras, de sorte que, maintenant, le terrain oligocène, à peu
près inconuu jusqu'ici, en Algérie, va occuper de notables surfaces
sur la nouvelle édition de la carte géologique générale de l'Algérie.
Les terrains à phosphate de chaux, dont l'existence dans le nord
africain a été, pour la première fois, signalée par notre confrère et
ami, M. Philippe Thomas, et qui, depuis, ont été recherches par
tant d'autres explorateurs, géologues ou industriels, ont naturelle-
ment aussi appelé l'attention du jeune et zélé professeur de l'école
des sciences d'Alger.
C'est dans la direction de l'ouest que M. Ficheur a porté ses inves-
tigations pour y rechercher les limites de l'extension des couches
phosphatées.
Jusqu'ici, c'est la région de Boghari qui, dans cette direction,
semble être la dernièreoùle phosphate de chaux puisse être recherché
au sein des couches éocènes. Plus loin, dans la partie occidentale
des hauts-plateaux et dès le voisinage de Teniet-el-Had, on n'en a
plus rencontré aucune trace. M. Ficheur nous a donné, sur tous les
gisements qu'il a reconnus, des renseignements détaillés, accompa-
gnés de coupes, et ces renseignements seront d'un grand secours
pour les chercheurs et les industriels.
Cette région des environs de Boghari est intéressante à d'autres
1899 RAPPORT DE LA COMMISSION DU PRIX FONTANNES EN 1899 163
titres. Elle offre, en effet, le type le plus complet de l'étage éocène
inférieur africain. M. Ficheur y a distingué deux grandes divisions,
séparées Tune de l'autre par des discordances manifestes et par des
actions de ravinement qui vont parfois jusqu'à l'ablation totale de
l'étage inférieur.
C'est dans cet étage inférieur, puissant de 350 mètres et composé
d'assises argileuses gypsifères, de marno-calcaires à silex et d'autres
roches variées, que sont interstratifiées les couches phosphatées.
La division supérieure, comprenant à la base, comme la précé-
dente, des argiles gypsifères est, au contraire, plus haut, presque
exclusivement composée de bancs de grès très puissants. L'ensemble
de cette division ne comprend pas moins de 400 ou 500 mètres
d'épaisseur.
La grande formation éocène qui avait été déjà spécialement étudiée
par M. Ficheur, dans le Djurjura et autres régions, a encore été, plus
récemment, l'objet de ses recherches dans la chaîne montagneuse
littorale du nord de Constaotine, où elle présente un puissant
développement.
Notre confrère y a pu constater l'indépendance complète de
l'Eocène inférieur, c'est-à-dire du Suessonien à phosphate de chaux,
que nous venons de voir si développé à Boghari, par rapport à
l'Eocène moyen, c'est-à-dire aux assises à Nummulites aturica répan-
dues surtout dans le Djurjura. Une lacune importante, correspon-
dant à une longue période d'érnersion, sépare nettement, d'après
M. Ficheur, ces deux premiers étages éocèues.
Un phénomène semblable peut, en outre, être observé entre
l'Eocène moyen et l'Eocène supérieur qui est également bien repré-
senté dans ces montagnes. Ce dernier étage de la formation, indé-
pendant comme les autres, a été également subdivisé par M. Ficheur
en deux sous-étages, leMedjanien et le Numidien, tous deux consti
tués principalement par des grès, mais avec des différences qui
permettent de les distinguer facilement.
C'est ainsi que, dans celte intéressante région, on peut suivre,
sur un espace restreint, toute la série des formations éocèues, et
résumer nettement l'histoire de cette période dans l'Afrique du Nord.
Dans plusieurs notes successives, sur la région de Djidjelli, sur le
massif des Matmatas, etc., M. Ficheur a montré que son étage
medjanien s'étendait aussi à l'ouest du méridien d'Alger, notamment
dans le Djebel Matmatas, dans les envirous de Teuiet el-Had, dans
le grand massif de l'Ouarsenis, etc., et que, au contraire, l'étage
numidien manquait dans ces régions.
164 peron 6 Avril
Obligé d'écourter les analyses de ces nombreux travaux de
M. Ficheur, j'ai hâte d'aborder les importantes études qu'il a faites
sur les montagnes d'Alger, pourdresser la carte géologique détaillée
de ces montagnes (feuilles de Blida et de Médéa) et sur les phéno-
mènes de plissement et de recouvrement, restés jusqu'alors inaper-
çus, dont il a constaté l'existence dans l'Atlas metidjien.
C'est en 1893 que, pour la première fois, notre confrère, dans une
note à l'Académie des Sciences, a appelé l'attention du monde savant
sur le vaste plissement anticlinal qui, sur le flanc nord du massif
de Blida, affecte toute la série sédimentaire de cette montagne et se
trouve étiré et renversé vers le nord. Plus tard, en 1896, dans une
seconde note, M. Ficheur a signalé sur le versant sud de ce même
massif, l'existence de phénomènes analogues et d'une amplitude
pareille. Mais, c'est surtout dans le grand mémoire que ce savant a
publié dans notre bulletin, en 1896, à propos de la Réunion extra-
ordinaire de la Société à Alger, que nous trouvons tous les détails
relatifs à ces importantes observations.
Dans ce mémoire, plusieurs chapitres considérables sont d'abord
consacrés à l'étude stratigraphique des terrains de l'Atlas de Blida.
L'auteur y a examiné en détail les diverses formations qu'on y
rencontre, schistes paléozoïques de la Chifïa, d'une puissance de
1000 mètres au moins, et qui paraissent pouvoir être rapportés au
Silurien, calcaires liasiques du Mermoucha, série crétacée, à peu
près complète mais médiocrement représentée paléontologiquement,
et dans laquelle cependant l'auteur a pu distinguer un Néocoinien
schisteux avec Ancy laceras, le Cénomanien et un Sénonien avec
Inocerames et Micraster Peini qui est très développé et présente un
faciès constant dans toute la région littorale, enfin, les terrains
tertiaires, limités aux deux étages de l'Éocène moyen, à des traces
d'Oligocène, au Miocène cartennien et helvétien et, enfin, à des
lambeaux de Pliocène.
Les observations sur la tectonique du massif constituent la partie
principale du mémoire. La description des successions de couches
et l'interprétation des phénomènes y est appuyée de très nom-
breuses coupes partielles et de trois grandes planches de coupes
générales qui, dans une série de profils successifs relevés sur la
longueur de la chaîne, résument la constitution si tourmentée de
toute la montagne.
11 résulte de toutes les observations de M. Ficheur que des zones
de plissement en éventail se distribuent dans le massif, autour de
deux axes dont le principal est formé par la crête de Blida, de
1899 RAPPORT DE LA COMMISSION DU PRIX FONTANNE8 EN 1899 165
chaque côté de laquelle les plis sont déversés en sens contraire, et
dont le secondaire est le massif des Beni-Messaoud, où les plis sont
étirés au sud sur plus de trois kilomètres.
M. Ficheur estime que la dernière période, pendant laquelle ces
plissements se sont produits, a suivi la un des dépôts cartenniens
et a précédé ceux de l'Helvétien.
D'autres notes complémentaires, publiées par notre confrère à
l'occasion de la réunion d'Alger, ont eu pour objet, l'une, de décrire
en détail le bassin tertiaire de Médéa, où M. Ficheur a reconnu une
série oligocène, l'étage car tennien, et enfin l'Helvétien, dont l'allure
régulière présente le plus grand contraste avec les plissements du
massif de Blida, l'autre, de décrire les terrains néogènes du Sahel
d'Alger.
Dans cette dernière note, malgré le titre d'Aperçu sommaire
qu'il lui a donné, M. Ficheur a produit de nombreux détails sur les
terrains pliocènes et sahéliens des environs d'Alger et il a discuté
les opinious émises sur la classification de ces terrains.
Enfin, quelques membres de la Société ayant, lors de l'excursion
à travers le Djurjura, préseutédes objections à propos de l'interpré-
tation de certains mouvements et de l'attribution de certaines
assises, M. Ficheur a jugé nécessaire, comme plaidoyer en faveur de
l'opinion qu'il avait émise, de publier, dans une note spéciale, les
principaux faits stratigraphiques qui lui paraissent venir à l'appui
de cette opinion.
Il s'agissait surtout, dans cette discussion, du classement de
certains schistes argileux noirâtres et de divers grès rouges, que
l'on rencontre en montant au col de Tirourda. Plusieurs de nos
confrères, se basant sur des analogies de faciès, de succession et de
situation, étaient disposés à attribuer ces roches au terrain houiller
et au Trias. Or, pour M. Ficheur, elles sont d'Age jurassique, et
c'est par l'examen de leurs relations avec les assises du Lias supérieur,
bien caractérisées par de nombreux fossiles dans diverses localités
voisines, que l'auteur est arrivé à cette conviction.
C'est à regret que je me vois obligé de borner à ces notions trop
sommaires l'analyse de tous ces travaux dout l'examen plus détaillé
nous entraînerait trop loin, mais je ne puis terminer ce rapport
sans insister ici sur le rôle si capital que M. Ficheur a rempli dans
la Réunion extraordinaire de notre Société à Alger, en 1896.
J'ai eu le chagrin de ne pouvoir prendre part à cette réunion, mais
j'en ai soigneusement suivi les travaux et recueilli tous les échos.
166 peron 6 Avril
Tous nos confrères ont été unanimes à louer la parfaite organisation
delà réunion et des excursions ; tous ont reconnu le grand intérêt
que M. Ficheur a su donner aux explorations par le choix judicieux
des localités, par l'importance des questions soulevées et par les
explications qu'il a fournies.
Constamment sur la brèche pendant plus de vingt jours, notre
dévoué confrère a guidé la Société, non seulement dans les environs
d'Alger, mais dans les montagnes si difficiles de la grande Kabylie
et, enfin, dans toute l'étendue de la province de Constantine, depuis
le littoral jusqu'au Sahara.
Les comptes-rendus de ces voyages et de ces excursions, tous faits
par M. Ficheur, composent un gros volume. Loin de comprendre
uniquement le récit des incidents, des recherches et des discussions
survenus, ces comptes- rend us constituent le plus souvent un véri-
table travail original et ils contiennent, appuyés de coupes et de
dessins, beaucoup de faits nouveaux et d'observations propres à
M. Ficheur lui-même.
C'est, incontestablement, grâce au zèle du savant professeur
d'Alger, grâce à son activité et à sa complète connaissance de son
sujet, que nous avons dû la parfaite réussite de cette importante
réunion qui a été, pour notre colonie africaine, un gros événement
scientifique et qui sera certainement le point de départ et l'origine
de progrès considérables dans la connaissance de la géologie du
nord africain.
Ce sont là, Messieurs, des titres sérieux qui viennent s'ajouter à
ceux que je viens de vous énumérer et qui justifient le choix que
votre commission a fait de M. Ficheur comme lauréat du prix
Fontannes en 1899.
M. Ficheur adresse la lettre suivante au Président :
« J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien exprimer en mon
nom ma profonde gratitude envers la Société géologique pour la
distinction flatteuse dont je suis l'objet. J'ai le plus vif regret de ne
pouvoir, à cause de l'éloignement, me rendre à Paris, pour la
séance générale annuelle.
» J'apprécie trop la haute importance de la sanction donnée aux
travaux d'un géologue, par les plus éminents de ses confrères, pour
ne pas être très flatté de l'honneur qui m'est fait. J'en suis d'autant
plus touché que le doyen et le représentant le plus autorisé de la
Géologie algérienne a bien voulu accepter de présenter sur mes
modestes travaux un rapport qui, je le crains, ne soit empreint
1899 FICHEUR. — • REMERCIEMENTS 167
d'une trop grande bienveillance. Son appréciation sera pour moi
un précieux encouragement à poursuivre, avec toute l'activité dont
je puis être capable, les études stratigraphiques sur notre vaste
territoire algérien, qui nous réserve encore bien des surprises.
Que M. Pérou me permette, à son tour, de lui exprimer toute mon
admiration pour sou œuvre relative à l'Algérie, dont j'ai pu apprécier,
en toute circonstance, la haute valeur et la rigoureuse précisiou, et
qui sera toujours pour nous un modèle que nous nous efforcerons
de suivre.
» Je regrette bien vivement que mon absence de la séance générale
m'empêche de présenter moi-môme l'hommage que j'ai tenu à
rendre à la mémoire de mon éminent maître, M. Pomel, qui, j'en
suis certain, eut été heureux de la distinction que vous venez de
m 'attribuer.
» Veuillez, je vous prie, exprimer encore à la Société géologique
mes sincères remerciements ».
168 6 Avril
NOTICE SUR JAMES HALL
par M. Charles BARROIS.
James Hall a fait partie de la Société pendant 53 ans. Ses recher-
ches poursuivies sans relâche pendant la plus grande partie du
siècle, ont eu pour résultat d'élucider Tordre de succession des
couches paléozoïques des Etats-Unis, et d'illustrer les faunes de ces
temps reculés.
Il nous a quitté à l'âge de 87 ans, et la Société géologique de
France doit un hommage reconnaissant à la mémoire du confrère
illustre qui sut tracer un sillon si profond sur une terre encore
vierge et y déposer le germe fécond qui devait engendrer les
Geological Surveys des Etats-Unis.
Ce sera l'éternel honneur des géologues de New- York d'avoir
donné l'essor aux surveys nationaux. Ils out ouvert la période de
ces grandes explorations scientifiques, dont les publications, libé-
ralement disséminées dans toutes les bibliothèques par le gouver-
nement des Etats-Unis, proclament dans les deux mondes la prodi-
gieuse fécondité du sol américain et la valeur intellectuelle de ses
enfants.
James Hall naquit de parents anglais, le 12 septembre 1811. à
Hingham, petite ville du New-England, au sud de la baie de Boston.
11 fit ses études à Troy, dans l'Etat de New-York, et quelques années
plus tard il enseignait dans cette même Rensselaer School, où il
avait été élève. Dès ses débuts, James Hall se classait ainsi parmi
ces hommes d'élite, qui donnent leur mesure, dès qu'on les voit à
l'œuvre.
Bientôt cependant il quitte l'enseignement, appelé à l'âge de
25 ans au service du Geological Survey de l'Etat de New-York qu'on
venait de créer. Il entrait jeune dans sa voie définitive, et cette voie
devait être droite et longue ; il allait la parcourir d'une façon hono-
rable pour son pays, autaut que profitable pour la science.
Ce fut en 1837 que James Hall, chargé de dresser la **arte du 4e
district géologique de New-York, débuta dans la carrière. A cette
époque, le 4e district, correspondant à l'ouest de l'Etat, était à peine
colonisé. On pouvait ramasser des fossiles au point où se sont éle-
vées les grandes villes de Bufïalo et de Rochester; c'étaient déjà
1899 NOTICE SUR JAMES HALL 169
pourtant des centres et, en dehors d'eux, il n'y avait guèt-e que
quelques villages prospères dans les vallées les plus fertiles, dans
les terres basses, à portée d'une grande voie commerciale, le canal
Erie. Mais en s'éloignant de ces parties, dans les hautes vallées du
centre du district, sur le large plateau correspondant à sa portion
méridionale, le voyageur parcourait encore des solitudes délaissées.
Dans les terres basses, accessibles et habitées, James Hall distin-
gua les formations nombreuses de Médina, Clinton, Niagara, Salina,
Cornifère,Waterlime, Marcellus, Hamilton ; dans les Highlands soli-
taires, il décrit le Portage et le Chemnng. Les rives des lacs et des
rivières coupent transversalement les formations, et lui permettent
de reconnaître avec certitude la superposition des divers étages.
La simplicité de ces grands traits orographiques facilitait la
solution du problème stratigraphique, mais elle allait en même
temps exercer une influence définitive sur l'homme et imprimer au
jeune savant sa façon ; elle devait lui permettre, dès ses débuts,
d'arriver à la certitude par l'observation pure, consciencieuse et
profonde, et lui donner, dès lors, une aversion qu'il ne devait
jamais perdre, pour les conjectures et l'hypothèse.
Le point de départ de James Hall fut l'analyse détaillée du sol de
son pays natal.
Le nombre des groupes ou sous-étages paléozolques distingués
par les géologues officiels de l'Etat de New-York fut de 28, et ces
28 groupes sont restés dans la science, tels qu'ils ont été définis par
leurs auteurs. Ils avaient doté leur pays d'un travail devenu depuis
le fondement de la géologie stratigraphique en Amérique, mais le
monument ne s'était pas élevé sans efforts et sans tiraillements.
Ainsi ce ne fut qu'après une lutte assez vive que James Hall put
faire admettre à ses collègues la superposition du Onondaga-salt et
du Lower-Helderberg sur les groupes de Médina et de Niagara : on
avait considéré d'abord l'Onondaga-salt comme la continuation du
Médina sandstone, et les inductions erronées allaient s'accumulant.
L'intérêt de ces discussions était cependant resté confiné à
l'Amérique et ce n'est qu'après la publication de New-York que
l'Amérique cesse d'être aux seuls Américains. Les publications des
géologues de New-York attirèrent dans les Appalaches de nombreux
savants européens, et les noms de Lyell, de Verneuil, Ramsay sont
conservés des deux côtés de l'Atlantique, associés pour toujours à
celui de James Hall.
Ensemble, ils ont écrit un des chapitres fondamentaux de l'histoire
du globe, en reconnaissant une loi commune pour l'ancien et le uou-
170 ch barrois 6 Avril
veau continent, dans la succession des espèces animales, dès les
temps les plus reculés.
Depuis lors, les 28 groupes de la série paléozoïque du Nouveau-
Monde, d'abord répartis entre les quatre divisions de Champlain,
d'Ontario, d'Helderberg et d'Erie, peuvent se classer naturellement
dans les systèmes Silurien, Dévonien et Carbonifère du Vieux-
Monde, auxquels ils appartiennent. Les grands traits de la stratigra-
phie américaine sont tracés, il reste à en faire connaître les faunes.
Ces faunes contenaient des merveilles, et James Hall le fit bientôt
voir.
A partir de 1843, la Paléontologie de New York devient l'œuvre
capitale à laquelle il consacre son talent et toute son activité : dans
cette œuvre, aucun obstacle ne devait l'arrêter. Il n'avait d'abord
que de mauvaises collections ; il en recueille d'incomparables. Il
était dépourvu de collaborateurs, de dessinateurs, de lithographes;
il crée des élèves, forme des artistes et fait éclore le mérite autour
de lui. Il manquait de ressources et il a su dépenser 8 millions de
francs, au dire de l'autorité compétente, pour la publication de son
livre (1). Sa préparation scientifique même était sommaire, il s'élève
au niveau de la tâche qu'il s'était imposée et il domina son sujet en
mattre.
Pour lui, la Paléontologie de New- York, c'était la description des
fossiles qui, dans tous les pays de Y Union, se trouvaient dans le
système de New-York : il fallait donc commencer par voyager, par
suivre l'affleurement des roches de New-York, de l'Océan aux
plaines du Mississipi, c'est-à-dire sur une étendue égale à la moitié
de l'Europe. Il reconnut l'ordre de succession des faunes dans ces
vastes régions, leur parallélisme, leur continuité ou leurs interrup-
tions locales, et recueillit méthodiquement les éléments de ses
futures descriptions. C'est au cours de ces voyages et, pour ainsi
dire, à titre accessoire, qu'il retraça l'histoire des oscillations du
sol de la région appalachienne pendant la période paléozoïque.
Frappé de ce que les couches qu'il suivait à travers les Etats de
l'Amérique présentaient leur épaisseur maxîma dans les régions
montagneuses, il vit que les conditions initiales de sédimentation
jouaient un rôle dans la formation des montagnes; ce fut lui qui
posa les fondements de cette théorie américaine, que les directions
des chaînes de montagnes sont tracées par les zones d'accumulation
des sédiments.
(1) Déclaration de Hon. T. Guilford Smith, Régent de l'Université de New- York,
parlant au nom de l'Etat et de l'Université de New- York {Science, novembre 1896,
p. 713).
1899 NOTICE SUR JAMES HALL 171
Enfin, en 1847, il fit paraître le premier volume de la Paléonto-
logie de New-York. Avec ce volume commença la série de ses
grandes publications paléontologiques. Dès lors, et pendant 50 ans,
la vie des anciens temps va refluer en quelque sorte, vers deux
points du globe et, chaque année, on verra sortir, en ordre, des
presses d'Albany ou de Prague, les légions des premiers habitants
des temps géologiques, ressuscitées par la puissance de James Hall
et de Barrande : ces deux hommes remarquables, unis pour tou-'
jours dans l'histoire de la géologie, décrivent ensemble plus de
formes paléozoïques que tous leurs contemporains réunis.
Il fallut en effet 50 ans pour publier la faune de New- York, riche
de treize gros volumes in 4°, où soot figurées avec uoe exactitude
scrupuleuse et par milliers les espèces d'Invertébrés paléozoïques
d'Amérique. Ces livres sont des traités de spécification, remplis de
diagnoses savantes et détaillées, mais où la sûreté de l'analyse
permit de proposer des groupements élevés. L'auteur commence
son exposé par l'étude des formes siluriennes les plus anciennes,
et aussitôt il dépasse ses prédécesseurs américains ; il poursuit par
l'examen des espèces dévoniennes, et rien, chez nous, n'a encore
été écrit de comparable sur ces faunes. Ses descriptions des Trilo-
bites, Euryptérides, Lamellibranches, Brachiopodes, Crinoïdes,
Coralliaires, Graptolites et Bryozoaires paléozoïques constituent des
monographies précieuses, des modèles du genre : il a traité avec la
même compétence, la même profondeur de vues, les classes les
plus éloignées du règne animal.
James Hall était devenu l'historien attitré des premiers temps de
l'Amérique ; son jugement ferme lui avait permis de voir plus loin
que le fait local ou passager et de saisir les manifestations succes-
sives de la vie, les formes et Tordre des êtres, déjà si variés et si
complexes dès les temps siluriens. Dans cette recherche, il n'eut
qu'un souci, être exact, un désir, être complet ; il y fît la preuve
d'un esprit positif, précis et net, ennemi des hypothèses. Par là, il
sut inspirer à ses contemporains uoe confiance absolue, et ses
traités constituent la source claire où devront toujours remonter
les paléontologistes américains pour retrouver leurs types, comme
nous remontons, en Europe, à Linné, à Sowerby, à Barrande.
Des travaux si considérables devaient même attirer l'attention
du public, et divers gouvernements voulurent s'attacher le concours
de James Hall pendant les moments qu'il ne consacrait pas à la
Paléontologie de New-York. C'est ainsi que le gouvernement de
l'Iowa le chargea du levé géologique de cet Etat. Le gouvernement
172 ch. barrois 6 Avril
du Wisconsin, celui de Missouri, le chargèrent de missions ana-
logues, et de nouveaux volumes enregistrent le résultat de ses
recherches. James Hall s'assurait une autorité grandissante par
ces longues et belles études ; aussi les fossiles paléozoïques recueillis
dans les expéditions scientifiques lui arrivent de toutes parts. Nous
les trouvons bientôt figurés en divers mémoires, telle sa décade sur
les Graptolites du Canada, son rapport sur les fossiles du 40e paral-
lèle de Clarence King, sa description de la faune de la frontière
mexicaine dans le Rapport d'Emory, et encore dans ses études sur
le Pacifique-railway, sur le Grand-Lac salé, avec Stansbury, sur les
terrains crétacés du Nebraska et tant d'autres.
Le State Muséum de l'Etat de New- York était devenu entre les
mains d'un seul homme la principale collection américaine de
Paléontologie.
James Hall comprit alors qu'il devait à la science d'en faire un
grand établissement d'enseignement supérieur, une école de Paléon-
tologie descriptive. Elle était en pleine prospérité, cette maison
bâtie par lui, quand il sut y attirer et tenir serrés au tour de lui une
élite de jeunes gens, curieux des choses de la nature, avides de
savoir et d'avenir ; il en fit des hommes éminents, qui s'illustrèrent
à leur tour dans l'étude des sciences minérales. C'est entouré de
cet état-major, où brillent parmi ses élèves, les noms de Gabb,
Meek, Hayden, J. Whitney, Worthen, Newberry, Leconte, C. A.
White, Whitfield, Walcott, Beecher, Clarke, Schuchert, que James
Hall a passé sa longue vie. C'est à leur tète qu'il passe à la postérité.
Mais il a fait plus, pour l'histoire des temps oubliés, que penser
et écrire ; il a donné à la géologie américaine sa fécondité et lui
a pour ainsi dire assigné son lot. Pendant que le travail organisé
par lui, progressait autour de lui, pendant que les matériaux
s'accumulaient, se rangeaient, se complétaient daus ses tiroirs et
que le passé s'éclairait aux yeux de ses jeunes collaborateurs, il
marchait de l'avant, il faisait le chemin qui menait au but, écartant
les obstacles, les difficultés scientifiques et parfois même les opposi-
tions faites à ses coûteuses publications. Par là, il rendit à la Géologie
d'inoubliables services en montrant à son pays, par son exemple,
ce que pouvait être pour le progrès de la science et le développement
de la patrie, la grande institution des Surveys géologiques.
Après avoir forcé l'Etat de New- York à s'intéresser au progrès de
la Paléontologie et à proclamer de la sorte l'union intime qui existe
dans les pays d'initiative entre tous les progrès, James Hall crut
qu'il pourrait encore servir la Géologie en facilitant l'échange des
1899 NOTICE 8UR JAMES HALL 173
idées entre les diverses nations. En 1876, il essaya de réaliser cette
idée et, à la suite de l'Exposition de Philadelphie, il fut nommé à
Baffalo, président d'un comité pour l'organisation d'un congrès géolo-
gique international, qui devait se réunir deux ans plus lard à Paris.
Ce fut l'origine de ces congrès qui, depuis lors, ont tant facilité
nos voyages scientifiques et réuni tous les trois ans, en des pays
différents, les géologues, rapprochés par de nouveaux liens. Comme
fondateur des congrès internationaux, James Hall favorisa la colla-
boration des intelligences et la mise en lumière des observations
recueillies dans toutes les parties du monde.
On aimerait pouvoir attribuer à la conscience de tant de services
rendus, l'état d'âme et l'invincible ardeur de cet homme extraordi-
naire qui, à l'âge de 86 aus, voyageait encore de Californie en
Europe par amour de la science, et traversait jusqu'à la Russie,
avec plusieurs d'entre nous, des Monts Ourals au Caucase « mente
et malleo ».
Ainsi son activité semblait croître avec les années, et rien ne
semblait capable de refroidir l'énergie de cette longue vie consacrée
au culte de la science. Le savant n'avait pas cependant échappé aux
luttes ordinaires de l'humanité et, pour lui aussi, la lutte avait été
la condition de la victoire.
Des échos lointains d'outre-mer laissèrent parfois arriver jusqu'à
nous des bruits sourds de bataille, des récits de blessures person-
nelles, de souffrance même, apprenant que James Hall subissait, lui
aussi, l'expiation habituelle de ceux qui dépassent les niveaux
moyens; mais, quelque douloureuses que fussent ces rumeurs,
elles arrivaient toujours à nous mêlées de protestations et comme
noyées dans un retentissement d'acclamations sympathiques, parmi
des ovations. Les honneurs uniques qui lui furent rendus, par
l'Association américaine pour l'avancement des sciences, à Buffaio,
en 1896, et dont les journaux de l'époque ont dit la spontanéité et
l'éclat, trouvèrent de l'écho dans l'Europe entière.
De son vivant, on le voit s'élever au-dessus des divisions humaines
et pénétrer dans des régions sereines. Aujourd'hui il repose, et son
labeur lui assure une place d'honneur parmi les plus grands paléon-
tologistes de notre temps. Précurseur des grands Surveys géolo-
giques modernes et fondateur de nos congrès internationaux, James
Hall demeurera pour notre Société un de ces hommes qui ne meu-
rent pas tout entiers : il laisse à son pays un nom, pour son livre
d'or, et à nous, ses confrères, l'exemple d'une lougue vie remplie
par l'ardent amour du travail et par une foi filiale à la science.
17i 6 Avril
NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER
par M. H. DOUVILLÉ.
Au mois de juillet 1896 nous apprenions soudainement la mort
de notre confrère et ami Chaper ; parti plein de santé pour un court
voyage en Transylvanie, il avait été atteint brusquement par une
maladie grave et quelques jours après il s'éteignait à Vienne, loin
de tous les siens. C'était une perte cruelle pour tous ceux qui
l'avaient connu et aimé, et d'autant qu 'elle était plus imprévue ; mais
nous devions la ressentir encore plus vivement à l'École des Mines,
à laquelle il avait toujours témoigné un intérêt si passionné. Nous
verrons plus loin de quels grands services lui sont redevables en
particulier les collections de Paléontologie, et le dernier hommage
que nous lui rendons aujourd'hui ne pourra être qu'un bien faible
témoignage de notre reconnaissance.
Maurice- Armand Chaper naquit le 13 février 1834, â Dijon (1) ;
il termina ses études au collège Sainte-Barbe et entra à l'École
Polytechnique en 1854,
A sa sortie de l'École il embrassa la carrière d'Ingénieur et occupa
successivement diverses situations dans les Chemins de fer, les
Travaux publics et la Métallurgie.
Chaper avait toujours eu un goût prononcé pour les sciences
naturelles, et sa qualité d'ingénieur le dirigea d'abord vers la
Géologie. Originaire du Dauphiné, où sa famille possédait les mines
d'Allevard, il avait toujours conservé dans ce pays des relations
suivies ; c'est ainsi qu'il eut l'occasion d'acquérir la collection
Répelin, collection locale particulièrement importante par les
fossiles du Dauphiné que son auteur avait patiemment rassemblés.
Vers la môme époque, il commença à fréquenter l'Ecole des Mines et
se lia bientôt d'amitié avec Bayle puis avec Bayan, qui venait d'être
attaché aux collections de Paléontologie ; cette double direction
(1) Son père, ancien élève de l'Ecole polytechnique (1813), lut, après 1830, préfet
du Gard, de la Cote-d'Or, de la Loire-Inférieure et du Rhône. En 1848, les élec-
teurs de la Cote-d'Or l'envoyèrent à l'Assemblée législative ; en 1852, il rentra
dans la vie privée et mourut à Grenoble en 1874; il avait épousé Henriette
Teisseire, petite-fille de Claude Périer.
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAUIUCE CHAPER 175
donna une orientation particulière à ses études paléontologiques :
il apprit qu'il était imprudent de déterminer des fossiles avant de
les avoir complètement dégagés, et d'avoir ainsi mis en évidence
tous leurs caractères. Il se familiarisa avec l'emploi du burin et du
marteau et devint bientôt sous ce rapport aussi babile que son
maître ; beaucoup d'entre vous ont pu admirer les magnifiques
résultats obtenus ainsi par Bayle et par Chaper, et qui sont de vrais
chefs-d'œuvre de patience et d'adresse. Chaper polissait ses prépa-
rations avec un amour-propre d'artiste et il a toujours plus ou moins
méprisé les autres méthodes plus rapides ou plus faciles à employer,
telles par exemple que la méthode des coupes ou l'attaque par les
acides. Il savait bien cependant que la méthode de préparation
directe exige souvent un temps considérable et que les caractères
mis en évidence dépendent beaucoup de l'habileté de l'opérateur.
En 1863, Chaper devenait membre de notre Société sous les
auspices de Bayle et de Deshayes et, peu après, il se trouvait amené à
intervenir dans une question qui passionna à cette époque tous les
géologues, je veux parler de la discussion au sujet de l'âge des
couches de la Porte de France à Grenoble, discussion qui s'étendit
bientôt à toutes les couches renfermant des Térébratules trouées.
Ces formes singulières étaient connues depuis longtemps ; d'Orbi-
gny avait placé la Terebratula diphya dans le Callovien, et en avait
distingué la /. diphyoïdes du Néocomien. Cette manière de voir,
un peu modifiée, était restée classique, au moins eu France, et nous
voyons en 1866, Hébert constater encore que pctar les géologues
« les plus expérimentés » les couches à /'. diphya représentent
l'Oxfordien supérieur. Oppel et l'école allemande étaient arrivés à
une conclusion toute différente, et cette même année Saemaun
présentait à notre Société un mémoire de Benecke dont les conclu-
sions, disait-il, rendaient très probable l'attributiou de ces couches
au Kimeridgien supérieur.
Pour Hébert c'était une « erreur » d'Oppel, et il n'hésita pas à le
dire à notre Société ; mais, en même temps, persuadé que cette
opinion devait être fondée sur quelque motif sérieux, il se résolut à
étudier de très près et par lui-même la question controversée. Les
fossiles des couches eu litige dans les environs de Grenoble étaient
très rares; il se fit communiquer par Lory ceux de la Faculté de
Grenoble et emprunta à Chaper les matériaux qui existaient dans
la collection Répelin. Le résultat de cet examen fut tout-à fait
inattendu : Hébert modifia complètement sa première opinion ; il
crut reconnaître parmi les fossiles qui lui avaient été communiqués,
176 h. douville 6 Avril
des formes incontestablement néocomiennes, il en conclut que les
couches à T. diphya de la Porte de France étaient d'âge néocomien,
qu'elles reposaient sur des couches oxforditnnes et qu'il existait par
suite une lacune entre les deux séries. Jusqu'à la fin de sa vie, Hébert
restera invariablement fidèle à cette manière de voir ; il cherchera
à la faire prévaloir par des raisons de tout ordre, aussi bien stratigra-
phiques que paléontologiques. Il faut dire qu'à cette époque les
questions de faciès étaient encore bien mal connues; beaucoup de
géologues admettaient que les terrains de même âge présentaient
toujours la même constitution miuéralogique; Fuchs se refusait à
placer dans l'Infra-lias, les couches de houille du Tonkin et du
Chili, et Hébert ne voyait partout qu'un seul niveau corallien depuis
les couches de Chatel-Censoir jusqu'à celles du Salève avec Hetero-
diceras Luci; c'est pour cette raison que les couches à Am. tenuilo-
balus placées au-dessous étaient pour lui de l'Oxfordien.
La question était surtout d'ordre paléontologique et elle ne pouvait
être résolue que par une étude minutieuse des fossiles. Les détermi-
nations indiquées par Hébert n'avaient pas satisfait Chaper et ne lui
paraissaient pas établies avec une rigueur suffisante ; il prit le parti
de communiquer ses matériaux à Pictet. Le savant paléontologue de
Genève avait déjà commencé l'étude de la faune des calcaires de
Grenoble ; il avait montré que l'espèce de Térébratule trouée qu'on y
rencontrait, était différente des deux espèces admises par d'Orbi-
gny, et lui avait donné le nom de T. janitor; il était passé ensuite à
l'étude des Ammonites, qui ont une importance toute particulière
pour la fixation des horizons de la période secondaire ; il était sur le
point de faire connaître les résultats de son examen, lorsque Hébert
fit à la Société géologique une communication sur le Néocomien du
sud-est de la France. Il est vraisemblable qu'il affirmait à nouveau
dans ce travail les conclusions qu'il avait précédemment énoncées,
aussi Chaper se crut-il obligé d'intervenir et de faire connaître
l'opinion de Pictet, d'après laquelle un grand nombre des espèces
signalées par Hébert étaient ou mal déterminées ou douteuses, à
cause de leur mauvais état de conservation. A la suite de ces obser-
vations, Hébert différa la publication de sa note, qui ne fut pas
insérée dans notre Bulletin.
Il est difficile aujourd'hui de se rendre compte à quel point une
question d'ordre aussi exclusivement scientifique a pu passionner
les membres de notre Société. Sans doute les questions personnelles
jouèrent dans cette discussion un rôle trop considérable : Hébert
occupait une haute situation scientifique et admettait difficilement la
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 177
contradiction; Chaper, de son coté, indépendant de situation et de
caractère, n'a peut-être pas toujours suffisamment ménagé les
susceptibilités de son contradicteur. Mais il faut bien dire aussi que
les fossiles des couches en litige étaient rares, presque toujours mal
conservés et plus ou moins empâtés dans une roche dure ; souvent
aussi ils présentaient ces caractères ambigus que Ton rencontre
d'ordinaire dans les couches de passage, où les fossiles intermé-
diaires entre ceux qui ont précédé et ceux qui ont suivi peuvent
être rattachés soit aux premiers, soit aux seconds, suivant les idées
de ceux qui les examinent.
Quoi qu'il en soit, un mois après cette première escarmouche,
Chaper présentait à la Société le mémoire de Pictet ayant pour
titre « Étude provisoire des fossiles de la Porte de France, d'Aizy et
de Lemenc » et en indiquait les principales conclusions : les couches
de la base représentaient les couches à A. tenuilobatus et n'avaient
pas d'affinités oxfordiennes ; au-dessus les couches à Ter. janitor ren-
fermaient la faune de Stramberg. Enfin trois espèces néocomiennes
seulement sont signalées dans les couches de la Porte de France, et
se trouvent mélangées avec une faune d'un caractère franchement
jurassique. Pictet voit dans ce mélange une anomalie résultant de
la position incertaine de la ligne séparative des deux formations;
Chaper, au contraire, partisan de la continuité de la sédimentation
sur ce point, fait observer avec raison que ce mélange est tout-à-fait
normal, personne n'admettant plus, dit-il, que les limites d'étage
correspondent à un renouvellement intégral de la faune. Il ajoute
que la série des couches est complète, et sans se prononcer sur leur
assimilation précise et détaillée avec les divers étages du bassin
parisien, il prévoit le moment où, par suite du progrès de nos con-
naissances paléontologiques, il sera possible de retrouvera Grenoble
les équivalents rigoureux du Kimeridgien et du Portlandien. Un
autre point sur lequel Chaper insiste également, c'est que le même
faciès peut se retrouver dans des couches d'âge di fièrent ; ainsi, en
particulier, un étage corallifère n'est pas nécessairement d'âge coral-
lien. Il peut paraître singulier aujourd'hui qu'il fût nécessaire, il y a
trente ans à peine, d'insister aiusi sur une vérité aussi évidente et
acceptée maintenant comme telle par tous les géologues.
La discussion était déjà montée à un diapason bien élevé ; elle
s'envenima encore par suite du retard apporté à la publication de
notre Bulletin. Les auteurs avaient pris peu à peu la fâcheuse habi-
tude de ne remettre leurs notes que tardivement et comme il n'exis-
tait pas encore de compte-rendu des séances, il en résultait qu'il n'y
9 Juin 1800. — T. XXVII. Bull. Soc Géol. Fr. — 12
178 h. douvillé 6 Avril
avait pas toujours une concordance exacte entre les communications
faites en séance et leur texte imprimé dans le Bulletin. Chaper a
protesté souvent et d'une manière très vive contre ces pratiques, qui
rendaient les discussions extrêmement difficiles et souvent peu
compréhensibles; ainsi nous le voyons, dans une des séances du
commencement de 1870, s'étonner de voir dans le Bulletin une note
dont il n'avait pas gardé le souvenir, et refuser de répondre à une
communication avant d'en avoir sous les yeux le texte imprimé.
Dans ces conditions la discussion ne pouvait que traîner en lon-
gueur, d'autant qu'on en était réduit des deux côtés à procéder par
simples affirmations, Hébert maintenant d'un côté l'existence d'une
lacune, tandis que Chaper continuait à affirmer que la série des
couches était continue et que les assises à /'. janitor n'étaient pas
néocomiennes.
Aujourd'hui le temps a fait son œuvre, la lumière s'est faite, et
l'opinion soutenue par Pictet et Chaper a complètement triomphé:
les couches à Térébratules trouées pour lesquelles on avait créé
l'étage tithonique, sont devenues du Portlandien ; quelques géologues
vont môme plus loin encore puisqu'ils veulent faire rentrer le
Berriasien dans la série jurassique ; mais sur ce point l'accord n'est
pas encore complet.
Sur ces entrefaites de graves préoccupations étaient venues
détourner l'attention de la Société : la guerre, puis le siège de Paris,
ne laissaient plus de temps pour les discussions scientifiques, et
par surplus les collections publiques durent être entassées dans les
caves pour échapper au bombardement. Malgré tout la Société
continua à tenir régulièrement ses séances et à servir de centre de
réunion pour ceux de ses membres que le service actif n'appelait
pas sur les remparts (1).
(I) Chaper se donna tout entier aux travaux de la défense ; convaincu que la
garde nationale pouvait rendre de sérieux services si elle était bien organisée, il
voulut en faire partie, malgré une ancienne blessure ci la main qui le rendait
impropre au service actif. Il fut successivement élu capitaine, puis chef de bataillon
et enfin nommé lieutenant-colonel du 3K' régiment. Avec ses compagnies de guerre
il fut chargé du service des avant-postes à Arcueil d'abord puis à Créteil, et il ne
dépendit pas de lui que la défense ne fit un meilleur usage des forces sérieuses
qu'il avait contribué a organiser. Son inflexibilité sur 1rs questions de discipline ne
fut pas sans lui créer des animositès violentes : démissionnaire le 23 février, il fut
décrété d'arrestation par la Commune et obligé de quitter Paris. Il fut un des
rares chefs qui, avec des peines infinies, étaient parvenus à faire rendre aux
hommes de leur bataillon les armes qui leur avalent été confiées.
Par contre, les services signalés qu'il avait rendus à la cause, de Tordre lui
avaient attiré de vives sympathies dans le quartier qu'il habitait a cette époque ;
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 179
Les séances ne furent interrompues que pendant la Commune,
après le 20 mars ; elles reprenaient dès le 19 juin, et dans la séance
suivante nous voyons Chaper intervenir dans une discussion rela-
tive au mode de formation des nodules de chaux phosphatée ; la
forme et la constitutiou de ces nodules montrent, dit-il, qu'ils se
sont formés comme les silex, pendant le dépôt même des couches et
alors qu'elles étaient encore molles. Peut-être Chaper ne séparait-il
pas assez nettement les deux phases du phénomène, la précipitation
du phosphate au moment du dépôt de la couche et sa concentration
sur certains points, à la manière de la silice, et à une époque
postérieure.
En 1872, Chaper était nommé secrétaire de notre Société et Tannée
suivante il présentait une étude particulièrement intéressante sur
un Rudiste encore très incomplètement connu, le Plagioptychus
Toucasi, Matheron {PL Coquandi d'Orb.). Les échantillons de cette
espèce sont presque toujours bivalves et empâtés dans un calcaire
dur ; aussi Matheron, qui avait avec beaucoup de sagacité rapproché
cette forme du Plagioptychus paradoxus, avait-il été obligé de recon-
naître que l'intérieur des valves de cette coquille lui était presque
complètement inconnu. Les échantillons étaient extrêmement diffi-
ciles à préparer et c'est cette difficulté même qui tenta Chaper. Sur
un premier échantillon il enleva patiemment au burin la valve
droite et la gangue qui remplissait l'intérieur de la coquille, il put
ainsi isoler d'une manière complète la valve gauche ; un deuxième
échantillon traité d'une manière analogue lui fournit la valve droite.
L'opération ainsi résumée paraît d'une très grande simplicité, mais
il faut avoir eu les échantillons en main pour se rendre compte de
tout ce que Chaper a dû mettre en œuvre de patience et d'adresse
pour achever un pareil travail. Cette superbe préparation fait
aujourd'hui l'ornement des collections de l'École des Mines, et on
peut l'admirer à côté des préparations bien connues de Bayle, mais
au point de vue de la difficulté vaincue, l'élève a certainement
dépassé son maître.
En 1874, Chaper quittait le secrétariat et était nommé membre du
Conseil. Cette même année il commençait la série des voyages
lointains qui le retinrent trop souvent éloigné de nous. 11 s'était
c'est ainsi qu'il fut nommé en 1872 adjoint au maire du 5* arrondissement, et il
conserva ces fonctions jusqu'en 1876. Plus tard, lorsqu'il vint habiter le 7* arron-
dissement, il fut nommé administrateur du Bureau do bienfaisance et je n'ai pas
besoin de dire avec quelle conscience il s'acquitta toujours (pendant 15 années)
de ces délicates fonctions.
180 h. douvillé 6 Avril
consacré presque entièrement à l'étude des questions de mines et
fut ainsi amené à accepter de nombreuses missions à l'étranger pour
explorer les gites nouveaux qui étaient signalés.
Pendant plus de vingt années il parcourut successivement les
cinq parties du monde, depuis le Venezuela et les Montagnes
Rocheuses jusqu'à Bornéo, depuis le Gap jusqu'au nord de l'Oural.
Dans toutes ces explorations il se montra toujours non seulement
ingénieur habile, mais encore naturaliste infatigable. Tous les
échantillons qui pouvaient avoir une utilité scientifique étaient
recueillis, préparés, étiquetés et emballés avec une méthode rigou-
reuse et un soin méticuleux ; il ne réservait pour sa propre collectioo
qu'un petit nombre de spécimens, des Mollusques surtout, qui
l'intéressaient particulièrement ; tout le reste était déposé dans les
collections soit du Muséum d'Histoire naturelle, soit de l'École des
Mines. On a évalué à plus de 25.000 le nombre des échantillons dont
il a ainsi enrichi les grandes collections publiques de Paris (1).
11 est curieux de constater que parmi de si nombreux échantillons
les fossiles ne figurent qu'en nombre très restreint : c'est d'abord que
les explorations industrielles sont presque toujours exécutées dans
des conditions de rapidité qui rendent bien difficiles les observations
géologiques, et en outre les mines sont presque toujours situées
dans des massifs formés de roches cristallines et le plus souvent
azoïques. On peut s'expliquer ainsi que dans les nombreux travaux
de notre confrère, le paléontologue ait toujours été incomparable-
ment moins favorisé que le naturaliste. Le minéralogiste fut plus
heureux, et parmi les échantillons d'une importance particulière et
que l'on peut admirer dans les collections de l'École des Mines, nous
signalerons les Ouvarovites qu'il recueillit dans les fentes du fer
chromé à Bicer, dans l'Oural, et surtout le gros bloc de minerai de
Kimberley présentant encore en place un superbe diamant octaé-
drique : ce spécimen que Chaper eut beaucoup de peine à rapporter
intact, à cause de la friabilité de la roche, avait été donné par la
Kimberley Mining O à M. le baron d'Erlanger, qui, sur les instances
de Chaper, l'a généreusement offert à l'École des Mines.
Les observations géologiques intéressantes que notre confrère a
eu l'occasion de faire dans ses explorations ont été l'objet de
plusieurs communications à notre Société ; parmi les plus impor-
(1) L'ensemble de ces récoltes a fait l'objet d'une exposition publique très inté-
ressante au Muséum en 1893 ; elle comprenait 38 espèces de Mammifères, 206 de
Reptiles, 719 de Poissons, 2731 d'Articulés, 833 do Mollusques et autres animaux
inférieurs, 809 espèces de graines et de végétaux.
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 181
tantes, il faut signaler ses études sur les gîtes diamantifères : un
• des premiers (en 1879), il a exploré les anciens gîtes des environs
de Kimberley, et il a publié à ce sujet une importante monographie,
sous le titre de « Note sur la région diamantifère de l'Afrique
australe ». Il décrit ce gisement comme constitué par une boue
serpentineuse consolidée, dans laquelle les diamants sont épars ;
cette roche remplit des sortes d'ouvertures ou boutonnières, percées
au travers des roches anciennes et par lesquelles elle s'est épauchée.
Les nombreuses photographies qui accompagnent cet ouvrage uous
montrent le curieux aspect des exploitations à Kimberley, à Bultfon-
tein et à Du Toit's pan ; les claims ou parcelles de 10 mètres de
côté, souvent subdivisés eux-mêmes, étaient exploités à ciel ouvert
et indépendamment les uns des autres ; il en résulte un singulier
enchevêtrement d'excavations de forme rectangulaire el de profon-
deur inégale, produisant le plus curieux eiïet. Avec son expérience
des travaux de mines, Chnper montrait que ce mode d'exploitation
ne pouvait durer, qu'il était nécessaire d'en arriver i\ une exploita-
tion souterraine par remblais, permettant l'enlèvement complet du
minerai diamantifère, solution qui exigeait naturellement un grou-
pement préalable des claims. Toutes ces prévisions ont été rapi-
dement réalisées.
Deux ans auparavant il avait visité de prétendus gites de diamants
signalés dans le nord de l'Oural et avait pu se convaincre qu'il ne
s'agissait là que d'une supercherie qui durait depuis plus de 50
années. Une troisième exploration du même genre faite en 1882,
dans l'Hindoustan, lui fournit des résultats plus intéressants ; il put
reconnaître la présence du diamant en place dans une roche érup-
tive, bien différente de celle de l'Afrique australe, puisqu'elle est
constituée par une pegmatite rose, épidotifère ; le diamant s'y trouve
associé avec le corindon, il est cristallisé en octaèdres à arêtes vives,
mais ne présente pas des faces aussi nettes et aussi brillantes que
celles des cristaux de Kimberley. Dans l'un et l'autre cas, on peut se
demander avec Chaper si la roche éruptive qui contient le diamant
est la matrice même du minéral ou n'en est au contraire que le
véhicule. C'est une question à laquelle il était et il est encore diffi-
cile de donner une réponse catégorique.
En 1883, il allait explorer un important gisement houiller situé
sur la côte nord du Venezuela, à côté de la ville de Barcelona. Les
couches où le combustible minéral a été rencontré sont constituées
par un système très puissaut (de 6.000 mètres environ d'épaisseur,
d'après l'auteur) de grès à grains fins, couronnés par des poudingues
182 h. nou ville 6 Avril
et reposant sur des calcaires également très épais et alternant avec
des couches argileuses. Tout cet ensemble est malheureusement
dépourvu de fossiles déterminables. Chaper a signalé seulement des
indices de fossiles marins dans les calcaires inférieurs et des em-
preintes végétales dans les grès ; ces dernières, trop fragiles, n'ont
pu être rapportées. Il en résulte que l'âge de ces dépôts houillers
est resté très incertain : les couches sont nombreuses, la houille
est de très bonne qualité, et d'après Chaper tout cet ensemble parait
appartenir au terrain houiller. Mais on sait aujourd'hui que les
dépôts de houille ne se rencontrent pas exclusivement dans les
couches de la période carboniférieune ; en particulier il parait
probable que les couches houillères du Venezuela doivent être
rapprochées des dépôts analogues que Ton rencontre dans le Crétacé
inférieur du Pérou.
Dans son voyage à Assinie, notre confrère eut l'occasion d'ob-
server ces curieux dépôts superficiels, de nature argilo sableuse,
qui masquent presque partout le sous-sol dans les régions tropicales.
Ces dépôts sont mélangés de cailloux anguleux de quartz blanc, et
Chaper crut pouvoir les rapprocher des formations glaciaires qu'il
avait eu l'occasion d'observer dans l'Oural ; sans doute l'analogie
est grande et il est incontestable que les cailloux de quartz sont
disséminés sans ordre dans la masse et ne sont pas roulés. Mais
tous les géologues sont d'accord aujourd'hui pour rapprocher ces
dépôts de la latérite et les considérer comme résultant de la décom-
position sur place de roches schisteuses anciennes, traversées par
des filons de quartz, roches qui constituent en effet le sous-sol dans
cette région. Chaper a du reste très bien observé les encroûtements
ferrugineux passant quelquefois à un vrai minerai de fer, qui
caractérisent si souvent la latérite.
En 1890 il lit partie de la commission d'études instituée par le
liquidateur de la Compagnie du canal de Panama et fut chargé de
la description géologique des terrains traversés par le canal. Mais
il s'agissait surtout d'une étude industrielle, au double point de
vue de la nature et de la dureté des roches à traverser et des res-
sources qu'elles pouvaient fournir pour la construction; en outre,
le temps était très limité et Chaper dut se borner à l'examen du
côté technique. Bien que sou rapport présente un certain nombre
de détails intéressants, il n'eut malheureusement la possibilité ni
de relever des coupes, ni de recueillir des fossiles.
La fondation de la Société zoologique en 1876 ne pouvait laisser
Chaper indifférent; il en fit partie dès l'année suivante et fut presque
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 183
aussitôt nommé membre du Conseil. Vice-président en 1882, Prési-
dent en 1884, il n'a jamais cessé de prendre une part active à ses
travaux. C'est dans ses publications qu'il fit paraître les descriptions
des Mollusques nouveaux qu'il avait découverts dans ses voyages.
C'est égalemeut devant celte Société qu'il souleva la question de la
nomenclature à laquelle il s'était toujours vivement intéressé.
Tous ceux qui se sont occupés d'Histoire naturelle ou de Paléon-
tologie, savent combien sont déplorables les changements des noms
par lesquels on désigne des formes animales soit vivantes, soit
fossiles ; le seul moyen de les éviter est d'établir des règles fixes et
invariables. C'est là le but que s'était proposé le Congrès géologique
de 1878 en nommant une commission chargée d'étudier la question
des Règles à suivre pour établir la nomenclature des espèces; cette
commission venait de publier (novembre 1880) un rapport provi-
soire qui avait été envoyé à toutes les Sociétés savantes pour
solliciter leurs observations. La Société zoologique ne pouvait se
désintéresser de cette question, mais Chaper alla plus loiu et il fut
d'avis que les lois de la nomenclature étaient d'ordre purement
zooloyùfue et ne pouvaient être soumises au contrôle d'un congrès
géologique. Sur sa proposition une commission fut nommée dans la
séance du 11 janvier 1881 ; elle le choisit pour son secrétaire et le
chargea de rédiger un rapport, qui fut présenté dans la séance du
14 juin et adopté avec quelques légères modifications. Nous retrou-
vons dans ce rapport les qualités bien connues de Chaper, une
grande netteté jointe à une extrême rigueur de raisonnement : les
règles proposées ne pouvaient différer au fond de celles qui avaient
été précédemment indiquées. C'est toujours la loi de priorité qui
doit servir de fondement à la nomenclature, mais elle ne peut être
appliquée qu'à des noms clairement définis. Ce dernier point est
affaire d'appréciation personnelle; de là des divergences plus ou
moins considérables dans son application. Bayle et Chaper étaient
d'avis de faire remonter la loi de priorité jusqu'à Tournefort (1700)
et étaient très peu exigeants sur les conditions de clarté exigées
dans la définition des noms de genre ou d'espèce; la commission
de la Société géologique avait pensé qu'il n'y avait pas lieu de fixer
une limite dans le temps, mais, par contre, elle estimait qu'il était
nécessaire de rejeter définitivement tous les noms insuffisamment
définis. Vous vous rappelez que la question fut portée devant le
Congrès de Bologne, qui décida de ne pas remonter au delà de
Tannée 1766, date de la 12© édition du Systema naturse de Linné.
Cette décision avait été principalement soutenue par Fischer, ce
184 h. nouviLLrë 6 Avril
qui n'empêcha du reste pas notre confrère de prendre quelques
années plus tard des noms de genre dans Belon (1553).
Chaper fut aussi chargé en 1888, par la Société zoologique, d'étu-
dier, de concert avec Fischer, la question de l'adoption d'une
langue scientifique internationale. Une telle langue est incontesta-
blement nécessaire; telle fut du moins la conclusion du rapport
présenté par les deux naturalistes, mais ils ajoutaient qu'une
langue vivante rendrait plus de services que le latin. Chaper avait
fait ici prévaloir son opinion, car il n'avait jamais fait mystère de
son aversion pour le latin plus ou moins barbare employé par les
faiseurs de diagnoses. Il faut reconnaître toutefois que les diagnoses
en tchèque, en russe ou en hongrois, en attendant celles qui
pourront être publiées en japonais ou en chinois, seraient encore
infiniment plus gênantes que les diagnoses en mauvais latin. Le
développement exagéré du principe des nationalités et le soin
jaloux avec lequel chacune d'elles revendique aujourd'hui sa langue
nationale, ne permet pas d'espérer que le français soit adopté
comme langue scientifique universelle; d'un autre côté, il est
essentiel que les diagnoses soient établies dans une langue familière
à l'auteur ; il eût donc été certainement plus pratique de se borner
à demander que les diagnoses soient établies dans une des trois
langues principales : français, anglais ou allemand.
Il me reste à parler d'un sujet moins connu, c'est du rôle joué
par Chaper dans l'agrandissement des collections de l'Ecole des
Mines. La collection Deshayes, achetée en 1867, avait augmenté
dans des proportions considérables l'importance de la collection de
Paléontologie et, dès ce moment, l'emplacement qui lui avait été
attribué se trouvait insuffisant. L'encombrement fut encore aug-
menté par Tachât de la collection Terquem en 1872, et enfin quand,
en 1873, de Verneuil légua à l'Ecole des Mines la magnifique collec-
tion qu'il avait recueillie dans ses nombreux voyages, la place
faisait presque entièrement défaut; il fut nécessaire de loger provi-
soirement cette collection dans les combles de l'Ecole et, malgré
cela, les échantillons s'entassaient les uns sur les autres, se strati-
fiaient dans les vitrines et devenaient peu à peu inaccessibles ;
toute recherche était rendue impossible. L'agrandissement des
collections s'imposait à bref délai.
Tous ceux qui fréquentaient l'Ecole des Mines, avaient pu se
rendre compte de cette situation lamentable : Chaper était du
nombre et bien décidé à saisir la première occasion favorable pour
tenter d'y mettre fin.
1899 NOTICE NECROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 1«SM
En principe, la haute administration de l'Ecole admettait la
nécessité de cet agrandissement, mais sa réalisation venait se
heurtera une difficulté en apparence insurmontable. Les collections
ne pouvaient raisonnablement se développer qu'en expulsant de
leurs appartemeuts l'inspecteur et le directeur de l'Ecole; ces
appartements avaieut une si belle vue sur les jardins du Luxem-
bourg! était-il vraiment nécessaire d'y installer des collections de
« cailloux » ? c'est ce qui me fut dit textuellement à cette époque.
Pour vaincre ces résistances, très compréhensibles du reste, un
coup d'Etat, en miniature, fut nécessaire.
Un ingénieur des Mines, Béral, camarade et ami de Chaper, était
de l'entourage de Gambetta, alors président de la commission du
budget ; Chaper sut l'intéresser au sort malheureux des collections
de Paléontologie; sur ses instances, Béral en parla à Gambetta et le
décida à venir visiter l'Ecole incognito, pour se rendre compte par
lui-même de la situation. J'ai raconté d'ailleurs cette curieuse
visite, où j'assistai seul en tiers, Bayle se trouvant absent ce jour-là.
Gambetta fut vivement intéressé par les fossiles (il n'en avait
probablement jamais vu auparavant) ; je dois ajouter que nous
insistâmes également sur les abus à réformer, sur ce que les écoles
d'application étaient faites pour instruire les élèves et non pour
loger les fonctionnaires; ce sont là des raisons qui font toujours
impression sur les présidents des commissions du budget. En fin de
compte, Gambetta fut convaincu et il promit tout son appui. L'af-
faire fut engagée de suite et d'une façon singulière : la sous-commis-
sion du budget pour le ministère des Travaux publics proposa, en
1876, d'affecter une somme de 200.000 francs à l'agrandissement
des collections de Paléontologie, et cela sans que l'administration
de l'Ecole eut été préalablement consultée ; uu avis d'urgence lui fut
demandé et c'est alors que l'Ecole déclara que le cadeau qu'on lui
offrait était beaucoup trop beau et qu'une dépense de 80.000 francs
serait parfaitement suffisante : un crédit de pareille somme fut en
effet inscrit au budget de 1877.
Une commission spéciale fut nommée pour dresser un programme
et uu devis détaillés; elle comprenait naturellement le directeur et
l'inspecteur de l'Ecole; elle s'arrêta à une demi-solution et proposa
d'affecter aux collections seulemeut l'appartement de l'inspecteur
(soit une dépense de 143.898 fr. 44). Mais comme l'agrandissement
ainsi réalisé était insuffisant, elle proposait de consacrer une somme
de 43.000 francs à l'installation d'une passerelle qui permettrait
aux collections de s'étendre dans les combles d'un bâtiment voisin.
186 h. nouviLLÉ 0 Avril
En conséquence, un crédit supplémentaire de 107.000 francs fut
voté sur le budget de 1878.
Mais cette solution ne satisfaisait ni Chaper, ni ceux qui, comme
lui, s'intéressaient à l'avenir des collections ; ils estimaient qu'il
était nécessaire de leur attribuer le second étage en entier et l'ap-
partement du directeur aussi bien que celui de l'inspecteur; du
reste le moment était favorable et il était à craindre que pareille
occasion ne se représentât jamais. A la fin de cette même année,
Chaper adressait, à titre privé, un rapport à M. de Freycinet, alors
ministre des Travaux publics; grâce à l'appui de Gambetta, une
nouvelle commission était instituée le 21 octobre 1878 et Chaper
en était nommé secrétaire ; elle devait « étudier les aménagements
» de l'Ecole des Mines et rechercher les moyens d'assurer, dans les
» conditions les moins onéreuses pour le Trésor, la bonne instal-
» lation des divers services de l'Ecole et le développement des
» collections scientifiques qu'elle renferme ». Cette commission
était présidée par Carnot, sous-secrétaire d'Etat.
Chaper, obligé de partir en mission, ne put remplir jusqu'au
bout ses fonctions de secrétaire et fut remplacé par Béral ; la com-
mission reconnut bien vite que la solutiou défendue par notre
confrère était la seule acceptable et que les convenances person-
nelles du directeur devaient céder à l'intérêt général. Le directeur
de l'Ecole (c'était Daubrée) dut s'incliner devant cette décision et
abandonner son appartement. Chaper avait gain de cause et c'est
certainement grâce à ses efforts persévérants et désintéressés que
la collection de Paléontologie de l'Ecole des Mines a pu prendre
tout le développement qu'elle présente aujourd'hui.
Aussitôt après l'acquisition de la collection Deshayes, les fonda-
teurs et organisateurs de la collectiou, Bayle et Bayan, avaient formé
le projet de constituer une collection rangée zoologiquement et
dans laquelle toutes les espèces pourraient être exposées. L'inter-
vention de Chaper a permis la réalisation complète de ce projet :
aujourd'hui, le rangement de la collection est à peu près terminé
et il est devenu possible d'embrasser d'un coup d'œil les modifica-
tions que chaque groupe d'animaux (1) a éprouvées pendant la
succession des temps géologiques, sous la réserve, bien entendu,
des nombreuses lacunes que présentent toutes les collections, même
les plus riches. Par son mode de classement, par le groupement des
formes vivantes avec les formes fossiles, cette collection constitue
(1) Il n'est question ici que des Invertébrés et principalement des Mollusques,
des Bracbiopodes et des Ecbinides.
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 187
un ensemble unique et un instrument de travail d'une grande
valeur.
Parmi les services que sont appelées à rendre les grandes collec-
tions publiques, il en est un qui avait principalement attiré
l'attention de notre confrère, je veux parler de la sauvegarde et de
l'exposition des types décrits et figurés. Toujours préoccupé de la
précision à donner à la définition des genres et des espèces, il avait
rencontré bien souvent dans ses recherches, des descriptions incom-
plètes et des figures insuffisantes ; de là des difficultés presqu'insur-
montables lorsqu'il n'est pas possible de recourir à l'examen du
type lui-môme. Ces recherches sont grandement facilitées lorsque
ces types sont exposés dans une grande collection publique et en
même temps ils échappent à bien des causes de destruction aux-
quelles ils sont exposés dans la plupart des collections particu-
lières. A ce point de vue, Chapera toujours prêché d'exemple, et
tandis que beaucoup d'auteurs conservent avec un soin jaloux les
échantillons qu'ils ont particulièrement décrits et figurés, Chaper,
au contraire, s'est toujours empressé de les déposer dans les collec-
tions de l'Ecole des Mines, à la seule condition qu'ils fussent expo-
sés et qu'il fût loisible à tous de venir contrôler ses descriptions et
ses déterminations.
En 1893 le Muséum organisait une exposition générale des échan-
tillons de tout genre que Chaper avait rapportés de son voyage et
qui, pour la plus grande partie, étaient venus enrichir les grandes
collections publiques. A la suite de celte exposition, Chaper recevait
la croix de la Légion d'honneur, juste récompense d'une vie toute
de dévouement aux intérêts de la science.
Les questions coloniales avaient pour lui un intérêt parti-
culier et il joua un rôle important dans l'organisation de l'Ecole
coloniale; il faisait partie du comité permanent des travaux publics
des colonies, et c'est en cette qualité qu'il fut chargé en 1895, par
le ministre des colonies, d'aller étudier le chemin de fer de Saint-
Louis à Dakar, à la suite d'un différend survenu entre l'Etat et la
Compagnie.
L'année suivante il partit au mois de juin pour aller reconnaître
un gisement aurifère à Mûhlbach,en Transylvanie; son exploration
était à peu près terminée et il se disposait à rentrer en France
lorsqu'il fut pris d'un violent accès de fièvre à la suite d'un refroi-
dissement. Ses compagnons de voyage purent le ramener à Vienne,
où les médecins reconnurent l'existence d'une double pneumonie
grave. Quelques jours après, le 5 juillet, le malade se sentait mieux
188 h. Douvnxtf 6 Avril
et exprimait l'intention de partir le soir même pour Paris pour
rejoindre les siens; il s'endormit avec cette pensée et s'éteignit
dans ce dernier sommeil sans souffrance et sans agonie : mort douce
et enviable s'il en fut, mais qui vint frapper, comme d'un coup de
foudre, cette noble famille dont il était le chef aimé et respecté.
Pour tous ceux qui l'ont connu, Chaper fut ce qu'on appelle un
caractère ; il croyait à son opinion et s'y tenait ; ce qu'il pensait, il
le disait, peut-être trop franchement et sans observer tous les
ménagements d'usage. Enfin, qualité bien précieuse et bien rare,
c'était un homme d'action, toujours calme et réfléchi, mais qui
n'hésitait pas à agir pour réaliser ce qu'il avait jugé juste et bon.
Pendant la guerre, au milieu des éléments de désordre dont il
était entouré, il a eu le courage civil, plus difficile à pratiquer que
le courage militaire. Dans ses voyages lointains il s'est toujours
dévoua aux intérêts de la science et, quelque dure que fut l'étape,
il a bion souvent pris sur son sommeil pour mettre en ordre les
spécimens qu'il avait recueillis. Enfin, lorsqu'il crut que l'intérêt
de la science était en jeu, il s'est mis résolument en avant; c'est
ainsi qu'il put assurer le complet développement des collections de
l'Ecole des Mines. Et tout cela il l'a fait uniquement parce qu'il
croyait que c'était bien.
C'est un noble exemple qu'il nous a paru utile de mettre en
lumière, surtout à notre époque que l'on accuse à tort de tout sacri-
fier aux considérations égoïstes de l'intérêt personnel.
Puisse ce dernier hommage adoucir un peu les regrets de ses
nombreux amis et la douleur d'une famille désolée.
LISTE DES TRAVAUX PUBLIES PAR CHAPER
1868. — Réponse à M. Hébert au su jet des fossiles de la Porte-de-France [H. s'.
G. F., 2* série, t. XXV, p. 692, 18 mai 1868).
1868. — Sur le travail de M. Pictet : Etudes provisoires des fossiles de la Porte-
de-France, d'Aizy et de Leraenc {Ibid., p. 811, 15 juin 1868).
1869. — Observations au sujet de la communication de M. Hébert sur les carac-
tères de la faune de Stramberg (II. S. (i. F., 2- série, t. XX VI, p. 668, 6 mars 1869 .
1870. — Observations au sujet des notes de M. Hébert, insérées dans le précédent
volume du Bulletin {H. S. G. F., 2' série, t. XXVII, p. 429, 7 février 1870).
1871. — Sur la formation des nodules de phosphate de chaux (B. S. G. F.,
2« série, t. XXVIII, p. 75, 10 juillet 1871).
1873. — Observations sur une espèce du genre Plagioptychus (in-4°, 2 pi.).
1899 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR MAURICE CHAPER 189
•
(Etudes faites dans la collection de l'Ecole des Mines sur des fossiles nouveaux ou
mal connus, publiées par F. Bayan, 2* fascicule).
1873. — PUtgioptyehus Cnqvandi {H. S. G. F.,3« série, 1. 1, p. 199, 3 février 1873) .
1874. — Observation sur la Terebratula Repellini {B. S. G. F., 2e série, t. II,
p. 347, 18 mai 1874).
1874. — Sur la fondation du Club alpin français (Ibid., p. 463).
1879. — Notes sur quelques faits observés dans le massif de l'Oural entre le
58* et le 59- degré de latitude Nord (B. S. G. F., 2- série, t. VIII, p. 110, 1er décem-
bre 1879).
1879. — Sur les minéraux trouvés dans les mines de diamant de l'Afrique
australe {Bull. Soc. min. France, Bull. N° 7).
1880. — Note sur la région diamantifère de l'Afrique (Jn-8", 142 p., 4 plans et
8 photo-lithographies. Paris, Masson).
1880. — Présentation du volume précédent (B. S. G. /•'., U IX, p. 8, 8nov. 1880).
1881. — Découverte en Toscane, dans les environs du Monte-Amiala, de la
Dawsonite (hydrocarbonate d'aluminium et de sodium {B. S. miner. Fr , t. IV).
1881 . — Rapport fait à la Société zoologique de France au nom de la Commission
de nomenclature (Bull. Soc. zool. France, séance du 14 juin 1881, imprimé à
part en une plaquette de 37 pages, sous le titre de a Règles applicables à la nomen-
clature des êtres organisés, proposées par la Société zoologique de France).
1882. — Rapport de mission sur l'exploration du territoire d'Assinie (Archives
des missions scientifiques et littéraires).
1883. — Observation d'un cas d'adaptation de certains Poissons à dos eaux de
salures très différentes (Ile de Cuba) (Bull. Sac. zool. Fr.% t. VIII, p. 445).
1884. — Rapport sur les recherches et découvertes faites au cours d'une mission
dans l'intérieur de l'Hindoustan, en 1882.
1884. — Rapport de mission sur l'exploration de la partie Est de l'ile <ie Cuba,
en 1883.
1884. — Découverte du diamant dans une pegmatite de l'Hindoustan (f. H.
le. Se., 14 janvier 1884).
1885. — Description de nouveaux genres et espèces de Mollusques vivants
rapportés d'Assinie, de Madras et du Cap de Bonne-Espérance (Bull. Soc. zool. Fr.t
t. X. p. 42 et 479, pi. 1 et XI).
1885 — Sur la géologie de la colonie française d'Assinie {B. S. G. F., 3e série,
t. XIV, p. 105, 7 décembre 1885).
1886. — Constatation d'un terrain d'origine glaciaire à Assinie (C. R. Ac. Se).
1886. — Pegmatite diamantifère de l'Hindoustan et roches qui l'accompagnent
(B. S. G. F., 3' série, t. XIII, p. 330, 15 février 1886).
1886. — Rapport sur les recherches faites au cours d'une mission au Venezuela
en 1884 (Archives des Missions, t. XIII).
1888. — Note sur les prétendus combustibles minéraux du territoire d'Obokh
(B. S. G. F., 3- série, t. XVI, p. 816).
1888. — Rapport sur ia proposition d'adoption d'une langue scientiûquo inter-
nationale (Bull Soc. zool. Fr., t. XIII, p. 134, 12 juin 1888).
1890. — Deux rapports de la Commission d'études instituée par le liquidateur
de la Compagnie universelle du Canal interocéanique de Panama : VI, Description
géologique des terrains traversés par le canal; — VIII, Examen de divers projets
présentés à la Commission (2 plaquettes in-8a).
1891. — Notes recueillies au cours d'une exploration dans l'Ile de Bornéo (B. S.
G. F.t 3e série, t. XIX, p. 877, 8 juin 1891).
190 DOUV1LLÉ. — NOTICE NÉCROLOGIQUK SUR MAURICE CHAPER () Avril
1891. — Observations à propos d'une note de M. Daubrée sur les mines de
diamant de l'Afrique australe [H. S. G. F., 3« série, t. XIX, p. 943, 4 déc. 1891).
1892. — Les mines de diamant de l'Afrique australe (Conférence faite a l'Asso-
ciation française le 30 janvier 1892).
1892. — Unionidés de Bornéo (en collaboration avec M. Drouet) {Mém. Soc. zool.
Fr.% t. V, p. 145, pi. V et VI).
1892. — Fossilisation du test des Mollusques après séjour dans le tube digestif
(B. S. G. F., 3' série, t. XX, p. 114).
1893. — Note sur un gîte cuivreux d'origine volcanique du Caucase méridional
(Congrès des Sociétés savantes et /*. S. G. F., 3e série, t. XXI, p. 101).
1894. — Huit cents kilomètres dans l'intérieur de l'Ile de Bornéo (Notes de
voyage avec carte) {Bull. Soc. géogr. commerciale).
1894. — Sur quelques Unionidés de Grèce (Mém. Soc. Zool. Fr.t t. VII, p. 372,
pi. VI et VII).
1899 191
NOTICE BIOGRAPHIQUE
SDH
A. PO M E L
par M. E. FI OBEIR.
En me confiant le soin de retracer la carrière si remarquable de
M. Pomel, le Conseil de la Société Géologique me procure la double
satisfaction de faire revivre cette belle et noble figure, dont la place
est si bien marquée dans nos Annales, et d'apporter mon témoi-
gnage de reconnaissance envers celui qui fut mon maître et qui
m'honora de son affection. C'est pour moi un pieux devoir de
consacrer le souvenir de ce savant émineut et modeste, dont l'exis-
tence, toute de labeur et d'énergique persévérance, offre à uos
yeux un précieux enseignement. Retracer sa vie, c'est faire son
éloge, car rien n'est plus propre à mettre en relief sa haute valeur
que le tableau des vicissitudes multiples et des obstacles qu'il eut
à traverser et dont il sut triompher.
Pomel appartenait à la génération ancienne, dont les représen-
tants se font de plus eu plus rares dans notre Société, à laquelle il
a participé depuis 1844 ; en outre, son indépendance de caractère,
son isolement pendant longtemps en Algérie, ont laissé méconnus
une partie de ses travaux, qu'il importe de mettre en évidence.
Durant sa longue carrière de près de soixante années d'activité
continue, en dépit de péripéties inattendues et écrasantes, la science
a toujours été sa principale préoccupation ; il y consacra tous ses
loisirs, travaillant sans relâche, traçant son sillon sans se laisser
rebuter par les difficultés de toute nature. Une énergie peu com-
mune le lit planer au-dessus d'événements qui en eussent découragé
tant d'autres ; la crise passée, il reprenait sa marche en avant, sans
se détourner du but poursuivi, quelles que fussent les perspectives
passagères du présent. La science, envers lui, ne faillit pas à ses
promesses; il y puisa sans cesse de nouvelles forces et eu recueillit
toutes les intimes satisfactions.
Les infortunes morales qui l'ont poursuivi durant la dernière
période de sa vie, ont pu assombrir son caractère, mais il conser-
192 e. ficheur 6 Avril
vait la force de ne laisser paraître aucune de ses tristesses ; son
entourage seul connaissait ses peines que la plupart de ceux qui
l'ont fréquenté n'out même pas soupçonnées.
L'avantage précieux que j'ai eu de vivre à ses côtés pendant près
de quinze ans, suivant jour par jour ses travaux, prenant ma part
des résultats de ses principales recherches, recevant ses impres-
sions, l'accompagnant dans un grand nombre de ses excursions,
m'a laissé, pour l'homme comme pour le savant, une admiration
profonde, dont je tiens à apporter ici hautement le témoignage.
I
Auguste Pomel, né à Issoire le 20 septembre 1821, d'une famille
modeste, se vit de bonne heure attiré vers les Sciences natu-
relles dans cet admirable pays d'Auvergue, qui a fait éclore tant de
vocations pour l'étude de la nature. Durant le cours de ses études
qu'il fit comme externe au Collège de sa ville natale, il commença
à faire de la Botanique, sous l'égide d'un vieux curé collectionneur ;
puis il se trouva en relations avec son compatriote Bravard, dont
les recherches sur les Vertébrés fossiles de la Limagne sont bien
connues. Ses premières courses géologiques, faites sous cette direc-
tion, se continuèrent en 1839 à Clermont, où il étudia la Botanique
et la Géologie sous l'impulsion du savant Clermontois Lecoq. Très
rapidement ses recherches prireut un caractère original et, en 1840,
à peine âgé de 19 ans, Pomel rédigeait son premier mémoire sous
le titre de : Essai de coordination des terrains tertiaires du département
du Puy-de-Dôme avec ceux du Nord de la France, qui parut en 1842
dans les Annales scientifiques de l'Auvergne.
Ces premières recherches fructueuses furent brusquement in ter.
rompues par le service militaire : Auguste Pomel, tombé au sort,
sans fortune, dans l'impossibilité de se faire remplacer, était incor-
poré pour sept ans et, grâce à de favorables influences, heureuse-
ment désigné pour le 2e bataillon de chasseurs d'Orléans, en garni-
son à Viucennes (1842). Au bout de peu de temps, le sergent Pomel
put obtenir de ses chefs les permissions nécessaires pour se rendre
journellement à Paris, au Muséum, où, sous l'obligeante direction
de Laurillard, il se consacra à une étude approfondie de l'Ostéologie
comparée et des Vertébrés fossiles alors connus.
Cette période, de 1843 à 1844, fut Tune des plus fructueuses pour
ses études ; Pomel se plaisait à ajouter, en se remémorant ces
souvenirs : « J'avais alors le gîte et le couvert assurés par le gou-
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 193
vernement et la liberté pour mon travail ». 11 put aiosi étudier les
matériaux déjà recueillis par lui en Auvergne et donner la descrip-
tion de trois espèces de carnassiers fossiles : Felis cultridens, Canis
mcgamastaides, Luira Bravardi, dans le Bulletin de la Société
Géologique dont il lut nommé membre, sur la présentation de
MM. Viquesnel et Leblanc, le 18 novembre 1844. Diverses commu-
nications à l'Académie des Sciences sur la Paléontologie de la
Limagne suivirent de près ces premières publications. Au début
de 1845, parut, dans notre Bulletin, une note importante sur
Gergovia, avec la détermination des plantes fossiles recueillies; les
conclusions du jeune géologue sur l'intrusion des coulées de basalte
dans les couches sédimentaires ont reçu une approbation unanime
bien longtemps après, lors de la Réunion extraordinaire de la
Société Géologique en Auvergne en 1870, sous la direction de
M. Michel-Lévy.
Entre temps, Pomel s'occupait de la détermination des végétaux
fossiles découverts dans le calcaire grossier parisien et y rectifiait
une interprétation erronée.
Le brusque changement de garnison de son bataillon, envoyé à
Metz, au commencement de 1845, vint arracher notre sergent aux
avantages de cette situation privilégiée; ce fut pour lui une grosse
déception de quitter Paris et ses travaux pour de longues années.
Mais ses amis ne l'abandonnaient pas ; un beau jour, le Général
Inspecteur, prévenu en sa faveur, lui apporte un congé de six mois,
avec ordre de rentrer à Paris. En même temps, il recevait d'Adolphe
Brongniart une mission pour des études géologiques dans la vallée
de la Moselle et le bassin de Saarbruck ; il en rapporta des docu-
ments intéressants, tant sur la géologie du terrain houillerque sur
quelques gisements de végétaux fossiles, qu'il publia dans le
Bulletin de la Société en 1845-1846.
De retour à Paris, avec un congé qui lui fut renouvelé de six mois
en six mois jusqu'à l'expiration de son service, Pomel se trouva
aux prises avec les nécessités de la vie; il n'avait plus, comme
auparavant, les ressources de la caserne; il dut à la bienveillante
obligeance de Brongniart quelques indemnités pour un travail qui
lui fut confié au Laboratoire de Paléontologie du Muséum : travail
de bénédictin, qui consistait en la rédaction du Catalogue des
Plantes fossiles de la collection, et en réalité dans la revision et la
détermination nouvelle de la grande majorité des espèces, dont les
étiquettes étaient devenues illisibles. Cette situation provisoire
permit à Pomel de continuer ses études paléontologiques sur
9 Juin 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 13
194 e. ficheur 6 Avril
l'Auvergne et de tirer des conclusions très remarquables sur la
répartition des Mammifères de ce pays en trois faunes successives,
correspondant aux trois périodes Miocène, Pliocène et Quaternaire.
11 quitte le Muséum vers la fin de 1845, après s'être vu refuser
une situation de Préparateur, pour entrer à l'Ecole des Mines, où
Dufrénoy l'attacha à l'organisation des Collections paléontologiques.
De cette époque datent ses relations avec Elie de Beaumont, qui ne
tarda pas à le prendre en estime, ainsi que l'attestent des lettres
élogieuses retrouvées çà et là au milieu des notes manuscrites très
considérables laissées par Pomel.U se fit alors recevoir Garde-mines
pour justifier sa nomination de Préparateur à l'Ecole des Mines,
qui lui fut accordée en mai 1846, non sans grandes difficultés, à
cause de son service militaire et grâce aux pressantes instances du
comte Jaubert, Pair de France, botaniste distingué, qui avait pris
en grande considération les travaux du jeune savant.
Pomel avait dès lors une position assurée et tous les loisirs que lui
laissaient ses occupations furent consacrés à l'Anatomie comparée ;
la liste de ses publications paléontologiques dans le cours des
années, 1846, 1847 et 1848, témoigne d'une prodigieuse activité,
dénotant une puissance de travail peu commune ; ses recherches,
d'ordre général, s'attaquent aux questions les plus complexes de
l'anatomie des Vertébrés fossiles ; suivant pas à pas les publications
de l'Ostéographie de Blainville, il présente sur les diverses parties
d'importantes critiques développées dans les Archives scientifiques
de la Bibliothèque universelle de Genève. Les différents groupes des
Vertébrés : Pachydermes, Ongulés, Suillicns, Carnassiers, Insecti-
vores, y sont l'objet d'une revision rigoureuse et d'une classification
basée sur les rapports avec les genres vivants. Ces travaux s'éten-
dent à l'étude comparative des descriptions paléontologiques sur
les Mammifères fossiles de l'Amérique du Nord. A 27 ans, Pomel
s'est ainsi placé en évidence parmi les plus éminents paléontolo-
gistes. Dans quelques courses, il étudie la bordure orientale du
Bassin tertiaire parisien, fait des découvertes heureuses au Mont-
Aimé, d'où il rapporte et décrit en particulier le Gacialis isorhyn-
chus, puis à Sézanne. dans les travertins, dont il détermine une
partie de la flore, signalant entre autres le genre Marchantia.
Une mission lui est confiée par Adolphe Brongniart dans le cours
de l'année 1847 pour estimer et cataloguer la collection de plantes
fossiles houillères d'Eschweiler, de M. Grœsen, collection qui fut,
à la suite de sou rapport, acquise par l'Etat pour le Muséum et
l'Ecole des Mines. Pomel profite de ce voyage pour se rendre au
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 195
Congrès des Naturalistes allemands d'Aix-la-Chapelle (septembre
1847) et en rapporte des documents sur le terrain crétacé d'Aix et
de Maastricht, publiés dans notre Bulletin (1848).
A la lin de 1848, envoyé à Rennes comme garde-mines, pour un
service ordinaire, Pomel refusa d'accepter ce changement, funeste
à ses études, et préféra quitter sa situation pour rester à Paris
pendant quelque temps; puis il retourna en Auvergne reprendre
avec Bravard, ses recherches sur les ossements fossiles de Périer.
Ses relations avec son premier maître étaient empreintes de la
plus grande cordialité, ainsi qu'en témoignent quelques lettres
conservées de cette époque. Les deux savants étudièrent ensemble
pendant plusieurs mois les gisements de la Débruge et de Cucuron
et donnèrent un catalogue des espèces recueillies, en attendant la
description iconographique qu'ils comptaient publier.
En 1851, chargé d'une mission à l'Exposition de Londres, Pomel
profita de son séjour pour étudier les col lections du British Muséum ;
les indications précieuses qu'il eut l'occasion de donner et la sûreté
de ses déterminations le mirent en relief à tel point qu'on lui fit
l'oflre d'une situation avantageuse qu'il refusa par chauvinisme,
étant loin de prévoir que quelques mois plus tard il serait contraint
de quitter la France.
Le coup d'Etat du 2 décembre 1851 vint briser la carrière de
Pomel ; il se trouvait à Saint-Gérand-le-Puy, fouillant le gisement
de Vertébrés, lorsqu'il fut avisé que la gendarmerie était à sa
recherche. Son esprit indépendant, sa franchise souvent brutale,
ses idées de libre-penseur lui avaient attiré des rancunes et des
haines impitoyables. En parcourant ses montagnes, il trouvait
80 u vent l'occasion de donner, çà et là, quelques conseils médicaux,
que les paysans recherchaient de cet original qui connaissait si
bien les plantes et les remèdes simples; sa loyauté l'avait entraîné
à redresser, peut-être un peu trop vertement, la funeste maladresse
et l'ignorance d'un médecin de campagne qui ne le lui pardonna pas.
Les délations sur son compte furent d'autant mieux accueillies,
que ses relations d'iutimité avec Bravard, ardent républicain, non
moins que ses propres opinions politiques, suffisaient déjà à le
rendre suspect. On lui attribua la paternité d'un pamphlet qu'il
n'avait pas même lu, et il fut frappé de proscription avec son maître
et ami Bravard, qui fut déporté à Cayenne. Pomel put se soustraire
heureusement à l'arrestation, en se cachant chez un ami, dans les
environs de Saint- Nectaire, où il fut obligé de se réfugier dans des
grottes pendant les perquisitions domiciliaires faites à sa recherche.
196 e. ficheur 6 Avril
Pendant ce temps, l'intervention d'Elie de Beaumont et d'autres
personnages influents obtint pour lui une commutation de peine et
il fut interné en Algérie, où il arriva à Oran le 25 octobre 1852.
Quelle ne dut pas être l'amertume du savant, ainsi brusquement
chassé, éloigné de tout centre intellectuel, séparé de ses matériaux
de travail, au moment où son avenir scientifique se dessinait d'une
manière aussi brillante, et quel courage ne lui fallut-il pas pour
réagir et dominer cette crise, sans ressources, avec deux enfants en
bas-âge I Contraint d'abandonner les matériaux qu'il avait réunis
et dont il se préparait à publier une iconographie détaillée, pré-
voyant l'impossibilité de pouvoir jamais reprendre ce travail, il
trouva l'énergie de rédiger à la hâte son Catalogue méthodique et
descriptif des Vertébrés fossiles du bassin de la Loire et de l'Allier.
Cet important résumé a fixé une date mémorable dans l'histoire
paléontologique de la région, et malgré sa concision, qu'expliquent
les circonstances de la rédaction, ce travail a servi de guide et de
base aux travaux ultérieurs. Ce mémoire fut couronné par l'Aca-
démie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Clermont-Ferrand,
dans sa séance de novembre 1S52, comme un hommage à l'exilé,
qui s'éloignait pour toujours de ses montagnes, si chères au cœur
de tous les enfants de ce beau pays.
Aux environs d'Oran, Pomel s'installa près de son père, venu
comme colon à Saint-Louis en 1848, et essaya de la colonisation.
Mais il lui manquait l'essentiel, l'argent nécessaire pour mener à
bien les tentatives d'introduction de nouvelles cultures, entre
autres le coton ; aussi, après quelques essais infructueux, il dut
y renoncer et se mettre au service d'une Compagnie de mines, à
Garrouban, sur la frontière du Maroc. De 1854 à 1856, d'abord
comme ingénieur, puis comme directeur, il fut occupé aux travaux
de recherches industrielles, consacrant tous ses loisirs à la Géologie
et à la Botanique autant que le lui permettait l'insécurité du pays,
et cherchant, par quelques communications à l'Académie des
Sciences et à la Société géologique, à ne pas se laisser oublier. La
situation qu'il avait été contraint d'accepter dans une Société « dont
les projets lui paraissaient suspects », dit-il, n'était pas sans lui
procurer d'amers déboires, et Pomel ne songeait qu'à la possibilité
de quitter ce milieu qui lui répugnait. Les instances d'Elie de
Beaumont obtinrent sa réintégration dans le Service des Mines, en
qualité de garde-mines à Miliana, en octobre 1856.
Dans ces conditions, Pomel fut chargé de l'étude géologique de
la circonscription de Miliana, qu'il poursuivit jusqu'en 1859. Tou-
1899 .NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 197
jours soumis à la surveillance de la police jusqu'à l'amnistie de
1839, il recevait chaque mois la visite du commissaire, qui ne cher-
chait, nous disait-il en riant, qu'à donner à sa démarche une allure
de respectueuse déférence.
Ses premières recherches sur la région vinrent lui fournir des
observations précieuses sur la division des terrains miocènes en
trois étages ; il en développa les déductions les plus importantes
dans plusieurs communications, présentées par Elie de Beaumont
à l'Académie des Sciences. Dans les travertins de Miliana il signale
la présence de plusieurs espèces actuelles : Ficus carica, Hedera
hélix et Vitis vinifera. Toutes les tournées géologiques étaient pour
Pomel l'occasion d'observations botaniques, et il continuait à
amasser, tant dans sa circonscription que dans les différentes
régions qu'il traversait, des documents qu'il devait utiliser plus
tard. C'est vers cette époque que, chargé d'une mission au Djebel
Amour, il en rapporta des renseignements précieux sur cette région
à peine entrevue. Les conceptions nouvelles de Pomel sur la classi-
fication des terrains tertiaires, contraires aux idées admises par
l'ingénieur en chef Ville, amenèrent des discussions et un désaccord
qui se termina par son déplacement de Miliana pour Oran (1859).
Il avait pu terminer, avant son départ, et remettre à son chef la
rédaction delà Description géologique delà circonscription de Miliana,
avec carte géologique au 200.000', qui ne fut publiée qu'en 1872.
Au Service des Mines d'Oran, il fut spécialement chargé de l'étude
géologique des arrondissements de Mostaganem et de Mascara,
qu'il poursuivit pendant plusieurs années, accumulant des docu-
ments très complets sur les terrains tertiaires, dont les riches
gisements fossilifères lui fournirent des matériaux considérables,
réunis à la collection des Mines, où il organisa un laboratoire
paléontologique. Parfaitement secondé par M. Rocard, ingénieur
en chef de la province, qui le tenait en grande estime, il entreprit
le vaste projet d'une publication de la paléontologie oranaise, dans
des conditions rendues difficiles, tant parl'éloiguement des centres
scientifiques que par la privation des éléments de comparaison
qu'il dut se constituer peu à peu. L'activité et l'énergie de Pomel
surmontèrent les difficultés; il fut aidé par sa fille aînée, Augusta,
qui devint Madame Lioult, femme d'une rare intelligence et d'un
talent artistique d'une grande finesse, qui dessina et lithographia
les pièces les plus diverses et les plus délicates des Invertébrés
fossiles, Spongiaires, Echinodermes, Bryozoaires, Ammonites, don-
nant lieu à l'exécution de plus de 150 planches in-4°, entièrement
préparées de sa main, de 1863 à 1869.
198 e. picheur 6 Avril
Durant cette période, Pomel entremêlait l'étude de ses fossiles
de nombreuses explorations; il eut l'avantage en 1862 d'être attaché,
comme naturaliste, à l'expédition Colonieu, à Ouargla, dont il
eut même à lever le plan. Ce voyage d'exploration par Geryville,
Laghouat et Metlili lui procura d'importantes observations de tout
ordre qu'il mit plus tard en évidence dans sa publication sur le
Sahara (1872). C'est de cette époque que datent ses relations avec
M. Pouyanne, alors ingénieur à Tlemcen, relations qui aboutirent
à leur précieux accord comme Directeurs du Service géologique.
En 1864, un malheureux accident survenu dans une course,
entorse et fracture du pied, vint interrompre pendant plus de deux
ans ses explorations. Pomel profita de ses loisirs forcés pour se
consacrer entièrement à l'élaboration desr matériaux accumulés et
à leur description, passant en revue les divers groupes d'Invertébrés
avec une étonnante sagacité. En même temps, il continuait la mise
en œuvre de son herbier, reconnaissant et signalant un nombre
considérable de genres et d'espèces nouvelles, dont il avait donné
une première indication dans les matériaux pour la flore atlantique
(1861).
La participation de Pomel à l'Exposition de 1867 où il exposa
ses belles séries d'Echinides tertiaires, lui permit de faire un voyage
à Paris et de revivre ses souvenirs paléontologiques en trouvant
matière à une note sur le Myomorphu* cubensis, dans des pièces
fossiles envoyées de Cuba. Il publia également vers cette époque
(1868), une classification nouvelle des Echinodermes, servant de base
à la description des fossiles dont il préparait les planches.
Passionnément attaché à cette Algérie qui, après l'avoir assez mal
accueilli, s'était emparée de lui, comme de la plupart de ceux qui
trouvent dans son habitat, outre les agréments du climat, l'attrait
d'études nouvelles et captivantes, Auguste Pomel s'était adonné à
toutes les questions que sa belle intelligence et ses vastes connais-
sances lui permettaient de traiter, et prêtait son concours au déve-
loppement vital du pays. Il s'était attiré, de ce fait, par les services
rendus, une juste considération. Aussi l'on n'est pas étonné de le
voir, au lendemain du 4 septembre 1870, qui fut marqué à Oran
par une crise violente, désigné par le vœu de ses concitoyens pour
faire partie de la Commission municipale qui prit en mains les
affaires de la ville. Ses qualités d'administrateur le font envoyer au
Conseil général d'Oran, dont il ne tarde pas à être nommé Président.
Délégué au Conseil supérieur de l'Algérie, durant cette période de
réorganisation qui a été le début de la phase la plus féconde en
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 199
heureux résultats, il sut défendre, avec une compétence fort appré-
ciée, les intérêts de son département. Ses concitoyens lui témoi-
gnèrent leur confiance en l'envoyant siéger au Sénat, à la première
élection en 1876. Dans l'intervalle, il avait été délégué à l'Exposition
de Vienne (1874) pour l'organisation de la section algérienne.
Durant cette période de sa vie politique jusqu'à la fin de son mandat
de sénateur en 1881, il consacra une grande part de son activité au
développement de la province d'Oran, qui prit son remarquable
essor agricole et commercial. Les connaissances géologiques de
Porael trouvèrent plus d'une fois leur application dans le choix de
l'emplacement des centres nouveaux, pour lesquels les conditions
d'hygiène et d'alimentation en eau n'étaient pas toujours rigoureu-
sement observées. Son rôle dans la province d'Oran a été particu-
lièrement apprécié et fructueux pour la prospérité du pays.
Malgré ces préoccupations de nature à le détourner de la science,
cette période n'en fut pas moins féconde en publications impor-
tantes. C'est d'abord la Description géologique du massif de Miliana,
publiée dans le Bulletin de la Société de Climatologie d'Alger, puis
le 1er fascicule des Mémoires paléontologiques, comprenant les
Spongiaires. Ensuite vint son Etude sur le Sahara, œuvre de haute
valeur, dans laquelle Pomel établit d'une façon magistrale la géolo-
gie du Sahara, en rectifiant les idées erronées sur la géographie
physique du pays et discutant, pour répondre au désir exprimé par
Edouard Lartet, les questions relatives à l'hypothèse d'une mer
saharienne à l'époque quaternaire. Cette fameuse question de la mer
saharienne fut aussi l'objet de diverses notes à l'Académie des
sciences en 1874-1875. C'est encore vers cette époque que Pomel
publia, dans le Bulletin de la Société de Climatologie d'Alger, deux
fascicules des Nouveaux matériaux pour la flore atlantique, renfer-
mant les diagnoses succinctes des nombreuses espèces et genres
créés d'après ses collections et recherches personnelles.
La constatation par les travaux géodésiques du commandant
Roudaire, de l'altitude négative des chotts constantinois, avait
soulevé de gigantesques projets de mer intérieure, auxquels l'in-
fluence toute puissante de Ferdinand de Lesseps prêtait l'appui de
son autorité, malgré les idées contraires nettement émises par les
divers savants consultés sur les conséquences plus que douteuses
de cette colossale entreprise. Pomel revint sur cette question et
exposa, dans un résumé d'une remarquable précision, « l'état actuel
de nos connaissances sur la géologie du Soudan, de la Guinée, de
la Sénégambie et du Sahara » au congrès de l'Association française
200 e. ficheur 6 Avril
à Clermont-Ferrand en 1876. Puis il demanda au ministre de l'Ins-
truction publique, Waddington, une mission pour l'exploration
géologique de la Tunisie, dans le but principal d'étudier les forma-
tions littorales de la côte orientale, le seuil de Gabès et les dépôts
du voisinage des chotts tunisiens.
Cette mission s'effectua heureusement etsansdifficultés en Tunisie,
par suite de la facilité de transport en charrettes, au moins dans
la région des grandes plaines. Durant les mois d'avril-mai 1877,
Pomel put traverser, sans escorte, la région littorale par Sousse,
El Djem et Sfax jusqu'à Gabès, pénétrer dans l'intérieur du Chott
et revenir par Bordj el Hammam, Sfax, Monastir et Tunis. Pomel
se proposait de continuer son exploration par la vallée de la Med-
jerda et de rentrer en Algérie par LeKef et Souk-Ahras, lorsque les
événements du 16 mai 1877, la dissolution de la Chambre, l'obli-
gèrent à renoncer à ce projet pour rentrer en France où « le devoir
l'appelait à son poste ».
Les résultats de cette mission furent présentés dans plusieurs
communications et articles! Association française, congrès du Havre,
1877 ; Bulletin de la Société géologique, 1878) et parurent plus
tard, développés pour la première partie, dans un mémoire impor-
tant qui ne fut publié qu'en 1884, sous le titre de : Géologie de la
côte orientale de la Tunisie et de la Petite-Syrie.
Lorsque le projet Roudaire vint à la tribune du Sénat, Pomel,
malgré l'engouement général et l'appui apporté par la personnalité
de Ferdinand de Lesseps, soutenue par de hautes influences, affirma
sa conviction scientifique et la complète indépendance de son carac-
tère, en combattant le projet de crédits à allouer pour cette étude.
Son opinion eut un certain retentissement et les faits ont prouvé
que son opposition était parfaitement justifiée.
Le séjour de Pomel à Paris, durant son mandat, lui fournit l'oc-
casion de se retremper dans le milieu scientifique et de reprendre
les relations avec ses confrères, dans un cercle assurément bien
changé; Sénateur de la République, après avoir été déporté de
l'Empire, il retrouvait, à 25 années de distance, quelques-uns
de ses amis d'antan, notamment Hébert, avec lequel ses relations
dataient de l'époque où ce dernier commençait à enseigner la Géolo-
gie à l'Ecole normale. Il suivait alors, aussi assidûment que possible,
les séances delà Société géologique; il y fit plusieurs communica-
tions, entre autres sur ses découvertes de Vertébrés quaternaires,
Eléphants, Hippopotames, Rhinocéros, dans la sablière de Ternifine,
dans la plaine d'Eghis. Il fut Vice-président de la Société en 1879,
et membre du Conseil de 1878 à 1881.
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 901
Sa situation de Sénateur lui donna une participation importante
à l'installation de la section algérienne de l'Exposition de 1878.
Lors de l'organisation de l'enseignement supérieur à Alger et de
la création des Ecoles des Sciences et des Lettres en 1880, pour
lesquelles il avait apporté un précieux concours, Pomel fut nommé
professeur de Géologie et Minéralogie, et directeur de l'Ecole des
Sciences. Sa voie était dès lors toute tracée; non seulement sa santé
se ressentait de la rigueur des hivers parisiens, dont 25 années de
séjour en Afrique l'avaient déshabitué, mais surtout il trouvait dans
sa nouvelle situation, si conforme à ses goûts, une excellente occa-
sion de sortir de ce milieu politique dans lequel la rectitude de
son caractère pouvait difficilement accepter les obligations, et il
saisit avec empressement la belle occasion qui lui permettait de
se consacrer uniquement à la science.
En 1881, l'Association française pour l'Avancement des Sciences
tint le premier de ses congrès à Alger, avec une affluence considé-
rable ; les notices sur Alger et l'Algérie, préparées en vue de cette
réunion, renferment des chapitres fort importants sur la zoologie,
la botanique et la géologie de l'Algérie, dans lesquels Pomel expo-
sait avec précision les problèmes à résoudre. La carte géologique
provisoire de l'Algérie, au 800.0006, fut publiée, pour cette circons-
tance, en deux parties ; la province de Constantine fut confiée à
Tissot ; les provinces d'Alger et d'Oran furent réservées à MM. Pomel
et Pouyanne, avec texte explicatif. Cette première carte consacra
l'association de ces deux hommes de haute valeur à une même
œuvre ; elle présentait pour la première fois un caractère d'unifor-
mité et, malgré ses lacunes, elle resta le guide et la base de tous les
travaux ultérieurs.
C'est peu de temps après que les circonstances me conduisirent
à Alger ; ma première visite et mes relations suivantes avec M. Pomel
me laissèrent une impression profonde d'admiration qui n'a fait
que s'accentuer dans le contact journalier que mes fonctions de
Préparateur me donnèreut avec lui.
Pomel avait été placé à la tête de l'Ecole des Sciences d'Alger à
cause de sa valeur incontestable et sans aucun des titres exigés par
les règlements ; le moment était venu de les acquérir. Il obtint la
dispense de la licence et soutint, en novembre 1883, pour le doctorat
es sciences, en Sorbonne, deux thèses, Tune de Paléontologie :
« Classification méthodique et gênera des Echinides vivants et fossiles »,
l'autre de Botanique : « Contribution à V étude des Crucifères ». Ce fut
une séance mémorable, dont les annales de la Sorbonne conservent
202 e. ficheur 6 Avril
le souvenir, que cette soutenance d'un candidat à barbe blanche (il
avait 62 ans) devant un jury composé des vénérables doyens :
Milne-Edwards, Duchartre, Hébert, tous trois septuagénaires. Ce
fut un triomphe qui dut laisser dans l'esprit de tous les assistants
une inoubliable impression.
Pomel, qui avait été associé, en juillet 1882, à M. Pouyanne, pour
la direction du Service de la Carte géologique dans les provinces
d'Alger et d'Oran, devint plus tard, dans les mêmes conditions,
chargé de l'organisation du Service dans toute l'Algérie, à la mort
de Tissot, en 1884. C'est de cette époque que datent les premières
études détaillées sur les feuilles au 50.0006, qui venaient d'être
publiées en petit nombre et qui parurent progressivement d'année
en année. Pomel donna l'impulsion à ces travaux, recherchant des
collaborateurs, les guidant de ses conseils et de son expérience, les
dirigeant souvent dans les régions difficiles. De divers côtés les
études stratigraphiques furent poussées avec activité ; les résultats
obtenus vinrent parfois à rencontre des opinions émises par le
savant maître, qui s'inclinait, après discussion serrée et examen
approfondi des faits démonstratifs, devant les conclusions nouvelles.
Dans les diverses régions encore délaissées il eut pour préoccupa-
tion primordiale de combler les lacunes de la carte générale ; les
collaborateurs, guidés et encouragés, se mirent à l'œuvre : une
école de géologues algériens se créa ainsi sous sa direction ; si
quelques dissidents, à la suite d'observations trop rapides et forcé-
ment incomplètes, ont pu se croire autorisés à exprimer avec trop
de précipitation une opinion contraire à celle qui était professée,
nous avons le droit d'affirmer que les recherches approfondies et
détaillées ont donné la plus complète sanction aux grandes divisions
stratigraphiques établies par le maître.
Pomel prenait sa grande part des travaux de rectification de la
carte et nous avons eu le précieux avantage de l'accompagner dans
quelques-unes de ses principales excursions durant les années 1884
à 18S6, tant dans la province d'Oran que dans celle de Constantine.
Dans tous les conseils et les renseignements qu'il fournissait à
chacun avec la plus entière libéralité, sans arrière-pensée, Pomel
n'avait d'autre préoccupation que de pousser à la recherche des
faits nouveaux, signalant les points importants qu'un passage rapide
lui avait fait seulement entrevoir. Tous ceux qui ont recours à ses
profondes connaissances peuvent témoigner de son désintéresse-
ment à cet égard. Sa mémoire vraiment prodigieuse lui permettait
de préciser, dans les plus petits détails, les différentes particularités
4899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 203
observées et les localités où il avait recueilli soit un fossile, soit une
plante. En voyage, il se montrait d'une extrême simplicité, accep-
tant toujours d'excellente humeur les conditions les plus difficiles
des courses en Algérie : les mauvais prîtes, les difficultés de trans-
port, les couchers sous la tente, rien ne l'inquiétait : aucune compli-
cation ne pouvait entraver une course projetée. En 1885. dans le
voyage que nous fîmes ensemble à Tébessa, dans les conditions pré-
caires et inconfortables de transport de cette époque, il résista
admirablement aux fatigues de toute nature, me donnant l'exemple
de l'endurance et de l'entraînement. En 1890, Pomel avait alors
69 ans, il nous arriva, durant une longue course sur le plateau du
Sersou, de coucher sous la tente arabe, ce qui lui procura une nou-
velle occasion de rappeler les souvenirs de ses tribulations passées,
les insolations, les accès de fièvre, et de renouveler ses conseils
de prudence qui m'ont été si précieux.
Durant cette période, Pomel publiait son mémoire sur la Géologie
de la côte orientale de la Tunisie, dans le Bulletin de l'Ecole des
Sciences d'Alger, qu'il avait créé pour en faire une publication
utile par ses applications à l'Afrique du Nord, et qui, malheureu-
sement, fut arrêtée à son début faute de crédits.
Puis il fit paraître deux fascicules importants sur les Echino-
dermes, le premier renfermant un atlas de 78 planches destinées
antérieurement par sa fille, le second, la description des espèces
d'Echinides tertiaires, dont l'iconographie n'avait pu être entiè-
rement terminée, et qui comprenait les espèces nouvellement
recueillies; ensuite vinrent une notice avec trois planches sur les
Echinides du Kef ïghoud et diverses notes sur les Echinides dans
le Bulletin de la Société géologique et dans les Comptes-rendus de
l'Institut.
En 1888, à la recherche de documents sur les Vertébrés quater-
naires de l'Afrique du Nord, Pomel fit plusieurs voyages successifs
en Tunisie, sur des renseignements fournis à Souk-Ahras, où il
venait d'étudier la question des phosphates récemment signalés.
Le congrès de l'Association française à Oran, en 1888, lui donna
l'occasion d'exposer ses idées sur les terrains éocènes, à la section
de Géologie dont il était président ; dans le cours de la réunion et,
après la clôture, il eut la satisfaction de diriger quelques excursions
dans la région qu'il connaissait si bien.
La deuxième édition de la carte géologique provisoire de l'Algé-
rie, en 1889, permit aux directeurs de présenter la première carte
unifiée, avec les subdivisions nouvellement reconnues. Pomel donna,
204 e. ficheur 6 Avril
dans la Description stratigraphique de l'Algérie, un aperçu aussi
complet que possible de la classification des terrains sédimentaires
reconnus en Algérie, en indiquant l'extension des divers étages,
montrant les progrès réalisés et indiquant les lacunes à combler et
les problèmes à élucider.
Le 23 décembre 1889, Auguste Pomel était élu, par 32 voix sur
37 votants, membre correspondant de l'Académie des Sciences pour
la section de Minéralogie. Cette sanction justifiée de ses remar-
quables travaux venait en quelque sorte marquer l'apogée de sa
carrière scientifique. Lors de l'inauguration du Palais des Ecoles
d'enseignement supérieur d'Alger, en avril 1887, M. Berthelot,
ministre de l'Instruction publique, apportait à Pomel la croix de la
Légion d'honneur, que ce dernier n'avait ni souhaitée, ni sollicitée,
et dont il remercia son ancien collègue en quelques paroles simples
qui ne ressentaient en rien la raideur officielle.
En 1891, atteint par la limite d'âge, Pomel fut admis à la retraite
et nommé Directeur et Professeur honoraire de l'Ecole des Sciences.
Il continua comme parle passé ses travaux au laboratoire de Géolo-
gie, dont rien n'était changé, où ses collections, sa bibliothèque
étaient installées; j'eus la profonde satisfaction, après avoir été
favorisé de l'honneur de lui succéder dans la chaire de Géologie, de
le voir reprendre journellement le chemin de l'Ecole, poursuivant
ses recherches et me communiquant ses impressions sur ses
découvertes et ses déterminations. Les relations affectueuses dont
il m'honorait furent pour moi le plus précieux stimulant à conti-
nuer son œuvre. De nouveaux collaborateurs, pleins de zèle et
remplis à son égard d'une respectueuse vénération, formèrent
autour de lui un cercle au milieu duquel il aimait à se trouver, en
revivant, dans les conseils prodigués, les phases multiples de son
existence de géologue, qu'il savait émailler d'anecdotes pittoresques.
Tous ceux qui l'ont connu durant cette période ne peuvent oublier
cette belle physionomie, cette tète énergique au regard profond,
qui s'éclairait en présence des jeunes et s'épanchait en une franche
et simple bonhomie, heureux de voir que son œuvre se continuait
et que ses efforts se trouvaient récompensés par une enthousiaste
activité.
Pomel put alors mettre à exécution son projet, longtemps retardé
par les difficultés de mise en œuvre, de la publication des Mono-
graphies rfe Vertébrés quaternaires de l'Algérie; depuis plusieurs
années, il s'occupait activement de réunir les matériaux, étudiant
lui-même les points où des débris d'ossements avaient été signalés
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 205
pour y faire procéder à des fouilles, et accumulait des documents
importants sur l'histoire de la période quaternaire. Aidé par l'habile
talent de M. Ferra nd, qui dessina sur pierre les reproductions de
ses fossiles avec la plus rigoureuse exactitude, il commença en 1893
cette publication par le Bubalus antiquus ; il se reprit d'une passion
nouvelle pour l'anatomie comparée, qu'il avait dû négliger pendant
de si longues années, retrouvant avec une merveilleuse intuition
les caractères les plus fugaces sur des fragments trop souvent
incomplets, dont il savait reconstituer avec une remarquable habi-
leté les parties brisées ou absentes. Il eut souvent la satisfaction
profonde, à la suite de découvertes nouvelles, de voir ses déductions
entièrement confirmées.
Pomel dut se créer un petit musée d'anatomie comparée, en
réunissant à l'Ecole des Sciences les squelettes des types vivants
en Algérie : Mouflons, Antilopes, Caméliens, Bovidés, etc.
Durant cette dernière période de cinq ans il publia successive-
ment treize fascicules de monographies : « le Bubalus antiquus, les
Caméliens et Cervidés, les Bœufs-Taureaux, les Bosélaphes, les
Antilopes, les Eléphants, les Rhinocéros, les Hippopotames, les
Carnassiers, les Porcins, les Equidés, le Singe et l'Homme, les
Ovidés », renfermant un total de 170 planches lithographiées.
La première partie de cette œuvre colossale lui valut de l'Aca-
démie des Sciences une distinction bien méritée dans l'attribution
du prix Petit-d'Ormoy, pou r les Sciences naturelles, en décembre 1895,
sur un rapport élogieux de Daubrée.
En dehors de ces recherches sur la faune quaternaire, l'éminent
savant eut encore à étudier les débris de Reptiles provenant des
phosphates de Tébessa, dans lesquels il reconnut un représentant
d'une famille signalée dans l'Eocène des environs de Reims et aux
Etats-Unis, le Dyrosaurus thevestensis. L'un de ses derniers fasci-
cules comportait l'étude des débris humains recueillis dans les
grottes et dépôts quaternaires, contemporains des artistes préhisto-
riques qui avaient figuré, dans les dessins rupestres du Sud-Oranais.
les figures d'un grand nombre d'espèces retrouvées à l'état fossile.
D'autres fascicules étaient en préparation, concernant les débris
délicats de Rongeurs, recueillis en abondance dans les poches à
phosphorites des environs de Nédroma ; quelques espèces avaient
été sommairement signalées et Pomel pensait pouvoir conduire à
bonne fin cette dernière partie quand il se sentit terrassé par la
fatigue et contraint de tout abandonner après la terminaison du
fascicule des Ovidés.
206 e. ficheur 6 Avril
Ses dernières années avaient été douloureusement marquées par
de violentes commotious : sa fille aînée, Augusta, qu'il avait associée
à ses travaux par le concours de son talent artistique, frappée à la
mort de son mari d'une paralysie cérébrale, traîna pendant dix ans
une existence pénible, douloureuse pour les siens et pour son
pauvre père, qui éprouva un violent chagrin de sa perte. Entouré
des soins affectueux et des prévenances de sa fille cadette et de ses
deux petites filles, qui s'efforçaient, par leur tendresse, de lui faire
oublier ses amertumes, il goûtait enfin le calme et le repos bien
mérités. La séparation causée par le mariage de ses petites-filles fut
eucore pour lui une dure épreuve, dont toute sa résignation appa-
rente n'empêchait pas l'effet. Déjà, vers la fin de 1895, il avait été
atteint d'une congestion cérébrale qui l'obligeait à de grands ména-
gements ; l'accumulation des fatigues de toute cette existence si
étrangement mouvementée prit le dessus; la marche lui devint
pénible et ses visites au laboratoire de Géologie de plus en plus
espacées.
Lors de la réunion de la Société géologique en Algérie, en
octobre 1896, malgré son profond désir de se trouver une dernière
fois au milieu de ses confrères, il se vit contraint de renoncer à
cette suprême satisfaction ; il m'en exprimait ses regrets en répon-
dant à mes instances, qu'il voulait encore se ménager quelques
années « pour mènera bonne fin le travail entrepris ». Toute fatigue
pouvait lui être funeste. Dès ce moment, la marche lui devint de
plus en plus difficile et son état ne lui permettait pas de supporter
la moindre locomotion ; la dernière visite qu il nous fit à l'Ecole
date de mai 1897. Ce philosophe envisageait nettement sa position
et sa fin prochaine, laissant seulement entrevoir l'espoir de pouvoir
encore travailler jusqu'au dernier moment. Sa vue s'affaiblissant,
il fut atterré de se voir entravé et brusquement arrêté. Après une
deuxième attaque de congestion qui faillit l'emporter en février 1898,
il se reudit aux sollicitations des siens pour se laisser transporter
à la campagne, à Drà el-Mizan, chez son gendre, M. de Valdan,
administrateur de la commune mixte. Entouré de la tendre solli-
citude de sa lille et pouvant passer ses journées au grand air, ses
derniers mois s'écoulèrent dans une grande tranquillité. Lorsque
j'eus la dernière satisfaction de le voir en juillet dernier, il parut
éprouver une commotion heureuse et témoigna, par une émotion
touchante, l'impression qu'il en ressentait. A peine un mois après,
le 2 août 1898, il s'éteignait doucement, sans souffrance, dans le
calme de la nature. Les obsèques à Drà-el-Mizan furent simples,
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 207
comme cet homme modeste l'eût désiré : l'éloignement d'Alger et
surtout l'absence, en cette saison d'été, du personnel universitaire
et de la plupart de ceux qui l'avaient connu et estimé, ayant empêché
de donner à ses obsèques un caractère plus solennel.
II
La carrière si imprévue dont je viens de retracer les diverses
phases est, sans contredit, l'un des exemples les plus frappants des
résultats obtenus, en dépit des circonstances défavorables, par une
persévérante énergie et une activité de travail peu commune. Cette
ténacité, qui faisait le fond de son caractère et qui est un peu
l'apanage de ses compatriotes d'Auvergne, ne pouvait exclure un
certain entêtement dans les idées qu'il soutenait avec opiniâtreté.
D'un côté, cette disposition s'explique par les conditions dans les-
quelles il a dû se former, par 1 état d'isolement dans lequel il se
trouvait en Algérie, éloigné des discussions qui seules peuvent
modifier les idées, tout en excitant les recherches. Mais il m'est
permis d'affirmer, à moi qui l'ai suivi de si près pendant quinze
ans, que cette tendance autoritaire, en matière scientilique, n'était
qu'apparente, que ce savant admettait comme tout autre la dis-
cussion courtoise, et qu'il cherchait surtout à convaincre en présen-
tant les faits les plus probants.
Doué d'une mémoire prodigieuse et d'une puissance de travail
vraiment étonnante, Pomel a su accumuler en quelques années,
dans les branches si diverses de la Paléontologie, des résultats
nombreux et d'autant plus surprenants qu'il a dû tirer presque tout
de ses propres recherches, privé qu'il était souvent de moyens
d'étude, de livres et surtout de termes de comparaison. Voici, du
reste, comment il débute dans l'un de ses premiers ouvrages de
paléontologie algérienne, dans la préface du volume des Spongiaires :
(( Qu'il nous soit permis de réclamer ici toute l'indulgence des
naturalistes pour les imperfections inévitables d'une publication
faite en Thébaide scientifique et avec des ressources que nous avons
dû organiser nous-mêmes ».
Dans toutes ses œuvres se manifeste cet esprit de patience, de
persévérance, qui lui a permis de mener à bien des travaux ardus
qu'il a plus d'une fois regretté d'avoir entrepris, mais qu'il pour-
suivait sans se laisser arrêter par les difficultés. Cela devait lui être
d'autant plus sensible qu'il avait connu, dans la première partie
308 k. fichkur 6 Avril
de sa carrière, le milieu savant, les grandes collections où le cher-
cheur trouve des guides bienveillants et des encouragements.
Pomel fut surtout un naturaliste de premier ordre; toutes les
branches de l'Histoire naturelle ont été l'objet de ses études. Pour
la paléontologie, qui l'attira le plus spécialement et qui le ressaisit
à nouveau si passionnément vers la fia de sa vie, il suivit toujours le
même principe: l'étude des êtres vivants. C'est ainsi qu'il procéda
pour les Invertébrés, Spongiaires et Echinodermes, à la classification
desquels il apporta de nombreuses et importantes modifications.
C'est peut-être l'exemple unique d'un naturaliste qui, à notre époque
de spécialisation indispensable, ait abordé avec succès les diverses
branches de la Paléontologie et de la Botanique, pour laquelle sa
mémoire fidèle lui conservait avec une précision infinie les carac-
tères distinctifs des espèces. Chacun de ses voyages se jalonnait en
quelque sorte pas à pas, tant par l'observation géologique que par
la récolte de telle ou telle plante, et, bien longtemps après, ses
souvenirs retraçaient dans les détails les plus minimes, les moindres
péripéties de ses excursions.
J'ai dit plus haut sa force de résistance pour ces explorations, si
pénibles et difficiles à tant de points de vue, que comporte l'étude de
l'Algérie, et dont les conditions étaient encore plus primitives au
début de ses recherches. Dans les conditions les plus sommaires où
il avait dû disposer ses éléments de travail, il se pliait à tout et
acceptait les installations les plus rudimentaires, sans attendre une
organisation plus complète pour se mettre à la besogne.
Les vicissitudes de son existence, les contacts de sa vie politique
l'avaient doué d'une philosophie, d'une résignation parfaite aux
événements défavorables, aux déceptions dont il parlait sans
amertume. Ce fut un sage, un homme taillé à l'antique, faisant
simplement son devoir, aimant le travail pour la satisfaction des
résultats et, pardessus tout, l'homme modeste, éloigné du bruit,
ennemi de toute vaine gloriole. Dans les situations élevées, il resta
toujours le même, aussi simple, mais avec la conscience de sa force.
L'Algérie doit reconnaître en lui, non seulement un des plus
illustres savants qui l'honorent, mais aussi l'un de ceux qui ont
donné une bonne part de leur intelligence à son développement.
III
L'œuvre scientifique de Pomel est considérable ; la liste bibliogra-
phique ci-jointe en fait foi : la paléontologie tient la plus large
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 209
place dans cette énumération, mais ses observations géologiques,
pour n'avoir pas toujours reçu le développement qu'elles compor-
taient, n'en out pas moins joué un rôle très important ; de plus, la
Botanique l'a compté parmi ses plus fervents adeptes.
Ses nombreux travaux peuvent se grouper en trois parties : la
première se rapporte à ses dix années d'études en France, de 1841
à 1851 ; la deuxième comprend la période de recherches en Algérie
jusqu'à la création de l'Ecole des Sciences d'Alger en 1880; la
troisième phase correspond à sa situation de directeur de l'Ecole
des Sciences et de la carte géologique.
L'analyse de ses nombreuses publications mériterait de longs
développements; elle doit se résumer dans les appréciations de ses
œuvres principales qui ont été, en majeure partie, la synthèse des
notes disséminées dans divers recueils.
Ses premiers travaux consistent dans l'étude géologique des ter-
rains tertiaires de la Limagne et dans la description des Mammifères
fossiles recueillis par ses soins ou par les recherches de Bravard
dans les départements du Puy-de-Dôme et de l'Allier. La division
rationnelle établie dans ces terrains fut basée pour la première fois
sur la différence des faunes des périodes miocène, pliocène et
quaternaire. Ses études sur l'Auvergne se complétèrent par diverses
déterminations sur les Vertébrés fossiles de la Gironde et par les
fouilles de la Débruge. Pomel se proposait de publier une descrip-
tion iconographique détaillée de ces matériaux dont il dut se
contenter de donner un résumé, sous le titre de : Catalogue métho-
dique et descriptif des Vertébrés fossiles découverts dans le bassiyi
hydrographique supérieur de la Loire et surtout dans la vallée de son
affluent principal l'Allier. Le jugement sur ce travail ne pouvait être
plus justement porté que par réminent maître de la paléontologie
française. M. Albert Gaudry a bien voulu répondre à ma demande
par une appréciation que je ne puis résister au désir de reproduire
en entier :
« Ce travail, bien qu'il ne renferme que 193 pages, me paraît
» l'œuvre la plus importante qu'il ait accomplie. Il renferme, sous
» une forme concise, une multitude d'observations habilement
» dirigées. Pomel a fait connaître un grand nombre de types
» inconnus ou mal déterminés. Encore aujourd'hui il est indispen-
» sable aux Paléontologistes de s'y reporter. Pour les Insectivores
» et les Rongeurs, il a réuni des matériaux précieux; on lui doit
» aussi beaucoup pour les Carnivores et les Ongulés. Je trouve qu'il
» a agi avec sagacité en reconnaissant, dans les Hyœnodon et les
1» Juin 1899. - T. XXVII. Bull. Soc. Gool. Fr. - 14
210 e. ficheur 6 Avril
» Pterodon (Subdidelphes d'Aymard, Créodontes des savants amé-
» ricains) des animaux qui ont conservé quelques souvenirs de
» leurs ancêtres les Marsupiaux. Il a embrassé, en même temps
» que l'étude des Mammifères, celle des Reptiles tertiaires, peu
» examinés avant lui. Mais ce qui rend son ouvrage vraiment
» remarquable, c'est qu'en 1853 il a su établir des liens étroits
» entre la stratigraphie et la paléontologie des Vertébrés. On ne
» peut pas lire sans l'admirer le chapitre intitulé : Remarques
» générales sur les caractères des diverses faunes du Velay et de
» la Limagne, comparées entre elles et avec celles de différentes
» régions. A l'époque où Pomel composa son ouvrage, on s occupait
» peu de suivre les Vertébrés à travers les âges ; on les étudiait
» habilement au point de vue zoologique, mais on n'avait pas
» encore entrepris sur eux des comparaisons chronologiques comme
» d'Orbigny l'avait fait pour les Invertébrés. Pomel a bien mis en
» lumière les différences d'aspect qu'ont présentées les Mammifères :
» à l'époque du gypse de Gargas, à l'époque de la formation des
» terrains lacustres du Velay, de l'Auvergne, de Mayence, à l'époque
» des formations lacustres de Sansan auxquelles il joint celles de
» Montabuzard, distinctes pour lui du lacustre d'Auvergne et les
» dépôts marins des faluns, à l'époque des sables d'Eppelsheim à
» laquelle il rattache celle du Mont Léberon, à l'époque pliocène,
)) enfin à l'époque alluviale (quaternaire). Elève de Laurillard,
)> admirateur de Cuvier, adversaire de Rlainville, il n'a pas été
» porté aux études sur les enchaînements du monde animal, mais
» on peut dire que ses habiles travaux d'analyse ont contribué à
» préparer ces études ».
A ces travaux paléontologiques s'ajoutent les diverses recherches
géologiques qu'il effectua dans la bordure orientale du bassin
parisien, une première détermination de la flore de Sézanne et la
description de la faune du terrain pisolithique, en particulier du
Gavialis isorhynchns, qu'il avait rapporté du Mont-Aimé. Ses travaux
sur les végétaux fossiles du Lias de la Moselle, sur le terrain houiller
de Saarbrùck, sur le bassin crétacé de Maêstricht, témoignent de
sa remarquable aptitude à l'étude des différentes questions qu'il
abordait.
IV
Avec son arrivée en Algérie commence une série d'études nou-
velles sur la géologie régionale, à peine entrevue. La province
d'Oran, par le développement des terrains tertiaires et la pauvreté
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 211
en fossiles des formations antérieures, devait naturellement entraî-
ner Pomel vers l'étude des terrains néogènes. Il ne tarda pas à se
rendre compte de la nécessité d'une classification en plusieurs
étages de ces assises, qui conservent, malgré de nombreuses modi-
fications locales, des faciès assez constants dans l'ensemble pour
chaque formation. Pomel ne tarda pas à constater des faits évidents
de discordance par régression ou érosion entre les diilérents étages.
Pénétré des idées d'Elie de Beaumout, qui furent si longtemps la
base de toutes les discussions stratigraphiques, ayant pu relever un
grand nombre de faits qui militaient en faveur de la théorie des
systèmes de montagnes, il établit dans la série miocène trois
divisions nettement tranchées et séparées par des mouvements
orogéniques, dont la coordination fournissait une application
remarquable des grandes lignes de direction de plissement. C'est
principalement dans ses études sur la circonscription de Miliana et
dans le bassin du Chélif, qu'il acquiert la confirmation, basée sur
un nombre considérable d'observations, de ses conclusions. Il n'était
guère possible alors de chercher à préciser la comparaison avec les
terrains tertiaires de la France, dont la classification a été soumise
depuis encore à des vicissitudes multiples. C'est surtout avec les
divisions établies par Pareto, en Italie, que l'auteur chercha les
termes de comparaison, qui purent l'amener à commettre des
erreurs inévitables.
La division établie par Pomel en 1858 pour les terrains miocènes
de l'Algérie, a été confirmée par toutes les études détaillées com-
plètes ; on ne saurait se refuser à reconnaître l'importance des
déductions appuyées sur une théorie, aujourd'hui délaissée, en
constatant la consécration récente de ces conclusions par la paléon-
tologie. Les terrains miocènes de l'Algérie occidentale présentent
des modifications locales de faciès qui ont pu prêter à confusion
pour une attribution rigoureuse, principalement en ce qui concerne
les faciès récifal ou littoral à lithothamnium ; les études de détail
ont pu amener quelques changements, mais ce ne sont là que des
questions locales, dont Pomel a, du reste, dans ses plus récentes
publications, établi la rectification. Les grands jalons posés par sa
classification subsistent intacts.
C'est principalement dans la Description géologique du massif de
Milianah que Pomel a développé ses idées sur ce sujet, mais chacune
de ses publications ultérieures porte l'empreinte de nouvelles
preuves à l'appui, notamment après ses études sur le Dahra. Dans la
Description stratigraphique générale de 1889, il précise le plus nette-
212 e. ficheur 6 Avril
ment les caractères des différents étages, auxquels il donne l'impor-
tance d'un groupe ; les termes de Cartennien, Helvétien, Sahélien
sont suffisamment appuyés sur des documents de toute nature pour
obtenir une juste sanction. Le Cartennien, en particulier, occupe
une place spéciale et il est regrettable que cette désignation d'étage,
si nettement défini, n'ait pas reçu une consécration définitive en
prenant place dans la série stratigraphique française. Le terme
d'Helvétien peut donner lieu à contestation puisqu'il parait com-
prendre l'ensemble des assises correspondant à l'Helvétien propre-
ment dit et au Tortonien, ou bien, comme l'a montré M. Brives,
d'accord avec M. Depéret, au deuxième étage méditerranéen. Quant
au nom de Sahélien, qui a donné lieu à de nombreuses critiques, il
paraît devoir se paralléliser avec les formations désignées sous le
nom d'étage pontien.
La description du massif de Milianah renferme, en outre, quantité
de faits importants concernant les formations quaternaires et les
terrains volcaniques de la région.
Le Sahara, publié en 1872, est une œuvre remarquable, dont
l'éloge a été unanimement fait, même par les contradicteurs du
maître. Pomel, mettant à profit les observations recueillies dans le
cours de son voyage de 1862 et les documents fournis par les explo-
rateurs, présente un aperçu géographique des plus précis sur les
différentes parties du Sahara, les bassius des Chotts, la Hamada et
l'Erg, et fait justice des fausses conceptions répandues sur l'exten-
sion des dunes et leur infertilité complète, il attribue les véritables
causes de la stérilité à la sécheresse et à la nudité de la Hamada.
La partie géologique expose avec une grande clarté l'état de nos
connaissances sur le Sahara, le Soudan occidental et le massif
atlantique. Pomel montre l'Atlas rattaché à l'Europe par la grande
complexité de sa structure géologique; c'est une partie de l'Europe
séparée de l'Afrique par le Sahara. Au sujet de l'Algérie, il montre
le massif cristallophyllien littoral de l'Edough à la Kabylie et la
Bouzaréa, se prolongeant probablement par des tlots sous-marins
au Cap Chénoua et au Cap Tenès. Les poudingues gris et schistes du
Djebel Kahar sont attribués au Permien, ce qui est conforme à nos
conclusions actuelles. Un des chapitres les plus importants traite
des dépôts marins quaternaires, les plages émergées, dont les
terrasses sont observées à Tripoli, Tunis, la Calle, Philippeville,
d'Alger à Oran, à Tanger et au Cap Blanc ; cette action de faible
relèvement infirmant l'existence de tout phénomène important de
dislocation et de ridement, et réduisant à néant la conception d'un
effondrement récent du détroit de Gibraltar.
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 213
A la bordure du Sahara, Pomel indique les atterrissements
tertiaires fortement relevés (Brézina) et décrit les puissants dépôts
d'alluvions dont l'érosion a donné lieu à ces gours géants; il donne
l'explication de la formation de cette croûte ou carapace calcaire
développée dans le Tell et les Hauts-Plateaux et la surface de la
Hamada. Il signale les recherches à faire, relativement au Chott
Melrir, sur les rapports des dépôts environnants avec les formations
littorales de Gabès, et émet l'opinion de l'existence d'un seuil
crétacé. Pomel expose ses idées sur la formation des dunes et sur
les dépôts de gypse et sel gemme des Chotts, qui ne peuvent être
en aucune façon attribués au retrait d'une mer quaternaire saha-
rienne. D'importants documents sur la faune et la flore accom-
pagnent cette description.
Les hypothèses sur la nature et l'origine des terrains des Chotts
tunisiens furent vérifiées et développées à la suite de sa mission
de 1877, et publiées avec une foule de détails concernant la géologie
du littoral tunisien dans son mémoire de 1884.
La description stratigraphique générale de l'A Igérie de 1889 constitue
un document qui fait époque en établissant l'état des questions
stratigraphiques en Algérie. Pour la première fois, l'échelle com-
plète des terrains sédimentaires est présentée de façon à se mettre
en harmonie avec la classification adoptée en France. Les groupe-
ments des terrains tertiaires y occupent une large place avec un
grand nombre de subdivisions nouvelles. Les terrains anté-juras-
siques ne sont guère que la reproduction de l'exposé de 1881, laissant
toujours les mêmes problèmes à résoudre. La série jurassique y est
subdivisée suivant les étages classiques, mais avec de nombreuses
incertitudes sur la place à donner à certaines assises dans le Juras-
sique supérieur. Les terrains crétacés, bien mieux connus, d'après
les travaux de Coquand, Brossard, M. Péron, y sont classés d'une
façon plus rigoureuse ; Pomel discute la valeur des subdivisions
proposées et conclut à la difficulté de généraliser d'après quelques
points particuliers des mieux favorisés. Les points litigieux y sont
nettement indiqués, dans ce résumé d'un nombre considérable de
faits, dans une description très serrée. Les modifications les plus
considérables apportées par ce travail ont trait à la classification
des terrains éocènes, pour la première fois subdivisés en trois
groupes. L'inférieur^ dont le type le plus complet se trouve carac-
térisé dans la région de Boghari, présente des divisions un peu trop
multipliées, reposant sur les observations de M. Pierredon et qui
concordent très difficilement avec la simplicité de ces formations
214 e. fichbur 6 Avril
dans la province de Constantine. Le groupe de l'Eocène moyen,
dont les assises occupent une zone bien distincte, concentrée dans
la région littorale, a été séparé en plusieurs étages d'après mes
recherches sur le Djurjura ; il en est de môme de l'Eocène supérieur,
à faciès gréseux, divisé en deux étages d'extension différente et de
faciès particulier.
Un nouveau terme dans la série miocène, correspondant à
l'Oligocène, est indiqué par les dépôts marins de la région de
Dellys ; à cette période Pomel rapporte les dépôts continentaux de
la bordure du Sahara et du versant sud des vallées de l'Aurès.
Les dépôts lacustres du bassin de Constantine y sont placés dans
le Miocène moyen (Smendou)et supérieur (argiles à hélices dentées).
Cet important résumé peut paraître d'une lecture assez difficile
pour les géologues peu familiarisés avec les détails de la géographie
de l'Algérie ; on peut faire à son auteur la critique de passer d'une
région à l'autre, dans l'examen des différents étages, d'une manière
assez brusque qui peut dérouter, mais on y trouve accumulées une
quantité considérable d'observations, dont une grande partie entiè-
rement inédites, résultat des dernières recherches ou des études
antérieures de Pomel. C'est une synthèse, dans laquelle on regrette
de ne pas trouver de coupes géologiques permettant de fixer les
idées avec plus de précision. Pomel hésitait à donner à la publicité
ces croquis schématiques qu'il livrait si volontiers à ses collabora-
teurs ; il estimait que des coupes forcément incomplètes peuvent
prêter à des interprétations discutables, et comme il n'a pas été en
mesure, faute de bonnes cartes, de relever des profils détaillés, il a
jugé préférable de s'abstenir de toute interprétation de ce genre.
Ses publications sur la Paléontologie algérienne ne comprennent
qu'une partie de l'ensemble du programme que Pomel s'était tracé.
En commençant par les Spongiaires (1866), l'auteur indique son
but de faire connaître les richesses paléontologiques de la province
d'Oran et son intention de passer successivement en revue les diffé-
rents groupes des Invertébrés ; c'est pour ce motif qu'il divise son
travail sur les Zoophytes en cinq fascicules, devant comprendre les
Bryozoaires, les Echinodermes, les Coralliaires, les Foraminifères
et les Spongiaires.
Le fascicule des Spongiaires comporte un fort volume renfermant
la description de 124 espèces du groupe des Pétrospongiaires du
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 215
Miocène inférieur (Cartennien), appuyée sur les figures de 36 plan-
ches dessinées par Mlle Augusta Pomel. Cette importante série,
recueillie pour la presque totalité au Djebel Djambeida,près Cher-
cbell, constitue une faune « très analogue à celle des terrains
» crétacés moyen et supérieur, mais qui a également des caractères
» propres. Un géologue, peu familiarisé avec le faciès lithologique
» algérien, tombant sur un pareil gisement, n'eut pas hésité à se
» déclarer en plein Crétacé ».
Ce travail entraîna Pomel à des recherches considérables sur la
classification des Spongiaires; il s'exprime ainsi à ce sujet : « Si
» d'un côté, j'ai été favorisé par mon séjour sur une côte méditer-
» ranéenne très riche qui m'a permis d'étudier sur le vif de nom-
» breuses espèces, j'ai eu, d'autre part, à regretter la privation des
» matériaux considérables des bibliothèques et des grandes collec-
» tions de la métropole, que des visites trop rapides ont fait passer
» comme des silhouettes devant mes yeux. Il est probable que si le
)> géologue paléontologiste n'eût pas engagé l'affaire, le zoologiste
» n'eût pas eu le courage de le faire, en présence des difficultés
» considérables qu'il devait y rencontrer. Ces explications étaient
» nécessaires pour excuser les nombreuses imperfections qui se
» sont dévoilées au cours de la publication » (Spongiaires, page 253).
Pour le fascicule suivant, comprenant les Echinodermes , les
matériaux étaient abondants, en bon état de conservation et don-
naient lieu h des études attrayantes, pour lesquelles Pomel conserva
toujours une vive prédilection. L'auteur en fit une étude générale
et présenta en 1867 une classification dont les caractères importants
sont basés sur la présence ou l'absence des mâchoires et des dents,
impliquant des modifications profondes dans le régime alimentaire.
Les résultats et conclusions en furent développés dans la Classifi-
cation méthodique et gênera des Echinides vivants et fossiles, qui parut
en 1883. Pomel établit deux divisions primordiales : Atélostomes
ou édentés, Gnathostomes ou dentés. La première comprend deux
groupes : les Spatiformes et les Lampadiformes ; la deuxième divi-
sion renferme les Néaréchinides (secondaires, tertiaires et actuels)
avec les deux groupes des Clypeiformes et des Globiformes, et les
Paléchinides (Oursins paléozoïques).
Cette classification sert de préface à la description des Echinides
de l'Algérie, dont Pomel n'a décrit que les fossiles tertiaires, com-
prenant un nombre considérable d'espèces spéciales, dont la
description est appuyée sur une première série de 78 planches
parue en 1885. L'iconographie des espèces non figurées dans ce
216 e. ficheur 6 Avril
travail et dues à des découvertes plus récentes, notamment d'une
remarquable série de Clypéastres, avait été préparée par des
reproductions phototypiques, dont quelques épreuves ont donné
malheureusement de trop mauvais résultats, pour que Pomel se
décidât à les publier. Cette iconographie, complétée par de nouvelles
planches lithographiques, sera terminée par les soins du Service
de la Carte géologique.
Diverses notes sur les Echinides du Kef Ighoud, sur le Thagastea,
etc. ont apporté une nouvelle contribution à l'échinologiealgérienne.
Les Bryozoaires avaient été l'objet de travaux sérieux de la part
de Pomel, qui avait fait lithographier une première série de 16
planches par ses deux filles, Mlle8 Auguste et Pauline Pomel, et que
des circonstances diverses ne lui ont pas permis de continuer.
L'étude des Coralliaires fossiles, également abordée, avait donné
lieu à une première note.
Les Céphalopodes ont également eu leur part de ses recherches :
Pomel nous laisse une description des Céphalopodes néocomiens de
Lamoricière, renfermant une faunule berriasienne, retrouvée à
l'état erratique dans le Néocomieu. Les 14 planches qui accompa-
gnent ce travail ont été dessinées avant 1869.
Il nous reste à parler de l'importante publication des Vertébrés
fossiles quaternaires de l'Algérie. Treize fascicules, dont l'énumé-
ration a été faite ci-dessus, renferment les monographies des grands
Mammifères dont les débris ont été recueillis par les soins de Pomel
et réunis à la collection de l'Ecole des Sciences d'Alger. L'analyse
de ces documents considérables nous entraînerait trop loin; la plus
importante consécration de cette œuvre a été donnée par l'éloge
qui en a été fait à l'Académie des Sciences. Les grands Mammifères,
Eléphants, Rhinocéros, Hippopotames, Buffles, Chameaux, Cerfs,
Antilopes, qui peuplaient le sol de la Berbérie à l'époque préhisto-
rique, sont en majeure partie exhumés dans ce travail qui, outre
l'intérêt de l'anatomie comparée, présente des considérations du
plus haut intérêt sur l'histoire des temps quaternaires. Pomel a eu
soin de faire ressortir, dans l'étude de chaque groupe, les rappro-
chements avec les figures gravées sur les rochers du Sud oranais,
par l'homme contemporain, les dessins rupestres, dont M. Flamand
a rapporté des descriptions et des photographies d'une grande
netteté.
Les différents gisements qui avaient fourni ces matériaux, ne
présentant séparément qu'un petit nombre de types, il restait tou-
jours des doutes sur l'âge relatif des dépôts qui les renfermaient.
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 217
La découverte d'un dépôt ossifère dans les tranchées du chemin de
fer en construction à la Pointe-Pescade, près Alger, en 1894, vint
donner à cette question une heureuse solution. Les travaux de
fouilles, habilement dirigées par M. Brives, permirent de recueillir
un nombre considérable de pièces, Eléphants, Hippopotames, Rhi-
nocéros, Buffles, Cerf, Antilope, permettant d'affirmer la contempo-
ranéité de ces espèces. 11 serait trop long d'énumérer seulement les
nombreuses espèces étudiées dans ces monographies, qui ont été,
au fur et à mesure de leur apparition, avidemeut recherchées par
les paléontologistes de tous pays.
Je ne saurais terminer cet aperçu rapide des travaux de M. Pomel,
sans indiquer encore la contribution importante qu'il a apportée à
l'étude de la flore algérienne dans ses Matériaux pour la Flore
atlantique et surtout dans ses Nouveaux matériaux, dans lesquels il
donne la description de toutes les plantes non encore décrites, soit
près de 800 espèces ou variétés. L'éloge de ce travail a été fait par
mon collègue et ami M. le professeur Battandier, dans le Bulletin
de la Société Botanique de France (22 août 1898).
En terminant cet hommage à la mémoire de l'homme éminent
qui vient de disparaître, je tiens à exprimer tous les regrets que sa
perte cause à la Géologie algérienne, à l'Algérie et à la Société
Géologique de France, dont il a été secrétaire en 1849-1850, vice-
président en 1879. Le souvenir de ce savant vivra par les travaux
dont il a enrichi la science et par l'impulsion fructueuse qu'il
a donnée à la Géologie de l'Algérie.
BIBLIOGRAPHIE DES TRAVAUX SCIENTIFIQUES DE A. POMEL
I. — PUBLICATIONS ÉTRANGÈRES A L'ALGÉRIE
Géologie et Paléontologie
1842. 1. — Essai de coordination dos terrains tertiaires du département du
Puy-de-Dôme avec ceux du Nord de la France {Annales scient, de V Auvergne).
1843. 2. — Description des Carnassiers fossiles des terrains meubles de l'Au-
vergne : Felis cultridens, Canin megamasloides. Luira Dravardi (B. S. G. F.,
1" série, t. XIV).
— 3. — Observations sur la paléontologie des terrains meubles de la Li magne
d'Auvergne {B. S. G. F., V série, t. XIV).
1844. 4. — Note sur un Bouc fossile, Capra Rozeti, découvert près d'Issoire,
avec Eléphant, Rhinocéros, etc. (C. R. Ac. .Se, vol. XIX).
218 e. fichbur 6 Avril
1844. 5-6. — Description géologique et paléontologique des collines de la Tour-
de-Boulade et du Puy-de-Tellier (C. R. Ac. Se, t. XIX, et B. S. G. F., 2- série, t. I).
1845. 7. — Gergovia, ses basaltes, ses calcaires, ses fossiles. — Plantes fossiles
des terrains tertiaires de l'Auvergne (B. S. G. F., t. II).
— 8. — Note sur des végétaux fossiles nouveaux, découverts dans le Calcaire
grossier des environs de Paris (B. S. G. F., 2« série, t. II, p. 307).
— 9. — Note sur les prétendues Cycadées fossiles tertiaires (/cf.) .
— 10. — Note sur quelques phénomènes géologiques de la vallée de la
Brems, près Saarlouis. Relations du terrain houiller avec les Porphyres (B. S.
G. F., 2« série, t. III, p. 49).
1846. 11. — Nouvelles considérations sur la paléontologie de l'Auvergne : L'en-
semble des Mammifères fossiles de ce pays est divisé en trois faunes successives et
les terrains qui les renferment sont classés dans les trois époques, miocène, plio-
cène et quaternaire (B. S. G. F., 2« série, t. III, p. 198).
— 12. — Note sur la Géologie paléontologique du département de l'Allier
(B. S. G. F., 2- série, t. III, p. 365).
— 13. — Note sur le Lias de la Moselle et sur quelques gisements de végé-
taux fossiles {B. S. G. F., t. III, p. 652).
— 14. — Sur le Pterodon. genre fossile de Dasyure, dont les espèces ont
été trouvées dans les terrains tertiaires de Paris, de l'Auvergne et de la Gironde
{B. S. G. F., 2« série, t. III).
— 15. — Détermination des Vertébrés fossiles de Cadibona, recueillis par
M. Gastaldi (B. S. G. F., 2- série, t. III).
— 16. — Note sur les Animaux fossiles de l'Allier {B. S. G. F., £• série,
t. IV, p. 385).
1847. 17. — Note sur un nouveau Pachyderme de la Gironde, Elotherium
magnum, congénère d'autres fossiles décrits plus tard par M. Aymard sous le
nom d'Entelodon, {B. S. G. F., f série, t. IV).
— 18. — Note sur le genre Palœotherium, ses caractères et ses limites
(B. S. G. F., f série, t. IV, p. 384).
— 19. — Note sur divers Vertébrés fossiles des terrains éocènes de Paris :
Pachynolophus, Coryphodon, Crocodilus, Cœlorhinus, Apholidemys, Palœophis
(Arch. scient. Bibl. Univ. de Genève, vol. IV).
— 20. — Sur les Hippopotames et les Sangliers fossiles [Arch. se. Bibl. de
Genève, vol. IV).
— 21. — Faune fossile du terrain pisolithique comprenant la description du
Gavialis isorhynchus du Mont- Aimé, le plus ancien représenté du type des Croco-
diles [Arch. Bibl. Genève, vol. V).
— 22. — Sur le genre Palœotherium [Arch. Bibl. Genève, vol. V).
— 23. — Note sur la flore de Sézanne, première indication du genre Mar-
chantia (Arch. Bibl. Genève, vol. V).
— 24. — Matériaux pour servir à la flore fossile des terrains jurassiques de
la France (Congrès Natur. AU. a Aix-la-Chapelle}.
1848. 25. — Sur le terrain crétacé d'Aix-la-Chapelle et de Maestricht (B. S.
G. F., 2« série, t. VI).
— 26. — Mémoire pour servir à la Géologie paléontologique du département
de l'Allier (B. S. G. F., 2» série, t. VI).
— 27. — Note sur les Animaux fossiles de l'Allier (W.).
— 28. — Recherches sur les caractères et les rapports des divers genres
vivants et fossiles de Mammifères ongulés (f . R. Ac. Se, t. XXVI, p. 686).
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 219
1847. 29. — Communication sur le même sujet à la Société géologique de France
avant la publication d'un mémoire analogue de Richard Owcn (B. S. G. F.,
2- série, t VI).
— 30. — Etudes sur les Insectivores (Ârch. Bibl. Univ. de Genève, vol. IX).
— 31. — Recherches sur la distribution géographique et géologique des
Carnassiers insectivores (B. S. G. F., t. VI).
— 32. — Sur le Castoroïdes ohioensis, par Wymann (Arch. Bibl. Genève,
vol. IX).
— 33. — Notices bibliographiques sur divers Mammifères fossiles de l'Amé-
rique du Nord (Ârch. Bibl. Genève, vol. IX).
1849. 34. — Observations sur le parallélisme du gypse d'Aix avec les dépots
lacustres de la Limagne et de la Beauce (B. S. G. F., 2» série, t. VII).
— 35. — Notices bibliographiques sur les Ongulés fossiles de l'Amérique du
Nord [Ârch. BibL Genève, vol. X).
— 36. — Sur le genre Anoplotherium, ses caractères et ses limites (Arch.
BibL Genève, vol. XII).
1850. 37. — Notice sur les Ossements fossiles de la Débruge, comprenant le
catalogue des espèces que plusieurs mois de fouilles y avaient fait découvrir (en
colla b. avec A. Bravard) (Ext. du Mercure Aptésien, Apt).
1851. 38. — Observations nouvelles sur la structure des pieds dans la famille
des Anoplotherium et dans le genre Hyemoschus (C. R. Ac. Se, vol. XXXIII, p. 16).
1852. 39. — Catalogue méthodique et descriptif des Vertébrés fossiles décou-
verts dans le bassin hydrographique supérieur de la Loire et dans la vallée de
l'Allier (Ouvrage couronné par l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de
Clermont-Ferrand, dans sa séance de nov. 1852) {Annales scient, de V Auvergne).
1854. 40. — Sur la succession dos faunes de Vertébrés fossiles du centre de la
France (Lettre à Elie de Beaumont, C. R. Ac. Se, vol. XXXVIII, p. 463).
1868. 41. — Sur le Myomorphus cubensis, sous-genre nouveau de Megalonyx
(C. R. Ac. Se, t. LXVII, p. 665).
-- 42. - Note additionnelle sur le Myomorphus cubensis (C. R. Ac. Se,
t XLVII, p. 850).
II. — PUBLICATIONS CONCERNANT L'ALGÉRIE ET L'AFRIQUE DU NORD
A. — Géologie
1854. 43. — Observations géologiques sur la province d'Oran : Sur d'anciennes
solfatares de la forêt de Muley-Ismael (Lettre à Elie de Beaumont) (t\ R. Ac. Se,
t. XXXVIII, p. 836).
1855. 44. — Notice géologique sur le pays des Beni-bou-Sald, près la frontière
du Maroc (C. R. Ac. Se, t. XL, p. 882).
— 45. — Id., Id. (B. S G. F., 2* série, t. XIII).
1856. 46. — Observations sur la structure géologique de l'Algérie [C. R. Ac. Se,
t. XLIII, p. 880).
1858. 47. — Note sur les soulèvements du massif de Milianah (C. R. Ac. Se,
t. XLVII, p. 107).
— 48. — Sur l'âge géologique du système du Vercors (C. R. Ac. Se, t. XLVII,
p. 479).
— 49. — Sur le système de montagnes du Mermoucha et sur le terrain sahé-
lien (C. R. Ac. Se, t. XLVII, p. 852).
220 e. ftcheur 6 Avril
1858. 50. — Nouvelles remarques sur les subdivisions du terrain miocène
(C. R. Ac. Se, t. XLVII, p. 949).
1859. 51. — Sur quelques-unes des révolutions du globe qui ont construit les
reliefs algériens (C R Ac. Se, t. XLVIIl. p. 992).
1872. 52. — Le Sabara. Observations de Géologie et de Géographie physique et
biologique. Discussion de l'hypothèse d'une mer saharienne à l'époque préhisto-
rique (Bull. Soc. climatolog. d'Alger).
1873. 53. — Description et carte géologique au 200.000* du massif de Milianab
(Bull. Soc. climat. d'Alger).
— 54. — Carte du Losange saharien en projection gnomonique sur l'horizon
de son centre pour l'étude des cercles du réseau pentagonal {C. R.Âc. Sc.t t. LXXVII,
p. 557).
1874. 55. — Sur la prétendue mer saharienne (C. R. Ac. Se, t. LXXIX, p. 792).
1875. 56. — Il n'y a pas eu de mer intérieure au Sahara aux temps quater-
naires (C. R. Ac. Se, t. LXXX, p. 1342).
1876. 57. — Etat actuel do nos connaissances sur la géologie du Soudan, de la
Guinée, de la Sénégambie et du Sahara (A. F. A. S., Congrès de Germon t-
Ferrand).
1877. 58. — Géologie de la Petite-Syrte et du littoral oriental de la Tunisie
[Id.y Congrès du Havre).
— 59. — La mer intérieure de l'Algérie et le seuil de Gabès {Revue scienti-
fique).
1878. 60. — Géologie de la Petlte-Syrte et de la région des Cholts tunisiens
(B. S. G. F., 3- série, t. VII).
1881. 61. — Notice sur la géologie de l'Algérie (Notices sur Alger, publiées en
vue du Congrès de VA. F. A. S. (Alger, Jourdan).
— 62. — L'Algérie et le Nord de l'Afrique aux temps géologiques {A. F.
A. S., Congrès d'Alger).
1882. 63. — Carte géologique provisoire des provinces d'Alger et d'Oran, avec
texte explicatif (en collaboration avec M. Pouyanne).
1884. 64. — Une mission scientifique en Tunisie. Géologie de la côte orientale
Jusqu'à la Petlte-Syrte (Bull, de l'Ecole des Sciences d'Alger).
1888. 65. — Sur un gisement de quartz blpyramidé avec cargneules et gypses
à Souk-Ahras {C. R. Ac. Se, t. CVII, p. 53).
— 66. — Sur les boues geyseriennes a quartz bipyramidés, gypses et car-
gneules des environs de Souk-Ahras {A. F. A. S.. Congrès d'Oran, p. 262).
— 67. — Le terrain suessonien à Nummulites et à Phosphorltes des environs
de Souk-Ahras (A. F. A. S., Congrès d'Oran, p. 243).
— 68. — Compte-rendu de l'excursion de la Section de géologie aux environs
d'Oran (Id., p. 177).
1889. 69. — Description stratigraphique de l'Algérie pour servir à l'explication
de la 2* édition de la carte géologique provisoire (Alger, Fontana).
— 70. — Carte géologique générale provisoire do l'Algérie, 2* édition unifiée,
revue et complétée par le Service de la Carte géologique sous la direction de
MM Pomel et Pouyanne.
1891 . 71 . — Les tremblements de terre des 15 et 16 janvier 1891 en Algérie
(C. R. Ac. Se, t. CXII, p. 643).
— 72. — Les formations éocènes de l'Algérie (en collaboration avec
M. Ficheur) (C. R. Ac. Se, t. CXIII, p. 26).
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. POMEL 221
1892. 73. — Aperçus rétrospectifs sur la géologie de la Tunisie [B. S. G. F.v
3* série, t. XX, p. lOi).
— 74. — Sur la classification des terrains miocènes en Algérie et réponse
aux critiques de M. Peron (B. S. G. F., 3e série, t. XX, p. 166).
1894. 75. — Sur certaines des dernières phases géologiques et climatérlques
du sol barbaresque [C. R. Ac. Se, t. CXIX, p. 314).
— 76. — Réponse à M. Maycr-Eymar à propos de sa défense du Saharien
comme nom du dernier étage géologique [C. R. Âc. Se, t. CXIX, p. 938;.
B. — Paléontologie
1858. 77. — Végétaux fossiles des travertins quaternaires de Milianah (in Notice
minéralogique sur les provinces d'Alger et d'Oran. par Ville, Imp. Impla).
1867. 78. — Note sur la classification des Echinodermes (f. R 4c. Se, t. LXVII).
1868. 79. — Observations sur la classification des Echinodermes pour servir
d'introduction à l'étude des fossiles (Paris, Deyrolle).
— 80. — Sur les Alcyonaires fossiles des terrains tertiaires algériens (C. R.
Ac. Se, t. LXVII, p. 963).
— 81. — Id. Id., avec une planche (Paris, Deyrolle).
1872. 82. — Description des Animaux fossiles de la province d'Oran. 5' fascic,
Spongiaires, i fort vol. avec 36 planches lithogr. par Ml,e Augusta Pomel (Oran).
1878. 83. — Station préhistorique de Terniûne, dans la plaine d'Eghis : Elé-
phants, Rhinocéros, Hippopotames (B. S. G. F., 3" série, t. VII, p. 44).
— 84. — Un Hipparion dans le terrain pliocène d'Oran {B. S. G. F., t. VII).
— 85. — Sur une station préhistorique de la plaine d'Eghis, à l'est do Mas-
cara (À. F. À. S., Congrès de la Rochelle).
1883. 86. — Classification méthodique et gênera des Echinides vivants et
fossiles. Thèse pour le doctorat ès-sriences (Alger, Jourdan).
1885. 87. — Paléontologie ou description des Animaux fossiles de l'Algérie,
2* fascicule : Echinodermes, 1 fort volume renfermant : 1° Généralités ; 2° Classi-
fication méthodique et gênera ; 3° Atlas de 78 planches lithogr. par Mlle Augusta
Pomel.
— 88. — Sur la station préhistorique de Terniûne, près Mascara (A. F.
À. S., Congrès de Grenoble).
— 89. — Les Echinides du KeMghoud (Matériaux pour la Carte géologique
de l'Algérie, 1 fasc. avec 3 planches. Alger, Fontana).
1887. 90. — Paléontologie de l'Algérie. Echinodermes, 2* fascic, 2* livraison.
Description des espèces fossiles tertiaires. 1 fort vol. de 340 pages (Publication du
Service de la Carte géologique. Alger, Fontana).
— 91. — Sur le genre Thersitea Coq., singuliers Mollusques gastropodes
particuliers au terrain suessonien d'Algérie (A. F. 1. s.. Congrès de Toulouse).
1888. 92. — Sur le Thagasteu. nouveau genre d'Echinides éocènes d'Algérie et
observations sur le groupe des Fibulariens (( . R. Av. Se, l. CVI, p. 373).
— 93. — Compte-rendu de l'excursion de la Section d'Anthropologie à Terni-
fine {A. F. A . S., Congrès d'Oran, p. 208).
— 94. — Notes d'échinologic synonymiquu (B. S G. F.. 3a sér., t. XVI, p. 441).
1889. 95. — Matériaux pour la Carte géologique de l'Algérie. Les Céphalopodes
néocomien8 de Lamoricière (14 planches dessinées antérieurement par Mllr A.
Pomel. Alger, Fontana).
222 e. ficheur 6 Avril
1890. 96. — Sur les Hippopotames fossiles de l'Algérie (C. R. Ac. Se, t. CX,
p. 1112).
1892. 97. — Sur le Bramus barbarus, nouveau type de rongeur fossile des
phosphorites quaternaires de la Berbérie [C. R. Ac. Se, t. CXIV, p. 1159).
— 98. — Sur le Libytherium maurusium, grand ruminant du terrain plio-
cène piaisanclen d'Algérie [C. R. Ac. Se, t. CXV, p. 100).
— 99. — Sur un Macaque fossile (Macacus trarensis) des phosphorites
quaternaires de l'Algérie (C. R. Ac. Se, t CXV, p. 157).
— 100. — Sur deux Ruminants de l'époque néolithique en Algérie : Cervus
pachygenys, Antilope Maupasi (C. R. Ac. Se, t. CXV, p. 213;.
1893. 101 . — Présentation d'une monographie du Bubalus antiquus Duvernoy ;
notes résumant les caractères et l'habitat (C. R. Ac. Se, t. CXVI, p. 1346).
1894. 102. — Découverte de Champsosauriens dans les gisements de phospho-
rites du Suessonien d'Algérie (Dyrosaurus IhecestensU) (C. R. Ac. Se, t. CXVII1,
p. 1309).
— 103. — Sur le Dyrosaurus thevestensis Pomel — Crocodilus phospha-
ticus Thomas {C. R. Ac. Se, t. CXVUI, p. 1396).
— 104. — Présentation de la monographie des Bœufs-Taureaux fossiles des
terrains quaternaires de l'Algérie (C. R. Ac. Se, t. CXIX, p. 526).
— 105. — Sur une nouvelle grotte ossifère découverte à la Pointe-Pescade,
à l'ouest d'Alger (C. R. Ac. Se, t. CXIX, p. 986).
1896. 106. — Présentation de la monographie des Eléphants quaternaires de
l'Algérie {C. R. Ac. Se, t. CXXIII, p. 975).
— 107. — Présentation de la monographie des Rhinocéros quaternaires de
l'Algérie (C. R. Ac. Se, t. CXXIII, p. 977).
— 108. — Sur les Hippopotames fossiles de l'Algérie (C. R. Ac. Se, t. CXXIII,
p. 1241).
1897. 109. — Présentation de la monographie des Carnassiers fossiles quater-
naires de l'Algérie (C. R. Ac. Se, t. CXXIV, p. 889).
— 110. — Note accompagnant la présentation de la monographie des Porcins
(C. R. Ac. Se, t. CXXIV, p. 1421).
Série des Monographies des Vertébrés fossiles de l'Algérie. Publication du
Service de la Carte géologique de l'Algérie (Alger, Fontana). 13 fascicules.
— 1er fascicule. — Bubalus antiquus Duvernoy (avec 10 planches).
— — Camé liens et Cervidés (8 planches).
— — Les Bœufs-Taureaux (19 planches).
— — Les Bos élaphes (avec 11 planches).
— — Les Antilopes (15 planches).
— — Les Eléphants (15 planches).
— — Les Rhinocéros (12 planches).
— — Les Hippopotames (avec 21 planches).
— — Les Carnassiers (15 planches).
— — Les Suilliens- Porcins (10 planches).
— — Les Equidés (12 planches).
— — Le Singe et l'Homme (8 planches).
— — Les 0 vidés (14 planches).
1893.
111.
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1<
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1898.
123.
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13-
1899 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR A. PO M EL 223
C. — Zoologie et Botanique
1836. 124. — Note iar la Mammalogie algérienne (C. R. Ac. Se, t. XLII, p. 652).
1860. 125. — Matériaux pour la flore atlantique. Coupes génériques nouvelles.
Période actuelle jOran).
1861. 136. — Matériaux pour la flore atlantique [C. R. Ac. Se, t. LU, p. V62).
1864. 127. — Note sur la classification dus Echinodermcs {C. R. Ac. Se, t. LXVI1) .
1874. 128. — Nouveaux matériaux pour la flore atlantique (1" livraison).
1875. 129. — Id. Id. (ST livraison) {Bull. Soc. de climatol. d'Alger).
1881. 190. — Notices sur la Zoologie et la Botanique de l'Algérie (in Notices
sur Alger et l'Algérie, publiées à l'occasion du Congrès de l'Ass. franc, pour
PAvanc. de* Se. Alger, Jourdan).
1883. 131. — Contribution à l'étude des Crucifères, 2 planches (2' thèse pour
le doctorat ès-sciences) (Alger, Jourdan).
1889. 132. — Sur les ravages exercés par un Hémlptore du genre Œlia, sur les
céréales algériennes {C. R. Ac. Se, t. CVII1, p. 575).
1892. 133. — Sur l'Ecureuil de Barbarie (C. R. Ac. Se, t. CXIV, p. 53).
1893. 134. — Le Surmulot dans l'ancien monde occidental (C. R. Ac. Se, t. CXVI,
p. 1031).
[). - Varia
1860. 135. — Nouveau guide de Géologie, Minéralogie et Paléontologie (Paris,
Deyrolles).
1871. 136. — Les races indigènes de l'Algérie (Oran, V" Daguin).
1873. 137. — L'Algérie à l'exposition de Vienne (Oran).
224 6 Avril
SUR LES TRIGONIES BYSSIFÈRES
par H. COLLOT.
Agassiz a distribué les Trigonies en huit groupes. Lycett (1) a
ajouté une neuvième division, celle des Byssiferœ, pour la Trigania
carinata Ag. du Néocomien, dont l'ornementation générale res-
semble à celle des Costatœ, mais qui présente, lorsqu'elle est adulte,
une ouverture pour le passage du byssus, formée par une légère
excavation du bord antérieur de chaque valve. Lycett ajoute à ce
caractère principal la considération de la forme plus allongée qu'il
ne convient à une Trigonie.
Ces divisions ont été reproduites par Fischer, en 1887, dans son
Manuel de Conchyliologie, et par Zittel, la même année, dans son
Traité de Paléontologie (édition française). Enfin Bernard, dans ses
Eléments de Paléontologie, mentionne l'existence de dix divisions,
qu'il ne nomme pas, en se référant à Agassiz et à Lycett, ce qui
implique la conservation de toutes celles qu'admet Lycett. Or, des
caractères sur lesquels est fondée la division des Byssifères, le
premier est insuffisante et le second, qui est le principal, n'existe
pas. à mon avis.
Si l'on compare la T. carinata à certaines Trigonies costées, telles
que la T. monilifera Ag. de l'Oxfordien, ou du Kimeridgien, Lycett,
pi. 31, fig. 3 et Trig. elongata, var. lata Lyc, pi. 30, fig. 4, du corn-
brash, ou à Lyrodon (Trigonia) supra jurense Ag. in Bayle, Explic.
carte géol., t. IV, p. 119, fig. 2, l'aspect général apparaît bien le
même, de quelque côté qu'on examine les individus, et la différence
d'allongement que l'on peut noter entr'elles est moindre que celle
qui sépare ces formes de certaines autres, telles que 7. costata Sow.
iu Lycett, pi. 29, fig. 8, T. cassiope d'Orb. in Lyc, pi. 32, fig. 1, 4,
T. Merianikg. in Lyc, pi. 33, fig. 2.
Quant au caractère principal qui a fait séparer la T. carinata des
Costées, je remarquerai d'abord, au point de vue théorique, qu'il
paraît invraisemblable de voir le byssus, après qu'il se serait a tro-
ll) On a by8siferous fossll Trigonia. Ann. and Mag. Nat. Hist.t 1870. — A Mono-
graph of thc british fossll Trigonia. Palseonlographical Soc, vol. 26, pour 1872,
p. 11, et vol. 31, pour 1877, p. 179.
1899 SUR LES TRIGONIES BYSSIFÈRES 225
phié dans une longue suite de générations de Trigonies et peut-être
déjà chez les genres qui ont donné naissance à celui-ci, réapparaître
sur le tard dans une forme de ce groupe. Et pour augmenter l'ano-
malie, ce retour atavique ne se ferait pas chez le jeune, mais chez
l'adulte ! En fait cela n'a pas lieu.
Les auteurs qui, à ma connaissance, ont figuré cette espèce,
Àgassiz, Leymerie, Matheron, d'Orbigny, Chenu, Ogérien, ne l'ont
représentée qu'à plat ou par son côté postérieur. Lycett, pi. 35,
fig. 5», représente, il est vrai, un échantillon par le côté antérieur
montrant un bâillement dont la situation correspond à peu près à
celui qui conviendrait au passage d'un byssus. Mais, d'abord la
coquille n'a pas ses deux valves au contact, du côté palléal, comme
elles l'étaient du vivant de l'animal ; elles ne se touchent qu'au bord
cardinal, et, si on rapprochait les bords palléaux, la largeur du soi-
disant sinus byssal serait déjà diminuée. 11 en subsisterait, il est
vrai, quelque chose. Mais je crois que cette apparence résulte d'un
défaut de conservation de la coquille, que la figure, il faut l'avouer,
ne laisse pas reconnaître, ou bien d'une conformation accidentelle
et purement individuelle de l'échantillon figuré.
La Trigonia carinata a été créée, sur de mauvais échantillons,
par Agassiz dans son Mémoire sur les Trigonies en 1840. Elle a été
décrite par Leymerie (1) sous le nom de T. harpa. Il en attribue la
paternité à Deshayes, ce qui au premier abord peut provoquer de
vaines recherches dans les publications antérieures de Deshayes et
le fairo croire plus ancien que celui donné par Agassiz. Mais le
nom étant imprimé eu caractères romains, indique, suivant la
convention indiquée au début des tableaux paléontologiques, que
l'espèce est en réalité nouvelle et décrite pour la première fois. Ce
nom a été adopté par Matheron dans son Catalogue des corps
oganisés fossiles des Bouches-du-Rhôue, daté de 1842, et je l'ai
moi-même employé en citant (2) cette espèce de Pélissanne et de
l'oratoire Sainte-Anne, près Mimet (Bouches-du-Rhône). La des-
cription de Leymerie ne remontant pas au delà de 1843, il faut en
réalité revenir au nom de T. carinata que j'avais d'ailleurs employé (3)
eu citant la même espèce au bois de Concors, près Jouques(Bouches-
du-Rhôoe). J'ai en outre des échantillons de Mirabeau (Basses-Alpes),
(1) Mémoire sur le terrain crétacé du département de l'Aube. Mém. de la Soc.
çéol. d$ la France, t. V, 1840-1843.
(2) Description du terrain crétacé dans la Basse- Provence. B. S. G. f\, nov. 1889,
p. 61.
(3) Description géologique des environs d'Aix -en- Provence, 1880, p. 81.
12 Juin 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - 15
?,'iii
«Avril
de Saint-Julien-le-Montaguier (Var), d'AUauch, près Marseille, où
Matheron cite l'espèce.
Certains de mes échantillons, comme la figure donnée par Mathe-
ron, montrent des côtes un peu moins obliques que la figure qu'on
trouve dans Lcymerie et surtout daus Lycett. On peut d'ailleurs se
demander si, dans les lig. 5 et 6 de ce dernier, la rectitude des côtes
D'à pas été exagérée. Sur certains de mes échantillons, les côtes de
l'area et les carènes sont très fortes et noduleuses, taudis que sur
d'autres ces ornements sont très peu saillants, à peine noduleux,
et s'elfaceut de bonne heure. Ce dernier cas est réalisé par l'échan-
- Trlfcnnla earinatii Ag.
tillon figuré ci-dessus. La lunule est sensiblement plane, comme
dans la fig. 6" de Lycett, et non concave comme Lycett a reproché
à d'Orbigny de l'avoir figurée. Elle est à peine limitée dans cet
individu par des carènes très mousses. Sous les soin mets on voit la
fossette ligamentaire limitée par les nymphes, comme dans la
figure de la Paléontologie française. Les bords de la coquille sont
recti lignes.
Avant de passera l'examen du côté extérieur, je ferai remarquer
que l'échantillon est silicifié, ce qui m'a permis de le dégager par
l'acide chiot hydrique d'une manière très nette. H est adulte et assez
épais pour que des auimaux lilbophages aient creusé dans les
crochets des alvéoles, dont une a 1™ de diamètre transversal. Les
1899 SUR LES KLlfPEN DES BASSES-PYRÉNÉES 227
bords antérieurs de la coquille, comme le montre la fig. 1, sont
contenues dans le plan de lu commissure, sans trace de la formation
d'un sinus. Il en était de môme lorsque la coquille avait atteint à
peu près la moitié de sa taille, comme on peut le voir par une ligne
d'accroissement qui reste marquée sur les deux valves, surtout sur
la droite. La coquille est très légèrement entr'ouverte, sans quoi les
deux bords se toucheraient en avant comme ils le feraient sur le
bord ventral. Aucun des échantillons en ma possession ne montre
trace d'un sinus byssal.
Je conclus donc que la section des Trigonies byssifères doit être
supprimée et l'espèce pour laquelle elle avait été créée reportée tout
simplement dans les Trigonies costées.
9 9
SUR LES KL1PPEN DES BASSES-PYRENEES
par M. STl ART-MEWEATH.
En 1881, j'ai signalé, sur la lisière des Pyrénées, les phénomènes
du Flysch et des Klippes du bassin de Vienne. Ce Flysch, tant éocène
que crétacé, contient toujours des lentilles élastiques de conglo-
mérat à Orbitolines, et, au nord de la prétendue faille de Caseville
(Bidart), il présente également des quartz bipyramidés brisés,
roulés, et dérivés des couches gypseuses de la prétendue faille. Par
une carte, dans les C. R. Ac. Se. de juin 1894, j'ai expliqué comment
ces couches éocènes de Caseville, reposant à 15° sur le Danien de
Fontarabie, ont été supposées crétacées d'après la carte de Duf rénoy.
qui classait le Nummulitique sous la même teinte. Des diaclases
de quelques centimètres de déplacement, qui caractérisent partout
le Danien de la région, ont servi à appuyer l'illusion de la faille.
Les Klippes, enfouies dans ce Flysch, sont dispersées irrégulière-
ment, mais toujours dirigées N.E., et leurs fossiles liasiques,
jurassiques et crétacés, correspondent à ceux de la large plateforme
que j'ai constatée sous le Flysch sur la lisière des Pyrénées de Gui-
puzcoa. On peut les comparer aux ilôts et récifs qui, sur la côte
orientale de l'Adriatique, sont rongés par les vagues et fournissent
actuellement une marne très calcaire aux fonds abrites et du sable
228 STUART MKNTEATH 6 Avril
en présence des courants. La Klippe la plus remarquable est
exploitée sur un kilomètre de long entre le nord de Sare et le
vallon d'Amotz, et m'a fourni de nombreuses espèces du Lias sur
tout son parcours. M. Seunes, connaissant seulemeut mes obser-
vations jusqu'en 1887, l'a dessinée comme dirigée E. 10° S., et a
représenté une bande de Précambrien traversant son parcours
réel. Ce Précambrien est simplement une partie irrégulière du
Flysch enveloppant la Klippe. A l'est de Lourdes, ce même Flysch,
à Fucoïdes caractéristiques, a été également attribué au Précam-
brien, bien qu'il repose nettement en discordance sur les têtes
arasées du Jurassique à Bélemnites et du Crétacé à nombreuses
Ammonites. Depuis l'Océan jusqu'à Bagnères-de-Bigorre, le Flysch
présente en cent endroits, autour d'injections de granulite et
d'ophite, des filets et lentilles de quartz, et passe insensiblement à
des schistes pourris et même au micaschiste. Le clivage développé
en pareil cas produit l'illusion d'un plongement sous les Pyrénées.
La Klippe au nord de Sare plonge de 50° vers le nord-ouest, avec
une épaisseur variable mais très restreinte. Les récits de mineur
cités par M. Marcel Bertrand dans le dernier Bulletin seraient facile-
ment reproduits si l'on fonçait un puits vertical traversant cette
Klippe. Mais j'ai relevé dans la mine de Banca (Baigorry) une
dislocation presque horizontale de plus de douze mètres, et il est
très probable que les plissements du Flysch ont pu déplacer
entièrement de leur socle quelques klippes fortement inclinées.
Du reste, si l'on dessine la bordure jurassique d'un bassin crétacé,
et les courbes de niveau d'une couche quelconque, comme la même
chose que la limite du Crétacé reposant sur les affleurements d'un
bassin houiller,on trouverait à Sare tout ce qu'on cherche en Silésie.
Si, pour invoquer une hypothèse de charriage dans les Basses-
Pyrénées, on introduit des lignes directrices virtuelles et si l'on
dessine les klippes d'une façon arbitraire, on se heurte néanmoins
contre un organisme complet d'injections et tufs ophitiques, dont
les racines sont visiblement dans le Jurassique et qui monte jusqu'à
l'Eocène. A la surface du Flysch on trouve des traînées de marnes
bariolées avec gypse et sel qu'on pourrait comparer à celles de la
Provence. Pour les expliquer par un charriage superficiel, il faudrait
d'abord abandonner l'attribution théorique au Lias qu'on a appli-
quée à l'Eocène silicifié de Mouligna (Biarritz). Ses relations directes
avec l'Eocène normal sont souvent cachées par les sables déplacés,
mais je les ai vues après un orage, et la roche métamorphisée
reproduit minutieusement les caractères spéciaux de la roche nor-
1899 SUR LES KLIPPEN DES BASSES-PYRÉNÉES 229
maie et ne ressemble nullement aux gisements de Lias que j'ai
découverts dans les régions environnantes. L'hypothèse d'un
charriage impliquerait l'abandon des preuves factices d'une origine
profonde.
En retournant ainsi les hypothèses, on devrait encore admettre
que le terrain superficiel qui recouvre le Flysch de Bidart n'est pas
pliocène. J'ai longuement prouvé que ce terrain consiste dans le
gravier de la haute terrasse de la Nive et autres vallées actuelles,
recouvert par une argile bariolée à dents d'Elephas primigenius ; et
que le fond des vallées actuelles est creusé dans ces deux formations
précédentes et contient partout le lignite moderne, à silex travaillés,
qu'on a représenté comme interstratifié à la base du Pliocène de
Bidart. Les traînées de terrain saliférien étant rarement recouvertes
par autre chose que ces terrains superficiels, leur âge est à fixer
entre ces terrains et le Flysch. L'argile bariolée post-diluvienne est
le huitième terrain qui, à ma connaissance, a été attribuée au Trias
dans les Pyrénées. Sous les noms de Précambrien, Dalle cainbrienne,
Griotte, Marnes irisées, Flysch, etc., on a classé des faciès dans une
même formation, en élaboraut des hypothèses à distance.
230 6 Avril
SUR LE TOARCIEN DES ENVIRONS DE NANCY (1)
par M. Cb. AITHELIN.
Les observations présentées dans cette note ne sont que le préli-
minaire d'un travail d'ensemble ayant pour but l'étude des faunes
du Toarcien de la Lorraine et leur répartition stratigraphique.
Cet étage a déjà été l'objet d'un grand nombre de travaux.
M. Bleicher a notamment, dans des études très consciencieuses,
exposé avec beaucoup de talent la succession stratigraphique du
Toarcien de la Lorraine et ce sont ses études qui nous ont servi de
point de départ dans nos recherches (2).
Les premières couches toarciennes reposent sur l'assise, dite du
Grès médioliasique, caractérisée par la présence de YAmaltheus
spinatus Brug. et par l'abondance des Brachiopodes.
Il semble rationnel de faire débuter le Toarcien immédiatement
au-dessus des dernières couches à Brachiopodes. Il y a lieu de
remarquer toutefois que le Grès médioliasique ainsi limité renferme
à sa partie supérieure une espèce d' Harpoceras voisine d1 Harpoceras
falciferum Sow.
Le Toarcien des envirous de Nancy comprend quatre zones :
1° zone à Harpoceras falciferum : 2° zone à Hildoceras bifrons ; 3° zone
à Grammoceras fallaciosum ; 4° zone a Duniortieria radiosa et Gram-
moceras aalense.
1° Zone à Harpoceras falciferum
La zone à //. falciferum comprend deux assises :
a) Les couches inférieures, très rarement abordables, sont formées
de calcaires marneux d'un bleu cendré. Elles diffèrent peu, comme
coloration, des couches supérieures du Grès médioliasique, mais se
débitent plus facilement suivant la stratification en laissant appa-
raître des empreintes d'Harpoceras. On y rencontre deux espèces,
l'une à ombilic étroit et voisine d'H. subplanatum Oppel, l'autre
plus largement ombiliquée que je rapporte â //. falciferum Sow.
(1) Les déterminations ont été faites au Laboratoire de Géologie de la Faculté
des Sciences de Nancy.
(2) (îuide du (îéoln«;ue en Lorraine. Nancy, 1887. — Minerai de fer de la Lorraine
[H. S. G. F.% 3' série, t. Xll, p. 4T>, 1S83).
1899 SUR LE TOARCIEN DES ENVIRONS DE NANCY 231
Les Cœloceras sont aussi représentés par C. commune Sow. et
C. (innulatum Sow.
Souvent dans ces bancs sont intercalées des couches pyriteuses
de quelques centimètres d'épaisseur très riches en Bélemnites.
b) Les assises supérieures se débitent facilement parallèlement à
la stratification en plaquettes minces et sont désignées aux environs
de Nancy sous le nom de « schistes cartons ».
La partie inférieure seule de ces marnes schisteuses appartient à
la zone à H. faUiferum. La partie supérieure renferme déjà //. bifrons
et appartient à l'horizon caractérisé par cette forme.
Dans les schistes cartons sont intercalés, surtout vers la partie supé-
rieure, des nodules de grande taille souvent assez riches en fossiles.
La faune de ces assises comprend :
Harpoceras falciferum Sow. sp. Cœloceras cf. annulatum Sow. sp.
Cœloceras cf. commune Sow. sp. Posidonomya Bronni Voltz, etc.
2° Zone à Hildoceras bifrons
L'étude attentive des faunes permet d'y reconnaître trois sous-
horizons. Le faciès des schistes cartons se poursuit dans la partie
inférieure de l'horizon h //. bifrons, où il y a passage insensible à
des marnes plus argileuses contenant également des nodules de
grande taille. Le niveau supérieur comprend des marnes à nodules
phosphatés de couleur claire.
a) Sous-zone à Hildoceras bifrons et Cœloceras commune.
Hildoceras bifrons se trouve associé aux Cœloceras du groupe de
C. commune Sow. L'extrême abondance de VA mcula substriata
Mûnst dans les nodules de cet horizon est à mentionner ainsi que
la présence de Posidonies.
Les espèces les plus communes sout :
Hildoceras bifrons Brug. Phylhceras heterophyllum Sow.
Cœloceras commune Sow. Avicula substriata Mùnst.
Cœloceras cf. annulatum Sow. sp. Posidonomya (espèce indéterm. )
6) Sous-zone à Cœloceras subarmaturn.
Jusqu'alors les formes de cet horizon n'ont été rencontrées qw%
dans les environs immédiats de Nancy.
Les espèces les plus répandues sont :
Hildoceras bifrons Brug. Cœloceras cf. Desplacei d'Orb. sp.
Cœloceras subarmaturn Young Harpoceras subplanatum Oppel.
(d'Orb.). Phylloceras heterophyllum Sow.
Cœbceras cf. subarmaturn Young a cicula substriata Mûnst.
SP- (hmiomya rhomboidalis Goldf. sp
Cœloceras Desplacei d'Orb.
232 ch. authelin 6 Avri.
c) Sous-zone à Cœloceras crassum.
C'est un niveau à nodules phosphatés très facilement reconnais-
sable à cause de l'abondance des fossiles et de leur teinte blanchâtre,
qui tranche sur la couleur foncée des argiles.
La structure des nodules phosphatés de ce niveau a été étudiée
par M. Bleicher dans un travail remarquable (1).
Ce niveau est caractérisé par :
Cœloceras crassum Phill. sp. Hildoceras bifrons Brug.
Cœloceras Raquinianum d'Orb.
Ce sont les formes les plus communes. Elles sont associées à un
certain nombre de formes des genres Grammoceras, Hauyia et
Hammatoceras.
3° Zone à Grammoceras fallaciosum (2)
On peut subdiviser cette zone en trois niveaux :
a) Aux couches à C. crassum succèdent des marnes ferrugineuses
peu épaisses (0m50 au maximum) mais très constantes et parfois
assez riches en Bélemnites.
On y trouve :
Bélemnites itregularis Schlot. Grammoceras cf. fallaciosum Bayle
Bélemnites tripartitus Schlot. sp. sp.
b) Au-dessus vient une puissante assise marneuse avec nodules
assez rares à la partie inférieure où ils sont de petites dimensions ;
mais plus abondants vers la partie supérieure.
Ces nodules, très irréguliers, renferment une faune caractéris-
tique de l'horizon â Grammoceras fallaciosum Bayle.
Les échantillons entiers sont assez rares, les fragments sont au
contraire assez communs.
On peut recueillir à ce niveau :
Grammoceras fallaciosum Bayle sp.
Grammoceras fallaciosum var. Cotteswoldtae Buckm.
Grammoceras fallaciosum var. Bingmanni Denckm.
Grammoceras Dœrntense Denck m .
Haugia sp.
(1) Sur le gisement et la structure des nodules phosphatés du Lias de Lorraine
{B. S. G. F., 3« série, t. XX, p. 237-247 et xcvi).
(2) M. Benecke, dans un travail sur le nord de la Lorraine (Beltrag zur Kenntniss
des Jura in Deutsch-Lothringen, 1898), vient do signaler la présence de la zone a
G. fallaciosum dans cette région. Je l'avais, de mon côté, fait connaître aux envi-
rons de Nancy au Congrès de la Société belge de Géologie, d'Hydrologie et de
Paléontologie à Nancy (Séance du 22 août 1898).
1899 SUR LE TOARCIEN DBS ENVIRONS DE NANCY 233
Cet horizon affleure à Ludres, Messein, Houdemont, etc. Aucune
des formes précitées n'avait été signalée jusqu'alors aux envirous
de Nancy.
c) La partie supérieure de la zone comprend des marnes mica-
cées, quelquefois ferrugineuses, avec nodules presque toujours de
grande taille et souvent cloisonnés. Cette subdivision est peu fos-
silifère. Les rares espèces rencontrées appartiennent au groupe du
Grammoceras striatulum Sow.
4° Zone à Dumortiera radiosa et Grammoceras Aalense
C'est dans cette zone que sont comprises toutes les assises de
minerai de fer exploitées dans le bassin minier de Nancy.
Les formes les plus caractéristiques sont :
Dumortieria radiosa Sebb. Hammatoceras Lorteti Dum.
Dumortieriasubundulata Branco. Oxynoticeras(fï)serrodens Quenst.
Grammoceras Aalense Ziet. Lytoceras sp.
Grammoceras mactra Dura.
Ici devrait être placée la zone caractérisée par Lioceras opalinum
Rein. ; mais celle-ci semble faire complètement défaut. Aucune des
nombreuses espèces qui m'ont été communiquées ou que j'ai pu
recueillir dans la région étudiée ne peut être rapportée à Lioceras
opalinum Rein.
Sur les assises franchement liasiques à G. Aalense Ziet., G. mactra
Dum., etc., reposent les couches bajociennes dans lesquelles on
rencontre assez communément Lieras concavum Sow. et une faune
très riche en Gastéropodes, Bi\WVes, Spongiaires, etc., dont les
principales formes ont été signalées par M. Bleicher (1).
La zone à Ludwigia Murchisonœ Sow., dont l'individualité a pu
être nettement établie pour plusieurs régions, semble ici faire
complètement défaut. Ainsi que l'a signalé M. Nicklès (2), cette
espèce n'a pas été rencontrée dans le bassin minier de Nancy.
En résumé, le Toarcien de la région étudiée présente une succes-
sion d'horizons paléontologiques identique à celle observée dans
différentes régions. Toutefois la zone à I). radiosa et G. Aalense
représente deux zones qui, distinctes dans d'autres régions, n'ont
pu être séparées en Lorraine.
L'étude du contact du Toarcien et du Bajocien n'a fourni jusqu'à
présent ni Lioceras opalinum, ni Ludwigia Murchisonœ.
(1) Minerai de fer de la Lorraine.
(2) Bulletin de la Carte géologique de France, t. X, mars 1898 (Feuille de
Sarrebourg).
234 AUTHELIN. — SUR LE TOARCIEN DES ENVIRONS DE NANCY 6 Avril
Ceci conduit à envisager l'existence probable d'une lacune corres-
pondant aux zones caractérisées par ces deux espèces. La présence,
dans les couches à Lioceras concavum, de fragments roulés d'ammo-
nites toarciennes viendrait apporter un argument en faveur de
cette lacune qui pourrait être attribuée, au moins partiellement,
à un remaniement des zones absentes.
Des études ultérieures conduiront à déterminer si cette lacune
ne présente pas des variations dans son étendue et si des lambeaux
de ces zones ont pu échapper au remaniement.
Tableau résumant le Toarcien des environs de Nancy
Zone à I. concavum.
Zones à
L. Murchisonœ
L. opalinum
Semblent faire défaut.
M
0
OS
<
0
b
4° Zone à D. radiom et G.
aalense .......
3° Zone à G. fallaciosuw .
2" Zone a H. bifrons
Minerai de fer exploité et ses équiva-
lents latéraux.
c) Marnes micacées avec nodules de
grande taille et marnes ferrugi-
neuses.
b) Marnes avec nodules irréguliers ou
sans nodules.
a) Marnes ferrugineuses.
/ c) Sous-zone à C. cras&um (Marnes à
nodules phosphatés).
b) Sous-zone à C. subarmatum (Mar-
nes avec grands nodules).
a) Sous-zone à H. bifrons et C.
commune { Marnes avec
grands nodules).
a
©
!• Zone à H. falciferutn
b) Marnes schisteuses avec no-
dules à la partie supérieure.
a) Calcaires marneux et couches pyri
teuses a Bélemnites.
I
Grès médiolasique ........ A. spinatus.
mmm
1899 235
Séance du fO Avril 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite de la présentation faite à la dernière séance, le Président
proclame membre de la Société :
M. Simon, Directeur des mines de Liévin, présenté par MM. Ch.
Barrois et M. Bertrand.
Le Secrétaire signale parmi les ouvrages reçus à la Société :
Notice explicative de la feuille de Digne, par W. Kilian et E. Haug ;
la deuxième livraison de 1899 des Annales des Mines, renfermant le
Rapport sur les travaux du Service géologique de VA Igérie (1897), par A.
Pomel et J. Pouyanne ; Catalogue de Paléontologie quaternaire
des collections de Toulouse, par M. Edouard Harlé ; le tome III
des Annale* de l'Observatoire météorologique du Mont Blanc, contenant
un chapitre sur La moraine profonde et V érosion glaciaire ; le nu-
méro 13 des Comptes-rendus de l'Académie des Sciences qui contient
une note de M. Termier Sur une tachylyte du fond de l'Atlantique
nord.
M. E. de Martoone signale parmi les dons récemment parvenus
de l'Etranger à la Société :
1° 5 vol. du Bulletin de la Société des Sciences Naturelles de
Neuchatel (tomes XXI-XXV, 1893-1897) contenant un certain nombre
de mémoires de MM. du Pasquier, Rollier, etc., et deux livraisons des
Matériaux pour la Carte géologique de la Suisse : Texte explicatif
de la Carte du Phénomène erratique et des anciens glaciers du versant
nard des Alpes suisses et de la chaîne du Mont-Blanc, par Alph.
Favre ; Supplément à la Description géologique de la partie juras-
sique de la feuille V II de la Carte géol. de la Suisse au 1/100.000»
avec deux cartes géol. au 1/23.000° et 5 pi. de coupes et profils, par
Louis Rollier ;
2° Une carte minière de la Hongrie en deux feuilles, publiée par
la k. ungarische geolog. Anstalt : Angabe der im Betrieb stehenden
und im Aufschlusse begrilTenen Lagerstiitten von Edelmetalleo,
Erzen, Eisensteinen, etc. ;
236 SÉANCE DU 10 AVRIL 1899
3° Un fascicule de Palœontologia Indica (Memoirs of the Geol.
Survey of India), série XV, Hymalayan Fossils, vol. I, part. 3 : The
Permocarboniferous Fauna or Chitichun, n° I, by Cari Diener, 105 p.,
13 pi.
4° Le deuxième tome du Maryland geological Survey (1898).
M. Labat offre à la Société une note Sur la température de la mer
(Extr. Bull. Soc. météorologique de France, juin 1898).
M. Douvillé présente, de la part de notre confrère M. Botti (de
Reggio Calabria), la deuxième édition d'un ouvrage intitulé « Dei
piani e sottopiani in Geologia ».
C'est un dictionnaire alphabétique de tous les noms (mononomes)
qui ont été proposés pour désigner des étages et sous-étages ; chacun
de ces noms est accompagné de la désignation de l'auteur et de la
date de sa première publication ; M. Botti ajoute ensuite sa défini-
tion et discute brièvement ses équivalences.
L'utilité pratique de cet ouvrage ressort du nombre vraiment
extraordinaire de noms d'étages et de sous-étages (plus d'un
millier) qui encombrent la littérature géologique et de leur capri-
cieuse application (comme le dit très justement M. Botti). Tantôt
une même formation a plusieurs noms, tantôt un même nom a été
appliqué à des formations différentes; enfin il n'est pas rare de
rencontrer des noms employés avec une signification différente de
celle qu'ils avaient d'abord.
Le dictionnaire de M. Botti pourra certainement empêcher le
retour de ces pratiques fâcheuses. Il est à désirer que dans les
éditions subséquentes, l'auteur ajoute un nouveau chapitre, indi-
quant la corrélation chronologique de tous les noms figurant dans
le dictionnaire.
SUR UN NOUVEAU GISEMENT DE POISSONS FOSSILES
AUX ENVIRONS DES PYRAMIDES DE GHIZEH
par M. R. FOURTAlï.
Me trouvant il y a quelque temps aux environs des Pyramides de
Ghizeh, j'eus l'idée de visiter nue carrière abandonnée, située au
sud du cimetière du village arabe de Kafr et A h m m (Cafra deFraas).
J'eus la bonne fortune d'y trouver des restes de Poissons que notre
confrère, M. F. Priem, a bien voulu se charger d'étudier.
Celte localité n'ayant pas été signalée jusqu'à ce jour, je crois
utile de lui consacrer quelques lignes de description qui serviront
de préface à l'étude de notre confrère.
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Sables descrti
\
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"t...j,.!.. ; ib TrauTH»™,
9 '"' ■-■■ --- r E /,*/
Le croquis topographique ci-dessus donne une idée assez exacte
de sa position. Cette carrière est située au sud du plateau sur lequel
sont érigées les trois grandes pyramides de Ghizeh, le Sphinx et le
temple de granit. Elle en est séparée par un vallon sablonneux où
se trouve le cimetière du village bédouin de Kafr el Ahrain qui en
est distant d'un kilomètre et est bâti au pied est du plateau des
238 FOURTAU. — NOUVEAU GISEMENT DE POISSONS FOSSILES 10 Avril
Pyramides, à la limite du désert. La distance entre le village et la
carrière peut être évaluée à 1200 mètres environ.
Le plateau, dont la carrière limite le nord-est, est appelé commu-
nément par les bédouins, Gebel Kxbli cl Ahram, ce qui signifie
simplement montagne au sud des Pyramides, et il sépare le plateau
où se dressent ces dernières du Gebel Chelloul dont j'ai parlé
dernièrement à la Société, à propos des Sables à Clypéastres des
environs des Pyramides (I). La partie du plateau où se trouve la
carrière m'a été désignée par mon guide, un indigène de Kafr el
A lira m, sous le nom de Heitel el Gorab.
Les bancs exploités se trouvent à mi-hauteur du plateau dont
l'altitude au-dessus de la plaine ne
dépasse pas trente-cinq mètres. Le
pied de la colline se trouve, de ce fait,
recouvert de détritus provenant de la
découverte et de l'exploitation de la
carrière, détritus d'autant plus abon-
dants que les bancs de calcaires exploi-
tés sont séparés par des lits de marnes
argileuses et d'argile jaunâtre que les
carriers indigènes désignent sous le
nom générique de Tafia.
La coupe ci-contre donne une idée
de la structure de la colline.
Les quelques fossiles que j'y ai récol-
tés indiquent que, sauf le dernier banc
qui la couronne, cette colline appar-
tient aux dernières couches du Luté-
tien d'Egypte, sans atteindre toutefois
le niveau où Schweinfurth a recueilli
au .Fayoum, dans l'île de Birket Ka-
roum, les restes étudiés par Dames (2).
La présence dans ces couches de
Fibularia Lorioli Th. et G. signalée aussi dans le Mokattam (3) par
M. de Loriol, sur les spécimens récoltés par M. Mayer-Eymar, me
donna l'idée de rechercher cette couche à Poissons dans cette chaîne
de montagnes.
(1) Cf. R. Fourtau. Sur les sables à Clypéastres des environs des Pyramides de
Ghizeh. B. S. G. F., 3" série, t. XXVI, pajxe 39, janvier 18118.
(2) Dames. Ueber eine Wierbelthierfauna von der westliehen Insel der Birket-
el Qurun in Fajum. Sttz. der K. preuss. Ak. der Wiss. Berlin, t. VI, p. 130, 1883.
(3) do Loriol. Notes pour servir à l'histoire des Echinodermes. VI. Genève, 1897.
Cimetière
arabe
t.— -- —«"".-Vi- rr -
Fig. 2. — Coupe de la carrière
au sud du cimetière arabe
de Kafr el Ahram.
a, Agglomérats pléistocènes avec
Ostren cucullata Born. ; b}
Calcaire à Carolia placunoi-
des Cont. ; c, Marnes salifères
et gypsifères ; rf, Cale, blanc
siliceux avec Ecnxnolampas
gtobulus Laube ; e, Marnes
schislo-argileuses (tafia) avec
débris de Poissons ; /*, Cale,
jaunâtre siliceux avec moules
de bivalves Lucina ? sp. et
Fibularia Lorioli Thomas et
Gauthier ; g, Cale, siliceux
sans fossiles ; A, Détritus d'ex-
ploitation.
1899 AUX ENVIRONS DES PYRAMIDES DE GHIZEH 239
Je compulsai d'abord mes notes et constatai que Lefebvre, dans
sa lettre à Cordier, publiée dans le Bulletin de notre Société (1),
avait signalé un niveau à dents de Poissons à 124 pieds au-dessus
de la couche à dents de Squales du Lutétien inférieur, où j'avais
récolté les restes étudiés précédemment par M. Priem (2).
C'était donc à 40 métrés au-dessus de cette couche que se trouvaient,
d'après Lefebvre, ces restes de Poissons.
Je dirigeai d'abord mes recherches du côté du Gebel Ghiouchy,
point culminant de la chaîne du Mokattam et rencontrai en effet la
couche indiquée par Lefebvre.
C'est dans le chemin de carriers qui conduit sur le plateau supé-
rieur aux carrières de Bir Mouna, où l'on exploite la couche à
Cardium Schweinfurthi comme pierre de taille, que je rencontrai
l'affleurement de cette couche ; la coupe ci-dessous donne une idée
de sa position.
Cette coupe va du nord-ouest au sud-est. Les dents de Poissons que
j'y ai récoltées ont été en-
voyées par moi à M. Priem N 0 !^!Z^Z S.E
vllii'H/l»/l[tff'M|i
qui veut bien se charger de
les décrire.
Il était intéressant de Se.1 el Dabban
rechercher alors si cette J^— ^
couche se retrouvait en tdr^*^~T :~:2--~
d'autres points du Mokat- *&^
tam. Je me Suis livré à FiK- 3- — Coupe au Gebol Giouchy prise sur
, . . . le sentier de Sikket-el-Dabban.
cette recherche en trois n t .. , mj „ _ t
. .. ,.„. A , a, Cale, à ( arolxa placunmdes Cont.; 6, Cale,
endroits différents sur le à Fibularia Lorioli Th. et G., Ttiagastea
versant nord de l'anticli- Lucxani de Loriol, Vidaris sp. ; c, Cale, jau-
nâtre avec débris de Poissons ; a. Cale, a
nal de la chaîne et trois Voluta Rostellaria et Echinolampas Cra-
fois mes retfcrcbes ont été meri ,,e ^^ ; '• Detr"U8-
couronnées de succès, et j'ai pu ainsi envoyer de nouveaux spéci-
mens à M. Priem.
La différence de cote entre le point du Giouchy où j'ai recueilli
les restes de Poissons et la carrière de Kafr el Ahram, peut être
évaluée h 150 mètres, il s'ensuit donc que nous devons admettre,
pour l'expliquer, l'existence d'une faille représentée actuellement
par la vallée du Nil. Or, les environs du Caire nous offrent beaucoup
d'exemples de dislocations, et celte hypothèse n'a rieu d'exagéré.
(I) Cf. ». S. G. F., I" série, t. X, p. 144, 1831).
f2) Priem. Sur les Poissons de l'Koeène du Mont Mokattam (Egypte). H. S. F. G'.,
3- série, tome XXV, p. 2l>2, 1W7.
240 POISSONS FOSSILES AUX ENVIRONS DES PYRAMIDES DE GHIZEH 10 ÂV.
Je me réserve d'ailleurs dans un travail ultérieur de parler de ces
failles que n'a point vues M. K. Zittel, et dont quelques-unes ont été
déterminées et étudiées par notre confrère M. J. Walther, d'iena (1).
En résumé le Lutélien d'Egypte m'a donné jusqu'à présent trois
niveaux à Poissons :
1° Le niveau tout-à-fait supérieur de l'Ile du Birket Karoun,
étudié par Dames (2) ;
S0 Le niveau un peu inférieur au premier puisqu'il en est séparé
par les couches à Carolia que je viens de décrire eu quelques mots
et dont M. Priem va décrire les restes ;
3° Le niveau à Carcharodon aurlculatus Blainville sp. et Pycnodus
mokattamensis Priem, dont les fossiles ont déjà été décrits en 1897
par M. F. Priem (3).
Les deux premiers niveaux appartiennent au Lutétien supérieur,
le troisième au Lutétien inférieur et correspond au calcaire grossier.
Mon excellent confrère et ami M. G. Schweiofurth m'a indiqué
à Hélouan et dans l'Ouady Atfieh, au sud du Caire, dans la chaîne
arabique, deux couches à empreintes de Poissons que je n'ai pu
encore étudier, surtout dans l'Ouady Atfieh qui est d'un accès
difficile vu le manque absolu de communications. J'imagine que
c'est dans ces couches que se trouvent les restes de Perça Lorenti
décrits par H. von Mayer, mais comme je n'ai pu en avoir de
spécimens je réserve la question de leur niveau jusqu'au jour où
j'aurai pu en entreprendre l'étude, me bornant à indiquer aujour-
d'hui à titre documentaire ce quatrième horizon à Poissons.
(1) J. Walther. L'apparition de la craie aux environs des Pyramides. Bull,
institut Egyptien, f série, n° 8, p. 1, 1887.
(2) Dames. Loc. cit.
(3) Priem. Loc. cit.
1899 241
SUR DES
POISSONS FOSSILES ÉOCÈNES D'EGYPTE ET DE ROUMANIE
ET RECTIFICATION RELATIVE A
PSEUDOLATES HEBEHTI Gervais sp.
par M. F. PRIEH.
(Planche II).
SOMMAIRE
I. — Poissons de l'Eocène d'Egypte : 1' Lutétien inférieur. Pycnodu* mokatta-
mensis Prie m, Lamna Yinrenti Wlnkler sp. — 2° Lutétien supérieur. Gisement
de Kafr el Ahram. Carcharia* (Aprvmodon) frequens Dames, Carcharias
(Prionodon) sp., Saurocephalus Fajvmensis Dames, Cœlorhynckus sp. —
Faune ichthyo logique do Kafr el Ahram. — Lutétien supérieur de la région du
Mokattam. Odontaspis Abbatei n. sp. — Faune ichthyologique du Lutétien du
Moka t ta m.
II. — Poissons êocènes de Roumanie. Scorpmnoides Popovicii n. g., n. sp. —
Scopélidé de genre indéterminé. — Remarques sur la faune ichthyologique do
Flysch éocène de Roumanie.
III. — Rectification relative à Pseudolalea Hébert i Gervais sp.
Nos confrères, MM. Fourtau et Popovici-Hatzeg, ont eu l'obli-
geance de me confier un certain nombre de restes de Poissons de
l'Eocène d'Egypte et de l'Eocène de Roumanie. Je décrirai ici d'abord
ceux provenant d'Egypte et que M. Fourtau a recueillis dans de
nombreuses courses géologiques.
I. — Poissons de l'Eocène d'Egypte
1° Lutétien inférieur
Pycnodus mokattamensis Priem.
(Pi. il, fig. i).
F. Priem. Sur les Poissons de l'Eocène du Mont Mokattam (Egypte).
B. S. G. F., 3« série, t. XXV, 1897, p. 217-220, pi. VII, iig. 9-14.
J'ai eu l'occasion en 1897 d'étudier une nouvelle espèce de Pyciw-
dus de l'Eocène du Mont Mokattam et je lai décrite sous le nom de
12 Juin 1899. — T. XXVII. Bull. Soo. Géol. Fr. — Ni
242 PR1EM. — POISSONS ÉOCÈNES d'ÉGYPTE ET DE ROUMANIE 10 Avril
P. mokattatnensia. Elle était représentée par une dentition vomé-
rienne, un fragment de mandibule et quelques dents isolées. Ces
pièces m'avaient été remises par M. Pourtau et provenaient d'une
couche qu'il place dans le Lutétien I et qui correspond au calcaire
grossier moyen des environs de Paris.
Notre confrère m'a récemment envoyé un nouveau fragment
appartenant à la môme espèce et provenant du même gisement.
C'est la partie droite de la mandibule. Elle a été habilement dégagée
de sa gangue par M. Barbier, mouleur au Muséum. La rangée la
plus externe de dents n'est pas représentée (1), mais il y a cinq
dents de la rangée moyenne et quatre de la rangée interne.
Les trois premières dents de la rangée moyenne sont presque
ovales ; les deux dernières sont grossièrement arrondies. La troi-
sième dent est la plus grande; elle a un diamètre trausverse de
0m0i3 et un diamètre antéro-postérieur de 0n,008. Les dimensions
des deux dernières dents sont 0m01 pour le diamètre transverse et
0m009 pour le diamètre antéro-postérieur. Toutes ces dents ont une
dépression au centre et des stries sur les bords.
Les dents de la rangée interne sont très fortes, presque ovales,
avec l'extrémité interne à peine moins obtuse que l'extrémité
externe. Elles sont presque complètement lisses ; la première est la
plus allongée dans le sens transverse ; son diamètre transverse est
0m02 et son diamètre antéro-postérieur 0m01. La distance de la
rangée principale au bord interne de la mandibule est de 0m018.
Cette dentition mandibulaire a des rapports avec celle de P. Bower-
banki Egerton (2) de Sheppey, mais les dents de la rangée principale
et de la rangée moyenne sout ovoïdes dans cette dernière espèce,
parce que l'extrémité interne des dents priucipales et l'extrémité
externe des dents moyennes sout effilées tandis que chez P. mokaî
tatueïisis ces deuts sonl plus obtuses.
Lamna Vincenti Winkler sp.
(PI. Il, fig. 2-4).
Winkler. Deuxième mémoire sur des dents de Poissons du terrain
bruxellien. Arch. Musée Teyier, vol. IV, 1876, p. 25, pi. II, fig. 9-10.
(1) Deux dents de la rangée externe se trouvent sur le fragment de mandibule
représenté. B. S. G. F., 3' sér., t XXV, 1897, pi. VII, fig. 11.
(2) Egerton. On some new Pycnodonts. Geol. May., n«>w séries, dec. II, vol. IV,
1877, p. 52-54, pi. III, fig. 1-2.
1899 poissons éocènes d'égypte et de Roumanie 243
A. Smith Woodward. Catalogue of the fossil Fishes in the British
Muséum, t. I, 1889, p. 403.
F. l'riem. Loc.cit., p. 212, pi. VII, fig. 1-3.
M. Fourtau a trouvé dans le Lutétien I du plateau des Pyramides
de Ghizeh une quinzaine de dents de Lamna Vincenti. J'ai déjà eu
l'occasion de m'occuper de cette espère bien reconnaissante à ses
faces lisses, ses bords tranchants et aux doubles (lenticules latéraux
larges et pointus. Je figure ici quelques unes de ces dents à cause
de leur belle conservation.
Ou peut signaler une petite deut basse et large tout à fait posté-
rieure, dont les denticules latéraux sont simples et se confondent
presque avec la pointe principale.
11 faut indiquer dans le Lutétien l de la chaîne arabique, près de
Béni Souef, une deut antérieure mal conservée de Carcharodon
auriculatus Blainv. sp.
Des détritus d'érosion du pied du Mokattam ont fourni à
M. Fourtau quelques dents d'Oxyrhina Desori Ag. (pi. H, fig. 5-6)
et deux dents droites, striées ù la face interne, qu'il faut rapporter
à Odontaspis elegans Ag. sp. (pi. II, fig. 7). Cette espèce si répandue
n'avait pas encore été signalée au Mokattam.
2° Lutétien supérieur
Gisement de Kafr el Ahham
La plupart des pièces envoyées par M. Fourtau proviennent d'un
gisement nouveau découvert par notre confrère à Kafr el Ahram
(Cafra de 0. Fraas) au nord du Gebel Chelloul, situé lui-môme au
sud des Pyramides de Ghizeh. On trouve là des calcaires marneux
passant aux marnes jaunes (tafia des Arabes) qui appartiennent,
d'après la note présentée à cette même séance par M. Fourtau, au
Lutétien II et, par suite, à un niveau supérieur au précédent.
Ces calcaires marneux ont fourni les restes suivants :
Carchakias (Aprionodon) frequens Dames.
(PI. H, tig. 8-15).
W. Dames. Ueber eine tertiâre Wirbelthierfauua von der westlichen
Insel des Birket el Qurùu im Fajum (/Egypten), Sitzungsb. K.
preuss. Akad.Wiss. Berlin, physik-math. Cl. t. IV, 1883, p. 143,
pi. 111, fig. 7 a-/;.
244 f. priem 10 Avril
Cette espèce a été établie par M. Dames pour de nombreuses
dents de petite taille dont la couronne est d'une hauteur inférieure
à la largeur de la base et dont la racine large et basse présente en
son milieu un sillon profond. La couronne se prolonge sur la racine
de chaque côté de la poiute par une sorte de crête à bord tranchant
ou légèrement plissé sans qu'il y ait jamais de vrais denticules
accessoires. La face interne de la couronne est bombée et la face
externe plate ; elles sont toutes deux lisses. La forme est assez
variable. Il y a des dents dont la pointe est droite et élancée, d'au-
treè, au contraire, dont le cône plus large, plus court, est ou bien
droit, ou bien, plus souvent, arqué vers l'arrière. Par analogie avec
les Aprionodon actuels, les premières dents appartiennent à la
mâchoire inférieure et les secondes à la mâchoire supérieure. Les
dimensions de ces dents diffèrent beaucoup, il y en a dont la cou-
ronne mesure 0m009 à 0m01 de hauteur et d'autres n'ayant comme
hauteur de la couronne que 0m004 et même 0m002. Ces dents sont
très abondantes à Kafr el Ahram ; j'ai pu en examiner quarante-
cinq de toutes les tailles.
CARCHARIA8 (PRIONODON) Sp.
(PI. II, fig. 16).
Une autre petite dent, dont la couronne est conservée ainsi
qu'une partie de la racine, est absolument droite, sa couronne
triangulaire légèrement bombée sur la face interne, presque plate
sur la face externe et lisse sur les deux faces, présente sur ses
bords des denticulations serrées, arrondies, bien visibles à la loupe
et allant jusqu'au sommet de la couronne. Celle ci a une hauteur
deOm008 et une largeur deOm005à la base. La racine est plus haute
sur la face interne que sur la face externe ; elle y a une hauteur
de 0m004. Il n'y a pas trace de denticules latéraux. Cette dent paraît
appartenir au geure Carcharias et au sous-genre Prionodon où les
dents sont denticulées sur les bords. Elle a des rapports avec les
dents de Gheziret el Korn, dans le Birket el Karoun, que M. Dames (1)
appelle Corax Egertoni Ag., dents qui paraissent appartenir en
réalité au genre Carcharias (Prionodon) suivant M. A. Smith Wood-
ward (2) et dont l'identification avec l'espèce d'Agassiz est d'ailleurs
douteuse.
(1) Dames. Loc. cit., p. 142, pi. III, flg. 5.
(2) A. Smith Woodward. Catalogue, t. I, 1889, p. 440.
1899 poissons éocènes d'égypte et de Roumanie 245
Saurocephalus Fajdmensis Dames.
(PI. II, fig. 18-19).
Daines. Loc. cit. p. 147, pi. III, fig. 12 a-c.
Daos le gisement de Kafr el Ahram, M. Fourtau a trouvé deux
dents sans racine, légèrement bombées sur les deux faces, à bords
tranchants faiblement convexes. L'une d'elles a une hauteur de
0*001 et une largeur à la base de 0m003, l'autre est haute de 0m005
et large à la base de 0m004. On distingue à la loupe sur cette dernière
une très fine striation sur l'une et l'autre face, striation qui n'est
visible sur le premier exemplaire qu'à la base d'une des faces.
M. Dames a trouvé des dents semblables au Birket el Karoun et en
a fait une espèce nouvelle sous le nom de Saurocephalu* Fajumensis,
les rapportant au genre crétacé Saurocephalus. Jusqu'ici il est
impossible de préciser les relations zoologiques de ces dents.
COELORHYNCHUS Sp.
(PI. II, flg. 20).
Parmi les restes de Poissons trouvés par M. Fourtau se trouve un
fragment cylindrique, long de 0m021, ayant un diamètre de 0m008,
dont la surface porte de nombreux sillons profonds et pourvu d'un
canal central. C'est un Ichthyodorulite du genre Cœlorynchus. On ne
connaît pas la nature exacte de ceslchthyodorulites qui se trouvent
dans le Crétacé supérieur et dans l'Eocène. Suivant M. A. Smith
Woodward, ils pourraient avoir appartenu à des Chiméroïdes indé-
terminés.
M. Dames (1) a trouvé Cœlorynchus au Birket el Karoun. D'autre
part, M. A. Smith Woodward (2) a décrit sous le nom de C. gigas
des fragments trouvés en Egypte dans la roche du Grand Sphinx.
Pour terminer la nomenclature des débris de Poissons trouvés à
Kafr el Ahram il faut mentionner une petite vertèbre de Squale
appartenant probablement au genre Carcharias ; un petit fragment
aplati, finement strié sur ses faces, avec un sillon profond sur l'une
des tranches et qui pourrait être un fragment de piquant de nageoire
de Squale; enfin quatre dents arrondies du genre Chrysophrys
(pi. II, fig. 21-24).
(1) Dames. Loc. cit., p. 148.
(2) A. Smith Woodward. Ami. Mag. fiât. HxsL, (3e série, t. I, 1888, p. 225, et
Catalogue, II, 1891, p. 122.
2'#6 F. prirm 10 Avril
Faune ichthyologique de Kafr el Ahram
En résumé, cette faune ichthyologique du nouveau gisement
découvert par M. Fourtau, a des rapports avec celle des couches du
Birket ei Karoun étudiée par M. Dames. Il y a deux espèces com-
munes : Carcharias (Aprwnodon) frequens Dames et Saurocephalus
Fajumensis Dames, sans compter Carcharias (Prionodon) sp. qui
rappelle les dents décrites par M. Dames sous le nom de Corax
Egertoni Ag. et Cœlorhynchus.
L'âge des couches du Birket el Karoun est incertain, M. Dames les
regarde comme éocènes ou oligocènes (1). M. Fourtau place les
couches de Kafr el Ahram dans le Lutétien supérieur et les regarde
comme un peu plus anciennes que celles du Birket el Karoun, qui
seraient aussi du Lutétien supérieur et par suite éocènes.
Lutétien supérieur de la région du Mokattam
Dans la région du Mokattam se trouvent aussi des couches appart-
enant au Lutétien supérieur et que M. Fourtau considère comme
du même âge que le gisement de Kafr el Ahram.
Il m'a envoyé des dents de la tranchée d'El Orta au Gebel Abiad.
Ces dents, mal conservées, paraissent appartenir à Carcharias
frequens Dames.
D'autres débris plus nombreux proviennent du Gebel Ghiouchy,
sur le sentier de Sikket el Dabhan. J'y ai reconnu des dents de
Carcharias frequens Dames ; deux dents de Carcharias (Prionodon)
sp. ressemblant beaucoup à celles décrites par M. Dames sous le
nom de Corax Egertoni Ag. ; Tune d'elles est figurée pi. II, fig. 17.
Il y a aussi des débris dWncistrodon armatus Gervais sp., des mor-
ceaux de petites plaques latérales et une plaque médiane de Mylio-
bâtis (pi. II, fig. 25), une dent à couronne complète sans denticules
latéraux que je rapporte à Oxyrhina Desori Ag. Enfin je dois décrire
une petite dent du môme gisement de Gebel Ghiouchy que je pense
appartenir à une espèce nouvelle.
Odontaspis arbatei n. sp.
(PI. II, fig. 26).
II s'agit d'une petite dent verticale, élancée, à courbure légère-
ment sigmoïdale, à face interne bombée, à face externe presque
11) Dames, hoc. cit., p. 153.
1899 poissons tocÈNEs d'égypte et de Roumanie 247
plate, lisse sur les deux faces. Les denticules latéraux sout conservés
d'un côté: il y en a deux, bien séparés du denticule principal;
l'interne est mince et pointu, l'externe bien séparé du précédent
est beaucoup plus bas, presque insignifiant. La ligne basilaire de la
couronne est droite, présentant à la face externe une légère dépres-
sion. La racine est en partie brisée, avec un sillon profond au milieu.
Les dimensions sont : longueur de la couronne, 0m005 ; largeur a
la base, 0m002 ; épaisseur à la base, 0m002.
Cette petite dent a des rapports avec <). Bronni Ag. du Danien et
0. Hntoti Winkler sp. de l'Eocène inférieur (Heersien, Landénien,
Yprésien, Thanétien) de Belgique et d'Angleterre, mais elle diffère
de tous deux par sa petite taille, et en outre de 0. Bronni par sa
courbure plus accusée et de 0. Rutoti par la présence du profond
sillon à sa racine.
Je crois que cette dent appartient à une espèce nouvelle, pour
laquelle je propose le nom d' Odontaspis Abbatei. Abbate-pacha,
Président de la Société de géographie du Caire et Vice-président de
l'Institut égyptien, a accordé une précieuse assistance à M. Fourtau,
lors de ses excursions dans le désert libyque.
Faune ichthyologique du Lutétien du Mokattam
J'ai déjà eu l'occasion (B. S. G. F., 3« sér., t. XXV, 1897, p. 224)
de donner la liste des Poissons du Lutétien I du Mokattam. Nous
venons de voir que le Lutétien II de la même région contient
Carcharias fréquent Dames, Carcharias (Prionodon) sp., Oxyrhimi
Desori Ag., Odontaspis Abbatei ' n. sp., Myliobatix sp. et Ancistrodon
armatns Gervais sp. Des détritus d'érosion du Mokattam il faut
ajouter Odontaspis elegans Ag. sp. qui accompagne Oxyrhina Desori.
Je dois rappeler aussi l'existence dans l'Eocène du Mokattam,
sans indication précise de niveau, de Myliobatix Pentoni A. Smith
Woodward (1) remarquable par les grandes dimensions de ses
plaques dentaires. Par comparaison avec M. aquila actuel, cette
espèce devait avoir un disque large de 5 mètres.
Enfin, H. von Meyer (2) a décrit sous le nom de Perça (Smerdls)
Lorenti, un Poisson provenant d'un niveau non déterminé du
Mokattam.
(1) A. Smith Woodwahd. On the dentition of a pigantic extinct spocirs olMylio-
batis from the lower tertiary formation of fyrypt. Proc. Zool. Soc. Lvnrton, 1893,
p. 558-:iT>9, pi. XLVII1.
(il H. von Meyer. Palaontographica, t. I, 1N51, p. 105-106, pi. XII, fip. 3.
248 f. priem 10 Avril
II. — Poissons éocènes de Roumanie
Notre confrère M. Popovici Hatzeg a bien voulu me communiquer
deux Poissons qu'il a recueillis dans des marnes très développées
dans la Valea Caselor, près du village de Fieni, district de Jalomitza
(Roumanie). Ces marnes, en dehors d'empreintes de Poissons, ne
contiennent pas de fossiles ; elles alternent avec des plaquettes de
grès contenant des traces hiéroglyphiques énigmatiques, des Nura-
mulites et d'autres Foraminifères. Cette formation constitue pour
M. Popovici (t) un Flysch -éocène ; elle repose sur les marnes rouges
du Sénonien et disparaît sous les dépôts du Miocène (étage helvé-
tien).
Les Poissons de la Valea Caselor appartiennent à deux espèces.
ScorpjENoides Popovicii n. g., n. sp.
(PI. II, fig. 27-30).
Le premier de ces Poissons est représenté par une empreinte et
une contre-empreinte. Il a une longueur totale de 0m016. La tète
très forte, aussi large que longue, occupe le tiers de cette longueur
totale. La gueule est largement ouverte; sur les mâchoires il y a
des traces de dents. Une baguette osseuse réunit l'anneau sous-
orbitaire au préopercule. Ce dernier présente une demi-douzaine de
pointes très nettes, dont les trois plus longues se trouvent à l'angle.
Le corps est mince, haut de 0m002. La colonne vertébrale et ses
apophyses se voient très nettement. Il y a 26 ou 27 vertèbres.
11 y a deux nageoires dorsales de même longueur. La dorsale
épineuse, qui commence très près de la tète, est formée de six
rayons. Le premier, très long, a plus que la longueur de la tête
(0m006), les trois suivants sont plus courts et décroissent régulière-
ment, ils ont environ 0m002. Les deux derniers sont très petits et
en partie cachés par le quatrième. La dorsale molle, peu éloignée
de la précédente, est formée de dix petits rayons.
La nageoire anale, opposée à la dorsale molle, présente trois
rayons épineux et, à la suite, de courts rayons mous mal conservés
qui semblent au nombre de six ou sept. Les piquants de l'anale
sont sensiblement égaux et atteignent la longueur du second piquant
dorsal.
(1) Popovici. Etude géologique des environs de Campulung et de Sinaia (Rou-
manie). Thèse de la Faculté des Sciences de Paris, 1898, p. 151-152.
1899 poissons eocènes d'Egypte et de Roumanie 249
La nageoire caudale, longue de (MXtë, est légèrement échancrée
et composée de seize rayons.
Sous la tête, une masse informe avec traces de rayons représente
seule les nageoires pectorales. Les nageoires ventrales thoraciques
sont très longues et atteignent eu arrière l'anale. Elles sout compo-
sées d'un grand rayon épineux et de cinq courts rayons mous ; la
longueur du piquant est de 0m006. On voit très bien en avant des
ventrales la ceinture pelvienne. On ne voit pas trace d'écaillés.
Ce Poisson remarquable doit évidemment être rangé, à cause de
ses piquants, parmi les Acanthoptérygiens. L'arc osseux qui réunit
le préopercule à l'anneau sous-orbitaire, le préopercule fortement
armé font songer immédiatement aux Cottidés ou aux Scorpénidés,
mais chez les Cottidés la dorsale molle et l'anale sont plus longues
que la dorsale épineuse, ce qui n'a pas lieu ici. Comme chez les
Scorpénidés, la dorsale épineuse a au moins la même longueur
que la dorsale molle, l'anale est courte, les piquants dorsaux sont
très développés. Nous rangeons donc le Poisson de Roumanie dans
la famille des Scorpénidés. Cependant la dorsale divisée au lieu
d'être absolument continue, le petit nombre des piquants dorsaux
qui sont généralement nombreux dans cette famille, la caudale
échancrée au lieu d'être arrondie, la grande longueur des ventrales,
le distinguent des genres actuels. L'une des différences les plus
saillantes est précisément le grand développement des ventrales,
mais M. Vaillant, Professeur au Muséum, qui a bien voulu examiner
ce fossile, m'a fait remarquer que la petite taille du Poisson indique
un individu jeune et que chez les jeunes, soumis à de plus grandes
chances de destruction, certaines nageoires sont souvent beaucoup
plus développées que chez les adultes. En tenant compte de cette
explication à la grande longueur des ventrales, il reste assez de
différences avec les genres actuels (Scorpienay Sebastes, Pelor, etc.)
pour être autorisé à rapporter le Poisson de la Valea Caselor à un
genre nouveau. Nous lui donnerons le nom de Scorp&noïdes et nous
établirons une espèce : Scorpienoïdes Popuvicii dédiée à notre
confrère M. Popovici.
Les caractères du genre sont :
Corps qiince, tète grosse, aussi large que longue, ayaut le tiers
de la longueur du corps. Dents petites. Préopercule avec fortes
pointes. Deux dorsales de même longueur et peu séparées Tune de
l'autre, la dorsale épineuse avec six piquants, le premier très long.
Trois piquants à l'anale qui est opposée à la dorsale molle. Caudale
échancrée. Pectorales mal conservées. Ventrales longues. 26 ou 27
vertèbres. Ecailles non visibles.
2!S0 F. PMUI 10 Avril
Les caractères de l'espèce sont :
Formule de la dorsale : VI 10. Formule de l'anale : 111 6-7.
Hauteur du corps comprise «aviron sept fois dans Ik longueur
totale et égale à moins de la moitié de la hauteur de la tète. Le
premier rayon épineux de la dorsale très développé, plus long que
la longueur de la tète, les autres décroissent régulièrement et les
deux derniers sont très petits. Les épines anales sont sensiblement
égales et atteignent la longueur du second piquant dorsal. Nageoires
ventrales longues (peut-être par suite du jeune âge de l'individu),
le rayon épineux plus long que la tête et atteignant en arrière la
nageoire anale.
ScOPÉLIDÉ DE GENRE INDÉTERMINÉ
(PI. II, ùf. 31).
Le gisement de la Vnlea Caselor a fourni à M. Popovici un autre
Poisson, mais dans un état de conservation très imparfait.
Le corps grêle a une longueur de 0m033 sur laquelle la tête
occupe 0m0i. La mandibule est plus longue que la mâchoire supé-
rieure, il y a des dents assez nettes. Vers le milieu du corps on voit
une dorsale composée de six rayons mous. L'anale o'est pas conser-
vée. La caudale o'est représentée que par une partie de son coutour
extérieur et parait être arrondie.
Tandis que la lête est vue de profil, les pectorales sout au contraire
de champ ; ou en voit une presque entière et des traces de l'autre ;
elles sont composées d'une quinzaine au moins de rayons courts.
Les ventrales sont opposées à la nageoire dorsale et sont formées
d'une douzaine de longs rayons ; une seule est visible.
H y a plus de trente vertèbres à la partie antérieure de la colonne
vertébrale: on voit de nombreuses baguettes fines et serrées qui
paraissent être des arêtes.
Sur le Poisson on ne voit pas trace d'écaillés, mais au voisinage
on peut observer plusieurs débris qui pourraient être des écailles
pseudo-cténoïdes, notamment un fragment assez net sous la cau-
dale, qui pourrait être aussi un débris de cette caudale.
L'absence de rayons épineux et les ventrales abdominales mon-
trent que ce Poisson appartient à l'ordre des Physostomes. La
détermination de la famille est difficile à cause de l'absence d'ccailles,
de l'absence de l'anale et aussi de ce qu'il est impossible de voir si
le bord de la mâchoire supérieure, est réimposé des Inter maxillaires
seulomeut cm eu même temps des maxillaires. Le corps allongé, la
1899 poissons éocènks d'égypte et de rolmanie 2.">l
large gueule armée de dents me font rapporter le Poisson ici étudié
à la famille des Scopélidés, détermination que M. Vaillant, après
un examen de ce fossile, a regardée comme admissible. Le mauvais
état de l'échantillon ne permet pas de pousser plus loin et de fixer
le genre. C'est le désir seulement «l'appeler l'attention des géologues
sur le Flysch éocène de Roumanie si pauvre en fossiles, qui m'a
déterminé à figurer cette empreinte imparfaite.
Remarques sur la faune ichthyologique
du Flysch éocène de Roumanie
D'après ce qui précède, la faune ichthyologique du Flysch éocène
de Roumanie comprend un Scorpénidé et un Scopélidé.
Il y a des Scopélidés assez douteux pour la plupart dans le Crétacé
supérieur de Comen (Istrie), de Sahel Alina (Liban), de Sendeuhorst
(Westphalie). Il y en a un aussi dans les schistes de (îlaris (Oligo-
cène inférieur) où Wettstein a étudié Scopeloides glaronensis Agassiz
sp. Ils se développent ensuite dans le Miocène supérieur de Licata
(Sicile) avec des genres voisins des genres actuels (Avapterns.
Paraxcoprlvs Sauvage).
Les Scorpénidés fossiles sont rares. Ils ne sont représentés que
par le genre Srorpwna dans les marnes aquitaniennes (Oligocène
supérieur) de Radoboj, en Croatie, dans le Miocène du bassin de
Vienne et dans celui d'Orao. M. Kramberger-fïorjanovic (i) a décrit
deux espèces de Scorpwna provenant des marnes de Croatie :
S- Pilan du gisement de Radoboj et S. mini ma du gisement de
Dolje. Elles présentent bien les caractères du genre Scorptena actuel.
Le Scopélidé des m il mes de la Valea Caselor montre une certaine
ressemblance avec Scopeloidctf glaronemi* Wettst. des schistes de
61a ri s [%) autant qu'on peut en juger dans l'état de mauvaise
conservation de notre Poisson. Toutefois le Poisson de (îlaris, mieux
conservé, montre une longue anale et une caudale fourchue, tandis
que chez celui de Roumanie nous ne connaissons pas l'anale et la
caudale parait arrondie. Nous avons vu d'autre part que le Scorpé
nidé de Roumanie n'appartient pas au genre Scorp&na actuel, qui
a une queue arrondie et une dorsale continue avec douze ou treize
piquants. Il y a donc des analogies entre les Poissons des marnes
(1) Draoutik Krambehqer-Gorjanovic. Die Jungtertifiiv Kischfauna Ouations.
1" ptrtie. Halaont. Oe*t. Ungarn*, t. III, 188'*, p. IOs-111, pi. XXII, IU. l ±.
(S) Wimiu*. Ueber die Fischfauna des tertiaeren Glarncrschirfrrs. Denk*chr.
behwtix. Patamf. Geêdlsch., t. XIII. 1880, p. îft-;>7, pi. n. tiir. 7-13.
252 PRIEM. — POISSONS KOCÈNES D* EGYPTE ET DE ROUMANIE 10 Avril
de Roumanie et ceux de Glaris et de Radoboj, mais il y a aussi des
différences. Les analogies en question pourraient faire regarder les
marnes de la Valea Caselor comme oligocènes, si M. Popovici n'était
pas arrivé par des raisons d'ordre stratigraphique à les placer dans
l'Eocène.
Je remercie vivement M. Popovici de m'avoir communiqué ces
Poissons fossiles de Roumanie et M. le professeur Vaillant des
utiles renseignements qu'il a bien voulu me fournir.
III. — Rectification relative à Pseudolates Heberti Gervais sp.
Dans ma note sur la faune ichthyologique des assises montienues
du bassin de Paris (B. S. G. F., 3» série, t. XXVI, 1898, p. 399, j'ai
été amené à rapporter Lates Heberti Gervais à un genre nouveau
Pseudolates. M. A. Smith Woodward, tout en approuvant l'établis-
sement d'un nouveau genre pour Lates Heberti, m'a fait observer que
Pseudolates est préoccupé par un Poisson vivant. En effet, Alleyne
et Macleay (Proc. Linn. Soc. N. S. W.t t. I, 1877, p. 262) ont décrit
sous le nom de Pseudolates cavifrons un Poisson des eûtes et estuaires
d'Australie, qui n'est autre que Lates calcarifer Bloch sp. (1). Je
propose au lieu de Pseudolates le nom de Prolates. Lates Heberti
Gervais deviendrait ainsi Prolates Heberti Gervais sp.
EXPLICATION DE LA PLANCHE II
Les échantillons sont représentés sans retouches et grandeur naturelle, sauf
avis contraire.
Flg. 1. — Pycnodus mokattamensis Priera. LutéUen inférieur du Mokattam.
Moitié droite de la mandibule.
Fig. 2-4. — Lamna Vincenti Winkler sp. Lutétien inférieur du plateau des
Pyramides de Ghizeh. — fig. 2 et 3, dents antérieures; fig. 4, dent latérale, vues
par la face interne.
Fig. 5-6. — Oxyrhina Desori Agassiz. Détritus d'érosion du pied du Mokattam.
— fig. 5, dent latérale, et fig. 6, dent antérieure, vues par la face externe.
Fig. 7. — Odontaspis elegans Agassiz sp. Détritus d'érosion du pied du Mokat-
tam. Dent antérieure vue par la face interne.
Fig. 8-15. — Carcharias {Aprionodon) frequeiis Dames. Lutétien supérieur.
Gisement de Kafr el Ahram. — fig. 8-11, dents inférieures ; fig. 12-15, dents
supérieures, vues par la face interne.
(I) Boulenger. Catalogue of the Perciform Fishes in the Brltish Muséum.
2* édition, t. 1, 1895, pp. 361 et 363.
1899 LES ACCIDENTS FRONTAUX DE LA BARRE DE CA US SOLS 253
Flg. 46. — Carcharias (Prionodon) sp. Dent voe par la face Interne. Lutétlen
supérieur. Gisement de Kafr el Ahram.
Flg. 17. — Carcharias [Prionodon) sp. Dent vue par la face Interne. Lutétien
supérieur du Gebel Ghiouchy.
Flg. 1S-19. — Saurncephalus Fajumensi* Dames. Lutétien supérieur. Gisement
de Kafr el Ahram.
Flg. 20. — Cœlorhynchus sp. Lutétien supérieur. Gisement de Kafrel Ahram.
Flg. 21-24. — Chrysophrys sp. Dents. Lutétien supérieur. Gisement de Kafr
el Ahram.
Flg. 25. — Myliobatis sp. Plaque médiane. Lutétien supérieur. Gisement du
Gebel Ghiouchy.
Fig. 26. — Odontaspis Âbbatei n. sp. Dent antérieure vue de côté. Lutétien
supérieur. Gisement du Gebel Ghiouchy.
Flg. 27-28. — Scorpsenoï<l<>$ Popovicii n. g., n. sp. Empreinte ot contre-
empreinte. Marnes éocènes de la Valea Caselor (Roumanie).
Fig. 29-30. — Les mêmes grossies trois fois.
Fig. 31. — Scopélidé de genre indéterminé. Marnes éocènes de la Valea Caselor
(Roumanie).
LES ACCIDENTS FRONTAUX DE LA BARRE DE CAUSSOLS
(ALPES-MARITIMES)
par M. Ad. tiCÉBHARI).
Parmi les nombreux accidents frontaux de la barrr de Caussols
(Alpes-Maritimes), il en est un. en particulier, aux lieux dits Grêle
et Y Aire de la Dourne (inscription VAdrech de l'Etat-Major), où uue
nappe callovienne, visiblement émanée de la barre, s'avance au-
dessus du Cénomanien en portant elle-même, dans de petits plis
parallèles au pli principal, des lambeaux du même Cénomanieu,
que leur grand rapprochement, leur aspect non trituré, l'absence
enfin de Néocomien et de traces, en encadrement, des niveaux
jurassiques supérieurs, ne permettent guère de regarder, ainsi
qu'il arrive fréquemment, comme les jalons axiaux de grands plis
jurassiques doublement étirés et imbriqués.
D'autre part, l'évidente pénétration du Callovien par dessous
rend peu vraisemblable l'hypothèse d'apparitions du substratum
à travers des déchirures en boutonnière de la nappe compri-
mante. Au contraire, le surbaissement que montre précisément en
ce point le Callovien de la barre, descendu au niveau qu'occupent,
254 GUÉBHARD. ACCIDENTS FRONTAUX DK LA BARRE DE CAUSSOLS 10 Av.
à droite et à gauche, au-dessus du Crétacé, le Bajocien et le Batho-
nien, au point de montrer même, avec le premier, sur le côté, un
contact anormal, fournit une base matérielle à l'hypothèse de
l'avancée, en pleine masse molle du Crétacé, d'une nappe juras-
sique, relativement mince, qu'aurait préalablement ou simultané-
ment pliée en forme de gouge, une action locale de In composante
secondaire de la striction terrestre, perpendiculaire à la composante
principale, N.-S. Sous l'influence combinée de ces deux forces,
l'éperon jurassique, protégé en avant par le bouclier des bancs
supérieurs, que l'on voit actuellement, sur le front de poussée,
donner l'illusion d'un pli-faille presque vertical, se serait avancé
au sein même de la masse crétacée, suivant le plan de glissement
presque horizontal que semblent bien montrer les golfes d'érosion,
à fond crétacé, formés par les déchiquetures de la nappe jurassique,
vite débarrassée de sa surcharge crétacée, partout ailleurs que dans
les encoches ou petits plis secondaires formés par l'effet de la
résistance à la poussée.
Un exemple analogue, quoique, en quelque sorte, inverse, serait
fourni, en plus grand, par la bordure méridionale du large syncli-
nal de Caussols, à la Colle des Maçons, poiut d'inflexion de l'anti-
clinal de Ferrier, où un vaste éperon projeté vers le sud, mais par
relèvement, cette fois, et non par surbaissemeut, est venu labourer
comme un soc de charrue le Crétacé du synclinal de La Malle, en le
rejetant de part et d'autre sur les côtés et le mettant presque en
contact, à l'ouest, avec l'infralias argileux du plan de glissement.
Ici encore apparaît évidente l'action secondaire de la striction
perpendiculaire au méridien, sans laquelle pourraient difficilement
s'expliquer nou seulement les plis N.-S., mais aussi les nombreuses
inflexions des axes E.-O., auxquelles correspondent presque toujours
les étoilements de plis en patte d'oie qui compliquent si singuliè-
rement l'étude tectonique de la région.
1899 3tt>
Séance du Z4 Avril 18»»
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRESIDENT
M. 1\ Cambronue, Vice-Secrétaire, donne lecture du procès- verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
M. de Margerie présente à la Société l'ouvrage suivant : La carte
dt France, étude historique par le Colonel Berthaut, ± vol. in-4>.
M. E. de Martoniie signale daus les Yertuindlungen drr Geselhchaft
fur Erdkunde zu Berlin un article de M. Keilhack sur les anciens
lacs et les anciennes vallées du Plateau Baltique « Thaï und Seehil-
dung im Gebiet des baltischen Hôhenrtirkens ».
M. P. Cauibronne signale parmi les dons récemment parvenus à
la Société : 1° la 3e édition du Traité de Minéralogie de M. A. de
Lapparent ; ±' les deux premiers volumes de la collection
« Scientia ».
M. A. Gaudry entretient la Société du brillaut résultat déjà
obtenu pour les souscriptions du Congrès géologique international
de 1900.
M. M. Boule a le regret d'annoncer la mort bien prématurée, à
l'âge de 40 ans, de M. Charles Brongniart, qui était membre de
notre Société depuis 1876, et dont les obsèques ont eu lieu le 20 avril
1899.
Eu dehors de ses travaux sur les Insectes actuels, M. Charles
Brongniart s'était fait connaître par de nombreuses publications
paléontologiques et, notamment, par un grand mémoire sur les
Insectes (ossiles de Commentry, dont M. Fayol lui avait confié l'étude
et qui remplissent aujourd'hui plusieurs vitrines de la nouvelle
galerie de Paléontologie du Muséum. Ce mémoire, dont l'importance
avait été aussi hautement appréciée à l'étranger qu'en France, lui
avait mérité le grand prix des Sciences physiques de l'Institut.
M. Ch. Brongniart, en décrivant le Pleuracanthus Gaudryi nous
avait également fait connaître un des types d'organisation les plus
curieux que nous ait révélés la Paléontologie.
Notre regretté confrère avait un caractère aimable; au Muséum
tous ses collègues l'avaient en grande estime et on ne lui connaissait
que des amis. Je suis sûr d'être l'interprète de tous les membres de
la Société en adressant à sa famille l'expression de nos sincères
condoléances.
256 24 Avril
SUR LA TECTONIQUE DE LA COLLETTE DE CLARS
(ALPES-MARITIMES)
par M. A. «UÉBHARD.
Toutes les anomalies stratigraphiques de ce point célèbre dans
les annales de la Paléontologie : le brusque arrêt, à quelques mètres
au nord de la route, du fameux banc fossilifère du Gault, l'appa-
rente superposition, à la sortie est de la petite tranchée, du Nëoco-
mien au Cénoraanien, puis, plus loin, du Callovien en gros bancs,
flanqué d'Oxfordien fossilifère, au Crétacé donnant naissance à une
petite source, tout cela s'explique très simplement, si Ton consi-
dère la petite éminence de la Collette, d'une part, et, de l'autre, la
grosse masse tourmentée des Rouguières (au-dessus de la route,
K. 14,5) comme les extrémités, de deux des interdigitations anticli-
nales qui viennent, jusqu'au pied de la grande barre de l'Audibergue,
séparer les directions convergentes des sept synclinaux crétacés
que l'étude générale de la région montre confluant tous en patte
d'oie aux environs de ce même point.
Si, dans cette sorte de gripement étoile, en dessous d'un pointe-
ment vers le sud d'un des plis principaux de la région, Ton voit,
sous une forme différente, une manifestation spéciale de cette com-
posante de la striction terrestre, perpendiculaire au méridien, à
laquelle l'auteur a déjà cru pouvoir attribuer les accidents frontaux
que montrent les grands plis déversés vers le sud, on comprendra
que, parmi les plis secondaires, ail dû être affecté surtout de discon-
tinuités le pli médian, dirigé à peu près du nord au sud. Or, ce pli
est précisément celui que flanquent, à son confluent avec les autres,
la Collette de Clars, à l'ouest, et la colline des Rouguières à l'est,
tandis que le jalonne, en son milieu, un lambeau de poudingue
tertiaire, trait d'union certain avec le synclinal de la Colle de Mons.
Rien d'étonnant, dès lors, aux superpositions anormales constatées
et le seul problemeencoreincertain.au point de vue cartographique,
est de savoir si, par dessous les éboulis, le Callovien des Rouguières
rejoint celui qui forme la barre, en interrompant le synclinal cré-
tacé du pied de l'Audibergue, ou en le laissant passer.
fHoU De M. &: LSx\
Bull. Soc. Géol. de Franw
■■■■• Série, r. xxvn, ?i. s
(lU« ,\. lo.twlf fSgyl
0- G. Pil.rsl, Ira,
Poissons fossiles éo^ôiiss d'Egypte et de Ronituwàfi
► • ••
• ••
_-*.!
1890 257
NOTE SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES
DU BASSIN DE L'ISSER (DÉPARTEMENT D'ALGER)
ET DE QUELQUES AUTRES BASSINS DE LA COTE ALGÉRIENNE
par M. L. J. B. de LAIOTHE.
(Planche III)
M. Fie heur, dans son remarquable mémoire sur la Kabylie du
Djurdjura (1), consacré principalement à l'étude des terrains ter-
tiaires, a résumé brièvement ses observations sur les terrasses des
principaux fleuves qui arrosent cette région et sur les anciennes
plages de la zone côtière.
Notre confrère a distingué trois niveaux de terrasses : un niveau
supérieur, peut être pliocène, dominant de 135 à 200m les thalwegs
actuels ; un niveau moyen, situé au-dessous du précédent, d'une
quantité variable suivant les vallées ; un niveau inférieur, dont
l'altitude au-dessus des vallées varie de 20 à 40m.
Les alluvions récentes forment des plaines plus ou moins étendues
au fond des vallées.
Pour les anciennes plages, il admet deux niveaux : l'un à l'alti-
tude de 10 à 35m, l'autre à l'altitude de 40 à 50».
C'est d'après ces données qu'ont été coloriées les feuilles de
Ménerville et de Palestro.
A l'époque où M. Ficheur a commencé ses recherches, la plupart
des feuilles topographiques de la grande Kabylie n'avaient pas
encore été publiées ; il lui a donc été matériellement impossible de
déterminer avec précision les altitudes des anciennes plages et
terrasses et par suite de les suivre sur le terrain. D'ailleurs le
tracé des courbes de niveau de la carte est souvent trop défectueux
pour que Ton puisse les utiliser dans la détermination des altitudes,
sans un contrôle barométrique préalable qui nécessite des courses
réitérées, incompatibles avec l'établissement d'une carte géologique
détaillée.
Dans ces conditions, il m'a paru qu'une étude spéciale des
terrasses de quelques-uns des principaux cours d'eau de l'Algérie
(I) Ficheur. Descript. géol. de la Kabylie du Djurdjura. Etude spéciale des ter-
rains tertiaires, 1890, p. 398 et seq.
17 Août 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 17
258 de lamothe 24 Avril
et des anciennes plages, étude dans laquelle on utiliserait à la fois
les données de la carte et les indications fournies par le baromètre,
ferait peut-être apparaître des faits nouveaux et intéressants.
Cette tentative me paraissait d'autant mieux justifiée que j'avais
été, dès mon arrivée en Algérie, frappé de la disposition en gradins
superposés qui caractérise les anciennes plages de certaines parties
de la côte, et de la liaison intime qui existe entre quelques-unes de
ces plages et les nappes d'alluvions, notamment à l'embouchure
de Tisser. Il m'avait semblé dès lors, que des recherches dirigées
dans cet ordre d'idées permettraient d'établir nettement la corréla-
tion des deux phénomènes, et de prouver que les mouvements
successifs d'émersion (1) qui ont donné naissance aux plages,
ont été la cause déterminante de la formation des nappes alluviales
étagées dans les vallées, chaque niveau de la mer correspondant à
une plage sur le littoral et à une nappe alluviale dans l'intérieur
des vallées. Dans cette hypothèse, la disposition des alluvions en
terrasses superposées serait la conséquence du creusement des
différentes nappes alluviales, à la suite de l'émersion de la plage
correspondante.
La solution du problème ainsi posé, nécessitait donc la recher-
che des anciennes plages et nappes alluviales, puis la détermina-
tion de leurs altitudes et enfin la démonstration de leur liaison.
C'est le travail que j'ai entrepris tout d'abord dans la vallée de
Tisser et dont la préseule note est le résumé. 11 établit, je crois, d'une
façon indiscutable pour cette vallée, la corrélation entre les terrasses
ou plus exactement les nappes alluviales dont elles sont les débris,
et les plages, et par conséquent entre les unes et les autres d'une
part et les mouvements du sol d'autre part ; il ma permis en outre
de reconstituer en partie l'histoire de la vallée de Tisser depuis le
pliocène inférieur jusqu'à l'époque actuelle.
J'aurais désiré pouvoir étendre mes recherches à l'ensemble de
la côte algérienne. Malheureusement, bien que la vallée de l'fsser
fût de beaucoup la plus abordable et celle où les terrasses et les
plages sont le mieux conservées, je nie suis heurté à de telles
difficultés d'observation, que l'étude de cette vallée a absorbé la
majeure partie des deux hivers que j'ai passés eu Algérie, et que
j'ai dû renoncer à entreprendre le même travail dans d'autres
vallées. — J'ai pu néanmoins rassembler par moi-même ou extraire
(1) 11 est entendu, une fois pour toutes, qu'il ne s'agit ici que de mouvements
relatifs, ri que les mots émersion ou immersion n'impliquent nullement que c'est
la côte qui s'est déplacée, ic niveau de la mer restant fixe.
1899 SUR LES ANCIENNE8 PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 259
de travaux antérieurs, des faits assez nombreux et assez précis sur
d'autres portions de la côte algérienne, pour me croire autorisé à
généraliser dans une certaine mesure et à appliquer à une notable
partie au moins de l'Algérie, quelques-unes des conclusions
déduites de l'étude de la vallée de Tisser.
Je tiens à remercier ici tout particulièrement M. Ficbeur, de
l'extrême obligeance avec laquelle il a bien voulu me signaler les
points où je pouvais espérer faire quelques observations intéres-
santes : sa profonde connaissance de la géologie algérienne m'a
évité bien des tâtonnements.
Chapitre I. — Anciennes plages de la côte
entre le Cap Blanc et le Cap Djinet (1).
Les anciennes plages de cette région sont caractérisées à la fois
par des particularités topographiques et par la nature des dépôts
qui les recouvrent.
Au point de vue topograplrique, elles sont formées par des plate-
formes plus ou moins larges, plus ou moins inclinées vers la mer,
qui interrompent la continuité des pentes et que Ton peut suivre
parfois sur de grandes étendues. Dans quelques cas, la position de
ces plateformes est telle qu'il est impossible d'attribuer leur forma-
tion à une autre action que celle de la mer. Sur quelques points,
plusieurs replats sont disposés les uns au-dessus des autres comme
les gradins d'un amphithéâtre.
Entre le Cap Blanc et le Cap Djinet, les gradins les plus éloignés
du rivage sont à 4 kil. ; dans le chenal de Tisser, cette distance
peut atteindre exceptionnellement 8 kil. L'altitude de la plupart
est comprise entre 0 et 100m; mais quelques-uns s'élèvent plus
haut, et il y a des traces très nettes d'une ancienne plage presque
horizontale à 200m.
Les replats s'observent indifféremment sur tous les terrains : ils
sont surtout développés et bien conservés sur les marnes bleues (2) ;
mais on en observe également sur le miocène, les liparites, les
granités, etc.
(I) Consulter la carte géol. détaillée de. l'Algérie, feuilles de Ménerville et de
Palestro, et la carte topographique, a 1.200.000*, feuilles «l'Alger et de Médéa. —
Ficheur. Op. cit., p. 393-398 et seq. — Pomel. Descrlpt. stratij?. de l'Algérie,
1889. p. 195.
<2) O sont les marnes appelées Sahéliennes par les géologues algériens ; elles
sont désignées sur la carte géolog. et sur les coupes par le signe m4 ; leur par-
tie supérieure, tout au moins, doit être considérée comme Plaisancienne.
260 de lamothe 24 Avril
Au point de vue lithologique les dépôts qui recouvrent ces replats
appartiennent à deux catégories bien distinctes : a) des poudingues
et des grès plus ou moins cimentés, prédominants jusqu'à l'altitude
de 30m ; b) des sables rouges avec ou sans galets, qui se rencontrent
jusqu'à l'altitude de 200m. En réalité, ces deux catégories sont très
probablement intimement liées, les sables paraissant n'être que le
résultat de la désagrégation et de l'altération chimique des pou-
dingues et des grès.
a. Grès et poudingues. — Ces dépôts qui figurent sur la carte
géologique sous les signes q,m, q„m, forment des bordures minces
et étroites sur les replats les plus bas, très près du rivage actuel.
Au Cap Blanc leur épaisseur peut atteindre 10m. Souvent les pou-
dingues sont presque exclusivement composés de petits galets de
quartz cristallin blanc ou translucide, de la grosseur d'une dragée
ou d'un pois, auxquels s'associent des quartzites du Crétacé, des
débris de schistes anciens, etc. ; les grès sont formés des mêmes
éléments. Tous ces dépôts sont stratifiés horizontalement : leur sur-
face présente parfois une pente marquée vers la mer.
b. Sables rouges. — Ces sables que la carte a désignés sous le
signe p1 sont argileux et presque toujours fortement colorés, ruti-
lants. Dans quelques cas ils ont été décolorés, sans doute par la
culture, et rappellent alors les sables des plages actuelles (plateau
des Béni Kous). Us sont souvent légèrement agglutinés ; tantôt ils
sont composés d'éléments fins, tantôt les éléments sont grossiers et
de nombreux galets leur sont associés. En général ces galets sont
petits, bien roulés, et parmi eux, les plus nombreux sont des quartz
blancs ou translucides. Lorsque ces derniers sont prédominants et
que leur diamètre ne dépasse pas' celui d'une noisette ou d'une
grosse dragée et qu'en outre les éléments fins ont été entraînés
par les vents, le sol reste couvert d'une multitude de petits galets
d'un blanc éclatant qui tranchent sur la couleur rouge des sables,
et donnent au terrain un aspect caractéristique.
Il n'est pas inutile d'ajouter que fréquemment des sables exclusi-
vement composés d'éléments fins sont recouverts de galets de quart-
zites colorés ou d'autres roches, provenant par ruissellement de
poudingues plus anciens, à une époque antérieure au creusement
des vallées qui les séparent actuellement de leur point de départ
(cote 124 sur le plateau des Béni Kous).
Les sables présentent souvent des traces de stratification. Les
sables fins sont parfois formés d'une multitude de feuillets minces,
inclinés dans tous les sens, et dont la disposition rappelle celle des
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 261
dunes. Les sables grossiers sont aussi fréquemment stratifiés ; la
stratification est indiquée par des lits horizontaux de gravier ou
même de galets rangés les uns à côté des autres.
Les sables rouges couvrent d'une couche peu épaisse, mais con-
tinue, la surface des replats et les pentes qui y aboutissent ; excep-
tionnellement l'épaisseur de cette couverture peut atteindre une
vingtaine de mètres, notamment sur les plages d'unegrande étendue,
et sur les points où des dunes se sont accumulées. Ils s'étendent
indifféremment sur tous les terrains : marnes bleues, miocène,
li parités, granités..., etc. Nulle part je n'ai observé de preuves
d'un recouvrement des sables par les limons et graviers des
terrasses de Tisser, sauf dans le lit même du fleuve, près de
Modrabin, où des sables rouges entraînés des pentes voisines se sont
intercalés dans les limons.
L'altitude maximum atteinte par les sables ne dépasse pas 205m
dans la vallée de Tisser.
J'ajouterai, enfin, que sur quelques points il y a intercalation au
milieu des sables rouges de bancs de grès et de poudingues, géné-
ralement disloqués. Les sables apparaissent alors nettement comme
un produit de la désagrégation et de l'altération d'un dépôt préexis-
tant (plage de 30mau sud du Cap Djinet).
L'origine marine et littorale des dépôts que je viens de décrire,
à l'exception bien entendu des dunes qui leur sont associées locale-
ment, ne peut être mise en doute. Dans les poudingues et grès on
trouve fréquemment, sinon dans la vallée de Tisser, du moins dans
des dépôts identiques situés sur d'autres points du littoral algérien,
des coquilles marines appartenant exclusivement à des espèces
vivantes ou émigrées. Dans les sables, M. Ficheur a trouvé, et j'ai
moi-même recueilli dans des conditions de gisement qui ne laissent
aucune incertitude, des débris plus ou moins roulés de Pectunculus,
Venus Leur extrême rareté s'explique d'ailleurs tout naturelle-
ment par ce fait que les sables sont un produit d'altération.
Ine autre preuve de l'origine marine des sables me paraît du
reste résulter de leur composition même. Par l'extrême abondance
des galets blancs relativement aux autres, par la prédominance
parfois presque exclusive de ces galets et la régularité de leurs
formes et de leurs dimensions, les sables rouges contrastent d'une
façon complète avec les alluvions des ditïérents niveaux de Tisser,
qui sont en quelque sorte enchevêtrées au milieu d'eux, et s'élèvent
comme eux jusqu'à 200m. Dans ces alluvions, les galets blancs sont
262 de lamothe 24 Avril
toujours relativement très rares : les quartzites colorés forment la
presque totalité des galets. Il est par suite bien difficile d'attribuer
la prédominance des galets blancs dans des plages telles que celles
qui bordent la rive gauche de lisser près de son embouchure, à un
transport fluviatile dont le point de départ eût été dans les massifs
anciens de Test ou de l'ouest, et la seule hypothèse admissible
consiste à faire intervenir la mer.
Cette intervention peut être comprise de deux façons différentes :
on peut faire venir les galets blancs des massifs anciens jusqu'au
rivage le plus voisin, et admettre qu'ils ont ensuite cheminé sous
l'action des courants littoraux jusqu'aux points où nous les obser-
vons aujourd'hui. On peut aussi supposer que l'enrichissement en
galets blancs s'est effectué sur place, aux dépens des cailloutis des
alluvions anciennes, et qu'il est la conséquence de la plus grande
dureté du quartz cristallin. Sous l'action incessante des vagues, les
grès et quartzites colorés auraient été en majeure partie détruits,
et les éléments blancs auraient fini par prédominer. Ce qui donne
quelque vraisemblance à cette manière de voir, c'est ce fait que
d'une part les sables où abondent des galets sont toujours voisins
de cailloutis contenant les mêmes galets, ou même reposent sur eux,
et que d'autre part, on voit parfois à la base des sables des traînées
de galets assez gros où les éléments blancs sont rares, puis un
peu plus haut dans la même coupe des galets moins gros où les
éléments blancs sont déjà beaucoup plus fréquents, et finalement
vers le sommet une prédominance marquée de ces derniers (tran-
chées du chemin de fer entre Bellefontaine et l'Aima). En tous cas,
quelle que soit la véritable explication, il me paraît hors de doute
que la mer seule a pu intervenir et que par conséquent les dépôts
de sables rouges à galets représentent bien une formation littorale.
Ainsi que je lai dit plus haut, les sables rouges ont été désignés
sur la carte géologique par le signe p1 ; les plages basses ont été
distinguées à part sous les signes q'.m et q..,n. Pour M. Ficheur ces
plages seules font partie du Quaternaire ; les sables rouges appar-
tiennent au contraire entièrement au Pliocène supérieur. Notre
confrère admet que les sables se sont formés pendant cette période
et ont été ensuite relevés par un mouvement d'une très faible
intensité qui n'a occasionné aucun plissement ni accident remar-
quable (1) et qui a marqué la séparation du Pliocène et du Quater-
naire.
(1) Ficheur. Op. cit., p. 396.
1899 SUR LIS ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 263
Je regrette de ne pouvoir me ranger à cette opinion. Les traces
de stratification horizontale que j'ai observées jusqu'au voisinage
des points les plus élevés atteints par les sables (point 205 au S.W.
de Courbet à 4 kil. du rivage, point 99 à Ben Hamouch à 1 kil. 500)
me paraissent difficilement conciliables avec l'hypothèse d'un
redressement même faible. D'autre part, nous verrons bientôt que
les sables rouges occupent plusieurs niveaux bien déterminés dont
quelques-uns correspondent à la fois à d'anciennes plages et à des
terrasses d'alluvions de Tisser. Cette connexion entre les anciennes
plages et les anciennes alluvions entraîne le démembrement des
sables rouges dont une partie, la plus basse, devra, comme les
terrasses, être rapportée au Pleistocène, la partie la plus haute pou-
vant continuer à être rattachée au Pliocène supérieur.
Ces données préliminaires établies, je vais rapidement passer en
revue les anciennes plages de l'embouchure de Tisser.
Les plages bien conservées, et dont il est encore relativement facile
de retrouver le tracé, sont au nombre de quatre et correspondent
respectivement à des niveaux de la mer voisins de 15m, 30m, 53m et
100*.
1° Plage de 53m. — Je commencerai par cette plage qui est la plus
remarquable par ses caractères et sa netteté. Elle est représentée
sur la rive gauche de Tisser par le vaste plateau de Mandoura qui
se développe parallèlement à la côte sur 5 kil. de longueur et
1 kil. 5 de largeur.
Toute sa surface est couverte de sables rouges, fins ou remplis de
galets. Sur le bord de la coupure de Tisser près de Mandoura, les
sables épais de 4m seulement, sont séparés des marnes bleues par
10 à lim de graviers et cailloutis appartenant à un ancien lit de
Tisser (4* niveau). Mais ces alluvions ne sont qu'un étroit placage
(fig. 1), dont la largeur ne dépasse peut être pas 100m, et partout
ailleurs les sables recouvrent directement les marnes qui forment
en-dessous un vaste plan incliné vers la mer (1).
L'épaisseur des sables est de 15 à 30m à l'ouest de Mandoura ;
elle diminue vers le sud et l'ouest, où elle n'atteint probablement
pas 10m. Dans la plupart des coupes, les sables sont nettement
stratifiés horizontalement. Il y a près de Bordj Ali des dunes qui
se rapportent à ce niveau.
L'altitude primitive du plateau devait, près du bord nord, être
très voisine de 53m. On peut en conclure que près du rivage, sur le
(1) Pour la légende de toutes les Coupes, voir page 302.
264
DE LAHOTBE
24 Avril
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1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 2B5
bord sud, en raison de la grande largeur du plateau, la cote de la
mer devait atteindre environ 55m.
La plage de 53m se retrouve très nette sur la rive droite de
Tisser, où elle est représentée par trois plateaux très réguliers au
nord d'Haouch Bel Abbès.
A l'ouest de Courbet, entre ce village et Ben Hamouch, plusieurs
replats bien marqués appartiennent à ce niveau, et nous verrous
dans le chapitre IV que Ton en retrouve de nombreuses traces vers
l'ouest, autour du Corso, d'Ain Ta va, de Zéralda, de Ténès, d'Arzew.
2° Plage de 400™. — Si Ton quitte la plage de Mandoura pour
s'élever au sud, on gravit d'abord un talus de sables rouges recou-
vrant les marues bleues, et on arrive bientôt à un vaste plateau de
1200m de longueur sur 350 à 400m de largeur nord-sud, à peu près
horizontal et à l'altitude de 100m : c'est le plateau qui porte les
douars des Béni Kous (fig. 2).
Les sables rouges couvrent sa surface; leur épaisseur est généra-
lement faible (2 à 3m au plus); mais à l'ouest, près du point 124,
elle devient beaucoup plus grande. Les sables très fins sur ce point
représentent probablement d'anciennes dunes contemporaines de la
plage de 100m (fig. 5).
Le substratum du plateau est formé par des alluvions apparte-
nant à un ancien lit de Tisser (3e niveau), plus élevé que celui de
Mandoura.
Vers l'ouest la plage de 100m est jalonnée par une série de
replats assez étroits, mais dont la cote est presque identique : Douar
Guellal 94", replat à l'ouest de Courbet 100m, Oulad Bendo 95 à 100",
Ben Hamouch 99». — A l'est de Tisser le plateau coté 94 (colorié en
q,, sur la carte géologique) est également formé de sables rouges et
doit être rattaché à ce niveau.
On peut adopter comme cote probable de la mer pendant la for-
mation des plages que je viens de citer la cote 100 qui est celle du
plateau des Béni Kous.
J'ajouterai que la plage de 100m se retrouve très bien caractérisée
autour de Bellefontaine, et entre Staouêli et Zéralda.
La fig. 2 montre la disposition étagée des deux plateformes de
marnes bleues qui supportent les plages de 53 et de i00ln. Ces deux
plateformes sont séparées par une pente rapide, véritable falaise
littorale, contemporaine de la plage inférieure ; la même falaise se
retrouve au nord de cette plage. Il est impossible de ne pas être
266 de lamothe 24 Avril
frappé de ces particularités topographiques qui ne laissent aucun
doute sur l'intervention de la mer.
3° Plages de 15 et de 30m. — Au pied des deux plages précédentes,
on trouve des traces de plages plus récentes, malheureusement le
plus souvent démantelées. On peut néanmoins y reconnaître deux
niveaux bien distincts.:
a) Un niveau de 15m visible au Cap Djioet, à la Marsa, au Cap
Blanc ; il est représenté sur ce dernier point par des grès et poudin-
gues à très petits galets, surtout de quartz blanc, dont l'épaisseur
est d'environ 2m à 2m50 ;
b) Un niveau d une trentaine de mètres qui se montre au-dessus
du précédent au Cap Djinet où il est formé de grès coquilliers
démantelés et de galets isolés de quartz blanc, associés à quelques
petits quartzites colorés du crétacé.
Au sud du Cap Djinet une falaise éocène supporte plusieurs
mètres de sables rouges au milieu desquels se voient des lambeaux
de grès et poudingues à galets blancs : la cote est de 30m environ (1).
A l'ouest de Courbet, la plage de 30m est représentée par plusieurs
replats très vastes et bien caractérisés. Près du Cap Blanc, les pou-
dingues et les grès de ce niveau atteignent une épaisseur de
plusieurs mètres et ont un grand développement : malheureusement
ils sont en partie masqués par des dunes récentes, et par des sables
rouges qui ont ruisselé des pentes.
La carte géologique indique au sud du Cap Djinet une plage de
5 à 6m d'altitude formée de grès coquilliers : elle a été marquée
q,m. Faut-il voir dans cette plage une preuve que le niveau de la
mer s'est encore abaissé depuis la formation de la plage de 15m? Je
ne le pense pas : la faible altitude de ce dépôt, séparé aujourd'hui
de la mer par des dunes, permet d'admettre qu'il est simplement
le résultat de la transformation en grès d'un appareil littoral récent.
J'ajouterai, pour terminer, que les deux niveaux de 15 et de 30m
sont représentés sur un très grand nombre de points de la côte
algérienne (voir chap. IV).
Au-dessus de ces quatre niveaux bien caractérisés, on trouve sur
une partie du golfe de Tisser jusqu'à une altitude de 200m, des
sables rouges couronnant des replats plus ou moins étendus et qui
(I) C'est le lambeau marqué q„m sur la carte.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERHASSES DU BASSIN DE L'iSSER 367
sont évidemment les dé-
bris d'anciennes plages.
Mais, en raison de leur état
de dégradation et de leur
petit nombre, il est diffi-
cile de les rattacher à des
niveaux définis, et c'est
pour ce motif que je n'ai
pas cru devoir les faire
figurer sur la carte jointe
a cette note.
J'ai fait exception cepen-
dant pour un dépôt remar-
quable par son étendue et
sa conservation , indiqué
par M. Ficheur au sud-
ouest de Courbet, sur un
massif de li parité et de
gneiss qui s'élève à l'alti-
tude de 200» (fig. 3). Le
vaste plateau presque hori-
zontal formé par ces roches
(plateau des Oulad el-Bor),
est couvert de sables rou-
ges dont l'épaisseur sur
quelques points peut
atteindre 4 A 3™. D'innom-
brables petits galets blancs
et des galets de quartzite
leur sont associés. Dans
une coupe, on voit le sable
rouge très agglutiné, à
petits grains de quartz
blanc- et petits galets de
quartzite, alterner a ver
des lits horizontaux de
galets de quartz blanc et
de quartzites colorés. A la
base apparaissent de nom
breux quartzites dont le
diamètre peut atteindre
0*30; ils représentent pro-
268 de lamothe 24 Avril
bablement, comme nous le verrons, un ancien lit de lisser.
Le plateau des Oulad-el-Bor est certainement la plage la plus
remarquable de la côte algérienne par ses caractères lithologiques
et topographiques.
Enfin, j'ai découvert en 1897, tout près du sommet de Sidi Feredj
(452m), point culminant du massif de Ménerville, une accumulation
de gravier et de galets roulés qui semble un débris de plage (fig. 3).
Un peu au S.-W. du sommet, à 432m, sur la pente, près de la zone
de contact des granités et des li pari tes, le sol est couvert d'un
grand nombre de galets parfaitement roulés. Ce sont des liparites,
des quartz noirs, des quartz blancs, provenant exclusivement du
massif ancien : les liparites et même quelques quartz noirs présen-
tent des traces d'altération. Je n'y ai vu aucun fragment pouvant
se rapporter à des roches d'origine éloignée. Le diamètre des galets
est petit, quelques-uns cependant mesurent 0m15. On rencontre
également épars à la surface du sol des blocs granitiques arrondis ;
mais leur surface est corrodée, et il est impossible de décider,
s'ils ont appartenu à la même formation que les galets précités,
ou s'ils proviennent de la décomposition sur place de la roche
sous-jacente.
J'avais d'abord songé à considérer ce dépôt comme provenant de
la désagrégation de poudingues miocènes; mais ceux-ci qui affleu-
rent beaucoup plus bas au S.-E. ne renferment pas de liparites (1).
Cette origine étant écartée, on est amené à admettre, au moins
procisoirement, que les galets roulés de Sidi Feredj représentent
des débris d'une plage très ancienne, dont l'âge pourrait même
remonter à l'époque du Pliocène marin, ainsi que je le montrerai
dans le chapitre 111 (2). Nous verrons également dans le chapitre IV
que le dépôt de Sidi Feredj ne constitue pas un fait isolé : j'ai
observé en effet dans le massif de Bouzaréa, près d'Alger, à 350m
d'altitude, des galets roulés empruntés exclusivement à ce massif.
Je ferai remarquer, pour finir, que la disposition des anciennes
plages en amphithéâtre, à une très petite distance du rivage actuel,
prouve que les formes générales du littoral n'ont subi que de faibles
(1) Voir à ce sujet Fichelr, op. cit., p. 416.
(2) L'hypothèse d'un ancien cimetière arabe à laquelle j'avais un moment songé
pour expliquer la présence de ces galets, me parait inconciliable avec la position
du dépôt sur une pente rapide et avec la nature des galets et leurs faibles dimen-
sions.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 269
changements depuis le Pliocène supérieur, époque à laquelle on
peut rapporter la formatiou de la plage de 200m des Oulad-el Bor,
et que les grands alignements qui marquent les limites septentrio-
nales de la côte algérienne existaient déjà.
Chapitre II. — Terrasses de la vallée de Tisser
Le cours de Tisser dépasse 150 kil. ; mais en amont de Thiers ce
fleuve est encore peu accessible à l'exploration, faute de routes et
de gîtes. C'est donc seulement entre Thiers et la mer, c'est-à-dire
sur les 50 derniers kilomètres que la recherche et l'étude des
anciennes terrasses peut être tentée actuellement. On remarquera
du reste, qu'en amont de Thiers, le fleuve est presque constamment
encaissé dans des gorges étroites, et que très probablement la
plupart des anciennes terrasses ont dû être détruites, ou ne sont
plus représentées que par des lambeaux discontinus ou même par
des galets isolés (1).
Palestro. — C'est dans le petit bassin de Palentro qu'apparaît la
première succession de terrasses bien caractérisées.
5 0. ~- g. N E.
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Fig. 4. — Coupe des terrasses de Palestro un peu en aval du village.
Echelle : 1/25.000 pour les longueurs; 1/10.000 pour les hauteurs (Légende p. 50i).
Une coupe en aval du village (fig. 4) montre de bas eu haut :
1° Une nappe de limou calcaire, jaunâtre, au milieu de laquelle
le fleuve coule resserré entre des berges de 5 à <>m ; le lit est couvert
de galets de4à5R£ de diamètre en moyenne, mais dont le grand
axe peut atteindre 0,25 à 0,30 ;
(1) J'ai pu cependant, entre Tablât et Bir-Rabalou, constater dans l'oued
Zeroua, affluent de Tisser, des lambeaux d'une terrasse élevée de 30" environ
au-dessus du thalweg.
270 DE LAMOTHE 24 Avril
2° Trois terrasses de cailloutis s'élevant respectivement à 32, 66,
100m au-dessus du thalweg (1); leur épaisseur est d'environ 10 à
15m ; elles reposent sur les couches redressées du Crétacé supérieur.
Les galets sont roulés et proviennent pour la plupart des quartzites
colorés du Danien et du Gault : leur grand axe est en général de
quelques centimètres, mais il dépasse souvent 0,25 et peut même
atteindre 0,40, surtout dans la terrasse la plus élevée.
Sur la terrasse inférieure, il y a une couche de limon jaunâtre de
2 à 3m, dont j'ai fait abstraction pour déterminer la cote au-dessus
du thalweg.
Les mêmes niveaux de cailloutis se retrouvent en amont du
village (2) ; on y observe en outre, à Test du kilomètre 78 du chemin
de fer, une terrasse de 14 à 15m.
En m 'élevant sur les pentes qui dominent l'entrée des gorges au
N.- VV. de Palestro, j'ai découvert à l'altitude de 309m (21 8m au-dessus
du thalweg! de nombreux galets roulés, principalement de quartzites
crétacés, épars à la surface du sol et associés à du gravier. On ne
peut expliquer leur présence qu'en les considérant comme les
débris d'un ancien lit de Tisser : quelques-uns m'ont paru altérés
et fissurés.
Heni'Amrane. — En aval de Palestro, le fleuve coule encaissé
entre des murailles presque verticales qui forment le défilé pitto-
resque connu sous le nom de gorges de Palestro ; il serait probable-
ment inutile d'y rechercher les traces des anciens lits du fleuve.
Mais en aval de la sortie des gorges, les pentes s adoucissent un
peu, et celles de la rive gauche présentent alors des replats étages,
couverts d'alluvions anciennes que les torrents latéraux ont séparées
en lambeaux discontinus.
Entre le grand pont de Tisser et Toued Oucedfa, on retrouve de
bas en haut, une nappe limoneuse de 7 à 8m et les trois niveaux de
cailloutis de Palestro, avec des altitudes à peu près égales au-dessus
(I) L'altitude relative de la terrasse la plus élevée a été, en raison de la posi-
tion <le cette terrasse, déterminée par rapport à un point du thalweg pris un
peu plus en amont et roté 106. Four la terrasse intermédiaire, j'ai adopté 104
pour cote du thalweg.
Les cotes du thalweg m'ont été fournies par le nivellement de l'Est algérien.
Grâce a l'extrême obligeance de M. Seal, sous-directeur de la Compagnie, J'ai en à
ma disposition les cotes des gares et ouvrages d'art de la vallée de Tisser, ce
qui m'a permis d'utiliser le baromètre dans des conditions excellentes
<2) Le point 103 marqué comme alluvion ancienne est un affleurement crétacé.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 271
du thalweg : 34m, 67m, 98m (1). Plus haut, il existe des amas de
galets a 112 et 127m. L'épaisseur de ces divers lambeaux est très
faible : elle est d'une vingtaine de mètres pour la terrasse de 34m,
de quelques mètres seulement pour les plus élevées.
En raison des difficultés du terrain, je n'ai pas recherché s'il
existait des traces d'anciennes alluvions à une altitude correspon-
dant à celle de la nappe de 200ra de Palestro.
Basse User. — Un peu en aval de Beui-Amrane, les montagnes
élevées qui enserraient le cours de Tisser s'abaissent de 4 à 500m
et s'écartent en circonscrivant une vaste dépression de 12 kil. de
largeur, qui a été autrefois remplie jusqu'à nue altitude de 200m
au moins par les marnes bleues. L'isser qui, au début du Pliocène
supérieur, parait avoir étalé ses cailloutis sur les marnes dans la
direction de Courbet, a peu à peu incliné vers l'est, et fini par
creuser son chenal contre les hauteurs de la rive droite. Comme
traces de ces érosions successives, il a laissé une série de lambeaux
d'alluvions qui peuvent se rapportera 6 niveaux distincts que je
numérote de 1 à 6, en commençant par les plus élevés qui sont
aussi les plus anciens. La fig. 3 donne une idée de la disposition
générale de ces anciennes alluvions; elles forment, comme on le
voit, trois groupes : le Ier, le plus occidental, comprend seulement
les cailloutis de la cote 205 sur le massif de Sidi-Feredj (l6r niveau) ;
le 2e renferme une série de lambeaux isolés, qui ont peut-être fait
partie de la même nappe (2e niveau) ; enfin le 3e, qui est le plus
oriental, renferme 4 niveaux de cailloutis ; c'est le seul qui présente
des terrasses bien caractérisées et en rapport avec les anciennes
plages.
Je vais étudier séparément ces divers niveaux :
A, Alluvions du premier niveau.
Les traces les plus anciennes d'un passage de Tisser se trouvent
au S.-W. de Courbet sur le plateau des Oulad-el-Bor. J'en ai déjà
parlé dans le chapitre I. La présence des gros galets de quartzites
du Crétacé qui abondent sur le plateau à la base des sables rouges,
ne peut s'expliquer qu'en attribuant leur transport à Tisser. Leur
volume, l'isolement et la composition du massif de Sidi-Feredj,
excluent la possibilité d'un cheminement le long d'un ancien rivage
sous l'action de courants littoraux, et d'autre part, l'hypothèse d'un
(I) Le thalweg est coté 58f"6Q sous le viaduc du chemin de fer.
272 de lamothe 24 Avril
soulèvement local n'est pas justifiée par les autres faits observés et
rendrait inintelligibles les phénomènes qui se sont accomplis dans
la vallée de Tisser pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène.
J'admettrai donc que les cailloutis des points 204 et 205 représen-
tent les traces d'un ancien lit de Tisser, plus élevé de 200m que le
lit actuel et situé dans le prolongement direct de la gorge de Beui-
Arnrane. A cette époque, les marnes bleues formaient encore une
surface à peu près régulière et continue, à une altitude représentée
actuellement par la cote 200. Cette hypothèse d'un ancien cours de
Tisser, plus élevé de 200m que le cours actuel, paraîtra d'autant plus
probable, que le fleuve a laissé à Palestro des traces de son passage
à plus de 200m d'altitude au-dessus du thalweg, et que dans la vallée
du Sebaou, contiguë à celle de Tisser, il existe des preuves nom-
breuses de l'existence d'un ancien lit à 200m au-dessus du lit
actuel (1).
H. Alluvions du deuxième niveau.
A Test du dépôt précédent, il n'existe plus sur les marnes
bleues qui affleurent seules, aucunes traces d'anciennes alluvions
sur une largeur de 6 kil. (2). Au delà, ou trouve à des altitudes
au-dessus du thalweg variant de 120 à 150m, une série de lambeaux
isolés de poudingues couronnant des pitons de marnes bleues.
Tels sont du sud au nord, les lambeaux de Sidi Bennor (14tm), de
Lalla Touila (164m), du cimetière de Sidi-Feredj (132m), des points
141 et 146 et enfin du K* Rachdia (148») (3).
Les poudingues renferment des galets de toutes les roches du
bassin en amout : mais les quartzites du crétacé (gault et danien)
dominent ; le diamètre des galets atteint souvent 0,40. L'épaisseur
des dépôts varie de 5 à 12m.
11 est impossible de décider si ces divers lambeaux ont fait ou non
partie d'un même lit de Tisser ; les écarts d'altitude de leurs bases
et de leurs sommets n'ont aucune signification, car ils peuvent
s'expliquer par des glissements. Je serais assez disposé à admettre
(1) Ficheur Op. cit., p. 400 et sq.
(2) Cependant j'ai rencontré d'assez nombreux petits galets de quartz blanc et
de quartzites colorés sur les hauteurs du K" Bou-Dissa (155*) qui semblent
séparer nettement les alluvions du premier niveau de celles du deuxième, et
s'élevaient d'ailleurs autrefois au moins à 200" comme l'ensemble des marnes.
Ce sont peut-être les traces d'anciennes plages.
(3) Ces lambeaux et quelques autres ont été marqués ptb sur la carte géologique
Je n'ai maintenu sur ma carte que ceux dont j'ai reconnu l'existence.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE LISSER 273
qu'ils se rattachent à un même niveau, et que le tleuve qui les a
déposés, coulait à une altitude au-dessus du thalweg actuel comprise
dans la Basse Isser entre 130 et 150m.
C. Alluvions du troisième niveau.
A l'est et au pied des lambeaux du 2e niveau s'étendent les
alluvions du 3* groupe. Très réduites en amont d'Aïn-Refaïa, elles
prennent tout-à-coup en aval uu extraordinaire développement :
concentrées presque exclusivement sur les pentes de la rive gauche,
elles y forment quatre nappes bien distinctes correspondant à
quatre niveaux différents, et dont les trois plus anciens (niveaux 3,
4, 5) sont caractérisés par leur continuité et leur état de conservation,
qui contrastent d'une façon frappante avec le morcellement des
alluvions des deux niveaux précédents. Ce sont ces nappes qui
constituent les remarquables terrasses que je vais décrire, terrasses
qui sont en connexion avec les anciennes plages.
Les alluvions du 3e niveau sont les plus occidentales du groupe.
Elles forment une bande dont la largeur varie de 12 à 1500m, et
qui s'étend de la ferme Vainsoono jusqu'au plateau des Beni-Kous,
situé à 4 kil. au nord ; partout elles reposeut sur les marnes bleues
(fig. 2, 3, 5, 6, 7). Ou peut y rattacher les lambeaux cotés 97 et 108
au sud de l'oued Challal, mais je u'en connais aucune trace en
amont jusqu'à Souk-ei-Had. Elles font également défaut sur la rive
droite de Tisser, en aval d'isserville.
Ces alluvions ont occupé à l'origine une dépression hémicylindri-
que creusée dans les marnes bleues. Sous le plateau des Beni-Kous
on voit encore des traces indiscutables de l'ancieu chenal et la
lig. 5 montre que les alluvions y sont en partie eucastrées dans une
gouttière marneuse dont les parois se relèvent rapidement à l'est et
à l'ouest (1).
La masse de la nappe alluviale dont l'épaisseur maximum est de
30 à 35™, est formée de poudingues très cimentés, dont les éléments
ont été empruntés à toutes les roches du bassin en amont ; les
quartzites colorés du crétacé forment la majorité. Le diamètre des
galets est en moyenne de 8 à 10 centimètres ; il atteint rarement
30 centimètres. Ces poudingues se montrent à peu près seuls au
nord de Vainsonno; en approchant de l'extrémité sud, ils sont en
(1) A Ain Khader les marnes sont a t>2" ; à l'ouest elles se relèvent brusquement
a 140" ; a l'est elles affleurent a 7(ï" sous les Beni-Ksir.
17 Août 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 18
274
DE LAMOTHE
24 Avril
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1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 27îi
partie remplacés et recou-
verts par des grès fins ou
grossiers, argileux, plus
ou moins friables, dont la
puissance peut atteindre
10". Un banc de grès sem-
ble former dans cette ré-
gion le toit des poudin-
gues. Partout la stratifica-
tion est horizontale.
Au nord de Vainsonno
l'altitude des alluvioos est
comprise entre 98m sur le
bord oriental et 105m sur
le bord occidental ; on
peut admettre la cote 98
comme représentant leur
altitude sous le plateau des
Béni Kous. Le bord orien-
tal est donc à peu près
horizontal, et il est évident
dès lors qu'il a été dénudé
en amont : la dénudatioo
du reste l'a profondément
échaucré au nord de l'oued
Guetta Sefara (plateau 91}.
11 en résulte que pour
déterminer la cote relative
des alluvions au-dessus du
thalweg, il faut prendre de
préférence celle du bord
occidental. On trouve alors
que cette altitude est cons-
tante et égale à 93m envi
ron.
Au-dessus des poudiu-
gues et des sables, on ob-
serve sur une grande par-
tie de la nappe alluviale
des limons jaunes à con-
crétions calcaires dont
l'épaisseur est très varia-
ble, mais ne paraît pas
276 de lamothe 24 Avril
dépasser 3 à 4m. Ces limons débordent à l'ouest sur les marnes
bleues jusqu'à une distance qui peut atteindre 1 kil., et ils se sont
élevés dans cette direction à l'altitude de 120m environ (fig. 7). Il est
probable qu'ils appartiennent au moins à deux époques différentes.
Ceux qui couvrent les points les plus élevés des âlluvions du troi-
sième niveau (plateaux des Beni-Kous et de Vainsonno) sont contem-
porains de ces âlluvions ; ceux du plateau 91 sont au contraire
postérieurs à leur dénudation et peut-être contemporains des limons
qui couvrent les âlluvions du quatrième niveau : l'altitude de ces
derniers atteint encore, en effet, la cote 90 au sud-ouest de Ben-Bata.
Les dénudations considérables qui ont raviné les âlluvions du
3e niveau, semblent liées à la présence, sur presque toute leur
surface, de sables rouges identiques à ceux qui recouvrent la plage
des Beni-Kous. Ces sables couvrent le plateau au nord de Vainsonoo
dont la cote est à peu près égale à celle du plateau des Béni Kous ;
on les trouve dans les diverses dépressions du bord oriental, et ils
jalonnent le bord occidental (à l'est d'Haouch Karmoul notamment,
et près du point 141).
11 est fort remarquable que la présence de ces sables, du moins
au sud de l'oued Ben-Hazine, soit limitée à la zone occupée par les
âlluvions du 3e niveau ; ils font, en effet, défaut sur les âlluvions des
niveaux plus récents.
La terminaison des âlluvions sous la plage des Beni-Kous à une
cote presque égale à celle de cette plage, leur ravinement par les
sables rouges, l'existence au nord de Vainsonno d'une plage de
même altitude que celle des Beni-Kous, sont autaut de faits qui,
s'ils ne démontrent pas la contemporanéité des âlluvions et de la
plage de 100m, prouvent en tous cas que la mer a séjourné longtemps
à cette altitude, et que ce séjour est antérieur à la formation des
âlluvions du 4" niveau.
En terminant, je dois dire un mot d'une particularité remarquable
que présente la composition des poudingues du 3e niveau. Au N. W.
de Vainsonno, on observe, encastrée en quelque sorte dans les
cailloutis à éléments crétacés, une vaste leotille de grès et graviers,
à petits grains irréguliers de quartz cristallin ; les lits sont minces
et horizontaux. Ces âlluvions ne peuvent venir de Tisser, et je
serais assez disposé à les considérer comme originaires du massif
ancien au nord de Méaerville. A cette époque, la dépression entre
Courbet et Blad Guitoun n'existait pas avec sa profondeur actuelle,
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'fSSER 277
et il n'y a par suite aucune impossibilité à admettre qu'un affluent
latéral issu des hauteurs de Sidi Feredj ait atteint Tisser près de
Vainsonno.
D. ÀLLUVIONS DU QUATRIÈME NIVEAU.
Elles reposent comme les précédentes sur les marnes bleues; à
l'ouest et au nord d'Ain Legatha jusqu'à l'oued Béni Miane, elles
forment le long de la route une série de replats dont la cote initiale
est de 70m, et qui vont en s'abaissant jusqu'à 64m. Sur cette étendue
de 2 kilomètres, la largeur de la bande alluviale atteint au maxi-
mum 1000m.
Au nord de l'oued Beni-Miane, les alluvions ne forment plus
qu'un placage étroit contre léftmarnes bleues ; elles pénètrent ensuite
sous les sables rouges de la plage de 53m, et finissent en biseau près
de Mandoura, où leur largeur ne dépasse probablement pas 1()0m.
Je n'en connais aucunes traces sur la rive droite.
Jusqu'à l'oued Beni-Miane les poudingues à éléments crétacés
forment la masse ; ils sont parfois moins cimentés que les précé-
dents. Au nord de Ben-Bata, des sables et grès les recouvent et les
remplacent en partie. L'épaisseur de la nappe alluviale, calculée
d'après les niveaux des sources, est d'environ 40m près du bord
oriental ; elle diminue vers l'ouest. Son altitude au-dessus du
thalweg est constante et comprise entre 55 et 57m.
Sur le bord occidental, les alluvions offrent quelques particula-
rités intéressantes. Au nord du point 87, on les voit contourner la
pointe marneuse et remonter vers l'amont de l'oued Ben Hazine,
formant ainsi un cône de déjection bien marqué, contemporain, et
dont les éléments ont été empruntés aux cailloutis des deuxième et
troisième niveaux. On observa également dans quelques ravins de
cette région, des intercalations de sables fins, argileux, qui semblent
dues au barrage de dépressions latérales préexistantes, par les
alluvions de la vallée de Tisser ou de l'oued Ben Hazine.
Sur le bord oriental, dans le vallon de Ben Hamida et dans celui
au nord (1), on constate l'existébce d'une puissante accumulation
de sables fins, de grès, et de poudingues à petits galets, stratifiés
horizontalement. Les éléments constitutifs, au lieu de provenir de
la Haute-Isser, sont descendus des hauteurs au sud-est de Bordj
(I) Ce dépôt a été distingua sur la carte jointe a cette note par des points de.
même couleur que l'alluvion du 4' niveau.
278 de la mot ut 24 Avril
Menaïel. Ce sont des gneiss, granulites, schistes anciens, grès
éocènes, calcaires du Cartennien ; les débris sont généralement
petits, mais mal roulés et irréguliers. Le contraste est complet entre
ce dépôt et les cailloutis à éléments crétacés qui l'enveloppent de
toutes parts sauf à l'e6t, le recouvrent, et passent même par dessous ;
c'est le représentant évident d'un ancien lit de l'oued Ménaïel plus
élevé d'une cinquantaine de mètres que le lit actuel.
Une nappe de limon à concrétions calcaires couvre la plus grande
partie des alluvions du quatrième niveau, du moins au sud de l'oued
Beni-Miane ; son épaisseur peut atteindre 20m à l'ouest de Ben-
Hamida et Ben- Bâta (Points 87 et 90).
Au uord de l'oued Beni-Miane, les alluvions s'abaissent brusque-
ment de 10 à 15m ; leur altitude au-dessus du thalweg n'est plus que
de 40m en moyenne : les poudingues peu épais (3 à 4ra à l'extrémité
nord), sont surmontés par des sables et grès fins. L'épaisseur totale
qui est de30m environ, se réduit rapidement vers le nord : elle n'est
plus que d'une dizaine de mètres à Mandoura.
Cet abaissement brusque des alluvions, leur amincissement rapide
vers Mandoura, leur ravinement, sont liés à la présence des sables
rouges. Ces sables qui couvrent la plage de 53m se sont étendus
vers le sud jusqu'à l'oued Miane, couvrant le plateau des Oulad
Ziane et toute la bordure alluviale, à une altitude à peu près égale à
celle de la plage. Ils forment d'importants amas sur les flancs de
la vallée, notamment au nord-ouest de Modrabin, et à l'est de
Sidi Mebrouck et des Béni K'sir.
De même que pour les alluvious du troisième niveau, il est
impossible de ne pas être frappé du lien qui existe entre les sables
rouges et les alluvions du quatrième niveau et, de ce fait, que la
mer a dû séjourner longtemps à un niveau voisin de 55m.
K. Alluvions du cinquième niveau.
Ce niveau est le plus étendu dans le sens de la vallée. On en
observe les premières traces à Blad Guitoun sous le village (4).
Les cailloutis forment ensuite en aval et jusqu'à Ain Refaîa une
série de lambeaux étroits, plaqués contre les marnes ; leur épais-
seur est d'une dizaine de mètres.
A Ain Refaîa et jusqu'à Ain Legatha, la nappe alluviale s'élargit
(1) Pout-étre en trouverait-on des lambeaux plus en amont en approchant de
Souk-el-Had.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 279
et atteint près de 400m. En aval lescailloutis semblent disparaître,
et le plateau d'Ain Legatha se prolonge en une longue et étroite
bande de limon jaunAtre à concrétions calcaires jusqu'au marabout
de Sidi Kacem. Ces limons sont un produit latéral de l'oued Challal,
et il est probable que les cailloutis ont dû se porter plus à Test.
En tous cas» on ne trouve plus de traces des alluvions du cin-
quième niveau jusqu'à Haoucb Bel Abbès sur la rive droite, où les
cailloutis forment plusieurs mamelons à l'altitude de 30m environ,
en placage contre les pentes. Peut-être pourrait-on cependant ratta-
cher à ce niveau des amas de galets à éléments crétacés qui se mon-
trent au débouché du vallon de Ben Hamida.
Les alluvions du cinquième niveau sont essentiellement formées
de poudingues souvent moins cimentés que ceux des niveaux plus
anciens : les éléments sont de môme nature ; la stratification est
horizontale.
L'épaisseur maximum ne parait pas dépasser 30m; le pied des
cailloutis se trouve près de 10m plus bas que la surface supérieure
des limons qui couvrent la plaine actuelle.
L'altitude au-dessus du thalweg est constante et comprise entre
28 et 30».
Il n'y a aucune preuve d'un recouvrement des alluvions de ce
niveau par des limons, sous une épaisseur appréciable, ni aucune
preuve que les sables rouges les aient recouvertes et ravinées.
F. Alluvions du sixième niveau.
Le sixième niveau n'est représenté que par la terrasse caillou-
teuse qui supporte la gare de Blad Guitoun ; elle est à 15m au-
dessus du thalweg, en défalquant les2m de limon qui la recouvrent.
L'existence de ce niveau, basée seulement sur les deux lambeaux
de Palestro et de Blad Guitoun, pourra paraître douteuse. Je l'ai
acceptée pour deux motifs : 1° sa disparition presque complète,
s'explique naturellement, parce fait, que le lit actuel ne diffère pas
sensiblement comme étendue de celui de la nappe de 30m ; 2° le
niveau de 15m complète la série des niveaux ri'alluvion de la zone
deO à 100m et la rend entièrement comparable à celle des plages
de la même zone, comme on le verra plus loin.
G. Limons de la plaine.
La carte géologique et les coupes montrent que tout le fond de
la basse vallée de Tisser en aval de Souk el Had, c'est-à-dire sur
280 de lamothe 24 Avril
près de 20kil., est remblayé par un dépôt limoneux (1). bien nivelé
longitudinalement et transversalement. Le fleuve coule encaissé
entre deux falaises de limon, dont la hauteur atteint 40m près de
Blad Guitoun et diminue régulièrement jusqu'au voisinage de la
mer, où elle se réduit à 2m50 ou 3m. Le limon est jaunâtre ou bru-
nâtre; il est calcarifère, mais paraît dépourvu des concrétions cal-
caires qui caractérisent les limons plus anciens. Il est très souvent
stratifié horizontalement : la stratification est marquée par la
différence de coloration des bandes limoneuses. Je n'y ai pas
observé de coquilles fluviatiles.
Le lit du fleuve est couvert de galets roulés, provenant du bassin
en amont, parmi lesquels dominent les quartzites du crétacé : le
diamètre des plus gros dépasse rarement 0ml. Autant qu'il est pos-
sible d'en juger par un affleurement de marnes bleuâtres que j'ai
observé dans les berges de Tisser, près de Modrabin, sous les
limons, il semble probable que le lit du fleuve n'a pas dû être
creusé beaucoup au-dessous du thalweg actuel.
Le mode de formation des limons a été le même que celui du
Nil: c'est un produit d'inondation. Mais comme actuellement, dans
la Basse Isser, le fleuve, quelle que soit l'importance de son cours,
ne déborde plus par-dessus ses rives, on doit admettre que ce
limon correspond à un état de choses différent de l'état actuel. La
modification survenue dans le régime du fleuve peut d'ailleurs être
attribuée soit à un changement des conditions climatériques, soit
à un léger empiétement de la mer vers l'embouchure.
Rive droite de tisser, en aval d'Isserville. — Ainsi que je l'ai dit
plus haut, il n'existe sur la rive droite de la Basse Isser aucune
trace de l'extension, sur cette rive, des cailloutis de la haute
vallée de Tisser, en dehors toutefois des lambeaux d'Haouch bel
Abbès qui font partie du cinquième niveau.
Nous avons vu, d'autre part, que les alluvions de TOued Ménaïel
s'étaient autrefois étendues jusqu'à Ben Hamida, refoulant ou main-
tenant vers l'ouest le cours de Tisser, à l'époque du quatrième
niveau. On retrouve précisément sur les hauteurs au sud-est de
Bordj Ménaïel des traces d'un ancien lit de TOued de même nom.
Ce sont les lambeaux figurés sur la carte géologique sous le signe q„ :
ils sont à 5on> au-dessus du thalweg. Leur composition rappelle celle
(1) Ce limon est désigné sur la carte géologique par le signe a* et sur les coupes
de cette note par le signe i?.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE LAISSER 281
du dépôt de Ben Hamida : ils renferment surtout des granulites,
des gneiss, des grès numidiens, des li pari tes. . . , mais les éléments
sont plus volumineux et moins bien roulés.
Vallée de l'Oued Djemaa. — A hauteur et en amont d'Isserville,
il existe de puissantes alluvions accumulées par l'Oued Djemaa, et
dont le creusement a donné naissance à deux terrasses bien carac-
térisées.
Le village d'Isserville est bâti sur la plus basse, qui forme à 35™
au dessus du thalweg de l'Oued Djemaa, une vaste plateforme
inclinée vers l'aval.
Un peu au sud deux plateaux, cotés 92 et situés par suite à 64m
au-dessus du thalweg, forment un deuxième niveau.
Enfin on doit considérer comme représentant un niveau plus
élevé les puissants cailloutis du Ka Koléa (207"») (t). Par leur alti-
tude au-dessus du thalweg (174m), ils correspondent probablement
à ceux de Lalla Touila.
Indépendamment des niveaux de cailloutis que je viens de décrire
on observe sur quelques points de la Basse Isser, des amas de
galets que je n'ai pas cru devoir figurer sur la carte, mais qu'il est
nécessaire de mentionner pour éviter toute erreur.
Ce sont d'abord des galets épars sur les pentes marneuses parfois
à une assez grande distance des cailloutis eu place (replats à l'ouest
du cimetière de Sidi Feredj, à l'altitude de 120m) ; ces galets sont
les résidus d'anciennes alluvions.
On trouve également de nombreux galets sur les pentes qui
descendent des divers niveaux des cailloutis ; ils se montrent même
sur des plateaux séparés du point de départ par des ravins plus ou
moins profonds. (Point 124 sur les Béni Kous, pente à l'est du
K* Rachdia, plateaux limoneux des ravins de Ben Hamida). Le
transport de tous ces débris est évidemment antérieur au creuse-
ment des dépressions qu'ils ont franchies.
Enfin, des amas de galets, sans cohésion, se voient au pied de
quelques vallons, notamment dans l'oued Ben Hazine : ce sont des
débris de cônes de déjection contemporains des niveaux de cail-
loutis les plus récents et même du lit actuel.
(1) O lambeau a été par erreur colorié commo Cartonnicn.
282 de lamothe 24 Avril
Résumé et Conclusions.
1° Comparaison des altitudes des différents niveaux. — Si J on
réunit, dans un tableau, les altitudes au-dessus du thalweg des
différents niveaux de cailloutis, ou obtient les résultats ci-dessous:
Palestro Béni Amrane Ba9se-Issek Oued Djemaa Bohdj MenaIel
Limons . . . 7 à 8 7 a 8 10 7 à 8 »
6* niveau. .15 » 15 » »
5* niveau. .32 34 28 à 30 35 »
4' niveau . . 66 67 55 à 57 64 55
3e niveau. 100 98 93 » »
2« niveau. . » 112 a 127 120 à 148 177 »
1" niveau. . 218 » 200 » »
Si on laisse de côté, pour un instant, les premier et deuxième
niveaux, on voit que les nappes alluviales qui ont donné nais-
sance à des terrasses bien caractérisées, se correspondent très exac-
tement, soit dans les vallées principales, soit dans les vallées
latérales. Ou remarque, en outre, que dans la vallée de Tisser
proprement dite, le creusement semble avoir été plus considérable
en amont qu'en aval, à partir du premier niveau. La pente générale
a donc diminué depuis l'époque où Tisser a charrié ses premiers
cailloutis.
2° Composition des allumons. — La stratification des alluvions est
uu fait constant ; elle est toujours horizontale. Les matériaux vien-
nent de l'ainont. Dans les alluvions de Tisser, lesquartzites colorés
du Crétacé sont prédominants : on y remarque l'extrême rareté
des éléments blancs (quartz blancs ou translucides). C'est un con-
traste absolu avec la majeure partie des cailloutis des plages.
La grosseur des galets semble avoir été plus forte dans les allu-
vions les plus élevées (Lalla Touila, K" Koléa). Dans la Basse Isser
on ne voit presque jamais de blocs d'un diamètre supérieur à 0,50.
Par exception sur le Ka Koléa on trouve des blocs de 0.60 à 0,70;
j'ai vu également à Haouch Bel Abbès, à 10*" d'altitude, uu bloc de
granité de Ménerville, arrondi et usé, de 0,80cm.
En principe, les poudingues des niveaux les plus anciens sont
mieux cimentés que ceux des uiveaux plus récents.
3" Limons. — II y a des limons sur les quatre niveaux d'allu-
vions les plus récents : ils sont très inégalement développés. Dans
la Basse lsser, l'épaisseur des limons du quatrième niveau a pro-
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 283
bablement dépassé 20m ; sur le troisième, ils ont été très dénudés
et sont actuellement réduits à une épaisseur insignifiante ; mais,
si l'on admet que les limons situés à l'ouest du cimetière de Sidi
Feredj sont de la même époque, on pourra également évaluer à 20m
Tépaisseur des limons de ce niveau. Sur le cinquième niveau
l'existence des limons est douteuse ; ceux d'Ain Legatha sont peut-
être dus au ruissellement sur les pentes. Sur le sixième niveau
l'épaisseur est d'environ 2m.
Dans la Haute Isser, les limons sont peu développés. A Palestre,
sur le cinquième niveau, l'épaisseur est de 2m50 à 30).
Les limons des terrasses sont caractérisés par la présence de con-
crétions calcaires, irrégulières, de 2 à 3e. Ces concrétions semblent
faire défaut dans les limons du lit actuel.
Ou ne trouve pas de limons sur les premier et deuxième uiveaux.
4° Déplacement du cours de Visser de l'ouest vers l'est. — Les
anciennes alluvions de Tisser sont, comme nous lavons vu, dis-
posées en gradins d'altitudes décroissantes de l'ouest vers lest. A
partir du moment où il a étalé ses alluvions sur le plateau des
Oulad el Bor, le fleuve a donc sans cesse appuyé vers l'est.
Cette constatation pourra paraître un argument de grande valeur
pour les géologues qui attribuent à la rotation de la terre une
action sur le déplacement des cours d'eau dans le sens des paral-
lèles. Je crois que cette conséquence ne s'impose pas et que dans
le cas particulier d»1 Tisser le déplacement du fleuve vers Test
s'explique par des phénomènes de capture, et par la présence, à
la fin du dépôt des alluvions des troisième et quatrième niveaux,
d'un golfe profond qui s'enfouçait au sud vers Aïn Legatha.
5° La concentration des alluvions sur la rive gauche de la Basse
Isser et la présence presque exclusive au voisinage de l'embouchure,
des terrasses des troisième, quatrième et cinquième niveaux, sont
des faits qui méritent de retenir l'attention.
L'absence presque totale des caillou tis de Tisser sur la rive droite
est la conséquence du sens ouest-est suivant lequel s'est effectué le
creusement de la vallée; les apports des vallées latérales, près de
Bordj Ménaïel, ont en outre contribué dans une certaine mesurée
maintenir Tisser écartée des pentes de la rive droite.
En ce qui concerne le développement des alluvioos, au voisinage
de l'embouchure, on peut admettre que ce phénomène est dû sur-
tout à la destruction de la partie amont, pendant le creusement
284 de làmothe 24 Avril
de la vallée. Cette destruction a du être facilitée par ce fait que les
nappes alluviales semblent, d'une manière générale, avoir été beau-
coup moins épaisses en amont qu'en aval. J'indiquerai dans le troi-
sième chapitre la cause probable de cette particularité.
6° Liaison entre les plages et les terrasses. — Si Ton se reporte au
tableau du premier paragraphe de ce résumé, on voit que la dimi-
nution d'altitude relative des trois principales nappes alluviales
(3e, 4e et 5e niveaux) au-dessus du thalweg est très faible d'amont
en aval et que dans la Basse Isser, cette altitude est sensiblement
constante pour un même niveau.
Pour expliquer la formation des nappes alluviales sans faire
intervenir une émersion de la côte, il faudrait, par suite, admettre
que le niveau de base a subi des déplacements horizontaux d'une
très grande amplitude. En prenant la troisième nappe alluviale
comme exemple, la diminution d'altitude absolue étant seulement
de 10m sur 5 kil., le niveau de base aurait dû dans l'hypothèse pré-
citée se trouver A près de 50 kil. du rivage. Cette distance serait
beaucoup plus grande encore pour les alluvions des premier et
deuxième niveaux.
On voit immédiatement les difficultés d'une semblable théorie.
Tandis que nous sommes conduits à supposer le niveau de base
extrêmement éloigné vers le nord pour expliquer la formation des
nappes alluviales, l'étude des anciennes plages démontre au con-
traire que les traces des anciens rivages sont en quelque sorte enche-
vêtrées au milieu de ces nappes.
Il est donc logique à priori, de penser que la disposition des
alluvions en gradins superposés, s'expliquerait beaucoup mieux et
plus simplement par une variation verticale du niveau de base, et
puisque d'autre part cette variation verticale est prouvée par l'exis-
tence de plusieurs lignes de rivage, au voisinage même des points
où se terminent les alluvions, il est également logique d'en conclure
que la formation des plages et celle des nappes alluviales sont
deux phénomènes contemporains, intimement liés l'un à l'autre.
Cette liaison peut du reste être démontrée par des considérations
d'ordre très différent. On notera d'abord que les plages et les niveaux
d'alluvions bien conservés sont près du littoral compris dans la
même zone de 100m d'altitude, que le nombre des unes et des autres
est le même, et que l'une des plages au moins, celle de 400m, se con-
fond à l'embouchure de Tisser avec la surface supérieure d'une des
nappes alluviales. Mais l'argument capital, c'est la remarquable
1899 sur les anciennes plages et tkkrasses du bassin de l'isser 285
coïncidence qui existe entre les altitudes relatives des différents
niveaux au-dessus du thalweg et les altitudes absolues des plages
comme le montre le tableau ci-dessous :
A LTIT II 1) ES H EL ATIV ES
Altitude absolue des alluvions
des anciennes plages des .'!', 4r, 5r, ti' niveaux
15m <i' niveau H\m
29 à 32 ."V niveau 28 a 30
53 4* niveau. ..... 55 à 57
100 3e niveau 93
Pour discuter les indications de ce tableau, ou ue doit pas
perdre de vue tout d'abord, que les altitudes obtenues pour les
anciennes plages peuvent différer légèrement du niveau de la mer
correspondant, le seul qui en réalité devrait servir de base à une
comparaison. C'est ainsi notamment qu'à l'époque de la plage
de 53°*, le niveau de la mer, comme je l'ai montré, devait être
plutôt voisin de 5om. Cette réserve faite, on peut constater qu'à
l'exception du troisième niveau, la concordance est complète entre
les deux colonnes, les écarts, très faibles, étant dans les limites des
erreurs d'observation ou de détermination des altitudes.
La discordance entre les nombres obtenus pour les plages et les
alluvions du troisième niveau est au contraire trop forte pour être
expliquée de la même façon. Mais il est facile de montrer que
l'anomalie n'est qu'apparente, et constitue au contraire une preuve
nouvelle en faveur de l'hypothèse. L'écart constaté est simplement,
en effet, la conséquence nécessaire de ce fait que le tracé de l'ancien
rivage ne différait pas sensiblement du tracé actuel pendant la for-
mation des quatrième, cinquième et sixième nappes alluviales,
tandis qu'il se trouvait à 4 kil. au sud, sur le plateau des Béni Kous,
pendant que se déposaient les alluvions du troisième niveau. Il en
résulte que l'altitude relative au-dessus du thalweg de la nappe du
troisième niveau doit être diminuée de l'épaisseur du remblayage
de la vallée, correspondant à l'intervalle qui existe entre les deux
niveaux de base successifs, comme on peut le voir d'ailleurs sur la
figure 8.
Dans cette figure, AB représente le thalweg d'un cours d'eau
débouchant sur un niveau de base AC représenté en perspective.
Si le niveau s'abaisse verticalement de A en A', le nouveau thalweg
B'A' sera séparé du premier par un intervalle égal à AA . Mais si
le niveau de base se transporte en même temps en A", le thalweg
286
DE LAMOTHE
24 Avril
correspondant sera B"A", et la hauteur relative du thalweg pri-
mitif AB au-dessus du thalweg final sera inférieur à AA' d'une
quantité MA'. L'inverse aurait lieu si le niveau de base s'était
avancé en A".
B
B
-fi_
A"
Flg. 8.
En résumé, on doit considérer comme absolument démontré qu'à
chacune des anciennes nappes alluviales des troisième, quatrième,
cinquième et sixième niveaux correspond une ancienne plage, et
que par conséquent la formation successive de ces nappes à des
niveaux de plus en plus bas, est liée à des variations correspon-
dantes du niveau de la mer.
Nous verrons, dans le troisième chapitre, comment il faut inter-
préter cette formation synchronique.
Le lien qui existe entre les alluvions des niveaux précités et les
plages comprises dans la même zone de 100m, existe-t-il aussi
entre les plages plus élevées et les lambeaux de cailloutis que Ton
observe sur le littoral jusqu'à l'altitude de 200m? On est conduit
à l'admettre par analogie, et le fait d'ailleurs ne parait pas douteux
pour la plage de 200m des Oulad el Bor. En ce qui concerne la
bande de cailloutis du deuxième niveau , il "n'existe pas, à ma
connaissance du moins, à l'embouchure de Tisser, de plage qui
puisse lui être rattachée. Mais on remarquera que l'absence suppo-
sée d'une ligne de rivage d'altitude correspondante, entraînerait
à admettre que le niveau de base des cailloutis du deuxième niveau
était très loin vers le nord, conséquence inconciliable avec les faits
acquis; d'autre part, nous verrons dans le chapitre IV, qu'il
existe, près d'Alger, des traces de plages anciennes de 135 à
145m d'altitude. On peut donc provisoirement étendre au deuxième
niveau les conclusions établies pour les autres.
1899' SUR LIS ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN OB L'iSSER 287
!• Age des plages et terrasses des différents niveaux. — La déter-
mination exacte de cet âge exigerait des documents paléontolo-
giques qui, dans la vallée de Tisser, font à peu prés complètement
défaut, ou sont inutilisables.
Dans Tisser les alluvions des différents niveaux n'ont fourni
aucun fossile. Mais on a trouvé Elephas afrieanus (4) dans les
limons de la Mitidja, dans ceux notamment de l'Oued Bourkika,
près Marengo, et de l'Oued Kerma, près Baba Ali, qui occupent par
rapport au thalweg de ces oueds la même position que les limons
de la plaine de Tisser (2).
Les débris de mollusques recueillis dans les sables rouges et
sur les plages de la vallée de Tisser, sont également trop
mauvais ou trop peu nombreux pour permettre une déduction
quelconque. En outre, plusieurs des espèces qui ont été trouvées
dans des localités voisines de Tisser, peuvent provenir d'un rema-
niement des couches pliocènes sous-jacentes (3). Le seul fossile
intéressant a été fourni par la plage de 15m : c'est une molaire
d'Elephas Yolensis Pomel, découverte dans les grès à Pectoncles de
cette plage, entre l'embouchure du Boudouaou et le cap Blanc (4).
En dehors de la vallée de Tisser, les diverses plages et terrasses
n ont, jusqu'à présent, fourni aucun document paléontologique, à
l'exception de cette même terrasse de lom.
A Cherchell, et dans les environs d'Arzeu et de Mostagauem, on a
retrouvé dans les dépôts de ce niveau plusieurs débris û'Elephas
Yolensis, associés à des mollusques dont deux n'existent plus dans
la Méditerranée: 1° Le Strombus niedUerraneus (Lk mss) Duclos,
espèce qui, d'après l'auteur, serait voisine de St. bubonius du
Sénégal et du Cap Vert (5). et qui est caractéristique des plages de
Corse, de Sardaigne, de Majorque et de Tunisie (6); 2° un grand
cône du type du Conus ponderosus. mais dont la détermination m'est
inconuue. D'après Pomel, on y trouverait également une forme de
Nassa gibbosula qui ne se rencontre plus que dans la Méditerranée
orientale (7).
(1) Pomel. Monog. paléont. Eléphants, p. 22. — In. Explication delà carte géolo-
gique de l'Algérie, p. 200.
(2) Os limons soitf marqués a2 sur la carte du Service géologique, l2 sur les
coupes de cotte note.
(3) Voir cette liste dans Ficheih, op. cit., p. 394.
(4) Ficheur. Id. y p. 398.
(5) Chenu. Illust conchyl. genre Strombus.
(6) Voir .1. Haime. H. S. II. F., £ série, XII. p. 751. — Pomel. l'ne mission
scientifique en Tunisie en 1877, p. 93. Bull. Ecole sup. fi es Science* d'Alger, 1884.
(7) Pomel. Explic. de la carte géol., p. 196.
288 de lamothe 24 Avril
J'ajouterai que des dunes correspondant comme âge à cette plage
de 15m renferment sur quelques points (Arzeu, Castiglione. . .) uue
faune de coquilles terrestres qui paraissent identiques aux espèces
actuelles, mais dont l'étude n'a pas encore été laite, à ma connais-
sance du moins.
Quelque intéressants que soient ces rares documents, ils sont
évidemment insuffisants pour déterminer l'âge des plages et des
nappes alluviales, et il est nécessaire pour y parvenir de s'appuyer
sur des considérations théoriques.
Comme je l'ai dit plus baut, l'ensemble des anciennes alluvions de
Tisser forme trois groupes distincts, disposés en gradins d'altitude
et d'âge décroissants de l'Ouest vers l'Est: le plus ancien et le plus
élevé est à l'Ouest du Ka Bou Dissa, les deux autres à l'Est (fig. 3).
Le groupe le plus récent formé par les alluvions des 3e, 4*, 5e et
6e niveaux, correspond à la dernière grande phase du creusement de
la vallée; sauf au début de cette période où Tisser oblique encore
un peu au Nord-Ouest, la directiou du fleuve concorde avec la
direction actuelle. La continuité des terrasses, leur état de conser-
vation, ainsi que celui des plages correspondantes, la faible cimenta-
tion d'une partie des alluvions, le contraste que présente ce groupe
avec le deuxième, tout concourt à justifier l'attribution à une même
époque du groupe oriental.
Le deuxième groupe qui renferme les cailloutis de Sidi Bennor,
Lalla Touila. . ., etc., est au contraire formé de lambeaux discon-
tinus, profondément dénudés, sans liaison apparente ; les cailloutis
y sont plus fortement cimentés, les sédiments lins plus rares. Il
semble qu'entre ce groupe et le précédent, il se soit écoulé un inter-
valle de temps considérable.
L'ensemble de ces deux groupes rappelle d'une façon frappante
celui formé par les terrasses de la vallée du Rhin près de Bâle, et
les Deckenschotter du Sundgau, et je crois que, par analogie, il est
rationnel de classer provisoirement dans le pleistocène le groupe
des quatre niveaux à terrasses, et dans le pliocène supérieur les lam-
beaux démantelés du deuxième groupe. Les limons de la plaine
appartiendraient, avec les alluvions du lit actuel, au néo-pleistocène.
Les cailloutis de la cote 200 au sud-ouest de Courbet et la plage
de même altitude, marquant une phase encore plus ancienne de
l'histoire de Tisser, pourraient correspondre aux débuts du pliocène
supérieur : ils représentent, en effet, les premiers apports du fleuve
sur le pliocène marin.
1899 SUR LR8 ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BA8SIN DE LISSER 289
En ce qui concerne les galets roulés de Sidi Feredj, nous verrons
dans un moment que leur âge est peut-être contemporain du
pliocène marin.
8. Contradiction entre les conclusions qui précèdent et la doctrine
qui attribue la formation des terrasses à l'intervention des glaciers.
Il importe en terminant ce chapitre de faire remarquer que les
conclusions qui précèdent, en établissant un lien étroit entre les
variations du niveau de base et la formation des nappes alluviales
et subsidiairement des terrasses, infirment, du moins dans sa
généralisation excessive, la doctrine d'après laquelle l'origine de
ces terrasses est toujours en connexion avec la présence des glaciers.
Dans lisser, il n'y a aucunes traces de glaciers récents ou anciens,
et il n'y en a pas davantage sur les cimes les plus élevées du Djurd-
jura et du Dira. Mais, même en admettant l'existence de ces glaciers
dans le passé, les terrasses de la Basse-lsser ne pourraient être
attribuées à leur action. Leur formation, en effet, est manifestement
due à l'intervention d'une cause qui agissait non pas du côté de
l'amont, mais bien au contraire du côté de l'aval et vers le point le
plus bas du thalweg.
Chapitre III. — Aperçu des phénomènes qui se sont
accomplis dans la basse vallée de Tisser, à partir
du pliocène supérieur.
Avant d'aborder cet exposé, quelques considérations complémen-
taires sont nécessaires.
1° L'altitude des marnes bleues a dû atteindre au moins 200m. —
D'après l'altitude des lambeaux encore existants, on peut admettre
que les marnes bleues, couronnées peut-être de calcaires coquil-
liers ou de dépôts marneux représentant l'Àstien, ont comblé
l'embouchure de Tisser entre le cap Blanc et le cap Djinet jusqu'à
une altitude marquée au moins par la cote 200. Ces marnes atteignent
en effet cette cote à l'ouest de Ménerville ; on les trouve à 184m dans
l'Oued Djemaa, et dans la région entre Courbet et Ain Legatha
f étroite arête du Ka Bou Dissa s'élève encore à 155m.
L'altitude de 200m peut même être considérée comme un mini-
mum, ainsi que l'indique la présence à cette cote, au sud-ouest de
Courbet, de galets roulés provenant de Tisser.
17 Août 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - l'J
290 dr lamothe 24 Avril
2° // est nécessaire d'admettre, pendant le pliocène marin, une
submersion beaucoup plus grande de la côte, que celle marquée par U
niveau de 200m auquel se sont élevées les marnes bleues.
Il serait en effet impossible de comprendre sans cette hypothèse,
comment une formation aussi homogène que les marnes bleues,
composée entièrement d'éléments fins, à l'exclusion de tout élé-
ment grossier, aurait pu se déposer dans des vallées aussi étroites,
aussi escarpées que celle de Tisser près de Béni Amrane.
Il faut absolument supposer que le dépôt des marnes s'est
effectué sous une profondeur d'eau assez considérable pour sub-
merger la plus grande partie des pentes qui dominent immédiate-
ment les affleurements actuels. A Béni Amrane, le niveau minimum
de cette submersion doit correspondre à une cote comprise entre
400 et 450.
Cette conclusion, comme nous le verrons dans un moment, permet
d'expliquer d'une façon simple l'origine des galets de Sidi Feredj.
3° F/épaisseur considérable des allumons des troisième, quatrième
et cinquième niveaux, au voisinage immédiat de l'ancien rivage, ne peut
s'expliquer sans faire intervenir pour chacun de ces niveaux un mouve-
ment d'émersion, suivi d'une immersion de plus faible amplitude.
La surface supérieure des nappes alluviales coïncidant à peu près,
au voisinage de l'embouchure, avec le niveau de la mer, la partie
inférieure des alluvions devait au même moment se trouver au-
dessous de ce niveau d'une quantité variable avec l'épaisseur de la
nappe, et qui atteignait 35m pour la troisième nappe et 40m pour la
quatrième. Le fleuve n'ayant pu creuser son lit au-dessous du niveau
de la mer, de quantités aussi considérables, il faut conclure que le
creusement s'est effectué à une époque où ce niveau ne s'élevait pas
sensiblement au-dessus de la base des alluvions.
Ou est ainsi conduit à admettre que la formation de chaque nappe
alluviale a été précédée d'une émersion plus ou moins rapide de la
côte, qui a permis le creusement de la vallée jusqu'à une profon-
deur correspondante à la base des alluvions. A cette émersion a
succédé une immersion très lente, d'amplitude beaucoup plus faible
et à peu près égale à l'épaisseur de l'alluvion. C'est pendant cette
immersion qu'a eu lieu le remblayage de la vallée. A la fin de ce
mouvement d'immersion, il y a eu une période de stabilité relative
du niveau absolu de la mer, période pendant laquelle le niveau de
base a pu subir des déplacements horizontaux plus ou moins
téendus. C'est à cette période que Ton peut rapporter la formation
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE LISSER 291
des plages, le dépôt des limons et le creusement des golfes profonds
qui ont pénétré au milieu des alluvious des troisième et quatrième
niveaux.
L'épaisseur des limons est probablement en connexion avec la
stabilité plus ou moins prolongée du niveau de base.
La disposition en terrasses suspendues sur les lianes de la vallée,
qu'affectent les alluvions des quatre niveaux les plus récents, est
la conséquence des érosions qu'elles ont subies pendant la période
d'émersion qui a suivi le dépôt de chacune d'elles.
Le diagramme de la fig. 9 représente la succession des oscilla-
tions du niveau de la mer. par rapport à la côte supposée immo-
bile» à partir du dépôt des cailloutis de la deuxième nappe alluviale.
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Xiveau de U Mrr
Fig. 9. — Diagramme des mouvements relatifs du niveau de la mer
pendant le plelstocène.
4° La prédominance des allumons des troisième, quatrième et cin-
quième niveaux au voisinage de l'embouchure, semble liée à la diffé-
rence de structure géologique de la Basse Isser en amont et en aval de
Souk el H ad.
Les anciens lits de Tisser en aval de Souk el Had ont été entière-
ment creusés dans les marnes bleues ; en amont apparaissent au
contraire des massifs de roches dures, beaucoup plus résistants à
l'érosion. Il est facile de montrer l'influence que ces différences de
structure ont eue sur l'épaisseur des nappes alluviales.
Soit B A (fig. 10) le lit du fleuve, entre Souk el Had et la mer, à
une époque quelconque- Si le niveau de la mer vient à s'abaisser
rapidement de A en A', l'affouillement des marnes se produisant
292
DE LAMOTHE
24 Avril
infiniment plus vite que celui des massifs rocheux en amont, il se
formera un lit B A* raccordé en B par une chute plus ou moins
rapide avec l'ancien lit amont, ou un lit peu différent.
Si maintenant nous supposons un mouvement d'immersion fai-
sant remonter le niveau de la mer en A" et suffisamment prolongé
pour permettre au lleuve de creuser son lit en amont de Souk el Uad
d'une quantité BE plus petite que AA\ le lit final deviendra
B"A'\ et l'on voit que les remblais effectués par le fleuve dans toute
l'étendue de son lit pour arriver à son profil d'équilibre, seront
_/Rcr
Zotiedrs roches
dures
Zone de* marnes bltruc*
Fig. 10.
relativement minces en amont, et prendront au contraire vers
l'embouchure, une épaisseur considérable. On conçoit que dans
ces conditions, la dénudation ait pu facilement faire disparaître
plus ou moins complètement les traces des alluvions anciennes en
aval de Souk el Had, dans toute la partie où ces alluvions reposât)!
sur des marnes très affouillables, étaient en outre peu épaisses et
peu développées en largeur.
A l'aide de ces données, il est facile de reconstituer l'histoire de
Tisser à partir du pliocène supérieur.
A. Pliocène supérieur. — 1er Cours de l'Isser. — Plage de 200m. —
Si l'on admet que la submersion de la côte pendant le pliocène
marin a atteint au moins 430m, la présence de galets roulés au som-
met de Sidi Feredj, s'expliquera aisément, en supposant que ces
galets sont les débris d'une plage contemporaine des débuts de
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE LAISSER 293
Témersion du massif et dont l'âge par conséquent correspond à
peu près à la fin du pliocène marin (fig. 3).
Avec le pliocène supérieur, le mouvement général d'émersion
qui avait commencé pendant le pliocène marin s'est accentué; les
dépôts de l'étage précédent ont émergé. C'est alors que Tisser, dont
le cours était de 200m plus élevé qu'aujourd'hui, a charrié ses pre-
miers cailloutis (niveau n° 1), qu'elle a étalés, en le ravinant, sur le
pliocène marin dans la direction de Courbet. La plage des Oulad
el Bor montre qu'à cette époque la mer baignait les pentes du
massif de Sidi-Feredj.
5e Cours de l'fsser. — Le mouvement d'émersion continuant, la
mer est descendue à une cote voisine de 150m. A la suite, probable-
ment, de phénomènes de capture dus à l'action de l'oued Djemaa
et de ses affluents en aval d'isserville, Tisser s'est jetée brusquement
vers TEst, et a passé déjinitirement de l'autre côté du massif mar-
neux dont Taré te du K* Bou Dissa est un débris.
Les dépôts de cette époque sont représentés par les lambeaux de
Sidi Bennor, de Lalla Touila, des points 132, 141, 146, 148, et dans
Toued Djemaa par les cailloutis du K* Koléa. Comme je Tai dit, il n'y
a pas de traces de plages de ce niveau, du moins dans la Basse
Isser; mais nous avons la certitude que la mer a occupé dans cette
région des niveaux intermédiaires entre les cotes 100 et 200.
B. Pleistocène. — A partir de cette époque, on constate dans la
Basse Isser, la succession d'une série de mouvements d'émersion et
d'immersion, qui ont donné naissance aux troisième, quatrième,
cinquième et sixième nappes alluviales. Bien qu'il n'y ait aucune
preuve positive que ces oscillations se soient également produites
pendant le pliocène supérieur, je pense que, par analogie, il convient
d'admettre que les cailloutis des première et deuxième nappes se
sont formés dans des conditions analogues.
5e Cours de Visser. Plage de i00m. — Un mouvement d'émersion
a amené la mer à une cote voisine de 65m (fi<;. 9); le fleuve a creusé
le chenal des alluvions du troisième niveau, chenal qu'il a ensuite
remblayé pendant une période de lente immersion. A la lin de ce
nouveau mouvement, la mer qui avait atteint l'altitude de 100m, a
pénétré dans la vallée jusqu'à Ain Legatha en y creusant un golfe
profond, en ravinant les alluvions du troisième niveau, et eu les
recouvrant de ses dépôts littoraux. Pendant cette invasion de la mer,
le plateau des Beui K'sir, coté 78, formait le fond de la mer à
l'entrée du golfe : il correspond au plateau de Courbet qui a la
même origine. (Voir la carte, planche 111).
294
DE LAMOTHE
24 Avril
Tableau synoptique résui
PÉRIODE
NéO-
plélttocène
ÉTAGE
»
»
o
»
»
i>
2
O
S
Supérieur,
Inférieur
l
ANaENS COURS DE L ISSER
ANCIENNES TERRASSES
DE LA VALLÉE PRINCIPALE
Lit actuel de Tisser.
Limon d'inondation.
6* Cours de Tisser. Terrasse de
15" à Blad Guitoun et à
Palestro.
5* Cours de Tisser. Terrasse de
28 à 30" dans la Basse Isser,
de 34" à Béni Amrane, de
32" a Palestro.
4* Cours de Tisser. Terrasse
de 55 à 57m dans la Basse
Isser, de 66 à 67" à Palestro
et Béni Amrane.
3* Cours de Tisser. Terrasse de
93" dans la Basse Isser, de
98" à Béni Amrane, de 100"
à Palestro.
2" Cours de Tisser. Lambeaux
de Sidi Bennor, La lia Touila,
Sldi Feredj, Ht", K» Rach-
dla.
Lambeaux de 112 et 127" à Béni
Amrane.
1" Cours de Tisser. Cailloutis
de 219™ au-dessus du thalweg
à Palestro.
Cailloutis de 200" au S.W. de
Courbet.
»
DEPOTS
CORRESPONDANTS
DANS
LES AFFLUENTS
DE LISSER
Idem.
»
Terrasse
de35"
à Isserville.
Cailloutis de
54" à Bord j
Ménalel,
de 64" à
Isserville.
»
Cailloutis
du K« Koléa
à 177".
»
»
PLAGES
CORRESPON-
DANTES
Plages
et dunes
actuelles.
Plage de 15'
Plage de 30«
Plage de 53"
Plage de 100"
Plage de 205"
«plateau
des Oulad
el Bor).
Galets roulés
à 432- près
du S1 de
Sidi Feredj.
FAUNl
Elepha*
canus da
limons
Mitidja.
Strombus
terrant
grand Ci
ElepkasYol
n
»
»
»
4899 80R LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BtSSIN DE LISSER 295
hits exposés dans cette note
SUCCESSION
mouvements relatifs
DU LITTORAL
Ementon de ?
Immersion do ?
Emersion de ?
Immersion à la cote 30.
Emersion à la cote zéro
environ.
mmerslon à Ja cote 53.
Smersion à la cote 29.
m menton à la cote 100.
Smersion à la cote 65
environ.
Gomme ci-dessous.
innation du mouvement d'é-
rsion, peut-être avec alter-
ice d'immersions correspon-
ît à la formation des allu-
oi des 1" et z* niveaux.
nencement de l 'emersion du
oral à la fin du Pliocène
rin.
PLAGES OBSERVÉES
SUR D'AITRES POINTS DE LA CÔTE
»
Plage de 15" a Ain Taya,
Cherche! I, Arzeu, Tunisie.
Plages de 30" à l'Est de Mener-
ville, Alu Taya, Zeralda, Casti-
glione, Cherchell, Ténès, Arzeu,
Rachgoun.
Plages de 50 â GO" entre Méuer-
ville et Alger, Zeralda, Tipaza,
Ténès, Arzeu.
Plages de 90 à 100"
près de Bellefontaine, et
aux environs de Zeralda.
Traces d'anciennes plages dans le
massif de Bouzaroa (près Alger)
entre 135 et Mo.
Plage de 200- à Cherchell.
Galets de la Kouzaréa a 350"
TERRASSES OBSERVÉES
DANS DAUTnES VALLÉES
»
Terrasse de 15" à Tarada.
Terrasse de 29* à El Kseur,
de 30* à Kebeval et à
Tamda.
Terr. de 53" tlans l'oued Allada,
à Tenès. — Terr. de 53" à
Kebeval, de58" à El Kseur —
Terr. du Chélif, entre aOdGO»
t?) Terrasse de HO- à Kebeval.
Terrasse de 134" au-dessus de
Rebeval.
Anciennes alluvions du Se-
baou, à 200" au-dessus du
thalweg.
»
296 de lamothe 24 Avril
4* Cours de laisser. Plage de 53m. — Une émersion de plus de 70m,
suivie d'une immersion de 25 à 30m, a donné naissance aux allu vions
du quatrième niveau, et aux puissants dépôts de limon qui les
recouvrent. Le rivage qui était précédemment aux Béni Kous s'est
éloigné vers le nord jusqu'à Mandoura où se trouvait l'embouchure.
Puis la mer a rongé la côte et formé d'abord la plage de 53m, en
dénudant la nappe alluviale qu'elle a recouverte de ses sables; enfin,
poursuivant sa marche, elle s'est avancée jusqu'à l'oued Miane.
La disposition relative des alluvions du quatrième niveau et de
celles du troisième au sud de l'oued Ben Hazine (fig. 7) explique les
faits assez compliqués que Ton y observe (cône de déjection au nord
du point 87, galets de quartzites à la surface des limons, et
présence de petits amas de sables rouges remaniés sur quelques
points de la quatrième nappe). Des lagunes dues à des barrages
alluviens latéraux ont dû prendre naissance le long de la falaise
orientale formée par les poudingues du troisième niveau, et c'est
par une circonstance de ce genre que l'on pourrait peut-être expli-
quer l'existence du gisement de Mélanies dont je reparlerai à la fin
de cette note.
C'est également pendant la période d'immersion que l'oued
Ménaïel dont le cours était de 50m à 55m plus élevé, a accumulé près
de Ben Hamida les dépôts que j'ai signalés page 277.
5e et 6e cours de l'isser. Plages de 30m et de /am. — Un mouvement
d'émersion de 50 à 55m, suivi d'une immersion de 30m, a déterminé
la formation des alluvions du cinquième niveau. La plage de 30m
correspondante s'est formée au voisinage du rivage actuel.
En ce qui concerne le sixième niveau et la plage de 15m, l'absence
de données sur l'épaisseur des alluvions de ce niveau, sur le creuse-
ment de la vallée au-dessous du lit actuel et sur le sens des mouve-
ments de la mer à notre époque, ne permet pas de déterminer
l'amplitude de l'oscillation du niveau de la mer, ni de relier cette
dernière étape du creusement de la vallée à la période présente.
C. Néo-pleistocène. — Je range dans cette période les alluvions
du lit actuel (graviers et limons) et les dépôts des plages actuelles.
J'ajouterai, en terminant, qu'il n'y a aucune preuve que l'isser se
soit pendant le pliocène et le pleistocène déversé à l'ouest par le
col de Meuerville ou que le Sebaou ait franchi le col d'Haussonvil-
lers pour se jeter dans Tisser.
Le tableau synoptique ci-dessus permettra d'embrasser d'un
coup d'œil la succession des faits que je viens d'exposer, et en même
temps ceux qui font l'objet du chapitre suivant.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 297
Chapitre IV. — Résumé des observations
faites sur quelques autres points du littoral algérien.
Ainsi que je l'ai dit dans la préface de cette note, j'ai dû renoncer
à étendre mes recherches à d'autres vallées de la côte algérienne.
Je me bornerai donc dans ce chapitre à grouper, à titre documen-
taire, les observations assez nombreuses que j'ai pu faire person-
nellement sur divers points de la côte, en y joignant celles publiées
par d'autres géologues.
Quelque incomplètes qu'elles soient, elles constituent néanmoins
un ensemble qui permet de prévoir qu'une étude ultérieure condui-
rait, pour une grande partie au moins de la côte algérienne, à des
résultats analogues à ceux obtenus dans la vallée de Tisser.
I. — Anciennes plages
Région entre Ménertille et Alger. — Les sables rouges présen-
tent un grand développement entre Ménervilleet l'Aima. En faisant
abstraction des anciennes dunes, on reconnatt dans cette région
l'existence d'au moins deux niveaux de plages, l'un voisin del00m,
l'autre de 55m.
Près d'Ain Taya, on distingue trois anciennes plages : l'une de
17m reposant sur le Cartennien ; l'autre de 30m, que l'on peut suivre
jusqu'à la presqu'île de Matifou, la troisième enfin de 50 à 60m.
Au cap Matifou les plages de 15 et de 28m sont très nettes.
Environs d'Alger. — A l'ouest d'Alger j'ai observé de nombreuses
traces de plages très élevées sur les pentes de la Bouzaréa, notam-
ment près de Notre-Dame d'Afrique (135 à 145m), et du fortin
Duperré (145m) ; il existe même des galets roulés, provenant exclu-
sivement du massif ancien jusqu'à une altitude voisine de 350m,
sur des points où l'action des eaux courantes est inadmissible, et
qui ne paraissent pouvoir provenir que d'un ancien rivage.
Entre Zéralda et Staouéli il y a trois systèmes de plages bien dis-
tinctes cotées approximativement : 30 à 35m, 55 à 60m, 91 à 100.
De Castiglione à Tipaza, ou trouve plusieurs lambeaux d une
terrasse de 27 à 35m; la surface est fréquemment couverte de dunes
anciennes. Près de Tipaza, à lest, il y a un débris d'une terrasse de
60m environ.
Cherchell. — A Cherchell, une falaise de 16m, couronnée par des
sables et grès coquilliers, gisement d'Elephas Yolensis, s'étend à
298 de lamotre 24 Avril
l'ouest de la ville. Dans la cité et à l'ouest, il y a des traces d'une
plage de 30m. Enfin Pomel a signalé à 200m d'altitude au sud de la
ville, une ancienne plage (1), bien conservée. Il est fort remar-
quable que l'altitude de cette plage corresponde exactement à celle
des lambeaux de sable rouge du plateau des Oulad el Bor au sud-
ouest de Courbet.
Tente. — A Ténès j'ai observé au-dessus du port, à 53m d'altitude,
une corniche à coquilles marines, reposant sur le Cartennien ; c'est
une ancienne plage qui correspond exactement comme altitude à
la terrasse decailloutis sur laquelle est bâtie la ville.
Immédiatement à l'ouest de Ténès, on trouve une plage très
étendue de 27 à 33».
M. Brives, qui a fait une étude approfondie du Dahra, admet
qu'entre Ténès et Mostaganem, il y a deux niveaux de plages
anciennes, l'un de 50'", l'autre ne dépassant pas 20m (2); notre con-
frère ajoute qu'il n'a pu constater la superposition des deux
niveaux.
Mostaganem etArzeu. — Entre Mazagran et la Stidia, j'ai retrouvé
sur plusieurs points des lambeaux d'une plage de 48 à 5om. Au sud
d'Arzeu les sables rouges et grès coquilliers forment deux niveaux
bien distincts : l'un à 15m renfermant Strombus medtterraneus,
l'autre de 52 à 60m : ce dernier est remarquablement développé. Il
y a aussi des indices d'une plage de 30m.
Oran. — La seule observation que j'ai faite m'a permis de recon-
naître le long de la corniche, en allant vers Mers el Kébir, des traces
d'un ancien rivage entre 50 et 60m.
Cote entre Beni-Saf et Nemours. — Il y a sur cette côte au moins
deux niveaux de sables rouges, que l'on voit très nettement du large.
A l'embouchure de la Tafna, j'ai noté des indices d'une plage de 30'\
Côte à test de Visser. — Je n'ai pu étudier dans cette direction que
la plage de Dellys, que M. Ficheur m'a signalée. C'est un lambeau
très démantelé, situé à l'intérieur de la ville, et qui forme un étroit
replat à l'altitude de 33".
H. — Terrasses fluviatiles.
Je n'ai fait d'observations précises que dans trois vallées : celle
de Ténès, celle du Sebaou et celle de l'oued Soumane.
(1) Pomel. Le Sahara, p. 49. Bull. Soc. climat. d'Alger, 1872. — Id. Description
du massif de MUianah, p. 91, 1873.
(2) Brives. Les terrains tertiaires du bassin du Gbélif et du Dahra, p. 80.
i 899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSBR 299
A Ténès, la terrasse de cailloutis qui porte la ville est à 53m ; elle
couronne un escarpement crétacé et se raccorde en amout à des
dépôts de môme altitude. La cote de cette terrasse, comme je l'ai
dit plus haut, est exactement celle d'une ancienne plage située au-
dessus du port.
D'après M. Brives (1) les terrasses de la vallée du Chélif ont une
altitude de 50 à 60m au dessus du thalweg.
Vallée du Sebaou. — A Rebeval, on retrouve deux des niveaux de
Tisser. Sur la rive gauche, une terrasse, très nette, de 30m, porte le
village d'El Tnin, et sur la rive droite le cimetière a été installé sur
un vaste replat de cailloutis qui domine le thalweg de 53m. Au-dessus,
on rencontre successivement un plateau caillouteux à 110m au
dessus du Sebaou (ait. 127m), et un deuxième plateau à 134m
(ait. 151").
En amont, à Tamda, il y a deux terrasses bien distinctes : l'une,
d'une trentaine de mètres, porte le village; la deuxième, au pied,
est à 15m. L'existence de cailloutis au sommet de Tirecht (300m)
prouve que le Sebaou comme Tisser a coulé autrefois à près de 200m
au-dessus du thalweg actuel. J'ajouterai que les cailloutis de
Tirecht sont très volumineux et renferment des blocs de près d'un
mètre de diamètre.
Vallée de la Soumane. — On trouve à El Kseur deux niveaux
bien nets ; l'un à 29m, l'autre à 58m. La Soumane coule dans une
large plaine encaissée par des berges limoneuses de 3 à 4m.
Quelque incomplètes que soient les observations qui précèdent,
il est impossible de ne pas être frappé de la concordance qui se
manifeste entre les altitudes de plages ou de terrasses très éloi-
gnées, et surtout de la répétition dans des profils très distants, des
mêmes formes de terrains au voisinage des mêmes altitudes.
La comparaison des cotes de ces anciennes plages avec celles du
bassin de Tisser fait, il est vrai, ressortir des écarts et des lacunes *
mais ces anomalies qu'une étude minutieuse fera probablement
disparaître, peuvent presque toujours s'expliquer par la déouda-
tion, la présence de dunes anciennes, le ruissellement sur les
pentes, et surtout par cette considération que l'altitude des lambeaux
d'une même plage soulevée peut varier dans des limites assez
étendues. C'est, en effet, ce que montre l'étude des plages actuelles.
Près du cap Blanc, à l'ouest de Courbet, on voit des dépôts littoraux
(1) Brives. Op. cit., p. 87.
300 de lamothe 24 Avril
en formation, à coquilles marines, s'élever à 4 ou 5m au-dessus du
niveau moyen, tandis que sur d'autres points, les dépôts sont
entièrement sous-marins. Une même émersion de la plage actuelle
élèverait donc à des hauteurs qui pourraient différer d'une dizaine
de mètres des formations littorales contemporaines. On devra, par
conséquent, dans la recherche des anciennes plages, attacher moins
de valeur à la concordance rigoureuse des altitudes qu'à la cons-
tatation de ce fait que les mêmes formes de terrain, recouvertes
de dépôts ayant la même nature et la même origine se reproduisent
régulièrement au voisinage des mêmes altitudes, et se superposent
parfois dans des profils pris à de grandes distances les uns des autres.
En ce qui concerne les terrasses fluviales, les données sont trop peu
nombreuses pour permettre une généralisation : on notera cepen-
dant la similitude des cotes entre la terrasse de Ténès et celle du
quatrième niveau de Tisser. Là encore, il y a des lacunes et des
divergences. Mais on ne doit pas perdre de vue que ces anomalies
peuvent être dues à des causes locales, dont les deux principales,
en dehors de la dénudation, sont les suivantes : 1° Les variations
du niveau de base dans deux vallées même voisines peuvent avoir
été très différentes aux diverses époques de creusement de ces
vallées ; les intervalles entre deux terrasses consécutives pourront
par suite présenter des différences sensibles suivant les vallées;
2° les phénomènes de capture qui semblent s'être produits dans un
grand nombre de vallées doivent entraîner des lacunes dans la
succession des terrasses sur certaines parties du cours. 11 est
indispensable de tenir un grand compte de ces faits dans la compa-
raison des observations faites dans des vallées différentes, ou dans
des portions d'une même vallée.
En résumé, s'il n'est pas possible d'admettre comme absolu-
ment démontré que toute la côte algérienne ou du moins une notable
partie, a subi pendant le pliocène supérieur et le pleistocène des
mouvements de même amplitude que ceux dont nous avons cons-
taté la manifestation dans la vallée de Tisser, on peut dire néanmoins
que cette hypothèse doit être considérée comme très vraisemblable.
Il est difficile dès lors de ne pas se demander, si des phénomènes,
aussi réguliers, affectant des étendues de côte de plusieurs centaines
de kilomètres, peuvent réellement s'expliquer par des oscillations
verticales d'une zone aussi étendue de Técorce terrestre, et s'il ne
serait pas, au contraire, plus logique, de les attribuer, comme Ta fait
M. Suess, à des oscillations de l'ensemble de la surface de la mer.
1899 SUR LKS ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE LISSER 301
J'ajouterai, en terminant, que l'uniformité supposée des mouve-
ments de la côte algérienne pendant le pliocène supérieur et le
pléistocène, n'est nullement incompatible avec l'existence de phé-
nomènes locaux, contemporains, variables suivant les vallées.
Dans la Mitidja, par exemple, les sondages exécutés par Ville (1)
ont prouvé que le fond de la vallée était rempli jusqu'à une pro-
fondeur inférieure de près de 200m au niveau actuel de la mer. par
des dépôts nettement fluviatiles, dont il est difficile de faire remonter
l'âge au delà du pléistocène. L'hypothèse d'une émersion locale
post-pliocène de 200m suivie d'une immersion de même amplitude
étant difficilement conciliable avec l'existence des plages de 15, 30
et 55m à Ain Taya et à Matifou, on est conduit à admettre que le
fond de la vallée dans sa partie nord s'est effondré dans des condi-
tions analogues à celles qui ont donné naissance à certains grands
lacs alpins, et a été ensuite rempli par les alluvions.
NOTE ADDITIONNELLE
Ce travail était déjà en grande partie rédigé, lorsque, dans une
dernière course, j'ai découvert dans le vallon de l'oued Hazine, sur
le flanc ouest du plateau 87, un affleurement de sables argileux
jaunâtres de 3 à 4m d'épaisseur, renfermant de nombreuses Méla-
nies, assez bien conservées.
Ce gisement est à l'altitude de 63m environ ; il est marqué sur la
carte par le signe V, et sur la figure 7 la lettre B indique à peu
pressa position relative, avec cette réserve que l'emplacement exact
est à 600 ou 700m au nord de la coupe.
M. Depéret, qui a bien voulu examiner les exemplaires recueillis
par moi, les considère comme appartenant à une même espèce :
Melania Ercterusts Brugnone = MeL plicatula Libassi, forme du Plio-
cène supérieur du Monte Pellegrino (post pliocène des Italiens).
Cette forme ne parait pas avoir été figurée, mais la description qu'en
donne Stefani (2) semble se rapporter exactement à l'espèce algé-
rienne.
11 eût été très intéressant de déterminer exactement la position
de ce gisement par rapport aux nappes alluviales des troisième et
quatrième niveaux. Malheureusement, j'étais à la veille de quitter
( I ) Ville. Notice sur les sondages exécutés dans le territoire civil de la province
d'Alger pour la recherche des eaux jaillissantes, 1866.
(2) Carlo de Stefani. Molluschi continental! pliocenici d'Italia, p. 138.
302 de lamothe 24 Avril
l'Afrique, et il ne m'a plus été possible d'y retourner. Les deux
seuls faits qui me paraissent acquis sont les suivants : 1° les couches
à Mélanies ravinent les marnes du pliocène marin ; 2° elles sont
recouvertes par les limons et sables du quatrième niveau. Mais je
ne puis dire si elles soot antérieures ou postérieures aux alluvions
du troisième niveau.
L'étude des pentes de la rive gauche de l'oued Haziue, où affleu-
rent des calcaires marneux blanchâtres, probablement contempo-
rains, permettra peut être de trancher cette question.
Je ne crois pas, d'ailleurs, que la solution, quelle qu'elle soit, doive
entraîoer une modification de la classification chronologique provi-
soire adoptée pour les différents niveaux de lisser. Des formes
aussi variables que les Mélanies ne peuvent avoir que bien peu de
valeur au point de vue de la détermination de l'âge des dépôts,
d'autant plus que leurs variations pendant le pliocène et le pleisto-
cène de l'Afrique du Nord nous sont à peu près inconnues. La
découverte d'une faune de Vertébrés pourrait seule résoudre le
problème.
LÉGENDE DES FIGURES
Signes conventionnels
Signes conventionnels correspondant sur les
adoptés cartes géolog. détaillées
w, Liparites ; yu, Granité de Ménerville 1
a-X, Andésites et labradorites > Mêmes signes.
c"-8, Craie supérieure ; m4, Marnes bleues )
a2, l2, Alluvions du lit actuel de Tisser et limon
correspondant a2
a1, Alluvions anciennes de la terrasse de 15a (6* ni-
veau) (pour mémoire) »
a0, Id. terrasse de 30" (5* niveau) qi
ai, h, Alluvions anciennes et limon de la terrasse \
de 55* (4- niveau) ( q„
a?, ls, Id. terrasse de 93* (3V niveau) )
plb, Alluvions du 2* niveau plb
p|a, » 1" niveau »
S, Sables rouges, sans distinction d'âge p<
Les poudingues sont figurés par des points noirs, et les sables et grès qui les
surmontent par un pointillé plus fin.
1899 SUR LES ANCIENNES PLAGES ET TERRASSES DU BASSIN DE L'iSSER 303
Observations relatives à la Carte
Pour la clarté et la simplification de la carte, on n'a figuré comme dépôts litto-
raux que ceux qui correspondent a des plages bien définies. Pour les autres, on
se reportera â la carte géologique détaillée, où ils sont représentés par le signe p1.
Pour les mêmes motifs on a supprimé les alluvions récentes et les limons du
lit actuel, indiqués sur la carte détaillée par le signe a2, ainsi que les limons
situés en dehors de la zone des terrasses.
On a également omis les amas de galets accumulés au pied des pentes, notam-
ment dans l'oued Ben Hazine et ses affluents ; ils sont récents ou contemporains
des niveaux les plus bas.
La cote 87 du plateau des Béni K'sir est Inexacte et a été remplacée par la cote 78.
304 24 Avril
NOUVELLES PIÈCES DE DRYOPITHÈQUE
ET QUELQUES COQUILLES, DE SA1NT-GAUDENS (Haute-Garonne)
par M. Edouard HABLÉ.
(Planchr IV).
•
J'ai décrit, dans le Bulletin de Tannée dernière, p. 377, une
mâchoire inférieure de Dryopithecus Fontani Lartet(l), trouvée, peu
auparavant, dans l'une des exploitations de la maruière de Saint-
Gaudens (Haute-Garonne). J'ai recueilli depuis, dans une autre
exploitation de cette maruière, deux molaires delà môme espèce de
Singe. Je les ai figurées daus la planche ci-jointe (fi g. 4 5 et 6-7)
après les avoir dégagées du morceau de mâchoire, en très mauvais
état, dont elles étaient encore munies.
Ces deuts sont lavant-dernière et la dernière arrière-molaires,
Ms et Ma, de la mâchoire inférieure, côté droit. L'avaut-dernière
M: est en parfait état de conservation, sauf la pointe extrême des
racines. La dernière M3 a perdu un peu d'émail, à la partie posté-
rieure de la couronne, et une portion notable des racines.
Le degré d'usure de ces dents est faible. 11 est bien moindre
qu'aux dents correspondantes de la mâchoire que j'ai décrite Tannée
dernière.
La largeur de chacune de ces deux dents est exactement la même
— lOmmi/2 — qu'aux dents correspondantes de la mâchoire que j'ai
décrite. Mais leur longueur est plus faible, caractère qui est surtout
bien net pour lavant-dernière molaire M*, grâce à son excellent état
de conservation. La longueur inaxima de la couronne de cette dent
est en effet 10mml/2 à mon nouvel échantillon, tandis qu'elle est
12mm à mon échantillon de Tannée dernière. Au lieu d'être de forme
légèrement allongée, comme à la mâchoire que j'ai décrite, la
nouvelle dent que j'ai recueillie est donc aussi large que longue, ce
qui lui donne un aspect humain qui frappe à première vue.
(1) dryopithecus signifie Singe de chêne». Lartet (Comptes-rendus, 1856) a
choisi ce nom à cause de « dépots de lignites existants sur les premiers contreforts
pyrénéens » et qu'il croyait, d'après leurs fossiles, dater de l'époque de ce Singe.
Je crois qu'il s'agit des lignites d'Orignac, près de Bagnères-de-Bigorre, que
M. Boule a montre dernièrement appartenir au Miocène supérieur.
1899 NOUVELLES PIÈCES DE DRYOPITHÈQUE 305
La dent correspondante est de forme un peu allongée à La mâchoire
de Dryopithèque décrite par Lartet en 1856 (1) et à celle étudiée par
M. Gaudry en 1890 (2). il en est de même des dents supposées de
Dryopithèque étudiées par M. Branco, d'après l'intéressant Mémoire
que ce savant vient de publier (3). Il en est de même aussi de la
dent correspondante du Gorille, du Chimpanzé, de l'Orang et du
Gibbon. Pour trouver cette dent aussi large que longue, comme
mon échantillon, il faut aller jusqu'à l'Homme, et encore a-t-elle
souvent chez lui une forme un peu allongée.
11 se peut que cette brièveté des molaires de mon nouveau Dryo-
pithèque soit liée à un raccourcissement de son museau.
Les deux nouvelles dents que j'ai trouvées présentent d'autres
caractères intéressants :
M- est munie, à la partie tout à fait antérieure de sa face externe,
d'un rudiment de bourrelet basai qui se relève obliquement sur sa
face antérieure. Mais il est tellement effacé que je ne l'aurais pas
trouvé si je n'avais soupçonné son existence par analogie avec les
pièces déjà décrites de Dryopithèque de Saint Gaudens. Ce bourrelet
basai est remplacé par une sorte de pointe interlobaire qui barre
le pied de la vallée antérieure. M3 n'a aucun vestige de bourrelet et
la pointe interlobaire y est remplacée par un simple ressaut dans
la pente de la vallée. Aux molaires inférieures supposées de Dryo-
pithèque, étudiées par M. Branco, il n'y a ni bourrelet basai, ni
pointe interlobaire (4). Chez le Gorille, j'ai trouvé exceptionnelle-
ment tantôt cette pointe, tantôt ce ressaut, mais bien plus réduits.
Chez le Chimpanzé, je ne les ai jamais trouvés.
Comme aux arrière-molaires de la mâchoire que j'ai déjà décrite,
les tubercules sont séparés par des vallons peu marqués, contrai-
rement à ce qui a lieu chez le Gorille (5).
Ma a deux racines très longues — plus longues, en proportion, que
chez le Gorille.
Ma a deux racines divergentes, soudées l'une à l'autre dans la
partie supérieure. La plus antérieure de ces deux racines est aplatie
longitudinalement ; la postérieure est aplatie transversalement et
(1) Lartet. C.-R. Âr. Se, 28 juillet 1856.
\2) Gaudry. Mémoires de Paléontologie de la Soc. géol. de /•>., 1890.
(3) Branco. IHe m enschenâhn lichen Zâhne au* dem Bonnerz der achw&bischen
Alb, 1898, p. 43 et 59.
(4) Branco. L. c.} p. 00.
(5) Ce fait a déjà été observé sur d'autres échantillons, par M. Gaudry (Mém. de
Paléontologie de la Soc. géol. de France,, 1890), et par M. Schlosser (Die foasilen
Aflen. Archiv. fur Anthropologie, 1888).
18 Août 1899. — T. XXV11. Bull. Soc. Géol. Fr. — 20
306 ÉD. HARLÉ. — NOUVELLES PIÈCES DE DRYOPITHÈQUE 24 Avril
présente ainsi un grand développement dans le sens de la longueur
de la dent.
Les détails que je viens de donner seront peut être utiles pour
établir la descendance du Dryopithèque lorsque les Singes anthro-
pomorphes moins anciens seront mieux connus.
Je profite de l'occasion qui m'est offerte pour publier, sur la même
planche que ces deux dents, la mâchoire qui a fait l'objet de ma
dernière Note. Je crois devoir rappeler les observations que j'ai
présentées au sujet de la symphyse :
La symphyse manque, en partie, à cet échantillon. Les traces de
sa cassure le long du corps de la mâchoire (visibles sur les figures 2
et 3) montrent que, eu arrière, son raccordement avec le corps de
la mâchoire s'étendait tout au plus jusqu'à l'aplomb de l'extrémité
antérieure de Mi. Par suite, suivant l'axe de la mâchoire, la sym-
physe cessait plus en avant. En outre, on reconnaît (mêmes
figures) que la paroi postérieuredu menton descendait brusquement
jusqu'au bas de la mâchoire, dès l'aplomb de la prémolaire anté-
rieure P:i. A l'échantillon de M. Gaudry, la symphyse est beaucoup
plus forte : elle se raccorde à l'aplomb de l'extrémité postérieure de
Mi ; elle s'arrête, suivant Taxe de la mâchoire, un peu en arrière de
l'extrémité antérieure de cette dent ; en outre, la paroi postérieure
du menton y reste sur un plan élevé jusqu'à l'aplomb des arrière-
molaires.
Le Dryopithèque de Saint-Gaudens avait donc bien plus de place
pour la langue que celui décrit par M. Gaudry.
Chez TOrang et le Chimpanzé, la symphyse ressemble à celle de
mon échantillon. Il en est de même chez les Gorilles femelles et chez
plusieurs Gorilles mâles. Mais j'ai vu quelques Gorilles mâles où
elle rappelle plutôtlasymphyse de l'échantillon étudié par M. Gaudry.
Ainsi, à deux Gorilles mâles du Muséum de Bordeaux (uOH815et 840),
la symphyse s'étend, en arrière, plus loin même qu'à la pièce de
M. Gaudry, et la paroi postérieure du menton reste au niveau de la
base de la couronne des dents jusqu'à la prémolaire postérieure P*.
11 semble donc que, somme toute, la symphyse du Dryopithèque
ressemble à celle du Gorille.
Le point de la marnière où ont été trouvées les deux nouvelles
dents est fort éloigné de celui où l'on a recueilli la mâchoire que
j'ai décrite l'année dernière. Leur distance est en effet 150 mètres.
Et cependant, leur niveau est le même : 385 mètres d'altitude. L'on
n'a pas noté, que je sache, où ont été découverts les restes de
1899 KT QUELQUES COQUILLES, DE SAJNT-GAUDEN8 307
Dryopithèque décrits en 1856, par Lartet, et en 1890, par M. Gaudry.
A défaut de ce renseignement, l'on peut supposer, d'après mes
échantillons, que la couche horizontale de marne d'altitude 385
mètres constitue, à Saint-Gaudens, le niveau à Dryopithèque.
Le lait que, ayant commencé mes recherches à Saint Gaudeus, il
y a un an seulement, j'ai pu cependant y recueillir des restes de deux
Dryopithèques, me fait penser que les restes de ce Singe si inté-
ressant ne sont pas très rares dans ce gisement. Les deux seules
découvertes faites jusque-là, en 1856 et en 1890, pouvaient faire
supposer le contraire.
M. Rixens m'a procuré dernièrement une troisième arrière-
molaire supérieure de Cervidé trouvée à un niveau de 20 mètres
inférieur à celui du Dryopithèque. Elle ressemble beaucoup à celle
du Daim actuel et diffère ainsi, par des caractères importants et
modernes, de celle des Cervidés de Sansan. Elle parait provenir
d'un Cervidé de même espèce que celui que j'ai signalé dans le
gisement miocène supérieur de Montréjeau (B. S. G. F., 1897, p. 902).
J'ai recueilli, au point d'où provient la mâchoire que j'ai décrite,
une pièce du plastron d'une Tortue dont la carapace devait avoir uu
peu moins de vingt centimètres de longueur.
J'ai aussi recueilli, au même point, plusieurs coquilles et emprein-
tes de coquilles. Je les ai communiquées à M. le DrBoettger, de Franc-
(ort-sur-le Mein. Répondant à mes questions, ce savant a eu l'obli-
geance de m'envoyer les renseignements que voici. Mais je dois
tout d'abord appeler l'attention sur ce que, suivant les idées alle-
mandes, M. Boettger fait commencer le Miocène supérieur plus tôt
qu'on ne le fait en France et attribue, par suite, au Miocène supé-
rieur des couches que nous classons dans le Miocène moyen.
Je traduis :
Les coquilles que vous m'avez envoyées» sont des Unio, de trois espèces, qui
appartiennent au groupe de VU nia flabellatus Goldf., groupe très répandu dans
le Miocène supérieur, mais dont je ne connais qu'une seule espèce dans le Pliocène
inférieur.
L'échantillon N" 1 est un Unio subtrigonus Noulet (Noulet : Mom. sur quelques
coquilles fossiles nouvelles, dans Mém. de l'Acad. des Se. de Toulouse, 1846, p. 234
et pi. III, fig. 2-3).
L'échantillon .V t est très probablement un Unio stricteplicalus Noulet (Le.,
p. 235, pi. II, tig. 2. — Noulet a écrit strictiplicalus, ce qui est moins correct).
L'échantillon N° 3 appartient à une espèce qui ne me parait pas avoir été décrite.
Les échantillons qui ont servi à Noulet pour créer les espèces U. subtrigonus
et L. slricleplicatus provenaient de Laymont et de Le Planté et, en outre, pour
la première espèce, de Lahas et, pour la seconde, de Le Pin, localités toutes situées
dans le département du Gers, sauf la dernière, qui est dans la Haute-Garonne.
308 ÉD. HARLÉ. — NOUVELLES PIÈCES DE DRYOP1THÈQUE 24 Avril
Nous pouvons donc admettre que le gisement de Saint-Gaudens est du même
âge que ceux de La y m ont, Le Planté, Lahas et Le Pin (donc à peu près contem-
porains de Simorre). En Allemagne, appartiennent à cet âge : les couches do
Pfrungen, Pflummern, Blinzhofen, près Ehingcn, et Fischbach, près Biberach
(Wurtemberg) ; Gûnzburg, Reis«iiburg, Hâder, Kutzenhausen, Sand, près Din-
kelscherben, Landestrost et Dillingen, près A ugsburg (Bavière); Dcttighofen, près
Thlengen, etOcningen et Engels wies, près Môsskirch ( Bade). En Suisse : Schotzburg,
Berlingen, Stein-am-Rlioin (canton de Thurgovie), Littenhaid, près Wyla, Hôdin-
gen, Kâpfnach et Schwammendingen (canton de Zurich), Sitteswald (canton de
Saint-Gall), Kilchberg (canton de Bâle) et Kloster Mûri et Schloss Riid (canton
d'Argovie), ainsi que Vermes, près Délémont (canton de Berne).
Nous avons donc à peu près la succession que voici :
Miocène moyen
Da*
Marnes bieues de Saint-Jean-de-Marsac et de Saubrigues. Falun de Moulin de
Cabanne, près Dax.
Haut. Sansan (étage supérieur du Miocène moyen).
Miocène supérieur
Bas. 1. Selssan, Ornezan.
t. Laymont, Lahas, Saint-Gaudens (couches à Umo flabellatus Goldf. H
espèces du même groupe et à M étant a escheri Brongn. var. aqui-
tanica Noulet).
3. Simorre.
4. Dans l'est de l'Europe, couches sarmatiques à Potamides p ictus et
rubiginosus. Manquent dans le sud-ouest de la France.
Haut. 5. Orignac — Eppelsheim.
Pliocène inférieur
Manque dans le sud-ouest de la France.
Je crois donc que le gisement de Saint-Gaudens est un peu plus ancien que
l'étage de Simorre. Quoi qu'il en soit, il est certain que :
Saint-Gaudens — Laymont, Lahas — Pfrungen, Pflummern, etc.
Le gisement à Dryopithèque de Saint-Gaudens étant, d'après
M. Boettger, contemporain des couches où Noulet a recueilli les
Unio subtiHgonus et stricteplicatus à Laymont, Le Planté et Lahas
(Gers) et à Le Pin (Haute-Garonne, à 1 kil. seulement de la limite
du Gers), il serait intéressant de rechercher directement à quel étage
appartiennent ces couches. Ce problème semble facile à résoudre,
étant donné que, d'après M. Jacquot (1) et M. Depéret (2), la limite
supérieure de l'étage de Sansan, inférieure de l'étage de Simorre,
est partout, dans le Gers, à l'altitude 230 m. ou à une altitude très
voisine. 11 suffit donc, semble t-il, de définir les altitudes de ces
(1) Description géol., etc., du département du Gers, 1870.
(2) B. S. G. F., 20 novembre 1893.
1899 ET QUELQUES COQUILLES, DR SAINT-GAUDENS 309
couches et de voir si elles sont notablement supérieures ou infé-
rieures à 230 m. Malheureusement, Noulet n'a donné aucune autre
indication sur ces gisements que les noms de villages ci-dessus.
Ces villages sont dans un pays de coteaux accidentés et les altitudes,
aux environs, varient de beaucoup plus de 230 m. à beaucoup moins
que cette cote. Ainsi, le village de Laymont est bâti sur un sommet
de coteau à l'altitude 311 m. ; mais, à 1 kil. seulement de distance,
un fond de vallée descend à 183 m. Les étiquettes de ceux des
échantillons de la collection de Noulet que j'ai vus ne renseignent
pas davantage. La même incertitude existe pour les autres gise-
ments à Unio. Tout au plus, de l'affirmation générale du Mémoire
de Noulet, que ses Unio ont été recueillis, le plus souvent, sur les
sommets, peut-on induire que ceux dont il s'agit proviennent des
altitudes approximatives 311 m. (Laymont), 278 m. (Saint-Lizier-
du-Planté, à défaut de Le Planté qui ne ligure ni sur la carte d'État-
Major, ni sur celle de Cassini), 273 m. (Lahas), 320 m. (Le Pin),
c'est-à-dire d'altitudes supérieures à celle de 230 m. où se trouve
le passage de l'étage de Sansan à celui de Simorre.
Je rappelle que, dans ma Note précédente, j'avais conclu de
plusieurs Mammifères découverts à Saint-Gaudens (Dinotherium,
Sus) et de considérations stratigraphiques, que ce gisement appar-
tient à l'époque de Simorre et même à la fin de cette époque. Cette
conclusion est accentuée par la découverte à Saint-Gaudens, que je
viens de signaler, d'une molaire de Cervidé ressemblant à la dent
correspondante du Daim actuel. Les Mollusques de Saint-Gaudens
conduisent, au contraire, M. Boettger à considérer ce gisement
comme intermédiaire entre Sansan et Simorre et, par conséquent,
comme un peu plus ancien que je n'avais cru. On peut donc suppo-
ser que la faune des Mammifères et celle des Mollusques ne se sont
pas modifiées tout à fait en môme temps et que la seconde a été
plus lente à changer.
M. Boettger a bien voulu me donner aussi le renseignement
suivant :
Le groupe fossile do VUnio flabcllatus Gold. est le précurseur du groupe de
l'Amérique du Nord Unio verrucoaus Rafln, encore vivant.
Par analogie avec les espèces voisines actuellement vivantes, on doit admettre
que vos Unio ont vécu dans un lac à eaux pauvres en calcaire, ou bien dans le
delta ou l'eau dormante d'un grand fleuve à courant presque insensible. Aucun de
vos échantillons ne peut guère être considéré comme une forme réellement
fluviatile.
310 ÉD. HARLÉ. — NOUVELLES PIÈCES DE DRYOPITHÈQUE 2i Avril
Une couche de cailloux de quartz, granité, etc., dont le plus volu-
mineux n'est pas gros comme la moitié d'un œuf, se trouve à un
mètre ou deux en contrebas du point où ont été trouvées la mâchoire
de Dryopithèque et les coquilles. Elle indique l'existence d'un cours
d'eau en ce point au temps du Dryopithèque. Mais le régime de ce
cours d'eau devait bien différer de celui de la Garonne dont les
alluvions anciennes et actuelles contiennent, à Saint Gaudens,
d'énormes cailloux : ainsi, par exemple, dans la plaine inférieure,
au pied de la marnière, mais sur l'autre rive, un caillou de quartz de
1/5 de mètre cube.
Tous les cours d'eau miocènes de cette région n'ont charrié que
de petits cailloux.
EXPLICATION DE LA PLANCHE IV
Fig. 1-2-3. — Portion gauche d'une mâchoire inférieure d'un Dryopithèque. —
Fig. 1, vue suivant sa face externe. Fig. 2, vue suivant sa face interne. Fig. 3, vue
en plan, un peu inclinée vers l'extérieur. G, canine; P.«, Pi, prémolaires ; Mi, M*, M^,
arrière-molaires; ac, fond de l'alvéole de la racine de la canine droite.
La cassure de la symphyse a été légèrement teintée à l'encre de chine pour la
faire mieux paraître. On remarquera que la paroi postérieure du menton descen-
dait brusquement jusqu'au bas de la mâchoire dès l'aplomb de la prémolaire
antérieure Pt et que. en arrière, son raccordement avec le corps de la mâchoire
s'étendait, tout au plus, jusqu'à l'aplomb de l'extrémité antérieure de la première
arrière-molaire Mi.
Fig. 4-5 et 6-7. — Deux arrière-molaires inférieures droites d'un Dryopithèque.
— Fig. 4, l'avant -dernière M*, vue en plan. Fig. 5, la même, vue suivant sa face
externe.
On remarquera que cette dent est aussi large que longue.
Fig. 6, la dernière arrière-molaire Mj, vue en plan. Fig. 7, la même, vue suivant
sa face interne.
1899 311
SUR LE TRIAS DES ENVIRONS DE ROUGIERS
ET SES RELATIONS AVEC LA ROCHE ÉRUPTIVE
DE CETTE RÉGION
par M. i. REPELIN.
(Planche Y).
Le Muschelkalk occupe en Provence des étendues considérables
aux environs de Rougiers et de Saint-Maxiniin. Son aspect est assez
uniforme, c'est un ensemble formé par des calcaires durs gris
bleuâtres presque noirs et généralement couverts de taches noi-
râtres, et des calcaires moins durs marneux gris clair contenant
plus spécialement les fossiles. Les calcaires noirâtres sont souvent
cargneuliformes et des intercalations dolomitiques se montreut à
divers niveaux. Ce faciès est très constant, aussi ai-je été fortement
surpris lorsque, dans uue excursion que j'avais l'honneur de faire
avec lui, M. Marcel Bertrand me montra, reposant sur le basalte de
Rougiers, un horizon spécial du Trias d'un aspect tout à fait inusité
et dans les strates duquel il avait observé des traces de bivalves et
de Gastéropodes. Après de minutieuses recherches, j'ai eu la bonne
fortune de trouver, indépendamment des bivalves, généralement
frustes, de bons exemplaires des Gastéropodes qui appartiennent
aux genres créés par Kittl, Koken, Bolun, pour les Gastéropodes du
Muschelkalk de l'Autriche, de l'Allemagne et de l'Alsace-Lorraine.
M. Vasseur avait observé en certains points des traces de Gasté-
ropodes et de petits bivalves dans le calcaire dur du Muschelkalk,
mais l'état de conservation de ces fossiles, qui n'apparaissent géné-
ralement qu'en section, ne permettait pas de détermination.
Dans les couches de Rougiers, au contraire, les fossiles, lorsqu'ils
sont entiers, peuvent être assez facilement dégagés de leur gangue.
Sur les conseils de M. Marcel Bertrand j'ai étudié avec soin :
1° La roche triasique et ses relations avec la roche éruptive de
Rougiers; 2° La faune de ce niveau du Muschelkalk.
1° L'affleurement très restreint des couches fossilifères se montre
interstratifié entre un tuf feldspatbique directement eu contact avec
le basalte et les bancs compacts du Muschelkalk à facièsnormal,
312 REPELIN. — SUR LE TRIAS DES ENVIRONS DE ROUQIERS 24 Avril
contenant Cœnothyris vulgaris. C'est une véritable lumachelle
formée de débris de bivalves et de Gastéropodes à lest blanc englo-
bant en outre d'innombrables débris d'une roche éruptive altérée.
Je crus y reconnaître des débris de la roche éruptive à péridot de
Rougiers, mais pour plus de sûreté j'envoyai quelques échantillons
à M. Marcel Bertrand. M. Michel Lévy, qui a bien voulu les examiner,
a reconnu dans ces débris altérés la présence du péridot, il ne
semble donc pas douteux qu'ils appartiennent au basalte de
Rougiers. Malgré l'aspect moderne du basalte, je crus d'abord avoir
affaire à un remaniement et je n'hésitais pas à considérer la roche
éruptive comme antétriasique. Les raisons étaient que les morceaux
de roche éruptive, loin d'être anguleux comme ceux que l'on trouve,
par exemple, dans les calcaires aquitaniens de l'Auvergne, avaient
une apparence roulée. J'étais surpris en outre de voir un faciès
spécial que je croyais localisé en ce point et que je considérais
comme littoral. L'état de conservation remarquable de certains
fossiles militait aussi en faveur de cette hypothèse, ainsi que la
situation des bancs de lumachelle légèrement relevés sur le basalte.
J'avais constaté également des débris de roche éruptive dans
l'intérieur même de certaines coquilles fossiles et j'attachais une
certaine importance à ce fait. Il faut ajouter encore que je n'avais
vu en aucun point le basalte superposé au Trias.
M. Marcel Bertrand, à qui je communiquai mes impressions,
me rappela les pépérites d'Auvergne et les longues discussions
auxquelles elles avaient donné lieu. 11 me signala en outre deux
affleurements de couches probablement analogues à celles de
Rougiers, l'un sur la route de Tourves à Bras, l'autre à peu de
distance du précédent au sud de la ferme du grand Valbelle. Les
observations que j'ai faites dans cette région ont modifié complè-
tement mon opinion première. J'ai trouvé, en effet, la plus frap-
pante analogie entre ces affleurements et ceux de Rougiers. Les
débris inclus dans le Trias sont aussi abondants qu'à Rougiers, ils
sont tous altérés mais reconnaissables. Ainsi les couches à débris
basaltiques ne sont pas spéciales à Rougiers, elles ne représentent
pas un faciès local, littoral, puisque les lambeaux sont distants de
plus de 8 kil. Des observations plus précises à Rougiers m'ont
permis en outre de constater que le basalte n'est pas recouvert, sur
tout le pourtour de l'affleurement, par le Trias, mais qu'au contraire,
dans la partie S.-E., il repose sur les dolomies triasiques. Enfin, et
cette observation est des plus importantes, j'ai pu m 'assurer que ces
dolomies, non loin de là, présentent des phénomènes d'altération
1899 ET SES RELATIONS AVEC LA ROCHE ÉRUPTIVE DE CETTE RÉGION 313
manifestes et qu'elles renferment, comme les calcaires du côté
ouest, des débris de la roche éruptive. Ces faits ne peuvent s'expli-
quer ni par le remaniement ni par une pluie de cendres contem-
poraine du dépôt. Il est à remarquer, en outre, que l'altération
même du basalte inclus est uue preuve en faveur des inclusions.
On se trouve donc là en présence d'un phénomène analogue aux
pépérites et il ne me paraît pas douteux maintenant que les débris
de basalte que l'on observe dans le Trias et qui atteignent parfois
la grosseur du poing, sont dus à des intrusions. Je ne puis
m'expliquer l'extension de ce phénomène que par la présence
d'une nappe épanchée au sein même des sédiments triasiques et
dont le pointement de Rougiers n'est qu'une dépendance. C'est là
une première conclusion à tirer des études précédentes. Une autre
est relative à l'âge des couches qui affleurent sur la route de Tourves
et près de Valbelle. Leur identité avec celles de Rougiers permet de
les classer dans le même horizon géologique. Quant à préciser cet
horizon, c'est un point assez difficile. La faune de Gastéropodes de
Rougiers se trouve, en effet, aussi bien dans le Wellenkalk que
dans le Muschelkalk proprement dit (1). Quelques fragments de
Cératites que jai eu la bonne fortune de trouver associés aux Gasté-
ropodes dans la lumachelle, et que M. Haug a bien voulu examiner,
tendraient à lui faire considérer ces couches comme appartenant au
Muschelkalk proprement dit. Quoi qu'il en soit, les couches des
environs du grand Valbelle doivent être rangées dans le Norien
(Muschelkalk) et non dans le Werfénien, comme l'indique la carte
géologique.
Eu fin une dernière conclusion, d'un intérêt plus général, est que
la constatation d'un phénomène analogue aux pépérites d'Auvergne,
et dont la nature parait ici bien démontrée, est un argument
important en faveur de l'hypothèse des brèches (iloniennes, pour
les inclusions de basalte dans les calcaires de la Limagne.
2° Faune. — Le gisement fossilifère est très intéressant, c'est le
seul point où le Muschelkalk présente cette petite faunule dans des
conditions qui permettent de l'étudier. Les échantillons sont assez
nombreux, mais le nombre des espèces est très restreint. Avant de
les étudier je tiens à faire remarquer combien est grande l'unifor-
mité de la faune triasique, à l'exception des formes de Céphalo-
podes propres au Trias alpin. On trouve, en effet, cette faune à
(I) Je dois ce renseignement, ainsi que d'autres relatifs aux publications alle-
mandes sur les faunes de Gastéropodes triasiques, à M. Haug; je le prie d'accepter
mes remerciements.
314 REPEL1N. — SUR LE TRIAS DES ENVIRONS DE ROUGIERS 24 Avril
Undularia et Marmolatella aussi bien dans les Alpes du Trentin,
c'est à-dire dans la province méditerranéenne, que dans le Trias
extra alpin et, dans ce dernier, aussi bien au nord qu'au sud, en
Alsace- Lorraine et en Provence. J'ai distiugué dans la faune de
Rougiers quatre espèces appartenant au genre Undularia, une Holo-
gyra, trois espaces de Marmolatella et trois formes appartenant aux
genres Arcomya, Gonodun et Lima.
Indépendamment de ces types de Gastéropodes et de Lamelli-
branches, j'ai à signaler les frigments de Cératiles que M. Haug a
examinés et qu'il rattache au groupe du C. nodosus. Ils présentent,
en effet, comme ce savant me l'a fait remarquer, beaucoup de
rapports avec certaines formes décrites par Toroquist (1). L'un
montre des tours très embrassants et porte des tubercules ombi-
licaux très développés ainsi que deux rangées de tubercules
ventraux allongés parallèlement à l'enroulement. L'autre, plus
comprimé que le précédent, possède un grand nombre de lobes et
de selles.
G. Undularia
J'ai rapporté au genre Undularia de Koken (2) quatre fossiles eu
bon état de conservation et dont l'un au moius, celui qui est orné
de côtes sinueuses normales à la ligne de suture, correspond
exactement à la diagnose de ce genre donnée par Koken pour
Turritella excatata et scalata Schloth. Chez les trois autres les orne-
ments font défaut, mais l'ouverture buccale présente absolument les
caractères de ce genre et la forme générale est identique à celle de
l'exemplaire orné de côtes, et rappelle certainement aussi celle des
Turritelles. La coquille est allongée, subulée, les tours sont plats,
à peine infléchis vers la ligne suturale, la bouche est ovale ou
suhquadrangulaire, non dentée, il n'y a pas d'ombilic visible.
Undularia Bertrandi n. sp, lig. 3.
Cette espèce est remarquable par la netteté de ses ornements qui
sont visibles sur tous les tours. Dans certains exemplaires les
premiers tours eux-mêmes ont des sillons transversaux sinueux
aussi accentués que les derniers. Elle a quelques rapports avec
Und. loxonemoides de Kittl., mais les sillons sont bien plus nets,
plus profonds et moins nombreux par tour. Les tours sont aussi
(1) Zeitschrift d. D. geol. Gesellsch., 1897, n° 2.
(g) Je tiens à remercier M. le Dr Hagenmuller, à qui je dois la traduction des
ouvrages allemands qui m'ont été nécessaires pour ce travail.
1899 ET SES RELATIONS AVEC LA ROCHE ÉRUPTIVE DE CETTE RÉGION 315
plus hauts et moins nombreux. La bouche est subquadraugulaire
à angles émoussés.
Undularia obtusa d. sp., fig. 1.
Cette espèce de petite taille se distingue facilement des autres par
ses tours légèrement bombés, ce qui lui donne un aspect un peu
plus scalariforme. La bouche est ovalaire comme dans la plupart
des Undularia. On trouve aussi, mais plus obtuse, la carène du
dernier tour qui donne dans certaines formes, comme Und Bertrandi
et Und. loxonemoides, un aspect subquadrangulaire à l'ouverture
buccale. Ici cette carène se termine très atténuée au bord buccal
sans modifier la forme ovalaire de la bouche.
Undularia simplex n. sp., fig. 4.
Cette forme, plus grande que toutes les autres du même gisement,
correspond exactement, sous tous les rapports, à la description du
genre, excepté au point de vue des ornements. Elle est, en effet,
absolument lisse. 11 faut ajouter aussi que la partie carénée des
tours est très nette et que la bouche est presque arrondie.
Undularia exigua n. sp., fig. 8.
Très petite espèce, qui se distingue de suite des autres par sa
taille ; elle présente en outre une callosité sur la partie interne du
bord buccal. Les tours sont très peu nombreux, on en compte trois,
mais le quatrième, ou plutôt le premier, doit avoir disparu.
G. Hologyra Koken.
Ce genre est voisin de Naticopsis et par conséquent de Marmola-
tella. Le principal caractère différentiel est la présence d'un sillon
longitudinal près du bord de la suture des tours. Ce genre est repré-
senté par une jolie petite espèce que j'ai dédiée à mon maître
M. Vasseur. Les caractères du genre créé par Koken sont des plus
nets. La forme appartient au groupe des Hologyra carinata de
Koken.
Hologyra Vasseuri n. sp., fig. 5.
La coquille est naticiforme, épaisse et à spire très courte, la
bouche est ovalaire, peu allongée de haut en bas, la callosité colu-
mellaire est très épaisse et masque presque complètement l'enfon-
316 RKPEUN. — SUR LE TRIAS DBS ENVIRONS DE ROUGIERS 24 Avril
cernent columellaire, le test est absolument lisse. L'opercule m'est
inconnu.
Cette forme rappelle un peu Hologyra Ogilvia> Koken, mais elle
s'en distingue très nettement par l'aplatissement presque complet
delà spire, l'épanouissement de l'ouverture buccale et surtout par
le sillon longitudinal que portent les tours près de la suture. De
plus, la carène qui borde ce sillon est absolument lisse comme le
reste de la coquille et ne porte pas de tubercules.
G. Marmolatella Kittl.
Ce genre est représenté par quatre espèces ayant des caractères
généraux qui les rapprochent, mais dont trois au moins sont bien
distinctes. Les tours internes ne sont pas résorbés. J'ai pu m'en
rendre compte dans plusieurs coupes faites dans des échantillons
de Af. Rougieri.
Marmolatella Rougieri n. sp., fig. 2.
Cette espèce est assez voisine des M. cf. complanata de Stoppa ni
in Bôhra (1) et de \f. picta, mais elle s'en distingue par l'absence
d'épanouissement de l'ouverture buccale et la longueur un peu plus
grande de la spire. De plus la callosité columellaire couvre complè-
tement l'enfoncement columellaire, et cette callosité très nette,
mais obtuse, n'atteint le bord buccal ni eu haut, ni en bas. Les
mêmes caractères la distinguent également de M. planoconvexa de
Kittl. Les exemplaires que j'ai recueillis ne m'ont jamais montré
de stries à la surface.
Marmolatella cf. Rougieri n. sp., fi g. 10.
Cette espèce se distingue à peine de la précédente par sa forme
un peu plus globuleuse, l'aplatissement presque complet de la
spire, et l'élargissement plus considérable du bord labial.
Marmolatella cf. Rougieri n. sp., fig. 11.
J'ai recueilli quelques formes qui paraissent un peu différentes
de la précédente par l'aplatissement encore plus grand de la partie
interne du dernier tour et l'allongement du bord buccal, comme
l'indique la ûgure 11. Elles appartiennent ou à cette espèce ou à
M. planoconvexa de Kittl., mais à cause de leurs petites dimensions
je crois devoir les réunir plutôt avec M. cf. Rougieri, Il serait
possible que l'on eut affaire à des M. planoconvexa jeunes.
(1) Palxontographica, Bd. XL1I, Planche XI.
1899 ET SES RELATIONS AVEC LA ROCHE ÉRUPTIYE DE CETTE RÉGION 317
Marmolatella minima n. sp., fig. 7.
Cette espèce se distingue facilement des autres par l'absence de
callosité columellaire et la forme conique de la spire. 11 faut ajouter
que la bouche est aussi bien moins épanouie et d'ailleurs la taille
ne permet pas de confusion.
G. Arcomya Ag., 1842.
Je crois pouvoir rapporter au genre Arcomya un Lamellibranche
à coquille équivalve non dentée que j'ai figuré (fig. 9).
Arcomya sp., tig. 9.
Coquille équivalve à contour subhexagonal. Côté anal plus déve-
loppé que le côté buccal. Côté anal parcouru en travers par une
carène obtuse. Pas de dents cardinales. La coquille est ornée de
stries assez irrégulièrement disposées et peu accusées.
Ces formes sont rarement en bon état de conservation.
G. Gonodon? sp. indét., fig. 6.
Je rapporte avec doute au genre Gonodon une forme qui se
rapproche un peu des espèces de ce genre décrites par Bôhm dans
le Paleontographicn. Cette coquille, qui rappelle par sa forme géné-
rale les Corbis et les As tarte, est peu abondante. Elle est ornée de
sillons concentriques et l'on y voit également des traces de stries
parallèles aux sillons, le crochet est très élevé et tourné en avant.
G. Lima
Ce genre est représenté par une forme de petite taille, un centim.
environ, dont l'état de conservation laisse trop à désirer pour
permettre une description.
318 24 Avril
NOTE SUR UN BOIS DE VIGNE DES CINÉRITES DU CANTAL
par M. P. FLICHE.
Parmi les échantillons de fossiles végétaux provenant des Ciné-
rites du Cantal, que l'Ecole supérieure des Mines a reçus récemment,
se trouve un fragment de charbon, encore en partie engagé dans la
roche encaissante. M. Zeiller. qui l'a trouvé avec M. Marty, au cours
de fouilles entreprises par celui ci, au Pas de la Mougudo, a bien
voulu me le confier pour l'étudier. Quoiqu'il soit très petit, puisqu'il
ne mesure que 32 mill. de longueur et 13 de largeur au maximum,
il n'est pas sans présenter quelque intérêt, car il appartient bien
certainement à une Vigne, genre dont l'existence a déjà été cons-
tatée sur des empreintes do feuilles dans les mêmes gisements;
comme je l'établis plus loin, il semble que ce soit le bois de l'espèce
rencontrée; de plus, l'échantillon fournit quelques renseignements
sur les conditions dans lesquelles il a été déposé.
Malheureusement, ce fragment est trop petit pour qu'il soit aisé
d'en détacher des coupes microscopiques sans l'endommager, et de
plus il est si complètement carbonisé, puisqu'il tache le papier
sous la moindre pression, que l'obtention de bonnes coupes est
fort problématique. Mais les caractères microscopiques de structure
sont si nombreux et si nets, que la détermination peut être consi
dérée comme absolument certaine ; l'échantillon présentant même
la plus étroite ressemblance avec la vigne, cultivée ou sauvage, en
en France et en Algérie.
Des deux parts, on observe de très nombreux rayons médullaires
épais et à peu près égaux, entre lesquels le tissu prédominant, quant
à l'espace qu'il occupe, est formé par des vaisseaux de deux dimen-
sions; les uns très gros, très visibles à l'œil nu, aussi bien sur une
section transversale que sur une section longitudinale ; les autres,
plus difficilement visibles, même à la loupe, quand on ne les
examine pas par transparence, sur une coupe mince, telle que les
sections Nordlinger on Thil ; ces derniers sont égaux, formant de
petits groupes à côté des premiers ; ceux ci, légèrement inégaux,
parfois couplés, forment des lignes rayonnantes plus ou moins
régulières, souvent uniques entre deux rayons médullaires; sur les
1899 NOTE SUR UN BOIS DE VIGNE DES CINÉRITES DU CANTAL 319
sections longitudinales ou voit qu'ils sont, en partie, remplis par
des matières de dépôt, en partie en diaphragmes. Des deux parts
aussi, c'est à-dire sur le fossile et les échantillons vivants, les
accroissements annuels sont peu marqués.
De tout ce qui précède, il résulte que le charbon des Cinérites du
Pas de la Mougudo a la structure des bois des vignes actuelles et
même qu'il ressemble singulièrement à la vigne européenne. Comme
aucun autre genre que les vignes parmi ceux, déjà nombreux,
signalés dans les Cinérites, ne possède une structure semblable,
celle-ci étant très caractérisée d'ailleurs, je crois que ce n'est pas
excéder les bornes de l'induction, permise en pareil cas, d'y voir
le bois d'une vigne et même de celle qui a été signalée dans les
Cinérites et nommée, par de Saporta, Vitis xubintegra. Elle n'a pas,
jusqu'à présent, été indiquée au Pas de la Mougudo, mais bien dans
les deux gisements contemporains de Saint-Vincent et de la Sabie,
elle l'a été aussi dans une autre localité pliocène, étrangère aux
Cinérites, Meximieux.
Son auteur a beaucoup varié quant à l'appréciation de ses affi-
nités avec les espèces actuelles du genre Vitis ; ce fait n'a rien de
surprenant puisqu'il n'avait à sa disposition qu'un petit nombre
d'empreintes de feuilles, ce qui est très insuffisant quand il s'agit
d'un genre où ces organes sont susceptibles de grandes variations
dans la même espèce; où les types spécifiques sont souvent assez
voisins pour amener de grandes divergences dans l'appréciation
qui en est faite, pour que, en tout cas, ou ne puisse les définir sou-
vent qu'en faisant appel à tous les caractères que peuvent fournir
les différents organes.
Dans l'ouvrage qu'il a consacré à établir les origines des végétaux
ligueux cultivés, en 1888, de Saporta ne cite pas le Vitis subintegra
parmi les ancêtres qu'il admet pour le Vitis cîm/era ; et, en effet,
en 1873, dans sa première communication sur la flore des Cinérites
du Cantal (I), il se borne à citer cette espèce sans la rapprocher
d'aucune vigne vivante. La même année, dans une communication
à la Société géologique (2), il disait qu'elle a des affinités améri-
caines, mais sans les spécifier (p. 223) ; il émettait la même opinion
dans les considérations finales de ses recherches sur les végétaux
fossiles de Meximieux en 1876. En 1884, dans un travail sur la flore
(1) Forêts ensevelies sous les cendres éruptives de l'ancien volcan du Cantal,
observées par M. J. Rames. Ânn. Se. iïat., 5* série, XVII, p. 402.
(2) Sur les caractères propres à la végétation pliocène à propos des découvertes
de M. Rames dans le Cantal. B. S. G. F., 3* série, I, p. 212.
320 p. fliche 24 Avril
deMogi (1), il revient sur le V. s ub intégra et le rapproche du Vitis
labrusca (page 100) ou au moins de ce que Nathorst a considéré
comme tel à Mogi. En 1885, dans l'ouvrage qu'il publie avec
M. Marion, sur l'Evolution du règne végétal (2), il dit à la page 176 :
(( Avançons d'un degré et le Vitis subtntegra Sap. des Cinérites du
Cantal nous découvre l'existence, au sein des forêts pliocènes, d'une
vigue différente de celle qui précède ( V. prœomifera Sap.) mais se
rattachant de même au groupe des Euvitis. Le V. subintegra est
assimilable, par ses feuilles, aux formes simplement lobées angu-
leuses de l'Asie occidentale et austro- occidentale, particulièrement
aux Vitis lanata Roxb. et Cinnanoinea Vall. On voit que, sans tenir
encore le V. vinifera, nous gravitons cependant vers lui et que nous
nous en rapprochons sensiblement ». A la page 175 du même
ouvrage il ligure, en demi-grandeur, une feuille de V. subintegra,
et à la page 177 une de V. vinifera, de race spontanée en Provence,
et il fait remarquer leur ressemblance qui est grande, en elfet, bien
que les lobes de la dernière soient un peu plus prononcés que
ceux de la seconde.
Enfin, dans le dernier travail (3) où il ait été amené à traiter ce
sujet, il dit, après avoir signalé une nouvelle et très belle empreinte
de feuille de Vitis subintegra : « Cette vigne est assimilable par la
forme et l'aspect gaufré de ses feuilles au V. amurensis, ainsi qu'aux
formes à feuilles entières du V. Thunbergi Sieb. et même au Vitis
lanata Roxb. ».
Ces oscillations, dans la manière de voir de i'éminent paléonto-
logiste, n'ont rien de surprenant, si l'on songe aux affinités qui
existent souvent entre les espèces du genre Vitis, à la grande varia-
bilité que présente fréquemment pour la même, la forme de la
feuille, l'organe le plus habituellement conservé à l'état fossile. On
voit qu'après avoir rapproché sans hésitation, mais sans ideutiiica-
tion, le Y. subintegra du V. labrusca américain, il avait fini par voir
ses affinités plutôt du côté du V. vinifera, les figures de l'Evolution
et le rapprochement avec le V. amurensis (4) le prouvent.
Le bois du Pas de la Mougudo conduit à des conclusions ana-
logues, à raison de l'identité qu'il présente avec celui du V. vinifera,
(1) Nouvelles observations sur la flore fossile de Mugi, dans le Japon méridional
Ann. Se. Mat. Bol., 6* série, XVII, p. 73.
(2) L'Evolution du régne végétal. Les Phanérogames, 11, Paris, 1875.
(3) Revue des travaux de paléontologie végétale, etc. Extrait de la Revue
générale de Botanique, tome II, 1890, p. 46.
(4) Cette dernière vigne est assez voisine de V. vinifera pour que Regel en ait
fait une simple variété de celle-ci.
1899 NOTE SUR UN iiOIS DE VIGNE DES CINÉRITES DU CANTAL 32 1
dans tous les caractères conservés, tandis qu'il y a des différences
appréciables avec le bois du V. labrusca, à en juger par un échan-
tillon contenu dans la collection Nordlinger. Chez celui ci, en effet,
les gros vaisseaux sont plus nombreux, plus régulièrement répartis,
plus égaux ; les plus gros étant un peu plus faibles que chez le
V. vinifcra vivant et chez le charbon des Cinérites. On ne peut
malheureusement voir les autres caractères qui distinguent le bois
du V. labrusca de celui de la vigne commune, à savoir sa couleur
blanche et l'absence de parenchyme ligneux appréciable; malgré
cela et sous les réserves que comportent toujours les caractères
distinctifs chez des bois de structure aussi voisine, il n'y en a pas
moins, dans ce qu'on peut constater, sur le bois fossile des Cinérites
de sérieuses raisons de le rapprocher du bois du V. tinifera et par
suite un motif aussi pour rapprocher de celle-ci le V. subintegra;
mais ici les réserves doivent encore augmenter, puisque feuilles et
bois sont seulement coexistants dans les Cinérites, sans avoir été
trouvés adhérant l'un à l'autre.
Même en admettant que le bois dont je viens de parler appar-
tienne à une autre espèce du même genre, il ne m'en semble pas
moins certain, pour les raisons exposées plus haut, que c'est bien
le bois d'une vigne, et je ne crois pas nécessaire de lui donner un
de ces noms génériques qui indiquent seulement une ressemblance
de structure, sans rien préjuger sur l'attribution véritable. Si
cependant cette conviction ne paraissait pas devoir s'imposer, il y
aurait lieu de créer ce nom, puisque c'est le premier bois à structure
de vigne, signalé à ma connaissance, et suivant la règle assez géné-
ralement adoptée en pareille matière, ce serait un Ampeloxylon qui
pourrait, comme nom spécifique, être qualifié A. cineritarum.
Ainsi qu'il a déjà été dit plus haut, l'état dans lequel se trouve le
fossile qui vient de nous occuper, indique dans quelles conditions
il a été déposé; il s'agit d'un fragment de charbon, tel qu'on en
obtient dans nos foyers, complètement enveloppé dans la roche
encaissante. De cela il résulte que le bois qui l'a fourni a été brûlé
par le feu et non soumis à une décomposition lente et qu'il était
déjà réduit en fragments lorsqu'il a été enveloppé par les cendres
volcaniques qui ont constitué la roche. C'est donc alors qu'elle était
encore sur pied, que la vigne, dont ce fragment provient, a été
brûlée dans un incendie de forêts amené par les matières en igni-
tion sorties du volcan; un fragment en provenant a été ensuite
renfermé dans les cendres ou boues volcaniques qui ont, en se
durcissant, constitué la roche.
18 Août Itm. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — iî
322 K1LIAN. — OBSERVATIONS 24 Avril
M. Kilian envoie les observations suivantes au sujet d'une note
de M. David Martin, parue dans le dernier fascicule du Bulletin.
M. David Martin se refuse à reconnaître l'existence de dépôts
glaciaires antérieurs aux alluvions de la terrasse d'Embrun et de
Mont-Dauphin et semble hostile à la conception de glaciations
successives, pourtant aujourd'hui bien établie par les faits dans le
bassin de la Durance. Il est intéressant de remarquer que la coupe
qu'il propose (p. 573 du Bulletin), et dont je ne discuterai pas ici
l'exactitude, ne peut s'expliquer que par la théorie même qu'il combat ;
cette môme coupe fait également ressortir d'une façon frappante
l'ancienneté relative des alluvions du Calvaire d'Embrun que l'au-
teur s'attache cependant à rajeunir à la fin de sa note.
En mettant en évidence, comme il le fait, le caractère mixte
et semi -glaciaire de cette terrasse de Mont- Dauphin-Embrun,
M. Martin ne fait du reste que confirmer l'origine fluvio-glaciaire et
l'âge interglaciaire que nous lui avons assignés, M. Penck et moi.
Les alluvions du Mont Genèvre out été citées en 1890 et 1891 par
M. Martin, mais il ne les a pas décrites et n'a tiré de leur existence
aucune des conséquences que j'en ai déduites en 1896.
Tout en croyant avec M. Martin que la plupart des matériaux de
la terrasse de Mont-Dauphin proviennent du Guil, je ne pense pas
qu'il soit possible de reconnaître les galets de variolites du Mont
Genèvre des variolites que le Guil a charriées et qui sont originaires
du Queyras.
Connaissant mieux que la plupart de nos confrères la somme
considérable d'observations que M. Martin a recueillies pendant le
cours de ses patientes et longues recherches, je suis profondément
persuadé que les fruits de ce labeur immense ne prendront leur
juste valeur que lorsque leur auteur admettra la réalité des glacia-
tions successives du bassin de la haute Durance et des périodes de
creusement qui les ont séparées.
1899 323
SUR UN DOME TRIASIQUE
DANS LES ENVIRONS DE RELIZANE (DÉPARTEMENT D'ORAN)
par M. ti. FABRE.
M. Brives a fait connaître à la séance du 20 mars dernier l'exis-
tence d'une région pétrolifère au sud de Relizane, dans le dépar-
tement d'Oran, et il attribue une grande importance stratigraphique
et industrielle à une faille N.E.-S.O. qui s'étendrait depuis Kalaa
à TO. jusqu'au confluent de la Mina avec l'Oued Tliouanet à TE.;
cette faille serait, d'après M. Brives, d'âge nettement post-tortonien.
Je viens de visiter avec notre aimable confrère la partie centrale
de cette région, à 5 kil. N.-E. du village de Tliouanet, mais mes
observations me conduisent à voir en ce point tout autre chose
qu'une faille post-tortonienne.
Faisons passer une coupe N.-S. par le sommet le plus élevé du
Koudiat m'taa Argoubet Teizna, sommet coté 388 m. sur la carte
d'État-Major (feuille d'Aine-Faress 1/50.000°). Nous observons
d'abord que sur ce sommet le sol est jonché de masses souvent
volumineuses de calcaire blanc cristallin récifal à Mélobésies ; c'est
un lambeau de calcaire du Djebel Bar bar (Tortonien) désagrégé sur
place par les dénudations. Puis, en dessous, '20 mètres de marnes
grises plongent légèrement vers le N. et s'épaississent rapidement
à mesure qu'on se rapproche du Chabet bou Seffir, où ces marnes
atteignent 40 m. d'épaisseur visible. Sous ces marnes, si on descend
la colline vers le ravin du Chabet Mezaref, on voit émerger les
poudingues caractéristiques du Cartennien à éléments siliceux
(10 m.).
Puis, brusquement, sous ces poudingues bruns apparaissent des
marnes bariolées sans stratification bien nette, mais offrant cepen-
dant des indices de flexures et de contournements parfois verticaux.
Dans ces marnes sont emballées des niasses considérables de gypse
gris ou rose, cristallin, sans stratification bien nette. C'est le faciès
classique des marnes et gypses triasiques.
Enfin, sur la rive droite du Chabet Mezaref, nous voyons des
marnes avec petits rognons ferrugineux alternant avec des calcaires
marneux de même couleur à surfaces roui liées ; cette série de cou-
324 SUR UN DÔME TRIASIQUE DANS LES ENVIRONS DE RELIZANE 24 Avril
ches est comme flanquée sur le Trias en couches très inclinées
plongeant vers le sud ; nous y avous recueilli quelques fragments
d'Inocérames et d'Ammonites. C'est incontestablement le Crétacé,
probablement le Sénonien avec quelques assises néocomiennes à la
base.
D'autres profils menés à un kilomètre plus à l'est par le marabout
El Djama m'taa Tadjine font voir les mêmes couches tertiaires, créta-
cées et triasiques dans les mêmes relations de position réciproques.
Interprétant tous ces faits, nous les voyons se grouper naturellement
de façon à démontrer jusqu'à l'évidence qu'on a ici un dôme anti-
clinal crétacé, au centre duquel apparaît le Trias en couches plas-
tiques qui semblent avoir été poussées au jour de bas en haut par
des pressions orogéniques.
Ce dame eut d'âge antecartennien puisqu'il a été évidemment arasé
et usé avant l'invasion de cette mer qui y a déposé ses poudingues
sur les tranches relevées du terrain crétacé. Puis ce dôme a dû
éprouver après l'époque cartennienne un nouvel et léger bombe-
ment avaut d'être recouvert de nouveau par la mer tortonienne à
Mélobésies qui l'a décapé partiellement avant d'y laisser ses dépôts
de calcaire récifal.
Il n'y a donc pas ici de faille à proprement parler, ni même
d'accident post-tortonien comme le voudrait M. Brives; les seuls
mouvements orogéniques dont ou ait ici la trace nette sont, l'un
ante-cartennien et l'autre an te- tor Ionien.
Un autre petit dôme anticlinal est situé à trois kilomètres N.N.O.
de celui que nous venons d'étudier ; il montre près du Chabet
Matrani ses couches les plus anciennes (Néocomien ?) et il ne semble
pas non plus explicable par une faille. Quant aux relations du
pétrole avec ces dômes elles sont pour le moment très obscures ;
mais des sondages profonds vont être prochainement entrepris dans
toute la région, ils nous éclaireront sur ce point très intéressant de
la géologie oranaise.
1899 325
Séance dn 1er Mai f 8*M»
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE. PRÉSIDENT
M. P. Cambronne, Vice-Secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce deux présentations.
M. de Martonne signale parmi les dons récemment parvenus à la
Société un fascicule du lieport de la Commission géologique du Cap de
Bonne- Espérance (année 1897) avec une carte au 1/800.000 et une
planche de coupes.
M. P. Cambronne signale dans les ouvrages français : 1° la notice
nécrologique sur Hippolyte Crosse, par M. Fischer et les
discours prononcés sur sa tombe ; 2° le troisième fascicule des
Essais de Paléoconchologie comparée, par M. Cossmazm.
M. A. de Lapparent appelle l'attention de la Société sur les inté-
ressantes observations faites récemment au Vésuve par M. Matteuci.
326 \<* Mai
LES OVICELLES DES CÉIDÉES
par M. F. CANU.
(Planche VI).
Les Céidées sont des fossiles bryozoaires propres au Crétacé.
Aucune espèce actuelle connue ne peut faire supposer leur orga-
nisation. D'Orbigny (1) (1850) qui les a découverts les considérait
comme une famille de sa division des Centrifuginés foraminés.
Marsson (2) (1887) les classait dans son type Metoporina des Cyclos-
tomes. Le Dr J. Jullien (3) (1888) en faisait des Cheilostomes mono-
dermiés. Pergeos (4) (1889) en fait une des trois divisions des
Bryozoaires cyclostomes (Ceina).
Cet hiver, en dépouillant des matériaux provenant des environs
de Tours (Santonien), j'ai découvert leurs ovicelles (loges spéciales
où les larves se développent). Ils sont d'une rareté extrême. Je n'en
possède qu'une dizaine d'échantillons. La planche VI représente les
photographies des meilleures.
Par la seule inspection des ces figures il est facile de voir que ces
ovicelles sont analogues à ceux de beaucoup de Tubulipores dont
plusieurs sortes ont été décrites ; mais il y en a deux principales :
les sacciformes et les irrégulières (5). Les ovicelles de la première
remplacent les cellules normales : ceux de la seconde glissent entre
elles. Les ovicelles des Eléidées sont du premier type. Ceux des
Céidées sont du second.
L'analogie des ovicelles des Céidées avec ceux des Diastopores et
des Mesen ter i pores est complète. Ainsi, par exemple, presque
toujours les deux faces d'une même colonie de Mesenteripore
portent un ovicelle à la même hauteur. De même ici les figures 5
et 6 (Cea lamellosa d'Orb.) sont les deux faces d'une même colonie :
(1) d'Orbignt. Paléontologie française. Bryozoaires crétacés, p. 1.000.
(2) J. Marsson. « Rugen », 1887, p. 45.
(3) J. Jullien. « Cap Horn », 1888, p 8.
(4) Pergens. Bull. Soc. Belge Géol., 1889, p. 388.
(5) Waters. On some Ovicelles of Cyclost. Bryozoa. Journ. Linn. Sor.t 1888,
p. 275. — Canu. « Occaignes », B. S. G. F., 1898, p. 259.
1899 LES OVICELLES DES GÉIDÉES 327
les ovicelles ont même forme. Dans les figures 3 et 4 qui repré-
sentent aussi les deux faces d'une même colonie, les ovicelles ont
des formes différentes, mais ils sont à la même hauteur. La figure 5
représente une face d'une colonie. De l'autre rôle il existe un même
nombre d ovicelles symétriques. Nous avons jugé inutile de la
figurer.
Dans tous les Tubulipores, lovicelle n'est qu'une partie fortement
dilatée d'une zoécie (1). Il en est de même dans les Céidées. La
figure 5 est éloquente à cet égard. Les quatre ovicelles brisés
montrent au fond l'ouverture de la portion zoéciale restée tubulaire.
Le petit nombre des exemplaires ne m'a pas permis de découvrir
ni œciostome (passage par où s'échappent les larves) ni œciopore
(ouverture de ce passage). Les figures 4, 5 et surtout 2 montrent
bien des petits pores accouplés de nature spéciale, mais il serait
imprudent d'en tirer une déduction quelconque.
EXPLICATION DE LA PLANCHE VI
Fig. 1. — Cea sp. Ovicelles brisas montrant l'ouverture de la partie restée
tubulaire. X 10,5.
Fig. 2. — Cea 8p. Los deux petits pores accouplés constituent peut-fltre l'œcio-
pore. X 10,5.
Flg. 3. — Cea lamellosa d'Orb. Première face. X 10,5.
Fig. 4. — Id. Seconde face. X 10,5.
Fig. 5. — Id. Première face. X 10,5.
Fig. 6. — ld. Seconde face. X 10,5.
(1) S. Harmer. On tbe development of Tubulipora. Quart. Journ. micr.
Science, 1897, p. 73.
328 1er Mai
SUR V AMMONITES PERAMPLUS
ET QUELQUES AUTRES FOSSILES TURONIENS
par M. A. de GROSSOITVRE.
En 1893, après avoir montré que le genre Pachydiscus, tel que
l'avait établi M. Zittel, comprenait des espèces n'ayant entre elles
que des affinités fort éloignées, j'ai proposé de le limiter aux formes
du groupe d'Am. neubergicus et d'en séparer notamment Am. peram-
plus : j'avais rattaché provisoirement ce dernier au genre Sonneralia.
Depuis lors (1896), me basant sur l'analogie de l'Ain, peram plus
adulte avec une espèce de l'Inde, ,4m. Telinga Stoliczka, pour
laquelle M. Kossmat venait de créer le genre Neoptychites, j'ai pensé
qu'il convenait de classer notre forme turonienne dans ce nouveau
groupe.
Cette manière de voir a été combattue successivement par MM.
Kossmat, Peron et Haug : je crois néanmoins devoir la maintenir
dans ce qu'elle a de plus essentiel, c'est-à-dire dans la séparation
absolue du groupe de YAm. peramplus de celui de VAm. neubergicus
et je viens répondre ici aux critiques formulées par nos savants
confrères.
Déjà en 1895, M. Kossmat (1), dans son beau mémoire sur les
Céphalopodes de l'Inde, disait : « après avoir examiné non seule-
ment Am. peramplus, mais aussi des formes a truies de la craie de
l'Inde et de la craie de Vancouver, je n'ai pu découvrir aucun
caractère permettant de les séparer de Fachydiscus : la ligne des
cloisons est absolument typique et semblable à celle des espèces
rattachées par de Grossouvre aux Fachydiscus. »
Plus tard (1897), revenant sur cette question dans la troisième
partie de son mémoire (p. 154), il déclare de nouveau que le groupe
de YAm. peramplus possède les cloisons typiques, très finement
découpées et à lobes étroits, des Pachydiscus, et que le dessin des
cloisons donné par Sharpe est trop schématique pour pouvoir
servir de base à une comparaison.
1 1 1805. Kossmat. Untorsuchungen ûber dio sûdindische Krfi de format ion. Erstor
Theil, p. m.
1899 sur l'ammox/tes peramplus 329
Au contraire, d'après M. Peron (1) Am. peramplus forme avec
plusieurs autres espèces de la craie moyenne, telles que Am.
Telinga, Am. lewesiensis, Am. cephalotus% etc., un groupe de formes
très voisines que, peut-être, il sera utile de distinguer par une
même dénomination générique.
Mais, après avoir rappelé l'opinion de M. Kossmat, il ajoute :
<( Cette manière de voir de M. Kossmat, rapprochée de celle de
M. Zittel, qui considère A m. peramplus comme une des formes
typiques de son genre Pachydiscus, est évidemment à prendre en
très sérieuse considération. Nous devons donc, malgré l'incontes-
table analogie des formes adultes d'Am, peramplus avec celles d'Am.
Telinga, maintenir cette première espèce dans le genre Pachydiscus
où nous l'avons précédemment placée. »
Enfin, tout récemment, M. Haug (2) s'exprimait ainsi : « On peut
distinguer, parmi les Pachydiscus de l'Inde, deux groupes : celui de
P. peramplus et celui de P. colligatus, qu'il n'est pas possible de
séparer génériquement, car les caractères de l'ornementation et de
la suture présentent partout une assez grande stabilité. Je rap-
pellerai que M. de Grossouvre, après avoir rapproché le groupe de
P. peramplus du genre Sonneratia, l'a réuni à Neoptychites Kossm.,
qui possède toutefois des cloisons complètement différentes. »
Il y a dans la question discutée deux points à examiner : l'un
purement de nomenclature, l'autre de fait.
11 s'agit d'abord de savoir si Am. peramplus étant supposé appar-
tenir à un groupe différent de celui d'Am. neuhergicus, on a le droit
d'exclure la première espèce du genre Pachydiscus, créé par M.
Zittel, et de réserver exclusivement ce nom aux formes du groupe
de la seconde.
M. Pérou me fait remarquer que « Am. peramplus étant la
première espèce citée par M. Zittel comme forme typique de son
genre, si l'on peut éliminer de celui-ci certaines formes, il semble,
qu'à défaut d'autres indications, c'est la première espèce citée qui
doit rester le type générique. »
Sans méconnaître la portée de cette observation, je puis cependant
répondre qu'aucune règle de nomenclature n'a été formulée à ce
sujet et que toute latitude a été laissée pour préciser dans un sens plus
étroit les genres hétérogènes ou susceptibles d'être démembrés (3).
(t) 1897 Peron. Les Ammonites du Crétacé supérieur do l'Algérie, p. 43.
(2) 1899 Revue critique de Palënzooloyip, p. 79.
(3) Malgré l'affirmation contraire de M. Haug dans la séance du 1" mai, je crois
devoir maintenir l'opinion précédente. Tel est aussi l'avis de plusieurs paléonto-
logues que j'ai consultés : ils se refusent à admettre que le type du genre soit
nécessairement la première espèce citée.
330 DE GROSSOUVRE. — SUR h' AMMONITES PERAMPLUS 1er Mai
Il me reste donc à prouver qu\4m. peramplus n'appartient pas
au même groupe qu'il m. neubergicus et dès lors j'aurai établi qu'il
ne peut être maintenu dans le genre Pachydiscus limité, conformé-
ment à ma proposition (1893), au groupe de cette dernière espèce.
M. Kossmat dit avoir examiné des échantillons dMm. peramplus
dont' les cloisons ne diffèrent pas de celles des espèces que j'ai
classées dans les Pachydiscus; M. Haug également affirme que les
caractères de l'ornementation et de la suture sont les mêmes dans
le groupe de VAm. peramplus et dans celui de l'A m. colligatus.
J'ai cité à l'appui de la thèse contraire le dessin des cloisons
donné par Sharpe et reproduit par M. Schlûter : M. Kossmat
l'écarté comme étant trop schématique. Sans vouloir affirmer son
exactitude absolue, je crois être en droit de soutenir qu'en fait il
se rapproche beaucoup plus de celui des cloisons de VAm. peram-
plus typique que du plan général de la suture des Pachydiscus.
Je trouve dans le mémoire de MM. Laube et Bruder (1) sur les
Ammonites du Crétacé de la Bohême, une preuve à l'appui de ce
que j'avance : ces deux savants ont donné les dessins des cloisons
dMm. peramplus (p. 226, fig. 3a et 3//) et d'il m. lewesiensis (p. 227,
4a, 46 et 4c): leur examen permet de constater de grandes analo-
gies avec les figures de Sharpe et au contraire des différences fort
nettes et bien accentuées avec les cloisons de Pachydiscus neuber-
gicus, P. colligatus, etc.
J'ai pu, d'ailleurs, vérifier les caractères indiqués sur un certain
nombre d échantillons d'Am. peramplus bien typiques de prove-
nances diverses, Belgique. Touraine, etc. (collections de l'Ecole des
Mines, de la Sorbonne, ma collection).
M. Peron a également figuré (loc. cit., pi. XVIIÏ, fig. 6) les cloisons
d'un échantillon de Tebessa qu'il rapporte à Am. peramplus : elles
sont fort différentes de celles des Pachydiscus, tels que je les com-
prends, et M. Peron signale leur analogie avec le dessin de Sharpe.
Chez les Pachydiscus typiques, les cloisons sont très profondément
découpées: les lobes sont étroits et terminés en pointe; le premier
lobe latéral ne descend pas plus bas que le lobe siphonal. Au con-
traire, dans les espèces turoniennes. les selles sont beaucoup plus
massives et moins découpées; les lobes sont beaucoup plus larges,
notamment à leur partie inférieure; le premier lobe latéral descend
beaucoup plus bas que le lobe siphonal. En un mot, nous trouvons
dans les deux groupes des caractères suffisamment tranchés pour
maintenir leur distinction.
(1) 1887. Laubi und Bruder. Ammoniten der bôhmischen Kreide.
1899 ET QUELQUES AUTRES FOSSILES TURONIENS 331
M. Haug considère [loc. cit., p. 79) que le groupe de VA m. peramplus
a des cloisons complètement différentes de celles de Keoptychites :
je ne partage pas cette manière de voir et, si je me réfère aux
dessins de MM. Laube et Bruder, je relève de nombreuses analogies
avec celui des cloisons de Neoptychites Telinga donné par M.
Kossmat (loc. cit., pi. VII, fig. 1). Des deux côtés le premier lobe
latéral est large, plus profond que le lobe siphonal, élargi à sa
partie inférieure et subdivisé par deux branches assez développées ;
le second et le troisième lobe sont beaucoup plus courts et ne descen-
dent pas plus bas que le lobe siphonal, seulement dans Am. Telinga
la troisième selle est la plus large, tandis que c'est la seconde chez
Am. peramplus et Am. Invesiensis. Il existe donc de grandes analo-
gies entre ces diverses cloisons et, pour cette raisou comme pour
les motifs que j'ai précédemment donnés (1896) et qui sont basés
sur la ressemblance des individus adultes, je crois que l'Am. peram-
plus se place plus près du genre Neoptychites que de tout autre : je
ne méconnais point que les jeunes sont assez différents et peut-être
y aurait-il là un motif pour créer un nouveau groupe, mais, en
tout cas, il n'y a aucune affinité entre Am. peramplus et les vrais
Pachydiscus.
La cause du désaccord qui existe au sujet de la position de VAm.
peramplus dans la classification me semble provenir de la confusion
produite par les analogies extérieures qui existent entre les jeunes
de cette espèce et certains exemplaires qui se rattachent réellement
au genre Pachydiscus.
Ainsi malgré la grande similitude de VAm. Jimboi Kossmat, avec
les jeunes de VAm. peramplus, je u'hésite pas à dire que nous avons
là deux espèces fort éloignées l'une de l'autre et que, si nous pou-
vions étudier les deux coquilles aux diverses périodes de dévelop-
pement, nous verrions immédiatement ressortir les différences qui
les séparent.
En l'état de nos connaissances sur l'espèce de l'Inde, cette com-
paraison n'est pas possible et je ne puis baser mon opinion que
sur le dessin des cloisons, analogues, dit M. Kossmat, à celles
d'Am. anapadcnsis(P\. XX, fig.2)etdMm. rotalinus (PI. XX, fig. 36),
c'est-à-dire à celles des Pachydiscus : elles s'écartent ainsi tout à fait
de celles des .4m. peramplus vrais.
J'ai sous les yeux un échantillon du Santonien des Corbières : il
rappelle beaucoup l'espèce précédente et aussi .4m. Vaju Stoliczka
(Kossmat, loc. cit., pi. XX, fig. 4); au premier abord je fus frappé
par sa ressemblance avec les jeunes de VAm. peramplus et étonné
332 DE GR08S0UVRE. — SUR h* AMMONITES PERAMPLUS lAr Mai
de retrouver à un niveau si élevé une forme si voisine de celle du
Turonien. Après examen, je ne tardai pas à reconnaître que l'ana-
logie était toute superficielle et à constater des différences bien
marquées dans les caractères extérieurs et dans le dessin des
cloisons : celles-ci rappellent absolument celles des Pachydiscus.
Toutes les espèces rattachées par MM. Kossmat et Haug au groupe
de VAm. peramplus, telles que Am. Jimboi, Am. Vaju, etc., aussi
bien que les espèces analogues des Corbières, sont donc pour moi
de vrais Pachydiscus et, sur ce point, je partage l'opinion de mes
deux savants confrères, mais, en même temps, je constate qu'elles
possèdent des cloisons fort différentes de celles de VAm. peramplus
typique, tel que nous le connaissons dans le Nord de l'Europe. Par
suite et contrairement à leur manière de voir, je pense qu'il n'existe
pas dans la craie de l'Inde d'Ammonites du groupe du peramplus
ou, tout au moins, que nous n'en connaissons pas encore.
Toutes ces espèces me rappellent des formes sénoniennes : j'ai
déjà parlé de celles de la craie des Corbières qui sont santonien-
nes ; je crois que l'on doit rattacher à ce même groupe A m. hernensis
Schlûter (1867, Beitrag zur Kenntniss der jùngsten Ammoneen
Norddeutschlands, p. 35, pi. VI, fig. 4) qui provient des marnes de
l'étage Emschérien (Schlûter) de la Westphalie, ces t-à dire de
couches correspondant à notre étage Couiacien.
Je ne crois donc pas que la base de l'étage de Trichinopoly, dans
l'Inde, soit turonienne, car cette conclusion est basée sur l'existence
d'espèces rapprochées à tort de VAm, peramplus et qui sont repré-
sentées en Europe par des types très voisins habitant l'étage séno-
nien. Il est vrai que l'on trouve encore dans le groupe de Trichi-
nopoly Am. serrato-carinatus, du groupe d'Am. Germari, mais cette
espèce à elle seule ne peut suffire pour confirmer ce rapprochement.
Quant à Puzosia Gaudama Forbes sp. du groupe de Trichinopoly,
rapprochée dUm. hernensis Schlûter, 1871 (non Am. hernensis
Schlûter, 1867, = Puzosia Mûlleri de Gross., 1893), du Turonien
supérieur de la Westphalie, je dois faire observer que les espèces
de ce groupe ne sont pas encore suffisamment connues et trop
difficiles à distinguer pour permettre un parallélisme à grandes
distances : je possède un échantillon de Puzosia du Santonien des
Corbières qui se rapproche beaucoup de P. Gaudama.
Pour tous ces motifs je suis porté à croire que, dans l'Inde, le Turo-
nien est représenté seulement par les couches supérieures du groupe
d'Utatur et que le groupe de Trichinopoly tout entier est sénonien.
Je reviens à VAm. peramplus : on l'a cité un peu partout et sou-
1899 ET QUELQUES AUTRES FOSSILES TURON1ENS 333
vent à tort, je crois. Je n'en connais d'échantillons bien authen-
tiques que de l'Angleterre, qui a fourni le type, de la Belgique, de
l'Allemagne du Nord, de la Bohême, du Nord de la France et de la
Touraine.
Dans les Charentes. dont les faunes présentent, aux époques
cénomanienne, turonienne et sénonienne, tant de traits communs
avec celles de la Touraine qu'on doit en conclure qu'il existait
alors une large communication entre ces deux régions, je ne con-
nais aucun échantillon dMm. peramplus : de môme dans le Turonien
des Pyrénées.
Cette espèce a été citée à Uchaux et daos la région alpine fran-
çaise; mais nous n'avons pas lieu de nous en étonner, car nous
savons que vers la fin du Turonien, la faune du bassin de Paris a
pénétré dans ces régions : ce sont les contrées les plus méridionales
dans lesquelles se rencontrent des Micrasters identiques à ceux de
la craie blanche du bassin anglo-parisien.
D'après les données fournies par M. Peron, .4m. peramplus semble
bien exister en Algérie.
Par contre, je doute fort qu'il se retrouve dans le Turonien du
Portugal : l'espèce citée par M. Choffat et décrite par lui comme
var. beyrensis diffère du type notamment par la persistance des
côtes secondaires à une taille où elles sont déjà effacées chez les
échantillons typiques et par le peu de relief des côtes principales.
Il est d'ailleurs difficile de dire si on a là une forme du groupe du
peramplub ou du neubergicus ou même si elle ne se rattache pas à
Am. Denisonianus Stol. qui est un Puzosia.
Malgré l'absence dans le Crétacé de l'Inde de formes voisines
de Y Ain. peramplus, nous constatons cependant des analogies indis-
cutables entre la faune de notre Turonien et celle de la partie supé-
rieure du groupe d'Utatur.
J'ai déjà signalé la présence dans la Touraine et les Charentes de
l'espèce de la craie de l'Inde Neoptychites Telinga Stol., sp., qui a
été décrite par Courtiller sous le nom d\lm. cephalotus, d'après des
échantillons provenant du Turonien inférieur des environs de
Saumur: les variétés renflées de ce type ressemblent beaucoup à
iV. Aetra Stol. sp., qui cependant, d'après Stoliczka, proviendrait
de la zone à Am. inflatus.
A m. Medlicotti Stol., du groupe de l'Utatur, me parait identique
à l'adulte de YAm. Deveriai d'Orb. ; j'ai recueilli au sommet du
Turonien de la Touraine des échantillons qui ne me paraissent pas
pouvoir être distingués du type de Stoliczka.
334 DE GR0S80UVRE. — SUR \, AMMONITES PERAMPLUS 1er Mai
M. Kossmat a montré l'identité de YAm. ornatissimus S toi., avec
l'espèce de la craie de la Touraine, précédemment confondue avec
Am. Dexeriai, que j'avais distinguée sous le nom d'Am. deverioides.
J'indiquerai encore l'identité très probable de mon Pachydiscus
Linderi des Corbières avec Puzosia Denisionana Stol. sp. (Kossmat,
loc. cit., pi. XXf, fig. 5a) également du groupe d'Utatur : j'avais, sur
les indications de M. Roussel, donné P. Linderi comme provenant
du Sénonien, mais notre savant confrère a reconnu depuis lors
qu'il appartenait au Turonien.
L'espèce la plus remarquable, commune aux deux régions, est
certainement YAm. superstes Kossmat, qui rappelle si singulière-
ment VAm. coronatus du Callovien. Je l'ai découverte dans le
Turonien inférieur des Charcutes : ainsi s'affirme encore la grande
ressemblance des faunes à l'époque turonienne dans l'Ouest de la
France et sur la côte orientale de l'Inde.
A m. superstes a été rattachée par M. Kossmat au genre Olcoste-
pkanus (ou mieux Holcostephanus), mais le dessin des cloisons me
parait établir une distinction tranchée, car les lobes de VAm.
superstes dont M. Kossmat a donné le dessin (PI. XVII, fig. le)
sont à terminaison bifide, tandis que leur extrémité est en pointe
chez les véritables Holcostephanus. Je serais plutôt disposé à rap-
procher cette espèce des Acanthoceratidés et à la désigner provi-
soirement comme Ac. (?) superstes Kossmat, sp., mais les Acantho-
ceras typiques ont leurs selles bifides et nous ne retrouvons pas ce
caractère chez Am. superstes : quoi qu'il en soit, je ne puis voir
dans celui-ci une récurrence du groupe de YAm. coronatus.
Près de cette espèce et comme variété plate probablement se
place l'échantillon du Portugal décrit par M. Choffat (1). (.4m. sp.
ind. ail. superstes, p. 60, pi. X, fig. 4a et 4/;). J'en possède un très
bon exemplaire provenant du Turonien inférieur des Cha rentes.
Ce type rappelle un peu, à mon avis, Am. naticularis (in Sharpe,
pi. XVIII, fig. 3) et mieux encore la forme décrite par d'Orbigny
sous le nom d'Am. Mantelli (PI. 103, fig. 1 et 2) avec cette différence
que dans l'échantillon des Charentes les côtes partent par paires
d'une côte subtuberculée, tandis que dans les deux autres des côtes
simples s'intercalent entre les côtes principales subtuberculées
au voisinage de l'ombilic. L'espèce du Portugal et des Charentes me
parait être à A m. superstes ce que Am. Ajax d'Orb. est à Am. coro-
natus Brug.
(1) 1898. P. Choffat. Los Ammonites du Bellasien, des couches à Neolobites
Vibreyeanus, du Turonien et du Sénonien.
1899 ET QUELQUES AUTRES FOSSILFS TUR0N1ENS 335
Les observations qui précèdent prouvent les liens étroits qui
rattachent leTuronien de l'Ouest et du Sud de la France à celui
de l'Inde : il y a là un motif sérieux pour penser qu'il existait une
communication directe entre ces deux régions, contrairement à
la thèse soutenue par M. Kossmat qui croit qu'elle avait lieu par
l'extrémité Sud de l'Afrique. Bien d'autres considérations que je
me propose de développer plus tard confirment cette conclusion.
J'ai montré qu'il existait dans le groupe d'Utatur des espèces des
divers niveaux de notre Turonien, inférieur, moyen et supérieur :
c'est là un nouveau motif pour ne pas rechercher un équivalent de
cet étage à la base du groupe de Trichinopoly et classer ce dernier
dans le Sénonien.
De la sorte et c'est la conclusion la plus importante à tirer de ce
qui précède, le groupe d'Utatur représente à la fois le Gault supé-
rieur, le Cénomanien et tout le Turonien, et le groupe de Trichino-
poly correspond au Coniacien et au Santonien.
En réponse à la note de M. de Grossouvre, M. Haug fait remar-
quer que, en ce qui concerne la réunion des groupes de VA mm.
peramplus et de YAmm. colligatus en un genre unique Pachydiscus,
il n'a fait que reproduire, dans l'analyse qu'il a donnée récemment
de l'excellent travail de M. Kossmat, l'opinion de cet auteur. Quant
à la question de nomenclature elle lui parait avoir été posée par
M. Peron sur son véritable terrain, car il est dérègle de considérer,
en l'absence d'indication spéciale de la part de l'auteur, comme type
d'un genre, la première espèce citée. Daus le cas présent c'est donc
YAmm. peramplus qui doit être envisagé comme le type du genre
Pachy disais.
M. Haug rappelle ensuite que, dans une note présentée à l'Aca-
démie des Sciences, par M. de Lapparent, dans la séance du
14 novembre 1898, M. Pervinquière a démontré l'existence, au
Sénonien, de communications entre l'Inde et la région méditer-
ranéenne et il a réfuté ainsi l'hypothèse d'une barrière séparant les
deux bassins, qu'avait formulée M. Kossmat en se basant sur une
prétendue différence fondamentale dans la composition de la faune.
Les observations de M. de Grossouvre relatives au Turonien vien-
nent donc confirmer les résultats obtenus par M. Pervinquière.
Enfin, pour ce qui a trait à « Olcostephanus » superstes Kossm.,
M. Haug renvoie aux remarques qu'il vient de présenter au sujet
de cette espèce dans la Revue critique de Paléozoologie (t. III, n° 2,
p. 81).
336 1« Mai
LES CHAINES DE LA BORDURE SEPTENTRIONALE
DU BASSIN DE MARSEILLE
par M. E. FOURMER.
L'hypothèse de l'existence d'une immense nappe de recou-
vrement (1) constituant toutes les chaînes de la bordure septen-
trionale du bassin de Marseille, est certainement de nature à
séduire les géologues épris de généralisations. Cette hypothèse
présenterait, en effet, l'immense avantage d'expliquer par un seul
schéma, en somme très simple, les coupes réputées les plus com-
pliquées de la Provence ; malheureusement elle se heurte partout,
dans l'examen des coupes détaillées, à des impossibilités et à des
contradictions; c'est ce que je me propose d'établir ici.
Dans une note précédente (2), j'ai déjà exposé les raisons qui
m'empêchaient d'admettre cette hypothèse pour la partie des
chaînes formant la bordure du bassin de Fuveau. La note de
M. Marcel Bertrand ayant été imprimée en même temps que la
mienne, l'auteur n'a pu encore discuter les arguments que j'ai fait
valoir, mais par contre il a produit, en faveur de son hypothèse,
plusieurs assertions nouvelles que je vais essayer de réfuter une
à une.
Tout d'abord, je dois dire que, dans mon étude sur la bordure du
bassin de Fuveau, j'avais cru que M. Marcel Bertrand admettrait
sans peine, ainsi que tous les géologues l'ont fait jusqu'ici (3), que
la partie occidentale de la Nerthe, qui se présente comme un anti-
clinal absolument normal, était bien en réalité enracinée. La lecture
du mémoire de M. Bertrand me montre qu'il n'en est rien, et que
son auteur, au contraire, considère aussi toute la Nerthe comme un
massif charrié, il ajoute même, page 640 : « il est incontestable que ce
» massif fait corps avec celui de l'Etoile et les mêmes conclusions doivent
» s'y appliquer. » Cette dernière remarque, au sujet de laquelle je suis
totalement d'accord avec M. Marcel Bertrand, va singulièrement
(1) M. Bertrand. La nappe de recouvrement des environs de Marseille, etc. . .
0. S. G. F., (3), XXVI, p. 632.
(2) £ Fournier. Ibid., p. 613.
(3) Voir les travaux de MM. Matheron, Carez, Collot, Vasseur et M. Marcel
Bertrand lui-même dans son explication de la Feuille de Marseille.
1899 LES CHAÎNES DE LA BORDURE DU BASSIN DE MARSEILLE 337
faciliter ma démonstration, car, si j'arrive à prouver d'une manière
irréfutable que le massif de la Nerthe n'est pas en recouvrement^
M. Marcel Bertrand sera obligé, de son propre aveu, d'abandonner
son hypothèse. Or, cette démonstration que, dans ma première note,
j'avais considérée comme un lait acquis pour tous, il m'est facile de
l'appuyer par des arguments nombreux et probants :
Pour appuyer son hypothèse, M. Marcel Bertrand cite deux
coupes : celle de la Folie et de Valapoux qui, à elles seules et sans
autre alternative possible, lui paraissent suffisantes pour démontrer
directement que tout le massif est en recouvrement, « Dans ces
» deux localités, dit-il, au milieu des plateaux urgoniens, on voit
» s'ouvrir une dépression allongée, remplie par du Gault et du
)) Turonien. Le Turonien forme au centre une voûte des plus nettes
» sur laquelle s'appuient de part et d'autre le Gault et l'Aptien qui
» plonge avec contacts bien visibles et une inclinaison modérée sous
» l'Urgonien voisin. Aux deux extrémités de la dépression, les
» deux flancs urgoniens de l'anticlinal (1) se réunissent en une
)) nappe unique qui forme le plateau. » « Le Turonien et l'Aptien
» renversés forment le substratum du plateau urgonien, ce qui est
» absolument inexplicable s'ils ne forment pas le substratum de
» tout le massif de la Nerthe. » Donc, d'après M. Marcel Bertrand,
l'Urgonien et le Néocomien qui entourent la dépression en question
font partie de la nappe de recouvrement. Or, si l'on suit la coupe
en s'avançant vers les Martigues, on voit que cet Urgonien et ce
Néocomien font partie d'une série infracrétacée bien continue et
que, dans la région de la Gueule d'Enfer, ils supportent successi-
vement l'Aptien, le Cénomanien, le Turonien, le Sénonien à Hip-
purite, lequel est surmonté lui-môme par les couches à lignites de
Martigues et de l'Etang de Caronte.
Si donc /' Urgonien en question fait partie de la nappe de recouvrement,
tous les étages qui le surmontent en font alors partie et les couches à
lignites de Martigues et par suite toutes les couches fluvio-lacustres
du bassin d'Aix en font partie également, ce qui est invraisemblable.
De plus, les couches à lignites des Martigues sont en continuité
indiscutable avec celles des Pennes, du Plan de Campagne et du
bassin à lignites du nord de l'Etoile; or, ces dernières sont préci-
sément considérées par M. Marcel Bertrand comme faisant partie du
(1) Ceci est erroné pour le bassin de la Folie, dont la bordure méridionale seule
est ursronienne, la bordure septentrionale étant constituée par de< calcaires
néocomiens: voir fitf. 2 de ma note « sur la bordure du bassin d«* Fuveau. »
20 Août 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — ±±
338 FOUR NIER. — LES CHAÎNES DE LA BORDURE SEPTENTRIONALE 1er Mai
substratum. Comment une môme couche pourrait-elle faire partie à
la fois du substratum et de la nappe de recouvrement?
D'ailleurs l'argument peut en somme être résumé sous forme
d'un dilemme qui me semble impossible à réfuter. De deux choses
l'une : ou bien les couches à lignites des Martigues font partie de la
nappe de recouvrement, ou bien elles font partie du substratum.
Si elles font partie de la nappe de recouvrement, les couches à
lignites des Pennes et du Nord de l'Etoile, avec lesquelles elles sont
en continuité directe, sont aussi en recouvrement, ce qui est con-
traire à l'hypothèse de M. Marcel Bertrand, puisqu'il les considère
comme faisant partie du substratum raboté et retroussé par la
nappe. Si elles font partie du substratum, les couches qu'elles sur-
montent et auxquelles elles succèdent stratigraphiquementet sans
interruption tectonique font a fortiori partie du substratum et
alors le massif de la Nerthe fait partie du substratum et n'est pas
en recouvrement, ce qui est encore contraire à l'hypothèse de
M. Marcel Bertrand.
Mais alors comment expliquer les coupes de Valapoux et de la
Folie? J'ai parcouru plusieurs fois ces régions et, au lieu de la
voûte turonienne des plus nettes et des plongements modérés et
constants de l'Aptien, j'ai constaté partout des brisures, des frois-
sements violents, de véritables failles et enfin surtout des plon-
gements excesaivement variables; partout l'Urgonien et le Néocomien
de la périphérie se sont montrés coupés comme à l'emporte- pièce,
avec surfaces de friction et même brèches de faille, en un mot tous
les caractères les plus nets des bassins d'effondrement. Il est vrai
qu'en plusieurs points l'Aptien plonge sous l'Urgonien et le Turonien
sous le Gault, mais partout les inclinaisons sont beaucoup plus fortes
dans l'Aptien et le Turonien que dans l'Urgonien lui-même. Je
m'étonne que M. Marcel Bertrand qui, jusqu'ici, a toujours inter-
prété (1) les bassins de Valapoux et de la Folie ainsi que tous les
bassins analogues comme bassins d'effondrement, les interprète
aujourd'hui comme démontrant le recouvrement sans autre inter-
prétation possible.
Il dit ensuite que cette coupe prouve que l'Aptien et le Turonien
forment tout le substratum de la Nerthe. Donc, s'il faut tirer toutes
les conséquences de ses conclusions, l'Aptien des bassins du Rove
et d'Ensués, par exemple, qui se présente dans des conditions iden-
tiques à celui de Valapoux et de la Folie serait aussi recouvert par
(I) Voir notamment la légende de la Feuille de Marseille et Réunion extraordi-
naire de la Société à Marseille, 181)1.
1899
DU BASSIN DE MARSEILLE
339
la nappe. Or, dans le bassin du Rove on voit affleurer au contact de
cet Aptien une mince bande de Trias qui est la suite du Trias du
Jasde-Rode, de Septèmes et de Jean-le Maître et qui, par consé-
quent, serait, d'après M. Marcel Bertrand, la couche axiale de la
nappe de recouvrement. Or, dans le bassin du Rove, cette bande de
Trias est intercalée entre V Aptien du bassin et les étages infracrétacés
renversés du flanc nord. Si l'Aptien était recouvert par la nappe, ce
serait au contraire entre le Trias et l'Aptien que devrait s'intercaler
le reste de l'Infra crétacé renversé, et, bien que ce Trias n'ait que
trois ou quatre mètres de largeur, des puits profonds percés dans
cette étroite bande n'ont jamais rencontré que des marnes à gypse
et des cargneules, et non des étages plus récents, comme le vou-
drait l'hypothèse de M. Marcel Bertrand. Enfin, un dernier argu-
ment que Ton pourrait invoquer en faveur du recouvrement, c'est
la présence sur la bordure méridionale, dans la Baume des Onze
heures, près Figuerolles, de Valanginien horizontal sur lequel repo-
sent les Dolomies jurassiques (fig. 1). Mais c'est justement de ce
renversement que nous allons tirer un argument irréfutable contre
l'hypothèse d'un recouvrement.
S. Baume
des
Onze heures
N.
N.
•■•:•• T
Fig. 1. Fig. ±.
Jd, Dolomies jurassiques; cv, Valanginien.
Fig. 1. Coupe relevée a la Baume des Onze heures.
Fig. t. Coupe prise au Vallon de la Vesse.
En ellet, si l'on suit vers le vallon de la Vesse le contact anormal
des Dolomies et des marnes valanginiennes, on ne tarde pas à voir
les couches se redresser progressivement, redevenir normales (fig. 2)
et à partir du vallon de la Vesse on peut suivre sans discontinuité les
marnes valanginiennes normalement superposées au Jurassique
supérieur. Ces marnes valanginiennes supportent elles-mêmes une
série infracrétacée (Vallon du Médecin et Moulin de la Cride, qui
se poursuit sur le flanc nord où elle se renverse sous le Jurassique).
L'Iijfracrétacé forme donc bien une nappe s'étendant d'un flanc à
l'autre du massif de la Nerthe, mais cette nappe passe uormalement
340 FOURNI BR. — LES CHAÎNES DE LA BORDURE SEPTENTRIONALE 1er Mai
au-dessus des Dolomies et non au-dessous, comme le voudrait
l'hypothèse d'un recouvrement.
Enfin, à tous ces arguments d'ordre tectonique nous allons en
ajouter un d'ordre stratigraphique qui, à lui seul, pourra paraître
décisif.
Dans la région de Camplleury on observe au-dessous des marnes
vertes du Valanginien des calcaires en plaquettes lithographiques
très fissiles. J'ai étudié tout spécialement ces calcaires qui ont même
été l'objet d'une tentative d'exploitation; ils correspondent au
Jurassique le plus supérieur et à la base de l'Infracrétacé.
Or, ces calcaires forment ici Taxe du massif de la Nerthe; ils
feraient donc partie, d'après M. Marcel Bertrand, de la nappe de
recouvrement. Or, tandis que ce faciès de calcaires en plaquettes
se retrouve dans les régions situées au nord de la Nerthe, telles
que les environs de Lançon et de Mouries, on ne les retrouve jamais
dans la région située au sud qui est précisément celle d'où provien-
drait la nappe de recouvrement.
La Nerthe est donc bien enracinée et cette seule constatation
suffirait pour faire abandonner l'hypothèse ; je tiens néanmoins à
discuter un à un tous les autres arguments fournis par M. Bertrand
pour les régions voisines, qui sont beaucoup plus complexes. Dans
ces régions le procédé d'explication de M. Marcel Bertrand consiste
à figurer des synclinaux partout où il existe des anticlinaux et
réciproquement, et à supposer, au lieu d'une série primitivement
normale, une série primitivement renversée à l'horizontale. Il est
évident qu'avec cette manière d'envisager la question, la discussion
peut être en certains cas difficile; néanmoins j'espère pouvoir
montrer partout la contradiction de l'hypothèse proposée avec la
réalité.
Si Ton compare les fig. 1 et 2 du mémoire de M. Bertrand, on
constate que, pour expliquer l'allure filiforme du Trias, l'auteur est
obligé d'admettre deux anticlinaux a1 b{ d'assez grand rayon séparés
par un synclinal excessivement aigu t'A ; de plus, le pli anticlinal
a1 fig. 1 aurait dû, dans l'hypothèse, donner aux Dolomies une
allure anticlinale, tandis qu'au contraire nous voyons dans la fig. 2
de M. M. Bertrand les Dolomies former un synclinal dans l'Aptien.
Les deux figures de M. Bertrand sont donc incompatibles : si le
Trias est en synclinal entre c„ et c„ il est impossible que J5 soit
également en synclinal, sans quoi nous aurions affaire à deux
synclinaux qui se succèdent sans être séparés par un anticlinal, ce
qui est impossible.
1899 DU BASSIN DE MARSEILLE 341
M. M. Bertrand dit ensuite que le « poudingue Bégudien (1) »
(Brèche danienne de nos coupes), faisant partie de la série ren-
versée, ne peut s'être déposé en discordance sur cette môme série.
Personne n'a jamais eu l'idée de dire que la brèche serait déposée
en discordance sur la série renversée, puisque le renversement de la
série date de l'Eocène supérieur; mais il parait au contraire bien
établi qu'elle s'est déposée en discordance sur la série déjà relevée
et fortement érodée. Il y avait eu avant le Danien formation dans
le bassin d'Aix, et, sur la bordure môme de la Nerthe, d'une véri-
table pénéplaine sur l'emplacement de laquelle s'est établie la grande
lagune à dessalure progressive définitivement transformée en lac
dès le début du Tertiaire. La brèche correspond au littoral de cette
lagune pendant le Danien. La présence de cette brèche serait inex-
plicable si, dès cette époque, la Nerthe n'avait déjà formé un bour-
relet anticlinal.
Quant au faciès spécial de l'Aptien (faciès de Fontdouille), dont
M. M. Bertraud semble vouloir tirer un argument en faveur de son
hypothèse, j'ai déjà montré que l'existence de ce faciès l'infirmait
au contraire d'une manière très nette pour deux raisons : 1° ce
faciès vaseux indique un littoral ; 2° l'Aptien du bassin de Marseille
(La Penne) et du bassin de Cassis (La Bedoule) est constitué par
des marnes à Céphalopodes. Si la nappe de recouvrement venait du
bassin de Marseille ou d'une région plus au sud, l'Aptien qu'elle
aurait charrié avec elle présenterait donc ce faciès à Céphalopodes.
11 faut aller jusqu'au voisinage des Maures, c'est-à-dire au voisi-
nage d'un autre littoral des mers crétacées, pour retrouver le faciès
de Fontdouille.
M. Marcel Bertrand considère la coupe du Four, près La Treille,
comme démontrant d'une manière péremptoire l'existence d'une
nappe renversée. Or, môme eu admettant l'interprétation qu'il en
donne et qui consiste à regarder le monticule triasique et dolomi-
tique au nord des Bêlions comme non enraciné (ce qui, comme
nous allons le voir, n'est pas admissible), la coupe ne démontrerait
pas autre chose que l'existence d'un pli couché sur la distance qui
sépare la Treille des Bêlions, c'est-à-dire sur t kilomètre et demi.
Nous sommes loin des 25 ou 30 kilomètres de recouvrement que
(1) Nous n'avons pas voulu employer, pour désigner cette formation, le mot
poudingue, car les éléments sont presque tous anguleux et que, de plus, la roche
présente une très grande analogie avec la brèche bien connue du Tholonet. Nous
n'avons pas non plus voulu préciser l'Age (Bégu<lien\ car rette !»r<vhe contient a
la fois des assises bégudiennes et rognaciennes.
342 FOURNIER. — LES CHAÎNES DE LA BORDURE SEPTENTRIONALE 1«r Mai
supposerait la nappe totale. Il suffit d'ailleurs de se reporter à la
carte géologique (Feuille de Marseille), pour voir que la coupe de
M. Bertrand, au lieu d'être dirigée perpendiculairement aux élé-
ments de la bande triasique qui entoure le massif d'Allauch, est
dirigée parallèlement à un des segments de cette bande ; c'est sur-
tout par ce point et par l'interprétation qu'elle diffère de la coupe
très voisine que j'ai publiée (B. S. G. F., (1), XIII, p. 516, coupe V).
M. M. Bertrand figure l'Infralias U en concordance avec le
Valanginien cv alors qu'il existe au contraire entre eux une dis-
cordante tectonique très nette avec stries et brèche de friction. La
même discordance existe entre le Valanginien et l'Àptien, elle est
également négligée ; enfin, la longueur totale de la coupe de
M. Bertrand représente environ 2 kilomètres et les dimensions qu'il
donne à l'affleurement aptien lui attribueraient environ 200 mètres
de largeur alors qu'il en a 10 à peine.
Ceci est très important à noter car, sur ces 10 mètres, l'Aptien
présente en effet un petit plissement en voûte qui, étant donné ses
dimensions, n'a aucune signification et qui pourrait en avoir une
s'il atteignait réellement les dimensions que M. Bertrand lui
attribue. Enfin, ce qui vient prouver directement que le Trias au
nord des Bêlions n'est pas en recouvrement, c'est qu'un puits creusé
à 50 mètres de profondeur dans ce Trias et à 5 ou 6 mètres seulement
du contact entre ce Trias et le Néocomien, n'a rencontré que des
marnes gypseuses et des cargneules.
Je n'insisterai pas sur le massif de Saint-Julien, les coupes très
exactes que M. Bresson en a données (1) montrent surabondamment
qu'il est enraciné; d'ailleurs, s'il ne l'était pas, on peut se demander
d'où proviendrait la nappe invoquée par M. Marcel Bertrand,
puisque plus au sud il n'existe plus de plis à axe triasique, à moins
de les imaginer sous la mer, ce qui est bien problématique. Cette
nappe aurait alors passé par dessus tout le massif de Carpiagne
et de la Tête-Puget, à moins qu'elle n'ait passé encore en dessous,
hypothèse que M. M. Bertrand lui-même a hésité à envisager. Par
tous ces arguments concordants, les conclusions relatives à la non
existence des plis périphériques se trouvent infirmées.
Je n'ajouterai que quelques mots au sujet de la vérification que
va fournir la galerie à la mer, entreprise par la Société des Char-
bonnages de Fuveau. M. M. Bertrand semble admettre dans sa
nouvelle note que la galerie puisse rencontrer l'Aptien, ce qu'il
(l) B. S. G. F., (3), XXVI, p. 3&0 et suiv.
1899 DTJ BASSIN DE MARSEILLE 343
refusait d'admettre dans sa note précédente. Mais il déclare
que si elle ne rencontre pas le Trias, ce serait une confirmation
absolue de 6on hypothèse ; à ce sujet je tiens à faire remarquer que
la galerie passe tout à fait vers l'extrémité du Massif de Saint-
Germain, que j'ai considéré comme une sorte de dôme en champi-
gnon et par conséquent déversé sur sa périphérie, l'argument ne
serait donc pas sans réplique: le fait de ne pas rencontrer le Trias,
prouverait simplement que l'amplitude du déversement atteint 3
ou 400 mètres. Seul le fait de rencontrer sous l'Aptien des terrains
plus récents, comme l'a affirmé M. Bertrand, serait concluant ; par
contre le fait de rencontrer le Trias à 350 mètres de profondeur
sera un argument irréfutable en faveur de notre interprétation car,
quelque forme que l'on puisse donner aux plis figurés par M. M.
Bertrand, il est impossible de faire plonger, avec quelque vraisem-
blance, la charnière des synclinaux triasiques jusqu'au niveau de
la galerie.
344 1er Mai
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ÉCH1NIDES FOSSILES
par M. V. GAUTHIER (1).
IV. — Appareil apical
dit Plesiospatangus cotteaui (de Loriol) Pomel.
En 1880, M. de Loriol, dans sa Monographie des Echinides contenus
dans les couches nummulitiques de l'Egypte, a décrit un type très
intéressant qu'il a rapporté au genre Euspatangus et dédié au
regrette Cotteau. Les aires ambulacraires paires de cet oursin sont
logées dans des sillons assez profonds, tandis qu'elles sont superfi-
cielles dans les autres espèces du genre. Cette particularité n'avait
pas échappé à M. de Loriol, mais trouvant tous les autres caractères
exactement conformes au type du genre Euspatangus, il s'était
refusé à voir un caractère générique dans le seul fait que les ambu-
lacres étaient placés dans une dépression du test. En 1883, Pomel,
dans sa Classification méthodique, lit des tribus distinctes des types
à ambulacres superficiels (Euspatanyidés) et des types à ambulacres
déprimés (Brissidés), et relevant le détail qui nous occupe établit
pour cet éebinide le genre Plesiospatangus. Pomel n'avait pas vu cet
oursin et par conséquent il n'avait pu y remarquer que ce qu'avait
remarqué M. de Loriol.
J'ai reçu dernièrement de notre confrère M. Fourtau un grand
nombre d'exemplaires du Plesiospatangus Cotteaui, la plupart bien
conservés ; ils proviennent du Gebel Haridi, près de Tahta, au sud
d'Assiout, dans le Nord de la Haute-Egypte. En les examinant, j'ai
été bien vite frappé d'uu détail étrange de l'appareil apical : il n'y
a que deux pores génitaux, et ces deux pores sont ceux du côté
gauche portés par les plaques 3 et 4 ; les plaques 1 et 2 du côté
droit en sont complètement dépourvues. M. de Loriol, daus sa
description, dit : « quatre pores génitaux très petits et très rappro-
chés )). Les exemplaires qu'il a étudiés portaient-ils réellement ces
quatre pores, ou l'auteur a-t-il cru les voir ne supposant pas l'ano-
malie que je signale aujourd'hui ? La localité qu'il indique est assez
(1) Voir H. S. G. F., 3' série, t. XXV, p. 831, 18U7.
1899 CONTRIBUTION A L'ÉTCDK DBS ÉCHIMDCS FOSSILES 345
vague : environs de Thôbes ; faut-il supposer une variété locale
différant par ce caractère des individus recueillis au G. Haridi ?
Ce qui est certain c'est que tous ceux de ces oursins où je vois
nettement l'appareil apical sont uniformément dépourvus des deux
pores génitaux du côté droit ; il n'y a pas une seule exception.
L'appareil, dont je donne ici le grossissement, est subcompact ;
la plaque géDÎtale antérieure de droite 2 se rattache au corps
madréporiforme et celui-ci se prolonge en arrière, sépare les géni-
tales postérieures ainsi que les ocellaires, mais sans s'étendre au-
delà. Ce développement du corps madréporiforme se retrouve plus
ou moins prolongé, à peu près chez tous les Spalangoldes tertiaires ;
de ce coté, l'appareil de l'oursin qui nous occupe est parfaitement
régulier.
Il n'est point rare de constater chez les échinides irréguliers des
terrains tertiaires des modifications dans le nombre et la disposition
des pores génitaux ; on en rencontre même dans quelques types
crétacés. Les genres Oolopygus d'Orbigny, Cyclaxter Cotteau, Peri-
costnm Agassiz n'ont que trois pores génitaux s'ouvrant sur les
plaques 1, 3 et 4 ; la plaque 2 à laquelle se rattache le corps madré-
poriforme en est dépourvue ; mais c'est à tort qu'on a affirmé que
dans les cas où un des pores génitaux fait défaut, c'est toujours la
plaque antérieure de droite qui en est privée. Si cette remarque est
juste jusqu'à présent chez les Spalangoldes.
elle ne l'est pas chez toutes les espèces des
Cassidulidèes; ainsi, dans le genre Ptiolam-
pas Pomel, les espèces qui n'ont que trois
pores génitaux fil en est qui en ont quatre)
présentent une autre disposition ; c'est la
plaque 3, l'antérieure de gauche, qui en est
dépourvue, tandis que la plaque 2 est régu-
lièrement perforée ; il en est de même dans
le genre Trimomanthus de M. Bit tuer qui a j,-, , _ Appareil du
fait de cette disposition le caractère prio- Pte'*i<>*patttngtu Cat-
, , , , . teuui, «rossi six lois.
cipal de sa coupe générique établie pour une
espèce d'Australie ei qui se répète dans plusieurs types européens
cités par cet auteur.
D'autres genres n'ont que deux pores génitaux, comme beaucoup
de Scliizaster et les Ditremustrr, que M. Monter-Chaltnas a séparés
des tlemiaster pour cette raison. Chez ces oursins, les deux pores
présents sont toujours les postérieurs portés pir les plaques 1 et 4.
La disposition que je signale ici pour le genre P lésion patangw
346 v. Gauthier i*r Mai
n'existe chez aucun autre ; elle donne l'appareil un aspect bizarre
que j'ai cru utile d'indiquer à ceux qui s'occupent des études éclii-
nologiques.
V. — Gubttaria pustuufbra Gauthier.
Syn. — Holaster pustulifer Coquand in collect.
Cardiaster pustulifer Peron et Gauthier, Echin. foss. de
l'Algérie, fasc. IV, p. 74, pi. I,
fig. 1-5, 1878.
Quand nous avons publié, M. Peron et moi, le Cardiaster pustu-
lifer, nous n'avons eu entre les mains pour nous servir de type qu'un
exemplaire déformé par compression latérale ; l'appareil apical
n'était pas suffisamment visible et le sillon antérieur rétréci parla
déformation du test ne pouvait pas nous faire supposer le déve-
loppement considérable qu'il prend dans le genre Guettaria. L'appa-
reil apical paraissant allongé et la présence d'un fasciole marginal
nous ont fait ranger ce type assez bizarre dans le genre Cardiaster.
L'établissement du genre Guettaria Gauthier, avec les grands
exemplaires de Guettar-el-Aïch, G. Angladei, et de Diégo-Suarez,
G. Roccardi Cotteau, n'a pas rappelé tout d'abord à ma mémoire
l'oursin déformé publié dix ans auparavant sous le nom de Car-
diaster pustulifer. Depuis, l'étude du G. Danglesi dont la forme se
rapproche beaucoup de celle du Cardiaster en question m'a engagé
à faire une comparaison minutieuse des deux types, et il n'est pas
douteux aujourd'hui pour moi que Je C. pustulifer d'Aumale ne
doive entrer dans le genre Guettaria. Les deux exemplaires sont
certainement très voisins, et il n'y a qu'à se reporter à la figure
que j'indique dans les Echinides fossiles de l'Algérie pour être
frappé de leur ressemblance. Je ne crois pas cependant qu'on
puisse les réunir spécifiquement. La déformation du type unique
du C. pustulifer, aujourd'hui cédé à un musée étranger avec la
collection Coquand, ne permet pas de tirer des arguments bien
précis de la différence des deux exemplaires; toutefois le test du
G. pustulifera parait avoir été plus allongé, surtout dans la partie
antérieure ; le sillon impair montait plus haut que dans le G. Dan-
glesi où il ne commence à être sensible qu'à moitié de la distance
entre l'apex et le bord et seulement dans la partie verticale de la
face antérieure. En soumettant le G. Danglesi à une compression
latérale analogue à celle qu'à subie l'autre espèce, il me semble
qu'on obtiendrait un résultat très différent et que la partie a nié-
1899 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ÉGHINIDES FOSSILES 347
Heure de cet oursin serait plus raccourcie encore qu'elle ne Test
déjà régulièrement. La compression latérale aurait dû exagérer la
hauteur du test dans l'exemplaire d'Aumale, et cependant il est
moins élevé que celui de l'exemplaire des environs de Mascara, et
la partie antérieure se déprime rapidement, au lieu de rester haute,
verticale et presque rentrante comme dans l'autre type. A ces
divergences on peut ajouter la différence du nombre et de la gros-
seur des tubercules qui forment la ceinture péripétale dont j'ai
parlé : ils sont plus abondants et plus développés dans le G. Dan-
glesi où l'on en compte au moins sept dans l'aire interambulacraire
latérale, tandis qu'il n'y en a que deux dans l'autre espèce, un sur
chaque moitié de l'aire. 11 en est de même pour les tubercules
ornant les aires ambulacraires, assez nombreux chez l'espèce de
Mascara, presque invisibles dans l'autre ; les deux types ne se con-
fondent donc pas et il est facile de les distinguer.
Je ne puis trouver aucun argument dans l'horizon géologique où
ces deux exemplaires ont été rencontrés, puisque je ne connais pas
exactement, comme je l'ai dit, la position stratigraphique du
G. Danglesi ; le G. pustulifera provient d'Aumale, selon Coquand, et
appartient à l'étage cénomanien. La similitude des formes peut
faire supposer la contemporanéité des deux types. Quoi qu'il en
soit, l'apparition de ce genre se trouve bien plus ancienne que ne
l'avaient fait présumer les Guettaria Angladei et Roccardi qui appar-
tiennent à l'époque sénonienne; et l'avenir nous dira peut-être
comment on le trouve à la fois en Algérie, où il semble avoir pris
naissance, et à Madagascar.
348 1" Mai
GROS CAILLOUX DE LA GARONNE
EN AVAL DU CONFLUENT DU TARN
par M. Edouard HARLÉ.
Dans une note sur les alluvions de la Garoune, insérée au
Bulletin de 1895, j'ai signalé, p. 4U7, d'énormes cailloux, atteignant
jusqu'à 1/20 de mètre cube, qui avaient été dragués daus le lit de
la Garonne, à Golfech, à 20 kilomètres en aval du confluent du
Tarn. J'ai admis que ces cailloux avaient été amenés à la Garonne
par le Tarn. J'ai ajouté que les plus gros cailloux de Goliech que la
Garonne ait charriés de points situés en amont du confluent du
Tarn (des cailloux de quartzite vert, des Pyrénées) atteignent, au
maximun, un volume de 1/160 de mètre cube, c'est-à-dire 8 fois
moindre.
Depuis, j'ai obtenu aussi d'énormes cailloux par des dragages
dans le lit de la Garonne à Saint-Pierre-de-Gaubert, à 15 kilomètres
en aval de Golfech et 10 en amont d'Ageu.
J'avais prélevé des échantillons sur quelques-uns de ces énormes
cailloux dragués à Golfech et Saint-Pierre-de Gaubert. Ils m'ont
servi à mieux préciser la provenance originelle de ces cailloux.
M. Lacroix, Professeur au Muséum, a eu la grande obligeance
de me faire connaître les déterminations minéralogiques.
Les échantillons que j'ai prélevés sur ces cailloux appartiennent
à trois catégories :
1° Caillou dragué à Golfech, volume 1/25 de mètre cube (dimen-
sions : Um59 — 0in3(> — 0ra37) (1), quartz grenu à structure
saccharoïde.
Caillou dragué à Golfech, volume 1/36 de m. c. (0,55 — 0,45 —
0,22), quartz haché.
Caillou dragué à Saint-Pierre-de-Gaubert, volume 1/35 de m. c.
(0,58 — 0,33 —0,30), quartz grenu à gros grains et quartz haché.
(1) J'ai admis que le volume des cailloux peut être calculé comme s'ils avaient
la forme d'ellipsoïdes et que le volume d'un ellipsoïde est égal approximative-
ment a la moitié du produit de ses trois plus grandes dimensions rectangulaires.
J ai donc ;idmi» :
Voluiiii: d'un caillou— \/'l longueur X largeur X épaisseur.
1899 GROS CAILLOUX DE LA GARONNE EN AVAL DU TARN 349
Caillou dragué à Saint-Pierre-de-Gaubert, volume 1/21 de m. c.
(0,60 — 0,51 — 0,30), quartz grenu à gros grains.
Ces cailloux appartiennent à une même roche, ainsi définie :
« Quartz bâché dont les cavités ont été remplies postérieurement
par du quartz — quartz grenu à structure saccbaroïde — quartz
grenu à plus gros éléments. »
Je n'ai trouvé cette roche ni dans les alluvions de la Garonne
en amont du confluent du Tarn, ni même (au moins d'une manière
nette) dans celles du Tarn en amont du confluent de l'Aveyron.
EUe est au contraire fort commune dans les alluvions de l'Aveyron,
où elle forme les plus gros cailloux. En remontant la vallée de cette
rivière, on trouve les cailloux de cette nature de plus en plus gros.
J'en ai vu de 1/7 de m. c. près de Montricoux (0,73 — 0,64 —
0,57); de un mètre cube à Laguépie (dans le lit de l'Aveyron, au
confluent du Viaur : 1,80 — 1.20 — 0,90). La grosseur extraordi-
naire des cailloux de Laguépie montre que le gisement d'origine
est peu éloigné. Et en effet, à Najac, à 10 kil. seulement en amont
de Laguépie, un filon de quartz, situé sur le versant droit de la
vallée de l'Aveyron, au dessus de la station du chemin de fer, con-
tient, en abondance, les mêmes variétés de quartz que les cailloux
en question de Golfech et de Saint-Pierre-de-Gaubert, ainsi que
M. Lacroix me l'a confirmé sur le vu des échantillons que je lui ai
soumis. Ce filon, rendu bien visible par son relief de près de 10 m.
sur la surface du sol, atteint 4 m. d'épaisseur. [I est divisé, par des
fissures, en très gros blocs. Les cailloux que j'ai cités doivent pro-
venir de ce filon et de filons semblables comme nature minéralogi-
que et comme grosseur de blocs.
Le confluent delà Garonne et du Tarn est moitié moins loin du
gisement d'origine de ces cailloux de quartz haché et grenu que de
celui des cailloux de quartzite vert des Pyrénées (120 kil. au lieu de
230 kil.), ce qui suffit à expliquer pourquoi les premiers sont plus
gros que les seconds.
2° Caillou de couleur verte dragué à Golfech, volume 1/21 de in. c.
(0.57 — 0,41 — 0,40). Je n'ai trouvé aucun caillou de cette nature
dans la vallée de la Garonne en amont du confluent du Tarn, ni
même dans la vallée du Tarn en amont du confluent de l'Aveyron.
J'en ai trouvé, quoique rarement, dans la vallée de l'Aveyron et,
notamment, un gros caillou au bord de l'Aveyron, à Laguépie. Ce
caillou de Laguépie et celui de Golfech ont été reconnus, par M.
Lacroix, appartenir à la même roche : « Gneiss amphibolique, ce
terme désignant, non un âge géologique, mais une composition et
une structure miuéralogique déterminées. »
350 ÉD. HARLÉ. — GROS CAILLOUX DE LA GARONNE 1er Mai
3° Caillou ayant l'aspect d'un Porphyre, à pâte grise avec noyaux
blancs de feldspath (de la grandeur d'un gros pois, mais de forme
allongée), dragué à Golfech, volume 1/36 de m. c. (0,57 — 0,32 —
0,30). Je n'ai trouvé de cailloux de cette espèce ni dans la Garonne
en amont du confluent du Tarn, ni dans l'Aveyron. Des cailloux
semblables, mais bien plus gros, sont, au contraire, assez com-
muns dans la vallée du Tarn, notamment aux environs de Rabas-
tens et de Gaillac. Ce sont, avec des cailloux de quartz moins
volumiueux, les plus gros cailloux du Tarn. L'un d'eux, qui m'a
été montré par M. Philadelphe Thomas, à 1 kil. de Gaillac, au bord
de la route de Moutans, dans la basse-plaine ou plaine inférieure,
atteint i/5 de m. c. (0,99 — 0,74— > 0,46). Ce caillou de Gaillac,
d'autres gros cailloux de Gaillac et de Rabastens et le caillou en
question de Golfech appartiennent, d'après M. Lacroix, à la même
roche qui est : « ou bien une roche éruptive du groupe des a pli tes,
ou bien une roche sédimentaire très métamorphisée par le granité.
On se trouve dans l'impossibilité de préciser à cause de l'importance
des phénomènes dynamiques qui ont déformé la structure de
la roche et l'ont parfois reudue franchement rubanée. Tous ces cail-
loux appartiennent à une même roche qui, suivant l'une où l'autre
hypothèse, est ou bien un granité à grains fins, ou bien un quartzite
micacé et feldspathisé. Les noyaux blancs sont du feldspath. »
En résumé, les plus gros cailloux de la Garonne, en aval du
confluent du Tarn, ont été apportés par le Tarn, qui en a reçu lui-
même le plus grand nombre de l'Aveyron.
Le Tarn, ainsi que je viens de le montrer, a transporté, aux
environs de Gaillac, de très gros cailloux atteignant jusqu'à 1/5
de m. c. La pente de la vallée du Tarn, dans cette partie, est d'un
peu plus de 1 mètre par kilomètre. Pour trouver une pente égale
dans la vallée de la Garonne, il faut la remonter jusqu'un peu au-
dessus de Toulouse, à Empalot et Pinsaguel. Mais les cailloux les
plus volumineux, dans cette partie, sont bien moindres que ceux
de Gaillac. Les plus gros que j'y aie trouvés, dans les alluvions
soit modernes, soit anciennes, sont un caillou de 1/53 de m. c.
(quartzite bru u ; 0,50 — 0,31 — 0,24) au pied du barrage d'Empa-
lot et un caillou de 1/22 de m. c. (quartzite vert; 0,70 — 0,38 —
0,34) dans la plaine inondée par les fortes crues, à Pinsaguel,
au bord du chemin de Saubens. Ces cailloux sont 1 1 et 4 fois et demi
plus petits que le plus gros de Gaillac. La Garonne aurait donc
1899 KN AVAL DU CONFLUENT DU TARN 351
pu transporter des cailloux bien plus gros qu'elle ne Ta fait. Elle
a d'ailleurs charrié, à Pinsaguel, pendant la crue de 1875,
sur 175 iu. de longueur, une pierre de taille de 2/3 de m. c,
c'est-à-dire 3 fois plus volumineuse que le gros caillou de Gaillac (1).
De même, à 20 kil. en aval d'Agen, la ballastière exploitée à Feu-
ga roi les, dans la terrasse qui domine immédiatement la plaine
submersible, a donné des blocs calcaires, charriés des environs,
dont le volume atteint jusqu'à 2/5 de m. c, c'est-à-dire 8 fois le
volume du plus gros caillou de cette région. La pente de la vallée
de la Garonne dans cette région (Feugarolles, Agen, Saint Pierre
de-Gaubert, Golfech) est d'environ 0m30 par kil.
Je crois pouvoir conclure de ces faits et d'autres que le volume
maximum des cailloux de la Garonne n'est pas limité par la pente
ou la force de transport de cette rivière, mais seulement par l'usure
qu'ont subie les cailloux depuis leur gisement d'origiue et par la
grosseur des blocs de rocher dont ils proviennent, grosseur qui
dépend elle-même de l'épaisseur des bancs et de leurs tissures.
J'ajoute que certains cailloux sont détruits par décomposition
chimique.
Il arrivera sans doute un temps où la Garonne, en continuant à
creuser sa vallée, réduira tellement sa pente qu'elle ne pourra plus
charrier que de petits cailloux. La grosseur des cailloux sera alors
limitée par la force de transport de la rivière. Beaucoup de cailloux,
provenant directement des gisements d'origine ou empruntés aux
berges d'alluvions plus anciennes, s'accumuleront sur le fond du
lit et formeront un sérieux obstacle à un nouveau creusement et,
par conséquent, à une nouvelle réduction de la pente.
■
(1) La Garonne a charria de. gros blocs pondant d'autres crues que celle do
1875. Ainsi, la visite du pont du Fourc (un peu en amont du confluent du Salât),
à la suite de la crue du 3 juillet 1897, a fait découvrir un bloc de rocher, arrondi,
de 1 mètre cube (1,75 — 1,40 — 0,80), sur le pavage (radier) de ce pont. Ce
bloc y avait été charrié, postérieurement à la crue de 1875, car ce pavage n'a
été construit qu'après cette crue. Il provenait des berges ou du lit, en amont. La
longueur suivant laquelle 11 avait été charrié sur le pavage, et par conséquent
sans que son mouvement ait été favorisé par alfouillement de gravier, atteignait
10 mètres.
352
Séance du 15 Mai 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite de la présentation faite dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM. Ch. Balsan, Député de l'Indre, présenté par MM. Lipp-
mann et G. Dollfus.
Dop, Licencié es sciences, étudiant à la Faculté des Sciences
de Toulouse, présenté par MM. Léon Bertrand et E. de
Margerie.
M. £. de Martonne siguale parmi les dons récemment parvenus
à la Société, un mémoire de M. F.-P. Gulliver : Shoreline Topo-
graphy, paru dans les Proceedings of the American Academy of Arts
and Sciences (XXIX, N° 8, janv. 1899), 107 p., 32 fig. ; un fascicule
des Mémoires du Comité géologique contenant la Notice explicative
de la feuille 427 de la Carte géologique de Russie, par M. A. Stucken-
berg (cetta feuille contient principalement des dépôts permo-carbo-
nifères), 363 p., 5 pi.
Dans la Zeitschrift fur Praktische Géologie (1899, N° o) il croit
devoir mentionner une note de M. F. von Richthofen signalant
l'apparition des premières feuilles imprimées de la Carte géologique
détaillée de l'Autriche.
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353
LE BASSIN TERTIAIRE D'ASPRIÈRES (AVEYRON)
par M. A. THEYMIN.
Ud trait frappant de la carte géologique de la France centrale est
le grand système de fractures, presque rectiligne dans son en-
semble, dirigé N.N.E. qui s'étend de Decize à Champagnac, ja-
lonné parles bassins houillers. Il se prolonge dans le Cantal par les
bassins que M. Pouqué a indiqués sur la carte au 80.000e à l'ouest
de Saint-Christophe, à Nieudan, à Miécaze, à Pers, au nord de
Cayrols. 11 se continue par la grande fracture de Villefranche de
Rouergue. J'ai entrepris en vue dune publication détaillée l'étude
de la partie méridionale de ce grand accident et des terrains sédi-
mentaires de la bordure S.-O. du Massif Central.
Dans cette étude, le petit bassin tertiaire qui avoisine Asprières
(chef-lieu de canton du département de l'Aveyron situé à 10 kilo-
mètres de la gare de Capdenac) m'a paru assez intéressant pour lui
consacrer, dès maintenant, une note préliminaire. Ces formations
d'Asprières, étroitement liées aux lambeaux calcaires tertiaires, figu-
rés sur toutes les cartes de la région entre le Lot et le Cantal à
Maurs, Saint-Santin, Montmurat, Saint-Julien-Le-Pigagnol, etc.,
sont intéressantes à cause de leur situation même entre les dépots
tertiaires d'Aurillac au nord, de Cieurac et Lalbenque à l'ouest, de
Cordes, d'Amarens et du bassin d'Albi au Sud. Elles sont intéres-
santes encore par leurs relations avec les grands accidents tecto-
niques de la région et enfin parce qu'elles permettent de fixer une
limite stratigraphique supérieure aux poches à phosphates situées
dans la partie la plus orientale du Quercy.
La coupe détaillée du bassin d'Asprières montre de bas en haut,
reposaut sur un calcaire dolomitique jurassique, la superposition
suivante :
1. Conglomérat à ciment argileux rouge avec pisolithes de fer,
rognons d'hématite, dont les éléments varient depuis la grosseur du
poing et moins jusqua des blocs de jurassique peu roulés de 50 ou
60 centimètres de diamètre. Ces éléments sont surtout des galets de
roches anciennes, micaschistes, porphyrites, etc., de grès, de cal-
caire jurassique, de quartz rares. Ce conglomérat qui n'est obser-
31 Octobre 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — Si
354 a. thevemx 15 Mai
vable que par places et dans les parties les plus basses (surtout au
voisinage de Bè§), correspond au lit d'un cours d'eau rapide, tandis
que l'argile ferrugineuse qui cimente le tout est le produit de décal-
cification» d'altération du substratum, en particulier du calcaire
jurassique; elle présente la plus grande analogie avec certaines ar-
giles sidérolithiques des causses du Quercy ou des pocbes à phos-
phate: c'était la terre du causse avant l'arrivée des eaux oligo-
cèues i li.
2, Argiles rouges très puissantes que supportent des assises plus
sableuses et même des grès, gris ou rouges. Ces argiles sont abso-
lument identiques d'aspect aux argiles rouges d'Aurillac. Je crois
qu'elles se relient étroitemeutaux dépôts mécaniques d'argiles rou-
geàtres. veinées de gris et de blanc, quelquefois très sableuses, qui
se trouvent en lambeaux épars sur tout le massif ancien, au N. el à
TE.* et sur les causses jurassiques, au S. 0. et à l'O. Leur aspect est
aualogue. mais les éléments sout ici plus tins et le bariolage moins
marqué parce que les altérations superficielles sont moindres en
masse que dans les lambeaux peu puissants. Leur âge serait l'âge
des argiles rouges d'Aurillac. Leur épaisseur atteint ici une tren-
taine de mètres.
;i Marnes grisâtres, verdàtres ou blanches avec intercalations de
calcaire marneux à cassure très blanche contenant des empreintes
de uiouoeotyledones fjffÀa .*• asseï fréquentes ; leur puissance est
dYmïrou 5 mètres.
4. Calcaire gris. Âpre au toucher, avec nombreux petits planorbes
le plus souvent à 1 état de moules, spécifiquement inirierminables,
quelques tV-' -\<. f»pn* •..*>; rire grandes Liiuuees L. cf. pyntmi-
•4AÎIS . Il \ a quelquefois intervalatiou àe siîice entre ces bancs
calcaires.
5. Alternance Je taucs c»lcaires et marneux: ficaires plus ou
tuoius îriabks ovnr.eiun; parfois .tes r\\*raoas àr >:ii;e: argiles grises
stries à: fossiles à tes: vvcserve mats ^eaerv/.enir-: écrasés, ce qui
renàimjxxssit 'et^u:*. .ictr:ïuiaa:î.-aspecià.ïu-. Lycées. Pianorbes.
tV".» iutervala::.^ .:*ar^:lts.» ve^euux iv-ssaa: ^.ix .imites.
Cvlt'us*:"!^ a e;-*::x-:i l«> :v.:--:res .ir :* -issô-:.r,
r Puis \ï-n-es: tB>' a ±a ir :-a:ifs :!>.-■; r.fs qut surmontent
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1899 LE BASSIN TERTIAIRE d'aSPRIÈRES 355
7. Calcaire à cassure conchoïde, de plus en plus riche eu silice
dans les bancs plus élevés, sans fossiles, formant un plateau aussi
aride que les plus arides causses du Jurassique. C'est ce calcaire qui
est exploité pour empierrement et moellons. . .
En résumé, nous voyons que des calcaires blancs, fossilifères, sur-
mootent par l'intermédiaire de marnes et argiles grises, blanchâtres
ou verdâtres, uoe formation puissante d'argiles rouges quelquefois
bariolées ou très sableuses et sans fossiles connus. 11 y a là une grande
analogie apparente avec les régions voisines.
Vers le nord, en Auvergne, dans les carrières des environs d'Au-
rillac, M. Boule a bien voulu me montrer la coupe suivante :
6. Calcaire à Limnées et Planorbes : L. pachy ganter, L. sublong is-
cata, L. cylindrica, P. cornu, etc.
5. Calcaire à silex : Potamides et Limnées associés.
4. Marnes et calcaires feuilletés à silex ménilite abondant;
Potamides Lamarcki, Hydrobia Dubuissoni.
3. Marnes grises feuilletées à silex ménilite : Cypris faba, oogones
de Chara destructa.
2. Argiles vertes.
1 . Argiles rouges puissantes avec graviers à la base.
Vers le sud, dans le Tarn, on voit de même les calcaires de Cordes
et d'Amarens surmonter les argiles rouges à Cyclostoma formosum de
la gare de Vindrac ; de même, vers l'ouest, dans le Quercy, le calcaire
de Cieurac dans ses lambeaux orientaux (Servanac, Lavaurette par
exemple). Le bassin d'As prières doit-il être rattaché à la formation
méridionale de Cordes, qui se lie, on le sait par les travaux de M.
Vasseur, au calcaire de Cieurac équivalent d'eau douce de la mollasse
de l'Agenais, ou bien doit-il être rattaché au bassin d'Aurillac? C'est
l'étude de la faune des calcaires d'As prières qui permettra de ré-
pondre à cette question.
Les Limnées sont : L. cf. ore longo Boub., L. cadurcensis Noulet,
L. cf. pyramidalis Brard, L. albigensis Noul.
Toutes ces espèces se trouvent à Cordes, Amarens et Cieurac. Il n'y
a pas de Limnées à spire courte du groupe de L. obtusa ou L. cylin-
drica Brard qui sont communes à Aurillac.
On ne trouve pas non plus à Asprières /,. Pachygaster. On peut
rapprocher pourtant L. cadurcensis Noulet à spire aiguë, dernier
tour ventru, ouverture ample de L. fabulum Bouillet, qui se trouve à
Aurillac et en outre quelques formes d'Asprières peuvent être rap-
356 a. thkvemn 15 Mai
portées à L. sublongiscata Tournouer, d'Aurillac, descendante peu
modifiée de L. longiscata des environs de Paris (1).
Les Planorbes sont du groupe de P. cornu et présentent les
formes variées : P. crassus M. de Serres ou P. planulatus Noul. ou
encore la grande variété figurée par Sandberger (2). Ce sont les pla-
norbes de Cieurac ou de Cordes. Remarquons en passant que si l'on
examine un certain nombre de planorbes d'un même gisement, on
voit que les échantillons sont plus ou moins épais, que la concavité
de leur face supérieure varie dans une certaine mesure ; il semble
que les caractères réellement importants au point de vue spécifique
sont, outre, bien entendu, l'enroulement de l'ombilic, le fait d'avoir
des tours plus ou moins embrassants (3) et l'existence ou l'absence
d'un méplat interne ; encore ce caractère varie-t-il un peu.
Les Hélix sont très rares, je n'en ai rencontré que deux échantillons
très petits, peut-être voisins de l'Hélix corduensis Noulet.
Les Paludines sont ici extrêmement nombreuses ; les dépôts
d'Aurillac n'en contiennent pas et Noulet signale une paludine à
Cordes (P. castrensis) mais l'indique comme très rare. Les espèces
oligocènes du Tarn paraissent spéciales ; toute assimilation avec
les espèces éocènes de Longpont ou de Saint Paires est douteuse, à
cause de la différence de niveau et en elle-même. Pour appliquer
aux fossiles d'Asprières les dénominations de Noulet P. castrensis
ou P. soricinensis, il serait indispensable d'avoir les figures des
types (4).
Potamides Lamarcki n'existe pas à Asprières non plus qu'à Saint
Santiu, Montmurat, etc. 11 semble que cette forme saumàtre du bas-
sin de Paris n'a pas dépassé au Sud la latitude d'Aurillac et de Mur
de Barrez.
L'étude de la faune nous amène donc absolument à réunir les cal-
caires d'Asprières à ceux de Cieurac et de Cordes et non aux cal-
caires d'Aurillac. On peut dire seulement que les calcaires lacustres
d'Asprières, sont au moins de l'âge des assises saumâtres à Pota-
mides d'Aurillac.
Il y a là une partie du massif central où la mer n'a pu pénétrer.
(i) On sait qu'on trouve à Saint-Ouen les passages de i.pyramidalis à L. longis-
cata.
(2; Land-und-SussicasserConchylien der Vorwelt, pi. XX, fig. 26.
(3) Nous exceptons les monstruosités, les planorbes, on le sait, peuvent excep-
tionnellement se dérouler ou devenir scalaires.
(4) Ce serait plutôt P. castrensis d'après la description de Noulet et aussi d'après
l'assimilation (douteuse d'ailleurs) que fait cet auteur avec P. novigentiensis Des h.
à laquelle l'espèce qui nous occupe ressemble assez.
1899 LE BASSIN TERTIAIRE D'aSPRIÈRES 357
De légères différences stratigraphiques, l'abondance spéciale des
paludines à Asprières, le développement plus considérable des
lignites à Saint-Santin (1), etc., portent à penser qu'il y avait une
série de lacs contemporains très voisins qui, situés tous à peu près
sous la même latitude, à la même altitude contenaient la même
faune ; mais il faut reconnaître que ces différences ont pu se pro-
duire aussi dans les parties différentes du fond d'un grand lac. Les
mouvements ultérieurs du Cantal n'ont laissé subsister que des
lambeaux de ces calcaires à des altitudes variées (2).
Le bassin d'Asprières est limité au N. et à l'E. par deux failles fort
importantes, et probablement fort anciennes, dans l'histoire du
Massif Central : La faille dite de Villefranche (Boisse) (3) ou de
Marnaves (Magnan) et la faille qui, suivant M. Bergeron (4), limite
au S.-O. le bassin de Decazeville, prolongement d'une zone effondrée
et d'un système complexe de fractures déjà indiqué nettement sur
la carte de Boisse, dirigé à peu près N. 75°0qui vient de la direction
Fitf. 1. — Coupe par Tournhac et Las Gazes. — Échelle 1 : 50.000.
I, Argiles rouges : 2, Marnes frises et blanches ; 3, Calcaires d'Asprières
Y, Granité ; F, Faille de Villefranche.
de Séverac et passe au N. de Rodez. L'étude du bassin d'Asprières
permet de reconnaître que ces deux failles ont rejoué postérieure-
ment au dépôt des assises calcaires de l'oligocène moyen (Stampien).
Le contact par faille de ces calcaires et du granité est d'une netteté
absolue sur le bord du cbemin de Naussac à Peyrusse (flg. 1).
(1) Masigler. Note sur h* terrain tertiaire d«» Saint-Santin. tt. Soc. Ind. miné-
rale, (2), VIII, p. 611.
(2) Rames. B. S. G. F.t (3), XIV, p. 357. Les calcaires d'Asprières sont à l'alti-
tude de 490" environ.
(3) Boisse. Esquisse géologique du département de l'Âveyron. La coupe d'As-
prières donné par M. Boisse est totalement différente de la précédente.
(i) Bergehon. Rouergue et Montagne Noire, p. 197.
358
A. THEVENIN
15 Mai
Le contact par faille avec les micaschistes, au N., est également
visible sous le bourg d'Asprières (fig. 2) (1).
Un chenal se forma antérieurement aux dépôts des argiles ton-
griennes suivant la direction de la faille de Villefranche (2) puis
lors des mouvements alpins la faille se produisit telle que nous la
voyons aujourd'hui.
On est frappé de l'analogie de l'argile à pisolithes de fer qui
cimente le conglomérat de base avec l'argile sidérolithique (décal-
cification des calcaires jurassiques) qui remplit les poches à phos-
phate du Quercy (3). Or, j'ai pu voir à proximité de la métairie du
Causse et du chemin de Villeneuve (Aveyron) à Saint-Igest un
lambeau de calcaire d'Asprières de très faible étendue surmontant
l'argile rouge. Ce témoin calcaire (fig. 2), proche des dépôts de
N. E.
—01* Mairinhaéues Le fausse Station de SaDe«
S. o.
Villeneuve f*°
36S
33o
Bê« Tournhac
2So
Aaprifcraa
490
fFig. 2. — *Coupe par" Villeneuve et Asprières. — Échelle 1 : 200.000.
L|, L2, L:u Lias: J,iCalcaires du Jurassique moyen: 1, Conglomérat à ciment
d'argile pisolithique ; 2, Argiles bariolées du Tongrien et marnes grises supé-
rieures : 3, Calcaire d'Asprières ; ;, Micaschistes ; F, Faille ; Ph, Poche à
phosphate.
décalcification et des poches à phosphate de Villeneuve, situé à
une altitude supérieure, permet de reconnaître que le creusement
ou le comblement des poches de cette région orientale du Querry
par les argiles rouges est stratigraphiquement un peu plus ancien
que les calcaires inférieurs d'Asprières, formation d'eau douce
contemporaine des dépôts saumatres à Potamides. M. Vasseur était
{I) On peut voir les assises calcaires plissées assez fortement au-dessus de
Tournhac.
(2) J'ai vainement cherché les dépots tertiaires le long de la faille de Ville-
franche vers le Sud. Je ne connais aucun aflleurement entre Villeneuve et le bassin
synclinal de Varen étudié par M. Peron, mais l'existence de pareils lambeaux
est inûniment probable.
(3) J'ai pu examiner la plupart des poches à phosphate du Quercy et je crois,
comme MM. Vasseur et Fmirnier, que l'hypothèse d'une origine hydrothermale
doit être absolument abandonnée.
1899 LE BASSIN TERTIAIRE D'ASPRIÈRES 359
arrivé exactement à la même conclusion par l'étude des dépôts
tertiaires, bordant les causses du Quercy à l'Ouest et avait fixé
comme limite supérieure aux phosphorites le calcaire de Cieurac (1 ).
Le comblement des poches à phosphate considérées par M. Vas-
seur ou de celles de Villeneuve serait donc au plus d'âge stampien.
Une vérification intéressante pourrait être faite si l'on connaissait
spécialement la liste des Mammifères trouvés dans ces gisements.
M. A. Gaudry, à propos de la communication de M. Thevenin,
observe qu'il serait intéressant de parvenir à savoir si les dépôts
de phosphates du Quercy n'appartiennent pas à différentes époques,
car on y a trouvé un Lophiodon comme dans l'Eocène moyen et un
Acerotherium à prémolaires trigones qui semblent représenter un
type ancien. On y a signalé aussi des Palœothrrium et des Anaplo-
therium comme dans l'Eocène supérieur, des Entelodon comme dans
le Tongrien, des Anthracotherium comme dans l'Aquitanien.
M. M. Boule insiste sur l'intérêt que présente la note de
M. Theveuin pour tous ceux qui s'occupent de l'histoire de la
période oligocène en France. 11 était important de savoir, en effet,
si les dépôts du petit bassin d'Asprières se relient à ceux des
bassins de l'Auvergne ou à ceux du Sud-ouest. M. Thevenin a
constaté, d'une part, l'absence à Asprières de fossiles saumfttres
comme le Potamùles Lamarcki qui ne paraît pas avoir dépassé la
latitude d'Aurillac et du Mur de-Barrez; d'autre part, la ressem-
blance de la fauue malacologique des calcaires d'Asprières avec la
faune des calcaires de Cieurac et de Cordes. Les petits bassins de
l'Aveyron se relient donc plutôt aux bassins méridionaux qu'aux
bassins auvergnats, dont ils sont séparés par de hauts reliefs cris-
tallins que M. Boule considère comme étant absolument dépourvus
de témoins oligocènes.
Un autre fait non moins intéressant est la relation des dépôts
oligocènes argileux, sidérolithiques, avec les matériaux de remplis-
sage des poches à phosphorites. Pour M. Boule, celles-ci représen-
tent les gouffres verticaux et les cavernes des causses à l'époque
oligocène. Il y a, entre ces poches à phosphorites riches en ossements
de vertébrés et les argiles sidérolithiques oligocènes, où l'on
ne trouve aucun fossile, des relations de l'ordre de celles qu'on
(1) Vasseur. Bull. Carie geol. France, n° 10, 1891.
36U BIGOT. — SUR LES DÉPÔTS PLÉISTOCÈNES ET ACTUELS 15 Mai
observe entre les dépôts de limons quaternaires de l'Europe occi-
dentale et les cavernes à ossements, dont le remplissage est grosso
modo contemporain des dépôts de limons.
Les grandes cassures N.-N.-E. de la région ont coupé et déni-
velle ces dépôts. Ces cassures ont donc joué après l'Oligocène, pro-
bablement au Miocène supérieur comme le pense M. Thevenin. Mais
il ne faut pas oublier que ces accidents orogéniques ont des origines
beaucoup plus anciennes. Dans le Cantal, la Corrèze et le Puy-de-
Dôme, elles sont véritablement comme le souvenir d'uue orographie
ou d'une topographie hercyniennes. Partout elles sont jalonnées
par des épanchements de roches éruptives; vers la fin des temps
primaires, il devait y avoir sur leur trajet toute une chaîne de vol-
cans analogue aux traînées des volcans tertiaires d'Auvergne.
M. Bigot fait une communication Sur les dépôts pléistocèiies et
actuels de la Basse- Normandie.
Il rappelle que dans une note antérieure il a fait connaître l'exis-
tence, dans le Coteutin,de terrasses littorales, formées par des dépôts
qui correspondent au cycle d'érosion consécutif au mouvement
d'émersion de la région pendant le Quaternaire supérieur (Phase à
El. primigenius).
Ces dépôts d'origine continentale, superposés aux galets ou aux
graviers marins d'une phase antérieure, se retrouvent dans les
mêmes conditions dans les îles anglo-normandes où Ansted a,
depuis longtemps, signalé les « raised beaches » d'Àurigny.
A ces terrasses correspondent dans la vallée de l'Orne des cirques
remblayés par des limons qui renferment la faune de Mammifères
décrite par Deslougchamps père et des silex des types chelléen et
moustiérien.
Ce cycle d'érosion, en rapport avec le mouvement d'émersion,
s'est continué au moins jusqu'à l'époque néolithique, car au-dessous
des graviers de fond de la vallée de l'Orne, à une dizaine de mètres
de profondeur au-dessous du niveau actuel de la rivière, on a
trouvé dans les tourbes une pirogue renversée sur un squelette
d'Homme dont M. Hamy a étudié le crâne et qu'il considère comme
néolithique. Bien plus, à Cherbourg, ce sont des objets en bronze
qu'on rencontre dans ces conditions.
C'est donc à une époque relativement rapprochée qu'à ce cycle
d'érosion se sont substitués, par suite d'un allaisseinent de la
région, des phénomènes d'un autre ordre. Des faits déjà connus
(tourbières submergées, vallées sous-marines) démontrent la réalité
1899 DE LA BASSE-NORMANDIE 361
de cet affaissement, assez considérable pour qu'il soit nécessaire
d'aller, à l'embouchure de l'Orne, chercher à plus de 30 mètres au-
dessous du niveau de la mer le fond rocheux de l'ancienne vallée.
Une des conséquences de cet affaissement a été de transformer
les vallées continentales en baies très allongées, dans lesquelles des
tangues à Psammobies se sont superposées aux tourbes. En même
temps, l'attaque des parties convexes du rivage fournissait aux cou-
rants cheminant de l'ouest à l'est des matériaux de transport qui,
d'abord arrêtés en travers des baies, ont déplacé de plus en plus
vers l'est le chenal des cours d'eau (Orne, Dives, Touques), créant
des barres en arrière desquelles les baies se sont comblées pendant
la période historique, comme l'a montré M. Leonier.
Il est possible de prévoir que les points du littoral de la Norman-
die qui ont jusqu'ici échappé à ce travail de régularisation sont
destinés à subir le même sort si les conditions actuelles persistent.
Ainsi l'on peut prévoir que la région de l'embouchure de la Seine
est destinée à un comblement certain, d'abord par l'établissement
d'épis littoraux, facilité par la présence des bancs d'Amfard, du
Ratier et de l'Eclat à l'intérieur desquels se comblera la baie.
L'embouchure de la Seine se trouvera ainsi reportée vers l'ouest à
travers une barre étendue de Villerville à la Hève, probablement
beaucoup plus rapprochée du Havre, par suite de l'apport plus con-
sidérable de matériaux provenant de la côte du Calvados, compara-
tivement à ceux qui amènent les courants entre Antifer et le Havre.
M. M. Boule dit que les observations de M. Bigot apportent
une sérieuse contribution à l'histoire si intéressante des phéno-
mènes physiques qui ont marqué en France l'époque quaternaire.
Les études de ce genre, trop négligées en Frauce depuis un grand
nombre d'années, sont pourtant des plus curieuses et méritent
toute l'alteution des géologues et des paléontologistes.
Les cordons littoraux de Saint-Aubin avec Huccinum groenlan-
dicum et autres espèces arctiques ne sauraient être contemporains
de Tépoque chelléenne, cette dernière expression étant prise dans
le sens purement paléontologique, puisque la faune chelléenne est
une faune composée d'espèce dénotant un climat chaud. Ces gra-
viers marins correspondent à une période froide, peut-être con-
temporaine de la mer à Yoldia do l'Europe septentrionale, peut-être
plus ancienne. Il serait très intéressant d être fixé sur ce point.
M. Stuart-Menteath : Sur les failles des Pyrénées.
Magnan a représenté comme spéciales aux Pyrénées, des masses
362 stuart-menteath. — sur lus failles des Pyrénées 15 Mai
de 4.000 mètres de Cambrien, 2.000 mètres d'Albien, et pour les
accommoder entre elles, des failles d'un déplacement de 8.000 in.
Dans le C. R. S. du 24 juin 1895 j'ai signalé a trois anticlinaux à
noyau de Jurassique fossilifère » au nord de Pont-Suson dans la
vallée d'Aspe. Dans le dernier volume du Bulletin des Services de la
Carte géol. de France, je trouve ce Jurassique remplacé par l'Ai bien
dans une coupe reproduisant celle deMagnan. Seulement, Magnan
ayant parfaitement reconnu que le calcaire à Toucasia descend à la
grande route immédiatement au nord de Sarrance, et qu'il monte
sans discontinuité pour former tous les sommets à Test et à l'ouest
de ce village, on a biffé cette charnière significative ainsi que la
croûte contiuue de 50 mètres de calcaires pétris de Toucasia qui
recouvre partout les prétendus schistes albiens de la coupe et for-
merait nécessairement le trait principal de toute coupe exactement
relevée. Précisément au-dessous du point où ce calcaire descend
pour toucher la grande route, on l'a dessiné à 2.000 mètres au-
dessous de la rivière, grâce à une faille de 8 kilomètres qui l'aurait
arraché de la Crète du Napayt avec lequel il est non seulement
identique par des fossiles abondants, mais encore visiblement con-
tinu. Pour justifier cet enfoncement, on a classé le Lias à Belem-
nites, Pecten œquivalvis et Spirifer Hartmanni, au sud de Sarrance,
comme étant un affleurement du calcaire à Toucasia si injustement
enseveli.
Tout observateur qui aura retrouvé les masses de Toucasia, à
deux pas au nord de Sarrance, pourra facilement suivre ce calcaire
dans le grand anticlinal qui fait suite au sud, et s'assurer que le
Lias forme, à la cote de 400 mètres, la base des schistes du Juras-
sique et de l'Aptien. Au-dessus de ces schistes, le calcaire crétacé
est continu avec une épaisseur deoO à 100 mètres, depuis la hauteur
de 1.247 mètres et à travers le sommet du col à l'ouest de Pont-
Suzon. Le Tronc du Roi et la Crète de Napayt sont deux charnières
synclinales de ce même calcaire, dont le Signal d'Asasp est la
retombée définitive, plissée, mais plongeant de 45° vers le nord. Le
prétendu Albien n'est autre chose que les trois noyaux des trois
anticlinaux de Jurassique avec gypse, lherzolite, ophite, dolomie,
cargneule, et des Bélemnites abondantes. Un Néocomien mal défini
et douteux et des schistes aptiens y sont intercalés, le Flysch qui
recouvre le calcaire à Toucasia étant entièrement rejeté à l'ouest,
excepté au sommet du col à l'ouest de Pont-Suson. Une carte quel-
conque et la coupe donnée par Magnan feront comprendre cette
structure très normale de la région.
NOTE SUR L'APTIEN SUPERIEUR
DES ENVIRONS DE MARSEILLE
par M. 4. REPEL1N.
L'Aptiea supérieur (marnes à A. Nixus et A.furcatus) ne se mon-
tre avec un faciès analogue aux marnes de Gargas et de la montagne
de Lure que dans le bassin même de l'Huveaune, au sud de la
chaîne de l'Etoile et de la SMJeaumc et surtout dans la région de
Carpiagne et de Cassis. Les fossiles sont assez abondants à la partie
supérieure des marnes, mais les gisements, fouillés depuis long-
temps, tels que Ratataigne, sont en grande partie épuisés. Mon
ami le Dr Léger m'indiqua il y a quelques mois un gisement très
riche et très intéressant dans l'Ile Maire aux environs de Marseille.
M. Léger me donna même un certain nombre de fossiles, qui, avec
ceux que j'ai recueillis depuis à plusieurs reprises, constituent les
H*
ialli|Uf du versa Dl mini do l'Ili' Maliv.
matériaux de cette étude paléontologie) ue. La carte géologique de
MM. Gouret et Gabriel indique un affleurement d'Aptien à l'Ile
Maire et M. Fournier avait eu l'occasion de recueillir également des
fossiles en ce point ou en un point très voisin.
Situation nu uisemknt. — L'affleurement marneux est très réduit
364 j. repelin 15 Mai
et se trouve sur le versant nord de l'île Maire qui fait face à l'arête
méridionale du Cap Croisette. Il y a là un synclinal faille dont l'axe
passe à la partie sud du chenal au point où affleurent les marnes
de l'Aptien supérieur; la coupe est la suivante :
Les couches aptiennes plongent au sud-ouest, les horizons supé-
rieurs sont au bord même de la mer et l'on voit dans l'île l'Aptien
inférieur (Bedoulien) apparaître très laminé entre les marnes supé-
rieures et l'Urgonien (1). Sur la rive opposée il se relève d'une
manière assez régulière sur l'Urgonien qui forme presque toute
cette extrémité du massif de Marseille-Veyre.
Faune. — La faune comprend des Cœlentérés, des Echinodermes,
des Brachiopodes, des Lamellibranches, des Gastéropodes et des
Céphalopodes.
I. — Cœlentérés. — Ce groupe n'est représenté que par quelques
formes appartenant aux familles des Trochosmiliacés, des Trocho-
cyathacées et des Fungidés.
Parasmilia sp. (PI. VIL fig. 4). Echantillon de petite taille, tur-
biné, à cloisons fortement granulées sur les côtés, ce qui le diffé-
rencie facilement de P. Aptiensis Pict. et Ren. (Aptien de la Perte-
du-Rhône).
Trochocyathus sp.
Cyclotites Aptiensis ? E. de From.
IL — Echinodermes. — Toxaster de très petite taille communiqué
par M. le commandant Savin à M. Lambert, qui a confirmé la déter-
mination générique, mais qui n'a pu reconnaître l'espèce.
Echinospatagus sp.
La classe des Crinoïdes est représentée par une tige de Pentacrine.
Pentacrinus Legeri n. sp. (PL VII, fig. 1). Fragment d'un bras de
Pentacrine composé de cinq articles, dont roruementation est très
nette et extrêmement délicate. Chaque article plus large que haut
présente uue forme pentagonale à côtés légèrement infléchis vers le
centre de l'article et porte à chaque angle un gros tubercule allongé
dans le sens de la largeur. Chaque tubercule est relié au suivant
par deux rangs de petites granulations au nombre de 3 à 4 et
(1) Les deux assises supérieures habituelles des marnes aptiennes, l'assise à
A. Dufrenoyi et l'assis»* à II. seniicanaliculatus, distinguées par MM. Kilian et
Léenhardt dans la Haute Provence sont ici confondues sans doute par suite de
phénomènes mécaniques. Les Bélemnites qui, à la Bédoule, abondent également à
la partie supérieure des marnes, se trouvent là mélangées en grand nombre à
la faune des couches à .1. Dufrenoyi.
1899 NOTE SUR L'APTIEN SUPÉRIEUR DES ENVIRONS DE MARSEILLE 365
entre ces deux rangées d'ornements, on trouve deux rangées inter-
médiaires longitudinales, de petites granulations. Cette espèce a
été dédiée au Dr Léger.
III. — Brachiopodes. — Terebratulina Mairensis n. sp. (PI. VII,
fig. 2). Espèce assez voisine de T. auriculata d'Orb. trouvée dans le
Néocomien de la Couronne et de T. Martini d'Orb. du Gault de
Gueule-d'Enfer. Elle a la taille de la première, mais elle n'est pas
pentagonale comme elle. Sa forme générale est plutôt celle de
T. Martini. Elle est même beaucoup plus flabellée. Les stries d'ac-
croissement y sont très marquées et forment des sortes de granu-
lations par leurs intersections avec les côtes. Les petites oreillettes
de la valve supérieure sont costulées et non lissées comme dans
T. Martini. Elle est, de plus, moins acuminée que ces deux espèces.
Terebratulina? espèce courte et bombée en assez mauvais état de
conservation. Elle rappelle un peu T. echinulata par sa fine
striation et par le grand nombre des plis du bord frontal.
Terebratula cf. biplicata Brocchi (in Pictet, Aptien supérieur de
la Perte-du Rhône).
Elle est un peu moins acuminée que le type figuré par Pictet et
le bord frontal est plus droit. 11 y a deux plis au lieu de trois sur la
petite valve. Le pli médian de la valve inférieure est moins marqué.
T. biplicita Defrance in d'Orb. PI. 54, fig. 14 et 15.
Rhynchonella Doll/usi ? Kilian. Cette espèce paraît identique, par
sa forme générale et le nombre de ses plis, de celle décrite par
M. Kilian dans le Barrémien de la montagne de Lure. Toutefois
l'état de conservation ne me permet pas de l'affirmer.
IV. — Lamellibranches. — Astarte sp. de la grosseur de celles
de la Perte du-Rhône, A st. laticosta, mais à côtes plus fines et plus
accentuées.
Astarte sp.
Venus Roissii d'Orb. Echantillons identiques au type de d'Orbigny
comme forme générale et grandeur, mais avec des stries concentri-
ques bien visibles. Cette espèce n'avait pas encore été signalée en
Provence.
Tellina sp. Aucune telline n'est signalée par d'Orbigny, ni par
les divers auteurs qui se sont occupés de l'Aptien. L'auteur
de la Paléontologie française signale une espèce de ce genre dans
le Gault, mais elle n'a aucun rapport avec notre petite espèce.
Plicatula sp.
366 J. REPELiN 15 Mai
Lucina sculpta Phillips in d'Orb. Cette espèce aurait été trouvée
dans l'Albien d'après d'Orbigny. On la trouve à Lure, à Gargas, etc.
Trois bivalves indéterminables.
V. — Gastéropodes. — Solarium indéterminable spécifiquement,
espèce très aplatie.
Trochus Marioni n. sp. (fig.. 3). Coquille aussi haute que large,
sans ombilic, tours scalariformes portant sur le pourtour et sur la
face interne une série de côtes obliques qui sur les bords anguleux
des tours sont ornées de tubercules. Le dernier tour presque plat
sur sa face supérieure, qui ne montre que de fines stries concen-
triques, se termine par une ouverture buccale déprimée de forme
presque trapézoïdale.
Trochus ttequieni d'Orb. var., espèce déjà recueillie dans la craie
chloritée de Cassis (B.-du-Rhône) par MM. Requien et Matheron.
Les échantillons de l'Ile Maire sont identiques à l'espèce de d'Orbi-
gny au point de vue de l'ornementation, mais la forme générale est
plus élancée. La taille est la même, mais la largeur est bien
moindre. J'ai pensé que ces différences, bien que notables, ne
justifiaient pas la création d'une espèce nouvelle.
Trochus sp. Indéterminable, à tours anguleux comme T. Giron-
dinus du Cénomanien.
Pleurotomaria sp.
Avellana sp. de petite taille à l'état de moule ferrugineux, très
voisine des formes du Gault telles que A. Hugardi d'Orb.
Cerithium aptiense d'Orb. déjà trouvé au Chêne et à Gargas dans
TAptien supérieur.
Scalaria Dupini d'Orb., variété de petite taille, mais avec des orne-
ments bien visibles. Cette forme est signalée pour la première fois
en Provence.
Nerinea sp. ind.
Apoirhdis ou Rostellaria sp. ind.
Moules de Nucula et d'Astartes allongées.
Nombreux autres Gastéropodes de genres douteux.
VI. — Céphalopodes. — Phylloccras Guettardi Rasp. Echantillon
de petite taille ferrugineux. Espèce déjà trouvée à Gargas, dans
les Basses-Alpes, dans la montagne de Lure (1) et dans la Drôme
(Fallot).
(1) Kilian. Thèse de doctorat.
1899 NOTE SUR L'APTIEN SUPÉRIEUR DES ENVIRONS DE MARSEILLE 367
Phylloceras inornatum d'Orb. Forme déjà trouvée à Gargas et dans
la montagne de Lure. Echantillon de petite taille.
Phylloceras Rouyanum d'Orb. Cette espèce a déjà été recueillie à
Caslellane dans le Néocomien de d'Orbigny et dans l'Aptien de la
montagne de Lure. Je possède un certain nombre d'exemplaires
coaformes à la figure de d'Orbigny, Pal. Franc., T. crétacés, PI. 110.
Je n'en ai pas trouvé qui ressemblent à Ph. in/undibulum de
d'Orbigny. Et certains exemplaires provenant de l'Hauterivien des
Hautes-Alpes m'ont paru identiques à ceux de l'Aptien de l'Ile
Maire. Les cloisons visibles sont au nombre de cinq et tout à fait
identiques.
Phylloceras. Voisin de Ph. Velledœ.
Phylloceras sp. Peut-être Phyll. Calypso, à en juger par la forme
générale, mais les cloisons ne sont pas visibles ; les tours qui tom-
bent à pic sur l'ombilic très étroit comme dans .4. Calypso portent
cinq sillons très nets sur tout le pourtour.
Lytoceras voisin de Lyt. Juilleti.
Lytoceras Juilleti d'Orb. Les tours sont un peu plus embrassants.
Celte espèce à déjà été trouvée à Gargas, près d'Apt, et aux environs
de Digne.
Lytoceras tenuistritum n. sp. (PI. VU, fig. o). Jolie petite espèce
dont les ornements consistent eu fines côtes très serrées au nombre
de quatre-vingts environ par tour. Chaque tour porte en outre deux
étranglements légèrement obliques par rapport au reste de l'orne-
mentation. Ombilic profond, tours assez recouvrants, section des
tours subarrondie, un peu surbaissée de haut en bas, ce qui le
distingue à première vue de l. Juilleti avec lequel il n'a du reste pas
de rapports.
Lytoceras Jaubertil La forme générale est bien celle de cette
espèce signalée à Lure au même niveau, mais les cloisons sont peu
visibles.
Desmoceras Emerici Rasp. in d'Orb. Espèce déjà rencontrée à
Vergons (Basses-Alpes) et aux environs de Carpentras, ainsi qu'à
Gargas. La section est un peu moins triangulaire que dans le type
de d'Orbigny.
Desmoceras voisin de D. Emerici, mais au lieu de sillons trans-
versaux elle présente des côtes entre deux sillons, et dans les
intervalles de deux à trois côtes. Elle a quelques rapports avec
A. Belus d'Orb., mais elle paraît encore plus voisine de A.Dupini
du Gault.
Oppelia nisus d'Orb. Déjà trouvée à Gargas, dans la Montagne de
368 j. repblin 15 Mai
Lure et au Ventoux. Cette espèce très commune en Provence est abon-
dante dans ce gisement et se trouve associée à ces formes très voisi-
nes que M. Sarasin a cru devoir distinguer Opp. Aptiana, 0. Haugi[\).
Oppelia aptiana Sarasin. Un certain nombre d'exemplaires des
Oppelia recueillies à Maire correspondent à la description de
Opp. Aptiana, elles ont en effet des tours plus larges et très arrondis
sur la face ventrale et de plus la partie externe est bien ornée de
20 à 23 côtes falciformes.
Oppelia Haugi Sarasin. Il y a également quelques Oppelia qui
m'ont paru se rapporter à cette espèce, les tours sont presque
embrassants et portent de 20 à 2o côtes falciformes allant de
l'ombilic à l'arête ventrale qui est tranchante.
Hoplites fissicostatus Phillips. Cette forme très abondante dans les
calcaires inférieurs de la Bédoule n'est représentée ici que par
quelques rares exemplaires en très bon état de conservation et
identiques à la figure de d'Orb., Pal. française.
Hoplites Dufrenoyi d'Orb. = H. furcatus J. Sow. avec des cloisons
plus nettes que celles des figures de d'Orb.
Gargas, Lure, env. de Digne (2).
Hoplites voisine de H. Dufrenoyi et de H. Itelim d'Orb. Elle diffère
de //. Dufrenoyi par ses côtes beaucoup plus aplaties et qui se
terminent sur la partie latérale de la face ventrale par uu tubercule
allongé dans le sens de l'enroulement.
Hoplites sp. (fig. 10). Petite espèce à tours presque arrondis, à
peine aplatis latéralement. Côtes simples pour la plupart ne pas-
sant pas sur la face ventrale.
Hoplites asperrimus d'Orb. Les tours ont une section bien moins
quadrangulaire que dans le type de d'Orbigny, pi. 60. L'ornemen-
tation est identique.
Hoplites Aptiensis n. sp. (PI. VII, fig. 7). Petite ammonite discoï-
dale à côtes nombreuses rappelant un peu H. Neocomiensis. Mais
les côtes passent sur la face ventrale qui est légèrement aplatie.
Parmi ces côtes au nombre de 20 à 26 par tour un certain nombre
sont simples et n'arrivent pas jusqu'à l'ombilic, les autres sont
bifurquées; on trouve deux côtes simples séparant bien régulière-
ment les côtes bifurquées. Les tours se recouvrent sur 1/5 environ
de leur largeur. Ouverture plus haute que large. Cloisons invisi-
bles. La bifurcation des côtes se fait à peu de distance de l'ombilic.
(1) //. s. a. F., .3), XXI.
(2) Fallot. Étude géologique sur les étages moyens et" supérieurs du Crétacé
dans le sud-est de la France (1885, Paris, Masson).
1899 NOTE SUR L'APTIKN SUPÉRIEUR DES ENVIRONS DE MARSEILLE 369
Acanthoceras Martini d'Orb., très abondant. Se trouve aussi à
Gargas et dans les Basses-Alpes, env. de Digne (1). Identique au
type de d'Orbigny. fig. 7-10, pi. 58.
Acanthoceras Milieu d'Orb. Déjà trouvée à la Perte-du-Rhône et à
St-Paul-Trois-Chàteaux, ainsi que dans le Gault de la montagne de
Lure. Cette espèce, qui se trouve habituellement dans le Gault, se
montre ici associée à des formes aptiennes. Sa présence, et celle
d'un certain nombre d'autres fossiles du Gault, indique un horizon
tout A fait supérieur de l'Aptien et permet d'assimiler ce faciès
marneux de l'Ile Maire avec celui dit de Fondouille, qui ne se
trouve que .cur le versant nord de la chaîne de l'Etoile et qui pré-
sente tellement Acanth. Milleti. L'échantillon est identique au type
de d'Orbigny.
Desmoceras sp. Petite espèce rappelant beaucoup par sa forme géné-
rale D. Mayori d'Orb. Les sillons principaux, au nombre de 4, out
toutefois une inflexion différente, leur convexité est dirigée en avant,
les côtes intercalaires ne sont pas visibles, les cloisons non plus.
Des m. latidorsatum ?Mich. Presqu'identiqueau type de d'Orbigny
mais les tours ne tombent pas à pic sur l'ombilic et les cloisons
sont moins nombreuses. A. latidorsatus a été déjà signalée à Cassis
tout à fait à la base du Cénomanien.
Desm. (Puzozia BayleJ Munieri n. sp. (fig. 6). Cette forme présente
de nombreux rapports avec le groupe de l). Parandieri (D. Dupini,
D. Charrieri).
Elle diffère de D. Parandieri parce que les côtes comprises entre
deux sillons n'existent que sur la face ventrale. Sur les flancs ces
côtes avec leurs sillons passent à des étranglements. Leur nombre
est aussi moins grand. Les tours sont un peu plus embrassants et
les étranglements ne sont pas sinueux comme dans D. Parandieri
de d'Orbigny.
La forme générale avec tes étranglements au nombre de 9 serait
plutôt celle de D. Belus d'Orb. dont elle diffère par l'absence com-
plète de petites côtes et par une inflexion très marquée des deux
dernières selles auxiliaires en arrière, ce qui rappelle un peu
Z). Mayori dont les selles, en môme nombre, sont toutefois bien plus
compliquées. Elle diflère aussi de l). Belus par la forme générale des
tours moins aplatis latéralement et ne tombant pas à pic sur
l'ombilic. Le nombre de tours visibles dans l'ombilic est de 2 au
lieu de 3 ou 4 dans D. Belus.
(I) Fallot. Thèse de Doctorat. Loc. cit.
31 Octobre; 1809. - T. XXVII. Bull. Soc. Gcol. Fr. - ii
370 J. repelin 15 Mai
Desm. Munieriî J'ai représenté (fig. 9) un exemplaire dont la
forme générale rappelle la précédente, mais il n'y a pas de côtes
dans la région ventrale, les sillons existent sur tout le pourtour et
sont en môme nombre que dans Z). MnnierL Les cloisons pres-
qu'identiques ne présentent cependant pas l'inflexion des deux
premiers lobes.
Lytoceras Duvali d'Orb. Les tours paraissent un peu plus embras-
sants et le nombre des sillons est de 10 au lieu de 13 par tour
comme dans le type de la Paléontologie Française.
On l'a trouvée aussi à Vergons et dans les B. -Alpes, ainsi que dans
la montagne de Lure et dans la Drôme (Fallot).
Dans certains exemplaires que j'ai rapportés à la même espèce,
les tours sont encore plus embrassants et le nombre des sillons est
de 8 au lieu de 13.
Desmoceras? cf. Versicostatum Mich. duGault (PI. VIL fig.8. La bifur
cation y est moins régulière et l'ombilic parait plus profond (1).
Hamites alternatus Phillips. La seule différence qui existe entre
cet exemplaire et celui qui est figuré dans la Paléontologie Française,
est que chaque côte porte des tubercules. Ceux-ci sont plus gros
sur certaines côtes séparées par deux autres côtes à tubercules plus
petits. Les cloisons sont à peu près identiques. H. alternatus a été
trouvé dans le Gault à Escragnolle (Var).
H. Bouchardi d'Orb. Cette espèce est signalée pour la première
fois en Provence.
Ancyloceras (Tojcoceras) Hoyeri d'Orb. Espèce déjà signalée à Apt,
à Gargas, ainsi que dans la montagne de Lure.
Ptychoccras lœve Math. (2). Cette forme paraît identique à celle
décrite par M. Matheron, toutefois on n'eu connaît pas les cloisons.
Nombreux Céphalopodes déroulés indéterminables, Ancyloceras,
Anisoceras ou Toxoceras.
Belemnites sewicanaliculatus Blainv. Très abondante comme dans
(t) Cette Ammonite est intéressante à étudier en ce qu'elle montre, sur une
partie des tours, les ornements qui lui sont propres, et sur l'autre, les ornements
du moule interne. Or ces ornements ont si peu de rapports entre eux, que si l'on
trouvait le moule seul, on serait tenté d'en (aire une espèce spéciale. On voit, par
là, quel intérêt il y aurait à connaître d'une manière certaine les moules des
Ammonites. On peut même voir assez nettement les relations des ornements de
l'Ammonite avec ceux du inouïe, comme l'indique la figure 8 L'Ammonite pré-
sente des cotes régulièrement bifurquées, le moule de petites côtes entre deux
sillons séparées par un intervalle sans ornement, et c'est au bord interne de cet
intervalle que correspondent les cotes de l'Ammonite et non aux côtes du moule.
(2) Mathehon. Recherches paléont. dans le midi de la France.
1899 NOTE SUR L APTIBN SUPÉRIEUR DES ENVIRONS DE MARSEILLE 371
le Ventoux, la montagne de Lure, les Basses-Alpes, la Drôme, et
môme les couches gréseuses du versant nord de l'Etoile.
J'ai figuré deux fragments en bon état de conservation de mes
Céphalopodes déroulés que je rapporte avec quelque doute au
genre Hamttes et qui ne sont figurés nulle part à ma connaissance.
H ami tes massiltensis n. sp. (fig. 11). Cette forme est régulièrement
ornée de côtes un peu obliques et qui passent régulièrement sur la
partie dorsale et sur la partie ventrale. Section ovalaire.
Hamites tenuis n. sp. (fig. 12). Petite espèce à côtes régulières très
aiguës et très accentuées, sans tubercules, section subarrondie.
11 m'a paru intéressant de comparer la faune de l'île Maire avec
celle des gisements les plus connus de l'Aptien supérieur marneux,
Gargas, le Ventoux et la montagne de Lure.
1° Gargas. — Peu de formes signalées à Gargas manquent à l'Ile
Maire. Ce sont :
A. Crassicostatus d'Orb.
A. Gargasemis d'Orb.
De$m. Melchioris.
Macroscaphites striatisulcatus
d'Orb.
Aucella C o quand i.
Par contre beaucoup des espèces trouvées à Maire n'ont pas été
citées de Gargas, soit que la faune ait été peu étudiée, soit qu'elles
manquent réellement. Ce sont les suivantes :
Pentacrinus Legeri n. sp.
Terebratulina Mairensis n. sp.
Terebratulina sp.
Tereùratuta biplicata Brocch.
— cf. biplicata Brocch.
in Pictet.
A star te.
Venus Roissii d'Orb.
Tellina.
Solarium.
Trochus sp.
Trochus Requieni d'Orb.
Trochus.
Pleurotomaria.
Avellana.
Scalaria Dupini d'Orb.
Nerinea.
Lytoceras quadrisulcatum d'Orb.
Hamites alternatus Mantell.
//. Bouchardi d'Orb.
Acanthoc. Milleti d'Orb.
Desm. Munieri n. sp.
Hopl. asperrimus d'Orb.
Toutefois, le nombre et la valeur systématique des formes com-
munes ne laissent pas de doute sur l'assimilation avec les marnes
de Gargas.
On trouve en effet comme à Gargas :
Bel. semicanaliculatus Blainv.
Phyll. Guettardi Rasp.
Hopl. Dufrenoyi d'Orb.
Oppelia M sus d'Orb.
Acanth. Martini d'Orb.
Desm. Emerici Rasp.
372
J. REPELIN
15 Mai
Toxoceras Royeri d'Orb.
Ptyclwceras lœve Math.
Plicatula sp. et de petits Gaste
ropodes.
21 Ventoux. — D'après Mr Leenhardt les autres gisements du
Ventoux contiennent aussi un certain nombre d'espèces qui ne sont
pas à Maire et dont voici la liste :
.4. forcit d'Orb.
A. crassicostatus d'Orb.
A. Cornueli d'Orb.
Desm. Belus d'Orb.
Macroscaph.striatisulcatus d'Orb.
» recticostatus d'Orb.
Turrilites
En revanche un grand nombre d'espèces de Maire font défaut ou
n'out pas été reconnues dans le Ventoux. Ce sont :
Des Polypiers
Pentacrinus Legeri n. sp.
Terebratulina Mairensis n. sp.
Terebratula biplicata Brocch.
Astarte sp.
Venus Roissii d'Orb.
Tellina sp.
Solarium sp.
Trochus
Trochus Requieni d'Orb.
Pleurotomaria sp.
Avellana sp.
Scalaria Dupini d'Orb.
Nerinea sp.
Rostellaria sp.
Lytoceras quadrisulcatum d'Orb.
Lyt. Jauberti
Uopl. fussicostatus Phillips.
Hopl. asperrimus d'Orb.
Acanth. Milleti d'Orb.
Desm. Munieri n. sp.
Hamites Bouchardi d'Orb.
c'est-à-dire à peu près toutes les espèces qui manquent également
à Gargas; d'ailleurs les gisements du Ventoux paraissent tous
assimilables à celui de Gargas.
3° Lare. — M. Kilian a cité dans sa thèse un assez grand nombre
de fossiles des marnes aptiennes supérieures de Lure. Beaucoup
n'existent pas à Maire, ce sont :
les vertèbres amphicœliques
les restes de Crutacés
les dents de Squale
Conoleutnis Dupini
Bec de Nautile
Nduîilus Ricordeaui d'Orb.
Phyll. Carlavanti d'Orb. Prodr.
Phyll. Thethys d'Orb.
Lyt, strangulatum d'Orb.
Macroscaph.striatisulcatus d'Orb.
Hamites? Emerici d'Orb.
Hopl. crassicosta d'Orb.
» var. épineux.
» Gargasemis d'Orb.
Ancyloceras sp.
» Emerici d'Orb.
Nerinea sp.
Cerithium Barremense d'Orb.
Prodr.
Cerithium Gargasense
» anal, au C. Gueran-
deri d'Orb.
1899 NOTE SUR L'APTIEN SUPÉRIEUR DES ENVIRONS DE MARSEILLE 373
Rostellaria glabra Forbes(l) Leda (Nucula) cf. scapha d'Orb.
» cf. gargasensis d'Orb. Nucula cf. simplex Desm.
Prodr. Yoldia sp.
Anisocardia sp. Aucella (Inoc.) Coquandi d'Orb.
Cucullœa sp.
Les espèces suivantes sont au contraire spéciales à Maire :
Parasmilia Trochus
Cyclolites Aptiensis? E. de From. Trochus Requieni d'Orb.
Pentac. Legeri n. sp. Pleurotomaria
Terebratulina Maïrensis n. sp. Avellana
Terebratula biplicala Brocchi. Scalaria Dupini d'Orb.
Astarte sp. Acanthoc. Milleti d'Orb.
Astarte sp. Desm. latidorsatum Mich.
Venus Roissii d'Orb. Desm. Munieri n. sp.
Tellina Hamites Bouc hardi d'Orb.
Solarium Ham. sp.
Quant aux espèces communes ce sont les suivantes :
B. semicanaliculatus Blainv. Acanth. Martini d'Orb.
Phyll. Gueltardi Rasp. Toxoceras Royeri d'Orb.
Phyll. Rouyanum d'Orb. Ptychoceras lœve Math.
Lytoceras Duvali d'Orb. Cerith. Aptiense d'Orb.
Lyt. Jauberti d'Orb. Lucina sculpta Phillips.
Opp. nisus d'Orb. Trochocyathus.
Hopl. Dufrenoyi d'Orb. Polypiers.
L'Aptien de Maïre correspond donc bien aussi à l'Aptien marneux
de la montagne de Lure ; les espèces communes sont nombreuses
et significatives, et il semble môme que ce soit avec l'Aptien de
cette région orientale de la Haute-Provence qu'il faut comparer les
couches supérieures de l'Ile Maire. Mais notre gisement se distin-
gue de tous les précédents par la présence d'un certain nombre de
fossiles du Gault tels que A. Milleti. A. latidorsatus.
On est donc amené à le considérer comme faisant partie d'un
horizon un peu plus élevé que les précédents, comme une zone de
passage aux premières assises du Gault.
Il y a lieu également d'assimiler ces marnes aux couches gré-
seuses de Fondouille et de Plan de campagne qui représentent un
faciès particulier gréso-calcaire du Gargasien et à la partie supé-
rieure desquelles on trouve également Acanth. Milleti. Comme Ta fait
remarquer M. Collot (Terr. crét. de la Basse-Provence), ce niveau
doit correspondre aussi aux sables verts à Bélemnitesde l'Ardèche.
(1) Quart. Journ. Geai. Soc. du lower greensand.
374
Séance du 5 Juin 1899
PRÉSIDENCE DE M. DE LAPPARENT, VICE-PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès- verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce le décès de M. E. Jannettaz, maître de
conférences à la Sorbonne, assistant au Muséum d'Histoire natu-
relle. 11 fait l'éloge de notre regretté confrère, bien connu par ses
beaux travaux de minéralogie, et rappelle qu'il fut trésorier puis
président de notre Société en 1875.
Il annonce quatre présentations.
Les Secrétaires signalent parmi les ouvrages parvenus à la Société :
Le granité des Pyrénées et ses phénomènes de contact (1er mémoire :
Les contacts de la Haute-Ariège), par M. A. Lacroix (Bull. Serv.
Carte géol. de France, N° 64). — Les cartes géologiques au 1/80. 000e
récemment publiées par le Service géologique de la Carte de France :
Aiguilles, Saint-Martin Vésubie, Sarrebourg, Lesparre. — Fauna der
Gaskoltle und der Kalksteine der Permformation Bôhmens (Arthropoda,
4* vol., ire livraison). — Catalogue systématique et géographique des
espèces minéralogiques (Boletin del Inst. geol. de Mexico, N° 11).
M. Pallary fait une communication Sur les faunes fossiles des
mollusques terrestres et d'eau douce de V Algérie.
Grâce à MM. Thomas, Gentil, Bleicher, Doumergue, Debeaux,
Susini, Séguin et Joly, età l'examen de la collection Tournouër que
MM. Gaudry et Boule ont bien voulu l'autoriser à étudier, M. Pallary a
réuni les éléments d'un mémoire qu'il résume devant la Société (t).
La forme la plus ancienne est représentée par une hélice (H. Tho~
masi) du M'fatah, près Boghar ; elle n'a aucun analogue dans la
faune paléarctique actuelle. Puis viennent les espèces des marnes
rouges des Doui Hasseni, considérées comme pliocèues par M. Bour-
guignat, mais qui sont bien plus anciennes. Malheureusement, ces
espèces ayant été établies d'après des moules internes, on ne peut
(1) O travail paraîtra dans les Mémoires de la Société.
SÉANCE DU 5 JUIN 1899 375
les admettre toutes sans restrictions. A l'exception du Rumina
décollât a, elles n'ont pas de représentants dans le Nord de l'Afrique.
Les marnes du polygone de Constantine ont été considérées com-
me oligocènes par M. Ficheur ; aux espèces décrites par MM. Crosse
et Bourguignat, l'auteur a ajouté une Hyaline et deux Ferussacies.
Quant aux Bulimus Bavouxi et Gladlina Jobœ, ils sont à supprimer ;
d'autre part, M. Pallary a pu établir la filiation des H. subsenilis,
Dumortieri et Jobœ qui dérivent d'un type initial : 177. senilis.
Les argiles de Smendou, considérées comme plus récentes
(Cartennien), renferment surtout une faune lacustre à Limnées,
Melanopsis, Neritines, Unios et Anodontes. M. Pallary a décrit de
ce gisement une nouvelle Melanopside et un Planorbe à tours infé-
rieurs très serrés, dont il est difficile de trouver des formes affines
dans les Planorbes oligocènes et plus récents.
Les argiles à lignites de Lamoricière, étudiées déjà par MM. Ville
et Bleicher, ont fourni des Potamides, un Micromelania sp., des
Bithinelles, etc., et une jolie hélice : H. altavensis.
La faune du polygone de Constantine est représentée dans le
département d'Oran dans les grès helvétiens du Dj. Adjir et de
l'Oued Zitoun. L'//. Dexoudiana a été encore trouvée dans des mar-
nes helvétiennes à Sidi-Ouadda (M. Flick) et une variété fort dis-
tincte a été découverte aux Amamra par M. Repelin dans une
formation tortonienne.
Les calcaires blancs de Mascara (Pliocène inférieur?) ont donné
une Hélice du groupe des Ibcrus : 17/. Boxdei ; le groupe se trouve à
l'état sporadique au Maroc (Tétouan), mais ne vit pas en Algérie.
Les travertins d'Aïn el Bey et les calcaires ferrugineux d'Aïn Jour-
del offrent une faune terrestre dont on retrouve les équivalents en
Sicile ; une espèce bien caractéristique est VU. fossulata Pomel.
Les formes aquatiques sont remarquables à cause de leurs affinités
avec des espèces oligocènes. On remarque des grosses Limnées :
L. Thomasi, Jobœ, cirtana, deux Corbicules nouvelles de petite
taille (C. numidica et Tkomasi) et quelques Planorbes et Bithinies.
Les dépôts pliocènes de la Batterie espagnole, près Oran, en outre
d'une majorité d'espèces terrestres encore vivantes, ont fourni quel-
ques types intéressants, entre autres une Hyaline (H. subincerta),
dont le groupe ne vit pas en Algérie, mais se retrouve au Maroc,
un Cyclostome (C. mauretanicum), émigré dans les Traras, et un gros
Rumina éteint (R. atlantica).
La faune du puits Karoubi est bien connue, grâce aux recherches
de MM. Bleicher, Paladilhe, Pomel et Tournouër. La majorité des
376 SÉANCE DU 5 JUIN 1899
espèces sont saumâtres et presque toutes éteintes. M. Pallary y a
découvert une Pseudamnicole (P. Jolyi) à tours carénés, une Mêla-
nopside à tours très acu rainés et une variété de la Melania luber-
culata (M. tuberculata v. oranica).
Les dépôts du cap de Garde, près Bône, considérés comme qua-
ternaires, sont pliocènes, car on y trouve deux formes éteintes, dont
une non encore décrite : H. Milsomi Hagenmûller.
Mais ce sont surtout les formations quaternaires qui ont fourni
à Fauteur les matériaux les plus nombreux de son étude. Si les
espèces terrestres ne diffèrent pas sensiblement de la faune actuelle,
il n'en est pas de même des espèces aquatiques qui sont bien diffé-
rentes des faunes locales. La faune du Sud Algérien, qui a déjà fait
l'objet de quelques notes de M. Fischer, renferme des espèces très
importantes comme : Succinea Maresi, Goleahensis, Limnœa Saharica,
Ksouriana, Srguini, Hulinus Dybowskii, Planorbh Aucapitaineanus,
des Physes, Amnicoles, Hydrobies, Melanies et Melanopsis. Cette
faune s'est éteinte depuis peu, à une époque préhistorique.
En résumé : 1° La faune terrestre diffère moins de la faune
actuelle que la faune aquatique ; 2° Les faunes terrestres des ter-
rains miocènes ont leurs équivalents actuels daus les steppes du
sud de l'Ouest algérien (Hélices bidentées et Huliminus Soleilleti,
du Touat) ; 3° Les faunes aquatiques de ces mêmes terrains offrent
des affinités singulières avec les espèces oligocènes du centre et du
sud de la France ; 4° Les espèces terrestres du Pliocène et du Qua-
ternaire ont émigré dans des régions plus fraîches ; les espèces du
Sud algérien sont comparables aux formes du centre européen ;
5° La faune aquatique quaternaire est à peu près éteinte; elle
annonce l'existence à cette époque de grands cours d'eau et de lacs
et elle indique, par cela même, depuis cette époque, un boulever-
sement profond des conditions climatériques ; 6° Enfin, ces faunes
anciennes et récentes ont encore, presque toutes, leurs équivalents
dans la faune paléarctique actuelle. On n'y trouve aucun type de
la faune africaine proprement dite.
M. M. Boule est heureux de constater que M. Pallary, au moyen
de documents nombreux, a pu réduire le nombre des espèces de
certains genres au lieu de les multiplier. Il est beaucoup plus inté-
ressant par exemple de constater que Vllelir subscnilis peut varier
dans diverses directions sous l'influence de tels ou tels phénomènes
physiques sans cesser d'être V Hélix subsenilis, que de mettre un
certain nombre d'étiquettes différentes sur un certain nombre de
SÉANCE DU 5 JUIN 1899 377
ses variations. Non seulement les savants, dont le but principal
parait être de pulvériser les genres et les espèces, ne fout pas œuvre
philosophique, mais encore ces savants spécialistes rendent de plus
en plus difficiles les travaux de synthèse en dissimulant sous une
terminologie abondante et disparate les rapprochements les plus
légitimes. Et, ici comme ailleurs, la richesse de la nomenclature
cache trop souvent la pauvreté des idées.
Un autre résultat des plus intéressants des études de M. Pallary
est l'analogie qu'il a constatée entre les faunes fossiles miocènes de
l'Algérie et les faunes oligocènes françaises, tandis que les faunes
quaternaires de l'Algérie sont remarquables par leurs caractères
paléarctiques.
M. Bleicher, en présentant un échantillon de Graptolites prove-
nant des poudingues du Grès vosgien, s'exprime ainsi :
Cet échaotillon de petite taille, formé d'un éclat de caillou de
lydienne trouvé dans la forêt domaniale de Celles (Vosges), a fait
l'objet d'une récente note de l'auteur à l'Académie des sciences
Une tige de graptolite pourvue de ses denticulations admirable-
ment conservées, s'y détache en blanc sur fond noir, et il est
possible d'y reconnaître le type du Monograptns Bcekii Barr. du
Silurien supérieur de Bohème, en considérant cette espèce comme
répondant à un groupe de formes, à l'exemple de Rœmer dans sa
Lethea geognostica, \™ p., lor vol., 1880 97, p. 642.
Jusqu'ici, on n'avait trouvé dans le grès vosgien des deux ver-
sants des Vosges et de la Forêt Noire que des fossiles, troncs sili-
cifiés, du Permieu sous-jacent, ou des Brachiopodes et Lamelli-
branches plus ou moius bien conservés et pouvant être rapportés
au Dévonien. Il est donc prouvé aujourd'hui que le massif auquel
le grès vosgien a emprunté ses éléments, contenait aussi du Silu-
rien supérieur.
Quanta l'origine de ce Graptolite, il faut peut-élre la chercher
daus la direction du S.-E. des Vosges, plutôt que dans celle opposée
du N.-N.-O. ou des Ardennes, si l'on tient compte des observations
de Sandberger et Beneeke. suivant lesquelles les cailloux inclus
dans le poudingue diminuent de taille du Sud au Nord. Cepen-
dant il est à remarquer que la seule roche à Graptolite, qui se
rapproche de celle de la vallée de Celles, se rencontre en Maine-et-
Loire, d'après un échantillon qui nous a été commuuiqué par notre
confrère M. Douvillé.
378 SÉANCE DU 5 JUIN 1899
M. A. de Grossouvre. — Sur quelques fossiles crétacés de
Madagascar.
J'ai reçu de mon confrère M. Bleicher un certain nombre de
fossiles de Madagascar qui lui ont été remis par M. le commandant
Bourgeois : ils viennent des environs de Diego-Suarez (chaîne
côtière de l'ouest).
Us sont fournis par une roche gris-jaunâtre, sableuse ; la plupart
sont fragmentés et tous sont entièrement recouverts par une patine
brillante d'un brun ocreux foncé.
Ce lot de fossiles comprend principalement des Gastropodes,
quelques Lamellibranches et uu certain nombre de Céphalopodes.
Avec eux se trouvaient des débris de bois taraudés qui ont été
reconnus par MM. Bleicher et Fliche appartenir à des Conifères
et quelques nodules ferrugineux, à substratum siliceux, d'après
les recherches de M. Bleicher.
Les Céphalopodes comprennent :
Un Nautile que j'identifie à N. Bouchardi de l'Arialoor-Group de
l'Inde ;
Des fragments de tours internes de Scaphites du groupe Se.
œqualis et Sr. (leinitzi, qui ne descend pas au-dessous du Céno-
manien ;
Une crosse de Scaphite du groupe de Se. Meslel et Se*, binodmus
qui n'est pas connu au-dessous du Coniacien ;
Un Acanthocératidé que je considère comme pouvant représenter
les tours internes d'une Scaphite du groupe de Se. pulchemmus ;
Un fragment de Hauericeras bien voisin de H. Rembda (in Stol.) :
on ne connaît pas de représentants de ce genre au-dessous du San-
tonien ;
Un gros fragment de Puzosia lisse et un Pkylloceras : espèces
indifférentes.
Un fragment de Drahmdites qui me paraît identique à l'échan-
tillon de B. Brahma figuré par M. Kossmat (PI. XIX, fig. 8).
En résumé cette faune a un caractère franchement sénonien et je
crois qu'elle appartient au niveau de l'Arialoor-Group. Par l'en
semble de ses caractères (Céphalopodes et Gastropodes) elle se
rattache intimement aux faunes crétacées de l'Inde.
M. M. Boule dit que tous les étages du Crétacé paraissent être
représentés à la Montagne des Français, dans le nord de Mada-
gascar, puisqu'il y a déjà signalé des fossiles cénomaniens, turo-
niens et sénoniens. Depuis, il a pu étudier une série d'échantillons
de Schlœnbachia inflata provenant de la même région.
SÉANCE DU 5 JUIN 1899 379
Il a aussi des fossiles identiques par leurs caractères physiques
à ceux dont vient de parler M. de Grossouvre. Ce sont des Gastro-
podes, qu'à cause de leur nature ferrugineuse et des renseignements
topographiques qui les accompagnaient, il avait cru devoir rappor-
ter, avec doute, à l'Infra -Crétacé.
M. M. Boule : Je profite de cette occasion pour dire quelques
mots, à la Société, d'observations nouvelles et fort importantes de
M. E. Gautier sur la partie occidentale de l'Ile de Madagascar
faisant face à la côte Mozambique et se terminant par le cap Saint-
André. La ceinture sédimentaire est très réduite dans cette régiou.
Les couches jurassiques, crétacées et tertiaires, sont remplacées par
une avance des terrains cristallophylliens et granitiques qu'accom-
pagnent de vastes étendues de grès et schistes du Trias (??) avec de
véritables causses liasiques (calcaires à Spihferina et Harpoceras
actuellement à l'étude au Laboratoire de Paléontologie du Muséum).
De sorte que les dépôts jurassiques et crétacés sont disposés dans
l'Ouest malgache, non pas comme je l'avais d'abord pensé, en une
ceinture continue, mais en deux grands bassins, l'un au N.-O. ou
bassin de Majunga, l'autre au S.-O. qu'on peut designer sous le nom
de bassin Morondava-Tulléar.
Une autre avance de terrains primitifs forme le substratum des
îles Nossy-Komba et Nossy-Bé en face des îles Comores, lesquelles
jalonnent une ligne de hauts fonds reliant Madagascar à l'Afrique.
380
Séance du 19 Juin 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce deux présentations et proclame membres
de la Société :
MM. Amiot, Ingénieur en chef des mines, adjoint à la Direction
de la O des chemins de fer P.-L.-M. à Paris, présenté par
MM. Zeiller et Marcel Bertrand ;
Oflret, Professeur à l'Université de Lyon, présenté par
MM. Michel Lévy et de Margerie;
Quillermond, Etudiant à l'Université de Lyon, présenté
par MM. Depéret et Riche;
Pallary, Instituteur à Oran, présenté par MM. Albert Gau-
dry et Philippe Thomas.
M. Racovitza, un des savants naturalistes de l'Expédition
antarctique belge, assiste à la séance. Le Président lui souhaite la
bienvenue et lui adresse les félicitations de la Société, ainsi qu'à
M. Arctowski, géologue de cette mission. « La Société s'houore
d'avoir deux de ses membres parmi les uotabilités scientifiques de
l'audacieuse campagne de la Belgica qui comptera au nombre des
plus profitables et des plus célèbres expéditions polaires. »
Les Secrétaires signalent parmi les ouvrages récemment parvenus
à la Société :
Le 3° vol. des Wissenschaftliche Ergebnisse der Heise des Grafen
Bêla Széchenyi in Ostasien contenant l'étude des fossiles recueillis
par MM. Loczy, Frech, Em. Lôrenthey etSchenk (p. 1 33;j) et l'étude
des miuéraux, par MM. Schmidt, Krenner et Koch (p. 337 381). —
Deux fascicules des Beitràge zur Paldontologie and Géologie Oester-
reichs-Ungams und des Orients consacrés à un Mémoire de M. G. von
Arthaber sur des fossiles crétacés du Caucase. — Un important
ouvrage de M. Rudolfo Amando Philippi, sur les Fossiles secondaires
du Chili (4°, 104 p., 42 pi.).
SÉANCE DU 19 JUIN 1899 381
Du Geological Survey des Etats-Unis nous avons reçu 3 vol. Deux
sont consacrés aux Ressources minérales. Dans le troisième, con-
tenant les travaux proprement géologiques, il faut signaler : un
Mémoire de M. W.-M. Davis, sur la Formation triasiquc du Connec-
ticut et un Mémoire de MM. Hill et Vaughan, sur la Géologie du Pla-
teau Edwards et de la Plaine du Rio-Grande, dans le Texas.
Note sur le péristome de /'^Ecoptychius Christoli, par M. A.
Gevrey (1 planche en phototypie).
Géologie expérimentale, par M. Stanislas Meunier (1 vol. in-8°,
300 p., 56 fig., de la Bibliothèque scientifique internationale,
F. Alcan, édit.).
Le numéro du 12 juin des C. R. de l'Académie des Sciences renfer-
mant une note de M. Lacroix, Sur un gîte de magnétite en relation
avec le granité de Quérégut (Ariège) et celui du 5 juin qui contient
une note de M. Garalp, Sur le Carbonifère des Pyrénées centrales.
Dans les Annales de géographie (N° du 15 mai), à noter: 1° un article
de M. G.-B.-M. Flamand : « La traversée de l'Erg occidental. Grandes
dunes du Sahara oranais » ; 2° « Les grands travaux en cours
d'exécution dans la vallée du Nil », par M. J. Brunhes; 3° Résultats
des missions BlondiauxetEysséricdans le N.-O. de la côte d'Ivoire
(1 carte et 3 planches hors texte).
M. Albert Qaudry, en présentant un ouvrage de Lady
Prestwich, s'exprime ainsi :
Mmo Prestwich me prie de faire hommage, en son nom, à la
Société géologique de France, d'un livre intitulé : Life and Letters
of Sir Joseph Prestwich, written andedited by his wife.y 1899.
Cet ouvrage nous sera précieux, car il nous rappellera la vie si
pleine d'enseignemeuts de l'un des savants étrangers que nous
avons le plus estimés. Le legs que Prestwich a fait à la Société
géologique de France est le meilleur témoignage des liens d'affec-
tion qui l'unissaient aux savants de notre pays. Le nom de ce
grand géologue anglais, dont l'esprit ne connaissait pas de fron-
tière, sera toujours prononcé avec respect et reconnaissance dans
le sein de la Société géologique de France. Le livre que je pré-
sente n'est pas intéressant seulement, parce qu'il résume l'œuvre
scientifique de Sir Joseph Prestwich, mais aussi parce qu'il fait
revivre la plupart des principaux géologues de l'Angleterre dans
la seconde moitié de ce siècle. 11 aide à saisir le curieux mouve-
ment géologique qui s'est produit, surtout pour la partie qui
concerne l'histoire des temps quaternaires, c'est-à-dire l'histoire
des débuts de l'humanité.
382
SÉANCE DU 19 JUIN 1899
M. Albert Gaudry présente : 1° une note de M. Ch. Barrois :
« Sketch of the geology of Central Brittany » (32 p., 17 fig.),
extrait du Bulletin de la Geologists Association de Londres.
L'auteur ayant dirigé en Bretagne, au mois d'avril dernier, une
excursion de géologues anglais, résume succinctement l'histoire
géologique de la région parcourue.
2° un mémoire de M. R. Fourtau : « Revision des Echinides
fossiles de l'Egypte », extrait des Mémoires de l'Institut égyptien.
(Le Caire, 1899, in 4°, 135 p., 4 pi. hors texte).
M. Albert Gaudry communique l'extrait suivant d'une lettre de
M. R. Fourtau, qui lui est adressée du Caire :
Je viens d'explorer le Gebel Haridi en face Ta h ta, point qui n'a
été jusqu'ici visité par aucun géologue. Un de mes amis, qui est
entrepreneur de travaux publics, y creuse un canal à flanc de coteau
et j'ai fait une abondante récolte d'Echinides tertiaires. Plusieurs
espèces sont nouvelles pour l'Egypte et quelques-unes sont nou-
velles pour la science. Voici d'ailleurs la liste à peu près complète
de ma récolte :
ECBINODERMES I
Rhabdocidaris aff. Zitteli Lor.,
fragment.
Cassidulus amygdala Desor.
Cassidulus sp. n.
Eckinolampas globulus var. minor
de Lor.
Conoclypeus Delanouei Lor.
Ditremaster nux M. Ch.
Prenaster aff. alpinus Desor.
Schizaster Gaudryi Lor.
Linthia cavernosa Lor.
Euspatangus libyens Lor.
Plesiospatangus Cotteaui Pomel.
Hypsosputangus sp. n. ail. Ficheri
Lor.
Megapneustes sp. n. aff. grandis
Gauthier.
Gastropodes :
Bulla sp.
Pélécypodes :
Ostrea sp.
Spondylus aff. Rouaulti d'Arch.
Vulsella cf. Caillaudi Zittel.
Cardita cf. libyea Zittel.
Ckama calcarata Lamk.
Céphalopodes :
Un jeune Nautilus, qui semble
être A;. regalis Sovv.
Les exemplaires du Gebel Haridi sont bien conservés et j'ai pu
déjà constater qu'ils serviront à compléter l'étude de certains types
de M. de Loriol, basés sur des spécimens déformés. Ce sera le cas
pour Linthia cavernosa et Conoclypeus Delanouei; ce dernier est une
espèce dont certains caractères sont très variables. De même, j'ai
SÉANCE DU 19 JUIN 1899 383
constaté que l'appareil apical du Schiz. Gaudryi n'était pas celui
décrit par mon savant confrère de Genève; j'en ai d'ailleurs une
magnifique série de huit exemplaires tous plus beaux que le type
dessiné. Cassidulus amygdala et Ditremaster uux n'étaient connus
d'Egypte, le premier que par un exemplaire incomplet du musée
de Zurich (j'en possède une centaine), et le second par un exemplaire
cassé du Mokattam que possède le Muséum (collection d'Orbigny)
et figuré par M. de Loriol sous le nom de Hemiaster Pellati Cotteau
(j'en possède plusieurs en très bon état). C'est sur des exemplaires
de ce même gisement que je lui avais communiqués, que M. V. Gau-
thier vient de décrire le curieux appareil apical du Plesiospatatigus
Cotteaui.
Une excursion aux environs des Pyramides m'a fait trouver un
Coptosoma sp. n. voisin du C. blangianum Des. C'est le premier
Coptosoma tertiaire d'Egype. Enfin, plus à l'Ouest, j'ai trouvé dans
le Sénonien inférieur (Santonien) d'Abou Roach une série d'Oursins
très voisins de ceux d'Algérie et de Tunisie. Dans le Turonien situé
au-dessous de ces couches, il y a de grands Rudistes (i), très
probablement Biradiolites Mortmi d'Orb. Je n'ai pu encore en
détacher de bons exemplaires, et enfin j'ai trouvé un mauvais
échantillon de Mortoniceras texanum. — Je pense pouvoir bientôt
continuer cette exploration.
Bientôt, je partirai pour l'Ouady Moghara; la distance n'est pas
très longue, quatre jours de marche avec des points d'eaux pérennes ;
à TOuady Moghara, il y a une bonne source, je pourrai alors récolter
les beaux spécimens de vertébrés miocènes qu'on y rencontre en
assez grande abondance, suivant ce que m'a dit Blankenhorn, et je
pousserai quelques pointes dans les couches miocènes d'eau douce
qui sont à peu près inconnues.
M. D.-P. OEhlert présente au nom de M. Kerforne une série de
notes sur la géologie de la presqu'île de Crozon (Finistère). L'auteur
a pu étendre et modifier les connaissances acquises, par suite de
la découverte d'assises nouvelles. C'est ainsi qu'il a pu constater la
présence de schistes précambriens au centre d'anticlinaux de grès
armoricain (Crozon, Baie de Dinan, Portmeyr). Du fait que ce grès
est en général peu épais, lorsqu'il repose sur les schistes précam-
briens, et qu'au contraire il atteint une grande puissance lorsqu'il
est associé au poudingue groupé, il pense qu'il y a lieu de distinguer
(1) M. Douvillé a eu occasion d'examiner les Biradiolites signalés dans la région
des Pyramides ; ils lui paraissent devoir être rapportés au Bir. Mortoni.
384 SÉANCE DU 19 JUIN 1899
à sa base une assise, généralement feldspathique, qui est cam-
brienne. Cette série plus complète se trouvant cantonnée dans la
partie sud de la région étudiée et non dans le nord, M. Kerforne en
conclut qu'il existe dans cette dernière région une transgression
coïncidant avec la base de l'Ordovicien, c'est-à-dire avec le grès
armoricain, et mettant en contact cette assise avec les schistes
précambriens. — Au-dessus du grès armoricain, M. Kerforne a pu
distinguer l'horizon des schistes d'Angers proprement dits (schistes
de Courijon), auxquels succèdent des dépôts gréseux (grès de
Rerarvail) faisant parfois défaut, puis de nouveau des schistes (sch.
du Morgat) avec prédominance de Placopowa Tourneminei, et enfin
les schistes de Kerarmor à Trinucleus BnreauL Tout cet ensemble
est placé par l'auteur dans l'Ordovicien moyen. Dans l'Ordovicien
supérieur il distingue en allant de bas en haut : 1° des schistes de
Raguenez avec Trinucleus sp. et dont la faune rappelle celle d'Ecal-
grain en Normandie; 2° des grès et des psammites (Kermeur-
Camaret) avec Orthis, [llœnus et Trinucleus, ce qui les rattache
sûrement au Silurien moyen ; 3° les tufs et les calcaires de Rosan à
Orthis Actoniœ. M. Kerforne pense que le maximum des venues
diabasiques est contemporain du dépôt des couches de Rosan,
c'est-à-dire antérieur au Silurien supérieur. La base de ce dernier
niveau est marqué par des grès, en général très réduits, auxquels
succèdent les schistes ampéliteux à Graptolites, les schistes à Sphé-
roïdes ou Orthocèies, et les schistes altérés avec bancs de quartzites,
difficiles à séparer, à cause de leur faciès, de la base du Dévonien.
L'étude détaillée de ces différents niveaux a fait admettre à
l'auteur quatre anticlinaux séparés par quatre synclinaux, les flancs
de ces plis disparaissent souvent par faille. Les deux anticlinaux
du centre dont les couches sont dirigées N.E.-S.O. sont limités
par des failles contre lesquelles viennent butter les couches dévo-
niennes ; d'autres failles parallèles à celle-ci amènent des réappari-
tions découches. De plus une grande faille de décrochement dirigée
N.O.-S.E., postérieure aux premières, a causé la rupture et amené
le déplacement de toutes les bandes; cette faille a subi une déviation
vers l'ouest qui parait être en relation avec le changement de direc-
tion qu'on observe dans les couches de la presqu'île de Camaret.
L'inclinaison des axes synclinaux tant vers l'ouest que vers l'est,
montre la possibilité d'un prolongement dans ces deux directions
du bassin de Brest Laval.
385
SUR UNE GOUPE DE MADAGASCAR
dressée par M. VILUAUBftE
présentée par M. H. DOUVILLÉ
M. Villiaume, chargé de mission par M. le Gouverneur général, a
dressé une coupe géologique de Madagascar suivant une ligne voisine
du parallèle de 20° 30m-,
La coupe comprend deux parties bien distinctes : elle traverse,
à Test, depuis Ambositra jusqu'à Janjina, le massif ancien, où les
sommets ont une altitude de 1200 mètres, et à l'O., jusqu'à Moron-
dava, les plaines Sakalaves, dont l'altitude dépasse rarement
200 mètres ; une ride intermédiaire (Tsiandava, Bemaraha), dont
les points saillants atteignent près de 400 mètres, s'étend en ligne
droite du N. au S. au milieu de ces plaines. La descente du haut
plateau s'effectue par une pente rapide de 1/15 environ (falaise
de Bongo Lava).
Le massif oriental est constitué par des terrains cristallins et
métamorphiques : granités, gneiss, micaschistes, schistes, cipolins,
quartzites, etc.
Sur la pente de raccordement, les terrains anciens sont recou-
verts par des grès et des poudingues ferrugineux avec argiles
subordonnées rouges, blanches ou bleues. Ces mêmes couches
forment essentiellement le substratum de la plaine sakalave ; elles
sont associées vers la base à des schistes gris avec débris de végé-
taux : cet ensemble pourrait être rapproché des grès de Karoo et
serait alors triasique.
La crête intermédiaire parait être formée par un relèvement de
ces mêmes couches par faille, ou pli brusque; mais l'inclinaison
des strates reste toujours faible.
Entre cette crête intermédiaire et le Bongo Lava les grès sont
partiellement recouverts par des calcaires jurassiques formant un
synclinal à pentes très faibles : on distingue, à la base, des calcaires
grisâtres, cristallins, plus ou moins altérés et des grès calcaires avec
Triyonia cf. costata (forme identique à celle qui a été trouvée en
Abyssinie) et Alveolina, et au sommet, des calcaires à Nerinea
bathonica; cet ensemble représente probablement le Bajocien et
une partie du Bathonien. Il est surmonté par des couches jaunâtres,
31 Octobre 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - 25
386 h. douvillé 19 Juin
grossièrement oolithiques, dans lesquelles on retrouve la faune
étudiée par Fischer en 1873 (Phylloceras Puschi, Pli. cf. Zignoi,
Lytoceras Adelœ, Astarte excavata, Sphœra madag oscar iensis et
nombreux polypiers) et qui doit être attribuée au Bathonien supé-
rieur. Dans cette même région, M. Boule a signalé des calcaires
également jaunes avec Macrocephalites macrocepkalus.
Des calcaires très différents se montrent sur le versant occidental
de la crête intermédiaire : ils sont blanchâtres et pétris de Forami-
nifères (Idalina, Archiacina, d'après M. Schlumberger) ; ils ren-
ferment en outre des moules de bivalves, une Ostrea du groupe de
Yedulis et un gros Oursin plat, irrégulier, rappelant les Echinan-
thus. Ces calcaires ont l'apparence des couches éocènes de la
région. M. Boule a signalé dans la même zone, un peu plus au
sud, des calcaires crétacés à Desm. planulalum. Plus à l'ouest,
M. Villiaume signale encore des grès micacés gris ou rouges et des
schistes gris noirâtres très redressés.
La coupe relevée par M. Villiaume indique à plusieurs reprises
des réapparitions brusques de couches et des dislocations locales qui
rendent vraisemblable l'existence d'un système de failles parallèles
à la bordure du massif ancien. Une de ces failles d'une importance
plus grande pourrait expliquer la réapparition des grès triasiques
à Beronono.
C'est peut-être un accident de même ordre qui fait apparaître
plus au nord les terrains cristallins, les grès et schistes triasiques
et les calcaires du Lias signalés par M. Boule (1).
Les diverses formations que nous venons de signaler paraissent
se retrouver plus au nord dans des conditions de gisement ana-
logues : on a signalé à Suberbieville, auprès du massif ancien, des
gypses (Trias?) et un peu plus à l'ouest on exploite de la pierre
à chaux; M. Dorr a recueilli dans la même région (Marololo)
des Ammonites pyriteuses reproduisant des formes bien connues
de l'Oxfordien du Jura: nous signalerons en particulier de petits
Perisphinctes à tours étroits et nombreux (très fréquents à Palente),
des Oppelia du groupe de 0. punctata, et une autre forme du même
genre reproduisant l'ornementation de VA mm. hecticus îiodosusde
Quenstedt. Un peu plus loin (Ambalia), les couches jurassiques
explorées par M. le capitaine de Bouvié sont adossées à l'O. à une
chaîne de collines (Bongo Lava du Nord) formées d'argile rouge et
de sable. Enfin, les gisements explorés par M. Baron dans le N. de
(1) H. S. G. F., Séance du 5 juin 1899.
lio * «lion dry
50
KcliRilv
20
Mohnlio
JS
Canal de JOaamtiijnr
1
388 h. douvillé 19 Juin
l'Ile, avec Trigonia costata et Sphœra mcujlagascariensis sont égale-
ment compris entre le massif ancien et les grès charbonneux de
Nossy-Bé.
On voit en outre que la longue bande jurassique, qui suit le pied
du massif ancien, présente des étages variés et dont la série se com-
plète de plus en plus; leurs faunes présentent des analogies
marquées avec les faunes européennes.
Signalons enfin que M. le lieutenant Boutonnet a recueilli dans
le sud de l'île, au N.-E. de Tulléar, quelques fossiles crétacés
(Pycnodontes et grande Trigonia cf. longa) dans un grès grisâtre à
ciment calcaire.
Nous reproduisons ci-contre, avec quelques légères modifications,
un schéma de la coupe relevée par M. Villiaume. Cette coupe ne
pouvait être mieux expliquée que par un extrait du rapport même
de l'explorateur ; la sagacité avec laquelle les observations ont été
faites et la netteté des descriptions nous ont paru donner à ces
extraits un intérêt tout particulier.
EXTRAIT D'UN RAPPORT DE MISSION A M. LE GÉNÉRAL GALLIENI (1)
par M. VILLIAUME
Garde d'artillerie de marine.
Le point de départ de la coupe à l'Est est Ambositra à la cote
1290, au centre d'un grand cirque cambrien, entouré par des som-
mets granitiques. Après avoir franchi vers l'Ouest des hauteurs à la
cote 1610, on rencontre une série de filons et d'amas quartzifères,
désagrégés en partie et s'appuyant sur des micaschistes et sur le
granité. En un certain point émerge une masse de conglomérats à
éléments roulés de feldspath, noyés dans une pâte blanche feldspa-
thique elle-même. Cette roche a une épaisseur de 2000 mètres et se
poursuit dans le S.-O. et le N.-E. avec une persistance d'allure et
de composition exceptionnelles.
Un peu avant d'atteindre lu passage à gué de la Vato, un premier
bassin silurien se manifeste nettement par la présence de phyllades
cristallins, de calcaires marmoréens et de sédiments arénacés. Les
(1) Nous avons reproduit autant que possible les termes mêmes du rapport en
nous bornant strictement aux passages qui ont un intérêt purement scientifique ;
les seules modifications que nous avons apportées sont celles qui résultent de
l'examen que nous avons pu faire des fossiles et des roches recueillis par
M. Villiaume.
1899 SUR UNE COUPE TRANSVERSALE DE MADAGASCAR 389
couches sont violemment relevées et contournées. Quelques filons
porphyriques s'intercalent dans le sens des strates.
Bassin de la Haute-Mania (un peu au N. de la route précédente). —
Il est caractérisé par un énorme amas de calcaires marmoréens qui
présente une épaisseur de plus de 4000 mètres. On distingue à la
base un gneiss rubanné à mica noir, puis de puissantes couches
très redressées de phyllades cristallins, trop chargés de principes
siliceux pour prendre la véritable allure feuilletée des ardoises. A
cette première assise de plus de 70 mètres d'épaisseur; succède une
couche de calcaires magnésiens d'environ 130 mètres de puissance,
sans solution de continuité ; vient ensuite une deuxième couche de
phyllade de même nature que la précédente, mais d'une épaisseur
un peu moindre ; le calcaire marmoréen lui succède de nouveau
avec des épaisseurs variables, puis vient la série des roches aréna-
cées Au contact des calcaires, les sédiments siliceux forment des
roches mixtes d'un blanc bleuâtre très résistantes. Les assises
arénacées proprement dites se composent de psammites en bancs
puissants; sur la rive gauche de la Mania, elles forment des hau-
teurs élevées, dont les couches verticalement redressées ajoutent au
pittoresque de la région.
Aux bancs arénacés succèdent encore de nouveaux calcaires
dolomitiques d'une étendue considérable ; ils constituent sur plus
de 2000 mètres tout le fond de la vallée de la Vato et se relèvent sur
la rive gauche vers l'altitude 1330 ; ils sont séparés d'un nouveau
massif calcaire par une forte assise de grès quartzeux. Certains
bancs calcaires sont chargés de paillettes d'amphibole. Les roches
d'exception consistent en filons quartzifères et porphyriques, en
serpentines, et en conglomérats à éléments anguleux, calcaires ou
schisteux. Toutes ces roches sont du reste fréquemment altérées,
les phyllades passent à des schistes satinés friables et les calcaires
deviennent quelquefois sableux.
Toutes ces couches sont du reste fracturées et morcelées par les
éruptions du granité fondamental.
D'Ambatofangehana à Itremo. — Près d'Ambatofangehana, vers la
cote 1300, on rencontre des schistes satinés chargés de mica, et
veinés de vermiculures en forme d'S ; ce sont les seuls indices
fossilifères observés dans la région (l). Au-delà on retrouve des
schistes, des grès quartzeux et des calcaires dolomitiques, forte-
(1) Il serait intéressant de comparer ces corps énigmatiques avec les vermicu-
lures qui ont été signalées dans les schistes de Kimberlcy.
390 h. douvillé 19 Juin
ment redressés ; puis reparaissent de nouveau les schistes, et le
granité qui affleure jusqu'à Itremo.
D'Itremo à Janjina. — Quelques strates schisteuses sto manifes-
tent encore à l'ouest d'Itremo, ce sont des schistes grossiers, chargés
de micas et passant sur certains points au micaschiste, puis des
grès schistoïdes, le tout à peine incliné de 12° sur l'horizon. Cette
zone étroite est marquée aussi par des conglomérats à éléments
anguleux calcaires agglutinés par un ciment ferrugineux.
Sur la rive gauche de la Masohandro ces couches sont surmontées
par des bancs puissants de grès quartzeux métamorphiques à
éléments fins ou grossiers, et redressés verticalement ; ils s'élèvent
jusqu'à la cote 1585.
Au flanc de l'une des hauteurs constituant ce massif, on recon-
naît les derniers calcaires magnésiens. Les grès sont teintés en gris
et en bleuâtre à la base; vers la partie moyenne on rencontre quel-
ques filons ferrugineux et siliceux, puis des grès rouges au sommet.
Le granité apparaît un peu avant Midongy et s'étend jusqu'au
sommet du Bongo Lava (1220m) un peu à l'Est de Janjina.
Janjina et région sakalave. — Contre l'énorme contrefort qui
marque la fin du règne des granités, des lambeaux d'argile rouge,
blanche et bleutée, mêlée à des conglomérats siliceux, et à des
porphyres quartzifères (?), reposent sur un lit de grès rouge ; ce
grès rouge, tantôt grossier, tantôt à grains fins, est veiné de bleu
et de violet, mais la teinte rouge ferrugineuse domine.
Janjina repose sur ces épaisses assises à la cote 1095 ; du haut de
ce dernier sommet, aux fraîches altitudes, l'œil embrasse à 950
mètres plus bas, dans l'ouest, toute la contrée sakalave ; c'est dans
le lointain, uue mer immense de verdure qui se confond, à la
chute du jour, dans le bleu des brumes. Plus près à 80 kilomètres,
se dessine une crête ondulée qui court sans interruption du nord
au sud : c'est la chaîne intermédiaire.
On descend en trois heures de Janjina à Tambazo (ait. 175m) ; en
suivant les pentes du Bon go Lava, on remarque de nombreux affleu-
rements des couches sédimentaires restées suspendues au flanc du
massif ancien. La base de ces roches est formée d'un grès rouge très
ferrugineux en couche épaisse et continue. Il est surmonté par une
série d'argiles schisteuses aux teintes variées : l'ensemble de ces
assises est fréquemment percé par des quartzites et des poudingues
à éléments de cailloux roulés.
Près de Tambazo, une forte assise de schiste gris argileux, d'une
grande épaisseur, renferme de nombreux vestiges de plantes fos-
1899 SUR UNE COUPE TRANSVERSALE DE MADAGASCAR 391
siles (1) ; ces schistes sont traversés par des failles minces, verti-
cales, remplies de calcaire spathique.
A six kilomètres de Tambazo, les premiers poudingues se révèlent
en masses puissantes ; ils sont composés de cailloux quartzeux
ovoïdes, variant de la grosseur d'un œuf de poule à celle d'un œuf
de petit oiseau, agglutinés par un ciment ferrugineux chargé de
grains de quartz anguleux ; ils relèvent les couches schisteuses de
Tambazo, mais sans grandes dislocations, l'inclinaison des couches
restant toujours très faible.
Un peu avant d'atteindre le poste de Malaimbandy, à la cote 135,
un affleurement de calcaire gris émerge du sol ; ce calcaire renferme
des Alvéolines (2), de la grosseur d'un grain de blé.
De Malaimbandy au ruisseau d'Ankazomena sur vingt kilomètres,
le sol n'est formé que d'une masse de poudingues semblables aux
précédents; cependant entre les cotes 130 et 13S de nombreuses
éruptions de porphyre (?) feldspathique pointent à travers la couche
inférieure des grès rouges.
Du fond du ravin où coule le ruisseau, les grès rouges sillonnés
horizontalement de couches minces de graviers de toute grosseur,
sont relevés à la cote 220.
A quelques cents mètres du ruisseau Ankazomena, on voit
affleurer des calcaires en grandes masses : tous sont métamorphi-
ques et criblés de restes de fossiles convertis en chaux spathique;
cet étage affleure sur vingt-six kilomètres de largeur.
Les premières couches observées sont surmontées à 3kil. 4, plus
loin par celles d'Andafia (3). Celles-ci sont vivement relevées, mais
(1) Les échantillons recueillis en ce point sont des psammites tendres, fissiles,
avec traces de fossiles et de matières charbonneuses.
(2) Elles avaient été prises pour des Fusullnes.
(3) Los calcaires de la hase sont fortement imprégnés de calclte cristallisée et
souvent vacuolaires ; les fossiles ont disparu et ne sont représentés que par
leurs empreintes, parmi lesquelles nous avons reconnu Trigonia cf. coftata
(même forme qu'en Abyssinie, voisine de celle du Rajocien des environs de Metz
et différente du type de Bayeux). De nombreuses petites vacuoles arrondies rappel-
lent comme forme et grosseur les Alvéolines trouvées dans le voisinage. Enfin la
roche contient des fragments de charbon plus ou moins altérés. Avec ces échan-
tillons de calcaire, M. Villiaume a recueUli des grès à grains de quartz et ciment
spathique, renfermant de nombreuses Alvéolines qui ont été déterminées par
M. Schl u m berger ; ce genre déjà signalé par M. Glangeaud dans le Jurassique
supérieur, descendrait ainsi jusque dans le Bajocien.
Les calcaires du sommet sont gris, caverneux, un peu moins cristallins ; ils
renferment des empreintes de Bivalves et surtout de nombreuses Nérinées qui
paraissent devoir être rapprochées de N. bathnnica Rig. et Sauv. (in Cossmann,
Mém. S. G. Fr.% t. XII); c'est peut-être cette même forme qui a été citée par
M. Newton, sous le nom de N. Eudesi.
392 h. do u ville 19 Juin
sans perdre leur allure en pente douce. Les bancs supérieurs sont
séparés de ceux de la base par des assises de grès blanc à grain
fin, fossilifère. Les bancs supérieurs (à Nerinea bathonica) ont une
texture cristalline de teinte grise ; la cassure est esquilleuse, les
fossiles nombreux. Les assises inférieures sont plus grenues; il en
est une cependant sans fossiles, à texture compacte, à cassure con-
choide, de teinte claire, ayant toutes les apparences du calcaire
lithographique. Enfin la plupart des bancs contiennent de nombreux
débris charbonneux.
L'éminence calcaire d'Andafia domine toute la région qui s'étend
à perte de vue au nord et au sud.
D'Andafia à Ampandrarano, les assises calcaires continuent sous
l'aspect d'ondulations en pente douce. Ce sont des roches grenues à
fossiles indiscernables, sous forme de tâches rouges, disséminés
dans la pâte (1) ; le sol est jonché d'une infinité de nodules détachés
des parties moins résistantes, puis viennent des calcaires à cassure
conchoîde, très durs, sonores, grenus ; enfin dans le Ht d'un petit
torrent, une autre assise d'un calcaire à texture oolithique et à pâte
rougeâtre chargé de fossiles (2).
Au-delà d'Antsoaravina, â 1500 mètres, surgit un fort pointement
de poudingues à petits éléments et à pâte ferrugineuse rouge som-
bre; à 3 kilomètres plus loin le sol est parsemé de fossiles trans-
portés et noyés dans l'argile (3).
A la cote 180, les calcaires cessent brusquement, et les conglomé-
rats et les poudingues reprennent avec puissance jusqu'à Beronono,
puis cessent tout à coup.
Sur la rive droite de la Mitsataka, se dresse en face de l'observa-
teur une puissante éminence de grès rouge sombre, sa base est à
l'altitude de 105 mètres et son sommet à 395 mètres (plus au nord
on distingue d'autres sommets à 410 et 500 mètres). Ce dépôt
arénacé, arraché à la grande assise qui prend naissance à Janjina
a donc été porté par un violent soulèvement à 290 mètres au-dessus
(1) Os calcaires sont jaunâtres, a grosses oolithes irrépulières plus ou moins
fondues dans la pâte; par place ils présentent des lumachellcs, de petites huîtres
indéterminables et souvent des individus, empAtés dans la roche, de Montlivaultia
(en forme de bouton). Une plaque est pétrie de radioles aplatis à'Acrosalenia au
milieu desquelles on distingue les échinides eux-mêmes assez imparfaitement
conservés.
(2) Phylloceras Puschi, Ph. cf. Zignoi, Lytoceras Âdelœ, Sphœra madagasca-
riemiSy A star le excavala, polypiers, c'est la faune signalée pour la première
fois par Fischer.
(3) Les mêmes que ci-dessus.
1899 SUR UNE COUPK TRANSVERSALE DE MADAGASCAR 393
de son niveau. Un banc de calcaire métamorphique l'accompagne à
la base, les empreintes de coquilles sont très nettes, mais conver-
ties en cristaux de carbonate de chaux spathique (1).
La masse de la formation gréseuse se subdivise en de nombreux
dépôts étages de grès fin, d'argile jaunâtre et violacée fossilifère;
l'ensemble des couches soulevées est traversé par des veines de fer
siliceux et par des coulées de grès à grains anguleux, à ciment
ferrugineux rouge violacé sombre, rappelant par leurs formes
pseudo- régulières les rebuts des grandes fonderies, et par leur
structure quartzeuse et brillante la cassure grenue des fontes à gros
grains. Certaines coulées en masse affectent des formes si étranges
et si puissantes que, s'il était permis de rappeler ici les souvenirs
mythologiques, on se croirait sur les restes d'un chantier de Titans.
L'étendue de ce soulèvement vers l'ouest ne mesure pas moins
de 12 kilomètres, mais comme à Andafia et malgré l'aspect dislo-
qué de ces crêtes, l'ensemble des assises garde une inclinaison
douce vers la mer.
Au-delà de Beronono, sur les bords de la Morondava, une échan-
crure accentuée par le passage d'un torrent, permet l'observation
des couches sous-jacentes : immédiatement aux grès meuliers fins
succèdent des bancs d'argile schisteuse noire micacée, dont les
débris parsèment les rives et le lit du fleuve. Les couches le tra-
versent presque normalement avec une direction N. 37° E., et une
inclinaison de 72° vers l'ouest. Ici le grès semble avoir glissé sur la
masse stratifiée et redressée de la base, donnant ainsi l'exemple
d'une discordance de stratification due à des mouvements de trans-
port et de glissements combinés. Les grès sont parsemés de rares
cailloux roulés ; les couches arénacées forment une masse compacte
d'une exceptionnelle puissance entièrement métamorphique. Ils
(1) Sur la carte ces calcaires sont indiqués comme renfermant des débris de
végétaux carbonisés ; ils renferment des empreintes très nettes de Trigonia cos-
tata. Ces calcaires présentent lithologiquement et paléontologiquemcht les mêmes
caractères que ceux qui apparaissent à i'E. à la base de la formation jurassique.
Dans le voisinage, M. Villiaume a recueilli une sorte d'argilite d'un rouge violacé
avec empreintes de Pecten, d'Arca et de grandes Aslarle; on dirait des argiles ou
des marnes rubéfiées par des rocbes éruptives.
D'après les observations de M. Villiaume les grès de Horonono seraient les
mémos que ceux de Janjina, ils seraient donc triasiques ; les nombreux écban-
tillons que j'ai pu examiner me font penser que (vtte assimilation est exacte ;
la présence des calcaires bajociens au pied des monticules de grès à Beronono
s'expliquerait alors par le jeu des failles qui ont donné naissance au relèvement
des grès. Ces grès paraissent du reste bien différents des grés fossilifères qui
représentent dans cette région le Crétacé inférieur.
394 D0UVILLÉ. — COUPE TRANSVERSALE DE MADAGASCAR 19 Juin
sont surmontés par deux couches d'argile tenace, Tune blanche,
l'autre très verte lorsqu'elle est humectée, sans traces de fossiles.
Puis les grès reprennent en amas puissants, avec accompagnement
de nombreuses émanations porphyriques (?) à pâte blanche, felds-
pathique à zébrures rouges et de grès métamorphiques gris et
vitreux, sans grains bien nettement discernables.
Le village de Besakondry, situé à l'un des coudes et sur les bords
du fleuve Morondava, marque la reprise des assises du calcaire
marin, à cassure conchoïde, très chargé de fossiles (1).
Un peu au-delà, la formation se subdivise en bassins par des
exhaussements postérieurs au dépôt des couches. La zone calcaire,
dans son ensemble, conserve cependant encore une direction paral-
lèle au grand axe de l'île ; mais au fur et à mesure que Ton avance,
on constate de plus en plus ses tendances à se fractionner en
bassins indépendants.
Les calcaires marins de Besakondry forment un nouveau dépôt
considérable d'une seule masse ; leur largeur est de 3 kil. 5. Ce n'est
qu'au sommet qu'interviennent les vrais grès gris, très durs, schis-
toïdes, à texture finement grenue, parsemés de mica blanc ou jaune
peu abondants ; ils alternent avec des grès rouges à grains plus ou
moins fins et aussi avec des schistes gris noirâtres et quelques
faibles bancs calcaires, le tout très redressé.
A sept kilomètres avant d'atteindre Kelifaly, tout disparatt sous
une épaisse couche de sable terreux rougeâtre horizontal qui s'étend
jusqu'au rivage sur 55 kilomètres environ. Cependant entre Mahabo
et Morondava, dans le sud et dans le nord, on aperçoit une ligne
de soulèvement formée par des roches siliceuses.
La crête gréseuse de Beronono, ou chaîne du Bemara, se prolonge
avec des solutions de continuité vers le nord et vers le sud, depuis
bien au-dessus de la province de Betsileo jusqu'à hauteur du cap
Saint André; puis de là elle s'infléchit vers l'est jusqu'à la baie du
Courrier en frôlant le rivage à partir de la baie de Passandava ; les
dépôts gréseux avec couches de combustible affleurent au fond des
baies qui dentellent le nord de l'île. 11 est probable que ces dépôts
se continuent en faisant un coude brusque au sud des terrains
secondaires qui constituent la pointe nord de l'île (Diego Suarez et
Montagne d'Ambre).
(1) Nombreux Fora mi ni f ères, moulos de Hlvalves, Ostrea, Oursin irrê^ulier
rappelant les Echin'tnlhvs. Ce calcaire ressemble à certains calcaires tertiaires
de la région ; d'après les Foraminiféres (Tdalina, Ârchiacina) M. Schlumberger
serait porté à les attribuer plutôt au Crétacé supérieur.
1899 séance du 19 juin 1899 395
M. G. Dollfus expose que la faune malacologique vivante de
Madagascar parait démontrer que cette lie a été depuis longtemps
isolée et sans communication continentale. Cette faune n'est ni
africaine, ni asiatique, ni pacifique, ni australienne, mais toute
spéciale. Parmi les Hélicéens, un premier groupe renferme des
Hélix comme H. Grandidieri, H. magnifica, H. Souverbii à robe
fauve, à dernier tour ample, à test peu épais et qui forment le sous-
genre des Helicophanta. Un autre groupe renferme des espèces de
coloration foncée, presque noire, avec bandes ornementales; ce sont
Hélix sepulcralis, H. funebris, H. Sganziniana qui ont été groupées
dans le sous-genre Ampelita. Il y a aussi des Bulimes allongés, de
grande taille, du sous-genre Clavator, de grands Cyclostomes peu
élevés, carénés, comme C. Cuvieranns, d'autres à spire haute et à
ornements peristomiens formant le sous-genre Acroptychia. Cette
faune se relie au point de vue générique avec des formes analogues
découvertes dans les Iles Maurice, de la Réunion, aux Comores et
aux Seychelles. mais les affinités africaines se bornent à une seule
espèce qui paratt avoir été introduite, qui est la grosse Agathina
fulica. Une autre espèce inattendue est le Conchostyla viridis d'un
genre jusqu'ici spécial aux Philippines. Mais ces éléments isolés et
discordants ne font que mieux faire ressortir le caractère spécial
qui s'attache à cette faune remarquable.
M. M. Boule pense que dans la coupe interprétée si habilement
par M. Douvillé, il y a place pour d'autres termes de la série juras-
sique et de la série crétacée.
La réapparition vers l'ouest des grès dits triasiques, c'est-à-dire
des grès de la bordure cristalline, est un fait nouveau, paraissant en
contradiction avec tout ce que nous ont appris les géographes explo-
rateurs sur l'allure des couches sédimentaires de Madagascar. Il faut
d'ailleurs ne pas oublier que beaucoup de ces couches sont formées
par des roches très détritiques : le Bathonien, l'Oxfordien, l'Infra-
f rétacé, le Cénomanien, se présentent souvent à l'état gréseux.
A propos des affinités biologiques de Madagascar avec les terres
voisines ou éloignées, M. Boule constate que les observations inté-
ressantes de M. Dollfus viennent à l'appui des conclusions énoncées
par divers savants zoologistes, notamment par M. Milne Edwards
qui a dit que « Madagascar est elle-même ». Mais ces conclusions
varient un peu suivant qu'on invoque tel ou tel ordre de renseigne-
ments. C'est ainsi que M. F. Renauld, qui vient de publier, sous les
auspices du Prince Albert de Monaco, une flore bryologique de
Madagascar, insiste beaucoup, dans cet ouvrage, sur les affinités
des moussesjroalgaches avec les mousses africaines.
396 19 Juin
SUR LE CÉNOMANIEN DE DIEGO-SUAREZ (MADAGASCAR)
par M. Emile HAIG.
En 1896, M. Coridon, aujourd'hui trésorier-payeur à Papeete
(Tahiti), voulut bien me confier, pour en faire l'étude, une série de
fossiles recueillis par lui dans les environs de Diego-Suarez (Ambo-
himarina et Montagne des Français), à la pointe septentrionale de
Tile de Madagascar. J'adresse à M. Coridon, eu même temps que
mes remerciements pour la communication de ces fossiles, toutes
mes excuses d'avoir été obligé de retarder jusqu'à ce jour, par
suite de circonstances indépendantes de ma volonté, la publication
de cette note.
Un premier lot comprend de gros Céphalopodes qui ont en partie
conservé leur test et sont englobés dans des nodules calcaires à
surface souvent recouverte de moulages d'empreintes cylindriques
ramifiées. J'ai pu y reconnaître les espèces suivantes :
Lytoceras Timotheannm Mayor, échantillon identique au plus gros
de ceux qu'a figurés Stoliczka ; Anisoceras armatum Sow. et Aniso-
ceras Oldhamiannm Stol., en gros fragments: Schlœnhachia inflata
Sow. ; Desmoceras (Puzosia) planulatum Sow., identique à l'une des
variétés figurées par M. Kossmat, et une espèce voisine à tours
plus embrassants, représentée par un magnifique échantillon.
Il ne peut y avoir aucun doute que cette petite série ne pro-
vienne de couches représentant la zone à Schlœnbachia inflata,
c'est-à-dire le Cénomanien inférieur. Les analogies avec la partie
inférieure des couches d'Ootatoor, dans l'Inde, sont particulièrement
frappantes et s'étendent même aux caractères lithologiques.
Un second lot est constitué par quelques blocs d'une marne gré-
seuse, légèrement micacée, grise à l'intérieur, jaune à la surface.
J'ai pu en extraire un certain nombre de fossiles, qui tous sont
plus ou moins écrasés et recouverts d'un enduit ferrugineux, à
l'exception des Bélemnites et des Serpules, dont la conservation
est parfaite. J'ai déterminé les formes suivantes :
Bélemnites ultimus d'Orb., que je ne puis distinguer de Bélem-
nites (?) fibula Forbes, du groupe d'Ootatoor; Desmoceras (Puzosia)
aff. Bhima Stol.; Hoplites sp. ; Acanthoceras Mantelli Sow. (non
d'Orb.), plusieurs échantillons: Scaphites sp. indét. ; Turrilites tuber-
cnlatus d'Orb. ; Nanti lus sp. indét.; Atari a sp., appartenante un
groupe dont Stoliczka a figuré plusieurs espèces, et d'autres Gas-
1899 SUR LE CÉNOMANIEN DE DIEGO-SUARKZ 397
tropodes indéterminables; enfin, Serpula ootatoorensis Stol., iden-
tique à la forme de l'Inde. La présence d'Acanthocera* Mantelli et
de Turrilites tuberculatus permet d'affirmer que Ton se trouvé en
présence de couches représentant le Cénomanien moyen. Les analo-
gies, même lithologiques, avec la partie moyenne du groupe d'Oota-
toor, sont tout à fait remarquables. Ce sont donc les deux niveaux
inférieurs du Cénomanien que M. Coridon a eu le mérite de décou-
vrir et de séparer dans ses récoltes ; le Cénomanien supérieur (zone
à Acanthoceras rotomagense) n'est pas connu à l'heure actuelle dans
les environs de Diego-Suarez, mais M. Boule en a signalé la pré-
sence, dès 1895, à Isakondry, dans le sud de Madagascar.
J'ajouterai quelques mots sur un petit lot de fossiles sénoniens
de Diego-Suarez, qui m'a été également remis par M. Coridon et
paraît provenir du même gisement qu'une série dont M. de
Grossouvre nous a parlé dans la dernière séance. Il renferme plu-
sieurs exemplaires de Nautilus Bouchardianus d'Orb., cité par notre
confrère de Bourges ; un fragment de Baculites à face ventrale
amincie, qui vient confirmer l'âge sénonien; une Alaria, voisine
des formes d'Arialoor et une Vola, qui est dans le même cas. Ces
fossiles sénoniens sont incontestablement remaniés, car ce sont
des moules ferrugineux, rongés et englobés dans une gangue de
grès plus clairs.
Les analogies entre le Crétacé supérieur de l'Inde méridionale
et celui de Madagascar, sur lesquelles M. Boule avait déjà insisté
dans une note antérieure (1), se trouvent amplement confirmées par
mes déterminations; elles s'expliquent parfaitement si Ton admet
que la mer cénomanienne s'est étendue en transgressivité sur une
masse continentale comprenant les deux pays et les reliant l'un à
l'autre, suivant l'hypothèse de Neumayr. Je ne crois pas que la
découverte récente de dépôts (2) sénoniens sur la côte orientale de la
grande île, qui complète d'ailleurs les analogies avec l'iudoustan,
puisse être invoquée contre cette hypothèse, car les limites d'une
masse continentale sont tout-à-fait indépendantes des limites
de la mer, qui, lors des transgressions, peut recouvrir en grande
partie cette masse continentale, sans qu'elle cesse d'exister comme
unité géographique (3).
(1) Note sur les fossiles rapportés de Madagascar par M. E. Gautier. Bull, du
Mus. dhist. nat., 1895, n" 5.
(1) M. Boule. Note sur de nouveaux fossiles secondaires de Madagascar. Ibid.t
1899, n" 3, p. 133.
(3) Il sullira de rappeler l'extension du Callovien du type boréal dans les
régions polaires, où il repose en général en transgressivité sur des terrains
anciens. La présence de ce Callovien à la Terre François-Joseph, au Spitzberg,
398 SÉANCE DU 19 JUIN 1899
M. M. Boule : Lorsque j'ai fait connaître les fossiles crétacés de
Fanivelona, au milieu de la côte orientale de Madagascar, j'ai dit
que cette observation venait à rencontre des idées d'Oldham, de
Neumayr, de Suess, de Kossmat, parce que, pour établir l'existence
d'un ancien continent indo-malgache, ces savants s'étaient appuyés
principalement sur l'absence de tous dépôts secondaires sur la côte
est de l'île.
Je rappellerai d'autre part que les considérations d'ordre paléon-
tologique émises par les savants précités étaient basées sur des
faits négatifs et que les découvertes récentes effectuées à Mada-
gascar sont venues plutôt les infirmer.
De sorte que, si l'on continue à admettre l'existence d'une énorme
masse continentale, on est obligé de la placer à Test de Madagascar,
c'est-à-dire sur l'emplacement des abîmes de l'Océan Indien ; on émet
ainsi une hypothèse qui pourra peut-être se soutenir un jour par
de nouveaux arguments, mais qui, dans l'état actuel de nos connais-
sances, n'est qu'une pure vue de l'esprit.
M. D.-P. (Ehlert fait une communication Sur le Silurien des
environs de Chemiré-en-Charnie (Sarthe).
L'auteur apporte de notables modifications aux interprétations
données par de Verneuil, Triger, Barrande, Guillier, de Tromelin,
Hébert. Il montre que c'est par suite de l'existence d'une série de
cassures dirigées N.-S. que dans la crête de la Charnie, considérée
jusqu'ici comme homogène et ininterrompue, il y a lieu de distin-
guer deux massifs : l'un à l'ouest (Grande-Charnie), dans lequel se
trouvent toutes les assises du Cambrien, auxquelles sont super-
posées celles de l'Ordovicien et du Gothlandien ; l'autre à l'est
(Petite-Charnie), dans lequel le Cambrien manque, le grès armo-
ricain reposant par transgression sur les schistes du Précambrien.
Le faisceau de failles qui sépare ces deux massifs permet égale-
ment d'expliquer la présence de schistes ampéliteux à Graptolites
colonus, qui avaient été considérés comme surmontant normalement
le grès armoricain et dont la place stratigraphique avait été invo-
quée comme une preuve de l'existence de colonies du Silurien
supérieur, apparaissant dès la base de l'Ordovicien.
dans l'Ile d'Andô (Norvège), au Grônland, dans les Black-Hills du Dakota ne vient
nullement infirmer l'existence du continent nord-atlantique, elle vient au contraire
la confirmer. La transgressivité du Silurien supérieur dans l'Amérique boréale
conduit au même résultat. On peut appliquer le même raisonnement au continent
indo-malgache, dont l'existence a d'ailleurs été admise par un grand nombre
de zoogéographes.
1899 399
MICR0GRAN1TES DE LA VALLÉE DE LA GUISANNE
(BORD NORD DU MASSIF DU PELVOUX)
par M. P. TERMIER.
Sommaire : I. Microgranite de Gombeynot et du Tabuc-Nord.
II. Microgranite des Gardéolles.
Le long de la vallée de la Guisanne, du col du Lautaret, où cette
rivière prend sa source, jusqu'à Briançon, où elle se jette dans la
Durance, on rencontre d'importants affleurements de microgranite
(microgranulite de MM. Fouqué et Michel-Lévy, granitporphyr de
M. Rosenbusch). J'ai signalé en 1892 (1) ceux du massif de Gom-
beynot, immédiatement voisins du col du Lautaret. MM. Lâchât
et KÙ8S, dans des rapports restés inédits, ont fait connaître, long-
temps auparavant, sous le nom de porphyre euritique, les roches
de même nature qui apparaissent dans le Houiller des Gardéolles,
près du Villard de Saint-Chaffrey.
Tout dernièrement enfin, M. Primat, ingénieur des mines à
Grenoble, a appelé l'attention de M. Kilian sur d'autres intercala-
tions de roches éruptives blanches dans les assises houillères, au
Serre-Barbin, près de La Salle. Nous avons visité, M. Kilian et moi,
ce dernier gisement, et, là encore, il s'agit bien de microgranites.
A l'heure actuelle, je connais quatre groupes d'affleurements de
ces roches microgranitiques : ceux du massif de Gombeynot ; ceux
de la vallée du Tabuc-Nord ; ceux des Gardéolles; enfin ceux du
Serre-Barbin. Les deux premiers groupes appartiennent au massif
cristallin du Pelvoux et ne sont en relation qu'avec des granités,
des a pli tes et des schistes métamorphiques anciens. Les deux der-
niers sont compris dans les terrains houillers du Briançonnais.
La liaison des microgranites de Gombeynot et du Tabuc-Nord
avec le granité du Pelvoux n'est pas douteuse. Ces microgranites
sont des formes de bordure (grenzfacies) de la roche granitique
fondamentale. C'est ce que je me propose tout d'abord d'établir.
Quant aux microgranites qui affleurent dans le Houiller, ce sont
des roches intrusives. Leur âge est donc bien différent de celui des
premiers. Leur composition est également différente. Les analogies
de ces roches soot avec les microdiorites du Briançonnais (formes
hypo-abyssiques d'un magma quartzo dioritique), plutôt qu'avec
le granité du Pelvoux. Tel sera mon deuxième point.
(1) c. R. âc. Se, t. cxv, p. 971.
4(K) P. TERMIER 19 Juill
I. — Microgranite de Combeynot et du Tabuc-Nord.
A . Combeynot. — Le bord septentrional du massif granitique de
Combeynot est constitué par des scbistes azoïques très métamor-
phiques, souvent gneissifiés, riches en magnésie et en oxyde de fer.
Les minéraux habituels de ces schistes sont le quartz, les micas, la
chlorite, la magnétite et l'oligiste, et enfin des feldspaths alcalins.
Sur i'arôte escarpée qui descend, vers les sources de la Guisanne,
du pic central de Combeynot, à l'altitude d'environ 2400m, j'ai
observé, parmi les schistes métamorphiques en question, un banc
de conglomérat à galets (de la grosseur d'une noix) de granité et
de gneiss. Il s'agit donc, indubitablement, d'une formation sédi-
mentaire. L'âge de cette formation est inconnu : nous savons
seulement qu'elle est antérieure au Houiller. C'est elle qui joue le
principal rôle dans la constitution des massifs cristallins du Pel-
voux et des Grandes Rousses. Sur la carte géologique détaillée
(feuilles de Saint Jean-de-Maurienne et de Briançon), je lui ai
attribué le symbole X> sans attacher à ce symbole aucune signifi-
cation chronologique.
Il est très rare de voir, dans le massif de Combeynot, le véritable
granile, je veux dire le granité à gros grain du type Pelvoux, con
finer directement aux schistes et aux gneiss X. Il en est presque
toujours séparé par une épaisseur plus ou moins grande d'aplite à
grain très fin ou de microgranite. Généralement, ces deux formes
de bordure apparaissent successivement. C'est ainsi que le pic est
de Combeynot (3153m) est fait d'aplite rose passant graduellement,
sur son versant sud au granité, sur son versant nord au micro-
granite. 11 y a aussi, dans les schistes et gneiss A', des apophyses
innombrables, les unes aplitiques, les autres, et les plus nombreuses,
microgranitiques. Ces apophyses ont des afileurements de forme
compliquée et de direction capricieuse. Parfois, elles s'intercalent
entre les strates métamorphiques. Beaucoup d'entre elles présen-
tent, quand on les suit, des variations de structure et passent alter-
nativement de l'aplite au microgranite. Tous ces phénomènes
s'observent assez aisément, malgré le caractère abrupt du terrain,
dans les rochers qui dominent, au sud, le col du Lautaret, de la
Pyramide de Laurichard au ravin de la Liche.
Au contact immédiat de l'aplite ou du microgranite, les mica-
schistes A sont, le plus souvent, criblés de petits noyaux feldspathi-
ques. J'appelle ainsi des cristaux de feldspath au contour vaguement
1899 MICROGRANITES DE LA VALLEE DE LA GU1SANNE 401
arrondi, qui se sont développés, en les déformant, dans les lits
quartzo-micacés du schiste. Ces feldspaths sont identiques à ceux
de la roche granitique, c'est-à-dire qu'ils sont d'albite et de crypto-
perthite. Ils ont, pour la plupart, quatre ou cinq millimètres, plus
rarement un centimètre de diamètre. Je n'ai pas observé, à Com-
beynot, les cornéennes (hornfels) qui sont, au contraire, comme je
le dirai bientôt, très abondantes daus la vallée du Tabuc-Nord.
Le développement des noyaux feldspathiques prouve que l'aplite
et le microgranite ont modifié, à leur contact, les schistes encais-
sants. Mais, là où les schistes sont remplacés par des gneiss, il n'y
a pas, au contact des apophyses, de modification sensible dans la
structure ou la composition de ces gneiss. J'ai déjà signalé (1), en
décrivant le granité du Pelvoux, cette impassibilité des gneiss en
présence du granité ou de ses apophyses. Il semble qu'antérieure-
ment à la dernière montée, à la mise en place définitive du granité
du Pelvoux, les terrains A' aient déjà subi un métamorphisme régional
intense. Quelle était la cause de ce métamorphisme? Etait-elle
totalement indépendante du magma granitique dont la dernière
ascension se préparait? Ces questions me paraissent actuellement
insolubles. Quoi qu'il en soit, sous l'influence de ce métamorphisme
régional, les terrains A' s'étaient déjà transformés, pour la plus
forte part, en micaschistes et gneiss. Les rares portions échappées
à cette première cause de métamorphisme étaient seules capables,
désormais, de se modifier d'une façon radicale au contact du
granité, (l'est ainsi, sans nul doute, qu'ont pris naissance les cor-
néennes de la vallée du Tabuc-Nord. Les assises devenues mica-
schistes pouvaient encore se charger de noyaux feldspathiques. Mais
celles qui avaient pris la nature de gneiss étaient désormais réfrac-
taires à toute nouvelle transformation, comme si elles eussent été
définitivement saturées d'alcalis et de silice.
Les microgranites de Combeynot sont des roches très blanches,
qui montrent, dans une pâte (grundmasse) holocristalline et crypto-
cristalline, d'un blanc de porcelaine, des cristaux hyalins de quartz,
d'autres, moins nombreux, de feldspath, et d'autres enfin, assez
rares, d'un mica noir eu voie dechloritisation. Ces cristaux de pre-
mière consolidation ont rarement plus de trois ou quatre millimètres
de plus grande dimension.
Suus le microscope, les quartz se présentent bipyramidés, avec
des contours arrondis et corrodés. Les cristaux feldspathiques
(I) C. R. Ac. Se, séance du 8 février 1897.
31 Octobre 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Ciéol. Fr. — 20
402 p. termier 19 Juin
appartiennent, les uns à de l'albite presque pure, les autres à de
la cryptoperthite. Les cristaux de mica noir sont, pour la plupart,
entièrement chloritisés, et renferment un squelette d'ilménite.
L'albite, la cryptoperthite, le mica, sont identiques aux minéraux
de même nature que j'ai décrits dans le granité du Pelvoux.
La pâte, holocristalline, est d'une finesse extrême. Elle est for-
mée, au moins pour les deux tiers de la masse, de petits cristaux de
cryptoperthite, sans contours bien nets, sensiblement isométriques,
auxquels s'adjoignent, çà et là, des cristaux d'albite de même appa-
rence générale. Ces individus feldspathiques, s'appuyant les uns
aux autres, constituent une sorte de canevas dont les mailles sont
remplies par du quartz informe. On observe de distance en distance,
dans la pâte, de petites lamelles de mica blanc, généralement grou-
pées en paquets ; mais ce minéral parait être de formation secon-
daire. La micropegmatite est assez rare.
Comme je l'ai dit plus haut, il existe un passage graduel du
microgranite typique à i'aplite franche. On voit alors les cristaux de
première consolidation diminuer, de grosseur comme de nombre;
et en même temps grossit le grain de la pâte. La roche prend, à
l'œil nu, l'aspect du sucre cristallisé. Au microscope, le hiatus
entre les deux stades de consolidation devient de moins en moins
marqué. Les grands cristaux se fondent, pour ainsi dire, dans
la mosaïque qui les entoure : leurs contours sont imprécis,
nuageux, hérissés de soudaines protubérances. Puis, tout hiatus
disparaît; le grain devient homogène, tantôt assez gros pour être
discernable à l'œil nu, tantôt assez lin pour rester indéchiffrable
à la loupe; les feldspaths (cryptoperthite, albite, plus rarement
microcline) forment des prismes courts, laissant entre eux de
nombreux interstices qui ont été remplis par une mosaïque de
grains, vaguement arrondis, de quartz; d'autres grains de quartz,
également arrondis, sont inclus dans la cryptoperthite. Des régions
entières de la roche sont occupées par de la micropegmatite.
Les aplites qui passent ainsi au microgranite sont blanches.
Elles ne renferment que très peu de mica noir, et en très petits
cristaux. On y observe çà et là des prismes de tourmaline. Le
grenat y est ti es rare. Quelques-unes montrent des lamelles de
muscovite, mais, là encore, il y a lieu de se demander si ce
minéral n'est pas dû au dynamométamorphisme (1).
Les aplites blanches passent à leur tour, quand on marche vers
(1) La muscovite apparaît surtout dans les variétés devenues schistoldes par
laminage.
1899 MICROGHAMTES DE LA VALLÉE DE LA GUIS AN NE 403
le granité, à des aplites de couleur rose. Telles sont celles qui
forment l'arête entre le pic est et le pic central de Combeynot, et
qui donnent à la moraine du petit glacier de Combeynot une si
jolie nuance aurore.
Les aplites roses ont, d'une façon générale, un graiu plus gros
que les aplites blanches. Elles passent, de l'autre côté, au granité à
grands cristaux de cryptoperthite rose (proloyine du Pic central et
du vallon du Foutenil). Ce dernier passage est assez rapide. Près de
la zone intermédiaire, le granité est coupé par de nombreux filous
d'aplite francbe (crête entre Roc Noir et Combeynot central; pentes
qui descendent, au sud, vers le lac de Combeynot).
A la base et au nord de la Pyramide de Laurichard, au-dessus
des grès et des dolomies triasiques qui forment, au pied des escar-
pements, un affleurement continu, on voitapparaitre, au milieu des
gneiss et micaschistes, plusieurs apophyses de microgranite. Les
unes ne présentent aucune particularité notable ; d'autres, les plus
rapprochées de l'hospice du Lautaret (I), sont faites d'une roche
étrange, d'un noir foncé, schistoïde, tendre et friable, ayant, de
prime abord, l'aspect d'un schiste houiller, mais montrant à
l'œil nu, dans sa masse noire, de nombreux grains de quartz hyalin.
Cette roche noire passe, latéralement, au microgranite blanc, du
type ordinaire : dans certaines apophyses, la roche est zonée, mi-
partie noire, mi-partie blanche, et Ton voit alors, très nettement,
que la coloration noire n'est qu'un accident local résultant de la
concentration, dans de certaines régions du microgranite, d'un peu
de carbone ou de bitume. Cette couleur noire disparait par lacalci-
uation. Les microgranites noircis, et aussi les microgranites zones,
et les roches blanches qui passent aux uns et aux autres, sont forte-
ment laminés. Les grands cristaux sont tronçonnés, écrasés, épar-
pillés; la pâte, très altérée, est riche eu quartz et en mica blanc
secondaires.
Dans la vallée de la Romanche, du Villard-d'Arène au Bourg-
d'Oisans, je n'ai pas rencontré un seul affleurement de microgranite.
Le long du bord nord du grand massif granitique de la Meije et du
Râteau, l'aplite est la seule forme de bordure. 11 en est de même sur
le bord nord du massif granitique du Rochail (aplites de la Rivoire
et du Pont-Saiut-Guillerme). Ces aplites sont d'ailleurs identiquss
aux aplites blanches de Combeynot.
Je terminerai en mettant en regard les unes des autres, des
analyses du microgranite des sources de la Guisanne (I), de
(1) Une heure de marche environ : altitude 2400".
404
P. TERMIFR
19 Juin
l'aplite rose du pic oriental de Combeynot (II), du granité du
sommet central de Combeynot ((II), de l'aplite blanche de la
Rivoire (IV), et enfin (V) une moyenne de six nouvelles analyses de
granité du Pelvoux, analyses faites par M. le Dr Rûst, de Genève.
1
I
II
111
IV
V
Si02
A1203
Fe*03
MgO
CaO
K*0
Na20
Perte par calcination
Total ....
75,12
13,21
2.66
traces
0,33
3,03
4,46
0,47
77,77
11,64
1,56
0,15
0,50
4,20
3,80
0,61
70,84
14,53
2,46
1,17
1,45
5,12
3,04
1,71
75,30
11,01
1,12
0,60
1,01
2,97
8,82
1,18
76,20
12,73
1,85
0,52
0,85
4,66
3,35
0,78
99,80
100,23
100,32
102,01
100,94
Ce tableau montre clairement l'intime liaison du microgranite et
des aplites, et la parenté de ces roches avec le granité du Pelvoux
dont elles sont, simplement, des formes hypo-abyssiques. D'une
façon générale, les microgranites et les aplites en question sont un
peu plus riches en silice et en alcalis, et tiennent un peu moins de
magnésie et de chaux que le granité le plus voisin : mais ces diffé-
rences sont peu importantes.
Je n'ai observé nulle part de modifications endomorphes du gra-
nité, du microgranite ou de l'aplite, au contact des terrains X.
Comme je l'ai dit en 1897, le granité du Pelvoux, au contact des
terraius encaissants, peut changer de structure : il ne s'enrichit ni
en magnésie, ni en chaux, ni en fer. Ce granité a injecté, et, parfois,
métamorphosé les schistes au milieu desquels il s'est fait place; il
ne semble pas les avoir dissous.
B. Tabuc-Nord. — La rivière de Tabuc, qui réunit les eaux du
col d'Arsines et celles du glacier du Casset, coule, près de son con-
fluent avec la Guisanne, dans une gorge étroite, à peu près perpen-
diculaire à la direction des plis. Cette gorge est creusée, soit dans
le granité, soit dans le microgranite, soit enfin dans des cornéennes
(hornfels) extrêmement compactes et dures. Quand ou remonte la
rive droite, ce sont les cornéennes que l'on rencontre tout d'abord
1899 MICROGRANITES DIS LA VALLÉE DE LA GUISANNE 405
et qui constituent les premières falaises, immédiatement au-dessous
des ardoises du Flysch. Ces cornéenues ne présentent aucune trace
de stratification. Elles sont massives, homogènes, d'un gris sombre,
parfois brunâtre, souvent violacé. Ou les voit, à l'amont, passer
peu à peu à des sortes de gneiss très feldspathiques qui se fondent
graduellement dans le granité. Sur la rive gauche, en remontant la
rivière, ce sont encore des cornéennes que l'on observe tout d'abord
et qui forment le substratum du Flysch. Mais bientôt les cornéennes
font place à des microgranites blancs ou à des aplites blanches
saccharoïdes qui passent, à leur tour, au granité normal.
Le microgranite est identique à celui de Combeynot : pâte holo-
cristalline d'une extrême finesse, formée d'un agrégat de quartz et
d'orthose ; grands cristaux de quartz, de cryptoperthite et d'albite,
le plus souvent mal séparés de la pâte et montrant des contours
imprécis et nuageux. La cryptoperthite, fréquemment assemblée
suivant la loi de Carlsbad, a tous les caractères de celle du granité.
L'intérêt des falaises du Tabuc réside dans l'existence des cor-
néennes. Il est manifeste que ces roches sont des schistes argileux
métamorphosés par le granité. Voici leur composition chimique :
Cornéenne de la rive droite du Tabuc-Nord
SiO* 64,60
A1W 17,80
Fe203 6,49
MgO 2,95
CaO 2,10
K-'O 1,80
Na-0 2,98
Perte par calcinatiou 2,14
Total 100,86
Au microscope, tout caractère détritique a disparu. Ou observe
un agrégat très (in de quartz et de petites lamelles de mica noir
partiellement chloritisées. Çà et là, apparaissent quelques cristaux
de feldspath, généralement d'albite. Il y a des filonnets et des
nids de calcite. Certains échantillons sont assez riches en fer titane.
Les caractères et la composition ci-dessus sont ceux des cor-
néennes classiques des contacts granitiques. Je n'y aurais pas insisté
si ce gisement du Tabuc n'était pas le seul de toute la région cris-
talline du Pelvoux où l'on puisse observer de semblables roches, et
où le granité semble être venu au contact de véritables schistes
argileux, réfractaires jusqu'alors au métamorphisme régional.
406 p. termier 19 Juin
II. — Hicrogranite des Gardéolles
Les microgranites de la deuxième catégorie apparaissent, je l'ai
dit, au milieu du Houiller. Je ne décrirai que ceux des Gardéolles.
Le gisement du Serre-Barbin et la roche qui le constitue sont étudiés
par mon ami M. Kilian.
Aux Gardéolles, près du Villard-de-Saint-Chafïrey, le microgra-
nite affleure à l'un des tournants de la route qui monte au fort de
l'Olive. Il forme trois amas intrusifs, fort inégaux, enclavés dans
les grès houillers. Les strates gréseuses sont, ici, verticales. A moins
de cent mètres au-dessus de ce tournant de la route, ou les voit se
rapprocher de l'horizontale : mais les amas intrusifs ne se prolon-
gent point jusque-là. Du côté de la vallée, raflleurement des grès
et des amas est bientôt caché par le Glaciaire : en sorte que nous
ne sommes pas renseignés sur l'extension des amas suivant la
direction des couches. Normalement aux couches, le long de la
route, l'un des amas mesure au moins 100 mètres d'épaisseur; les
deux autres sont beaucoup moins épais.
Il n'y a aucun phénomène de contact appréciable, ni dans le
microgranite qui touche les grès (ou les schistes) houillers, ni
dans les assises houillères qui confinent au microgranite. Mais il
ne faut pas oublier que, dans la région briançonnaise, les strates
de consistance très différente ont, presque toujours, fortement
glissé les uns sur les autres, et qu'ainsi les vrais contacts ont pu
disparaître.
La roche des Gardéolles est très blanche. Elle montre à l'œil nu,
dans une pâte aphauitique, des grains de quartz, et des individus
feldspathiques altérés et informes. Beaucoup d'échantillons sont
laminés, parallèlement à la stratification du Houiller : ils ont alors
un aspect de schiste satiné, dont le clivage brillant, blanc ou ver-
dàtre, est formé de minces membranes de mica blanc et de kaolin
enchevêtrés.
Au microscope, on aperçoit quelques cristaux, presque entière-
ment décolorés, de biotite. Les grands feldspaths sont, les uns de
l'orthose (mais non pas de la cryptoperthite), les autres un oligo-
clase très voisin de Talbite contenant de nombreux grains de
calcite. L'orthose est partiellement muscovitisé et kaolinisé. Les
quartz sont bipyramidés, et, le plus souvent, rongés. Plus rare-
ment, ils se fondent dans la pâte par des protubérances capillaires.
La pâle est holocristalliue. formée d'une mosaïque de quartz,
1899
MICROGRANITES D& LA VALLÉB DE LA GU1SANNK
407
d'orthose et d'albite. Elle renferme beaucoup de mica blanc secon-
daire, surtout dans les variétés laminées et schistoïdes. Il y a
aussi de nombreuses mouches et veinules de calcite et quelquefois
de sidérose. Les feldspaths sont fortement kaolinisés.
La composition moyenne actuelle du microgranile des Gardéolles,
dans les échantillons les plus frais et les moins laminés, correspond
sensiblement à un mélange de : 30 % albite, 10 orthose, 3 musco-
vite, 2 biotite, 15 kaolin, 1 calcite, 4 anorthite (combinée à Talbite),
34 quartz et 1 alumine libre et eau. Voici deux analyses et leur
moyenne :
I" échantillon 2aa échantillon Moyenne
SiO2 70,70
A120:J 1S,60
Fe203 traces
MgO 0,39
CaO 2,26
K*0 2,81
Na-0 2,39
Perte par calcination .... 2,80
Total. . . . 99,95
73 ,10
71,90
17,60
18,10
traces
tracés
0,33
0,36
0,80
1,53
1,95
2,38
4,35
3,37
1,70
2,25
99,83
99,89
La reconstitution de la roche originelle, suivant la méthode que
j'ai indiquée l'an dernier, s'opère ici sans difficulté. La roche
moyenne tenait probablement, à l'origine : 23 % quartz, 30 albite,
32 orthose, 10 anorthite et 5 biotite. Je mets ici en regard la compo-
sition moyenne actuelle, et la composition originelle probable.
SiO-
AW
FejO:'
MgO
CaO
K-0
Na^'O
Perte par calcination . . . .
Total
Roche
actuelle
71,90
18,10
0,36
1,53
2,38
3,37
2,25
99,89
Roche
restaurée
70,80
17,15
0,85
2,10
5,84
3,54
néant
100,28
408 TERMIER. — MICROGRAN1TES DE LA VALLÉE DE LA GU1SANNE 19 Juin
Il s'agit donc ici d'une métasomatose par kaolinisation et musco
vitisatioD. L'ablalion de chaux est peu importante; mais la chaux
est passée à l'état de carbonate.
La teneur originelle en alcalis était à peu près la même dans la
roche des Gardéolles que dans les microgranites de Combeynot et
du Tabuc. Mais, aux Gardéolles, la richesse en silice était notable-
ment moindre, et, par contre, la teneur en chaux beaucoup plus
forte.
Ces différences, ce fait aussi que le feldspath potassique n'est pas
le même (1), me portent à croire que les microgranites du Houiller
briançonnais ne se rattachent pas (ou du moins pas directement)
au magma granitique du Pelvoux.
D'autre part, il existe, dans la série des microdiorites briançon-
naiscs, des types très acides et très alcalins. J'ai signalé déjà (2) le
type de Sachas, près Prelles. Voici trois analyses d'une roche de
Puy-Saint- André, qui, tout en ayant l'aspect extérieur d'une micro-
diorite, est une véritable microayenite.
SiO* 63,69 63,4.') 63,30
Al-'O3 21,10 20,43 20,68
Fe-O3 3,89 4/20 3,92
MgO 1,89 0,88 0,74
CaO 1,43 2,69 2,37
K*0 2,33 2,21 2,18
Na^O :>,07 4,98 4,91
Perte par calcination .... 2,76 2,19 2,45
Total 102,16 101,03 100,55
Toutes ces roches, microgranite des Gardéolles, microsyénite de
Puy-Saint-André, microdiorite acide de Sachas, microdiorites basi-
ques du Chardonnet et de Névache, se présentent dans les mêmes
conditions de gisement. Elles forment une série presque contiuue,
quanta la composition chimique, et elles ont, à peu de choses près,
la même structure.
Je crois donc, jusqu'à plus ample informé, que les microgranites
du Houiller de la vallée de la Guisanne sont une forme hypo abyssi-
que extrême d'un magma mixte, dont la composition moyenne
serait, probablement, quartzo-dioritique, ou peut être syénitique.
Je reviendrai sur ce point en décrivant la microsyénite de Puy
Saint-André.
(1) Ortliose aux Gardéolles, rryptoperthite à Combcynol <>l au Tabuc.
(2) H. S. G. F., 3' série, XXVI, p. 185.
1899 409
STRUCTURE INTIME
DES CALCAIRES L1ASIQUES DU BRIANÇONNAIS
par M. W. KILIAX.
J'ai l'honneur d'attirer l'attention de la Société sur la fréquence
de la structure oolithique et zoogène dans le Lias de la zone du Brian-
çonnais. En poursuivant des recherches commencées avec mon
ami Maurice Horelacquc (1), j'ai pu me convaincre, en effet, que
certains calcaires noirâtres du Lias alpin, d'apparence souvent
cristalline et compacte, présentent au microscope une structure
zoogèue et oolithique qui ne le cède eu rien comme netteté à celle
des calcaires urgoniens ou balhoniens les plus typiques des régions
extra alpines.
Les meilleurs exemples observés sont les calcaires qui aHleurent
entre Bonuenuit (Savoie) et les Losettes au N. du Col du Calibier.
ceux qui forment une barre rocheuse au N.-E. du Lautaret sur le
chemin de la Mandette, les calcaires formant les pentes entre la
Madeleine et l'Alpe du Lauzet, ceux qui forment le pied 0. des
Aiguilles de la Saussaz vers le Col de Martignare, enfin ceux du
Col de Reslefond (Basses Alpes). A ces types, il faut rattacher
aussi les calcaires de Vallouise et de Puy-St-Vincent (au N.-E. du
hameau du Poët; derrière le village même de Vallouise; près des
Chalets de Nareyroux) que j'ai visités en compagnie de M. Termier.
Ces roches présentent une grande identité de structure avec les
précédentes: leur nature oolithique et zoogène m'avait déterminé
en 1897 (1), alors que je ne connaissais pas encore les types du
Lautaret et des Losettes, à les considérer comme appartenant au
Jurassique supérieur. Aujourd'hui leur remarquable ressemblance
avec les calcaires incontestablement liasiques cités plus haut me
conduit à les rattacher sans hésitation au Lias ; cette conclusion
est d'accord avec l'interprétation à laquelle notre éminent confrère
M. Termier a élé amené par d'autres considérations.
Dans tous les calcaires, ou aperçoit au microscope de nombreuses
(1) Les documents réunis, on vue de ce travail, seront prochainement publiés
en un Atlas de 50 planches. (Microphotographies de Maurice Uovelacque), en
phototypie, actuellement sous presse.
410 KILIAN. — CALCAIRES L1ASIQUES DU BRIANÇONNAIS 19 Juin
oolithes noirâtres dont les couches concentriques sont nettement
fibreuses (radiées) et qui contiennent fréquemment en leur centre un
débris organisé ; ces oolithes ne sont que rarement étirées et allon-
gées, donnant alors lieu à une structure « amygdaloïde » ; d'habi-
tude (Calcaire des Losettes, etc.), elles se présentent avec la plus
grande netteté et sont noyées dans un ciment de calcite cristalline.
Les débris d'Echinodermes sont fréquents et dans certains cas très
abondants (La Saussaz), donnant lieu à de grandes plages de calcite
à clivages très apparents. On y distingue des Eutroques (La Saussaz)
et des radioles d'Echinides(Lautaret). Ces débris sont accompagnés
de rares Foraminifères (Vallouise), de nombreux fragments roulés
d'organismes divers, de Polypiers (La Saussaz, La Mandette, etc.)
d'Hydrozoaires, et de quelques Algues cakaires verticillées (Lau-
taret, Vallouise). De petits Gastropodes et des débris de Pélécypodes
apparaissent dans quelques préparations. — Enfin les intervalles
de ces éléments sont occupés par une mosaïque de calcite cris-
talline.
La structure particulière et très caractéristique des calcaires
liasiques, que je viens de décrire, se présente aussi bien à l'ouest
(Aiguilles de la Saussaz) de la « Zone de Flysch » qu'à l'est de cette zone
(Losettes, Mandette, Vallouise) ; il est facile de suivre, eu allant du
massif du Pelvoux vers Briançon, la transformation rapide, mais
cependant graduelle, que subissent les dépôts du Lias et qui atteste
une liaison originelle entre les deux bords du synclinal tertiaire.
J'ajouterai que les mêmes oolithes noires ont été retrouvées par moi
dans le ciment d'un galet (2) de brèche liasique lui-môme inclus
dans les brèches à cailloux cristallins de l'Eychauda, auxquelles
M. Termier assigne une origine lointaine et qu'il solidarise avec sa
« 4e Ecaille » de charriage. Ce fait semble indiquer cependant une
provenance moins éloignée que ne le croit notre confrère.
(1) Kilian et Hovelacque. H. S. G. F . 3' série, t. XXV, p. (>W).
(£) Cet échantillon m'a été obligeamment communiqué par M. Termier.
1899 411
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE
DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES
par M. A. de RIAZ.
Sommaire : 1° Laghet, la Turbie, Eze, vallée du Paillon. — 2° Villefranchc,
Beau lieu, Saint-Hospice. — 3° Environs de Menton. — Résumé.
Si, dans certaines parties de la France, les connaissances géolo-
giques sont fort avancées, bien qu'il y ait toujours place pour de
nouvelles découvertes, il est encore quelques régions qui sont loin
d'avoir été suffisamment étudiées. Les Alpes Maritimes sont de ce
nombre. Aussi je crois devoir publier les observations suivantes,
qui contiennent des laits nouveaux. J espère avoir contribué à
accroître nos connaissances sur le Crétacé de cette contrée, tout en
reconnaissant que dans plusieurs localités, je ne suis pas arrivé à
des conclusions définitives, fautes d'éléments paléontologiques
suffisants.
Les fossiles que j'ai recueillis étant principalement des Echinides,
je n'aurais guère pu rédiger cette note sans le secours d'un spécia-
Principaux ouvrages consultés :
1813. Risso. Observations géol. sur la presqu'île de Sl-Hosplce [Journal des
Mines, t. XXXIV).
1841 . A. Sismonda. Osservazioni geol. sulle Alpi mariltime e sugli Apenninl
liguri (Memorie délia Reale Accademia délie Scirnze di Tortnnt série II, t. IV).
1841. Eug. Sismonda. Monografla degli Echinidi fossili del Pie mon te (id„ id.).
1812. P. de Tchihatcheff. Observations sur les environs de Nice (in Constitution
géol. des provinces méridionales du Royaume de Naples).
1843. Eug. Sismonda. Memoria geo-zoologica sulli Echinidi fossili del conta do
di Nizza [Memorie délia Reale Accademia délie Scienze di Torino, série II, t. VI).
1861. Reynès. Etude sur le synchronisme et la délimitation des terrains cré-
tacés du sud-est de la France.
1865 Galdin et Moggridge. Menton [Bull. Soc. vaud. des se, nul., t. VIII).
1873. A. Toucas. Mémoire sur les terrains crétacés des environs du Beausset
(Mémoires de la Soc. géol. de Fr., 2"" série, t. IX).
1877. Camérk. Carte géol. d'une portion du dép. des Alpes-Maritimes.
1877. Réunion extraordinaire à Nice (B. S. G. F., t. V).
1881. Potier. Feuilles géologiques de Saorge et de Pont S' -Louis.
18S4. Fallot. Note sur un gisement crétacé fossilifère des environs «le la gare
d'Eze [B S. G. F., t. XII, p. 289).
1885. Fallot. Etude géol. sur les étages moyens et supérieurs du terrain cré-
tacé dans le sud-est de la France (Paris, Masson).
(Voir la suite de la note page 412).
412 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 Juin
liste expérimenté : j'exprime donc à M. J. Lambert, qui a bien
voulu déterminer mes échantillons, une reconnaissance d'autant
plus vive, que l'amabilité avec laquelle il s'est mis à ma disposition
a doublé pour moi le prix du service rendu (1).
Les points que j'ai explorés se divisent ainsi qu'il suit :
1° Laghet, la Turbie, Eze, vallée du Paillon.
2° Villefranche, Beaulieu, Saint-Hospice.
3° Environs de Menton.
1° Laghet, la Turbie, Eze, vallée du Paillon.
A 500 mètres approximativement en aval du célèbre monastère
de Notre-Dame de Laghet, sur la rive droite du vallon qui rejoint
le Paillon, j'ai observé le Cénomauien sous forme de marnes noirâ-
tres et de marno-calcaires grisâtres. Les couches deviennent de
moins eu moins argileuses à mesure qu'on s'élève à flanc de coteau,
et Ton arrive à des calcaires compacts sans fossiles qui n'appar-
tiennent probablement plus au même étage. Ces couches sont très
relevées. Elles plongent de 60 degrés vers le nord-ouest, et sont
comme pincées dans un grand pli du Jurassique.
J'ai recueilli :
Acanthoceras naviculare Mant. (Ac. MantelliSow. ind'Orb. PI. 103,
1887. Issel, Mazzuoli, Zaccagna. Carta geol. délie Rivière liguri e délie Alpi
marittimc.
1889. Fallot. Note sur le terrain crétacé dans les Alpes-Maritimes (Soc. lin-
néenne de Bordeaux, séance du Ier mai).
1889-1890. Collot. Description du terrain crétacé dans une partie de la Basse-
Provence (B. S. G. F, t. XVIII, p. 49, et t. XIX, p. 39).
1890. Zurcher Note sur le terrain crétacé supérieur de la feuille de Castellane
(Bull. des services de la carie géol. de la France, n" 18, t. II).
1890. De Grossouvre. Légende de la feuille géologique 121 (Valençay).
1891. Réunion extraordinaire en Provence {B. S. G. F., t. XIX).
1893 De Grossouvre. Les Ammonites de la craie supérieure (Paris, Imprimerie
nationale).
1893. Baron. Note géol. sur les environs de Menton (B. S. G. F., t. XXI, p. 110).
1894. Franchi. Contribuzione allô studio dcl titonico e del cretaceo nelle Alpi
marittinie italiane {Bull, del R. comitalo geol.).
1896. Bertrand (Léon). Etude géol. du nord des Alpes-Maritimes {Bull, des
services de la carie géol. de la France, n° 56, t. IX).
(I) Feuilles d'Etat major 225, Nice, et'225 bis, Pont Saint-Louis.
Travaux sur la craie de MM. Arnaud, de Grossouvre, Péron, Toucas, etc.
Pour la bibliographie complète de la région des Alpes-Maritimes, voir les listes
données par MM. Fallot et Léon Bertrand. — Voir aussi : Issel. Bibliografia
sceintifica délia Liguria (Genova, 1887).
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 413
non pi. 104) ; assez beaux exemplaires. Schlœnbachia tartans Sow.,
Turrilitcs costalus Lam., Scaphites sp., Holaster subglobosus Leske,
Epiaster crastissimus ? Def r.
Bien que les fossiles ne soient pus d'une abondance extrême, ce
gisement n'est pas difficile à trouver; et je suis étonné d'être le
premier à indiquer la présence du Cénomanien sur ce point. Je
n'en ai rencontré l'indication dans aucun auteur. M. Canavari,
professeur à l'Université de Pise, parait être seul à posséder un
Acanthoceras rhotomagensc avec l'indication Laghet. M. Parona, qui
a eu l'obligeance de me donner la liste des localités d'où provien-
nent les fossiles cénomaniens déposés au Musée de Turin (ce dont
je le remercie vivement), ne mentionne pas Laghet. Eu revanche,
je n'ai pu découvrir ici les gisements où ont été recueillis les
fossiles albiens du même Musée de Turin, que MM. Parona et
Bonarelli ont récemment décrits dans la Paleontologia ilalica
(PI. II), avec la mention de cette localité.
Les observations que j'ai faites en descendant cette vallée de
Laghet jusqu'à la Trinité-Victor, sont bien incomplètes, faute
d'avoir pu trouver des fossiles suffisants : je n'ai aperçu que quel-
ques mauvaises empreintes d'Iuocérames. Sauf erreur, je crois
cependant que le Sénonien commence peu après le Château, et se
continue jusqu'à la Trinité, mais je ne puis indiquer d'horizons
précis.
A la Turbie, se voient aussi des marnes noires surmontées de
calcaires, et lorsqu'on a examiné attentivement les couches de
Laghet, il me parait difficile d'hésiter à classer dans le Cénomanien
le Crétacé de la Turbie, à l'est et à l'ouest du village, bien qu'on n'y
trouve aucun fossile. On avait voulu en faire de l'Aptien, de même
que de certaines couches de la vallée du Paillon, au moins pour les
argiles inférieures. M. Fallot, qui a consciencieusement étudié
ces assises dans la dite vallée, a cru devoir les rattacher au Céno-
manien, à fossiles certains, placé au-dessus. J'adopte entièrement
sa manière de voir, car je crois que soit à Eze, soit dans le vallon
de Saint-Laurent (1), ce sont ces mêmes marnes que l'on voit
superposées au Gault : le faciès de ces couches est identique sur
tous ces points : et, dans les deux localités que j'indique, il est
incontestable qu'elles sont au-dessus, et non au-dessous de l'étage
albien.
(1) Vallon descendant de la Turbie à la mer, à l'ouest de la Tête de Chien. Ne
pas confondre avec la localité de Sl-Laurent, de la coupe du col de Braus : la
confusion pourrait résulter notamment de ce que les deux points sont désignés
l'un et l'autre par une petite chapelle.
414 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19Juin
Aux affleurements crétacés de la Turbie se rattacheraient aussi
ceux de Bordiua, à Test de la Tête de Chien, dans le ravin descen-
dant à Monaco entre le sentier à mulet et le chemin de fer à
crémaillère. A l'altitude de 220 ou 230 mètres, j'ai recueilli une
empreiuted'Ammonite pouvant se rapporter à Schlœnbachia varians,
et des Inocérames mal conservés. Ces couches descendent en coin
jusque très près de Monaco, ainsi que l'indique la carte de
M. Caméré.
Si maintenant Ton se dirige à l'ouest, en se rendant à pied de la
Turbie à Eze parle sentier qui se détache de la route de la Corniche,
et qui, par parenthèse, oiîre des perspectives admirables, on ne
quitte pas le système crétacé. Lorsqu'on a dépassé une arête qui
monte jusqu'au fort de la Révère, les couches crétacées se présen-
tent sous forme de grès blanchâtres, compacts, peu fossilifères.
J'ai observé là : Echinocorys sp., Inoceramus sp., Spongiaires
siliceux.
Par analogie avec la localité de Gorbio dont je parlerai plus loin,
je rapporte ces couches à l'étage sénouien, et j'y vois un des niveaux
inférieurs de l'étage.
En se rapprochant d'Eze, on voit d'autres assises, inférieures à
celles-ci, assez diverses d'aspect, tantôt jaunâtres et très calcaires
avec des portions grumeleuses, parfois marneuses et bleuâtres,
ressemblant alors au Cénomauien d'autres localités. Je n'ai pu y
découvrir aucune trace de fossiles. Ces assises sont très puissantes,
car on peut les suivre jusqu'au point où le Crétacé disparaît dans
le ravin, par où passe le sentier qui descend du village d'Eze à la
gare. Je les range dans le Cénomauien, avec une légère incertitude
faute de bonnes preuves. Le Turouieu serait il représenté par une
partie de bancs supérieurs? Son existence étant problématique
dans la région, je penche pour la négative.
Au nord-nord-est d'Eze, dans la direction du fort de la Drette,
le système crétacé occupe une certaine étendue, et Reynès eu a
donné une coupe (1). Cette coupe est trop schématique, peu compré-
hensible, et M. Fallut en a contesté l'exactitude pour la partie
comprise entre Eze et la mer. A mon tour, je ferai des réserves
pour la portion de la coupe qui est à gauche du village, et je ne
suis pas sûr que la succession des couches soit celle indiquée par
Reynès. Mais je reconnais n'avoir pu consacrer un temps suffisant
à l'étude de cette localité, où aux difficultés du terrain s'ajoute celle
d'être dans une zone militaire.
(1) Op. cit., p. 53, fig. 11.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 415
Ce qu'il y a de certain, c'est que la route de la Corniche entame
le Cénomanien près de la bifurcation du chemin qui conduit à Eze.
On le suit à la descente, où j'ai remarqué : Scklœnbackia varians
Sow., Ilolaster subglobosus Leske.
Un peu plus bas, on trouve le Gault. Mes observations concor-
dent du reste avec les indications qu avait bien voulu me donner
M. Ambayrac, professeur au Lycée de Nice, et dont je suis heureux
de le remercier.
Le Gault se présente sous la forme d'un calcaire dur, jaune, pétri
de glauconie. Il serait sans intérêt, pour une couche aussi bien
définie, de donner la liste des fossiles que j'ai recueillis, et de ceux
que j'ai vus au Musée de Nice. Je signalerai seulement l'abondance
relative des Bélemniies et des Brachiopodes, par rapport aux
gisements classiques de Bellegarde-sur-Valserine et autres.
Abandonnons maintenant les hauteurs, et descendons près de la
mer, au voisinage de la gare qui porte le nom d'Eze, malgré la
différence des altitudes. Là se trouve le gisement albien décrit par
M. Fallot en 1884. J'ai essayé plusieurs fois, mais en vain, de le
découvrir. Il est difficile de l'atteindre sans être guidé, d'autant
qu'il est généralement oblitéré par les éboulis. M. Fallot a reconnu
des marnes cénomaniennes par-dessus ce lambeau de Gault. Moi-
même, près de là, à l'ouest de la gare, dans le vallon qui est au
nord du cap Roux, j'ai observé des calcaires compacts, glaucouieux,
inclinés à l'est de 45 degrés, et paraissant succéder à des marnes
ou calcaires marneux. J'y ai recueilli plusieurs exemplaires d'Exo-
gyra eolumba Lam.
Le seul détail exact de la coupe de Reynès (considérée comme
schématique), serait donc la mention faite dans le voisinage de la
mer de bancs d'Exogyra eolumba superposés aux fossiles rhoto-
magiens.
Il est assez remarquable, en effet, de trouver VExogyra eolumba
dans l'intérieur du pli compris entre le cap Roux et la pointe du
Cabuel. Sur les hauteurs d'Eze, à Laghet, et à la Turbie, le Céno-
manien est absolument pélagique, et l'on ne découvre dans ces
localités aucune trace d'Ost racées. Dans la presqu'île de Saint-
Hospice, je dirai au contraire que ce faciès d'Ostracées existe seul.
Le point que j'indique eu ce moment se relierait donc avec le banc
â'Exogyra eolumba appelé par M. Fallot, Rompe-Talon, plus exac-
tement Monciaco), qui n'est pas, du reste, à une bien grande
distance, mais est séparé d'ici par le Jurassique du Cap Roux et le
Sénonieu de Beaulieu.
416
»JL
DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L ETUDE
19 Juin
Je reviens maintenant à la vallée du Paillon où m'avait amené le
vallon de Laghet, à la Trinité Victor. Là, on observe sur la rive
droite des couches sénoniennes signalées par M. Fallot, et qui pré-
sentent une disposition en éventail assez singulière. Il ne m'est pas
12 3 4 5 0
1, 2. 3, 4, Bancs sans fossiles ; 5, Couche à Inocérames ; (>, Couche à Micraster.
possible de dire si les Inocérames sont placés au dessus ou
au-dessous des Micraster. Ces Micraster ne sont pas abondants.
J'en ai recueilli un seul déterminable, qui, d'après M. Lambert, est
le Micraster eoranguinum Kl.
Cette observation concorde avec celle de M. Fallot, qui avait
annoncé la présence de cette espèce. J'ai su que les échantillons
qu'il a déposés à la Sorbonne ont été contrôlés par Hébert. Il
ne saurait donc y avoir de doute sur l'existence d'un des niveaux
inférieurs du Sénonien (Santonien), en face de la Trinité-Victor.
En remontant la vallée, on trouve le bombement qui fait appa-
raître au-delà de Drap, le Cénomanieu, et même peut-être des hori-
zons plus anciens (1). A Pont de Peille, sur Ja rive droite du
Paillon (2), j'ai revu les marnes à Holaster subglobosns. En face, sur
la rive gauche, où M. Fallot avait vu une couche i^lauconieuse qui
lui semblait être le Gault, j'ai découvert de nombreuses Bélemnites
malheureusement fort difficiles à détacher. Elles me paraissent
appartenir à un étage plus ancien, Hauterivien ou Barrémien, car
ce pourrait être : Hibolites subfmiformis ? Rasp., //. pistilliformis?
Blainv. Les Bélemnites sont accompagnées d'Ammonites indétermi-
nables, parmi lesquelles serait représenté le genre Desmoceras.
L'observation est donc peu concluante.
Ce banc glauconieux, d'une épaisseur insignifiante et de peu
(1) Fallot. Crétacé du sud-est de la France, p. 135. Op. cit.
(2) lu., B. S. G. F.f t. XIV, p. 8. Une erreur typographique indique rive
gauche, au lieu de rive droite.
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Fossiles aPtiens dt l'île Wnïre nrèsMarseillx.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 417
d'étendue, est presque plaqué sur des calcaires très durs qui appar-
tiennent probablement au système jurassique.
Plus loin, en suivant la route de Turin, après des couches qui
semblent sans fossiles, et où il serait téméraire de voir l'étage turo-
nieu par la seule raison qu'elles sont comprises entre le Céno-
manien et le Sénonien, on retrouve ce deruier étage : c'est même
un niveau assez élevé du Sénonien qui apparaît immédiatement,
du point marqué Gando à la pointe de Contes et à Font-de-Giariel.
Ce gisement de Font-de-Giariel a été signalé plusieurs fois; et si
tous les auteurs sont d'accord pour y voir un horizon haut placé du
Sénonien, ils ne s'accordent pas complètement sur la détermination
des Echinides qu'on y récolte.
M. Lambert a reconnu parmi mes échantillons : Micrasttr gibbus
Lam., dont un individu surtout lui paraît tout à fait typique (voir
les figures de M. Lambert, B. S. G. F., t. XXIV, pi. XII, fig.3et 4).
M. Schlûter, de Bonn, conteste que Mici aster (pour lui Epiaster)
gibbus se trouve ici. L'espèce n'est pas interprétée de la même façon
en Allemagne et en France.
Cotteau (Echinides fossiles de l'Yonne) a indiqué Micraster gibbus
à la Palarea (même localité que Font-de-Giariel) (1).
M. Fallot a rapporté ce type à Micraster cordatus Ag., qui, d'après
Cotteau, ne serait qu'une variété du Micraster gibbus.
Micraster Brongniarti Héb. var. Sismondœ Lamb. Serait-ce cette
forme que Cotteau a rapportée à Micraster glyphus Schlût. (2)?
Mais M. Schlûter, qui a bien voulu examiner quelques-uns de mes
échantillons, dit qu'ils ne sont pas conformes à ceux de la West-
phalie, et ne peuvent être réunis à l'espèce qu'il a créée (3).
Ces deux Micrastvr sont les fossiles les plus intéressants et les
plus abondants du gisement : malheureusement ils sont souvent
écrasés.
(1) La Palarea est un château situé sur la hauteur, et déjà sur le Tertiaire qui
commence à côté même de l'endroit nommé Font-de-Giariel. Le nom de couches
de la Palarea ayant été généralement donné à celles qui correspondent a l'étage
parisien, il me semble qu'on peut éviter toute confusion en appelant le gisement
sénonien Font-de-Giariel, ce qui est du reste rigoureusement exact, et en réser-
vant le nom de la Palarea aux assises éocènes.
[t) Echinides fossiles de l'Yonne, étage sénonien. Il continue l'existence de ce
type à la Palarea en 1874 (Echinides crétacés du Hainaut, H. S. G. F.y t. II, p. 0*57).
(3) Voir pour des détails sur Micraster gibbus et sur Micraster glyphus : Notes
pour servir à l'histoire du terrain de Craie dans le sud-est du bassin anglo-pari-
sien, par M. A. Péron, avec description des Echinides par MM. Gauthier et
Lambert [Bull. Soc. Se. hist. H nat. de l'Yonne, 1887).
31 Octobre 1899. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 27
418 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 Juin
En outre j'ai recueilli :
Inoceramus Crispi Mant. (signalé par M. Fallot), Heteroceras sp.,
Spongiaires.
Le fossile caractéristique, c'est Micraster Brongniarti Héb., bien
qu'il diiïère quelque peu du type, et soit une variété régionale.
Nous pouvons donc, à mon avis, placer le gisement de Font-de-
Giiiriel sur l'horizon de la craie de Meudon.
M. Péron disait, il y a quelques années, que cet Echinide était
tellement spécial à la localité de Meudon, qu'on ne le trouvait pas en
Champagne, et que la citation qui en avait été faite dans l'Yonne
lui semblait mériter confirmation. Depuis ce moment, M. deGros-
souvre a reconnu ce fossile dans le centre de la France, au-dessus
de la craie de Villedieu, et n'a pas hésité à placer la craie à silex qui
le contient au niveau du Sénonien supérieur à Bélemnitelles.
La route de Contes-les-Pins s'embranche sur celle de Turin pour
remonter un vallon latéral dirigé vers le nord-nord est. 1.500 mètres
environ avant le village, on rencontre les carrières de chaux
hydraulique, que je laisse un instant, pour parler d'abord du banc
à Micraster qui se trouve en montant de Contes à la Madone,
C'est de là que provieut Micraster arenatus Sism. Le créateur de
l'espèce n'indique pas d'autre gisement, tandis que je l'ai rencontrée
aussi à Saint-Hospice. J'ai pu recueillir, en effet, un certain nombre
d'individus plus ou moins écrasés. De plus, j'ai eu entre les mains
un magnifique exemplaire, parfaitement intact, de cette espèce
intéressante qui a passé sous les yeux de M. Lambert (1) : il
appartient au Musée de Menton, et avait été mis à ma disposition
par le Directeur, M. Bonfils (2), à qui j'offre tous mes remerciements.
Echinocorys vulgaris Breyn. se rencontre également, mais moins
abondant.
(1) Voici ce que M. Lambert m'écrit à ce sujet : « Micraster arenatus était une
espèce oubliée depuis Sismonda, ou réunie à Micraster coranguitium. En 1895,
j'ai cru devoir rétablir l'espèce, et en rappeler les caractères d'après Sismonda,
en montrant que les réunions proposées par Agassiz et Cotteau étaient incompa-
tibles avec les descriptions si exactes de l'auteur piémontais. Vos découvertes
sont venues eonlirmer complètement mes vues a ce sujet, car j'étais obligé
«l'avouer n'avoir jamais vu l'espèce en nature, et des doutes restaient possibles. »
i'1) .le suis heureux de rendre hommage ici à la bienveillance de M. Bonfils,
et à l'activité avec laquelle il a su créer un musée local très intéressant. Les
géologues y remarqueront une belle collection du Plaisancien de Castel d'Appio,
ainsi que les crânes et objets préhistoriques recueillis dans les cavernes des
Baoussi-Rossi. De plus on a collectionné des oiseaux, coquillages, médailles,
poteries, etc., de la région. Toutes les petites villes devraient tenir à honneur
d'avoir un semblable musée, qui est fort instructif.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 419
Nous n'avons pas ici les mômes espèces qu'à Font-de Giariel ; j'ai
tout lieu de croire néanmoins que les couches qui les contiennent
sont au même niveau, ou à peu près, passant les unes et les autres
sous les couches à Ammonites des carrières de ciment. Si des études
ultérieures amènent à distinguer les couches à Micraster arenatus
de la Madone, de celles à Micraster gibbus et Micraster Brongniarti
de Font-de-Giariel, je ne crois pas qu'on puisse les écarter beaucoup
ni l'une ni l'autre, de l'horizon de la craie de Meudon. Peut-être
Micraster arenatus indiquerait-il l'assise inférieure et Micraster Bron-
gniarti var. Sismondœ, l'assise supérieure de cet horizon.
Au-dessus de ces couches à Echinides de Font-de-Giariel et de
la montée de Contes à la Madone, viennent, pour terminer l'étage
sénonien de la contrée, les bancs à Ammonites des carrières de
Contes-les-Pins.
Je renvoie à la coupe relevée par M. Baron, et donnée par
M. Fallot (1). Les bancs de Font-de-Giariel à Micraster gibbus et
Micraster Brongniarti var. SismuncUe ne représentent pas la partie
tout à fait supérieure de l'étage. Ils ne sont cependant séparés de
l'Eocène que par quelques assises de peu d'épaisseur, où je n'ai pu
découvrir de fossiles, et qui semblent plutôt la continuation des
bancs à Micraster : je me garderais de chercher à y voir l'horizon à
Ammonites, ou la représentation de l'étage danien.
Quelles sont ces Ammonites de Contes? Elles sont grandes,
mais rares. M. Fallot a indiqué : Pachydiscus neubergicus von Hauer,
P. ootacodensis Stol., Sonneratia blanfordiana Stol. Ces deux der-
nières espèces de l'Arialoor group de l'Inde.
Dans sa belle description des Ammonites de la Craie supérieure,
M. de Grossouvre a décrit et figuré de Contes-les-Pins : Mortoniceras
catnpaniense de Gross., Pachydiscus Levyi de Gross. Je possède moi-
même un bel exemplaire de cette dernière espèce : je le dois à
l'extrême obligeance de M. Bourgouguon, ingénieur des Ponts et
Chaussées à Nice, auquel je renouvelle mes remerciements.
M. de Grossouvre attribue à ces deux Ammonites l'horizon P' de
M. Arnaud, ou Campanieu inférieur : Mortoniceras campaniense
occuperait cette place dans les Charentes. Je crois que les couches
des carrières de Contes sont d'uu âge plus récent, et sont du Cam-
panien très supérieur. Cela pour deux raisons : d'abord, parce que
nous sommes au-dessus d'une assise à Micraster Brongniarti var.
qui me paraît l'équivalent de la craie de Meudon ; et à cause de la
présence de Pachydiscus neubergicus, espèce citée par M. Fallot des
[i) Crétacé du sud-est de la France, p. 137. Op. cit.
420 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 J 11 111
collections de la Sorbonne, et doot la détermination doit être
incontestable. Cette espèce occupe un niveau très élevé du Sénonien
(grande carrière de Tercis avec Micraster aturicus, Micraster corco-
lumbarium et Echinocorys Heberli). Si M. de Grossouvre a raison
de réunir P. Jacquoti Seunes à P. neubergicus von Hauer, l'espèce
monterait jusqu'à l'extrême limite supérieure de l'étage sénonien
(calcaires à Stegaster de Gau).
Il y a là une légère incertitude paléontologique, les Ammonites
de la Craie supérieure n'étant peut-être pas connues encore avec
toute la précision désirable. Sommes-nous bien sûrs aussi que les
parallélismes auxquels nous nous référons actuellement, entre les
bassins du Beausset, des Pyrénées, des Charentes, et du grand
bassin anglo-parisien, soient définitifs? Enfin, dans l'état actuel
de la science, l'horizon à Ammonites de Contes représente la craie
de Koyan ou le commencement du Maestrichtien, puisque la craie
de Maestricht est maintenant réunie à l'étage sénonien.
On aura déjà remarqué que le faciès du Crétacé supérieur est ici
un faciès complètement septentrional : des Echinides, quelques
grandes Ammonites, point d'Hippurites. Il y a lieu de trouver le
fait remarquable, à une si faible distance des récifs du Beausset et
des Martigues.
Pour achever ce qui se rapporte aux vallées aboutissant à Nice,
je dirai que le Crétacé de la vallée de Contes va se relier à celui de
la vallée de Tourette par Châteauneuf-de-Ville Vieille, près duquel
on trouve le Gault, d'après M. Ambayrac et d'autres observateurs.
Je n'ai pas fait ce trajet moi-même ; mais dans la réunion de 1877,
la Société a vu en aval de Tourette le Néocomien, le Gault et le
Cénomanien. J'ai recueilli, moi aussi, près des Moulins, Acantlto-
ceras naviculare Mant. Il y aurait encore à faire des recherches
autour de Châteauueuf et en amont de Tourette, où la carte de
M. Caméré indique que le système crétacé se prolonge fort loin.
2° Villefranche, Beaulieu, Saint-Hospice.
Sur la carte de M. Caméré, les environs de Villefranche et de
Beaulieu, et toute la presqu'île de Saiut Hospice figurent comme
Crétacé, sans distinction d'étages. Mes observations ne m'ont révélé
l'existence que de deux étages distincts : le Cénomanieu et le Séno-
nien, celui-ci probablement avec deux horizons. C'est ce qu'avait
déjà vu M. Fallut, mais j'entrerai dans quelques détails.
Près de Villefranche, au bord de la mer, au pied du petit tunnel
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 421
qui suit de très près la gare lorsqu'on vient de Nice, j'ai vu des
couches crétacées presque verticales. Cependant l'inclinaison est du
côté de l'est : on comprend que c'est dans ce sens qu'elles ont été
placées par les soulèvements énergiques qui ont porté à leur hau-
teur actuelle les formations jurassiques avoisinantes. Ces couches
sont des calcaires assez compacts, à peine glauconieux, plutôt
blanchâtres. VExogyra columba y est fréquente. Je les classe à la
partie supérieure du Cénomanien. C'est probablement l'endroit
appelé Deux-Rubs par Risso, qui y avait reconnu des Gryphées.
A. Sismonda aussi a parlé de VExogyra columba à Villcfranche, sans
la rapporter à un étage déterminé.
Un peu plus loin, à Test, on voit d'autres assises qu'il est difficile
de raccorder avec les précédentes, car les observations intermé-
diaires font défaut. Ces nouvelles assises sont de grès verdàtres
avec des délits spathiques. Leur inclinaison, tout-à fait différente
des couches à Exoyyra columba, est de 45 degrés nord ouest :
bientôt les bancs deviennent horizontaux, puis se renversent au
sud ou sud-est, en allant butter contre le Jurassique du cap Ferrât.
Le petit cap (1) qui s'avance au fond de la baie de Villefranche
représente donc une voûte anticlinale. de dimensions bieu modestes
d'ailleurs par rapport aux grands escarpements de la contrée : On
se serait plutôt attendu à trouver ici le centre d'un pli synclinal
auquel serait due la formation de la baie de Villefranche.
Quel est l'Age de ces assises? En venant de l'ouest, je n'ai pu
apercevoir aucun fossile. A la retombée de la voûte, sur la route
de Villefranche à Saint-Jean, j'ai observé des lumachelles de petites
Huîtres et autres petits fossiles empâtés. Ce n'est pas concluant;
mais par analogie avec les couches de Saint-Hospice dont je discu-
terai tout-à l'heure le niveau précis, je classerai ces assises qui
bordent le nord-est de la baie de Villefranche dans le Sénonien
supérieur (Campanien).
Près de ces points qui bordent le rivage, M. Ernest Chantre, le
célèbre anthropologiste, a recueilli des fossiles il y a plus de 30 ans,
avant la construction du chemin de fer. lia eu lVxtrôme obligeance
de me les communiquer, et M. Lambert y a reconnu : Echinocorys
vulgaris Breyn. ( Ananchytes gibba Lam.), Micraster corbaricus Lamb.
(M. brevis auctorum), Micra&ter coranguinum Kl. Ces trois espèces
annoncent le Sénonien inférieur. Y aurait-il deux horizons, l'un à
Micraster corbaricus (Coniacien), l'autre à Micraster coranguinum
(1) Il n'a pas do nom sur la carte : le point désigné par Risso sous le nom de
Grosueil serait l'anse à l'est du cap.
422 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 jllill
(Santonien)? Je ne sais, les souvenirs de M. Chantre étant trop
anciens pour être précis : il croit avoir récolté ses fossiles sur des
talus à forte pente, où ils pouvaient donc être mélangés. D'autre
part, M. Fallot, dans certains points des Basses-Alpes, n'a pu
séparer les niveaux à Micraster cortestudinarium et à Micraster
coranguinum; et il n'y aurait pas d'impossibilité à ce que nous nous
trouvions ici en présence d'un phénomène analogue. Mais faute de
preuves suffisantes, je ne puis pas donner une conclusion plus
précise que l'existence d'un niveau inférieur de l'étage Sénonien.
J'ai vainement essayé de revoir les gisements où M. Chantre avait
fait ces récoltes. Par suite de la forte déclivité du terrain, les murs
de soutènement successifs du chemin de fer, de la route nationale
et des propriétés privées, masquent aujourd'hui toute la surface
autrefois observable. C'est évidemment des mêmes parages que
provinrent les Micraster donnés par M. Hermite à la Sorbonne, et
d'après lesquels M. Fallot admit l'existence du Sénonien à Beaulieu,
sans indiquer de niveaux précis. Je me suis informé à la Sorbonne
si ces Micraster auraient été déterminés depuis cette époque ; il m'a
été répondu qu'ils étaient actuellement dans des caisses, et qu'on
ne pouvait me renseigner.
Au nord-est de Beaulieu, au-delà de la batterie, j'admets que
c'est le Sénonien qui affleure le long de la mer, bien que les talus
soient à présent masqués, et que je n'aie pu faire là aucune obser-
vation précise ; les couches sont un peu marneuses, et pourraient
être la continuation des bancs à Echinicles, car les échantillons
qui m'ont été communiqués sont bien dégagés.
Un peu à l'ouest de la batterie, le long de la mer, sous l'hôtel
Métropole et à la pointe de Pierre-Formigue, on voit aussi le Séno-
nien sous la forme de grès très durs à Huîtres et à (Gastéropodes ; et
la même couche se relie à l'anse de Grosueil par la hauteur de la
villa Miramar un peu au nord du point marqué 65 sur la carte
d'Etat-major. Sur la hauteur les Polypiers dominent. Les fossiles
sont extrêmement difficiles à extraire.
Je citerai sur le rivage dans les bancs rongés par la vague: Exo-
gyraplicifera Duj., Turritella sp., etc., et sur la hauteur : Rhyncho-
nella ccspertilio d'Orb., Exogyra plicifcra Duj., Ostrea resicularis
(jeune) Lam., Cyclolites sp., Placosmilia atnriformis ? Edw. et H.
Vers le point 05 et au-delà, sur la crête entre les baies de
Beaulieu et de Villefranche, on voit des couches analogues, malgré
de très légères différences ; elles sont plus tendres et plus blanches;
Les Huîtres qu'elles contiennent sont un peu plus grandes ; au lieu
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 423
de se rapporter à Kxogyra plicifera Duj. elles appartiennent presque
toutes à une autre espèce : Ostrea proboscidea d'Arch.
Les mêmes Huîtres se retrouvent au nord de l'isthme qui relie ;iu
continent la presqu'île de Saint-Hospice, à 150 mètres environ d'alti-
tude. Les couches marneuses qui les contiennent succèdent à des
marno-calcaires un peu glauconieux, où je n'ai pu découvrir de
fossiles. Probablement ces marno calcaires descendent jusqu'à la
mer, où ils sont masqués par la voie ferrée, entre le Cénomanieu
du tunnel de Deux-Rubs et le Sénonien de Beaulieu : Leur classe-
ment reste incertain, tandis que les bancs tl9 Ostrea proboscidea sont
sénoniens comme presque toute la presqu'île.
Si maintenant on Se dirige de Beaulieu vers Saint Hospice par le
sentier qui longe la mer, on voit d'abord, près de la villa Vial, des
couches verticales faisant front à Test. Leur faciès gréseux et la
présence de quelques petites Huîtres prouvent qu'elles sont la
continuation des falaises de Grosueil et de Pierre-Fonnigue.
200 mètres plus loin, avant le promontoire de Rompe Talon, sont
des couches qui plongent à Test de 45 degrés, et qui offrent des
lumachelles d'assez grosses Huîtres où Y Ostrea vesicularis est pré-
dominante. Elle est accompagnée de Ostrea proboscidea d'Arch.,
Exogyra plicifera Duj., Pecten sp., Cardium (assez grosse forme
sphérique), Terebratula sp., Rhynchonella difformis d'Orb.
La roche est dure, et l'on ne peut guère observer que les fossiles
détachés par la vague.
Cette observation m'a paru intéressante. VOstrea vesicularis h été
signalée dans la Drôme et dans les Basses-Alpes; mais peut-être
d 'avait-il pas encore été découvert dans le sud-est de la France, un
banc qui en fût presque entièrement composé (1).
200 mètres environ encore au-delà de ce point, la falaise est for-
mée par des grès très durs, remplis de silex. Ils sont légèrement
glauconieux, comme les précédents, mais présentent des veines
spathiques nombreuses. La faune se compose à peu près exclusive-
ment de petites Exogyra plicifera fort nombreuses, avec de rares
Lamellibranches. Le plongement ici est à l'ouest. On peut donc
remarquer que la presqu'île est entièrement disloquée, et qu'on ne
peut guère compter sur une succession stratigraphiquc régulière.
Les Huîtres sont d'ailleurs peu concluantes, et il uous faut arriver
tout-à-fait à l'extrémité de la presqu'île pour découvrir un fossile
vraiment caractéristique.
(1) Tchihatcheff après avoir indiqué Gryphxa cotumba à Heaulicu, signale
Gryphœa vesicularis à Villefranche (?).
424 DE RIAZ. — - CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 juin
Mais avaut, immédiatement après la pointe nommée Monciaco
sur la carte d'Etat- major, un sentier menant au bas de la falaise
assez haute et très escarpée à cet endroit, permet de faire une
observation qui diffère complètement des précédentes. Des couches
glauconieuses plongent au nord est avec une inclinaison que j'évalue
à 60 degrés. Elles sont pétries à certaines places d'Exogyra columba
d'assez grande taille. Je n'ai remarqué en outre que de très petits
Polypiers. Nous avons donc à cette place l'étage cénomanien avec un
faciès littoral. Cette observation a été faite avant moi par M. Fallot ;
toutefois je ferai remarquer qu'en appelant le gisement Rompe-
Talon, il a commis une légère inexactitude, car ce point est plus
rapproché du hameau de Saint-Jean, il est au sud du deuxième cap
dénommé sur la carte.
Ces assises qui correspondent tout-à-fait à celles du tunnel de
Deux-Rubs, près de la gare de Villefranche, sont surmontées
d'autres assises blanchâtres dépourvues de fossiles. Aucun motif
ne me permet d'admettre ici l'existence du Turonien.
Le Sénonien recommence à Saint-Jean ; et vers l'extrémité de la
presqu'île, au nord de la vieille tour, les couches déchiquetées par
la mer out une inclinaison de 25 ou 30 degrés dans la direction du
nord. Ce sont des grès durs à silex comme près de Beaulieu.
Certains bancs sont pétris de petits fossiles (Gastéropodes, Lamelli-
branches, Polypiers), tellement empâtés qu'on ne peut guère ni les
extraire, ni les déterminer sur place.
Au midi de la tour, entre le cap Saint-Hospice et la pointe du
Pilon, on retrouve daus la falaise les mêmes assises de grès durs à
fossiles empâtés; mais j'ai réussi à découvrir sur ce point des
Echinides qui permettent d'en déterminer l'âge. L'allure des
couches est variable ; près du cap Saint-Hospice, elles sont horizon-
tales, puis elles penchent à l'ouest de 30 à 35 degrés; entin, un
peu plus loin, elles penchent d'autant en sens inverse, c'est-à-dire
à Test ; il n'y a pas de discontinuité d:ins les bancs fossilifères, qui
ont seulement éprouvé un affaissement vers le milieu de la falaise.
Les bancs à Echinides sont intercalés parmi d'autres à petits
fossiles formant lumachelle, quelques autres étant répandus spora-
diquement un peu partout. L'ensemble parait indivisible. 11 est du
reste assez difficile de déterminer quelques-uns de ces petits
fossiles, et la connaissance de quelques Bivalves et Gastéropodes
importe peu pour le classement des couches.
J'ai tenu à décrire en détail les différents points de la presqu'île ;
mais on voit que ce sont les mêmes espèces d'Huîtres qui se retrou-
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 425
vent partout, l'abondance relative de chacune diversifiant seulement
lesgisemeuts. J'en conclus que si nous avons ici un Echinide carac-
téristique, nous pouvons avec certitude fixer l'horizon de tous ces
grès lumachelles.
Cet Echinideest le Micraster arenatus Sism., l'espèce de la Madone
de Contes. Après de patieutes recherches, j'ai pu en dégager quel-
ques exemplaires (ils sont très empâtés dans la roche, et les agents
atmosphériques ne les dégagent que mal). M. Lambert y a reconnu
sans hésitation le type de Sismonda. Nous avons donc dans la
presqu'île de S1 Hospice, comme à la Madone et à Font-de-Giariel,
l'horizon de la craie de Meudon (Campanien). Si le banc d'Ostrea
vesicularis que j'ai découvert près de Beaulieu n'est point une
preuve décisive, c'est au moins un argument à l'appui de celle tirée
de la présence du Micraster arenatus.
Seulement, au lieu de couches complètement pélagiques, nous
avons ici un faciès sublittoral : beaucoup d'Huîtres, et des Echinides
sur un seul point très limité.
Avec Micraster arenatus, j'ai récolté plusieurs individus du genre
Hemiaster, appartenant très probablement à des espèces distinctes.
Ils n'ont malheureusement pu être suffisamment dégagés.M. Lambert
croit que l'un d'eux est très voisin de Hemiaster Baroni Fall., des
grès de Dieulefit. J'ai recueilli en outre à S^Hospice : Serita (lors
même que mon exemplaire n'est pas complet, il ne peut se rapporter
à Serita rugosa= Otostoma ponticum Hœn., espèce qui annopcerait
un niveau plus élevé), Turritella sp., Trigonia Umbata d'Orb.,
Janira quadricostata d'Orb., Cyprina oblonga? d'Orb., Ostrea vesi-
cularis jeune Lam., Exogyra plicifera Duj. in Coq., notamment
formes de la pi. XXXVI, fig. 17, 18; Exogyra Matheroni d'Orb.,
pi. 48.j, fig. 2 (M. Péron croit que la véritable Exogyra Matheroni ne
se trouve pas en Provence ; l'échantillon que je vise particuliè-
rement me semble conforme, quoique plus petit).
A l'est de la pointe du Pilon est une anse où l'on revoit des
bancs à Ostracées : Ostrea proboscidea d'Arch., Exogyra plicifera
Duj., Rhynchonetla sp.
Ces couches, toujours sous la forme de grès durs avec filets
spathiques, se continuent à l'est pour former un petit cap, puis une
deuxième anse nommée le Bouyou, à l'extrémité de laquelle se
trouve le Jurassique du Sémaphore et du cap Ferrât.
Risso a signalé près de ce point nommé le Bouyou des couches
très fossilifères contenant des Ammonites, des Turrilites, des
Arches, etc. Cette observation m'étonne, car en fait de niveaux à
426 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A l'ÉTUDK 19 juin
Ammonites, il- o'y en a que trois dans la contrée : le Gault, le
Cénomanien, et les couches de Contes-les-Pins (Sénonien supérieur).
A Contes-les Pins, les Ammonites sont rares et de grande taille; il
semble que Risso aurait mentionné ces particularités. Sa descrip-
tion semblerait pourtant annoncer le Sénonien, puisqu'il place les
Ammonites entre les calcaires à Gryphites (Cénomanien), et le
Nummulitique. D'un autre côté, les Turrilites feraient pencher
pour un étage plus ancien. Or, je n'ai point aperçu le Gault ici ; et
quant au Cénomanien, je ne l'ai vu dans toute la presqu'île, ni avec
les fossiles de Rouen, et le faciès marneux de Pont-de-Peille ou de
La«;het, mais seulement comme formé de bancs gréseux à Exogyra
columba. J'ai donc peine à croire à l'exactitude du fait indiqué par
Risso, tout en faisant remarquer qu'au commencement de ce siècle,
le terrain devait être bien plus facile à examiner en détail, qu'à
présent où tout est clos et cultivé.
En résumé la constitution de la presqu'île de Saint-Hospice
s'interprète de la manière suivante : le Cénomanien existe au
milieu sur une étendue limitée, et aux deux extrémités se trouve
le Sénonien, dont les niveaux supérieurs prédominent. En consé-
quence, c'est par une voûte anticlinale dirigée nord-sud, et rompue
au sommet, que devrait s'appliquer l'iutercalation des couches plus
anciennes de Monciaco. Mais les dislocations nombreuses et les
changements perpétuels d'inclinaison des assises ne permettent
guère de reconnaître le phénomène dans sa simplicité primitive.
Le Cénomanien était connu. M. Fallot avait aussi annoncé l'exis-
tencedu Sénonien à Beaulieu, M. Potier avait observé les grès à
Bivalves et à Gastéropodes. La découverte du Micraster arenatus
permet maintenant de classer positivement la plus grande partie de
la presqu'île de Saint-Hospice dans le Sénonien supérieur ou Cam-
panien, au niveau de la craie de Meudon, tout en admettant vers
Beaulieu le Sénonien inférieur qui n'est plus observable actuelle-
ment.
3° Environs de Menton.
M. Baron (1) s'est servi de l'expression Bassin de Menton, et le
compare à une cuvette. Je dirai plutôt que c'est un golfe relevé au
nord, le mot cuvette impliquant un espace qui aurait été, à un
moment donné, définitivement fermé du côté de la mer, ce qui
n'est pas le cas ici. Ce bassin, enclavé dans les puissantes masses
(I) n. s. <;. F., t. XXI, p. 110.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LKS ALPES-MARITIMES 427
rocheuses du Jurassique supérieur qui forment des pics de 1.000
et môme 1.200 mètres d'altitude, présente sur ses bords le Crétacé
supérieur très relevé. Contre celui-ci s'appuie en sensible concor-
dance l'Eocène (étage parisien), avec le faciès côtier delà Palarea à
l'ouest et au nord, avec le faciès pélagique à Nummulites à Test.
Au centre du bassin se trouve la formation appelée grès de Menton,
que M. Potier attribue à l'Eocène supérieur. Il y a bien cependant
quelques accidents secondaires, mais qui n'infirment pas l'exac-
titude de la conception de M. Baron. Ainsi, à 100 mètres environ
au-dessus de l'Hôtel National, j'ai remarqué des rochers juras-
siques en place, sous forme d'un calcaire très cristallin avec
baguettes de Cidaris et empreintes de Pecten. Peut-être est-ce un
récif, peut-être est-ce un éboulement détaché des pics plus éloignés.
Transportons-nous à l'ouest, dans le quartier appelé Lodola, vers
le commencement de la presqu'île qui aboutit au cap Martin. Un
petit vallon, suivi par la route nationale, marque à peu près la
limite des formations jurassique et crétacée. Toutefois le Crétacé se
voyant aussi sur le côté ouest, on peut en conclure que ce vallon
est dû à l'érosion, et non à une faille. La route entame donc les
couches qui se prolongent sur les coteaux couverts d'oliviers. Je
n'ai guère recueilli de fossiles qu'à un endroit, c'est ù la carrière
abandonnée qui est située derrière la caserne des chasseurs alpins,
et dans quelques éboulis au-dessus.
A mesure qu'on s'élève sur les coteaux, les fossiles sont de plus
en plus rares ; et à une certaine altitude j'ai parcouru d'assez vastes
espaces sans apercevoir autre chose que quelques empreintes
d'Inocérames. Ces couches se prolongent jusqu'au village de Gor-
bio, où on les retrouve dans de meilleures conditions d'observation.
A Gorbio, au dessus et à l'ouest du village, beaucoup de pentes
et de ravins permettent de recueillir des fossiles dont quelques-uns
assez bien conservés: ce sont surtout des Echiuides et des Spon-
giaires. Les couches sont des calcaires marneux qui se désagrègent
dans une certaine mesure. Les Spongiaires sont siliceux.
Cette localité de Gorbio est importante pour l'étude du Sénonien,
et je ne crois pas que M. Baron en ait eu connaissance.
On peut observer aussi les couches (c'est affaire de chance d'y
découvrir quelques fossiles sporadiques), en montant à Gorbio,
soit le long de la route carrossable ou de l'ancien sentier à mulet,
soit dans le lit du torrent. M. Baron a indiqué près de Menton, vis-
à-vis du poteau de l'octroi, un point où j'ai fait quelques récoltes.
Cette formation ne me parait pas susceptible dfêtre divisée. Je
428 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 juin
réunirai donc les fossiles de Lodola, des points intermédiaires, et
de Gorbio. Les Echinides, assez abondants et très importants pour
la détermination du niveau, sont les suivants : Micraster decipiens
Bayle (M. cortestudinarinm auct.), Micraster decipiens, variété allon-
gée très voisine de M. Xormanniœ Bue, Micraster Hehcrti de Lacv.,
Micraster corbaricus Lamb. (M. brevis auct.), Micraster ail. brevis
(très voisin du Micraster Epiastcr? brevis de Paderborn; sans lui
être absolument identique, la face inférieure est plus accidentée et
le plastron plus saillant), Micraster Leskei Desm. (M. brciiporus
auct., non M. breviporus Ag.). M. Lambert estime que Hébert a
commis une erreur, en assimilant Micraster Leskei Desmoulins
d'Orbigny, à Micraster breciporus Agassiz L'espèce, si abondante
dans le Turonien supérieur, et qui monte jusqu'à la partie infé-
rieure du Sénonien, doit reprendre le nom de Micraster Leskei.
Je n'en ai recueilli qu'un exemplaire, mais M. Lambert déclare
qu'il est bien typique, et le premier qu'il connaisse de la Provence
ou des Alpes-Maritimes. Echinocorys scu talus Leske, var. Gratesi
De&.iPleurotomariaperspectim d'Orb.;peu d'Inocérames, fnoceramus
Lamarckif Brongn., Terebratula cf. carnea Sow.
Spongiaires extrêmement abondants. De grands exemplaires
cupuliformes.
Le Musée de Menton possède une grosse Ammonite provenant de
ce district, et que j'ai pu comparer avec les belles planches de
M. de Grossouvre. Elle appartient certainement au genre Mortoni-
ceras, mais son état de conservation ne permet pas une détermi-
nation spécifique rigoureuse : l'échantillon est déformé, et les tours
internes ne sont pas visibles. C'est probablement Mortoniceras Bnur-
(jeoisi d'Orb. Gross.,ou 1/. twamun Rœm.; je pencherais pour cette
dernière espèce, parce qu'elle a été signalée daus la région (\), et
aussi parce qu'il m'a semblé, autant que j'ai pu eu juger, que
quelques côtes sont issues par paires du même tubercule ombilical,
Tune des côtes étant plus faible que la priucipale.
Si nous avions a lia ire à Mortoniceras Bourgeoisie nous serions sur
l'horizon coniacien. Si c'est Mortoniceras texan um, nous nous trou-
verions probablement plus haut, daus le Saulonieu, car M. de Gros
souvre estime aujourd'hui que ce fossile n'existe pas dans le
Coniacien (il avait exprimé autrefois une opinion différente).
Bien qu'on doive se guider d'après les Ammonites, toutes les fois
qu'on le peut, je suis obligé, avec un seul iudividu d'espèce indécise,
(!) L'Escarôno, col dos Peyres, par M. do (jrossouvre. S1 -Michel Olivotta (Italie),
près Sospel, par M. Franchi.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 429
de me rapporter de préférence aux Echinides, dont là détermination
par M. Lambert ne peut donner lieu à contestation, et dont la
réunion dans les mêmes gisements donne des résultats remar-
quablement concordants.
Le Micraster decipiem {M. cortestudinarium auct.), et le Micraster
Heberli dont on n'avait peut-être pas encore constaté la présence
simultanée dans la même couche, le Micraster corbaricus (M. bretis
auct. pars.) aussi bien qu'un autre Micraster très voisin du vrai
M. brevis, tout cela annonce de la manière la plus certaine un
niveau très inférieur du Sénonieu.
Depuis les travaux d'Hébert sur les falaises de la Manche, on
sait que le Micraster qu'on appelait autrefois cortestudinarium
caractérise la base de l'étage sénonien.
Le Micraster Heberti, qu'on place dans le Sénonien, occupe un
niveau si peu élevé, que ceux qui l'ont découvert au Bastiê ( Ariège),
MM. Ambayrac et de Lacvivier, penchaient pour le placer dans le
Turonieu (1). Les marnes à Micraster des Corbières, d'où émane le
Micraster corbaricus, sont aussi du Sénonien inférieur, tout autaut
que les premiers bancs de la craie de Villedieu caractérisés par le
vrai Micraster brevis ou Micraster turonensis. Les couches de Gorbio
auraient donc pour équivalents la craie de Cognac et celle du
Tréport. Je suis obligé de me séparer de M. Barou, qui plaçait
indistinctement toutes les couches crétacées des environs de
Menton dans le Sénonien supérieur. Quant à admettre à Gorbio et
à Lodola deux horizons, dont l'un serait coniacien, et l'autre
santonien même inférieur, je ne le puis pas, car j'ai recueilli un
Micraster Heberti en place, au premier lacet de la route de Menton
à Gorbio, très près des marnes éocènes à fossiles de la Palarea ; il
n'y a donc pas d'horizou supérieur à celui de Micraster Heberti,
espèce qui, dans l'état actuel de nos connaissances, est cantonnée à
un niveau très bas.
Micraster Leskei annonce aussi la partie inférieure du Sénonien,
puisque son habitat le plus fréquent est le Turouien.
Quant à Mortoniceras texanum, si sa présence était démontrée, ce
fossile ne nous ferait même pas remonter bien haut, puisque dans
la coupe des Corbières donuée par M. de Grossouvre (2) la couche
n° 3 contenant Mortoniceras texanum et Micraster turonensis succède
immédiatement aux grès n° 2 à Micraster brevis, M. Heberti,
M, Matheroni.
(1/ C. de Lacvivier. Ktudes geol. sur le départ, de l'Ariege, p. 229 et suiv.
(t) B. S. ii. F., t. XVII, p. 518.
430 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A l' ÉTUDE 19 juin
M. Baron paraît avoir été plus heureux que moi dans ses décou-
vertes autour du Castellar, dout il cite des lnocérames et des frag-
ments d'Ammonites. Je n'ai pu observer là qu'un mauvais Micraster
cf. cortestudi7iarium, avec quelques Spongiaires; et je n'ai pas de
motifs personnels pour mettre ces assises au-dessus de celles de
Gorbio. Pourquoi M. Baron place-t il toutes les couches des environs
de Menton à la partie supérieure du Sénonien? Est-ce parce qu'il a
observé près du Castellar une Ammonite du Campanien ou Aturien?
Dans tous les cas, ce n'est que de ce côté qu'existerait le Sénonien
supérieur.
J'admettrais qu'on peut rapporter à la partie supérieure de
l'étage, les assises que j'ai vues au nord du Castellar, dans la vallée
du Careï, sur la route de Castillon. Je les jugerais par analogie
avec ce que j'ai observé sur le territoire italien. Au-delà de la fron-
tière, j'ai retrouvé au cap sans nom qui précède le cap de la Mur-
tola, les calcaires signalés par MM. Gaudin et Moggridge, et où ils
prétendent avoir recueilli Fnoceramus Cuvieri. Ce sont des falaises
entre la mer et le chemin de fer, où les observations sont très diffi-
ciles (les pentes au-dessus sont couvertes d'éboulis). Les couches
fortement inclinées penchent vers l'est-nord-est.
D'abord j'ai remarqué des bancs marneux avec débris d'Échinides,
puis des calcaires gréseux à silex, rappelant ceux de Saint-Hospice.
Je les classerais donc volontiers au même niveau dans le Sénonien
supérieur, bien qu'ils ne m'aient pas offert de fossiles. Quant aux
assises franchement calcaires avec délits spathiques plus accentués
et très blancs, elles pourraient représenter un horizon sénonien
plus élevé eucore, et supérieur à la craie de Meudon. Elles sont
fort peu fossilifères. J'y ai remarqué seulement des fragments de
Lamellibranches de très grande taille, qu'on ne peut extraire de la
roche et que je rapporterais au genre Trichites (1).
Mes couclusioos seront forcément ici un peu incertaines, faute
de bonnes preuves paléontologiques. Si mes prévisions sont exactes
(je dois dire prévisions plutôt qu'observations), les calcaires de la
route de Castillon dont je parlais tout-à-1'heure seraient du Séno-
nien très supérieur. Leur faciès est analogue aux calcaires du cap,
à cause de ces grandes plaquettes spathiques qui séparent les bancs,
et dont on peut enlever des morceaux d'assez grande dimension.
On les observe notamment à l'endroit où la route s'élève par des
lacets. Peut-être le village de Castillon est-il encore sur cette assise.
(1) M. Franchi parle do fragments tT lnocérames à test Gbreux très caractéris-
tiques. Je pense donc qu'il s'agit des mômes fossiles toujours incomplets.
1899 DU SYSTEMS CKÉTACfe DANS LES ALPES-MARITIMES 431
Ces couches du bord de la mer, au cap, entre ceux de Gerbai et de
la Murtola, sont certainement la continuation de celles qu'on peut
observer au-dessus du pittoresque village de Grimaldi (on en voit
aussi la coupe sur la grande route ; je répète que plus bas, dans
les bois de citronniers et les plantations, le terrain est obstrué
par les éboulis du Nummulitique). Je n'ai pu découvrir de fossiles,
mais ces calcaires gréseux ont tout-à-fait l'aspect sénonien ; et
M. Franchi signale plus haut encore, sur le Mont Belliuda, des
Micraster écrasés.
Le degré d'inclinaison des couches situées au-dessus de Gri-
maldi, précisément à pic sur le ravin du Pout Saint-Louis, me
donnent à penser que la coupe de MM. Gaudin et Moggridge, qui
parait d'abord singulière, pourrait être exacte de ce côté (la partie
occidentale est en tout cas inexacte, la pente des couches étant en
sens inverse). M. Franchi la tient pour bonue, et dit que Fontannes
s'est trompé dans celle qu'il a donnée du vallon de Ciotti (1).
Je laisse à de plus experts que moi en matière de tectonique le
soin de résoudre définitivement la question. Je me borne à faire
remarquer que les coupes de Fontannes et de M. Frauchi ne sont
pas dirigées dans le même sens, mais presque perpendiculairement
l'une à l'autre. Toutefois je vois bien que Fontannes n'admet pas le
synclinal par lequel les autres auteurs expliquent la région de la
Murtola. M. Frauchi appuie sou opinion sur celles de MM. Taramelli
et Potier.
MM. Gaudin et Moggridge ont prétendu reconnaître ici l'étage
danien entre le Sénonien et l'Eocène ; ils se fondent sur la décou-
verte de Foraminifères, preuve qui me parait discutable. M. Franchi
également croit à la présence du même étage. Je laisse à ces diffé-
rents auteurs la responsabilité de leurs assertions.
Eufin, pour terminer ce qui se rapporte aux environs de Menton,
je dirai que d'après les fossiles du Musée, le Cénomanien existerait
au nord de la cime de l'Ours, derrière les grands pics jurassiques
(ceci n'est donc plus dans le bassin de Menton). Quelques bons
échantillons : Schlœnbachia varians Sow., Acanthoceras Alanlelh
d'Orb., Holaster subglobosus Leske, recueillis par le Directeur
M. BonQls lui-même, indiquent en effet qu'on retrouve dans cette
direction le faciès de la Craie de Rouen que j'ai observé à Laghet et
à Eze.
(1) B. S. G. 7«\, t. V, p. 858.
432 DE RIAZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 juin
Résumé.
Les étages crétacés que j'ai observés dans le cadre de cette étude,
sont les suivants :
Le Néocomien ou Barrémien à Pout-de-Peille, sur la rive gauche
du Paillon, caractérisé par des Ammonites et des Hélemnites peu
déterminahles. Le même étage a été vu par la Société en 1877 dans
la vallée de Tourette.
L'Aptien ne s'est pas offert à moi. Il est assez extraordinaire
qu'Eug. Sismonda ayant créé une espèce bien connue des géologues,
le Toxaster Collegnoi (1) (fréquentée Capeou, près Pas-des- Lanciers,
et ailleurs), les gisements ne soient pas faciles à retrouver aujour-
d'hui. M. Ambayrac, cependant, croit counaitre des affleurements.
On aurait pu aussi s'atteudre à observer ici la riche faune d'Ammo-
nites de Hyèges et autres localités ; mais cette faune ne parait pas
avoir vécu dans le périmètre que j'ai visité.
L'étage albiense trouve à Saint-Laurent (environs d'Eden-Hôtel),
et près d'Eze, où il est très fossilifère avec abondance de Bêle m -
nites et de Térébratules. Il doit en exister uu gisement important
près de Notre-Dame-de-Laghet, puisque MM. Paronaet Bonarelli en
ont décrit de nombreux fossiles.
Le Cénomanien se voit à Laghet, à Pont de-Peille, dans la vallée
de Tourette, et sur divers autres points, sous le faciès de la craie
de Rouen à Ammonites et à Echinides. Outre ce faciès entièrement
pélagique, on voit aussi des bancs d'Exogyra columba. Ceux-ci sont-
ils superposés aux calcaires marneux à Acanthoccras naviculare,
Schlœnbachia varians et Holaster subglubosusl II semble plutôt que
les deux faciès s'excluent, celui à Ostracées occupant une position
géographique plus méridionale.
Je n'ai pu constater sur aucun point la présence de l'étage turo-
nien, et je ne suis pas plus en mesure que les observateurs précé-
dents de donner de ce fait une explication satisfaisante. La sédimen-
tation parait continue et concordante, le plissement général de la
contrée étant, de l'opinion de tous, postérieur à l'Eocène.
M. Fallot n'a reconnu le Turonien d'une manière certaine que
dans peu de localités : aux Ferres (où il est caractérisé par Periaster
oblongus d'Orb. et Micraster laxoporus d'Orb. ; entre Saint-Lions
(1) Mcmoria geo-zoologica, etc., p. 21. La mention de gisement est : « Grès
verde di Nizza maritima ».
L'espèce étant dédiée à Collcgno (général commandant la division de Gènes), il
vaut mieux dire T. Collegnoi que T. Collegnii.
1899
DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES -MARITIMES
433
et Hyèges, où M. Doze a recueilli Inoceramus labiatus, enfin sur la
route de Vergons à l'Iscle, où il a été observé Pachydiscus peramplus.
M. Zùrcher (1) classe cependant certaines assises des Basses-
Alpes dans le Turonien, à cause de l'ideutité des exemplaires
d'Exogyracolumbaquoïi y recueille avec ceux de Soubise (Charente-
Inférieure), où cette espèce accompagne Inoceramus labiatus.
J'ignore si cette manière de voir sera généralement acceptée. Je
crois prudent de ne reconnaître l'existence du Turonien dans les
régions alpines, où il est peu caractérisé, que sur des preuves plus
décisives.
De tous les étages que j'ai vus, le Sénonien est le plus étendu, le
plus puissant, le plus complexe, et aussi le plus intéressant.
M. Fallot a fait remarquer que la chronologie minutieuse des
assises sénoniennes dans les Alpes est difficile à établir, parce que
les gisements sont isolés, mal encadrés, de faciès différents. Grâce
aux déterminations de M. Lambert, je crois a voir réalisé un progrès
notable en présentant la succession suivante :
T.
u:
?
X
s
H
X
Ui
<
M
Z
<
û.
r.
u
T.
©
H
Z.
<
V,
M
3
<
T.
3
Couches des carrières de Contes-les-
Pins avec Pachydiscus neuber-
gicus, P. Levyi, Mortoniceras
campaniense, etc.
[ Bancs à Mie r aster gibbus et M.
Hrongniarti de Font de Giariel.
Bancs à Micraster arenatus entre
la Madone et Contes.
Grès de la Trinité-Victor à Micras-
ter coranguinum et Inocérames.
Couches de Grimaldi et du Cap
entre Gerhai et Ja Murtola ? Cou-
ches des Monti à Castillon.
(ires lumachelles de la presqu'île de
S'-Hospice à Micraster arenatus
et Ostracées.
Banc d'Ostrea vesicularis% 0. pro-
boscidea, Exogyra pi ici fer a, etc.,
près de la villa Vial à Beaulieu.
Marnes de Beaulieu à Micraster
coranguinum.
Calcaires marneux de Lodola et de
Gorbio avec Micraster decipiens,
M. Heberli, M. Leskei, et Spon-
giaires.
Ce qui est remarquable, c'est la prédominance des faciès péla-
giques, et la ressemblance de ces couches sénonien ues (sauf leur
couleur grisâtre) avec celles d'Angleterre et de Normandie. Ce
n'est qu'à la fin de l'époque qu apparaissent des Ostracées, et cela
seulement dans la presqu'île Saint-Hospice, où déjà le phénomène
(!) Bull, des serv. de la carte géol. de Fr„ t. II, p. il.
2 Novembrr 189». — T. XXVII.
Bull. Soc. Gèol. Kr. — 2J8
434 DE R1AZ. — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE 19 jllin
s'était manifesté à l'époque cénomanienne. Tout le reste de la
faune, et surtout les grandes Ammonites de Contes-les-Pins, a
vécu et s'est déposé dans des mers profondes.
Cette région des Alpes-Maritimes se rattache par les Basses-Alpes,
le bassin de Dieulefit, les affleurements du Haut-Dauphiné et de la
Savoie, les lambeaux jurassiens de craie grise et blanche, au bassin
anglo-parisien. Cette vaste aire géographique fait partie de la pro-
vince septentrionale de la période crétacée. J'ai éprouvé un grand
plaisir à trouver ici des espèces d'Echinides que j'avais récoltées en
Normandie et à Lewes, et à constater la différence absolue de cette
formation, au moins à la fin de la période, avec celle de la basse
Provence et de la vallée inférieure du Rhône, où le faciès coralligène
est si acceutué.
M. Collot (1) a tenté d'expliquer par un isthme séparant deux
mers, ces dépôts si dissemblables, quoique contemporains. M. Fallot
lui a fait remarquer qu'il n'était pas nécessaire pour cela de
supposer des mers qui ne communiqueraient pas entre elles : la
différence des températures, des profondeurs, l'existence des cou-
rants, permettent en effet de comprendre que des faunes très
différentes vivaient à des distances qui pouvaient n'être pas très
grandes. Le fait a dû se renouveler fréquemment dans l'histoire
des âges.
Enfin, je n'ai recueilli aucutfe preuve de l'existence de l'étage
danien, affirmée par quelques auteurs.
Ce travail peut être considéré comme un appendice à l'ouvrage si
important et si consciencieux de M. Fallot sur les étages crétacés
du sud-est de la France. Mon distingué confrère m'a dit qu'après
avoir consacré plusieurs années à des recherches pénibles dans la
Drôme, les Basses Alpes et le nord des Alpes Maritimes, il avait
été obligé, à regret, d'abréger ses recherches sur le littoral. J'espère
qu'il ne m'en voudra pas si j'ai tâché de les compléter et de les
étendre. Mes résultats ont d'ailleurs toujours confirmé les siens.
Ainsi que je l'ai dit en commençant, je n'ai nullement la prétention
d'avoir complètement élucidé les problèmes difficiles que soulève
la constitution du système crétacé des Alpes-Maritimes, même
dans la région limitée à laquelle se sont bornées mes observations.
Je reconnais que pour la vallée du Paillon et de ses affluents, beau-
coup de temps et d'efforts seraient encore nécessaires avant d'arriver
à une connaissance complète : il y aurait à suivre bauc par banc des
(1) n. s. G. /•'., t. xix, p. 74.
1899 DU SYSTÈME CRÉTACÉ DANS LES ALPES-MARITIMES 435
couches dont l'allure change à chaque pas, et dont les fossiles ne
sont ni abondants, ni bien conservés.
En revanche, j'ai fait une étude assez complète de la presqu'île
de Saint-Hospice, sur laquelle je n'avais trouvé que des observations
ou très anciennes ou fragmentaires. La découverte du Micraster
arenatus, à Saint-Hospice même, et celle d'un banc d'Ostrea vesicu-
laris près de Beaulieu, me paraissent avoir une certaine impor-
tance. Je crois que le Cénomanien n'avait pas encore été indiqué à
Laghet, où il a le faciès de Rouen à Ammonites. Enfin par les
fossiles que j'ai recueillis à Lodola et à Gorbio, j'ai pu classer avec
certitude les couches des environs de Menton. Comme faits paléon-
tologiques, j'ai découvert le Micraster Leskei [M. breviporus auct.),
qui n'était pas cou nu en Provence. Le Micraster lleberti n'avait pas
encore été rencontré en dehors des Pyrénées (1), et enfin les Micraster
arenatus de la Madone de Contes et de Saint-Hospice, ont permis à
M. Lambert de confirmer la valeur de l'espèce de Sismonda, incon-
nue dans d'autres régions.
(1) .l'avais écrit cette phrase un peu précipita m mont, et «les recherches ulté-
rieures m'ont fait découvrir que M Corel l'avait cité des Basses-Alpes (vallée de.
lTbaye), M. Roussel, des Cornières, où il est fréquent à Bu^arach notamment
(ceci est encore un faciès pyrénéen). Enfin il vient d'être indiqué par M. Kara-
kasch comme provenant du Caucase central, où il se trouverait dans une couche
contenant Pachydiscus Baeri, Innceramus Cuvieri, /. Cripsi, Ananchytrs gibha,
A. ovata, etc. (Note ajoutée pendant l'impression).
436 19 Juin
SUR LE FLYSCH A FUCOÏDES DE LA BELLONGUE
ET DU BASSIN D'OUST (PYRÉNÉES),
par M. CARALP.
«
Dans les montagnes du Saint-Gironnais et au pied de la haute
chaîne, se développe une zone puissante, en grande partie schis-
teuse, sur Tâge de laquelle plane l'indécision la plus complète.
Quelques géologues, en effet, y voient une formation trèsaucienne;
d'autres l'ont rapportée au Jurassique; la plupart, à divers étages
du Crétacé supérieur.
Adossée vers le sud au massif grauito-gneissique de Seix-Castillon,
dont le cap de Bouirech forme le point culminant, et plus loin au
chaînon carbonifère de l'Arraing, elle s'arrête du côté du nord à la
base des escarpements abrupts de Surroque et de Balaguères qui
relèvent du Crétacé inférieur. La Bellongue, grande vallée longitu
dinale qui s'étend du col de Portet à Castillon, en fait essentielle-
ment partie, et avec elle les deux rives du Lez entre Audressein et
Alas, les vallons d'Astien et de Sour, le pays d'Alos et de Rogalle,
le bassin d'Oust presque en entier.
C'est une région relativement déprimée, à surfaces sphéroïdales,
où se montrent rarement des reliefs heurtés mais où abondent les
profondes coupures ; le ruissellement, conservant ici toute son
énergie érosive grâce à l'imperméabilité à peu près complète du
sol, a produit daus cette région naturelle des effets considérables;
mais le modelé qui en résulte varie généralement avec l'altitude :
dans les parties hautes dominent les croupes allongées Rabaissant
graduellement vers le cours d'eau principal ; au voisinage du
thalweg, elles se résolvent souvent en ballons ou eu buttes coniques
$e touchant par leur base.
Du col de Portet aux rives du Salât la longueur de cette zone
dépasse 30 kilomètres; mais elle se retrouve bien au-delà de ces
limites, soit vers l'est à travers le paysd Aleu et de Massât, et selon
nous jusque dans le bassin de Tarascon, soit vers l'ouest, dans la
vallée du Ger et sur les flancs de la monlagne de Cagire; en outre
des traînées jusqu'ici méconnues se montreut au uord de cette
bande en plein terrain secondaire : l'une d elles en particulier, dont
aucun géologue n'a jamais soupçouné l'existence, peut se suivre sans
1899 CARALP. — SUR LE FLYSGH A FUCOÏDES DE LA BELLONGUE 437
interruption depuis les environs de Moulis jusque dans la région
d'Arbas et de Paloumère, par Pouech de Luzenac, Espiède et
Beouech, le col de la Houste, le Tue de la Cabanasse.
La largeur de la zone principale est très variable : atteignant son
maximum dans la Bellongue sur les méridiens d'Orgibet et
d'Argein où elle dépasse 6 kilomètres, elie diminue vers Test dans
la traversée du Lez et de la rivière de Sour ; réduite à un millier de
mètres dans la gorge d'Alos. elle s'épanouit au-delà du Pic de la
Quère pour atteindre environ une lieue sur les bords du Salât.
Dans la région que nous venons d'esquisser, les schistes domi-
nent, surtout dans la Bellongue ; mais ils sont loin de constituer le
seul élément : on leur trouve fréquemment associés, alternant avec
eux à maintes reprises, des grès, des conglomérats plus ou moins
puissants et diverses roches calcaires.
Les schistes ont habituellement un faciès paléozoïque très
accusé : quand ils n'ont pas subi d'altération ils sont noirs comme
les schistes carbures du Silurien; parfois ternes comme des schistes
argileux, ils ont dans d'autres cas la surface brillante, satinée, ainsi
que la cristallinité des phyllades les plus métamorphiques. Le délit
ardoisier y est fréquent.
Les grès, ordinairement micacés, sont en couches minces ou en
grandes dalles ; aux environs d'Aleu ils sont activement exploités
comme pierres à aiguiser. Leur graiu est variable ainsi que leur
composition. Ils se rapportent communément au psammite, mais
on rencontre aussi parmi eux des arkoses, des métaxites et parfois
même des quartzites.
Les conglomérats (poudingues et brèches) sont essentiellement
variables quant à la grosseur et à la nature de leurs éléments. Leur
composition est très complexe : dans un conglomérat des environs
de Rogalle on trouve du granité, des sables granitiques, du quartz
blanc, de la lydienne, des schistes noirs, du quartzite.
Les calcaires varient également dans de larges limites : parfois
ce sont des plaquettes minces, rappelant celles de l'infralias pyré-
néen, ou des calcschistes ardoisiers; ils constituent ailleurs des
bancs épais, gris ou noirs comme les calcaires néocomiens ; dans
certains cas, ils présentent la blancheur et la cristallinité des
marbres statuaires.
Contrairement aux idées généralement reçues, ces diverses roches
font partie d'un même système impossible à séparer génétiquement.
Ces sédiments de divers ordres forment en effet ente eux des alter-
438 CARALP. — SUR LE FLYSCH A FUCOÏDES DE LA BELLONGUE 19 Juin
nances multipliées parfois à très court intervalle ; ils se remplacent
les uns les autres quand on les suit en direction. Le schiste passe
fréquemment au calcschiste et au calcaire; cette transformation
latérale est parfois graduelle (Tue de la Quère) et se fait par alter-
nances, mais parfois (monticule de la Haille près Cescau) le calcaire
apparaît brusquement dans la masse des schistes et se termine de
même à la façon d'une construction corallienne.
Ces diverses roches ne sont donc pas indépendantes, mais elles
font partie d'un même ensemble stratigraphique remontant sensi-
blement à la môme époque.
Il faut toutefois faire remarquer que ce complexe d'assises est
souvent interrompu, du moins à la surface, par divers dépôts trans-
gressifs d'âge plus ou moins récent, disposés de la façon la plus
irrégulière, tantôt en Ilots restreints et en lambeaux discontinus,
tantôt en traînées plus ou moins considérables pouvant se suivre sur
un long parcours. Ces dépôts anormaux sont variables comme âge :
dans la Bellongue notamment, ceux qui avoisinent le sud sont for-
més par du grès triasique ou du calcaire sinémurien qu'accompa-
gnent fréquemment des ophites ; vers le nord le Sinémurien se
mêle au Crétacé inférieur et aux dolomiesdel'oolite; à l'ouest enfin,
sur la ligne de partage séparant la Bellongue et la vallée du Ger,
on trouve avec le Crétacé inférieur le Jurassique au complet.
Cette zone sédimentaire est traversée par de nombreuses roches
éruptives en dikesou en massifs : le granité se montre sporadique-
ment sur de nombreux points, en particulier dans les pays de
Rogalle, Alos, Moulis et Engomer, c'est-à-dire sur la bordure du
massif granito gneissique méridional. Les ophites se rencontrent
dans une foule de localités ; la Bellongue est particulièrement riche
à cet égard. Ajoutons à ces roches d'origine interne des Lherzolites,
parfois changées complètement en serpentines, comme celle de
Castillon, ainsi que l'a montré M. Lacroix, en outre des diorites
(environs d'Argein) et enfin de nombreux filons de quartz tautôt
stérile, tantôt métallifère. Ces diverses roches ont modifié de la
façon la plus nette les sédiments qu'elles en ont traversés, donnant
naissance à une foule de variétés éminemment cristallines, fort
intéressantes pour le minéralogiste, mais qui compliquent singu-
lièrement l'étude géologique de ces régions.
A quel horizon géologique faut-il rapporter les schistes de la
Bellongue et les roches qui leur sont congénères ?
1890 et du bassin d'oust 439
Les fossiles n'ont fourni jusqu'ici aucune ressource pour cette
détermination. Les calcaires n'ont donné que des encrines à tige
ronde et quelques autres débris indéterminables (polypiers, bival-
ves. . .). Les fucoïdes, il est vrai, sont en certaine abondance, et on
les trouve à la fois dans les grès, les schistes et les calcaires en
plaquettes ; on en a signalé depuis longtemps dans diverses loca-
lités du canton d'Oust et de Massât ; j'en ai recueilli également sur
quelques points de la vallée du Lez: à Aulégnac, près Castillon, à
Alas en Balaguères, à Sl-Lary.
Les roches à fucoïdes du bassin d'Oust ont été rapportées par
la plupart des géologues au niveau du grès de Celles, et par suite
au Crétacé supérieur, de ce seul fait que ces grès renferment aussi
des fucoïdes. Mais l'assimilation des fucoïdes de ces deux prove-
nances paraît très discutable; elle a été mise en doute par
M. de Lacvivier qui trouve que les empreintes végétales du bassin
d'Oust « ne ressemblent en rien aux traces charbonneuses du grès
de Celles ». On sait d'autre part que ces végétaux marins ont peu
varié à travers les temps géologiques ; leur valeur stratigraphique
est, par conséquent, très faible.
Les fossiles n'apportant aucune donnée positive pour la détermi-
nation de Tâge, nous avons cherché si des considérations stratigra-
phiques ne nous fourniraient pas des arguments.
1° 11 est d'abord à remarquer que cet ensemble d'assises, que
nous désignerons provisoirement par la lettre x, est recouvert en
discordance et parfois en transgressivité par divers terrains secon-
daires. On pourrait à cet égard multiplier les exemples :
Entre St-Lary et Portet (fig. 1) les schistes ardoisiers x accompa-
gnés de schistes terreux sont discordants en direction et en incli-
naison avec les calcaires à couseranites et dolomies du Sinémurien
(J1) reposant sur l'ophite.
A Alas en Balaguères (fig. 2) le Sinémurien (J1) formé à la base
de brèches dolomitiques et vers le village de calcaires cristallius
à couseranites, est absolument discordant avec le système x de la
côte de Coumaoury, qui se compose de roches variées, schistes,
grès, caleaires noirs, conglomérats, tufs éruptifs, alternant à
diverses reprises.
Si ou suit ce complexe d'assises vers l'ouest, on voit avant
d'arriver à Balaguères (fig. 3) que les schistes et calcaires noirs de
cette série, particulièrement développés à Espiède, sont discor-
dants avec le Reuper (T;{) et le Sinémurien des Ruines (côte 730) et
que, d'autre part, du côté nord ces assises sont recouvertes en trans-
440 CAfULP. — SUR LE FLYSCH A FUCOÏDKS DE LA BELLONGUE 19 JUÏD
gressivité par les dolomies de l'oolite et les calcaires néocomiens.
Les dislocations sont encore plus accusées dans la gorge de
Lachein (fig. 4): à Beouech, en efïet, le système x représenté par
des schistes carbures, plus ou moins riches en phosphates de
chaux, et plus à l'ouest par des grès, est recouvert soit par le Trias,
soit par le Sinémurien ou les dolomies de l'oolite (J3), soit, comme
à la Hourcade, par le Crétacé inférieur (C1) de l'Embès.
SainL-L ary œ^<0^M^':>>^(^
éoi,,,|'l,,hl '1 l'-ii-'"
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Fig. i. — Coupe entre Saint- La ry ot Portet.
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S.O.
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or
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Fig. 2. — Coupe d'Alas a" la cote de Coumaourv.
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Balaâuères
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Fi#. 3. — Coupe de la montagne des Kuines à Bala^uères.
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Fig. 4. — Coupe du signal de Caslelnerou à Beouech.
189»
ET DU BASSIN D OUST
441
0.
E.
Bcouoch
Fig. 5. — Panorama schématique pris du cul d'Argent.
t35o
S • Ccl delAmmna^
/ , / ïMïV <& Sa/sein
Pont
Fig. 0. — Coupe entre le col de l'Arraing et la Bellongue.
Légende explicative commune à toutes les figures.
C , Calcaires néocoin iens ; J\ Dolomies de l'oolite; Ji, Calcaires sinémuriens ;
'P, Marnes bariolées du Keuper; T>, (irès bigarrés; P*, Conglomérats et grés du
Permien moyen; H', Calcaire carbonifère; x, Système de la Bellongue (schistes,
calcaires, grès, conglomérats); tû 0 phi te.
Les rapports de ces diverses assises sont indiqués dans un dessin
panoramique (fig. 5) pris depuis le col d'Argent au sud de Lachein :
sur le plan premier sont les schistes x de la Bellongue qui, au Tue de
Castelnerou (tig. 4), renferment des bancs de calcaires et de brèches;
puis successivement sur des plans de plus en plus éloignés, on a
figuré le calcaire néocoinien de TEmbès (Cl), le Sinémurien (J1) de
Lachein, horizon du calcaire des Ruines et de celui d'Alas; puis,
les schistes (x) de Beouech recouverts çà et là par les marnes
bariolées du Keuper, et enfin formant le fond les dolomies de
l'oolithe (J3) et les calcaires du Crétacé inférieur (C1).
Les deux bandes schisteuses de la Bellongue (Castelnerou) et de
Balaguères (Beouech), ici séparées à la surface par le Néocomien de
l'Embès, se rejoignent néanmoins en profondeur, comme on peut le
voir à la Hourcade (fig. 4).
2° Les considérations qui précèdent attestent l'antériorité des
schistes de Bellongue par rapport aux terrains secondaires. Ils
442 CARALP. — SUR LE FLYSCH A FUGOÏDES DE LA BELLONGUE 19 Juîll
appartiennent donc au Primaire. Divers géologues étaient déjà
arrivés à cette conclusion mais sans preuves à l'appui ; M. Carez (1)
seul a abordé ce sujet d'une façon plus rigoureuse en faisant inter-
venir quelques discordances qu'il a reconnues aux environs de
SaintLary.
A quel étage du Primaire faut-il rattacher ces schistes? Ceux qui
les attribuent au Primaire les rapportent aux terrains les plus
anciens, soit au Silurien, soit au Cambrien et au Laurentien. Nos
études montrent que cette manière de voir est inacceptable.
En suivant la bordure méridionale de ces schistes dans la Bellon-
gue, nous avons pu voir qu'ils succèdent immédiatement, soit dans
les hauts vallons d'Augirein et SaintLary, soit dans la coume de
Salsein, au calcaire carbonifère qui forme les crêtes méridionales.
Une coupe (C\g. 6) levée entre le col de l'Arraing et la Bellongue
dans la directiou d'Argeiu nous paraît décisive à cet égard. Elle
montre eu effet que les schistes (.r) de ce col qui, à travers la forêt
de Salsein, se rattachent à ceux de la Bellongue, butent en con-
cordance contre les calcaires carbonifères (H) du Tue du col de
Pouech (1350m), et d'autre part sont en rapport, en dessous du Pla-
de Pont, avec les grès et conglomérats rougeâtres (P-) du Permien
moyen sur lesquels vienneut s'adosser les grès triasiques (T1) et
des bancs de calcaires cristallins.
La position de ces schistes entre le calcaire carbonifère, équiva-
lent du calcaire dinantîen à Productus d'Ardengost, et les conglo-
mérats rougeâtres du Rothliegende, les désigne comme représen-
tant le carbonifère et selon toute apparence l'étage houiller.
Le même âge carbonifère doit être appliqué selon nous à tous les
schistes de la Bellongue et du bassin d'Oust, aux calcaires à
fucoïdes, aux grès et conglomérats, toutes roches qui, ainsi que
nous l'avons dit, paraissent inséparables. Avec ses roches détriti-
ques, ses schistes argileux si abondants, ses fucoïdes, le système
de la Bellongue paraît représenter un flysch carbonifère.
Ce complexe d'assises n'a toutefois pas la puissance qu'on lui
supposerait au premier abord : la Bellongue. en effet, et le bassin
d'Oust sont des régions essentiellement plissées, dans lesquelles le
plougement des assises éprouve de fréquentes variations. L'étude
détaillée de ces formations sédimentaires révèle une série d'anticli-
naux et de synclinaux orientés daus leur ensemble de l'est à l'ouest,
réserve faite de quelques perturbations locales ; certains de ces
(1) «. S. G. F., 18 juin 18%.
1899 et du bassin d'aoust 443
anticlinaux paraissent occupés par le calcaire; ce serait alors un
retour du Dinantien sous les schistes et conglomérats houillers.
Ainsi que nous l'avons déjà dit, les formations de la Bellongue et
du bassin d'Oust ont été mises sur des niveaux très variés. Coquand
le premier attribua au Jurassique et plus spécialement au Lias les
schistes ardoisiers de la Bellongue et en particulier ceux d'Arrout
où Charpentier avait signalé des ammonites. Dufrénoy et plus tard
M. Mussy acceptèrent cette détermination dans ses traits généraux.
Au début de mes recherches j'avais, pareillement, sur l'autorité de
ces géologues, attribué au Lias les schistes ardoisiers; j'abandonnai
plus tard cette manière de voir qui se heurtait dans la pratique à
de grandes difficultés.
M. Roussel y voit uniquement du Crétacé inférieur et surtout du
Gault, d'autres enfin rapportent ces formations au Primaire, soit
au Cambrien et au Silurien, comme M. Bleicher, soit seulement au
Silurien, comme M. de Lacvivier. Plus récemment, M. Carez s'est
prononcé également pour leur attribution aux terrains paléozoïques;
il a rapproché, mais avec quelques doutes, les schistes ardoisiers
de ceux du Siiurieu moyen ; il a laissé néanmoins dans le Lias les
schistes de la rive gauche de la Bouigaue, bien qu'on ne puisse les
vséparer de ceux de la rive droite.
Quant aux grès et conglomérats de la région d'Oust, la plupart des
géologues, sinon tous, n'y ont vu jusqu'ici que du Crétacé supé-
rieur. Mais cette détermination ne parait nullement plausible étant
donnée l'association intime qui existe entre les grès et les schistes
ardoisiers: tout semble indiquer que ce sont là deux formations
synchroniques.
M. Stuart-Menteath adresse les observations suivantes sur le
bassin de Saint -Jeun- Pied- de- Port.
Le Muschelkalk, caractérisé par Linyula tenuissimu, depuis
Baigorry jusqu'à Saint-Michel, forme le fond de ce bassiu, qui a
été brisé, disloqué et enveloppé de la façon la plus irrégulière par
des émissions d'ophite qui ont dû former une sorte de laccolite
presque continue. Pendant l'émission le bassin a été rempli de
Flysch qui, aujourd'hui déblayé, forme de grandes falaises au nord,
présentant à tous les niveaux des lentilles de tufs ophitiques for-
més pendant les émissions laccolitiques eu profondeur. Dans le
bassin un lambeau conservé par failles, préseute, le long de sa
bordure méridionale, des Nérinées, Actionelles, Caprines, Huîtres et
444 STUARTMENTEATH. — OBSERVATIONS 19 Juin
Polypiers caractéristiques de la base cénomauienne du Fiysch. On a
donc la preuve que l'ophite en question est postérieure au Trias et
contemporaine du Fiysch. En la faisant contemporaine du Muschel-
kalk on aurait donné à ce dernier une épaisseur invraisemblable.
La superposition du Lias fossilifère est ici incontestable. Dans
d'autres gisements à Ungula le Lias est remplacé par l'ophite,
transformé en gypse, ou inséparable du Fiysch, dont la base lui
ressemble parfois très exactement. Sur la lisière des bosses des
Pyrénées chaque terme de la série stratigraphique varie très brus-
quement en épaisseur. Le Fiysch parait avoir enveloppé ces bosses
pendant leur développement et de manière à se déposer sur un
terme quelconque, par suite d'une érosion contemporaine attestée
par des conglomérats également très variables. Le Muschelkalk du
Hartz et celui des Pyrénées ont une grande similarité de dévelop-
pement et de relations. L'ophite dans les Pyrénées parait due à des
facilités d'intrusion; et d'ailleurs les bosses de calcaire crétacé
dans le Fiysch présentent souvent des émissions d'ophite entre la
surface du calcaire et la base des marnes enveloppantes.
Au sud de Saint-Jeaji, des argilites et conglomérats permiens
sont nettement intercalés entre le poudingue quartzeux de la base
du Trias et la grauwacke schisteuse micacée qui m'a donné partout,
et dernièrement encore à la naissance de la Bidouze, à six kilo-
mètres au S.-E. de Saint-Just, des plantes caractéristiques du
Houiller le plus supérieur. Le Permien, souvent difficile à distin-
guer du Trias ou du Fiysch, est typique entre Banca et Les Aldudes,
et les plantes du gisement cité sont d'une conservation très satis-
faisante. Entre Banca et Valcarlos toute la montagne est composée
de Dévonien fossilifère partout lardé de filons et lentilles métamor-
phiques de quartzite. Le Dévonien, avec ce môme faciès, repose sur
des ardoises du Silurien et forme le fond du pays. A l'O. d'Irissarry
et au S.-E. d'Urepel on voit des pointements lenticulaires d'ophite
traversant les quartzites. De pareils points d'émission sont nom-
breux en Navarre, mais ont facilement échappé à l'observation. La
silicification, qui a surtout attaqué les calcaires, est presque entiè-
rement antérieure au Trias, et a été accompagnée d'imprégnations
de cuivre, plomb, argent, mercure et étain. Les ophites ont été
largement accompagnées de fer.
1899 445
QUELQUES POINTS NOUVEAUX DE GÉOLOGIE JURASSIENNE
par xM. BOURGEAT.
Sommaire : I. Le Glaciaire. — II. Jurassique supérieur de la Plaine.
III. Failles obliques.
Comme les loisirs me manquent pour exposer en détail un cer-
tain nombre de faits, que j'ai récemment recueillis sur la région du
Jura, je prie la Société de me permettre de résumer les principaux
d'entre eux. Ils se ramènent à trois chefs : le Glaciaire, le Jurassique
supérieur de la plaine, les failles obliques.
I. — Le Glaciaire.
En ce qui concerne le Glaciaire, j'ai à signaler deux nouvelles loca-
lités présentant des blocs alpins. La première est le territoire de
Germagnat-sur-Surand, la seconde le plateau des Rousses. A Ger-
raagnat, en effet, soit du côté de Montfleur, soit du côté de Simandre,
on remarque le longdu Surand des blocs assez volumineux de quart-
zites et de gneiss qui offrent les mêmes caractères que ceux de Si-
mandre et qui doivent avoir la même origine. Si ceux de Simandre
sont réellement alpins, comme tout parait le démontrer, il faut
admettre que le glacier qui les a charriés remontait la vallée du
Surand jusqu'au-dessus des moulins de Corcelle, c'est-à-dire au-
dessus de l'altitude de 312 mètres.
Aux Rousses jusqu'ici je n'avais pu rencontrer aucune trace de
glaciaire alpin. Il me semblait cependant presque nécessaire d'ad-
mettre que le glacier du Mont-Blanc avait débordé le col de la Fau-
cille ou le col de Saint-Cergues et couvert le territoire des Rousses
pour expliquer la présence de micaschistes, de chloritoschistes et de
quartzites aux environs de Val fin et de Leschères. Or, mes prévisions
ont été justifiées, car au nouvel an j'ai reçu de M. le curé des Rousses
un assez beau fragment de micaschiste trouvé sur le territoire de sa
paroisse aux environs du hameau des Graviers.
Le glaciaire jurassien présente entre Passennans et le tunnel de
Domblans une particularité qui a été déjà signalée ailleurs. 11 est
recouvert d'argiles àchailles qui proviennent assurément de l'alté-
ration et du transport des formations bajociennes de Frontenay,
situées à un ou deux kilomètres plus haut vers Test.
Leur présence sur le glaciaire semble montrer qu'après la grande
446 BOURG EAT 19 JuÎD
glaciatioa qui a laissé ses traces au pied de la falaise, il y a eu un
ruissellement très intense. Peut être ces silex se rattachent-ils à un
phénomène qu'on observe à Au mont dans les carrières de sable rap-
portées au Pliocène bressan. On y voit au-dessus des conglomérats
siliceux de la forêt de chaux, d'abord des sables micacés, puis des
fragments bajociens ferrugineux, enrichis en fer par décalcification,
puis de l'argile à chailles, puis à nouveau des sables et des conglo-
mérats siliceux, puis enfin des argiles à chailles. Le premier niveau
de chailles ne serait-il pas antérieur au glaciaire de la falaise et le
second postérieure? C'est là une question qui mérite d'être étudiée
par des observations méthodiques entre Passenans et Aumont.
Quoi qu'il en soit de ce point, j'ai pu dernièrement, grâce aux tran-
chées nouvelles qui ont été pratiquées dans la forêt de Mouchard à
Saint-Cyr, trouver la solution d'un problème qui m'avait plus d'une
fois préoccupé. On observe facilement en elïet des traces de glaciaire
jurassien sur presque tout le front de la falaise qui s'étend de Lons-
le Saulnierà la petite ville d'Arbois. Mais ces blocs glaciaires sem-
blaient ne pas exister vis-à-vis Salins sur les territoires de Mouchard,
de Pretiu, de Marnoz, d'Aiglepierre. Le fait paraissait d'autant plus
étrange que Salins et les territoires en question se trouvent au pied
du mont Poupet, dont la hauteur de plus de 900 mètres est bien
supérieure à celle des autres saillies de la falaise. N'y aurait-il donc
pas eu de glaciers au pied du Poupet? Telle est la question que je
me posais. Elle est aujourd'hui résolue par la mise au jour de blocs
glaciaires dans les tranchées de la forêt de Mouchard. Seulement,
comme ces blocs ne se rencontrent qu'eu morraiues de très faible
étendue, je crois que le Poupet, tout eu ayant ses glaciers propres,
n'a pas permis aux masses glaciaires venant des hautes chaînes
orientales de s'étaler plus loin. C'est ainsi qu'il aurait moins de blocs
erratiques à ses pieds que vis-à-vis d'autres d'endroits moins
élevés de la falaise.
II. — Jurassique supérieur de la plaine.
Le Jurassique supérieur de la plaine du Jura est celui qu'on trouve
au pied de la falaise sur les limites orientales de la plaine bressane.
Je l'ai observé à trois endroits : à Vadans, entre Sellières et Baudin
et à Cesansey, au sud de Lons-le-Saulnier. La disposition qu'il y
affecte est représentée par les ligures 1, 2 et 3. Elles ne méritent
aucune mention spéciale au point de vue stratigraphique si ce n'est
qu'à Cesansey, au Sud du village, le Jurassique supérieur forme un
des rares synclinaux que l'on observe dans la plaine.
1899 QUELQUES POINTS NOUVEAUX DE GEOLOGIE JURASSIENNE 447
Voici ce que j'y ai constaté de particulier.
A Va dans, ainsi qu'entre Sellières et Baudin, la partie supérieure
de l'Oxfordieu est constituée, comme dans les eavirons de Dole, par
des marnes grises se fragmentant en petits nodules et d'un aspect
, Lias ; 2, Kajucli-n ; 3, Dathunirn : 4, Os lord i en se terminant par des marnes
grises ; ii, Corallien avec l'olypiers, Rprmirlaires, Dicernu cl Encrines (t'tVfari*
^lorigtmma a la base].
I , Uxfordien formé de. marnes srlilsteuaes ne liant al
rolitlies riches en petites Huîtres, on Serpules et en Spun^luii
pauvre en Polypiers, fitlari* fltirigrmma; 3, (ficaires marneux en plaquettes,
débris île llivalvcs ; 4, Calcaires fraitmentos puissant à la nreetu'.
tout différent des marnes oxfordiennes supérieures du haut Jura.
La base du Corallien à Cidaris florigtmma n'offre en retour au-
cune trace de ces sphérolithes roulés que l'on rencontre si fré-
quemment à l'est de la falaise. On y voit apparaître peu à peu des
chailles, des Spongiaires, des Polypiers et des Encrines qui rap-
448 bourgeat 19 Juin
pellent le Corallien des bords de la Serre. Toute la formation est
à l'état de calcaire plus ou moins compact. Enfin le Jurassique se
termine par des calcaires fragmentés passant à la brèche.
A Cesansey l'Oxfordien offre au contraire tous les caractères
pétrographiques du haut Jura. Ce sont des marnes feuilletées très
riches en débris de Lima, d'Huîtres et de Serpules qui sont surmon-
tées de sphérolithes analogues encore de tout point à ceux du Coral-
lien inférieur de la chaîne. Rien ne rappelle donc le Jurassique supé-
rieur de Vadans et de Baudin si ce n'est les dernières couches qui
sont aussi fragmentées et qui passent également à la brèche. A quel
des deux étages Kimeridgien ou Portlandien, se rattache cette
brèche? Une serait pas encore possible de le dire. Mais elle me pa-
rait témoigner d'une émersion de la région vers la fin du Jurassique.
Par le fait que les assises de Vadans et de Sellières ont plus de
ressemblance avec celle de Dôle qu'avec celles du Jura proprement
dit, dont elles sont cependant plus rapprochées, il me semble tout
naturel de croire, comme je l'ai déjà supposé depuis longtemps,
qu'il y avait entre Vadans et Sellières d'une part et le haut Jura
de l'autre, un massif jurassique inférieur émergé.
lit. — Failles obliques.
J'ai eu l'année dernière l'honneur de présenter à la Société un cer-
tain nombre de coupes figurant ces failles obliques et montrant
comment elles sont le résultat d'une poussée exercée sur des plis.
Je puis y ajouter quelques autres exemples.
S.E. . ■•'" "V N.O.
Fig. 4. — Coupe du Jurassique entre Montenet et les Crozets.
Échelle des longueurs 1/5U.000 ; des hauteurs 1/15.000.
1, Lias ; 2, Jurassique inférieur ; 3, Oxfordien ; 4, Jurassique supérieur ; 5, Pur-
beckien et Néocomien : FF, Faille oblique.
Le premier est fourni par la coupe (fig. 4) de Montenet aux Crozets,
prise à 8 kilomètres à vol d'oiseau au nord de Sl-Claude, à travers
la forêt de la Sourda. On y voit que par suite du glissement d'une
1899 QUELQUES POINTS NOUVEAUX DE GÉOLOGIE JURASSIENNE 449
moitié d'anticlinal sur un synclinal situé au nord-ouest, le Lias est
venu en contact avec le Néocomien, dont les couches repliées en V
accusent manifestement l'existence du synclinal.
Le second est fourni par la coupe (fig. 5) prise entre Chevry et
N.o.
Pont deLisoii
Fig. 5. — Faille oblique de Chevry à Pont-de-Lizon.
Échelle des longueurs 1/50.000 ; des hauteurs 1/15.000.
1, Jurassique inférieur (Bajocien et Bathonien) couvert de buis ; 2, Oxfordien ;
3, Jurassique supérieur ; 4, Urgonien à Chaînas couvert de grands arbres.
Pont-de Lizon-sur Bienne. On y voit aussi comment, par le fait du
glissement du cùté sud-est d'un anticlinal sur le bord opposé, le
Jurassique inférieur est venu se superposer à l'Urgonien.
Fig. fî. — Coupe de Rochefort & Avignon.
Échelle des longueurs 1/50.000 ; des hauteurs 1/15.000.
1, Lias ; 2, Jurassique inférieur ; 3, Oxfordien ; 4, Jurassique supérieur ; 5, Néoco-
mien et Purbeckien fragmentés.
L'obliquité de la faille en cette coupe se laisse facilement recon-
naître aux caractères de la végétation. On remarque en ellet que
H Décembre 18W. — T. XXVII.
Bull. Soc. Géol. Fr. — 29
450 BOURGEAT. — QUELQUES POINTS DE GÉOLOGIE JURASSIENNE
l'Urgonien couvert de bois de hautes futaies se prolonge longtemps
du côté de B au-dessous du Jurassique inférieur recouvert de buis.
Le troisième est tiré de la Cluse de S^Claude même et s'observe
très bien vis-à-vis le pont suspendu qui traverse la gorge du Tacon.
On y remarque en effet (fig. 6) comment le bord sud-est d'un
synclinal a glissé vers le centre et est venu se superposer comme en
discordance de stratification sur des assises qui devraient en être
le prolongement normal. La même chose s'observe d'une manière
plus accentuée mais un peu moins à découvert plus au nord-est
sur le chemin de Trébayard.
Je pourrais encore citer un bel exemple de double glissement
visible entre Cinquétral et la forêt du Fresnois, signaler les parti-
cularités du pli-faille de S1 Romain de Roche et quelques anomalies
observées près de Moirans, mais j'y reviendrai dans une étude plus
complète.
451
Séance du H Novembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGER1E, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président, annonce trois présentations.
11 souhaite la bienvenue à M. Zujovic, Professeur à la Haute
École de Belgrade, membre de la Société, qui assiste à la séance.
Le Président fait part à l'assemblée du décès de l'un des Vice-
Secrétaires de la Société, M. Paul Cambronne, Préparateur de
géologie à la Faculté des Sciences de Paris, mort en Espagne le 24
septembre, au cours d'une mission scientifique. « Le zèle empressé,
le caractère cousciencieux et modeste de notre jeune confrère lui
avaient conquis, au Secrétariat de la Société, comme au Laboratoire
de la Sorbonne, l'estime et l'amitié de ses camarades. En lui, nous
perdons un travailleur plein d'avenir. Je suis certain d'être l'inter-
prète de tous ceux qui l'ont connu, en adressant à sa famille l'ex-
pression de nos vifs regrets et de notre respectueuse sympathie. »
Le Président présente ensuite, au nom de M. K. A. von Zittel,
un ouvrage intitulé : Geschichte der Géologie und Palàontologie.
Dans ce volume, l'auteur passe en revue l'histoire des études et
des doctrines géologiques depuis l'antiquité, en insistant sur « les
débuts de la Paléontologie » et sur ce qu'il appelle « l'âge héroïque
de la Géologie », c'est-à-dire la période comprise entre 1790 et
1820; les plus longs développements sont réservés à la « période
moderne ». qui embrasse la plus grande partie du XIXe siècle : les
progrès récents de chacune des branches de notre science y sont
exposés dans Tordre suivant : Géologie cosmique, physiographique,
dynamique, topographique; Stratigraphie, Pétrographie, Paléon-
tologie. « Notre savant confrère de Munich a fait preuve, dans ce
livre, de la plus grande érudition, en même temps que de l'équité
la plus complète. C'est un nouveau titre qu'il acquiert à la recon-
naissance des naturalistes de tous les pays. »
M. de Margerie appelle également l'attention sur le tome III de
la Theory of the Earth de James Huttou, qui vient d'être imprimé
452 SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899
par les soins de la Société Géologique de Londres, et dont un
exemplaire nous a été adressé par Sir Archibald Geikie, chargé
d'en diriger la publication. Cette suite, encore inédite, mais mal-
heureusement incomplète, d'une œuvre capitale, comprend six
chapitres, où il est surtout question de l'histoire des roches grani-
tiques et du métamorphisme.
M. Blayac signale, parmi les ouvrages reçus à la Bibliothèque de
la Société, les N°"67, 68, 69, 70 du Bulletin des Services de la Carte
géologique de la France : N° 68 : La grande nappe de recouvrement
de la Basse- Provence, par M. Marcel Bertrand (71 p.f 42 fig., 3 pi.;
carte en couleur des environs de Marseille au 1/80.000* et nom-
breuses coupes coloriées). — N° 67 : Le Gabbro du Fallet et ses modifi-
cations, par M. A. Lacroix (52 p.. 14 fig. et 1 pi.). — N° 69 : Compte
rendu des Collaborateurs pour la campagne de 4898 (140 p.). — N° 70 :
Etude sur les plissements du Crétacé du bassin de l'Aquitaine, par Ph.
Glangeaud (48 p., 22 f., 1 carte en couleur au 1/80.000*). — Le N°41
des Annales de Géographie : Bibliographie géographique annuelle
(1898), 304 p., publiée sous la direction de M. L. Raveneau, avec le
concours d'une cinquantaine de collaborateurs. — Les C. R. de
l'Académie des Sciences contiennent : Sur les brèches éogènes du
Briançonnais, par M. Kilian (24 juillet). — Sur le bord externe du
Briançonnais entre Freyssinières et Vars, par MM. Kilian et Haug
(7 août). — Observations relatives au dépôt de certains travertins cal-
caires, par M. Stanislas Meunier (23 octobre). — Sur lf intervention
des végétaux dans la formation des tufs calcaires, par M. de Lapparent
(30 octobre).
M. L. Gentil signale, parmi les ouvrages venus de l'étranger, plu-
sieurs fascicules du Bulletin de la Commission géologique de la
Finlande, dont un mémoire de M. von J.-J. Sederholm : Uber eine
archàische Sedtmentformation im Sudwestlichen Finland und ihre
Bedeutung fiir die Erklàrung der Entstehungsweise des Grundgebirges
(n° 6, 255 p., 97 fig., 5 pi., 2 cartes en couleurs); 1 volume très
important des Memoirs of the geological Survey of the United
Kingdom : The Silurian Rocks of Britain, Vol. /, Scotland, par Peach,
John Horne, J.-J .-H. Teall (749 p., 121 fig., 27 pi., 1 carte et 3 coupes
en couleurs) ; 9 feuilles au 1 /75.000e, avec notice, de la Carte géolo-
gique détaillée de l'Autriche- Hongrie; 6 feuilles de la Carte géologique
du Queemland; 6 feuilles de la Carte géologique du Danemark au
41400.000e, avec texte explicatif (368 p., 1 pi. Résumé en français),
par M. A. Jessen; ld., 2 feuilles, avec texte explicatif (107 p., 5 pi.
Résumé en français), par M. K. R0rdam.
SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899 453
En présentant les deux premiers fascicules de la quatrième édition
de son Traité de Géologie, M. de Lapparent signale, en quelques
mots, les différences qui distinguent cette édition des précédentes.
H insiste notamment sur la refonte totale qu'a subie la description
des terrains sédimentaires, par suite de la substitution des étages
aux systèmes comme unités. Ce changement a entraîné l'auteur à
dresser, pour chaque époque géologique, des esquisses paléogéo-
graphiques représentant, partout où la chose a paru possible, les
rivages des mers anciennes. Si défectueux et si prématuré que pût
paraître cet essai, pour la première fois tenté sur une aussi vaste
échelle, Fauteur a tenu à s'y risquer, non seulement pour faciliter la
tâche des étudiants, mais aussi pour accentuer définitivement la
tournure que doit prendre la science géologique, si elle veut se faire
accepter partout dans l'enseignement. En effet, notre science ne doit
plus se résigner à apparaître comme une aride énumération de
strates, de fossiles et de roches. Sa véritable mission est de tendre
sans cesse à la reconstitution des épisodes successifs dont se com-
pose l'évolution géographique totale de notre planète.
M. M. Boule présente de la part de leurs auteurs : une note de
M. Sauvage sur les Pachycormidés du Lias supérieur de Vassy et
des notes de M. P. Lahille sur Terebratella patagonica Sow. et
sur les dimensions du Stenodelphis Blainvillei.
Terebratella patagonica est un Brachiopode du Tertiaire de la Pata-
gonie décrit et fort mal caractérisé par Sowerby, considéré plus tard
par von Ihering comme appartenant au genre Magellania et ayant en
réalité un appareil brachial de Terebratella. M. Lahille a fait pour
cette espèce, dont il a pu se procurer de très nombreux individus,
une étude analogue à celle qu'il a déjà publiée sur le Monophura Dar-
wini. Son travail, accompagné de planches photographiques, montre
a qu'en ne tenant compte que de la variation normale des caractères
extérieurs indépendants les uns des autres, on peut calculer que le
nombre des principales variétés de Terebratella patagonensis s'élève
à un minimum de 384. Les naturalistes, ajoute M. Lahille, qui
pourraient être tentés de créer de nouvelles espèces patagoniennes
de Brachiopodes, feront bien de réfléchir à ce résultat. »
M. M. Boule offre en outre à la Société diverses brochures
dont il est l'auteur : 1° Note sur de nouveaux fossiles secondaires de
Madagascar; 2° Sur l'existence d'une faune d'animaux antiques dans
la Charente à l'époque quaternaire (en collab. avec M. Chauvet); S0 Note
sur la physiographie du Carladez ; 4° L'abri sous roche du Rond, près
Saint- Arçons d'Allier (Haute-Loire) [en collab. avec M. Vernière].
454 SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899
M. Marcel Bertrand fait hommage à la Société, de la part de
MM. de Angelis d'Ossat et P. Millose vich , d'une note
Cenni intorno aile raccolte Geologiche deWultimm spedizione Bbttego.
Ce travail est accompagné d'une carte géologique au 1/3.000.000°
de la région parcourue par le Dr Maurizio Sacchi, région située
dans l'Afrique équatoriale un peu au nord du Kénia, entre le fleuve
Ganana qui se jette dans l'Océan Indien et le lac Rodolphe.
M. A. Gaudry présente une note de M. J. Igino Cocchi, intitulée :
I denti delV Ele faute africavo el il commercio delV Avorio.
M. Haug présente à la Société deux livraisons de la Grande
Encyclopédie renfermant les articles Néocomien et Permo Carbonifère
rédigés par lui. Il présente également la Revue annuelle de Géologie
qu'il a publiée dans la Revue générale des Sciences du 30 août. Dans
cette revue, il a traité les sujets suivants : 1° la dissymétrie de
l'hémisphère nord (d'après un travail de M. Suess) ; 2° les nappes
de recouvrement (au sujet des publications récentes de MM.
Schardl, Marcel Bertrand, Termier) ; 3° l'histoire pléistocène du
massif fenno-scandinave (résumé des résultats obtenus par MM. de
Geer et Ramsay) ; 4° l'origine et l'âge du lœss (d'après MM. Stein-
mann et Frùh) ; 5° les terrains secondaires de la Roumanie (au sujet
des thèses de doctorat de MM. Anastasiu et Popovici-Hatzeg).
M. Zeiller offre à la Société une note publiée par lui dans le
Bulletin de la Société botanique de France (t. XLV, p. 392-396) « Sur
la découverte, par M. Amalitzky, de Glossopteris dans le Permien
supérieur de Russie » ; il ajoute que, postérieurement à la rédaction
de cette note, il a reçu de M. Amalitzky une photographie qui ne
laisse aucun doute sur la présence du Gloss. indica parmi les échan-
tillons recueillis dans le gouvernement de Vologda par l'éminent
professeur de Varsovie. Depuis la publication de son premier
travail, M. Amalitzky a trouvé également (1) des Gangamopteris
dans ces mêmes gisements, associés, avec les Glossopteris et les
Schizoneura, d'une part à de nombreuses Anthracoxidées, à des
Estheria, ainsi qu'à des Callipteris et des Tœniopteris, c'est-à-dire
à des types delà flore normale du Permien d'Europe, d'autre part à
une riche faune de Reptiles (Pareiasauriens, Dicynodontes, Stégo-
céphales), rappelant beaucoup celle qui accompagne la flore à
(1) Excursion géol. dans le N. de la Russie. Sur de nouveaux vertébrés et fos-
siles végétaux trouvés dans les couches a Glossnpterù du Permien, dans les
bassins de la Soukhona et de la Dwina du Nord (Soc. biol.y t. IX, 1898) (on russe).
SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899 455
Glossopteris dans les dépôts permo-triasiques indiens des Lower
Gondwanas ou dans la série austro-africaine du Karoo. Il est inutile
d'insister sur l'intérêt de ces découvertes, au point de vue de la
répartition des formes animales et végétales à la surface du globe.
Répondant à l'appel de M. le Président, M. de Lapparent
donne quelques détails sur le récent Congrès géographique de Berlin,
la plus brillante assemblée d'hommes de science à laquelle il lui
ait été donné d'assister. Il signale surtout, parmi les questions
traitées, la prépondérance marquée des sujets de géographie phy-
sique, ainsi que l'aisance parfaite avec laquelle les géographes
étrangers manient les considérations géologiques. Cette leçon est
importante à recueillir et prouve le danger qu'il y aurait à persister
dans les fâcheux errements qui, trop souvent en France, ont
dominé dans la pratique de l'enseignement géographique.
Ph. Glangeaud. — Sur les plissements du bassin de V Aquitaine.
— Réponse à M. Raulin.
Quelques jours avant la publication de la note de M. Raulin
(Observations à une note de M. Glangeaud. B. S. G. F., t. XXVII,
p. 114), relative à ma note « sur les plissements du Crétacé du bassin
de l'Aquitaine » (C. H. Ac. Se., 26 décembre 1898), paraissait, dans
le Bulletin des Services de la Carte géol. de la France (n° 70), une
étude détaillée sur le même sujet dans laquelle je donnais la biblio-
graphie complète de la question et où je citais plusieurs passages
importants des travaux de notre confrère. Je ne pouvais pas, dans
un simple compte-rendu à l'Académie, examiner les nombreux
travaux se rapportant au sujet que je traitais.
456 6 Nov.
NOTE SUR QUELQUES FORAMINIFÈRES NOUVEAUX
OU PEU CONNUS DU CRÉTACÉ D'ESPAGNE
par M. C. SCHLUIBERGER.
(Planches VIII, IX, X et XI).
Dans une Note que j'ai publiée en 1898 (1) sur le Meandropsina
Vidali j'avais exprimé le regret de n'avoir pas à ma disposition une
quantité suffisante d'individus pour élucider complètement tous les
détails de construction de ce curieux Foraminifère. Notre confrère
M. Vidal, ingénieur en chef des mines à Barcelone, s'est empressé
de répondre à mon désir et y a mis une bonne grâce et une amabilité
si complète, que je tiens avant tout à lui en exprimer tous mes
remerciements
Dans un premier envoi il m'a procuré avec beaucoup de Forami-
nifères de différentes localités, tout ce qu'il possédait de Mean-
dropsina. La petite quantité de sable qui accompagnait ces derniers
m 'ayant montré quelques formes intéressantes, M. Vidal a bien
voulu, à mon intention, entreprendre le voyage assez fatigant de
Barcelone à Trago di Noguera dans la montagne où se trouve la
couche santonienne à Meandropsina. La provision de sable à gros
grains anguleux, presque entièrement calcaire, qu'il m'a envoyée,
contient un très grand nombre de Foraminifères et c'est le résultat
de mes recherches que je viens présenter à la Société.
Malheureusement beaucoup d'espèces ont eu leur tét extérieur
corrodé par la fossilisation et parfois les cloisons intérieures ont
disparu par la cristallisation.
Voici la liste des espèces que j'ai rencontrées :
MiliolidjE (2).
Biloculina n. sp. — Idulina antiqua d'Orb. — Periloculina sp. n. —
Pentellina sp. — Cornuspira cretacea Reuss. — Lacazina elongata
Mun.-Chal. — Vidalina kispanica n. sp.
(1) B. S. G. F., 3- série, T. XXVI, 489H, p. 330-339.
it) Bhady. Challenger Report, Vol. IX.
1899 FORAMINIFÈRES NOUVEAUX DU CRÉTACÉ D'ESPAGNE 457
LaGENIDjE
Cnstellaria cf. microptera Reuss. — Vaginulina. — Frondicularia
gaultina Reuss. — Tritaxia tricarinata Reuss.
ROTALTDiE
Rotalina.
NUMMULINIDiE
Nonionina cretacea nov. sp.
Textularida:
Cuneolina conica d'Orb. Textilaria.
Et les trois espèces Dictyopsella Kiliani Mun.-Chal. n. g., /). Chai-
masi d. sp. et Meandropsina Vidait Schlumb.
Description des Espèces
Les nombreuses espèces de vraies Miliolidœ, que Brady réunit
dans sa sous-famille des Miliolininœ, sont généralement très mal
conservées dans la couche de TragD di Noguera. Les loges exté-
rieures manquent et les loges internes sont souvent ou écrasées ou
brisées. Je n'ai pu reconnaître avec certitude, par de nombreuses
sections, que : une Biloculina^ probablement d'espèce nouvelle;
Yldalina antiqua d'Orb. sp., si fréquente dans les couches séno-
niennes de l'Etang de Rerre; une Periloculina (malheureusement
rare), voisine, comme disposition des loges, de Periloculina Zit-
teli, mais dont le test a une apparence perforée (1), et enfin une
Pentellina qui reste à étudier.
En revanche, les autres Miliolid», Lacazina, Comuspira et
Vidalina sont relativement mieux conservées.
Lacazina elongata Munier-Chalmas n. sp.
(PI. VIII, flg. 3; PI. X. fig. 15-18 ; PI. XI, flg. 19).
Dans la Note sur les Miliolidées trématophorées que nous avons
publiée, M. Munier-Chalmas et moi (2), nous avons mentionné
(1) A un fort grossissement on constate que ces nombreuses perforations n'at-
teignent pas la lare interne de la paroi.
{*) Miliolidées trématophorées. tt. S. G. f\, 3* Série, t. XIII.
458 SCHLUMBERGER. — QUELQUES FORAMINIFÈRES NOUVEAUX 6 NOV.
l'existence de Lacazina dans le Crétacé d'Espagne. Cette assertion
se basait sur quelques rares individus étiquetés « Province de
Lerida » et l'un de nous avait nommé cette espèce /,. elongata.
Elle n'a été ni décrite, ni figurée, en raison du petit matériel à
notre disposition, mais l'envoi de M. Vidal comportant de nombreux
exemplaires de toute taille me permet d'en donner une description
complète.
Les Lacazina elongata, comme les L. compressa, sont dimorphes.
Forme mégasphérique (Forme A). PI. X, fig. 16; PI. XI, fig. 19.
Toutes les sections faites dans des individus de petite taille se
sont trouvées de forme mégasphérique. La fig. 16 est la section sur
Taxe des pôles; la mégasphère, suivant les individus, varie de
200 à 300 {*.. Après la loge initiale viennent cinq loges très embras-
santes, allongées suivant Taxe des pôles, et dont les ouvertures
sont alternativement à chacune des extrémités. Mais il arrive
presque toujours que la section des premières loges, plus ou moins
obliques sur Taxe, ne passe pas par leur ouverture.
La section médiane transversale, fig. 19, perpendiculaire à l'axe,
d'un autre individu ayant aussi cinq loges, produit des sections
concentriques : la paroi des loges est extrêmement mince et leur
intérieur est occupé par de fortes côtes longitudinales, anasto-
mosées intérieurement, atteignant la face intérieure de la loge sui-
vante et plus ou moins échancrées sur leur longueur pour assurer
la communication d'un compartiment à l'autre.
Forme miscrosphérique (Forme B). PI. X, fig. 15-18.
La microsphère des grands individus est si petite que malgré de
nombreux essais je n'ai pu obtenir des sections plus parfaites que
celles des fig. 15 et 18, l'une daus le sens de Taxe et l'autre perpen-
diculaire à l'axe des pôles dans des individus composés de 20 à 22
loges.
Inutile de revenir sur ce qui a été déjà dit sur l'organisation des
Lacazina, il su (lira d'appeler l'attention sur l'amas de petites loges
qui entourent la microsphère et d'ajouter un mot sur le trématophore.
Celui-ci est reproduit par la section mince PL Xf fig. 17. La partie
centrale du trématophore est occupée par des trous plus ou moins
réguliers, son pourtour par ses fentes en V. (Les ouvertures que
l'on voit à la circonférence de la section font partie de la loge
suivante). Intérieurement le trématophore était soutenu par un fort
pilier situé sur le fond de la loge précédente (Fig. 15) et par des
trabécules émanant des côtes internes.
Caractères externes, — Les plus grands individus atteignent une
1899 OU PEU CONNUS DU crétacé d'espagne 459
longueur de 12mm pour un diamètre tra us versai de 5rom. Us se
présentent presque tous sous la forme de corps ovoïdaux garnis de
très nombreuses côtes longitudinales plus ou moins continues.
C'est là une apparence trompeuse provenant de l'ablation de la très
mince paroi de la dernière loge. Ces côtes étant réunies par une
couche continue (Fig. 18 et 19), en les enlevant avec précaution
avec une fine aiguille on obtient le véritable aspect de la Lacazina
représenté en photographie directe par la Fig. 3 de la PI. VIII. Le
test lisse est orné de nombreuses lignes de ponctuations en quin-
conces, mais si peu profondes qu'on les distingue à peine sous le
microscope dans les sections minces.
Habitat. — Très abondante dans les couches santoniennes de la
Catalogne à Trago di Noguera, Montsech, Corsù, Ayramout.
Observation. — Lacazina elonijala Mun.Chal. est très voisine,
sinon identique, de Lacazina Wichmanni Schl. (1) de la Nouvelle-
Guinée, mais le peu d'éléments que j'avais à ma disposition pour
la décrire et le mauvais état de ces fossiles ne permet pas une
identification certaine de ces deux espèces.
CORNUSPIRA CRETACEA ReUSS. (2).
On ne peut constater des différences de caractères entre les
Cornuspira de Trago di Montera et ceux décrits par Reuss.
Vidalina Schlumb. n. g.
Plasmostracum discoïdal formé par un tube continu enroulé dans
un plan, mais dont la cloison extérieure s'étend et se superpose
successivement sur les deux faces jusqu'au rentre du disque en y
produisant un renflement saillant.
Vidalina hispanica Schlumb. n. sp.
(PI. VIII. fig. li; PI. IX, fitf. 12 et 13).
Ce sont des disques circulaires minces sur le bord et renflés au
centre, constitués par un tube non cloisonné roulé en spirale. Le
test non perforé est rugueux à l'extérieur et les tours de spire sont à
peine marqués vers le bord du disque. L'ouverture est simple à
l'extrémité du tube.
Les plus grands ont lmm5;> de diamètre.
(1) B. S. G. F., 3« série, T. XXII, PI. XII.
(2) Sitzungtber. K. Ak. Wiss. Wien. Die Fora m. der westph. Kreideformation.
460 SCBLUMBERGER. — QUELQUES FORAMINIFÈRES NOUVEAUX 6 NûV.
La section médiane horizontale, fîg. 13, montre le grand nombre
de tours de spire et ce n'est que dans les premiers que l'on remarque
quelques légers étranglements dus à la croissance.
La section médiane transversale perpendiculaire au disque, fîg. 12,
fait ressortir la superposition centrale de toutes les parois externes.
Habitat. — Très abondant dans le Santonien de Trago di Noguera.
On les distingue facilement par le fait que le bouton se détache
en blanc sur la couleur brune du test.
Observations. — Le genre Vidalina, que je dédie à M.Vidal, Ingé-
nieur en chef des Mines à Barcelone, est voisin des Cornuspira
Schultze, mais s'en distingue par l'extension que prennent les
parois du tube. On pourrait le rapprocher aussi des Involutina (1)
Terquem, mais chez ces derniers la surépaisseur de la partie cen-
trale du disque est tout à fait indépendante des cloisons.
Les Lagenidae sont assez rares dans la provision de sable que j'ai
pu examiner. Je n'ai rencontré qu'un individu de Vaginulina; deux
individus de Cristellaria macroptera Reuss ; deux aussi de Frondi-
cularia gaultina Rss. et un plus grand nombre de Tritaxia carinata
Rss. Ces espèces se rapportent assez bien à celles décrites par
Reuss (2).
Les Rotalina que j'ai mentionnées précédemment présentent un
caractère assez singulier. Dans une section mince on remarque que
tout le plasmostracum est enveloppé d'une couche uniforme de
calcaire fibreux un peu plus épaisse que la paroi des loges. Sur
des points assez régulièrement espacés, de petits paquets de fibres
font saillie sur l'épaisseur de la couche et produisent à la vue
directe de la Rotaline l'effet d'une surface perlée. Aucun autre
Foraminifère de la même provenance ne présente ce caractère, mais
on peut se demander si cette couche calcaire a été sécrétée par
l'animal ou si elle n'est pas un résultat de la fossilisation. Dans ce
doute il me paraît plus prudent d'attendre la découverte de cette
Rotaline dans d'autres couches crétacées.
Nonionina cretacea Schlumb. n. sp.
(PI. VIII, fig. 1 ; PI. XI, fig. 21 et 22).
Aucun des nombreux individus récoltés n'a conservé son test
extérieur et tous sont plus ou moins frustes.
Le plasmostracum est discoïdal, symétrique, caréné sur le pour-
(1) Terquem. Fora m. du Lias. 1862.
(2) Reuss. Loc. cit.
1899 OU PEU CONNUS DU CRÉTACÉ b' ESPAGNE 461
tour et surépaissi au centre qui est occupé par un bouton saillant,
PI. VIII, fig. 1. Les loges très embrassantes comme dans la plupart
des Nonionines viennent butter avec leurs parois contre un dépôt
de calcaire qui se forme déjà sur la tnégasphère et s'élargit à
mesure de la croissance, PI. XI, fig. 22. Dans cette même figure on
voit après la troisième loge qui suit la mégasphère (en haut de la
figure) une des ouvertures triangulaires qui a été effleurée par la
section.
La fig. 21 est une section longitudinale dans le plan d'enroule-
ment des loges dont quinze à seize sont visibles à l'extérieur. La
dimension de ces Nonionines est de 0,8mm.
Habitat. — Très commun dans le Santonien de Trago di Noguera.
Observation. — Cette espèce ressemble beaucoup au Nautilus
incrassatus Ficht. et Moll (1), mais elle en diffère par sa carène,
par un plus grand nombre de loges visibles et par son ouverture
triangulaire. Les mêmes caractères la différencient de Nonionina
incrassata F. et M., décrite par Terrigi (2).
Cuneolina conica d'Orb.
(PI. VIII, fig. 8-10)
Je profite de la présence de Cuneolina conica d'Orb. dans le
Santonien de la Catalogne pour compléter et rectifier les quelques
mots que j'ai publiés sur ce fossile en 1883 (3). Je ne crois pas que
depuis la publication de l'ouvrage classique de d'Orbigny sur les
Foraminifères de Vienne aucun auteur ait donné une bonne figure
de Cuneolina. J'ai choisi pour le photographier un individu du
Sénonien de l'Ile Madame parce qu'ils sont mieux conservés que
ceux d'Espagne.
La fig. 9, PI. VIII, représente le fossile vu par l'extérieur sur
l'une de ses faces planes. Les nombreuses loges superposées dont
il se compose vont en augmentant transversalement et alternent
avec les loges de la face opposée. Le test est arénacé et est
marqué d'un réseau caractéristique très visible dans les parties
foncées de la photographie, où les mailles se détachent en clair.
Ce réseau provient d'une différenciation du test, car dans les sec-
(1) Tes lace a microscopica. Fichtel et Moll. PI. IV, fig. 38.
(2) Sulla fauna microsc. dcl c a Icare Zancleo «le Palo. Terrigi, p. 205, PI. IX,
Hg. 52.
(3l H. S. <1. F '., IV série, T. XI, p. 272.
462 SCHLUMBERGER. — QUELQUES FORAMINIFÈRES NOUVEAUX 6 NOV.
tions transversales (fig. 3) on ne distingue aucune perforation. Un
réseau semblable caractérise quelques autres genres : Orbitulina,
Dictyopsella, Spirocyclina (1) M.-Ch.
La section transversale représentée par la fig. 8 passe par la loge
initiale, dont on voit le contour supérieur à gauche de la ligure et
montre la forme en crosse avec dentelures intérieures des nom-
breuses subdivisions des loges, subdivisions que fait ressortir la
section plane reproduite par la fîg. 9 (2).
Habitat. — Peu commun dans le Santonien de Trago di Noguera.
Dictyopsella Munier-Chalmas, nov. g.
C'est dans les terrains crétacés supérieurs de l'étang de Berre
que M. Munier-Chalmas a découvert ce genre nouveau, qui n'a
pas encore été décrit.
Les Dictyopsella ont un plasmostracum composé de nombreuses
loges enroulées en spirale, semblable à celui des Hotalina, Discor-
l/ina ou les Peneroplis. L'intérieur des loges est subdivisé par de
nombreuses cloisons qui se ramifient vers l'enveloppe extérieure.
La surface externe du test est couverte par un réseau caractéris-
tique à larges mailles.
Dictyopsella Kiliani Mun.-Chalm., n. sp.
{PI. VIII, fig. 5 et 7; PI. XI, fig. 20).
Plasmostracum discoîdal, convexe d'un côté et concave de l'autre,
composé de nombreuses loges enroulées en spirale. Sur la face
convexe des individus adultes, la spire, entièrement visible, pré-
sente une vingtaine de loges dont les sutures, très arquées eu
arrière, sont bien marquées par une saillie des loges vers le pour-
tour (fig. 5); sur la face concave on ne voit que sept à huit loges
dont les sutures sont rayonnantes. Le test est finement arénacé et,
dans les individus bien conservés, est marqué, à la surface, d'un
réseau dont les mailles se détachent en clair. x
11 est facile de se rendre compte, d'après l'enroulement des loges
et la forme générale du fossile, que des sections menées parla loge
initiale dans un sens ou dans l'autre doivent couper obliquement
presque toutes les loges. Cependant la section mince longitudinale,
(1) Genre nouveau non décrit.
(t) Ces doux sections ont été photographiées à la vue directe et proviennent
d'individus préalablement teints au bleu d'aniline, qui n'a imprégné que le
remplissage en faisant mieux ressortir les cloisons.
1899 OU PEU CONNUS DU CRÉTACÉ DKSPAGNK 463
PI. VIII, fig. 7, démontre l'existence dans toutes les loges de nom-
breuses cloisons qui se ramifient vers les parois externes, où elles
donnent naissance, par une dillérenciation du test, au réseau que
j'ai signalé plus haut.
La section transversale, PI. XI, fig. 20, est trop confuse pour
fournir des indications certaines et je ne l'ai conservée que pour
montrer la forme aplatie des Dictyopsella. On voit à droite la loge
initiale sphérique, et au bord supérieur, un peu vaguement, la
subdivision des cloisons internes.
Habitat. — Assez abondant dans la couche santonienne de Tragt.
Dictyopsella Chalmasi Schlumh. n. sp.
(PI. VIII, fig. 4).
Avec les Dictyopsella Kiliani on rencontre à Trago di Noguera une
autre espèce dont le plasmostracum à peu près symétrique sur les
deux faces a ses loges enroulées en spirale comme un Peneroplis.
Treize à quatorze loges sont visibles sur les deux faces, les sutures
sont bien marquées et la carène est ondulée.
Le têt est plus grossièrement arénacé que dans l'espèce précédente.
Habitat. — Santonieu de Trago di Noguera, moins fréquente que
D. Kiliani.
Meandropsina Vidali Schlumh. (1).
(PI. VIII, fig. 2; PI. IX, fig. 11 et 14).
J'ai trouvé dans le sable de Trago di Noguera un très grand
nombre de petits organismes de contour circulaire, les uns épais,
les autres comprimés et ressemblant à s'y méprendre à des Polys-
tomelles. Des sections minces m'ont démontré que ce sont de
jeunes individus de Meandropsina Vidali des deux formes mégasphé-
rique et microsphérique et leur présence me permet de compléter
la description de ce fossile si curieux.
Forme mégasphérique (Forme A). PI. IX, lig. 14. Les plus grands
individus atteignent environ 2,,,m de diamètre. Celui dont la section
est représentée par la fig. 14 de la PI. IX a 0mm78 de diamètre pour
une épaisseur de 0mm26 et sa mégasphère a un diamètre de 0mml.
Un autre individu que j'ai sectionné ayant respectivement pour
diamètre et pour épaisseur lmm2et 0mmH a une mégasphère deOmm3.
(1) li. S. G. F., .V sério, T. XXVI, 1898, p. 336-339.
464 SCHLUMBERGER. — QUELQUES FOKAMINIFÈRES NOUVEAUX 6 NOV.
Les diamètres de la mégasphère peuvent donc varier de 100 à 300 a.
On peut remarquer dans la fîg. 14 que, des deux côtés de la mégas-
phère, les loges sont remplies par du calcaire fibreux et comme,
dans la localité de Trago, la plupart des Foraminifères ont perdu par
la fossilisation leur enveloppe externe, ce remplissage, quand
l'individu est très jeune, apparaît sous la forme d'un bouton blanc
central (Fig. 2, PI. VIII).
A la suite de la mégasphère les loges se disposent comme nous le
verrons pour la forme microsphérique, mais il esta remarquer que
les deux couches de loges méandriformes n'existent pas.
Forme microsphérique (Forme B). — C'est un individu de cette
forme que représente la photographie PL VIII, fig. 2. Pour 2mm de
diamètre il n'a que 0mm4 d'épaisseur et la microsphère d'un individu
de même dimension a 27 u. de diamètre. On voit (fig. 2) que les
couches méandriformes de l'adulte ne sont pas formées et la dispa-
rition de presque toutes les parois externes permet de constater la
présence des nombreuses cloisons interues des loges spiralées. La
section médiane de ces petits individus microsphériques est la
même que celle des individus adultes dont je vais parler. •
Les nombreux matériaux que je dois à l'obligeance de M. Vidal
m'ont permis de faire des sections plus complètes et plus exactes
que celles que j'ai publiées précédemment.
La photographie PI. IX, fig. 11, représente au grossissement de
120 diamètres la partie centrale d'une de ces sections. La micro-
sphère a 35 [jl de diamètre; autour d'elle s'enroule en spirale, de
droite à gauche et sur deux tours et demi, une étroite loge subdi-
visée par une vingtaine de petites cloisons émanant de la paroi
concave et n'atteignant pas la paroi opposée. Puis brusquement se
présente la série des loges spiralées qui s'enroulent en sens inverse ;
elles sont ici au nombre de dix-sept.
L'animal des Meandropsina avait la faculté d'opérer des restau-
rations de son test, d'introduire des loges intercalaires, comme on
le voit dans le haut de la fig. 11 et, en un point quelconque, de
changer la direction d'enroulement de ses loges (Voir la fig. 4,
PL IX, de ma précédente note). C'est à cette faculté que l'on peut
attribuer la formation subséquente des deux couches de loges
méandriformes de l'âge adulte.
Habitat. — Tous les individus que m'a envoyés M. Vidal provien-
nent de la couche du Santonien de Trago di Noguera et n'ont pas
encore été rencontrés dans d'autres localités du Crétacé d'Espagne.
Observation. — Dans mes nombreuses recherches sur le dimor-
1899 OU PEU CONNUS DU crétacé d'espagne 465
phisme des Foraminifères, c'est la première fois que je trouve pour
une espèce fossile des individus presque embryonnaires des deux
formes mégasphérique et microsphérique. C'est une nouvelle con-
firmation des belles recherches de MM. Lister et Schaudin sur le
dimorphisme des Polystomelles.
EXPLICATION DES PLANCHES
Planche VIII.
Fig. 1. — Nonionina cretacea Schlumb., au grossissement de 25 diam.
Fig. 2. — Meandropsina Vidali Schlumb., jeune, forme microsphérique, au
grossissement de 20 diam.
Fig. 3. — Lacazina elongata Mun.-Chal., au grossissement de 5 diam.
Fig. 4. — Dictyopsella tnalmasi Schlumb., au grossissement do 15 diam.
Fig. 5. — Dictyopsella Kiliani Mun.-Chal., au grossissement de 20 diam.
Fig. 6. — Vidalina Mspanica Schlumb., au grossissement de 20 diam.
Fig. 7. — Dictyopsella Kiliani Mun.-Chal., section longitudinale, au grossis*
sèment de 25 diam.
Fig. 8. — Cuneolina conica d'Orb., section transversale, au grossissement de
25 diam.
Fig. 9. — Cuneolina conica d'Orb.. vu extérieurement, au grossissement de
25 diam .
Fig. 10. — - Cuneolina conica d'Orb., section plane, au grossissement de 20 diam.
Planche IX.
Fig. 11. — Meandropsina Vidali Scblumb., section plane, au grossissement de
120 diam.
Fig. 12. — Vidalina Mspanica Scblumb., section transversale, au grossissement
de 45 diam .
Fig. 13. — Vidalina Mspanica Scblumb., section longitudinale, au grossissement
de 85 diam.
Fig. 14. — Meandropsina Vidali Scblumb., jeune, de forme mégasphérique, au
grossissement de 35 diam.
Planche X.
Fig. 15-18. — Lacazina elongata Mun.-Chal.
15, Forme microsphérique, section longitudinale, au grossissement
de 17 diam. ; 16, Forme mégasphérique, section longitudinale au
grossissement de 32 diam. ; 17, Trématophore au grossissement
de 25 diam. ; 18, Forme microsphérique, section transversale au
grossissement de 25 diam.
Planche XI.
Fig. 19. — Lacazina elongata Mun.-Chal., forme mégasphérique, au grossisse-
ment de 85 diam.
Fig. 20. — Dictyopsella Kiliani Mun.-Chal., section transversale, au grossis-
sement de 50 diam.
Fig. 21. — Xonwnina cretacea Schlumb., section longitudinale, au grossissement
de 85 diam.
Fig. 22. — Nonionina cretacea Schlumb., section transversale, au grossisse-
ment de 100 diam.
31 Janvier 1900. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 30
466 6 Nov.
NOTE
SUR QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE
DANS LES ALPES FRANÇAISES
par M. P. FLICHE.
(Planche XII).
Il y aura bientôt deux ans, M. Perrot, alors Inspecteur-Adjoint
des Forêts à Saint-Bonnet (Hautes-Alpes), a envoyé à l'Ecole fores-
tière un fossile végétal trouvé dans les grès mouchetés de Chaillol,
près d'Embrun. Ce fossile m'a paru intéressant, d'une part, à raison
de la rareté des restes végétaux terrestres dans les terrains de cet
horizon, dans les Alpes; de l'autre, parce qu'il s'agissait d'un strobile
de Conifère qui me paraissait nouveau et qui présentait, dans sa
structure, des particularités remarquables. Avant de le décrire, il
m'a semblé bon de m'adresser à M. Kilian, pour savoir à quels
résultats on est arrivé aujourd'hui, relativement à l'âge des grès
mouchetés de Chaillol, pour lui demander en outre s'il connaissait,
dans les collections de Grenoble et de la région alpine française,
d'autres fossiles végétaux de provenance analogue.
Notre confrère eut l'obligeance de me répondre que les Grès
mouchetés de Chaillol lui paraissent être sûrement de l'Oligocène
inférieur, par conséquent Tongrien ou Infratongrien, niveau du
calcaire de Brie; que les collections de l'Université de Grenoble
ne renferment aucun fossile végétal de cette provenance, apparte-
nant au groupe de couches dont font partie les grès mouchetés de
Chaillol, mais que son assistant, M. P. Lory, possédait quelques
restes végétaux de ce niveau et de la région.
Celui-ci voulut bien m'envoyer, avec un travail dans lequel les
grès mouchetés étaient rapportés à l'horizon sus-indiqué, les fos-
siles dont m'avait parlé M. Kilian, et il les accompagnait d'une
lettre dans laquelle se trouvaient les indications suivantes, relati-
vement aux restes végétaux rencontrés dans les Alpes, au même
horizon que les grès mouchetés de Chaillol ou dans les couches
voisines : « Le cône de M. Perrot est, à ma connaissance, le seul
1699 NOTE SDR QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE l'oLIGOCÂNE 46?
fossile déterminable que l'on ait trouvé dans le Flysch de Chaillol,
que nous rapportons à l'Oligocèoe inférieur, par simple probabilité.
Les couches schisteuses contiennent souvent des restes végétaux
(et même de très petits lits de lignite), mais où je n'ai rien vu de
reconnaissable.
» Un peu à l'ouest, en Dévoluy, les traces végétales abondent
aussi, soit dans le Flysch (Saint-Etienne), soit dans l'Oligocène d'eau
douce (Agnières, Saint-Disdier, Montmaur ). Une feuille du
Nagelfluhe de Montmaur est moins mauvaise que le reste. »
Les restes végétaux que M. P. Lory a bien voulu me confier sont,
en effet, très médiocres en général, et quelques-uns ne comportent
aucune détermination. Mais en dehors même de l'empreinte de
feuille de Montmaur, qui mérite l'observation dont elle est l'objet
ci-dessus, il y a encore quelques échantillons qui sont susceptibles
de fournir des résultats intéressants. Les fossiles végétaux dans ce
cas sont si rares, dans les Alpes, qu'il y a lieu de ne rien négliger.
En ce qui concerne les Alpes françaises, on ne paraît pas, jusqu'à
présent, y avoir signalé de végétaux terrestres, dans les couches
éocènes ou oligocènes, puisque de Sa porta, dans le chapitre « Paléon-
tologie » rédigé par lui pour l'ouvrage de M. Faisan (1), est obligé,
pour donner une idée de la flore terrestre de ces époques, de se
référer à celles de Moote-Bolca et d'Aix; s'il ne mentionne dans ce
travail aucune plante terrestre trouvée dans les Alpes, par contre,
il y signale plusieurs algues, mais de celles qui ont donné lieu à
contestation sur la véritable nature des fossiles qu'on leur a rap-
portés, et suscité des doutes tels qu'un géologue (2) ayant fait une
étude spéciale du Flysch, les considère toutes, sans exception,
comme des traces animales. Les échantillons trouvés par M. P. Lory
et M. Perrot ont donc le mérite de nous fournir, pour la première
fois, quelques indications sur la flore fossile terrestre, dont les restes
peuvent se trouver dans le Flysch et les couches voisines ou synchro-
niques des Alpes, de nous donner aussi, comme on le voit, le premier
vestige certain d'Algues ayant vécu dans les eaux où il se déposait.
Les restes végétaux que j'ai examinés sont de nature fort diverse;
ce sont des lignites, les objets conservés avec leur forme, mais
plus ou moins minéralisés, enfin des empreintes, avec ou sans
trace de matière organique.
(1) Les Alpes françaises. Paris, 1891.
(2) Th. Fuchs, de Vienne, lettre reproduite par M. Nathorst : Mémoire sur
quelques traces d'animaux sans vertèbres, etc., p. 94-96, dans Kongliga swenska
Vête tiskaps- À kade miens Handlingar. Stockholm, 1880.
468 FLICHE. — QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NOV.
Les lignites, dont j'ai pu étudier quelques échantillons de Mont-
raaur, où ils sont en veinules dans la mollasse rouge, sont noirs,
parfois très brillants sur la cassure, et plus ou moins schisteux;
examinés macroscopiquement, ils ne montrent aucun reste végétal
déterminable. Microscopiquement, après avoir été traités par
l'acide azotique et le chlorate de potasse, ils laissent voir des traces
d'organisation bien nettement conservées, cellules isodiamétriques,
fibres très longues et vaisseaux annelés, mais sans que, dans ces
éléments anatomiques, entièrement dissociés, et le plus souvent
non intacts, on puisse trouver rien qui permette une détermina-
tion, même simplement familiale, certaine.
Le seul objet conservé dans son intégralité est le cône de M. Per-
rot, mais il est visiblement en grande partie minéralisé, bien que,
en certains endroits, sur les surfaces avant tout, la matière orga-
nique carbonisée ait persisté.
Quant aux empreintes, tantôt elles se trouvent sur des grès à
grain très grossier, et alors elles sont indéterminables, bien que la
matière organique soit souvent restée abondante, mais à l'état
amorphe; tantôt, au contraire, on les trouve sur des roches cal-
caires ou marno-calcaires, parfois de grain très fin ; dans ce dernier
cas, elles sont ou noirâtres, ou d'un brun rougeâtre ; la matière
organique est irrégulièrement conservée.
Je vais maintenant décrire les éléments de cette petite florule;
en terminant, je ferai ressortir l'intérêt qu'ils présentent, soit en
eux-mêmes, soit par comparaison avec ce qui a été observé dans
les Alpes de Suisse au même horizon.
Algues
Ce que m'a envoyé M. P. Lory ne renferme aucun de ces corps
toujours dépourvus de matière organique, de nature, par suite, très
problématique, mais une plaque calcaire porte de très nombreux
fragments végétaux qui me semblent, sans contestation possible,
appartenir à une algue. L'étiquette qui l'accompagne porte Oligo-
cène Flysch (probablement marin) de la Haute-Souloize (Dévoluy).
Quelquefois, rarement, les débris de la plante sont représentés
seulement par une empreinte; le plus souvent la matière organique
brune a été conservée, comme on peut le voir sur la fig. 1. Ces
restes végétaux sont très fragmentés ; cependant il est visible,
notamment en a, que le corps de la plante présentait des bifur-
cations ; que celui-ci était de consistance toujours faible, mais
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 469
cependant un peu plus forte dans ses portions les plus vieilles,
comme en b, où la matière organique ayant été enlevée, en partie,
a laissé une empreinte très nette; plus faible vers les régions visi-
blement terminales de la plante comme en c; de plus les différents
fragments de la plante n'ont pas tous la même longueur et c'est
parmi ceux qui semblent appartenir à la périphérie qu'on trouve
les plus larges. Les extrémités sont arrondies quelquefois, ainsi en c,
on voit deux lobes arrondis, séparés par un sinus peu profond.
Tous les caractères qui viennent d'être donnés me semblent bien
indiquer qu'il s'agit d'une Thallophyte, que de plus, celle-ci avait
un thalle membraneux. L'absence de toute nervation, même en
des endroits visiblement très bien conservés, combinée avec les
caractères de formes, exclut notamment toute attribution à des
feuilles de végétaux cotylédonés. Parmi les Thallophytes, les Hépa-
tiques, les Lichens et les Algues pourraient seuls nous présenter
des thalles qui, par leur forme générale, rappelleraient le fossile
qui nous occupe. Il faut exclure, je crois, les deux premiers
groupes, non seulement parce que, étant donnée l'origine pré-
sumée des dépôts, il serait assez peu probable d'y trouver des
plaques aussi complètement et exclusivement couvertes de débris
d'une seule espèce appartenant à ces végétaux nullement marins,
mais parce que ces thalles s'éloignent par leur aspect et les carac-
tères saisissables de tout ce qu'on observe aujourd'hui chez eux,
tandis que la ressemblance avec certaines Algues est au contraire
frappante. 11 en est même une, parmi les plus communes de celles
qui vivent sur nos côtes, avec laquelle la plante fossile des Alpes
présente beaucoup d'analogie, assez pour qu'il soit très vraisem-
blable d'y voir une plante du même genre, c'est le Chondrus crispus.
Des deux parts, il y a une fronde d'assez forte consistance vers sa
base, qui est plus étroite, cylindrique, de moindre solidité à mesure
qu'on se rapproche des extrémités, qui sont minces, de largeur
inégale, arrondies et bilobées à leur bord, les lobes étant le début
d'une ramification. La largeur des bases cylindriques de fronde est
même fort approchée de celle des mêmes régions, sur des échan-
tillons de Chondrus crispus des environs de Cherbourg. Il me
semble donc certain que l'Algue fossile appartient au genre Chon-
drus et à une espèce voisine de celle qui vient d'être nommée,
laquelle habite l'Atlantique, de la Norwège au sud de l'Espagne,
et sur la rive américaine opposée ; des espèces affines se trouvant
dans le Pacifique. J'avais espéré pouvoir corroborer ce rapproche-
ment par l'étude de la structure anatomique, malheureusement
470 FLICHE. — QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NOV.
celle-ci est fort mal couservée ; cependant quelques cellules, plus
ou moins nettes, semblent être ponctiformes comme chez l'espèce
vivante; à raison de cette connaissance incomplète de la structure
et du mode de reproduction de l'Algue fossile, il n'est pas possible
de la faire rentrer, sans réserve, dans le genre Chondrus. Ce n'est
pas la première Algue fossile qui ait été considérée comme s'en
rapprochant beaucoup, et lui appartenant sans doute.
Unger en a décrit deux semblables : Tune tertiaire, dont il a
fait le Sphœrococcides cartilagineux, l'autre jurassique, Chondrites
flabellatus, dont il fait aussi ressortir la ressemblance avec le
C. crispus. Schîmper a fait passer ce dernier fossile dans le genre
Sph&rococcides, réservant, avec raison, le nom de Chondrites, pour
les fossiles problématiques auxquels on a appliqué ce nom et qui,
même en admettant que ce soient des Algues, auraient été fort
différents des Chondrus actuels. Le genre Sphœrococcides, tel qu'il
a été considéré par Schimper, est lui-même fort hétérogène, et
renferme aussi des corps dont l'attribution aux Algues est des plus
contestables. Il me paraîtrait donc préférable de donner à ceux qui,
leur appartenant incontestablement, se rapportent, d'une façon
presque certaine, aux Chondrus, un nom spécial, rappelant cette
grande ressemblance, sans affirmer une identité que de meilleurs
échantillons permettraient seuls d'établir; celui de Chondropsis
serait très convenable. S'il me semble possible, d'après tout ce qui
vient d'être dit, de rapporter certainement les débris végétaux de
la Haute-Souloize aux Algues et de constater leur grande ressem-
blance avec les Chondrus, il me parait impossible de leur attribuer
un nom spécifique; ils sont trop fragmentés pour permettre une
description tant soit peu précise.
Conifères
Nous ne possédons d'autre reste de cette classe, pour le Nummu-
litique français, que le cône trouvé par M. Perrot. 11 était contenu
dans un rognon calcaire; c'est par suite delà rupture accidentelle,
mais fort heureusement très régulièrement longitudinale de celui-
ci, qu'il a été mis à nu ; une moitié seulement du rognon a été
conservée; c'est celle qui fait aujourd'hui partie des collections de
l'Ecole forestière. Le cône, dans sa moitié supérieure, montre une
coupe longitudinale de l'organe, atteignant Taxe de celui-ci: dans
la moitié inférieure, les écailles, sauf celles des bords, sont brisées
à une plus ou moins grande hauteur au-dessus de leur base.
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 471
Le cône est fortement minéralisé, les écailles présentant sur leurs
faces une couleur brune ou noirâtre, tenant à un reste de matière
organique. Il est complètement encastré dans la substance du
rognon, en sorte qu'on ne peut songer à l'en extraire.
La section, faite accidentellement, porte sur toute la longueur et
la largeur du cône, en sorte qu'il est possible de se rendre compte
de ses dimensions, qui étaient assez fortes : 133mm de longueur sur
35 de largeur, y compris les appendices fimbriés dont il va être
question.
L'axe est grêle ; les écailles, de consistance moyenne, étaient un
peu plissées, ou légèrement sillonnées dans le sens de la longueur,
comme on peut le voir très bien, notamment en a (fig. 2) ; leur base,
un peu épaissie, portait deux graines, ce qui est, en général, assez
difficile de constater, cela est bien net cependant sur une écaille
se trouvant à la partie supérieure de celles qui sont brisées au-
dessus de leur base; malheureusement la figure photographiée ne
permet pas de bien constater ce caractère. Quant à ce qui concerne
la forme de l'extrémité supérieure de l'écaillé, on est frappé, quand
on considère le fossile lui-même ou sa figure photographiée, de
voir qu'en certains endroits, surtout de meilleure conservation,
les bords semblent être fimbriés; cette apparence de franges, pour
l'ensemble du strobile, pourrait tenir seulement à ce que les extré-
mités des écailles, très longues et nullement épaissies, seraient
coupées normalement à leurs surfaces; mais en y regardant de
près, on voit que si cela est vrai dans une certaine mesure, les
filets des franges sont trop nombreux pour comporter tous une
semblable origine, que de plus beaucoup d'entre eux forment une
véritable empreinte sur la roche et ne sont nullement la section
d'un organe mince; enfin en divers endroits, notamment en b-b' , etc.,
les franges partent d'une écaille qui, dans la fossilisation, s'est
trouvée posée plus ou moins à plat sur la matière encaissante ; que
de plus elles se détachent parfois les unes des autres à une hauteur
inégale. La conséquence à tirer de ces observations, c'est que
l'écaillé était mince et longuement frangée aux extrémités.
Les graines sont grosses : 8mm de longueur et un peu plus de
3mm de diamètre, un peu irrégulière, l'épisperme ne parait pas
avoir été très épais; on ne peut bien voir s'il y a une aile, quoique
cela me semble probable, d'après ce que l'on constate, notamment
pour une graine.
Le cône, dont je viens d'indiquer les caractères, diffère de tous
ceux qui ont été décrits pour les terrains de même âge que les
472 FUCHB. — QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NOT.
Grès de Chaillol ou de niveaux peu différents ; celui qui s'en rap-
procherait le plus, par ses écailles fortement laciniées, serait celui
de l*01igocène d'Armissan, auquel de Saporta a donné le nom
d'Entomolepis ; mais ces analogies, dont je discuterai plus loin la
valeur, ne vont point sans d'assez fortes différences, qui ne per-
mettent pas de donner au fossile de Chaillol cette attribution géné-
rique. Non seulement celui-ci ne ressemble à aucune des formes,
également fossiles, déjà décrites, mais il s'éloigne aussi de tous les
cônes de Couifères vivants, aujourd'hui connus, et cela assez pour
que, jusqu'à nouvel ordre au moins, il me semble nécessaire de
créer pour lui une coupe générique spéciale.
Le caractère le plus saillant offert par lui c'est le bord longue-
ment frangé de l'écaillé; il ne se retrouve à ce degré chez aucun
Conifère vivant. Ce n'est pas à dire que, chez certains d'entre eux,
cet organe ne soit assez fortement denté ou même incisé à son
bord supérieur, pour éveiller l'idée d'une étroite affinité entre le
fossile qui nous occupe et eux. C'est parmi les Picea, chez les
Abiétinées, qu'on les rencontre. De Saporta a signalé aussi, à
propos de son Entomolepis, les strobilcs des Cuninghamia, chez les
Cupressinées; mais les dentelures de l'écaillé dans ce genre sont
beaucoup moins prononcées que celles observées chez les Picea,
dont je vais parler. Les écailles, dans ce dernier genre, présentent
un bord de forme très variable, d'espèce à espèce, quelquefois dans
une même espèce. Ainsi le P. excelsa, l'épicéa qui entre, pour une
part si importante, dans la végétation forestière d'une grande
partie de l'Europe, de la France en particulier, a des écailles ter-
minées par un prolongement trapézoïdal, échancré à son extrémité,
et le plus souvent le bord, dans son intégralité, présente des den-
telures irrégulièrement réparties et peu profondes. Parfois, au
contraire, le bord est régulièrement arrondi, c'est ce qu'on observe
sur une forme parfois assez commune dans le Jura, ou bien à
l'extrême opposé, on trouve des épicéas à écailles laciniées, j'en ai
observé de tels aux environs de Barcelonnette, et M. Schrôter (1)
en a figuré, d'après Wilhelm, un cône provenant de Moravie.
Ces découpures peu prononcées, en général, ou anormales, chez
l'espèce commune, deviennent de règle chez d'autres espèces japo-
naises et américaines: P. ajanensis Fischer du Japon, P. Menziesi
Cass., P. Alcoquiana Veitch, et P. Engelmanni Parry Engelm. d'Amé-
rique, comme on peut le voir fig. 3, qui représente un cône prove-
(1) Ueber die Vielgestaltigkcit der Fichte {Picea excelsa Link). Zurich, 1896,
p. 84, fig. 30.
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 473
liant du bel Arboretum de M. Allard, à la Maulévrie, près d'Angers.
Chez ces espèces, très rapprochées les unes des autres, notamment
chez la dernière, l'écaillé, très mince, se fend facilement sur une
plus ou moins grande longueur, de telle sorte que récaille peut
présenter des franges de plus en plus analogues à celles qu'on
observe sur le fossile, chez lequel une pareille fissilité de l'écaillé
semble avoir aussi existé. C'est donc de ce côté que me paraissent
être les affinités de ce remarquable strobile; elles sont encore cor-
roborées par les stries longitudinales, qu'on observe des deux
parts, sur la face externe de l'écaillé, elles le sont aussi en ce qui
concerne la forme générale du strobile, allongée et étroite des deux
parts. L'épaisseur de l'écaillé est très différente de ce qu'on voit
chez les Picea japonais et américains, dont je viens de donner les
noms, puisque, chez ceux-ci, elle est plus ou moins papyracée;
mais elle ne dépasse pas beaucoup celle du même organe chez
l'espèce commune, tout en étant certainement plus forte, ce qui
la rapproche de celle des Sapins. Ce qui la rapprocherait plus
encore de ceux-ci serait la grosseur et la forme de la graine. Quant
à la persistance des écailles, les affinités seraient du côté des Picea
et des Tsuga, car il semble bien certain qu'on est en présence d'un
strobile adulte qui n'aurait pu arriver intact, à l'endroit de fossi-
lisation, si les écailles avaient été caduques, comme chez les Sapins.
Ainsi qu'on le voit, le cône fossile de Chaillol présente des
caractères communs à des genres actuels différents des Picea, de
ces derniers il a la forme et la taille du cône, la persistance et le
bord incisé des écailles; sans doute aussi, d'après ce qu'on a pu
voir, la forme générale de celles-ci était plutôt de ce genre ou des
Tsuga que des Abies; de ces derniers, le cône fossile a l'épaisseur
des écailles, la grosseur et l'irrégularité des graines. Enfin, il dif-
férait des trois par la longueur des divisions de l'écaillé qui les
faisait ressembler dans leur ensemble à une frange.
Ce mélange de caractères se retrouve chez des Abiétinées chi-
noises, dont l'attribution générique n'est pas sans présenter, par
suite, des difficultés et éveiller des doutes sur la légitimité des
genres établis aux dépens des Pinus de Linné. C'est le cas, en ce
qui concerne les A Mes, Tsuga et Picea. C'est ce qu'a fait observer,
par exemple, pour V Abies ou Pseudotsuga Davidiana M. Franchet (1).
C'est ce que j'ai pu constater aussi pour Y Abies sacra Franchet sur
deux cônes, un peu différents du type habituel, d'après M. Franchet,
(1) Planta Davidiana, première partie, 1884, p. 288 et suiv.
474 FLICHB. — QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NOV.
envoyés du Yunnan, au Muséum (1) par l'abbé Delavay ; pour la
grosseur des graines, leur irrégularité, avec des écailles persistantes
et plus ou moins dentées aussi aux bords, double caractère qui
rapproche le fossile de cette forme vivante, je crois utile de signaler
ce rapport parce que ce n'est pas le seul entre les formes tertiaires
européennes et celles vivant aujourd'hui en Chine, particulièrement
dans la région du Yunnan et du Sutchken ; d'autres, et remar-
quables, ont été déjà constatés. Néanmoins, au cas particulier, la
longueur des divisions de l'écaillé écarte suffisamment le fossile,
non seulement de YAbies s<9crv.t mais même de toutes les formes
vivantes, pour qu'il me semble util* d'établir, pour lui, une coupe
générique spéciale, coupe provisoire sans éoute, même au cas où
on continuerait à admettre celles créées aux dépens des Hnvs de
Linné; puisque de plus nombreux et meilleurs échantillons mon-
treront peut-être que cette longue fimbriation de l'écaillé n'a pas
une très grande valeur. Mais j'ai déjà dit ailleurs pourquoi, en
paléontologie, il me semble préférable, au point de vue soit géné-
rique, soit spécifique, de distinguer par un nom, toute forme nette-
ment différente de ce qu'on connaît antérieurement à sa découverte,
sauf à faire des réunions, à la suite d'études poursuivies sur de
plus nombreux et meilleurs échantillons. L'analyse ici, même un
peu exagérée, présente moins d'inconvénients qu'une synthèse
prématurée qui ferait réunir, sous le même nom, des êtres essen-
tiellement différents.
Dans le nom de genre, il y avait naturellement à faire intervenir
le caractère dont je viens de parler : les genres Entomolepis et
Schizolepis avaient déjà employé deux épithètes grecques dont je
pouvais me servir, j'ai recouru à une troisième, KpoccioTo?, faisant
d'ailleurs plus spécialement allusion à l'aspect frangé de l'organe;
le nouveau genre devra donc s'appeler Crossôtolepis et j'en établis
la diagnose comme il suit :
Crossôtolepis.
Strobilo cylindrico elongato, 4SSmm longitudine 35mm latitudine
metiente ; squamis sat numerosis,subtus Imiter striatis, margine longé
fimbriatis ; seminibus sat magnis 8mm longitudine plmquam 3mm lati-
tudine metientibus, paulisper irregularibus ; epispermio haud crasso.
Le genre ainsi constitué ne renferme qu'une espèce dont la
diagnose, par suite, se confond avec la sienne; je lui donnerai le
nom de celui qui a trouvé ce fossile intéressant; ce sera ainsi le
C. Perroti.
(1) N* 5842.
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 475
Comme je l'ai déjà dit, le strobile étudié ici, non seulement ne
ressemble exactement à aucun de ceux des Conifères vivaots, mais
il n'est pas moins distinct de tous ceux qui ont été décrits à l'état
fossile. Toutefois, de même que parmi les espèces vivantes, il se
rapproche beaucoup des Sapins, entendus dans le sens le plus
large, c'est-à-dire en comprenant sous ce vocable, non seulement
les Sapins proprement dits, mais aussi les Epicéas et les Tsugas,
et même plus spécialement des Picea du groupe P. Menziezii et
espèces affines; de même aussi, il n'est pas impossible de trouver
des formes auxquelles il se rattache probablement parmi les fossiles.
Ce me semble être le cas pour YËntomolepis cynarocephala Sa p.,
son auteur (1), en faisant observer que ce doit être un type éteint,
et c'est pour cela qu'il lui donne un nom générique spécial, cherche
ses affinités du côté du Cuninghamia sinensis, et même du Sciado-
pitys verticillata S. et Z.; toutefois, pour celui-ci, il se fait à lui-
même, avec raison, de telles objections qu'il en revient au premier;
plus tard son opinion parait s'être modifiée; dans une note émanée
de lui, puisqu'elle est suivie des initiales de son nom entre paren-
thèses, insérée par Schimper dans son Traité de Paléontologie (2),
après avoir rappelé les deux espèces qui viennent d'être citées,
il dit que le cône d'Armissan a peut-être encore plus de ressem-
blance avec celui de YAbies Jezoensis, synonyme de Picea Ajanensis
Fischer, dont j'ai parlé plus haut. Ce dernier rapprochement me
semble beaucoup plus légitime. 11 convient d'écarter définitivement
les Sciadopitys, dont l'écaillé ne ressemble en rien à celle du fossile
d'Armissan. 11 ne semble pas non plus y avoir d'affinités réelles
avec les Cuninghamia ; non seulement la forme et la taille du
strobile sont tout autres, mais celle de l'écaillé n'est pas moins
différente, malgré la dentelure qui avait déterminé le rapproche-
ment fait par de Sa porta. Celle-ci est très fine, la forme de l'écaillé
est très différente; elle présente en son milieu une saillie qui vient
se terminer à l'extrémité de l'organe en une épine courte et simple,
ne rappelant en rien l'appendice épineux de Y Ëntomolepis; les
écailles -de base, chez le Cuninghamia, ne sont nullement réfléchies;
tout au plus sont-elles un peu étalées. Les analogies avec le P. Men-
ziezii et espèces affines, notamment le P. Engelmanni, sont au
contraire évidentes; si ces épicéas ne présentent pas un appendice
(1) Études sur la végétation du Sud-Est de la France à l'époque tertiaire.
Deuxième partie, II. Flore d'Armissan et de Peyriac dans le bassin de Narnonne
(Aude). Ann. Se. nalur. Bot., 5* sér., IV, 1865, p. 55.
(2) Traité de Paléontologie végétale, II, 1870-1872, p. 260.
476 FLICHE. — QUELQUES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NOV.
à l'écaillé, le bord de celle-ci est fortement denté, les écailles de
base sont quelquefois assez nettement réfléchies ; l'absence d'ap-
pendice, la longueur des franges et l'extrémité nullement épi-
neuse (i) de celles-ci éloignent aussi le cône de Chaillol de YEnto-
molepis. Malgré cela, les affinités entre les deux me semblent fort
probables. Comme Schimper (2), je serais aussi porté à rapprocher
de YEntomolepis, YAraucarites Gœppmi Presl de Haering. D'après la
diagnose et la figure qui se trouvent dans la Flora der Vorwett (3),
de ce fossile, en médiocre état de conservation d'ailleurs, on ne
voit pas ce qui a décidé Presl à un rapprochement avec les Araucaria,
tandis que les deux, la figure surtout, sont favorables à l'opinion de
Schimper; les affinités me semblent bien plus évidentes encore avec
le strobile de Chaillol, et je ne serais pas étonné que de meilleurs
échantillons que celui d'Haering, ne vinssent démontrer l'identité
générique et même spécifique ; il est facile de voir sur la figure de
Stembergque la forme était la même, le diamètre à peu près le même
aussi ; quant à la longueur, on ne peut s'en rendre compte, le
strobile d'Haering n'étant pas complet, sous ce rapport; les écailles
sont visiblement prolongées à l'extrémité, et celle-ci réfléchie ; il
semble également sur certaines écailles qu'elle était divisée
longitudinalement.
Pour résumer la discussion à laquelle je viens de me livrer, il
parait très probable qu'il y a eu, en Europe, durant l'Oligocène, un
groupe de Conifères de la famille des Abiétinées, à strobiles assez
grands, dont les écailles étaient plus ou moins divisées à leurs
extrémités, ce qui les rapproche surtout des Picea, particulièrement
du groupe du P. Menziesii et des espèces affines, mais à en juger
par le Crossôtolepis Perroti, la seule espèce dont nous connaissions
en partie la structure intérieure, ces écailles étaient, au moins à
leur base, de consistance plus épaisse que chez ceux-ci, de plus
les graines, plus grosses et plus irrégulières, se rapprocheraient
davantage de celles des Sapins. Sous ce rapport, il y avait de
l'analogie avec des Sapins de la Chine méridionale : Abies ou
Pseudotsuga Davidiana C. E. Bertrand et Abies sacra Franchet (4).
(1) Il convient toutefois de faire observer que d'après ce que j'ai vu sur les
échantillons du Muséum, les extrémités dos divisions de l'écaillé chez VEnto-
molepis ne sont pas toujours épineuses, elles peuvent être même un peu arrondies.
(2) Traité de Paléontologie végétale. II, p. 260.
(3) Sternberg. Flora der Vorwett. V-VIII, p. 204 du premier fascicule.
Tab. XXXIX, fig. 4.
(4) Chez cette dernière, d'après deux échantillons au Muséum de l'abbé Delavay,
l'écaillé est trilobée, le lobe moyen surtout, à bord incisé, rappelle, de loin, il
est vrai, l'appendice épineux de VEntomolepis.
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 477
Comme ceux ci, les Conifères à écailles découpées de l'Oligocène
montrent combien sont fragiles les bases sur lesquelles les genres
Picea et Tsuga ont été établis aux dépens des Abies, et sans préjuger
l'identité générique de toutes les Abiétinées proprement dites,
peut-être serait-il préférable, en présence des faits paléontolo-
giques, des observations faites depuis quelques années sur les
espèces vivantes, de réunir les Picea, Tsuga et Abies en un seul
genre sous le dernier vocable.
Dicotylédones
Protéacées
Bancksia Declceana Heer? fig. 4. — Un grand fragment de feuille
coriace, sur une plaque marno- calcaire de Malmort en Dévoluy, ne
peut se déterminer sûrement, pas plus qu'en général ces feuilles
sans nervation, sans découpures des bords, qu'on rencontre souvent
à l'état fossile. Cependant la solidité de l'organe, l'absence totale
de nervation, en dehors d'une très forte nervure médiane, la forme
générale, rattachent bien évidemment ce fossile au groupe de
formes probablement fort hétérogènes dont les Paléontologistes
ont fait des Banlcsia, rapprochement fort douteux, quand il s'agit
de feuilles tertiaires, de même que la plupart, si ce n'est la totalité,
des soi-disant Protéacées européennes de cet âge. Toutefois,
même sous ces réserves, la feuille de Malmort n'en présente pas
moins quelque intérêt, parce que Heer a décrit, dans le Flysch
suisse, des feuilles analogues ; il les rapporte à son B. helvetica,
établi d'abord, par lui, sur des échantillons du Miocène moyen de
Saint-Gall en Suisse. L'empreinte de Malmort me semble, à raison
de son limbe très franchement inéquilatéral, moins allongé par
rapport à sa largeur, plutôt se rapporter à son B. Declceana, aussi
de ce dernier dépôt. Certaines figures de cette plante dans la Flora
tertiaria helvetica offrent une grande ressemblance avec notre fossile,
mais on conçoit qu'une identification précise est toujours un peu
douteuse, sur des feuilles offrant aussi peu de caractères.
Rhamnées
Zizyphus iïngeri Heer, fig. 5. — Une feuille en assez bon état de
conservation, dont jai parlé plus haut, trouvée par M. Lory dans
les marnes calcaires en plaquettes du Bas Sigaud me parait appar-
tenir à cette espèce, déjà trouvée par Heer dans les schistes du Val
478 FLICHE. — QUELQOES FOSSILES VÉGÉTAUX DE L'OLIGOCÈNE 6 NoV.
d'Uliez, lesquels se rapportent très probablement au Flyscb. Cette
feuille, très franchement triplinerviée, pourrait faire songer d'abord
à un de ces Cinnamomum% si communs dans les terrains tertiaires,
mais le bord très nettement denté, en certains endroits bien con-
servés, les exclut ; tandis que la ressemblance est, au contraire,
complète avec les Zizyphus et notamment deux espèces tertiaires
très voisines l'une de l'autre : Z. paradisiacus (Ung.) Heer et Z. Un-
geri Heer; il me semble, d'après les dents prononcées du fossile,
qu'il s'agit plutôt de la dernière; mais il faut convenir qu'il est
assez difficile de décider entre les deux, sur une seule feuille qui
n'est même pas complète; d'autant plus que la séparation des
deux espèces repose Sur de bien faibles caractères, comme le fait
observer avec raison Heer (1). 11 n'y a pas d'ailleurs grand intérêt
à les distinguer non plus, au point de vue de l'âge auquel elles
appartiennent, puisqu'elles sont sensiblement contemporaines de
l'Oligocène inférieur au Miocène; le Z. paradisiacus. paraissant
toutefois avoir apparu le premier, puisqu'on le trouve dès les
gypses d'Aix, à la partie supérieure de ceux-ci toutefois.
Synantuérées
Baccharites obtusatus Sap.? fig. 6. — Une petite empreinte de
feuille entière sur plaquette ma rno- calcaire du vallon du Sigaud,
dans le massif de Géuze, appartient certainement au groupe de
feuilles rapportées longtemps à plus ou moins juste titre aux
Protéacées, notamment aux genres Bancksia, Lomatia; elle se dis-
tingue du Bancksites helvetica, avec lequel elle n'est pas sans ana-
logie, par la base du limbe, presque auriculée, dans tous les cas
pas décurrente sur le pétiole, qui est très court; de plus il est
visible que le bord de la feuille n'est pas entier; il est sinué, denté,
quoique faiblement et fort irrégulièrement. Par tous ces caractères,
la ressemblance est, au contraire, complète avec le Lomatites
obtusatus Sap., devenu ensuite, pour son auteur, Baccharites obtu-
satu* par suite d'un rapprochement, qui semble assez légitime,
avec les Baccharis, arbrisseaux de la famille des Synanthérées. H
n'y a qu'une différence de taille, le plus petit échantillon, figuré
par de Sa porta, ayant 28mm de longueur sur 6 de large maximum,
tandis que le nôtre est de dimensions environ moitié moindre :
13mm x &*m. Les nervures secondaires ne sont pas visibles d'une
(1) Flora fossilis Helvetiae. Zurich, 1876. Fùnfte Abtheilung. Die eocene Flora
der Schwelz, p. 172.
1899 DANS LES ALPES FRANÇAISES 479
façoû nette, mais cela est dû à l'état de conservation, car on en
voit des traces qui légitiment l'attribution. Celle-ci semble donc
naturelle, sous la réserve de la différence de taille qui, jusqu'à
nouvel ordre, interdit une affirmation absolue.
Comme on a pu le voir par tout ce qui précède, la florule, dont
nous devons les éléments aux recherches de MM. Perrot et Lory,
présente, malgré sa grande imperfection, comme nombre ou état
de conservation des échantillons, un intérêt très réel. On peut
formuler ainsi les résultats qu'elle fournit.
1° Elle offre les premières traces certaines de végétaux pour le
flysch des Alpes françaises.
2° Un échantillon prouve l'existence des Algues et sous une
forme paraissant assez voisine d'espèces actuelles; celle-ci ne
prouve rien, d'ailleurs, en faveur de l'attribution aux Algues de
tous les Chondrites, sans matière végétale, décrits dans les couches
de même niveau, et dont elle diffère beaucoup.
3° Les quelques plantes terrestres dont il vient d'être question
présentent, pour la plus grande partie, une remarquable analogie
avec celles que Heer a décrites dans les couches de même âge en
Suisse. Dans leur ensemble, elles corroborent l'attribution déjà
faite, pour d'autres motifs, des couches dont elles proviennent à
l'Oligocène.
4° Le remarquable strobile de Chaillol, rapproché d'organes
similaires déjà décrits, semble prouver l'existence, dans l'Oligocène,
d'un groupe d'Abiétinées à écailles plus ou moins laciniées, fai-
sant partie des Abies entendus dans le sens le plus large, groupe
remarquable, par certains autres caractères de structure du stro-
bile. Il présente par suite un réel intérêt, aussi bien au point de
vue géologique qu'à celui de la paléontologie, puisqu'il parait se
rencontrer, sous ses différentes formes, à des niveaux fort rappro-
chés comme âge.
EXPLICATION DE LA PLANCHE XII
Fig. 1. — Algue. — a, bifurcation du thalle ; 6, baie ; e, extrémités de thalles.
Fig. 2. — Crossotolepis Perroli n. ap. — a, sillons de l'écaillé; byb\ franges
d'écaillés.
Fig. 3. — Picea Engelmanni Parry Engelmann.
Fig. 4. — Bancksia Deckeana Heer?
Fig. 5. — Ztzyphus Ungeri Heer.
Fig. 6. — Bacchantes obtusatus Sap. ?
480 6 Nov.
OBSERVATIONS
SUR LES TERRAINS ÉOCÈNES ET OLIGOCÈNES D'EGYPTE
par M. R. FOURTAU.
La connaissance exacte de la constitution géologique de l'Egypte
est encore loin de nous être acquise, et il est certain que bien des
découvertes et des surprises sont encore réservées au géologue qui
explorerait le plateau libyque et le désert arabique. Mes recherches
personnelles m'ont permis d'établir quelques faits nouveaux; et je
dois, en présence de la plus grande activité géologique qui s'est
manifestée en Egypte depuis la création du « Geological Survey of
Egypt », chercher à conserver leur priorité à mes observations.
Ces observations portent surtout sur l'Eocène d'Egypte et les
divisions qu'on peut y établir au point de vue stratigraphique et
paléontologique. De l'Oligocène je ne dirai que quelques mots, car
ces terrains, du moins les véritables, sont encore bien peu connus.
1° ÉOCÈNE INFÉRIEUR
L'ensemble des couches que nous devons attribue? à cet étage
couvre une grande étendue de l'Egypte, depuis le parallèle d'Assouan
jusqu'au nord de Rodah, à la limite des provinces d'Assiout et de
Minieh, dans la vallée du Nil. Dans cette même vallée, il affleure
encore plus au nord à Béni Hassan et à Minieh même, mais alors
il est recouvert par l'Eocène moyen. Dans le désert arabique, on le
trouve toujours recouvert par l'Eocène moyen jusque dans la grande
vallée de l'Ara bah et même au Gebel Attakah, près de Suez. Dans
le désert libyque, il constitue la plus grande partie du plateau,
entre la vallée du Nil et les oasis du sud, qu'il dépasse même à
Farafrah, pour aller se perdre sous les dunes de sables mouvants,
à l'ohest de cette oasis, derrière le plateau d'El Gouch abou Saïd;
sa limite au nord du désert libyque est moins certaine et reste
encore très incomplètement connue.
Dans ses travaux sur la géologie du désert libyque et de
l'Egypte (1), M. K. von Zittel a proposé de désigner les couches
(1) Cf. K. Zittel. Beitrâge zur Géologie und Paléontologie der libyschen
Wûste und der angrenzenden Gebiete von Aigypten. I. Theil. Cassel, 1883,
1899 SUR LES TERRAINS ÉOCÈNES ET OLIGOCÈNES D'EGYPTE 481
composant l'Eocène inférieur sous le nom de libysche stufe. Mais
l'ensemble des couches que désigne ainsi le professeur de Munich
ne constitue pas tout l'Eocène inférieur d'Egypte. Les explorations
de la mission Rholfs ne se sont point étendues assez au sud, et plus
tard, en 1892, M. Mayer-Eyinar a découvert au Gebel Garab, à
l'ouest d'Assouan, des couches éocènes plus anciennes que les
libysche stufe, qui se prolongent du Gebel Gara h, près du Nil, jus-
qu'aux petites oasis de Douukoun et de Kourkour, situées à près
de 150 kilomètres au sud de l'oasis de Kbargheh.
Ces couches renferment peu de Foraminifères et sont plutôt
caractérisées par deux Echinides : Bothriolampas abundans Gauthier
et Porocidaris Schmiedelii Goldf. Le premier de ces Echinides me
permet de fixer l'âge exact de ces couches puisqu'une seconde
espèce de ce genre, très voisine de l'espèce égyptienne, Bothriolam-
pas tunetana Thom. et Gautb. a été rencontrée à la base de
l'Eocène inférieur des hauts plateaux de la Tunisie. Enfin leur
faciès catcaréo-marneux aveo de nombreux moules de bivalves
principalement Cardium et Cardita, indique bien une formation
littorale, ce qui tendrait à me faire croire que l'unique spécimen
de Micraster que M. Mayer y a recueilli et dont il a fait son
M. ulîimm, pourrait bien n'être qu'un individu remanié provenant
des couches du Crétacé supérieur qui en sont assez voisines.
Dès lors, si le littoral de l'Eocène inférieur a été primitivement
sur le parallèle d'Assouan, devons- nous admettre que les couches
marneuses situées à la base de la coupe de d'Archiac et Delanoue (1),
prise au Gebel Gournah, à l'ouest de l'ancienne Thèbes, sont cré-
tacées comme paraît l'admettre M. Zittel? Je ne le crois pas. Le
Trachyaster (Hemiaster) Archiaci de Lor. qui caractérise ces
couches est bien éocèneet non crétacé, les Aturia Zic-Zac Sow. mal
conservées et les rares dents de Lamna ne prouvent pas grand
chose, c'est vrai, mais cette faune est bien différente de celle des
marnes dordoniennes ou campaniennes des Oasis, dont l'âge crétacé
est définitivement fixé par les calcaires à Micraster et Echinocorys
qui les surmontent. Il est donc plus rationnel de considérer les
marnes du Gebel Gournah comme un faciès pélagal des couches
littorales du Gebel Garah et des Oasis de Dounkoun et de Kourkour.
L'absence de ces couches à la base de l'Eocène inférieur des
Oasis où les bancs à Operculina libyca reposent directement sur la
<i) D'Archiac et Delanoue. Sur la constitution géologique des environs de
Thèbes. ('. H. \c. Se , 181)8, T. LXVI1, p. 701.
1" Février KWU. - T. XXVII. Buii. Soc-. tiéol. Fr. — M
482 R. FOURTAU 6 Nov.
craie à Micraster et Echinocorys est évidemment la cause qui a
déterminé M. Von Zittel à faire de ces bancs la base de son Eocène
inférieur et à considérer les marnes qu'ils surmontaient près de
Thèbes, comme une formation probablement crétacée. Mais étant
donné d'un côté la différence absolue des faunes et d'un autre côté
la régression continue vers le nord des mers tertiaires d'Egypte,
nous sommes bien forcés de considérer les couches des environs
d'Assouan comme plus anciennes que les bancs à Operculines des
Oasis, et à leur chercher un faciès latéral d'eau profonde qui ne
peut être que les marnes de la base du Gebel Gournah, situées à
250 kilomètres plus au nord.
Ce premier point acquis, je crois utile de formuler quelques
observations au sujet des libysche stufe mêmes.
Les localités types de M. Von Zittel ne me paraissent point offrir
la sécurité désirable pour l'établissement de ses divisions de
l' Eocène égyptien, et cela non seulement pour i'Eocène inférieur,
mais encore et surtout pour I'Eocène moyen, comme j'espère le
démontrer au cours de cette étude.
Pour la partie inférieure des libysche stufe, M. Von Zittel a pris
comme types les localités d'El Gouch Abou Saïd et de Naqb el Faroud-
jah dans l'Oasis de Farafrah, qu'il a été à même d'étudier plus
particulièrement au cours du voyage d'exploration de la mission
Rholfs. Les coupes qu'il donne ne peuvent se rapporter qu'à des
faciès d'eau profonde. Ce sont des couches marneuses ou marno-
calcaires avec de nombreux Foramiuifères et Nummulites, et par
conséquent des formations marines zoogènes de type éminemment
pélagal.
Au point de vue paléontologique, je pourrais faire bien des
objections ; il n'y a pas dans les fossiles cités, à part quelques
Nummulites et Operculines, une seule espèce qui ne remonte pas
dans les couches les plus supérieures des libysche stufe, etquelques-
unes, comme Schizaster foveutusXg., Vêlâtes Schmiedelianus Chem.,
Terebcllum sopitum Lk., et Turitella ^Egyptiaca M. E., remontent
même jusqu'au sommet de I'Eocène moyen. Je possède aussi
un Micropsis Mokattannensn Cott. provenant d'El Gouch Abou Saïd
qui me porte à croire que la dernière couche de ce plateau pourrait
bien n'être que de I'Eocène moyen.
Les formations marines terrigènesdu type littoral ont été laissées
de côté par M. Von Zittel qui, d'ailleurs, ne lésa pas rencontrées dans
sou itinéraire, et pour la vallée du Nil nous ne trouvons dans sou
ouvrage que deux coupes qui se rapportent entièrement à la partie
1899 SUR LES TERRAINS ÉOCÈNES ET OLIGOCÈNES I>* EGYPTE 483
inférieure des libysche stufe, l'une à l'ouest d'Esneh à la limite du
plateau libyque ne nous apprend pas grand chose, et l'autre n'est
que celle de D'Archiac et Delanoue. Il est cependant à noter dans
cette dernière, que nous avons pu vérifier et suivre entièrement,
que les couches au-dessus du grand banc sans fossiles où sont
creusés les tombeaux des Rois, présentent un faciès calcaréo-
marneux où prédominent les bivalves, qui est, par conséquent, un
faciès littoral. L'on doit donc considérer les couches à Operculines
d'El Gouch abou Saïd et les couches moyennes du Gebel Gournah,
ainsi que toutes les couches à Operculina libyca de la vallée du
Nil comme des faciès latéraux et non superposés.
La partie supérieure des libysche stufe comprend les couches à
Alvéolines et à Callianassa des environs d'Assiout et de Minich,
situées plus au nord dans la vallée d'Egypte et le plateau libyque.
A Assiout, le Gebel Drounka (Todtenberg des auteurs allemands),
serait, d'après M. Von Zittel, composé tout entier de couches apparte-
nant à la partie supérieure des libysche stufe. Lors de l'extension
du réseau ferré égyptien vers le sud, j'ai pu, en installant à cette
montagne une grande carrière qui a fourni plus de 100.000m3 de
pierres, véritier l'exactitude de la coupe de M. Von Zittel. Je ne me
sépare de lui qu'en ce que je reporte la séparation en deux sous-
étages des libysche stufe au-dessus des couches à Conoclypeus Delà-
nouei Lor., qui occupent les 50 premiers mètres de la base de la
montagne. Cet échinide est en effet un des rares fossiles très
caractéristiques de la partie inférieure des libysche stufe au même
titre que Operculina libyca. Je l'ai récolté non seulement à Assiout,
mais aussi au Gebel Haridi, en face Tahta, au Gebel Essaouieh,
entre Sohag et Ghirgheh, à la carrière de Mouallah, au sud de
Louqsor ; Schweinfurth l'a recueilli dans les couches à Operculines
de l'oasis de Khargheh, et Delanoue en a rapporté le type des
environs de Thèbes. La base de la partie supérieure des libysche
stufe doit donc être reportée au niveau des grands tombeaux de
la nécropole de Lycopolis, qui sont creusés dans le Gebel Drounka.
A propos de cette coupe, je ferai observer que les empreintes
d'Algues, que cite M. Von Zittel dans les couches de la base de la
montagne avec un point de doute qui, certes, a sa raison d'être,
sont simplement des dendrites de manganèse et d'oxyde de fer.
A Béni Hassan et à Minieh, l'Eocène moyen apparaît au-dessus
des libysche stufe qui aflleurent le long du Nil jusqu'à Cheikh
Hassan, à 20 kilomètres environ au nord de Minich en face
Samallout. Mais si l'on abandonne la vallée du Nil pour remonter
484
6Nov.
à l'est dans le désert arabique, on retrouve encore les libysche stufe
plus au nord sur le crétacé supérieur, le long de l'Ouady Keneh,
puis dans la vaste coupure de la vallée de l'Arabah, el enfin il est
permis de considérer la plus grande partie des calcaires éocènes
qui couronnent le Gebel Attakah, près de Suez, comme un faciès
latéral de ces mêmes couches.
L'ensemble des libysche stufe représente, d'après M. Von Zittel, une
épaisseur d'environ 500 mètres. C'est, à mon avis, exagéré, et cela
provient sans nul doute de cequ'il a considéré comme superposés
des faciès qui sont eu réalité latéraux, et en ajoutant aux libyschc
stufe les couches éocènes plus anciennes d'Assouan, je ne puis
arriver qu'aux évaluations ci-dessous.
COUCHES
PACTES LITTORAUX
FACIÈS D'EAU PROFONDE
rCBÎAKt
A
Calcaires* Bothriolampas
iihuiu/niifGaulta.el mou-
les de Cardium el Car-
itita du Gebel Uarah et
des oasis de Dounkoun
et Kourkour.
Calcaires a Opereulinu
libyen. ConnefytMMt De-
lanoveï et Lucina glo-
bulosa Lk. de l'oasis de
Khar«heh, îles environs
de Louqsor. du Gebel
Harldl et du Gebel
Drouoka.
Calcaires a Àtvroliiia fru-
mtntilorinin,Fitbularia
Ztlteli et a pinces de
Calhanùua ntiodca
Fraasdu Gehel Urounka
et des environs de Mi-
iiicli et Benl Hassan.
Marnes lerrugineuseB fl
Traehyanter ArcMaci,
Aluria zic-:ac Sow. el
denta delnmnii du Gebel
Gnurnuh aux environs de
30
m
150
:■■
, 17
1 u.
?
B
C
Marnes el calcaires mar-
neux a Opercutina iiby-
caetNuinniulitPxdetinti
de l'Oasis de Faralrah. .
i ilcajres ■ : 1 1 1 ■■ [ ii — du
Gebel Attakah, près Sue»
el partie intérieure des
couches nu mm u lUiques
de l'Ouady Arababuaua
le désert arabique . . .
Total
. 400
11 est évident que j'ai du, dans cetteénumérationrapide, négliger
des faciès intéressants, tels que les calcaires à bombes de silex des
environs de Déclina et de Kcneli et la couche de brèche polygé-
nique (griotte), qui s'étend de l'Ouady Syout au Gebel Taref, sur
une épaisseur moyenne de 10 à 12 mètres, mais ce sont là des faciès
locaux dont l'étude nous entraînerait trop loin.
1899 SUR LES TERRAINS foCÈNES ET OLIGOCÈNES D EGYPTE 485
Il est à noter qu'une des causes qui contribuent aussi à faire
croire à une plus grande épaisseur des couches de l'Eocène infé-
rieur, est le brusque changement de direction delà vallée du Nil
qui, à Keneh, tourne brusquement à angle droit vers l'ouest et
recoupe ainsi les calcaires sur un parcours de près de 150 kilo-
mètres jusqu'à Ghirgheh, où elle reprend de nouveau presque à
angle droit sa direction primitive vers le nord.
2° EOCÈNE MOYEN.
L'Eocène moyen apparaît dans la vallée du Nil à Beni-Hassan,
pour disparaître sous les sables pleistocènes un peu au nord du
Caire. Dans le plateau libyque, il se prolonge jusque près de l'oasis
de Syouah. L'ensemble des couches qui le composent a été désigné
par M. Von Zittel sous le nom de Mokattam stufe, du nom de la
localité type, le Gebel Mokattam. à Test du Caire.
Il est certain quede prime abord, le choix de cette localité parait
tout indiqué ; c'est la mieux connue de toute l'Egypte et la plus
facile à observer. Située aux portes du Caire, elle a été étudiée ou
visitée par tous les géologues qui sont venus en Egypte. Russeger,
Newbold, Gaillardot, Figari, Lefebvre, Fraas, Delanoue, Schwein-
furth, Mayer-Eymar, lui ont consacré une bonne partie de leur
temps passé en Egypte, et quoique leurs conclusions n'aient pas
été d'une parfaite concordance, il est évident que, par cela seul,
le Mokattam était tout désigné au choix qu'en a fait M. Von Zittel
comme localité-type de l'Eocène moyen d'Egypte. Malgré cela, et
ne considérant que l'intérêt stratigraphique, j'ai le regret de me
séparer absolument de tous mes prédécesseurs, et de déclarer que
jamais localité ne mérita moins que le Mokattam de servir de type
à l'Eocène moyen d'Egypte.
Si l'on considère, en effet, toutes les coupes qui en ont été
données et qui ne diffèrent en somme que par la plus ou moins
grande subdivision des strates, on est frappé tout d'abord par la
présence, au-dessus des couches pétries de Numinulites de la base
de la montagne, d'un énorme banc de calcaires marno-ocreux que
Fraas et après lui tous les géologues allemands ont appelé la
pierre à bâtir (Baustein) du Caire. L'attention du géologue qui
visite le Mokattam est de suite attirée par cette couche où sont
ouvertes la plupart des carrières du Ghiouchy et du Gebel Abiad,
dont le front d'exploitation a, dans quelques-unes, une hauteur
presque à pic de plus de 30 mètres. Ce qui le frappera d'abord, est
486 R. POURTAU 6 Nov.
l'absence à peu près complète de Nummulites et autres Forami-
nifères qui pullulent dans les couches inférieures. A l'exception
de nombreuses dents de squales, il n'y rencontrera que de rares
fossiles, des A nomia indéterminables et quelques moules de bivalves,
Lucino, Cardium, Clavagella, etc., mais il pourra y recueillir les
fruits fossiles d'une espèce de Palmier, que Fraas a, je ne sais trop
pourquoi, désigné sous le nom d\4 peibopsis gigantea. C'est dans
cette couche que Clôt bey a récolté l'unique échantillon du
Bulimus Osiridis, décrit et figuré par Bellardi. Ce mélange de faune
marine et de flore terrestre, ajouté à la disparition presque totale
des foraminifères, indique évidemment le voisinage des côtes,
d'autant plus que la pierre elle-même a un grain bien moins serré,
moins siliceux et tend à se déliter en plaques minces schisteuses.
Je ne puis donc considérer cette couche que comme un faciès par-
ticulier d'estuaire, qui doit être éminemment local.
C'est ce dont je me suis rendu compte au cours de nombreuses
excursions dans l'Eocène moyen des deux côtés de la vallée du
Nil, entre Le Caire et Minieh. Depuis Torah et Mahsara jusqu'à
cette dernière ville, je n'ai pu retrouver, le long de la chaîne ara-
bique, la pierre à bâtirdu Caire. A Helouan, à Atfieh, à Maimoun,
à Beni-Souef, à Fechn, à Magagah et Cheikh Hassan, j'ai retrouvé
les dents de squales, Carcharodon auriculatus, Lamna Vincenti,
Oxyrhina Desori et Galeocerdo latidens dans les calcaires nummu-
litiques, mais je n'ai pu retrouver nulle part le faciès particulier de
la pierre à bâtir du Caire.
De même sur la lisière du plateau libyque, au plateau des Pyra-
mides de Ghizeh, en face le Mokattam, Lamna Vincenti se trouve
dans un banc pétri de Nummulites et la pierre à bâtir du Caire fait
totalement défaut, il en est de même au Gebel Sidment et au Gebel
llahoum, qui séparent le Fayoum de la vallée du Nil. L'effet de cette
régression momentanée de la mer éocène dans la région du Mo-
kattam, se fait ressentir dans les couches supérieures à la pierre à
bâtir, et nous voyons la transgression se produire de nouveau
lentement sous la forme des couches à Lobocarcinus Paulino Wur-
tembergicus v. May. qui surmontent la pierre à bâtir, puis vient un
faciès littoral encore particulier au Mokattam, avec récifs de Bryo-
zoaires du type Eschara, de nombreux Echinides et une masse de
moules de bivalves empâtés dans un calcaire marneux. Au-dessus,
les Nummulites reparaissent en masse dans un calcaire siliceux,
indiquant la transgressiou complète par ce faciès de haute mer.
Tout cela est absolument particulier au Mokattam, (fui ne doit
1899 SUR LES TERRAINS ÉOCÈNES ET OLIGOGÈNES D' EGYPTE 487
donc pas être choisi comme type de l'Eocèue moyen d'Egypte»
puisque sa partie médiane ne comporte qu'une suite de faciès
locaux, dont l'équivalent ne se retrouve nulle autre part dans la
vaste étendue que couvre l'Eocène moyen d'Egypte.
En dehors de ces observations sur la localité type de l'Eocène
moyen en Egypte, je ne vois rien à signaler, si ce n'est l'âge par*
faitement éocène des couches à Carcharias frequens Dames du
Gheziret el Korn, dans le Birket Karoun (Fayoum),que MM. Dames
et Zittel ont placé dans l'Oligocène.
Dans la partie supérieure de l'Eocène moyen du Mokattam et du
plateau des pyramides, l'on rencontre une couche d'aspect à peu
près semblable et renfermant de nombreux débris de Careharias
frequens et des autres poissons qui l'accompagnent dans les
couches du Gheziret el Korn. Dans ces deux localités l'âge éocène
moyen de cette couche est nettement fixé par les bancs à Carolia
placunoides Cantr. et Plicatula polymorpha Bell, qui l'encadrent.
Dès lors il n'y a pas de raisons pour que la couche du Gheziret el
Korn ne le soit pas aussi. L'argument tiré par Dames, de la
présence du Zeugbdon, inconnu dans l'Eocène d'Europe et d'Amé-
rique, est bien affaibli par la présence, dans ce même banc, des
genres Saurocephalus qui est toujours crétacé dans ces mêmes
contrées, et Cœlorhynchus, qui est crétacé ou éocène inférieur. On
rencontre aussi des débris de Zeuglodon au Mokattam et plus au
sud dans le Gebel Tourah (Mons Traicum de Ptolémée) et personne
à ma connaissance n'y a vu des couches oligocènes. Quant à
l'argument tiré des Pélécypodes, je ne m'y arrêterai pas, étant
donné que ces fossiles sont tous à l'état de moules internes dont
la détermination est toujours problématique.
3° Eocène supérieur et Oligocène
Le Bartonien à Nummulites Fichteli La Harp. et Clypeaster
Breunigii Laub. étant situé à la lisière sud-est de l'oasis de Syouah,
n'est pas d'un abord facile et je ne possède sur lui que les données
de M. Von Zittel. 11 n'en est pas de même pour le Tongrien, auquel
M. Mayer-Eyinar a consacré plusieurs notices.
J'ai déjà, dans une précédente étude sur le Gebel Ahmar (1),
démontré que les quartzites qui composent ce piton étaient
d'époque pleistocène, ou tout au moins pliocène supérieur, ce qui
(1) R. Fou ht au. Étude géologique sur le Gebel Ahmar. Bull. Inst. Egyptien,i&l.
488 R. FOUHTAU 6 Nov.
les synchroniserait avec les épanchements de même nature que
M. Thomas a étudiés dans le sud Tunisien.
J'ajouterai aujourd'hui : 4° Que l'épanchement doléritique (Pla-
gioklaz-Dolerit des auteurs allemands) d'Abou Zabel et tous ses
similaires en Egypte (Kom Kachab et oasis de Beharieh) me pa-
raissent devoir être rapportés à cette même époque, et synchro-
nisés avec les épanchements basaltiques que notre Société vient
de visiter il y a un mois aux environs de Pézenas, sous l'habile
direction de M. Ch. Depéret.
2° Que les grès situés au pied du Mokattam derrière les tom-
beaux des Califes, entre la nécropole de Kaïtbaï et celle de l'iman
Afifi, et qui constituent, suivant M. Mayer, le Tongrien inférieur
des environs du Caire, ne sont autre chose qu'une formation ana-
logue au hadjar soud du Pliocène supérieur de l'Oued Mamoura, si
bien décrit en Tunisie par mon excellent confrère M. Ph. Thomas ;
et que si VHelix Cairensis M. E. ressemble étrangement à 17/.
subsemperiana Cros. des dépôts algériens et tunisiens, en revanche,
les Pholas des grès de Kaïtbaï sont les mêmes que celles qui,
d'après M. Mayer, ont perforé à l'époque saharienne les falaises
calcaires du Mokattam. De plus, ces grès comme les quartzites du
Gebel Ahmar et comme V hadjar soud de la Tunisie, renferment des
fragments roulés de bois silicifiés Nicoliaei Araucarioxylon, il s'en
suit donc qu'ils sont plus récents que la forêt pétrifiée du Caire,
que M. Mayer déclare être du Tongrien supérieur, ce qui n'est pas
du tout prouvé et qui doit être, elle aussi, bien plus récente, attendu
qu'elle repose sur des sables identiques aux sables pleistocènes du
substratum du Delta et que ces sables surmontent une coulée de
quartzites identiques à ceux du Gebel Ahmar et du Gebel Kreïboun.
On se demande d'ailleurs à la vue du gisement de Kaïtbaï ce que
viendrait faire là, à la base du Mokattam, ce maigre lambeau de
Tongrien, tandis qu'il est admirablement à sa place en continuant la
série des dépôts littoraux du Pliocène supérieur que l'on rencontre
surtout au Gebel Chelloul et à l'Ouady Mellaha.
Il s'en suit donc que le Tongrien ne serait plus représenté, dans
la vallée du Nil, que par les marnes salées et gypseuses qui
affleurent entre la vallée du Nil et le Fayoum, dont elles forment
en grande partie le substratum. Ces marnes n'ont donné jusqu'à
présent aucun fossile et si elles reposent sur la partie supérieure de
l'Eocène moyen, elles ne sont recouvertes que par des sables et
graviers pleistocènes. Ce ne sont donc que des raisons de senti-
ment qui peuvent les faire classer dans l'Oligocène.
1899 SUR LES TERRAINS ÉOCÊNES ET OLIGOCÈNES D'EGYPTE 489
Dans le plateau libyque il existe très probablement des couches
tongriennes, mais je ne veux point empiéter ici sur les études de
mon excellent confrère et ami M. Max Blankenhorn, qui possède
lui seul aujourd'hui les éléments nécessaires pour traiter cette
importante question et dont les conclusions viendront, j'en suis
convaincu, à l'appui de ma thèse.
4° Divisions stratigraphiques et paléontologiques
Dans la préface de mon mémoire sur les Echinides fossiles
d'Egypte, j'ai essayé d'établir un tableau des couches sédimentaires
de l'Egypte, en les synchronisant avec les divisions de la série
générale. Je dois avouer que si, pour le Crétacé, la tâche m'a été
assez facile, il n'en a pas été de même pour le Tertiaire, et que les
divisions établies pour cette dernière époque par MM. de Lappa-
rent et Munier-Chalmas, et par tous ceux qui, avant eux, se sont
occupés de classification générale, s'appliquaient bien difficilement
au Tertiaire égyptien ; et, comme en présence des objections sou-J
levées par moi au cours de cette note au sujet des noms spéciaux"
proposés par M. Von Zittel pour les coupures qu'il a faites dans
l'Eocène égyptien, il m'est difficile de les admettre, j'estime donc
qu'il vaut mieux rester dans les termes généraux et supprimer
toute dénomination, môme prise dans son sens le plus large.
11 est évident que dans l'Eocène inférieur les libysche stufe cor-
respondent au Suessonien français, mais il est bien difficile d'établir
exactement quelles sont celles qui sont contemporaines du
Thanétien, du Sparnacien, ou de l'Yprésien, et les coupures que
l'on y ferait seraient absolument arbitraires. Et cela d'autant plus
que la paléontologie ne peut nous être d'aucun secours pour les
établir.
Dans une région où durant un si long espace de temps il y a eu
sédimentation marine continue avec régression très lente vers le
nord, les espèces ont vécu plus longtemps que dans d'autres
contrées où les régressions et transgressions marines ont mainte
fois changé les conditions d'existence et contribué ainsi à la modifi-
cation des espèces.
C'est ainsi qu'en Egypte, bien des espèces caractéristiques autre
part ont une extension verticale très grande. L'Ostrea multicostata
et ses nombreuses variétés si bien étudiées en Tunisie par MM.
Thomas et Locard, se rencontre en Egypte dans l'Eocène inférieur,
et jusqu'au sommet de l'Eocène moyen. Il en est de même pour
490 R. FOURTAU 6 Nov.
Vêlâtes Schmiedelianus, Turritella œgyptiaea, T. oxycrepis, Harpopsis
strûmhoides, Cardium obliquum, Vulsella legumen, etc., etc. Sur 50
espèces de mollusques citées par M. Von Zittel dans la partie infé-
rieure de ses libysche stu/e, 26 remontent dans TEocène moyen et
môme dans l'Oligocène, l'une d'elles même, Cardium discrepans Bas t.,
va jusqu'au sommet du Miocène. Des 38 espèces des libysche stufe
supérieurs du Gebel Drounka, 15 remontent dans l'Eocène moyen
et supérieur et dans l'Oligocène, et 10 se rencontrent dans les
couches éocènes inférieures. Bref, à part les espèces nouvelles,
aucune déjà décrite ne peut servir de point de comparaison, et
dans bien des espèces propres à l'Egypte, on ne peut retenir que
leur apparition comme caractéristique. C'est ainsi, que si au
Mokattam grâce à l'intercalation du faciès d'estuaire de la pierre
à bâtir, les bancs à Carolia placunoïdes semblent appartenir à la
partie supérieure de l'Eocène moyen, on retrouve en revanche à
Minieh et à Béni Hassan, ces mêmes Carolia, très abondantes dans
les couches à Nummulites Ghizehensis de la partie la plus inférieure
de l'Eocène moyen.
Cette même Nummulites Ghizehensis ne peut servir que de carac-
téristique générale à l'Eocène moyen. Comme M. Von Zittel,
je crois que son apparition doit servir à déterminer la limite de
l'Eocène inférieur et de l'Eocène moyen, de même que sa dispari-
tion fixe la limite supérieure de l'Eocène moyeu, mais il est impos-
sible de s'en servir pour faiie une coupure dans l'Eocène moyen.
Pour les Echinides, c'est la même chose. Malgré que leur durée
phylétique soit en général fort courte, il y a une longue liste à
établir de ceux qui sont communs à l'Eocène moyeu et à l'Eocène
inférieur. Mais il y en a ne qui mérite une mention particulière, car
il peut servir de caractéristique générale à tout l'Eocène égyptien,
c'est le Porocidaris Srhmiedelii dout les radioles si caractéristiques
se rencontrent aussi bien dans les couches des oasis de Dounkoun
et de Kourkour à la base de l'Eocène, que dans les couches voisines
du Bartonien, aux environs de Syouah.
Les Annélides sont peu représentés dans l'Eocène égyptien. Les
Serpules comprennent deux espèces, l'une Serpula Kephren Fraas,
se trouve dans tout l'Eocène moyen. L'autre, Serpula spiruhva Lk.,
apparaît au début de l'Eocène moyen et y est aussi abondante dans
les couches de la base de cet étage dans l'Ouady Sannour, près
Béni Souef, où M. Max Blankenhorn l'a récoltée, et dans les
couches plus élevées du plateau des pyramides de Ghizeh et du
Mokattam, qui m'ont fourni de bons échantillons, que dans les
1899 SUR LES TERRAINS ÉOCÈNES ET OLIGOGÈNES D' EGYPTE 491
couches bartonienne8 des environs de l'oasis de Syouah, où M. Zittel
l'a rencontré.
La paléontologie ne peut donc nous être que de très faible
secours pour diviser les couches du Tertiaire inférieur d'Egypte, et
tant que nous n'aurons pu relier entre eux d'une façon indiscu-
table tous les lambeaux de l'Eocène méditerranéen, j'estime que
tout essai de classification générale serait prématuré et qu'il vaut
mieux s'en tenir aux termes vagues d'Eocène inférieur, moyen et
supérieur.
PROGRÈS DE LA GÉOLOGIE DES PYRÉNÉES
par M. STl ART MMTEATH
Le Trias de Bordères, entre Jezeau et Ys, et entre Notre-Dame-des-
Neiges et Bareilles, est intercalé en stratification verticale entre le
granité et le calcaire de Sarrencolin ou de Geteu, lequel est
recouvert par les schistes lustrés de la plaine d'Esquieu (Campan).
Ce calcaire et ces schistes représentent le Trias alpin des Pyrénées,
décrit dans le C. H. S. G. F., 1895, p. 166. Dans les vallées de Gistain,
Bielsa et Pinède, au sud de Bordères, on voit partout le Trias
souvent horizontal, entre le granité et tous les dépôts sédimentaires.
La transformation de sa base en quartzite est la cause de la méprise
qui Ta fait représenter comme un placage superficiel. A Sarren-
colin et à Cierp, le même calcaire superposé au Trias est recouvert
par les mêmes schistes lustrés. Magnan a donc classé le Trias de
ces localités dans le « Vieux Grès Rouge » des Anglais, et on a tou-
jours classé dans le Silurien les schistes lustrés qui, au nord de
Cierp et de Sarrencolin, sont pénétrés de granulite, bien que la même
bande soit également pénétrée par cette roche à Esquieu, Ferrières,
etc., où on l'a classée dans le Carbonifère et dans l'Albien. Des
Graptolites trouvés dans les conglomérats à la Source de Labassère
et à Ferrere et de faux Graptolites assez fréquents, ont confirmé la
méprise. La situation de ses schistes lustrés entre le Lias inférieur
fossilifère et le calcaire de Sarrencolin à Nerinées et Belemuites de
caractère triasique. à Beaudeau, Rebouc et Geteu, implique leur âge
rhétien. Le calcaire a été identifié par Coquand à celui de Carrare,
dont il présente en effet tous les caractères, mais qu'il croyait carbo-
nifère. Au nord d'Argelès, ce calcaire se relie à ceux d'Argelès (syn-
492 STUART-MBNTEATH. PROGRÈS DE LA GÉOLOGIE DES PYRÉNÉES 6 NoV.
clinaux d'Argelès) discordants sur le Dévonien et, par suite, nette-
ment différents du calcaire carbonifère qui, partout, est inséparable
du Dévonien. Au nord d'Argelès, des lambeaux de Culm à nodules
de phtanite et nombreuses entroques se trouvent d'ailleurs à la base
du calcaire. Ce calcaire triasique est largement développé entre Gripp
et Campan, forme la crête de Bayen, et par Ferrières et le col de
Louvie atteint Geteu, et à l'ouest repose toujours sur la base du Trias.
Le calcaire carbonifère, bien développé entre Canfranc et Gavar-
nie, est disposé en anticlinaux renversés vers le sud et dont les
têtes sont encore souvent enveloppées par la grauwacke à Calamités
du Culm. Mais le tout est arasé et sur la surface d'érosion repose
le grand horizon rouge et élastique des Pyrénées. Ceci varie d'épais-
seur depuis quelques centimètres jusqu'à 1.000 mètres et repré-
sente tantôt le Trias, tantôt le Cénomanien, tantôt toute la série
intermédiaire. La transgression dite cénomanienne est donc une
illusion de première impression. Le versant nord de la dalle des
Eaux-Bonnes est formé par le calcaire de Geteu, à tiges d'Encrines;
il est recouvert par le Culm et séparé du Crétacé normal des Eaux-
Chaudes par les schistes lustrés avec lentilles d'ophite. Au sud, le
pli couché est brusquement replié, mais son aile nord est déblayée
Un anticlinal de calcaire carbonifère qui recouvre le Dévonien
forme le noyau du pli au nord. De Geteu à la vallée d'Izas, où on
retrouve le calcaire triasique, tous les plis sont analogues. Il s'agit
d'un golje de Crétacé supérieur, analogue à celui de Vera ou de
Gosau, et qui a été enfoui lors du soulèvement post-éocène des Pyré-
nées. J'ai complété l'étude d'un golfe semblable à Burguete et Ron-
cevaux, où 100 mètres de Plnfracrétacé charbonneux, avec nom-
breuses bandes de jayet, de Saint-Lon ou d'Utrillas, forme la base
du remplissage, recouvert par des masses d'Orbitoltna eoncava et
de Flysch turonien des Pyrénées. Ces couches sont écrasées contre
le Trias au sud et une belle faille, d'où jaillit la source de Ronce-
vaux, les limite au nord. Des deux côtés de cette faille, dirigée O.
7° S., j'ai trouvé des filons de cuivre gris, d'un type nouveau, avec
10 •/• soit d'étain, soit de mercure. Ces filons ont été protégés par
les couches marneuses du Crétacé. A La Tume, le terrain ligni-
teux de Burguete, réduit à quelques centimètres, forme la base
du Crétacé, reposant sur les tètes arasées du calcaire carbonifère
vertical.
483
Séance du 20 Novembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRESIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président proclame membres de la Société :
MM. le Dr Otto Jœkel, Professeur à l'Université de Berlin,
présenté par MM. de Lapparent et de Margerie.
Joleaud, Sous-Intendant militaire à Constantine, présenté
par MM. de Lamothe et Ficheur.
Pellegrin, Ingénieur civil, présenté par MM. Marcel Ber-
trand et Guébhard.
Il annonce quatre présentations.
Le Secrétaire annonce que M. Raulin fait don à la Bibliothèque
de la Société de son ouvrage : Statistique géologique et agronomique
du département des Landes (3 vol.), dont les deux premiers volumes
ont été faits en collaboration avec M. Jacquot. Cet ouvrage est accom-
pagné d'une carte géologique des Landes au 1/200.000* des mêmes
auteurs et des feuilles géologiques de Saint-Sever et de Dax au
1/80.000* par M. Raulin.
11 signale : 1° le N° du 15 novembre des « Annales de Géographie »,
contenant un article de W. M. Davis, la Pénéplaine, et le compte-
rendu d'une Excursion de géographie physique dans le Morvan et
l'Auxois, par E. de Martonne (4 pi. photographiques et une carte en
couleurs) ; 2° le Compte-rendu de la 27e Session de l'Assoc. franc,
pour l'avanc. des sciences (1898), qui renferme des notes géologiques
de MM. Ramond, Cossmann, Levât, Bureau, de Grossouvie, etc..
M. J. Blayac appelle l'attention de la Société sur une note de
M. P.-G, de Rouville : Sur V Infracrétacé de la feuille de Montpel-
lier. L'auteur affirme qu'une partie des assises classées dans le
Valanginien supérieur et l'Hauterivien sur la feuille de Montpel-
lier, récemment parue, doivent être rapportées au Barré mien
(Cruasien et Barutélien de M. Torcapel).
M. L. Gentil signale, parmi les dons reçus de l'Etranger, le t. IX
de la a Revista del Museodela Plata » (1899), renfermant plusieurs
494 SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899
mémoires avec planches en couleurs de MM. Santiago Roth, Dr Cari
Burckhardt, Dr Léo Wehrli; le vol. XXXIII du « Bulletin of the
Muséum of Comparative Zoology at Harvard Collège » (Cambridge,
may 1899), renfermant un important mémoire de M. Al. Agassiz :
The Islands and corat Reefs of Fiji (167 p., 45 fig., 112 pi.).
Le Président présente une brochure de M. Emmanuel Portai :
Les Origines de la vie et la Paléontologie. L'auteur a déposé au
Secrétariat un certain nombre d'exemplaires de cette note pour être
distribués aux membres de la Société qui en feront la demande.
M. J. Bergeron annonce que les Mémoires de Paléontologie publiés
sous la direction de la Société, chez Carré et Naud, viennent de
s'enrichir de quatre nouveaux fascicules : 1° Mémoire N° 19 : Contri-
bution à la Paléontologie française des terrains jurassiques, Néri-
nées (fasc. H du t. VIII, 7 pi.), par M. Cossmann ; 2° Contribution
à Tétude de la faune du Crétacé supérieur. Environs de Campulung
et de Sinaïa (fasc. 111 du t. VIII, 2 pi.), par M. Popovici Hatzeg ;
3° Etude sur la flore fossile du bassin houiller d'Héraclée (Asie-
Mineure) (fasc. IV, t. VIII et fasc. I, t. IX, 6 pi.), par M. R. Zeiller.
M. M. Bertrand présente une brochure contenant une note, de
lui et de M. Zurcher, sur la Géologie de l'isthme de Panama, et une
autre sur les Phénomènes volcaniques et les tremblements de terre de
l'Amérique centrale.
11 donne la coupe suivant le tracé du canal, coupe établie d'après
les observations de M. Zurcher, d'après les nombreux sondages de
la nouvelle et de l'ancienne Compagnie, et d'après les données
déjà publiées par M. Douvillé. Cette coupe montre que l'isthme est
constitué par une voûte très surbaissée, et que l'abaissement des
seuils en ce point est dû uniquement à un moindre effort des forces
de soulèvement qui, à l'est et à l'ouest, ont fait surgir le granité dans
l'axe de l'anticlinal plus accentué.
Au point de vue de l'activité volcanique, M. Bertrand insiste sur
les faits qui semblent montrer un déplacement progressif de cette
activité vers le sud-est. On connaît déjà le déplacement progressif
vers l'Océan des brèches volcaniques alignées suivant des fentes
transversales; mais il y a quatre autres fentes transversales beau-
coup plus importantes, qui divisent la chaîne volcanique en tron-
çons distincts, et qui ont été jusqu'ici le siège des plus grandes
éruptions et des séismes les plus violents L'une d'elles est la ligne
de la baie de Fonseca, sur les bords de laquelle s'est produite, en
SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899 495
1835, la fameuse éruption du Coseguina, la plus grandiose du siècle
après celle du Krakatoa. La ligne qui vient plus au sud est celle
qu'emprunterait le canal de Nicaragua; elle a vu l'activité éruptive
se réveiller en 1888 par l'éruption de l'Omotepe.
Or, si Ton examine séparément les quatre tronçons de la chaîne
(Guatemala, San Salvador, Nicaragua, Costa-Rica), la statistique
des éruptions et des séismes montre que, depuis la conquête
espagnole, le maximum, aussi bien des éruptions que du nombre
des séismes destructeurs et que du nombre total des séismes, a
passé du Guatemala au San Salvador, et que la différence avec le
Nicaragua s atténue ; qu'à Guatemala de nombreux volcans se sont
éteints; qu'à San Salvador deux nouveaux volcans se sont formés,
sans qu'on cite une seule extinction récente, et qu'enfin à Nica-
ragua trois nouveaux cratères se sont ouverts. Les grandes lignes
de fracture présentent un échelonnement semblable et dans le
même sens : celle de Guatemala est un foyer en voie d'extinction ;
celle de Fonseca est un foyer en pleine activité ; celle de Nicaragua,
un foyer en préparation. 11 semble donc qu'on assiste à la marche
progressive de l'onde souterraine, qui, aux époques miocène et
pliocène, couvrait d'éruptions le bord des Montagnes Rocheuses, qui,
à l'époque quaternaire, se manifestait surtout dans les volcans du
Mexique et qui a aujourd'hui transporté son maximum d'action
dans l'Amérique centrale. S'il y a une nouvelle catastrophe à
craindre dans la région, c'est à Fonseca ou à Nicaragua, sur le
trajet du canal projeté, qu'elle semble devoir se produire.,
M. Haug présente une note intitulée : Les régions dites exotiques
du versant nord des Alpes suisses, réponse au Dr H ans Schardt, note
qu'il vient de publier dans le Bull, delà Soc. Vaudoise des Se. natur.
M. 6. Dollfus présente une brochure qu'il vient de publier
avec M. Ph. Dautzenberg dans le dernier numéro du Journal de
Conchyliologie « Sur quelques coquilles nouvelles ou mal connues des
Faluns de la Touraine. » <( Nous nous sommes spécialement occupés
de deux Cerithium assez abondants dans le Miocène moyen et dont
l'ouverture était restée mal connue. La découverte de spécimens
complets permet de les classer exactement et ils doivent prendre
les noms de Clava bidentata Defr. in Grat. et de Tympanotomus ligni-
tariun Eichw. Ces espèces importantes sont connues dans presque
tous les bassins miocènes du Midi, dans le Bordelais, en Portugal,
en Espagne, dans le Roussillon, le Languedoc, la vallée du Rhône,
l'Italie, la Suisse, l'Autriche, là Hongrie, la Roumanie, la Russie
496 SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899
méridionale et l'Asie mineure ; les analogues vivants habitent les
fleuves de l'Asie orientale et de l'Australasie. Les espèces nouvelles
décrites sont : Turbo Lecointreœ, Pholas (Triumphalia) Bonneli décou-
verte ultérieurement aussi à Mirebeau, Vanikoro Cossmanni ».
M. Albert Gaudry donne des détails sur les curieux restes
de Neomylodon recueillis en Patagonie, à la Cueva Ebethardt.
M. Lonnberg lui a communiquée Upsal les échantillons rapportés
par M. Otto Nordenskjôld, neveu du célèbre explorateur, notam-
ment un grand morceau de peau montrant, sur la face inférieure,
des ossicules nombreux, irréguliers, pressés les uns contre les
autres, et sur la face supérieure des poils adhérant fortement,
longs de 5 centimètres. M. Lonnberg a bien voulu me donner une
touffe pour le Jardin des Plantes. 11 vient de publier sur le Neomy-
lodon un travail très approfondi. Grâce à M. Lindstrôm, M. Albert
Gaudry a pu examiner aussi dans le Musée de l'Académie, à
Stockholm, l'importante série de pièces de la même espèce, que
M. Erland Nordenskjôld, le fils de l'explorateur, vient d'aller cher-
cher à la Cueva Eberhardt. Il a en outre été à Copenhague voir
avec M. Erland une partie des pièces qu'il avait portées au Musée
Lund pour les comparer avec les fossiles de la magnifique collec-
tion de l'Amérique du Sud réunie dans ce Musée.
Les découvertes de MM. 0. et E. Nordeuskjôld montrent que le
Neomylodon n'est éteint que depuis un temps très court, et peut-être
même vit encore. M. Moreno, l'habile directeur du Musée de la
Plata, a organisé une exploration à la Cueva Eberhardt depuis les
fouilles des savants suédois ; un compte rendu de cette exploration
a été donné par MM. Hauthal, Roth et Lehmann-Nitsche. On s'est
demandé si le Neomylodon ne doit pas être appelé Glossotherium, ou
Grypothei'ium, ou Mylodon ; il est certain que c'est un type regardé
jusqu'alors comme tout à fait différent des êtres vivants et que
cependant il appartient à la nature actuelle. 11 est peu vraisemblable
qu'une telle créature ait été domestiquée, ainsi que cela a été
exposé. En tout cas on ne pourra lui donner le nom de Grypotherium
domesticum proposé dernièrement, car il a été appelé déjà par
M. Ameghino Neomylodon Listai en l'honneur du voyageur Lista.
Après la communication sur le Neomylodon, M. Albert Gaudry
parle de VHelicoprion découvert par M. Karpinsky dans le Permien
du Gouvernement de Perm. C'est assurément un des plus sin-
guliers fossiles qui aient été signalés. L'éminent directeur du
Comité géologique russe, après examen chimique, coupes micro-
scopiques et nombreuses comparaisons, pense que VHelicoprion
SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899 497
représente la partie antérieure d'une bouche de quelque Poisson
élasmobranche.
M. Douvillé fait une communication Sur les couches à Orbit&ides
(Lepidocyclina) du Bassin de l'Adour.
A l'occasion de sou étude sur les couches de Panama il avait
indiqué précédemment que les Orbitàides de la section Lepidocyclina
sont jusqu'à présent exclusivement cantonués dans l'Oligocène.
Dans les environs de Bordeaux le Lep. burdigulensis (type) pro-
vient de l'Aquitanien de Mérîgnac. On retrouve des formes ana-
logues (voisines du Lep. marginata, de l'Aquitanien des collines
de Turin) aux environs de Dax, à la base des faluns de Saint-Paul
(Abesse), où elles sont associées au Cassidaria Buchi de l'Oligocène ;
il y aurait donc un niveau aquitanien au-dessous du Burdigalien
de Cabanne et de Mandillot. Ce niveau à Lepidocyclina cf. marginata
se retrouve sur la rive droite de l'Adour, à l'O. de Saint-Paul et à
Mimbaste, toujours sur la bordure du bombement crétacé et ophi-
tique d'Angouiné-Tercis. Sur ce bombement même on voit affleurer
à Saint-Geours en Maremme, des couches encore plus anciennes à
grands Lepidocyclina Mantelli, et dont la faune a été rapprochée par
M. Fallot du Tongrien (Ph. Puschi de Biarritz, Eckinolampas Blain-
villei du Tongrien delà Gironde) (1); il parait probable que ces
couches représentent tout au moins l'Aquitanien inférieur.
Plus au sud on rencontre des couches analogues dans le golfe
limité au nord par le bombement Angoumé-Tercis et au sud par
les derniers contreforts nummulitiques des Pyrénées. Le fond de
ce golfe est occupé par les couches de Gaas ; en se dirigeant à
l'ouest on rencontre successivement les couches de Peyrère (au
nord de Peyrehorade) avec Lepid. Mantelli et Diastoma costellatum (2),
puis celles de Saint-Etienne d'Orthe à Lep. cf. marginata (3) ; au delà,
sur la rive droite de l'Adour affleurent les faluns de Saubrigues et
Saint-Jean de Marsacq; toutes ces couches ont des caractères pétro-
(1) Notre confrère, M. Prie in, a reconnu parmi des dents de Poissons, recueillies
dans cette localité par M. E. de Morgan, une mâchoire de Gymnodus qui ne peut
être distinguée de celles qui ont été signalées en plusieurs points dans le calcaire à
Astéries.
(2) Variété (ou plutôt mutation) idenUque à celle du Tongrien des environs do
Rennes.
(3) M. Schlumberger vient de retrouver à Saint-Etienne d'Orthe un Miogypsina
de forme plus archaïque que ceux du Miocène de la Superga ; la même forme se
retrouve a Léognan, associée au Lep. Ourdigalensis; il serait intéressant de déter-
miner d'une manière précise l'âge de cet horizon qui correspond à la lin des Lepi-
docyclina et a leur remplacement par Miogypsina. (Note ajoutée pendant l'im-
pression).
tl Février 19UU. — T. XXVIi. Bull. Soc. liëol. Fr. - 32
498 SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899
graphiques analogues, ce sont des faluns bleus plus argileux et
à grains plus fins que ceux de Dax (faluns jaunes).
Les faluns de la rive droite de l'Adour occupent une zone de
4 kilomètres de largeur environ avec un plongeaient constant et
marqué vers le sud-ouest; leur épaisseur est donc considérable et
leur dépôt a dû être de longue durée. Déjà M. Raulin a signalé sur
certains points une faune à peu près identique à celle du Burdi-
galien de Saint- Paul. Sur d'autres points on rencontre la Cardita
Jouanneti de l'Helvétien. Rien ne s'oppose donc à ce que ce com-
plexe de couches ne se complète à la base, comme celui de Saint-
Paul, par l'Aquitanien supérieur à petits Lepidocyclina et par
l'Aquitanien inférieur à Lep. Mantelli. On rencontrerait ainsi succes-
sivement en venant de Gaas, qui représente le Sannoisien ou le
Tongrien, d'abord l'Aquitanien, puis le Burdigalien et l'Helvétien.
Il est vivement à désirer que la faune très intéressante recueillie
à Peyrère par M. Raulin, soit l'objet d'une étude approfondie ;
c'est également le désir de notre savant confrère, et M. G. Dollfus,
qui s'occupe spécialement en ce moment de l'étude des faunes mio-
cènes, a bien voulu nous promettre de se charger de cet examen.
M. Douvillé ajoute encore qu'au sud de la bande principale des
faluns de Saubrigues les couches se relèvent dessinant un syn-
clinal dont le prolongement correspond précisément à la célèbre
fosse du Cap breton.
M. Douvillé communique à la Société une lettre de M. Paquier,
lui annonçant la découverte de vraies Caprines au sommet des
calcaires à faciès urgonien de YAptien inférieur du Rimet,
immédiatement au dessous des couches à Matheronia Virginiœ.
Cette lettre est accompagnée de croquis montrant la disposition
des lames radiantes, simples ou bifurquées, qui forment une zone
périphérique régulière et continue sur tout le pourtour de la valve
supérieure, comme dans les Caprines. 11 faudrait cependant
s'assurer de l'absence de canaux marginaux périphériques sur la
valve inférieure, pour être bien certain que les formes découvertes
par M. Paquier sont des Caprina et non des Schiosia.
499
ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITES DE CHINE
par M. J. BERGEROH.
(Planche XIII).
Le nombre des Trilobites qui nous sont connus des terrains
primaires de la Chine est encore fort restreint. Dames et Kayser
ont été les premiers à en signaler la présence parmi les fossiles
rapportés de ce pays par M. von Richthofen. Depuis 1883, époque à
laquelle ont paru les études de ces savants paléontologistes, aucune
découverte nouvelle n'était venue enrichir la liste des dix-huit
espèces signalées dans l'ouvrage de « China ». Aussi est-ce avec
empressement que j'ai accepté l'aimable proposition que m'a faite
M. Douvillé, Professeur de Paléontologie à l'Ecole supérieure des
Mines de Paris, de me communiquer, pour les étudier, quelques
formes nouvelles de Trilobites provenant de Chine. Je tiens à lui
en exprimer toute ma gratitude.
Les fossiles en question se trouvent à la surface de deux plaques
de provenance différente appartenant, l'une à M. l'Amiral Regnault
de Prémesnil, l'autre à M. Chauveau, Ingénieur civil des Mines.
Tous deux ont mis leurs échantillons à ma disposition avec une
libéralité dont je leur suis très reconnaissant. Je remercie tout
particulièrement M. l'Amiral Regnault de Prémesnil de son obli-
geance qui ne s'est jamais lassée.
I
La plus grande de ces plaques (PI. XIU), et en même temps la
plus intéressante par sa richesse en formes différentes et en indi-
vidus, a été rapportée par M. l'Amiral Regnault de Prémesnil, qui
l'a achetée à vil prix, en 1858, à un brocanteur de Pékin; son lieu
d'origine était inconnu à ce dernier, qui savait seulement qu'elle
venait des montagnes situées au N. de cette capitale; nous n'avons
donc aucune donnée précise sur la région d'où elle provient.
Elle est formée d'un calcaire compact, à grain très fin, de couleur
500 j. BERGERON 20 NoV.
bistre foncé. Elle a une forme rectangulaire, les plus grands côtés
mesurant une longueur de 185mm et les plus petits une largeur
de 97mm.
Toutes les faces ont été sciées, sauf la face supérieure qui est
littéralement couverte de débris uniquement de Trilobites. Ils sont
très nombreux, mêlés les uns aux autres, sans aucun ordre; on peut
y reconnaître des céphalothorax et surtout des pygidiums. Ce qu'il
y a de très curieux c'est que les céphalothorax et les pygidiums
n'appartiennent pas aux mêmes genres; il y aurait eu dissociation
de nombreux exemplaires de Trilobites et mélange de leurs débris.
Mais quelque nombreux que soient ces derniers, on ne peut les
rapporter qu'à cinq formes, dont deux sont représentées par leurs
céphalothorax et trois par leurs pygidiums.
Genre Calymmene Brng. (1).
Calymmene? sinensis n. sp.
(PL XIII, 1, 2).
il n'y a pas un seul exemplaire de cette espèce qui soit complet ;
les glabelles seules sont assez bien conservées, et présentent une
constance de caractères qui permet de les rapporter toutes à un
même type, quelque petites que soient leurs dimensions.
C'est vraisemblablement au groupe des Calymmenidœ qu'il faut
rattacher cette espèce, car elle offre les caractères généraux de la
famille: forme de la glabelle, disposition des sillons latéraux.
Cependant elle présente assez de différences avec les formes
connues de cette famille, pour qu'on puisse se demander si elle ne
correspondrait pas à une nouvelle section, peut-être même à un
(1) AL Brongniart a donné en 1822 (Histoire Naturelle des Crustacés fossiles
sous les rapports zoologiques et géologiques, savoir : les Trilobites par AL Bron-
gniart, les Crustacés proprement dits par A. G. Desmarest. Paris, 1822, in-8*) le
nom générique de Calymene au « Trilobite qui a été le mieux et le plus souvent
décrit sous le nom de fossile de Dudley ». En note infrapaginale, Brongniart
ajoutait : « Calymene par contraction de Cecalymene, obscure, cachée ». Ce nom
est tiré du participe passé xExaXu{i.(iEvo; du verbe xaXu7rrw Je cache. Si Brongniart
a bien spécifié son intention de supprimer le préfixe, par contre il ne dit rien de
la suppression de la double lettre. Il est vraisemblable qu'il y a eu barbarisme
dans la confection de ce nom et l'on est en droit, à l'exemple d'Angelin, de
Lindstrôm, de Schmidt, de Pompecky et d'autres, de rétablir la véritable
orthographe Calymmene.
1899 ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITES DE CHINE 501
nouveau genre. Eu effet, si on la compare aux types des subdivisions
établies récemment dans le genre Calymmene par MM. Schmidt (1)
et Pompecky (2), on voit qu'elle se distingue plus de ces types que
ceux-ci ne se différencient les uns des autres. Mais les exemplaires
en question sont trop incomplets pour que j*ose créer un genre
nouveau. Je laisserai à cette espèce le nom générique de Calym-
mene, mais tout en émettant quelque doute relativement à cette
attribution.
La glabelle (fi g. 1) est de forme tronco nique, arrondie en avant,
de relief accusé. Elle est proportionnellement plus haute et moins
large à sa base que celle des espèces déjà connues. Elle porte deux
sillons latéraux très accusés, qui déterminent trois lobes; mais
Fig. 1. — Fragment de cépha- Fig. 2. — Fragment de joue mo-
lo thorax de Calymmene? bile appartenant peut-être à
sinensis n. sp. la môme espèce.
ceux-ci ne sont pas arrondis en forme de perles comme dans la
plupart des Calymmene; cela tient à la [forme des sillons qui sont
droits. Le sillon postérieur est long, et va en s*atténuant de
l'extérieur vers l'intérieur de la glabelle; il est à 45° environ de
l'axe de la glabelle. Il détermine un lobe postérieur de forme trian-
gulaire. Le lobe médian, de forme un peu plus circulaire que le lobe
postérieur, est délimité en avant par un sillon latéral antérieur
droit et court. Le lobe antérieur est très développé en surface; il
semble que, sur le côté gauche de la glabelle du plus grand exem-
plaire, il y ait trace d'un sillon latéral à peine marqué; s'il en était
ainsi, il y aurait quatre lobes de chaque côté, mais les deux anté-
rieurs seraient à peine distincts l'un de l'autre.
La glabelle s'avance jusqu'au bourrelet antérieur, dont elle est
séparée par un sillon presque aussi large que le bourrelet. Dans le
(1) Révision der Ostbaltischen silurischen Trilobiten. IV, Galymmenidœ. Mem,
À cad. Saint-Pétersbourg, 42, N° 5, p. 7.
(2) Ueber Calymmene Brongniart. Neues Jahrbuch fur Min., Geol. und
Palœont., 1896, t. I, p. 187.
SÔ2 J. BERGERON 20 NûV.
plus grand exemplaire, ce bourrelet a une section sensiblement
circulaire et il ne change ni de forme ni d'allure au droit de la
glabelle, changements qui sont fréquents chez les Calymmene.
11 est à remarquer que dans le plus grand exemplaire le bord
antérieur du céphalothorax a la forme d'un arc légèrement concave
en avant. Cette courbure tout-à-fait anormale est due sans doute à
une déformation accidentelle du céphalothorax.
Sur ce même exemplaire, le bourrelet se continue sur une assez
grande longueur ; cependant les parties latérales du céphalothorax
faisant défaut, on ne sait comment il se terminait du côté des joues
mobiles, ni où il était coupé par la grande suture.
Le bourrelet occipital est large, plus large que le sillon occipital ;
il se prolonge latéralement en des bourrelets marginaux posté-
rieurs moins épais.
De chaque côté de la glabelle il y a un sillon longitudinal étroit.
Les joues fixes sont mal conservées ; elles devaient être saillantes,
exceptionnellement développées pour des joues fixes de Calymmene
et couvertes de granulations fines et espacées. Le peu qui en reste
sur le grand exemplaire, qui est le mieux conservé, ne permet pas
de déterminer la position de l'œil, s'il y en avait un, ni celle de la
grande suture.
Sur un exemplaire de petite taille apparaît dans la région axiale
de la glabelle, au niveau de la paire de lobes médians, un tubercule;
peut être est-ce un ocelle. Il est plus volumineux que les granu-
lations qui ornent la surface du test. Ce tubercule ne se retrouve
pas sur les glabelles des autres exemplaires, notamment sur celle
du plus grand, il est vrai que la partie en relief de la glabelle, chez
ce dernier, a été usée.
En résumé les caractères distinctifs de cette espèce résident dans
la forme de la glabelle, la forme des lobes, la forme du bord et du
bourrelet antérieurs, les dimensions des joues fixes.
Comme je l'ai dit plus haut je rapporterai jusqu'à nouvel ordre
cette espèce, à coup sûr nouvelle, au genre Calymmene, mais avec
très grand doute et je lui donne le nom spécifique de sinemis pour
rappeler son origine.
Peut être faut-il rapporter à cette espèce une petite joue mobile
(fig. 2 et PI. XIII, 2) avec pointe génale, dont le test est couvert de
granulations. C'est ce dernier caractère qui me fait la réunir à
Calymmene ? sinensis, car cette dernière espèce est la seule dont le
test porte le même mode d'ornementation.
1899 ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITES DE CHINE 303
Cette joue mobile présente les caractères suivants: elle est
arrondie, bordée extérieurement, latéralement et postérieurement
par un bourrelet mince. La trace de la grande suture se voit sur
une partie du contour interne ; mais la partie supérieure est brisée.
Le lobe palpébral est relativement bien développé.
La pointe génale est courte et acuminée.
Si cette joue mobile appartient à l'espèce en question, celle-ci
ferait partie du groupe de Trilobites auquel Beecber a donné le nom
d'Opisthoparia (1). Ils sont caractérisés par ce fait que la branche
postérieure de la grande suture aboutit au bord postérieur du
céphalothorax. On ne pourrait la rattacher à la famille des Calym-
menidœ qui rentre dans le groupe des Proparia, chez lesquels la
branche postérieure de la grande suture aboutit au bord latéral du
céphalothorax. Dans ce cas, il y aurait certainement lieu de créer
un nom générique nouveau pour cette espèce.
Genre Aonostus
Groupe des Limbati, sous-groupe des Régit
Agnostus Doumllei n. sp.
(PI. XIII, 3).
Le mauvais état de conservation de tous les exemplaires de
cette espèce rend leur étude très difficile. Un seul d'entre eux
permet d'établir les caractères distinctifs.
La largeur du bord postérieur du céphalothorax et sa hauteur
sont sensiblement égales. Le contour antérieur
est de forme elliptique (fig. 3).
D'après ce qui reste de la glabelle, le lobe
antérieur était large, sa plus grande dimension
étant transversale par rapport au sens de
l'alloDgement de l'animal. Une grande partie
de ce lobe a disparu et le lobe postérieur, FlK41_3- — péphaio-
,, ... r ,. .. . /<av .. .,, ... thorax d'Âgnostus
d ailleurs assez peu distinct (2), était de petites Doumllei nov. sp.
dimensions par rapport au lobe antérieur. Sa
largeur est un peu inférieure au tiers de la largeur totale du cépha-
lothorax ; elle est sensiblement la même que celle des joues entre
(1) Beegher. Article Trilobites ext. d'un traité, sans autre indication.
(2) Sur la figure 3, les reliefs ont été exagérés.
504 J. BERGERON 20 NOV.
lesquelles ce lobe est situé. Les deux lobes de la glabelle semblent
avoir été séparés par un sillon assez profond.
Les joues sont arrondies du côté interne, ce qui est la caractéris-
tique de cette espèce. Elles se prolongent vers la partie antérieure
du céphalothorax sous forme d'un mince bourrelet qui entoure le
lobe antérieur de la glabelle.
Un limbe entoure le céphalothorax ; il offre l'aspect d'une gout-
tière par suite du relief très accusé de la zone génale et de la pré-
sence d'un mince bourrelet qui le borde vers l'extérieur; il diminue
de largeur et finit par se perdre dans les angles génaux.
Rapports et différences. — Dans Agnostus rex Barr. le céphalothorax
est plus allongé, de forme plus rectangulaire ; dans Agnostus regius
Sjo., il est plus large dans sa partie antérieure que dans Agn. Dou-
villei. Dans ce dernier les joues sont plus arrondies du côté interne
que dans les autres espèces : elles sont aussi moins hautes que
dans Agnostus rex Barr. Le lobe de la glabelle est de forme plus
triangulaire dans les deux espèces précédemment citées; il est
aussi moins arrondi dans ses angles latéraux. Le lobe postérieur
est plus large et surtout plus haut dans les espèces européennes.
Les joues et la glabelle constituent également un ensemble plus
allongé dans Agn. rex et Agn. regius. Le limbe qui entoure le
céphalothorax dans ces deux espèces est large et le bourrelet qui
le borde est bien plus accusé que dans Agnostus Douvillei.
Je suis heureux de dédier cette espèce à M. Douvillé.
A l'étude de ces céphalothorax il convient de joindre celle d'un
hypostome isolé (fig. 4 et PI. XIII, 4) qui se rencontre entre des
débris de Trilobites qui le cachent en partie. Il en
résulte qu'il est très difficile d'arriver à y reconnaî-
tre des caractères suffisants pour le rapprocher
des types connus.
Fig. 4. — Hypos- Le corps central de l'hypostome est ovale ; mais
tome indéter- \\ s'amincit en arrière de manière à former une
sorte de bourrelet. Les ailes sont cachées sous des
fragments de Trilobites ; sur un des côtés, il semble qu'il y ait un
bourrelet, mais ce doit être également un débris.
Les bords latéraux, séparés du corps central par un sillon pro-
fond, ne sont visibles que dans leur partie postérieure ; ils sont bien
développés et prennent un peu l'aspect de bourrelet. Us s'élargissent
au moment où ils forment le bord postérieur, tout en gardant leur
même aspect.
1899 ÉTUDE DK QUELQUES TRILOBITES DE CHINE 905
Le bord postérieur, légèrement concave en avant, a lui-même la
forme de bourrelet ; il est tangent à l'extrémité postérieure du corps
central.
On n'y voit aucune trace de saillie ni d'empreinte creuse.
Un caractère commun à tous les pygidiums qui abondent sur la
plaque rapportée par M. l'Amiral Regnault de Prémesnil consiste
en la présence de denticulations sur leur pourtour extérieur.
Ils se groupent tous autour de trois formes dont la détermination
générique présente de très grandes difficultés.
En effet les seuls caractères tirés du pygidium ne sont pas tou-
jours suffisants pour reconnaître le genre des Trilobites. S'il y a
quelques genres tels que Bronteus et Lichas, par exemple, dont le
mode d'ornementation soit assez spécial pour permettre leur déter-
mination générique à la simple vue du pygidium, par contre, il en
est beaucoup d'autres chez lesquels le pygidium offre trop peu de
caractères saillants pour qu'il en soit ainsi. C'est le cas pour cer-
tains genres d'Asaphidœ, de Calymmenidœ, etc. Il faut alors avoir
recours aux caractères fournis par les autres parties du corps,
l'abdomen et surtout le céphalothorax ; faute d'en tenir compte,
on commet de nombreuses erreurs.
C'est ainsi qu'il y a une quinzaine d'années on groupait tous les
pygidiums denticulés dans les Dicellocephalus. Mais dans ces der-
niers temps on en a retiré quelques genres tels que Olen&ides, Asa-
phelina, etc., dont les céphalothorax sont parfaitement distincts de
ceux des vrais Dicellocephalus. Il est vraisemblable que lorsqu'une
étude critique de toutes les nombreuses espèces rapportées à ce der-
nier genre aura été faite en tenant compte d'autres caractères que
ceux du pygidium, il y aura lieu d'établir de nombreuses coupures.
Cette révision d'ailleurs ne peut être entreprise qu'en Amérique,
région où abondent les Dicellocephalus et où les espèces types pourront
être comparées aux figures généralement mauvaises des auteurs.
N'ayant à ma disposition que des pygidiums denticulés pour
déterminer les espèces de Chine autres que les précédentes, je n'ai
pu en reconnaître le genre avec certitude; j'ai dû les comparer
individuellement à des formes déjà connues et ce n'est que pour
un seul d'entre eux que j'ai trouvé des analogies assez grandes pour
m'autoriser à le rapporter au genre Olenoides. Egalement par compa-
raison j'ai attribué, mais avec beaucoup de doute, une seconde
forme nouvelle au genre Dicellocephalus. Enfin, la troisième espèce
est tellement différente de toutes celles connues que je lui ai donné
un nom générique nouveau.
506
J. BERGERON
20NOV.
Genre Olbnoïdes Meek.
Olenoides Leblanci n. sp.
(PI. XIII, 5, 6).
Céphalothorax et abdomen inconnus.
Pygidium de forme semi-circulaire, dont le bord externe est
garni de denticulations très accusées.
Cette forme et ce mode d'ornementation sont ceux des Olenoides;
tout l'ensemble d'ailleurs de ce pygidium rappelle beaucoup les
figures d'Olenoïdes données par les auteurs américains. C'est donc
Fig. 5. — Pygidium d'Olenoïdes Leblanci
n. sp.
Fig. 6. — Pigidium d'un individu
jeune d'Olenoïdes Leblanci
n. sp.
à ce genre que je rattache cette nouvelle espèce ; mais le céphalo-
thorax seul permettrait une attribution certaine.
Le plus grand exemplaire de cette espèce semble avoir un
pygidium de forme triangulaire; mais il n'en est ainsi que par
suite d'une déformation accidentelle; le limbe portant la denticu-
lation caractéristique est cassé et il est venu s'appliquer sur le
pygidium, semblant ainsi lui former un bourrelet angulaire, très
saillant.
Le nombre des anneaux constituant le pygidium (fig. 5 et PI.
XIII, 5) devait être de six. Sur aucun des exemplaires, il n'est possi-
ble de les compter avec certitude, parce que les échantillons sont
frustes.
L'axe de fort relief est légèrement conique. Les anneaux, très
vraisemblablement au nombre de six, sont sensiblement de même
hauteur ; les derniers diminuent rapidement de largeur et se distin-
guent difficilement les uns des autres. Cet axe s'avance presque
jusqu'au bord postérieur. Il est limité par le limbe.
Les côtes qui correspondent aux plèvres, sont au nombre de six ;
1899 ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITES DE CHINE 507
celles qui sont les plus rapprochées de l'extrémité postérieure de
Taxe sont très réduites; on les distingue à peine; elles ne sont pas
reproduites dans le schéma de la figure 5 de manière à laisser au
pygidium son véritable aspect, tout trait délimitant cette dernière
côte lui donnant trop d'importance par rapport aux autres.
Le limbe, bien développé, est garni de denticulations sur son
pourtour extérieur. Celles-ci paraissent n'être que des découpures
du limbe; bien que situées dans le prolongement des côtes, elles
ne portent aucune nervure qui fasse suite à ces dernières. Elles ont
toutes la même forme et les mêmes dimensions. L'intervalle entre
deux denticulations est à peu près égal à la largeur de l'une d'elles.
Elles sont au nombre de sept de chaque côté, la première corres-
pondant à la nervure antérieure.
Je rapporte également à cette espèce des pygidiums de petite
taille dans lesquels se retrouvent tous les caractères signalés plus
haut (fig. 6 et PI. XIII, 6). Ils ont en général une forme un peu
moins arrondie, les denticulations sont relativement plus grêles,
plus acuminées que dans les autres. Mais de pareilles modifications
peuvent être en relation avec l'âge et ne pas correspondre à des
différences spécifiques.
Je dédie cette espèce à M. Leblanc, Inspecteur général des Ponts
et Chaussées, par l'intermédiaire de qui la plaque étudiée a été
connue de M. Douvillé.
Rapports et différences. — Comme je l'ai dit plus haut, la détermi-
nation générique est basée uniquement sur les analogies qui
existent entre les pygidiums des exemplaires de Chine et ceux
figurés des espèces d'Olenaides.
C'est avec Olenoïdes Marconi Whitfield que les analogies sont les
plus grandes ; mais cependant ce sont deux espèces distinctes. Les
épines qui ornent le bord du limbe ont la forme de dents de scie
dans 01. Marcoui, tandis qu'elles sont droites dans Ol. Leblanci.
Dans l'espèce américaine les côtes des plèvres sont plus larges que
les sillons qui les séparent; dans l'espèce chinoise, les côtes et les
sillons ont sensiblement la même importance. Le nombre des
épines est d'ailleurs la même dans les deux espèces.
Olenwdes quadriceps Hall, rappelle beaucoup la forme jeune d'O/.
Leblanci; les épines sont plus grêles, elles s'infléchissent plus en
arrière que dans l'espèce de Chine. La principale différence consiste
en ce que les sillons et les plèvres ont des reliefs plus accusés dans
cette dernière.
508 J. BERGERON 20 NOV.
Genre Dicellocephalus Owen.
Dicellocephalus ? sinensis n. sp.
(PI. XIII, 7).
Le pygidium d'une des espèces de Chine se rapproche beaucoup
de la figure donnée par Angelin de son espèce nouvelle Centropleura
s erra ta. Ce genre (1) nouveau avait été créé par le paléontologiste
suédois pour les trois espèces suivantes: Centropleura? dicrœura,
Centropleura serrata et C. angusticauda. De ces trois espèces, les
deux dernières, d'après les figures données
par Angelin, pourraient peut-être appartenir
au même genre, mais en tous cas elles se
rapporteraient à deux types spécifiques
Fig. 7. _ pygidium de différents. Brôgger (2), qui en a repris
J^7jfw ? 8i- l'étude, déclare la fig. 10 d'AngeJin tout à
fait inexacte et réunit C. serrata et C. angus-
ticauda en une seule espèce qu'il rapporte au genre Dicellocephalus
et à laquelle il conserve le nom de Dicellocephalus serratus. Il en
donne deux figures (3) qui se rapprochent du type figuré par Ange-
lin sous le nom de C. angusticauda; mais il y a une telle différence
entre Die. serratus figuré par le savant professeur de Christiana et
C. serrata figuré par Angelin qu'il parait bien vraisemblable que ce
sont, même en admettant de très grandes erreurs de dessin, des
types différents.
Ne pouvant trancher la question (4) puisque les éléments de
comparaison me manquent, j'admets que C. serrata type d 'Angelin
soit un Dicellocephalus, ce qui est également l'opinion de Holm.
De plus, le pygidium de l'espèce de Chine rappelle un Dicelloce-
phalus représenté par fiillings (Gcol. of Canada. Palseozoic Fossils,
p. 405, fig. 384), mais non dénommé spécifiquement. Dans ces condi-
tions, je range dans les Dicellocephalus l'espèce nouvelle eu question,
mais, pour les raisons que j'ai dites plus haut, c'est avec beaucoup
de doute que je fais cette attribution.
L'axe du pygidium est saillant, conique, se rétrécissant très
rapidement vers sa partie postérieure. Il s'arrête au limbe qui
(1) Pateontologia scandinavica, p. 88, pi. XLI, fig. 9, 10 et 10*
(2) Die Siturischen Et a g en 2 und 3, p. 126.
(3) Loc. cit., pi. III, fig. 7 et 8.
(4) La diagnose donnée par Angelin pour le pygidium de C. serrata est la
suivante: « Abdomen immarglnatum, margine splnosum vel dentatum; rachis
distincte, ante apicem scuti desinens. » Cette description est insuffisante.
1899 ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITES DE CHINE 509
entoure le pygidium. II porte cinq anneaux, mais peut-être le
dernier correspond-il à la soudure des deux anneaux terminaux.
Sur les plèvres on ne compte que quatre côtes, sans sillon; peut-
être y en avait-il de très réduites dans l'angle postérieur des
plèvres. Les côtes sont fines, séparées les unes des autres par des
sillons presque aussi larges qu'elles. Elles diminuent très rapide-
ment de longueur selon qu'elles sont situées plus près de la partie
terminale du pygidium.
Le limbe a une largeur qui varie peu ; au droit de la terminaison
de l'axe, il présente une sorte de bombement. Les denticulations,
au nombre de cinq de chaque côté, correspondent aux côtes; elles
sont en forme de deuts de scie, larges, plates et semblent décou-
pées dans le limbe; elles rappellent un peu celles qui bordent le
pygidium de certains Lickas. Elles diffèrent légèrement les unes des
autres ; les deux postérieures sont les plus fortes, les deux anté-
rieures les moins fortes.
Genre Drepanura n. gen.
Drepanura Premesnili n. sp.
(PI. XIII, 8).
Cette espèce semble avoir été la plus abondante de toutes celles
représentées sur la plaque calcaire. On peut en effet en compter
jusqu'à quinze exemplaires contre dix de toutes les espèces décrites
plus haut.
La forme de ce pygidium est toute spéciale ; il est large, à bord
antérieur recti ligne, légèremeut arrondi aux angles. 11 s'élargit un
peu en arrière de ce bord ; de chaque côté
se détache une forte pointe incurvée eu
dedans, en forme de faux (Speiravov) ; c'est
sur ce caractère bien spécial que j'ai voulu
attirer l'attention en faisant ce nom nouveau.
L'axe, de forme conique, est très court et
très saillant. A son extrémité postérieure il
s'atténue rapidement de manière à se fondre
avec la surface plane qui l'entoure. Celle-ci Fi ' 8 _ PvKidiuin dc
correspond aux plèvres et au limbe du pygi- Drepanura Preme*-
dium. Cet axe porte six anneaux dont la mlt n' g*' n- 8p'
distinction est de moins en moins facile selon qu'ils sont situés
plus près de l'extrémité postérieure. Latéralement cet axe est bien
délimité par des sillons dorsaux.
510 J. BKRGERON 20 NOV.
Il n'y a aucune côte sur la très grande surface plane qui entoure
Taxe ; c'est à peine si l'on voit la trace de sillons dans le voisinage
de l'axe, sillons qui correspondraient à la séparation virtuelle des
plèvres et qui viendraient aboutir entre les dentelures qui ornent
le bord extérieur du pygidium. Ces dentelures sont au nombre de
douze, toutes sensiblement égales, serrées les unes contre les autres
et formant plutôt un bord crénelé entre les deux grandes pointes
dont il a été parlé plus haut. Chaque paire de denticulations corres-
pond à un anneau de Taxe, si on suit les sillons. On voit ainsi que
la première paire, celle située contre et à l'intérieur des deux
grandes pointes, correspond au premier anneau.
Quant aux deux grandes pointes, dont la longueur totale est
un peu inférieure à deux fois la hauteur du pygidium, elles sont
séparées du reste du pygidium par un sillon qui correspond à leur
bord interne et qui vient aboutir à la partie supérieure du premier
anneau de Taxe. Ce fait indique que ces pointes ne sont pas en
relation avec ce premier anneau; ce sont, suivant la nomenclature
de Barrande, des pointes secondaires externes.
A la face inférieure, le test porte des nervures ou peut-être des
craquelures disposées concentriquement entre elles et parallèle-
ment au bord postérieur du pygidium.
Cette forme n'est comparable à aucune de celles qui sont connues.
Je me fais un plaisir de la dédier à M. l'Amiral Regnault de Pré-
mesnil.
De quel terrain paléozoique cette plaque calcaire peut-elle pro-
venir? Comme elle ne renferme aucune espèce déjà connue qui
permette quelque attribution d'âge, il faut tenir compte de l'ensem-
ble des caractères de la faune, caractères tirés surtout de l'associa-
«
tion des genres qui y ont été reconnus.
Le plus sûrement établi est le genre Agnostus, qui est représenté
par Agnostus Douvillei. Il appartient au groupe des Limbati et au
sous-groupe des Régit) or, jusqu'à présent l'âge de deux espèces
appartenant à ce groupe, Agnostus rex Barr. et Agn. regius Sjo. est
bien défini. Cette dernière espèce se rencontre en Scandinavie dans
la zone à Paradoxides ôlandicus, à la base du Cambrien moyen. D'au-
tre part, Agnostus rex est cantonné également en Scandinavie dans
la zone à Paradoxides Tessini, immédiatement supérieure à celle du
Par. ôlandicus. En Bohème, d'après Frech (1), la même espèce appar-
eil Lethsea Geogn., 2"e vol., 1" partie, p. 40.
1899 ÉTUDE DE QUELQUES TRILOBITBS DE CHINE 311
tient encore au Cambrien moyen. Il semble donc que le groupe des
Regii soit cantonné dans le Cambrien moyen.
Les Olenoïdes et en particulier 01. Marconi Whitfeld, qui est
l'espèce la plus voisine d'Ol. Leblanci, sont plus abondants dans le
Cambrien moyen.
A côté de ces espèces dont les genres sont connus et dont la
position dans la série s trati graphique est bien précise, il y a le genre
nouveau Drepanura, qui ne peut fournir aucun renseignement
relatif à l'âge et les deux espèces nouvelles: Calymmene ? sinensis et
Dicellocephalus ?sinen$is, dont les déterminations génériques sont des
plus douteuses. Dans ces conditions, il n'y a à tenir compte que dos
renseignements d'âge fournis par les deux premiers genres. Ils
concordent assez bien d'ailleurs pour que Ton puisse affirmer que
la plaqué rapportée de Pékin par M. l'Amiral Regnault de Prémesnil
provient du Cambrien moyen.
C'est à ce même étage que Walcott (1) rapporte le Cambrien de
la province du Liau-tung (N.-E. de la Chine, près de la frontière de
Corée), dont Dames a décrit la faune. Cependant la comparaison de
cette dernière avec celle que je viens d'étudier montre qu'il n'y a
aucun point commun entre elles.
Dames, sur les quatorze formes de Trilobites qu'il a examinées et
qui d'ailleurs sont toutes nouvelles, a reconnu quatre Conocephalus,
six Anomocare, trois Liostracus, dont un indéterminable, et un
Agnostus ; enfin il y a un genre nouveau, le genre Dorypyge (Dames),
qui ne comprend qu'une espèce.
Le seul de ces genres, dont j'ai trouvé un représentant, est le
genre Agnostus. Mais l'espèce du Liau-tung n'appartient pas au
groupe des Regii mais à celui des Longifrontes.
Le genre Dorypyge a été considéré par Walcott comme synonyme
du genre Olenoides. S'il en était ainsi il y aurait entre les deux
faunes de Chine un genre commun, genre caractéristique du Cam-
brien moyen ; mais cette synonymie n'existe pas et il faut conserver
le genre de Dames. La glabelle des Olenoïdes se dilate un peu dans
sa partie antérieure ou bien reste de même largeur sur toute sa
hauteur ; celle des Dorypyge est légèrement conique, arrondie en
avant. Dans le pygidium du premier genre, l'axe est conique; dans
celui de Dorypyge l'axe se termine par un article arrondi, de dia-
mètre au moins égal à la largeur de l'avant-dernier anneau. Les
denticulations qui entourent le limbe ne présentent pas la même
(1) Bull, of the Un. St. Geol. Survey, N° 81. Corrélations papen-Cambrlan, p. 377.
512 J. BRRGERON 20 NOV.
disposition, mais ce pourrait être là une différence spécifique. Ce
qui me parait être un caractère tout à fait distinctif entre les deux
genres, c'est la présence de fines granulations à la surface du test
de Dorypyge, tandis que les Olen&ides n'en portent pas (1). Tous ces
caractères me font séparer l'un de l'autre ces deux genres.
Ma conclusion est donc que les deux faunes sont distinctes.
Pour Dames (2), dans le Liau-tung, les calcaires de Saï ma-ki et
de Ta-Iing qui renferment la faune à Conocephalus, Anomocare. Lios-
tracus et Agnostus, doivent être rangés dans le Cambrien supérieur,
au niveau des assises d'Andrarum de Scandinavie, à la base du
Potsdamien d'Amérique, puisque ces dépôts sont synchroniques.
Quant aux couches à Dorypyge, le même auteur en fait du Silurien
inférieur ou Ordovicien inférieur, l'équivalent des couches à Cera-
topyge de Scandinavie. 11 s'appuie sur ce fait que deux espèces de
Dicelbcephalus (Die. quadriceps Hall, et Die? golhicus), très voisines
de Dorypyge Richthofeni et qu'il rapporte au genre Dorypyge, se ren-
contrent dans le groupe de Québec.
Mais Walcott (3), qui admet, ainsi que je l'ai déjà dit, que Dorypyge
et Olenoides sont synonymes, et qui de plus considère Dicelbcephalus
quadriceps Hall, et Die. ? gothicus comme des Olenoïdes, range la
faune cambrienne du Liau-tung dans l'étage moyen ou Acadien.
Actuellement, la position du genre Dorypyge, en l'admettant
comme genre distinct, n'est pas encore assez bien établie pour que
sa présence puisse être considérée comme caractéristique d'un
niveau quelconque. Il aurait été rencontré en Amérique, dans le
Cambrien moyen, et même dans le Cambrien inférieur (4). D'autre
part, G. F. Mathew désigne sous le nom de Dorypyge Dawsoni Walc.
une espèce du Cambrien supérieur de Mount Stephen (5). Le genre
Dorypyge ne peut donc entrer en ligne de compte. Agnostus chinensis
Dames, trouvé à un niveau inférieur à celui des Dorypyge, appar-
tient au groupe des Longifrontes, dont le maximum de développe-
ment correspond à la base du Cambrien supérieur. Quant aux
(1) Frech (in Leth. Geogn., 1" partie, Leth. Palmo., t. 2, p. 58, note infrapagi-
nale) attire l'attenUon sur cette différence que présente le test des deux genres.
(2) China. T. IV, p. 32.
(3) Bull, ofthe Un. St. Géol. Survey, n* 8 (.Corrélations papers-Cambrian, p. 377.
(4) Le Dorypyge rencontré dans le Cambrien inférieur serait Dnr. quadriceps
Hall. 8p., dont il est question plus haut sous le nom d' Olenoïaes quadriceps Hall,
sp. que lui donne Walcott; mais l'espèce de Hall n'est pas un Dorypyge.
(5) Studies on Cambrian Faunas, N* 3. Upper Cambrian Fauna of Mount Stephen
(Brit. Columbia). Iran*, ofthe Royal Society of Canada, 2«,tt série, t. V.— D'après
la forme de la glabelle (PI. III, flg. 1) il ne me semble pas que ce soit un Dorypyge.
1899 ÉTUDE DE QUELQUES T KILO BIT ES DE CHINE 513
autres genres, ils ne sont pas caractéristiques du Cambrien moyen,
quoiqu'ils y soient bien développés. Il est donc difficile de préciser
Tàge des couches cainbriennes du Liau-tung.
Si les remarques de Walcott (1) ne peuvent s'appliquer à la faune
cambrienne du Liau-tung, par contre, elles conviennent très bien à
celle qui couvre la plaque de M. l'Amiral Regnault de Prémesnil.
Le Cambrien moyen ou Acadieu serait caractérisé en Chine comme
dans la région occidentale de l'Amérique du Nord, par la présence
du genre Olenoides ; on y remarque également l'absence du genre
Paradoxides qui, dans l'Amérique orientale comme dans l'Europe,
sert à le caractériser.
Cette région occidentale de l'Amérique correspond à la province
cambrienne désignée par Walcott sous le nom de « Province des
Montagnes Rocheuses » (2) et comprend l'Utah, le Nevada, la Colom-
bie anglaise, c'est-à-dire la partie de l'Amérique qui est la plus
rapprochée du Liau-tung, de la Corée où Gottsche (3) a retrouvé la
faune décrite par Dames, enfin des montagnes au N. de Pékin
d'où provient la plaque que j'ai étudiée. Il y avait donc déjà à
l'époque du Cambrien moyen une mer recouvrant le N.-E. de
l'Asie et le N.-O. de l'Amérique et dont la faune présentait des
caractères distinctifs de celle qui recouvrait l'Amérique orientale
et l'Europe. Les éléments nous manquent pour dire si cette mer
existait déjà en Asie à l'époque du Cambrien inférieur et si elle a
persisté durant le Cambrien supérieur ; mais, comme le fait remar-
quer Walcott, les coupes relevées par von Richthofen prouvent qu'il
y a au-dessous, comme au-dessus du Cambrien moyen, une assez
grande épaisseur de sédiments pour que les deux étages extrêmes
du Cambrien puissent y être représentés.
Quelle que soit la différence qui existe, au point de vue de Tàge,
entre les calcaires cambriens du Liau-tung ou de la Corée et celui
d'où provient la plaque que j'ai étudiée, ils ont comme caractère
commun d'être très riches en Trilobites. Certainement le calcaire
des montagnes au N. de Pékin est le plus remarquable à ce point
de vue, d'après l'échantillon rapporté par M. l'Amiral Regnault
de Prémesnil. Daines signale le même fait dans le Liau-tung.
A Ta-ling, par exemple, ce sont des calcaires gris vert, souvent
tachetés de noir, à Anomocare et à Liostracus, des calcaires gris
(1) Ibidem
(2) Walcott. Op. cit., p. 313.
(3) Geol. Skizze von Korea. SUz. Ber. der K. Preus8. Akad., 1886, t. XXXVI,
p. 865.
2 Mars 1900. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - 33
514 J. BERGERON 20 NOV.
clair à Conocephalus et à Anomocare, des calcaires oolithiques allant
du gris clair au noir, à Conocephalus, Anomocare et Liostracus ; à Wu-
lo-pu, c'est un calcaire brun gris à Dorypyge et Anomocare, ainsi
qu'un calcaire gris clair à Dorypyge et Liostracus.
II
La seconde plaque que m'a communiquée M. Douvillé est formée
d'un grès siliceux de couleur foncée, à cassure irrégulière. Elle a
été rapportée de Chine par M. Chauveau, Ingénieur civil des Mines,
qui l'a recueillie dans la chaîne de montagnes qui passe au Nord de
Toung-yen-Fou. Elle provient d'une série d'assises, relevées jusqu'à
la verticale, de schistes ardoisiers alternant avec des quartzites. Sur
ces assises reposent, en couches horizontales, des grès rouges assez
compacts pour pouvoir être utilisés comme pierre à bâtir; ces
grès sont surmontés en concordance de stratification par des cal-
caires. On ne connaît aucun fossile dans cette série horizontale. Par
suite, on ne possède aucune donnée sur l'âge des quartzites.
Cette plaque, dont les dimensions sont de six centimètres en
longueur et de quatre en largeur, présente une dizaine de débris de
Trilobites ; ce sont des céphalothorax et des pygidiums isolés, des
abdomens et des pygidiums associés ensemble. Il n'y a pas de
doute que tous ces exemplaires n'appartiennent à une seule espèce.
Genre Arthricocephalus n. gen.
Arthricocephalus Chauveaui n. sp.
La caractéristique de cette forme est la structure annelée (apôpixoç)
de tout son corps et en particulier de la glabelle. Celle-ci semble
formée d'anneaux superposés et à ce point de vue seulement elle
rappelle la disposition caractéristique du genre Olenellus.
Céphalothorax. — Il est de forme parabolique et il devait porter
des joues mobiles de petites dimensions qui ont disparu de tous les
exemplaires trouvés sur la plaque.
La glabelle porte trois lobes séparés les uns des autres par des
sillons profonds sensiblement' égaux; ils sont légèrement arrondis
sur les côtés; l'anneau occipital est un peu moins haut que les lobes;
le lobe antérieur a une hauteur double de celle des autres lobes, sa
largeur est plus grande, il est arrondi en avant, avec un sillon à
peine marqué qui montre qu'il correspond à la réunion de deux
lobes.
1899
ÉTUDE DE QUELQUES TRIL0B1TES DE CHINE
515
Lz=-
\
\
\
La partie antérieure du céphalothorax est bordée par un bour-
relet ou filet marginal, très mince, qui disparait latéralement.
Les joues fixes sont hautes et larges. Elles sont limitées antérieu-
rement par une sorte de bourrelet assez épais qui se perd le long
du lobe antérieur de la glabelle et le long du bord latéral du
céphalothorax.
Abdojnen. — Le plus grand nombre d'anneaux qui aient été trou-
vés réunis entre eux est de huit ; il est bien probable que l'abdomen
était formé de ce même nombre d'anneaux.
Les plèvres arrondies à leur extrémité extérieure portent des
sillons fins. L'axe est formé d'anneaux
bien distincts les uns des autres, sans
ornement, et dont la largeur est la moi-
tié de celle des plèvres.
Pygidium. — L'axe est constitué par
six anneaux dont la largeur décroit rapi-
dement, ce qui lui donne une forme coni-
que ; ces anneaux ne portent aucun orne
ment.
11 y a de chaque côté six côtes bien en
relief portant des sillons très accusés
vers le bord externe, mais qui s'atténuent
en se rapprochant de Taxe et qui finis-
sent par disparaître. Ces côtes sont bien
plus larges que les sillons qui les sépa-
rent les unes des autres.
Le pygidium est bordé par un limbe
qui forme un véritable bourrelet limitant
les côtes.
IHine-nsions. — Tous les exemplaires de cette espèce sont très
petits et ont sensiblement les mêmes dimensions. Largeur du
céphalothorax, 4mm5 ; hauteur du céphalothorax, 2mm5 ; hauteur
des huit anneaux de l'abdomen et du pygidium, 4mmo ; largeur du
pygidium, 4mm ; hauteur du pygidium, 2mm5.
Rapports et différences. — Par les caractères de son pygidium et
de son abdomen, cette forme se rapprocherait un peu de la
famille des Proëtidœ; mais les caractères du céphalothorax l'en éloi-
gnent d'une façon certaine. Le céphalothorax de cette nouvelle
espèce ditléraut de tous ceux connus, je n'hésite pas à en faire le
type d'un nouveau genre et je dédie à M. Chauveau la seule espèce
qui en soit eucore connue.
Fip. 9. — Arthricocephalus
Chauveaui n. g., n. sp.
516 J. BKRGERON. — ÉTUDE DE QUELQUES TR1LOBITES DE CHINE 20 NOV.
Bien que ce que nous savons du gisement de cette espèce ne
nous permette pas d'en déterminer l'âge, cependant, si la distinc-
tion très accusée entre les lobes de la glabelle est un caractère
embryonnaire aussi bien que d'ancienneté, ainsi qu'il semble
résulter des études sur le développement des Trilobites, entreprises
par MM. Beecher et Bernard, le genre Arthricocephalus doit être
ancien, très probablement cambrien.
EXPLICATION DE LA PLANCHE XI11
Fig. 1. — Céphalothorax d<> Calymmene ? sinensis n. sp.
Fig. 2. — Joue mobile appartenant peut-être à l'espèce précédente.
Fig. 3. — Céphalothorax d'Âgnostua Douvillei n. sp.
Fig, 4. — Hypostome Indéterminé.
Fig. 5. — Pygidium d'Olenaides Leblanci n. sp.
Fig. 6. — Pygidium d'un individu jeune â'Olenoïdes Leblanci n. sp.
Fig. 7. — Pygidium de Dicellocephalu* ? sinensis n. sp.
Fig. 8. — Pygidium de Drepanura Premesnili n. gen., n. sp.
1899 517
ABSENCE DU BARRÉMIEN
SUR LA FEUILLE DE MONTPELLIER
par M. F. ROMAN.
Le Crétacé inférieur occupe sur la feuille de Montpellier et
sur la partie méridionale de la feuille du Vigan des surfaces
considérables. Les études faites pour le Service de la Carte géolo-
gique (feuille de Montpellier), m'avaient conduit à reconnaître,
contrairement à l'opinion admise, l'absence du Barrémien dans
cette région ; les termes les plus élevés de la série crétacée étant
pour moi représentés par l'Hauterivien.
Une note de M. de Rouville (1), parue tout récemment, vient
d'attirer de nouveau l'attention sur cette question. Suivant cet
auteur, une partie des assises que j'avais classées dans le Valangi-
nien supérieur et dans l'Hauterivien sur la feuille de Montpellier
(notations cVb et cIV) doivent se rapporter au Barrémien (Cruasien
et Barutelien, de M. Torcapel).
J'ai admis et indiqué à diverses reprises la succession suivante
de couches dans la région comprise entre Montpellier, Luael et le
pied du Pic Saint-Loup (2).
1. Calcaires marneux grisâtres en bancs peu épais, parfois
feuilletés et renfermant des exemplaires souvent écrasés de Hoplites
Bomieri Pict., Hoplites occitanicus Pict., Haploceras Grasi d'Orb. Ils
sont bien développés autour du village de Prades.
2. Calcaires marneux en bancs minces alternant avec des
marnes. Les bancs calcaires deviennent beaucoup plus épais à la
partie supérieure, pendant que les marnes diminuent et finissent
par disparaître. Ces calcaires, jaunâtres à leur surface, bleus en
profondeur, méritent bien le nom de calcaires bicolores qui leur a
été attribué.
Je n'ai pas rencontré de fossiles dans cet ensemble.
3. Calcaires blancs jaunâtre durs, à cassure miroitante, bien
(1) P.-G. de Rouville. L'Infracrétacé sur la feuille de Montpellier (Âc. Se. Let.
Jfonfp., SpcL .Se, » Série, t. II, 1H99).
(2) F. Roman. Recherches stratigr. et pal. dans le Bas-Languedoc, etc., et légende
de la carte au 1/80.000.
518 F. ROMAN 20 Nov.
typiques au sud du village de Teyrao, et parfois exploités comme
matériaux d'empierrement.
Ces calcaires laissent apercevoir dans leur pâte une infinité de
débris organiques triturés, parmi lesquels dominent des fragments
spathiques de Crinoïdes. Au premier aspect ces couches rappellent,
par leur faciès pétrographique, certains calcaires subcoralligènes
de TUrgonien du Dauphiné.
On observe, rarement il est vrai, dans ces couches, des Janira du
groupe atava, ainsi que des sections de Nérinées indéterminables.
Les calcaires miroitants semblent occuper dans la région que j'ai
indiquée plus haut et seulement dans cette région, le sommet du
Crétacé inférieur.
S'il est facile d'affirmer, paléontologiquement, que les couches
n° 1 appartiennent au Berriasien, au moins pour leur base, il est
impossible d'établir de la même façon le niveau précis des assises
2 et 3.
Mais si au lieu d'observer le Crétacé inférieur entre Montpellier
et Lunel, on se porte au nord de cette dernière ville, on peut voir
une série plus complète des assises infracrétacées les plus élevées
de la région.
La coupe suivante, que j'ai déjà publiée, mais sans l'accompagner
d'un croquis, a été revue. Les résultats ont été contrôlés par M. Sayn,
qui a bien voulu m'accompagner dans uue récente excursion dans
la région.
Les assises les plus anciennes se rencontrent sur les bords du
Vidourle, près du Pont Romain ruiné.
Ce sont des calcaires grisâtres feuilletés et un peu marneux
sans fossiles (n° 1 de la coupe).
o.
E Grès àLophiodan
Mleteïïe
Rdourle.Jl.
Fig. 1. — Coupe prise à la limite nord de la feuille de Montpellier,
entre Villetelle et Saturargues.
Echelle des longueurs environ 1/80.000'.
2. Puis viennent des calcaires de même teinte en bancs plus épais,
un peu errodés par le Vidourle et recouverts d'alluvions entre le
Pont Romain et le village de Villetelle. Ces assises forment en ce
1899 ABSENCE DU BARRÉMIEN SUR LA FEUILLE DE MONTPELLIER 519
point un petit monticule dominant la rivière, elles se prolongent
vers le nord dans la direction de Ville telle et s observent au contact
des alluvions du Vidourle, derrière ce village.
Ces calcaires alternent avec des bancs un peu plus marneux et
sont souvent tachés de rose. Cette assise n'est pas plus fossilifère
que la précédente.
3 . Les bancs deviennent un peu plus épais à la partie supérieure»
tout en conservant à peu près la même teinte. Cet ensemble
s'observe partout avec la même succession entre Lunel et Villetelle.
4. Au-dessus un relief très accusé, mais ne formant pas toute-
fois d'abrupt vertical, est constitué par une série de bancs de
calcaire blanc jaunâtre, massif, à cassure miroitante en certains
points, d'autres fois saccharoïde, en somme, d'aspect lithologique
absolument identique aux calcaires miroitants de Teyran précé-
demment signalés, dont ils paraissent être le prolongement latéral.
La colline formée par ces calcaires descend en pente douce dans
la direction de l'ouest, en suivant à peu près le plongement des
couches. Ces dernières se terminent dans la dépression placée en
avant du village de Saturargues.
5. En ce point, immédiatement au-dessous du village, les cal-
caires n° 4 passent sous des bancs de calcaire marneux d'un gris
terne, formant un nouveau relief de même importance que le
premier et dominant Saturargues.
Ces couches se débitent en gros blocs arrondis, renfermant une
faune abondante, où dominent principalement des Holeostephanus
du groupe Astieri.
Ces Céphalopodes, ordinairement de grande taille, ont été
attribués aux espèces suivantes, par MM. Kilian et Sayn, à qui j'ai
communiqué mes échantillons :
Holeostephanus pennflatus Math.
» Sayni Kilian.
» A thersthoni Sharpe (= multiplieatus Neum.).
C'est cette dernière espèce qui est de beaucoup la plus fréquente.
Il existe en outre quelques Hoplites du gr. Arnoldi, mais trop
incomplets pour qu'il soit possible de donner de détermination
plus précise, et quelques formes du groupe de H. longinodus Uhl.
Les Ostréidés sont abondants, et se rapportent aux deux espèces:
Exogyra Couloni Defr. sp. Alectryonia macroptera Sow.
On y rencontre aussi :
Toxaster retusus Lam. (= complanatus).
520 ABSENCE DU BAR RÉ MIEN SUR LA FEUILLE DE MONTPELLIER 20 NOV.
6. Ces dernières assises sont recouvertes en transgression par
les cailloutis du Bartonien (prolongement des grès à Lophiodon).
Cette coupe vient, comme on le voit, compléter la série crétacée
de la feuille de Montpellier, et indiquer l'âge des calcaires miroi-
tants, impossible à fixer auprès de Teyran et de Castries.
L'ensemble de la faune des couches n°5, par la prédominance des
Holcostephanus du gr. Astieri et Hoplites du gr. longinodus, appar-
tient à la base de l'Hauterivien et non au Barrémien supérieur {Bsltix-
télien), ainsi que l'indique M. de Rouville dans la carte annexée à
son travail.
Les bancs miroitants inférieurs (assises n* 4) peuvent donc tout
au plus représenter du Valanginien supérieur. Leur faciès pétro-
graphique rappelle, il est vrai, les calcaires cruasiens si nettement
visibles dans la coupe de Brouzet à Euzet de M. Torcapel, et
reproduite par M. de Rouville. Mais en ces derniers points les
« calcaires blancs lumachelle » sont compris entre des assises appar-
tenant nettement à l'Hauterivien, et surmontées par des marnes
jaunes (Barutélien) renfermant une faune du Barrémien inférieur.
C'est dans ces dernières couches qu'ont été trouvés, par M. Pellat(l):
Holcodiscus Caillaudi d'Orb. Desmoceras difficile d'Orb.
» Perezi d'Orb.
J'ai cherché à prouver dans les lignes qui précèdent que les cou-
ches de Saturargues sont le terme le plus élevé du Crétacé de la
feuille de Montpellier, et en cela je suis complètement d'accord
avec M. de Rouville, mais que la faune de ces assises ne peut en
aucun cas être rapportée au Barrémien.
Les faciès très côtiers du Crétacé inférieur et tout particulière-
ment du Valanginien supérieur et de l'Hauterivien, semblent
indiquer une mer en voie de régression avant l'époque barré-
mienne. Il en serait de môme des dépôts barrémiens, des environs
de Nîmes, si pauvres en fossiles, qui semblent aussi s'être formés
dans les mêmes conditions.
(1) E. Pellat. Sur la géologie du sud du bassin du Rhône. B. S. G. F., 3' série,
t. XXIII, 1895, p. 431.
521
Séance do £ Décembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGEME, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès- verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
A la suite des présentations faites dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM. Durand, Conducteur des Ponts-et-Chaussées, présenté par
MM. Réjaudry et Arnaud ;
Mémin, Pharmacien à Paris, présenté par MM. Boistel et
Gentil ;
Du Passage, Étudiant à l'Université de Fribourg, pré-
senté par MM. Lugeon et Brunhes ;
Paul Lemoine, Licencié ès-sciences, présenté par MM.
Munier-Chalmas et Haug.
Il annonce une présentation.
M. Blayac signale dans le Compte-rendu de l'Académie des Sciences
(6 novembre), les notes suivantes : 1° Sur l'état actuel des volcans
de l'Europe méridionale , par M. Matteuci ; 2° Sur les périodes gla-
ciaires dans les Karpaîhes méridionales, par M. E. de Martonne.
M. L. Gentil signale, parmi les dons venus de l'Etranger : 1° deux
mémoires du Service géologique de la Prusse : l'un du Dr G. Mûller :
Die Molluskenfauna des Untersenon von Braunschweig und llsede,
I, Lamellibranchen und Glossophoren, 142 p., 1 atlas avec 18 pi.;
l'autre de M. H. Burkenne : Beitrag zur Kenntniss der Fauna der
Tentaculitenschiefer im Lahngebiet, 56 p., 9 pi. — 2° Un lot de bro-
chures envoyées par M. Otto Jaekel, de Berlin, parmi lesquelles une
note intitulée : Ueber Hybodus Agassiz. — 3° Un fascicule des « Peter-
manns Mitteilungen » renfermant un mémoire de M. H. Bûcking :
Beitràge zur Geobgie von Celebes, avec 3 cartes, 1 coupe. — 4° Un
volume des mémoires couronnés par l'Académie royale de Belgique
de M. Jean de Windt : Sur ks relations lithologiques entre les roches
considérées comme cambriennes des massifs de Rocroif du Brabant et
de Stavelot, 96 p., 3 pi. — Enfin plusieurs volumes des mémoires de
l'Académie de Vienne dont l'un relatif à V Expédition S. M. Schiff
« Pola » in das Rothe Meer, 628 p., nombreuses pi. et cartes.
522 SÉANCE DU 4 DÉCEMBRE 1899
M. J. Bergeron offre à la Société, de la part de M. Paul Jan-
nettaz, un exemplaire de la troisième édition de l'ouvrage de M.
Ed. Jannettaz, ayant pour titre : Les roches et leurs éléments minera-
logiques. Notre regretté confrère venait d'en terminer le manuscrit,
lorsque la mort Ta frappé si soudainement. Sa famille ne pouvait
mieux faire, pour honorer sa mémoire, que de publier cet ouvrage
auquel il avait donné tant de soins. Si, en effet, on compare la pre-
mière et la troisième édition, on voit que la première, de format
in-12, comprenait 274 pages ; la dernière, de format in-8, en ren-
ferme près de 700, avec 322 figures, 21 planches en chromolithogra-
phie, 2 cartes géologiques dont Tune de la France, l'autre de l'Eu-
rope. L'ouvrage se divise en trois parties : la première est consa-
crée à l'étude des caractères physiques, cristallographiques et chi-
miques des minéraux; la seconde comprend la description des
espèces minérales ; enfin, dans la troisième partie, l'auteur, après
avoir décrit les structures des roches, en donne une description
accompagnée de nombreuses figures tirées de l'ouvrage de MM. Fou-
que et Michel-Lévy. C'est une sorte de manuel très complet sur la
matière. M. Paul Jannettaz a tenu à ce que la Société géologique,
pour qui son père avait tant d'attachement, fût la première à rece-
voir cet ouvrage.
M. Edm. Pellat offre à la Société un exemplaire d'une brochure
qu'il a publiée au mois d'août dernier, à l'occasion du XXVIIIe
Congrès de l'Association française pour l'avancement des Sciences
tenu à Boulogue-sur-Mer, au mois de septembre. Cette brochure,
intitulée : « Quelques mots sur le terrain jurassique supérieur du
Boulonnais », modifie, sur plusieurs points, en ce qui concerne ce
terrain 1' « Aperçu général sur la Géologie du Boulonnais », publié
par M. Gosselet, à l'occasion du môme Congrès.
Dans sa brochure, M. Edm. Pellat cite les observations récentes
de M. Munier-Chalmas sur les faciès d'estuaire du Portlandien du
Boulonnais, observations que nous ne connaissons encore que par
les Comptes-rendus de l'Académie des Sciences. M. Edm. Pellat
rappelle à cette occasion, que, dès 1878, contrairement à l'opinion
des géologues qui ont parlé du Boulonnais, il a considéré les cou-
ches remplies de Cyrènes de Wimille, d'Ecaux et d'autres localités
du Boulonnais comme l'équivalent saumàtre des couches franche-
ment marines à Trigonia Edmunsdi du Portlandien supérieur des
falaises deWimereux. Dans cette notice, M. Edm. Pellat s'est appli-
qué à caractériser mieux qu'il ne l'avait fait, les diverses assises
SÉANCE DU 4 DÉCEMBRE 1899 523
du Jurassique supérieur, par les Ammonites, que l'on considère
aujourd'hui, comme les fossiles les plus caractéristiques, dans les
terrains secondaires.
M. Labat offre à la Société une brochure qu'il vient de publier,
intitulée : Vilks d'hiver et bains de mer de la Corniche franco-italienne.
M. H. Douvillé fait une communication Sur la découverte de
nouvelles couches à Villers-sur-Mer. li signale une découverte géolo-
gique qui a été faite l'été dernier à Villers-sur-Mer. Un coup de
mer a enlevé environ deux mètres de sable sur la plage, au nord de
la rue de la Mer et a dégagé la base de la digue ; il a mis ainsi à
découvert un banc de calcaire jaunâtre qui a attiré l'attention de
M. Julien Raspail et a été signalé par lui à deux de nos confrères,
MM. Schlumberger et Adrien Dollfus, qui ont pu y recueillir un
certain nombre de fossiles. Ceux-ci ont été communiqués à M. Dou-
villé qui y a reconnu les espèces suivantes : Amm. sub-Bakeriœ,
Pholadomya inornata. Ph. carinata, Trigonia cf. elongata, Zeilleria
umbonellaf Rhynchonella spathica, Dysaster ellipticus ; c'est la faune
bien connue du Callovien de la Sarthe et en particulier de la zone à
Amm. coronatus. Ces couches sont donc inférieures à tout l'ensemble
des assises qui affleurent entre Trouville et Dives.
Entre cet affleurement nouvellement découvert et la falaise de
Villers il existe ainsi une très forte dénivellation certainement
supérieure à 60 mètres et indiquant très probablement l'existence
d'une faille. Cet accident doit suivre la base des coteaux et vient
passer un peu au sud de la gare où il est figuré sur la carte géolo-
gique ; en ce dernier point il est marqué par un fort plongement
vers le sud des couches de TOxfordien supérieur (Oolithe blanche).
M. Douvillé ajoute que, déjà en 1898, M. Adrien Dollfus lui avait
signalé un peu au nord de ce point, au-dessus de la gare, sur la
route de Tourgeville, un affleurement de couches fossilifères dans
lesquelles il avait recueilli en abondance la Gryphea A limena ainsi
que quelques Gr. dilatata ; cette association caractérise les marnes
qui constituent la petite falaise du Mauvais Pas à la sortie de
Beuzeval, sur la route de Dives, et qui surmontent immédiatement
les couches à Amm. athleta. Ces couches relativement très basses se
montrent également dans le cimetière et elles sont amenées à ce
niveau par le relèvement brusque des couches déjà signalé. Elles
marquent avec le nouvel affleurement découvert sur la plage l'axe
de la route comprise entre Villers et Trouville et que l'on plaçait
habituellement plus au nord, à Bénerville.
524 4 Dec.
RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ
La Commission a vérifié les comptes présentés par le Trésorier
pour Tannée 1898, ainsi que les prévisions pour 1899 ; ces chiffres
sont reproduits dans le tableau A, où ils sont rapprochés de ceux
de 1897.
Le tableau B résume l'ensemble des opérations effectuées par la
Société pendant l'année 1898.
Les résultats financiers de cet exercice sont plus favorables que
ceux des deux années précédentes ; le déficit ne s'est pas renouvelé
par suite de la diminution notable des frais d'impression du
Bulletin.
Recettes
Les revenus ordinaires sont en légère augmentation, de 100 francs
environ, il en est de même des cotisations arriérées qui ont passé
de 360 à 530 francs, mais les cotisations courantes et les cotisations
anticipées ont diminué cette année, les premières de 270, et les
secondes de 305 francs ; les droits d'entrée eux-mêmes ont éprouvé
une réduction de 100 francs. La situation réelle de la Société est
donc, au fond, peu satisfaisante.
La vente des publications de la Société (Bulletin et Mémoires de
Géologie) est également en diminution de 428 fr. 85, et celle des
ouvrages de Fontannes de 445 fr. 10. 11 est vrai de dire que, pour
cette dernière recette, le chiffre de 1897 était tout à fait exceptionnel.
En résumé les recettes, si on laisse de côté les Mémoires de
Paléontologie, ont passé de 22.600 fr. 18 en 1897 à 21.326 fr. 60
en 1898, soit une diminution de 1.273 fr. 58.
Dépenses
Les frais généraux, qui avaient diminué de 1.000 francs en 1897,
ont remonté de 572 fr. 75 en 1898. Il faut ajouter que cette augmen-
tation provient de dépenses utiles faites pour la bibliothèque et qui,
dans l'exercice courant, ont dépassé de 905 fr. 10 celles faites en
1897. La comparaison de ces chiffres montre que la plupart des
autres dépenses comprises dans les frais généraux sont au contraire
en diminution.
1899
RAPPORT DE LA COMMISSION DR COMPTABILITE
525
Les frais de publication ont brusquement diminué et dans une
très forte proportion, l'impression du Bulletin est passée de
13.256 fr. 65 à 7.012 fr. 30, c'est-à-dire n'a pas môme atteint le
chiffre des prévisions. Ce résultat un peu anormal et auquel nous
n'étions pas habitué, est certainement avantageux pour les finances
de la Société, mais on pourrait se demander s'il ne correspond pas
à une diminution réelle de l'activité de la Société.
Mémoires de Paléontologie
C'est par erreur que dans le rapport de Tannée précédente
l'impression du tome VII avait été considérée comme terminée en
1897, la Société a dû encore dépenser 891 fr. 50 pour son achève-
ment en 1898, ce qui porte la dépense totale à 4.078 fr. 75, en
augmentation de 200 francs environ sur celle des volumes précé-
dents. Par contre les recettes ont continué à décroître de telle sorte
EXERCICES
DÉPENSES
RECETTES
V
VI
VU
V
VI
VU
1894
1895
1896
1897
1898
Total . .
478 75
3.228 65
•
>»
»
1.433 80
2.438 35
»
»
»
u
532 60
2.654 65
891 50
»
1.360 50
1.025 »
293 40
40 »
i)
145 50
1.625 »
518 80
40 »
»
»
100 »
1.713 50
117 »
3 707 40
3.872 15
4.078 75
2.718 90
2.329 30
1.930 50
que le déficit, qui n'était que de 1.000 francs environ pour le tome V,
dépasse 2.000 francs pour le tome VII; ce déficit sera atténué dans
une certaine mesure par les ventes des années suivantes.
Quant au tome VIII dont la publication est très en retard, la
Société a reçu un certain nombre de cotisations : 305 fr. 50 en 1897,
525 francs en 1898, soit en tout 830 fr. 50 sur lesquels elle a, par
erreur, versé seulement 770 fr. 50 à l'éditeur ; il restera donc à
verser encore 60 francs. La Société n'ayant reçu en réalité ces coti-
sations que pour le compte d'une tierce personne, il eut été préfé-
rable de dresser pour ce chapitre un compte spécial et de ne pas
le faire figurer dans les comptes généraux de la Société.
526
RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ
4 Dec.
Comptes de 1898 et pr
RECETTES
1° Ordinaires
Revenus nets
Cotisations arriérées
» courantes
» anticipées
Droits d'entrée
Divers
2° Vente des Publications
Bulletin et tables
Mémoires de Géologie
» de Paléontologie. . .
Ouvrages de Fontannes ....
Souscription ministérielle. . .
Total des Recettes
Frais généraux à retrancher .
Dotation des publications ....
En caisse ) au commencement
Manque j de l'exercice
Total de l'actif
Emprunt au compte capital . . .
ACTIF DISPONIBLE
1897
4.776,15
360 »
10.200 »
1.47o »
460 »
1,83
17.272,98
3.173,53
628,25
2.831,20
525,40
1.0()0 »
8.158,40
25.431,38
9.166,40
16.264.98
»
-5.544 35
10.720.63
7.673,45
18.394,08
PRÉVUES
pour 1898
»
3.150
500
»
»
1.000
4.650
»
4.900 »
360 »
10.200 »
1.500 »
460 »
17.420 »
»
>>
»
22.070 »
9.305 »
12.765 »
- 232,25
12.532,75
»
12.532,75
1898
4.873,35
530 »
9.930 >»
1.170 »
360 »
10 »
16.873,35
2.907,65
465,40
722 »
80,30
1.000 »
5.175,25
22.048,60
9.739,15
12.309,45
»
— 232,25
12.077,20
»
12.077,20
prévu:
pourlt
4.875
400
10.200
1.200
400
»
17.075
3.000
500
»
»
1.000
4.500
21.575
9.340
12.235
+ 1.588
13.834
»
13.834
1899
RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ
527
de budget pour 1899
DÉPENSES
1° Frais généraux
Personnel. Appointements . .
— Gratification . . .
Loyer effectif et contributions
Chauffage et éclairage
Mobilier et nettoyage
Bibliothèque
Frais de bureau
Port de lettres
Divers
Total
2° Frais des Publications
Bulletin, exercice courant . . .
Compte-rendu sommaire ....
Port : Bulletin et Compte-Rendu.
Mémoires de Paléontologie . . .
Table de la 3* série
3° Dépenses extraordinaires
Contribution aux prix
Exposition de Bruxelles . . .
Total
Dépenses totales (autres que les
frais généraux) . . .
. .
+ En caisse) ^ ,,
' J en fin d exercice . .
— Manque )
Total ou différence égale.
1897
1.800 »
100 »
4.651,30
614 »
589,30
511,30
473,25
334,20
90,05
9.166,40
13.256,65
721,25
1.521,23
2.654,65
300 »
18.453,78
23,10
149,45
172,55
18.626,33
»
- 232,25
18.394,08
PREVUE8
pour 1898
1.800
100
4.525
650
500
800
500
330
100
»
»
»
»
»
»
»
»
9.305 »
9.000 »
800 »
1.400 »
»
1.000 »
12.200 »
12.200 »
+ 332,75
»
12.532,75
1898
»
»
1.800
100
4.533,60
666,50
454,50
1.416,40
424,30
253,50
90,35
9.739,15
7.012,30
631,35
1.171,77
1.662 »
»
10.477,42
»
10.477,42
+ 1.599,78
»
12.077,20
PRÉVUB8
pour 1899
1.800 »
150 »
4.540 »
650 »
450 »
900 »
450 »
300 »
100 »
9.340 »
8.000 »
700 »
1.250 »
»
1.000 »
10.950 »
»
»
10.950 »
+ 2.884,78
»
13.834,78
528
RAPPORT DE LA COMMISSION DR COMPTABILITÉ
4 Dec.
Résumé dea
RECETTES
1° Ordinaires
Revenus
Cotisations, droits d'entrée et divers . .
2° Vente des publications
Bulletin et Mémoires de Géologie . . .
Mémoires de Paléontologie
Ouvrages de Fontannes
Souscription ministérielle
8° Looatives
Produit des sous-locations.
4° Compte capital
Cotisations à vie
Remboursement d'une obligation . .
5° Fonds spéciaux
a. Barotte . .
b. Fontannes.
c. Viquesnel.
Total
6° Encaisse au 1er Janvier 1898
Budget ordinaire (manque)
Fonds spéciaux
Compte capital
4.873, 35
12.000 »
3.372, 95
722 »
80,30
1.000 »
232,46
n
3.150 »
— 232,25
232,46
16.873, 35
5.175,25
3.150 »
1.688,90
1.489,75
28.377, 25
0,21
28.377,46
1899
RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ
529
comptes de l'Exercice 1898
DÉPENSES
1° Ordinaires
Personnel, loyer, chauffage et éclairage. .
Mobilier et bibliothèque
Frais de bureau, ports de lettres, divers .
2° Frais des publications
Bulletin(1898)et Réunion extraordin™(1897).
Compte-rendu sommaire
Port du bulletin et du compte- rendu som-
maire
Contribution aux Mémoires de Paléon-
tologie
8° Compte capital
Néant.
4° Fonds spéciaux
a. Barotte
b. Fontannes
c. Viquesnel
Total
5° Encaisse au 31 Décembre 1898
Budget ordinaire
Fonds spéciaux
Compte capital
10.250, 10
4.870, 90
768, 15
7.012,30
631,35
1.171,77
1.662 »
»
400 )>
663, 45
■
i
1.599,78 ,
658, 76
1.688,90
12.889, 15
10.477,42
»
1.063,45
24.430,02
3.947, 44
28.377, 46
8 Mars 4900. - T. XXVII.
Bail. Soc. Géol. Fr. - 31
530 RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ 4 Dec.
Par suite des retards apportés à cette publication et du défaut de
publicité, il est facile de prévoir que les recettes du tome VIII seront
encore inférieures à celles du tome VII, mais il est impossible
d'évaluer à quelle somme s'élèvera la contribution que la Société
devra verser à l'éditeur, conformément à la convention qui a été
signée avec ce dernier.
Résumé et conclusions
En résumé, la situation financière de la Société pourrait être
considérée comme favorable en 1898, puisque l'exercice a donné un
excédent de 1.832 fr. 03, ou même de 2.007 fr. 03, si l'on tient
compte des différences des cotisations anticipées et arriérées.
Rappelons que l'exercice 1897 avait donné au contraire un déficit
de 1.886 fr. 35.
Mais, en réalité, la situation de la Société est au contraire peu
satisfaisante: si le nombre total des membres n'a diminué que de
2 en 1898, le nombre des membres ayant acquitté leur cotisation a
diminué de 12, ce qui fait que le total des membres effectifs s'est
abaissé de 497 à 483. Il en résulte que l'exercice 1898 se trouve
caractérisé par une double diminution, portant à la fois sur le
nombre des membres et sur la vente des publications de la Société.
En ce qui concerne les comptes présentés par M. le Trésorier, la
Commission vous propose de les approuver et de lui voter des
remerciements.
Présenté au nom de la Commission do comptabilité,
H. Dou VILLE.
Sur la proposition du Président, l'assemblée approuve les comptes
du Trésorier.
Des remerciements sont votés au rapporteur, M. Douvillé, et au
Trésorier, M. Léon Janet.
1899 531
OBSERVATIONS SUR QUELQUES ÉQUIDÉS FOSSILES
par M. lareellin BOULE.
Tous les paléontologistes savent quel intérêt mais aussi quelles
difficultés présente l'étude des Équidés fossiles. Malgré les beaux
travaux d'Owen, Rûtimeyer, Cope, de MM. Albert Gaudry, Forsyth-
Major, Nehring, de Mme Pavlow et de bien d'autres savants, il nous
reste beaucoup à apprendre. On est loin d'être d'accord sur la spéci-
fication des diverses formes, sur leurs affinités, leurs relations
génétiques. Ces problèmes sont des plus difficiles à résoudre : d'un
côté, nous n'avons le plus souvent à notre disposition que des
molaires isolées et, d'un autre côté, la spécification des Chevaux
actuels est encore elle-même matière à discussion.
J'ai été conduit, soit par mes études personnelles, soit par mes
fonctions au Muséum, à examiner beaucoup de matériaux provenant
d'un grand nombre de gisements pliocènes ou quaternaires de nos
pays. Je n'ai pas la prétention, pour le moment, de reprendre
l'étude des Équidés fossiles pour la traiter avec toute l'ampleur
qu'elle mérite; je veux simplement présenter quelques observations
de nature à éclairer certains côtés de la question et, je crois, à pré-
ciser les affinités de diverses formes. En môme temps les dessins
qui accompagnent cette note seront de quelque utilité pour les
personnes qui ont à déterminer des molaires de Chevaux fossiles.
1. — Les Chevaux zébrés dans le Quaternaire algérien.
Eu 1884, M. Ph. Thomas (1) a décrit et figuré, sous le nom d'Equus
asinus atlanticus. une mâchoire inférieure de jeune Équidé provenant
des alluvions quaternaires de l'Oued-Seguen. Cette pièce présente
un caractère fort curieux : les troisièmes molaires de lait (fîg. 4)
ont, à leur angle postéro-exteme, une colonoette noyée dans le
cément et figurant sur la couronne un cercle d'émail (fig. 4, 0).
M. Thomas a cherché en vain ce petit pilier supplémentaire sur les
mandibules de Poulains ou d'Anes et j'ai pu m'assurer qu'il ne se
(1) Recherches sur quelques formations d'eau douce de l'Algérie (Mémoires d*
la Société géologique de France, 3* série, t. 111, n° 2, pi. VIII, lig. 7).
532
M. BOULE
4 Dec.
Fig. 1. — 3" molaire
de lait inférieure
gauche d'un Equus
caballus. Gr. nat.
Fig. î. — 3e molaire
do luit inférieure
gauche d'un Equus
asinus <Anon d'Al-
gérie). Gr. nat.
trouve pas non plus chez les jeunes Hémiones. Mais, comme les
molaires de lait des Hipparion présentent souvent des colonnettes
analogues, M. Thomas a cru pouvoir dire: « La signification morpho-
logique de ce denticule supplémentaire ne nous semble pas douteuse :
sa position, sa forme et son développement le désignent comme
une manifestation
atavique, rattachant
TÉquidé asinien de
rOued-Segueu à son
ancien compatriote
et ancêtre probable
{'Hipparion pliocène
des dépôts fluvio-
lacustres de Cous-
tantine ». Or nous
verrons tout-à-l'heu-
re que ce rapproche-
ment n'est pas tout
à fait exact et je dirai
pourquoi TÉquidé de
TOued-Seguen ne
saurait être consi-
déré comme un des-
cendant direct d'une
forme d' Hipparion.
Etant donnée la
provenance géogra-
phique de la mandi-
bule décrite par M.
Thomas, j'ai pensé
que Tétude du sys-
tème dentaire des
Chevaux zébrés afri-
cains me fournirait
quelques renseigne-
ments et j'ai passé
Fig. 3. — 3e molaire
de lait inférieure
gauche d'un Dauw
(Equus Burchelli).
Gr. nat.
Fig. 4. — 3" molaire
de lait inférieure
ifauche de l'Equidé
fossile de l'Oued-
Seguen (Equus asi-
nus atlanticusTho-
mas). Gr. nat.
Fig. 5. — 3" molaire
de lait inférieure
rauche d'un Equus
Uetwnis de Perrlcr
(Puy-de-Dôme). Gr.
nat.
Fig. 1 à 5. — Molaires inférieures de lait
chez divers Équidés.
en revue tous les documents ostéologiques de la galerie d'Ana-
tomie comparée du Muséum se rapportant à ces animaux. Les
crânes de Chevaux zébrés adultes y sont relativement nombreux,
mais les dentitions de lait y sont, comme partout, très rares. Pour-
tant j'ai pu étudier la mâchoire inférieure d'un jeune Dauw, mort
1899 OBSERVATIONS SUR QUELQUES ÉQUIDÉS FOSSILES 533
en 1841, à la Ménagerie du Muséum, à l'âge de 137 jours, et j'ai été
agréablement surpris de constater que cette pièce ressemble tout-à-
fait à celle de l'Oued-Seguen. Sur les deux échantillons l'emplace-
ment de la 1™ prémolaire est marqué par un alvéole. Sur le fossile,
les molaires sont un peu plus épaisses, mais cela tient à leur état
d'usure plus avancé, l'animal étant mort plus âgé. Les dessins de
l'émail sont semblables. La 3me molaire de lait montre, à son angle
postéro-externe, le même petit pilier supplémentaire (fig. 3, 0). Je
me crois donc autorisé à rapprocher le fossile de l'Oued-Seguen des
espèces de Chevaux zébrés qui vivent actuellement dans le sud de
l'Afrique, et en particulier du Dauw (Equus Burchelli), qui habite
la Cafrerie.
J'ajouterai, à l'appui de cette première observation, qui remonte
à 1891, qu'en faisant la revue des collections données par M. Ph.
Thomas au Muséum, j'avais observé des molaires supérieures de
seconde dentition rappelant, par diverses particularités, les Chevaux
zébrés plutôt que Y Equus caballus. Telles sont cinq molaires prove-
nant du calcaire lacustre le plus supérieur de la colline d'Ain-el-
Hadj-Baba et désignées par M. Thomas comme ayant appartenu
« soit à V Equus Stenonis, soit à un vieil flipparion » ; ainsi qu'un
fragment de maxillaire supérieur provenant du calcaire lacustre
de Guelma.
J'ai été récemment amené h reprendre cette question à propos de
l'étude de documents paléontologiques recueillis par M. Gentil dans
un curieux gisement paléolithique de la province d'Oran (1 ). M. Gen-
til m'a remis, avec de nombreux débris d'Éléphants, de Rhinocéros,
d'Hippopotames, de Ruminants, etc., une certaine quantité de dents
supérieures et inférieures d'un Équidé qui diffère notablement, à
première vue, de ÏEquus caballus et, pour arriver à la plus grande
certitude possible, j'ai repris l'étude morphologique comparée des
molaires chez les Chevaux zébrés, en particulier chez le Dauw,
d'une part, et chez le Cheval ordinaire d'autre part. J'ai observé un
assez grand nombre de caractères différentiels dont plusieurs
avaient déjà été signalés par Owen (2). Je crois utile de les indiquer
ici au moyen de figures dessinées à la chambre claire avec le plus
grand soin (3).
(1) La description de ce gisement, accompagnée de planches et de figures, a paru
dans le n° 1 de 1900 do L'Anthropologie.
(2) Philosophical transactions of the Royal Society of London. 1869.
I (3) Dans toutes ces figures, j'ai employé, pour désigner les diverses parties des
dents, la nomenclature de mon éminent maître, M. Albert Gaudry, parce que je
S34
4 Dec.
Molaires inférieures de première dentition. — Nous avons déjà vu
que chez le Dauw, la 3me prémolaire (fig. 3) présente, à l'angle
postera externe, un pilier ou colonnette, 0, qu'on n'observe ni chez
le Cheval (fig. 1), ni chez l'Ane (fig. 2}, ni chez l'Hémione. Je n'ai
pas eu de mandibule de jeune Zèbre, ni de jeune Quagga.
Molaires supérieures. — i'' D'une manière générale, les molaires
supérieures des Chevaux zébrés actuels (fig. 7) ont la colonnette
interne (denticule interne du i<" lobe, I, dans la nomenclature de
M. Albert Gaudry) moins développée, c'est-à-dire moins allongée
que dans le Cheval (fig. 6, 1) ; le dessin des boucles est plus arrondi.
Fig. 6.
Fig. 6. — Troisième molaire supérieure gauche
Gr. nat.
Fig. 7, — Troisième molaire supérieure gauche d'un lia ut
Gr. nat.
Fig- 8. — Molaire supérieure gauche de l'ÉquIdé fossile du
Gr. mil,
Fig- 8.
Et/uns cahatlus de Solutré.
d Dauw Œquus BnrchtlH).
Karâr (Algérie).
2° Les piliers de la muraille externe (a, a') tout en étant aussi
saillants, sont moins robustes; le pilier médian n'est jamais dédou-
blé ou divisé en deux par un sillon longitudinal (sillon bien marqué
fig. fi, en a').
3° Les denticules externes E, e, au lieu de dessiner de véritables
croissants, comme cbez le Cheval, sont plus dilatés et plus arrondis,
un peu comme chez les Bœufs; celte disposition s'accuse, sur la
muraille externe, par une légère convexité, au lieu d'une dépres-
sion profonde et régulière ; il s'en suit également que les espaces
interlobaires sont plus arrondis chez le Dauw, plus aplatis chez
le Cheval.
considère cette nomenclature comme la plus simple et la plus pratique qu'on ait
indiquée jusqu'à ce jour. E, M, I, désignent les denticules externe, médian et
interne du premier lobe ; r, >", i, désignent les mêmes denticules dans le second
1899 OBSERVATIONS SDR QUELQUES EQUIDKS FOSSILES 535
4* La dernière molaire supérieure a une forme assez différente
dans les deux groupes, et cette différence tient au développement
inégal des diverses parties de la dent. Chez le Dauw (fig. 10), ledon-
ticule interne du deuxième lobe, t, est au moins aussi saillant que
le denticule externe, e, tandis que le contraire a lieu chez le Cheval
(iig. 9) où le denticule interne est moins saillant que l'externe. La
couronne de la dernière molaire, chez le Dauw, a doue une forme
plus rectangulaire que chez le Cheval où elle a une forme plus
triangulaire.
rig. 9. Fig. io. Fig. il.
Flg. 9. — Dernière molaire supérieure gauche d'un Equus caballiu de Solutré.
Gr. nal.
Flg. 10. — Dernière molaire supérieure gauche chez le Dauw (d'après Owen).
Gr. nat.
Flg. 11. — Dernière molaire supérieure gauche de l'Ëquldé fossile du lac Karar.
Gr. nat.
Par tous ces caractères, les molaires supérieures des Chevaux
zébrés ressemblent bien plus aux dents d'IIipparion que celles des
Chevaux ordinaires. 11 est évident que les Chevaux zébrés sont plus
près de la souche originelle des Equidés que les Chevaux du type
caballin et que ces derniers sont bien plus différenciés au point de
vue dentaire.
Molaires inférieures. — Il en est de même des molaires inférieures
qui se rapprochent également beaucoup plus des molaires d'Hippa-
rion. Chez le Dauw (fig. 13) la muraille externe n'est pas aussi
rectiligne que chez le Cheval (fig. 12); les deux denticules qui la
composent, E, e. out un contour beaucoup plus arrondi. Les boucles
internes, notamment la boucle t', toujours plus ou moins pointue
et aplatie chez le Cheval (fig. 12), est ici plus dilatée et plus ronde.
Par tous ces caractères les dents d'Équidés du lac Karâr se
distinguent nettement de» dents d'Equus caballus et présentent,
même en les exagérant, les caractères des Chevaux zébrés, comme
on peut s'en assurer en examinant les fig. 8, 1 1 et 14 en comparaison
536
M. BOULE
4 Dec.
Fig. 12. — Molaire
inférieure gauche
d'un Equus cabal-
lus de Solutré. Gr.
nat.
avec les figures voisines représentant les mêmes dents chez YEquus
caballus et Je Dauw. Il en est de même de l'Équidé fossile de Palikao
décrit par M. Pomel sous le nom d'Equus mauritaniens, à en juger
du moins sur les figures données par ce dernier savant.
Il y a, par suite, tout
lieu de croire qu'à l'épo-
que quaternaire, les an-
cêtres directs des Che-
vaux zébrés, aujour-
d'hui cantonnés vers le
Sud de l'Afrique, occu-
paient la partie septen-
trionale du continent.
Un phénomène analo-
gue nous est offert par
l'Hippopotame, le Pha-
cochère, le Rhinocéros
simus, etc. La faune
pléistocène d'Algérie
est essentiellement une
faune africaine compre-
nant, avec des formes
vivant encore actuelle-
ment dans le pays, beau-
coup d'espèces qui ont
émigré vers le sud (1).
Fig. 13. — Molaire
inférieure gauche
d'un Dauw Œquus
Burchelli). Gr. nat.
Fig. 14. — Molaire
inférieure gauche
de l'Equidé du lac
Karar. Gr. nat.
Fig. 15. - Molaire
inférieure gauche
d'Equus Sténo nia
du Pliocène de Sain-
zelles (Haute Loire).
Gr. nat.
2. — Observations
sur l*Equus Steaon/s.
Fig. 1(>. — Molaire
inférieure gauche
à'Hipparion gra-
cile. Miocène supé-
rieur de Pikermi.
Gr. nat.
Fig. 12 à 16. — Molaires inférieures gauches
de divers Ëquidés.
Les paléontologistes
qui s'occupent des
Équidés fossiles ne
manqueront pas de
constater que les carac-
tères distinctifs énu-
mérés ci dessus sont en
grande partie ceux qui ont été établis par divers savants, notam-
(1) Cf. les Monographies de Paléontologie de Pomel et l'analyse critique que
j'en ai donnée dans l'Anthropologie, t. X, p. 5G3.
1899 OBSERVATIONS SUR QUELQUES ÉQUIDÉS FOSSILES 537
ment par Rûtimeyer, pour distinguer YEquus Stenonis Coch. de
VEquus caballus (1). Beaucoup s'appliquent aussi aux Asiniens, dont
les molaires isolées peuvent, par suite, le plus souvent, être distin-
guées des molaires de Chevaux de petites races et qui, d'ailleurs,
se séparent des autres Équidés par des caractères secondaires sur
lesquels il n'y a pas lieu d'insister ici.
Ce que je voudrais essayer de montrer pour le moment, ce sont
les affinités étroites qui relient les Chevaux zébrés actuels à YEquus
Stenonis du Pliocène européen, plutôt qu'à VEquus caballus consi-
déré par la plupart des auteurs comme le descendant direct de
YEquus Stenonis. Les fig. 15 et 17 montrent que les molaires supé-
rieures et inférieures de YEquus Stenonis se rapprochent beaucoup
plus des formes zébrées et de YHipparion que des formes caballines.
C'est là un Heu commun. Mais il est un point qui me paraît plus
nouveau et sur lequel je dois insister. C'est que la 3mo molaire infé-
rieure de lait présente, chez YEquus Stenonis, la même colonnette
supplémentaire que chez le Dauw. Je l'ai d'abord observée sur
deux mandibules provenant de Perrier (Puy-de-Dôme) et faisant
partie de la collection Brava rd au Muséum (fi g. 5); puis, sur de
nombreuses pièces provenant de Senèze (Haute-Loire) et M. Forsyth
Major a figuré une dent semblable originaire du Val d'Arno (2).
Si l'on se rappelle, d'un autre côté, que le Cheval ordinaire,
l'Ane et l'Hémione, sont dépourvus de colonnettes à leurs molaires
de lait, on sera bien porté à considérer les Chevaux zébrés pléisto-
cènes et actuels d'Afrique comme les descendants directs de YEquus
Stenonis. D'ailleurs les autres Mammifères qui accompagnent cette
espèce dans nos gisements pliocènes sont en grande partie des
formes africaines : Rhinocéros, Hippopotames, Antilopes, Hyènes,
Porcs-Epics, etc.
Pourtant il y a lieu de faire une distinction.
Quand on étudie une collection nombreuse de dents d'Equus
Stenonis, comme l'a fait M. Forsyth Major pour les gisements plio-
cènes italiens, comme j'ai pu le faire pour les gisemeuts du Massif
central de la France, on s'aperçoit que pour la taille, pour les
dimensions et la forme de la colonnette, pour le plissement de
l'émail, YEquus Stenonis présente des variations comparables aux
variations qu'on observe dans les différentes races de YEquus cabal-
lus. Pour donner un exemple de l'amplitude que peuvent présenter
(1) MBt Pavlow a parfaitement présenté le tableau de ces différences dans sa
remarquable Etude sur les Chevaux pléistocènes de la Russie.
(2) Mémoires de la Société paleonto logique suisse, vol. VU, 1880, pi. VII, fig. 4.
M. BOULE
ces variations, je figure, à côté l'une de l'autre, deux molaires
supérieures d'Equus Stenonis provenant, l'une de Sainzelles, l'autre
de Solilhac, prés Le Puy (Haute-Loire).
Ffg. 17. Fig. «. Fig. t9.
Flg. 17. — Molaire supérieure gauche de VEquus Stenonis. Pliocène du Coupet
(Haute-Loire). Gr. nat.
Flg. 18. — Molaire supérieure gauche de l'Squtu Stenonis (Eqtms robustus) de
Solilhac (Haute-Loire). Gr. nat.
Flg. 19. — Molaire supérieure gauche d'Equus caballus. Quaternaire de Brunl-
quel (Tara-et Garonne). Gr. nat.
La première (fig. 17) se rapporte au type de VEquus Stenonis tel
qu'il a été défini et dessiné par Rûtimeyer ; elle olïre, au suprême
degré, les caractères dont nous avons parlé plus liaut. On peut dire
que c'est le type le plus répandu dans nos gisements pliocènes. Par
sa taille, la forme de ses diverses parties et le faible plissement de
l'émail, elle est aussi voisine que possible des molaires de Chevaux
zébrés actuels.
La seconde (fig. 18) existe dans le Velay, à Ceyssaguet, a Solilhac,
à Taulhac, c'est-à-dire dans des gisements qui paraissent un peu
plus récents que Vais, Vialette, Le Coupet, où s'observe surtout
la première forme (1). Elle se retrouve à Chagny, où je l'ai signalée
en 1891, grâce à une obligeante communication de M. Douvillé (2).
Elle diffère de la première par ses dimensions beaucoup plus
grandes, qui dénotent une espèce énorme, et par le plissement
très compliqué de l'émail. Sa colonnette a conservé les caractères
de la forme Stenonis car elle est proportionnellement aussi petite
que dans le premier type, tandis qu'on observe quelques caractères
conduisant à l'Equus caballus: les lobes externes, E, e, sont moins
dilatés et se rapprochent de la forme en croissant, les piliers
moyens des prémolaires commencent à se dédoubler, et il suffirait
(1) Ct. M. Boule. Description géologique du Velay.
(2) Ballet, de la Société géologique de France, 3- série, t. XIX, p. 801.
1899 OBSERVATIONS SUR QUELQUES ÉQUIDÉS FOSSILES 539
que la colonnette prit un peu plus de développement pour que cette
dent ressemblât tout à fait à certaines molaires de fortes dimen-
sions, à émail très plissé, qu'on observe dans divers gisements
d'Angleterre (1) et de nos pays, Cindré (Allier), Bruniquel (Tarn-et-
Garonne). A cet égard la comparaison des fi g. 18 et 19 est des plus
instructives.
Les anciens paléontologistes du Plateau central, Aymard, Robert,
Pomel avaient parfaitement distingué ces deux formes, du moins
parleurs dimensions. Ils avaient donné à la première le nom d'Equus
ligeris (2) et à la seconde le nom d'Equus robustus. Celle-ci doit-elle
être considérée comme une espèce spéciale ou comme une simple
race major de VEquus Stenonis ? Peu nous importe, au point de vue
philosophique où nous nous plaçons. Ce qui est intéressant à cons-
tater, c'est que parmi nos Équidés fossiles, tous remarquables par
leur colonnette étroite, les uns, de petite taille, à émail peu plissé,
à lobes externes dilatés, paraissent s'être continués directement en
les Chevaux zébrés de l'Afrique actuelle tandis que d'autres, de
plus forte taille, à émail beaucoup plus plissé, accentuent la forme
en croissant de leurs lobes externes et paraissent se transformer
insensiblement en VEquus caballus de grande taille de certains
gisements quaternaires.
Il faut remarquer qu'on peut suivre cette transformation, pas à
pas ; que les dents de Sainzelles ou de Chagny, qui sont franche-
ment pliocènes, sont plus voisines des dents d'Equus Stenonis type
que les dents de Solilhac qui sont du Pliocène tout à fait supé-
rieur ou du Quaternaire tout à fait ancien et qui nous amènent à
VEquus caballus bien caractérisé des gisements quaternaires.
3. — Observations sur la robe des Chevaux quaternaires.
Les considérations précédentes nous amènent à poser une ques-
tion fort intéressante. Les Chevaux, dont on trouve les restes en si
grande abondance dans tous nos gisements quaternaires, alluvions
ou cavernes à ossements, étaient-ils des Chevaux zébrés ?
A en juger par les représentations que nous ont laissées les artis-
tes de l'Epoque du Renne, les Équidés quaternaires ont dû avoir une
robe rayée. Tout le monde connaît la célèbre gravure de Thayngen
représentant un Équidé à crinière droite, à queue dégarnie de
(1) C'est VEquus plicidens d'Owen.
(2) Aymard réunissait à tort, sous cette dénomination, VEquus Stenonis de petite
taille et VEquus caballus de divers gisements quaternaires.
540 m. boule 4 Dec.
longs crins, à pelage zébré. M. Piette (1) a publié plusieurs œuvres
d'art analogues provenant de divers gisements français, Gourd an
(Hautes-Pyrénées), Arudy (Basses-Pyrénées), Lourdes, etc. Notre
savant confrère conclut de l'étude de tous ces documents que la plu-
part des animaux figurés par les artistes de l'Époque du Renne se
rapportent à une espèce particulière qu'il a désignée sous le nom
d'Equus maculatus et qui aurait été intermédiaire « entre l'ancêtre
commun de tous les Équidés actuels, lequel était zébré, et le Cheval
tacheté qui vit de nos jours ».
Or, que nous apprend à ce sujet 1 étude des dents des Chevaux
quaternaires ? Déjà Owen avait cherché à se rendre compte si les
Équidés fossiles de la caverne de Bruniquel présentaient les carac-
tères des Zèbres, des Dauws, des Hémiones ou des Quaggas actuels
et il avait conclu par la négative.
J'ai moi-même passé en revue l'énorme collection de documents
de ce genre que possède la galerie de Paléontologie du Muséum et
je n'ai trouvé aucune pièce pouvant faire admettre l'existence dans
nos pays, à l'époque quaternaire, des Chevaux zébrés africains.
Tous les échantillons que j'ai vus se rapportent incontestable-
ment au type caballin actuel. On peut même dire, à la suite de
divers naturalistes, Nehring, Toussaint, Sanson, Piètrement, etc.,
que les Chevaux quaternaires d'une région déterminée paraissent
être les ancêtres directs des races habitant actuellement la même
région.
On pourrait supposer que les artistes de l'Epoque du Renne ont
représenté les poils de leurs Chevaux par des lignes régulières, en
employant un procédé aussi simple que primitif, et sans avoir l'in-
tention de figurer des zébrures, mais il suffit d'examiner avec quel-
que attention la gravure de Thayngen ou la statuette de Lourdes
pour voir que cette supposition n'est pas fondée. Dans ces deux
monuments de l'art de l'Époque du Renne, la disposition des
zébrures se rapproche trop de la disposition générale des zébrures
chez les Chevaux zébrés actuels pour qu'il y ait une simple coïnci-
dence.
Il ne reste plus que la seconde hypothèse: c'est que tous les
Équidés primitifs, aussi bien ceux du type caballus que ceux du
type Stenonis ou du type zèbre (Hippotigris de certains zoologistes)
ont eu à l'origine une robe rayée que les premiers ont perdue, à la
longue, par l'effet de la domestication.
(1) Matériaux pour l'Histoire naturelle et primitive de l'Homme, Septembre
1887. — Bull, de la Société d'Anthropologie de Paris, 1887 et 1892.
1899
OBSERVATIONS SUR QUELQUES ÉQUIDÉS FOSSILES
541
4. — Relations du genre Hipparion et du genre Equus.
Pendant longtemps, le genre Hipparion a été considéré comme
l'ancêtre direct du genre Equus. Si Ion ne considère que les mem-
bres, il est certain que V Hipparion représente une forme beaucoup
moins évoluée que les Chevaux, dans lesquels les deuxième et qua-
trième doigts sont beaucoup plus réduits et où le type Solipède est
tout à fait réalisé. Si Ton considère la dentition Ton* voit au con-
traire que, par certains caractères, notamment par l'isolement de
la colonnette médiane (ou denticule interne du premier lobe) V Hip-
parion est plus évolué que le Cheval. Mmo Pavlow a insisté, avec
beaucoup de force, sur ce double phénomène et s'est appuyée sur
lui pour exclure complètement l' Hipparion de l'ascendance directe
du genre Equus. tandis que d'autres paléontologistes, à la suite de
Cope, admettent, pour les Chevaux, uue
origine diphylétique. Sans nier d'une
façon absolue la réalité de ce phénomène
de convergence, je serais plus porté à
admettre la théorie soutenue avec beau-
coup de talent par Mmo Pavlow, théorie
eu faveur de laquelle on peut apporter
un nouvel argument tiré de l'examen des
molaires inférieures de première denti-
tion.
Nous avous au Muséum, dans les
collectious recueillies à Pikermi et au
Léberon par M. Albert Gaudry, un grand
nombre de mandibules de jeunes Hippa-
rion avec dentition de lait et Ton peut
constater, sur ces pièces, que les piliers,
ou colonnettes supplémentaires, se ren-
contrent un peu partout : à l'angle an-
téro-interne, entre les deux lobes, mais
jamais à l'angle postéro interne (fig. 20
à 22).
Si, comme le veulent beaucoup de
paléontologistes, on considère les mo-
laires de lait comme représentant un
souvenir aucestral, le pilier des molaires de lait de YEquus Stenonis,
des Chevaux pléistocèues de l'Algérie et des Chevaux zébrés actuels
ne saurait être regardé comme un souvenir de l'état Hipparion; il
Fig. 20 à 22. — Trois molai-
res inférieures de lait, do
côté gauche d' Hipparion
gracile de Pikermi et do
Léberon. Gr. nat. (d'après
M. Albert Gaudry).
542 m. boule 4 Dec.
doit représenter un legs d'une forme qui possédait ce pilier posté-
rieur et que nous ne connaissons pas.
Si, au contraire, à l'exemple de Mme Pavlow, on suppose que
les molaires de lait, loin de répéter les prémolaires des formes
précédentes, prédisent, pour ainsi dire, des formes nouvelles, on
voit qu'à ce point de vue encore les molaires de lait des Hipparion
sont loin d'annoncer les molaires de lait de YEquus Stenonis ou
des Chevaux zébrés.
Résumé
En résumé, il me parait bien établi par l'étude des molaires de
première et de seconde dentition :
1° Qu'un grand nombre d'ossements d'Équidés des gisemeuts
pléistocènes de l'Algérie se rapportent aux espèces ou à des races
des espèces de Chevaux zébrés vivant actuellement dans les régions
méridionales de l'Afrique.
2° Que YEquus Stenonis du Pliocène européen est représenté, dans
notre pays, par diverses formes dont les unes paraissent bien être
les ancêtres directs des Chevaux zébrés actuels et dont les autres,
dont on pourrait faire des espèces particulières si on le voulait,
passent aux Équidés du groupe caballus par des transitions insen-
sibles.
3° A l'époque pléistocène, les Chevaux de France appartiennent
au type caballin. Pourtant on ne saurait guère douter que la plu-
part au moins de ces Chevaux n'aient eu la crinière droite, la
queue peu garnie de crins et le corps couvert de zébrures comme
les Uippotigris actuels.
4° Les caractères tirés des molaires de lait confirment l'opinion
de Mrac Pavlow que le genre Hipparion n'est pas l'ancêtre direct du
genre Equws.
M. L. Gentil donne, à la suite de la communication de M.
M. Boule, quelques explications sur le gisement préhistorique du
Lac Karar, près Montagnac (Oran), dans lequel il a recueilli, avec
les ossements dont il vient d'être fait mention, de nombreuses
haches taillées du type chelléen.
1899 543
NOTE SUR LES GASTROPODES DU GISEMENT BATHONIEN
DE SAINT-GAULTIER (INDRE)
par M. H. COSS1AHN.
(Planches XIV, XV, XVI et XVII).
A la séance du 20 mars 1899 de la Société Géologique de France,
j'ai fait une communication, qui a été l'objet d'une courte Note
dans le Bulletin (3° sér., t. XXVII, p. 136 et suiv.), relativement à la
découverte d'un gisement de coquilles palustres (Paludines et Val-
vées) dans une carrière du bourg de Saint-Gaultier (Indre), entre
des couches dont l'Âge bathonien paraissait bien établi. A l'appui
de cette assertion, j'ai donné une liste sommaire des principaux
fossiles recueillis dans ce gisement, soit au-dessus, soit surtout au-
dessous de la couche à Paludines, et j'ai annoncé que, dans une
Communication ultérieure, je ferais connaître, d'une manière plus
détaillée, ces éléments paléontologiques, qui permettent de fixer
très exactement le niveau des calcaires, en exploitation dans cette
carrière.
La présente Note réalise cet engagement, du moins en ce qui
concerne une partie de la faune dont il s'agit; elle contient, en effet,
la description de Gastropodes détermina blés, pour la plupart recueil-
lis dans le Vésulien, au-dessous de la Couche à Paludines.
Sur 40 espèces, ci-après décrites et figurées, 37 appartiennent, en
effet, à la Couche dite « à Brachytrema » parce que ce fossile y est
très répandu, c'est-à-dire au calcaire n° 4 de la série ci-dessous
énumérée, à partir du Bajocien en bas, jusqu'aux assises supé-
rieures du Bathonien, représentées dans cette carrière ou dans celles
de Chabenet :
1 . — Marne à Clypeus Plotti.
2. — Calcaire oollthlque à Eudesia.
3. — Calcaire siliceux.
4. — Calcaire à Polypiers et à Brachytrema.
5. — Banc à Céphalopodes.
6. — Calcaire à Viviparus.
7. — Calcaire lithographique à Fucoldes.
8. — Calcaire à oolithes miliaires.
9. — Calcaire à Ânabacia.
544 M. C0SSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Cette division diffère un peu de celle que j'ai donnée à la page
138 du Bulletin de la même année, et qui ne comprenait que
six termes, parmi lesquels la couche susdite occupait le n° 5, en
comptant de haut en bas. Le motif en est le suivant : l'exploitation
de la carrière a eutamé les récifs de Polypiers qui en formaient le
fond, quand notre première Note a paru, et les fossiles trouvés à ce
niveau étant les mêmes que ceux de la couche à Brachytrema, il faut
en conclure que ces récifs sont contemporains, ou à peu près, de
cette couche; puis au-dessous, les ouvriers ont atteint des bancs
à Oursins et à Pinnigcna ; enfin il y a d'autres carrières, au bord de
la Creuse et à Chabenet, dans lesquelles M. Benoist a distingué les
trois niveaux additionnels, indiqués dans notre nouvelle liste,
représentant le Bathonien inférieur, et. sous lesquels doit probable-
ment se trouver le Bajocien.'
Ce chiffre de 40 espèces de Gastropodes, dont 39 provenant de la
carrière de Saint-Gaultier, et un échantillon du Callovien du Blanc,
est d'ailleurs au dessous de la réalité, en ce sens que nous n'avons
admis, dans nos descriptions, que les échantillons qui sont dans un
état de conservation qui les rend déterminables et qui permet d'en
donner une figure suffisante. Nous avons donc laissé de côté,
jusqu'à ce que la découverte de meilleurs matériaux nous mette à
même de combler cette lacune, les pièces suivantes, sur lesquelles
il ne nous est pas encore possible de nous former une opinion exacte :
Cerithiella ? cf pygnma Morr. et Lyc. Solarium du groupe Nummocalcar.
Purpuroidea ? du Calcaire n' 7. Trochus Burnburyi ? Morr. et Lyc.
Nerinea cf. elegantula id. Trochus ? à côtes obliques.
Pseudomelania Nerei f
En résumé, le total des Gastropodes de Saint-Gaultier s'élève actuel-
lement à 46, dont 42 du Calcaire n° 4, 2 du Calcaire n° 6, et 2 du
Calcaire n° 7. Mais il n'est pas douteux que cette faune s'enrichira,
à la longue, quand l'exploitation de la carrière mettra à découvert
de nouvelles surfaces de la couche à Brachytrema ; bon nombre de
débris, dont il n'a pu être fait mention dans cette première étude,
se retrouveront dans un état de conservation qui permettra de les
déterminer et de les décrire, de sorte qu'on doit s'attendre à ce que
notre Monographie comporte ultérieurement des suppléments.
Cerithiella nuda [Piettej.
(PI. XVII, fig. 21).
1855. Fusus nudux Piette. B. S. G. F. , 2« sér., XII, p. 1093, pi. XXXI,
lîg. 12- 13.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SA1NT-GAULTIBK 545
1856. Tubifer nudus Piette. Ibid., XIII. p. 692, pi. XV, fig. 13-14.
1885. Ceritella nuda Cossm. Contrib. et. Bath., p. 119.
1895. — — Cossm. Mém. Soc. géol. Fr., Paléont., n° 14,
p. 92, fig. 13.
Taille assez petite; forme très étroite, allongée, aciculée; spire
assez longue, pointue ; environ 8 tours légèrement convexes, dont la
hauteur égale les trois quarts de la largeur, obscurément anguleux
vers le tiers inférieur de cette hauteur, et munis, par conséquent,
d'une rampe déclive, très obsolète; sutures obliques, profondes,
non rainurées ; surface lisse en apparence, mais marquée, princi-
palement sur le dernier tour, de stries d'accroissement écartées et
inclinées, qui semblent rétrocurrentes vers la suture inférieure.
Dernier tour très allongé, par rapport à la spire, ovale à la base,
qui est atténuée vers le cou du bec antérieur; ouverture très étroite,
à columelle excavée à sa jonction avec la base de Pavant-dernier
tour.
Dimensions. — Longueur probable: 18mm; diamètre : 4mm 1/2.
Observations. — On sait que cette espèce, fondée sur un échantil-
lon unique et perdu, dont M. Piette avait fait le type de son Genre
Tubifer, n'avait jamais été retrouvée ; quoique l'individu, ci-dessus
décrit, soit mutilé, de sorte qu'il lui manque la moitié antérieure
de l'ouverture, il m'a permis de rectifier certaines inexactitudes de
la diagnose que j'ai donnée, dans mon Mémoire sur les Opistho-
branches jurassiques, d'après la figure originale seulement. L'exa-
men des véritables caractères de cet échantillon, et notamment de
son ornementation axiale, bien qu'elle soit très effacée, me confirme
dans l'opinion que j'ai émise en réunissant Tubifer à Cerithiella
(= Ceritella Morr. et Lyc. em., non Verrillj; tout au plus pourrait-on
conserver la dénomination Tubifer à titre de simple Section du
Genre Cerithiella, de même que Fibula Piette, qui est une exagé-
ration opposée de la forme moyenne, représentée par le Genre de
Morris et Lycett sensu stricto.
Néotype. — PI. XVII, fig. 21. Unique dans le calcaire n° 4.
Nerinea carinata Piette.
(PI. XIV, fig. 13).
1855. A\ carinata Piette. B. S. G. F.f t. XII, p. 118.
1885. — Cossm. Contrib et. Bath., p. 186, pi. XIII, fig. 13.
1898. — Cossm. Gastr. jurass. Nérinées, p. 27, pi. II,
fig. 29-31.
8 Mars 1900. — T. XXVII. Bull. Suc. Géol. Fr. — 35
546 M. C08SMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Fragment d'une taille assez grande; tours imbriqués et étages par
une carène postérieure, excavés et munis d'une rampe spirale, au-
dessous delà suture, presque plans sur le reste de leur surface, or-
nés de filets spiraux excessivement fins et obsolètes. Dernier tour peu
élevé, limité par une carène tranchante à la périphérie de la base,
qui est déclive et un peu concave vers cette carène, à peine convexe
aux abords du cou ; ouverture rhomboidale, avec un pli très sail-
lant, aux deux tiers de la hauteur du labre ; pli pariétal assez
saillant.
Dimensions. — Diamètre à la base: 27mm; hauteur du dernier
tour: 18mm; diamètre de la partie excavée: 22mm.
Rapports et différences. — Le fragment que je viens de décrire
répond assez exactement à la diagnose que j'ai récemment donnée
de cette espèce, dans mon Mémoire sur les Nérinées; comme il est
formé des quatre derniers tours de la coquille, avec une taille
beaucoup supérieure à celle des individus que j'avais précédem-
ment examinés, j'ai pu compléter, sur certains points, cette diag-
nose, sauf en ce qui concerne l'ouverture, malheureusement mutilée.
D'abord, le profil excavé des tours de spire existe à l'âge adulte,
comme sur les premiers tours ; il en est de même des filets spiraux
qui, quoique très fins, sont encore visibles sur la surface du dernier
tour, mais sans les rugosités produites par les stries d'accroisse-
ment, sur les premiers tours de quelques individus : toutefois la
base parait complètement lisse. Ainsi que je l'ai précédemment
indiqué, cette espèce se distingue, par son ornementation, de N.
bathonica, bien qu'elle ait à peu près le galbe de la var. scaliformis.
D'autre part, ses tours excavés et carénés ne permettent pas de la
confondre avec Ar. mnltistriata Piette.
Pl4siotype. — PI. XIV, fig. 13. Un seul fragment, dans le calcaire n° 4.
Melanioptyxis Altararis [Cossm.].
(PI. XV, fig. 6-8).
1850. Nerinea Voltzi Morr. etLyc.Moll.gr.Ool.,I,p.32,pl.VII,fig.7.
1885. Nerinea Altararis Cossm. Contrib. et. Bath., p. 200, pi. XVIII,
fig. 1-3.
1892. Nerinea Voltzi Hudl. et Wils. Brit. jur. Gastr., p. 90.
1896. Melanioptyxis Altararis Cossm. Essais Pal. comp. II, p. 30,
pi. IV, fig. 10.
1898. — — Cossm. Gast. jurass. Nérinées, p. 64,
pi. V, fig. 9 et pi. VIII, fig. 40.
1899 DU GtSBMENT BATHONtEN DE SAJNT-GAULTtER 547
Observations. — Je crois qu'il est superflu de donner une nouvelle
diagnose de cette espèce, qui a été décrite, en détail, dans mon
récent Mémoire sur les Nérinées jurassiques de France. Les échan-
tillons de Saint-Gaultier sont aussi roulés que ceux de la Haute-
Saône et de l'Orne ; dans cet état d'usure, on n'y constate pas
l'existence de la bande étagée, qui caractérise notre espèce. Néan-
moins, il ne paraît pas y avoir de doute au sujet de leur détermi-
nation: outre que le galbe général de la coquille, et que l'angle
spiral sont semblables à celui de mes échantillons types, de Montar-
lot, la base ovale à peine subanguleuse, du dernier tour, et la
position des plis dans l'ouverture, sont identiques.
M. Altararis est évidemment très voisin de M. Archiaci d'Orb.,
qui existe à un niveau un peu plus élevé, dans le Bathonien supé-
rieur de l'Aisne: on l'en distingue toutefois par ses tours plus
élevés, à peine étages, tandis que M. Archiaci porte une rampe
déclive très nette, qui coïncide avec la bande suturale; d'autre
part, le pli interne du labre est à peine visible à l'ouverture de
M. Altararis, tandis qu'il est extrêmement saillant chez M. Archiaci.
Il est donc facile de séparer ces deux espèces, quoique l'une soit
généralement aussi mal conservée que l'autre.
Plésiotype. — PL XV, fig. 6-8. Commune dans le calcaire n° 4.
Nerinella pibula [Eud. Desl.J
(PI. XIV, fig. 2-3).
1842. Ncrinea fibula DesL, Mém. Soc. linn. Norm., t. VII, p. 185,
pi. VIII, fig. 26-27.
Taille assez petite ; forme conique, turriculée, étroite ; 18 à 20
tours plans, lisses, dont la hauteur égale un peu plus de la moitié
de la largeur, séparés par des sutures peu profondes, sans arêtes ni
bourrelets. Dernier tour égal au quart de la longueur totale, suban-
guleux à la périphérie de la base, qui est déclive, à peine convexe,
et lisse comme la spire; ouverture subrhomboïdale, avec un pli
pariétal bien visible.
Dimensions. — Largeur: 45mm; diamètre : 10mm.
Observations — Cette espèce n'a pas été reprise par d'Orbigny, ni
dans le Prodrome, ni dan9 la Paléontologie française : j'ai également
omis de le cataloguer dans ma première Etude sur les Gastropodes
bathoniens, ainsi que dans mon récent Mémoire sur les Nérinées ;
cependant Eudes Deslongchamps en avait donné une courte descrip-
548 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
tion et une bonne figure, dans ses Notes sur les Gastropodes
jurassiques de la Normandie, en citant, comme provenance, la
localité de Falaise, et comme gisement un calcaire formé « d'oolites
blanches de grosseur égale, ressemblant à des graines de pavot » ;
il y a tout lieu de croire, ajoute cet auteur, que ce calcaire fait
partie de la Grande Oolite.
Rapports et différences. — Les échantillons de Saint-Gaultier se
superposent exactement à la figure de N. fibula ; ils ont le même
angle spiral et des tours de même hauteur ; toutefois leurs sutures
paraissent un peu plus horizontales, et leur base un peu moins
obliquement déclive ; mais ce sont là des différences trop légères
pour ne pas identifier ces échantillons avec l'espèce de Deslong-
champs. Il est probable qu'il faut également y rapporter les indi-
vidus de Falaise, que Deslongchamps a désignés, bien à tort, sous
le nom N. Goodalli ; il semble qu'ils ont le même galbe que N. /ibula,
ils sont non moins lisses, et les tours ont à peu près les mêmes
proportions.
Cette espèce est un peu plus trapue que N. [uni eu lus, ses tours
sont plus plans, et ne sont pas ornés des stries spirales qui carac-
térisent l'autre espèce. Je ne la compare pas h N. pseudocylindrica,
dont l'angle spiral est encore beaucoup plus aigu.
Néotype. — PI. XIV, fig. 2-3. Trois individus dans le calcaire n° 4.
Nerinella cf. scalaris [d'Orb.].
(PI. XIV, fig. 9).
1849. Nerinea scalaris d'Orb. Prod. I, p, 298, n° 34.
1861. — — d'Orb. Pal. fr. II, p. 87, pi. CCLIII, fig. 1-4.
1885. — — Gossm.Coutrib. et. Bath.,p.207,pl.I,iig. 29-30,
1898. Nerinella scalaris Cossm. Gastr. jurass. Nérinées, p, 100,
pi. VIII, fig. 17-19.
Observations. — L'individu de Saint-Gaultier, que je rapporte à
cette espèce, est malheureusement très usé, de sorte qu'on soup-
çonne, plutôt qu'on ne les aperçoit bien distinctement, les orne-
ments de sa surface; les sutures ont été creusées à l'aide d'un burin,
de sorte qu'elles ne semblent pas situées sur une arête, comme cela
a généralement lieu chez les Nerinella, et qu'elles ont plutôt l'air
d'être comprises entre deux bourrelets, comme cela se produit chez
Nerinea s. s. Les tours, un peu déprimés au milieu, bombés vers les
sutures, devaient probablement être ornés d'un rang de pustules,
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 549
aux deux tiers de leur hauteur, et de quelques filets spiraux; enfin
le bombement, situé au-dessus de la bande suturale, parait avoir
été fascicule par des accroissements curvilignes et rétrocurrents.
Tous ces caractères s'écartent sensiblement de la description
originale de N. scalaris ; mais, dans l'état de conservation de l'échan-
tillon figuré, il serait peut-être téméraire de proposer une espèce
nouvelle, d'autant 'plus que la hauteur des tours et la forme de
l'ouverture ressemblent beaucoup à la fig. 18, que j'ai précédem-
ment donnée, de N. scalaris.
Plésiotype. — PI. XIV, fig. 9. Un échantillon douteux, dans le Cal-
caire n° 4 ; autre fragment de l'extrémité de la spire.
Bactroptyxis axonensis [d'Orb.].
(PL XV, fig. 9-11)
1849. Nerinea Voltzi d'Arch. Mém. Soc. Géol. Fr., V, p. 381, pi. XXX,
fig. 5.
1851 . Nerinea axonensis d'Orb. Pal. Fr. terr. jur., II, p. 92, pi. CCLIII,
lig. 12-15.
1885. — — Cossm.Contrib.ét.Bath.p.l98,pl.IX,fig.l-2.
1898. Bactroptyxis axonensis Cossm. Gastr. jur. Nérinées, p. 143,
pi. XI, fig. 1-2.
Rapports et différences. — Il y a identité complète entre les
individus de Saint-Gaultier et ceux de l'Aisne, tant en ce qui con-
cerne le galbe de la coquille, que pour les proportions de chaque
tour de spire; la surface étant, en général, très usée, les arêtes
suturales ont complètement disparu, de sorte que la spire parait
tout-à-fait subulée. L'un des fragments, que j'ai sous les yeux,
montre bien trois plis columellaires et un pli pariétal ; mais, sur
aucun individu, je n'ai pu constater les trois plis à l'intérieur du
labre. Pour les caractères distinctifs, entre cette espèce et ses con-
génères, je prie le lecteur de se reporter à mon récent Mémoire sur
les Nérinées.
Plésiotype. — PI. XV, fig. 9-11. Abondant dans le Calcaire n°4.
Bactroptyxis cf. subbruntrutana fd'Orb.].
(PI. XVII, fig. 20).
1843. Nerinea bruntrutana d'Arch. Mém. Soc. géol. Fr., V, p. 82,
pl.XXV.fig.il.
550 M. GOSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
1849. Nerinea subbruntrutana d'Orb. Prod., I, p. 298, n° 42.
1851. — — d'Orb. Pal. fr., terr. jur., II, p. 94,
pi. CCLIV, fig. 1-2.
1885. — — Cossm. Contrib. et. Bath., p. 199.
1898. — — Cossm. Gastr. jur. Nérinées, p. 144.
Taille petite; forme conique, cérithiolde; spire assez courte,
douze à quinze tours, dont la hauteur égale la moitié de la
largeur, à peine convexes, en avant, déprimés vers la suture infé-
rieure, qui est à peu près invisible, tant elle est fine, ornés de cinq
ou six filets spiraux, presque égaux, assez régulièrement écartés,
non granuleux.
Dernier tour à peu près égal au quart de la longueur totale,
presque plan, anguleux à la périphérie de la base, qui est déclive,
et qui porte quelques filets concentriques, très obsolètes, plus
visibles vers la périphérie qu'au centre; ouverture petite, quadran-
gulaire, avec deux plis peu saillants à l'intérieur du labre, deux
lamelles très proéminentes à la columelle, et un pli pariétal bien
distinct, quoique moins élevé.
Dimensions. — Longueur : 20mm ; diamètre : 6mm.
Rapports et différences. — Le petit échantillon de Saiut-Gaultier,
que je rapporte à cette espèce douteuse, n'est pas tout-à-fait sem-
blable à la figure donnée par d'Archiac, laquelle représente une
coquille absolument subulée, tandis que notre individu a les tours
un peu déprimés aux sutures ; mais il se peut que cette différence
soit due à l'état d'usure du type figuré par d'Archiac ; on sait, en
effet, que je n'ai retrouvé, dans l'Aisne, aucun échantillon d'une
conservation suffisante pour affirmer l'existence de cette espèce.
D'autre part, comme la plication de l'ouverture ne permet pas de
classer notre coquille dans le genre Nerinella s. s., quoiqu'elle
ressemble extérieurement à certaines espèces de petite taille, du
Bathonien, je préfère interpréter l'espèce de d'Archiac, plutôt que
d'en proposer une nouvelle.
Néotype. — PI. XVII, fig. 20. Unique, dans le Calcaire n° 4.
PURPUROIDEA MULTIFILOSA HOV. Sp.
(PI. XVI, fig. 10).
Taille très grande ; forme ventrue, ovoïdo-conique ; spire courte,
à galbe parfaitement conique sous un angle spiral de 85° environ ;
sept tours étroits, presque plans, séparés par des sutures peu pro-
1899 DU GISEMENT BATHONIBN DE SAINT-GAULTIER 551
fondes, lisses, commençant, à partir du troisième tour amat le
dernier, à se couronner de neuf ou dix tubercules, juxtaposés à la
suture antérieure, bientôt arrondis et très Aaflbtnts, sans être épi-
neux, dans les intervalles desquels apparaissent ensuite deux ou
trois filets spiraux qui na remontent pas sur la pointe des tubercules.
Dernier tour égal aux trois quarts de la hauteur totale, avec un
diamètre égal à cette hauteur, portant, au dessus d'une rampe
déclive et lisse, une couronne de neuf à dix tubercules subépineux,
entre lesquels il y a quatre cordons spiraux, puis une large rainure
périphérique qui isole la base ; celle-ci est ovale, arrondie, ornée
d'une vingtaine de filets ou cordonnets, plus larges que leurs inters-
tices, cessant aux abords de la région ombilicale, qui est incomplè-
tement close par une large callosité columellaire.
Ouverture semilunaire à labre sinueux, à columelle concave, à
base échancrée.
Dimensions. — Hauteur: 100mm; grand diamètre: 75mm; petit
diamètre : 65mm.
Rapports et différences. — J'ai séparé cette espèce de P. Morrisea
Buv., à cause de sa spire un peu plus allongée, et de ses filets beau-
coup plus nombreux sur la base ; elle a aussi un tubercule de plus
sur chaque tour. D'autre part, elle diffère de P. minax Piette, par
sa forme plus courte et plus ventrue, par ses filets beaucoup plus
serrés sur la base, non treillissés par les accroissements, par sa
rampe déclive et non excavée, au-dessous de la couronne de tuber-
cules, de sorte qu'elle n'est pas étagée comme l'autre espèce; enfin
son angle spiral est beaucoup plus ouvert, quoiqu'il le soit un peu
moins que chez P. Morrisea. Enfin l'espèce oxfordienne de Vieil
Saint Rémy et de Neuvizi (P. Moreana Buv.) se distingue de la
nôtre par sa forme plus trapue et par son ornementation plus
grossière.
Type. — PI. XVI, fig. 10. Echantillon unique du Callovien des
calcaires de l'Ipaudière, près Le Blanc (Indre).
Purpuroidea bicincta [Piette].
(PI. XIV, fig. 4).
1857 . Purpura bicincta Piette. B. S. G. F., t. XIV, p. 597, pi. XV, fig. 5.
1885. Purpuroidea bicincta Cossm. Contrib. et. Bath., p. 59, n° 44.
Taille assez petite; forme ovoldo-conique ; spire assez allongée, à
galbe à peu près conique, sous un angle spiral de 60° environ; tours
552 M. GOSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
convexes, un peu excavés vers la suture inférieure, ayant une hauteur
à peine égale au tiers de leur largeur, ornés d'une douzaine de gros
tubercules confluents, peu saillants, traversés par de fines stries
spirales, qui persistent sur la rampe inférieure.
Dernier tour à peu près égal aux deux tiers de la hauteur totale,
couronné d'une première rangée de tubercules arrondis et peu
écartés, au-dessus de la rampe excavée et striée qui surmonte la
suture, puis d'une seconde rangée de tubercules plus petits, plus
nombreux, plus rapprochés, allongés dans le sens axial ; entre les
deux rangées, le profil du dernier tour est presque rectiligne, et sa
surface est à peu près cylindrique, ornée de sillons spiraux peu
profonds : base déclive et peu convexe, faiblement sillonnée.
Ouverture courte, ovale, à labre un peu sinueux, presque vertical,
à columelle très excavée, recouverte par un bord étroit et calleux,
à échancrure basale peu profonde.
Dimensions. — Longueur : 60mm ; grand diamètre : 40mm ; petit
diamètre : 54mm.
Rapports et différences. — Cette espèce se distingue de P. minax,
de P. Morrisea et de la précédente, par sa double rangée de tuber-
cules sur le dernier tour; ces tubercules sont, d'ailleurs, plus
nombreux et moins saillants; en outre, la forme du dernier tour est
polygonale. Les sillons spiraux persistent sur la rampe située au-
dessus de la suture. On ne peut pas la confondre avec P. nodulata
[Young], qui porte un rang de gros tubercules écartés, auxquels
succèdent en avant des côtes axiales, et dont la surface n'est pas
sillonnée; quant à P. glabra, Morr. et Lyc, c'est une espèce lisse,
bien plus étagée, qui n'a qu'un seul rang de gros tubercules et qui
est lisse.
Plésiotype. — PI. XIV, fig. 4. Calcaire n° 4; unique.
COLUMBELLARIA BATHONICA nOV. Sp.
(PI. XV, fig. 22, et PI. XVII, fig. 13).
Taille au-dessous de la moyenne ; forme ovoïdo-conique ; spire
assez courte, un peu étagée ; cinq tours convexes, anguleux au
milieu, séparés par des sutures linéaires et enfoncées, ornés d'une
douzaine de côtes épaisses et obtuses, croisées par cinq cordons
spiraux, également répartis. Dernier tour égal aux deux tiers de
la hauteur totale, muni d'une forte varice opposée à l'ouverture,
entièrement dénué de côtes axiales, simplement orné, ainsi que la
base, d'environ dix gros cordons spiraux, très saillants, un peu plus
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 5S3
étroits que leurs intervalles, se prolongeant obliquement sûr te cou,
par des filets moins épais et plus rapprochés.
Ouverture ovale dans son ensemble, très rétrécie en dedans par
l'épaississement du péristome, munie en arrière d'une gouttière
échancrée, et en avant, d'un canal court et tronqué, sans échan-
crure dorsale à son extrémité; labre presque vertical, épaissi à
l'extérieur par une forte varice, sur laquelle les cordons forment
des nodosités terminales, calleux à l'intérieur, avec un renflement
sinueux du côté postérieur, et quelques rides marginales; columelle
bisinueuse, se rapprochant du labre à la naissance du canal anté-
rieur qu'elle rétrécit beaucoup; bord columellaire assez large,
formant une épaisse callosité, lisse, qui rejoint celle du labre autour
de la gouttière postérieure, et qui couvre hermétiquement la région
ombilicale.
Dimensions. — Hauteur: 21mm; grand diamètre: 12mm; petit
diamètre : 10mm.
Observations. — Le Genre Columbellaria Rolle (1861), classé par
M. Zittel auprès des Columbella, a été placé par Fischer, avec plus
de justesse à mon avis, dans une Famille spéciale ColumbellinidjE,
avec Columbellina, Zittelia et Petersia, entre les lYitonidœ et les
Cassididœ: M. Zittel avait été probablement guidé par l'analogie qui
existe, au premier abord, entre l'ouverture de C. ornata et celle de
l'espèce vivante Columbella mercatoria, dont la surface n'est pas
lisse; mais, quand on examine l'épaisse callosité du péristome de
ces coquilles jurassiques, et surtout quand on constate que le canal,
tronqué très brièvement, n'est pas échancré à son extrémité dorsale,
on reconnaît que cette hypothèse n'est pas admissible. Ces formes
singulières, qui ne se rattachent évidemment à aucun Genre de
l'Époque actuelle, méritaient certainement une nouvelle Famille ;
quant au classement de celle-ci, la place que lui a attribuée Fischer
me parait confirmée par l'existence de la varice que j'ai constatée, du
côté opposé à l'ouverture, sur l'échantillon que je viens de décrire.
Ce Genre n'a encore été signalé que dans les étages supérieurs du
Système jurassique; sa présence dans des couches franchement
bathoniennes en étend beaucoup la longévité, et c'est un fait inté-
ressant à signaler.
Rapports et différences. — C. bathonica ressemble beaucoup à
C. Aloysi Guir. et Ogér., du Kimméridgien de Yalfin; il en diffère
toutefois par sa spire moins allongée, par ses tours dont l'angle est
plus médian, et dont les côtes sont plus épaisses, enfin par son
dernier tour moins ventru, dépourvu de l'ornementation axiale qui
554 M. G08SMANN. — NOTE SUR LES OA8TROPODES 4 Dec.
caractérise l'autre espèce; en outre, le bord columellaire parait
entièrement lisse chez l'espèce bathonienne, tandis qu'il n'en est
pas de même chez C. Aloysi, ni chez C. corallina Quenst., du Coral-
lien de Nattheim.
Type. — PL XV, flg. 22, et pi. XVII, fig. 13. Calcaire n°4 ; échan-
tillon unique.
Cbrithium Dorvali nov. sp.
(PI. XV, flg. 4-5).
Tailla moyenne, larme étroite, ■iihninr; tours plans, dont la hau-
teur égale la moitié de la largeur, séparés par des sutures linéaires;
ornementation composée de sept cordonnets spiraux, peu saillants,
les deux antérieurs un peu plus écartés, les cinq postérieurs plus
serrés, et crénelés par des costules très obsolètes, larges et à peine
saillantes, qui ne se prolongent pas jusque sur les deux cordons
antérieurs.
Dernier tour relativement court, n'atteignant probablement pas
les deux septièmes de la hauteur totale, subanguleux à la périphérie
de la base qui est convexe, sur laquelle les cordons se resserrent
jusque sur le cou du canal, tandis que les costules s'effacent en deçà
de l'angle périphérique.
Ouverture circulaire, un peu dilatée, terminée en avant par un
canal très court, à peine rejeté au dehors; labre épais, subvariqueux
ou bossue, paraissant lisse à l'intérieur, à profil presque vertical ;
bord columellaire excavé, formant une lamelle, peu calleux, her-
métiquement appliquée sur la base.
Dimensions. — Longueur probable : 40mm ; diamètre à la base :
15mm ; diamètre transversal : 11**.
Rapports et différences. — Bien que les coquilles, désignées comme
Cerithium, soient nombreuses dans le terrain Bathonien, je n'en
trouve aucune qui puisse se confondre avec cette espèce, soit à
cause des détails de l'ornementation, soit à cause de l'ouverture,
qui ressemble à celle de certains Potamides tertiaires. Parmi celles
qui s'en rapprochent le plus, je citerai : C. semiobliteratum Cossm.,
qui a le même angle spiral, et des côtes arrêtées à la moitié de la
hauteur des tours, mais dont l'ornementation spirale est beaucoup
plus obsolète, et dont le dernier tour n'est pas anguleux à la péri-
phérie ; C. portuliferum Piette, dont les côtes s'étendent d'une suture
à l'autre, et dont les stries spirales sont plus fines ; C. multiforme
Piette, qui est beaucoup plus trapu et dont les côtes sont plus
grosses, plus continues.
Type. — PI. XV, ûg. 4-5. Unique dans le Calcaire n° 4.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 555
BrachytRema Buvignieri Morris et Lyeett.
(PI. XV, flg. 1-3).
1850. B. Buvignieri Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., p. 24, pi. V, fig. 7.
?*856. - Piette.B.S.G,F.,t.XUI,p.593,pI.XV,fig.H-12.
1885. — Cossm. Contr. et. Bath., p. 78, n° 89.
1892. — Hudl. et Wilson. Catal. brit jar. Gastr., p. 45.
Taille assez grande ; forme courte, buccinoïde, ventrue ; spire
régulièrement conique, à peine étagée, composée de sept tours
environ, dont la hauteur égale à peine le tiers de la largeur moyen-
ne ; sutures peu profondes, non bordées ; ornementation formée,
sur les premiers tours, de quatre ou cinq filets spiraux, et de
costules obsolètes, droites, assez serrées, s'arrétant un peu en deçà
de la suture inférieure; presque à chaque tour, il existe une varice
irrégulièrement située, assez épaisse et saillante, s'étendant d'une
suture à l'autre.
Dernier tour égal aux trois cinquièmes de la hauteur totale,
subanguleux à la périphérie, et orné de cordonnets un peu plus
grossiers que ceux de la partie inférieure ou du reste de la spire,
avec des filets intercalaires plus fins; les costules deviennent plus
noduleuses sur l'angle périphérique, elles sont au nombre d'une
quinzaine environ, et cessent subitement sans s'étendre sur la base,
qui ne porte que des cordonnets serrés et réguliers, divisés en trois
zones par deux angles très obsolètes.
Ouverture (fig. 1) en pavillon très dilaté, petite et arrondie au
fond de cette large embouchure, munie d'une double gouttière à la
partie inférieure, très rétrécie sur le canal anté-
rieur, qui est court, tronqué et bien échancré ;
labre ample, un peu réfléchi à l'extérieur, non
bordé, à contour arrondi, lacinié à l'intérieur,
échancré aux deux points où aboutissent les
gouttières ; columelle excavée, tordue en avant
par un pli, à la naissance du canal; bord colu-
mellaire calleux, formant une large lame apla-
tie, détachée du cou du canal, se terminant en Fi_ i
pointe à son extrémité inférieure.
Dimensions. — Hauteur: 15mra: diamètre, y compris le pavillon
du labre: 22mm; diamètre transversal : 16mm.
Observations. — J'ai refait complètement la diagnose de cette
espèce déjà connue, parce qu'elle est le type du Genre Brachytrema
S56 M. C0SSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Morris et Lycett, et que ces auteurs n'ont fait figurer qu'un seul
échantillon incomplet et vu de dos; les excellents individus, re-
cueillis dans le Bathonien de l'Indre, m'ont permis de caractériser,
d'une manière complète, l'ouverture de Brachytrema, et de constater
qu'elle présente une réelle analogie avec celle de Petersia; toutefois
le péristome de ce dernier forme une callosité continue qui n'existe
pas chez Brachytrema, dont le canal est mieux formé, quoique briè-
vement tronqué ; en outre, l'état de conservation de mes néotypes
me permet de signaler l'existence caractéristique des deux gout-
tières labiales, dont l'une surtout (l'antérieure) est assez profondé-
ment échancrée, probablement pour l'évacuation des matières
fécales. En résumé, je persiste à penser que le Genre Brachytrema
est bien à sa place dans la Famille Cerithidœ où Fischer le plaçait
avec doute, et où je l'ai classé ; mais il est désormais impossible d'y
placer Cerith. muricoides, comme je l'ai fait dans mon Catalogue de
l'Eocène des environs de Paris, et ce dernier fossile, ainsi que ses
congénères tertiaires, doit appartenir à un Genre nouveau : Benoistia,
nobis (1899), beaucoup plus voisin de Cerithium.
Rapports et différences. — Au point de vue spécifique, mes échan-
tillons sont identiques, comme galbe et comme ornementation, à la
figure de la Planehe V de l'ouvrage de Morris et Lycett ; tandis que
la figure que M. Piette a donnée, sous le nom de B. Buvignieri,
représente un individu armé de nodules arrondis, au lieu de côtes,
et dont les tours sont convexes comme ceux de B. brevis Morr. et Lyc. ;
peut-être ces différences sont-elles uniquement dues à l'usure de
l'échantillon, ou à l'imperfection du dessin. En tous cas, B. brevis se
distingue de B. Buvignieri par sa spire plus courte, par ses tours
plus arrondis, moins subulés, subimbriqués en avant, par ses côtes
moins écartées, et par ses cordonnets moins nombreux.
Néotypes. — PI. XV, fig. 1-3. Assez commun dans le Calcaire n° 4,
auquel il donne son nom.
PURPUMNIDAS, Zittel.
OCHETOCHILUS (1), nov. gen. (1899).
Taille peu grande; forme ventrue, à spire conique, pointue;
protoconque lisse, à nucléus déprimé; tours convexes, à sutures
profondes, ornés de cordonnets spiraux, faiblement variqueux par
places, surtout le dernier, qui est grand, arrondi et imperforé à la
(1) Oxctoç, .gouttière ; xe(^°c* tèvre.
1899 DU GI8EMENT BATHONIEN DE 9A1NT-GAULTIER 557
base. Ouverture ovale, un peu dilatée, terminée en avant par une
gouttière anguleuse, qui en modifie le contour supérieur, et à la-
quelle vient aboutir un gros bourrelet basai, taillé en biseau; labre
largement épaissi à l'extérieur, obliquement incliné à gauche de
l'axe, du côté antérieur, antécurrent à la suture, lisse à l'intérieur;
col u m elle épaisse, rectiligne et oblique, recouverte par un bord
assez large et calleux, qui s'étend jusque contre le bourrelet basai,
et qui s'infléchit en avant, pour se terminer en pointe contre le bec
antérieur. Type: 0. snbvaricosus, sp. nov. Bath.
Observations. — Quoique ce nouveau Genre ait quelques affinités
avec Purpurina, il possède des caractères bien distincts, dont l'im-
portance justifie la création d'une coupe générique, et qui confir-
ment, pour moi, la nécessité de proposer également une nouvelle
Famille, comprenant les Genres Purpurina, Eucycloidea et Ocheto-
chilus. Jusqu'à présent, Purpurina occupait, dans la classification,
une position très incertaine : Fischer l'a placé près des Littorina,
guidé probablement par la faible sinuosité que forme le contour
de quelques Purpurines, à ouverture très arrondie ; d'autre part,
M. Hudleston, dans son récent travail sur les Gastropodes de l'Oolite
inférieure, a décrit les Purpurina bajociens d'Angleterre, avant les
Alaria, c'est-à-dire tout à fait dans les Siphonostomes. Je crois que
la vérité est entre ces deux extrêmes, et que la Famille Purpurinidœ
doit trouver sa place à proximité des Trichotropidœ, c'est-à-dire
précisément entre les Siphonostomes et les Holostomes.
Rapports et différences. — J'ai constaté, sur de bons exemplaires
de Purpurina eoronata Héb. et Desl., provenant de Montreuil-Bellay,
que la protoconque était iden-
tique à celle d'Ochetochilus, à y \
nucleus déprimé, avec deux ( ^ A
tours un peu en gradins ; en ^Z/^ )
outre la forme du bec antérieur ^* '
est à peu près la même, et si l'on
regarde la coquille en plan (voir
fig. ci-contre), on observe que le Fig 2.
bec ne produit, sur le contour,
qu'une légère sinuosité, plutôt qu'une échancrure; enfin, le bord
columellaire a presque la même disposition dans les deux Genres,
seulement la lèvre qu'il forme recouvre entièrement la région ombi-
licale chez Ochetochilus, tandis que chez Purpurina, il existe généra-
lement une fente ou un entonnoir, entre le bord columellaire et le
bourrelet basai, qui correspond à la sinuosité du bec ; d'ailleurs, ce
558 M. C088MANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
bourrelet est beaucoup plus saillant et taillé eu biseau chez Ocheto-
chilus. Les différences capitales résident surtout dans le galbe de la
spire, dans le système d'ornementation, et dans la forme du labre :
tandis que, chez Purpurina, les tours sont étages par une rampe
suturale, ornés de côtes axiales (qui disparaissent, il est vrai, chez
Eucycloidea), Ochetochilus a les tours arrondis, simplement funi-
culés ; le labre, qui est mince, et qui est sinueux sur la rampe
postérieure, chez Purpurina, s'épaissit au contraire chez Ochetochi-
lus, au point qu'il reste des varices sur le dernier tour, et il est
oblique, antécurrent vers la suture. Quant à Eueycbidea, c'est un
Sous-Genre de Purpurina, que M. Hudleston a proposé pour des
formes plus élancées, ayant l'aspect des Eucyclus, et un bec antérieur
plus prononcé que les Purpurines trapues; mais il présente les
mêmes caractères différentiels que Purpurina, par rapport à Oche-
tochilus.
Ochetochilus subvaricosus nov. sp.
(PI. XV, flg. 15-16).
11 y a, pour la description de cette espèce, peu de chose à ajouter
à la diagnose ci-dessus du Genre Ochetochilus : six tours convexes,
dont la hauteur égale les deux cinquièmes de la largeur, avec six
cordonnets spiraux, finement crépus par les accroissements. Der-
nier tour égal aux deux tiers de la hauteur totale, portant, ainsi
que la base, une quinzaine de cordonnets également crépus, surtout
aux abords de la varice labiale. Ouverture presque égale à la moitié
de la hauteur totale.
Dimensions. — Longueur: 19mm; grand diamètre: 14mm ; petit
diamètre: 41mm.
Rapports et différences. — Je ne connais aucune coquille batho-
nienne, même incomplète, dont la description se rapproche de celle-
ci; peut-être Purpurina buccinoides Piette, du Bathonien des Arden-
nes, appartient il au même Genre ; mais l'auteur indique une surface
lisse, et en tous cas, la forme de la coquille parait plus allongée, de
sorte que j'ai proposé, en 1885, de le placer dans le Genre Cerithiella;
mais en 1895, j'ai renoncé à cette assimilation hasardeuse ; je crois,
en résumé, que ce doit être un Ochetochilus distinct de celui de
l'Indre.
Type. — PL XV, fig. 15-16. Neuf individus, dans le Calcaire n° 4.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 559
PSEUDOMELANIA Pictet et Camp.
Subgenus : Mesospirà Cossmann.
Type : Phasianella Leymeriei d'Arch. (Annuaire géol., 1892, p. 719).
Taille moyenne; forme ovo-conoldale ; spire courte, lisse en
apparence, mais ornée de très fines stries spirales, qui ne persis-
tent qu'à la partie inférieure du dernier tour. Ouverture semilu-
naire, anguleuse en arrière, arron-
die en avant, avec une sinuosité
versante et assez profonde, à la
jonction du contour supérieur et du
bord columellaire (voir fig. ci con-
tre); labre mince, proéminent en
avant, un peu sinueux et excavé
vers le tiers postérieur, aboutissant Fi 3
presque perpendiculairement à la
suture ; columelle obliquement rectiligne, formant une large sur-
face cylindracée, recouverte par une mince callosité à peine
distincte de la base.
Rapports et différences. — On sait que le Genre Pseudomelania a été
divisé, par Fischer et d'après Gemmallero, en quatre Sections:
Pseudomelania s. s., Rhabdoconcha, Microschiza et Oonia; il faut y
ajouter Cloughtonio Hudleston (1892), et le nouveau Sous-Genre,
que j'ai proposé, en 1892, dans l'Annuaire géologique, pour une
espèce bien connue, qui ne pouvait, à mon avis, être placée dans
aucune des subdivisions précédemment créées.
Laissant de côté Pseudomelania et Rhabdoconcha, qui sont des
formes allongées, Microschiza qui a des côtes axiales, et Cloughtonia
qui a une carène ou un angle périphérique, à la base, je ne puis
guère comparer Mesospirà qu'à Oonia, qui a presque le môme galbe,
avec une spire courte et un dernier tour ventru. Mais, dans sa
diagnose d1 Oonia, Gemmellaro (1) dit expressément « Coquille ovale,
lisse et pourvue de stries transversales d'accroissement sinueux ;
bouche ovale, arrondie en avant, rétrécie en arrière; columelle
légèrement courbée et incrustée; labre incliné et mince ». Or, non
seulement cette diagnose ne fait nulle mention des stries spirales
que portent les tours de Mesospirà, mais encore elle est muette sur
(1) Sui fossill del calcare cristallin© délie Montagne del caaale e di Bellampo
nella Provincia di Palermo (Giorn. Se, nat. ed Econ.t vol. XIII, 1878, p. 262).
560 M. GO88MANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
la siuuosité du contour supérieur de l'ouverture ; enfin, — et c'est
le caractère différentiel le plus important, — la columelle d'Oonia
est indiquée comme excavée, tandis qu'elle est oblique et tout à
fait recti ligne chez Mesospïra. A ce point de vue même, ce dernier
s'écarte davantage de Pseudomelania que les autres Sections, et
mérite, par conséquent, de former un Sous-Genre distinct, tout en
se rattachant aux Pseudomelaniidœ par le contour versant de son
ouverture du côté antérieur, par son bord columellaire hermétique-
ment appliqué sur la base, et à peine limité du côté antérieur.
Mesospïra Letmeriei [d'Arch.].
(PI. XV, fig. 19-20).
1843. Phasianella Leymeriei d'Arch. Loc. cit., p. 380, pi. XXVIII,
fig. 12.
1849. — — d'Orb. Prod., I, p. 301, n° 84.
1850. — — d'Orb. Pal. fr. terr. jur., II, p. 320,
pi. CCXXIV, fig. 5-7.
1850. — — Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., I, p. 74,
pi. XI, fig. 31-32.
1892. — — Hudleston. Gastr. infer. Ool., p. 253,
pi. XXI, lig. 5.
Forme ovoïde : spire peu allongée, à galbe conoïdal, composée de
cinq ou six tours à peine convexes, croissant rapidement, séparés
par des sutures peu profondes, ornés de nombreuses stries spirales,
très serrées, et visibles surtout à la loupe. Dernier tour un peu ven-
tru, égal aux quatre cinquièmes de la longueur totale, orné, à la partie
inférieure seulement, de stries spirales, lisse en avant et sur la base
qui est peu convexe et très élevée; ouverture comme dans la
diagnose générique ci-dessus.
Dimension*. — Longueur: 25mm; diamètre: 14mm.
Observations. — Les échantillons de Saint-Gaultier sont d'une
taille plus grande que ceux de l'Aisne, décrits par d'Archiac, et
dont je possède plusieurs échantillons, provenant du gisement
d'Eparcy ; mais ils ont identiquement le même galbe et la même
ouverture. Quant aux stries, d'Archiac n'en a pas signalé l'existence,
parce que les individus d'Eparcy n'ont pas, en général, la surface
fraîchement préservée.
Il parait douteux que les échantillons d'Angleterre appartiennent
à cette espèce; d'ailleurs, M. Hudleston a séparé ceux du Bajocien
1899 DO GISEMENT BATHON1EN DE SAINT-GAULTIER 561
sous le nom de variété lindonensis. D'autre part, j'ai décrit, en 1885,
sous le nom Eligmoloxus bulimoides, une coquille bathonienne qui
a quelque ressemblance avec celle-ci, notamment par ses stries à
la partie inférieure du dernier tour; mais, outre qu'elle est plus
étroite et plus comprimée que M. Leymeriei, sa suture ascendante,
son labre obliquement incliné, sa columelle mince, ne permettent
même pas de rapprocher les deux Genres en question.
Pies 10 type. — PI. XV, ûg. 19-20. Quatre individus dans le Cal-
caire n° 4.
Amberlkya Aureliana sp. nov.
(PI. XIV, flg. 1).
Test épais; forme trapue, conique, trochoide; spire assez courte,
six à huit tours, convexes en avant, excavés en arrière, dont la
hauteur égale les deux cinquièmes de la largeur, séparés par des
sutures lioéaires, non bordées; neuf côtes axiales, épaisses, noueu-
ses sur la région convexe de chaque tour, atténuées ou disparaissant
sur la rampe inférieure, croisées par douze à quinze filets spiraux,
très serrés, plus ou moins égaux, dont deux, plus saillants, forment
des angles sur les côtes.
Dernier tour à peu près égal aux deux tiers de la hauteur totale,
bianguleux à la périphérie de la base, qui est obliquement déclive,
imperforée, et ornée de filets concentriques, nombreux et serrés ;
ouverture arrondie, oblique, dépourvue de cou; columelle excavée,
tronquée en avant, recouverte par un bord lisse, largement étalé,
mince et peu calleux,
Dimensions. — Hauteur : 52mm ; diamètre à la base : 40mm.
Rapports et différences. — Cette espèce est voisine de A. Piettei
Cossm. ; mais on l'en distingue au premier abord, par son ornemen-
tation spirale beaucoup plus fine, par ses côtes moins nombreuses,
par l'absence du bourrelet suturai et crénelé, qui caractérise l'espèce
de l'Aisne, enfin par la pente plus déclive de sa base. Quant à Amber-
leya nodosa (Buckm.), c'est une coquille beaucoup plus allongée que
notre espèce, sans ornementation spirale, avec des nodosités plus
nombreuses et plus serrées, à la partie antérieure de chaque tour
seulement. En définitive, cette espèce parait bien légitimement
nouvelle. En ce qui concerne son classement dans le Genre Amber-
leya, elle a bien exactement le galbe du type de ce Genre (A . nodosa),
et elle ne s'en écarte que par des différences spécifiques. On sait
que, dans le secoud volume de ses Notes paléontologiques (1889),
8 Mars 1900. — T. XXVII. Bull. Soc. GéoL Fr. — 36
562 M. GOSSM ANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Eug. Deslongchamps a maintenu la distinction à faire entre ce
Genre et Eucyclus, par suite de l'existence d'un ombilic sur la base»
et de traces de nacre qui classeraient ce Genre avec les Turbinidœ,
tandis qu'Amberleya resterait auprès de Littorina. Cette question
n'est pas encore définitivement tranchée.
Type. — PI. XIV, fig. 1. Un seul individu dans le Calcaire n° 4.
Eucyclus Camillus [d'Orb.].
(PI. XIV, fig. 5-6).
1850. Turbo Camillus d'Orb. Pal. fr., terr. jur., H, p. 349, pi.
CCCXXXIII, fig. 13 14.
Taille assez grande; forme turbinée, élancée; spire un peu
allongée, à galbe conique; cinq ou six tours très convexes, dont la
hauteur égale les trois cinquièmes de la largeur, séparés par des
sutures profondes, ornés de quatre carènes spirales, saillantes,
équidistantes, plus minces que leurs interstices, qui sont déçusses
par des plis d'accroissement très fins.
Dernier tour égal aux deux tiers de la hauteur totale, arrondi,
orné, ainsi que la base convexe, de douze carènes qui se resserrent
sur la région ombilicale, qui est entièrement close. Ouverture
subcirculaire, à peine sinueuse sur son contour supérieur; labre
mince, peu oblique, non sinueux, lisse à l'intérieur; columelle
épaisse, oblique, faiblement arquée, se raccordant, sans troncature,
avec le bord supérieur, vis-à-vis la sinuosité de ce dernier ; bord
columellaire large, calleux, aplati, séparé par une petite rainure du
contour du péristome.
Dimensions. — Hauteur : 45mm ; grand diamètre : 28mm ; petit
diamètre: 23mm.
Observations. — Bien que l'échantillon figuré ait subi une défor-
mation accidentelle qui comprime l'ouverture, je n'ai pas hésité
à le choisir comme néotype de cette espèce, parce que j'ai réussi à
en dégager l'ouverture, dans sa partie essentielle, aux abords de la
columelle, de manière à bien préciser les caractères du Genre
Eucyclus dans lequel je le classe. En effet, dans la plupart des figures
que les auteurs ont données d'après des échantillons restaurés,
l'ouverture des Eucyclus est,avec raison, indiquée comme circulaire;
mais, en outre, la columelle est représentée avec une courbure
arquée, parallèle au contour extérieur du bord columellaire ; or,
ainsi que je l'ai constaté sur l'individu ci-dessus décrit, la columelle
1889 DtJ G1SHIENT BATHONIEN DB 8AINt-GAULTVR 863
d'Eucyclus présente une surface presque plane et une inclinaison
oblique, presque recti ligne, qui est comme une exagération de
ce que Ton observe chez les Littorines vivantes; en dégageant
l'ouverture de cet échantillon, j'étais surpris, à chaque coup de
burin, de ne pas rencontrer encore le contour libre de cette colu-
m elle, tant cette surface est large ; elle atteint environ 5mm à la
partie inférieure, au point où elle se raccorde avec la base de
l'avant-dernier tour; en avant, au contraire, elle se rétrécit, s'atténue
et se perd dans la sinuosité du contour supérieur.
Toutefois, la plus grande partie des Amberleya (= Eucyclus)
figurés dans la Monographie des Gastropodes de l'Oolite inférieure,
par M. Hudleston, sont représentés avec une columelle droite,
calleuse et généralement aplatie; il n'y a guère d'exception que
pour A. ornaia, précisément une espèce très voisine de la nôtre,
représentée avec une columelle excavée, évidemment mal restaurée
(PI. XXI, flg. 17-18).
Dans ces conditions, on peut conclure : que cette disposition du
bord columellaire caractérise le Genre Eucyclus, contrairement aux
données de la diagnose originale, qui n'en fait pas mention ; qu'en
outre, le classement de ce Genre dans la Famille Littorinidœ, paraît
tout à fait rationnel.
Rapports et différences. — Notre coquille du Bathonien de l'Indre
ressemble extérieurement à la figure de Turbo Camillus, dans la
Paléontologie française; il est vrai que le texte attribue aux carènes
des tubercules, qui ne sont pas indiqués sur la figure, et qui n'exis-
tent pas non plus sur nos échantillons ; d'autre part, la description
ne mentionne que sept carènes sur le dernier tour, c'est à peu près
le nombre de celles qui existent sur nos individus, quand on ne
compte pas celles de la base ; enfin, il faut tenir compte de ce que
le type de d'Orbigny est une coquille cinq fois plus petite que celle
prise ci-dessus comme néotype. Néanmoins je ne puis séparer ces
deux formes, et je crois préférable de reprendre le nom publié par
d'Orbigny.
Dans ma précédente Etude sur l'étage Bathonien, j'ai réuni Turbo
Camillus avec Amberleya Castor, qui a beaucoup moins de carènes
spirales, et qui porte des épines sur ces carènes ; c'est une erreur
que je rectifie aujourd'hui, grâce à l'étude de ces nouveaux maté-
riaux.
On peut encore comparer E. Camillus à E. ornattis Sow., de
TOolite inférieure de l'Angleterre ; mais cette dernière espèce, qui
n'a que trois carènes sur chaq.ue tour, et huit ou neuf sur le dernier,
564 M. C0SSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
porte de ânes épines sur les carènes postérieures ; ces épines
deviennent tuberculeuses chez certaines variétés, décrites par M.
Hudleston. et elles envahissent môme les carènes supérieures ; je
n'en ai observé aucune trace sur aucun des quatre échantillons
de l'Indre.
Néotype. — PI. XIV, fig. 5-6. Calcaire n° 4, assez rare.
Littorina ? Cceneus [d'Orb.].
(PI. XV, fig. 47-48).
1850. Turbo Cœneus d'Orb. Pal. fr., terr. jur., H, p. 349, pi.
CCCXXXIII, fig. 10-12.
V1885. Littorina Cceneus Cossm. Contrib. et. Bath., p. 238, pi. X,
fig. 31-32.
Taille moyenne ; forme turbinée, un peu allongée ; spire à galbe
subconoïdal ; cinq tours légèrement convexes, surtout en avant,
séparés par des sutures assez profondes, ornés de huit cordonnets
spiraux, égaux et serrés, sur lesquels des accroissements obliques
découpent des granulations très fines.
Dernier tour un peu supérieur aux deux tiers de la hauteur totale,
arqué à la périphérie de la base, qui est imperforée et ornée comme
la spire ; ouverture arrondie, à labre oblique, un peu sinueux.
Dimensions. — Longueur: 30mm ; diamètre basai : 20mm.
Observations. — N'ayant pu dégager la columelle de ces échantil-
lons, je n'ose les classer dans le Genre Ooliticia, que j'ai proposé,
en 1893, dans l'Annuaire géologique (p. 767), et qui est caractérisé
par un renflement calleux, à la partie inférieure de la columelle.
Rapports et différences. — Les échantillons de l'Indre correspon-
dent assez exactement au galbe de la figure de la Paléontologie
française, sauf que cette dernière indique un contour plus conique
pour la spire; quant à l'ornementation, il parait évident qu'elle a
du être restaurée d'une manière peu fidèle, attendu que les cordon-
nets spiraux y sont ornés de cicatricules qui ne répondent à aucun
motif. Il est donc probable que ce sont les granulations, produites
par les stries d'accroissement sur nos échantillons du Calvados, que
le dessinateur aura essayé de reproduire avec plus de zèle que
d'habileté; d'Orbigny n'en fait nullement mention dans le texte de
la diagnose.
Quant au fragment provenant de Luc, que j'ai, en 1885, rapporté
à cette espèce, je ne suis pas bien sûr que l'assimilation en soit exacte ;
1899 DU GISEMENT BATHONIBN DE SAINT-GAULTIER 565
ce serait une question à réviser avec de meilleurs matériaux,
attendu qu'il parait avoir une ouverture ovale, et des rubans, au
lieu de cordonnets granuleux.
Néotype. — PI. XV, fig. 17-18. Calcaire n° 4, peu commun et géné-
ralement en mauvais état.
Viviparus Aurelianus Benoist.
(PI. XVII, fig. 2-7).
(B. S. G. F., 3«sér., t. XXVII, 1899, p. 141, fig. 4).
Observations. — La diagnose de cette espèce, qui peuple et carac-
térise une couche palustre de 0m50 à lm50 d'épaisseur, a été
donnée, d'une manière très complète, dans le Bulletin de la Société
(3* sér., t. XXVII, p. 141, fig. 4, 1899), de sorte que je me borne à
reproduire, cette fois, sur Tune des Planches accompagnant la
présente Note, à côté d'échantillons typiques, quelques-uns de ceux
qui ont été déformés par la compression qu'a subie cette couche;
il y a des individus qui ont une forme tout à fait solarioïde, à tel
point qu'on pourrait se demander si ce ne sont pas des Hélicéens ;
mais il suffit de regarder la pointe de la spire, qui est restée sail-
lante, pour se convaincre que cette hypothèse n'est pas admissible.
De même, on pourrait confondre certains petits échantillons avec
le Genre Bithinia; mais ce ne sont que de jeunes Viviparus. Par
conséquent, on n'a, jusqu'à présent, trouvé dans cette couche,
extrêmement riche en fossiles, que V. Aurelianus très abondant,
et l'espèce ci-après, beaucoup plus rare.
Rapports et différences. — Dans la première description de cette
espèce, j'ai indiqué que V. Aurelianus paraissait être le plus ancien
représentant du Genre, dans le Système jurassique : or, en feuille-
tant l'excellente Monographie de M. Hudleston, sur les Gastropodes
du Bajocien d'Angleterre, j'ai constaté que cet auteur a décrit
Paludina langtonensis (p. 488, pi. XLIV, fig. 1), provenant aussi
d'une Couche à Paludines, à Langton Bridge, près de Chipping
Norton; d'ailleurs, M. Hudleston ajoute que son espèce est associée
à des formes marines qui paraissent bathoniennes, de sorte qu'elle
est évidemment contemporaine de celle de Saint-Gaultier. Toutefois,
elle parait, d'après la figure, s'en distinguer par son ouverture plus
petite, plus circulaire, par son dernier tour moins développé, par
sa spire moins conique et moins pointue : on peut donc admettre
deux formes distinctes.
Gisement. — Très abondant, dans le Calcaire n° 4.
566 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Valvata (Cincinna) Benoisti Cossmann.
(PI. XVII, fig. 8-9).
(B. S. G. F., 3« sér., t. XXVII, 1899, p. 142, fig. 5).
Rapports et différences. — De même que pour l'espèce précédente,
il y a lieu de comparer celle-ci avec V. cornes Hudlest., de la Couche
à Paludines de Langton Bridge; l'espèce anglaise est beaucoup plus
aplatie que celle de Saint-Gaultier, son dernier tour est bien moins
élevé, plus large, et elle a l'ombilic plus ouvert. 11 est donc bien
certain que c'est une forme tout à fait distincte. M. Hudleston cite
aussi Valvata prsecursor Tate, du Lias d'Angleterre; mais je ne
connais pas cette espèce, qui se confond peut-être avec celles anté-
rieurement décrites par Moore.
Gisement. — Assez rare, dans le Calcaire n° 6.
Ampullina Aglaya [d'Orb.].
(PI. XVII, fig. 10).
1849. Natica Aglaya d'Orb. Prod., I, p. 397, n° 52.
1852. — — d'Orb. Pal. fr. terr. jur., II, p. 196, pi. CCXCI,
fig. 4-6.
1885. Ampullina Aglaya Cossm. Contrib. et. Bath., p. 133, pi. III,
fig. 22-23.
Observations. — Je ne puis rapporter qu'à cette espèce, interpré-
tée comme je l'ai fait en 1885, un échantillon de Saint-Gaultier,
dont la spire est très courte, à peine saillante, composée de trois
tours étroits et convexes, et d'un quatrième subsphérique; malheu-
reusement son ouverture n'est pas suffisamment dégagée, pour qu'on
puisse vérifier les caractères du bord columellaire, et l'existence
d'un limbe, comme dans le Genre Ampullina. D'ailleurs ce limbe est
tout à fait rudimentaire chez A. Aglaya, et il se confond avec le
contour du bord columellaire.
Plésiotype. — PI. XVII, fig. 10. Un seul individu, dans le Calcaire
n°4.
Ampullina Micheuni [d'Arch.].
(PI. XVI, fig. 2).
1843. Natica Michelini d'Arch. Mém. Soc. géol. Fr., t. V, p. 377,
pi. XXX, fig. 1.
1899 DU GtSSMBNT BATHONIBN DE SAINT-GAULTIER 567
1849. Natica Michelini d'Orb. Prod., I, p. 299, n° 53.
1862. — — d'Orb. Pal. fr. terr. jur., II, p. 192, pi.
CCLXXXIX, fig. 11-12.
1850. — — Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., p. 44, pi. VI,
fig. 3 (exclus fig. 2).
1855. — — Piette. B. S. G. F., 2* sér., t. XII, p. 1110.
1885. Ampullina Michelini Cossm. Contrib. et. Bath., p. 131, pi. II,
fig. 9-10, et pi. III, fig. 28.
1892. Natica cf. Michelini Hudl. Gastr. infer. Ool., p. 269, pi. XX, '
fig. 18.
1892. — — Hudl. et Wils. Cat. of. Brit. jur. Gastr.,
p. 82.
Observations. — Bien que l'unique échantillon de Saint-Gaultier
soit en assez mauvais état, et que je n'aie pu en dégager la columelle,
pour vérifier si elle porte répaisse callosité qui caractérise l'espèce
de d'Archiac, je trouve que la spire présente, dans les parties où
elle est recouverte de son test, exactement le galbe de cette dernière ;
le dernier tour est très grand, il occupe les neuf dixièmes de la
hauteur totale, quand on le mesure de face, jusqu'à la suture infé-
rieure; cependant l'ouverture n'a que les trois quarts de cette
hauteur, de même que le diamètre de la coquille.
Rapports et différences. — Comme Ta fait remarquer M. de Loriol,
dans son Etude sur le Bathonien du Jura suisse, la figure 3 de la
pi. VI, de la Monographie de Morris et Lycett, représente une espèce
beaucoup plus étroite, qu'il a séparée sous le nom minchinhampto-
nensis. Au contraire, A . Vcrneuili est beaucoup plus sphérique qu'A.
Michelini, et d'ailleurs sa columelle, munie d'un limbe, est bien
différente.
Plésiotype. — PI. XVI, fig. 2. Unique, dans le Calcaire n° 4.
Neritopsis Benoistt nov. sp.
(PI. XVII, fig. 18 et 23).
Taille moyenne; forme peu élevée, auriculaire; spire très courte,
à peine saillante; trois tours et demi, convexes, croissant rapide-
ment, séparés par des sutures très profondes, ornés de côtes
axiales, obliques, sublamelleuses, proéminentes, à peu près égales
entre elles, et de cordonnets spiraux, presque aussi saillants que les
côtes, produisant à leur intersection des granulations subépineuses;
dans les intervalles des cordonnets principaux, on distingue des
568 M. C0S8MANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 DéCJ
filets moitié plus fins, qui ne portent, au croisement des côtes,
que des nodosités beaucoup plus petites.
Dernier tour formant presque toute la coquille, orné comme la
spire, arrondi à la base, qui porte une dépression ombilicale pro-
fonde, mais imperforée ; ouverture auriforme, circulaire, à péris-
tome épais et continu ; labre très obliquement incliné, antécurrent
vers la suture ; columelle excavée entre deux légères saillies ; bord
columellaire large, calleux, aplati, extérieurement limité par une
carène.
Dimensions. — Hauteur: 13mm; grand diamètre: i7mm; petit
diamètre: 13mm.
Rapports et différences. — Par son ornementation, cette coquille
est très voisine de N. Deslongchampsi Cossm., du Calvados; mais
elle s'en distingue immédiatement par sa forme plus surbaissée,
par sa spire plus courte, par son ouverture plus renversée, par sa
dépression ombilicale plus ouverte, non limitée par une côte et
imperforée ; d'ailleurs, le treillis des côtes et des cordonnets forme
des mailles plus serrées chez .Y. Benouti. Si on la compare à N.
Guerrei Héb. et Desl., du Callovien de Montreuil-Bellay, qui paratt
avoir aussi existé dons le Corn-Brash du Boulonnais, on trouve
qu'elle n'a pas de méplat au-dessus de la suture, que son ornemen-
tation forme un treillis plus régulier, et que sa forme générale est
moins élevée.
Type. — PI. XVII, fig. 18 et 23. Cinq échantillons, dans le Cal-
caire n° 4.
PlLEOLUS iEQUICOSTATUS ÛOV. Sp.
(PI. XVII, fig. 15).
Taille petite ; forme conoïde, assez élevée ; sommet situé à peu
près vers le tiers du grand diamètre, du côté postérieur; surface
ornée d'environ 28 à 30 côtes rayonnantes, égales entre elles et
équidistantes ; stries d'accroissement indistinctes. Base ovale, ellip-
tique, à peine bombée au milieu, faiblement excavée vers les bords;
fente buccale en croissant très étroit, à péristome épais ; contour à
peine festonné par les côtes.
Dimensions. — Hauteur : 6mm ; grand diamètre : 9mm ; petit dia-
mètre : 7mm 1/2.
Rapports et différences. — Il ne m'a pas paru possible d'identifier
cette coquille avec P. plicatus Sow.; d'abord elle a presque deux
fois plus de côtes rayonnantes, et comme ces côtes sont égales entre
1899 DU GISEMENT BATHONIKN DB SAINT-GAULTIER 569
elles, dès le sommet, il n'est pas possible que ce soit un P, pUcatus,
dont les côtes intermédiaires aient exceptionnellement grossi ; en
outre, sa forme est plus élevée» plus conoïde, à galbe un peu plus
arrondi ; le contour de la face basale est moins profondément fes-
tonné, etc. . . Je n'ai vu qu'un échantillon de cette nouvelle espèce,
je ne puis donc affirmer que ces caractères différentiels soient cons-
tants ; cependant, comme ils sont au nombre de quatre ou cinq au
moins, il est peu probable que cette variabilité s'étendrait à tous.
Type. — PI. XVII, flg. 15. Unique, dans le Calcaire n° 4.
Neritodomds ponderosus [Piette].
(PI. XVI, flg. |).
1855. Nerita ponderosa Piette. B. S. G. F., 2« sér., t. XII, p. 1094.
1885. — — Cossm. Contrib. et. Bath., p. 151, pi. X,
fig. 2-3.
Observations. — Je ne puis rapporter qu'à cette espèce, d'ailleurs
répandue, un gros moule interne, qui en a tout à fait le galbe et les
dimensions : la spire est à peine saillante, le dernier tour très arrondi
et très grand, l'ouverture auriforme ; enfin le bord columellaire
parait avoir été recouvert par une épaisse callosité.
En citant cette espèce, dans mon Mémoire sur les Gastropodes
batboniens, où elle a été figurée pour la première fois, j'ai omis de
reprendre la dénomination sous-générique Neridomus, qui a été
proposée, en 1850, par Morris et Lycett, pour ces grosses espèces à
bord columellaire convexe, et que Fischer a amendée en Neritodomus,
d'une formation plus correcte.
Plésiotype. — PI. XVI, fig. 1. Unique, daus le calcaire n° 7, à
Fucoldes.
Phasianella (?) elegans, Morr. et Lyc.
(PI. XV, fig. 21).
1850. P. elegans Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., I, p. 74, pi. XI, fig. 27.
1885. — Cossm. Contrib. et. Bath., p. 251, pi. XVI, fig. 40-41.
1892 . — (Bourguetia) Hudl. Gastr. infer. Ool. , p. 252, p. XIX,
fig. H-12.
1892. — — Hudl.etWils.Cat.brit.jur.Gastr.,p.43.
Forme ovale ; spire médiocrement allongée; sept tours convexes,
lisses, dont la hauteur dépasse la moitié de la largeur, séparés par
570 M. COSSllANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
des sutures peu profondes. Dernier tour égal aux cinq septièmes
de la longueur totale, régulièrement ovale, peu ventru, un peu
atténué à la base, près du cou, sur lequel on distingue deux ou
trois sillons écartés, très obsolètes. Ouverture sérail un aire, ovale en
avant; labre mince, à peine oblique; columelle excavèe; bord
columellaire indistinct, à peine limité par un angle émoussé sur
le cou.
Dimensions. — Longueur : 35mm ; diamètre : 17mm 1/2.
Rapports et différences. — Les échantillons de Saint-Gaultier ont
exactement le galbe et les proportions indiquées dans le Mémoire
de Morris et Lycett; ils ressemblent également à ceux d'Eparcy,
que j'ai précédemment rapportés à la même espèce. 11 est d'ailleurs
assez difficile de séparer toutes ces formes lisses et très voisines les
unes des autres; ce n'est guère que par les proportions relatives de
la spire et du dernier tour, du diamètre et de la longueur, qui sont
dans un rapport à peu près constant pour la môme espèce, qu'on
arrive à les différencier entre elles. Ainsi, P. tumidula a la spire un
peu plus longue, et le dernier tour plus arrondi ; P. acutiuscula est
plus étroit ; P. Délia est bien plus élancé ; je ne le compare pas à
M. Leymeriei qui, par sa columelle droite et par sa sinuosité basale,
appartient à un tout autre Genre.
En ce qui concerne le classement générique de ces coquilles,
dénommées Phasianella par tous les auteurs, il est encore à fixer, les
matériaux n'étant pas dans un état de conservation qui permette
encore de caractériser un Genre nouveau et d'en préciser la place
exacte. M. Hudleston, qui a éprouvé le même embarras que moi, les
a classées provisoirement avec Bowguetia, auprès des Pseudomela-
nia ; je ne partage pas cette opinion, attendu que Bourguetia striata,
type et unique espèce de Genre, est une coquille à test très mince,
ornée de gros sillons spiraux, dont la lèvre columellaire est distinc-
tement bordée, et dont l'ouverture arrondie a un tout autre aspect.
Plésiotype. — PL XV, fig. 21. Deux individus, dans le Calcaire n° 4.
Phasianella ? Grossouvrki nov. sp.
(PI. XIV, fig. 12).
Taille moyenne ; forme ventrue, ampullinoïde ; spire peu allongée,
à galbe conique; huit tours convexes, dont la hauteur égale le
tiers de la largeur, séparés par des sutures linéaires et enfoncées,
déprimés par une rampe à peine sensible, au-dessus de la suture ;
surface entièrement lisse.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DR SAINT-GAULTIER 571
•
Dernier tour un peu inférieur aux quatre cinquièmes de la hau-
teur totale, quand on le mesure de face jusqu'à la suture inférieure,
subsphérique, avec une légère rampe déclive, non limitée en
arrière, régulièrement ovale-arrondi à la base, lisse comme la
spire. Ouverture relativement petite, semilunaire, également atté-
nuée à ses extrémités, à peine sinueuse sur son contour supérieur:
columelle lisse, un peu excavée; bord columellaire indistinct, sauf
en avant, où il est séparé du cou par un angle émoussé.
Dimensions. — Longueur : 25*™ ; diamètre : 16mm.
Rapports et différences. — Cette coquille appartient évidemment
au même Genre que la précédente, et provisoirement doit être dési-
gnée comme Phasianella ; car l'ouverture, un peu moins mutilée, a
bien les mêmes caractères, courbure identique de la columelle,
contour antérieur en forme de cuiller, bord columellaire mince et
indistinct. Au point de vue spécifique, elle s'en distingue aisément
par sa spire plus longue et plus conique, par ses tours plus étroits,
par son dernier tour beaucoup pins renûé et moins ovale ; sa base
ne porte aucune trace de stries spirales, mais il se peut que ce soit
par suite de l'usure du test. Si on la compare à P. tumidula Morr.
et Lyc, on trouve qu'elle a une forme plus courte et des tours plus
étroits que l'échantillon figuré du côté du dos dans le Mémoire de
ces auteurs ; d'ailleurs, l'échantillon qu'ils ont représenté de face,
possède une columelle qui, si elle est exactement dessinée, appar-
tiendrait plutôt à un Strombidœ. Notre espèce ressemble davantage à
la figure 32 (PL XI) de P. Leymeriei ; maïs on a vu ci-dessus que le
néotype authentique de cette dernière espèce est d'un Genre, et
même d'une Famille, tout à fait différents, sans aucun rapport avec
P. Grossouvrei; enfin P. naticiformis Piette, a une taille beaucoup
plus petite, des tours presque plans, et une columelle plus excavée,
recouverte par un bord mieux limité.
Type. — PL XIV, fig. 12. Un seul individu, dans le Calcaire n° 4,
Phasianella ? acutiuscula Morr. et Lyc.
(PI. XVII, fig. 49).
1850. P. acutiuscula Morr. et Lyc. Moll. gr. OoL, p. 75, pi. IV, fig. 2
(exclus, pi. XI, fig. 28).
1885. — Cossm. Contrib. et. Bath., p. 253, pi. IX, fig. 18
(exclus, pi. XVII).
4886. — Greppin. Environs de Bâle, p. 64, pi. Il, fig. 19.
1892. Bourguetia conica Hudl. et Wils. Cat. brit. jur. Gastr., p. 43.
572 M. 0068MANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec
TaiHe assez petite ; forme ovoïdo-conique, assez étroite ; spire un
peu longue, à galbe régulièrement conique, subulée ; tours presque
plans, lisses, dont la hauteur atteint la moitié de la largeur, séparés
par des sutures linéaires, absolument dépourvus de rampe au-
dessus de la suture. Dernier tour égal aux trois cinquièmes de la
longueur totale, peu ventru, régulièrement ovale à la base, qui est
imperforée, non atténuée en avant; ouverture petite, semilunaire,
anguleuse en arrière, rétrécie en forme de cuiller sur son contour
supérieur, qui ne parait pas sinueux ; columelle excavée, recouverte
par un bord mince et indistinct.
Dimensions. — Longueur probable: 20mm; diamètre à la base: 10mm.
Rapports et différences. — Si l'on superpose l'individu que nous
venons de décrire, à la figure 2 de la planche IX, dans l'ouvrage de
Morris et Lycett, on trouve qu'il y a complète identité ; il n'en est
pas tout à fait de même de la figure 28 de la planche XI, qui repré-
sente une coquille à tours un peu plus convexes et à spire un peu
moins subulée, ressemblant davantage à P. conica (PI. XI, fig. 30).
Aussi ne suis je pas surpris que Lycett, puis Hudleston et Wilson,
aient réuni les deux espèces ; toutefois, je crois qu'il y a lieu d'ex-
cepter de cette réunion l'échantillon de la planche XI, qui mérite
de former une espèce distincte de celle de la planche IV, pour
laquelle on conserverait, ainsi que je l'ai fait ci-dessus, la déno-
mination acutiuscula. La même distinction est à faire en ce qui
concerne les échantillons figurés dans mon Mémoire de 1885, sur
les Gastropodes bathoniens ; seul, le plésiotype de la planche IX
(fig. 18) peut être attribué à P. acutiuscula.
Si on compare cette espèce aux autres coquilles, improprement
et provisoirement désignées comme Phasianella, on trouve qu'elle
est moins conique et moins pointue que P. parvula ; qu'elle n'a pas
la spire aussi longue, ni les tours à beaucoup près aussi convexes
que P. elegans; qu'elle est plus ovoïde, plus subulée que P. variata
Lyc, dont le dernier tour est d'ailleurs plus court. Enfin P. latius-
cula Morr. et Lyc, du Bajocien, a la spire plus courte et le dernier
tour plus ventru.
Plésiotype. — PI. XVII, fig. 19. Unique, dans le Calcaire n° 4.
Ataphrus Labaoyei [d'Arch.]
(PI. XV, fig. 23-24).
1843. Trochus Labadyei d'Arch. Mém. Soc. Géol. Fr., t. V, p. 279t
pi. XXIX, fig. 2.
1899 DU GISBMKNT BATHONIEN DB 8AINT-GAULT1ER 573
1847. Turbo Labadyei d'Orb. Prod., I, p. 301, n° 82.
1850. Monodonta Labadyei Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., p. 68, pi. XI,
Og. 2.
1852. Turbo Labadyei d'Orb. Pal. fr., terr. jur., II, p. 351, pi.
CCCXXX1V, fig. 4-7.
1885. Ataphrus Labadyei Cossm. Contrib. et. Bath., p. 279, pi. VII,
fig. 5-8.
1892. — — Hudl.etWils.Cat.of.Brit.jur.Gastr.,p.41.
1895. — — Hudl. Gastr. infer. Ool., p. 350, pi. XXIX,
fig. 9-10, var.
Rapports et différences. — Ainsi que je l'ai fait remarquer dans
mon premier Mémoire sur les Gastropodes bathoniens, la distinc-
tion à faire entre les nombreuses espèces d' Ataphrus, du Bathonien
et du Bajocien, n'est pas très facile, à cause de leur variabilité ;
néanmoins on peut caractériser .4. Labadyei: par sa forme réguliè-
rement évasée, moins déprimée cependant que A. ovula tus, moins
conique et moins élevée que A. Halesus, moins conoide que A . Acmon;
par son dernier tour plus court et plus arrondi à la base que chez
cette dernière espèce bajocienne, beaucoup moins grand que celui
dM. Belus. La variété, figurée par M. Hudleston, dans le Bajocien
d'Angleterre, parait avoir les tours beaucoup moins convexes que
la forme typique du Bathonien; ce doit être une mutation bien
distincte.
Quoique le sillon columellaire de cette espèce soit plus obsolète
que chez la plupart de celles auxquelles nous l'avons comparée,
c'est bien un Ataphrus, dont la callosité columellaire est épaisse et
indistincte. Les individus de Saint-Gaultier, qui atteignent 20mm de
hauteur et de diamètre, sont plus grands que ceux de l'Aisne.
Pttsiotype. — PI. XV, fig. 23-24. Quatre individus, dans le Calcaire
n° 4.
Ataphrus discoideus [Morr. et Lyc]
(PI. XV, fig. 25-26).
1850. Crossostoma? discoideum Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., p. 73,
pi. XI, fig. 7.
1850. — heliciforme Morr. et Lyc. Id., pi. XI, fig. 8.
1855. Trochus applanatus Piette. B. S. G. F., t, XU, p. 1115.
1855. — heliciformis Piette. Id., p. 1115.
1885. Ataphrus ovulatus Cossm. Contrib. et. Bath., p. 278, pi. VU,
fig. 15, etc... (non Uéb. et JDesl.) •
574 M. C0S8MANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
1888. Ataphrus oculatus Greppin. Environs de Bàle, p. 74 pL III,
fig. 12, et pi. 10, fig. 10.
1892. — rftscoûfeus Hudl . etWils. Cat. of . Brit.jur.Gastr.,p.41.
1894. — heliciformis Hudl. Gastr. infer. Ool.f p. 348.
Rapports et différences. — Il y a lieu de reprendre, pour cette
espèce, la dénomination discoideus, qui est la plus ancienne ; car la
description en est donnée, par Morris et Lycett, une demi-page
avant celle de D. heliciformis, qui est évidemment identique. Je
l'avais confondue avec A. ovulât us, du Callovien, qui en diffère par
sa forme beaucoup plus globuleuse, moins évasée. L'un des échan-
tillons de Saint-Gaultier se superpose exactement à la figure n° 7
de la PI. XI (Morris et Lycett). A . discoideus a la spire bien plus courte
et la forme encore plus évasée que l'espèce précédente; et il se rap-
proche beaucoup de A. lucidus; mais ce dernier est encore plus
déprimé.
Plésiotype. — PI. XV, fig. 25-26. Deux individus, dans le Cal-
caire n° 4.
Chilodontoidea trochoides nov. sp.
(PI. XVII, ûg. 14-12).
Taille moyenne ; forme trochoïde, conique ; spire médiocrement
allongée, non étagée, subimbriquée ; environ six tours peu con-
vexes, dont la hauteur dépasse à peine le tiers de la largeur, séparés
par des sutures peu profondes ; quatorze nodosités axiales, épaisses
et peu saillantes, disposées à la partie antérieure de chaque tour,
et traversées par deux carènes spirales, entremêlées de cordonnets
plus fins, qui donnent aux tours l'aspect imbriqué en avant; en
arrière, les cordonnets persistent, mais les côtes noueuses dispa-
raissent, et de petites granulations existent à l'intersection des
accroissements obliques et des cordonnets.
Dernier tour à peu près égal aux deux tiers de la longueur totale,
subanguleux à la périphérie de la base, qui est obliquement déclive
et imperforée, ornée de cordonnets assez fins et peu réguliers, avec
quelques rangées spirales de pustules. Ouverture subquadrangu-
laire, à labre oblique, intérieurement muni d'une varice qui laisse,
de place en place, sur le moule, une rainure axiale assez profonde;
columelle presque rectiligne, avec deux plis spiraux, bien visibles
sur le moule ; bord columellaire indistinct.
Dimensions. — Hauteur : 25mm ; diamètre : 18mm.
Observations. — Le Genre Chilodontoidea a été séparé, en 1896,
1899 ne «suent batbonien db saint-gaultier 575
par M- Hudleston, pour une coquille de l'Oolite inférieure d'Angle-
terre, qui s'écarte de Chilodonta par les caractères de son ouverture :
au lieu de cinq dents au. labre et à la columelle, elle porte un
épaississement variqueux au labre et deux plis columellaires. Ce
sont exactement les caractères que présentent nos deux échantil-
lons de Saint-Gaultier; aussi, quoiqu'ils s'écartent de C. oolitica par
leur forme, qui est conique, au lieu d'être pupoïde, par leur orne-
mentation qui n'est pas réticulée comme celle du type de Chilodon-
toidea, je suis d'avis qu'il y a lieu de les classer dans ce Genre, ou
plutôt dans ce Sous-Genre de Chilodonta, à côté de Clanculus, comme
l'a proposé Fischer. Je ferai remarquer incidemment que les figures
données par M. Hudleston n'indiquent qu'un seul pli à la columelle,
tandis que le texte mentionne une double callosité.
Type.— PL XVII, fig. H-12. Deux échantillons, dans le Calcaire n°4.
Cirrus Calisto fd'Orb.]
(PI. XIV, fig. 7-8).
1847. Turbo Calisto d'Orb. Prod., I, p. 300. Et. XI, n* 71.
1850. — — d'Orb. Pal.fr. terr. jur.,II,p.345,pl.CCCXXXIIf
fig. 9-10.
1885. Hamusina Calisto Cossm. Contrib. et. Bat h., p. 249, pi. XIV,
fig. 5.
1879. Cirrus Calisto Buckman. Proc. Field Club, p. 139, fig. 6.
1892. — - Hudl.,Gastr. infér. Ool.,p.312, n<> 245, pl.XXVf
fig. 1.
Coquille sénestre; forme turbino-turriculée; spire pointue au
sommet, élargie à la base, à galbe extra-conique; tours très con-
vexes, presque disjoints, à sutures très profondes et très obliques ;
côtes axiales obliques, un peu écartées, visibles sur la convexité
et à la partie inférieure de chaque tour, effacées en avant, crénelées
par dix cordonnets spiraux, égaux et saillants, plus épais que la
largeur des sillons séparatifs.
Dernier tour égal à la moitié de la longueur totale, arrondi à la
périphérie de la base, sur laquelle les côtes cessent, tandis que les
cordonnets sont finement granuleux, par suite de l'existence de
fines stries d'accroissement ; perforation ombilicale relativement
étroite. Ouverture arrondie, à péristome épais et presque détaché.
Dimensions. — Longueur probable: 52="°; grand diamètre: 33mm;
petit diamètre : 27.
876 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
Observations. — Le Genre Cirrus a été créé, en 1816, par Sowerby,
pour l'espèce bajocienne C. nodosus, remarquable par son large
ombilic et par sa spire proboscidiforme, à galbe tout à fait extra-
conique; mais toutes les espèces de Cirrus ne présentent pas au
même degré ces caractères, et notamment celle que je viens de
décrire a un aspect turbiné qui m'avait autrefois décidé à la classer
dans le Genre Hamusina Gemmellaro. Toutefois il y a des différen-
ces capitales entre ces deux Genres : d'abord l'ombilic, qui existe
toujours, même chez les plus turbines d'entre les Cirrus, tandis
que Hamusina est imperforé ; puis la continuité du péristome, tandis
que celui de Hamusina est interrompu sur la base de l'avant-dernier
tour; enfin la forme conique de Hamusina, qui est, en quelque
sorte, un Amberleya sénestre, ne ressemble aucunement à celle dé
Cirrus, qui a, lorsque la spire est complète, chez les individus adul-
tes, un galbe concave, avec une pointe effilée, les derniers tours
croissant beaucoup plus lentement et sous un angle spiral plus
ouvert, que les premiers.
Il résulte de ce qui précède, que, tandis quf Hamusina appartient
vraisemblablement à la Famille Turbinidœ, Cirrus doit, au contraire,
être classé dans la Famille Delphinulidœ, où il forme un groupe tout
à fait à part; encore est-il possible que les caractères de la proto-
conque, quand on aura pu les observer, justifient la création d'une
Famille nouvelle et distincte, pour le Genre Cirrus, et pour le Genre
Scœvola Gemmellaro (1878), qui n'en diffère que par son péristome
bordé.
' Rapports et différences. — C. Colis lo étant la seule espèce batho-
nienne jusqu'à présent connue, je ne puis la comparer qu'aux
formes bajociennes, décrites et figurées dans l'excellente Monogra-
phie de M. Hudleston, sur les fossiles de l'Oolithe inférieure. Tout
d'abord, l'espèce que cet auteur rapporte à C. Calisto comme
« variété britannique », me parait distincte, autant que Ton peut en
juger d'après le fragment figuré: les costules, plus écartées et plus
minces, reparaissent sur la base, autour de l'ombilic; les cordonnets
spiraux sont moins saillants et plus serrés, ils ne paraissent pas
granuleux, peut-être à cause de l'usure de l'échantillon figuré; il est
donc probable que cette variété bajocienne pourra être définitive-
ment séparée de l'espèce du Bathonien, quand on aura recueilli de
meilleurs matériaux.
• Quant à Cirrus varieosus Hudl., outre jque ses tours sont moins
convexes et ses satures moins profondes, ses.xordonnets spiraux
paraissent plus écartés et moins nombreux; enfin, de placé- en place,
1899 DU GISEMENT BATH0N1EN DE SAINT-GAULTIER 577
sa surface porte d'épaisses varices, qui fout défaut chez C. Calisto.
C. pyramidalis Tawney pourrait encore être rapproché de notre
coquille ; toutefois, non seulement son ornementation spirale est
bien plus fine, mais encore ses tours, presque plans, sont subimbri-
qués par un angle antérieur, qui forme une carène saillante à la
périphérie de la base.
Il est inutile de comparer C. Calisto aux autres espèces qui sont
réticulées, subépineuses, ou noduleuses. Je ferai seulement remar-
quer que, si la figure que j'ai donnée, en 1885, ne ressemble guère
à celles que je publie actuellement, cela tient à l'état d'usure de
l'échantillon de Luc, qui était presque indéterminable, comme
ornementation.
Néolypcs. — PI. XIV, fig. 7-8. Peu rare dans le Calcaire n° 4, avec
Brachytrema Buvignieri.
Delphinula Renoisti nov. sp.
(PI. XV, fig. 12-14).
Taille moyenne ; forme turbinée, subglobuleuse ; spire courte,
subsphérique, à dernier tour disjoint; protoconque aplatie; cinq
tours, d'abord solarioides, puis croissant rapidement et convexes,
séparés par des sutures d'abord linéaires, puis très profondes; cinq
cordons spiraux, très serrés, finement muriqués, à peu près égaux
entre eux.
Dernier tour égal aux trois quarts de la hauteur totale, souvent
presque détaché de l'avant-dernier, arrondi à la périphérie de la
base, orné, ainsi que celle-ci, de dix cordonnets, ceux de la base
plus fins que ceux de la partie inférieure du dernier tour, qui sont
plus grossièrement muriqués ; au centre de la base est un funicule
assez saillant, crénelé par des tubulures plus saillantes, et circons-
crivant la cavité ombilicale; les sillons qui séparent tous ces
cordonnets sont cloisonnés par des lamelles d'accroissement peu
obliques. Ouverture arrondie, à péristome épais et continu, avec
une lèvre rudimentaire sur le contour supérieur, au point où aboutit
le funicule; labre à peine oblique, presque ructiligne.
Dimensions. — Hauteur: 20mm; diamètre. I7mm.
Observations. — La plupart de celles des coquilles jurassiques,
qui ont une forme turbinée et une surface ornée de cordonnets,
à tubulures emboîtées ou muriquées, ont été désignées par les
auteurs sous le nom Turbo, bien qu'elles n'aient aucun rapport avec
le type vivant de ce grand Genre. Un certain nombre d'entre elles
12 Mars 190U. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 37
578 M. GOSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
ont été, depuis, considérées comme de&Littorina, et quelques Genres
nouveaux, tels qu'A mberley a, ont été proposés pour les recevoir;
d'autres ont été classées comme Uelphinula, et se rapprochent, eu
effet, de ce Genre par leur ombilic ouvert, par leur dernier tour
superposé, par leur péristorce arrondi et continu, à peine modifié
à la jonction du funicule circa-ombilical. C'est précisément le cas
de la coquille dont je viens de donner la diagnose, d'autant plus
qu'aux caractères que je viens d'énumérer, et qui semblent motiver
ce rapprochement, il y a lieu d'ajouter la forme aplatie de la proto-
conque que j'ai pu observer sur l'un des échantillons de cette
espèce. On sait, en effet, que, chez Delphinula, les premiers tours
sont presque plans, carénés et souvent armés d'épines, qui persis-
tent parfois jusque sur la périphérie du dernier (D. Regleyi et
/). calcar, de l'Eocène). Dans ces conditions, il ne paraît pas y avoir
d'hésitation au sujet du classement générique de 1). Benoistt : c'est
bien un Delphinula. et il doit en être de même de quelques-unes
des espèces voisines de la nôtre, auxquelles je la compare ci-après,
tandis que celles que j'exclus de la comparaison, quoiqu'elles aient
une ornementation et une forme analogues, ont l'ombilic fermé, et
le sommet pointu.
Rapports et différences. — Parmi les espèces bathoniennes dont
celle-ci se rapproche le plus, il y a lieu de signaler principalement:
Turbo planispira Cossm., T. Davousti d'Orb., T. segregatus Héb. et Desl.
Or, D. Benoisti se distingue de la première par la forme un peu
plus élancée de son dernier tour disjoint, par son avant-dernier tour
plus développé, par son diamètre basai moins grand; de la seconde,
par ses cordonnets plus nombreux, plus serrés sur le dernier tour,
par sa spire plus globuleuse, par son sommet plus aplati ; de la
troisième, qui a aussi le dernier tour disjoint, par sou ornementa-
tion plus fine, surtout à la base, par sa forme moins allongée, par
son péristome, dont le contour supérieur ne porte pas une lèvre
aussi développée, au point où aboutit le funicule circa-ombilical ;
toutefois, en ce qui concerne particulièrement T. segregatus, dont
le type est du Callovien de Montreuil-Bellay, je remarque que la
forme bathonienne d'Hidrequent, que j'ai autrefois rapportée à la
même espèce, pourrait peut-être s'en écarter par plusieurs de ses
caractères, et se rapprocher davantage de D. Benoisti ; pour être
plus affirmatif sur ce point, il faudrait comparer de nouveau le
plésiotype du Boulonnais (Cont. et. Bath., p. 258, pi. VII, fig. 36),
que je n'ai plus actuellement sous les yeux.
Types. — PI. XV, lig. 12-14. Très commun dans le Calcaire u° 4,
avec les Brachytrema.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 579
Delphinula ? Buckmanni Mon*, et Lyc.
(PI. XVII, fig. 16-17).
1850. Delphinula Buckmanni Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., I, p. 71,
pi. V, fig. 8.
1855. — — lMette.B.S.G.F.,2«sér„t.XII,p.llll.
1885. Turbo Buckmanni Cossin. Contr. et. Bath., p. 265, pi. VII,
lig. 50.
1892. Delphinula Buckmanni Hudl.etWils. Cat. of Brit. jur. Gastr.,
p. 67.
? 1894. — — Hudl. Gastr. infer. Ool., p. 364, pi.
XXX, fig. 11.
Taille assez petite ; forme turbinée, étagée ; spire courte, à galbe
conique; cinq tours dont la hauteur atteint les deux cinquièmes de
la largeur, anguleux vers le tiers antérieur, obliquement déclives
en arrière, séparés par des sutures très profondes ; sur la région
antérieure, deux cordons spiraux assez saillants, surtout celui qui
forme l'angle, crénelés par une quinzaine de costules noduleuses ;
sur la rampe postérieure, les costules s'allongent obliquement et
sont traversées par quatre cordonnets plus fins que ceux de la
région antérieure.
Dernier tour supérieur aux deux tiers de la hauteur totale, un
peu arrondi au-dessus de la rampe, orné de quatre ou cinq cordons
crénelés par les côtes, qui cessent sur la base convexe ; celle-ci est
largement perforée par un entonnoir ombilical, et ornée de cordon-
nets spiraux, qui deviennent saillants et grossièrement granuleux
autour de l'ombilic. Ouverture arrondie, peu oblique.
Dimensions. — Hauteur : 13mm ; diamètre à la base: 14mm.
Observations. — Cette coquille n'est certainement pas plus du
Genre Delphinula qu'elle n'appartient au Genre Turbo; son ombilic
est, il est vrai, circonscrit par des rangées de grosses granulations;
mais, ni son ornementation, ni sa forme générale, ni surtout son
sommet, ne ressemblent à ceux des véritables Dauphinules. Malheu-
sement jusqu'à présent aucun échantillon n'a été recueilli dans un
état de conservation qui permette d'étudier les caractères de l'ou-
verture et de proposer un Genre nouveau; il faut donc provisoire-
ment la laisser dans le Genre dont elle s'écarte le moins.
Au point de vue spécifique, il me parait douteux que l'individu
de TOolite inférieure, figuré par M. Hudleston, appartienne à la
morne espèce que le type de la grande Oolite; il paraît avoir le
580 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
dernier tour bianguleux, non arrondi comme celui de nos échantil-
lons ; en outre ses côtes se prolongent sur la base, et l'ombilic est
plus évasé.
Plésiotype. — PI. XVII, fig. 16-17. Trois individus, dans le Calcaire
n°4.
Leptomaria Palinurus [d'Orb. J
(PI. XVII, fig. i).
1848. Pleurotomaria Ifevis Desl. Mém. Soc. linn. Norm., t. VIII f
p. 136, pi. XIV, fig. 2 (non M'Coy).
1849. — Palinurus d'Orb. Prod., I, p. 301.
1854. — — d'Orb. Pal. fr. terr. jur., II, p. 527,
pl. CD VI, fig. 4-6.
1885. Leptomaria l&vis Cossm. Contrib. et. Batb., p. 328.
Taille moyenne ; forme conique, évasée ; spire peu allongée, à
galbe un peu conoïdal; environ six tours convexes, dont la hauteur
égale à peu près le tiers de la largeur, séparés par des sutures linéai-
res et peu enfoncées; surface entièrement lisse, à peine marquée
de stries d'accroissement ; bande du sinus presque invisible.
Dernier tour presque égal aux deux tiers de la hauteur totale,
quand on le mesure de face, jusqu'à la suture inférieure, arrondi à
la périphérie de la base, qui est peu convexe et largement ornbiliquée.
Dimensions. — Hauteur : 30mm ; diamètre à la base : 37mm.
Rapports et différences. — Par sa surface lisse, cette espèce se
rapproche de /.. keciyata, du Bajocien ; mais ou l'en distingue par
sa forme plus évasée et par son ombilic moins ouvert. Les autres
Leptomaria du Bathonien ont une ornementation spirale et sont, en
général, plus élevés, comme par exemple, L. obesa Desl.; il n'y a
guère que L. Brevillei qui soit plus surbaissé que /.. Palinurus, mais
son ornementation est composée de sillons profonds.
Dans mon Mémoire de 1885, sur les Gastropodes bathoniens, j'ai,
à tort, conservé à cette espèce, en la faisant passer dans le Genre
Leptomaria^ le nom lœiis, que lui avait attribué Deslongchamps et
qui fait double emploi avec une espèce carboniférienne de M'Coy.
Cette manière de procéder est incorrecte, au point de vue de la
nomenclature; la correction faite par d'Orbigny est antérieure au
changement de Genre, et, par conséquent, c'est la dénomination
Palinurus qu'il faut adopter, comme dans tous les cas où il y a, à
la fois, changement de Genre et substitution de nom d'espèce.
Plésiotype. — Pl. XVII, fig. 1. Unique, dans le Calcaire u° 4.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 581
Trochotoma magnifica Cossm.
(PI. XIV, fig. 10-11).
1855. Trochotoma globulus Piette. B. S. G. F., t. XII, p. H 20 (non
Desl.)
1885. — magnifica Cossm. Contrib. et. Bath., p. 305, pi.
VIII, fig. 15-17.
Observations. — Ainsi que je l'ai précédemment indiqué, dans
mon Mémoire sur les Gastropodes bathoniens, cette intéressante
espèce est caractérisée par ses gros funicules spiraux, égaux aux
sillons qui les séparent, réguliers et saillants, au nombre de quatre
au-dessus, et de trois au-dessous de l'angle proéminent qui partage
chaque tour en deux régions inégales, vers le tiers inférieur de la
hauteur, qui est égale aux deux cinquièmes de la largeur comptée
sur l'angle; la rampe postérieure, un peu excavée, fait un angle de
100° environ avec la région antérieure.
Comme pour la plupart des autres espèces, les échantillon^ de
Saint-Gaultier sont d'une taille supérieure à celle des types du
Boulonnais et de l'Aisne ; mais le rapport de la hauteur au diamè-
tre est le même, c'est-à-dire que ces deux dimensions sont égales
entre elles, environ 35mm.
Plésiotype. — PI. XIV, fig. 10-11. Cinq échantillons, dont un dou-
teux, à cause de ses cordonnets plus fins, dans le Calcaire n° 4.
Trochotoma imbricata Cossm.
(PI. XVI, flg. 3-5).
1885. Trochotoma imbricata Cossm. Contrib. et. Bath., p. 308, pi.
VIII, fig. 18.
Observations. — L'échantillon d'Eparcy, que j'ai pris comme type,
en 1885, étant incomplet, montre une carèue périphérique qui
n'existe pas chez les individus adultes, dont la base est arrondie au
pourtour ; hormis cette différence, tous les autres caractères, et en
particulier ceux de l'ornementation spirale imbriquée, se retrouvent
exactement sur les individus de Saint-Gaultier. Je n'ai pas cité,
dans la synonymie, Pleurot. ornata Queust. (non Sow.)» à l'instar de
Hébert et Deslongchamps, parce que la figure donnée par l'auteur
allemand est trop défectueuse pour qu'il soit possible d'affirmer
qu'il s'agit bien de la même espèce. Enfin, dans mon Mémoire de
582 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
1885, j'ai indiqué, comme synonyme, Plenrot. calix d'Orb. (non
Solarium calix Phill.) ; mais un nouvel examen de la figure de la
Paléontologie française me donne à penser que c'est plutôt Trocho-
toma tornatilis Phill.
Rapports et différences. — Cette espèce, beaucoup plus surbaissée
que je ne le croyais, quand je l'ai décrite d'après un échantillon
incomplet d'Eparcy, ressemble, à ce point de vue, à T. funiculosa
(= T. discoidea Morr. et Lyc, non Rœmer); mais elle s'en distingue:
par son ornementation composée de sillons imbriqués, au lieu de
gros funicules crénelés par les accroissements; et par sa périphérie
arrondie à la base, tandis que l'espèce anglaise a le dernier tour
bianguleux. On ne peut la confondre avec Pleurot. striata Leck.
{non Sow.), du Callovien de Montreuil-Bellay, qui est, ainsi que je
l'ai constaté sur un échantillon de ma collection, un véritable
Pleurotomaria.
Neotype. — PI. XVI, fig. 3-5. Assez commun dans le Calcaire n°3.
Emarginula scalaris Sow.
(PI. XVII, fig. 22).
1825. E. scalaris Sow. Min. Conch., VI, p. 33, pi. DXIX, fig. 3.
1842. — Desl. Mém. Soc. linn. Norm., t. Vil, p. 125.
1850. — Morr. et Lyc. Moll. gr. Ool., I, p. 88, pi. VIII, fig. 4.
1871. — Terq. et Jourdy. Bath. de la Moss., p. 69.
1885. — Cossm. Contrib. et. Bath., p. 346, pi. XII, fig. 39-40.
1892. — Hudl. et Wils. Cat. of. Brit. jur. Gastr., p. 70.
1896. — Hudlest. Gastr. infer. Ool., 451, pi. XLI, fig. 12.
Observations. — L'échantillon incomplet et mutilé, que je rapporte
à cette espèce bien connue et très répandue, diffère un peu de la figure
donnée dans l'ouvrage de Morris et Lycett; mais M. Hudl es ton, qui
a comparé les types du British Muséum, affirme que cette figure est
une restauration fantaisiste. Toutefois, notre individu parait avoir
plus de dix-sept côtes principales, et à ce point de vue, il se rappro-
che plutôt de ceux de Luc. Il y a lieu de noter que E. scalaris de
Deslongchamps n'est pas l'espèce de Sowerby, mais une forme
moins haute, à sommet moins excentre, que j'ai désignée, en 1885,
sous le nom Deslonychampsi.
Plésiotype. — PI. XVII, fig. 22. Unique, dans le Calcaire n° 4.
1899 DU GISEMENT BATHONIEN DE SAINT-GAULTIER 583
Patella macéra Cossm.
(PI. XVI, fig. 8-9).
1885. P. macéra Cossm. Contr. et. Bath., p. 351. pi. XII, fig. 31-32.
Taille assez grande ; forme médiocrement élevée, elliptique,
arrondie à ses extrémités, un peu comprimée sur les flancs ; profil
concave du côté postérieur, déclive ou légèrement convexe du côté
antérieur; sommet situé presque au milieu, un peu en avant.
Surface ornée de rides d'accroissement nombreuses et serrées,
subimbriquées, et de quelques côtes rayonnantes très obtuses,
généralement effacées sur les côtés, et seulement visibles sur les
bords des individus adultes,
Dimensions. — Longueur : 18mm ; largeur : 15mm ; hauteur : 6mm.
(Prises sur le petit individu, le plus grand étant trop déformé).
Rapports et différences. — Striée comme P. cingulata, cette espèce
s'en distingue par sa forme moins relevée, par sa base plus ellipti-
que, et par ses côtes rudimentaires qui font totalement défaut sur
l'autre espèce. Notons seulement que le type d'Aignay-le-Duc, autre-
fois figuré, était plus costulé que les individus que je viens de
décrire, et dont le plus petit est totalement dépourvu de côtes; néan-
moins c'est bien la même espèce.
Plésiotype. — PI. XVI, fig. 8-9. Deux individus, dans le Calcaire n° 4.
Patella raduloides nov. sp.
(PI. XVI, fig. 6).
Taille moyenne; forme conique, élevée, sommet subcentral;
profil à peu près également déclive, de part et d'autre de ce sommet.
Surface ornée de petites aspérités transversales, peu régulièrement
disposées en séries horizontales, à peu près lisse vers le sommet.
Base ovale, elliptique.
Dimensions. — Longueur : 26mm ; largeur probable : 18mm ; hau-
teur: 17mm.
Rapports et différences. — On pourrait, au premier abord, confon-
dre cette coquille avec P. squamula Desl., à cause de son ornemen-
tation tout à fait spéciale ; mais elle s'en écarte aisément par sa
forme moins étroite, plus haute, par son sommet moins excentré,
par sou profil non concave en arrière, par ses squamules persistant
sur les côtés latéraux.
Type. — PI. XVI, fig. 6. Unique, dans le Calcaire n° 4.
584 M. COSSMANN. — NOTE SUR LES GASTROPODES 4 Dec.
PATFXLA AURELIANA DOV. Sp.
(PI. XVI, fig. 7i.
Taille assez grande; forme capuloïde, assez haute; base ovale,
plus rétrécie eu avant qu'en arrière; sommet subcentral; nombreu-
ses stries rayonnantes, souvent ponctuées par les accroissements,
séparant des costules aplaties, de largeur très inégale.
Dimensions. — Longueur: 38mm; largeur: 30mm; hauteur: 18mm.
Rapports et différences. — Cette espèce est beaucoup moins élevée
que P. aubentonensis; ses stries beaucoup plus nombreuses séparent
des côtes bien moins saillantes; enfin elle a le profil à peu près
également bombé de tous les côtés, ce qui lui donne un galbe capu-
liforme, tandis que l'autre est plus conique. Si on la compare à
P. olinensis nob., on trouve qu'elle est beaucoup plus haute, que ses
stries sont plus étroites et plus nombreuses que les rainures égales
aux côtes de la coquille de l'Orne. Elle ressemble davantage à la
coquille de Minchinhampton, que Morris et Lycett ont, à tort, rap-
portée à P. aubentonensis, et qui me semble bien différente par son
ornementation et par sa faible hauteur ; toutefois, je ne pourrais
affirmer l'identité de ces deux formes d'après une simple figure.
Quant à P. sulcata Desl., de l'Oolite inférieure, c'est une coquille à
côtes plus saillantes et bien moins nombreuses que celle de notre
espèce.
Type. — PI. XVI, fig. 7. Unique dans le Calcaire n° 4.
EXPLICATION DES PLANCHES
(Toutes les figures sont de grandeur naturelle, sauf 10 (PI. XVI) réduite de moitié,
et 15 à 23 (PI. XVII) qui sont grossies une fois et demie).
Planche XIV.
Fig. 1. — Amberleya Âureliana Cossm.
Fig. 2-3. — Nerinella fi bu la [Desl.]
Fig. 4. — Purpuroidea bicincta [Pietto].
Fig. 5-6. — Eucyclus Camillus [d'Orb.]
Fig. 7-8. — Cirrus Calisto [d'Orb.]
Fig. 9. — Nerinella cf. scalaris [d'Orb.]
Fig. 10-11. — Trochotoma magnifica Cossm.
Fig. 12. — Phasianellaf Grossotwrei Cossm.
Flg.fc13. — Nerinea carinala Piette.
1899 DU GISEMENT BAT HO NI EN DE SAINT-GAULTIER 585
Planche XV.
■ •
Flg. 1-3. — Brachy tréma Buvignieri Morr. et Lyc.
Fig. 4-5. — Cerithium Dorcali Cossm.
Flg. 6-8. — Melanioptyxis Âltararis [Cossm.]
Fig. 9-11. — Bactroplyxis axonensis [d'Orb.]
Fig. 12-14. — Delphinula Benoisti Cossm.
Fig. 1516. — Ochetochilus subvaricosus Cossm.
Fig. 17 18. — Littorina Cœneus [d'Orb.]
Fig. 19-20. — Mesospira Leymeriei [d'Arch.]
Fig. 21. — Phasianella? elegans Morr. et Lyc.
Fig. 22. — Columbellaria bathonica Cossm.
Fig. 23-24. — Ataphrus Labadyei [d'Arch.]
Flg. 25-26. — Ataphrus discoideus [Morr. et Lyc]
Planche XVI.
Fig. 1. — Neritodomus ponderosus [Plette].
Ampullina Miche Uni [d'Arch.]
Trochotoma imbricata Cossm.
- Patella raduloides Cossm.
- Patella Aureliana Cossm.
- Patella macéra Cossm.
Fig. 10. — Purpuroidea multifilosa Cossm.
Planche XVII.
- Leptomaria Palinurus [d'Orb.]
- Viviparus Aurelianus Cossm.
- Valvata fCincinnaJ Benoisti Cossm.
- Ampullina Aglaya [d'Orb.]
- Chilodontoidea trochoides Cossm.
- Columbellaria bathonica Cossm.
- Phasianella ? Grossouvrei Cossm.
- Pileolus œquicostatus Cossm.
- Delphinulda ? Buckmanni Morr. et Lyc.
- Neritopsis Benoisti Cossm.
- Phasianella î acutiuscula Morr. et Lyc.
- Bactroplyxis subbruntrutana [d'Orb.]
- Cerithiella nuda [Piette].
- Emarginula scalaris Sow.
M. Munier-Chalmas rappelle, au sujet de la communication
de M. Cossmann, que, dès 1889, M. Bigouret signalait dans le
Bulletin, très brièvement d'ailleurs, la présence de fossiles lacus-
tres, dans le Bathonien des bords du Plateau central, à la même
localité de Saint-Gaultier de Montrond.
Fig.
2.
Fig.
3-5.
Fig.
6.
Flg.
7.
Flg.
8-9.
Flg.
1.
Flg.
2-7.
Flg.
8-9.
Flg.
10.
Flg.
1112.
Flg.
13.
Flg.
14.
Fig.
15.
Flg.
16-17.
Fig.
18et23
Fig.
19.
Fig.
20.
Fig.
21.
Fig.
22.
586
Séance du 18 Décembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. E. DE MARGERIE, PRÉSIDENT
M. J. Blayac, Secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président proclame membre de la Société : M. Paul Léon,
agrégé d'histoire et de géographie, présenté par MM. de Martonne
et Gentil.
M. L. Gentil signale parmi les dons reçus de l'Etranger : Un
fascicule de la Fauna der Gaslcohle und der Kalksteine der Permforma-
tion Bôhmens (Band IV, Heft. 2, Myriapoda, Pars II, Arachnoidea),
par le Dr Ant. Fritsch, 64 p.. 10 pi. en 2 couleurs; et, en hommage
du Musée de Bohème, le vol. VII du Système silurien du centre de la
Bohême, de Joachim Barrande : Classe des Echinodermes, famille
des Crinoldes, par le Prof. Dr W. Waagen et le Dr J. Jahn, 215 p.,
40 pi., 33 fig. dans le texte.
Le Président fait connaître la mort de Sir John William Dawson,
le doyen des géologues du Canada, et du Dr Hicks, dont les
savantes recherches sur les terrains anciens du Pays de Galles sont
connues de tous les géologues.
Il annonce ensuite que l'Académie des Sciences vient d'attribuer
le Prix Delesse à M. W. Kilian et le Prit Fontannes à M. E. Haug.
« La Société est justement fière, dit-il, de compter parmi ses mem-
bres les deux lauréats, dont les travaux parallèles sur les terrains
et la structure des Alpes françaises trouvent dans cette récompense
simultanée une si légitime consécration. »
M. Golliez, professeur à l'Université de Lausanne, fait une
conférence Sur les travaux du chemin de fer de la Jungfrau.
Cette conférence est illustrée d'un fort grand nombre de pro-
jections afin de rendre plus plastiques les descriptions des diverses
régions que cette ligne hardie va traverser. La première série sert
à démontrer le tracé, sa situation et les divers terrains qui sont
percés par le tunnel dont la longueur prévue est de 10,5 kil.
Plusieurs concessions ont été demandées, la première en date
est celle de l'ingénieur Koechlin, de la maison Eifel, puis celle des
SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 1899 587
ingénieurs suisses Frautweiler et Locher ; toutes s'élevaient de Lau-
terbrunnen, à environ 100m par la vallée de Stechelberg, jusqu'au
sommet de la Jungfrau à 4166m, par le moyen de trois à quatre
tronçons en tunnel avec forte rampe, les wagons étant traînés par
des câbles ou poussés par des moyens pneumatiques. Le Gouverne-
ment suisse a accordé la concession à M. Guyer Zeller, sur un tout
autre tracé qui part de la Petite Scheidegg à l'altitude de 2064m,
pour s'élever en décrivant une grande courbe sous l'Eiger et le
Mônch par le col de la Jungfrau et l'arête nord-est de la Jungfrau
au sommet à 4166m.
Les deux premiers kilomètres sont ù ciel ouvert, après quoi le
tracé s'enfonce en tunnel sur une longueur de 10,5 kil., avec une
pente maxima de 25 %» mini ma de 6,2 %, un système de crémail-
lère et la traction électrique.
Les problèmes que soulève l'étude de ce tunnel tirent leur intérêt
tout d'abord du fait que la région traversée est de celles dont
l'accès est très difficile, ensuite du fait que leur solution fait prévoir
des conditions de travail exactement inverses de celles que l'on
rencontre ordinairement dans les grands souterrains, soit de mines,
soit de lignes de chemin de fer. Ici les températures seront, sur le
plus grand parcours, des températures négatives allant jusqu'à
— 12°2 C ; le roc sera ordinairement gelé, ce qui annonce que les
venues d'eau n'auront pas lieu ; enfin des fenêtres latérales pouvant
être percées très fréquemment, les problèmes de l'évacuation des
déblais ainsi que ceux de la ventilation en sont très facilités, ces
derniers d autant plus que la galerie étant inclinée elle agit comme
une longue cheminée.
Les terrains que traverse ce long tunnel sont peu variés. Les
premiers, huit kilomètres, sont dans des calcaires marmoréens très
solides formant de bonnes parois qu'on n'a pas besoin de revêtir de
maçonneries. Les deux derniers kilomètres sont dans un complexe
de schistes cristallins granitisés, type ordinaire de la première zone
alpine, où de très nombreux filons de granités de diverses épais-
seurs ont formé quelquefois aussi des faux gneiss. Les conditions
du plissement des couches n'ont pas une influence très grande ici.
Dans son ensemble la chaîne du Hochgebirgskalk forme un grand
synclinal dont la charnière est au sud de la Chaîne Eiger-Jungfrau,
tandis qu'en avant, au nord, tout le puissant massif de Jurassique
supérieur et de Nuramulitique s'enfonce sous la grande nappe de
recouvrement des chaînes du Maenlichen. La charnière est un peu
ondoyante, aussi ne peut-on dire avec beaucoup de certitude si le
588 SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 1899
tracé ne sortira pas du calcaire pour entrer dans les gneiss entre
les kilomètres 7 et 10.
La discussion des conditions de température du roc a amené la
nécessité de s'arrêter à un procédé de calcul dont plusieurs bases
sont hypothétiques. Tout d'abord les températures extérieures sont
évaluées par la loi de décroissance moyenne de 1° par 170m étant
donné comme point de départ la température moyenne du Saint-
Bernard à 2478m et qui est de — 1,76 sur une durée d'observation
de 27 ans. Quant à la température du roc elle est évaluée par la
formule de Stapf en fonction de la plus courte distance au sol.
Jusqu'à présent on n'a pas pris une série des températures du tunuel
en travail, mais on a arrêté la méthode la plus propice. Elle consiste
à creuser chaque 50m un trou à la perforatrice dans les pieds droits
du tunnel, à y introduire un thermomètre à maxima et miniraa
qui doit y séjourner pendant au moins six à dix heures avant
d'avoir pris sa température constante. Le trou dans lequel plonge
le thermomètre est protégé contre les influences extérieures de l'air
du tunnel par des tampons de ouate. C'est à partir de cet hiver que
la mesure des températures prendra de l'importance, car le tunnel
s'engage maintenant le long de la paroi de l'Eiger et l'an prochain
il traversera cette grande pyramide à peu près sous le sommet.
M. Golliez ajoute une foule de détails sur les travaux exécutés,
sur la voie, sur le matériel, sur la traction, en s appuyant de très
nombreuses illustrations.
Le Président, en remerciant M. le professeur Golliez, s'exprime
ainsi :
« Mon cher Confrère, vous nous avez montré, à l'aide d'un
exemple saisissant, combien il est profitable pour l'Industrie et pour
la Science, de marcher toujours de front.
)) Grâce à cette brillante conférence, nous savons désormais ce
que vous avez prévu ; dans quelques années, quand le projet gran-
diose dont vous nous avez entretenu sera un fait accompli, vous
reviendrez nous dire ce que vous aurez vu ; et les deux images, j'en
ai l'entière conviction, seront identiques. »
Après la très intéressante conférence de M. Golliez, l'heure se
trouvant très avancée, M. Munier-Chalmas remet à la prochaine
séance la communication qu'il devait faire.
M. Munier-Chalmas voulait : 1° faire connaître un nouveau terme
de la série bartonienne ;
2° Montrer quelles étaient l'étendue et la direction des courants
SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 1899 589
rapides du Bartonien inférieur qui out démantelé la partie centrale
du Dôme du Pays de Bray ;
3° Indiquer que les dépôts des courants rapides peuvent être
synchroniques des calcaires laguno-saumâtres et laguno lacustres
qui forment une bordure au sud-est du Bassin de Paris.
M. Stuart-Menteath. — Sur les schistes bistrés de la Bellonyue.
Ces schistes, décrits comme carbonifères par M. Caralp dans le
Bulletin qui vient de paraître (fasc. IV, t. XXV11, novembre 1899),
sont indiqués sur mes cartes comme triasiques pour les raisons
suivantes : leur substratum représenté comme calcaire carbonifère
dans la figure 5 du Bulletin, est figuré comme reposant régulière-
ment sur le Trias dans le panorama de la page 328 de la tbèse de
M. Caralp (1888). La même situation est indiquée par Leymerie et
M. Roussel. Ce calcaire est le prolongement de celui de Cierp et
Saint-Béat, dont j'ai défini l'âge triasique dans ma dernière note.
A Tarascon comme à Cierp il repose sur des marnes irisées. A Bor-
dères il est très nettement superposé au Trias que M. Caralp a
représenté comme un chapeau superficiel dans le H. S. il. F., 1896,
p. 531. De Bordères on peut le suivre par Sarrencolin, Campan,
Ferrières et Geteu, reposant toujours sur le Trias et toujours
recouvert par des schistes lustrés, qui ont tous les caractères de ceux
de la Bel longue, et qui ont été classés tantôt dans le Carbonifère et
tantôt dans le Crétacé par suite de leur ressemblance soit avec le
Flysch soit avec le Houiller. Les phosphates et les fossiles cités, se
trouvant dans les deux, ne prouvent rien. Les coupes de M. Caralp
sont compréhensibles si Ion ajoute que la schistosité est locale-
ment en travers de la stratification, et que des marnes irisées peu-
vent se présenter même au sommet des schistes lustrés. En passant
six mois dans les Pyrénées-Orientales et PAriège, j'ai pu reconnaî-
tre les mêmes schistes sur bien des points. Leurs caractères habi-
tuels les ont fait prendre pour cambriens et archéeus en dépit du
fait que le Cap de Creux a donné une bonne faune du Silurien
supérieur. Quant à la postériorité du granité au Trias j'ai toujours
recueilli de nouvelles preuves depuis 1881.
590 18 Dec.
NOTE SUR L'EXISTENCE DE L'ÉTAGE BARTONIEN
DANS LA VALLÉE DU LOING, ENTRE NEMOURS ET MONTIGNY
par M. Léon JANET.
Les travaux, actuellement en cours, de l'aqueduc destiné à amener
à Paris les eaux de diverses sources des vallées du Loing et du
Lunain m'ont permis de classer comme bartoniens des calcaires
que Ton considérait habituellement, jusqu'alors, comme ludiens.
11 m'a paru d'autant plus intéressant d'appeler l'attention sur
cette constatation, qui aura pour résultat de modifier beaucoup les
contours de la carte géologique de la région, que les tranchées, qui
m'ont fourni des échantillons fossilifères, sont déjà ou vont être
comblées, en sorte que les couches, bien qu'effleurant dans la val-
lée, cesseront en plusieurs points d'être observables, à cause de la
mince couche d'éboulis qui les recouvre.
De Nemours à Montigny, la vallée du Loing a été creusée jusqu'à
la craie, que Ton a trouvée, en divers points, sous les alluvions,
dans des forages entrepris pour le captage des sources ; mais cette
craie reste au-dessous du niveau du thalweg actuel, et n'affleure
qu'au sud de Nemours. Elle est recouverte par une couche peu épaisse
d'argile sparnacienne, exploitée souterrainement à Ecuelles. Au-
dessus, on trouve une épaisseur considérable (plus de 30 mètres) de
calcaires siliceux, de consistance irrégulière, parfois tendres et mar-
neux, mais le plus souvent durs, fistuleux, d'apparence brécholde,
percés de nombreuses cavités, où l'on n'avait pas encore signalé de
fossiles, et que l'on considérait généralement, à cause de leur aspect
lithologique, comme représentant le travertin de Champigny (étage
ludîen). Ces calcaires sont surmontés, le plus souvent sans inter-
position de marnes blanches ni de glaises vertes, d'autres calcaires
plus compacts, appartenant à l'horizon de la Brie (étage sannoisien).
dont il est souvent assez difficile de les séparer. On arrive enfin
aux sables de Fontainebleau et aux calcaires de Beauce dont je ne
m'occuperai pas ici.
Une tranchée de l'aqueduc secondaire du Loing, située au point
kilométrique 9 kil. 6, sur le territoire de la commune de Bourron,
a rencontré un banc de calcaire siliceux laguno lacustre de 0m40
1899 EXISTENCE DE L'ÉTAGE BARTONIEN DANS LA VALLÉE DU LOING 591
d'épaisseur, que l'on pouvait suivre sur une centaine de mètres de
longueur, préseutant de nombreux moules de limnées, de planorbes
et de bithynelles, et quelques moules d'hélix. M. Munier-Chalmas,
qui a bien voulu examiner quelques-uns de mes échantillons, a
reconnu nettement la Limn&a longtscata. M. Gustave Dollfus a cons-
taté sur un autre échantillon la présence de Y Hélix pseudo-labyrin-
thica. Le Planorbis goniobasis est fréquent.
Cette couche de calcaire siliceux a été retrouvée, avec une plus
grande épaisseur et les mêmes fossiles, à 5 kilomètres de là, dans
la tranchée de la conduite de refoulement de l'usine de Sorques,
près Montigny, destinée à relever les eaux de l'aqueduc. La tranchée
a été faite, à peu près, suivant la plus grande pente du coteau,
et a recoupé, au point kilométrique Okil.300, le banc fossilifère,
perpendiculairement à la ligne d'affleurement. Mais tandis qu'à
Bourron le banc fossilifère était à la cote 58, il se trouve ici à la
cote 67.
En face de Sorques, sur l'autre rive du Loing, au lieu dit « les
Hauts Rames », commune d'Episy, ou a ouvert au mois de mars
1899, une carrière où l'on peut relever la coupe suivante :
5. — Terre végétale . 0-50
4. — Blocs de calcaires siliceux englobés dans une marne
blanche sans consistance 2"
3. — Calcaire siliceux très dur, exploité pour moellons, avec
nombreux fossiles, Limnma longtscata, Planorbis
goniobasis 2"'2()
2. — Marne jaune 0"15
1. — Calcaire siliceux, assez dur, exploité pour moellons,
sans fossiles . 1"
La couche 3 renferme encore les mêmes fossiles : elle se trouve à
une altitude d'environ 75 mètres.
On observe donc une ascensiou lente des assises lorsqu'on se
dirige vers le nord-est, moins sous l'influence d'un axe anticlinal
est ouest, que d'un relèvement général des couches vers l'est.
La présence de la Limnma longiscata* très abondante, indique que
la couche fossilifère doit probablement être classée dans le Barto-
nien supérieur.
Dès lors l'épaisseur de 20 à 25 mètres de calcaires marneux et
siliceux se trouvant au-dessus de la couche à Limnœa longtscata
comprendrait à la fois les marnes à Pkoladomya ludensis, qui ne
paraissent pas fossilifères dans cette région, et le travertin de Cham-
pigny.
Quant aux calcaires siliceux existant au-dessous de la couche à
592 EXISTENCE DE l' ÉTAGE BARTONIEN DANS LA VALLÉE DU LOING 18 DéC.
Limnœa longiscata, et qui peuveut avoir une épaisseur d'une dizaine
de mètres au maximum, il n'est pas possible de dire s'ils appartien-
nent encore au Bartonien,ou s'ils représentent le Lutétien supérieur.
Quoi qu'il en soit, cette réapparition de l'étage bartonien dans une
région où il était inconnu jusqu'à présent parait présenter un
certain intérêt.
On sait que le Bartonien ne reste visible au sud de Paris que sur
quelques kilomètres : à Bicêtre, M. Munier-Chalmas a pu retrou-
ver, sous une épaisseur réduite, presque toutes les zones fossilifères
établies dans la région du nord, puis les couches plongent rapide-
ment et disparaissent. On ne connaît, sur toute la feuille de Melun,
aucun affleurement de l'étage bartonien, et l'on n'a pu constater
son existence que par des sondages. M. Dollfus, dans ses Recherches
sur la limite Sud-Ouest du calcaire grossier dans le bassin de Paris (1),
cite un certain nombre de ces sondages qui ont traversé à la fois le
Bartonien et le Lutétien. On remarque que les éléments arénacés
disparaissent de plus en plus, à mesure qu'on s'avance vers le sud,
et qu'à partir de Corbeil, l'étage est uniquement représenté par des
calcaires laguno-lacustres, qui sont d'ailleurs fossilifères, car en
1895, dans les fondations du pont sur l'Essonne du chemin de fer de
Corbeil à Montereau, près de Moulin-Galant, j'ai recueilli sous les
alluvions de nombreuses Limnœa longiscata. Lorsqu'on remonte les
vallées de la Seine et du Loing, on voit apparaître, avant Montereau
et Nemours, l'argile sparnacienne recouverte par des calcaires sili-
ceux ou marneux ayant une très grande épaisseur : dans la vallée
du Loing, la feuille géologique de Fontainebleau au 1/80.000° indi-
que à tort le travertin de Champigny comme reposant directement
sur l'argile plastique; dans la vallée de la Seine, la feuille de Sens
signale l'existence du Calcaire de Saint-Ouen au voisinage de Monte-
reau : la notice de cette feuille dit que l'étage n'est représenté que
par quelques couches minces de marnes verdâtres sans importance,
et dont l'âge ne peut-être établi que par l'étude de la feuille de
Provins, où l'étage bartonien présente, en effet, un grand dévelop-
pement, mais on est alors à l'est du bassin de Paris et non plus au
sud. Près de la Celle, M. Munier-Chalmas m'a dit avoir trouvé
quelques Limmea arenularia dans les tranchées de la ligne de
Corbeil à Montereau. 11 est donc vraisemblable que, dans les vallées
de la Seine et du Loing, les calcaires siliceux et marneux, reposant
sur l'argile sparnacienne, représentent le Ludien, le Bartonien et
peut-être aussi, en certains points, le Lutétien supérieur.
(1.) B. S. G. F., année 1897, tome XXV, 3* série, page 597.
SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 1899 593
M. Munier-Chalmas : Par cette observation intéressante,
M. Léon Janet précise l'existence du Bartonien sur un nouveau
point de la grande zone des calcaires laguno-lacustres bartoniens
qui s'étend en bordure au sud-est des terrains tertiaires du Bassin
de Paris.
M. Munier-Chalmas a déjà indiqué qu'il avait trouvé en 1896,
entre Melun et Montereau, dans la grande falaise qui borde la
Seine et qui est constituée par des calcaires que les géologues
avaient rapportés au Ludien, une zone renfermant des Mollusques
terrestres et fluviatiles caractérisant le Bartonien inférieur : Lym-
nœa arenularia, Planorb is aff. , PL goniobasis, Paludina, Hélix. Au-
dessous de ce banc, et reposant sur le Sparnacien, il existe envi-
ron 15 mètres de calcaires laguno lacustres qu'il lui parait possible
de rapporter en partie au Lu té tien supérieur. La grande masse cal-
caire qui forme ces falaises, se trouve ainsi répartie dans les étages
Lutétien, Bartonien et Ludien, avec cette réserve que les diverses
assises de ces étages peuvent, par suite de leur transgression vers le
sud, disparaître les unes après les autres à partir de leur base.
M. G. Ramond a visité en détail les travaux d'adduction des
sources de la vallée du Loing et de celle du Lunain, et il a présenté
à Toulouse, au « Congrès des Sociétés savantes », une Note résu-
mant les observations faites au cours d'une série de tournées sur
les tracés de ces nouvelles dérivations.
Il a remarqué, notamment, vers la base de la conduite de refou-
lement qui, partant de l'usine de Sorques, s'élève jusqu'à la ren-
contre de la nouvelle canalisation avec l'aqueduc de la Vanne, les
calcaires laguno-lacustres, bartoniens, à Lymmea lotigiscata, etc., qui
font l'objet de la communication de M. L. Janet et des observations
complémentaires de M. Munier-Chalmas. La présence du Ludien
supérieur dans la région ne paraît pas bien certaine; du moins,
M. Ramond n'a pas trouvé, jusqu'à présent, de fossiles de cet âge.
13 Mars 1900. — T. XXVII. Bail. Soc. Géol. Fr. — 38
894 18 Dec.
SUR LE GYPSE DE LA BASTIDE (VAR)
par M. Adrien GUÉBHARD.
Lorsque M. Léon Bertrand, dans son étude si intéressante et si
documentée sur le Nord des Alpes-Maritimes, cita des observations
de gypses métamorphiques cénomaniens (1), une grande perplexité
me prit. Car je venais d'observer moi-même, à La Bastide (Var), sur
les confins de la Commune de Mons (Var), dont je préparais alors la
carte (2), un petit pointement de gypse, si petit qu'il n'a pas été noté
sur la feuille de Castellane, et si bien entouré de Cénomanien — en
apparence, du moins — qu'une hésitation, tout au moins rétrospec-
tive, devait s'imposer.
Je dis rétrospective, car, cette hésitation, je ne l'avais nullement
éprouvée à première vue et, d'instinct, j'avais attribué cet accident
curieux à quelqu'un des grands mouvements orotectoniques qui, de
part et d'autre de l'étroite gorge crétacée, ayant porté le Tithonique
à quelque 60Qm plus haut, avaient fait béer, à l'ouest, par le flanc
déchiré de la montagne de Brouis, tous les bancs du Jurassique
inférieur, jusqu'au Bajocien, et pouvaient bien, dès lors, un peu plus
bas, avoir fait saillir, eu hernie, un peu de Trias.
Ayant voulu en avoir le cœur net, j'ai profité d'une circonstance
qui m'éloignait des Alpes-Maritimes et me rapprochait de ce point,
pour retourner à loisir sur les lieux, et en faire le relevé géologique
non plus seulement sur les plans d'assemblage du cadastre, au
1/10.000, mais sur les plans parcellaires au 1/2.500 : étude qui, tout
en me révélant des détails étrangers à la présente Note, sur lesquels
j'aurai à revenir (notamment l'existence de plusieurs niveaux
lacustres fossilifères en dessous du Poudingue considéré jusqu'à ce
jour comme éocène inférieur et relevé par mes constatations, pour
le moins, vers le milieu du Tongrien) a complètement confirmé
mes impressions du premier jour.
Situé à peu près exactement au milieu de la gorge nord-sud que
suit la route qui fait communiquer les larges bassins des rivières
de la Vieras et de l'Artuby, l'affleurement actuel du gypse de La
(t) Bull. Cart. GéoL, IX, 93 (1896).
(i) liull. Soc. Et. scient, de Draguignan, XX, 225-320, i pi. (1896).
f\ B è-irtàLd dti ntniu
Rg. 1. — Plan géologique de lu Gorge do La Barttde (Var).
596 A. GUÉBHARD 18 Dec
Bastide, mis à jour par les afifouillements du Vallon de l'Aire, occupe
exactement le bas des parcelles cadastrales 235 et 240 du quartier
des Gourguettes, en face de celui des Gipières. Dominé au nord par
la butte crétacée de Remeyau, il semble entouré de tous côtés par
le Cénomanien, sauf au sud, où vient à son contact une argile
rutilante, probablement tertiaire (bien distincte des marnes tria-
siques qu'on voit un peu plus haut, avec leur lit charbonneux),
puis un banc vertical de calcaire blanc siliceux à Planorbis pseudo-
ammonius et de nombreuses assises redressées du poudingue argilo-
sableux qui remplit toute la cuvette de La Roque-Esclapon.
La carte ci-contre (fig. 1), réduite au 1/30.000°, fait bien ressortir
cette position extraordinaire, mais, en même temps, en fait deviner
l'explication, en montrant que la vallée tout entière, avec son
aspect desimpie coupure transversale d'un vaste anticlinal est-ouest,
est, en réalité, polysynclinale, avec de fortes discontinuités sur ses
flancs, et de constitution beaucoup plus complexe qu'elle n'en a l'air.
Mais, d'abord, tout en admettant comme hors de doute l'existence
d'un axe de soulèvement est-ouest commun aux montagnes de
Brou i s et Lachen, peut-on considérer celles-ci comme ayant jamais
fait partie d'un même pli? La réponse, pour un adepte exclusif de
la prédominance du type anticlinal, dans ces régions, en tant qu'en-
tité orographique, serait sûrement négative, tant apparaissent diffé-
rents de structure, de part et d'autre de la coupure, les deux tronçons
que sépare la vallée de La Bastide.
Tandis, en effet, que la carcasse jurassique de Brouis montre, au
sud, une simple paroi fortement relevée, mais n'allant même pas
jusqu'à la verticale, Lachen, dans le prolongement, de l'autre côté
de l'interruption, montre un maximum de déversement et de
discontinuité, qui incline au-dessus du Crétacé les dolomies batho-
niennes et ne va s'atténuant qu'assez loin, le long d'un pli synclinal
remontant sur le flanc sud.
Mais si, au lieu de ne voir, à l'origine de chaque formation
anticlinale, que la composante principale de la striction terrestre
qui a poussé le pli dans un sens perpendiculaire à son axe, et Ta
fait souvent se déverser, l'on songe aussi à la composante orthogo-
nale, trop dédaignée, qui, une fois l'autre satisfaite, a dû forcément,
inéluctablement (1), tendre à se satisfaire elle-même en incurvant
(i) De quelque façon que l'on s'y prenne pour ramener théoriquement à des com-
posantes simples l'action physique de la striction terrestre sur un rectangle élé-
mentaire de surface déformable, il semble impossible d'aboutir à autre chose qu'à
deux couples orthogonaux agissant en sens opposés sur les quatre côtés du rec-
1899 SUR LE GYPSE DE LA BASTIDE 597
cet axe verticalement ou horizontalement pour raccourcir la distance
de ses deux extrémités, on comprendra très facilement, et sans qu'il
soit besoin de trancher delà simultanéité ou de la successivité des
deux actions, qu'à l'endroit même où, par suite d'un point faible,
l'axe anticlinal primitif s'est brusquement défléchi en U vers le
bas, pour donner passage à un synclinal perpendiculaire, une pro-
jection en avant se soit faite à l'un des angles, comme on le voit sur
un pli d'étofle qui, d'abord tendu entre deux doigts de chaque main,
se creuse d'un sillon transversal quand on rapproche les mains.
U est vrai que, dans ce cas expérimental, on voit les protubérances
se former symétriquement à chacun des angles, de manière à donner
finalement deux anticlinaux en T couché, opposés par leurs barres
supérieures, de part et d'autre du synclinal dernier venu. Mais,
dans notre cas réel, la seule dyssymétrie primitive du déversement
a dû supprimer, au nord, la branche de chaque T opposée au
sens de la plus grande poussée, et si nous supprimons encore la
branche qui aurait dû appartenir à la montagne de Brouis (nous
comprendrons de quel droit tout à l'heure) il restera exactement le
schéma de Lachen et du raccordement de son synclinal de bordure
sud avec celui qui remonte la gorge de La Bastide.
D'ailleurs celui-ci (et c'est ce qui explique sa naissance en cette
place), n'est qu'un petit tronçon d'une ligne de plissement bien plus
longue, arrivée du sud-est à travers tout le large bassin de La Roque-
Esclapon, où, recoupant, arrêtant peut-être même, les synclinaux
de l'est, il était venu se jeter, en dévalant du haut de la montagne
de Mnlay, à partir du curieux centre d'étoilement de Saint-Mar-
celliu de Mons (Var).
Vers le nord, cette même ligne, se poursuivant, incline peu à
peu à l'ouest pour contourner brusquement l'angle nord-est de
Brouis et aller ramener dans la direction dominante est-ouest des
plis de la région le cours de l'Artuby, séparé du pied de la grande
montagne par un petit contrefort anticlinal parallèle.
Il s'agit donc d'un pli important, que j'ai pu suivre, à travers ses
hauts et ses bas (1), sur plus de 12 kilomètres sans perdre sa trace et
tungle pour on diminuer les dimensions. L'un des deux couples at-il réussi à pro-
duire un pli perpendiculaire à sa direction? L'autre, pour cela, n'est pas satisfait, et
tend a raccourcir l'axe du pli, soit par inflexion dans le sens horizontal, soit en lui
superposant un autre pli orthogonal. Des exemples frappants de cette nécessité phy-
sique, se révélant a chaque pas d'une observation géologique tant soit peu atten-
tive, montrent qu'il ne s'agit pas là d'une simple conception théorique. Sans doute
en signaierai-je un plus spécialement quelque jour en décrivant le Mont Cheiron.
(1) Un des faits qui m'ont ie plus frappé dès que j'ai étendu a quelque distance
de mon clocher mes études de tectonique locale, c'est la persistante individualité
. GLEBHAHD
18 Dec.
sans arriver à son bout. Rien d'étonnant, par conséquent, à la pro-
fondeur de la coupure imposée a l'anticlinal rencontré sur son
chemin, et à la discontinuité manifestée sur sa bordure est, où les
bancs du Cénomanien, incli-
nés à l'est, viennent buter
contre ceux du Callovien for-
tement relevés. Mais, du coté
opposé, ce ne sont pas ces
mêmes bancs qui occupent le
fond de la vallée, où, tout au
plus, auraient-ils expliqué,
s'ils avaient formé synclinal
unique, la présence du Trias
exactement au pied de la
barre de Brouis. Eo contre-
bas viennent des poudingues
tertiaires, dont les strates,
violemment redressées, per-
mettent d'analyser les mouve-
ments compliqués qu'a subis
ce petit coin d'une région
partout très tourmentée.
Le schéma (fig. 2) nous
montre, venant de la plaine au sud de Brouis, trois synclinaux
différents qui, arrivés près du gypse, brusquement s'arrêtent, par
qne conservent sur de très grandes longueurs, quand nu se donne la peine de les
suivre A travers tuas leurs recoupements, les plis synclinaux ou anticlinaux, mais
surtout les premiers dont la trace est toujours plus facile ù relever matériellement
sur lu terrain. Aussi n'est-ce pas sans surprise que j'ai vu dans le précieux ouvrage
de de Margèrlu et lli-im, sur les (Usinai lions de l'Krorre terrestre, p. SI, cette asser-
tion de Heim que « les plis ne paraissent jamais se croiser directement, a Ma pra-
tique personnelle m'a tellement appris le contraire que c'est précisément crtte
notion de la continuité des plis per fa» et ueftt» qui me sert de fil d'Ariane à
travers te dédale de nos régions compliquées, et qui m'amène, par monts et par
vaux, presque sûrement, à îles découvertes prévues d'avance, qui, constamment,
justifient « posteriori l'exactitude du principe directeur, émané lui-même d'une
longue suite d'observations. Aussi ai-je été amené à croire qu'il ne devait s'agir
que d'un différend sur ta manière d'entendre le terme continuité. Pour moi, par
exemple, quand je vois, sur une crête anlicllnale. même très saillante, une dépres-
sion en selle, même très faible, correspondre au trajet de l'axe d'un synclinal
transversc, visible de part et d'autre, je considère cet axe, non pas comme inter-
rompu, mais simplement dévié dans le sens vertical, et l'accident orographique
comme résultant de l'interférence de deux mouvements, l'un synclinal, l'autre
anticlinal, et d'ailleurs successifs ou simultanés, peu importe, mais tous deux
continus, tout comme est l'axe anticlinal de lirouis et Lnchcn, malgré la profonde
coupure de la Vallée de La Bastide.
1899 SUR LE GYPSE DE LA BASTIDE 599
un relèvement périclinal violent de leurs strates, presque verti-
cales de Test à l'ouest. Cela est, du moins, très évident pour les deux
médians. Quant au plus rapproché de Brouis, peut-être celui-là se
continue-t-il par dessous la masse des éboulis qui masque, à cette
place, les affleurements; il irait, en ce cas, rejoindre un autre pli
dont l'amorce oblique se voit, vers l'extrémité nord de la barre,
et qui, remontant par dessus celle-ci, y découpe une petite gorge
pour le passage du chemin forestier, puis redescend (1) former le
lit est-ouest d'un petit affluent parallèle de l'Artuby.
Peu importe, d'ailleurs, la question, matériellement insoluble,
de la jonction de ces deux branches-là de synclinal, au pied de la
coupure de Brouis, pour faire pendant au synclinal continu qui
borde la coupure de Lachen, ou de leur simple convergence vers le
nœud gypseux. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'au milieu de la
vallée, deux autres branches intermédiaires viennent s'arrêter
brusquement contre ce gypse.
Or, plus est restreint l'affleurement de celui-ci, et plus s'impose
une remarque quant à sa position, juste à l'intersection de Taxe
principal est-ouest du soulèvement de la grande chaîne anticlinale
rompue, et de Taxe médian nord-sud de tous les plis secondaires
qui occupent la rupture, dessinant une sorte de X, à branches
toutes dédoublées. Anticlinal médian qui n'est nullement un mythe,
mais une réalité nettement accentuée, au sud, par le petit dôme
cénomanien qui porte l'église de La Bastide et, au nord du gypse,
par une butte cénomanienne à crevure néocomienne, continuée par
une petite chaîne parfaitement dessinée orographiquement, qui, en
se contournant à l'ouest, va rejoindre la crête séparative est-ouest
de l'Artuby et de son affluent du pied de Brouis.
Ainsi donc on constate visiblement que le point d'apparition du
gypse au milieu du Cénomanien a correspondu, soit à un instant
donné, soit à deux moments successifs, à un double eiïort de soulè-
vement et au croisement de deux ondulations de terrain, l'une
(1) Exemple curieux d'un petit pli synclinal qui, après qu'un autre plus impor-
tant a coupé transversalement un grand anticlinal, remonte très obliquement lt*
liane de la coupure pour épouser ensuite la direction même de l'anticlinal, .l'ai vu
souvent le fait se reproduire expérimentalement en essayant de simuler, avec une
étoile souple posée sur un substratum pétrissable de sciure ou de son, tes formes
superficielles des accidents terrestres. Il y aurait même, en employant une étoile
quadrillée de rayures inégales dans les deux sens, à faire ainsi, par la photographie,
une jolie étude iconographique de tectonique expérimentale. Le défaut de temps
m'a seul empêché d'en poursuivre l'essai, mais je serais heureux qu'entre d'autres
mains l'idée portât fruit.
600 a. r.uKBHMiD 18 Dec.
est-ouest, l'autre nord-sud, que nous voyons traduire matérielle-
ment la décomposition physique naturelle de la grande force de con-
tracture qui tendaità diminuer superficiellement, en projection hori-
zontale, h place occupée par chaque élément de la croûte refroidie.
Or, c'est un fait encore inscrit lisiblement dans tous les phéno-
mènes de la géologie, que cette contracture tendait à agir de moins
en motos sur les couches de plus en plus profondes* Et si l'on
considère que, dans nos régions, la masse calcaire très régulière-
ment feuilletée du Jurassique était séparée du bloc solide du Trias
inférieur par la surface glissante et plastique des argiles de l'Infra-
lias, il n'y a rien que de très plausible à admettre que les premiers
efiorts de striction, concentres d'abord sur cette croûte superficielle,
ont dû tendre presque toujours a la décoller d'abord de son subs-
tratum, pour produire particulièrement, dans le cas qui nous
occupe, sans remuer beaucoup le gypse, la grande coupure trans-
versale A bords discontinus qui a fait deux tronçons du grand
anticlinal est-ouest, en laissant, au fond de IX* à branches séparées,
le Crétacé en contact avec la masse amorphe résistante du gypse,
après disparition de tous les intermédiaires, étirés et rétractés de
part et d'autre.
Puis, dans un second temps opératoire, comme disent les chirur-
giens (mais toujours sans rien préjuger de la successivité, à peine
probable, des phénomènes réels), la contracture finissant par attein-
dre le gypse lui-même, localement rapproché du jour et délivré de
sa surcharge, sous quelle forme pouvait-elle bien se manifester, si
ce n'est sous celle de hernie, à travers le revêtement léger du Cré-
tacé, et où devait forcément se faire le pointement, si ce n'est à l'en-
droit précis 011 concordaient pour s'ajouter — telle l'interférence
physique positive de deux ondes — la totalité maximale des forces
de soulèvement?
t
■ .
Ktg, :t. — Coupe d travers le Gypse tic L» Itastldc (Var).
Là seulement où nous le voyons, pouvait apparaître, là devait
apparaître le gypse, et peu importe que. dans la coupe schématique
1899 8UR LE GYPSE DE LA BASTIDE 601
(fig. 3), par deux courbes en L\ nous fusionnions les lignes de discon •
tinuité alïérentes à cette émergence et celles de bordure du grand
synclinal jurassique, pour ne figurer que la résultante des mouve-
ments que nous avons théoriquement décomposés, et qui, restés
tels, auraient donné des schémas de discontinuité en lignes brisées;
peu importe, ensuite, que nous considérions comme cause ou
comme elïet de la saillie gypseuse, les petits plis qui, de celle-ci,
comme d'un véritable nœud anticlinal de plissement, partent vers
le bas, et vont se contourner parallèlement au synclinal qui a
limité, au sud, le mouvement de Brouis.... toujours sera-t-il que,
malgré le proche entourage du Cénomanien, malgré le voisinage
de tout un assortiment de niveaux tertiaires intéressants, l'appari-
tion, cartographiquement inattendue; du gypse eu ce point, s'expli-
que tectoniquement de la manière la plus simple, la plus nécessaire,
en sorte que, sans invoquer la conformité d'aspect minéralogique,
qui doit être toujours un argument secondaire, je crois devoir resti-
tuer avec certitude au Trias le pointement gypseux de La Bastide
(Var), comme tous ceux que j'ai personnellement observés dans les
Alpes-Maritimes.
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE
DE FRANCE
RÉUNION EXTRAORDINAIRE
SUR LE
VERSANT MÉRIDIONAL DE LA MONTAGNE NOIRE
du Mercredi 6 Septembre au Vendredi 45 Septembre 4899
Les membres de la Société qui ont assisté à la Réunion extra-
ordinaire, sont :
le chanoine Almera.
MM. Dop.
Bergeron.
FlCHEUR.
Bertrand (Léon).
FOURTAU.
Bofill.
GUILLERMONT.
l'abbé Bourgeat.
Jacquemet.
Cannât, Présideut de la
MlQUEL.
Société d'étude des Scien-
NlCKLÈS.
ces naturelles de Béziers.
Pervinquière.
Caralp.
Reymond.
Carez.
Riche.
Depéret.
Roman.
Dereims.
Sayn.
DONNKZAN.
Vidal.
Les personnes étrangères à la Société ayant pris part aux excur-
sions, sont :
MM. l'abbé Audran. MM. Maurette.
COUSTAN. MENGAUD.
DONNEZAN (fils). MlQUEL (fils).
ESCOT. MOUSTELON.
18 Août 1901. — T. XX VU. Bull. Soc. Géol. Fr. — 39
606
PROGRAMME DES EXCURSIONS
Proposé par MM. BERQERON, DEPÉRET et NICKLE8
Mercredi 6 Septembre. — Rendez-vous à Saint Pons (Hérault).
— Séance d'ouverture à 9 heures du matin, à la mairie de Saint-
Pons. Après la séance, excursion sur la route de la Salvetat pour
étudier les schistes métamorphiques (micaschistes et gneiss). — A
deux heures, excursion au coi de Sainte-Colombe. Dévonien non
fossilifère; Ordovicien inférieur fossilifère; Cambrien supérieur
non fossilifère ; Cambrien moyen fossilifère (Paradoxides rugubsus,
Conocephalus coronatus); Cambrien inférieur (calcaire à Arch&ocya-
thus). — Coucher à Saint-Pons.
Jeudi 7 Septembre. — Départ en voitures à 7 heures pour Saint-
Chinian. Dévonien non fossilifère, Ordovicien inférieur, Cambrien
complet (moyen fossilifère, supérieur avec traces d'Annélides). Série
de plis dans le Cambrien. Pli en éventail de Poussa rou. Cambrien
moyen fossilifère. Ordovicien inférieur fossilifère (niveau à Eubma-
Niobe ou de Tremadoc). — Déjeunera Saint-Chinian. — A 2 heures,
course à Assignan : grès de Saint-Chinian. Etage de Rognac fossi-
lifère. Nummulitique marin. Calcaires lutétiens à Planorbis pseudo-
ammonius. Grès à Lophiodon. — Coucher à Saint-Chinian.
Vendredi 8 Septembre. — Départ à 7 heures du matin. Etude
des envirous de Pierrerue et Cazedarnes. Double pli déversé au
nord (plis de Pierrerue et de Cazedarnes). Trias et Infralias chevau-
chant sur le Nummulitique marin par lequel débute une série
renversée allant jusqu'au grès à Lophiodon. — Le soir, séance à
THÔtel-de- Ville de Saint-Chinian. — Coucher à Saint-Chinian.
Samedi 9 Septembre. — Départ en voitures à 6 heures pour
Roquebrun par le Mont Peyroux. Eocène. Carbonifère inférieur
(Tournaisien). Dévonien complet renversé sur le Carbonifère. Anti-
clinal formé des assises suivantes : schistes à Euloma-Niobe, grès à
Lingules, Dévonien. Déversement des couches dévoniennes et car-
bonifères vers le nord dans la vallée du ruisseau de Laurenque.
Déjeuner à Roquebrun. — Départ à 2 heures pour Mons-la-Trivalle.
Etude de la dépression de la vallée de l'Orb : Ordovicien, Dévonien
PROGRAMME DES EXCURSION8 607
et Carbonifère renversés.— Gorges d'Heric. Etude du cône de déjec-
tion du ruisseau d'Heric. — Départ de Mons-la-Trivalle par le train
de 5 heures 33 pour Bédarieux. — Le soir, séance à l'Hôtel Para. —
Coucher à Bédarieux.
Dimanche 10 Septembre. — Matin : repos. Départ en voiture à
midi pour Carlencas. Etude du Tertiaire et du basalte du bois de
Levas et de la Frégère. Retour à Bédarieux par la Braunhe. Bauxite.
Série jurassique. — Coucher à Bédarieux.
Lundi 11 Septembre. — Départ pour Laurens par le train de
7 heures 32 (1). Gare de Laurens. Carbonifère (Tournaisien et
Viséen) recouvert par le Silurien et le Dévonien. — Étude du récif
miocène d'Autignac. — Retour à Gabian par Fouzillon. Trias,
Jurassique fossilifère. — Déjeuner à Gabian. Après déjeuner étude
de l'écaillé de Laurens-Gabian en suivant la route de Faugères :
Ordovicien, Gothlandien et Dévonien fossilifères, en concordance
de stratification, reposant sur le Carbonifère. Porphyrite traversant
le Carbonifère. Permien et Trias de Gabian. Retour à Bédarieux par
le train de 5 heures 33. — Le soir, séance à l'Hôtel Para.
Mardi 12 Septembre. — Départ pour Pézenas par le train de
#
5 heures 45. Etude de l'Helvétien de Montagnac. Déjeuner à Pézenas.
Étude du Miocène du monticule de Saint-Siméon. — Pliocène du
ruisseau du Riège. — Cratère de Valros. — Dîner à Pézenas. —
Départ de Pézenas à 7 heures 49 du soir pour Clermont-l'Hérault.
Arrivée à 9 heures 7. — Coucher à Clermont-l'Hérault.
Mercredi 13 Septembre. — Départ en voitures à 7 heures pour
Cabrières. Plaine de Cadenas formée par le Carbonifère inférieur,
recouvert en partie par le Silurien et le Dévonien. Plateau du
Caragnas (Dévonien schisteux et Carbonifère inférieur). Massif de
Tourière (écaille de Silurien et de Dévonien sur les schistes tournai-
siens et le calcaire viséen). Filon de basalte dans le calcaire dévo-
nien. — Déjeuner à Cabrières. — Après-midi, étude de la Combe
lzarne (écailles de Silurien, de Dévonien complet et de Carboni-
fère fossilifères). Dîner et coucher à Clermont-l'Hérault. Le soir,
séance à l'Hôtel du Commerce.
Jeudi 14 Septembre. — Départ en voitures à 7 heures par la
route de Bédarieux. Faille de Mourèze. Ascension du Pic de Bissous
(!) Par suite dos dlfli cultes à organiser les courses en voiture, le programme
primitif a dû être modifié. Le présent programme est celui suivi par la Société.
608 LISTE DBS PRINCIPALES PUBLICATIONS
ou de Cabrières par sa face nord. Ordovicien puis Dé von i eu. puis
renversement des couches vers le sud de manière à donner en
descendant vers Cabrières la série suivante : Givétien (fossilifère),
Dévonien supérieur (fossilifère), Carbonifère inférieur. — Déjeuner
à Cabrières. Après-midi, étude des plis de la colline des Japhet,
basaltes de Lieuran-Cabrières. — Dîner et coucher à Germon t-
l'Hérault.
Vendredi 15 Septembre. — Départ en voitures à 7 heures pour
Saint-Saturnin. Faille inverse de Saint-Saturnin. Ascension du Pic
des Deux-Vierges. Déjeunera Saint- Jean de la Blaquière. Retour par
Rabieux. Le soir, séance de clôture à l'Hôtel du Commerce.
LISTE DES PRINCIPALES PUBLICATIONS
RELATIVES A LA RÉGION PARCOURUE
1833. A. Boué. — Note sur les environs de Pézenas (B. S. G. F., 1" sér.,
t. III, p. 332).
1847. M. de Serres. — Découverte du premier Productus carbonifère
(Mèm. Ac. Se. et Let. de Montpellier, 1. 1, p. 63).
1849. Fournet et Oraff. — Note sur les terrains de Neffîez et de Roujan
(Hérault) appartenant aux formations carbonifère, dévonienne et
silurienne (B. S. G. F., 2e sér., t. VI, p. 625).
— de Verneuil. — - Sur les fossiles des terrains anciens de Neffiez et
de Roujan (Hérault) (B. S. G. F., 2e sér., t. VI, p. 627).
1851. de Christol. — Présentation de fossiles du terrain silurien de
Clermont-l'Hérault (B. S. G. F., 2e sér., t. VIII, p. 566).
1854. Fournet. — Lettre à M. Viquesnel sur les terrains anciens de Neffiez
(Languedoc) composés de terrains carbonifère, dévonien, silurien,
de schistes argileux, ardoisiers non fossilifères, de gneiss, de
micaschistes et de granités (B. S. G. F., 2e sér., t. II, p. 169).
1855. M. de Serres. — De Mourèze et de ses colonnades de rochers (C. R.
Ac. Se, t. XL, p. 1367).
1857. de Ro avilie. — Sur la série des terrains entre Saint-Affriquc
(Aveyron) et Clermont-rHérault, composée de Trias, de terrains
liasique, permien, houiller et de transition (B. S. G. F., 2e sér.,
t. XV, p. 69).
1859. Hébert. — Note sur la limite inférieure du Lias et sur la composi-
tion du Trias dans les départements du Gard et de l'Hérault (B. S.
G. F., 2e sér., t. XVI, p. 905).
1862. de Rou ville. — Sur l'âge essentiellement triasique des dépôts gyp-
seux secondaires du midi de la France (B. S. G. F.y 2* sér., t. XIX.
p. 683) .
RELATIVES A LA RÉGION PARCOURUE 609
1866. Id. — Lettre à M. Élie de Beaumont sur la constitution géologique
des terrains situés aux environs de Saint-Cbinian (C. R. Ac. Se,
t. LX1II, p. 637).
— Leymerie. — Réponse à M. de Rouville à propos des argiles rouges
et des calcaires qui constituent la montagne comprise entre Bize
et Saint-Chinian (C. R. Ac. Se, t. LXlll, p. 1069).
— Matheron. — Lettre à M. de Rouville sur les terrains tertiaires de
Saint-Chinian (R. S. G. F., 2« sér., t. XXIV, p. 44).
— de Rouville. — Réponse à M. Matheron (R. S. G. F., 2e sér.,
t. XXIV, p. 49).
1867. Magnan. — Note sur un chaînon qui réunit les Corbières à la Mon-
tagne Noire {R. S. G. F., 2e sér., t. XXIV, p. 721).
1868. de Rouville. — Excursion à Roujan et à Cabrières (R. S. G. F ,
2* sér., t. XXV, p. 959).
— Id. — Compte-rendu des courses faites au pic de Cabrières, à Mou-
rèze, à Clermont et à la tuilerie de Lodève {R. S. G. F., 2e sér.,
t. XXV, p. 974).
— Id. — Course de Lodève à Bédarieux (R. S. G. F., 2# sér., t. XXV,
p. 989) .
— Dieulafait. — Comparaison du Trias de l'Hérault avec celui des
Alpes et surtout aes Alpes de Provence (R. S. G. F., 2- sér.,
t. XXV, p. 970).
— Id. — Note sur l'horizon de YAvicula conforta aux environs de
Lodève (R. S. G. F., 2* sér., t. XXV, p. 980).
— Matheron. — Compte-rendu de la course de Pézenas. Observations
de MM. Tournouer, Bel grand, Gaudry, de Rouville (R. S. G. F.,
2#sér., t. XXV, p. 944).
1869. Dieulafait. — Zone à Avicula conforta et Infralias dans le midi de
la France, à l'ouest du Rhône (Ardèche, Lozère, Aveyron, Hérault)
(R. S. G. F., 2« sér., t. XXVI, p. 398).
— Daubrée. — Sur l'existence de gisements de bauxite dans les
départements de l'Hérault et de l'Ariège (R. S. G. F., 2* sér.,
t. XXVI, p. 915).
1873. Leymerie. — Sur la position et le mode de formation des marbres
dévoniens du Languedoc {R. S. G. F., 3* sér., t. I, p. 242).
— de Rouville. — Sur le Permien de l'Hérault (R. S. G. F., 3* sér.,
t. I, p. 250).
1874. Oraff. — Notice sur les terrains paléozolques du département de
l'Hérault (Soc. des Se. industr. de Lyon).
1876. de Rouville. — Introduction à la description géologique du dépar-
tement de l'Hérault. ln-8°.
1877. de Tromelin et de Grasset. — Etude sommaire sur la faune
paléozoïque du Languedoc et des Basses-Pyrénées (4. F. A, S.
Le Havre, p. 529).
1879. Ch. Barrois. — Le marbre griotte des Pyrénées {Ann. Soc. gèol.
duS.. t. VI, p. 270).
— de Tromelin. — Etude sommaire des faunes paléozolques du Bas-
Languedoc et des Pyrénées (A. F. A. S. Montpellier, p. 662).
1883. von Rœnen. — Sur le Dévonien supérieur et sur le Carbonifère de
l'Hérault (R. S. G. F., 3e sér., t. Xii, p. 114).
1884. Id. — Ueber den Marbre griotte der Gegend von Montpellier (N.
Jahrb.,t. I, p. 203).
610 LISTE DES PRINCIPALES PUBLICATIONS
1884. de Rouville. — Note sur le Dévonien de l'Hérault (B. S. G. F.,
3e sér., t. XII, p. 364).
1885. Ch. Barrois. — Sur le calcaire à Polypiers de Cabrières (Hérault)
(Ann. S. G. du N., t. XIII, p. 74).
1886. de Rouville. — Monographie géologique de la commune de
Cabrières (Mfm. Ac. Se. et Lettres de Montpellier).
— Id. — L'horizon armoricain dans la région de Cabrières (Hérault)
(B. S. G. F., 3« sér., t. XV, p. 738).
— Id. — L'horizon de Montauban-Luchon à Cabrières (Hérault) (C. R.
Ac. Se, séance du 25 juillet).
— Id. — Sur les formations paléozolques de Neffiez-Cabrières (Hérault)
(C. R.Ac. Se, t. Cil, p. 780).
— Id. — Prolongement du massif paléozolque de Cabrières (Hérault)
dans la région occidentale du département de l'Hérault. Silurien
et Dévonien (C. R. Ac. Se, séance du 31 octobre).
— Id. — Extension du terrain carbonifère dans la région occidentale
de l'Hérault. Considérations stratigraphiques générales (C. R.
Ac Se. y séance du 7 novembre).
— von Rœnen. — Ueber Clymenienkalk und Mitteldevon resp.
Hercynkalk bei Montpellier (N. Jahrb., t. I, p. 163).
— Id. — Ueber neue Cystideen aus den Caradoc-Schichten der Gegend
von Montpellier (N. Jahrb., t. II, p. 246. PI. VIII et IX).
1887. Frech. — Die Palaeozoischen Bildungen von Cabrières (Languedoc)
(Zeitsch. d. D. geol. Gesellschaft, t. XXXIX, p. 360).
— de Rouville. — Les formations paléozolques de la région de
Cabrières par le Dr Frech (B. S. G. F., 3e sér , t. XVI. p 64).
— J. Bergeron. — Elude paléontologique et stratigraphique des ter-
rains anciens de la Montagne Noire (B. S. G. F., 3* sér., t. XV,
p. 373).
— Id. — Note sur les terrains primitifs, archéen, cambrien et dévo-
nien du versant méridional de la Montagne Noire {B. S. G. F.,
3e sér., t. XVI, p. 210).
1888. de Rouville. — Sur le Permien de l'Hérault {B. S. G. F, 3e sér.,
t. XVI, p 350).
— Id. — Note complémentaire sur le prolongement du massif paléo-
zolque de Cabrières dans la région occidentale du département de
l'Hérault (C. R. Ac. Se, t. CV1, p. 1437).
— Id — Sur un horizon à Trinucleus du Glauzy (Hérault) (C. R. Ac. Se,
t. CVI1, p. 841).
— de Rouville et Delage. — Pétrographie de l'Hérault. Les porphy-
rites de Gabian (C. R. Ac. Se, t. CVII, p. 665)
— Munier-Chalmas et J. Bergeron. — Sur fa présence de la faune
primordiale (Paradoxidien) dans les environs de Ferrals-les-Mon-
tagnes (Hérault) (C. R. Ac. Se, séance du 30 janvier).
— J. Bergeron. — Sur la présence de la faune primordiale (Para-
doxidien) dans les environs de Ferrals-Ies Montagnes (Hérault)
(B. S. G. F, 3' sér., t. XVI, p. 282).
— Id. — Sur le Cambrien et sur l'allure des dépôts paléozolques de la
Montagne Noire (C. R. Ac. Se, t. CVII, p. 760).
— Id. - Réponse au Dr Frech. de Halle (B. S. G. F., 3« sér., t. XVI,
p. 935).
RELATIVES A LA RÉGION PARCOURUE 611
1889. de Rouville. — Note sur le Paléozoïque de l'Hérault. Lettre à
M. J Bergeron (B. S. G. F., 3e sér., t. XVIII, p. 8).
— Id. — Note sur la présence du Pleurodictyum problematicum dans
le Dé von ion de Cabrières et sur un nouvel horizon de Graptolites
dans le Silurien de Cabrières (B. S. G. F., 3* sér., t. XVIII, p. 176).
— Id — Le genre Amphion (Pander) à Cabrières (Hérault) (C. R.
Âc. Se, t. CVIII, p. 470).
— Hébert. — Observations relatives à la communication précédente
{C. R. Ac. Se, t. CVIII, p. 470).
— J. Bergeron. — Etude géologique du massif ancien situé au sud
du Plateau Central (Annales des Se. géologiques, t. XXII).
— Id. — Réponse à la lettre de M. le Prof, de Rouville (B. S. G. F.,
3* sér., t. XV1I1, p. 13).
— Id. — Sur la présence dans le Languedoc de certaines espèces de
1 étage Ei, du Silurien supérieur de Bohême (B. S. CF.,3* sér.,
t. XVIII, p. 171).
— Id. — Observations au sujet de la communication de M. de Rouville
sur la présence du Plfurodicti/um problematicum dans le Langue-
doc (B. S. G. F., 3e sér., t. XVIII, p. 177).
1890. J. Bergeron. — Sur une forme nouvelle de Trilobitede la famille
des Cahimenidœ (Genre Calymenella) (B. S. G. F., 3e sér., t. XVIII,
p. 365)'.
— de Margerie. — Note sur la structure des Corbières (Bull. Serf).
Carte géol. Fr.% N° 17).
1891 . Viguier. — Pliocène des environs de Montpellier {A. F. A. S., p. 413).
1892. Ch. Barrois. — Mémoire sur la distribution des Graptolites en
France (Ann. Soc. géol. du A\, t. XX, p. 89).
— J. Bergeron. — Contributions à l'étude géologique du Rouergue
et de la Montagne Noire (B. S. G. F., 3* sér., t. XX, p. 248).
1893. Jean Miquel. — Note sur la géologie des terrains primaires du
département de l'Hérault. Saint-Chmian à Coulouma {B. Soc. et.
Se. AVU. de Bèziers).
— J. Bergeron. — Observations au sujet de la note précédente (C. R.
S. Soc. géol. Fr., séance du 6 novembre, p. cvm).
— Id. — Notes paléontologiques. Genre Âsaphelina (B. S. G. F., 3- sér.,
t. XXI, p. 333).
1894. Jean Miquel. — Note sur la géologie des terrains primaires du
département de l'Hérault. Le Cambrien et l'Arenig (B. S. et. Se.
i\at. de Bèziers).
— de Rouville. — L'Hérault géologique.
— Id. — Atlas d'anatomie stratigraphique du territoire de l'Hérault.
— de Rouville, Delage et Jean Miquel. — Les terrains primaires
de l'arrondissement de Saint-Pons (Hérault) avec une carte géolo-
gique coloriée au 1/^0.000* et une planehcde coupes (Mém. Ac. Se.
et Lettres de Montpellier. Section des Sciences, 2* sér., t. II).
1894. J. Bergeron. - Réponse à MM. de Rouville, Delage et Jean Miquel
(T. R. S. Soc. géol. Fi:, t. XXII, p. xxxiv, séance du 19 février).
— Id. — Note sur l'allure des couches paléozolques dans le voisinage
des plis tertiaires de Saint-Chinian (B. S. G. F., 3e sér., t. XXII,
p. 578).
612 LISTE DES PRINCIPALES PUBLICATIONS
1894. Id. — Montagne Noire. Roches cristallines {Bull. Sert). Carte géol.
de Fr., t. VI, p. 61).
— Depéret. — Sur les plis tertiaires de la région de Saint-Chînian
(Hérault) (C. R. S. S. G. F., 3* sér., t. XXII, p. clvi).
— R. Nicklôs. — Montagne Noire. Terrains secondaires (Bull. Serv.
Carte géol. de Fr., t. VI, p. 65).
1895. Jean Miquel. — Note sur la géologie des terrains primaires du
département de l'Hérault. Essai de stratigraphie générale (B. S.
et. Se. Nat. de Béziers).
— Id. — Note sur la géologie des terrains secondaires et des terrains
tertiaires du département de l'Hérault (B. S. et. Se. Nat. de Béziers).
— J. Bergeron. — Remarques relatives à deux notes de M. Miquel
(B. S. G. F., 3* sér., t. XXIII, p. 337).
— Id. — Notes paléontologiques. III {B. S. G. F., 3« sér., t. XXIII, p. 465).
— Id. — Montagne Noire (Bull. Serv. Carte géol. de Fr., t. VII, p. 67).
— Id. — Sur les calcaires cambriens et sur la série crystallophyl-
lienne de la Montagne Noire (C. R. S. Soc. géol. Fr., p. xcvii.
Séance du 10 juin 1895).
— Id. — Sur le métamorphisme du Gambrien de la Montagne Noire
(C. R. Ac. Se. Séance du 9 décembre 1895).
— Id. — Sur le métamorphisme du Cambrien de la Montagne Noire
(C. R. S. Soc. géol. Fr. Séance du 16 décembre 1895, p. cxcix).
— Depéret. — Languedoc. — Feuilles de Montpellier et de Bédarieux .
(Bull. Serv. Carte géol de Fr.t t. VU, p. 86).
— R. Nicklôs. — Feuille de Bédarieux. Régions de Saint-Chinian et
de Clermont-l'Hérault (Bull. Serv. Carte géol. Fr.9 t. VII, p. 69).
1896. Depéret. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serc. Carte géol. Fr.,
t. VIII, p. 101).
— J. Bergeron. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serv. Carte géol. Fr.,
t. VIII, p. 95).
— R. Nicklôs. — Feuille de Bédarieux. Terrains secondaires. (Bull.
Serv. Carte géol., t. VIII, p. 103).
1897. Depéret. — Sur le Pliocène et les éruptions basaltiques des vallées
de TOrb et de l'Hérault (B. S. G. F., 3' sér., t. XXIV, p. 641).
— Id. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serv. Carte géol. Fr., t. IX, p. 342).
— J. Bergeron. — Feuille de Bédarieux (Roches éruptives tertiaires)
(Bull. Serv. Carte géol. Fr., t. IX, p. 338).
— R. Nicklôs. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serv. Carte géol. Fr.,
t. IX, p. 345).
1898. J. Bergeron. — Etude du versant méridional de la Montagne Noire
(B. S. G. F., 3e sér., t. XXVI, p. 472).
— Id. — Feuille de Bédarieux. Extrémité orientale du massif ancien
de la Montagne Noire (Bull. Sert). Carte géol. Fr., t. IX, p. 123).
— Depéret. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serv. Carte géol. Fr.. t. X,
p. 131).
— D. Levât. — Sur les phosphates noirs des Pyrénées (C. R. Ac. Se ,
t. CXXV1I, p. 834).
1899. J. Bergeron. — Note sur la base du Carbonifère dans la Montagne
Noire (B. S. G. F., 3« sér., t. XX Vil, p. 36).
— Id. — Feuille de Bédarieux (Bull. Serc. Carte géol. Fr., t. X, p 509).
SÉANCE DU 6 SEPTEMBRE 1899 613
1899. D. Levât. — Mémoire sur les phosphates noirs des Pyrénées (Ann.
des Mines, 9e sér., t. XV, p. 26).
— R. Nicklôs. — Sur la tectonique des terrains secondaires au Sud
de la Montagne Noire (C. fl. Ac. Se. Séance du 31 octobre 1899),
Cartes géologiques
1876. de Rouville. — Carte géologique du département de l'Hérault. —
Arrondissements de Saint-Pons, de Béziers et de Lodève, au
1/80.000".
1888. J. Bergeron. — Carte géologique du Rouergue et de la Montagne
Noire au 1/320.0006, in : Etude géologique du massif ancien situé
au sud du Plateau Central.
1894. de Rouville, Delage et Jean Miquel. — Carte géologique des
terrains primaires de l'arrondissement de Saint Pons au 1/80.000%
in: Les terrains primaires de l'arrondissement de Saint-Pons.
1899. Depéret, Nicklôs et Bergeron. — Carte géologique détaillée de
la France au 1/80.000*. — Feuille N° 232. Bédarieux.
Cartes topographiques
Les excursions se feront toutes sur la feuille N° 232 (Bédarieux) de la
carte de l'Etat-Major au 1/80.000".
Séance d'ouverture, f» Septembre f S99
PRÉSIDENCE DE M. DEPÉRET, PUIS DE M. BERGERON, Président de la Réunion.
La Société se réunit à 10 h. 1/2, à l'Hôtel- de-Ville de Saint-Pons.
M. Depéret, président de l'une des réunions antérieures, déclare
ouverte la Réunion extraordinaire sur le versant méridional de
la Montagne Noire, et Ton procède de suite à la constitution du
bureau.
M. Bergeron est élu président; il est assisté de MM. Depéret,
Nicklès, Vidal, vice-présidents ; Dereims, trésorier ; Pervinquière,
secrétaire.
M. J. Bergeron remercie la Société de l'honneur qu'elle lui fait ;
en l'appelant à la présidence, elle s'est conformée aux traditions
par suite desquelles le président est choisi parmi ceux des membres
614 SÉANCE DU 6 SEPTEMBRE 1899
présents qui se sont le plus occupés de la région que la Société doit
parcourir. En toute justice, l'honneur de la présidence devrait
revenir à M. de Rouville qui, pendant quarante ans, a déployé tant
d'activité dans l'étude de la géologie de l'Hérault; M. J. Bergeron
propose donc à la Société de le nommer président d'honneur de la
réunion extraordinaire de 1899.
M. de Rouville est nommé, par acclamation, président d'hon-
neur.
Par suite des présentations faites dans la séance du 19 juin 1899,
le Président proclame membres de la Société géologique de France:
M. Meunier, demeurant à Crépy-en-Valois (Oise), présenté par
MM. Gosselet et J. Bergeron ;
La Société d'étude des Sciences naturelles de Béziers,
présentée par MM. de Margerie et J. Bergeron.
Le Président a le regret d'annoncer la mort de M. Louis Lartet,
ancien professeur de géologie à la Faculté des sciences de Toulouse.
11 s'était fait connaître dés ses débuts par ses importantes explora-
tions géologiques de la région de la Mer Morte ; elles constituent
d'ailleurs son œuvre principale. La Société perd en lui un de ses
membres les plus estimés.
Le Président distribue aux membres présents une brochure qui a
été envoyée par M. de Rouville et ayant pour titre « Vlnfracritacé
sur la feuille de Afontpellier. » Il donne communication d'une lettre
de M. de Rouville accompagnant cet envoi.
Le Président donne lecture d'une lettre de M. Eugène Mir,
sénateur de l'Aude, annonçant le succès qu'il a obtenu en fonçant
un puits artésien dans la partie lauraguaise de la grande plaine de
Bordeaux à Cette, aux Cheminières, à 3 kil. à lest deCastelnaudary,
entre la ligne des Chemins de fer du Midi et le canal du Languedoc.
L'eau artésienne s'est manifestée le 28 juillet 1899 à la profondeur
de 420 mètres.
Le 1er août la colonne jaillit à 10 mètres au dessus du sol, avec
un débit de 312 litres par minute, dans un tubage réduit de 15 cen-
timètres de diamètre :
L'eau accuse une température de 30 degrés; elle n'est pas encore
absolument limpide ; elle remonte du gravier à la surface, avec une
apparence légèrement laiteuse; mais elle semble avoir un goût
franc, « cuit rapidement les légumes et savonne bien ».
SÉANCE DU 6 SEPTEMBRE 1899 615
Le forage est poursuivi pour atteindre, si c'est possible, une
nappe plus importante. Le débit actuellement acquis, qui fournit
450 mètres cubes par 24 heures, permet l'irrigation d'une notable
étendue de prairies et de vignes.
Dans la région, il ne semble pas qu'il ait été tenté jusqu'ici un
forage de ce genre, du moins à une aussi grande profondeur.
La coupe des terrains traversés indique des bancs argileux et
marneux de mollasse, dite de Carcassonne ou de Castelnaudary,
alternant avec des couches degrés plus ou moins durs, et s'amalga-
mant le plus souvent avec elles.
Après la lecture de la lettre de M. Mir, M. J. Bergeron donne
les renseignements suivants :
En 1895, M. Mir me fit l'honneur de me consulter sur les
chances probables de succès, d'un puits artésien qu'il projetait de
foncer dans sa propriété des Cheminières, près Castelnaudary.
C'est la mollasse de Carcassonne (Eocène supérieur) qui en forme le
sous-sol ; cet ensemble de grès argileux avec accidents gypseux et
calcaire», s'étend vers le nord jusqu'au pied de la Montagne Noire où
il recouvre les grès et sables désignés sous le nom degrés d'Issel
(Eocène moyen). Ces derniers grès s'élèvent déjà à une altitude
assez grande, au-dessus de la plaine, sur le versant méridional
du massif montagneux, pour recevoir les pluies résultant de la
condensation des vapeurs amenées de la Méditerranée par les vents
du sud-est. De plus, ils sont situés au voisinage de la ligne de par-
tage des eaux des bassins méditerranéen et atlantique, de sorte
qu'ils reçoivent encore les pluies venant de l'Atlantique. La quan-
tité d'eau tombée sur les affleurements de grès d'Issel, à l'extrémité
sud-ouest de la Montagne Noire doit donc être assez grande.
D'ailleurs à Castelnaudary plusieurs fontaines reçoivent leurs eaux
de cette région particulièrement humide.
Les grès d'Issel formaient donc le niveau d'eau à rechercher par
le sondage en question ; de plus les conditions étaient particuliè-
rement favorables à la rencontre de l'eau. En effet la mollasse de
Carcassonne formée par des grès argileux constitue un toit imper-
méable. Les assises sous-jacentes aux grès sont des calcaires com-
pacts nummulitiques, et des argiles crétacées dont l'ensemble est
peu perméable à l'eau. Si ces grès, comme il était vraisemblable,
se prolongeaient jusqu'en dessous des Cheminières, ils devaient
former un niveau d'eau compris entre deux assises imperméables,
et donner par suite le maximum de débit et peut-être même des
616 SÉANCE DU 6 SEPTEMBRE 1899
eaux jaillissantes. Il y avait donc lieu de faire le sondage en ques-
tion. Ce fut aussi l'avis de plusieurs praticiens consultés par M. Mir.
Mais au cas où le soudage rencontrerait l'eau, serait-elle jaillis-
sante? Sur cette question les opinions étaient partagées. La très
grande majorité, et je reconnais que j'en étais, pensait qu'il y avait
entre les Cheminières et les affleurements de grès une trop faible
différence d'altitude pour que la force ascensionnelle des eaux les
fît jaillir. L'événement a prouvé que nous avions tort.
M. Mir commença le sondage en question en septembre 1895. En
juin 1896 celui-ci avait atteint la profondeur de 140 mètres sans
avoir rencontré l'eau. Alors M. Mir crut devoir demander de nou-
veau leur avis aux géologues connaissant la région. Plusieurs,
découragés par l'insuccès du sondage, furent d'avis de l'arrêter.
M. Mir voulut bien me communiquer leurs rapports ; et nous dis-
cutâmes sur place ce qu'il fallait faire. Le sondage étant toujours
resté dans la mollasse de Carcassonne et n'ayant pas dépassé ou
même atteint les grès d'issel, rien n'était désespéré et je fus d'avis
de persévérer.
Avec une constance digne de tous éloges, M. Mir fit continuer ce
sondage, et le 28 juillet 1899, à 3 heures du matin, l'eau arriva au
jour d'une profondeur de 420 mètres ; de plus elle était jaillissante.
J'ai été très heureux de ce résultat qui était la juste récompense
de (a ténacité de M. Mir.
M. J. Bergeron résume la communication suivante :
617
ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE
par M. J. BERGERON.
C'est en 1883 que, sur le conseil de mes maîtres MM. Hébert et
Munier-Chalmas, j'entrepris l'étude de la région que la Société va
parcourir; les terrains paléozolques y étaient connus grâce aux
travaux de MM. Fournet, Graff, de Verneuil, de Rouville, de Tro-
melin et de Grasset. Je croyais n'avoir à y faire qu'un travail de
coordination qui pourrait me servir de thèse inaugurale. Mais dès
mes premières courses, je me rendis compte de l'importance et de
la durée de l'étude que j'avais entreprise. J'aurais voulu ne publier
les résultats de mes recherches que progressivement; mais sur le
désir de M. Hébert je dus, en 1889, donner un résumé (1) de mes
explorations encore trop peu avancées ; en le publiant alors, je Je
considérais avec raison comme devant être complété par mes études
ultérieures (2). Celles-ci, qui ont duré encore une dizaine d'années,
m'ont amené à modilier sur bien des points ma première manière
de voir.
Ce n'est que seize ans après avoir commencé mes études dans la
Montagne Noire que je les trouve assez avancées pour désirer en
montrer les résultats à la Société géologique.
Pendant mes longs et nombreux séjours dans le Languedoc j'ai
pu faire quelques réelles amitiés. Il serait trop long d'énumérer
ici toutes les personnes qui ont cherché à m 'être utiles ou même
seulement agréables; mais je veux rappeler ici les noms de celles
qui sont mortes, quand ce ne serait que pour les associer une der-
nière fois à des travaux dont elles suivaient les progrès avec grand
intérêt. C'est d'abord M. l'abbé Filachou, curé de Cassagnolles,
qui en me communiquant les échantillons les plus intéressants de
sa collection (3) m'a permis de reconnaître l'existence dans le
(1) J. Bergeron. Etude géologique du massif ancien situé au sud du Plateau
central. Ann. Se. géol., t. XXII.
(2) Op. cit., p. ii.
(3) Cette collection a été donnée, sur ma demande, au Laboratoire de Géologie de
la Sorbonne, par M. Gleizes, neveu de M. Filachou.
618 J. BERGBR0N. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Languedoc de la base de l'Ordovicien ; c'est enfin le Dr Grauel de
Saint-Pons qui, me faisant profiter de l'affectueuse estime dont il
jouissait dans le pays, m'a mis en relation avec un grand nombre
de personnes qui m'ont facilité singulièrement mes recherches (1).
Au point de vue géologique la Montague Noire est un massif dont
l'axe est gneissique tandis que la périphérie est occupée par les
terrains paléozoïques. Par suite de cette disposition, il semble que
la série gneissique soit la plus ancienne et que les autres terrains
reposent sur elle. C'est de cette façon que j'avais interprété les faits
en- 1889 (2). Mais en réalité il n'en est pas ainsi.
Si l'on examine l'allure des couches, on reconnaît que toutes,
d'une manière générale, sont plissées et que les plis sont alignés
suivant la direction du massif, c'est à-dire N. 60° à 70° E. Une
section normale à la direction des plis et partant de la région
gneissique pour gagner les terrains paléozoïques les moins anciens,
donne la succession suivante : aux gneiss succèdent des mica-
schistes, puis des schistes micacés, enfin des schistes à séricite,
auxquels font suite des schistes à minéraux et enfin le Cambrien
non métamorphisé. 11 y a passage insensible et graduel de la roche
non métamorphique à celle qui Test le plus, de telle sorte qu'on
peut ainsi suivre pas à pas les progrès du métamorphisme.
D'ailleurs les zones formées par ces différents termes sont toujours
peu épaisses; elles ont, dans leur ensemble, quelques centaines de
mètres.
Mais la région nord-est du massif gneissique (environs de Saint-
Gervais-Ville et de Combes), aussi bien que les régions où le
gneiss forme des sortes d'apophyses, sur le versant méridional
de la Montagne Noire (environs de Labastide et de Colora bières),
permet de voir le passage latéral du Cambrien (3) au gneiss. C'est
la même succession que celle que je signalais plus haut, mais
ici, elle se suit latéralement, parallèlement à la direction des plis ;
ce sont les mêmes couches qui se modifient progressivement à
(1) Depuis la séance du 6 septembre 1899 la mort a frappé M. Salles, ancien
instituteur à Ferrais, et M. le Dr Villebrun de Saint-Chinian. Je tiens à dire quel
charmant accueil j'ai toujours reçu de M. Salles et de sa famille. Je dois à M. le
Dr Villebrun la communication de quelques-unes des belles pièces de sa collection;
par son activité à recueillir les fossiles siluriens, il a rendu de grands services à
la Paléontologie.
(2) Étude géologique du massif ancien situé au sud du Plateau Central. Ann.
Sci. geul., t. XXII, p. 14.
(3) Pour la composition du Cambrien dans la Montagne Noire, v. plus loin, p. 621.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 619
mesure que Ton se rapproche de la région où le métamorphisme
s'est fait sentir avec le plus d'intensité. Ce sont toujours les schistes
potsdamiensque j'ai vus se transformer ainsi, mais il doit en être
de même pour les autres schistes cambriens.
Dans le massif gneissique lui-môme, le métamorphisme n'a pas
toujours atteint son maximum, et, en bien des points, il y a des
bandes de schistes, généralement à l'état de schistes micacés, qui
témoignent encore de l'origine des gneiss. C'est le cas pour les
environs de la Salvetat, ainsi que pour une bande de micaschistes
qui s'avance de plusieurs kilomètres dans le gneiss, au sud de Saint-
Gervais-terres-rosis, dans le massif du Caroux.
11 n'y a qu'une seule bande de calcaire cambrien que l'on puisse
suivre de la périphérie à l'intérieur de la région gneissique; elle
passe par le hameau de Causses au nord-ouest de Murât (Tarn);
elle disparaît vers le sud-ouest en s'engageant dans la région méta-
morphique. C'est grâce à une érosion profonde de la vallée du
ruisseau de Viau, qu'elle réapparaît un peu au nord de Nages. Mais
en plusieurs points du massif gneissique, en particulier au nord de
la Salvetat, apparaissent des lambeaux calcaires au cœur même des
roches métamorphiques.
Ces calcaires persistent très longtemps au milieu des micaschistes
et même au milieu des gneiss, avec les mêmes caractères que ceux
qu'ils possèdent en dehors de la zone métamorphisée. Cepen-
dant on peut y reconnaître des traces de dissolution : la masse
présente un aspect lité très accusé qui provient de l'alternance
de bancs dans lesquels les calcaires n'ont pas été attaqués et de
lits où, au contraire, une partie du calcaire a été dissoute et
remplacée par de la silice. Ces derniers ont un aspect carié et
souvent dans les vides résultant de la dissolution du calcaire se
sont formés des cristaux de calcite, de dolomie et de quartz. Plus
dans l'intérieur du massif gneissique, les calcaires se chargent de
minéraux ; alors ils sont plus cristallins, et ils ont une coloration
gris vert qui provient de la présence de silicates ferro-maguésiens.
Ce sont de 'vraies cornes vertes dont les unes sont riches en
pyroxène, les autres en amphibole, d'autres enfin en épidote. On
reconnaît au milieu d'une foule de cristaux de calcite, quelques
cristaux polysynthétiques d'amphibole et de pyroxène. C'est un
type comparable à ceux que M. Michel-Levy a décrits dans le
Beaujolais, en Auvergne et en Normandie. Fréquemment dans les
calcaires cariés, les cristaux sont recouverts par une sorte d'enduit
ferrugineux résultant de l'oxydation des sels de fer qui sont
toujours associés aux calcaires.
620 J. BERGKRON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Etant donnée la grande fréquence des affleurements de calcaire.
géorgien dans les bandes cambriennes qui entourent le massif
gneissique, on peut s'étonner que ces mêmes calcaires, métamor-
phisés ou non, soient si rares à l'intérieur de ce dernier. On en
trouve l'explication dans ce fait que la région gneissique repré-
sente une très grande épaisseur de sédiments, puisqu'ils ont résisté
davantage aux érosious ; de plus les vallées y sont rarement pro-
fondes. De la sorte, les calcaires sont restés enfouis sous les schistes
métamorphiques, sauf dans la région de la Salvetat où les érosions
ont creusé une largo dépression. Les affleurements de calcaire à
minéraux y sont nombreux ; ils sont alignés suivant la direction
générale des plis et correspondent à des anticlinaux.
Malgré toutes mes recherches, ce ne sont jamais que des roches
cambriennes que j'ai vu se transformer progressivement en gneiss.
La présence du Dévouien, dans la région de Saint-Pons, au voisinage
du massif métamorphique, pourrait justifier l'hypothèse qu'une
partie des schistes métamorphiques appartient au Dévonien. si on
ne savait que ce dernier terrain est presque exclusivement calcaire
dans la Montagne Noire. D'autre part les calcaires à minéraux sont
très éloignés de tout gite dévonien. Pour ces raisons je suis porté à
.attribuer uniquement au Cambrien toute la série cristallophyl-
lienne (1).
Les phénomènes de métamorphisme ne sont pas cantonnés daus
la région gneissique ni dans l'auréole de schistes micacés qui l'en-
toure. On les retrouve en dehors, mais principalement suivant la
direction nord-est, dans le prolongement du massif gneissique.
Suivant cette direction les filonnets de quartz sont nombreux;
quand ils ont rencontré des calcaires géorgiens, il s'est produit le
type des calcaires cariés ; mais il n'y a encore formation d'aucun
silicate ferro-magnésien.
Suivant la même direction, les schistes potsdamiens (2) sont éga-
(1) Antérieurement a la séance du 10 juin 1895, dans laquelle j'exposai pour la
première fols devant la Société géologique (B. S. G. F. (3), XXIII, p. xcvii).
les faits que je viens de rappeler, la notion de métamorphisme avait été admise
pour certaines roches de la Montagne Noire. M. de Rouville dès 1889 attribuait
au voisinage des roches éruptives du massif gnessique, la transformation en
schistes à séricite, d'assises qu'il croyait dévoniennes. En 1894, M. Miquel pensait
pouvoir reconnaître dans les gneiss toutes les roches paléozolques qui auraient
subi un puissant métamorphisme. Aucun argument n'avait été donné à l'appui
de ces manières de voir.
(2) En quelques rares points, du côté de Saint-Gervais-Ville, les calcaires géor-
giens affleurent sous les schistes en question, ce qui précise l'âge de ces derniers.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 621
lement traversés de nombreux filonnets de quartz, généralement ali-
gnés suivant la direction des couches; cependant ils ont souvent
suivi les fractures qui se sont produites lors du plissement des
schistes et on les retrouve nombreux dans toutes les directions. Les
schistes ont perdu leur aspect d'ardoises, de phyllades ; ils sont
devenus de vrais schistes à séricite. Quant aux schistes acadiens qui
se distinguaient si facilement par leur fissilité et leurs colorations
des autres termes schisteux de la série, on ne les reconnaît plus,
soit qu'ils aient disparu par laminage, soit qu'ils aient subi la même
transformation que les schistes potsdamiens. Les injections par les
filons de quartz ayant pu se produire plus facilement suivant la
schistosité des lits que suivant une direction perpendiculaire la
région où les schistes à séricite se sont développés, est étendue vers
le nord-est tandis qu'elle esc très étroite, normalement à cette direc-
tion, sur les bords nord et sud du même massif gneissique. Il en est
de même pour les schistes à minéraux (le plus souvent à s tau rôti de).
Les knotenschkfer sont relativement peu développés dans la
Montagne Noire. Us le sont plus, au nord, dans le voisinage des
pointements granuli tiques de la région du Sidobre.
La possibilité de suivre la transformation de la série cambrienne
en série cristallophyllienne, étant un des faits géologiques les plus
intéressants de la Montagne Noire, j'ai cru bon d'en parler avec
quelque développement, bien que la Société ne puisse, faute de
temps, vérifier par elle-même les faits que j'avance.
Cambrlen (1)
La série cristallophyllienne ne correspondant pas dans la Monta-
gne Noire à l'Archéen, le terrain le plus ancien qui y ait été reconnu
est le Cambrien.
Les seules assises cambriennes dont l'âge soit établi avec certi-
tude, appartiennent au Cambrien moyen ou Acadien ; leur faune ne
laisse aucun doute à cet égard. Mais il n'en est pas de môme pour
les niveaux qui leur sont supérieurs et inférieurs. C'est uniquement
pour des raisons d'ordre stratigraphique qu'ils ont été classés dans
le Cambrien, et, si leur attribution au Géorgien ou Cambrien infé-
(1) J'insiste sur les successions et les superpositions d'étages parce que depuis
1880, époque a laquelle je les ai énumérées pour la première fois, j'ai été amené
à modifier à plusieurs reprises l'ordre que j'avais donné à cette époque. 11 en est
résulté que dans deux récents ouvrages de synthèse, U y a eu des confusions
dans les assises paléozolques de la Montagne Noire.
18 Août 1901. — T. XXVII. Bull. Soc Géol. Fr. — 40
622 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
rieur et au Potsdamien ou Cambrien supérieur, est très vraisem-
blable, du moins elle n'est pas certaine par suite de l'absence des
faunes caractéristiques.
GÉORGIEN
Les couches les plus profondes ou les plus anciennes qui se
voient sous l'Acadien sont formées par un calcaire bleu foncé dans
lequel les lits se distinguent assez facilement par suite de légères
différences dans leur coloration et parfois aussi par suite d'inter-
calations de parties argileuses n'arrivant que rarement à être assez
épaisses pour constituer des feuillets ; dans ce dernier cas, leur pré-
sence est surtout décelée par des surfaces légèrement miroitantes
provenant de la transformation de l'argile en séricite. Ces calcaires
sont toujours cristallins.
Fréquemment les calcaires bleus sont mouchetés de taches d'un
blanc jaunâtre ou même brunes qui sont formées par la réunion de
petits cristaux de cal ci te ou de dolomie associés à des cristaux de
sidérose. Parfois ces derniers sont colorés en brun par suite de la
peroxydation partielle du protoxyde de fer du carbonate.
Généralement ces calcaires ont été dolomitisés ; mais cette trans-
formation qui a eu lieu après leur dépôt s'est faite progressivement
en suivant les lits. On peut très bien distinguer encore ces der-
niers quand la dolomitisation n'est pas complète. Ils sont consti-
tués par des grains de calcite de faibles dimensions et à contours
irréguliers ; entre ces lits se voient des bandes formées de cristaux
déplus grandes dimensions, agissant plus vivement que la calcite
sur la lumière polarisée ; ils appartiennent à la dolomie dont la
biréfringence est supérieure (nK — nP = 0,179) à celle de la calcite
(nK — nP = 0,171). 11 y a d'ailleurs encore beaucoup de calcite dans
ces bandes. Les plages sont orientées de telle sorte que l'axe optique
est sensiblement normal à la surface des lits du calcaire primitif.
Quand la transformation est plus complète, on ne retrouve plus
trace des lits ; il y a cristallisation confuse de toute la masse qui
devient grenue. Parfois, très vraisemblablement par suite de la
dissolution de la calcite restée au milieu de la dolomie, celle-ci
devient pulvérulente et alors elle peut être confondue avec la
dolomie sableuse du Dévonien etdu Jurassique moyen de la région.
Dans ces calcaires bleus se rencontrent parfois des facettes spa-
tbiques présentant une petite perforation en leur centre. Au micros-
cope, des coupes minces, faites dans de pareils calcaires, ont
présenté des sections de tiges d'Encrines. 11 est excessivement rare
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 623
de pouvoir distinguer les articles de ces tiges tant elles font corps
avec la masse calcaire.
A mesure que les bancs calcaires se rapprochent davantage de
l'Acadien, ils perdent leur coloration foncée. Us deviennent gris
bleu clair et alors ils renferment des traces d'autres organismes
tous d'ailleurs très mal conservés. Les seuls qu'on puisse déterminer
sont des sections d'Archœoqjatlius, organismes encore mal connus
placés souvent dans les Spongiaires, mais qui sont peut-être des
représentants d'un groupe de Coraux complètement éteint (1). Ces
sections sont comparables à celles décrites et figurées par J.-G.
Bornemann du Cambrien de la Sardaigne (2) sous les noms d'Ar-
chœocyathus et de Coscinoqjathus. Mais leur état de conservation
est encore bien plus mauvais dans les échantillons de la Montagne
Noire que dans ceux de la Sardaigne, et ce nouveau gfte n'a pu
fournir de documents sérieux pour la connaissance de ces curieux
organismes.
Quelque mal connus que soient les Archœocyathus, il semble
qu'il faille leur attribuer, à défaut d'autres fossiles, un certain
rôle dans la classification des terrains. Us ont été signalés en effet
dans le Cambrien de l'Amérique du Nord par Billings (3),Walcott (4),
etc.; dans le Cambrien de la Sardaigne par J.-G. Bornemann (5) et
Meneghini (6); enfin en France je lésai reconnus dans des couches
inférieures à l'Acadien (7). Ce sont donc des organismes qui parais-
sent être cantonnés dans le Cambrien.
Mais peuvent-ils non seulement caractériser ce terrain, mais
encore un de ses étages? Je crois qu'à défaut de certitude, ils peu-
vent donner des présomptions. En effet d'après les indications de
Walcott les espèces américaiues seraient cantonnées dans les
couches à Olenellus Gilberti du Cambrien inférieur (8) ou Géorgien.
Dans la Montagne Noire, c'est également sous l'Acadien qu'on
(1) Frech. Lethœa palœozoica, t II, p. 47.
(2) J.-B. Bornemann. Die Verstelnerungen des cambrischen Schichten Systems
der Insel Sardinien, etc. Nova Acta d. k. Leop. Carol. Deutsch. Akad. der Natur-
forscher, 1" partie, 1886, t. LI, n« 1. p. 3 ? 2- partie, 1891, t. LVI, n* 3, p. 429.
(3) Billings. Patmoz. /b**., II, p. 3 et 354.'
(4) C. D. Walcott. Second contribution to tbe studies on the carabrian Faunas
of North America Bull. Un. St. geol. Suro., n* 30, p. 73.
(5) J. G. Bornemann. Op. cit.
(6) Meneghini. Nuov. Trtlob , p. 201. Paleontologia dell' Iglesiente in Sardegna.
Fauna Cambriana. Trilobité. Mm. d. B. Corn. Geol. Ital., t. III, part. 2, p. 6.
(7) J. Bergeron. Note sur l'allure des couches paléozolques dans le voisinage
des plis tertiaires de Saint-Chinian. B. S. G. F., (3), XXII, p. 378, 1894.
(8) C. D. Walcott. Bull. U. S. GeoL Survey, n* 81. Corrélation papers, p. 319.
624 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÎQUES
rencontre les Archxocyathus. Il est vrai qu'en Sardaigne ils semblent
apparaître plus haut; mais la série stratigraphique est assez mal
établie dans ce dernier pays pour qu'on ne puisse être allinnatif
sur l'âge des couches, d'ailleurs nombreuses, où ils se voient (1).
Dans ces conditions il me semble naturel d'admettre que les assises
renfermant les Archxocyathus ainsi que toutes les couches calcaires
qui leur sont inférieures appartiennent au Cambrien inférieur ou
Géorgien et c'est pour cette raison que j'ai placé la limite de
cet étage au dessus des calcaires gris bleu clair.
L'épaisseur des calcaires que j'attribue au Géorgien, est très
difficile à évaluer; partout où ils affleurent, ils sont affectés de plis
qui donnent l'impression qu'elle doit être grande; mais je n'ai
aucune donnée qui me permette de l'indiquer même avec une
approximation quelconque.
Cette série calcaire se retrouve sur le versant septentrioual
de la Montagne Noire, avec ses mêmes caractères ; mais ses affleure-
ments sont moins beaux que sur le versant méridional, ce qui tient
à ce que ce flanc nord, qui dépend du bassin atlantique, a été moins
profondément attaqué par les érosions que le versant sud qui limite
le bassin méditerranéen.
Vers la partie supérieure s'intercalent des lits schisteux pouvant
atteindre une épaisseur de 0 m. 50 à 0 m. 80. Ils sont jaunes et
offrent le même aspect que certains schistes acadiens dont il sera
parlé plus loin. Us sont d'ailleurs surmontés par des calcaires de
couleur de plus en plus claire, à la partie supérieure desquels se
montrera la faune acadienne, mais il y a continuité dans les assises.
Les derniers horizons géorgiens seraient constitués par un calcaire
blanc à grains fins rappelant les marbres statuaires (2).
Acadien
A partir d'un certain niveau les calcaires blancs se chargent
d'éléments argileux de couleur rouge lie-de-vin ou violacée dont
l'importance augmente rapidement. La roche devient un vrai cale-
schiste. Puis les parties calcaires ne forment plus que des nodules,
dont les dimensions sont sensiblement constantes pour les mêmes
(1) Je reviendrai plus loin sur le Cambrien de Sardaigne. Voir p. 631.
(2) En quelques rares points, comme près du sommet du Saint- Beauzlle, on
y trouve des parties également calcaires, de couleur plus foncée, en forme de
pointes comme des plèvres de Trilobites; je n'ai jamais pu arriver à les assimiler
à quoi que ce fût.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 625
couches (1). Mais ces nodules diminuent en dimensions et en nom-
bre, à mesure que les bancs qui les renferment s'éloignent davantage
de la masse calcaire. Très fréquemment ils sont alignés suivant des
traînées parallèles; le fait est surtout sensible dans les régions
où les couches cambriennes ont été soumises à de fortes pressions.
Je serais porté à admettre que c'est sous l'action de ces efforts
que les nodules se sont disposés avec cette régularité frappante.
Les eaux d'infiltration les ont souvent dissous, surtout ceux de
la partie supérieure, et il en résulte que la roche est vacuolaire;
c'est ainsi qu'aux calcschistes succèdent parfois des schistes troués,
dont les cavités sont alignées comme l'étaient les nodules avant
leur dissolution.
Déjà dans les calcschistes apparaît la faune acadienne : dans les
parois schisteuses de certaines vacuoles se reconnaissent des
empreintes de Trilobites (2). Celle qui est la plus fréquente appar-
tient au Conocephalus coronatus ; les autres sont indéterminables,
cependant elles semblent pouvoir être rapportées aux mêmes
espèces de Conocephalus qui abondent plus haut. Je crois donc être
en droit de rapporter ce premier niveau fossilifère à l'Acadien et
même à la zone à Paradoxides rugulosus de l'Acadien moyen.
Les schistes troués passent insensiblement à des schistes de
couleur lie-de-vin ou violet, sans calcaire, qui renferment une
faune acadienne. Parfois les mêmes schistes sont jaunes; quelle que
soit leur coloration, leur faune est la même ; ils se débitent en
fragments peu épais et de très faibles dimensions. Ce qui prouve
que les schistes jaunes ne sont que des schistes rouges modifiés,
c'est qu'en de nombreux points on peut recueillir des fragments
présentant les deux colorations. Celles-ci sont en relation avec le
degré d'oxydation et d'hydratation du fer.
La faune recueillie dans les schistes jaunes ou violets est la
suivante :
Paradoxides rugulosus Corda.
Conocephalus coronatus Barr.
Conocephalus Heberti Mun.-Chalm. et J. Berg.
Conocephalus LevyiMun. Chai m. et J. Berg.
(1) C'est le premier niveau dans lequel je signale cette structure dite Kramen-
zelstructure par les géologues allemands ; elle se développera beaucoup dans le
Dévonien.
(2) La première note imprimée dans laquelle il soit question de ce passage des
calcaires aux schistes acadiens est due à M. Miqucl {Société d'étude des sciences
naturelle» de Béziers, séance du 28 juin 1893).
626 J. BERGER0N. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Ptyçhoparia Ronairouxi Mun.-Chalm. et J. Berg.
Ptychoparia n. sp.
Agnostus Sallesi Mun.-Chalm. et J. Berg.
Dùcina sp.
Trochocystites Barrandei Mun.-Chalm. et J. Berg. .
Puis ces schistes deviennent moins argileux, moins terreux ; ils
passent à des schistes verdâtres, parfois à de vrais phyllades, dans
lesquels c'est encore la même faune que dans les schistes rouges ou
jaunes; mais les exemplaires sont de dimensions bien plus grandes.
M. Armand Granel m'a communiqué, venant de ces schistes, un
exemplaire de Paradoxides rugulosus assez incomplet qui mesure,
pour quatorze anneaux, une hauteur de 11 centimètres. La largeur
entre les bords extrêmes des plèvres du thorax est de 14 cen-
timètres. Ces schistes verts et phyllades ont une grande puissance,
mais les Trilobites ne se rencontrent qu'à leur base, sur une épais-
seur de quelques mètres, au voisinage des schistes versicolores.
Bien qu'il y ait dans la série schisteuse que je viens d'étudier,
des termes différents les uns des autres par des caractères litholo-
giques assez nets, je ne crois pas cependant qu'il y ait lieu de faire
de ces termes des niveaux distincts car les faunes qu'ils renferment
sont sensiblement les mêmes. 11 est de plus à remarquer que les
gites fossilifères, dont le nombre s'est rapidement accru, grâce à
l'ardeur des géologues du pays, n'ont pas fourni de formes autres
que celles décrites en 1888. Il semble donc bien établi que, dans la
Montagne Noire, il n'y a qu'un niveau caractérisé par les genres
Paradoxides et Conocephalus, c'est-à-dire appartenant à l'Acadien.
Mais il ne représente pas tout l'étage acadien. En effet le seul
Paradoxide qui ait été reconnu est Paradoxides rugulosus dont la
place est bien déterminée dans la série des zones acadiennes : il est
supérieur, dans le nord de l'Europe com me de l'Amérique, à la zone
à Par. Tessini ; la zone qu'il caractérise correspond sensiblement à
la partie moyenne de l'Acadien. Elle devrait être surmontée par
la zone à Par. Forchhammeri et celle à Agnostus lœvigatus.
Il faut donc considérer une partie de la série calcaire inférieure
comme appartenant encore à l'Acadien inférieur. Comme il n'y a
aucun moyen de placer une ligne de démarcation entre les calcaires
non fossilifères du Géorgien et de l'Acadien, j'ai cru préférable,
sur la feuille de Bédarieux, de grouper ensemble sous la rubrique
de calcaires géorgiens tous les calcaires nou fossilifères inférieurs
au premier niveau à Paradoxides.
Les affleurements d'Acadien moyen sont fréquents sur le versant
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 627
méridional de la Montagne Noire ; ils forment le plus souvent des
bandes, longues parfois de plusieurs kilomètres, facilement incon-
naissables aux schistes terreux et jaunes ou aux phyllades vert
foncé qui renferment la faune caractéristique. Sur le versant
septentrional, comme à l'extrémité nord-est du massif, on retrouve
au voisinage des calcaires cambriens, les mêmes schistes et les
mêmes phyllades, mais non fossilifères ; les affleurements y sont
bien moins nombreux que sur l'autre versant. L'épaisseur de cet
Acadien moven serait d'une trentaine de mètres.
POTSDAMIEN
L'Acadien n'est pas mieux délimité à sa partie supérieure qu'à
sa partie inférieure : au dessus du niveau à Paradorides rugulosus
ce sont encore des phyllades comme ceux de l'Acadien moyen,
mais sans fossiles. Ces schistes deviennent très gréseux par place,
surtout sur le versant méridional. Il y a là un ensemble puissant
de plusieurs centaines de mètres. Les assises supérieures changent
progressivement de nature ; elles deviennent plus schisteuses, plus
voisines des ardoises ; finalement on y recueille des fossiles du ni-
veau de Tremadoc, c'est-à-dire de la base de l'Ordovicien. Cette
puissante série schisteuse et gréseuse dans laquelle il n'a pas encore
été rencontré de fossile appartenant à des niveaux déjà connus
ailleurs, doit représenter pour sa partie inférieure les derniers
horizons acadiens et pour sa partie supérieure tout le Potsdamien
ou Cambrien supérieur.
On ne peut songer à s'appuyer sur des changements lithologiques
pour y faire des subdivisions, car sur le versant septentrional de
la Montagne Noire, la même série, c'est-à-dire les assises com-
prises entre les mêmes horizons bien définis, est presque unique-
ment schisteuse, tandis que sur le versant méridional une grande
partie est formée de grès et parfois même de quartzites.
Dans cette série gréseuse les traces d'organismes sont nombreuses.
Certains bancs ont leur surface couverte de pistes de Vers et de
ripple-marks. Ce sont là des indices que les eaux étaient peu pro-
fondes et très vraisemblablement ce versant méridional de la
Montagne Noire correspondait à un rivage; comme plus au nord
le faciès est plus argileux, il faut admettre l'existence vers le sud
d'un continent ou d'un haut fond dont nous ne connaissons pas la
place ; mais il ne semble pas avoir persisté jusqu'au début de l'Ordo-
vicien, ainsi que cela résulte de la nature des sédiments apparte-
nant à l'étage de Tremadoc et occupant les deux versants. Peut-être
628 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÎQUES
à l'époque potsdamienne des Méduses venaient-elles s'échouer sur
ce rivage. On trouve en effet quelques reliefs annulaires qui pour-
raient représenter des moulages de Méduses comme le pense
M. Depéret. Je les avais assimilés primitivement (1) à des orifices de
tubes de gigantesques Annélides. Aucune des formes si curieuses
décrites et figurées par Walcott (2) comme provenant du Cambrien
d'Amérique ne s'en rapproche; seule la figure d'une Méduse décrite
et figurée par Hœckel pourrait appartenir au même groupe. Il In
désigne sous le nom de Medusites porpitinus (3). Walcott la fait
rentrer dans le genre Medusina « terme destiné à renfermer toutes
les espèces de Méduses fossiles dont les caractères génériques ne
peuvent être déterminés » (4). Dans ces conditions la forme du
Languedoc peut être un Medusina. Mais ce n'est pas la même espèce
que celle qu'Hœckel a décrite du Jurassique : dans l'espèce du Lan-
guedoc le cercle intérieur est relativement au cercle extérieur de
plus petit diamètre et par suite l'anneau semble plus large. Je n'ai
vu, sur aucun des exemplaires, trace des bras oi du système circu-
latoire de Tanimal.
Peut-être est-ce encore à des Méduses qu'il faut attribuer les
nombreux sillons et bourrelets que l'on observe à la surface de
certains bancs de grès du même étage. Ce serait des pistes dues au
frottement de leurs appendices.
Par suite des renversements qui sont si fréquents dans la Mon-
tagne Noire et dont je parlerai plus loin, j'avais cru que ces grès
étaient inférieurs à l'Acadien (5) et je les avais distingués à tort
des assises supérieures au niveau à Paradoxides. En 1889 M. de
Rouville (6) les rangeait plus haut dans la série, mais sans bien
préciser, dans l'Ordovicien, au voisinage des calcaires qu'il croyait
dévoniens. Depuis 1894 (7) j'ai reconnu la succession normale et
établi la continuité des assises, au moins depuis l'Acadien moyen
jusqu'au niveau de Tremadoc, telle que je viens de l'indiquer.
(1) Bergeron. Etude géologique du massif ancien situé au sud du Plateau central,
p. 16, fig. 10.
(2) Walcott. Fossil Medusae. Monographs of the vnited st. geol. survey,
vol. XXX.
(3) Hœckel. Zeitsch fur Wiss. Zoologie, t. XIX, p. 556, PI. XLII, fig. 5. (fide
Walcott).
(4) Walcott. Op. cit., p. 49.
(5) Etude géol. du massif ancien, etc., p. 76. B. S. G. F. (3), XVIII, p. 17.
(6) B. S. G. F. (3), XVIII, p. 12.
(7) B. S. G. F. (3), XXII, p. 576.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 629
Résumé sur le Cambrien de la Montagne Noire
La région méditerranéenne fournit de nombreux termes de com-
paraison avec la Montagne Noire.
C'est d'abord l'Espagne où en 1861 l'existence du Cambrien a été
signalée pour la première fois par Casiano de Prado, Barrande et
de Verneuil dans la province de Léon (1). Depuis ce terrain a été
retrouvé dans le sud de l'Aragon (2), dans les Asturies (3), dans
lu Galice (4).
Les analogies avec l'Espagne sont frappantes à tous les points de
vue, et, une des plus remarquables consiste en ce fait que le seul
étage cambrien fossilifère est l'Acadien; de plus le seul horizon
fossilifère est celui à Paradoxides rugulosus qui correspond à la
partie moyenne de l'étage.
Si nous examinons la série cambrienne, au point de vue strati-
graphique et lithologique, nous voyons qu'au nord de Sabero, dans
la province de Léon, les fossiles cambriens se montrent dans des
calcaires rouges séparés les uns des autres par des schistes rouges.
A leur partie supérieure, les calcaires forment des lentilles alignées
dans des couches gréseuses, argileuses, de couleur rouge ou verte.
A sa partie inférieure le calcaire fossilifère passe à des calcaires
blancs dolomitiques. C'est la même série que dans la Montagne
Noire; les seules différences concernent la coloration des calcaires
fossilifères ; de plus il semble qu'à Sabero ce soit le premier niveau
fossilifère du Languedoc, celui de la partie tout-à-fait supérieure de
la série calcaire, qui soit le plus riche en fossiles.
Dans la Galice (5) et les Asturies (6) la succession est encore la
même : la série cambrienne de la Vega comprend une assise calcaire
dont tous les caractères d'ailleurs sont ceux des calcaires que j'ai
décrits précédemment ; les fossiles se rencontrent dans des schistes
argileux verdàtres, avec lits de quartzites. C'est au-dessus de
(1) B. S. G. F (2), XVII, p. 516.
(2) De Verneuil et Lartet. B. S. G. F. (2), XX. — M. Donayre. Bosquejo de
una descripcion flsica y geologica de la prov. de Zaragoza. Mém. com. Map. géol.
Esp.t t. I. — A. Dereims. Recherches géologiques dans le sud de l'Aragon, 1898,
p. 25.
(3) Mallada et Buitrago. But. del Map a geol. de Esp.t 1878, t. V, p. 1. —
Delgado. âc. réal des sciencias, 1879, t. V. — Barrois. Recherches sur les ter-
rains anciens des Asturies et de la Galice, p. 416.
(4) Barrois. Op. cit., p. 410.
(5) Barrois. Op. cit., p. 416.
(6) Barrois. Op. cit., p. 433.
630 J. BERGERON. — tiTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
ces schistes que se trouvent des grès à Scolithus qui correspon-
draient à la base de POrdovicien pour M. Barrois (1) et qui repré-
senteraient le Potsdamien pour M. Dereims (2). Dans ce dernier
cas ce serait l'équivalent des grès à traces de Vers et à Medusina.
En Aragon. (3) la série serait différente au point de vue lithologi-
que; il n'y aurait pas de calcaire à la partie inférieure; tout le
cambrien serait schisteux et ce ne serait qu'au dessus des horizons
à faune acadienne que le calcaire apparaîtrait sous forme de lits
peu épais intercalés au milieu des schistes. On peut se demander
s'il n'y aurait pas de renversements, comme on en voit si fréquem-
ment dans la Montagne Noire. Dans ce cas la série serait conforme
à ce que M. Barrois a observé dans la province de Léon, dans la
Galice et les Asturies.
Quelle que soit la nature des sédiments les faunes restent les
mêmes : à Sabero, Barrande a déterminé les espèces suivantes (4).
Paradoxides Pradoanus Barr.
Conocephalus Sulzeri Zenk.
Conocephalus coronatus Barr.
Ptychoparia (Solenopleura) Hibeiro Barr.
Discina primœva Barr.
Trochocystites bohémiens Barr.
En Galice et en Asturies, M. Barrois (5) a reconnu h la Vega de
Rivadeo et à Pout-Radical les formes suivantes :
Paradoxides Pradoanus Barr.
— Barrandei Ch. Barrois.
Conocephalus Sulzeri Zenk.
Ptychoparia (Solenoplenra) Castroi Ch. Barrois.
— = — liibeiro Barr.
Arioncllus ceticephalus Barr.
Trochocystites bohémiens Barr.
En Aragon M. Dereims (6) a recueilli :
Paradoxides rugulosns Corda.
— Pradoanus Barr.
(1) Barrois. Op. ci/., p. 413.
(2) Dereims. Op. et*., p. 35.
(3; Dereims. Op. cit., p. 26.
(4) Barrande. 11. S. C. F. (2), XVII, p. 516
(5) Barrois. Recherches sur les terrains anciens des Asturies et de la Galice,
p. 16S.
(6) Dereims. Recherches géologiques dans le sud de l'Aragon, p. 29.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 631
Conocephalus Sulzeri Zenk.
— Heberti Mun.-Chalm. et J. Berg.
— coronatus Barr.
Ptychoparia (Solenopleura) Ribeiro Barr.
— Rouaironxi Mun.-Chalm. etJ. Berg.
Agnottus Sallesi Mun.-Chalm. et J. Berg.
Discina.
Ces faunes appartiennent certainement au même horizon. La
présence d'espèces communes, telles que Paradoxides Pradoanus
Barr., Conocephalus Sulzeri Zenk., Ptychoparia (Solenopleura) Ribeiro
Barr. dans tous les gisements ne laisse aucun doute à cet égard.
Mais de plus Paradoxides Barrandei Ch. Barrois qui n'est qu'une
variété, sinon même une forme représentative du Par. rugulosus
Corda, précise bien la place de ces assises dans la partie moyenne
de TAcadien.
D'ailleurs ces faunes offrent de grandes similitudes avec celles de
la Montagne Noire ; je ne parle pas des espèces qui ont pu être
identifiées, mais d'autres telles que Conocephalus Sulzeri et Conoc.
Heberti et Levyi. Ptychoparia Ribeiro eiPtych. Rouairouxi, Trochocys-
tites Bohémiens et Trochocystites Rarrandei, qui sont très voisines les
unes des autres et que Ton peut considérer comme des formes
représentatives les unes des autres.
Jusqu'à ces derniers temps, si Ton s'en rapportait aux descrip-
tions données par Bornemann (1) pour les gttes cambrions de la
Sardaigne, les analogies étaient moindres avec la Montagne Noire.
Mais il est très difficile de se faire une idée exacte des successions
d'assises et de faunes d'après la description de l'auteur ; en tous cas
il signale de nombreuses alternances des mêmes couches qui me
rappellent les plis isoclinaux que j'ai observés dans le Languedoc;
je serais donc porté à croire qu'en Sardaigne comme dans la Mon-
tagne Noire, le Cambrien est affecté de plis avec lacunes dues à des
étirements. D'après Frech (2) le Géorgien serait représenté en Sar-
daigne par les couches à Onelopsis, ce nouveau genre de Bornemann
n'étant autre que le sous-genre Holmia créé par Matthew pour une
section d'Olenellus ; dessus reposerait le calcaire à Archœocyathus.
La série cambrienne serait donc entière, et ce serait le Géorgien qui
serait le mieux développé.
(1) J. G. Bornemann. Die Vorsteinerungen des cambrischen Schlchtensystems
der Insel Sardinien. Nova Acta d. k. Leop. Carol. Peutsch. Akad. der Natur-
forscher. 1" partie, 1886, t. LI, n« 1, p. 1 ; 2* partie, 1891, t LVI, n« 3, p . .
(2) F. Frech. Le l h ma pateozoïca, p. 40.
632 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALKOZOÏQUES
Mais au mois de juillet dernier, le Dr Pompecki a eu l'amabilité
de m'écrire que le professeur E. Fraas avait rapporté de Sardaigne,
d'une localité située à une trentaine de kilomètres de Canal Grande,
des fossiles, qu'il avait déterminés et qu'il avait reconnus être
identiques à ceux que j'ai figurés : Paradoxides rugulosus, Conocepha-
lus Heberti, Conocephalus Levyi, Ptychoparia sp. ; ces fossiles se ren-
contrent également dans des schistes rouge lie-devin et dans des
schistes jaunes. 11 y a donc, en Sardaigne, la même série que dans le
Languedoc. Mais quelle est la position relative des faunes trouvées
par Bornemann et par E. Fraas, c'est ce que nous ne savons pas
encore. Les Paradoxides décrits et figurés par Bornemann et Mené*
ghini sont dans un trop mauvais état de conservation pour qu'il soit
possible de les rapprocher d'espèces connues. Quant aux autres
Trilobites, ils appartiennent à des espèces et à des genres nouveaux ;
il est donc impossible d'en tirer parti pour la classification des
assises qui les renferment.
En résumé, dans la région méditerranéenne, partout où le Cam-
brien a été reconnu, il a présenté la faune de l'Acadien moyen à
Paradoxides rugulosus» Ce sont les mêmes espèces ou des formes
très voisines; les sédiments qui la renferment, comme ceux qui
l'accompagnent, sont les mêmes. 11 est donc certain qu'à l'époque
de l'Acadien, il y a eu une même mer recouvrant la Sardaigne, le
nord de l'Espagne et le Languedoc.
Mais il y aurait eu encore des relations avec des régions très
éloignées du bassin méditerranéen.
M. Matthew (1) a retrouvé dans lo faune ac^dienne delà Mon-
tagne Noire, celle qu'il a étudiée dans l'Amérique du Nord.
Il est incontestable que cette dernière a de grandes analo-
gies avec celle de la Montagne Noire (2) ; mais ce n'est pas
(1) Canadian Record, IV, 1890, p. 260.
(2) J'avais l'intention de publier, avec cette étude stratigraphique, un mémoire
consacré a la Paléontologie des terrains anciens de la Montagne Noire; mais dans la
crainte de retarder davantage la publication du compte-rendu de la Réunion extra-
ordinaire, j'ai dû ne pas attendre que ce mémoire fût terminé. J'aurais voulu par
la même occasion répondre à plusieurs paléontologistes qui m'ont adressé quelques
critiques au sujet de mes déterminations ; comme depuis plusieurs années, je
néglige systématiquement toute polémique jusqu'à ce que mes études sur le ter-
rain soient terminées, ils pourraient croire qu'ils m'ont convaincu sur tous les
points. Je reconnais le bien fondé de plusieurs critiques dont j'ai tenu compte
d'ailleurs dans le présent mémoire ; mais il en est d'autres, relatives le plus
souvent aux espèces nouvelles, que je ne puis admettre. J'exposerai bientôt
dans ce travail paléontologique, les raisons pour lesquelles je crois qu'il est néces-
saire de faire des espèces nouvelles pour des régions distantes les unes des antres.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 633
seulement avec l'Amérique qu'il y a des ressemblances, c'est
encore avec la région septentrionale de l'Europe et M. Pompecki
réclame avec raison la même faune (1) comme dépendant de cette
dernière proviuce paléontologique.
Il y a certainement entre les faunes acadiennes de l'Amérique
nord-est, de la Scandinavie et de l'Angleterre, de la Bohème, de
la Montagne Noire, de l'Espagne et de la Sardaigne des affinités
très grandes et Ton peut les opposer aux faunes de même âge do
l'Asie et de l'Amérique occidentale ; mais, si c'était le même océan
qui occupait l'Europe et l'Amérique orientale, cependant les condi-
tions biologiques ne devaient pas être les mêmes partout, puisqu'on
constate des différences dans les faunes des différents pays.
Certaines espèces pouvant vivre sous toutes les latitudes se
retrouvent constamment : telles sont Paradoiides rugulosus et aff. ;
Conocephalus coronatus et aff.; Conocephalus Sulzeri et aff.; seulement,
suivant les régions, tel caractère devient prédominant, de là les
espèces qui ont pu être faites avec raison dans l'ancien et dans le
nouveau monde; mais, comme l'admet M. Pompecki, ce sont des
espèces représentatives et je ne pense pas qu'il y ait lieu de les
grouper de manière à distinguer des zones multiples.
Par contre je suis très frappé de ce fait que dans la région nord-
est de l'Amérique septentriouale, comme dans le nord de l'Europe,
le Cambrien présente plusieurs étages; de plus d'après l'état actuel
de la science ils seraient les mêmes ; s'il n'y a pas identité de faunes
entre ces régions, du moins elles sont comparables depuis le Géor-
gien jusqu'au Potsdamien. D'autre part dans la région méditerra-
néenne, il y a un ensemble de caractères bien spéciaux et bien identi-
ques à eux-mêmes, du moins en Espagne et dans le sud de la France.
D'abord le Cambrien est sensiblement composé des mêmes termes :
à la base ce sont des calcaires qui peuvent correspondre à des for-
mations de récifs, ou tout au moins à des formations subrécifales,
ainsi que le feraient supposer les débris de tiges d'Encrines et dMr-
chœocyathus qui y ont été trouvés. Puis il y a le même passage de ces
calcaires aux schistes franchement acadiens ; enfin ces derniers ne
correspondent qu'à un seul horizon, celui à Paradoxides rugulosus.
Cette similitude entre les dépôts de l'Espagne et du sud de la France
comme, en partie, entre ceux de la Sardaigne et des régions pré-
cédentes, me porte à admettre « la grande zone méridionale » mais
en la restreignant au bassin de la Méditerranée, sans y comprendre
(1) Die Fauna des Cambrium von Tejrovic und skrej in Bôhmen. Jarhb. d. k.k,
geol. Reichgamt., 1895, t. XLV, 2e et 3* parties, p. 495.
634 J. BERtiERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
la Bohème comme faisait Barrande. Pour ce dernier pays je n'ose-
rais comme M. Pompecki (1), considérer les assises à Paradoxides
comme correspondant aux zones inférieure et moyenne de l'Aca-
dien du Pays de Galles ; mais en tous cas, en dehors des espèces,
déjà citées comme pouvant se rencontrer à toutes les latitudes, il y
a une faune beaucoup plus riche et plus variée que celle de la zone
méridionale; évidemment les conditions biologiques devaient y
être différentes de ce qu'elles étaient dans le bassin méditerranéen
et je crois qu'il faut laisser la Bohême distincte, bien que présen-
tant plus d'affinités que toute autre région avec elle.
Etant donnée la richesse en fossiles de la zone septentrionale
(c'est la région où la faune cambrien ne présente son maximum
de développement), il est naturel de considérer cette faune comme
y étant autochtone. Mais elle est déjà moins riche vers le sud, en
Bohème, où les niveaux sont moins nombreux. Enfin dans la zone
méridionale, le nombre des espèces est tout- à-fait réduit et ce ne
sont plus que celles que l'on trouve partout, c'est-à-dire celles qui
se plient le mieux aux différences de conditions biologiques. Seules,
elles ont pu s'acclimater. 11 semble donc qu'il y ait eu une migration
du nord vers le sud, migration qui, durant le Cambrien, aurait
atteint son maximum vers le milieu de l'Acadien.
Frech (2) admet également à cette époque un mouvement d'inva-
sion de la mer dans la région méditerranéenne qui comprend pour
lui le Languedoc, la Sardaigne et le centre de l'Europe. Il y aurait
eu transgression de la mer par rapport aux terrains plus anciens;
mais l'invasion marine serait venue du sud, par exemple de la
Sardaigne que la mer aurait recouverte pendant le Géorgien, tandis
que le centre de l'Europe aurait été émergé. J'ai dit plus haut com-
ment toutes les assises du Cambrien de l'Espagne et du Languedoc
se font suite régulièrement ; cette transgression ne se serait donc
pas produite, dans le sens indiqué par Frech, mais il y aurait eu
arrivée d'une faune venant du Nord.
Le régime de la zone méridionale, antérieurement à l'Acadien
moyen, était d'ailleurs différent de celui de la zone septentrionale.
Les calcaires y sont très abondants, très épais. Pouvons-nous ratta-
cher ce faciès à d'autres dépôts calcaires d'âge acadien et aussi
géorgien? 11 est impossible dans l'état actuel de nos connaissances
de faire une réponse affirmative ; mais cependant il est quelques
(1) Die Fauna des Cambrium von Tejrovic und Skrej in Bôhmen. Jarhb. d. k. k.
geol. ReichsansL, 1895, t. XLV, 2' et 3f parties, p. 601.
(2) Letfma palœozoua, I, tueU, t Bd, p. 56.
HT DE LÀ TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 635
faits très curieux sur lesquels je crois bon d'appeler l'attention.
Le faciès calcaire pour le Cambrien inférieur et moyen est déve-
loppé vers Test. On le connaît en Russie, dans le Sud de la Sibérie
à Krasnojarsk, où il renferme des Archteocyathus (1), dans le nord de
la Chine (2) dans les Montagnes Rocheuses (3) et daus la partie occi-
dentale de l'Amérique du nord. Dans ces deux dernières régions, la
faune de l'Acadien est caractérisée par le genre Olendides qui
remplace le genre Paradoxides. Les calcaires de la Montagne Noire
qui représentent le Géorgien et une partie de l'Acadien ne renfer-
ment pas cette faune, et je ne préteuds pas les identifier à ceux de
l'Asie et de l'Amérique occidentale ; mais cependant je suis très
frappé de voir les sédiments calcaires du Géorgien et de l'Acadien
jalonner une zone qui, par les quelques points qu'on en connaît,
correspondrait, d'une manière approximative, à la future zone des
formations zoogènes. Y avait-il dès le Géorgien et l'Acadien uue
sorte d'esquisse de celle-ci ? Ce n'est qu'une hypothèse, mais elle
m'a paru assez curieuse pour devoir être signalée.
Frech admet le retrait de la mer lors du Cambrien supérieur,
dans l'Europe centrale. Le fait, pour la Montagne Noire, me semble
être infirmé par l'existence d'une série continue, en concordance
de stratification, depuis l'Acadien fossilifère jusqu'à l'équivalent
de l'étage de Trémadoc. D'autre part en Espagne, sur l'Acadien
reposent des grès à Scolithus et Tig Mites, devant rentrer dans le
Cambrien supérieur pour M. Dereims (4), dans l'Ordovicien infé-
rieur pour M. Barrois (5). En tous cas ils sont en concordance de
stratification sur l'Acadien. Quant à la discordance signalée en
Bohême entre l'Acadien et l'Ordovicien, elle est loin d'être évidente,
des dislocations nombreuses avec chevauchements s'étant produites
dans le centre de la Bohême depuis le dépôt du Silurien. Tout au
plus, le faciès gréseux de la partie supérieure du Cambrien pour-
rait-il indiquer un changement de régime par rapport à celui de
l'Acadien.
La comparaison que j'ai faite entre le sud de la France et
l'Espagne en ce qui concerne le Cambrien, pourrait probablement
se faire aussi en ce qui concerne la série cristallophyllienne ou
(1) Von Toll. NeuesJahrbuch, 1895, II, p. 157 (in de Lapparent).
(2) Dames in China, t. IV, p. 32. — Walcott. Bull, of the un. st. geol. survey,
n° 81, p 377. — J. Bkrgeron. B. S. G. F., (3), XXVII, p. 499.
(3) Walcott. Loc. cit., p. 313.
(4) Dereims. Recherches géologiques dans le sud de l'Aragon, 1898, p. 35.
(5) Barrois. Recherches sur les terrains anciens des Asturies et de la Galice, p. 413.
636 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
série cambrienne métamorphisée. J'ai déjà signalé (1) dans les
environs de Barcelone, près de Vallcarca, la présence d'un ensemble
de schistes plus ou moins métamorphisés et de calcaires qui, par
leur position au-dessous de la série ordovicienne, doivent corres-
pondre au Cambrien.
Peut-être faudrait-il rapporter également quelques-unes des séries
cristallophylliennes du Massif central de la France au Cambrien
métamorphisé. A ne juger que des caractères lithologiques et des
successions d'assises qu'on y observe, il semble bien que cette
hypothèse soit fondée, mais il faudrait encore plus d'études que je
n'en ai faites pour pouvoir être aiïirmatif à cet égard. Théorique-
ment rien ne s'oppose à ce qu'il en soit ainsi ; seules, les observa-
tions sur le terrain permettront de voir si cette hypothèse est fondée.
S'il en a été ainsi à l'époque cambrienne, la mer s'étendait depuis
la Scandinavie jusqu'à la Catalogne, et même vraisemblablement
au-delà, sans rencontrer aucun obstacle dans la région du Massif
central qui n'existait pas encore avec son individualité propre.
Ordovicien
Étage de Trémadoc
Les premières couches ordoviciennes se reconnaissent à l'appa-
rition brusque d'une faune absolument difléreute de toute faune
cambrienne ; les Trilobites de la famille des Asaphidœ, des Calym-
menidœ, etc., sont immédiatement abondants; il en est de même
des Bellerophons ; il y a quelques très rares Agnostus et des Dicello-
cephalus douteux qui rappellent le Cambrien ; mais étant donné le
petit nombre de ces formes à affinités canariennes, elles ne peuvent
être considérées comme assez importantes pour donner l'âge de
cette faune nouvelle.
Au point de vue lithologique, il n'y a guère de différence entre
les dernières couches du Potsdamien et les premières de l'Ordovi-
cien : ce sont les mêmes schistes bleus, à surface lustrée avec
taches ferrugineuses rouges ou jaunâtres. Dès les premières assises
ordoviciennes, apparaissent des nodules noirs siliceux renfermant
fréquemment des restes de fossiles, soit entiers, soit à l'état de
débris. La matière organique semble avoir servi de centre d'attrac-
tion pour la silice; mais très rarement celle-ci se montre avec des
(1) B. S. G. F., (3), XXVI, p. 868.
Et DE LA t ECTONIQUK DÉ LA MONTAGNE NOIRE 637
formes cristallines à l'intérieur de ces nodules, ainsi que cela
s'observe dans les silex du Crétacé ou du Tertiaire. Elle forme
parfois une sorte de croûte tapissaut le moule des fossiles. Le plus
souvent, elle est associée à de l'oxyde de fer qui ne la laisse voir que
très mal et elle n'apparaît qu'après la dissolution de cet oxyde.
La première fois (1) que je reconnus l'existence de cette faune je
n'hésitai pas à la rapporter à la base de l'étage ordovicien ; mais
alors la valeur de l'étage de Trémadoc était très discutée ; pour
plusieurs auteurs anglais il devait y avoir des confusions et des
mélanges d'assises cambriennes et ordoviciennes dans ce soi disant
étage. Pour bien préciser que cette faune nouvelle devait occuper
la base de POrdoviqjen je la rapprochai de celle de l'Arenig inférieur
dont l'âge était bien établi, sans toutefois faire aucune assimilation.
Le mérite d'avoir rapporté cette faune à son vrai niveau revient à
MM. Schmidt (2), Pompecki (3), Brôgger (4) qui, ayant pu étudier
par eux-mêmes et dans des régions où sa place est bien définie, la
faune de Trémadoc, l'ont facilement reconnue dans le Languedoc.
Les formes les plus fréquentes sont :
Agnostus Ferralsensis Mun.-Chalm. et J. Berg.
Dicellocephalus? Villebruni J. Berg.
Euloma Filacovi (5) Mun.-Chalm. et J. Berg. (spec).
Megalaspis Filacovi Muu.-Chalm. et J. Berg.
Asaphelina Barrom Mun.-Chalm. et J. Berg.
Niobe LigneresiJ. Berg. (sp.).
Dictyocephalites Villebruni J. Berg.
Bellerophon Œhlerti Mun.-Chalm. et J. Berg.
Dans des schistes de même aspect que les précédents, apparais-
sent en abondance des Orthocères, comprimés, écrasés, jamais assez
bien conservés pour pouvoir être déterminés. Sur une même
plaque ou dans un même nodule, on trouve associés plusieurs
exemplaires d'Orthocères ; ils semblent être cantonnés, ainsi dis-
(1) B. S. G. F., (3), XVI, p. 212.
(2; In lUteris, 18 février 1896.
(3> Ein neuentdccktes Vorkommen von Trémadoc- Fossi lien bei Hof (sans date).
(4) Uber die Verbrcitung der Euloma-Niobe-Fauna (der Ceratopygenkalkfauna)
in Europa. Nyt. Mag. for Naturcidmsk, t. XXXV, p. 164, 1896.
(5) La plupart des espèces du Languedoc ont été identifiées à celles des régions
septentrionales; il y a là une exagération. H est certain que l'étage de Trémadoc,
avec tous ses caractères faunistiques et lilhologiques, existe dans le Languedoc ;
mais il y a cependant dans le Midi de la France des formes un peu différentes de
celles du Nord de l'Europe, comme le fait s'est présenté déjà pour l'Acadien.
18 Août 1901/ — T. XXVII. Bull. Soc. Gôol. Fr. - 41
638 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOlQUES
posés, à un certain niveau, sans cependant que la faune qui les
accompagne diffère sensiblement de celle que je viens de signaler.
Sur cette série reposent des schistes bleus, mats, renfermant
en grande abondance Niobe Lignerai J. Berg. (sp.) déjà vu plus
bas et surtout Asaphelina Miqueli J. Berg. qui est une des formes
les plus facilement reconnaissables de la région. Peut-être est-ce
à ce même niveau qu'il faut rattacher des schistes de même couleur
et de mêmes caractères que les précédents, mais renfermanMmpfo'on
E&coti J. Berg. ; je n'ai jamais trouvé Asaphelina Miqueli J. Berg.
et Âmphion Escoti J. Berg. à côté l'un de l'autre dans ces couches ;
de plus les assises à Asaphelina Miqueli sont très développées dans
les environs de Saint-Chinian, tandis que les couches à Amphion
Escoti ne sont guère connues que dans les écîîlles de Cabrières.
Le rapprochement est donc lithologique et par suite peut n'avoir
aucune valeur. 11 est à remarquer que dans les couches à Amphion
Escoti, les schistes ont un aspect fibreux; mais cela provient peut-
être du fait que les couches renfermant ce fossile font partie
d'écaillés et par suite ont subi des efforts de compression et de
laminage qui ont pu en changer les caractères physiques.
Etage inférieur et moyen de l'Arenig
C'est au-dessus que se place une puissante série de schistes ver-
dâtres terreux, friables, se fragmentant en débris de très petites
dimensions qui donnent au sol un aspect tout particulier. On les
désigne dans le pays sous le nom de « cagadenier ». Dans les
écailles de Cabrières, dans la combe du Moulin, dans le vallat des
Claviers, ils reposent sur les schistes à Amphion. Leur faune est
riche ; malheureusement, par suite de leur friabilité, les fossiles y
sont rarement bien conservés. Il n'y a pas été encore reconnu
d'horizons différents; mais par leur position entre le niveau de
Trémadoc et celui de l'Arenig supérieur, il n'est pas douteux qu'ils
ne représentent l'Arenig inférieur et moyen.
Les fossiles les plus fréquents appartiennent aux genres Niobe,
Calymmene (groupe des Synhomalonotus de Pompecki) Rcmopleu-
rides, Ampyx, Cybele, Agnostus, Orthis, LingtUa; mais les espèces
sont nouvelles, ce qui ne permet aucune assimilation certaine avec
les faunes déjà connues. Cependant il est permis de dire, d'après
les associations de genres qui sont les mêmes que dans l'étage 3 de
Suède, que c'est une faune appartenant à l'Ordovicien inférieur.
Les Graptolites sont très abondants dans ces schistes dits deBou-
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 639
toury du nom de la première localité où ils ont été reconnus.
M. Barrois (1) qui en a fait une étude particulière a pu y recon-
naître les espèces suivantes :
Didymograptus haïtiens Tullberg.
— Vfractus Salter.
— pennatulus Hall.
— nitidus Hall.
— bifidus Hall.
— indentus Hall.
— Escoti Barrois.
Tetragraptus serra Brong.
— quadribrachiatus Hall.
Rouvillograptus Richardsoni Barrois.
M. Barrois conclut de cette faune graptolitique que les schistes
de Boutoury appartiennent à l'étage de l'Arenig; il lui paraît même
probable qu'ils représentent l'Arenig moyen.
11 y a donc une concordance assez grande entre les deux faunes
trilobitique et graptolitique pour n'avoir aucune hésitation à ranger
ces schistes dans l'Arenig inférieur et moyen.
Ce sont les études subséquentes qui permettront de distinguer
l'un de l'autre ces deux étages.
Etage supérieur de l'Arenig
Dans la colline de Boutoury, dont les schistes précédents consti-
tuent le substratum, on voit ces derniers devenir progressivement
gréseux ; certains bancs se couvrent de paillettes de mica. Ce sont
sans doute d'anciennes plages sur lesquelles se reconnaissent des
traces d'Annélides constituant co que M. de Saporta a désigné
sous le nom de Vexillum Rouvillei Sap. et Cruziana Monspeliensis
Sap. Puis les bancs deviennent de plus en plus gréseux; finalement
ce sont des bancs de grès pouvant atteindre une épaisseur de 0,50
à 0,60. Parfois ils sont feldspathiques et alors ils deviennent
identiques à ceux de l'Ouest de la France. En même temps appa-
raissent des Vexillum aff. Halli Rou. et des Cruziana afl. Goldfussi
Rou. Mais c'est surtout dans les bancs très siliceux que se montre
la faune la plus intéressante de ce sous-étage : elle est caractérisée
(i) Mémoire sur la distribution des Graptolites en France. Ann. soc. géoL du N.,
t. XX, 1892, p. 85. — Sur le Rouvillograptus Richardsoni de Cabrières, Ann. soc.
géoL du N.t t. XXI, 1893, p. 107.
640 J. BERGERON. — ÉTUDE DÉS TERRAINS PALÉ0201QUE8
par une très grande abondance de Lingula Lesueuri Rou. (1)
qu'accompagnent des Dinobolus Bhmonti Rou., et des Lingules du
groupe de L. crumena Phill.
C'est la même faune que celle de l'Arenig supérieur d'Angleterre,
de Normandie, de Bretagne, d'Espagne et de Portugal.
Etage de Llandeilo
Dans la série stratigraphique doit venir ensuite l'étage de Llan-
deilo. En aucun point dans la Montagne-Noire, il n'est facile de
voir la superposition directe de cet étage sur les grès de l'Arenig
supérieur. Il est formé de schistes très voisins, comme aspect,
de ceux de l'étage de Trémadoc. Mais ce qui permet de les
distinguer le plus souvent les uns des autres, c'est que dans les
schistes de Trémadoc les fossiles sont contenus dans des nodules
noirs siliceux, tandis que dans les schistes de Llandeilo ils sont
renfermés dans de grandes concrétions schisteuses qui ont reçu de
Linné le nom de Tuttenstein et que l'on désigne dans le pays sous
le nom de gâteaux. Ce sont des feuillets schisteux fortement com-
primés les uns contre les autres et par suite rendus adhérents. La
structure cône in cône s'y est le plus souvent développée. La faune
est très différente de celle du niveau de Trémadoc. Les fossiles de
beaucoup les plus fréquents sont des Asaphus de grande taille (2),
voisins d' Asaphus glabratus Salter ; mais le type de cette espèce n'a
pas été encore rencontré à Cabrières. De Verneuil a désigné dans
la collection qu'il a laissée à l'Ecole des Mines ces grands Asaphus
sous le nom df Asaphus Fourneti Vern. 11 y a encore dans ces mêmes
concrétions des Illœnus, des Graptolites. M. Barrois cite (3) de ce
niveau Didymograptus euodus Lapw.
C'est le premier horizon silurien qui ait été reconnu dans le
Languedoc. Depuis sa découverte on lui a attribué tous les fossiles
ordoviciens, même ceux qui proviennent des schistes de Boutoury
et des schistes de Trémadoc. C'est en somme un horizon très pauvre
en espèces. Néanmoins les affinités de V Asaphus Fourneti Vern.
avec As. glabratus Salter, permettent de considérer les schistes à
Tuttenstein comme appartenant bien au niveau de Llandeilo. Les
(1) C'est à M. de Tromelin qu'est duc la découverte de ce niveau. Voir Davidson.
Bulleigh-Salterton Pebble lied. Palœotogr. soc, t. XXXV, p. 362.
(2) C'est en 1850 que pour la première fois Fournet signala (0. S. G. F., (2),
VIII, p. 44) en son nom et en celui de Graff la découverte de schistes à grands
Asaphus.
('S) Bahhois. Op. cil., p. 97.
ET DE LA TECTONIQUE OE LA MONTAGNE NOIRE 641
grandes formes qu'on y rencontre rappellent par leurs dimensions
celles des schistes du même niveau en Bretagne.
Cet horizon n'occupe jamais de grandes surfaces; il semble
qu'il soit réduit à l'état de lambeaux sporadiques sur les horizons
ordoviciens qui lui sont inférieurs. Il a toujours été trouvé dans
des écailles et jamais en place. Dans les environs de Cabrières, il
y a bien une dizaine de points où il est connu et facilement
reconnaissable à ses Tuttenstein ; mais nulle part, il ne forme
de bandes continues ainsi que le font les autres horizons.
Etage des grès de May
Le niveau supérieur est caractérisé par des grès très-siliceux,
très-durs, verdâtres, de couleur rousse dans les parties qui ont
été soumises à l'action de l'eau et au contact de l'air. Par suite de
leur richesse en sels de fer, leur coloration change suivant le degré
d'hydratation. La faune est riche en Calymmenella BoisseUJ. Berg.,
Trinucleus sp., Dalmanites sp.
Par sa position, immédiatement sous les couches à OrthU
Actoniœ, ce niveau est l'équivalent des grès de May, de l'Ouest de
la France. La présence du genre Calymmenella qui est cantonné
dans les grès de May et de St-Germain-sur-IUe, ne laisse aucun
doute sur l'exactitude de cette assimilation.
Son principal gisement, dans le Languedoc, est au Grand Glauzy,
à l'ouest de Neffiez.
Etage de Bala et de Caradoc
Sur ces grès et en concordance de stratification avec eux, repose
un ensemble de schistes calcareux avec bancs calcaires.
Les schistes prédominent à la base; ils renferment un grand
nombre d'Orthis qui, le plus souvent, ne se reconnaissent que par
l'empreinte qu'ils ont laissée dans les schistes, leur coquille ayant
été dissoute par les eaux d'infiltration. D'ailleurs ces couches sont
très souvent décalcifiées. Les espèces les plus fréquentes sont :
Orthis Actoniœ Sow.
— calligramma Sait.
— vespertilio Sow.
— - alternata Sow.
— porcata M'Coy.
642 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRA1N8 PALÉOZOÏQUE8
Dans les bancs calcaires de la partie supérieure, les Cystidées sont
nombreuses et de grandes dimensions. M. von Kœnen en a décrit (1)
les espèces suivantes :
Corylocrinus piriformis v. Kœnen.
Juglandocrinus crassus v. Kœnen.
Caryocistites Rouvillei v. Kœnen.
On y retrouve encore les mêmes Orthis que dans l'étage précé-
dent et en particulier Orthis Actonise qui y est abondant.
C'est un niveau qui représente celui de Bala et de Caradoc en
Angleterre ; on le connaît eu Normandie et en Bretagne , en
Belgique, dans les Pyrénées, en Espagne.
Ces assises ne sont connues, en Languedoc, que dans les écailles
de Laurens-Gabian et du Falgairas.
• Il est à remarquer combien sont peu connus les contacts des
différents horizons ordoviciens entre eux. Cela tient à l'allure des
couches. Il n'y a que quelques points sur le versant méridional de
la Montagne Noire où les assises siluriennes soient en place; mais
alors on ne voit que les assises tout à fait inférieures de l'Ordo-
vicien, en superposition les unes sur les autres, le reste de l'étage
étant caché sous le Secondaire et le Tertiaire, comme dans les envi-
rons de Saint-Chiaian. Parfois la série qui est en place et semblerait
devoir être complète, a subi des compressions telles que certains
horizons sont réduits au point de passer inaperçus. Enfin dans les
écailles qui ramènent au jour le Silurien sur le Carbonifère, beau-
coup de niveaux ont disparu par laminage, de sorte que la super-
position normale ne se voit plus et souvent même certaines assises
sont isolées entre le Carbonifère du substratum et le Dévonien de la
partie supérieure.
C'est ce qui explique pourquoi il a été si long d'établir la suc-
cession des niveaux siluriens dans le Languedoc : il n'y avait pas
à compter avec la stratigraphie, étant données ces lacunes ; il
fallait trouver des fossiles et, le plus souvent, ils ne se rencontrent
que par rares amas dans lesquels, il est vrai, les exemplaires sont
nombreux.
•
(1) Ueber neue Cystideen aus den Caradoc-Schichten der Gegend von Montpellier.
Ncues Jahrb, 1886. Bd II, p. 246, pi. VIII, et IX.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 643
Résumé sur i/Ordovicien de la Montagne Noire
Nous avons vu les relations qui devaient exister entre la zone
septentrionale de l'Europe et le Languedoc, à l'époque acadienne;
elles sont tout aussi évidentes, sinon même plus, au début de
l'époque ordovicienne.
M. Brôgger dans son étude magistrale sur la faune à Euluma-
Niobe (1) a passé en revue toutes les régions où ont été reconnus
les fossiles de l'étage de Trémadoc. Je ne puis mieux faire que d'y
renvoyer le lecteur. Ce que je tiens à faire remarquer, c'est que l'on
peut encore, comme à l'époque cambrienne, suivre la communication
de la mer qui occupait la région septentrionale de l'Europe avec
celle de la Montagne Noire par la Bavière. Elle s'étendait d'ailleurs
jusqu'en Catalogne (2); mais cette similitude de faune ne dure que
pendant le temps où se déposaient les étages de Trémadoc, de
l'Arenig inférieur et moyen. Ce sont les mêmes genres et même
des espèces très voisines, au nord comme au sud ; ce sont peut-être
encore des espèces représentatives les unes des autres. En tous cas,
il n'y a pas de doute qu'il y ait eu une communication facile entre
le Pays de Galles, la Scandinavie et la Montagne Noire. Mais à la
fin de l'Arenig, les analogies avec la province Scandinave n'existent
plus et les affinités sont plus grandes avec les dépôts des régions
occidentales de l'Europe. En Normandie et en Bretagne, il y avait
eu jusqu'à ce moment une diflérence très nette avec le Languedoc;
le faciès, comme l'allure des couches, indiquait un régime cotier.
Il semble que lors du dépôt de l'Arenig supérieur ce régime se soit
étendu davantage vers l'est, englobant la Montagne Noire.
Il en est encore ainsi pendant que se dépose l'étage de Llandeilo.
Tandis qu'en Scandinavie, la faune encore très riche, renfermait des
Ampyx, des Nileus, des Remopleurides, des Megalaspis, etc., qui
indiquent une faune descendant directement de celle qui caracté-
rise l'étage de Trémadoc, dans le Languedoc, la faune est différente :
elle a plus d'affinités avec celle de l'Ouest de la France, de l'Angle-
terre, de l'Espagne et du Portugal.
Cette interruption de communication directe entre la Scandi-
navie se continue pendant le dépôt de l'étage de Bala et de Caradoc.
(1) Ueber die Verbrcitung der Euloma-Niobe-Fauna (dcr Oratopygenkalkfauna)
in Europa. Nyt. Hag. for Naturtvdedsk, t. XXX, p. 164.
(2) M. Barrois a reconnu la faune à Euloma-Niobe aux environs de Barcelone.
B. S. G. F., (3), XXVI, p. 867.
644 J. BERGBRON. — ÉTUDE DBS TERRAINS PALÉOZOlQUES
Les grès du Glauzy, qui sont l'équivalent des grès de May, ainsi que
les schistes et calcaires à Orthis Actoniœ et à Cystidées, se rappor-
tent au faciès de l'Ouest de la France, de l'Angleterre, des Pyrénées,
et de l'Espagne. '
En résumé pendant l'Ordovicien inférieur, les relations entre la
Scandinavie et le Languedoc étaient restées les mêmes que pendant
le Cambrien moyen et probablement supérieur. A partirde l'Arenig
supérieur, le Languedoc semble faire partie de la même province
que toutes les régions occidentales de l'Europe (Angleterre, Bre-
tagne et Normandie, Pyrénées, Espagne et Portugal).
Gothlandien
Le Gothlandien est caractérisé, dans la Montagne Noire comme
partout, par ses schistes ampéliteux noirs. Ils reposent en quelques
rares points sur les schistes et calcaires du niveau de Bala et de
Caradoc : près du mouliu de Faytis dans la vallée de la Peyne,
près du mas de Lauriol dans la vallée du ruisseau de Pitrous. Us
se rencontrent le plus souvent, dans les écailles, sur un niveau
quelconque de l'Ordovicien, ce qui tient aux laminages subis par
les horizons siluriens, lors du charriage des nappes de recou-
vrement.
Ils sont caractérisés par des Graptolites abondants appartenant
au groupe des Monograptus. Dans son étude sur les Graptolites de
France, M. Barrois a signalé les espèces suivantes :
Monograptus priodon Bronn.
— Bohémiens Barr.
— colonus Barr.
— Rœmeri Barr.
— Nilsonni Barr.
Cette dernière espèce est parfois très abondante. Il en est de
même pour Cardiola interrupta Sow.
Au milieu des schistes, il y a des amandes d'un calcaire noir,
riche en pyrite, très dur, faisant feu au marteau. Elles sout alignées
aux mêmes niveaux, se faisant suite les unes aux autres de manière
à dessiner des horizons. Quand elles ont été exposées pendant long-
temps à l'air, elles s'altèrent à la surface et prennent une colora-
tion rougeâtre qui provient de l'oxydation de la pyrite et de la
formation d'oxyde de fer hydraté; cette oxydation d'ailleurs est
toute superficielle. Ces amandes, dont les plus volumineuses
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 645
n'atteignent jamais un mètre cube, sont des concrétions qui se sont
formées autour d'organismes calcaires tels que Cardiola interrupta
ou de nombreux fragments d'Oi thocères. Parfois elles sont criblées
de M. priodon Bronn., qui se dessinent en noir dans un calcaire
blanc ou gris clair.
Ces schistes noirs, à leur-partie supérieure, se chargent de plus
en plus de calcaire. Celui-ci finit par former des lits dont l'épais-
seur augmente progressivement. Finalement ce n'est plus qu'une
formation de calcaire gris remarquable par la richesse de sa
faune. Les espèces suivantes y ont été rencontrées :
Orthoceras styloideum Barr.
— severum Barr.
— originale Barr.
Tuhina patula Barr.
Cardiola interrupta Sow.
— Bohemica Barr.
S lava bohemica Barr.
Maminka comata Barr.
Arethusina Konincki Barr.
Spirifer sulcatus Hisi ng.
Atrypa Sapho Barr.
— hircina Barr.
— Philomela Barr.
— Megœra Barr. (sp.).
Strophomena, nombreux.
Il est donc possible dans le Languedoc de faire deux subdivi-
sions dans le Gothlandien, subdivisions qui doivent correspondre
à celles que BaTande a admises en Bohême. D'ailleurs toutes les
espèces reconnues jusqu'à présent dans la division supérieure du
Languedoc existent en Bohême. Il semble donc qu'à la fin du
Silurien les relations directes entre les deux régions se soient
rétablies; mais les affinités avec la Scandinavie étaient moins
grandes qu'au commencement de l'Ordovicien.
Le Gothlandien n'est connu dans la Montagne Noire qu'en un
nombre restreint de gisements: sur toute la bordure de l'écaillé de
Laurens-Gabian ; en bordure de l'écaillé du Falgairas, du côté de
Cabrières comme du côté de Vailhan. Dans tous ces gisements on a
aflaire à des écailles ; le Gothlandien n'a jamais été trouvé en place
sur le versant méridional de la Montagne Noire. Il semble donc que
là où il est connu, il ait été entraîné de régions situées plus au sud
que celles où il se rencontre actuellement.
646 J. BERGER0N. — ÉTUDR DES TERRAINS PALÉ0Z0ÎQUE8
La disparition du Gothlandien pourrait avoir deux causes diffé-
rentes.
Là où les couches dévoniennes sont eu place, c'est-à-dire le long
de la vallée du Jaur et de l'Orb, dans les anticlinaux qui s'étendent
de Faugères à Villeneuvette, dans l'anticlinal de Roquebrun, elles
reposent directement et indifféremment sur les schistes du Potsda-
mien et sur ceux de l'étage de Trémadoc. Il y a donc indépendance
du Dévonien par rapport à l'Ordovicien et au Cambrien. Comme
les massifs dans lesquels on observe de pareilles lacunes n'ont pas
eu à subir d'autres efforts que ceux décompression et que d'autre
part le Gothlandien existe sur le versant septentrional de la Mon-
tagne Noire, il est vraisemblable que si la série silurienne y était
complète, on en trouverait trace en un point quelconque; il faut
donc admettre : ou que la série s'est déposée complète, mais qu'elle
a été enlevée en partie par érosion avant le dépôt du Dévonien
inférieur, ou que déjà pendant le Silurien, il s'était produit un
soulèvement par suite duquel les derniers étages de ce terrain ne
se sont pas déposés. De toutes façons, il est probable qu'il y a eu un
mouvement du sol antérieur au Dévonien dans la région de la Mon-
tagne Noire qui avoisine le massif gneissique ou qui le constitue.
D'après la composition des écailles, le Gothlandien s'est déposé
sur la série ordovicienne dans la région méridionale d'où provient
la nappe de recouvrement; mais lors du charriage, il a disparu, en
de nombreux points, par laminage.
Dévonien inférieur
Sur les calcaires gris du Gothlandien supérieur qui se voient au
fond de la Combe Izarne près Cabrières et qui forment le soubas-
sement du plateau du Falgairas, reposent en concordance de stra-
tification, des grès de couleur légèrement rosée ou brunâtre, due
aux oxydes de fer qu'ils renferment. Jusqu'à présent ces grès n'ont
fourni comme fossiles que des moules de tiges d'Encrines et quel-
quefois des fragments de ces tiges. Leur épaisseur ne dépasse guère
une dizaine de mètres.
La présence de ces Encrines n'est pas suffisante pour permettre
une assimilation d'âge ; mais il est à remarquer que dans le Hartz,
le Dévonien débute par de semblables grès à Encrines, correspon-
dant au Gedinnien. Etant données les nombreuses analogies qui
existent pour le Dévonien entre le Languedoc et le Hartz, ainsi que
je le démontrerai plus loin, il y a grande probabilité que les grès
du Falgairas soient gédinniens.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MO NT AG SB NOIRE 647
De semblables grès se rencontrent encore entre le Gothlandien
et la dolomie dévonienne du côté de Laurens.
Le plus souvent, ils n'existent pas à la base du Dévonien qui
débute par des calcaires dolomitiques, finement grenus, de couleur
grise ou bleu gris; quelquefois ils sont pulvérulents et rappellent à
s'y méprendre les dolomies sableuses de l'Infralias et du Jurassique
moyen. On n'y a jamais trouvé que des moules de Brachiopodes,
absolument indéterminables, ainsi que des tiges d'Encrines. Dans
ces conditions il est impossible de préciser l'âge de ces dolomies.
Mais comme elles sont immédiatement inférieures aux bancs
calcaires renfermant le Spirifer cultrijugatus F. Rœmer et supé-
rieures aux grès qui pourraient être gedinniens, il est naturel d'en
faire l'équivalent du Coblentzien.
Quand les assises sont en place, l'épaisseur de la dolomie est de
100 à 200 mètres. Mais dans les écailles, là où il y a eu des com-
pressions et parfois des laminages, cette épaisseur est très variable
et peut se réduire à quelques mètres.
Dévonien moyen
A leur partie supérieure ces dolomies passent à des calcaires
grenus, puis à des calcaires faiblement argileux. Alors la stratifi-
cation s'accuse de plus en plus. Ce sont finalement des alternances
de bancs calcaires plus ou moins marneux, parfois très fossilifères.
Les Polypiers sont nombreux surtout à la base des calcaires ; la
silice s'est souvent concentrée autour d'eux ; de là leur nom de
Calcaires à Polypiers siliceux.
La faune est très riche. Les espèces les plus importantes sont
Spirifer cultrijugatus F. Rœm., et Calceola sandalina Lamk., parce
qu'elles permettent de déterminer ces calcaires comme appartenant
à l'Eifélien. Mais il y a encore abondance de :
Phacops occitanicus Trom. Grasset.
Bronteus meridionalis Trom. Grasset.
Orthis striatula Schl.
Strophomena rhomboidalis Wahl.
Atrypa reticularis Lin.
— aspera Schl.
Uncinulus Orbignyanus Vern. sp.
Pentamerus Œhlerti Barrois var. Languedociana Trom.
Grass.
Spirifer cabedanus Vern. var.
648 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Spirifer Gerolsteinensis Stein.
Heliolites porosa Larak.
Amplexus annulatus M. Edw. et H.
Zaphrentis gigantea Lesueur.
Phillipsastrea Hennahi M. Edw. et H.
— cantabrica M. Edw. et H
Cyatfwphyllum helianthoides Goldf.
Favosites Goldf iissi M. Edw. et H.
— fibrosa Goldf.
Alvéolites subœqualis Mich.
Je n'ai cité dans cette liste déjà nombreuse que les espèces que
j'ai trouvées moi-même dans ces assises. M. Barrois, qui d'ailleurs,
a le premier précisé l'âge de ces calcaires (1), d'après des fossiles
qui lui avaient été envoyés, a donné une liste un peu différente, par
suite de confusions de niveaux faites par l'envoyeur. M. Frech (2),
a étudié ce même horizon, comme d'ailleurs tout le Dévonien de
Cabrières avec un très grand soin ; mais, même après avoir examiné
sur place les niveaux qu'il a cru devoir établir dans le Dévonien
du Languedoc, je ne puis admettre sa classificaiion. Il voit dans
ces calcaires à Polypiers siliceux trois niveaux: l'un correspondant
bien au niveau à Spir. cultrijugatus et cantonné à la Combe d'Izarne ;
au-dessus viendrait le calcaire siliceux de Ballerades ; enfin le Dévo-
nien moyen serait terminé par les calcaires en dalles de Bataille ou
par le calcaire ferrugineux du Pic de Bissous. J'ai déjà dit (3) pour-
quoi je considère les calcaires de la Combe Izarne, de Ballerades et
de Bataille comme de même âge ; je n'y reviendrai pas. Je ferai
remarquer que M. Frech lui-même dans son tableau de la p. 172
de son dernier travail signale une dizaine d'espèces communes
aux niveaux de la Combe Izarne et de Ballerades ; les différences
qui, dans ces conditions, subsistent entre les deux gisements
sont purement locales. Les calcaires de Bataille correspondraient
aux assises tout à fait supérieures du calcaire à Polypiers siliceux ;
peut-être même renfermeraient-ils déjà quelques espèces du Givé-
tien. Quant aux calcaires ferrugineux du Pic de Cabrières, ils foui
partie du Givétien, ou même de la base du Frasnien.
Le « calcaire de Japhet à Phacops fecundus » que M. Frech range
avec doute à la partie supérieure du Dévonien moyen, n'est autre
(1) Ann. Soc. Géol. Nord, t. XIII, 1885, p. 74.
(2) Zeitsch. d. d Géol. Gesell., 1887, p. 359. — Lethœa palœozoica, 1. 1, p. 172.
(3) B. S. G. F., (3), XVI, 1888, p. 935. - Étude du massif ancien situé au sud
du Plateau central, 1889, p. 133.
Et DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 649
chose que le calcaire de la Combe Izaroe et de Ballerades à Ptiacops
occitanicus Trora. Grass. ainsi que je l'ai dit dès 1888 (1).
C'est également à ce même niveau qu'il faut rapporter le a Cal-
caire siliceux de Bissounel à Ph. Escoti » de M. Frech, ce Phacops
n'étant autre chose que Ph. occitanicus Trom. Grasset.
A ce calcaire, toujours un peu grossier, qui représente l'Eifélien
entier, bien que le niveau supérieur à Spir. concentrions Rœra.,
n'y ait pas été encore reconnu, succède un calcaire blanc spathi-
que, très développé au Pic de Bissous dont il constitue le point
culminant. Il est désigné sous le nom de « calcaire blanc du Pic ».
La faune qui y a été trouvée est remarquablement riche ; beaucoup
d'espèces sont nouvelles ou bien ce sont des variétés d'espèces
connues déjà dans le Givétien de la région rhénane; d'autres au
contraire peuvent être assimilées à des espèces de cette dernière
région. Telles sont :
Tornoceras simplex v. Buch.
Meneceras terebratum Sandb.
Rhynchonella crenulata Sow.
— ascendens Steining.
Spiri/er Maureri Holz.
Pentamerus globus Schw.
Mais il en est d'autres qui appartiennent à la faune de Konieprus
de Bohême, comme Spiri/er indifférons Barr., Atrypa philomela Barr.
Dans les deux régions les Polypiers sont nombreux, et tous de
petite taille. Ils appartiennent aux genres Amplexus, Favosites,
Petraia, etc.
Les espèces nouvelles déjà décrites sont : Harpes Escoti J. Berg.,
Phacops Munieri J. Berg., Ph. Houvtllei J. Berg., Cheiwrus Lenoiri
J. Berg., Br ont eus Gouzesi J. Berg., Rhynchonella bissounensis
J. Berg., mais il en est bien d'autres que je ferai -connaître prochai-
nement dans le mémoire paléontologique qui est en préparation.
La position de ces calcaires blancs a été longtemps discutée. Me
basant sur leur position stratigraphique entre le niveau à Spirifer
cultrijugatus et celui à Gephyroceras intumescent, je les assimilais
au Givétien (2); telle ne fut pas l'opinion de M. Frech, qui crut y
reconnaître la faune de l'étage F* de Mnenian en Bohême ; il les assi-
(1) B. S. G. F., (3), XVI, 18*8. p, 944.
(2) Étude paléontologique et stratigraphique des terrains anciens de la Monta-
gne Noire B S. G. F., (3;, XV, 1887, p. 376.
650 J. BERGERON. — ETUDE DES TERRAINS PALi0Z0lQUE8
milait ainsi à la partie supérieure du Dévooieu inférieur (1). La dis-
cussion que nous eûmes relativement à l'âge de ces calcaires,
M. Frech (2) et moi (3), ne nous fit rien modifier à notre manière
de voir à tous deux. Depuis, M. Holzapfel, dans son beau travail sur
le Dévonien de la région rhénane (4), exprima, en 1895, l'opinion
que le calcaire du Pic pourrait bien être l'équivalent de la partie
supérieure du Dévonien moyen. En 1897 M. Frech (5) a repris de
nouveau son opinion de 1887 et maintint toujours le calcaire du Pic
à la partie supérieure du Dévonien inférieur. Il est certain qu'il
existe entre les calcaires de Konieprus et ceux dits du Pic une
identité frappante de faciès. Mais ce caractère ne suffit pas ; l'étude
des récifs jurassiques a montré qu'un même faciès pouvait se con-
server sinon identique à lui-même, du moins très peu différent,
pendant de longues périodes, alors que les faunes et en particulier
la faune ammonitique, en dehors de la zone récif aie, étaient suscepti-
bles de grands changements. C'est ainsi que la présence de quel-
ques rares Céphalopodes, sur le bord des récifs jurassiques, a
permis d'y distinguer des étages qui , sans cette circonstance ,
auraient passé inaperçus. Heureusement qu'à partir du Dévonien
les Céphalopodes de la famille des Goniatites vont devenir nom-
breux et leur rencontre permettra de préciser l'âge des couches
dans lesquelles apparaîtront certains genres de Goniatites. Dans
les calcaires blancs du Pic se voient des Meneceras (6) et des
Tornoceras associés à la faune déjà citée. D'après Holzapfel (7) ces
deux genres ne se montrent que dans le Dévonien moyen, le pre-
mier étant cantonné pour ainsi dire dans la partie supérieure du
Dévonien moyen (Givétien). La présence de ces genres dans le cal-
caire du Pic, s'il appartenait au Dévonien inférieur, serait tout à fait
extraordinaire, tandis qu'elle est très naturelle s'il est Givétien.
Si la découverte annoncée par M. de Rou ville (8) du Strïngoce-
(1) Die palœozoischen Bildungen von Cabrières (Languedoc). Zeitschd. d. Géol.
Gesell., Jahrg, 1887, p. 406.
(2) Frech. op. cit., p. 459.
(3) Réponse au Dr Frech. B. S. G. F., (3), XVI, 1888, p. 940. — Étude géolo-
gique du massif ancien situé au sud du Plateau central, 1889, p. 133.
(4) Das obérera Mitteldevon im Rheinischen Gebirge. — Abhandl. d. k. Pr.
geol. Landesanstalt, 1895, p. 427.
(5) Lelhœa palseozoica, t. 1, p. 197.
(6) Hauo (Etude sur les Goniatites. Mém. paléont. Soc. Géol. Fr. N* 18, p. 56).
cite de Cabrières Meneceras terebratum Sandb. et Tornoceras simplex v. Bucb.
(7) Op. cit., p. 426.
(8) Âc. Se. et Lettres de Montpellier. Section des sciences. Extrait du procès-
verbal de la séance du 9 juillet 1894.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 651
phalus Burtini dans ces calcaires se confirme, la question serait
définitivement tranchée conformément à ma manière de voir.
Très fréquemment, dans ces calcaires blancs, se voient, sur de
grandes longueurs, des bandes cariées, de coloration rouge ; il s'est
produit une dissolution du calcaire en même temps qu'une oxyda-
tion et une hydratation des sels de fer qu'il contenait. J'aurai
occasion de revenir plus loin sur ces accidents dont la direction
est d'ailleurs sensiblement parallèle à celle des plis ou des cassures.
Ces calcaires givétiens affleurent dans toutes les bandes dévo-
niennes; mais le plus souvent, ils ne sont pas fossilifères et ne se
laissent reconnaître qu'à leur couleur blanche et à leurcristallinité
plus grande que celle des autres dépôts dévoniens. Les gttes fossili-
fères sont abondants autour de Cabrières ; on en connaît au Pic de
Bissous, à la colline de Ballerades, à celles de Japhet I, deTourière,
de Bataille et de la Serre. Un gite très riche se trouve au Mont
Peyroqx au sud-est de Roquebrun.
Si l'on compare les séries eifélienne et givétienne du Languedoc
à celles de l'Allemagne, elles paraissent pouvoir se paralléliser dans
leur ensemble les unes avec les autres. Je ne doute pas qu'à la
suite des études de détail que je vais entreprendre maintenant, le
parallélisme ne soit complet.
•
Dévonien supérieur
Au Pic de Bissous les calcaires blancs givétiens se coloreot en
rouge à leur partie supérieure ; à partir d'un certain niveau appa-
raissent des Goniatites appartenant au genre Gephyroceras, C'est lui
qui permet de reconnaître lé Dévonien supérieur. Mais parfois les
calcaires frasniens, au lieu d'être roses ou roiiges sont noirs et
donnent, sous le marteau, une odeur fétide. Ces calcaires noirs
peuvent être compacts ou schisteux. La faune que l'on rencontre
dans ce Frasnien est la suivante :
Tornoceras simpleœ v. Buch.,
Gephyroceras intumescens Beyrich.,
Orthoceras en débris,
Cardiola Nehdensis Kays.,
Camarophoria sp.
Parfois les fossiles sont groupés par places et tout autour le
calcaire s'est concrétiooné de telle sorte qu'il forme ce que les
géologues locaux appellent des galettes; elles rappellent à s'y
652 J. BERGEKON. — ÉTUDE DE8 TERRAINS PALÉOZOÏQUES
méprendre les concrétions calcaires du Gothlandien; mais elles
sont bien moins dures, se fendent suivant le plan de dépôt des fos-
siles et émettent une odeur fétide, caractères qui permettent de les
distinguer ; elles sont toujours très riches en fossiles ou en débris
de fossiles : Orthoceras, Tornoceras simplex v. Buch, Avicules, etc.
Ces calcaires rouges ou noirs sont recouverts par des calcaires
noirs ou bleu foncé, vacuolaires, dans les vacuoles desquels se
voient des Goniatites ferrugineuses, toujours de petites dimensions.
Elles sont remarquablement nombreuses. Voici la liste des espèces
qui y ont été recueillies tant par M. Frech que par moi :
Tornoceras simplex v. B.,
Gephyroceras retrorsum v. B.
Beloceras mullilobalum Beyr.
— Kayseri Holzap.
Chiloceras amblylobum Sab.,
— subpartitum Mstr.
— planilobum Sbd.,
— oxyacantha Sdb.,
— curvispina Sdb.,
En plus de ces Céphalopodes, il y a des Acéphales nombreux, tels
que Cardiola Nehdensis Kayser, Cardiola tenuistriata Goldf ., Cardiola
retrostriata V. Buch. 11 est certains bancs qui sont couverts d'exem-
plaires de cette dernière espèce.
Le plus souvent les fossiles qui primitivement étaient pyriteux
sont à l'état d'hydroxyde. Ils se rencontrent dégagés dans des
vacuoles comme si le calcaire avait été dissous à leur contact.
Il y a, comme je l'ai dit, passage insensible des calcaires noirs ou
rouges à Gephyroceras intumescens aux calcaires noirs ou rouges à
Chiloceras curvispina Sbd. Il est impossible de mettre une ligne de
démarcation entre les deux. Néanmoins les Gephyroceras sont plutôt
cantonnés à la base, tandis que dans les couches supérieures il y a
un grand nombre de Chiloceras et de Tornoceras.
Dans les calcaires noirs se développent parfois des concrétions
siliceuses noires ; leur forme est irrégulière mais toujours aplatie ;
elles ne forment jamais des lits continus, et se distinguent ainsi
des lydieunes du Carbonifère inférieur dont il sera question plus
loin; ce sont uniquement des accidents siliceux, dus sans doute,
comme ces dernières, à des dépôts siliceux, provenant de la très
grande abondance des Radiolaires.
La superposition des couches, telle que je viens de l'indiquer, est
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOtRE 653
parfaitement nette au Pic de Bissous, à la colline de Ballerades, à
celles de Tourière, de Japhet, et de la Serre, dans la Combe Izarne;
il n'y a pas de doute relativement à la superposition de ces niveaux,
M est nécessaire toutefois de faire remarquer qu'en plusieurs points
tels que le Pic de Bissous, la colline de Japhet, il y a eu des renver-
sements de couches et, par suite, Tordre de superposition est inverse
de celui que je viens de donner.
Kayser et Frech ont établi et soutenu à plusieurs reprises l'exis-
tence de cette superposition (i); cependant il y a peu de temps
encore, M. Haug (2) a émis l'hypothèse que les couches à Chiloceras
curvispina n'étaient qu'un faciès argileux des calcaires à Clyménies.
Mais à Cabrières elles sont constituées par du calcaire et le faciès
lithologique est celui des calcaires à Gcph. intumescens.
A cette série de calcaires noirs succèdent des calcaires très com-
pacts susceptibles de prendre le poli et d'être employés comme
marbres. (Pour la succession des niveaux du Dévonien supérieur et
du Carbonifère inférieur voir PI. XVIII) (3). On y voit en très
grand nombre des nodules rouges se détachant sur un fond rouge
d'un autre ton : de là le nom de marbres griottes (cerises). Ces
nodules ne sont souvent autre chose que des Goniatites (Chiloceras).
Les Clyménies, qui apparaissent pour la première fois, sont moins
nombreuses que les Goniatites, mais elles peuvent atteindre de très
grandes dimensions, jusqu'à quinze centimètres de diamètre. Géné-
ralement, ces fossiles font corps avec la roche de telle sorte qu'il
est très difficile de les en détacher. Les espèces les plus fréquentes
sont les suivantes (4) :
Clymenia (Cyrtoclymenia) angustiseptata Mstr.
— — flexuosa Mstr.
— — binodosa Mstr.
— — Dunkeri Mstr.
— — lœvigata Mstr.
— (Oxyclymenia) undulata Mstr.
— — striata Mstr.
— (Gonioclymenia) speciosa Mstr.
En plus des Clyménies, on y rencontre des Orthocères, des Gastro-
podes indéterminables et des Petraia.
(1) Frech a été le premier a la signaler a Cabrières. Loc. cit., p. 442.
(t) Etude sur les Goniatites. Uém. Paleont. Soc. Géol. Fr., nu 18, p. 59.
(3) Dans cette coupe, donnée par la vallée du ruisseau de Laurenque, Tordre de
superposition des couches est inversé par suite d'un déversement vers le nord.
(4) Frech. Die palcdozoischen Bildungen von Cabrières, p. 448.
18 Août 1901. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 42
654 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
A ces calcaires noduleux en sont associés d'autres de couleurs
variées, renfermant des stromatopores et identiques à certains
marbres exploités en Belgique à ce même niveau.
La variété de marbre dite Campan est rare dans le Languedoc.
Il arrive fréquemment, étant données les fortes compressions
qu'ont subies les terrains anciens dans la Montagne Noire, que
certaines parties argileuses intercalées dans les calcaires sont deve-
nues schisteuses; dans ces conditions, les marbres se débitent
d'eux-mêmes en fragments de faibles dimensions et par suite ne
peuvent être exploités comme pierres d'ornementation. Ces acci-
dents schisteux sont fréquents dans les griottes de la Montagne
Noire, aussi les exploitations de marbre y sont-elles rares.
La série dévonienne se continue par d'autres calcaires noduleux
de couleur grise : les nodules sont généralement de même ton que
le fond de la roche. Mais fréquemment des parties schisteuses
jaunes se développent au milieu de la masse calcaire. Alors la roche
prend l'aspect du niveau à Cypridines du Dévonien tout-à-fait
supérieur du Hartz. L'analogie est encore bien plus complète dans
les parties où la roche est très riche en schistes et où les nodules
calcaires ont disparu par dissolution.
Les fossiles y sont très rares. J'y ai trouvé des sections de grands
Orthocères, de Goniatites et de Clyménies indéterminables spécifi-
quement. Ces calcaires gris, par suite de leur structure noduleuse
comparable à celle des griottes, ont reçu dans le pays le nom de
«griottes gris ».
Sous l'action des pressions qu'ont subies les assises dévoniennes,
leurs nodules calcaires se sont orientés et la structure dite Kramen-
zelstructure par les Allemands s'y est produite (1). Parfois les nodules
calcaires se sont dissous ; il en résulte que ces horizons du Famen-
nien présentent le même aspect que les calcschistes acadiens décal-
cifiés dont j'ai parlé plus haut.
Carbonifère
Les calcaires avec schistes, que j'assimile au niveau à Cypridines
de l'Allemagne, sont recouverts en concordance de stratification par
une masse puissante d'une trentaine de mètres de schistes, de
lydienne, d'adinole (2) et de calcaire. Ces roches ne forment jamais
(1) Elle a déjà été signalée par M. Frecb dans le Languedoc. Die Palmozoischen
Bildungen von Cabrières, p. 466.
(2) D'après Zirckel {Lehrb. der Pétrographie, t. III, p. 561) il faut conserver
ce nom à une sorte de jaspe renfermant jusqu'à 10 % de sodium et jamais plus
ET DI LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 6&t
que des lits d'une épaisseur de quelques centimètres ; puis des cou-
ches calcaires viennent s'intercaler en augmentant d'épaisseur à
mesure que l'horizon est plus élevé dans la série.
Dans les lydiennes, il s'est formé des nodules siliceux, à peine
plus épais que les lits, dans l'intérieur desquels il y a des traces
de fossiles, le plus souvent indéterminables : ce sont des débris
d'Orthocères et de Céphalopodes dibranchiaux. Dans quelques-uns
de ces nodules j'ai pu reconnaître à la forme de leurs cloisons des
Glyphioceras, genre caractéristique du Carbonifère inférieur.
Mais la faune la plus riche de ce niveau est celle des Radiolaires.
M. Rûst (1) en compte vingt-cinq espèces dont les genres ont été
déjà rencontrés dans le Carbonifère d'autres régions.
On doit encore à M. Rûst la connaissance de ce fait fort curieux,
que beaucoup de ces nodules, naturellement les plus riches en
débris organiques, ont une teneur en phosphate de chaux qui peut
atteindre jusqu'à 73,65 %.
Les bancs calcaires qui augmentent en nombre et enépiisseur
à la partie supérieure, sont de couleur grise, parfois gris bleu; ils
sont comparables comme aspect à ceux du Viséen. Jusqu'à présent
les fossiles qui y ont été trouvés consistent en fragments de tiges
d'Encrines et en Céphalopodes tellement écrasés qu'il est impos-
sible d'avoir aucune idée du genre auquel ils appartiennent.
Au Pic de Cabrières, ces mêmes calcaires forment sur la face
sud des abrupts, dans lesquels se dessinent des parties saillantes
en forme de colonnes, par suite de l'existence de rigoles profondes
qui ont été creusées par les eaux sauvages : de là le nom de « cal-
caires à colonnes » sous lequel ils sont connus dans la région.
Puis progressivement et très rapidement les schistes finissent par
former la seule roche. Us sont légèrement argileux ; par laminage,
ils deviennent lustrés et peuvent alors être confondus avec les
schistes siluriens. D'autres fois, ils ont subi une simple compres-
sion et sont devenus pour ainsi dire fibreux; c'est la variété dite
schistes xytoldes par M. Rouville. Us sont très rarement fossilifères.
Le principal gisement se trouve sur la route de Faugères à Gabian,
au niveau de Roquessels. M. Escot et moi y avons recueilli des
de 2 % de potassium. C'est une roche de précipitation chimique. En France nous
employons ce nom pour désigner une roche métamorphique provenant de l'action
des diabases sur des schistes (de Lapparent. Traité de géologie, 4* édition, 1900,
p. 713). Ici il ne peut être question de métamorphisme.
(1) Beitrage zur Kenntniss der fossilen Radiolarien ausGestelnen der Trias und
der palaeozolschen Schichten. PaUeontograpMca, t. XXXVIII, p» 107, 1891-189Î.
656 J. BERGBRON. — ETUDE DES TERRAINS PALÉ0Z0ÎQUB8
fossiles mal conservés, surtout des moulages, d'après lesquels j'ai
pu reconnaître les espèces suivantes (1) :
Spirifer tornacensis de Kon.,
Productus semireticniatus Mart.
Posidonia Becheri Bronn.
J'ai recueilli en quelques autres points des fragments de Posi-
donia, et surtout de tiges d'Encrines.
Par places se voient des bancs gréseux formés de la roche que les
Allemands désignent sous le nom de grauwacke(2). Enfin, au milieu
des schistes, se suivent, parfois sur de grandes longueurs, des bancs
de poudingues à petits galets blancs (quartz) et noirs (lydienne).
Tout cet ensemble est identique au Cul m d'Allemague et en par-
ticulier à celui du Hartz. C'est l'équivalent du Tournaisieu. Il pré-
sente une épaisseur de plusieurs centaines de mètres et affleure sur
de très grandes surfaces.
C'est sans doute encore à cet étage qu'il faut rattacher des grès à
Phillipsia, avec débris de végétaux qui terminent cette série schis-
teuse. D'après M. Zeiller (3), ces végétaux seraient :
Lepidodendron Weltheimianum Stem.
— Glineanum Eich.
Archseocalamites f
Le Carbonifère marin se termine par des calcaires gris, parfois
très épais, dans lesquels les fossiles sont généralement abondants
et incontestablement d'âge viséeu, le Productus giganteus Martin se
fait remarquer par les dimensions et le grand nombre de ses exem-
plaires. Les autres fossiles sont :
Productus striatus Fisch.,
— semireticulalm Martin,
Spirifer bisulcatus Sow.,
(1) Étude du versant méridional de la Montagne Noire. JB. S. G. F., (3), XXVI,
p. 472, 1898.
(2) Sous le nom de Grauwacke, on désigne en France des < schistes originaire-
ment siliceux et calcaires, mais ultérieurement décalcifiés et oxydés, avec cavités
produites par la disparition du carbonate de chaux ». (de Lapparent. Traité de
Géologie. 4* édition, 1900, p. 690). La roche, à laquelle les géologues allemands don-
nent ce même nom, est un grès compact, siliceux, de couleur verte, exploité pour
l'empierrement des routes. Les deux roches, bien que désignées de même, sont
donc très différentes. 11 serait à désirer que les Congrès internationaux établissent
une nomenclature uniforme pour éviter pareille confusion.
(3) In de Rouville. Monographie de la commune de Cabriôres, p. 50.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 657
Spirifer glaber Martin,
Rkynchonella angulata Lin.
Terêbratula reflexa de Kon.
Il y a encore en grand nombre des Loxonema, Bellerophon, Euom-
phalus, Murchisonia, Conocardium, Edmondia, Aoiculopecten, Cyatho-
phyllum, Lithosirotion, Oursins.
Je m'arrête ici dans l'étude de la succession des étages paléo-
zoïques de la Montagne Noire, quoique la série comprenne encore
des dépôts houillers de l'âge des Cévennes (bassins houillers de
Neffîez et de Graissessac) et toutes les assises permiennes, parce
que le Viséen est le dernier étage que la Société ait à étudier dans
ses excursions.
Résumé sur le Dévonien et le Carbonifère de la Montagne Noire
et comparaison avec les mêmes terrains dans le Hartz
Ce qui frappe le plus dans le Dévonien de la Montagne Noire,
c'est le faciès de l'étage moyen, qui est connu surtout en Bohême,
et le faciès à Céphalopodes de l'étage supérieur qui est très déve-
loppé dans la Thuringe et le Hartz. Quant au Carbonifère inférieur
il est comparable trait pour trait à celui du Hartz. Dans ces condi-
tions il m'a paru intéressant d'étudier sur place le Dévonien et le
Carbonifère de cette dernière région. J'y suis allé à deux reprises
différentes. En 1892, M. le Prof, von Kœnen a bien voulu m'auto-
riser à suivre l'excursion qu'il dirigeait pour montrer à ses élèves
les principaux gisements paléozoïques rendus classiques par les
travaux de Rœmer et de Lôssen. Mais à ce moment l'étude stra-
tigraphique était encore incomplète et Ton admettait des associa-
tions de faunes bien singulières. J'avais rapporté de mon rapide
séjour dans le Hartz l'impression, que j'ai consignée au compte-
rendu sommaire de nos séances (1), qu'il y avait lieu d'établir dans
la série paléozoïque du Hartz plus de coupures qu'il n'en avait été
fait jusqu'alors.
En 1899, je suis retourné dans l'Unter-Hartz ou Hartz oriental
dont les beaux travaux de MM. Kock, Denkmann et Beushausen,
avaient fait connaître la constitution. MM. Kock et Beushausen ont
bien voulu interrompre momentanément leurs travaux pour me
servir de guides dans les régions qu'ils avaient étudiées avecjant
(1) B. S. G. F., (3), XXI. p. i03, 189*.
658 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PàLÉOZOÏQUES
de soin. Grâce à eux j'ai pu faire une étude comparative, quoique
très rapide, du Hartz et de la Montagne Noire et je tiens à les
remercier ici de leur accueil qui a été si cordial.
Sur l'Ordovicien et le Gothlandien, qui sont assez mal repré-
sentés dans le Hartz, reposent des grès avec nombreux débri6 de
tiges d*Encrines que Ton range dans le Gédinnien ; ils sont iden-
tiques, à tous les points de vue, à ceux du Falgairas et du Causse
de Fuxian dans la Montagne Noire.
Le reste du Dévonien inférieur au lieu d'être représenté par une
dolomie sans fossile, comme je l'ai signalé dans le midi, est un
calcaire argileux avec le faciès à Brachiopodes. Ce n'est pas d'ailleurs
le faciès hercynien proprement dit qui est aussi à Brachiopodes
mais dans lequel le calcaire est pur et cristallin; c'est le faciès
rhénan. Ce Dévonien inférieur parait être très inégalement
développé selon les points considérés.
Dans le Hartz oriental la base du Dévonien moyen présente deux
faciès : celui à Céphalopodes est très développé ; c'est l'équivalent
des schistes de Wissenbach. Les sédiments sont des schistes comme
à Hasselfelde et Elbingerode avec intercalations calcaires renfer-
mant des Goniatites des genres Aphyllites et Anarcestes ; par places
lesTentaculites sont extrêmement abondants. L'autre faciès corres-
pond à des calcaires marneux à Spiri/er cultrijugatus et Calceola
sandalina. C'est sous cet aspect que j'ai vu l'Eifélien à Hahnenklee
et alors il est identique à celui de la Montagne Noire.
Très fréquemment dans le Hartz oriental, les schistes de Wissen-
bach ont été injectés par des diabases. En général elles forment les
reliefs au milieu des schistes, ce qui tient à ce qu'elles ont mieux
résisté aux érosions. 11 s'est produit au contact de la roche éruptive
et de la roche sédimentaire de nombreux phénomènes d'endomor-
phisme et d'exomorphisme. C'est ainsi que se rencontre une très
grande variété de roches basiques. D'autre part les schistes au
contact des roches éruptives sont modifiés; ils sont silicifiées.
M. Kock à qui Ton doit de nombreux travaux sur ces roches (1) a
eu l'amabilité de me montrer ces différents types dans les environs
de Wernigerode, Elbingerode et Blankenburg. De plus dans le
voisinage du massif granitique du Brocken la même série est tra-
versée par des granités, des micro granités à amphibole, des kersan-
tites, etc., ayant produit également des phénomènes de métamor-
(1) Voir Jahrbuch d. Kôn. Preuss. geol. Landesanstalt und Bergakad, 1896,
p. 131 ; 1894, p. 185 ; 1889, p. xxxm.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 659
phisme. Dans la Montagne Noire, le Dévonien n'est percé que par
des porphyrites micacées et des porphyrites à pyroxène ; les
diabases, presque toujours ophitiques, semblent cantonnées dans
les régions cambriennes. Les éruptions y ont été beaucoup moins
nombreuses et moins variées que dans le Hartz, et les phénomènes
de métamorphisme y sont bien moins intenses.
C'est à partir du niveau à Stringocephalus Burtini que la ressem-
blance entre le Hartz oriental et la Montagne Noire devient par-
fois une identité. Souvent les calcaires à Spirifer cultrijugatus chan-
gent de faune à leur partie supérieure sans changer d'aspect et Ton
sait que l'on a affaire au Givétien par l'apparition du Stringoce-
phalus Burtini ; mais parfois, par suite de la présence de parties
schisteuses au milieu des calcaires et sous l'action des pressions
l'ensemble prend la structure dite Kramenzelstructure comme c'est
le cas près de l'étang moyen de Grumbach. D'autres fois, le niveau
à Stringocephalus Burtini est formé de calcaire gris devenant parfois
blanc, cristallin, comme au Pic de Bissous dans le Languedoc. Ce
faciès est bien développé au Bûchenberg, près Elbingerode.
Dans cette région du Hartz, il y a de puissants amas de fer tou-
jours situés dans les calcaires à Stringocephalus Burtini, et géné-
ralement au contact de parties schisteuses. J'ai signalé dans la
Montagne Noire la présence dans les calcaires blancs du Givétien
de parties cariées, couvertes d'oxyde de fer rouge ; elles correspon-
dent au passage d'eaux qui ont dissous les calcaires avec précipi-
tation des sels de fer. Ce ne sont jamais que des accidents peu
importants dans le Languedoc, tandis que dans le Hartz la précipi-
tation du fer a été telle qu'il s'est formé des poches de minerai
parfois exploitées très activement. Cette différence entre la richesse
eu fer des deux pays doit être en relation avec la différence d'impor-
tance des venues de roches basiques. Il est à noter que souvent à la
base des calcaires se voient de vrais tufs de diabases (thonstein des
Allemands) avec fossiles du niveau à Stringocephalus Burtini; ces
tufs peuvent être également très riches en minerai de fer que l'on
exploite.
A la base des calcaires à Stringocephalus Burtini il y a des lits
riches en débris d'Encrines : j'ai remarqué la présence de lits sem-
blables dans la série des calcaires dévoniens de la Montagne Noire ;
mais le plus souvent je n'ai trouvé aucun fossile me permettant de
reconnaître dans les assises supérieures l'équivalent du niveau à
Stringocephalus. Dans le Hartz il y a encore des minerais de fer
dans ces calcaires à Encrines.
660 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Le Givétien à Stringocephalus Burtini peut se présenter avec un
faciès à Céphalopodes dans lequel les Goniatites sont les fossiles
prédominants ; parmi ces derniers il faut citer comme espèce la
plus importante Meneceras terebratum, parce qu'elle semble êfre
caractéristique; ce faciès s'observe au Bùchenberg, près Elbinge rode
et près de l'étang moyen de Grumbach, où ce niveau n'atteint pas
une épaisseur de dix mètres.
Le Dévonien supérieur débute dans le Hartz oriental par des
schistes qui se signalent souvent par la multiplicité de leurs cou-
leurs : ils sont noirs, gris, verts, bleus, bleuâtres ; de là leur nom
de Bandschiefer (schistes ru banés). Ce sont les schistes de Budes-
heim. Pour beaucoup d'auteurs, ils sont un simple faciès de la
partie inférieure du niveau à Gephyroceras intumescent et non un
niveau distinct. Parfois se sont développés des bancs siliceux noirs,
de vraie lydienne, comparables à ceux que j'ai signalés dans les
calcaires de {a base du Dévonien supérieur du Languedoc. Dans
les schistes, les Tentaculites et les Styliolines peuvent arriver à
former par leur accumulation de vrais amas ; près de Sparenberg,
les Styliolines sont en si grand nombre que la roche en est spon-
gieuse. Ce faciès schisteux du niveau à Gephyroceras intumescent
n'existe pas dans la Montagne Noire ; mais en Catalogne, dans les
environs de Barcelone, où le Dévonien est plus schisteux, j'ai ren-
contré par places des schistes terreux ayant l'aspect de ces amas
de Styliolines. Dans ces schistes de Budesheim,où la pyrite est très
abondante, la coloration est parfois jaunâtre par suite de sa trans-
formation en limonite.
Les schistes rubanés se voient avec tous leurs caractères sur la
rive droite du Innerste près Lautenthal; il en est de même dans le
Hûhnenthal. Dans cette dernière région, les schistes se chargent
rapidement de calcaire et passent ainsi au calcaire à Gephyroceras
intumescens. Leur épaisseur est très variable ; là où ils atteignent
leur maximum de puissance ils ont 80 mètres; dans le Hùhnen-
thal ils n'ont que 10 à 11 mètres.
Les différents aspects du calcaire à Gephyroceras infumeacens
sont sensiblement les mêmes dans le Languedoc et dans le Hartz.
Peut-être cependant est-il plus noir, plus chargé de matières
organiques dans la Montagne Noire. On retrouve dans les deux
régions des bancs couverts presque exclusivement de Cardiola
retrostriata ; j'ai pu les reconnaître identiques à ceux de la colline
de Japhet I, dans le chemin de Hûhnenthals-Kopf.
Le même niveau présente parfois dans le Hartz un faciès coral-
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 661
lien ; c'est ce que l'on appelle le calcaire d'Iberg ; les Céphalopodes
y sont abondants. Ce calcaire est cristallin et on peut le rapprocher
du calcaire rouge du Pic de Bissous dans lequel se retrouvent Car-
diola retrostriata et Gephyroceras intumescent. Ce faciès est très
développé dans le Hartz, entre Elbingerode et Rùbeland.
Le niveau à Chiloeeras eurvispina n'a jamais été rencontré dans le
Hartz et ce sont les calcaires à Clyménies qui reposent directement
sur ceux à Gephyroceras intumescens ; ils sont bleus et devien-
nent brun clair par altération des sels de fer, comme c'est le cas
au Schulenberg, tandis que dans le Languedoc ce sont des calcaires
aux couleurs vives, rouges le plus souvent. Mais dans les deux
régions les calcaires ont la même structure noduleuse, qui passe
à la Kramenzelstructure ; les faunes sont d'ailleurs les mômes. Les
espèces communes, d'après les listes données pour le Hartz (1) sont
les suivantes: Clymenin lœcigata Mslr., CL undulata Mstr., CL
speciosa Mstr.
Dans le Hartz sur les calcaires à Clyménies repose une série
schisteuse avec intercalations de bancs calcaires. Fréquemment il
y a eu dissolution du calcaire et il ne reste plus que des schistes de
couleur jaunâtre ou rougeàtre. A la loupe on peut reconnaître à la
surface des schistes une grande abondance de Cypridina seirato-
s triât a, comme au Bûchenberg, près Elbingerode. Mais parfois le
calcaire devient très abondant et les schistes sont au contraire
bien plus rares, comme à Lautenthal sur la rive droite de l'innerste.
Ce faciès est celui du « griotte gris » du Languedoc. Dans la Mon*
tagne Noire comme dans le Hartz, ce niveau a également la structure
noduleuse. La faune en est très pauvre dans le Languedoc et les
fossiles mal conservés jusqu'ici n'ont pu être déterminés. Elle
semble être également pauvre dans le Hartz.
Avec les schistes et calcaires à Cypridines, se termine le terrain
dévonien. Les Chiloeeras, les Tornoceras si abondants à la base du
Famennien deviennent rares dans les assises suivantes et alors appa-
raissent des Céphalopodes du groape des Glyphioceras. C'est le
commencement du Carbonifère. Il y a également changement dans
les caractères lithologiques : la série est formée de schistes avec
bancs de lydienne et d'adinole. En Allemagne le faciès est le même
que dans le Languedoc ; les lits de lydienne (2) et d'adinole ont la
(1) Kock. Jabrb. d. Kôn. Preuss. Geol. Landesanst., 1895, p. 139.
(2) M. Rûst cite de ce niveau, dans le Hartz, soixante dix-neuf espèces de
Radiolaires sur lesquelles il n'y en aurait que trois qui lui seraient communes
avec le Languedoc. Palœontographica, t. xxxvm, p. 107.
662 J. BERGE RON. — ÉTUDE DBS TERRAINS PALÉOZOÎQUES
même épaisseur, le même aspect ; il y a identité absolue de faciès.
Celle-ci s'observe jusque dans les moindres détails : à la base
des lydien oes carbonifères du Hartz comme du Languedoc
il y a des schistes noirs ampéliteux en feuillets minces ; le long des
fissures, par suite de l'oxydation au contact de l'air, la matière
organique a été brûlée et le schiste est devenu blanc.
L'épaisseur du niveau à lydienne et à anidoleest très variable:
dans la région de Schulenberg cette épaisseur n'est guère que de
deux mètres, mais elle peut atteindre jusqu'à une vingtaine de
mètres et plus, comme près de Lautenthal. Il en est de même dans
la Montagne Noire.
La seule distinction que l'on puisse faire entre les lydiennes des
deux régions consiste en ce que dans le Hartz oriental, je n'ai'
pas trouvé de nodules comme ceux que j'ai signalés dans le Lan-
guedoc ; s'ils y existent, ils doivent y être beaucoup plus rares.
A cet horizon de schistes, de lydienne et d'adinole, fait suite, dans
le Hartz, une série schisteuse avec amandes calcaires qui diminuent
progressivement d'importance et finalement il n'y a plus que des
schistes. La (aune de ces calcaires consiste surtout en Céphalopodes
(Glyphioceras, Pronoiites) et en Phillipsia. Dans le Languedoc le
même niveau est plus puissant; c'est celui qui est désigné à
Cabrières sous le nom de « calcaire à colonnes ». Dans les deux
régions, les eaux d'infiltration ont fréquemment dissous les
amandes calcaires et les schistes présentent alors de nombreuses
vacuoles.
Les schistes qui viennent ensuite sont argileux : ils ont pris, par
suite des compressions qu'ils ont subies) un aspect fibreux aussi
bien en Allemagne qu'en France. Mais dans le Hartz on y trouve
de nombreux exemplaires de Posidonia Becheri et, dans les parties
encore riches en calcaire, des Glyphioceras ; dans la Montagne Noire,
les fossiles sont excessivement rares dans ces schistes, mais cepen-
dant la Posidonia Becheri y a été reconnue. Par places, les débris
de tiges d'Encrines sont abondants dans les deux pays.
Cette série inférieure du Carbonifère est surtout bien développée
à Lautenthal; c'est d'ailleurs sous le nom de cette localité que le
niveau inférieur est désigné en Allemagne. 11 repose, comme je l'ai
dit, sur le Dévonien supérieur presque identique à celui du Lan-
guedoc. Aussi est-ce dans cette même localité de Lauthenthal que
la similitude entre le Hartz oriental et la Montagne Noire apparaît
le mieux.
Sur ces schistes, épais d'une cinquantaine de mètres environ,
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 663
apparaissent les grès verdâtres, durs, que les Allemands appellent
des grauwackes. Ce sont des bancs d'abord peu épais in ter stratifiés
dans les schistes; puis ils augmentent d'épaisseur tandis que les
bancs de schistes diminuent ; finalement la roche n'est plus qu'une
grauwacke. A sa partie inférieure s'intercalent des lentilles de
conglomérats formés de petits cailloux ronds de lydienne, d'adi-
nole et de quartz blanc avec quelques débris anguleux des schistes
sous-jacents. Il y a identité avec les poudingues carbonifères du
Languedoc. Ces éléments diminuent progressivement de volume
et les conglomérats passent à des grès dont les éléments déviennent
latéralement de plus en plus fins. Dans les grès apparaissent
des débris de végétaux : ces conglomérats sont dus sans doute à
des apports continentaux par des rivières.
Dans la région de Lautenthal, les grauwackes sont très épaisses.
Elles sont visibles, dans une carrière, sur une trentaine de mètres,
mais elles sont encore plus puissantes. On peut y distinguer un
certain nombre de bancs séparés les uns des autres par quelques
assises schisteuses dans lesquelles se reconnaissent des troncs de
Calamités. Il n'en est pas ainsi partout dans le Hartz : vers le N.-E.,
les grauwackes ne forment que des lits relativement minces, dissé-
minés dans les schistes. C'est ainsi qu'elles se présentent dans la
Montagne Noire.
Mais tandis que dans le Languedoc, cette série carbonifère
équivalente au Tournaisien du centre de la France, est surmontée
par des calcaires renfermant une riche faune du Viséen. dans le
Hartz, il n'y a aucun sédiment paléozoïque qui lui soit supérieur;
il est vraisemblable qu'il en est ainsi par suite d'érosion.
C'est postérieurement à l'époque carbonifère que dans le Hartz
se sont produites les dislocations que l'on y voit maintenant. Les
failles y sont très nombreuses ; on y observe quelques discordances
de stratification, quelques transgressions et quelques étirements de
plis (1). Je suis resté trop peu de temps dans le Hartz pour pouvoir
me faire quelque idée de sa tectonique et je ne puis en parler. Mais
il est à remarquer que les grandes dislocations de la Montagne Noire
sont également postérieures au Carbonifère, et que les failles y ont
été rares, tandis que les plis et les chevauchements semblent carac-
téristiques pour le Languedoc.
(1) Pour se faire une idée de ces dislocations lire le mémoire de M. Kock ayant
pour titre : Gliederuug und Bau derCulm-und Devonablagerungen des Harlenberg-
Buchen berger Sattels nord lie h von Elbingerode im Harz. Jahrb. d. preuss. geot.
LandesaHstalt fur 1895, p. 131.
664 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
De ce qui précède ou peut tirer la conclusion qu'aux époques
dévonienne et carbonifère les régions du Hartz et de la Montagne
Noire devaient communiquer largement entre elles.
Relations générales entre les faunes paléozoïques
de la Montagne Noire et celles des autres régions.
Si l'on se reporte à ce qui a été dit pour chaque terrain, des
analogies qu'il présente dans la Montagne Noire avec les dépôts
synchroniques d'autres régions, on sera frappé de voir qu'elles sont
presque toujours les plus grandes avec les régions septentrionales.
Lors du Cambrien la faune acadienne semble avoir été en relation
directe avec celle de la Scandinavie et de la Bohème. 11 en a été
encore de môme pendant l'étage de Trémadoc, l'Areuig inférieur et
moyen. Mais depuis l'Arenig supérieur jusqu'au Dévonien inférieur,
les analogies sont plus grandes avec les régions occidentales de
l'Europe telles que l'Angleterre, la Normandie, la Bretagne, l'Espa-
gne et le Portugal. Lors du Dévonien moyeu et supérieur comme
durant le Carbonifère, la faune a des affinités avec celle de l'Alle-
magne et plus particulièrement avec celle du Harlz ; de plus, les
sédiments sont identiques.
Il semble donc qu'il y ait eu, presque d'une façon constante,
pendant le Paléozoïque, communication des régions septentrio-
nales et centrales de l'Europe avec le Languedoc, ce qui force à
admettre l'existence d'un large chenal reliant entre elles les deux
régions, puisque les mêmes accidents lithologiques se reproduisent
sensiblement en même temps dans le Harlz et la Montagne Noire.
Mais ce chenal devait se prolonger encore plus au sud, jusqu'en
Espagne, en passant par les Corbières (1) pour atteindre la Cata-
logne, puisque nous retrouvons dans les envirous de Barcelone une
faune Scandinave pour l'Ordovicien inférieur et le faciès du Hartz
pour le Dévonien et le Carbonifère.
L'identité de faciès entre les dépôts permiens de la Saxe, des
vallées de la Sarre et de la Nahe et ceux du Languedoc (2) et des
Pyrénées prouve que cette communication a persisté entre ces
régions jusqu'à la fin des temps primaires.
(1) D'après les travaux de M. Bresson (Voir légende de la feuille de Carcas-
sonne de la Carte géologique de la France) il semble que la même série paléo-
zoïque se retrouve dans ce massif montagneux.
(2) H. S. G. F.. (3*), XX, p. 252.
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 665
Bien que ce chenal soit jalonné par quelques gisements, il est
bien difficile de les raccorder de manière à préciser son parcours.
Il est probable qu'il passait, du moins à l'époque carbonifère, sur
remplacement du Massif central, car on y connaît les gisements de
l'Ardoisière, près Cusset, où la série tournaisienne est identique à
celle du Languedoc. 11 se prolongeait par les régions deMouthoumet
et des Pyrénées orieutales jusqu'en Catalogne.
11 est impossible de dire d'après la nature des sédiments, comme
d'après les caractères des faunes, quelle était la distribution des
terres et des mers à l'époque du Cambrien, de l'Ordovicien et du
Gothlandien. Mais il semble (v. p. 646) qu'à la (in du Silurien il se
soit produit un mouvement d'exhaussement de la partie axiale de
la Montagne Noire. A la suite de ce mouvement, des érosions puis
santés ont fait disparaître certains horizons siluriens. Puis il y a eu
un mouvement d'affaissement à la suite duquel la mer dévonienne
a envahi de nouveau toute la région. C'est ce qui explique comment
on retrouve le Dévonien inférieur sur le versant nord de la Mon-
tagne Noire.
Sur le versant méridional la série est complète, du moins dans
les écailles qui viennent du sud ; mais là où le Dévonien est en
place, les étages moyen et supérieur (sauf les griottes qui se recon-
naissent facilement) sont rarement déterminables par suite de
l'absence de fossiles. Il est possible qu'il y ait dans la Montagne
Noire des transgressions comme celles qui ont été signalées dans le
Hartz. En bien des points, le Carbonifère parait être transgressif,
mais il est très difficile de se prononcer à ce sujet quand il s'agit
d'une région dans laquelle il y a eu tant de plissements, de lami-
nages et de chevauchements. Ce qui parait certain, c'est que sur le
versant septentrional, le Carbonifère et le Dévonien supérieur font
défaut, tandis que les mers frasnienne et famennienne se seraient
avancées jusqu'à Saint- Pons sur le versant méridional, au voisi-
nage du massif gneissique. Peut-être le Dévonien moyen existe-t-il
sur le versant septentrional ; certains calcaires blancs cristallins
rappellent ceux du Pic de Bissous ; mais il n'y a jamais été trouvé
de fossile. Il y aurait donc eu, antérieurement au Dévonien supé-
rieur, un nouveau mouvement d'exhaussement et la mer frasnienne
et famennienne comme celle du Carbonifère, serait venue battre le
flanc méridional de la Montagne Noire qui existait déjà comme ride.
Les conglomérais tournaisiens, à débris de lydienne et de quartz
blanc, prouvent l'existence de reliefs dus au soulèvement des pre-
mières couches carbonifères avant la fin du Dinantien.
666
J. BERGER ON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
Tectonique
C'est postérieurement au dépôt du Viséen et vraisemblable-
ment avant l'époque stéphanienne, que les grands mouvements du
sol se sont produits en donnant lieu à une série de synclinaux et
d'anticlinaux intéressant tous les sédiments primaires Pour bien,
comprendre la structure de la Montagne Noire, il faut faire abstrac-
tion des plis de second ordre, qui sont multiples et qui font perdre
la notion des grandes lignes qu'accusent les plis de premier ordre.
En ne tenant compte que de ces derniers, on peut dire que la Mon-
tagne Noire est formée d'un anticlinal axial (fig. 1, 1) constitué dans
sa partie médiane par le massif gneissique et par son prolongement
sous la région d'effond rement de Bédarieux (fig. 1, VI). Sur cet axe
Castres
eziers
Fig. 1. — Schéma de la Montagne Noire.
I, Anticlinal axial (la partie gneissique est délimitée par un trait interrompu) ;
II, Dôme de Pont-Guiraud montrant par érosion, dans sa partie médiane, les
assises cambriennes ; III, Synclinal occupé par des sédiments carbonifères ;
IV, Anticlinal de Roquebrun: V, Nappe de recouvrement de Laurens Cabriores ;
VI, Région d'effondrement de Bédarieux.
gneissique, qui correspond à la partie profonde de l'anticlinal et
au Cambrien métamorphisé, devaient exister le Silurien et le
Dévonien inférieur, peut-être même le Dévonien moyen d'après la
composition du versant septentrional. Les érosions ont fait dispa-
raître tous ces étages, sauf à la périphérie du pli, de telle sorte
qu'ils forment auréole autour de la région gneissique. Mais sur le
versant sud la série est plus complète, car on y voit le Dévonien
supérieur et le Carbonifère. Au sud de l'anticlinal axial s'étendait
une vaste région occupée par ce dernier terrain ; elle a été affectée
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 667
d'un synclinal qui, théoriquement, s'étend de Cabri ères à Caunes
(fig. 1, III) en longeant le versant méridional de l'anticlinal axial.
Mais ce synclinal n'est pas continu ; il s'est formé un dôme dans la
région de Pont-Guiraud (fig. 1, II); par suite des érosions qui l'ont
attaqué, ce dôme laisse voir le Cambrien dans sa partie axiale,
tandis que le Silurien et le Dévonien lui forment auréoles. De plus le
dôme est déversé vers le nord et il en résulte que le synclinal car-
bonifère, dans la région de Caunes, est recouvert par l'Ordovicien
déversé appartenant à ce dôme.
Ce syuclinal carbonifère est délimité au sud par un anticlinal
qui n'est bien esquissé que du côté de Roquebrun (fig. 1, IV).
Vers le sud-ouest, il disparait ainsi que le dôme cambrien, le syn-
clinal carbonifère et l'anticlinal axial, sous les sédiments crétacés
et tertiaires. Cet anticlinal de Roquebrun ne dépasse guère
St Nazaire-de-Ladarez ; au nord-est s'éteudait une sorte de plaine
constituée par la série tournaisienne sur laquelle se trouvaient
quelques îlots de calcaire viséen.
C'est sur cette sorte de plaine que s'est étendue une nappe de
charriage (fig. 1, V) sur laquelle je vais revenir dans un moment.
Les grands plis dont il vient d'être question ne sont pas sim-
ples; ils sont formés eux-mêmes d'une série de plis synclinaux et
anticlinaux. Par exemple, dans le dôme de Pont-Guiraud, il y a des
synclinaux où se retrouvent des vestiges d'Ordovicien, comme du
côté de Ferrais, et peut-être même de Dévonien et de Carbonifère,
comme dans la région de Caunes. 11 en est dé même dans l'anticlinal
de Roquebrun dans lequel les assises des étages de Trémadoc et de
l'Arenig sont très plissées et étirées à l'intérieur même du pli.
Tous ces plis, de quelque ordre qu'ils soient, se sont formés sous
L'action d'une force venant du sud est, ainsi qu'il résulte de
leur orientation. Mais en plus, sous l'action de cette même force,
ils se sont déversés vers le nord ; il eu résulte que le plongement
général se fait vers le sud. Cependant lorsque les anticlinaux sont
limités au sud par des dépressions, il y a déversement vers le
sud du flanc méridional de l'anticlinal. C'est ce qui a lieu pour
le flanc méridional du dôme cambrien de Pont-Guiraud. Il est
bordé au sud par une plaine creusée dans les schistes ordoviciens.
Les assises géorgiennes, acadiennes et potsdamiennes de ce même
flanc sont déversées vers le sud et ont par suite un plonge-
ment nord, tandis que le flanc septentrional du même dôme
présente le déversement ordinaire, c'est-à dire vers le nord. H en
résulte pour ce dôme une structure en éveutail qui est très nette.
668 J. BERGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÎQUES
D'ailleurs dans cette région grâce à la profonde vallée de Poussarou
(Voir fig. 12, p. 683) on peut reconnaître qu'il y a eu poussée venant
du massif montagneux et chevauchement d'une partie des couches
les unes sur les autres suivant la direction nord-sud. Il y a eu
également déversement périphérique de ce dôme vers Test.
Le même déversement du flanc méridional vers le sud se voit
dans l'aaticlinal de Roquebrun qui affecte lui aussi la structure en
éventail. On le retrouve encore sur la bordure du massif axial,
bordure formée de Dévonien supérieur et de Carbonifère. Enfin il
est remarquablement net au Pic de Bissous (Voir pi. XIX) et dans
son prolongement vers Test.
Cette allure générale s'explique par la réaction qui a dû se pro-
duire dans le massif ancien, lors de la poussée venant encore du
sud -est, sous laquelle se sont formés les plis couchés et les écailles
de la région de Saint-Chinian et de ClermooM'Hérault, à la fin de
l'Eocène.
Vraisemblablement, un peu après la formation de ces plis, et
sous l'action prolongée de la force qui les avait formés, une
nappe de recouvremeut s'est avancée du sud-est et a recouvert la
région carbonifère qui s'étendait au nord-est, entre Laurens et
Cabrières (1). D'une manière générale elle .est composée de
tous les terrains primaires, depuis le Cambrien, jusques et y
compris le Visé en. Cependant je ne connais qu'un seul point où
l'Acadien soit venu recouvrir des terrains plus récents ; c'est à l'est
de la localité de Roquessels. Le plus souvent, pour ne pas dire tou-
jours, la base de la nappe est formée par des schistes ordoviciens,
appartenant tantôt à l'étage de Trémadoc, tantôt à celui de PAreuig,
tantôt eufin-à celui de Llandeilo. Lors du charriage, il y a eu des
laminages et disparition des niveaux calcaires et gréseux du Silu-
rien. Il serait trop long d'examiner toutes ces dispositions qui,
d'ailleurs, n'ont qu'une importance très relative, et qui ont été
indiquées autant que possible sur la carte au 1/80 000 (Feuille de
Bédarieux).
Cette nappe dont nous retrouvons la trace depuis Laurens, à
l'ouest, jusqu'à Cabrières, à l'est, a été morcelée par les érosions
tertiaires et pléistocènes. Elle est réduite actuellement à des lam-
beaux qui forment autant d'écaillés ; les principales de ces écailles
se voient entre Laurens et Gabian, à l'est de Roquessels entre les
(1) Sur la figure 1, j'ai marqué en traits pleins les contours apparents de la
nappe de charriage, et en traits interrompus ceux correspondant à l'extension
probable de cette môme nappe.
ET DE LA TKCTONlQUE DE LA MONTAGNE MOIRE
«9
ruisseaux de Roquessels et de
la Touque (écaille de Sainte-
Cécile), entre la vallée de la
Touque et celle de la Peyae,
entre Vailhan et Cabrières.
Le plus souvent elles ont une
allure régulière et, n'était la
présence du substratum car-
bonifère, il semblerait que
l'ont a affaire à une série en
place. La fig. 2 donne une
idée de la disposition de ces
écailles. Elle représente la
partie méridionale de celle
de Cabrières. Je crois inutile
de revenir sur l'étude de ces
lambeaux de recouvrement
que j'ai décrits précédem-
ment (1).
Vers l'est, l'écaillé comprise
entre Vailhan et Cabrières et
que je désignerai sous le nom
de cette dernière localité, a
été particulièrement plissée,
laminée, déchirée dans sa
partie septentrionale et elle
mérite une étude spéciale à
cause de son allure anormale.
Plusieurs accidents en ont
rendu l'interprétation très
longue et très difficile ; c'est
ce qui explique comment sur
la feuille de Bédarieux qui a
été terminée en 1899, mais n'a
paru qu'en 1900, il y aurait
dans la région de Cabrières
plusieurs corrections à faire.
Pour comprendre ces acci-
dents,- il faut se reporter à la
(I) 8. S. C. F., (3), XXVI, p. 472.
U Asdt 1901. - T. XXVII.
Bull. Soc. Géol. Fr. -
670
J. BERGERON. — ETUDE DES TERRAINS PALEOZOÏQUBS
fin de l'époque viséenne. Le sol présentait un certain nombre de plis
mais il est vraisemblable que les érosions les avaient déjà nivelés.
Les synclinaux étaient occupés par les calcaires viséens, tandis
que dans les anticlinaux, ces calcaires avaient disparu par érosion
et les scbistes du Tournaisien affleuraient seuls. Lorsque la nappe
de charriage s'est avancée venant du sud-est, elle n'a rencontré aucun
obstacle jusqu'à l'anticlinal correspondant au Garagnas. d'une part,
et jusqu'à l'anticlinal correspondant au Pic de Bissous d'autre part ;
mais antérieurement à l'arrivée de la lame de charriage les dépots
carbonifères avaient du être plissés et déversés vers le nord, à moins
que ce ne soit sous l'action du frottement du au glissement de la
nappe charriée, que les synclinaux de calcaire viséen aient été sou-
levés et renversés. Us sont le plus souvent couchés, de manière à
I, OrdoTlcien ; 2. DÉvonlen Inférieur et E. , _ .. _ ,
TOctra* intumescent et calcalrea a Chiloeeran curvUpina ; 5, Calcaire* à . ,
mèniet et calcacbistes a Cypridines ; 6, Tournaisien ; 7, Viséen ; S, Porpbf rite ;
9, Basalte ; 10, Filons de quartz.
figurer, par suite de la disparition par érosion d'une partie des
schistes qui les entouraient, de véritables vagues calcaires, avec
un abrupt du coté du massif montagneux. Cette allure est très
nette, dans la vallée de la Peyne, aux environs de Vailban.
Maïs parfois sous l'effort qui a provoqué le renversement et le
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE
671
charriage des assises secondaires et tertiaires, la nappe de recou-
vrement et son substratum se sont plissés et alors les massifs de
calcaire viséen ont provoqué autour d'eux, en se soulevant et en
pénétrant pour ainsi dire dans la nappe, des laminages, des étire-
ments, des ruptures de cette dernière. C'est ainsi que se sont pro-
duits des accidents que je vais étudier tout spécialement.
Au sud du village de Cabrières passe une sorte de barre alignée
suivant une direction E.-O. et formée de massifs portant les
noms de Tourière, du Château, de Mounio-Cabrières et des Japhet
(fig.3).
Je vais étudier successivement ces différents massifs en commen-
çant par l'ouest, c'est-à-dire par celui de Tourière; par leur compa-
raison les faits qui semblent les plus anormaux pourront s'expliquer
aisément.
s.
Toar-ièrr
Flg. 4. — Massif de Tourière. — Echelle : 1/15000* environ.
1, Ordovicien ; 2, Dévonien inférieur ; 3, GivéUen ; 4, Calcaires à Gephyroceras
intumescens et calcaires à Chiloceras curvispina ; 5, Calcaires à Clyménieê
et calcschistes à Cypridines ; 6, Tournalsien ; 7, Viséen ; S, FUon de quartz.
Le massif de Tourière (fig. 4) a une base constituée par des
schistes ordoviciens appartenant en partie aux schistes de l'Arenig
(schistes à Didymograptus et Houvillograptus) et en partie aux
schistes de Llandeilo (à débris de tuttenstein). Puis c'est une masse
de calcaires dévoniens dans laquelle manquent les dolomies de la
base. Sur la face occidentale du massif c'est le calcaire à Polypiers
siliceux (zone à Spirifer cultrijugatus) qui repose directement sur les
schistes ordoviciens. Ces calcaires dévoniens sont surmontés par
les calcaires blancs cristallins du Givétien qui forment l'abrupt de
la face nord. Puis viennent tous les niveaux du Dévonien supérieur
qui plongent vers le sud. Ils s'arrêtent brusquement de ce côté en
arrivant au contact de schistes très peu épais qui s'appuient sur
une bande de calcaire viséen. Il est très difficile de reconnaître
612
J. BERGEROK. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÉOZOÏQUES
dans les schistes compris entre les deux masses calcaires les schistes
ordoviciens. Mais, du côté est, au col entre le massif de Tourière et
celui du Château (1), les schistes siluriens plongent sous le Dévo-
nien; d'autre part les mêmes schistes reposent du côté sud sur la
bande de calcaire viséen ; il est donc vraisemblable qu'ils passent
entre les deux masses calcaires et dès lors il faut interpréter
Tourière comme un synclinal dont le flanc méridional aurait été
laminé et aurait même disparu au contact de la bande viséenne.
Au col de Tourière on retrouve quelques fragments de calcaire
carbonifère représentant les derniers vestiges d'une bande dont il
sera parlé plus loin (2).
Le massif du Château (fig. 5) est* formé tout entier de calcaire
viséen, reposant sur les schistes tournaisiens. C'est un pli synclinal
couché sur son flanc nord d'après l'allure des couches. L'épaisseur
du calcaire viséen y est d'une quarantaine de mètres. Ce n'est pas
s.
«î.4 Rome.
N.
Vallée
de
Pitre ne
Fig. 5. — Massif du Château. — Coupe allant de la vallée de Pitrous
au vallat des Clavies.
Echelle : 1/15000*. — Mémo légende que pour la fig. 4.
autre chose que le synclinal carbonifère qui forme la limite méri-
dionale de Tourière et dont il vient d'être question ; mais au Château
il a toute sa puissance, tandis qu'il est très réduit dans le premier
gîte. La face méridionale est constituée uniquement par des schistes
carbonifères avec un synclinal viséen au niveau du mas de Pitrous.
(1) On donne le nom de Château à la masse de calcaire viséen, d'aspect ruini-
forme, située au nord des Ruines de Saint-Rome (Voir fig. 3). Sur la figure 5 je
l'ai désigné sous le nom de Saint-Rome pour éviter toute confusion.
(2) Dans toutes les coupes se rapportant à la bande de Tourière-Japhet, j'ai
désigné par la lettre A un même synclinal de calcaire viséen qui longe la bande
dévonienne au nord : elle est désignée dans le pays sous le nom d' * écharpe a
l'Espagnol. »
t&T DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 673
Les schistes ordoviciens de la base de la nappe se retrouvent sur les
bords du ruisseau. Mais les schistes comme les calcaires carboni-
fères sont bien en place. Sut la face nord, il y a des lambeaux de
schistes siluriens recouvrant les schistes carbonifères. Peut-être
quelques morceaux de calcaire dévonien accompagnant les schistes
ordoviciens sont-ils des vestiges du pli de Tourière, se prolongeant
vers l'est. Dans le fond du vallat des Clavies se retrouvent les
schistes ordoviciens au nord et au sud de la bande de calcaire
viséen, constituant V « écharpe à l'Espagnol ».
Dans le massif de Mounio de Cabrières (fig. 6), le synclinal viséen
qui était si important, a perdu de sa puissance. Il forme encore
une bande mais très peu épaisse contre laquelle s'appuie encore
un synclinal dévonien dont le flanc méridional a disparu par lami-
nage contre lui. C'est le même accident qu'à Tourière, seulement le
S. Mounio de Cabrières N.
3,
Fig. 6. — Massif de Mounio de Cabrières. — Coupe allant de la vallée de Pitrous
au vallat des Clavies.
Echelle : 1/15000*. — Même légende que pour la fig. 4.
pli est constitué un peu différemment par suite delà disparition de
certains horizons et l'apparition de certains autres. 11 y a encore
des schistes entre les deux masses calcaires; il n'est pas possible de
déterminer leur âge ; mais un peu plus à l'est les schistes siluriens
à tuttenstein réapparaissent entre les deux, ce qui confirme l'hypo-
thèse que la série dévonienne, à Mounio-Cabrières comme à Tou-
rière, appartient à la nappe de recouvrement. Mais à Mounio il y a
apparition, au sommet du massif, de schistes ordoviciens au milieu
des calcaires dévoniens. Cela tient à ce que dans l'écaillé il y a eu
formation d'un anticlinal dont le Dévonien a été enlevé par érosion
le long de l'axe du pli ; par suite, la base en apparaît. Vers le nord la
dolomie du Dévonien inférieur repose sur le Silurien. De ce même
côté il y a encore la même bande de calcaire viséen, dite écharpe
à l'Espagnol, accompagnée de ses schistes ordoviciens.
Au niveau de la route de Fontes, l'extrémité orientaledu massif
674
J. BERGER0N. — ÉTUDE DES TERRAINS PÀLÉ0Z0ÏQUE8
de Mounio de Cabrières donne la coupe suivante (fig. 7) qui permet
de relier ce massif à celui de Japbet I situé vis à vis sur la rive gau-
che de la Boyne. Dans cette coupe, les schistes ordoviciens viennent
s'intercaler entre les
•• *-* -4-^-rr?*v» H' dolomies dévoniennes
et les schistes carboni-
fères; ceux-ci renfer-
ment quelques lam-
beaux calcaires, der-
nières traces du syncli-
nal si puissant au Châ-
teau. Les dolomies
occupent alors toute la largeur du massif dans lequel on reconnaît
un synclinal, où les calcaires noirs à Gephyroceras intumescens seuls
sont déterminables; les autres horizons dévoniens ont disparu par
laminage ou n'ont pas été reconnus.
La Boyne coupe la série de collines dont l'étude nous occupe en
ce moment; mais, sur sa rive gauche, s'élève le massif de Japbet I
(fig. 8) qui fait suite à celui de Mounio de Cabrières. Sa face nord
correspond au synclinal de la coupe précédente, mais le flanc sep-
tentrional du pli a disparu et le flanc méridional seul repose sur les
Route de
Fig. 7. — Coupe prise à l'extrémité orientale du
massif de Mounio de Cabrières.
Echelle : 1/15000*. — Même légende que pour
la fig. 4.
Pallee du
/^ Brorvc
W:\>*
Fig. 8. — Coupe du massif de Japhet I.
Echelle : 1/15000*. — Même légende que pour la fig. 4.
•
schistes ordoviciens. La série y est d'ailleurs incomplète: les griottes
rouges et gris font défaut ; ce sont les calcaires à Chiloceras curvi-
spina et Goniatites intumescens avec nombreuses concrétions sili-
ceuses noires qui reposent sur les schistes ordoviciens. Peu à peu
vers le sud les couches reprennent une allure normale. Au niveau
de la combe du Moulin (1) doit exister un anticlinal, qui n'est visible
que vers Test et qui correspond soit à l'anticlinal qui, au sommet
(1) La combe du Moulin est située au sud des massifs de Japhet I, Japhet III et
Japhet IV dans les figures 8, 9 et 10.
ET DE LÀ TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 675
de Mounio de Cabrières ramenait les schistes ordoviciens de la base,
soit à la bande de calcaire viséen qui limitait vers le sud les
écailles précédentes.
Au massif de Japhet III (Voir la PI. XX pour l'étude des Japhet) (1)
le prolongement du synclinal précédent se montre sous un nouvel
aspect (fig. 9). Au milieu des dolomies du flanc méridional apparaît
le calcaire cristallin blanc du Givétien légèrement déversé vers le
S- Japhet m
3
Vallée du
Bronc
Fig. 9. — Coupe du massif de Japhet III.
Echelle : 1/15000*. — Même légende que pour la fig* 4.
nord et accompagné des calcaires noirs à Gephyroceras et Chiloceras
curvûspina qui recouvrent à leur tour les dolomies dévoniennes. Il
y a donc eu encore renversement des couches vers le nord et
disparition d'une grande partie du flanc septentrional du synclinal.
Mais vers le sud, la combe du Moulin ayant entamé assez profon-
dément la voûte de l'anticlinal déjà signalé, les schistes ordoviciens
apparaissent dans le fond du ravin.
6. Japhet IF H.
Vallée du.
Mrorus
Fig. 10. — Coupe du massif de Japhet IV.
Echelle : 1/15000*. — Même légende que pour la fig. 4.
Au Japhet IV (fig. 10) la coupe est sensiblement la même ; mais
vers le sud, dans le fond de la combe du Moulin, le calcaire viséen
apparaît sous le Silurien.
(1) Le point désigné sous le nom de Japhet II fait partie du massif du Japhet I
et il n'y a pas lieu de le distinguer au point de vue géologique de ce dernier.
m
J. BEBGERON. — ÉTUDE DES TERRAINS PALÊOZOlQUES
Il est à remarquer que l'altitude des Japbet va en croissant ; le fond
de la Combe du Moulin a également une altitude croissante. Le
substratum de la nappe présente donc un soulèvement qui va
s'accentuant à mesure que Ton se rapproche du Japhet IV.
A partir du Japhet IV le synclinal qui affecte le Dévonien ne
renferme plus d'horizon géologique supérieur à celui des dolomies.
Mais le ravin de la combe du Moulin qui s'infléchit vers le Nord,
laisse voir, au fond, le calcaire carbonifère et, sur les bords, les
schistes ordoviciens recouvrant ce dernier. Dans la PI. XX, j'ai
exagéré un peu l'importance du Silurien et du calcaire viséen
dans la partie tout à fait supérieure pour faire comprendre com-
ment ils réapparaissent dans la dépression qui sépare Japhet V de
Japhet IV.
Mais au Japhet V (fig. 11) réapparaît le synclinal déjà étudié
dans les massifs de Japhet I, Japhet III et Japhet V; seulement ici,
S. Japhet V «.
Fig. H. — Coupe du massif de Japhet V.
Echelle : 1/15000*. — M£me légende que pour la fig. 4.
c'est le tlauc septentrional qui, cette fois, est complet. Le flanc
méridional a disparu par laminage. Par suite, le Dévonien supé-
rieur est au contact des schistes ordoviciens de la base, reposant
sur le calcaire viséen qui fait suite à celui du fond de la Combe
du Moulin.
Plus à l'est, descend vers Peret, une vallée qui montre sous la
nappe de recouvrement, le prolongement du calcaire viséen et des
schistes tournaisien du substratum.
On retrouve encore sur le flanc méridional du massif de Balle-
rades (fig. 11) un exemple de laminage d'un flanc de synclinal au
voisinage d'une bande de calcaire viséen. L'écharpe à l'Espagnol
après avoir suivi la rive gauche du Bronc, traverse ce ruisseau et
passe sur la rive droite. Elle est recouverte au nord par les schistes
ET DE LA TECTONIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE 677
ordovicieos surmontés des dolomies dévoniennes. Mais il y a un
synclinal dont le flanc nord comprend toute la série dévonienne
tandis que le flanc méridional est constitué seulement par la
dolomie du Dévonien inférieur qui est ainsi en contact avec les
calcaires à Clyménies et le niveau à Cypridines.
Le plus souvent les accidents que je viens d'étudier se présentent
comme des failles locales; mais ce qui me fait les rapporter à des
étirements, c'est la présence constante, que j'ai signalée, de schistes
ordoviciens, entre les éléments du substratum et ceux des écailles;
après avoir servi de matière lubréfiante, ceux-ci sont restés comme
témoins des plis qui se sont formés immédiatement avant l'étiré-
ment. D'ailleurs, en bien des points, l'allure même des couches,
au voisinage dés accidents, indique quelle est leur nature.
Le dépôt des assises stéphaniennes s'est effectué postérieurement
à l'arrivée de la nappe de recouvrement, très vraisemblablement
dans des dépressions qui sont encore en relation avec les efforts
venus du sud-est. A l'époque permienne, les érosions avaient déjà
nivelé les plis de la bordure méridionale de la Montagne Noire de
telle sorte que les sédiments permiens reposent indifféremment sur
tous les dépôts paléozolques plus anciens, qu'ils soient en place où
qu'ils appartiennent à la nappe de recouvrement.
La Montagne Noire date donc de la fin de l'époque primaire et
elle fait partie des ridements hercyniens.
Elle a subi peu de modifications depuis sa formation. Elle a été
recouverte en partie par les sédiments secondaires, ainsi qu'il
résulte de la présence de ces derniers au milieu des plis primaires,
dans la région d'effondrement de Bédarieux. Mais il est impos-
sible de dire jusqu'où se sont avancées les mers secondaires.
Cependant à la façon dont se comportent les sédiments triasiques
et jurassiques à la périphérie de la Montagne Noire, il est certain
qu'une grande partie de cette région a du rester émergée depuis sa
formation. A l'époque crétacée la mer n'occupait que le bord du
versant méridional et la pointe sud-est du massif ancien. Les
sédiments éocènes sont cantonnés également sur ce même versant,
mais ils recouvraient l'extrémité sud-est du massif, d'après les
restes reconnus dans les environs de Bédarieux.
La Montagne Noire a reçu le contre-coup des efforts qui, à la
fin de l'Eocène, plissèrent les assises secondaires et tertiaires, et
même les refoulèrent vers le nord-ouest dans les régions de
Glermont et de St-Chinian, ainsi que MM. Depéret et Nicklès le
678 J. BERGERON. — LA MONTAGNE NOIRE
montreront à la Société. J'ai dit plus haut comment la réaction
produite par le massif ancien s'était traduite par le chevauchement
vers le sud des flancs méridionaux renversés de certains anticli-
naux. Enfin j'ai décrit les accidents qui se sont produits alors dans
la nappe de recouvrement.
Emergée depuis la fin des temps primaires, la Montagne Noire
a été soumise à des érosions longues et puissantes, surtout dans
sa partie haute, dans la région gneissique ; aussi celle-ci s'est-elle
transformée en pénéplaine. Mais, à la fin des temps tertiaires, la
différence de niveau entre cette pénéplaine et la mer Méditerranée
s'étant accrue, soit par suite d'un affaissement de la région du
Languedoc, soit au contraire par suite d'un exhaussement du
Massif central, le versant méditerranéen a été profondément mo-
difié par les érosions pliocénes et pléistocènes. A l'époque pliocène
il y avait de grandes et profondes vallées dont l'une semble avoir
été en relation avec l'effondrement de la région de Bédarieux. Mais
il ne nous en reste que des lambeaux insuffisants pour déterminer
leur direction.
A l'époque pléistocène, les cours d'eau actuels existaient déjà ;
la vallée de l'Orb en particulier était telle qu'elle se voit aujour-
d'hui, avec son allure irrégulière qui résulte des cassures qu'elle
suit et qui est due à une série de captures sur lesquelles je revien-
drai en parlant des excursions de la Société. La seule différence
réside en ce qu'à cette époque le lit de l'Orb et du Jaur était à un
niveau supérieur de vingt mètres au niveau actuel. Des terrasses
qui bordent ces cours d'eau ainsi que des cônes de déjection qui
occupent l'embouchure de tous les ruisseaux qui s'y jettent sont
autant de témoins de ce changement de niveau et témoignent de
l'importance beaucoup plus grande de tous ces cours d'eau à une
époque ancienne.
679
Séance du 8 Septembre 18»»
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON, PRÉSIDENT
La séance se tient dans la salle de délibération du Conseil
municipal de la ville de Saint-Chinian, mise gracieusement à la
disposition de la Société par la Municipalité, en présence d'un
nombreux public. Le président a à sa droite, M. Chama, premier
adjoint.
Le Président remercie les habitants de Saint-Chinian de
l'empressement qu'ils ont mis à se grouper autour des membres de
la Société pour la séance de ce soir ; cet empressement témoigne de
leur sympathie pour une science à laquelle plusieurs d'entre eux,
par leurs découvertes, ont rendu de grands services. M. J. Bergeron
rappelle que dans les nodules recueillis dans les schistes de la
région, il a trouvé de nombreux fossiles qui ont permis de recon-
naître, par la similitude des faunes, qu'à l'époque de l'Ordovicien
inférieur la mer communiquait entre les régions Scandinaves et le
Languedoc. Il engage donc les habitants de la région à imiter
MM. Miquel, Villebrun, Lignères et Donnadieu et à continuer leurs
recherches, car il y a encore beaucoup à trouver.
Lecture est ensuite donnée du procès-verbal de la précédente
séance ; la rédaction de ce procès- verbal est adoptée.
680
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 6 SEPTEMBRE
par M. J. BER6ER0N.
La Société est partie de Saint-Pons par la route d'Oloazac. Elle
traverse d'abord une bande calcaire sur laquelle est située la ville
de Saint-Pons. Ce calcaire semble appartenir au terrain dévonien.
Les couches les plus élevées de la série ont des couleurs vives qui
rappellent celles du Dévonien supérieur : ce sont des marbres qui,
par leur coloration et leur structure, peuvent être comparés à
l'incarnat et au griotte. Dessous sont des calcaires de couleur blan-
che ou gris bleu que l'on pourrait comparer à ceux du Dévonien
moyen et inférieur. Dans toute cette série, il n'a jamais été trouvé
que des débris d'Encrines.
La route d'Olonzac qui, d'une manière générale, a une direction
nord-sud, quitte cette bande qui est orientée nord-est-sud-ouest,
au niveau de la métairie du Pont de Rascle, pour entrer dans des
schistes ordoviciens à Euloma-Niobe (Etage de Trémadoc) ; ces
schistes forment une bande très étroite ; d'après leur allure,
ils ont dû subir de fortes compressions. Peut-être toute la série
silurienne s'est-elle déposée en ce point et les laminages, lors de la
formation des plis, en ont-ils fait disparaître tous les autres horizons.
L'absence de certains niveaux, la réduction d'épaisseur de cer-
tains autres, sont des accidents que la Société retrouvera du côté de
Cabrières dans les écailles de recouvrement, aussi pourrait-on se
demander si dans la région de Saint- Pons on n'a pas affaire à une
pareille nappe. Mais ce sont là des phénomènes mécaniques qui ont
pu se produire partout où il y a eu de fortes compressions, et ils
ne sont pas exclusivement caractéristiques des chevauchements.
Dans le cas présent, il semble qu'il y ait une série en place, sinon
complète. D'ailleurs, la bande ordovicienne du Pont de Rascle s'é-
tend vers Test et vers l'ouest sur plusieurs kilomètres de long.
Vers l'ouest elle atteint le pic de Saint Bauzile et disparait peu
après; vers l'est elle suit la vallée du Jaur : de ce côté, elle devait
se relier aux assises siluriennes et dévoniennes qui se montrent
au sud de Tarasson et qui font suite aux massifs de Vieussan,
de Ceps et de Roquebrun. Dans ces conditions la bande ordovi-
cienne et la bande dévonienne de Saint- Pons correspondraient à
un synclinal, limité vers le sud par un anticlinal dont l'axe serait
jalonné par la bande de calcaire géorgien de Cavenac.
COMPTE-RENDO DE L'EXCURSION DU è SEPTEMBRE 68 1
En quittant l'Ordovicien du Pont de Rascle, la Société s'avance
vers Taxe de cet anticlinal. D'ailleurs, avant d'arriver au col de
Sainte-Colombe, elle aura à traverser plusieurs synclinaux et anti-
clinaux intéressant tous le Cambrien.
Sur le versant méridional du premier anticlinal, celui de Cavenac,
se reconnaissent les schistes jaunes de l'Acadien moyen, mais sans
fossiles. Us sont recouverts par une série très puissante de phyl-
lades de couleur vert foncé, avec quelques bancs gréseux, passant
parfois à de vrais quartzites. La route, par suite d'un coude et aussi
grâce à la direction nord-est*ud-ouest des plis, après avoir traversé
cette série, principalement potsdamieune, normalement à sa direc-
tion, recoupe l'anticlinal calcaire de Cavenac au niveau de ce village.
A Cavenac les membres de la Société trouvent chez M. Jean Belot
à acheter de nombreux exemplaires de fossiles cambriens provenant
du gite de Sainte-Colombe, but de l'excursion.
A rentrée du village, sur l'ancienne route d'Olargues, à quelque
centaine de mètres sur ce chemin, se dresse une sorte de mur formé
par un filon de diabase ophitique.
La structure ophitique y est en apparence, moins accusée que
dans bien d'autres filons de la région, aussi M. Léon Bertrand n'y
reconnaît il pas le type normal des ophites des Pyrénées. Cependant
l'étude microscopique ne laisse aucun doute. Les cristaux de labra-
dor sont allongés suivant l'arête pg' ; tout autour se voient des
débris de cristaux de pyroxène qui semblent les avoir moulés.
C'est la structure ophitique bien caractérisée.
La Société, en revenant sur la nouvelle route de Sainte-Colombe,
retrouve, dans les dernières couches de l'anticlinal calcaire de
Cavenac, des filons, peu épais il est vrai, de diabase ophitique
qui semblent n'être que des apophyses du filon précédent.
En continuant à monter vers Sainte-Colombe, la Société traverse
de nouveau la série potsdamienne déjà vue avant d'arriver à
Cavenac. Bien des bancs au voisinage des calcaires rappellent les
schistes dans lesquels ont été trouvés, plus au sud-ouest, du côté de
Pardailhan, les grands exemplaires de Paradoxides rugulosus, mais
jusqu'ici, il n'y a été rencontré aucun fossile.
Au point où la route tourne vers l'ouest, sur la rive gauche du
ravin qui passe au nord de Sainte-Colombe, apparait un anticlinal
présentant toutes les variétés de calcaire cambrien; dans des bancs
gris bleu clair la Société trouve des traces organiques (?) absolu-
ment indéterminables. C'est dans ces mêmes calcaires que j'ai ren-
contré des débris d'Arch&ocyathus (peut-être du genre Coscynocya-
thus décrit par J. G. Bornemann).
682 J. BERGERON
C'est au fond du ruisseau, sur la plongée méridionale de cet anti-
clinal que la Société voit, pour la première fois, les schistes jaunes
et rouges de l'Acadien. Mais comme ils sont peu fossilifères en ce
point, elle ne s'y arrête pas et elle continue son chemin vers le
sud, à travers les schistes et les grès potsdamiens, jusqu'au col de
Sainte-Colombe. Un peu au sud de ce col, passe un nouvel anticlinal
de calcaire géorgien, sur la plongée méridionale duquel les schistes
acadiens fossilifères sont très développés. Les membres de la Société
y recueillent en abondance : Paradoxides rugulosus Corda, Conoce-
phalus coronatus Barr., Trochocystitêk Barrandei, Mun.-Chalm. et
J. Berg.; les exemplaires d'AgnostusSallesi, Mun. Chalm. et J. Berg.
ont été très rares.
La Société rentre à Saint-Pons par le même chemin ; elle peut se
rendre compte que les plis qui intéressent le Cambrien sont nom-
breux, alternativement synclinaux (bandes schisteuses et gréseuses)
et anticlinaux (bandes calcaires). Ces plis sont généralement déver-
sés vers le nord ; exceptionnellement ils sont normaux. En plusieurs
points, en particulier là où affleurent les bancs gréseux, l'allure,
contournée des couches est très visible.
COMPTE-RENDU
DE L'EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE AU MATIN
par M. J. BERGERON.
En sortant de Saint- Pons, la Société suit en direction les cal-
caires que j'attribue au Dévonien, puis elle prend la route de
Saint-Chinian qui se dirige vers le sud et traverse normalement
le prolongement vers le nord-est de tous les plis vus la veille.
Au niveau de la métairie de Bégot, les assises potsdamiennes
renferment des bancs de grès, redressés jusqu'à la verticale. La
route les coupe à plusieurs reprises, sous des angles très différents,
ce qui donne l'illusion d'une grande complication d'allure, alors
que leur direction reste sensiblement constante. Le grand inté-
rêt de ces grès, réside dans l'abondance des pistes qui les recou-
vrent. Ce ne sont pas d'ailleurs des empreintes comparables aux
Cruziana; elles sont plus simples. Les ripple-marks y sont très fré-
quents. Enfin il y a quelques traces circulaires, en forme d'anneaux
aplatis, dont l'origine est fort douteuse : ce sont ou des sections de
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE AU MATIN 683
tubes d'Annelés ou des empreintes de Méduses. Cette dernière opi-
nion a été celle de M. Depéret.
Avant le point culminant de la route de Saint-Chinian,
les schistes acadiens du versant septentrional du pli anticlinal
passant par le col de Sainte- Colombe, affleurent sur le talus gauche
de la route; mais ils sont très pauvres en fossiles.
Au niveau de Cathalo, la route de Saint-Chinian s'engage dans la
gorge du ruisseau de Nouvre qui traverse un anticlinal cambrien,
pli le plus méridional du dôme cambrien de Pont-Guiraud. Tous les
plis vus précédemment étaient déversés vers le nord, avec
plongement vers le sud. Les premières couches rencontrées en
descendant de Cathalo plongent également vers le sud ; elles appar-
tiennent au Potsdamien. Puis viennent des schistes acadiens, très
pauvres en fossiles, que surmontent des schistes troués qui ne sont
autres que les calcschistes acadiens décalcifiés ; enfin, c'est la série
calcaire correspondant aux niveaux inférieurs de l'Acadien et au
niveau supérieur du Géorgien. Toute cette série cambrienne est
disposée en ordre inverse de la] superposition normale. Mais à
Boni de Fouasarou
&Chinian
Fig. 12 — Coupe de Cathalo a Saint-Chinian.
1, Calcaire géorgien ; 2, Acadien ; 3, Potsdamien ; 4, Schistes à Euloma-Niôbe
(Trémadoc) ; 5, Crétacé supérieur (Rognac) ; 6, Eocène ; 7, Diabase.
Figure extraite du livret-guide des excursions en France, du VIII' Congrès
géologique international de 1900.
partir d'un point, situé à 2 kilomètres environ de Cathalo, les cou-
ches calcaires commencent à se redresser, puis elles prennent un
plongement nord et il en est ainsi jusqu'au delà du moulin de
Poussarou, vers le sud. Les assises présentent d'ailleurs, à partir de
ce point, la même superposition inverse déjà signalée du côté de
Cathalo ; il y a encore renversement, mais avec plongement en sens
contraire du premier, il en résulte que cet anticlinal méridional
correspond à un pli en éventail (fig. 12).
Dans la partie axiale du pli, comme d'ailleurs dans presque toute
cette masse de calcaire cambrien, il s'est produit des phénomènes
de métamorphisme. Il y a eu dolomitisation ou encore silicilication
d'un très grand nombre de bancs et la roche ne présente plus les
caractères ordinaires des calcaires géorgiens; on peut la confondre
avec un calcaire paléozoïque quelconque dolomitisé. En deux
684
1. BERGERON
points, sur la route, la Société reconnaît de minces filons de dia-
base ophitique ; mais ils ne sont pour rien dans ce métamorphisme
qui eet général et nullement localisé au contact de la roche éruptive.
Les travaux nécessités par la construction de la route, ont mis à
jour dans la région calcaire, de nombreux canaux souterrains dont
les parois sont couvertes de stalactites ; au niveau du pont de Pons-
sarou, dans le fond du ruisseau, il y a des sources vauclusîenoes
qui viennent au jour en suivant de pareils canaux. Ce faitexplique
la présence dans la région de plusieurs grottes qui ont servi d'abri
a l'homme primitif.
En plusieurs points de la gorge que suit la grande route, il y a
des dépots situés généralement à un niveau supérieur à celui de la
route et formés de débris de schistes et de calcaires. Ce sont de
vraies terrasses. Il est impossible de fixer leur âge ; mais elles se
trouvent à une altitude de 10 à 15 mètres au-dessus du fond de la
vallée Peut-être sont-elles dues à des inondations récentes: en
effet, dans ces gorges très étroites de la région de Saint-Chinian,
les torrents peuvent, en cas d'orage, acquérir très rapidement un
volume considérable et s'élever d'une quinzaine de mètres.
Au niveau du pont de Poussarou, construit sur le ruisseau de
Ferrières, les calcs-
chistes et en parti-
culier les bancs vio-
lets de la base de
l'Acadien sont très
développés (fig. 13).
La proportion de
calcaire diminue de
plus en plus dans
les calcschistes et,
3 par suite, les vacuo-
les correspondant
aux amandes cal-
caires dissoutes sont
de moins en moins
nombreuses. Sous
l'action des pres-
sions qu'ils avaient subies en ce point, les nodules calcaires s'étaient
alignés ; par suite, les vacuoles résultant de leur dissolution le
sont également.
Les schistes deviennent de vrais phyllades verdâtres dans lesquels
Flg. 13. — Pont de Poussarou.
I, Calcaires blancs de la partie supérieure du Géor-
gien; 2,CalcschlBleaacadlon3;a. Schlstea acadiens
de la zone a Paradoxydes rvguio»a$.
Figure extraite du livret-guldc îles excursions en France
du VIII' Congrès géologique international de 1900.
COMPTE RENDU DE L'kXCURSION DU 7 SEPTEMBRE AU MATIN 685
se rencontrent des débris de très grands Paradoxides, particulière-
ment abondants dans le chemin muletier qui descend de la grande
route au moulin. Les quelques débris de plèvres qui y ont été recueil-
lis, témoignent de la grandeur des individus dont ils proviennent.
Au niveau de ce même moulin, il est facile, à la simple vue des
deux rives, de se rendre compte de l'allure des couches. Dans la
partie haute des flancs du ravin, les schistes plongent vers le nord,
tandis que dans la partie basse, ils s'infléchissent de manière à pren-
dre progressivement dans le fond du ravin un plongement sud, qui
est leur plongement primitif. Ce n'est vraisemblablement qu'à la
suite d'une poussée venant du sud, mais produisant une réaction en
sens contraire, qu'il y a eu renversement vers le sud. Cette réaction
a été fournie par le massif paléozoïque situé plus au nord, lors
de la formation des plis de Saint-Chinian, à la fin de l'Eocène.
D'ailleurs, elle s'est produite avec chevauchement des couches ren-
versées les unes sur les autres ; ce chevauchement est très-net
surtout pour les assises de la base de l'Acadien (Voir fig. 12, p. 683).
Le temps pressant, la Société s'est rendue directement à Saint-
Chinian. Elle a pu reconnaître, en passant, la même série de phyl-
lades et de grès, vue la veille sur la route de Sainte-Colombe. Cette
série est très plissée et accuse d'abord une tendance à plonger vers
le nord par suite de déversement déjà signalé; elle se redresse pro-
gressivement jusqu'à la verticale; enfin, elle prend un plongement
général vers le sud ; mais les assises sont affectées de nombreux
plis, très irréguliers, qui témoignent des efforts de refoulement,
de froissement qu'elles ont subis.
La série de sédiments correspondant, par leur position, à l'étage
potsdaraien est toujours sans fossile. Elle est recouverte par les
schistes bleu foncé, d'aspect gras, miroitant, de l'étage de Tréma-
doc. Ils deviennent fossilifères à peu près au niveau du village de
Bouldou, et on y rencontre, dans des nodules noirs siliceux : Belle-
rophon Œhlerti Mun.-Chalm et J. Berg., Euloma Filacovi Mun.-Chalm.
et J. Berg., sp. La Société n'a malheureusement pas le temps de
faire de fouilles dans les gîtes très fossilifères de Sourteillo et de
Saint-Cels où elle aurait trouvé en abondance des Asaphelina Aliqueli
J. Berg. et des ATto6e Ligneresi J. Berg. sp.
L'Ordovicien disparaît vers le sud au niveau du Vernazobre sous
une falaise formée par des écailles superposées de Crétacé et de
Tertiaire que la Société étudiera dans l'après-midi.
24 Août 1901. - T. XXVII. BulL Soc. Géol. Fr. - 44
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAINON DE SAINT-CHINIAN
par M. Charles DEPÉRET
I. Disposition générale et Tectonique
Ou peut, à la suite de Magnan, de MM. de Rou ville, Col lot, de
Margerie et Miquel, désigner sous le nom de chaînon de Saint-Chi-
nian (du nom de la petite ville qui en occupe le centre) un petit
massif de collines rocheuses allongé parallèlement au bord méri-
dional de la Montagne Noire, entre le méridien de la rivière d'Orb
et celui de la Cesse dans la région de Bize.
Ce chaînon, localement interposé entre les terrains paléozoïques
de la Montagne Noire et les grandes plaines miocènes des bassins
de l'Orb et de l'Aude, est constitué par un faisceau de plis d'âge
pyrénéen (antéoligocènes), tous déversés au nord et ayant affecté
le Keuper, l'Infralias, le Lias, le Bajocien, le Crétacé supérieur
fluvio-lacustre et l'ensemble des terrains éocènes.
Le trajet de ces plis et des lignes de relief qui en sont la consé-
quence, affecte une direction générale E.N.E. O.S.O., coïncidant
avec la direction des plis paléozoïques de cette région. Mais aux
deux extrémités du chaînon, au nord-est vers la vallée de l'Orb, au
sud-ouest dans la région de Bize, les plis se dévient suivant une
direction nord-sud presque perpendiculaire à l'orientation générale
du chaînon, de sorte que le schéma d'ensemble des lignes directrices
prend la forme sinueuse d'un S couché.
J'ai essayé dans la petite carte ci-jointe (fi g. 1) de résumer les
principaux éléments tectoniques du chaînon de Saint-Chinian. Ces
éléments se succèdent du nord au sud dans Tordre suivant :
1° Synclinal éocène du Minervois. — Le long de la bordure
du massif ancien, on observe, directement appuyé avec une assez
faible inclinaison sur les couches paléozoïques, un plateau régulier
de terrains éocènes, véritable causse calcaire que les ruisseaux
descendus de la Montagne Noire ont découpé en lambeaux séparés
par de profonds canons aux parois abruptes de calcaire nummuli-
tique. Vers le sud, ce plateau éocène se dispose en un synclinal
dont la relevée est brusque, parfois même renversée sous Tinfluenèe
de l'anticlinal nord du chaînon, déversé sur toute sa longueur sur le
aperçu sur la géologie du cbaImon DE SAIN t-chinian 687
synclinal éocène. Ce dernier commence sur les bords mêmes de
l'Orb, au iiord de Cesseoon, suit la vallée du Vernazobre jusqu'à
Saint-Chinian, mais reste très étroit jusqu'à la hauteur du village
d'Assiguan ; à partir de ce point, il s'élargit rapidement eu triangle
vers l'ouest et acquiert dans la région de Minerve et d'Olonzac
[Minervois! une largeur de plus de 10 kilomètres, d'où le nom de
synclinal éocène du Minervois.
Mua; VIII, Dôme
du Pech de Blie ; IX, Dûme de la Serre d'Oupfu
2° Anticlinal de Montahut (fig. 1, I) et écaille anticlinale de
Pierreruk (fig. 1, 1,). — Le pli le plus septentrional du chaînon est
un anticlinal à axe danien (grès de Saint-Chinian et calcaire de
Rognac), déversé au nord-ouest sur le synclinal éocène sur tout son
parcours depuis le roc Notre-Dame de Saint-Chinian, jusqu'à la
montagne des grottes de Bize, en passant par le Pech de Montahut,
point dominant de tout le pays. La charnière de cet anticlinal est
conservée sur une grande partie de ce trajet ; on la voit fort bien
par exemple au roc de Notre-Dame (fig. 2 et planche XXI, fig. 1).
Entre ce dernier rocher et le village de Pierrerue, sur une lon-
gueur de 5 kilomètres, l'anticlinal danien est éventré et laisse
apercevoir largement son axe formé par les grès à Reptiles. Mais
688
GH. DEPÉRET
je pense que Ton doit considérer comme sa prolongation, dans la
direction de l'ouest, Vécaille (avec flanc inverse supprimé par étire-
ment) de Keuper et d'Infralias qui va de Pierrerue à Cazedarnes,
s. t.
i
Rs^-~"
Notre -DtLave
Fig. 2. — Coupe passant par le rocher Notre-Dame. — 1/90.000*
S, Schistes siluriens ; I, Infralias; G, Grès de SaintChinian ; R\ R*, R', les trois
barres des calcaires de Rognac ; m, Marnes roses intercalées ; N, Calcaire à
Alvéolines; L, Lutétien lacustre.
écaille refoulée suivant un plan peu incliné sur une série éocène
renversée qui forme un puissant talus dominant la vallée du
Vernazobre jusqu'à Cessenon (fig. 3).
Aussi ai-je donné à ces deux segments d'un même pli le nom
d'anticlinal de Montahut et de Pierrerue.
SX-
Pli de CcLxednm<cf
N.O.
Pli de Pierrerue
SArvc renversée
Vallée- du.
VeTTtaAobre-s
Fig. 3. — Coupe de Pierrerue. — Echelle 1/20.000"
K, Gypse et marnes du Keuper. — Infralias : m, Marnes vertes ; p, Calcaire en
plaquettes à Avicula contorta; <i, Dolomies. — R, Rauxitc ; G, Grès de Saint-
( hinian ; N, Calcaire à Alvéolines ; L, Calcaire lacustre lutétien ; A, Grès
d'Assignan et marnes jaunes ; a1, Alluvions du Vernazobre.
3° Anticlinal de Cazedarnes (fig. I, II). — En arrière du pli de
Pierrerue se trouve déversé et refoulé au nord un second anticlinal
à axe de Keuper et d'Infra-lias que je désignerai sous le nom de pli
de Cazedarnes : il est le plus souvent transformé en écaille, mais
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SAINT-CHINIAN 689
son flanc inverse infra-liasique est partiellement conservé sur
quelques points de son trajet. Le pli commence sur la rive droite
de l'Orb, au sud de Cessenon ; il passe au village de Cazedarnes,
rejoint un peu à l'ouest de ce point le pli de Pierrerue auquel il
se superpose directement (Infra-lias sur Infra-lias avec lambeaux
de bauxite marquant la séparation des deux plis), se sépare ensuite
de ce pli et commence à s'infléchir au sud-ouest en passant un
peu au sud de Saint-Chinian (fig. 4), à l'ouest de Villespassans, et
court au sud, pour se terminer aux plâtrières deMontplo, sur la
rive sud du ruisseau de Roquefourcade (ruisseau de Cruzy), où il
disparaît sous les alluvions pliocènes.
N.O.
Fig. 4. — Coupe au col de la route de Cebazan à Saint-Chinian. — 1/15.000*.
K, Argiles bariolées du Keuper. — Infralias: m, Marnes vertes rhéUennos ; ;\
Calcaire en plaquettes à Âvicula contorta; d, Dolomies hettan^icnnes —
G, Grès de Saint-Chinian ; R1, Calcaire de Rognac ; M, mnrncs île Rognac ;
a1, Alluvions du Vernazobre.
Anticlinaux de Cebazan-Cruzy (fig. 1, III, IV et V). — Dans Paugbi
sud-ouest du chaînon, on voit se développer en arriére du pli précé-
dent, trois autres anticlinaux infraliasiqnes légèrement déversés au
nord-ouest et séparés par des bandes synclinales de grès daniens.
Ces plis qui viennent fiuir tous les Irois vers le sud à la traversée du
ruisseau de Roquefourcade, n'ont pas uu trajet aussi étendu que les
précédents; les deux premiers (fig 1, 111 et IV) s'abaissent complè-
tement au nord-est avant d'atteindre le village de Cebazan en face
duquel ils présentent une terminaison périclinale. Le troisième ou
pli de Cruzy (fig. 1, V), après un trajet de 2 kilomètres disparaît dans
les grès à Reptiles au col delà route de Cruzy à Saint-Chinian.
4° Anticlinal de Cazouls-Creissan (fig. l,Vl). — A une distance de
4 à 5 kilomètres au sud-est du faisceau serré des plis précédents,
apparaît à travers un revêtement plus ou moius complet de terrains
690 CH. DEPÉRET
miocènes, un dernier anticlinal à axe keupérien, mais dans lequel
la série jurassique se complète par l'adjonction à l'Infra-lias du
Lias et du Bajocien. Le refoulement de ce pli vers le nord-ouest
est beaucoup plus intense que celui de tous les plis précédemment
décrits et a donné lieu à des charriages horizontaux particulière-
ment étudiés par M. Nicklès dans la région de Cazouls-lez-Béziers.
Vers le sud, entre Quarante et Creissan, le pli se dégage partielle-
ment de son manteau miocène et apparaît sous la forme d'une
bande de gypse triasique que surmontent les différents termes du
Jurassique inférieur ci-dessus énumérés. Le pli, après une inter-
ruption notable, reparaît plus loin au nord-est et le bord externe
de la nappe charriée sur le calcaire de Rognac dessine un arc de
cercle autour de Cazouls comme centre; il se termine à la métairie
de Cazal-Vieil au-dessus de la station de Reals, et dépasse à peine
le bord de la rivière d'Orb. Dans cette partie de son trajet, le pli de
Cazouls éprouve une inflexion brusque vers le nord, presque à
angle droit sur sa direction primitive, ce qui détermine suivant les
intéressantes observations de M. Nicklès, une série de plis secon-
daires transversaux des plus curieux, donnant lieu à une véritable
mosaïque de terrains de tous les niveaux.
5° Anticlinal de Mus (fig. 1, VII). — Enfin la direction nord-sud
s'accentue tout à fait dans un dernier anticlinal de Keuper et
d'Infralias déversé à l'ouest, qui traverse l'Orb, en aval de Reals,
non loin du château de Mus et après une inflexion très curieuse
vers le nord ouest, va disparaître en s'abaissant sous l'Éocène à
une petite distance du village de Causses.
Je ne vois pour le moment aucune explication rationnelle de ce
changement de direction vers le nord des plis du chaînon qui vont
ainsi buter à angle droit contre les bandes paléozoïques orientées
sud-est nord ouest du massif de la Montagne Noire.
6° Dômes du Pech de Bize (fig. 1, VIII) et de la Serre d'Oupia
(fig. 1, IX). — Dans la partie méridionale du chaînon on a vu que
les plis s'infléchissaient directement vers le sud, ce qui permet de
supposer leur raccordement avec les plis de la chaîne de Fontfroide,
au sud de la vallée de l'Aude; mais les plis des environs de Cruzy
disparaissent avant d'atteindre cette vallée qui se présente ainsi
comme une dépression naturelle due à l'abaissement des plis dans
sa traversée. Avant de s'éteindre dans la vallée de l'Aude, l'effort
orogénique s'est encore manifesté, en dehors du chaînon de Saint-
Chinian proprement dit, par deux dômes anticlinaux de calcaire
AKBÇU SDR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SAINT-CHINIAN 691
lacustre lu té tien allongés du nord-ouest au sud-est : l'un forme le
Pecfi de Bize, sur la rive gauche de la Cesse, l'autre la .Serre
d'Où pi a, sur la rive droite de la même rivière. Ces dômes con-
tribuent avec les plis du chaînon à délimiter au sud le grand
synclinal du Minervois.
II. Stratigraphie
Les terrains qui prennent part à la constitution du chaînon de
Saint-Chinian sont de bas en haut :
1° Trias, Lias et Jurassique inférieur. — Mon confrère et ami
M. Nicklès ayant fait de ces terrains l'objet d'une étude spéciale, je
me bornerai à renvoyer à la Note de ce géologue et à rappeler
simplement que le Trias supérieur est formé ici d'argiles bariolées
avec amas de gypse, auxquelles succèdent les divers termes de
Vlnfralias : 1, marnes vertes et bariolées; % grès infraliasiques ;
3, calcaires en plaquettes à Avicula conlorta; 4, dolomies. Le Lias
inférieur ne peut être caractérisé faute de fossiles ; le Lias moyen
est calcaire à la base, marneux en haut ; le Lias supérieur est
formé de marnes à petites Ammonites ferrugineuses et le Bajocien
de calcaires compacts souvent dolomitisés.
2° Bauxite. — On constate dans toute la région une lacune consi-
dérable s'étendant depuis le Bajocien jusqu'au Danien fluvio-
lacustre, lacune qui me parait répondre à une longue phase
d'émersion continentale. La seule formation qui correspond à cette
lacune est un dépôt alumino-ferrugineux de bauxite rouge ou
blanche, avec nombreux pisolithes d'oxyde de fer, qui repose en
couches parfois assez épaisses sur le terme le plus élevé, quel qu'il
soit, des terrains jurassiques de la région : à Pierrerue, à Cazedar-
nes, à Villespassans sur les dolomies infraliasiques : auprès de
Cazouls, sur les calcaires dolomitiques bajociens. La bauxite rem-
plit à sa base des poches d'érosion creusées à la surface des dolo-
mies jurassiques, disposition qui a amené quelques géologues à
invoquer pour cette roche une origine éruptive ou hydro-thermale.
J'incline plutôt à la considérer comme un produit de décalcification
(plus ou moius modifié par des réactions chimiques ultérieures en
ce qui concerne la perte de silice), des calcaires et des dolomies
jurassiques sous l'influence des actions de ruissellement et de
dissolution qui se sont exercées à la surface de ces roches pendant
leur très longue période d'émersion continentale. Quoi qu'il en soit
692 CH DEPÉRET
de son origine encore un peu obscure, la bauxite occupe dans la
région de Saint-Chinian une place stratigraphique parfaitement
déterminée qui se retrouve dans toutes les coupes.
3° Danien (Crétacé fluvio-lacustre). — La transgression crétacée
débute ici plus tardivement qu'en Provence. Il n'existe dans toute
l'étendue du Languedoc aucune trace des étages de Valdonne et de
Fuveau (Sénonien supérieur).
L'étage de Rognac par lequel débute la transgression lagu no-
lacustre ne semble même pas être complet : le Rognac inférieur
(Bégudien) fait défaut et la série danienne commence par les grès de
Saint-Chinian qui représentent les grès à Reptiles du Rognac moyeu
de Provence. On doit distinguer dans ce Danien les termes suivants
de bas en baut :
a Grès de Saint-Chinian Rognac moyen
h Marnes rosées et calcaires .... Rognac supérieur
c Argiles rutilantes Vitrollien
a) Le grès de Saint-Chinian est une puissante assise (80 mètres
environ) de grès grossiers, de couleur générale lie-de-vin, passant
fréquemment, surtout dans le voisinage du massif ancien, à des
conglomérats à galets peu roulés de quartz blanc, de lydiennes,
de schistes et de calcaires paléozoïques. Des zones limoneuses
rouges ou bariolées s'intercalent au sein des grès et des poudin-
gues et sont le gisement ordinaire des ossements de grands Dino-
sauriens qui sont assez fréquents à ce niveau. Aux environs de
Saint-Chinian, j'ai observé avec M. Nicklès, de grands os de Rep-
tiles près de la halte de Pierrerue et au col de la route de Saint-
Chinian à Cébazan. Mon ami et confrère M. Miquel m'a signalé
la présence d'ossements à Balndou, près de Saint-Chinian à l'ouest ;
et surtout à côté de la ferme de Castigno, au sud-ouest d'Assignan,
où j'ai pu extraire en sa compagnie de grands os pleins des
membres et des vertèbres caudales procœliennes d'un Sauropode
du genre Titanosaurus Lydekker. Plus au sud, dans la région de
Cruzy (Gabelas) et de Quarante, ce même horizon a fourni des pièces
mieux conservées se rapportante deux autres types de Dinosau-
riens : un Théropode (Carnassier digitigrade) de la famille des
Mégalosauridés, appartenant au genre Dryptosaurus Marsh du Cré-
tacé supérieur du New-Jersey et de Madagascar ; et uu Orthopode
de la famille des Cératopsidés identique génériquement au Cratœomus
Seeley de la Craie supérieure de Neue Welt, près de Vienne, et sans
doute extrêmement voisin des Triceratops de 1 étage de Laramie.
APERÇU SDR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SAINT-CHINIAN 693
h) Les marnes et calcaires de Rognac sont une puissante assise
composée de plusieurs barres calcaires formant le plus souvent des
arêtes saillantes dentelées, séparées par des marnes rouges ou
rosées, à nombreuses concrétions pisolithiques, et dont le trajet
dessine de petites combes longitudinales. Les calcaires sont
compacts, blancs ou roses, à pâte sub-lithographique, souvent
bréchoïdes, identiques de faciès au calcaire de Rognac de Provence.
Daus la bande septentrionale du chaînon de Saint-Chinian, par
exemple entre cette ville et Assignan, on peut compter facilement
trois barres calcaires distinctes séparées par des zones marneuses
(Voir figure 2). Plus au sud, dans la bande de Reals-Cébazan-
Cruzy, la distinction des diverses bandes calcaires est moins
nette et il semble y avoir fusion plus ou moins complète de ces
diverses barres par atténuation des marnes intermédiaires.
Les calcaires de Rognac sont fossilifères en plusieurs points de
la bande septentrionale: à Test et au sud-est d'Assignan, une zone
de calcaire marneux grisâtre qui doit occuper à peu près la
partie moyenne de l'assise a fourni les espèces suivantes : Cyclo-
phorus helicifvrmis Math., Lychnusurgonensis Math., Bauxia, Limnœa
n. sp. (à dernier tour très évasé à la base).
Un autre gisement, d'un niveau plus élevé que le précédent, a
été découvert par M. Miquel dans les calcairesde la barre supérieure
sur le revers nord du Pech de Montahut qui domine toute la région.
Cet horizon, riche surtout en Bauxia de plusieurs espèces, con-
tient en outre : Cyclotus solarium Math., Palœostoa, Auricula, Pupa.
c) Les argiles rutilantes vitrolliennes forment au-dessus de la
dernière barre de Rognac une assise argilo-gréseuse rouge, de
teintes généralement plus vives que celle des marnes de Rognac.
Ces argiles forment, dans le chaînon de Saint-Chinian, une longue
bande qui présente un premier affleurement près de Cesse d on,
sur la rive droite de I'Orb, puis, après une interruption notable
jusqu'un peu au delà de Saint-Chinian, recommence auprès du
rocher Notre-Dame, et court presque sans discontinuité sous la
forme d'une étroite vallée longitudinale passant au sud d'Assignan,
puis au pied du Pech de Montahut pour aboutir à la vallée de la
Cesse un peu au nord de Bize.
4* Eocène inférieur. — Il faut attribuer au Paléocène des couches
peu épaisses de faciès fluvio-lacustre, qui se montrent à peu près
partout à la base du grand causse nummnlitique régulièrement étalé
au pied de la Montagne Noire, et découpé par les ruisseaux des-
694
CH. DBPÉRKT
cenrius de ce versant en fragments que séparent de profonds
canons aux parois abruptes de calcaire à Alvéolines. Partout où les
éboulis trop fréquents ne masquent pas l'affleurement des couches,
se montre directement au contact des schistes anciens, une étroite
bande de Paléocène presque toujours entamée par l'érosion en
abris sous roche que surplombent les calcaires nummulitiques.
Les bonnes coupes sont rares dans ces assises friables. Dans la
cluse de Barroubio, on observe sur les schistes un poudingue
grossier surmonté par des marnes et des calcaires grumeleux. Sur
les bords du ruisseau de Mounio, M. Miquel a observé une succes-
sion commençant par des marnes roses, panachées de blanc, avec
rognons calcaires et grains de quartz ; puis viennent des grès de
1 m. 50 d'épaisseur que couronne un calcaire lacustre avec sections
de coquilles indéterminables. Souvent le calcaire supérieur a été
enlevé par les érosions prénuramulitiques de sorte que le calcaire
à Alvéolines repose alors directement sur les grès ou les poudingues
inférieurs (Minerve) et parfois même directement sur les schistes
anciens (Saint-Chinian).
Par assimilation avec la coupe de Montoulieu (Aude) où le
calcaire lacustre infra-nummulitique a fourni une faune classique
à Phymprisca Noulet (horizon de Saint-Marc- la-Morée de Provence)
il est permis d'attribuer cet ensemble à la base du Paléocène.
SX.
Flg. 5. — Coupe de la chapelle Saint-Pierre. Echelle 1/15.000'
S, Schistes siluriens ; R3, R2, Barres de Rognac ; V, Argiles rutilantes de Vitrol-
les ; P, Calcaires et marnes à Physa prisca ; N, Nnmmulitique ; L, Calcaires
à Planorbis pseudo-am monius ; A, Grès d'Assignan.
J'attribue au même horizon un calcaire lacustre blanc à pâte très
cristalline, avec traces de coquilles, qui forme, le long de la route
de Saint-Chinian à Assignan, au-dessous de la chapelle Saint-
Pierre, une étroite bande verticale étirée entre les argiles dç
Vitrolles et le calcaire nummulitique (fig. 5 et PI. XXI, 2).
Rien n'indique paléontologiquement dans toute la région l'exis-
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAINON DE SAINT-CHIN1AN 695
tence des étages Sparnacien et Yprésien signalés plus à l'ouest sous
le prolongement du plateau nummulitique par MM. Bresson et
Vasseur. Il est vraisemblable que ces couches marneuses ont été
enlevées par les érosions prénummulitiques. On va voir plus loin
qu'un certain nombre de géologues pensent au contraire que ces
étages ou au moins V Yprésien pourraient être représentés ici sous
le faciès marin parla partie inférieure du Nummulitique.
5° Nummulitique {Lutétien inférieur). — Je n'ai pas en mains les
matériaux d'une étude complète du Nummulitique du chaînon de
Saint-Chinian et je me bornerai à une description stratigraphique
sommaire, en renvoyant pour les détails des gisements au travail
très consciencieux de M. Miquel.
On distingue facilement dans toute la région les trois termes
suivants de bas en haut.
a) Conglomérats et grès inférieurs. — Sur le bord du massif
ancien, aux environs même de Saint-Chinian, le Nummulitique
débute directement sur le Silurien par un conglomérat grossier,
bréchoïde, à éléments quartzo-schisteux avec débris d'Ostrea stricti-
costata, Alvéolines et autres organismes. J'ai rencontré ce conglo-
mérat grossier en d'autres points, par exemple à la montagne
d'Agel près de Bize. Mais souvent (Barroubio,Pierrerue, etc.) le faciès
est moins grossier et passe à un véritable gris nummulitique à élé-
ments siliceux avec alvéolines et débris de fossiles très roulés.
b) Calcaires à Alvéolines et à Nummulites. — L'assise la plus
importante du Nummulitique est formée d'un calcaire gris, com-
pact, à pâte sub-cristalline, de 50 mètres environ d'épaisseur.
Quelques lits plus marneux s'intercalent dans la masse calcaire
presque partout entaillée en abrupts et en canons pittoresques.
Dans la région du causse nummulitique (Saint-Chinian, Barroubio,
Minerve) ainsi que dans le plateau du bois de Bousquet (bande
renversée) près de Pierrerue, la pâte du calcaire, surtout dans les
bancs supérieurs, est pétrie d'Alvéolines (Alveolina subpyrendica,
Leyrn.) qui se détachent en blanc sur le fond gris de la roche. Les
Nummulites y sont rares, fortement empâtées et impossibles ù
extraire ; elles appartiennent d'ailleurs à la même espèce (N. ata-
cica9 Leyrn. et Guettardi, d'Arch.) qui abonde à l'état libre dans les
marnes supérieures.
Les affleurements les plus méridionaux du calcaire nummuli-
tique (montagne de l'Aussille, massif du Cayla, près Agel) ont un
faciès paléontologique tout différent : les Alvéolines deviennent
696 CU. DKPÉRBT
rares ou disparaissent même et à leur place abondent les Num nul-
lités associées ici fréquemment à de grandes Operculines (Oper-
culina ammonea Ley m.), à des Assilines, à des Echinides, à des
Mollusques presque tous à l'état de moules internes. On peut
aisément reconnaître de gros Vêlâtes Schmideli Lam., des Turritelles
voisines de Turritella imbricataria Lam, les Natica brenispira et lon-
yispira Ley m., le Terebellopsis Brauni, Leym., des Spondyles et des
Dimyaires variés. L'Ostrea stricticostata est commune avec son test
dans les délits marneux, plus fréquents et plus épais que dans la
région du Causse.
Les calcaires à Alvéolines forment en résumé une bande tout à
fait littorale, qui longe immédiatement le bord du massif ancien ;
à mesure qu'on s'écarte de l'ancien rivage, les Alvéolines sont peu
à peu remplacées par les Nummulites et les Operculines, qui affec-
tionnaient sans doute des fonds plus vaseux et moins littoraux.
c) Marnes supérieures à Nummulites et à Operculines. — Le Num-
mulitique se termine par une assise marneuse de quelques mètres
seulement d'épaisseur. Ces marnes, dont l'affleurement est partout
dessiné nettement par une zone de culture de vignoble, contiennent
à l'état libre de nombreuses Nummulites atacica Leym. et la petite
forme qui l'accompagne, N. Guettardi d'Arch. des Operculina ammo-
nea, des Echinides particuliers (Pygorhyncus Savini Cott., Linthia
llousseli Cott., Cyphosoma sp.), et des Brachiopodes (Terebratula
montolearensis Leym., Terebratulina tenuistriata Vène) avec de
nombreuses Ostrea stricticostata répandues partout.
Quel est l'âge précis du Numrnulitique marin du pied de la Mon-
tagne Noire? C'est une question sur laquelle les géologues ont émis
des avis divers : les uns avec Hébert attribuent ces couches au
Lutétien ; d'autres tels que MM. Miquel, Carez, Ficheur pour ne
citer que les membres ayant pris part à la Réunion extraordinaire,
y ont vu un représentant de l'Eocèue inférieur, plus particulière-
ment de VYprésien. MM. Vasseur et Bresson qui ont étudié le
prolongement de ces couches sur la feuille de Carcassonne, ont
adopté une opinion mixte et ont vu dans cette formation un
complexe qui embrasse à la fois l'Yprésien et le Lutétien inférieur.
Il faut d'abord remarquer que les trois assises : grès, calcaires,
marnes que j'ai distinguées plus haut, sont intimement liées l'une
à l'autre par leur faune de Foraminifères : Nummulites atacica et
Guottardi se trouvent depuis la base des calcaires jusqu'au sommet
des marnes et Alveolhia subpyrcnaica se rencontre depuis les grès
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CBAtNON DE SAINT CHINI AN 69?
inférieurs jusqu'au sommet de la masse calcaire. On peut conclure
de ces faits que cet ensemble ne répond qu'à une seule zone paléon-
tologique de l'Eocène.
Pour pouvoir apprécier le caractère lutétien ou yprésien de ces
faunes, il faudrait s'adresser aux divers ordres d'animaux fossiles
contenus dans ces couches. Mais les comparaisons à distance sont
difficiles, soit parce que l'on a affaire à des espèces spéciales à la
région, comme pour les Echinides, soit par suite du mauvais état
de conservation des fossiles, tels les Mollusques, presque toujours
à l'état de moules peu déterminables. Deux espèces très abondantes»
le Vêlâtes Schmideli et YOstrea stricticostata, simple variété de
VOstrea multicostata des sables de Cuise, sont il est vrai, presque
identiques à des types yprésiens du Bassin de Paris; mais on sait que
ces deux espèces ont dans l'Eocène méditerranéen une très grande
extension verticale et s'élèvent jusque dans les couches à Nummu-
lites perfarata (Nice, Catalogne), c'est-à-dire jusque dans le Lutétien
moyen. On ne peut donc s'appuyer sur ces espèces pour conclure à
l'âge yprésien des couches de la Montagne Noire.
Restent les Foraminifèresqui fournissent en général un très bon
critérium pour le parallélisme des assises éocènes des divers bassins.
Notre savant confrère, M. Ficheur, a bien voulu, sur ma demande,
examiner les Nummulites des diverses localités du chaînon de Saint-
Chinian et m'a transmis avec la plus grande obligeance les rensei-
gnements suivants : « Les grandes Nummulites que vous m'avez
« envoyées sont bien le N. atacica Leym.; les petites sont les formes
« à grande loge de la même espèce, désignées sous le nom de
« N. Guettardi d'Archiac.
« Cette espèce a été réunie à N. Biarritzensis par d'Archiac, en
« sorte que la désignation de N. atacica me paraît devoir être conser-
« vée seulement à titre de variété ou de race. De la Harpe a égale-
« ment englobé cette espèce sous le nom de N. Biarritzemis.
« Je ne puis faire aucune différence entre vos échantillons et
« ceux qui sont abondants dans l'Eocène inférieur d'Algérie (Souk-
« Arhas, Tébessa, Boghari, Relizane), et dont ils sont caractéristi-
« ques. On peut rapprocher également N. atacica de la variété
(( indiquée par De la Harpe sous le nom de AT. Biarritzensis var.
« prcecursor qui caractérise l'étage libyen (Eocène inf.) de l'Egypte.
« J'ajoute cependant que N. Biarritzensis type se rencontre,
(( d'après M. Zittel, dans le Lutétien, c'est-à-dire dans les couches à
« N. Gizehensis de la région du Caire.
(( Le groupe de N. Biarritzensis est représenté en Algérie dans
698 CH. DEPÉRET
(( les couches à N. lœvtgata, par quelques individus d'espèce diffé-
(( rente, mais très rares. Pour moi, j'incline toujours pour l'Eocène
« inférieur dans les Corbières. »
Mais pour réunir sous les yeux du lecteur tous les éléments de
la question, je dois ajouter que M. Munier-Chalrnas, dans sa Thèse
sur le Vicentin, a indiqué que N. atacica était associé à N. lœvigata
dans les calcaires de la Guichellina et que la même espèce était
également prédominante, associée aux Alvéolines, dans les
calcaires de Monte-Postale et de Monte-Bolca, dont l'âge lutétien
inférieur n'est pas douteux.
Ainsi, nous aboutissons à la conclusion que N. atacica se trouve
à la fois dans le sommet de l'Eocène inférieur et à la base du
Lutétien et ne permet pas de trancher la question qui nous occupe.
Mais je trouve dans les études de M. Bresson (1) pour le levé de
feuille de Carcasson ne, des raisons stratigraphiques qui me parais-
sent en faveur de l'âge lutétien des couches discutées. Ce géologue
a signalé dans le centre du synclinal nummulitique des Corbières
entre Rieux et Caunettes, près du mont Alaric, « un banc peu épais
<( de calcaire avec Bryozoaires, Polypiers, Cérithes voisins de
« Cerithium acutum, et une Turritella allongée comparable à T. édita
« des sables de Cuise. Là où le banc marin fait défaut, il existe un
« lit calcaire contenant des Lymnées et des Physes columnaires
« comme celles des calcaires de Langesse dans le bassin d'Aix. Ce
« complexe doit donc correspondre à l'argile plastique et aux sables
« de Cuise dans le bassin de Paris ». C'est seulement au dessus de
ces couches lagunomarines que se montrent les calcaires à Alvéolines,
identiques à ceux de la Montagne Noire, quoique plus réduits
d'épaisseur (2). 11 me semble logique de conclure de ces faits intéres-
sants que la transgression marine Eocène a débuté dans le centre
du synclinal des Corbières avec le Sparnacien et l'Yprésien, mais
qu'elle n'a acquis son extension maximum qu'avec le Lutétien
inférieur, époque à laquelle le rivage nummulitique est venu
baigner momentanément le bord des terrains anciens de la Mon-
tagne Noire. Cette manière de voir concorde d'ailleurs avec ce que
nous savons sur l'importance et la généralité de la transgression
(1) Compte-rendu des collaborateurs, campagne de 1896, p. 76 (Bull. Serv. Carte
géol. de France).
(2) M. Doncieux a observé des faits analogues dans les Corbières orientales,
près de Coustonge. Des marnes à Cerithium cf. acutum et autres espèces de
l'horizon de Cuise, c'est-à-dire franchement y présiennes, se montrent au-dessous
des calcaires à Alvéolines identiques à ceux de la Montagne Noire.
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAINON DE SAINT-CHINUN 699
lutétienne dans un grand nombre de points du bassin de la
Méditerranée.
6° Eocène fluvio-lacustre (LutétienBartonien). — Le régime
marin se termine avec les marnes à Operculines et on voit débuter
au dessus assez brusquement un régime d'eau douce (alternative-
ment lacustre et fluvio-terrestre) qui va durer jusqu'à la fin de
l'Eocène.
A la base de la série on retrouve dans toute la région l'assise
suivante :
I) Calcaires a « Bulimus Hopei » et « Planorbis pseudo-ammo-
nius » avec lignite intercalé à la partie supérieure (Lignites de la
Caunette). — Ces calcaires blancs compacts, forment au-dessus du
causse nummulitique un gradin très marqué qui prend à son
tour l'aspect d'un causse calcaire à surface raboteuse. Ce plateau
régulier de calcaire lacustre débute un peu à Test d'Assignan,
passe au sud de Barroubio, puis à Gémenos, à Saint Jean, à Caillol,
à Viallanove, pour atteindre la Caunette et Minerve et se prolonger
au loin sur la feuille de Carcassonne, où il est connu depuis les
travaux de Matheron sous le nom de calcaire de Ventenac.
Du côté de l'est, dans la vallée du Vernazobre, le plateau
lacustre a été en grande partie déblayé par les érosions ; il en est
pourtant resté un témoin près de Combejean et un autre lambeau
au Mas Sarra, en face de Cessenon.
Dans l'aile sud du synclinal éocène, le calcaire lacustre prend
part au pli nord du chaînon de Saint-Chinian, et forme sur le flanc
du talus du bois du Bousquet une bande renversée qui va du rocher
de Cessenon à la halte de Pierrerue. On le revoit ensuite à l'état
de lambeaux étirés le long du flanc renversé du pli danien, par
exemple au sud d'Assignan, à Castigno, au pied du Pech de Monta-
hut. Enfin tout-à-fait au sud de la région plissée, ce calcaire forme
le centre des dômes anticlinaux du Pech de Bize et de la Serre d'Oupia.
Les caractères lithologiques de cette assise sont très uniformes :
elle est formée de gros bancs d'un calcaire à pâte fine, à cassure
mate, blanc ou bleuté, traversé de veinules ou de géodes spathiques,
et se débitant en plaques sonores sous le pied. A divers niveaux,
les bancs deviennent plus minces, plus marneux, sont remplis de
coquilles écrasées et prennent une teinte foncée, brune ou noire,
due à la présence de matière charbonneuse, qui se concentre
souvent en lits irréguliers de lignite impur. Ces lits ligniteux
peuvent se montrer dans toute la hauteur de la formation, mais
700 CH. DEPERKT
forment à la partie tout-à-fait supérieure un horizon plus constant
dignités de la Caunette). Ce niveau charbonneux est peu développé
à Test dans la région de Saint-Chinian ; on l'observe cependant
à Pierrerue dans la tranchée du chemin de fer. Mais c'est dans
la vallée de la Cesse, aux environs de la Caunette que ces lignites
sont mieux développés et ont donné lieu à des exploitations aujour-
d'hui abandonnées ; on peut suivre aisément encore, grâce aux
déblais, la ligne des anciennes mines de Viallanove à Babio, à la
Caunette et à Minerve d'où elle se prolonge au loin vert l'ouest.
La faune de ces calcaires est également très uniforme. Elle com-
prend les espèces suivantes :
Bulimus Hopei Marcel de Serres.
Rillya cf. rillyensis Boissy.
Hélix Marioni Math.
Limnœa Michelini Desh. type et grosse variété (-= L. aquensis
Math).
Planorbis pseudo-ammmius Voltz, type et variété plus plate,
à tours plus minces tendant vers le /'. pseudorotundatus
Math.
II) Les termes supérieurs de la série éocène montrent des faciès
plus variables, et il devient nécessaire de décrire à part la région
occidentale qui s'étend de Saint-Chinian au Minervois, et la région
orientale comprenant la vallée de l'Orb et du Vernazobre.
■
A. — Région occidentale. — Dans toute la région à l'ouest de
Saint-Chinian dominent les faciès gréseux avec intercalation de faciès
marnocalcaires.
On distingue aisément de bas en haut les trois assises suivantes :
a) Grès d*Assignan. — La roche dominante est un grès grisfonc^
ou jaunâtre, à dragées de quartz blanc, tantôt à grain fin, tantôt
assez grossier pour passer au poudingue. Mais les bancs gréseux
alternent avec des lits de marnolithes panachés, roses, jaunes,
violets, de faciès continental, qui se chargent parfois de calcaire au
point de se transformer en bancs de calcaires gréseux jaunâtres,
avec traces de coquilles mal conservées.
Les grès d'Assignan contiennent quelquefois vers leur base des lits
liguiteux toujours peu importants : c'est à ce niveau que se placent
les petits affleurements charbonneux de Cazelles, des Terres- Noires
de la Roueyre, des Co m bettes, de Barroubio, etc. Il en est de môme
beaucoup plus au sud des lignites autrefois exploités près de Cabezac,
APERÇU SUR LA GEOLOGIE DU CHAINON DE SA1NT-CHINIAN 701
à l'extrémité sud du Pech de Bize et peut-être aussi de ceux qui
affleurent à l'ouest de ce hameau, près de la grande route de Pouzols.
Cette assise forme dans le synclinal éocène une double bande,
l'une septentrionale passant par Saint-Pierre d'Assignan, Assigoan,
Cazelles, Paguignau, Babio, la Caunette, puis entre Azillanet et
Minerve d'où elle se prolonge au loin dans le Minervois ; l'autre
méridionale débutant entre Montouliers et Bize, passant par Bize,
Maillac et Oupia pour se prolonger jusque non loin d'Olonzac.
Les fossiles sont rares dans cette assise en grande partie gréseuse.
Les calcaires m a rno gréseux intercalés contiennent parfois des
coquilles d'eau douce, en général des Limnées peu déterminables.
Près de la Roueyre, M. Miquel m'a montré dans les grès des plaques
de Tortues et des dents de Crocodiles; j'ai observé aussi des débris
des mêmes animaux dans un banc de grès qui a été exploité comme
pierre à bâtir un peu au nord de Cazelles.
b) Marno- calcaires d'Agel avec lignites intercalés (lignites (TA gel).
— M. Miquel a le premier reconnu et caractérisé cette assise marno-
calcaire qui forme un point de repère précieux et constant au
sein de l'interminable série gréseuse de cet Eocène fluvio-lacustre.
Elle est essentiellement formée de bancs peu épais d'un calcaire
lacustre à pâte fine qui présente en surface quelque ressemblance
avec le calcaire à Bulimus Hopei, mais s'en distingue à la cassure
par une teinte plus foncée, une nature plus marneuse et surtout
par la présence de petits grumeaux ou de concrétions traverti-
neuses caractéristiques. Les calcaires alternent à la partie inférieure
de l'assise avec des marnes jaunâtres ou noires et même avec
quelques bancs de grès identiques aux grès d'Assignan, mais les
bancs calcaires finissent par dominer à la partie supérieure, de
telle sorte que la surface d 'affleurement constitue à son tour de
Castigno à Agel, â Aigues-Vives et à Azillannet%n causse calcaire
moins aride que le causse du calcaire à Bulimus Hopei, mais
d'aspect assez analogue. Des lits de lignites parfois assez épais sont
intercalés entre les bancs calcaires : on les voit bien dans la tran-
chée de la route d'Aiguesvives à Paguignan, le long de la route de la
Roueyre à Bize, etc., mais ils sont surtout bien développés daus la
vallée de la Cesse un peu en aval d'Agel, où ils ont été ou sont
encore exploités des deux côtés de la rivière (lignites d*Agel). C'est
à ce niveau qu'appartiennent les lignites autrefois exploités en
divers points autour de Maillac et sur la route de Maillac à Bize,
cest-à dire dans l'aile méridionale du même synclinal.
24 Août 1901. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr - 45
702 CH. DEPÉRET
Les marno-calcaires de l'assise d'Agel sont heureusement plus
riches en fossiles que les assises gréseuses dans lesquelles ils
s'intercalent. Les zones marneuses et marno-ligniteuses se mon-
trent partout remplies de débris de carapaces de Tortues (Emydes)
de plaques ou de dents de Crocodiles; l'abondance de ces Reptiles
est telle que Ton pourrait donner à ces marno-calcaires le nom de
calcaires à Tortues, suivant l'expression proposée par M. Miquel.
Exceptionnellement j'y ai observé des dents de Mammifères du
groupe des Pachynolophus.
Les Mollusques se trouvent partout en abondance, surtout dans
le voisinage des lits ligniteux> où leur test est malheureusement
toujours écrasé. Quelques points se montrent un peu plus favo-
rables à la récolte des fossiles : je citerai en particulier les environs
de Maillac et surtout un petit vallon qui se trouve au nord de Bize,
au pied même des premiers escarpements nummulitiques du Cayla.
J'ai recueilli dans ces localités, en compagnie de M. Miquel, une
faunule intéressante, qui diffère d'une manière très sensible de la
faune du calcaire à Bulimus Hopei. Cette fauoule mériterait une
6 7 8 9
Flg. 6-9. —6. Bulimus gerundensis Vidal, de l'Eocène inférieur de Catalogne. —
7 Bulimus Bopei de Serres, de l'horizon du Montaiguet (Lu té tien moyen) de
Provence et du Languedoc. — 8. Bulimus Cathalai n. sp., du Lutétien supé-
rieur. — 9. Bulinms Bouvyi Haime, de l'Oligocène des Baléares.
étude spéciale complète (1) rendue difficile, il est vrai, par le
mauvais état de conservation des fossiles ; je me bornerai pour le
moment aux indications suivantes :
Bulimus Cathalai n. sp. (fig. 8). — Grande espèce du groupe du B
(1) C'est sur le prolongement de ces marno-calcaires que M. Miquel a décou-
vert à la chapelle de Centeilles, près Siran, dans le Miner vois, un beau gisement
de coquilles lacustres, parmi lesquelles M. Roman a décrit Limnœa Miqueli, forme
véritablement intermédiaire entre L. Michelini Dcsh. du Lutétien et L longiscata
Brg. du Bartonien (Ann. Université de Lyon, nouv. sér., (a se. 1, pi. II, flg. 8-9).
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SA1NT-CBINIAN 703
Hopei, mais différent de cette dernière par sa spire beaucoup plus
courte, sou dernier tour en proportion plus élevé (bien plus de la
moitié de la hauteur totale, tandis qu'il n'atteint pas la 1/2 hau-
teur dans le H. Hopei, fig. 7) et surtout bien plus ventru ; par son
bord buccal notablement plus évasé. Le B. Cathalai se rapproche
par la hauteur de son dernier tour du B.Boutyi Haime des Baléares,
(fig. 9), qui appartient à un niveau encore plus élevé; celui-ci en
diffère par sa spire moins renflée, à profil presque plan et par
ses sutures plus superficielles.
J'ai cru utile de reproduire ici (fig. 6-9) les dessins au trait, à demi-
grandeur, des 4 espèces de Bulimtis de ce groupe, décrites dans les
différents niveaux de l'Eocène.
Clausilia sp. — Petite espèce (hauteur 5 millim.) remarquable
par ses tours fortement convexes et ses sutures profondes; la
bouche est inconnue. Cette espèce parait se rapprocher par sa
forme générale de Clausilia indifferens Sanberger (Land. u. Sussioasser
ConchyL, pi. XII, fig. 14) des breccioles Eocènesdu Vicentin (Monte
Altissimo, Pugnello, etc.).
Hélix Marioni Math. — Sujets assez déprimés que je ne puis dis-
tinguer de l'espèce des calcaires à Bulimus Hopei.
Limnœa Michelini Desh. var. — Forme à spire plus courte, à
dernier tour plus haut en proportion que dans lp type du calcaire
de Longpont et du causse de Castres (L. Castrensis Noulet).
Planorbis pseudo-ammonius Schl. var. — Forme plus plate, à
dernier tour moins élevé et moins large en proportion du diamètre
total que dans le type de Buschweiler, de Longpont et du causse
de Castres. Par ces divers caractères, il tend à se rapprocher d'une
forme encore plus aplatie que Ton trouve dans l'Eocène supérieur
de Saint-Gély (Hérault) et de Sommières (Gard) , où elle a été
signalée par M. Roman, mais qui n'a pas encore été nommée ni
figurée.
Planorbis Rouxi Noulet, 1859 (= PL Chertieri Desh., 1864). —
Petite espèce plate, à spire assez embrassante, à dernier tour aplati
en une carène mousse, qui se trouve à la fois dans le bassin de
Paris, à Longpont, à Saint-Parres, en Alsace à Buschweiler et dans
le calcaire du causse de Castres.
Sphœrium castrense Noulet var. — Les sujets des" en virons de
Bize diffèrent du type du causse de Castres par leur sommet plus
gros et un peu plus saillant; l'ornementation est identique.
c) Grès et argiles d'Aigne. — Au-dessus des marno-calcaires
d'Agel, le faciès gréseux recommence sur une énorme épaisseur de
704 CU. DtiPÉRET
couches que Ton ne saurait évaluer à moins de 150 mètres. C'est
uoe interminable série de grès sombres, siliceux, plus ou moins
grossiers, alternant avec des argiles marnolithiques moius bariolées
que celles de l'assise des grès d'Assignan et d'une couleur jaune ou
brune assez générale.
Ces couches remplissent le centre du synelinal éocène, dont Taxe
constitue, par un phénomène d'inversion de relief des plus remar-
quables, une arête de collines continue depuis la montagne num-
mulitique du Cayla jusqu'à la plaine d'Olonzac en passant par le
signal d'Agel, le village d'Aigne et la haute colline du signal
d'Aigne entre Azillanet et Beaufort.
Sur cette vaste surface d'affleurement, il m'a été impossible de
découvrir la moindre trace de fossiles vertébrés ni invertébrés.
Mais ces grès et marnes supérieures se prolongent au loin dans le
Minervois en passant par les localités d'Olonzac, de Cesseras, de
Pépieux, de la Livinière, où les grès et les marnes intercalés {grès
de Cesseras) ont fourni autrefois aux recherches du Dr Pittore et
plus récemment à celles de MM. Miquel, Bertrand, Bousquet, de
remarquables séries de Mammifères fossiles. P. Gervais et M. Filhol
ont déjà décrit (1) de cet horizon plusieurs espèces fort intéres-
santes, telles que le Lophiodon leptorhyncum Filh. dont les molaires
inférieures ont leurs crêtes qui se recourbent en demi-croissants,
indiquant une évolution marquée vers le type des Acerotherium ; le
Cesserasicus antiqutis, Filh. (qui n'est peut-être qu'un jeune avec
SignaLd'AjeL Pa£uionan
PechdmBixe t5o /a£.w D •©
t|5 laisse Afo\ *°3
• IBise
Fig. 10. — Coupe du synclinal éocène du Minervois. — Echelle : 1/80.000*.
S, Schistes paléozolques; 1, Eocène inférieur; 2, Numroulitique; 3, Calcaire lacustre
à Bulimus Bopei ; 4, Grès d'Assignan ; 5, Marno -calcaire à llgnites d'Agel ;
6, GW>s et argiles d'Aigne.
dentition de lait, de l'espèce précédente) et le Pachynolophus cesse-
rasicus Gervais (2), espèce plus forte que le P. Duvali Pomel du
calcaire grossier supérieur de Paris, et distinct par la forme
remarquablement étroite et allongée de sa dernière molaire infé-
(1) Filhol Vertébrés fossiles d'Issel {Menu Soc. géol. France, 1888).
(2) Gervais ZooL et paléont. fr., 1859, pi. 18, fig. 8.
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SAINT-CHINIAN 705
Heure. Il y a aussi de très nombreux fragments d'Emydes et de
Crocodiliens dans ces gisements qui sont loin d'avoir dit leur der-
nier mot au point de vue de leurs richesses paléontologiques.
La coupe ci-jointe (fig. 10) à travers la vallée de la Cesse peut
donner une bonne idée de la structure de cette région.
B. Région orientale. — En allant de Saint-Chinian dans la direc-
tion de Test, le faciès gréseux tend à s'atténuer et à sa place on voit
se développer un faciès surtout argileux et marnolithique.
Je dirai d'abord un mot de deux lambeaux fossilifères dont la
place stratigraphique exacte est assez délicate à préciser: on peut
les indiquer sous le nom de faciès grumeleux rouge à Bulimus Hopei.
Le premier de ces gisements a déjà été signalé par M. Miquel à la
montée St-Laurent, sur la rive gauche du Vernazobre, en face de
l'abattoir de Saint-Chinian. C'est une curieuse formation d'aspect
continental, plaquée contre les schistes siluriens et comprenant
des marnes grumeleuses rouges alternant avec des lits bréchoides
provenant d'éboulis de roches locales ; on y recueille en abondance,
mais à l'état de moules internes, le Bulimus Hopei associé rarement
ici à une forme sénestre, Y Amphidromus gib'ms Nicolas.
Un gisement très analogue comme faciès a été découvert par
M. Canoat sur la rive gauche de l'Orb à côté même du pittoresque
village de Reals; dans les marnes grumeleuses qui affleurent presque
au niveau de la rivière abonde VA mphidromus gibbus (espèce si rare
partout ailleurs) mélangée avec quelques exemplaires du Bulimus
Hopei.
Ces deux lambeaux appartiennent bien certainementà un niveau
très bas de l'Eocène fluvio-lacustre. Je suis disposé à penser qu'ils
représentent les couches les plus inférieures de l'assise des grès
d'Assignan; mais il ne serait pas impossible qu'ils puissent corres-
pondre à tout ou partie de la grande assise calcaire à Bulimus
Hopei, sous un faciès de bordure tout à fait continental.
Je distinguerai dans cette région orientale qui s'étend de Saint-
Chinian à Cessenon, à Reals et au delà de l'Orb, trois assises qui
correspondent assez bien aux trois assises de la région occidentale,
avec des faciès un peu différents.
a) Marnes à Melanopsis castrensis (= M. dubiosa Math.). — Cette
assise est essentiellement marneuse ou marco-calcaire, de teintes
grises, mais des bancs gréseux s'intercalent fréquemment à la
partie supérieure.
Sur la rive gauche du Vernazobre, en aval de Saint-Chinian,
706 CH. DEPÉRBT
uoe série de lambeaux discontinus de marnes et calcaires marneux
de cette zone s'appliquent en série normale contre les schistes silu-
riens. Près du hameau de Combejean, on y recueille de bons
exemplaires du Melanopsis castrensis Noulet.
De l'autre côté de l'Orb, en face de Cessenon, les marnes de cette
zone surmontant le calcaire compact à Planorbis pseudo-ammonius
du Mas Sarra, forment une série de collines qui s'avancent au
nord-est jusqu'au pied du massif dévonieu du Mont Peyroux, dont
l'Eocène est séparé par une faille rectiligne des plus nettes. Le
long de la route de Saint Nazaire, avant la bifurcation de la route
de Causses, M. Cannât y a découvert le Melanopsis castrensis.
Enfin plus au sud entre le pli de Cazouls et le pli de Mus se place
un synclinal éocène, dans lequel on observe au-dessus du faciès
rouge à Amphidromus gibbus, les marnes de cet horizon dans les-
quelles on trouve sur le flanc d'un ravin qui débouche à la halte de
Réals, d'abondants exemplaires du Melanopsis castrensis. Au-dessus
des marnes on voit une assise de grès fin, siliceux, très dur, exploité
à 200 m. environ au sud de la station, dans d'importantes carrières
de grès à pavé. Ces grès passent sous les calcaires pisolithiques qui
terminent la formation.
b) Marno-calcaires pisolithiques avec poupées à Melanopsis. — La
partie moyenne de la formation devient calcaire comme dans la
vallée de la Cesse, mais le faciès de la roche est très différent ;
c'est un calcaire à gros bancs, souvent bréchoïde, de teinte rosée,
imitant à s'y méprendre le calcaire de Rognac, avec lequel je
l'avais d'abord confondu. M. Miquel a attiré mon attention sur un
caractère assez constant qui permet de distinguer le calcaire
éocène : c'est la présence dans la pâte de la roche de concrétions
travertineuses, pisolithiques, sphériques, cylindroïdes, ou aplaties,
présentant en un mot les formes les plus variables. Dans les parties
plus marneuses de l'assise, en particulier sur les hauteurs qui
dominent Cessenon, ces concrétions sont libres et prennent la forme
de véritables poupées dont le centre est occupé par une coquille de
Melanopsis castrensis. Les poupées de Cessenon sont maintenant bien
connues dans toutes les collections locales. Sur la rive gauche de
l'Orb, tout le plateau qui porte le village de Causses est formé du
même calcaire qui, d'après un renseignement de M. Miquel, con-
tient des moules d'un gros Bulime, probablement le Bulirnus
Cathalai de Bize.
Le synclinal de Reals montre également de beaux affleurements
du môme calcaire à pisolithes, coupé en tranchée par la route de
APERÇU SUR LA GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SAINT-CHINIAN 707
Murviel. Ce calcaire traverse l'Orb en face la halte de Reals et est
recoupé par le chemin de fer à une petite distance au sud de la
station ; son apparence rognacienrie y est des plus trompeuses.
c) Argiles bariolées et grès de Cessenon. — A la base du grand talus
de couches éocènes renversées qui domine la rive droite du Verna-
zobre eu aval de Saiut-Chinian, on voit affleurer sur une grande
épaisseur des argiles limoneuses de teintes vives, jaunes ou rouges,
parfois marnolithiques ; la tranchée du chemin de fer à Cessenon
en offre un bon type. L'élément gréseux n'est pas exclu, mais son
rôle est plus subordonné que dans la région d'Aigne.
Dans le synclinal de Mus, cette assise parait avoir été enlevée en
entier par l'érosion.
Age de la série éocène fluvio-lacustre du chaînon de Saint-
Chinian. — Une dernière question me reste à examiner, c'est celle
des comparaisons stratigraphiques que l'ou peut établir entre les
diverses assises fluvio-lacustres ci-dessus décrites et les étages classi-
ques du système éocène. Un bon point de départ nous est fourni à la
basepar le Nummulitique marin à Nummulites atacica que j'ai été
amené plus haut à rapporter à la partie tout à fait inférieure du
Lutétien.
Le calcaire compact lacustre à Ëulimus Hopei (avec lignite de
la Caunette à la partie supérieure) qui succède directement à l'assise
marneuse terminale du faciès marin, contient une faune de Mollus-
ques fluvio-terrestres qui permet un parallélisme précis avec le
calcaire du Montaiguet de Provence que tous les géologues depuis
Matheron s'accordent à considérer comme l'équivalent du calcaire
grossier proprement dit du bassin parisien, c'est-à-dire du Lutétien
moyen (eu Provence peut être également du Lutétien inférieur). Il
existe entre la faune de l'horizon provençal et celle de la Montagne
Noire quelques légères différences : le véritable Planorbis pseudo-
rotundatus avec ses tours étroits et très minces n'existe pas dans
la région de Saint-Chinian, tandis qu'on y observe le P. pseudo-
ammonius Schlot., typique, associé il est vrai à des formes de
passage à l'espèce précédente. Cette remarque paléontotogique peut
s'interpréter, je crois, en supposant que le calcaire du Languedoc
est légèrement plus élevé dans la série que le niveau fossilifère du
bassin d'Aix (Pont des Trois Sautets) et correspond seulement aux
couches tout-à-fait supérieures du Montaiguet, touchantau calcaire
deCuques. La vraie faune du Montaiguet à P. pseudo-rotundatus
correspondrait dans cette idée au Nummulitique murin de la
Montagne Noire.
708 CH. DfcPÉRKT. — GÉOLOGIE DU CHAÎNON DE SA1NT-CH1NIAN
Les grès d'Assignan qui viennent ensuite n'ont point de faune
déterminable et ne peuvent être classés que par les couches cal-
caires qui les encadrent.
Les marno-calcaires à Tortues avec lignites d'Agel intercalés
possèdent une faune très abondante, malheureusement en mauvais
état. On y trouve un gros Bulime (Bulimus Calhalai, n. sp.) qui est
une véritable mutation ascendante du Bulimus Hopei ; mais cette
forme intéressante n'existe ni en Provence ni dans le sud-ouest.
Les affinités fauniques les plus importantes sont d'une part avec le
calcaire de Cliques dans le bassin d'Aix, d'autre part avec le calcaire
du causse de Castres et de Labruguière dans le Tarn. Les Limnées
du type Michelini, les Planorbes du groupe pseudo-ammonius, le
Melanopsis castrensis (= M. dubiosa Math.) sont communs aux trois
régions et on trouve en outre dans les marno calcaires d'Agelle
Planorbis Rouxi et le Sphœrium castrense du causse de Castres.
Cependant le parallélisme rigoureux entre les calcaires d'Agel,
de Cuques et de Castres n'est pas tout-à-fait aussi exact que l'on
serait tenté de le croire d'après ces analogies fauniques. Les espèces
d'Agel sont presque toutes des variétés ou si l'on veut des formes
représentatives des espèces précitées : le Planorbis pseudo ammonius
n'est pas le type de Buschweiler et de Castres avec son dernier tour
épais, élevé et assez embrassant ; c'est une forme plus plate, à
dernier tour moins enroulé et en proportion moins large, qui tend
à se rapprocher d'une espèce encore non décrite de l'Eocène supé-
rieur de Saint-Gély et de Sommières. La Limnœa Michelini n'est pas
non plus typique ; la spire est beaucoup plus courte, le dernier tour
plus important sur l'ensemble de la spire. Le Sphœrium castrense a
des sommets plus gros et plus saillants que le type de Castres. Enfin
et surtout la présence dans les marno-calcaires de Sirau (Minervois)
de la Limnœa Miqueli Roman, forme qui s'éloigne beaucoup de
I. Michelini par sa spire plus allongée et ses sutures bien plus
obliques nous indique un passage évident vers les Limnées du
groupe longiscata Brg.
En raison de ces diverses nuances paléontologiques, je suis
disposé à admettre que les marno-calcaires d'Agel occupent un
niveau légèrement plus élevé que le calcaire de Cuques et de
Castres et doivent être considérés comme un véritable terme de
passage entre le Lutétien supérieur et le Bartonien.
Enfin les grès et argiles d'Aigne qui terminent la série sont à
fortiori bartonitns et leur faune de Mammifères est en faveur de
cette détermination. Elle comprend un Lophiodon très évolué
EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE A ASSIGNAN Et BARROUBIO 709
(L. leptorhyncum Filh.) dont les molaires inférieures tournent aux
Acerotherium^et un Pachynofophus cesserasicus Gerv. très différent du
*\ Duvali du calcaire grossier supérieur parisien. Nous avons
l'espérance de pouvoir arriver un jour, par de nouvelles recherches,
à préciser les caractères de la faune maminalogique encore si mal
connue de l'étage Bartonien.
COMPTE RENDU DE L'EXCURSION DU 7 SEPTEMBRE
A ASSIGNAN ET BARROUBIO
par M. Cb. DEPÉRET
En sortant de Saint-Chinian à l'ouest, la Société a observé au
quartier de Baladou les grès de Saint-Chinian ou grès à Reptiles du
Rognac moyen, grès grossiers, lie-de-vin, qui ont fourni en ce point
des ossements de Dinosauriens dont on voit encore quelques traces ;
vers le sud, on voit ces grès surmontés en concordance par la barre
dentelée des calcaires de Rognac qui dominent la ville et donnent
au paysage un aspect assez pittoresque.
Les grès forment là un anticlinal danien couché au nord, dont la
charnière se voit bien au roc Notre-Dame (fig. 11). C'est le début du
grand pli nord du chaînon qui se prolonge au sud-ouest saus
interruption jusqu'à la montagne des grottes de Bize.
En continuant de suivre la route d'Assignan, on recoupe bientôt
les trois barres renversées des calcaires de Rognac, légèrement
couchées sur un plateau de terrains éocènes.
A la hauteur du hameau de Tudéry, la coupe est des plus nettes
et des plus complètes (fig. 12) : l'anticlinal comprend dans son flanc
inverse, outre les calcaires de Rognac, les argiles rouges vitrol-
liennes, un banc de calcaire lacustre blanc de l'âge du calcaire de
Montoulieu à Physa prisca, puis la barre des calcaires à Alvéolines
formant le rocher élevé de la chapelle Saint-Pierre ; enfin les cal-
caires éocènes à Planorbis pseudoammonius et les grès d'Assignan.
Ces derniers forment l'axe d'un synclinal couché sur un plateau
très régulier d'éocène lacustre et de calcaire nummulitique qui va
s'appuyer en pente douce sur les schistes siluriens.
710
CB. DEPÉRET
Ou a exploré ensuite plusieurs gisements fossilifères : au col de
la route à droite dans la barre des calcaires nummulitiques ; un
deuxième au sud de la route dans les calcaires marneux de l'étage
de Rognac avec Cyclophorus heliciformis, Lychnus urgonensis, Bauxia.
Le village d'Assignan est assis sur les grès éocènes, séparés ici
des calcaires blancs à Planorbis pseudo-ammonius par une pelite
faille verticale dont le miroir poli s'observe en plusieurs points près
de l'entrée du village.
s. s..
H.O.
Fig. 11. — Coupe passant par le rocher Notre-Dame. — 1/30000"
S, Schistes siluriens ; I, Infralias ; G, Grès de Saint-Chtnian ; R\ R', R*. Les trois
barres des calcaires de Rognac ; m, Marnes roses intercalées ; N, Calcaire à
Alvéolines ; L. Lutétien lacustre.
SX.
Route ^N
'tsrnm
N.O.
Fig. 12. — Coupe do la chapelle Sa int- Pierre. — 1/15000'
S, Schistes siluriens; R3, R-, Barres de Rognac ; V, Argiles rutilantes de Vitrolies ;
P, Calcaires et marnes à Physa prisca ; N, Nummulitique ; L, Calcaire a Planor-
bis pseudo-ammonius : A, Grès d'Assignan.
Plus à l'ouest la route descend et recoupe les grès d'Assignan, à
gros grains de quartz, alternant avec des marnolithes panachés,
de faciès continental. Ces grès très puissants forment au sud
un talus assez raide le long duquel on voit l'intercalation de
quelques bancs de calcaire marneux jaunâtre qui passent par
transitions insensibles aux marnolithes.
On descend ainsi rapidement vers la cluse du ruisseau de
EXCURSION A ASSIGNAN ET BARROUBfO 711
Barroubio, en recoupant la faille d'Assignan déjà signalée plus à
Test, et on atteint le calcaire lacustre blanc, compact, en gros
bancs, dont les gros blocs détachés à droite du chemin fournissent
aux recherches des membres delà Société: Bulimus Hopei Marcel de
Serres, liillya cf. rillyensis Boissy, Limnœa Michelini Desh., Planorbis
pseudo-ammonius Viltz, Hélix Afarûmi Math.
On arrive ainsi à l'entrée du pittoresque canon de Barroubio
découpé dans les calcaires nummulitiques; c'est le plus beau de la
région, toutefois après celui de Minerve. Le calcaire est rempli
d'une multitude d'Alvéolines surtout dans les bancs supérieurs. Au
dessus de l'entablement calcaire, M. Miquel nous moutre en passant
sur le chemin de traverse qui monte au hameau de Barroubio, les
marnes nummulitiques assez fossilifères en ce point; on recueille
en abondance des Ostrea stricticostata avec leurs deux valves et des
Echinides parmi lesquels domine Pygorynchus Savini Cotteau.
A Barroubio, bâti sur un véritable causse de calcaire numinuliti-
que, la Société trouve le plus charmant accueil dans la famille de
notre confrère M. Miquel, dont la réputation d'hospitalité est bien
connue de tous les géologues qui ont passé dans la région. Mais la
nuit arrive. Nous nous arrachons non sans peine aux douceurs de
cette hospitalité et à l'examen des belles collections de M. Miquel
pour rentrer rapidement en voiture à Saiitt-Chinian.
712
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 8 SEPTEMBRE
A PIERRERUE ET CAZEDARNES
par M. Cbo DEPÉRET
Le malin, la Société est partie à pied de Saint-Chinian par la
nouvelle route de Cébazan qui s'élève à travers les grès à Reptiles
du Rognac moyen. Ces grès plongeant au sud sont couronnés en
concordance par la barre inférieure des calcaires de Rognac, de
teintes rosées et d'aspect souvent bréchoïde. Au niveau du col de
la route, on voit reposer sur cette série normale un anticlinal cou-
ché vers le nord, avec flanc inverse et flanc normal conservés,
constitué par les dolomies infraliasiques entre lesquelles apparais-
sent dans le noyau du pli les marnes vertes caractéristiques de la
base du Rhétien et même un peu d'argilekeupérienne bariolée (fig. 13).
Ce pli couché de Keuper-ïnfralias se coutinue d'une part vers le
sud-ouest dans la direction de Villespassans; d'autre part vers le
nord-est, couroonant directement les grès à Reptiles, dans la direc-
tion de Cazedarnes (pli de Cazedarnes).
Après avoir admiré la netteté de ce refoulement presque horizon-
tal, la Société s'est dirigée sur le village de Pierrerue à travers la
vallée creusée dans les grès de Saint-Chinian, où on a pu voir en place
dans les marnolithes un grand os de Dinosaurien, non loin de la
halte de Pierrerue.
A Pierrerue se voit un nouveau pli, couché au nord, plus septen-
trional que celui de Cazedarnes et qui se place, selon toute vrai-
semblance, sur le prolongement du pli rognacien étudié la veille
au rocher Notre Dame. Le pli couché de Pierrerue comprend une
écaille en série normale (avec flanc inverse supprimé par étirement)
de Keuper gypsifère, de marnes vertes du Rhétien, de grès infralia-
sique, de plaquettes calcaires à Avicula contorta et enfin de dolomies
hettangiennes : cette écaille est refoulée sur une série renversée
très épaisse qui comprend les calcaires à Alvéolines, le Lutétien
lacustre à Planorbis pseudo-ammonius (avec traces de lignite visi-
bles dans la tranchée du chemin de fer) et les grès et marnes
jaunes d'Assignan. Ces couches renversées forment entre Pierrerue
et Cessenon un important talus qui domine la vallée du Verna-
zobre, talus dont l'arête supérieure est constituée par la barre
saillante du calcaire oummulitiqueifig. H). Sur les dolomies infra-
EXCURSION A PIERRERUE Et CAZEDARNES
713
liasiques de Pierrerue reposeot des couches épaisses de bauxite
rouge ou panachée, recouverte par les grès de Saint-Chinian. Ces
derniers forment un large synclinal couché au nord, sur lequel est
refoulé à son tour l'anticlinal couché d'infralias étudié déjà au col
de la route de Cebazan (fig. 13).
s. t.
N.O.
PU de CaJkedarnes
Fig. 13. — Coupe au col de la route de Cebazan à Saint-Chinlan. — 1/15000°.
K, Argiles bariolées du Keuper. — Infrauas : m, Marnes vertes rhétiennes ; p,
Calcaire en plaquettes à Avicula contorta ; a\ Dolomics bettangiennes. —
G, Grès de Saint-Chinlan ; R1, Calcaire de Rognac ; M, Marnes de Rognac ; a\
Alluvionsdu Vernazobre.
s.E.
PU de CajLedçrjvee
W.O.
PU de Pierreru.m
Série renversée
Vallée du
Vernaxobres
Fig. 14 — Coupe de Pierrerue. — Échelle 1/20000*.
K, Gypse et marnes du Keuper. — Infralias : i»f Marnes vertes; p, Calcaire en
plaquettes à Avicula contorta ; d, Dolomies. — R, Bauxite; G, Grès de Saint-
Chinian; N. Calcaire à Alvéolines; L, Calcaire lacustre lutétien; A, Grès d'As-
signan et marnes jaunes ; a1, Alluvions du Vernazobre.
Les deux plis couchés keupériens-infra-liasiques de Cazedarnes
et de Pierrerue convergent vers Test et se rapprochent au point
de venir en contact direct. A moitié chemin de la route de Pierrerue
à Cazedarnes, la Société a pu voir les dolomies des deux bandes
infra-liasiques chevaucher Tune sur l'autre, n'étant plus séparées
que par des lambeaux irréguliers de bauxite qui marquent seuls
la limite des deux plis.
714 CB. DEMfcftET. — EXClinSlOK A PIERREMIK ET CAZEDARNES
Près de ce point de contact des plis à la hauteur du col de la
route, en se dirigeant à une centaine de mètres vers le nord, on a
exploré un gisement assez riche de plaquettes rhétiennes à Avieula
contorta, Ottrea tublamellosa, écailles de Poissons, etc.
Après le déjeuner qui a eu lieu à Cazedarnes-le-Bas, la Société a
fait à pied une coupe transverse au nord de ce village pour étudier
à nouveau la série danienne et éocène renversée déjà entrevue le
matin à Pierrerue, et compliquée ici d'un pli secondaire (fig. 15).
Flg. 1». — Coupe de Cazedaraes-le-Bas. — Échelle 1/tOOOÛV
H. Gypse du Kcuper; I, Infraliaa: G. Grès de Salnt-Chlnlan; H, Calcaire de Rognai
m, Marnes de Rognée; N, Calcaire a Alvéolines; L, Calcaire lacustre lutélien :
A,. Gréa et marnes jaunes d'Asslgnau.
À Cazedarnes-le-Bas on est sur les dolomies infraliasiques appar-
tenant au flanc normal d'un pli couché au nord, à axe de Keuper
(avec gypse exploité dans la combe au nord du village); sur les
dolomies reposent les grès de Saint-Chioian surmontés par la barre
dentelée de Rognac. De l'autre côté de l'axe keupérien vers le nord,
le flanc inverse du pli montre l'infralias, puis le grès de Saint-
Chinian très aminci, ensuite le calcaire rose bréchoïde de Rognac,
enfin les calcaires à Alvéolines qui sont remarquablement riches
en ce point. Mais ensuite intervient un pli secondaire (que l'on voit
un peu à l'ouest n'être qu'une bifurcation du pli de Pierrerue)
faisant affleurer un petit anticlinal de marnes et calcaires de Rognac,
lesquels reposent à leur tour sur un plateau incliné de calcaire
à Alvéolines. Ce dernier forme la lèvre supérieure du grand talus de
couches éocènes renversées qui domine la vallée du Vernazobre.
La Société s'est rendue jusqu'au bord de l'escarpement d'où l'on
jouit d'un magnifique aperçu panoramique sur l'ensemble de la
Montagne Noire. M. J. Bergeron en a profité pour exposer les prin-
cipaux points géographiques et géologiques de ce beau paysage.
715
EXCURSION DU 8 SEPTEMBRE
AUX ENVIRONS DU MAS CAPEL ET DE SAINT-BLAISE
par M. René NICKLÈS.
L'après-midi du 8 septembre, la Société est partie en voitures de
Cazedarnes pour rejoindre la route de Cessenon à Cazouls. Elle a tra-
versé, aux environs de Belesta, Taxe keupérien du pli couché vers le
nord situé au sud de Cessenon, et dont le flanc renversé, conservé en
partie, avait été observé vers la fin de la matinée aux environs de
Cazedarnes le-Bas. Sous les dolomiesinfra-liasiques on voit en ellet
le Keuper recouvrant lui-même la bande nord des dolomies infra-lia-
siques qui viennent reposer sur les calcaires et marnes de Rognac :
ce pli primitivement
orienté est-ouest se
relève du sud-ouest
au nord-est et vient
se terminer sur les
hauteurs dominant
la vallée de l'Orb
(fig. 1).
En arrivant à cette Flg' *' " CouPe du PH coucné au nord de Cazedarnes.
... , . Échelle: 1/20.000» environ.
vallée on prend la
, , ^. , . , K. Keuper; t, Infralias ; R, Calcaires de Rognac.
route de Cazouls-les-
Béziers pour se rendre aux environs est du Mas Capel. La colline
qui franchit la route, et qui domine l'Orb, est la suite naturelle des
coteaux qui, surmontés par la barre de Rognac, s'étendent des
environs de Cebazan jusqu'au coude de l'Orb à Réals, formant le
prolongement du flanc normal supérieur du pli de Belesta et de
Cazedarnes-le-Haut.
Or, dans les environs du point où la route de Cessenon à Cazouls
franchit cette barre, les calcaires de Rognac sont recouverts par nu
nouveau pli couché, venu de l'arrière, du sud, et qui non seule-
ment se couche complètement mais plonge même vers le nord,
dépassant ainsi l'horizontale : le fait frappe d'ailleurs les yeux par
son évidence : lorsqu'on a franchi la première rampe en partant de
la vallée de l'Orb, on voit de part et d'autre de la route le Trias et
le Jurassique reposer sur les marnes et les calcaires de Rognac.
Par suite de l'érosion, ce nouveau pli laisse voir, au milieu des
terrains secondaires inférieurs un affleurement de marnes et de
716 R. NICKLÈS
grès de Rogoac présentant la forme d'une boutonnière que traverse
dans sa longueur la route de Cessenon à Cazouls. C'est à l'étude de
cet affleurement anormal de Crétacé supérieur, et à ses relations
avec le Trias et le Jurassique qui le surmontent que la Société con-
sacre une partie de l'après-midi.
Cette boutonnière de marnes et grès de Rognac présente 1 kilom.
environ dans sa longueur (N.-S.); sa largeur est à peu près la moi-
tié de sa longueur. Sa bordure, sensiblement elliptique, est inté-
ressante à étudier dans ses rapports avec le Trias et le Jurassique.
Au nord, à Test et au sud les marnes et les grès de Rognac sont
dominés par le Keuper; au nord -est le gypse est exploité dans les
marnes keupériennes fortement ridées ; en suivant la limite de ces
deux systèmes (Trias et Danien) à l'est on la voit bientôt s'amincir,
surtout vers le sud est (au point où la route va rentrer dans la série
jurassique), puis disparaître presque complètement sous les
éboulis de surface; cet amincissement du Keuper s'explique d'ail-
leurs naturellement par la proximité du faisceau de plis du Roucan
(v. plus loin) et de l'extrême dislocation des couches dans le voisi-
nage sud est de la boutonnière. Au sud, les marnes du Keuper
reparaissent nettement (environs est du Mas Capel); à l'ouest, au
contraire, une petite faille due à un tassement local du lambeau les
élimine en faisant buter le Toarcien fossilifère surmonté du Bajo-
cien contre les marnes et grès de Rognac de la boutonnière : la
bordure ouest de la boutonnière en est par suite rectiligne sur une
partie de sa longueur.
Sur toute la longueur de la boutonnière, les couches qui, en se
renversant, ont dépassé l'horizontale, plongent au nord : à la limite
sud, à la hauteur du Mas Capel, un plongement inverse, vers le sud,
commence à s'accuser, par suite de la proximité des racines du pli.
Ridement transversal du pli. — Les détails qui précèdent montrent
que cette succession anormale s'explique par une écaille de Trias et
Jurassique inférieur recouvrant les marnes et grès de Rognac. Cette
écaille affectant le Trias et le Jurassique présente une particularité
intéressante, susceptible de déconcerter au premier abord : celle
de rides transversales orientées nord-sud, et dont l'origine est due
évidemment, suivant l'hypothèse ingénieuse de M. Depéret, à ce que
le pli tourne dans cette région de la direction primitive est-ouest
à la direction sud-ouest-nord-est.
Les plis de ce faisceau, difficile à observer au sud du ravin du
Roucan y présentent la disposition de la fig. 2.
EXCUR8I0N AUX ENV1R0N8 DU MAS CAPEL ET DE SAINT- BL AISE 717
Quatre anticlinaux faciles à observer dans le ravin même du
Roucan se déversent de plus en plus vers l'ouest lorsqu'on chemine
. de l'est à l'ouest. Ces anticlinaux affectent d'abord le Keuper
(marnes bariolées gy psi f ères) et l'Infralias gréseux et dolomitique ;
puis au sortir de la partie où le ravin du Roucan forme de véri-
tables gorges on voit le Charmouthien fossilifère plongeant sous
l'Infralias; au-dessous de lui lé Toarcien puis le Bajocien à Rhyn-
chonella Ruthenensis Reynès. A cet anticlinal déjà déversé vers
l'ouest succède un autre anticlinal encore plus déversé à l'ouest,
et présentant une arête de Charmouthien comprise entre deux
affleurements toarciens : dans l'un de ses affleurements, le Toarcien
est très réduit par suite de l'étirement, mais très nettement recon-
naissable.
Fig. 2. — Faisceau du Roucan. — Échelle : 1/25.000" environ.
R, Grès, marnes et calcaires de Rognac ; B, Rajocien; Lo, Toarcien; chy Charmou-
thien; t, Infralias; K, Keuper. (Cette légende s'applique aux autres coupes).
Un dernier anticlinal renversé à l'ouest comme les précédents
vient presque border la boutonnière : toutes les couches sont
extrêmement réduites ; cependant l'arête anticlinale est en Char-
mouthien bien caractérisé ; le Toarcien très visible ; seuls le Char-
mouthien et le Keuper du flanc normal inférieur du synclinal,
succédant à l'ouest à l'anticlinal 4, sont très difficiles à discerner par
suite des éboulis nombreux en ce point à la surface : mais l'Infra-
lias est extrêmement net au pont de la route situé à 100 mètres
environ au sud du point où elle sort des marnes et grès de Rognac
Tel est l'aspect que présente ce ridement transversal dans sa
coupe la plus complète. A l'extrémité ouest ce lambeau ridé
repose pendant plus d'un kilomètre sur les marnes et grès de
Rognac ; à l'est, à la sortie des gorges du Roucan, on voit pointer
au travers du Keuper un ilôt assez important de calcaire de
96 Août 1901. — T. XXVII
Bull. Soc. Géol. Fr. - 46
718
B. NICKLÈ8
Rognac. Uo peu plus au nord, après avoir traversé la vallée
keupérienne de Thézanel, les mêmes calcaires émergent sortant
au-dessous du Keuper. Tout ce lambeau de Trias et de Jurassique
semble donc bien reposer dans son ensemble sur l'étage de Rognac.
Le Keuper paraît constamment former la base de ce lambeau, qu'il
soit très épais comme à Thézanel ou très réduit comme aux abords
sud-est de la boutonnière du Mas Capel.
Ainsi que je l'ai indiqué brièvement le déversement progressif
vers l'ouest des plis transversaux de ce lambeau s'accuse de plus
en plus lorsqu'on se dirige au nord.
Par suite de l'érosion qui a enlevé l'Infralias aux environs de
Thézanel les plis de l'est du Roucan ne peuvent plus être suivis
vers le nord, le Keuper se prêtant difficilement à leur observation
en raison de son extrême plasticité.
Les deux derniers plis de l'ouest peuvent bien se suivre jusqu'à
la vallée de l'Orb. Le déversement devient de plus en plus accusé au
point qu'aux environs de Cazal-Vieil les plis sont couchés presque
horizontalement vers l'ouest.
L'étirement est même tellement prononcé qu'il s'agit ici plutôt
de deux petites écailles superposées en structure imbriquée : je
^ — -^ n'ai pu d'ailleurs
observer aucune
trace du flanc mé-
c...ivua dian averse. La
coupe ci-jointe (fig. 3)
montre la disposi-
tion des couches ob-
servées à proximité
de la ferme de Cazal-
Vieil.
Au-dessous du Keuper du lambeau inférieur on retrouve sur les
flancs de la vallée de l'Orb les calcaires et marnes de Rognac : si on
ne les observe pas à l'ouest de la coupe, c'est parce que l'érosion
n'a pas été profonde.
Le lambeau de recouvrement que je viens d'étudier en détail se
relie incontestablement au pli couché de Sévignac à quelques kilo-
mètres à Test. Rien que le programme des excursions n'ait pas
permis de le voir, ce pli présente assez d'intérêt pour mériter d'être
mentionné brièvement.
Sur le trajet même de la voie ferrée de Cazouls à Réals, à peu
*^.
t.
Fig. 3. — Coupe de Cazal-Vieil.
Echelle : 1/20.000* environ. — Môme légende.
■XCUR8I0N AUX ENVIRONS DU MAS CAPEL ET DE BAINT-RLAISt 719
FIK. 4. — Faisceau de plis
du Roucan. — Echelle : 1/50.000'
environ.
près & mi-chemin près de Séviguac, le Keuper est surmonté par les
dolomios de l'Infralias, et un peu
plus au nord repose sur elles en
série renversée dans le ravin qui
va du chemin de fer a l'Orb, ces
dernières reposant en concordance
sur l'étage de Rognac : on est en
présence du flanc normal supérieur
et du flanc renversé d'un pli cou-
ché, les couches de Rognac formant
le flanc supérieur d'un nouveau pli :
les couches sont très faiblement
inclinées vers le sud .
En résumé, on peut donc obser-
ver dans celte région non seule*
ment la répétition — en arrière —
des plis couchés observés aux envi-
rons de Cazedarnes, et avec une
intensité plus grande, puisquele pli
y est couché au point de dépasser
l'horizontale comme le prouve l'observation de la boutonnière de
grès et marnes de Rognac, entre le Mas Capel et Saint-Biaise, —
mais aussi des ride-
ments transversaux
qui ont été eux-
mêmes assez inten-
ses pourdouner lieu
à de petits plis cou-
chés transversaux et
presque normaux à
la grande écaille qui
a'étend du Mas Capel
à Saint-Biaise.
Les caractères strati graphiques des diverses assises jurassiques
peuvent se résumer ainsi pour la région du Mas Capel.
Sur le Keuper constitué comme on le sait par les marnes
bariolées gypsifères reposent 1" l'Infralias (1) : le Rhétien est
constitué principalement par des calcaires plus ou moins dolomi-
tiquesoù l'on rencontre parfois des écailles de Poissons (Réals) ou
une lumachelle de petits Bivalves très nombreux.
(I) L'Infralias du lambeau de Salnt-Chlniau a été l'objet d'une intéressante étude
de H. Hlquel : Note sur la géologie des terrains secondaires et des terrains ter-
tiaires du département de l'Hérault. Béliers, 1868.
720 EXCURSION AUX ENVIRONS DU MAS CAP EL Et DE SAINT BLAISE
Dans la région de Saint-Chinian ces calcaires offrent en abon-
dance (Cebazan) Avicula contorta Portl. ; à Pierrerue cette forme
moins fréquente, a cependant été trouvée par la Société.
La partie supérieure de l'Infralias ou Hettangien, difficile à déli-
miter du Rhétien, est généralement constituée par des dolomies, le
plus souvent à teinte presque blanche sur la cassure.
Si le Sinémurien est encore inconnu dans la région comme dans
les diverses parties visitées par la Société dans la Montagne Noire,
du moins le Charmouthien est reconnaissableà ses calcaires à chaux
hydraulique renfermant des Bélemnites parfois nombreuses et où
M. Collot a justement signalé prés Cebazan la présence de Gryphea.
Ces calcaires souvent pyriteux sont fréquemment dolomitiques, et
présentent sur la cassure une teinte gris bleu foncé.
Le Toarcien parait présenter les niveaux inférieurs à Montmajou
où il repose sur le Charmouthien qu'on peut facilement étudier. Il
comprend des marnes puissantes avec de nombreuses Ammonites
pyriteuses W. bifrons, H. bicarinatum, Cœloceras crassum, G. mucro-
natum, Amm. nautiloides. Le gisement visité par la Société à l'est
du Mas Capel (1) parait correspondre à un niveau supérieur ; il
renferme : vers le bas, Harpoceras cf. [allaciosum et H. cf. striatu-
lum ; au-dessus, presque au contact avec le Bajocien des marnes
avec Lucina sp. Le Bajocien est généralement constitué par des
couches à teinte rose, à l'extérieur du moins. Lorsqu'il est calcaire
il renferme souvent des fossiles en abondance et particulièrement
Rhynchonella nitenensis Reynès : à cette forme si fréquente s'adjoi-
gnent des Bivalves et notamment des Goniomya.
Cet étage présente souvent des lits siliceux importants notam-
ment aux environs nord de Cazouls. 11 y est dolomitique, et la
dolomie rose (2) ou rouge foncé à la surface est brune sur les cassures
fraîches. Il n'est pas rare de trouver des fossiles dans la dolomie
bajocienne : des Térébratules de grande taille (Cazouls, Montmajou).
Aux environs de Fontcaude, M. Collot (3) y a très exactement
indiqué la présence de radiolesde Cidaris. Ils y sont associés à des
Polypiers.
(1) On trouve cependant, non loin de là des schistes marneux avec empreintes
de H. falciferum du Toarcien inférieur.
(2) Bien qu'il ne faille avoir qu'une confiance très limitée dans la couleur pour
fixer l'âge des couches, j'ai cru cependant devoir indiquer ici la différence de
coloration des dolomies infraliasiques charmouthienne et bajocienne qui paraissent
à ce point de vue présenter une constance assez remarquable dans le lambeau de
Saint-Chinian.
(3) B. S. G. F., (3), 111, p. 392.
781
NOTE SUR LE PLIOCÈNE MARIN
DES BASSINS DE L'ÉTANG DE THAU, DE L'HÉRAULT
DE L'ORB ET DE L'AUDE
par M. E. JACQUEHET.
Pour Foutannes la mer pliocène devait, après avoir doublé le
promontoire de Frontignan , s'avancer jusqu'aux environs de
Béziers et de Narbonue. Ces données paraissent devoir être absolu-
ment exactes. Depuis longtemps déjà M. Triadou de Pézenas, un
des collaborateurs de M. de Rouville, avait signalé les marnes à
Potamides Basterott de Bassan; en 1897, M. Depéret (1) faisait con-
naître les sables astiens à Ostrea cucullata de Ribaute et de Cor-
neilban. Dans la région de Meze, M. Roman (2) iudiquait également
la présence de ces sables en ce point très peu fossilifères. Les
quelques données que je vais ajouter à ces découvertes aideront à
délimiter je crois les rivages de la mer astienne dans ces régions.
A Bouzigues, tout au bord de l'étang de Thau, les roches secon-
daires sont perforées par les Mollusques lithophages et par dessus
ces perforations ou dans de petites excavations sont fixés des valves
d'Huîtres peu déterminables. Ce n'est que dans la région de Meze
qu'on voit reparaître le Pliocène marin avec les caractères qu'il
affecte aux environs de Montpellier. Vers Loupian ces sables dégra-
dent la mollasse miocène qui servait de rivage. Ils sont peu fossili-
fères et contiennent çà et là de rares Ostrea cucullata Born. Une des
localités où il est plus facile de les étudier se trouve auprès de la
route d'Agde, tout-à côté de la halte du chemin de fer, à Font-Mars.
Recouverts dans la région de Pinet et de Pomerols par le Pliocène
fluvio continental, les sables marins reparaissent sur une très
grande étendue vers les fermes du Barrai et de Saint-Hippolyte entre
Florensac et Castelnau de Guers. Us sont ici très fossilifères. Les
érosions quaternaires ont creusé en ce point une vaste cuvette aux
dépens du Pliocène marin. De nombreuses sablières, les tranchées de
la route de Florensac à Castelnau et de plusieurs chemins avoisi-
nants permettent d'étudier leur constitution. A la base sont de?
(1) B. S. G. F., (3), t. XXV, p. 641.
(2) Roman. Recherches str. et pal. dans le bas Languedoc, p. 242.
722 SUR LE PLIOCÈNE MARIN DES BASSINS DE L'ÉTANG DE THAU
sables jaunes micacés sans fossiles et présentant quelques bancs
d'un véritable grès susceptible de servir à la construction. Bientôt
ils se foncent en couleur, deviennent plus ferrugineux et renfer-
ment quelques Ostrea cucullata de très grande taille, puis enfin à la
partie supérieure se trouve un banc extrêmement fossilifère. On y
rencontre avec de nombreuses Balanes toutes les variétés d'Ostrea
cucullata Born., 0. Perpiniana Font., 0. Serresi Tourn. Vers Saint-
Hippolyte les calcaires daniens sont perforés par les Mollusques
lithophages et un peu plus haut avant d'arriver aux fours à chaux
les sables dégradent la mollasse miocène.
De l'autre côté de l'Hérault, entre Saint-Thibéry et Nézignan-
l'Evêque, le Pliocène marin érodé par l'Hérault et ses alluvions
quaternaires réapparaît. A Sainte-Cécile est ouverte une carrière
de sables blancs fins micacés et vers Nézignan-1'Évêque il est facile
de constater la présence des sables jaunes micacés avec débris de
fossiles et bancs de grès. Ces sables sont l'objet d'une exploitation
assez active. Ils ravinent la mollasse miocène et au contact on peut
remarquer de nombreux galets de rivages et coquilles roulées ainsi
que de gros blocs arrachés au calcaire moellon.
Après Nézignan le rivage pliocène s'infléchit légèrement, puis
vient disparaître un peu avant Montblanc sous le Pliocène fluvio-
continental, qui empêche de le délimiter.
A partir de ce point il est impossible de suivre le rivage astien,
les alluvions considérables du Riege et du Libron, les basaltes de
Valros et les tufs volcaniques de La Roque masquant les couches
inférieures. A Bassan les marnes astiennes à Potatnides Basteroti
M. de S. et Hydrobia Escoffierœ Font, viennent butter contre le
Miocène. A propos de ces marnes M. Biche, dans une communica-
tion à la Société d'étude de Béziers en 1892, avait cité en plus des
Mollusques déjà nommés un fragment de bois de Cervidé et une
dent de Ruminant, il est dommage qu'il n'y ait pas eu une détermi-
nation plus précise, mais peut-être ces échantillons se trouvent-ils
encore dans sa collection qui est à Pézenas.
M. Depéret a montré à Ribaute le contact des sables astiens avec
les marnes bleues miocènes à 0. digitalina. Le massif miocène de
Béziers formait donc un promontoire que doublait la mer astienne
pour aller déposer ses sables à Corneilhan au point étudié par
cet auteur.
En dedans des rivages je ne connais pas de localités fossilifères
mais dans la vallée du Libron à Cantogal, non loin du village de
Boujan, sur la route de Béziers, on peut relever une coupe inté-
DE L'HÉRAULT, DE L'ORB ET DE L'AUDE 723
ressante. Oq exploite en ce lieu an banc d'argile rouge sans fossiles,
immédiatement recouvert par le Pliocène fluvio-continental si
bien décrit dans cette région par M. Depéret. Ce banc d'argile a
une puissance d'une douzaine de mètres. Lorsque l'on fit il y a
quelque temps des fouilles pour forer un puits on traversa au
dessous de cet argile dix mètres environ de marnes bleues pour
arriver ensuite à un sable blanc jaunâtre, micacé et fin, en tout
semblable à celui de Sainte-Cécile dont j'ai parlé plus haut. Malgré
l'absence de fossiles on peut, je crois, considérer ces couches
comme constituant l'Astien complet : à la base les sables marins,
puis les marnes bleues à Potamides, les argiles d'eau douce et enfin
les sables continentaux. Cette coupe nous montre que la mer
astienne pénétrait largement dans le Golfe de Bassan. Elle
doublait ensuite, comme je l'ai dit plus haut, le promontoire
miocène de Béziers, pénétrait dans le profond golfe de Corneilhan
jusque probablement vers Murviel en buttant contre la falaise mio-
cène de Maurassan. À ce point, l'entrée du golfe devait être fort
étroite. La nier astienne contournait ensuite les massifs miocène de
Lespignan et oligocène de Nissan, pénétrait par un large golfe
jusqu'à Capestang pour, après avoir formé un grand nombre d'Iles
vers Ouveillan et laissé de côté l'Ile considérable de la Clape et celle
plus petite de Sainte-Lucie, venir butter au promontoire de Leu-
cate. Dans cette région on ne trouve plus trace de sables astieus,
mais de nombreux dépôts marins plus récents à Vend r es, Lespi-
gnan, Nissan, Montels, Capestang attestent que très probablement
les coutours que je viens de déterminer sont exacts. Ces dépôts
font, avec ceux de l'étang de Thau, l'objet d'une étude que je me
propose de poursuivre.
Séance du f f Septembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON, PRÉSIDENT.
La séance est tenue dans la salle à manger de l'Hôtel Para, à
Bédarieux.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté.
724
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE
par M. J. BERGERON.
Après avoir longé les plis étudiés la veille entre Saint Chinian et
Cessenon, la Société franchit l'Orb au niveau de cette deruière
ville, et s'engage sur la route de Saint Nazaire de Ladarez. Elle
traverse les marnes et les grès à Lophiodon. Au delà de la métairie
de la Fontramy, des bandes de calcaires paléozoïques émergent
de dessous les couches tertiaires. Ce sont des marbres griottes de
couleur rouge, des calcaires noduleux gris avec schistes jaunes du
niveau à Cypridioes, appartenant au Dévonien supérieur, des
lydiennes, enfin des schistes appartenant au Carbonifère infé-
rieur. Tous ces horizons se montrent à plusieurs reprises, alter-
nant entre eux, allure qui correspond à celle de nombreux plis
synclinaux et anticlinaux. Ces couches appartiennent à la plongée
méridionale d'un vaste anticlinal dont la voûte a été enlevéo en
grande partie par érosion et dont la Société reverra la plongée
septentrionale à Roquebrun. C'est celui que j'ai désigné sous le
nom d'anticlinal de Roquebrun (Voir fig. 1, p. 666).
La route en remontant vers le nord s'engage dans les schistes
carbonifères. Us sont argileux, à surface plus ou moins miroitante;
ils sont devenus fibreux par compression et se détachent en frag-
ments allongés semblables à des morceaux de bois. C'est le type
des schistes à Posidonia Becheri Bronn. du Hartz; mais en cette
région, je n'y ai jamais trouvé qu'un fragmeut très douteux de cette
dernière espèce. Au milieu des schistes, pointent des bancs de
conglomérat à galets de quartz blanc et de lydienne noire compa-
rables à ceux du Hartz.
La vallée du Landeyran que remonte le chemin, coupe normale-
ment la bande dévonienne delà plongée méridionale de l'anticlinal
dont je viens de parler, mais la Société ne s'arrête pas à l'étudier,
car elle doit voir cette série bien mieux développée à Roquebrun.
La rive gauche du Landeyran est formée par le Mont Peyroux,
masse calcaire, dans laquelle les assises du Dévonien moyen et
supérieur sont particul ièrement bien développées. Vers le sud, ainsi
que la route de Causses et Veyran permet de le constater, les lydien-
nes et les schistes carbonifères réapparaissent à plusieurs reprises,
COMPTE-RBNDU DE L'EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE 725
par suite de plis, au milieu des calcaires dévoniens. Une faille
remarquablement nette met cette série paléozolque en contact
avec la série tertiaire.
Au Mont Peyroux, qui forme le dernier anticlinal du côté de la
région tertiaire, les couches sont déversées vers le sud et, par suite,
plongent vers le nord, conformément à ce que j'ai signalé pour
tous les anticlinaux de la bordure méridionale.
En remontant la vallée du Landeyran par la route de Saint-
Nazaire-de-Ladarez , la Société constate que les couches de la
base du Dévonien sont redressées à la verticale. Elles sont limitées
vers le nord par une masse de quartz qui se poursuit sur plusieurs
centaines de mètres de long entre les calôaires dévoniens et des
schistes verdàtres, argileux, très fragmentaires, qui appartiennent
à TOrdovicien. Une discussion s'engage sur l'origine de cette masse
de quartz : M. Miquel y voit un horizon sédimentaire ; M. Bergeron,
s'appuya nt sur la façon dont elle se termine vers Test, y voit plutôt
l'apparence d'un filon. Il est possible que ce soit un niveau gréseux,
silicifié postérieurement à sa formation par un filon qui l'aurait
transformé en quartzite.
Les membres de la Société recherchent des fossiles dans les
schistes verts ordoviciens ; mais par suite de leur état fragmen-
taire, il est très difficile d'y recueillir des fossiles bien conservés.
Ils appartiennent aux étages inférieur et moyen de l'Arenig ; et
sont l'équivalent des schistes de Boutoury, nom d'une localité
où ils sont recouverts en concordance de stratification par les grès
à Lingules de l'Arenig supérieur. On y rencontre un grand nombre
d'Orthis, de Calymmene, etc.
Si les quartzites dont il vient d'être question correspondent à
un niveau gréseux, ce ne peut être qu'aux grès à Lingules ou à un
niveau inférieur du Dévonien, peut-être aux grès du Falgairas ;
mais ils sont bien plus compacts. De toutes façons une partie
de TOrdovicien et le Gothlandien font défaut dans cette région.
En se rendant au Foulon, sur les bords de FOrb, la Société traverse
les grès à Lingules de l'Arenig supérieur, et des schistes ordoviciens
non fossilifères, mais dont le faciès n'est pas assez franc pour qu'on
puisse les assimiler avec certitude à d'autres d'âge connu. Ces grès
et ces schistes sont très plissés; de plus il y a eu desétirements, des
compressions qui leur ont donné une allure très compliquée. Ces
étirements expliqueraient la disparition de plusieurs horizons silu-
riens dans Cette région.
Au Foulon les schistes dits de Boutoury, déjà vus sur la route
726 J. BERGERON
• -. • • » ■
de Saint-Nazaire, fournissent de nombreux exemplaires tïOrthiç
et de Calymmene, grâce à l'obligeance de M. Moustefon, propriétaire
à Roquebrun, qui a fait faire des fouilles à l'intention de la Société.
Dans le6 grès de l'Arenig supérieur, M. Miquel montre un bloc
couvert d'une couche, épaisse de plusieurs millimètres, formée
uniquement de valves de Lingules.
La Société s'arrête aux sources du Foulon pour déjeuner. M. Mous-
telon avait eu soin d'orner de ses plus beaux raisins les arbres sous
lesquels la table avait été dressée et il avait tenu à offrir de ses meil-
leurs vins aux membres de la Société. Le Président le remercie au
nom de tous de son accueil si cordial.
Après déjeuner, la Société gagne Roquebrun en voitures. Elle tra-
verse à plusieurs reprises des bandes de grès et de schistes qui
sont autant de plis plus ou moins contournés, couchés et étirés. Tout
cet ensemble correspond à la partie axiale de l'anticlinal de Roque-
brun. Il semble bien que par suite des accidents qui ont intéressé
la série ordovicienne, les couches qui affleurent du côté de Roque-
brun appartiennent à un niveau plus ancien que celles des environs
du Foulon, car il y a été trouvé uu Euloma Filacovi, c'est-à-dire un
fossile caractéristique de l'étage de Trémadoc.
A Roquebrun passe la plongée septentrionale du grand anticlinal
du même nom. Elle est formée par les séries dévonienne et carbo-
nifère. Le ravin du ruisseau de Laurenque en donne une coupe
complète. Sur les schistes de l'étage de Trémadoc reposent des
calcaires dolomitiques dans lesquels la stratification a parfois dis-
paru. Au nord de ces dolomies apparaissent des calcaires bien lités
comparables à ceux du Coblentzieo. On n'y a pas encore trouvé de
fossiles, au voisinage de Roquebrun ; mais plus à l'est, sur la route
qui conduit aux exploitations de marbre de Saint- Etienne, ils
renferment des Polypiers, très mal conservés d'ailleurs. La place
qu'ils occupent dans la série ne laisse aucun doute sur leur âge. A
ces calcaires font suite d'autres calcaires cristallins blancs, peu
développés le long de la route de Laurenque mais qui augmentent
d'épaisseur vers l'est ; ils représentent le Givétien. (Voir PI. XVIII).
Puis viennent des calcaires noirs comparables en tous points à
ceux du niveau à Gephyroceras intumescens auxquels font suite
d'autres calcaires noirs vacuolaires dans lesquels il a été trouvé
quelques moules de Cardiola Nehdensis.
Des marbres aux couleurs vives, le plus généralement rouges,
leur succèdent: ce sont les griottes avec leurs différentes variétés.
Les sections de Goniatites et de Clyménies y sont abondantes. On
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 9 8BPTEMBRE 727
a voulu ouvrir des carrières dans ces marbres ; mais ils ont subi de
tels efforts de compression qu'ils sont tout fissurés et ne peuvent se
débiter en gros blocs. Ils offrent la structure noduleuse et vacu
laire dite par les Allemands kramenzelstructure ; celle-ci se voit
déjà dans les calcaires noirs de la base du Dévonien supérieur, et
elle se maintient jusque dans des calcaires gris, associés à des schis-
tes jaunes qui sont l'équivalent des couches à Cypridines. Ils
terminent le Dévonien. Ils passent insensiblement à une série
formée d'alternances nombreuses de lits de schistes, de lydienne
et d'adinole ; des bancs calcaires s'intercalent dans les dernières
couches de cette série. Puis les calcaires, les adinoles et les lydien-
nes disparaissent à leur tour et ce ne sont plus que des schistes,
des grès, ces derniers comparables en tous points à ce que les
Allemands appellent la grauwacke.
Le Dévonien inférieur à la sortie de.Roquebrun est redressé
jusqu'à la verticale ; mais à mesure que Ton avance vers le nord, en
remontant la vallée du ruisseau de Laurenque. bien que l'on s'élève
dans les terrains paléozolques, on voit les couches se déverser
progressivement vers le nord. Les griottes ont déjà un plongement
sud très accusé; les lydiennes et les schistes du Carbonifère sont
complètement renversés. Les bancs de lydienne sous l'effort qui a
amené toutes ces roches à occuper la position que je viens d'indi-
quer, se sont fissurés ; mais les eaux, qui circulent entre ces roches
siliceuses, ont déposé dans les fissures une partie de la silice qu'elles
ont dissoute ; il en résulte que les lydiennes sont criblées de petits
filonnets blancs de silice.
En abordant la plongée méridionale de l'anticlinal deRoquebrun,
la Société avait vu les couches déversées vers sud ; dans la plongée
septeutrionale, les couches sont déversées vers le nord ; cet anti-
clinal de Roquebruu présente donc lui aussi la structure en éven-
tail, déjà vue dans l'anticlinal de Poussarou. La Société peut cons-
tater que c'est toujours la plongée méridionale des anticlinaux de
bordure qui est déversée vers le sud, tandis que la plongée nord est
déversée, comme tous les plis, vers le nord.
La Société gagne en voiture la station deMons la-Trivalle où elle
doit prendre le train pour Bédarieux. Chemin faisant, elle peut
observer quelque faits intéressants. Au niveau de Roquebrun, sur
la rive droite de l'Orb il y a une terrasse formée de gros blocs
roulés de gneiss, de micaschistes, de granulite, de pegmatite qui
proviennent de Taxe gneissique de la Montagne Noire. Elle se
trouve à dix ou quinze mètres au-dessus du niveau actuel de l'Orb;
728 J. BERGERON
On en connaît beaucoup d'autres restes dans la vallée de ce fleuve;
sa cote est d'autant plus élevée au-dessus du niveau actuel de l'eau
qu'elle est située plus haut dans la montagne. Elle se relie à des
cônes de déjections que la Société verra plus tard dans la vallée de
TOrb et qui existent également dans la vallée du Jaur. Elle semble
correspondre à la terrasse de 20 mètres au-dessus des cours d'eau
actuels signalée par M. Depéret dans la plaine de l'Hérault.
La route en quittant Roquebrun reste dans l'Ordovicien et dans la
série dévonienne de la plongée septentrionale de l'anticlinal de
Roquebrun ; puis elle traverse cette dernière et s'avance dans les
schistes carbonifères qui forment une sorte d'anse entourée par la
série dévonienne de Roquebrun, de Ceps et de Vieussan. Les
assises dévoniennes, ainsi disposées en ceinture, offrent cette
particularité d'être toutes déversées vers la région occupée par les
assises carbonifères : à Roquebrun elles sont renversées vers le
nord; au niveau de Ceps, il y a un massif dévonien et carbonifère
avec un déversement vers l'est; le massif de Vieussan, formé de
môme, est déversé vers le sud. Il y a donc eu déversement péri-
phérique vers l'intérieur du synclinal. Là encore la question se pose
si la poussée au vide seule a pu produire une pareille allure, ou
s'il n'y a pas lieu de faire intervenir des réactions provenant des
massifs anciens lors des grands mouvements orogéniques de la fin
de TÉocène .
Les schistes carbonifères, au niveau de Ceps, au lieu d'être
devenus fibreux sous l'action des compressions, ont pris un éclat
gras et rappellent à s'y méprendre les schistes à séricite du Cam-
brien métamorphisé.
Au point où le ruisseau venant du Pin se jette dans l'Orb, la
route traverse un dépôt très épais de tufs calcaires dont l'âge n'a
pas encore été établi; en tous cas le ravin qui vient du Pin l'a
entaillé sur une grande profondeur.
Du point culminant de ces tufs, la Société peut voir de loin
la grande brèche qui entaille le massif gneissique et qui
correspond à la gorge d'Héric. Celle ci sépare le massif gneissique
en deux parties d'importance très inégale: la partie occidentale
forme en allant de l'est à l'ouest l'Espinouse et le Saumail; le
Caroux correspond à la partie orientale. Dans le prolongement
de cette entaille, vers le sud, s'ouvre une grande dépression qui
traverse les bandes paléozoïques suivant une direction nord -sud
et vient aboutir dans la vallée du Vernazobre au niveau de
Pierrerue. L'Orb actuel utilise une partie de cette dépression,
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE 729
lorsqu 'après avoir reçu le Jaur, il passe de la direction est-ouest
à la direction nord-sud. Cette dépression a dû se former à une
époque fort ancienne; cependant ni M. Depéret, ni M. Nicklès
n'ont trouvé dans son prolongement, dans les dépôts tertiaires
et secondaires, trace d'aucun cours d'eau. Les érosions ont dû les
faire disparaître progressivement. Dans cette dépression même on
ne rencontre également aucun caillou roulé ou tout autre vestige
d'un ancien cours d'eau. Quant au cours de l'Orb actuel on peut
expliquer son allure capricieuse de la façon suivante.
Le ruisseau venant du Pin, après avoir suivi une direction est-
ouest s'infléchit vers le nord eu arrivant au niveau des tufs que
traverse la route de Vieussan. Il va donc se jeter dans l'Orb pour
ainsi dire à contre courant. Cette allure s'explique très bien si Ton
admet que ce ruisseau se jetait dans un autre cours d'eau s'écou-
lant vers le nord et allant après bien des détours se jeter dans la
vallée de l'Orb qui longe le massif gneissique ; le cours d'eau de
cette ancienne vallée devait s'écouler vers l'est. D'autre part il devait
exister un autre cours d'eau allant du nord au sud, et passant par
la coupure qui se voit actuellement dans la vallée de l'Orb, un
peu au-dessus de Ceps. Ce dernier cours d'eau a dû finir par capturer
le cours d'eau dont il vient d'être question et dès lors il y a eu
progressivement creusement de la vallée en remontant du sud vers
le nord. C'est ainsi que s'est creusé le lit de l'Orb, antérieurement
au Pléistocène, puisque nous savons que sa vallée existait déjà à
cette dernière époque.
De ce même point de vue la Société peut se rendre compte de
la façon dont le flanc méridional de la Montagne Noire est découpé.
Le flanc septentrional, qui appartient au versant atlantique, est à
reliefs très peu accusés. Le flanc méridional est méditerranéen ; si
les pluies y sont moins fréquentes que sur l'autre versant, par
contre, elles sont beaucoup plus violentes et en ravinent profondé-
ment les terrains dénudés ; de là les reliefs bien plus accusés de ce
versant méridional de la Montagne Noire
De plus le massif gneissique se présente de ce point comme un
plateau à très faibles ondulations : c'est une vraie pénéplaine dont
la formation s'explique par la longue durée de la période pendant
laquelle cette région a été exposée aux érosions.
La Société, en continuant son chemin vers Mons-la-Trivallc, tra-
verse de nouveau, à partir du Moulin de Grais, la série carbonifère,
le Dévonien supérieur rendu schisteux par compression, puis, jusqu'à
Vieussan et au-delà, une série très puissante de dolomies datant au
730 J. BERGERON. — COMPTE-RENDU DE L* EXCURSION DU 9 SEPTEMBRE
moins du Dévonien inférieur. Toutes les assises du Dévonien supé-
rieur et du Carbonifère de cette bande de Vieussan sont déversées
vers le sud ainsi que je l'ai signalé-plus haut.
Au-delà de Vieussan les schistes ordoviciens réapparaissent sous
le Dévonien ; enfin c'est le Cambrien (schistes potsdamiens et
calcaires géorgiens) qui se montre un peu avant Tarassac.
De la route, au niveau de ce village, la Société peut voir en avant
de la gorge d'Héric un vrai cône de déjections, à son débouché dans
la vallée de l'Orb. 11 est parfaitement conservé. La Société devait
en voir des sections dans les tranchées du chemin de fer et dans
la vallée actuelle du ruisseau d'Héric, qui entame le cône de déjec-
tions dans sa partie orientale. Mais le temps lui a manqué. Dans
ce cône de déjections se rencontrent toutes les roches que Ton
connaît dans la région gneissique (gneiss œillé, leptinite, mica-
schistes, granité, granulite, pegmatite).
Il existe dans les vallées du Jaur et de l'Orb un grand nombre
d'autres cônes de déjections; la Société les traverse en se rendant
de Mons-la-Trivalle à Bédarieux en chemin de fer. Les ruisseaux
actuels, d'ailleurs très peu importants, ont toujours creusé leur lit
au contact de ces cônes de déjections et des roches en place. Ces
dernières ont été souvent entaillées à d'assez grandes profondeurs,
tantôt sur la rive droite, tantôt sur la rive gauche des anciens
cours d'eau. Ces cônes de déjections sont situés sur la rive droite
de l'Orb et sur la rive gauche du Jaur, du côté du massif gneissique
et à une altitude supérieure à celle où coulent actuellement ces
cours d'eau. Ils sont contemporains des terrasses pléistocènes.
MM. Depéret et Léon Bertrand reprennent la discussion
sur la poussée au vide et demandent quelle est l'importance des
mouvements qui ont pu être produits par cette action.
M. J. Bergeron admet bien que la poussée au vide puisse
produire des déversements de têtes de couches vers les vallées ;
il en a vu de très beaux exemples dans la Mayenne sous la conduite
de son ami M. D. P. QEhlert ; mais il ne croit pas qu'elle soit suffi-
sante pour donner lieu à un phénomène de chevauchement comme
celui qui a été constaté au niveau du moulin de Poussarou. Il ne
peut expliquer un pareil déplacement des couches que sous un
effort dirigé du nord-ouest vers le sud-est et provenant du massif
ancien. Cette réaction n'a pu se produire qu'au moment de la forma-
tion des plis couchés de Saint-Chinian, c'est-à-dire vers la fin de
l'Eocène.
731
COMPTE-RENDU
DE L'EXCURSION DU 10 SEPTEMBRE A BÉDARIEUX
par M. René NICKLÈS.
Dans la matinée du dimanche 10 septembre quelques membres
de la Société ont bien voulu m'accompagner dans le raviu de
Canalsaux environs immédiats de Bédarieux pour étudier l'Infralias
au point de vue stratigraphique. La région secondaire avoisinant
Bédarieux se prête très bien aux études de stratigraphie ; toute la
surface des terrains secondaires ayant Bédarieux pour centre
n'est en effet qu'une aire polygonale affaissée de plusieurs centaines
de mètres, et dont les couches presque toujours horizontales ou
très faiblement inclinées ne présentent pas trace de ridement sauf
à proximité des failles de bordure.
Cette aire affaissée est limitée au nord-ouest par la faille allant
de Taussac à Boussagues ; au nord une deuxième faille recoupant
la première passe par le Viaduc de la Tour, par le Mas Blanc et se
continue en se recourbant légèrement vers le sud-est jusqu'à Car-
lencas où elle disparaît sous le basalte.
Au sud une grande faille partant de la Vernière passe au pied
septentrional du pic de Tantajou et se dirige vers la région sud de
la Braunhe où elle est masquée par les épanchements basaltiques
et les dépôts pliocènes. A l'est les massifs primaires qui enserrent
cette aire affaissée se resserrent, et les strates secondaires com-
mencent à se rider : ce fait déjà visible vers le Mas Nouguier
devient remarquable à Salasc et dans la région de Mourèze, qui
confine d'ailleurs à Glermont l'Hérault.
Toute la région de Bédarieux était autrefois le prolongement
naturel du plateau du Pioch (près Lunas) où le Rhétien supérieur
atteint la cote 560, alors qu'à Bédarieux même il est à peine à
195 mètres d'altitude. 11 y a eu par conséquent un affaissement d'au
moins 300 mètres, affaissement qui s'est produit par le moyen
d'une faille pouvant à Test dégénérer en flexure monoclinale comme
on le verra au nord de Mourèze (Pic de Saint-Jean d'Aureilhan) et
au Roc des Vierges près de Saint-Saturnin.
Le temps a fait défaut à la Société pour étudier le Trias de La
Malou : il eût été intéressant de savoir si l'on était en présence du
Trias inférieur ou si, comme il parait beaucoup plus probable, il
s'agit plutôt de la partie supérieure du grès bigarré ou du Muschel-
732
R. NICKLÈS
kalk : à cette question que Ton n'a pu étudier sur place, il a été
néanmoins fait allusion et je me rattache à la manière de voir si
vraisemblable de M. Léon Bertrand.
Au-dessus du Keuper gypsifère développé surtout à l'ouest de
Bédarieux et où le gypse est exploité en plusieurs points, apparaît
le grès infraliasique à galets de petite taille très roulés : c'est dans
un de ces bancs, à Hérépian, sur la rive gauche de l'Orb, que j'ai eu
occasion de rencontrer Avicula contorta Portl., qui fixe bien l'âge
de ces couches.
Le grès assez puissant est recouvert par des dolomies et des
calcaires marneux avec géodes de calcite exploités comme pierre
à chaux hydraulique près de la gare. Ce sont ces couches qui
affleurent à la partie inférieure du ravin de Canals.
La coupe exacte de l'affleurement où j'ai rencontré Avicula con-
torta se présente ainsi : à la base, des marnes bariolées (fig. 6, 1)
formant talus, ainsi que le reste de la coupe sur la route d'Hérépian
à la Vernière ;
Ces marnes présentent, au-dessus, des alternances avec des bancs
de dolomie (fig. 6, 2) ; puis les bancs de dolomie prédominent
(fig. 6, 3) avec empreintes de Bivalves.
Ils sont recouverts par un poudingue (fig. 6, 4) qui appartient au
Rhétien puisque
j'y ai rencontré
Avicula contorta
Portl., au contact
d'un mince lit
marneux on y
recueille aussi
des écailles de
Poissons. Les ga-
lets de ce poudin-
gue sont nom-
breux, de petite taille, très roulés, formés de quartz blanc ou de
lydienne. Au-dessus viennent des grès (fig. 6, 5) assez puissants
(40 mètres environ), assez constants dans la région (Villemagne,
etc.).
Les couches plus anciennes, auxquelles il vient d'être lait
allusion, n'apparaissent pas dans cette partie des environs de
Bédarieux, par suite de leur situation inférieure au niveau du lit
de l'Orb.
Les couches qui séparent le débouché du ravin de Canals des
Fig. 6. — Coupe du Rhétien au sud d'Hérépian.
Échelle: I/10.0ÛO*.
1, Keuper; 2, 3, 4, 5, Rhétien.
EXCURSION DU 10 SEPTEMBRE A BÉDARIEUX 733
premiers niveaux hettaogiens ont une puissance d'environ 30
mètres : ce sont des calcaires marneux, souvent dolomitiques,
lités en minces plaquettes présentant souvent une surface glandu-
leuse. En brisaut des plaquettes analogues du même niveau dans
la région de Ceilhes Roqueredonde, j'ai eu occasion de recueillir
des Bivalves de grande taille, nulle part aux environs de Bédarieux
je n'ai pu en voir de vestiges ; mais il existe une telle ressem-
blance dans l'aspect des couches qu'il me semble difficile qu'on ne
les y trouve pas un jour. Au-dessus on rencontre des bancs avec
Pagiophyllum peregrinum Sap. Ces empreintes sont fréquentes à ce
niveau dans les environs de Bédarieux : je les ai retrouvées bien
conservées au-dessus de la gare, et assez abondantes à la carrière
des fours à chaux situés à la tête du grand viaduc sur la rive droite
de l'Orb : dans cette dernière localité ils étaient associés à de
beaux exemplaires de Thinnfeldia rhomboidalis (1) Ettingsh.
Quelques plaquettes se rattachant à cette assise ont présenté des
empreintes trop mal conservées pour les déterminer exactement
mais paraissant cependant se rapprocher du genre Cyrena.
Les bancs à empreintes végétales reparaissent au moins à deux
reprises différentes : d'après les fossiles que je viens de citer ils
appartiennent à une formation d'estuaire remarquable par son épais-
seur d'une trentaine de mètres au moins et par sa constance dans la
région nord de Bédarieux jusque sur la feuille de Saint-Affrique.
Hettangien. — Au-dessus de cette formation d'estuaire appa-
raissent des lits dolomitiques avec des rangées de nodules siliceux
souvent plus gros que le poing, assez abondants et régulièrement
lités :
L'examen en lames minces de ces nodules au microscope y
révèle une structure oolithique que j'avais déjà rencontrée fréquem-
ment dans les calcaires bleu-noirs du même niveau aux environs
de Cebazan (près Saint-Chinian) ; on y voit de plus des spicules
d'Epongé qui montrent qu'on est bien en présence d'une formation
marine.
Le caractère marin de ces dépôts se manifeste d'ailleurs très net-
tement un peu plus haut par l'apparition d'une lumachelle en bancs
épais renfermant en abondance Ostrea cf. sublamellosa, puis en lits
extrêmement minces littéralement couverts de fragments de Pen~
tacrinus, Avicula sp., Pecten.
(1) M. Zeillcr a eu l'obligeance de vérifier cette détermination par l'examen
microscopique de la cuticule.
26 Août 1901. - T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - 47
734 R. NICKLÈS
L'examen attentif de ces Avicula différentes de Avicula conforta
Portl. montre qu'on n'est plus en présence du Rhétien : il faut donc
rattacher ces couches à l'Hettangien qui débuterait avec le retour
des faciès marins francs, — les dépôts d'estuaire à Pagiophyllum et
Thinnfeldia paraissant devoir rester dans le Rhétien.
L'Hettangien reposerait ainsi en trangression sur les dépôts rhé-
tiens, ce qui est conforme d'ailleurs à ce que l'on observe fréquem-
ment sur la bordure du Plateau central.
Au-dessus des lumachelles apparaissent des bancs épais de
calcaire dolomitique faciles à observer au faubourg du Château
(près du Viaduc) à Bédarieux : on y rencontre parfois des Bivalves
de petite taille appartenant au genre Lima.
' Puis la dolomie prédomine sur le calcaire, devient même pulvé-
rulente : c'est à ce niveau que l'on rencontre en quelques points
(ravin de Canals, faubourg du Château, hauteurs dominant le
faubourg Saint-Louis), des Spiriferina siliceuses semblables à celles
décrites par Martin dans l'Hettangien de la Côte-d'Or. En d'autres
points la partie siliceuse du test a disparu, et la roche ne conserve
que le moulage par la dolomie de ces Spiriferines : le gisement le
plus remarquable est situé dans la propriété de M. Bompaire, au
sud et à proximité de Bédarieux.
Cette intéressante assise à Spiriferines est aussi celle où se déve-
loppent par places, au-dessus du faubourg Saint-Louis, des Ilots de
Polypiers peu importants, il est vrai, mais présentant des échan-
tillons bien nets de Thecosmilia Martini de From. signalés par
Martin dans l'Hettangien de la Côte-d'Or, et Astrocoenia.
La coupe du ravin de Canals peut se résumer ainsi :
Hettangien. — 11. Dolomie pulvérulente à Spiriferina.
10. Cale, dolomitiques parfois oolithiques à grain fin avec Lima .
9. Couche marneuse bleue environ 1"
8. Plaquettes très minces et lumachellc à 0. cf. sublamellosa
Dunker, Spiriferina, Penlacrinus, Avicula sp., Lima, toutes
de peUtè taille 2à3-
7. Couches calcaires et dolomitiques à gros nodules siliceux (spi-
cules d'Epongé et oolithes siliceuses) 8 à 10"
6. Calcaires marneux en plaquettes minces
5. Calcaires à nodules siliceux 1"
Rhétien. — 4. Calcaires marneux à végétaux fossiles avec interca-
la tion s de marnes à la base avec Pagiophyllum peregrinutn
Sap 5-
3. Calcaire à cassure concholdale bleue dolomitique. ...... 3"
2. Bancs bleuâtres avec lits marneux renfermant des rognons de
silex et de petits fragments charbonneux 8 à 10"
1 . Bancs blancs dolomitiques plus de ... 2*
-i-mj
EXCURSION DU 10 SEPTEMBRE A BEDARIEUX 733
Le point, où l'on peut le mieux voir le contact de l'Hellaugien et
du Rbètien est à l'extrémité sud du grand viaduc auprès de l'an-
cienne gare de Bédarieux, on y observe en effet la coupe suivante
présentant cette par-
ticularité que le Rbé-
tien lacustre, paraît
avoir été raviné en
ce point, faiblement
il est vrai par l'Het-
tangien : c'est une
preuve de plus me
semblant démontrer ; i^SiC
qu'on est bien en pré- £ :2~TJ F i ^ \r T^^T L"T~Li— * /''**"™
sence de la limite des
deux étages. De plus,
la présence dans cette
coupe des Spiriferi-
nes au dessous de la lumachelle, indique qu'on peut les rencontrer
dans les coucbes n° 7 auxquelles elles semblent correspondre.
CiiARUotiTHiEN. — Au-dessus des couches hettangienaes à Spiri-
ferirta et Lima paraissent reposer en transgression les dépôts
charmoulhiens.
Généralement recouvertes par les éboulis les couches qui les
constituent sont difficiles à observer en place; on peut cependant
en voir de nombreux débris grâce à la culture en terrasses qui
utilise cet étage et surtout le Toarcien, plus meuble que l'Iiifralias.
Ce n'est donc pas une succession mais plutôt quelques indications
d'ensemble qu'on peut donuer sur cet étage.
Il paraît renfermer à la base des blocs arrondis très nombreux
d'un calcaire marneux bleu noir à l'intérieur el jaune vif à la
surface et renfermant des Bélemnites. Ces Bélemniles très
nombreuses par places sont parfois associées à des nodules
phosphatés dans des couches de calcaire pyriteux où l'on recueille
A. margaritatus, Lytoceras fimbriatum, Grypkca cymbium parfois de
très grande taille. Ces couches de calcaire marneux parfois
dolomitique, enduit de pyrite, sont toujours facilement reconnais-
sablés et renferment de grandes quantités de Bélemnites : ce
calcaire est souvent oolithique ■■ la localité de Boussaguea, près de
Bédarieux, est en quelque sorte typique à ce point de vue.
A ces calcaires il convient de rattacher les marnes du Bousquet
près Latour el du Mas Blanc situé à 1 kilomètre à peine de ce
736 A. NiCKLàs
village. Des échantillons que j'ai recueillis dans les terres prove-
nant d'une fouille m'ont donné :
Harpoceras cf. normannianum.
— nitescens Young et Bird sp. Wright, 1883 (//.
algovianum Tate et Blake, 1876, pro parte).
Toarcien. — Comme le Charmouthien, le Toarcien est très difficile
à observer. La partie inférieure est presque partout recouverte par
des éboulis, aussi n'ai-je pu rencontrer trace de la zone à H. falla-
ciosum, ni des couches à H. bifrons. Seule la partie supérieure est
visible dans les ravins qui ont reçu dans le pays le nom de Canals
et qu'on voit à la partie supérieure du ravin qui porte ce nom ainsi
qu'en divers au très points des environs est de Bédarieux. Les couches
supérieures du Toarcien y sont constituées par des marnes noires
presque sans fossiles ; quelques nodules dans ces marnes m'ont
fourni des empreintes de Harpoceras et de Fosidonies de très
petite taille.
Bajocien. — Au-dessus des marnes noires (1) profondément
ravinées, se dresse la falaise bajocienne signalée par MM. de Rouville
et Reynès, le plus souvent inaccessible et dont les divers niveaux
sont par suite d'une étude très difficile pour les géologues. Ce n'est
que dans les éboulis que l'on peut généralement rencontrer des
fossiles, dans les débris des assises inférieures.
Aux niveaux inférieurs il faut rattacher un calcaire jaune à
En troques où l'on rencontre parfois, au-dessus du ravin de Canals, de
nombreuses baguettes de Cidaris et quelquefois des exemplaires
trop souvent déformés appartenant à Cidaris cf. Zschokkei Cott.
associés à des. Polypiers Isastrea Richardsoni M.-Edw. et H., de plus,
des débris nombreux de Terebratula, Lima et Hhynchonella sp. de
grande taille ; ce calcaire à Entroques d'un jaune orangé est sur-
monté par des calcaires compacts marmoréens avec Hhynchonella (2)
sp., Terebralula, ayant une teinte lie-de-vin caractéristique. Au-
dessus apparaissent les dolomies plus ou moins friables, quelquefois
pulvérulentes, donnant lieu à des roches aux formes étranges ana-
logues à celles de Mourèze et de Montpellier-le-Vieux : on y trouve
de loin en loin des vestiges de fossiles indéterminables, le plus
souvent des Bivalves et des Brachiopodes. Cet ensemble très puis-
sant correspond au Bajocien et au Bathonien probablement : sur la
(1 ) Le Toarcien et le Dogger, qui n'avaient été vus que dans la course de l'après-
midi {Course aux sources des Douze et au bois de Levas), sont réunis ici aux
étages qui précèdent pour simplifier le plan d'ensemble de ce travail.
i2) J'en dois un très bel exemplaire à l'obligeance de M Cannât.
EXCURSION DU 10 SEPTEMBRE A BÉDARIEUX ?37
feuille de Montpellier, M. Roman a fixé la limite supérieure de
dolomîes analogues ; aux environs de Bédarieux, malgré les recher-
ches poursuivies dans ce but je n'ai pu arriver à préciser exacte-
ment leur niveau supérieur. Mais, d'une part, l'analogie est telle
quand on suit vers Test ce lambeau jusqu'aux environs de la
Vacquerie qu'il semble qu'il n'y ait aucun doute à conserver à ce
sujet : aux environs sud de la Vacquerie, en effet, on voit ces dolo-
mies au-dessous des calcaires en plaquettes du Callovien ; l'assimi-
lation avec les résultats précis auxquels est arrivé M. Roman ne me
parait donc pas douteuse.
Sources. — Cette masse considérable de dolomies et de calcaires
dolomitiques qui présente au moins de 60 à 80 métrés de hauteur
est très perméable par sa nature même dans les parties dolomitiques,
et parles fissures nombreuses qui sillonnent les calcaires compacts
et les calcaires à Eutroques de la base. Elle repose d'autre part sur
un Toarcien essentiellement imperméable : on conçoit donc, à priori,
que lorsque le pendage est favorable elle puisse fournir des sources
abondantes : c'est en effet ce qu'on peut observer en quatre points,
sur le chemin de la Braunhe, sur la route de Carlencas (source dite les
Douze), en haut du ravin de Canals, et près du hameau le Bousquet.
t* C»*»rt>rjf*
Fig. 8. — Vue dos hauteurs jurassiques à l'est de Rédarleux.
Echelle : 1/60. 000* environ.
i, lnfralias ; c/i, Charmouthlen ; lo, Toarcien; B, Bujocien et Bathonlen ; 0, Basalte.
De ces quatre sources, la source dite des Douze qui alimente la
ville de Bédarieux est incontestablement la plus importante : elle
comprend plus de vingt orifices de sortie d'un volume remarquable.
Située au contact du Toarcien et du Bajocien, elle doit son débit
abondant à la convergence des pendages au nord et au sud qui
constituent un synclinal à pentes faibles sur les flancs qui présen-
tent un assez grand développement. Cette structure, facile à saisir
au premier coup d'œil, se voit nettement depuis la route montant
de Bédarieux aux sources.
Après la visite de ces sources et l'excursion au Tertiaire du bois
738 CH. DEPÉRET ET L. BERTRAND
de Levas, la Société a remarqué avant de reprendre le chemin de
Bédarieux un important gisement de bauxite non exploité situé sur
le chemin de Bédarieux à la Braunhe. La bauxite est située sur la
partie supérieure des dolomies où elle forme des amas importants :
ce fait est général d'ailleurs dans la région de Bédarieux où elle
existe en plusieurs points. Le plus important gisement est situé au
sud du Courbesou : c'est celui que visite la Société; d'autres points
en renferment encore en quantité importante, entre le Courbesou et
La Tour. La bauxite y est presque toujours colorée en rouge foncé
par l'oxyde de fer, mais au gisement visité par la Société on peut
voir fréquemment de la bauxite presque blanche seulement tachée
de rouge.
La disposition du gisement indiquée ici est d'ailleurs analogue
à celle que l'on observe dans le lambeau de Saint-Chinian, à Pier-
rerue et plus fréquemment encore près de Cazouls-lès-Béziers.
M. Depéret indique et montre à la Société la composition du
curieux lambeau de terrain éocène qui constitue les sommets du
bois de Levas, où il est couronné à son tour par les basaltes pliocènes.
Ce lambeau atteint l'altitude de 491 mètres, démontrant ainsi
l'amplitude des dénivellations verticales qui se sont produites dans
la région postérieurement à la période éocène et qui semblent de-
voir se rattacher comme les plis du chaînon de St-Chinian, à
l'époque des grands mouvements pyrénéens.
L'Eocène du bois de Levas comprend à la base le calcaire com-
pact lutétien assez riche au premier tournant de la route en
Strophostoma lapicida Leufroy, Planorbis pseudoammonius Voltz,
Limn&a Michelini Desh. Sur le calcaire repose une sériçjJe marnoli-
thes grumeleux brunâtres où l'on recueille en abondance des
moules internes du Bulimus Hopei Marcel de Serres. Ces marnolithes
alternent avec des grès à grains de quartz blancs qui représentent
l'assise des grès d'Assignan> enfin ces grès sont dominés à leur tour,
sur le monticule le plus élevé (point 491) par une petite barre de
calcaire jaunâtre où l'on trouve de nombreuses contre-empreintes
d'un tout petit Planorbe qui est, je crois, le Planorbis Houvillei de
Matheron (espèce des calcaires supérieurs de Grabels, près
Montpellier).
M. Léon Bertrand, à propos de la communication de
M. Nicklès, sur la présence de plantes terrestres dans le Rhétien
de Bédarieux, signale à la Société la découverte récente de com-
bustible pouvant être considéré comme de la houille véritable, à
J. BERGERON. — OBSERVATIONS 739
la base de l'Infralias des environs de Monaco et Menton. Ces char-
bons, déjà reconnus par M. de Chambourg dans plusieurs galeries
et puits de recherches assez distants les uns des autres, vont être
prochainement exploités ; dans l'un des points les plus voisins de
Monaco, ces couches affleurent à 200 mètres d'al titude et Ton y trouve,
au-dessus de gypses triasiques et au-dessous dedolomies probable-
ment hettangiennes, quatre lits superposés de chart>on séparés par
des bancs argileux et dont la puissance totale est d'environ 2 m. 40.
M. Léon. Bertrand émet ensuite l'opinion que les grès rouges
et verts par lesquels débute le Trias aux environs de Bédarieux ne
représentent pas la base du Trias. Il rappelle que, d'après les
recherches de M. Munier-Chalmasdans l'Ardèche et d'autres obser-
vations faites aux environs d'Autun (où l'on a trouvé les fossiles
de la Lettenkohle au milieu des grès), la base de la série triasique
doit manquer en beaucoup de points de la bordure du Massif cen-
tral. Les grès qui commencent cette série, au lieu d'être contem-
porains des grès vosgiens et bigarrés auxquels on est porté à les
paralléliser au premier abord, peuvent ne représenter que la
partie supérieure du Trias moyen et même la base du Trias supé-
rieur, le faciès des argiles bariolées gy psi f ères du Keuper ne com-
mençant que plus haut. Enfin, se basant sur des caractères pure-
ment pétrographiques et sans attacher plus d'importance qu'il ne
convient à ces caractères, il fait remarquer que les poudingues
quartzeux et les grès quartzeux compacts, dits quartzites, si déve-
loppés à la base du Trias dans la région alpine et aux environs de
Barcelone (d'après des indications données par MM. Aimera et
Bnfill), manquent complètement dans la région parcourue par la
Société, bien qu'on soit dans des conditions analogues de substratum .
Il se base sur tous ces faits pour penser que la série triasique y est
incomplète à la base, sans d'ailleurs vouloir chercher à préciser
l'âge de ses couches les plus inférieures.
M.J. Bergeron donne quelques renseignements sur les basaltes
qui couvrent les plateaux de TEscandorgue et du Salagou. Le type
le plus fréquent est celui du basalte labradorique. Le péridot y est
parfois très fréquent et forme des amas gros comme des noix. C'est
un type très basique, qui peut passer à la limburgite par dispari-
tion des microlithes de feldspath. Cette limburgite n'est connue
qu'à l'état de filons.
Une autre variété de basalte labradorique est très pauvre en
péridot et passe à la labradorite typique. Elle semble cantonnée
dans le sud et paraît dater de l'époque de VElephas meridionalis.
740 J. BERGER ON
Les basaltes occupent une grande bande orientée suivant la
direction nord-sud. Ils formaient primitivement de vraies nappes
qui recouvraient les plateaux jurassiques ; maig par suite d'érosions
postérieures à leur venue et très vraisemblablement pléistocènes,
les plateaux jurassiques et les basaltes qui leur sont superposés,
ont été morcelés et forment des îlots, avec de véritables tables
de basalte. Toutes ces roches ne sont pas arrivées au jour par un
seul orifice, mais par une multitude de fissures, ainsi qu'on peut
s'en rendre compte par le très grand nombre de filons, mis à jour
par les érosions. Ces filons occupent d'ailleurs un champ de frac-
tures dont les directions principales sont sensiblement N. S. et
E.-O. Même là où le basalte semble former les nappes les plus
continues, comme sur l'Escandorgue, il est certain que le nombre
des évents volcaniques est très grand, comme c'est le cas près
du village de Dio. Tantôt ce sont des filons formant murs, tantôt
ce sont de vraies cheminées. Au bois de Levas il y a un
pointement basaltique de quelques mètres carrés au milieu des
calcaires éocènes ; il correspond vraisemblablement à une chemi-
née dont la partie supérieure a été enlevée par érosion.
En un grand nombre de points, des lits de scories sont intercalés
entre les coulées de basalte. 11 y a donc eu des alternances de pro-
jections et de coulées.
D'après l'allure des coulées, il semble qu'il y ait eu au moment
de leur venue, une dépression dans laquelle elles se seraient
toutes réunies ; de là l'aspect d'une coulée unique.
L'âge de ces éruptious est donné par le fait que des filons de basalte
traversent les alluvions pliocènes de l'époque du Mastodon Arver-
nensis du Courbesou, ainsi que la Société peut le constater sur le
chemin qui va de la Frégère à ce dernier point.
D'après la configuration actuelle du pays, il semble que ces allu-
vions aient dû être déposées par un cours d'eau venant de la dépres-
sion occupée par la vallée du Jaur et celle de l'Orb ; mais la com-
position lithologique des galets qu'on peut y recueillir ferait
supposer que le cours d'eau eu question venait du nord-ouest.
Cette longue traînée de basalte se termine dans les environs de
Gabian où les centres éruptifs paraissent avoir été très nombreux ;
malheureusement les érosions pléistocènes n'ont laissé subsister
que des vestiges de ces appareils volcaniques.
Encore plus au sud, se trouve, toujours suivant la même direc-
tion nord-sud, un centre éruptif bien plus important; c'est le
massif d'Agde, qui par ses reliefs plus nets, parla meilleure conser-
EXCURSION DE LA MATINÉE DU 11 SEPTEMBRE 74 1
vation de ses roches, parait être plus récent que ceux étudiés par
la Société. La roche est une labradqrite très belle.
M. Léon Bertrand signale l'analogie qui existe au point de
vue de leur composition minéralogique entre ces basaltes et ceux
qui, en Auvergne, ont reçu le nom de basaltes des plateaux.
COMPTE-RENDU
DK L'EXCURSION DE LA MATINÉE DU 11 SEPTEMBRE
par M. J. BERGEROHT
Pour la première fois, à la gare de Laurens, les membres de la
Société peuvent voir les terrains silurien et dévonien, en concor-
dance de stratification, formant nappe de recouvrement sur les
schistes tournaisiens comme sur les calcaires viséens. L'îlot de
calcaire à Productus giganteus situé près de la gare a un intérêt
historique car c'est le premier gisement viséen qui ait été
reconnu dans le Languedoc en 1847 par Marcel de Serres. La
ligne du chemin de fer longe le bord occidental de l'écaillé de
Laurens-Gabian et il est facile de voir les schistes de l'étage de
Llandeilo, le Gothlandien et le Dévonien inférieur formant le
plateau de Fuxian sur le Carbonifère.
Les champs qui longent la route de la gare au village de Laurens
renferment de petites espèces détachées de calcaires viséens.
M. Cornac, ancien chef de gare de Laurens, en a recueilli un très
grand nombre.
Pour aller aux gisements miocènes d'Autignac, la Société traverse
une partie de la grande plaine carboniférienne qui s'étend entre
Saint-Nazaire de Ladarez, Fa u gères et Autignac. Par places, se
rencontrent dans les grès, de nombreux débris de végétaux carbo-
nifériens. Cette plaine est recouverte vers le sud par les assises mio-
cènes, mais les schistes carbonifériens affleurent au fond des ravins.
En se rendant d'Autignac à Fouzilhon la Société voit affleurer
le Permien au niveau du Mas Journan. Là, il repose sur le Carbo-
nifère du substratum de l'écaillé de Laurens, tandis que plus vers
l'est les mêmes assises permiennes recouvrent le Dévonien de cette
écaille. U n'y a donc pas de doute sur l'antériorité de la formation
des écailles à l'époque permienne.
742
ETUDE DES DÉPOTS MIOCÈNES D'AUTIGNAC
par M. Ch. DEPÉRET
La Société s'est rendue à pied de la gare de Laurens à la colline
d'Autignac dans le but d'étudier la composition du terrain Miocène
marin qui repose directement sur les schistes et calcaires carboni-
fères de Laurens. Nous sommes ici dans la zone de transgression
du 2e étage méditerranéen (Vindobonien) et on n'observe aucune
tracedulCT étage (Burdigalien). La mer vindobonienne s'est avancée
jusqu'au pied même des terrains anciens de la Montagne Noire et
y a déposé des couches relativement peu épaisses dont la successioo
est la suivante : à la base sont les marnes bleues à Pecten Fuchsi
Font., avec Anomies, Ostrea digitalinaDub. ; ces marnes devien-
nent jaunâtres et plus sableuses vers le haut et sont recouvertes par
un grand banc à Polypiers saccharoïdes qui représente un véritable
récif frangeant de la mer miocène.
L'aspect et la composition paléontologique de ce récif à Polypiers
rappelle étonnamment ceux du récif d'ailleurs tout à fait syn chro-
nique, étudié l'année dernière par la Société en Espagne aux
environs de San Pau d'Ordal, sous la direction de notre confrère
M. le chanoine Aimera.
L'ensemble des couches éuumér^es ci-dessus peut être attribué
au sous étage helvétien et on peut considérer (d'une manière il est
vrai un peu arbitraire) comme appartenant au Tortonien les couches
supérieures de la colline d'Autignac : je n'ai point observé sur ce
point le calcaire laguuo-lacustre à Hélix Hebouli si fréquent à ce
niveau dans le Languedoc, mais on y observe une mollasse à grains
de quartz (mollasse à dragées de M. de Rouville) riche en Turritelles.
Des galets quartzeux forment sur le plateau d'Autignac une
nappe plus ou moins discontinue ; ces allumions très anciennes
doivent être considérées comme le produit de torrents descendus
des pentes schisteuses, antérieurement au creusement des vallées
actuelles, c'est-à-dire vers la fin du Pliocène.
Du ravin d'Autignac la Société, conduite par M. Nicklès, gagne
rapidement Gabian en passant par Fouzilhon, où elle peut observer
le Toarcien à Ammonites pyriteuses et le Charmouthien fossilifère
s'appuyant contre un gisement de Keuper gypsifère.
743
SUR LE LAMBEAU SECONDAIRE DE FOUZILHON-GABIAN
par M. René NICKLÈS
A
F«vaflh«n
Les terrains secondaires sont extrêmement disloqués dans la
région de Fouzilhon-Gabian ; aussi n'a-t-il pas été possible de
montrer la structure du Trias et du Jurassique dans la course
rapide pendant laquelle on n'a fait que les traverser pour se rendre
d'Autignac à Gabian ; je vais cependant indiquer ce que j'ai pu
observer sur ce lambeau et chercher à en déduire sa structure.
L'itinéraire sui-
vi par la Société ••
aborde à l'ouest le
lambeau secon-
daire de Fouzi-
lhon: ce lambeau,
lorsqu'on en ob-
serve la bordure
entre Magalas et
Fouzilhon,prèsdu
Mas Trinchée pré-
sente des traces de
charriage orien-
tées sensiblement
S.-O.N.-E.icefait,
bien visible , ne
peut malheureu-
sement être suivi
que sur quelques
centaines de mè-
tres, les graviers
pliocènes mas-
quant un peu plus
au nord les cou-
ches du Secon-
daire : dans cette
localité qui sem
ble être la combe
du Verre citée par M. de Rouville, et qui tirerait son nom des innom-
brables cristaux de gypse toarcien, un charriage semble bien s'être
Fig.
9. — Structure des environs de Fouzilhon.
Echelle : 1/10.000\
toy Toarcien ; ch, Char mou thien ; t\ In frai la s ; K, Keuper ;
T, Grès triasiques.
744 ft. NICKLÈS
produit en prenant pour base non plus ou non seulement le Keuper,
comme c'est généralement le cas, mais aussi la base du Toarcien
constitué par des marnes très argileuses. Ceci constitue une première
indication.
Si maintenant on aborde le lambeau à l'ouest de Fouzilhon, on voit
le Toarcien en couches presqu'horizontales (fig. 9, A) ou plongeant
très faiblement au nord venir recouvrir les tranches d'un lambeau
de Charmouthieu plongeant très brusquement au nord. Au nord de
ce lambeau, une plaine de quelques centaines de mètres couverte
d'éboulis de surface ne permet pas de voir si, comme c'est probable,
le Keuper est représenté au-dessous : mais un peu plus au nord les
grès triasiques apparaissent avec leur allure constante, plongeant
toujours au sud.
Un peu plus à l'est, avant Fouzilhon, tous les étages jurassiques
sont représentés , mais considérablement amincis , fortement
froissés, traversés
de toutes parts par
des fissures reci-
mentées par de la
calcite ; lorsqu'on
arrive à la base de
l'Infralias qui est
Echelle : 1/5.000*. — Même légende , ,
au plus de son
épaisseur, on voit que le Keuper qui le séparait des grès triasiques
est tellement aminci qu'il a pour ainsi dire disparu : ici le contact
est presque horizontal (Fig. 10).
A Fouzilhon même on peut observer la même allure que dans
la coupe précédente ; le petit synclinal qui précède le flanc nord du
lambeau jurassique et lui est sensiblement parallèle,"~devient plus
brusque et parait dégénérer en faille. Mais sur le flanc nord du
lambeau le Keuper a reparu et les dolomies qui le surplombent et
qui portent le village de Fouzilhon plongent au nord, reposant sur
le Keuper, alors que les grès triasiques à faible distance au nord
ont un pendage en sens inverse (Fig. 9).
Lorsqu'on arrive à la source de Santé on voit le Toarcien fossili-
fère, puis le Charmouthien avec Gryphea cymbium et Lytoceras, ce
dernier fortement froissé, ridé et fracturé', formant un petit lam-
beau, reposer tous deux horizontalement sur le Keuper.
Mais lorsqu'on arrive auprès de la source de pétrole, on voit, un
peu au sud, les grès triasiques eux-mêmes, qui jusqu'alors avaient
SUR LE LAMBEAU SECONDAIRE DE FOUZILHON-GABIAN 74$
paru étrangers aux rideraents des couches supérieures former un
pli déversé vers le nord-est, à tel point que les grès triasiques
montent sur le revers ouest de la colline dominant Cassan au sud,
surplombant les marnes bariolées du Keuper.
Ce déversement semble se prolonger d'ailleurs au nord de la
coupe précédente (Source de Santé et Mas Bastard) les cargneules
et les grès y étant très fortement redressés. A la source de pétrole
toutefois, la direction du déversement semble avoir dévié momen-
tanément à Test, l'orientation de Taxe du pli étant nord-nord ouest-
sud-sud-est. La source de pétrole vient au jour au contact renversé
des grès triasiques et du Keuper gypsifère dans le lit de la rivière
où Ton est averti de sa présence par de nombreuses bulles gazeuses
qui se dégagent dans l'eau.
Si ce charriage a existé, il a dû se continuer beaucoup plus à
Test, dans la région comprise entre Cassan et Roujan ; l'Infralias y
présente une réduction d'épaisseur extraordinaire, fait signalé par
M. de Rouville (1) ; mais ici les éboulis de surface sont fréquents,
et le rivage tertiaire rétrécit de plus en plus les affleurements secon-
daires, et avant Roujan le Secondaire est réduit au Trias, qui y
renferme de remarquables gisements de gypse décrits par M. de
Rouville, en 1868.
11 semble donc, en résumé, que si comme cela parait probable il
y a eu, dans la région de Fouzilhon, non seulement déversement des
couches comme c'est le cas des grès triasiques, mais charriage pour
les assises qui les surmontent, ce charriage aurait eu lieu dans cette
région, non plus du sud au nord comme dans les autres parties de
la feuille, mais du sud-ouest au nord-est, suivant presque parallè-
lement la direction de la limite des terrains primaires et secon-
daires au nord de Neffiès, direction qui serait elle-même une con-
séquence de ce charriage.
Cette déviation aurait eu probablement pour cause l'important
massif primaire qui sépare Bédarieux de Gabian et qui en résistant
à la marche du lambeau lui aurait fait modifier momentanément
sa direction première.
L'explication que je propose ici, non parce que je la crois cer-
taine, mais parce qu'elle me parait être celle qui se rapproche le
plus de la réalité ne sera peut-être pas sans soulever des objec-
tions: comme pour d'autres faits analogues observables plus loin,
on pourra m'objecter qu'ici il n'y a pas de recouvrement propre-
ment dit, puisque ce sont toujours des couches plus anciennes qui
(i) B. S. G. F., RéuD. Montpellier.
746 N1CKLÈS. — SUR LE LAMBEAU SECONDAIRE DE FOUZ1LHON-GABIAN
sont recouvertes par des couches plus récentes, seulement avec
suppression d'un ou plusieurs termes de la série.
Or, tout porte à croire que ces termes ont été tous représentés :
on peut même l'affirmer : le Charmouthien, par exemple, à la source
de Santé, existe à l'état d'îlot isolé entre le Toarcien et le Keupcr
gypsifère ; l'infralias absent dans cette partie se retrouve dans le
prolongement des couches de l'autre côté de la vallée, vers
le Mas Bastard ; on le voit encore à l'ouest (Fouzilhon) et à
l'est (Cassan). Les étages qui font défaut par places devaient donc
exister auparavant, et s'ils ont disparu on ne peut attribuer leur
disparition qu'à des dislocations violentes dont les témoins isolés
de ces étages, violemment impressionnés, portent tous la trace.
L'explication la plus simple me parait donc celle-ci : dans sa
marche en avant, la base de la lame de charriage souvent plissée
transversalement a par suite du frottement sur le substratum été
violemment rabotée, amenant ainsi la réduction et la suppression
de certains termes (Rhétien et Keuper), dans la région de Cassan.
Quant à la constitution stratigraphique des couches, elle présente
les plus grandes analogies avec la succession observée à Bédarieux :
il y a cependant quelques restrictions et quelques différences : le
Rhétien, difficile à observer entièrement, est presque toujours dolo-
mitique, et lorsqu'il présente des galets quartzeux, il diffère de celui
d'Hérépian par sa teinte rosée et ses galets plus anguleux.
Le Toarcien est riche en Ammonites pyriteuses comme dans la
région sud de l'Aveyron, tandis que à Bédarieux ces fossiles
semblent jusqu'à présent faire défaut (1).
Entre Fouzilhon et Pouzolles on rencontre en effet à la base
Harpoceras bifrons, H. bicarinatum, Cœloceras crassum, C. mucrona-
tum, etc.. ; un niveau supérieur affleure à la source de Santé, repo
sant par dislocation sur le gypse triasique : la Société y a recueilli
Harpoceras fallaeiosum, H. discoides à l'état pyriteux. Enfin la partie
supérieure de l'étage est bien visible à l'ouest de Fouzilhon où l'on
trouve en cassant des nodules calcaires Harpoceras cf. subcomptum
Branco forme de la zone à H. aalense.
Le Bajocien constitué par des calcaires compacts lie-de-vin dans
les environs de Bédarieux est ici extrêmement siliceux comme aux
environs de Cazouls : les escarpements sud de Fouzilhon sont à ce
point de vue très remarquables. Dans les parties calcaires j'ai
trouvé Hhynchonella Ruthenensis.
(1) Il est possible toutefois que leur absence soit due à Bédarieux à ce que les
niveaux inférieurs sont généralement masques par les éboulis.
747
EXCURSION DE L'APRÈS-MIDI DU II SEPTEMBRE
par M. J. BER6ER0N
L'excursion avait pour but d'étudier en détail l'écaillé de Laurens-
Gabiau, sur son bord oriental, car cet examen est plus facile que
sur le bord occidental. La Société suit la route de Gabian à
Faugères. A partir du pont du chemin de fer, elle marche sur les
assises autuniennes qui reposent directement sur les schistes
carbonifères. Ceux-ci se modifient rapidement par suite d'injections
de porphyrites, qui, actuellement, sont tout à fait terreuses.
Quelques filons de porphyrite micacée sont assez bien conservés ;
mais le plus souvent l'ensemble des schistes et de la roche
éruptive forme une masse argileuse de couleur vert olive. Les
pointements de porphyrite sont remarquablement nombreux dans
toute la région de Gabian; ils ont traversé le Carbonifère et les
schistes siluriens de la base de l'écaillé de Laurens-Gabian, mais
ils se sont toujours arrêtés au calcaire dévonien du causse de
Fuxian.
Pour examiner le contact du Silurien et du Carbonifère du
substratum, la Société gagne la Grange du Pin au-dessus de la
ligne de chemin de fer. En ce point les schistes ordoviciens et
carbonifères peuvent se distinguer les uns des autres par leur
allure et leurs caractères lithologiques.
Plus au nord, l'Ordovicien est recouvert par les schistes noirs
à boules de calcaire noir pyriteux du Gothlandien. Grâce à un puits
qui a été creusé dernièrement en vue de rechercher la houille (1),
il y a dans un champ un très grand amas de schistes ampéliteux
riches en Monograptus Nilsonni.
Le chemin qui surplombe la voie, coupe successivement tous
les horizons ordoviciens et en particulier le niveau calcaire à
Cai-yocystites Roumllci ainsi que les schistes à Orthis Actoniœ.
On peut suivre ainsi le bord oriental de l'écaillé jusqu'au point où
les lignes de Laurens à Faugères et de Gabian à Faugères se
rejoignent, c'est à-dire au niveau de la métairie des Adouzes.
L'écaillé de Laurens-Gabian se reliait primitivement à celle de
Sainte-Cécile qui se reliait elle-même à toutes les autres : de la
route on peut se rendre compte que toutes formaient primitive-
748 COLLOT. — SUR UNE DISCORDANCE REMARQUABLE
ment une seule nappe de recouvrement, réduite actuellement à
des écailles qui n'en sont que des lambeaux isolés par érosion.
Il faut rattacher à cette nappe un lambeau de schistes acadiens
fossilifères qui se trouve à Test de Roquessels et qui a été
recouvert par un anticlinal dévonien, déversé vers le nord.
Malheureusement, la Société, pressée par l'heure du train qui
doit la ramener à Bédarieux, ne peut aller l'examiner.
Dans la tranchée comprise entre la gare de Gabian et la vallée
de la Tongue, les grès rouges de Permien moyen sont en contact
par faille avec un conglomérat qui représente la base du Trias.
SUR UNE DISCORDANCE REMARQUABLE
ENTRE PERMIEN ET TRIAS
DANS LES ENVIRONS DE BÉDARIEUX (HÉRAULT),
par M. COLLOT
La discordance est de règle entre le Permien et le Trias dans
l'Hérault comme en général autour du Plateau central, notamment
en Bourgogne, où l'on voit le Trias et le Lias affleurer à peu près
horizontaux, suivant les courbes de niveau, tandis que le Permien
souvent fort incliné ne se coordonne nullement à ces courbes.
Généralement lorsqu'un terrain plus récent repose en discordance
sur un plus ancien les coupes figurées montrent le premier moins
incliné que le second. Les exemples contraires paraissent rares.
J'en ai figuré un où le Crétacé supérieur d'eau douce incliné repose
sur le Néocomien presque horizontal, à Saint-Charles, près Jouques
(Bouches du Rhône) (1). La réunion de la Société dans l'Hérault
me suggère le désir de faire connaître un autre exemple qui, s'il
n'est pas sur son itinéraire, doit en être peu éloigné.
Le village de Dio, au nord-est de Bédarieux, repose sur le grès
bigarré plongeant au nord d'environ 20°. Au sud du village la pente
du coteau montre les tranches des couches successives de cet étage,
puis un peu avant d'arriver au fond du ravin, le Permien qui
supporte le Trias. Or celui-ci plonge de 2° environ dans la même
direction approximative. La discordance est très apparente (fig. 1).
(I) Description géologique des environs d'Aix-en Provence, 1880.
ENTRE PBHMIEN BT TRIAS DANS LES ENVIRONS DR BBDARIKOX 749
Au delà du ruisseau de Valguières te Permien prend une légère
pente en sens inverse, c'est-à-dire vers le sud.
Après le plissement du Permien ce terrain a été soumis à dee
érosions qui en
ont lait affleurer à
la surface du sol
les diverses cou-
ches. Cette surface
inclinée a consti-
tué à un certain
moment une plage
sous- marine sur
laquelle les pre-
miers sédiments
triasiques se sont
déposés, recou-
verts ensuite en
concordance par
le reste du Trias
et par toute la
série jurassique
Le dépôt sur une
surface inclinée
est d'autant plus admissible qu'il s'agit de sédiments grossiers,
grès et poudingue» qui ont besoin, pour être déplacés, de courants
violents. D'ailleurs rien ue s'oppose, si l'on préfère supposer que
le grès du Trias s'est formé horizontalement sur ce point, à ce
qu'on admette que le Permien avait à Dio une pente vers le sud,
que les mouvements ultérieurs du sol ont changé le sens de cette
pente en même temps qu'ils produisaient ou au moins accentuaient
la pente vers le nord des terrains secondaires.
La rareté de la disposition observée à Dio m'a fait croire qu'il
était bon de publier l'observation laite par moi en 1875 et je serais
satisfait si le passage de la Société dans la région était une occasion
de confirmer ou de rectifier ma coupe.
A, Infrallas; t, Keuper; A, Alternance d'argiles lie-de-vin,
de psammltea, de grès plus ou moins lins, en nsseï
gros bancs; g. Psammlte lie, de vin. comme e: 3"; f.
Gros banc de gréa blond asseï homogène: 3"; e, Psam-
mltea rouge sombre alternant avec de petits bancs de
grès plus grossiers termines par un lit vert; d. Cou-
ches argileuses vert sole. Ilede-vin ; c, Psammltea en
lits minces, rouge sombre, avec lits blancs, inclinaison
80* ; h, Gras grossiers roux, avec noyaux de quart*
blanc; quelques lits argileux verdâtres; a, l'ermien
rouge argileux, incliné à 2* environ.
26 Août 1901. — T. XXVII.
Bull. Soc. tiéol. Fr. - VA
750
NOTE SUR LES FORMATIONS MIOCÈNES
DES BASSINS DE L'ÉTANG DE THAU, DE L'HÉRAULT,
DE L'ORB ET DE L'AUDE
par M. E. JACQUEMET
Sans parler des travaux plus anciens, le Miocène de la partie du
département de l'Hérault qui est le sujet de ce travail a été pendant
ces dernières années l'objet d'études considérables consignées dans
les travaux de MM. Depéret, Miquel et Roman pour ne citer que
les plus importantes. Dans la présente note, résultat de deux années
de recherches journalières, je m'efforcerai de coordonner ces divers
travaux en y ajoutant un certain nombre de données et d'appré-
ciations nouvelles. Elle n'est que le résumé d'une étude beaucoup
plus étendue, que je dois publier plus tard, mais qui n'est pas
encore suffisamment mise au point en ce qui concerne la paléonto-
logie.
I. — BURDIGALÏEN
Le Burdigalien, beaucoup moins représenté dans la zone qui
nous occupe que dans le Gard et la partie est de l'Hérault, n'a été
encore que trop peu étudié par moi pour que je puisse en donner
une description sérieuse. Je signalerai toutefois l'Ile burdiga-
lienne de Sainte-Lucie, dans l'Aude, et les couches indiquées par
M. Roman, à la Bergerie de Perpignan, près de Loupian (Hérault).
IL — VlNDOBONIEN
A l'exemple de M. Depéret qui a créé ce terme et de MM. Miquel et
Roman qui l'ont adopté, je conserverai ce nom à l'ensemble des
assises helvétiennes et tortoniennes. Je ferai toutefois remarquer
que, bien qu'assez difficile au point de contact, on pourrait montrer
une différence notable entre ces deux étages.
A. — Helvétien.
L'Helvétien de la région peut se diviser en deux niveaux : les
marnes bleues inférieures et la mollasse marno-sableuse.
bassins de l'étang de thau, de i/hérault, de l'orb et de l'aude 751
I. — Marnes bleues inférieures. — Tout à fait à la base se trou-
vent les marnes bleues hélvétiennes peu fossilifères à la partie
inférieure et le devenant davantage au sommet. On me parait avoir
confondu souvent la partie supérieure de ces marnes avec les
assises marno-sableuses qui les surmontent. Elles sont remarqua-
bles par leur grande homogénéité, elles présentent une sérieuse
épaisseur et sont en maints endroits exploitées pour la tuilerie, on
les mélange alors avec des argiles pliocènes ou quaternaires.
Les marnes bleues inférieures contiennent des pinces de Crusta-
cés, des piquants d'Oursins, des dents de Poissons : Centuna, Pristis,
Aetobatis, Myliobatis, Chrysophys, Carcharias, Galeus. Hemipristis,
Notidanus, Odontaspis, etc., de nombreux moules noirs de Gasté-
ropodes, des moules de Bivalves appartenant aux genres Venus,
Cypricardia, Cytherea, Tapes, Tellina, Cardium, Cardita, etc., des
Peignes variés qui mériteraient une véritable monographie telle-
ment les formes en sont nombreuses. Le Pecten Fuchsi Font, est
assez rare et ne devient commun que dans les assises marno-
sableuses qui surmontent ces couches. On y peut recueillir encore
quelques rares Ostrea digitalina Dub. avec d'autres formes dJ Ostrea.
L'O. crassissima Lam. commence à se montrer par bancs à la partie
supérieure mais sous une forme plus courte et moins développée
que le type.
Les marnes bleues inférieures existent d'une façon très générale
dans toute la région. Elles forment le fond de toutes les grandes
dépressions, on les retrouve dans les forages de puits, mais elles
affleurent en un petit nombre de points à Nizas, Caux, Aspiran,
Montagnac, Béziers, Lespignan, Nissan, Puisserguier, Cazouls
d'Hérault, Pézenas, Tourbes, Nézignan l'Evêque, etc. A la partie
supérieure des marnes bleues se trouve un niveau assez constant
à Scutelles : Scutella nv. sp., Amphiope bioculata, Ag., Âmphiope
elliptica, Desor. Ce niveau est très riche à Lespignan, à Boujan,
ù Nézignan l'Evêque, etc.
Dans l'île Sainte-Lucie (Aude), le Burdigalien qui constitue à
peu près toute l'Ile, est surmonté d'un grès dur à Scutella, Pecten
Fuchsi, Ostrea crassissima formant l'équivalent de la marne bleue.
C'est également une mollasse grise très dure qui existe à ce
niveau à Bouzigues et à Loupian (Hérault).
II. Mollasses marno-sableuses. — Au-dessus de la marne bleue
inférieure se. trouvent des assises marneuses plus sableuses que
les précédentes et d'un bleu plus pâle. Elles sont entrecoupées
soit de bancs considérables d' Ostrea crassissima, soit de bancs
752 JACQUEMET. — FORMATIONS MIOCÈNES DES BASSINS DE L ÉTANG
de moules de Bivalves ou d'Anomies. Les fossiles en sont en
général nombreux et les plus caractéristiques sont Pecten Fuchsi
Font, et Ostrea digitalina Dub. En certains points ces espèces se
trouvent avec une extrême abondance. Avec elles des Gastéropodes
ayant parfois conservé leur test, des Balanes de diverses espèces,
de nombreux Oursins : Cidaris, Psammechinus dubias, etc. En
beaucoup de points enfin à la base de ces marnes dans la zone à
Anomia on trouve çà et là Pecten subp leur onec tes d'Orb. (Nizas,
Caux, Nézignan-l'Evêque, etc.).
Ces marnes sableuses sont parfois remplies de rognons calcaires
qui ne sont en général que des fossiles transformés, elles présen-
tent par places une coloration ferrugineuse.
La partie supérieure de ces marnes passe à des sables fins peu
fossilifères à Gastéropodes, dents de Poissons et pinces de Crus-
tacés. C'est à ce niveau que Ton rencontre : les vertèbres et les
dents énormes du Carcharodon megalodon Ag. ; parmi les Gastéro-
podes Nerita Martiniana Math. ; parfois quelques Oursins et une
quantité de toutes petites Balanes : Balanus stelliformis Brocchi.
Ces sables entremêlés de couches de marnes sont, vers leur
partie supérieure, très fossilifères et entrecoupés de bancs extrême-
ment riches en échantillons devenant parfois de véritables luma-
chelles. Malheureusement les Gastropodes très nombreux de ce
niveau sont presque toujours à l'état de moules : Tnrritella, Cyprœa,
Conus, Voluta, Pyrula, Natica sont représentés par plusieurs espè-
ces. Les Bivalves à l'état de moules également appartiennent aux
genres déjà signalés dans les couches inférieures. Parmi les Peignes
Pecten Fuchsi devient abondant, on trouve encore P. scabriusculus
Math., P. substriatus d'Orb., P. subbenedictus Font, (rare), etc., des
Ostrma crassissima Lamk. de très grande taille, 0. digitalina Dub.
etc., de grands Balanes à la partie supérieure, des Bryozoaires
très abondants en certaines localités, des Eponges perforantes, des
Foraminifères, etc.
Les couches marno-sableuses affleurent en un grand nombre de
points de la région qui nous occupe et forment la plupart des colli-
nes miocènes de la région : Montagnac, Saint Pons de Mauchien,
Paulhan, Aspiran, Loupian, Bouzigues, Nizas, Caux, Roujan, Péze-
nas, Nézignan-l'Evêque, Adissan, Boujan, Béziers, Maurassan,
Maureilhan, Puisserguier, Montady, Lespigoan, Le Malpas et
l'Anserune à Colombiers, Nissan, etc., dans l'Hérault; Moussan,
dans l'Aude.
Si les marnes bleues sont homogènes et paraissent indiquer un
DE THAU, DE L'HÉRAULT, DE L'OUB ET DE L'AUDE 753
dépôt assez lent daos uoe mer un peu profonde ; les mollasses
marno sableuses, par suite d'un eusablement encore particulier à
la région, semblent avoir comblé plus rapidement les anses et
dépressions de la mer helvétienne. Les fossiles ont un caractère
plus littoral et paraissent indiquer une mer moins profonde. On
reconnaît une tendance à l'émersion, par suite d'une de ces oscilla-
tions de rivages si fréquentes sur ces côtes. A la fin de cette période
apparurent les récifs de Coraux construits sur des parties un peu
solides du fond ayant moins de profondeur.
B. - Tortonien
I. Récifs coralliens. — C'est au début du Tortonien que les
Polypiers commencèrent à constituer les récifs importants de la
région et même plusieurs de ces récifs appartiennent-ils au Torto-
nien tout-à-fait supérieur. Jusqu'à cette époque on ne trouve dans
les sables que quelques Polypiers isolés. Les récifs coralligènes
paraissent s'être développés suivant deux bassins que séparerait
actuellement le cours de l'Orb. Dans la partie orientale ce sont les
récifs frangeants de Fontes, de Neffîez et d'Autignac, suivant une
ligne est-ouest. Dans la portion occidentale, les récifs se sont alignés
plutôt du nord au sud à Fontanelle, les Uguières, Massacats, le
Bosc, Seriège, Bellevue, etc., dans la région de Quarante. Signalons
cependant le récif frangeant de Puisserguier. Les espèces qui ont
construit ces Polypiers sont fort nombreuses et Ton remarque avec
elles tout un monde de fossiles, Huttres, Turritelles et Gastéropodes
divers et surtout un grand nombre de Mollusques lithophages
perforant les récifs et les roches avoisinantes. A signaler aussi un
Oursin régulier extrêmement intéressant et encore inédit.
Je crois que le début de l'édification des récifs doit marquer la
fin de la période helvétienne dans la région. En effet, bien qu'il soit
impossible d'indiquer une délimitation très précise, ce qui a néces-
sité la création du terme de Yindobonien, à partir de ce moment,
commence une nouvelle phase, une période d'émersion qui fera
apparaître successivement des formations saumâtres et des dépôts
franchement lacustres. Le faciès, d'abord général de la marne bleue
et moins homogène de la mollasse marno sableuse, cédera mainte-
nant la place à des faciès locaux. C'est à cette époque qu'apparais-
sent les galets de quartz qui ont, de leur aspect particulier, reçu
de M. de Rouville le nom de dragées ; la Montagne Noire envoyait
son tribu.
A
754 JAOQUBMBT. — FORMATIONS MIOCÈNES DBS BASSINS DE L'ÂTANG
La ligne de récifs de la région de Quarante qui était probable-
ment presque ininterrompue, l'ensablement continuel de la zone
côtière analogue à ce qui se produit encore de nos jours, l'existence
très probable de dunes, sont avec l'exhaussement progressif du sol
autant de facteurs pour l'établissement d'étangs saumâtres comme
il en existe tant à notre époque. Je crois qu'il a dû s'en former
deux, un oriental, de Saint-Guiraud à Pézenas, et l'autre, occi-
dental, dans la région de Quarante et Puysserguier avec un troi-
sième très probablement sur le territoire actuel de Cruzy. C'est de
cette époque également que date le calcaire moellon supérieur.
Je vais étudier successivement toutes les formations.
II. Série saumatre. — a) Calcaire moellon supérieur. — A Saint-
PoDS-de Mauchiens, Montagnac, Aumes, Pézenas, Nézignan-l'Evé-
que, Adissan, Aspiran, Paulhan, etc., le dernier banc de calcaire
gréseux est pétri de fossiles identiques à ceux de la mollasse
marno-sableuse, mais à faciès plus saumatre, les Gastéropodes
abondent et Ton commence à trouver des Potamides. Ces fossiles
sont à l'état de moules, mais à l'aide des contre-empreintes il
devient facile d'arriver à des déterminations précises ; d'ailleurs,
en certains points, les fossiles ont conservé leur test. Je citerai,
avec des dents de Poissons, Potamides papaveraceus Bast, Potamides
lignitarum Eich., Turritella turris Bast., T. gradata M entre, T. corn-
munis Risso, Cyprœa, Tapes, Venus, Cardium, Pecten, Ostr&i, etc.
Souvent les dragées de quartz commencent à apparaître dans le
calcaire moellon saumatre.
b) Couches saumâtres de Moussan (Aude). — Entre Marcorignan et
Moussan (Aude), vers la bergerie du Fresquet, des couches sau-
mâtres à Potamides, Turritella, Ostrea, Lithothamnium se trouvent
immédiatement au-dessous des sables marins à Amphiope. Le
niveau lacustre n'est pas ici représenté.
c) Calcaire saumatre de Paviro. — M. Miquel a parfaitement
décrit, à Paviro, près de Cruzy, un calcaire rosé, à faune d'abord
marine, puis de plus en plus saumatre avec nombreux fossiles :
Potamides nombreux, Cyclostomes, Hélices à la partie supérieure,
Murex, Cardium et Turritelle à la partie inférieure.
d) Calcaires saumâtres de Massacats. — C'est encore à M. Miquel
que nous devons l'étude de cette couche riche en petits Gastéropodes.
Hélices, Cyclostomes, dents de Poissons, çtc. Je renvoie à son étude
du Miocène de Capestang pour la description.
e) Calcaires et marnes à Cérithes de Sainte- Agathe. — M. Miquel,
dans son étude, avait comparé cette formation aux couches sarma-
D* THAU, DE L'HÉRAULT, DE L'ORB ET DE L'AUDE 755
tiennes de la Hongrie. Je crois plutôt qu'elles doivent rentrer dans
notre série saumâtre.
f) Marnes de la Grenatière. — Ces marnes situées dans la commune
de Puysserguier sont remarquables par leurs nombreux fossiles
saumâtres ayant conservé leur test et dans un parfait état de conser-
vation. Ces couches ont été étudiées par M. Miquel. Elles con-
tiennent : Potamides papaveraceus Bast., P. lignitarum Eich., P.
bidentatus G rat., Natica millepunctata Lam., Nassa Dujardini Des.,
Columbella turunica Maz., Murex sublavata Horn., M. Basteroti
Benoit., M. coelata Grat., M. striée for mis, Ostrea crassissima Lam. ,
Anomya, Arca, Corbula, Cardita, etc.
g) Manies à Potamides des Près Dansayres. — Etudiées par M.
Miquel, dans la commune de Quarante, extrêmement riches en
Potamides, Murex, etc.
h) Marnes bleues à Turritelles et à flore de Pétulay. — Ces marnes
très intéressantes décrites par M. Miquel ont été placées par lui
au niveau des marnes bleues inférieures. La couleur seule pouvait
prêter à confusion. Je suis, pour ma part, persuadé que leur véri-
table place est ici. Elles sont fort riches en Turritelles et présentent
par places, dans leurs feuillets, des plantes variées. Cette flore, non
encore étudiée, parait devoir être d'un grand intérêt.
i) Calcaire à Turritelles de Gresan. — Situé tout près du récif
d'Autignac, ce calcaire est rempli ds fossiles ayant plus ou moins
conservé leur test : Turritella, Conus, etc.
j) Calcaire saumâtre de Saint- Félix-de-Lodez. — Ce calcaire immé-
diatement inférieur au calcaire lacustre contient Cardium, Turri-
tella, Cyclostoma, etc.
k) Marnes à Potamides de Montpeyroux. — Non loin de Saint-Félix-
de-Lodez des marnes bleues surmontées d'un banc épais d' Ostrea
sont remplies de Gastéropodes saumâtres ainsi que de Potamides
lignitarum et P. bidentatus. La faune en est très riche mais les
échantillons sont parfois d'une conservation assez difficile.
1) Calcaire saumâtre de Fontes. — Immédiatement à la base de la
couche lacustre le calcaire contient des Cardium mêlés aux Cycl os-
tomes et aux Turritelles.
III. Calcaire lacustre. — Ainsi que je viens de le montrer, le
faciès saumâtre est extrêmement répandu dans la région qui fait
l'objet de cette étude. Les étangs ayant leurs graus souvent obstrués
par les sables, n'étant plus en communication avec la mer que par
les gros temps, recevant, d'autre part, les apports de nombreux ou
de puissants cours d'eau, finirent bientôt par se transformer en
756 JACQUEMET. — FORMATIONS MIOCÈNES DES BASSINS DE L ÉTANG
véritables lacs d'eau douce, qui remplacèrent ainsi les- étangs
saumâtres primitifs ; ainsi se constituèrent le lac oriental couvrant
les territoires de Saint-Guiraud, Saint-Félix-de-Lodez, Clermont-
l'Hérault, Nébian, Aspiran, Paulhan, Adissan, Fontes, Caux, Nizas,
Pézenas, Bassan, Magalas, etc., et le lac occidental de la région de
Quarante. A ceux-ci ajoutons le petit lac de Paviro.
Ces diverses formations ne sont probablement pas toutes du
même âge, les phénomènes qui les ont produites sont si complexes
que cela se comprend facilement. La faune, d'ailleurs, est loin d'être
partout la même. Les Hélix apportés parles cours d'eau et entraînés
dans les crues sont variés et mériteraient une monographie spéciale,
malheureusement ils n'ont pas conservé leur test et l'étude en est
dès lors fort difficile. Je ne connais d'Hélix avec leur test qu'à
Nebian et à Aspiran, mais ils sont tellement empâtés dans la roche
qu'ils sont fort difficiles à extraire.
IV. Mollasse blanche. — Au niveau des couches et des forma-
tions saumâtres on rencontre en certains points des mollasses
blanchâtres avec fossiles de la mollasse marno-sableuse. Quelques
dragées commencent à s'y montrer et elles sont immédiatement
recouvertes par la formation suivante.
V. Mollasse a dragées. — Si dans la région de Montpellier le
calcaire lacustre semble, d'après M. Roman, terminer l'étage
Vindobonien, dans la zone qui nous occupe la mer fit une
dernière fois irruption et ceci coïncidant avec un apport plus
considérable de galets de quartz, elle couvrit de la mollasse à
dragées toute la région de Pézenas à Fontes. Ce nom de mollasse à
dragées, si bien donné par M. de Rouville, caractérise donc un
accident local d'une réelle importance.
Cette mollasse, véritable conglomérat empâtant des fragments
roulés d'Ostrea crassissima, avec des morceaux et même des blocs de
couches plus anciennes contient une faune assez importante, mal-
heureusement le plus souvent indéterminable. Toutefois dans
quelques localités elle présente un intérêt particulier à cause
du bon état de ses fossiles. A Fontes, la mollasse à dragées
contient une grande quantité de dents de Poissons et de moules
noirs de Gastéropodes, à Caux les fossiles en certains points
ont conservé leur test. On y rencontre avec d'énormes Balanes, des
dents de Poissons remarquables par leur belle conservation,
Turritella bicarinata Eichw, Nassa miocenica Mich., Spheronassa
tnutabilis Lin., Calyptrœa deformis Lamk., Arca Breislaki Bast.,
Tellina planata Linn., Dosinia Adansoni Phil., Cytherea pedemontana
Ag., Venus, Léucinia} Psammobia, Cardium^ Donax, etc.
de thau, de l'Hérault, de l'orb et de l'aode 757
VI. Sables a Amphiope. — A Saint-Félix de Lodez et à Saint-
Guiraud (Hérault) le calcaire lacustre est recouvert par des sables
à dragées, parfois condensés en véritables grès employés pour la
construction. Ces sables contiennent des Ostrea crassissima, des
Pecten, mais surtout Amphiope perspicillata Ag. et une abondance
extraordinaire de Lithothamnium.
A la bergerie du Fresquet, entre Moussan et Marcorignan (Aude),
des sables identiques renferment la même faune, des Amphiope
bioculata Ag. et de nombreux Lithothamnium au dessus des couches
saumâtres dont j'ai déjà parlé.
A Paulhan (Hérault) des grès à Lithothamnium et à Ostrea
crassissima recouvrent le calcaire lacustre.
Je n'hésite pas, bien que je ne les ai encore que peu étudiés,
à placer par analogie dans le Tortonien supérieur les sables à
Amphiope décrits par M. Miquel à Cruzy et rangé par lui dans
l'Helvétien.
C'est après cette époque qu'a dû se placer le moment du maxi-
mum d'émersion. En effet, nous retrouvons les couches supérieures
à une altitude qui dépasse parfois cent mètres, tandis que le Pliocène
marin qui vient dégrader le Miocène ne dépasse guère dans
la région une altitude de quarante mètres. Cette émersion dont je
ne puis ici étudier la cause ne s'est pas faite sans dénivellement
parfois assez considérable en certains points, sans failles et sans
plis. L'étude de la tectonique ne rentrant pas dans le cadre que je
me suis tracé, je ne m'étendrai pas davantage sur ce sujet.
III. — PONTIQUE.
Dans toute la région cet étage n'est représenté qu'à Montredon
sur le territoire de Montouliers (Hérault). Ces couches à Hipparion
gracile et à Dinotherium ont été trop bien décrites par M. Depéret et
sont trop connues pour qu'il soit utile d'y revenir dans ce travail.
M. Depéret complète la communication du Dr Jacquemet en
annonçant l'existence du Burdigalien supérieur (1er étage méditer-
ranéen) aux environs de Béziers, des deux côtés de l'anticlinal oli-
gocène de Nissan, au nord à Brégines, au sud dans les environs de
Lespignan. Ici, comme aux environs de Montpellier et dans la
vallée du Rhône, le Burdigalien est débordé transgressivement par
le 2e étage méditerranéen ou Vindobonien, qui s'avance beaucoup
plus loin vers le nord et va reposer directement sur la bordure
secondaire et paléozoïque de la Montagne Noire.
758 SÉANCE DU 14 SEPTEMBRE 1899
/
M. Jacquemet répond que si dans son étude il a évité de
parler des Brégines, c'est que, frappé de la grande analogie existant
entre le Pecten terebratuliformis et le P. TourncUi, il voulait se livrer
à de nouvelles recherches avant de se heurter à l'opinion générale-
ment admise.
D'autre part il a trouvé au jardin de Viguier, entre Lespignan et
Vendres, des sables jaunes ferrugineux à Pecten en contact avec la
mollasse bleue miocène et au chemin des Tuillières, entre Lespi-
gnan et Nissan une mollasse jaune à Pecten en contact avec des
couches marno-sableuses à Scutella nov. sp. et Amphiope biocu-
lata. Jusqu'à ces derniers jours il avait attribué ces Pecten à
l'espèce prsescabriusculus , mais les voyant différents du type et
trouvant obscurs les modes de contact il avait ajourné à plus
tard leur attribution définitive.
A propos d'une discussion qui s'était produite à la précédente
séance, M. Fourtau conteste que la Serpula spirul&a puisse être
caractéristique du Bartonien, en Egypte elle se trouve dans une
grande partie des couches éocènes. M. Carez répond que les
couches de Biarritz, auxquelles il a été fait allusion, renferment non
seulement cette forme, mais toute une faune qui est bien carac-
téristique du Bartonien.
Séance du 14 Septembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON, PRÉSIDENT.
La séance est ouverte à huit heures et demie, à l'hôtel Lavit, à
Clermont-l'Hérault. Le procès-verbal de la précédente séance est
lu et adopté. Le Secrétaire annonce avoir reçu, pour la bibliothè-
que de la Société, deux brochures de M. Maistre sur Y Algérie
en {899, et deux autres du Dr Jacquemet, intitulées : Contribution
à Ntude géologique de Vile de Crémieu et Catalogue des mollusques
vivants de l'île de Crémieu.
Au sujet d'une opinion de M. Berge ron, rapportée dans le procès-
verbal, M. Dop dit que pour M. Roussel les griottes se trouvent
dans le Dévonien inférieur et surtout dans le Dévonien supérieur.
759
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 12 SEPTEMBRE
DANS LA RÉGION DE PÉZENAS (1)
par M. Ch. DEPÉRET.
Le matin, la Société s'est rendue en voiture à Montagnac pour
observer les magnifiques bancs d'Ostrea crassissima qui sont inter-
calés dans les marnes blanches à Pecten Fuchsi de l'étage helvétien.
Au-dessus de ce niveau, les couches deviennent plus sableuses,
plus jaunâtres et on y voit s'intercaler à plusieurs reprises de gros
bancs calcaréo-gréseux qui sont une véritable lumachelle de coquilles
brisées (calcaire moellon). Les couches plus élevées du Miocène
ont disparu ici par érosion.
L'après-midi, les voilures ont conduit la Société au pied du
monticule de Saint-Siméon, déjà étudié lors de la Réunion de 1869.
On y observe une coupe complète du Miocène de la région, com-
prenant les termes suivants de bas en haut : 1. Marnes bleues à
Pecten Fuchsi; 2. Mollasse marno-gréseuse jaune à moules de
Bivalves ; 3. Calcaire laguno-lacustre à Hélix Rebouli ; 4. Mollasse à
dragées de quartz, avec grosses Ostrea et Cardium. L'ensemble de
ces assises représente tout le deuxième étage méditerranéen ou
Vindobonien, dans lequel il est difficile de séparer d'une manière
précise les sous-étages helvétien et tortonien.
A la hauteur de la ferme de Saint-Palais, on a pu observer que le
Miocène était profondément raviné suivant une surface oblique qui
correspond au flanc d'une vallée pliocène creusée jusqu'à la pro-
fondeur du thalweg actuel et même plus bas. Dans cette vallée qui
correspond à peu près au ruisseau du Riège actuel, se sont accu-
mulés des limons continentaux, des sables et des graviers ferru-
gineux qui ont fourni des Mammifères du Pliocène moyen ou de la
faune de Montpellier, tels que Rhinocéros leptorhinus, Palœoryx
Cordieri, dont la Société a pu admirer de magnifiques restes dans
la collection Biche, à Pézenas. M. Laurent Maurette a eu la chance
de découvrir dans les limons, sous les yeux mêmes de la Société,
une partie de mâchoire de Capreolus australe.
(1) Je donnerai un très court résumé des courses aux environs de Pézenas,
parce que tous les faits observés par la Société sont déjà décrits en détails dans
une Note récente que j'ai publiée sur la région (B. S. G. F., (3), XXV), note
à laquelle je renverrai le lecteur.
760 J. BERGERON. — EXCURSION DU 13 SEPTEMBRE
Ces graviers du Pliocène moyen, couronnés à leur sommet par
les puissantes nappes de galets de quartz du Pliocène supérieur
des plateaux, sont à leur tour profondément ravinés, entre le
château du Peyrat et Saint-Martial, sur la rive droite du Riège, par
une nouvelle formation de graviers quartzeux à éléments basal-
tiques, alternant avec des tufs et îles cinérites, et avec des couches
peu épaisses de calcaire lacustre à Limnées, qui remplissent une
cuvette formée aux dépens du Pliocène ancien, sur les flancs duquel
les tufs basaltiques s'appuient sous un angle assez accentué. Ces
graviers basaltiques ont fourni aux recherches de de Grasset et
Biche une faune pliocène très récente, comprenant Elephas mendio-
naiis, Hippopotames major, Cervus martialis, Equus sp., Bos sp. de
l'extrême fin de la période pliocène.
Les produits de projection balsa tiques intercalés dans ces couches
proviennent vraisemblablement du cratère de Valros, que la Société
a visité à la fin de la journée. On y observe nettement une cheminée
volcanique dont les scories ont entraîné des fragments volumineux
d'argile rouge recuite et de cailloutis du Pliocène ancien, pour
s'épancher au dehors sous forme d'un basalte scoriacé, point d'ori-
gine de la coulée qui se dirige vers le sud-est en traversant la
ligne ferrée de Pézenas.
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 13 SEPTEMBRE
par M. J. BERGERON.
La Société se rend de Clermout-l'Hérault à Cabrières en voitures.
Après avoir traversé la région jurassique qu'elle étudiera le lende-
main sous la conduite de M. Nicklès, elle trouve, au niveau de
Villeneuvette, le Trias typique reposant sur des couches décolo-
rations rouges et vertes représentant peut-être la partie supérieure
du Rothliegende.
Dessous apparaissent les schistes carbonifères qui vont s'étendre
jusqu'à Cabrières (1) en formant la plaine de Cadenas sur une lon-
(4) Je ne puis parler de Cabrières sans faire une mention toute spéciale des
longues et patientes recherches de M . Kscot dans les terrains paléolozoïques de
la région. C'est grâce à lui que la faune des différents horizons a été reconnue
et par suite beaucoup des progrès réalisés dans ces dernières années lui sont
dus. Je tiens à le remercier des services qu'il m'a rendus personnellement en
m 'accompagnant dans les nombreuses courses que j'ai faites à Cabrières
EXCURSION DU 13 SEPTEMBRE 761
gueur de 4 kilomètres et sur une largeur de 1 kilomètre. Cette
plaine est bornée au nord par uo massif calcaire, qui n'est autre
chose que le prolongement oriental du Pic de Bissous. Ce dernier
Sera étudié le lendemain, mais on peut voir déjà que la crête est
formée par les calcaires dévoniens redressés à la verticale et même
légèrement déversés vers le sud ; il correspond au flanc méridional
d'un anticlinal, qui comprend tout le Dévonien, les lydiennes, les
calcaires et les schistes de la base du Carbonifère. Le tout vient
plonger vers le sud sous les schistes carbonifères de la plaine de
Cadenas.
Celle-ci est bornée vers le sud par un massif calcaire qui n'est
autre chose qu'une écaille dont la partie septentrionale forme la
colline de Ballerades. Cette écaille se poursuit vers l'ouest jusqu'à
la vallée de la Boyne, avec une composition constante : à la base,
des schistes ordoviciens appartenant à un horizon quelconque
reposant indifféremment sur les schistes tournaisiens ou sur les
calcaires viséens; dessus, les dolomies de la base du Dévonien;
puis les couches à Spirifer cultrijugatus, les calcaires du Givétien,
enfin le Dévonien supérieur et les lydiennes carbonifères ; mais
ces derniers niveaux sont peu développés.
Le Carbonifère de la plaine de Cadenas (Voir PL XIX) est
constitué par des schistes argileux, parfois très plissés, au milieu
desquels se rencontrent des bancs de grès et de conglomérats à
éléments noirs et blancs de lydienne et de quartz. C'est la même
série déjà étudiée par la Société du côté du Mont Peyroux. Par places
se voient des Ilots ou plutôt des blocs de calcaire à Productus
giganteus. Us sont abondants surtout sous les écailles, ce qui
s'explique par le fait qu'elles les ont protégés contre les érosions.
Vers l'ouest, le Carbonifère de la plaine de Cadenas s'appuie sur
l'extrémité orientale d'un anticlinal dit du Caragnas, qui, par suite
des érosions qu'il a subies, montre de son centre à sa périphérie le
Dévonien inférieur, moyen, supérieur et la base du Carbonifère ; les
schistes tournaisiens l'entourent en grande partie. C'est un anti-
clinal en place, dans lequel, par suite des compressions qu'elles
ont subies, toutes les assises sont devenues schisteuses.
Du pont de la Boyne, la société voit la base ordovicienne de
l'écaillé de Ballerades reposant sur les schistes carbonifères de
l'extrémité orientale du Caragnas et de l'extrémité occidentale de
la plaine de Cadenas; les niveaux supérieurs ont été enlevés par
érosion tout le long de la rivière. Vers le sud se dresse une série
de crêtes à flanc septentrional abrupt, mais à flanc méridional
762 J. BERGERON
relativement peu incliné. Toutes ces crêtes correspondent à des
accidents que la société va étudier.
Au niveau du pont apparaissent, sur les deux rives, des lambeaux
de calcaire à Produclus giganteus; vers l'ouest ils sont à découvert,
tandis que vers Test ils disparaissent en partie sous les schistes
ordoviciens de l'écaillé de Ballerades.
Sur la rive droite de la Boyne, sur le flanc oriental du Caragnas,
se profile un massif tu face dit de l'Estabelle. 11 a été formé par une
source qui vient des calcaires dévoniens du massif du Caragnas,
mais qui maintenant est intermittente; il doit être de formation
très ancienne : M. le Dr Jacquemet y a trouvé des cavernes avec
restes d'Ursus spelœus.
La Société prend à Cabrières le chemin des Crozes qui monte
au massif de Tourière et qui passe sur le Silurien de la nappe de
recouvrement jusqu'au niveau du cimetière. (Voir fig. 3, p. 670).
Dessous ce sont les schistes carbonifères. Puis la route continue
sur ces derniers avec quelques retours de schistes siluriens, s'appli-
quant contre le Caragnas. Les mêmes schistes siluriens se retrou-
vent sur la rive droite du Vallat des Clavies; mais au milieu
d'eux émerge une bande de calcaire à Productus giganteus, dite
écharpe à l'Espagnol qui remonte vers l'ouest et ne disparaît qu'au
niveau de Tourière. La même bande se poursuit vers Test dans
la vallée du Bronc (voir Tectonique, p. 672). Elle appartient au
substratum carbonifère et n'apparaît que par érosion. Elle fait
d'ailleurs saillie par suite des efforts qui ont ridé le substratum.
Au col de Tourière passe un filon cuivreux qui vient de l'est, du
flanc méridional de la colline de Ballerades, et qui se prolonge
encore vers l'ouest. Il est postérieur au charriage qui nous occupe,
et il ne semble pas que la cassure, par laquelle il est venu, soit une
faille avec dénivellation.
A ce même col réapparaissent les schistes siluriens; ils sont de
l'étage de Llandeilo et renferment de grands tuttenstein dans
lesquels les membres de la Société n'ont trouvé que quelques
débris informes de fossiles.
En descendant vers la métairie du Temple, la Société traverse la
base de la nappe de recouvrement, formée de schistes ordoviciens
riches en Didymograptus et en Bouvillograptus. C'est dessus que
repose le massif dévonien de Tourière.
La métairie du Temple est assise sur un mamelon qui a la
composition suivante : à la base ce sont les schistes carbonifères
sur lesquels reposent des calcaires à Pr oduc tus giganteus ; cette
EXCUR8I0N DU 13 SEPTEMBRE 763
série est en place et forme le soubassement de la colline. Elle est
recouverte par des schistes ordoviciens que surmontent immédia-
tement les dolomies dévoniennes qui couronnent le monticule.
C'est un lambeau qui se rattache à la grande écaille de Bataille.
Puis la Société continuant à marcher sur le substratum carboni-
fère, va étudier le bord septentrional de l'écaillé du Falgairas. La
série silurienne y est assez complète, ce qui est rare par suite des
laminages éprouvés par les assises constituant les écailles. Vis à
vis la métairie de Lauriol affleurent les grès à Lingula Lesneuri ;
puis plus à l'ouest, non loin du col de la Gabelle, se voient des
calcaires à Caryocystites Rouvillei et des schistes à Orthis Âctoniœ.
La Société recueille quelques échantillons de plaques de Cystidées
qui ne laissent aucun doute sur l'âge du dépôt.
Le déjeuner est servi dans un jardin mis gracieusement à la
disposition de la Société, par M. Rigaud, propriétaire à Cabri ères.
Le président porte la santé de M. Lenoir qui, il y a trente ans, lors
de la première réunion de la Société à Cabrières, fonda en son
honneur 1' « hôtel des géologues ».
Après le déjeuner, la Société va visiter la combe Izarne; la
route de Fontes qu'elle suit traverse l'écharpe à l'Espagnol, puis la
bande de Tourière-Japhet (Voir Tectonique, p. 674). Elle passe
ensuite sur les schistes carbonifères qu'elle ne quittera plus qu'à
l'entrée de la combe Izarne.
Sur la rive gauche de la Boyne s'étend une grande plaine carboni-
fère en place ; elle est bornée vers l'est par les restes de l'écaillé
de Balader ne qui n'est autre chose que le prolongement oriental
de l'écaillé de la Serre.
A droite de la route, au-delà du pli de Tourière-Japhet, s'étend
la vallée de Pitrous occupée par le Carbonifère en place (Voir
fig. 2, p. 669). Sur la rive droite du ruisseau de Pitrous affleurent
quelques blocs de calcaire à Productus giganteus pinces dans un
pli des schistes tournaisiens. Au-dessus affleurent des schistes ordo-
viciens qui forment la base du massif de Bataille. Ce dernier n'est
en réalité qu'une partie de l'écaillé de la Serre, ainsi qu'il sera
démontré plus loin. Sa grande masse est formée des dolomies du
Dévonien inférieur. Les calcaires givétiens sont redressés à la ver-
ticale et forment la crête de la colline. Les horizons du Dévonien
supérieur sont peu développés. A l'entrée de la combe Izarne, sur
la rive gauche du ruisseau, il y a un gros bloc renfermant les hori-
zons du Dévonien supérieur, mais il ne paraît pas être en place ; il
serait tombé de la partie supérieure. D'ailleurs le flanc oriental du
massif de Bataille est couvert d'éboulis.
764 J. BERGEflON — EXCURSION DU 13 SEPTEMBRE
L'entrée de la combe Izarne est creusée dans les schistes tour-
naisiens, renfermant quelques lambeaux de calcaire viséen qui
affleurent au-dessus de la route de Fontes. C'est à une altitude
supérieure qu'apparaissent les schistes ordoviciens de la base
de l'écaillé de 1» Serre. Celle-ci forme le flanc droit de la vallée
(Voir fig. 2, p. 669).
En s'avançant dans la combe, la route de Cabrières à Neffîez
qui en suit la rive droite, s'élève progressivement dans les niveaux
qui forment cette dernière écaille ; elle passe successivement de
l'Ordovicien (étage de Llandeilo) aux dolomies du Dévonien infé-
rieur, au calcaire à Spirifer cultrijugatus et Calceola sandalina,
au Givétien, à toutes les assises du Dévonien supérieur. Dans
cette région, les calcaires à Chiloceras curvitpirui et à Clyménies
sont particulièrement riches eu fossiles. La rive gauche de la combe
Izarne n'est pas constituée comme la rive droite : elle correspond
à la plongée méridionale de l'écaillé de Bataille et elle est formée
par des calcaires dévoniens qui semblent s'enfoncer sous le Car-
bonifère et sous Técaille de la Serre. Mais cette série dévonienne
va rejoindre celle de la rive droite vers le milieu du ravin et il
est facile de se rendre compte que la Combe Izarne correspond à une
ligne de rupture, avec affaissement de la lèvre septentrionale, d'une
seule écaille primitive qui comprenait les assises de la Serre et
de Bataille ; cette écaille unique est reconstituée au fond de la
combe Izarne et, en la suivant sur le flanc méridional de la
colline de la Serre, on retrouve, sur les marbres griottes et sur
les calcaires gris du niveau à Cypridines, les lydiennes et les
adinoles de la base du Carbonifère, que surmontent les schistes
tournaisiens puis les calcaires viséens.
Une faille qui passe par le fond de la combe Izarne met en
contact avec le Carbonifère de la partie supérieure du massif de la
Serre, les schistes ordoviciens, les schistes et les calcaires gothlan-
diens, enfin les grès et les calcaires dévoniens du plateau du Fal.
gairas. Celui-ci dépend de l'écaillé de Vailhan-Cabrières, dont la
partie orientale faillée, disloquée et érodée constitue les écailles
de Bataille et de la Serre, ainsi que les massifs de Tourière Japhet
et l'écaillé de Ba liera des que la Société vient de reconnaître.
Du sommet de la colline de la Serre la Société peut se rendre
compte de l'allure des couches tertiaires qui forment une vaste
plaine s'appuyant au nord contre les écailles qui bordent le massif
paléozoïque.
765
COMPTE-RENDU DE L'EXCURSION DU 14 SEPTEMBRE
par M. J. BERGERON.
La Société se rend en voitures par la route de Clermont à
Bédarieux, jusqu'au niveau du Mas du Cantonnier, au nord du Pic
de Bissous. Elle traverse ainsi, à partir du calvaire de Villeneuvette,
dans le sens de sa longueur, le flanc méridional de l'anticlinal qui
forme le Pic de Bissous. A plusieurs reprises, la route coupe les
calcaires à Spirifer cultrijugatus ; quant aux assises supérieures,
elles se trouvent plus au sud, bordant la plaine de Cadenas, tantôt
redressées jusqu'à la verticale, tantôt déversées vers le sud.
Le dévonien ainsi traversé s'appuie au nord sur les schistes
ordoviciens (niveaux de Trémadoc et de l'Arenig). Le Gothlandien
existerait peut-être à l'état de lambeaux de faible importance.
L'ascension du flanc septentrional du Pic de Bissous commence
dans les dolomies du Dévonien inférieur. Puis apparaissent les
calcaires blancs cristallins du Givétien, que surmontent des cal-
caires noirs à Gephyroceras intumescens. Il y a un pli synclinal au-delà
duquel réapparaît le calcaire cristallin blanc du Givétien, sur lequel
la Société continuera à monter jusqu'au sommet du Pic. La strati-
fication de ces calcaires est très difficile à voir, à cause de leur état
cristallin ; de plus ils se fissurent parallèlement à la direction géné-
rale des plis, ce qui leur donne une fausse stratification.
Du sommet du Pic de Bissous la Société a sous les yeux l'extré-
mité orientale de la Montagne Noire. Vers le nord ce sont, au
dernier plan, les causses jurassiques qui s'étendent jusque dans
l'Aveyron. Plus près ce sont les dépôts jurassiques de Mourèze. Us
sont séparés des premiers par une large dépression, que l'on pour-
rait appeler dépression du Salagou et qui s'étend des environs de
Lodève au nord jusqu'à Salase et Liausson au sud. Elle a été creu-
sée dans les marnes rouges du Saxonien supérieur et peut-être du
Zechstein. Mais les terrains jurassiques se reliaient les uns aux
autres. Il semble d'ailleurs que la dépression en question corres-
ponde à une région particulièrement riche en venues basaltiques ;
elle aurait subi de nombreuses dislocations ayant facilité les
érosions et c'est après que celles-ci auraient fait disparaître eo
*3 Aoûl 1901. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. - 49
i766 J. BERGERON
partie les couches jurassiques que les coulées basaltiques se
seraient répandues sur les marnes permiennes.
Vers le nord-ouest, au-delà de la région jurassique de Bédarieux,
ce sont les plateaux (pénéplaines) gneissiques du Saumail et du
Caroux qu'entourent les schistes métamorphiques. C'est par suite
d'un effondrement que les dépôts jurassiques se trouvent dans cette
région, au niveau des schistes paléozoïques. La faille qui limite
vers le sud la région effondrée passe par le pied du Tantajo, au
sud de Bédarieux, et au nord de Cabrières. Elle parait avoir inté-
ressé un anticlinal paléozoïque. Les assises siluriennes qui occu-
pent l'axe de ce pli sont très plissées et elles offrent de nom-
breux exemples d'étirement et de disparition d'horizons. Les assises
supérieures de TOrdovicien et le Gothlandieu n'y sont pas repré-
sentés ; on n'y connaît que les schistes de Trémadoc, les schistes
de l'Arenig inférieur et moyen et les grès de TArenig supérieur
qui constituent le massif de Boutoury. Ils plongent sous les dolo-
mies du Dévonien inférieur, qui, en se prolongeant vers le sud,
forment la base du Pic de Bissous. Celui-ci correspond au flanc
méridional d'un anticlinal renversé, ainsi qu'il résulte des super-
positions que la société est à même de constater en descendant
à Cabrières (Voir PI. XIX) : le Givétien, avec des accidents fer-
rugineux qui rappellent ceux du Hartz, repose sur des calcaires
rouges à Gephyroceras intumescens qui recouvrent ceux à Chiloceras
curvispina. La série continue ainsi dans l'ordre inverse de la
superposition normale : les griottes à Clyménies, les calcaires et
schistes du niveau à Cypridines, les lydiennes et adinoles, les
calcaires dits calcaires à colonnes et les schistes tournaisiens. Vers
l'est la série se prolonge assez identique à elle-même, jusqu'à
Villeneuvette, mais les couches y sont moins déversées vers le
sud qu'elles ne le sont au Pic. Vers l'ouest, au Pic de Bissounel,
les calcaires givétiens sont très développés ; le Dévonien supérieur
disparaît graduellement vers l'ouest sous le Givétien renversé.
Les lydiennes et les calcaires tournaisiens disparaissent encore
plus tôt vers l'ouest. Toute la succession des assises dévoniennes
repose alors sur les schistes tournaisiens.
Plus vers l'ouest, au delà de la vallée de la Boyne, c'est la même
série qui reprend, mais il y a eu encore des étirements et même
des. disparitions d'horizons.
Au sud du Pic s'étend la plaine carbonifère de Cadenas qui est
recouverte vers le sud par la nappe de charriage dont les ondula-
tiqua semblent former autant de vagues qui viennent s'arrêter ai|
EXCURSION DU 14 SEPTEMBRE 7ti?
pied du Caraguas et du Pic de Bissous. Ainsi que je l'ai dit plus
haut (p. 671), ces vagues correspondent en réalité à des plis dans
les assises carbonifères du substratum, plis qui ont amené des
étirements dans les couches de la nappe qui les recouvre.
Du haut du Pic on se rend compte de la grande étendue de cette
nappe et des érosions par suite desquelles elle est actuellement
morcelée en écailles. On a la confirmation des relations énumérées
plus haut entre toutes les écailles.
En descendant vers Cabrières, la Société recueille sur la face
méridionale du Pic, des fossiles givétiens et au col de l'Ane, des
débris de Glyphioceras el d'Orthocères dans les nodules des lydiennes
carbonifères. Elle traverse, suivant leur épaisseur, tous les étages
précédemment signalés.
Les schistes tournaisiens s'étendent en pente douce pour former
la plaine de Cadenas et leur allure contraste avec celle des niveaux
précédents qui forment un abrupt vers le sud.
Au milieu des schistes tournaisiens se trouvent des lambeaux de
grès avec débris de végétaux et blocs de calcaire à Productus gigan-
teus. (Voir PI. XIX). Tous ces lambeaux correspondent au fond
d'unsynclinal pris dans les plis des schistes carbonifères ; ils ont
participé au renversement du Pic vers le sud; ce sont des restes
d'une bande plus développée autrefois et que les érosions ont fait
disparaître presque en totalité.
Plus bas, toujours sur la face méridionale du Pic, il y a également,
des lambeaux de schistes ordoviciens pris dans les schistes carbo-
nifères. Ils appartiennent à la base de l'écaillé de Ballerades, base
dont la Société a déjà vu un lambeau la veille sur la plaine de
Cadenas. Ces lambeaux de la face méridionale du Pic, sont à une
altitude supérieure à celle de la base de l'écaillé de Ballerades ; ils
ont été renversés avec les schistes carbonifères qui les entourent.
Ce fait montre la postériorité du renversement vers le sud, des
couches du Pic, au charriage de la nappe de recouvrement. J'ai
déjà dit que je supposais que le renversement datait de la fin de
l'Eocène.
Par suite de la présence de schistes carbonifères autour de
lambeaux ordoviciens de la plaine de Cadenas, plusieurs membres
de la Société avaient pensé que ces derniers étaient en place et
qu'il y avait superposition normale, c'est-à-dire que le Silurien
pointait à travers le Carbonifère. Mais la continuité de ces schistes ;
ordoviciens avec ceux de récaille de Ballerades ne laisse aucun
doute sur le recouvrement du Carbonifère.
768 j. bergeron
Le lambeau ordovicien le plus important de la plaine de Cadenas
est traversé par un filon d'une porphyrite très altérée comparable
à celles de Gabian. C'est un fait qui vient confirmer la postériorité
des éruptions de porphyrite aux phénomènes de recouvrement.
Après le déjeuner, qui a encore lieu dans le jardin mis si aima-
blement à la disposition de la Société par M. Rigaud, la Société
gravit la colline de Mounio-Cabrières (1). Elle franchit la bande de
calcaire carbonifère, dite écharpe à l'Espagnol, puis les schistes
ordovfciens de la base de l'écaillé qui s'étend de Tourière aux
collines de Japhet. Sur cet Ordovicien, reposent les dolomies dévo-
niennes. Elles sont affectées d'un synclinal dans lequel on ne
reconnaît guère que les calcaires noirs de la base du Dévonien
supérieur. Au sommet de la colline de Mounio-Cabrières apparais-
sent des schistes ordoviciens. Us correspondent à l'axe d'un anti-
clinal qui intéresse l'écaillé étudiée et l'a soulevée ; c'est par suite
d'érosions dans le Dévonien que la base de celle-ci apparaît au
jour (V. p. 673).
Dans les calcaires dolomitiques dévoniens de la face nord de la
colline de Mounio, il y a un filon de basalte qui «n traversant ces
calcaires, sans doute imprégnés d'eau, a affecté une structure
spéciale : ce ne sont plus des cheminées de roche compacte comme
dans les calcaires jurassiques, mais elle est fragmentaire, réduite
pour ainsi dire en grenailles. Au point de vue pétrographiquece
basalte a les caractères suivants : le fond de la roche est formé par
un verre brun avec nombreux cristaux de magnétite. Sur ce fond
se détachent des cristaux de pyroxène allongés et inaclés. Le
péridot a des contours assez nets et il ne forme pas de grands
cristaux. La roche appartient au type des basaltes labradoriques
déjà vus par la Société ; mais, par suite d'un refroidissement
rapide, les microlites de feldspath n'ont pu cristalliser.
Pour compléter l'étudedes plis qui affectent l'écaillé deCabrières,
la Société se rend à la colline de Japhet 1 (Voir PI. XX). Mais,
chemin faisant, plusieurs membres de la Société ayant remarqué
que les schistes ordoviciens formaient une bande de chaque côté de
la bande de calcaire carbonifère dite écharpe à l'Espagnol, émirent
l'hypothèse que la bande ordovicienne du nord avec le calcaire à
Productus, formait une écaille, tandis que la bande méridionale
avec le Dévonien qui la surmonte en formait une seconde. Mais ce
calcaire carbonifère n'apparaît que par suite d'érosion dans une
(4) Pour ce qui va suivre se reporter à ce qui a été dit plus haut de la barre
calcaire de Tourière-Japtaet (Voir p. 671 et suivantes).
EXCURSION DU 14 SEPTEMBRE 769
bande ordovicienne unique. Si le calcaire à Productus fait saillie,
c'est qu'il a été refoulé à travers l'écaillé et qu'il y a formé ainsi
une saillie toute préparée à subir l'action des érosions. Il est
impossible, d'autre part, d'admettre une écaille qui serait seule
à ne pas renfermer de Dévonien, alors que c'est l'élément essen-
tiel de toutes les autres.
La colline de Japhet I (v. p. 674), suite vers l'est du massif de
Mounio, présente à sa face nord un synclinal qui n'est autre que
le prolongement de celui vu à Mounio. Mais dans ce synclinal de
Japhet, plusieurs termes manquent par suite de laminage. De plus,
il y a renversement des couches vers le nord. Il en résulte que sur
les schistes ordoviciens de la base de l'écaillé, reposent directe-
ment des calcaires noirs qui renferment des Chiloceras curvispina
puis des Geph. intumescens. Le reste du Dévonien est complet. Les
couches se relèvent peu à peu et les calcaires cristallins blancs
sont redressés à la verticale ; les autres assises plongent vers le nord.
La Société a pu se rendre compte dans cette dernière excursion
des difficultés d'interprétation que présente l'étude des plis dans
les écailles.
M. Miquel, dont l'opinion diffère de celle de M. Bergeron sur
divers points, présente sa manière d'interpréter quelques-unes des
coupes que nous avons pu étudier.
La Société géologique a vu, dans sa course du 9 Septembre, à
travers la vallée de l'Orb, la coupe de l'Escougoussou et du Foulon.
Cette coupe montre, en série redressée, avec des pendaisons sud,
régulières pour tous les étages :
1° Le grès armoricain à Lingula Lesueuri.
2° Des schistes à Orlhis et Calymmene, dit Schistes de Boutoury.
3° Un banc compact très quartzeux.
4° La série des dolomies et des calcaires dévoniens.
Depuis quelques années cette coupe m'avait vivement frappée,
et j'en ai publié, dans le Bulletin de la Société d'Étude des Sciences
naturelles de Béziers, une interprétation nouvelle, modifiant les
idées admises jusqu'ici pour la constitution de la série silurienne
de la Montagne Noire.
Le banc quartzeux avait été considéré comme un filon de quartz;
les schistes de Boutoury avaient été donnés par tous les auteurs
comme représentant, avec l'Arenig inférieur ou le Trémadoc, la
base de la géologie de Cabrières, au-dessous du grès armoricain.
J'ai publié, il y a deux ans, 1° que le banc quartzeux est un banc
770 M1QUBL ET J. BERGERON. — OBSERVATIONS
degrés sédimentaire très silicifié; 2° que les schistes de Boutoury
sont supérieurs au grès armoricain, qu'ils sont ordoviciens et peu-
vent être considérés comme un horizon voisin des schistes à
Calymmene de Bretagne.
La Société a admis mon interprétation pour le banc quartzeux ;
mais on a pensé que les schistes de Boutoury devaient être main-
tenus dans l'échelle géologique au-dessous du grès armoricain.
Malgré ma profonde déférence pour mes maîtres de la Société
géologique, il m'est impossible d'admettre cette manière de voir,
qui me paraît être en contradiction avec les données formelles de
la pétrographie, de la stratigraphie et surtout de la paléontologie.
Les schistes de Boutoury ont des caractères lithologiques très
particuliers, qu'il est impossible de confondre avec ceux des
assises de l'Arenig inférieur ou Trémadoc de Saint-Pons, de Cassa-
gnôles ou de Saint-Chinian.
La stratigraphie les montre partout soit dans la série normale
du Foulon, soit dans la série renversée de Boutoury comme supé-
rieurs au grès armoricain.
La faune est encore plus probante, elle diffère absolument de
celle de Trémadoc et ses Calymmènes ont des affinités incontestables
avec celles des schistes à Calymmene de Bretagne.
Je maintiens mon interprétation et j'essayerai de la faire préva-
loir dans une petite note que j'enverrai à la Société à ce sujet.
M. J. Bergeron ne peut admettre les successions signalées par
M. Miquel. Les superpositions observées au Foulon, bien que
paraissant normales, ne le sont pas; il y a en ce point un accident
signalé précédemment. Au contraire, à Boutoury, les superposi-
tions sont normales et il ne faut pas, parce que le Pic de Cabrières
est situé dans le voisinage et présente un renversement, admettre
que toute la région soit bouleversée. L'allure normale du synclinal
traversé par la Société, en montant sur la face nord du pic, synclinal
qui passe entre Boutoury et le pic, prouve que le renversement
des couches est limité à une région étroite. Pour établir l'ordre de
succession stratigraphique des couches, il faut avant tout tenir
compte des faunes; elles sont assez bien connues maintenant pour
ne plus permettre d'erreur.
SUR LA TECTONIQUE DES TERRAINS SECONDAIRES
DANS LA RÉGION DE CLERMONT-L'HÉRAULT
par M. René NICKLÏiS
Pour bien se rendre compte de la structure du lambeau secon-
daire visité sommairement par la Société au retour de Cabrières,
dans l'a près midi du 14 septembre, il est nécessaire de se reporter
aux indications générales qui ont été données, sur l'allure du lam-
beau de Bédarieux affaissé par rapport au horst saillant encore
actuellement et comprenant le Piocb, le Saint-Amand et l'Escan-
dorgue.
^
HLM
Flg. tl. — Vue de la région comprise entre Salase et Mourexe.
*t, Bajocien ; /*, Toarclen ; M-l, Keuper; t,-m. Grès trlasiqne ; r„ Permleo.
On a vu que vers l'est, le lambeau secondaire de Bédarieux à
allure presque horizontale se ridait en devenant plus étroit et que
ce rideinent devenait des plus nets vers le Mas du Rouet et Salase.
Des hauteurs dominant Salase à l'ouest on a certainement un des
plus admirables poiuts de vue géologiques qu'on puisse trouver.
Faute de temps il n'a pas été possible a la Société de s'y rendre.
772 R. NICKLÈS. — SUR LA TECTONIQUE DES TERRAINS SECONDAIRES
De ce point on a, d'un coup d'œil la clef du lambeau affaissé et ridé
de Mourèze. La fi g. 11 calquée sur une photographie permet
de s'en rendre compte.
Au sud, un synclinal assez large, suivi au nord de deux anti-
clinaux très brusques et très rapprochés et constitués, ces derniers
par les dolomies du Dogger ; puis immédiatement une faille à rejet
considérable les séparant du Permien et des conglomérats inférieurs
du Trias contre lesquels ils viennent buter. La partie située au
nord est le reste du horst qui domine Salasc et qui se raccordait
avec le mont Saint-Amand et l'Escandorgue.
En se rapprochant de Mourèze, cette grande faille qui n'est autre
que celle qui limite au nord le faisceau de Bédarieux, dégénère peu
à peu en flexure monoclinale à pendage sud, et laisse alors appa-
raître successivement les étages compris entre l'Infralias et le
Bajocien que la faille avait soustraits à la surface ; elle dévie à ce
moment vers le nord-est, va passer au col de Liausson (sentier de
Liausson à Mourèze) puis redevient faille, faisant disparaître suc-
cessivement les étages qui s'étaient montrés momentanément, au
point de faire buter l'Infralias contre le Permien à Liausson, où la
faille a complètement repris depuis le col sa direction ouest-est, en
suivant le pied septentrional de la montagne de Saint-Jean d'Au-
reilhan.
Avant Creissels cette faille se dirige de nouveau au nord-est, sépa-
rant la partie affaissée (Bajocien et Toarcien) de l'Infralias et du
Trias qui, bien que les surplombant, n'ont plus l'altitude qu'ils
avaient précédemment, et paraissent, par suite, former un palier
intermédiaire entra le horst et le lambeau affaissé.
Vers le hameau des Bories la faille semble se perdre dans les
dolomies ; mais à très peu de distance latéralement une nouvelle
faille parait, se relevant au N.-N.-E. et jouant le même rôle que la
précédente, séparant le Secondaire du Primaire.
Cette faille se poursuit jusqu'à la gare de Rabieux où elle dispa-
raît sous l'Infralias en flexure de Saint-Guiraud et de Saint-Satur-
nin, puis reparaît près d 'Arboras pour se prolonger sur la feuille
de Saint-Affrique et du Vigan, séparant les hauteurs de Sainte-
Baudille et de la Séranne de la région affaissée du sud-est.
Cette faille, tantôt faille, tantôt flexure monoclinale, a donc une
grande importance : elle est certainement un accident de premier
ordre dans la tectonique de la région.
DANS LA RÉGION DE CLfcRMONT L'HÉRAULT 773
Limite méridionale du lambeau
Nous avons vu, d'autre part, que le lambeau affaissé de Bédarieux
était limité au sud par une grande faille qui, partant de la
Vernière, s'infléchit de l'ouest à Test au pied du Tantajo, pour
disparaître sous les basaltes et les graviers pliocènes dans la région
de la Braunhe.
De ce point jusqu'au sud de Salasc où réapparaît la faille, la
direction n'est pas sensiblement modifiée : on la revoit après le
Mas du Rouet, à l'avant-dernier lacet de la route montant de
Clermont l'Hérault jusqu'au sud de Mourèze; sa direction rectiligne
n'y est pas sensiblement modifiée: l'observation des couches permet
d'ajouter qu'au synclinal sud du lambeau fortement ridé en ce
point, venait s'adjoindre un anticlinal dont le flanc sud butait
contre la faille : les couches respectées par l'érosion à l'avant-
dernier lacet de la route présentent en effet un plongement au sud
qui deviendra très brusque en se rapprochant de Mourèze et
éliminera à l'est immédiat de Mourèze toute trace de cet anticlinal
qui semble pourtant reparaître plus à Test, au nord de Clermont-
l'Hérault.
Mais, à partir du nord-ouest de Villeneuvette la faille disparaît,
et c'est alors qu'apparaissent les écailles de Notre-Dame du Peyrou,
que je vais chercher à décrire.
Ecailles de Glermont-l'Hérault
1° Lorsqu'on se dirige à quelques centaines de mètres au nord-
ouest de Notre-Dame du Peyrou, près de ClermoDt-l'Hérault, on voit
la masse de dolomies infraliasiques formant le flanc sud de l'anti-
clinal du lambeau ridé dont je viens de parler. Dans le petit vallon
qui le précède, au sud, les marnes bariolées du Keuper reposent
sur l'Infralias : C'est la base d'une première écaille.
En ce point, sans doute par suite de l'élirement, les marnes sont
peu épaisses ; mais leur épaisseur augmente rapidement, ou tout
au moins leur surface, et on peut les retrouver constamment au
pied méridional des escarpements infraliasiques qui séparent le
Peyrou de Creissels. Elles se présentent toujours plus ou moins
inclinées, mais recouvrant toujours l'Infralias depuis les environs
du Peyrou jusqu'au col de la route de Clermont à Lodève, près du
hameau des Bories. Les éboulis de face les masquent souvent ; mais
partout où j'ai pu les voir soit dans des excavations, soit dans les
ravins qui les entament» j'ai toujours constaté cette disposition.
774 R. NICKLÈS. — SUR LA TECTONIQUE DES TERRAINS SECONDAIRES
Elles sont surmontées par une masse réduite d'épaisseur consti-
tuée par de l'Infralias et du Charmouthien et en certains points du
Toarcien : c'est la partie supérieure de cette première écaille.
La masse rocheuse à laquelle la chapelle du Peyrou est adossée
est formée d'Iofralias, peut-être de Charmouthien plongeant faible-
ment vers le sud-est ; plus loin,
au centre de la plaine, l'Infralias
supporte le Charmouthien fossi-
lifère très réduit mais nettement
reconnaissable par la présence
de Harpoceras niteseen*, Penta-
crinus et des nombreuses Bélem-
nites fréquentes dans cet étage.
Au-dessus, à quelque distance,
un lambeau de Toarcien à Cœlo-
ceras crassum.
2° La chapelle du Peyrou est
donc construite sur l'Infralias,
sur le bord septentrional de la
route de Villeneuvette ; or, sur
le bord méridional de la même
route, — presque au même point,
— on retrouve le Keuper à quel-
ques mètres supportant de nou-
veau un lambeau important
d'Infralias et de Charmouthien
x„ ^
Fig. 12. — Cartedes écailles de Clermont-
l'Hérault. - Echelle 1/65 .000* environ
I, Première écaille; II, Deuxième écaille;
III, Troisième écaille; K, Keuper; i,
Iofralias; c/i, Cha r mou tien ; to, Toar-
cien .
surmontés par le Toarcien. C'est
la deuxième écaille. A proximité de la chapelle l'Infralias et le Char-
mouthien sont redressés assez fortement; mais plus loin ils devien-
nent momentanément presque horizontaux et les tranches de cette
deuxième écaille, tra-
versant le sentier qui
ramène à Clermont,
semblent s'enfoncer
dans le Keuper sous
la masse infraliasi-
que de la troisième
écaille.
11 semble que l'on
doive rattacher à
cette deuxième écaille, les lambeaux de Keuper qui, au milieu de
Fig. 13. — Coupe des écailles de Clermont l'Hérault
sur la route de Lodève. — Echelle 1/10.000*
Même légende que pour la flg. 12.
DANS LA RÉGION DE CLERMONT-l'HÉRAULT 775
la plaine, à l'ouest de Clermont, recouvrent successivement Infra-
lias, Charmoutbien et Toarcien (ce dernier visible, notamment au
bord de la route de Clermont à Lodève, au point où j'ai recueilli
Cœloceras crassum. En ce point, la coupe est la suivante: La
deuxième écaille très réduite repose sur le Toarcien, et n'est consti-
tuée en ce point que par le Keuper et l'Infralias qui porte les traces
d'un laminage intense, et supporte le Keuper et l'Infralias de la
troisième écaille.
Les roches calcaires et dolomitiques des deux premières écailles
sont très fortement impressionnées, fissurées et recimentées en
tous sens : celles de la troisième écaille paraissent au contraire
avoir été moins éprouvées.
3° Au-dessus de ce deuxième lambeau de recouvrement se dresse
la masse des hauteurs infraliasiques qui séparent la chapelle du
Peyrou de Nébian : c'est la troisième et dernière écaille que je dési-
gnerai sous le nom d'écaillé de Nébian. Elle surmonte bien la pré-
cédente, parce qu'on voit le Toarcien de cette dernière s'enfoncer
sous le Keuper et l'Infralias situé au sud ; parce que l'Infralias du
deuxième lambeau vient en tranches relevées au travers du sentier
se noyer dans le Keuper sous l'Infralias, au nord ; parce qu'enfin
sur la route de Lodève, dans le prolongement de la deuxième
écaille, on voit nettement le deuxième lambeau disparaître sous le
troisième, ainsi que l'indique la figure 13.
Cette troisième écaille, la plus étendue, mérite d'être étudiée de
près, dans son étendue et dans son allure.
SI IB lLD.du P*jr«n NO.
Fig. 14. — Ecailles de Clermont-l'Hérault entre Nébian et Notre-Dame du Peyrou.
- Echelle 1/35.000»
Même légende que pour la flg. 12.
Ecaille de Nébian. — On a vu vers le nord-ouest, la masse du
Keuper et de l'Infralias constituant la troisième écaille reposer en,
série normale sur la deuxième. Lorsqu'on franchit l'abrupt qu'elle
présente au-dessus de la chapelle du Peyrou, on chemine pendant
quelque temps sur l'Infralias en couches à peu près horizontales ;.
776 R. NICKLÈS. — SUR LA TECTONIQUE DES TERRAINS SECONDAIRES
puis en redescendant vers Nébian, on ne tarde pas à rencontrer au-
dessous un affleurement à peu près périphérique de Keuper. Cet affleu-
rement, d'épaisseur variable, supporte l'Infralias et repose lui-
même sur un lambeau d'Infralias qui forme la partie supérieure de
la deuxième écaille.
Du point où cet affleurement domine Nébian jusqu'au col du
sentier de Nébian à Villeneuvette, on peut la suivre très facilement :
la nature plus meuble du sol y est utilisée pour la culture; mais
dans cette partie le Keuper est bordé par un repli transversal du
lambeau.
Le liseré devient beaucoup plus difficile à suivre entre le point où
il domine Nébian, et la propriété de Fontenilles ; il a été, par l'éti-
rement, considérablement réduit dans son épaisseur. On n'a la
preuve de son existence que dans les cargneules que Ton rencontre
très fréquemment dans cette partie où la culture en terrasses vient
encore masquer les affleurements des coucbes. La teinte rouge de
la' terre dans ces terrasses ne peut être une indication suffisante,
puisqu'on la retrouve dans les éboulis du fond des ravins, sur l'In-
fralias.
A la propriété de Fontenilles, le Keuper prend un développement
considérable, comme si enlevé au sud, il avait été accumulé en ce
point par le charriage, puis le lambeau triasique vient mourir
contre une surface verticale portant les traces d'un frottement
puissant, où les couches infraliasiques sont fortement redressées et
contre laquelle viennent buter, en la contournant, les couches hori-
zontales de même âge avec Cypricardia cf. lœvigata Terq.
C'est, suivant toute probabilité, une saillie de la deuxième écaille
que n'a pu abattre la troisième, venue après ; la troisième écaille l'a
peut-être surmontée et franchie en passant au-dessus des couches
redressées entre lesquelles est actuellement construit Cleraiont-
l'Hérault, pour disparaître plus tard par érosion : ceci n'est qu'une
hypothèse, mais ce qui paraît certain, c'est que la partie affaissée
seule de la troisième écaille a persisté et se voit encore au col
entre Clermont et Fontenilles. Le prolongement au nord de cette
troisième écaille se voit au nord de Clermont dans la figure 13
| route de Clermont à Lodève).
L'étude des surfaces de frottement qu'on observe à la partie
supérieure des écailles semble indiquer, lorsqu'on les compare
entre elles, que le mouvement général de progression des lambeaux
a dû être dirigé du sud au nord, et non comme cela avait été ma
première impression du sud-est au nord-ouest : dès lors il est
DANS LA REGION DE CLBRMONT-l'hÉRAULT 77?
facile de comprendre comment la rencontre de ces lambeaux avec
le faisceau ridé de Mourèze amène une complication extrême dans
l'allure des couches au col des Bories : c'est une conséquence de
l'obliquité des deux directions, Tune par rapport à l'autre, la
rencontre ayant dû se faire sous un angle d'environ 50 degrés.
Au col des Bories, les trois écailles deviennent pour ainsi dire
inextricables par suite de l'extrême réduction des affleurements ;
cependant près de Saint Barthélémy on en retrouve encore des
traces manifestes : l'Infralias et le Charmouthien dolomitiques
plongent vers le sud sous le Keuper recouvert au sud par l'Infralias,
le Charmouthien et le Toarcien (Harpoceras faleiferum, Cœloceras
subai-matum à la chapelle de Saint-Sixte).
C'est vers ce point que la faille nord du lambeau de Mourèze, ou
la bordure du horst qui le domine au nord, prend la direction
N.-N.-O. : l'action des lambeaux de recouvrement, si elle a existé
plus au nord, a donc été encore plus oblique: fait de nature à
expliquer certains* contacts anormaux de la région de Rabieux et
la faille inverse du Roc des Vierges.
A ces indications sur la tectonique de la région de Clermont-
l'Hérault il convient peut-être d'ajouter quelques remarques strati-
graphiques : la série secondaire est facile à discerner dans ses
diverses assises qui présentent le même aspect que dans les régions
précédemment décrites.
Toutefois le Charmouthien parait avoir un développement plus
considérable, dû à la présence de calcaires marneux exploités à
Clermont-l'Hérault pour la fabrication de la chaux hydraulique :
ces calcaires, d'après des échantillons recueillis par M. Cance,
directeur de cette mine, présentent parfois des Pectense rapportant
à Pecten cf. Hehlii d'Orb. Ce faciès remarquablement développé à
Clermont-l'Hérault est relativement rare dans les régions étudiées
par la Société : les couches à //. nitescens se retrouvent au contraire
en divers endroits (Bédarieux, etc.) à ce niveau on pourrait ratta-
cher les couches à Gryphea de Mourèze.
Quant au Toarcien il se présente constamment avec l'aspect de
marnes bleuâtres avec Ammonites pyriteuses.
Le Bajocien est presque toujours dolomitique.
978 AJLMERA. — OBSERVATIONS
M. Aimera fait remarquer l'analogie de constitution surtout
d'après la coupe donnée, par M. Depéret, de Saint Siméon au vallon
du Riège, du Miocène de cette région de l'Hérault et de celui du
Panades dans son bord nord-ouest. Là, la constitution est la sui-
vante :
1. Calcaire à Echinides (Echinolampas hemisphericus Agassiz)
surmonté par des marnes bleues plus ou moins sableuses et mica-
cées devenant jaunes par altération avec Pereirœa Gervaisi Véz.,
Pleurotoma asperulata Lk., Pecten Fuchsi Font., P. subpleuronectes
d'Orb., Lucina catalaunica A. et B.yTrocltocyatu$ lalerocristatus E. A.,
etc.
2. Mollasse gréso- calcaire passant à la lumachelle, parfois à un
calcaire cristallin très dur. Il est rempli de débris de fossiles
fragmentés, de Lithothamnium, de Polypiers (Heliastrœa Defrancei
E. H., H. Ellisiana Defrance) : elle constitue de véritables récifs
frangeants de la mer miocène. C'est le niveau qui renferme Venus
Aglaurœ en grande quantité.
3. Calcaire lacustre à Hélix. Au-dessus vient une intercalation de
calcaire lacustre qui implique la retirée momentanée de la mer. Ce
calcaire est bleu, marneux, sableux et il contient à la base, Cerithium
bidentatum Grat. et plus haut Melania cf. Toumoueri, Micromelania?
sp., Melanopsis sp., Valvata sp., Planorbis sp., Hélix Gualinoi Mich.,
Hélix sp., Cyclostoma du type de Tudora, etc.
4. Dépôt mollassique caillouteux qui correspond à la mollasse
à dragées. Il est caractérisé par l'abondance de graviers de quartz
blanc. Il contient un banc assez épais de Ostrea crassissima, 0. gin-
genstSy 0. digitalina, Cardium (diverses espèces), Turritella, etc., qui
indique nettement la régression de la mer dans le Panades.
5. Dépôt de graviers qui, à Torrellas de Foix, prend un dévelop-
pement extraordinaire. Il est constitué par des argiles sableuses et
des graviers rougeâtres formant des couches plongeant vers le nord-
ouest et butant contre le Trias; dans un niveau supérieur ils passent
à un conglomérat. Ce dépôt qui présente près de 80 mètres de puis-
sance paraît représenter le Pliocène lacustre (Plaisancien, A s tien)
du pays ; d'ailleurs le Pliocène marin est bien caractérisé dans la
vallée du Llobregat, comme l'a pu remarquer la Société dans sa
réunion extraordinaire de Barcelone Tannée dernière.
779
NOTE SUR LES TERRAINS PALÉOZOÏQUES D'ESPAGNE
par M. A. DERE1MS
M. Bergeron nous a montré que le Cambrien et le Silurien étaient
très développés sur le versant méridional de la Montagne Noire. Les
mers cambrienne et silurienne s'étendaient plus ou moins large-
ment vers le sud, recouvrant une partie de laMeseta espagnole où
elles ont laissé des sédiments très puissants; ces assises sont
caractérisées par une faune présentant avec celle de la Montagne Noire
les plus grandes analogies.
Dans la chaîne ibérique, un peu au nord de Daroca, à Murero et
à Romanos, le Cambrien et le Silurien sont faciles à étudier et assez
riches en fossiles; ils forment un anticlinal dont Taxe est occupé
par les schistes et les quarlzitesde l'Acadien ; le Géorgien n'affleure
nulle part dans la région. La faune acadiennne est caractérisée par
les Paradoxides rugulosus de grande taille et les Conocoryphe Heberti
et Conoc. coronata; d'après M. Bergeron, qui m'a aidé de ses conseils
et qui a vérifié mes déterminations, cette faune est identique à celle
delà Montagne Noire.
Sur l'Acadien reposent en concordance des schistes potsdamiens
non fossilifères, surmontés par une série silurienne présentant les
subdivisions suivantes :
1° Schistes arec nodules (non fossilifères).
2° Grès armoricains à Lingules.
3° Schistes à Calymmene Tris t an t.
4* Quartzites et schistes à Orthis Actonite.
5* Calcaire à Cystydés et schistes à Orthis.
6° Schistes ardoisiers avec quelques rares Âcidaspis Buchi.
7° Quartzites très puissants, riches en BUobites.
Gothlandibn { 8° Schistes avec calcaires à Cardin la in 1er ru/ Un et Orlko-
ceras.
Dans la chaîne hispanique, sur le bord oriental de la Meseta, les
schistes gothlandiens sont très développés et riches eu Graptolites
(Moriograptus priodon, Mon. Becheria).
Cette série présentedonc, comme M. Bergeron me Ta faitobserver
en 1893, les plus grandes analogies avec celle de la Montagne
Noire : les mêmes mers s'étendaient certainement sur les deux
régions.
Sur le flanc oriental de 1 anticlinal de Murero et de Romanos-
Ordovicien
780 R. N1GKLÈS. - EXCURSION AU ROC DBS VIERGES
repose le Dévonien inférieur très fossilifère, facile à étudier aux
environs de Nogueras. Le Dévonien, en concordance sur le
Gothlandien, est formé par des quartzites, des schistes et des
calcaires riches en Trilobites et en Brachiopodes caractéristiques de
la faune de Néhou. De Verneuil a, le premier, signalé l'existence
de cette faune et a montré les analogies qu'elle présentait avec celle
du Dévonien inférieur de l'Ouest de la France; les nombreux
fossiles que j'ai recueillis confirment les idées émises par de Ver-
neuil, et d'après notre savant confrère M. D.-P. GEhlert il y a identité
de faune entre ces deux régions si éloignées : ce sont les mêmes
espèces, la même association d'espèces, le même faciès minéralo-
gique. A l'époque du Dévonien inférieur, c'était donc la même
mer qui recouvrait l'Ouest de la France et l'Est de la Meseta.
Les dépôts primaires plus récents n'affleurent pas dans le sud de
l'Aragon; le Trias, et parfois les assises miocènes, reposent en
discordance sur le Silurien et le Dévonien inférieur.
Séance du I g» Septembre 1899
PRÉSIDENCE DE M. J. BERGERON , PRÉSIDENT
La Société a tenu sa réunion de clôture à Saint-Jean de la Bla-
quière. A une heure le président déclare la séance ouverte et donne
la parole à M. Nicklès.
EXCURSION AU ROC DES VIERGES
par M. René NICKLÈS
Le Roc des Vierges, qui s'élève entre Saint-Jean de la Blaquière
et Saint-Saturnin et que Ton aperçoit de toute la région environ-
nante, est particulièrement intéressant par sa situation géologique :
à l'extrême sud du plateau du* Larzac dont il semble encore faire
partie, et à proximité du prolongement de la région affaissée qui
vient d'être étudiée depuis Bédarieux.
Lorsqu'on en fait l'ascension depuis Saint-Saturnin on traverse
d'abord les dolomies et calcaires dolomitiques roses attribués au
Bajocien-Bathonien présentant un plongement très rapide vers
EXCURSION AU HOC DES V1EHGE8
781
l'est. C'est d'ailleurs l'allure que présentent les couches secondaires
qui s'étendent depuis Arboras jusqu'à Rabieux et même au-delà du
Lergue : la disposition est tout-à-fait celle d'une flexure monocli-
nale : le pendage très rapide à l'est où il disparaît sous le Tertiaire,
s'affaiblit peu à peu et les strates ne tardent pas, en se rapprochant
de l'ouest, à devenir horizontales.
Le Roc des Vierges situé à l'extrême sud du Larzac en fait partie,
mais légèrement affaissé par rapport à lui, constitue une sorte de
palier limité au col qui le sépare du Puech-Bouisson dont les
dolomies infraliasiques sont à la même altitude que son Bajo-
cien : sa base constituée par le Permien (ruffe) supporte le Trias
et le Jurassique inférieur et moyen, depuis les grès trîasiques
jusqu'aux roches dolomitiques du Bajocien dont les aspects ruioi-
formes lui ont valu sa réputation.
Ce n'était donc pas la constitution géologique du Roc des Vierges
qui attirail la Société géologique, mais surtout par suite de sa
situation à l'extrême sud du Larzac, l'étude du contact du pla-
teau et de la zone plissée du sud et du sud -est.
Pour se rendre compte de la structure géologique des environs
du Roc des Vierges, il est préférable de partir de la gare de Rabieux
et de se diriger vers cette montagne, en examinant la structure de
l'arête qui sépare la vallée de l'Aguarel de la plaine de Saint-Satur-
nin. Pour des raisons pratiques il n'a pas été possible de faire
suivre à la Société cet itinéraire trop long et trop fatigant : c'est
cependant celui que je vais adopter ici (lig. 1$).
Flg. i.'i. — Coupe près de la gare de Rabieux. — Echelle 1/15.000'
r„ Permien; T, Grès Musique»; K, Keuper; i, Infrallaa.
Lorsqu'on étudie la pointe méridionale de l'arête de Rabieux, au
défilé du Lergue, on voit qu'elle est constituée par une flexure
monoclinale des calcaires de l'Infralias. Un peu au nord, sur la
rive droite du Lergue. l'Infralias et le Trias très réduit butent par
faille presque verticale contre le Permien : c'est la continuation de
30 Aont 1901 - T. XXVII. Bull. Soc. (Mol. Kr. - 50
782
R. N1CKLÈS
la grande faille de La Tour (nord de Bédarieux) : comme précédem-
ment le Secondaire au sud-est est affaissé par rapport au Primaire
au nord-ouest.
Du peu plus au nord, à 300 mètres environ de la gare de Rabieux,
la faille se rapproche de l'arête : les grès triasiques retournés pres-
que à la verticale viennent buter contre les marnes keupérieunes
horizontales et ne tardent pas à être recouvertes par elles, surmon-
tées par l'Infralias également horizontal: on est en présence d'un
lambeau de recouvrement qui non seulement dépasse les grès tria-
siques sur les tranches desquelles il repose, mais franchit la faille
et va reposer horizontalement sur le Permien ayant toujours la
même composition, c'est-à-dire le Keuper à la base, l'Infralias au-
dessus, et plus loin vers le Haut Mont le Charmouthien au sommet.
Il y a toutefois cette légère différence, que le Keuper n'est plus aussi
puissant que précédemment mais d'épaisseur très variable, très
aminci, réduit presque à rien par places, plus épais en d'autres points,
bien que les éboulis empêchent souvent d'apprécier cette épaisseur*
Ce contact anormal a été indiqué sur sa carte par M. de Rouville,
abstraction faite du Keuper qui n'est par représenté, fait d'ailleurs
parfaitementcom-
préhensible, puis-
que la représen-
tation graphique
exacte du Keuper
sur la carte d'Etat-
Major se réduit
tout au plus à
l'épaisseur d'un
trait de crayon
sur une partie des
affleurements.
Cette structure
d'un lambeau de
Keuper et Infra-
lias recouvrant le Permien se poursuit jusqu'au pied du Roc des
Vierges, un peu au sud « des Geyssières ».
Les Geyssières. — Ici la structure se complique : la coupe ci-
dessus donne une idée de ce que l'on voit : sur le Permien rouge lie-
de-vin qui forme le fond de la vallée, reposent presque horizonta-
lement des marnes keupériennes gypsifères qui ont été l'objet
d'exploitation pour la fabrication du plâtre. Mais, au-dessus de ce
• • GcyaaiAra»
n
Fig. 16. — Coupe des Geyssières. — Echelle 1/20.000* env.
Même légende que pour la figure 15.
EXCURStON AU ROC DES VIERGES 783
gisement qui s'étend sur une longueur de près de un kilomètre, on
trouve, non l'Infralias, mais le grès triasique inférieur au Keuper.
Ce grès ne saurait être confondu avec le grès infraliasique : sa cou-
leur rose, son aspect scintillant, les bancs de marne gréseuse lie-de-
vin intercalés lui donnent un aspect identique au grès triasique que
l'on peut observer en place dans les environs : il y a donc renver-
sement (fi g. 16).
Au-dessus de ce grès, en s'avançant vers le nord, on voit une
petite dépression couverte d'éboulis, s'élargissant peu à peu, et
aboutissant bientôt à un affleurement considérable de Keuper (1)
gypsifère recouvert partout par l'Infralias ; en arrivant sur le chemin
du Roc des Vierges, au col qui sépare la vallée de l'Aguarel de la
vallée d'Arboras et en regardant du côté de Rabieux, la convergence
des affleurements vers les Geyssières est frappante ; et la réduction
progressive du Keuper par étirement, vers le sud, explique comment
le Keuper compris entre les grès et l'Infralias passe inaperçu près
des Geyssières, sous les éboulis à flanc de coteau par suite de son
extrême diminution d'épaisseur. Le même fait se produit d'ailleurs
pour les grès triasiques qui s'amincissent vers le sud et disparaissent
vers le Haut Mont, laissant alors llnfralias reposer sur le Keuper et
le Permien comme nous l'avons vu précédemment.
Nous avions vu à Rabieux le Trias gréseux, en tranches presque
verticales, s'enfoncer sous le Keuper et l'Infralias horizontaux ; ici
nous voyons réapparaître sous
le même lambeau de recou-
vrement le même Trias gré-
seux mais renversé. La figure
ci-contre donne l'aspect des ^ N , \ " v \ x ^
affleurements pris depuis la v v » * < v - N ^
pointe méridionale du Roc Flg# 17. __ Aspecl de9 affleurements des
des Vierges (fig. 17). Geyssières. — Echelle 1/40.000- env.
Les grès triasiques domi- ru Permien ;T, Grès triasiques ; K, Keuper;
Al „ ., A ., ., i, Infralias; cA, Charmouthlen.
nant les Geyssières sont d ail-
leurs plus complets que dans le lambeau de Rabieux : leur compo-
sition est de tous points semblable à celle des mêmes couches non
disloquées aux abords de Larzac. On y retrouve les grès scintillants,
les couches argilo-gréseuses lie-de-vin, les grès mouchetés, les cou-
ches argilo-gréseuses bariolées, finement litées et renfermant par
places des empreintes de cubes de sel gemme (2), que Ton retrouve
(1) Ce n'est qu'après la clôture de la Réunion que j'ai pu trouver en ce point
d'anciennes traces d'exploitation de gypse.
(2) Je dois la connaissance de ce fait au coup d'œil exercé de M. Depéret.
!•• 0«j»ii>p—
78î
NICKLÈS
sur le pourtour méridional du Larzac, au même niveau, jusqu'aux
environs du Vigan et de Saint-Afrique (1). Ou est donc bien en pré-
sence du Trias gréseux, inférieur au Keuper, et d'âge encore incer-
tain comme on l'a vu précédemment ; à ces grès viennent s'associer,
vers le milieu, des bancs dolomitiques qui paraissent se rattacher
aux couches analogues de Gabian, classées par M. de Rouville,
daus le Muschelkalk, et en ayant d'ailleurs tout à (ait l'aspect.
Le col des Geyssières. — Au col des Geyssières en suivant le che-
min on passe brus-
quement du Keuper
au Toarcien. En des-
cendant dans la val-
lée d'Arboras on voit
qu'on est en pré-
sence d'une faille in-
verse ainsi disposée.
Le Keuper vient
buter au col contre
leToarcieo ; plus bas,
les dolomies et les
grès de la partie infé-
rieure du Tria? butent contre le Toarcien d'abord, et plus bas contre
le Charmoulhien (fig. 18).
On est en présence d'une faille inverse pouvant expliquer le ren-
versement des Geyssières : en
effet, si le Trias gréseux etdolo-
mitique repose aux Geyssières
sur le Keuper, sa succession
y parait normale et n'est pas
doublée comme dans un pli
couché complet ; il y a donc là
simplement un lambeau sou-
levé et amené par faille inverse
liés oblique à reposer sur le Keuper plus récent que lui.
Celte faille inverse se poursuit jusque vers le fond de la vallée où
elle est masquée par les broussailles et les éboulis.
De l'autre côté de la vallée elle devient plus difficile à voir et
semble se perdre en faisant buter Infralias cou tre Infralias : témoin
un point sur la route d'Arboras à la Vacquerie où l'on peut voir
(I) Constatation fuite, depuis la Réunion.
Flg. 49. — Coupe prise sur la route
«t'Arborai A la Vacquerie. — Echelle
1/aQO' environ.
EXCURSION AU ROC DES VIRRGES 785
(fig. 19), riofralias recouvrir ses propres tranches, toujours dans
le prolongement de la faille inverse. Il se peut aussi que cette
faille inverse soit subdivisée en plusieurs autres de rejet moin-
dre que Ton peut observer vers le fond du ravin d 'Arboras, le
long du chemin du Bas.
Partout, d'ailleurs, les couches à proximité de cette faille sont
froissées à un degré extrême, souvent bréchoïdes, recimentées
par des veines irrégulières de calcite les parcourant en tous
sens. Elles sont devenues dolomitiques souvent dans l'Infralias,
très fréquemment dans le Charmouthien et le Bajocien. Elles
sont souvent méconnaissables et d'autres fois fragmentées en parai -
lélipipèdes dans les plaquettes de l'Infralias.
Conclusions. — Malgré les hésitations que j'ai traversées en cher-
chant une explication rationnelle de ces faits, et malgré la défiance
que je me suis imposée d'expliquer les contacts anormaux par des
lambeaux de recouvrement, je me vois ici encore obligé d'avoir
recours à cette hypothèse. On a vu, à Clermont-l'Hérault, la lame
de charriage se rapprocher peu à peu du lambeau ridé de Mourèze,
le joindre au col des Bories sous un angle de 50°. A partir de ce
point la direction de la faille qui le limite au nord-ouest s'infléchit
vers le nord et prend sensiblement la direction de N. 15° E. C'est
dire que si le mouvement de la lame de charriage a continué à être
orienté sud-nord comme tout semble l'indiquer, l'attaque de la
bordure méridionale du horst par la lame de charriage a dû se
faire sous un angle de 15°, très faible par conséquent : l'obliquité
de l'attaque a permis plus facilement à la la me de charriage d'esca-
lader la bordure du plateau.
A en juger par l'état de dislocation des couches aux environs du
Roc des Vierges et dans la partie comprise entre la faille et le
Puech Bouissou, la lame de charriage a dû déborder sur la région
occupée par la vallée de l'Aguarel en y présentant un état extrême
de dislocation qui a facilité plus tard son déblayage par les agents
atmosphériques.
A partir de la gare de Rabieux jusqu'au pied du Roc des Vierges,
le lambeau de charriage dépasse la faille et va reposer sur le Per-
mien de la partie exhaussée ; le contact anormal est horizontal ;
plus loin, aux Geyssières, la faille reparaît au jour et la lame de
charriage semble persister dans la région nord d 'Arboras, n'empié-
tant plus alors sur la partie surélevée dont eile reste séparée par la
grande faille qui aboutit au pied de la Séranne.
786 R. NICKLÈS
Ainsi donc, depuis la région de Clermont l'Hérault jusqu'aux
environs d'Arboras et peut-être plus loin, on aurait, au pied du
Larzac, limité au sud par la grande faille de Latour, Liausson,
Rabieux et le Roc des Vierges, une lame de charriage, dont le mou-
vement aurait été orienté sud-nord, et qui aurait par places empiété
(de Rabieux au Roc des Vierges) sur la bordure parfois affaissée du
horst comme c'est le cas pour le Roc des Vierges.
Or il est probable que ces accidents se sont encore manifestés
plus loin, au nord-est. A Saint-Jean de Buëges, en effet, M. Fabre a
constaté l'existence des marnes irisées du Trias sur le Toarcien (1).
D'autre part à Brissac, près de Ganges, on peut voir un lambeau de
Tithonique reposant par faille inverse sur les couches de Berrias :
bien que l'inclinaison de la faille soit peu accusée il semble qu'on
soit ici encore comme à Saint-Jean de Buèges en présence du pro-
longement des accidents étudiés à Clermont l'Hérault, au pied du
Roc des Vierges.
En résumé cette bande de dislocations internes qui apparaît de
temps en temps sous le Tertiaire supérieur et le Pleistocène présente
une extension considérable : en examinant sur la carte les lambeaux
disloqués de Saint-Chinian, de Fouzilhon, de Clermont, de Saint-
Saturnin et de Saint-Jean de Buèges on voit qu'on est en présence
d'affleurements divers de la portion septentrionale d'un même
faisceau qui vient montrer au jour des phénomènes de recouvrement
sur une longueur de plus de Ï00 kilomètres à vol d'oiseau.
Si cette structure d'une extension si remarquable paraît diminuer
et même disparaître vers Ganges, il se peut qu'il faille l'attribuer
à ce que la bordure du Plateau central, du massif résistant, est
dans cette région considérablement reculée au nord. Dans ces con-
ditions, la compression latérale ayant pu exercer son action sur
une surface peu vaste, se serait bornée à produire des plis et des
failles relativement simples et n'aurait plus été jusqu'à provoquer
la formation de lambeaux de recouvrement.
Mais il serait également possible que cette région qui s'étend
au nord est de Ganges dans la direction de l'Ardèche et qui pré-
sente au moins dans la région de SaiotHippolyte du Fort des
(( Klippe » très accusés, ne soit que le prolongement des phéno-
mènes de charriage observés au sud-ouest (Clermont l'Hérault, etc.).
Les travaux récents de M. Quareau sur les « Klippe » d'Iberg
(Schwyz) permettent en effet de ne pas écarter cette hypothèse à
priori.
(1) B. S. G. F., (3), XI, p. 93.
EXCURSION AU ROC DBS VIERGES 787
D'ailleurs, au col des Bories, près de Clermont-l'Hérault, au
point où les lambeaux de charriage ont été fortement pressés par
la faille de Rabieux, on voit apparaître progressivement des îlots
calcaires à surfaces de frottement inclinées d'abord, puis verti-
cales à mesure qu'on se dirige au nord-est et finissant par cons-
tituer un ensemble hétérogène d'Ilots calcaires émergeant, sans
aucun ordre appréciable, des terrains marneux (Toarcien, Char-
mouthien, Keuper) environnants, méritant par suite l'application
du terme de « Klippe ».
Si cette manière de voir se vérifiait un jour les phénomènes de
charriage s'étendraient beaucoup plus loin vers le nord-est, et
viendraient peut-être se raccorder avec la région de l'Àrdèche où
M. Munier-Chalmas, se basant sur certaines lacunes paléontolo-
giques, a fait entrevoir la possibilité de l'existence de phénomènes
de ce genre.
M. Depéret constate que les plissements dont il vient d'être
question sont antéoligocènes, c'est-à-dire de même âge que ceux
des Pyrénées.
M. Bergeron ajoute qu'il connaît des plis analogues dans la
région du Vigan ; ils sont dans le prolongement de ceux observés
sur la feuille de Bédarieux; eux aussi sont, les uns carbonifères,
les autres tertiaires.
•
M. J. Aimera, au sujet du Keuper, fait remarquer à la Société
combien il diffère de celui de la province de Barcelone, dans
laquelle, à Foix, il est bien développé en étendue et en puissance.
Il est fossilifère à deux niveaux ; dans le niveau inférieur il renferme
Myophoria cf. Goldfussi A\b., M. cf. vulgarisStihl., Lingulaci. tenuis-
sima Bronn. A Pontons, dans le niveau le plus élevé, lescargneules
gypseuses les plus hautes présentent une assise de calcaire blanc
parfois plus ou moins dolomitique, pétri de fossiles.
Sur sa demande, MM. Bergeron et Munier-Chalmas ont bien
voulu faire l'étude de cette faune. Ils ont reconnu des Cassianella
(C. afif. decussata, C. planidorsata) de Saint-Cassian en Tyrol.
En outre elle contient Pecten sp. (très fréquent), Modiola sp.,
Natica gregarea Schl., Chemnitzia sp., etc., faune probablement de
même niveau que celui de Saint-Cassian. Cette découverte vient
confirmer en partie l'idée avancée en 1856 par M. Vézian qui écrivait
au sujet du Trias de Barcelone : « La série triasique se complète
78Ô SÉANCE DU 15 SEPTEMBRE 1899
par l'addition d'un nouvel étage constitué par le calcaire de Saiot-
Cassian, dans le Tyrol. A ce calcaire correspondent les dolomies et
les calcaires de notre quatrième étage triasique (1) ».
M. J. Bergeron est de l'avis de M. Aimera. LeTrias des euviroos
de Barcelone est plus épais que celui des environs de Bédarienx
parce qu'il est plus complet. Ainsi qu'il l'a dit en 1892 (2) les grts
bigarrés manqueraient dans le Languedoc et le Trias débuterait
par l'équivalent des couches intermédiaires (Zwischenschichten) du
Trias de la vallée delà Moselle. Entre ce niveau et le Keuper il y a
des grès à éléments plus ou moins fins, bien lités ; ces couches
peuvent appartenir à la partie supérieure des grès bigarrés ou au
Muschelkalk.
M. Léon Bertrand fait remarquer que la constitution de la
série triasique observée le matin par la Société justifie la remarque
qu'il a faite précédemment au sujet de l'absence probable des termes
inférieurs du Trias. On trouve, en effet, presque immédiatement au-
dessus du Permien et après une série très peu épaisse de grès, les
premières cargneules, avec lesquelles alternent encore de nombreux
bancs de grès indiquant des alternatives de faciès de charriage. Ces
cargneules, gypsifères à leur partie supérieure, semblent être du
Keuper, et il lui parait vraisemblable que le Trias a dû commencer
en ce point, sinon avec le début du Keuper, du moins peu de temps
auparavant.
M. Nicklès déclare n'avoir aucune raison de considérer comme
Trias inférieur la partie inférieure du Trias observé sur la feuille
de Bédarieux. Les seuls fossiles qu'il y ait rencontrés sont, soit
des empreintes A'Eqvisetum, soit des Bivalves mal conservés, mais
qui cependant sembleraient indiquer un niveau plus élevé : l'assi-
milation de la partie inférieure du Trias à des couches comprises
entre le Rôth et le Lettenkohle lui paraît donc possible, bien qu'on
ne possède pas à ce sujet de preuves positives pour la région.
M. Jacquemet appelle dès aujourd'hui l'attention de la Société
sur les tufs de l1 Estnbelle, à Cabrières (Hérault).
Ces tufs, sur lesquels il prépare un travail plus complet, sont très
intéressants, car ils représentent une suite non interrompue de
H) Du terrain post- pyrénéen des environs de Barcelone, p. 15.
(2) B. S. G. F, (3), XX, p. 258
SÉANCE DU 15 SEPTEMBRE 1899 78$
formations depuis le Pliocène jusqu'à nos jours. Ils sont produits
par une source intermittente d'eau chaude qui sourd de la roche
tous les quatre ou cinq ans par trois ou quatre ouvertures très
rapprochées. Elle jaillit brusquement avec un très fort débit qui ne
dure que quelques heures; l'eau s'étend sur tout le petit plateau
tuiïeux en entraînant des végétaux, des coquillages et s'écoule assez
lentement vers le nord-ouest en déposant de nouveaux travertins.
Primitivement, la source jaillissait à une dizaine de mètres
au-dessus et plus à l'ouest, elle a formé à ce point une véritable
brèche formée de fragments anguleux provenant des roches voisines
et soudés par un ciment tuffeux rouge. Son ouverture s'étant trouvée
sans floute obstruée par ces formations, elle s'est ouvert un nou-
veau passage et a commencé par l'est ses nouveaux dépôts de tufs.
Dans ces derniers sont creusées trois grottes qui ont été habitées ù
l'époque du grand Ours. Les fouilles que j'y fais pratiquer depuis
deux années m'ont donné une grande quantité d'ossements de
Mammifères, d'Oiseaux et de Poissons en ce moment à l'étude.
J'y ai recueilli également en abondance des outils d'os, de silex,
de quartzite et de basalte, des ornements en os ou en coquillages,
etc. L'ouverture naturelle de ces grottes de l'époque quaternaire
dans ces tufs déjà consolidés indique leur origine ancienne que
confirme encore l'étude des végétaux et des coquillages qu'ils
contiennent. Si l'on considère enfin que les formations bréchi-
formes ont précédé les formations tuffeuses, on peut admettre que
la source chaude a dû jaillir la première fois à l'époque où les
basaltes des plateaux s'épanchaient, c'est-à-dire pendant le Pliocène
supérieur.
M. Jacquemet demande à M. Depéret s'il a changé d'avis depuis
1883 sur l'attribution au Néocomien ou à l'Urgonien des marnes
rouges du Vallon d'Opoul (Pyrénées-Orientales). Pour lui il croit que
ces marnes non fossilifères sont d'origine beaucoup plus récente
et que ce n'est là qu'un dépôt probablement lacustre très posté-
rieur à l'époque crétacée, elles ne seraient que le produit détriti-
que des roches voisines. En effet, ayant eu l'occasion de descendre
dans un aven très intéressant de 250 mètres de profondeur qui se
trouve dans la vallée, il a trouvé le sous-sol entièrement rocheux
et la marne rouge déposée dans les fentes. La coupe donnée par
M. Depéret en 1885 serait donc inexacte en ce point seulement,
tout le reste paraissant rigoureux.
790 SÉANCE DU 15 SEPTEMBRE 1899
M. Depéret répond qu'il n'a appelé néocomiennes que les
marnes du bord de la plaine; en réalité ces marnes sont aptiennes
et il y a eu un renversement. Outre cela, il y a la formation que
signale M. Jacquemet.
M. Depéret, au nom de tous les membres de la Société, félicite
vivement M. le Président de ses efforts soutenus pendant seize ans,
et qui l'ont amené à de belles découvertes : établissement rigou-
reux de la série paléozolqne et explication d'une tectonique com-
pliquée dont le trait caractéristique est la présence d'une série
d'écaillés toutes refoulées du sud vers le nord. Grâce à lui, la
Montagne Noire est devenue le type d'une région de refoulements.
M. J. Aimera s'associe pleinement aux paroles de M. Depéret,
il constate avec plaisir que les travaux de M. Bergeron ont fourni
une foule de renseignements et de points de comparaison pour les
géologues espagnols.
M. Jacquemet remercie alors M. le Président, au nom de tous
les géologues de l'Hérault, qui tireront. grand profit des remar-
quables études qu'il a faites.
M. Audran offre à M. le Président les remerciements de tous
ceux qui, sans faire des recherches de science pure, s'intéressent
néanmoins à la géologie.
M. J. Bergeron est particulièrement sensible aux remercî-
ments qui lui sont adressés et aux paroles de M. Depéret. Si la
réunion a présenté autant d'intérêt, c'est moins au Paléozoïque
qu'on le doit qu'aux faits si intéressants que nous ont montrés
MM. Depéret et Nicklès dans le Tertiaire et le Secondaire.
Le Président, après avoir remercié le Secrétaire et le Trésorier
du zèle avec lequel ils se sont acquittés de leurs fonctions, déclare
close la réunion extraordinaire de 1899.
791
EXPLICATION DES PLANCHES
Planche XVIII
Oontaot du Devonlen et du Oarbonlfère sur la rouie de Laurenque
Par suite du déversement des couches vers le nord, la succession naturelle se
trouve inversée.
Planche XIX
Oabrlèrea et le Plo de Blttout
1. Ordovicien.
2. Dolomie du Dévonlen inférieur.
3. Givétien.
4. Zone à Gephyroceras intumescent.
5. Zone à Chiloreras curvispina.
6. Calcaire griotte à Clyménies.
7. Calcaire et schistes. Niveau à Cypridines.
8. Lydiennes, adinoles, schistes et calcaires de la base du Carbonifère.
9. Schistes tournaisiens
10 Calcaires viséens.
11. Pilons de quartz
12. Tufs calcaires de l' Esta bel le.
Planche XX
Oolllnes des Japhet
1. Schistes ordoviciens.
t Dolomies du Dévonien inférieur.
3 Givétien.
4. Calcaire noir k Gephyroceras intumescent et calcaire vacuolaire à Chilo-.
ce ras curvispina
5. Calcaire griotte à Clyménies; calcaire et schistes du niveau à Cypridines.
6. Schistes tournaisiens.
7. Calcaire viséen.
792 EXPLICATION DRS PLANCHES
Planche XXI
1. — Flanc 1NVEH8R du pu couché de marnes et calcaires de Rognac au roc
Notre-Dame près Saint-Chinian. - R', R-, R;i sont les trois barres de calcaire de
Rognac renversées sur un plateau au b- horizontal de calcaire lutétien lacustre (L)
et de Nummulitique marin (N).
i. — Flanc inverse du mûme pu un peu plus a l'ouest a la chapelle Saint-
Pierre. — La série renversée comprend ici les marnes vitrolliennes (V;, le calcaire
paléocène a Phy*a prixca (P) et le calcaire nummulitique à Alvéolines {Ni : le tout
couché au nord sur le plateau des grès d'Asstgnan (A; et des calcaires lu Lé lien s
lacustres (L).
•i. — Talus forme par l'étage de Rognac au Sud de la ville de Saint-Chinian :
à la base les grès à Reptiles (G), en haut la barre dentelée du calcaire de Rognac
(R1). En bas du talus, la vallée du Vernazobre (a!, Alluvions anciennes;.
4. — Érosions dans les alluvions rouges sous-basaltiques pliocène» (/>x) du
Courresou, près Rédarieux.
783
TABLE GÉNÉRALE DES NOTES ET MÉMOIRES
CONTENUS DANS CE VOLUME
(par ordre des séances)
8èanoe du 0 Janvier 1800 :
Proclamation do nouveaux membres : MM. Barthélémy, le Dr Imbeaux et
Camillo Crema ... 5
Elections 5
Composition du Bureau, du Conseil et des Commissions 6
8èanoe du 83 Janvier 1800 :
J. Bergeron, Emm. de Marorrie. — Allocutions présidentielles 7, 8
Proclamation de nouveaux membres : MM. David Levât, Ph. Dautzenberg.
l'abbé Boone, J. Jean . . 10
Albert Gauurt. — Première circulaire du Congrès géologique international
do Paris (VIII" session, 1900) 10
L. Duparg et Mrazeg, G.-B -M. Flamand, Bleigrer et Mieg, Almera et
Bopill. — Présentations d'ouvrages 18
G. Dollfus et P. Gaucher t. — Notes nouvelles sur le calcaire de Montabu-
zard. près d'Orléans (/ fig. dans le texte). 21
E. Fojjrniir. — Sur la nappe de recouvrement de la Basse- Provence ... 27
E. de Martonne. — Lapiez dans des grès crétacés (Massif du Hucegiu. Rou-
manie) {/carte dans le texte) 28
G. Dollfus, Léon Janet. — Observations ... 32
Séance du 6 FéTiier 1800 :
Proclamation d'un nouveau membre: M. Spiess 33
Nécrologie : M. Charles de Grasset 33
D. Levât. — Présentation d'ouvrage 33
de La un at. — Conférence sur les variations des filons métallifères en pro-
fondeur 34
J. Bergeron.— Note sur la base du Carbonifère dans la Montagne Noire . 36
D. Levât. — Observations 43
■
8èanoe du 10 Février 1800 :
Nécrologie : M. le Pr. W. Dames 44
Leresconte. — Présentation d'ouvrage 45
R. Fourtau — Sur la présence de fragments d'Astéries dans les couches de
la base du Mokattam 45
P. Termier.— Les nappes de recouvrement du Rriançonnals (17 fig.ei i carte
dans le texte, PI. I) ... . 47
Kiuan, Haug. — Observations 83,84
794 TABLE GÉNÉRALE DES NOTES ET MÉMOIRES
E. Ficheur. — Le Massif du Chettaba et les Ilots triasiques de la région de
Constantine (13 fig. et 4 carte dans le texte) 85
V. Raulin. — Sur les plissements du Bassin de l'Aquitaine (Observations a
une note de M. Glangeaud) ....-....' 414
Séance du 6 Mars 1899 :
Proclamation de nouveaux membres: MM. Lugeon, Emile Bôse 118
Albert Gaudrt. — Communication sur les fouilles de M. Le Bel à Busch-
weiller 118
V. Paquter. — Note préliminaire sur la découverte de Méduses fossiles
(2 fig. dam le texte) . . 119
Stuart-Mbnteath. — Sur la géologie des Pyrénées. 121
Séance du 20 Mars 1899 :
Proclamation d'uû nouveau membre : M. Dbprat 122
Nécrologie : M. Nagel ISS
Attribution du Prix Fontannes à M. E. Ficheur 122
Albert Gaudrt. — La mort du Professeur Marsh 122-
V. Paquier. — Présentation d'ouvrage 123
M. Boule. — Sur la géologie des terrains sédimentaires à Madagascar. 124
Mumer-Chalmas. — Observations 125
Kilian. — Sur la découverte, faite par M. Baum berger, d'un deuxième
exemplaire de Hoplites Euthymi, près de Bienne (Suisse) . . 125
W. Kilian. — Sur certains points de la structure des Alpes françaises (A
propos d'une hypothèse récente) 126
Brives. — Sur la géologie de la région pétrolifère des environs de Relizane
(Algérie) 128
A. de Grossouvre. — Quelques observations sur les Bélemnitelles et en par-
ticulier sur celles des Corbières. 129
M. Cossmann. — Sur la découverte d'un gisement palustre à Paludines dans
le terrain Bathonien de l'Indre (9 fig . dans le texte) . 136
Séance générale annuelle du 6 ATril 1899 :
Proclamation de nouveaux membres : MM. Authelin, Giraud. 144
Ph. Glangeaud. — Sur la découverte de Crustacés fossiles dans le Précam-
brien de l'EUt de Montana (U. S. A.) . . 144
J. Bbrgeron. — Allocution présidentielle 145
Id. — Nécrologie: MM. Faucher, Frbund, Gallois, Gouverneur,
de Lavrrnedb, Meunier, Jules Maroou, Htpp. Crosse,
Nogues. G. de Mortillet, Briart. F. Bernard. . . . 152-158
Pbron. — Rapport de la Commission du Prix Fontannes en 1899; attribu-
tion du prix à M Ficheur 160
Ficheur. — Remerciements 166
Charles Barrois. — Notice sur James Hall ... 168
H. Douvillé. — Notice nécrologique sur Maurice Chaper 174
Id. — Liste des travaux publiés par Chaper . 188
E. Ficheur. — Notice biographique sur A. Pomel 191
Id. — Bibliographie des travaux scientifiques de A. Pomel. . . . 217
Collot. — Sur 'les Trigonies byssiféres (* fig. dans le texte) 224
Stuart Menteath — Sur les klippen des Basses-Pyrénées . . 227
Ch. Authelin. — Sur le Toarclen des environs de Nancy » » •
TABLE GÉNÉRALE DES NOTES ET MÉMOIRES 795
Séance du 10 Arril 1899 :
Proclamation d'un nouveau membre : M. Simon 233
D' Labat, Botti. — Présentations d'ouvrages 236
R. Fourtau. — Sur un nouveau gisement de Poissons fossiles aux environs
des pyramides de Ghlzeh (3 fig. dans le texte) 237
F. Priem. — Sur des Poissons éocènes d'Egypte et de Roumanie, et rectlli-
cation relative a Pseudolates Heberti Qervais sp. (PI. Il) . . 241
Ad. Guébhard. — Les accidents frontaux de la barre de Caussols (Alpes- 293
Maritimes) 253
Séance du 22 Arril 1899 :
Nécrologie : Charles Hrononiart 255
Ad. Guébhard —Sur la tectonique de la Collette de Clars (Alpes-Maritimes) 256
L. J. B. de Lamothe. — Note sur les anciennes plages et terrasses du bassin
de l'Isser (dépt. d'Alger) et de quelques autres
bassins de la côte algérienne (40 fig. dans te texte,
PI. III) 257
Edouard Harlé. — Nouvelles pièces de Dryopithèque et quelques coquilles,
de Saint- Gaudens (Haute-Garonne). (PI. IV) 304
J. Repelin. — Sur le Trias des environs de Rougiers (Provence) et ses rela-
tions avec la roche éruptive de cette région (Pi. V) .... 311
P. Flighe. — Note sur un bois de vigne des Clnérites du Gantai 318
Kilian. — Observations au sujet d'une note de M. David Martin sur les
dépôts glaciaires du bassin de la Durance .-. . 322
6. Fabre. — Sur un dôme triasique dans les environs de Relizane (dépar-
tement d'Oran). . 323
Séanoe du 1" Mai 1899 :
F. Canu. — Les ovlcelles des Céidées (Bryozoaires) (PI. VI) 326
A. de Grossouvrb. — Sur V Ammonites peramptus et quelques autres fos-
siles turoniens 328
Hado. — Observations 335
E. Fourmibr. — Les chaînes de la bordure septentrionale du bassin de
Marseille (2 fig. dans le texte) 336
V. Gauthier. — Contribution à l'étude des Echinides fossiles (/ fig. dans le
texte) 344
Edouard Harlé. — Gros cailloux de la Garonne en aval du confluent du
Tarn 348
Séanoe du 15 Mai 1899 :
Proclamation de nouveaux membres: MM. Ch. Balsan, Dop 352
A. Thkvbnin. — Le bassin tertiaire d'Asprières (Aveyron) (2 fig. dans le
texte) 353
A. Gaudry, M. Boule. — Observations 359
Bigot. —, Sur les dépôts pléistocenes et actuels de la Basse-Normandie . . 360
M. Boule. — Observations 361
Stuart-Menteath. — Sur les failles des Pyrénées. . . 361
J. Repelin. —Note sur l'Aptlen supérieur des environs de Marseille (/ fig.
dans le texte) (PI. VII) 363
796 TABLE GÉNÉRALE DES NOTES ET MÉMOIRES
Séance du 5 Juin 1899 :
Nécrologie : E. Jannettaz . 374
Pallart. — Sur les faunes fossiles des Mollusques terrestres el d'eau douce
de l'Algérie. 374
M. Boule. — Observations 366
Bleigher. — Présentation d'un échantillon de Graptolites provenant des
poudingues du Grès vosgien . 377
A. de Grossouvre. — Sur quelques fossiles crétacés de Madagascar. . . 378
M. Boule. — Observations 378
M. Boule. — Sur la géologie de Madagascar 379
Séance du 19 Juin 1899 :
Proclamation de nouveaux membres : MM. Amiot, Offrît, Guillkrmond,
Pallart 380
Albert Gaudrt. — - Présentation d'un ouvrage intitulé : Life and Letters of Sir
Joseph Prestwich. wrltten and edited by his wife., 1899. 381
Ch. Barrois, R. Fohrtau. — Présentations d'ouvrages 38£
R. Fourtau. — Découverte de nouveaux fossiles tertiaires en Egypte. . . . 382
Kerforne. — Présentation de plusieurs notes sur la géologie de la pres-
qu'île de Crozon (Finistère) 383
H. Douvillë — Sur une coupe de Madagascar, dressée par M. Villiaume
(/ fig. dans te texte) 385
G. Oollfus. M. Boule. — Observations. 395
Emile Hauo. — Sur le Cénomanien de Diego-Suarez (Madagascar) 396
M Boule.s— Observations 398
D.-P. OEhlert. — Sur le Silurien des environs de Chemiré-en-Charnie (Sarlhe) 398
P. Termier. — Microgranites de la vallée de la Guisanne (Bord nord du
Massif du Pelvoux) 399
W. Kilian. — Structure intime des calcaires linéiques du Briançonnais. . 409
A. de Riaz. — Contribution a l'étude du système crétacé dans les Alpes -
Maritimes [4 fig. dans le texte) 411
Caralp. — Sur le Flysch à Fucoldes de la Bel longue et du Bassin d'Oust
(Pyrénées) {6 fig . dans te texte) 436
Stuart-Menteath. — Sur le Bassin de Saint Jean- Pied -de- Port 443
Abbé Bourgeat. — Quelques points nouveaux de géologie jurassienne (6 fig.
dans le texte) 445
Séance du 6 NoTembre 1899 :
Nécrologie : M. Paul Camrronne 451
K. A. von Z itt kl, A. de Maroerie. — Présentations d'ouvrages 451
do Lapparent, M. Boule. Sauvage, Marcel Bertrand, Igino Cocchi, Haug,
Zeiller. — Présentations d'ouvrages 453
de Lapparent. — Sur le récent Congrès géographique de Berlin 455
Ph. Glangeaud. — Sur les plissements du bassin de l'Aquitaine, réponse
à M. Raulin 455
C. Schlumrergeii. — Note sur quelques Foraminifères nouveaux ou peu
connus du Crétacé d'Espagne (PI. VIII, IX. X, XI). 456
P. Kliche. — Note sur quelques fossiles végétaux de l'Oligocène dans les
Alpes françaises (Pi. XII) 466
R. Fourtau. — Observations sur les terrains éocènes et oligocènes d'Egypte 480
Stuart-Menteath. — Progrès de la géologie des Pyrénées 491
TABLE GÉNÉRALE DES NOlgS ET MÉMOIRES 797
Séance du 20 Novembre 1899 :
Proclamation de nouveaux membres : MM. Otto Jjbckel, Jolbaud, Pellbgrin. 493
Blatac, de Margerie, J. Bergeron. — Présentations d'ouvrages 494
M. Bertrand et Zïrcber. — Présentation de notes sur la Géologie de
l'Isthme de Panama et les Phénomènes
volcaniques et les tremblements de terre
de l'Amérique centrale . . . 494
Haug, G. Dollfus. — Présentations d'ouvrages 495
Albert Gaudrt. — Sur le Neomylodon et sur VHelicoprion 496
H. Douvillé. — Sur les couches à Orbitoides { Lepidocyclina ) du Bassin de
l'Adour 497
Id. — Communication d'une lettre de M. Paquier, sur la décou-
verte de Caprines dans l'Aptien inférieur 496
J. Bergeron. — Etude de quelques Trilobitcs de Chine (PI. XIII, 9 fig. dans
le texte) 499
F. Roman. — Absence du Barrémien sur la feuille de Montpellier ..... 517
Séance du 4 Décembre 1899 :
Proclamation de nouveaux membres : MM. Durand, Mbmin, du Passage,
Paul Lemoine 521
J. Bergeron, Edm. Pellat, Labat. — Présentations d'ouvrages. 522
H. Douvillé. — Sur la découverte de nouvelles couches à Villerssur-Mcr. 523
Rapport do la Commission de Comptabilité présenté par M. H. Douvillé. . 524
Marcellin Boule. — Observations sur quelques Équldés fossiles 531
L Gentil. — Observations 542
M. Cossmann. — Note sur les Gastropodes du gisement bathonien de Saint-
" Gaultier (Indre) (3 fig. dam le texte, PI. XIV-XVIIj. . 543
Mumer Chalmas. — Observations 586
Séance du 18 Décembre 1899 :
Proclamation d'un membre : M. Paul Léon. 586
Golliez. — Conférence sur les travaux du Chemin de fer de la Jungfrau . 586
Munier-Chalmas. — Communication. 588
Stuart-Menteath. — Sur les schistes lustrés de la Bel longue 589
Léon Janet. — Note sur l'existence de l'étage Bartonien dans la vallée du
Loing, entre Nemours et Montigny 590
Munier-Chalmas, G. Ramond. — Observations 593
Adrien G uébhard. — Sur le gypse de la Bastide (Var.) 594
Compte-Rendu de la Réunion extraordinaire de la Société Géologique
sur le versant méridional de la Montagne Noire en 1899.
Liste des membres ayant pris part à la Réunion extraordinaire de 1899. . 605
Programme de la Réunion extraordinaire 606
Bibliographie concernant la Réunion extraordinaire 608
Séance du 6 Septembre 1899 à Saint- Pons :
Constitution du Bureau 613
J. Bergeron. — Allocution présidentielle 613
Septembre 1901. — T. XXVII. Bull. Soc. Géol. Fr. — 51
798 TABLE GÉNÉRALE^DES NOTES ET MÉMOIRES
Proclamation de nouveaux membres : M. Meunier ; La Société d'étude des
Sciences naturelles de Béziers. 614
Nécrologie — M. Louis Lartet 614
E. Mir, J Bergeron. — Forage d'un puits artésien aux Cheminières. près
Castelnaudary 614
J . Bergkron . — Étude dos terrains paléozolques et de la tectonique de la -
Montagne Noire (// fig. dans le texte, PI. XVIII XX). . 617
Séance du 8 Septembre 1899 à SaintChinian :
J . Bergeron . — Compte-rendu de l'excursion du 6 septembre au col de
Sainte-Colombe 680
Id. — Compte-rendu de l'excursion du 7 septembre au matin de
Saint-Pons à Saint-Chlnian \% fig. dans le texte) .... 682
Charles Depéret. — Aperçu sur la géologie du chaînon de SaintChinian
{10 fig. dans le texte, PI. XXI) 686
Id. — Compte-rendu de l'excursion du 7 septembre à
Assignan et Barroubio {2 fig. dans le texte) . . . 709
In. — Compte rendu de l'excursion du 8 septembre à Pier-
rerue et Cazedarnes (3 fig . dans le texte) 712
RenéNicKLÈs. — Excursion du 8 septembre aux environs du Mas-Capel et
de Saint-Biaise (5 fig. dam le texte) 715
E. Jacquemet. — Note sur le Pliocène marin des bassins de l'étang de Thau,
de l'Hérault, de l'Orb et de l'Aude 721
Séance du 11 Septembre 1899 à Bédarieux :
J . Bergeron. — Compte- rendu de l'excursion du 9 septembre à Roquebrun. 724
Depéret, Léon Bertrand — Observations. 790
René Nicklès. — Compte-rendu de l'excursion du 10 septembre à Béda-
rieux (3 fig. dans le texte) 731
Ch. Depéret. — L'Eocène du bois de Levas. 738
Léon Bertrand. — Observations 738
J. Bergeron. — Les basaltes de l'Escandorgue et du Salagou. 739
Léon Bertrand. — Observations 741
J . Bergeron . — Compte-rendu de l'excursion de la matinée du 1 1 septembre.
— Terrains paléozolques 741
Ch. Depéret. — Étude des dépôts miocènes d'Autignac 742
René Nicklès. — Sur le lambeau secondaire de Fouzilhon-Gabian (S fig.
dans le texte) . 743
J. Bergeron. — Excursion de l'après-midi du 11 septembre à Laurens et
Gabian 747
Collot — Sur une discordance remarquable entre Permien et Trias dans
les environs de Bédarieux {4 fig. dans le texte) 748
E. Jacquemet. — Note sur les formations miocènes des bassins de l'étang de
Thau, de l'Hérault, de l'Orb et de l'Aude 750
Ch. Depéret, Fourt au, Carez. — Observations. 757-758
Séanoe du 14 Septembre 1899 à Clermont-l'Hérault :
Dop. — Observations 758
Ch. Depéret. — Compte-rendu de l'excursion du 12 septembre dans la
région de Pézenas 759
TABLE GÉNÉRALE DES NOTES ET MÉMOIRES 799
J. Bbrobron. — Compte-rendu de l'excursion du 13 septembre à Cabrières. 760
Id. — Compte-rendu de l'excursion du 14 septembre au Pic de
Bisous 765
Miqubl. — Observations 769
René Nicklès. — Sur la tectonique des terrains secondaires dans la région
de Clermont- l'Hérault (4 /ty. dans le texte) 771
Almera. — Observations . 778
A. Dereims. — Note sur les terrains paléozolques d'Espagne 779
Séanoe du 15 Septembre 1899 à Saint- Jean de la Blaquière :
René Nicklès. — Excursion au roc des Vierges (5 fig. dans le texte). . . 780
Depéret, Berqbron, Almera, Léon Bertrand. — Observations 787
Jagquemet. — Sur les tufs de l' Esta bel le à Cabrières 788
Depéret. — Observations 790
Explications des Planches relatives à la Réunion extraordinaire 791
Tables 793
Date de publication des fascicules qui composent ce volume. ....... 823
Erratum du Tome XXV 824
Errata du Tome XXVII 824
FIN DE LA TABLE DES NOTES ET MEMOIRES
800
TABLE ALPHABÉTIQUE
DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
POUR LE VINGT-SEPTIÈME VOLUME
(TROISIÈME SÉRIE)
Année 1899
Actuel. Sur les dépôts pléistocènes et
— s de la Basse- Normandie, par M.
Bigot, 360.
Adour. Sur les couches à Orbitoldes du
bassin de 1'—, par M. Douvillé, 497 .
Allocution*. M. J. Berge ron, 7, 145. —
M. Albert Gaudry, 10.
Allocutions présidentielles. 7, 8, 145.
Almera. Observations, 778, 787.
Almera et Bofill. Présentation d'ou-
vrage, 19.
Algérie. Le massif du Chettaba et les
îlots triaslques de la région de Cons
tantine (— ), par M. E. Ficheur, 85. —
Sur la géologie de la région pétro-
lifère des environs de Relizane (--),
par M. Brives, 128. — Note sur les
anciennes plages et terrasses du bas-
sin de Tisser (— ) et de quelques autres
bassins de la côte algérienne, par M .
L. J. B. de Lamothe (PI. 111), 257. -
Sur un dôme triasique dan- les envi-
rons de Relizane (— ), par M G. Fabre,
323. — Sur les faunes fossiles des
mollusques terrestres et d'eau douce
de P-, par M. Pallary, 374.
Alpes. Sur certains points de la struc-
ture des — françaises (à propos d'une
hypothèse récente), par M. W. Kilian,
126. — Note sur quelques fossiles végé-
taux de l'Oligocène dans les — fran-
çaises, par M. P. Fliche (PI. XII), 466.
A Ipes-Maritimes. Les accidents frontaux
de la barre de Caussols ( — ), par M.
Ad. Guébhard, 253. - Sur la tecto-
nique de la Collette de Gars ( — ), par
M. Ad. Guébhard, 256.— Contribution
à l'étude du système crétacé dans les
—, par M. A. de Riaz, 411.
Ammonites. Sur 1'— peramplus et quel-
ques autres fossiles turoniens, par
M. A. de Grossouvre, 328.
Aptien. Note sur 1'— supérieur des
environs de Marseille, par M. J. Repe-
lin(Pl. VII), 363.
Aquitaine. Sur les plissements du bas-
sin de 1'— [ Observations à une note
de M. Glangeaud), par M. V. Raulin.
114 — Sur les plissements du bassin
de 1'- , réponse à M. Raulin, 455.
Asprières (Aveyron). Le bassin ter-
ri'— , par M. A. Thévenln, 353.
Assignan. C.-R. de l'excursion du 7
septembre 1899 à — et Barroubio,
par M. CU. Depérct, 709.
Astéries. Sur la présence de fragments
d'— dans les couches de la base du
Mokattam, par M. R. Fourtau, 45.
Aude. Note sur le Pliocène marin des
bassins de l'étang de Thau, de l'Hé-
rault, de l'Orb et de 1'— , par M. E.
Jacquemet, 721 . — Note sur les for-
mations miocènes des bassins de
l'étang de Tbau, de l'Hérault, de
l'Orb et de 1' — , par M. E. Jacque-
met, 750.
Aurifères. Renseignements géologiques
sur les régions — de la Guyane fran-
çaise, par M. Levât, 34.
Authelin (Ch.). Sur le Toarcien des
environs de Nancy, 230.
Autignac. Etude des dépôts miocènes
d'-, par M. Ch. Depéret, 742.
Aveyron. Le bassin tertiaire d' Asprières
(— ), par M. A. Thevenin, 353.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
801
B
Barré mien Absence du — sur la feuille
de Montpellier, par M. F. Roman, 517.
Barrois (Charles). Notice sur James
Hall, 108 — Présentation d'ouvrage,
382
Barroubio. C.-R. de l'excursion du 7
septembre 1899 à Assignan et — , par
M. Ch. Depéret, 709.
Bartonien. Note sur l'existence de
l'étage — dans la vallée du Lolng,
entre Nemours et Montigny, par M.
Léon Janet, 590.
Bastide (la) (Var). Sur le gypse de —,
par M. Ad. Guébhard, 594.
Bathonien. Sur la découverte d'un
gisement palustre à Paludines dans
le terrain — de lindre. par M. Coss-
mann, 136. — Note sur les Gastropo-
des du gisement — de St- Gaultier
(Indre), par M. M. Cossmann (PI. XIV-
XVII), 543.
Bédarieux. C.-R. de la séance du 11
septembre 1899 à — . 724. — C.-R. de
l'excursion du 10 septembre 1899 a —,
par M René Nicklès, 731. — Sur une
discordance remarquable entre Per-
mien et Trias dans les environs de — .
par M. Collot, 748.
Bélemnitplle*. Quelques observations
sur les — et en particulier sur celles
des Corbière?, par M. A. de Grossou-
vre, 129.
Bellongue (la). Sur le Flysch a fucoïdes
de — et du Bassin d'Oust (Pyrénées),
f>ar M Caralp, 436.— Sur les schistes
ustrés de —, par M. Stuart-Men-
teath, 589.
Bernard (Félix). Notice nécrologique.
p;ir M. J. Bergeron, 158.
Bergeron (J.). Allocution, 7. — Note
sur la base du Carbonifère dans la
Montagne Noire, 36. — Allocution à
la séance générale annuelle. 145. —
Notices nécrologiques sur M. Jules
Marcou, 153, Hippolyte Crosse, 154,
Noguès. 155, Gabriel de Mortillet, 155.
Briart, 156, Félix Bernard. 158. —
Etude de quelques Trilobites de
Chine, 499. — Forage d'un puits arté-
sien aux Chominières, près Castel-
naudary, 614. — Elude des terrains
Saléozoïques et de la tectonique de la
lontagne Noire (PI. XVIII-XX), 617.
— C.-R. de l'excursion du 6 septem-
bre 1899, au col de Sainte-Colombe,
680. — C.-R. de l'excursion du 7 sep-
tembre 1899, de Saint-Pons à Salnt-
Chinian, 682. — C.-R. do l'excursion
du 9 septembre 1899, a Roquebrun,
724 — Les basaltes de l'Escandorgue
et du Sa lagon, 739. — C.-R. de l'excur-
sion du 1 1 septembre 1899 (Terrains
paléozoTques de la Montagne- Noire),
/41. — Excursion du 11 septembre
1899, à Laurens et Gabian, 747. —
C.-R do l'excursion du 13 septembre
1899, à Cabrières, 760. - C.-R. de
l'excursion du 14 septembre 1899, au
Pic de Bissous, 765. — Observations,
787.
Bertrand (Léon). Observations, 730,
738, 741, 787.
Bertrand (Marcel). Présentation de
notes sur la géologie de l'Isthme de
Panama et sur les phénomènes volca-
niques de l'Amérique Centrale, 494.
Bigot. Sur les dépots plelstocènes et
actuels de la Basse- Normandie, 360.
Bissous (Pic de). C.-R. de l'excursion du
14 septembre au — , par M. J. Berge-
ron, 765.
Bletcher. Présentation d'un échantil-
lon de Graptolites provenant des
poudingues du grès vosgien, 377.
Bofill (Almera et). Présentation d'ou-
vrage, 19.
Botti. Présentation d'ouvrage, 236.
Boule (M.). Sur la géologie des terrains
sédimentaires de Madagascar, 124. —
Notice sur Charles Brongniart,
255. — Observations à propos de la
note de M. Thevenin sur le bassin
tertiaire d'As prières, 359. — Obser-
vations à propos de la communica-
tion de M. Bigot sur les dépôts
pléistocènes de la Basse- Normandie,
361. — Observations, 376, 378. — Sur la
géologie de Madagascar, 379, 395,398.
— Présentations d'ouvrages, 453. —
Observations sur quelques Equidés
fossiles, 531.
Bouroeat (Abbé). Quelques points nou-
veaux de géologie jurassienne, 4i5.
Briançonnais. Les nappes de recou-
vrement du —, par M. P. Termier
(PI. I), 47. — Structure intime des
calcaires Basiques du —, par M. W.
Kilian, 409.
Briart. Notice nécrologique, par J.
Bergeron, 156.
802
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
Brivbs. Sur la géologie de la région
pétrollfère des environs de Relizane
(Algérie), 128.
Brononiart i Charles). Notice nécrolo-
gique par M. M. Boule, 255.
Bryozoaires. Les ovicelles des Géidées
(— ). par M. F. Canu (PI. VI), 326.
Bucegiu. Lapiez dans des grès crétacés
(Massif du —.Roumanie), par M. E.
de Martonne, 28.
Bureau de la Réunion extraordinaire
de la Société géologique en 4899.
Composition du - , 613.
Bureau de la Société géologique de
France. Composition du ~, 6.
Cabrières. C.-R. de l'excursion du 13
septembre à —, par M J . Bergeron,
760. — Sur les tufs de l'Estabelle à
—, par M. E Jacquemet, 788.
Cambronne (Paul). Nécrologie, 451.
Cantal. Note sur un bois de vigne des
Cinérites du—, par M. P. Fliche,318.
Canu (F.). Les ovicelles des Céidées
(PI. VI). 326.
Caprines. Découverte de vraies — dans
l'Aptien inférieur du Rimet (lettre
de M. Pasquier), 498.
Caralp. Sur le Flysch à fuçoldes de la
Bellongue et du Bassin d'Oust (Pyré-
nées), 436.
Carbonifère. Note sur la base du —
dans la Montagne Noire, par M. J .
Bergeron, 36.
Carez (Léon). Observations, 758.
Caslelnaudary . Forage d'un puits arté-
sien aux Cheminières près — , 614.
Caussols. Les accidents frontaux de la
barre de — (Alpes Maritimes), par
M. Ad. Guébhard, 253.
Cazedarnes . C.-R. de l'excursion du 8
• septembre 1899 à Pierrerue et — ,
par M. Cta. Depéret, 712.
Céidées. Les ovicelles des — (Bryo-
zoaires), par M. F. Canu (PI VI), 326.
Cénomanien. Sur le — de Diego-Suarez
(Madagascar), par M. Em. Haug, 396.
Chaper (Maurice). Notice nécrologique
sur—, par M. H. Douvillé, 174. —
Liste des travaux publiés par —, 188.
Chemiré-en-Charnie /Sarthe). Sur le
Silurien des environs de — , par M.
D.-P. GEhlert, 398.
Chettaba. Le massif du — et les flots
triasiques de la région de Constan-
tin^, par M. E. Ficheur, 85.
Chine. Etude de quelques Trilobites de
—, par M. J. Bergeron (PI. XIII), 499.
Cinérites. Note sur un bois de vigne
des - du Cantal, par M. P. Fliche, 318.
Clermont-l Hérault. C.-R. de la séance
du 14 septembre 1899 à — , 758. —
Sur la tectonique des terrains se-
condaires dans la région de — , par
M. R. Nicklès, 771
Collette de Clars (la). Sur la tectoni-
que de — (Alpes-Maritimes), par
M. A. Guébhard, 256.
Collot. Sur lesTrlgonies byssifères, 224.
— Sur une discordance remarquable
entre Permien et Trias dans les envi-
rons de Bédarieux, 748.
Comité d'organisation du VI II* con-
grès qéologique international. Com-
position du — , 11.
Commission. Rapport de la — du Prix
Fontannesen 1899, par M. Peron, 160.
— Rapport de la — de comptabilité
présenté par M. Douvillé, 524.
Commissions diverses de la Société
géologique de France. Composition
des —, 6.
Conférence. Sur les travaux du che-
min de fer de la Jungfrau, par
M. Golliez, 586.
Congrès géologique international de
Paris. {VIII* session en 4900). Pre-
mière circulaire du —, 10.
Conseil de la Société géologique de
France. Composition du —, 6.
Constantine. Le massif du Chettaba et
les Ilots triasiques de la région de — ,
par M. E. Ficheur, 85.
Corbières. Quelques observations sur
les Belemnitelles et en particulier sur
celles des —, par M. A. de Grossouvre,
129.
Cossmann (M.). Sur la découverte d'un
gisement palustre à Paludines dans
le terrain batbonien de l'Indre, 136.
— Note sur les Gastropodes du gise-
ment bathonien de St-Gaultier( Indre)
par M. - (PI. XIV-XVII), 543.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
803
Crétacé. Lapiez dans des grès —s (Mas-
sif du Rucegiu ; Roumanie), par M. E
de Martonne, 28. —Sur quelques fos-
siles —s de Madagascar, par M. A. de
Grossouvre, 378. — Contribution à
l'étude du système — dans les Alpes-
Maritimes, par M. A. de Riaz. 411. —
Note sur quelques Fora minières
nouveaux ou peu connus du — d'Es-
pagne, par M. C. Schlumberger (PI.
VIII-XI), 456.
Crosse (Hlppolyte). Notice nécrologique
par J. Bergeron, 154.
Crozon (Finistère). Présentation de
plusieurs notes sur la géologie de la
presqu'île de —, par M. Kerforne,
Crustacés. Sur la découverte de — ,
fossiles dans le Précambrien améri-
cain, 144.
D
Depéret (Charles). Aperçu sur la géolo-
gie du chaînon de Saint-Chinian (PI.
XXIl, 686. — C.-R. de l'excursion du
7 septembre 1899, à Assignan et Bar-
roubio, 709. — C.-R. de l'excursion
du 8 septembre à Pierrerue et Caze-
darnes. 712. — Observations, 730, 757,
787, 790.— L'Eocône du bois de Levas,
738 — Etude des dépots miocènes
d'Autignac,7i2.— C.-R. de l'excursion
du 12 septembre dans la région de
Pézenas, 759.
Dereims (A.). Note sur les terrains
paléozolques d'Espagne, 779.
Diego-Suarez (Madagascar). Sur le Céno-
inanien de —, par M. Em. Ilaug.396.
Dollfus (G.) Observation sur les La-
piez, 32. — Présentation d'une bro-
chure sur quelques Coquilles nouvel-
les des Faluns de Ton raine, 495.
Dollfus (G.) et P. Gauchert. Noies
nouvelles sur le calcaire de Montabu-
zard. près d'Orléans. 21. — Obser-
vations a propos d'une coup*' de Ma-
dagascar, j9o.
Dop. Observation, 758.
Douvillk (H.). Notice nécrologique sur
Maurice Chaper, 174. — Liste des tra-
vaux publiés par M. Chaper. 188. —
Sur une coupe de Madagascar, dressée
par M Vllliaume, 385. — Sur les
couches à Orbitoldes du bassin de l'A-
dour, 497. — Sur la découverte
de nouvelles couches a Villers-sur-
Mer, 523. — Rapport de la Commis-
sion de Comptabilité. 524
Dryopithèque Nouvelles pièces de—,
et quelques coquilles, de Saint- Gau-
dens (Haute-Garonne) par M.Edouard
Harlé(Pl. IV), 304.
Duparc(L.) et Mrazec (L.) Présentation
d'ouvrage, 18.
Durance {Bassin de la). Observation
de M. Kilian au sujet d'une note de
M. David Martin sur les dépôts gla-
ciaires du —, 322.
E
Echinides. Contribution à l'étude des
— fossiles, par M. V. Gauthier, 3i4.
Egypte. Sur la présence de fragments
d'Astéries dans les couches de la
base de Moka t ta m (— ), par M. R.
Fourtau, 45. — Sur des Poissons
fossiles éocènes d' — et de Roumanie
et rectification relative à Pseudolates
Heberti Gervais sp., par M. F. Priem
(PI.) II), 241. — Découverte de nou-
veaux fossiles tertiaires en — , par
M. R. Fourtau, 382. — Observations
sur les terrains éocènes et oligocènes
d'-.par M.R. Fourtau, 480.
Elections, 5.
Eoc.ïne. Sur des Poissons fossiles —s
d'Egypte et de Roumanie et rectifica-
tion relative k Pseudolates Heberti
Gervais sp., par M. F. Priem (PI. II),
241. — Observations sur les terrains
— et oligocènes d'Egypte, par M. A.
Fourtau, 480. — L'— du bois de Levas
(Montagne Noire), par M. Ch. De-
péret, 738.
Equidés. Observations sur quelques —
fossiles, par M. Marcellin Boule, 531.
Espagne. Note sur quelques Foramtni-
fères nouveaux ou peu connus du
Crétacé d'— , par M. C. Schlumberger
(PI. VIII-XI). 456. — Note sur les
terrains paléozolques d' — , par M . A.
Dereims. 779.
Estabelle (tufs del'). Sur les — à Ca-
hrières. par M. E. Jacquemet. 788.
Excursions Liste provisoire des — du
VHP Congrès géologique internatio-
nal, 13. — Réunion extraordinaire de
1899. — diverses, 724 a 791 .
Fabre (G.). Sur un dôme triasique dans
les environs de Relizane (dép. d'Oran),
323.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIERES ET DES AUTEURS
Fichicb (E.|. Le massif du Chettaba et
les Ilots trlasiqucs de la région de
Conslanllne (Algérie), 85. — Rapport
de la Commission du prix Fontanne?,
en 1893, décerné a M. —, 160. —
Remerciements, 166. — Notice bio-
graphique sur A- Pomel, 191. — Bi-
bliographie dea travaux scientifiques
de A. Pomel, 217.
FintÊtère. Présentation de plusieurs
notes sur la géologie de la presqu'île
de Croxon (— |, par M. Kerforne, 383.
ï'lichi (P.). Note sur un bola de vigne
des cinérites du Cantal, 318. — Note
sur quelques fossiles végétai
Flysch. Sur le — a fucoides de la Bel-
longue et du Bassin d'Oust (Pyrénées),
par M. Caralp, 436
Foramintfires. Note sur quelques —
nouveaux ou peu connus du Crétacé
d'Espagne, par M. C. Schlum berger
'Espagne, par
M.VIÏI-XI], n
Fouhnka (E.) . Observations sur la tec-
tonique des environs de Marseille. 27.
— Les chaînes de la bordure septen-
trional du bassin de Marseille, 336.
Fourtau iR.) Sur la présence de frag-
ments d'Astéries dana les couches de
la base du Mokaltam lEgyptci, 43. —
Sur un nouveau gisement de Pois-
sons fossiles aux environs des pyra-
mides de Glllïch, 237. — Présentation
d'ouvrages, 382 — Découverte de
nouveaux fossiles tertiairesen Egypte.
382. — Observations sur les terrains
éocènes cl oligocènes d'Egypte, 480
— Observations, 758.
Fucoïdtl. Sur le flysch a — de la Bel-
longue et du liassi'ù d'Oust (Pyrénées).
par M. Caralp, 436.
Gabion. Sut le lambeau secondaire de
Fouzilhon- -, par M. R. Ntcklès,
743. — Excursion dn II septembre
1899 à Laurens et —, par M. J. Ber-
Gnslronodt* . Note sur les — du gise-
meni balhonien de Saint -Gaultier
llndre... par 11. M. Cossmann (PI.
XIV-XVIIJ,543.
Garonne. Nouvelles pièces de Dryopi-
theque et quelques coquilles de
Saint-Gaudens (Haute — i, par H.
Edouard Hurlé (PI. IV), 301. — Gros
cailloux de la — en aval du confluent
du Tarn, par M. Ed. Rarlé, 348.
Gauchf.hï (G.) et Dollms lP.|. Note*
nouvelle* sur le calcaire de Monta bu-
xard, près d'Orléans, 21.
Gaudrt (Albert). Présentation par M.
— de la première circulaire du Con-
grès géologique International de Paris
(VIII- session - 19001. 10. — Présen-
tation d'ouvrages, 45. — Découverte
d'ossements de Mammifères a Kusch-
. weillcr, 118 — Notice nécrologique
nu Pr. Marsh, 122. — Observations,
338. — Présentation d'un ouvrage
Intitulée Lif and lellers «f sir Joseph
Prestwlch, 381. — Sur le Neomyfi-
don de Patagonie, 496.
GAUTRirn <V.). Contribution a l'étude
dea Ecbinldes fossiles. 344.
Gentil (L.|. Observations, 542.
Ghiieh. Sur un nouveau gisement de
Gtaciairr* (Dépôts), Observation» de
M. Killan au sujet d'une note de
M. David Martin sur les — du bas-
sin de la Durauce, 322.
Glangeaud. Sur les plissements du
Bassin de l'Aquitaine [observations a
une note de M. — ). par M. V. Huulin,
114. — Sur la découverte de Crusta-
cés (ossiles dans le Précambrien amé-
ricain, 114. — Sur les plissements
du Bassin de l'Aquitaine, réponse a
M. Ranlln, 4Si.
IraptO.
tlflon de — provenant des poudingue
du grès vusgien, par M. Bleicher, 377.
apiei
slf du Buceglu ; Roumanie), par M.
E. de Ma ilonnc, 28. — Présentation
d'un échantillon de Graptolites pro-
venant des poudingues de — vosglens,
par M. Blelcber, 377.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
805
Grossouvrb (A. de!. Quelques observa-
tions sur les Bélemnitclles et en
particulier sur celles des Cor bières,
129. — Sur ['Ammonite* peramplu*
et quelques autres fossiles turoniens,
328. — Sur quelques fossiles crétacés
de Madagascar, 378.
GuÉBHARO(Ad.). Les accidents frontaux
de la barre de Caussols (Alpes-Mari
Urnes), 253. — Sur la tectonique de
la Collette de Clars (Alpes-Maritimes),
256. Sur le gypse de la Hastidr
(Var), 59*.
Guisanne. Microgranites de la vallée
de la — (bord nord du massif du
Pelvoux), par M. i*. Termier, 399.
Guyane. Renseignements géologiques
sur les régions aurifères de la —
française, par M. Levât, 34.
Gypse. Sur le — de la Rastide (Var»,
par M. Ad. Guébhard, 594.
H
Hall (James). Notice sur—, par M.
Charles Bar rois, 168.
Harlé (Edouard). Nouvelles pièces de
Dryopithèque et quelques coquilles
de Saint-Gaudens (Haute-Garonne)
(PI. IV), 304. — Gros cailloux de la
Garonne en aval du con Huent du Tarn,
348.
Haug (Emile). Observations, 84. —
Observations à la note de M. de
Grossouvre, intitulée : sur l'Ammo-
nite* peramplus et sur quelques au-
tres fossiles turoniens. ÎJ28. — Sur le
Cénomanien de Diego Suarez (Mada-
gascar;, 396. — Présentation d'ou-
vrages, 454.
Hérault Note sur le Pliocène marin
des bassins de l'étang de Thau, de
1-, de l'Orb et de l'Aude, par M. E.
Jacquemet, 724. — Note sur les for-
mations miocènes des bassins de
l'étang de Thau, de 1'—, de l'Orb et
de l'Aude, par M. E. Jacquemet, 750.
Hoplites. Sur la découverte de —
Eulhymi dans le Jura suisse, par M.
W. Kilian, 125.
I
Indre. Sur la découverte d'un gisement
palustre à Paludincs dans le terrain
bathonien de 1'—, par M. Cossmann,
136. — .Note sur les Gastropodes du
gisement bathonien de Saint-Gaul-
tier ( -), par M. M. Cossmann (PI.
XIVXVII), 543.
User. Note sur les anciennes plages et
terrasses du Bassin de 1'— (départe-
ment d'Alger) et de quelques autres
bassins de la côte algérienne, par M.
i . J. B. de Lamothe (PI. III), 257.
Jacquemet (E.). Note sur le Pliocène
marin des bassins de l'étang de Thau,
de l'Hérault, de l'Orb et de 1 Aude, 721.
— iNote sur les formations miocènes
des bassins de l'étang de Thau, de
l'Hérault, de l'Orb et de l'Aude, 750.
— Sur les tufs de l'Estabelle à Ca-
brlères,788.
JANET(Léon). Observation sur les lapiez,
32. — Note sur l'existence de l'étage
bartonien dans la vallée du Lolng,
entre Nemours et Montigny, $90.
Jungfruu. Sur les travaux du chemin
de fer de la — , par M. Golliez, 586.
Jura. Sur la découverte de Hoplites
Eut h j mi dans le — suisse, par M. W.
Kilian, 125. — Quelques points nou-
veaux de géologie -ssienne, par M.
l'abbé Bourgeat, 445.
K
Kerfornr. Présentation de plusieurs
notes sur la géologie de la presqu'île
de Crozon (Finistère), 383.
Kilian (W.). Sur la découverte de Ho-
plites Eulhymi dans le Jura suisse,
125. — Sur certains points delà struc-
ture des Alpes françaises (à propos
dune hypothèse récente), 126. —
Observations au sujet d'une note de
M. David Martin sur les dépots gla-
ciaires du bassin de la Durance, 322.
— Structure intime des calcaires Basi-
ques du Briançonnais, 409
Klippen. Sur les — des Basses- Pyrénées,
par M. Stuarl-Mcnleath, 227.
LahilleiF.v. Présentation d'ouvrages,
453.
Lamothe (L. J. B. de). Note sur les
anciennes plages et terrasses du bas-
sin de lisser (Département d'Alger)
et de quelques autres bassins de la
cote Algérienne (PI. III), 257.
8()6
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
Lapiez. — dans des grès crétacés (Massif
du Bucegiu, Roumanie), par M. E. de
Martonne, 28. — Observation sur les
—, par M G Dollfus. 32— Observa-
tion sur les —, par M. Léon Janet,32.
Lapparent (A. de). Présentation d'ou-
vrage, 453.
La ht et (Louis). Nécrologie, 614.
Launat (de). Conférence sur les varia-
tions des filons métallifères en pro-
fondeur, 34.
Laurens. Excursion du 11 septembre
1899 à — et Gabian, par M. J. Ber-
geron, 747 .
Lebbsconte. Présentation d'ouvrage,
45.
Lepidocyclina . Sur les couches à Orbi
toldes (— ) du Bassin de l'Adour, par
M. H. Dou ville, 497.
Levât. Présentation d'ouvrage, 34 —
Observations à la note de M. J.Ber-
geron sur la base de Carbonifère
dans la Montagne NolreY 43.
Lias. Structure intime des calcaires
— iques du Brlançonnais, par M. W.
Kilian, 409.
Loing. Note sur l'existence de l'étage
Bartonien dans la vallée du — , par
M. L. Janet, 590.
M
Madagascar. Sur la géologie des terrains
sédimentaires de — , parM M. Boule,
124. — Sur quelques fossiles crétacés
de — , par M. A. Grossouvre, 378. —
Sur la géologie de — ,par MM. Boule,
379. — Sur une coupe de — dressée
par M. Villiaume, par M. H. Dou-
ville, 38o. — Sur le Cénomanien de
Diego-Suarez (— ), par M. bm. Haug,
396.
Mammifères. Découverte d'ossements
de — , à Buschweiller, 118.
Marcou (Jules). Notice nécrologique,
par M. J. Bergeron, 153.
Margerie (E de). Allocution prés id en
tielle, 8.
Marseille. Observations sur la tectoni-
que des environs de — , par M. E.
Fournier, 27. — Les chaînes de la
bordure septentrional du bassin de— ,
f>ar M. E. Fournier, 336. — INote sur
'Aptien supérieur des environs de —,
par M. J. Repelin(Pl. VII», 363.
Marsh. Notice nécrologie sur le Pr. — ,
par M. A.Gaudry, it£.
Martin (David). Observations de M.
Kilian au sujet de la note de M —
sur les dépots glaciaires du bassin de
la Durance, 322.
Martonne (E. de). Lapiez dans des grès
crétacés (massif du Bucegiu ; Rouma-
nie), 28.
M as- Cape L Excursion du 8 septembre
1899 aux environs du — et de Saint-
Biaise, par M. R. Nicklès, 715.
Méduses Note préliminaire sur ^décou-
verte de — fossiles par M. V. Paquicr,
119.
Microgranites. — de la vallée de la Gui-
sanne (Bord nord du massif du Pel
voux), par M. P. Termier. 399.
Miocènes. Etude des dépôts — d'Au-
tignac, par M. Ch. Deperet, 742. —
Note sur les formations — des bas-
sins de l'étang de Thau, de l'Hérault,
de l'Orb et de l'Aude, par M. E.
Jacquemet, 750.
Miquel. Observations. 769.
Mm (E.). Forage d'un puits artésien
aux Cheminières près Castelnaudary,
614.
Mokaltam. Sur la présence de fragments
d'Astéries dans les couches de la base
du —(Egypte), par M. B. Fourtau,45.
Mollusques. Sur les faunes fossiles des
— terrestres et d'eau douce de l'Al-
gérie, par M. Pallary, 374.
Montabuzard. Notes nouvelles sur le
ca Icaire de — . près d'Orléans, par M M .
G. Dollfus et P. Gauchery, 21.
Montagne Noire. Note sur la base du
Carbonifère dans la— , par M. J. Berge-
ron, 36. — Béunlon extraordinaire do
la Société Géologique en 1899, sur le
versant méridional de la — . 605. —
Etude des terrains paléozolques et de
la tectonique de la (PI. XVIU-XX),
par M. J. Bergeron, 617. — Explica-
tion des planches relatives à la réu-
nion extraordinaire de la — , 791.
Monligny. Note sur l'existence de l'étage
bartonien dans la vallée du Loing,
entre Nemours et —, par M.L. Janet,
;>90.
Montpellier . Absence du Barrèmien sur
la feuille de— , par M. F. Roman, 517.
TABLE ALPHAB&riQUE DBS MATIÈRES ET DES AUTEURS
807
Mortillet (Gabriel de). Notice nécrolo-
gique, par M. J. Bergeron, 155.
Mrazec(L.) et Duparc (L.). Présenta-
tion d'ouvrage, 18.
Munier-Chalmas. Observations, 125,585,
588, 593.
N
Nancy. Sur le Toarcien des environs de
—, par M. Ch. Autbelin, 230
Nécrologie. — Paul Cambronne, 451. —
E. Jannettaz, 374. — Louis Lartet,
614. — Note sur Charles de Grasset,
33. — Le Pr. March, par M. A. Gaudry,
122. — Jules Marcou. 153. — Hip-
polyte Crosse, 154 — Noguès, l.*»5. —
Gabriel de Mortillet. 155. — Briart,
156. — Félix Bernard, 158. — IVotice
sur James Hall, par M Charles Bar-
rois. 160. — Notice nécrologique sur
Maurice Chaper. par M. H. Dou ville,
174. — Notice biographique sur A.
Pomel, par M. E. Ficheur, 191. —
Notice nécrologique sur Ch. Bron-
gnlart, par M. M. Boule, 255.
Nemour*. Note sur l'existence de l'étage
bartonien dans la vallée du Loing,
entre— et Montigny, par M. L. Janet,
590.
Neomylodon. Sur le — de Patagonie,
par M. Alb. Gaudry. 496.
Nicklès (René). Excursion du 8 septem-
bie 1899, aux environs du MasCapel
et de Saint-Biaise, 715. — C.-R. de
l'excursion dn 10 septembre 1899, à
Bédarieux. 731. — Sur le lambeau
secondaire de Fouzilhon-Gabian, 743.
— Sur la tectonique des terrains
secondaires dans la région de Cler-
mont l'Hérault, 771. — Excursion au
roc des Vierges, 780.
Noguès. Notice nécrologique par M . J .
Bergeron, 155.
Normandie. Sur les dépôts pléistocènes
et actuels de la Basse— .par M. Bigot,
360.
0
CEblert (D.-P.). Sur le Silurien des
environs de Chémlré - en - Charnie
(Sarthe), 398.
Oligocène. Note sur quelques fossiles
végétaux de 1'— dans les Alpes fran-
çaises, par M. P. Fliche(Pl.XlI),466.
Observations sur les terrains éocènes
et —s d'Egypte, par M. R Four tau,
480.
Oran (Dépt. d'). Sur un dôme triasique
dans les environs de Relizane (— ), par
M. G. Fabre, 323.
Orb. Note sur le Pliocène marin des
bassins de l'étang de Thau, de l'Hé-
rault, de 1'— et de l'Aude, par M. E.
Jacciuemet, 721. — Note sur les for-
mations miocènes des bassins de
l'étang de Thau. de l'Hérault, de 1—
et de l'Aude, par M . E. Jacquemct, 750.
Orbitoïdes. Sur les couches à — du
bassin de l'Adour, par M. H. Douvillé,
497.
Orléans. Notes nouvelles sur le calcaire
de Montabuzard. près d'-, par MM.
G. Dollfus et P. Gauchery, 21.
Oust. Sur le flysch a fucoldes de la Bel-
longue et du bassin d'— (Pyrénées),
par M. Caralp, 436.
Pallart. Sur les faunes fossiles des
Mollusques terrestres et d'eau douce
de l'Algérie, 374.
Paléozoiques ( terrains i . Etude des —
et de la tectonique de la Montagne
Noire, par M . J . Bergeron ( PI . XV11I
XX), 617. - C -R. de l'excursion du
1i septembre. — de la Montagne Noire,
{mr M . J. Bergeron, 741 . -- Note sur
es — d'Espagne, par M . A. Dereims,
779.
Paludines. Sur la découverte d'un gise-
ment palustre à — dans le terrain
batbonien de l'Indre, par M. M . Coss-
mann, 136.
Paquier (V.). Note préliminaire sur la
découverte de Méduses fossiles, 119-.
— Présentation d'ouvrage. 123. —
Découverte de vraies Caprines dans
l'Aptien inférieur du Rimet, 498.
Pellat (Edm.). Présentation d'une bro-
chure sur le Jurassique supérieur du
Boulonnais, 522.
Pelvoux. Microgranites de la vallée de
la Guisanne (Bord nord du massif du
— ). par M. P. Termier, 399.
808
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
Permim. Sur une discordance remar-
quable entre — et Trias dans les en-
virons de Bédarieux, par M. Collot,
748.
Peron. Rapport de la Commission du
Prix Fontannes en 18W 160.
Pétrolifère. Sur la géologie de la
région — des environs de Relizane
(Algérie), par M. Brives. 128.
Pézenas C.-R. de l'excursion du 12
septembre dans la région de — . par
M. Cl» Depéret, 759.
Pierrerue. C.-R. de l'excursion du 8
septembre 1899 à — et Cazedarnes,
par M. Ch Depéret, 712.
Plages. Note sur les anciennes — et
terrasses du bassin de 1 Isser (dépar
tement d'Alger) et de quelques autres
bassins de la côte algérienne, par M.
L J B. de Lamothe(Pl. 111), 257.
Pléistocène, Sur les dépôts— set actuels
de la Basse-Normandie, par M. Bigot,
360.
Pliocène. Note sur le — marin des
bassins de l'étang de Thau, de l'Hé-
rault, de l'Orb et de l'Aude, par M. E.
.lacquemel, 721.
Plissements. Sur les — du bassin de
l'Aquitaine (Observation à une note
de M. Glangeaud), par M. V. Raulin,
114. — Sur les — du bassin de l'A-
quitaine, réponse à M. Raulin, 455.
Poissons fossiles. Sur un nouveau gise-
ment de — aux environs des Pyra-
mides de Ghizeh, par M. R. Fourtau,
237. — Sur des — éocènes d'Egypte
et de Roumanie, et rectification rela-
tive à Pseudolates Ueberli Gervais
sp., par M F. Priem (PI. II). 241.
Pomel (A.). Notice biographique sur — ,
par M. E. Ficheur, 191. — Bibliogra-
phie des travaux scientifiques de —,
217.
Précambrien.Suv la découverte de Crus-
tacés fossiles dans le — américain, 144.
Prestwich (Sir Joseph). Présentation
d'un ouvrage intitulé : Life and Ict-
ters of -, 381.
Priem (F.). Sur des Poissons fossiles
éocènes d'Egypte et de Roumanie et
rectification relative à Pseudolates
Heberti Gervais sp. (PI. II), 241.
Provence. Sur le Trias des environs de
Rougiers (— ) et ses relations avec la
roche éruptive de cette région, par
M J. Repelin (PI. V), 311.
Pseudolates. Sur des poissons fossiles
éocènes d'Egypte et de Roumanie et
rectification relative à — Ueberli
Gervais sp.. par M. F. Priem (PI. II),
241.
Pyrénées. Observations sur la géologie
des —, par M. Stuart-Menteath. la).
— Sur les Klippen des Basse» — , par
M. Stuart-Menteath, 227. - Sur les
failles des —, par M. Stuart-Men-
teath, 361 . — Sur le flysch à fucoides
de la Bel longue et du bassin d'Oust
(— ). par M. Caralp, 436. — Progrès
de la géologie des — par M . Stuart
Mcntcath, 491.
R
Ramono (G ) . Observations, 593.
Rapport de la Commission de Compta-
bilité présenté par M. H. Douvillé,524.
Rascles. Lapiez (ou — ) dans des grès
crétacés (Massif du Bucegiu; Rouma-
nie), par M. E de Martonne, 28.
Raulin (V.). Sur les plissements du
Bassin de l'Aquitaine. (Observation a
une note de M. Glangeaud), 114. —
Sur les plissements du bassin de
l'Aquitaine, réponse de M. Glangeaud
à M. — , 455.
Recouvrement. Les nappes de — du
Briançonnais, par M. P. Termier
(PI. I), 47.
Relizane. Sur la géologie de la région
pétrolifère des environs de — ; Algérie),
par M. Brives, 128. — Sur un dôme
triasique dans les environs de —
(département d'Oran , par M. G.
Fabre, 323.
Repelin (J.). Sur le Trias des environs
de Rougiers et ses relatations avec la
roche éruptive de cette région (Pl.V),
311. — Note sur l'Aptien supérieur des
environs de Marseille (PI. VII), 363.
Réunion extraordinaire de la Société
géologique on 1899 sur le versant
méridional de la Montagne Noire,
605. — Explication des planches. 791.
Riaz (A. de). Contribution à l'étude
du système crétacé dans les Alpes-
Maritimes, 411
Roman (F.). Absence du Barrémien
sur la feuille de Montpellier, 517.
Roquebrun. C. R. de l'excursion du 9
septembre 1899 à —, par M. J. Ber-
geron, 724.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRE8 ET DE8 AUTEURS
809
Rougiers. Sur le Trias des environs de
— (Provence) et ses relations avec la
roche éruptive de cette région, par
M. J. Repelin (PI. V), 311.
Roumanie. Lapiez dans des grès cré-
tacés (Massif du Bucegiu, — ), par M.
E. de Martonne, 28. — Sur des Pois-
sons fossiles éocènes d'Egypte et de
— et rectification relative a Pseudo-
lates Heberti Gervaissp., par M. F.
Prie m (PI. II), 341.
Saint-Biaise. Excursion du 8 septembre
1899, aux environs de Mas-Capel et de
—, par M. René Nicklès, 715.
Saint- Chinian. C.-R. de la séance du 8
septembre 1899, à —, 680. — C.-R. de
l'excursion du 7 septembre 1899, de
Saint- Pons a —, par M. J. Berge ron,
682. — Aperçu sur la géologie du chaî-
non de — , par M. Depéret (PI. XXI),
686.
Sainte-Colombe (Col dei. C.-R. de l'ex-
cursion du 6 septembre 1899, au —,
par M. J. Rergeron, 680.
Saint-Gaudens (Uaute-Garonne). Nou-
velles pièces de Dryopithèque et
quelques coquilles de —, par M. Ed.
Harlé(Pl. IV), 30*.
Saint- Gaultier (Indre) Note sur les
Gastropodes du gisement bathonien
de —, par M. M.Cossmann (PI. XIV-
XVII;, 543
Saint- Jean- de-la- Blaquière. C.-R. de
la séance du 15 Septembre 1899, à —,
780.
Saint-Jean- Pied-de-PorL. Sur le bassin
de —, par M. Stuart-Menteath, 413.
Saint-Pons. C -R. de la séance du 6 sep-
tembre 1^99, à —, 613. - C -R. de
l'excursion du 7 septembre 1899, de
— à Saint-Chinian, par M. J. Berge-
ron, 6*2.
Sartne. Sur le Silurien des environs de
Chemiré-en-Charnie (— ), par D. P.
GElilert, 398.
Sauvage Présentation d'ouvrage, 453.
Schlum berger (C). Note sur quelques
Fora min if ères, nouveaux et peu con-
nus du Crétacé d'Espagne (PI. VIII
XI), 456.
Secondaire. Sur le lambeau — de Fou-
zilhon-Gabian, par M. R. Nickles. 743
— Sur la tectonique des terrains —s
dans la région de Clermont l'Hérault,
par M. R Nicklès. 771.
Silurien. Sur le — des environs de
Chemiré-en-Charnie (Sarthei, par M.
D. P. Œhlert, 398.
Stuart-Menteath (P. W.) Observations
sur la géologie des Pyrénées, 120. —
Sur les Klippen des Basses-Pyrénées,
227. — Sur les failles des Pyrénées,
361. — Sur le bassin de Saint -Jean-
Pied-de-Port, 443 — Progrès de la
géologie des Pyrénées, 491. — Sur les
schistes lustrés de Bellongue, 589.
Tarn. Gros cailloux de la Garonne en
aval du confluent du —, par M. Ed.
Harlé, 348.
Tectonique Sur la — de la Collette de
Clars (Alpes- Maritimes), par M. A.
Guébhard, 256. — Etude des terrains
paléozolques et de la — Montagne
Noire (Pi. XVII1-XX), par M. J. Ber-
geron, 617. — Sur la — des terrains
secondaires dans la région de Cler-
inont-l'Hérault. parM.R. Nicklès, 771.
Tehmibr (P.). Les nappes de recouvre-
ment du Briançonnais (PI. I), 47 —
Microgranites de la vallée de la Gui-
sanne (Bord nord du Massif du Pel-
voux), 399.
Terrasses. Note sur les anciennes pla-
ges et— du bassin de Tisser (départe-
ment d'Alger) et de quelques autres
bassins de la côte algérienne (PI. III;,
par M. L. J. B. de Lamothe. 257.
Tertiaire. Lu bassin — d'Asprièrcs
(Aveyron), par M. A. Thévenin, 353.
— Découverte* de fossiles —s en
Egypte, par M. R. Fourtau, 382.
Thau (Etang de;. Note sur le Pliocène
marin des bassins de 1'—, de l'Hé-
rault, de l'Orb et de l'Aude, par M.
E. Jacquemet, 721 — Note sur les
formations miocènes des bassins de
1'-, de l'Hérault, de l'Orb et de
l'Aude, par M. E. Jacquemet, 750.
TatvENiN (A). Le bassin tertiaire d'As-
prières (Aveyron), 353.
Toarnen. Sur le — des environs de
Nancy, par M. Ch. Authelin, 230.
810
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS
Trias. Le Massif du Chettaba et les Ilots
— Iques de Ja région de Constantine.
par M. E. Ficheur, 86. — Sur le
— lque des environs de Rougiers et ses
relations avec la roche éruptive de
cette région, par M. J. Repelin (PI.
V). 311. — Sur un dôme — iquc dans
les environs de Relizane (départe-
ment d'Oran, par M. G. Fabre. 323.
— Sur une discordance remarquable
entre Permien et — dans les envi-
rons de Bédarieux, par M. 001101,748.
Trigonies. Sur les — byssifères, par
M. Collot, 224.
Trilobiles. Etude de quelques — de
Chine, par M. J. Bergeron (PI. XIII),
499.
Turonien. Sur Y Ammonites veramplus
et sur quelques autres fossiles —s,
par M. A. de Grossouvre, 328.
Var. Sur le Gypse de la Bastide (— ),
par M. A. Guébhard, 594.
i Vierges (Roc des). Excursion au — ,
par M. R. Nicklès. 780.
Villers-sur-Mer. Sur la découverte de
nouvelles couches à — , par M. H.
Douvillé, 523.
Vilis. Note sur un bois de — des ciné-
rites du Cantal, par M. P. Fliche, 318.
Zeiller. Présentation d'ouvrages, 454.
Zittkl (K. A. von). Présentation d'ou-
vrage, 451 .
PIN DE LA TABLE ALPHABETIQUE DBS MATIÈRES ET DES AUTEURS
811
TABLE DES GENRES ET DES ESPÈCES
DÉCRITS, FIGURÉS, DISCUTÉS ET DÉNOMMÉS A NOUVEAU
ET DES SYNONYMIES INDIQUÉES DANS CE VOLUME (1)
Actinocamax cf g r an u lattis Blainv.
p. 130.
— Grogsouvrei, p. 429.
— quadratus, p. 130.
— Toucasi, p. 129
— verus, p. 130.
— Westphalicus, 130.
A gn os tus Douvillei Bergeron, n. sp.,
p.603,fig.3;pl XIII, fig. 3.
Algue indet, p. 468, pi. XII, fig. 3.
Amberleya Aurcliana Cossm., n. sp.,
p. 561, pi. XIV, fig. 1.
Ammonites peramplus, p. 329.
Ampeloxyloncineritarum FIiche,p.321.
Ampvllina aglay a (d'Orb.), p. 566, pi.
XVII, fig. 10. — Natica
aglaya d'Orb.
- Michelini (d'Arch.), p. 566,
81. XVI, fig. 2. — Natica
[ichelini q'Arch.
Archœocyathus f p. 623.
Arcomy a Ag., p. 317.
— sp.,p. 317, pi. V, fig. 9.
Arthricocephalus Bergeron, n. g., p. 514.
— Chauveaui Bergeron,
n.sp., p. 514, fig. 9a
Ataphrus discoideus (Morr. et Lyc),
p. 573, pi. XV, fig. 25-26-
Cirossostoma ? aiscoideum
Morr. et Lyc; C. helici-
formi Morr. et Lyc. ; Tro-
chus applanatus Piette: T.
h el ici for mis Piette ; Ata-
Ehrus ovulatus Cossm. ; A.
eliciformU Hudl.
Ataphrus Labadyei (d'Arch.), p. 572,
pi. XV, fig. 23-24. - Tro-
chus Labadyei d'Arch. ;
Turbo Labadyei d'Orb. ;
Monodonta Labadyei Morr.
et Lyc.
Bacchantes obtus a lus Sap. ?, p. 478,
pi. XII, fig. 6
Bactroptyxis axonensU (d'Orb.), p. 548,
pi. XV, fig. 9-11 —
Nerinea Voltzi d'Arch.;
Nerinea axonensis
d'Orb.
— cf. subbrun tr a ta na (d'Orb.)
p. 549, pi. XVII, fig. 20.
— Nerinea bruntrutana
d'Arch.
Bancksia Deckeana Heer ? p. 477, pi. XII
fig. 4.
Brachy tréma Buvignieri Morris et
Lycett.,p. 555, fig. 1,
pi. XV, fig. 1-3.
Brooksclla? p 119, fig. 1-2.
Bulimus Bouvyi Haime, p. 702, fig. 9.
— Cathalai Depéret, n. sp., p.
702, fig. 8.
— gerundensis Vidal, p. 702,
fig. 6.
— Hopei de Serres, p. 702, fig. 7.
Calymmene Brong., p. 500. — Caly-
mene Brong.
— ? sinenxis Bergeron, n. sp.,
p. 500, fig. 1-2, pi. XIII,
fig. 1-2.
Carchartas ( Aprionodon ) frequens
Dames, p. 243, pi. il,
fig. 8-15.
(1) Les noms de genres et d'espèces en caractères romains sont ceux que les
auteurs placent en synonymie.
812
TABLE DES GENRES ET DES ESPÈCES
Car char ias (Prionodon) sp , p. 245-
246 PI. II, fig. 16-17.
Cea sp., p. 327, pi. VI, fig. 1-2.
— iamellosa d'Orb, p. 327, pi. VI,
fig. 3-6.
Cerithulla nuda (Piette), p, 544, pi.
XVII, fig. 21. -Fususnudus
Piette ; Tu M fer du du s
Pie t te ; Ceritella nuda
Cossm.
Cerithium Dorvali Cossm., n.sp, p. 554,
pi. XV, fig. 4 5.
Chilodontotdea trochoides Cossm. n.
sp., p. 574, pi. XVII,
fig. fl-12.
Chondropsis ? p. 468, pi. XII, fig. I.
Chondrusf p. 468, pi. XII, fig. 1.
Chrysophrys, p. 245, pi. II, fig. 21-24.
Cincinna Benoisti Cossm , nov. sp.,
p. 142, fig. 5.
Cirrus Calisto (d'Orb.), p. 575, pi. XIV,
fig. 7-8. — Turbo Calisto
d'Orb. ; Hamusina Calisto
Cossm .
Clausilia sp., p. 703.
Cœlorhynchus sp.,p 245, pi. Il, fig. 20.
Columbellaria bathonica Cossm. n.
sp., p. 552, pi. XV,
fig. 22 et pi. XVII,
fig. 13.
Cren<uter? p. 46.
Crossotolepis Fliche n. g., p. 473, |>1.
XII
i n. g.
— Perroti Fliche n. sp.,
p. 473, pi. XII, fig. 2.
Cuncolina contea d'Orb. p. 461, pi.
VIII, fig. 8 10.
Delphinula Benoisti Cossm., n. sp.,
p. 577, pi. XV, fig. 12-14.
— ? Buckmanni Morr. et
Lyc, p. 579, pi. XVII,
fig. 16 17. — Turbo
Buckmanni Cossm.
Desmocera»{Puzozia Bayle) Munieri,
Repelin, n. sp., p. 369,
pi. VII, fig. 6-9.
?cf. versicoslatutu Mich.,
p. 370, pi. VII, fig. 8.
Dicellocephalus ? sinensis Bergeron ,
n. sp , p F.08.
fig7,pl.XUI,fig.7.
Dictyopsella Munier Chalmas, n. g.,
p. 462.
— Chalmasi Schlumb., n.
sp.,p.463, pi. VIII, fig. 4.
— Kiliam Mun.-Chalm., n.
sp.,p.462,pl. VIII, fig.
5-7, pi. XI, fig. 20.
Drepanura Bergeron, n. g., p. 500.
— Premesnili Bergeron, n
sp.,p.509,fig.8,pl. XIII,
«g 8.
Dryopithecus Fonlani Lartet, p. 304,
pi. IV, fig. 4-7.
Emarginula scalaris Sow-, p. 582, pi.
XVII, fig. 22.
Eucyclus Camillus (d'Orb.), p. 562,
pi XIV, fig 5-6. —Turbo
Camillus d'Orb.
Equus, p. 531 .
— asinus, p. 532, fig. 2.
— asinus allanticus Ph. Thomas,
p. 531, fig. 4.
- Burchelli, p. 532, fig. 3, 7, 10. 13.
— caballus, p. 532. lig. 1 , 6, 9, 12, 19.
- robuslus, p. 538, lig. 18.
- Stenonis, p. 532, p. 536, fig 5,
15, 17, 18.
Goniaster ? p. 46.
Gonodan ? sp., indét., pi. V fig. 6.
•
Guettaria pustulifera Gauthier, p. 346.
— Holaster pustulifer
Coquand ; Cardia s ter pus-
tulifer Peron et Gauthier.
Hamiles massiliensis Repelin, n. sp.
p 371, pi. VII, fig. 11.
— tenuis Repelin. n . sp , p. 371,
pi. VU, fig. 12.
Uipparwn p. 531.
— gracile, p. 536. fig. 16, 20,
21, 22.
Holcoslephanus, p. 334-335.
Hologyra Kokcn p. 315.
— Vassevri Repelin, n. sp..
p. 315, pi. V, fig. 5.
Hoplites sp., p. 368, pi. VII, fig. 10.
TABLE DES GENRES ET DES ESPÈCES
813
Hoplites itpffenm Repelin, n. tp. p. 368,
pL VU, fig. 7.
lacaxina elongata Munier-Chalmas,
n. sp. p. 457, pi. VIII fig.
3: pi. X, fig. 15-18; pi XI,
fig. 19.
Lamna Vincenti Wlnkler sp , p. 242,
pi. H, fig. 2-4.
Leptomaria Palinurus (d'Orb.), p. 580,
pi. XVII, fig. 1.- Pleuro-
tomaria lœvis Desl.; P.
Palinurus d'Orb.
littorina ? Cœneus (d'Orb ), p. 564, pi.
XV. fig. 17-18. — Turbo
cœneus d'Orb.
Lymnma Miche Uni Desh.-Var., p. 700-
703 — L. aquensis Math .
Lytoceraê tenuistritum Repelin, n. sp.»
p. 367, pi. VII, fig. 5.
Marmolatella Kittl., p. 316.
— minima Repelin. n. sp.,
p. 317, pL V, fig. 7.
— Rougieri Repelin, n. sp.,
p. 316, pi. Y, fig. 2
— cf. Rougieri Repelin, n.
sp. p. 316, pi. V, fig.
10; p.316,pf.V,fig. H.
Meandropsina Vidali Schlumb., p. 463,
pi. Mil, fig. 2, pi. IX,
lig. 11-14.
Medusina Walcott? p. 628.
Melanioptyxis altararis (Cossm.). p.
546, pi. XV, lig. 6 8.
— Nerlnea voltzi
Morr et Lyc. ; Neri-
nea altararis Cossm.
Melanopsis castrensis Noulet, p. 705.
— M . dublosa Math .
Mesospira Cotsmann, n. g., p. 559,
— Ley meriei (d'Arch.), p. 560,
fig. 3, pi. XV, lig. 19-20.
— Phasianella Leymeriei
d'Arch.
Hier aster arenatus Sismonda, p. 418.
Myliobatis sp., p. 246, pi. Il, fig. 25.
Neomylodon Listai, p. 498.
Neoptychiles, p. 328.
Nerinella fibula (Eud. Desl.), p. 547,
pi. XIV, fig. 2-3. — Neri-
nea iibula Desl.
Septembre 1901. - T. XXVII.
Nerinella cf. sealaris (d'Orb.). p. 548,
pi. XIV, fig. 9. — Nerlnea
scalaris d'Orb.
Nerinea carinala Plette,p.545,pl. XIV
fig. 13.
Neritodomus ponderotus (Piette), p.
569, pi. XVI. fig. 1. —
Nerita ponderosa Piette
Neritopsis Benoisti Cossm., n. sp.. p.
567, pi. XVII, lig. 18, 23.
Nontonina crelacea Schlumb, n. sp.,
p. 460, pi. VIII, fig. 1,
pi. XI, fig. 21-22.
Nummulites alacica Ley m, p. 697. —
N Guetta rdi d'Arch.; N.
Blanitzensis.
Ochetochilus Cossm., n. g., p. 556.
subvaricosus Cossm., n.
p. 558, fig
Ug. 15-16.
sp., p. 558, fig. 2, pi.
XV, «g. "
Odontaspis Abbatei Prlem, n. sp., p.
246, pi. II, Ug. 26.
— élégant, Ag. sp., p. 243,
pl. H, fig. 7.
Olcostephanu8, p. 334-335.
Olenoïdes Leblanci Bergerou, n. sp.
p. 506, fig. 5-6, pl. XIII,
lig. 5-6.
Oxyrhina Desori Ag., p. 243, pl. Il,
fig. 5-6.
Vachy disons, p. 328.
Paras mi lia sp., p. 364, pl. VII, fig. 4.
Palella Aureliana Cossm , n. sp.. p.
584, pl. XVI, lig. 7.
— macéra Cossm., p. 583, pl. XVI,
lig. 8-9.
— raduloides Cossm., n. sp., p.
583, pl. XVI, lig. 6.
Pentacrinus Legeri Repelin, n. sp., p.
364, pl. VII, fig. 1.
Phasianella aculiuscu la Morr. et Lyc,
p. 571, pl. XVII, lig. 19.
— Bourguelia conlca
Hudl. et Wils.
— ? elcgans Morr. et Lyc,
p:56U, pl. XV, lig. 21.
— ? Grossouvrei Cossm., n.
sp, p. 570. pl. XIV, Ug.
12, pl. XVII, lig. 14.
Bull. Soc. Géol. Fr. - 52
814
TABLE DES GENRES ET DES ESPÈCES
Picea Engelmanni Parry Engelmann,
p. 475, pi. XII, flg. 3.
Pileolus œquico*latU8 Cossm . , nov. sp.,
p. 568, pi. XVII, flg. 15.
Planorbis pseudo - ammoniut Schl.-
Var.,p. 703.
— Rouxi Noulet, p. 703. —
PI. Cberlieri Desh.
Plesiospatangus Cotieaui Pomel, p. 344,
fig. 1 — Euspalan-
gus Cotteaui de Lo-
riol.
Prolatee Heberti Gerv. sp. p., p. 252.—
La tes Heberti Gerv.; Pseudo-
la tes Heberti Gerv. sp.
Pseudolates Hefrerti Gervaissp., p. 252.
Purpuroidea bicincta (Piette), p. 555,
pi. XIV, fig. 4.— Pur-
para bicincta Piette.
— multi/ilosa Cossm., n.
sp , p. 550, pi XVI,
«g. 10.
Pycnodus Mokaltamensis Priem, p.
241, pi. II, fig. 1.
Saurocephalus Fajumensi* Dames, p.
245, pi. H, fig. 18-19.
Scopélidé de genre indéterminé, p. 250,
pi. II, fig. 31.
Scorpœnoides Popovidi Priem n. g.,
Sphaerium castrense Noulet Var. ; p.
703.
Terebratulina Afaïrenm Repelin n sp.,
p. 365, pi. Vil. fig. 2.
Trigonia carinata Agasslz, p. 224, fig.
1 et 2. — T. harpa Leyme-
rie.
Trocholoma imbricfila, Cossm., p. 581
pi. XVI, fig. 3-5.
— magnifica Cossm, p. 58if
pi. XIV, fig. 10-11.— T.
globulus Piette.
Trochus Marioni Repelin, n. sp , p. 366,
pi. VU, flg. 3.
Undularia Koken, p. 314.
— Bertrandi Repelin, n. sp.,
p. 314, pi. V. fig. 3.
— &ri0t/a Repelin n.sp., p. 315,
pi. V, fig. 8.
— • o bluta Repelin, n. sp., p.
315, pi. V, fig. 1.
— simple* Repelin, n . sp . , p .
315, pi. V, fig. 4.
Vnio stricteplicatus Noulet, p. 307. —
U. strictlplicatus Noulet.
Valvato (Cincinna) Benoisti Cossmann,
nov. sp., p. 142, fig. 5, p. 556,
pi. XVII, fig. 8-9.
Vidalina Schlumb., n. g., p. 459.
— hispanica Schlumb., n. sp.,
p 459, pi. VIII, fig. 6, pi.
IX. fig. 12-13.
Vilis subintegra de Sa porta ?p. 319.
Viviparus aurelianut Benoist, p. 141,
fig. 4: p. 565, pi. XVII,
fig. 2-7.
Ziziphus Ungeri Heer, p. 477, pi XII,
fig. 5.
FIN DE LA TABLE DBS GENRES ET DES ESPECES
i
815
LISTE DES FIGURES ET DES CARTES
INTERCALEES DANS LE TEXTE
Pages
G. Dollfus et P. Gaucher y. — 1. Coupe de la voie ferrée à Ingré, près
Orléans .
E.deMARTONNB.— 1. Carte donnant la position des lapiez dans le Massif du
Buccgiu en Roumanie (150 000)
P. Termier. — 1. Carte donnant les limites respectives des 4 zones alpines
dans le Briançonnais (500.000*)
2. Trois coupes à travers les lambeaux de la 4' écaille
(Lambeaux de l'Eycbauda et de Serre-Chevalier . .
3. La Butte des Galets, vue du Sud ... *
4. Lame houillère, permienne ou trlasique, a la base du
lambeau de Serre-Chevalier
!>. Retour de la lame de quartzites dans le flanc renversé
du synclinal, à Prorel, et au dessus des Fa ures. . .
H. Coupes à travers la chaîne de Montbrison ......
7. Coupe au voisinage du col de la Poustcrle
8. Coupe dans la forêt de Monétier
9. Chevauchement de la 3e écaille sur la 2* écaille . . .
E. Ficbeur. — 1. Coupe du Djebel Zouaoui et du Karkara
2. Coupe du Karkara au Djebel Ch et ta ba
3. Carte géologique du Chettaba et des environs de
Constantlnc (75.000»)
4. Croquis montrant les relations du Trias et du Sénonien
au nord du Chettaba . . .
5. Superposition du Trias au Sénonien, au N. du Chettaba .
6. Etirement delà bande triasique dans le Sénonien . .
7. Profil du Kef Talaa, vu de l'est
8. Coupes parallèles dans le Trias du Chettaba
9. Coupe générale du Chettaba au Djebel Ouach . .
10. Coupe du Trias à Ain Goulla
11. Coupe du Koudat el Amra (Oulcd Rahmoun) ....
V. Paquier. — 1-2. Restauration d'une Méduse fossile des Lauzes du Cam-
panien du Villard de Lans (Isère) . . .
M. Cossmann. — 1. Coupe de Touvcnt à Thenay
2. Coupe de Saint-Gaultier à Chabenet
3 Coupe de la carrièrre du bourg de Saint-Gaultier . .
4. Viviparus aurelianus Cossmann
5. Valvata Benoisti Cossmann
.1-2. Trigonia carinata Ag
21
29
50
60
62
64
65
70
71
73
74
91
92
95
99
100
101
101
103
105
108
113
119
137
138
138
141
142
COLLOT. —
816
LI8TB DES FIGURES ET DES CARTES
R. FODRTAU. — 1.
3.
L. J. B. de Lamothk
2.
3.
4.
6.
7.
8.
9.
10.
E. FOURNIER.
— 1.
2.
V. Gauthier.
— 1.
A. Thbvbnin.
- 1.
2.
J. Repelin. -
- 1.
H. Dou VILLE.
— 1.
Caralp. —
1.
2.
3.
4.
6.
Bourg bat. —
1.
2.
3.
4.
5.
6.
J. Beroeron.
- 1.
3.
Croquis topographiqae indiquant remplacement de la
carrière de Kafr el Ahram . 237
Coupe de la carrière au sud du cimetière arabe de
Kafr el Ahram 238
Coupe au Gebel Glouchy prise sur le sentier de Sik-
ket-el-Dabban 239
. — 1 . Coupe schématique parallèle à la côte à travers
la plage de 53" 264
Coupe schématique entre la ferme Vainsonno et la
mer 264
Disposition théorique des anciennes ail uvions de Tisser,
vers l'embouchure 267
Coupe des terrasses de Palestro en aval du village . . 269
Coupe schématique de la plage de 100" entre le K\Rach-
dia et lisser 274
Coupe schématique entre le K* Bou Dissa et Tisser . . 274
Coupe schématique entre le point 141 et Tisser au nord
de la coupe de la figure 6 275
Figure schématique des déplacements du niveau de
Tisser 286
Diagramme des mouvements relatifs du niveau de la
mer pendant le Pléistocène 291
Schéma montrant l'influence des différences de struc-
ture du sol sur l'épaisseur des nappes alluviales 292
Coupe relevée à la Baume des Onze heures 339
Coupe prise au vallon de la Vessc 339
Appareil apical du Plesiospatangus Cotteaui Pomel 345
Coupe par Tournhac et Las Cazes 357
Coupe par Villeneuve et A s prières 358
Coupe schématique du versant nord de l'Ile Maire. . 363
Essai d'une coupe transversale de Madagascar entre
Morondova et Janjina, d'après les levés et les obser-
vations de M. Villiaume . . 387
Coupe entre Saint-Lary et Portet 440
Coupe d'Alas à la côte de Coumaoury 440
Coupe delà montagne des Ruines à Balagnères. . . 440
Coupe du signal de Castelnerou a Beouech 440
Panorama schématique près du col d'Argent 441
Coupe entre le col de l'Airain g et la Bellongue. . . . 441
Coupe du Jurassique sup. entre Baudin et Sellières. 447
Coupe du Jurassique entre Vadnas et Saint-Pierre . . 447
Coupe du Jurassique supérieur de Cesansey 447
Coupe du Jurassique entre Montenet et les Crozets . . 448
Faille oblique de Chevry à Pont-de-Lizon 449
Coupe de Rochefort à Avignon 449
Fragment de céphalothorax de Calymmene ? sinensis
Bergeron 501
Fragment de Joue mobile appartenant peut-être a la
même espèce . 501
Céphalothorax d' A g nos tus Douvillei Bergeron. . . 503
LISTE DK8 FIGURES ET DES CARTES
817
4. Hypostome indéterminé 504
5. Pygidium d'Olenoïdes Leblanei Bergeron 506
6. Pygidium d'un individu jeune d'Olenoïdes Leblanei. . 506
7. Pygidium de Dicelloctphalus ? sinensis Bergeron . . ,'108
8. Pygidium de Drepanura Premesnili Bergeron. ... 509
9. Arthricocephalus Chauveaui Bergeron 515
F. Roman. — 1. Coupe prise à la limite nord de la feuille de Montpel-
lier, entre Villetelle et Saturargues 518
M. Bouli. — 1. 3* molaire de lait infér. gauche d'un Equus caballus. 532
2. Id. d'un Equus asinus 532
3. Id. d'un Dauw. 532
4. Id. de l'Equidé fossile de l'O. Seguen 532
5. Id. d'un Equus stenonis 532
6. 3* mol. super, gauche d'un Equus caballus de Solutré 534
7. Id. d'un Dauw (Equus BurchelliJ 534
8. Molaire supérieure gauche de l'Equidé du lac Karar . 534
9. Dernière mol. sup. gauc. d'un Equus caballus (Solutré) 535
10. Id. d'un Dauw (d'après Owen) 535
11. Id. de l'Equidé du lac Karar 535
12. Molaire infér. gauche d'un Equus caballus de Solutré. 536
13. Id. d'un Dauw [Equus Burcnelli) 536
14. Id. de l'Equidé du lac de Karar 536
15. Id. d' Equus Stenonis 536
16. Id. d'Hipparion gracile 53Ç
17. Molaire sup. gauche de YEquus Stenonis 538
18. Id. d'Equus r obus tus Solilhac . 538
19. Id. d'Equus caballus 538
20-22. Trois molaires inférieures de lait du côté gauche
d'Hipparion gracile 541
M. CossMAifr*. — 1. Brachytrema Buvignieri Morr. et Lyc 555
2. Ocneiochilus subvaricosus Cossmann 557
3. Mesotpira Leymcriei d'Arc h 559
A. Guébbard. — 1. Plan géologique de la Gorge de La Bastide (Var) (30000*) 595
2. Schéma des plis de la Gorge de La Bastide 598
3. Coupe à travers le gypse de La Bastide 600
Réunion extraordinaire de la Montagne-Noire
J. Bergeron. — 1. Schéma de la Montagne Noire 666
2. Vue allant de la colline de la Serre au massif de Mou-
nio de Cabrières et donnant une partie de l'écaillé
de Cabrières . 669
3. Carte des plis allant du massif de Tourière à celui de
Japhet V (50.00(r) 670
4. Massif de Tourière 671
5. Massif du Château. Coupe allant de la vallée de
Pitrous au vallat des Clavies 672
6. Massif de Mounio de Cabrières. Coupe allant de la
vallée de Pitrous au vallat des Clavies 673
7. Coupe prise à l'extrémité orientale du massif de
Mounio de Cabrières 674
818
LISTE DES FIGURES ET DES CARTES
8. Coupe du massif de Japhet I 674
9. ( oupe du massif du Japhet III . 675
10. Coupe du massif du Japhet IV 675
11. Coupe du massif du Japhet V .... 676
12. Coupe de Cathalo à Saint-Chinian 683
13. Pont de Poussarou 684
Ch. Deperet. — 1. Schéma des plis du chaînon de Saint-Chinian (320.000') 687
2. Coupe passant par le rocher Notre-Dame 688
3. Coupe au col de la route de Cebazan à Saint-Chinian. 688
4. Coupe de Picrrerue 689
5. Coupe de la chapelle Saint- Pierre 694
6-9. 6. Bvlimus gerundensis\\da\. — T.BulimusHopei
de Serres. — 8. Bvlimus Cathalai Deperet, n
sp. — 9. Bvlimus Bnuvyi Haime. 702
10. Coupe du synclinal oocène du Minervois 704
11. Coupe passant par le rocher Notre-Dame 710
12. Coupe de la Chapelle Saint-Pierre 710
13. Coupe au col de la route de Cebazan à Saint-Chinian. 713
14. Coupe de Picrrerue 713
15. Coupe de Cazedarnes-le-Bas . 714
R. Nicklks. — 1. Coupe du pli couché au nord de Cazedarnes 715
2. Faisceau du Roucan 717
3. Coupe de Cazal-Viel 718
4. Faisceau de plis du Roucan. 719
5. Anticlinal couché de Sévignac 719
6. Coupe du Rhétien au sud d'Hérépian 732
7. Coupe prise près de l'ancienne gare Bédarleux. . . . 735
8. Vue des hauteurs jurassiques à l'est de Bédarieux. . 737
9. Structure des environs de Fouzilhon 743
10. Coupe à l'ouest de Fouzilhon 744
11. Vue de la région comprise entre Salasc et Mourèze. . 771
12. Carte des écailles de Uermont-I'Hérault (65.000e) . . 774
13. Coupe des écailles de Clermont l'Hérault sur la route
de Lodève 774
14. Ecailles de Clermont-l'Iiérault entre Nébianet N-D du
Peyrou 775
15. Coupe près de la gare de Rabieux 781
16. Coupe des Geyssières 782
17. Aspect des affleurements des Geyssières . ...... 783
18. Faille Inverse du col des Geyssières 784
19. Coupe prise sur la route d' Arbora s à la Vacquerie . . 784
Collot. — 1. Coupe au village de Dio près Bédarieux 741»
FIN DE LA LISTE DES FIGURES ET DES CARTES
819
LISTE DES PLANCHES
PI. 1. — P. Termier. — Esquisse des affleurements actuels des diverses
écailles superposées qui constituent, près de Briançon, la zone
du Bhian<;onnais (topographie de la carte de l'état-major au 80 000^).
PI. 11. — F. Priem. — Poissons fossiles éocènes d'Egypte et de Roumanie —
Les échantillons sont représentés sans retouches et grantieur natu-
relle, sauf avis contraire. — Fig. 1. Pycnodus mokattam en sis Priem.
Lutéticn inférieur du Mokattam. Moitié droite de la mandibule. —
Fig. 2-4. — Lamna Vinrenti Winkler sp. Lutéticn inférieur du pla-
teau des Pyramides de Ghizeh ; fig. 2 et 3, dents antérieures; fig. 4,
dent latérale, vues par la face interne —Fig. 5-6. Oxyrhina Desori
Agassiz. Détritus d'érosion du pied du Mokattam ; fig. 5, dent laté-
rale, et fig. fi. dent antérieure, vues par la face externe. — Fig. 7.
Odontaspi* elegans Agassiz sp. Détritus d'érosion du pied du Mokat-
tam. Dent antérieure vue par la face interne. — Fig. 8-15. Carcha-
rias (Aprionodon) fréquent Dames. Lutétien supérieur. Gisement de
Kafr el Ahram : fig. 8-11, dents inférieures; fig. 12 15. dents
supérieures, vues par la face interne. — Fig. 16 Carchahas (Prio-
nodon) Fp. Dent vue par la face interne. Lutétien supérieur. Gise-
ment de Kafr el Ahram. —Fig. 17. Carcharias (Prionodon) sp.
Dent vue par la face interne. Lutétien supérieur du Gebel Ghiouchy.
— Fig. 1819. Saurocephalus Fajumensis Dames. Lutétien supérieur.
Gisement de Kafr cl Ahram. — Fig. 20 Cœlorhynchus sp. Lutétien
supérieur Gisement de Kafr el Ahram. — Fig. 21-24. Chrysophrys
sp. Dents. Lutéticn supérieur. Gisement de Kafr el Ahram Fig. 25.
Mylwbatix sp. Plaque médiane. Lutétien supérieur. Gisement du
Gebel Ghiouchy. — Fig. 26. OdtmtaspU Abbatei n. sp. Dent anté-
rieure vue de côté. Lutétien supérieur. Gisement du Gebel Ghiouchy.
— Fig. 27-27. Scorpœnoidcs Popovicii n. g., n. sp. Empreinte et
contre-empreinte. Marnes éocènes de la Valea Caselor (Roumanie).
— rig. 29-.T0. Les mêmes grossies trois fois. — Fig. 31 . Scopélide de
genre indéterminé. Marnes éocènes de la Valea Caselor (Roumanie).
PI. III. — de Lamothe. — Carte des anciennes plages et terrasses du bassin de
l'Isser (Algérie) au 50.000*, topographie de la carte de l'État- major
(feuille de Ménerville). — Pour la clarté et la simplification de la
carte, on n'a figuré comme dépôts littoraux que ceux qui correspon-
dent à des plages bien définies. Pour les autres, on se reportera à la
carte géologique détaillée, où ils sont représentés par le signe p1 . —
Pour les mômes motifs on a supprimé les alluvions récentes et les
limons du lit actuel, indiqués sur la carte détaillée par le signe a-, ainsi
que les limons situés en dehors de la zone des terrasses. — On a
également omis les amas de galets accumulés au pied des pentes,
notamment dans l'oued Ben Hazine et ses aflluents ; ils sont récents
ou contemporains des niveaux les plus bas. — La cote 87 du plateau
des Béni K sir est inexacte et a été remplacée par la cote 78.
820 LISTE DES PLANCHES
PI. IV. — Edouard Harlé. — Nouvelles pièges de Drtopithèque de Saint -
Gaudens. — Fig. 1-23. Portion gauche d'une mâchoire inférieure
d'un Dryopithèque ; fig. 1, vue suivant sa face externe; fig. 2,
vue suivant sa face interne; fig. 3, vue en plan, un peu inclinée vers
l'extérieur. C, canine, Pft, P*, prémolaires ; M«, Mt, M,, arrière- mo-
laire; ac, fond de l'alvéole de la racine de la canine droite. — La
cassure do la symphyse a été légèrement teintée. La paroi posté-
rieure du menton descendait brusquement jusqu'au bas de la
mâchoire dès l'aplomb de la prémolaire antérieure P, et en
arrière, son raccordement avec le corps de la mâchoire s étendait,
tout au plus, jusqu'à l'aplomb de l'extrémité antérieure de la
première arrière-molaire M,. — Fig. 4 5 et 6-7. Deux arrière-mo-
laires inférieures droites d'un Dryopithèque; fig. 3, l'avant-dernière
Ma, vue en plan; fig. 5, la même, vue suivant sa face externe. On
remarquera que cette dent est aussi large que longue. Fig. 6, la
dernière arrière-molaire M,, vue en plan ; fig. 7, la même, vue
suivant sa face interne.
PI. V. — J. Repelin. — Fossiles du Trias de Rouoiers (Var). — Fig 1. Undu-
laria obtusa Repelin. — Fig. 2. Marmolatella Rougieri Repeiin. —
Fig 3. U. Bertrandi Repelin. — Fig. 4. U. simplex Repelin. —
Fig. 5. Hologyra Vasseuri Repelin. — Fig. 6. Gonodon sp. ind.
— Fig. 7. M. minima Repelin. — Fig. 8. U. exigua Repelin. —
Fig. 9. Ârcomya sp. — Fig. 10 et 11. M. cf. Rougieri Repelin.
•
PI. VI. — F. Canu. — Ovicelles des Céidêes . — Fig. 1. Cea sp. Ovicelles brisés
montrant l'ouverture de la partie restée tubulaire. X 10,5. — Fig. 2.
Cea sp. Les deux petits pores accouplés constituent peut être l'œcio-
pore. X 10.5. — Fig. 3 6. Cea la me Uo sa d'Orb. x 10,5. ; 3,5. Pre-
mière face ; 4.6. Seconde face.
PI. Vil. — J. Repelin. — Fossiles aptiens de l'Ile Maire, près de Marseille. —
Fig. 1. Pentacrinus Legeri Repelin. — Fig. 2. Terebralulina Maï-
rensis Repelin. — Fig. 3. Trochus Harioni Repelin. — Fig. 4.
Parasmilia sp. . — Fig. 5. Ly laceras tenuistrilum Repelin. —
Fig. 6. Desmoceras (Puzozia) Munieri Repelin. — Fig. 7. Hoplites
Apticnsis Repelin. — Fig. 8. Desmoceras? cf. versicostatum Mich.
— Fig. 9. Desmoceras Munieri ? Repelin. — Fig. 10. Hoplites sp.
— Fig. 11. Hamites massiliensis Rep. — Fig. 12. Ham. tennis Rep.
PI. VIII. — C. SCHLUMBEROER. — FORAMINIFÈRES DU CRÉTACÉ D'ESPAGNE. — Fig. 1.
Nonionina crelacea Schlumb., au grossissement de 25 diam. — Fig. 2.
Meandropsina Vidali Schlumb., jeune, forme microsphérique, au
grossissement de 20 diam. — Fig. 3. Lacazina elongata Mun.-Chal.,
au grossissement de 5 diam. — Fig. 4. Dictyopsella Chalmasi
Schlumb., au grossissement de 15 diam.— Fig. 5. D. Kiliani Mun.-
Chal , au grossissement de 20 diam. — Fig. 6. Vidalina hispanica
Schlumb., au grossissement de 20diam. — Fig. 7. D. Ktliani M un -
Chai , section longitudinale, au grossissement de 25 diam. — Fig. 8.
Cuneolina conica d'Orb., section transversale, au grossissement de
25 diam. — Fig 9. C. conica d'Orb., vue extérieurement, au gros-
sissement de 25 diam. — Fia. 10. 6. conica d'Orb., section plane, au
grossissement de 25 diam.
U8TI DBS PLANCHES 821
PI. IX. — Id. — Flg. 11. Meandropsina Vidali Schlumb., section plane, an gros-
sissement de 120 diam. — Fig 12. Vidalina hispanioa Schlumb.,
section transversale, au grossissement de 45 diam. —Fig. 13. V. his-
pa ira Schlumb., section longitudinale, au grossissement de 85 diam.
— Fig. 14. M. Vidali Schlumb., jeune, de (orme mégasphérique, an
grossissement de 35 diam.
PI. X. — Id. — Fig. 15 18. Lacazina elongata Mun. -Chai.; fig. 15, Forme micros-
phérique, section longitudinale, au grossissement de 17 diam.; Hg. 16,
Forme mégasphérique. section longitudinale, au grossissement de
32 diam.; fig. 17,Trématophoreau grossissement de 25 diam ; fig. 18,
Forme mlcrosphériquc, section transversale, au gross. de 25 diam.
PL XI. — Id. — Fig. 19. Lacazina elongata Mun. -Chai., (orme mégasphérique,
au grossissement de 85 diam. — Fig. 20 Dictyopsella Kiliani Mun.-
Chal., section transversale, au grossissement de 50 diam. — Fig. 21.
Nonionina cretacea Schlumb., section longitudinale, au grossisse-
ment de 85 diam. — Fig. 22. If. cretacea Schlumb., section trans-
versale, au grossissement de 100 diam .
PI. XII. — P. Fliche. — Fossiles végétaux de l'Oligocène Alpin. — Flg. 1,
Algue. — fl, bifurcation du thalle : 6, base ; c, extrémités de thalles.
— Fig. 2. Crossotolepis Perrnti n. sp. — a9 sillons de récaille ; b, 6',
(ranges d'écaillés. — Fig. 3. Picea Engelmanni Parry Engelmann. —
Fig 4. Bancksia DeckéanaHeerl.— Fig. 5. Ziziphus LngeriHeer.
— Fig. 6. Bacchantes obLusatus Sap. ?
PI XIII . — J. Bergeron.— Trilobites de CniNE. — Fig. 1. Céphalothorax de Calym-
mené ? sinensis n. sp. — Fig. 2. Joue mobile appartenant peut-être à
l'espèce précédente — Fig. 3. Céphalothorax d'Agnostus Douvillei
n sp. — Fig. 4. Hypostome indéterminé.— Fig. 5. Pygidium d'0/é-
noïdes Leblanci n. sp. — Fig. 6. Pygidium d'un individu jeune
d'Olenoïdes Leblanci n sp — Fig. 7. Pygidium de Dicellocephalus?
sinensis n. sp. — Fig. 8. Pygidium de Drepanura Premesnili n.
gn., n sp.
PI. XIV. — M. Cossmann. — Gastropodes du terrain Bathonien de Saint-
Gaultier. — (Toutes les figures sont de grandeur naturelle, sauf 10
(PI. XVI) réduite de moitié, et 15 à 23 (PI. XVII) qui sont grossies
une fois et demie). Fig. 1. Amberleya Aureliana Cossm.— Fig. 2-3.
Nerinella fibula [Desl.]. — Fig. 4. Purpuroidea bicincta. [Piette].
— Fig. 5 6. Eucyclus Camillus [d'Orb.]. - Fig. 7-8. Cirrus CalisLo
[d'Orb.]. — Fig. 9. iïerinetla cf. scalaris [d'Orb. |. — Fig 10 11
Trochotoma magnifxca Cossm. — Fig. 12. Phasianella? Grossou-
vrei Cossm. — Kerinea carinata Piette.
PI. XV. — Id. — Fig. 1-3. Brachytrema Buvignieri Morr. et Lyc. — Fig. 4-5.
Cerithium Dorcali Cossm — Fig. 6-8. Melanwptyxis Altararis
[Cossm.].— Fig. 911. Bactroptyxis axonensis [d'Orb.].— Fig 12-14.
Delphinula Benoisti Cossm . — Fig. 16. Ochetochylus subvarteosus
Cossm. — Fig 17-18. Ltttorina Cœneus [d'Orb.]. — Flg. 19-20.
Mesospira Leymeriei [d'Arch.]. — Fig. 21. Phasianella? eleg ans
Morr. et Lyc. — Fig. 22. Collumbellaria bathonica Cossm. —
Fig. 23-24. Ataphrus Labadyei [d'Arch.]. — Fig. 25-26. À. discoideus
[Morr. et Lyc.].
822 UBTE DES PLANCHES
PI. XVI. — Id. Fig. 1. Neritodomus pondéra sus [Piette]. — Fig. 2. Ampullina
M ichelini [d'Arch].— Fig. 3-5. Trochotoma imbricata Gossm. — Fig. 6.
Patella raduloides Cossm. — Fig. 7. P. Âureliana Cossm. — Fig.
8-9. P. macena Cossm. — Fig. iO. Purpuroideamultifi losa Cossm.
PI. XVII.— Id.— Fig. i. Leptomaria Palinurus [d'Orb.] — Fig. 2-7. Viviparus Aure-
lianus Cossm. — Fig. 8-9. Valvata (CincinnaJ Benoisti Cossm. —
Fig. iO. Ampullina Âglaya [d'Orb.]. — Fig. 11-12. Chitodontoidea
trochoides Cossm. — Fig. 13. Columbellaria bathonica Cossm. —
Fig. 14. Phasianella ÎGrogsouvrei Cossm. — Fig. 15. Pileolus aequi-
costatus Cossm. — Fig. 16-17. DelpMnula ? Buckmanni Moor. et
Lyc. — Fig. 18 et 23. Neritopsis Benoisti Cossm. — Fig. 19. Pha-
sianella ? aculiuscula Moor. et Lyc. — Fig. 20. Baclroptyxis sub-
br un trutana [d'Orb.]. — Fig. 2\.Cerithiella nuda [Piette]. — Fig.
22. Emarginula scalaris Sow.
Pi. XVIII. — J. Bergeron. — Contact du Dévonien et du Carbonifère sur la
route de Laurenque. — Par suite du déversement des couches vers
le nord, la succession naturelle se trouve inversée.
PI. XIX. — Id. — Cabrières et le Pic de Bissous. — 1. Ordovicien . — 2. Dolomie
du Dévonien inférieur. — 3. Givétien. — 4. Zone à Gephyroceras
intumescens. — 5. Zone à Chi lacera s curvispina. —6. Calcaire
griotte à Clyménles. — 7. Calcaire et schistes. Niveau à Cypridines.
— 8. Lydiennes, adlnoles, schistes et calcaires à la base du Carboni-
fère. — 9. Schistes tournaisiens . — 10. Calcaires viséens. — 11.
Filons de quartz. — 12. Tufs calcaires de l' Esta bel le.
PI. XX. — Id. — Collines des Japhet. — 1 . Schistes ordoviciens. — 2. Dolomies
du Dévonien inférieur. — 3. Givétien. — 4. Calcaire noir à Gephy-
roceras intumescens et calcaire vacuolaire à Cfiiloceras curvispina.
— 5. Calcaire griotte à Clyménles; calcaire et schistes du niveau à
Cypridines. — 6. Schistes tournaisiens. — 7. Calcaire viséen.
PI. XXI. — C. Depéret. — 1. Flanc inverse du pli couché de marnes et cal-
caires DE ROGNAC AU ROC NOTRE-DAME PRÈS SaINT-ChINIAN . — R1, R2
R* sont les trois barres de calcaire de Rognac renversées sur un pla-
teau sub-horizontal de calcaire lutétien lacustre (L) et de Nummu-
litique marin (N). — 2. Flanc inverse du même pu un peu a l'ouest
de la chapelle Saint-Pierre. La série renversée comprend ici les
marnes vitrolliennes (V), le calcaire paléocène à Physa prisca (P) et
le calcaire nummulitique à Alvéolines (N) ; le tout couché au nord
sur le plateau des grès d'Assignan (A) et des calcaires lu létiens lacus-
tres (L). —3. Talus formé par l'étage de Rognac au sud de la
ville de Saint-Chinian : à la base les grès a Reptiles (G), en haut \a
barre dentelée du calcaire de Rognac (R1). En bas du talus, la vallée
du Vcrnazobre (a1, alluvions anciennes). — 4. Érosions dans les
ALLUMONS ROUGES SOUS-BASALTIQUES PLÉISTOCÈNES (p1), DU COURBESOU,
PRÈS BÉDARIEUX.
FIN DE LA LISTE DES PLANCHES
m
DATE DE PUBLICATION
DES FASCICULES QUI COMPOSENT CE VOLUME
Fascicule 1
— 2
— 3
— 4
5
6
feuilles i-7, PI. I), avril 1899.
— 8-16, PI. II), juin 1899.
— 17-22, PI. IIIVI), août 1899.
— 23-28, Pi. VII), novembre 1899.
— 29 38, PI. VIIIXVII), mars 1900.
— 39 52, PI. XVIII-XX1), août 1901.
Non :
ERRATUM DU TOME XXV
Page 399, Ûg. 8. — La ligne qui marque le thalweg de la Moael!,
erreur, tracée pan. 1161e au grand cote de la page, an lien d'être inclinée de gaucl
à droite pur rapport a ce coté, d'une quantité égale à la pente de la rivière .
lire lu ligure 11 luut donner a cette ligne l'Inclinaison correspond a nu- a la pente
de la Moselle, de telle lut-on que le trait qui représente le sommet d. la terrante
Remiremont-Salnt-fiabord, paraisse parallèle a la ligne des jeux, e
quent, horizontal.
ERRATA DU TOME XXVII
Liste des travaux publiés far Ciufer :
Page 190, ligne 11, ajouter : IBM. — Voyage à Bornéo {Annale» de Grographit
VU, 1893-189*, n' 11, 15 avril 1894, p. 371-381).
M.
; Lauotbe.
Page 890. dernière ligne, au lieu de « léendus • lire a étendus »
— £91, Cg. 9, au Heu de « 25>««- » lire a l3*»* ».
— 295, 1" colonne, au lieu de « émeraion a la cote SB a, lire « Émerslon ■
cote 13 ».
— 296, 1" ligne, an lien des mois n plus de 70* », lire « près de 90- i
%■ ligne, au lieu de « 25 à 30m », lire • 40* au moins i.
— 300, ligne 18, intercaler le mpt horizontales entre le mot i variation* ■■ et
les mots o du niveau de base ».
Planche III, légende. Alluvlons du 2* niveau, au Heu de n 120 a 150* », lire a 130 *
190* ». Dans cette planche quelques signes Ai, sont par erreur munis de
l'exposant 2, et figurés ainsi A;. Il faut supprimer cet exposant 2.
Note de M. C. Schlumberger
Bull. Soc. Géol. de France 3™ Série T. XXVIi. PI Vlli
Note de M. C. Schlumbcrger
Bull. Soc. Geol de France 3mB Série. T. XXVII. PI, IX
(Stmca du 8 Kov. 1399)
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Note de M. C. Schltimberger
Bull. Soc. Gôol. de France ?™ Série T. XXVII. PI, X
(Séance du 6 Mot. 1399)
Note de M. C. Schlumbeiyer
Bull. Soc. Gtol. de France 3™" Sérié l. XXVII. Pi. XI
lf-a! ■ Jll i. Nov 1839J
Hôte de M. Fliche
p» Série) T. XXVII. PI. XII.
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F-i:t>r végétaux de l'O'.lgOîèns »'-P»
%
\fLote- Oc JTL, *3-. UJei^cïon
:-eo], de France 3e Série T. XXVII,
Soie île M. ,W. Cmumann
Bull. 8m. Ort»l. do Fran.?9 3"" Séri*. T. XXVII. PI. XIV
■?rtciro!)i'i-: in T«™r. Bath*»nwn H^ !*t- jviltisr (Tndr?)
.Voft* (te M. M. Coxsmimtt
'-!">• S-.-r:e. T. aXVIî. PI. XV
*Hî
fit fit
^ # t». $ i?
i1v •]■: Ternir. F-vh"
Xote de M. M. tUtssmann
Bull Soc. Géol. de France 3™ Série. T. XXVII. PI. XVI
(9w v:-; U'-«nLmifi99)
3# #
; BatV-riion d? ~;-0.v:Hier 'Indre)
Sote (/<• M. M. C.oxsinann
Bull. Soc. Gèol. de francs 3-r"> Série. T. XXVII. PI. XVI!
'tr-p-cî"- >*.•; "^rrnin Evhor.i«i ^ ~t- jr.iltiT (Iirir0)
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Bull. Soc. Gèol. dft Kraiv-a £"■« Série. T. XXVII. PI. XVII
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1 1
LISTE DES OUVRAGES
REÇUS EN DON OU EN ÉCHANGE
PAIt LA
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE
Supplément au tome XI Vil du Bulletin de la Société Géologique de France, a.
ABRÉVIATIONS
Abh.
— Abhandlungen.
Ac.
» Académie, Accademia, Akademie, Academy, etc.
A m.
— America, American.
Ann.
» Annales, Annali, Annalen, Annuel, Annual, etc.
Arch.
«=» Archives, Archiv, Archiva, etc.
B. S.
-= Bulletin de la Société, Bollettlno délia Société, etc.
Bur.
— Bureau.
CR.
— Compte Rendu (RC. — Rendlconti).
D.
-= Deutsch.
Eng.
— English.
Erdk.
— Erdkunde.
Ergh.
-= Ergânzunsheft.
Fr.
» France, de France, Français.
Geog.
a Géographie, ique, isch, y, ical, ià, etc.
Geol.
— Géologie, ique, ià, isch, y, ical, etc.
Ges.
» Gesellschaft. .
H. N.
» Histoire Naturelle, Hisloria Natural(e).
hgg.
— herausgegeben.
I.
— Impérial.
Inst.
=-> Institution }.
II.
— Italià.
Jahrb.
— Jahrbuch.
Jahrber.
— Jahresberichl.
Journ.
— Journal.
Mag.
« Magazine.
Mitt.
— Mitleilungen.
Nat.
— Nalure(l), Naturaliste (N. H. — Natural History).
Philos.
— Philosophical.
Proc.
= Proceedings.
R.
— Royal, Régal, Reichs, etc.
Rec.
— ■ Records.
Rep.
« Report.
Se.
« Sciences, tiûque, zà, etc.
Schr.
■= Schriften.
Sitzber.
— Sitzungsberichle.
Soc.
«- Société, Société, Sociedad, Society, etc.
Trans.
-= Transactions.
U. S. Geol
1. Surv. — United States Geological Survey.
Ver.
— Verein.
Ver h.
-= Verhandlungen.
Wiss.
= (der) Wissenschaft(en), wissenschaftlich.
Zeitsch.
— Zeitschrift.
Zool.
=- Zoology, y, ique, isch, etc.
Exemple :
Philadelphie. Journ. Ac. of Natural Se., (2), XII, 1, 1898.
Lisez : Journal of the Academy of Natural Sciences at Philadelphy, 2* série,
tome XII, N» 1, 1898.
LISTE DES OUVRAGES
REÇUS EN DON OU EN ÉCHANGE PAR LA
SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE
Séances des 9 et &3 Janvier 1899
1° Non périodiques
Aimera (/.) et Bofill. Moluscos fosiles recogidos en los terrenos
plioceDOS de Cataluna. Ex. Bol. Com. Mapa geol., 8°, 224 p., 14 pi. Madrid, 1896.
Bleicher. CR. des excursions de la Réunion extraordinaire de la
Société géologique de France dans les Vosges, à Belfort, Porrentruy
(Coll. de MM. M. Mieg et Rollier). Ex. b. s. g. f. (30 août-4 sept. 1897), 8».
— Sur le remplissage des poches et fissures des calcaires juras-
siques du massif de Ferrelte par des sables quartzeux. Ex. B. s. G. F.,
8% 79 p., 1 pi., 1898. f
Duparc et Mrazec (L.). Recherches géologiques et pétrographiques
Sur le massif du Mont-Blanc. Ex. Mém. Soc. Phys. et II. N. de Genève, XXXIII,
1, p. 1-227, 24 pi.
Flamand (G.-B.-M.). Aperçu général sur la géologie et les produc-
tions minérales du bassin de l'Oued Saoura et des régions limi-
trophes. Ex. Documents pour servir à l'étude du N.-W. africain, gr. 8°, 166 p.,
1 carte. Alger, 1897.
— Notions élémentaires de lithologie et de géologie appliquées
aux grandes zones culturales de l'Algérie et de la Tunisie. Ex. Manuel
pratique de l'Agr. algérien, 8°, 40 p. Paris, 1898.
— De l'Oranie au Gourara (Notes de voyage). 8% 236 p., 17 pi., i carte.
Jentzsch (Alfred). Maase einiger Renthierstangen ausWiesenkalk.
Ex. Jahrb. K. Pr. Geol. Landesanst., 8°, 4 p., 1 Og. Berlin, 1898.
— Chronologie der Eiszeiten. Ex. Sitzung. d. Physikal. ôkonom Gesellsch.
zu Kônig in Pr. J. XXXVII, Sitz. v. 2, Avril 1896, 8% 2 p.
— Ist weissgefleckter Feuerstein ein Leitgeschiebe? Ex. Zeitz. d.
I). Geol. Ges., J. 1896, 8", 2 p.
— Ueber den ersuchten Nachweis des Interglacial durch Bohr-
mUScheln. Ex. Zcitsch. d. D. Geol. Ges., Dec. 1895, 8°, 2 p.
— Fine Tiefbohrung in Graudenz. Ex. Schr. der Naturforsch. Ges. In
Dantzig, B. IX, H. 3 et 4, 8% 7 p. Dantzig, 1898.
Nicklès (René). La géologie et ses applications industrielles. Ex. Bull.
Soc. lnd. de l'Est de la France, 1898, 8°, 16 p., fig.
4 DONS. — SEANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1899
— Sur la tectonique des terrains secondaires du Sud de la Mon-
tagne Noire. Ex. CR. Ac. Se., 31 oct. 1898, 4% 2 p.
— Sur quelques Ammonites du Bajocien des environs de Bel fort.
Ex. B. S. G. F., [3], XXV, 1897, 4«, 2 p.
— CR. des Collaborateurs du Service de la Carte géol. de France.
Feuilles de Metz, Sarrebourg. Ex. b. s. g. f., x, 1898-99, 8» (2 p. + 3 p.).
Parandier (A.-N.). Application de la géologie à la recherche des
chaux et ciments hydrauliques sur la ligne du canal de la Marne
au Rhin. Ex. Ann. des Ponts-et-Chaussées, 1" sem. 1840, 8», 64 p., 1 tabl.
— Difficultés d'adaptation des plants exotiques dans les vignobles
du Jura. 8°, 30 p., 2 profils géolog. A r bois (Jura), 1893.
— Etude agronomique des sols en régions montagneuses juras-
siennes. Ex. Bull. Soc. Vitic. d'Arbois (Jura), 8% 7 p. Arbois, 1897.
— Topographie stratigraphique et prodrome de géologie utili-
taire. 4°, 60 p., pi., 1 carte, 1897.
Pervinquière (Léon). Sur un faciès particulier du Sénonien de
Tunisie. Ex. CR. Ac. Se, 14 novembre 1898, 4°, 2 p.
Ramsay (Wilhem). Uber die Geologische Entwicklung der Halbin-
selKola, in derQuartarzeit. Ex.Fennia,8°,151p.ï5pl.,lcarte.Helsingfors,1898.
Rothpletz (A.). Das Geotektonische Problem der Glarner Alpen.
251 p., atlas in-f, 10 pi. coloriées + 1 carte géol. au 1/100.000*.
Schardt (IL). Revue géologique suisse pour Tannée 1897. Ex. Eclogae
Geol. Helvetiae, V, n- 6, 8°, 95 p. Genève, 1898.
Ward (Lester F.). — Description of the Species of Cycadoïdea, or
fossil cycadean trunck, thus for détermination from the Lower-
Cretaceous Rim of the Black-Hills (U. S. A.). Ex. Proc. u. S. National
Muséum, vol. XXI, n° 1141, 1898, 8% 134 p.
2° PÉRIODIQUES
France. — Amiens. B. S. Linnéenne du N. de la France. XIII,
N<* 299-300.
Auxerre. B. S. des Se. hist. et nat. de l'Yonne. L, suppl*; LI, 1897.
L : Péron : Les terrains de transport. — de St-Venant : La grotte de « La Cuillère »
à travers les âges. — Excursion aux grottes d'Arcy et St-Moré. — LI : Péron : La
Réunion extr. de la Soc. géol. de Fr. en 1897 dans les Vosges.
La Rochelle. Soc. des Se. nat. de la Char. Inf. Ann. 1894, N°* 31 32.
Aug. Dollot : Mission d'études dans le Sud de la Régence (Tunisie), Janv.-Fév. 1894.
DONS. — SÉANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1899 5
Moulins. Revue se. du Bourbonnais. XI, N<» 132-133, Dec. 1898-
Janv. 1899.
V. Berthoumieu : Essai bibliog. sur l'histoire nat. du Bourbonnais (I. Géologie).
— L. Levistre : Les monuments de pierre brute de la région de Montoucel (Allier) (I).
Paris. Ponts-et-Chaussées. Service hydrométrique du Bassin de
la Seine (année 1897), par A. Babinet.
— Atlas (Obs. sur les cours d'eau et la pluie), par G. Lemoine et
A. Babinet.
— Ministère de l'Instruction publique. Revue des travaux scien-
tifiques. XVIII, 8, N° 9.
— CR. Ac. Se. CXXV1I, N« 25 (Séance publ. ann. du 19 déc. 1898).
N° 25. Bleicber : Sur la découverte de graptolithes dans les Poudingues du a Grès
vosgien » des env. de Raon-1'Etape (Vosges). — Cl. Gaillard : App. de l'Oure dès
l'époque miocène. — P. Lory : Sur un ensemble de plis extérieurs à Belledonne et
refoulés vers cette chaîne. — Ph. Glangeaud : Les plissements des terrains crétacés
du bassin de l'Aquitaine. — de Mercey : Sur l'origine du minerai de fer hydroxydé
du Néocomien moyen du Bray par l'altération superficielle du fer carbonate, etc. —
Obs. de M. A. de La p parent. — A. Lacroix : Sur l'existence, aux env. de Corinlhe
(Grèce), de lherzolites identiques à celles des Pyrénées. — Fr. Wallerant : Sur une
loi nouvelle relative aux groupements des cristaux.
— CXXVII, Nos 1-3. N» 1. Kilian et Lugeon : Coupe transversale des Alpes
briançonnaises, de la Gy ronde à la frontière italienne. — N° 2. A. Lacroix : Les
roches volcaniques à leucite de Trébizonde (Asie Mineure). — Fr. Wallerant : Sur
les lois régissant les macles proprement dites. — N° 3. du Ligoudès : Sur la varia-
tion de la densité à l'intérieur de la terre. — F. Kerforne : Sur l'Ordovicien de la
presqu'île de Crozon (Finistère). — Vest : Note relative à une aérolithe observée à
Hio-de-Janeiro le 21 décembre 1898.
— B. S. Anthropologie de Paris. 1898, 4.
A. Dubus : Contr. à l'étude des époques paléolithiques et néolithiques des stations
de Bléville, la Mare-aux-Clercs et Frileuse (Banlieue du Havre, S.-I.). — A. Rollain :
Sur les découvertes faites dans les tracés de rectification des égouts de la rive
gauche (à Paris).
— Ann. des Mines. XIV, 11, 1898.
P. Jordan : Note sur l'industrie minérale au Japon.
— B. S. française de Minéralogie. XXI, 7, Nov. 1898.
F. Wallerant : Théorie des anomalies optiques. . . déduites des théories de Mallard
et Sohucke. — G. WyroubofT : Notice sur A. Schrauf.
— Club Alpin Français. N° 12, Déc. 1898.
E. Brunnaire : Conférence sur le Mont Cervin.
— Journal des Savants. Nov. -Dec. 1898.
— Feuille des Jeunes Naturalistes. (3), 29, N°339, 1« Janv. 1899.
Eug. de Boury : Révision des Pleurotomes du bassin de Paris (PI.). — J. Deprat :
6 DONS. — SÉANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1898
Jfote sur le Crétacé des bassins d'effondrement de la vallée de l'Ognon et de la
Saône (suite).
. — La Nature. N<* 1335-1339, Dec. 1898-Janv. 1899.
N° 1336. L. de Launay : Capta ge des sources minérales chez les anciens. — N° 1339.
C.-G. Guignet : La montagne de la Soufrière (Guadeloupe).
— Le Naturaliste. N<* 283-285.
N° 283. P. Gaubert : Minéraux nouveaux. — N° 284. Stanislas Meunier : Expé-
riences relatives à l'histoire des Dunes. — N° 285. Bougore : Diminution des sources.
— p P. Combes : Promenade géol. en Corse.
— Rev. critique de Paléozoologie. III, 1, Janvier 1899.
Paléozoologie générale, par Cossmann ; Poissons, par H.-E. Sauvage ; Crustacés,
par G. Ramond ; Paléoconchologie, par Cossmann ; Céphalopodes, par E. Flaug ;
Rudistes, par H. Dou ville ; Echinodermes, par J. Lambert ; Bryozoaires, Foramini-
fères, Radiolaires, par G.-F. Dollfus. — Rectifications de nomenclature et Errata.
Saint- Etienne. Soc. Industrie minérale. CR. mensuels. Dec 1898.
Fourel : Lignites de la Savoie.
— Bull. (3), XII, 3, 1898.
E. Dusaugey : Etude géologique et économique du gisement de lignite de Marceau
(Algérie). — F. Coi^net : Traitement des quartz aurifères.
— Atlas de la Soc. d'Industrie minérale. (3), XII, 3, 1898.
Allemagne.— Berlin. Zeitsch. f . PraktischeGeol. 1898, 12; 1899, 1 .
1898 : F. Wahnschaffe : Die Entwickelung der Glazialgeologie in Nord Deutscben
Flachlande, p. 400-411. — J.-H.-L. Vogt : Die relative Verbreitung der Elemente,
besonders der Schwermetalle (suite), p. 413-420. — 1899 : R. Beck : Ueber einige
mittelschwedische Eisenerzlagerstatten, p. 1-10. — J.-H.-L. Vogt : Ueber die rela-
tive Verbreitung der Elemente, besonders der Schwermetalle, p. 10-16.
Gotha. Petermanns Mitt. XL1V, 12, 1898.
N.-A. Rusch : Vorlâufiger Rericht ûber eine Reise in den N.W. Kaukasus 1m Jabre
18%, p. 271-275. — M. Bauer : Ueber die Natur der Lalerits, p. 280-283.
Leipzig. Zeitsch. fur Naturwiss. LXXI, 3, 1898.
Strasburt/. Geol. Spezialkarte von Elsass-Lothringen. Abh. (2),
I II, 1898.
E.-W. Benecke : Beitrag zur Kenntniss des Jura in Deutsch Lothringen, p. 1-97,
8 pi. — E. Koken : Zur Kenntniss des S. Deutschen Muschelkalkes, p. 1-49, G pi. —
B. Fôrster : Erlnulcr. zu den Bl. Mulhausen W.-Mûlhausen 0. und Homburg, 12 p.
Australie. — llrisbane. Queensland Geol. Surv. Bull. 1898, 8-10.
W.-ll. Rands : Report on the \ioh\ mines at the Fauning and Mount Succès, 10 p.,
carie. — Rob.-L. Jack : Six Repurts on the geol. features of part of the District to
be transversed by the proposée! transcontinental railway, p. 46, 1 pi.
Sydney. Rtc Geol. Surv. of New S. Wales. II, 1-4, 1890-92; VI, 1, 1898.
M : T.-W. Edgeworth David : Proposer! petrological Classification of the Rocks of
DONS. — SÉANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1899 7
New. S. Wales, p. 1-14. — R. Etheridge : On tbe occurrence of tbe genus Tryplasma
Lonsdale (= Pholidophyllum Lindstrôm) and another Coral apparently refera ble
to Diphyphyllum Lonsdale, in the Upp. Silurian and Devonian rocks of New S.
Wales, respectively, p. 15-20, pi. I. — W. Anderson : On the Tertiary deep Lead at
Tumbarumba, p. 21-25. — R. Etheridge : The ahoriginal Rock carvings at the head
of Bantry Bay, Middle Harbour, Port Jackson, p. 26-33, pi. 2. — On Dromornis
australis Owen, p. 36. — T.-W. Edgeworth David and R. Etheridge : The raised
Beaches of the Hunier River Delta, p. 37-51, pi. 3. — W. Anderson : On the Shell-
heaps or Kitchen-middens accumulated by the Aborigènes of the S. Coastal District,
p. 52-60, pi. 4. — R. Etheridge : On some beautifully formed Stone Spear-heads
from Kimberley N.VV. Australia, p. 61-65, pi. 6. — G.-A. Stomer : On the Gunnedah
Coalûeld, p. 66-71. — R. Etheridge : On the occurrence of Fish remains in the rocks
of the Drummond Range, centr. Queensland, p. 71-72. — \V. Anderson : Descriptions
of some Stone weapons and implements used by the Aborigènes of N. S. Wales,
p. 73-81. — R. Etheridge : Description of Iwo Univalves from the Lower Carboni-
ferous rocks of N. S. Wales, p. 82-83. — T.-W. Edgeworth David and Wr. Ander-
son : On a collection of Rocks and Minerais from Mount Morgan, near Rockhampton.,
Queensland, p. 85-92. — C.-H. Mingaye : On some N. S. Wales Minerais, p. 93-94. —
R. Etheridge : Occurence of mieroscopic Fungi allied to genus Palxachlya Duncan,
in the Permo-Carboniferous rocks of N. S. Wales and Queensland, p. 95-99, pi. 7. —
T.-W. Edgeworth David : The associated minerais and volatility of Gold, p. 100-108.
— C.-H. Mingaye : Analyses of Sa m pies of Coal and Coke, manufacturée! from the
various Coke-producing Coal s in the N., S., and W. Coal Districts of N. S. Wales,
p. 109-118. — R. Etheridge : Lepidodendron australe M'Coy, ils synonyms and
range in E. Australia, p. 119-134. — Edm.-F. Pittman : On Experiments with the
Wunktel Chlorination proeess at Belhanga, Victoria, p. 135-140. — W. Anderson :
On the gênerai Geology of the S. Coast with petrological notes on the intrusive
granités, and their associated Rocks around Moruya, Mount Dromedary and Cobarga,
p. 141-165, pi. 8-10. — R. Etheridge : Four Madreporaria Rugosa Species of the
gênera Phillipsastraea, Heliophyllum, and Cyathophyllum, p. 165-174, pi. 11-12.
— P.-T. Hammond : The Cave-shelters near Wollombi, in the Hunter River District,
p. 174-176, pi. 13-14. — R. Etheridge : Idiographic Rock-Caroings of the aborigènes
at Fiat-Rocks, near Manly, p. 177-180. pi. 16. — VI : E.-F. Pittman : On the Geology
and Minerai Deposits of portions of W. Australia, p. 1-16. — G.-W. Card : On the
Country Rock of the Kalgoorlie Gold-lield W. Australia, p. 17-42. — R. Etheridge :
On the Occurrence of the genus Endophyllum Ed. and H., in the lower Palaeozoîc
Rocks of N. S. Wales, p. 43-45, pi. 4-5. — W.-S. Dun : Additions to the Permo-
Carboniferous Flora of N. S. Wales, p. 46-50, pi. 6. — C. Hlawatsch : On Stalzite
and a new Minerai, Raspite, from Broken Hill, p. 51-61, pi. 7. — R. Etheridge and
W.-S. Dun : On the Structure and Method of Préservation of Receplaculites austra-
lis Salter, p. 62-75, pi. 8-10.
Autriche-Hongrie. — Cracovie. Bull. Internat. Ac. S. CR.
Nov.-Déc. 1898.
Vienne. Verh. K. K. Geol. R. Anstalt. 1898, 14-15.
Oth. Abel : Der Wasserleitungsstollen der Stadt Eggenburg. Ein Beitrag zur
Kenntniss der Gauderndorfer Schichten, p. 301-312. — A. Bittner : Fischzahne lui
Norischen liallstâtterkalke von Miihlthal bei Piesting, p. 321-326. — W. Salomon :
Ueber das Aller des Asta-Granites, p. 327-332. — F. Kerner : Neuer Pllanzenfund im
mahrisch-schlesischen Dachschiefergebiete, p. 333-335. — Fr. Schaflcr : Ueber eine
ne Fundstalte von Badener Tegel bel Stegenfeld, p. 335-338.
8 DONS. — SÉANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1898
— Beitrâge zur Pal. und Geol. Oesterreichs-Ungarns und des
Orients. XII, 1, 1898.
Fr. Toula : Eine Geolog. Reise nach Kleinaslen (Bosporus und Sûdkûsta des Mar-
mara-Meeres), p. 1-26. — E. Kayser : Devon-Fossilien vom Bosporus und von der
N. Kûste des Marmara-Meeres, p. 27-41, pi. 1. — Aug. Rosiwal : Eruptlvgesteine
vom Bosporus und von der Klein-Asiatischen Seite des Marmara-Meeres, p. 42-52.
— Berg- und hûttenmànnisches Jahrb. XLVI, 4, 1898.
Brésil. — San Paolo. Comm. Geogr. e Geol. 1895-1898.
Datos climatologicos do anno de 1893, 1894, 1895, 1896, 1897.
Espagne. — Madrid. Ann. Soc. Esp. de H. N. (2), VII, Dec. 1898.
D. Salvador Calderon : Existencia del infraliâsico en Espafta y geologia fisiogràûca
de la Meseta de Molina de Aragon, p. 177-206, pi. 1.
— Act. Soc. Esp. de H. N. Dec. 1898.
États-Unis. — Cambridge. Muséum of comparative Zool. at
Harvard Collège. Ann. Rep. of the Curator for 1897-98, 44 p., 1898.
Chicago. Journal of Geology. VI, 7, Oct.-Nov. 1898.
H.-S. Williams : The Classification of Rock Formations, p. 671-678. — F.-W. Sar-
deson : Tbe so-called Cretaceous deposits in S. Minnesota, p. 679-691. — St. Weller :
The Sliurian Fauna interprétée! on the Epicootinental Basis, p. 692-703. — J.-P.
Iddings : Bysmaliths, p. 704-710. — E.-C. Case : Studies for Students : The Develop-
ment and Geol. Relations of Vertebrates. Part III, Reptilia.
New-Haven. The Amer. Journ. of Se. (4), VII, N° 37, Janv. 1899.
W.-F. Hiilebrand : Mineralogical Notes, p. 51-58. — F.-W. Sardeson : Wbat is the
Loess ?, p. 58-60.
New-York. Ac. of Se. Ann. X, 1-2, 1898.
— Science. VIII, N°« 207209, Dec. 1898; IX, 210-212, Janv. 1899.
VIII ; D.-G. Brinton : Orlgin of Neolithic Art in France ; Palaeollthic Stations in
Russia, p. 862-863.
Philadelphie. Proc. Ac. of N. S. 1898, 2.
Ch.-S. Boyer : Fossil Mollusks and Diatoms from the Dismal swamp, Virginia
and N. Carolina, the Geol. Age of the Deposit, p. 414.
— Journ. Ac.ofN.S.(2), VI, 4,1869; VU, 1869; VIII, 1,1874; 3, 1877.
VI : Isaac Lea : New Unionidae, Maelanidae etc., chiefly of the United States, p. 303-
343. — VII : Joseph Leidy : The extioct Mammalian fauna of Dakota and Nebraska
with a Synopsis of the Mammalian Fauna of Norlh America, preceeded with an
introduction on the Geology of the Tertiary formations of Dakota and Nebraska by
F.-V. Hayden, p. 1-472, 30 pi., 1 carte. — VIII : Isaac Lea : Description of fifty two
species of Unionidae, p. 5-69, pi. 1. — Joseph Leidy : Description of Vertébrale
Remains, chiefly from the Phosphate Beds of S. Carolina, p. 209-261, pi. 30-34. —
Wm.-M. Gabb : Description of a Collection of Fossils, made by Dr. Antonio Rai-
mondi in Peru, p. 263-336, pi. 35-43.
DONS. — SÉANCES DES 9 ET 23 JANVIER 1899 9
Washington. U. S. Geol. Surv. Bull. N°» 88, 89, 149.
Rofus Malher Bagg : The Cretaceous Foratninifera of New Jersey, 71 p., 0 pi. —
F. Leslie Ransome : Some Lava flows of the W. slope of tbe Sierra Nevada, Cali-
fornia, 74 p., 9 pi. (carie). — Fr. Boughton Weeks : Bibliography and Index of N.
American Geoi. Paleontol. Petroiogy and Mineralogy for 18%, 150 p.
Grande-Bretagne. — Lowlres. Geol. Surv. Eugland and Wales.
Mem. 1898.
Anbrey Straham : The Geology of the Isle of Purbeck and Weymouth, 278 p., 11 pi.
(1 carte). — Clément Reid : The Geol. of the country a round Eastbourne, 15 p. — A.
Straham : Supplément to the Geol. of the nclghbourhoods of Fllnt,Mold,and Ruthin,7p.
— R. Soc. Proc. LXIV, N« 405, Dec. 1898.
— The Geol. Magazine. (4), VI, 1, Janv. 1899.
T. -G. Bonney : Fulgurites from Tupungato and the summilof Aconcagua, p. 1-4.
— H. Howorth : The Scandlnavian ice-sheet and the Baltic glacier, p. 4-13, pi. 1. —
0.-C. Marsh : The Origin of Mammals. p. 13-1 G. — J.-W. Spencer : Submerged
Plntform of W. Europe, p. 10-19.
Italie. — Florence. Boll. délie Publicazioni It. 1898, N« 312-313.
Milano. La Terra. III, N°* (517 620.
Modène. Boll. Soc. Sismologica. IV, 5, 1898.
S. Arcidiacono : Principal! fenomeni eruttivi avvenuti in Sicilia e nelle isole adia-
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— Sur les phénomènes de contact de la lherzolite des Pyrénées.
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— Sur la structure et les propriétés optiques des divers silicates
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— Sur des roches basiques à néphéline du Plateau Central de la
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Id., 15 juin 18%.
— Sur la découverte d'un gisement d'empreintes végétales dans
les cendres volcaniques auciennes de l'Ile de Théra (Santorin).
M., 26 octobre 1896.
— Sur la formation actuelle de zéolites sous l'influence du
ruissellement superficiel. M., 9 novembre i»96.
— Les minéraux néogènes des scories plombeuses athéniennes
du Laurium (Grèce). Id., 30 novembre 1896.
— Sur un minéral cristallisé formé dans un cercueil de plomb.
Id., 22 février 1897.
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— Sur la constitution minéralogique de l'île de Polycandra
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— Sur la marcasite de Pontpéau et les groupements réguliers de
marcasite, pyrite, galène constituant des pseudomorphoses de
pyrrhotine. id., 26 juillet 1897.
— Sur le sulfate anhydre de calcium produit par la déshydrata-
tion complète du gypse. Id., 24 janvier 1898.
— Sur la formation d'anhydrite par calcination du gypse à haute
température. Id., 14 février 1898.
— Sur la Ktypéite, nouvelle forme du carbonate de calcium,
différente de la calcite et de Taragonite. id., 21 février 1898.
— Les filons granulitiques et pegmati tiques des contacts graniti-
ques de TAriège. Id., 17 octobre 1898.
— Les roches à axinite (limurites) des contacts granitiques des
Hautes-Pyrénées. Id., 31 octobre 1898.
— Les modifications endomorphes du gabbro du Pallet (Loire-
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— Sur l'existence, aux environs de Corinthe, de lherzolites iden-
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tenue à Huy (2-5 oct. 1897). w., t. xxiv (Bull.), 1897, 8*, 57 p., 1 gr. pi.
coloriée. Liège, 1897.
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Meuse, etc. Id., t. XXV (Mém.), 1898, 8-, 17 p. Liège, 1898.
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tenue à Beauraing et à Gédinne (17 20 sept. 1898). Id., t. xxv (Mém.),
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35 p., 3 pi. Liège, 1885.
— De la structure hélicoïdale de certains Anthracites de Visé.
Id., t. XII (Mém.), 1885, 8», 19 p., 1 pi. Liège, 1885.
— De l'âge de certains dépôts de sables et d'argile plastique des
environs d'ËsneuX. Id, t. XIII, 1886, 8», 4 p. Liège, 1886.
— Résumé d'une conférence sur « Quelques conséquences des
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— De l'âge et de l'origine des dépôts d'argile plastique des envi-
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— Recherches sur les Poissons paléozoïques de Belgique, id., t. xv
(Mém.), 1888, 8", 87 p., Il pi. Liège, 1888.
— De la découverte d'espèces américaines do Poissons fossiles
dans le Dévonien supérieur de Belgique, id., t. xvi (Bull.), 188$), 8*, 3 p.
Liège, 1889.
— De l'origine des Anthracites du calcaire carbonifère de Visé.
Id., t. XVI (Mém.), 1880, 8», 7 p. Liège, 1889.
— De l'âge relatif des failles du bassin houiller de Liège. — Sur
le mouvement d'une couche de houille, entre son toit et son mur.
Ici. (Mém.), 1890, 8°, 19 p. Liège, 1890.
— Alluvions anciennes de la Meuse, w , t. xvii (Bull.), 1890, 8», 4 p.
Liège, 1890.
— Sur la signification des conglomérats à noyaux schisteux des
Psammites du Coudroz. id., t. xvm, 1891, 8-, 7 p. Liège, 1891.
— Visite au Musée de « Smithsonian Institution », de Washing-
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Id., t. XIX (Bull.), 1892, 8°, lli p. Liège, 1892.
— De l'origine des failles des terrains secondaires et tertiaires et
de leur importance dans la détermination de l'allure souterraine
des terrains primaires, id., t. XX (Mém.), 1894, 8% 14 p. Liège, 1894.
— De la présence du Calcaire carbonifère inférieur, au bord du
Bassin de Namur, à l'E. de Huy. id., t. XXI (Mém.), 1894, 8% 7 p. Liège, 1894.
DONS. — SÉANCES DES 6 ET 20 MARS 1899 21
— Sur le parallélisme entre le Calcaire carbonifère des environs
de Bristol et celui de la Belgique. — De l'équivalent calcaire des
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— Des dépôts tertiaires de l'Ardenne et du Condroz. M., t. xxm
(Mém.). 1896, 8°, 19 p. Liège, 18%.
— De la présence du « Calcaire à Palécbinides » dans le Carbo-
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M. de Dorlodot. Id., t. XXHI (Mém.), 1896, 8°, 18 p. Liège, i«*i.
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Feuilles : 41 Freudcntbal, 54 Olmûtz, 66 Boskowitz-Blansko, 67 Prossnitz-Wis-
chau, 77 Austerlitz, 83 Eisenkappel-Kanker, 84 Prassberg a. d. Sann, 85 Pragerhof-
Wind, 86 Pettau-Vinica, Skelett.
Suède. — Stockholm. Carte géol. 1/100.000*.
Feuilles Orkeljunga el Ulricehamn.
— Carte géol. de la Suède, 1/2.000.000*.
3° PÉRIODIQUES
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Marlot : Barytlnc de l'Auxois et du Morvan, p. 96-102. — A. Raymond : Note
sur les roches de la montagne de la Marolle (Creusot), p. 111-114. — H. de Chai-
gnon : Sur la présence d'une lentille de gneiss à pyroxène ; sur une pegmalite
avec cristaux de chlorophyllite ; sur la présence de la vaugnérite aux environs de
Montbrison ; sur un gisement nouveau de gneiss à pyroxène, p. 140-146. — A.
Raymond : Note sur les terrains du Creusot, p. 172-175. — A. Meunier : Excursion
DONS. — SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899 49
sous la direction de M. — , p. 366-376. — B. Renault et A. Roche : Etude sur la
constitution des lignites et dos organismes qu'ils renferment, p. 201-239. — B.
Renault : Notice sur les Calamariées (suite, 3* p.), p. 377-436, pi. 1XIII. — J. Ca-
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Dunkerque. Bull. Soc. pour l'encouragement des Se, Lettres et
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Rabelli : Note sur les carrières de Pont-à-Bucy et de Nouvion-lc-Comte (Aisne),
p. 72-75. — Excursion géologique à Rcugin, du 16 avril 1899, p. 75-79. — Excur-
sion géologique à Saint-Momelin et à Watten, le 30 avril 1K99, p. 79-X3. — II. Ri-
gaux : Les modifications de la plage de Wissant, p. 84-92. — Leriche : Note sur
le Crocodilus depreasifrons trouvé a Urcel (Aisne), p. 92-94, pi. I. — Leriche :
Faune d'eau douce sparnacienne de Cuvilly (Oise), p 95-104, pi. II. — Leriche :
Excursion géologique dans la forêt de Saint-Gobain, p. 105-112. — Excursions des
11 et 12 juin à Avesnes et Maubeuge, p. 113-115. — Ch. Rarrois : Note sur l'étage
à Anarcestes laleseptatus dans l'Ille-et- Vilaine, p. 11H-117. — A. Hotte : La station
préhistorique et un foyer de même époque à Ablain-Saint-Nazaire (P.-de-C),
p. 118-127. — De la Vallée Poussin et Renard : Notice sommaire sur le porphyrite
du Quenast, p. 131-142. — Excursion et séance extraordinaire annuelle de la Société
géologique du Nord, p. 142-147. — J. Péroche : Des marées et de leur action éro-
sive sur nos côtes, p. 148-155. — J. (J osselet : Sur le tun aux environs de Lille,
p. 155-159. — Leriche : Sur la présence de Sonneratia perampla dans la meule,
p. 159-161. — Parent : Lambeaux crétacés sur le plateau de Gris-Nez, p. 161-165.
— Parent : Coupe de la Grande Oolithe «1 Le Wast (Roulonnais), p. 166-169, fig. 1.
— Eg. Rertrand : Description d'un échantillon de charbon papy racé ou papierkohte
trouvé à Prisches en 1859, p. 171-247. — J. Gosselet : Note géologique et géogra-
phique sur la montagne de Noyon, p. 247-256.
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Bavard : Note sur 1rs gisements de minerais de fer des presqu'îles de Kertchet
de Taman (Russie), p. 505-522, pi. XV. — Prost : Note sur les minerais de fer des
territoires des Meknas et dos Nefzas, p. 533-555, pi. XVH-XVIH. — A. Carnot :
Analyses des eaux minérales françaises exécutées au bureau d'essai de l'Ecole
Nationale des Mines, p. 33-94. — de Launay : Les mouvements des eaux souter-
raines dans la région de Teplitz et de Rrûx, en Bohême, p. 103-136, 1 fig.
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Sur les brèches éogènes du Briançonnais p. 240-242. — Kilian et P. Haug : Sur le
bord externe du Briançonnais entre Fressynières et Vars, p. 351-354. — Jean
50 DONS. — SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899
Brunhes: Sur les Marmites des (lots granitiques de la cataracte d'Assaouân lllc-
Egypte). p. 354-357. — St. Meunier : Complément d'observations sur le terrain
caillouteux des Préalpes vaudoises, p. 527-529. — C. Kg. Bertrand : Les plaques
subéreuses calcifiées du terrain hou il 1er d'Hardinghen (Pas-de-Calais), p. 619-621.
— J. Thoulet : Lithologie sous-marine des côtes de France, p. 623-624. — St. Meu-
nier: Observations relatives au dépôt de certains travertins calcaires, p. 659-660.
— de Lapparent : Sur l'intervention des végétaux dans la formation des tufs cal-
caires, p. 664. — Matteucci : Sur l'état actuel des volcans de l'Europe méridionale,
p. 734-737. — Fred Wallerant : Sur l'origine de la symétrie dans les corps cristal-
lisés et du polymorphisme, p. 775 778. — Munier-Chalmas : Les assises supé-
rieures du terrain jurassique dans le Bas-Boulonnais, p. 1532-1535.
— Soc. d'Anthropologie. Bull. (10e), X, 2-3, 1899.
G. Fouju : Ossements humains découverts dans une couche de terre argileuse,
à Aunay-sous-Crécy (Seine-et-Oise), p. 88-94. — A. La ville : Couche infra-néolithi-
que rue Danton, p. 102-103. — Ad. Thieullen: Dent d'elephas antiquus découverte
à Paris, p. 117-120. — A. La vil le : Coupe prise à coté du gisement à ossements
humains et à silex tailiés d'Aunay-sous-Crécy, p. 127-128.
— Soc. de Spéléologie. Spelunca. Bull. 21, Septembre 1899.
Fournier et Magnin : Recherches spéléologiques dans la chaîne du Jura, p. 289-
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— Soc. fr. de Minéralogie. Bull. XXII, 3-6, 1899.
G. Friedel : Nouveaux essais sur les Zéolites [suite), p. 84-91, 1 pi. — F. Gon-
nard : Sur un groupe de cristaux de quartz de Striégau (Silésie), p. 92-94. —
F. Gonnard : Etude cristallographique du quartz des géodes des marnes oxfor-
diennes de Meylan (Isère), p. 94-131.
— Journ. de Conchyliologie. XLVII, 3, 1899.
G. Dollfus et Ph. Dautzenberg : Sur quelques coquilles fossiles nouvelles ou mal
connues des faluns de la Touraine, p. 198-222, pi. IX. — M. Cossmann : Description
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Marcel Bertrand : La grande nappe du recouvrement de la Basse Provence, 71 p.
3 pi. (dont 2 en couleurs), 42 fig. — Comptes-rendus des collaborateurs pour la
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Révision des pleurotomes éocènes du Bassin de Paris (suite), p. 153-160, p. 172-174.
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in Transvaal, p. 271-274. — G. Mûller: Verbreitung der Deutschen Torfmoore, p.
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Schwemmgebirge, p. 347-354, fig. 38-40. — Leriche : Excursion des VIII géol.
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W. Volz : Zur Geol. Kenntniss von N. Sumatra, p. 1-61, pi. 1-5. — L. Milch :
Ueber Gesteine von der Battak-HoebllàYhe (Central Sumatra), p. 62-74 — E. Kraas:
Die Sibyllenbohle auf der Teck bei Kircbheim, p. 75-88. — O. von Huber : Zur
Kenntniss (1er Kruptivgesteine von Predazzo und des Monzoni, p. S9-103, pi. 6-N.
— Cl. Schluter : Ueber einige von Goldfuss bescbrieben Spalangiden, p. 104-124, pi.
9-10. — H. VV. Ptalï. : Ueber Aenderung der Schwerkraft, p. 125-150. — Deecke :
Einige Beobachtungen im Bornholmer Lias, p. 151-155. — Arth. Welss in VVeimar :
Die Concbylienfaunu der Kiese von Sûssenborn bei VVeimar, p. 156-167. — P.
52 DONS. — SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 1899
Oppenheim : Ueber Miocân (Helvétien) in der unmittelbaren Umgebung Veronas,
p. 168-174. — P. Michsei : Der alte Ilmlauf von Sûssenborn bei Weimar nach
Rastenberg an dep Finne. p. 178-180. — E. Philippi : Ueber das Schloss von Pteri-
nea retmflexa Wahlenb. sp., p. 181-183. — M. Semper: Das Palaeo thermale
Probtèm II, Rerichtigungcn und Zusâtze ueber die Klimatischen Verbà Unisse des
Eocan, p. 185-206. — P. Oppenheim : Ueber Troclwcyalhus sinuosus Brongniart
und verwandte Formen, p. 207-216. — Korallcn des Venetianischen Tertiârs. p.
227 226. — Einige Tabula ten-ahnliche Korallen des Mesozoïcums, p. 226-236, pi. 11
13. — Die Reziehungen von Ub.ighasia und Canavaria zu Alcyonarien und Tabu-
la ten, p. 237-242. - Gûnther Maas : Die untcre Krcide des subhercyn. Quader-
sandstein-Gebirges, p. 243-257. — Otto Jaekel : Ueber die Organisation der Peta-
lodonten, p. 258-298 pi. 14-15. — K. Picard : Ueber Cephalopoden aus dem unter.
Muschelkalk bei Sondersliausen, p 299-309. — E. Kayser : Zwei neue Fossilien aus
dem Devon der Eifel, p. 310 314, pi. 17. — P. Oppenheim: Zur Fauna des Septarien-
thones, p. 315-321. — M. Semper: Remerkung zu Herrn Harbœs Aufsatz ûber
« Vereisung und Vulkanisnius », p. 322-324. — Joh. Bôhm: Ueber Tria s- fossilien
von der Râren-Insel, p. 325-320. - A. Baltzer: Zum geol. Rau des Glârnisch, p.
327-3**4. - G. Boehm : Aptien und Hauterivien im Kleinen Balchan, p. 335 340.
— Zeitsch. d. Ges. fur Erdk. XXXIV, 2-3, 1899.
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p. 75-192, pi. 3-7. — Max Friederischsen : Morphologie des Tien se ha n, p. 193-271.
Breslau. Schlesische Ges. f. vaterlàud. Cultur Jahrber. LXXVI,
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Gotha. Petermanns Mitt. XLV, 6-10, 1899.
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schiebungen in der Aussicht, p. 218-222 — G. Gerland : Aufruf zur Grûndung einer
internationalen seismologischen Gesellschaft, p. 222-223. — P. Langhans: Lécha p-
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fâlt, 60 p., 21 pi. — N« 176 : G. Holm : Palaeontologiska Notiser, 51 p , 2 pi. — N»
178 : Gérard de Geer : Om den Sankvartâra Landhôjningen kring Bottniska Viken,
27 p., 1 pi. — N° 179 : Gehr. Holm : Palaeontologiska Notiser, 83 p., 7 pi. — N° 181 :
P.-J. Holmquist : Om Rôdoomradcts Rapakivi och Gângbergarter, 113 p. Résumé
ail 8 pi. — N° 182 : A -G. Hogboin : Om Ragandalons Geologi, 123 p., 28 fig., 1 pi.,
(carte). — N* 177 : Parktiskt Geologiska Undersôkningar inow Vesternorlands lân.
med bidrag of La net s hushâllningssâllskap ut fôrda genom sveriges geologiska
undersôkning II Berggrunden, 60 p., 2 pi. (carte). — Série A a n* 114 : Axel Und-
DONS. — SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 1899 63
strôm : Beskrifning till Kartbladct Orkelljunga, 39 p., 1 pi. (carte). — Série A c :
Ax. Lindstrôm : Beskrifning till Kartbladcd 31. Ulriehamn, 36 p. — Série Ba n*5 :
Ax. Lindstrôm : Nfigra Allmnnna Upplysningar till ôfversigtskarta angifvande do
k va r tara halsaflagringarnas o m rade samt Kalkstens och Mergelfôrekomsters
utbrednieg i sverigc, 80 p.
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Le Secrétaire, L'Archiviste,
E. de MARTONNE. A RAMOND.
FIN DE LA LISTE DES DONS POUR 1899
UNIV. OF MICHJCANj
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